TL , rt ADR EN ES FRERE nu + : = CSC + CES EEE a ce a QG D oi fée. Mange me dr mg. nn hot ex LS | Le = “ ÉD 47: = F2 _ ACADÉMIE DE LA ROCHELLE. SECTION DES SCIENCES NATURELLES. ANNALES. 1854. LA ROCHELLE , lYPOGRAPIHIE G. MARESCHAL , RUE DE L'ESCALE , 20. 1859 RAPPORT FAIT A LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES SUR SES TRAVAUX EN 1854. Par M. le docteur Sauvé. Séance du 7 Mai 1859. MESSIEURS , L'Académie de la Rochelle, dont votre société forme une des sections, va publier les Annales de ses travaux pour l’année qui vient de s'écouler {1854 }. Invités par cette Académie à fournir votre contingent à l'œuvre com- mune , vous avez décidé , dans votre dernière séance, que votre secrétaire serait chargé du soin de rassembler les vôtres et de vous faire un rapport suceinet à ce sujet. Je viens, en conséquence de cette décision, m'acquitter de la mission que vous m'avez confiée. + Je commencerai tout d'abord , Messieurs , par vous rappeler le but pour lequel la société s'est créée, afin que vous puissiez juger si vous avez marché dans la voie que vous vous étiez tracée et si les résultats que vous avez obtenus vous rapprochent chaque jour davantage du point où vous voulez arriver. Notre société s’est proposé, avant tout, la création d’un Musée départemental dans lequel viennent successi- vement se ranger en ordre méthodique tous les produits naturels de notre département. Il suflit d'ouvrir nos ar- moires, de visiter nos collections et de compulser nos catalogues , pour s'assurer que nous avons marché d’un pas ferme et rapide dans cette voie. Nous avons employé une partie de nos ressources à l'acquisition de mammi- feres, d'oiseaux , de poissons , de reptiles. Je ne vous parle ici que des vertébrés, parce que ce sont les seuls pour lesquels nous ayons fait des dépenses sérieuses : les animaux des autres ordres nous ont coûté beaucoup moins , quoique nous ayons eu autant à cœur d'en com- pléter les collections. En vous parlant de celles-ci, je ne puis résister au désir de vous faire l'éloge de notre jeune conservateur, M. Édouard Beltremieux , qui a pris la tâche difficile de les remanier toutes, avec le concours d’un de nos nou- veaux membres , M. Michelin. C’est encore le lieu de nous féliciter d'avoir un préparateur aussi habile que l'est M. Guéri, qui s’est acquis dans la préparation des oiseaux et surtout des poissons une réputation qui à tra- versé la France. Si bien qu'aujourd'hui on lui demande de plusieurs villes diamétralement opposées à la nôtre ses poissons qui ont conservé , avec leurs couleurs naturelles, l'aspect de la vie. Nos collections se sont journellement augmentées des dons que chacun de nous a faits à notre Musée. Peut-être auraient-ils pu être plus considérables ? Cette réflexion ne saurait être un reproche , c’est seulement l'expression du désir de les voir se multipler plus rapidement. Pour arriver à ce résultat, il serait bon de renouveler plus souvent les courses scientifiques que nous n'avons faites qu’une seule fois , l'été dernier. En outre du plaisir que chacun de nous a pris dans cette excursion, celle-ci a valu à la société trois rapports intéressants : le premier, sur l'entomologie , par M. Blutel ; le second , sur la géo- logie, par M. Beltremieux ; et le troisième, sur la bota- nique , par M. Michelin. Ayant pour but encore dans nos travaux les applica- tions pratiques et d’une utilité publique reconnue, nous nous sommes beaucoup et très vivement occupés des questions de Pisciculture. Notre voisinage de la mer nous permettait de faire pour les poissons marins les tentatives que d’autres faisaient pour les poissons d’eau douce. Nous avons Compris qu'il incombait à notre société de faire à ce sujet des recherches et des études qui pouvaient con- duire à des résultats intéressants. Y sommes-nous arrivés ? Nous ne saurions répondreaflirmativement, d’une manière absolue. Il faut plus de temps que nous n’en avons eu , nos expériences sont encore toutes en voie d'exécution ; cependant on peut déjà savoir qu'elles n'ont pas été tout- 6 a-fait infructueuses : deux rapports adressés à la société par sa commission de Pisciculture établissent suflisam- ment. Les dépenses que la société fait pour son établisse- ment piscicole, bien que très-fortes pour elle, ne permettent cependant pas de multiplier et de varier les expériences comine il conviendrait de le faire. Il est en vérité fâcheux que nous ayons été abandonnés à nos faible moyens et que le Gouvernement et le Conseil général ne soient pas venus encourager notre utile entreprise. Je rapprocherai des deux rapports sur la Pisciculture un mémoire très-intéressant d'un de nos membres agrégés, M. Robert, de Marennes, qui nous a fait connaitre avec des détails très-circonstanciés la manière dont on engraisse les huitres dans les claires des bords de la Seudre et le produit qu'en retirent les propriétaires , qui les expédient dans toute la France, en Italie et même en Algérie. Ce mémoire est très-riche de faits pratiques, d’'apercus scien- tifiques et de détails statistiques. Je suis heureux d'avoir eu l'idée de demander à notre collègue des détails sur cette industrie , puisque cette demande et les questions que je le priais de résoudre ont été l'occasion de ce mémoire. Cet écrit serait digne de figurer dans vos Annales ; mais comme il se rattache à la question de Pisciculture, il trouvera naturellement sa place lorsque la Société fera paraitre un travail d'ensemble sur cette question. Je passerai de la Pisciculture à l'Hirudiniculture , en vous rappelant les communications fréquentes que Je vous ai faites à l'occasion de mes marais à sangsues. Plusieurs de nos séances ont été occupées par la lecture d'un long mémoire dans lequel je vous ai exposé l'orga- nisation , les fonctions , les mœurs et les habitudes des annelides , et dans lequel je vous ai développé les moyens de multiplication, de nutrition et de conservation que J'ai employés. Les résultats auxquels je suis arrivé, et que votre commission pu constater, vous ont paru assez inté- ressants pour vous faire voter l'impression de ce mémoire dans vos Annales. J'ai dù décliner cet honneur, afin de ne pas empêcher, par cette impression (1), le jugement de l'Académie des sciences , à qui j'ai transmis un mémoire manuscrit sur le mème sujet. Parmi les travaux manuscrits que la Société des sciences possède dans ses archives il en existe plusieurs qui ont trait aux sciences naturelles proprement dites et qui étant plus du ressort de la Société , devraient être choisis de préférence pour être imprimés dans ses Annales; mais le travail intitulé : Recherches sur la salubrité de l'air de la Rochelle, sur les moyens de l'augmenter et sur l'étiolo- gie des fièvres paludéennes | touche à des intérêts hygié- niques si grands et les conséquences pratiques qui en ont été déduites ont été si utiles à notre ville, que vous avez pensé devoir le choisir de préférence à tout autre. Je vous remercie de votre choix qui est bien plutôt dû à l'inrportance du sujet qu'à la manière dont il est traité. Comme vous le voyez , Messieurs, nous ne nous sommes pas seulement bornés à collectionner, nous avons (1) L'Académie des sciences ne fait pas de rapport sur les ouvrages imprimés, à voulu apporter notre tribut à la science et dire notre mot dans les questions où l'histoire naturelle vient seconder l’agriculture , le commerce et l’économie politique. Ilest un autre ordre de faits qui a aussi bien souvent préoccupé la Société : je veux parler de la météorologie. Nous sentons tous la nécessité qu'il y a à s'occuper de ces phénomènes qui se passent dans l'atmosphère. La création d'un observatoire , où les expériences seraient régulièrement faites et enregistrées, vous a paru tellement indispensable que vous aviez nommé une commission à l'effet d'étudier ce projet et de vous faire un rapport. La commission s’est acquittée de sa mission; elle vous a, par l'organe de son président , exposé combien il importerait de donner suite à ce projet , elle vous a indiqué quels seraient les instruments nécessaires et le chiffre approximatif auquel s’élèverait la dépense. Ce chiffre vous a paru trop élevé pour vos finances et vous avez été contraints, bien à regret , d’ajourner l'exécution de vos plans. Vous avez été informés que la Rochelle avait été choisie pour la tenue du Congrès scientifique de France, en 1856. Vous vous êtes empressés d'accueillir cette bonne nou- velle et de créer dans votre sein deux Bureaux provi- soires ; le premier , pour la section des sciences physiques et mathématiques ; le deuxième, pour la section ‘des sciences naturelles. Vous avez ensuite préparé et proposé une série de questions à traiter dans le Congrès. Je n’entreprendrai point de rappeler ici les nombreuses discussions scientiques qui ont occupé la plus grande 9 partie de vos séances ; ce sont habituellement des conver- sations sur les communications faites au public savant par les journaux qui s'occupent des sciences. Nous trouvons dans ce genre de travail l'avantage de nous entretenir de toutes les questions à l’ordre du jour ; de suivre le mouvement intellectuel ; de nous communiquer réciproquement nos idées; d'établir et de resserrer entre nous ces liens de confraternité scientifique, qui nous procure à tous de si douces jouissances. Je ne vous entretiendrai pas longuement de nos relations avec nos correspondants ; nous avons reçu d'eux plusieurs ouvrages imprimés , parmi lesquels plusieurs ont été le sujet de rapports verbaux , qui en ont fait connaître le mérite à la Société. Celui de nos correspondants , qui nous a payé le plus large tribut, est sans contredit M. Charles Desmoulins , travailleur infati- gable , exclusivement dévoué aux sciences qu'il cultive avec éclat. Il me reste encore à vous dire que nos rangs se sont ouverts avec empressement pour y recevoir comme membres titulaires : MM. Dubois, Michelin , Paumier , Garnaud et Arnoux. Agrégés : MM. Bois-Giraud et Laporte. Correspondants : MM. Desmoulins , Desmortiers et Janvier. Pourquoi faut-il avoir à finir cette rapide esquisse par le souvenir de la perte si grande et si prompte que nous avons faite de notre vice-président , M. Boutiron. Deux de nos collègues, MM. Blutelet Savary , ont exprimé les 10 regrets que nous avons éprouvés et le vide qui s’est fait au milieu de nous. Je n'ai rien à ajouter au discours prononcé sur la tombe par le premier et à la note lue ici par le second, si ce n’est pourtant l'expression personnelle du chagrin que m'a causé la mort de ce regrettable collègue. Bien que la perte que nous avons faite de notre vénéré président remonte à 1852, je dois la rappeler ici avec d'autant plus de raisons, que vous avez décidé que les deux discours prononcés en votre nom, le premier sur sa tombe, par votre secrétaire, et le deuxième , à l'inaugu- ration de son buste , qui a eu lieu au jardin des plantes le 24 septembre 1854, seraient insérés dans vos Annales. —FOASD— DISCOURS PRONONCE SUR LA TOMBE DE M. FLEURIAU DE BELLEVUE. Par M. le docteur Sauvé. DURUNE. MESSIEURS , Chargé par mes collègues, les membres de la Société des Sciences naturelles de la Charente-Inférieure , d'ex- primer leurs regrets sur la tombe de notre vénérable Président, je viens m'acquitter de ce triste et pénible devoir, en leur nom et au mien. La perte que nous éprouvons en ce moment est trop grande et notre afliction est trop profonde pour que nous vous parlions ici avec détail des nombreux travaux , des ouvrages réellement importants que nous devons à la plume de notre savant collègue. Cette tâche , je la rem- phrat plus tard. Aujourd'hui je ne veux et ne dois vous donner qu'un apercu rapide de la vie scientifique dé 12 Fleuriau et esquisser à grands traits le portrait du savant et vertueux concitoyen, qui réunit, en ce moment , le concert unanime de louanges et de regrets que lui ont mérités les excellentes qualités de son cœur et la supério- rité de son intelligence. Louis-Benjamin FLEURIAU DE BELLEVUE naquit à la Rochelle , le 24 février 1761 , d’une ancienne famille qui occupait un rang éminent. Son père était officier de la maison du Roi , et sa mère, cet ange tutélaire que la Providence nous donne au berceau de la vie, se distin- guait parmi toutes les autres par ses vertus privées et surtout par l'excellence de son cœur, par sa charité. Ces éminentes qualités lui valurent les honneurs exceptionnels d’une sépulture à laquelle toute la population prit alors part, comme elle le fait aujourd'hui pour son fils. Une décision du conseil municipal prescrivit que les honneurs funèbres lui seraient rendus comme à un grand citoyen. Le Maire et ses adjoints, assistés du conseil municipal , s’y présentèrent avec leurs insignes, Un spectacle si imposant dut frapper vivement l'imagination de Fleuriau et féconder les germes de bonté qu'il avait reçus d'une semblable mère. L'affluence , le concours de tous ceux qui m'en- tourent prouvent que Fleuriau sut dignement mettre à profit l'exemple et les préceptes de celle dont il recut le jour et que dans sa famille toutes les vertus étaient héré- ditaires. L'éducation de celui dont nous déplorons la perte fut des plus soignées. I était protestant , et malheureusement alors la tolérance religieuse, cette fille de paix et de 13 concorde , n'existait pas ; il lui fallut donc aller chercher en dehors des frontières de sa patrie une éducation qu'elle lui refusait à cause de sa religion. Il fut envoyé au collége de Genève où il fit d'une manière brillante ses huma- nités. Après les avoir terminées il eut le bonheur , grâce à la fortune dont jouissait sa famille, de pouvoir com- pléter ses connaissances par des voyages qu'il fit en Allemagne et surtout en Italie. Cest là qu'il séjourna longtemps , c'est là qu'il se livra avec passion à l'étude des sciences naturelles” et surtout à celle de la géologie. IL établit des relations avec tous les savants les plus illustres du pays qu'il parcourait ; il mit à profit ces musées , ces collections si remarquables que possèdent plusieurs villes d'Italie. Son âme faite pour admirer le beau , pouvait prendre un libre essor au milieu de ces monuments d'une architecture si parfaite et si grandiose, au milieu de ces immenses galeries où le pinceau des Michel-Ange , des Raphaël, des Rubens avait animé la toile inerte ; au milieu enfin où l'art, la poésie et la science venaient sous mille formes et de mille manières , montrer jusqu'à quel point l'intelligence humaine peut atteindre. Il visita en savant la Sicile, cette terre si fertile, le grenier d’abondance des Romains ; il étudia , sur la nature , les effets géologiques des tremblements de terre dans la Calabre ; il rechercha la cause et l'origine des volcans, et sut, en un mot, mettre à profit chacune des nombreuses excursions qu'il fit dans le pays. Il parcourut ensuite les Alpes, fit une ascension au mont Blanc el rentra en France, possesseur de notes, de collections, de 14 plans avec lesquels il rédigea plus tard des mémoires. Tels furent ses débuts{scientifiques. Rentré dans sa patrie avec l'esprit orné de connaissances littéraires et scientifiques , favorisé autant de la nature que de la fortune, le cœur plein de générosité et de dévouement , Fleuriau ne tarda pas à prendre rang parmi les plus illustres et les plus considérés de notre cité. Modeste autant qu'instruit , affable autant que supérieur, il sut promptement conquérir l'estime générale; ses concitoyens, si bons juges, ne tardèrent pas à le distinguer et à mettre à profit ses connaissances et son dévouement ; il fut promptement élevé aux charges honorables de conseiller municipal. Plusieurs fois on lui offrit l'honneur d'être le premier magistrat de la cité ; mais soit que sa modestie l'emportat , soit qu'il redoutàt pour sa popu- larité le poste scabreux qu'on lui offrait, il refusa toujours et préféra occuper son activité à l'étude des questions sociales qui avaient pour but le bien-être de l'humanité et celui surtout de ses concitoyens. Appelé dans le conseil général du département, ils’y fit remarquer par la recti- tude de son jugement et par l'étendue de ses vues adminis- tratives; aussi eut-il l'honneur d’être appelé à le présider. Possesseur à si juste titre de la confiance générale , il fut chargé pendant une douzaine d'années de représenter la Rochelle à la chambre des députés. Là , encore , il se montra ce qu'il était partout : entièrement dévoué aux intérèts de la ville et du département. Le gouvernement ne pouvait laisser sans récompense tant de services rendus ; il fut nommé chevalier et plus tard officier de la Légion-d'Honneur, Ses travaux politiques et administratifs ne l'absor- bèrent pas à tel point qu'il ne put trouver moyen de cultiver les sciences ; ses travaux lui méritèrent la consi- dération des savants, et l'Institut de France voulut se l'adjoindre comme associé en lui confiant le titre de membre correspondant. Une foule de sociétés savantes . nationales et étrangères , se disputèrent le même honneur qu'il ne cessa de mériter par ses travaux sans cesse renaissants , jusqu'à la fin de sa longue et cependant trop courte carrière. Président de presque toutes les sociétés savantes , littéraires , agricoles , il semblait avoir une prédilection toute particulière pour celle au nom de laquelle je parle ici ; il est vrai qu'il avait eu le premier l'idée de sa fondation et qu'il n'avait pas moins aidé à son développement par ses connaissances si varices que par la libéralité avec laquelle il créa les précieuses collec- tions que nous possédons. Quelle exactitude il apportait dans nos réunions où il arrivait avec quelques communications importantes à nous faire. Vous n'avez pas vu que son àge eüt ralenti son zèle : loin de là, plus il voyait décliner ses forces physiques , plus il devenait avare de son temps et plus il se hâtait de mettre la dernière main à des travaux commencés. En vain dix-huit lustres avaient passé sur sa tête, is ne l'avaient pas affaibli ; car la veille même de la mort cruelle qui nous l'enlève , il travaillait encore malgré 16 la fièvre qui le dévorait et le peu de force qui lui restait ; Il s'enquérait d'expériences industrielles et agricoles et mandait , dans son cabinet, ceux qui pouvaient le renseigner à cet égard. Je ne puis, Messieurs, qu'indiquer rapidement, comme je viens de le faire , les phases si bien remplies de la vie politique et scientifique de Fleuriau. Il me resterait à vous le peindre dans sa vie privée ; mais que vous apprendrai-je ? qui de vous ignore la source inépuisable de son cœur , la générosité de son caractère , sa bienfai- sance , sa douceur , son affabilité. Ce serait faire injure à vos sentiments et à votre jugement que de m'’arrèter à vous les dépeindre ; la lumière ne se prouve pas; mais qu'il me soit permis , à moi qu'il honorait de sa bien- veillance , qu'il encourageait de son exemple et de ses conseils , de vous dire que c'était l'homme le plus vertueux , le plus honnète, le plus digne que j'aie connu ; c'était le vi probus dans sa plus large acception. Adieu, bon et vénérable collègue ! ta mémoire vivra sans cesse parmi nous et nous nous eflorcerons , non pas de t’égaler , maïs du moins de suivre les nobles exemples que tu nous as donnés. DISCOURS PRONONCE À L'OCCASION DE L’'INAUGURATION DU BUSTE DE M. FLEURIAU DE BELLEVUE. Par M. Blutel. MESSIEURS , C’est au nom de l’ancienne Académie des Belles-Lettres, Sciences et Arts de la Rochelle, dont M. Fleuriau de Bellevue fut longtemps président ; c'est spécialement au nom des Sociétés d'Agriculture et des Siences naturelles, dont il dirigea les travaux pendant de nombreuses années et jusqu'à son décès ; c’est enfin au nom de tous les amis des sciences , de tous les hommes dévoués au bonheur de 9) 18 leurs concitoyens , que j'ose élever la voix pour rendre à sa mémoire des hommages aussi vifs que sincères. D'abord humilions-nous , Messieurs, devant les décrets de la Providence !.. Notre collègue ne pouvant être que moralement immortel , remercions Dieu d'avoir bien voulu attendre qu'il eût blanchi sous l’auréole de la science, pour l'appeler à lui. Né en 1761, décédé en 1852, les années, nous en avons tous été témoins , n'avaient pu affaiblir cette jeu- nesse d'esprit et de cœur, cette netteté d'idées , cette activité investigatrice qui brillaient dans tous ses actes. Non seulement on trouvait en lui l'homme essentiellement travailleur , l'homme charitable par excellence , l'homme de société aux qualités aimables et attachantes ; mais encore l'ami des arts et des sciences , l'ami du pauvre, le défenseur de l’ordre et des lois. La perte d'un homme aussi éminent est une douleur publique , qui a blessé au cœur toutes les classes de notre ville ; c'était une âme généreuse , réellement passionnée pour le bien, pour le bonheur de tous !.. L'histoire de la Rochelle lui devra l’une de ses plus belles pages .… Jamais aueun homme ne fit de sa vie un usage plus rempli , plus désintéressé ; né pour l'étude , d’une activité incessante , il promena , pendant soixante-quinze ans , son esprit observateur à travers presque toutes les sciences !.… Cette grande âme n'avait qu’une passion , celle d’être utile, et constamment il éprouva le souci de l'intérêt publie; toutes les améliorations créées depuis plus d’un demi-siècle, soit dans notre cité, soit dans 19 plusieurs localités de notre département , notamment pour parvenir au desséchement des marais insalubres de la Sèvre , nous l'attestent assez. Je n'essaierai pas , Messieurs , de vous retracer sa vie, sous le rapport de son ardent amour pour les sciences naturelles , pour l’agriculture ; je n’entreprendrai pas non plus de vous peindre les services éminents qu'il leur a rendus pendant sa longue et cependant trop courte carrière : il me faudrait faire un livre pour enregistrer seulement les titres des œuvres qui lui avaient mérité le diplôme de membre correspondant de linstitut de France et qui le recommandent au souvenir de ses collègues , ainsi qu'à celui de la population rochelaise. Plus ou moins intimement lié, à la fin du XVIII et au commencement du XIX° siècle , avec les Saussure , les Haüy , les Fourcroy , les Chaptal , il le fut depuis éga- lement , et l'on peut dire de nos jours , avec les Cuvier , les Brongniart , les Thénard , les Arago, les de Beaumont; il s'enrichit de leurs lumières , fut, parfois, leur émule, et toujours sut, par un mérite éminent, conquérir leur estime. Aussi sa mort a-t-elle laissé partout, mais surtout dans les rangs des sociétés que j'ai l'honneur de repré- senter , un vide immense , irréparable ; car l'amour , le dévouement et la supériorité sont des faveurs dont la nature se montre avare et qu'elle ne reproduit qu'à de longs intervalles, dans le même pays. Ces sociétés garderont éternellement le souvenir de leur vénérable Président ; lassiduité dont il donnait l'exemple, utile et bonne impulsion qu'ilsavait imprimer 20 à leurs travaux, resteront gravées dans nos cœurs et légueront son nom à nos derniers neveux ! Jamais notre cité ne perdra la mémoire des libéralités magnifiques qui ont marqué sa carrière ; Jamais ses anciens collègues n'oublieront les nombreux sacrifices qu'il a faits pour les sciences naturelles, dans l'intérèt de leur étude et de leur avancement, soit en dotant la Société que j'ai l'honneur de présider , d’un legs qui assure son existence , soit en concourant , avec le Conseil municipal, à récompenser l'un des patriarches et des plus fervents adeptes de la science , dans la famille duquel l'étude de la nature , le savoir et le mérite sont héréditaires. Vous peindrai-je la vie intime de M. Fleuriau de Bellevue ; vous parlerai-je de ces causeries scientifiques , qui exprimaient si bien ses plus secrètes pensées? Je ne peux , sous ce rapport, résister au désir de vous en retracer quelques passages. « Les beautés de la nature ;'disait-il un jour , parlent » aux yeux des hommes ; elles tendent à lui mspirer » l'amour du bien; leur contemplation moralise le peuple; » l'étude des sciences naturelles dispose le cœur de celui » quis y livre à tous les bons sentiments dont l'humanité » s’honore ; affranchissant son esprit d'idées frivoles , » elle tend sans cesse à l'élever vers l'auteur des mer- » veilles qui se déroulent devant lui. Il faut nécessai- » _rement à l'homme une occupation secondaire en dehors » de son état ; une distraction qui , à certains moments, » vienne interrompre la chaine uniforme et un peu monotone du devoir ; un grand nombre d'hommes 21 vont chercher cette distraction dans les lieux publics ; » d'autres , plus sages , plus heureux , la trouvent dans » la culture des arts , des lettres et surtout des sciences » naturelles !.. Celles-ci forment notre raison , épurent » _NOS passions, rendent notre esprit capable de connaitre » et d'admirer les grandeurs de la création etle ramenent » naturellement, je ne peux trop le répéter, vers le » divin auteur de toutes choses. » Rappellerai-je aux membres de la Société des sciences, avec lesquels il aimait tant à se trouver, combien il parut délicieusement impressionné lorsque , en 1833, à l'ins- tigation et sous les auspices de M. Callot aîné, “alors maire de notre ville, qui lui doit tant d'heureuses amé- liorations , nous arrèêtàmes chez moi la création de la Société des sciences naturelles de la Charente-Inférieure , à laquelle notre honorable collègue contribua si puis- samment de ses collections et de ses propres deniers ? Efforcons-nous , Messieurs, par un redoublement de zèle et d’études , à maintenir , à conserver les œuvres au succès desquelles il a tant concouru ; ce sera, J'en suis convaineu , le véritable moyen de consoler son ombre de ne plus être dans la possibilité d’être utile aux sciences. Ces bonnes œuvres qui ont si bien rempli une vie, pendant laquelle M. Fleuriau de Bellevue n'a pu, je le crois, dire une seule fois : « j'ai perdu ma journee » ; celte longue vie qui lui permit de recueillir l'écho anticipé des bénédictions et des regrets qui resteront attachés à sa mémoire , excitèrent dans la population de notre ville un grand désir de voir ses traits reproduits , d'une 22 manière indestructible , par le burin. Chacun , pour l'accomplissement de ce vœu, s’empressa d'ouvrir sa bourse ; et l’obole du pauvre et la pièce d'or du riche , ont , aidés des votes du Conseil municipal , coopéré à l'érection du monument que nous inaugurons aujour- d'hui , et auquel nous attachons d'autant plus de prix , que son auteur s’honore d’avoir reçu le jour à la Rochelle. Image vénérée de notre digne Président , transmets son nom aux générations futures ; que ce nom , buriné dans les souvenirs, soit placé à côté de celui de Réaumwur, de celui de tous les savants , de tous les hommes de bien, qui ont illustré notre cité, et à la gloire desquels l’associe, depuis longtemps , la voix équitable de nos concitoyens, voix qui a pleinement confirmé le jugement que M. Fleuriau de Bellevue, lui-même, avait eu le bonheur d'entendre prononcer de son vivant ! » —FRASD— DISCOURS PRONONCE SUR LA TOUBE DE M. SOSTHÈNE BOUTIRON. Par M. Blutel. Messieurs ! Nos regrets et nos pleurs accompagnent aujourd'hui dans la tombe l'excellent collègue qui, il y a cinq jours à peine, siégeant au milieu de nous, nous éclairait de ses lumières, nous prodiguait les trésors de son érudition , de son savoir et de son amour épuré des sciences et des lettres. Les personnes qui se pressent autour de ce cercueil , les douloureuses émotions dont elles sont agitées , sont le plus éloquent témoignage qui puisse être donné à la mémoire de M. Boutiron ; son nom vivra dans nos cœurs : le souvenir d'un homme aussi distingué ne périt pas. 24 En prenant la parole , dans cette triste circonstance , je me rends l'interprète , non seulement des sentiments de la Société des Sciences de la Charente-Inférieure, pour son honoré et digne vice-président , mais Je suis encore l'organe de la Société des Arts-et-Métiers , dont il fut l’un des membres honoraires les plus dévoués et les plus utiles. Sa mort si imprévue a profondément attristé tous ses collègues, qui n'oublieront Jamais ses éminentes qualités et son noble caractère ? La population entière de la Rochelle partage nos sen- timents. M. Boutiron s'était acquis l'attachement de tous ses concitoyens dont il emporte l'estime et les regrets. Né le 1% septembre 1800, admis, vers 1818, à la célèbre École polytechnique, à peine y terminait-il l'étude des hautes sciences que l'on y cultive , que ses maitres , reconnaissant en lui leur émule , le désignèrent pour remplir une chaire à l'École militaire non moins célèbre de Saint-Cyr , ou, pendant quinze années , il concourut à former , à instruire ces jeunes gens, qui, devenus hommes, dirigent maintenant nos phalanges victorieuses. Dans sa vie privée , comme père de famille , personne plus que lui ne fut esclave de ses devoirs ; aussi était-il l'idole de sa femme, de ses enfants, et, s’il peut exister un adoucissement à leur juste et inappréciable douleur , à celle de ses nombreux amis , c’est la pensée, c’est la certitude, qu'une âme aussi belle, aussi pure, recoit dans le sein de Dieu la récompense de ses vertus. ———— LT LS TES 2 ———— CI SE ED RECHERCHES SUR LA SALUBRITÉ DE L'AIR A LA ROCHELLE , SUR LES MOYENS DE L'AUGMENTER, ET SUR L'ÉTIOLOGIE DES FIÈVRES PALUDÉENNES, Par M. le docteur Sauvé. Sublatà causà tollitur effectus. AVANT-PROPOS. Depuis un très-grand nombre d'années que j'exerce la médecine à la Rochelle, j'ai dû m'enquérir de l'état sanitaire habituel de cette ville et des causes qui y ont produit et qui peuvent y produire encore des maladies. Afin de mieux les apprécier et de mieux juger dans une question si délicate , j'ai dû recourir à toutes les sources historiques pour savoir quel avait été, antérieurement à 26 moi, la salubrité ou linsalubrité de cette ville ; quel avait été aux différentes époques son état topographique. Le résultat de ces recherches a été de me convaincre que le climat de la Rochelle est maintenant un climat salubre; que cette ville a cependant été le théâtre d'épidémies très-fréquentes et souvent très-meurtrières ; qu'il y régnait, endémiquement , des fièvres intermittentes ; que la cause de ces épidémies et de ces fièvres était toute spéciale , toute locale; que je lavais parfaitement reconnue ; qu'il était facile de la faire disparaitre et de donner à notre localité , où la moyenne de longévité atteint la moyenne générale de France , sous ce rapport, une supériorité beaucoup plus marquée. J'avais soumis au conseil municipal, dès l'année 184%, un mémoire dans lequel j'indiquais les causes du mal et les mesures à prendre. On entra dans la voie des amé- liorations. Je désirais qu'on y persistàt et surtout qu'on arrivat promptement au but ; aussi, en ma qualité de membre du Conseil départemental d'hygiène publique et de salubrité , je fis part, en 1849 , à ce Conseil d’abord, et aux autorités compétentes ensuite , de mes recherches et de mes réflexions sur un sujet digne au plus haut point de fixer l'attention et de provoquer la coopération de tous ceux qui s’intéressaient à la santé publique. Ces recherches datent déjà , comme on le voit, de longues années ; les résultats pratiques auxquels elles m'avaient conduit ont été obtenus : le génie militaire a exécuté en partie les travaux nécessaires pour enlever la cause des maladies endémiques que j'avais signalée. 27 La santé publique y a tellement gagné , que jamais fait plus évident n'était venu confirmer le pouvoir irré- cusable de l'application des lois de l'hygiène à la pro- blylaxie des maladies. Les casernes et le quartier de la ville qui les avoisine sont aujourd'hui très-salubres ; c’est donc avec une grande satisfaction que j'ai communiqué à la Société des sciences naturelles de la Charente-Infé- rieure le présent mémoire dont elle a voté l'impression dans ses Annales. On s’apercevra facilement en lisant ce travail qu'il n'a pas été écrit tout d’un trait, mais bien à plusieurs années d'intervalle. Nous n'avons pas voulu en faire disparaitre ce qu'on pourrait appeler un défaut , mais ce qui pour nous est au contraire un avantage , puisqu'on peut mieux voir par là la succession des faits et la modi- fication de l’état des lieux et des choses. ——0 0 0-0 —— NOTIONS TOPOGRAPHIQUES. La Rochelle, ville fortifiée, chef-lieu de la Charente- Inférieure , est située au 46° 9° 32° de latitude nord , et au 3° 29 2° de longitude ouest. Bâtie au fond d'une baie qui lui sert d'avant-port, elle se trouve à l'extrémité sud d'une langue de terre qui s'incline légèrement en pente, en marchant du nord-est 28 [Re] au sud-ouest. Cette langue de terre , que nous appelons ainsi parce qu'elle s’avance entre deux vallées, est la continuation du terrain calcaire jurassique ou oolitique moyen et supérieur, appelé ici hanche; c'est ce calcaire qui forme le sol du nord du département. Ce prolongement de terrain , de forme allongée , allant en se rétrécissant au fur et à mesure qu'il se rapproche de la mer, est entouré de tous les côtés , excepté au nord- est, où il se continue avec le calcaire, par les dépôts d’une argile marine, appelée bri. Cette argile, d’une cou- leur grise, est très-compacte ; elle provient d’attérisse- ments modernes de la mer. La présence de ce dépôt d’alluvions marines tout autour de cette langue de terre, sauf du côté du nord-est, prouve que celle-ci, à une époque qui remonte à plusieurs siècles, était baignée par la mer. Des marais plus ou moins desséchés ont succédé au retrait naturel des eaux et se trouvent aujour- d'hui à l'abri de nouvelles inondations par les travaux d'art que l’on a exécutés à cet effet. Toujours est-il que la Rochelle est encore aujourd'hui entourée , à l'ouest, par les marais de la Genette et de Fétilly ; au nord-ouest, par celui de Lafond : ces trois marais n'en font, à proprement dire, qu'un. Is peuvent être inondés par la mer en levant l'écluse des Deux- Moulins. ILest certain que la retraite de la mer de ces marais n'est pas très-ancienne, En effet, on a trouvé des ancres près de la porte Dauphine, en y faisant des fouilles. M. de Verdon trouva également des coques de navires 29 en faisant creuser davantage les fossés devant la Place d'armes , et l'on sait que l'hôpital Auffrédy fut construit en 1202 sur le bord de la mer. A l'est, règne un vaste marais mal desséché dans lequel se trouvent des salines en activité. La superficie de ce marais, qui s'étend jusque vers Tasdon , la Courbe , Périgny et Rompsay , est de quelques kilomètres carrés. On peut l’évaluer à 1,000 hectares environ. Au sud , se trouvent le port et le bassin à flot ; au sud- est, les quartiers de la ville neuve et de Saint-Nicolas , tous les deux bâtis sur pilotis au milieu de cette argile que nous avons décrite. Ainsi donc, de quelque côté qu'on se tourne, sauf celui du nord, on ne voit la Rochelle entourée que de marais provenant d'alluvions marines. Cette position seule indique de quel genre ont dù être les maladies qui y ont régné et celles qui peuvent encore sy manifester. RECHERCHES HISTORIQUES Sur les épidémies qui ont régné à la Rochelle avant le siège de 1628. Si, jetant un coup d'œil dans le passé, nous recherchons quelle a été la salubrité de la Rochelle, depuis les premiers temps de sa fondation jusqu'à nous, il nous sera facile de constater que cette ville dut être très-malsaine et que 30 ce n'est que successivement que, la mer se retirant de plus en plus, faisant des invasions plus rares dans les lieux qu'elle avait abandonnés , les causes d’insalubrité diminuèrent d'intensité et que les maladies ou les épidé- mies prirent un caractère de moins en moins grave. Cette revue rétrospective a été pour nous excessi- vement diflicile à faire. Les archives de la ville de la Rochelle furent enlevées après le siège de 1628 ; c’est en 1631, je crois, que la translation s’en fit à Paris par ordre du cardinal de Richelieu. [nous a donc été impos- sible de les consulter. Mais à leur défaut nous pouvons ici raisonner par induction , et si nous prouvons que dans le laps de temps où les investigations nous sont permises , c’est-à-dire depuis les trois derniers siècles, la salubrité est devenue de plus en plus grande, nous serens bien en droit d’en conclure que plus nous nous éloigne- rions de cette époque , plus nous verrions s’accroitre l'insalubrité. Pour preuve , nous citerons d'abord les passages suivants que nous empruntons aux manuscrits d’Amos Barbot, sur l'histoire de la Rochelle, et à d’autres chroniqueurs. 1515. — « Cette année et au mois de juin , la conta- gion fut si grande que tous les principaux sortirent de cette ville, s’en allèrent aux champs, voire tous les officiers de la ville, comme le procureur de ville, le crefier et autres , le maire étant comme demeuré seul, de manière qu'ayant recu lettre du roi, faisant sonner les cloches pour y délibérer, ne se trouvant que six au conseil, ce qui occasionna ledit sieur maire de faire 31 publier à son de trompe par les bourgs et villages où ceux du corps s'étaient retirés , qu'ils eussent à rentrer dans la ville dans le jour. Ce qu'aucuns firent , qui ordon- nèrent en conseil que, sur le refus que feraient les ofliciers de venir , ledit sieur en pourrait commettre et principa- lement pour l'exercice de la juridiction. » ( Amos BARBOT, Histoire de la Rochelle, t. 1, p. 342.) 1554. — « Au mois d'octobre de cette présente année, la contagion qui s'était éprise en cette ville quelque temps auparavant, commencant à pulluler, fut fait un règlement pour les pauvres, avec grande connaissance et circons- pection , pour ce que les maires, échevins et paires , pour ce faire, y furent appelés par les juges, plus les gens d'église, en la personne du grand vicaire , du sieur de Saintes , évêque du diocèse , les avocats et procureurs du Roy, avec plusieurs autres bourgeois et habitants ; et pour assujettir un chacun à l'exécution d’y-celui , fut homologué en cour ordinaire et présidiale au jour d'audience , auquel règlement comme plus authentique de ceux qui eussent été faits, on a toujours eu recours lorsqu'il a été besoin d'en faire pour les pauvres, et contient les articles qui s'en suivent. » ( Histoire de la Rochelle , de 1179 à 1575 , vol. 2 , p. 30 et 126.) Je crois faire plaisir aux lecteurs en leur donnant ici le susdit règlement, 92 STATUTS ET RÉGLEMENTS DE L'ANCIEN CORPS DE VILLE DE LA ROCHELLE. (Présumé être de 1597 à 1605). Manuscrit de la Bibliothèque de la Rochelle , page 107. RÉGLEMENT POUR LA CONTAGION. 1° Premièrement est enjoint à tous ceux qui auront pourceaux , oies, cannes, pigeons , chiens , aient à les mettre hors cette ville , sous peine de confiscation et d'amende arbitraire et ce dans les vingt-quatre heures après la publication qui en sera faite. 20 Sera défendu à tous bouchers de ne pas buffer leurs chairs , à mêmes peines. 3° Sera pareillement défendu à toutes personnes malades et à tous ceux qui les traiteront de non aller quérir de l’eau aux fontaines ni autrement que première- ment couvre-feu soit sonné , ni par la ville sans porter une verge blanche en la main, de deux pieds de long , pour être remarquez, et ne se mêler en facon que ce soit parmi les autres à peine d'être mis hors la ville et d'amende arbitraire. 4° Sera aussi enjoint à toutes personnes aflligées de ladite contagion , ou qui en auront en leur maison, de 39 tenir leurs portes et bouliques fermées , et aux voisins desdites maisons avertir les commissaires, lesquels, en cas qu'ils n’obéissent pas à la présente publication , en aver- tiront M. le Maire qui y donnera ordre. 9° Est pareillement défendu à tous sergents et autres personnes , de ne faire aucun encan de quelques meubles que ce soit sans la permission de M. le Maire , à peine de confiscation desdites choses et d'amende arbitraire. 6° Est aussi défendu à tous revendeurs et revendeuses de ne porter, ni vendre par la ville , ni étaler en leurs boutiques , aucuns draps , habillements, linge, ni lits, à peine que dessus. 7° Aussi est expressément défendu à toutes personnes d'éparer ni faire éparer sur les murailles et remparts de la ville, ni aux fenêtres des maisons d'vy-celle, nuls linges, lits, habillements et couvertures aux mêmes peines. 8° Et est enJoint à toutes personnes de tenir leur maison nette et leurs pavés et emporter leurs immon- dices et bourriers sur les remparts ou les mettre sur les chariots à ce destinés , lorsqu'ils passeront. 9% Aussi est enjoint à tous bouchers et tripiers de tenir leurs maisons nettes et ieter ou faire jeter leurs infections, soit de sang ou autres choses, en lieux qui leur ont été ci-devant désignés , savoir : ceux de Cougne à la Jaudon, où est à présent la balise; ceux du Perrot à la Porte- Neuve, hors la porte des Deux-Moulins; et ceux de Saint-Nicolas, hors la porte , au lieu qui leur est désigné. 10° Sera aussi enjoint à tous chirurgiens, apothicaires et autres qui visiteront les malades , de jeter et mettre à 34 au feu les emplâtres qu'ils tireront desdits malades et ne les jetteront par les fenètres ni èz bourriers, à peine que dessus. 11° Pour éviter et empêcher le cours de ladite conta- gion , sera bon d'avoir deux hommes pour cadener les portes de ceux qui seront frappés d'y-celle, pour ense- velir les corps morts , lesquels les descendront en bas, lesquels aussi conduiront les pauvres frappés de la conta- gion au lieu de Mireuil , avec leurs lits et linceuls. 120 Lesquels aussi , pour être connus et distingués des autres personnes, porteront un bonnet rouge et une casaque bleue, avec une barre blanche , et une verge blanche en la main de la longueur ci-dessus. 13° Sera aussi écrit six hommes pour porter les corps morts de ladite contagion en terre , qui feront les fosses, si ceux qui sont commis à ce faire par le consistoire ne le veulent faire. 14 Et aussi seront pris deux hommes à gages pour soigner les pauvres qui seront menés audit lieu de Mireuil. 15° Et aussi est ordonné que les maitres ou maitresses qui enverront leurs serviteurs et servantes audit lieu de Mireuil, seront tenus de donner aux serviteurs et servantes les lits , linceuls et couvertures sur lesquels ils couchaient pour les porter audit Mireuil , et aussi de l'argent selon qu'il sera avisé. 160 Et aussi faudra avoir un homme audit Mireuil pour faire les fosses de ceux qui mourront de la contagion. 39 179 Et pareillement est expressément défendu aux gardes de cette ville de ne laisser en y-celle nuls pauvres mendiants , à peine d'amende arbitraire. » La peste de 1554 fut très-violente. Le père Arcère , ( Histoire de la Rochelle ;&. 1, p. 333) dit : « que le mal fit tant de ravages que le maire, voyant la ville presque déserte , se retira dans la tour de la Chaine, crainte de surprise de la part des ennemis. » 1564. — « En cette année, la contagion fut grande dans cette ville et quelque ordre et police qu'il y ait pu ètre apportés, plusieurs personnes en moururent et mème des plus apparentes , et du corps de ville et de la justice : voire que le 12° du mois d'octobre , en mourut noble homme , M. Faguere Pontard , procureur du Roy.» 1582. — « Le médecin Olivier Poupard , de Saint- Maixent , établi à la Rochelle, décrit la peste dans un petit ouvrage intulé : Conseil divin touchant la maladie divine et peste en la ville de la Rochelle. Cette maladie qui sévissait , d'après lui, surtout sur les pauvres , ins- pirait la plus grande crainte aux villes et villages circon- voisins. Fontenay envoya des médecins pour étudier cette maladie. Des cordons sanitaires empêchaient les pestiférés d'entrer dans les bourgs et dans les villes non infestés. « Vous aurez (dit l'auteur dans sa dédicace aux maire et échevins } pourvueus les poures mallades de logis , de vivres et de chirurgiens , à grands frais et ne voient-on les poures mendier par les rues pour être appensionnez, ou en leurs logettes ou ès lieux par vous destinez. 36 1604.— «On nettoya et cura le premier fossé de la ville , appelé de Maumusson , hors ladite porte ( celle de Saint-Nicolas. ) » Environ le vingtième de juillet , la pes/e, qui avait commencé quelque temps auparavant en cette ville , augmenta et s'échaulfa si fort, que presque de mémoire d'hommes il ne s’en était vue de plus grande , et dura aussi furieuse jusqu'à la fin du mois de décembre. I y fut apporté un fort bon ordre par M. le maire et et messieurs du corps de ville et bourgeois qui ne l’aban- donnèrent point. On y employa aussi grande somme de deniers qui furent levés sur les habitants de mois en mois, et on ne laissa pas que de bien vaquer à la garde et à la conservation de cette ville tant de jour que de nuit. » ( Annales de la Rochelle, t. 2, p. 358. ) 1605.— « De cette citation nous rapprocherons celle du père Arcère , historien de la ville de la Rochelle , dans lequel nous lisons : « La peste qui l'année précédente (1604) avait enlevé un grand nombre d'habitants , se ralluma lorsqu'on la croyait entièrement éteinte. Ge fat principalement sur la populace qu'elle exerca ses fureurs. On transportait les malades à Mireuil, lieu consacré pour les pestiférés ; enfin la vigilance et les soins des magistrats arrêtèrent dans la ville le mal qui s'était répandu déjà dans les bourgs voisins. » Ce que nous venons de voir prouve incontestablement que de très-violentes épidémies décimaient de temps à autre la malheureuse Rochelle. Etait-ce bien la peste ? Si nous consultons l'ouvrage de Poupard, déjà cité, 5 VA qui à été imprimé en 1983, et qui est écrit sur la ma- ladie divine ou peste qui régnait à la Rochelle, nous pouvons en douter. Bien que cet auteur considère la peste comme un fléau, une punition du ciel lancée contre les faibles humains , en un mot, comme un #al divin dont on ignore les causes , qui sont dépendantes de la volonté de Dieu ; cependant , il est amené comme forcément par l'observation plus directe des causes, à dire : « Nous séparons la peste des autres maladies qui courent et qui se peuvent engendrer de quelque mutation d’air ; comme celle d'à c’est’ heure , et celles que nous vismes l'an passé. » Plus loin, il indique la cause de la pré- tendue peste : « Il a esté prouvé que l'air ne se pourrist point , mais que de la ferre et des eaux au-dessous , estans infectées , il prend le venin. Et chacun sait que, bon gré mal gré , il nous faut humer l'air, quel qu'il puisse estre : et qu'i-celuy donne à nos corps les causes des offences ; qu'ainsi il ne reçoive les vapeurs des eslangs, mares ou marelz. » Enfin il termine ainsi son ouvrage : « Voilà, messieurs, ce que l'ay amassé , et mis en ordre touchant la peste, afin que par antithèse on voye combien ce qui nous a molestez et moleste encore quelque peu , est autre chose que la peste qu'on trouve par toutes les histoires estre une, quoiqu’en divers lieux. » D'un autre côté, nous dirons que la cause de la peste est une cause exclusive, qu'elle doit ètre mème ren- fermée dans la basse Égypte, où les débordements du Nil peuvent la produire. La peste y naît comme le choléra- morbus nait des débordements du Gange, 34 Les miasmes pestilentiels se développent partout où les matières organiques se trouvent en décomposition dans des eaux marécageuses. Si leurs effets sont différents, cela tient sans doute à la nature des miasmes et plus encore à la température qui peut modifier eette nature et augmenter l'intensité de son développement et de son action ; de sorte que les miasmes de nos marais , dégagés sous l'in- fluence de la chaleur de notre climat , produisent les fièvres intermittentes ; tandis que ceux qui se dégagent des marais des Antilles produisent la fièvre jaune ; dans la basse Égypte ils causent la peste ; dans la presqu'île du Gange ils donnent naissance au choléra-morbus. La peste a souvent été confondue avec d’autres mala- dies, et plus souvent encore d'autres maladies ont été prises pour elle. Les anciens, n'ayant pas observé avec la judicieuse attention des modernes , n'ont pas toujours bien saisi les différences qu'offraient entre elles les diverses maladies soumises à leur observation. Les années où la peste est indiquée comme ayant porté la désolation à la Rochelle , ne sont pas celles où la même maladie a paru en France ; et les années où la peste s’est manifestée ailleurs , il n’est pas dit dans nos chroniques que la Rochelle en ait été atteinte; si on excepte toute- fois la peste du XVI siècle, qui pourrait alors avoir quelque rapport avec la maladie signalée à la Rochelle en 1554. Voici du reste les recherches que j'ai faites à ce sujet : FODÉRÉ , qui a fait de nombreuses recherches sur la 39 peste , donne l'historique de vingt-deux pestes, parmi lesquelles je choisis celles qui se rapprochent le plus de celles indiquées par nos chroniqueurs Rochelais : 1° En 1504, peste de Marseille ; 20 En 1511, peste de Vérone , décrite par FORESTIER ; 30 En 1525, Lyon et Vienne furent ravagés par la peste, décrite par Moxrnus HaLos, Feb., Lib. 7, Cap. T. 49 En 1527 et 1530 , peste de Marseille et de toute la basse Provence. La maladie qui régna à la Rochelle en 1515 fut-elle de la même nature ? rien ne l'indique. En 1554 , une horrible peste ravagea Misène , décrite par G. AGRICOLA , Lib. 2, De peste. Cette année est aussi indiquée comme fatale pour notre ville , où régnait la contagion. Si nous passons à l'année 1564, année également signalée comme fatale pour la Rochelle, nous ne voyons de rapprochement possible que la peste de Hongrie , en 1566 , décrite par SENNERT. De 1582 à 1587, Aix et surtout Marseille éprouvèrent les plus grandes pertes par la peste. La maladie signalée par Pourarp , à la Rochelle , en (582 , serait-elle de mème nature ? c'est pour le moins douteux, d'après la lecture même de l'ouvrage de ce médecin. Les rapprochements que nous venons de faire et que nous sommes allés chercher très loin perdent encore de leur probabilité de concomittance , si nous considérons que la peste fut on ne peut plus répandue en Europe pen- 40 dant le X VIE et mème le X VIH siècle sans qu'à la Rochelle on en ressentit les effets ; du moins nos annales n’en ont pas conservé le souvenir. C'est ainsi que la peste de 1623 , portée de Turquie en Pologne , pénétra dans tout le reste de l'Europe , qu’elle ravagea jusqu'à la fin de 1630 (1); qu'on vit la peste de 1649-1650 , à Marseille et à Aix ; — celle de 1664-1665, à Toulon et en Italie (2): — celle de 1665-1666, à Londres, où elle emporta97,000 personnes en moins de dix mois. (3) En 1720, peste dans tout le Midi , mais particulièrement à Marseille. Sur une population de 247,899, ilen mourut 87,659. F En 1771-1772 enfin, peste en Russie, faisant périr 133,299 personnes , décrite par Samoëlovitz. A toutes ces données qui militent en faveur de l'opinion qui rejette la réalité de la peste dans notre ville, nous pouvons ajouter que des épidémies à peu près pareilles à celles dont parle Barbot ont existé à la Rochelle en 1775, 1786, 1793 et qu'on ne les a pas appelées du nom de peste ; que les premières ont pu ètre plus actives par les moyens barbares avec lesquels on traitait les soi-disants pestiférés ; les mesures prises à leur égard étaient de nature à les rendre malades s'ils ne l’eussent été. On peut en juger en lisant le règlement très bien nommé pour la contagion, que nous avons donné ci-dessus. La peste n'a donc, selon nous, jamais régné à la (1) Gascendi, én vitä Pereise. , lib. 9. (2) Ganfredi, Histoire de Marseille. 3) Mead, De pestilentià. — Sydenham , Febr. pestilent. 41 Rochelle. Ce sont de violentes épidémies , des fièvres dites pestilentielles , d'autant plus graves , Je le répète , qu'on placait les malades dans les conditions les plus fâcheuses , que toutes les mesures d'hygiène publique étaient négligées ou mal prises , que le quinquina et ses préparations étaient inconnus. L'auteur de l’article Peste, de l'Encyclopédie , en disant qu'on voyait mourir beaucoup de malades de la peste de Siam à la Rochelle , a donc commis une grave erreur , qui à sans doute eu une fâcheuse influence sur l'opinion qu'on a conçue de la salubrité de notre ville. M. Malartic, en cherchant à réfuter cette assertion, a voulu, d’un autre côté, trop prouver en faveur de la salu- brité de la Rochelle , en attribuant au savant physicien, auteur de cet article , une légéreté assez grande pour prendre comme vrai un mot dit sans doute par plaisanterie. Degraves épidémies ont bien réellement existé à différentes époques à la Rochelle, comme dans un très-grand nombre d’autres villes de France ; mais ces maladies tenaient à une cause locale. Le sol marécageux qui l’entourait alors de toutes parts et sur lequel les eaux de mer et les eaux douces se mélangeaient et séjournaient, en donne une explication très-satisfaisante. On sait aujourd'hui que les épidémies ont toutes leur cause dans la constitution particulière et actuelle du pays où elles exercent leurs ravages. Or peu de villes étaient plus défavorablement placées que la Rochelle ; il suflit de jeter les yeux sur le plan qui accompagne ce travail pour s'assurer que les émanations marécageuses de la 42 plus mauvaise nature devaient envelopper la ville , et qu'à certaines saisons, où les circonstances météorolo- giques étaient favorables , des fièvres considérées comme pestilentielles par leur intensité devaient se déclarer. La preuve qu'il en était ainsi , c’est que lesdites pestes, dont on a conservé le souvenir, se sont déclarées au temps chaud de juillet à octobre, au temps où les fièvres se développent ordinairement avec le plus d'intensité ; ou bien nos historiens signalent avant l'apparition de ces fièvres le curage des fossés : exemple en 1604. Ainsi donc, dans les siècles précédents , la Rochelle, comme Rochefort, comme Brouage , comme toutes les villes situées dans des conditions analogues à celles-ci, a dù ètre souvent le théâtre d'épidémies meurtrières. Ces épidémies ont été de jour en jour en s’affaiblissant au fur et à mesure que des travaux de desséchement ont eu lieu et que les règles hygiéniques ont été appliquées. C’est ce que la suite de ce mémoire nous prouvera com- plètement. Depuis le Siège jusqu'à ce jour. Après avoir recherché quel a pu être l'état sanitaire de la Rochelle dans les siècles passés, voyons ce qu'il est maintenant et ce qu'ila été dans le siècle le plus rapproché de nous , le XVIIF. La place de la Rochelle était restée démantelée depuis le dernier siège. C'est en 1689 que l'enceinte de la ville 43 se trouva augmentée au moins d'un tiers. Louis XIV avait chargé Ferry de faire de nouvelles fortifications ; les remparts du côté de l'ouest furent portés beaucoup plus en avant , et un nouveau quartier se trouva compris dans la ville. La rue Porte-Neuve a été construite depuis cette époque sur l'argile molle dont nous avons parlé. IL fut nécessaire pour poser les fondements des maisons de faire des pilotis. u Ces travaux génèrent un peu l'écoulement des eaux de Lafond qui furent alors reçues dans les nouveaux fossés de la ville , tandis qu'auparavant elles se rendaient directement à la mer. Les fortifications achevées, on construisit les casernes. C'est au commencement du XVIII siècle, en1702, que la ville fit bâtir les deux corps de caserne A et B qui se trouvent à la porte Dauphine. Mais à peine furent-elles bâties, qu’on ne tarda pas à se plaindre de leur insalubrité. Les régiments qui s’y succédèrent furent victimes des maladies, qui alors ressemblaient à celles de nos jours ; c'était, comme aujourd'hui, des fièvres intermittentes ; aussi voyons-nous des travaux d'assainissement entrepris dès 1724. Le canal de la Verdière, qui seul permettait l'écoulement à la mer des eaux de Fétilly, de Lafond, ete., était dans le plus mauvais état ; il était en partie comblé et ses bords étaient dégarnis de revêtements. On chercha à rendre l'écours des eaux plus facile en le creusant et en le nettoyant ; ses bords furent maintenus par un revé- tement solide , on couvrit une partie de ce canal aux Âi extrémités duquel on plaça deux vannes pour retenir ou laisser s’écouler les eaux ; mais on n'avait obtenu que très incomplètement ce que l’on désirait , les maladies con- tinuaient et les régiments redoutaient la garnison. En effet , on lit dans un mémoire de M. Malartic , imprimé à la Rochelle, pour prouver que l'état sanitaire de cette ville n’est pas mauvais ; on y lit, dis-je, en note, à la page quatorze : « L'état de délabrement dans lequel quelques régiments sont sortis de cette garnison , le nombre des malades qu'ils y avaient eus , les pertes qu'ils y avaient éprouvées , avaient fait dire de cette ville , ce qu'on disait autrefois des Bergues et de Gra- velines : « Que Dieu nous préserve de la peste, de la famine et de la garnison de Gravelines. » Tel était le pré- jugé des troupes. » En 1733 , le régiment de la Gervesais éleva des plaintes très-graves, au point de demander son chan- gement de garnison, huit jours après son arrivée à la Rochelle. Évidemment cette réclamation hâtive ne pouvait être fondée que sur l'expérience de l’insalubrité faite par les régiments qui l'avaient précédé. On trouve du reste dans le mémoire rédigé par le corps de ville pour com- battre les plaintes portées par les officiers de la Gervesais, l'aveu de l'existence de fièvres intermittentes au temps de la canicule ; ainsi done, le fait est avoué mème par ceux qui avaient alors le plus d'intérêt à en nier l’exis- tence. Mais bien plus, dès l’année suivante, 1724, on s'empressa de rechercher d’autres moyens d’assainis- sement. Alors , comme aujourd'hui, on crut reconnaitre la cause de l'insalubrité : ce furent encore les eaux des fossés qui attirèrent l'attention ; leur écoulement ne s'opérait, comme nous venons de le voir, que par le canal de la Verdière , il était difficile et incomplet ; on cura donc les fossés , et de plus on fit l'écluse des Deux- Moulins qui permit de maintenir les eaux , de les renou- veler et de les laisser s’écouler, bien plus aisément que ne le faisaient les vannes de la Verdière. Ces travaux rendirent l'air beaucoup moins insalubre ; mais de cet état à une salubrité complète , il y avait bien loin; aussi les maladies continuèrent-elles, bien qu'avec moins d'in- tensité, Cependant nous voyons dans un mémoire déposé aux archives de la mairie, nous voyons , dis-je , que les fièvres faisaient encore en 1774 de tels ravages en temps de la canicule , que le projet d'abandonner les casernes y est sérieusement discuté, ainsi que celui d'en construire d’autres dans la passe Saint-Nicolas. Ces projets sont combattus par l’auteur du mémoire. Des sommes assez fortes furent alors destinées par le gouvernement pour la translation des casernes. Il arrivait très souvent que le nombre des malades dans les casernes était si considérable , qu'on était obligé de les faire évacuer et qu'alors on logeait les soldats dans les maisons qui avoisinaient le. port. Là, bien qu'ils y fussent accumulés dans des chambres peu spacieuses , et que les circonstances hygiéniques fussent en apparence moins favorables , cependant la maladie cessait de sévir sur eux. Nous verrons que, de nos Jours, pareille mesure a dù être prise ; en 1843 on fut obligé de faire cantonner 46 les soldats dans les villages circonvoisins de la ville, Aytré, Lagord, etc. En 1774 les fossés répandaient une si mauvaise odeur, la place d'Armes et les allées de charmilles qui la bordaient à l'ouest, seule promenade où se réunissaient tous les habitants , ne pouvaient être fréquentées aussitôt que les vents soufllaient de l’ouest ; aussi la municipalité faisait- elle force réclames et adressait-elle des mémoires et des lettres dans lesquelles elle signalait le mal et les causes qui étaient , selon elle , les eaux croupies des fossés et le mélange de l’eau douce de Lafond avec celles de la mer. Pour faciliter l'écoulement des eaux on dut curer le fossé. Cette réparation produisit le plus fàcheux effet. Voilà le tableau qu’en fait un médecin de l’époque : (Correspon- dance flamande et rochelaise, p. 209 et 210.) « La Rochelle nous offre un tableau perpétuel de maladies mortelles , de fièvres putrides occasionnées par linfection de l'air extérieur, En 1774, on creusa les canaux de la ville dans la partie de l’ouest ; l'hiver de 1775 fut chaud et trop sec, les boues et les immondices retirés de ces fossés ne furent pas assez lavés par les eaux pluviales, les chaleurs de juillet et août exhalèrent de cette masse fétide des vapeur abondantes et meurtrières, les vents de l'ouest les portèrent le long de ces canaux, depuis la porte des Deux-Moulins jusqu'à la porte Dauphine, les fièvres putrides désolèrent les habitants, chaque maison ren- fermait plusieurs malades , une foule de citoyens dont nous regrettons la perte perdirent la vie à la fleur de leur âge , etc., ete. » Plus loin le même auteur ajoute : « Nos casernes sont très-malsaines, quoiqu'elles soient très- vastes, bien aérées et bâties au nord en plein air ; les soldats qui les habitent sont très-souvent malades. » L'année 1775 fut on ne peut plus désastreuse ; la fièvre putride , maligne et bilieuse exerça de grands ravages, et renouvyela , plus fortes que jamais , les réclamations des habitants. Les ofliciers municipaux de la Rochelle recher=- chèrent et firent rechercher les causes de ces maladies perpétuelles qui revenaient à chaque canicule ; ils adres- sèrent une longue lettre à M. de la Vrillière pour lui signaler le danger que causait le séjour d'eaux crou- pissantes dans les fossés ; ils se plaignirent que l’on permettait aux religieux de la Charité, qui dirigeaient l'hôpital Auffrédy : 1° de creuser un égoût dirigé de chez eux aux fossés ; 2° d’enterrer dans le jardin lorsque la ville, pour éviter cet inconvénient , avait fait acquisi- tion d’un lieu extérieur aux remparts , appelé cimetière des soldats. Les archives de la ville renferment un mémoire écrit à la même époque, qui peint parfaitement le mauvais état sanitaire pendant la saison chaude. Les causes qui produisent les fièvres y sont parfaitement analysées ; ce sont toujours les émanations marécageuses qui sont signalées, ce sont les vents d'ouest qui sont très-fréquents et qui apportent une odeur si désagréable et si fâcheuse que , lorsqu'ils soufflent , la promenade de la place est complètement abandonnée. Les moyens proposés sont le renouvellement fréquent des eaux des fossés et la sépa- tion des eaux douces et des eaux de la mer. 48 1776. — L'année précédente avait été si meurtrière , les plaintes étaient si nombreuses et s’élevaient depuis si longtemps , qu'on se décida enfin à y porter remède. Des sommes assez fortes furent dépensées au fossé de Lafond et à ceux qui avoisinaient la porte Dauphine. Les devis et les comptes de ces travaux se trouvent dans les archives de la Mairie. Ces travaux partiels ne portaient qu'une amélioration presqu’insensible ; M. de Monthion , intendant de la généralité, qui avait su , par sa bonne gestion , écono- miser une somme de 20,000 livres, demanda au roi que cette somme füt employée à l'assainissement de la ville et au desséchement du marais de Lafond; ce qui fut accordé. 1780. — Pendant l'exécution des travaux, il y eut des mouvements de terre qui firent augmenter l’insalubrité ; aussi lit-on dans la Topographie médicale de la Rochelle , par GABAUDE (an 11 de la République, p. 38.): « L'année 1780 , qui fat si universellement calamiteuse par la quan- tité de malades et la gravité des maladies qu'il y eut , est remarquable pour constater l’insalubrité. La garnison , qui était alors formée de régiments suisses d’Olbonne , en fut particulièrement fort maltraitée. » Il ne suflisait pas de faire des travaux , on prenait d’autres mesures. Les lavoirs de Lafond étaient signalés comme cause permanente d'insalubrité ; les sels lessiviels et les ordures de toute sorte que ces lavoirs introdui- saient dans les eaux marécageuses des fossés, qui les apportaient ensuite dans les fossés de la ville , devaient , disait-on , être très-préjudiciables à la santé des habi- 49 tants. Aussi provoqua-t-on des mesures. Un arrêt du Conseil-d'État du Roi parut à la date du 27 avril 1782 À faisant défense aux propriétaires des terrains situés au village de Lafond d'y former aucuns lavoirs, et à tous particuliers, de quelque qualité et condition qu'ils f ussent, d'y faire des lessives ainsi que d'y faire laver aucunes peaux de tanneries , sous peine de 300 livres d'amende. Le 17 mai de la même année , l’Intendant de la géné- ralité faisait exécuter l'arrêt du Conseil-d’État. Il faisait défense expresse de laver quoi que ce fût dans les fossés de la ville, tant intérieurs qu'extérieurs ; et, pour rem- placer les lavoirs supprimés , on en fit disposer d'autres du pont des Salines jusqu’à Rompsay. On tenait forte- ment la main à l'exécution de ces dispositions, aussi plusieurs condamnations eurent-elles lieu contre les délin- quants ; mais il paraît que la force de l'habitude et la nécessité l'emportèrent , puisqu'on voit le chirurgien Gabaude se plaindre , en 1792 , des inconvénients que causent les lavoirs de Lafond pour la santé publique. (Gabaude , loco cit., p. 17). 1786, 1787. — Une épidémie de fièvres graves , ana- logue à celle de 1775, se manifesta pendant ces deux années. Mais cette fois ce ne fut plus la partie ouest de la ville qui en fut atteinte, ce fut la paroisse Saint-Nicolas , située au sud-est ; et de ce centre , foyer d'infection , la maladie atteignit successivement les autres quartiers , en sévissant d'autant moins qu'elle s'éloignait davantage de son point de départ , qui était évidemment les vases abondantes provenant du creusement et de l’excavation  20 du fossé qui fait suite au canal Maubec et longe le rem- part Saint-Nicolas. Il est curieux de rapprocher cette épidémie de celle de 1775. Toutes les deux furent très-meurtrières ; elles étaient de même nature, d'après le citoyen Gabaude. Les causes étaient évidemment les mêmes , il y avait un foyer d'infection dans chacune d’elles, dont on ressentait de moins en moins l’action à mesure qu'on s’en éloignait davantage. Nous verrons plus loin que la cause qui agit aujourd'hui contre la salubrité de l'air est tout-à-fait localisée et que son action va aussi s’afflaiblissant en s’éloignant du point où elle est produite. 1793. — Cette année est signalée aussi comme ayant fourni à la Rochelle beaucoup de malades. Outre l'hôpital militaire , on avait été obligé d'en établir provisoirement cinq autres , sans comprendre les hospices civils qui étaient eux aussi complètement occupés. Les hôpitaux militaires continrent alors jusqu’à 2,500 malades. Les nombreuses évacuations faites de la Vendée étaient la cause de ce surcroit tout accidentel ; mais cette accumu- lation de malades, jointe à la sécheresse qui fut très-forte cette année , rendit la mortalité très-grande. Épidémies dans le XIX° Siècle. 1819, 1826.— Si, continuant nos recherches, nous arrivons au XIX!* siècle , à notre époque, nous. verrons que l’état des lieux n’a pas beaucoup changé et que les fièvres intermittentes sont toujours une des maladies les plus fréquentes. ol Au mois d'août 1826, l'eau des fossés était si corrompue et répandait une si mauvaise odeur que la population était prête à en venir à la violence pour forcer le Génie à re- nouveler plus souvent les eaux. Il parut à cette époque un poëme , imprimé à la Rochelle chez C. Bouyer , vis- à-vis la Place d’Armes, intitulé Les Fossés de la ville, où se trouve décrite sous les couleurs les plus sombres lin- fection que les eaux répandaient. Le docteur Romieux , dans sa thèse soutenue en 1819, intitulée Essai sur la Topographie de la Rochelle | ouvrage dans lequel il émet , dit-il, au sujet de l'hôpital militaire, l'opinion du docteur Clairian , ex-médecin en chef de cet établissement , signale que le mouvement des entrées et des sorties de l’hôpital militaire est considérable dans tous les temps, mais surtout dans certaines saisons , rela- tüivement à la garnison, ce qui fait attribuer à la ville elle-même l'insalubrité qui ne dépend que de l'habitation de ces casernes. Ce que pensait le docteur Clairian , a été pensé et dit par tous les médecins qui se sont succédé depuis à l'hôpital militaire : le fait est trop patent pour qu'il ne soit pas reconnu. Toutefois , l'insalubrité des casernes ne dépend pas de leur construction, mais bien de leur situation très-rapprochée (à 50 mètres peut-être) du point où les eaux douces de Lafond se mélangent avec les eaux salées des fossés. Depuis longtemps, ou plutôt dès la création des casernes , On n'a cessé de répéter qu'elles étaient con- struites d'une maniere vicieuse; au point, comme nous 52 l'avons déjà vu , qu'on a été plusieurs fois près de les abandonner , ou qu'on a tenté de les assainir en les modifiant , soit en percant le mur mitoyen qui séparait , dans toute la longueur des casernes , les chambres qui sont exposées au nord de celles qui sont exposées au midi ; soit en déblayant les places qui sont devant chacune d'elles, des maisons qui pouvaient gêner la circulation de l'air. Ces opérations ont été parfaitement entendues , au point de vue hygiénique; ilest certain qu'elles ont eu pour avantage de faciliter l'accès de l'air dans les chambres, de permettre qu'il s’y renouvelle facilement ; mais ces mesures ne pouvaient être qu'insuflisantes , car toute la question n’est pas dans le renouvellement de l'air, mais bien dans la pureté de cet agent dont on facilite l'accès. Or, cette pureté est viciée par le dégagement des miasmes putrides qui se dégagent des fossés. Depuis plusieurs années , les murs mitoyens des casernes sont percés , les croisées du nord et du midi se correspondent de manière à opérer la ventilation la plus complète, et les épidémies n'ont pas cessé. Si elles ont diminué , cela tient évidem- ment à ce qu'on a comblé une vaste mare dans laquelle le mélange des eaux douces et salées se faisait el où 1} restait jusqu’à complète évaporation ; à chaque fois qu’on permettait l'écoulement des eaux de Lafond , la mare se remplissait de nouveau et de nouvelles émanations se dégageaient. ( Voyez le plan ci-joint. ) Pour ce qui est de la salubrité apportée par les places que l’on a faites, ilne faut pas s’y tromper ni se lexagérer. b3 Sans doute la mesure a été utile sous beaucoup de rapports, mais la salubrité y a eu la plus faible part : en effet, les maisons abattues étaient éloignées des casernes, qui avaient devant elles des cours palissadées ; elles étaient peu élevées, l'air arrivait donc suffisamment aux casernes, et ce qui prouve que ce voisinage avait peu d'influence , c'est que la caserne B , la plus saine , celle du moins où le nombre des militaires atteints de fièvres était le moins grand, la caserne B, disons-nous, était la plus rapprochée de ces maisons qu’on a abattues. Du reste , on sait que le voisinage des maisons , qui pouvait empêcher la venti- lation , n'a jamais produit de fièvres intermittentes ; et je n’ai pas oui dire que les casernes situées dans des rues étroites , comme celle de la rue du Foin, à Paris, par exemple , aient à souffrir de la fièvre intermittente. En outre , si le défaut d'aération des casernes eût été causé par l'encombrement , cette cause étant permanente, ses effets l’eussent été aussi; or, ceci n'existait pas , le temps des émanations marécageuses passé, tout rentrait dans l'ordre , les casernes A et B devenaient aussi salubres que les autres casernes de la ville. Si elles sont aujour- d'hui plus saines , si les fièvres dites caniculaires y sévissent moins , C’est certainement grâce aux travaux déjà exécutés dans les fossés , et si elles disparaissent , chose que je crois certaine , c’est que l’on aura continué ces travaux , c'est qu’on aura détruit la cause que nous signalons et que nous prouverons être la seule vraie , la seule agissante. Jusqu'à présent nous avons admis comme certaine d4 l'influence facheuse qu’exercent, plus particulièrement sur la garnison , les émanations qui s'élèvent des fossés. Tout ce que nous venons de dire paraitrait suflisant pour le démontrer , mais dans une pareille question les assertions seules ne suflisent pas ; appuyons donc notre opinion , qui est aussi celle de tous ceux qui ont étudié cette question , de faits positifs. En examinant le mouvement de l'hôpital militaire pendant les vingt années qui se sont écoulées de 1830 à 1848 inclusivement, je trouve dans le tome 4 du Journal de médecine, chirurgie et pharmacie militaires , un mémoire du docteur Godélier fils, duquel J'extrais les chiffres suivants pour la période de dix ans de 1830 à 1839 inclusivement. Rapport p. °/, de malades reçus à l'Hôpital militaire , de la Rochelle , eu égard à l'effectif , en : 4.er Janvier. 4.er Avril. 4.er Juillet, 15 Sept. 15 Octobre, 1820 42:84 03 70) — 8.35 —505%=)01/73 1831 — 2,20 — 6,59 — 7,24 — 35,26 — 34,05 1832 — 11,24 — 3,86 — 5,60 — 6,69 — 6,93 1833 — 6,64 — 6,50 — 4,52 — 11,20 — 7,54 1834 — 5,27 — 9,12 — 9,60 — 9,64 — 5,65 1835 — 6,27 — 3,72 — 4,31 — 13,75 — 9,92 1836 — 3,14 — 92,56 — 3,67 — 9,46 — 5,56 1837 — 6,64 — 8,49 — 8,31 — 13,99 — 19.42 1838 — 18,93/— 7) 8,33 — 449 — 793 — 6.83 1839 — 7,59 — 6,03 — 4,96 — 5.61 — 3,50 60,06 58,83 49,03 118,46 93,43 Moyenne... 8,00 5,88 4,90 11,85 9,35 I suflit de jeter les yeux sur le relevé précédent pour 55 acquérir la certitude qu'une cause, qui se renouvelle tous les ans à la même époque, produit des résultats toujours identiques , c’est-à-dire l'accroissement très- notable des entrées des soldats malades à l'hôpital. C’est à partir des mois d'août et septembre , des mois qui répondent à la plus forte chaleur, au temps où toutes les conditions sont favorables pour lévaporation des miasmes, qu'apparaissent les fièvres intermittentes. Le nombre des malades est alors doublé, triplé et quelque- fois sextuplé. Cette cause disparait avec les conditions atmosphériques qui l'avaient fait naître ; on voit alors le nombre des malades diminuer à mesure qu'on s'éloigne de cette époque jusqu’à ce qu'il arrive , au mois de juillet, à son chiffre le plus bas pour repasser brusquement à son chiffre le plus élevé. La disproportion énorme des entrées pour cause de fièvre, qui a lieu du {5 juillet au 15 septembre , paraitrait bien plus grande encore si au lieu de prendre la moyenne sur l'effectif entier de la garnison , réparti dans cinq ou six casernes, on n'avait tenu compte que des malades envoyés à l'hôpital par l'effectif des hommes habitant seulement les casernes A et B. Ces deux casernes, placées près du lieu où se dégagent les miasmes , envoient presqu'à elles seules tout cet excédant de malades. Ce fait est à la connaissance de tous les chefs des régiments qui ont tenu garnison à la Rochelle et des ofliciers de santé tant des corps que de l'hôpital militaire. M. le docteur Crouigneau , dans un travail qu'il à publié sur les épidémies de la Rochelle, a tenu note des malades envoyés 6 à l'hôpital militaire pendant les mois de juillet et d'août 1843 ; la caserne A en a fourni 682, la caserne B 525 ; total : 1,207 malades. La caserne H (Sainte-Claire), distante de 200 mètres environ du foyer miasmatique, fut beaucoup mieux traitée ; la caserne G (des Cor- deliers) , distante de 500 mètres, fut tout-à-fait soustraite aux miasmes. Ce que M. Crouigneau a prouvé par des chiffres en 1843, se renouvelle tous les ans d’une manière si certaine et si ostensible , que c’est un fait que personne de notre localité n’ignore. J'ajouterai que la caserne des canonniers vétérans (Saint-Dominique ) n'est jamais atteinte par les fièvres endémiques qui se manifestent tous les ans plus ou moins dans les casernes A et B. D'un autre côté je dois à l’obligeance de M. Duveau , officier comptable en chef de lhôpital militaire de la Rochelle , le relevé des journées de fièvreux traités dans cet établissement , de 1840 à 1848 inclusivement ; je le transcris 11 : 4 .er Semestre. 2.e Semestre. Total. 1840. 84e 79400 AUTO AE RAI 019 583 NS: 114 308 AP SE 808 1842 — 4972 — 98,496 — 33,468 1849-44 108 = 7454 2 VAL 562 (84411704, € 09/4800 D — 0" 17,143 1845 — 4995 — 4,448 — 9,443 1846 — 3,817 — 10,789 — 14,606 (SAT NAT RTE 5 460 TRS "5360 RAMMIEEQ IS: 9r2 70,242 110,761 181,003 > = )/ On voit que le nombre des journées d'hôpital est presque doublé dans le deuxième semestre , mais l'in- fluence des mois les plus chauds ressortira encore mieux par l'inspection du tableau suivant , indiquant le nombre des entrées : n 2 a > [sl A ON PES MT CT IRAN ol 2) MC LRQ CE ETS RCE) LES IR LES ES ECS UE 3 Z 3 = = SM NZ = |£ ec CRIME = 5 3 & & & | & HUILE 5 & & | 5 = ZE NN TRS D € É = > Es = = ES n Lei y J L. . = œ — 1 cd . . a . œ œ 4 5| 176] 184! 101] 1081 107] 83! 79! 116] 111} 108] 1410 11 181] 126! 134] 116] 150! 167! 146! 234] 117) 21| 1929 4161 860! 3281 311] 159! 133] 2583 80! 117] 253] 316] 149] 143] 95] 2141 9 1 1843 | 222! 155] 200] 240] 17 7 311 127] 72} 124] 35] 51| 1097 1844] 76! 80] 55! 100 1845] 55 1846 58] 53] 49] 38] 44[ 52] 78] 102| 189] 110] 60! 44 869 1547] 40] 63] 44! 82! 60! 64! GG] 119] 106] 491 631 50 503 1848] 48] 35] 42! 75] 93] 87] 124] 183] 206] 98] 81] 85] 1139 872| 759] 859] 973] 789] 717] 135/192712188/1275] 825] 638] 12553 Il résulte de ce tableau que la somme des entrées pendant les quatre mois de chaleur, juillet, août, sep- tembre et octobre , mois pendant lesquels se montrent les fièvres presqu’à l'exclusion de toute autre maladie , est égale à la somme des huit autres mois et qu'elle les surpasse mème de 911. Les mois d'août et septembre représentent à eux deux environ le tiers des entrées totales ; il est donc impossible de nier l'influence très-marquée d’une cause morbide toujours la même ; produisant une véritable maladie endémique, sévissant , à peu près tous les ans, plus DS ou moins fortement, et causant parfois des épidémies lorsque des circonstances météorologiques favorisent son développement et son action. Le nombre total des entrées pendant ces neuf années étant de 12,553 , il en résulte qu’en répartissant unifor- mément les entrées entre tous les hommes qui ont composé la garnison , chacun d’eux serait entré à-peu- près une fois à l'hôpital. Autres preuves , je lis dans le Journal hebdomadaire de médecine plusieurs mémoires du docteur Gasté, ex- médecin en chef de l'hôpital militaire, sur les épidémies de fièvres intermittentes qui ont atteint la garnison pendant les années 1827, 1828, 1829, 1830, 1831. MM. Casimir et Godélier, qui ont exercé la médecine à la Rochelle peudant plus de quarante ans, ont remarqué que les fièvres abondent tous les ans pendant l'été ; enfin, M. Crouigneau , médecin militaire, a parfaitement décrit l'épidémie de 1843 , qui fut très-forte. Ainsi donc, il n’y a pas de doute sur l'insalubrité cons- tante des casernes depuis leur fondation ; des mémoires et de nombreux rapports ont été faits presque annuelle- ment à ce sujet. J'ai cité les principaux dans le cours de ce travail ; je ne dois pas oublier toutefois celui de M. Vialis, ex-colonel du génie à la Rochelle , en 1778 , qui signale, comme ses devanciers , les causes d'’insalubrité qu'il attribue aux eaux de Lafond , aux lavoirs , au mélange des eaux de mer et des eaux douces, ete., etc. ; il propose différents projets dont l'exécution , dit-il, « parera à toutes les plaintes raisonnables qui ont été faites 59 jusqu'ici sur le mauvais air de la Rochelle ; le quartier de la porte Dauphine deviendra aussi sain qu’il est infect, et la garnison n'aura plus de motifs pour abandonner ces établissements (les casernes) qui sont d’ailleurs aussi commodes qu'on peut le désirer. » (Manuscrit dépose à la Bibliothèque de la ville.) Plusieurs des améliorations proposées par M. Vialis furent opérées, et il n'est pas douteux qu'elles furent avantageuses ; mais on négligea la principale, qui était d'empêcher le mélange des eaux douces avec celles qui sont salées. Nous avons démontré par des témoignages nombreux et authentiques et par des chiffres irrécusables que , tous les ans , l'époque de la canicule est l'époque où appa- raissent, en grand nombre, les fièvres intermittentes. l'effectif de l'hôpital militaire augmente alors dans de très- fortes proportions ; les registres de l'hôpital et les renseignements pris près des autorités militaires sont là pour l’attester, et notre expérience personnelle, depuis vingt et quelques années, ne nous laisse pas de doute sur cette fâcheuse et constante influence. De ce que nous venons de dire nous croyons devoir tirer les conclusions suivantes : La Rochelle est entourée de terrains marécageux qui vont en se desséchant de plus en plus , et sont arrivés aujourd'hui à n'exercer qu'une influence très-peu délé- tère sur la population ; que la salubrité s'est accrue successivement par les différents travaux d’assainisse- ment entrepris; qu'il ne règne plus à la Rochelle de peste ni d'épidémies meurtrières , comme celles qui 60 décimaient la population aux XV°, XVIe, XVII et mème XVII siècles ; que des fièvres endémiques ont exercé jusqu'en ces derniers temps leurs ravages sur les quartiers qui avoisinent les fossés, et particulièrement sur les casernes de la porte Dauphine. Il nous reste à signaler et à prouver quelles étaient les causes qui produisaient ces fièvres , et à entretenir le lecteur des moyens par lesquels on les a fait disparaitre : c’est ce qui fera la seconde partie de ce mémoire. nn LT 2 BTS FES LE — Ile PARTIE. De l'étiologie des fièvres intermittentes en général, et en parti- culier de celles qui étaient endémiques à la Rochelle. _—_…— Des moyens proposés et employés avec succès pour combattre les causes signalées. —— La recherche de ces causes nous conduit à faire tout d’abord la description des lieux qui, bien qu'ils soient connus de la plupart de nos lecteurs , exigent cependant d’être examinés maintenant avec soin. (Voyez le plan ci- joint.) | La partie des fossés qui entourent la ville, qu'il est le plus utile de connaître pour nous , est celle qui s'étend de la porte des Deux-Moulins , C'est-à-dire de la mer, au 61 Cavalier construit à l'extrémité ouest de la caserne A. est à ce point là que le fossé se bifurque de manière à fournir deux branches; la première, à direction à-peu-près droite, est le canal qui apporte les eaux de Lafond ; la seconde, qui se contourne en formant un angle droit avec la première , est le fossé nord de la ville; celui-ci ne contient de l’eau que jusqu'à la porte Dauphine ; dans ce court trajet, pendant lequel il baigne le pied des remparts adossés aux casernes, il reçoit un égoût de la rue Porte-Dauphine, les eaux chaudes de la machine à vapeur de la filature et les matières provenant des latrines des deux casernes. L'écluse bâtie à la porte des Deux-Moulins permet de vider les fossés à mer basse et de les remplir lorsque la mer est haute. Après avoir indiqué les deux points extrèmes des fossés , signalons les canaux qui en partent et ceux qui y affluent. Un seul canal , celui de la Verdière, peut rapporter, en outre de l’écluse des Deux-Moulins, les eaux des fossés à la mer ; il débouche dans le port et peut être considéré comme canal propre à faire des chasses pour entrainer les vases qui tendent à le remplir. A la porte Neuve le fossé recoit les eaux et immondices de la rue du même nom. Plus loin , aux deux angles de la place , il reçoit deux égouts ; le premier provient de l'hôpital militaire et des rues adjacentes, le deuxième vient de la rue Rambaud et autres circonvoisines. De là à sa bifurcation se trouve encore un dernier égoût venant 62 de la rue Dauphine et de la place qui est devant la façade des casernes. Si nous examinons de quoi se compose le liquide qui est recu dans la partie des fossés qui s’étend de la porte Dauphine à la porte des Deux-Moulins , nous voyons qu'il est formé : 1° D'une quantité d’eau de mer , qui peut représenter les 4/5° de la masse totale. (On pourrait savoir la quantité précise , en analysant l’eau de mer et l’eau des fossés ; les quantités relatives des sels indiqueraient suffisamment l'état du mélange.) Cette eau de mer est renouvelée seulement lors des grandes marées , par le moyen d'une écluse qui ne permet, vu son étroitesse , le renouvellement complet que dans l’espace de plusieurs jours ; ce qui , joint à la mème durée de temps pour que les eaux puissent s’écouler , fait que les vases sont à découvert pendant plusieurs heures et exhalent, pendant ce temps , une odeur d'œufs pourris. Pour éviter cet inconvénient, on ne vide qu'incomplètement les fossés et on ne renouvelle qu'une partie des eaux. L'opération est sans doute moins désagréable et moins dangereuse que si on les vidait tota- lement , mais elle n’en présente pas moins l'inconvénient d’un dégagement considérable de gaz et celui d’un écou- lement imparfait des eaux; en effet, les plus insalubres qui sont à l'autre extrémité des fossés , sont évidemment les dernières à s’écouler , et on ne leur donne pas le temps de le faire; ce sont donc les eaux dont on devrait le plus promptement se débarrasser qui restent le plus longtemps. 63 90 Des eaux douces provenant des fossés de Lafond qui ont servi à laver toutes les lessives de la ville ; elles sont alimentées par une source qui jaillit dans la maison de M. Gibert et par les pluies qui tombent sur les villages de Lagord, Puilboreau et Cognehors, dont la pente naturelle représente à Lafond la forme d’un entonnoir. Le renou- vellement de ces eaux se fait continuellement en hiver et l'été seulement quand il survient de grandes pluies. Dans cette dernière saison , la plupart des petits fossés et le sol marécageux du village de Lafond restent à sec, le fossé principal a mème une partie de ses bords également desséchée. Cette circonstance de la grande baisse des eaux de Lafond pendant toute la saison chaude, est très-impor- tante à noter, car c’est l'époque où lesfièvres sont endé- miques. On conçoit que plus il y a de terrains naturellement mouillés mis à sec, plus il y a de surface d'où l'exha- lation des miasmes peut s'opérer : ajoutons que c'est à cette époque aussi que se font les curage et recalage des fossés, opération qui a pour conséquence le remuement des vases boueuses qui restent exposées à l'air et au soleil, où elles fournissent de nombreuses décompositions, Nous reviendrons sur ces deux circonstances. Ces eaux, qui ont toujours séjourné un temps assez long dans ces fossés marécageux , sont saturées de sels lixiviels et de nombreuses matières animales et végétales que les pluies entrainent avec elles ou qui y naissent et s'y développent naturellement ; elles recoivent la décharge d'une fabrique de crème de tartre et de toutes les maisons du bourg de Lafond ; ces eaux impures vont se mêler à 64 l'eau de mer dont nous avons déjà parlé , chargée elle- même de fucus et d'algues de toutes espèces , et rappro- chée par l'évaporation. 3° Des égoûts nombreux, venant de la ville, apportent leur contingent de matières animales et végétales ; les latrines des casernes y aboutissent, et un courant conti- nuel d’eau chaude , provenant d’une chaudière à vapeur, vient ajouter à la masse et à l’insalubrité du-mélange. Avec de pareils éléments peut-on croire qu’il ne s'opère pas des compositions et des décompositions nouvelles ? Peut-on supposer que ce mélange de l’eau de mer , des eaux douces et impures, et des nombreuses matières organiques , puisse rester exposé longtemps aux ardeurs du soleil, dans un espace aussi resserré que celui que présentent les fossés des remparts, sans éprouver une fermentation , une sorte de travail qui donne naissance à des miasmes et à des gaz très-délétères ? Non , aucune personne, même parmi celles qui sont étrangères aux sciences physiques et chimiques, ne mettra en doute les résultats fâcheux qu'il doit produire et qu’il produit d’une manière malheureusement trop réelle. En veut-on des preuves matérielles et faciles à acquérir ? Qu'on descende en été dans les fossés et qu’on s’arrète un instant au bord de l'eau , on voit à chaque instant de petites bulles de gaz qui se dégagent. Ce phénomène est si sensible aux points où les égoûts arrivent aux fossés et où l’eau de mer se mèle à l’eau douce , qu'on dirait un vrai bouillonnement et que des quantités très-notables de 6 gaz peuvent y ètre recueillies en peu de temps, ainsi que j'ai pu le faire. Si, de ce fait patent, matériel , nous passons à des expé- riences scientifiques , nous pourrons avec elles prendre la nature sur le fait et voir se produire les décompositions qui, selon toute apparence , sont la cause efficiente des maladies endémiques que nous étudions. Désireux de connaître les réactions chimiques qui s’opèrent par le mélange des eaux douces et des eaux de mer, et guidé en cela par les travaux de MM. Savi et Daniell, je priai un pharmacien de notre ville de me prêter son concours pour suivre les expériences que je voulais tenter. A cet effet, le 28 octobre 1844, à deux heures après midi, nous fûmes prendre de l’eau : 1° A la source qui alimente les fontaines de la ville et celle qui, sortant de la maison de M. Wilkens , va se perdre et alimenter les fossés de Lafond ; 29 A la partie inférieure du canal de Lafond , c’est-à- dire l'eau qui, après avoir servi au lavage du linge de presque toute la ville, arrive aux fossés des remparts , chargée de matières végétales et animales ; 3° Devant le Cavalier, c'est-à-dire au point de jonction des eaux douces et des eaux provenant des parties ouest et nord des fossés des remparts ; 4° Dans les fossés , à l'écluse des Deux-Moulins : o° Dans le port. Partout où nous primes de l'eau , partout aussi nous ramassämes de la vase ou de la boue, et des substances végétales qui y étaient flottantes. 66 Le lendemain , 29 , nous disposàmes trois flacons d’une capacité de quatre litres. Dans chacun d’eux nous mimes une quantité égale d’eau , trois litres. Le n° 1 était rempli aux deux tiers d’eau douce puisée près de l'écluse de Lafond. J'avais eu soin d’y mettre des conferves prises à la surface et de la vase recueillie au fond du fossé. Le n° 2 contenait une quantité égale d’eau de mer, d'algues marines et de vase. Le n° 3 contenait un mélange , par parties égales , des substances contenues dans les deux premiers. Ces trois flacons furent déposés sur une table dans une chambre exposée au midi. La température était de 26 à 30 degrés. Je suspendis dans l'ouverture du goulot de chaque flacon un morceau de papier trempé dans une solution saturnine. Celui qui était dans le troisième ne tarda pas à se noircir et à indiquer d’une manière certaine le dégagement de l'hydrogène sulfuré ; nul doute qu’une réaction s’opérait dans le mélange et avec elle la produc- tion des gaz et des miasmes susceptibles de donner la fièvre. Les liquides des deux autres flacons restèrent beaucoup plus longtemps sans se décomposer, et le papier de plomb resta longtemps à se colorer très-légèrement en noir. Je ne mets pas en doute qu’on puisse produire à volonté la fièvre chez des individus qui se soumettraient à respirer l'atmosphère d'une chambre où seraient placées plusieurs terrines remplies du mélange que contiennent nos fossés. 67 Ce qui se passe à Laleu, village situé près de la mer, vient à l'appui de notre opinion. Les habitants, qui vivent de poissons et de coquillages qu'ils vont chercher au bord de la mer, sont dans l'habitude, chaque fois qu'ils vont à la côte, d'apporter des fucus, qu'ils jettent sur leurs fumiers , qui sont aux portes de chaque habitation. Lorsqu'arrivent les chaleurs, ces plantes se décomposent, répandent une odeur d'hydrogène sulfuré et les fièvres ne tardent pas à se manifester dans chaque maison. Ainsi donc, la cause de nos fièvres endémiques est positivement connue , elle git dans le mélange que nous venons de signaler , mélange qui s'opère très-fréquem- ment, puisque les eaux douces n’ont pas d'autre issue que celle des fossés qui contiennent de l'eau de mer. Ce mélange s’est opéré nuit et Jour pendant toute la durée de l'épidémie de 1843. La vanne de l'écluse du fossé de Lafond , qui retient les eaux , présentait à sa partie inférieure une ouverture de plus d’un demi-mètre de circonférence. Cette circonstance à pu avoir une influence fâcheuse ; mais, en l'absence de cet accident , le mélange qui se produit lors des chasses intermittentes n'en aurait pas moins causé l'épidémie , qui était, cette année-là , favorisée par des circonstances atmosphériques. Tous nos efforts doivent tendre à combattre cette cause, je dirai presque unique : Sublatä causa tollitur effectus. Ainsi les expériences que nous avons faites et que nous venons de rapporter prouvent incontestablement que la matière organique dans un mélange d’eau douce et d’eau 68 salée réagit, en se décomposant, sur les sulfates de l'eau de mer et qu'au gaz hydrogène carboné et phosphoré qui se dégage habituellement, il faut joindre l'hydrogène sulfuré. Mais nous devons insister pour prouver que là où se dégagent ces gaz, il se produit des fièvres intermittentes. Jusqu'à présent les nombreuses analyses tentées sur l'air des marais n'avaient conduit à aucun résultat positif. C'est en vain que Jules-César Gattoni a fait l'analyse de l'air de différents marais comparativement avec celui des montagnes , il n’a trouvé aucune différence; que Moscati a recueilli au moyen de globes de verre, rem- plis de glace, les vapeurs qui se trouvent à la surface des rivières et qu'il a répété les mêmes expériences sur l'air des salles de l'hôpital de Milan , il n'a pu saisir qu’une matière floconneuse dans ces vapeurs condensées ; Brochi n'a pas obtenu d'autre résultat sur les vapeurs condensées prises dans les lieux insalubres qui avoisinent Rome ; Rigaud de l'Isle , aidé par Vauquelin , Julia, Herpin , ont fait les expériences les plus nombreuses et les plus variées sur l'air des marais , des égoûts, des latrines , des cimetières, des hôpitaux, etc. ; et malgré tous les travaux très-intéressants et parfaitement faits de tous ces chimistes , nous en sommes encore aujour- d’hui à nous demander ce que c’est que le corps, le miasme qui agit par intoxication sur nos organes pour produire l'empoisonnement paludéen. L'expérience n'a pu démontrer dans l'air marécageux aucun des gaz qu'engendre la putréfaction , l'air le plus insalubre donne à l'analyse les mêmes principes que Pair le plus sain. 69 Cependant quelques chimistes, parmi ceux que nous venons de citer, Moscati, Brochi, Rigaud de l'Isle, ont précipité de l'atmosphère qu'ils analysaient, une eau qui leur a présenté les phénomènes qui résultent de la décom- position spontanée des matières organiques ; mais aucun d'eux n’en a démontré la propriété délétère. La majeure partie de ceux qui ont analysé l’atmos- phère pour y découvrir la cause des maladies endémiques, n'ayant rien trouvé qui püt établir une différence avec l'atmosphère normale , ont nié l’existeuce des miasmes ; mais n'est-ce pas aller trop loin ? nos moyens d'analyses sont-ils assez complets pour tirer une pareille conclusion ? les substances recherchées dans l'atmosphère n’ont-elles pas pu se trouver en quantité trop faible pour y être reconnues? Que nos instruments deviennent meilleurs et on concevra la possibilité d'opérer la liquéfaction ou la solidification d’un miasme qui se trouve à l’état de vapeur dans l'atmosphère , soit par la compression soit par le refroidissement. Au lieu de saisir le miasme dans l’atmos- phère où il se trouve trop étendu, ne peut-on pas le rapprocher, le produire en créant toutes les circonstances favorables à son développement et le recueillir dans un espace beaucoup moindre, de manière à pouvoir alors le reconnaitre à l’aide de nos procédés chimiques actuels ? c'est ce que nous avons fait dans nos expériences. Dans la partie vide de nos flacons , se sont accumulés tous les produits gazeux des réactions chimiques ; là des réactifs ont pu décéler le dégagement de l'hydrogène carboné et sulfuré. 70 Nous venons de démontrer chimiquement le dégage- ment naturel de l'hydrogène sulfuré. Cherchons à établir les rapports qui existent entre ce dégagement et l'intoxication paludéenne , recherchons s’il y a un rapport de cause à effet et si, en un mot , la présence de ce gaz dans l'atmosphère est indispensable à la production des fièvres, soit qu'il agisse seul ou concurremment avec l'hydrogène carboné pour causer directement cet effet , soit que la présence de ces deux gaz soit nécessaire au développement du miasme ou agent toxifère qui produit les fièvres. Nous serons forcés d'admettre ce rapport de cause à effet , si nous démontrons que partout où il se développe des fièvres intermittentes, partout il y a dégagement d'hydrogène sulfuré , résultant de la décomposition de la matière organique réagissant soit sur les sulfates de l’eau de mer ou des eaux minérales , soit sur les matières salines que renferment certains terrains comme celui du pays de Volterra en Toscane, la terre des Maremmes, etc. , elc. Si, une carte à la main , et s’aidant des observations médicales faites dans différents pays, on cherche quelles sont les localités où règnent endémiquement ces fièvres , on voit queles pays marins sont, à très-peu d’exceptions près , les plus maltraités sous ce rapport. Parcourons les côtes, celles de la Méditerranée par exemple, et nous verrons à chaque pas les populations moissonnées par les eflluves marécageuses : les bouches du Rhône nous en offrent de nombreux exemples. 71 En Corse et en Sardaigne surtout, les marais menacent de plus en plus la vie des habitants. Toute l'Italie est, comme on le sait, en proie à la #alaria ou cattiv'aria. Brochi , le comte de Fossombronne , Gianini, Amoretti, l'ont assez prouvé dans leurs écrits; M. Gaetano Giorgini a inséré une note dans le vingt-neuvième volume des Annales de chimie, qui vient à l'appui de notre opinion et qui parait on ne peut plus applicable au cas spécial de notre ville. M. Giorgini a porté son attention sur l’état de l’atmos- phère , dans le voisinage de certains marais au bord de la Méditerranée, et, en se reportant aux dates et aux différents documents , il a justifié la grande importance qu'il attache à leur communication temporaire avec les eaux de mer. « Au sud des Apennins se trouve une plaine de trois à quatre milles de largeur , bordée à l’ouest, pendant douze milles, par la Méditerranée, et divisée en trois bassins. Quand les eaux de la mer montent , aidées par un vent de nord-ouest , elles remplissent les bassins et inondent la contrée jusqu’au pied des montagnes ; le mélange ainsi formé avec les eaux douces qui descendent des montagnes , répand une infection dans le voisinage au point de décimer la population , qui ne se composait que d'enfants débiles et d'hommes malades; on n'y voyait jamais de vieillards. » Tel fut l’état des choses jusqu'en 1741; déjà Gemi- gnano , Rondelli, Eustache Manfredi et B. Zendroni, LP 12 avaient insisté sur la nécessité d'exclure les eaux de mer des marais. En 1741 une écluse, permettant à l'eau de ceux-ci de sortir , mais empêchant l'eau de mer de rentrer, fut construite à l'embouchure de la Burlamacca. Cette tentative fut couronnée d’un succès complet et fut suivie d’une disparition rapide des maladies , et d’une augmentation proportionnelle de la population. » En 1809, 1810 et 1811, on prit avec le mème succès les mèmes mesures aux environs de Montignoso. Enfin les’ écluses de Montroni et de Tonfalo furent terminées en 1821 ; depuis ce temps les maladies ont complètement cessé sur tous ces points. » Peut-on , je le demande, citer des expériences et des faits plus positifs que ceux-ci et qui aient plus d’analogie avec celui qui nous occupe pour notre localité. Les fièvres intermittentes pernicieuses de Nauplie (Grèce), sont dues aux miasmes marécageux des marais de Lerne , situés au fond du golfe de l'Argolide , à une lieue ouest de Nauplie. Le sol des environs de cette ville est situé presqu'au niveau de la mer , il est d’une nature argileuse. (Journal de médecine militaire, t. 40, p.11, Gassaud , 1832.) Nos campagnes de Morée n’ont laissé aucun doute dans l'esprit de tous nos médecins militaires sur l'influence fâcheuse des émanations des marais, de ceux surtout qui ont des rapports continus ou momen- tanés avec la mer. Si, sans abandonner la Méditerranée , nous passons sur la côte nord d'Afrique, nous verrons les fièvres dues à la 73 malaria figurer presque seules dans nos hôpitaux d’AI- gérie où elles enlèvent, pendant la saison épidemique , une quantité de malades trois fois plus considérable que dans d’autres saisons. (FINOT , Compte-rendu du service médical de l'hôpital militaire de Blidath.) C’est dans les archives de la médecine militaire qu'il nous importe d'aller puiser nos renseignements, Depuis 1830 , le zèle de tous les ofliciers de santé de l’armée d'Afrique n’a fait défaut dans aucune circonstance , et malgré les fatigues et les nombreux travaux qui les accablent , ils ont trouvé le moyen de faire la topo- graphie de toutes les localités que nous y occupons ; ils ont signalé la fréquence et la nature des maladies qui y règnent, ils ont apprécié les causes et indiqué les mesures hygiéniques à employer pour les com- battre. Tous sont unanimes pour attribuer les fièvres intermittentes ou continues aux miasmes qui se dégagent des marais; or on sait que ceux-ci ont encore des communications avec la mer, ou bien en ont eu à une époque antérieure , de manière à avoir conservé les mêmes sels que ceux qui se trouvent dans la mer. Si l’on veut se convaincre de l’influence pernicieuse des effluves marécageuses , on consultera avec fruit dans le journal de médecine et de chirurgie militaire : 1° Le rapport de MM. Antonini, médecin en chef de l'armée d'Afrique, et Monard frères, sur les maladies d'Alger , en 1831 (t. 33, p. 203 ; en 1832 et 1833, É939: pb); 20 Le mémoire de M. Lacauchie, qui regarde la plane 74 marécageuse de Métidja , comme la cause exclusive des maladies épidémiques des environs d'Alger. (Idem t. 35, p. 78.) M. Fournerou partage les mêmes idées que M. Lacauchie (idem. t, 34 > DH) M. Vilette,t. 53, P. 125, Topographie de a Métidja , signale comme cause des fièvres les vastes marais au nord , communiquant avec la Méditerranée , les débor- dements , les eaux pluviales , et le sol argileux. 3° Bone doit son insalubrité au voisinage d’une prairie basse baignée par la mer , et à un lac marécageux qui est à quelques lieues et dont les miasmes sont apportés le long de la vallée de la Boudjima. (Huer, Histoire médicale du 95° régiment, Journal mililaire, t. 35, p. 92.) A Bone, les pluies subites et par torrent font de la plaine qui l’entourre un lac immense. La plaine de la Seybouse, située au-dessous du niveau de la mer dans une grande étendue, offre dans la saison des pluies un lac immense, puis, aux chaleurs, un véritable marais. Jusqu'à ce que le desséchement arrive , les eaux de mer et pluviales sont mélangées ; de là, activité plus grande dans la décomposition. Les fièvres pernicieuses qui désolent Bone ont diminué depuis les travaux de desséchement. (M. BOUDIER, t. 52, p. 229.) 4° La commission de santé établie à Bone reconnait la même cause et conseille le desséchement et la culture. (Idem, t. 35, p. 135.) »° Au sud d'Oran est un grand lac salé dont les émana- tions semblent causer les fièvres. Le climat est sain, sauf cette circonstance. (GUERRE , t. 36 , p. 140.) 6° Le même marais a forcé à lever le camp de Brédif , très-insalubre. (SOUCEYLER , t. 92 , p. 19. — MAILLOT , t. 33, p. 150. — Recherches sur les fièvres du nord de l'Afrique.) 7° Blidah est située au nord des marais d'Oued-Lalague, qui se trouvent à six kilomètres au nord , dans l'intérieur de la Métidja. Il n'existe dans ses environs ni #4récages , ni flaques d'eau , ni terrains fangeux ; aussi sa réputation de salubrité est si bien établie parmi les Arabes , qu’elle est devenue proverbiale. (BERTHERAND , Journal médical militaire ,t. 52, p. 175. 8° Philippeville. — Son insalubrité est due , d’après MM. Guyon et Antonini , au voisinage d’une plaine qui se trouve inondée par les débordements du Salsaf , qui ont lieu à l'époque des grandes pluies et d'où s’exhalent des émanations qui arrivent avec les vents du sud. (Canaux, plantations d'arbres. (GAUDINEAU, t. 52, p. 217-223.) Il résulte des travaux que nous venons d'indiquer que les fièvres n'existent en Afrique : 1° que sur certains points du littoral, et que là où elles se montrent , là aussi se trouvent de vastes marais ; 2° que les chaleurs qui dessèchent ces marais sont indispensables à la production des épidémies qui ne paraissent jamais quand les marais sont submergés ; 3° que les pluies très-abondantes aux- quelles succèdent de grandes chaleurs , sont toujours la cause d’une plus grande intensité dans le développement des miasmes, qui s'exerce alors sur uue plus grande 76 superficie ; 4° que , lom des plaines marécageuses et dans les saisons où les miasmes ne se produisent pas, On ne remarque jamais d’affections endémiques. Si des côtes de la Méditerranée nous passons à la côte Atlantique de France , nous y trouvons de vastes marais et aussi des pays infectés de fièvres endémiques ; sans parler des Landes et de la Gironde , je citerai plus parti- culièrement ceux de la Charente-Inférieure. Il nous suffit dé nommer Marennes, Brouage, Rochefort, pour rappeler l'idée de fièvre intermittente. Le département de la Vendée, qui n’a pas moins de 49,600 hectares de marais, n'est guère plus favorisé. Ces marais sont aussi très- insalubres, et les troupes qui ont habité dans leur voisi- nage pendant les derniers troubles qui ont agité ce pays, n'ont pas été mieux traitées que ne sont .celles qui tiennent garnison dans la Charente-Inférieure : on peut à ce sujet consulter les mémoires des chirurgiens des régiments qui ont eu à souffrir de ces garnisons. Voyez celui du docteur BoNTÉ, Mémoire de médecine et chirurgie militaire (t. 36, p. 140), et celui de M. Manceau (mème journal, t. 38, p. 86). Dans le département du Pas-de- Calais , Gravelines , ville située au milieu d’un vaste marais , effraie à l'avance, par sa triste réputation d'insa- lubrité, la garnison qui doit l'occuper pendant la saison des fièvres, c’est-à-dire pendant celle des chaleurs. Si nous remontons plus au nord, nous trouvons la Hollande , ce vaste pays tout marécageux qui devrait ètre à chaque instant la proie des épidémies, si la température qui y règne ne mettait un obstacle au développement _— 11 trop considérable des gaz méphitiques, et si d’autres causes dont nous parlerons ne venaient en combattre les effets. Le Danemark , les côtes de la Baltique , la Russie, sont pourvus de nombreux marais dont l'insalubrité passe presqu'inapereue, Certes la température a la plus grande influence, soit pour empêcher la décomposition organique , soit pour faciliter l'élimination de l’économie des substances miasmatiques toxiques en activant les sécrétions ; mais aussi ne peut-on pas admettre comme pouvant avoir une certaine influence , le degré de salure bien moins élevé de la mer Baltique, dans laquelle les sulfates de soude et de magnésie sont en si faible quantité qu'ils ont échappé aux analyses faites par Psaff. Link et Lichtemberg en ont trouvé des quantités excessivement faibles. Après la revue de l'Europe et du nord de l'Afrique que nous venons de faire, nous pourrions considérer l'état sanitaire du reste de l'Afrique , de l'Asie et de l'Amérique, nous y verrions le fléau qui ravage l'Italie et nos possessions d'Afrique, sévir avec une intensité bien plus grande encore dans les plaines du Bengale, dans les vallées de la côte ouest d'Afrique et dans les iles des Indes-Occidentales. Partout là nous verrions, dans le voisinage de la mer, la présence des sulfates mis en décomposition par les matières organiques. Les fièvres de l'Inde sont aussi, sans doute, dues à l’action des pluies, qui dissolvent les sulfates de soude et de magnésie contenus dans le sol et les mettent en rapport avec les Q 15 matières organiques , dont la décomposition est hàtée par une extrème chaleur. M. Darwin , dans son journal de voyage de l'Adrenture et du Beagle, parle souvent de localités semblables sur la côte du Pérou. Il mentionne l'efflorescence des sulfates de soude et de magnésié à la surface du sol , et l'odeur fétide de la vase des lacs salés. M. Gardner / American journal of radical sciences) à cherché à démontrer que, dans les localités marécageuses et près de la mer , la qualité de l'air désignée par le nom de malaria doit être rapportée à une certaine proportion de gaz sulfhydrique produit par la décomposition des sulfates. Ce gaz ne se dégage que lorsque le sol ne contient pas de sels métalliques susceptibles de neutraliser d’une manière énergique le gaz sulfhydrique, comme il arrive particulièrement pour les sels ferrugineux. C'est à l’aide de cette particularité qu’on peut expliquer comment, de deux localités topographiquement semblables , l'une est soumise à l'influence délétère de la malaria, tandis que l'autre s’en trouve exempte. / Gazette des Hôpitaux , page 296 , année 1844.) Nons dirons encore, à l'appui de cette opinion , que M. Daniell a publié dans le Philosophical Magazine , 3° série, n° 121, un mémoire sur le dégagement spontané de l'hydrogène sulfuré dans les eaux de la côte occiden- tale d'Afrique et d’autres localités. L'analyse qu'il a faite des eaux prises à l'embouchure des rivières Sierra-Leone, Volta, Bonny, Congo, Bango, 79 et celle des eaux de la baie de Lopez , lui ont donné 11 p. 69 d'hydrogène sulfuré par gallon d’eau analysée. Les équipages des navires qui stationnent près de l'em- bouchure de ces rivières sont très-souvent atteints de la fièvre. M. Garden a également constaté la présence de l'hydro- gène sulfuré dans les eaux de l'embouchure des rivières Bonny et Lagos. M. Menet, dans un mémoire publié dans les Transac- tions philosophiques (1819) sur des analyses d’eau marine, a trouvé deux échantillons qui contenaient de l'hydrogène sulfuré. Le premier avait été pris dans la Mer jaune , et le second en faisant voile vers Amérique du sud. M. Daniell attribue à la présence de ce gaz la détério- ration rapide que subissent les vaisseaux qui naviguent sur la côte d'Afrique. Il dit qu'il doit en ètre de même en Amérique et que l'existence de ce fait lui a été assurée par un oflicier supérieur de marine qui avait fait la guerre en Amérique. Il attribue à cette cause l’insalubrité de la côte d’Essez et cile l'opinion reçue que le doublage des navires se perd plus rapidement dans le Medway qu'à Wolwich ou en d’autres endroits de la Tamise. Mais , nous dira-t-on , l'hydrogène sulfuré n’est pas lié essentiellement à la cause qui détermine les fièvres , car, si nous vous accordons qu'il résulte de la réaction de la matière organique en décomposition sur les sulfates con- tenus dans l’eau de mer, on ne saurait trouver rien d’analogue dans les marais de la Sologne et dans les tin 80 étangs de la Bresse , qui sont tout-à-fait dépourvus d’eau salée et où cependant règnent endémiquement les fièvres intermittentes simples et quelquefois pernicieuses. L'objection est très-grave et il nous est diflicile de la résoudre , éloigné que nous sommes de ces localités et ne pouvant par conséquent analyser les terrains maré- cageux ; cependant, n'est-il pas possible d'admettre que le sol de la Sologne et de la Bresse contiennent des sulfates ou des sulfures qui peuvent , en présence de la décom- position organique , être eux - mêmes décomposés et fournir le soufre nécessaire à la formation de l'hydrogène sulfuré ? Cette supposition n’est pas aussi gratuite qu’on pourrait le croire de prime-abord. Le terrain qui forme le fond des étangs de la Bresse, doit être composé de manière à ce que les matières organiques puissent réagir sur les sulfates qu'il contient. La statistique de l'Ain indique que l'argile , le gypse , la marne, les tourbières et mème quelques sulfures , se trouvent dans le sol de ce département. On peut , avec de tels éléments , expliquer très-bien la formation de l'hydrogène sulfuré. Lorsque les étangs sont à sec , l'action du soleil active la décomposition des matières organiques végétales et animales, et les pluies d'orage dissolvent les sulfates , alors les réactions chimiques s’opèrent , la matière orga- nique ou azotée se combine avec l'oxigène et réduit les sulfates, mème ceux qui sont peu solubles , le sulfate de chaux par exemple, à l'état de sulfures ; ceux-ci, d'abord solubles, se volatilisent plus tard ; l'air devient insalubre ; S1 de là l'observation faite depuis longtemps et générale- ment de l'insalubrité plus grande d'un étang desséché que de celui qui contient toutes ses eaux, dans lequel les pluies et le soleil se trouvent n'avoir presque pas d'action. M. Savi, professeur à l'université de Pise, a lu, à la section de géologie, dans le congrès scientifique tenu dans cette ville en 1839, un mémoire sur l'insalubrité de l'air dans les maremmes, dans lequel il établit que dans le pays de Volterra, où règne la #alaria , le terrain est composé de dépôts marins très-étendus, renfermant des masses séléniteuses imprégnées de soufre et souvent de sel gemme , accompagné de sulfate et de carbonate de soude. Si on ajoute à cela les matières végétales en décom- position et les pluies abondantes, on aura tous les éléments qui se trouvent dans les lacs d’eau salée ; il n’est done pas étonnant que ces terrains soient aussi insalubres que les marais qui avoisinent les côtes. Les eaux minérales elles-mèmes peuvent , par leur dé- composition , être la source de la #alaria dans quelques localités. M. Savi cite, par exemple, le lac de Rimigliano, situé entre Torre san Vincenzo et le promontoire de Popu- lonia. Avant 1832, époque à laquelle ce lac a été desséché, il recevait les eaux thermales et minérales de la source de Caldana qui contenaient des sulfates de chaux , de soude et de magnésie. Le voisinage de ce lac était insalubre, mais depuis qu'on a détourné les eaux minérales et que le lac a pu être mis à sec, les choses ont changé de face, l'air est salubre et une riche végétation couvre le fond et les bords du lac. Cette observation, relative aux eaux minérales, qu'a faite M. Savi, nous rappelle les travaux de M. Fontan ; ce chimiste, dans ses analyses des eaux minérales de la Belgique , de l'Allemagne , de la Suisse et de la Savoie , attribue la formation de l'hydrogène sulfuré à la décom- position des sulfates par les matières végétales. M. Henry avait signalé depuis longtemps le même phénomène dans les eaux d'Enghien, et M. Chevreul explique de la même manière la production des eaux minérales sulfureuses accidentelles qu'on peut constater dans tous les lieux atteints d’insalubrité. Il nous parait donc impossible de nier le dégagement de gaz hydrogène sulfuré, soit dans les marais sous- marins, soit dans les terrains qui contiennent des sulfates ; pourvu que des circonstances météorologiques d'humi- dité , de pluie et de chaleur soient favorables à ce déga- gement. Si partout où on observe des fièvres intermittentes , partout on rencontre la production et le dégagement de l'hydrogène sulfuré , il est rationnel de considérer ce gaz comme lié intimement à la production de ces maladies. Il est vrai que le gaz hydrogène carboné , que l'on trouve dans toutes les eaux marécageuses , peut seconder et activer l’action du premier ; peut-être même la réunion de ces deux gaz est-elle indispensable pour produire l'em- poisonnement miasmatique des marais et des maremmes. ’est ce que l’on serait tenté de croire si l'on considère , d’une part, qu'il existe des marais non malfaisants qui ne contiennent pas les substances minérales propres à Ja 83 production de l'hydrogène sulfuré : tels sont, d'après M. Savi , les marais de Bientina et Maciuccoli ; et que , de l'autre , le dégagement isolé de l'hydrogène sulfuré dans les solfatares et aux sources d'eaux minérales sulfureuses ne détermine pas de fièvres intermittentes. L'action délétère de l'hydrogène carboné , bien que très-minime en comparaison de celle de l'hydrogène sul- furé, n’en existe pas moins. Le gaz provenant de la distillation de la houille produit des accidents que l'on ne pourrait pas seulement attribuer à la privation d'air respirable ; son action délétère , mème sur les végétaux, est prouvé par le travail que MM. Aubergier et Le Coq ont publié, dans les Annales d'hygiène et de médecine légale , t. XXX , p. 328, au sujet de l’action des fours à chaux sur les vignes qui recoivent la fumée de ces fours. L'hydrogène sulfuré exerce l’action la plus délétère sur les animaux ; d’après les expériences de MM. Dupuytren, Chaussier et Thénard, un air contenant un deux millièmes de ce gaz tue sur-le-champ les oiseaux qu'on y plonge. On a vu des vidangeurs frappés comme par la foudre à l'ouverture de certaines fosses d’aisances. Le fait transmis à l’Académie des sciences par Dupuy, médecin de la marine à Rochefort , est trop curieux , sous le rapport de la décomposition de l'eau de mer , pour que je ne le rapporte pas en entier. Dupuy écrivait à Duhamel qu'au désarmement d'une flûte du roy , le Chameau , qui revenait de Cadix, un matelot ayant débondé une futaille remplie d'eau de mer , qu'on avait imprudemment bouchée, fut tout d'un S4 coup frappé d'une vapeur qui le renversa raide mort ; six de ses camarades , qui étaient dans la même cale, mais un peu plus éloignés de la futaille , furent renversés ; ils perdirent connaissance et parurent agités de violentes convulsions. Le chirurgien-major, averti de cet accident, voulut les aller secourir ; mais aussitôt qu'il fut entré dans la cale, il s’évanouit et éprouva les mêmes accidents. On les retira tous de ce lieu empoisonné; dès qu'ils eurent pris l'air, ils revinrent. M. Dupuy voulut examiner le cadavre du mort; il était extrêmement enflé et fort noir; le sang lui sortait par les narines , la bouche et les oreilles ; mais il était déjà si corrompu qu'il ne fut pas possible d’en faire l'ouverture. { Histoire de l’Académie des sciences , année 1745 , p. 28.) La réunion de ces deux gaz doit nécessairement pro- duire , lorsqu'ils sont mêlés à l'air, mème en proportion inappréciable par nos moyens chimiques , doit produire, dis-je, une action délétère sur l’homme et les animaux. Peut-être aussi les miasmes des marais, s'ils sont distincts de ces gaz, ne peuvent-ils se produire qu’à la condition que ceux-ci se formeront. Est-ce la seule cause des fièvres dites de marais ? il est permis de penser que c’est la cause, sinon unique, au moins la plus active , puisque sans elle les autres restent sans effets ; ce que prouve l'existence de marais non malfaisants et celle des lacs et des étangs , sur le bord desquels on ne voit pas de fièvres endémiques. Rejetterons-nous l’action des autres causes, telles que la chaleur et l'humidité , ou la quantité plus ou moins grande de la vapeur contenue dans l'atmosphère ? 89 non certainement; mais ces causes ne sont qu'adjuvantes, soit qu'elles favorisent le développement des gaz dont nous parlons, soit qu’elles facilitent le transport et l'action de ceux-ci sur notre économie, soit enfin qu’elles s’oppo- sent à leur élimination de nos organes ; c’est ce que nous allons essayer d'établir dans les chapitres suivants. Nous considérons encore comme causes adjuvantes , le terrain argileux , la direction des vents , etc., etc. ACTION DE LA CHALEUR. Quelques auteurs , remarquant que c'est le plus souvent , pour ne pas dire toujours , pendant les fortes chaleurs que se développent les fièvres intermittentes , ont attribué la cause de ces fièvres à la chaleur ; M. Faure est de ce nombre : voyez son ouvrage sur les fièvres inter- mittentes et continues. Plusieurs raisons paraissent militer en faveur de cette opinion ; ainsi il est bien vrai que ces fièvres sont plus fréquentes en été qu'en hiver , qu'un simple changement de saison suflit pour les faire dispa- raitre , que leur intensité s’accroit selon la latitude plus chaude sous laquelle on les observe , qu'ainsi ces maladies endémo-épidémiques, peu nombreuses dans le nord, le deviennent davantage dans les contrées du centre et acquièrent leur saummum de gravité et de fréquence sous la zone torride. SG Ces faits sont incontestables, cependant la chaleur seule ne saurait produire de semblables résultats; quelque élevée qu’elle soit , elle est impuissante. Les plaines de la Russie sont plus chaudes , en été , que les marais de la Hollande, et cependant ceux-ci sont très-insalubres, sous le rapport des fièvres , tandis que celles-là ne le sont pas. Il en est de même de la température de Rome et de Moscou , qui ne diffère, pendant les mois les plus chauds de l’année , que de quelques degrés et qui sont pourtant si différentes sous le rapport de la salubrité. On sait , en outre , que les déserts sablonneux et brülants de l'Asie et de l'Afrique sont exempts de la »alaria. Dans ces plaines de sable, nous ne trouvons plus les matériaux nécessaires au dégagement des gaz auxquels nous attri- buons une partie, sinon la totalité, des phénomènes morbides des fièvres intermittentes. Ainsi donc, d’une part , nous remarquons que la chaleur à une influence marquée dans le plus grand nombre de localités , et que, daus d’autres , elle n’en a pas , quelque excessive qu’elle soit ; ne devons-nous pas en conclure que , dans certains cas , elle développe ou favorise un agent toxique qui, manquant dans d’autres localités , ne saurait y produire , quel que soit le degré de chaleur, les phénomènes qui lui sont propres. C’est ainsi qu’agit la chaleur , par son action prolongée sur les marais ou sur les terrains contenant des sulfates ; elle favorise l’évaporation des eaux et, par le desséche- ment des terrains, les réactions chimiques qui s’opèrent concurremment avec les décompositions des matières ee 87 organiques et minérales ; elle aide , elle favorise le déve- loppement de la cause morbide ; mais elle n’est pas cette cause , qui est toute gazo-miasmatique. En veut-on une nouvelle preuve ? il arrive souvent , quelque grande que soit la chaleur , que les fièvres intermittentes n'appa- raissent que lorsqu'elle dure depuis longtemps : c’est que le liquide à évaporer sur le lac ou sur l'étang était considérable , ses bords et le fond ont dù être mis à nu pour que les gaz aient pu se développer; de là , l'appa- rition tardive des maladies endémo-épidémiques. Le foyer miasmatique au contraire peut-il être desséché prompte- ment, l'apparition des fièvres est également prompte. Ces maladies peuvent disparaitre bien que la chaleur n'ait pas cessé, c'est que la source du mal a été tarie ; mais qu'il survienne des pluies , de nouvelles réactions vont s’opérer et la fièvre apparaîtra de nouveau; on sait en effet, par expérience, que les années les plus abondandes en fièvres , sont celles où les alternatives de pluies et de sécheresse sont les plus fréquentes. ACTION DE L'HUMIDITÉ. La cause efliciente des fièvres n'étant pas, pour tout le monde , #iasmatique où toxique, on a dù l'attribuer à d'autres causes. Nous venons de voir la part que la chaleur à sur leur développement ; nous allons examiner ss celle que l'humidité ou plutôt la vapeur d'eau contenue dans l'air, peut avoir sur ce genre de maladies. M. Hopkins (1) est le premier qui ait fait des recherches pour déterminer quelle peut être l'influence de la vapeur d’eau contenue dans l'air, sur la santé et la maladie de l'homme; il a cherché à démontrer que la #alaria est due, non pas à un miasme, mais bien au défaut de perspiration et de transpiration à laquelle les vapeurs aqueuses , contenues dans l'air, mettent obstacle. Une température chaude et humide est pour lui la cause la plus directe de la fièvre ; plus le point de rosée est élevé et rapproché de la température de l'atmosphère , plus le danger est grand; car alors l'air contient une très- grande quantité de vapeurs et rend l’évaporation de la transpiration cutanée et pulmonaire , rare et diflicile. Après avoir réuni un grand nombre de faits à l'appui de cette doctrine , auteur termine ainsi : «Si les obser- vations précédentes sont fondées , il est présumable que la malaria doit exister dans celles des localités suivantes, où la température est élevée, surtout si l'air a été stagnant pendant un certain laps de temps : » 1° En pleine mer , elle n’aura alors qu’une énergie peu considérable , car la chaleur n’y est pas très-intense; » 20 Sur les rivières , dont le cours est peu rapide, elles s’échauffent quelquefois plus fortement que la mer elle-même par l'action du soleil , et l'évaporation sy accomplit avec plus de liberté ; (1) London and Edimb. philos. magazine. (Third series, n° 86.) Traduit par M. Guérard, (Annales d'hygiène, t. 25, p. 33.) $s9 » 3° Au-dessus des prairies et des forêts, la grande étendue des surfaces humides est une condition qui favorise singulièrement l’évaporation dont elles sont le siège ; » 3° Sur les eaux {basses et stagnantes , le peu de profondeur de l’eau favorise son échauffement et par suite sa rapide évaporation ; » 9° Sur les plages sablonneuses ou vaseuses, elles acquièrent une haute température , et conséquemment fournissent une grande quantité de vapeur ; » 6° Sur les marais, là se trouvent réunies une chaleur extrème , une grande surface d’évaporation et une humi- dité abondande. » Cette manière d'expliquer la cause des fièvres est nouvelle , mais peut-elle être soutenue avec succès ? nous ne le pensons pas. Sans nier l'influence défavorable pour la santé d’un défaut de transpiration , causé par la satu- ration à-peu-près complète de l'air ambiant, nous ne voyons pas bien comment cette cause produirait des maladies intermittentes, plutôt que des maladies conti- nues. Lorsque nous voyons tous les jours des phénomènes morbides continus résulter d’une suppression de trans- piration , nous ne nous expliquerions pas comment beaucoup de localités très-chaudes et où le point de rosée est élevé , sont préservées des fièvres intermittentes. Les remarques et les observations de M. Hopkins sont faites avec beaucoup de discernement, mais il en a tiré de fausses conséquences. En éloignant la cause miasmatique , il a rendu l'expli= 90 cation de certains faits tout-à-fait impossible , et il a accordé à l’eau en vapeur dans l'atmosphère beaucoup plus d'action qu’elle n’en a véritablement. Il n’est cer- tainement pas douteux qu'un air chaud , saturé de vapeur , est d'autant plus nuisible à la santé qu'il rend les pertes que nous faisons par la transpiration plus rares et plus difficiles, en ce sens que l’économie se trouve sur- chargée de matériaux, qu’elle doit éliminer par cette voie, matériaux qui , comme on le sait, sont très-abondants. Dalton estime que sur 1,643 grammes de nourriture ou de boisson ingérés en vingt-quatre heures , on perd par la peau ou les poumons, 845 grammes : c’est-à- dire plus de moitié ; tandis que Lavoisier et Séguin estimaient aussi que le corps perdait par ces transpi- rations, 1,376 grammes. On concoit tout le danger qui se présente pour l’économie , si elle vient à être surchargée de cet excédant. Mais remarquons que les localités où le point de vue de rosée est égal à la température du corps, sont très-rares ; que l’air peut toujours se charger plus ou moins rapidement des fluides qui s’évaporent à la surface du corps et que la cessation de la transpiration provoquerait un degré de chaleur du corps de 45°, qui permettrait alors qu'elle püt continuer. Le défaut de transpiration due à la présence de l’eau en vapeur dans l'atmosphère , ne saurait donc être invoqué comme produisant à lui seul les fièvres intermittentes. Est-ce à dire qu’il est sans influence sur leur apparition ? non certainement ; mais nous répéterons ici ce que nous avons dit pour la chaleur : c’est encore ici une cause 91 adjuvante. L'eau en vapeur agit dans cette circonstance de trois manières : 1° elle favorise la décomposition organique , 2° elle sert de véhicule aux gaz délétères , 3° elle rend l'élimination de la matière toxique, hors de l'économie, plus difficile ; la part qu'elle a dans la malaria est donc très-importante ; mais elle n’est évidemment que secondaire. Nous n'avons ; dans ce qui précède, considéré la vapeur aqueuse qu'à l’état de gaz; si nous la considérons à l’état de vapeur vésiculeuse, sous la forme de brouillard, nous verrons qu'elle a la même manière d'agir , qu’elle diminue la transpiration et que cependant elle ne cause pas de fièvres partout où elle se produit à cet état : c'est que l'élément gazo-miasmatique manque et que, sans lui, il n'y a pas de #alaria possible. Nous ne pourrions admettre avec plusieurs auteurs, et Broussais entre autres , que le froid humide peut à lui seul déterminer des fièvres intermittentes. DE L'ACTION D'UN SOL ARGILEUX. La majeure partie des marais étant sur un sol argileux, quelques auteurs, Linnée et autres, en ont conclu que la nature de ce terrain pouvait engendrer la fièvre ; mais ici encore on a pris comme cause directe une circons- tance favorable au développement de la malaria. Un sol argileux n'est pas perméable , les eaux sont retenues à sa, 92 surface ; de là, décomposition des substances qu'elles contiennent , aussitôt que les chaleurs viennent à élever leur température et que l’évaporation successive laisse à nu la matière organique ; celle-ci macérée dans l'eau , se désorganise et se décompose avec rapidité. Le sol argi- leux n'est nuisible que par son imperméabilité, il favorise la malaria ; voilà tout le rôle qu’il joue dans son déve- loppement : peut-être aussi a-t-il sa part dans les réac- tions chimiques qui ont lieu à sa surface. Notre argile marine contient des matières organiques et des sels qui doivent fournir leur contingent à cet effet. DIRECTION DES VENTS. La directiou des vents exerce une grande influence sur la transmission de la malaria ; en effet, la cause étant miasmatique ou gazeuse, et probablement l’une et l’autre, ces corps aëèriens doivent être charriés par les vents. Malheureusement , comme si tout se réunissait autour de nos casernes pour favoriser la #alaria, les vents d'ouest et de nord-ouest, qui ne peuvent leur arriver qu’en passant par-dessus les fossés, sont les plus fréquents d’après les observations recueillies par le médecin Pinet , pendant plus de quarante ans ; observations qui du reste se trouveraient d'accord avec celles qui ont été faites par MM. Seignette et Fleuriau de Bellevue. Le nom de ce dernier savant me rappelle une observation fort judicieuse 93 qu'ila faite sur l'influence des vents , pour propager les miasmes : il a remarqué que tous les villages au sud des marais n'étaient que très- rarement atteints des éma- nations paludéennes , tandis que ceux qui étaient situés au nord en recevaient les plus fâcheuses influences. Ce phénomène s'explique facilement, les vents du midi, en passant à la surface du marais , favorisent par leur température les dégagements mrasmatiques dont ils se chargent ; la fibre perd sous leur action de sa tonicité ; l'absorption se fait sans doute alors plus aisément , léco- nomie réagit moins ; les vents du nord, au contraire, abaissent la température , rendent le dégagement mias- matique moins actif, impriment à la fibre plus de tonicité et de cette triple manière, ils empêchent l'empoisonne- ment miasmatique. Notre confrère et ancien camarade le docteur Boudin, pour qui l'existence du miasme est bien démontrée, émet, dans son intéressant traité des fièvres intermittentes , l'opinion que ce miasme toxifère pourrait être dù à une végétation paludéenne et qu'il ne le croit pas le produit de la décomposition organique. (1) Cette opinion est appuyée : 1° par des expériences que l’auteur a tentées sur le chara vulgaris et d’autres algues qui sembleraient douces de la propriété de produire l'intoxication des marais; 2° sur la croyance où l’on est dans la basse Bresse que le flouve /Authæantum odoratum) cause dans ce pays, par son odeur infecte , les fièvres d'automne, 3° sur (1) Boudin, Traité des fièvres intermittentes, p. 36 et suivantes, 94 l'assertion de M. de Humbold , qui nous apprend , d'une part, que les habitants des deux Indes considèrent comme cause de fièvres les racines de mangliers et de mance- nilliers, lorsqu'elles ne sont plus recouvertes d’eau; et d’autre part, que la fièvre jaune de Panama est attribuée à la grande quantité de fucus, alques et méduses , mis à découvert par le retrait de la marée; dans ce dernier cas , d’après le docteur Boudin, ce serait les émanations de ces plantes vivantes, qui seraient la source des miasmes, Les objections que nous ferons à l'opinion du médecin en chef de l'hôpital du Roule , sont les suivantes : Les expériences sur lesquelles il se fonde ne sont pas connues et par conséquent ne peuveut être discutées ; le chara n'existe pas dans beaucoup de marais malfaisants ; tandis, au contraire, qu'il existe dans beaucoup de marais non insalubres. Mème objection pour la flouve. Quant aux assertions de M. de Humbold, elles sont toutes favorables à l'opinion de l'existence d’un miasme résul- tant de la décomposition organique ; il est évident que les racines des plantes marécageuses ne peuvent être mises à nu, sans que les vases où elles sont implantées ne soient en complète décomposition ; et les matières végétales et animales, qui vivent dans l'eau , ne sauraient être longtemps exposées à la sécheresse brülante du soleil de Panama , sans entrer de suite en décomposition. Les nombreux détails-dans lesquels nous venons d’en- trer en recherchant l’étiologie des fièvres intermittentes, 95 nous conduisent à conclure, d'une manière positive, que les miasmes paludéens ne s'engendrent qu'autant que la décomposition des matières organiques contenues dans les eaux ou dans les terrains , provoque des réactions sur les matières minérales qu'on y rencontre. Ces miasmes peuvent être d’une nature spéciale, mais il parait démontré, pour nous, que leur existence est liée au déve loppement des gaz hydrogène carboné et surtout hydro- gène sulfuré : peut-être mème ces gaz constituent-ils à eux seuls la véritable cause des fièvres intermittentes. Au point où nous sommes arrivés de notre travail, il ne nous reste qu'à indiquer quelles sont les mesures que nous avons conseillées , quelles sont celles qui ont été exécutées et enfin quelles sont celles qui restent à faire, pour que l'assainissement soit aussi complet que possible. Je citerai ici, textuellement, les pages qui terminent le mémoire que je lus en {848 au Conseil d'hygiène et de salubrité publique : « Je me crois en droit de conclure que partout où les eaux douces et les eaux salées se mêlent et séjournent , il y a une prompte décomposition lorsque la temperature s'élève; les matières organiques réagissent sur les sulfates, des gaz hydrogène sulfuré et hydrogène carboné se dégagent , peut-être entrainent-ils avec eux des miasmes d’une nature particulière ; toujours est-il, qu'agissant seuls ou par l'intermédiaire de ces miasmes , ils pro- duisent des fièvres intermittentes. Pour nous ces propo- sitions ne sont pas contestables. Voyons si nous ne 96 pouvons pas nous servir de ces données pour indiquer positivement la cause des fièvres qui attaquent les soldats des casernes A et B, qui sont adossées au rempart. A quelques dizaines de mètres de la caserne À , s'opère le mélange dés eaux douces du marais de Lafond avec l'eau de mer qui remplit les fossés ; le mélange opéré, les eaux restent stagnantes , elles sont généralement couvertes d'une couche de végétaux privés de vie, apportés et de la mer et du marais. Les nombreux animaux aquatiques qui vivaient naguère , les uns dans l'eau de mer, les autres dans l’eau douce , ne peuvent plus s'arranger ni les uns ni les autres du milieu nouveau qui leur est fait , ils meurent et se décomposent. Ajoutez à cela les immondices entraînés par les égoûts de la ville et les matières solides et liquides , provenant des latrines des deux casernes, et vous aurez l’idée du mélange le plus propre à produire des miasmes et des gaz délétères. Votre étonnement cessera de voir les fièvres endémiques dans les casernes et vous vous expliquerez facilement alors pourquoi la caserne À, qui est plus rapprochée du foyer d'infection, est plus malsaine que la caserne B , qui s’en éloigne un peu plus. Le mélange dont nous venons de parler , sera d'autant plus redoutable qu'il trouvera pour s'étendre un terrain plus plat et plus vaste. Cette fâcheuse circonstance existait avant l’année 1843 ; une grande flaque d'eau s'étendait entre la route de Nieul et le rempart, au point où se mélangent les eaux douces et les eaux salées ; la couche de liquide , peu épaisse dans cette mare , 97 s'échauffait en été et donnait lieu à de nombreuses éma- nations ; elle a été comblée, et depuis lors le chiffre des malades a considérablement diminué. Cette mesure hygié- nique , qui a eu de si heureux résultats, ne prouve-t- elle pas incontestablement que la science a su deviner juste ? ne démontre-t-elle pas, de manière péremptoire, que l’insalubrité des casernes tient à la cause que nous signalons et que l'intensité de cette cause ayant été diminuée , le nombre des malades et l'intensité des maladies ont suivi la même proportion décroissante ? Enfin ne doit-on pas en tirer la conséquence qu’en insistant sur les moyens d'assainissement , on ferait disparaitre en entier l'insalubrité de la partie de la ville baignée par les fossés ? Cela n’est pas douteux ni pour vous ni pour moi et ne saurait l'être pour tout homme instruit , qui étudiera sérieusement la question. Quels sont les moyens d'assainissement ? ils sont très- simples et se réduisent à empêcher le mélange des eaux douces du marais de Lafond et des eaux de mer. Pour arriver à ce résultat, deux voies sont ouvertes : la pre- mière , qui me parait la plus simple et la moins couteuse , serait de vider les fossés , d’empècher les eaux de mer d'y pénétrer , d'y creuser une cunette pour l'écoulement des eaux du marais de Lafond et des égoûts de la ville , et de laisser le reste se couvrir de végétation. Cette opération ne se ferait qu'à la fin de l'automne ou au commencement de l'hiver, pour éviter la mauvaise influence des vases mises à découvert. On ne devrait s'arrêter à ce moyen, qu'autant que la défense de la 98 place n'aurait pas à en souffrir et que l'on pourrait se passer de la chasse de la Verdière pour le désenvasement du port. Je laisse aux hommes spéciaux à décider ces questions , en leur faisant remarquer que devant des intérêts si grands de salubrité , on pourrait faire fléchir des intérêts d’une défense, sans doute très-éloignée , ou ceux du port qu'on peut entretenir par d’autres moyens. Si cependant il était impossible de renoncer au maintien de l'eau de mer dans les fossés, il faudrait alors empècher les eaux douces de Lafond d'y entrer et pour cela il serait nécessaire de continuer à creuser un fossé , qui conduirait directement ces eaux douces à la mer ou à une petite écluse qui les verserait dans les fossés, mais tout près de l’écluse des Deux-Moulins , de manière à ce qu’elles pussent s’écouler successivement par ces deux écluses, sans se mêler aux eaux des fossés. Ce travail, déjà à moitié exécuté , ne saurait être très- coûteux. Nous en avions demandé l'exécution dans un mémoire que nous remimes à la mairie en 1844. Depuis lors, ce travail n’a pu être achevé; j'attire toute l'attention du Conseil de salubrité sur la nécessité de son achè- vement. Ce sera sans doute aux frais du ministère de la guerre que cette opération continuera à s’exécuter. S'il ne devait pas être ici question exclusivement d'hy- giène , nous signalerions les avantages qu'il y aurait, soit au pôint de vue statistique , soit au point de vue d’une foule d’autres intérêts , à faire communiquer la porte Neuve avec la porte des Deux-Moulins par un pont 99 jeté sur l'écluse projetée ; mais désireux de rester dans les attributions du Conseil, je n’insisterai pas sur ce point. Je désire que les recherches auxquelles je me suis livré portent dans l'esprit des autres une conviction aussi pro- fonde qu'elle l’est dans le mien. Au point de vue de l'humanité, comme à celui de l'éco- nomie , le ministère de la guerre ne saurait reculer devant la dépense qu'exigera la terminaison du canal, dont le plan, que je dois à l’obligeance de M. Bonniot , conduc- teur des ponts-et-chaussées , est joint à ce mémoire. J'ai dit au point de vue de l’économie, car c'en serait une que de diminuer de moitié ou des deux tiers les journées d'hôpital. Or, que le ministre de la guerre fasse faire par le Conseil de santé, qui possède les rapports mensuels des ofliciers de santé de l'hôpital militaire , le relevé des journées de malades , et il acquerra facilement la preuve que la mesure proposée, si elle doit être efficace , ce dont on ne saurait douter , sera une véritable économie ; d'autant que ce qu'il reste à faire du fossé ne présente aucune difliculté ; le terrain est une vase argileuse : il est déjà creusé, mais sa largeur est cinq à six fois trop grande ; il ne s’agit, à vrai dire, que de le diminuer. En jetant les yeux sur le plan ci-joint, on verra que les lignes rouges , qui indiquent les projets, ne sont tracées que dans des lieux teintés en bleu, ce qui indique qu'ils sont déjà occupés par les eaux. Partout où de pareils travaux ont été entrepris , la salubrité de Fair en a été la conséquence. Ici mème l'expérience est en voie d'exécution et les résultats les 100 plus satisfaisants ont été obtenus. Qu'on achève done promptement l'œuvre entreprise. S'il fallait ajouter ici quelques exemples, nous citerions les travaux du même genre entrepris sur les maremmes de la Toscane. « Dans l'espace de trente ans , de 1814 à 1843 , la population de Grosseto est parvenue de 53,175 à 76,170 ; mais ce qu'il y a de curieux ou plutôt de surprenant, c’est que , com- parativement aux autres provinces de Toscane , l’avan- tage réel des progrès de la population est pour la province maremmatique ; ainsi la circonscription de Florence donne 160,691 habitants d'augmentation , ou 31 pour 100; celle du territoire pisan , 99,208 , ou 39 2/5 pour 100 ; celle de Sienne , 23,470 , ou 20 1/4 pour 100 ; celle du territoire arétin, 44,810 , ou 23 1/2 pour 100 ; celle de la province de Grosseto comprend 23,004 ou 43 1/5 pour 100. ( Cerrière, du climat de l'Italie, p, 333.) » Les travaux que nous indiquions comme nécessaires , indispensables, ont été, depuis, exécutés. Les eaux douces de Lafond ne se mêlent plus aux eaux salées des fossés ; elles ont été dirigées sur un autre fossé plus extérieur jusqu'au Pâté. (Voir le plan ci-joint. ) Il eût été sans doute préférable de les conduire droit à la mer , mais cela eût augmenté considérablement la dépense , à cause des travaux maritimes qu'il eût fallu faire. On a creusé une cunette au fond des fossés et diminué beaucoup leur largeur de manière qu'une végétation active s'opère 101 aujourd'hui sur les bords étendus et fangeux où régnait naguère un foyer pestilentiel. L'exécution de ces travaux a rendu la ville et surtout les casernes beaucoup plus saines, ce que prouve Île tableau suivant, comparé à ceux que nous avons donnés plus haut. “a = 2 = > eu ue. : CM re LE © © &- Z = œ* 4 > D — = V2. = S s = = z £ Z < = | = =: | © & a a o &- =: =<£ 3 =, = = = = Œ 5 = a @ & ñ = : Z > a = TH = = LA $ = 5 2 << ol 3 o FA é SE EEE i8aol ol 551 1031 831 121] 115 95! 118) 123 97 65| 39/1093 18501 611 451 411 85! 89! Gal 39] 35] 47, 34 31| 25] 599 18511 351 261 511 481 34] 281 241 29] 27, 24 221 25] 373 18521 201 271 36! 361 24| 45! 36] 55! 54! 99! 118 68! 615 18531 40l 561 731 81] 76! 50! 40] 33] 39] 51! 48 25] 642 18541 411 431 61| 501 63| 53[ 72] 44] 54] 49 471 51! 625 le 976| 2521 3651 3831 407! 355] 306! 314] 3411 3541 3311 263/3947 On voit par ce tableau que la somme des entrées à l'hôpital pendant les quatre mois de chaleur, juillet, août , septembre, octobre , loin de dépasser la moitié des entrées, comme cela arrivait et comme le démontre le tableau placé à la page 57 , atteint juste le tiers des entrées totales de l'année. C'est donc un résultat très-favorable obtenu , il ne. laisserait rien à désirer si les eaux des égoûts pouvaient être dirigées vers la mer plutôt que vers les fossés , ce qui empècherait tout mélange stagnant d'eaux douces et d'eaux salées. La saison chaude, naguère la plus insalubre, deviendrait alors la plus salubre. 102 | Tout ce que l’on pouvait faire pour la salubrité a-t-il été fait ? nous n’hésitons pas à dire que les travaux principaux ont été exécutés ; cependant ‘nous émettrons encore le vœu de voir placer une petite écluse au point où les eaux du Päté communiquent avec celles des fossés. C'est le moyen d'isoler complètement les eaux douces des eaux de mer; c’est le moyen, par conséquent , de compléter les mesures d'assainissement. Espérons que le génie militaire, auquel on doit de la reconnaissance pour les travaux exécutés , voudra achever son œuvre déjà si grandement et si utilement accomplie. Après la lecture de ce mémoire, je ne pense pas qu'il puisse rester dans l'esprit du lecteur le moindre doute sur la réalité et l'importance des résultats obtenus. L’assainissement de la ville s’est opéré au fur et à mesure que les travaux conseillés par l'hygiène se sont exécutés. La science médicale revendiquera, à juste titre, l'im- portance des conseils qu'elle a donnés en cette circons- tance. Elle mettra au nombre de ses axiômes les mieux démontrés , l'influence pernicieuse du mélange des eaux douces et salées , surtout lorsqu'elles restent stagnantes ; enfin elle pourra, en mille lieux différents, provoquer l'application des moyens qui ont, ici, si complètement réussi. RE EDS — D DE") cd LA FABLE. Rapport fait à la Société des sciences naturelles sur ses travaux en 1854, par son secrétaire le docteur SAUVE ST ce ae PORN RO ET se Discours prononcé à l’occasion de l'inauguration du buste de M. Fleuriau de Bellevue, par M. Blutel.. Discours prononcé sur la tombe de M. Sosthène Boutron:, par M'Blutel:.:. 2007 ie due Recherches sur la salubrité de l'air à la Rochelle, sur les moyens de l’augmenter et sur l'étiologie des flèvres paludéennes , par le docteur Sauvé... .... Pre PARTIE. ARE DIODORR +02 2 0e A me me Te Notiôns IopographIQuES, 22.250 ER Recherches historiques sur les épidémies qui ont régné à la Rochelle avant le siège de 1628............ Depuis le siège jusqu'à ce jour..., ............. Ie PARTIE. De l’étiologie des fièvres intermittentes en général, et en particulier de celles qui étaient endémiques à la Rochelle et des moyens proposés et employés pour Pages. 11 17 29 97 BRITISH MUSEUM 17 DEC 30 NATURAL HISTORY. a e LA | LL TRS Le ; el TISH ML SEUM 17 DEC. ,30 NATURAL HISTORY. { “ | Il | À (S | in ACT ACADÉMIE DE LA ROCHELLE. SECTION DES SCIENCES NATURELLES. ANNALES. LA ROCHELLE , TYPOGRAPHIE G. MARESCHAL, RUE DE L'ESCALE, 20. 1856. COMPTE-RENDU DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES PENDANT L'ANNÉE 1855, Par le Secrétaire de la Société , le docteur Sauvé. Séance du 44 janvier 4856. Messieurs , Il est un devoir imposé chaque année à votre secrétaire dont je viens m'acquitter aujourd'hui , c’est celui de vous exposer brièvement les travaux dont vous vous êtes occupés pendant le cours de l'année qui vient de s’écouler. Ma tâche , j'ai le regret de le dire , ne sera pas longue, non que vous ayez été moins zélés ou moins assidus aux séances, mais bien parce que vous avez fourni peu de travaux écrits à la Société. C'est une année de disetie à laquelle va succéder , j'en ai l'espoir, une année d’abon- dance : la présence du Congres scientifique de France dans 1 notre ville va stimuler lactivité et l'amour-propre de chacun de nous ; l'ensemble de nos travaux y gagnera bien certainement. En 1854 j'avais commencé la lecture d’un mémoire sur l'hirudiniculture. L'étendue de cet écrit a rejeté sur l'année 1855 une partie de cette lecture : ne soyez done pas surpris de voir que je commence tout d'abord par m'occuper d'une œuvre qui m'est personnelle. I ne m'appartient point d'en faire ni la critique ni l'éloge ; je ne puis ici constater qu'une chose, c’est que l'attention que vous avez prètée à mes lectures m'a été un sûr garant de votre bienveillance pour moi et de l'importance du sujet que je traitais. Cette importance m'a paru bien plus manifeste encore lorsque vous avez nommé une commis- sion pour l'examen de ce travail et pour visiter l’établis- sement que j'ai créé dans les environs de la Rochelle. Cette commission, composée de MM. Blutel, Savary, Brossard et Beltrémieux , s’est acquittée de sa mission, et son rapporteur , M. Savary , vous à fait et lu un rapport , où se trouvent énumérés tous les faits dont je vous ai entretenus et des éloges que ma modestie me défend de rappeler ici. Chacun pourra, du reste, juger mon travail et les résultats auxquels je suis arrivé , puisque vous en avez voté l'impression dans vos Annales. Vos expériences de pisciculture n’ont pas cessé de vous occuper. J’avouerai cependant que vous les avez faites bien moins activement cette année que les années précé- dentes : la raison principale doit en être attribuée au peu de ressources financières de la Société, pour qui , néan- moins , il demeure acquis : 1° que les chevrettes peuvent vivre, se multiplier et passer des hivers rigoureux dans des bassins analogues à ceux que nous avons fait creuser ; 20 Que les huîtres peuvent également y vivre, grossir, s'y multiplier et y acquérir la couleur verte. Ces résultats, obtenus et constatés pendant plusieurs années , vos expériences sur ces mollusques et ces crus- tacés se trouvent en quelque sorte complètes. C'est à l'industrie privée à en tirer parti et à exécuter en grand ce que nous avons fait en petit. Les conditions principales dans lesquelles devront être créés les établissements de ce genre sont les suivantes : 1° Les bassins, piscines ou réservoirs , devront être creusés de manière à ce qu'ils puissent se remplir à marée haute et ne pas se vider à marée descendante ; des vannes seront disposées à cet effet ; 2° La vase étant l’obstale le plus sérieux que le piscul- teur ait à vaincre , il sera nécessaire que l'eau n'entre dans les bassins qu'après qu’elle aura été retenue pendant quelque temps immobile dans des fossés de ceinture ou dans de grands réservoirs analogues à ceux qu'on appelle jarres dans les marais salants ; 3° Le voisinage de l’eau douce est indispensable ; d’abord , parce que l'eau de mer mélangée avec elle est plus propice au développement rapide des poissons ; des mollusques et des crustacés, et qu'ensuite Pété, où l'évaporation est très-active, la salure de l'eau devien- drait trop considérable et serait nuisible aux élèves. En satisfaisant à ces trois conditions fondamentales , le 6 succès de l'entreprise est assuré. Il existe d’autres con- ditions de détail que les rapports de votre commission de pisciculture ont suflisamment indiquées ; au reste , l'expé- rience que vous avez acquise est mise à la disposition de tous ceux qui voudront se livrer à l'industrie piscicole. C'est ainsi, Messieurs, que vous avez encouragé les tentatives que veut faire dans ce genre M. Garnier- Savatier. Ce pisciculteur , né dans notre département, à l'ile d'Oleron , étudiait en mème temps que nous les mêmes questions, et créait dans le Var un établissement de pisci- culture. $e rappelant son pays natal et ses productions, il a dû penser aux bouchots et se demander s'il ne pourrait pas appliquer aux moules, qui y sont cultivées, les procédés de conservation qui permettraient de trans- porter au loin ces bivalves, dont la consommation est restreinte aux contrées limitrophes de la mer. M. Garnier n’a pas hésité à faire des expériences qui lui ont prouvé que cette conservation était possible. Il vous a soumis ses produits. Vous avez nommé une commission pour les examiner , après deux mois de conservation dans votre Musée, et vous vous êtes assurés , par le rapport de cette commission , que le succès avait couronné l'expérience. Vous avez encouragé scientifiqnement l'industrie nou- velle à laquelle veut se livrer M. Garnier , industrie pour laquelle il crée en ce moment une société par actions. Nous espérons, dans l'intérêt de nos populations côtières, qu'il réussira. Son intention est aussi d'élever un ou plusieurs établissements de pisciculture : nous l'r encourageens de tous nos vœux, car la production deit ètre en rappert avec là consommation , et il arrivera qu'au moven de ces conserves celle-ci sera centuplkée : il faut done que cele-B augmente dans la mème proportion. Vous avez pensé avec raison qu'il y avait B une grande question, qu il était de votre devoir de l'étudier, et vous avez mis votre concours scientifique et votre appui moral à k dsposiüon de l'inventeur. C'est en asissant ainsi, Messieurs , que , descendant des spéculations purement scentifiques aux applications pratiques, vous pouvez augmenter le bien-être et les richesses du pars en général et des localités qui nous entourent en particulier. Bien que l'archéologie ne soit pas de notre domaine , vous n'en avez pas Bois recu avec un grand imtérèt k commumcation qui vous à été faite par un de nes membres asrésés , M. Fraïsneau , euré de Meursac . de la découverte qu'il a faite d'us vaste esuare dans k crypte de léghse de sa commune. Cette crypte, qu règne sous toute l'étendue , non seulement de Fée , mais encore de la sacre, et qui a accès avec l'ar extérieur par un conduit qui débouche dans ke cimetière. se divise en trois compartiments qui renferment des ossements rangés avec ordre, en couches superposées. M. Frassneau croit avoir remarqué que Les trois subdi- visons de l'ossuaire contiennent des ossements diférents. she les sexes et l'âge, de manière à cœ que l'une cos- tient des ossements qui out appartenu à des bommes , Fautre des essements de femmes et la trossweme des esse- 8 ments d'enfants. Une correspondance s’est établie entre M. Fraigneau et la Société au sujet de sa communication. Vous avez recu le plan de cette crypte, qui a été suivi du plan genéral de l'église de Meursac. Un de nos membres, M. Bonniot, l'a reproduit avec une netteté et une précision remarquables. Les recherches de M. Fraigneau n'ont pas été com- plètes ; il doit les poursuivre et il nous a promis de nous tenir exactement au courant de ses découvertes. De cette communication de M. Fraigneau , je dois rapprocher celle que je vous ai faite de la découverte d’un vaste terrain dans lequel j'ai trouvé , partout où J'ai fouillé, des ossements humains. Ce terrain est situé à quelques kilomètres des bourgs de Marsilly, Esnandes , Villedoux et Saint-Xandre , dans la plaine qui est au nord-ouest du village appelé le Jardinet, lequel n’est composé que de quelques maisons. Les squelettes , rangés à la suite les uns des autres , ne sont pas enterrés à plus de 66 centimètres. Chacun occupe une fosse spéciale, dont le fond ou plan horizontal est couvert de larges pierres plates ; les parois latérales sont aussi revêtues de pierres plates mises de champ et soutenant une petite voûte qui sert de paroi supérieure. Ce cimetière contient également des pierres creusées ; dans l’une d'elles étaient les ossements d’un enfant ; j'en ai fait apporter une : elle est déposée dans le vestibule de votre Musée. | Ce cimetière, car il n’est pas douteux que c'en soit un , a-t-il appartenu à l’une des communes que je viens 9 de citer , ou plutôt indique-t-il que là ou dans son voisinage existait jadis, sur les bords de la mer, qui venait battre près de lui, une petite ville ou un gros bourg , qui aurait été détruit ? Il serait impossible de répondre à priori à une pareille question , qui offre un intérêt historique digne de fixer l'attention des archéo- logues, des numismates et des historiens. Nous confierons ce soin à la section littéraire de notre Académie. Vous vous êtes , comme d'habitude , beaucoup occupés d'augmenter votre Musée , et vous avez fait des acquisi- tions tant de mammifères que d'oiseaux et de poissons. Vous avez fait aussi, dans ce but et dans celui de visiter les localités, une excursion scientifique à la forêt de Benon. La liste de vos membres titulaires s’est augmentée de MM. Drouineau et Chevalier , qui avaient momentané- ment cessé de faire partie de la Société. Un seul membre correspondant a été admis, c’est M. le docteur Clauzure, d’Angoulème. En terminant cette rapide esquisse de vos travaux en 1855 , Je dois dire que , si cette année a été assez pauvre en productions originales dues aux membres titulaires , nos correspondants ne nous ont pas fait défaut : nous avons recu des mémoires très-intéressants sur lesquels des rapports verbaux ont été faits par MM. Dubois, Bonniot, Drouineau , Sauvé, etc. Parmi nos correspon- dants les plus actifs, je me plais à signaler MM. Desmou- lins et le docteur Desmartis. Vous n'attendez pas de moi , Messieurs, que je rappelle 10 ici toutes les diseussions soulevées dans nos séances à l'occasion des faits les plus saillants qui se passent dans le monde savant, et qui nous sont transmis par les journaux qui s'occupent des sciences ; Ma tâche s’agran- dirait considérablement , car il ne parait pas de question nouvelle que vous ne l'agitiez : vous savez ainsi suivre la marche toujours croissante de la science el vous initier au mouvement intellectuel et scientifique de notre époque. La Rochelle, 14 janvier 1856. Le Secrétaire, SAUVNÉ. D. M. P. EXPÉRIENCES ET ETUDES PHYSIOLOGIQUES SUR LES FONCTIONS ET SUR L'HYGIÈNE DES SANGSUES , Failes en vue de conserver et de multiplier cos annélides, Par L.S.t C. Sauvé, Docteur en médecine, Président de l'Académie et de la Société médicale de la Rochelle, Secrétaire de la Société des sciences naturelles de la Charente-Inférieure, membre de plusieurs Sociétés sarantes REA D RAR CR La consommation énorme de sangsues que fait la France, a rendu, dans ces dernières années, l'emploi thérapeutique de ces annélides inabordable pour une très-nombreuse classe de la société. On a dù bannir de la médecine des pauvres ce moyen si souvent utile, ou réduire de beaucoup le nombre de sangsues à appli- quer. D'un autre côté , la cherté des sangsues (cinquante centimes la pièce) a fait que les bureaux de bienfaisance et même les hôpitaux, dans le but de diminuer leurs dépenses, ont laissé distribuer soit des sangsues bâtardes, soit des sangsues d’un très-petit volume. Quelques administrations bienfaisantes ont même prescrit aux médecins d'être très-sobres d'un moyen si coûteux , etc. 12 A Frappé de ces graves inconvénients , que Je ressentais plus que personne , m'étant toujours beaucoup occupé de la médecine des pauvres et de la classe ouvrière , j'entrepris , il y a une dizaine d'années , des recherches sur les moyens de multiplier les sangsues. Je lus tout ce qu'on avait publié sur ce sujet ; je fis plusieurs expériences en petit ; j'obtins des cocons qui me donnèrent des petites sangsues, que je soumis à divers régimes. J'invitai mon confrère Brossard , directeur du jardin botanique , à faire une expérience plus en grand dans un réservoir de ce jardin; elle échoua : les sangsues, ayant été mangées tant par les poissons que par leurs autres ennemis , disparurent. Une autre expérience , également en grand , que je fis dans un marais, appartenant à un de mes amis , M. de Théronneau , échoua également. Javais fait creuser un vaste bassin, ses parois étaient faites en maçonnerie bien cimentée, et le tout était couvert avec des grilles en fer; néanmoins, les sangsues disparurent sans que j'aie pu en découvrir la cause. Désespéré de ces insuccès, je ne me rebutai pas cependant, et je pris le parti d’expérimenter chez moi. Je fis faire dans ma cour un vaste bassin circulaire , dont je crois utile de donner la description. Au milieu d’une petite cour , large de 7 mètres et longue de 5 mètres , dont le sol est couvert par de larges dalles, cimentées avec un mortier de chaux hydraulique , s'élève un bassin circulaire de 2 mètres 88 centimètres de diamètre. (Voyez le plan ci-joint). Les parois de ce bassin, BASSIN EN PIERRE DU DOCTEUR SAUVE. COUPE ET PLAN DU BASSIN À SANGSUES, __…— — LEGENDE. @ cl » A, Dasou ceutral IT, Couduui to uufoueurs el DUPIERULCU LD 4940 BB, ) à ch xboi BDBB, Bassu cutouraut le piece picoa chaque basoiu s o TN » > CCC, Quvaututes de commaamealion Cour FF 0e x coupe Les Deux pariheo re » ul el C2 el d D, Garoi de deparatiou cutrale Elauches qui fout heune aux poutslll. L i ‘ 1 DS pt 4 . 9 E, Courounaucut ciculaite quseral ; iepricoeulteul Les pouls de souie N' dupeuieu- ‘ 1 e 0 . ul " Q " . F, a aouidocur de celle ameume paror ciculaute ; teueut dutrop plu L'ufeureurement Des ] ! PJ a » ) . À G, Jaroi deb separaious Larouurauntes; décharges deobasoimes ouee à vof : 1 n nl “ed pp: : nf ) EHF, Soiuulle mdiquant La lique de pasoadge Doiseau . Le re A u r (. An , * ‘ » du’ conduit deconleuceut Dubasou ceu- KK, douille detote ploiulee a deutelures A 2 ; à tal au Delsous que ou voit œuu Daus la COMME Ur EF F: MENU DA ÉTELES D El ISH MUSEUM 17 DEC 30 NATURAL | HISTORY. 13 L faites en briques et en ciment , sont élevées de O0 mètre 6G mètres de hauteur et couronnées par des pierres de taille qui font saillie de O mètre 02 centimètres en dehors et de O0 mètre 04 centimètres en dedans. Au centre de ce bassin J'ai fait disposer, entre quatre pierres de taille, un espace de 0 mètre 33 centimètres carrés. De chacun des quatre angles de ce carré part une cloison en briques et ciment qui va à la circonférence. D'où il résulte que mon bassin se trouve divisé en quatre grands compartiments, plus un cinquième qui est central et beaucoup plus petit , et qui joue pour les autres compar- timents le rôle de principal organe circulatoire. En effet, ce carré central communique à l'extérieur par sa face supérieure, qui est à ciel ouvert ; à sa face inférieure se trouve un conduit en plomb , garni de toile métallique , qui peut servir à le vider. Au milieu de chacune de ses parois latérales se trouve un trou , garni d’un côté d’une toile métallique et de l’autre d’un tampon, de manière à ce que ce trou puisse être ouvert ou fermé à volonté. C’est par ces ouvertures que l’eau mise dans le compartiment central peut pénétrer dans un ou dans tous les compartiments de la circonférence. On comprend également que l'eau d’un seul ou de tous les compar- timents peut également être enlevée en la laissant refluer dans le bassin du centre qui, comme on le voit, sert tantôt à donner l’eau, tantôt à la recevoir ; c'est, on peut le dire , le cœur des bassins. En outre de cette communication avec cette partie centrale, chaque compartiment est pourvu de deux 14 tuyaux en plomb: l’un à sa face inférieure pour le vider complètement , l'autre à 25 centimètres de sa face supé- rieure pour le vider par déplacement et pour y établir , si l'on veut , un courant de bas en haut. Pour ce faire , il suflit de verser l’eau au centre , elle pénètre par le trou de communication dont nous avons parlé, et cherchant à prendre son niveau, ses couches inférieures s'élèvent successivement pour s’écouler par le conduit supérieur , et elle peut se trouver ainsi complètement renouvelée sans qu'il se soit opéré de trouble ou de perturbation sensibles. La construction de notre bassin est des plus simples et réunit, nous le pensons , tous les avantages imaginables pour le mouvement des eaux dans chacun des compartiments. Voyons maintenant les autres dispo- sitions que nous y avons prises pour donner aux sangsues un milieu qui leur convint et où elles pussent , tout en restant captives, trouver tous les avantages qu'elles rencontrent dans les marais naturels. Au fond de chacun des quatre compartiments , j'ai fait mettre une couche de terre argileuse prise dans le marais, parfaitement préparée et épaisse de 0 mètre 15 centimètres; aux deux angles extérieurs sont placées deux grosses mottines, enlevées à la surface d’un marais tourbeux. Ces mottines plongent à moitié dans l’eau, leur partie supérieure est couverte de carrex qui végètent parfaitement ; c’est au point qu'il faut réprimer quelque- fois leur végétation en les coupant avec des ciseaux. La partie immergée repose sur l'argile , la partie non immergée est toujours humide par capillarilé, et sert d'ilot où les sangsues viennent très-souvent se mettre hors de l’eau. C’est dans ces mottines qu'elles viennent déposer leurs cocons. En outre de ces mottines ou gazons tourbeux , le fond des bassins sert d'appui à des végétaux aquatiques au nombre desquels je citerai les suivants : Chara vulgaris ; Chara hispida ; Lemma trisulca (lentille d’eau) ; Alisma plantago ; Hydrocharis morsus rane ; Nasturtium officinale ; Lysimachia nummularia ; Potentilla reptans ; Juncus ; Carrez ; Nymphœa , alba et lutea. Tous ces végétaux vivent parfaitement et donnent la vie et l'habitation à une foule de petits insectes aqua- tiques. Is servent de point d'appui et peut-être de nourriture aux sangsues, et ils ont en outre le grand avantage d'empêcher l'eau de se corrompre ; c’est au point que J'ai laissé l'eau pendant plus de trois ans sans y en ajouter, l’eau de pluie compensant celle qui se perdait par évaporation. Toutefois , si les chaleurs étaient trop prolongées ou les pluies trop abondantes, rien ne serait plus aisé que de maintenir le niveau d’eau constant. Voulant que mes sangsues puissent jouir de la libre 16 circulation de l'air et de la lumière , condition très- essentielle à leur bonne santé, je recouvre mes bassins avec des toiles métalliques à larges mailles, qui n’ont pour objet que d'empêcher les corps étrangers de tomber dans les bassins, car pour éviter que ces sangsues ne sortent des bassins , j'ai recours à un procédé très-simple : j'ai fait garnir les bords d’une bande de tôle plombée qui dépasse les bords de 0 mètre 03 centimètres , et présente des dentelures recourbées à angle droit ; ces dispositions sont tellement efficaces que pas une seule sangsue ne peut sortir. Mes quatre bassins, bien que réunis en un seul , sont complètement indépendants ; je puis tenir l’eau à des hauteurs variées dans les uns et dans les autres ; aussi. puis-je m'y livrer à toutes les expériences désirables. C'est grâce à eux que j'ai pu répéter toutes les expé- riences faites par ceux qui se sont occupés de ces questions, cest avec eux aussi que j'ai pu tenter toutes celles qui me sont propres. En résumé , voici les avantages qu’ils me présentent : 1° Facilité on ne peut plus grande de manœuvres , tant pour la conservation que pou. la manipulation qu’exige le commerce ou l'éducation ; 20 Réunion de toutes les conditions hygiéniques que trouvent les sangsues dans les marais naturels ; 30 Absence complète de toutes les causes de destruc- tion qui s’y rencontrent , car elles se trouvent à à l'abri de tous leurs ennemis ; 4 Dispositions on ne peut plus favorables pour la 17 reproduction ; aucun des cocons qu'elles déposent dans la tourbe n'étant exposé à être submergé , desséché ou mangé ; 59 Facilité de faire maigrir rapidement les sangsues gorgées , en renouvyelant journellement l'eau de bas en haut ; renouvellement qui s'opère , comme nous l'avons dit , le plus facilement du monde. Je ne sache pas qu'avant moi aucun bassin ait présenté des avantages aussi nombreux et qui ne laissent , je puis le dire avec assurance , rien à désirer. L’étendue que Je leur ai donnée a été circonscrite par la grandeur de ma cour , mais on conçoit que rien n'empécherait de leur donner tel développement qu'on le désirerait. Je ne mets pas en doute qu’un bassin ainsi disposé ne permette à tous les établissements de bienfaisance d’avoir sous la main un nombre de sangsues bien plus que suflisant pour leur service journalier , et cela sans qu'il leur en coùtàt la moindre dépense, si ce n'est celle de la con- struction du réservoir. Ne voulant pas laisser cet objet , unique but de mes recherches , à l'étdt de simple supposition , j'ai voulu réaliser moi-même ce que je conseille à tout établissement hospitalier. Dans un des compartiments de mes bassins , J'ai mis , pendant toute une année, les sangsues qui avaient servi aux malades de l'hôpital militaire de la Rochelle, et celles que plusieurs sociétés de secours mutuels avaient em- ployées aux besoins de leurs membres malades. Ces 71 18 sangsues y étaient déposées sans dégorgement préalable et presque aucune d’elles n’a succombé. Dans un autre bassin, je mettias également des sang- sues gorgées sur les malades , mais avec la précaution d'opérer leur dégorgement dans du vin rouge; je recom- mande ce procédé de dégorgement, il réussit très-bien. Je ne me suis pas aperçu que ces sangsues dégorgées fussent dans de meilleures conditions que celles qui ne l'avaient pas été, surtout au point de vue de la repro- duction. Elles m'ont en général donné moins de cocons que les premières, et la mortalité n’a pas paru moindre chez elles. J'ai acquis, par lexpérience, la certitude qu'il vaut mieux ne faire aucun dégorgement. Ces sang- sues, mises dans mes bassins, y ont donc parfaitement vécu ; elles ont , beaucoup d’entre elles du moins , donné des cocons qui sont venus à parfaite éclosion , et plus tard les sangsues ainsi conservées ont pu être remises en service. Mes bassins sont dans une cour exposée au nord et entourée de bâtiments très-hauts ; l’eau s’y échauffe peu, les sangsues y sont presque inactives , il leur faut près d’un an pour y digérer complètement. En parlant d’ex pé- riences que j'ai tentées dans des conditions opposées , on verra que la digestion est bien plus rapide lorsqu'elle s'exécute librement dans des marais exposés au soleil. Les petites sangsues provenant des cocons faits par les sangsues gorgées sur les malades sont tout aussi saines et tout aussi vives que les autres. Pour les prendre , il me suflit d'agiter l'eau dans le bassin où elles se trouvent et 19 de jeter à la surface de l’eau quelques pièces d'étoffe de laine : elles viennent y adhérer à la face inférieure ; je fais alors passer ces pièces de laine couvertes de sangsues dans le bassin voisin et je les isole ainsi complètement. (”) Quant aux grosses , elles peuvent, après un temps qui varie entre six mois , si les conditions de digestion sont favorables , et un an si elles ne le sont pas, être rendues au commerce ou être employées à l'usage thérapeutique. Ces faits sont pour moi si positifs que je n'hésite pas à acheter les sangsues qui ont servi ou à prèter des sangsues avec l'obligation de me les rapporter ; j y trouve un bénéfice réel, car j'estime plus, pour mettre dans mon marais, une sangsue gorgée que celle qui ne l'est pas. Il suflit d’énoncer de pareils faits, que l'expérience de plusieurs années est venue constater d’une manière irré- cusable , pour regarder comme résolu le problème de soustraire tous les établissements hospitaliers à la dépense que leur occasionnent les sangsues. Si toutes les tentatives faites dans ce but ont été jusqu'à ce jour à-peu-près infructueuses , cela tenait à ce qu'on n'avait pas, comme je l'ai fait, étudié parfaitement les conditions hygiéniques les plus propres à entretenir les sangsues dans un état qui se rapproche le plus de celui de la nature. Je ne soumets les miennes à aucune mani- pulation : pas de dégorgement , pas de changement d'eau, les plantes de mes bassins sont chargées de la (*) Voyez pour les soins à leur donner au titre : De la reproduction des sangsues. 20 tenir toujours pure ; pas d’alternative de température par l'introduction subite d’eau trop chaude ou trop froide ; pas de trouble ni d’agitation; de l'air et de la lumière à profusion , enfin liberté absolue. La sangsue peut vivre selon ses besoins et ses goûts , soit dans l’eau ou hors de l’eau , soit sur les plantes, soit dans l'argile, soit dans la tourbe ; elle se trouve, en un mot , dans mes bassins à mème de jouir de tous les avantages des marais naturels , et cela sans que personne ait à s'en occuper , sans que la négligenee d’un gardien ou d’un employé puisse venir la compromettre , sans qu'enfin on intro- duise avec l’eau quelques-uns de ses ennemis naturels. M. Soubeiran a reconnu qu’une des causes d’insuccès des tentatives faites à Paris pour avoir des réservoirs de sangsues , tenait à ce que les eaux de la Seine contenaient l'Oniscus , qui mange les petites sangsues et empèche ainsi toute reproduction. (*) J'ai donc la satisfaction d'annoncer à toutes les per- sonnes qui s'occupent des questions économiques, qu’au- jourd'hui on pourra, en suivant mes procédés, donner gratuitement des sangsues à tous les établissements hospi- taliers, qui, s'ils le veulent, pourront non seulement subvenir à leurs besoins , mais encore à ceux des bureaux de bienfaisance et à ceux des sociétés de secours mutuels , pour qui la dépense en sangsues est une véritable charge. Les éleveurs et les marchands de sangsues trouveront des avantages immenses à avoir sous leur main de pareils {*) Voyez Répertoire de Pharmacie , t. vu, n° 6. Décembre 1850. bassins , qui peuvent s'établir partout sans beaucoup de frais. Grands marais à sangsues naturels et artificiels. Après être arrivé à des résultats aussi avantageux sur une échelle aussi restreinte que celle sur laquelle j'opérais, je ne balançai pas à tenter l'élève des sangsues en grand , et j'affermai, en 1851, un vaste marais contenant 70 hectares de superficie. Ce marais produisait naturellement des sangsues , mais la pêche acharnée que l’on y faisait en tous temps l'avait complètement épuisé. Je résolus de le repeupler, et, pour y parvenir, je fis venir des sangsues de toutes provenances , d'Afrique , de Hongrie, de Syrie, de Georgie, et enfin des sangsues indigènes , vertes , grises et interrompues ou bâtardes , furent achetées par moi ; j'en mis environ 100,000. J'établis au milieu des marais un logement pour un garde et fis mettre des barrages en planches à l'extrémité des fossés par où les sangsues auraient pu s'échapper. Toutes ces sangsues ont parfaitement vécu dans les marais ; elles y ont déposé des cocons dès la première année. M. de Quatrefages , qui était venu à la Rochelle faire des études anatomo-physiologiques sur des annélides de mer, put, en visitant mon marais , constater que des sangsues de tous les pays y pullulaient et s’y étaient par- faitement acclimatées. Mais deux années excessivement pluvieuses m'ont causé les plus grands désordres ; une submersion complète ct 22 très-longtemps prolongée, a permis aux sangsues de fuir dans toutes les directions et aujourd'hui ce marais ne réalise pas les espérances que J'avais concues. J'ai fait des pertes considérables que je réparerai peut-être plus tard, mais qui n’en sont pas moins fâcheuses au point de vue de mes intérèts et de mes expériences , qui ont toutefois réussi sous le double rapport de l'acclimatement et de la reproduction. Malgré cet insuccès , peut-être momentané puisqu'il est dù à des circonstances exceptionnelles , qui, je l'espère, ne se présenteront plus , je crus , bien loin de me rebuter , devoir continuer et je cherchai à me procurer, aux portes de la Rochelle , un autre marais dans lequel je pourrais faire des observations presque journalières. J’eus le bonheur de trouver ce que je cherchais et j'ai, depuis quatre ans, un marais que je donnerais comme un modèle, tant il réunit d'avantages. On en jugera par la description que je vais en faire : A deux ou trois kilomètres de la Rochelle, dans une vallée à fond argileux , se trouvent des prairies ayant 15 hectares environ d’étendue ; ces prairies étaient jadis des marais salants : aussi aujourd'hui sont-elles encore sillonnées de dépressions et d’élévations de terrain ; les eaux d’un canal qui les côtoie , les couvrent quelquefois et rendent leur superficie toujours fraiche et souvent mouillée ; c’est là que j'ai eu l’idée de mettre des sangsues, pour l'éducation desquelles la nature fait seule les frais. A cela près des issues, dans les fossés, que j'ai fait obstruer 23 par des barrages garnis de toiles métalliques, je n'ai rien changé à l’état naturel , afin d'étudier mes annélides en plein état de liberté. N'ayant, d’ailleurs , besoin que d’un espace beaucoup plus rétréci pour mes expériences sur mes sangsues en état de captivité, j'ai pris les dispositions suivantes : A l'angle le plus déclive de la prairie , j'ai tiré parti d'un ancien marais salant parfaitement conservé , Con- tenant 2 hectares 60 centiares et représentant trois longs parallélogrammes que je puis tenir sans cesse submergés. Ces parallélogrammes , qui forment trois grands bassins, sont complètement isolés les uns des autres par des levées de 10 à 15 mètres de superficie et de près de 2 mètres de hauteur ; elles proviennent des terres extraites des bassins. J'ai fait diviser ces parallélogrammes ou bassins en d’autres petits bassins, au moyen de fossés dont la terre m'a servi à faire de petites digues que j'ai fait planter d’arbustes (Salix purpurea, salix rubra) et près desquels croissent en abondance des jones, des carrex et une foule de plantes aquatiques. Tous les fossés communiquent entre eux au moyen de petites vannettes qui me permettent de les mettre à sec ou de les remplir à ma volonté. Dans mes bassins croissent en abondance une foule de végétaux qui servent de pâture ou de litière aux chevaux et aux vaches employés à la nutrition des sangsues , et qui me rendent le service bien plus signalé encore d'empêcher les caux de se corrompre ; car, contrairement à tout ce qui se fait dans les autres 24 établissements d’hirudiculture, les eaux sont stagnantes et je m'en trouve bien. J'évite par là des pertes ou fuites auxquelles les toiles métalliques s'opposent, souvent très- ineflicacement , soit qu’elles se rompent , soit qu'elles soient à mailles trop grandes pour empêcher les petites sangsues de suivre le cours de l'eau, soit enfin que, en les manœuvrant, elles laissent échapper quelques sangsues , toujours promptes à profiter de la moindre issue. Si les eaux de pluie sont insuffisantes pour combler le déficit causé par l’évaporation, au moyen d'une noria j'élève l’eau du canal ou cours d’eau de la Moulinette, qui longe mon établissement , et je maintiens, par ce moyen, un niveau d’eau constant, qui n'excède jamais 15 à 20 centimètres au-dessus du sol des marais. Dans cet établissement, j'ai réalisé en grand ce que j'avais fait en petit dans les bassins de ma cour. En effet , j'ai une multitude de petits marais isolés ou communiquant à volonté : les sangsues y trouvent de l'eau en nappe mince à la surface végétante du marais , ou une eau profonde dans les nombreux fossés remplis ‘de nénuphar, de chara et d’autres plantes qui leur four- pissent un appui et un ombrage tutélaires. Elles peuvent , selon la température , choisir et trouver leur bien-être à différentes profondeurs et se mettre ainsi à l'abri de toutes les intempéries des saisons. Si elles veulent sortir de l’eau et se promener sur le sol humide , elles trouvent dans les nombreuses petites digues autant de surfaces solides qu’elles en ont de liquides. 925 Lorsque l'heure de la ponte est arrivée , elles déposent leurs cocons dans ces digues où rien ne vient les déranger. Leurs ennemis naturels sont ici impuissants : les rats sont chassés par les gardiens , par les chiens, par les pièges. Les poissons destructeurs , tels que l’anguille, ne peuvent pénétrer dans le marais puisque les eaux sont élevées par une nova. Les oiseaux aquatiques , tels que les canards , ne peuvent y avoir accès. Toutes les circon- stances les plus favorables les entourent done au moment de la ponte, qui ne peut non plus être dérangée par la sécheresse du sol ou par la submersion : deux extrèmes également mortels pour les cocons. Avec de tels avan- tages , il n’est pas étonnant que la reproduction soit prodigieuse dans mes marais. Quant à leur nourriture , elles la trouvent abondante et voici comment je procède. De la nourriture des sangsues. Partant d’un principe que j'ai maintes et maintes fois constaté, à savoir que la sangsue est essentiellement sanguivore et qu'aucun accroissement sensible n’est pos- sible pour les sangsues élevées dans l’eau pure et filtrée , J'ai dû , à l'exemple de tous les éleveurs , rechercher quel était le moyen le plus avantageux de leur faire prendre le sang dont elles ont besoin pour leur accrois- sement. Pour décider la question , j'ai eu recours aux expériences les plus variées , et dont l'énumération et la description nous entraineraient un peu loin. Je rappor- terai ici quelques-unes de celles qui ont trait plus direc- tement aux différentes questions que j'ai voulu résoudre, 26 J'ai conservé pendant un an et plus des sangsues tant dans l'argile que dans la tourbe, elles y ont sensiblement diminué de poids et de volume. Le mème phénomène s'est produit pour celles que j'ai conservées dans des vases remplis d'eau. Je dirai même que les sangsues mises au marais et qui ne sont pas nourries directement, diminuent toutes en général de volume; ainsi, plusieurs fois , il m'est arrivé de mettre au printemps dans une autre partie de mon marais des sangsues grosses et bien nourries et qui , repéchées à l'automne suivant, avaient considérablement diminué de poids et de volume. Ces expériences que j'ai répétées nombre de fois ne laissent aucune doute dans mon esprit sur la nécessité qu'il y a de ourrir directement les sangsues lorsqu'elles sont réunies en grand nombre dans un marais où les animaux qu'elles peuvent attaquer ne se trouvent pas en assez grande quantité pour subvenir à leur subsistance. Les êtres du règne animal sont seuls aptes à fournir l'alimentation aux sangsues ; et c’est à tort, selon moi, que les auteurs ont voulu soutenir la thèse contraire. M. Fermond , entre autres, blème l'usage du sang pour nourrir les sangsues et croit que les matières mucilagi- neuses qui se trouvent à la surface des feuilles en décom- position suffisent à la nourriture des jeunes sangsues ; c’est une erreur que la pratique démontre à tous les éleveurs. La sangsue se nourrit de sang rouge et blanc à toutes les époques de son existence; et au sortir du cocon , les petiles sangsues sont déjà très-avides et £ 27 s’attachent au premier être vivant qu'elles rencontrent pour sucer le liquide indispensable à leur accroissement. J'ai conservé tout un hiver des petites sangsues, des filets, que j'avais fait gorger à l'automne avec du sang. Je les avais mises dans une ventouse mi-pleine d’eau dans laquelle végétaient quelques conferves et quelques lentilles aquatiques ; cette ventouse était placée sur la cheminée ce mon cabinet , et je n’en ai pris d’autres soins que d'y ajouter de temps à autre un peu d’eau. L'opinion de M. Ebrard , relative à la nutrition des sangsues par absorption cutanée me parait on ne peut plus hasardée, et l’auteur lui-même, faisant bon marché de cette opinion , reconnait que cette absorption est in- suflisante , et qu'il faut toujours recourir à l'ingestion stomacale. Je suis, sous ce rapport , parfaitement de son avis. Après m'être assuré que les sangsues de tout âge et de toute grosseur pouvaient, avec avantage pour elles, tant sous le rapport d’un rapide accroissement que sous celui d'une reproduction plus certaine et plus nombreuse , pouvaient, dis-je , être nourries avec le sang extrait des vaisseaux des animaux , ou avec celui qu'elles peuvent elles-mèmes tirer par la succion , je me suis déterminé depuis plusieurs années à leur présenter cet aliment dont elles sont très-avides. Pour le faire , j'emploie trois procédés qui me réussis- sent également bien et qui se secondent et se remplacent mutuellement. {9 Aussitôt qu'aux premiers beaux jours du printemps, 28 les sangsues s’agitent et arrivent sur les points où on remue l’eau, je fais procéder au gorgement dans les parties du marais où se trouvent les sangsues qui ne sont pas destinées à la vente. Pour opérer ce gorgement , je fais prendre aisément les sangsues , ce qui est très-facile, grâce à la disposition des fossés et aux moyens que je mets en usage (voy. Pêche, p. 36). Je fais trier , si les besoins du commerce l'exigent, les sangsues marchandes, je fais mettre ensuite les grosses et les petites séparément dans des sacs de laine ou de toile, et je fais plonger ces sacs dans des bidons pleins de sang apportés de l’abattoir. Je conserve la tem- pérature du sang au moyen d’eau très-chaude mise dans le double fond des bidons. Ce sang chaud non défibriné est de beaucoup supérieur à celui qui a perdu sa chaleur et sa fibrine. J'y laisse les sangsues environ une demi- heure , quel que soit leur âge et leur grosseur ; les sacs retirés du sang sont ouverts, on lave les sangsues et on les rejette immédiatement et sans autres soins dans le marais. Toutefois, il est bon d'observer que les sangsues ainsi gorgées sont Jetées sur les bords des bassins, les ilots et les levées , afin qu'elles puissent s’enfoncer de pré- férence dans la terre, si elles le désirent , ce qui a presque toujours lieu. On leur évite ainsi la fatigue toujours très- graude pour elles, lorsqu'elles sont gorgées, de gagner à la nage les points solides du marais. II ne faut pas mettre une trop grande quantité de sangsues dans chaque sac, car elles auraient de la peine à s’y mouvoir, et toutes ne pourraient pas venir appliquer leur ventouse orale aux 20 parois, ce qui les empècherait de se gorger, et aurait en outre le grave inconvénient d'exposer les sangsues placées à la circonférence à être piquées ou mordues par celles du centre, qui se gorgent ainsi médiatement. J'ai constaté que les sangsues ne pouvaient se gorger avec du sang parfaitement liquide ; elles ne peuvent l'avaler qu'autant que les muscles du pharynx peuvent trouver un point d'appui; pour arriver à ce résultat , il faut que la ventouse orale soit fixée soit sur les parois des sacs , soit sur tout autre corps intermédiaire, comme serait un petit caillot. Lors du gorgement dans les sacs, les sangsues qui sont attachées à la face interne de la poche servent de corps intermédiaire pour celles qui , placées au centre, y baignent dans le sang sans pouvoir s’en repaitre. Ce phénomène se présente surtout très-apparent , lorsqu'on fait gorger simultanément dans le mème sac les grosses et les petites. Ce qu'il faudra toujours éviter. 2° Malgré les facilités nombreuses que l'on a pour pêcher, cette opération n’en est pas moins un peu gênante lorsqu'on a à opérer sur de grandes masses ; pour sim- plifier alors l'opération du gorgement , je procède de la manière suivante : J'ai des planchettes légèrement concaves à leur face supérieure. Chacune d’elles supporte un gros caillot, dont J'ai laissé égoutter le sérum qui, sans cela, pourrait s’écouler dans les fossés et corrompre l’eau. Je fais agiter fortement l'eau à l'extrémité d'un fossé où je place une ou deux de ces planchettes. Je les recouvre ensuite avec mes _— S 30 un petit paquet de jones ou d'herbes qui dépassent de tous côtes les bords de la planchette. Les sangsues appe- lées par l'agitation de l’eau viennent dans le jonc qui recouvre le sang auquel elles arrivent ainsi facilement. Ces jones ont encore pour avantage de protéger les caillots et les sangsues contre l'impression du vent, de la lumière et de l’ardeur du soleil. A défaut, on peut recouvrir chaque planchette avec un morceau d'étoffe en laine. On place successivement un grand nombre de ces planchettes en suivant les mêmes errements et d’un seul coup , et, presque sans peine, on nourrit une grände quantité de sangsues. Avec les précautions indiquées, les sangsues sont à couvert et protégées par les jones , et le sang , n'ayant aucune communication avec l'eau, ne saurait l’altérer. Ce procédé de gorgement peut réussir partout, mais il sera surtout avantageux dans les marais sillonnés d’une multitude de petits fossés. 3° Pour être bien certain qu'aucune sangsue n'échappe au gorgement, je fais de temps à autre entrer dans mon marais soit des chevaux, soit des vaches. Par ce moyen, j'excite l'appétit de celles qui ont refusé le sang mort. Je fais présenter les animaux sur tous les points du marais où je veux nourrir, et leurs jambes, qui se couvrent d'une multitude de sangsues, viennent témoigner que ce troi- sième procédé, qui est sans contredit le meilleur, s’il ne coûtait pas aussi cher, ne doit pas être négligé par les éleveurs. Si: j'ai des sangsues sous la main, je les fais quelquefois gorger de la manière suivante : on applique quatre longues jambières aux membres du cheval , on pes 31 remplit ces sacs , une fois placés , de sangsues ; celles-ci se gorgent promptement et simultanément ; lorsqu'elles en ont assez pris , on ouvre la coulisse inférieure de la jambière, et on les laisse s'échapper dans le marais. C’est dans ce gorgement, dit Du Chausson, qu'il est important d’arrèter de suite, après la chute des sangsues, l'hémor- rhagie au moyen des agents hémostatiques. Tous les ruminants domestiques , les chevaux , les ânes , con- viennent aux sangsues. Il ne faut pas fatiguer ces animaux par des saignées trop copieuses et trop souvent renouvelées ; il ne faut pas craindre de bien les nourrir. Pour qu'il ne se perde pas de sang inutilement , j'ai le soin , lorsque mes animaux sortent du marais , de leur envelopper les pieds dans des compresses imbibées de liquide ou de poudres hénosta- tiques : grâce au perchlorure de fer, on peut aujourd'hui arrèter facilement les hémorrhagies consécutives. Un autre soin que je ne néglige pas , c’est de faire placer les quatre pieds de l'animal qu'on fait sortir du marais sur un grillage en fer. On fait tomber sur ce grillage les sangsues qui adhèrent encore aux jambes , et quels que soient les mouvements de l'animal , aucune des sangsues qui se détache n’est exposée à être écrasée par le piétine- ment ; j'ai fait construire ces grilles les unes en fer, les autres en bois et je me trouve également bien des unes et des autres. J'ai dit que la nourriture des sangsues par les animaux était un moyen coûteux , lors même qu'on n'emploie à cet usage que des chevaux hors de service. Le meilleur 32 moyen de diminuer cette dépense est d’avoir des vaches en bonne santé et dans la force de l’âge : en les nourris- sant bien, elles donnent du lait qui défraie souvent en- tièrement de la dépense qu'elles occasionnent. Je viens de passer en revue les trois procédés de gorge- ment qui assurent à tous les hôtes de mon marais une nourriture abondante et substantielle , et j'ajouterai économique ; en effet, plus on nourrit avec le sang de boucherie , qui ne coûte presque rien , plus on diminue la dépense qu'occasionnent les chevaux. Le gorgement dans les sacs , avec le sang défibriné et mieux encore non défibriné, doit être employé toutes les fois que l'on a les sangsues sous la main; par exemple lorsqu'on les achète ou lorsqu'après la pêche et le triage on a les petites et les vaches , qu’on doit remettre au marais. Le gorgement à la planchette doit se faire très-souvent parce qu'il est facile , peu coûteux et que les sangsues peuvent le prendre ou le refuser, selon qu'elles y sont portées par leur instinct et leur appétit. Enfin , le gorgement par les animaux vivants est le procédé qu’il faudra préférer et que j'emploierais unique- ment si je n'étais retenu par des considérations d'écono- mie. Je dois dire pourtant que je me trouve parfaitement bien de l'emploi simultané de ces trois procédés. Avec eux aucune sangsue n'échappe au gorgement. Aussi les résultats que j'obtiens en productions et en accroisse- ment sont-ils considérables. Les partisans du gorgement exclusif par les animaux vivants, m'objecteront peut- être que ces résultats ne sont dus qu’à la quantité de sang 33 chaud et vivant que prennent mes sangsues, et que celui que je leur donne par les deux autres procédés ne leur porte aucun profit. L'erreur pourrait être commise , en effet , s’il ne m'était pas souvent arrivé de laisser des bassins dans lesquels je n'avais pas permis l'entrée des animaux , el où les sangsues avaient été nourries seule- ment avec le sang de boucherie. Dans ces bassins j'ai pu constater des résultats à-peu-près aussi favorables que dans les autres, où le troisième procédé avait été mis en usage. Je dirai, en outre , qu'avant de me décider à agir aussi en grand , j'avais fait des expériences en petit , que j'avais fait gorger des sangsues soit avec le sang défibriné, soit avec le sang chaud ou en caillots; que ces sangsues, conservées tantôt dans des baquets remplis soit d'argile, soit de tourbe , tantôt dans des flacons en verre , remplis mi-partie d'argile, mi-partie de mousse , tantôt dans les bassins de ma cour , avaient parfaitement vécu dans les milieux où je les avais placées, et qu'elles ne succom- baïient pas en plus grand nombre que des sangsues gorgées sur les animaux vivants, mises dans de pareilles ‘conditions. J'ai, qui plus est, soumis les mêmes sangsues à des gorgements successifs. La plupart les ont bien supportés ; cependant, je dois à la vérité de dire que la mortalité devenait d'autant plus considérable que les gorgements avaient été plus nombreux. Mais n’en est-il pas de mème dans les gorgements multipliés faits avec le sang vivant ! Le troisième procédé de gorgement a quelque chose de cruel et de répugnant : je labandonne de plus en 3 34 plus pour ne recourir qu'aux deux premiers , qui sont bien suflisants ; j'espère que mon exemple sera de plus en plus suivi. La faible mortalité que j'ai observée dans mes baquets eût été beaucoup diminuée encore et peut-être nulle dans les fossés du marais ; là elles auraient joui de toute la liberté de leurs mouvements , auraient choisi le milieu qui leur convenait le mieux ; la digestion eüt été facile et rapide et aucune peut-être ne serait morte. La meilleure preuve que le gorgement avec le sang de boucherie récemment sorti des vaisseaux ne compromet pas la vie des sangsues , c’est que je n’en vois pas de mortes à la surface du marais ni au fond des fossés , et l’on sait que toutes les sangsues qui succombent ne restent pas en terre, mais viennent toujours mourir à la surface du sol. Entre mille expériences, je citerai les suivantes à l'appui de la thèse que je soutiens : Le 28 octobre 1851, je mis dans le sang, provenant d'une saignée que je venais de pratiquer , 400 petites sangsues vertes et grises, la plupart nées dans des baquets aux mois d'août et septembre. Avant le gorge- ment elles pesaient , y compris le sac, 169 grammes ; après le gorgement elles en pesaient 500 ; elles avaient par conséquent absorbé 331 grammes de sang. Après les avoir extraites du sac je les mis dans de la terre de marais légèrement humide. Le 11 novembre, je pris vingt de ces petites sangsues, je les mis comme la première fois dans le sang d'une 35 saignée ; elles se gorgèrent de nouveau et doublèrent de grosseur. Elles ont parfaitement vécu après ces deux gorgements très-rapprochés l'un de l'autre et faits avec du sang veineux privé de vie. Voulant expérimenter sur des sangsues plus petites encore , Je pris cent petites sangsues. Elles étaient nées depuis quinze jours au plus dans des bocaux qui conte- naient des sangsues vaches, mises en expérience dans mon cabinet pour la pose des cocons. Ces petites sangsues, qui n'avaient pas encore sorti de l'argile, au milieu de la- quelle elles étaient nées , mises dans des caillots de sang, provenant d’une saignée , se gorgèrent presque toutes et assez rapidement. Je les plaçai dans un flacon rempli d'argile roulée sous forme de petites boules; elles y vécurent très-bien : les unes s’enfoncèrent dans la terre , le plus grand nombre se réunit pour ne former qu'une seule masse. Trois jours après, je pris douze de ces petites sangsues gorgées , Je les plaçai dans un petit flacon mi-rempli d'eau et contenant quelques plantes aquatiques. Quelques jours après Je les y vis très-bien portantes et aussi vigoureuses que celles qui étaient restées dans l'argile. Le 14 novembre , je les gorgeai de nouveau avec le mème succès que la première fois. Le 18 novembre , j'opérai un troisième gorgement qui réussit comme les deux premiers. De ces faits et de beaucoup d’autres analogues , j'ai conclu que le gorgement était possible et profitable dès âge le plus tendre de la sangsue , et que plus elle était 36 jeune, plus il y avait nécessité de le répéter, car les grosses sangsues ne se seraient pas gorgées à des inter- valles aussi rapprochés, Pèche de sangsues. Le gorgement dans les sacs serait une chose d’une difficulté immense si la pèche était difficile, et si le marais ne présentait pas, comme fait le nôtre, un avantage très-grand sous ce rapport. Voilà , en effet, comment on y pratique la pèche , qui est tellement facile qu’en quel- ques heures , lorsque le temps est convenable, c’est-à- dire lorsqu'il ne fait ni froid ni vent , on peut en prendre plusieurs milliers sans fatigue et sans même se mouiller les pieds. Nous avons dit que chacune de nos baisses , ou grand bassin en forme de parallélogramme , était coupée d’une multitude de petits fossés qui servaient de séparation , avec les digues, aux différents autres petits bassins. 11 résulte de cette disposition que chaque petit bassin est entouré de fossés avec lesquels il est en communication. Si l’on vient à agiter l’eau dans ces fossés, londulation qu'on y produit s'étend bientôt à toute la surface du petit bassin. Les sangsues accourent en foule au point d'où part cette agitation, et le pêcheur , armé d’un large goboir emmanché à l'extrémité d’une longue tige, n'a qu'à leur en présenter l'ouverture pour qu’elles y entrent en foule. Ce goboir , fait en toile d’un tissu peu serré, doit être assez profond pour que les sangsues puissent RO 37 s’y amonceler. On empèche leur sortie en tenant l'ouver- ture en haut et en donnant au goboir un mouvement rotatoire, qui tend à retenir les sangsues déjà prises et à s'emparer de celles qui apparaissent dans l'eau où à sa surface. Lorsque la quantité des sangsues prises vient à trop charger le goboir , on le retire de l’eau , puis on le relourne de manière à ce que sa face interne devienne externe ; on fait tomber dans un baquet mi-plein d’eau toutes les sangsues qu'il contient ; puis on recommence de la mème manière sur un autre point des fossés. Les digues sont assez larges pour qu'on puisse se promener dessus et le bâton des goboirs assez long pour atteindre dans les fossés ; c’est done en se promenant sur ces digues , le goboir et Ja passette à la main, qu’on peut, en quelques heures , prendre, le plus facilement du monde , la plus grande partie des sangsues contenues dans un bassin. Notre marais présente donc encore ici un avantage sur tous les autres , car nulle part on n'a pris des dispositions pareilles aux nôtres. Si l'on voulait pècher d’une manière plus complète et plus facile encore , on pourrait faire baisser l'eau de manière à ce que toute la surface du marais fût mise lentement à sec ; l’eau ne restant plus que dans les fossés, les sangsues s'y rendraient en foule, et la pèche y devien- drait aussi simple que si on les prenait dans un baquet. On jugera de la facilité avec laquelle la pêche se fait , quand on saura qu'il suflit d’une demi-journée de deux employés pour prendre une quantité de sangsues telle , | | 38 qu'elles peuvent absorber vingt et quelques litres de sang que je fais apporter chaud de l'abattoir. Si nous nous sommes bien fait comprendre jusqu'ici , on doit savoir que nos sangsues sont à chaque instant du jour soumises à l'examen du gardien ; qu’elles sont dans des conditions hygiéniques les plus favorables ; qu’elles se trouvent protégées contre leurs ennemis et contre toutes les variations de température ; qu'elles trouvent des eaux chaudes en nappe et d’autres à des profondeurs variées ; que leur alimentation est complète et selon leur goût et leur appétit ; qu’elles peuvent être prises et changées de bassin avec la plus grande facilité et sans qu'on ait à les manier et à les toucher. Voyons mainte- nant quels soins nous prenons pour les faire se reproduire. Jusqu'à présent nous les avons vues en parfait état de conservation et de développement ; arrivons maintenant à leur multiplication , point extrèmement intéressant de la question. De la reproduction des sangsues. Pour me guider dans les procédés les plus avantageux que j'avais à mettre en usage pour la reproduction des sangsues , J'ai dû , comme je l'avais fait pour leur con- servation et leur accroissement , étudier l'anatomie et la physiologie de leurs organes génitaux , et expérimenter sur les différentes phases par lesquelles passent l'embryon et la jeune sangsue. J'ai dù rechercher quelles étaient les conditions hygiéniques qu'il fallait remplir pour favoriser 39 la fécondation , la pose des cocons , leur ineubation et leur éclosion. M'aidant , dans mes recherches , tantôt de l'observation directe de la nature , tantôt des expériences de mes prédécesseurs , tantôt et le plus souvent de celles que je répétais moi-mème ou que j'inventais , Je suis arrivé à les faire multiplier à l'infini. Je passe sur les détails anatomiques des organes sexuels : M. Moquin-Tandon les ayant parfaitement décrits , je n'aurais rien à ajouter qui ne soit connu. Les sangsues sont hermaphrodites, c’est un fait aujour- d'hui bien reconnu ; mais ce qui est douteux encore, c'est de savoir si elles le sont toujours; si, dans leur jeunesse, elles ne sont pas aptes à remplir seulement les fonctions de mâle , comme quelques auteurs l'ont pensé, et comme l’Académie de médecine elle-même la supposé. (Voyez sa séance du 4 avril 1848, dans laquelle l'Aca- démie prie M. Remondet d'étudier cette question, au Sénégal.) Je ne pense pas que l'opinion de l'auteur suédois , qui a avancé que chaque hermaphrodite était mäle pendant une année et femelle pendant une autre , soit fondée. En effet , toutes les sangsues , sans exception , arrivées à l’âge adulte, posent des cocons. Tous les ans , il me passe sous les yeux des centaines de mille de sangsues franches ou bâtardes, et je puis constater que toutes ont, au mois de juin ou de juillet au plus tard, les signes non équivoques d'être fécondées : l'organe femelle est entouré d’un renflement jaunâtre , extrêmement appa- rent, puisqu'il n'échappe à aucun des pêcheurs , qui 40 reconnaissent eux-mêmes parfaitement que Ja sangsue est prète à déposer son cocon. Ce renflement est également manifeste sur la sangsue officinale et médicale ; mais ces sangsues s’enfonçant généralement en terre lorsqu'elles sont dans cet état , il est plus difficile de constater chez elles que toutes sans exception en sont pourvues. Les sangsues bâtardes, au contraire, se prenant dans des petits paquets de jones, appelés bouchons par les pècheurs, et dans lesquels elles se rendent pour y déposer leurs cocons , en sont toutes pourvues , ce qui prouve qu'elles sont alors toutes femelles. J'ai, en outre, souvent observé l'accouplement de deux sangsues , et je n’ai pas vu que l'une d'elles füt petite et l'autre grosse. Les grosses sangsues , conservées dans l'argile depuis plus d’un an, ont donné des cocons féconds. Les sangsues, mème petites, donnent des cocons , petits à la vérité, et ne contenant que quelques germes ; mais cela prouve que si elles jouent le rèle de mâle , elles jouent aussi celui de femelle. La disposition des organes génitaux et la position que prennent les sangsues pour se féconder réciproquement, prouvent qu'elles jouissent chacune des facultés du mäle et de la femelle ; en effet, pour que l'organe femelle de l'une soit en rapport avec l'organe mâle de l’autre et vice versé , on voit les deux sangsues se poser sur le côté , ayant la tête dirigée en sens opposé vers le ventre de l'autre , de manière à ce que les verges répondent exac- tement aux vulves. Il m'est souvent arrivé d’apercevoir 41 au fond des fossés deux sangsues dans cette attitude ; elles étaient enroulées l’une autour de l’autre, dans la position que je viens de signaler. Les sangsues se reproduisent-elles seulement par le dépôt de cocons , ou bien peuvent-elles ne déposer sim- plement que des œufs nus, comme l'ont observé Berg- mann , illustre savant suédois, et plus près de nous, M. Guérin de Lézé, de la Haute-Vienne , et M. Formond, dans les bassins de l'hôpital de la Salpètrière ? J'avoue qu'en présence de détails si circonstanciés que donne M. Formond, j'ai cru longtemps que ce double moyen de reproduction était possible ; mais avant voulu observer par moi-même , je n'ai jamais été assez heureux pour rencontrer ces œufs nus. J'ai bien, il est vrai, rencontré souvent de petits cocons dans lesquels la partie spougieuse manquait entièrement , soit qu'ils provinssent de sangsues très-petites, soit que l’eau les ayant atteintes aussitôt la ponte , la partie spongieuse n'avait pas eu le temps de s'organiser et s'était dissoute. Je présume que l'erreur dans laquelle sont , selon moi , les observateurs que je réfute , tient à cette seule cause ; en effet, voici la description que donne M. Formond : «Les œufs des sang- » sues ont en général une forme elliptique , aplatie par » Ja face qui tient à la plante , bombée par la face op- » posée... la surface bombée présente toujours deux » petites ouvertures operculaires placées aux deux points » posés du grand axe de l'ellipse.. ces œufs sont formés » par une matière membraneuse transparente, d'une » couleur jaunâtre plus où moins brune, renfermant une te — 2 "pm SLR E eZ 42 » matière mucilagineuse , parfaitement liquide. + Cette description s'applique parfaitement à des cocons de petites sangsues qui ne seraient pas recouverts des aréoles de la partie spongieuse. Mille fois il m'est arrivé de conserver dans des pots de grès des sangsues qui étaient prêtes à déposer leurs cocons. Pour faciliter ce dépôt je mettais au-dessus de la surface de l’eau des masses de chara soutenues par des petits morceaux de bois en croix ; les sangsues mon- taient dans ces végétaux et y déposaient leurs cocons. Très-souvent , j'ai trouvé dans les parties les plus rap- prochées de l’eau , de ces cocons complètement nus, mais je me suis bien gardé de les considérer comme des œufs différents des cocons spongieux , auxquels ils ressemblent à cela près de la matière spuneuse qui s’est dissoute. Il n’y a donc pas là d'anomalie , ou plutôt elle n’est qu'ap- parente. Je ne m’arrète pas à la description anatomique des cocons ; ils ont été décrits déjà tant de fois que je puis passer outre et m'occuper seulement de ce qui se rat- tache à leur dépôt et à leur éclosion. Vers le milieu du mois de juin , presque toutes les sang- sues, en âge de se reproduire, disparaissent ; e’est en vain que l'on agite l'eau du marais , elles restent enfoncées dans la terre et sont toutes occupées de rechercher un lieu convenable pour y déposer leur cocon. Ce dépôt a lieu surtout dans les mois de juillet et août, et se prolonge jusqu’en septembre et octobre pour les plus grosses , qui font plusieurs cocons. 43 La majeure partie des sangsues ne posent qu'un cocon; cependant celles qui ont été nourries et qui sont grosses en posent plusieurs. La grosseur du cocon est en rapport avec l’âge et le développement de la sangsue ; plus celle-ci est grosse, forte et vigoureuse, mieux elle a été nourrie, plus le cocon est gros, plus il contient d’ovules. Les petites sangsues , provenant de ces gros cocons , ont aussi beau- coup plus de force et de vigueur que celles qui proviennent des petits cocons déposés par de jeunes sangsues ou par des sangsues mal nourries. Le dépôt des cocons se fait presque toujours dans la terre humide , à quelques centimètres au-dessus de la sur- face de la flottaison; cependant , il se fait aussi dans des paquets de jones ou de roseaux qu'on laisse flottants , ou dans des petits tas d'herbes aquatiques coupées et laissées à la surface des marais ; dans ce cas encore le cocon est à quelques centimètres au-dessus de la partie mouillée. Pour que les cocons réussissent et viennent à parfaite éclosion , il faut un laps de temps qui varie beaucoup selon la température et le degré de sécheresse et d'humidité auquel ils sont exposés. En général, Féclosion a lieu vers le 40° jour ; j'ai obtenu dans mes bocaux à expérience l’éclosion dès le 35° jour : ilest vrai que la tourbe, qui a la propriété de rester toujours humide par capillarité , a aussi celle de s’échauffer beaucoup au soleil et que cette double propriété la rend excessivement propre à hâter léclosion. D'un autre côté, léclosion peut ètre considérablement retardée , et j'ai trouvé souvent dans mes boîtes coconnières des petites sangsues 44 renfermées dans le cocon encore aux mois de janvier et de février. Je dirai à ce sujet que si les circonstances atmos- phériques ne sont pas favorables à ce que les petites quittent le cocon , elles y restent. J'ai observé aussi qu'elles y attendaient souvent le moment de la crue de l'eau pour en sortir. Ce cocon est pour elles un lieu de refuge , on les voit souvent en sortir et y rentrer. J'eus l'idée , il y a plusieurs années , de mettre à profit toutes les petites expériences que j'avais faites dans mon cabinet sur les cocons. À cet effet, je fis construire de grandes caisses de 2 mètres 33 centimètres de longueur , de 80 centimètres de largeur et de 45 centimètres de hauteur. Ces caisses furent déposées dans la partie du marais le plus à la portée des gardiens; je fis creuser, à une dizaine de centimètres de profondeur , le terrain sur lequel je les fis placer , afin que leur fond, percé de petits trous , fût toujours baigné par l’eau; je fis circon- scrire le lieu où elles étaient placées par un petit fossé et une petite digue , afin de pouvoir retenir les sangsues qui pourraient s'échapper des boîtes et de leur offrir un lieu où elles pussent aller déposer leur cocon. Ces caisses, qui peuvent servir à la conservation des sangsues , furent construites surtout en vue de la reproduction ; voici la disposition intérieure que je leur donnai : Une couche d'argile de 10 centimètres fut étendue sur toute la surface du fond de Ja caisse ; puis, divisant l'in- térieur en trois compartiments, je fis séparer celui du milieu des deux autres par de grosses mottines extraites à la surface d’un marais tourbeux et encore pourvues de 15 leur végétation, qui, depuis, a très-bien continué. L'espace mitoyen , limité par ces deux rangs de gazons , fut laissé libre et recut plus tard l'eau nécessaire à l'humidité de la boite. Les deux autres compartiments furent remplis : 1° par une couche de tourbe fraiche en carreaux ; 2° par une autre couche de tourbe également fraiche , mais réduite en petits morceaux. Ces deux couches ont une épaisseur de 10 centimètres chacune , reste 15 centimètres de vide. Chacune de ces caisses , ainsi disposée , représente au centre un vide de 75 centimètres de largeur : c’est l'image d'un fossé : au fond se trouve de l'argile, au- dessus se trouve de l’eau dans laquelle végètent des chara , des lentilles , du cresson , et qui ont pour mission d'empêcher l’eau de se corrompre. A droite et à gauche sont deux rangs de gazons tourbeux qui , trouvant l'humidité nécessaire, végètent parfaitement et présentent aux sangsues le sol habituel du marais. Aux deux extré- mités de la boîte se trouvent les deux couches de tourbe toujours humides par capillarité. Les carreaux sont espacés de manière à ce que les sangsues puissent déposer leurs cocons entre chacun d'eux , comme dans des galeries. L'eau ne doit jamais dépasser la partie inférieure de cette couche. Avec ces dispositions, mes caisses réunissent toutes les conditions de bien-être que les sangsues peuvent rechercher ; bien que captives , elles n’en sont pas moins en plein air, au milieu d’un marais artificiel où elles nn 46 trouvent , selon leur besoin , de l’eau qui ne se corrompt jamais , un fond argileux , de la tourbe toujours humide et dans laquelle elles se creusent facilement des galeries , enfin un gazon tout-à-fait analogue à celui du marais. Si l’une d'elles devient malade et meurt, elle vient succomber à la surface de l'argile où il est facile de l'apercevoir et de l'enlever. La meilleure preuve que le séjour qu’elles y trouvent leur convient parfaitement, c’est qu'elles s’y habituent promptement et qu'il est à peine nécessaire de les y retenir, les premiers jours, par un procédé très-simple , qui consiste à mettre sur les bords de la caisse une feuille de tôle plombée , qui fait une saillie intérieure de trois à quatre millimètres. L’angle droit que fait cette tôle avec les parois de la caisse est un obstacle suffisant pour les retenir. Les sangsues ainsi parquées déposent leurs cocons dans la tourbe, à quelques centimètres de la surface , puis elles se retirent dans l'argile , où elles trouvent plus d'eau et une température qui leur convient mieux. L'eau doit toujours être maintenue au même niveau , sans cela les cocons seraient exposés à être submergés ; j'obtiens ce résultat en maintenant un niveau permanent dans toutes les parties du marais. On conçoit que si les caisses étaient indépendantes de ce niveau général, on pourrait pratiquer à l'une des parois une ouverture garnie d’une toile métallique qui donnerait issue au trop-plein. Je puis sans crainte déposer trois à quatre mille sangsues dans chacune de ces caisses : toutes y font un ou plusieurs y = 4/ cocons qui s’y trouvent placés dans de très-bonnes con- ditions et à l'abri de tous les animaux et insectes qui en sont friands. Lorsque je suppose que toutes les sangsues ont fait leurs cocons , je puis les reprendre en pèchant dans le compartiment central et les livrer au commerce après avoir eu le profit de la ponte. Si, au contraire , je veux les laisser aller au marais, J’enlève les plaques de tôle plombées et j'ôte les tampons qui bouchent des trous qui laissent communiquer les caisses avec l’eau des marais. Si je m'aperçois d’une mortalité trop forte dans la colonie, je fais enlever les couches de tourbe , avec les cocons , que je mets dans une autre caisse ; puis je visite l'argile et j'enlève les sangsues qui me paraissent malades et celles qui sont mortes. Les cocons peuvent même être replacés et ne souffrent nullement de ce dérangement momentané. Jy joins même très-souvent des cocons trouvés dans le marais, que je suis ainsi bien aise de mettre à l'abri de toute atteinte ; et, chaque année, j'achète aux pêcheurs de nos environs un nombre assez considérable de cocons que je place dans mes boites, où ils éclosent presque tous. Un avantage qu'offrent mes caisses et que je ne dois pas taire est qu'elles n’exigent aucun soin. On y dépose les sangsues sans plus s’en occuper , si ce n’est au moment de les reprendre, ce qui est facile , si on veut les vendre ou leur permettre de s'échapper dans le marais. Quant aux cocons , On n'a pas à s'en occuper. Les petites sang- sues naissent et se répandent à leur guise dans les diverses 48 parties de la caisse, et au printemps suivant on peut facilement leur donner les soins dont je vais maintenant entretenir le lecteur : Lorsqu'au mois d'avril la température s'élève assez pour que les petites sangsues se mettent en mouvement , je fais agiter l’eau dans la partie centrale de mes caisses et jy place aussitôt une petite planchette chargée d’un caillot de sang de veau très-frais. Je recommence jour- nellement cette opération et au bout d’un certain temps J'ai à-peu-près gorgé toutes les sangsues. Ces gorgements sont faits et continués jusqu'aux premiers jours de juin ; à cette époque, je juge que mes petites sangsues , qui se trouvent âgées de huit à dix mois , sont en état d'entrer au marais. J'ouvre alors les trous dont sont percées les parties inférieures des parois de la boite, et mes petites sangsues peuvent facilement s'échapper et vivre comme toutes les autres : elles se trouvent assez fortes pour échapper à leurs ennemis. Abandonnent-elles trop difici- lement la caisse, j'opère alors un déplacement d’eau de bas en haut en introduisant un tuyau de gouttière jusqu’au fond de la caisse , par lequel je verse de l’eau jusqu’à ce qu’elle déborde en entrainant avec elle toutes les sangsues. Les caisses, ainsi lavées et privées de leurs hôtes, peuvent immédiatement servir à recevoir des sangsues- mères, et l'opération recommence comme l’année précé- dente. L'usage de mes caisses donne plusieurs avantages : 1° celui d'y déposer des sangsues-mères au mois de juin 49 et de les avoir sous la main à la fin de l'automne pour les vendre à un prix ordinairement supérieur à celui auquel on les a achetées ; 2° d’avoir une quantité considérable de petites sangsues qui ne vous coûtent rien , que vous pouvez protéger, nourrir et enlever ainsi aux chances les plus nombreuses de leur destruction. Ce système , dont nous nous trouvons très-bien et qui aura , nous n'en doutons pas , de nombreux imitateurs , est pratiqué par nous depuis trois ans. Quelques procédés, qui ont quelque analogie avec les nôtres, ayant été publiés dans ces temps derniers, nous croyons devoir, pour qu’on ne nous accuse pas de plagiat et aussi pour ne pas perdre nos droits de priorité , donner ici copie d’un billet cacheté que nous avons adressé à la Société d'encouragement le 7 juillet 1852 : le dépôt de ce billet a été accepté dans la séance du 14 juillet 1852 par cette Société. BILLET CACHETÉ adresse le 7 juillet 1852 à la Société d'encouragement par le docteur SAUVÉ , secrétaire de la Societé des sciences naturelles de la Charente-Infcrieure : « Le moyen que je propose et que j'emploie en ce » moment pour la reproduction des sangsues , est le » Suivant : » Lo Je fais pêcher dans les marais les sangsues , aux » mois de février, mars, avril, mai et juin ; » 29 Je fais gorger avec le sang des quadrupèdes , en » ayant soin que le gorgement soit modéré ; » 3° Je place ensuite ces sangsues dans des réservoirs,  20 où elles sont mises à l'abri de tous les ennemis qui peuvent les inquiéter , tels que rats, taupes, musa- raignes, canards, ete., ete. Ces réservoirs sont, en outre , disposés de manière à ce que je puisse faire la récolte des cocons , que je puis enlever sans nuire à la ponte de celles qui n’en ont pas encore produit ; » 4° Mis en possession des cocons, Je les fais éclore en prenant toutes les précautions nécessaires pour les soustraire aux influences fâcheuses de l'humidité , du froid, de l'électricité et des animaux et insectes qui les attaquent ; » Je procède à l'éducation des filets que je protège contre toutes les causes de destruction auxquelles ils sont exposés dans les marais où ils naissent habi- tuellement , et , de plus, je les nourris avec des larves d'insectes, des tétards, des grenouilles et mème du sang , et par là j'arrive à les développer très-prompte- ment. Lorsqu'ils sont arrivés à un développement de forces suflisantes, je les mets dans des marais, où je règle la pèche de manière à ne la faire qu’à la fin de l'automne ; j'évite de prendre les sangsues-vaches et les petites, et je peux par ces moyens arriver à une multiplication considérable. Ces procédés, sur lesquels je donnerai plus tard des détails circonstanciés, pourront être imités, et cette industrie pourra se perfectionner au point d'empêcher la France d’être tributaire de l'étranger. » « P. S. Je fais connaître ce système à M. le docteur Ebrad , de Bourg , par une lettre en date de ce jour. » ot Ce billet , écrit il y a quatre ans, prouve de la manière la plus irrécusable que nos procédés nous appartiennent bien réellement. Si nous ne leur avons pas donné plus tôt la publicité, c’est que nous voulions être sûrs de leur eflicacité. Nous n’en avons, du reste, pas fait mystère , et toutes les personnes qui ont visité notre établissement ont recu de nous tous les renseignements qu’elles ont voulu nous demander. Notre but principal, dans toutes les recherches et les expériences que nous avons faites , a été un but scientifique , un but philanthropique. Des ennemis des sangsues. Il ne nous suflit pas d’avoir étudié jusqu'à ce moment tout ce qui convient aux sangsues; il faut aussi connaître ce qui peut leur être nuisible. Elles ont des ennemis qui les dévorent , elles ont des maladies qui les font périr ; on doit donc, dans tout bon système d'éducation de ces annélides , vivement se préoccuper des uns et des autres. Avant de penser à combattre ses ennemis , il est bon de les connaître ; c’est ce que J'ai fait. Ne voulant pas m'en rapporter en cela qu'à des expériences directes faites par moi , j'en rapporterai ici ce que j'ai vu et non ce que j'ai lu. RAT D'EAU. — Tous les auteurs qui ont écrit sur les sangsues ont signalé le rat d’eau comme très-meurtrier pour elles. Me fiant à l'opinion générale, je fais poursuivre à outrance ceux qui se présentent dans mon marais : le fusil, la pâte phosphorée , les engins d'osier mis dans 2 l'eau et les chats, réussissent à les détruire. I m'est arrivé trente fois au moins d'ouvrir l'estomac des rats d’eau tués par l’un ou l’autre de ces moyens, et je n'y ai jamais trouvé trace de sangsues. Le plus souvent et pour ne pas dire toujours , je n’y trouvais que des végétaux broyés et en pâte. Est-ce à dire qu'ils sont inoffensifs ? je suis loin d'en tirer cette conclusion , et J'agis contre eux comme un homme très-peu convaincu de leur innocence ; d'autant plus que j'ai à les accuser d’un crime de lèse-sangsue, bien grand , celui de les dévorer pendant qu'elles sont encore dans les cocons. Je trouve en effet, très-souvent, des cocons ouverts et vides et je me doute fort que ce sont les rats et les musaraignes qui sont les coupables , d'autant plus qu'on voit sur ces cocons détruits les traces évidentes des dents des rongeurs. Les MUSARAIGNES , Sorex fodiens , Sorex daubentonii , sont pour le moins aussi dangereuses que les rats et doivent être poursuivies avec le même soin; on les a vues, dit-on , détruire des réservoirs entiers. (Je n’ai pas été à mème de constater de pareils faits : les musaraignes étant très-rares dans mes marais.) Le HÉRIssON est aussi un grand destructeur de sangsue ; le fait suivant le prouve de la manière la plus péremp- toire : un jour mon chien de chasse me rapporta un tout petit hérisson ; j'eus hâte aussitôt que j'en fus possesseur de le mettre en présence de sangsues ; il en dévora autant que je voulus lui en présenter ; mes essais ne se prolon- gèrent pas, son repas m'eût coûté trop cher. Les caNaRDs. — A la Lêle des plus grands destructeurs 53 de sangsues , 1l faut placer le canard. On en jugera par l'expérience suivante : J'avais une ferme contenant un marais assez étendu produisant naturellement des sang- sues ; les portions de marais les plus voisines de la ferme étaient journellement fréquentées par les canards ; aussi était-il impossible d'y trouver des sangsues , lorsque plus loin on en trouvait abondamment à pêcher. Attribuant la disparition des sangsues à la présence des canards, je priai le fermier de se défaire immédiatement des soixante et quelques canards qu'il avait ; il me fit des objections, prétexta que les palmipèdes ne détruisaient pas les sang- sues. Je voulus le convaincre : je lui dis de prendre un de ses canards , et je le portai, lui présent, dans un fossé où J'avais beaucoup de petites sangsues. Ne voulant pas laisser échapper le canard je l’attachai par les deux ailes ; pendant que je faisais cette opération, arrive une sangsue qui est plus tôt apercue par le canard que par nous, car nous eùmes à peine le temps de la voir passer dans le bec de l'oiseau : celle-ci est au mème instant suivie de dix autres ; au train dont il y allait, la centaine y eül passé en peu d'instants. Je jugeai, dans mes intérêts, que l'expérience était suffisante ; je tuai le canard et j'ouvris immédiatement après son gésier , où je trouvai toutes mes sangsues déjà broyées et presque méconnaissables , tant est rapide la force de digestion de ce palmipède. Le fermier , convaincu , s’'empressa de porter la preuve du délit à sa compagne , la fermière, et la mort des soixante canards fut à l'instant décrétée : ils furent vendus au marché dès le lendemain. 54 De ce fait et de plusieurs autres que je pourrais rapporter ici , il résulte pour moi la conviction que rien n’est plus nuisible aux sangsues que les canards, et que le premier soin des éleveurs doit être de défendre l'accès de leurs marais et réservoirs à ces rapaces et gloutons volatiles. Ce que je viens de dire du canard domestique , je le dirai à plus forte raison du canard sauvage et des autres palmipèdes de ce genre. Aussi le fait rapporté par Puymaurin et consigné dans l'ouvrage de M. Moquin- Tandon me parait très-croyable , tout exagérée que puisse paraître la disparition en vingt-quatre heures de 200,000 sangsues dévorées par des bandes de canards sauvages , qui s'étaient abattus sur un marais peuplé par un paysan de Sologne. L’éleveur devra faire faire une guerre continue aux canards sauvages et éloigner de son voisinage les canards domestiques. La COURTILLIÈRE ou taupe-grillon est un insecte aussi très-redoutable pour l’éleveur. J'ai pu apprécier ce dont elle est capable : J'avais fait creuser un trou dans l'argile et je l'avais rempli de tourbe ; jy avais mis 2,000 sangsues environ pour y déposer leurs cocons ; le plus grand nombre de ces sangsues disparurent sans doute en s’élevant par-dessus les bords du trou, mais les cocons qu’elles avaient déposés restèrent dans la tourbe. A la fin de l'automne, voulant savoir ce qu’étaient devenus ces cocons et les petites sangsues, je fus fort surpris de ne pas en trouver autant que je le supposais. Ha Je trouvai plusieurs courtillières qui avaient établi leur domicile dans ce trou ; j'en pris une , je la mis dans un large flacon avec de la tourbe et des petites sangsues , et je me convainquis , par la disparition de celles-ci, que la courtillière en faisait bonne pâture. Il est difficile de les détruire ; voici pourtant les moyens que l’on a conseillés pour y arriver. On peut les prendre : 1° dans des pots à parois très-lisses, remplis à moitié d'eau et enterrés ; les courtillières qui y tombent ne peuvent plus s’en retirer ; 2° on peut les détruire en bêchant la terre ; 3° après la fauchaison leurs nids apparaissent à la surface de l'herbe : ce sont de petites taupières faites en terre battue et corroyée en rond ; si on soulève l'espèce de calotte qui en résulte, on trouve les œufs et les petites courtillières et on les met dans un pot pour les détruire plus tard ; 4° vers le mois de juin, on peut fouiller la terre dans le voisinage des jeunes plantes que leur état de souffrance indique comme attaquées par la courtillière, on détruit ainsi le nid et les œufs, qui sont d’un blanc jaunàtre et de la grosseur d’un grain de chénevis. L'AULASTOME , sangsue noire , sangsue de cheval, dévore , dit-on , avec avidité les petites sangsues. Cette assertion n’est vraie qu'autant qu'elles sont encore très-jeunes , car plus tard elles attaquent elles- mêmes l’aulastome et la font succomber. (Beich., Réper- toire de pharmacie, &.1x , p. 273.) J'ajouterai que j'ai très-souvent mis des aulastomes dans mes bocaux , dans mes baquets et mème dans mes caisses el je n'ai pas pu les voir dévorer de petites sang- PE M 56 sues. Je crois donc que cet ennemi est beaucoup moins dangereux qu'on n’a voulu le dire. L’AZELLE d’eau douce (Asellus vulgaris Geof, Oniscus aquaticus , etc.) M. Soubeyran a reconnu , par des observations et des expériences répétées, que ce crustacé , analogue au cloporte, dévorait toutes les petites sangsues et il attribue à sa présence , dans les eaux de la Seine et dans les mares qui avoisinent Paris, l’insuccès de toutes les tentatives qu'on a faites pour y élever des sangsues. (Voyez Journal des Connaissances médicales , t. 1V , 1850 , déc., p. 70.) En résumé , nous dirons qu'en ce qui regarde nos bassins en maçonneries , nous y avons réuni toutes les conditions hygiéniques propres à conserver les sangsues ; qu'avec eux on peut, sans beaucoup de soins, utiliser toutes les sangsues qui ont servi à l'usage thérapeutique, soit qu'on les y ait placées après le dégorgement, soit qu’on les y ait mises sans dégorgement préalable ; qu’enfin , ils facilitent la fécondation, la pose des cocons et la nutrition des filets, et qu'avec eux tout établissement hospitalier pourra éviter en tout temps, ou du moins en grande partie , les dépenses occasionnées par l'emploi de ces annélides. Pour nos marais, nous avons suivi à-peu-près les mêmes errements que dans nos bassins : A. — Eaux stagnantes, vivifiées par une végétation active. B. — Niveau d’eau toujours constamment le même. C. — Petits fossés intérieurs très - multipliés pour Jus RS ef J/ favoriser la pèche , d’une part , et pour donner des eaux profondes à côté de celles qui sont étendues en nappe sur le marais. D. — Petites digues très-multipliées qui facilitent la surveillance de chaque partie du marais, permettent de pêcher sans se mouiller, et servent de lieu de repos pour les sangsues et de réceptacle pour les cocons. E. — Végétation permanente à la surface de tous les marais , de toutes les digues , grandes et petites ; plantes marécageuses conservées avec beaucoup de soin dans les fossés. : F. — Divisions nombreuses qui permettent : 1° de nourrir dans les unes et de laisser jeûner dans les autres; 90 de séparer les sangsues selon leur espèce et leur grosseur. G. — Nutrition abondante donnée au moyen du sang chaud non défibriné , du sang en caillot , enfin du sang pris aux veines mêmes de l'animal par l'annélide. Ces trois genres d'alimentation réussissent également bien et leur emploi successif donne des résultats aussi avantageux pour le développement des sangsues qu'économiques pour l'éleveur. H. — Les caisses-marais permettent de parquer sur un espace très-réduit les sangsues prêtes à déposer leur cocon; ces sangsues peuvent être livrées au commerce aussitôt la ponte terminée ou bien être gardées captives dans ces caisses-magasins pour les ventes d'hiver. Les cocons y sont déposés à l'abri de tout danger de 58 sécheresse ou de submersion ; ils s'y trouvent garantis contre les attaques de leurs ennemis. Les filets qu'ils produisent peuvent être nourris facile- ment, puis lâchés dans le marais lorsqu'ils ont la force de résister aux causes de destruction. L — Notre procédé de pêche , grâce aux dispositions du marais, est si simple qu’une femme ou un enfant peut prendre des milliers de sangsues à l'heure sans se mouiller ni les pieds , ni les mains. J. — Beaucoup d’'ennemis attaquent les sangsues dans les différents états par lesquels elles passent : nous en avons fait connaître un grand nombre et indiqué les moyens de les combattre. Notre système d'éducation est complet et les résultats que nous obtenons , et que la Société des sciences natu- relles de la Charente-Inférieure a vérifiés , prouvent surabondamment qu’il est bon, et qu’en le publiant et le vulgarisant on arrivera au but que nous nous étions proposé, celui de faire tomber à très-bas prix cet utile agent qu'emploie la médecine et de le mettre à la portée de tout le monde. La priorité de nos procédés ne saurait nous être con- testée, grâce au paquet cacheté que nous avions remis en dépôt à la Société d'encouragement le 7 juillet 1852. SAUVÉ, D. M. r. RAPPORT COMMISSION NOMMÉE PAR LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES, DANS SA SÉANCE DU 4 JUIN, À l'effet d'examiner l'application faite par M. le docteur Sauvé, de son système d'éducation des sangoues. er isee— La commission composée de MM. Blutel, Brossard , Beltrémieux, Savary, s'est transportée, à l'exception de M. Brossard , absent, dans l'établissement formé par M. le docteur Sauvé pour l'élève des sangsues. La commission , après avoir pris connaissance des moindres détails sur lesquels M. Sauvé a bien voulu appeler son attention , résume ainsi l'opinion qu'elle s’est formée : Le choix de l'emplacement est extrèment convenable ; un ancien marais salant, situé commune de Périgny , près la Rochelle , et longeant le cours d’eau de la Moulinette , qui ne tarit jamais , a paru très-avantageux sous tous les rapports pour l'établissement de réservoirs a UE I 60 destinés à conserver les sangsues et à faciliter leur repro- duction. On sait que ces anciens marais consistent en des bas-fonds , assez étendus , séparés par de très-larges digues , appelées bosses. Chacun de ces bas-fonds a été divisé en plusieurs compartiments , au moyen de petits fossés et dé petites digues, lesquelles permettent de traverser en divers endroits le bassin général, à l'effet d'exercer une surveillance suflisante et de faire la pèche avec facilité. Au moyen d'une vanne, placée en aval de la propriété, on pourrait élever l’eau assez pour inonder le marais ; mais cette vanne n'appartient pas à M. Sauvé : il a voulu s'en rendre indépendant au moyen d’une oria. Profitant des alternatives de hausse et de baisse des eaux , qui se ressentent du flux et du reflux de la mer, il retire à volonté l’eau de ses bassins , à l’aide d’un petit conduit évacuateur. Nous avons été de suite à même de nous convaincre que ces bassins sont déjà remplis d’une multitude innom- brable de sangsues de tous les pays ; il y en a non seule- ment de France, mais d'Algérie, du Levant, de Hongrie, etc. ; il est évident qu’elles se reproduisent toutes par- faitement dans les conditions où elles sont placées , car nous avons vu des filets, des petites et des moyennes appartenant à toutes les variétés. Il est clair qu’on ne peut pas réunir en un seul point une aussi grande quantité de ces animaux , sans s'occuper de les nourrir. M. le docteur Sauvé en trouve le moyen à l’aide du voisinage de la ville , lequel lui permet de faire : } GI prendre du sang à l’abattoir. Ce sang sert à gorger les sangsues. Ce gorgement s'opère de la manière suivante : on va à la pêche des sangsues ; celles qu'on rapporte sont placées dans des baquets, puis dans des sacs, où l’on verse une certaine quantité de sang ; les sangsues s’en abreuvent , se remplissent : alors on les rejette dans les bassins ; on en prend d’autres, et ainsi de suite , jusqu'à ce que toutes les sangsues aient passé par les baquets et par les sacs. Cette opération n’est pas aussi considérable qu'on le croirait d’abord , attendu que les sangsues se laissent prendre facilement : il suflit d’agiter l'eau un peu fortement , elles viennent en masse croyant qu'il s’agit d’une proie ; on les saisit alors , à l’aide d’une espèce de passoire à long manche. On s'assure que toutes les sang- sues ont pris leur repas , quand aucune d’elles ne répond plus à l'appel qui leur est fait, aux endroits où l'on trouble fortement l'eau. Toutefois, une pareille opération , à exécuter pour des millions de ces petits animaux , comme il arrivera bientôt dans l'établissement de M. Sauvé, étonne et effraie l'imagination ; heureusement il n’est pas nécessaire de la répéter souvent : les sangsues sont de petits boas qui, pour digérer, ont besoin d’une année entière. Pour avoir toujours sous la main les moyens d'exécuter à temps cette main-d'œuvre, qui, d'un autre côté, ne pourrait pas toujours occuper les mèmes bras , M. Sauvé a joint à son établissement une exploitation de jardins légumineux ; ces jardins profitent de la noria : créés sur une terre qui a été longtemps imprégnée de sel et qui n'a 62 jamais produit l'espèce de plantes qu'on y cultive , ils donnent des résultats de végétation vraiment étonnants. Après avoir ainsi examiné l’ensemble de l'exploitation, nous avons porté notre attention sur les boîtes , de l'in- vention de M. Sauvé : ce sont des cadres en bois, avee des rebords en zinc dentelé , saillants en dedans et en dehors ; M. Sauvé y place des mottes de la terre du marais et de l’eau ; bien entendu , il y apporte des sang- sues : non seulement elles y vivent très-bien , mais elles déposent dans la terre rapportée des cocons qui éclosent là aussi bien qu'ailleurs et qui trouvent dans cette dispo sition l'avantage d’être à l'abri des ennemis qui les détruisent si souvent dans les conditions ordinaires , en dépit de très-grandes et de très-minutieuses précautions prises pour les en préserver. Nous sommes venus ensuite visiter , dans la cour de la maison d'habitation de M. Sauvé, les bassins en pierre dont il a donné une description détaillée dans son mémoire et nous nous sommes concaincus qu'à l’aide de dispositions bien simples , on peut avoir chez soi des sangsues, non seulement pour son service, mais aussi pour en donner aux malheureux qui en peuvent avoir besoin : les établis- sement hospitaliers , entre autres , trouveront là une précieuse ressource. Différentes personnes ont mis en avant des procédés analogues, mais M. Sauvé s’est assuré la priorité au moyen d’un dépôt cacheté fait, il y a plusieurs années , à la Société d'encouragement. En résumé , il convient d’abord de remercier M. Sauvé des louables efforts qu'il tente pour introduire dans notre on sat rent 63 pays une industrie qui ne s'y trouve nulle part, à notre connaissance , sur une aussi grande échelle ; toutefois , et dans la crainte que nos paroles, justement appro- batives , n'entrainent des imitations qui ne seraient pas raisonnées aussi bien que la été l'entreprise-modèle , nous croyons devoir dire qu'il est prudent d'attendre que M. Sauvé ait complètement achevé cette expérience , qui peut devenir si utile au pays : il en aura de cette facon tout l'honneur avec les dangers, et ceux qui suivront son exemple seront assurés de n'avoir que des actions de grâces à lui rendre. Nous revenons avec plaisir, en finissant , aux éloges que mérite M. Sauvé pour son esprit d'observation et d'invention , comme aussi pour le désintéressement avec lequel il fait connaitre et cherche lui-même à répandre toutes ses méthodes. La Rochelle , le 1° juin 1855. Les membres de la Commission : BLUTEL. BELTRÉMIEUX. SAVARY. ACADÉMIE DES BELLES-LETTRES, SCIENCES ET ARTS DE LA ROCHELLE. EEE —— DEUXIÈME SECTION. — SCIENCES NATURELLES. ! MM. BLUTEL père, Président. DUBOIS , vice-Président. SAUVÉ, Secrétaire. Bureau : ) BELTREMIEUX { Édouard), Conservateur- | urchiviste. pour 1856. D'ORBIGNY , Conservateur-archiviste ho- noraire. BONNIOT, Trésorier. MEMBRES TITULAIRES FONDATEURS : MM. BLUTEL père , directeur des douanes , en retraite. à la Rochelle , rue Fleuriau, n° 3............ 1835 CHEVALLIER, Élie, chef d'institution, à la Ro- ST) CORRE ERA RE EUL TETE 1839 66 MM. SAUVÉ , docteur-médecin , à la Rochelle... .... DROUINEAU , Paul , docteur-médecin , à la Ro- chelle.. cd: SORA RE... us PARENTEAU-DUBEUGNON , juge au tribunal de 1re instance séant à la Rochelle, rue de l’'Escale, CASSAGNAUD , secrétaire en chef de la mairie , conservateur du Muséum, à la Rochelle... NON FONDATEURS : BROssARD , docteur-médecin, directeur du Jardin- Botanique, à la Rochelle, rue Dauphine, 12. DuBois #% , recteur en retraite de l’Académie , à Role." APE ER. ee ce MALLET , docteur-médecin, à la Rochelle, rue de Reel nr, RIRE EE MENUT , employé au bureau de la direction des Douanes, à la Rochelle, rue Chef-de-Ville . CARTIER, pharmacien , à la Rochelle , rue du Ten SET cr VIvIER, Théodore, #, officier supérieur d'artillerie en retraite , rue Bazoges , à la Rochelle... BELTREMIEUX, Édouard, agent de change, à la BonnioT, Léon, conducteur des ponts-et-chaus- sées, à la Rochelle, rue Porte-Neuve...... Savary, %, officier supérieur du génie en retraite, à la Rochelle, rue des Augustins , 9...... GARREAU , Paul, médecin principal, à l'armée d'OFERL, 1/25 Re «lo PCR 1835 1839 MM. MaRCHEGAY, ingénieur des ponts-et-chaussées, à Hhhochelle...:.,-4 40234. 0 EMMERY, X, ancien maire de la ville, membre du Conseil général, à la Rochelle. ........ De VERDON, inspecteur des lignes télégraphiques, Al Rochelle ee ie - ae MICHELIN, propriétaire, à la Rochelle. ........ PAUMIER , ingénieur des ponts-et-chaussées , à AN NOCHOEE A ne donnons ter ARNOUX , professeur de physique au Lycée de la Rochelle, rue Bethléem , 30............. RucKk, inspecteur de l’Académie. ............. MONTAGNE , professeur d'hydrographie de la MARNE. de ee mu MAZURE , professeur de physique et de chimie au MEMBRES AGRÉGÉS FONDATEURS : MM. D'OrBiGny père, médecin militaire en retraite , conservateur honoraire de la Société, à la s LEE! C'ÉMOVT NE SOS AR RE SEA AS BARGIGNAC, membre du Conseil général , juge- de-pait à Cozes..5.......:... use CorTaRD , propriétaire à Touche-au-Roi , près Durour , capitaine d'artillerie en retraite , à LUE lee ORAN RER RE E ES DuRAT , propriétaire, ancien directeur du collége, AP OT diode ME SU Mere MiCHELET , docteur-médecin , à Pons... 67 1896 18395 1839 1835 1835 1839 1839 68 NON FONDATEURS : MM. BraRD , docteur-médecin , à Jonzac,.......... LiPPHARDT , botaniste-jardinier, à Rochefort. . . LEM, Casimir , percepteur des contributions , à Saint-Martin (île de Ré)................ PonsIN , docteur-médecin, maire à Saint-Martin (He de RENAN A ARMES ERREER GAUDINEAU fils , pharmacien, à Saint-Pierre de SOTÉOTES LA Nan Cas 1 DURERNNENEE PERSON vicaire "4'Rochefort:... 2220.27 ROMIEUX, Oscar , enseigne de vaisseau , à Ro- COPIE EURE Sn nee DORE IR eee ROCHE, pharmacien, à Rochefort. .......... CASTEL , pasteur, à Rochefort. .............. ROBERT, négociant, président du tribunal de commerce: à Marennes: ;:::::::1.220... De MESCHINET, économe , professeur d'histoire naturelle , au petit séminaire , à Montlieu.. RULLIER, curé à Montils, par Pons........... Dugois , % , docteur-médecin, chirurgien-major de la marine en retraite, secrétaire de la Société d'agriculture, arts, ete., à Rochefort. M.me GEORGES, au Lin, près St-Jean d’Angély. . BuUTAUD, docteur-médecin des douanes, à Saujon. BESNARD , professeur de rhétorique , au petit séminaire , à Montlieu........ DAME PTE ES BOFFINET père, à Saint-Savinien............. GEAY , médecin des douanes, à la Jarne....... FOLLET, #, chirurgien en chef de la marine en retraite, A Rochefort. 2070 ae BOUTARD, pépiniériste-horticulteur, à la Rochelle. 1836 1837 1841 1842 MM. MM. De SAINT-MATHURIN, propriétaire , à Saint-Jean LÉPINE, docteur-médecin, chirurgien de 1re classe de la marine , à Rochefort............... RACINE , % , colonel d'infanterie en retraite , à Nanerag.: 5h50 Me Hem Dan D'ORBIGNY, Alcide-Neveu, commis de négociant, à la Rochelle, ....., RP PS OR safe DE RAVET, notaire, à Surgères. . ............... L'abbé LACURIE, membre de plusieurs sociétés BOISGIRAUD , doyen en retraite de la Faculté de Toulouse , à Gemozac, par Pons. (Ch.-Inf.). VIVIER fils , Alfred, avocat, à la Rochelle... MAYRAND , employé des ponts-et-chaussées , à la ROCHÉNRE. MEL Re ASS ent A MEMBRES CORRESPONDANTS : BAUGA, docteur-médecin, à Cognac. ......... D'ORBIGNY, Édouard, commis principal des con- tributions indirectes , à Mortagne (Orne)... D'ORBIGNY, Salvator , employé à la Monnaie , à Rouen (Seine-Inférieure). ............... FAURE , médecin en chef de l’armée d'Italie Ed Rome (États-Romains)...... ........... HUBERT , pharmacien , à New-York (États-Unis). LECOQ aîné, négociant , à Cognac (Charente). … 69 1842 1842 1854 1854 1856 1856 1839 1839 70 MM. MOSHAMMER , botaniste , à Munich............ D'ORBIGNY, Alcide, professeur au Muséum, à Paris (Seine): 26 Cut VE GE BAYLE, ingénieur, professeur de paléontologie, à l’école des mines, à Paris (Seine)...,.... ; Coquanp , professeur à la faculté des sciences , à Besaneon’ (Doubs)... ire GRAssET, membre de plusieurs sociétés savantes, A la Charité (Nièvre) LR Nr GALLES , conseiller de préfecture, imprimeur à Wannes/(Morbihan.) A VapeumenTRee CLARET, docteur-médecin, conseiller de préfec- ture à Vannes (Morbihan). ............. TASLÉ , notaire, ancien maire de la ville de Vannes\(Morbihan), tie fes ER ECR BOUSCASssE fils , professeur de génie rural, à la ferme modèle de Grandjouan {| Loire-Infér.). GRATELOUP , docteur - médecin , à Bordeaux (GEO) RP NN Eee Guyor-DucLos, #, colonel du génie en retraite , à Toulon. (Var) 5oecbuss.- 2eme 2: BrOussAIS, François, médecin-major (Algérie). . Dugroca, docteur-médecin , à Barzac (Gironde). MourA, docteur-médecin, à Rio-Janeiro (Brésil). GouGET, chirurgien-major militaire de 1re classe en retraite, à Dole (Jura)................ AULAGNIER, docteur-médecin, ancien directeur de l’hôpital militaire de Barèges , rue Des- cartes, 21, a Paris (Seine)... cu. ITIER , directeur des douanes , à Montpellier (Hérault), 40 md ct seat ER. 1839 1839 MM. DELASTRE, ancien sous-Préfet, propriétaire à Lacour, près Rouillé (Vienne). ........... 1539 LACHRONIQUE , docteur - médecin , chirurgien- major à Paris (Seine}ka.f4:,2. Hat 08, 1839 BLUTEL fils, employé au bureau de la direction des douanes, à Brest (Finistère)... ....,.. 1840 BERTHAUD, professeur de physique et d'histoire naturelle Ras ane ss fi LDOLEt 1540 BROCHANT , docteur-médecin, à Paris (Seine)... 1840 CoRNAY, docteur-médecin, à Paris (Seine)... 1840 CAILLIAUD, naturaliste, conservateur du Muséum, à Nantes {Loire-Inférieure).............. 184 De BARREAU, docteur-médecin, à Rodez (Aveyron) 1840 LESIEUR-DESBRIÈRES , pharmacien , rue Pelletier, GraParis/(Seine)}s5 54:52 ss ti: 2 slt 11840 REY-LACROIX , inspecteur des douanes , à Cette POP en fe Leu es CU 7 7 LA 1840 DuPUY , professeur d'histoire naturelle, au sémi- nuire are) IGers)s. BL en ef. 141 \EGNIER , naturaliste , à Saint-Maixent ! Deux- SENNÉR) ES, 45h Ride 16S AROAUE 1841 HESSE , directeur des vivres de la marine, à Brest (Finisiése)e euh ad. HHAga 1842 MAssÉ , jardinier - botaniste , à Montmorency Seine-ctisRh ti tes ii AUuÉ 1842 BuHOT, officier au GO régiment. ............. 1543 M,lle POEY-DAvanT , propriétaire , à Fontenay (Nadeau nr Ai ACT ER : IS44 GUÉRIN-MENNEVILLE , professeur de zoologie , appliquée à l’agriculture, rue des Beaux- Arts, 4, à Paris (Seine, Sem 2. à. 1S45 72 MM Le marquis De LalZER , naturaliste , ancien colonel, à Chidrac, par Issoire (Puy-de- Dos tin trente SSD AUULULUUÉ DUPrRÉ, professeur de physique et de chimie... De GRESSOT, capitaine d'artillerie. ........... D'HASTREL, # , Capitaine d'artillerie en retraite, peintre, rue Rochechouart, 74, à Paris MANËS , ingénieur en chef des mines en retraite ; à Bordeaux (Gironde)................... LECOQ, président de la Société des sciences natu- relles, conservateur du Muséum, à Clermont (Pure Die). encor LEUR GUILLON, Anatole, employé à Niort (Deux-Sèvres). Le baron D'HOMBRES, Firmas, correspondant de l'Institut, naturaliste, à Alais (Gard)... ... De la PYLAIE, naturaliste, à Paris (Seine)... MoranD, François-Jules, naturaliste, à Vars, par Saint-Amand de Boxe (Charente)... AUCAPITAINE , naturaliste, à Alger. ........... BOUTIGNY, garde-général des eaux et forêts , à Lourdes (Hautes-Pyrénées). ............. LETOURNEUX , juge d'instruction, à Fontenay Dendehe 2. Suns eur ttes De QUATREFAGES, membre de l'Institut, quai de Béthune, 38, à Paris (Seine)... ......... PETIT DE LA SAUSSAIE , chef de division en retraite, rue Neuve des Mathurins , 19, à Pañs (Saint bee, irc Mer ral CONTEJEAN, botaniste, conservateur du Musée ; à Montbéliart (Doubs)... ... 1845 1847 1848 . MM. LÉVESQUE, inspecteur des écoles primaires , à Provins (Seine-et-Marne). .............. : PERSONNAT , Victor, employé des contributions indirectes , à Saint-Flour (Cantal). ....... DESMOULINS , Charles, président de la Société linnéenne, à Bordeaux (Gironde)......... DEsmarTis, docteur - médecin, membre de la Société linnéenne , à Bordeaux (Gironde)... JANVIER, membre de la Société linnéenne , rue Duhà, 48, à Bordeaux (Gironde). ........ GaRNAULT , professeur d'hydrographie, à Brest (FHUBOrE) EE ee sente RAS OR CE na CLAUZURE , docteur - médecin , à Angoulèm (Gharènte). 1 MT A ss DE La SAUSSAIE, X, Recteur de l’Académie , membre de l'Institut, à Poitiers... ....... SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES : Académie impériale du Gard, à Nismes. Académie impériale des sciences, belles - lettres et arts, à Bordeaux (Gironde). Société linnéenne de Bordeaux (Gironde). Société d'agriculture et des sciences, au Puy (Haute-Loire). Société des sciences physiques et naturelles , à Bordeaux (Gironde). Société d'agriculture , sciences et arts, à Meaux ( Seine-et- Marne). Société d'agriculture , sciences et arts, à Angers ( Maine-et- Loire ). Société d'agriculture, sciences et arts, à Mende (Lozère). Société polymathique du Morbihan, à Vannes. Société de statistique, sciences et arts utiles, à Valence (Drôme). Société d’horticulture , à Macon (Saône et Loire). Société de médecine, à Poitiers (Vienne). Société de médecine , à Rennes (Ille-et-Vilaine). Société de médecine, à Besançon (Doubs). Société de médecine , à Chàteau-Gontier (Mayenne). Société des sciences naturelles, à Cherbourg (Calvados). Société des sciences naturelles de la Moselle , à Metz. Société des sciences naturelles, à Rheims (Marne). Société industrielle, ete., d'Angers (Maine-et-Loire). Société d'agriculture , belles- lettres, sciences et arts, à Rochefort (Charente-Inférieure). 3 Fà [TIM MU SÉt M 17 DEC 30 NATERA D ISTOR ACADÉMIE DE LA ROCHELLE. II É TETE — COMPTE-RENDU DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES | PENDANT L'ANNÉE 1856. —"_"p6 6e —— N° 3. LA ROCHELLE, EYPOGRADHIE DE G. MARESCHAL , RUE DE L'ESCALE , 20. 1857 ACADÉMIE DE LA ROCHELLE. RL COMPTE-RENDU DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES PENDANT L'ANNÉE 1856. 2 D QD e—— LA ROCHELLE, TYPOGRAPHIE DE G. MARESCHAL, RUE DE L'ESCALE , 20. 1857 COMPTE - RENDU DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES PENDANT L'ANNÉE 1800. MESSIEURS ; Parmi les travaux auxquels nous avons continué de nous livrer pendant le cours de l'année qui vient de s’écouler , il en est qui ne se produisent pas au dehors et qui ne laissent de trace que dans les procès-verbaux de nos séances et dans notre mémoire : je veux parler de cet examen , que nous avons coutume de faire en com- mun , des questions ayant trait aux sciences naturelles , contenues, soit dans les nombreuses publications périodi- ques que nous recevons , soit dans les annales qui nous sont adressées par des diverses sociétés savantes, avec lesquelles nous sommes en relations , par voie d'échange de nos productions. Ce genre d'occupations a pour nous 4 beaucoup d’attraits et il ne laisse pas que d’avoir aussi des résultats utiles : il nous tient au courant des progrès des sciences ; il ouvre le champ à des discussions où chacun de nous apporte le tribut de ses connaissances , et enfin , il nous prédispose à traiter nous-mêmes des questions, lorsque l’occasion s’en présente. Deux circons- tances importantes nous ont précisément donné lieu, pen- dant l'année 1856, de sortir des limites dans léquelles sont généralement resserrés nos travaux habituels ; la première a été la séance publique de l'académie de la Ro- chelle, dont nous formons une section, qui s’est tenue le > juin, et dans laquelle M. le docteur Sauvé qui la prési- dait, mais que nous revendiquons comme un des membres les plus actifs de notre société des sciences naturelles , dont ilest le secrétaire, a prononcé un discours d’un grand intérêt , et qu’il nous avait préalablement lu dans une de nos séances ; il y a donné une nouvelle preuve de son érudition solide et variée et de l'élégance de son style ; il y a renoué , avec bonheur, la chaine qui lie notre académie actuelle à l’ancienne académie , fondée à la Rochelle en 1732 , et dont il a rappelé les titres glorieux, en citant les noms des Réaumur , Arcère , Dupaty , Seignette, Girard de Villars , la Faille, Richard-des- Herbiers , Barret, Fleuriau de Bellevue, Casimir , D'Orbigny , auxquels elle a dù une partie de son illus- tration. M. Edouard Beltremieux , qui s’est toujours occupé avec un zèle intelligent et soutenu d'études géologi- ques , a lu aussi , à la séance publique , une description des falaises de l'Aunis , dont il nous avait déjà donné communication ; il y a témoigné non seulement de son esprit éminemment gobservateur , mais encore de ses connaissances générales relativement à la science à laquelle se rattache le sujet qu'il a traité. M. Edouard Beltremieux a, depuis , fait imprimer son intéressant mémoire , auquel il a joint des planches qui font saisir , au premier çoup-d’œil , la superposition des couches jurassiques et crétacées composant le terrain qu'il à si bien étudié. La seconde circonstance à laquelle j'ai fait plus haut allusion , c’est le congrès scientifique de France , dont la vingt-troisième session s’est tenue à la Rochelle du 1% au 10 septembre 1856. Notre société des sciences vaturelles s'était sérieusement préoccupée , à l’avanee , de cette solennité ; elle avait consacré plusieurs de ses séances à l'examen attentif de chacune des questions proposées dans le premier paragraphe du programme du congrès , et l'appel qu’elle avait fait à ses membres à ce sujet , soit verbalement dans nos séances , soit par écrit, pour les correspondants , a été entendu : ainsi , M. Manès, ingénieur en chef des mines à Bordeaux , l'un de nos correspondants , s’est chargé de traiter les deux questions suivantes : « 1° Etudes géologiques de la Charente-lnférieure ; » quelles sont ses richesses minérales ? en donner la » statistique. » « 29 La carte géologique de la Charente-Inférieure est- » elle suflisante pour que l’on puisse , à priori , indiquer » les espèces de terrains sur lesquels il serait utile de 6 a le drainage ? Dans > doute , quels moyens , le Gouvernement aurait-il de préparer cette améliora- » tion et d’y disposer les propriétaires ? » M. Manès, qui était plus compétent que qui que ce fût pour traiter ces deux questions , les a résolues d’une manière supérieure, telle au surplus qu'on devait l'atten- dre de l’auteur de l'ouvrage remarquable intitulé : Des- cription physique, géologique et minéralurgique du départe- ment de la Charente-Inférieure , publiée en 1855. M. Mairand a traité la question ainsi conçue : « Rechercher les causes qui ont pu produire les buttes » coquillières de Saint-Michel en l'Herm. » Il a accompli sa tâche de la manière la plus satisfai- sante ; ses observations sont pleines de sagacité , et tout en citant les opinions des savants qui se sont occupés avant lui de ce problème géologique, M. Mairand a exposé ses propres hypothèses , avec une clarté qui naît de sa conviction. M. Vivier a traité la question ainsi formulée : Donner la statistique et le gisement des marnes que » renferme le département de la Charente-Inférieure ; » en faire l'analyse et en déduire les richesses , comme » amendement des terres. » Après avoir présenté des considérations générales sur les avantages que peut offrir à l’agriculture l'emploi intelligent de la marne , M. Vivier a fait connaître les divers lieux du département où il s’en trouve, en s’aidant à cet égard des renseignements fournis par l'ouvrage de M. Manès. Quant aux échantillons des marnes, mention- nées dans ce mémoire , et dont l'analyse a été soigneuse- ment faite par deux membres de notre société, MM. Mazure et Arnoux, professeurs de physique et de chimie au Lycée, ils avaient été envoyés par trois de nos agrégés , M. de Meschinet , professeur d'histoire natu- relle au petit séminaire de Montlieu, M. Butaud , docteur médecin à Saujon, et M. Mairand, alors détaché à Saint- Jean d’Angély , pour le service des ponts-et-chaussées. M. Léon Bonniot a répondu , par un mémoire plein d'intérêt, fruit de ses longues observations sur cet important sujet, à cette question : « Quelles sont les causes et les lois des atterrissements » et envahissements opérés sur nos côtes ? Quelles mo- » difications apportent-ils au port de la Rochelle ? Enfin M. Marchegay , ingénieur des ponts-et-chaus- sées, a traité la question suivante, à laquelle les nombreux travaux qu'il a dirigés, le mettaient parfaitement à mème de répondre avec connaissance de cause : « L'expérience ayant démontré que les pouzzolanes » artificielles ne conservent pas longtemps leur cohésion » et leur dureté dans les constructions sous-marines , » a-t-on fait quelques essais pour fabriquer , avec des » matières communes , des bétons capables de résister » à l'action de la mer, soit à l’état de repos , soit à » l’état de grande agitation ? Ainsi, vous le voyez, Messieurs, cette espérance , exprimée dans le précédent compte-rendu de nos tra- vaux , que la présence du congrès scientifique de France dans notre ville stimulerait activité et l’amour-propre de chacun de nous, n’a pas été déçue, et l’année 1856 pourra être comptée au nombre de celles où nous aurons fourni un plus large tribut à la publicité par nos travaux; mais une bien triste circonstance est venue affliger notre société pendant cette même année ; nous avons eu malheureusement à y déplorer une perte dans la per- sonne de M. D'Orbigny père dont la longue et honorable existence fut presque entièrement consacrée aux siences naturelles. M. le docteur Sauvé, se faisant l'interprète de nos justes sentiments de regrets , a prononcé sur la tombe de cet estimable savant les paroles suivantes, que je crois devoir reproduire ici textuellement comme un hommage bien mérité rendu à sa mémoire : MESSIEURS , « Avant de laisser fermer cette tombe où repose l'hom- me utile que vous êtes venus accompagner à sa dernière demeure , je dois, à beaucoup de titres, faire entendre ici des paroles d’adieu , et retracer à » grands traits la vie si pleine et si bien occupée de Charles-Marie-Dessalines D'Orbigny. Y LA L2 » Né en 1770 , un navire fut son berceau ; sa mère lui donna le jour en faisant la traversée d'Amérique » en France. Cette circonstance a paru , pendant sa Jon- » gue carrière , influer sur son existence , qu'il a passée, LA POP met is: tit 9 presque tout entière, sur la mer ou dans les ports. Dès l'âge de quinze ans , nous le voyons monter , comme volontaire d'honneur , faisant fonctions de chirurgien, sur la frégate l'Arie! , puis sur le vaisseau le Réfléchi. Rentré dans les hôpitaux de Brest, après deux an- nées de service à bord , il y resta pendant deux autres années , en qualité de chirurgien aide-major , continua son service actif , tantôt sur la mer , tantôt dans leg hôpitaux de la marine de Brest , de Lorient, de Paimbœuf , de manière à mériter un avancement rapide ; aussi le voyons-nous de simple volontaire qu'il était parti en 1785, arrivé en l'an XI (1803) au grade élevé de médecin de première classe dans l’armée expéditionpaire d'Irlande ; l'année suivante , il fut envoyé en qualité de médecin principal pour inspecter les hôpitaux des prisonniers de guerre francais en Angleterre. » Une carrière qu’il parcourait avec tant d'éclat aurait dà le retenir ; il n’en fut rien ; et malgré ses douze années de services très-actifs, il se retira dans la vie civile , où il put se livrer avec toute facilité à l'étude des sciences naturelles , vers lesquelles il se trouvait invinciblement entrainé, sans négliger pour cela l’'étuce et la pratique de la médecine qu’il exerça toujours avec dévouement et désintéressement. » Il se maria en 1799 , et eut le bonheur d'élever une nombreuse famille : ses fils , guidés par son exemple et ses conseils , occupent aujourd'hui dans les sciences naturelles des postes élevés , qu'ils doivent aux per- {0 sévérantes études , aux infatigables efforts et aux nombreux travaux qu'ils ont faits. » Le nom de D'Orbigny est un nom célèbre et à juste titre dans les sciences ; la part de célébrité apportée par les fils , est sans doute supérieure à æelle fournie par le père ; cependant , combien est grande celle de celui qui sut se former tout seul à l'étude des siences naturelles ; qui toujours éloigné du grand centre des lumières , se créa les collections les plus variées et les plus nombreuses , pour s’aider dans ses recherches ; qui correspondait avec les savants de France et de l'étranger ; qui se fit, par ses nombreux travaux, asso- cier aux sociétés les plus savantes de France et des iles Britanniques ; qui répandit partout où il se trouva, et surtout au milieu des siens , le feu sacré dont il était animé; qui passa presque toute sa longue vie , tantôt à fouiller la terre pour en étudier la struc- ture ou en extraire les fossiles et les minéraux , tantôt à explorer la mer et son rivage , pour lui surprendre ses mystères et rechercher ses hôtes nombreux, tantôt enfin à parcourir les plaines et les bois pour y récolter des fleurs et des végétaux de toutes sortes, ou pour y saisir l’insecte léger ou le reptile dangereux ! D'Orbigny, ta vaste intelligence voulait tout apprendre, tout connaître ; ta passion dominante était l'étude ; tu y consacrais tous tes instants ; ta mémoire prodi- gieuse étonnait avec raison tes collègues et les nom- breux visiteurs de tes riches collections ; mais le cercle que tu L’étais tracé était trop vaste ; si , moins Il jaloux de tout embrasser , tu eusses spécialisé davan- tage , si tu eusses fait ce cercle plus étroit, tu te serais acquis encore plus de gloire et de célébrité ! » Membre d’une cinquantaine de sociétés savantes, littérairesouartistiques, D'Orbiguy a publié une foule de travaux sur les sujets les plus variés, ce qui prouve l'étendue et la diversité de ses connaissanes. Poëte, musicien, médecin, naturaliste , agriculteur, il était à lui seul toute une encyclopédie ; aussi, son nom se trouve-t-il figurer honorablement parmi les membres de l’ancienne académie de la Rochelle et parmi ceux de trois des sections dont la nouvelle se compose. » La société impériale des sciences naturelles de la Charente-Inférieure, dont je suis ici plus particulière- ment l'organe , lui doit un Juste tribut d’éloges et de reconnaissance. Il fut un de ses premiers fondateurs , travailla activement à la création de son musée dépar- temental, qu'il enrichit de très-nomhreux et très- importants objets ; ilfut par son assiduité aux séances et par son savoir , un de ses membres les plus utiles ; malheureusement , les infirmités, inséparables des années, étaient venues depuis trop longtemps nous pri- ver de son utile concours ; nous ressentions vivement le vide qu'il avait laissé parmi nous , nous le ressen- tirons bien plus encore maintenant que nous ne pou- vons plus aller le consulter. » La société de médecine perd en lui un de ses membres honoraires et un de ses fondateurs. » Je manquerais à mon devoir de Président &e cette » société , si je n’exprimais ici , en son nom, les regrets » que nous cause cette séparation qui , toute prévue » qu’elle était, n’en est pas moins pénible. » La carrière médicale de D’Orbigny a été ce qu'elle » est pour le plus grand nombre des médecins , une » carrière de dévouement et d’abnégation. Il ne laisse » à ses enfants pour tout héritage que son nom. « Adieu , collègue regretté ; ta vie laborieuse , quel- » que longue qu’elle ait été , quelque bien remplie que » tu l’aies faite , n’a pu te donner les jouissances de » l’opulence; mais tu as connu, plus que personne, celles » beaucoup plus douces que donnent l'étude et le bien » que l’on fait aux hommes. » Nous avons recu , pendant le courant de l’année 1856, comme membres titulaires : Monseigneur Landriot , évêque de la Rochelle et de Saintes ; M. Ruck , inspec- teur d'académie; M. Montagne, professeur d'hydrogra- phie; M. Mazure, professeur de physique et de chimie, au Lycée, et M. Fradin de Belläbre, juge de paix ; com- me membres agrégés : M. Henri Mairand , employé des ponts-et-chaussées ; M. Alfred Vivier , avocat, et M. Boubier , docteur en médecine , à Chéray (Ile-d’Oleron) ; comme membres correspondants : M. de la Saussaye , membre de l'Institut , recteur de l'académie de Lyon ; M. Maillard, pasteur protestant, à la Mothe Sainte- Héraye , et M. le Gall , conseiller à la cour impériale de Rennes. 13 Nous avons vu passer avec regret , par changement de sa résidence , M. Paumier , ingénieur des ponts-et- chaussées, de la classe des titulaires dans celle des corres- pondants. Notre musée , dont notre but constant est de chercher à compléter , autant que possible , les collections en objets provenant exclusivement du département , s’est encore eurichi , cette année , d’un certain nombre de mammi- fères , d'oiseaux , d'insectes et de plantes, qui nous manquaient. Suivant l'usage adopté par notre société, nous avons effectué , dans le mois de septembre dernier , une course d'histoire naturelle ; elle a eu lieu dans la partie de notre arrondissement comprise entre les communes de Nuaillé, Vérines, Saint-Médard, Saint-Christophe et Virson ; elle n'a pas été infructueuse au point de vue de la géologie, de l’entomologie et de la botanique. Les résultats des observations météorologiques , faites à la Rochelle par MM. les ingénieurs des ponts-et-chaus- sées et les professeurs de physique du Lycée, ont été remis , chaque mois , à une commission formée dans le sein de notre société et chargée de réunir tous les docu- ments qu’elle pourra se procurer sur les diverses circons- tances atmosphériques de notre localité. Nos archives se sont accrues non seulement des publi- cations périodiques auxquelles nous sommes abonnés , telles que les comptes-rendus hebdomadaires des séances de l'académie des sciences, les annales des sciences naturelles , la revue des sociétés savantes , l'annuaire 14 de la société météorologique de France et le journal l'Institut , mais encore des ouvrages suivants qui nous ont été adressés : Annales de la société académique du Gard ; Mémoires de la société des sciences de Cherbourg ; Note sur le loup , ses races ou variétés , dans le département de la Vienne , par M. Mauduyt ; Énumération des plantes vasculaires des environs de Montbéliard , par M. Contejean ; Bulletin de la société industrielle d'Angers ; Voyage d'exploration sur le littoral de la France et de l'Italie , par M. Coste , membre de l'Institut ; Recherches géogéniques , par M. Quiet ; Travaux de la société d'agriculture , des belles lettres, sciences et arts de Rochefort ; Mémoires de la société d'agriculture du département de la Marne ; Annales de l'académie de la Rochelle ; Annales de la société d'agriculture, sciences et arts de la Lozère ; Description des falaises de l'Aunis, pas M. Beltre- mieux ; Journal local d'agriculture de la Charente , par M. Clauzure ; Cosmos (8e volume), donné par M. Blutel , président de la société des sciences naturelles de la Rochelle ; ES PE RE SR RE 15 Rapport (manuscrit) sur une excursion botanique faite dans la forêt de Benon , par M. Chevalier , membre de notre Société ; Mémoires malacologiques ; discours d'ouverture de l'école forestière de M. Ivoy ; rapport sur le congrès scientifique de 1853 ; rectification des noms génériques, par M. Charles des Moulins. Moyens de réparer les ravages causés par les inonda- tions , par M. Lemoll ; Bulletin semestriel de la société des sciences , belles- lettres et arts de Toulon ; Note sur les maladies des végétaux , par M. Victor Chatel ; Mémoire sur les mines de l'empire d'Autriche ; Congrès scientifique de France (22° session) ; Histoire du siège de la Rochelle en 1573 , traduite du latin de Philippe Cauriana ; Observations sur les oursins perforants de Breta- gne et les Pholades , par M. Caillaud , directeur-conser- vateur du musée d'histoire naturelle de Nantes ; Flore de l'ouest, par M. Lloyd. Note sur une pétrification découverte en Touraine , par M. Charles des Moulins ; Ici se termine , Messieurs , le compte-rendu des tra- vaux de notre société des sciences naturelles , pendant l’année 1856, dont vous m'aviez particulièrement chargé, 16 à défaut de notre honorable secrétaire , M. le docteur Sauvé , auquel ses nombreuses oceupations n’ont pas permis , dans ce moment , de faire ce rapport. Cet exposé formera , à lui seul, le modeste tribut que notre section apportera , cette année , aux annales de l'académie des belles-lettres , sciences et arts de la Rochelle ; nous éprouvons le regret que notre situation financière ne nous permette pas d'y insérer des mé- moires , rédigés par des membres de notre section , et qui nous avaient paru mériter d'être livrés à l'impres- sion. A la Rochelle , le 24 janvier 1857. Th. VIVIER , Officier supérieur d'artillerie en retraite. ACADÉMIE DES BELLES LETTRES, SCIENCES ET ARTS DE LA HOCHELLE. Deuxiéme section. — Sciences naturelles. MM. Blutel, père, Président. Dubois , vice-Président. Sauvé , Secrétaire. Beltremieux , Edouard , Conserva- teur-Archiviste. Bonniot , Léon , Trésorier Bureau pour 1857. Membres titulaires fondateurs. MM. Blutel père, directeur des Douanes , en retraite 1835 Chevalier , Elie , chef d'institution............ 1355 Sauvé , docteur-médecin ................... 1835 Drouineau , Paul , docteur-médecin.......... 1839 Parenteau Dubeugnon, Pérsident du tribunal civil. 1835 Cassagnaud , Secrétaire en chef de la Mairie... 1835 18 Non fondateurs. MM. Brossard , docteur-médecin................,. Dubois # , recteur d'Académie , en retraite... Mallet , docteur-médecin. .........,........ Menut, employé au bureau de la direction des Dotatese LR UE, NAS ER 4 Carter, RoArmaEien +... . 222-0202 Vivier, Théodore, O0. # , officier supérieur d'Artil- lérie: en réa. | ie Gus LR de à dy Beltremieux , Edouard , agent-de-change. . Bonniot, Léon , conducteur des Ponts-et-chaus- A RARE: AE Mr D ES CYCLE Savary, O. % , officier supérieur du Génie , en CRE NT Le ENS A Garreau, Paul, #%, médecin-principal. . ...... Marchegay, Emile , #, ingénieur des Ponts-et- CHAUSSERSS LAMPE ETES PRE : Emmery, % , ancien Maire de la ville, Re du onse PÉTER AG 0 URAUEr Verdon (de), inspecteur des lignes télégraphiques. Michelin S'propriétaiue ee HS ee Arnoux , professeur de physique , au Lycée... Ruck , inspecteur de l'Académie............. Monseigneur Landriot , évêque de la Rochelle et deiSaintes:."HMURERSERNnn ROLE AT Montagne , professeur d’hydrographie.. ....... Mazure , professeur de physique et de chimie au 1837 1839 1839 19 Membres agrégés fondateurs. MM. Bargignac, membre du Conseil général , juge de paix à Cozes....,...................... 1835 Cotard , propriétaire à Touche-au-Roi , près POS ER EE a ser eur elle 1833 Dufour , capitaine d’Artillerie , en retraite , à NE hop dt Le A GS GATE 1835 Durat, propriétaire, ancien directeur du Collége, PONS SNA AAPORENMENONNR EE 18395 Michelet , docteur-médecin , à Pons......... 1835 Non fondateurs. Brard , docteur-médecin , Jonzac............ 1836 Lipphardt , botaniste-jardinier , à Rochefort... 1837 Lem , Casimir, percepteur des contributions à Saint-Martin (île de Ré)................. 1337 Ponsin , docteur-médecin , à Saint-Martin (ile 5 A EC PNR PE Er MUC CO CU 1837 Gaudineau fils , pharmacien , à Saint-Pierre de SES LL. De END LORS 1838 Person , vicaire , à Rochefort............... 1839 Romieux, Oscar, enseigne de vaisseau , à Roche- EE RP ER A MR RU 1839 Roche , pharmacien , à Rochefort............ 1839 Castel , pasteur protestant , Rochefort. ....... 1839 Robert , négociant , à Marennes............. 1835 Meschinet (de), professeur d'histoire naturelle au petit séminaire , à Montlieu............... 1835 Rullier , curé à Montils , près Pons.......... 1839 20 MM. Dubois, # , docteur-médecin , chirurgien-major de la Marine, en retraite, à Rochefort. ..... Georges (Mme), au Lin , près Saint-Jean d'Angély. Butaud , docteur-médeein à Saujon.......... Besnard , professeur de rhétorique , au petit séminaire , à Montlieu....... RE TS Boffinet père , à Saint-Savinien.............. Geay , médecin des Douanes , à Lajarne....... Follet, % , Chirurgien en chef de la Marine , en retraite , ARochefort. ....... ....:...14... Boutard, pépiniériste horticulteur , à la Rochelle. Mathurin (de Saint), propriétaire à Saint-Jean Lépine , docteur-médecin , chirurgien de {re classe de la Marine , à Rochefort.......... Racine, C. #%, Colonel d'infanterie en retraite , n'Nanerasst euh, menant es). et D'Orbigny, Alcide , commis de négociant , à la Hvehoes LES: ds AU ATRAMNN ee Ravef:, nofuire ; à DUIBEIES:. rss mPes L'Abbé Lacurie , membre de plusieurs sociétés savantes à unies: 2327 TERRES Fraigneau , curé , à Meursac...:.......1..... Laporte fils , employé de la Marine, à Rochefort. Boisgiraud , doyen en retraite de la faculté de Toulouse , à Gemozac , près Pons.......... Vivier , Alfred , avocat à la Rochelle......... Mairand , employé des Ponts-et-chaussées , à la ROCReNer LR. APRES. NE Bouhier, docteur-médecin, à Chéray, île d'Oleron. 1859 1839 1840 1856 1856 Membres correspondants. MM. Bauga , docteur-médecin , à Cognac.:........ 1839 D'Orbigny , Edouard, commis principal des con- tributions indirectes , à Mortagne (Orne)... 1835 D'Orbigny , Salvator , employé à la monnaie , à ROUEN LEE SERRES ART ee 1839 Faure, médecin principal à l'hôtel des Invalides, AUPATIS SUD ARMES 1 MAL GUNE 1, AR 1839 Hubert , pharmacien , à New-York (Etats-Unis). 1835 Lecoq aîné, négociant, à Cognac............. 1835 Moshammer , botaniste , Munich. ...... ..4.) 1839 Bayle , ingénieur des Mines , à Paris. ......... 1835 Coquand , professeur à la faculté des sciences , à Besancon: ::..2 007 RMI QRRNX . 1839 Grasset, membres de plusieurs sociétés savantes, à la Charité-sur-Loire: : .:/:,:1.:..1:.23 1836 Galles , ancien conseiller de Préfecture , à Van- RES PME CETTE MARTIN, HUE 1836 D'Orbigny, Alcide , professeur au Muséum d’his- toire naturelle , à Paris. ............:::. 1836 Claret, docteur-médecin, conseiller de Préfecture, à VanNES 2 OR ENNEMI TE CRE 1836 Taslé , notaire, ancien Maire de la ville de VOS NUMIER RAR TER IT Ga 1836 Bouscasse , Jules , professeur de génie rural à la ferme-modèle de Grandjouan............. 1836 Grateloup , docteur-médeein , à Bordeaux... .. 1837 Guyol-Duclos, C. # , Colonel du Génie en retraite, x’ Toulons ss =, LL siens HR 1837 Broussais, François, médecin-major, en Algérie. 1838 22 MM. Dubroca , docteur-médecin à Barrac (Gironde)... Gouget, chirurgien-major de fre classe, en retraite , à Dôle-(Jura).:.::.......:..,...: Aulagnier , docteur médecin , à Paris.... .... ltier, directeur des douanes, à Montpellier. . . . Delastre , ancien sous-Préfet , propriétaire à Hour { Vienne)... eue due een Lachronique , médecin-major de 1re classe... Blutel fils , employé au bureau de la direction des Danames à Brest : . Returns Bertrand , professeur de physique. ........... Brochand , docteur-médecin à Paris...... ve Cornay , docteur-médecin à Paris............ Caillaud , directeur conservateur du Musée d’his- toire naturelle , à Nantes................ Barreau (de) , docteur-médecin , à Rodez... ... Lesieur des Brières, pharmacien à Paris... ..... Rey-Lacroix , inspecteur des Douanes , à Cette. Dupuy , professeur d'histoire paturelle, au sémi- Mare a AMche déedaun SMaUE seraient: Régnier , naturaliste , à Saint-Maixent ( Deux- St ot céHiionbe: Ca bent rs Made Hesse , directeur des vivres de la Marine , à Pnést.&l Ah en ONE 7: HAROSTLNRS Massé , jardinier-botaniste , à Montmorency... Buhot , officier au 60° régiment d'infanterie... Poey-d’Avant (Mlle), propriétaire à Fontenay, (Vendée) "er. rhcminenet fire MOV Guérin-Menneville, professeur de zoologie, à Paris Laizer (le marquis de) , naturaliste , ancien colo- el , à Chidrac , par Issoire............, .1838 1839 1839 1839 1839 1839 1846 1840 1840 1840 1840 1840 1840 1840 1841 1841 1842 1842 1843 1844 MM. Dupré , professeur de physique. ............. Gressot (de) , capitaine d’Artillerie. . ......... Hastrel (d'), capitaine d’Artillerie en retraite , perntret la Paris AMEN, 0 Manès, ingénieur en chef des mines, en retraite, À DOAOAUR AR ee de ce ee, | AS Lecoq , Président de la société des sciences na- inrelles "as 0lermont.. 207.7. Men Guillon , Anatole, employé , à Niort (Deux- Se) POP RS De RASE DER Pylaie (de la), naturaliste, à Paris. ........... Moraud , naturaliste, à Vars , par Saint-Amand de Boxe (Charente). :..:2.%.4.......... Aucapitaine, naturaliste, à PT ARNO Boutigny, garde-général des eaux-et-forêts , à ouest meer te DNA DA (WNEHDUE) PSS RS RSR ee Quatrefages (de), membre de l'institut , à Paris. Petit de la Saussaie, chef de Division en retraite, APATISE .C ST CRE ORAN Contejean , botaniste , à Montbéliard (Doubs)... Lévèque, inspecteur des écoles primaires, à Provins Paumier , ingénieur des Ponts-et-chaussées , au ANSE, PEER TOR AR NA, LS Personnat , employé des contributions indirectes, due RNA Des Moulins , Charles , Président de la société Linnéenne à Bordeaux.................. Des Martins , docteur-médecin , à Bordeaux 1854 1854 24 ; MM. Janvier , membre de la société Linnéenne , à Bordeaux. .... dal ee DR cts trcaratfh 1854 Garnault , professeur d'hydrographie , à Brest.. 1845 Clauzure , docteur-médecin, à Angoulème...... 18595 Saussaie (de la), membre de l'Institut , recteur de l’Académie de Lyon.................. 1856 Maillard , pasteur protestant , à la Motte Saint- Hérayes «2: MES 5-2 dr DUR PA Te 215 2 1856 Legall, conseiller à la cour impériale, à Rennes. 1856 ADDRESS PAPA TS BRITIS E] | MUSEUM | 17 SEP 50 | NATURAL 1 HISTORY. fe BRITISH MÜSEUM 17, SEP 30 NAT TURAL EL HISTORY. Denis À : CN SNS 7 _ me D à À. 34 een + ve 3! Lé