"fü m e EE. — HISTOIRE NATURELLE DES CANARIES. ECL. mE— Uro ( | | i i 113 | i f ji | L | [ i E | DD < ue oia + and PARIS. — IMPRIMERIE DE BÉTHUNE ET PLON, Rue de Vaugirard, 36. EN Ee TS HISTOIRE NATURELLE DES || | Y A R l E * "n I gp * MM. P. BARKER-WEBB ET SABIN BERTHELOT, : "D 212 | Membres de plusieurs Académies et Gociétés savantes; . uu * iu OUVRAGE PUBLIÉ sous LES AUSPICES — | a : | E: $ : : ; OP Me, Guizol, Monstre de P4 V publque. : TOME TROISIÉME. | * i i Première partie. " CONTENANT LA GÉOGRAPHIE BOTANIQUE. " » E BÉTHUNE, ÉDITEUR, RUE DE VAUGIRARD, 36. MDCCCXL. m A E — Europ itu ? y ea D Ce omi > E- ge cum ea jamaa ar [z" < A GEOGR : sparsa, sive sociatce i HISTOIRE NATURELLE | ILES CANARIES. t 1 | CHAPITRE PREMIER. v.m - po Eae HM ASPECT GÉNÉRAL DE LA VÉGÉTATION DANS LES ILES CANARIES. P « J'ai trouvé sous la zone torride des sites où la nature est plus » majestueuse, plus riche dans le développement des formes im" ..» organiques; mais aprés avoir parcouru les rives de l'Orénoque, E 1 » les Cordilléres du Pérou et les belles vallées du Mexique, À E » j'avoue n'avoir vu nulle part un tableau plus varié, plus } p » attrayant, plus harmonieux par 1a distribution des masses de E i | » verdure et de rocher. » ill | HUMBOLDT f | 17 E.g Ee AÑ AN : EIS : : : * e L LI , - PALACE Cy e : 4 "n | Les iles Canaries, par leur proximité des tropiques, se trouvent si- i4 tuées sous une des latitudes les plus favorables à la végétation; leur climat se ressent à la fois de l'énergie de la zone torride et de la frai- é cheur de la zone tempérée. La chaleur du soleil s'est combinée avec ie les principes les plus actifs pour féconder cette terre que les volcans semblaient avoir frappée de stérilité : placées dans d’autres conditions d'existence, de nouveaux germes se sont développés; ce sol vierge s'est dei d couvert des produits d'une flore spéciale, et plus tard les influences th en 7 rm, o 0g climatériques sont venues se préter à la naturalisation des plantes des deux hémisphères (1). Les espèces aborigénes qui apparurent spon- (1) Voir dans les chapitres suivans les plantes naturalisées et celles cultivées dans le jardin d'ac- climatation. HISTOIRE NATURELLE DES CHAPITRE PREMIER. ASPECT GÉNÉRAL DE LA VÉGÉTATION DANS LES ILES CANARIES. « J'ai trouvé sous la zone torride des sites où la nature est plus » majestueuse, plus riche dans le développement des formes ..» organiques; mais aprés avoir parcouru les rives de l'Orénoque, 2 » les Cordilléres du Pérou et les belles vallées du Mexique, "EE » j'avoue n'avoir vu nulle part un tableau plus varié, plus » attrayant, plus harmonieux par la distribution des masses de E » verdure et de rocher. » H E HUMBOLDT. Les iles Canaries, par leur proximité des tropiques, se trouvent si- tuées sous une des latitudes les plus favorables à la végétation; leur climat se ressent à la fois de l'énergie de la zone torride et de la fraí- cheur de la zone tempérée. La chaleur du soleil s'est combinée avec les principes les plus actifs pour féconder cette terre que les volcans semblaient avoir frappée de stérilité : placées dans d'autres conditions E d'existence, de nouveaux germes se sont développés; ce sol vierge s'est 13 | couvert des produits d'une flore spéciale, et plus tard les influences t | & climatériques sont venues se préter à la naturalisation des plantes des 4 deux hémisphères (1). Les espèces aborigénes qui apparurent spon- k (1) Voir dans les chapitres suivans les plantes naturalisées et celles cultivées dans ]e jardin d'ac- d climatation. $ E LES aem... ON BAT * lai TOR y regia vo Lu MN i ( 4) lanément dans ces îles atlantiques, appartiennent la plupart à des genres d'Europe, mais elles sont plus vivaces, plus ligneuses et sou- vent arborescentes. Il en est aussi d'autres qui ont d'autres formes et un autre aspect; plusieurs sont des monotypes de genres qui nont pas encore d'analogues (1), tandis que d'autres constituent des groupes d'espèces endémiques d'un facies remarquable (2). Parmi ces végétaux divers, ceux-ci sont empreints d'un caractère africain (3), et ceux-là, quoiqu'en plus petit nombre, laissent déjà entrevoir quelques traits de la végétation d'Amérique (4). Ainsi la flore canarienrie parait établir le passage des plantes de nos pays lempérés à celles des contrées intertropicales. Si l'on a égard à la quantité des espéces locales, à la nouveauté de leurs formes, à l'étran- gelé de leur port, caractères d'autant plus frappans qu'ils appartien- nent à la masse des plantes dominantes, l'archipel des Canaries mérite bien le titre de Région botanique. Les différentes stations quoccupent tous ces végétaux, cette sorte de sociabilité qui semble réunir les uns, l'isolement qu'affectent les autres, soni aütant de constlérations qui augmentent l'importance des recherches, lorsqu'aprés avoir examiné les divers groupes en dé- tail, on veut saisir l'ordre de leur répartition. « Les flores des iles, a » dit l'illustre professeur de Genève (5), offrent en particulier un in- ? térét réel, soit par la bizarrerie qu'elles présentent, soit parce que le > travail, étant plus circonscrit, peut étre fait avec exactitude.» Nous avons été à méme de r | parcourant les Canaries, et les rapports que nous avons pu saisir dans nos explorations partielles econnaitre la vérité de cette observation en nous eussent sans doute échappé sur un Di eS PIER DN INO RUN ROREM (1) Genres Zisnea » Phyllis, Bosea , Drusa » Plocama , Canarina , etc. (2) Les Joubarhes (S'empervipa), les Bystropogon , les Echium , etc. (3) Les grandes Euphorbes , les Palmiers les Zygophyllées , les Aizoon , les Kleinies, et la plupart des plantes des bases. (4) Les Lauriers , les Ardisiers , les Bœhmeria les Drusa, et plusieurs espèces de Fougères. (9) De Candolle, Géog. bot. Diction. des sciences nat. , tom. XVII, p. 421. (5) | continent; il nous eut été impossible du moins d'arriver aux mémes résultats sur un plus vaste espace. Les différences qui existent dans l'orographie de chaque ile, en variant les accidens du sol, les expositions et les températures, ont multiplié les contrastes et produit de notables changemens dans la distribution phytostatique. Il est résulté de ces différences presque autant de flores distinctes qui offrent toutes quelques espéces propres à chaque localité; en outre, la masse des plantes de chaque ile, quoi- que composée des espèces communes à toutes les parties de l'archipel, ne se présente jamais dans les mêmes proportions. Ainsi, par exemple, Alegranza, Montaña-Clara, Graciosa, et les autres îlots déserts situés au nord de Lancerotte, abondent en Chenopodées et en Polycarpées, avec lesquelles viennent se méler plusieurs autres plantes de la région maritime. En abordant sur ces rochers isolés, rien ne signale encore la végétation des autres iles : l'Eaphorbe des Canaries et ses autres congénères, les Plocames, les Kleinies, les Prenanthes, y sont rem- placés par de grands buissons d'Atriplex, de Salicornia, de Suceda et de Salsola , à l'ombre desquels croissent d'autres plantes alcalines (1). (1) Les plantes que nous recueillimes sur l’ilot de Graciosa , le 5 juin 1829, sont rangées dans la liste à la fin de ce chapitre (a) d’après leur degré de fréquence, vu leur petit nombre. ; Cette florule, composée de vingt-neuf espèces , offre les particularités suivantes : 1° 7 Chénopodées , 5 Légumineuses , 3 Plumbaginées , 2 Polycarpées , 2 Plantaginées, 1 Liliacée ; 1 Graminée, 1 Euphorbiacée , 1 Borraginée, 1 Caryophyllée, 1 Composée, 1 Geraniacée, 1 Cistinée , 1 Frankeniacée. 9» L' Atriplex Halimus, variété à larges feuilles qu'on ne retrouve pas dans les autres iles ; le Salicornia fruticosa, qui croit aussi sur la côte de Lancerotte , en face de Graciosa ; Atriplex glauca, le Salsola vermiculata et le Suœda fruticosa, bien plus nombreux sur cet ilot que dans le reste de Farchipel, forment la plus grande masse de végétation de ce rocher. i 3° Le Statice pruinosa, que M. Delile rapporta le premier d'Égypte, se trouve également à Ale- grauza. Le Statice puberula, N., le Reseda crystallina, N., Y Ononis ocreata, N. et l Ononis pendula, sont quatre espèces fort rares que nous n'avons trouvées que dans un seul endroit de l'ile de Lancerotte ; quant à l Ononis hebecarpa, N., nous ne l'avons vu qu'à Graciosa. 4 Enfin, une seule espèce d'Euphorbe (V Euphorbia piscatoria), trés-commune dans les autre iles, se trouve confondue sur ce rocher au milieu des Chénopodées. Ainsi sur vingt-six espèces, dix à douze ne s'écartent guère de cette localité, et les autres, quoique communes aux autres îles du groupe, s'y montrent dans une autre proportion. Ce sont la plupart des M indios Moa dn ae i bs od E O À atiam: yp s GE C6) Cette flore, qu'on retrouve en partie sur le littoral voisin, a un cachet particulier. | À Lancerotte et à Fortaventure la végétation commence à s'étendre sur une plus grande échelle : des plages de sable, de vastes plaines viennent rappeler les Zaharas de l'Afrique occidentale et quelques- unes des plantes qui croissent sur la lisière du désert; les mouvemens de terrain y sont plus prononcés, et les espèces communes au restant de l'archipel se sont répandues dans les vallées et les ravins qui les traversent. Les Éuphorbes se montrent déjà en grand nombre, et avec elles les composées et les convolvulacées frutescentes (1). Quel- ques bruyéres rabougries (2) et des Fayas (3), cachés dans les anfrac- tuosités des montagnes ou battus par les vents sur leurs crètes dé- vastées, sont les annonces de cette région toujours verte qui fait la principale beauté des îles les plus élevées du groupe. Cependant, mal- gré ces rapports généraux, Lancerotte et Fortaventure possèdent aussi leurs plantes spéciales (4) : trois arbres, les Palmiers, les Pistachiers et les Tamarix, abondent bien plus dans ces îles que dans les autres. À Lancerotte, les Palmiers (Phænix dactylifera) peuplent le district d Haria; à Fortaventure, cette même espèce, mêlée avec les Pistachiers espèces herbacées et rampantes , cachées parmi les plantes ligneuses. Or, si on a égard à l'abondance des espéces sédentaires et à la différence qui existe dans les rapports numériques de celles des autres iles, on concevra que la végétation de Graciosa doit présenter un autre aspect , puisque les plantes qui abondent le plus dans celles-ci manquent entièrement dans celle-là. (1) Conyza sericea, Prenanthes pinnata et P. arborea, (2) Erica arborea. (3) Myrica Faya. (4) Parmi ces espèces sédentaires, les suivantes ne se trouvent qu'à Lancerotte et à Fortaventure : Ruta bracteosa, Arenaria procumbens, Vahl, Linaria heterophylla, Schousb , Sonchus divaricatus , Reseda subulata, Reseda crystallina, N., Melica ciliata, Thymus origanoides, N., Borrera "Atlantica, Ferula communis? Gnaphalium Sp., n., Ononis hebecarpa, Statice pruinosa, Delile, Lotus trigonelloides, N. 2 e . . , . DES = , ` U Helianthemum Niloticum wa été recueilli jusqu’à présent qu'à Fortaventure. ? . . E . . 1 L’ Argemone mexicana et le Scrophularia arguta ne se voient que de loin en loin, nous pouvons à peine citer dans tout l'archipel trois localités différentes pour ces deux plantes. (oyez à la fin du chapitre (2) la liste des plantes recueillies à Lancerotte et à Fortaventure.) Convolvulus floridus et C. scoparius. N., Heliotropium Europeum , Statice puberula, N., Vn nen ot mime re oa a nn ne ——— TCI jm RII 2 ( (Pistacia Atlantica), garnit l'étroite vallée de Rio-Palma, un des sites les plus remarquables et qui conserve encore toute son originalité (1). ) Les Tamarix (T. Canariensis) couvrent les plages marécageuses de Grand-Tarajal et reparaissent ensuite sur la côte de la grande Canarie aux alentours de Maspaloma; ces arbustes ont trouvé là le méme sol avec une exposition et une température analogue; abrités par des dunes, ils se sont propagés au bord des lagunes. À mesure que l'on s'avance dans le centre de l'archipel, la flore de- vient plus riche en espéces canariennes. Cette végétation régnicole a ses lois et sa distribution; en s'élevant sur les pentes des montagnes, on passe successivement par des climats divers; dans chaque région ce sont d'autres plantes qui deviennent plus nombreuses suivant l'al- titude des lieux et l'avantage des sites. Les espèces némorales, les Pins, _les Cytises, les Adenocarpes et les végétaux des crétes et des plateaux culminans que Lancerotte et Fortaventure ne possédent pas, vien- nent accroitre ces groupes de plantes sociables qu'on rencontre à différentes hauteurs. Le long des cótes la température est celle de la Mauritanie; une fraîcheur qu'entretiennent les brouillards se fait ressentir sous les ombrages des foréts lauriféres et dans les ravins ad- jacens, tandis qu'au-dessus de ces stations l'air est de plus en plus raréfié, et la terre, presque dépourvue d'humus, nourrit des germes qui se reproduisent sous d'autres formes. La présence ou l'absence du soleil occasionnent dans cette zone des variations atmosphériques trés-tranchées ; le jour la sécheresse de l'air est des plus sensibles et la (1) Les chapelains de Bethencourt visitérent Fortaventure en 1402 ; voici le passage de leur relation qui a rapport à Rio-Palma. C a Quand on est outre, l'on trouve le val bel et honny et moult delectable, et y peut bien » avoir huit cens Palmiers qui ombroient la vallée, et les ruisseaux des fontaines qui courent parmy, » et sont par troupeaux cent et six vingts ensemble, aussi longs comme mats de nef, de plus de vingt » brasses de hault, si verds et si feuillus, et tant chargez de dattes que c'est une moult belle chose à » regarder. » (Hist. de la première descous. et conqueste des Canaries, par F.-P. Bontier et J. Le Ver- RIER. Paris, MDCXXX , pag. 70.) Son «ce T. à nd INR i. " (87 chaleur étouffante, la nuit, au contraire, est humide et froide. Enfin, sur les plus hautes cimes, des neiges amoncelées pendant la saison orageuse retracent les frimats du nord et le spectacle de nos régions alpines. Ainsi, le paysage change d'aspect à chaque instant, quelques heures suffisent pour parcourir tous les climats, et, sans franchir de grandes latitudes, les pas deviennent des degrés. Cependant, méme dans ce groupe occidental des Canaries que le savant Broussonet distinguait de celui d'Orient à cause de la diffé- rence de végétation (1), la structure orographique et la nature du lerram semblent s'étre combinées pour isoler certaines plantes. Une nouvelle espèce d'un genre du cap, le Manulea Canariensis, N., s'est fixée dans l'ancien cratère de Bandama; le Commelina Canariensis ne se plait qu'au bord des cours d'eau des environs de la Ciudad et de Terror. A Palma, l'Umbilicus Heylandii, N., habite exclusivement les bois piniféres de Barlovento; le Sempervivum Goochiæ, N., ne se montre que dans les ravins de la cóte orientale; tandis que le Be- thencourtia Palmensis veste caché dans l'immense profondeur de la | Caldera. Ces singularités se font encore plus remarquer à Ténériffe : le Statice arborea, dont on ne connaissait lexistence que par quel- ques pieds cultivés dans les jardins d'Orotava, sest isolé sur les ro- chers du Burgado. (Voy. Arras, Vues phytost., pl. 8.) Un autre statice (S. imbricata, N.), s'est confiné sur un îlot désert, situé en face de Garachico, le Gymnocarpum decandrum (2), cette Paronychiée si cu- rieuse, que Forskal observa le premier en Égypte. reparait sur les (1) « M. Broussonet observe qu'on peut diviser l'archipel des Canaries en deux groupes d'iles : le- » premier renferme Lancerotte et Fortaventure; le second , Ténériffe, Canarie, la Gomère, Fer et » Palma. L'aspect de la végétation diffère essentiellement dans ces deux groupes. » (Huwsorpr, Voyage aux régions équinoxiales, tom. 1, pag. 417.) s ` (2) L'existence de cette plante aux Canaries n'était point connue avant nous; nous avons été aussi les premiers à recueillir dans ces îles le Statice pruinosa, le Traganum nudatum , etc., etc.; et c'est sans doute sur un faux renseignement que M. Decaisne a avancé dans sa florule du mont Sinai que M. de Buch avait mentionné ces espèces dans son catalogue. ( Voyez Annal. des Scien. nat., part. bot., 1834, p. 7.) mes I į | j (9) scories du promontoire de l'Aguja. Il en est ainsi de plusieurs autres espéces quon ne retrouve que dans des stations trés-éloignées les unes des autres, ou qui ne se fixent que dans un seul endroit (1). La présence de ces plantes sédentaires dans ces diverses localités est aussi inexplicable que les autres cas d'isolement dont nous aurons à parler au sujet des arbres forestiers; ces faits d'épirréologie végétale tien- nent sans doute à l'influence que les agens extérieurs et les milieux ambians exercent sur l'organisation. L'illustre Ramond médita sou- vent sur ce mystère de la dissémination originaire des végétaux; plus d'une fois, en gravissant les cimes escarpées des Pyrénées, il fut sur- pris de la rencontre imprévue de certaines plantes ou de l'absence de celles qu'il s'attendait à trouver sur ces montagnes. « La nature, dit- »1l, semble indifférente tour-à-tour à la similitude des lieux et aux » distances qui les séparent; tantôt rappelant dans les climats pareils » les plantes des contrées les plus éloignées, et tantôt refusant cette » conformité de productions à des régions qui réunissent toutes les »conformités du sol et de la température (2). » Les lois de la réparti- tion des germes sur la surface du globe peuvent seules donner lexpli- cation de ces bizarres anomalies; mais ces lois se lient aux causes premières par lesquelles la nature agit sécrétement; ce sont des prin- cipes qu'elle ne nous a pas révélés, et de long-temps, peut-être, nous ne pourrons pas plus pénétrer le mystère de ces créations spontanées que celui de leur stabilité ou de leur migration. C'est en vain que l'on chercherait à résoudre ces grands problémes; l'apparition des plantes . (1) A Ténériffe, l'Euphorbia aphylla, qui est trés-commune à Canarie, ne croit qu'aux environs de Buenavista ; l'Echium simplex, le Lavatera phœnicea et le Pterocephalus virens , N., ne sont connus que des bergers de Baxamar ; le Reseda scoparia ne se trouve qu'à la pointe de Teno et sur la isleta de la grande Canarie; le Pistacia Lentiscus, si abondant dans cette île, n'a jamais été vu à Ténériffe, et le Cneorum pulverulentum , si commun dans celle-ci, n'existe pas dans celle de Palma. Il nous serait facile de multiplier ces exemples, on en jugera par le tableau général et comparatif que nous donnerons de la flore de chaque île. : : (2) Ramond, De la végétation des montagnes. Annales du muséum, tom. 1v, pag. 397. I Je CL) sur la surface du globe est antérieure à celle de l'homme; vouloir porter nos regards au-delà de cette préexistence serait nous lancer dans le vague des hypothéses et interroger des temps qui n'ont point d'annales. Amis du positif, ces questions de botanique transcendante ne sauraient nous intéresser par cela méme qu'elles seraient dénuées de preuves; et sans plus y attacher d'importance, nous continuerons à présenter lensemble de cette distribution phytostatique sur la- quelle nous avons plus particuliérement fixé notre attention. La masse des plantes n'est pas également répartie dans chaque ile : nous avons déjà observé que la réunion ou l'isolement des groupes dans les différentes stations que l'on traverse depuis le littoral jus- qu'aux sommets culminans, dépendaient de la configuration du ter- rain et de la hauteur des montagnes. Pour expliquer ces changemens, nous donnerons d'abord une idée générale de la végétation dans la partie occidentale de l'archipel, nous dirons de quelle maniére elle est répandue sur le sol, en signalant les transitions de forme par les- quelles elle passe, les divers caractères qu'elle affecte et le ton qu'elle imprime au paysage. Prenant Ténériffe, l'ile la plus centrale et en méme lemps la plus élevée du groupe, comme type de cette topo- graphie botanique qui se reproduit en partie dans les îles voisines, nous appellerons l'attention sur les analogies et les différences qui nous ont paru les plus dignes de remarque. Le littoral de Ténériffe, de méme que celui de Canarie, de Palma, de Gomére et de l'ile de Fer, se présente comme un boulevard de falaises; ces escarpeémens se dressent du sein des eaux et laissent voir de toute part leurs murs de basalte bordés d'une gréve étroite. Les plantes de cette région maritime ont pris racine dans les falaises, elles en tapissent les pentes et garnissent les assises qui les surplombent. Ce sont pour la plupart des espéces à feuilles charnues, qui s'imbibent des vapeurs de l'atmosphére et. des émanations des vents de mer. Un pareil terrain, en effet, ne saurait nourrir que des plantes grasses ou C) salines qui se développent sous l'influence de l'air marin. Ces espéces du littoral varient suivant les sites qu'elles occupent, les unes crois- sent sur les massifs de la cóte et appartiennent aux Ficoides , AUX Chenopodées, aux Euphorbes, aux Crassulacées, etc.; mais il en est d'autres aussi qu'on trouve sur les gréves et qui sont souvent baignées par les flots (1). | Ces végétaux des plages se propagent parfois sur les talus des vallées et dans l'intérieur des ravins. L'exposition explique encore ces ano- malies : l'air, chargé d'émanations salines, peut, selon les accidens d'une cóte qui offre passage au vent marin, favoriser jusquà une certaine distance du rivage le développement des plantes qui ont besoin du carbonate de soude (2). Mais ces mémes plantes ne pour- raient vivre trésloin de la mer, parce qu'elles n'aspirent l'eau que sous la forme gazeuse et que leur organisation réclame une tempéra- ture chaude où l'évaporation soit active; aussi est-ce toujours dans les stations inférieures qu'elles croissent. Dans les régions plus élevées, des pluies abondantes, en purgeant le sol de tout principe salin, dé- veloppent des gaz qui apportent une autre économie dans le systéme . de nutrition des végétaux. On trouve pourtant là encore des plantes grasses, mais ce sont pour la plupart des Joubarbes, et si l'on sen tient aux analyses chimiques, au lieu de carbonate de soude, c'est du carbonate de potasse qu'elles donnent en dernier résultat. Douées aussi d'une absorption puissante, les espèces du genre Sempervioum . si nombreux aux Canaries, croissent sur les vieux murs, dans les (1) Zygophyllum Fontanesii, N., Picridium Tingitanum, Astydamia Canariensis, Crithmum maritiman, Conyza sericea, Statice imbricata, N., Statice pectinata, Frankenia pulperulenta, etc., etc. - (2) M. le professeur de Candolle a depuis long-temps consigné cette observation dans un de ses écrits : « L'air chargé des émanations salines de la mer nuit à certains végétaux ; et favorise au contraire » le développement de ceux qui ont besoin du carbonate de soude, comme on le voit dans les vallées » du midi de l'Europe, où l'on trouve des plantes marines ; €t où l'on peut cultiver la soude à une » assez grande distance de la mer, pourvu qu'elles soient ouvertes de son côté et exposées au vent ma- » rin. » (Géog. bot., Diction. des Scien. nat. , tom. xvii, pag. 379.) porca 0 «x fruticosa, Cneorum pulverulentum, Echium gig (12) interstices des rocs, contre les falaises les plus escarpées, et en général sur toutes les surfaces hygroscopiques où l'humidité pénètre sans séjourner. Au-dessus des falaises, le terrain sélargit pour former une première assise et se relever ensuite vers le centre de l'ile en talus déchirés par les ravins et séparés par les vallées côtières. La végétation disséminée sur ces versans prend des formes africai- nes, et se distingue par des troncs nus et tortueux , des feuilles char- nues et un vert bleuâtre. (oy. Arras. Vues phytostat., pl. 1 et 2.) L'Euphorbe des Canaries, aux tiges droites et anguleuses, domine dans cette région. Ces grands buissons abritent souvent d'autres végétaux qu'on retrouve épars sur ce sol volcanique; les rameaux fleuris des Klei- nies, des Plocames, des Echium arborescens, etc. (1), flottent au-dessus des massifs d'Euphorbes, tandis que les Periploca et les Rubia sen- trelacent dans ces halliers impénétrables. La verdure glauque de ces différentes plantes ne produit de l'effet que par sa masse ; les espèces dont les parties foliacées ont une couleur plus vive, tranchent alors sur la teinte cendrée du paysage; cest ce contraste qui lui donne le ion ; mais considérées en détail, les plantes isolées sont presque perdues au milieu de ces nappes de tuf et de ces rocs calcinés. Dans les vallées côtières , au contraire ; la végétation indigène vient sanimer d'une autre vie en présence des cultures, et les plantes sau- vages semblent perdre de leur nature au milieu des progrès de l'in- dustrie agricole. La main de l'homme se montre là de toute part, et la physionomie de pays a changé pour prendre divers caractères: elle re- trace à la fois l'agreste campagne d'Europe avec ses vergers d'arbres fruitiers, ses vignobles et ses labours; les beaux sites des tropiques et la verdure qui en relève l'éclat, les oasis du désert avec leurs Palmiers et de bee e e ira NR (1) Convolvulus floridus , Jasminum odoratissimum, Prenanthes arborea et P, pinnata , Messerschmidia anteum , Rumex Lunaria > Euphorbia piscatoria, Physalis aristata, etc. — RR mt e atm an ^ fa — 4 man saa rn quen tg - anges Er « p à vm iiis wol a Ta . ( 13.) leurs sources, puis cette végétation régnicole qu'on voudrait proscrire, maïs qui se reproduit toujours avec ses Euphorbes et ses autres plantes. Ainsi, les espéces étrangéres se sont naturalisées à cóté de celles qu'une force spontanée fit croître dans ces climats; les Dattiers , les Papayiers, les Orangers, les Péchers, les Bananiers, et une foule de végétaux exo- tiques, introduits à différentes époques, croissent maintenant à cóté des Dragoniers, des Bosea et des Ardisiers. Deux arbres des foréts pri- mitives , les Arbousiers et les Lauriers, viennent aussi confondre leur feuillage dans ces groupes variés; les Agaves et les Nopals, apportés d'Amérique, forment des haies de clôture où sentrelacent le Drusa aux feuilles opposées, la Canarine à clochettes, et d'autres plantes du pays qui finissent par envahir les champs comme pour reconquérir leur ancien domaine. | On trouve toutefois dans les vallées et sur quelques parties du litto- ral des terrains qui par leur nature ont pu garantir la végétation pri- mitive des envahissemens agricoles. Tels sont, vers la côte, ces espaces stériles compris entre les gréves et les cultures, ou ces champs de lave qui entourent les cônes d'éruption. La première espèce de terrain prend le nom de Toscales, lorsque les tufs volcaniques en forment la base; les seconds sont appelés Walpais. À 'Ténériffe on peut voir des exemples des uns et des autres dans l'enceinte de Teno, aux alentours de Sainte- Croix, au bas des vallées de Guimar et d'Oratava, ou mieux encore vers le nord de l’île, à la pointe del Hidalgo, où les coteaux maritimes sont couverts d'Artemises, de Lavandes, de Thyms, et d'autres espèces aromatiques, la plupart ligneuses et à feuilles cendrées (1). —————— (1) Artemisia argentea, Lavandula pinnata, Sideritis Canariensis , Thymus Calamintha, Thymus Tene- riffe, Plantago arborescens, S lachys Canariensis, etc., etc. La partie inculte de la vallée de Guimar, que nous avons citée plus haut, offre un des meilleurs types de cette végétation des Toscales : on y trouve le Notoceras Canariensis, le Gnaphalium cauliflorum , le 2 Buphthalmum sericcum, le Fagonia Cretica, Y Aizoon Canariense, le Saccharum Teneriffe, le Linaria sco- varia et le Linaria Elatine, le Teucrium pseudo-iva , le Plantago Coron 7 pa - e : , ie ; P , B opus s le Micropus pygmæus, etc. C'est aussi dans la même localité qu'on commence à rencontrer le Prenanthes spinosa et le Cneorum AA um | vet Fe x " I — ARM cm NN NEUSS. MR oer amena RE e , y O ET rs — NETS rr RR iE ——— 47m e aggredi + eA eds sem ON EE ur csi p INIRE og ny (14) À la grande Canarie, la presqu île de la Isleta offre aussi des plantes analogues parmi lesquelles dominent toujours les Euphorbes et leurs affiliées. La Isleta, que les feux souterrains vomirent dans des jours de tourmente, porte partout l'empreinte de la fureur des volcans. Cette presqu'île s'unit à la Canarie par l'isthme de Guanarteme ; plusieurs cônes d'éruption dont la base est encombrée de matières lithoïdes , s'é- lèvent au-dessus de ce sol en désordre. Lorsque la nature eut repris son calme, la Isleta devint un lieu vénéré que la terreur religieuse des abo- rigènes transforma en Moraï. Des scories entassées en forme de tumu- lus renferment les corps de ces insulaires, et occupent le centre d'une nappe de lave en partie décomposée; la végétation s'en est emparée, et l'action incessante des forces organiques a fait pousser des plantes du sein de ces tombeaux. Ce site, par son aspect bizarre, ne saurait étre comparé à aucun autre. Ces morts ensevelis dans des cratéres éteints , les cendres d'un peuple exterminé mélées à la cendre des volcans , puis sur les restes de ces deux catastrophes, la nature accomplissant ses lois et fécondant de nouveaux germes au milieu de ces débris; tel est l'en- semble du tableau que présente la Isleta. Les grands buissons d'Eu- phorbes sans feuilles s'étalent autour des sépultures comme des cande- labres (1), les Plocames, en inclinant leurs branches vers le sol. rap- pulverulentum, bien plus répandus sur la bande méridionale de l'ile où abondent le Zygophyllum Fon- tanesü, N., Y Euphorbia balsamifera, Y Alo vulgaris et le Justicia hyssopifolia. Dans les Malpais, les plantes suivantes viennent se joindre à quelques-unes de celles que nous venons de citer : Polycurpæa gnaphalodes ; Achyranthes argentea, Paronychia Canariensis, Salia Ægyptiaca, Asparagus umbellatus, Forskalea fruticosa , Echium aculeatum , Frankenia ericæfolia , Rumex spinosus, Buphthalmum maritimum, Lycium Afrum, Datura Stramonium et Datura met el, Hyoscyamus Ca- nariensis, Mesembryanthemum nodiflorum et le Mesembryanth. crystallinum qui s'est naturalisé dans ces climats ; puis les Euphorbes et la plupart des espèces ligneuses qui les accompagnent. (D Euphorbia Canariensis* et Euphorbia aphylla *. Viera , en parlant de l'aspect de l'Euphorbe de Canaries , compare toujours cette plante singulière à un grand candelabre et à ses fleurs des charbons ardens. « Forman al arrancar de la Fe raiz » una curbatura , que las hace semejantes a una grande araña llena de blandones encendidos. » (Noticias de la hist. gener. de las islas Canarias, tom. 1, pag. 72; Madrid, MDCCLXX1I.) M. Léopold de Buch , à l'imi- tation de Viera, a donné une description pittoresque de cet ? te Euphorbe dans son ouvrage sur les iles Canaries. (Physicalische Beschreibung der Canarischen Inseln ; Berlin, 1825.) -— (15) pellent nos saules-pleureurs, tandis que l'Orixama (1), cette térébin- thacée qu'on employait dans les embaumemens, vient méler ses ra- meaux argentés aux teintes chaudes de cette terre où reposent les an- ciens de l'ile. Parmi les autres plantes (2), il faut distinguer les Physa- lis et les Conyza (3) qui abondent dans cette localité, et le Convokulus scoparius dont le bois est si recherché pour son parfum de rose. Si l'on en excepte quelques espéces (4), la plupart des plantes de la Isleta se retrouvent à Palma dans des endroits moins célébres, il est vrai, mais bouleversés aussi par les éruptions. Là encore, au milieu des Lapilli de Fuente-blanca, du Mi alpais de Tazacorte, et sur les rochers escarpés de la cóte orientale, la végétation est venue exercer son action puissante sur un sol envahi par les volcans. - Mais sans nous arréter maintenant à ces observations de détail, nous continuerons à prendre Ténériffe pour type de cette distribution phy- tostatique qui se fait remarquer à chaque pas. | Les villes et les bourgades du littoral, et celles situées sur la pre- miére assise, au-dessus des talus qui bordent la cóte, ont aussi leur flore, à laquelle s'unissent toutefois plusieurs des espéces déjà citées. Ces plantes croissent entre les pavés et dans les rues solitaires (5), con- tre les murs et sur les toits des vieux édifices (6). En général, les villes (1) Cneorum pulverulentum *. (2) Ces autres plantes sont les suivantes : Heliotropium erosum*, Reseda scoparia*, Chenopodium am- brosioides, Forskalea fruticosa, Buphthalmum stenophyllum*, Aizoon ue eec Mesembryanthemum no- diflorum, Beta maritima, Zygophyllum Fontanesii*, N., Prenanthes spinosa *. (3) Physalis aristata *, Conyza sericea et Conyza dichotoma * ? (4) Ces espéces sont celles marquées par une astérisque dans les notes précédentes ; elles sont rem- placées à Palma par le Frankenia corymbosa, le Messerschmidia fruticosa, le Physalis somnifera , l Echium aculeatum et le Glaucium: flavum. (5) Achyranthes nipea, Euphorbia Peplus , Senebiera didyma , Lappago racemosa, Aristida cœr oc Datura Stramonium, Erigeron Canadense, Erigeron viscosum, Urtica urens, ee fruticosa, Hyoscyamus Canariensis, Parietaria Judaica, Oxalis corniculata. À la ville de l'Orotava, le Solanum pseudo-capsicum , le Chelidonium majus et le Fiala odorata crois- sent le long des chaussées. (6) C'est surtout à la Laguna que cette flore urbaine est plus remarquable. Parmi les plantes des SR n tO c ue au F- mU NE x z- —— ra da Atem ou cn | pcm 4 rare D SUR ne aues eus: gni io gt an E COR a e... ELT pissas ma a+ Vera: ne DM 1 i | | T LAM escaping © Res digno (6) maritimes offrent toutes quelques espèces sporadiques, soit qu'elles aient été introduites accidentellement par la voie des importations, ou que les circonstances locales les aient produites là comme ailleurs. Ainsi l'Argemone du Mexique ne croit que sur le sol volcanisé de la ville de Garachico, et à Lancerotte aux environs du port d'A recife ; le Scrophu- laria arguta està peu près dans le méme cas; mais le nombre des es- pèces répandues dans les villes éloignées de la côte est bien plus consi- dérable. La Laguna, cette ancienne capitale de Ténériffe, qu'Alonzo de Lugo, le conquérant, fit bâtir sur la lisière des bois, à 1722 pieds au-dessus du niveau de la mer, jouit d'une température trés-favorable aux plantes urbaines. Plusieurs maisons gothiques, construites vers la fin du xv* siècle, offrent le plus singulier coup-d oeil. Ces vieux ma- noirs se sont couverts de Joubarbes et de Fougères; le blason de leur porte a disparu sous la mousse : cette végétation s attache même aux édifices modernes, et leur imprime en peu de temps un air de vétusté qui plaît aux amateurs du romantique (1). Le long des chemins communaux, on trouve encore d'autres plan- tes qui croissent de préférence dans les haïes et sur les bords des sen- tiers (2). | rues nous citerons le Ranunculus parviflorus et le Ranunculus muricatus, le Solanum nigrum , le La- marckia aurea , le Malva parviflora, le Thlaspi Bursa pastoris, Polygonum aviculare, Trifolium sub- terraneum. Espèces qui croissent contre les murs et sur les toits : Sonchus congestus , Sempervivum urbicum , S. Canariense et S. dichotomum , Geranium Robertianum, Thelygonum Cynocrambe, Hedera Cana- riensts , Campanula lobelioides, Asplenium palmatum, Cyathea fragilis et Davallia Canariensis. A ces plantes, il faut ajouter encore le Kleinia neriifolia et le Prenanthes pinnata qui se montrent parfois sur les murs des jardins dans les endroits exposés au midi, et quelques autres espéces plus communes dans les villes maritimes. (1) « Cette végétation, a dit M. Bory de St-Vincent, donne une triste idée de la ville à ceux qui » la visitent pour la première fois et qui n'étant pas botanistes, ne la regardent pas comme un em- » bellissement. » (Essais sur les Fortunées, pag. 344.) | (2) Urtica morifolia, Galium Aparine, Daphne Gnidium , Hypericum Canariense et H. grandifolium, Cineraria Tussilaginis, Carduus clavulatus, Rubus fruticosus, Rubia fruticosa, Canarina Campanula, Bryonia verrucosa, Arum dracunculus, Arum Arisarum , Delphinium Staphysagria. ( 17) La nature, si variée dans ses créations, les a répandues partout, sur les rochers battus par les vagues, le long des chaussées, parmi les dé- combres et jusque sur le faite de nos monumens; les germes qu'elle a répartis se propagent constamment dans les mémes sites. Ainsi, les murs humides de la cité de Lugo se sont couverts d'une végétation spéciale et toujours renaissante; le Colisée a aussi ses plantes romaines, qui depuis des siècles se reproduisent dans la poussière des ruines (1). 5i l'on compare les plantes urbaines dont nous venons de faire men- tion, avec celles de la flore du Colisée ; On verra qu'il sen trouve envi- - ron la moitié qui croissent également dans les principales villes de Té- nériffe et dans les ruines de l'ancienne Rome. Quant aux autres espèces que nous avons observées à l'Orotava et à la Laguna, la plupart se trouvent représentées au Colisée par des espèces congénères. Cepen- dant, malgré ces rapprochemens, la végétation de Rome n’a pas le méme aspect que celle de la Laguna; les plantes qui couvrent les vieux ma- noirs de l'ancienne capitale de Ténériffe, et qu'on voit même se déve- lopper sur les édifices modernes, ne croissent pas sur les maisons ro- maines, car le climat de l'Italie centrale est bien moins humide que celui de la Laguna. Celles qui se sont emparées du Colisée sont presque toutes des espèces herbacées qu'on rencontre ordinairement sur les dé- combres et qui poussent au milieu de ces grandes ruines comme sur une colline calcaire. Les sonchus et les joubarbes de la cité de Lugo sont au contraire des espèces frutescentes qui dominent sur les autres plantes urbaines; on ne voit en Europe rien de semblable pour le port et l'éclat des fleurs. Dans les ravins: de Ténériffe, la végétation se multiplie sous -des formes plus fraîches et plus variées; ces défilés prennent nais- sance sur les premiers versans des montagnes centrales et cou- pent les talus qui descendent vers la cóte. On les distingue dans (1) Voyez Sebastiani, Enumer. plant. spon. nascent, in ruder, amphith. F lari; Rome, moccex. l. 3 LR el sare tao vt dl —€— e à E Lib ur a Somme teen mr cra CAS) le pays sous le nom de Valles ou de Barrancos, selon que leurs berges sont plus ou moins rapprochées. Tantôt à sec, tantôt parcourus par des ruisseaux, ces ravins offrent à chaque pas les accidents les plus pitto- resques; ici les assises de la montagne barrent le fond du Thalweg et interrompent tout-à-coup le plan de pente; alors le torrent supérieur, en franchissant ce ressaut, se précipite en cascade et creuse des mares autour desquelles se développent les plantes qui veulent l'humidité (1). Plus loin, des quartiers de rochers, détachés des hauteurs voisines , for- ment un nouvel obstacle et divisent le cours d'eau. A mesure que l'on s'nterne plus avant dans les détours de ces gorges, leurs berges se res- serrent de plus en plus et présentent dans certains endroits des escar- pements d'une élévation extraordinaire. Une végétation vigoureuse sest emparée de ces murs de basalte, les racines ont pénétré dans tou- tes les fentes, une foule d'espèces diverses, suspendues aux rochers des alentours, les décorent de leurs fleurs. Tous ces végétaux garnissent les moindres rebords, se réunissent en masse sur les assises des berges et le long des rives des torrens; on trouve là les plantes qui se plaisent dans les endroits abrités, le Salix Canariensis avec ses beaux chatons roses, le Solanum Nava, N., aux tiges volubiles, le Bæhmeria rubra, le Poterium caudatum aux rameaux panachés et plusieurs autres espéces rares (2). | —Ó— M— (1) Scirpus globiferus, Caladium nymphæifolium, Scrophularia betonicæfolia, Equisetum elongatum, etc. On trouve aussi dans ces mêmes localités plusieurs espèces de l’Europe méridionale, telles que le Typha angustifolia (trés-rare), le Mentha syleestris, le Nasturtium officinale, V Apium graveolens, Y Arum Dracunculus, etc., et le Potamogeton Canariensis flottant sur les eaux stagnantes. (2) Principales plantes des ravins : Adianthum reniforme. Cheiranthus mutabilis. Lavandula abrotanoides. Anthemis revoluta. Crambe Strigosa. Lavandula pinnata. Asparagus scoparius. Dactylis Smithii. Orchis tridactylites , N. Athamantha cerviariæfolia. Digitalis Canariensis. Peucedanum aureum. Bosea Yervamora. Ferula glauca. Phyllis Nobla. Bupleurum salicifolium. Galium Neesianum. Ranunculus cortusæfolius. Campylanthus salsoloides. Gymnogramme aurea. Rhamnus crenulatus. Carlowizia salicifolia, Justicia hyssopifolia. Ruta pinnata. ( 19 ) Diverses causes concourent ensemble pour réunir dans ces lieux une -grande variété de plantes : à l'abri des vents d'Afrique, dans ces gorges profondes, l'ombre des berges les garantit des ardeurs du soleil, l'infiltration des sources et les eaux des torrens y entretiennent l'humi- dité; aussi les végétaux des ravins sannoncent de suite avec un air de fraicheur qui les distingue de ceux de la côte. Les ravins les plus remarquables de Ténériffe sont ceux de Badajos dans la vallée de Guimar et de Llarena dans celle d'Orotava , ceux de Tamadaya et del Infierno sur la bande méridionale de l’île, le Barranco hondo et celui d'Acentejo sur la côte opposée. Le ravin de Badajos est borné à l'occident par les montagnes de la Ladera de Guimar. et de l'autre par les mouvemens de terrain de la vallée. Lorsqu'on s'est avancé dans cette gorge, on voit ses berges ; Couvertes de plantes, se dresser à plus de huit cents pieds au-dessus du torrent dont il faut remonter les bords (1). Dans la grande Canarie, les ravins sont modifiés par la str graphique; ce ne sont plus, comme à Ténériffe, de longues crevasses qui rayonnent du centre de l’île vers le littoral; les torr ucture oro- ens roulent au fond de larges vallées, leur lit.est moins encaissé et leur plan de pente offre peu d'irrégularité. Il résulte de là un sol plus uniforme, plus accessible à la culture, et partant une réduction sensible dans le nombre des plantes indigènes. Dans l'ile de Palma, au contraire, les ravins reprennent le caractére original de ceux de Ténériffe; ce sont encore des berges coupées à pic et tellement rapprochées que souvent les arbustes se balancent d'un Sisymbrium millefolium. | Tanacetum Canariense. Stachys Canariensis. Teucrium heterophyllum. et diverses espéces des genres Bystropogon, Cineraria, Convoleulus, Conyza, Echium Hypericum, Lotus, Pyrethrum, Sideritis, Sempervivum, Sonchus, etc. (1) Ce ravin sera reproduit dans notre Atlas par l’habile crayon de M. Saint-Aulaire ; d’après le dessin original de notre ami J.-J. Williams. ay arra a À va (20) bord à l'autre en formant une voüte de feuillage au-dessus du torrent. Nous citerons principalement le grand ravin de las Augustias, qui. donne entrée dans la Caldera et les barrancos de la côte orientale qui nous ont fourni plusieurs espéces nouvelles (1). La végétation des ravins s'assimile vers leur débouché à celle du lit- toral (oyez Arias, vue phytost., pl. 2.), tandis qu'à leur issue supérieure elle se confond avec celle des foréts. Ainsi, en remontant les pentes de l'île par ces longs défilés, on parvient dans la région des bois. Alors la masse des végétaux devient plus compacte, les arbres, pressés les uns contre les autres, laissent à peine pénétrer le soleil à travers leurs ra- meaux, et sous l'ombrage qui les protège, les plantes némorales crois- sent au milieu d'une atmosphére humide et d'une terre riche d'humus. Envisagées sous leurs rapports pittoresques, les forêts Canariennes ont fait l'admiration de tous ceux qui les ont parcourues; mais notre in- tention n'est pas de les considérer sous ce point de vue, car elles occu- pent une place trop importante dans la flore de ces climats; aussi nous réservons nous de donner dans un autre chapitre nos observations sur l'agroupement des espèces forestières et les divers changemens surve- nus dans ces bois primitifs; pour le, moment, il nous suffira d'énumé- rer les principaux arbres et les plantes les plusremarquables. Les Lauriers y dominent sur toutes les autres espèces (2) et sont réunis par groupes entremélés de Bruyères arborescentes, d'Ilex, de Visnea et d Arbousiers. L’ Ardisia excelsa,le Cerasus Hixa, le Viburnum rugosum et le Myrica Faya, sont, aprés les. Lauriers, les Bruyères et les Ilex, les espèces les plus abondantes; le Bæhmeria rubra et le Pittos- (1) Sempervivum Goochiæ, N., Cytisus splendens, N., Cytisus filipes N. et Cytisus stenopetalus, N., Lotus eriophthalmus, N., et Phagnalon umbelliforme, N. i (2) Les Lauriers sont au nombre de quatre espèces, savoir : Laurus Canariensis, N., L. Indica, L. Barbusano et Persea fætens. Les autres arbres appartiennent aux espèces suivantes : Erica arborea , Nex Perado, Ilex Canariensis, Visnea Mocanera, Arbutus Canariensis, Rhamnus glandulosus, Celastrus cassinoides, Myrsine Canariensis et Olea excelsa. (21) porum coriaceum y sont fort rares. Parmi les plantes némorales , le Con- eoleulus des Canaries s'élance comme une liane jusqu'au sommet des plus grands arbres, le beau. Géranium à feuilles d'anémone vit dans le voisinage des sources, le Ruscus androgynus entoure les vieux troncs. et une multitude de Fougères étalent de toute part leurs élégantes frondes (1). | Lorsqu'on a traversé ces bois vierges, on trouve des terrains dévastés oü la végétation, abandonnée à elle-méme, peut reprendre à la longue son premier aspect. Ce sont d'abord des groupes de jeunes Lauriers et de Fayas qui repoussent parmi les Bruyères; bientôt celles-ci, plus nom- breuses, ne souffrent autour d'elles aucune autre plante; mais en sa- vancant vers la région supérieure, elles ne se montrent plus que par buissons épars au. milieu des Pteris et des Cistes. A l'altitude de 3,600 pieds, ces bois nains, déjà bien éclaircis , finissent par disparaítre ; alors le Cistus vaginatus règne seul et se multiplie en masse jusque sur la li- sière des bois de Pins. | Par son port et ses formes, le Pin des Canaries (Pinus Canariensis J, ressemble assez à nos espèces d'Europe; aussi au premier abord, la région pinifére rappelle dans ces iles nos forêts alpines. Sous ces arbres gigantesques, le terrain est sec et peu substantiel, le nombre des plantes némorales est en même temps très limité (2). Les Pins croissent sur les pentes les plus abruptes et garnissent les premiers (1) Les plantes suivantes, dont le nom seul indique l'origine, appartiennent aussi à la région des bois : Digitalis Canartensis. Asplenium Canariense. Hedera.Can. Davallia Can. Smilax Can. Trichomanes Can. Bystropogon Can. Astrodontium Can. Genista Can. | Bryum Can. Dracocephalum Canariense. (2) On ne rencontre que très-peu de plantes sous les bois de Pins , les principales sont les suivantes : Helianthemum guttatum, Asphodelus ramosus, Thymus Calamiñtha, Lotus angustifolius, Pteris . à. lina, Erigeron viscosum et Hypericum grandifolium rabougri. y server S ipi — — Gegen yet m. id - — Vang Sapin Loin bom irc tii eee a esed costi NES ERR éme tt Y plus beaux ouvrages. « Les pays montueux, di (22) sans des montagnes. On les voit rarement couronner les mornes qui accidentent les crêtes: l'aréte de la ch de "Ténériffe apparait ar ver aine qui entoure le pic ide et nue, du moins tel est de loin las- pect de ces cimes culminantes dont les plus 9000 pieds de hauteur absolue; mais, lorsqu'on parvient sur ces ro- chers sourcilleux, on s'étonne d'y voir encore rencontrés nulle part. Il. faut du Sombrerito pour cueillir le élevées ont environ des végétaux qu'on n'avait gravir les assises escarpées Carlina xeranthemoides, le Cheiran- thus scoparius, le Pimpinella Cumbre, ou le Plantago Teydea. N. . Le Tolpis lagopoda, le Bethencourtia Palmensis et le Thymus Ben- thami, N., ne se trouvent qu'au pic d Imendro; un arbuste unique connu des bergers sous le nom de PZmientero de la cumbre, le fihamnus coriaceus, vit relégué sur le morne de Guaxara; quel- ques Génévriers rabougris (Juniperus Cedrus, N. ) couronnent la cime du Cedro; le Rosier 'd'Armide (Rosa Armidæ, N.) et une belle variété du Pyrus Aria ne croissent guére que dans deux en- droits trés-éloignés l'un de lautre, la montagne du Rosal et la partie de la chaîne des Cañadas appelée Tiro del Gugnche. Toutes ces plantes, isolées sur ces arétes volcaniques, végètent là depuis des siècles sans se propager sur les pics adjacens (1). En traversant le grand cirque des Caíiadas pour se rapprocher du Teyde, la vue s'étend de toute part sur des nappes de tuf et de torrens de lave vitrifiée. Le Teyde, dont la cime commande toutes les hauteurs voisines, s'élève comme un dôme immense du milieu de ce sol tourmenté, et cependant, cette région, d'un aspect si dé- (1) M. Mirbel a eu occasion d'observer plusieurs de ces cas d'isolement et les a cités dans un de ses t-il, offrent beaucoup de ces espèces sédentaires. Elles dent point dans les plaines. Aussi voyons-nous que les » Pyrénées, les Alpes, les Apennins ; etc: , ont des flores particulières , et que plusieurs Montagnes de » ces grandes chaines nourrissent des^ es espèces qui leur sont propres, et qu'on chercherait en vain sur » les pics environnans. » Élémens » vivent isolées sur les hauteurs, et ne descen de Physiol. végét., tom. 1, pag. 423. ( 23 ) vasté, a aussi ses plantes particulières, Dès qu'on a franchi les es- 7 carpemens des montagnes du cirque, on admire au sein d'une na- | ture sauvage cette végétation qui perdrait toute l'originalité de ses caractéres si on tentait de la reproduire ailleurs. Les Légumineuses frutescentes dominent dans cette enceinte que les éruptions ont en- 1 vahie à plusieurs reprises. Le Cytise prolifére est le premier ar- | buste qui se présente avant de pénétrer dans les gorges des Caña- | | L | . das; une fois parvenu sur le plateau central, à laltitude de Ps | 11 | | 7,000 pieds, ce ne sont plus que des Adenocarpes et des Cytises me. da a | (Adenocarpus Jrankenioides et C yiisus nubigenus ), les premiers d'a- ' ! 3 | bord seuls, puis disséminés parmi les seconds qui finissent par res- ter maîtres du terrain. Ces Cytises, que les habitans appellent Re- tamas, croissent de préférence sur les tufs volcaniques. Les autres matières lithoides ne sont pas pourtant sans végétation. Les anciens lorrens de lave nourrissent plusieurs espéces solitaires; le Rhaponti- cum Canariense, DC. MSS, se trouve sur le petit plateau de Masca; le Chrysanthemum Broussonetii , dans le défilé de Cañada blanca; l'Echium Auberianum, N. le Polycarpæa aristata, le Scrophularia glabrata, le Nepeta Teydea, N., etc., sur les scories amoncelées à la base du "Teyde. Aussitôt qu'on commence à gravir les pentes «| de ce pic que les récits des voyageurs ont rendu si célèbr e, deux es- pèces diverses. de genre et identiques par la forme des feuilles et le parfum de leurs fleurs, une Violette et un Silène (1), apparaissent + H tout-à-coup au milieu des ponces. Les Retamas deviennent alors |I plus rares, à 8,673 pieds de hauteur absolue (2) on dépasse leur der- | nier groupe; mais la Violette brave toujours l'aridité du sol et la | j sécheresse de lair; les changemens de température qui se manifes- * tent instantanément dans cette sphére de réaction dont le pic oc- 1 O ost —— À | : | E. (1) Viola cheiranthifolia et Silene nocteolens, N. L B (2) C'est la station appelée Estancia de arriba. ri sati a tp mt À (24) cupe le centre, ne paraissent pas retarder son développement; on la retrouve jusqu'au dessus d' Altavista , et ce n'est quà 9,850 pieds d'élévation, sur la petite assise de la Rambleta , qu'elle cesse de croi- tre. À partir de cette státion, les Phanerogames ne se montrent plus, le volcan semble repousser toute végétation; seulement quelques li- chens colorent sa cime, et sur les bords du cratére, de chétives mousses (1) tapissent les crevasses d'où s'exhalent de chaudes ya- peurs. | Aprés cet apercu de la distribution des plantes dans la haute ré- gion de Ténériffe, si nous jetons un coup d'œil sur les stations correspondantes dans les îles voisines, nous verrons la végétation y changer d'aspect et s'y modifier encore selon l'élévation des monta- gnes et la nature des lieux. En effet, les plus hautes cimes de la grande Canarie n'arrivent qu'à 5,842 pieds, c'est-à-dire, à la hauteur moyenne des montagnes centrales de Ténériffe; aussi n'avons nous rencontré à cette altitude nil'Adenocarpeni le Cytise du pic. Toutefois, les cimes de Canaria, quoique dépourvues de végétaux arborescens, ont aussi leurs plantes alpines qui représentent dans ces stations quelques-unes de celles que nous avons déjà indiquées dans l'autre ile, au-dessus des bois de pins. Deux labiées etune lécumineuse frutescente (2) se sont propagées sur les assises du Saucillo (3); vers la vallée de Tira- xana, le col de Manzanilla nous a encore fourni trois nouvelles espéces, le Prenanthes pendula, N., le Satureja helianthemifolia, N., et une autre plante volubile quil faudra rapporter peut-étre à la fa- mille des Apocynées (4). Palma nous a offert aussi des observations analogues. D'aprés les MÀ (D) Weissia verticillata var. à 11,424 pieds au-dessus du niveau de la mer. (2) Satureja tenuis et Satureja lanata, Genista microphylla. (3) La hauteur absolue du morne du S'aucillo est de 5,306 pieds. [ , JT : : : (4) Nous n'avons t ouve cette plante ni en fleur ni en fruit. (25 ) évaluations de M. de Buch (1), le point éulminant de cette île at- leint 7,234 pieds de hauteur absolue : à cette altitude, on a déjà dépassé à 'Ténériffe les limites des Adenocarpes et commencé à pénétrer dans la région des Cytises du pic; cependant Palma ne posséde que les premiers; la configuration et la nature du sol, en di- minuant l'influence des hauteurs, ont empéché les autres de s'y dé- velopper. Les versans intérieurs des montagnes de Palma forment, au centre de l'ile, les parois d'un cratère primitif Lorsqu'on par- à vient sur les bords de cet épouvantable gouffre, l'oeil plonge avec effroi dans une profondeur de 4,500 pieds; on aperçoit d'antiques foréts surgir des énormes crevasses qui sillonnent les flancs de la montagne, tandis qu'on ne voit pas un seul arbuste sur les crétes arides des alentours. Cette région culminante a un caractère tout | original, ce n'est plus, comme à Ténériffe, un cirque immense dont les Cytises se sont emparés et où la décomposition des tufs volcani- ques s'est prêtée à la végétation; mais au lieu d'un plateau central bordé de montagnes en ruine, c'est un système orographique d'un autre ordre (2), des masses de basalte se sont séparées en grands blocs, des pics menaçants (3) hérissent la créte des monts et sem- blent. suspendus sur l'abime. En atteignant ces sommités oit la com- pacité du terrain est venue arréter les Adenocarpes et exclure les Cytises, on trouve, le long de corniches dangereuses, plusieurs es- péces qu'on chercherait en vain dans les stations inférieures; ce sont l;4rabis albida du Caucase, une variété frutescente du Ce- . rastium strictum de De Candolle, et notre Viola Palmensis , qui rem- ki place là le Viola cheiranthifolia du pic de Teyde. Ainsi, les lieux —— (1) Physic. Beschr. der Can. Ins., pag. 103. (2) Les montagnes démantelées, qui entourent à Ténériffe le grand cirque des Cañadas, sont trachy- tiques , tandis que ce sont des basaltes qui dominent dans l'ile de Palma. (3) Le Pic des Enfans (Pico de los Muchachos). 7,934 pieds de hauteur absolue ae : j Le Pic de la Croix (Pico de la Cruz). . . . 7,082 Id. P a pie Le Pic du Genevrier (Pico del Cedro). . . . 6,803 Id. re Lo 3. ; 4 wai cn - "assum à sx å ? ERA it ` -iama s i nale ; — T d " e - 5 | - — MÀ ott LL. ste Ter tn ada E - ii . eei, E 7 M OMNI - TE PNIS: SPA til NUR meter n - RR. Sw Fn a e a at a aln D FRERE — - —Ü X ` - Pn — M. " — ( 26 ) en apparence les plus arides offrent au botaniste de nouvelles con- quêtes. ! Les observations. que l'on peut déduire. de la répartition des vé- gétaux dans l'archipel des Canaries * reposent sur une masse de faits du plus grand intérét. Lorsqu'en parcourant ces iles, on s'arrête dans les différentes stations qu occupent les plantes, on dirait, à voir ce choix de localités, qu'une sorte d'instinct a porté les germes sur les points les plus favorables à leur développement. Nous venons de donner un premier apercu de cette véeétation considérée dans son ensemble; nous allons maintenant l'examiner en détail, afin d'ap- précier quelques-unes des causes qui ont le plus influé sur sa dis- tribution. | | | cy a E "- ————— ( 27 ) SUPPLÉMENT AU CHAPITRE PREMIER. 99999 (a) FLORULE DE L'ILE DE GRACIOSA. I. mm Halimus. "e OBI Q3 M Salsola vermiculata. Salicornia fruticosa. Suceda maritima. — fruticosa. Chenopodium album. * Polycarpoea Teneriffe. we «1 ACTES — gnaphalodes. 10. Euphorbia piscatoria. 11. Heliotropium erosum. Lehm. 12. Frankenia ericæfolia. Ch. Sm. 13. Reseda crystallina. Nob. 14. Plantago argentea. Desf. 15. = Coronopus. Observation. Cette liste contient toutes les plantes que nous recueillimes à Graciosa le 5 . nous les avons rangées d'aprés leur degré de fréquence; mais aux observations que nous avons ex- 16. Statice pruinosa. Delile. rg. — puberula. Nob. 18. Ononis pendula ? 19. — serrata. 20. . ==" "Dereala, Nob. a1. — hebecarpa: Nob. 22. Lotus trigonelloides. Nob. 23. Senecio crassifolia ? 24. Arenaria maritima. 25. Echium (violaceo affine.) 26. Poa (valdé pusilla)? 57. Merendella -i 28. Erodium malachoides, 29. Helianthemum Canariense. 9 juin 1829 : posées dans la note (1), pag. 9., nous devons ajouter que notre herborisation eut lieu à une époque trop tardive pour cette végétation éphémère qui périt ordinairement au commencement de l , été. Il est aussi une autre circonstance qui doit contribuer à faire disparaître certaines espèces vivaces qui pourraient résister probablement toute l'année à la sécheresse du sol et aux ardeurs du soleil. Les habitans des districts de Lancerotte, voisins de Graciosa, font hiverner leurs troupeaux dans cette petite ile, et bien des plantes Braces et sous-ligneuses doivent alors servir de pâture aux chèvres et aux br TN (b) LISTE DES PLANTES RECUEILLIES DANS L'ILE DE LANCEROTTE, DEPUIS LE 25 MAI JUSQU’AU 15 JUILLET 1829. GRAMINÉES. Poa trivialis. Stipa tortilis. | Bromus Matritensis. Pennisetum cenchroides. Phalaris brachystachys. Link. — cœrulescens. Melica ciliata. Lamarckia aurea. PALMIERS. Phoenix dactylifera. ——— JONCÉES. Juncus maritimus. — acutus: LILIACÉES. Asphodelus ramosus. "aai fistulosus. Pancratium Canariense. Ker. SMILACÉES. Asparagus horridus. — retrofactus ? MYRICÉES. Myrica l'aya. 200909 URTICÉES, Urtica urens. Forskalea fruticosa. PLOMBAGINÉES. Heliotropium Europæum. — erosum. Lehm. Statice puberula, Nob. — pruinosa. Delile. RUBIACÉES. Rubia fruticosa. Galium Aparine. SYNANTHERÉES. Lactucées. Scolymus Hispanicus. : Sonchus oleraceus. — divaricatus. Desf. Picridium Tingitanum. Prenanthes spinosa. Cichorium Intybus. Crepis sp. pusilla. Tolpis umbellata. Hedypnois rhagadioloides. Barkhausia Sp. n. Thrincia hirta. Andryala cheiranthifolia. p Centaurées. Centaurea Melitensis. A do EDS AN 20 P e 3E ee pee ds A Carduinées. Carduus clavulatus. Link. Cnicus sp. n. Cynara horrida. Silybum marianum. Anthemidées. Anacyclus clavatus. Maruta fœtida. Cass. Chrysanthemum canalicula tum. : Reese, Inulées. Gnaphalium cauliflorum. Desf. = luteo-album. = sp. n. Buphthalmum maritimum. € sericeum. S'enecionées. Senecio crassifolia. Kleinia neriifolia. CUCURBITACÉES. Cucumis Colocynthis. CAMPANULACÉES. Wahlenbergia lobelioides. LABIÉES. Thymus origanoides. Nob. Satureja varia. Nob. — spn. Salvia Verbenaca. Teucrium pseudo-Iva. Lavandula pinnata. Marrubium vulgare. VERBENACÉES. Verbena procumbens. Forsk. (29) BORRAGINÉES. Echium violaceo aff. CONVOLVULACÉES. Convolvulus arvensis. — > Siculus. - Cuscuta Europæa. OROBANCHES. Orobanche cœrulea. SCROPHULARINÉES. Antirrhinum Orontium. Linaria heterophylla. Schousb. Scrophularia arguta. SOLANACÉES. Solanum. miniatum. _ nigrum. Datura Stramonium. Hyoscyamus albus. Lycium Afrum. PRIMULACÉES. Anagallis cœrulea. Samolus Valerandi. PLANTAGINÉES. Plantago lanceolata. — sericea. — Coronopus. ÉRICINÉES. Erica arborea. di. j m E viii URS QUII cuida, "em, OMBELLIFÈRES, Bupleurum glaucum? Apium graveolens. Anethum Fæniculum. Ferula communis? Caucalis arvensis. Huds. —— LÉGUMINEUSES, Genista monosperma. Ononis pendula? — . hebecarpa. Nob. — ocreata. Nob. — serrata, Psoralea bituminosa. Lotus glaucus. mrt 5 — trigonelloides. Nob. Astragalus hamosus. Ornithopus perpusillus. Melilotus sulcata. — - parviflora. Medicago echinata. Trifolium arvense. — agrarium. — lappaceum. Ervum tetraspermum. amm FICOÍDES; Aizoon Canariense. Mesembryan themum crystallinum. — nodiflorum. ——— CRASSULACÉES. Sempervivum ciliatum? Bua dichotomum. Cotyledon Umbelicus. TAMARISCINÉES. Tamarix Canariensis. PARONYCHIÉES. Herniaria incana. POLYCARPÉES. Polycarpon tetraphyllum. Polycarpæa Teneriffie. — gnaphalodes. — POLYGONÉES, Emex spinosus. humex Acetosella. — bucephalophorus. Polygonum aviculare. —— CHÉNOPODÉES, Chenopodium viride. Suceda fruticosa. Atriplex glaucum. PAPAVÉRACÉES, Papaver hybridum. ee ADI — somniferum. var. setigera. Glaucium corniculatum. Argemone Mexicana, FUMARIACÉES. Fumaria officinalis. CRUCIFÈRES, Matthiola parviflora, Eruca sativa. Erucaria Canariensis. Nob. Hirschfeldia incana. Nob. haphanistrum ‘segetum. Rapistrum rugosum., —L—— ( 31 ) Lobularia Libyca (Koniga Libyca. R. — RÜTACÉES. v. dex : Ruta bracteosa. — intermedia. Nob. Notoceras Canariense. Capsella bursa pastoris. E ZYGOPHYLLÉES. Zygophyllum Fontanesii. Nob. Fagonia Cretica. RÉSÉDACÉES. Reseda luteola. TE | | MALVACÉES. z — crystallina. Nob. F 2 santa Malva parviflora. 1 | OXALIDÉES. CISTINÉES. E : E Oxalis corniculata. Helianthemum Canariense. — : . ' GERANIÉES, FRANKENIACÉES. Erodium cicutarium. Frankenia pulverulenta. — . botryoides. — corymbosa? << — . malachoides. — rotundifolium. | RENONCULACÉES. CARYOPHYLLÉES. Silene inflata. | E Arénaria maritima. — procumbens. Adonis æstivalis. EUPHORBIACÉES. Euphorbia Paralias. — heterophylla. | HYPÉRICINÉES. — Mauritanica. -| Hypericum grandifolium. — balsamifera. E — piscatoria. = Canariensis. LINÉES. Ricinus communis. | Linum strictum. Observation. Durant notre séjour à Lancerotte en 1829, nous poursuivimes sans relâche nos herborisations depuis le 25 mai jusqu'au 15 juillet : la saison était déjà avancée pour les plantes an- nuelles, on venait de faire la moisson , beaucoup de graminées, et les autres espèces qui croissent I ordinairement dans les blés, avaient disparu; nous n'avons donc mentionné , dans la liste précé- dente , que les plantes assez robustes pour braver la chaleur du climat, ou bien celles qui, malgré leur faiblesse, se trouvent placées dans des conditions d'existence plus favorables. Le nombre des espèces omises ne peut cependant être considérable | et nous avons tout lieu de croire que notre meii sdb, a 4 P — 1523] atii EA nr 4 TE a (32). catalogue donne une idée assez juste de l'ensemble de la végétation de l'ile et des rapports numériques des espéces de chaque famille. Lancerotte, par son aspect comme par sa forme, semble un lambeau détaché de l'Afrique occi- dentale; constamment balayée par les vents généraux (E.-N.-E.), l'Harmatan du désert (le vent de S.-E.) y fait sentir aussi sa funeste influence; ses plaines arides et sablonneuses sont rarement arrosées par les pluies ; le pays en général manque de sources et les arbres n’y prospérent pas. La végétation éparse sur cette ile, la plus volcanisée des Canaries, ne se présente ni en masse, ni par groupe ; les plantes sont cachées dans des crevasses ou disseminées çà et là dans des espaces incultes. La flore si caractéristique des autres iles de l'Ouest n'y joue qu'un róle secondaire : relégués sur les cimes de Chaché, à l'altitude de 1,773 pieds, le Myrica Faya , Y Erica arborea et I Hypericum grandifo- lium s'annoncent comme les dernières limites de la région des bois vers l'orient de l'archipel; trois plantes de l'Europe tempérée, qu'on ne retrouve pas dans les autres iles , accompagnent ces végétaux des montagnes; ce sont le Melica ciliata, lé Thrincia hirta et une espèce de Barkhausia, peut-être la méme que celle de Madère. Les Lauriers durent ombrager autrefois ces crêtes dévastées ; quelques vieux troncs subsistent encore , mais bientôt ces points de repère de la végétation némorale disparai- tront à leur tour, et les insulaires de Lancerotte perdront jusqu'au souvenir de leur existence. Le Cynara horrida croit en abondance dans les alentours de lermitage de Notre-Dame-des-Neiges (JNuestra-Sefiora- de-las- Nieves), le point le plus élevé de la chaine de Famara (1). C'est uniquement dans cette localité, et contre les murs de la Sainte-Chapelle , que nous avons recueilli une belle variété du Borrera Atlantica, si commun sur les buissons des environs de Tanger et dans les iles boisées du xuadalquivir. ; On dirait que Félite de la flore de Lancerotte s'est réfugiée le long de la chaine de Famara et sur les rochers escarpés de Guatifay ; toutes les espéces qu'on y rencontre sont rares ou nouvelles. Nous cite- rons surtout parmi les plantes dont l'aspect nous a le plus frappé, le Statice puberula, Nob., le Linaria heterophylla que Schousboe trouva le premier dans la Mauritanie , l’ 4renaría procumbens d'Égypte , une belle variété du Picridium Tingitanum à feuilles denteléés comme celles du houx, le Thymus origa- noides, Nob., une nouvelle espèce de Satureja et un Gnaphalium qui prend la forme d'un petit buisson. La végétation côtière des Canaries occidentales est moins prononcée à Lancerotte , l'Euphorbia Ca- nariensis et le Kleinia neriifolia y sont plus clair-semés; le long des plages, les Salsola et les Chénopodces ligneuses se mêlent avec lU Enphor bia Mauritanica et Y Euphorbia piscatoria. Deux autres plantes abondent dans toute l'ile, la triste 4/hulaga (Prenanthes spinosa), qu'on retrouve en masse sur la bande méri- dionale de T'énériffe, et le Sonchus divaricatus , autre espèce des déserts d'Afrique, que l'infatigable Wallich a ramassé aussi dans l'Inde, aux environs de Sabarunpore. La plaine de Mala nous a fourni également quelques végétaux curieux : d'abord le Lobularia Lybica, rapporté par Oudney et Della Cella des grands Syrtes de la Cyrenaique, puis une nouvelle espéce d'Ononis, VO. ocreata, Nob., qui a beaucoup d'affinité avec le vaginalis, Y Ononis serrata, deux Mes- embryanthemum et Y Aizoon Canariense, qui croit aussi dans les sables de l'Arabie. Autour du port d’Arecife, diverses plantes de la région maritime couvrent par intervalle la nudité du sol; ce sont, le Lotus trigonelloides , Nob., le Reseda subulata de l'Égypte , et plusieurs Chénopo- dées rabougries. On voit parmi ces espèces un petit Bupleurum annuel (B. glaucum 2) qui atteint à peine deux ou trois pouces de hauteur et.garnit les creux oü la terre végétale a conservé quelque humidité. Il est encore d'autres espèces de l'ancien continent qu'on retrouve confinées dans cette ile et qui ne se sont jamais reproduites dans les antres parties de l'archipel : le Ruta bracteosa, par exemple, s'est fixé à la base de la montagne de la Corona, sur les pentes méridionales de ce cône volcanique; "E (4) Environ 1,773 pieds, d’après les évaluations de M. de Buch. — e O — ———— — —— M ÀÀ sentence m d went (c) reae rera es m 222 l cu SUR SNY = © d'isolement sont nombreux aux Canaries, et il nous a subie curieux de | l Anacyclus clavatus ne se montre que dans li li | les diverses Sl exclusives à à Lanccrotte et à Fortaventure. Melica ciliata. Asparagus horridus. Statice puberula. — pruinosa. Sonchus divaricatus. Barkhausia sp. n: Thrincia hirta. . . Anacyclus clavatus. . Thymus origanoides. . Satureja sp. n. Andryala cheiranthifolia. ( 33) 13. Linaria heterophylla. 14. Bupleurum glaucum. 19. Ferula communis? 16. Ononis pendula? 17. . .— . hebecarpa. 19. | — ocreata. 19. Lotus sp. n. 20. — trigonelloides. . 21. Reseda crystallina. Gnaphalium gossypinum. Nob. 22. —. subulata. e. n 23. Euphorbia Mauritanica. 24. Arenaria procumbens. i LISTE DES PHARES RECUEILLIES A FORTAVENTURE, DANS LE COMMENCEMENT DU iere D'AOUT 1829. Asphodelus fistulosus. = ramosus. Juncus acutus. Avena sterilis. Milium lendigerum. Asparagus retrofractus ? Beta maritima. Suceda fruticosa. - Salsola vermiculata. Plantago Coronopüs. kh. — argentea. Desf. Samolus Valerandi. . Salvia ZEgyptiaca. Antirrhinum heterophyllum. Schousb** Papaver hybridum. I. Lycium Afrum. Carduus clavulatus. Link. | Cynara horrida. Silybum marianum. | Carthamus lanatus, Kleinia neriifolia. . Scolymus Hispanicus. Prenanthes spinosa. . Sonchus divaricatus. Desf. . Crithmum maritimum. .Scandix Pecten. — . Bupleurum glaucum. Glaucium phoeniceum. Sm. Intérieur, prés du bourg de. Saint-Bartolomé. Ces cas réunir à la fin de cette note (34) Reseda subulata. Delile. | Aizoon Canariense. | Helianthemum Niloticum. Mesembryanthemum nodiflorum. b: en Canariense. | — crystallinum. Fagonia Cretica. Lotus trigonelloides. Nob. Arenaria maritima. | — sp. Creticæ aff. Silene inflata. Pistacia Atlantica. Desf. Tamarix Canariensis. DC. - Euphorbia piscatoria. Cactus Tuna. | Observation. Cette liste offre une preuve de la ressemblance de la flore de Fortaventure avec celle de Lancerotte ; si on excepte l Helianthemum Niloticum , le Tamarix Canariensis , e Pistacia Atlantica et quelques autres espéces , les restantes sont communes aux deux iles. La région némorale qui décore si bien la partie occidentale de Värchipel , et dont nous avons retrouvé des traces sur les sommets de Lancerotte , manque entierement dans les divers districts de Fortaventure que nous avons parcourus. Cette absence provient de ce que lef points culminans de cette ile atteignent à peine 1,500 pieds de hau- teur absolue, et qu'à cette station la température est trop élevée pour les Lauriers , les Bruyères et les autres arbres forestiers. Le Pistacia Atlantica, Desf., et le Phœnix Dactylifera , deux arbres qui appar- tiennent bien plus à la flore de l'Afrique continentale qu'à celle des Canaries , sont les seuls grands vé- gétaux que nous avons vus dans l'intérieur du pays. Cependant il est probable que plusieurs espèces de la région des bois existent dans la presqu'ile de Handia, où les montagnes sont plus élevées. Nous regrettons encore aujourd'hui que les chaleurs excessives de l'été de 1829 nous aient contraints de partir de Fortaventure sans explorer la partie méridionale de l'ile, contrées tout-à-fait inconnues aux botanistes et peu fréquentées par les habitans, En 1815, M. de Buch et son infortuné compagnon Ch. Smith ne furent pas plus heureux que nous : leurs excursions leur fournirent peu de plantes ; comme nous, ils visitèrent l'ile dans cette saison brûlante où la végétation est amortie par la. sé- cheresse et qu'on pourrait comparer en quelque sorte à nos hivers, car dans les mois de juillet et , A . * . j zi j : d'août les herborisations sont aussi infructueuses à Fortaventure qu’en décembre et janvier dans les environs de Paris. és -— m CHAPITRE SECOND. DISTRIBUTION PHYTOSTATIQUE. : A Les terrains ont leurs exigences; les disséminations, !es 4 ` migrations des végétaux, ont leurs caprices; et les diverses : . régions du globe, diversement dotées- dans les distributions ý primitives, livrent à l'influence des climats analogues des À séries d’espèces souvent très-différentes. i l : RAMOND. La répartition des plantes, considérée sous le rapport des espé- | ee ces qui dominent en plus grande masse depuis les bords du rivage | jusqu'aux sommets culminans, et les relations de la végétation f | avec les climats, ont servi de base à notre distribution phytosta- ! tique; mais avant d'en présenter le tableau, nous dirons un mot des notions que lon avait déjà sur la géographie botanique des Canaries. ! E Broussonet , qui résida plusieurs années dans cet archipel, y | conçut l'heureuse idée d'une distribution géographique des êtres organisés , dans laquelle on aurait pu répartir toutes les espèces du globe. Il appliqua d'abord cette grande pensée à la botanique et .communiqua. ses essais à un des savans les plus illustres de notre époque, M. de Humboldt, qui, appelé sur, un plus vaste champ , devait doter la science d'une série d'observations qu'on | | prendra toujours pour modèle. M. de Humboldt ne s'arrêta pas assez à Ténériffe pour se livrer à une étude approfondie de la végétation de cette ile; mais plus tard, les beaux travaux de ce d... naturaliste vinrent jeter de nouvelles lumières sur une des bran- ( 36 ) ches les plus importantes de la phytologie; les grandes généralités quil proclama furent le prélude de recherches plus spéciales, et bientót aprés, les noms de Wahlenberg, de De Candolle, de Ro- bert Brown, de Ramond, de Mirbel et de Schouw prirent rang Parmi nos maîtres. Adoptant les idées de Broussonet, alors que la géographie bo- tanique commençait à sortir de l'oubli où on l'avait laissée depuis que Linnée en avait indiqué les principes (D, M. de Humboldt divisa le sol de Ténériffe en cinq zones ou régions de plantes su- perposées les unes aux autres et occupant, à partir du littoral, sur les pentes rapides de l'ile , une hauteur absolue de 10,500 pieds. En indiquant cette altitude comme la limite de la végéta- tion sur les montagnes voisines des tropiques, cet habile observa- leur fit remarquer la différence existante avec la région des Py- rénées, qui, située à quinze degrés plus au nord que les Canaries. ne peut nourrir de plantes qu'à 13 ou 1400 toises d'élévation per- pendiculaire, à cause des neiges permanentes de la zone supérieure, Si à Ténériffe, la force expansive des végétaux semble s'arrêter à environ 900 pieds en dessous du sommet du pic de Teyde, « ce ^ n'est pas, dit M. de Humboldt, que les glaces éternelles et le ^ froid de l'atmosphére ambiant lui oppose des limites qu'elle ne ^ peut franchir; ce sont les laves scorifiées du mal pais et les ^ ponces broyées et arides du piton qui empéchent la migration ^ des plantes vers les bords du cratère. » (2) Nous avons eu plu- sieurs fois oceasion de constater l'exactitude de cette remarque , mais nous ajouterons aussi que la raréfaction de l'air et son ex- cessive sécheresse nous ont semblé deux autres causes non moins influentes de laridité du sol. (1) Lin., Stationes (2) Voy. Foya plantarum in Amænit. academ. Edit. ScHREB , tom. IV, pag. 64 et suiv. 8€ aux régions équinoxiales, tom. 1, pag. 403 et suiv. €——— ( 37 ) Les divisions phytostatiques signalées par le savant auteur du Voyage aux régions équinoxiales, sont les suivantes :> - DÉSIGNATION : | ÉTENDUE 1. La zone des Vignes, . .depuis o jusqu'à 1,200 ou 1,800 pieds au-dessus. 3. La zone des Lauriers, .‘. . . . 1,800 à 5,400 . . . : . Ta: s.e zohe des Pms, eya 7:59(00 à. 5,860 , . 4... Id. 4. La zone des Retamas, Boo UE Id 5. La zone des Graminées , Dui: ro i EM E 5 Nous nous abstiendrons pour le moment d'expliquer les motifs qui nous ont déterminés à adopter d'autres divisions; il nous suf- fira d'observer : | | 1° Que la désignation de zone des vignes ne saurait caractériser d'une manière précise l'espace compris entre le rivage et les bois de Lauriers, attendu que les vignobles n'en occupent qu'une trés- petite partie, qu'ils ne s'étendent jamais jusqu'à la mer et sarré- tent bien avant d'àrriver à la région des forêts. : 2' Le Quercus Canariensis de Brouss., ( Wild., plant. hort. Berol., Enum. 1809, p. 975) que M. de Humboldt indique dans la seconde zone, celle des-Lauriers,.n est pr 'obablement que le Quercus pubescens un peu modifié par le climat et introduit,-avec les châtaigniers, par les premiers colons , quelques années aprés la conquéte de Ténériffe. En outre, l'étendue qu'il donne à la région némorale dépasse de beaucoup ses limites naturelles, surtout vers le nórd- est de lile. |. 3' Quant au Juniperus C edo de Brouss., quil a placé dans la troisième zone, celle des Pins, nos recherches sur cette espèce, au- jourd'hui si rare, nous ont presque donné la certitude qu'elle dut occuper autrefois des stations plus élevées. 4 Enfin, la quatrième et la cinquième zone, la région des Retamas et celle des Graminées, comprennent, suivant M. de Humboldt, des hauteurs qui égalent à Ténériffe les cimes les ——)Áá— « dm ( 38 ) plus inaccessibles des Pyrénées. C'est en effet ce qui a lieu pour les Retamas (Cytisus nubigenus ); mais non pas pour les Grami- nées dont il n'existe que deux espèces dans la haute région, le Festuca Myurus et le Festuca laxa. La culture des céréales ne sétend pas au-dessus de 4,800 pieds, et M. de Humboldt a sans doute été trompé par de faux renseignemens : Broussonet , qui les lui fournit, herborisa peu lui-même ; son fidèle J oseph, ce com- pagnon de ses émigr ations, fut son collecteur d'habitude. A. la mort. de l'illustre professeur de Montpellier, il fallut souvent avoir recours à son zélé serviteur pour s'assurer des habitats de certai- nes plantes que les herbiers du maître avaient fait connaître de- puis long-temps sans aucune indication. (1) Quelques espèces des genres *Zristida, Polypogon, Bromus, Lamarckia, Aira, Panicum, Setaria , etc. ; ramassées dans les environs de Chasna, le village le plus élevé de Tile (à..4,008 pieds), auront fait croire à Broussonet, que les Graminées s'étendaient encore plus haut, et que, sembla- bles à ces plateaux supérieurs de nos montagnes alpines, les som- mets de Ténérifte possédaient aussi ces herbages naturels qui se renouvellent et se couvrent de fleurs aprés la fonte des neiges. Nous pouvons assurer que parmi les plantes sociables qui font partie de la Flore Canarienne, les Graminées sont celles dont les agroupemens sont moins notables. Le nombre des espèces de cette famille arrive à peine à quatre-vingt, leur spontanéité est due pour la plupart à des causes accidentelles, et ces apparitions fortuites, quoique devenues constantes par des reproductions successives , restent pourtant assujetties aux mouvemens des populations agri- (1) Dans les dernières années de sa vie, Broussonet a avait presque entièrement perdu la mémoire et ne pouvait plus fournir de renseignemens sur les stations et les habitats de certaines plantes éparses dans son herbier sans la moindre indication. « Demandez à Joseph, » disait-il ; lorsqu'on lui faisait une question relative à üne des localités dont il avait oublié de prendre note. Peso souvent répondait juste, et, grâce à ses souvenirs , quelques espèces qu'on croyait originaires des Canaries furent re- connues pour avoir été recueillies à Mogador. | SS 4 | (39) coles; elles cessent avec les cultures et se manifestent de rechef dans les endroits où de nouvelles exploitations viennent étendre le domaine du cultivateur. Il est vrai que quelques espèces plus vitrail finissent par s'accommoder aux conditions d'existence qui | ne contrarient pas trop leur développement, mais ces sortes d'ac- | climatation sont rares, et l'on. voit ordinairement ces plantes na- | À ^ turalisées se reproduire dans des localités qui trahissent leur ori- gine; rarement on les rencontre mélées dans ces brandes couvertes d'espéces canariennes, ni dans les ravins où la végétation primitive semble sétre réfugiée. On compte à Ténériffe très-peu de Grami- 1 | nées endémiques (1) et presque toutes restent confinées dans le voi- fi sinage des côtes. Parmi les espèces introduites, la plupart se trou- | | vent confondues avec les céréales et croissent sur la lisière des champs, "il | le long des chemins ou aux alentours des habitations. | i Nous ne saurions donc admettre aux- Canaries une région de |» Graminées : en s avancant vers les climats des ‘tropiques , les es- i | pèces de cette famille cessent de se présenter en masse et ne se | montrent plüs que disséminées et pour ainsi dire perdues au mi- | i lieu des autres végétaux; le Tristegis glutinosa, qui envahit les | i montagnes déboisées du Brésil, est peut-être la seule espèce qui E fasse exception à cette loi (2). : E | Il serait inutile de nous arrêter plus long-temps è à cette première ébauche de la géographie botanique de Ténériffe, et nous passe- E | rons de suite à un travail plus récent, celui que M. Léopold: de l (1) M. Léopold de Buch , selon ses idées sur les migrations des plantes et Tos spontanéité acciden- telles, a été encore plus loin que nous et n'a reconnu aucune Graminée indigéne aux Canaries. 1 (Voy. e chip. de bot. Coup-d' œil sur la flore des fles Canaries; traduct. de l'allem. ) Nos opinions sur ce sujet ne s'accordent pas tout-à-fait avec celles de ce naturaliste, et sans qu'il soit nécessaire de les ' discuter ici, nous ferons remarquer seulement que Festuca ne P Aristida gigantea et le Dacty Uy Smithii n'ont été encore recueillis qu'à Ténériffe. Deux autres espéces, le Phalaris Canari “ensis et le r | Saccharum Teneriffæ, qu’on retrouve aussi ailleurs , furent d’abord découvertes dans ces îles. (2) Voy. Aug. de Saint-Hilaire, Tableau de la végétat. primit. dans la province des mines. TU, M — ( 40°) Buch a publié en 1825, dans un ouvrage en allemand, sous le titre de Description physique des iles Canaries (1). Les renseigne- mens quil a donnés, dans le quatriéme chapitre, sont le résultat de ses observations et de celles de son zélé compagnon Chr. Smith, dont tous les phytologues ont déploré la perte. L'île la plus élevée du groupe a aussi servi de cadre à la dis- tribution phytostatique de M. de Buch : il a divisé Ténériffe en cinq Du désignées de la manière suivante. t. La RÉGION SUBTROPICALE OU des formes afri icaines. Étendue : depuis les rivages jusqu'à 1,200 pus au-dessus. Température moyenne : 17? à 18° de R. (21°: Lans. ) Climat : analogue à celui de l'Égypte ou de CP : 2. L4 RÉGION MÉDITERRANÉENNE OU des cultures europeennces. Étendue : depuis 1,200 pieds jusqu'à 2,500. Température moyenne : 14^ R. (175,5 C.) Climat : analogue à celui du midi de la France et de l'Italie centrale. 3. LA RÉGION TOUJOURS VERTE x (SEMPERVIRENTE) , ou celle des Forêts. Étendue : depuis 2 ,500 pieds j jusqu'à 4,100. Température moyenne : 11° R, (13°,7 C.) Climat : analogue à celui dé Lyon et de la Lombardie. 4. L^ RÉGION .DU PINAR- ou des Pins des Canaries. Étendue : depuis 4,100 pieds jusqu'à 5,900. Températüre moyenne : 8° R. (10° C.) ^ Climat : analogue à celui du nord de la France, de l'Écosse et dù nord de l'Allemagne. 5. La RÉGION DE LA CUMBRE ou celle des Retamas blancas. Étendue : depuis 5,900 pieds jusqu'à 10,380. Température moyenne : à la hauteur de 7 à 8,000 pieds, 4 R. (5° C. ) Climat : analogue à celui du nord de l'Écosse et du Dronthein. Quoiqu'au premier coup-d cil cette distribution semble pré- senter la marche et les différens changemens de la v égétation. (1) Physical. Beschr, der Can. Insel. Berlin , 1825. ue paru CM) en passant par des climats divers, sur une ligne de pente de 10,380 pieds d'étendue, une longue série d'observations nous a dé- terminés à la modifier dans son ensemble et à la reformer entière- ment dans ses détails. Nous ferons d'abord quelques remarques préalables. 1°. Les limites que M. de Buch a assignées à la PREMIÈRE ZONE sont trop restreints : il eüt fallu les porter au moins à 400 pieds plus haut, car il doit avoir vu, comme nous, les principales plan- tes de la RÉGION SUBTROPICALE, telles que les Euphorbes et les Kleinies, croître à l'altitude de 1,600 pieds, en montant vers la Laguna, et ces mêmes espèces végéter encore plus haut sur la bande méridionale de l'ile. : 2". La deuxième zone, quil indique sous le nom de RÉGION MÉ- DITERRANÉENNE Ou DES CULTURES EUROPÉENNES , n' occupe pas, selon nous, un espace assez déterminé pour qu'on puisse en fixer les li- mites. Dans un pays aussi accidenté que les Canaries, le cultiva- teur a dû soumettre peu-à-peu à ses travaux les endroits qui lui offraient le plus d'avantages, sans chercher à lutter inutilement contre les obstacles que lui opposait la nature du sol. Il a défri- ché d'abord le fond des vallées côtières, et les grèves ou les falai- ses du rivage ont été les premières barrières de ses plantations; puis, évitant les escarpemens inaccessibles, les masses de rochers et tous ces espaces que les volcans ont frappés d'une longue stéri- lité, il a été s'établir sur les plateaux supérieurs. Ces sortes d'ex- ploitations sont reslées assujéties à la structure orographique de cha- que ile, leurs progrès ont été plus ou moins lents, et le système de labour a varié suivant les localités. Dés que les populations agri- coles ont commencé à se réunir dans les vallées principales, les cultures, en s'étendant, se sont régularisées ; les vignobles ont garni les bases, et les céréales, semparant des terrains qu'avaient occupés les bois vierges, ont souvent franchi cette zone pour s'a- I. 6 snos ne RUM iier A ( 42) vancer vers la haute région. Le bourg de Chasna, situé à 4,008 pieds au-dessus du niveau de la mer, s'est entouré de vergers où prospérent nos arbres à fruit, et la charrue a converti en champs de blé les plateaux de T; rebejo et d'Escalona. Sur les pentes rapi- des au contraire, les végétaux indigénes sont restés en dehors de ces envahissemens, tandis que le long des côtes moins abruptes, l'industrie des colons a encore su se créer de nouvelles ressources : des petits espaces ensemencés, et soutenus par des murs, se sont échelonés jusques sur la créte des collines; les ravins méme ont été mis à profit toutes les fois que les rives rehaussées du torrent ont donné quelque espérance de récolte, et dans la région des bois, des clairières, toujours plus élargies, ont offert pendant les premières années une terre des plus productives. Si on fait excep- tion de l'enceinte infertile et dévastée du centre de l'ile, on peut dire quà Ténériffe les champs sont un peu partout. Il est des sites privilégiés qui présentent le tableau le plus pittoresque par l'abondance et la variété des productions; mais ailleurs ce ne sont que des Oasis au milieu de nappes de tuf et de lave, des petites propriétés que des sources cachées fertilisent, des fermes sans voi- sinage, des clos improvisés sur le penchant des mornes et qu'on voit souvent disparaître dans la saison hivernale sous des avalan- ches de pluie. Comment fixer les limites de la région des cultures dans un pareil pays? | 3. Les RÉGIONS DES Fonfrs, pu PINAR ET DE LA CUMBRE, qui for- ment les trois dernières divisions de M. de Buch, se trouvent comprises dans des espaces trop resserrés : les bois lauriféres de sa troisième zone dépassent rarement, il est vrai, l'altitude de 4,100 pieds; mais dans bien des endroits on. commence à les rencontrer avant d'arriver à 2,000. Dans lile de Canaria, par exemple, la partie la plus ombragée de la forêt de Doramas (las madres de Moya.) n'est élevée que de 1,387 pieds au-dessus du niveau de la mer. ( 43 ) Il en est de méme des Pins qui affectent des stations différen- tes sur les deux versans de Ténériffe : du cóté du nord, on les irouve jusquà environ 9,000 pieds le long du talus d'Icod et sur les premières pentes du Teyde; mais ils ne descendent rarement sur cette bande en dessous de 4,000. L'exposition du sud paraît leur étre plus favorable, leur force expansive est plus prononcée et ils sétendent de ce côté en plus grande masse; dans le district de Chasna, nous ne les avons vus quà 8,000 pieds. d'élévation absolue, sur les dernières assises du Sombrerito (voy. Vues phyt., pl. 6.), et quoique maintenant ils ne descendent guére plus bas que sur la bande du nord, des renseignemens authentiques prouvent que ces forêts primitives couvrirent autrefois des terrains dont l'altitude n'excède pas 1,200 pieds. i Le terme que M. de Buch a assigné à la végétation de sa der- nière zone, la région de la Cumbre, est à peu près celui que nous avons déjà indiqué; mais il serait difficile de déterminer d'une maniére précise les limites inférieures de cette région, car la pré- sence des plantes qui en font partie dépend aussi bien de laltitude que de la nature du sol. | Les indications de M. de Buch sur les températures moyennes de ses diverses zones de végétation, et lanalogie quil en déduit avec les climats de plusieurs contrées d'Europe, ne peuvent donner une idée exacte de l'état de l'atmosphère de chaque région, attendu qu'il n'y a pas proportion de temps entre les mois de chaleur et ceux - du froid. La température moyenne, quelle que. soit la hauteur à laquelle on rapporte ces observations, ne saurait servir de point de comparaison entre latmosphére locale d'une des régions phy- lostatiques indiquées et celle d'un pays oü les changemens cli- matériques sont très-tranchés et presque proportionnels entre les saisons. Ces considérations ne doivent pas étre négligées , et notre opinion à cet égard se trouve appuyée par celles de ngo dimer (44) Ramond (1) et de son digne émule M. Mirbel (2). Le profes- seur De Candolle, qui a traité aussi ce sujet (3), sest exprimé en ces termes : « La température moyenne, qui, pendant long- ^ temps a été l'objet presque unique des physiciens, est en réalité » la donnée la moins importante pour la géographie des plantes : ^ à ne la considérer que comme une indication vàgue, elle est d'un emploi assez commode; mais la méme température moyenne peut étre déterminée par des circonstances tellement différentes, » que les conséquences et les analogies qu'on voudrait en déduire ^ Sur la végétation seraient très-erronnées. » Cette judicieuse re- marque la porté à conclure quon doit tirer des résultats plus exacts des points extrémes de la température. » » Aux Canaries l'hiver est presque nul sur la cóte et dure peu dans les stations supérieures. Sur le littoral, le thermométre monte de 26,6 à 316 centigrade (4) dans le mois d'octobre qui est le plus chaud, et se soutient encore entre 166 et 194 mois de janvier qui est le plus froid. Ainsi, il n'y a guére que 10 à 12' dé différence entre le maximum e de la chaleur de l'année, dans le t le minimum et, depuis le mois de mars jusqu'au mois d'octobre, cette différence n'est guére plus de 6 à 8, (5) Sur les hauteurs moyennes, et dans la haute région, ces varia- (1) « Des températures qui semblent pareilles, à ne considérer que leur terme moyen » d'avoir la méme marche et d'étre pareillement graduées. On ne trou » ni le méme ordre de saisons, , Sont loin ve au nombre de leurs élémens ni une succession. semblable des jours et des nuits, » Ramond, État de la végét. au sommet du Pic du Midi. (Mém. du Mus., tom. xim, pag. 218.) (2) « Les botanistes qui seraient tentés de croire que la température moyenne de l'année donne la » mesure de la force végétative , ne tarderont pas à reconnaitre que c'est une erreur. » Mirper, sur la distrib. géog. des conif. (Mém. du Muséum; tom. xim, p. 39.) Voy. sur le méme sujet dans ses Recherches sur la dist. géog. des végét. pag. 362.) (3) Dict. des Scienc. nat. (Géog. bot., tom. xvin, pag. 366.) (4) Toutes les températures dont nous faisons thermomètre centigrade. (5) Vov. les notes à la fin de ce chapitre. Essai ce que M, Mirbel dit encore » etc. (Mém. du Muséum , tom. XIV, mention ont été ramenées par le calcul aux de grés du ( 45 ) tions sont plus sensibles; le froid que lon ressent au milieu de l'atmosphère des bois provient moins pourtant du erand abaisse- ment de température que du passage trop rapide d'un climat subtropical à une région toujours humectée par les nuages. La sensation du froid sur les sommets culminans est produite par une autre cause : c'est la brusque transition de la température du jour à celle de la nuit ou dés instants de la journée -où le soleil cesse d'échauffer la terre, car, dans cette zone , l'intensité des rayons solaires a une action d'autant plus forte que l'air se trouve plus rarefié, et l'on doit plus avoir égard aux influences de la chaleur du jour et au refroidissement qui s'opère pendant la nuit qu celle des maxima et des minima de lempérature des saisons opposées. Sur le Pic de Ténériffe, à l'altitude de la Estancia (7,756 pieds), nous avons vu, le 4 juillet 1825, à 3 h. aprés midi, le mercure monter à 18,8 et baisser rapidement jusqu'à 10° dans-la nuit. . Des observations faites à la même station, le 23 février 1828, par M. Alison, physicien anglais, ont donné les résultats sui- vants. ' 10? à 1 h. 15’ aprés midi. 1?,1 vers le soir. 35,9 à minuit. 2°,2 le lendemain matin un peu avant le lever du soleil. - En comparant les observations des deux époques que nous ve- nons de citer, nous trouvons que le 5 juillet le thermomètre in- diquait une température de 9 à 5 h. 5' du matin à la pointe du pic (11,424 pieds), tandis quà la méme station, le 24 février à 8 h. 45° du matin, il montait déjà à T, 4. M. Alison, qui voulut bien nous communiquer ces notes, avait eu soin de placer le thermomètre. au bout d'une perche, à 10 pieds d'élévation au-dessus du sol et de manière que le bois lui fit ombre; l'instrument ayant été posé sur un chapeau noir, une mU 5” ( 46 ) heure environ aprés cette premiére expérience, le mercure monta en peu dinstant à 37,7 (1). D'après ces indications, on concevra que les plantes doivent peu redouter la rigueur du froid dans un pays oü les gelées sont fort rares et où l'hiver nempiéte jamais sur les autres saisons. Aussi la végétation passe-t-elle par tous ses développemens an- nuels, sans éprouver de perturbations dans sa marche, et cet engourdissement hivernal dans lequel les plantes restent plongées et dont M. Mirbel a si bien démontré l'importance (2), n'a guère lieu aux Canaries quà l'époque des pluies. Alors cette terre vol- canique recoit son engrais le plus précieux; les graines, détachées de leur tige, pénètrent dans son sein pour y germer presque aussilôt; avant les premiers soleils de mars, la nature a recouvré toute son énergie, les espèces des rivages sont déjà en fleurs et celles de la haute région recommencent à pousser des feuilles. Quelques exemples de températures, observées à différentes épo- ques dans les principales stations, compléteront ces notions sur l'état de l'atmosphère des divers climats de ces îles. À "TÉnériffe, dans la forêt d'Agua-Garcia et à l'altitude de 2,445 pieds, la température est de 24 à 26°, au mois d'août et a acquis déjà la même force au mois de mars. À cette époque (mars) le thermomètre se soutient à 16,6 dans l'endroit le plus om. bragé et le plus humide de la forét. Au milieu des bois d 4gua-Mansa, et à une élévation qui nexcéde pas moins de 3,821 pieds, le thermométre se soutient à 18 au mois d'octobre. Dans la journée, l'atmosphère reste char- gée de brouillards qui se dissolvent en pluie, les nuages couvrent constamment les pentes de la montagne; mais, à là nuit, cette masse (4) Voy. dans les notes à la fin de ce chapitre les observations de M. Ali pic, et celles que nous fimes nous-mémes en 1825. (2) Recherches sur la distribut. géog. des végét. (Mém. du Muséum, tom. xiv son sur la température du » Pag. 353 et suiv.) ————— Ir t 1 ———— (opem quor rU e OQ n pnr s PR IE MES Peta ee SP o m À oe (AT ) de vapeur gagne insensiblement les terrains supérieurs que lab- sence du soleil a refroidis; alors, la pureté de l'air et la douceur de la température font de cette station un lieu de délices. Plu- sieurs végétaux des tropiques se sont assez bien acclimatés sur la charmante habitation du marquis de la Candia, où nous avions établi le quartier général de nos herborisations, durant notre sé jour dans cette partie la plus élevée de la vallée d'Orotava. A La Laguna, dans le voisinage d'une des foréts les plus im- portantes de Ténériffe et à laltitude de 1,722 pieds, le thermo- mètre ne baisse jamais en janvier au-dessous de 105 et s'élève souvent jusqu'à 14. Il est ordinairement entre 16 et 17° en dé- cembre, et monte jusqu'à 24 et 25° en juillet. Le climat de cette ville passe pourtant pour un des plus pluvieux et des plus froids de l'île; l'atmosphère est rafraichie pendant l'été par les brises de nord-est souvent accompagnées de pluie; les brouillards rasent con- stamment la plaine; l'hiver les averses sont fréquentes et durent par fois plusieurs semaines. Cependant, quoique les Orangers, les Citron- niers et les Bananiers sy développent moins vite que sur la côte, ces vé- gétaux ne paraissent pas souffrir des variations du climat; les Dragon- niers y parviennent à de grandes dimensions, et plusieurs autres espéces dela flore indigène, qu'on a transplantées dans le jardin du marquis de Villa Nueva del Prado, y ont parfaitement prospérées. On s'étonne de voir réunies dans ce beau site les plantes des différentes zones, le Pancratium Canariense avec les Euphorbes des coteaux maritimes; les Bystropogons avec les Lavandes et les Hypéricons des ravins; le Ruscus androgynus, les Cinéraires et les autres espèces némora- les y croissent, comme dans les bois, à l'ombre des grands Lau- riers. Dans la vallée de Guimar, à 3,178 pieds d'élévation absolue, on rencontre encore le Myrica. Faya, et la température n'est pas moindre de 22' à la mi-septembre. Le méme arbre se retrouve ( 48 ) aussi dans l'île de Palma, à l'altitude de 3,916 pieds, et à cette station la chaleur est encore de 18° au mois d'octobre. À la grande Canarie,. M. de Buch observa la température en juillet, dans la vallée de Tiraxana, à laltitude de 2,961 pieds, et son thermomètre marquait 26°, à 6 h. p. m. Dans le mois d'oc- tobre nous l'avons vu se soutenir, à la méme station, à 23', par un temps brumeux et avec la brise au nord-est. | Dans la méme île et d'aprés les indications de M. de Buch, à 1,387 pieds d'élévation perpendiculaire, le thermomètre ne baissait pas au-dessous de 19° au mois de juillet, dans l'intérieur de la forêt du Doramas et aux alentours des sources de Moya. L'obser- vation se fit à 10 h. du matin (1). | Ces dônnées démontrent suffisamment que le climat des forêts, la troisième région ‘de M. de Buch , ne ressemble en rien à celui de Lyon et de la Lombardie, où le froid est même plus rigoureux en hiver que sur les cimes les plus élevées de Ténériffe. L'Olivier (Olea Europea), indigène aux Canaries, et que l'on rencontre encore dans ces iles à 2,109 pieds au-dessus du niveau de la mer (2), na jamais pu sacclimater dans le bassin du Pô. Plusieurs arbres des foréts canariennes, introduits dans nos jardins d'Europe, n'ont pu résister à nos hivers que dans les sites les plus abrités du littoral méditerranéen et des alentours de Lisbonne (3); mais, sous ces la- titudes, ces végétaux ne paraissent pas destinés à acquérir le beau développement qui les rend si remarquables dans leur patrie. La quatrième région de M. de Buch, celle des Pins, ne saurait non plus être comparée pour son climat avec la France ou l'Al- (1) Voy. Léopold de Buch., PAysical. Beschr. der Can. £nsel., pag. 102. (2) Dans la vallée de Tiraxana de la grande Canarie: (3) Le Visnea Mocanera est cultivé à Gênes dans les beaux jardins du Zerbino , mais ses fruits ne parviennent jamais en maturité. Le Laurus indica semble mieux s'accommoder au climat de Nice : ice : à Lisbonne cette espèce orne les promenades publiques. — a DR ES run ( 49 ) lemagne du nord, et encore moins avec le midi de Écosse, où le froïd-est si intense pendant la saison hivernale et les pluies si abondantes. Aux Canaries, le soleil continue d'échauffer la région pinifère jusqu'au commencement de décembre (1); les nuits sont alors plus froides, sans que le sol ni l'atmosphère soient pour cela plus humides. En Angleterre, dans le comté de Surrey, où le climat est plus doux quà Paris, le Pinus Canariensis wa ja- mais pu passer l'hiver hors de l'orangerie. Quant à la cinquième région que M. de Buch a désignée SOUS le nom de Cumbre, la cime, et dont le climat a paru à ce sa- vant avoir des analogies avec celui du nord de l'Écosse et du Drontheim, nous ne saurions admettre non plus une pareille comparaison. Dans cette zone, la sécheresse de lair est encore plus forte que dans celle des Pins, et laridité du sol est-en rapport avec létat de l'atmosphère ; M. de Buch lui-même en a fait l'ob- servation, et pourtant ce qu'il dit du climat des deux régions les plus élevées de Ténériffe est tout-à-fait contraire avec lanalogie quil en déduit (2). La partie supérieure des Canaries Occidentales constitue un pays inondé de laves. vitrifiées et de tufs volcaniques que le soleil échauffe facilement, et où l'humidité n'exerce qu'une (1) Le bourg de Chasna , situé au milieu des bois de Pins de la bande méridionale de Ténériffe , et à l'altitude de 4,008 pieds, jouit encore d'une chaleur de 26°,6 dans les belles journées de décossbie: et de 135,3 à 155,5 dans les temps de bruine. A 2 ou 300 pieds plus haut, autour des sources acidulées d'Ucanca, le thermomètre se soutenait entre 22°,2 et 935,3 de dix heures du matin à midi, le 29 dé- cembre 1828. Voy. les observations de température rapportées dans le supplément à ce chapitre. (2) « Les deux dernières régions sont très-élevées au-dessus de la limite habituelle des nuages. Elles » restent donc, à l'exception de peu de mois dans l’année, dans un état de sécheresse constant et particulier » à ces fles; c'est pourquoi il n’y a qu'un petit nombre de végétaux qui puissent s'y maintenir..... Les » conditions extraordinaires dans lesquelles ces stations se trouvent placées sont cause que des 23 » espèces , 19 sont entiérement propres à ces iles, et jusqu à présent n'ont été trouvées nulle autre » part. On ne peut en aucune manière comparer celle flore à celle des Alpes, plong oée dans une perpétucile » humidité. » (Coup-d'œil sur la flore des les Canaries , trad. de Y'allem. de M. Léopold de Buch ; ; ext, du 1%, vol. des Arch. de bot.) I. — — P ——— X ( 50 ) action passagére. Si l'on sen tient aux variations de température observées à diverses époques de l'année sur les plus hautes cimes de Ténériffe, on voit que les différences sont peu marquantes. Le climat, la nature du sol et les productions végétales de lenceinte des Cañadas, des crétes qui l'entourent et du pic qui la domine, nous ont paru plutôt offrir de grandes ressemblances avec l'Etna. Le Teyde, de méme que le volcan de la Sicile, ne se couvre de neiges que pendant deux ‘ou trois mois de l'année, encore y fond- elle souvent au bout de quelques jours; aucune source ne jaillit de ses pentes, les eaux pluviales se perdent aussitôt sous les laves, et les nuages sarrétent rarement sur cette montagne isolée (1). Deux légumineuses, assez identiques par leur port, se trouvent également sur les cimes de Ténériffe et sur l'Etna, ce sont le Cytisus nubigenus et le Genista AEtnensis. L'une couvre tout le plateau qui entoure le pic de Teyde depuis 6,000 pieds environ jusqu'à 8,673 au-dessus de la Estancia; Vautre s'est répandue sur les pentes de V'Etna depuis 4,000 pieds jusqu'à 6,000 (2); ainsi la première com- mence à se montrer à l'altitude où la seconde cesse de croître. Le nombre des espéces de la haute région est à peu prés aussi res- ireint dans ces deux localités; le sommet des montagnes y est dépourvu de ces gazons émaillés de fleurs qui tapissent les hautes Alpes. Ces analogies ne se rencontrent pas seulement dans la ré- gion la plus élevée, les stations adjacentes en offrent aussi quel- ques autres. Le Pinus Canariensis remplace, sur les montagnes de Ténériffe et des iles voisines, le Pinus Laricio qui croit en Sicile jusqu'à 6,200 pieds; l'Erica arborea forme, dans les deux contrées, une zone de végétation distincte au-dessus des grandes foréts et dispute le terrain au Pteris Aquilina, fougère ‘vagabonde, dont (1) Philippi uber. die vegetation an Ætna. (2) Id. Id. Cr EUM. ii a Em spit MER Aelio a t e : 0B) la force expansive brave toutes les températures. Mais si, des bois de Bruyéres, nous passons dans la région des Lauriers, puis de là dans celle des plantes des bases, nous ne trouverons plus les mémes rapports, et il faudra aller chercher ailleurs des ressemblances. Certaines contrées de l'Océanie paraissent avoir plus d'analogie avec les parties boisées de l'Archipel Canarien. M. d'Urville et les deux savants naturalistes qui l'accompagnaient lors de son excur- - sion à Ténériffe (1), furent frappés de l'aspect de la végétation en pénétrant dans la région des bois : ces belles masses de verdure, le port de certains arbres et la fraîcheur dont ils étaient empreïnts, leur rappelérent un instant les forêts vierges de l'Océan Pacifi- que. Mais il est surtout dans ces mers polynésiennes et à une la- titude équivalente, un archipel qui, sous les rapports du climat et de l'organisation du sol, présente une similitude encore plus | frappante avec le groupe des- Canaries; c'est celui de Sandwich , dont M. Gaudichaud nous a donné une description si intéressante, Plus d'une fois, en lisant les observations de ce botaniste, sur la région des foréts de ces terres lointaines, nous noüs sommes crus de nouveau dans les îles Fortunées; méme conformité, en effet, dans la nature des terrains, dans la constitution de lat- mosphére et dans les phénomènes météorologiques qui s'y mani- festent. i | « Les nuages, dit-il, sont permanens aux iles de Sandwich de » 250 à 300 toises et s'étendent jusqu'à 600 au moins... À 50 ou » 100 toises au-dessus des habitations situées près de la lisière des forêts ^ vierges, on. entre tout-à-fait dans les brouillards dont les vapeurs » acquièrent une densité de plus en plus considérable et finissent » par se résoudre en pluie ( 2). » (1) Voy. Foy age de l' Astrolabe , partie hist. , pag. 46 et 47. (2) Voyage autour du monde de V Uranie, part. bot., par M. Gaudichaud , pag. 89. ———————— BÉ! der - D 4 he PEN 1 " 37 papa siiis — Mem nes gr eui T t a mei . rap ———ÁM o ————Ü | epe te. MAS -—« €—— ( 52) Dans un autre passage de sa relation, M. Gaudichaud dépeint ainsi l'état de l'atmosphére à mesure que lon passe de la région des cótes dans celle des bois. | « Le soleil, d'abord obscurci par des vapeurs légères, se voile ^ de plus en plus, perd successivement de sa chaleur et cesse de ^ tourmenter une végétation qui se montre alors dans toute sa ^ magnificence, et offre presque tout-à-coup la verdure et l'image » d'un printemps éternel. On est transporté effectivement dans » une autre région, et l'on croit passer de la zone torride dans la ^ zone tempérée (1). » | Le phénomène de la condensation des nuages et de leur éva- poration instantanée, que ce voyageur infatigable décrit ensuite avec tant de vérité, nous l'avons vu se produire sous nos yeux à Ténériffe, sur le plateau des Rodeos situé entre les forêts de las Mercedes et celles d’ Agua Guillen et de l'Esperanza. Cette plaine, par son heureuse position, réunit toutes les conditions nécessaires à la végétation; lorsque le calme règne dans l'atmosphère, les nuages restent stationnaires sur les collines qui entourent les Rodeos et se (1) On retrouvera sans doute avec plaisir, dans cette note , la suite de la description de M. Gaudi- chaud : elle retrace à la fois la nature des phénomènes dont l'atmosphère des bois est ordinairement le théâtre dans les iles de Sandwich et sur les montagnes boisées de l'archipel Canarien. « L'air raréfié, brûlant, qu'on respirait avec peine à quelques toises au-dessous , rafraichi.par des , » petites brises échappées des nuages qui dominent et. ombragent ces lieux, est ici agréable et salubre. » Ces nuages permanens , qui sans cesse enfantent des orages, chassés par les vents impétueux , s'élan- » cent quelquefois de leur séjour habituel, viennent inonder et vivifier de leurs vapeurs légères les » parties inférieures qui commencent à se boiser ; mais rarement ils dépassent cette limite, qui paraît » être pour eux une barrière insurmontable : saisis en méme temps par la chaleur directe et réfléchie » du soleil, ils s'évanouissent et disparaissent instantanément sur ce point, pour se condenser encore »- au haut de la montagne et revenir bientôt aprés apporter de nouveaux trésors à la végétation. Poussés » parles brises violentes qui se forment continuellement dans leur sein , on les voit souvent se déta- » cher en colonne et fondre ainsi sur la plaine en rasant la terre ; mais rarement ils arrivent jusqu'au » rivage. i » Ce phénomène, que vingt fois j'ai vu se reproduire , m'a toujours étonné par la rapidité avec la- » quelle il s’opère. On croirait qu'une force élastique a lancé dans l'espace ce cône de vapeurs, qui, » bientôt aprés, semble revenir sur lui-même : mais ce n’est qu'une illusion; en s'approchant da- » Vantage, on voit le nuage s'évaporer avec promptitude. » Voyage autour du monde de l Uranie, part. bot. , par Gaudichaud , pag. 95. md ( 53 ) fixent le long de la lisiére des bois, comme un rideau de vapeur; mais aussitót que les brises deviennent plus fraiches, leur masse condensée commence à rouler sur elle-méme, se dilate en suivant l'impulsion du vent, déborde au-dessus les collines environnantes et inonde la plaine par les gorges qui y aboutissent (1). Alors la brume -s'étend de toute part et s'épaissit de plus en plus, le soleil reste voilé et une forte bruine , en pénétrant la terre d'humidité, vient fertiliser des champs qu'on a justement appelés les greniers de l’île. Ces nuages, amoncelés dans cette enceinte, sont incessam- ment chassés par les brises de mer; on les voit déboucher par les cols ouverts au nord, ils semblent descendre des montagnes boisées pour sabattre sur le plateau, et disparaissent ensuite vers lest, à la des- cente de Sainte-Croix, où une température brûlante produit leur évaporation. C'est sans doute pour cette raison que ces temps bru- meux ont recu dans le pays la dénomination de Tiempo de arriba , temps d'en haut, tandis qu'on désigne par l'expression analogue de Tiempo de abajo , temps d'en bas, le vent du sud , qui souffle dans une direction contraire et dont l'influence se fait d'abord sentir sur la cóte. Ainsi, dans chacune des zones où la végétation se trouve distribuée aux Canaries, elle est assujétie à des influences diverses. Pour bien faire apprécier ces différentes conditions d'existence, nous présenterons le tableau des températures observées simultanément à Ténériffe aux stations les plus importantes, depuis le niveau de la mer jusqu'au som- met du Pic (2). Nous réunirons en méme temps dans ce cadre les observations relatives à l'exposition, à la nature des terrains et aux autres circonstances locales. (1) Ce phénoméne, si intéressant à observer, a lieu aussi en hiver dans les stations les plus élevées de la bande méridionale de Ténériffe. A Chasna (4,008 pieds) , lorsque l'action puissante qu'exerce le Pic sur toute l'atmosphére environnante, attire sur lui les vapeurs chassées par la brise du nord-ouest, le temps devient alors pluvieux ; les nuages amoncelés autour de la base du volcan, s'augmentent et débordent les montagnes des Cañadas, pour venir se grouper sur le revers opposé et fertiliser des terrains trop souvent dévorés par la sécheresse. (2) Les données de M. de Buch nous ont servi de guide pour les températures et les altitudes rap- portées dans ce tableau. ( 54) TABLEAU COMPARATIF des différences dans la température des principales stations. ; HE "du A OBSERVATIONS | | : RP A = Z Relatives aux circonstances locales qui f d STATIONS INFÉRIEURES. s $ | STATIONS SUPÉRIEURES. E R- a peuvent produire des égalités, ou déterminer | & | à | = z = des différences anomales de température, "PE. 2 B z dans les stations supérieures. E sd C. Pieds C. " 1 | 1815. Oct.|Garachico:. . . . . . . .| » [26° “|Pino Santo. .. : . . .. 740 |26° | Egalité. Terrain découvert et aride. Nappe d'obsi- | dienne. 4 » Juin.|Puerto de la Orotava. . .| » [23° |Victoria. . . . . .....| 864/22» |toen—| Voisinage des forêts, brumes fréquentes. » Sept.|Candelaria. . . . .. . .. LA AUS IEEE SI RER 914 250,5 10,1 id. . Id. Ia. : i » Juin.|Puerto de los Christianos.| » [22° |Adexe. ....... ...| 923/209 |20 ig.| Embouchure du grand ravin de l'Enfer, voi- | c ~ sinage des montagnes, irrigations, cultures, 1 La petite vallée d'Adexe est une oasis au mi- | : lieu des terres arides et incultes de la bande | Barranco hondo de Can- méridionale de Pile. » Sept.|Candelaria.. .. . . . . EM atu —. MASON 1,232/209,5|0,5 en--| Exposition du sud. L'Euphorbia Canariensis savance jusque sur cette station; la monta- gne n'offre que des pentes arides et dépeuplées ; ; d'arbres jusqu'à une grande hauteur. » Aoüt|Santa-Cruz. ....... » [28 Ieodelalto. ..... ...| 1,597128» |Egalité,| Pays découvert, forêts détruites, tufs vol- | 3 caniques. La vigne y est cultivée avec succès. » Juin.|Puerto delos Christianos.| » |25» (Guia. <... a...n 1,715/23° |2e en — Mn sus méridionale, nappe de lave, sé- cheresse. » Août.|Santa-Cruz. . . ., ...| » [30° |Laguna.. . . . . . . . .. 1,722,269 |49 id. Exposition du nord. Voisinage des foréts, Limites des vignobles dans brises fraiches, brouillards et bruines. » Sept.|Puerto de la Orotava. . .| » 128° la vallée d'Orotava... .| 1,725|25* |3e id. : a du nord-ouest. Voisinage des : oréts. » Juin.|Puerto de los Christianos.| » |205,2 Chinamada. . . . . . . .| 1,8912|179,8/25,4 id. Tufs volcaniques, terrains arides et déboi- sés; exposition méridionale. | » Sept.|Puerto de la Orotava. . .| » [260 |Victoria. . . , ... . .. 2,147]25o |lo id. Coteaux dépeuplés d'arbres forestiers. Cul- f tures des Nopals, de la Vigne et des Palmiers. || | » Sept.|Candelaria.. . , . . . , .| » [250 |Vallée de Guimar. . . .. 2,174|25o | Egalité. Exposition méridionale. Pays volcanisé. On rencontre encore à cette station le Lavandula b : abrotanoides et l'Artemisia argentea. " ». Oet.[Garaehico. .. ... .. -| » [2455 Paso de Masca.. . . . .. 2,302|22o |2o,5en-- Exposition au S.-O. Foréts détruites, gorges | arides et profondes. | » Aoüt.|Santa-Cruz. . ...... » [8300 |Agua Garcia. . . . .. . .| 2445124 169 id. Exposition du nord. Grande forét, bruines B : fréquentes, » Aoüt.||Santa-Cruz. . . . . . .. » {270,8 Esperanza. . . . . . . .. 2,5631240,5| 30,3 id. Exposition orientale. Pays sec, situé sur la | 2 lisiére des bois de Pins, | » Juin.|Puerto de la Orotava. . .| » [200 San lago.. . . . . . . .. 2,775|160,;|302 id. Exposition méridionale. Pays sec, anciens | $ torrens de lave. Dans les endroits les plus vol- caniques, la différence de température de cette station avec celle de la côte adjacente , est à peine de 2». Le Cytise prolifère se ren- ; contre déjà dans cette vallée, et pourtant les | i ; Euphorbes et les Kleinies y croissent aussi | | |Fuente de los Berros (au- parmi les Nopals, les Müriers et les Amandiers. | » Sept.|Candelaria.. . . . . . .. » 269,6, : dessus de l'Esperanza).| 9,180]199,6| To id. Exposition au N.-E. Forêts, nuages, bruines. IE » Sept.|Puerto de-la Orotava. . .| » |240,5 Agua mansa. . . . . . . .| 3,821/140,4 69,1 id. Exposition au N. Grande forét, nuages per- 3 $ manens. i » » Mai.|Puerto de la Orotava. . .| » |189 |Chasna.. . . . . . . . . .| 4,008/100 |8e id. Exposition au sud. Foréts de Pins, vergers, irrigations. | » Aoüt.|Santa-Cruz. . . . . . . ,| » [2859 Loscuchillos.. . . . . . . 5,130/220,2| 60,7 id. Crète déboisée. j » Aoùt. Santa-Cruz. ...,... » |280,9|Montagne de Pedro Gil. .| 5,658/139,3/159,6 id.| Cette différence de 159,6, qui vient tout-à- | ; Eva coup se manifester ici; provient de ce que la | température a été prise. à 5 h. p. m. à la sta- | | tion supérieure, tandis que l'observation cor- f respondante a été faite à midi. Or, nous avons | déjà fait remarquer que la diminution de la chaledr était très-sensible dans la haute région | Cruz del Paso, au-dessus vers le déclin du jour. : | ; » Sept.|Puerto de la Orotava. |.» [220,2| de Guimar. . . .... s 5,974]11o,4| 119 id. Ici la diminution de température se trouve plus en rapport avec l'altitude de la station y | 4 . | attendu que les dcux observations ont été fai- tes à peu prés à la méme heure, ou dans les : mémes circonstances. » Mai |Puerto de la Orotava. . | » [210 |Angostura. ........ 6,195|13e |89 id. Ces deux stations font partie du grand cirque à : des Canadas, où la chaleur est beaucoup plus » Mai.|Santa-Cruz. ....... » |21» Estancia dela Retama. . .| 6,266 12» |9» id. Jforte que sur les crétes environnantes. » Ne LL RATE » |260 |Estancia de obaxa. . . . . 1,156]13e |130 id. Pentes du Pic, cendres et scories volcani- : ques. j » Mai, xl ee Ce. ON » |26o Id. de arriba. . . . .| 8,673/109,4|169 id. Id. Id. i n Mai. JS co oc Y M 2200 EMA Cr es A 9,276 119,5 189 id. Id. Id. à » Mai...1-........;. » |26» |Alta-Vista. . . . …. ... 9,753|10o. |160 id. Id. Id. j » 2Mat|... d^ 105 9 M da E V M VEN 119,6|17o id. — 5. Cime., M © © E — ar ( 55 ) On peut déduire du tableau antérieur trois résultats importans : 19 La chaleur se fait ressentir depuis le niveau de la mer jusqu à 1,500 pieds au-dessus, sans variation tres-sensible, puisque la tempé- rature est parfois égale à celle de la cóte ou qu'elle ne diminue guére dans cette zone que de 1 à 2 degrés, selon les changemens que déter- minent l'ouverture des vallées, la nature du sol, l'exposition, le voi- sinage des montagnes boisées, etc. 2» En ayant égard aux circonstances locales déjà énoncées, la tem- pérature continue à diminuer de 2 à 8 degrés, depuis laltitude de 1,500 pieds jusqu'à 4,000, c'est-à-dire dans cette région presque tou- jours rafraîchie par la présence des nuages et où les végétaux se trouvent réunis en grande masse. 3° A partir de 4,000 pieds jusqu'au sommet du Pic à l'atmosphère, dégagée des vapeurs de la | région inférieure, n'est plus influencée par les mêmes causes. Dès lors, la température diminue proportionnel- lement à laltitude, et cet abaissement progressif , le long d'une ligne de pente d'environ 8,000 pieds, donne une différence de 9 à 17 et 18° avec la température de la côte. Mais il faut observer que ces trois séries de diminution de tempé- rature ne sont pas toujours restreintes aux limites que nous avons . fixées; elles varient suivant que les montagnes sont abritées des vents généraux ou Tafraichies par les brises. Ainsi, lorsqu'il s'agit d'indi- quer les changemens atmosphériques qui se font ressentir à mesure qu'on remonte les pentes de Ténérifle, depuis les rivages jusqu'aux plus hauts sommets, on peut établir en fait que l'ile est partagée en trois grands climats caractérisés d'aprés les modifications suivantes. o e.. ID Ed ( 56 ) PREMIER CLIMAT. (INFÉRIEUR. ) EXPOSITION DU NORD. Limites. Depuis le niveau de la mer jusqu'à 1,500 pieds au-dessus. TEMPÉRATURE CHAUDE. Maximum dela chaleur sur la cóte, au niveau de RN C iE 2 30° Hind. .— 7A SRE A 16,1 Différence de température avec celle du niveau de la mer, suivant l'altitude des stations de cese. cr .eR nt tar mob às État de l'atmosphére. Brises régulières variant du N.-N.-O. à l'E.-N.-E. Ciel presque toujours sans nuages. Quelques averses de novembre en janvier. Terrains. Tufs volcaniques, basaltes, scories et nappes de lave en décomposition. dre classe. Grèves bordées de falaises; coteaux maritimes coupés par des ravins. 2me classe. Ravins profonds souvent parcourus par des torrens; berges escarpées. VEGETATION. RÉGION DES EUPHORBES DANS LES TERRAINS DE LA PREMIERE CLASSE. l MP iscatoria ni t foli P ria, Kleinia neriifolia, Plocama pendula. Espèces ÉPAnsEs qui appartiennent aux genres Co- nyza, Aizoon, Statice, Artemisia , Prenanthes ; Achyranthes , Chrysanthemum , Astydamia , Kochia, Periploca, Frankenia , Crithmum, Forskalea , etc. ; VécÉraux waTURALISÉs. Palmiers, Nopals, Fi- guiers, Agaves, Bananiers, Müriers, Oran- gers; etc. ; : | RÉGION DES PLANTES RUPESTRES DANS LES TERRAINS DE LÀ DEUXIEME CLASSE. EspekcEs ÉPARSES appartenant aux genres ZHyperi- cum, Bystropogon, Echium, Lavandula, Digi- talis, Sonchus, Messerschmidia , Thymus, Ta- nacetum, Teucrium , Sempervivum, S tachys , S aliz, Sisymbrium, Solanum, Pyrethrum , Datura, Cineraria, Anthemis » Asparagus , Athamantha , Canarina, Globularia, Rumex , Bosea, Peucedanum > Phyllis , Crambe , Cam- pylanthus > Carlowizia > Bryonia, Cyperus , Dactylis , Drusa, Lavatera , Adianthum , etc. EXPOSITION DU SUD-EST ET DU SUD-OUEST. Limites. Depuis le niveau de la mer jusqu'à 2,500 pieds au-dessus, et méme plus haut dans certaines localités. ( Exemp. vallée de San- Iago.) TEMPÉRATURE TRÈS-CHAUDE. Maximum de la chaleur sur la côte, au niveau de-la mer (OISE MN MISES Mine. co. M. de IB. Différence de température avec celle du niveau de la mer, suivant l'altitude des stations ZO 02 009. LODS FR État de l'atmosphére. Calme, parfois interrompu par des vents d'Ouest ou de Sud-Est. Ciel presque toujours sans nuage. Pluies fort rares, méme en hiver. Terrains. Nappes de lave, tufs volcaniques, ba- saltes, scories et ponces en décomposition. 1re classe. Grèves, plages sablonneuses, falaises et coteaux maritimes coupés par des ravins. 2me classe. Ravins nombreux et trés - profonds , rarement parcourus par les torrens, berges escarpées. VÉGÉTATION. RÉGION DES EUPHORBES DANS LES TERRAINS DE LA PREMIÈRE CLASSE. PLANTES DOMINANTES. Euphorbia balsamifera, E. Ca- nariensis, E. aphylla, Cneorum pulverulentum, Zygophyllum Fontanesi, Prenanthes spinosa. Espèces Érarses appartenant aux genres Cero- pegia, Gnaphalium, Heliotropium, Salvia, Linaria , Lotus , Lycium , Mesembryanthemum, Reseda, Aloe, Artemisia, Notoceras, Parony- chia, Physalis, Jasminum , Saccharum , Sem- pervivum, Sida, Gymnocarpus, etc. Vécéraux NaTURALISÉS. Nopals, Agave , Figuiers, Amandiers , etc. RÉGION DES PLANTES RUPESTRES DANS LES TERRAINS DE LA DEUXIÈME CLASSE. Espèces ÉPAnsEs appartenant aux genres Cheiran- thus, Euphorbia, Salbia, Lotus, Dracæna, Helianthemum, Hypericum, Bystropogon , Echium, Juniperus, Lavatera, Lavandula , Convolvulus , Asparagus ; Pyrethrum , Rham- nus, Rubia, Sideritis, Sonchus, Cineraria, Co- nyza , Salix , Bosea, Forskalea , Justicia, Bu- | pleurum , Cyathea , Roccella. n———— - Supe ELEM ——À——— Hal d ET (57) — A mum Eu dn EE RAM Rr m — SECOND CLIMAT. (INTER MÉDIAIRE). ne EXPOSITION DU NORD. | Limites. Depuis 1,500 pieds d’altitude jusqu’à plus de 5,000 pieds. - Température humide. Différence de la température avec celle de la côte, suivant l'altitude des stations, de 2 à 8e. Etat de l'atmosphère. Brises fraîches variant du N:-N.-0. à l'E.-N -E. Ciel presque toujours couvert de nuages, surtout pendant le jour. Brumes et bruines fréquentes en été. Orages et fortes pluies en hiver. Observation. La neige, qui, dans la saison hiver- nale arrive parfois jusqu'à la limite supé- . rieure de ce climat, s'y fond presque aussitót. Terrains. Vallées et montagnes ; sol argilo-volca- nique chargé d'humus. Laves décomposées. | VÉGÉTATION. RÉGION DES LAURIERS ET DES PLANTES NÉMORALES. Espèces pominanres. Laurus Canariensis, L. In- dica, L. Barbusano, Persea fœtens, Myrica Faya , et autres espèces éparses appartenant aux genres Arbutus, Ardisia, Bœhmeria, Ce- rasus, Celastrus, Erica, Ilex , Myrsine , Olea, Pittosporum , Rhamnus , Viburnum , Visnea. ARBRES NATURALISÉs, Castanea vesca, Quercus pu- . bescens. PLANTES NÉMORALES des genres Adenocarpus , Cine- raria, Coneoleulus , Dracocephalum, Exacum, : Fragaria, Genista , Festuca, Geranium , He- dera, Luzula, Myosotis, Origanum, Ranun- culus , Rubus, Ruscus, Scrophularia, Sem- pervivum, Smilax, Solanum, Viola, etc. Foucères. Diverses espèces des genres Adiantum, Asplenium, Blechnum, Cyathæa, Davallia , Gymnogramme , Trichomanes, Woodwar- dia, etc. Mousses et LicuxNs. RÉGION DES BRUYERES ET DES CISTES. Erica arborea , E. scoparia , Cistus vaginatus , C. candidissimus , C, Monspeliensis , Helianthe- mum guttatum, Fovucknrs. Pteris Aquilina, Nothochlena Marantæ et N. vellea. EXPOSITION DU SUD-EST ET DU SUD-OUEST. Limites. Depuis 2,500 pieds jusqu'à environ 4,000 et quelquefois moins , suivant les lo- calités. Température. Chaude et séche. Différence de température avec celle de la cóte, suivant l'altitude des stations de 3 à 6°. État de l'atmosphère. Calme, parfois interrompu par des vents de S.-E. trés-chauds. Ciel] presque toujours sans nuage; seulement quelques brouillards dans les vallées boi- . Sées. Pluies rares, orages instantanés en hiver. Observation. La neige descend rarement jusqu'à la limite supérieure de cc climat et s'y fond aussitót. | Terrains. Vallées et montagnes presque généra- lement dépourvues de forêts laurifèress » 1 moins substantiel, pentes plus rapides. VÉGÉTATION. Seulement quelques petits groupes de Lauriers, d’Arbousiers et de Bruyères dans les gorges les plus anfractueuses du Sud-Est et du Sud-Ouest. Les Cistes en plus grande masse. Observation. De ce côté les Cistes sont rarement accompagnés par les bruyères ; ils occupent, le long de la bande méridionale de l'ile , un espace beaucoup plus large que sur l'autre | versant et s'étendent depuis l'altitude de |i 1,800 pieds jusque sur la lisière des bois de Pins (4,000 pieds). Les principales espèces de | la région des Cistes sont le C. vaginatus, le C. candidissimus,le C. Monspeliensis et Y Helian- themum guttatum. Le Cistus vaginatus est toujours l'espéce dominante , le C. candidis- | simus est fort rare; on rencontre ordinaire- ment le C. Monspeliensis dans les stations plus rapprochées dela cóte. Quant à I Ae- lianthemum guttatum , id croit un peu par- tout, méme dans la région des Pins. —r——— -— » ewig cnl d —— at n tts —— em ten, = — ram (58) TROISIÈME CLIMAT. (SUPÉRIEUR). Observation préalable. La distribution phytostati restent ordinairement stationnaires trouve compris , et les brises de mer que n'est plus modifiée ici par l'exposition ; les nuages | au-dessous de la zone dans laquelle le troisième climat se | exercent peu d'influence à cette hauteur. 4,000 pieds du coté du Sud á j "à la ci ic (11,424 pieds). 5,000 pieds du coté du Nord (Jusqu'à la cime du Pic(11, pieds) Température. Assez chaude et sèche pendant le jour, froide et parfois humide pendant la nuit. ; Différence de température avec celle de la cóte , suivant l'altitude des stations , de 9 à 18». Etat de l'atmosphére. Vent faible et chaud pendant le jour sur tous les plateaux supérieurs et les crétes || des montagnes; calme pendant la nuit, mais cet état de quiétude est souvent troublé, au mo- ment du lever du soleil, par les bourrasques subites et passagères qui se manifestent au sommet du Pic (1). Limites. Depuis| Ciel sans nuage, air trés-raréfié nuage, ; Soleil brûlant, nuits froides, pluies très-rares en été, orages |f instantanés en hiver. Observations. La neige s'amoncelle sur les hautes cimes de l'ile de Palma , dans le cirque des Cañadas » || à Ténériffe, et sur les crètes des alentours ; mais le plus souvent elle s'y fond de suite ou dispa- rait balayée par les vents. Elle n'est permanente que sur le pic de Teyde pendant deux mois | environ ; plusieurs hivers se passent méme sans qu'elle y reste plus de deux ou trois semaines. La glace se maintient toute l’année dans la grotte de la /Vieve à 9,312 pieds d'élévation au-dessus du niveau de la mer. Il gèle quelquefois dans la nuit vers la fin de décembre et dans le mois de | janvier , sur les rochers isolés et à l'ombre, mais ces sortes de cas sont rares et ne se manifestent presque jamais au-dessous de 7,000 pieds. i Le à] . * é s ? . 5 l i | Terrains. Talus trés-rapides, plateaux et sommets culminans , mornes escarpés et pics volcaniques. Sol presque entièrement envahi par les ér uptions, roches trachytiques par grandes masses, tufs , scories et torrens de lave de différente nature. VEGETATION. RÉGION DES PINS, EspEckE-UwiQuE. Pinus Canariensis. PLantes NÉMORALEs. Helianthemum Thymus Calamintha, Asphode Buttatum, Lotus angustissimus, Festuca Myurus, Erigeron BE NS lus ramosus, Pteris Aquilina, etc. (A Palma, Umbilicus Heylandii, N .). RÉGION DES LÉGUMINEUSES FRUTESCENTES ET DES PLANTES ALPINES. ESPÈCES DOMINANTES, Cytisus nubigenus , Adenocarpus frankenioïdes ‘(et Cytisus proliferus dans des stations inférieures). i . PLANTES ALPINES. Eparses à Ténériffe parmi les légumineuses du grand plateau ou cirque des E ; Centaurea aynaroides, Chrysanthemum Broussonetii, Echium Auberianum, N., Nepeta Teydea, N., . Polycarpe aristata, Scrophularia glabrata, Pteris Aquilina , etc. pe 3 à Ip. sur la créte des montagnes centrales à Ténériffe. Arabis albida , Carlina xeranthemoïdes, Cheiran- thus scoparius, Juniperus Cedrus, Ephedra monostachya, Festuca laxa, Pimpinella Cumbre, P. Den- droselinum, N., Pyrus Aria, var, Rhamnus coriaceus ; Rosa Armidæ, N., Satureja tenuis, Bethen- courtia Palmensis, Tolpis lagopoda, Thymus Benthami, N.,etc. In. à Canaria, Satureja lanata, S. tenuis, Genista microphylla , etc. = i Iv. à Palma. Juniperus Cedrus , Arabis albida , Cerastium strictum , var, Viola Palmensis, etc. Sur les pentes du Pic de m eu Silene nocteolens, N., et Viola cheiranthifolia, depuis altitude de ieds jusqu'à 9,850. : Ha 3 2H | KE Ea querer is bords du cratère (11,424 pieds). 77 eissia verticillata, var, et Scytonema myocrhus. (1) Ce vent, qui oblige souvent les voyageurs d'abandonner cette station ; Souffle presque toujours dans une direction contraire au vent de mer. : etann ~- Be rence A mm À a— LM oL E ir TE c: = en (59 ) Ce que nous venons d'exposer dans les trois tableaux précédens sur les différ 'ens climats de ces iles et sur les groupes de végétaux subordonnés à leur influence, peut se résumer en un seul cadre , ainsi qu'il suit : ` DISTRIBUTION PHYTOSTATIQUE. . OBSERVATIONS SUR LES. LIMITES. Les limites supérieures des deux premiéres régions ar- rivent à peine à l'altitude de 2,000 pieds du côté du Nord et ne dépassent cette hauteur que dans les endroits dé- ie CLIMAT. boisés; elles s'étendent au contraire jusqu'à 3,000 pieds : s du côté du Sud. ire région. Plantes des bases.) Cultures dans tous les lieux | „Les Bruyères qui bordent les forêts de la bande septen- 2me région, Plantes des ravins. } accessibles. : trionale, et les Cistes, qui viennent aprés les Bruyères, s'a- vancent jusqu’à plus de 5,000 pieds sur les versans du Nord; sur le revers opposé le Cistus Monspeliensis et le 2me C LIMAT. * | C. vaginatus occupent à eux seuls tout l'espace qu'emibrasse [le second climat (1), mais leur force expansive ne s'étend 3me région. Lauriers et plantes némorales.y Cultures dans leg | pas au-delà de 4.000 pieds. j| Ame région. Bruyères et Cistes. . d espaces déboisés, La région des Pins ne descend guére au-dessous de 4,000 pieds du côté du Nord, et monte jusqu'à près de 9,000 7(2) Cette région occupa autrefois un très-grand espace sur le 3me CLIMAT. revers méridional de Ténériffe et s'étend encore aujour- d'hui depuis 3,000 pieds jusqu'à 8,600. Les limites de la 6me région varient suivant les localités; les plantes alpines sont disséminées à Ténériffe parmi les Légumineuses arboresc. du plateau central; partout ail- leurs elles s'isolent sur les rocs les plus escarpés et cha- que ile possède, sur ses hautes cimes, des espèces particu- liéres. Terrains in- " me e o z Gme région. Légumineuses frutescentes et au Atés. j| 5me région. Pins et autres plantes forestières. tres plantes Vicio Y Nous n'avons voulu présenter dans ce tableau que la répartition des plantes sous le rapport des espèces qu'on rencontre par grandes masses en suivant. une méme ligne de pente; les régions que nous indi- quons ne sont point des zones de végétaux toujours régulièrement superposées les unes aux autres, mais seulement des groupes par- tiels et isolés; la car te phytostatique que nous publions (voy. ATLAS, pl. m) donnera une idée assez juste de ces divers agroupe- mens. Tous ces tableaux séduisans, qui ont paru à différentes époques avec leurs zones de plantes échelonnées sur les gradins (1) Gette observation n’est applicable qu’à la partie de l’île de Ténériffe comprise depuis Guimar jus- qu'au port de San-lago : de ce côté, des conditions particulières d'existence déterminent la présence des plantes de la bande nine dans la vallée de Guimar, dans les gorges de l'Ouest et le long de la chaine du Nord-Est ou d'Anaga. La distribution de la végétation se trouve par conséquent changée dans ces diverses localités. (oy. Arras, carte ct profils phytost., pl. nt et 1v). (2) Il faut excepter les talus volcaniques d'Icod où les Pins descendent jusqu'à 3,000 pieds. Sur tout cet espace, la nature du sol, son excessive sécheresse et l'éloignement des forêts lauriferes ocea- sionnent un changement notable dans la température locale. Les Pins seuls peuvent braver l'aridité de cette station et se reproduire au milieu de ces nappes de scorie et de lave vitrifiée. ( 60 ) des montagnes pyramidales, perdent beaucoup de leurs prestiges lorsqu'on descend dans les détails; on saper coit que la nature ne sassujétit pas loujours à nos systémes, car ses lois reposent sur d'autres bases et souvent s'accordent peu avec nos théories. Il sem- blait établi, en règle générale, que chaque centaine de mètres de hauteur abaissait la température d'environ un demi-degré du ther- mométre de Réaumur, et on en avait conclu que chaque centaine de mètres d'élévation verticale correspondait à un degré de la distance de la montagne au pôle (1). Mais dans l'application que l'on peut faire de cette observation, on doit avoir égard aux modifications que les circonstances locales produisent dans la température des diverses stations, aux conditions d'existence dans lesquelles les plantes se trouvent placées, et à cette loi de la répartition des germes qui, en déterminant la spontanéité des espéces, semble avoir choisi de pré- férence certaines contrées pour leur berceau. Ces considérations, que l'illustre Ramond n'avait pas négligées (2), sont de la plus haute importance; si l'on cessait d'en tenir compte, on tomberait dans de fausses généralités, car dès lors il ne pourrait y avoir de ré- sions botaniques, et la végétation des climats les plus opposés se trouverait reproduite et distribuée comme par étages sur toutes les hautes montagnes du globe. Mais il n'en est pas ainsi, déjà dans les Pyrénées de nombreuses exceptions viennent rompre les rap- ports entre les hauteurs et les latitudes, et la théorie, déduite des hauteurs et des climats, trouve bien moins son application à me- sure quon se rapproche de la zone intertropicale. Le savant ex- (1) Voy. Ramond, De la végétation des montagnes. (Annal. du Muséum d'hist. nat., tom. Ma (2) « Quel que soit le caprice des causes qui ont présidé à fa répartition des espéces..., nul doute » qu'elles ne pussent habiter indistinctement les mêmes lieux, si la nature avait obéi seulement à la » loi des climats, et si ses distributions n ’eussent été primitivement soumises à des nécessités » nous est difficile de pénétrer le mystère. » (État de la végétation au sommet du Pic du Midi. Muséum , tom. xin, pag. 235). dont il Mémoires du o T ——M9À MÀ M ( 61 ) plorateur du Mont-Perdu avait lui-méme reconnu cette vérité en appréciant les causes capables de modifier les lois phytostatiques dont son génie avait saisi lensemble; le revers méridional des Pyrénées lui avait offert bien des fois des espèces quil n'avait pas revues sur le versant opposé, et plusieurs de celles qui végétaient encore à une grande élévation, sur les pentes septentrionales. sétaient présentées, dans des stations beaucoup plus basses, sur les expositions du sud. De ce cóté les plantes se trouvent à l'abri des vents du nord, et laction du soleil venant tempérer le climat, l'influence de la hauteur est réduite à peu de chose; aussi devais- Je m'attendre, dit-il, à ne trouver au midi que la végétation commune des élévations moyennes (1). E. La différence des expositions, augmentant ou diminuant lin- fluence des hauteurs, doit entrer en première ligne parmi les causes qui déterminent la présence ou l'absence de plusieurs grou- pes de plantes, ou simplement de certaines espéces à des altitudes égales. La position géographique des Canaries, la structure de leurs montagnes et le gisement de leurs cótes contribuent plus que partout ailleurs à modifier le climat et à changer le caractére de la végétation (2). | Lorsqu'aprés avoir parcouru les vertes forêts qui couv reni une partie des versans du nord de Ténériffe, on tourne lile par la pointe la plus occidentale, les bois de Lauriers ne se retrouvent plus que dans le fond des étroites vallées comprises entre le cap de Teno et le port de San-lago. Quelques groupes d'arbres fores- tiers garnissent encore, de ce cóté, les anfractuosités les plus humides (1) Ramond , Voyage au Mont-Perdu, pag. 71. (2) M. ment de Saint-Hilaire a su apprécier ces diverses transitions phytostatiques sur les mon- tagnes du Brésil. « Ce qui sous la même latitude et à des hauteurs semblables, a-t-il dit, modifie » véritablement la nature des productions végétales, ce sont l'exposition du sol: le plus ou moins » d’humidité qu'il renferme , la division plus ou moins grande d'humus eui compose sa. surface. » (Tableau de la végétation de la province des mines). ' cm MT RP T 7 a a E A ree ——À va == — —€— P ne RR tar — — Pn nmi ie D. ne E, ———É——— ~ ÀÓ€—€ L———— — | ( 62 ) tandis que partout ailleurs ce ne sont que pentes -arides -et nues. A mesure qu on s'avance sur le revers méridional, le pays est encore plus dévasté : là, plus de brises rafraichissantes, plus de nuages; mais le climat de la Mauritanie méridionale avec sa sécheresse désespérante et son atmosphère de feu. La nature du sol, l'aspect du ciel, le caractére de la végétation, tout a changé sous l'influence de l'exposition. La structure de lile est la principale cause de cette brusque transition : la chaine de montagnes qui s'étend du nord-est au sud -ouest, en divisant le pays en deux bandes, oppose une barrière aux vents alizés, et le calme -de l'atmosphère nest troublé sur les versans méridionaux que par l'harmatân. du désert (le vent du S.-E.), qui augmente alors la chaleur brûlante de cette côte. | Les températures observées à Ténériffe, aux mêmes mois de l'année et à des altitudes à peu prés égales, sur les versans du nord et du sud, sont. les suivantes. NES err a rari t t es s VERSANS DU NORD. VERSANS DU SUD. ie] q vi ds u | 5 Uu o LE £L ! c E E ous LE | à z z STATIONS. | 2 u CIRCONSTANCES LOCALES. | STATIONS. z E CIRCONSTANCES LOCALES. E | 2-1 & < E E | | F "o vam { | Pieds, Pieds, Juin. Puerto de 0 20»| Brises fraiches au N.-E..| Puerto de] ^ 0/|25à 27e| Calme ou vent du Sud. |5à 7e la presque constantes. los | Orotava. Christianos. ; Juin. Laguna. 11,722 |180 Voisinage des forêts, cul-| | Guia. 1,715 240| Atmosphère presque tou- 6o tures, brouillards et brui- jours sans nuages, pays vol- nes, E ; : canisó. Euphorbes, Nopals. jJuin. | Taganana. 2,690 |14o Voisinage des forêts, cul-| Vallée de 2,690 |18 à 200| Atmosphère ordinairement |4 à Go | tures, irrigations, brises San-Iago. sans nuages, terrains volca- fraiches, bruines. nisés. Jonction de la végéta- tion des bases avec celle de la haute région. r. Sept. [Agua - Mansa. 3,821 |140 Forêts, faibles brises du| Vilma. 3,800 |18 à 20] Atmosphère sans nuages ,|4 à 6o : Nord, bruines. $ sécheresse absolue. Végéta- tion clair-semée, plantes de la haute région. ERO D ENCORE eee dee iie o ON | | Ces exemples suffisent pour donner un aperçu des différences climatériques et des circonstances lo- cales qui les accompagnent dans toutes les stations correspondantes sur les deux bandes de l'ile. En remontant du côté du sud, on ne trouve que des brandes in- MESE a ( 63 ) | cultes et des champs appauvris : les Euphorbes, les Plocames et les | Kleinies recommencent à se montrer en grand nombre et sont en- tremélées de Cneorum et de Zygophyllum (1); plus haut dominent les | Cistes, et sur les pentes supérieures s'étend cette zone des Pins que les ; plantes némorales semblent fuir, car le sol qu ombragent ces bois est sans substance, et la couche de feuilles qui le couvre ne forme aucun l terreau. Cependant, dans les grands ravins de Xerque et de Tama- daya, la végétation reprend de la vigueur et paraît se ranimer à l'ombre des berges. En continuant à s'avancer vers l'orient de l'ile. les brises commencent à se faire sentir, et le climat devient plus tem- péré; on trouve des Saules (2) au bord des torrens; les Bosea, les Hy- | péricons, les Joubarbes et la plupart des plantes des ravins garnissent | les rochers; mais, hormis quelques Bruyères rabougries, les arbres des forêts ne reparaissent pas encore. Dès qu'on est parvenu dans | le district de Guimar, le paysage prend un autre ton; les montagnes | L : sabaissent pour se prolonger dans le nord-est, leurs versans descen- | f dent rapidement vers la mer du coté de lest et dù sud; tandis que j 1 . leurs pentes septentrionales viennent se perdre sur les bords du pla- | : teau des Rodeos, à l'altitude d'environ 2,000 pieds. L'exposition des ! | versans se trouve ainsi changée par cette direction de-la chaine cen- trale, et les nuages amoncelés sur le plateau, ne rencontrant pas d'obstacle, sont chassés par les brises et débordent sur le revers oriental de l'ile où l'on retrouve des bois de Lauriers. Ce phénomène de l'agroupement des nuages, dont nous avons eu déjà occasion de parler, a souvent fixé notre attention. Dans l'enceinte de Guimar, la masse de vapeur, que refoule le vent du nord-est, sengouffre dans les gorges de la montagne partout où une plus + : grande réunion de végétaux entretient un échange d'humidité et de (1) Cneorum pulverulentum et Zygophyllum Fontanesi, N. (2) Salix Canariensis, Willd. EE CT rr E e MP ee IW re e E a meute ne imas. pee c EM en ( 64 ) calorique avec l'atmosphère environnante. En arrivant dans cette vallée, les nuages samassent dans le grand ravin de Dadajos et res- tent presque toujours fixés à la méme élévation (voy. ATLAS, vue phytost., pl. m); le contrefort de la Ladera, qui borne la vallée au sud-ouest, semble au premier abord étre le seul obstacle qui les ar- réte, mais il est une autre cause qui les empêche de s'étendre en de- hors de cette gorge : lorsque les brises plus fraiches augmentent leur masse, on les voit alors dépasser un instant la créte des monts pour s évaporer aussitôt qu ils se trouvent en contact avec l'air chaud de la bande méridionale. - Dans les iles voisines des causes semblables influent également sur la distribution des végétaux par grandes masses et sur leur isolement par groupes partiels. A Canarie et à Palma, de méme quà Ténérifte. les forêts laurifères occupent les versans du nord et du nord-est : si l'on retrouve quelques arbres des régions intermédiaires sur le revers opposé, ils sont toujours situés dans les gorges où une humidité per- manente vient changer la constitution de l'atmosphère et favoriser leur développement. Les Pins, au contraire, fuient le ciel nuageux des expositions septentrionales et vont chercher, dans des stations | i plus élevées, un climat analogue à celui du revers méridional où | | leur force expansive s'étend sur un plus large espace. Lexploration de l'ile de Palma nous a fourni un autre fait qui prouve jusqu'à quel point la structure orographique peut, en se com- binant avec l'exposition et d' autres circonstances de localité, amener des changemens dans la distribution naturelle des plantes. La chaine de montagne qui parcourt l'ile du nord au sud forme une trés-forte dépression vers le milieu de son prolongement. Ce col, appelé Paso de la Cumbre, n'a guère plus de 4,255 pieds d'élévation verticale (1). —— (1) M. de Buch. ‘appelle ce col le Paso de la Lavanda : E: altitude de cette station , ainsi que celles autres lieux que nous aurons à indiquer, sont dues aux observations de ce géologue. g ( 65 ) Lorsqu'on veut se rendre du district de Tedote dans celui d’ Aridane (coy. ATLAS, car te phytos. de Palma. PI. v), situé sur l'autre bande de l'ile, il faut traverser d'abord les foréts de Lauriers qui ombragent le revers oriental: à mesure que l'on se rapproche de la créte des mon- tagnes, les grands ar bres disparaissent et sont remplacés par les Bruyères, qui continuent jusqu'au col que nous venons d'indiquer. Ces bois garnissent les sommets de la Cumbre et se répandent de l'autre côté, où ils se mélent avec les Pins qui peuplent la bande occidentale. En descendant dans la vallée del Paso, on est surpris de l'association de ces deux espèces, dont les limites sont si tranchées partout ailleurs. A 1,000 pieds au-dessous du col. les Bruyères sont encore en grand nombre, mais à 2,725 pieds, à la station du Pino santo, les Pins seuls gar nissent les pentes de la montagne. et s 'étendent en masse jusque sur les bords du vallon. Ainsi, dans cette distribution géographique. la région des Bruyères, qui se trouve placée d'un cóté dans l'ordre habi- tuel, offre sur l'autre versant une anomalie dont on ne peut bien se rendre compte qu'en arrivant sur la créte. Là, tout s'explique : les nuages amassés sur le revers oriental de l'ile, depuis 2,000 pieds jus- |. quà 4,500 environ, restent stationnaires, sur les foréts, le long de la chaine dont ils ne peuvent franchir les sommets; mais au col de la Cumbre, les. montagnes, - en sabaissant au-dessous du maximum d élévation de la région des nuages. permettent à ces vapeurs de passer sur Tautre bande; la dépression de la crète leur ouvre une issue, le vent les chasse dans le défilé, et, en se répandant sur le revers occidental, ils y reproduisent l'atmosphère humide des bois avec la végétation de cette zóne. Plus bas un air sec et chaud, des terrains volcanisés, sur lesquels le soleil exerce toute son éner gie, repoussent les nuages et les Bruyères qui les ont suivis. Les Pins sont alors les seuls arbres indigènes qui résis tent à ce climat, et tandis qu'ils ne montent pas de ce côté au-dessus de 3,000 pieds, le Laurus Indica et le Myrica Faya croissent sur les versans opposés, le premier Jusqu'à 3,556 pieds I. 9 . ; - — —— à — c E mes A = € - — e n ~ a see » MÀ co tib — — ——— .( 66 ) et le second jusqu'à 3,916. (77 oy. ATLAS, profils phytost. de Palma. PL v.) La Caldera de Palma, la vallée de San-lago à 'Ténériffe et celle de Tiraxana dans la grande Canarie, que nous avons visitées en détail, sont trois localités oü ces sortes d'anomalies phytostatiques s'offrent d'une manière encore plus prononcée. Lac aldera de Palma, qui formait anciennement ledistrict d'Ecero. est une vallée profonde, située au centre de lile et entourée de toute part de montagnes inaccessibles; on y arrive par le ravin de las An- 8ustias aprés huit heures de marche (1). M. de Buch a évalué l'altitude du sol de ce cratére primitif à 9.951 pieds, et les plus hauts sommets de la cordillére qui en cerne l'enceinte à 7,234, ce qui produit une coupe verticale de 4,977 pieds. Abreu Galindo, Georges Glas et Viera (2) donnent à ce gouffre environ six lieues de circuit, mais cette mesure nous à paru un peu exagérée si elle a été prise de la base. La végétation répandue dans cet immense cirque, n'affecte aucun ordre de distribu- tion; les arbres de la haute région y croissent confondus avec ceux des „zones inférieures. Deux rochers. s'élèvent en pyramide à lentrée de l'Ecero, des Pins gigantesques, des Dragonniers et des Palmiers en _couronnent la cime, les Genévriers (3) ont pris racine sur les assises les plus escarpées et mêlent leur feuillage à celui des Lauriers, des (1) Ce ravin, que les Aborigénes appelaient Exerjo, grand torrent, n'est pas le seul passage qui conduit dans la Caldera ; toutefois, malgré les précipices et les obstacles qu'on rencontre à chaque pas, on est forcé de suivre cette route afin d’arriver avant la nuit et de trouver un endroit pour établir son bivouac. On sort ordinairement de la Caldera par le défilé d’Adamancansis; ce chemin, quoique beaucoup plus long , est bien plus agréable et surtout moins dangereux ; le retour a lieu alors par la rive gauche du ravin, à travers d'antiques foréts cachées dans les anfractuosités de la montagne. Les nuages qui s'amassent pendant le jour dans ces gorges boisées , pénètrent dans la profondeur du val- lon, dont les berges , élevées et dépourvues de végétation , restent toujours à découvert. Ces vapeurs disparaissent ensuite à la nuit, à mesure que le soleil cesse d'échauffer la terre. (2) Abreu Galindo, Mss., lib. 3, cap. 8. Georges Glas, History of the Canary Islands. | Viera , Noticias de la hist. gener. de las isl, Can., tom. 11, p. 153. (3) Juniperus Cedrus, N. -mra — 9 Át]gnÜMÓ M etidm S AMMIAN aa = , LL tum UT atr m Ri z en e craintes n tn musco Ar SD [ov^ Pope T t rm I o UP RA e vt vt ET - Pi - e tu mM — "2 QT ( 67 ) : ; y Bruyères et des Fayas. Un Figuier énorme couvre une partie du pla- teau de T'abouventa et s'est propagé dans les environs: cet arbre, qu'on " dit contemporain de la conquéte, est connu des habitans sous le nom f LL ees de la Brevera. Des Amandiers sauvages et des Pistachiers (1) ont pous- _sé au milieu de ces rochers parmi les {ypericons, les Lavandes et les autres espèces des ravins. Les bords du torrent qui traverse cette vallée solitaire, sont garnis d'Ignames (2); le Poterium caudatum, le Bethen- courtia Palmensis, les Kleinies, les Cineraires, les Bystropogons, les Joubarbes et les Pteris tapissent les talus, tandis que les berges de la montagne sont entièrement dépouillées de végétation. | | Au milieu de ce péle-méle de plantes, le botaniste reste étonné : il | voit autour de lui un nouvel ordre de phénomènes ; les monts envahis par la végétation des plaines, les arbres du littoral groupés avec ceux des sommets, l'échange réciproque des régions les plus opposées et le EE | contact des espèces les plus disparates , tout le confond; et si le pouvoir | de la nature ne se révélait à chaque pas dans cette bizarre distribution, E si dans ce mélange de zones diverses chaque plante ne conservait le | caractère de sa spontanéité, il serait tenté de croire que quelque arti- | fice a présidé à cet arrangement. | | A A Ténériffe, la vallée de San-Iago, située au sud-ouest du Pic, offre I quelque chose d'analogue (3) : élevée de 2,690 pieds au-dessus du niveau de la mer, cette enceinte est bornée à l'occident par les hauteurs de j (1) Pistacia Atlantica. x F " ; ud (2) Caladium nymphææfolium. | P. T | (3) On trouve aussi aux alentours de San-lago des végétaux de toutes les régions de l'ile, voici les principaux : | Cytisus proliferus. Euphorbia atro-purpurea. .Plocama pendula. . f Adenocarpus frankenioides. | Pinus Canariensis. Agave Americana, f Phænix dactylifera. Erica arborea. | Cheiranthus cinereus, N. - p". Bystropogon origanifolium. Cistus Monspeliensis. Morus nigra. $ Euphorbia Canariensis. ~ Polycarpæa aristata. Amygdalus communis. | on piscatoria. Kleinia neriifolia. ——— , — balsamifera. Prenanthes pinnata. ( 68 ) Erje (1) et à l'orient par les pentes escarpées de Chio. La chaine des montagnes centrales se trouvant démantelée sur ce point (voy. ATLAS, cart. topogr. et phytost. Pl. u et m), le terrain s'est incliné en amphi- théâtre depuis la base du Pic jusqu'à la côte. De larges torrens de lave ont débordé par cette bréche, les plantes des stations supérieures, concentrées ailleurs dans le cirque des Cañadas, ont franchi le passage qui leur était ouvert, se sont répandues sur le talus de Vilma et ont envahi la vallée. Les végétaux de la région maritime, en pénétrant - dans cette enceinte par les ravins qui y aboutissent, sont venus se grouper à cóté de quelques restes de foréts. Dans la grande Canarie, l'acclimatation des plantes des diverses ré- gions de l'île sur un méme point, a acquis plus de développement , et cest dans une vallée semblable à la Caldera de Palma que cetteanomalie . a eu lieu. Enclavée au milieu des montagnes centrales, la vallée de Tiraxana est plus large et moins profonde que /' Ecero (2) : elle forme à elle seule un district important qui réunit dans son sein les popula- tions agricoles de deux bourgs(3); les plus hautes cimes qui la domi- nent dépassent 4,000 pieds d'élévation verticale, tandis que le fond présente un terrain inégal dont l'altitude varie depuis 2,109 pieds jus- quà 2,591. D'autres influences ont effacé dans cette enceinte les rap- ports- phytostatiques; on dirait que les plantes ont franchi tous les degrés de l'échelle végétale pour se ranger sur un méme plan : les Pins, qui couvrent les montages environnantes, sont descendus dans la val- lée par le col de Manzanilla, les Oliviers conservent encore toute leur vigueur aux alentours du village de Tunte (2,600 pieds) oü croissent les Palmiers, les Müriers et les Vignes; le Pterocephalus dumetorum ,quon (1) Erje ou Erxos, point culminant des montagnes occidentales. — (2) Escolar évalua le diamètre de cette vallée à deux lieues et demie. (3) L'un est situé dans la partie supérieure de la vallée à 2,591 pieds au-dessus du niveau de la mer, c'est le bourg de Tunte ; l’autre, appelé Santa-Lucia, occupe le terroir le plus fertile. La popu- lation entiére du district est d'environ 2,200 habitans. : à - 7 UR PIE. è ( 69 ) ne trouve à Ténériffe que sur la cime des Cañadas (1), s'est propagé à quelques pas d'un cours d'eau bordé d'Ignames et de Bananiers. A cet aperçu de la végétation de Tiraxana, i faut ajouter les plantes de la cóte et la variété des cultures produite par la fertilité du sol et la dou- ceur du climat. Bien que les cannes à sucre, introduites par les pre- miers colons, aient été remplacées par les vignobles, on en voit encore quelques pieds dans les jardins; les Nopals et les Agaves d'Amérique entourent les champs de Mais et de Patates ( Coneoleolus Batatas), les Orangers et les Citronniers prospèrent de toute part à côté de nos arbres d'Europe. L'abri des expositions dans les vallées de Tiraxana, de I Ecero et de San-lago, le peu de variation de la température locale, la nature vol- canique du sol et la fraicheur des ruisseaux qui le baignent, nous donnent la portée des influences sous lesquelles la végétation se déve- loppe dans ces trois districts. Les plantes y vivent comme .en serre, c'est une température d'orangerie : l'air y est à la fois humide et chaud ; aucune perturbation ne vient changer ses combinaisons, et, dans cet état de quiétude, les espèces de toutes les zones trouvent là des conditions d'existence favorables à leur accroissement. Au reste, ces sites privilégiés ne sont pas exclusifs aux Canaries, quelques val- lées des Andes en offrent des exemples, et notre Europe a aussi les siens (2). | AES Tout ce que nous venons de dire sur les différentes stations des plantes et leurs anomalies peut donc se réduire à ceci. 1° Lorsque les versans des montagnes présentent des talus uni- formes et soutenus par des plateaux superposés les uns aux autres, (1) A l'altitude de 9,000 pieds. (2) M. Durieu, récemment de retour des Asturies, qu'il vient de parcourir en botaniste, a vu, | dans la cóte de Biscaye , des orangers cultivés dans les jardins de la petite ville de Santoña, tandis que les murs de clóture étaient couverts de plantes alpines. La position de Santoña , au fond d'un golfe , et l'abri que lui prêtent les dernières ramifications des Pyrénées , peuvent expliquer cette réunion de la végétation alpine avec les plantes intertropicales. ( 10 ) la différence des hauteurs, en produisant un changement de climat, fait passer la végétation par des transitions successives. Les plantes séchelonnent alors sur la ligne de pente, suivant l'abaissement pro- gressif de la température. | 2' Les régions végétales qui résultent de ces transitions de forme se présentent par agroupemens distincts , subordonnés aux localités et aux expositions. 3° Diverses circonstances climatériques et des qualités particu- lières de terrain, s'opposent à la force expansive des espèces réunies en masse ou disséminées dans chaque station. Les végétaux ne sont pas toujours rangés sur les pentes des montagnes par zones régu- lières et eraduelles; les limites d'une région sont assujéties à la struc- ture orographique et aux autres circonstances de localité; elles ne sont donc pas exactement circonscrites autour d'une ile, et il est sou- vent difficile de fixer leur démarcation, car partout où deux régions sont. en contact, il y a mélange des espéces qui en font partie. # Les divers agroupemens de plantes varient à des altitudes isothermes sur chacun des versans d'une chaine : ces changemens phytostatiques sont dus à la différence d'exposition ; alors, les limites des régions ne sont plus les mémes, et telle plante qui s'écartait peu du littoral sur les versans du nord, peut croître sur le revers opposé jusqu à une élévation assez considérable, et vice versa. Il n'est pas rare aussi de rencontrer d'un cóté des espèces qu'on n'avait jamais vues sur l'autre bande (1). | | (1) La végétation qui couvre à Ténériffe les deux versans des montagnes de la Goleta , offre un des meilleurs exemples de ce contraste des expositions; nous citerons dans cette note les différentes espéces que nous recueillimes de chaque cóté. Fersans du Midi. Espèces communes aux deux versans. F'ersans du Nord. Andropogon distachyum. Pteris Aquilina. Asplenium réniforme. Convolvulus floridus. Sideritis Canariensis. - Carlowizia salicifolia. Cynara horrida. Sempervivum viscosum , N. Cheiranthus mutabilis. Xx é a LEE za = m > UT — (71) 5 Enfin, il est des plantes que la nature semble avoir confinées dans des lieux déterminés. Lorsque ces circonscriptions topographiques ont leur origine dans des vallées profondes et entourées de montagnes escarpées, telles que celles de la Caldera, de Palma et Tiraxana, alors la distribution des plantes n'est plus soumise aux mémes lois; l'état de l'air, ses principes, la température de ces enceintes abritées vien- nent rompre les rapports entre les climats et les altitudes pour se préter à la réunion des végétaux de toutes les zones. ; Nous faisons connaître, dans la liste du supplément à ce cha- pitre, toutes les plantes de la flore des Canaries occidentales, d'après les différentes stations qu'elles occupent; notre carte phytostatique de l'ile de Ténériffe présente l'ensemble de cette répartition, les di- vers groupes qui en résultent, leurs limites respectives et les localités dans lesquelles chaque espèce a coutume de croître. La planche rv de notre Atlas complète cette topographie botanique : les associations végétales comprises dans chaque circonscription, n'y sont plus re- présentées sur le plan horizontal; nous avons voulu indiquer les dit- férentes masses de végétation d'après l'échelle des altitudes, pour qu'on pût saisir d'un coup-d'oeil les modifications que les accidens du F'ersans du Midi. Espéces communes aux deux versans. . F'ersans du Nord. Echium giganteum. Sempervivum Canariense. ‘Dracæna Draco. — strictum. * — .. . DBracocephalum Canariense. Euphorbia piscatoria. Echium simplex. — Canariensis. Erica arborea. Jasminum odoratissimum. "s Erigeron viscosum. Kleinia neriifolia. Ilex Canariensis. Lavandula abrotanoïdes. Lavandula pinnata. Olea Europea. Lavatera phœnicea. Opuntia Ficus Indica. Laurus Canariensis. Periploca levigata. : — Barbusano. Plantago arborea. E: | : Persea fœtens. i Polycarpæa Teneriffæ. Pterocephalus virens, N. Rhamnus crenulatus. á _Semperv. tabulæformi aff. Rubus fruticosus. | Stachys arvensis. Silybum marianum. (72) terrain et l'influence des expositions apportent dans l'ordre général de la distribution. Enfin, notre vue de la Caldera de Palma reproduit une des grandes anomalies que nous venons de décrire et la nature spéciale d'un des sites les plus curieux de l'archipel Canarien (Voy. ATLAs, vue phytost., CARTE 1x. PL v). Nous terminerons ce chapitre par quelques autres observations détachées, mais qui s'associent à la masse des faits que nous nous sommes proposé de réunir dans un seul cadre. Il est des plantes vagabondes qui n'affectent aucune station dé- terminée et semblent appartenir à tous les climats : le Pteris Aqui- lina, Y Hypericum grandifolium et Y Erigeron viscosum sont plus sou- vent dans ce cas; ces deux premieres espèces, quon commence à rencontrer à Ténériffe, entre 1,000 et 1,500 pieds déléyation, se retrouvent encore à plus de 7,000 dans le cirque des Cañadas du Pic. D'autres, sans se répandre sur les hauteurs intermédiaires, se fixent à des altitudes trés-éloignées; nous en avons déjà fait connaitre quel- ques-unes (1), mais nous citerons aussi le Pancratium Canariense qui croit sur la plage du Val de Guerra et reparait vote sur le plateau de Trebejo, à plus de 3,800 pieds. Parmi celles d'une méme région, les unes sont disséminées cà et là, tandis que d'autres forment des groupes à part et couvrent sou- vent une grande étendue de terrain, en se propageant de proche en proche. Outre les espéces dominantes qui ont imposé leur nom à chacune de nos grandes divisions phytostatiques, lelles que les Euphorbes, les Lauriers, les Bruyères, les Cistes, les Pins et les Lé- eumineuses frutescentes, nous nommerons encore l Aloe vulgaris de la bande méridionale de Ténériffe, le Pancratium Canariense, les Asphodèles (2). les Scilla et la plupart des espèces vivaces qui se mul- (1) Voy. chap. 1*, pag. 8. (2) L’ Asphodelus ramosus abonde, dans la grande Canarie, sur un plateau auquel cette espece à imposé son nom, el llano de las Gamonas , la plaine des Asphodèles. (78 ) tiplient plus par leurs racines que par leurs graines. Il faut com- prendre aussi dans ces sortes d'associations deux plantes de la famille des Synantherées, le Matricaria suaveolens? (1), qui forme des prairies naturelles au milieu des bois de Bruyères, et le Cineraria lactea, si commun dans les clairières de la forêt de las Mercedes. Plusieurs végétaux, nombreux autrefois et réduits aujourd'hui à quelques individus, se sont isolés sur des rochers inaccessibles : nous voulons parler d'abord des Génevriers, dont il n'existe que deux espèces aux Canaries. Celle que les habitans appellent Sabina n'est pas l'espèce de ce nom; M. le professeur Link l'a rapportée au Ji uniperus thurifera, et la dénomination de Sabinal affectée à plusieurs vallées de la côte, où l'on retrouve encore quelques-uns de ces arbres. prouve que les bois de Génevriers formaient auparavant la première ligne de la région némorale. Dans l'ile de Fer, où la dévastation a été moins rapide, le Juniperus thurifera peuple le district de Sabinosa. Quant au Juniperus Cedrus, N., on sait que cette belle espèce, qu'on a presque entièrement détruite, occupait la partie supérieure de la région des Pins. Ainsi, ces deux Coniféres, douées, comme les autres végétaux de cette famille, d'une organisation robuste, peuvent braver à la fois la chaleur de la zone maritime et l'excessive sécheresse de la haute région. 3 | uS Le Dracæna Draco, qu'on avait cru originaire des Indes orien- tales (2), est une espèce particulière à cet archipel, aussi bien quà Madère et à Porto-Santo. Dans l'ile de Palma, les Dragoniers abon- dent sur les coteaux volcaniques de la Breña; à Ténériffe, on en trouve encore de très-vieux dans les vallées d'Orotaa et dcod de los Vinos, sur la côte de Tacoronte et aux alentours de la Laguna. Dans le ravin de l'Enfer (district d 4dexe), nous les avons vus sur les . (1) Au-dessus des forêts Laurifères, sur les berges septentrionales de la vallée d'Orotava. (3) Nous avons nous-mémes partagé cette opinion que d'autres botanistes avaient accréditée. É Ne 4E (74) saillies d'un rocher que le guide le plus intrépide n'aurait osé gravir, (oy. Arias, vues phytost., pl. 8). À Taganana, ils ont pris racine sur deux rocs élevés (Los dos riscos, voy. ATLAS, pl. 8), et garnis- sent les pentes orientales de ces pyramides de basalte; les assises opposées sont couvertes d'Ardisiers, et à la base de grands buissons d Euphorbe entourent ces derniers repaires de la végétation primi- tive. En présence de ces faits nous n'avons plus douté que le Dracæna Draco ne füt évidemment une espéce indigéne : nous lavons com- pris parmi celles du premier climat. l | Le Pistacia Lentiscus, VOlea Europea et le Salbia Canariensis sont trés-répandus dans la grande Canarie. Les Lentisques, qui n'existent pas dans les iles voisines, et les Oliviers, dont on ne rencon- tre plus que quelques pieds à Ténériffe et à Palma, formaient, il y a peu d'années, des bois assez importans : les vignobles sont venus les remplacer, et les noms de monte del Lentiscal et de barranco de los Acebuches (bois des Lentisques et ravin des Oliviers sauvages), ser- vent encore à désigner leur ancienne station. Aujourd'hui les Len- tisques sont épars aux alentours des champs, et ne se montrent plus en masse que dans les terrains incultes. Les Oliviers, plus utiles, ont été un peu mieux conservés; ils abondent dans les vallées de Temisa et de Tiraxana où l'on en voit de trés-grands. Rare à Ténériffe et in- connue dans les autres iles, la Sauge des Canaries est au contraire la plante la plus commune de Canaria : d'abord trés-répandue sur la côte septentrionale et dans les ravins qui y aboutissent, cette espèce couvre les talus des vallées et parvient jusque sur les plateaux culmi- nans; mais à cette altitude, qu'on peut évaluer à 5,000 pieds envi- von, elle est rabougrie; ses feuilles, moins dilatées, sont devenues rügueuses . ses panicules lâches et gréles, ses bractées moins bril- lantes. Dans cet état de dégénérescence, on a peine à reconnaître la plante des bases, et ces altérations de forme, dues la plupart aux changemens climatériques , en se perpétuant dans les localités les plus MEN "RN * | (75) éloignées du point d'origine, prennent. presque le caractère de les- I | | pèce. r 5 Nous avons eu souvent occasion de faire des observations analogues sur d'autres plantes; l Hypericum qui, des ravins humides de 'Téné- | riffe, parvient jusque sur le plateau des Cañadas, ne mérite plus à | par cette station le nom de grandifolium qui sert à le distinguer de ses con- - i | généres. Cette polymorphie, si fréquente dans les iles volcaniques (1). | | se fait aussi remarquer, en sens inverse, parmi les espèces de la zone | supérieure que des causes accidentelles ont amenées dans des lieux l E plus bas. On trouve parfois, au fond des vallées de 'Ténériffe, des pe- tits buissons d'Adenocarpe et de Cytise du Pic, provenant sans doute des graines que les torrens auront entrainées dans leur chute. Il est facile de s'apercevoir que ees plantes ne sont pas à leur place; il en se développant dans une autre atmosphère, elles ont acquis un n" nouveau facies; mieux nourries et surtout plus humectées que dans | 3. | f la station où la nature déposa leurs premiers germes, leurs parties fo- liacées se sont accrues au détriment des autres organes et leurs tiges alongées ont verdi sans fleurir. ll leur faut l'air vivifiant des mon- tagnes et sa température. locale, pour que la sève puisse repr endre Y sa marche accoutumée; là-haut, le Cytise perdra ses feuilles, et ses | fleurs nombreuses répandront au loin leur parfum ; là-bas, au con- traire, toujours c chétif, il s'épuisera par excès de nutrition et mourra | sans se repr oduire. Lorsque, durant nos longues explorations, nous avons rencontré dans des lieux isolés quelques-unes des plantes qui ont ailleurs un centre de réunion déterminé, nous avons cherché leur station habi- tuelle, afin de les étudier dans leur état normal. Les her borisations de passage sont sujettes à erreur, des espèces échappées de leur région sont recueillies sans examen et décrites d après des formes anomales ; | (1) Voy. Y oyage autour du monde de Ë Uranie, part. bot.; Gaudichaud , pag. 92 et suiv. ———- À «M Á nM M 5 (76) plus tard ces mêmes espèces, retrouvées dans de meilleures conditions d'existence, ont présenté d'autres caractères; de là cettesynonymie em- brouillée au milieu d'une nomenclature toujours croissante. Les cir- constances locales, en se prétant à la force expansive des végétaux, les portent en dehors des lieux où leur degré de fréquenceest plusmar- qué; il importe donc de déterminer les limites de ces circonscriptions, en exceptant les cas particuliers qui s'éloignent trop de l'ensemble des généralités. Mais les progrès des cultures ont effacé sur plusieurs points ces associations partielles; alors les individus d'une même espèce sont devenus moins nombreux, et, réduits souvent à quelques pieds, ils n'ont dû leur stabilité qu'à leur isolement. | . Néanmoins, malgré la marche rapide. des défrichemens, M. de Buch, qui nous devanca dans l'exploration des Canaries, a peut-être trop exagéré la décadence de cette végétation qu'on détruit tous les jours et qui renaît sans cesse. L’ Arbutus Canariensis et le Statice arbo- rea qu'il ne vit que dans les jardins, lors de sa tournée dans ces îles, lui firent croire que ces deux espèces étaient presque perdues où du moins qu'elles ne croissaient plus spontanément hors des enceintes où elles étaient cultivées (1). Nous avons fait connaître le véritable kabi- tat du Statice arborea (2); quant à l'autre espèce, nous l'avions déjà trouvée dans les bois de Lauriers de la vallée d'Orotava avant que nos courses nous conduisissent dans la belle forét d'Arbousiers du district de Guimar. Un long séjour dans cet archipel, et des recherches plus spéciales, nous ont permis de rectifier plusieurs autres observations de M. de Buch. Z/ Exacum viscosum, quil assure ne vivre que dans les (1) « Déjà le magnifique Statice arborea ne croit plus que dans quelques jardins d'Orotava, nulle » part peut-être sauvage ; et cependant, on ne l'a jamais vu hors de Ténériffe. ..... » Le bel A4rbutus callicarpa (A. Canariensis) , dont on mangeait les fruits, et qui faisait autrefois » l’un des principaux ornemens des bois, est maintenant si rarement disséminé , que les propriétaires » connaissent exactement le nombre de leurs pieds d'arbres... » (Coup-d’œil sur la flore des Can., trad. de l'allem. de M. L. de Buch, arch. de bot.). (2) Voy. chap. 1», pag. 8, et Arras, vues phyt., pl. 8. (€T ) bois de Bruyères (1), croit dans toutes les forêts de Ténériffe et abonde dans celles de Palma, où il acquiert le port d' un sous-arbrisseau. Le Drusa opositi ifolia, quil présume avoir été transporté d Amérique et qu'il n'a pas vu à Ténériffe avec les plantes sauvages. mais seulement avec celles des décombres (2), est assez fréquent dans les ravins humides et sous les buissons isolés. Le Solanum Vespertilio, que ce zélé voyageur ne recueillit que sur quelques rochers où il ne lui paraissait pas; sauvage non plus (3), est une espèce propre à plusieurs vallées de Ténériffe et de la grande Canarie. Il en est de méme du Bosea yerva mora. (4), qui se fixe contre les berges des ravins et dont les longs rameaux forment en retombant, des masses de verdure du plus bel effet. Dans un pays coupé par tant de précipices, où les obstacles se multiplient à chaque pas, il faut long-temps pour tout examiner en détail; une première exploration ne suffit pas, il faut revoir plusieurs fois les mêmes sites. ne négliger aucune gorge, gravir tous les mornes, en un mot visiter toutes les localités, car maintenant les plantes sauvages se sont réfu- giées sur des rochers où il est souvent difficile de les atteindre, et d'es- pèce que l'on recueille au sommet du pic le moins accessible, ne se re- irouve plus ensuite que par hasard. Nous nous réjouissons de pouvoir rassurer les botanistes sur la perte de plusieurs types de la flore Cana- rienne; cette force spontanée, que notre savant devancier a crue au moment de s'éteindre , n'est pas encore arrivée à sa fin; dans la lutte des plantes régnicoles contre celles qui les remplaceront un jour. le sort de la végétation originaire peut bien inspirer quelques craintes, mais son anéantissement est encore kginitajiah les ger mes. ensevelis (1) « Le Tero (Erica scoparia) est le seul arbre qui vienne sur les hauteurs de Santa-Cruz et » Saint André. Sous son abri, et là seulement, s'élève et s 'étend ľ Exacum viscosum. » (Coup-d' œil sur la flore des Can., arch. de bot.). (2) Ut supra. (3) Ut supra. (4) « Le Bosea yerva mora ne se rencontre plus que dans les bd qui entourent les vigues et les » champs. » (Coup-d’œil sur la flore des Can., arch. de bot.) Ele eos -—- 94 ( 18 ) sous les débris volcaniques n'attendent que des circonstances favora- bles pour se développer, et durant une résidenee de dix années nous avons vu les espèces indigènes renaître et se reproduire dans les lieux d'où elles avaient déjà été expulsées. ll est dans les phases de la végétation d'un pays trois états à consi- dérer : d'abord, le développement des premiers germes et leur ac- croissement successif; ensuite, les espéces parvenues au dernier terme de leur multiplication par rapport à l'espace qu'elles occupent; puis enfin, le décroissement des masses à mesure que l'industrie agricole élend ses progrès. Les îles corallifères de la mer du Sud sont dans le premier Cas; sur ces montagnes qui se forment, on peut observer la marche ascendante de la végétation; les plantes se répandent de leur point d'origine vers _les lieux où les appellent la température et la nature du sol; elles en- vahissent le pays aussitót que la couche de terre qui le couvre peut nourrir un plus grand nombre d' individus (1). ^, Dans certaines parties des continens et sur les iles de primi- tive formation, que les défrichemens n'ont pas encore atteintes, la végétation est à son apogée, elle a tout envahi; les plantes les plus fortes ont fini par étouffer les plus faibles, et celles-ci, devenues à leur tour les plus robustes, ont prévalu sur d'autres moins tenaces. Le mélange des espéces dans les régions équinoxiales a été la consé- quence de la fécondité du climat et de cette énergie qui caractérise la végétation parvenue à sa plus brillante phase. La flore du vieil archipel des Fortunées a déjà passé parles deux premières époques. son troisième âge a commencé avec l'occupation européenne; elle suit maintenant une marche rétrograde; mais dans cette période décroissante, qui marque son déclin, les espéces dont (1) M. Gaudichaud pense que la végétation des iles montueuses de l'Océan Pacifique s'est d'abord développée dans la zone des nuages , pour s'étendre ensuite en dessus et en dessous. (Voyage autour du monde de l Uranie , part. bot., pag. 109). - - T - m " — Ur —ÀÀ À— en, ——————— P —— = (—————— BÓ ( 79 ) elle se compose se replient sur leurs divers points de départ, et pous- sent encore cà et là. On concevra, d'après notre raisonnement, que nous sommes loin d'adopter les idées de M. de Buch sur l'origine et les migrations des plantes qu'il fait arriver dans ces îles des régions les plus opposées, tantôt franchissant les déserts brülants de la Lybie et de l'Afrique centrale, tantôt charriées par les vents à travers limmensité des mérs (1); Nous ne saurions admettre d'autres lois pour la répartition des (1) « Chaque plante, ou plutót son type que nous avons coutume de désigner du nom de genre , s'est » propagée en partant d'un point central, rayonnant lorsque le climat ne s'est pas opposé à sa dis- » persion én tous sens, suivant une ‘bande ou zone, lorsque cette dispersion s'est trouvée arrétée par » la température au sud et au nord...., etc. Des plantes de Gréce firent route , avec les vignes, aux îles » Canaries, telles sont les Anethum fœniculum, Coix lacryma, Rumex bucephalophorus, Rumex spinosus, » Panicum crus-galli, et vraisemblablement aussi Delphinium staphysagria. ... Parmi les espèces exclusi- » vement propres aux Canaries, la plupart ont aussi leur point de départ dans l'Atlas, peut-étre » méme dans l'Égypte et la Syrie, mais plusieurs autres paraissent être venues là de tout autre côté. » Le Dracæna et le Ceropegia des Indes orientales par le milieu de l'Afrique, le Plocama pendula et » les Euphorbes arborescentes proviennent des déserts brülans de la Lybie. Quelques végétaux » viennent évidemment du nord, et, comme si la nature ne voulait sur ce point nous laisser aucun » doute, on les voit encore maintenant vis-à-vis des lieux qui, les présentant en plus grand nombre, » peuvent par conséquent étre regardés comme leur habitation plus naturelle. Le Lavandula pinnata , » qui est évidemment une plante de Madère, est fréquent dans les vallées et sur les montagnes de » Taganana, précisément vis-à-vis Madère... Que les Palmiers se soient trouvés aux Canaries (à l'épo- » que de l'expédition des envoyés de Juba) et méme en grand nombre , c'est ce qui est fort remar- » quable et rend vraisemblable que ces arbres, l’ornement du désert , trouvèrent d'eux-mêmes leur » chemin jusqu'à ces iles, sans y être transportés par les hommes; peut-étre est-ce la mer qui en » charria les fruits... La flore des Canaries a donc de l'importance par la considération de ces rayons » de végétation qui viennent s'y rencontrer ; quelques-uns s'y perdent, tandis que d'autres poursui- verit leur course avec énergie , et peut-être au loin à travers la mer jusqu'aux Acores , etc. » (Coup- d'œil sur la flore des îles Canaries, trad. de l’allem. de M. L. de Buch , arch. de bot., re vol.). | Sans nous attacher à combattre toutes les opinions de M. de Buch sur ces migrations de plantes, nous ferons observer seulement que les Palmiers sont fort rares sur la côte de Fortaventure qui fait face à l'Afrique, tandis qu’ils abondent dans la vallée de Rio Palma, située du côté opposé. A Ténériffe, ces arbres sont peu répandus sur la bande orientale de l'ile; les vallées du nord et de l’ouest , au con- traire, les possèdent en grand nombre; enfin , en les retrouvant à Palma dans le site le plus sauvage et sur des rochers inaccessibles, on ne peut douter qu'ils ne soient aussi bien originaires des Canaries que du pays des dattes. Il en est de méme de beaucoup d'espèces propres à ces iles et à d'autres con- trées. Que d'hypothéses ne faudrait-il pas admettre pour rechercher le véritable point de départ, la patrie originaire de ces plantes cosmopolites qu'on rencontre à toutes les latitudes? A-t-on quelque raison de croire que les continens aient été plutót couverts de végétation que les îles adjacentes, surtout lorsque les traditions accordent à ces terres isolées une antiquité qui se perd dans la nuit des temps? Une Fougère se trouve à la fois à Ténériffe et à Bourbon : demandera-t-on dans laquelle de RE rm Gg T? "mons * M S c9 eee ( 80 ) végétaux à la surface du globe que celles de la préexistence des germes : ^ chaque contrée fut dotée selon son climat, et la végétation apparut \ aussitôt que le sol répondit à ses exigences. Dire comment se sont opérées ces créations distinctes, de quelle manière les plantes se sont montrées tout-à-coup sous d'autres formes, ou pourquoi celles-ci ont reproduit des types déjà. connus, serait aussi difficile que de prédire l'époque de l'épuisement des forces qui leur ont donné naissance. Ces questions, presque métaphysiques, sont au-dessus de notre intelli- gence. Avant d'être refoulée dans ses derniers retr anchemens par les envahissemens d'une végétation étrangère, la flore locale passera par - diverses alternances; mais quoiqu'effacée auj jiourd hui sur plusieurs points, elle reprendrait son premier essort, si elle était abandonnée à elle-même, et se ressaisirait encore de cette terre-mère que les autres es pèces ont usurpée. Les îlots déserts et les crètes escarpées des montagnes sont les loca- lités qui conserveront le plus long-temps leurs plantes primitives. Par leur peu d'importance. et les difficuljés de leurs abords, les ilots sont restés incultes et n'ont rien per du par conséquent: dans la révolution qui s'est opéréesur le sol des Canaries. Ceux que nous avons parcourus nous ónt fourni des observations curieuses; les plantes qui les peuplent peuvent servir à faire connaître celles qui croissaient autrefois sur- la côte adjacente; aussi les avons-nous toujours notées avec le plus g orand soin (1). Ces florules sont des fragmens intacts de l'ancienne végétation , ces deux îles elle a commencé à croître , pour passer ensuite dans l'autre? À une pareille question , nous doutons que l'on pût répondre d'une manière satisfaisante. | (1) L’ilot appelé Roque de Garachico et situé en face du port du même nom, sur la côte N.O. de Ténériffe , renferme les espèces suivantes : Statice imbricata, N., sur les rochers de la partie oen S tatice pécisnata. . + + éparse. Euphorbia Canariensis , très-répandue. . Lycium afrum gh + Id. a piscatoria, sur les rochers exposés au (nord. —— Biia hastam 0; Wd. à balsamifera , sur les rochers exposés au sud. Atriplex glaucum. . .:. | ld. Kleinia neriifolia, . . . . . . éparse. , | ` Pyrethrum chrithmifyl.. Tà. Frankenia ericifolia.: . . . . Id. - Aizoon Canariense.. . . Id. Mesembriantemum nodiflorum. — 1d. - : Raccella tinctoria. . . . Id. a -i ; -— ( 81) et les botanistes qui, après nous, visiteront ces roches solitaires, y retrouveront les espèces les plus rares : les Statice arborea et S. imbri- cata. IN. sontaujourd hui dans le méme cas que l Origanum Tournefortii du petit îlot d Amorgos (1); confinés dans ces recoins, la nature les a conservés comme les échantillons vivants de deux espèces que les autres îles ont perdues. Les accidens du sol ont été la sauve-garde de la végétation primitive; la Flore Canarienne a sans doute couru bien des chances depuis la conquête du pays, mais rien n'est changé encore dans cette partie de la haute région oü les colons n'ont pu porter leur industrie. Plusieurs faits viennent à l'appui de notre as- sertion : en 1825 nous retrouvâmes, au pic de 'Ténériffe, cette Violette si rare (Viola Cheiranthifolia) que le P. Feuillée avait recueillie cent ‘ans avant nous (en 1724), sur ces mémes scories qui encombrent la base du T eyde (2). Les recherches que nous avons faites à Londres dans l'herbier de Banks nous ont offert d'autres remarques intéres- santes sur les végétaux sédentaires; parmi les plantes que Masson fut chercher à Ténériffe en 1778, nous avons reconnu notre Echium Auberianum qu'il ramassa aussi au pied du Pic dans l'endroit où nous l'avons cueilli nous-mêmes. Nous ne fümes pas moins surpris en revoyant, dans cette riche collection. le Carlina xeranthemoides, échappé aux herborisations de nos devanciers; cette espéce, dont Linnée fils donna la premiére description , fut aussi rapportée en Angleterre par le zélé collecteur du jardin de Kew, et cest pré- cisément dans la station indiquée sur l'étiquette de ses échantillons (Prope pagum Chasna, 1718), que nous avons découvert la méme plante, plus d'un demi-siécle aprés lui. La stabilité des espèces ne dépend donc pas toujours de leur force (1) On sait que cette espèce découverte par Tournefort, et qui n'a jamais été observée ailleurs, fut retrouvée sur le méme rocher, par Sibthorp, plus de 80 ans aprés. ; (2) Cette espèce a été décrite et figurée par le P. Feuillée , sous le nom de 4 iola Tenerifera. Voy. à la Biblioth. roy. son Voyage aux (les Canaries, Mss. I. 11 n E EE A M e ( 82) expansive, puisque celles qui sont réunies en masse n'ont guère plus de chance de conservation que d'autres qu'on voit disséminées sur de grands espaces ou isolées dans des sites peu fréquentés. Plusieurs plantes ligneuses , quon ne rencontre que sur les cimes les plus élevées de Ténériffe (1), ont pris racine dans les fentes du roc qui leur sert d'appui : les moyens de reproduction de ces espèces séden- taires sont très-bornés, les semences trouvent rarement , Sur ce ter- rain sans substance, les conditions nécessaires à leur germination ; mais la nature a pourvu à tout, la propagation a lieu par drageons, chaque nouveau rejet répare les pertes accidentelles; et toujours fixée à ce point d'origine, oü se développa son premier germe, la méme plante peut croître pendant des siècles, en se renouvelant sans multiplier l'espéce. C'est ainsi que les végétaux les plus rares de la Flore des Canaries ne sont représentés à Ténériffe que par quelques V individus. Dans les deux stations où l'on trouve le Rhamnus coria- ceus, il n'existe qu'un seul pied de cette espèce, l'un aux environs de Chasna , près de la source du Traste, et l'autre, sur la crète des Cañadas, au-dessus du défilé de l’Angostura, où nous l'avons revu douze ans après Chr. Smith. La montagne du Rosal, élevée de 6,300 pieds au-dessus du niveau de la mer, a recu sa dénomination du Ro- sier qui couronne sa cime. Nous ne pousserons pas plus loin ces exemples et résumerons en peu de mots la série des faits que nous venons d'exposer. | La connaissance des stations des plantes offre un cours d'observations du plus grand intérêt, et les recherches de topographie botanique , auxquelles cette étude donne lieu, peuvent conduire à des résultats importans. Si par des observations consciencieuses, entreprises à dés époques fixes, on avait déterminé les diverses conditions d'existence dans lesquelles les plantes se trouvent placées; si l'on eût tenu (1) Pyrus aria, var, Pterocephalus dumetorum, Rosa Armidæ N., Ephedra monostachya, etc. ( 83) compte des rapports des espéces entre elles, des modifications que les déboisemens ont amenées dans la constitution du climat, et des con- quétes successives des populations agricoles, les comparaisons dé- | duites de plusieurs séries de faits, nous auraient indiqué la marche B progressive ou décroissante de la végétation sur un espace donné. Ces E tableaux d'une statistique nouvelle, en nous montrant la flore d'un L | pays dans toutes ses phases, nous auraient éclairés alors sur l'histoire phytologique des contrées moins connues. | F| Nous avons. examiné dans ce chapitre la distribution des plantes sur le sol, les rapports entre la végétation et les climats, les anomalies | | phytostatiques dépendantes de la nature des lieux, de leur exposition — à L | et de leur température, nous avons hasardé quelques considérations générales sur les causes de là dégénérescence des espéces, sur celle de leur isolement et de leur destruction. Enfin, nous pouvons dire aussi : sans sortir du cercle étroit où nos observations se sont renfer- | mées, nous avons rencontré sous nos pas tout ce que la répartition des Nd - végétaux à la surface du globe offrait de faits variés et de combinai- sons inattendues. a ( 84) SUPPLEMENT AU CHAPITRE SECOND. OBSERVATIONS CLIMATÉRIQUES. Température du Pic de T'énériffe à deux saisons différentes. j OBSERVATEURS. DATES. HEURES. LIEUX. ALTITUDES. | TEMPÉRATURES. BERTHELOT. . . | 1825. Juillet, 4. Estancia. . Id » i PAR BHEBBE » » » » EM: Sommet du Pic. . MVA oo TUTUP DPPPPPP SPPP r ex » » » » 5. » 0» . | 1828. Février, 23. » » ~ Estancia. 14 ; + Zv > » EEEREN m CO «3 OT gm v - s. Ld . eI ANdEVIERNE e . . Grotte de la Neige. Rambleta. . . . : Sommet du Pic. . v v 041020102 me eo EI M > =} OT oo NO o5 CO OÙ mu I O7 CRC CRE CE AME" o2 NO NO po $2 po me M O7 © vy - Remarque. Les différences entre la température du jour et celle de la nuit indiquées dans ce tableau, et celles que nous exposons dans le suivant, donnent la portée des changements climatériques qui s’opèrent sur le sommet des montagnes de Ténériffe. Pendant le jour, la chaleur pénétre ces terrains volcanisés; mais à mesure que l'action du soleil diminue d'intensité , la température baisse rapide- ment. À la nuit, les nuages condensés sur les forêts de la zone intermédiaire , montent insensible- ment vers le Pic où ils se dissolvent en rosée : alors, le sol et l'atmosphére sont rafraichis par ces va- peurs latentes qui disparaissent au lever du soleil pour se former de nouveau au-dessus de la région des bois. 2 j Les conditions d'existence dans lesquelles les plantes se trouvent placées sur ces hautes stations, expliquent la cause du petit nombre d'espéces qui peuvent y croitre et de leurs différences carac- téristiques. (85) _ OBSERVATIONS | SUR LA TEMPÉRATURE DE LA HAUTE RÉGION (za Cumere.) (ILE DE TÉNÉRIFFE.) NN us " E $ OBSERVATEURS. | > DATES. E LIEUX. = 4 OBSERVATIONS. ja $ =i E * $ Py E: z $ 3x [ À — | : È Pieds. C. T » WEBB et BERTHELOT.| 1828. Novembre , 30. |Midi. Cruz de Guimar.....| 5,974 69, 6 ....| Brume épaisse. Id...........| Id. Décembre, 29. |9 a. m..| Roques delas Canadas.|8,600 environ. |20 ...... . Au soleil et à l'air libre. $ cie Msi dd ena a M-p. M BEL ses: EET : 4 LR DURS 9 d. ME us S ETNE ERON id. | : Id....| Fuente Salada. ...... Be ue 5. s NE Ide 2099 set Ares m od Midi 2. | Azhlejos. ...:2€-. st 8,400 Ni ud eve 2s HU- 3 Id... NX E id. |3 p. m.. T PETE EEE E Id. E ded he e e i | Rc UI EE 30. |11 a. m.| Degollada de Ucanca.|9,300 11, 1....| Brouillard. Dx J. NAUDU. iru set Ad: de... res 27. |Midi. . | Agua Agria......... 8,000 environ.|22, 7 ....| Au soletl et à l'air libre. Aaa das crea Si FIF H5 dd ss A0. ] Id... Ido eV yet ens (sd... 298124 0 .... | A Tombre. 4» Id,,..,.. vtt Id. . idi... s. ... 1d..]6 p. m..]--..- ROIS vases sl. M ne à." ME NEC . A L^ mme wie Idle TUM CE ORME Ms ivre mE Eum ETT T BEAT a MB Ics TEUIT OT E a | . : z Id. nuu I... 28. |6 a. m..|..... a roses ae Ptit te coss DR vu ce e. : À Le Ra PR AA cs sue rs ee pMa PES ES Fi Prec. cte ve BE A 23,3 ....| Au soleil et à l'air libre. > 4 G RO DRE ET TES As eoru id: | Id.....|..... Hs ev eve SSP D MSS A.IATGmbee. ido. CPU Vot EO ever id. Id.:..—-]e« ID TEES rue d: UIT I POPE e 22, 2....| Au soleil et à l'air libre. Jav Me ERE Id Bye id. |? p. m..|..... Ed ace ue s T |: Der 9,2 AT ATSumiex. [CMM Id.. idi ..:.. IDEE A sue T sez hi: E o de IG uncRu i9 x- à TE ONT PR ST ee VAN) EP ER id. [Midi. ...|..... RTS A R i ERR a E E Télipcdiíuie n rom Ub 5 ld. e o4. MN oid. die... e p. mJ... ee, ER 10, 5 dope Per Tw XM MEE. UB. WS Roe c Pus PN y pA i HMM OH EN LM d " Tdi. dre ud dide... 20. OR ERP COBRE D Vie A Brume, petite pluie. | E E Ide: else EG PE CS vor id.. |10 a, miss. Bi Lies sors ....1d. .....123, 8 ....| Au ‘soleil et à l'air libre. Bi Wezg et BERTHELOT. |- - Id...id.....16et17. |Midi. ...| Chasnai............ 4,008 13,3 ...| Tempsclair, vent au N.-E. Ses Jil. 4 esae ves ld.. id: dui8au21. 1 Id. + ids... PETS TAE Id. $, S T. M.| Brouillard, pluie. ^ FU COP VIRES CEMURMMEREETMIENMUE —— IHNEN Id. ER Pluie. b lier Id...id.. du 22 au 26. |Midi. ... D ue diner Id. 11 T. M..| Brume épaisse, gros nuages. Alert v) Id.. .id.. du27au 31. | Id. .... Bus diis. Id. 8, T. M...| Brouillard, pluie, temps va- - riable. | | |; petet Id..Janv. du 1er au 6. | Id. .... TR E. Id. Gà 89...| Temps variable, mêlé de | : . pluie et de brouillard, faible z gélée pendant la nuit, neige 3 1 : presque aussitót fondue dans | | i , - la journée du 6. d ———————— Á——————————————ÜH iR Remarques. Dans une région où le sol par sa nature est aussi promptement échauffé que refroidi, la présence du | soleil, son absence accidentelle ou absolue, le changement de l'air au moment que le brouillard se développe, | occasionent de très-fortes variations dans la température. Les plantes qui appartiennent à un pareil climat doivent Á présenter des caractéres non moins tranchés : subordonnées alternativement aux influences d'une atmosphére | extrêmement sèche et d'une liumidité pénétrante , elles passent dans les vingt-quatre heures par les transitions les plus opposées. Si on a égard à ces circonstances, on concevra que la mutabilité des saisons n'est rien auprès de j : ces perturbations journalières. : z | MH C'est à don Joseph Naud? , qui nous accompagna pendant nos explorations d'hiver sur les montagnes de Téné- riffe, que nous sommes redevables des données les plus importantes sur la température d'Agua agria et de ses sources acidulées. Durant trois jours consécutifs , et malgré la rigueur de la saison , ce zélé naturaliste poursuivit ses observations au milieu d'une gorge sans abri, où , à une chaleur presque insupportable, succède subitement un froid des plus vifs. Ainsi, le thermomètre qui marquait 235,33 le 28 décembre à midi, était déjà descendu à 7°,32 à 6 heures du soir; le lendemain 29, il marquait 2°,22 à 6 heures du matin, et 235,89 au miiieu de la journée. i d Nous regrettons qu'un trop court séjour à Chasna n'ait pu nous permettre d'apprécier tous les changemens at- à [ mosphériques qui se manifestent sur ce point, mais les observations comparatives de plusieurs années, dont on i$ nous communiqua les séries, fixent la température moyenne de cette localité à 13°,5, qui cst la même que celle de | Londres. Néanmoins, on se tromperait fort , si l’on regardait ces deux climats comme parfaitement analogues; les ne ne qM an EM Pep LE ———— ( 86 ) vents de S.-E. qui sont très-fréquens sur la bande du sud de Ténériffe, produisent souvent , à l'altitude de Chasna (4,008 pieds), une augmentation de température de 6 à 8°; le froid n'y est guère sensible qu'aprés le coucher du soleil , depuis la mi-décembre jusqu'à la fin de janvier ; jamais il ne géle dans la journée, et l'expérience a prouvé que les végétaux de ces montagnes ne pouvaient résister en plaine terre aux hivers de l'Angleterre méridionale. SÉRIES d ‘observations. sur la température de diverses localités de l'ile de T énérif) e. OBSERVATIONS OBSERVATEUR. DATES. : CLIMATÉRIQUES. LIEUX. ALTITUDES. HEURES. TEMPÉRATURES. 4 1828. Août, du 25 au 31. Port d'Orotava. Temps clair, vent au N.-E. le mercure montant à 426,2 É au soleil. i Id. Sept. , du 1erau 292. : 123 PEN RARE 5 tri - : Temps clair, vent au N.-E. M Le SES m ua. Id... . S.-E., faible. t Dee. CN CNE |: Eo Id. . I... 1d. 221. 3d. xe. VN M Ec Bb er Nuages blancs. Id. . . Id. ta: 14 Ios c EM : Ville del'Orotava, > Air trouble, vent au S.-E., plus fort que sur la cóte. m M Temps clair, vent au N.-E. ho Temps clair pendant le jour, vent au N.-E, pluie dans - la nuit. Id. à a S88, Rl... RSS . + .] Temps clair, forte brise au : N.-E. Id. Id. du 98 au 50. A (S S Ciel couvert, petite pluie par En intervalle. Id. Octob., du41erau7. 5 hi... X Ss. xul. 124 2 . .| Beau temps, quelques nuages, vent au N.-E. Beau temps. I ; a- LL DA NC Qt -i Gt DO bauo Q1 r2 19 19 t2 ~ E Port d'Orotàva. Pee dp E Ee b9 19 Septemb: +- . .6. . m.|Matanza. Id. mecs SIC, Eu Bd... lup ge 490pg« .. “Jess Id. i. + + d.| Midi. {Forêt d'Agua Garcia. . E PAE 0. © EP | A 1 SEE à Hd... c EN Température de l'eau de Ja source. Beau temps, vent au N.-E., le mercure montait à 400,5 au soleil. High Li 16 + m. SRE X CR T S 2 Id. Id. du 14 au 17.| Midi nn y 2 uU RE: Id. Id. du 18 au 90. ; ELO VV. WE. Id. Id. du 21 au 27, ; Bh cus EE Id. Octob., du 8 au 15. + |Saguna.. Vent variable. Brise au N.-E., ciel brumeux. Brise, temps couvert, bruine, pluie. | Brise au N.-E., brume. Brise, brume, pluie pendant la nuit. ` Id. Nov., du 4er au 7. ; HL CCP. Vent variable. "n dic iuo Esperanza, . . . 9,565 . . .J: . .| Vent au S.-E., faible. Id. s du 8 au 12, D LES EU. EP . . .| Brume épaisse, vent au N.-E. ECL. V 914. . . ./22,2 . .| Vent au Sud, faible. Id. Id. . du 22 au 99. ee ; Id. * ; ; : ; RASE TRR . .| Brouillard par intervalle, + .| Id. Décembre.. . 9. : Bb zou: 10! Bütlenvien: . . ;.]Beau temps. Remarques, On voit d'aprés ce tableau que la température varie peu depuis le niveau de la mer jusqu'à la région des forêts : le passage des brises au vent du sud est presque la seule cause qui amène des perturbations dans l'état de l'atmosphére. Cependant , ces changemens sont bien moins sensibles sur la côte, et ce fait, que nous connaissions ` déjà, est démontré par un grand nombre d'observations. Ainsi, le 24 septembre 1898, le vent régnant au Scb. le thermométre ne marquait au port d'Orotava que 285,33 , tandis que dans la méme journée il montait à 325,92 à la ville située à 1,027 pieds plus haut, | 209152 e EGO mS b2 b mJ =l M, . 98.| Id. |Tegina (Mesa). . .|9,000 environ. Id. Id. du 99 au 31. |C[Eaguna.. co uo 14,799 d S g t2 © mJ oo Qt = 3 m (1) Cette observation a été faite dans une de s clairières de la forêt, à l'endroit le plus ombragé, la différence était de 4 à 6 degrés. ( 87 ) Dans la vallée de Guimar, où le climat est ordinairement très-tempéré , le thermomètre se soutient encore dans le mois de novembre à 17°78; les Orangers et les Citronniers, qu'on a multipliés dans ce canton , y ont mieux prospéré que dans les autres districts de Ténériffe; le système d'irrigation, qu'on est parvenu. à établir, a rendu la fécondité à des terrains autrefois stériles , mais, malgré ces avantages, la situation de cette vallée, sur la bande méridionale de l'ile, la livre aux vents du désert. Nous rap- porterons ici les observations dont nous primes note sur les lieux, pendant trois jours que régna l'Har- matan (le S.-E.). ' i (914 pieds d'altitude). à 10 h. a. m. . 285,89 » 29. p.m..30 } Température moyenne. . 285,70. » 6. p.m... 27,22 | à E 19 juillet.. . / » 10 a. m. . 273,22 11 juillet 1827 Vent au S. - E. Id. CPS PONT. PR 80 Température moyenne. . 28588. . Id. » 6 p.m. . 29, 44 | » 2 p. m.le mercure monta à 325,78 à l'air libre. 13 juillet.. . (3 10 a. m. . 285,33 y ^ OR » 9 p.m.. 99,44 $ Température moyenne. . 285,70. Td. 44 po 99,83 7 | Le terme moyen des températures observées dans ces trois jours ne peut donner une idée bien exacte de la sensation de chaleur qu'on éprouve avec le vent du S.-E. : la sécheresse de l'air, son . opacité et sa pesanteur sont des circonstances météorologiques que nous n'avons pu apprécier que par leurs effets naturels. Déjà, dans le premier récit d'une de ses ascensions au pic de Teyde, un de nous (1) a parlé de l'Harmatan et de ses influences : le 8 juillet 1827 , à l'altitude de 8,400 pieds, dans le cirque des Cañadas , où la chaleur se concentre comme dans une fournaise, le thermomètre placé à l'ombre monta à 345,44 et dépassa 465,11 au soleil. Cette température extraordinaire fondit la cire des ruches de cette station et fit enfuir les abeilles. Ce vent dura plusieurs jours; ce fut celui qu'on res- sentit dans la vallée de Guimar (11, 12 et 13 juillet) où ses effets ne furent pas moins désastreux. Les Nopals, dont les rameaux articulés paraissaient devoir résister davantage à l’intempérie de l'at- mosphére , à cause de leur nature charnue, ne furent pas épargnés ; un grand nombre sécha sur place; le souffle brülant du vent du désert passa sur les champs comme un incendie. Dans la région des Pins, la chaleur fit éclater l'écorce des plus grands arbres et la tempête en déracina plusieurs. Les annales Canariennes citent d'autres époques remarquables par les ravages du vent du sud, le 26 juillet 1704, le 9 avril et 13 mai 1763, le 28 avril 1768 (2) et le 24 août 1821. Heureusement ces désastres ne se renouvellent que de loin en loin; les brises du nord arrivent bientót aprés avec leurs vapeurs bienfaisantes pour rafraichir la terre et rendre à la végétation toute son énergie. e (1) S. Berthelot, Excursion au Pic de Ténériffe ; Biblioth. univ. de Genève, août 1831. Id.. . . . . Mémoire de la société de géographie. (2) Viera, JVoticias de la hist. gen. de las Isl. Canar. , tom. 1, liv. 1, chap. v. ( 88 ) OBSERFATIONS Sur la température de la grande Canarie durant nos excursions dans cette ile. | g E 5 £ | OBSERVATIONS OBSERVATEURS. DATES. S LIEUX. E Es z E > CLIMATÉRIQUES. - & Heures Pieds. C. Wers er BenTHELOT.|1829. Août. . . 22.12 p. m.|Telde. 259 25o,5|Beau temps, vent au à N.-E. Id... Id. id. . 29.| Midi. |Véga de los Mocanes. |1,711 131,6 | Vent au S.-E. Id.. RETCHL. . id.|2 p. m.|Telde.. . ;o99 089 26,6 Id. . , Id. . Id. id.. sidlo p. mud. o) ocv 4. 25 Id. . Id. . ML. B. . $0. [2 p. m.|Vega de los Mocanes. |1,711 26,1 Ig. . . . Id.. Id, _id.: . .id.|6p. m. (FPE ES à 25,5 |Vent au N.-E. S. - Id. Septembre.. 2.|8 a. m.|Texeda 2,945 14,4 |Brume, vent au N.-E. Id. . 1d. -.id.. di M@, | HM. Id. - 17,2. id. . à Es Id.. REO CUNE (3.39.2 8 … : 2.91. M 25,5 |Vent au S-E, . Id. . Id. Octobre.. . 2.| Midi. |Vega de San Matheo. |2,406 16,1 |Petitepluie,ventau N. Id. . Id, . id. SI US AS RER wc] 49. 20,5 |Brouillard , vent au | N.-E. Id. . Id... d 4| Id. |Saucillo. 2c. 5. [5,906 16,6 |Brume, verit au N.-E. ; Tunté (vallée de Ti-| - Ciel couvert, vent au Id. SRE RES A: raxana).. . . .|2,000 22,7 | N.-E. , Id. . Id. id.6,7et 8| Id. [Santa Lucia. Id. .[2,109 28,5 |Vent à l'est, faible. Id. . Id. id. . 25.1 Id. |Teror. pa 1,681 125,5 [Beau temps. Id.. Id. id. . id.| Id, Id. Id. 29,9 |Température de la | source acidulée. Id.. Id. Novembre. 7.|7 p. m.|La Gaeta. . . . . 0 25,5 |Beau temps. Id. . Id. id. 8.| Midi. |Aldea San Nicolas. . 0... .126,6 REL 5-4 id.. Id. id. .429.| Id. [Galdar.. . . . .[950environ.|25,5 Id. ; ; SU température du littoral. Le professeur Don Juan Bandini (89) Aux remarques particulières que nous venons g la végétation est subordonnée à des altitudes-diverses , nous aj : x de dix années d'observations sur la température de reproduirons ici ses propres annotations. . DANS DEUX DIFFÉRENTES LOCALITÉS. OBSERVATIONS COMPARATIVES R LA TEMPÉRATURE DE L'ATMOSPHERE AU NIVEAU DE LA MER exposer sur les influences climatériques auxquelles outerons quelques renseignemens sur la a consigné, dans un traité élémentaire d'agriculture (1), les résultats la grande Canarie (la Ciudad de las Palmas): nous Variations du thermomètre dans le courant de l'année. En Janvier. . . . ... . de 16,67 à 185,89 C. En Juillet 5... - . . de 22,22 à 250,56 C. » 5 e 170,99 » 199,14 OR LL e so ce » 949,44 » 279,22 » Mars «e . +. » 195,99 » 190,14 `» Septembre. . . .. . » 240,44 » 295,44 - l 5 52: RON PEE 189,33 » 20°,»» » Octobre. . . .. .. . » 209,67 » 315,67 : RD... 49,09.» 2E ,11 . » Novembre. . . .. » 18°,33 » 26°,67 Ec JUDI E oS Di »ccenbre. .. .. -» 16511 » 195,44 Les travaux de Don Francisco Escolar (2), qui résida plusieurs années aux Canaries , nous ont fourni is le commence- des données suivantes sur les températures moyennes, déduites, mois par mois, depui ment de mai 1808 jusqu'en aoüt 1810. | ^ 7 DE 17,70€. | EnJuillet. . . : :. :, + - +: .. 259,15 C. PUER: 2c: is 175,93 | es SP TR E 26°,05 Pale ere he 5 195,53 Fidéptembre-. 2: «ss 200 959,21 J- ANTE 26 EC sor CONTE | EL a E EE AEA 239,70 $5 SEMESTRE EE es as 69 220,28 BR sine: :: 5: : 5 5 Vs En 21788 ? iis re a te RE oh .23,27 ‘| » Décembre. . . . sie e:e z is 18578 En comparant les données de ces deux séries d'observations , on s'apercoit d’une différence notable dans la température des deux localités ; à la Ciudad de las Palmas, la plus grande chaleur n’a pas lieu au omme à Sainte-Croix , mais au mois d'octobre. M. de Buch , qui a eu soin de citer cette 'elle est d'autant plus surprenante que , jusqu'en septembre , la chaleur ; qu'elle augmente ensuite rapidement, et atteint bientót Ce savant géologue attribue la cause de cette diffe- hique et la constitution physique du sol Ciudad se trouve adossée d'un côté à de presqu'ile qui l'unit à la Isleta. mois d'aoüt , c | anomalie (3), fait remarquer-qu est plus faible à la Canarie que dans les autresîles celle des contrées les plus chaudes des tropiques. rence à l'influence des vents régnans ; mais la structure orograp doivent aussi contribuer puissamment dans ce phénoméne. La hautes falaises , et cernée de l'autre par les dunes de sable blanc de la Dans les mois de l'année où les calmes règnent le plus fréquemment, c'est-à-dire depuis aoüt jusqu'en oc- (1) Lecciones elem. de Agricultura. Laguna de Tenerife, 1816, tome 1, pag. 24. (2) Diario meteorog. , Mss. (3) Voy. L. de Buch , Physical. Beschr. der Can. Ins., p. 65. II. tobre , la chaleur, ne se trouvant plus tempérée par le mouvement de l'air, augmente progressivement. Le rayonnement du soleil est alors trés-fort sur toute cette côte , et cette radiation , en se concentrant nosphére ne pouvant de stagnation de l'air gt-quatre heures ; selon les données sur un petit espace, y produit une haute température. L'état de quiétude de Yatı occasioner une grande perte de calorique pendant la nuit , il résulte de cette sorte une différence peu sensible entre les maxima et les minima de température dans les vin cette différence est peut-étre moindre encore qu'à Sainte-Croix de Ténériffe , où , d'Escolar, la température de midi ne surpasse celle du lever du Soleil que de 15,16 R. C'est aux circonstances climatériques , qui produisent une augmentation de chaleur sur la cóte sep- tentrionale de la grande Canarie , qu'il faut sans doute attribuer la présence de certaines plantes qu'on ile. Ainsi , on y voit abondamment le Plo- ne rencontre à Ténériffe que dans la partie méridionale de l PEuphorbia balsamifera ; cette dernière cama pendula, Ye Cneorum pulperulentum , I Euphorbia aphylla et espèce , qui ne s'écarte pas ordinairement du littoral dans ile voisine, se propage , dans celle-ci , sur les montagnes cotières jusqu'à l'altitude de huit cents pieds, et y atteint à de grandes dimensions. Le Tamarix Canariensis , qui ne croit spontanément que sur les bords de la mer, dans les parties les plus chaudes et les plus abritées de Lancerotte et de Fortaventure , pousse avec vigueur à l'entrée de la vallée de la Vega, dont la hauteur est d'environ mille pieds ,et s'y développe comme un arbre de moyenne grandeur. iy^ : . Les observations thermométriques de Bandini, dont nous avons fait connaitre les résultats , furent exécutées à l'aide de bons instrumens. M. de Buch les a groupées pàr dizaines dans un de ses tableaux mais comme le professeur de Canarie ne maniere approximative, ans les expériences d'Esco- de température (1), et en a calculé les moyennes pour trois années ; observait seulement à midi , la vraie moyenne n'a pu étre appréciée que d'u en corrigeant les températures observées de la différence que présentaient d lar la température moyenne et la température de midi. Les données obtenues par M. de Buch, d'aprés ses corrections , sont les suivantes : Moyennes calculées pour la Ciudad de las Palmas. ——— : Tara o IE sU judi eo es s tee or EAE UL Coo Ze 175,58 Rr cto Clu de D araa Septembre. . . . ..: .:.. - . e 27908 ET GR Dal CREE. sn à à secs RD MAD I 0. LEES Nuvembre. 12 2 02. 7 HAND lamb... horae MESS T ete... : + Le... UI. « Si, d’après ces résultats, dit M. de Buch, on trace une courbe de température pour cette localité, » on conçoit aisément que les températures de l'année, à partir du mois d'aoüt jusqu'à la fin de no- » vembre, se trouvent en dehors de cette courbe et dérivent d'une autre source de chaleur. Les obser- » vations sont en cela tout-à-fait d'accord avec les rapports des gens du pays, et prouvent que la tempé- » rature du milieu de l'été diffère entièrement de celle du milieu et de la fin du mois d'octobre. » Les moyennes de température de Sainte-Croix , dont nous avons présenté plus haut la série pour chaque mois de l’année, ont été aussi déduites, par M. de Buch , des résultats des observations qui lui u'apporta le naturaliste espagnol dans ses expériences furent communiquées par Escolar. Les soins q dont il se servit étaient d'excellente construction et doivent en garantir l'exactitude : les. instrumens placés, à l'abri du soleil, sous un balcon aéré; les observations se firent régulièrement le matin et à midi. À n T à yw : : M. de Buch , en rendant compte des résultats de ces expériences, est entré dans des considérations rature de Sainte-Croix de Ténériffe, et sur les circonstances phy- d'une haute importance sur la tempé (1) Voy. Physical. Beschr. der Can. Ins., pag. 74. ^" — ———— áo nml ( 91) siques qui, en général, déterminent ses variations aux îles Canaries. C'est pour compléter nos propres remarques sur les influences climatériques, considérées par rapport à la végétation, que nous citerons ici ce que notre savant devancier a écrit de plus important sur ce sujet. « La courbe des températures, pour Sainte-Croix , n'offre pas les mêmes irrégularités qué pour la » Ciudad de las Palmas, et ne semble pas soumise aux perturbations des influences locales ; ainsi, je » crois qu’on peut très-bien s’en servir dans les recherches sur les variations de température, suivant » les différentes latitudes comprises dans une même zone météorologique de longitude. . : . . . ~. -» Les résultats des observations d'Escolar, dit-il ailleurs, présentent, en général, des températures » fort élevées ; la température moyenne du mois de janvier, le plus froid de l'année , surpasse méme ^» la température moyenne, pour toute l'année, des parties méridionales de l'Italie ; mais, à la manière » dont la température varie d'un mois à l'autre , on s’aperçoit que, dans cette région , le soleil ne passe » plus au zénith. En effet, on ne reconnait pas dans la série des températures les deux maxima et les » deux minima qu'offrent les températures inter -tropicales ; au contraire, le minimum de chaleur, » de méme que dans les régions tempérées, a lieu en janvier, et le maximum un mois aprés le solstice » d'été. » » Les îles Canaries ne sont pas arrosées s par ces grandes pluies des tropiques, qui, selon l'expression » des marins, suivent le soleil, parce qu'elles tombent avec plus d'abondance à mesuré que cet astre at- » teint sa plus grande ascension. Les pluies commencent, aux Canaries, lorsque la température a déjà » beaucoup diminué en hiver, et lorsque la différence de cette température avec celle des régions » équatoriales s'est considérablement augmentée. Ces pluies semblent, par conséquent, provenir des » mémes causes que celles qui agissent dans les pays septentrionaux, c'est-à-dire, le refroidissement de » l'air chaud, produit par le vent de sud-est, lorsqu'il arrive des régions tropicales et des latitudes in- » férieures ; puis, par suite de cet abaissement de température, la condensation des vapeurs aqueuses » de l’air ambiant. : » Cependant la température de l'automne, aux îles Canaries, n'est pas encore assez basse pour con- » denser les vapeurs atmosphériques ; il résulte de là, que dans ce climat les pluies commencent beau- » coup plus tard qu'en Espagne et en Italie, et surtout qu'en France et en Allemagne : elles n’ont pas » lieu avant les. premiers jours de novembre pour les parties des iles Canaries situées sur le littoral , et » finissent, au plus tard, au mois de mars. On sait qu'en Italie les pluies durent depuis la mi-octobre » jusqu'au milieu du mois d'avril. » L'été des Canaries commence donc à rapprocher le climat de ces iles de celui des contrées. inter- » tropicales, et les zones torrides et les zones tempérées semblent se confondre dans ces latitudes. » (L. de Buch, Physical. Beschr. der. Can. Ins. 11. Bemerkuhg ) | Nous n'ajouterons qu'une seule observation aux importantes remarques : de M. de Buch. Le long sé- jour que nous avons fait aux iles Canaries nous a convaincu que la saison pluvieuse est bien plus courte sur le littoral que dans la région supérieure. Sur la côte, les pluies commencent rarement avant la fin de novembre, et ne durent guére plus de deux mois; encore ne sont-elles, la plupart du temps, que de fortes averses bientót interrompues par des vents d'ouest assez violents. Dans la partie méridionale des iles, principalement dans la contrée maritime, les pluies sont fort rares ; la sécheresse qu'éprouvent, pendant plusieurs années, les districts de cette bande, oblige souvent une partie de la population à émi- grer vers des contrées plus fertiles. Les iles de Lancerotte et de Fortaventure, plus basses que celles de la partie occidentale de l' Archipel, sont principalement dans ce dernier cas; leur climat, aussi bien que P jus cm à p : leurs productions naturelles, se ressent du voisinage del'Afrique. — ` y ne ENAS Se -5 D UT sde rM | (92) AVERTISSEMENT. À mesure que nous avangons dans la rédaction de la phytographie canarienne, une étude plus approfondie de chaque espéce nous entraine dans d'autres considérations et détermine de nouveaux changemens. Vouloir nommer maintenant toutes les espèces nouvelles que nous avons re- cueillies, et que nous sommes appelés à décrire, serait hasarder d'avance des dénominations que nous serions peut-étre tentés de changer plus tard. C'est pour éviter une synonymie, qu'on serait en droit de nous reprocher, que nous ne donnerons qu'à la fin de ce volume la liste des plantes de la Flore des Ca- naries-Occidentales, que nous avions annoncée pour ce supplément. CHAPITRE TROISIÈME. DES FORÉTS CANARIENNES, DE LEURS CHANGEMENS ET DE LEURS ALTERNANCES:e La terre, que les arbres embellissaient au temps de leur végétation; S$ 'enrichit de leurs dépouilles; dés germes | vigoureux , déposés dans son sein, font succéder d'autres générations à celles qui viennent de s 'éteindre , et Ja mort des individus est comme un garant de la jeunesse E P ; E : mo éternelle des races. i. MInBEL.. ‘La réunion des mêmes arbres sur un espace donné, et la succession alternative d'un certain nombre d'espèces dominantes, sont des faits observés depuis long-temps : ces associations et ces alternances ont fixé l'attention de plusieurs natur alistes distingués; mais ce ne sera qu'en comparant entre elles les séries d'observations entreprises sous diverses latitudes qu'on pourra obtenir des données précises sur les lois générales de la distribution des végétaux vivans en société, et ré- soudre peut-étre le probléme de ces reproductions spontanées dont nous ne saurions encore trouver l'explication. Bornons-nous mainte- nant à décrire les foréts que nous avons parcourues; fixons-en la topo- graphie, et faisons connaitre les changemens auxquels donnent lieu l'apparition successive des différentes espèces qui les peuplent. — Nos bocages d'Europe, enclavés au milieu de champs et parqués re distinctif la symétr je des comme des troupeaux, ont pour caracté itudes des exploi- taillis et l'uniformité des futaies. Soumis aux vicissl tations et modifiés selon les vues des agronomes , Ces bois , souvent re- nouvelés, ne sont plus que des plantations dont tous les arbres ont le ( 94 ) même port. Ce n'est guére que sur nos montagnes Alpines et dans les contrées isolées de l'Orient et du Nord, où la civilisation et ses exigen- ces n'ont point encore pénétré, que les foréts conservent leur primi- tive indépendance. Partout ailleurs, l'homme à étendu arbitrairement sa puissance, et la nature est venue se préterà son vouloir. L accroisse- ment progressif des sociétés a exigé d'autres ressources, et les produits du sol ont dü se mettre en rapport avec les besoins et les goûts des populations. Alors, dans les cercles d'activité où se sont exercées les industries agricoles, le pays boisé a perdu sa physionomie originaire, pour prendre un air moins sauvage et plus en harmonie avec ses alentours. Les iles Canaries n'en sont pas encore à cette phase; on y retrouve des foréts vierges, et, dans ces régions némorales, la nature, par sa seule puissance, maintient et régénére ce quelle a créé. Là i de vieux Lauriers, minés par le temps, finissent par s'affaisser sous leur propre poids, augmentent la masse de l humus, et de nouvelles races naissent de leur décomposition. Le terreau de la forét, incessamment engraissé par tant de dépouilles végétales, nourrit les espèces qui couvrent le sol, et conserve dans son sein les germes de celles qui doivent les rem- placer. La nature préside à ces associations, et régle la marche lente de leurs alternances. Des arbres, aussi anciens que là terre qu'ils ombra- gent, dominent tous les autres, comme ces baliveaux qu'on laisse croitre au milieu des taillis; leur tronc et leurs branches sont couverts de mousses et de lichens; au-dessus de ces dómes de feuillage , les Fougères et les autres plantes des bois entretiennent une humidité fécondante. Tantôt des masses de la même espèce entourent ces vétérans de la fo- rêt, et tantôt des groupes d'espèces diverses cernent l'espace qu'ils semblent avoir conquis depuis des siécles. Ces arbres séculaires sont les points de départ de la végétation environnante , et leur existence vient jeter quelques clartés sur le mystère des alternances. En effet, bien que le plus grand nombre de semences germent sous l'arbre qui ( 95 ) les produit, lesplantules qui en proviennent s'étiolent bientôt, et péris- sent par excès d'ombre et d'humidité, tandis que toutes celles qui prennent racine sur le terrain découvert poursuivent leur dévelop- pement. Il peut arriver cependant que les germes d'autres espéces, en s'écartant aussi de leur point d'origine, se trouvent portés à cóté des premiers par cette sorte d'envahissement progressif. Il s'établira dès- lors une lutte entre les deux espèces, et celle qui prédominera pourra se limiter numériquement. Dans un mémoire d'une haute portée, M. de Humboldt s est, avant nous, exprimé en ces termes : « Nous ^ concevons comment, sur un espace de terrain donné, les indivi- ^ dus appartenant à différentes iribus de plantes ou. d'animaux » peuvent se limiter numériquement ; comment aprés une lutte opi- ^ niâtre et aprés de longues oscillations, il s'établit un état d'équi- » libre qui résulte des besoins de la nourriture et des habitudes de » la vie (1). » C'est ainsi sans doute, que se forment ces agroupemens et ces circonscriptions partielles; un Mocan peut se trouver isolé au milieu de Lauriers, ou, dans d'autres cas, s'entourer d'une nouvelle génération. | - Les différentes causes Ea destruction qui abattent les vieux arbres laissent à découvert des parties de terrain que le soleil pénétre de ses rayons: la chaleur, en se combinant avec l'humidité, vient change r la nature chimique du sol et peut-étre aussi celle de l'atmosphère par le dégagement de nouveaux gaz; alors commencent plusieurs périodes d'alternance, d. autres plantes apparaissent à la surface, d'abord des Pteris, puis des Bruyères et des ar ‘bustes, ] jusqu'à ce qu'enfin la terre. rendue 1 à sa constitution première , apr ès plusieurs régénérations suc- cessives , se recouvre encore des mémes espéces qu auparavant. dilya dans notre sobonReenE plus que de simples conjectures ; la (1) Addition aux Nouvelles recherches sur les lois que l'on observe dans la distrib. des formes végét. Voy. Ann de chim. et de phys., tom. xvr, p. 267. ( 96 ) méthode des assolemens , si bien développée par M. de Candolle, dans In sa Physiologie végétale , est fondée en grande partie sur cette loi de la reproduction alternative des végétaux sociables, entrevue depuis long- temps par les agronomes, et appuyée de tous les faits que M. Dureau de la Malle a consignés dans son mémoire sur l'alternance (1). Ceux que —— nous allons décrire sont fondés sur dix années d'observations: ce laps de —ro temps suffit aux iles Canaries pour juger de la durée d'une révolution dans la renaissance des bois qui ont été détruits par l'action des hommes, et pour pouvoir apprécier les phénomènes qui se manifes- tent pendant les différentes périodes de reproduction. Dans ces climats, où tout concourt à exciter l élaboration de la sève, une autre écono- mie règle la marche de la végétation; des arbres toujours verts, une croissance continue, un développement rapide, sont les conséquences de cette énergie vitale qui se déploie dans toute sa plénitude. Les va- riations des saisons étant moins brusques, et les intermittences de la végétation presque inappréciables, les arbres passent sans interruption par les différentes phases de la vie, et leurs rameaux se chargent à la fois de fruits, de fleurs et de nouveaux bourgeons. . Les nuages , que les vents alizés chassent incessamment devant eux , s'amoncellent au-des- sus des foréts, et les imbibent de leurs vapeurs. Cette rosée salutaire, en sinfiltrant dans les couches crevassées du sol, alimente les sources qui percent de toute part; elle se répand en perles brillantes sur les feuilles, on la voit filtrer goutte à goutte des rochers couverts de Ca- pillaires; de là cet échange continuel des émanations de la terre et de l'atmosphère, ces eaux limpides qui s'échappent en petits ruisseaux des grottes tapissées de mousses. Et, si à ces bienfaits de la nature, à cette chaleur du jour tempér ée par les brises de l'Océan, on joint encore la sérénité des nuits, la tr anquillité dont on jovit sous ces beaux ombra- ges, et cet air vivifiant qui pénètre les végétaux et qu'on respire avec (1) Voy. Ann. des scienc. nat., vol. v, p. 353. 1825. v e ge iam R v PRE — " In ——PÁÓ — nn RE x RUNE Les , 3 ra REN TT MER (97) tant de délice, on pourra alors se faire une idée de la physionomie de cette région. | yos - Par leur caractére cilditique; los foréts Canariennes n'ont presque plus rien de commun avec celles de nos climats; elles offrent en géné- ral des points de vue trés-variés, se groupent de la maniere la plus pit- toresque sur les pentes des montagnes, garnissent le fond des ravins et les anfractuosités de leurs berges. Quand on arrive dans cette région némorale, on éprouve un sentiment d'admiration mêlé de bien-étre; l'épaisseur de la fourrée ne saurait opposer un obstacle au désir de tout voir, de se procurer à chaque instant d'autres surprises et de nouvelles émotions. On erre ainsi long-temps sous ces massifs de verdure et parmi ces tribus d'arbres et de plantes qui se pressent et se confondent ; mais lorsque, parvenu sur la lisière des bois, on découvre tout-à-coup, sous un soleil radieux, les vallées de la côte, la mer et son immense horizon, il n'est pas de description qui puisse rendre un pareil tableau. Si pourtant ces foréts offrent, dans leur ensemble , des beautés que tout observateur peut saisir d'un coup-d' oeil, elles présentent aussi dans leurs détails des particularités pleines d'intérét pour le botaniste. Placées sur les confins de la zone tempérée, elles ont déjà de grandes analogies avec celles des contrées les plus chaudes des deux hémis- phéres. Les Lauriers y croissent en masse comme aux Antilles et dans quelques iles de l'Archipel d'Asie ; plusieurs arbres, exclus des régions septentrionales (1), s'annoncent comme des espèces dont les nom- breuses congénères se retrouveront plus loin; les Mocans sy montrent pour la premiere fois, tandis que par leurs belles dimensions d'on- doyantes fougères ` se rapprochent de certaines espèces d'Amérique et de l'ile Bourbon ; il en est même deux qui paraissent tout-à-fait iden- tiques. Les Lauriers abondent partout et ces. ee espèces bien dis- (1) Ces arbres appartiennent aux genres Ardisia, Olea, Myrsine, Pittosporum, Boehmeria, die. 13 III. a AL | | Pom RÀ poc , 1 1 s k n f y ( 98 ) tinctes, auxquelles viennent s'unir d'autres arbres de haute futaie et plusieurs beaux arbustes; ce sont les Arbousiers, les Myrsines et les Ilex des Canaries (1); l Ardisia excelsa, le Rhamnus glandulosus, le Visnea Mocanera, le Myrica Faya, le Viburnum rugosum , YErica - arborea , e Cerasus Hixa , le Boehmeria rubra et Y Olea excelsa si dif- férent de notre Olivier d' Europe. Toutefois , au milieu de ce mélange d'espèces, les Lauriers dominent toujours et forment le type caracté- ristique de cette région que nous avons appelée Laur ifère. Répartis le plus souvent en divers groupes, ils semblent s'être réunis par espèces ; le Laurus Canariensis Nob. s'est placé en première ligne sur la lisière des foréts, les gorges des montagnes sont peuplées de Laurus Indica, le robuste Barbusano (.L. Barbusano) se plait sur les pentes escarpées des ravins, et le Til, au bois infect (L. Fætens), ombrage les alentours des sources. Ces singularités dans le mode de répartition des Lauriers se font aussi remarquer chez les autres espèces. A Ténériffe , les Druyé- res en arbres sont toutes réunies dans les bocages de San Diego del monte et à l'entrée de la forêt d Agua Garcia; VIlex Perado, qui ne se trouve que dans cette dernière localité, y croit le long des cours d'eau et dans les endroits les plus ombragés ; les Cerisiers (Cerasus Hixa) se montrent, en grand nombre; sur divers points de la chaine d'A- naga (2) et ne se rencontrent pas ailleurs. Dans la vallée de Guzmar, les Arbousiers garnissent les berges du ravin de las Aguas et sont très- rares dans les autres quartiers de l'ile; les Ardisiers et les Fayas sont à peu prés dans le méme cas : les premiers croissent, en masse, dans les environs de Buenavista , tandis que les seconds bordent toujours les foréts vers leur partie supérieure, et forment le passage de la région Laurifére à celle des petites Bruyères. La végétation forestière Offre, —— — (1) Arbutus Canariensis. Myrsine Canariensis. Iex Canariensis. Iex Perado. (2) Dans les bois de las Mercedes et au-dessus de Taganana. AN agunt —— ( 99 ) en général, la méme distribution dans les autres iles : à Canaria, les Tils, dont nous n 'avions vu d'abord que quelques pieds dans la forét de Doramas , depuis Terror jusqu'à Arucas , devinrent ensuite I espèce dominante dans les environs de Moya; les Mocans, toujours épars au milieu des autres arbres, se sont multipliés à l'ile de Fer sur les montagnes du Golfo, et y ont acquis les plus grandes dimensions. Ces sortes d'associations des mêmes arbres, et ces cas d'isolement in- 4 dividuels, au milieu d’autres groupes, donnent lieu à une remarque : | | quin 'est pas sans intérét lorsqu'on examine les caractères de la végé- Am tation dans différens climats. En Europe, par exemple, où les an- ciennes forêts ont été remplacées par de nouvelles plantations, on se ferait une bien fausse idée de la végétation primitive, par celle qui lui a - succédé. C'est dans les pays restés en dehors des envahissemens agricoles qu'il faut aller étudier cette végétation ; partout ailleurs, le remaniement du terrain a créé des bois artificiels, et s'est prêté au mélange des espèces introduites à différentes époques. Il n'est donc pas question ici des taillis ni des futaies, que l'agronomie a soumis à ses spéculations ; ces bois, coupés à des intervalles réglés, sont devenus l'ouvrage des hommes; si ces domaines forestiers étaient abandon- nés à eux-mêmes. les Chênes, les Bruyères, les Hétres, les Pins et ‘quelques autres espèces à bois dur, prédomineraient bientôt, et finiraient par reconquérir le terrain sans partage. L'observation est en cela d accord avec les faits; ; Ton voit rarement les arbres intro- duits, méme les espèces européennes transplantées hors de leurs li- mites naturelles, soit en France, en. Angleterre ou autre part, se reproduire spontanément. Les plantes régnicoles, que la nature a E restreintes dans certaines limites, sont aussi dans le méme cas; de ma- | nière quil existe celte différence entre les végétaux du sol et ceux qui lui sont étrangers, que les premiers se multiplient dés que des cir- constances favorables facilitent la germination, et que les causes qui S 'opposaient à leur force expansive cessent de les géner, tandis que les -——————— M — —M — 9 À pue c wW o — uM eor Daum. oc P : - " d " v , XN ————— c£ - I4 l—— mS: P MÁÀ— RE — € S — — —— ET — Pa APTE SE " LÁ E re m te Eus, Coi DNE on PR IT agemus A E e: Ls cil fmm pie pne io ds a monem ( 100 ) seconds, tout en s accommodant au terrain et à la température, c'est-à- dire en s'acclimatant, ne se naturalisent pas (1). Il est rare, du moins, qu'une plante exotique acquiére cette spontanéité, caractère distinc- tif des espéces régnicoles; c'est ce qui a fait dire, avec raison, que les végétaux introduits empruntaient le sol sans le posséder. Ainsi, le Ma- | ronnier, le plus bel ornement de nos parcs, ne peut se propager de lui- même, ses fruits pourrissent sur place; la faculté germinatrice n'est pas pourtant éteinte en eux, mais cette vertu innée a besoin d'autres stimulans pour les faire croître, le sol d'emprunt qui les recoit n'est pasà leur température, et ne peut couver, dans son sein, les graines étrangères ; elles réclament un terr eau préparé parune combinaison chi- mique que nous ne savons encore apprécier que par tátonnement, mais qui seule est capable de développer le principe fécondateur, en rendant | au germe son énergie vitale. Beaucoup d'arbres forestiers s'assimilent, | | en cela, avec le Maronnier, et les exemples ne nous manqueraient pas pour appuyer notre raisonnement. Dans la plupart de nos provinces de France, un bois de Châtaigniers , de Platanes ou de Peupliers d'Tta- lie, qu'on ne renouvelle pas, ne prend aucune extension. C'est que ces arbres sont originaires de l'Europe australe; transplantés dans nos contrées, leurs graines ne lévent plus que par semis; devenus vieux et décrépis, ils périssent sans léguer à la terre une nouvelle génération: ' (1) Ces deux expressions, Acclimatation et Naturalisation , ont été souvent confondues et faussement appliquées. D’après notre manière de voir, nous ne pouvons admettre la définition du vénérable | Thouin : « Naturaliser un végétal, c’est le transporter du lieu où il croít naturellement dans un autre lieu, où, E » à l'aide de la culture, on parvient à l'acclimater de manière qu'il s'y multiplie comme les plantes indigénes. » I | Voy. Cours de cult. et de natural. des végét., publié par Oscar Leclerc. 1827. Selon nous, un végétal ac- i i climaté donne des graines , mais elles ne se multiplient spontanément , comme celles des plantes indi- : genes, que lorsque l'arbre ou la plante se sont entièrement natur alisés , ce qui n'arrive que bien rare- ment. L'acclimatation n'est réellement maintenue que par le moyen des semis, qui seulement, et dans trés-peu de cas, peut amener la naturalisation , c'est-à-dire la reproduction spontanée. Nous n° enten- dons parler ici que des végétaux ligneux : quant aux plantes herbacées , qui durent peu et dont la A fructification est beaucoup plus rapide, celles-là ont moins à redouter les intempéries de T a Po TT PL PDO AA pf atmo- sphère. La quantité et la ténuité de leurs graines, qui s’enterrent presque aussitôt, et dont la faculté germinatrice se développe plus promptement , leur dissémination sur un plus large espace , sont autant de chances favorables à la reproduction spontanée. | (101) Alors, à la place qu'avait occupée la futaie, naissent spontanément des plantes et des sous-arbrisseaux que lombrage avait auparavant expulsés des alentours, ensuite succèdent des Bouleaux, des Trembles ou d'autres espèces à bois blanc, puis enfin des Chênes, des Bruyères ou des Pins indigènes, selon la nature du climat et du sol. Quelque chose d'analogue a lieu aux Canaries, dans les îles où les Châtaigniers ont été introduits, c'est-à-dire, à Ténériffe, à Palma et à la grande Canarie. Peu d'années après la conquête de cet archipel, les Châtai- gniers vinrent remplacer dans certaines vallées les forêts de Lauriers qui boisaient auparavant tous les versans des montagnes; mais, bien que ces arbres aient pris de. suite un bel accroissement et qu'ils soient devenus trés-productifs , leurs fruits ont rarement germé sur place; lexcés d'ombre et d'humidité les a presque toujours détruits. Aussi a-t-on observé que, sur plusieurs points, les bois de Chátaigniers s'éclaircissaient de plus en plus et finissaient par se perdre. Lorsque l'on cesse de les replanter, les espaces découverts sont bientôt envahis par les Ronces et les Pteris, auxquels viennent se mêler des Hypéricons et quelques Cinéraires, puis apparaissent les Bruyères, et après elles, les Lauriers et les Fayas, première annonce de la renaissance des an- ciens bois. On ne saurait aujourd'hui douter de ces phénomènes, que détermine la ioi des alternances si bien démontrée par les judicieuses observations de M. Dureau de la Malle. C'est à ces reproductions successives et spontanées qu'est due, à la longue, la régénération du sol. H est aussi bien des terrains en France susceptibles de redevenir ce qu ils furent autrefois : partout où l'industrie agricole cesserait d'exercer son empire, la végétation primitive, après un certain laps de temps, reprendrait le dessus, les arbres régnicoles repousseraient de nouveau pour se ranger par groupes distincts, en faisant dispa- raitre ces taillis mélangés d'espèces exotiques et toutes ces plantations artificielles. Qu'on parcoure les contrées encore incultes des grandes Alpes et des Pyrénées, les antiques forêts des monts Scandinaves et des ( 102 ) autres pays de l'Europe boréale, la chaîne des Crapack. les grands es- paces boisés de l'Allemagne et de la Russie, et dans ces régions encore vierges on retrouvera la végétation des premiers temps. Là, les fo- réts ont conservé ces caractéres originaires qui décélent leur nature sauvage et leur spontanéité; leur mode de distribution n'a pas changé, et, sauf les modifications dépendantes des latitudes et des localités, cette méme répartition phytostatique dut embrasser jadis la majeure partie de la Germanie, des Gaules et des contrées adjacentes, avant que la terre, mille fois retournée, n'eût éprouvé tant de vicissitudes. - L'histoire des changemens de la végétation européenne est peut-étre un des sujets les plus intéressans à traiter, mais l'enchainement des causes qui a entraîné la destruction des bois primitits, n'est pas facileà saisir. Pour apprécier, par exemple, les différentes phases de la végéta- tion sur le sol de la France, peut-être faudrait-il remonter au temps de ces antiques foréts des Druides qu'une théogonie protectrice avait rendues sacrées. À partir de cette époque, il est dans nos fastes des évé- nemens notables qui ont puissamment contribué à modifier la végé- tation du pays; M. Auguste de Saint-Hilaire, dans une note de ses savans écrits, nous a indiqué ceux qui avaient eu le plus de part à ces grandes révolutions agricoles (1). 1l serait superflu maintenant de nous occuper de ces recherches, et nous résumerons, en peu de mots, les considérations que nous venons d'exposer. Nous n'admettons comme foréts primitives que celles où les arbres qui les peuplent sont dusà leur seule spontanéité. En Europe, ces foréts se composent, le plus souvent, d'une ou de plusieurs espéces domi- (1) « Il est clair, dit-il, que les événemens qui ont dü occasioner les modifications les plus notables » dans la végétation de la France, sont : 1? la fondation de Marseille, par les Phocéens ; 2° la conquête » de Jules César ; 3° les grands encouragemens donnés à la culture de la vigne sous l'empereur Probus ; » 4^ la création de certains ordres religieux, et les immenses défrichemens qui en ont été la suite ; 5° les » croisades ; 6° la découverte de l'Amérique ; 7° les encouragemens donnés à l'agriculture par Henri IV » et Sully ; 8 enfin la révolution, qui a conduit une foule d'hommes éclairés à s'occuper de la culture » des terres , et qui , par le partage des biens communaux et la division des grandes propriétés , a amené » de nouveaux défrichemens. » Tableau de la végétation primitive dans la province des Mines. p—À— em —— : s ~ M CCE Le MP tn qnn CS a CE p ———— ( 103 ) nantes, et toujours réunies par groupes. D: aprés les données d'un de nos plus célébres horticulteurs, le nombre des espèces d'arbres indi- gènes de première grandeur qui peuplent les foréts de la France ne s'élève quà dix-neuf, encore faut-il retrancher de cette quantité cinq espéces propres aux terrains humides, savoir : le Peuplier noir, le Tremble, l'Hypréau, le Frêne et l'Aune. Parmi les quatorze espèces restantes, le Pin d'Alep , l'Yeuse et le Liége ne croissent que dans les pays méridionaux, de sorte que le nombre des arbres forestiers des autres provinces se trouve réduit à onze espèces, qui rarement se ren- contrent réunies dans la méme contrée; quatre, surtout, semblent appartenir plus particuliérement aux régions alpines : ce sont le Mé- léze, l'Épicéa, le Sapin et le Bouleau (1). En général, ces diverses es- péces d'arbres sont rarement mélées ensemble, elles forment chacune | de petits bois à part, quelquefois des foréts entières. Aux Canaries, ce sont bien encore des groupes d'une même espèce , mais parmi lesquels on rencontre , disséminés cà et là, des arbres dif- férens. Ce mélange est souvent très-varié. Le nombre total des es- pèces forestières s'élève à vingt-deux, sur cette quantité on en compte dix-sept qui, sur de petites étendues de terrain, peuplent ensemble les mêmes forêts. Ainsi le premier chiffre dépasse déjà celui de la to- talité des arbres de premiére grandeur propres au sol de la France, et le second présente une différence de plus de la moitié sur celui des espéces qu'on rencontre, disséminées. sur un immense espace, dans l'intérieur de ce royaume et vers ses frontiéres septentrionales. 5i nous passons de là dans les contrées situées entre les tropiques, , nous n'y verrons plus la méme répartition; un péle-méle d'arbres, d'arbustes et de plantes diverses, dont l'énumération serait trop lon- gue, viendra remplacer, dans les foréts, la sociabilité de la végétation européenne et sa fatigante monotonie. | (1) Voy. Cours de cult. et de natural. des végétaux, par André Thooit, pub. par Oscar Leclerc. Prin, 1827, pag. 360. RÀ ( 104 ) Le mélange des espéces forestiéres, qui commence à se manifester ‘aux Canaries, semblerait donc établir, à cette latitude, une sorte de | transition entre la région némorale de la zone tempérée et celle de la zone torride, Ce caractère intermédiaire, que nous avons eu déjà occa- sion de signaler, repose aussi sur certaines ressemblances de formes avec quelques espéces des deux autres grands climats. Nous nous ré- _servons, dans un autre chapitre, de faire apprécier ces analogies. À mesure que le nombre des espèces diminue, l'agroupement des végétaux d'une méme espéce, par grandes masses, se fait donc remar- quer de plus en plus en s'avançant vers les pôles, ef vice versá, la quantité numérique des espèces et le mélange individuel dû à leur dissémination sur un espace donné, augmentent progressivement en se rapprochant des régions équinoxiales. | ' Táchons de déterminer les causes de ces différences. « La quantité comme la qualité de la végétation répond essentiellement ^ à la quantité et aux modifications de la température. » Les observa- tions de Walhenberg , sur les montagnes de la Suisse et de la Scandi- navie (1), ont fait connaitre l'importance de cette loi; mais c'est sur- tout dans les contrées qui avoisinent l'équateur, ce centre de vie et de fécondité, qu'on peut en apprécier toute l'influence. Dans nos régions tempérées, la germination, laccroissement, l'apparition des bour- geons, l'épanouissement des fleurs, la maturité des fruits, en un mot tous les phénoménes phytologiques, suivent une marche régulière, toujours conforme à celle de la température , et parfaitement en rap- port avec les périodes de chaleur et de froid, d'humidité et de séche- resse. Il est des époques fixes pour la floraison et la fructification de chaque espéce : la dissémination a aussi les siennes. A ces phases de la vie végétale succède l'engourdissement hivernal, puis le cercle annuel. recommence sa révolution. Ces intermittences dans la végétation font (1) Voy. Wahlenberg, De J"egetatione et climate in Helveti& septentrionali , etc. | H 4 $ | ( 105 ) que chacune des fonctions. organiques, qui concourt à la ‘repro- duction de l'espèce, agit à la fois chez tous les individus. La pro- pagation. successive des mémes arbres, et leur -agroupement sur ‘un espace donné; sont donc les conséquences de cette simultanéité d'action. | Dans les foréts ile lazone tor nid: Jb état de la température maintient s sève sans cesse en activité; la végétation n ‘a pas d'intermittence, et chaque plante exerce pour ainsi dire son action individuelle suivant ses moyens d'agir et les circonstances qui les favor isent. La reproduc- tion n'a donc pas lieu simultanément; si les ouragans et les orages viennent rompre. l'équilibre de l'atmosphère aux époques où le soleil est parvenu à sa plus haute élévation, ces perturbations, loin de ralen- tir la végétation, redoublent au contraire son énergie. Dans les temps d hivernage, aprés ces ouragans désastreux qui ravagent en quelques heures la végétation des Antilles, nous avons vu les arbres des grands bois repousser avec plus de vigueur qu'auparavant. Ces fortes secousses semblaient accélérer la reproduction, et, aprés ces intempéries, le dé- veloppement des bourgeons se manifestait avec une énergie extraor- dinaire. Dans les vergers, les arbres dont la tempête avait haché les br anches réparaient leurs pertes en fort peu de temps, et recommen- caient bientót à se couvrir de fleurs et de fruits. Les. clairières qui se forment dans les forêts par la chute des grands: arbres, en laissant pé- nétrer dans ces massifs de feuillage une plus grande quantité de lu- mière et de calorique, favorisent la floraison; et l'élagage accidentel qu'éprouvent les arbres isolés, en excitant le mouvement de la sève et en la précipitant vers les parties lésées, doit nécessairement déterminer la formation de nouv elles branches. Telles sont sans doute les princi- pales causes de ces phénomènes, mais la masse d'électricité dont l'at- mosphère est chargé dans ces temps or ageux y contribue aussi puis- samment. L accroissement de température pendant lhivernage, les averses instantanées qui ont lieu. à cette époque, la fréquence des n. 14 ( 106 ) vents du midi, le rapport des mois (1), font de cette saison l'été brû- lant de l'Amérique équinoxiale: Depuis novembre jusqu'en février, au contraire, la diminution de la chaleur, la permanence des nuages, l'humidité occasionnée par la fréquence des grains, la fixité des vents du nord, sont autant de circonstances qui établissent dans ces lati- tudes une sorte d'analogie avec les hivers de nos climats; mais avec cette différence que, dans la majeure partie de l'Europe, la tempéra- ture descendant au-dessous du point de la congélation, l'excès du froid arréte la marche de la végétation, et les plantes restent alors plongées dans une vie passive, espéce d'engourdissement assez sem- blable à l'hivernation chez certains animaux ; tandis que dans la zone torride, le thermomètre ne s'abaissant pas, sur la côte, au-dessous de 12° centigrades et se soutenant ordinairement entre 20 et 25°, une pareille température ne ralentit pas l'activité de la sève, et la végétation, tou- jours livrée à ses impulsions, se montre à la fois sous toutes ses phases. M. Ramon de la Sagra, directeur du jardin botanique de la Ha- vane, vient de nous fournir sur ce sujet plusieurs faits intéressans, D'aprés les observations de ce naturaliste, il parait démontré que les végétaux dans l’île de Cuba n'ont, en général, aucune époque de fleu- raison et de fructification déterminée; ces périodes de reproduction varient méme de deux à trois mois chez les plantes dont les fonctions organiques offrent le plus de régularité, c'est-à-dire, parmi celles qui ne fleurissent et ne fructifient qu'au temps des pluies ou de la séche- resse, deux grandes saisons qui se partagent l'année dans les régions intertropicales. Pour donner une idée des différentes époques d'inflo- rescence parmi les végétaux que M. la Sagra appelle à reproduction régulière, il nous suffira de citer : Le Calycophyllum candidissimum, qui fleurit en octobre „novembre, décembre et janvier. (1) Dans les grandes Antilles Phivernage dure depuis le mois de juin jusqu'au mois de septembre ECL SÉ o dt EN A ne PE t —— ————— MÀ ROS ae giae e ——— ` Meri mots es semet tea C cM - ( 107 ) Le Casearia hirsuta et le Cordia gerascanthoides , en janvier, février et mars. | a n | | | Le Laurus Martinicensis et le Picramnia pentandra, en avril, mai et juin. Maisil en est un bien plus grand nombre dont les organes reproduc- teurs parviennent à leur dernier état de développement à des époques très-différentes. Les indications extraites de l'herbier de M. Ea Sagra, et que nous rapportons en note (1), serviront à faire apprécier ces irré- gularités. Ainsi, l'on s'apercevra que les périodes de reproduction n'ont pas lieu en méme temps pour toutes les espèces, qu'elles diffèrent pour chacune d'elles, et qu'elles varient par fois d'une année à l'autre. Le . Bauhinia scandens, par exemple, dont les fruits furent d'abord re- cueillis en mars, a été ensuite, dans d'autres herborisations, retrouvé en fleur en janvier, puis en octobre; l Amyris floridana, ramassé en fruit en juin et avril, a été ensuite revu en fleur en octobre et novem- bre, et le Schmidelia viticifolia , qui déjà fructifiait en mars, refleuris- sait encore en mai. Or, ces phénoménes ne présentant aucune coin- cidence, soit parmi les individus de méme espéce, soit entre ceux d'espèce différente, on peut établir en fait qu'il y a continuité d'ac- tion, mais non simultanéité. M. Ramon de La Sagra nous assure, en effet, que la faculté reproductive par voie de fécondation est perma- nente imas les ne tropiques, et sql plupart fleurissent et (1) Bauhinia scandens recueilli en fleur en juin et octobre. » fruit » mars et octobre. hr à atamasco » fleur » juin et septembre dans la méme année. » fruit » juillet et septembre dans une autre année. Catesbea longiflora » fleur » juillet et octobre. : ad » . fruit » juillet et octobre. Croton lucidum » fleuraison successive durant toute l'année. Ehretia aspera » fruit » novembre, avril et septembre. Amyris floridana ©» fléur » janvier, mars, octobre et novembre. : E fruit » juin, avril et novembre. Calophyllum calaba : » . fleur » janvier et juin. Schmidelia viticifolia — » fleur » avril, mai et octobre. » — fruit » mars, octobre, novembre et décembre. ( 108 ) fructifient pendant tout le cours de l'année (1). « C'est à l'influence fé- » condatrice de ce climat, nous écritil, qu'est due cette énergie proli- » fique qui force les végétaux à répandre au dehors une surabondance » de vie; c'est elle qui provoque, chez les plantes comme chez les ani- » maux, ce besoin incessant de reproduction. Là, nul repos dans les » diverses phases de la végétation, toutes les fonclions organiques s'o- | » pérent à la fois, et la fleuraison successive n'est que la conséquence | : » d'une nutrition continue. » | | . M. Ramon de la Sagra, en sempressant d'extraire les faits que nous venons de citer du journal de ses herborisations dans lile de Cuba, et de ses annotations sur les phénoménes de physiologie végétale qu'il à observés dans l'établissement confié à sa direction (2), nous a donné | une nouvelle preuve de son désintéressement , lorsqu'il s'agit d'accroi- À tre le domaine de la science, en ajoutant de nouveaux faits à ceux qu'il a déjà fait connaître dans plusieurs de ses écrits (3). Nous ne saurions trop louer un si beau zéle, et nous sommes heureux de pouvoir lui en témoigner ici toute notre gratitude. (1) L'assertion de M. La Sagra est d'accord avec tous les souvenirs que nous avons conservés de la vé- gétation des Antilles : aux Canaries méme, il est un bon nombre d'arbres et de plantes qui se trouvent dans le méme cas, et, dans plüsicurs localités, nous avons recueilli, en fleur et en fruit, presqu'à toutes les époques de l'année, le Laurus fœtens, le Viburnum rugosum, le Myrica Faya, le Bosea yereamora, le Zisnea Mocanera , etc. (2) Un autre fait, que nous devons également aux communications de M. La Sagra, prouve jusqu'à quel point la température peut influer sur le développement des fleurs, et retarder, accélérer ou méme prolonger leur épanouissement. : . Parmi les plantes cultivées au jardin botanique de la Havane se trouve l Hibiscus mutabilis, cette belle espèce dont les corolles s'épanouissent au lever du soleil, et passent, depuis le blanc le plus pur, par toutes les teintes de rouge, jusqu'au brun, dernier terme d'une existence qui finit au déclin du jour. Le 19 octobre 1827, la vie des fleurs de cette malvacée fut prolongée de dix-huit heures ; les corolles restèrent blanches pendant tout le jour, jusqu'au lendemain matin qu'elles recommencèrent leurs va- riations accoutumées jusqu'à midi, instant où elles se flétrirent. M. La Sagra observa, le 19, un abais- sement de température de plus de 3^ centigrades ; le thermomètre se soutint tout ce jour un peu au- dessous de 27° et remonta le lendemain à 30° centigrades, température nécessaire à l'accomplissement de ce singulier phénomène. | (3) Parmi le grand nombre de publications que M. Ramon de la Sagra a fait paraître successivement dans ces dernières années, ses Mémoires pour servir d'introduction à l'horticulture de Cuba (Memorias para servir de introd. a la horticul. Cubana. 1827 ) méritent d'étre cités comme les plus importans pour — MNA nnn i ( 109 ) Toutefois, malgré l'importance des observations de cet habile na- turaliste, on aurait tort de penser que tous les arbres des foréts des tropiques fleurissent abondamment. Dans les grandes masses de vé- gétaux, cette exubérance florifère n'est guère déterminée que par les causes accidentelles que nous avons expliquées plus haut; mais l'on peut assurer que le phénoméne de linflorescence n'est pas plus simul- tané parmi les espèces némorales que parmi celles qu'on rencontre hors des foréts, et qu'on ne trouve là rien de comparable à cette régularité d'action si frappante dans nos climats. Àu premier abord, dans les Catingas du Brésil, la végétation semblerait, par ses phases. s'assimi- ler en quelque sorte à celle d' Europe; les arbres qui peuplent ces bois perdent leurs feuilles au temps de la sécheresse, mais à cóté de ce pay- sage d'automne s'offre l'image du printemps (1), car les Catingas qui croissent au bord des riviéres ont conservé leur parure. L'apparition des feuilles et des fleurs est souvent méme instantanée dans les bois les plus dépouillés : « Qu'une pluie soudaine vienne tout-à-coup humecter » la terre, dit le savant Martius (2), un monde nouveau se montre » comme par enchantement, les branches dégarnies se couvrent aus- » sitót de verdure, et des fleurs nombreuses, en étalant leurs brillantes » corolles, exhalent au loin leur parfum. » : Il résulte de tout ce que nous venons d'exposer que, pendant tout le cours de l'année, les plantes croissent et se reproduisent sans discon- tinuité, en se disputant le terrain qu'elles ont envahi. De cette lutte de vitalité, de cette liberté d'action, résulte le mélange des espèces qui peuplent les forêts vierges des régions équinoxiales. e ses études. On trouve dans le premier l’histoire météorologique du pays qui a été long-temps l'objet d observations du plus grand intérét sur cahier de cette revue, oü il traite du climat de l'ile; une masse d’ les influences de la température considérées par rapport à la végétation. . (1) « Excitée sans cesse par ses deux agens principaux, l'humidité et la chaleur, la végétation des bois » vierges est dans une activité continuelle; l'hiver ne s'y distingue de l'été que par une nuance de teinte » dans la verdure du feuillage, et, si quelques arbres y perdent leurs feuilles, c'est pour reprendre aus- » sitót une parure nouvelle. » Aug. de Saint-Hilaire, Tab. de la végét. prim. dans la province de M. G. (2) Phys. Pflanz. Braz. 17. hk | ( 110 ) | C'est entre les deux systèmes d'action que nous venons d'envisager quil faut chercher les causes de la répartition des végétaux dans les forêts canariennes. Par son voisinage du tropique, cette région né- morale se trouve sous l'influence de deux grands climats; à cette lati- tude , les chaudes émanations de la zone torride sont amorties par la | | | fraîcheur des brises du nord, et les saisons, quoique moins tranchées | | | que dans notre Europe méridionale, exercent encore beaucoup d'in- | : fluence sur les plantes. Une végétation intermédiaire doit donc être le résultat de cetté température mixte, et c'est en effet ce que nous prouve l'observation. Dès lors, on peut concevoir comment les mêmes espéces peuvent former des groupes distincts ou se trouver enclavées , chacune individuellement , au milieu d'espèces différentes; comment encore.l'influence continue des milieux maintient ces associations ou ces isolemens, et de quelle manière enfin les arbres, ainsi réunis en société, peuvent se limiter numériquement et, jusquà un certain point, pendant de longues périodes. | . Mais tous les végétaux forestiers se sont-ils développés simultané- ment? Existait-il dans le principe d'autres rapports numériques! et quel était alors le degré de fréquence de chaque espèce? Une fois lan- EDEN ÁMETMEU mmm T cée dans le vague des conjectures, l'imagination va plus loin que les | | faits : les questions que nous venons de poser sont hors de notre por- - | i tée , et nous tenterions en vain de les résoudre. L'état de la végétation | avant l'envahissement du pays nous est entièrement inconnu; cepen- | | dant, malgré tous les changemens survenus, nous pensons que les es- | paces encore boisés représentent, sur une petite échelle, les grandes | forêts primitives. La nature, en jetant les germes des végétaux sur cette terre volcanique, les a äbandonnés aux circonstances qui devaient E i plus ou moins favoriser leur développement et leur propagation; | ceux-ci auront eu pour eux l'exposition et la température, ceux-là les | | | accidens et la qualité du sol. Toutes ces causes peuvent avoir agi en- | a semble ou séparément, et leur influence soutenue doit avoir contribué || wmm on ts mae PEATOED ANEETA DFE ( 111 ) à la stabilité de certaines: espèces dans les mêmes sites, il y aura eu auparavant des:arbres isolés pet! d'autres réunis par groupe; la végé- tation d'aujourd'hui n'est donc que la continuation de celle d'au- trefois ::elle a conservé avec ses caractères originaires son mode de distribution. Ainsi ,soit qu'on considère cette répartition topographi- . que dans son ensemble ou dans ses détails, il est probable qu'elle sub- sistera tant que les plantes se trouveront placées dans les mêmes con- ditions d'existence , et qu'aucune perturbation ne viendra troubler cet état normal. | | Avant la conquête des Canaries, la région laurifère devait s'étendre jusque dans le voisinage du littoral, partout où l'exposition et les autres causes influentes étaient venues favoriser le développement des arbres. Les premiers navigateurs qui visitèrent ces iles en ont parlé comme d'un pays boisé jusqu'à la mer; mais aujourd'hui les forêts sont loin du rivage. Lorsque Pedro de Vera et Alonzo de Lugo restèrent maîtres de la partie occidentale de l'Archipel, ils voulurent exploiter à leur pro- fit ce sol encore vierge, et les répartitions de terre entre les chefs et les soldats furent les premiers résultats de la victoire. Alors, à la guerre de spoliation succéda la dévastation des forêts: pressés de jouir de leur conquéte , les nouveaux maítres eurent recours à l'incendie comme au moyen le plus prompt pour accélérer les défrichemens, et poursuivi- rent ce système d ‘exploitation avec un acharnement inouï. | Bientôt tout changea d'aspect, les arbresindigènes cédèrent leur an- cien poste aux plantes exotiques, la végétation primitive fut refoulée par les cultures dans les sites les plus anfractueux, et les forêts, enta- mées-de toute part, s'ouvrirent en vastes clairières. Ces déboisemens prirent une telle extension que les chefs alarmés se virent contraints d'en arrêter les progrès. Lugo, plus clairvoyant que ses compagnons, rendit quelques ordonnances et voulut régulariser les plantations ; mais les mesures conservatrices auxquelles il eut recours ne firent que dudo funestes conséquences qu'il avait su prévoir. « T'énériffe ne ( 112 ) durera pas deux cents ans», disait-il, en dictant ses dernières volon- tés. Bien que cette prédiction soit devenue populaire aux îles Canaries, les habitans n'ont rien fait pour la démentir , et si l'époque fatale, dési- gnée par le conquérant , a été dépassée, elle ne peut être lointaine. Les administrations municipales, moins vigilantes que le premier chef, ont toléré la violation des réelemens forestiers; avec l'accroissement de population, les exigences des communes ont autorisé de nouvelles concessions , et les défrichemens, en s'étendant plus haut, ont encore empiété sur les bois. Toutefois, ces agrandissemens agricoles n'ont guère produit que des avantages momentanés ; les lavanges ont balayé les pentes des montagnes, un sol nu a dà céder à leur action, et, dans la saison orageuse, les torrens débordés de la région supérieure ont entraîné à la mer cette terre meuble que les grands arbres ne garan- tissaient plus. Le domaine du pauvre a toujours beaucoup souffert de ces pertes: la population de cet Archipel se trouve divisée en deux ca- tégories , les majorats et les petits propriétaires; les premiers, qui choi- sirent, à l'époque des grandes répartitions, surent faire leur lot avec avantage , tandis que les derniers venus n'ont plus eu pour eux que les mauvais terrains lorsqu'ils ont réclamé d'autres concessions ; mais le sol ingrat qui leur a été adjugé ne pouvant suffire à leurs besoins, il leur a fallu chercher d'autres moyens d'existence, et les bois ont été en- core leur unique ressource. C'est là l'histoire de tous les pays fores- tiers: aux Canaries comme ailleurs les montagnards vivent de la fo- rêt; le monopole du bois à brûler et dn charbon végétal leur est échu par droit de nécessité. De là ces incendies médiiés que nous avons vus se renouveler si souvent, et ces dévastations journalières que les lois ne répriment qu'à peine , et dont les progrés vont toujours croissans. "Tant de causes destructives, en amenant de grands changemens _ dans les forêts, ont fait disparaître sur plusieurs points de grándes masses de végétation. Néanmoins, les localités qui ont conservé des noms de plantes, peuvent servir à reconnaitre encore les anciennes DE PE er nee o a ep ra hl — 7 * DUMP " NM NS, v3 ý Pw \ moti LP ns ins ( 113 ) limites de la région des bois. Ainsi, à Canaria, les agrestes coteaux situés au midi de Valsequillo sont désignés sous le nom de 7. ega de los Mocanes (Vallon des Mocans), et pourtant ces arbres, jadis si abondans sur ces collines, ont cessé de s'y reproduire; il n'en existe pas un seul pied dans les environs. Dans la méme ile, à l'occident de la Ciudad de las Palmas, le hameau du Madroñal (des Arbousiers) vient rappeler une espéce qu'on ne retrouve plus dans cet endroit. Nous avons déjà observé ailleurs que les dénominations de Monte del Len- liscal et de Barranco de los Acebuches étaient appliquées, dans la grande Canarie, à des terrains garnis autrefois de Lentisques et d'Oli- viers sauvages (1). A Ténériffe, le pic du Laurier (el Pico del Lauro), qui domine la vallée du Palmar, n'est plus couvert que de Bruyères. Dans le district d'Orotava , l'Erica arborea est venu aussi remplacer les autres arbres qui peuplaient jadis les hauteurs d'Agua manza, et le nom de Monte Verde (bois vert), affecté à ces montagnes, subsistera encore aprés la disparition des Bruyères. Dans l'ile de Fer, les crêtes de Tygulahé ont perdu, avec leur vieux Til, les derniers restes des foréts qui boisaient cette chaine, et les habitans montrent encore avec re- gret la roche stérile de l Arbol santo (9). Dans d'autres lieux, des groupes d'arbres isolés sont les seuls indices des forêts primitives : à Ténériffe, le joli bocage de san Diego del Monte, enclavé dans l'enceinte d'un couvent de dominicains, ne doit sa con- servation qu'à cette circonstance. En longeant les collines qui avoisi- nent ce monastère, on rencontre cà et là quelques pieds de Bruyéres arborescentes ; des repousses de la méme espéce se montrent encore sur les crêtes pelées de san Roque aux environs de la Laguna; mais les (1) Voy. précédemment, pag. 74. - (2) Cet arbre merveilleux, auquel on a attaché sans doute une trop grande célébrité, et qui fournis- sait, dit-on , de l'eau à toute l'ile, parce que les vapeurs atmosphériques qu'il attirait sur lui alimen- taient probablement les eaux d'une source qu'ombrageait son feuillage , était appelé Garoé par les primitifs habitans de l'ile de Fer. Les auteurs canariens, qui ont parlé du Garoé , l'ont désigné sous le nom de T, ce qui rapporterait cette espèce au Laurus fetens d' Ait. III. 15 (114) sombres forêts qui entouraient la capitale de l'ile, à l'époque de la conquéte, sont concentrées maintenant dans les montagnes du nord- est. Ce n'est donc pas sans raison que M. de Buch a dit qu'Alonzo de Lugo, le fondateur de la Laguna, eût pu vivre assez pour ne plus aper- cevoir que de loin les bois qui touchaient à sa nouvelle ville (1). On peut suivre aussi les traces de l'ancienne végétation sur le pla- teau de Tegina (la mesa de Tegina), où l'on retrouve des Bruyères , des Myricas et des Lauriers; le Rhamnus glandulosus se reproduit en- core dans le vallon de Tegueste. L'existence de ces arbres sur ces di- vers points prouve évidemment que les foréts, qui bordent les som- mets des montagnes d'Anaga, s'étendirent autrefois sur tous les versans de cette chaine, et méme dans les vallées les plus rapprochées du littoral. Nos recherches dans la partie occidentale de Ténériffe nous ont fourni des indications analogues; le Pittosporum coriaceum, | aujourd'hui si rare, les Mocans, les Lauriers, et les Myrsines, isolés maintenant dans des endroits inaccessibles, devaient couvrir aupara- vant tout l'espace compris entre la pointe de Teno et le val de San lago. Lorsqu'on arrive dans le district de Buenavista , on est surpris de voir I Ardisia excelsa au milieu des vignobles dans une station qui n'excéde pas cinq cents pieds au-dessus du niveau de la mer. Cette espèce croit aussi dans la vallée de Taganana sur un rocher basaltique qui n'est pas trés-éloigné du rivage. A Madère, où la région des bois se compose à peu prés des mêmes espèces qu'aux Canaries, du côté de Ribeiro-frio, et dans les autreslgrands ravins du Nord, les forêts descen- dent presque jusqu'au littoral. Vis-à-vis de Santa-Cruz, il existe un ro- cher connu sous le nom de l’#/e de l'arbre : un superbe Ardisier s'élève au milieu de cet oasis (2), et sa présence dans cette localité semble- rait indiquer que Ardisia excelsa, abondait autrefois sur la côte ad- jacente. Ce nouveau fait, non moins concluant que ceux déjà cités - (1) Voy. Coup-d'cil sur la flore des fles Canaries ; Arch. de Bot., t. 1. (2) On y voit aussi un Olivier sauvage, Olea Europea. (115) | pour les iles Canaries, vient à l'appui de nos probabilités sur les déli- mitations des Ardisiers avant les défrichemens. Ces arbres garnis- saient sans doute la base des montagnes le long des versans septen- trionaux, et formaient ainsi la première zone de la végétation forestière. 1 | - Daus les iles les plus dépouillées de végétation, l'existence des bois primitifs nous a été signalée par la présence d'arbres que les circonstan- 1 ces de localité avaient garantis des dévastations. Nous avons fait remar- | quer précédemment (1) quà Lancerotte quelques pieds de Myrica Faya | et d'Erica arborea s'étaient conservés sur les cimes de Chaché à 1773 ] | pieds d'élévation , et que dans l'ile de Fortaventure, les Pistachiers et | les Bruyères arborescentes repoussaient de loin en loin sur les monta- gnes arides de la Peña. Ces espèces pourraient repeupler les endroits où elles végètent encore, si la nature du terrain ne s'opposait à leur propagation; mais, une fois que le massif de l'île a été mis à nu, la force germinatrice ne s'est plus trouvée en rapport avec les élé- { | mens extérieurs, l'action atmosphérique a pris le dessus et a miné 1 : la montagne; les vents, le soleil, les orages, toutes les intempéries sont venus changer la constitution du sol, et frapper peut-étre d'une stérilité éternelle ces crétes décharnées et leurs immenses blocs de lave. Cependant, dans les îles qui ne sont pas encore arrivées à ce dernier terme de décadence, comme à Canaria, à Ténériffe , à Palma, et surtout à Gomére, les foréts tendent à se reproduire partout où la terre reste en friche, bien que cette renaissance s'opére lentement, quelle ait besoin du concours de plusieurs circonstances favorables, et que le renouvellement des espéces némorales soit toujours précédé de l'apparition alternative d'autres plantes. Nous allons rendre te E SR pu A e compte de nos observations sur ces différentes périodes d'alternance. Parmi les arbres forestiers, le Myrica Faya se reproduit de préfé- x Ten FN Li ict EUM (1) Voy. chap. ter, pag. 6 et 7, et supp., pag. 32 et 34. Xe MR cuite cir Ra, v I t ( 116 ) rence aprés les déboisemens. Les Lauriers et les autres espèces ne se montrent plus dés qu'on commence à défricher; mais si la terre reste abandonnée à elle-méme, on les voit pousser derechef. Lorsque de nouveaux défrichemens ont détruit les Fayas, les Bruyères ne tardent pas à se montrer en grand nombre, et enva- hissent tous les environs. Ce ne sont plus alors que des sous-ar- brisseaux dont les dimensions diminuent progressivement en rai- son de laltitude des lieux où ils croissent. Dans cet état, ces sortes de bois nains ressemblent à ces brandes incultes. du midi de l'Europe, où cette méme espèce se trouve mélée avec plu- sieurs de ses congénères. Les variations de la température, en modifiant la nature du sol, occasionnent le rabougrissement que l'on observe dans les Bruyères à mesure qu'elles se répandent sur des espaces découverts pour s'avancer vers la haute région. Au milieu de l'atmosphére humide des bois, et sur un terrain chargé d'hu- mus, l'Erica arborea mérite bien le nom qu'elle porte; ses dimen- sions égalent alors celles des autres arbres forestiers, mais, en se rapprochant des stations supérieures, elle trouve à la fois un air plus raréfié, un sol maigre et desséché : les grands végétaux ne lui prétent plus leur ombrage, et, tandis qu'elle atteignait cinquante pieds de hauteur à côté des Lauriers , elle n'est plus qu'un chétif buisson à laltitude de six cents toises. Les envahissemens des Bruyères s'étendent maintenant sur un espace considérable, et se sont tellement accrus depuis: la "destruction des forêts, quon peut assurer que cette espéce a envahi aujourd'hui une étendue de terrain trois fois plus grande que celle qu'elle occupait avant - l'établissement des Européens. Si la nature du climat et du sol ne sopposait dans ces iles à la force expansive des Bruyères, elles - S'étendraient encore bien davantage vers la haute région; mais, à Cette latitude, la masse des nuages qui se fixe sur les versans des montagnes de la bande du nord ne dépasse guére quatre mille vu. ( 117 ) pieds; au-dessus, la terre est séche et aride comme sur la cóte. Ainsi, tandis que, sur le revers septentrional de la chaîne canta- brique, l'Erica arborea arrive jusqu'à environ cinq mille pieds dans les vallées du Narcea et du Naviego, selon les observations récentes de M. Durieu (1) la même espèce, qui prend un développement si extraordinaire dans les foréts canariennes, atteint à peine cette alti- tude sur les montagnes de cet archipel. Mais, en comparant les deux localités, il faut tenir compte des circonstances climatériques qui les distinguent et de la différence de leur sol. Dans la chaine des As- turies, l'hiver est de bien plus longue durée qu'aux Canaries ; de grands amas de neige couvrent; pendant toute cette saison, les som- mités culminantes, les brouillards y régnent presque toujours, et les pluies y sont trés-abondantes. Cette humidité permanente alimente les sources qui arrosent le pays, et contribue au développement des bois qui le couvrent. Aux Canaries, au contraire, la neige ne reste que très- peu de temps sur le pic et sur les cimes qui lavoisinent. La nature volcanique et l'excessive sécheresse de la partie centrale des îles re- poussent la végétation : aussi le peu d'espèces qui saccommodent de ces conditions d'existence sont presque toutes propres à cette région, et la plupart ne peuvent que difficilement s'acclimater ail- - hrs: - | | ba Lorsqu'aprés un défrichement opiniâtre, on est parvenu à dé. truire les Bruyères, une autre plante vient les remplacer : c'est le Pteris aquilina, le désespoir des botanistes, car cette fougère est toujours l'indice d'une contrée appauvrie, et l'annonce d'une herbo- risation infructueuse. On retrouve ce Pteris dans presque tous les climats du globe; il est connu aux Canaries sous le nom d'Zele- cho, et croit à toutes les hauteurs, depuis les coteaux maritimes jus- _ que sur les sommets des montages. L'intérieur des forêts est le seul (1) Ex Gay, In Duriei itin. Asturico „inéd. Soest suene itr i í " —T - " á 2 ere E aie REN "uS UM uS d k D dd z y - M —Á à - à ~ m T, - f nd a : Er y^ 3s af ds 58 s —nÜ Loa p~ ra. ho E t ^ AS tam «m x ~ = OMM M -g — +$ — € mew. — - M v n E "T RS ——— E Me es de ic MUN cs » ceret - T^ - 2e esc TI el; cmm semen e eed — n Eo z F pe — S: MM ( H8.) endroit qui semble ne pas lui convenir; il fuit l'ombre des grands | arbres; mais, après les déboisements, il apparaît aussitôt parmi les Bruyéres, et subsiste encore long-temps aprés elles. La présence de cette malencontreuse Fougére n'est pas méme compensée par les ressoüirces alimentaires qu'elle fournit aux habitans dans les temps ON Bd 7 de disette (1). Par ses apparitions spontanées on peut la comparer au Pteris caudata, qui pousse au milieu des cendres aprés l'incendie des foréts dans l'Amérique méridionale (2). Le Capim gordura des Brési- liens (Tristegis glutinosa), autre plante qui envahit les nouvelles friches, et sur laquelle M. Auguste de Saint-Hilaire nous a donné des détails | si curieux (3), et le Carreist des Majorquais, dont les envahissemens ont été observés par M. Cambessedes (4), offrent aussi beaucoup d'a- nalogie avec notre Pteris. Plus vivace pourtant que la graminée du | | Brésil et celle des îles Baléares, l'Æelecho des Canaries, dont rien | narréte les progrés, pousse de nouveau au milieu des cultures, et sy multiplie avec une étonnante rapidité. Ce n’est qu'après bien des 1f tentatives qu'on parvient à l'extirper, il reparait méme encore dés ) que le terrain reste vacant, et finit par lasser la persévérance du | laboureur. L'Erigeron viscosum, connu aux Canaries sous le nom d'Æltabaca, - (1) Dans les districts du nord-est de l'ile de Palma , les habitans ne font usage que de la farine d’hele- cho pour leur nourriture journalière; mais cet aliment est loin de satisfaire leurs besoins. Les bois pi- | nifères des alentours de Guara ifia et de Tiraxafe, qu'exploite cette population languissante, ne lui offrent que bien peu de ressources , €t chaque année des familles nombreuses sont obligées de s'expatrier pour aller chercher sur un sol moins ingrat d'autres moyens d'existence. | (2) Voy. Auguste de Saint-Hilaire » Tableau de la végétation primitive dans la province de Mines-Geraes. (3) Voy. Idem. Idem. (4) « Le Donaz tenax , nommé Carreigt dans l'ile de Majorque , dit M. Cambessedes , vit en société | » sur les montagnes dépourvues d’arbres ; et les paysans , afin de se procurer plus abondamment cette | » plante, qui sert de nourriture à leurs mulets , mettent le feu aux forêts de Chênes et de Pins qui les | » entourent. Dès l’année suivante, le sol est couvert de Carreigts qui envahissent tout le terrain, laissant | | | » à peine quelques places aux Cistes, aux Pistachiers lentisques et à quelques autres arbustes qui vége- » tent au milieu d'eux. Dans les forêts anciennement détruites on voit quelques Pins, et plus rarement » quelques Chénes, qui cherchent à reconquérir le sol de leur patrie ; mais ils sont de longues années » avant d'avoir subjugué les Carreigts qui poussent partout avec vigueur. » Voy. (Enum. plant. quas in ins, Balear. collegit. J. Cambessedes. Introd.) Mém. du Museum, pag. 189, tom. xiv. l——— 1 | $ ! | H ? d à i $ | f \ 1 E à à k qo M i — 2. wi n —: | ZA. k Epp VAE à aens o MR - Que Ea eaim -— nn. y Wu —À -e ma -— -— n PE aa ( 119 ) est, après le Pteris aquilina, la plante qui abonde le plus aux Canaries: elle croit de préférence dans les clairiéres qui se forment dans la ré- gion des Pins. Assez semblable à l'Helecho par ses habitudes, F Ka- baca s'empare des terres en friche aussi bien que des champs cultivés, apparait spontanément dans des localités différentes, n'a point de sta- tion bien déterminée, et ne semble pas faire plus de cas des expositions que du climat et de la nature du sol. A Canaria, on rencontre cette plante vers la cóte, dans le fond des ravins, puis dans les vallées de l'intérieur, sur les collines qui les entourent, et jusque sur les crètes les plus élevées. A Ténériffe, elle abonde dans la plaine de la Laguna, couvre les coteaux du nord, et reparait encore sur les plages arides de la bande du sud. . | | Avec l'Erigeron viscosum, lorsque le Pteris aquilina ne vient pas exclure les autres espèces, les Cistes,: les Asphodèles et les Helianthè- mes (1) se montrent aussi en grand nombre dans les terrains pini- feres. À Canaria, el Ilano de las Gamonas, la plaine des Asphodéles occupe un petit plateau qui fut jadis couvert de Pins; à Ténériffe et à Palma, les diverses plantes que nous venons de citer abondent dans les mémes stations. Toutefois, on rencontre plus particuliérement le Cistus monspeliensis sur le revers méridional des montagnes : c'est seulement de ce côté qu'il arrive jusquà la région des conifères ; mais le Cistus vaginatus occupe sur les deux versans un espace bien plus considérable, et envahit souvent les plateaux misà nu aprés la destruction des Pins. D | Les diverses mutations auxquelles les forêts sont assujetties, depuis qu'elles perdent leur aspect primitif jusqu'à ce que la terre épuisée ou livrée à d'autres plantations ne puisse plus les reproduire, offrent (1) Cistus vaginatus. — monspeliensis. Asphodelus fistulosus. — ramosus. Helianthemum guttatum, etc. ( 120 ) une série de remarques curieuses pour l'histoire de la végétation, et l'on doit regretter que jusqu à ce Jour ces sortes d'observations aient été trop souvent négligées. M, Auguste de Saint-Hilaire, dans plu- sieurs écrits remarquables (1), a recherché les causes qui ont amené de grands changemens dans les forêts du Brésil, et a indiqué les dif- férentes phases par lesquelles a passé la végétation de cette belle contrée, depuis qu'une population plus active a débordé ses ancien- nés limites. Les savantes observations qui fixèrent l'attention de ce botaniste durant ses longues courses dans l'Amérique septentrio- nale, doivent différer de celles que nous fimes nous-mémes sous une latitude en dehors des T ropiques; mais les considérations géné- rales quon pourra déduire de l'ensemble des faits présenteront des | ; ] analogies qui seront appréciées par les agronomes. En comparant ce 1 que dit M. Auguste de Saint-Hilaire de la végétation némorale dans l'intérieur du Brésil avec nos propres remarques sur la région des | Bois dans l'archipel canarien, l'on verra que les Catingas de l'Amé- 1 rique centrale, si ressemblans à nos taillis d'Europe (2), ou peut-étre mieux encore les Carrascos, sortes de bois nains trés-épais et compo- sés en grande partie d'une synantherée à feuilles de Bruyère (3), sont représentés aux Canaries, tantôt par les Bruyères à balais, l Erica scoparia, tantôt par l'Erica arborea rabougrie, ou par les Cistes, sui- vant les expositions. Quant au Pteris aquilina, on a dà déjà remar- quer les rapprochemens qui existent entre les envahissemens de $ cette fougère et ceux du Pteris caudata et du Tristegis glutinosa. La végétation, quoique moins variée qu'au Brésil, présente donc sur le sol des Canaries des transitions et des circonscriptions analogues : dans cet archipel se montre d'abord la verte région des (1) Voy. Mémoire sur le Système d' agricult. adopté par les Brésiliens, et les résultats, etc. , dans les Mém. du Museum, vol. xiv, l'introduction à l Histoire des plantes les plus remarquables du Brésil et du Paraguay. (2) Voy. Tableau de la végétation primitive dans la province de Minas- Geraes , extrait des Ann. des i Sciences nat., septembre 1831, pag. 25. ) (3) Idem , idem , pag. 97. 1 ( 494 )) Lauriers, puis viennent les Fayas et les masses de petites Bruyères, en- suite les Cistes, aprés eux les Pins, et en dernier lieu les grands pla- teaux couverts de légumineuses frutescentes. Ainsi, en partant des bords de la mer, dans cette immense province des Mines, qu'il était dà à lillustre auteur que nous nous plaisons à citer de nous faire connaitre, on passe successivement des grandes foréts vierges aux Catingas, de celles-ci aux Carrascos et des Carrascos aux Cam- pos (1). « Les foréts du Brésil, nous dit encore M. Auguste de Saint-Hilaire, » retournent à leur vigueur première en repassant, en sens inverse, » par les phases qui les avaient réduites à ne plus offrir que d'humbles ^ graminées. » Selon les observations de ce botaniste, lorsque la couche des vieilles tiges du Capim gordura finit par étouffer les nouvelles pousses, cette graminée commence à dépérir; alors apparaissent de jeunes taillis désignés sous le nom de Capoeiras , et formés presque entièrement de Baccharis; bientôt des arbres plus élevés les font dis- paraitre, et les grands bois reprennent peu à peu leur ancien poste (2). Durant notre séjour aux Canaries, nous avons été témoins de cet heureux retour de la végétation à son état primitif, bien que, sur plu- sieurs points, celte renaissance se trouve arrétée par des circonstances de localité. Nous voulons parler de l'excessive inclinaison du sol, dont les pentes, aprés la destruction des foréts, en cédant à l'action des eaux pluviales, se dégarnissent facilement de la couche d'humus qui les re- couvrait, et restent ainsi privées pour toujours des élémens qui pou- vaient faciliter la reproduction des végétaux. Cependant, malgré ces obstacles, il est plusieurs faits concluans que nous avons eu le temps d'observer, et que nous rapporterons ici. En 1815, un incendie avait presque entiérement consumé les foréts —— (1) Voy. Tableau de la végétation Sd dans la province de Minas- Geraes , extrait des Ann. des Sciences nat., septembre 1831, pag. 8. 1 (2) Idem , idem , pag. 12. III. IS H A 1 1 t Li ( 122 ) de Lauriers qui couvraient les montagnes de /a Resbala, dans la vallée d'Orotava : depuis cet événement, l'administration locale empécha toute dévastation dans l'espérance de voir renaître ces bois dont la perte était généralement sentie. Déjà, en 1820, à notre arrivée à Téné- riffe, les Bruyères se montraient en grand nombre parmi. les Pteris. Nous avons suivi pendant dix ans les progrés de cette végétation aban- donnée à elle-méme, et, en 1830, les Lauriers (Laurus Canarien- sis, Nob.), les Fayas et quelques Viburnes recommençaient à couvrir la montagne. Dans la partie méridionale de la méme ile, des coupes trop multi- pliées avaient dépeuplé les terrains pinifères qui dominent le bourg d Zrico; il ne restait plus que quelques arbres : les Cistes, les Pteris, - les Érigerons et les Asphodèles étaient venus remplacer successive- ment l'ancienne végétation. Mais, après quelques années, ce sol dé- laissé reprenait son premier aspect, et une génération nouvelle, en se pressant en masse, chassait peu à peu devant elle les plantes qui avaient envahi son territoire. Toutefois, après la lutte qui s'établit entre les espèces qui répoussent en même temps ou se succèdent tour à tour avant la renaissance des forêts, les plantes usurpatrices ne dis- paraissent pas entièrement, plusieurs continuent à se montrer isolées ou réunies par petits groupes au milieu des clairières et sur la lisière des bois. M. Dureau de la Malle a eu occasion de faire la méme remar- que en France, dans les forêts du département de l'Orne : « Dans les » Clairières des futaies du Perche, j'ai vu, depuis trente ans, les plantes » sociales, telles que les Airelles et les Bruyères, alterner plusieurs fois, , » et se succéder tour à tour. Je n'ai jamais vu pourtant s'opérer la des- _» truction totale d'une de ces espèces; l'une ou l'autre seulement pré- | > domine avec une supériorité excessive. Le parti vaincu et non détruit _» répare peu à peu ses forces , se relève de ses pertes, et finit par asser- > vir son vainqueur, sans l'exterminer. Puis le cercle alternatif d'infé- > riorité et de supériorité, de prédominance et de subjection , recom- deux dernières catégories d'arbres, sera peut-être de cinquante ans ( 123 ) » mence. » (Mém. sur I Altern.; Ann. des Sc. nat., vol. v, p. 360, 1825.) La renaissance des bois se trouvant subordonnée aux circonstances climatériques qui peuvent accélérer ou. retarder la végétation , sa du- rée doit nécessairement varier selon les pays; mais la qualité des ter- rains et la nature des arbres sont aussi des considéra tions qu'il ne faut pas négliger lorsqu'on veut apprécier numériquement les périodes de ce phénoméne. D'aprés nos propres observations, nous sommes portés à évaluer de quinze à vingt ans le terme de la renaissance des foréts canariennes, dans les endroits propices. Si on a égard aux remarques des deux naturalistes , dont les observations nous ont fourni déjà tant de points de comparaison (1), on peut fixer approximativement ces termes à dix et à quinze ans , suivant les localités, dans la zone torride; à trente ans pour les bois blancs, tels que Saules, Peupliers, etc., dans les contrées de l'Europe tempérée, et à cinquante ans pour les bois durs, comme Chênes, Hétres et cer taines espèces de Sapins. La diffé- rence que nous établissons entre les termes de renaissance, pour les pour les premiers et de quatre-vingt ou quatre-vingt-dix ans pour les seconds, dans les pays du Nord. En réunissant à nos considérations, sur l'alternance des végétaux, les observations déjà consignées dans plusieurs ouvrages sur les apparitions spontanées des plantes sociales dans les lieux qui ne les possédaient pas auparavant (2), et la ra pide mul- üplication de celles qui , d'abord isolées sur de petits espaces, finissent par s'emparer d'une grande étendue de terrain (3), on ne peut douter que ces phénomènes ne soient subordonnés à une loi générale; mais ee sen NE 2 ge ee ET E (1) Dureau de la Malle, Mém. sur l Altern., p. 357.— Aug. de Saint-Hilaire, Tableau de la végétation primitive dans la province de Minas- Geraes, pag. 12. (2) Un fait des plus curieux en ce genre est celui cité par Ray (Hist. plant.): le Sisymbrium Irio n'avait jamais été vu dans les alentours de Londres avant le terrible incendie de 1666; mais, aprés ce désastre, il apparut spontanément au milieu des cendres et sur les décombres des quartiers incendiés. Depuis lors cette espèce est devenue une des plus abondantes des environs. 7 (3) « Un de nos Myagrum, dont le premier pied parut, ii y a dix ans, sur les murs de Monte- Video, | CE... Donne citi e dB a a uu m tre ec " m " ( 124 ) il importe d'étudier les modifications qui résultent de cette loi dans des climats différens, afin d'acquérir de nouvelles données sur la marche et les progrès de ces reproductions alternatives, qui semblent avoir pour but la conservation des espèces et le retour de la végétation BE E à son état normal. Toujours constante dans ses créations, qu'elle varie | | suivant les pays, la nature tend, par ses reproductions successives, à | l | | rajeunir cette terre pour elle inépuisable, Ainsi , sur le sol de la Russie, | les Framboisiers, les Bouleaux et les Sorbiers viennent tour à tour remplacer les bois pinifères (1); dans le nord de la France le Z’acci- | num myrtillus, les Genets et différentes espèces de Bruyères succèdent aux Chênes et aux Hétres, (2), tandis que, dans les provinces du lit- toral dela Méditerranée, ce sont les Lentisques , les Cistes et les Chênes FE ! nains qui commencent à se montrer, lorsque les grands arbres ont été abattus. Aux îles Baléares, le Donax tenax occupe la place des "mr foréts aprés leur incendie; dans l'Amérique septentrionale, plu- sieurs espèces de Peupliers naissent au milieu des cendres des Sapins Spruce (3), et à l'ile de France, le Rubus rosæfolius pousse de toute part, aprés la destruction des bois-vierges (4). Ces espèces sociales vien- nent préparer la terre à de nouveaux produits ; cependant, malgré les T E MÀ | prévoyances de la nature et son immense pourvoir, il est des lieux où : | |. A elle tenterait en vain cette régénération, et nous devons convenir que, dans l'archipel qui a été plus particuliérement le but de nos observa- tions, le sol a éprouvé sur plusieurs points de trop fortes révolutions Ir $ ENT A « couvre, presqu'à lui seul, tout l'espace entre cette ville et son faubourg. » Tues de Saint-Hilaire, Voyage au Brésil, pag. 371. Voy. Mém. du Mus., 5° année.) M. D'Orbigny nous apprend encore que, dans les pays qu'il vient de parcourir, plusieurs acd r Ses, voisines de nos espèces européennes, se multiplient en masse, aussitôt que des circonstances favo- rables viennent accélérer leur propagation, et qu'elles envahissent alors les e" du Rio de la Plata et de l'Urugay. (1) Observation de Georgi et Pallas. (Voy. Dureau de la Malle, Mém. sur l Altern.) (2) Voy. précédemment. (3) Abies alba et nigra. (Voy. Mackensie, Voyage dans le nord de l Amér. sept., t. 1, pag. 360.) (4) Observation de M. du Petit-Thouars: DATE ur a e e t (rnm mto i We A CES | | | v ( 125 ) pour redevenir ce qu'il fut autrefois. Nous ne saurions trop le redire, l'occupation des Canaries par les Européens a eu une influence immé- diate sur la marche et les changemens de la végétation : la destruction complète des forêts en sera la dernière conséquence. Peu soucieux de l'avenir, les nouveaux occupans ont poursuivi le système de dévasta- tion qui commenca aprés la conquéte; cette imprévoyan tôt ou tard les résultats les plus funestes, si tous les propriétaires ru- raux, comprenant mieux leur propre intérét, ne veillent davantage à la conservation de ces bois protecteurs qui fertilisent les vallées agri- coles, et les préservent des débâcles de la haute région. Un jour s'éton- nera-t-on, peut-être, de ne plus rien retrouver dans cet archipel qui rappelle la végétation primitive; tous les arbres auront disparu, quel- Cistes perdus au milieu des Pteris signaleront à peine les lieux qu'ombragèrent les Lauriers et les autres grands végé- taux. Déjà cette triste destinée a excité les regrets d'un de nos devan- « Ces îles Fortunées, a-t-il dit, où la nature avait répandu tant t des rochers arides au milieu de l'Océan... ce doit amener ques Bruyéres et des ciers : » de charmes, deviendron » Nos Flores rediront les arbres et les plantes qui les couvrirent , et la » postérité n'osera y ajouter foi (1). » En 1526, lorsque l'Anglais Thomas Nicols visita Ténériffe, l'ile était presque entièrement couverte de bois. Galien de Béthencourt, qui a traduit en vieux langage la relation de Nicols. s'exprime en ces termes : Deux mille plus bas (que le pic de Teyde ) s'y rencontrent quantité de grands et puissans arbres qu ils appellent V’inaticos, et dont le bois est grandement pesant et solide. Ils ont aussi une autre es- de bois qu'ils nomment Barbuzano, qui ne pourrit point dans ] mesmes des milliers d'années , et outre Iceux ssous desdits arbres vous. iroueez pec? l'eau, y demeurast i plusieurs "Pins et Sapins. Au de grande quantité de Lauriers, qui contiennent dix ou douze milles de (1) Physical. Besch. der Can. Ins., p. 128. ( 126 ) i \ pays, chose très-délectable au voyageur : car, outre leur perpétuelle et gaye verdeur, s'y nourrissent infinis oysillons qui chantent très- doucement (1). | | ti Dans l'état actuel, si l'on fait exception de quelques districts privi- légiés, les. forêts canariennes, qui se pressaient en grande masse depuis la base des montagnes jusquà une grande élévation , se trou- vent isolées maintenant comme des oasis, ou sont cachées dans les d US Este À gorges les plus anfractueuses; bientôt de nouveaux défrichemens, secondés par des incendies, Jes traqueront dans les endroits les plus inaccessibles. Avant qu'elle ne disparaisse tout-à-fait du sol qui la produite , tâchons de décrire ce qui reste de cette végétation qui décroit chaque jour, et montrons-la encore telle que nous l'avons souvent ad- h mirée, avec ce qu'elle a conservé de ses beautés-vierges el de sa frai- | t I | cheur première. | i rier: Pari r . s€- (1) Hist. de la prem. descouv. et conquest des Can., par Bontier et le Verrier ; Paris, MDCXXX. Voy conde partie. Traité de la navig. et des voy. de descouv., par Galien de Bethencourt, p. 227. rmi» 0-0-O-Q-O- K ( 127 ) . CHAPITRE QUATRIÈME. DESCRIPTION DES FORÉTS. Siempre desea florecer la Oliva, Destilar de las peñas miel sabrosa, Y con murmürio blando la agua viva Baxar del alto monte presurosa : Templar el ayre la calor estiva, De suerte que à ninguno sea enojosa ; Y enfin, por su templanza, lauros, palmas, Ser los Campos Elyseos de las Almas. CAYRASCO. FORÉTS DU NORD-EST DE TÉNÉRIFFE. Ténériffe, la grande Canarie, Palma, Gomére et l'ile de Fer pos- sédent encore des beaux restes de ces forêts primitives qui les cou- vrirent presque en entier; Gomére, surtout, a toujours été citée comme la plus peuplée d'arbres, et, si lile de Fer, par son peu d'étendue et la sécheresse de son sol, ne renferme pas de grands bois, elle a pour elle ses Genévriers, ses Pins et ses Mocans. C'est principa- lement dans les trois premiéres iles que l'on trouve les foréts les plus étendues ; celles de Ténériffe n'ont été bien appréciées que par les bo- tanistes qui ont visité l'ile en détail : la plupart des voyageurs, qui n'ont fait que stationner à Sainte-Croix, nont pu croire aux beaux sites de l'intérieur et à la fraicheur de leurs ombrages. Et quelle idée pouvaient-ils se faire du pays, à la vue des monts décharnés qui entourent la rade, surtout lorsque, dans leurs herborisations im-. provisées, aprés avoir franchi les escarpemens de la côte, et s'être en- foncés dans les anfractuosités des ravins, ils ne rapportaient de leurs courses aventureuses que quelques espéces ramassées à grand'peine e idu rodeo iohannes ml, s Mem e, pre gt i seno + z ne AP dl mih £ TE ins TU P an yes a a pe Li re A estin PPS E semi nd e inaasa enr - le gpa TCR o^ mee t LG Re occ me RENE o tees © s - "e m " Mirum LEE re e e t ra ——— M À— a—PnÓÀ' » — — ( 128 ) sur ce sol tourmenté. Cependant, c'est de cette rade, dont les abords sont si nus, qu'on découvre la magnifique forét de La Laguna : elle apparaît dans le lointain , au-dessus des collines cotières, et se dessine en masses d'un vert obscur sur les premiers versans des montagnes du nord-est de l'ile. En 1801, lors de son séjour à Ténériffe, M. Bory de Saint-Vincent visita une partie de ces bois alors bien plus étendus qu aujourd'hui; trente-cinq ans d'intervalle n'ont pas diminué sa juste admiration , et tous les entretiens que nous avons eus avec le spirituel auteur des Essais P les Fortunées, nous ont prouvé que ces beaux lieux étaient encore présens à son souvenir. « Au nord se trouve cette » forét sombre et inimense qu'on distingue de la rade, entre les mon- .» lagnes et au fond d'un vallon. Je n'entreprendrai point, disait -il » dans son intéressante relation, de décrire sa majesté, ni l'impression » que me causérent ses productions et son ombrage (1). » Ces bois prennent différens noms selon les districts auxquels ils ap- partiennent : celui de Forêt de La Laguna ou Monte de las Mercedes est seulement Æpplicable à la partie située au nord de l'ancienne capi- tale. Ces masses de verdure s'étendent jusque sur les bords de la vallée, et couvrent toutes les hauteurs voisines. Parmi les Lauriers, le Lauro et le Viñatico (2) sont les deux espèces les plus nombreuses, les Bar- busanos (3) y sont rares; mais, à mesure qu'on se rapproche de la créte des monts, les T; ils (4) deviennent très-abondans et se trouvent tous réunis sur les mêmes pentes. Les Fayas et les Hixas (5), deux autres espèces très-répandues, forment des groupes isolés sur la lisière orien- tale. Pendant la belle saison on accourt de toute part à la Mesa poux jouir de la fraîcheur de ce bocage : les Viburnes y croissent à labri (1) Essais sur les îles Fortunées , pag. 950. (2) Laurus Canariensis et Laurus Indica. (3) Laurus Barbusano. (4) Laurus f«tens. (5) Myrica Faya et Cerasus Hiza. ( 129 ) des Lauriers, le Convoleulus des Canaries se roule autour des arbres, et grimpe comme une Liane jusque sur les branches les plus éle- vées: la Cinéraire à feuilles blanches (1) et la Renoncule de Téné- riffe (2), confondues avec les Fougères, couvrent le sol, et se pressent en masse sur les bords des cours d'eau. Du beau site de la Mesa, on jouit d'un coup-d'œil ravissant : l'agreste vallon de La Laguna, les montagnes de l'Esperanza, et, au-dessus, le pic de Teyde quiattire au- tour de lui toutes les vapeurs de l'atmosphère, tel est le paysage que nous avons táché de reproduire dans la planche 19. ( Voy. part. hist.) Avant 1826, El Llano de los Viejos était aussi un des sites qu'on allait visiter de préférence; mais un ouragan la presque entièrement ravagé; les plus beaux arbres ont été déracinés, des éboulemens consi- dérables ont changé l'aspect des lieux, et il est à craindre que cette partie de la forêt ne puisse de long-temps réparer ses pertes. Les Bruyèresarborescentes (Erica arborea) couvrent tous les terraïns qui s'étendent au nord-ouest; mais vers Bajamar, et au-dessus du petit vallon de La Goleta, les arbres de haute futaie reparaissent en grand nombre. Ce sont les mémes espéces que nous avons déjà citées, entremélées d'Ardisiers, de Sanguinos (3) et de Marmilans (4). Sur les versans méridionaux, principalement. dans les environs de Las Mer- cedes, les br uyères à balais (Erica scoparia ) forment à leur tour une |] | | | il | | végétation distincte, et qu'on ne trouve pas autre part. Les bois sont disposés de ce. côté par petits groupes dans chaque repli de la mon- tagne, tandis que sur les versans opposés ils garnissent toutes les pen- tes, et descendent jusque dans le fond des vallées. Vers Taganana la forêt prend le nom du bourg (5) et recommence à se peupler d'espèces variées jusqu'au-dessus du cap d'Anaga, où de petites Bruyéres et (1) Cineraria lactea. — (2) Ranunculus Teneriffe. (3) Rhamnus glandulosus. (4) Myrsine Canariensis. (5) Monte de Taganana. HI. 17 E 5 z Pen GR ht ntn tam m v —Rn -e += > T op € teneurs F ( 130 ) quelques repousses de Genévriers et de Pistachiers (1) rappellent en- core les arbres qui ombrageaient autrefois les districts du Sabinal et d’ Almacigo. Cette région forestière occupe ainsi une étendue de six lieues de pays sur trois quarts de lieue environ de largeur. (1) Juniperus thurifera et Pistacia Atlantica. Les Isleños ont donné le nom de Sabina à la première de ces deux espèces, l'autre est appelée Almacigo. —— or eur ge di tr ar anu tato ame, amem - p- Ton D ELA D — sod tn ah «Sd date E i Lit AM min ot e sire i AS. Lex Morata v ac -— TUNER SENA one aciei RU "- — T rale Porai en * ( 131 ) { | |... FORÊT D'AGUA-GARCIA, | ~ | La forét d'Agua-Garcia est, après celle que nous venons de décrire, - a la plus i impor tante de Ténériffe : la végétation sy montre dans tout son luxe; elle est située sur les pentes septentrionales de l'ile, et com- E mence à environ 1,200 pieds au-dessus du niveau de la mer, mais m" elle ne remonte pas, dans l'intérieur, à plus de 3,000 ; passé ce terme, |" les grands arbres cessent de se reproduire, et les Bruyères rabougries x couvrent seules tous les terrains supérieurs jusqu'à l'altitude de 1 4,200 pieds. | i E Quoique bien moins étendue que celle de la Leu la forêt d'Agua- i E Garcia offre une plus. grande variété d'espèces : l Adenocarpus Jolio- r | losus abonde sur sa lisière, et y remplace le Genista C anariensis des P bois de las Mercedes; le Cerasus Hixa n'y croit pas; mais avec la i .. masse des Lauriers, des Fayas et des autres arbres, on y trouve l Erica 4 | arborea d'une grandeur peu commune, lIlex Perado à la tige élan- i | cée, le Mocan, le Boehmeria rubra, YOlea excelsa, le Marmilan (1) et l | l A ceeino (2). Parmi les. plantes némorales , on y remar que principale- | 3 L | ment l'Hippion visqueux, le Bystropogon et la Digitale des Canaries ; | 3 à | le Bicacaro (3) aux brillantes cloches, les Salsepareilles (4) et la Ga- à a 1 | rance frutescente (5) s'entrelacent dans les halliers. Cette verdure sans À | à cesse renaissante garnit les moindres vides, les clairières sont envahies | A 1 is | à l'instant, et d'autres arbres viennent bientót augmenter le péle-méle | B | . général. Au milieu de cette atmosphère de rosée qui pénètre les plantes, | 1 à 1 la sève coule à pleins bords; l'on dirait que la nature a voulu réunir i \ d | | | | LM (1) Myrsine Canariensis. (4) Smilax Mauritanica ? H $ 2) Ilex Canariensis. ^ Smilaz Canariensis. i 1 E (3) Canarina Campanula. (5) Rubia fruticosa. E 1 4 | E d | 1 | À 1 ( 132 ) dans ces lieux tous les élémens de production et de vie; ce ne sont par- tout que des tapis de Polytriches, d'Hypnées et de Trichomanes, de vieux troncs recouverts de lierre (1), de Davallia (2) et d'Asplenium (3) ; favorisés parla rapide décomposition des substances végétales et par les principes fécondans qui en émanent, les Dolets, les Agarics, les Cla- vaires, les Dyssus, mélés aux Lichens, aux Mousses, aux J ongérmannes et aux Lycopodes, naissent à l'envi du sein de cette terre imbibée d'hu- mus. Mais c'est surtout dans les ravins qui traversent la forêt que la- végétation se montre plus forte et plus luxuriante , car les grands ar- bres semblent préférer ces gorges abritées; les Vifaticos (Laurus In- dica) y atteignent une hauteur extraordinaire, et, quoique la plupart proviennent de rejets, leurs branches radicales prennent un tel ac- croissement que leurs cimes arrivent souvent jusqu à quatre-vingts pieds d'élévation. Quelquefois ces diverses tiges se soudent par approxi- mation, et n'en forment plus qu'une seule; alors la partie de l'ancien tronc, qui subsiste toujours, se trouve cérnée au milieu de ce fais- ceau de branches, et donne à l'arbre un aspect bizarre. (Voy. Atlas, pl. 4) (4). | | La forét d'Agua - Garcia est peu visitée à cause de son isolement : quoiqu'elle ne soit pas trés-éloignée de la route la plus battue de l'ile, beaucoup de voyageurs ont ignoré son existence, car les replis du ter- rain la cachent en entier, et l'on peut passer outre sans se douter de son voisinage. C'est ce qui serait arrivé probablement à M. D'Urville et à ses deux compagnons (5) lors de la relâche de T Astrolabe, si l'un (1) Hedera Canariensis. (2) Davallia Canariensis. (3) Asplenium palmatum. (4) M. Saint-Aulaire nous a secondés de tout son talent en reproduisant, avec la plus grande vérité, le dessin original de notre ami Williams. Déjà avantageusement connu par ses marines et les belles litho- graphies de l'ouvrage sur l'expédition scientifique de Morée, cet habile artiste a prouvé, par l'exécution des travaux que nous avons confiés à ses soins, qu'il pouvait réussir dans tous les genres de paysage. (5) MM. Quoy et Gaymard , si avantageusement connus par les nombreux services qu'ils ont rendus à la science. ( 135 ) de nous ne leur avait servi de guide. Peut-être ne relira-t-on pas sans inlérét ce que ce célébre voyageur a écrit sur ce sujet : « Arrivés près » d'un aqueduc, à mi- chemin de Matanza à la Laguna, M. Berthelot » nous fit détourner vers la droite; à deux cents toises de distance au » plus, notre surprise fut extréme quand nous nous trouvâmes à len- » trée d'une belle et majestueuse forêt. On la connaît sous le nom » d'Agua-Garcia; elle est traversée par un ruisseau limpide qui coule, » avec un doux murmure , au travers des Basaltes, et de jolis sentiers » bien percés en font une promenade délicieuse. De superbes Lauriers » des Indes, des Ilex et des Viburnes en forment la base, tandis que » d'énormes Bruyères, de quarante à cinquante pieds de hauteur, en » peuplent la lisiére. Par le ton général, l'aspect et la forme des végé- » taux, et surtout des Fougéres, cette forét rappelle parfaitement celles » des iles de l'océan Pacifique , de la Nouvelle-Guinée et surtout d'Ua- » lan. Aprés avoir erré une heure sous ces délicieux ombrages, je sortis » de ce lieu, non sans éprouver le regret de n'y pouvoir rester plus » long-temps; et je me promis bien, si la fortune me ramenait ja- » mais à Ténériffe, de retourner visiter les bois charmans d'Agua- » Garcia (1). » L'opinion d'un observateur aussi judicieux que M. D'Urville doit faire autorité ; en envisageant ainsi cette forét sous ses rapports d'ana- logie avec celles des régions polygnésiennes, ce savant navigateur a confirmé, par sa comparaison, le caractère océanique et le ton de frai- cheur que nous avons déjà assignés à ces bois vierges. | La couche que recouvre la terre végétale, dans la forét d'Agua- (1) Voyage de l Astrolabe, part. hist., tom. 1, pag. 46 et 47. M. Quoy a aussi consigné ses souvenirs d'Agua-Garcia dans les notes du méme ouvrage. « Nous di- » nâmes à Matanza, dit-il : arrivé en cet endroit, M. Berthelot nous dit que nous n'étions qu'à cinq » cents pas d'une forêt, et cependant nous ne voyions point d'arbres ; mais en nous élevant un peu sur » la droite, nous aperçûmes celle qu'on nomme d'Agua-Garcia ; elle est magnifique et ressemble aux fo- » réts vierges d'Amérique. Il y à des arbres trés-gros ; ceux de l'entrée sont des Bruyères d'une gran- . » deur et d'une élévation telles que je n’en avais jamais vu de semblables. » (Ut suprà, pag. 181.) a magnm ME z» ( t34 ) Garcia , est presque entièrement composée d'un tuf volcanique très- tendre et que l'humidité pénètre facilement. L'hygroscopicité de cette roche doit beaucoup contribuer au développement de la végéta- tion. Plusieurs sources prennent naissance dans la partie la plus om- bragée de la forêt et se réunissent en deux ruisseaux qui vont fertiliser les riches campagnes de Tacoronte, si justement vantées par M. de Humbold (1). (1) « En descendant dans la vallée de Tacoronte on entre dans ce pays délicieux dont les voyageurs de » toutes les nations ont parlé avec enthousiasme, etc. (Joyag. aux régions équinox., t. 1, p.,236.) ( 135 ) GROUPES D'ARBRES ISOLÉS. A l'est d'Agua-Garcia, on aperçoit le bocage d'Agua- Guillen : ce groupe d'arbres, tout-à-fait isolé aujourd'hui, dut s'étendre aupara- vant jusque dans les environs de l'Esperanza , où l'on retrouve encore. des Lauriers et des Bruyères. En s'avançant vers l'ouest, on rencontre aussi des foréts dans des expositions semblables, et les hauteurs de Matanza, de ictoria et de Santa-Ursula offrent plusieurs sites bien ombragés. Au-dessus de ces bourgades commencent les bois de Chá- taigniers plantés du temps de Lugo, et que les successeurs du conqué- rant ont eu la prudence de conserver. Dans la vallée d'Orotava, ces nouvelles forêts s'étendent en avant de la région laurifère qu'elles ont envahie en partie. « La quantité de plantes européennes qui croissent » à l'abri de ces arbres exotiques, a dit M. de Buch, trahit leur ori- » gine (1). » Cette assertion nous semble un peu hasardée : les plantes que notre savant devancier suppose avoir été introduites y sont bien moins abondantes que les indigènes, c'est-à-dire que celles particu- liéres au pays. On trouve là, quoique clair-semées, un erand nombre d' espèces canariennes des genres (2) Phyllis, Bystropogon, Chrysan- themum, Canarina, Myosotis, Solanum, Cineraria, Hypericum, Rubia et Poterium ; les espèces européennes qui croissent dans ces bois sont aussi répandues dans beaucoup d'autres localités. La végétation a conservé là, aussi bien qu'ailleurs, son caractère régnicole; les Châ- (1) Physic. Beschr. der Can. Ins., pag. 123. (2) Phyllis Nobla. —. Solanum Nava. Nob. Bystropogon Canariensis. _ Cineraria multiflora. Chrysanthemum fœniculaceum. — — Hypericum floribundum. Canarina Campanula. Rubia fruticosa. M yosotis latifolia. Poterium caudatum. mE cec temere ( 136 ) : | taigniers seuls, par la forme de leurs feuilles comme par leur port, y | | | décèlent l'étrangeté de leur origine, et viennent produire un contraste | frappant à côté de cette région des Lauriers, si différente par son as- pect, son ton de fraicheur, ses belles masses de Fougères, et surtout | par la reproduction successive et spontanée des grands végétaux dont 1 elle se compose. À l'orient et à l'occident de la Villa, les foréts primi- tives garnissent encore les montagnes de cette enceinte. Les pentes de | | la Resbala et de la Florida, les hauteurs d'Agua-Mansa et les bases du contre-fort de Tygaiga possèdent des arbres précieux : l'Olea excelsa et le Laurus Barbusano sont de ce nombre; le Salix Canariensis om- brage les ruisseaux des Realexos. Le Poterium caudatum, joli arbuste dont les rameaux panachés flottent sur les bords des ravins, doit aussi entrer dans la liste des plantes némorales; car; avant les défrichemens, les bois occupaient les divers points où il sest maintenu. Aprés avoir dépassé la vallée d'Orotava, les bois les plus notables sont ceux qu'on rencontre au-dessus de la petite ville d'Icod, les seuls où lon trouve l'Ulex Europeus. Enfin, en se rapprochant de l'extré- mité occidentale de lile, on arrive à la forêt de Los Silos appelée Monte del Agua. Les Ardisiers et les Myrsines abondent encore dans ces montagnes que parcoururent Masson et Broussonet; mais le Pit- tosporum coriaceum que le premier de ces deux botanistes y trouva, il y a plus d'un demi-siècle , est maintenant devenu fort rare. ——— En tournant l'ile par la vallée du Palmar, le pays change d'aspect ; les Cistes et les Pins remplacent de ce cóté les foréts lauriféres qui ne reparaissent plus que dans la vallée de Guimar, où croit le Peradillo ( Cerasus cassinoides). Ce fut là aussi que nous retrouvâmes ces beaux Arbousiers que M. de Buch a cru réduits à quelques individus; ils sont tous réunis auprès du ravin de Badajos; et forment un des plus jolis bois de Ténériffe. Pendant notre séjour dans la vallée (novembre 1828), ces arbres offraient alors la plus brillante végetation : des gorap- pes de fruits orangés se mêlaient à des bouquets de fleurs colorées de ( 381 ) rose, et tranchaient d'une maniére admirable sur le vert brillant des feuilles (1). Cette union de teintes opposées produisait un ensemble des plus harmonieux, et rappelait à nos souvenirs les superbes foréts des tropiques avec tout le luxe de leur parure. (1) L’ Arbutus Canariensis est une des plus grandes espèces connues. Christian Smith lui avait donné le nom spécifique de callicarpa, à cause de ses jolis fruits. Cet arbre, si remarquable par l'élégance de son port et le lustre de ses longues feuilles, est trés-rare à la grande Canarie et à Palma; M. de Buch a cru reconnaitre dans les fruits de cet Arbousier les pommes dont il est question dans la relation des en- voyés du roi Juba (Cùm autem omnes copid pomorum, et apium omnis generis abundent, etc., Plin., lib. vı, cap. 32), « parce que, dit-il, on les mange partout comme ceux du Pommier, » (#7 me wie die Aepfel zu allen Zeiten gegessen wurde. Physical. Beschr. der Can. Ins. , pag. 119.) Mais il est aussi bien d'autres fruits qu'on mange de méme , et qui cependant ne ressemblent pas plus à des pommes que ceux de l'Arbousier. Le genre auquel notre espèce appartient devait être bien-connu des anciens, car l Arbutus Unedo est trés-commun dans tous les alentours du bassin de la Méditerranée, et méme dans la chaine de l'Atlas, Y Arbutus Andrachne croit en Orient et sur le mont Ida. Les envoyés du savant Juba ne pou- vaient donc confondre avec le Pommier l'arbre dont tant d'auteurs avaient déjà parlé et que Virgile a indiqué dans ses Géorgiques, liv. 11. Ainsi, sans avoir recours à des ressemblances forcées , nous retrou- vons plus naturellement les pu de Pline dans les fruits du Pyrrus Aria, qui croit spontanément aux Canaries. lit. 18 s: prete a " — — Deam T amp. s oS SEM qus, ee. matte m e e ——" ( 138 ) FORÉT DE DORAMAS, DANS L'ILE DE CANARIA. L'île de Canaria, la mieux cultivée de toutes celles de l'archipel canarien, a vu ses bois diminuer et disparaître peu à peu sur de grands espaces; bientôt de nouveaux défrichemens finiront par en- vahir en entier la région forestière. Dans beaucoup d'endroits, aupa- ravant très-boisés , ON ne voit plus que quelques Bruyères, et lés ter- rains montueux qui s'étendent du côté du nord, depuis la vallée de Teror jusquà l'ouest du bourg de Moya, sont les seuls où les forêts primitives subsistent encore, quoique bien éclaircies. La montagne de Doramas, célébre dans l'histoire des Canaries, fut un des sites les plus vantés pour ses beaux ombrages. Le prince Doramas, un des anciens guanartémes de l'ile, en fixant sa résidence dans une grotte spacieuse, située dans la partie la plus pittoresque des environs de Moya , imposa son nom à la forét qui couvrait jadis tout ce district. Nous avons vu cet antre rustique qu'habita le guerrier canarien ; les paysans de la vallée le montrent encore avec orgueil, car la tradition des hauts faits de Doramas, de son héroïsme, de sa force plus qu humaine s'est conservée parmi eux. La Hibalbera aux feuilles fleuries (1) et le Bicacaro des Guanches (2) serpentent en guirlande, et décorent l'entrée de la grotte; aujourd'hui cet antre est solitaire, la forét, elle-même, n'a plus pour elle que son renom, mais les souve- nirs qui s y rattachent en font toujours un endroit de prédilection pour les Zsleños. Nous donnerons une idée de l'aspect que ces lieux ases des descriptions de Figueroa et de Viera. Ce dernier, surtout, en a fait offraient encore il y a peu d'années, en empruntant quelques phr rie e Rei e E Ee Ei EE E EUM Serie ee ERE uii n ipai eli A 4" a p (1) Ruscus andr ogynus. (2) Canarina Campanula. " i À 5 ( 139 ) une peinture charmante dans un des chapitres de son ouvrage (1). «La nature, dit- il, s'y montre dans toute sa simplicité, et en » aucun lieu on ne la voit si riante et si féconde : la forét de Doramas » peut passer pour une de ses plus belles créations par la variété de » ses arbres robustes, élevés, toujours verts, étalant de toute part le »luxe de leur feuillage. Le soleil n'a jamais pénétré leurs rameaux » touffus, le Lierre ne s'est jamais détaché de leurs vieux troncs; cent » ruisseaux d'une eau cristalline se réunissent en. torrens pour bai- E: »gner ce sol toujours plus riche et plus productif. Il est surtout, | » dans la: profondeur de ces bois vier ges, un site délicieux qu'on ap- | .. »pelle Madres de Moya; le chant des oiseaux y est ravissant, des sen- | » tiers faciles le parcourent dans toutes les directions; on les croirait | » un ouvrage de l'art, ajoute naïvement Tauteur-des Noticias, mais * | » ils plaisent bien plus parce qu ils ne le sont pas (2). C'est en suivant » ces sentiers qu'on parvient dans l'enceinte que les Canariens ont ap- » pelée la Cathédrale, immense dóme de verdure formé par la réunion ctis ilic » des plus beaux arbres. Des Lauriers séculaires élèvent leurs troncs en » colonnades, et leurs branches entrelacées, et recourbées en gigan- » tesques arcades, produisent des effets merveilleux. En s'avançant sous »ces majestueux ombrages, on découvre à chaque détour de nou- » veaux points de vue, et l'imagination exaltée par les souvenirs de » l'antiquité se laisse aller aux impressions les plus poétiques. Ces lieux » enchanteurs sont bien dignes alors des fictions de la fable : à l'en- » thousiasme qu'ils font naître en les parcourant, les Canaries sem- »blent n'avoir rien perdu de leur célébrité, ce sont encore les {es » Fortunées, et leurs verts bocages, l'Élysée des Grecs, séjour des ames » heureuses, | » Locos lætos et amoena vireta | » Fortunatorum nemorum , sedesque beatas! » (1) Noticias de la hist. gen. de las isl. de Can. t. 1. p. 207 et suiv. (2) « Parecen un esmero del arte , y agradan mas porque no lo son. » ( 140 ) . Les descriptions que les auteurs nous ont laissées de la forét de Do- ramas n'ont rien d'exagéré : en 1581, Figueroa la vit dans toute sa splendeur; en 1634, le vénérable don Christobal de la Camara, évéque de la grande Canarie , la traversa dans toute son étendue, et ce qu'il en dit dans ses Sinodales prouve quà cette époque elle était encore digne des beaux vers de Cayrasco (1). Nous citerons ici un passage de la relation du prélat, mais nous ne prétendons pas imiter la noble simplicité de son style; ceux qui liront le texte original, que nous rapportons en note, comprendront toute la difficulté d'une traduc- tion littérale. | | | « La montagne d'Oramas, dit-il, est une des merveilles d'Espagne : »les différens arbres qui la peuplent atteignent une si grande hau- »teur quon peut à peine apercevoir leur cime; la main de Dieu, ? (1) Don Bartholomé Cayrasco de Figueroa, prieur et chanoine de la grande Canarie, où il naquit en 1540, fut l'inventeur du nouveau rhythme que les Espagnols ont appelé Esdrujulos. Il se rendit cé- lèbre par ses brillantes compositions, fut estimé de tous les littérateurs de son temps, et mérita le nom de divin Poète. Michel de Cervantes , dans le sixième livre de sa Galatée, lui a consacré un éloge qui termine ainsi: ; ERE | : Tu que con nueva musa extraordinaria Cayrasco, cantas del amor el animo, Si, a ese sitio, dela gran Canaria Vinieres con ardor, y magnanimo, Mis pastores ofrecen a tus meritos. ` Mil laures, mil loores benemeritos. La plupart des œuvres de Cayrasco sont restées inédites; les plus connues sont le Temple militant (el Templo militante), dont il a été tiré plusieurs éditions, et ses belles strophes sur l'invasion de Fran- cois Drake dans l'ile de Canaria, en 1595. L'Académie royale d'histoire de Madrid possède, dans sa bi- bliothèque , sa traduction de la Jérusalem délivrée : c'est au cinquième chant, où il est question des iles Fortunées et des enchantemens d'Armide, que le poète canarien, transporté d’un amour patriotique , inséra sa belle description de la forêt de Doramas, et en appela au jugement de ses contemporains sur ces deux vers du Tasse : | « Ben son elle feconde, e vaghe, eliete; « Ma pur molto di falso al ver s'aggiunge. » Il est aussi fait mention de la montagne de Doramas dans une comédie de circonstance, écrite en 1581, et qu'il dédia à l'évéque don Fernando de Rueda. Le théologal Cayrasco, à la fois poète et excellent musicien, mourut à Canaria vers la fin de l'an 1610. On voit son tombeau dans une des chapelles latérales de la cathédrale de Las Palmas, avec cette in- scription latine : Lyricen et vates toto celebratus in orbe Hic jacet inclusus, nomine ad astra volans. : (141) » seule, a pu les planter ainsi, et les isoler dans des précipices et »au milieu de ces masses de rocher. On trouve là beaucoup de » ruisseaux et de sources d'eau fraiche, et l'épaisseur de ces bois est »telle que les rayons du soleil, dans les instans de la plus forte » chaleur, ne peuvent arriver jusqu'à terre. Tout ce quon m'avait »dit auparavant m'avait paru un prodige, mais, après avoir exa- » miné par moi-même les parties de la forêt où je pus pénétrer, je fus » forcé de convenir qu'on ne m'avait pas assez dit (1). » En 1780, Viera, qui visita la forêt de Doramas, put encore en admirer de beaux restes, quoiqu'elle füt déjà bien déchue. Lorsqu'en 1820 nous parcourümes lile pour la première fois, les environs de Moya avaient conservé une partie de leurs superbes ombrages, mais dans ces derniéres années tout à changé d'aspect. Déjà, en 1830, ces bois, que nous revimes en détail, n'étaient plus reconnaissables; les vieux Tils de Las Madres étaient bien encore debout, mais ils avaient perdu leurs plus beaux rameaux; la dévastation étendait ses progrés sur toutes ces montagnes, et la forét de Doramas, la pomme de dis- corde des districts circonvoisins, avait donné lieu à de graves conflits. Quelques propriétaires influens, voulant profiter des innovations constitutionnelles , demandèrent le partage des terrains forestiers , les communes limitrophes se levérent en masse pour s'opposer à ces con- cessions arbitraires ; des intéréts politiques vinrent se méler à ces dé- - bats, l'affaire prit peu à peu toute la tournure d'une révolte, et l'au- torité ayant repoussé par la force ces réclamations à main armée, le sang coula dans une rencontre qu'on eüt pu éviter. La chute de la constitution semblait avoir mis fin à ces malheureuses querelles, lors- (1) « Es pues aquella montaña de Oramas de las grandiosas cosas de España : muy cerrada de va- » riedad de arboles, que mirarlos a lo alto, casi se pierde la vista, y puestos a trechos en unas profundi- » dades, y unas peñas, que fue singular obra de Dios criándolos alli. Ay muchos arroyos, y nacimientos » de frescas aguas, y estan los arboles tan acopados, que el mayor sol no baxa à la tierra. À mi me es- » pantava lo que me dezian, y visto de ella lo que pude, dixe me avian dicho poco. » Voy. Constitucio- nes sinodales de don Christov. de la Camara, obispo de Canaria. p. 240. Madrid. 1634. —" b. - á " — pe — L— .-— ^ ES ( 142.) que le général Morales (1) arriva aux Canaries, investi du comman- dement supérieur. Ferdinand VII, pour le payer de ses longs services, lui concéda une grande partie des terrains boisés situés entre Arucas et Moya : les habitans des communes voisines s opposérent long-temps à l'exécution du royal décret; mais enfin il fallut céder : les coupes commencèrent et les défrichemens sétendirent partout. Aujourd'hui la belle forêt de Doramas, jadis l'orgueil de la grande Canarie, est réduite à quelques groupes d'arbres que le nouveau maître n'a 1 dit-on, conservés que par condescendance, mais qui disparaitront aussi à leur tour. E | -E OR Re EUER o WERL AREE. * E: (1) Don Thomas Morales est naire, dont nous nous réservons élevé, par son seul mérite, néral des iles Canaries. Pa rique espagnole, de l'armée royale né à Canaria, dans le petit bourg d'Aguimez. Cet homme FRE de publier la biographie dans la partie historique de cet ouvrage, s a du rang de simple berger à celui de maréchal-de-camp et de onere. d rti de son village au commencement de l'insurrection des eglenigagel Amé- il fut chercher fortune à la Havane, où il s’enrôla comme volontaire dans un mc de Venezuela. Après avoir passé par tous les grades, il parvint, en peu d'années, - commandement. supérieur du corps d'opération. Par son audace, sa rare activité et cet instinct de gé- nie qui remplace chez lui les études théoriques, le général Morales tint long-temps en échec les bandes guerriéres de Bolivar, soutint des combats acharnés, remporta plusieurs victoires, et ne gui la partie qu'aprés l'honorable capitulation de Maracaybo. De retour en Espagne, le roi, malgré ses revers, lui à ivi ilitair s 1 ù i it reçu le tnt compte de ses services en lui donnant le gouvernement civil et militaire des iles où il avait rec jour. Son ficile qui administration a été juste et sage; patriote avant tout, il a su concilier, dans le poste dif- : NE : intéressées de la métropole. l occupait, le bien-être de son pays avec les exigences intéressées P ( 143 ) ———— | pe FORÉTS DE L'ILE DE PALMA. La végétation primitive s'est mieux conservée dans l'île de Palma qu'à Ténériffe et dans la grande Canarie; les arbres et les plantes s'y — développent avec plus de vigueur; les forêts, en général, s'y pré- sentent.en plus grandes masses , et occupent, au-dessus des champs | : cultivés, un espace considérable. La région laurifere affecte, sur les | pentes rapides du nord-est et du nord-ouest, une distribution et des expositions analogues à celles des îles voisines : depuis la vallée de Buenavista jusqu’à la pointe de Juan Aly, elle couvre les versans des montagnes et les berges des ravins qui rayonnent autour de l'ile. Dans les endroits les mieux fournis, cette zone de végétation corn- mence à l'altitude de 1800 pieds, et continue jusquà environ 4000; mais alors les Fayas et les Bruyéres (1) dominent exclusivement au- dessus des autres espéces. Dans quelques vallées de la cóte orientale, les Chátaigniers, qu'on introduisit aprés la conquéte, ont aussi rem- placé les bois. vierges. A l'occident de Buenavista les premiers gradins des montagnes offrent un exemple de ces changemens; ces grandes plantations garnissent maintenant les bords de ce plateau, se mélent aux cultures,et les séparent sur plusieurs points des bois indigènes ; mais partout ailleurs la végétation primitive règne encore sans par- tage, et a conservé tous ses caractères. Le Til (2) est un des arbres les plus abondans, les autres Lauriers sont aussi fort nombreux, et après eux les Mocans et les Aceviños (3) tiennent le premier rang. Parmi les plantes némorales , outre celles que nous avons déjà fait connaitre (1) Myrica Faya et Erica arborea. (2) Laurus fœtens. | (3) Visnea Mocanera et Ilex Canariensis. E». rs — P EE. = te il s, iioi is ERN orsa © mg de — OT E e t — * + SRE = ( 144 ) pour les autres iles et qui vivent ordinairement dans les foréts, il s'en trouve plusieurs que nous n'avons jamais rencontrées autre part (1). Les bois de Barlovento possèdent aussi une nouvelle espèce d'Echium que nous avons appelée Pininana , du nom que lui ont donné les habi- tans du pays. Cette belle espèce produit un tyrse chargé de fleurs qui s'élève jusqu'à quinze pieds au-dessus du sol. L'H: ypion viscosum, assez rare à Ténérifle, est également trés-répandu dans les foréts de la bande orientale où.il acquiert le port d'un sous-arbrisseau.- Les végétaux, dans l'ile de Palma, ont en général une croissance rapide, et leurs parties ligneuses y prennent de trés-grands dévelop- pemens. Aux environs de La Galga nous avons vu des Vifiaticos (Laurus Indica) dont la cime était tellement élevée que les ramiers qui s'y réfugiaient y restaient hors des atteintes des meilleurs chas- seurs, malgré la plus forte portée de leurs armes. Dans le district d'Adcaimen, au-dessus du bourg de Saint-André, nous avons me- suré un Til dont le tronc avait plus de quatorze pieds de circon- férence. bane ru | Mais c'est principalement dans la fameuse Caldera a que nous trou- vâmes les plus beaux arbres : en présence de ces végétaux séculaires cachés dans la profondeur de cet abime, nous fümes amplement dédommagés des fatigues et des dangers qu'il nous fallut surmonter pour y parvenir. Tout dans ce vaste cratère vint accroître l'intérêt de nos recherches : surpris d abord du péle-méle de la végétation, nous ne le fûmes pas moins à la vue d'un Pistachier (9), dont le tronc avait plus de sept pieds de diamétre, et d'un Genévri ier (3), aussi étonnant par les dimensions de sa base que par l'élévation extraordinaire de sa tige. Parmi les Pins, qui croissent confondus avec les Lauriers, les Fayas, les Bruyères et les autres arbres, il y en eut un surtout qui fit (1) Genista splendens, Nob. Genista stenopetala , Nob. et Lotus eriophthalmus, Nob. (2) Pistacia Atlantica. (3) Juniperus Cedro. má MNT ie — ——————— € r E n AT NE E a 4 PTT A gom, RR É à ( 145 ) Fd plus particuliérement notre admiration : il avait pris racine sur les bords du torrent qui traverse la Caldera , ses branches robustes s'éta- laient en larges rameaux et ombrageaient un immense espace, les plus basses étaient recourbées jusqu'à terre et formaient une voûte de ver- dure qui eût pu abriter tout un troupeau. Cet arbre si imposant était peut-étre contemporain des derniéres révolutions qui avaient bou- leversé ses alentours; ce fut au pied de son tronc colossal que nous nous établimes pour passer la nuit. De là nous -découvrions la plus grande partie de l'enceinte; en face s '"élevaient des pics menacans, des rochers entassés, des montagnes sur d'autres montagnes; des groupes de végétaux, composés d' espèces dispar ates, garnissaient toutes les berges et couronnaient les masses de basalte dont nous étions entou- rés, tandis qu'au-dessus régnait l'aridité la plus affreuse. Nous voyions là, pour la première fois, les Dattiers à côté des Pins, et les plantes du littoral mélées avec celles de la haute région. Nous devons en conve- nir, malgré ce que nous avons déjà dit de ces lieux et de leur aspect sauvage (1), on n'aura encore qu'une bien faible idée de l'impression qu'ils nous causèrent. Par son caractère grandiose, la végétation de la Caldera porte avec elle le cachet d'une nature indépendante et forte de sa liberté; ses principales beautés consistent dans le gigantesque de ses formes, dans la bizarre dissémination de ses produits, et plus en- core dans les contrastes qui résultent de ce désordre de création. (Voyez Atlas, vues phytos. VE CE (1) Voy. précédemment Géog. descript. , p. 12 et 13; et Géog. botan., p.25, 66, et suiv. n. 19 ( 146 ) RÉGION DES BRUYÈRES. —— Ce que nous avons déjà dit de cette région dans les deux chapitres précédens nous dispense d'entrer dans de plus grands détails sur sa distribution. Toutefois, nous ajouterons qu'on ne saurait comparer les Bruyères des iles Canaries à ces brandes monotones du nord de l'Eu- rope, où l'Erica tetralix, ciliaris et cinerea semblent se disputer le terrain. Si l'on excepte la Bruyère à balais (E. scoparia), qu'on ne trouve à Ténériffe que sur le revers oriental des montagnes du nord- est, la Bruyère arborescente est l'espèce dominante de cette région dont les verts bocages sont entremélés d Hypéricinées et de Cistes. Ces masses de végétation rappellent au voyageur qui a parcouru l'Ita- lie ces Macchie solitaires qu'on rencontre à chaque pas dans la campagne de Rome, tels que la Macchia dei Mattei , le Pignetto di Sac- chetti, etc., où Y Erica arborea joue aussi le principal róle. | Nos planches 51 et 52 de la partie historique donnent une idée assez juste de l'aspect de la région des Bruyères dans deux différentes loca- lités de l'île de Ténériffe, savoir : sur les hauteurs qui entourent la vallée du Palmar, et au-dessus de la ville de l'Orotava, dans une sta- tion dont l'altitude peut être évaluée à 3000 pieds environ. 1 : | (147) . 2 " _ RÉGION DES PINS. MÀ On ne trouve dans cette région ni la diversité de formes, mi cette variété de teintes qui caractérisent les forêts de Lauriers, et dont le | mélange produit un ensemble si harmonieux. Les Pins des Canaries | (Pinus Canariensis) sont les seuls. arbres qui-peuplent ces bois silen- LI cieux où règne la plus imposante uniformité; cette espèce robuste ) EB y fait tous les frais de la végétation; elle seule peut résister sur i 1 ces montagnes à la sécheresse et aux intempéries. Les vapeurs, qui à 4 : pendant la nuit pénétrent ces terrains hygroscopiques, s'arrêtent | sous la première couche, et les racines des Pins, en s'enfonçant F à travers les laves, vont chercher au-dessous l'humidité nécessaire à leur nutrition. Ainsi un sol volcanisé, qui au premier coup-d'œil semblerait devoir repousser les gr rands végétaux, renferme , au con- traire, tous les principes de fécondité et de vie. Nous avons vu, à | 'Ténériffe, des Pins de dimension -colossale au-dessus de la vallée | d'Icod, dans la nappe d'obsidienne sortie des flancs du Teyde à une époque où le volcan était dans sa plus grande effervescence. | On en trouve aussi de pareils dans la gorge d'Ücanca, que d'an- ciennes éruptions ont si étrangement bouleversée. Ces deux locali- | tés offrent de toute part l'image de la désolation; à chaque pas ce sont de larges crevasses, d'effrayans précipices, d'immenses amas de scories; el pourtant le Pin des Canaries sest euraciné sur ces rochers, il croît au milieu de ses fondrières, se plait dans leurs $ anfractuosités, et bravant la destruction au sein d'une contrée en | ruine, il arrête souvent dans leur chute les blocs qui se détachent des escarpemens voisins. Habitans privilégiés de la haute région, ces beaux arbres dominent en souverains dans les montagnes, cou- -— r^ fen: qme qM rom pen gr min cm TOT meer ICI n a neigt E ( 148 ) vrent les plateaux culminans, s'éparpillent le long de leur pente, et descendent en troupe de ces stations élevées pour envahir les vallées inférieures. | Lorsqu'au milieu de ce sol en diris nous admirions cette puis- sance de végétation, la monotonie de la région des Pins disparaissait à nos yeux : la robusticité de ces arbres, la rudesse de leur port s'identifiaient si bien avec l'aspect sauvage des lieux, qu'il y avait encore là de l'harmonie. Tout autre végétal eût été déplacé dans ce paysage; il fallait à ces masses imposantes un étre organique qui püt rivaliser de majesté, à côté de ces colonnes de basalte un arbre de forme pyramidale et dont la sombre verdure vint s'unir aux teintes rembrunies des alentours. Là tout est grave comme la na- ture, tout est tranquille comme son repos ; mais si le vent d'Afrique, le terrible sud-est parvient Jusqu'à cette zone, le calme cesse aussitôt. On entend d'abord un murmure vague et plaintif, qu'on écoute sans pouvoir définir ; les sifflemens du feuillage deviennent tout-à-coup plus distincts et plus sonores; prolongés par les échos, ils se mélent aux craquemens des branches qui s'agitent et se froissent. Ces bruits con- fus, avant-coureurs de la tempête, redoublent d'intensité : 'Harmatan a franchi le désert pour souffler sur cette haute région sa funeste in- fluence; brûlant, furieux, indomptable, il dessèche tout sur son passage, ébranle les grands arbres et couvre le sol de leurs débris. Mais après quelques jours de perturbation (1) l'atmosphère a éprouvé un changement, et le vent s'est fixé à l'ouest; on voit les vapeurs qui obscurcissaient l'horizon s'amonceler sur les montagnes, un dé- luge de pluie inonde la forét et vient ranimer la végétation. Alors l'équilibre est rétabli, le ciel reprend sa sérénité, le soleil son éclat, l'air sa transparence, et la région des Pins son silence et sa tran- quillité, | (1) Ge vent de sud-est dure ordinairement trois jours. Pme ee ee uU OO———— — (149 ) Dans les expositions. abritées des vents alisés les foréts piniféres sont plus par ticulièrement exposées aux bourrasques de. l'Harmatan ; aussi sur cette bande, plus que partout ailleurs, le terr ain est d'une aridité étonnante, la couche de feuilles qui le couvre se desséche sans for- mer d humus; les oiseaux et les insectes s éloignent d'une région qui n’a ni ruisseaux, ni prairies, et manque en général des plantes né- cessaires à la vie animale. Seulement quelques Cistinées , des Pteris et des Erigerons croissent sur la lisière des bois, prêts à s'étendre sur un plus large espace dés que les Pins sont abattus. Quoique les exploita- tions aient suivi une marche moins rapide dans cette région que dans celle des Lauriers r les arbres y sont pour tant bien moins nombreux qu autrefois, et, sur plusieurs points, on ne les trouve plus que clair- semés. Lorsqu'en 1724, le pére Feuillée fut mesurer la hauteur du pic de Ténériffe, la région des Pins s'étendait au-dessus de l'Orotava , depuis le Dornajito (3198 pieds) j jusqu'au Portillo de la villa (environ 6000 pieds) , oà l'on voyait alors le beau Pin de la Caravela (4. La dif- férence d'altitude entre ces deux stations peut donner une idée assez approximative de l'espace qu 'occupait à cette époque la région des Pins sur ce versant de l'ile. Presque tous ces arbres ont été détruits; le Pin de la Caravela n'existe plus, et a légué son nom au rocher qui lui servit de base (2). Le Pin du Dornajito a eu le méme sort, l'oura- gan de 1826 le déracina. Plusieurs fois avant cet événement nous nous étions reposés sous son ombrage; cet arbre, dont le tronc et les rameaux couverts d'Usnéa avaient acquis un développement prodi- gieux , se faisait apercevoir de tous les points de la vallée; sa perte fut comme une calamité publique, car, à chaque désastre de ce genre, (1) Voy. Voyage aux Iles bras: par le père Feuillée, manuscrit déposé à la Bibliot. roy. 1724. (2) En 1715, J. Edens avait vu aussi le Pin de la Caravela, qu'on appelait ainsi parce que ses branches, par leur extension, lui donnaient de loin l'apparence d’un navire. Ce voyageur cite aussi le Pino de la Merienda (le Pin du Diner), le seul qui existe encore de tous ceux qui couvraient alors les berges escarpées du défilé du Portillo. (Voy. Phil. Trans. Soc. Roy. Lond. , 1714-1716.) Re me — s 12. A Da ar tes , à TEE m game —À— me uut owe mpm ap LOU pugne ( 150 ) la fatale prédiction de Lugo (1) vient effrayer les Isleños sur l'avenir qui leur est réservé. | se Viera , dans ses Noticias, fait mention d'un autre Pin énorme quon vénérait à Canaria dans le district de Teror. Cet arbre avait environ trente pieds de circonférence à la base ; il était adossé comme une tou- relle à la chapelle de la Vierge del Pino (2), une de ses branches avait servi d'arc-boutant pour y suspendre le beffroi; mais des ébranlemens trop réitérés accélérérent la ruine de ce clocher de singuliére nature, et le 3 avril 1684 le Pino santo (Varbre saint), en sabimant sous son . propre poids, faillit écraser dans sa chute l'édifice qu'il dominait. Viera dit que l'image de Notre-Dame del Pino fut ainsi nommée, parce qu'on la trouva sur l'arbre dont il est ici question. Cette découverte eut lieu à l'époque de la soumission de la grande Canarie, en 1483. Les Aborigènes avaient souvent observé une sorte de lueur autour dun Pin dont ils craignaient de s'approcher. Don Juan de Frias, à la fois évêque et: co nquérant (3), et qui prit une part trés-active dans les derniers combats, osa monter le premier sur l'arbre et en descendit une statue de la Vierge, qu'il rencontra , dit-on , au milieu des grosses branches et entre deux jeunes Dragoniers de trois vares (neuf pieds) de haut, qui croissaient au-dessus du premier embranchement. Il ajoute, sur l'autorité du P. Sosa (4), que des touffes de Capillaires s é- taient enracinées autour de cette ramification et formaient une masse de verdure d'une agréable traicheur. | | Nous n'avons pas l'intention de discuter le miracle, et voulons seu- lement rapporter à des causes purement physiques ce que le vulgaire (1) Voy. précédemment, pag. 111 et 112. (2) Nuestra Señora del Pino, Notre-Dame-du-Pin. . El gran Pastor don Juan de Frias | Obispo de estas islas venturosas. Y gran conquistador de gran Canaria. | k Caxnasco, Templ. milit., pag. 283. (4) Topog. de Can., manuscrit, lib. 2, cap. 31. (454) attribue trop souvent au merveilleux. Nos explications seront donc inutiles à ceux qui ne voient qu'avec les yeux de la foi; mais, parmi | nos lecteurs, il en est aussi beaucoup sans doute qui cherchent, comme | nous; à concilier. les phénomènes de la nature avec les volontés qui | | émanent d'un pouvoir supérieur. Que les deux Dragoniers eussent été apportés là avec intention ou qu'ils s'y fussent implantés par hasard, | leur position dans ce lieu n’a rien pour nous de miraculeux. Ces arbres reçoivent presque toute leur nutrition de I atmosphère; desexpériences | nous ont démontré que de jeunes Dragoniers, arrachés depuis plusieurs E mois, pouvaient continuer de végéter et qu ‘ils reprenaient racine dès | qu'on les plantait de nouveau. Les graines du fameux Dracena du | jardin Franqui, à l'Orotava, germent dans les aisselles des grosses branches où elles s'arrêtent en tombant, et s'y développent comme | . sur le terrain (1). La présence des Capillaires sur le Pin de Téror na | rien non plus d'extraor dinaire : nous avons vu, aux Canaries, diffé- rentes espèces de Fougères, telles que des Adiantum, des Davallia etc., et méme des Joubarbes et des Sonchus, vivre en parasites sur les arbres aussi bien que sur les rochers. Quant aux lueurs que les Aborigènes - apercevaient sur les rameaux du Pin de Téror, elles rappellent celies | 3 dont parle J. Edens dans la relation de son ascension au Pic, et quil vit brillor pendant deux nuits consécutives, comme de petites fusées chargées de matières sulfüreuses, sur les arbres des environs de la Caracela (2). Nous avons observé nous-méme un semblable phé- nomène à Ténériffe, dans le Pinal de la Grenadilla, le lendemain d'une forte bourrasque de sud-est : des lueurs phosphorescentes sem- blaient s'échapper du milieu du feuillage et produisaient un effet ana- logue aux étincelles électriques, mais sans détonation. On sait que l'électricité joue un grand rôle dans les phénomènes de la vie végétale, ES (1) Voy. Nova acta phys.-méd. acad. nat. curios., dm 2b 9e Pc , pag. 273. Bonn. 1897. Obs. sur le Dracæna-Draco, par S. Berthelot. e (2) Voy. Phil. Trans. Soc. Roy. Lond., 1714-1716. a W - ~ s — ON s T T a No a ae somete RRQ. a - = sou LN v D. o Ms range m má cuoco WIRED PER D za p , — — ed s were RENE. ne - = - — . VUL À L- , c - 8 " WS à 2 = 2 d = T — euo D : E oS e ( 152 ) et qu'il est bien reconnu aujourd'hui que prets plantes se chargent abondamment de ce fluide. Ainsi, laissant de cóté la partie vraiment miraculeuse de l'histoire du. Pino santo , nous nous abstiendrons de tout autre commentaire, et citerons textuellement en note ce que le chanoine Viera ajoute: sur ce sujet, d'après le manuscrit de don Pedro August. del Castillo (lib. m, cap. 1) (1). Quoi qu il en soit, on peut déduire de la relation de l'au- teur‘des Noticias un fait important. L'existence -du Pino santo dans le district de Téror, à 1600 pieds environ au-dessus du niveau de la mer, nous prouve que la région des Pins était autrefois beaucoup plus rapprochée du rivage, et que, vers la fin du dix-septiéme siècle, il y avait réunion sur ce point de la végétation des bases avec celle du haut pays. Cette alliance dut prévaloir dans plusieurs autres endroits où le terrain, quoique favorable à la force expansive des arbres et des plantes de ces deux régions opposées, s'est refusé néanmoins au dé- veloppement des végétaux des zones. intermédiaires. C'est ce qu'on observe encore, dans toutes les iles, sur les versans du sud, où les fo- réts de Lauriers et les petits bois qui les accompagnent ( Bruyéres et Cistes) n'existérent jamais. La vallée de San-Tago, à "Ténériffe, nous à fourni un des meilleurs exemples de ce mélange de la végétation (1) Texte. « Nuestro autor asegura haver cono- Traduction. « Notre auteur assure avoir vu et » cido y examinado esta maravilla de la natura- » leza, este arbol, que siendo mas santo que el de » la isla del Hierro por el fruto que contenia, no lo » era menos por el agua medicinal que daba de si. `» El mismo refiere, que del pie de aquel Pino cor- » ria una fuente, hasta que haviendola cercado de » piedras un cura avido, y puestola llave para que » contribuyesen con limosnas los que acudian en » sus necesidades à buscar el remedio; no tardó » su codicia en secar àquella piscina saludable. » (Viera, Noticias de la hist. gener. de las Isl. Can., tom. ri, p. 113 et suiv.) | .» examiné cette merveille de la nature, cet arbre »'qui, bien plus saint que celui de l'ile de Fer (a), » à cause de son fruit, ne l'était pas moins aussi » sous le rapport de l'eau médicinale qu'il produi- . » sait (b). Caril dit en outre qu’une source s'échap- » pait du pied du Pin, mais qu'un curé avide » l'ayant murée et fermée à clé, afin de faire con- » tribuer par des aumónes ceux qui venaient y » chercher un reméde à leurs maux , l'avarice de » cet homme mit -— tót à sec cette piscine salu- » taire. » ` (a) Voy. précédemment, p- 4183. (b) Des sources d'eau acidulée existent encore aujour- ,d'hui, à Teror, non loin de ji el où croissait le Pino santo. ( 153 ) alpine avec celle du littoral (1). Ainsi, l'altitude de 1600 pieds ne représente pas, du côté du rivage, la ligne de démarcation de la ré- | : gion des Pins, puisqu'aujourd'hui, à Ténériffe, on retrouve ces arbres | dans des stations encore plus basses. En général, sur la bande méri- 4 dionale des îles, les Pins devaient descendre dans les premiers temps jusque sur la côte, tandis que sur les versans du nord une différence marquante dans le climat, en déterminant d' autres conditions d'existence, a produit des masses de végétation qui, par leur inter- position, sont venues éloigner les bois pinifères des stations mari- times. Les chaleurs et l'excessive sécheresse, les alternatives d'in- tempérie et de calme complet, que ces arbres ont à supporter et qu'ils peuvent braver si impunément, leur. permettent, dans les exposi- À tions du sud de saccommoder du climat de la côte, qui a de grandes | analogies avec celui de la haute région. Car, là aussi, comme dans les stations supérieures, la rosée des nuits humecte à peine une terre brülante que les pluies ne pénétrent que bien rarement ; la tempéra- | ture diurne est très-élevée, les perturbations atmosphériques sont E o- j rares; seulement, dáns la saison orageuse, la stagnation habituelle de | l'air est tout-à-coup troublée par des coups de vents impétueux, pres- que toujours suivis de fortes averses. | | B Le Pino santo de Téror, qui a donné lieu à notre digression , n'est pas le seul arbre de cette espèce que la piété des Jslefios a consacré à la polyonymie des vierges miraculeuses. Celui qu ‘on voit à Ténériffe, à l'entrée de la vallée d'Icod, se trouve dans une station qui n'excède pas 740 pieds au-dessus du niveau de la mer. Ainsi, sur ce point, la région des Pins arrivait autrefois très-près du littoral; la coulée de lave vitrifiée qui a débordé sur tout ce versant n'a jamais été j recouverte par les foréts lauriféres, car les arbres qui les peuplent ] |. ont besoin d'un sol plus meuble et de plus facile décomposition. . (1) Voyez précédemment, pag. 94, 62, 67 et 68. | nt. 20 (454) L'ile de Palma a aussi son Pin sacré : il est situé dons la forét qui domine le bourg del Paso (district d'Aridane). L'altitude de cette station est de 2727 pieds. Ce bel arbre, qu'on dit contemporain de la conquéte, semble ne pas avoir de vieillesse; une pétite statue de la Vierge a été placée sous son premier embranchement; chaque soir les bücherons du voisinage s'avancent, humbles et silencieux, vers cette chapelle vivante pour allumer un fanal suspendu au- dessus de la sainte image. Lorsqu'à l'entrée de la nuit on passe à côté du Pino santo, cette lampe qui veille seule au milieu de l'obscurité de la forêt, les reflets de cette lumière sur la voûte de feuillage qui protège la niche mystérieuse, tout dans ce lieu domine la pensée et inspire le recueillement. Pour nous, la présence de cet arbre devenu inviolable, et auquel on avait voué une sorte de culte, nous causa une profonde vénération. (Voy. Part. hist., pl. 43.) Ces Pins séculaires, que la dévotion des Canariens a placés sous la sauvegarde de la religion, propagent le respect qu'ils inspirent jus- que dans leurs environs, et sont en cela un véritable bienfait : durant nos courses dans les montagnes de cet archipel, nous n'avons cessé de recommander leur conservation. Naguéres encore, lorsque. parta- geant les vœux et répondant à l'appel de Tillustre professeur de Genéve (1), nous parcourions les Alpes pennines, d'autres arbres vinrent réveiller notre sollicitude, et les réflexions que nous fimes à la vue des antiques Sapins de la forét du Ferré ne seront pas déplacées ici (2. Si les monumens d'un autre âge, disions-nous alors, fixent notre attention, les vieux arbres ne la réclament pas moins, car ils (1) « Je voudrais que , dans chaque district , l'arbre le plus vieux füt reconnu propriété publique , » qu'il fût préservé de tout outrage et conser vé, soit comme monument historique, soit pour plaire à à » l'imagination de ceux qui aiment à se reporter vers l'antiquité. J'adresse ces considérations aux fores- » tiers, aux naturalistes, aux voyageurs, aux paysagistes, aux autorités locales de toutes les nations. » (Voy. Notice sur la longévité des arbres, par M. de Candolle ;? Bibliot. univ. de Genève, mai 1831. ) (2) Voyez le second mémoire Sur la longévité et lusto des ar. bres, par S. B. ; Bibliot. univ. de Genève, décemb. 1832. [ ( 155 ) } -intéressent autant que ces temples en ruine, et tous ces débris histo- | riques qui disparaissent pour ne rien laisser aprés eux. Mais , aprés i | plusieurs siècles, les vétérans de la végétation sontencore debout, lim- " pulsion organique ne s'est pas affaiblie, chaque année de nouveaux pro- | duits, en augmentant leur masse, semblent accroitre leur force; ; ils 1 i sé régénérent par les semences, revivent par des rejets etdonnentà la 1 terre bien plus qu'ils n'en reçoivent. Cependant, en dépit des raisonne- i mens les plus logiques, Thomme détruit en un instant ces géants des f forêts que la nature est si lente à former. Un sentiment religieux À était seul capable de prolonger l'existence des vieux arbres, comme 4 celle des anciens monumens, au-delà de toutes les prévisions. Ainsi, à force de déprédation, le Colysée de Rome eût bientôt disparu de la ville éternelle, si an pape philosophe, en en consacrant les beaux edis À # restes, ne l'eüt préservé d'un nouveau vandalisme. Les sombres fo- d rêts de la Germanie, celles de l'ancienne Gaule, les bois sacrés des * Grecs et des Romains n'ont dû long-temps leur conservation qu'au | respect inspiré par une fhéogonie protectrice. Ce sont sans doute ces traditions vénérées qui ont laissé croitre dans la citadelle d'Athénes les rejétons de l'Olivier dont la souche immortelle remonte à T origme de la ville (1). Les Turcs méme, malgré toute l'intolérance de leur is- lamisme, n'ont osé porter une main sacrilége sur les Oliviers de la montagne de Jér usalem en Si nous inter rogeons des temps plus modernes, d'autres exemples de D cette vénération traditionnelle nous montreront les mémes résultats. f = Lénorme Ceiba (Eriodendrum anfractuosum, DC.), sous lequel ii e ai Cr (1) (2) « L'Olivier, dit M. de Cháteaubriand, est pour ainsi dire immortel, parce qu'il renait de sa » souche. On conservait dans la citadelle d'Athénes un Olivier dont l'origine remontait à la fondation # » de la ville, Les Oliviers du jardin de ce nom, à Jérusalem, sont au moins du temps du Bas-Empire. | » En voici la preuve : En Turquie, tout Olivier trouvé debout par les Musulmans, lorsqu'ils envahirent à » l'Asie, ne paie qu'un médin au fisc; tandis que l'Olivier planté depuis la conquête doit au Grand- » Seigneur la moitié de ses fruits : or, les huit Oliviers dont nous parlons ne sont taxés qu'à huit mé- » dins. » (Voy. Itin: à Jérus., vol. 11, pag. 260.) ( 456 ) Diégo Vélasquez fit dire la première messe à l'époque de la fondation de la Havane, en 1519, ne mourut de vieillesse quen 1753. Les souvenirs historiques qui se rattachaient à cet arbre célèbre en faisaient un ob- jet de vénération pour les habitans de la capitale de Cuba. En 1754. don Francisco Cagigal, capitaine -général de l'ile, fit élever une pyra- mide à la place où le Cerba avait existé; l'arbre populaire y était re- présenté en relief , etsur une des faces on lisait cette inscription : SISTE GRADUM VIATOR ORNARAT HUNC LOCUM ARBOS CEIBA FRONDOSA POTIUS DIXERIM PRIMAEVAE CIVITATIS PRUDENTIAE RELIGIONIS PRIMAEVAE MEMO- RABILE SIGNUM, etc. Trois jeunes Ceibas furent apportés de l'intérieur de l'ile et plantés autour du monument. En 1828, on construisit un petit temple prés de l'ancienne pyramide qu'on restaura. Ce nouvel édifice, décoré de tableaux historiques, fut inauguré par trois jours de fétes et consacré par l'évéque de Cuba. Don Ramon de la Sagra, dans une relation imprimée, a exposé en ces termes l'enthousiasme que lui inspira cette touchante cérémonie : « Il y a trois cent neuf ans que nos ancétres » élevèrent dans ce méme endroit un autel rustique dédié à un dieu » de paix: un arbre majestueux le protégeait de son ombre. Sur un » rivage inhabité et couvert d'une végétation vigoureuse, ils jetérent » les premiers fondemens d'une ville aujourd'hui riche et florissante. » Àux actions de gráce du prétre ne répondirent alors que les accla- » mations d'une poignée de guerriers et les cris des hordes sauvages. » On n'apercevait de toute part que des bois épais remplis d'arbres et » de plantes inconnues ; mais aprés trois siécles , les nombreux descen- » ' dans de ces héros chrétiens se réunissent autour de l'arbre e régénéré » pour se prosterner devant le même autel et y célébrer le méme sa- » Crifice (1). » . (1) Voy. Relacion de las obras y fiestas publicas en memorias de la primera misa y del primer. cabildo cele- brados en 1519 ; Havana, 1828. CC AT ) A plupart des arbres affectés à l'ornement des tombeaux parvien- nent aussi à un áge trés-avancé; un respect religieux les protége. ll nous suffira de citer If du cimetière de Braburn, dans le comté de Kent, dont le tronc, mesuré par le dendrophile Evelyn, avait déjà, en 1661, soixante pieds de circonférence et deux mille huit cent qua- tre-vingts ans d'existence; et les Cyprès chauves (Taxodium distichum, Rich.) conservés dans le cimetière de Santa-Maria de Tesla, près d'Oaxaca. Un! de ces arbres, mentionné par Cortez, qui fit halte sous son ombrage avec sa petite armée, a cent dix-sept pieds dix pouces de tour ; il est antérieur au règne de Mutezuma et en gr rande vénération parmi les Mexicains (1). - | « Les changemens des opinions religieuses, a dit M. de Candolle, et » le refroidissement de quelques idées respectables, quoique souvent » superstitieuses, tendent à diminuer la vénération que les grands ar- » bres avaient inspirée à certains peuples (2). » En effet, depuis que des hommes, dominés de l'esprit d'une pieuse mission, ont porté le protestantisme chez les habitans de la Polynésie, cette dévote pro- . pagande a tout changé dans les archipels de l'Océan pacifique; les arbres à pain ne sont plus sacrés, un sévère /abou ne les garantit plus, et déjà leur nombre a diminué. Bientót, peut-étre, en adoptant d'autres cultures, ces peuples convertis, qui aujourd'hui parodient la civilisation, déploreront la perte de l'arbre précieux que la Provi- dence avait fait croitre pour les nourrir. (1) Nous empruntons ces deux derniers faits à la Physiologie végétale de M. de Candolle, tom. i, pag. 1005. Plusieurs arbres célèbres, conservés depuis des siècles dans différens cimetières d' Angleter re, sont cités dans cet ouvrage. Il y est question aussi de l'Oranger et du Citronnier, qu'on suppose avoir été plantés par saint Dominique (en 1200) et par saint Thomas-d'Aquin (en 1278). Ces deux arbres existent encore aujourd'hui, le premier dans le couvent de Sainte-Sabine, à Rome, et le second au monastère de Fondi. (Voy. ut suprà, pag. 995.) | Le vieil, Érable du village de Trons, dans les Grisons, n'est pas moins vénéré que le Ceiba de la Ha- vane. Ce fut sous cet arbre que les premiers confédérés jurérent, en 1424, de donner la liberté à la Suisse ; une inscription, placée surla porte d'une chapelle qu'ona construite à cóté, en rappelant l'évé- nement, recommande le respect. (Voy. ut suprà, pag. 997.) (2) Notice sur la longévité des arbres ; Bibliot. univ. de Genève, mai 1831. + DT Ts : one m mma P snb : : — : sai ps RE 2 o — MB ( 158 ) Mais bornons là des réflexions qui nous jetteraient trop en dehors de notre sujet, et terminons nos remarques sur ces foréts canariennes où le voyageur retrouve de loin en loin quelques-uns de ces arbres antiques qui parlent tant à l'imagination. Nous avons déjà fait connaitre plusieurs localités que la dévastation avait frappées plus particuliérement : il nous reste à en signaler d'au- ires; mais dans cette revue topographique nous parlerons en méme temps des sites où la végétation s'est maintenue dans son premier état. Les Pins nexistèrent jamais à Lancerotte et à Fortaventure, ni dans les îlots situés à l'orient; le climat de ces îles, toutes africaines, ne pouvait leur convenir. Cette contrée, presque toujours balayée par les brises, est en général trop peu élevée au-dessus de la mer ; les points culminans des montagnes n'y atteignent pas 300 toises. Ce n'est. que dans la partie occidentale de l'archipel qu'on rencontre le Pin des Canaries, cette. espèce qui surpasse en beauté toutes ses congénéres, si bien caractérisée par son port gigantesque, la longueur de ses feuilles réunies en aigrettes et la disposition ombelliforme de ses rameaux. Cet arbre précieux e t encore très-abondant à la grande Canarie, dans les bois au-dessus de Galdar; le Pinal de Tamadava, celui de Pajo- nales, et ensuite ceux qui, à partir du col de Manzanilla, s'étendent vers l'ouest jusqu'au-delà de Mogan, en sont bien pourvus. À 'Téné- riffe, les hauteurs d'/cod et les pentes septentrionales des montagnes adjacentes conservent aussi de beaux arbres; sur lautre bande de l'ile, oà les Pins forment presque une zone continue, nous citerons principalement les foréts qui dominent les districts de Chio, de Chasna et de la Grenadilla. L'ile de Fer, jadis si boisée , a vu disparaître ses for éts-vierges : au- jourd'hui le petit nombre d'arbres sauvés de la dévastation ne suffit plus aux besoins des habitans. Un passage de l'Histoire de la première découverte et conquête des Canaries, p. TT, nous donne une idée de E E ( 159 ) | l'état de la végétation en 1402. « Le pays, écrivaient les chapelains de Béthencourt, est très-mauvais une lieue tout entour par devers la mer ; E mais sur le milieu, qui est moult haul , est beau pays et délectable, et y | sont les bocages grands et verts en toutes saisons, et ya des Pins plus de cent mille , de quoy la plus grande partie sont si gros que deux: hommes ne les sauroient embrasser. » ! Les bois pinifères ont été plus respectés à la Gomére, mais ceux que nous avons visités à Palma n'ont presque rien perdu de leur premiere vigueur. Ils s'étendent sur les deux bandes de l'ile, et occupent encore un grand espace. La montagne de Tamanca, et les sommités qu'on ! aperçoit au-dessus des bourgs de T iraxafe, del Paso et de Guarafia E sont les endroits les mieux garnis (1). Pendant le printemps de 1830, | nous parcourümes toute cette contrée : la végétation, rafraichie par les pluies de l'hiver, semblait alors reprendre une nouvelle vie; nous ve- nions de franchir le col de la Cumbre et descendions vers le district d’ Aridane ; nos herborisations sur la crête des monts s'étaieat prolon- gées jusqu'au soir, et il était déjà nuit close lorsque nous pénétrâmes dans la forét de Pins qui avoisine le village où nous devions nous arré- ter. Favorisés par un beau clair de lune, nous pümes continuer notre route et jouir d'une scéne dont nous avons conservé tous les souve- nirs (2). Le calme qui régnait alors dans ces lieux déserts, les parfums de l'air, sa pureté, augmentaient le charrne de cette belle nuit. Les aiaa PET" lueurs vaporeuses qui perçaient à travers le feuillage , les masses d'om- bre qui se projetaient au loin, ce mélange d'obscurité et de lumière prétaient au paysage quelque chose de magique. Dans ces hautes so- + ~ (1) Voyez, pour ces diverses localités et celles des autres iles citées plus haut, les cartes phytostatiques et topographiques de notre Atlas. = (2) La lithographie de cette forêt a été confiée à M. E. Lassalle, dont nous ne saurions trop louer le zèle pour l'exécution d’un dessin qu'il fallait ombrer sur des souvenirs , d'aprés un croquis fait à la háte et dans des circonstances peu favorables. Ce jeune et habile artiste nous a parfaitement compris, et a suppléé par son talent à tout ce qui manquait dans notre esquisse. D ns Spem mo | ( 160 ) litudes, la nature se manifeste sous des formes si fortes et si grandioses que ses créations nous semblaient immortelles comme son pouvoir. Mais, en arrivant sur la frontière de la forêt, des troncs abattus, d'au- tres que le feu avait à demi consumés , détruisirent nos illusions et re- portèrent nos pensées sur des faits plus positifs. Des bücherons, que nous rencontrámes , venaient d'achever leurs travaux : contens de la journée, ils chantaient en retournant au village. « Ces arbres, nous dit » celui d'entre eux que nous interrogeámes, sont les soutiens de nos fa- » milles; jeunes, ils nous fournissent leur résine ; devenus vieux, nous » faisons profit de leur bois. — Mais aprés eux, qui vous nourrira? — » Les petits se font grands, répondit-il avec insouciance, et nos enfans » en trouveront d'autres. » Ces bonnes gens avaient raison : peut-étre s'est-on trop alarmé aux Canaries de l'exploitation des bois; il est cer- tains districts de l'ile de Palma où les Pins se régénérent avec une ex- tréme promptitude; dans le jeune âge, les pousses de l'année ont une croissance qui étonne, et comme les déboisemens dans cette région montueuse influent peu sur le sol (1), on doit espérer que les foréts (1) Après la destruction des forêts, le sol éprouve moins de changemens dans la région des Pins que dans celles des Lauriers et des Bruyères, car les pluies ont en général peu de prise sur des montagnes volcaniques où la couche de terre végétale est presque nulle. Les eaux, en tombant sur ce sol crevassé, sont absorbées aussitôt , et , dans les endroits où la compacité des laves ne donne lieu à aucune fon- driére, elles courent sur la surface, vont se perdre dans les ravins, ou s'infiltrer plus bas dans des terres plus meubles. La région des Pins, quelle que soit son exposition sur la bande septentrionale des iles ou sur les versans opposés, se trouve placée hors de l'influence de la masse de vapeurs qui entretient une fraicheur continuelle dans les régions centrales, puisque, d'une part , les nuages agglomérés sur les forêts de Lauriers restent stationnaires le long de cette bande et ne dépassent guère la région des Bruyères , tandis que de l'autre cóté , les vents alisés et les vapeurs qu'ils aménent se trouvant arrétés par l'interposition des montagnes , la constitution de l'atmosphére est tout- à-fait changée. Ainsi, bien que, dans la distribution des contrées pluvieuses, on puisse comprendre les iles Canaries dans le climat des pluies d'automne; la loi pluviale y est modifiée sur divers points par la structure orographique et la répartition des vents. Il ne pleut ordinairement que par orages ou par averses dans la région des Pins, et ces intempéries y sont toujours occasionnées par des perturbations subites. La sécheresse habituelle de cette zone dépend donc de plusieurs causes, parmi lesquelles doit prévaloir le nombre de jours de pluie, une des quantités les plus essentielles d'un climat , selon les judicieuses observations d'un de nos plus savans agronomes. En effet, « il n'est pas indifférent, a dit M. de Gasparin, qu'une quantité don- » née d'eau tombe en un seul ou en plusieurs jours ; supposons un pays ou il tomberait par mois un | | | | ( 161) feront encore pendant long-temps une des principales richesses du pays. sans contredit passer pour trés-humide si ce décimétre était réparti sur l serait trés-sec s'il tombait en un seul jour et qu'il füt suivi de alors que la plus grande partie de la pluie ne peut imbiber la rivières où elle est perdue pour le sol. » (Voy. Météo- Gasparin; Bibliot. unie., X. XXXVIII, p. 71.) » décimètre d'eau, il pourrait » un grand nombre de jours ; mais i » vingt-neuf jours de sécheresse. Il arrive | » terre, mais court à sa surface et va se rendre aux rologie des climats européens par rapport aux pluies, par M. de ( 162 ) CONCLUSIONS. Dans le chapitre précédent, des considérations, fondées sur la na- ture du climat et du sol, nóus ont fait envisager la végétation de la région forestière sous le rapport de sa distribution et de ses phases suc- cessives depuis son principe, pendant ses alternances et jusquà son retour à l'état normal. Le tableau statistique et descriptif des foréts encore existantes vient de compléter maintenant ce premier apercu. Notre récit a été extrait en grande partie de notes prises sur place, car on ne doit pas toujours se fier à des souvenirs de voyage; le temps les efface ou les altére, une nouvelle disposition d'esprit enfante une autre manière de voir, et quand il s'agit de se replacer en présence des objets qu'on est appelé à décrire, on se laisse aller parfois à des réminiscences trompeuses. Ces réflexions viennent à propos à la fin de ce chapitre : on a parlé des iles Canaries dans plusieurs ouvrages, quelques-uns méme leur ont été spécialement consacrés; mais, disons-le sans crainte, des opinions disparates, déduites d'observations faites à la course, ont montré cet archipel sous un faux jour. Naguéres encore, un natu- raliste, du reste fort recommandable par les services qu'il a rendus à la science, s'exprimait ainsi : « La plupart des botanistes qui sont venus à Ténériffe n'ont pas vu un seul pied de Pin.... Toutes les hauteurs sont des- séchées et dépouillées d'arbres.... Les nuages ne se reposent plus sur l’île, etc. » Tandis que quelques années auparavant un autre voyageur non moins célèbre avait écrit : « L/fle entière peut étre considérée comme une forét de Lauriers, d Arbousiers et de Pins, dont les hommes ont à peine défriché la lisière.» Nous nous dispenserons d'annoter ces cita- tions : aprés des assertions aussi contradictoires, nous devions faire connaitre la vérité. On a pu se convaincre, par notre relation , que les je ba tiic HR » pem - NER EE — ERR RET ——— ( 163 ) montagnes de T énériffe et celles des îles voisines ne sont ni dépeuplées d'arbres , ni entiérement couvertes de bois. Nous avons rendu un compte fidèle de ce que nous avons vu : peindre et décrire le pays, faire partager aux autres nos propres impressions, les associer pour ainsi dire à nos recherches, telle a été à la fois la tâche que nous nous sommes imposée. Des dessins originaux, exactement reproduits, ont servi de corollaire à notre texte. C'est en nous inspirant de ces dessins, sans outrepasser leur motif, que nous avons évité ces écarts d'imagi-- nation qui font admettre trop souvent comme faits des idées conçues dans le travail de la composition. ÁO M PUR pem D rm e eer rere e mere Tem e a a aq Sd A nepos | 3 | CHAPITRE CINQUIÈME. . DES GRANDS CARACTÈRES DE LA VÉGÉTATION. Il y a une physionomie générale pour chaque zone de végétation, et une physionomie particulière pour chaque plante. DE CANDOLLE. Les végétaux d'une région botanique ont un aspect particulier qui frappe au premier coup d'œil, Ce caractère indigène se fait remarquer, soit qu'on fixe son attention sur la masse des espéces, soit qu'on les examine isolément. 1l consiste bien plus dans le rapport numérique de certaines familles de plantes et dans le degré de fréquence de | . telle ou telle espèce que dans l'absence ou la présence de certains genres, car les masses de végétation qui couvrent le sol sur un espace donné forment le caractère distinctif du paysage. Ce caractère, qui se présente sous différens aspects, lorsqu'on observe la distribution phytostatique des espéces sous le point de vue de leur sociabilité, ne saurait étre déduit de l'étude des catalogues ni de l'inspection des herbiers, c'est seulement sur le terrain qu'on peut en saisir la physionomie. Dans l'examen comparatif de deux flores, si les espéces congénéres différent entre elles, si les mémes familles sont repré- sentées par des genres divers, et surtout si ces genres sont trés- variés, la végétation prend aussitôt un aspect d'étrangeté d'autant L plus frappant qu'elle se présente sous des formes qui s'écartent da- 3 vantage de celles que nous connaissions déjà. L'élévation du chiffre moyen des espéces de chaque genre ou de chaque famille produit la monotonie; lorsqu'au contraire ce chiffre se trouve trés- restreint, | l'aspect de la végétation acquiert plus de variété. Aux îles Canaries, | | un grand nombre de genres ne sont représentés que par une ou deux | it. 7 yr Eo it ( 166 ) espèces, dont le degré de fréquence multiplie sur d'assez vastes espaces cetle diversité de formes que ne saurait produire l'abondance des espèces congénères. Le rapport des espèces avec les genres correspon- dans est donc une des conditions essentielles du caractère de la végé- tation d'une contrée, et l'on peut sur-le-champ se faire une idée de ce caractère pour les différentes flores, par la comparaison des quantités numériques dans les relations que nous venons d'indiquer. Ainsi, tan- dis qu'en France la moyenne des espéces par genre est de 7 ; et en Allemagne de 6 ?, aux Canaries elle ne dépasse guère 1 ;. Les autres données qu'on voudrait déduire des rapports numériques des familles ne sauraient étre prises en considération , car ces rapports se trouvent rompus dans les climats de transition. Par exemple, le chiffre des cruciféres, des légumineuses ou des composées canariennes, ne pourrait servir à l'évaluation de celui des graminées ou des gluma- cées, et vice versá. Ces deux familles (les graminées et les glumacées). qui, dans les zones tempérées, font ensemble plus d'un quart des pha- nérogames, n'en composent pas la dixiéme partie dans la flore. de notre archipel. L'isolement de ce groupe de montagnes, l'influence qu'elles vecoivent du continent voisin et de la proximité du tropique , | les nuages qu'elles attirent, les bruines qui les baignent, les vents d'Afrique qui les échauffent, soumettent la végétation à des condi- tions climatériques tout à fait pa rticuliéres et qui ne peuvent conve- nir quà certaines plantes. La quantité de chaleur que reçoit ce point du globe diffère essentiellement de celle qui est répartie dans les autres contrées de la zone tempérée et méme du bassin méditer- ranéen. Mais il est d'autres considérations auxquelles il faut avoir égard dans la recherche des causes qui motivent, dans chaque climat, ces aspects variés, ces caracteres différens de paysage, que les botanistes voyageurs devraient s'attacher au moins à reproduire par le dessin, lorsque toutes les ressources de la langue, sa souplesse el son génie , ' E-T dr. j | i 1 "i i! E ! i ; í (167) i joints aux renseignemens de la science, ne peuvent suffire aux des- í E criptions. Ce sont les formes individuelles, c'est-à-dire le port ( facies, habitus), la sociabilité des végétaux, l'harmonieuse combinaison de leur feuillage , soit que les mêmes espèces se trouvent réunies dans un seul groupe, soit que des espèces différentes se rencontrent confon- ad nte CS. dues, et, dans ce second cas, ces combinaisons sans disparates, ces contrastes qui plaisent aux yeux, donnent à la contrée une physio- | nomie qui n'appartient qu elle. D'autre part, des espèces identiques AA i peuvent se produire dans deux pays différens sans s'y montrer sous | A A AS M LJ 3 B LJ s F $ i le méme aspect, à cause des dimensions que les unes auroht acquises ! R ^ | sous des influences diverses. Ainsi la bruyère (Erica arborea) qui croit T aux iles Canaries est la méme que celle de l'Italie et de quelques autres " = parties de l’Europe australe, mais cette espèce arborescente acquiert i | dans ce climat des proportions tellement gigantesques que le bota- 4 niste, transporté tout à coup à Ténériffe au milieu de la forét d'Agua- 1 Garcia, est tenté de douter de l'identité de l'espéce à la vue de ces beaux í | arbres de quarante à cinquante pieds d'élévation, qui, par leur réu- E nion, forment un massif de verdure du plus singulier coup d'oeil. | En décrivant dans notre premier chapitre l'aspect général de la i | végétation, nous avons indiqué les changemens qu'elle affecte dans ses 1 | différentes stations, depuis la région maritime jusque sur les plateaux et les crêtes les plus élevées. C'est ce caractère phytostatique, dépen- dant des influences d'un climat modifié par une autre température, | d'autres circonstances locales et une autre nature de terrain, que nous 4 avons tâché de reproduire dans les grandes planches dont nous allons E donner l'explication. | | ET ER /————————————Ó——m ait. ( 168 ) Fe VUE PHYTOSTATIQUE. (Ars, pl. 1.) RÉGION pes Eurnorges, — Cette vue embrasse la végétation de la région maritime sur les montagnes côtières de la baie de Sainte- Croix de Ténériffe. Les plantes dominantes dans cette partie orientale de l'ile sont l'Euphorbia canariensis et VE. piscatoria , le Kleinia nerit- folia, le Plocama pendula e le Prenanthes pinnata. Sur le littoral, on trouve plus communément le Crithmum maritimum , le Conyza seri- cea, le Chrysanthemum frutescens, le Lycium afrum, le Beta maritima, et quelques espèces alcalines de la famille des Ficoides et des Chéno- podées. Sur les coteaux pierreux qui avoisinent les bords de la mer, on remarque bien des Labiées comme sur les cótes des iles Baléares et dans quelques autres localités du littoral de la Méditerranée ; mails ces végétaux, presque tous d'espèces différentes, sont dominés par les grandes plantes ligneuses signalées plus haut, et qui, par leur fréquence aussi bien que par leur port, impriment au paysage un aspect tout à fait original. Dans toute cette région maritime, on ne rencontre ni Pins, ni Chênes verts, ni Palmiers nains, ni Câpriers épineux. Le ton général de la végétation est d'un vert glauque, par- fois à reflets argentés , et dont la teinte pâle et cendrée tranche sur le vert foncé des autres espèces. Toutefois, il est, suivant les expositions, des sites qui possèdent des plantes particulières, et où celles qui couvrent les coteaux de la partie orientale et septentrionale sont beaucoup moins abondantes et même totalement ignorées. Ainsi, vers la bande occidentale de l'île, sur les premières assises du littoral, on trouve plus fréquemment le Physalis aristata, l'Euphorbia aphylla, le Pancratium canariense, le Rumex Lunaria et le Messerschmidia fru- ticosa. Le long de la côte du Sud, au contraire , on voit dominer sur de grands espaces le Zygophyllum Fontanesii, Y Euphorbia balsamifera et le Cneorum pulverulentum , espéce canarienne qui diffère essentielle- ment, par le port et la couleur du feuillage, du C. tricoccon du littoral ( 169 ) | de la Méditerranée. Dans d'autres endroits, le sol est couvert de Frankénies, de Gnaphales , d'Héliotropes et de Prénanthes (F. puke- rulenta, G. luteo- album, H. erosum, P. spinosa), entremélés avec l Aizoon canariense , le Chenopodium ambrosioides et Y Erigeron vis- cosum, qu on rencontre un peu partout. IF ET III: VUES PHYTOSTATIQUES. (PL 2 et 3.) REGION pes RAvINs. — Nous avons dit que la végétation des ravins sassimilait vers leur débouché à celle du littoral et de la région maritime, tandis qu'à leur issue supérieure elle se confondait avec celle des foréts. C'est ce que montrent les deux planches que nous citons : la première (pl. 2) représente l'entrée d'un des grands barran- cos de la côte orientale de Ténériffe. Les plantes dominantes sont, pour la plupart, celles qui couvrent les coteaux maritimes de cette partie de l'île. C'est toujours la région des Euphorbes, entremé- lée plus fréquemment d'autres espéces ligneuses et d'un plus grand nombre d'herbacées qui recherchent l'ombre des berges et l'humi- dité des infiltrations. | L'autre vue (pl. 3) est celle du grand ravin de Badajos, prise vers le point où il commence à atteindre la région des forêts et des brumes permanentes. Ici, le changement de température et la fraîcheur du sol ne conviennent plus aux Euphorbes ni aux autres plantes qui les accompagnent. Un feuillage plus luxuriant, une verdure plus fraiche - et plus apparente viennent décorer les escarpemens de ces gorges sinueuses. La variété des espéces accuse des conditions d'existence mieux appropriées au plus grand nombre de végétaux (voy. précédem. pag. 18-19 et notes); mais l'abondance des Bruyères et quelques taillis de Lauriers signalent déjà le voisinage de la région forestière. ( 170 ) IVe ET V- VUES PHYTOSTATIQUES. (Pl. 4 et 55 RÉGION DES LAURIERS ET DES PLANTES FORESTIÈRES. — Nous avons fait reproduire, dans la pl. 4, un des beaux sites de la forêt d'Agua-Garcia, à Ténériffe. Là, seulement, quelques plantes némorales peuvent croi- tre sous l'ombrage des grands arbres, dont les branches touffues for- ment un massif impénétrable aux rayons du soleil. Un des caractères des foréts canariennes, et qui de prime abord les distingue d'avec celles de l'Europe, c'est la nature de leurs arbres toujours verts et le mélange des espèces appartenant à des genres divers. Dans ce climat de transition, on peut déjà observer le passage de la végétation de la zone tempérée à la zone tropicale. La multiplicité des genres et le péle-méle des espèces étonnent le botaniste qui parcourt pour la première fois cette région verdoyante et rafraîchie par les bruines qui se forment dans son atmosphère; mais , en méme tem ps. la similitude des formes organiques vient lui rappeler encore l'uniformité des forêts euro- péennes. En effet, si l'on excepte deux ou trois espéces, toutes les autres présentent à peu prés la méme structure dans le port comme dans leurs parties foliacées. Ce sont en général des feuilles d'un vert foncé et luisant, lisses, fortes, entières , lancéolées ou fort peu découpées sur leurs bords. Presque tous ces arbres portent des fruits à drupe ; leurs fleurs sont peu apparentes, mais quelques-unes répandent une odeur pénétrante qui se rapproche déjà du parfum musqué des foréts du Nouveau- Monde (le Laurus fœtens (1) et l Ardisia excelsa). Cette har- monieuse uniformité dans l'aspect du feuillage et dans la symétrie des grands arbres forestiers est tellement frappante qu'au premier coup d'œil on pourrait confondre facilement des espèces tout à fait diffé- rentes par leurs caractéres génériques; car rien ne ressemble plus pour le port à un Ardisier qu'un Myrsine; le Rhamnus glandulosus , le (1) Le nom spécifique du L. fætens, est dérivé de la mauvaise odeur de son bois, mais ses fleurs š comme celles de l'Ardisier, répandent un parfum de violette qui rappelle un peu à l'odorat celui du musc. TEUER deer nim o (AT ) Pittosporum coriaceum, le Myrica Faya, même "Iex Perado et l'Olea excelsa se rapprochent aussi de ce type de forme, et les quatre espèces de Lauriers qui peuplent cette région offrent encore le même facies. Quant aux observations de détails, nous renvoyons le lecteur à notre description de la forêt d'Agua-Garcia, pag. 191 et suivantes. Dans la pl. 5 nous avons fait figurer l'aspect des bois taillis apres la destruction des grands arbres , et l'on peut voir, à ce sujet. les ren- seignemens que nous avons consignés dans le chapitre iroisiéme , sur les foréts canariennes, leurs changemens et leurs alternances. VI: VUE PHYTOSTATIQUE. (PL 6.) — ác RéGion pes Pins. — On a représenté, dans la planche citée, la forêt de Pins des environs de Chasna, à treize cent cinquante-six mètres d'élévation au-dessus du niveau de la mer. A cette hauteur le Pin des | Canaries (P. Canariensis) est la seule espèce qui garnit les montagnes [ | de Ténériffe et des îles voisines. Cet arbre, par son port, ses grandes | proportions et la beauté de son feuillage, imprime à la région quil | occupe un caractère différent de celui des forêts pinifères de l'Europe. « Des espéces semblables de plantes, telles que les Pins et les Chénes, observe M. de Humboldt , couronnent également les montagnes de la Suède et celles de la partie méridionale du Mexique ; cependant, mal- gré cette correspondance de forme et cette similitude de contours, l'ensemble de leur groupe présente un tout autre aspect (1). » C'est aussi le cas du Pin des Canaries par rapport aux espéces de nos cli- mats. La croissance de ce bel arbre est trés-rapide; il atteint l'éléva- Do e F : ° e T 4. e. tion des plus hauts Sapins du Nord; soń tronc est droit et fort gros dans sa partie inférieure. Nous en avons mesuré un qui avait prés de dix métres de circonférence et dont les branches conservaient encore ja -— d'énormes dimensions à quelques pieds du sol. Ces branches , espacées Dui (1) Tableaux de la nature, tom. n, p. 2n t D D a a aaa aaa à 4 Sn à sal 3 ( 172 ) le long de la tige et disposées en verticilles , comme dans les Sapins et les Mélézes , vont en diminuant graduellement jusqu'au sommet. Ce système de ramification ombelliforme est surtout très-prononcé chez les vieux arbres; leurs longues feuilles forment des touffes de verdure du plus bel effet et les cónes ne sont pas moins remarquables par leur grosseur. Ces cônes, après avoir nourri dans leur sein des amandes membraneuses, entr'ou vrent leurs écailles à la seconde année et livrent à la nature les germes reproducteurs qui attestent sa puissance et son inépuisable fécondité. Le bois du. Pin des Canaries est presque incor- ruptible , car il se conserve encore intact après plus de trois cents ans de service. La charpente de plusieurs édifices de Ténériffe et de Cana- ria, qui datent du quinziéme siécle, n'a pas souffert la moindre altéra- tion. Les Pins de ces iles sont employés à des usages aussi importans que variés; leur bois n'est pas réservé seulement au service de la marine et des constructions civiles; l'économie rurale en retire aussi de grands avantages pour la grosse charpente et là fabrication d'une foule d'instrumens et d'ustensiles, tels que pressoirs, échalas, ruchers, etc. ll n'est pas une famille, parmi les gens de la campagne, qui ne mette les Pins à contribution pour ses besoins journaliers, et, outre la résine qu'on sait extraire de leur tronc, le coeur du bois (duramen), coupé en petites büches réunies en faisceaux, sert de flam- beau pour s'éclairer pendant la nuit, comme au temps de Virgile : ... Tædas sylva alta ministrat, | Pascunturque ignes nocturni , et lumina fundunt. En décrivant la région des Pins, dans notre chapitre sur les forêts, nous avons cité les arbres les plus remarquables. La pl. 6 de nos vues phytostatiques ne saurait donner une idée assez exacte de l'aspect imposant des bois pinifères , car les plus beaux sujets avaient été abat- tus lorsque nous fimes prendre le dessin des lieux ; mais les pl. 42et 43 de la partie historique reproduiront ces arbres aux yeux du lecteur, avec le grandiose des formes et toute la majesté du port. E pi à cette planche est prise du facies des végétaux , ce caractère dominant qu ( 173 ) VII VUE PHYTOSTATIQUE. (Pl. 7.) s FRUTESCENTES. — La vue représentée dans plateau des Cafiadas de 'Ténériffe , à trois la mer. Le REGION DES LÉGUMINEUSE mille sept centis mètres d'élévation au-dessus du niveau de Cytisus nubigenus et Y Adenocarpus Frankenioides croissent presque exclusivement sur ce plateau (voy. précédem., pag. 23). VUES PHYTOSTATIQUES. (Pl. 8 et 9) Ces deux planches se trouvent citées , avec les observations qui SY rapportent, aux pages T4 et 145 de ce volume. DU PORT DE QUELQUES ESPÈCES CANARIENNES. citer les planches de notre Atlas qui donnent le e la nature a tracé à Il nous reste à grands traits, quon peut observer à distance et que nous ne saurions bien définir sans le secours du dessin. « Pour déterminer les formes dont la beauté individuelle, lisolement ou le rassemblement en groupe constituent la physionomie de la végétation d'une contrée , a dit l'illustre auteur des Tableaux de la Nature, il ne faut pas.suivre la marche des systémes de botanique où, par d'autres motifs, on ne con- les petites parties des fleurs et des fruits , il faut, au con- traire, envisager uniquement ce qui, dans les masses, frappe plus particulièrement les regards. » M. de Humboldt a voulu parler des du feuillage, de l'aspect des troncs, de la symétrie des bran- us sommes attachés à reproduire, en mon- s formes organiques et l'en- sidère que contours, ches, et c'est ce que nous no trant les espéces canariennes qui, par leur e leur structure, nous ont offert un port caractéristique. semble d 23 IIt. Nd (174) Facies. — PI. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7. (Atlas.) | : | Nous avons compris dans cette série de planches quelques-unes des : espéces des coteaux maritimes et de la région des ravins. L'Euphorbe | des Canaries (E. canariensis), si remarquable par son port, et qu on prendrait, à ses tiges en colonnes, pour un grand candelabre où un | P Cactus du Pérou, figure sur les pl. 1 et 2. Dans la première, cette | espèce est représentée avec celles qui croissent à l'abri de ses tiges épi- neuses et qui bravent la dent vorace des chévres au milieu de ces buissons impénétrables. Ces espéces sont le Kleinia neriifolia , le Plo- cama pendula et le Periploca lævigata , dont les rameaux volubiles se roulent sur eux-mêmes, et que l'on appelle dans le pays du nom de Cornical,à cause de ses deux follicules en forme de cornes. Il en est encore beaucoup d'autres qui se plaisent dans ces halliers ; tels sont le Jasminum odoratissimum, le Canarina C ampanula, le Cneorum pul- | | eerulentum , le Drusa oppositifolia , les Messerschmidia et Rubia fruti- M. — Ni Á WP mm e n n o . | cosa, etc., etc. Dans la pl. 2, c'est encore l'Éuphorbe des Canaries que nous avons mis en opposition avec l'Euphorbia piscatoria et UE. aphylla; la pre- . miérc assez semblable, par son port et ses autres caractères , à l'Eu- | phorbe de Mauritanie; la seconde non moins remarquable, par un 38 feuillage plus développé et des bractées florales du plus vif incarnat. Quant à l'autre plante qui s'élève longue et grêle au milieu du buisson protecteur, c'est le Messerschmidia fruticosa, que les insulaires des Canaries appellent Durasnillo (petit pêcher), à cause de la ressem- blance de ses feuilles avec celles de cet arbuste. fi Pour réunir les espèces congénères dans cette courte indication , nous citerons à la suite l' Euphorbia aphylla et YE. balsamifera de la pl. 5; l'une, bien caractérisée par ses tiges herbacées, cylindriques , lis- ses et dépouillées de feuilles, comme l'indique son nom; l’autre au — sn PE o 2 Mes (315) tronc court et ligneux , aux branches étalées et aux petites feuilles dis- posées en rosettes au sommet des rameaux. Le Solanum Vespertilio figure aussi sur la méme planche. Cette espèce se fait remarquer par ses branches tortueuses et hérissées d'épines, ses larges feuilles cordées et ses belles fleurs. | Le Physalis aristata est une autre espece de la famille des Solanées, que nous avons représentée dans la pl. 4. Ses feuilles rappellent un peu.celles des Nicotiana , lorsque l'arbuste croit dans de bons terrains et que les repousses de ses branches radicales ne sont pas devenues la pâture des bestiaux avides de ce feuillage malgré son odeur nauséa- bonde. Nous donnons, dans la pl. 3, le facies du Convoleulus floridus , du Plocama pendula ei du Kleinia nertifolia. Le Convolvulus floridus , au port élancé , au feuillage léger, est un arbrisseau de moyenne grandeur, dont les feuilles oblongues , lancéo- lées, soyeuses et d'un vert cendré, ont quelque chose des brillans reflets du Protea argentea. Ses rameaux portent à leur extrémité de superbes panicules de fleurs d'un blanc mélé d'une légère teinte rose, et que Linnée fils a irés-bien caractérisées par cette phrase : Copia florum omnium pulcherrimus. f Le Plocama pendula est une espèce monotype de la famille des Rubiacées , remarquable par ses longues feuilles filiformes et flexueu- ses, ses rameaux penchés vers la terre, ses petites baies blanches, trans- parentes et brillantes comme des perles d'Orient. Toutes les parties de cet arbuste répandent une odeur nauséabonde et presque cadavé- reuse. La disposition de ses branch:s et de ses feuilles pendantes lui donne l'aspect d'un Saule Pleureur. Le Kleinia neriifolia est une de ces composées à tige ligneuse que certaines îles volcaniques (1). situées à de grandes distances les unes (1) Les Canaries, Sainte-Hélène, l'ile Bourbon et celle de Juan Fernandez. LL. RERO À ( 176 ) des autres, dans les deux hémisphéres, semblent produire de préfé- rence. Son port est celui d'un Dragonier nain; son tronc grisátre porte les empreintes des insertions des anciennes feuilles, les nouvel- les tendent toutes à se réunir à l'extrémité des rameaux. Orné de ses bouquets de fleurs terminales , ce singulier petit arbuste apparait cou- ronné d'une auréole d'aigrettes du plus gracieux effet. Ce sont encore des composées arborescentes que nous avons réunies dans les pl. 6 et 7. D'abord une Chicoracée ligneuse d'un facies étrange, mais dont l'aspect ne laisse pas d'être agréable à l'oeil. C'est le Sonchus fruticosus, aux belles feuilles découpées en rondache, aux fleurs superbes et d'un si brillant éclat. À côté de ce Sonchus arbores- cent se montre le Prenanthes arborea , aux feuilles plus déliées , aux panicules plus fournies, mais dont les fleurs sont bien moins apparen- tes. Ensuite vient le Prenanthes pinnata, chez lequel la nature s'est plu à multiplier les variantes d'un feuillage pinnatifide et filiforine. Rien n'égale la finesse et la légéreté de ces feuilles soyeuses qu'agite le moindre vent et la délicatesse de ces panicules aux petits fleurons d'un jaune doré. | | | — Enfin, la plante aux longues feuilles épineuses, qu'on voit suspendue sur le bord des rochers où elle a pris naissance, est le Carlowizia salicifolia, dont les rameaux flexueux tombent. en courbe bizarre pour se relever ensuite et étaler leurs grosses fleurs. Facies. — PI. 8. (Dracena Draco. Linn.) LE DRAGONIER A SES DIFFÉRENS AGES. — Telle est la planche dont nous sommes redevables à l'habile crayon de M. J. J. Williams, peintre paysagiste, qui résida plusieurs années aux îles Canaries. L'arbre sécu- laire y est représenté avant la catastrophe qui le priva d'une partie de son branchaee. On le voit ensuite mutilé par l'ouragan. mais pour- ) p suivant toujours le cours de sa longévité, Ce végétal gigantesque a E11 déjà été décrit: son aspect imposant, ses dimensions colossales ont fait l'admiration des voyageurs naturalistes (1) ; et l'on peut lire dans nos Miscellanées (2) l'impression que produisit sur nous-mêmes ce vétéran du règne organique, lorsque nous habitions dans son voisinage. Son tronc monstrueux mesure plus de dix-huit métres de circonférence. À cette énorme masse, qui sest accrue dans la suc- cession des siècles, s'unit l'expression d'une force qui se renouvelle sans cesse. SONUS | | Ce n'est qu'au cap de Bonne-Espérance, à l'île Bourbon et dans l'Inde qu'on peut voir des formes analogues à celles du Dragonier. Dans sa première jeunesse, son facies trouve un représentant dans l'Yucca d'Amérique. Quand on ne compare que leurs tiges et le fais- ceau de longues feuilles aigués qui les couronne, la ressemblance de ces deux espèces de familles si opposées est alors vraiment frappante. L'aspect bizarre de l'arbre que nous avons figuré à côté du grand Dragonier, en face de celui qui est orné de ses panicules florales , est | dû à des circonstances particulières dans le développement progressif de la tige. Ce jeune arbre n’a fleuri qu'après un grand nombre d'an- nées. et. par conséquent, toute sa croissance s est bornée à léloneation ? ? 9 de la tige par la chute successivé des anciennes feuilles et la reproduc- tion des nouvelles. S'il eût commencé à fourcher à quatre ou cinq mètres au-dessus du sol, chaque nouveau bourgeon floral aurait donné lieu à une nouvelle bifurcation , par la naissance de bourgeons laté- raux, et les vaisseaux radiculaires de ces mémes bourgeons , en se pro- longeant de leur point de départ, vers les racines, auraient grossi le dia- métre des branches et du tronc. Mais dans le cas que nous présentons, Ja nature n'a pas établi, dés le principe, une égale proportion de crois- (1) Voy. Humboldt : Tableaux de a Nature (traduct. dEyries) , t. 11, p. 26; et note, p. 100. Relation TOL, t. 1, pPU18, 639; et nos observations sur le Dracena Draco. (Nova Acta Acad. Natur. curios., vol. xin , p. 773. — 1827.) (2) Tom. 1, 2° parts, p. 98. Leo] ( 178 ) sance en longueur et en largeur. Le premier développement a long- temps dominé le second; le bourgeon foliacé originaire a fait seul tous les frais de l'accroissement, jusqu'à ce que l'apparition d'un bourgeon de fleur, au sommet de la tige, en déterminant celle des bourgeons latéraux, ait donné naissance aux premières branches. Cet exemple d'un développement continu en longueur par le seul prolongement des fibres ligneuses, provenant du renouvellement successif du premier bourgeon foliacé, nous semble la confirmation la plus patente de la théorie de La Hire , théorie naturelle qu Aubert du Petit-Thouars a démontrée dans ses Mémoires , que nous avons soute- nue par nos propres observations sur le développement des Conife- res (1), et que naguère M. Gaudichaud a prouvée à fond, dans un tra- sail complet, digne du prix qu'il a obtenu. Facies. — PI 9 et 11. Quatre arbres de la région forestière sont représentés sur ces deux planches: d'abord, l'Ilex canariensis et l'Ilex Perado (pl. 9). Le pre- mier a l'aspect d'un Laurier; le second se fait distinguer par sa tige droite , élancée, et ses rameaux étalés horizontalement. Le port de ce bel arbre et le lustre de son feuillage lui ont valu dans le pays le nom d'Oranger sauvage (Naranjero salvage), mais celui de Citronnier lui conviendrait peut-étre mieux. L'Olea excelsa (pl. 11) conserve, dans la symétrie de ses branches. un des caracteres de l'Olivier d'Europe. Ses feuilles dures, lancéolées , sont un peu curvatives , comme celles de ses congénères, mais leur lustrée lui donnent une tout autre appa- dimension, leur verdure on feuillage tient bien plus de la rence. La masse luxuriante de s végétation tropicale que de celle de nos climats. (1) Sur la longévité et laccroissement des arbres. 9e mém., Bibliot. univers. de Genève, 1'* série, vol. 51, p. 355. — Décembre 1832. — —. 24 —— e —— aa ( 179 ) Le Boehmeria rubra (pl. 11) est un arbuste de la famille des Urti- cées , qui, par son port,sécarte tout-à-fait de nos espèces d'Europe. C'est dans les iles de l'Océan-Pacifique, et surtout dans celle d'Ualan, quil faut aller chercher ses analogues. Le vert-tendre de ses feuilles sharmonise bien avec la teinte légère des grappes de fleurs rosées dont se panachent les rameaux. Par la gracieuse flexibilité du feuil- lage et l'agréable aspect des fleurs, ce joli arbuste fait l'ornement des sites où nous l'avons rencontré pendant nos herborisations (1). F'acies. — PI, 10. L’ Adenocarpus Frankenioides (2) et le Cytisus nubigenus (3) sont les deux plantes dominantes qui garnissent la haute région des légumi- neuses arborescentes. L'A. Frankenioides est un sous-arbrisseau au tronc. court et noueux, de la tribu des Genêts, mais dont les petites feuilles ternées , pubescentes et roulées en dehors sont ramassées le long de rameaux divergens et lui donnent un peu l'aspect de certaines Frankénies. Il se décore, au mois de mai, de fleurs odorantes, d'un jaune-citron, dont les thyrses, qui naissent à l'extrémité des rameaux , se marient agréa- blement avec le vert-gai du feuillage. A Ténériffe on commence à rencontrer cet Adénocarpe à deux mille quatre cents métres au-dessus du niveau de la mer, en montant vers le Pic par la vallée de l'Orotava. Il se mêle d'abord avec le Cytise prolifère, mais plus haut et à mesure que l'on savance sur le plateau des Cañad as (1800 m.) , il couvre à lui seul un espace d'une assez grande étendue et finit par se perdre dans une autre zone de (1) Voy. nos observations sur cette espèce (Nova Acta Acad, Natur. curios., vol. xiv, p. 943,—1829;. (2) Adenocarpus viscosus: Nob, Voy. m° vol., 2° sect. (PAytograph. canar.) , p. 32. (3) .Spartocytisus nubigenus. — Id., | ibid., p. 50, ; , ( 180 ) végétation formée par l'espèce que nous allons décrire et qui reste - 4 maîtresse de ces terrains volcanisés. E Le Cytisus nubigenus, que Linné avait placé dans les Spartes. 4 est une autre espèce de la tribu des Genêts, dont le tronc court et tor- ^" tueux se ramifie très-près du sol. Son écorce mince se fendille et se zi détache par lanières; les premières branches s'étendent horizontale- E - ment et se courbent jusqu'à terre ; elles donnent naissance à des tiges 4 longues, gréles, droites, grisâtres, qui poussent par paquets divergens, £ comme on le voit dans le Genét d'Espagne. De petites feuilles ternées, SP oblongues, soyeuses et d'un vert pàle naissent le long des tiges ; toute- d | fois, l'apparition de ces organes n'a lieu que sur les jeunes. rameaux, | P 1 g les vieux Cytises en sont privés , aussi l'aspect de la plante est des plus 3 I à tristes avant la floraison ; mais au commencement du printemps elle 3 Í se couvre d'une innombrable quantité de fleurs blanches , tellement l à pressées le long des tiges que, vu à une certaine distânce, ce buisson | 2 1 ressemble à un grand amas de neige. Les fleurs de ce genêt, qu'on appelle à Ténériffe Retama blanca, prennent sur quelques arbustes une légère teinte rosée ; elles exhalent un parfum suave qui embaume ious les lieux environnans et que la brise du soir répand jusque dans les vallées inférieures. Les abeilles butinent sans cesse autour de cette plante, quelles préfèrent à toute autre : sans elle point de ce miel 3 délicieux qui égale celui du mont Hymète , car les nombreux essaims, dont les ruches sont placées dans les endroits les plus abrités du pla- RES x dd va LU bodas d à " : d Man s V grae odia is x pi p eiut ed sé: à mu x 6 3 VS MR RE licec QD adliuc i ÁN RS ne 2 Volo NERIS NASA PAN i " x | teau . seraient privés de leur principale subsistance. Sans le Genét des Cañadas point de chèvres même, dont les troupeaux, relégués une broutent, faute d'autre partie de l'année dans ces hautes solitudes, pâturage, les jeunes tiges de la plante qui fournit aux habitans de l'ile deux précieuses ressources, le laitage et le miel. Elle n'est pas moins utile au voyageur que la curiosité conduit jusqu au sommet du Pic, car ses branches sèches leur servent à entretenir le feu de leur bivouac. E: Ce buisson,si triste quand il ne monire plus que ses tiges gréles et ( 181) nues, ses légumes noi res et plates, mais si éclatant lorsqu il est orné de ses blanches fleurs, vient embellir des lieux que les volcans semblaient avoir condamnés à une stérilité éternelle. Tel est le.Genét blanc qui occupe presque à lui seul l'immense cir- que cratériforme au milieu duquel s'élève le Teyde dans toute la majesté de sa masse imposante, Nous avons essayé de le peindre avec la physionomie qui le caractérise , formant avec l'aspect aride des lieux ce contraste qui étonne et charme à la fois. & | Berthelol Paris, 2 mai 1842. FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE DU TROISIÈME VOLUME. mme — — — 3 a EE ie 2 pean TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. CHAPITRE PREMIER. ASPECT GÉNÉRAL DE LA VÉGÉTATION DANS ES CANARIS S Lu... co Pag. SUPPLÉMENT AU. CHAPITRE PREMIER. Florule de l'ile de Graciosa. . . . . - . -- Liste de plantes recueillies dans l'ile de Lan- cerotte depuis le 25 mai jusqu'au 23 juillet RU CAM UI UE C V AAT Ug ec + Liste de plantes recueillies à Fortaventure dans le commencement du mois d'aoüt 1829. CHAPITRE DEUXIÈME. DISTRIBUTION PHYTOSTATIQUE. . - . + . . - . Tableau comparatif des différences dans la température des principales stations. . . . Tableau du premier climat. . . . . . . . .. — du deuxième... .. E dug troie... 00.05. 5 » SUPPLÉMENT AU CHAPITRE SECOND. OBSERVATIONS CLIMATÉRIQUES. . . >. ss.. Température du Pic de Ténériffe à deux sai- sons diiléggntes, & .: . .. . . 4. . .-A Observations sur la température de la haute EU RS EL Séries d'observations sur la température de diverses localités de l'ile de Ténériffe. . LES n o 27 28 95 '84 Jb. 85 86 FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES, Observations sur la température de la Grande Canarie, . . .* . Pag. Observations comparatives sur la température de l'atmosphère au niveau de la mer dans deux différentes localités. . . . . . . . . . CHAPITRE TROISIÈME. DES FORÉTS CANARIENNES, DE LEURS CHANGE- MENS ET DE LEURS ALTERNANCES. . . - CHAPITRE QUATRIÈME. DESCRIPTION DES FORETS. . . . + one Forêts du nord-est de Ténériffe. . . . . .. Eoret d'Agua Garcia. . 2...» Groupes d'arbres isolés. . . . . . . . . . .. Forêt de Doramas dans l'ile de Canaria. . . Forêts ded'île de Palma. . .. . o.o. ee = MEDION AS PRE 1. xev e COS e C L'or Ten ur CHAPITRE CINQUIÈME. DES GRANDS CARACTÈRES DE LA VÉGÉTATION. . Vues phytostatiques. Explication des plan- CES le LS Re $73 2 5 1s DU PORT DE QUELQUES ESPÈCÉS CANARIENNES. . Facies. Description d’après les planches de l'Atlas. $8 ligne — IBS or ERRATA. il en est aussi d'autres placées... . . .:.. les espèces aborigènes la symétrie les lavanges . B. Les trois premières fautes n'existent que dans un certain il en est aussi. placés. les espèces indigènes, la monotonie. les lavasses. nombre d'exemplaires. zA A AM ww » $ AN Dr m —nüÓ PW » i S DE RER EME RES ù fs