ANNALES SOIENCE AGRONOMIQUE FRANÇAISE ET ÉTRANGÈRE Comité de rédaction des Annales. Rédacteur en chef : L. GRANDEAU, directeur de la Station agronomique de l'Est. U. Gayon, directeur de la Station agronomique de Bordeaux. Guinon, directeur honoraire de la Sta- tion agronomique de Châteauroux. Margottet, recteur de l'Académie de Lille. Th. Schlæsing, de l’Institut, professeur à l'Institut national agronomique. E. Risler, directeur de l’Institut na- tional agronomique. L. Mangin, docteur ès sciences, pro- fesseur au lycée Louis-le-Grand. A. Müntz, professeur à l'Institut na- tional agronomique. ; A. Ronna, membre du Conseil supé- rieur de l'agriculture. Ed. Henry, professeur à l'École na- tionale forestière. E. Reuss, inspecteur des forèts à Fontainebleau. Correspondants des Annales pour les colonies et l'étranger. COLONIES FRANÇAISES. H. Lecomte, docteur ès sciences, pro- fesseur au lycée Saint-Louis. ALLEMAGNE. L. Ebermayer, professeur à l'Univer- sité de Munich. J. Kônig, directeur de la Station agro- nomique de Münster. Fr. Nobbe, directeur de la Station agronomique de Tharand. Tollens, professeur à l'Université de Gôltingen. ANGLETERRE. R. Warington, chimiste du laboraloire de Rothamsted. - : Ed. Kinch, professeur de chimie agri- coie au collège royal d'agriculture de Cirencester. BELGIQUE. A. Petermann, directeur de la Station agronomique de l'Etat (Gembloux). CANADA. Dr 0. Trudel, à Oltava. ÉCOSSE. T. Jamieson, directeur de la Station agronomique d’'Aberdeen. ESPAGNE ET PORTUGAL. Joâo Motta dâ Prego, à Lisbonne. ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE. E. W. Hilgard, professeur à l'Univer- sité de Berkeley (Californie). HOLLANDE. A. Mayer, directeur de la Station agro- nomique de Wageningen. ITALIE. A. Cossa, professeur de chimie à l'É- cole d'application des ingénieurs, à Turin. NORWÈGE ET SUÈDE. Dr Al. Atterberg, directeur de la Sta- tion agronomique et d'essais de se- mences de Kalmar. SUISSE. E. Schultze, directeur du laboratoire es de l'Ecole polytech- nique de Zurich. RUSSIE. Thoms, directeur de la Station agro- nomique de Riga. Noïa.— Tous les ouvrages adressés franco à La Rédaction seront annoncés dans Le premier fascicule qui paraîtra après leur arrivée. Il sera, en outre, publié, s'il y a lieu, une analyse des ouvrages dont la spécialité rentre dans Le cadre des Annales (chimie, physique, géologie, minéralogie, physiologie végétale et animale, agriculture, sylviculture, technologie, etc.). Toul ce qui concerne la rédaction des Annales de la Science agronomique francaise et étrangère (manuscrits, épreuves, correspondance, etc.) devra étre adressé franco à M. L. Grandeau, rédacteur en chef, 48, rue de Lille, à Paris, Cr ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE FRANÇAISE ET ÉTRANGÈRE ORGANE DES STATIONS AGRONOMIQUES ET DES LAPORATOIRES AGRICOLES PUBLIÉES Sous les auspices du Ministère de l'Agriculture PAR PFOtRES NC EUAN'D'E' AU DIRECTEUR DE LA STATION AGRONOMIQUE DE L'EST MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGRICULTURE DE FRANCE RÉDACTEUR EN CHEF DU « JOURNAL D'AGRICULTURE PRATIQUE » PROFESSEUR AU CONSERVATOIRE NATIONAL DES ARTS ET MÉTIERS INSPECTEUR GÉNÉRAL DES STATIONS AGRONOMIQUES VICE-PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ENCOURAGEMENT A L'AGRICULTURE MEMBRE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AGRICULTURE De SÉRIE — QUATRIÈME ANNÉE — 14898 Tome Il. Avec figures dans le texte. BERGER-LEVRAULT ET Ci, LIBRAIRES-ÉDITEURS PARIS | NANCY 5, RUE DES BEAUX-ARTS | 18, RUE DES GLACIS 1898 ÉTUDES SUR LA VINIFICATION DANS LE CANTON DE NEUCHATEL RAA TU ES EAN D EX NME NEED AN IG ES DIE ESIONT PAR M. Eugène ROUSSEAUX INGÉNIEUR AGRONOME PRÉPARATEUR A L'INSTITUT NATIONAL AGRONOMIQUE ——1-0 04 O o— INTRODUCTION Toute amélioration dans la fabrication du vin doit reposer, non sur de vagues appréciations, mais sur des bases précises et scienti- fiques. L'on aurait tort de croire qu'il suffit que des pratiques aient la consécration des siècles, pour que toujours elles soient justifiées et pour qu’elles doivent être indéfiniment conservées. S'il en est quelques-unes qui ont plus ou moins leur raison d’être et qui peuvent se justifier par les principes de la science moderne, bien plus nombreuses sont celles que des préjugés seuls ont intro- duites et que l’usage s’est ensuite chargé de perpétuer ; celles-ci évidemment sont susceptibles de diverses améliorations. Cependant, beaucoup de vignerons semblent trop vouloir rester fidèles à ces vieilles méthodes de vinification que leur ont transmises ANN. SCIENCE AGYON. — 2€ SÉRIE, — 1898. — 11. Î 2 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. leurs ancètres et sont souvent rebelles à toute idée de progrès ; nous l’avons maintes fois constaté. Ils objectent que ces méthodes donnaient d'excellents résultats, que les vins étaient toujours d’une qualité irréprochable et qu’on n’entendait jamais parler autrefois de toutes ces maladies qui les atteignent si fréquemment aujour- d’hui. Il n’en est rien et toujours il y à eu des vins malades. On ne pour- rait mieux s’en convaincre qu’en consultant les auteurs des premiers siècles, Pline tout particulièrement, dont les écrits attestent à plu- sieurs reprises que ces maladies des vins ont été reconnues dès la plus haute antiquité, que l’empirisme avait tout lenté pour les pré- venir etindiqué de nombreux remèdes, qui prouvent que cette ques- tion avait sérieusement préoccupé les anciens. Mais, sans remonter aussi loin, certains viticulteurs nous ont assuré avoir constaté autrefois dés vins malades, même des années les plus renommées. | Si l’on à une tendance à croire que les vins se faisaient bien naguère el se conservaient de même, il faut se rendre compte que la production en était moins abondante et que, par suite, les mala- dies n'embrassaient pas une aussi vaste échelle, qu’on y prêtait une moindre attention, et aussi qu’on se communiquait beaucoup moins qu'aujourd'hui les accidents qui pouvaient survenir ; et ils ont dû être nombreux les vignerons, possesseurs de bouteilles de vins gras ou amers, qui se sont bien gardés d'annoncer la chose dans le cercle de leurs relations ou de leur clientèle, désireux de ne pas compromellre la réputation de leurs caves, cela par un sentiment très légitime d'intérêt autant que d’amour-propre. Quoi qu'il en soit, qu’on en accuse les traitements auxquels la vigne est soumise pour la préserver des maladies qui s’acharnent sur elle, qu’on en accuse ces maladies elles-mêmes, ou l'épuisement du sol et l'insuffisance des fumures, ou les intempéries, ou maintes autres causes encore, que souvent il ne dépend pas de nous de pou- voir modifier au mieux de nos intérêts, il n’en est pas moins vrai que les vins sont fréquemment d’une qualité défectueuse et d’une conservation mal assurée .et qu'il y a lieu d’y porter remède. Ces pratiques de vinification, enfin, ne laissent-elles pas à désirer, n’ont- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 3 elles pas besoin d’être étudiées de plus près, et ne seraient-elles pas susceptibles de modifications? C’est ce qu’a pensé l’honorable compagnie des Vignerons de Neu- châtel, dont le but a toujours été de chercher à obtenir une meilleure culture et une meilleure vinification, et c’est dans cet esprit de haute initiative qu’elle m'a prié de venir passer dans la région l’époque des vendanges, pour y recueillir les documents d’où pourraient résulter, à cet égard, diverses améliorations. Il faut, en effet, se pénétrer de ce principe que c’est une bonne vinification qui doit, avant tout, contribuer à assurer la conservation des vins. Je dois dire que je me suis tenu sur le terrain des recherches et des observations. J'ai voulu d’abord examiner les méthodes employées, sans cher- cher à les modifier ; il était indispensable qu’il en fût ainsi, afin qu’il me füt possible de juger de leur valeur ou des inconvénients qu’elles pouvaient présenter, de les discuter et d'étudier les modifications qu'il conviendrait d’y apporter. D'ailleurs, d’autres considérations m’auraient empêché d’entre- prendre toutes les expériences qu'il eût été utile de faire : la récolte, exceptionnellement faible cette année, était en général trop avariée, pour que des essais pussent être entrepris dans de bonnes con- ditions. Je me suis donc surtout attaché à recueillir, par de nombreuses analyses et observations, les documents pouvant appuyer, sur des bases précises, toute conclusion concernant l’amélioration et la con- servation des vins. Les travaux analytiques nécessités par ces recherches ont pu être exécutés grâce à l’aimable hospitalité que j'ai reçue à l’École de commerce, de la part de M. Gaille, directeur, et de M. le D" Belle- not, professeur, dont le laboratoire a été mis si gracieusement à ma disposition pendant tout mon séjour. Je dois aussi tous mes remerciements à M. le professeur Hermann de Pury, pour le précieux concours de sa collaboration, dans les analyses que j'ai eu à effectuer et dont on trouvera plus loin les résultats. 4 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Enfin je ne saurais trop remercier les honorables viticulteurs chez qui j'ai pu suivre la vinification, et qui m'ont si entièrement prêté l'appui du plus bienveillant accueil et de leur expérience si au- torisée. C’est ainsi qu'ont pu être faites ces observations dont je vais rendre compte. PREMIÈRE PARTIE PRATIQUES ORDINAIRES DE LA VINIFICATION A NEUCHATEL ET AMÉLIORATIONS QU'IL CONVIENDRAIT D’'Y APPORTER Voici, sommairement résumées, les pratiques ordinaires de la vinification à Neuchâtel : Les vendanges s’effectuent quelquefois dès la fin de septembre, mais le plus souvent dans les premiers jours d'octobre; elles ne commencent qu'après la levée du ban des vendanges, ou sur l’auto- risation préalable d'opérer la cueillette. En raison du morcellement excessif de la propriété, la récolte est généralement vendue à des encaveurs, à des prix variables suivant l’année et qui ont été, en 1897, de 50 à 55 fr. la gerle ou l’hecto- litre de raisin foulé, pour les raisins rouges, et de 45 à 50 fr. la gerle, pour les raisins blancs. Les raisins sont cueillis dans des sortes de petites cuves, d’une contenance de 6 à 8 litres, appelées seilles, puis versés dans des hottes en bois ou brandes, de 40 à 50 litres de capacité. Les raisins sont foulés à la vigne même : les brandards vident la récolte dans un petit fouloir ou fouleuse, placé sur des récipients en bois d’un hectolitre, appelés gerles; ces gerles sont chargées sur un char à gerles, au nombre de 6 ou 7, et transportées au pressoir ; on dé- signe sous ce nom le local qui renferme les cuves à fermentation et les pressoirs. | Envisageons d’abord la fabrication des vins blancs. _ ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. J Le raisin foulé est versé dans des cuves en bois ou en ciment, d’une capacité variable de 15 à 30 hectolitres, où 1l est abandonné pendant quelques heures, le plus souvent 24 heures, rarement da- vantage. Le moût est décanté, c’est l'opération dite du tracolage ; le marc est exprimé au pressoir et le vin de coule, ou tracolon, est mélangé au vin de presse, et mis à fermenter dans des foudres ou lægres, dont la contenance varie de quelques hectolitres jusqu’à 75 et 150 hectolitres. La fermentation s'effectue d’abord plus ou moins tumultueuse, pendant quatre ou cinq jours, ensuite beaucoup plus lente ; à partir du mois de décembre, on procède régulièrement à l'ouilluge ou remplissage ; et, au mois de mars, a lieu souvent la mise en bou- teilles ; on obtient ainsi ce qu’on désigne sous le nom de vins sur lies, qui sont assez mousseux et très appréciés par cela même. Quel- quefois, au lieu d’opérer la mise en bouteilles au mois de mars, on procède à cette époque à un premier soutirage, pour mettre en bouteilles deux mois après ; ce sont les vins dits sur lies fines. Quant aux raisins rouges, également foulés à la vigne, ils sont versés dans des cuves où ils fermentent pendant un temps qui varie avec la température au moment des vendanges, mais qui est, en général, de cinq à dix jours. On décuve ou fracole; on exprime le marc au pressoir, el les vins de presse, mélangés au tracolon, sont mis dans des lægres, où ils achèvent leur fermentation. Vers le mois de mars, on procède à un soutirage, et l’on effectue la mise en bouteilles en septembre ou, plus rarement, l’année suivante. Reprenons maintenant cette vinification d’une façon méthodique, depuis la cueillette jusqu’à la mise en bouteilles. Nous avons remarqué, dans ces méthodes ordinaires de la vinifi- cation, certaines négligences qu'il sera utile de redresser, concer- nant, par exemple, la propreté du matériel vinaire et l’absence du triage de la vendange ; — d’autre part, des pratiques qui sont sus- cepüibles de modifications, telles que celles qui ont trait à l’amélio- ration des moûts et à la fermentation proprement dite, aux souti- rages, qui sont insuffisants ou se font d’une façon défectueuse ; — enfin, nous conseillerons divers essais, qui pourront contribuer, 6 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. eux aussi, à l’amélioration des vins, comme l'emploi des levures sélectionnées bien appropriées, et à leur conservation, comme le tannisage au cours de la fermentation, ou le chauffage ou pasteuri- sation des vins faits. Nous traiterons successivement ces divers paragraphes, avec tous les détails qu’ils comportent, Influence de la propreté du matériel vinaire. On ne saurait trop insister sur l'importance qu’on doit attacher à la propreté la plus parfaite de tout le matériel vinaire : gerles, cuves, lægres, fouloirs, pressoirs, etc. C’est certainement aux négligences qu'on a souvent l’occasion d'observer à cet égard que l’on doit attribuer, en grande partie, la qualité défectueuse et la mauvaise conservation de beaucoup de vins. Si dans les grandes exploitations ou chez les encaveurs qui opèrent sur des quantités importantes de raisins, les neltoyages du matériel vinaire sont l’objet de plus de soins que dans la petite culture, il n’en est pas moins vrai qu’ils ne parviennent pas toujours à mettre la vendange à l’abri de toute alté- ration. Le plus souvent, dans les quelques jours qui précèdent la cueillette, on se contente de laisser séjourner de l’eau dans les gerles, pour les rendre imperméables au moût. Quelquefois aussi, on pratique les nettoyages à l’eau et à la brosse. Mais ces précautions ne suff- sent pas toujours, comme on pourrait le croire. Il faut remarquer que ces récipients en bois s’imprègnent de moût sur une certaine profondeur et qu’abandonnés ensuite dans un endroit plus ou moins humide, comme c’est le cas le plus général, ils sont le siège du dé- veloppement d’organismes divers, de moisissures et de ferments de toutes sortes, et contractent un goût de moisi, de pourri ou d’aigre, dont il n’est pas facile de les débarrasser complètement. Ges alléra- tions peuvent nuire d'autant plus à la qualité du vin que les raisins sont foulés à la vigne, et que c’est le moût lui-même qui séjourne dans les gerles avant d’être transporté à la cuve. Aussi, après la récolte, au lieu de rentrer ces récipients sans leur avoir fait subir un nettoyage préalable, sous le prétexte que le moût 1 ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. desséché assure la conservation du bois, est-il préférable d’avoir recours aux lavages à l’eau, avant de les replacer dans un endroit aussi sec que possible. Si ces précautions sont prises après chaque vendange, à la ven- dange suivante les nettoyages à l’eau et à la brosse peuvent être suffisants. Cependant, surtout si les nettoyages après la vendange n’ont pas été pratiqués, ou si les gerles, conservées dans un endroit trop humide, ont contracté un goût d’aigre ou de moisi, on peut opérer de la façon suivante, qui nous a donné des résultats très satisfai- sants : On fait un premier lavage à l’eau, puis un second avec de l’eau contenant 4 à 5 p. 100 de cristaux de soude. On procède alors à un ou deux rinçages à l’eau, puis à un lavage avec de l’eau con- tenant À p. 100 d’acide sulfurique, enfin à un dernier rinçage à l’eau. Les lægres doivent être également l’objet des plus grands soins. Lorsqu'ils sont vides, on doit les rincer aussitôt à l’eau, pour faire sortir le plus du liquide vineux qui imprègne leurs parois. Ensuite, on les dessèche à l’aide d’un linge sec et on y fait brûler du soufre ou une mèche soufrée. Quand ils sont restés vides pendant assez longtemps, on doit recourir, quelques jours avant la vendange, à un nouveau soufrage. Mais si les lægres n’ont pas élé nettoyés après avoir été vidés, ils contractent un goût de piqué ou de pourriture, qui exige un nettoyage complet. On l’effectue, comme il a été dit précédemment pour les gerles, par des lavages à l’eau contenant des cristaux de soude, puis par d’autres avec une solution très étendue d’acide sulfurique, suivis de rinçages à l’eau, qu’on termine par un soufrage. Les pressoirs, les fouloirs et tous les appareils mis en contactavec le moût, doivent être nettoyés avec ces mêmes soins; 1l est indis- pensable d’assurer la propreté la plus rigoureuse de tout ce maté- riel ; la qualité du vin dépend beaucoup de ces précautions, qui im- posent si peu de travail, mais auxquelles le viticulteur n’attache pas toujours l’importance qu’il convient. 8 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Triage des raisins. Il arrive souvent, principalement dans les régions septentrionales, que des pluies froides et persistantes précèdent la récolte et occa- sionnent la pourriture de la vendan ze dans une proportion parfois assez élevée. Ge fut précisément le cas en 1897, à la suite des pluies du mois de septembre, et nous avons pu constater, dans certaines pièces, une proportion de pourri atteignant, pour les raisins rouges, le tiers de la récolte. Les raisins, entièrement moisis, sont recouverts de végétations cryptogamiques diverses : Penicillum glaucum, Bo- trytlis cinerea, Cladosporium herbarum, etc. Il est évident que des récolles à ce point avariées ne peuvent donner des vins de qualité ni de bonne garde et, en effet, les vins obtenus dans ces conditions sont très sujets à la casse, qui occasionne souvent des pertes consi- dérables. Il est donc nécessaire de procéder, lors de la cueillette, au triage de la vendange. Cette opération se fait toujours dans Lous les vignobles qui tiennent à la réputation de leurs crus et elle ne saurait être négligée sans inconvénients. Pour nous rendre compte de l'influence, sur la marche de la fer- mentation, de ces raisins moisis, nous avons fait comparativement deux essais de fermentation, d’une part avec des grappes triées, d'autre part avec des grappes identiques, mais additionnées d’en- viron un cinquième de raisins pourris. En raison de la température exceptionnellement basse qui régnait au moment où l'expérience a été mise en train, les deux vases ont élé chauffés au bain-marie, de façon à élever la température de la masse à 15 degrés, la plus favorable au départ de la fermentation, et le local a été maintenu, pendant les quelques jours suivants, au voisinage de cette tempé- ralure. La vendange saine, dès le second jour, n’a pas lardé à entrer en fermentation, alors que celle additionnée de grappes avariées ne manifestait aucun signe de dégagement gazeux. Mais lexamen mi- cruscopique surtout était intéressant : il a montré dans la vendange - saine une levure à peu près pure, en voie de développement, aux cellules identiques à celles qu’on constate dans les fermentations ré- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 9 gulières, tandis que, dans la vendange avariée, les cellules de levure étaient presque absentes et très infestées de bacilles nombreux, ronds ou allongés, qui avaient pris possession du milieu; on y trou- vail également des végétalions cryptogamiques, dont la plupart donnent naissance à des produits secondaires nuisibles. Le triage de la vendange constituerait une amélioration sensible dans la vinification et il serait à désirer que les propriétaires vou- lussent y consentir : on l’effectuerait facilement à la vigne, lors de la cueillette, sous la surveillance d'un des ouvriers de lexploitation, qui veillerait à ce qu’il ne soit introduit ni raisins pourris, meurtris ou moisis. Ce triage à la vigne serait moins coûteux que s'il était pratiqué chez l’encaveur et il y a lieu d'adopter cette matière de faire. Les raisins moisis, mis à part, pourraient d’ailleurs servir à l'obtention de vins inférieurs, que l’on ferait consommer ou dont on se débarrasserait à un prix qui payerait la main-d'œuvre nécessitée par le triage. Il y a lieu de signaler également l'inconvénient qui résulte du mé- lange de la terre à la vendange, à laquelle elle donne un mauvais goût. On doit donc veiller à éloigner toute cause qui puisse incor- porer de la terre à la vendange. Enfin, il est d'usage d'opérer la cueillette, même par la pluie. Dans ces régions septentrionales, où l’on n’a pas loujours un Lemps très favorable au moment de la récolte, on est quelquefois obligé de ne pas se laisser arrêter par les mauvais temps. Cependant, il faut remarquer qu’on introduit ainsi une quantité d’eau sensible, ce qui diminue d’autant la teneur en sucre et la richesse alcoolique du vin, et les grappes, ainsi lavées, contiennent moins de levure, ce qui peut retarder la fermentation et donner un vin de moins bonne tenue. En résumé, en ce qui concerne les conditions dans lesquelles la cueillette doit être effectuée, 1l faut se rapprocher autant que pos- sible de celles qui sont les plus favorables, mais les précautions qui dépendent de la volonté du viticulteur, comme les soins de propreté du matériel vinaire et le triage de la vendange, ne doivent pas être névligées. 10 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. COMPOSITION CHIMIQUE DES RAISINS DE LA RÉGION DE NEUCHATEL Nous devons ouvrir ici un paragraphe à l’étude de la composition chimique des raisins qui forment la base de la production, afin d’en déduire les améliorations dont le moût peut être l’objet, suivant les circonstances. Il est inutile d’insister sur l'importance de la composition du raisin sur la qualité du vin. En effet, si les bons vins ne se font qu’avec des raisins sains, il faut ajouter qu’il est également indispensable que le raisin soil ce qu’on appelle à point, c’est-à-dire que ses principaux éléments, sucre et acidité, y soient contenus dans des proportions convenables. Cette dernière condition n’est pas toujours remplie, aussi bien dans les régions méridionales, où le soleil et les vents chauds occasion- nent le plus souvent une maturité trop complète, que dans les climats septentrionaux, sous lesquels, au contraire, le raisin n’atteint par- fois que difficilement une maturité suffisante. On aurait évidemment intérêt à cueillir celui-ci lorsqu'il est arrivé au point extrême de sa maturité, c’est-à-dire quand il renferme le sucre dans la plus forte proportion ; c’est, en effet, le sucre qui doit fournir l'alcool, auquel le vin doit sa principale valeur ; on gagnerait également plus de couleur. Mais nous savons qu’à ce point extrême, le raisin contient une quantité d’acidité insuffisante et que cette acidité est indispensable pour l’obtention d’une bonne fermentation. Dans les régions méridionales, un excès de richesse saccharine, qui produit une élévation de température plus grande, est un inconvé- nient ; aussi, évite-t-on de vendanger à ce degré trop avancé de ma- turité, ou cherche-t-on à fournir l’acidité qui manque au moût par l'addition de grapillons verts ou verjus, ou par celle d’acide tar- tique. Dans les régions septentrionales, ce cas d’une insuffisance d’acidité se présente seulement dans les années particulièrement précoces, où les vendanges ont lieu par un temps très chaud, comme en 1893 ; alors on se trouve dans le cas précédent, entrainant presque loujours ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. JA des fermentations défectueuses, si la température reste élevée au moment des vendanges. Mais on peut dire qu’en général le raisin parvient difficilement à une maturité très avancée ; aussi, est-il tout à fait judicieux de chercher à laisser celle-ci arriver à ses dernières linites, car il existe, dans les années normales, assez d’acide dans le raisin pour que les vins en renferment en suffisance et l’on gagne, par ce retard, une force alcoolique plus grande, plus de finesse et de bouquet. Cependant, il convient de compter avec les intempéries qui pré- cèdent la récolte, avec les pluies froides de septembre ou d’octobre, qui parfois apportent un tel retard dans la maturation du raisin, qu’il est nécessaire de procéder prématurément à la cueillette. Dans ce cas, une amélioration du moût est souvent utile. Ces considérations montrent assez les services qu’on peut attendre de l’analyse du raisin. Celle-ci peut indiquer, si on la pratique à des intervalles réguliers pendant la maturation, quand la maturité est atteinte ; d’un autre côté, elle donne les moyens de remédier à ce manque d'équilibre dans les éléments du moût, soit à l’insuffisance d’acidité, soit à celle du principe sucré. Aussi, devons-nous donner ici les résultats des analyses que nous avons effectuées aux vendanges de 1897, sur les principaux cépages de la région, le Chasselas et le Pineau. Complétées par celles qui pourront être faites dans les années suivantes, elles constitueront des documents utiles, qui serviront de base aux viticulteurs pour l'amélioration de leurs moûts. Nous n’avons fait porter ces déterminations que sur les éléments principaux du moût, sur ceux qui influent le plus sur la qualité du vin : le sucre, l'acidité, le tannin, et aussi sur le bitartrate de po- tasse, l’acide tartrique, l'acide malique et autres. Ïl ne convient pas ici d’insister sur la pratique de ces dosages, cela n’aurait aucun intérêt el ce serait sortir du cadre de ce travail’. Il est cependant nécessaire de signaler les méthodes employées. Les échantillons de raisins, aussitôt leur réception au laboratoire, 1. Nous avons d'ailleurs consacré, à la suite de cette étude, un chapitre relatif à l'analyse sommaire du moût. 12 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. étaient égrappés, puis exprimés dans un linge propre, à l’aide d’une petite presse *. Le moût ainsi obtenu était filtré, pour le débarrasser des matières en suspension, débris de pulpe, etc., et c’est sur la liqueur limpide qu’étaient exécutées toutes les analyses. Celles-ci étaient toujours faites sur le jus frais, pour éviter tout commence- ment de fermentation ou toute acétification, qui eussent pu fausser les résultats. La densité du jus a été prise à l’aide d’un aréomètre Baumé de 8° à 12, gradué en dixièmes de degré, c’est-à-dire à divisions assez éloignées pour qu’il pût être obtenu la plus grande approximation. On prenait la température du jus au moment de la lecture de l’aréomètre, afin de la ramener, s’il y avait lieu, à celle de 15 degrés, à laquelle ces instruments sont gradués. La richesse saccharine n’a pas été déduite de la densité, comme cela peut se faire pratiquement. Le moût n’est pas une simple solu- tion sucrée, mais renferme beaucoup d’autres principes en propor- tions variables, qui ne permettent pas, dans des analyses précises, de déduire la teneur en sucre de la densité du liquide, sans s’exposer à une erreur, si légère qu’elle soit. Le sucre a été dosé par la mé- thode dite de réduction de la liqueur cupro-potassique de Fehling, titrée par rapport à une solution de glucose. On avait soin d’étendre le moût au 1/20°, pour le rapprocher d’une solution à environ 1 p. 100; dans ces conditions, le dosage s’opère facilement avec une très grande exactitude *. L’acidité totale a été obtenue à l’aide d’une solution d’eau de chaux, titrée par rapport à une quantité connue d’acide sulfurique pur et monohydraté, que l’on pouvait convertir, par le calcul, en acide tartrique. 1. L'égrappage préalable est indispensable ; si l'on exprimait le raisin tel quel, on extrairait de la grappe diverses substances, qui n'entrent pas normalement dans la constitution du jus ou du moût proprement dit. ?, Lorsqu'on a besoin d'une précision rigoureuse, il convient de précipiter au préa- lal'e, par le sous-acétate de plomb, diverses substances (acides organiques, matières azotées, etc.) qui pourraient avoir une action réductrice sur la liqueur de Fehling. Dans le cas du moût, nous avons constaté que cette précaution n’est pas indispensable, surtout lorsqu'il s'agit de recherches pratiques, comme celles qui font l'objet de cette élude. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 15 La teneur en bitartrate de potasse a été obtenue par la méthode de MM. Berthelot et Fleurieu, basée sur la précipitation du tartre à l’aide d’un mélange à parties égales d’alcool et d’éther et sur son titrage par une solution d’eau de chaux, titrée par rapport à une quantité connue de bitartrate de potasse pur; l’acide tartrique, par la même méthode, après saturation préalable d’une partie des li- quides éthéro-alcooliques par la potasse. L’acide tartrique libre est en proportions extrêmement faibles, c'est ce qui résulte des recherches de MM. Aimé Girard et L. Lindet sur la composition des raisins des principaux cépages de France, d’après lesquelles, dans le raisin à maturité, la proportion d’acide tartrique libre est généralement très faible, quelquefois nulle, et, en tout cas, de beaucoup inférieure à la proportion d’acide tartrique combiné. Nous avons exprimé en bloc les acides libres, en retran- chant de l’acidité totale celle due à la crème de tartre. Enfin, le tannin a été dosé par un procédé de mon Maitre, M. A. Müntz, reposant sur la précipitation du tannin par une solu- tion de gélatine, titrée par une solution de tannin pur. Voici les résultats de ces analyses. TABLEAU. {. Aimé Girard et L. Lindet, Recherches sur la composilion des raisins des principaux cépages de France. (Bulletin du Minislère de l'Agriculture, 159%, p. 694.) ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 14 ‘pl ‘PI "PI "PI ‘pt pi ‘pl "pl ‘PI ‘pr ‘pl ‘pl ‘PI Sasop uou ‘Pt [16° pr |e1'e ‘pr |89°e ‘pt |8°9 pr |66‘S “pr |gr'r DE |66 L ‘18 *(sorgne 3 onbryeur “uruue]J,| ‘onbrx -18}) SOIQII SOpI0Y ‘pl 9S0p OU &Y L 2S0P ou 0£'S LS'S 09°9 &9°L gL°S 06°€ &} 9 -osseod op 91} PJ (} A à de à à : 68°O0r |31°2 98 JE |98°L 6&'OY |£L°9 OC‘ |6€°L 00°} |61°L 61°} |&e° cs‘ 6 |cy'9 eG‘OT |06‘9 9g‘or |LL°9 18 ‘18 “onbrag |"onbriny 18] -[ns Opi98 u9|eproe ue I oouridAxo 91810} 9HDIOY I __—— ‘H&#LIT AVd 0° GOT [L£*ST 0191 [00 ‘CI 0‘O91 |86 y‘agr |g1°GT 0‘097 |6 C'LST |yL°YI 9p ‘007 ‘d Oui] 1Ud a HIAINOSALNAMAMU xaons ‘S2150p *‘ouneg 91}QUL “OPEL €LO"TT PT “pI €L0°] PI 10°] D 6201 D 010‘J| “osseq ou$iA D] 890°J| ‘amney en$r\ p] 1LO°] ‘JPUPNON 9P SUOIQUSIA S9p 2IUS2AUO") EJ 9(F CLONT LOIPUONON ÉUTIOMQUOR 2p uvaf ‘If 2( 890°1 "ASSOIg PT ‘UOINOT) 0P S08IO01 “IL 20 &LO‘J| ‘osseq ou8ri D] 690°J|"auuoioun ousrA D] GLOO‘1| ‘opneu ou$rA pI 190] pI 990°} pI CL90 ] D] 990°] "[PJEUIN9N 9P SUOHUFIA S0p 2IUSCAUOr) EI o(] Cy90°] *OSSOIY L'] ‘UOMO" 2P 281099 ‘IL 0 *SDJ0SSDYD “2xJQur -SUUL ne a ‘"HPNVNHAOUA saf na HXISNHa "DE L ‘Dr 9 Dr SG ‘Pr ? DE & DT & DO ‘Pr 06 ‘PE 06 Dr 06 DL 06 Pr e06 ‘DE 68 DE Sè Pre LC PL Gè “SHLYA 4 "PI PI ‘pi ‘pi "PI “PI ‘PI "PI ; PI "PI © ‘PI ‘PI E4 & ‘D! ‘pr E ‘I pi £ ‘pt S9s0p Uou rs ‘DL |F8'9 ” n Û e pr |L0‘9 eo °PL |sosop uou Ge :pT |07 2 = pr lente E (é # 2) SANTE) Dre Lerc ‘Pt |9r'0r ‘Pt |66G°TI SO MOMET 00‘0 |&r‘6 2S0p ou yl'‘0J 16° 6 9S0P UOU 3€ ‘01 0c°6 6Y°6 07'S8 91°8 YY°L ca‘ 09°L ec°9} 6& 91) 8L‘9] TL°YT es'c] 69°YI 9G LT 99°GT y9‘91 80 ‘97 a À LG'£T 8L°91 16‘91 8698 LOL 99°9} 19°91 88 ‘97 Ig‘97 88° GI. 086] 09'91 0£‘91 00 ‘91 01'9I 08°GI 080] LLO‘T LLO‘T 080] 910°] LLO‘] 8L0°] LLO ‘| CPLONT GGLO‘] &LO‘] 690 ‘} ‘2sSq AUSIA *9JNPU AUSIA PI "PI PI ‘PI "DJ ‘PI PI "PI "[JRUONON 9P SUOIUSIA S9p aruSedmon ef 2 |‘190 527 "SIP ‘Sous u SO'T = ‘PI 06 ELA “DIEM ‘I 2Œ | ‘PE 0€ ‘2SS0IY ET ‘UOINON 2p $281099 ‘I 04 | ‘PI 0€ "OST AUSIA QUUHAOU QUSIA "PI ‘PI O6 "PI ‘Pr O8 "SUOIQUSIA Sp oru$edmon ef 24 | PI GG ‘JeUonaN & UIIOUNUON 2p uvaf ‘K 20 | ‘PL SG "[PJEU2N9N 9P SUOIQUSIA S9p 9IUSEdW0") EI "PI "PI Q (IN RTC *aSS0If PT ‘UO[NoN 9p so81009 ‘It 2q | ‘Ido Ga ‘o0no A NDOUIT 16 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Voici, pour compléter ces analyses de jus de raisins, quelques ré- sultats de l'examen de moûts pris dans les gerles ou dans les cuves, avant toute fermentation et après filtration. DENSITÉ SUORE ACIDITÉ totale par litre du jus fermentescible ee exprimée en PROVENANCE. —— | 2 | — TANNIN. au acide | acide AA musti- F ë sulfu- tar- mètre. rique, |trique. — Chasselas. M. Jean de Montmollin, Auvernier, [1,072 20| 163,0 Id. 1,069 É 2| 157,4 Pineau. M. Breithaupt, Port-Roulant. 182,1 M. Périllard, Neuchatel. 172,2 M. Bovet, Areuse. 196,0 Nous pouvons déduire de ces chiffres quelques observations : Les premiers échantillons analysés, pour les raisins blancs comme pour les raisins rouges, étaient insuffisamment mürs, ne renfermant que 140 à 150 gr. de sucre par litre, pour le Chasselas, et 450 à 160 gr. pour le Pineau. Sous l'influence de la température assez éle- vée qui a régné pendant quelques jours à la fin du mois de septem- bre et dans les premiers jours d'octobre, la maturation a fait des progrès très sensibles et la richesse saccharine atteignait, quelques jours après, 160 à 170 gr. de sucre par litre, soit environ 16 p. 100 pour le Chasselas, et plus de 180 gr., soit 17 p. 100 pour le Pineau rouge. Quant aux moûts, dont nous donnons quelques analyses, 1ls sont un peu moins acides que les jus de raisins, le foulage incomplet que subissent ceux-ci n’en extrayant que le jus de la partie externe, un peu moins acide que celui de la pulpe interne. On remarque une différence très nette entre l'acidité des raisins blancs et celle des raisins rouges ; celle des premiers est d’environ 10 à 11 gr. par litre, en acide tartrique ; celle des seconds, 15 à 16 gr. Pourtant, les raisins rouges, bien que plus acides, sont plus ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. il riches en sucre. Cela montre que la richesse saccharine et l'acidité ne sont pas forcément inversement proportionnelles, comme on le croit communément; c’est un fait que nous avons signalé ailleurs’, Si l’on considère le même cépage, le Pineau par exemple, on voit fré- quemment une faible richesse saccharine avec une acidité relative- ment peu élevée et une richesse saccharine plus forte avec une plus forte acidité ; l’individualité des souches, l’exposition, ont une in- fluence sur ces relations. Cette acidité assez élevée est due en grande partie à celle du bi- tartrate de potasse ; ce sel se rencontre en fortes proportions dans les raisins les plus mürs, ce qui s’explique par la combinaison de l’acide tartrique libre avec la potasse qui immigre dans le grain, au fur et à mesure de la maturation ; or, la crème de tartre, insoluble dans les liqueurs alcooliques, se précipite et se dépose peu à peu sur les parois des lægres ; aussi, l'acidité des vins faits est-elle moins élevée que celle des moûts d’où ils proviennent. C’est ce qui ressort des résultats des analyses de quelques échan- tillons de vins blancs et rouges, de la récolte 1897, que nous avons effectuées le 19 décembre 1897. ACIDITÉ TOTALE PAR LITRE DÉSIGNATION, cÉprmecien - gr. gr. Vins blancs : de M. Jean de Montmollin, à Auvernier. 4,85 7,42 de M. Périllard, à Neuchâtel. o,00 8,41 de M. J. Wavre, à Neuchâtel. 5,28 8,08 de M. Breithaupt, à Neuchâtel (Port-Roulant). 5,23 8,00 Vins rouges : de M. Jean de Montmollin, à Auvernier. 3,44 5,26 de M. Périllard, à Neuchâtel. 6,69 10,23 de M. J. Wavre, à Neuchâtel. 4727 6,53 id. 5,03 7,69 de M. Breithaupt, à Neuchâtel (Port-Roulant) . 5,88 8,99 L’acidité était au début d’environ 9 à 12 gr. en acide tartrique, 1. À. Müntz et E. Rousseaux, Recherches sur la vinificalion dans le Roussillon. (Annales de la Science agronomique française et étrangère, 1895.) ANN. SCIENCE AGRON. — 2 SÉRIE, — 1898. — 11. Li] 13 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. par litre, pour les raisins blancs, et de 14 à 16 gr. pour les raisins rouges, suivant l’état de maturité de ces derniers. On voit que, dans le vin fait, cette acidité a sensiblement diminué. La diminution de l’acidité est attribuable principalement à la pré- cipilation du bitartrate. Ce sel n’était plus contenu dans le vin, le 19 décembre 1897, que dans les proportions suivantes : BITARTRATE DE POTASSE DÉSIGNATION. par litre. Vins blancs : de M. Jean de Montmollin, à Auvernier. 255,82 de M, Périllard, à Neuchâtel. 3:07 de M. J. Wavre, à Neuchâtel. 24167 de M. Breithaupt, à Neuchâtel (Port-Roulant). 2-92 Vins rouges : de M. Jean de Montmollin, à Auvernier. l'70 de M. Périllard, à Neuchâtel. 305 de M. J. Wavre, à Neuchâtel. PAM de M. Breithaupt, à Neuchâtel. 20 Le bitartrate a diminué d’environ moitié dans l’espace de ces deux mois et demi. Ajoutons que cette précipitation de tartre contribue, entre autres causes, à rapprocher l'acidité totale des vins rouges de celle des vins blancs, alors que l’acidité des moûts des premiers était sensiblement plus grande que celle des seconds. Signalons enfin l’absence du tannin dans tous ces jus qui n’ont subi aucune fermentation au contact du marc; nous reviendrons plus loin sur cet élément, dont le rôle est important au point de vue de la conservation du vin. Il convient de spécifier à la suite de ces analyses qu’elles ne s’ap- pliquent exclusivement qu’à l’année dans laquelle elles ont été obte- nues. Les résultats qui précèdent sont cependant à très peu près normaux, c’est-à-dire que les quantités de sucre et d’acidité ne sont ni sensiblement trop faibles, ni exceptionnellement élevées. Mais cette composition peut être différente suivant que l’année à élé plus ou moins favorable à la maturation. Dans des élés très chauds et si les chaleurs se prolongent jusqu’au moment de la ven- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 19 dange, on obtiendra le maximum de richesse saccharine et souvent une insuffisance d’acidité ; dans celles, au contraire, où la matura- tion aura été tardive ou ralentie par des temps froids et pluvieux avant la récolte, on pourra observer une teneur en sucre insuffi- sanle. AMÉLIORATIONS DU MOUT Le point de départ de toute amélioration du moût réside dans l'analyse de ce dernier, au point de vue des divers éléments qu’il renferme. A la rigueur, on sait que dans les années où la maturité s’effectue difficilement, le moût doit, à priori, pécher par une insuffisance de sucre, qu'il donnera par conséquent des vins d’un faible degré al- coolique et d’une acidité exagérée ; que, d’autre part, les automnes très chauds occasionneront une richesse saccharine maxima, avec une acidité insuffisante. On doit avouer que de telles déductions sont trop vagues, pour rendre le moindre service et que l’on risquerait fort de commettre des erreurs, si l’on se basait sur elles pour améliorer la composition du moût. C’est donc à l’analyse qu’il faut avoir recours, et les détermina- tions du sucre et de l’acidité totale ne doivent pas être négligées. Il convient de signaler l'intérêt qui s'attache, pour le viticulteur, à déterminer lui-même la richesse saccharine des moûts. Il le peut facilement, car il à à sa disposition les appareils dits aréomètres et mustimètres, qui sont d’un emploi commode. Ces instruments reposent sur ce principe : que si on les plonge dans un liquide, ils s’enfoncent d’autant moins que le liquide est plus lourd, c’est-à-dire, dans le cas particulier du moût, qu’il con- tient plus de sucre en dissolution. Il suffit de filtrer le moût, de le verser dans une éprouvette et d’y plonger le mustimêtre. On lit la division à laquelle il affleure, et l’on trouve, dans la table qui accom- pagne l'instrument, la quantité de sucre que renferme un litre de moût, en même temps que la teneur alcoolique du vin fait. 20 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Richesses saccharine et alcoolique du moût de raisin. DENSITÉS ou degrés du mustimètre. 1 050 1 051 1 052 1 053 1 054 1 055 1 056 1 057 1 058 1 059 1 060 1 061 1 062 1 063 1 064 t 065 1 066 1 067 1 068 1 069 1 070 1071 107? 1 073. 1 074 t 075 1 076 1 077 1 078 1 079 1 080 1081 1 082 1 085 1 084 1 085 1 086 1 087 1 058 DEGRÉS de l’aréomètre de Baumé. — Ho @® O O1 d 19 m © «© - Bis © - . = © © , DNS LU SRG ET, OT" - ND © © D #1 Qt 9 12 © DO D0- OT > V9 © © © © Æ@ © © © © Oo oo CO D CO D O0 A1 -1 2 D 2 5 7 ea GRAMMES de sucre par litre de moût. Rs 0,103 0,106 0,108 RICHESSE alcoolique du vin fait. D DO a [er] ww © 2 1 - V9 mé © O0 D Or OÙ © © 1 Où _ À 1 Om À D A où À 12 © © I 0: ET nu nt L2LSSECELL SE © «© Go D D © -1 4 M TC TRS ” - [Sal SUCRE cristallisable qu'il faut ajouter à un litre de moût pour obtenir du vin à 10 p. 100 d'alcool. kilogr. 0,068 0,065 0,063 0,059 0,056 0,054 0,051 0,048 0,046 0,042 0,041 0,037 0,036 0,032 0,031 0,027 0,024 0,022 0,019 0,017 0,013 0,012 0,008 0,007 0,003 ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 21 Si, par exemple, un moût donne au mustimètre 1071, soit 9°5 à l’aréomètre Baumé, on voit qu’il contient 159 gr. de sucre par litre, qu'il fournira un vin d’environ 9.3 p. 100 d’alcool et que, pour l’amener à donner un vin à 10 p. 400 d’alcool, il faut lui ajouter par litre 12 gr. de sucre, soit 1“8,200 par hectolitre. Le moût n’étant pas une simple dissolution de sucre, et renfer- mant des proportions variables d’autres substances dissoutes, les in- dications de ces appareils ne sont qu’approximatives, mais en les comparant, sur un grand nombre d'échantillons, aux résultats obte- nus par l’analyse chimique, nous avons observé que les différences sont très faibles, qu’elles n’atteignent que quelques grammes seule- ment par litre ; c’est une approximation qui suffit amplement aux besoins de la pratique. Ges instruments donnent donc des indications précieuses, et ils sont susceptibles de rendre de réels services aux viticulteurs, qu’on ne saurait trop engager à en faire un lrès large usage. Sucrage de la vendange. Les conditions de la maturation dans les régions septentrionales sont bien différentes de celles des régions méridionales ; ici, le so- leil est l'élément constant et ne fait jamais défaut, donnant des rai- sins d’unè richesse saccharine élevée, atteignant parfois 300 gr. de sucre par litre ; là, les temps froids commencent souvent assez tôt, ou diverses circonstances, telle qu’une longue période de pluies pré- cédant la récolte, occasionnent un retard dans la maturité. Il arrive donc qu’on est obligé de vendanger des raisins insuffisamment mûrs, qui ne sont susceplibles de fournir que des vins d’un faible degré alcoolique. Or, non seulement l'alcool est l’élément auquel le vin doit sa principale valeur, mais, en outre, il aide à sa conservalion, car 1l est reconnu que beaucoup de maladies, telle que la graisse, attei- gnent rarement les vins d’un degré alcoolique supérieur à 10 p. 100. Aussi, quand la richesse saccharine est exceptionnellement faible et susceptible de ne donner que des vins inférieurs comme richesse al- coolique à celle des années normales, y a-t-il lieu d’y remédier par le sucrage de la vendange. 22 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Qu'on ne s'étonne pas de nous voir conseiller cette addition de sucre; ce n’est pas, comme on le croit à tort, une falsification; c’est, au contraire, une amélioration du moût, très recommandable pour les moûts faibles, tels que ceux qu’on obtient dans certaines années où Ja maturité est insuffisante. Voici comment il convient d’y procéder : après avoir déterminé par l’aréomètre la quantité de sucre par litre de moût et, d’après les tables, la richesse alcoolique approximative du vin fait, on em- ploie environ par hectolitre 1,700 de sucre, par degré d’alcool dont on veut élever le vin, soit par exemple : Pour augmenter la teneur alcoolique de 1°, 15,700 de sucre. — — 19,2 ,990 — — — 90.9 5400 1 PRE La quantité de sucre nécessaire est préalablement dissoute, à la température d'environ 60 degrés, dans une certaine quantité de moût. On peut faire cette dissolution dans une gerle qu'on remplit de moût et dans laquelle on verse le sucre ; on élève la température à l’aide d’un jet de vapeur amené par un tuyau de caoutchouc et produit par un ébouillanteur, comme ceux que possèdent presque toutes les caves. À défaut d’ébouillanteur, on procède à la dissolu- tion du sucre d’une façon quelconque. Dans cette dissolution, opérée par chauffage en présence des acides du moût, le sucre commence à s’intervertir, c’est-à-dire à se trans- former en sucre de fruit, analogue au sucre de raisin lui-même et, par conséquent, facilement fermentescible. La dissolution, faite en une seule ou en plusieurs fois, est ajoutée dans la cuve ou dans le lægre, quand la fermentation est déjà com- mencée ; on ne doit pas ajouter le sucre quand la fermentation est terminée ; on risquerait, de la sorte, de laisser dans le vin un excès de sucre qui pourrait nuire à sa conservation. Il importe également d'éviter de mettre une quantité trop élevée de sucre, dans le but coupable de vouloir augmenter outre mesure la teneur alcoolique du vin; on s’exposerait alors à avoir une fer- mentation incomplète et un vin de mauvaise tenue. De même, doit-on se garder d’ajouter chaque année du sucre à la vendange, pour tomber dans un abus qu'il y a lieu de déconseiller. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 23 Le sucrage est une opéralion avantageuse, mais seulement pour les moûts faibles, tels qu’on les oblient dans les automnes où.la matu- rilé est insuffisante. C’est sous ces réserves que nous en recomman- dons l’emploi. Acidité du moût. Nous venons d'envisager le cas d'une vendange insuffisamment mûre, c’est-à-dire renfermant une quantité de sucre trop faible, et une proportion élevée d'acides, le sucrage du moût est l’améliora- lion à laquelle on doit recourir en pareil cas. Mais, dans les automnes très chauds, la récolte peut être excep- tionnellement mûre, ce que dans les régions septentrionales on con- sidère comme une circonstance heureuse et éminemment favorable à la qualité du vin, cette richesse saccharine élevée étant susceptible de fournir plus d’alcool et de couleur. Cependant, si la maturité est trop avancée, le raisin ne renferme plus toute l'acidité nécessaire à une bonne fermentation. IL est donc indispensable de se garantir contre une insuffisance d’acidité de la vendange. Si l'analyse dénote une proportion d’acidité trop faible dans les raisins, un peu avant la récolte, on peut vendanger prématurément ou bien, si l’on cherche à conserver le maximum de sucre, il y a lieu d'ajouter à la vendange müre les raisins les moins avancés en maturité, les raisins verts appelés grappillons ou verjus. Ceux-ci ne font pour ainsi dire jamais défaut dans les régions septentrionales, et le moyen le plus pratique et le moins coûteux de remédier à lin- suffisance d’acidité consiste à les faire entrer dans la vendange, dans une proportion variable. Nous ne pouvons donner de chiffres précis à ce sujet, ne nous étant pas trouvé dans le cas que nous considé- rons actuellement; cependant, nous pensons qu'il faut maintenir dans le moût une acidité minima, en acide tartrique, de 8 à 9 gr. par litre pour le Chasselas, et de 10 à 12 gr. pour le Pineau. Des observations sur ce point devront être faites dans les diverses condi- tions dans lesquelles les vendanges s'effectuent, par toute personne disposant des moyens d'action nécessaires; elles serviront à établir, sur des bases précises, l'influence de l'acidité. 24 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Tannin. Son apparition au cours de la fermentation, Le tannin est considéré comme un élément qui joue un rôle im- portant dans la conservation des vins. Il était intéressant d’examiner d’abord la teneur en tannin de quelques vins de Neuchâtel et de diverses autres régions, el ensuite les conditions de son apparition au cours de la fermentation. Cette étude n’avait pas seulement un intérêt théorique; elle devait nous indiquer comment le tannin entre en dissolution dans le vin, et les circonstances qui favorisent celle-ci. En ce qui concerne la richesse du vin en tannin, voici les résul- tats d’un certain nombre de dosages que nous avons effectués sur des vins de diverses années et de diverses régions. DÉSIGNATION, Vins de Neuchâtel. Vins blancs : M. Jean de Montmollin, Auvernier . . Périllard, Neuchâtel. . . Breithaupt, Neuchâtel . . Jean de Montmollin, Auvernier . . Périllard, Neuchâtel. . J. Wavre, Neuchâtel . Vins rouges : M. M. M. M. M. M Jean de Montmollin, Auvernier . Périllard, Neuchâtel. . Breithaupt, Neuchâtel. Jean de Montmollin, Auvernier Périllard, Neuchâtel. J. Wavre, Neuchâtel . Vins du Roussillon. Vignobles à l'aspre, Mas-Déous : Aramon . Carignan Grenache . RÉOOLTES. Années 1895 1896 1895 1897 1897 1897 1897 1895 1896 1895 1897 1897 1897 1897 1897 1897 1897 TANNIN par litre. gr. _ ÉTUPES SUR LA VINIFICATION. 25 Vignobles à l'arrosage, Sainte-Eugénie : Aramon, vin de coule. 1897 1,04 Id. vin de presse. 1897 1,68 Carignan, vin de coule. 1897 is (07 Id. vin de presse. 1897 LES rl Vins de la Gironde. Château-Latour (1° cru classé du Médoc, Gironde). 1889 2:03 Id. 1890 2,76 Id, 1891 1,64 Id. 1895 2,56 Id. 1896 161 Id. 1897 2,13 Château-Bellefond-Belcier (Saint-Emilion, Gironde) . 1889 0,60 Id. 1891 1,41 Id. 1892 1,14 Id. 1893 121 Id. 1894 121 Id. 1895 1,75 Id. 1896 0,74 Id. 1897 1,68 Château-les-Vergnes(Sainte-Foy-la-Grande, Gironde). 1897 2,83 Comme on le voit d’après ces résultats, les vins blancs ne renfer- ment pas de tannin; et nous verrons plus loin quelle est la cause de cette pauvreté de ces vins en tannin. Les vins rouges en contiennent aux environs de 1 à 2 gr. par litre. Les vins de Neuchâtel ne sont pas très différents des vins français de plusieurs régions, si distinctes par leur situation, le cépage, les conditions de la culture de la vigne et de la vinification. Abordons maintenant l’étude de l'apparition du tannin au cours de la fermentation. Ïl convient de dire tout d’abord que les moûts, avant toute fermen- tation avec le marc, ne contiennent pas de tannin. Cela résulte des analyses que nous avons faites sur un très grand nombre d’échan- tillons de moût. Le tannin n’existe que dans la rafle, ou grappe débarrassée de ses grains, dans les pellicules et surtout dans les pépins. Voici, à ce sujet, les résultats de la détermination des proportions de tannin dans les diverses parties des raisins. 26 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Nous avons examiné d’abord la constitution de la grappe entière et les proportions de rafles et de grains entiers qu’elle renferme : 100 gr. de grappes entières contiennent : CHASSELA\S. gr. Rafles. 3,83 Grains. 96,17 100,00 PINEAU. æ 3,56 96,44 100,00 Si l’on ne considère que les grains, leur constitation est la sui- vante : 100 er. de grains entiers contiennent : OHASSELAS. gr. Pépins '. 3,28 Peaux '. 1592 Pulpe. 88,50 100,00 PINEAU. gr A A 4,24 D,89 89,91 100,00 La teneur en tannin de ces diverses parties de la grappe est la suivante : TANNIN POUR 100. Chasselas, gr. Rafles. 3,19 Pépins. »,24 Peaux. 0,57 Pineau. gr. 3.07 6,43 1,65 Ces chiffres permettent de déterminer les quantités de tannin ap- portées à la cuve par 100 kilogr. de raisins : 100 kilogr. de grappes entières apportent à la cuve les quantités suivantes de tannin : CHASSELAS. Par les rafles qui représentent 3.83 p. 100 du poids de Ja grappe. Ok, 122 Id. pépins id. 3.15 id. Id. peaux id. 1102 id. Id. pulpe id. S5.40 id. Totale 0 ,165 O .043 0 ,000 Ok, 330 1. Les pépins et les peaux étaient pesés avant toute dessiccation et la proportion de pulpe a été obtenue en retranchant du poids des grains la somme du poids des pépins et des peaux. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 27 PINEAU. Par les rafles qui représentent 3.56 p. 100 du poids de la grappe. 0K5, 109 Id. pépins id. 4.09 id. 0 .263 Id. peaux id. 5.64 id. 0 ,093 Id. pulpe id. 86.71 id. 0 ,000 Total. . O0K5,463 On voit que ce sont surtout les pépins et la rafle qui renferment la presque totalité du tannin contenu dans la grappe entière, et que les quantités de cet élément apportées à la cuve sont très notables, puisqu'elles dépassent 300 gr., même 400 gr. par 100 kilogr. de vendange. L'étude de l'apparition du tannin dans le vin au cours de la fer- -mentation, suivant que le contact du moût avec le mare est plus ou moins prolongé, a été poursuivie sur les vins blanes et sur les vins rouges : le dosage du tannin était effectué sur le moût aussitôt après la mise en cuve, puis sur des échantillons prélevés au cours de la fermentation, enfin sur le tracolon ou vin de coule et sur le vin de presse. Voici quelques-uns des résultats obtenus : De l’apparilion du tannin dans les vins blancs. — Le samedi 2 octobre, on a commencé la vendange chez M. Jean de Montmollin à Auvernier. À cette époque, la température était assez élevée, soit d'environ 22 degrés dans le courant de la journée, et le raisin arri- vait à la cuve avec un échauffement de 19 degrés. La fermentation avait donc une tendance à partir aussitôt. Le tracolage n’a pu être effectué que le lundi soir; le moût était resté près de trois jours au contact du marc. Dans ces conditions, on à lrouvé : TANNIN par litre. Dans le moût aussitôt après la mise en cuve. 0:",000 | Dans le tracolon. 0 ,120 Au tracolage : au commencement du pressurage. 0 ,783 Dans le vin de presse L » à la fin du pressurage. .490 On voit que, par ce contact de près de trois Jours avec le mare, et surtout à cause de la température élevée de la vendange, il est 28 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. entré en dissolution, mais seulement dans le vin de presse, des quantités sensibles de tannin, atteignant, à la fin du pressurage, 38,09 par litre. En regard de cette première observation, nous devons placer la suivante, qui a été faite dans des conditions tout à fait différentes. La cuve n° 2 a été vendangée par une température de 8 à 10 degrés seulement; d’autre part, le contact avec le marc n’a duré que vingt-quatre heures, comme c’est le cas le plus général. Voici les résultats obtenus : TANNIN par litre. Dans le moût après la mise en cuve. 08r ,000 Dans le tracolon. 0 ,000 Au tracolage £ au commencement du pressurage. Traces. Dans le vin de presse = à la fin du pressurage. 0780 Dans ce cas, il n’y a que des quantités très faibles de tannin, même à la fin du pressurage. Des observations semblables ont été faites chez M. Périllard, à Neuchâtel. Le 5 octobre, on terminait la cuve À, commencée le 4, par une température d’environ:10 à 12 degrés. Le 6 octobre au soir, on effectuait le tracolage ; voici les résultats obtenus : TANNIN par litre. Dans le moût après la mise en cuve. 0%,000 Dans le tracolon. Traces. Au tracolage É au milieu du pressurage. 0 ,360 Dans le vin de presse{. à la fin du pressurage. PS0 Dans la cuve B, remplie les 7 et 8 octobre, par des températures de 7 à 8 degrés seulement, les résultats obtenus ont été les suivants : TANNIN par litre. Dans le moût après la mise en cuve. : 027,000 RP ul Dans le tracolon. 0 ,000 ; rie | Dans le vin de presse, à la fin du pressurage. 1 ,500 Les proportions de tannin sont moindres que pour la cuve A, ce ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 29 qui tient à la température exceptionnellement basse au moment de l’encuvage et à l'absence de toute fermentation. Ces résultats sont confirmés par les observations suivantes, faites chez M. J. Wavre, sur les échantillons qui nous ont été régulière- ment envoyés par M. Ch. Lardy. Le 5 octobre, à dix heures du soir, on remplissait la cuve n° 1. Température, 10 degrés. Le 7 octobre, malin, on effectuait le tracolage ; voici les résultats obtenus : TANNIN par litre. Dans le moût après la mise en cuve. 05° ,000 | Dans le tracolon. 0 ,000 Au tracolage : au milieu du pressurage. 0 ,540 | Dans le vin de presse à la fin du pressurage. 0 ,960 Le 6 octobre, soir, on terminait la cuve n° 2, qu’on tracolait le 7 octobre au soir : TANNIN par litre. Dans le moût après la mise en cuve. 057,000 Dans le tracolon. 0 ,000 Au tracolage ; au milieu du pressurage. Traces. Dans le vin de presse. à la fin du pressurage. 1 ,260 On voit nettement que dans le cas d’une température très basse de la vendange et sans qu’il y ait eu, pendant qu’a duré le contact avec le mare, aucune fermentation, les quantités de tannin sont nulles dans le tracolon et très faibles dans le vin de presse. Ces échantillons de vin de presse étaient prélevés tout à fait à la fin du pressurage, et la proportion de vin de cette composition est extrêmement faible, par rapport aux quantités de tracolon et de vin de première pressurée. Aussi, les quantités de tannin contenues dans ce vin de dernière pressurée ne sont-elles pas suffisantes pour élever sensiblement la proportion de tannin dans le mélange final, qui remplit les lægres; en effet, Lous les dosages que nous avons faits sur le vin prélevé dans les Iægres indiquent-ils que le tannin n’y est contenu qu’à l’état de traces. 30 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. En résumé, le contact du moût avec le mare, qui est d’une durée de vingt-quatre heures seulement, et a lieu sans qu'il y ait de fer- mentation, ne permet pas au tannin d'entrer en dissolution en pro- portions suffisantes; cet élément ne se trouve dans le vin qu’à l’état de traces. Aussi, ces vins blancs sont-ils généralement sujets à la graisse. Un cuvage plus prolongé pourrait y remédier dans une certaine mesure ; mais il aurait l'inconvénient d’accentuer la coloration du vin en lui donnant une teinte jaunâtre, peu appréciée de la clientèle. Aussi, croyons-nous pouvoir recommander l'essai d'une addition, dans les lægres, d’une quantité de tannin de 15 à 20 gr. par hecto- litre; cette dose, dissoute dans du moût, serait ajoutée en une seule fois, vers la fin de la fermentation. De l'apparition du lannin dans les vins rouges. — Nous avons fait des observalions analogues sur les vins rouges, qui fermentent en contact du mare pendant un temps variable, de 5 à 10 jours. Comme ceux de blanc, les moûts de rouge ne renferment égale- ment pas de tannin, Nous avons examiné quand celui-ci apparaît au cours de la fermentation et en quelles proportions. Chez M. Périllard, la cuve n° 1 a été remplie le 5 octobre au soir, par une température moyenne de 10 degrés environ. Voici les résultats obtenus : TEMPÉRATURES TANNIN du moût!. par litre. degrés gr. Le 6 octobre, dans le moût après la mise en cuve. 10,0 0,000 Le 9 octobre. 10.0 Traces. Lei nrd: 11,0 Traces. Denise 20,0 0,420 Le 14 :. id 24,0 1,080 : 24,0 1,300 Das le tracolon. 1,200 Le 16, au pressurage « Dans | au milieu du pressurage. 1,700 ‘le vin de presse | à la fin du pressurage. 2,280 1. Les températures du moût, que nous avons mises en regard des dates des pré- lèvements, ont pour but d'indiquer la marche de la fermentation ; tant qu'elles restent stationnaires, cela montre que la fermentation ne fait aucun pr Hors dès que celle-ci suit son cours régulier, la {emjérature du moût s'élève. | Roi ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. D On voit que la cuve n’a accusé un commencement de fermentation que du 12 au 13, c’est-à-dire 7 à 8 jours après son remplissage. Jusqu’à ce moment, le tannin n’est entré que faiblement en dissolu- tion; dès le 13, les proportions de tannin augmentent sensiblement. La cuve n° 2 a été remplie les 6 et 7 octobre, par une tempéra- ture moyenne du moût de 7 degrés. Jusqu’au 13 octobre, c’est-à-dire pendant 7 jours, la fermentation se refusa presque à partir; voici les résultats des dosages du tannin : TEMPÉRATURES TANNIN du moût. par litre. | degrés gr. Le 7 octobre, dans le moût après la mise en cuve. 7,0 0,000 Le 11 octobre. JD 0,000 ES SNA GE 12,0 Traces. Le 14 id. 14,0 Traces. eo 14,0 Traces. On voit également ici que le tannin n’entre en dissolution qu’au- tant que la fermentation est déjà assez avancée; or, le 15 octobre, la température du moût commençait seulement à s’élever sensible- ment et le vin ne renfermait que 3.8 p. 100 d’alcool. Aussi, le tannin W’élait-il contenu dans le vin qu’à l’état de traces. Au tracolage, qui eut lieu le 19 octobre, le vin de presse même ne contenait, par litre, que les quantilés suivantes : TANNIN par litre. Au commencement du pressurage. 7 08,7 A la fin du pressurage. 1052 Des observations analogues ont été faites chez M. J. Wavre. La cuve n° 1 à été remplie le 9 octobre; voici les résultats obtenus : TEMPÉRATURES TANNIN du moût. par litre. degrés gr. Dans le moût après la mise en cuve. 12,0 0,000 Le 11 octobre. 2) 12.5 0,000 Le.12 id. 14,0 Traces. Lester: 17,0 Traces. Le 14 id. (le vin renferme alors 6.8 p. 100 d'alcool). 21,0 0,30 32 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le 16 octobre, au pressurage, il y avait : TANNIN par litre. Dans le tracolon. 05%°,66 DL dois au commencement du pressurage . 0 ,92 ans le vin de pres : à la fin du pressurage. 2416 Pa? La cuve n° 2 a été remplie le 4 octobre; voici les résultats ob- tenus : TEMPÉRATURES TANNIN du moût. par litre, degrés gr. Dans le moût après la mise en cuve. » 0,000 Le 12 octobre. 25,0 0,84 Le 13 id. 22,0 0,90 dans le tracolon. 1,62 Le 14 id. au pressurage à Pa ; de p 48€) dans le vin de presse. 2,20 Ici, nous nous trouvons en présence d’une cuve remplie par une température moins basse que celles que nous avons précé- demment considérées ; aussi, la fermentation fut-elle moins lente et les quantités de tannin entrées en dissolution furent-elles plus : élevées. D’autres observations semblables ont également été faites chez M. Jean de Montmollin, à Auvernier : elles confirment les précé- dentes; nous nous dispenserons donc de les relater ici. Signalons seulement l’absence à peu près complète du tannin, dans le moût de la cuve n° 2, 8 jours après son remplissage; à ce moment, le moût commençait à peine à fermenter et sa température n'était que de 12 degrés. De ces résultats, on peut déduire les conclusions suivantes : Les quantités de tannin apportées par 100 kilogr. de vendange, soit approximativement par 1 hectolitre ou 1 gerle de raisins foulés, sont d'environ 400 gr. Une partie de ce tannin se dissout dans le vin, pendant la fermentation, à la faveur de la température el de l’alcoo!l formé. Mais la fermentation se fait plus ou moins attendre. Tant qu’elle RO TT ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 2 n’est pas franchement partie, les proportions de tannin dissous sont nulles ou à l’état de traces. Dès qu’elle a commencé et qu’elle suit son cours régulier, le tannin entre en dissolution. La lenteur de son apparition est secondaire, puisqu’ici la fermentation s'achève au contact des marcs ; il arrive toujours à se trouver contenu dans le vin, même dans le lracolon, en proportions sensibles. Nous allons examiner maintenant l’influence de la température du raisin sur la marche de la fermentation et comment on peut éviter, dans le départ de celle-ci, ces retards que nous venons de cons- tater. INFLUENCE DE LA TEMPÉRATURE DU RAISIN SUR LA MARCHE DE LA FERMENTATION On sait que la levure exige, pour se multiplier, une température qui ne doit pas être trop basse ; si l’encuvage se fait à moins de 10 à 12 degrés, la fermentation est plus ou moins retardée. C’est ce qui a eu lieu en 1897; voici quelques températures moyennes de l'air observées vers la fin des vendanges : Le 5 octobre, 6°,8 centigrades en moyenne. bé kid" 30 id. Leeds "274 id. Leon idee 00.0 id. Peut 400 jd: Nous avons constaté à plusieurs reprises dans les gerles, à leur arrivée à la cuve, des températures du moût de 4 à 5 degrés scu- lement. Ou se rend compte que, dans ces conditions, la fermentation peut se faire attendre plus longtemps. Un des moyens les plus sûrs et les mieux à la portée des vilicul- teurs, pour constater le départ de la fermentation et pour en suivre la marche d’après l’élévation de la température du moût, est l’em- ploi du thermomètre ; aussi, ne croyons-nous pas inutile d'indiquer ici le dispositif que nous avons adopié dans ce but : une sonde en ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1898, — 11. 3 34 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. cuivre (fig. 1) est fixée à lextrémité d'un manche en bois d’une longueur variable avec la profondeur des cuves. La sonde est ter- minée par un bouton fileté en forme de cône, pour en faciliter l'introduction dans la cuve. Elle porte une sorte de fenêtre, qui permet de retirer le thermomètre pour en faire la lecture. Le thermomètre est sus- pendu, à l’aide d’une ficelle, dans un trou pratiqué à la parlie supérieure de Ja fenêtre, et la longueur de la ficelle doit être telle que le réservoir du thermomètre arrive presque au fond de Ja sonde. Pour faire une observation, on enfonce la sonde jusque vers le milieu de la masse li- quide; on l’v laisse pendant 5 à 6 minutes et on la retire rapidement de la cuve. On lit aussitôt le thermomètre, puis on dévisse le bouton fileté de la sonde et on vide celle-ci | entièrement ; s’il reste, à l’intérieur, des grains ou des morceaux de grappe, on les enlève avec une baguette de bois. On visse à nouveau le bouton fileté et l'appareil peut servir à une nouvelle observation. Les températures doivent être prises ainsi une ou deux fois par jour, depuis la mise en cuve jusqu’au décuvage ; nous verrons plus loin combien sont intéressants les renseigne- . ments qu’elles fournissent. Voici les observalions que nous avons pu Via. 1. — Sonde pour la faire, grâce à l'obligeant concours de MM. Mont- prise de température des inoûts en fermentation. mollin,-Périliard, Ch. Lardy et Breithaupt. Vins blancs. — Chez M. Périllard, la vendange du Chasselas a commencé le 4 octobre; un lægre n° 1, de 60 hectolitres, a été rempli le 6 octobre au soir; le lægre n° 2, de 795 hectolitres, a été rmpli le 10 octobre, avec du moût récolté dans les journées du 6 au 9 octobre. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. Voici les températures observées : DATES. 7 octobre. 8 id. CUT 10e: LIRE AQU 1 ME 1400: MOT 1'GMMITE laide TEMPÉRATURES DU MOUT. Lægre n° 1. Rempli le 6 octobre. degrés 13,0 14,0 15,0 » _ _ - 2 _ = 9 49 19 t92 19 19 © © + 0 À O1 © PrhOMOIO De en] [Sa A Lægre n° 2, Rempli le 10 octobre. degrés . … NRC 12 t© Qt 19 29 © mm mm, 19 O9) Or © Malgré la température basse à laquelle le raisin du lægre n° 2 a été récolté dans les journées du 6 au 8 octobre, la fermentation n’a pas trop tardé; le départ de la fermentation est facilité par le large contact de l’air que subit le moût pendant le tracolage et le pressu- rage, et qui occasionne la multiplication de la levure. Les observations suivantes ont été faites chez M. Breithaupt, à Port-Roulant : DATES. 6 octobre. a 8 9 10 11 Le 13 14 15 16 TEMPÉRATURES DU MOUT. Lægre de 100) litres vendangé le 2 octobre, vendangé le 4 octobre, pressuré pressuré et rempli le 6 octobre. degrés 16,0 16,5 19,0 20,0 20,0 18,0 16,0 15,5 15,25 14,0 13,5 rempli le 6 octobre, Lægre de 1 200 litres et degrés 13,0 13,5 16,0 17,0 19,5 22,0 20,5 18,75 17,5 16,0 (524 et degrés 11.0 11,5 12,0 12,0 12,0 129 > Lægre de 570 litres vendangé le 5 octobre pressuré rempli le 6 octobre. Chez M. J. Wavre, la vendange a eu lieu du 4 au 6 octobre, et le 36 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. tracolage a été effectué les 7, 8 et 9 octobre; voici quelques résul- tats obtenus dans trois lægres : TEMPÉRATURES DU MOUT. DATES. Lægre n° 1, Lægre no 2, Lægre no 3, 1 60) litres. 800 litres. 4000 litres. degrés degrés degrés 11 octobre. 15,0 11,9 10,0 19: id 17,5 12,0 10,75 15910. 20,0 13,0 11,5 NT 22210 17,0 13,0 15 id. 20,0 22,0 17,0 .16 üd. 18,5 21,5 22,0 On voit que la fermentation a suivi son cours régulier sans se faire trop attendre et que la température maxima n’a pas dépassé 22 degrés. Ici également, le tracolage et le pressurage, en occasionnant l’aéra- tion du moût, ont permis le départ assez rapide de la fermentation. Des observations semblables ont enfin été suivies chez M. Jean de Montmollin, à Auvernier. Le foudre n° 1 a été vendangé le 2 oc- tobre par une température assez élevée, le raisin ayant dans les gerles 19 à 20 degrés ; le tracolage a été effectué les 4 et 5 octobre; dès le 7 octobre, la fermentation était très aclive, la température étant de 26 degrés. Comparativement, nous pouvons citer le lægre n° 4, de 150 hec- tolitres, rempli les 7 et 8 octobre, avec un moût récolté à tempéra- ture beaucoup moins élevée que le précédent; la fermentation fut beaucoup plus lente, la température du moût, de 5 degrés seule- ment à l’origine, n’augmenta réellement que le 15 octobre. Nous pouvons conclure de ces observations que la rapidité de la fermentation et l’échauffement maximum du moût dépendent sur- tout de la température du raisin au moment de l’encuvage. Mais l’aération produite dans le tracolage et le pressurage a pour effet d'activer le départ de la fermentation, même quand la température initiale du raisin est basse; nous devons retenir ce fait, sur lequel nous reviendrons à propos de lutilité de l’aération du moût. Nous allons voir que, dans la vinification des vins rouges, où le moût n’est pas mis au contact de l'air dans une aussi large mesure, la fer- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. SH mentation peut se faire attendre beaucoup plus longtemps, quand le raisin est récolté à basse température. Vins rouges. — Voici, en effet, concernant la vinification en rouge, quelques observations : Chez M. Périllard, la cuve de rouge n° 1 a été remplie le 5 octobre. Température moyenne de la vendange, 10 degrés. DATES. HEURES. TEMPÉRATURES du moût. degrés G octobre. $® 15 matin. 10,0 EAU 10! » matin. 10,0 Side 9h 30 matin. 10,0 OT 98 » matin. 10,0 ORAN 9h 20 matin. 11,0 UE 9% 50 matin. 15,0 13- id. 8" 45 matin. 20,0 LT 3" » soir. 22.0 14 id. 9% 15 matin, 24,0 15 7id. 9h » matin. 24,0 l'OIT 7% » matin. 19,0 Tracolage, le 16 octobre, matin. Cuve de rouge n° 2, remplie le 7 octobre. Température moyenne de la vendange, 7 degrés. DATES. HEURES. roi degrés 8 octobre. 9h 45 matin. 7,0 9 id. gù » matin. 8,0 it id. 9" 20 matin. 9,0 12014; 98 50 matin. 9,0 TE 82 45 matin. 12,0 13 0id 3h » soir. 13,0 14 id. 9 15 matin. 14,0 Doro 9 » matin. 14,0 lat 9h » matin. 16,0 CHU 3h » soir. 17,5 Les résultats qui précèdent sont de la plus grande netteté. La tem- pérature iniliale moyenne du moût, aussitôt la mise en cuve, ayant été inférieure à 10 degrés, on voit que la fermentation a tardé de {. Le 15 au matin, on fait une aération et on ajoute quelques gerles de la cuve n° 1, qui était en pleine fermentation. 33 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. plusieurs jours et que le moût est resté à une température infé- rieure à 12 degrés pendant toute une semaine. Chez M. J. Wavre, la cuve n° 1 a été remplie le 8 octobre, avec des raisins qui ont été triés à la cave même, pendant les 3 ou 4 jours précédents. La température de cette vendange prit donc à très peu près la température du local, sensiblement plus élevée que celle de l'air extérieur. Cependant, jusqu’au 11 octobre, c’est-à-dire pendant 4 jours, la température du moût fut inférieure à 12 degrés; les températures furent ensuite les suivantes : TEMPÉRATURES DÉDEES du moût. Du 8 au {1 octobre. moins de {2 degrés. Le 11 octobre soir. 1299 Le 12 id. 14 ,0 Le 13 id. 17 ,0 Le 14 id. 21 ,0 Le 15 id. 22 ,0 Le 16 id. 20 ,0 Le départ de la fermentation, par suite de la température un peu moins basse de la vendange, se fit moins attendre, tout en étant ce- pendant encore assez lent, puisque la cuve remplie le 8 octobre ne fermenta sensiblement qu’à partir du 12 au 15. Chez M. Jean de Montmollin, à Auvernier, la cuve n° 1 a été rem- plie le 4 octobre; la cuve n° 2, le 6 octobre, avec une vendange sensiblement plus froide. Les températures ont été les suivantes : TEMPÉRATURES DU MOUT. cm Eine Cuve n° 1. Cuve nv 2, Température moyenne Température moyenne initiale initiale de la vendange : 1195. de la vendange : 9e. degrés degrés 4 octobre. 11,5 » Did 14,5 9,0 ST 19,0 10,0 9 id. 22 0 11,0 16 EEE TE 20,0 11 0Ë 12H00 Décuvage » 1 RS Tan (1 LA » 12,0 15 id. ) 22,0 {. On ajoute dans la cuve n° 2, pour en faire partir la fermentation, quelques gerles de la cuve n° 1. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 39 Ces deux observalions comparalives montrent l'influence de la température du moût au moment de l’encuvage. La cuve n° 1, bien qu’à 11°,5 seulement, n’a pas trop tardé à fermenter et a atleint son maximum de température de 22 degrés, 5 jours après la mise en cuve. La cuve n° 2, dont la température initiale n’était que de 9 degrés, est reslée 8 jours stationnaire, entre 9 et 19 degrés. La fermentation aurait même lardé davantage, si nous n’y avions pas ajouté du moût de la cuve n° 1 et produit en outre, par cela même, une légère aéra- lion, ayant occasionné la multiplication de la levure. En résumé, il résulte de ces observations que la fermentation ne partira qu’autant que le moût aura une température moyenne d’au moins 11 à 12 degrés; si elle est inférieure, la fermentation tarde longtemps, et nous devons ajouter qu’il peut y avoir de réels incon- vénients. En effet, quand la température du moût, au moment de la mise en cuve, est voisine de 15 degrés, la fermentation se déclare aussitôt et le gaz carbonique se dégage abondamment. Dans ce cas, les moi- sissures de toutes sortes qui accompagnent la vendange ne peuvent se développer, car ces végétalions cryptogamiques sont essentiellement aérobies, c’est-à-dire ont besoin d’air, et, dans une fermentation assez active, elles ne trouvent pas, même dans la partie superficielle du liquide vineux, l'oxygène dont elles ont besoin. Il en est autrement dans le cas d’un retard dans la fermentation, tel que celui qui se produit avec une vendange à basse température ; tous les champignons et mycodermes qu’apporte le raisin ou qui s’ensemencent spontanément, trouvant, à la surface de la cuve, l'oxygène nécessaire à leur multiplication, se développent avec une rapidité remarquable et, en moins de 3 ou 4 jours, couvrent toute la surface de la cuve d’une épaisse couche de mycélium, qui aug- mente de plus en plus et qui ne peut que compromettre la qualité du vin. I y a donc intérêt, si la fermentation tarde de 3 ou 4 jours, de remédier à ces inconvénients qui peuvent en résulter. 40 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Chauffage du moût. Certains viticulteurs, que ces faits ont déjà frappés, cherchent à faire partir la fermentation en chauffant la cave à l’aide de poêles ou de fourneaux; le résultat ne peut être que satisfaisant, mais il n’est pas toujours suffisant; il faut observer que l’élévation de la température de la salle se communique difficilement au moût, à cause des parois assez épaisses des cuves. Le moyen qu'il convient d'employer est le chauffage d’une partie du moût, ce qui n'empêche pas, si la température extérieure reste très basse, de recourir concurremment au chauffage du local. On peut pratiquer ce chauffage du moût de diverses manières, suivant le matériel dont on dispose; par exemple : la quantité de moût à chauffer est mise dans une petile cuve ou même dans une gerle, si l’on opère ce chauffage en plusieurs fois. On y fait arriver de la vapeur d’eau, amenée à l’aide d’un tuyau de caoutchouc et produite par un ébouillanteur, comme ceux qu'ont à leur disposi- tion presque toutes les caves. On agite le moût de temps en temps et, quand la température est de 70 degrés environ, on le transvase dans la cuve et on brasse pour uniformiser la température. On peut aussi introduire le tuyau de caoutchouc directement dans la cuve pour faire passer la vapeur, en brassant la masse de temps à autre, et l’en sortir quand la température du moût est homogène et d'environ 15 degrés. Enfin, le moût peut être chauffé directement, soit au bain-marie, soit même à feu nu, et autant que possible à l'abri de Pair, en ayant soin d’agiter le liquide, de façon à ce qu’il n’y ait pas surchauf- fage, ce qui pourrait occasionner un léger goût de cuit par l’altération du sucre et du bitartrate de potasse. Voyons maintenant quelles sont les proportions de moût qu’il convient de chauffer, quand la fermentation se refuse à partir, c’est- à-dire quand la température de la cuve est inférieure à 12 à 15 degrés. Pour plus de simplicité, nous avons réuni dans le tableau ci-des- sous les renseignements suivants : La première colonne indique la contenance des cuves en hecto- ÉTUDES: SUR LA VINIFICATION. 41 litres ou gerles, de 5 en à hectolitres; les colonnes suivantes indiquent, pour les températures initiales da moût de 7 à 14 degrés, les quantités de moût qu’il faut chauffer à 70 degrés, pour élever la température de la cuve à 19 degrés. Températures moyennes du moût après la mise en cuve : des cuves, Quantités de moût à chauffer à 70 degrés pour élever la température E Le) 4 4 Z = = Z © Le] fr hectolitres litres litres litres litres litres litres litres litres 10 126 S Q 83 | 51 17 15 190 du 12e RE 5° 26 de la euvée totale à 15 degrés : 20 953 955 166 |. 13: 103 35 95 317 215 011708 5 129 30 RSR 94 | 9249 | 90: 155 35 34. 291 36 180 40 : BLEUE RÉLE PME 206 374 | 239 »0 94 C 416 338 258 5ô 20 | 5 358, 1un372 1) 1284 60 (0 LE) 2062 0 9) 5 310 D’après ce tableau, si la température moyenne d’une cuve de 90 hectolitres n’est que de 10 degrés, on voit qu’il faudra chauffer 249 litres de moût pour l’élever à la température de 15 degrés. Réfrigération des moûts. . Nous venons d’envisager le cas d’un retard considérable dans la fermentation, par suite de la température exceptionnellement basse à laquelle le raisin était récolté. Nous ne parlerons pas des conditions les plus générales dans les- quelles s'effectuent les vendanges dans les années normales : le raisin est cueilli avec un échauffement de 15 à 20 degrés et la fer- mentalion ne tarde pas à partir et à suivre son cours régulier, aussi favorablement que possible. Examinons le cas inverse de celui qui a fait l’objet des précé- dentes considérations, celui où le raisin est amené à la cuve avec A2 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. un échauffement de plus de 20 degrés, pouvant atteindre et dépasser 25 degrés. Nous avons vu que, dans ces condiiions, l’échauffement maximum du moût est tel que la levure souffre et que son action est séricuse- ment entravée, et qu'alors les fermentations bacillaires prennent bien vite la place de la fermentation alcoolique. Ces inconvénients de vendanges par des automnes exceptionnelle- . ment chauds sont considérables. Ils occasionnent presque chaque année dans les régions méridionales, et parfois dans les régions septentrionales, comme en 1893, les plus grands désastres et la perte de millions d’hectolitres de vin. Aussi, croyons-nous intéressant d'indiquer les essais que nous avons tentés, mon Maitre et moi, dans nos recherches sur la vinifi- cation des régions méridionales, pour parer à un tel état de choses". L'élévation de la température des moûts ayant pour principale cause l’échauflement que possède le raisin quand il est apporté à la cuve, il y avait d’abord lieu de chercher à abaisser la température du raisin. C'est ainsi que nous avons examiné la possibilité de la ré- colte pendant les heures froides de la nuit ou des premières heures du matin. Or, la vendange nocturne est pratiquement irréalisable, et la cueillelte matinale s’est montrée insuffisante pour amener une fermentation irréprochable. L'exposition au froid nocturne de la vendange cueillie, que nous avons aussi expérimentée, n'amène pas un abaissement de tempé- rature qui puisse compenser les frais de manutention et les incon- vénients auxquels le raisin serait exposé, dans le cas où les mauvais temps surviendraient. L’échauffement des moûts étant dù aussi à la grande masse de vendange que contiennent les cuves ou les foudres de grandes di- mensions (de 375 hectol.) et au manque de refroidissement par le rayonnement ou par conductibilité, nous avons aussi expérimenté la vinification dans des récipients de petites dimensions, à parois moins épaisses. Les résultats ont été satisfaisants ; mais, si à la rigueur {. À. Müntz et E. Rousseaux, Recherches sur la réfrigéralion des moûls. (Bul- lelin du Ministère de l'Agriculture, 1896 et 1897.) ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 43 cette pratique est possible dans les très petites exploitations, elle ne saurait être employée dans celles de moyenne étendue et, à plus forte raison, dans les grandes propriétés. Nous sommes donc restés en présence d’un seul moyen actuelle- ment pralique, c’est le refroidissement des moûts, par des appareils dans lesquels on les fait circuler et qu’on arrose d’eau extérieure- ment. Nous avons étudié et indiqué les conditions dans lesquelles la ré- frigération doit être faite et les résultats de nos recherches ont montré, de la façon la plus nette, que la réfrigération des moûts permet l’obtention de vins de qualité supérieure, en même temps que d’une conservation irréprochable et qu’en l’adoptant, la viticul- ture méridionale se mettrait à l’abri des accidents qui lui causent fréquemment de si grandes pertes. Mais, en raison de la rareté de ces automnes exceptionnellement chauds dans la région de Neuchâtel, nous ne pensons pas devoir insister sur la réfrigération, et c'est par d’autres précautions qu’on pourra éviter, partiellement tout au moins, les graves inconvénients de l’échauffement excessif des moûts. Lorsque les vendanges se font dans les conditions qui se sont pré- sentées en 1893, le raisin est au point maximum de sa maturité, sa richesse saccharine est très élevée et son acidité réduile au mi- nimum. Or, nous savons que l’échauffement excessif du moût sera surtout funeste à la levure, si celle-ci ne trouve pas l'acide qui lui est né- cessaire, pour sortir victorieuse dans la lutte contre les mauvais fer- ments, qui ne larderaient pas à envahir le milieu. Dans ce cas, on comprend la nécessité de conserver dans le moût une proportion suflisante d’acidité. On obtient ce résultat de diverses façons : on peut vendanger un peu prématurément et ne pas chercher à pousser la maturité jus- qu'à ses dernières limites. Si l’on se rend compte autour de soi de la façon dont se sont tenus les vins de 1893, par exemple, on pourra remarquer, en général, que ce sont ceux obtenus avec les raisins les moins mürs, vendangés prématurément ou provenant des vignes les plus élevées, qui ont le moins souffert ; le fait, d'ail- 44 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. leurs, nous à été confirmé par plusieurs viticulteurs des plus expé- rimentés. On peut aussi ajouter à la vendange une certaine proportion de raisins verts désignés sous le nom de verjus, qu’on rencontre sou- vent encore au moment de la récolte. Enfin, on ajoute à la cuve une proportion d’acide tartrique va- riable avec la proportion d’acidité que renferme le moût. En résumé, l'influence de la température du raisin est d’une im- portance capitale : dans les automnes froids, la température initiale du moût est trop basse pour que la fermentation puisse partir ; dans ce cas, on pratique le chauffage d’une partie du moût ; — dans les automnes très chauds et dans le cas d’une vendange insuffisamment acide, l’échauffement du moût peut être excessif et occasionner des fermentations bacillaires ; la réfrigération du moût au cours de la fermentation serait le moyen le plus pratique d’y remédier, mais on pourra aussi prévenir les accidents qui pourraient survenir en surveillant la proportion d’acide dans le moüût et en ajoutant à ce dernier, soit du verjus, soit de l’acide tartrique. Par ces moyens ju- dicieusement appliqués, on évitera les fermentations bacillaires. Eofin, pour entraver celles-ci autant qu’il est possible et pour mettre la levure alcoolique, dans le plus bref délai, en possession de la masse en fermentation, il est utile d'attirer tout spécialement latten- tion des viticulteurs neuchâtelois sur des essais d’ensemencement par des levures sélectionnées bien appropriées, comme nous allons l'indiquer maintenant. DE L'EMPLOI DES LEVURES SÉLECTIONNÉES DANS LA VINIFICATION La transformation du moût en vin ne s’effectue, comme l’a montré Pasteur, que sous l'influence d’un être vivant, qui est la le- vure alcoolique. Si la fermentation du moût se fait dans de bonnes conditions, on n’aperçoit guère que la levure du vin ou elliptique ; mais, dans le cas contraire, il se développe également beaucoup d’autres orga- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 45 nismes, qui gênent son développement et compromettent la qualité du vin. Si tous ces organismes différents ne se mulliplient pas avec la même rapidité que la levure du vin, dans les fermentations normales, cela tient à ce que le milieu qui leur est offert ne leur convient pas. Au début de toute fermentation, ce n’est pas la levure elliptique qui se développe le plus abondamment, c’en est une autre, la levure apiculée, qui donne de l'alcool, mais qui fournit, en outre, des pro- duits secondaires dont la présence est plutôt nuisible. Heureusement qu’elle ne peut se multiplier dans un liquide renfermant plus de 3 ou 4 p. 100 d'alcool; à ce moment, c’est la levure elliptique qui prend bientôt le dessus, car elle ne craint pas les liquides renfer- mant jusqu’à 15 p. 100 d’alcool ; c’est donc ainsi déjà que la levure apiculée se trouve supplantée. D'un autre côté, la température à laquelle s’opêrent, en général, les fermentations normales, la richesse saccharine du milieu, la pro- portion d’acidité du moût, conviennent particulièrement à la levure du vin, tandis qu’elles ne sont pas favorables au développement des autres organismes : en ce qui concerne les bacilles, ils trouvent une température insuffisante et surtout une acidité trop élevée; d’autre part, en ce qui concerne les moisissures et les mycodermes, le déga- gement de gaz carbonique et l’alcool formé arrêtent leur dévelop- pement, car la plupart de ces organismes ont besoin d’air et ne pour- raient vivre en pareille atmosphère. On voit d’après cela que, le plus souvent, la levure du vin, bien que moins abondante sur le raisin que tous les autres organismes, . a cependant toutes les chances pour supplanter ceux-ci, et que la fermentation alcoolique ne tarde pas à s’effectuer régulièrement dans les conditions les meilleures. Mais il arrive souvent, le plus souvent même dans beaucoup de régions, que ce sont les conditions les plus défavorables à la levure, par conséquent les plus favorables aux autres organismes, qui pré- dominent, soit au début, soit au cours de la fermentation. Il n’est pas inutile d’en donner des exemples : Dans les régions septentrionales, et nous avons observé le cas en 1897 à Neuchâtel, le raisin arrive tellement froid à la cuve que la 46 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. levure alcoolique trouve là des conditions essentiellement défavo- rables à son développement ; rappelons que, dans ces conditions, il n’y à ni alcool, ni gaz carbonique formés, et que les moisissures et mycodermes, grâce à la présence de l’air, envahissent bien vite le milieu, formant, à la surface de la cuve, dans l’espace de quelques jours, une épaisse couche d’un mycélium qui augmente de plus en plus. D'autre part, dans les régions méridionales, l'acidité est souvent insuffisante, le milieu devient donc moins défavorable aux bacilles et, sous l'influence de l’échanffement excessif du moût au cours de la fermentation, ceux-ci prennent possession du milieu et donnent naissance à des produits secondaires qui occasionnent la perte de récoltes entières. A ces diverses conditions, nous avons indiqué les remèdes qu’il convient d'apporter suivant le cas : chauffage du moût, réfrigération, augmentalion de l’acidité de la vendange, etc.; nous n’insisterons pas davantage sur un sujet déjà traité. Ce sur quoi on ne saurait trop appeler l'attention des viticulteurs neuchâtelois, c’est sur celte circonstance, à savoir : que la levure du vin est, sur le raisin, moins abondante que beaucoup d’autres organismes qui sont introduits avec elle dans la cuve, que ces orga- nismes se multiplient en même temps qu’elle dès le début de l’en- cuvage, et qu’ils ne seront supplantés par la levure qu’autant que les conditions seront favorables à celle-ci. D'où la nécessité de réa- liser, dès le début de l’encuvage, les conditions les plus favorables à la levure, pour que celle-ci puisse facilement devenir maîtresse du terrain et étouffer, par la rapidité de sa multiplication, le dévelop- pement des autres ferments. Tout retard, si faible qu'il soit, à la multiplication de la levure est très préjudiciable et il est indispen- sable de recourir, quand c’est nécessaire, à toute méthode qui tende à avancer, si peu que ce soit, la prise de possession du milieu par la levure alcoolique, nous en avons signalé quelques-unes, nous devons maintenant parler de l’ensemencement des cuves par des levures pures ou sélectionnées. Pasteur a montré qu'il existe un grand nombre de levures de vin et que suivant que c'est telle ou telle de celles-ci qui pré- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 47 domine dans la fermentation, on obtient un vin de qualité diffé- rente. Par des procédés spéciaux à la microbiologie, on peut isoler cha- cune d’elles et les cultiver à l’état pur. Si, en ce qui concerne la bière, par exemple, on ensemence dans un moût d'orge stérilisé une levure À, on obtiendra une bière spéciale à cette levure, et si on ensemence, au contraire, la levure B, on obtiendra une bière différente et spéciale à B. C’est d’ailleurs ce qui se fait couramment aujourd’hui et le brasseur peut obtenir telle bière qu'il désire. IL y a aussi plusieurs espèces de levures de vin et Pasteur écri- vait en 1876: « Le goût, les qualités du vin dépendent certaine- ment, pour une grande pari, de la nature spécifique des levures qui se développent pendant la fermentation de la vendange. On doit penser que si l’on soumettait un même moût de raisin à l’action de levures distincles, on retirerait des vins de diverses natures. » C’est de là qu’est né, il y a environ une dizaine d’années, l’em- ploi des levures pures dans la vinification. Dès le début du moins, le but que semblaient rechercher les fabricants de ces levures fut l'obtention du bouquet, d’après la pos- sibilité d'obtenir des vins de qualité avec des vins communs, en faisant fermenter le moût avec une levure provenant d’un meil- leur cru. Nous ne dirons rien des nombreuses discussions et polémiques que celle question a soulevées. Il est facile d'expliquer pourquoi les levures pures employées comme on l’a fait jusqu'ici, c’est-à-dire sans stérilisation du moût, n’ont pas donné en vinification ces résul- lats si sûrs et si constants obtenus en brasserie. C’est que le bras- seur ensemence la levure pure dans un moût débarrassé par la chaleur de tous les organismes qu’il contenait; dans ce cas, la le- vure peut se développer seule et communiquer au liquide les qua- liés qui lui sont propres. Mais, bien que l’on entre très sérieusement dans la voie de la stérilisation du moût, le vigneron a ensemencé jusqu’à présent la levure pure dans un moût non stérile et renfermant un grand uombre d'organismes divers. Or, nous savons que chaque levure a ses exigences spéciales et que loutes ne supportent ni la même tem- 4s ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. pérature, ni la même richesse saccharine, ni la même acidité. Il se pourra donc que la levure pure ainsi ensemencée trouvera dans le moût une température ou une acidité trop faible ou trop grande, en un mot, des conditions défavorables ; alors elle se développera difficilement et ce seront surtout les levures que le raisin apporte lui-même qui se multiplieront avec les autres ferments ; dans ce cas, le résultat pourra être nul ou négatif, ce qui arrive souvent. Il convient d'ajouter que les moûts ont une composition qui peut varier considérablement d’une année à l’autre, les conditions de température de la vendange peuvent également différer sensible- ment, de sorte qu'une levure, qui aura donné de bons résultats une année, peut en donner de médiocres et même de mauvais l’année suivante. En outre, les moûts de raisin renferment des substances mal défi- nies qui se trouvent même en quantité trop faible pour que la chimie puisse toujours les déceler d’une façon certaine et qui peuvent avoir sur la levure une influence très notable ; ces corps varient d’une année à l’autre ou d’un moût à l’autre ; on comprend qu'il puisse exister des levures qui donnent dans certains moûts de bons résul- tats el de mauvais dans d’autres. | Bien d’autres considérations s’ajouteraient à celles qui précèdent pour montrer combien est difficile, sinon illusoire, l’obtention, avec un moût commun non stérilisé, d’un vin possédant le bouquet d’un cru renommé. Il convient de mettre les viticulteurs en garde contre cette ten- dance qu’ils ont d’attribuer aux levures sélectionnées cette propriété du bouquet des grands crus ou de se l’exagérer. Îl ne faut pas cher- cher à faire ni du sauternes, ni du médoc ou du bourgogne dans un moût de raisins de Neuchâtel non stérilisé préalablement. Ce n’est nullement dans ce but que nous recommandons ici l'essai des levures pures, mais voici les desiderata que l’on peut cependant obtenir dans la plupart des cas : Nous avons dit précédemment combien il importe de mettre, dès le début de la fermentation, la levure alcoolique en possession du: milieu, afin de ne pas laisser aux autres organismes le temps de se développer. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 49 On comprend dès lors que si, au fur et à mesure de l’encuvage, on ensemence une levure bien appropriée au moût, pure, jeune, en pleine multiplication, elle se développera avec une intensité telle que es autres ferments ne pourront la supplanter. Au lieu d'observer ces fermentations lentes, irrégulières, incomplètes, compromises par le développement de bacilles et des ferments de maladies, on aura, par l’ensemencement de ces levures, des fermentalions plus rapides, plus régulières, plus complètes et, ce qui est le plus important, au- cune fermentation bacilluire nuisible, Par cela mème, la qualité du vin se trouvera améliorée, non pas tant par l'obtention du bouquet que par l'augmentation de l'alcool (car plusieurs moisissures et my- codermes brülent le sucre sans donner d’alcool ou détruisent l'alcool formé); — par un dépouillement plus rapide du vin; — par plus de couleur dans certains cas; — surtout par l’absence ou la moindre proporuon des produits secondaires et des ferments de maladies. Tels sont les avantages qu’on retire, dans la grande majorité des cas, des levures sélectionnées; il y a donc lieu d'entreprendre des essais dans celte voie. Une question se pose maintenant à la suite de ces premières con- clusions. Quelles levures doit-on employer? I ne faut pas trop chercher l'amélioration du vin dans l'emploi des levures étrangères, si renommés que soient les crus d’où elles pro- viennent ; on peut les essayer toutefois, mais ces levures ne seront pas toujours bien appropriées ni à la composition des moûts de Neu- châtel, ni aux conditions de milieu ; les résullats seraient donc in- certains. Les nombreuses recherches de M. E. Kayser, chef des travaux du laboratoire de fermentation à l’Institut agronomique, sur l'emploi des levures dans la vinification, ont montré « que les levures sont loin de se comporter toutes de la même manière, qu’il ne suffit nul- lement d’avoir des levures de grands crus pour obtenir de bons vins, que chaque levure semble exiger une température convenable et un rapport déterminé entre le sucre et l'acidité. D'ailleurs ce n’est qu'au bout d’un certain nombre d’années, à la suite d’essais variés et mul- tipliés, grâce à un choix judicieux de levures et surtout de levures indigènes, qu’on peut espérer obtenir une amélioration des vins. » ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1898. — 11. 4 cet Lo LR. € CNET STE re 4... 12 s - } n 2 4 eee 20 à Ve AR b0 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On ne saurait entreprendre des essais d’ensemencement de levures sans tenir grand comple de ces principales conclusions de travaux si autorisés ". Les levures de la région devront avoir la préférence ; elles devront être isolées à l’état pur et débarrassées de tous les ferments qui les accompagnaient. Cultivées par les procédés spéciaux de la microbio- logie, elles seront étudiées au point de vue des conditions de tem- pérature et d’acidité qui leur conviennent le mieux, régénérées de lemps à autre, et livrées au moment voulu aux viticulteurs. Disons maintenant quelques mots de leur mode d’emploi et cher- chons à obtenir avec elles le meilleur résultat. Au moment des vendanges, les fabricants de levures pures livrent celles-ci au vigneron dans des récipients de 1 à 10 litres et recom- mandent de verser le contenu de ces récipients dans la cuve, au fur et à mesure de l’emplissage. Cette manière de faire n’est pas suffi- sante, car on répartit une quantité de levure trop faible dans une trop grande masse de vendange. Il est préférable de recourir à la prépa- ralion d’un pied de cuve ou levain, c’est-à-dire à l’ensemencement de la levure pure, non pas directement dans la cuve, mais dans une gerle renfermant une certaine quantité de moût, de 90 à 60 litres, par exemple. Le levain est préparé deux ou trois jours avant le rem- plissage de la cuve. Au moment de son emploi, on voit qu’on dispose d’une quantité de levure bien supérieure à celle qui a servi à l’ense- mencement. Une objection à faire à cette manière d’opérer, c’est que le pied de cuve n’ayant pas été slérilisé, il a pu se développer, concurrem- ment avec la levure, des ferments divers qui peuvent rendre les ré- sultats moins satisfaisants. Aussi, croyons-nous devoir conseiller la stérilisation du pied de cuve de la façon suivante : Deux ou trois jours avant qu’on ait à l’'employer, on prépare, avec les raisins les plus beaux, un moût qu’on débarrasse à l’aide d’un tamis, des grappes et pellicules. Le jus est chauffé à 60 ou 70 degrés, 1. E. Kayser, Xecherches sur la vinificalion. (Bulletin du Ministère de l'Agri- Cullure, années 1893 et suivantes.) ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 5 pour tuer tous les organismes qui s’y trouvent contenus ; il est dès lors devenu stérile. Le jus est versé dans une gerle soigneusement lavée. Quand le moût est refroidi vers 20 degrés, on y vide le bidon de levure sélectionnée, on couvre la gerle d’un linge et on l’abandonne dans un endroit propre, où il y a le moins de passage possible. Quarante-huit heures environ après cet ensemencement, le pied de cuve est en pleine fermentation et sert à ensemencer la cuve. On commence par mettre au fond de la cuve environ 10 litres de levain préalablement bien agité, puis on verse ce dernier dans la cuve au fur et à mesure qu'on remplit celle-ci; on réserve quelques litres que l’on répartit à la surface de la vendange. Employée dans les conditions que nous venons d'indiquer, la le- vure donne une fermentation plus rapide, plus régulière et plus complète et occasionne, par ce fait, une amélioration du vin, au point de vue de sa qualité et de sa conservation. L'emploi des levures sélectionnées constitue donc un grand pro- grès dans la vinification et nous ne pouvons qu’en recommander l’essai aux viticulteurs neuchâtelois. Nous avons successivement examiné jusqu'ici les moyens d’amé- liorer la qualité du vin par la propreté du matériel vinaire, par le triage de la vendange, par le sucrage du moût ou par l'addition de verjus, par le tannissage ; nous avons insisté sur l'utilité d’un prompt départ de la fermentation et indiqué, pour l'obtenir, le chauffage du moût quand il y a lieu et l’emploi des levures sélectionnées et bien appropriées. Il convient maintenant de parler de la fermentation proprement dite, depuis la mise en cuve jusqu’au décuvage. Cuvage de la vendange. La première question qui se pose est celle qui a trait à la façon d'opérer cette fermentation. Doit-elle se faire en cuve ouverte et à chapeau flottant, ou bien en cuve fermée et à chapeau immergé? Voici comment on a opéré jusqu'ici le cuvage des raisins rouges : 52 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. le raisin, après foulage à la vigne, est versé dans les cuves, qu’on remplit aux trois quarts. Après plus ou moins de temps, suivant les circonstances, la fermentation part. Les grappes et les pellicules, poussées par le gaz carbonique, ne tardent pas à monter à la surface de la cuve, constituant ce qu’on appelle le chapeau. Une ou deux fois par jour, on le brise à l’aide d’un pilon et on l’enfonce dans le liquide. Celte fermentation en cuve ouverte et à chapeau flottant présente des inconvénients, si l’on apporte au refoulement du chapeau quel- que négligence, comme nous avons eu l’occasion de l’observer. En effet, le marc constitue à la surface de la cuve une masse po- reuse, où l’air a un très large accès ; aussi, la température y est-elle un peu plus élevée que dans les parties plus profondes du liquide. Le chapeau peut donc être le siège de fermentations diverses, sur- tout si la vendange a élé plus ou moins avariée et si la fermentation alcoolique s’est fait attendre. Grâce à l’air qui existe en abondance dans le marc, il se développe des mycodermes, des moisissures et autres végétations cryptogamiques ; le mycoderme du vinaigre peut lui-même se multiplier et acétifier le chapeau dans une proportion très faible, mais qui n’en compromet pas moins la qualité du vin. On croit assez communément que le gaz carbonique, produit pen- dant la fermentation, forme à la surface du moût une couche épaisse et imperméable à l'air, en raison de sa densité, et qui doit préserver le chapeau de toute altération. Il n’en est pas ainsi pour diverses causes. D'ailleurs, avant que le dégagement du gaz carbo- nique soit assez abondant pour s'opposer au développement de ces organismes aérobies, il a pu se produire déjà des fermentations nui- sibles à la conservalion du vin. Il est reconnu, en outre, qu’il ya une production d’acides volatils, principalement d’acide acélique, indices de fermentalions défectueuses. De nombreuses expériences ont été entreprises par divers auteurs, principalement par le professeur italien Pollacci, pour déterminer la valeur comparée des fermentations en cuves ouvertes ou en cuves fermées à chapeau submergé. Il est résullé de ces travaux une supériorité de la fermentation en cuve fermée, dont les principaux avantages sont d'éviter le refoule- 3 ment, de mettre le marc à l'abri de toute trace d’acétification ou au- tres altérations produites par les moisissures, d'obtenir une fermen- tation plus complète, une coloration plus intense, une suppression ou une production moindre de fermentations défectueuses et, par suile, une conservalion du vin mieux assurée. En raison de ces avan- tages, la fermentation en cuves fermées et à chapeau submergé a été presque partout adoptée; il n’y a aucune raison pour ne pas l'essayer également à Neuchâtel, le vin n’aura qu’à y gagner sensiblement. Il convient de répondre ici à diverses objections qui nous ont été Qt ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. posées. Quelques viticulteurs ont fait l’essai, en 1893, des fermentations en cuves fermées. Mais l’année 1893 a été, par suite de la tempéra- ture excessive qui a régné au moment des vendanges et à cause de l'insuffisance d’acidité du moût, toul à fait désastreuse dans toutes les régions viticoles. Les viticulteurs, qui avaient fait l’essai des fer- mentations en cuves fermées, ont fait rejaillir sur celui-ci les acei- dents survenus à leur récolte et qu’ils ne savaient autrement expli- quer. Il serait tout aussi injuste d'attribuer aux cuves fermées la produc- tion de mycodermes qui se développent abondamment, comme en 1897, à la surface des cuves, dans les années froides, où la fermen- tation se fait longtemps attendre. Si les viticulteurs, en général, avaient des notions plus exactes des phénomènes qui constituent la fermentation, ils rapporteraient à leurs véritables causes les accidents qu'ils observent dans leur vinification. | Nous constatons le fait, prouvé par de nombreux travaux, d’une amélioration due au mode de fermentation en cuve fermée et à cha- peau immergé ; cela nous permet d’en recommander l'essai. Aération du moût. La présence de l'air est non seulement nécessaire, mais indispen- sable, pour permettre la multiplication de la levure et, par suite, le départ de la fermentation. Dans maintes circonstances, nous avons eu l’occasion d’observer cette influence, connue d’ailleurs depuis longtemps déjà. : D4 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Pasteur écrivait à ce sujet dans ses Études sur les vins : « J'ai constaté que lorsque le moût est exposé au contact de l’air en grande surface pendant plusieurs heures, ou agité avec de l’air, sa fermen- lation est incomparablement plus active que celle du même moût non aéré. Îl est digne d’attention que l’aération peut produire des effets aussi sensibles, alors même qu’on l’effectue pendant la fermen- tation, lorsque le liquide est déjà chargé d'acide carbonique et de levure alcoolique. « Les expériences suivantes! ne laisseront pas de doute à ce sujet, mais elles montreront, d'autre part, que l’activité plus grande de la fermentation pendant les premiers jours n’est pas durable, qu’elle fait bientôt place à un ralentissement très marqué, et que, si l’on n'aère pas de nouveau, le moût primitivement non aéré finit par prendre le dessus... l'acidité des moûts a augmenté pendant la fer- mentation.., mais le moût qui avail été aéré a moins gagné en aci- dité par la fermentation que le moût non aéré... A l’aération du moût correspondrait donc un moyen d’apporter quelque changement dans les proportions des principes résultant de la fermentation. » Un autre effet très utile de l’aération du moût a été signalé par un savant américain, Olt, qui admet que les matières albuminoïdes sont absorbées d’autant mieux par la levure que l'oxygène est plus abondant dans le moût. Or, nous savons que ces matières albuminoïdes constituent une des causes les plus importantes des altérations des vins, qui se produisent subséquemment ; à ce point de vue donc, l’aération contribuerait à assurer la conservation du vin. Voici comment celte aération se pratique facilement : le moût s'écoule à l’aide d’un robinet à la partie inférieure de la cuve et se rend sur un tamis destiné à retenir les grains et à diviser le liquide. Il tombe ensuite dans une petite cuve, sur laquelle est placée une rigole permettant au liquide de se répandre sur une plus large sur- face et d’être ainsi largement en contact de l’air. Une pompe aspire le moût dans cette gerle et le refoule à la partie supérieure de la cuve, où 1l vient s’étaler sur une planchette de 40 à 50 centimètres de côté, qui lui permet de se répartir à la surface de la cuve. 1. L. Pasteur, Études sur les vins, p. 278. 2 ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 29 Cette aération peut durer plus ou moins de temps suivant la con- tenance des cuves ; il faut faire en sorte que presque tout le liquide ait eu le contact de l’air. À défaut de pompes, ou pour des cuves de faibles dimensions, le remontage du moût peut à la rigueur s’effectuer à l’aide de gerles et à la main. Vers la fin de la fermentation, si l’on constate un ralentissement ou un arrêt de fermentation, on doit répéter avantageusement cette aération, qui permettra à la levure de poursuivre et d'achever la transformation du sucre. Mais ici, comme dans beaucoup d’autres cas, il faut se garder de toute exagération. Si l’aération est très utile, quand elle est prati- quée modérément, elle peut être nuisible si on l’effectue d’une façon immodérée, en mettant le moût trop souvent et trop longtemps au contact de l'air. En effet, il est reconnu qu’il se produit alors une oxydation excessive de la matière colorante du vin; cette matière ainsi oxydée outre mesure se précipite et le vin perd de sa couleur. Nous savons que les viticulteurs de Neuchâtel cherchent à conserver au vin rouge le plus de couleur possible et nous devons les avertir des inconvénients que pourraient présenter, à cet égard, une aéra- tion du moût immodérée. C’est donc surtout dès le début de la fermentation qu’il convient de metlre le moût au contact de l’air, et, dans certains cas seulement, une aération peut être utile dans le cours de la fermentation, si l’on constate chez celle-ci un arrêt brusque pour une cause quelconque. Ici, nous devons rappeler les services que peut rendre l’emploi du thermomètre, pour suivre la marche de la fermentation. Décuvage. Nous venons de-passer en revue les phases les plus importantes de la vinification et indiquer les conditions les meilleures dont il est nécessaire de les entourer, pour obtenir une fermentation aussi sa- tisfaisante que possible. Le dernier terme de la fermentation proprement dite est le décu- vage, qu'il convient d’effectuer en temps opportun. Nr FT pp DR ps dl MEL codé 56 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Ce moment propice, auquel le vin doit être séparé du marc, quand il s’agit de vins rouges, est celui où la fermentation est terminée, c’est-à-dire où tout le sucre, ou à peu près, a été transformé en alcool. A ce moment, la densité du vin est presque égale à celle de l’eau et si l'on plonge dans le liquide le mustimêtre, dont nous avons déjà parlé, il s'enfonce à un point situé vers le sommet de la tige, mar- qué 1 000, qui indique que presque tout le sucre a disparu. Un autre indice précieux à cet égard, c’est l’abaissement de la température du moût. £nfin, la dégustation n’est pas moins utile pour juger des traces de douceur que le moût peut encore renfermer, vers la fin de la fer- mentalion, Tels sont les moyens de juger de lopportunité du décuvage ; on devra y recourir de préférence à ceux employés le plus générale- ment, comme l’enfoncement du chapeau, et qui sont tellement in- certains qu'ils exposent souvent à des mécomptes. D'une façon générale, il y a lieu d'opérer le décuvage aussitôt que possible, dès que la disparition du sucre est à peu près complète ; une macération trop prolongée avec le marc ne pourrait avoir que des inconvénients. D'un autre côté, il est dangereux pour la conservation du vin d’ef- fectuer prématurément le décuvage. La fermentation n'arrive pas toujours à faire disparaître tout le sucre, mais il faut faire er sorte qu'il ne reste de ce dernier que le moins possible, sans quoi la fer- mentalion lente, qui se produit postérieurement dans les lægres, ne suffirait pas à opérer la combustion complète du sucre, qui pourrait alors se transformer en divers produits secondaires, susceptibles d’allérer profondément la qualité du vin. Si l'on s'aperçoit, vers la fin de la fermentation, que celle-ci sem- ble arrêtée, alors que le moût présente encore une douceur trop prononcée, il conviendra d’y remédier. À cet effet, si l’on dispose d'une cuve en pleine fermentation, on pourra ajouter quelques serles de celles-ci dans la cuve dont la fermentation est ralentie. Ou bien encore, on pratiquera une aération du moût, comme nous l’a- vons indiqué précédemment. De la sorte, on occasionnera la multi- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. "JE plication de la levure et la fermentation pourra se poursuivre jusqu’à la disparition à peu près intégrale du sucre. Mais il est probable qu’on n’aura pas à observer ces fermentations incomplètes, si la fermentation a été conduite avec toutes les pré- cautions que nous avons recommanilées dans ce qui précède. DEUXIÈME PARTIE DE LA CONSERVATION DES VINS Nous n'avons pu assister aux pratiques ordinaires employées à cet égard à Neuchâtel, notre départ ayant dû avoir lieu avant même que les décuvages fussent effectués. Mais les renseignements que nous avons recueillis auprès des viticulteurs nous ont permis de juger des défectuosités auxquelles il conviendra de remédier, ici encore, à la manière de faire habituelle. Nous allons passer rapidement en revue les diverses manipula- ions auxquelles le vin est soumis après le décuvage. Ouillage. Lorsque le vin vient d'être décuvé, il contient encore des traces de sucre. Sous l’action de l’air que le moût subit pendant le trans- vasement, la levure acquiert un regain de jeunesse et achève de brüler le sucre que la fermentation tumultueuse n’avait pu entière- ment transformer. Cette fermentation lente doit durer le moins longtemps possible, afin que le dépôt des matières en suspension et des lies puisse s’effectuer assez rapidement, ces matières élant sus- ceptibles d’occasionner diverses allérations. Tant que la fermentation secondaire n’est pas terminée, on laisse les lægres imparfaitement fermés, pour que les petites quantités de gaz carbonique qui se forment puissent sc dégager. Mais, dès qu’elle a cessé, il convient de les boucher plus complète- ment, puis de les tenir toujours remplis par la pratique de l’ouillage. ter CURE 58 : ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. En effet, il se produit constamment dans les lægres, postérieure- ment à leur remplissage, un vide qui augmente peu à peu, princi- palement à cause de l’évaporation du liquide à travers leurs parois el à cause de limbibition de celles-ci. Or, il est indispensable d’évi- ter un trop large accès de l’air en présence du vin fait. Ce dernier contient des germes qui se développent rapidement; chacun sait qu’une bouteille en vidange se couvre, en quelques jours, d’une couche de mycoderme formant une pellicule blanchâtre, appelée communément « fleur du vin ». Ce mycoderme est presque toujours accompagné de celui du vinaigre, dont la facullé de multiplication est considérable et qui ne tarde pas à fixer sur l'alcool l'oxygène de l'air et à le transformer en vinaigre. Aussi, est-il nécessaire de tenir les legres pleins et de ne tolérer aucune négligence à cet égard. L’acétification est le principal aceci- dent causé par la vidange des lægres. Nous avons eu l’occasion d'observer les désastres dont elle est fréquemment la cause dans certaines régions, où l’ouillage n’est pas effectué, par ignorance de celte pratique cependant si élémentaire. Mais, à Neuchâtel, on veille, tout au moins généralement, à tenir les lægres pleins et nous nas dispenserons d’insister davantage. Rappelons seulement que c’est du vin sain et aussi semblable que possible à celui des lægres, qui doit servir à leur ouillage, que ce dernier doit être fait avec précautions, pour éviter de refouler dans la masse du liquide la surface de celui-ci, dans le cas où elle serait légèrement altérée ; enfin que les fûts qui renferment le vin destiné à l’ouillage doivent eux-mêmes être tenus exactement remplis ; quand la quantité de vin est insuffisante pour qu’ils le soient, 1l faut la dis- tribuer dans des fûts plus petits, dont l’un sert à l’ouillage de ces divers récipients. Soutirages. Cette question des soutirages est, à notre avis, des plus impor- tantes dans le cas particulier de la conservation des vins à Neuchâtel ; nous lui devons une étude assez approfondie. Dès maintenant, nous pouvons dire que les soutirages sont insuf- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 59 fisants et qu’ils sont pratiqués d’une façon défectueuse. Pour justi- fier notre appréciation, quelques notions préliminaires sont indispen- sables sur la nature et l'influence des matières en suspension dans le vin et sur l’action de l’air sur le vin fait. Un préjugé des plus répandus est celui qui consiste à croire que « la lie nourrit le vin » et d’après lequel il semblerait utile de laisser le plus longtemps possible le vin sur ses lies. Il est facile de montrer combien une telle assertion est inexacte. Les matières que le vin nouveau renferme en suspension sont de diverses sortes : ce sont d’abord des débris du raisin lui-même, de pulpe, de peaux et de grappe; en outre, la levure, qui, bien que veillissant, n’en conserve pas moins quelque temps sa vitalité ; enfin, les moisissures, mycodermes et ferments de maladies qu’apporte la vendange, ou qui ont pu apparaître au cours de la fermentation. Beaucoup de ces derniers ne peuvent se multiplier, soit à cause de l'acidité du vin (bacilles), soit parce que le milieu est alcoolique ou parce qu’il est saturé de gaz carbonique, qui s'oppose au déve- loppement de la plupart d’entre eux (moisissures, mycodermes). Mais, parmi tous ces organismes, il en est qui pourront fort bien s’'accommoder de ce milieu alcoolique et acide : «Le monde des infini- ment petits est tellement peuplé, qu'il y a beaucoup d’espèces dans ce cas, et qu’il n’y a lieu de s'étonner que d’une chose, dit M. Du- claux, c’est que le chiffre des maladies des vins ne soit pas plus grand ; il est probable qu’il n’est aussi petit que par suite de l’im- perfection de nos connaissances *. » Nous venons de constater la possibilité de l’envahissement du vin par une multitude d'organismes dont nous devrions examiner le rôle. Nous dirons seulement que tous ces ferments bons ou mauvais, y compris la levure elle-même, donnent naissance à des produits divers : acides volatils, etc., et qu’ensuite, vivant aux dépens d’eux- mêmes avant de mourir et de se putréfier, ils fournissent des pro- duits de désassimilation : leucine, tyrosine, etc., inutiles ou dange- reux. 1. E. Duclaux, Microbiologie, p. 623. 60 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Après la fermentation lente, que les premiers froids ont arrêtée, la masse du liquide est moins agitée et Lous ces ferments se déposent en grande partie au fond des tonneaux ; d'autre part, les froids de l'hiver les rendent inertes. Dès qu'il survient une température plus favorable, l’activité des ferments se réveille, et ceux-ci sont soulevés et entraînés dans le liquide par les bulles du gaz carbonique dont le vin est saturé à froid, et qui se dégagent sous l'influence de l’éléva- tion de la température ; ils se mélangent par conséquent au vin lim- pide, qu'ils peuvent profondément altérer. Ainsi se trouvent justifiées la pratique des soulirages et la néces- sité d’y recourir aussitôt que possible. Appliquons ces premières notons au cas particulier qui nous in- téresse. Le premier soutirage a lieu à Neuchâtel en mars ou avril ; nous avons su que souvent il est effectué trop tardivement ; les considé- rations précédentes montrent qu’il faut bien se garder d'attendre l'apparition des premières chaleurs. Nous pensons qu'il y aurait intérêt à pratiquer ce soutirage dès la fin de décembre ou le commencement de janvier, surtout si les lies sont abondantes, et nous conseillons vivement aux viticulteurs d’es- sayer cette manière de faire. Le second soutirage serait fait en mars ou commencement d’avril, ayant l’apparition des premiers beaux jours ; le troisième, fin août ou commencement de septembre. Si les vins étaient conservés en tonneaux pendant plusieurs années, il serait suffisant de ne plus les soutirer qu’une seule fois par an. Ajoutons qu’il faut choisir pour ces soutirages un temps clair, froid, avec vent du nord, qui coïncide avec une pression atmosphé- rique assez forte ; dans ces conditions, les bulles de gaz carbonique ont une moindre tendance à se dégager et à produire à l’intérieur du liquide ces courants, dont le résultat est de mélanger au vin clair les lies les plus légères et les ferments dont on cherche justement à se débarrasser. Nous avons vu, au début de cette étude, qu’on a l'habitude à Neu- chôtel de mettre souvent le vin blanc directement en bouteilles, dès ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. GI le premier soutirage, et le vin rouge dès le second. Nous sommes amené à conclure que les soutirages, non seulement doivent être effectués plus hâtivement, mais aussi qu'ils doivent être plus nom- breux, car on comprend facilement le danger de mettre en bouteilles un vin contenant encore des organismes divers et des ferments de maladies. Ici intervient la considération des exigences de la clientèle; nous nous réservons d'y revenir plus loin. A propos du nombre des soutirages, on nous a objecté que le vin perd considérablement de sa couleur, de sa force et de son bouquet, qu'il devient en un mot, plus plat, suivant l’expression consacrée. Nous avons trouvé l’explication de cet effet dans la façon dont les soulirages sont pratiqués. À ce sujet, quelques notions sur l’action de l’air sur le vin fait sont indispensables. Nous ne pouvons mieux faire que d'emprunter à Pasteur les con- sidérations qui vont suivre et qui ont fait l’objet de sa part de si re- marquables recherches. Les travaux de Pasteur l’ont conduit à considérer l'oxygène de Jair, non comme nuisible, mais comme très utile au vin. Selon lui, c’est l'oxygène qui fait le vin; c’est par son influence que le vin vieillit; c’est lui qui modifie les principes acerbes du vin nouveau et en fait disparaître le mauvais goût ; c’est encore lui qui provoque les dépôts de bonne nature dans les tonneaux et dans les bouteilles. Et cependant on considère l'oxygène de l’air comme l'ennemi du vin. C’est qu'il faut distinguer avec un très grand soin l’action brusque “et l’action lente de l'oxygène de l'air sur le vin. Il n’est pas difficile de démontrer que les pratiques de la vinification, si ennemies qu’elles paraissent être de l'introduction du gaz oxygène dans le vin, sont éminemment propres à soumeltre ce liquide à une aération progres- sive et lente, en même temps qu’elles s’opposent à une aération brusque et prolongée. Pour développer ces idées, Pasteur entre plus avant dans l'exposé des faits d’après lesquels il envisage l’action de l’oxygène de l’air sur le vin comme une action bienfaisante et indispensable. 62 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Mais il a soin d’insister à diverses reprises sur cette condition que l’action de l'air doit être lente, telle qu’elle l’est d’ailleurs dans pres- que toutes les pratiques de la conservation des vins, dans des ton- neaux de bois où l'air pénètre très lentement, par suite de l’évapo- ration du liquide, dans la mise en bouteilles, etc. D'autre part, Pasteur constate que loxydation du vin ne doit pas être poussée trop loin, car alors elle affaiblirait le vin, l’userait et enlèverait au vin rouge presque toute sa couleur. Ne reconnaît-on pas là précisément dans ces derniers effets les reproches que nous avons tant de fois entendu formuler contre la pratique des soutirages. Nous pouvons maintenant en fournir l’ex- plication. Nous venons de voir que l'air est utile, mais seulement à la condi- tion que son action soit très lente, du genre de celle à laquelle il est soumis dans les tonneaux de bois; qu’en somme le vin fait ne doit pas être exposé à l’air brusquement, sur une trop large surface ; dans ce cas, l'air serait nuisible et occasionnerait les graves incon- vénients de son affaiblissement que nous avons signalés. Or, ce sont ces dernières conditions essentiellement défavorables que l’on rem- plit dans la plus large mesure par les soutirages, tels qu’ils sont pra- tiqués à Neuchâtel. . En effet, les soutirages sont pratiqués à la brande : le vin jaillit en nappe dans une gerle ou une brande et de là il est déversé dans le nouveau lægre. De la sorte, le vin se trouve mis abondamment au contact de l’air, ce qui lui fait perdre sa couleur et ce qui l’affaiblit ; cet effet est done dû non pas au soutirage lui-même, mais unique- ment à la façon défectueuse dont on l’exécute. Nous croyons devoir insister sur ce point auprès des viticulteurs et les engager à pratiquer dès lors les soutirages à la pompe et de façon à mettre le vin le moins possible au contact de l'air. Collages. Les collages n’ont jamais été employés à Neuchâtel, malgré luti- lité qu'ils présentent. Les soutirages ne permettent pas toujours d’obtenir un vin par- ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 63 faitement limpide, et 1l est souvent nécessaire d’aider à la clarifica- tion du vin soit par la filtralion, soit par un collage. Les clarifiants les plus employés sont l’albumine de l’œuf et la colle de poisson ; la première convenant surtout aux vins rouges, la seconde aux vins blancs. Ces matières, qui sont des substances azotées, ont la propriété de se combiner au tannin et de former avec cet élément un précipité qui, en se déposant, entraine les corps en suspension. Quelquefois, les vins blancs « prennent mal la colle », c’est-à-dire ne se clarifient pas. Cela provient de ce fait que, ces vins manquant généralement de tannin, le précipité dont nous parlions ne peut se former et occasionner le dépôt des impuretés. Aussi, doit-on, dans ce cas, ajouter au vin, avant le collage, environ 10 gr. de tannin par hectolitre. Après le collage, le vin est abandonné au repos pendant au moins huit jours, puis soutiré. Le collage peut affaiblir quelque peu le vin; aussi, d’une façon générale, n’y doit-on recourir qu’exceptionnellement. Mise en bouteilles. La mise en bouteilles est effectuée à Neuchâtel beaucoup trop pré- maturément: pour les vins blancs, ils sont souvent mis en bouteilles au premier soutirage, et au second pour les vins rouges. Nous avons dit précédemment qu’un plus grand nombre de sou- tirages s’imposent si l’on veut avoir des vins de bonne garde ; toutes les considérations que nous avons exposées sur la nature des ma- lières en suspension du vin et leur rôle s'appliquent ici; nous n’y reviendrons pas. Mais nous devons insister sur ce point, à savoir que Jes vins ne doivent être mis en bouteilles que s'ils sont parfaitement limpides et débarrassés des sels et surtout des ferments qu'ils ren- ferment. Ces conditions ne peuvent être obtenues que par plus de soutirages. En ce qui concerne les vins blancs, la clientèle apprécie beaucoup ceux mis en bouteilles au premier soutirage et désignés sous le nom de vins « sur lies », à un moment où la fermentation lente n’est pas 64 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. encore entièrement terminée. Alors le sucre n’a pas complètement disparu; d’autre part, 1l reste encore de la levure en suspension ; lors de la mise en bouteilles, l’activité de la levure se réveille, la fermentation reprend et l’on obtient des vins mousseux, très recher- chés par cela mème. Nous répélons que plus de soutirages, voire même un mutage, assureraient mieux la conservation de ces vins; mais nous n’osons trop engager les viticulteurs à changer à cet égard leur manière de faire, à cause des exigences de la clientèle. Le mutage ou soufrage, par exemple, arrêterait toute fermentation, nécessaire à l’obtention des vins mousseux. Nous avons d’ailleurs, sur ce point, l'espoir que les améliorations apportées à la vinificalion proprement dite, contribueront beaucoup, même en ce qui concerne les vins sur lies, à leur conservation, et permettront de satisfaire en même temps aux exigences de la clien- tèle, avec laquelle, en somme, il faut toujours compter. Des maladies des vins, des causes qui les provoquent et des moyens de les prévenir. Les maladies des vins ont occasionné à Neuchâtel depuis un cer- tain nombre d’années des pertes très notables; en ce qui concerne les vins rouges, plusieurs des principaux propriétaires ou encaveurs voient souvent une partie de leur récolte sérieusement compromise, principalement par l’amertume qui est, on le sait, très spéciale au cépage de la région. Quant aux vins blancs, ils sont fréquemment atteints de la maladie des vins filants, désignée sous le nom de graisse des vins. La situation exige donc qu’il soit porté remède à un état de choses aussi regrettable. La connaissance des causes qui provoquent ces maladies doit pré- céder l’étude de leur traitement. Au commencement de ce siècle, et pendant ceux qui l’ont devancé, les opinions les plus vagues et les plus inexactes ont été émises sur les causes des maladies des vins. Pasteur à pu établir celle opinion nouvelle, qui constitue l’un des ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 65 principaux résultats de son mémorable travail sur les vins, que les variations qui s’observent dans les qualités du vin abandonné à lui- même reconnaissent pour causes des influences extérieures à sa composition normale. En ce qui concerne les maladies des vins qui nous occupent ici, Pasteur a montré qu’elles sont dues à la présence de végétations pa- rasitaires microscopiques, qui trouvent dans le vin des conditions favorables à leur développement, et qui l’altèrent, soit par soustrac- tion de ce qu’elles lui enlèvent pour leur nourriture propre, soit principalement par la formation de nouveaux produits, qui sont un effet même de la multiplication de ces parasites dans la masse du vin. De là, cette conséquence claire et précise qu'il doit suffire, pour prévenir les maladies des vins, de trouver le moyen de détruire la vitalité des germes des parasites qui les constituent, de façon à empê- cher leur développement ultérieur. Pasteur a montré ensuite combien il est facile d'atteindre ce but par le chauffage des vins, qui a pris depuis une grande extension _en raison de la simplicité et de la faible dépense qu’il nécessite. Il a donné à diverses reprises les démonstrations expérimentales des bons effets du chauffage, en demandant l’avis des personnes les plus compétentes et en sollicitant celui le plus autorisé, sans contre- dit, de la Commission préposée aux intérêts du commerce des vins dans Paris. Voici les conclusions d’un des rapports de cette Commission et qui acquièrent leur principale valeur par ce fait qu’elles s’appli- quent à des vins chauffés et non chauffés conservés depuis trois ou quatre années : «Il est impossible de nier l'immense résultat obtenu _par le chauffage sur les vins en bouteilles, au point de vue de leur conservation. « Le temps écoulé depuis leur chauffage ne permet plus aucun doute sur son efficacité. Son effet est surtout incontestablement pré- ventif; il détruit les germes des maladies auxquelles les vins sont généralement sujets, sans pour cela nuire au développement de leurs qualités. « Tous les vins chauffés sont bons; il n’y a d’altération ni dans ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE — 1893. — 11, 5 66 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. leur goût, ni dans la couleur ; leur lHimpidité est parfaite; ils sont, en conséquence, dans toutes les conditions désirables pour donner salisfaction aux consommateurs. Il n’y a rien de plus à dire, croyons- nous, pour témoigner toute notre confiance dans la valeur du pro- cédé de M. Pasteur. « Nous croyons ce procédé parfaitement pralique et peu coûteux, surtout si on l’applique sur de grandes quantités. » Les expériences de Pasteur avaient porté sur des vins de qualités les plus diverses, depuis les vins communs, jusqu'aux vins les plus fins de la Bourgogne. Il n'avait eu que rarement l’occasion de les effectuer sur des vins de Bordeaux. Des expériences récentes dirigées par M. Gayon, sur les vins de cette dernière région, ont pleinement confirmé les résultats obtenus par Pasteur. M. Gayon a fait d'importants travaux non seulement sur les con- ditions d’une bonne pasteurisalion, et sur l’action de la chaleur sur les divers ferments, mais aussi sur les appareils employés pour le chauffage en bouteilles et en füts. Nous ne pouvons entrer dans le détail de ces études, mais nous renvoyons au mémoire de M. Gayon‘. Nous voulions seulement insister sur ce fait que, d’ après ces ex- périences, quelles que soient l’origine et la nature d’un vin, le chauf- fage bien appliqué le préserve de toute altération maladive et que celte opération n’atteint ni la couleur ni le bouquet des grands vins, qu'elle ne nuit point à leur vieillissement, qu’elle ne le hâte ni ne le retarde, et qu’en outre elle est pratique et peu coûteuse. Nous ne doutons pas que ces résultats ne frappent l’attention des viticulleurs neuchâtelois et ne les engagent à entreprendre quelques essais de chauffage de leurs vins. 1. Étude sur les appareils de pasteurisation des vins, par M. Gayon. Extrait de la Revue de Viliculture, Paris, 1895. 4e. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 67 CONCLUSIONS Dans cette étude, j'ai entrepris la discussion des méthodes ordi- paires de la vinification neuchâteloise en l’appuyant sur des obser- vations précises ; j'ai cherché à me convaincre des défectuosités qu’elles présentaient et à les mettre en concordance avec les faits acquis par la science à la pratique. Ces recherches auraient pu être exposées plus succinctement. Je les ai traitées à dessein avec tous ces détails, afin d’initier quelque peu les viticulteurs à ces principales questions théoriques, si intéressantes et si importantes pour eux. Je les engage vivement à s’efforcer d'acquérir une connaissance plus complète des phénomènes de la fermentation, de l'influence de la température et de l’acidité des moûts, des exigences de la levure, des conditions de la conservation des vins. Ces notions leur per- meltraient de mieux comprendre les causes des accidents qu'ils observent dans leur vinification et les pratiques susceptibles d’y re- médier. Il est maintenant utile de résumer les principales conclusions qui découlent des considérations précédentes. Vendange. — Je ne saurais d’abord trop insister sur la nécessité d'assurer la propreté la plus parfaite du matériel vinaire, non seu- lement en ce qui concerne les gerles, les cuves, les pressoirs et les lægres, qui servent à la cueillette et à la fermentation, mais en tout ce qui touche aux diverses manipulations auxquelles le vin est sou- mis jusqu’à sa mise en bouteilles. Dans tous les pays, on observe une grande négligence à cet égard ; il convient de s’astreindre à plus de rigueur dans ces soins, qui ne demandent aucune dépense sup- plémentaire. De même, les propriétaires feront-ils bien d'adopter le triage de la vendange à la vigne et de veiller à ce qu'il ne soit introduit de raisins pourris et moisis, ni de corps étrangers, feuilles, terre, etc., qui ne peuvent que nuire à la qualité du vin et à sa conservation. 68 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Ce triage fait à la vigne sera moins coûteux que s’il est effectué à la cave ; 1l occasionnera cependant un supplément de dépenses; mais ces frais seront compensés par l’amélioration de la qualité du vin. Améliorations du moût. — Les viticulteurs auront le plus grand intérêt à examiner eux-mêmes la teneur en sucre de leurs moûts ; l'emploi du mustimèêtre ou de l’aréomètre est facile et à la portée de tous; il donne d’utiles indications sur la richesse saccharine du moût, sur celle du vin fait, et sur la quantité de sucre à ajouter pour obtenir un vin d’un degré alcoolique donné. Le sucrage est susceptible de fournir de bons résultats; mais on ne devra y avoir recours que pour les moûts faibles, dans le cas d’une maturité insuffisante. Là, comme partout ailleurs, il faut évi- ier les abus, opérer d’une façon judicieuse et avec ménagement, c'est seulement dans ces conditions que le sucrage est très recom- mandable. La détermination de l'acidité du moût est plus délicate; cepen- dant, elle ne devra pas être négligée, car l'influence de l'acidité sur la fermentation est très importante. Quant au tannin, il n’existe pas dans le moût aussitôt après le foulage; mais il se trouve contenu en proportions élevées dans di- verses parties du raisin. Il n'apparaît qu’au fur et à mesure de la fermentation, sous l’action dissolvante de l'alcool formé et de la température. On comprend que les vins blancs n’en renferment que des traces, puisqu'ils ne fermentent pas avec le marc. Dans la crainte qu’un contact prolongé du moût avec les grappes puisse nuire à la coloration et déplaire à la clientèle, je n’oserai conseiller un cuvage de plus de durée ; mais je recommande l'essai du tannisage du moût, vers la fin de la fermentation. J’ai confiance sur les bons effets de ce tannisage, qui pourra contribuer à la conservation du vin, par lui-même, et par la précipitation partielle d’une partie des matières albuminoïdes, causes de diverses altérations; je pense aussi que, par.ce fait, il aidera à la clarification plus rapide du vin. Les vins rouges fermentent avec le marc, le Lannin y apparaît plus où moins rapidement, mais il parvient à y être contenu dans ÉTUDES SUR LA VYVINIFICATION. 69 des proportions qui peuvent dispenser d’une addition au moment du cuvage. Telles sont les principales améliorations dont le moût est suscep- tible. Fermentation. — En ce qui concerne la fermentation proprement dite, J'insiste auprès des viticulteurs pour qu'ils fassent un fréquent usage du thermomètre, car l'influence de la température initiale du moût à son arrivée au pressoir est considérable sur le départ de la fermentation et sur l’échauffement maximum atteint par le moût. Pour que celle-ci parte et se poursuive dans de bonnes conditions, la température du raisin doit être de 15 à 20 degrés. Si elle est inférieuré à 15 degrés, la levure se multiplie diffici- lement, et ce relard peut avoir des inconvénients. Dans ce cas, il convient de chauffer une partie du moût, comme je l’ai indiqué ailleurs. Si elle est supérieure à 25 degrés, l’échauffement maximum atteint par le moût peut être funeste à la levure et compromettre sérieuse- ment la qualité du vin. Le moyen le plus pratique d’y remédier est le refroidissement du moût par des appareils spéciaux. En raison de la rareté de ces circonstances dans la région, je ne crois pas devoir entraîner les viticulteurs neuchâtelois dans des dépenses résultant de l’achat de réfrigérants. Dans ces années exceptionnellement chaudes, où le raisin, en gé- néral, ne renferme plus qu’une quantité d’acide insuffisante, il fau- dra surveiller l’acidité du moût et l’augmenter, s’il y a lieu, comme je l’ai indiqué précédemment. J'insiste beaucoup sur ce principe qu’il est indispensable d'assurer au plus tôt la prise de possession du milieu par la levure alcoolique et d'empêcher le développement de tous les autres organismes qui accompagnent. On ne devra négliger aucun moyen propre à obte- nir ce résultat. Il y aura lieu de recourir à ce point de vue à l’aération du moût, dès le début de la fermentation, pour aider à la multiplication de la levure et, en outre, à des essais d’ensemencement avec des levures sélectionnées. 70 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Ces derniers devront être faits avec toutes les précautions qu’ils exigent; il est reconnu qu'ils occasionnent une fermentation plus rapide, plus régulière et plus complète et, en s’opposant ainsi au développement des ferments de maladies, peuvent contribuer à l’a- mélioration des vins. Les levures de la région auront sans doute plus de chances que les levures étrangères de fournir de bons résultats. La fermentation devra être essayée en cuve fermée, avec chapeau immergé et maintenu à l’aide d’un clayonnage; le mode de cuvage, tel qu’il s’est toujours pratiqué, peut présenter des inconvénients, si on apporte quelque négligence au refoulement du chapeau. Pendant la fermentation, il sera utile de déterminer une fois ou deux par jour la température du moût, car c’est la façon la plus simple et la meilleure de juger de la marche de la fermentation et des précautions à prendre dans le cas d’une température trop éle- vée; elle permettra aussi de constater le moment le plus opportun auquel le décuvage doit être effectué. Avant ce dernier, si, par suite d’un échauffement excessif du moût, on observe un arrêt de la fermentation et une douceur trop grande du vin, on pourra faire une aération qui, par le contact de l'air qu’elle fournira à la levure, aura pour effet de réveiller l’acti- vité de celle-ci et lui permettre de brûler le plus grand excès de sucre qui persistait. Le décuvage aura lieu aussitôt que possible, dès que presque tout le sucre aura disparu; toute macération prolongée du moût avec le marc ne pourrait être que nuisible. Ces essais ne peuvent être exécutés qu’une fois par an; si, pour une cause ou pour une autre, par suite de conditions de milieu dé- favorables, les résultats ne sont pas aussi satisfaisants qu’on eût pu l’espérer, il ne faudra pas s’en décourager trop tôt, mais rechercher les causes qui auront pu troubler l'essai avant de rejeter sur lui, sans réflexion, l'insuffisance des résultats obtenus. Cette tendance est, dans certains cas, assez fréquente dans le monde agricole; on doit se rendre compte que si, dans ce genre d’études, l'expérience est plus longue à venir, c’est une raison pour y apporter plus de persévérance. Je fais cette observation d’une manière générale. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 11 Conservation des vins. — Je rappelle l’utilité de soutirages plus fréquents, dont le premier sera exécuté dès la fin de décembre ou le commencement de janvier. Il importe de séparer au plus tôt le vin clair des lies et des ferments, qui pourraient compromettre son avenir. Les soutirages seront pratiqués de façon à éviter au vin, autant que possible, le contact de l'air, qui laffaiblirait et lui ferait perdre sa couleur ; il conviendra, par conséquent, de les faire à la pompe. Les collages pourront aussi être employés pour aider à la conser- vation des vins, mais je ne conseille d’y avoir recours qu’exceplion- nellement. En ce qui concerne les maladies des vins, qui, dans ces dernières années, ont occasionné de si grandes pertes dans la région, elles doivent être trailées préventivement. Quand un vin est atteint de maladie, 1l n’y a guëêre de moyens qui puissent le guérir; on parvient, par tâtonnements, à l’atténuer, dans une certaine mesure, par l’addition de divers produits, mais la ma- ladie n’en est pas toujours guérie pour cela. Parmi les moyens propres à prévenir l’altération des vins faits (vinage, sucrage, mutage), le plus employé est, sans contredit, la pasteurisation, dont les conditions ont été étudiées par Pasteur, puis par M. Gayon dans ces dernières années. Il existe un grand nombre d’appareils fonctionnant dans de bonnes conditions ; je n’ai pas ici à indiquer l’un plutôt que l’autre. Je me contente d'appeler sur ce procédé l’attention des viticulteurs neu- châtelois. Quelques-uns de ces derniers m’ont émis la crainte que les vins si délicats de Neuchâtel se trouvent moins bien du chauffage qu’on pourrait l’espérer. La chose est possible, bien que Je ne pense pas qu’it doive en être ainsi, en présence des résultats remarquables obtenus avec les vins des régions les plus réputées de France. D'ail- leurs, on n'aurait pas raison si on reculait devant la tentalive de ces essais, qui sont nécessaires pour être fixé au sujet de l'effet du chauf- fage sur l'avenir des vins de Neuchâtel. Mais je dois faire à propos du chauffage cette remarque qu'il ne peut prévenir que les maladies qui se développent dans le vin apres LA 12 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. sa sortie de la cuve; il est naturellement impuissant contre les alté- rations qui prennent naissance pendant la fermentation même de la vendange. Cela confirme ce principe que je posais dès le début de cette étude, à savoir que le viticulteur doit s'attacher à faire la fermen- tation dans les conditions les meilleures, car c’est la vinification pro- prement dite qui doit contribuer le plus à assurer la qualité du vin en même temps que sa conservalion. Telles sont les principales conclusions de ces recherches. . Beaucoup de ces observations s’appliquent surtout à des automnes froids, comme celui de 1897, pendant lequel elles ont été recueil- lies. On objectera que la vendange fut faite par un temps assez anormal, tout au moins pendant la dernière période. Je dois répondre à cela que dans les automnes tempérés, où les divers principes du moût existent dans les proportions les plus con- venables, la fermentation s'effectue d’elle-même dans d'assez bonnes conditions et, bien qu’il soit toujours utile de la surveiller, peu d’ac- cidents sont à craindre. C'est surtout contre les automnes ou trop froids ou trop chauds, dans le cas de vendanges avariées et insuffisamment riches en sucre, ou, au contraire, trop peu acides, qu'il faut se mettre en garde. Aussi, l’automne de 1897, par cela même qu’il fut en partie peu favorable à la fermentation, aura été très instructif à beaucoup d’égards. D'ailleurs, j'ai envisagé le problème si complexe de la vinificalion dans les divers cas qui peuvent se présenter et où le viticulteur se trouve en présence de difficultés plus ou moins nombreuses; j'espère qu’il saura, dans ces diverses conditions, appliquer les conclusions déduites de ces observations, qui ont eu pour but la recherche des moyens d'assurer la qualité et la conservation des vins de Neu- châtel. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 45 APPENDICE DE L’ANALYSE SOMMAIRE DES MOUTS On sait le parti qu’on peut tirer de la connaissance de la richesse saccharine du moût, de son acidité, des dosages de l’alcool et du sucre restant vers la fin de la fermentation, des prises des tempé- ratures des cuves, elc. L'analyse du raisin peut indiquer, si on la pratique à des inter- valles réguliers pendant la maturation, quand la maturité est atteinte ; d’un autre côté, elle donne les moyens de remédier au manque d'équilibre dans les éléments du moût. En effet, les principaux éléments du raisin, sucre et acidité, doi- vent y être contenus dans des proportions convenables. Cette der- nière condition n’est pas toujours remplie, aussi bien dans les ré- gions méridionales, où le soleil et les vents chauds occasionnent le plus souvent une maturité trop complète, que dans les climats septen- trionaux, sous lesquels, au contraire, le raisin est insuffisamment mûr au moment de la récolte. On aurait évidemment intérêt à cueillir celui-ci lorsqu'il est arrivé au point extrême de sa maturité, c’est-à-dire quand il renferme le sucre dans la plus forte proportion ; c’est, en effet, le sucre qui doit fournir l’alcool, auquel le vin doit sa principale valeur; on gagnerait également plus de couleur. Mais on sait qu'à ce point extrême, le raisin ne contient plus qu'une quantité d’acidilé insuffisante pour l'obtention d’une bonne fermentation. Dans les régions méridionales, un excès de richesse saccharine, qui contribue à une élévation de température plus grande, est un inconvénient ; aussi, évite-t-on de vendanger à ce degré trop avancé de maturité, ou cherche-t-on à fournir l’acidité qui manque au moût, par l'addition de grappillons verts ou verjus, ou par celle d’acide tartrique. Dans les régions septentrionales, ce cas d’une insuffisance d’aci- dité se présente seulement dans les années particulièrement préco- 14 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ces, où les vendanges ont lieu par un temps très chaud. Mais on peut dire qu’en général le raisin parvient difficilement à une maturité très avancée ; aussi, est-il tout à fait judicieux de chercher à laisser celle-ci arriver à ses dernières limites, car il existe, dans les années normales, assez d'acide dans le raisin pour que les vins en renfer- ment en suffisance et l’on gagne, par ce retard, une force alcoolique plus grande, plus de finesse et de bouquet. Cependant, il convient de compter avec les intempéries qui précè- dent la récolte, avec les pluies froides de septembre ou d’octobre, qui parfois apportent un tel retard dans la maturation du raisin, qu’il est nécessaire de procéder prématurément à la cueillette. Dans ce cas, une amélioration du moût est souvent ulile et une addition de sucre à la vendange ne peut avoir que de bons effets pour la qua- lité du vin et sa conservation. À la rigueur, on sait que dans les années où la maturité s’ef- fectue difficilement, le moût doit, à priori, pécher par une insufi- sance de sucre, qu'il donnera par conséquent des vins d’un faible degré alcoolique et d’une acidité exagérée, que, d’autre part, dans les régions méridionales ou dans les automnes très chauds on observe une richesse saccharine maxima, avec une acidité insuffisante. On doit avouer que de telles déductions sont trop vagues pour rendre le moindre service et que l’on risquerait fort de commettre des erreurs, si l’on se basait sur elles pour améliorer la composition du moût. C'est donc à l’analyse qu’il faut avoir recours, et les déter- minations du sucre et de l’acidité totale ne doivent pas être négli- gées. Au point de vue des essais d’ensemencement avec des levures sélectionnées, la connaissance de la composition du raisin n’est pas moins nécessaire. Les levures sont loin de se comporter toutes de la même manière et chaque levure semble exiger, entre autres conditions, un rapport déterminé entre le sucre et l’acidité. D’autres éléments du moût que le sucre et l’acidité seraient éga- lement intéressants à déterminer, mais ces derniers sont de beau- coup les plus importants et, en général, suffisants à connaître pour les besoins de la vinification. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 75 On sait que l’influence de la température initiale du raisin à son arrivée au pressoir est considérable sur le départ de la fermentation et sur l’échauffement maximum atteint par le moût. Pour que celle-ci parte et se poursuive dans de bonnes conditions, la température du raisin doit être de 15 degrés environ. Si elle est inférieure à 15 de- grés, la levure se multiplie difficilement, et ce retard peut avoir des inconvénients. Dans ce cas, il convient de chauffer une partie du moût. Si elle est supérieure à 25 degrés, l’échauffement maximum atteint par le moût peut être funeste à la levure et compromettre sérieuse- ment la qualité du vin. Le moyen le plus pratique de remédier à ce dernier inconvénient est le refroidissement du moût par des appa- reils spéciaux, mais comme ces températures élevées du raisin qu’on constate dans les régions méridionales coïncident généralement avec une insuffisance d’acidité, il faudra survéiller l'acidité du moût et ’augmenter s’il y a lieu. Nous avons eu assez de fois l’occasion d’insister sur l’influence de l’'échauffement du moût au cours de la fermentation pour avoir suf- fisamment fait ressortir l’intérêt qui s'attache à la détermination de la température du raisin et du moût. Vers la fin de la fermentation et concurremment avec les prises de température, la prise de densité du moût et les dosages de l’alcool et du sucre restant, permettront de juger si la fermentation s’est effectuée dans des conditions satisfaisantes, ou si, au contraire, elle n’a pas subi un arrêt, souvent nuisible à la qualité du vin et auquel il y aurait lieu de remédier. Ces observations sont d’ailleurs les plus sûrs moyens de juger de l’opportunité du décuvage. Enfin, le dosage de l’alcool dans le vin fait sert, dans beaucoup de régions, à déterminer sa valeur, celui-ci étant en effet très souvent vendu d’après sa richesse alcoolique. Ces principales considérations montrent assez les services qu’on peut tirer de l'analyse sommaire du moût et du vin. Beaucoup de ces déterminations sont des plus simples, aussi ai-je cru utile de les exposer ici d’une façon succincte; en effet, la plu- part sont à la portée des viticulteurs, qui pourront y recourir eux- mêmes; quelques-unes sont plus délicates et nécessitent une cer- 76 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. taine habileté, que seuls des chimistes de profession ont pu acquérir; Je les décris cependant pour ceux qui voudraient entreprendre des recherches sur la vinification, en raison de l'intérêt qu’elles pré- sentent. Préparation de l'échantillon. On prélève dans la vigne un certain nombre de grappes de raisin, dont l’état de maturité représente aussi bien que possible la compo- sition moyenne de la vendange. Elles sont égrappées' et les grains sont exprimés à la main, dans une toile mince, telle qu'un morceau de calicot de 40 centimètres environ de côté au carré, et qu’on serre en un nouet. Le jus est reçu dans une capsule en porcelaine, un verre ou un récipient quelconque en faïence. On peut terminer l'expression et la rendre plus complète à l’aide d’une petite presse, analogue à celle que représente la figure 1 ci-contre. L'opération doit être conduite assez rapidement, afin d'empêcher tout com- F1G. 1. — Petite presse pour An tan mencement de fermentation, qui trou- blerait les résultats de lanalyse, par suite de la disparition partielle du sucre et le dégagement de gaz carbonique. De même, les moûts doivent être analysés aussitôt que possible, pour la même cause. Le jus du raisin, au sortir de la presse, ou le moût prélevé dans les cuves, est filtré pour le débarrasser des débris de pulpe et autres malières en suspension. La filtration s’opère, soit au travers d’un linge, soit à l’aide d’un filtre à plis en papier et d’un entonnoir. 1. L'égrappage préalable est indispensable ; si l’on exprimait la grappe telle quelle, on en extraierail diverses substances qui n'entrent pas normalement dans la constitu- tion du jus ou du moût proprement dit. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. Vi C’est sur le jus ou le moût ainsi filiré et limpide que portent les délerminations suivantes : Densité du jus et détermination de sa richesse saccharine. Voici ce qu’on entend par la densité d’un corps. C'est le rapport entre le poids d’un certain volume de ce corps et le poids du même volume d’eau. On sait qu’on a pris pour unité de poids, le poids du litre d’eau distillée, à la température de 4 degrés centigrades, et qui pèse 1000 gr. ou 1 kilogr. La densité de l’eau, prise pour unité, est donc 1. Si 1 litre ou, ce qui est identique, 1 décimètre cube d’un corps pèse 21 kilogr., c’est-à-dire 21 fois plus que l’eau, sa densité est 21. Si un décimètre cube d’un autre corps pèse 7“8,500, c’est-à-dire 7 fois et demie plus que l’eau, sa densité est 7,5, La densité du sucre pur cristallisé est environ 1,6, c’est-à-dire que 1 litre ou 1 décimètre cube de sucre pèse 1,6 ou 4 600 gr. Par conséquent, si l’on mélange 1 litre d’eau pesant 1000 gr. et Titre de sucre pesant 1600 gr., la densité de la dissolution sera plus grande que celle de l’eau, et moins grande que celle du sucre. D’après cela, 1l est facile de comprendre que plus une dissolution sucrée contient de sucre, plus sa densité est grande. On voit que la densité d’une solution sucrée peut servir à déterminer sa richesse en sucre. Maintenant que nous savons ce qu'est la densité d’un corps ou d’une dissolution, voyons comment on la détermine. On le fait à l’aide d'appareils appelés derisimètres et aréomètres. Voici le prin- cipe sur lequel repose leur emploi : Considérons un corps qui flotte dans un liquide; il s’y enfonce d’une certaine quantité et déplace de ce liquide un certain volume. Or, « lorsqu'un corps flotie dans un liquide, il déplace un poids de ce licuide égal à son propre poids ». Tel est le principe dit « des corps flottants ». Ainsi, si un corps du poids de 30 gr. flotte dans l’eau, la portion de ce corps immergé dans l’eau prendra la place, déplacera 30 gr. d’eau, c’est-à-dire un volume d’eau de 30 centi- 78 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. mètres cubes (la densité de l’eau étant 1, 30 centimètres cubes d’eau pèsent, en effet, 30 gr.). Supposons que nous plongions ce même corps du poids de 30 gr. dans un liquide plus lourd que l’eau. Le volume du liquide déplacé devant, d’après le principe énoncé, avoir un poids de 30 gr., et la densité de ce liquide étant supérieure à celle de Peau, le volume du liquide déplacé devra être inférieur à 30 centimètres cubes. En effet, le poids devant rester le même et la densité du liquide étant plus grande, son volume doit être plus petit; autrement dit, le corps s’enfonce dans ce liquide moins qu'il le faisait précédemment dans l’eau. Donc, si nous considérons toujours ce même corps flottant, d’un poids constant, et si nous le plongeons successivement dans plusieurs liquides de densités différentes, le volume du li- quide déplacé, ou le volume du corps immergé, sera d'autant plus petit, c’est-à-dire le corps s’en- foncera d'autant moins, que la densité du liquide sera plus grande. Et, d'autre part, la densité d’une solution su- crée élant d'autant plus grande que cette solution est plus riche en sucre, on voit que le volume du flotteur immergé dans le liquide sera d’autant plus pelit, autrement dit le flotteur s’enfoncera d’au- tant moins, que la solution sera plus riche en sucre. L'appareil flotteur (fig. 2) est une tige de verre creuse renflée inférieurement, qui est ainsi assez légère et capable de floiter sans s’immerger com- plètement. Le renflement est terminé par une petite sphère remplie de plomb ou de mercure, pour lester l'instrument et le maintenir vertical dans le liquide. La partie supérieure est terminée par une tige portant une gradualion correspondant à la densité du liquide, F1&. 2. — Aréomètre. ou une graduation variable avec les appareils. Celui qui est susceptible de rendre le plus de services aux viticul- teurs est le mustimètre Salleron (fig. 3.). La division plocée presque en haut de l'échelle et marquée ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 19 1 000 représente le poids de l’eau distillée (1000 gr. par litre), à la température de 15 degrés centigrades; les divisions au-dessus mesurent les densités inférieures et celles au-dessous les densités supérieures, c’est-à-dire le poids en grammes d’un litre du liquide expérimenté ; c’est ainsi que 1 060 signifie qu’un litre de liquide pèse 1 060 gr. Pour avoir une approximation plus grande, on peul faire usage du mustimètre à division fractionnée en grammes de 4 000 à 1100 seulement, dans lequel les divisions sont plus éloignées et per- meltent, par cela même, une plus grande exactitude. Le mustimètre étant gradué à 15 degrés centigrades, il y a une correction à faire subir si la température est différente. Après avoir lu le degré densimétrique, on plonge dans le liquide un thermo- mètre et on lit la température. On cherche dans le tableau ci-dessous quelle correction il faut faire subir à l’indication du mustimètre, pour la ramener à ce qu'elle serait si la température du moût était de 15 degrés. TEMPÉRATURE. CORRECTIONS. degrés. 10 — 0.6 1i — 0.5 12 — 0,4 13 — 0,3 14 — 0,2 15 0 16 + 0,1 17 + 0,3 1S 0,5 19 05 20 + 0,9 21 SES 22 + 1,3 23 ES 24 + 1.8 25 2, 0 26 2,0 27 + 2,6 28 —+ 2,8 29 + 3,1 F1G. 3. — Mustimètre Salleron. 30 Le Exemple : Le moût est pesé à la température de 18 degrés; le 80 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. mustimètre marque 1065, la première table indique qu'il faut ajouler 0,5 à l'indication du mustimètre, de sorte que le poids du moût à la température normale de + 15 degrés est 1 065,5. Si la température, au lieu d’être de 48 degrés, était de 12 degrés, la coc- rection — 0,4 indiquée par la table devrait être retranchée de 1 065, qui deviendrait alors 1 064,6. Il convient de dire que la correction afférente à la température du moût est de peu d'importance, et les viticulteurs pourront se dispenser de ramener les moûts à la température de graduation de l'appareil ; l'erreur résultant du défaut de correction est trop faible pour qu’il y ait lieu d’en tenir compte, si la température n’est pas trop différente de 15 degrés. Il suffira donc de lire le mustimètre et de chercher, dans la table ci-dessous qui l’accompagne, les indications correspondant à la ri- chesse saccharine du moût par litre ; le tableau suivant indique : 4° La densité du moût, c’est-à-dire l’indication du mustimètre ; 2 Les valeurs correspondantes des degrés de l’aréomètre Baumé et de ceux du mustimètre ; 3° Le poids du sucre de raisin que contient 1 litre de moût ; 4 La richesse alcoolique approximative qu’aura le vin après sa fermentation, en admettant que la totalité du sucre fermente ; 9° Le poids du sucre cristallisé pur qu’il faut ajouter à 1 litre de moût, pour que le vin contienne après fermentation 10 p. 400 d’al- cool. Richesses saccharine et alcoolique du moût de raisin. : RUE SUCRE DENSITÉS DEGRÉS GRAMMES RICHESSE cristallisable ou de À qu'il faut ajouter 3 TASER de sucre alcoolique à degrés l’aréomèêtre nico demon du de Par pour obtenir du vin mustimètre. Baumé. litre de moût. vin fait. Ün 100 DUDOL kilogr. kilogr. 1 050 6,9 0,103 6,0 0,068 1051 7,0 0,106 6,2 0,065 1 052 ail 0,108 6,3 0,063 1 053 HSE 0,111 6,5 0,059 1 054 7,4 0,114 6,7 0,056 1 055 7,9 0,116 6,5 0,054 1 056 7,6 0,119 He 0 0,051 ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 81 3 ; SUCRE D'ARÈEEES A aNeS GRAÂMMES RICHESSE cristallisable ou de & qu'il faut ajouter e DAT de sucre alcoolique “ degrés l’'aréomètre un litre de moût du de par du pour obtenir du vin mustimètre. Baumé. litre de moût. vin fait. 10 p. he kiloer. kKilogr. 1 057 7,8 O2? TI 0,048 1 058 1,9 0,124 71,3 0,046 1 059 8,0 0,127 7,5 0,04? 1 060 Soi 0,130 140 0,041 1061 8,3 0,132 tte 0,037 1 062 8,4 0,135 49) 0,036 1 063 8,5 0,138 (3 0,032 1 064 8,6 0,140 8,2 0,031 1 065 8,8 0,143 8,4 0,027 1 066 8,9 0,146 8,6 0,024 1 067 9,0 0,148 8,7 0,022? 1 068 GER) 0,151 8,9 0,019 1 069 9,3 0,154 9,0 0,017 1 070 9,4 0,156 952 0,013 1071 979 0,159 95e 0,012? 1 072 OPA 0,162 955 0,008 1 073 9,8 0,164 96 0,007 1 074 99 0,167 9,8 0,003 1 075 10,0 0,170 10,0 1 076 10,2 0,172 10,1 1 077 10,3 0,175 10,3 1 078 10,4 0,178 10,5 1 079 10,5 0,180 10,6 1 080 10,7 0,185 10,8 10812; 10,8 0,186 100 1 082 10,9 0,188 11,0 1 083 11,0 0,191 LI 1 0S4 JR 0,194 11,4 1 055 ie 0,196 SES 1 086 11,4 0,199 1127 1 087 11,9 0,202 119 1 088 11,6 0,204 12,0 1 089 11 7 0,207 122 1 090 A0 0,210 1253 1 091 12,0 0221? 12,5 1 092 PAGE | 0,215 12,6 1 093 12,3 0,218 12,8 1 094 194 0,220 LENS) 1 095 125 0,223 13,1 1 096 12:6 0,226 13,3 1 097 127 0,228 13,4 1 098 12,9 Oo 13,6 1 099 13,0 0,234 13,5 1 100 1391 0,256 13,9 ANN. SCIENCE AGRON, — 2° SÉRIE. — 1898. — I, G 82 Exemple : ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Si un moûl marque au mustimèêtre 1065, on voit : 1° Que le moût pèse 1065 gr. le litre, ce qui correspond à 8°,8 de lolitre __ ex heo Degrés Baurne P e PNLe DS 2 8 R $ a à © « 6 Ÿ © 5 2:21 Sucre de raisin Klog°® 0 eu © o _ + L [l | _ _ un Cal T a IT og Li 2 TEEN D à © Nbre iQ. 4. — Échelle du glucomètre du Dr Guyot. l'aréomètre ; 2 Qu'il contient 143 gr. de sucre de raisin par litre ; 9° Que ce sucre fournira, après sa fermentation, 8°,4 d'alcool ; ce qui veut dire que le vin fait contiendra S litres et 4 décilitres d’alcool pur par hectolitre ; 4° Qu'il convient d'ajouter au moût 27 gr. de sucre cristallisé pur ct blanc par litre, soit 24,700 par hec- tolitre, pour que le vin contienne 10 p. 100 d’alcool. D’autres aréomèêtres ou densimètres sont également très employés. $ L'aréomèêtre Baumé est un densimètre analogue au mustimèlre, mais dont la graduation seule diffère. Plongé dans l’eau distillée à 15 degrés, il affleure au sommet de la tige à un point marqué 0 (zéro). Plongé dans de lacide sulfurique monohydraté d’une densité de 1,84, il s'enfonce à un point qu’on a marqué 66; on a divisé en 66 parties égales ou degrés, l'intervalle compris entre ce dernier point et le zéro. Chaque degré est lui-même divisé en dixièmes de degré. Cet aréomètre est très emplové, surtout à cause de . ce fait que, par suite d’une coïncidence toute fortuile, ses divisions représentent approximativement la pro- portion d'alcool qu’aura le vin après la fermentation ; ainsi un moût pesant 10 degrés à l’aréomètre Baumé donnera un vin titrant environ 10 p. 100 d’alcool. Un autre aréomètre également très employé dans certaines régions est le glucomètre du docteur Guyot (fig. 4). Il porte trois échelles différentes : l’une est celle de Baumé; la seconde représente le nombre de erammes de sucre contenu dans un litre de moût; enfin la troisième fait connaitre quelle sera approximative- ment la richesse alcoolique du vin après fermentation. D'autres aréomètres, tels que le gleuco-ænomèlre de Cadet de Vaux ou pèse-moût, le mustimètre de Babo, le pèse-moût de . ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 83 Œchsle, etc., sont encore employés, mais nous ne faisons que les signaler. En ce qui concerne le jus de raisin ou le moût, comme ce n’est pas une solution de sucre pur, mais qu’il renferme d’autres matières en dissolution, la détermination de sa densité ne peut donner sur sa ri- chesse saccharine que des résultats approximatifs ; ces derniers sont cependant amplement suffisants pour les besoins de la pratique. Mais si l’on veut obtenir, avec toute la rigueur nécessaire à cer- taines recherches, la quantité de sucre par litre de moût, on le dose par le procédé suivant, que nous allons décrire brièvement, car il s'adresse plutôt aux chimistes, ce qui nous permettra d’être plus sobre de détails. Dosage chimique du sucre du raisin. Ce dosage se fait volumétriquement à l’aide d’une liqueur alca- line de cuivre, telle que celle de Fehling, et voici sur quel principe il est basé : La liqueur de Fehling est un réactif d’une belle couleur bleue foncé, ayant pour base un sel de bioxyde de cuivre qui, à la tempé- rature de l'ébullition, cède la moitié de son oxygène à la matière sucrée du raisin et, par ce fait même, se transforme en protoxyde de cuivre rouge. Ce protoxyde se précipite dans les conditions de l'opération, en même temps que la liqueur perd peu à peu sa cou- leur bleue. Les dernières gouttes du liquide sucré doivent être versées avec précaution ; si la réaction est dépassée, le liquide prend une teinte jaune verdâtre clair, qu’on ne doit pas atteindre. On commence par étendre le moût, qui est généralement beau- coup trop riche en sucre pour les conditions dans lesquelles on opère; la dilution qui nous a paru la plus convenable est celle de 10 centimètres cubes du moût qu’on complète avec de l’eau au vo- lume de 200 centimètres cubes, puis qu’on rend homogène par la- oitation. On obtient ainsi une solution 20 fois moins riche que le moût lui-même; aussi devra-t-on multiplier le résultat de sucre trouvé par 20. 84 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La dilution du moût est indispensable ; pour que les détermina- tions aient une plus grande rigueur, il convient, en effet, d’em- ployer des liqueurs sucrées à un état de concentration ni trop grand ni trop faible. Une concentration très grande ne permettrait pas, même en versant le liquide goutte à goutte, de s’arrêter exactement au point voulu; un trop grand -degré de dilution aurait l’inconvé- nient de délayer la liqueur outre mesure et de rendre ainsi la dis- parition de la teinte moins nette. Le degré de concentration le plus convenable est celui qui se rapproche de 1 p. 100 de sucre réducteur dans la so- lution, ce qu’on obtiendra en étendant au 1/20 le moût de raisin’. Le moût ainsi étendu est versé dans une burette graduée (fig. D). D'autre part, on met dans un petit ballon de 80 à 100 centimètres cubes ou dans une capsule en porcelaine, 10 cen- timètres cubes de liqueur de Fehling et 10 centimètres cubes de potasse à 10 p. — 100. On fait bouillir légèrement et on = verse, aussitôt que la liqueur commence à bouillir, quelques gouttes de la liqueur Free Dossge chimique dus 6e contenue dans la burette ; on porte à l’ébullition de nouveau et on observe si la coloration bleue a disparu ; sinon, on fait une nouvelle addition de quelques gouttes de liqueur sucrée et, après chaque addition, on fait bouillir un instant ; on Continue ainsi jusqu’à ce que toule coloration bleue ait disparu. L'opération doit être conduite assez lestement ; il ne faut pas trop attendre après chaque addition de liqueur sucrée, ni inter- rompre trop longtemps l’ébullition, car le liquide peut s’oxyder au =] 1. Lorsqu'on a besoin d'une précision rigoureuse, il est nécessaire de précipiter au préalable, par le sous-acétate de plomb, diverses substances (acides organiques. ma- tières azotées, ete.), qui peuvent avoir une action réductrice sur la liqueur de Fehling. Dans le cas du moût, nous avons constaté que cette précaution n’est pas indispensable, surtout lorsqu'il s'agit de recherches pratiques de vinification, comme celles qui font l'objet de cette étude. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 85 contact de l'air, et celui-ci redissoudrait un peu de protoxyde de cuivre, ce qui fausserait le résultat de l’analyse. Aussi, préférons- nous à l’emploi de la capsule celui du ballon, qui est tenu à la main à l’aide d’une pince. Quand la disparition complête de toute couleur bleue est obtenue, on lit le volume de liqueur sucrée versée, soil, par exemple, 6 centimètres cubes et 1 dixième. Or, 10 centimètres cubes de liqueur de Fehling, telle qu’elle est ordinairement préparée, correspondent à 05,050 de glucose ; on a la quantité de glucose renfermée dans les 6°"%,1 versés, d’après le raisonnement suivant : 6°" 1, décolorant 10 centimètres cubes de liqueur de Febling, contiennent 08,050 de glucose. 205,050 1e 0’contient See de glucose 2? et 1,000 centimètres cubes ou 1 litre de ce moût étendu con- ( 06°,050 >< 1,000 TENUE Et 6,1 Et comme cette solution est 20 fois moins concentrée que le moût Jui-même, on a la quantité de sucre que contient celui-ci en multi- de … 08,050 X 1,000 >= 20 pliant le résultat précédent par 20, soit = | ) 163 gr. de glucose par litre. Pour éviter tout calcul, nous avons dressé le tableau suivant, qui donne directement la teneur en grammes par litre de moût, d’après la quantité de solution sucrée versée, pour obtenir la décoloration de la liqueur de Fehling dans les conditions précédemment imdi- quées: c’est-à-dire en opérant avec le moût étendu au 1/20 et en admettant, ce qu’on doit avant tout vérifier, que 10 centimètres cubes de liqueur de Fehling soient exactement réduits, autrement dit décolorés, par 06°,050 de glucose. TABLEAU. 86 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Dosage chimique du sucre. 10 centimètres cubes de Jiqueur de Fehling =0:r,050 de glucose. À 1 1 Le moût a été étendu au — . 20 NOMBRE SUCRE NOMBRE SUCRE NOMBRE SUCRE de fermentescible de fermenteseible de fermentescible centimètres par centimètres par centimètres par cubes versés. | litre de moût. || cubes versés. | litre de moût. || cubes versés. | litre de moût. Q* 7 C2 © Cu YO 19 mm © ON 1 CE À on ©! - 9 [Sal oo S 7?! © © (ee) 1 Gr C2 © ©2 t © _ 1 © ©! — (=) D C2 C0) Co RO 19 19 KI) RO KI Co 1 2 [er] © CN TN TR em S ET D I D ,8 NAS 4,0 6 4,1 2] 3 ESS _ _ 1110 CG 2 2 _ en em . eo O7 O7 O7 Où À À À = ) 1 — ] D Où à © D mm © © 1 1 — Q9 19 = © © D I © Préparation de la liqueur de Fehling. — D’après la formule employée à l'Institut agronomique, on dissout : 40 gr. de sulfate de cuivre cristallisé pur, dans : 200 centimètres cubes d’eau bouillante. D'un autre côté, on dissout : 160 gr. de tartrate neutre de potasse ; 120 gr. de soude caustique en plaque, dans : 600 centimètres cubes d’eau chaude. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 87 On mélange les deux solutions, on fait bouillir pendant deux ou trois minutes et, après le refroidissement, on complète le volume à un litre en enlevant, par décantalion, le dépôt qui a pu se former. Cette formule est très commode pour l'emploi et la liqueur se con- serve inaltérée pendant un temps très long. Ainsi préparée, 10 cen- timèêtres cubes correspondent presque toujours exactement à 05,050 de glucose, ce dont il est nécessaire de s'assurer par un titrage. Tilrage de la liqueur de Fehling. — On titre la hqueur de Febling par une solution de glucose à 4 p. 100, qu’on prépare facilement de la façon suivante : 0#,950 de saccharose pur et préalablement desséché à létuve sont mis dans un ballon oradué de 400 centi- mètres cubes avec environ 80 centimèlres cubes d’eau ; on ajoute quelques gouttes d'acide sulfurique ou chlorhydrique et on fait bouillir au bam-marie pendant environ une demi-heure. Le saccha- rose se transforme en sucre interverli analogue au sucre que con- tent le raisin. Après refroidissement, on complète le volume à 100 centimètres cubes et on rend homogène par l’agitation. Cette solution de glucose à 1 p. 100 est versée dans une burette de Mohr, et sert à décolorer 10 certimèlres cubes de liqueur de Fehling additionnés de 10 centimètres cubes de potasse à 10 p. 100. Du nombre de centimètres cubes versés, on déduit la quantité de glucose qu'ils renferment et à laquelle correspondent 10 centimé- tres cubes de liqueur de Fehling. Le plus souvent il faut verser D°%,0, soit une quantité de 50 milligr. (la solution de glucose étant à 4 p. 100, 5°%,0 en renferment 05,050). Dans ce cas, 10 centi- mètres cubes de liqueur de Febling correspondent à 05,050 de glucose. Dosage de l'acidité totale du moût de raisin. Le moût a une réaction acide très nette, c’est-à-dire qu'il colore en rouge la teinture et le papier de tournesol. L’acidité du moût est très complexe et due à la présence du bilartrate de potasse et de divers acides libres (malique, etc.). On ne dose le plus souvent que l'acidité totale du moût, en la sa- 88 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. turant par une liqueur alcaline (potasse, soude ou eau de chaux), qu'on litre par rapport à une solution d’acide sulfurique, renfer- mant par litre une quantité exactement déterminée d’acide sulfu- rique pur et monohydraté SO* FF. L'indice de la saturation est fourni par le virage du tournesol, qui passe du rouge au bleu, dès que l'acidité du moûl est saturée par la liqueur alcaline. Dans les moûts, le virage n’est pas toujours très facile à saisir, mais on y parvient cependant avec un peu d’habi- tude. Le dosage se fait de la façon sui- vante : On verse dans un verre à fond plat d'environ 150 centimètres cubes, 10 centimètres cubes de moût et quel- ques gouttes de temture de tourne- sol. D'autre part, on introduit dans une burette graduée (fig. 6) la solution alca- line, de l’eau de chaux, par exemple. On verse peu à peu celle-ci dans le moût et, après chaque addition, on imprime au verre un mouvement de rotation, qui mélange le réactif au li- quide. Quand la saturation est obte- Fa. 6. — Dosage de l'acidité totale, Nue, On lit sur la burette le nombre de centimètres cubes versés ; suppo- sons que ce soit 30°%,4. On titre alors la liqueur alcaline en saturant 10 centimètres cubes de la solution d’acide sulfurique. La solution acide qui nous sert depuis longtemps contient exactement 68,51 d’acide sulfurique pur et monohydraté par litre, soit 08‘,0651 pour 10 centimètres cubes. Ces 10 centimètres cubes sont mis dans un verre, additionnés de quelques gouttes de teinture de tournesol, et saturés par Peau de chaux, jusqu’à virage du tournesol du rouge au bleu ; soit 28 "°,1 la quantité d’eau de chaux employée. On a : 28°% 1 d’eau de chaux correspondent à 08°,0651 d’acide sulfurique pur et monohydraté ; ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 89 05°,0651 1 centimètre cube d’eau de chaux correspond à ox © la ht) quantité nécessaire pour saturer les 10 centimètres cubes de moût, 06°,0651 % 30,4 LENIEI Comme on a opéré sur 10 centimètres cubes de moût, on multi- plie le résultat trouvé par 100 et on a ainsi l'acidité totale par litre de moût : soit 30°%,4, correspond à 0%,0651 X 30,4 X 100 = re 28,1 0 Pour l’exprimer en acide tartrique, on multiplie par 1,93 le ré- sultat exprimé en acide sulfurique, 75,04 X 1,55 — 105,77 en acide laririque. Si l’on doit doser l’acidité totale dans un moût en fermentation . et contenant, par conséquent, du gaz carbonique en dissolution, il est nécessaire d'éliminer celui-ci : il augmenterait, en effet, l’aci- dité du liquide dans lequel il est dissous et rendrait le virage plus difficile à saisir. On l’élimine en faisant bouillir dans un verre de Bohême, pendant quelques minutes, les 10 centimètres cubes de moût, avant de procéder à leur saturation par l’eau de chaux. Acidimèlre. — Le dosage de l’acidité totale, tel qu'il vient d’être décrit, présente quelques difficultés, le virage n’est pas toujours très net et embarrasse souvent l’opérateur dans ses débuts; le ti- trage de la solution alcaline et le calcul du résultat compliqueraient l’opération et seraient une entrave à son exéculion par les viticul- teurs. Cependant, la détermination de l'acidité est, comme celle du sucre, de première importance et on ne saurait trop engager à tou- jours y recourir. Aussi, divers auteurs ou constructeurs ont-ils cherché à simplifier le mode opératoire. Quelques-uns font usage d’une liqueur alcaline de potasse ou de soude, titrée de telle sorte que le nombre de divisions lu sur la bu- relte donne, directement et sans calcul, la quantité d’acide sulfu- rique par litre de moût. 90 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Pour dispenser du matériel nécessaire à ces titrages (burette, verre, etc.), M. J. Dujardin, successeur de Salleron, a construit un tube acidimétrique représenté ci-contre (fig. 7). C’est un tube de verre de 28 centimètres de longueur et de 2 cen- timètres de diamètre à sa partie moyenne. Il présente deux renfle- su ments, l’un à la partie inférieure, l’autre en forme de (@ boule à sa partie supérieure. Il peut être bouché pour permettre l’agitation des solutions. La saturalion de lacidité du moût s'effectue à l’aide d’une dissolution de soude et le tube est gradué de telle sorte que les divisions donnent directement, en acide tar- trique, l'acidité du moût par litre. On exprime souvent l'acidité des moûts en acide tartrique, de préférence à 1N l'acide sulfurique. Au lieu d'employer du tournesol comme indice de la réaction, on se sert de teinture alcoolique de phtaléine du phénol. Ce réacuf reste incolore en présence des acides, mer a. tandis que la moindre trace d’alcali le fait virer au rose. FRS S Voici le mode d’emploi de cet appareil : Verser dans le tube, jusqu’au trait À, le moût à essayer; affleurer, au besoin, le niveau du liquide avec la pipelte. — Ajouter deux gouttes de phtaléine. — Verser la liqueur alcaline titrée par petites quantités avec le flacon ou avec la pipette. La phtaléme prend une teinte rose qui disparaît par agitation; on continue à verser doucement, jusqu’à ce que le mélange prenne, par l’addition d’une dernière goutte de liqueur alcaline, une teinte rose persis- tante. On lit alors sur le tube, tenu bien verticalement, en regard de la graduation et en face du niveau du liquide, la richesse du moût, évaluée en grammes et décigrammes d’acide tartrique par litre. Il est nécessaire que la solution alcaline ne soit pas carbonatée, car le gaz carbonique, mis en liberté par les acides du moût, faus- serait les résultats du dosage et rendrait le virage de la phtaléine incertain. Oa la décarbonate facilement, lors de sa préparation, en l’agitant souvent et pendant quelques jours avec de la chaux éteinte, qui fixe le gaz carbonique à l’état de carbonate de chaux, qui se dé- on _ = “en NT pose. ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 91 Nous venons de décrire les déterminations les plus importantes que le viticulteur ait à effectuer sur le moût et qui lui permettront de remédier, s’il v a lieu, soit à l’insuffisance dans la teneur en sucre, soit à celle de l'acidité. Rappelons ici l’utilité des prises de la température des cuves: celle-ci indiquera si la fermentation se fait trop attendre ou si, au contraire, elle part trop brusquement et ne risque pas d'atteindre un échauffement excessif nuisible à la levure. Nous avons, dans l’é- tude qui précède, insisté suffisamment sur cette question, sur la- quelle nous croyons pouvoir nous dispenser de revenir. Nous sommes arrivé maintenant vers le moment auquel il cun- vient de procéder au décuvage, c’est-à-dire à la séparation du moût et du marc, s'il s’agit de vins rouges. Le moment précis du décu- vage doit être déterminé aussi exactement que possible, car un décuvage hâtif, effectué alors qu'il reste encore des proportions élevées de sucre, comme un décuvage tardif, entrainant une macé- ration trop prolongée du vin avec les grappes, peuvent, l’un et l'autre, être nuisibles à la conservation du vin. On sait que c’est l’abaissement du chapeau qui indique le moment du décuvage, en même temps que l’abaissement de la température du moût. Pour ce dernier, le thermomètre est le guide le plus sûr auquel on doive recourir. Mais d’autres déterminations sont plus précises. Ce sont la prise de densité du vin, le dosage du sucre restant et celui de l'alcool. Nous allons dire quelques mots de chacune d’elles. De la prise de densité du moût vers la fin de la fermentation. Voici comment la prise de densité du moût indique le moment du décuvage : À Nous avons vu que le moût, étant une solution sucrée, pèse plus que l’eau, c’est-à-dire a une densité supérieure à celle de l’eau. Au fur et à mesure de la fermentation, ce sucre disparait en produisant de l’alcool, qui a une densité sensiblement inférieure à celle de l’eau ; par conséquent, pendant la fermentation, la densité du moût dimi- 92 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nue de plus en plus et le mustimètre plongé dans ce moût s’y en- fonce davantage. Si le moût n’était qu’une solution sucrée pure, et le vin un simple mélange d’eau et d’alcool, la densité du vin serait très sensiblement inférieure à celle de l’eau. Mais le vin a dissous divers principes du moût et de la grappe, de sorte que la densité du vin n’est pas seulement fonction de celles de l’eau et de l'alcool, mais qu'elle dépend des autres matières qui le constituent. L'expérience démontre que la densité du vin est très peu différente de celle de l’eau (environ 0,995 au lieu de 1,000). On comprend dès lors que, vers la fin de la fermentation, si on prend chaque jour la densité du vin, dès qu’on l’observera très voi- sine de celle de l’eau, c’est-à-dire marquant à très peu près 1,000 au mustimètre; si, en outre, on constate qu'après deux ou trois dé- terminalions successives, elle cesse de s’abaisser, on considérera le moment du décuvage comme opportun. Le mustimètre sert donc pour juger du décuvage, comme il sert pour déterminer la richesse saccharine du moût; nous ne revien- drons pas sur son emploi. Dosage du sucre restant. La prise de densité du moût vers la fin de la fermentation est suffisante presque toujours dans la pratique, pour juger du décu- vage. Il pourrait se faire cependant que la conclusion qu’on tirerait d’une densité voisine de 1,000 soit légèrement faussée, par cette circonstance qu’une proportion élevée d’alcool dans le vin peut masquer densimétriquement la présence d’une proportion de sucre très sensible. Aussi, le dosage chimique du sucre restant est-il plus rigoureux que la prise de densité, car il faut que le vin ne ren- ferme au décuvage que des quantités de sucre aussi faibles que possible. En outre, le dosage du sucre restant renseigne sur la marche de la fermentation : si on constate que la proportion de sucre vers la fin de la fermentation persiste encore très élevée, on juge par là que celle-ci subit un arrêt, auquel il y a lieu de remédier. De même, dans le vin fait, une quantité de sucre assez élevée peut inspirer des ÉTUDES SUR LA VINIFICATION. 93 inquiétudes sur la conservation du vin, ce sucre pouvant dans la suite, s’il survient des fermentations secondaires, se transformer en produits nuisibles. Le dosage du sucre restant est donc une opération utile dans beaucoup de cas, et il n’est pas superflu d’en donner une descrip- tion d'autant plus sommaire, qu’elle s’adresse plus spécialement à ceux déjà au courant de l’analyse. Il n’est pas nécessaire ici, comme pour le moût, d'étendre le vin d’eau, car il ne doit contenir que des quantités de sucre peu élevées ; mais il faut précipiter les matières qu’il renferme en dissolution el lui enlever sa matière colorante, qui rendrait très incertaine la fin de la réaction. Voici comment il convient d’opérer : 100 centimètres cubes de vin sont additionnés de 10 centimètres cubes de sous-acé- tate de plomb à 32° Baumé, puis filtrés. On ajoute au liquide filtré quelques grammes de noir animal lavé, desséché et pulvérisé ; on laisse le contact s’opérer pendant quelque temps en agitant de temps en temps, puis on filtre. La liqueur incolore est mise daus une bu- rettte de Mohr et sert à décolorer 5 centimètres cubes de liqueur de Fehling ou même 1 centimètre cube, s’il resle peu de sucre dans le vin. Le dosage s’effectue comme il a été déjà dit pour le moût et le calcul d’une façon analogue et en tenant compte du sous-acélate ajouté. Dosage de l'alcool. L'alcool est utile à connaître concurremment avec le dosage du sucre restant. D'ailleurs, l'alcool constituant la principale valeur du vin, sa détermination est celle qui est la plus courante. Elle peut être effectuée facilement par les viticulteurs, car il existe divers appareils très commodes, tels que l’alambic Salleron ou les ébullioscopes. Mais ils sont trop connus pour que nous ayons besoin de les dé- crire ICI. Telles sont les déterminations les plus importantes qui ont trait à l'examen sommaire des moûls. 94 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Beaucoup d’autres présenteraient un intérêt non moins grand, mais celles que je viens d'exposer sont suffisantes pour permettre aux viticulteurs d'opérer leur vinilication d’une façon rationnelle. Elles sont, comme on a pu le voir, très à leur portée et jene saurais trop les engager à en faire un fréquent usage, en raison des services qu’elles sont susceptibles de leur rendre. dés à "OBSERVATION RELATIVE AU DOSAGE DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LES EAUX PAR MAP G:N OU L DIRECTEUR DK LA STATION AGRONUMIQUE D’AKRAS — > < 4 — On évalue généralement aujourd’hui les matières organiques con- tenues dans les eaux au moyen du permanganate de potasse, mais on sait que les nombres trouvés ne mesurent que l'aptitude de ces matières à s'emparer de l’oxygène et ne font aucunement connaître leur poids. Nous avons entrepris quelques expériences dans le but de déter- miner les rapports qui existent entre ces poids et ceux de l'oxygène absorbé. Un poids connu de la substance a été dissous dans un litre d’eau et on a fait immédiatement un premier essai au permanganate sur une partie du liquide. Une seconde partie a été conservée dans un vase ouvert et exposé à la lumière et une troisième partie dans un vase fermé et maintenu dans l'obscurité. Ces deux parties ont été de nouveau essayées 40 jours après. Le poids des matières introduites a élé de 20 milligr. pour l’urée, l’acide urique, le saccharose et le glucose. Pour la vinasse on a . d’abord déterminé le poids de l’extrait pour 100 et on a introduit dans le litre d’eau le volume correspondant à 20 milligr. d'extrait. Pour le jus de betterave on a également déterminé la matière sèche pour 100 ; on a trouvé 18 et on à introduit 50 milligr. de jus. La matière soumise à l’essai n’a donc été, dans ce dernier cas, que de 9 millier. 96 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE Le tableau suivant donne les résultats obtenus ainsi que les coeffi- cients qui en ont été déduits et qu’il aurait fallu employer pour pas- ser du poids de l'oxygène absorbé à celui de la matière organique. On voit que ce coefficient a varié de 1,10 à 28,6. Il est donc tout à fait inexact de donner le chiffre obtenu comme représentant le poids de la matière et d’ailleurs ce poids n’est pas non plus ce que l’on recherche en faisant l’analyse d’une eau. Les matières organiques introduites dans un cours d’eau par la plupart de nos industries ou par les égouts sont rarement toxiques, et la mortalité des poissons qu’elles occasionnent parfois n’est pas due à un empoisonnement, mais à une asphyxie. Les poissons meu- rent parce que l'oxygène dissous dans l’eau disparaît. Ge qu’il importe par conséquent de connaître, c’est la faculté plus ou moins grande que possèdent ces matières d’absorber l’oxygène et c’est précisément ce que donne l'essai au permanganate. Nous inscrirons donc désormais les résultats de ces essais sur nos bulletins d'analyse, non plus sous la dénomination de matières or- ganiques, mais sous celle de facullé désoxygénante, qui elle-même représentera en milligrammes le poids d'oxygène pris au permanga- nate par un litre d’eau, en opérant comme nous l’avons indiqué dans les bulletins précédents. Facultés désoxygénantes. ACIDE SACOHA-| GLU- . VINASSE urique | | Poids des matières à l'étal sec. | txyeene absorbé, essai immédiat. après 40 jours, vase ouvert. — vase fermé. 19 19219 1 mt (UT Rapport èe mn Rapport D - | nt | Re SET | apport Ë QUELQUES RECHERCHES RELATIVES AUX MATIÈRES AZOTÉES DU SOL PAR M. PAGNOUL DIRECTEUR DE LA STATION AGRONOMIQUE D'ARRAS —059%0— Nous avons continué cette année les expériences entreprises l’année dernière sur les transformations de l’azote dans le sol, en en modifiant un peu le programme. Nous croyons donc devoir rappeler succinctement, avant d'exposer les nouveaux résultats obtenus, ceux auxquels nous ont conduit les expériences insérées dans notre Bulletin de 1896. La terre sur laquelle on avait opéré contenait, pour 100 &r., 160 milligr. d'azote organique dont 10, c’est-à-dire 6 à 7 p. 100, se sont transformés, en deux mois et demi, en azote soluble dans l'essai fait avec la terre seule. Cette terre, dans toutes les expériences suivantes, a été addilionnée de 50 milligr. d’azote sous des formes diverses, toujours pour 100 er. de terre. Avec le sang desséché la mitrification a été rapide et la plus grande partie de l’azote introduit se trouvait nitrifiée après 2 ou 8 mois. Un essai fait après 7 jours a donné une forte quantité d’azote nitreux, mais cette forme n’est que transitoire dans les conditions ordinaires et on n’en trouve plus ensuite que des traces. Le guano de poisson et plusieurs engrais préparés avec les hanne- tons desséchés ont conduit à peu près aux mêmes résultats. La pro- portion d’azote solubilisé a été de 60 à 62 p. 100. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SERIE, — 1898. — 11. 7 98 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le tourteau de ravison s’est comporté un péu différemment. Après 12 jours il a donné, toujours pour 100 d’azote organique, 17 d’azote ammoniacal et à d’azoie nitreux, qui se sont bientôt après nitrifiés pour donner finalement 46 d’azote nitrique. Un tourteau très pauvre livré sous le nom de tourteau de palmes- line n’a rien produit, c’est-à-dire que les résultats obtenus ont été les mêmes qu'avec la terre seule. Je puis ajouter aujourd’hui que ces résultats ont été confirmés par la pratique. Plusieurs agriculteurs qui avaient employé ce tourteau, l’année dernière, sur une grande échelle, m'ont déclaré celte année n’en avoir rien obtenu. Cette concordance vient donc à l'appui de la méthode que nous avons adoptée. Avec l’azote ammoniacal la fermentation a été rapide, mais on n’a pas retrouvé à la fin de l'expérience, à l’état soluble, la totalité de l'azote introduit. Une addition de phosphate basique au sang desséché n’a pas sensiblement modifié les résultats, mais il n’en a pas été de même avec le superphosphate. Une addilion à la terre de 5 p. 100 de superphosphate à presque arrêté la fermentation nitrique pendant un mois, tandis que la proportion d’azote ammoniacal s’est élevée à 34 milligr. La transformation de cet azote ammoniacal en azote nitrique s’est ensuite opérée. Mais avec 10 p. 100 de superphosphate l'azote ammoniacal a persisté jusqu’à la fin et s’est élevé jusqu’au chiffre de 40 milligr., tandis que l'azote nitrique n’a guère dépassé 7. Des arrosages avec de l’eau saturée de sulfure de carbone ont presque arrêté toutes les fermentations. L’azote de lurine fraîche s’est rapidement nitrifié sans que l’on ail pu constater son passage à l’état ammoniacal ou nitreux. Une addition au sang desséché de calcaires provenant de résidus de potasserie a fait apparaitre, après une douzaine de jours, 10 mil- ligr. d'azote nitreux dans une première expérience et 18 dans une seconde. La transformation nitrique s’est ensuite produite. En opérant, non plus avec de la terre, mais avec un sable siliceux stérile, le sang desséché n’a plus donné que des traces à peu près nulles d'azote nitrique. Une petite addition de terre à ce mélange a fait apparaître l’azote nitreux mais non l’azote nitrique. RECHERCHES RELATIVES AUX MATIÈRES AZOTÉES DU SOL. 99 Enfin, l'addition de lazote à l’état de crottin de cheval, sec ou humide, a complètement arrêté toute fermentation ; aucune trace d'azote nitrique n'a pu être constatée pendant la durée des quatre expériences qui ont été faites avec cet engrais, dont la présence a par conséquent empêché même la nitrification de l’azote préexistant dans le sol. On pourrait peut-être rapprocher ces résultats de ceux qui ont été obtenus sur le sol des forêts. On sait en effet que M. Ebermayer a constaté. une absence complète de nitrate dans le sol des forêts et dans les terrains tourbeux de la Bavière, que M. Bréal a signalé le même fait et que M. Ed. Henri l’a vérifié plus récemment encore dans un sol forestier très calcaire. Voici maintenant les nouvelles expériences entreprises le 4 mars et terminées le 22 juillet 1897. La terre employée était encore à peu près la même, c’était une terre faiblement argileuse contenant, à l’élat sec, un peu plus de 10 p. 100 de calcaire et 173 milligr. d’azote total, dont 5 sous la forme soluble, c’est-à-dire à l’état nitrique, nitreux ou ammoniacal. Le dosage de cet azote, d’abord effectué par la méthode Kjeldhal, avait donné 166, mais notre but étant, dans cette nouvelle série -d’expériences, de rechercher s’il y aurait eu, en dernier résultat, gain ou perte d’azote, nous avons cru devoir effectuer aussi le dosage par l’oxyde de cuivre. La méthode Kjeldhal, en effet, suffisamment exacte lorsque la terre ne contient que des traces d’azote nitrique, cesse de l’être lorsque les nitrates sont en quantité notable ; or c’est le cas qui devait se présenter à la fin de nos essais. L’emploi du cuivre devenait donc alors seul possible et il était par conséquent préférable de recourir à la même méthode pour obtenir la richesse initiale, afin d’avoir des chiffres bien comparables. Nous ajouterons encore que la méthode Kjeldhal nous a parfois donné des chiffres sensiblement trop faibles avec lés substances qui contenaient des sels ammoniacaux. Il est à craindre qu'il y ait, dans ce cas, perte d’ammoniaque. À La méthode classique de Dumas, pour les dosages d’azote, parait un peu abandonnée aujourd’hui, sans doute à cause de quelques petites difficultés pratiques dans l’exécution. Il faut recueillir azote sur le mercure, manipuler une forte dissolution de potasse, opérer 100 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. un transvasement. Je rappelle que toutes ces difficultés disparaissent par emploi de l’appareil que j'ai décrit dans le Bulletin de la Station de l’année 1886 et qui permet de mesurer directement l'azote re- cueill. L'opération peut marcher, pour ainsi dire, sans surveil- lance jusqu’à la fin. Cet appareil se trouve cité dans quelques cata- Jogues sous la dénominalion inexacte d'appareil pour le dosage des nitrates. Restant toujours monté dans le laboratoire, il nous sert depuis une dizaine d’années pour les dosages d’azote par l’oxyde de cuivre. L’azote soluble de la lerre se répartissait ainsi: AZOtENILTIQUE ON ER ON EM EE 50 AOL AMMONACAL EEE MEN 2 2.0 AOL MITLEUXS NE MEET MEMANTACES) 175 milligr. d’azote total, dont 5 à l’état soluble, sont donc les chiffres que nous avons adoptés comme représentant la richesse de 100 gr. de terre à l’état sec, à l’origine des essais. Les opérations ont été faites sur la terre employée seule ou addi- tionnée d'engrais. Le poids de l’engrais a été calculé de manière à introduire toujours, au moins dans les cinq premières séries, le même poids de 50 milligr. d'azote pour 100 du mélange sec. L’azote déterminé sous ses différentes formes solubles a toujours été ramené également à 100 de mélange sec. Les opérations ont été faites sur 200 gr. des mélanges intro- duits dans des capsules de porcelaine et maintenues à 30° dans une étuve de Babes, pendant toute la durée de l'expérience. Presque chaque jour le contenu des capsules était fortement re- mué, puis arrosé avec de l’eau distillée de manière à maintenir l'humidité entre 15 et 25 p. 100, mais en prenant le soin de ne jamais rendre la masse pâteuse, afin que l’aération puisse toujours s’y faire convenablement. Pour les essais effectués successivement à différentes époques, 40 gr. du mélange pesés dans une capsule de platine étaient séchés dans une étuve à 105° pour la détermination de l’eau. Pour le dosage de l’ammoniaque, 10 gr. étaient introduits dans un ballon avec de la magnésie et environ 50 centimètres cubes d’eau, RECHERCHES RELATIVES AUX MATIÈRES AZOTÉES DU SOL. 101 puis un peu de paraffine pour éviter la mousse. On distillait en re- cueillant dans un ballon de 50 et le dosage était fait avec la liqueur Nessler, après avoir complété le volume, comme nous l’avons exposé dans le Bulletin de 1896. Enfin 20 gr. étaient additionnés de 100 d’eau, puis sur le mélange filtré après une heure de contact, on prélevait 5 centimètres cubes pour le dosage de l’azote nitreux et 5 centimètres cubes pour celui de l'azote nitrique, en suivant toujours la marche détaillée dans la première partie de ce travail. Les résultats étaient ensuite ramenés par le calcul à 100 de terre sèche. Les méthodes colorimétriques employées ne sont pas, il est vrai, d’une grande précision, mais elles suffisent au moins pour montrer la progression, l'abondance ou la disparition de ces différentes formes de l’azote soluble. Elles sont d’ailleurs les seules auxquelles il soit possible. de recourir lorsqu'il ne s’agit d'évaluer que des traces de ces corps. Enfin, au moment où l’on mettait fin à l'expérience, on prélevait encore sur le mélange 10 gr. pour le dosage de l'azote total par l’oxyde de cuivre, afin de voir, en comparant avee la richesse initiale, s’il y avait eu perte ou gain, dénitrification ou au contraire fixation de l'azote libre de l’air. Pour que la fixation de l’azote, si elle avait lieu, ne puisse être attribuée à une absorption de vapeurs ammonia- cales, on a laissé dans l’étuve, pendant toute la durée des expérien- ces, une capsule contenant du sable calciné imbibé d’acide sulfuri- que. L’ammoniaque dosé avant et après dans ce mélange n’a donné pour 100 gr. qu'un accroissement assez douteux de 1 à 2 milligr. Nous avons, comme l'année dernière, divisé en séries de quatre les essais qui ont élé entrepris cette année, en faisant varier les en- grais employés ou les conditions de l’expérience. 4r° série. — Du 4 mars au 24 mai (80 jours). Cette série a eu pour objet la comparaison entre la rapidité de la transformation de l'azote organique préexistant dans le sol et celle de l’azote introduit à l’état de sang desséché et à l’état de fumier. 102 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Pour les essais 2 et 3 on a employé du sang desséché à 11 p. 100 d’azote, mais il avait été plus finement pulvérisé pour le n° 3, ce qui n’a pas donné de différences bien sensibles. La terre du n° 4 a reçu un fumier vinassé en poudre sèche et qui contenait sous cel élat 4.98 p. 100 d’azote. Cet engrais diffère complètement du fumier ordinaire par son origine et s1 composition. [l est obtenu par M. Ha- nicotte, distillateur à Béthune, en faisant passer ses vinasses sur des résidus de courte paille. Pour le n° 1, si on retranche de l’azote soluble obtenu les à mil- ägr. préexistant, on obtient : 12 jours 16 jours. 80 jours. Pour l'azote solubilisé dans 100 gr. de terre . 7,64 F2 12,47 Ou pour 100 de l'azote organique de cette terre. 4,5 9,4 7,4 En faisant le même calcul avec les résultats obtenus l’année der- nière, on trouverait 6.6 p. 100 après 73 jours. | En prenant les moyennes des résullats obtenus avec le sang des- séché pour l’azote soluble total et en en retranchant ce qu'a donné la terre seule, on obtient ce qui doit être attribuable aux 50 milligr. d'azote du sang introduit dans 100 gr. de terre. Enfin, en doublant ensuite les chiffres pour rapporter toujours à 100 d’azote organique, on obtient : APRÈS —— 12 jours. 46 jours. 80 jours. Pour l'azote solubilisé du sang. . . . . 57 58 29 On aurait de même pour celui du fumier . 15 35 48 On voit donc que l’azote du sang desséché se solubilise en une quinzaine de jours dans la proportion de plus de 50 p. 100 et que sa transformation devient ensuite plus lente, soit que l'azote du sang se trouve sous plusieurs états inégalement nitrifiables, soit que la nitrification se ralentisse lorsque la proportion d’azote nitrique atteint une certaine limite dans le sol. Avec le fumier vinassé la nitrification est plus lente, mais elle s’ef- fectue d’une manière continue jusqu’à la fin de l'expérience. Enfin, dans ces quatre essais l’azote total trouvé après les 80 jours RECHERCHES RELATIVES AUX MATIÈRES AZOTÉES DU SOL. 103 a toujours été supérieur à l’azote initial, on peut donc admettre qu'il y a eu fixation d’azote, surtout pour les n° 2 et 3. 1°° série. — Expérience commencée le 4 mars 1897. AZOTE SOLUBLE P. 100 en milligrammes EEE ammo- ni- ni- ni2cal. | treux. | trique. 4. Terre seule sans addition d'en- | grais : 16 mars | Azote total p. 100 initial. . 1738; 20 avril | — =- me ; ie 24 mai Gain ou perte. | | 2. Terre avec sang desséché à f1 p. 100 azote : " Azote total p. 100 initial . 2 —— — final. D Gain ou perte. . . . .+ 6 16 mars 3m 20 avril 2 49 sé 24 mai 2 8. Terre avec saug desséché à 11 p. 100 azote: | 16 mars Azote total p. 100 initial . 20 avril RE ERA MUR 24 mai Rs ) Gain ou perte. 4,98 p. 100 azote: 16 mars Azote total p: 100 initial . > 20 avril — — final. . 24 mai Gain ou perte. 2° série. — Du 5 mars au 29 juin (116 jours). Ces expériences ont eu pour but de comparer l’assimilabilité de l'azote contenu dans la poudre de viande, dans les tourteaux d’ara- chides et dans les tourteaux de sésame. En évaluant approximativement, d’après les résultats du n° 4, ce que devait donner en azote soluble l’azote de la terre seule, et en le déduisant des nombres obtenus aux différentes époques de l’expé- 104 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. rience, on obtient pour l'azote soluble fourni par 100 d’azote organique : APRÈS EU 7 13 jours. 53 jours. 87 jours. 116 jours. Avec la poudre de viande. . . . ... 62 8S s6 100 Avec le tourteau d'arachides . . . . 64 6S 18 100 Avec le tourteau de sésame. . . . , 62 74 74 94 La nitrification, dans tous les cas, serait donc complète en 116 jours, mais nous trouvons encore ici, comme avec le sang desséché, que la nitrification, très rapide dans la première quinzaine, devient ensuite beaucoup plus lente. Pour ce qui concerne l’azote total, déterminé directement par oxyde de cuivre, nous voyons qu’il est encore supérieur à l’azote initial. L’accroissement est, il est vrai, très faible, mais il ne permet pas, au moins, de constater l'existence d’une action dénitrifiante. 2° série. — Expérience commencée le 5 mars 1897. AZOTE SOLUBIHE P. 100 en milligrammes — — —— — ammo- ni- ni- niacal. | treux, | trique. 18 mars 0,06 | 39,30 DopR be 27 avril 0,20 | 56,00 soEjo Pre al: sn 2} {er juin 2 | 0,17 | 57,00 Gain ou perte. JR | 29 juin 0,05 | 66,42 | 18 mars 27 avril 1°T juin | 5. Terre avec poudre de viande 1 6. Terre avec même poudre de viande : Azote total p. 100 initial . 223mer, = — halle. 225 Lee Gain ou perte. . . . . ë 29 jum. [er] 39,93 55,00 55,50 70,80 © 1 193 1 © > ot | 7. Terre avec tourteau d'arachides, à 7.40 p. 100 : | Azote total p. 100 initial . — a final. A Gain ou perte. . . . .+ 7 29 juin 1S mars 27 avril 42,08 | 18,88 54,00 76,16 D © D I jet juin JE À SO © LE it] | 8. Terre avec tourteau de sésame, à) | 7.39 p. 100 : | Azote total p. 100 initial . 223msr — — final. . 234 18 mars 07 | 39, 41,51 | 27 avril c Ù 49, 51,05 | 1er juin 17 | 51,00 | 52,25 Gain ou perte. . . : .—+ 11 29 jun y V< Vo > 67,00 | BR RS SOUS RECHERCHES RELATIVES AUX MATIÈRES AZOTÉES DU SOL. 109 3° série. — Du 19 mars au 5 juillet (107 jours). Nous avions à comparer iei la solubilité de lazote fourni par deux tourteaux de ricin de richesses un peu différentes, par un tourteau de colza de Russie et par un résidu de poussière de laine, les poids étant calculés, comme nous l’avons dit, de ma- nière à introduire toujours 90 milligr. d’azote dans 100 gr. de terre. Les deux tourteaux de ricin contenaient l’un 4.50, l’autre 4.69 d'azote pour 100 ; le tourteau de colza en contenait 5 et le résidu de poussière de laine 1.82. En calculant, comme nous l’avons fait pour les séries précédentes, les poids d’azote solubilisé attribuables à 100 milligr. de l’azote organique introduit sous ces différents états, on obtient : APRÈS RE NS 11 jours. 40 jours. 88 jours. 107 jours. Avec les tourteaux de ricin, moyennes. 52 72 68 50 AVeCIeMOourteAuL de colza En 32 48 58 70 Avec la poussière de laine . . . . . 6 44 40 46 Ces chiffres présentent quelques anomalies qui peuvent être dues au défaut d’approximation des méthodes colorimétriques employées et peut-être aussi à l'évaluation assez arbitraire de l'azote soluble attribuable à la terre elle-même; mais il est permis néanmoins d’en conclure que la nitrification commence très rapidement sur le tour- teau de ricin comme sur ceux des précédentes séries, qu’elle est un peu plus lente sur le tourteau de colza, qu’elle est beaucoup moins rapide et moins complèle avec la poussière de laine, et que l'azote, sous celte dernière forme, doit exiger au moins quatre mois, dans les conditions les plus favorables, pour se solubiliser dans la propor- tion de 50 p. 100. Enfin, le dosage de l’azote total nous donne encore un acerois- sement très sensible de richesse pour chacun des quatre mé- langes. 106 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 3° série. — Expérience commencée le 49 mars 1897. AZOTE SOLUBLE P. 100 en milligrammes EE ammo- ni- ni- niacal. | treux, trique. | 9. Terre avec tourteau de ricin l 4.30 p. 100 : | Azote total p. 100 initial . sa | — — final. . Fe | Gain ou perte. . . . .+ 30 mars 0,05 | 35,67 | 37,64 | 29 avril 0,15 | 47,96 | 49,64 {6 juin 0,09 | 49,56 | 52,25 | 5 juill. 0,16 [56,16 | 58,44 | | 40. Terre avec tourteau de riein à 4.69 p. 100 : Azote total p. 100 initial . su | / ] | 30 mars 0,05. | 31,00 29 avril 0,16 | 46,80 16 juin 0,10 | 46,40 D. re fi al” . 9 As de ee 5 juil. | 1,23 | 0,09 | 59,80 | Gain ou perte. . . . .+ 41. Terre avec tourteau de colza à 5 p. 100: Azote total p. 100 initial . 221" _— — final 227 Gain ou perte. . . . .+ 6 30 mars | 29 avril 16 juin 5 juill. 42. Terre avec poussière de laine à 1-82 p.100: Azote total p. 100 initial . 2208 — — final. . 238 Gain ou perte. , . . .+ 18 30 mars 29 avril 16 juin > juill. 4° série. — Du 19 mars au 16 juillet (118 jours). Cette quatrième série d'expériences avait pour objet la recherche de l’influence que pouvait avoir l’action préalable d’une température supérieure à 100° et une faible addition d’acide. Le n° 13 n’a été que la reprise, comme terme de comparaison, de l'essai déjà effectué avec le sang desséché, dans les conditions ordinaires. Les essais se sont suffisamment rapprochés de ceux du n°2; Pour le n° 14, la terre a été mêlée avec 20 centimètres cubes 2- RECHERCHES RELATIVES AUX :MATIÈRES AZOTÉES DU SOL. 107 d'acide sulfurique au dixième et on y a ensuite introduit le sang desséché. Les résultats obtenus ne présentent, avec les précédents, aucune différence assez sensible pour qu’elle puisse être attribuée à la présence de l’acide qui, en effet, a dù être rapidement transformé en sulfate. La terre du n° 15 a élé préalablement maintenue à l’étuve à 105° pendant 3 heures 1/2 dans un vase fermé, pour que la dessiccation ne soit pas complèle, puis on a opéré le mélange avec le sang et continué les opérations en suivant toujours la même marche. Pour le n° 16, on a opéré de même, mais avec addition préalable de 20 centimètres cubes d’acide sulfurique au dixième. L'influence du chauffage dans ces deux derniers essais s’est mani- festée par une production assez forte d’azote ammoniacal et considé- rable d'azote nitreux, tandis que l’azote nitrique n’était plus repré- senté que par quelques milligrammes. Mais l’action oxydante ne se trouvait néanmoins que momentané- ment arrêtée, car à partir du 1* mai, la forme nitreuse avait disparu et la transformation nitrique reprenait son cours ordinaire en mon- trant cependant une infériorité assez sensible dans l’essai n° 16 où . l'azote nitrique cesse de s’accroilre à partir du 1° mai. La recherche de l'azote total donne encore un accroissement sen- sible pour le n° 13, mais douteux pour les n° 14 et 15 et négatif pour le n° 17. Le chauffage à 100°, surtout avec l'addition d’acide, semble donc avoir été funeste aux organismes fixateurs de l'azote. TABLEAU. 108 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 4° série. — Expérience commencée le 49 mars 1897. AZOTE SOLUBLE P. 100 en milligrammes am 10 O- niacal. 43. Terre avec sang desséché à {1 p. 100 : Azote total p. 100 initial . — — final. | Gain ou perte. . . . :+ 2 avril 1° mai 18 juin 16 juill. || 44. Terre avec acide et sang dessé- | ché à 11 p. 100 : | Azote total p. 100 initial . — — final, Gain ou perte. 2 avril 17 mai 18 juin 16 juil]. 45. Terre chauffée, et sang desséché à {1 p. 100: Azote total p. 100 initial . = — final. Gain ou perte. 2 avril LM A {8 juin 16 juill. 16. Terre avec acide, chauffée, -et sang desséché à {1 p. 100: Azote total p. 100 initial . — — final. Gain ou perte. 2 avril 1°T mai 18 juin 16 juill. 5° série. — Du 22 mars au 17 juillet (117 jours). Nous avions obtenu l’année dernière, avec le crottin de chevai, une production de nitrate absolument nulle, sans qu’il y ait eu cependant déperdition de l'azote total et l’expérience, renouvelée quatre fois, avait toujours donné le même résultat. Nous l'avons reprise celle année, mais avec une proportion de crottin deux fois moins forte, c’est-à-dire en n’apportant sous celte forme que 25 mil- ligr. d'azote pour 100 gr. de terre, les 25 autres milligr. étant donnés sous la forme de nitrate ou de sulfate d’ammoniaque. Le crottin employé contenait, à l’état humide, 0,364 p. 100 d’azote. RECHERCHES RELATIVES AUX MATIÈRES AZOTÉES DU SOL. 109 Pour le n° 17, où les 25 milligr. d’azote complémentaire ont été introduits à l’état de nitrate de potasse, on les retrouve bien dans les quatre essais effectués du 8 avril au 17 juillet, avec un excédent d'azote nitrique pouvant provenir des crotlins ou de la terre, mais ne dépassant guère ce que peut donner la terre seule. Quant à l'azote total, il s’est encore accru d’une manière sensible, aucune action dénitrifiante ne s’est donc manifestée. La terre du n° 48 à reçu les mêmes doses de croftin et de nitrate, et en outre, 15',5 de fécule, dont 1 gr. en poudre et 1/2 gr. à l’état d’empois. Le but était de rechercher si, comme l’a établi M. Dehé- rain, la fécule aurait accru l’activité du ferment dénitrifiant et si nous aurions enfin obtenu, par son intervention, une perte d’azote. La présence de la fécule a, en effet, fortement modifié les résultats, puisque l’azote nitrique ne commence plus à paraître que le 19 juin, et que son poids n’est encore que de 16 milligr. le 17 juillet. Mais nous n’avons pu encore constater de perte par dénitrification, puis- que nous arrivons encore à un gain de 5 miligr. pour l'azote total. Les mêmes expériences ont été reproduites avec les terres 19 et 20, l'azote nitrique étant seulement remplacé par de l’azote ammo- niacal. Les résultats sont encore sensiblement les mêmes, mais la nitrification dans la terre 19 ne parait d’abord porter que sur l’azote ammoniacal, et c’est seulement le 17 juillet que l’on obtient un faible excédent pouvant être attribué à une nitrification d’azote organique. Pour la terre 20 comme pour la terre 18, la présence de la fécule fait d’abord disparaître toute trace d’azote nitrique et cette forme de l'azote ne commence à apparaître d’une manière assez sensible que le 19 juin. On ne peut constater encore cependant aucune perte d'azote, l’azote total se retrouvant toujours en excès, même assez notable, à la fin de l'expérience. En résumé, ces expériences paraissent montrer que le crottin de cheval, surtout en présence de la fécule, tend à faire disparaître la forme nitrique de l'azote, mais que dans les conditions où l’on s’est placé, c’est-à-dire dans une terre maintenue à 30°, constamment humide et convenablement aérée, cette disparition ne saurait être attribuée à une dénitrification, c’est-à-dire à un dégagement d’azote 110 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. gazeux, mais plutôt à la formation de nouvelles combinaisons organiques azotées aux dépens de l’azote nitrique. Une autre hypothèse pourrait encore être admise. La fixation par la terre de l’azote libre de Pair a été établie par M. Berthelot et, dans une récente communication à l’Académie des sciences, M. De- hérain vient de montrer que cette assimilation pouvait être con- sidérablement favorisée par une continuité de température, d’hu- midité et d'aération convenables. On pourrait donc admettre qu'il y a eu action simultanée des agents dénitrifiants et des agents fixateurs de l’azote, mais que le travail des agents fixateurs l’a emporté sur celui des agents destructeurs. 5° série. — Expérience commencée le 22 mars 1897. AZOTE SOLUBLE P. 100 en milligrammes DATES. ammo- niacal. | treux. trique. l'état de crottin, 25 à l'état de nitrate de DA AU : Azote total p. 100 in'tial . ms | 47. Terre, plus 50% azote: 25 SE 8 avril 4° 0,06 | 30,00 7 mai 0517 729,52 19 juin 0,11 | 40,80 — — final. nel 17 juill. 0,32 19,99 Gain ou perte. . . . .+ 48. Même terre, plus 15°, 5 de fécule : | 8 avril 0,02 | 0,00 Azote total p. 100 initial . 21778 7 mai 0,08 | 0,00 — — os E222 19 juin 0,09 | 7,50 Gain ou perte. . “a 17 juill. 0,23 | 16,05 U l'état de crottin, 25 à l'état avril 0,04 de sulfate d'ammoniaque : 7 mai Azote total p. 106 initial . 2198 19 juin _— — final. . de. 17 juill. Gain ou perte. (49. Terre, plus 50m% azote: 25 à Terre, plus 50m8r azote: 25 ne © 2 O Où # © © © © O2 19 19 1] 20. Mème terre, plus {57,5 de fécule : 8 avril Azote total p. 100 initial , 217m8{ 7 mai = — ferens ; fe ne 9 juin 1,90 | | Gain ou perte. 7 juill. Re r- RECHERCHES RELATIVES AUX MATIÈRES AZOTÉES DU SOL. 111 6° série. — Du 27 mars au 22 juillet (117 jours). Nous avons voulu rechercher, avec cette série, comment se com- portait une terre très riche en humus et en azote. L’échantillon a été pris sur Îles fortifications extérieures de la ville; c’était une terre ayant toujours porté gazon depuis un temps indéterminé, sans rece- voir aucun engrais. Elle contenait pour 100 de sec: Carbonate de chaux en grammes. . . . . . .… . 40,6 Azote organique en milligrammes. . . . . . . . 291,0 | er AMMONIAGAL ET PC + ER RE APT ER 3,0 — nitreux . 154) un TIQUE SRE 5 2 RÉ RESREENRR E TR NET FT Nous ferons observer en passant que les terres voisines, de même nature mais soumises à une culture ordinaire, ne renferment guère que 100 à 200 milligr. d’azole, et que, par conséquent, cette terre gazonnée a dû en emprunter à l'air une quantité ‘considérable pour atteindre le chiffre de 597, tout en fournissant l’azote nécessaire aux récoltes annuelles. Pour le n° 21, si l’on retranche de l’azote soluble trouvé les 6 milligr. préexistants, ont obtient pour l’azote soluble formé aux dépens de l’humus : APRÈS A 13 jours. 38 jours, 87 jours. 117 jours, Pour 100 grammes de terre, . . . . 5,95 5192 26,02 30:29 Et p. 100 milligr. d'azote organique . 1,0f 1,51 1,40 6,14 Avec une terre ordinaire, nous avions obtenu l’année dernière 6,6 après 75 jours ; celle année 7,4 après 80 jours. La nitrification serait donc ici un peu plus lente. Si maintenant on remarque que ces nombres ont élé obtenus dans des conditions exceplionnellement favorables de température, d'aération et d'humidité, on comprend que dans les conditions ordinaires, ils pourront s’abaisser au chiffre de 2,5 admis par M. Risler, comme représentant l'azote assimilable fourni annuellement par 400 de l'azote organique du sol. Pour les trois essais suivants, il a été fait une addition de 62 mil- ligrammes d'azote soluble à l’état de nitrate de potasse dans le n° 22, de sulfate d’ammoniaque dans le n° 23 et sous ces deux états dans 112 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. le n° 24. La dernière capsule a reçu en outre une culture faite avec du crottin de cheval et de la fécule suivant une formule donnée par M. Dehérain, dans le but de développer le ferment dénitrifiant. Les différents essais font bien retrouver à peu près l’azote soluble introduit, augmenté de celui qui a dû être fourni par la terre elle- même, le dernier chiffre du n° 24 est seulement un-peu plus faible que les autres. Enfin, l’azote total déterminé à la fin de chaque expérience donne encore un gain appréciable pour les n° 21, 22 et 23, mais cette fois une légère diminution pour le n° 24. 6° série. — Expérience commencée le 27 mars 1897. AZOTE SOLUBLE P. 100 en milligrammes © ammo- ni- ni- niacal. | treux. | trique. | 21. Terre de gazon : 9 avril 0,08 8,47 | Azote total p. 100 initial. 597%) 4 mai 102 10:2841 14-92 — — final. . 620° { 22 juin 0502122992 |» Gain ou perte: : . . .—+ 23 22 juill. 0,10 |-38,75 22. Même terre, plus 628 azote "1 trique : | Azote total p. 100 initial . Rue — — RL È | Gain ou perte. 9 avril 0,09 | 66,00 4 mai 0,17 | 80,90 22 juin : 0,32 | 95,04 22 juill. 0.13 102,00 : 23. Même terre, plus 62m8r el | moniacal : | Azote total p. 100 initial . 6595 | _— = te J | Gain ou perte. 9 avril 50 | 0,08 56,24 4 mai ,49. | 0, 71,00 22 juin j - 83,70 92 juill. ,90 | 0,13 [120,90 WW © 1 ot © à 1) 9 avril 4 mai 22 juin 22 juill. que, plus 31 azote ammonia- cal: | Azote total p. 100 initial . 6598 — — final. . KE | Gain ou perte. | 2&. Même terre, plus 31 azote = : | Ce Af Con FALSIFICATIONS DES GRAISSES INDUSTRIELLES ÉReCONTE SAT ES PROCÉDÉS À EMPLOYER POUR LES RECONNAITRE PAR MM. A. MUNTZ, CH. DURAND et E. MILLIAU INTRODUCTION ! Depuis plusieurs années, des contestations fréquentes s’élèvent entre les divers experts chargés de la vérification des graisses ali- mentaires, soit par l'administration de l’État, douane, etc., soit par les octrois ou le commerce en général. Les uns prétendent que les saindoux en litige contiennent soit du suif, soit de l'huile de coton ou soit une autre huile de graine, ou bien encore que le saindoux a été additionné d’huile de saindoux extraite du saindoux pressé, tandis que les autres affirment au cou- traire que les produits sont purs et que les différences trouvées dans les résultats analytiques proviennent de celles qui existent entre les diverses espèces de saindoux suivant leur origine, suivant leur mode d’extraction, leur âge, et aussi suivant les parties adipeuses du corps dont ils peuvent avoir été retirés. Dans le but d’éclaircir aussi complètement que possible une 1. Ge rapport, dressé conformément aux instructions ministérielles du 30 avril {595 (décision du ministre de l'agriculture) et du 9 juillet {895 (décision du ministre de ia marine), a été rédigé par M. Milliau, au nom des membres de la commission. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1SY8. — Ir. 8 114 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. question aussi complexe et aussi délicate, les membres de la com- mission se sont procuré des graisses alimentaires de toutes les ori- gines, de lous les pays, en s’assurant de toutes les garanties de pu- relé; de plus, ils ont obtenu dans leurs laboratoires des produits similaires tirés directement des diverses parties adipeuses des ani- maux et ont pu ainsi se livrer à des recherches exécutées dans les meilleures conditions possibles. CHAPITRE PREMIER CLASSIFICATION ET FABRICATION DES GRAISSES ALIMENTAIRES La graisse de porc élait autrefois uniquement obtenue par la simple fusion des parties adipeuses de l’épiploon et des reins de l’a- nimal, mais, depuis que le commerce de ce produit a pris en Amé- rique une extension aussi considérable, on a appliqué des méthodes d’extraction plus parfaites et plus rationnelles, qui ont eu pour but de recueillir toutes les parties grasses de l’animal, faisant naître ainsi des qualités différentes au lieu du type unique qui existait autrefois. Cette production, n’ayant pas en Europe la même importance qu’en Amérique, n’a pas donné lieu à une extraction aussi complète des diverses parties, et les procédés américains n’ont été suivis que partiellement. Nous prendrons donc comme type la fabrication américaine, celle d'Europe n’en étant qu’un diminutif. La graisse de porc donne en Amérique, suivant les parties de l’a- nimal employées et suivant les méthodes de préparation, les pro- duits suivants : 1. Saindoux neutre (extrait de la panne par pression). . Neutral lard. 2 A RANNEt (ÉLON)E EE EE TE RU Re Leaf lard. 3. Saindoux premier choix en autoclave (idem). . . . Choice lard. 4. Saindoux première qualité (dem). . . . . . . . Prime lard. 5. Saindoux de boucher (idem) . . . . . . . . . . Butlcher lard. 5. Saindoux raffiné (idem) . MORTE . . Refined lard. 7. Saindoux composé Ddedee de graisse el d huile) . = Compound lard. DST NT MO FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 115 Neutral lard. — La première qualité de saindoux (neutral lard) est extraite de la panne par pression. La panne est détachée, lavée avec le plus grand soin et mise en réserve dans des chambres froides. Elle est ensuite hachée, fondue dans une chaudière à double fond chauffée par la vapeur à 40° et 90°; ce saindoux, très neutre, puisqu'il contient à peine 0.35 p.100 d'acide gras libre, est surtout employé à la fabrication du beurre artificiel (butterine) ; il titre 39°, 40°, 44°. Leaf lard. — Par ce traitement, on est loin de retirer toute la graisse contenue dans les tissus mis en chaudière, les parties non fondues sont soumises à l’action de la vapeur sous pression, on ob- tient ainsi le leaf lard, que sa production limitée exclut presque complètement du marché. Choice lard. — Le choice lard provient de la graisse des rognons qui n’a pas été employée pour les deux qualités précédentes, de la graisse du dos après séparation de la peau et des déchets obtenus lors du découpage de la viande; suivant que ces graisses sont fon- dues en autoclave par la vapeur directe ou en chaudière ouverte, elles constituent le choice steam lard ou le choice keltle lard. La chambre de commerce (Bourd of trade) de Chicago définit ainsi le choice lard : « Le choice lard ne doit être fait qu’avec la graisse entourant les rognons ou provenant du découpage de l'animal ; il peut être fondu dans une chaudière ou par l’action directe de la vapeur. » La fabrication à la chaudière, chauffée à la vapeur ou à feu nu, est presque complètement abandonnée, bien qu’elle donne, parail-1l, un produit d’un goût spécial de fumée préféré par beaucoup de consommateurs. La facilité avec laquelle on peut brûler et par con- séquent noircir la graisse en la fondant explique l'abandon de cetie méthode. Prime lard. — Le prime lard prend, suivant son mode d’extrac- tion, le nom de prime steam lard (fabrication en autoclave) ou prime keltle lard (fabrication en chaudière ouverte). Cette deuxième méthode n’est plus employée et c’est sur le prime 116 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. steam lard que s’établissent tous les cours. La chambre de com- merce de Chicago en donne une définition très vague : « Le véritable prime steam lard ne doit être fait qu'avec les dé- chets du découpage de la viande et certaines autres parties grasses du corps par application directe de la vapeur. Cette graisse ne doit pas être traitée par des agitateurs ou des machines susceptibles d’altérer ses propriétés. Ce saindoux doit avoir une couleur et un goût spéciaux en même temps que la faculté de se conserver. Au- cune partie salée ne doit être employée dans la fabrication. Le nom et l'adresse du fabricant ainsi que la qualité de la marchandise doi- vent être visiblement marqués sur chaque récipient au moment de l'emballage. » On voit en somme que ce genre de saindoux n’aura pas une com- position constante, suivant que l’on prendra pour le fabriquer cer- taines parties, toujours les mêmes, ou l’ensemble de diverses parties. En général, l’autoclave est chargé avec les têtes, la graisse des intestins, la graisse du cœur, les découpures de viande, en un mot tout l’intérieur du porc sauf le foie, les intestins, les poumons et le cœur proprement dit. Les organes génitaux et les fœtus ne sont pas employés à la fabri- cation du saindoux à bouche. Ces parties sont fondues à part ou avec les cadavres des porcs morts en chemin de fer (dont la destruction est surveillée avec la plus grande sévérité par les autorités) et sont converties en graisses à fabriques sous le nom de while grease ou prime yellow grease, ou encore N. 1 lard. Ces graisses sont vendues à la savonnerie. La durée de l’autoclavation varie de douze à vingt-quatre heures, à la pression de 1 à 4 kilogr. par centimètre carré, 17 à 25 kilogr. par pouce carré. Le saindoux obtenu est blanc et possède une odeur sui generis ; refroidi lentement, il prend une apparence granuleuse; son acidité varie de 0.4 à 1 p. 100, et son titre de 37° à 38°. Butcher lard. — Le butcher lard, ou saindoux des charcutiers, a FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 117 une composition des plus variables; la plupart du temps, il contient plus d'acides gras que le prime steam lard et possède un titre infé- rieur. Épuration du saindoux. Dans certains cas, pour épurer le saindoux qui n’esl pas suffisam- ment blanc, on le traite, une fois fondu, par la soude caustique à environ 36° Baumé dans des appareils semblables à ceux employés pour l'huile de coton; on laisse déposer et on décante. On achève la décoloration à l’aide de la terre à foulon dans un ré- servoir muni d’un agitateur el traversé par un courant d’air chaud. En sortant du filtre-presse, le produit est très beau, surtout si l’on a opéré sur un saindoux exempt de traces d’eau. Refined lard, compound lard. — Le saindoux raffiné est un pro- duit préparé avec les autres saindoux, en leur enlevant leur couleur et leur mauvais goût à l’aide des moyens précités. Autrefois, les expressions refined lard et compound pouvaient être synonymes; aujourd’hui, la distinction est absolue et le refined lard doit être pur, tandis que le compound est toujours composé de graisses et d'huiles. A l’origine, les demandes de saindoux allant sans cesse en crois- sant, on eut l’idée d'augmenter la production et de diminuer le prix de revient en l’additionnant d’un mélange d'huile de coton et de suif, ou d’oléo-stéarine (suif pressé) ayant la même consistance (sou- vent après avoir déjà retiré l’huile de lard, du saindoux lui-même). De nos jours, le compound est quelquefois exclusivement composé de suif comestible et d’huiles végétales. S'il importe d'empêcher le commerce de livrer le compound lard comme ne contenant que du saindoux pur, il est juste d’ajouter que dans la fabrication soignée de ce produit il n’entre que des matières saines et de bonne qualité, et que le mélange obtenu est un produit comestible qui peut rendre de grands services à l’alimentation. Pour effectuer le mélange, on se sert d’un grand bac dont le fond constitue le plateau d’une bascule spéciale et dans lequel arrivent fondus les divers corps gras; on pèse la quantité voulue de chacun 118 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. et l’on envoie le tout dans une chaudière munie d’un agitateur pour mélanger la masse. Appareils à refroidir. — Les appareils à refroidir sont lous basés sur le même principe: le froid est produit par l’ammoniaque et transmis à une surface de contact par un liquide incongelable à quelques degrés au-dessous de 0°. Le liquide employé est l’eau salée. L'appareil le plus communément en usage comprend comme or- gane essentiel un cylindre creux à l’intérieur duquel circule l’eau salée; il est animé d’un mouvement de rotation autour de son axe placé horizontalement. Le corps gras est projeté sur sa surface suivant la génératrice et forme, à mesure que le cylindre tourne, une enveloppe qui se soli- difie graduellement. Avant d’avoir effectué une rotation complète, il est détaché par un racloir et tombe dans une gouttière munie d’un agitateur à palettes, qui le brasse et le pousse hors de l’appareil. Le saindoux, plus diff - cile à refroidir, subit une deuxième opération. Il existe aussi un deuxième dispositif qui semble moins générale- ment employé : le corps gras passe dans des réservoirs traversés par des serpentins à circulation d’eau froide, tombe dans une cuve ey- lindrique à double enveloppe maintenue à basse température par un courant d’eau salée refroidie par les machines à l’'ammoniaque. Dans l’intérieur du cylindre se trouve un cadre dont les côtés sont des couteaux qui raclent incessamment les parois de la cuve où vient se fixer la graisse solidifiée. Deux tiges qui servent à mélanger re- çoivent leur mouvement de l’arbre central au moyen de roues dentées et tournant en sens contraire. Elle donnent à la masse une agitation qui ramène au centre les parties extérieures et inversement. Le produit obtenu dans ces conditions présente une parfaite homogénéité. On retire du saindoux les produits dérivés suivants : 1° Huile de saindoux (lard oil). — Elle est obtenue en soumettant le saindoux grenu à une pression graduelle et continue. Le rende- FALSIFIUATIONS DES GRAISSES. 119 ment, variable avec la température, est en raison directe de la pres- sion et de sa durée. L'huile extraite à basse température supporte plus facilement l’action du froid ; 2 Sléarine de saindoux (lard stearine). — C'est la partie solide qui reste dans les scourtins après l'extraction de l’huile de saindoux. Le lard stearine n’est presque pas employé à la fabrication du compound lard. Par contre, les fabricants de saindoux raffinés purs, qui tiennent à ne livrer que de la graisse de porc sans mélange et qui sont obligés d'obtenir une consistance plus ferme que celle du saindoux ordinaire américain, qui est assez mou, se servent exclu- sivement de lard slewrine pour atteindre ce but. La consommation d’huile de saindoux ayant beaucoup diminué par suite de la concurrence des huiles minérales à graissage, la pro- duction du lard stearine est relativement limitée et le prix de l’article trop élevé pour que les fabricants de compound lurd puissent s’en servir. Suifs. On retire du bœuf deux qualités de suif : le suif à bouche et le suif à savon (suif de place). Pour la fabrication de loléo-margarine, qui sert à faire le beurre artificiel, on emploie la graisse qui entoure les rognons et le filet. Les parties adipeuses de ces organes sont lavées soigneusement à l’eau glacée ; elles sont coupées en morceaux et introduites dans des chaudières plus profondes et chauflées par un double fond, à la vapeur, sous pression atmosphérique, car la température ne doit jamais dépasser 100°. Ces chaudières sont munies d’agitateurs en forme de peignes qui remuent sans cesse les parties solides et retiennent entre leurs dents la viande qui pourrait adhérer aux cellules grasses. Quand tout est fondu, on laisse reposer puis on décante dans deux ou irois chau- dières successives chauffées à douce température ; de la troisième chaudière, le suif tombe dans des caisses mobiles qui sont alors placées dans une chambre spéciale où il se refroidit très lentement en prenant une apparence grenue. Quand il est arrivé à une tempc- rature de 2% centigrades environ, on le brasse pour le mélanger 120 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. et on le met en scourtins de 0",30 de long et 0,15 à 0",30 de large que l’on range sous une presse hydraulique. Il y reste une demi-heure et plus, la pression étant augmentée graduellement et devenant considérable à la fin de l'opération. L’oléo-margarine qui coule abondamment est reçue dans des gouttières et finalement employée pour la fabrication du beurre artificiel ; quelquefois, cette huile est filtrée avec un peu de terre à foulon pour augmenter sa transparence et sa blancheur. L’oléo-stéarine (ou suif pressé) reste dans les scourtins sous forme de gâteaux secs, elle est en général très neutre, titre 50° environ et s'emploie surtout dans les graisses alimentaires pour rendre aux mélanges la consistance que leur a fait perdre l'huile de coton. Mais il faut pour cela qu’elle soit de toute première qualité et très fraiche, Elle se détériore assez facilement et ne peut plus servir qu’à l’industrie dès qu’elle commence à prendre le moindre goût. Quand le cours est bas, on l’emploie aussi pour la fabrication de la bougie, où, par suite de son titre élevé, elle est avantageusement utilisée. Le suif proprement dit ({allow) est fait par autoclavation avec les déchets du découpage de la viande, les têtes, les entrailles, en un mot tous les organes non utilisés séparément. Suivant la qualité des parties employées et suivant la pression à laquelle on les soumet, on . obtient du suif à bouche ou du suif industriel. En n’employant que des morceaux de choix, on arrive à faire un suif assez neutre pour être mélangé au saindoux dans les graisses alimentaires. Huile de coton. La fabrication de l'huile de coton s’opère de la manière sui- vanlLe : : Les graines, préalablement dépouillées des fibres de coton, passent d’abord sur un tamis qui retient lés corps étrangers d’un assez gros volume ; ce tamis porte un aimant qui attire à lui les clous et évite les dégâts que ceux-ci causeraient aux appareils ; la graine passe ensuile dans une sorte de peigneuse, où elle abandonne les derniers vestiges du coton textile. La graine nettoyée arrive alors dans un concasseur formé de FALSIFICATIONS DES GRAISSES. LL cylindres animés d’un mouvement de rotation et dont la surface est garnie de couteaux. La coque et l’amande de la graine y sont coupées ensemble, les morceaux tombent sur un tamis à trépidation continue, les amandes le traversent pendant que les coques sont enlevées par une toile sans fin. Les amandes broyées par des meules et réduites en une pâte, que l’on soumet à l’action de la chaleur pendant une demi-heure environ (la température variant entre 98° et 102°), sont ensuite mises en scourtins par des machines spéciales et passées à chaud à la presse hydraulique. L'huile oblenue est plus ou moins rougeâtre et constitue ce qu’on appelle l’« huile brute ». Les tourteaux qui contiennent de 8 à 11 p. 100 d'huile sont utilisés pour la nourriture des animaux en morceaux ou en poudre. Sous celle dernière forme, ils trouvent fréquemment leurs emplois comme engrais. Depuis quelques années, on retire souvent l'huile restant dans le tourteau à l’aide du sulfure de carbone ; le tourteau prend alors le nom de tourteau sulfuré et n’est plus employé que comme engrais. Épuration de l'huile. — Pour raffiner l'huile brute, on l’introduit dans de grands bacs (25 pieds de long sur 15 de large) munis d’a- gilaleurs destinés à maintenir la masse en mouvement et chauflés par la vapeur qui circule dans des serpentins placés latéralement à une certaine hauteur au-dessus du fond. Dans certaines usines, on emploie, de concert avec l’agitateur, un barboteur à air chaud qui mélange la masse et favorise ainsi les réactions chimiques qui s’y opèrent, mais qui a aussi l’inconvénient d’oxyder la matière grasse. Quand lhuile est à la température de 38, 40° centigrades on ajoute 8 à 5 p. 100 d’une lessive de soude caustique à 36° Baumé environ. L'agitateur est mis en mouvement pendant une heure, on laisse ensuite déposer en maintenant seulement une température constante. La soude caustique a pour effet, sous l’action du savon formé, d’é- mulsionner la masse et aussi de détruire partiellement la matière colorante. Par le repos, l’émulsion se sépare en deux parties : l'huile liquide monte à la surface et le savon tombe au fond en entrainant 122 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. les impuretés. Après un repos de 6 à 36 heures suivant le cas, on décante au moyen d’un tuvau à genouillère, et le résidu noirâtre qui couvre le fond du bac en est retiré par un orifice ad hoc. Ce mélange d'huile, de savon et d’impuretés (foots ou soap-stock) est utilisé dans la fabrication des savons bruns. Les huiles encore acides après cette opération son! soum'ses une seconde fois au même traitement. L'huile raffinée est reçue dans un réservoir où on la laisse déposer quelques jours et se dépouiller d’une grande partie du soap-stock qu’elle pouvait contenir ; de là, on décante dans un autre réservoir chauffé à une douce température, puis on laisse reposer un certain temps pour que l'huile perde les dernières particules étrangères qui restent en suspension. C’est le produit ainsi obtenu qui est employé par la plupart des industriels. Décoloralion des huiles de coton. — On blanchit l'huile de coton dans des bacs semblables à ceux servant à la raffiner. Quand lhuile, parfaitement sèche, est à la température de 40° cen- tigrades environ, on ajoute 3 à 5 p. 100 de terre à foulon finement pulvérisée, et l'on met l’agilateur en mouvement pendant que la masse est traversée par un courant d'air chaud. Lorsque le mélange est intime et que l’huile parait suffisamment décolorée, on envoie le fond au filtre-presse. Celui-ci retient la terre à foulon et la matière colorante qu'elle a absorbée tandis que l'huile s’écouie parfaitement limpide. | Ce traitement donne une huile assez belle et dont les propriétés ne sont pas altérées. Les huiles de coton se divisent en deux classes principales : huiles d'été (sumimer oùls) ou huiles d'hiver (winter oils). Chacune d'elles peut être jaune (yellow) ou blanche (while). L'huile d’été jaune est l'huile raffinée, filtrée ou non. La même huile, refroidie à une tem- pérature suffisante pour qu’elle se solidifie en partie, donne naissance à 26 p. 100 environ de stéarine, que l’on extrait par pression à froid ; l'huile prend, après ce traitement, le nom d'huile jaune d'hiver (winter yellow oil). L'huile d'hiver (winter oùl) est reconnue comme telle lorsqu'elle ne se trouble pas exposée pendant trois heures dans un tube à essai, à la température de 0° (glace pilée). FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 123 Huiles d'arachide et de sésame. — Ces huiles, qui entrent aussi dans la composition des graisses alimentaires, sont extraites à la presse par les procédés habituellement employés dans l’huilerie et décolorées par la terre à foulon. CHAPITRE II ANALYSE CHIMIQUE Épuration préulable des graisses alimentaires soumises à l'analyse. — Les glycérides constituant les matières grasses naturelles con- tiennent toujours des acides gras libres en proportion variable et des matières étrangères en suspension ou même dissoutes ; il est donc rationnel, pour obtenir des résultats précis, de leur faire subir un traitement qui les débarrasse de l’excès d’acidité et de la plupart des impuretés. La proportion et la nature des acides gras contenus dans les graisses peul varier sous l'influence de causes les plus diverses. Les graisses faites dans les meilleures conditions contiennent toujours quelques dixièmes d’acides gras libres; cette proportion augmente notablement avec le temps, quelles que soient les précautions prises pour empêcher toute altération. L’oxydation des matières grasses donne des produits variables avec les causes qui la provoquent et leur intensité. Une oxydation très ménagée peut amener la production de glycérides oxydés, sans formation sensible d’acide gras. Si l'oxydation est plus énergique, le glycéride se décompose en acide gras et en glycérine ; cette dernière ne tarde pas à disparaitre en se transformant en produits nouveaux, acide formique, elc., Landis que l'acide gras se dédouble généralement en deux termes inférieurs et également oxydés des acides de la série grasse, dont l’un est vola- til, l’autre fixe, mais avec un point de fusion plus bas que celui de l'acide gras primitif, sauf pour les acides non saturés tel que l'acide oléique, qui en s’oxydant peut donner naissance à des acides concrets et à de l’acide acétique. 124 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Une oxydation encore plus intense détruit l'acide gras avec for- mation de produits substilués, et l’on désigne pratiquement cette transformation sous le nom de résinification des matières grasses. On sait en effet qu’il existe d’étroites relations chimiques entre les acides gras oxydés et les résines. On constate quelquefois dans les produits de substitution la présence de corps qui sont sans action sur la soude caustique. On trouve ainsi en dissolution dans les acides gras des graisses très allérées, des matières insaponifiables qui abaissent sensiblement l’indice de saponification. Des matières étrangères de nature très variable se rencontrent également dans les matières grasses. Ces considérations s'appliquent à toutes les matières grasses, mais on a à en tenir compte plus sou- vent encore dans l’analvse du saindoux qui est la graisse générale- ment la plus falsifiée à cause de son prix élevé. De plus, le porc étant un animal omnivore, on peut supposer que la graisse qu'on en relire offrira des différences appréciables suivant qu’il aura été nourri avec des glands, du maïs, des tourteaux, etc. La manière dont la fonte est opérée donnera également des pro- duits différents. Celle effectuée dans des chaudières à feu direct et sans pression aura des caractères qui ne seront pas absolument identiques avec ceux de la graisse dont la fonte aura été obtenue sous pression dans un autoclave. Dans ce dernier cas, par exemple, les fibres des tissus organiques qui se trouvent avec les tissus adipeux donnent des produits ayant une action réductrice prononcée. Épuration des matières grasses soumises à l'analyse. La marche de l’épuration des matières grasses ne peut être fixée d’une façon invariable puisqu'elle dépend à la fois de leur degré d’oxydation, de la nature des impuretés et de l’objet de la recherche. Nous allons indiquer deux procédés qui réussissent dans la plupart des cas. Premier mode. — On prend une quantité de matière grasse pro- portionnelle au nombre d'essais auxquels on veut la soumettre, on ajoute deux fois le volume d’une solution de sel marin pur mar- FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 125 quant 48° Baumé. On verse quelques gouttes d’une solution alcoo- lique de phénolphtaléine pur à 2 p. 100 ; on sature les acides gras libres en versant goutte à goutte une liqueur tilrée contenant 148,184 de Na°O par litre. On agite vivement après chaque addition de solution alcaline, et l’on arrête l'opération lorsque la teinte rose caractéristique persiste encore après une agitation de deux minutes environ. (Cette opération peut en même temps servir au dosage des acides gras libres.) On soumet ensuite la masse à l’action d’une douce chaleur, on décante la solution saline, on lave deux fois à l’eau salée et trois fois à l’eau distillée en chauffant légèrement après chaque addition : on peut alors filtrer les matières grasses après les avoir laissées reposer suffisamment pour permettre à la parlie aqueuse de se séparer entièrement. Celte épuration a pour effet de débarrasser la graisse de la plupart des matières étrangères ainsi que des matières résinoïdes, qui se trouvent saponifiées les premières, mais elle ne saurait convenir à tous les cas, ni enlever toutes les impuretés et encore moins rendre à la matière grasse altérée sa composilion primitive. Deuxième mode. — Lorsqu'on doit opérer sur les acides gras, on peut, si besoin est, faire précéder la saponification d’une épuration à l'alcool (100 grammes d’alcooi pour 50 grammes de graisse) qui ne saurait avoir d’inconvénients sérieux puisque la combinaison s’effectue ensuite en présence de lalcool, dont on débarrasse le savon par une ébullition prolongée en solution aqueuse. Les matières grasses, même neutres, dissolvent de notables pro- portions d'alcool, qu’il importe d’éliminer si l’on a usé de ce mode d’épuralion. Il suffit pour cela de laver la matière grasse épurée trois fois à l’eau distillée et de la soumettre ensuite à l’action d’une douce chaleur, jusqu’au moment où le poids de la masse devient constant. Les opérations ci-dessus indiquées élant terminées, on peut, sui- vant le cas, opérer soit sur la matière grasse neutralisée, soil sur les acides qui en dérivent. Il est bien entendu que ces opérations longues et délicates n° doivent être effectuées que dans les cas douteux, c’est-à-dire sur dès 126 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. malières grasses ayant donné des résultats incertains aux essais faits sur le produit naturel. Si l’on se trouve en présence d’une matière grasse ayant déjà subi un traitement qui a pour but de la débarrasser à la fois des impuretés et des acides gras, le cas se complique encore. En eflet, si une rectification légère telle que nous lavons conseillée a pour résultat! de débarrasser le produit de divers corps étrangers sans modifier l’élat chimique, par contre une attaque à chaud par une solution concentrée de soude caustique telle qu’elle est faite habituellement dans l’industrie non seulement saponifie les acides gras et les matières résinoïdes, mais aussi peut modifier les glycérides. Sans rappeler la propriété connue des hydrates alcalins de dé- doubler les corps de la série oléique en acides acétique et formique el un autre acide de la série saturée, on observe quelquefois dans l’analyse des matières grasses rectifiées Industriellement des varia- tions anormales de l’indice d’iode et en général du pouvoir absorbant de ces corps vis-à-vis de l’hydrogène, du chlore, du brome et de l’iode. La densité est également modifiée, de même que les points de fusion et de solidification, l’échauffement sulfurique et l'indice de saponificalion ; enfin, les vapeurs nitreuses n’opérent plus aussi par- faitement la solidification, qui est subordonnée au quantum d’é- laïdine ou d'acide élaïdique et par conséquent à celui de leurs isomères générateurs, l’oléme et l’acide oléique. Les considérations dans lesquelles nous venons d'entrer montrent la nature des difficultés qui attendent le chimiste dans l’analyse des matières grasses. Elles mettent aussi en évidence toute la puérilité des réactions colorées ct l'impossibilité absolue de trouver pour des analyses si complexes et si délicates un réactif infaillible et s’appli- quant à tous les cas, comme le public parait l’attendre de la science. Saponification des matières grasses et préparation des acides gras. Au cours des opérations qui vont suivre, on aura fréquemment à opérer la saponification des malières grasses soumises à l’analvse, FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 127 soit pour en extraire les acides gras à l’état pâleux, soit pour les obtenir fondus et déshydratés. Il est donc désirable de déterminer une fois pour toutes les bases de l’opération. Pour saponifier parfaitement les malières grasses, on en verse une quantité déterminée dans une capsule, on la recouvre de deux fois son volume d’alcool à 92, on chauffe graduellement et, au moment où l'alcool entre en ébullition, on verse goutte à goutte en agitant sans cesse avec une baguette un volume d’une solution de soude caustique à 30° Baumé, égal à celui des matières grasses. Dès que la masse en ébullilion est devenue homogène et limpide, on ajoute de l’eau distillée chaude (20 fois le volume des matières grasses employées) et on laisse bouillir pendant deux heures pour chasser tout l'alcool. Si l’on veut isoler le savon formé, on ajoute une solution con- centrée de sel marin. Si l’on veut obtenir les acides gras, on verse dans la dissolution savonneuse dont on a chassé tout l'alcool une quantité suffisante d'acide sulfurique pur dilué au dixième, jusqu’à réaction très légère- ment acide. Si les acides gras doivent être employés tels qu'ils montent à la surface, pâteux et hydratés, on les recueille immédiatement. Si au contraire on doit opérer sur les acides fondus, on laisse la fusion s'achever par l’action d’une douce chaleur, en ayant som, pour abréger la durée de l’opération, de placer sur la capsule un couvercle en porcelaine ou en verre. On décante l’eau acide à l’aide d’un siphon, on lave trois fois à l’eau distillée chaude, et au dernier lavage on doit constater que l’eau ne rougit plus le papier de tournesol. On décante l’eau et on dessèche les acides gras à 105° jusqu’au moment où leur poids reste _invariable. La fin de lopération doit être particulièrement surveillée pour éviter, lorsque l’acide gras est privé d’eau, la formation de vapeurs acides et les pertes qui en résulteraient. La marche que nous venons de suivre peut servir à déterminer le rendement d’une graisse en acides gras fixes. Ce rendement, qui est en movenne de 95.6 p. 100 sur les matières grasses fillrées et dés- AO CT MTS ” r 128 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. hydratées, se trouve sensiblement abaissé avec les matières grasses acides et oxydées. Ces résultats, qui pourraient paraître anormaux à première vue, confirment bien la formation d'acides solubles et volatils dont la proportion dépend du degré d’oxydation. Procédés généraux. Densité. — La détermination de la densité doit être la première opéralion que l’on doit faire dans l’analyse des matières grasses. C'est une indication indispensable autant qu'utile, à la condition de ne pas perdre de vue qu’elle peut varier dans des limites assez éten- dues pour une même espèce. La détermination scientifique absolument exacte de la densité des graisses solides à la température ordinaire serait une opération longue et délicate, si lon veut bien considérer qu’il est nécessaire, pour que les résultats soient comparables entre eux, de la ramener par une correction à une température fixe qui est habituellement celle de 15°, et que par conséquent il serait indispensable de déter- miner chaque fois le coefficient de dilatation, qui n’a pas une cons- tance absolue pour chaque espèce de matière grasse. Comme il s’agit avant tout de ne mettre entre les mains des experts que des moyens pratiques suffisamment exacts, la densité est prise à 5° environ au-dessus du point de fusion de la graisse (35° pour les saindoux) et ramenée à 15° en ajoutant 0,0007 par degré au-dessus de 15°. Cette densité peut être prise soit par la méthode du flacon, soit par des densimètres, soit enfin à l’aide d’une balance aréothermique ; c’est à ce dernier procédé qu’il faudra donner la préférence et c’est la seule méthode qui soit décrite ici. Préparation de l'échantillon. — L'échantillon à examiner peut n'être pas absolument homogène, car labaissement ménagé de la température détermine le dépôt des parties les plus concrètes. Même lorsque celles-ci sont de nouveau dissoutes par l’élévation de tem- pérature, il n’est pas sûr qu’elles soient bien mélangées avec la Abri PL, s COL LL adt dé M Abu, TC + nu ; dÉ VE + x ac , E FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 129 masse ; il est donc indispensable de les agiter suffisamment pour rendre le liquide parfaitement homogène. | Cette agitation doit être faite avec précaution ; si elle était trop violente ou trop brusque, les petites bulles d’air resteraient empri- sonnées et fausseraient le résultat. Il faut aussi éviter soigneusement toute cause qui pourrait amener un changement de température pendant l’opération. Balance aréothermique de Moor. — La balance aréothermique se compose d’un support à colonne creuse, d’un plongeur ayant la forme d’un flotteur en verre et renfermant un thermomètre, d’une éprouvelte à pied en verre et de poids en forme de fer à che val. L’un des bras du fléau de la balance porte à son extrémité un con- trepoids cylindrique, dans l'axe duquel se Irouve une pointe indi- catrice qui se meut devant un cadran divisé. L'autre bras est divisé en dix parties égales numérotées de 1 à 10; les divisions portent des entailles en forme de coins destinés à rece- voir les poids. A la dixième division se trouve un couteau tournant son arête vers le haut et sur lequel repose un crochet auquel on suspend le plongeur par un fil de platine. L’éprouvette en verre est destinée à contenir la matière grasse dont on veut obtenir le poids spécifique ; elle est elle-même placée dans un grand verre cylindrique qu’on remplit d’eau à une température supérieure de 1° à 2° à celle à la- quelle on veut opérer sur la matière grasse. Les poids ont la forme de fer à cheval et sont à leur partie cen- trale en forme de couteau, afin de pouvoir être placés bien à fond dans les entailles du fléau. Quand on place le plongeur dans la matière grasse, 1l perd un poids égal au poids du volume d’eau qu’il déplace. On rétablit l'équilibre en plaçant une série de poids dans les divisions ; ils sont combinés de telle façon que la lecture se fait très simplement. Le premier cavalier donne le décigramme, le deuxième le centi- gramme, le troisième le milligramme et le quatrième le dixième ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1898, — II, 9 130 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de milligramme. Si le flolteur déplace par exemple 5 centimètres cubes de liquide, lorsque l’équilibre sera rétabli de façon que l'aiguille qui termine le contrepoids du levier coïncide avec le zéro du cadran, la somme des poids employés sera bien égale au poids de à centimètres cubes du liquide dont on cherche la densité. Vérification de l'appareil. — Le fléau étant en place et muni des flotteurs, on soulève le support de façon que le flotteur puisse être immergé jusqu’au point supérieur de la partie tordue du fil de platine. On oriente le pied de telle façon que la vis de réglage se trouve dans le même plan vertical que le fléau et du côté de la pointe. Au moyen de cette vis de réglage, on amène la pointe à coïncider avec le zéro du cadran, le fléau élant en équilibre dans l'air tran- quille. On fait alors plonger le flotteur dans l’éprouvette contenant de l’eau distillée privée d’air par une ébullition préalable et ensuite refroidie. On note la température au bout de 10 minutes d'immersion et, au moyen des tables de densité de l’eau distillée, on s'assure que la densité indiquée par les cavaliers correspond bien à celle de l’eau distillée prise à la température de l’expérience. Détermination de la densité. — On retire le flotteur, on enlève l’eau, on essuie parfaitement les diverses pièces, on remplit ensuite l’'éprouvette en la tenant légèrement inclinée pour éviter l’intro- duction de bulles d’air ; on fait affleurer le flotteur de même façon et au bout de 10 minutes on procède à la lecture des poids. Si cette densité avait été prise exactement à 15° centigrades, il n’y aurait aucune correction à lui faire subir; mais comme cette condilion n’est presque jamais remplie, on opère la correction en ajoutant 0,0007 par chaque degré au-dessus de 15°. Cette correction est calculée d’après le coefficient de dilatation moyen des graisses. Ï n’a pas une constance absolue ; aussi, la détermination de la den- sité est-elle d'autant plus exacte qu’elle se fait à une température plus rapprochée de 15° centigrades. On peut d’ailleurs déterminer le coefficient de dilatation d’une graisse en prenant les densités DD” à deux températures différentes, 22 FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 131 , ù Spies .D—D',, tt", la correction à faire pour 1° étant égale à > er étant la den- silé prise à la température la plus basse £. Conclusion. — La densité est une détermination utile qui pourra servir aussi à constater l'identité d’une matière grasse ; mais, en ce qui concerne les indications à en tirer relativement aux falsifications, il faudra ne procéder qu’avec la plus grande prudence, en s’entourant de toutes les observations qui ont été faites plus haut et en y ajoutant d’autres caractères plus précis. Transformation de l'’oléine en sa modification isomérique l’élaidine. Procédé Cailletet. Mode opératoire. — On verse dans un tube à essai de 10 centi- mètres de long sur 2°",5 de diamètre 20 grammes de la matière grasse à analyser et 6 gouttes d’acide sulfurique pur à 66° Baumé ; on agite pendant une minute en secouant vivement. On ajoute ensuite 20 gouttes d'acide azotique pur à 40° Baumé, et l’on agite encore une seconde fois pendant une minute ; on plonge le tube dans un bain-marie dont l’eau est préalablement portée à l’ébul- lition et au-dessus duquel est placée une plaque métallique percée de trous ayant un diamètre un peu supérieur au diamètre extérieur du tube, et inférieur au diamètre de la partie évasée de l’orifice du tube. Ce dernier peut donc plonger dans l’eau bouillante sans risque d'immersion. (Cette forme de bain-marie nous servira chaque fois que nous aurons à chauffer au bain d’eau.) On laisse le tube exactement cinq minutes dans l’eau bouillante ; à la sortie, on le place dans un bain d’eau froide maintenu à l’aide de quelques fragments de glace entre 8 et 10° centigrades. On retire au bout de deux heures et l’on observe l’état de la masse. On peut également noter avec utilité, mais sans leur attribuer une trop grande importance, les diverses colorations obtenues : 1° Après l'addition de lacide sulfurique ; 2 Après l’addition de l'acide azotique ; 9° À la sortie du bain-marie ; 4° Après le refroidissement de la masse. 132 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Ce procédé est d’une importance secondaire dans l'analyse des graisses ; il peut néanmoins fournir d’utiies indications soit par la coloration obtenue au cours des opérations, soit par la solidification incomplète de la masse lorsque la proportion d'huile ajoutée à la graisse est trop considérable. Saponification sulfurique. Pour mesurer l'élévation de température produite par l'agitation de la matière grasse avec un volume déterminé d’acide sulfurique, on opère suivant les indications de M. Maumené, sauf quelques légères modifications de détail. On prend un verre à expérience de forme conique d'une con- tenance de 150 centimètres cubes, on y verse 50 grammes de corps gras à analyser dont on note la température (2 ou 3° au-dessus du point de fusion); on laisse ensuite écouler dans la masse 10 centi- mètres cubes d'acide sulfurique à 66° Baumé et à la même tempé- rature que les matières grasses (la pointe de la pipette doit être située à À centimètre environ au-dessus de la couche de graisse). On mélange rapidement les deux liquides pendant une minute à l’aide d’un agitateur. On plonge le réservoir d’un thermomètre de précision dans la couche supérieure de la masse, on tourne lente- ment jusqu’au moment où la colonne mercurielle atteint son maxi- mum de hauteur. La différence entre la température finale de la masse et latempérature initiale des matières grasses donne l’échauf- fement absolu. On répète la même opération avec 50 grammes d’eau distillée à la même température que la matière grasse et 10 centi- mètres cubes du même acide sulfurique. On agite dès le début avec le thermomètre lui-même et on suit la marche de la colonne mer- curielle, dont on note le point culminant. En multipliant par 100 l’échauffement absola de la matière grasse et en divisant le produit par l’élévation de température de l’eau, on obtient un quotient qui représente la saponification sulfurique relative des matières grasses. Ce procédé a l’avantage de donner des résultats à peu près constants, même avec des titres légèrement différents d'une opération à l’autre, pourvu bien entendu que k même opéra- 929 FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 133 tion qui comprend les deux déterminations de la matière grasse et de l’eau soit faite avec le même acide. Conclusions. — Ce procédé est susceptible de donner d’utiles in- dications. Indice d’iode. Il existe, dans les matières grasses, des corps non saturés, l'acide oléique par exemple, sur lesquels on peut fixer un nombre d’atomes de chlore, de brome, ou d’iode égal au nombre d’atomes d'hydrogène nécessaires pour saturer la molécule. La quantité absorbée par une même matière grasse peut servir à déterminer la nature et même jusqu’à un certain point la pureté d’une graisse, puisqu'elle est à peu près constante pour une même espèce et varie sensiblement d’une espèce à l’autre. Il est préférable de prendre l’iode qui est plus fixe et plus facile- ment maniable que le chlore ou le brome. Pour écarter toute cause d’erreur et éviter les différences que donnent des matières grasses de même espèce, mais d’acidité variable, on opère sur les produits de saponification débarrassés de tous les corps qui peuvent fixer l’iode. En opérant sur les acides gras, on a également l’avantage de pouvoir se servir, pour les dissoudre, de l’alcool, qui a sur l’iode une action moins sensible que le chluro- forme. Pour une analyse précise, on opérera comparativement sur un échantillon témoin, ne contenant que l'alcool en quantité égale à celle employée, et la différence donnera exactement la quantité d'iode absorbée par la matière grasse dans un laps de temps déter- miné, En faisant la détermination par les acides gras, il faut avoir soin, si l’on veut comparer l'indice trouvé à celui de la matière neutre, de multiplier les résultats par 0,955. Cette opération a l’'a-. vantage de donner des résultats comparables à ceux que l’on obtien- drait sur les matières neutres. Certains auteurs proposent d'opérer de préférence sur la matière neutre et non sur les acides gras, en conseillant de lui enlever son acidité à l’aide de l'alcool, qu’on chasse ensuite par évaporation. 134 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les expériences faites par M. Milliau ont démontré que non seule- ment les matières grasses dissolvaient une quantité notable d’alcool, mais aussi qu'indépendamment des réactions qui pouvaient se pro- duire entre les deux liquides, il n’était possible de chasser l’alcoo! qu’à une haute température. Ainsi, 100 grammes de matières grasses dissolvent très facilement à chaud 10 p. 100 d'alcool absolu, dont le point d’ébullition dans la masse s'élève de 42°, la distillation ne commençant à s’effectuer que vers 120° et les matières grasses con- tenant encore des traces d’alcool à 150°. Il faudrait donc, pour ob- tenir des résultats exacts, laver ultérieurement la matière à l’eau distillée, sans être encore assuré d’avoir éliminé toutes les impu- relés ; aussi, la méthode des acides gras est de tous points préfé- rable : MODE OPÉRATOIRE. PAR LITRE, Solution alcoolique d'iode.". . . . . . . . 505,00 ES A dd Solution aqueuse d'hyposulfite de soude . . . 24 ,78 re ‘ | Solution alcoolique de bichlorure de mercure. 60 ,00 Solution aqueuse d'iodure de potassium . . . 100 ,00 Tirage de la solution d’hyposulfite. — On prend 10 centimètres cubes d’une solution à 0.5 p. 100 de bichromate de potasse chimi- quement pur, qu'on verse dans un verre à réactif; on ajoute de l’iodure de potassium en quantité double environ (3 à 4 centimètres cubes d’une solution à 10 p. 100), puis on verse 4 à 5 centimètres cubes d’acide chlorhydrique concentré, afin de mettre l’iode en liberté (pour une molécule de bichromate il se dégage 6 atomes d’iode) ; on ajoute de la liqueur d’hyposulfite goutte à goutte jusqu’à décolo- ration, en se servant vers la fin de l’opération d’une solution d’a- midon comme indicateur. On note le nombre de centimètres cubes employés et, d’après l'équation suivante, on détermine à quelle quantité d’iode correspond 1 centimètre cube de la solution d’hy- posulfile. (Poids moléculaire du bichromate — 295) : 295 de bichromate PTS et 0,09 — 0,1991 d’iode. déplacent 197 X 6 d’iode, 1 de bichromate déplace 197 x 6 x 0,05 de bichromate déplacent 295 FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 139 Supposons qu’on ait employé pour la décoloration de cette quantité d’iode 10,1 d’hyposulfite. 10,1 d’hyposulfite décolorent 0,129 d’iode, donc 1 centimètre É — 0,01278 d’iode. cube d’hyposultite décolore TE Titrage de la solution alcoolique d’iode. — On pèse 50 grammes d’iode bi-sublimé qu’on dissout dans un litre d’alcool ; on prend 5 centimètres cubes que l’on verse dans un verre contenant une so- lution d’iodure de potassium (suffisante pour maintenir l’iode en dis- solution), puis on ajoute goutte à goutte la solution d’hyposulfite en se servant vers la fin de l'opération de l’amidon comme indicateur. On s’arrête lorsque le liquide est décoloré. Supposons qu'en ait employé pour la décoloration 17%,5 ; on a 17,5 X 0,01278—0#",221 d’iode dans à centimètres cubes de la solution. Donc 100 centimètres cubes contiennent 45,42 d’iode. Délermination de l'indice d’iode. — On sapoaifie 22 grammes de matière grasse par le procédé indiqué à l’article saponification. Toutefois, lorsque les acides gras sont fondus, au lieu d'opérer le lavage dans la capsule même, on verse les acides gras sur un filtre mouillé et on le lave sur le filtre avec un litre d’eau chaude. Lorsque toute l’eau s’est écoulée, on sèche l’intérieur de la douille ae l’en- tonnoir avec un papier filtre, on perce le filtre avec une aiguille de verre et l’on reçoit les acides gras qui s’écoulent dans une petite capsule. On les chauffe ensuite à 100 ou 105° jusqu'au moment où, ne perdant plus de poids, ils sont complètement déshydratés. On en pèse 5 grammes dans un ballon jaugé de 100 centimètres cubes, on complète le volume avec de l'alcool à 92°, on en pré- lève 10 centimètres cubes avec une pipette, on les laisse écouler dans un flacon ; on ajoute 20 centimètres cubes de la liqueur diode, puis 20 centimètres cubes de la solution de bichlorure de mercure ; on bouche le flacon, on agite et on laisse reposer pendant 3 heures, très exactement, la durée du contact influant considérablement sur le résultat. (Pour les coprahs et les palmistes, il faut prendre 10 centimètres cubes seulement de la liqueur d’iode.) 136 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On procède au titrage de liode non absorbé, au moyen de la liqueur d’hyposulfite en ayant soin d’ajouter au préalable 20 centi- mètres cubes de la solution d’iodure de potassium. Lorsque la dé- coloration est presque complète, on ajoute quelques gouttes de solution d'amidon et l’on continue à verser l’hyposulfite goutte à goulle jusqu’à complète décoloration. Exemple : employé pour la décoloration de 35,8 d’hyposul- fite : 0,01278 X 35,8 x 0,4573 (iode en excès), 20 centimètres cubes de la liqueur d’iode — 06",884; 0,884 — 0,4573 — 0,4267 (iode absorbé), _— = UD ; d’où x — 835,34 d’iode absorbé pour 100 grammes d'acides gras, soit pour 100 grammes de matière neutre 83,34 X 0,955 — 79,59 d’iode. Conclusions. — Sans vouloir attacher à l'indice d’iode une va- leur plus grande que celle qu'il a en réalité, il convient de dire que ce procédé repose sur des bases scientifiques. Conduit avec précaution, il sera de nature à éclairer grandement le résultat et à assurer l’analyse quantitative d’un mélange de graisses connues. Les résultats variables qu’il fournit pour une même matière grasse le rendent peu sensible dans la détermination des mélanges de à à 10 p. 100. Indice d’iode des acides fluides. Les acides fluides sont les parties des matières grasses qui absor- bent généralement l’iode. (IL y a pourtant des exceptions, l'acide hypogéique, par exemple, retiré de l'huile d’arachide, qui, quoique concret, est un acide non saturé) [Milliau]. On peut done, si l’on veut obtenir des résultats plus constants, déterminer l'indice d’iode des acides fluides. A cet effet, on saponifie 20 grammes de corps gras par les procédés habituels, on décompose le savon formé au moyen d’une solution d’acide sulfurique au dixième, les acides gras fondus sont recueillis après lavage dans une petite capsule ; on en pèse 10 grammes dans Shi FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 181 une fioie d’Erlenmayer, puis on les dissout dans 100 centimètres cubes d’alcool à 80°; on saponifie ces acides gras avec 100 centi- mètres cubes d’une solution alcoolique d’acétate neutre de plomb renfermant 15 grammes de ce sel dans 100 centimètres cubes d’al- cool à 80°. On chauffe légèrement jusqu’à ce que la solution soit claire, puis on abandonne au repos pendant une heure à la tem- . pérature de 15° centigrades. Les acides concrets se précipitent et on filtre. La solution filtrée renferme les acides fluides à l’état de savon de plomb. On élimine l’alcool par distillation et le résidu est repris par l’éther et introduit dans un entonnoir à robinet ; on décom- pose par l’acide chlorhydrique dilué de moitié, et on lave la solution éthérée d'acides gras jusqu’à ce que les eaux de lavage ne donnent plus de réaction acide ; la solution éthérée est alors distillée dans un ballon jaugé de 50 centimètres cubes el lorsque tout l’éther est éliminé on remplit avec de l'alcool aussi neutre que possible le ballon jusqu’au trait de jauge. Pour déterminer la quantité d’acides gras contenus dans celte solution, on en prélève 10 centimètres cubes, que l’on titre avec la hiqueur déci-normale de soude ; puis, lorsqu’on connaît son litre, on prélève une quantité déterminée de la solution alcoolique se rapprochant le plus possible de 05,5 d'acides gras et l’on procède à la détermination de l'indice d’iode par les procédés ordinaires. Exemple : 10 centimètres cubes de solution alcoolique ont exigé 17%,7 de solution de soude déci-normale (on détermine la teneur en acides gras en prenant pour base l’acide oléique, PM— 282) 0,0282 %< 17,7 — 0,49914. Nous avons donc 0,499 d’acides gras dans 10 centimètres cubes de solution alcoolique ; il suffira donc de prélever 10 centimètres cubes de notre solution pour déterminer l'indice d’iode. Points de fusion des graisses et des acides gras qui en dérivent. On introduit dans un tube fin étiré et bombé à un bout la matière neutre ou les acides gras fondus et déshydratés. On fixe le tube au réservoir d'un thermomètre sensible et on plonge le tout dans un 138 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. vase contenant de l’eau dont on élève très lentement la température. On note le degré thermométrique au moment où le corps passe de l’état solide à l’état liquide. Points de solidification de la matière neutre et des acides gras. On verse la matière neutre ou les acides gras fondus et déshydratés dans un tube de 15 centimètres de long et de 3 centimètres de dia- mètre. (Jusqu'à 3 centimètres les résultats sont influencés par le plus ou moins de largeur du tube. A partir de 3 centimètres et au- dessus ils deviennent constants.) On suspend le tube dans un flacon à l’aide d’un bouchon et l’on introduit dans la masse un thermomètre gradué par dixième, le réservoir placé au centre. Au moment où la solidification s'opère à la fois dans la partie basse et dans la partie. supérieure du tube, on imprime au thermomètre un mouvement circulaire à travers toute la masse, le thermomètre est ensuite laissé au repos et l’on suit attentivement la remonte de la colonne mer- curielle jusqu’à l'instant où celle-ci s'arrête. Ce point d’arrêt repré- sente le point de solidification ou titre conventionnellement adopté. Point de turbidité. Il se prend également dans un tube à essai de 3 centimètres de diamètre. On note la température à laquelle la matière grasse cesse d’être limpide et se trouble : c’est le point de turbidité. Nota.— Dans toutes ces observations, le tube à essai doit toujours être placé à l’aide d’un bouchon dans un autre tube de plus grand diamètre. Saturation des acides gras. La quantité de soude absorbée par les acides gras fixes est d'autant plus forte que leur poids moléculaire est moins élevé. Pour faire cette détermination, il suffit de saturer 5 grammes d’acides gras dés- hydratés (préparés comme il a été dit plus haut), par une liqueur FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 139 normale de soude caustique (31 grammes Na° O pour 1 000 centi- mètres cubes d’eau), les acides gras sont dissous dans lalcool et l’on se sert de la phénolphtaléine comme indicateur. Il est bon, pour éviter toute erreur, de verser au préalable dans l'alcool un nombre suffisant de gouttes de liqueur de soude caustique pour faire virer la phénolphtaléine au rose à peine perceptible. On immerge ensuite dans le liquide les acides gras pesés dans une petite capsule en verre ou en porcelaine et l’on titre. Solubilité dans l'alcool absolu. La matière grasse est dérancie à l’aide de l'alcool à 95° (2 vo- lumes alcool pour 1 saindoux) ; on chauffe à 50°, on agite pendant un quart d'heure, on décante le corps gras neutre, on le lave trois fois à l’eau distillée et on évapore au bain-marie jusqu’à siceité. On pèse alors 20 grammes d’alcool absolu, on chauffe à 50°, on agite pendant un quart d'heure, on laisse refroidir à 15°, on pèse 20 grammes de la solution alcoolique et on évapore à l’étuve à 100° jusqu’à poids constant. On fait le rapport à 1 000 grammes d’alcool. Oléo-réfractomètre et pouvoir rotatoire. L'indice de réfraction donne avec les graisses et les huiles pures des différences trop grandes pour qu’il puisse servir de base à la reconnaissance des fraudes. Il en est de même du pouvoir rotatoire, qui n’a pu jusqu’à présent fournir aucune donnée sûre. CHAPITRE III DOSAGES SPÉCIAUX Dosages des acides gras fixes. On saponifie par les moyens indiqués 100 grammes de corps gras; on dissout le savon formé dans un litre d’eau, on chasse l’alcool par ébullition, et l’on déplace ensuite les acides gras par l'acide sulfurique 140 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. au dixième. On continue à chauffer jusqu'à fusion complète des acides, on relire l’eau avec un siphon, on lave trois fois avec une égale quantité d’eau distillée chaude, on soutire toute l’eau, à l’aide d’une pipette, en ayant soin de ne pas enlever des acides par en- trainement, et l’on sèche à 105° jusqu’à poids constant. Détermination des acides gras volatils. Procédé Meissl. — Dans un ballon de 250 centimètres cubes relié à un condensateur à reflux, on saponifie 5 grammes de corps gras fondus à 90° et filtrés, avec 2 grammes de potasse caustique et 90 centimètres cubes d’alcool à 70° (l'opération se fait au bain- marie). Après saponification on évapore l’alcool, on dissout le savon dans 100 centimètres cubes d’eau distillée, et l’on ajoute 40 cen- timètres cubes d’acide sulfurique dilué au dixième, avec quelques morceaux de pierre ponce ou un petit fragment de zinc pour éviter les soubresauts. On adapte alors au ballon un petit réfrigérant de Liebig, et l’on distille jusqu’au moment où l’on a obtenu 110 centi- mètres cubes de distillatum. On en filtre alors 100 centimètres cubes que l’on titre au moyen d’une solution de potasse normale décime, en présence de la phtaléine du phénol. On obtient ainsi l’indice de Meissl ; celui de Richert est égal à la moitié du résultat trouvé. INDIOES DE MEISSL. \ STORE MAUR TE REC ARE SE 0,4 à 0,6 SU de PEU en Sert er OL 0,2 à 0,4 PUR IHOSMOUIDI See tente de de PURE 0,2 à 0,4 DIéo-MmArÉAnineE AS ee ee ete 0,3 à 0,5 HHNe TE COPINE CPR EEE 4,5 à 4,7 BOUT ESS en ele eh re Fe Dee Dosage des matières insaponifiables. On neutralise 10 grammes d’acides gras dissous dans l’alcool, par une liqueur de soude caustique normale, on ajoute 2 centimètres cubes pour sursaturer. On chasse l’alcool, et l’on épuise le savon sec et pur, mélangé avec du sable, dans un appareil à reflux, par FALSIFICATIONS DES GRAISSES. . 141 l'éther de pétrole bouillant au-dessous de 70°. On distille ensuite, et le poids du résidu donne celui des matières solubles dites insapo- nifiables. Dosage de la glycérine. Solutions à employer : 4° Solution de bichromate, contenant au litre 745,86 environ de bichromate et 150 centimètres cubes d'acide sulfurique pur. La puissance oxydante exacte de cette solution doit être déterminée par titrage avec des solutions de quantités connues de sulfate ferroso- ammoniacal ; 2% Solution de sulfate ferroso-ammoniacal contenant environ 240 grammes de sel par litre ; 9° Solution de bichromate dix fois plus étendue que celle décrite ci-dessus. Le titre de la selution ferreuse doit exactement corres- pondre à celui de la solution de bichromate n° 1. En divisant par 7,456 le nombre qui représente la quantité de bichromate employé, on obtient la quantité de glycérine. Saponifier 20 grammes de corps gras, décomposer avec un très léger excès d’acide, soutirer la lessive sous-jacente, laver deux fois les acides gras, réunir les eaux de lavage à la première lessive. Évaporer jusqu’à 100 centimètres cubes, en prélever 90 centimètres cubes que l’on introduit dans un flacon jaugé de 100 centimètres cubes, y ajouter environ 2 décigrammes d’oxyde d’argent pour éliminer le chlore et les composés aldéhydiques. On abandonne le mélange à lui-même pendant une dizaine de minutes. On ajoute ensuite de l’acétate basique de plomb en léger excès et de l’eau de façon à avoir 400 centimètres cubes, et l’on filtre une portion du liquide à travers un filtre sec. On place 25 centimètres cubes de la portion filtrée dans un verre préalablement lavé avec de l'acide sulfurique et du bichromate pour éliminer toute trace de corps gras, on ajoute 40 à 50 centimètres cubes de la solution type de bichromate, 15 centimètres cubes d’acide sulfurique pur et lon chauffe le verre, recouvert d’un verre de montre, pendant deux heures dans l’eau bouillante. Au bout de ce temps, on titre l'excédent de bichromate avec la solution de sulfate ferroso-ammoniacal en 142 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dépassant légèrement, puis on revient au titre exact avec la solution de bichromate. La solution de bichromate étant nécessairement assez forte, la quantité employée doit être mesurée avec le plus grand soin. Il faut aussi faire attention à la température de l’air au moment du mesurage. Une solution de bichromate de la force indiquée plus haut se dilate de 0.05 p. 100 pour chaque degré centigrade. Dosage de l’eau et des impuretés. Dosage de l'eau. — On agite*le corps gras fondu un temps suffisant pour obtenir un échantillon bien homogène ; on en pèse 50 grammes dans une capsule en porcelaine (passée à l’étuve) par additions suc- cessives et en agitant chaque fois. En général, chauffer doucement jusqu’à 115° et maintenir jusqu’à perte de poids insignifiante. Les matières grasses et oxydées exigent quelquefois une température légèrement supérieure. Par contre, les corps gras comestibles peuvent être déshydratés à 105, 110. La fin de l'opération doit être particulièrement surveillée et il faut éviter de laisser trop longtemps la capsule sur le feu lorsque toute l’eau est évaporée. On pèse tous les quarts d'heure. On place une lamelle de verre sur la capsule, on essuie de temps en temps la buée qui vient s’y condenser et, lorsque la lamelle reste claire, l’évaporalion est sur le point d’être terminée. En conduisant l'opération comme il est décrit ci-dessus, la perte de poids pour un corps gras parfaitement limpide ne dépasse pas un dixième. Dosage des impuretés insolubles. — On dissout ensuite le corps gras dans du sulfure de carbone, on filtre et on lave sur un filtre taré jusqu’à ce qu'il ne retienne plus de traces de corps gras. (La partie filtrée est recueillie dans un ballon.) On obtient aussi après dessiccation à 100° toutes les impuretés insolubles. Dosage des impuretés solubles. — Au cas où la matière grasse > 238% et RE ES hi, SA ten VS FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 143 contient des gélatines en quantité appréciable, il est nécessaire de les éliminer par le traitement suivant : On chasse par distillation le sulfure de carbone contenu dans le corps gras filtré. On enlève les dernières traces de sulfure en chauffant légèrement au bain de sable dans une capsule. On prélève 25 grammes qu’on lave avec leur poids d’acide sulfu- rique au dixième ; après une ébullition de quelques instants, on soutire l’eau acide et on la met dans un entonnoir à robinet. On fait un second lavage moins prolongé que le précédent, on décante dans l’entonnoir les eaux du second lavage comme celles du premier et l’on continue à laver jusqu’à ce que l’eau soutirée n'ait plus de réaction acide. (Ne pas vider à fond après chaque soutirage, pour pouvoir réunir les gouttes huileuses entrainées par les lavages.) Rincer la pipette et l’entonnoir avec un peu d’éther et sécher le corps gras comme pour le dosage de l’eau. La perte de poids donne la quantité d’impuretés solubles. Les matières grasses n’en contenant point n’accusent aucune perte par ce traitement. (Tenir compte, dans le pourcentage, de l’eau et des impuretés insolubles déjà dosées.) On élimine par celte méthode des corps inertes, les mucilages, les produits de saponification, d’oxydation ; acides volatils, etc., les substances gélatineuses et colloïdes, en un mot toutes les matières étrangères, organiques où non, qu’un Corps gras peut contenir. Le dosage des impuretés solubles est surtout nécessaire dans les graisses animales industrielles et dans les matières grasses de qualité très inférieure. Il peut être négligé dans les autres cas. Remarque. — Dans les corps gras contenant de fortes proportions de savons alcalins ou alcalino-terreux, le dosage de la matière grasse proprement dite : glycérme et acides gras libres, ne peut plus êlre effectué de la sorte. On peut dans ce cas rechercher la teneur totale en acides gras, l’acidité et le quantum de glycérine combinée, et, en complétant ces recherches par celle des bases, déterminer avec une approximation suffisante les proportions de matière grasse neutre et acide et de savons qui constituent le mélange. 144 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. CHAPITRE IV CARACTÈRES ET RECHERCHE DES DIVERSES GRAISSES ET HUILES COMESTIBLES Caractères physiques et chimiques du saindoux. Densité. — La densité du saindoux prise à 15° varie entre 913 et 916 avec une moyenne comprise entre 914 et 915. On voit que les chiffres moyens sont assez rapprochés, mais, si nous considérons les cas particuliers, nous observons de plus grandes divergences. Le saindoux extrait de la panne et des parties concrètes de l’animal a une densité plus faible ; le saindoux de la tête, des pieds, etc., plus liquide, plus riche en acide oléique, a une densité légèrement supérieure. Celle du suif étant légèrement infériéure à celle du saindoux, et celle des huiles de graines supérieure, il est facile de ramener, à l’aide de mélanges proportionnels, une graisse composée, à la densité moyenne du saindoux, sauf dans le cas où l'huile de graine entrerait en forle proportion. Le poids spécifique n’est donc pas un caractère absolu, il peut donner d’utiles indications, mais, aussi longtemps qu'il se trouve compris entre les limites établies par un nombre considérable d’ob- servations, il n’est pas possible de tirer des conclusions précises pour ou contre l’adultération. ; La densité peut servir à obtenir la proportion d’un mélange de matières grasses lorsqu'on connait exactement la nature de chacune d'elles. Conclusions. — Il n’y aura pas lieu, en se basant sur la densité, de suspecter la pureté d’un saindoux lorsque le poids spécifique sera compris entre 913 et 916, la moyenne étant de 914 à 915. Toutefois, lorsqu'un saindoux se rapprochera des limites extrèmes, il sera prudent d'examiner l'échantillon avec un soin tout spécial. Remarque. — Les résultats qui sont fournis dans tous les tableaux contenus dans le rapport représentent non pas un résultat unique, FALSIFIGATIONS DES GRAISSES. 145 mais bien la moyenne d’un grand nombre d’analyses. Tous les échantillons ont été prélevés aux sources les plus authentiques, en présence des autorités locales ou des consuls de France à l'étranger ; ils sont arrivés au laboratoire ayant leurs cachets intacts et accom- pagnés d’un procès-verbal de prélèvement. Les autres échantillons ont été soil faits au laboratoire, soit prélevés par les membres de la commission. Tableau des densités à 15°. Saindoux extrails des diverses parties de l'animal. FRANCE. AMÉRIQUE. ÉD RES At Let a Lie TR RAR PEAR EEE 91,46 91,41 DOS TES PEER RATE RES APE TUE 91,58 91,55 VAR SENTE AS De PEU 3 PROS EAN ER EE 91,57 91,55 DANONE 0 AOL Sie 91,50 91,51 ARENA PME LUE PE RE EE TR 91,55 91,54 IUT RERO SERA € SEE EEE LS ENS CR QE 91,47 91,43 Saindoux français el étrangers. MOYENNE. LES DO Len NE CNE CP ASE CE AP DE ORREME NE € 2 Ie DE 91,45 AICRÉ EN RES R DS RE AT D ODO nO SRE 91,52 TO ie rh MT OR EI AA RE Pr RER AE 91,47 TUE AO) TE SET ARC a CRIE LE LA PA CRE La Ad C4 LEONA EEE 91,54 ROME Te PAnemen ere eee nn RE NL AR IGUNT 91,48 DORA CHINE EE EE RAM uiertr Lis ae 91,43 Maximum observé : 91,61. — Minimum observé : 91,32. Saindoux américains. MEHORL (EG T0) Aie RS SU AIT EX CS CT ha te 91,45 Dear, (Dante) MEME NEA DOUTER LEE 91,47 Choice steam (saindoux de choix fondu à l’autoclave). . . . . 91,48 Prime steam (saindoux de première qualité fondu à l’autoclave). 91,49 Kettle rendered (saindoux fondu au feu). . . . . . . . . . 91,5 de t{bane dée)tEnens SNL RSERE MORTE NT, 91,57 lardrstesrmenfsaindoux pressé} PE e ee Ba es DS 91,3 Maximum observé : 91,63. — Minimum observé : 91,30. Divers. Rancid steam lard (saindoux rances) . . . . . . . .,. : 91,53 pounsteanulard (Sandoux SÛTS).7 25.0 Lu 2e 4.2. 91,43 DIdrsteannar dE tSAndoux vieux) PSN APTE EN PREMIERE 91,56 ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1898, — II. 10 146 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Actions des vapeurs nitreuses. Le gâteau obtenu en traitant le saindoux par les vapeurs nitreu- ses a une consistance ferme lorsqu'il est pur ou lorsqu'il contient seulement du suif. Cette consistance devient pâteuse lorsque la graisse renferme une huile de graine en assez forte proportion. La masse peut même être entièrement liquide si les huiles végé- tales dominent. Ce procédé peut fournir quelques indications à la condition tou- tefois de ne lui attribuer qu’une importance secondaire, car une forte addition de suif rendra au gâteau toute sa consistance. On peut aussi noter avec utilité les diverses colorations obte- nues : 1° Après addition d’acide sulfurique ; 2’ Après addition d’acide azotique ; 3° A la sortie du bain-marie ; 4° Après le refroidissement de la masse. Mais il reste bien entendu que toutes ces observations ne doivent pas être considérées comme concluantes. Il est à remarquer que les saindoux américains donnent des colo- rations généralement plus foncées que les saindoux d'Europe. Cette différence provient certainement de ce que les saindoux américains sont fondus en autoclave sous pression à une température plus élevée que les saindoux européens et qu’ils tiennent en dissolution des produits organiques provenant de la fibre animale. Les saindoux rances donnent également des teintes plus foncées : la présence des huiles végétales (sauf l’arachide) donne au con- traire des teintes verdâtres. Dans ce dernier cas, si le pourcentage d'huile de graine est élevé, la solidification de la masse ne s'opère pas. Conclusions. — Elles n’auront un caractère de certitude en ce qui concerne l’adultération que lorsque la solidification ne s’opé- rera pas et que les teintes seront franchement brunes. FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 147 Action des vapeurs nitreuses. APRÈS APRÈS CONSIS- DÉSIGNATION. s0{x2?. + x NO!. REFROIDISSE- ÉBULLITION. Pr TANCE. | Saindoux extraits des diverses parties de l'animal. , Panne . Jaune gris. Gris. Beurre clair. | Jaune frais. Solide. .\ Dos. . . .| Jaune trouble. Id. Jaune foncé. Jaune. Id. 5 Ventre . Jaune gris. Id. Jaune. Id. Id. < | Tête. . Jaune trouble. Id. Jaune foncé. Id. Id. Mr Pieds.… . Jaune gris. Id. Jaune. Jaune clair. Id. Intestins . Jaune gris. Id. Jaune.clair. Id. Id. Panne . Jaune gris. Id. Id. Beurre frais. Id. = À Dos . . . | Jaune trouble Id. Jaune foncé. Jaune. Id. & } Ventre. Jaune gris. Id. Jaune gris. Id. Id. È Tête. . . .| Jaune trouble, Id. Jaune trouble. Id. [d. < | Pieds. . Jaune gris. Id. Jaune. Jaune clair. Id. Intestins . Jaune gris. Id. Jaune clair. Id. Id. Saindoux francais el étrangers. France . Jaune gris. Gris. Jaune clair. Jaune clair. Solide. | Allemagne . . Jaune gris. Id. Id. Jaune. Id. Autriche . | Jaune trouble. Id. Jaune. Id. Id. Hongrie. Jaune gris. Id. Jaune clair. Id. Id. | Roumanie . Jaune trouble. Id. Jaune. Id. Id. {| Cochinchine . . Marron. Gris brun. Id. Id Id. | Saindoux américains. | Neutral. . . .[Jaune marron. Gris. Marron. Jaune. Solide. { Leaf . Id. Id. Id. Id. Id. | || Choice steam. Marron. Brun gris. Marron. Jaune marron. Id. | | Prime steam . Id. Id. Id. Id. Id. | Kettle rendered. .| Jaune trouble. Gris. Marron clair. Jaune. Id. | 1 Lard oil. Jaune brun. | Brun gris. | Marron foncé. | Jaune marron. | Liquide. | Lard stearine. , Brun. Id. Id. Id. Solide. Divers. | Rancid steam lard. Brun. Brun gris. | Marron foncé. Marron. Solide, Sour steam lard. .| Brun foncé. Id. Id. Id. Id. Old steam lard . .| Brun gris. Id. Jaune foncé. Jaune. Id. 148 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Saponification sulfurique. La saponification sulfurique absolue est comprise entre 25° et 33°, la relative entre 70° et 92°,8. La moyenne entre 27° et 30° et 75° et 82°. Elle est très utile pour constater la présence des huiles de graines car dans les compounds américains qui en contiennent toujours elle peut s'élever à 40° et au delà. Il est vrai que la présence du suif qui n’atteint que 16° d’élé- vation de température baissera quelque peu les résultats sans leur enlever pourtant leur valeur, l'écart étant beaucoup plus considé- rable entre le saindoux et les huiles de graines qu'entre le suif et le saindoux. Il faudrait donc, pour obtenir la saponification sulfurique exacte du saindoux à l’aide d’un mélange, ajouter une telle quantité de suif qu’elle serait immédiatement décelée par les autres carac- tères. Il en serait de même pour l'addition d’une huile végétale con- crête : coprah ou palmiste. L’addition d’une forté quantité de suif à du saindoux pur baisserait également la saponification. Conclusions. — La saponification sulfurique donnera d’utiles ré- sultats pour constater des mélanges faits dans de fortes propor- tions. Tableau des saponifications sulfuriques. (Huile : 50 grammes. — SOH? à 66P : 10 centimètres cubes.) Saindoux extraits des diverses parties de l'animal. FRANCE. AMÉRIQUE. TT EE Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne absolue. relative, absolue. relative, Panne MT TR Ce 26,5 13,6 30 85,3 Dos. . A qe: 32 88,8 32,2 8) NENEre ETES Nr EP NE 30,9 84 31,5 87,5 Tete SMART APM TEE 30 82 29,5 82 Pieds ss MR RENOM ES 29 80,5 29 80,5 72 A] 7 Intestinss 35,29 PRIMO SCAN AREAS NO OR PES NE 38,00 Keltle Tenderede EVER EME NERO 49,28 MER TO TR ICE MORT RE TANT 41,14 PAPAS ESS RENE en NN 33,27 Maximum observé : 60,5. Minimum observé : 29,5. Divers. Rancid;steam lard) ts y Rent 59,26 SOUCIStEAN ARE NUE APE RSS 55,40 (RES CET ETS SR ER AR 60,53 Examen microscopique. L’examen microscopique peut donner de bons résultats pour dé- terminer la pureté des saindoux, soit en examinant les cristaux des acides gras en solution alcoolique, soit ceux de la matière neutre dans un dissolvant approprié. Il importe seulement d'opérer dans des conditions rigoureuse- ment identiques, aux mêmes températures, avec le même grossis- sement et d'observer les cristallisations toujours après le même nombre d'heures. | Il y a tout lieu d’espérer que ce moyen d'investigation sera ap- pelé à donner de bons résultats, mais il ne faut pas perdre de vue FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 159 qu’on peut rencontrer dans le saindoux pur quelques cristaux affec- tant la forme de ceux du suif. Ces résultats sont faciles à prévoir, la stéarine dominant dans le suif, la palmitine dans le saindoux, sans être exempts le premier de palmitine, le second de stéarine. De plus, les proportions de ces deux glycérides varient dans le saindoux lui-même , et celui extrait des parties intestinales par exemple contient beaucoup plus de stéarine que celui du dos ou de la tête. Pour amener ce dernier à la même proportion que le sain- doux d’intestins, il faudrait lui faire subir une forte addition de suif. Les cristallisations de la matière neutre dans l’éther ou le chloro- forme ne nous ont pas donné de résultats bien précis; aussi, la com- mission a-t-clle entrepris de les étudier en se servant des indications de M. Milliau décrites ci-dessous. Corps gras neutres. — On commence par dérancir la graisse à l’aide de l’alcool, de la même manière que celle indiquée pour la détermination de la solubilité, dans l’alcool absolu. _ On prend d’autre part de lhuile d'olive vierge fraiche et pure à laquelle on enlève le léger excès d’acidité à l’aide du même pro- cédé. On dissout alors 20 grammes de la graisse à examiner et on amène le volume total à 100 centimètres cubes ; on laisse pendant une heure la cristallisation s’opérer à la température de 15°, on dé- pose alors à l’aide d’une petite pipette une goutte de la solution sur une lame porte-objet, on place au-dessus une lamelle couvre-objet, on appuie très légèrement avec une aiguille sur le couvre-objet pour diminuer l'épaisseur de la couche à observer, en évitant de presser les cristaux sur la lame de verre, car on risquerait de les déformer, de les écraser et même de les défigurer complètement. Le meilleur grossissement pour celte observation est celui de 390 diamètres. Le saindoux pur se présente sous la forme d’étoiles transparentes à radiations multiples dont l’aspect peut aussi rappeler celui de l’oursin. 160 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Il est bon de varier l’intensité de la lumière sur le champ du mi- croscope et de choisir le point qui paraît le plus favorable à l’obser- valion. Le suif se présente sous forme de rondelles opaques ressemblant à des pastilles, dont quelques-unes peuvent être légèrement dépri- mées vers les bords par l’effet de leur rapprochement. Dans un saindoux contenant 10 p. 100 de suif on constate le mé- lange de deux formes cristallines, mais les cristaux sont beaucoup plus petits. Dans un mélange de suif et de 10 p. 100 de saindoux les cristaux sont également plus petits mais moins caractéristiques que dans le mélange précédent. Dans les graisses alimentaires commerciales on retrouve les deux formes cristallines. La présence des huiles végétales ne modifie pas les résultats. La cristallisation de la matière neutre dans l'alcool absolu donne dans certains cas d’assez bons résultats. Acides gras. — On dissout 5 p. 100 d’acides gras dans de l'alcool à 90°, on refroidit à 15° et on fait une première observation après une heure, en déposant une goutte de la solution sur la lame comme il a été indiqué plus haut (le grossissement de 100 dia- mètres suffit pour les cristaux d’acides gras). Le saindoux pur se présente sous la forme de tablettes rectangu- laires et de feuilles à contours découpés en pointes. Le suif affecte la forme de longs bâtonnets et celle de plumeau ou queue de cheval. Si ces observations sont très nettes pour les produits purs, elles le sont bien moins pour les mélanges, qu’il est difficile de dis- tinguer. On obtient de meilleurs résultats en filtrant la solution d’acides gras dans l’alcool à 90° à la température de 15°. Il reste sur le filtre presque tout l'acide stéarique contenu dans le saindoux pur, tandis que le suif ne peut pas être sensiblement changé puisque ses acides concrets sont surtout formés d’acide stéarique. On ajoute alors à la partie filtrée une quantité d'alcool faible, suf- FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 16GI fisante pour descendre le titre à 70°; on refroidit encore à 15° et on observe au microscope les cristaux formés. Le suif pur donne des cristaux caractéristiques très nets : grands bâtonnets et plumeaux ; le saindoux pur, ses éléments spéciaux avec des contours moins nets. Le saindoux additionné de 10 p. 100 de suif contient quelques plumeaux en plus. Le suif additionné de 10 p. 100 de saindoux se présente sous son aspect habituel avec les éléments spéciaux du saindoux en plus net- tement caractérisés : tablettes rectangulaires, etc. | En faisant directement dissoudre 1 p. 100 d'acides gras dans de . l'alcool à 60°, on obtient également des cristallisations assez nettes et on constate dans le suif additionné de 10 p. 100 de saindoux la présence des éléments figurés de ce dernier. Les autres essais de cristallisation dans de l'alcool à différents litres ont donné de moins bons résultats. Il en a été de même en opérant sur les acides gras isomérisés par l’action des vapeurs ni- treuses. Conclusions. — En somme, pour la recherche de la pureté du saindoux, l’observation devra plutôt porter sur la matière neutre. Pour rechercher le saindoux dans le suif, il sera au contraire préfé- rable d’opérer sur les acides gras. Comme il a été dit plus haut, il est indispensable d'opérer dans des conditions toujours rigoureusement les mêmes et de n’accepter comme sûrs que les résultats maintes fois contrôlés. Ils auront plus de poids encore lorsqu'ils seront confirmés par d’autres carac- tères, Recherches du saindoux dans les autres matières grasses. La présence du saindoux dans les huiles ou graisses végétales serait aisément décelée par l'aspect, l'odeur, la consistance, l’act'on du chlore, la densité, l'indice d’iode, les points de fusion et de soli- dification, et l'examen microscopique. ANN. SCIENCE AGROY, — 9% SÉRIE. — 1898, — 11, 1 162 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Il n’en est pas de même? pour la recherche de faibles proportions de saindoux, 10 p. 100 par exemple dans le suif, surtout lorsque ce dernier a élé additionaé d'huile végétale, comme c’est le cas dans la plupart des graisses alimentaires de cette nature. En effez, les densités du saindoux et du suif sont trop rapprochées pour pouvoir fournir aucun résultat. La saponification sulfurique ne peut en donner de bien probants même lorsque la graisse ne contient que les deux éléments (16° pour les suifs, 26° à 30° pour le saindoux). De plus, lorsqu'on se trouve en présence d'huile végétale dont la saponification sulfurique est beaucoup plus élevée, il est impossible de savoir si l'élévation de température provient d’une forte addition de saindoux ou d’une faible addition d'huile liquide. Même observation pour l’indice d’iode, 40 pour le suif, 60 pour le saindoux, 102 à 105 pour les huiles végétales habituellement employées. Les mêmes critiques peuvent être adressécs aux points de fus'on et de solidification de la matière grasse et des acides qui en déri- vent. Il n’est donc pas possible, à l’aide des réactifs chimiques dont la science dispose actuellement, de déterminer avec une approxima- lion suffisante la présence de 10 p. 100 de saindoux dans 90 p. 100 d’un mélange de suif et d'huile végétale. L’examen microscopique, ainsi que nous l’avons vu plus haut, donne des meilleurs résultats ; mais les observations faites sont trop récentes et les méthodes employées trop différentes pour considérer la question comme entièrement résolue. Huile de saindoux (lard oil). Elle est obtenue en soumettant le saindoux grenu à une pression graduelle et continue ; le rendement varie avec la température, l'in‘ensité de la pression et sa durée. ét ris né dun -1 FALSIFICATIONS DES GRAÏiSSES. 163 Propiélés physiques ef chimiques. — Résultats analytiques moyens. CT ER ns Li. à ete den 4 Ja. A1016 Action des vapeurs Étrause ST Re = - ds i0esplIdiicAtion, SOPHRSÉRET RST 1. ce /JAune brun: z £ SO! [a 113 HAT ET : re rric Molratons 1? + HN9° : +. - 0 Diinoris Après ébullition. 2. . . . . Jaune foncé. | Après refroidissement . . . . . . Jaune foncé. 3 FUSION. Ar Cr Ru Corps gras neutre. : Pi re < 12 (SodRCAtIOon en sr Ces Point de turbidité . — 1,5 Différence entre les points de turbidité & re solidifieation Ge MORE) ESP ER AN 2 our RSR TO RS ee 5-3 etre (ion. ACTE : 34 : * ÜSolidification (tré) : route 0. s. - 30,3 e { abs: ME ST AP eut an Me po 36 apouification sulfurique . Me a ORNE dan pr à 100 SOUTENIR et AC RE PS PE 15 ee dode { Acides LOLAUSS ER PEN 6S,99 DACIRES DITES 2 107,1 On constate assez souvent sur l’huile de saindoux une réduction assez sensible du nitrate d'argent par le procédé Becchi; le procédé Wesson, même après la rectification par l'acide azoltique, donne * encore une très légère réduction. Recherche de l'huile de suindoux et des aulres huiles. — Toutes les observations faites à ce sujet pour le saindoux peuvent s’appli- quer à l’huile qui en est extraite, en tenant compte de l’abaissement des points de fusion et de solidification et de l’augmentation des indices d’iode et de la saponification sulfurique. Saindoux pressé (lard stéariné). C’est la partie solide qui reste dans les scourtins après Pextraction de l’huile de saindoux ; il est employé dans la fabrication des com- pound et a par conséquent une valeur plus grande que le saindoux lui-même. 164 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Propriélés physiques el chimiques. — Résultats analytiques moyens. DÉS ee ae de de 0 4. eee Pate OO ET er LORS A'CHONTOCSIYADEUTS DITTEUSES EN CC Solidification. SONORE, PMR RES NET ES. à Brun, SDAHE=EONO. à re M RARE OBTUR ARE PRIOR après ébullition ... .. +... 0. Marron chier, APTÉS rEfrOÏUISSEMENT . "7... Jaune Cris: PA Fe YÉRSION 1 1e SPORE See ee 39 DID PR Re lSoluiication street meer UE DieS Point des tUrDiMIé PEER, ON CRT RER RER TS 29 ,à Différence entre les points de turbidité et de solidification (remonte). + 2 RE Fusion . Et ES 17,5 CCE D Lee fe { Solidification (titre) remonte {° . 13 Saponification sulfurique . ONE Nr a Peer ee cs MOIALIVES Mec, me een M Ne Ile 69,4 S'AULLATION EN RE ET TOR te ete iii Ne ee 15,2 à À (Reides LOAUX EE MR Na EE 50,99 RAS SE des Ne re PÉTER EE Recherche du saindoux pressé dans les autres huiles. — La re- cherche du saindoux pressé s'effectue dans les mêmes conditions que celle du saindoux, en tenant compte de lPaugmentation des points de fusion et de solidification et de l’abaissement des indices diode, de la saponification sulfurique et de la densité. Suifs. Suif frais (1° choix). Densité AS RSR RE ete re teen EN URL -Eie CU 91279185 ACHODITES VADENESANITTEUSES DEEE EN EN EC Soiidilication. Ï SOS ta Me A Re ne ne Jaune trouble. L SO AS EAN D SR EEE CN Jaune trouble. COINT AIDER : 2. es CDUUUOUE RSR Jaune. NaDrÉSETEITOIISSEMEONIE EC R Jaune clair. e EUGENE SSSR OR LE RE 37 à 4? CORDSEERAS MONTE ES EN RURPRRRRE Loris ee LSolidifcationse + dues net Sn ’ EUSION TES ee D AE CO 46 à 50 Acides gras . GE CET à : due Solidification remonte {1° environ. . . 42 à 46 HU ar ADSOLUE STARTER EMI PRES. 16,5 Saponification sulfureuse. : AS lrelative. . A4 SALUT AUON 5 2 € Re Sc La ee De Er RE ee SES 18,2 ; É Acides totaux . 40 à 47 Indice d'iode, - ë ; A re Acides fluides . 10 à 77 La FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 165 Suif pressé ou oléo-stéarine. — L’oléo-stéarine est la partie con- crête qui reste dans les scourtins sous forme de gâteaux après l’ex- traction de l’oléo-margarine. Propriélés physiques et chimiques. — Résultats analytiques moyens. Densité . . RTE Action des vapeurs nitreuses . ; HSOMHÈES |sosn + HNor. aprés ébullition. . après refroidissement . | Fusion . * |Solidification. Fusion . RACE DER SITE 1 e (titre) remonte + 1°. absolue. . . MÉlATIVE Re FRERES MOlOTANOn EE. Corps gras neutre. . Acides gras . Saponification sulfurique. Saturation. een do: PE totaux . Acides fluides . 913 à 914 Solidification. Jaune trouble. Jaune gris. Jaune, Jaune clair. Oléo-margarine. — Elle est surtout employée pour la fabrication du beurre artificiel et ne peut servir à celle du saindoux mélangé, pour les raisons déjà données. Propriélés physiques et ciimiques. — Résullals analytiques. Densité. Action des vapeurs nitreuses . ; SOUSHE SOPHÈS ES HNO*- Coloration Le ax d le ébullition. | après refroidissement . { Fusion . * | Sulidification. | Fusion : Corps gras neutre. . Acides gras . k Pr à Las { absolue. Sapouification sulfurique. à lrelative. Saturation . à HR REQUIS Acides totaux . Indice d'iode. : : à Acides fluides . ‘ | Solidification (titre) remonte + 09,4. . 911,8, à 913 Solidification. Jaune trouble, Jaune trouble. Jaune. Jaune clair. 29,4 39 45 à 50 15 à 80 N 166 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Suif de mouton. DenSitérs es: etre fe CSN NP NE ER J15 à 9[S ACIDNAUOSAVADEUTS ULTEUSES PR RE CT Solidification. SOA RER MENU Le SRE PE CA Jaune. À SOS EAN Or RS RE Jaune trouble. Coloration. Es Re - Jantes CDUINTION ENTER ET CRE Jaune. (ADIÉSITETOITISSCMENT CT Jaune clair. Con { Fusion PLUS DITES ARE 47 à 50 ï LSobdifcation MAÉ RES | 33 à 56 ue | Fusion $ shGA a dits ss 49 à 59 ñ 3 " {Solidification (litre) remonte + 1°. 45 à 47 Saponificaltion sulfureuse. M Le relative. . 30 Saturaltion . . Peas MO SES Indice d'iode (acides totaux). . 35,40 Recherche du suif dans les autres matières grasses. — Les ca- ractères chimiques et physiques qui permettent de rechercher le suif soit dans le saindoux pur, soit dans le saindoux additionné d'huile végétale sont les suivants : Les points de fusion et de solidification du corps gras neutre et des acides gras seront sensiblement augmentés tandis que la sapo- nificalion sulfurique et les indices d’iode baisseront. Point de turbidilé. — On oblient des indications très utiles à l’aide du point de turbidité car dans toute graisse qui contient du suif 1l est silué au-dessus de 30° et dans toute graisse ne contenant que des saindoux purs où additionnés d'huile végétale, il est situé au-dessous de 30°. Une graisse alimentaire contenant seulement 10 p. 100 de suif se troublera à une température supérieure à celle du saindoux pressé pur. Ainsi que nous l’avons déjà signalé, l’oléo-margarine fait exceplion. Exumen microscopique. — Les cristaux des acides gras du suif cristallisés dans l'alcool, comme il a été dit, se présentent sous la forme de bâtonnets et de plumeaux caractéristiques, mais les ré- sultats paraissent, dans ce cas, préférables en opérant sur la ma- FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 167 lière neutre cristallisée dans l'huile d’olive. Le suif affectant la forme de rondelles ou de pastilles opaques, on distingue encore assez bien la forme oursin du saindoux dans un mélange de 90 p. 100 de saindoux et de 10 p. 100 de suif. Huile de coton. L'huile de coton extraite de la graine de cotonnier d'Amérique ou d'Égypte a pris depuis quelques années une grande importance sur le marché européen. Elle entre généralement dans la composi- Lion des graisses alimentaires. (Se rapporter au tableau ci-joint.) Femarque. — Les différences notables que l’on observe dans les résultats fournis par les divers auteurs, concernant le point de congélation ou de solidification des huiles et notamment de l'huile de coton, proviennent des divergences dans la manière d'opérer. Quelquefois l'huile de coton non démargarinée, par exemple, ne se solidifie qu'après une immersion de plusieurs heures et est en- core liquide au bout d’une heure, même à (, c’est-à-dire bien au- dessous de son point de congélation. D'autre part, si, au lieu de placer cette même huile dans un tube à essai, on l’expose pendant la nuit à une température extérieure de 10° à 12°, elle se trouble, devient pâtcuse et ne reprend sa limpi- dité qu'entre 15° et 18°. Il est donc indispensable, pour obtenir des résultats comparatifs, d'opérer rigoureusement dans les conditions indiquées et de sou- mettre longuement la matière grasse à une même température avant de passer à une température plus basse. Réaction caractéristique. — Outre ces caractères, dont quelques- uns permellent de soupçonner la présence de l’huile de coton dans les graisses, il y a une réaction caractéristique sur laquelle on doit s'appuyer. Pour cette dernière, deux méthodes ont été proposées, l’une par M. Becchi et l’autre par M. Milliau. Ces procédés, qui offrent une cerlaine analogie à première vue et paraissent basés sur la même AGRONOMIQUE. ANNALES DE LA SCIENCE 163 “(ourvorioue ‘ous AUISIIO ) u0y “uouen |‘8012 | 110 À “PI -09 Op OUHCIITI c‘ol1‘c6 "(asrusuesy “amy |'atupol aruol “joiu ap OutSIIO) UOy z ‘0 L°cG “afure10 95104 SLIX) | }19 À | aout 1616 |-09 ap OULILIICI EE ‘(aineroqut ‘99007 *uniq agueub) nyf “UNI | ‘unig | ouoer *DI |Sgz6 [on sre8ue woof) ‘(ostu[sue ‘99007 LI QUTSTIO) QULLES -I8W9P UOU U0J0) €G‘olr ‘C6 z6‘019°96 “(oureoroue ‘uL1q QUTLSTIO) OULIES 8 SOIT | IUT 2C ognor | ‘8119 | 310 À ‘PI -IRU9p HOU H0709) “(esrvouvci "AB[9 aut$110) Qu1I8S g‘6elg*2T 5 ‘PI 3420 À | ‘PI ‘PI -IUU9pP UOU 0709) ‘(ouivorre ue OUÊTIO) QUI c‘6gl2'2T 3 “PI ‘PI “PI |'PI ‘PI -VSIUMEp 070!) -(ostvoueu “8x8 l'areço| oprubtr OUISTIO) QUI “oneafnoy |'anvobnoy| 10 À ro À | SSI [2286 |-VSiumuop uoJ0) 9°c6 t- # nl 6‘eglor‘8cl6 LT 000F°d soide soide “Sopin[ RÉUNIE “on LRU L *PIOug & *“SA'TINH “mofqnq? -SSIPIOIFOI SJ91900") "STI18I0 À uO1Bal}IPI[OS *HOISN ‘UO1JB1}IPI[OS A —" _ onbrinypns a "ANIUHIAT9O ALITIHNANIOS *NOILVANTVS ‘ŒaoOI,4 HNIANT SHYNHAYFA ‘HLISNHQ *“soyquyruodesar tONH +, OS: ‘ATINH SAdIOV NOILVITINOFS H'IHA'IOS NGAISHH SVU9 SAGIDV ‘n[osqu [00e Suep “suoñou sonbrihinun SsJD)nSoy ‘u0709 9p seyiny sep senbiuiyo 39 sonbis£qd seyoradoid sep neelqe], FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 169 réaction, diffèrent notablement et comme précision el comme sen- sibilité. Le procédé de M. Becchi, dans lequel l’azotale d'argent réagit directement sur la matière grasse, a l’inconvénient de pouvoir faire rejeter comme falsifiés des produits absolument purs. | En effet, presque tous les échantillons de saindoux ou de suif qui ont été employés dans le présent travail ont fourni une réduction plus ou moins sensible mais permettant de douter de la pureté; il suffit de se reporter à ce qui a été dit au sujet de l'oxydation pour prévoir ce résultat, puisqu'on à constaté que, dans certains cas, il était difficile de purifier la matière grasse de toute impureté, même en opérant sur les produits de saponifisation dérivant de Ja graisse préalablement rectifiée. Indépendamment des éléments qui se forment par oxydation pour se dédoubler à leur tour en produits nouveaux de plus en plus oxydés depuis l'acide oxyoléique jusqu'aux acides acélique, formique et carbonique, n’a-t-on pas vu toules les difficullés que présente dans certains cas l'élimination d’autres corps : éléments sulfurés, produits de décomposition de la fibre ani- male, etc. Certains auteurs, dans ces derniers temps, revenant sur un fait signalé en 1894 par le précédent rapport de la Commission sur les huiles d'olive et antérieurement par M. Milliau, à savoir la présence du soufre dans certaines matières grasses non classées comme cru- cifères soit à l’état de sulfure organique, soit simplement dissous, ont conclu que cetle réaction était de peu d'importance. C’est une grave erreur qui n’échappera point aux spécialistes fa- miliarisés avec ces sorles de travaux, puisqu'on peut par épuration et saponificalion préalable, en opérant suivant la méthode de M. Millau, ürer au contraire le plus grand parti de cette précieuse réaction, une des meilleures que l’on possède dans l’analyse des malières grasses. Récemment, un chimiste américain, M. Wesson, a proposé d'opérer directement sur la matière grasse en la soumet- tant à un lavage préalable à l'acide azotique. La Commission a consciencieusement examiné Lous les échantillons soumis à son in- vestigation en opérant d’après cette méthode. La réduction qu'on obtenait sur les produits absolument purs 1:10 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. était beaucoup moins sensible que dans le procédé Becchi, mais elle pouvait encore donner lieu à des hésitations qui disparaissaient en- tièrement en opérant sur les acides gras, car, dans ce dernier cas, toutes les causes de réduction se trouvant éliminées, lazotale ‘d'argent était sans action sur la malière grasse, qui demeurait par- faitement incolore lorsqu'il n’y avait point d’huile de coton. Certai- nement, dans bien des cas on peut se passer d'opérer sur les acides gras, en se contentant d’épurer la matière grasse; d’autres fois, un simple lavage à l’eau peut suffire et enfin bien souvent on peut opérer directement sans aucun traitement. Mais aucun de ces divers moyens ne peut être préconisé comme méthole générale; ainsi l’acide azotique, qui réussit (quoique imparfaitement) lorsque les impuretés sont de nature aldéhydique, ne donne aucun résultat si l’on a à éliminer l'acide formique qui est pourtant l’un des produits les plus constants de Poxydalion des matières grasses. Il faut donc, si l’on veut procéder avec certitude, opérer sur les acides gras d’après la méthode de M. Milliau. Le procédé est plus long mais aussi plus juste et plus sensible, et il réussit dans Pim- mense majorité des cas. La saponification préalable appliquée à la recherche de la falsification des matières grasses constitue une mé- thode à laquelle on peut avoir utilement recours dans ces sortes d'analyses. Elle a pour effet non seulement de donner aux réactions une plus grande sensibilité, mais aussi d'éliminer les proûuils acci- dentels ou secondaires qui peuvent les troubler ou les marquer et leur enlever tout caractère de précision. Mode opératoire. — Dans une capsule en porcelaine de 250 cen- timètres cubes, on chauffe 15 centimètres cubes de l'huile à ana- lyser jusqu’à 110° environ, on verse alors lentement un mélange de 10 centimètres cubes d'alcool à 90°. Dès que la masse en ébul- lilion est devenue liquide et homogène, on ajoute 150 centimètres cubes d’eau distillée chaude, et lon continue à chauffer pour chasser l’alcool. On déplace alors les acides gras par de l'acide sul- furique au dixième jusqu’à très légère réaction acide. Dès que la séparation est complète, on recueille à l’aide d’une peute cuiller de platine ou d’argent, d’une contenance de 6 à 7 centimètres cubes, FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 171 même quaniité d'acides gras émulsionnés et non fondus (précau- Lions très importantes, les produits aldéhydiques de l'huile de coton élant solubles dans l’eau). On verse les acides gras pâteux dans un tube à essai de 2°",5 de diamètre et 9 centimètres de long. On les lave trois fois, chaque fois avec 10 centimètres cubes d’eau distillée froide, on fait égoutter l’eau en retenant le corps gras à l’aide de la cuiller ; on ajoute alors 15 centimètres cubes d'alcool éthylique à 92°, on dissout les acides gras dans l’alcool par agitation et l’on verse finalement 2 centimètres cubes d’une liqueur d’azotate d’ar- gent à 9 p. 100. On place le tube à l'abri de la lumière dans le bain-marie indiqué plus haut, on chauffe jusqu’à 90° centigrades, on laisse évaporer le liers de l’alcool, on le remplace par 10 cen- limètres cubes d’eau distillée chaude, et l’on continue à chauffer quelques instants. On observe alors la coloration des acides insolubles qui surna- gent. La présence de l'huile de colon délermine un précipiié d'argent métallique qui colore en noir les acues gras. Les produits de saponmificalion des autres matières grasses alimen- laires ne sont pas colorés par ce traitement, qui est assez sensible pour déceler très nettement 2 à 3 p. 100 d'huile de coton. Comme il a été dit plus haut, il est très important d'opérer sur les acides gras non fondus, car on constate que des lavages répétés éliminent tous les produits aldéhydiques qui déterminent la réaction. D'ail- leurs, en exposant les acides gras hydratés de lhuile de coton à l’action d’une douce chaleur, on peut séparer la partie aqueuse et constater qu’elle donne elle-même le précipité caractéristique. Lorsque la proportion d’huile de coton dépasse 15 p. 100 envi- ron, la partie aqueuse placée au-dessous des acides gras se trouve elle-même colorée en jaune à la sortie du bain-marie. Le traitement des acides gras ramène sensiblement toutes Îles matières grasses au même type, tout en opérant la meilleure des filtrations, et en éliminant diverses impuretés, matières mucilagi- neuses, glucosides, etc. Toutefois, lorsqu'on obtient le précipité caractéristique, il est bon par surcroit de précaution de s'assurer que la coloration noire est 172 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. bien due à la présence de l’huile de coton en opérant une rectifica- tion faite comme il a été indiqué à l'article Épuralion, car certaines matières grasses industrielles donnent quelquefois, si elles n’ont élé épurées par les fabricants, une teinte grisâtre qui pourrait laisser naître quelques doutes sur la pureté du produit. Avec un mélange de 5 p. 100 d'huile de coton la réaction est absolument caractéristique et la partie liquide des acides gras qui surnage dans le tube est fortement colorée. Il ne faut donc pas attacher une trop grande importance à la teinte légèrement grise que peuvent prendre quelquefois les acides concrets dans les parties exposées à l’air ou placées contre les parois du tube. Ce phénomène doit être attribué soit à l’action de la lu- mière, soil à une reclification imparfaite. Huile d’arachide. Propriétés physiques et chimiques. — Résullals analytiques moyens. MER EDEUE Te eu O0 NES Densité . de # À décortiquée . . . 921 JUSOITERESTRE 46 Saponification sulfurique. . f ne Leave re or DOI RU OUEN AMEN Te EM er ee 97 Poïatrde congélition PETER SEEN 1 : MEUSIOn Eee 31 Acides gras . SR RE re Te | Solidification. . . 28 DADDPALION ENT Mere Me ee een 17,8 Solubilité de l'alcool absolm. . . . + : . . 6G p. 1 090 Recherche de l'huile d’'arachide dans les matières grasses. — Acide arachidique. — Indépendamment des caractères ci-dessus indiqués, le procédé le plus sûr pour reconnaitre l’arachide consiste à isoler l'acide arachidique. Mode opératoire. — On saponifie 10 grammes de matière grasse par les moyens indiqués, et lorsque tout l’alcool à été chassé, on rend le savon insoluble par une addition de 100 centimètres cubes d’eau salée (chlorure de sodium pur) à 18° Baumé. Après refroidis- sement, on retire la lessive sous-jacente, on lave encore une fois | 4 FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 173 avec la même quantité d’eau salée, et, après deuxième élimination, on dissout à chaud dans l’eau distillée la masse savonneuse purifiée. D'autre part, on fait dissoudre dans une fiole de Bohême de 500 centimètres cubes 10 grammes d’acélate de plomb neutre et pur dans 250 centimètres cubes d’eau distillée, on verse lentement, et en agitant sans cesse, la masse savonneuse dans cette solution pour précipiter le savon plombique. On refroïdit sous l’eau courante en donnant au flacon incliné un mouvement de rotation qui fixe le précipité sur les côtés. Quand le flacon est parfaitement froid, on décante le liquide limpide et l’on s'assure par un essai à l’acétate de plomb qu'il ne contient plus de savon. On lave rapidement le précipité à l’eau bouillante et quand le lavage est terminé on dé- cante une dernière fois, on rince avec de l’alcoul et on y ajoute 150 centimètres cubes d’éther redistillé à 66° Baumé. Oa fixe le flacon dans un condenseur à reflux et l’on fait bouillir jusqu’à ce que tout l’oléate de plomb soit dissous et que la portion insoluble soit en poudre impalpable. On refroidit à 15° par les moyens qui viennent d’être indiqués, et l’on s'assure que le refroidissement est bien complet, l’éther dis- soivant partiellement à chaud les sels de plomb à acides gras con- crets. On répète deux fois cette opération avec 100 centimètres cubes d’éther par lavage. Pour décanter facilement, il suffit de placer le flacon d’Erlen- mayer sur un valet avec une inclinaison suffisante. Après avoir décanté une dernière fois l’éther, on verse de l’eau distillée et 50 centimètres cubes d’acide chlorhydrique pur, de façon à remplir à peu près le flacon. On chauffe jusqu’au moment où la décomposition est complète. On refroidit à la température de 8° à 10°. Les acides gras réunis à la partie supérieure et rétrécie du flacon se solidifient complètement et forment un petit gâteau dur. On peut alors facilement décanter les eaux de lavage, laver une première fois avec de l’eau légèrement acidulée et trois fois ensuite avec de l’eau distillée, afin d’enlever toute trace de chlo- rure de plomb. Les acides gras placés dans une petite capsule sont mis à l’étuve 174 ANNALES DE LA SUIENCE AGRONOMIQUE. de 105° pour chasser l'humidité. Après refroidissement, le gâteau d'acides concrets doit être assez dur, car s’il élait mou il contien- drait encore de l'acide oléique, qui empêche, même en faible pro- portion, la cristallisation de l'acide arachidique. On dissout la masse, placée dans un flacon, dans 20 centimètres cubes d’alcool à 90° centigrades, on ajoute une goutte d’acide chlorhydrique et l’on refroidit à + 15° centigrades. Si la matière grasse est pure, après refroidissement la masse reste sénéralement limpide; si elle contient de l'huile d’arachide, elle laisse déposer d'abondants cristaux d'acide arachidique. On fait alors deux lavages avec 20 centimètres cubes chaque fois d'alcool à 70° dans lequel l'acide arachidique est complètement insoluble. Le lavage est terminé lorsque quelques gouttes évaporées ne laissent plus de résidu. On chauffe alors lévèrement et l’on traite par l’alcool absolu et bouillant. Après filtration, on porte la solution alcoolique à l'étuve à 100° jusqu’au moment où le poids reste invariable. On détermine alors le point de fusion de l’acide par le procédé indiqué à l'article Fusion. Pour obtenir le point de fusion réel (74°), il faadrait faire encore une ou deux cristallisations, mais il est parfaitement sufli- sant de constater que le point de fusion du résidu dépasse 70° pour être certain qu’on se lrouve en présence de l'acide arachidique. On peut déterminer quantitativement le mélange, sachant que l'huile d’arachide pure contient 4.5 p. 100 d’acide arachidique. Remarque. — Dans les graisses alimentaires contenant de faibles proportions d'huile d’arachide, il est très difficile et quelquefois impossible d'obtenir les cristallisations de lacide arachidique à cause de la présence d’une trop grande quantité d'acides concrets, dans lesquels il est très soluble. Dans ce cas,.sa présence ne peut être guère caractérisée que négativement, tous les caractères des huiles de graines, saponifica- tion sulfurique, indice d’iode, etc., se trouvant nettement accusés et la recherche des huiles de coton et de sésame donnant des résul- lats négalifs. FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 165 Oa peut aussi, suivant les indications de M. Milliau, isoler l’autre acide qui caractérise également cette huile, l'acide hypogéique, en traitant les acides gras par l'alcool bouillant, précipitant les acides arachidiques et palmiliques par l’acétate de magnésie et d’am- moniaque et trailant la solution filtrée par l’acétate de plomb et d’ammoniaque. . L’hypogéate de plomb précipité est épuisé par léther traité par l'acide chlorhydrique à l'abri de l'air et agité avec de l’eau distillée. a solution éthérée laisse déposer en se refroidissant des cristaux dacide hypogéique. On purifie par dissolution et cristallisation dans l'alcool. Get acide, étant le seul parmi les acides concrets ex- traits des corps gras naturels appartenant à la série oléique non saturée, pourra être entièrement caractérisé par son indice d’iode qui se trouve compris entre 99 et 101. Les autres acides concrets convenablement purifiés n’absorbent point d’iode (Milliau). Si l'acide hypogéique n'avait pas été complètement privé d’acide oléique, les résultats seraient complètement erronés. Ce procédé ne peut être recommandé, son extrême délicatesse exigeant toute l’attention d’un spicialiste exercé. Huile de sésame. Propriélés physiques el chimiques. — Résultats analylijues moyens. ANS su 023 HéRSIÉREE ErtPressionachaud 8994 | Sésame du Levant. 926,5 Action des vapeurs nitreuses . Masse liquide. Saponification sulfurique. NP se relatives 00 150 ENONCE PE RTE RE TERS 104 CONLÉAD ON RTE RESTE STE; 50 Acides gras . : En ; 6 É Solidification. . DRE) SAUUTAUTO DER EE FER MEN ere at Solubilité de l'alcool absolu. A 18p:1 000 Réaction caractéristique. — La couleur rouge obtenue en trai- tant par l'acide chlorhydrique sucré les acides gras de l'huile neu- 176 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. tralisée est caractéristique. Elle permet de retrouver l'huile de sésame dans la matière grasse (procédé Camoin). Avant les nouvelles recherches de M. Milliau, on opérait directe- ment sur l'huile et l’on s’exposait ainsi aux plus regrettables erreurs ; certaines matières grasses parfaitement pures donnèrent fréquem- ment la coloration rose ou rouge et furent rejetées comme falsifiées, Il est donc indispensable, quand on procède à cette recherche, d'opérer sur les produits de saponification, le traitement direct sur la matière grasse ne devant être fait qu'à titre d’essai préliminaire. S'il ne donne aucune coloration rose ou rouge, on peut être assuré que l'échantillon analysé ne contient pas d'huile de sésame ; si au contraire on obtient la réaction indiquée, on contrôle le résultat en procédant comme il est dit ci-dessous. Une matière grasse qui, après avoir donné la coloration rouge par le traitement direct, ne fournit plus les mêmes indications en opérant sur les acides gras, ne contient pas de l’huile de sésame. Procédé Milliau. — On saponifie 15 centimètres cubes de la ma- tière grasse à examiner par 10 centimètres d’une solution de soude caustique à 36° Baumé additionnés de 10 centimètres cubes d’al- cool à 90. Dès que la maste en ébullition est devenue limpide, on ajoute 200 centimètres cubes d’eau distillée chaude, on laisse bouillir pour chasser l'alcool et on déplace les acides gras par l’acide sulfurique au dixième. On les recueille dès qu’ils montent à la surface à l’état pâteux, on les lave en les agilant deux fois dans un tube à essais avec 19 centimètres cubes d’eau distillée froide, on égoutte et on place les acides gras dans une étuve chauffée à 105°. Lorsque la majeure partie de l’eau est éliminée, et qu’ils com- mencent à fondre, on les verse sur leur demi-volume d’acide chlorhydrique pur, dans lequel on vient de dissoudre à froid et jusqu’à saturation du sucre blanc finement pulvérisé ; on agite vive- ment le tube à essai. La présence de l'huile de sésame est toujours nellement indiquée par la coloration rose ou rouge que prend la couche acide. Les autres huiles laissent l’acide incolore ou lui communiquent une leinte jaunâtre. | és FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 177 Cette réaction, d'une extrême sensibilité, permet de reconnaitre sûrement la présence de l’huile de sésame dans les matières grasses. Il est à remarquer que la matière colorante rouge de l’huile de sésame vire au jaune par l’action des alcalis et reprend sa couleur primitive sous l’action des acides. Huile de coprah. Cette huile entre quelquefois dans la composition des graisses alimentaires, il est donc utile de pouvoir la rechercher. Propriétés physiques et chimiques. — Résultals analytiques moyens. HUE AN RL 925 Densité à 13°. . ‘ 5 2 ACITE/OTAS 0 9 015 Action des vapeurs nitreuses . . . . . . . Solidification. Ur 2 absolue. . . : ITS Saponification Me 3 se ‘ (irelative st A DAS À À lode . 8 à 10 Indices . . x | Brome . 74 * Solidification. 22,5 Huile. : : | Fusion . 26 à Fusion . 26,5 NCTACSABTA SN ee APR MONE AO ne DIRES NE 52 © | Solidification . 22,7 Saturation. . 24,1 Solubilité de l'alcool absolu (procédé Milliau). — Où neutralise d'abord l'huile en l’agitant avec deux fois son poids d'alcool éthy- lique à 95°, dans lequel elle n’est presque pas soluble. O1 facilite la précipitation de l’huile en plongeant le tube à essai qui la con- tient dans de l’eau chauffée à 35° environ, on élève ensuite la tem- pérature du bain-marie en immergeant seulement la partie du tube contenant l’huile précipitée, on chauffe pendant une ou deux minutes et on remplace le peu d'alcool qui s’évapore par une égale quantité. Les huiles solubles dans l'alcool à 95° sont décelées par ce traile- ment préliminaire. Les huiles de Mowrah et de Karité produisent dans la couche alcoolique un trouble laiteux caractéristique. On prélève ensuite à l’aide d’une pipette 7 à 8 centimètres cubes de l’haile de coprah ainsi neutralisée, qu’on place dans un tube à ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — { 598. — rt. 12 178 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. essai gradué en centimètres cubes ; on chasse l’excès d’alcool au bain-marie, on ramène le volume de lhuile à 5 centimètres cubes et on ajoute 10 centimètres cubes d'alcool éthylique absolu. On porte le tout à la température de 31° centigrades, on agite vivement pen- dant 30 secondes et on plonge le tube dans un bain-marie dont la température doit toujours être légèrement supérieure à celle du tube (32° environ). L'huile de coprah pure se dissout complètement et la solution reste limpide ; toute addition d’un autre corps gras entraine sa pré- cipitation, la matière en dissolution étant dans un état d'équilibre moléculaire que la moindre modification détruit. Recherche de l'huile de coprah dans les matières grasses. — La recherche de l'huile de coprah s’effectue facilement à l’aide de la saturation qui est fort élevée, 24,1 au lieu de 17 à 18, de l'indice d’iode qui est très bas, 8, de la solubilité dans l’alcool absolu et des acides volatils 4,72 indice de Meissl au lieu de 0,7-0,9. Recherche des huiles végétales dans les graisses (procédé Wel- mans). — On dissout dans 3 centimètres cubes de chloroforme 1 gramme de la graisse à examiner, on ajoute 2 centimètres cubes d'une solution de phosphomolybdate de soude dissous dans de l’eau acidulée par quelques gouttes d'acide azolique et on agite vigou- reusement. Si le produit est exempt d'huiles végétales, la coloration de la masse est d’un jaune franc et disparaît par addition d’un excès d’ammoniaque. Si, au contraire, il existe dans le produit des huiles végétales, la couche supérieure du liquide se colore en vert passant au bleu par l’addition de l’'ammoniaque. Les huiles végétales ayant subi un traite- ment chimique ne donnent plus ou presque plus de coloration. Il est à remarquer que le réactif doit loujours être préparé au moment de l'expérience, et qu'on obtient dans les cas douteux des résultats plus nets, en prenant, au lieu d’un gramme, 5 centimètres cubes de la graisse à examiner, toujours pour 5 centimètres cubes de chloroforme et 2 centimètres cubes de la solution de phosphomo- lybdate de soude. FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 179 Ce procédé ne fournit pas toujours des résultats exacts : l'huile de coprah ne donne pas ou presque pas de coloration; par contre, les suifs en donnent fréquemment. CHAPITRE V CARACTÈRES D'UNE GRAISSE COMESTIBLE DE BONNE QUALITÉ Caractères organoleptiques.— La couleur d’une graisse comestible doit être blanche ou jaune et exempte de toute teinte grisälre ou verdâtre ; son odeur doit être franche et rappeler son origine. La saveur doit être douce et naturelle et ne laisser dans le palais aucun arrière-goût désagréable provenant soit de l’altération du produit, soit d'ingrédients chimiques ayant servi à la purification. Caractères physiques el chimiques. — Les caractères physiques et chimiques d’une graisse comestible doivent être normaux et se rapprocher sensiblement des moyennes indiquées. A ces caractères généraux, il convient d’ajouter la détermination des acides gras libres de l’huile ; le maximum pouvant être fixé à 2 p. 100 à l’état frais. La détermination de l'oxydation peut servir à faire un second classement parmi les graisses dont l'acidité a été reconnue bonne. Lorsqu'une graisse est très oxydée, on retrouve à l’analyse tous les phénomènes de la résinification : augmentation du poids molécu- laire, de la solubilité de la matière grasse dans l’alcool absolu et de la solubilité dans l’éther des sels gras de baryte obtenus par double décomposition. En résumé, les degrés d’acidité et d’oxydation d’une graisse de qualité connue peuvent servir, dans une certaine mesure, à déter- miner si elle est ou non comestible. Toutefois, ces renseignements ne sont pas suffisants et il y a encore lieu de s'assurer, par les moyens d'investigation habituels, si la matière grasse ne contient aucune substance minérale ou organique 130 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. pouvant avoir été additionnée dans un but frauduleux ou provenant de l'emploi de récipients sales, ou bien encore d’une épuration in- dustrielle mal conduite et dans laquelle on l’aurait imparfaitement dépouillée des réactifs chimiques employés pour la rectifier ou la décolorer. Il y aurait lieu également, pour compléter ces recherches, de dé- terminer si la graisse ne contient naturellement, ou pour toute autre cause, aucune substance vénéneuse, et d'essayer finalement son action sur les animaux soit en la mêlant à leurs aliments, soit par des injections appropriées des corps toxiques qu’on aurait pu isoler. Les caractères qui différencient scientifiquement une graisse comestible d’une autre qui ne l’est pas peuvent donc être nettement établis. Il n’en est pas de même si l’on veut faire une distinction chimique entre les qualités, les différences n’élant pas assez appréciables et la dégustation pouvant seule permettre d'arriver à ce résultat. Valeur alimentaire des diverses graisses comestibles pures ou mélangées entre elles. Tous les corps gras qui viennent d’être successivement étudiés possédent, lorsqu'ils sont frais et de bonne qualité, une valeur ali- mentaire sensiblement la même. Ils peuvent donc être employés indistinctement soit purs, soit mélangés les uns aux autres, comme dans le compound et en général dans toutes les graisses alimentaires du commerce. | Les hygiénistes, après avoir établi la comestibilité de ces divers produits, n’ont plus qu'à rechercher quelles sont les causes d’alté- ralion qui peuvent les rendre impropres à la consommation. Nous avons vu que l'acidité trop forte et l'oxydation sont évidem- ment nuisibles ; il en est de même d'une graisse imparfaitement épurée ou contenant des produits chimiques destinés à la colorer ou à la parfumer. La Commission a examiné avec la plus grande attention, à ces divers points de vue, toutes les graisses composées françaises ou FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 181 américaines ; elle a le devoir d’ajouter que tous les produits de mar- ques connues étaient sains et constituaient un aliment à la fois bon marché et de premier ordre dont il y a toui lieu d'encourager la vente en France. La présence de l'huile de coton n’a non seulement aucune action nuisible, mais encore aide à la conservation de la graisse. Au bout de trois mois, de six mois, d’un an même, l'acidité des graisses contenant du coton n’a pas sensiblement varié, tandis qu’elle a presque doublé sur le saindoux pur. Les proportions de saindoux, d'huile de graines et de suif sont naturellement extrêmement variables suivant les provenances, la saison, la qualité et le cours de la Bourse. Il n’est donc pas possible de fixer exactement leurs caractères physiques el chimiques. La densité peut varier de 914 à 920, la masse se solidifier ou non par l’action des vapeurs nitreuses suivant les proportions d'huile de graines. Il en est de même des poids de fusion et de solidification, et de la saponification sulfurique. L'indice d’iode est généralement compris entre 75 et 80, celui des acides fluides dépasse 115. Enfin, on retrouve les caractères des huiles de coton, d’arachide et de sésame par les procédés indiqués. L’acidité est très faible dans les graisses de bonne qualité addi- tionnées d’huile de coton 0.15 p. 100, et au bout de six mois 0,20 ; dans les mêmes condilions le saindoux pur a passé de 0.8 att5; E Ces résultats sont obtenus sur de petites masses. La conservation est plus parfaite dans les récipients du commerce soigneusement fermés et mis à l'abri de l'air et de la lumière. Étude de l'assimilation. Il était intéressant d'étudier assimilation des matières grasses qui vicnnent d'être décrites. Le chien, dont les excréments ne contiennent normalement aucune 182 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. matière grasse, phénomène commun à tous les carnivores, à été choisi comme sujet d'observation. Plusieurs chiens ont été nourris pendant six mois avec des soupes maigres additionnées d’une quantité déterminée de malière grasse. Chaque essai était suivi d’une période de régime maigre. Le dosage des matières grasses dans les excréments fait par les procédés habituels, avec élimination de la cholestérine, donnait par différence la quantité de matière grasse assimilée par les chiens. Pendant toute la durée de l'alimentation graisseuse, le chyle des animaux est resté opaque et riche en globules; traité par l’éther, il lui abandonnait beaucoup de matières grasses. Pendant l'alimentation maigre, le chyle restait au contraire trans- lucide ; traité par l’éther, il donnait un résidu gras insignifiant. Voici le tableau comparatif obtenu pendant six mois d’obser- vation : | GRAISSE DOSE PAR JOUR. ARACHIDE. p. 100. SÉSAME, SAINDOUX. p- 100. COMPOUND |. p-. 100. p. 100. DTAINMES EE 84.9 89 85.4 85.1 grammes Le: ::: 80. : 81 grammes . 1. Saindoux, 20 p. 100 ; suif, 30 p. 100 ; coton, 50 p. 100. Ces résultats démontrent d’une façon évidente qué les graisses et builes sont toutes assimilées en proportions sensiblement égales. Les divers chiens soumis au traitement sont restés en parfait état de santé pendant toule sa durée et n’en ont été nullement incom- modés, quelles que fussent les matières grasses qui leur étaient administrées. FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 183 CHAPITRE VI CONCLUSIONS GÉNÉRALES Après avoir décrit les méthodes dans l’ordre qui doit être suivi, en séparant neltement les graisses à bouche des graisses indus- trielles, après avoir rejelé les procédés reconnus défectueux et qui ont porté Jusqu'ici un si grand préjudice au commerce des malières grasses, il convient d'entrer dans quelques considérations générales sur la marche à suivre par les experts dans les recherches analytiques sur les conclusions qu’ils peuvent tirer de leurs résultats. La densité, dont nous avons fait ressortir les avantages et les in- certiludes, sera d’abord déterminée. On étudiera ensuite l’action des vapeurs nitreuses au point de vue de la coloration et de la soli- dification. La saponification sulfurique et la détermination des indices d'iode viendront après, ainsi que les points de fusion et de solidification de la matière neutre, le point de turbidité et l’examen micros- copique. Il est extrêmement rare, et l’on peut, par conséquent, écarter cette hypothèse, de trouver des, matières grasses donnant des résul- (ats négatifs par les procédés généraux que nous venons de décrire et n’accusant pas, à l’aide des réactifs spéciaux qui permettent de les caractériser, la présence d’une autre malière grasse élrangère ; ce qui est fréquent, c’est de trouver quelquefois un ou deux caractères anormaux ; une matière grasse peut avoir par exemple une densité ou plus faible ou plus forte que la moyenne, ou bien son imdice d’iode quelque peu différent des résultats habituels, sans être pour cela adultérée. Aussi, la Commission a-t-elle jugé utile et indispensable de fixer pour chaque caractère spécifique non point une moyenne de tous les résultats obtenus, mais bien un maximum et un minimum, cal- culés de la manière la plus large, de telle sorte que lorsqu'une matière grasse sortira, ne serait-ce que dans un seul des essais 184 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. caractéristiques, des limites indiquées, elle devra par ce fait même être écartée. Mais il ne découlera pas nécessairement de ce principe qu’une matière grasse, ayant donné des résultats compris dans les limites indiquées, sera forcément pure, puisqu'il a élé démontré, pour ne citer qu’un exemple, qu'avec un mélange à 10 p. 100 et au delà d'huile de sésame, de coton, d’arachide ou de saindoux, on pouvait obtenir dans l'emploi des procédés généraux des résultats analy- tiques ne s’éloignant pas sensiblement des moyennes indiquées pour les matières grasses pures. Il faut alors recourir aux recherches spéciales. Ainsi donc, une matière grasse sera déclarée pure: 1° Lorsqu'elle n’aura dépassé aucune des limites indiquées par les procédés généraux ; 2° lorsqu'on ne constalera, à l’aide des réac- tifs spéciaux, la présence d'aucune autre matière grasse étrangère. Les réactions qui caractérisent ces diverses matières grasses sont en général beaucoup pius sensibles et précises que celles qui appar- tiennent aux procédés généraux. Une graisse qui, après avoir élé soumise aux rectificalions voulues, donnera des acides gras colorant en rouge ou en rose bien net l'acide chlorhydrique additionné de sucre, contiendra certainement de l’huile de sésame. La coloration devra être absolument franche ; il ne fau- dra prêter aucune attention aux teintes jaunes plus ou moins foncées qu'on pourrait obtenir. L'expérience démontre en effet que les acides gras d’une matière grasse contenant 5 p. 100 d'huile de sésame donnent, par ce traitement, une coloration franchement rouge. Les mêmes remarques doivent être faites en ce qui concerne l’action de l’azotate d'argent sur les acides gras non fondus. Une addition de à p. 100 d'huile de coton donnera une coloration brunâtre très accentuée, et la partie liquide des acides gras se trou- vera fortement colorée. Il serait erroné d'attribuer à la présence du coton la teinte légère- ment grisâtre que l’on ubserve dans certains cas et qui peut provenir soit de l’action de la lumière sur le sel d'argent, soit plus rarement de certaines impuretés difficiles à éliminer. FALSIFICATIONS DES GRAISSES. 185 La présence de l'acide arachidique d’un point de fusion supérieur à 71 degrés est également Pindice certain de l'addition d'huile d’arachide dans l'échantillon à examiner. On peut, d’ailleurs, en opérant avec précaulion, faire dans ce cas un dosage quantitatif, qui permet d'apprécier l'importance du mélange, sauf dans le cas d’une faible addition. © Le saindoux et le suif seront caractérisés par leurs propriétés phy- siques et chimiques, l’examen microscopique et le point de turbidité. Il ne faut pas oublier que les mélanges au-dessous de 5 à 10 p. 100 seraient tellement peu rémunérateurs qu'il n'y aurait aucun intérêt à les effectuer. En résumé: dans l'état actuel de la science, on doit refuser, comme ne présentant pas tous les caractères physiques et chimiques des matières grasses décrites, Loutes celles donnant à l'analyse, ne serait- ce que dans un seul essai, des résultats supérieurs ou inférieurs aux maxima et aux minima fixés plus haut. Une matière grasse qui, tout en restant dans les limites indiquées, se rapprochera sensiblement par les résultats qu’elle aura fournis, soit du minimum, soit surtout du maximum dans un ou plusieurs essais, devra être l’objet d’un examen approfondi qui aura pour but de déterminer si ces caractères proviennent de la matière grasse elle-même ou d’une faible addition de matière grasse étrangère. Généralement, les falsifications que ces divergences font soupçonner pourront être contrôlées par les réactions particulières. Malgré toutes les précautions que nous venons d'indiquer, 1l peut se présenter des cas douteux, sur lesquels il est délicat de se prononcer, même après une étude approfondie de la question. Ces cas exceptionnels ne peuvent être appréciés que par des spé- cialistes avant une grande habitude des délicates manipulations des Corps gras. Les résultats obtenus gagneront encore en précision, si l’on opère comparativement avec des produits de même origine et de pureté certaine. La Commission espère donc avoir résolu la question qui lui était posée par les ministres de la marine et de l’agriculture et avoir fixé 186 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. les méthodes qui doivent être mises entre les mains des experts chimistes des divers départements intéressés. Elle pense avoir ainsi permis d'écarter des adjudications de l’État et des transactions com- merciales toutes les matières grasses adultérées, et mis les intéressés à l'abri des tromperies sur la nature de la marchandise vendue ou livrée, tromperies qui peuvent avoir pour eux, dans certains cas, les plus graves conséquences. Elle a évité de fixer des nombres immuables et s’est rapprochée autant que possible de la réalité des observations qui varient dans des limites assez élendues, même pour des produits purs. I y a lieu d'espérer qu’à l'avenir les erreurs regrettables prove- nant de l’emploi de méthodes inexactes pourront être évitées, ainsi que les suspicions injustes qui en découlent et qui ne peuvent que nuire aux transactions, en écartant des marchés les maisons qui craignent d’être discréditées par des poursuites mal fondées. Ces difficultés rendent la marchandise rare, ce qui provoque la hausse au détriment de la qualité même, le choix étant moins abondant. Les règles posées par la Commission ont un caractère général, et par suite n’écarlent pas des marchés les matières grasses de telle provenance, en favorisant, sans raison et contrairement à l’équilé, celles de telle autre provenance. Après avoir décrit les procédés qui permettent de reconnaître la pureté ou l’adultération des matières grasses et indiqué leur degré de certitude, la Commission lient à faire remarquer que, malgré leur simplicité, ces analyses sont délicates. Si elles offrent au chimiste expérimenté les moyens de se prononcer avec sûreté sur la nature des matières grasses, elles peuvent se trouver en défaut entre des mains inhabiles. C’est donc à des savants spéciaux qu’il convient de s’adresser, lorsque ces questions, qui intéressent à la fois l’agricul- ture, le commerce et l'hygiène, se trouvent soulevées. QUELQUES DONNÉES STATISTIQUES SUR LA PRODUCTION ET LA CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES DANS LE MONDE PAR Pour GRANDE AU LA PRODUCTION DES CÉRÉALES DANS LE MONDE. Étendue des surfaces cultivées en céréales. — Récolte des céréales alimentaires dans le monde. — Récolte par tête d'habitant du froment, du seigle, de l'orge, de l'avoine et du maïs dans les trente-trois pays producteurs. L'année 1898 s'annonce comme devant être exceptionnelle pour la récolte des céréales et particulièrement du blé, non seulement en France et en Europe, mais encore dans les pays d’outre-mer. Tout ce qui touche à la production des céréales alimentaires, notamment à celle du froment et du seigle, a une importance capitaie pour les nations civilisées, tant au point de vue de l’alimentation de leurs populations que sous le rapport de leur commerce international, par les quantités de grains disponibles en faveur des pays qui ne récol- tent pas assez de blé pour suffire à leurs besoins. Pour la France, la question des céréales est d’un intérêt primor- 188 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dial, puisque le septième environ de notre territoire agricole est consacré à la culture du blé, et que le seigle, l’avoine, l'orge etle mais couvrent chez nous une superficie égale à celle des emblavures en froment; il résulte de là que, sur 27 millions d'hectares sous culture (praries et forêts à part), les céréales s'étendent sur près des trois cinquièmes des terres cultivées et occupent environ le tiers du territoire agricole de la France. En attendant jes résultats définitifs de la récolte de 1898 qui nous donnera l’occasion de présenter à nos lecteurs une étude sur la situation privilégiée de la France en ce qui concerne la culture du blé, et de montrer le mince effort qu’il reste à faire à notre agri- culture pour que notre pays, cessant d’être importateur, prenne place parmi les nations exportatrices, nous nous proposons aujour- d'hui de leur présenter un tableau aussi complet que possible de la production et de la consommation des principales céréales alimen- taires dans le monde entier, qui servira d'introduction à l'examen détaillé de la question du blé en France. Au premier rang des causes qui ont transformé les conditions de l’agriculture continentale, depuis un quart de siècle, se placent la création el le développement des moyens de communication rapide des diverses contrées de l’Europe entre elles et avec les pays d’ou- tre-mer. La vapeur et lélectricité ont apporté dans les relations commer- ciales du monde entier des changements tels, que la connaissance exacte des ressources et des besoins des pays producteurs est deve- nue indispensable à l’agriculteur autant qu’au négociant. Si imparfaits que soient encore les documents slalistiques relalifs à la production agricole des régions civilisées du globe, ils n’en sont pas moins de grande utilité ; ils donnent une idée générale des ressources des divers pays, de l'intensité de leur production com- parée à la consommation indigène ; ils précisent, en outre, les élé- ments de concurrence avec lesquels les progrès des moyens de communication nous obligent, de plus en plus, à compter. Ce que je disais tout à l'heure de l’importance des surfaces consacrées en France à la culture des céréales, assigne le premier rang, dans l'ordre d'idées où nous nous plaçons, à la statistique de la pro- PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 189 duction et de la consoramation du blé, du seigle et du maïs dans le monde. La superficie de la terre est d'environ 135 millions et demi de kilomètres carrés. L’évaiualion approximative de la population cor- nue du globe fixe à un milliard et demi le nombre de ses habitants, très inégalement répartis à sa surface. L'Europe compte 37 habitants par kilomètre carré ; l’Asie 19; l'Afrique 5 ; l'Amérique 3; les îles océaniques 4. La moyenne arithmétique serait, pour le globe enter, de 11 habitants par kilomètre carré (100 hectares). Un peu plus du tiers seulement de la population humaine con- somme du pan: le nombre des mangeurs de pain, « Bread Eaters » comme on les désigne en Angleterre, serait actuellement, d'après les évaluations de M. Davis Wood, de 510 millions : il était de 371 millions en 1871. En vingt-cinq ans le nombre des consomma- teurs aurait done augmenté de 149 millions, soit de 37 p.100, tandis que, dans la même période, la production des quatre principales céréales alimentaires: blé, seigle, méteil et sarrasin, s’est accrue seulement de 7.6 p. 100, ainsi que le montre le tableau suivant, dressé par M. Davis Wood, dont sir R. Goffen à récemment con- firmé les évaluations devant la Société royale d'agriculture d’An- gleterre : SURFACES CULTIVÉES EN HECTARES. DIFFÉRENCE NATURE DES GRAINS. A en plus En 1871. En 1896. ou en moins. PA4100: Blé 00 936 400 63 974 000 + 29.0 SOL CE M ESA ste 44 922 000 43 100 000 — À.i Épeautre et méteil . . 2 307 000 1 781 000 — 22.8 Sarrasin 6 556 000 3 845 000 — 40.0 104 721 400 112 700 000 Su D'après ces chiffres, seule la surface cultivée en blé a augmenté. Il faut noter que le riz, le maïs et la pomme de terre, etc., qui four- nissent à l’homme le complément de son alimentation en farineux, quand ils ne la constituent pas entièrement, ne figurent pas dans les relevés de Davis Wood. D'après les calculs de ce statisticien, l’alimentation des mangeurs de pain réclamerait, dans les surfaces emblavées en froment et en 190 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. seigle, une augmentation qui ne devrail pas être moindre de 20 millions d'hectares, en supposant stationnaires les rendements moyens actuels. L’accroissement normal de la population qui est évalué à 14 p. 100, par période décennale, exigerait une augmentation annuelle d'environ 1 million 1/2 d'hectares, dans les emblavures de blé et de seigle. Il semble donc résulter de ces considérations que, pris dans son ensemble, le monde est loin d’être menacé d’une surproduction en céréales alimentaires. C'est à d’autres causes et notamment au pro- grès immense des communications internationales qu’est dû l’abais- sement général du prix de ces denrées. Avant de nous occuper spécialement du blé, jetons un coup d’œil sur l’ensemble de la pro- duction des cinq grandes céréales dans le monde : froment, seigle, mais, orge et avoine, en nous aidant des statistiques de J. C. Beer- bohm (Evening Corn Trade List) pour le blé, et de Broomhalls (Corn Trade Yearbook) pour les quatre autres céréales. J’emprunte les tableaux qui résument ces données, relativement à la période quadriennale 1892-1895, à une étude très documentée qu’a publiée en 14897 et 1898 la Deutsche Landwirtschaftliche Presse. Ce tableau indique la récolte globale en céréales de 35 pays pro- ducteurs rangés par ordre décroissant du chiffre brut de leur pro- duction. La France occupe, dans cette récapitulation sommaire, le cinquième rang, avec une production totale de 16 355 000 tonnes. Les récoltes sont exprimées en milliers de tonnes; les chiffres afférents à chacune des céréales sont indiqués en détail dans le tableau IIT. En se reportant à ce tableau, on se rend aisément compte de la manière dont est établi ce chiffre global de 16 355 000 tonnes pour la France, qui se décompose comme suit : RLÉ MER NDS ler Me de 8 574 milliers de tonnes. Sélole: terres Et 2 144 — Orpi MEnens et che 987 — AVOIIE Rime (Le 3 945 — MAIS tar eme A 705 — Totale + 16 355 milliers de tonnes. Et ainsi de suite pour tous les autres pays. NUMÉROS D'ORDRE. HN LL ND NN OÙ Æ PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. LOT Tableau I. — Production des céréales dans le monde. NOMS DES PAYS classés d’après leur production totale en céréales, _ Blé. — Seigie. — Orge. Avoine, — Mais. États-Unis d'Amérique . Russie (Pologne exceplée) . . Empire d'Allemagne. . Autriche-Hongrie . . . ÉTAnCe ere te pe ES nt Iudes . L'oeil Grande-Bretagne et Ir- lande co NE MEL UMEEC Espagne. . . . Roumanie... Cu CHAT RENONENLNE : République Argentine Suède et Norvège . . . | Bulgarie et Roumélie. Turquie d'Europe . . . Danemark. . . . Belgique Australie . Algérie . . Égypte . . . Asie-Mineure Hollande . . Portugal. . Serbie. Chili . Perse. Grèce . Tunisie . . Uruguay. . . Mexique. . SYrIC . Suisse. -25 10e Colonie du Cap. Totaux. . Europe . . . Pays hors d'Europe . . en milliers de tonnes, PRODUCTION TOTALE 15 075 46 824 17 530 17 079 16 355 6 679 6 164 5 638 4735 4 502 3 554 2 672 2 319 | 1 956 1 749 1 688 1 568 1 387 1 332 1 329 870 771 735 684 495 490 333 309 309 EN POUR CENT de la production du monde, en kilomètres carrés ou 400 hectares. SUPERKFICIE TOTALE 9 210 430 5 3°9 985 540 658 2 499 053 314 628 286 589 496 928 131 020 2 415 270 2 189 400 175 859 96 660 173 518 38 340 29 456 631 897 797 7170 994 693 » 33 000 92 575 48 303 716 122 645 00) 65 119 99 600 178 700 1 946 523 41 346 746 333 RAPPORT 18 0 26 2 48 5 Autriche. 367 [ Hongrie. 41 2 26 3 Suède. SL Norvège. 29 SURFACES cultivées en blé exprimées en kilomètres carrés. 1895. | 1885. 173 700 129 195 19 440 10 530 31425 70 065 88 290 138 510 | 106 920 | 117 045 | 116 235 | 19 035 | 18225) 11 745 9 27 510 69 660 104 895 25 192 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Tableau II. — Répartition de la production des céréales par pays et par tête d’habitant. SJ PAYS DE PRODUCTION ô = NOMBRE RÉPARTITION EN CENTIÈMES e classés 2 » 2 : dei 6 | PR NA PE d'habitants de la production totale de céréales à | d'après les quantités de céréales | ,, e «2 Aa Givers pays, 2 par tète d'habitant. à a & F ÿ Le £ | Blé. — Seigle, — Org?. ES ë kilomètre | a x | CR er Eu En En En En = Avoine, — Mais. SALLE CATEUS | x A blé. | seigle.| orge. |avoine,| mais. | ——— me | mms | mme Ram) an UE P.109.|P. 100.|P. 100.|P. 100. | P, 100. | 1 | États-Unis d'Amérique. . .| 1 012 7.5 19.0] 1.0 | 2.0 | 16.0 | 62.0 SUIPRONMANIE EU UTC 795 41,0 SSUMNE EE 1172 4.5 | 43.5 BMIÉDATeMATE TRE RER 768 26.6 TJ 28528227 RES 0 » AL CANAL ER NE 710 2.0 38.0| 1.4 9-3 Ft 40734110 5 | République Argentine . . . 668 1145) 62.8 » » » 37.2 6 | Bulgarie et Roumélie. . . . 593 32.6 54.6| 9.1 | 16.8 5.5 |- 14.0 HART SIC ER ES Eee eee 471 20.0 23.0| 4L.0 9.0 | 22.8 1.2 SAIRETAN CORTE RC NANCE 425 72.0 52.611372 6.1 | 24.0 4.1 (Autriche. 83 | 9 | Autriche-Hongrie . . . . . nie, 87 66:31.030:611 19.211531 15-7 1N1972 LON MURRENLT TE RECU 384 4.6 62.2 » » » 37.8 11 | Empire d'Allemagne . . . . 336 96.7 AO ANS NP T7 » | 12 | Suède et Norvège . . . . . 331 8.8 429125140790 » 13 | Australie . . . . . . . . .| 330 0.4 67:01 = | 1420 | 180 | 110 LAN |PAIGÉTIO NE EN IE 3)4 DA 10 LRIRO TEL 1.9 0.5 A NO ENT) O5e MORE MESA 298 48.0 210106: 9.8 5.3 | 41.6 16 | Turquie dEurTOpe 0 282 34.0 52.9! 19.5 8.9 2,5 19.5 AMPESDATIE PENSION Ne Lette 276 32.0 51.4| 11.2 A9 |R2720 » 197 |MBel TLC ENS EEE TS 244 218.0 82.413483 41N51.0 » » ON EREANISIE RES EEE PAM dise 206 15.0 43.0 » 2e 7 5.6 | 32.5 Ft NE INC MEANS PET RES ES EE 109.0 57.0| 2.2 | 2.7 | 5.6 | 52.5. DATE PyD tee la deteste Cet EEE foi 20 MISES » | 64.3: DOS PHGIMA EME 159 118.0 19.5| 37.2 | 13,2 |: 30.1 » 23 | Grande-Bre:agne et Irlande. 155 126.0 2 0) PONT à 2€ OR ES OM M ED » 2 OTCCOR MEET Re on CIC 152 314.0 59.9 » 14.5 1:89 1R9 LS 0 230) MBETIUNGAI NES EN TE 147 55.0 22.4| 17.0 5.4 2:04109572 20NNC DIRE MP RNERR ITR ee 146 4.4 83.6 » 12.3 » 4.1 DTA ISUISSE ANNE 0e cire 96 71.0 47.911717 6.2 | 28.2 » 28 | Colonie du Cap. . + . … . 68 2.3 100 ?| » » » » 29 alerte rte ete te 54 DH AIMIO0Rr » » » » 30MPIndes Tee MAROC 30 89.0 100 ? » » » » SINION OR QUO ER Re 24 6.0 100 ?! » » » » 32 | Asie-Mineure . . , . . . . » 2.0 100 ? » » » » EMI heal er 0e 200 fi ann 0 lo » 2.0 100 ? » » » » Totaux et moyenaes . 30.0, 17.0 8.0 | 19.0 | 26.0 PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 193 Pour quelques pays dont la statistique quadriennale n’a pu êlre établie, les chiffres ont été empruntés aux travaux si justement esti- més de Jurascheks (Uebersichten der Weltwirlschaft). Les tables de géographie statistique d’Otto Hübner ont fourni les indications suivantes : surfaces Lotales des pays, rapports centésimaux de ces surfaces à la superficie des territoires agricoles (tableau D); nombre d'habitants par kilomètre carré et production de chacune des céréales par tête d’habitant (tableau IN). D’après cette intéressante statistique, l’Europe dont la superficie totale est de 7 p. 100 et la population de 24 à 95 p. 100 de celles du globe, produit plus de 58 p. 100 des céréales récoltées. Si l’on défalque le maïs, elle produit 72 p. 100 des autres céréales (blé, seigle, orge et avoine). Le blé et le seigle sont des céréales européennes par excellence : les pays hors d'Europe récoltent 41 p. 100 de la production totale du froment et 2 p. 100 seulement de celle du seigle. Pour l’avoine, la récolte européenne est double de celle de l’ensemble des autres pays; pour l'orge, elle atteint 5 fois la production du reste du monde. C’est l'inverse que l’on constate pour le maïs, la récolte du conti- nent ne dépassant guère le cinquième de la production, en cette céréale, des régions exotiques (États-Unis d'Amérique). Le tableau If indique pour chacun des 33 pays classés d’après les quantités de céréales produites par tête d’habitant : 4° Le nombre de kilogrammes de céréales récoltés par tête d’ha- bitant ; 9° Le nombre d'habitants par kilomètre carré; 3° La répartition en centièmes de la production totale de céréales dans les divers pays. Enfin le tableau [IT donne pour chaque pays, classé cette fois par ordre alphabétique, afin de faciliter les recherches : 1° La récolte de chacune des cinq céréales exprimée en milliers de tonnes; | 2 Le taux p. 100 de la récolte de chaque pays, rapportée à celle du monde entier ; 3 Le nombre de kilogrammes de chacune des céréales récoltées par tête d’habitant. ANN, SCIENCE AGRON. 98 SÉRIE. — 189$. — 11. 13 LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ANNALES DE 194 « ages | TIC2r | « 1G'86 | 2267 | « IF'LT | 2686 « (9 M 008 ë CT'IF | 226223 |” * * “odomm,p s1om s£rq « 89'2T | 0801 | « GF'29 | 92688 | « 6g'e8 | O8 GT | « LS" LG 102 98 ë c8'8c | 69868 |° * * * * ‘odozngr,p sea « 00 007 | CTL 2€ | « 00°007 | £6£ ar | « 00°Q07 | 30987 | « 00°007 | 106 L£ ë 00001 06 29 Re nor GTI 08 0 9IE « « « « « « « « « 6£& 830 £6T PR) er, VOST * T°Aensntf} « « « « « « SIT c6'0 LIT « « « 88 13°0 ££I CUS RC ce ee C'eTEe, Le! (x oisiun] 9y 0ç‘0 c88 L 60°0 0F CG &8'0 9cT (Te 06°0 (413 GT. | 987 cel + +: * edomeg,p omban], ra « « « « « « « « « « « é Fr'0 668 pp Ces A, L'ALSACE 43 OTIAQ « « « La Gr°0 88 9 01°0 81 LT £T'0 1G 9F &'0 GET D NS ne Te GEST CA) « « « SLT | 06'8 OI8 I 6€ 08'& 91F cg 09° I c6ç LA: FL'0 86 ‘ * * * “e8QAI0N 3e apons ÿ&T | 0C'0 (HS 91 60'0 9€ 68 cg'0 99 6 81°0 FF OIT | 2£°0 £cr DEC OC OS OR LEE TR ET. c 860 89 OFT | 08°Ca | 26907 | 0ÿ 0L°c8 | L18 y £6 OL'FG | ETC OS | £6 (EE PO TON ol 7 AS OS EN OCT Te 91e | 7e OZST 9€ 9r°0 961 16 088 98 £g 9F'0 CA £8& | 0£'8 GRIP Ne SE orne un oï 8 89'°0 06€ £ £0°0 £I 8 cz'0 42 Ca (1 181 gg £a'0 99T Dr RE ET ENALO « « « « « « « « « « « « FC £$1°0 O06F Les OO >: SCIE MCE TETE 28194 « « « « « « « « « a « « Fa cy'0 cog D Ce UT TS A ON PIEO I 6e 08'£ CSI OL IL°0 00€ G 06°0 LT F 0£°0 rad £OT | OL'F à CA PO 1e Me EEE RCE CSORO TT « « « « « « « « « « « « 0£ 08°6 6199 et dE 2 ns CON PARDON « « « SF ce‘0 8£8 T8 090 TIT 6c cL'0 188 LE &&°0 LI 2e (ie) * ‘OpuslO « « « 8 10°0 Fr td4 930 F1 é « « T6 68°0 661 7, DEC ROOMS SORT GET « « « 8F cc'0 868 18 00°6 8297 Le 810 FF 9€ 01'& SIPT |'OPueqiT 0 ouSuJorg-opuer9 ST &&'T COL &OT | 0£'6 CF6 & 98 (4 LS6 9c 08°G FI 8 Cora |MOLS GT SF LCI Semen Rare COTE TT cg TO'T cac L 8a'0 LTI 19 09° € OT 1€ OF'I OF &FT | 09'€ Fiat) ONE OC ON OM ES (far « « « 698 | OF'I 69 888 | 0L'& 00 918 | OS'T 927 uG 81'0 081 LS RS TE TOUE CI 9 £0'0 18 « « « 8 8€'0 09 « « # 88 | 19°0 YIF RME PTE CORP ES Grfe « « « « « « « « « « « « e9 81'0 hrs MA FR * (ap 2IU0109) de 8L £9°0 888 188 | 07'£ LEP 99 ce'T T££ OT £1°0 1G 693 | 00’ DORA ES AS RE ER TE 1] £e LF'0 FLG 45 Ga 0 LOT 66 (M 938 FC 9F°0 LLT Gzg | 09'T ZIOT |‘ ‘ * ‘ergwunoy 30 opve3ng « « « 89 60'T (Ha2 &T 1F°0 08 cg OF'T La 62 cL'0 60G MS ue Se "O0 DISTOT « « « 6ç gc'0 SF& £T 68° 0 Fc « (s « 613 | G£'T 086 De TE D TES PO TeMIEL 9L FL'G CIg £ 89 079 969 8 6G OL'ET | GFGG 92 08'8 18 € Pen ROLL 88 | °° ‘ * ‘ouSuoH-oqorrny « « « « « « « « « « « « è EST 018 SE QUAIUE"E Ra € ‘OINaUTN A1SY 8r& | GL'I 66 « « “ « « F “ * € OF | 008 | 6297 | * ‘(onbrqndoy) ounuosiy 269 | g6°22 | 196PF | 991 | or8a | 2001 | £a 08'8 89 TI OT 00° a srL T6T | 03°08 | 2ILS£T | * (P stuN-syuy4) enbrowuy « « « £6 OF°IT | Ocgy LY OI'£T 687 & GET | O0£'6T | 8Ca 2 LG OFF 2868 |‘ ‘ * (perdu) ouSeworty 8 10'0 L GT £1'°0 cg YLT | OI‘r FoL « « Le (ri eu NE NI) GG A Lie: NET 2 OTIGS T7 CREER ETS ne Re | CERSERNES CESR CERTES | JMS cms CERN | nes nes pme um. | ous encens nn ne IE = A al E BE E tetes IE = À É SMIC] dx L'8 = AOC PE le) EC TH 0e. ll = DO IRIS en =. | ur | = Fate le Here 4 BÉSeNNE S'MEISE CPR 8 52 El renbrquudie o1pao ER TRS 3 Zz|2 3 Ed CRE + 5 au anale E Far a + | F sas UE Erel SE | 685 |88e) #28 | s8S |ÈËe) 225 | e8S SES) SL | ass |Ete) 225 | e2 Ë RQ LE EN REA NT PEL CRE" PO ES RE ER re E DONS sinojonpoid sfed E IE © 5 5 || NTS = 5 5 MT = 5 = ea NES = E E NE ASS E Tr al & S|E Tr al & © |5 DUR HAINE PR |ne SEE _@l| eve | LE sup ul % QUE % RARES ñ | “ GAILLE 4 Re Re a — = — Rd ne LNURASSVT) "SIVN ‘A&NIOAY ‘HPDuo ‘"ATDIAS ‘44 ‘queyiqeu,p 9199 Jed uoryraedex je uorgtodorg — ‘sejeodso sepuezf buro sep 93/09 — ‘JJ] neoqez PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES, 199 I LA PRODUCTION DU BLÉ DANS LE MONDE. Le calendrier des moissons. — Production du blé dans la période quadriennale 1592- 1895. — Consommation du blé en Europe. — Pays d'Europe importateurs. — Pays exportateurs. — Répartition de la production et de la consommation du blé en Europe. — Quantité moyenne de froment que l'Europe doit importer annuellement. — Répartition des importations. Jl n’y a, pour ainsi dire, pas de jour où la moisson n’ait lieu en un point quelconque du globe; de sorte que l’alimentation des mar- chés en blé se fait sans interruption du premier au dernier jour de l’année. Un stalisticien distingué, M. E. Meyer, a dressé récemment, eu s'appuyant sur les documents les plus sûrs, un tableau qui met ce fait important en évidence. J’emprunte au travail de M. E. Meyer le calendrier des moissons; je le fais suivre de la répartition ap- proximalive de la récolte dans les différents mois, élablie en prenant pour base des indications le tableau V, inséré dans le numéro du Journal d'agriculture pratique du 21 juillet dernier, page 83. Décembre. — Chili, République Argentine, Sud de l’Australie. Janvier. — Fin de la récolte en Australie, dans le Chili, dans la République Argentine et en Nouvelle-Zélande. Février. — Égypte supérieure et Indes. Mars. — Égypte et Indes. Avril. — Côtes d'Egypte, Syrie, île de Chypre, Perse, Asie Mineure, Indes, Mexique, Cuba. Mai. — Asie Mineure, Perse, Syrie, Algérie, Asie centrale, Chine moyenne, Japon, Texas, Floride. Juin. — Provinces danubiennes, Hongrie, Turquie et Grèce, Rus- sie du Sud, Italie, Espagne et Portugal, Sud de la France, Californie, Oregon, États-Unis du Sud, Louisiane, Mississipi, Alabama, Géorgie, Carolines du Nord et du Sud, Tennessee, Virginie, Kentucky, Kansas, Arkansas, Utah, Colorado, Missouri. Juillet. — Allemagne, Autriche-Hongrie, Suisse, France, Italie, Russie, Pologne, Angleterre (Sud-Ouest et moyenne), Oregon, Min- 196 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nesota, Nebraska, Wisconsin, Iowa, Illinois, Indiana, Michigan, Ghio, New-York, Nouvelle-Angleterre, Virginie, Canada supérieur. Août. — Allemagne, France, Belgique, Pays-Bas, Grande-Bre- tagne, Danemark, Pologne, Territoires de la baie d'Hudson, bas Canada, Colombie anglaise, Manitoba. Septembre. — Écosse, Suède et Norvège, Nord de la Russie. Octobre. — Écosse. Novembre. — Nord de l'Australie, Pérou, Afrique du Sud. Les quantités récoltées se répartissent comme suit : TONNES. EN CENTIÈMES. Décembre etrianvien: +. #0 3 009 000 4.4 FÉVrIERtELAMATSS RUE 6 700 000 9.9 ANNIIMe UM ALU. De de Aro 2 000 000 2.9 TUE NE EEE 42 000 000 62.0 AOULENPE ATP MERE 2 2 ET MEET 12 000 000 TNT Septembre, octobre, novembre. . 2 100 000 3.1 Récolte moyenne totale. . . . . 67 S00 000 100.0 Ces chiffres donnent une idée de la marche des récoltes, mais il ne faut pas leur attribuer une valeur absolue, les différences de cii- mat d’un pays à l’autre et d’une région d’un même pays à une autre rendant impossible une répartition rigoureuse de la récolte, par mo's. La production, pour ainsi dire ininterrompue, du blé à la surface du globe jointe aux progrès de la navigation et à l’extension des voies ferrées met désormais l’humanité à labri des famines qui la déei- maient. Un déficit de récolte dans un pays peut être rapidement comblé par la production d’autres contrées, et l’on n’a plus à redou- ter, du moins pour les nations civilisées, les effroyables famines que l’histoire a enregistrées. Après avoir jeté un coup d'œil sur la production des cinq grandes céréales sur le globe, étudions de plus près la production et la con- sommation du blé. Le tableau [IV reproduit la statistique dressée par Beerbohm ; il indique pour chacune des quatre années qui ont servi à établir le tableau V, la récolte du blé des années 1892 à 1895 dans tous les pays producteurs des cinq parties du monde. PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 197 Tableau IV. — Récolte du blé, de 4892 à 1895, dans les principaux pays de production des cinq parties du monde (en milliers de tonnes). es D OT Re 02 19 12 R ©2 à © 19 — PAYS DE PRODUCTION. I. Europe. Russie d'Europe (y compris la Pologne et le Caucase). Krance Hongrie . UNE LL SNS PERRET Empire d'Allemagne Espagne . . Roumauie SAN RTS Grande-Bretagne et Irlande. Autriche-Hongrie, BHGATIC MES Turquie d'Europe. . Belgique . Serbie . Grèce . Portugal . . Ge SRE Hollande. DUINROR vestes Danemark . . . - Suède et Norvège , . . . Ensemble de l'Europe. II. Amérique. États-Unis . . . Argentine. . . . Ganadie ee (TRIO ETES ERA MEXIQUE US LEURS DE Me III. Asie. Indes . 0: Asie Mineure . , . Perses Syrie . IV. Afrique. Algérie. Egypte. . Tuuis . NE Colonie du Cap . V. Australie. . Pays hors d'Europe. Totaux. . 1892. PAL RU VOUS VIe o0QMS ur e + pt Pi ND 9 O1 © 7” © op CT D M 1 = On 3 O © = Qr A ot: O2 Co dx =] 09 1 D 19 OO à © © S + ns bn 1 a © ss 37 394,8 [341 617,3 979,8 489,9 326,6 544,3 239,5 102,3 108,9 979,8 98 291,9 . 65616,7 1893. 1894. 1895 11572,3 121083,9 10821%0 R568,2 . 9840,5: 9209,9 MOSS SU E147 7 44471 S549 0 3211.57 -3045,2 2 982,9 3:004,6 .2786,9 2286,1 2830,5 2830,5 DEBAT DE 7I6S RAT LPO PER ENIT OS ES? 1154,0 1284,6 1 099,5 925,3 979,8 1251,9 870,9 62,0 979,8 457,2 500,8 590,8 24075 02 Er 27120 217577 196,0 163,3 152,4 185,1 152,4 152,4 130,6 PES 119,8 141,5 130,6 121,9 108,9 119,8 98,0 98,0 111,8 39487,2 41988,8 40 606,3 12-10, 50 13034-60013 #09 24286. GS OMR 250 113068 368 119750 SA GON7 489,9 359,2 370, 1 304,8 326,6 326,6 174,2 21TAT 21202 7272,1: 6880,2 6945,5 870,9 762,0 870,9 435,4 489,9 254,3 326,6 D 2) 212,2 402,8 244,3 489,9 122 YEN) 2H2a2 108,9 163,3 152,4 119,7 180,6 130,6 1110,4 903,6 685,8 27 847,4 28 086,9 .27 553,4 67334,6 70075,7 68159.1 193 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Tableau V. — Récolte du blé dans le monde (moyenne des 4 années 1892-1895). BA ÉCARTS 2 E PROPOR- . . a MILLIERS des récoltes, RÉCOLTE E RIDE le chiffre moyen | minimum | = PAYS DE PRODUCTION. de étant égal à 100. est [We centé- a à la É tonnes. Récolte | Récolte récolte = simale, maxi. [maximum | mum, comme 1. | | | 1| États-Unis d'Amérique . 13.111110220.2 109 {y | Russie, Pologne et Caucase .| 10 829 16.0 1? 120 3| France . 8574 | 12.7 109 1: 4| Indes. . ie 6 679 9.8 109 (e 5 Autriche-Hongrie . 5 242 TM 104 1e g| Italie. SNA 3 214 4.7 110 He 7| Empire d'Allemagne . 2 983 4.4 106 1e g| Espagne. 2 449 3.6 116 11 | 9| Argentine . 1 679 DE 133 1 | 101 Roumanie. Re 1 532 256) 117 {. | 11l Grande-Bretagne et Irlande .| 1 418 Di 116 1. 12| Canada. 1 347 2.0 109 1. | 13! Bulgarie. : 1 072 1.6 117 1.5 14| Turquie d'Europe . 925 1.36 118 1.44 15! Australie . 920 1295 121 1.61 16| Asie Mineure. 870 1.28 112 1.29 17| Belgique 509 0.75 113 1.25 18| Algérie . 495 0.73 110 1.36 19! Perse, . k 190 0.72 il 1.25 DCI 0 414 0.61 118 1.36 21| Mexique. . 305 0.45 107 1.24 29| Syrie. 299 0.44 109 1.20 93| Égypte . RAD 265 0.39 103 1.14 DA ISCRDIER.- PE ME UE 253 0.37 112 1.50 25| Grèce, . 199 0.29 110 1.36 26| Uruguay. . 193 0.28 iii 2.0? |27| Portugal 166 0.24 til La 28| Hollande . 147 0.22 109 1.20 1H99)MNSUISSe PET 139 DA 117 1.34 30| Tunisie. : 132 0.21 124 157 | 31| Colonie du Cap. 192 0.18 107 1.20 | 32] Danemark. : 120 0.15 110 1.22 | 33| Suède et Norvège. 98 0.14 122 1.56 Totaux et moyennes .| 67 796 | 100.00 103 .- 1° Europe . 2 39 869 28.5 105 LE Hors d'Europe . ME PAT ne PA 101.1 1: EN « PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 199 Le tableau V nous renseigne sur les points suivants : 1° Production moyenne des années 1892 à 1895 ; 2 Proportion centésimale afférente à chaque pays producteur dans l’ensemble des récoltes ; 3° Écarts entre les récoltes maxima et minima, FE rapport à la récolte moyenne des quatre années ; 4 Enfin, écarts abso!us entre lé récoltes maxima et minima de chaque pays. La comparaison de tous ces nombres donne lieu à bien des remar- ques intéressantes ; je me bornerai à signaler les plus importantes, en y joignant quelques observations supplémentaires sur le mouve- ment de la production du blé dans le monde entier. La récolte totale moyenne en blé dans les 33 pays de production inscrits dans ces tableaux a été, de 1892 à 1895, de 677 960 000 quintaux métriques. Le Japon ne figure pas dans le relevé de Beer- bohm ; mais celte lacune ne modifie pas sensiblement l’ensemble des évaluations : en effet, d’après Jurascheks, la a de ce pays peut être évaluée, de 1892 à 1896, à peine de 2 à 3 p. 100 de la production totale du globe. Un simple coup d’œil sur le tableau V montre que trois pays tien- nent la tête dans la production du blé: les États-Unis, la Russie et la France. Leur situation, à cet égard, est tellement prépondérante que leurs productions réunies égalent presque celle de tous les au- tres pays du monde, pris ensemble. Les États-Unis, la Russie et la France produisent 33 120 000 tonnes de froment, le reste du globe en récolte 34 656 000. La deuxième colonne donne la répartition centésimale de la ré- colte totale entre les divers pays. Les nombres des troisième et qua- trième colonnes expriment la comparaison, pour chaque pays, des récoltes maxima et minima à la récolte moyenne de la période qua- driennale. Ainsi le nombre 88 (3° colonne, France) signifie que la récolte la plus faible (1893, voir tableau IV) n’a été que les 88 cen- tièmes de la récolte moyenne et le nombre 109 indique que la meilleure récolte (1894) a excédé de 9 p. 100 la récolte moyenne. Les écarts ont donc été, pour la période envisagée, de 12 p. 100 en dessous et de 9 p. 100 en dessus de la moyenne quadriennale. 200 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. L'écart absolu entre les récoltes maxima et minima est inscrit dans la 9° colonne du tableau V. Le nombre 1.24 signifie que, entre ces deux récoltes, il y a eu un écart absolu de 24 p. 100 et ainsi de suile pour les autres pays. Les moyennes inscrites au bas des colonnes 3, 4 et 5 du tableau V sont très intéressantes, elles montrent que la récolte la plus faible (1892) n’est inférieure que de 3.4 p. 100 à la production moyenne des quatre années, et que l'écart absolu n’est que de 7 p. 100. Ainsi donc, malgré les conditions, si différentes d’un point du globe à l’autre, de sols, de climats, d’intempéries, les récoltes n’ont varié que de 3 1/2 p. 100 en dessus ou en dessous de la moyenne. La conséquence de ces constatations est que, s’il y a sur certains points, à un moment donné, une insuflisance de récoltes, on n’a plus, grâce aux compensalions qui se produisent et aux réserves de grains qu’elles permettent d’une année à l’autre, à redouter la famine pour l’ensemble des pays civilisés. | Depuis dix ans, la récolle en blé du monde s’est accrue sensible- ment : la moyenne quadriennale 1892-1895 accuse un excédent d’en- viron 6 millions de tonnes sur la période de 1887-1891. Les relevés du tableau V nous montrent que l'Europe a produit (1892-1895) 99 p. 100 de la récolte du monde entier. Malgré cela, la récolte européenne ne suffit pas à l’alimentation de ses 380 millions d’habi- tants (24 p. 100 de la population du globe); de là, nécessité de l'importation du blé des pays d'outre-mer qu'il nous faut étudier, en regard de la consommalion des différentes nations. Becrbohm a évalué à près de 44 millions de tonnes (43 980 000) les quantités de blé que l’Europe a consommées, dans l’année 1892- 1893; il estime à 248 000 tonnes l'augmentation annuelle de la consommation européenne. D’après cela, l'Europe aurait consommé, année moyenne de 1892-1895, 44 832 000 tonnes de blé, dont le tableau VI donne la répartition par pays et par tête d’'habitant. Dans celle même année la production indigène ne se serait élevée qu’à 39 869 000 tonnes, d’où une importation nécessaire de cinq millions de tonnes environ. PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 201 Tableau VI. — Consommation du blé en Europe (moyennes de 1892 à 1895). MILLIERS PAR TÊTE PAYS. de touues. d’habitant. kilogr BAC 7 ET à le 9 471 246 Grande-Bretagne et Irlande . . . . . 6 532 165 Russie PL ARR EE. 5: 6 532 56 AULNICHE-HONENIE.. LR RE 5 008 ox AUS AITGRTA CE Pers de ne Me NE UT 4 137 19 MNT RSR SRE 2 US PE 329119 125 Espagneret Portugal. «2700 3 102 140 Belgique. . : 1 524 238 ROMA IC 27 CONCURRENTS 925 171 Bulgarie. NC 870 264 Lurauie-dEnrope 5e «00. "pipe, 7162 123 MONANAE RARE PE D RER 600 125 SUR CORRE LT METRE ARE 490 163 Danemark, Suède et Norvège. . . . . 490 52 GT COPA ee Re ra 21e 124 DEEE SET CU 0 feu Puit 218 95 Total et moyenne. . 14 852 118 Il résulterait de ces chiffres que : La consommation élant de. . . . . 44 S52 milliers de tonncs. Larécolte siélevant à... 1: 39 869 — La’ différence est de . -… . . . : : 4 983 milliers de tonnes. Cette différence représente les quantités de blé importées des pays exotiques, soit en nombre rond 5 millions de tonnes, ce qui corres- pond à 11.95 p. 100 de la consommation européenne. Le tableau précédent montre que la consommation par tête d’ha- bilant va, en décroissant, de la Bulgarie (264 kilogr.) aux États scandinaves (92 kilogr.). Le Français mange cinq fois plus de pain de froment que le Danois ct trois fois plus que l'Allemand. L’Austro- Hongrois, le Turc, le Grec, le Hollandais et l'Italien consomment un poids de blé (116 à 195 kilogr.) voisin de la moyenne. Des rappro- chements entre la production et la consommation, il résulte que le Royaume-Uni et les Pays-Bas consomment quatre fois plus de blé qu'ils n’en récoltent et doivent, par conséquent, demander à l’im- portation les trois quarts de leur alimentation. Si l’on excepte l’Autriche-Hongrie où, depuis quelques années, la production excède Ia consommalion d'environ 4 p. 100, la France 202 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. occupe, en Europe, le premier rang parmi les pays importateurs, par la faiblesse de ses importations qui r’atteignent pas 10 p. 100 de la quantité de blé nécessaire à l’alimentation de ses habitants. Pour apprécier la situation respective des différentes nations européennes, jetons un coup d'œil sur leur répartition en pays importateurs et en pays exportateurs. Les chiffres du tableau VIT donnent à ce sujet une idée précise : Tableau VII. - 1° groupe. — Pays importateurs. IMPORTA-= IMPOR1A- PROPOR- TIONS POPULATION TION TION nécessaires à nécessaire RE te KOMS DES PAYS. en 1ot par tête re ; À milliers millions Œhabitant | ‘"POrtation de d'habitants. en l’alimen- tonnes. kilogr. tation. Grande-Bretagne et Irlande . . 5 114 39.6 129 75 ANEMAENE REA Re 1 154 5270 DENON SAS DeICIQUES RARE RENE ES 1 015 : 6.4 153 67 RrANCE AE er nee 897 38.5 23 9.4 ALICE ES OC TNT 705 318 22 LG: Espagne et Portugal . . . . AST DR 22 LOT PAYSABAS RSS CPIAE RE 453 4.8 94 TES SUISSE A ER NT ee PR ne Jo 3.0 117 TL Danemark, Norvège et Suède . UE 9.2 30 55.7 GRÉCE RL RENTE METRE 73 2 33 26,36 Totaux et moyennes . . 10 521 209.5 JÛ0EE 34.5 2° groupe. — Pays exportateurs. BLÉ RAPPORT disponible POPULATION EXCÉDENT centésimal pour 1 de l'exportation 22 disponible j'exportation NOMS DES PAYS, TE A à la .en millions par tête La ruilliers conso mma- de d'habitants. d'habitant. tion tonnes. par tête. p. 100. Russie, Pologne, Gaucase . . 4 297 115.9 66 Roumanie. mom le rot .ade 607 .4 112 66 Autriche-Hongrie. . . . . . 234 43.2 4.3 BTP AT PES ET RME TAN TERRE 202 3.3 Gi 292 Turquie d'Europe. . : . : . 163 6.2 26 LE ES DELDIÉ MS EU EN RERECER ET" 32 AE: 15 13.8 Totaux et moyennes . . D 258 176.4 31.4 38.7 Dans le premier groupe, la production indigène s'élève, par tête d'habitant, à 95*,5, tandis que la consommation moyenne est de PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 203 145*6,7. Dans le groupe IF, à l'inverse, la consommation n’est que de 81 kilogr. par tête, tandis que la production s'élève à 1192 kilogr. Les relevés de ce tableau permeltent d’inléressantes comparaisons que nous allons mettre en relief. La Grande-Bretagne, l'Irlande, la Hollande, la Suisse, la Belgique et les États scandinaves sont les pays où le rapport de l'importation à la consommation est, de beaucoup, le plus élevé, allant de 78 p. 100 (Grande-Bretagne) à 56 p. 100 (Danemark). D'autre part, la Russie et la Roumanie sont les régions dont la production excède le plus les besoins de la consommation : elles exportent 66 p. 100 de leur production. Les provinces danubiennes et la presqu'île des Balkans, la Grèce exceplée qui est importatrice, exportent moins du quart de leur production, 15.8 à 23.1 p. 100. La Russie et les pays de l'Europe méridionale (Autriche-Hongrie mise à part), ont une production moyenne de 100,8 de blé par tête d’habilant, tandis que dans les autres pays d'Europe, loujours en exceplant l’Autriche-fongrie qui suffit amplement à son alimentation, la production, comme nous l'avons vu, n’atteint que 95*8,5 par tête. Suivant qu'on range les pays d'Europe d’après leur production ou suivant leur consommation en blé, par tête d’habitant, on obtient des classements différents indiqués par le tableau VIE. Tableau VIII. Classement des pays d'après la consommalion par téte d'habitant. 1 Bulgarie, . 264 kilogr. 2 France . 246 — 3 Belgique. . 238 — ANROUMANIE EI PPAEEMEEUNAITE 171 — > Grande-Bretagne et Irlande . . . 165 — DAS US SES RS ARTE te 163 — 7 Espagne et Portugal. 140 — 8 Italie. 125) — 9 Hollande , ne 125, — L'ONGTÈCE PME EUMELENN Sr 124 — 11 Turquie d'Europe. . . 123, — 12 Autriche-Hongrie . 116 — 13 Serbe ae 95 — LAAAÎTeMaAENeEMMEMN OUT. YEN. AM SN OR HOEROSSIERR PT RNRNR 2e 2 56 — 16 Danemark, Suède et Norvège. . . 52 — 204 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Classement des pays d'après la production ‘ en blé par téle d'habilant. L'Bnlganie. ir RES 2 3295 kilogr. D HROUMADIC ANT EME RE ERUTRE 283 — 3 ÉTANCE SF NET ENRRee 92923 — LANDULOINENONEUTODE NES AT ER 149 — 9 AULTICHE-HONETIE ER NC 1j 6 Espagne et Portugal. : : . … : 118 — 1. SOLDION PEL S nier 110 — STLALE SA RATS RU EEE ER 103 — DARUSSIE Re NE TS EEE 23 — l'O Grèce CPE NA EAEZME 91 — IL: Deloique et Fete 19 — LAS AIMANT SR 57 — L'ANSUISSC NE MEN EDS ET EE Den 46 — {4 Grande-Bretagne et Irlande . 36 — LomHOl ane EEE TEEN Er 31 — 16 Danemark, Suède et Norvège. . 22 — La production moyenne est de 103 à 104 kilogr. par tête d’habi- tant. Les huit pays qui occupent la tête du tableau (Bulgarie à Italie) atteignent ou dépassent cette moyenne. Seule, parmi les pays méri- dionaux, la Grèce a une production en blé inférieure à cette moyenne. Le classement des pays européens, d’après le chiflre de leur récolte de froment par tête d’habitant, diffère essentiellement de leur classement d’après la consommation. Seuls, la Bulgarie et les pays scandinaves conservent le même rang dans les deux classements, l’un en tête, l’autre en queue. Les plus grands écarts entre la production et la consommation (en faveur de cette dernière) sont fournis : par la Belgique, la Grande- Bretagne et la Suisse. Les Belges, avec la faible production de 79 kilogr. par tête, ont une consommation de 238 kilogr., voisine de celle de la France (246 kilogr.) ; l’Angleterre et la Suisse, avec leur minime production, consomment 165 et 163 kilogr. par têle. Il est intéressant de constater que l'Allemagne, l'Italie et la pénin- sule ibérique présentent à peu près le même écart (22 à 23 kilogr..), par tête d’habitant, entre la production et la consommation (en 1. Le classement est obtenu, pour les pays importateurs, en retranchant l'impor- tation de la consommation ; pour les pays exportateurs, en ajoutant l'exportation à la consommation. PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 209 faveur de cette dernière). La quantité de blé à importer pour cou- vrir les besoins de la consommation de ces pays, pris ensemble, égale à peu près la récolte de l'Allemagne et de l’ftalie réunies. La situation de la Grande-Bretagne est des plus intéressantes à noter: d’une part, l'importation du blé en Angleterre est presque égale à celle de tous les autres pays d'Europe importateurs et voisine de la récolte de l’Autriche-Hongrie; de l’autre, elle est sensible- ment égale à l'exportation de l’ensemble des autres pays exportateurs d'Europe. Il résulte de ces rapprochements, que si l'Angleterre demandait aux pays hors d'Europe tout le blé nécessaire pour com- pléter son alimentation en pain, l’Europe continentale pourrait suffire aux exigences de sa propre consommation, sans faire appel aux pays d'outre-mer. : En résumé, actuellement l’Europe (Angleterre comprise) a besoin d’une importation annuelle moyenne de 5 millions de tonnes de fro- ment, ce qui correspond à 17 ou 18 p. 100 de la production totale des pays hors d'Europe. Le tableau IX permet l'évaluation approximative des disponibilités des pays d'outre-mer, d’après le nombre de leurs habitants. Tableau IX. PAYS HORS P'EUROPE. I NOMS DES PAYS. Production Production en Population. da milliers de tonnes. DAALELE : kilogr. 1 République Argentine. . 1 679 4.0 420 2rbanada MT Le 1 347 5 0 369 JAUMUEU IAA MAN EE 193 0.8 23 HÉAUSILA ER Ret Lu 920 42 219 DAEtals-Dnis ie 2 13 717 1948 191 (HENRI 414 3.4 129 ARÈNES Let Ar et 495 4.4 113 BARS pd A has à 132 1.9 88 9kColonie du Cap." à . 122 1.8 68 JOMPENSe MARCEL Le 490 JO 54 MAÉ ENDe er ere 265 De 7 35 A I GRR RE PRES 6 679 22) Lau 30 DAMEXIQUES SE An 306 1206 20 14 Asie Mineure. . . . . 870 ? ? AS Tr EU TT MRTE RE 299 ? ? RON EE 210927 343.4 1 248 206 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Si l’on admet, comme base de comparaison, le chiffre de 118 ki- logr. de blé par tête, pour la consommation indigène, on voit que la République Argentine, le Canada, l'Australie, les États-Unis et le Chili ont des quantités de blé disponibles assez considérables, mais très différentes d’une nation à l’autre. La République Argentine et les États-Unis surtout ont, à ce point de vue, une importance très supérieure à celle des autres pays d’outre- mer : les Indes, malgré le chiffre absolu de leur production et bien que leurs habitants vivent principalement de riz, n’ont, par tête, qu’une récolte de blé très faible (30 kilogr.) qui ne permet pas une large exportation. M. C. Beerbohm évaluant à 150 kilogr., par tête, la consommation en blé de l’Américain, celle des pays importateurs étant, pour la France de 246 kilogr. et pour l’Angleterre de 165 ki- logr., estime aux quantités suivantes les exportations que les États- Unis ont pu faire de 1892 à 1895: En 802 NE 4 17S 000 tonnes métriques. IPN SE 1 566 000 — 18040 ve 3 090 000 — LOST NUE 2 654 000 — Durant celte période, la Russie seule à fourni aux autres pays de l'Europe 17 188 000 tonnes de blé. On voit par là que la Russie est entrée dans une proportion bien plus large que les États-Unis dans l’approvisionnement en blé des nations européennes. Cette vue d'ensemble sur la production du blé dans le monde et sur les relations de la production et de la consommation en Europe, nous a paru devoir précéder l’étude détaillée que nous nous propo- sons de faire de la situation particulièrement favorisée de la France, au double point de vue cultural et économique, en ce qui regarde la preriière des céréales alimentaires. PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 207 JII LA PRODUCTION DU BLÉ EN FRANCE La récolte de 1898. — Divergences dans les évaluations provisoires de cette récolte. — La récolte d'une bonne année (1896). — Sa répartition sur le territoire français. — Conséquences qui en découlent. — La culture du blé en sol pauvre et les engrais minéraux, — Expériences du Parc des Princes. Le coup d'œil général que nous venons de jeter sur la production des céréales dans le monde a mis en relief la place exceptionnelle qu'occupe la France parmi les pays continentaux producteurs de blé. Dans aucun pays d'Europe, la production de froment, envi- sagée sous ses divers aspects, n’a une importance plus considérable que dans le nôtre, si tant est qu’elle en ait une aussi grande. Di- verses conditions, spéciales à la France, font de la culture du blé le pivot de son agriculture et l’une des bases essentielles de la pros- périté nationale. La France, en effet, est à la fois le pays où, par tête d'habitant (la Bulgarie exceptée), l’on consomme le plus de blé et celui où les emblavures occupent, proportionnellement à la superficie du terri- toire, la surface la plus étendue. Enfin son climat et son sol se prêtent, presque sur tous les points, à la culture productive du fro- ment, d’où 1l résulte que le plus léger effort permettrait à la pro- duction indigène de suffire régulièrement à la consommation. L'ensemble des besoins de la population française, y compris les quantités de semence nécessaires à l’emblavure des 7 millions d'hectares (nombre rond) consacrés annuellement au froment, s’é- lève environ à 92 millions de quintaux métriques. Si l’on admet les évaluations provisoires du ministère de l’agricullure pour la ré- colte de 1898 (101 millions de quintaux ou 131 millions d’hecto- litres), il y aurait un excédent disponible de quelques millions de quintaux. La statistique du Journal des halles el marchés n’estime la récolte de 1898 qu'à 123 millions d’hectolitres. En revanche, une troisième statistique, celle de l’Associalion française de lu Meune- 208 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE, rie, porte à 140 millions d’hectolitres la récolte de cette année. Le chiffre des surfaces emblavées en 1897 était, d’après le ministère de l’agriculture, de 6 862680 hectares ; il s’élève, suivant PAsso- ciation de la meunerie, à 7 129 470 hectares, en excédent sur le chiffre officiel de 267 000 hectares. Les rendements moyens accusés par la statistique du ministère sont de 19",09 ou 141,67 à l’hec- tare ; ceux de l'Association 191,79 et 151,44. Tous ces chiffres, il est vrai, sont provisoires, mais les divergences qu’ils présentent permettent cependant deux conclusions : la première, c’est que la récolte, ainsi qu'on le prévoyait, est une des meilleures du siècle ; la seconde, c’est qu’il y a bien à faire encore pour arriver à des résultats statistiques dignes de toute confiance. Nous laisserons de côté pour l'instant les stalistiques provisoires de la récolte de cette année ; il nous paraît préférable, pour étayer les considérations gé- pérales que nous allons présenter sur la production du blé en France, de prendre pour base les chiffres définiufs publiés par le ministère de l’agriculture pour la récolte de 1896, très bonne an- née aussi, où la production du froment a atteint en France près de 120 millions d’hectolitres ou de 93 millions de quintaux, ce qui correspond à un rendement de 17,42 ou de 131*,42 à l’hectare. S'il est une vérité économique incontestable, c’est la nécessité pour les pays conlinentaux, lorsque les conditions générales où la nature les a placés le permettent, comme c’est le cas de la France, d'arriver à assurer, en tout temps, l'alimentation de leur popula- tion par la production indigène, ne serait-ce que pour se mettre à l'abri des fluctuations brusques du marché étranger, dont les pre- miers mois de l’année 1898 ont offert en Amérique un si scanda- leux exemple. Les agronomes et les économistes ne sauraient donc faire trop d’efforts pour aider, par leurs exemples et par leurs con- seils, les cultivateurs français à atteindre cet objectif dans le délai le plus bref possible. La connaissance, aussi exacte que le permet- tent les données statistiques, de la situation de la France au point de vue de la production et de la consommation du froment, est le point de départ nécessaire de l’étude des moyens propres à réaliser le faible accroissement de rendement qui rendra notre pays indé- p2ndant, pour son alimentation, du marché étranger. DE a PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 209 Nous allons essayer d’en présenter un lableau succinct, mais précis. Nous établirons d’abord quelles ont été, dans la période de 1892 à 1895, à laquelle se rapportent les données résumées dans notre article du 15 août 1898, les quantités de froment récoltées, impor- tées el consommées. La récolte française s’est élevée, pour ces quatre années, à 347 370 000 quintaux métriques. Les importations nettes (exportations déduites) ont été de 22 390 000 quintaux métriques ‘. Au total, les quantités livrées à la consommation ont donc été de 309 760 000 quintaux métriques, pour la période 1892 à 1895. D’après cela, dans celte période, la récolte moyenne annuelle a CENSURE TR ARE) Te à «80 642 0001 L’importalion nette annuelle de. . . . . . . . 5 297 500 La consommation annuelle aurait donc été de . . 92459 5004 Le rapport des importations à la récolte moyenne est de 6.443 p. 100. Il faut noter qu’en 1895 la France, grâce à la récolte exceplion- nelle de 1894 (97 840 0001) à été exporlalrice de 524000 quin- taux métriques de blé, quantité faible il est vrai, mais qui montre combien nous sommes voisins du moment où, comme l’Autriche- Hongrie, notre pays pourrait passer de la catégorie des pays impor- lateurs au nombre des nations exportatrices. Répartie sur une population de 38 900 000 habitants, la con- sommation de 80 395 000 quintaux métriques représente par lête moyenne, enfants compris, 209 kilugr. de blé. Si l’on prend comme chiffre moyen du blutage 65 p. 100, ces 209 kilogr. de grain cor- respondent à 136 kilogr. de farine ; 100 kilogr. de farine donnant 130 kilogr. de pain, la quantité de pain consommée par année et {. Les données relatives aux quantités de blé importées ou exportées ont été éta- blies en transformant les farines en blé. Les importations nettes expriment les quan- Lités importées, défalcation faite des quantités de blé ou de farine exportées, 2, Dont il faut défalquer environ 12 millions de quintaux pour la semence. Reste pour l'alimentation 80 395 000 quintaux métriques. ANN. SCIENCE AGRON,. — 2° SÉRIE. — 189$. — 1x1. 14 210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. par tête d'habitant serait d'environ 177 kilogr., soit 0,485 par jour et par tête : cette évaluation doit peu différer de la réalité, qui est cependant trop élevée sans doute, les quantités de farine con- sommées sous d’autres formes que le pain n’en étant pas déduites. Nous avons vu plus haut que l’importation moyenne a été de 9600 (00 Guintaux, ce qui revient à dire qu’un accroissement de pareille quantité dans la production indigène suffirait pour nous affranchir de l'importation étrangère. La culture du blé s'étendant sur 7 millions d'hectares , il s’agit donc d'élever régulièrement le rendement moyen de l’hectare d'environ 80 kilogr., soit d’un peu plus d’un hectolitre. Or, en 1898, le rendement moyen a dépassé de près de 2 hectolitres celui des dernières bonnes années de ré- colle, ainsi que le montrent les chiffres suivants : Rendement à l'hectare en 1894. . . . . . . . 78202 _ — UC NT ER ER Pur — _- RL TONER Rem (Tue ee == 108 HP ONCE Des 19 ,09 Après ces indications approchées sur la consommation française, il nous faut examiner d’un peu plus près que nous ne l'avons fail Jusqu'ici les conditions générales de la production dans une bonne année. Nous prendrons pour exemple la récolte de 1896. Les emblavures couvrent 13 p. 100 de la surface totale de la France qui produit 12.7 p. 100 de la récole en froment du monde entier. Le rendement moyen a été de 121,95 à l’hectare (de 1892 à 1895), il a atteint 151%",42 en 1896 et serait voisin de 15 quintaux métriques cette année, d’après les évaluations provisoires de la der- nière récolle. Bien que le blé soit, fort heureusement pour l'humanité, une des plantes qui s’accommodent le mieux des sols et des climats les plus divers, les rendements qu'il fournit différent néanmoins très nola- blement dans les diverses contrées, et, dans un même pays, d’une région à l’autre. En France, les rendements moyens à l’hectare peu- veat varier, dans une bonne année, d’un département à l’autre, dans le rapport de T à 5, ainsi que je vais le montrer. Si nous je- PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 211 tons un coup d'œil sur la répartition de la récolte du blé en 1896, nous constatons un certain nombre de faits d’un grand intérêt. La production moyenne la plus faible a été de 51,29 (6,76) et 91,27 dans deux départements (Gard et Var). Le maximum de ren- dement a élé atteint dans le département du Nord, 241,5, la moyenne générale de la France ayant été, comme nous l’avons dit, de 131%,42. D'après le chiffre moyen des rendements de l’année 1896, on peut diviser les départements français en quatre groupes : PRODUCTION MOYENNE NOMBRE SURFACES RAPPORTS à de emblavées centésimaux l'hectare. départements, en hectares. des emblavures, p. 100 5 à 10 quintaux'. . 14 744 000 10.8 OEM ENNE REEOE 27 1 950 000 28.2 OA tr 28 2 491 000 36.2 15 et au-dessus‘ . . 18 1 710 000 24,8 Total. its 87 6 895 000 100.0 C’est la région méridionale de la France qui donne, on le voit, les rendements les plus faibles. D’après les évaluations provisoires du ministère pour 1898, la répartition de la production serait un peu différente ; elle donnerait le classement suivant : 20 départements auraient produit de 5 à {0 quintaux. 9 a = 10 à 12 — 30 = = LAS — 28 — — 15 à 20 _ 1. 1° groupe. — Basses-Alpes, Alpes-Maritimes, Ardèche, Bouches-du-Rhône, Corse, Cantal, Charentes, Gard, Gers, Lot, Lozère, Hautes-Pyrénées, Var, Vautluse. 2, 2€ groupe. — Ain, Hautes-Alpes, Ariège. Aveyron, Corrèze, Côte-d'Or, Creuse, Dordogne, Gironde, Hérault, Jura, Landes, Loire, Lot-et-Garonne, Manche, Haute- Marne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Morbihan, Basses-Pyrénées, Sarthe, Savoie, Haute- Savoie, Tarn, Tarn-et-Garonne, Haute-Vienne, Vosges. 3. 3° groupe. — Allier, Aube, Aude, Calvados, Charente-Inférieure, Cher, Doubs, Finistère, Haute-Garonne, Ille et-Visaine, Indre, Indre-et-Loire, Isère, Haute-Loire, Maine-et-Loire, Marne, Mayenne, Nièvre, Orne, Puy-de-Dôme, Belfort, Rhôae, Saône- et-Loire, Haute-Saône, Vendée, Vienne, Yonne, Seine-Inférieure. 4. 4° groupe. — Aisne, Ardennes, Côtes-du-Nord, Drôme, Eure, Eure-et-Loir, Loir-et-Cher, Loiret, Nord, Oise, Pas-de-Calais, Pyrénées-Orientales, Seine, Seine- Inférieure, Seine-et-Marne, Seine-et-Oise, Deux-Sèvres, Somme, 212 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On voit qu’en 1896, le quart du territoire emblavé a produit de 15 à 20 quintaux; un peu plus du quart, de 10 à 12 quintaux ; en- fin, un dixième seulement du sol emblavé a donné moins de 10 quin- taux. Il semblerait, d’après cela, que le premier progrès à réaliser consisterail à amener les cultivateurs d’un certain nombre de dé- parlements à substituer, dans la plus large mesure possible, à la culture du blé, celle d’autres végétaux et notamment à transformer en prairies et herbages et, dans certains cas, en cultures arbuslives, les parties du territoire où la production du froment est trop faible pour donner des profits. De prime abord, ces constatations parais- sent justifier l'opinion, fréquemment émise par des hommes auto- risés, qu'il y aurait lieu d'abandonner la culture du blé là où la récolle est inférieure à 10 quintaux à l’hectare, ces rendements n'étant que très rarement rémunérateurs. Dans les points du ter- riloire où les conditions climatériques sont tout à fait défavorables à la culture des céréales, cette conclusion pourrait être soutenue avec raison, ainsi que dans ceux où la nature physique du sol ne se prête pas à cette récolte. La question vaut d’être examinée de près. Le prix moyen du blé, dans la bonne année 1896, prise pour base de cette discussion, a été pour la France entière de 18 fr. 53 c. le quintal. Dans le Gard et dans le Var, qui n’ont produit que 5 quintaux métriques 1/4, le prix des 100 kilogr. s’est, il est vrai, élevé à 22 fr, 50 ec. et à 24 fr. 46 c.; mais il reste douteux que, malgré cet écart de 4 à G fr. par quintal sur le prix moyen, les cullivateurs de ces départements aient pu trouver dans leur récolte un bénéfice, si fable qu'il soit. Cependant, avant de conseiller l'abandon de ia culture du fro- ment dans ces conditions, il faut examiner la possibilité d’élever économiquement les faibles rendements à un chiffre qui rendrait rémunéralrice la culture du blé dans ces sols pauvres. C’est ce que nous ferons dans un instant. Auparavant, il est intéressant de se demander quel devrait être l’accroissement moyen du rendement dans le reste de la France appelé à combler le déficit de la récolte des départements qui substitueraient une autre culture à celle du froment. D, " 7 8 # ;, PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 213 Dans les 14 départements qui, en 1896, forment le premiez groupe (récolte inférieure à 10 quintaux métriques à l’hectare), l’ensemble des emblavures s’étendait sur 744 000 hectares, en nom- bre rond. La production totale de ces 14 dépariements a été de 6 900000 quintaux métriques en 1896. Si l’on suppose ramenée de 6 900 000 hectares à 6 156 000 la surface cultivée ea blé, lac- croissement de rendement nécessaire pour compenser le déficit serait de 11,12. Ajoutée aux 80 kilogr. dont j'ai montré que doit s’accroître le rendement moyen de l’hectare français pour couvrir ous les besoins de la consommation du pays, l'augmentation moyenne, régulière, de rendement à atteindre serait donc de 2 quin- laux environ : cet accroissement, qui porterait la production à 141,50, ne placerait point encore la France au premier rang, ainsi qu'il est aisé de s’en convaincre. De 1892 à 1896, les rendements moyens du blé ont été les sui- vants, à hectare, dans les principaux pays de production : Grande-Bretagne 2317, 30 Hollande. . 22 Belgique . 22 Danemark . 20 Canada . 15250 Allemagne . 154710 Suède. . 1208710 France . AS 1298425 République Argentine. . 12 Autriche-Hongrie . SK) Roumanie . 108650 États-Unis . 10 Russie. . 8 Indes. T6 0 Italie . 7 Australie. . 6 Nous n’occupons actuellement, on le voit, que le huitième rang au point de vue des rendements. On pourrait donc envisager, à priori, la possibilité de réduire les emblavures de la France aux départements dont le rendement moyen excède 10 quintaux mé- triques ou 13 hectolitres 1/3 à l’hectare, à la condition de faire pro- sresser les rendements dans une proportion qui nous placerait seu- 214 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. lement encore au cinquième ou au sixième rang, à côté du Canada ou de l'Allemagne. Cette solution serait peut-être la meilleure pour les cullivateurs de ces départements, mais, avant de la leur conseiller, j'appellerai leur attention sur diverses considérations qui leur permettraient de se décider, d’après la connaissance qu'ils ont des conditions lo- cales où ils se trouvent placés. Si l’agriculture était réduite, comme autrefois, à l'emploi exclusif du fumier de ferme pour l'entretien de ses terres, on ne pourrait espérer, dans les sols naturellement pauvres, qu’une amélioration légère et bien lente dans les rendements, particulièrement en ce qui regarde les céréales, le fumier d’étable étant produit en quan- lité Lout à fait insuffisante dans la plupart des territoires pauvres. Mais il en est tout autrement aujourd’hui, grâce à l'abondance et au bon marché des engrais minéraux, Joints au perfectionnement si remarquable de l'outillage agricole et des procédés culturaux. Si, en effet, l’on n’a pas affaire à des conditions exceptionnelle- ment défavorables, dues au climat ou à la constilution physique du sol, lintroduetion des labours profonds, la pratique des engrais verts, la semaille en ligne, l'emploi des engrais phosphatés et po- tassiques, celui du nitrate dé soude, rendent possible la culture productive du blé et des autres récoltes, dans presque tous les sols. La mise en valeur de terrains jusqu'ici laissés en friche, la trans- formation des sols de dernière classe en terres d’une ferlilité remar- quable ont mis hors de doute la possibilité de tirer économiquement un excellent parti de régions jusqu'ici, pour ainsi dire, stériles’. Quand le D° Schultz à entrepris, en 1859, la métamorphose du domaine de Lupitz, la production du seigle y était à peme d’un quintal par hectare ; le rendement de cette céréale y dépasse actuel- lement 20 quintaux. Le chaulage et le marnage, l’addition du mé- lange aui porte aujourd'hui le nom de la propriété qu’il a régéné- rée, l’engrais Lupilz, composé de 400 kilogr. de scories et 600 kilogr. {. J'ai fait connaître ailleurs les résultats si remarquables obtenus à Lupitz par le Dr Scheltz sur un domaine de 240 hectares non productif avant l'emploi de lacide phosphorique, de la chaux et des engrais azotés et potassiques (Études agrono- miques. 7° série, librairie Hachette, 1896), PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 219 de kaïnite à l’hectare, l'introduction de fumures vertes, lupin no- tamment, comme source d'azote, tels sont les moyens mis en œuvre par l’éminent agronome dont l'exemple a déjà rencontré en Europe de nombreux imilateurs. On peut rattacher à deux ordres de causes principales le degré de fertilité d’une terre : sa constitution physique el sa composition chimique. On sait qu’une bonne terre à blé doit être de consistance moyenne, facile à travailler, fraiche en été, assez profonde pour que le plan des eaux souterraines reste toujours à la portée des racines sans jamais leur être nuisible par stagnation hivernale. Le blé ne prospère complètement que dans les sols fermes, compacts, calcaires et frais. Il redoute les terres creuses, les sols trop légers ou caillouteux. Partout où ces condilions essentielles ne sont pas remplies ou ne peuvent pas être réalisées par des opérations méca- niques (drainage ou irrigation, suivant le cas, labours profonds, roulage, etc.), le mieux serait de renoncer à la culture du blé. Il résulte de là que l’examen attentif des propriétés physiques du sol suffirait à décider si la culture du froment doit être continuée ou supprimée, là où les rendements sont trop faibles pour être rému- nérateurs dans les conditions actuelles du marché du blé. En ce qui concerne la composition chimique de la terre, la ques- tion se pose tout autrement. Si l’on a affaire à un sol de bonne constitulion physique, relativement meuble et frais et qui, malgré ces conditions favorables, ne produit que 8 ou 10 quintaux de grains à l'hectare, on peut être presque certain que son peu de fertilité tient à sa pauvreté en principes nutritifs et que l’on y peut aujourd’hui obtenir des récoltes rémunératrices par un bon système de fumure. Dans ce cas, en effet, c’est la pauvreté du sol en aliments du blé qui est la cause prépondérante, je dirais volontiers unique, de fa faiblesse des rendements, el il n’y a pas lieu de renoncer à y cul- tiver le froment, le remède à l'infertilité relative du sol étant tout indiqué. Presque toujours l'analyse chimique de ces terres les mon- trera dépourvues de calcaire et d’acide phosphorique; couvent aussi, elles manqueront de magnésie ou de potasse; fréquemment encore leur teneur en malières azolées sera également trop faible. 216 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Il est, en général, infiniment plus facile et moins coûteux de re- médier aux imperfections chimiques d’une terre que de combattre ses défauts physiques; aussi ne saurail-on trop engager les culliva- teurs à porter leur attention sur la possibilité d'obtenir d’une terre pauvre, des rendements élevés, à la condition que sa constitution physique ne s’y oppose pas. Quelques indications sur les moyens simples d'arriver à ce résul- (at me paraissent de nature à convaincre les agriculteurs. L'expérience et l’observalion ont montré qu’on peut regarder comme des sols pauvres, ceux qui, par tonne de terre, ne renfer- ment pas naturellement au moins un kilogramme d'acide phospho- rique, un kilogramme d’azole et 1,5 de potasse; mais il ne s’en- suit pas, comme on l’a parfois admis, que pour transformer les sols pauvres, donnant par exemple, sans fumure, 6 à 7 quintaux de blé à l’hectare, en terres pouvant produire le double, il soit besoin dy incorporer les quantilés complémentaires d'acide phosphorique, d'azote et de potasse nécessaires pour alteindre le minimum de chacun de ces éléments, considéré comme la caractéristique d’un sol de fertilité moyenne. C’est ce que montrera mieux qu'un long raisonnement un exemple tiré des expériences que je poursuis depuis sept ans au Parc des l'rinces, en sol d’une extrême pau- vreté. Le sol du champ d'expériences présentait, au moment où il a été défriché (1891), la composition suivante : Par Dans kilogramme Gens 5 de Om,20 de terre. par hectare. gr. kilozr. CHAUX NES A PONS EEE 9e 28 520 MAGNÉSIE LA Sr RE EEE 0,500 2 480 Acide phosphorique. . . . 0,450 1 395 PORRSSE HIS AUTRE AUS, 0,190 0 589 AE MR EPS MA à 0 ,6S0 2 108 C’est donc une terre extrêmement pauvre. Le poids du mètre cube de ce sol est de 1 550 kilogr. ; la couche arable sur une épais- seur de 6",20 pèse donc 3 100 tonnes: elle contient, d’après cela, l'RODUCTIJON ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 21% les quantités de principes nutritifs exprimées en kilogrammes, en regard de l'analyse du sol dans le tableau précédent. La comparaison des chiffres de ces deux colonnes montre que si, d’une part, la teneur centésimale de cette terre en éléments fertilisants est très inférieure au minimum regardé comme néces- saire, d’autre part, le poids absolu de principes nutritifs contenu dans un hectare de terre arable excède de beaucoup les exigences de plusieurs bonnes récoltes successives qui n’enlèvent au sol que quelques centaines de kilogrammes d’acide phosphorique, d’azote el de potasse. L'apport de quelques quintaux d'engrais phosphatés, polassiques et azolés suffira pour obtenir des récoltes très rémuné- ratrices, égeles et même supérieures à celles que donnent les meil- leures terres. La contradichon apparente qui existe entre la pauvreté naturelle d’un sol et les accroissements de rendements qu’y produit l'apport de quantités de principes natritifs bien inférieures à celles qui com- bleraient le déficit entre leur teneur et celle qu’on assigne comme limite inférieure aux terres de moyenne qualité, s'explique par la dif- férence de valeur alimentaire des éléments minéraux naturels et celle des engrais qu’on emploie. L’azote, l’acide phosphorique et la potasse sont, dans ces derniers, à l’état immédiatement assimi- lable par les plantes, landis que, dans la terre, ils se Lrouvent en- gagés dans des combinaisons complexes qui ne permettent aux vé- gélaux d'en utiliser qu’une très faible partie, aussi longtemps que les opérations culturales et les conditions atmosphériques n’ont pas dissocié les combinaisons et transformé leurs éléments en principes assimilables. Dans le sol si médiocre du Pare des Princes, Paddition, par hec- larc et par an, de 50 kilogr. d’acide phosphorique * sous forme immédiatement assimilable (scories, superphosphates, phosphate minéral en poudre fine), associés à 40 kilogr. de potasse et à un poids d’azole nitrique (nitrate de soude) qui a varié de 15 à 49 kilogr. à l’hectare, suivant la nature des récoltes, a produit les 1. Quantité qui n'ajoute à un kilogramme de terre arable que 0%,01615 d'acide phos)yhoriqu?, 218 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. excédents moyens de rendements suivants sur les récoltes du même terrain n'ayant reçu aucune fumure : EXCÉDENT DÉPENSE D'EXGRAIS à l’hectare, à l'hectare. quint, métr, francs. Be ob tÈne a 14,52 97,80 AVUINE. eu EUR 1 1,, 58 49,80 Pommes de terre. . . 138,20 97,80 Maïs fourrage . . . . 258,40 104,00 Le coût du quintal produit en excédent, par la fumure, toutes les autres conditions restant égales, peut aisément se calculer, en divisant le prix des engrais employés par le nombre de quintaux récoltés sur les parcelles fumées, en plus que sur les parcelles sans engrais. On trouve ainsi les prix de revient suivants par quintal d’excé- dent : BIÉSAYEC SANTE ES ER 61,73 AVOIDE AVE CESAM EN RE 4 ,30 POMMÉS UE ELLE M en IE 0 ,7{ MAIS OUT PISE; +. M OMS A HEONTQURE 0 ,40 On voit, par ces chiffres, que même dans les sols pauvres, à la double condition que leurs propriétés physiques soient convenables et qu'on donne à la plante une alimentation suffisante, on peut ar- river à une production très rémunératrice. Ges exemples, dont nombre de visiteurs ont été témoins depuis sept ans au Parc des Princes, me paraissent de nature à inciter les cultivateurs des régions à sols pauvres à expérimenter la famure minérale, en l’associant à une bonne culture, pour la production économique du blé. C’est seulement si, contre notre attente, ces essais étaient infructueux qu'il y aurait lieu, pour eux, de substituer à la culture du blé celle des prairies naturelles et là où la constitu- on du sol lPindiquerait, soit la plantation de la vigne, soit le boise- ment avec les essences appropriées au climat et à la terre. L’essai de culture du blé que je recommande doit être fait avec la fumure suivante qui a donné les meilleurs résultats aux cultiva- PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 219 teurs qui, sur mes conseils, l’ont appliquée à des terres très pau- vres : A l’Eectare et par année : Acide phosphorique : 50 kilogr. (300 kilogr. de scories ou super- phosphate ou 400 kilogr. de phosphate minéral en poudre fine). Polasse : 40 kilogr. (350 kilogr. de kaïnite ou 80 kilogr. de chlorure de potassium). Azole : pour blé, 50 kilogr. de sulfate d’ammoniaque à la se- maille, 100 à 150 kilogr. de nitrate de soude en couverture, en ‘deux fois au printemps. Autant que possible, la semaille des céréales doit être faite au semoir, condition si favorable au développement de la plante. L’éco- nomie de semence et l’amélioration du rendement résultant de lem- ploi du semoir donnent une plus-value de récolte, par rapport à la semaille en ligne, que les agriculteurs anglais évaluent, d’après leur longue expérience, à 10 p. 100 environ. A titre de dernier renseignement, je noterai qu’au Parc des Prin- ces, à l'emploi de 100 kilogr. de nitrate de soude par hectare, con- curremmeñt avec les famures phosphatées et potassiques indiquées plus baut, ont correspondu les excédents de rendement que voici : GRAINS. PAILLE. kilogr. kilogr. PIRE AE an A < 484 4 292 ANOIRE RE RS Ur re 115 1 761 Pommes de terre . . . . 4 583 » Maiskonrrage th co i- 8 614 » Comme complément à celte étude sommaire sur les conditions de productien du froment, il me reste à présenter quelques considé- rations sur une question fort débattue et souvent mal comprise : le prix de revient du blé. 220 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. IV LE PRIX DE REVIENT DU BLÉ H n'existe pas de prix de revient uaique d'un produit quelconque. — Influence de la fumure sur le prix de revient du blé. — Résultats des expériences. — Le prix de revient dans quelques exploitations. — Avenir de la culture du blé en France, — Ses conditions. Le bénéfi:e, sur un produit quelconque, résulte, en agriculture, comme en toute industrie, de l'écart entre la valeur vénale et le prix de revient de ce produit. Les éléments du prix de revient sont extrêmement complexes ; ils varient d’un lieu à l’autre avec la valeur de la matière première, les frais généraux, les salaires, etc. Il n’est pas possible d'établir, avec quelque chance d’être dans le vrai, un prix de revient moyen unique d'une denrée quelconque, applicable à un pays tout entier. En ce qui regarde l’agriculture, le loyer de la terre, les charges qui pèsent sur elle, sa fertilité naturelle ou acquise au moment où l'on en entreprend l'exploitation, le capital à engager pour l’ouuil- lage, le bétail, la culture et la fumure, elc..…., présentent, suivant les régions el souvent d’une exploitation à une autre dans le même département, quand ce n’est pas dans la même commune, des diffé- rences considérables. Il suit de là qu’on ne saurait déduire du rap- prochement et de la combinaison de ces divers éléments un chiffre qui représente, pour }: pays entier, le coût de production du quin- tal de blé ou de viande, du litre de lait, de la tonne de fourrage ou de fumier. Les affirmations relatives à un prix de revient moyen du blé, si souvent apportées à la tribune du Parlement, au cours des discus- sions sur les droits dits protecteurs, ne peuvent avoir la valeur qu’on voulait leur attribuer. Fixer, comme beaucoup d’orateurs l'ont fait, à 25 fr. le prix de revient moyen du quintal de froment en France, ce qui amène logiquement à conclure que tous les cullivaleurs sont en perte, lorsque le cours du marché est inférieur PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTZIRES. AA | à ce chiffre, c’est à coup sùr une erreur. Une pareille généralisation est fautive. N’est-il pas évident, en effet, pour n’en donner qu'un exemple, que les cultivateurs qui, en 1896, ont obtenu les uns, dans le Nord, 25 quintaux, en moyenne, les autres, dans le Var et le Gard, # à 5 quintaux seulement, n’ont pas produit, au même prix, les 100 kilogr. de froment, quelque différents qu’aient été les frais de production ? On ne se tromperait pas moins lorsque, partant de ce prix de revient hypothétique de 25 fr., on chercherait dans léta- blissement des droits de douane une compensation aux charges que supporte l’agriculteur, différentes d’un pays à l’autre. Qui, d’ailleurs, pourrait établir la quotité de ces charges et, par suite, la compensa- on à leur donner ? D'autre part, s’il était vrai que le prix de revient moyen du quin- tal de blé est, en France, de 25 fr., on devrait en conclure qu’en 1896, avec une récolte de 93 millions de quintaux qui rous à per- mis d’être pour la première fois exportateurs, le prix moyen général du quintal sur le marché français n'ayant aîteint que 18 fr. 93 c., l’agriculture s’est trouvée en perte de 6 fr. 47 ©. par quintal, soil de plus de 600 millions de francs, rien que sur sä produclion en fro- ment ! Je ne pense pas qu'il se trouve personne pour soutenir qu'il a pu en être ainsi. La seule conclusion que je veuille tirer de ces remarques, c’est impossibilité de fixer, même dans les limites étendues, un prix de revient unique du quintal de blé. Cette fixation n'aurait d’ailleurs, à supposer qu’elle fùt possible, qu'un intérêt de curiosité, chaque culüvateur devant, par la force des choses, en raison des variations considérables des situations, arriver à produire 100 kilogr. de blé — comme des autres denrées agricoles — à des prix de revient es- sentiellement variables. Ce qui importe, c’est de rechercher les moyens d'abaisser le prix de revient des produits du sol et d’en vulgoriser la connaissance par des indications précises, à la portée des plus modestes culliva- teurs. C’est la tâche que nous poursuivons depuis trente ans. L'augmentation économique des rendements d’une surface donnée est la condition fondamentale de la diminution du prix de revient des produits du sol. Cette augmentation économique, réalisable à 222 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. divers degrés, partout où les conditions physiques de la terre et le climat n’y mettent pas d’obstacle, dépend de divers facteurs que l'on peut ramener à trois principaux : les opérations culturales (labour, mode de semaille, hersage), le choix des semences et la fumure. Les limites de cet article m’obligent à restreindre l'examen de ces influences à celle de la fumure. Je citerai à titre d'exemple si- enificatif les résultats de la culture du blé, en 1894, au Parc des Princes, dont j'ai tout à l'heure fait connaître l'extrême pauvreté du sol. En 1894, mon champ d'expérience a porté du blé sur une sur- face de 24 ares. La variété cultivée était le blé roux hâtif d'Alsace, semé en ligne le 12 octobre 1893, à raison de 133 kilogr. à l'hec- (are. La récolte a été faite le 18 juillet 1894. A la fumure fonda- mentale en phosphate et en potasse, dont j'ai indiqué précédem- ment la composition, on a ajouté un nitratage à la volée, le 28 mars 1894, à la dose de 15 kilogr. d'azote (100 kilogr. de nitrate de soude à l'hectare). Le sol avait été nettoyé par les cultures successives de pommes de terre en 1892 et 1893; il était parfaitement propre. L’acide phosphorique avait été donné à doses égales sous quatre formes différentes. Je grouperai les rendements en blé en quatre catégories, suivant la nature des engrais phosphatés, seule condition variable d’une parcelle à l’autre, tout le champ ayant reçu même quantité de potasse el de nitrate. Le coût total des fumures pour chacune des catégories d'essais a été le suivant‘: NATURE DES ESSAIS. A L'HECTARE. Phosphates minéraux. . . . . . . - . 511,50 Scories de déphosphoration . . . . . . 51,50 SUDERDhOSPhAlE EE SEEN TENUE 64 » BRoOSphate PréCIDITÉ PEN EE TR 58 ,50 Nous n’envisagerons ici que les excédents de récoltes dus à lin- 1. Les prix s'établissent sur les bases suivantes : pour les quatre séries d'expé- riences : 100 kilogr. de nitrate à 24 fr. et 334,3 de potasse à O fr. 45 e. (15 fr.) ; pour les deux premières séries, 50 kilogr. d'acide phosphorique à 0 fr. 25 c., soit 12 fr. 59 ç. ; pour le superphosphate, 59 kilogr. d'acide phosphorique à 0 fr. 50 c., soit 25 fr.; pour le phosphate précipité, 50 kilogr. d'acide phosphorique à 0 fr. 39 e., soit 19 fr. 50 c. PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES, 2923 fluence de la fumure, par rapport au rendement des parcelles sans fumure. Ces excédents ont été les suivants, pour chacune des catégories d'engrais phosphatés : EXCÉDENTS À L'HECTARE. NATURE DE LA FUMURE. — —— Grains. Paille. quint.métr. quint. métr. Phosphates minéraux . . . 14,71 42,34 Scories de déphosphoration. 13,58 35,07 Superphosphate, . . . . . 14,97 30,22 Phosphate précipité . . . . 8,06 24,20 Il est aisé, en rapprochant du coût des engrais le nombre et la valeur vénale des quintaux de grain et de paille, d’évaluer le béné- {ice résullant de la fumure et le prix de revient, réel cette fois, de 100 kilogr. de blé fournis en excédent sur la récolte du sol naturel non fumé. Admettant pour le quintal de grain le prix de vente de 20 fr. et pour la paille celui de 3 fr., la valeur des quatre récoltes s'établit comme suit : PHOSPHATES : SUPER - PHOSPHATE minéraux. RAD RIES PHOSPHATE, précipité. ÉEUNC, fr. AuC: fr REC. ÉD: (ÉTÉ TRES cb LEUR 294,20 277,60 291,40 161,20 Bale RER FAUSSES PRE D202 114,21 90,66 72,60 Totaux. . . 421,22 391,81 382,06 233,80 Goût des fumures . . 51,50 51,50 64 » 58,50 Restent. . . 369, 72 340,31 318,06 175,30 qui représentent le bénéfice net résultant de l’action des engrais. La relation entre la dépense de fumure et la valeur des excédents de récolte qui en ont été la conséquence montre combien est avan- tageux le placement que fait le cultivateur en donnant à ses terres un approvisionnement rationnel en substances fertilisantes. Les excé- dents de rendements ont produit, pour une avance de 100 fr. en engrais : Phosphates minéraux. . . . . . . . . Pie SCOLICSES tte Eden eue einer ose 661 SUPELDHOSPRALE = 20e em nn 496 RNOSDRALELPrÉCIDILÉ AMEN ERTENEN 299 224 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMI JUE. Dans ce dernier cas, de beaucoup le moins favorable, c’est encore un placement à 300 p. 100 que représente la famure. Envisageons maintenant le prix de revient des excédents. Des très nombreuses expériences que Je poursuis depuis plus de vingt- cinq ans, tant dans mes champs d'essais que dans un domaine de grande étendue, J'ai Liré la conclusion que l’on peut couramment produire un quintal de blé avec sa paille, ex excédent sur la récolte du même sol non fumé, avec une dépense de 4 à 8 fr. en engrais convenablement choisis. ( Cette affirmation, maintes fois revenue sous ma plume, dans ma longue campagne de propagande, m'a valu parfois, de Ja part de certains publicistes, des criliques aussi acerbes que mal fondées. Dénaturant, volontairement ou non, la lettre et le sens de mon assertion, on n’a fait dire que je prétendais produire le blé au prix moyen de 95 fr. les 100 kilogr. ; il s’est même trouvé des associa- tions agricoles et des commissions départementales pour me sommer de réaliser celte utopie sur des exploitations mises gratuitement à ma disposition. En leur temps, j'ai répondu à ces attaques lorsqu'elles n’élaient pas trop discourtoises, mais j'ai repoussé les sommalions qui m'étaient faites, mes détracteurs confondant à plaisir le prix de revient d’une récolte de blé prise dans son ensemble, en un point quelconque du territoire, et celui des quintaux de froment que lon peut obtenir en excédent sur le rendement d’un sol sans fumure ou insuffisamment fumé. Je montrerai tout à l'heure quelle peut être, sous l'influence de la fumure, la diminution du prix de revient de toute une récolte de blé et non plus seulement de l'excédent ; mais auparavant voyons, d’après mes expériences du Pare des Princes, combien est fondée mon asseruüon relative au prix de revient des excédents. C'est-à-dire la possibilité de l’abaisser aux environs de o fr. et même au-dessous, par un bon choix d'engrais. C’est là le point essentiel dont je voudrais que nos cullivatceurs pussent se convaincre par des expériences instiluées par eux dans leurs propres champs. Dans les quatre conditions de fumures rapportées plus haut, le prix de revient du quintal de blé, en excédent, s’obtiendra en divi- sant respectivement le coût de la fumure par le nombre de quintaux PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES. 229 qui dépasse le rendement des parcelles témoins sans engrais; on arrive ainsi aux résultats suivants : 517,50 Pour les phosphates minéraux. . TON 31,50 54,50 8 Pour les scories "+ ETUI 3 719 GA » 7. Pour le superphosphate . . . . TAv,57 = 58,50 = A . . , 9 EE Z f = Pour le phosphate précipité. . . un 1620 C’est donc au-dessous de à fr. que, du fait de la fumure seul, peut s’abaisser le prix de revient du quintal de grain (avec sa paille) obtenu en excédent. C’est là et pas davantage ce que j'ai dit de tout temps et voulu prouver. Quelle influence un semblable résultat peut-il exercer sur le pro- duit. net d’un hectare de blé? Pour les raisons que j'ai données en commençant, la question ainsi posée n’est pas susceptible d’une réponse applicable aux emblavures de tout un pays, mais on peut cependant s’en faire une idée à l’aide de quelques exemples choisis dans des conditions bien déterminées. J’en donnerai deux : l’un pris à l’école d’agriculture Mathieu de Dombasle; l’autre, qui n’a été fourni cette année (1898) par la culture de M. le docteur Menudier, président des syndicats agricoles de la Charente, propriétaire à Plaud-Chermignac. La comptabilité de l’école Mathieu de Dombasle m’a permis d’éta- blir, il y a quelques années, le coût de la culture du blé à Tomblaine. Nous étions arrivés M. Thiry, directeur de l’école, et moi, à en fixer le montant (fumure non comprise) à 268 fr. par hectare. Ce chiffre comprend le loyer de la terre, les frais de culture et de récolte et les frais généraux : il est plutôt supérieur qu’égal à la dépense moyenne dans une exploitation de Lorraine bien tenue. La production du blé dans des terres analogues à celle à laquelle se rapporte cette éva- luation et demeurées sans fumures depuis quelques années, atteint à peine 10 à 11 quintaux à l’hectare el nous a servi de terme de comparaison. Dans ces conditions, le prix de revient du quintal de blé se rapproche du chiffre de 25 fr. cité à la tribune, comme ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1898. — 11. 15 226 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. représentant le coût moyen des 100 kilogr. de froment en France Ée — 96 fr. 80e. TÀ — 94 fr. 30 c.), moyenne 25 fr. 50 c. Si nous ajoutons à celte dépense de 268 fr. la somme de 51 fr. 58 c. pour engrais, la dépense totale s'élève à 319 fr. 5$ c., soit, en nombre rond, à 320 fr. Si, comme M. Thiry l'a obtenu à Tomblaine et moi-même au Parc des Princes, la récolte atteint 25 quintaux à l’hectare, le prix de revient du quintal (paille comprise) se trouve abaissé à 42 fr. 80 c. environ, laissant plus de 7 fr. de bénéfice sur le cours de 20 fr. et chacun des quintaux en excédent sur le rende- ment de 11 quintaux reviendra à 3 fr. 84 c. seulement. Dans la note qu'il m’a adressée cette année à l'issue de la moisson", M. Menudier donne le détail de la dépense et du produit de la récolte en blé sur 5,42. La dépense totale s’est élevée, d’après la compta- bilité du domaine de Plaud, à 2633 fr. 75 c. La récolte a été de 166%°,25, à 20 fr. l'un. . . . . — 3,324 90 La récolte en paille à 4729, à 2{°,60 l'un. . . . . AL 220048 Total des produits . 4 5541r,05 FFSA COHETE MES SRE 2633 ,79 ANNE MES Lo eot à à 1 920fr,30 soit 394 fr. 20 c. par hectare. Que devient dans ces conditions le prix de revient du quintal de blé au Plaud. Pour l'obtenir il faut retrancher de la dépense totale égale à. 2 6331°,75 La valeur de la paille . 1 229 ,15 reste ne eue #04 E0 Cette somme, divisée par le nombre de quintaux récoltés (1661%,25) donne 8 fr. 45 c. pour le prix de revient net des 100 kilogr. de blé, laissant au cours de 20 fr. un bénéfice de 11 fr. 55 e. par quintal. Nous voilà loin du chiffre fatidique de 95 fr. Je dois encore ajouter que la dépense en engrais qui a été de 200 fr. à l’hectare en fumier 1. Je l'ai publiée ën extenso dans le Journal d'agriculture pratique du 25 aot 1598. PRODUCTION ET CONSOMMATION DES CÉRÉALES ALIMENTAIRES, 227 de ferme, aurait pu être singulièrement réduite par l'emploi des engrais COMMErCIaux. En résumé, la culture du blé bien conduite peut être rémunéra- trice et l’on peut formuler en quelques propositions les conclusions de cette rapide élude de la question : 1° D’une manière générale, il y a lieu d'examiner s’il ne convien- drait pas de restreindre la culture du blé, dans notre pays, aux terres les plus aptes par leur constitution géologique, physique et chimique à porter des céréales. C’est aux propriétaires, aux culliva- teurs et aux associations agricoles locales d'examiner dans quelle mesure et à l’aide de quelles modifications dans les exploitations des départements produisant moins de 10 quintaux à l’hectare, il y aurait lieu de donner suite à la diminution des emblavures et au remplacement du blé par des cultures plus productives : prai- ries, vignes, etc. ; 2 L’attention des agriculteurs doit, de plus, se porter sur la nécessité impérieuse d’accroitre économiquement les rendements par l'emploi, sur la plus large échelle, des engrais minéraux : sco- ries de déphosphoration, superphosphate, phosphates naturels, nitrate de soude, sulfate d’ammoniaque, sels potassiques, etc., que l'industrie et le commerce leur offrent aujouré’hui à des prix si avantageux ; 3° La pratique des fumures vertes: lupins, vesces, etc., est ap- pelée à transformer économiquement les sols siliceux pauvres en terres fertiles. Le chaulage, le marnage, l’emploi des phosphates et des sels potassiques sont le point de départ de cette transfor- mation ; 4° La France doit arriver à brève échéance à produire, en tout temps, la quantité de blé qu’exige son alimentation : l'effort néces- saire pour atteindre ce résultat si souhaitable est de ceux qu’on peut altendre sans hésitation de notre vaillante population agricole, lorsque linstruction professionnelle aura pénétré dans nos campa- ones, et que l'initiative privée, s'appuyant sur l’association des inté- ressés, sera devenue la base solide du crédit à l’agriculture. La (âche des pouvoirs publics doit consister à aider à la diffusion la plus étendue des connaissances et des faits sur lesquels reposent les 228 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. améliorations agricoles et à encourager l’esprit d’initialive et d’asso- ciation pour l’organisation du crédit, sans viser au rôle d’État-Pro- vidence si contraire au progrès. En définitive, il s’agit, suivant les modifications apportées au régime de nos emblavures, d’accroiître régulièrement le rendement moyen de lhectare de 1 à 2 quintaux de blé. Il est impossible que ce résultat ne soit pas bientôt atteint, si l’on consent à en prendre les moyens. Savoir, pouvoir, vouloir, ou, en d’autres termes : association de la science, du capital et du travail, là est l’avenir de l’agriculture. Ce n’est pas le socialisme d'État qui réalisera le progrès qu’on en peut attendre. RECHERCHES LES ÉCHANGES D'ÉNERGIE LEURS RAPPORTS AVEC LES ÉCHANGES NUTRITIFS CHEZ LE BOEUF ADULTE ANAEPAIQErA TEO ND ENTRETIEN Par le D' KELLNER'! Traduit de l’allemand, par M. Albert COUTURIER LICENCIÉ ÈS SCIENCES NATURELLKS, INGÉNIEUR AGRONOME L'alimentation du bœuf adulte, à la ration d’entretien, a déjà fait l'objet de travaux nombreux et importants qui ont permis de déter- miner d’une façon précise la quantité d’aliments nécessaires à l’ani- mal et les modifications chimiques que ces matières subissent dans le cours de la digestion. On a pu conclure des recherches de Henneberg et Stohmann* (1858 et 1860-1861) et de celles plus récentes de Gustave Kühn° et de ses collaborateurs que la ration d’entretien d’un bœuf adulte doit fournir à l'animal, par jour et par 1 000 kilogr. de poids vif, 0'£,7 1. En collaboration avec A. Kühler, F. Barnstein, W. Zielstorff, L. Hartung et H. Lührig de la Station de Mœkern. Landw. Versuchs-Stationen, t. XL. . Wolff, Ernährung der landw. Nulztiere, 1876. L'alimentation du bétail. . Die landw. Versuchs-Slationen. Travaux des stations agronomiques allemandes. Vol. 44. ©2 230 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de protéine digestible et 6*#,6 de matières non azotées digestibles (y compris la cellulose brute [ligneux}). Ces résultats, confirmés par une longue série d'expériences faites à la station de Mæckern, sont une base précicuse pour le calcul des rations; mais ils ne rendent compte que des phénomènes chimiques de la digestion, sans donner l’expression exacte de la valeur nutri- tive des aliments. L'analyse chimique est d’ailleurs insuffisante à ce point de vue ; elle n’isole, dans les fourrages, qu’un petit nombre de groupes im- portants et complexes : matières minérales, matières azotées albu- minoïdes et non albuminoïdes, matières grasses, ligneux, principes extractifs non azotés, sans pouvoir caractériser les termes si divers qui entrent dans ces groupes; du moins, cette recherche détaillée est-elle trop longue et trop délicate pour qu’on FRERE à l’ana- lyse courante des matières alimeniaires. L'auteur du présent travail a appelé l'attention, dès 1880, sur une autre méthode d’une grande valeur; elle est basée sur la détermi- nalion de la valeur calorifique des aliments et des produits de la digestion. Lorsqu'un animal adulte est maintenu à l’état de repos, son poids restant constant, il doit trouver dans sa ration les éléments néces- saires à la reslitution des quantités de chaleur perdues sans cesse par le rayonnement, par la respiration, la perspiration et par les combustions résultant du fonctionnement des organes; l'aliment est envisagé uniquement, dans ce cas, comme une source de chaleur. On conçoit donc qu’en déterminant d’une part les quantités de cha- leur latente représentées par les aliments et, d’autre part, les quan- tités de chaleur contenues dans les déjections ou consommées par l'organisme, on puisse dresser le bilan des échanges calorifiques et déterminer le rôle joué par les diverses matières. L'auteur tirait, en 1880, d'une longue série de recherches sur l'alimentation du cheval” les conclusions suivantes : « Nos recherches montrent combien il serait important de déter- 1. Landw. Jahrbücher, 18S0. Rapport annuel sur les travaux des stations agrono- miques allemandes. ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOŒEUF ADULTE. 591 miner d’une façon précise la chaleur de combustion des différents principes des aliments dont nous connaissons si imparfaitement la constitution chimique. Les matières albuminoïdes, leurs dérivés et quelques matières minérales sont les seuls produits auxquels nous puissions assigner une fonction définie. L'ensemble des ma- lières non azolées paraît n'avoir d'autre rôle que celui d’aliments respiratoires, indiqué déjà par J. de Liebig ; 1l serait done d’un haut intérêt de leur appliquer la méthode que nous venons d’exposer pour en mesurer la valeur exacte. » | D'importants travaux ont été faits dans ce sens, en particulier par Rubner’' et Stohmann*; le premier a confirmé la loi formulée par l’auteur de l’équivalence des aliments d’après leur valeur calori- fique ; il a aussi déterminé l'effet utile physiologique des principes immédiats des fourrages. — On doit à Stohmann une immense série de recherches qui l’ont amené à donner la valeur calorifique de presque tous les aliments connus. Mais il reste encore un sujet d’intéressantes études, laissé de côté par ces auleurs. Îl importe d'établir ce que deviennent les quantités d'énergie fournies par l'alimentation et quelles sont leurs relations avec les phénomènes dont l’animal vivant est le siège. C’est l’objet du présent travail. Il est indispensable, pour simplifier les choses, d’étudier d’abord ce qui se passe chez les animaux adultes, au repos et à la ration d'entretien; dans ce cas, les dépenses d’énergie se réduisent aux quantités nécessaires au maintien de la vie; on les connaitra en établissant le bilan des entrées et des sorties. La solution de cetle question exige les recherches suivantes. Il faut : 1° Déterminer la composition immédiate de la ration et celle des malières rejetées par l'animal dans ses déjections solides, liquides et mème gazeuses, pour connaître l’utilisation de la ration ; 9 Établir le bilan des entrées et sorties d’azote et de carbone chez les animaux en expérience ; 1. Zeitschrift fur Biologie. Journal de Biologie, passim, 1883 à 1894. 2, Idem, 1895. 3. Muskelthätigkeit und Stoffzerfall, 18S0. 932 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 3° Mesurer les quantités d'énergie fournies par l'alimentation et celles qui sont contenues dans les déjections pour en déduire la valeur exacte et la nature des principes immédiats assimilés. En rapprochant toutes ces données, on se rendra compte des échanges d'énergie qui se produisent chez un animal adulte, à la ration d'entretien, et du rôle joué par les principes immédiats de la ration. Nous allons faire connaître successivement ces différentes re- cherches. Dispositif des expériences. Les expériences ont élé suivies, au laboratoire de la station de Moekern, pendant les années 1894 et 1895 ; elles forment ainsi deux séries dont chacune a porté sur un bœuf adulte de la race bavaroise, maintenu au repos et à la ration d'entretien. La période d'expérience a duré chaque fois quinze jours, pendant lesquels on a soigneusement recueilli la totalité des déjections so- lides et liquides des animaux. Pour l'étude des échanges gazeux, l'animal a été introduit à cinq reprises dans la chambre de Petten- kofer et son séjour dans l'appareil a été, chaque fois, de vingt-quatre heures. L'ensemble des dispositifs employés aux expériences et les mé- thodes d’analyse sont connus ; ils ont été publiés par G. Kühn’. Après avoir progressivement préparé les animaux aux conditions de l’expérience, on a encore attendu cinq Jours avant de commen- cer les observations, pour se mettre sûrement à l’abri des erreurs qui auraient pu provenir des résidus d’alimentations antérieures. a) Expériences sur le bœuf A. Le bœuf À, qui a servi aux expériences de 1894, pesait 620 kilogr. Sa ration journalière était de 8,5 de très bon foin de prairie à 85.45 p. 100 de matière sèche, soit par jour 74,263 de matière sèche, que l’animal consommait intégralement. 1. Loc. cil. ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 233 Il se maintint en bon état et son poids resta constant pendant toute la durée de l'expérience, au cours de laquelle il faut signaler un léger accident. Le 20 novembre, dernier jour de l'expérience, la quantité d'urine rejetée par l’animal fut si considérable que le réci- pient en verre destiné à la recueillir ne put v suffire et qu’une partie du liquide dut rester dans le tube métallique qui unit le récipient à un entonnoir fixé sous le ventre de l’animal et recevant les urines à mesure de leur émission, Il a été possible cependant de recueillir tout le liquide et, par surcroît de précaution, on a lavé complètement l'appareil à l’eau distillée et recueilli les eaux de lavage. Une partie des excréments solides reste chaque jour dans les gout- lières pratiquées spécialement à cet effet dans les stalles et dans la chambre de Pettenkofer ; on la recueille soigneusement par lavage et on la pèse après dessiccation à l'air. On a trouvé de cette façon : Dans la stalle, en 10 jours, 142 gr. d’excréments à 93.9 p. 100 de matière sèche, soit pour les 10 jours, 1325°,8 de matière sèche ; Dans la chambre de Pettenkofer : gr. p- 100 gr. Le 6 novembre. 17,0 d'excréments à 90.94 — 15,5 de matière sèche. Le 9 — . 28,0 — CHENE 2005 — 10 16 REIN 19,0 ae LITRES — Herbe nr 52,5 — JDA 0 475 — BOUT) ARE 59,0 — RENE ME TT! — Soit, pour la totalité de l'expérience . . 290,50 de matière sèche. Avec cette correction, le poids moyen des excréments s'élève par jour à 2%6,547. b) Expériences sur le bœuf B. Il a servi aux expériences de 1895. Son poids était de 611,55; sa ration se composait de 5 kilogr. de paille d'avoine et 4 kilogr. du même foin que pour les expériences de 1894. Mais l'animal laissait chaque jour une partie de ses aliments dans le râtelier et l’ensemble de ces restes s'élève pour toute la durée de l'expérience à 2*4,560 ; 234 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ils se composaient surtout de paille et contenaient 87.26 p. 100 de matière sèche à 0.869 p. 100 d’azote ; voici d’ailleurs la composition des 25,234 de matière sèche : Paille d'avoine. . . . 1*5,508, soit 0.101 p. 100 par jour FOR LS 0 ,726 0.048 — La ration de l'animal lui donnait : Foin. . . . . 4 kilogr. à 88.54 p. 100 — 3,542 de matière sèche 4 Paille d'avoine . 5 — à 84.94 — — Il n’a donc réellement consommé que : Matière sèche du foin . shsle 3k5,494 — de la paille d'avoine . . . . 4 ,146 L'expérience s’est poursuivie sans aucun trouble; seulement, l'animal ne s’est jamais couché dans la chambre de Pettenkofer. Voici les quantités d’excréments recueillies par lavage dans les appareils : Dans la stalle en 10 jours, 194 gr. d’excréments à 93.95 p. 100 — 1895",3 de matière sèche ; Et dans la chambre de Pettenkofer : gr. p- 100 gr. Le 25 octobre. . 32,0 d'excréments à 91.74 — 29,4 de matière sèche, Len) ee 20,0 — 91.84 — 18,4 — Le 1° novembre . 18,0 — HE = TEST == Le 5 — : 28,0 — bn 25,1 — Le 8 — : 1730 — 92602" 1007 — Soit, pour l'ensemble de l'expérience . . 288,0 de matière sèche. ce qui porte à 3'#,086 la quantité d’excréments solides émise chaque jour par l’animal. Le a, ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. Utilisation de la ration. Voici pour les deux animaux la composition moyenne de l’alimen- Protéine brute. . Matières grasses . Cellulose brute Matières minérales , Extractif non azoté. AZOLE OLA MERE Azote à l'état d'albu- mine A Correspondant à pre- téine pure . Carpe CT tation et des excréments : BŒUF A. EE Foin Excréments. p. 100 p. 100 10.00 1122? 2.58 2,89 2122 28.12 7.06 12283 DORE) 41.98 1.60 795 LS Sel 16.16 47.39 On déduit de toutes ces données Matière sèche digestibilité des principes immédiats : Substance organique. Protéine brute . Matières grasses Cellulose brute . Extractif non azoté . Albumine . BŒUF B. TT Foin. Paille. Excréments. p- 100 p. 100 p- 100 9.89 3.28 8.69 2520 DL 3.19 DCE 492 41 32.94 7.41 6.60 10.55 23.30 45.44 45.09 1.583 0.525 1139 1.458 0.468 9,40 202 46.19 46.75 48.61 FOIN. PAILLE 64.9 Del 67.1 5622 60.6 DD 61.0 287 63.8 62.4 TOP 55.6 13.0 42.1 les chiffres suivants pour la Soient : matières digestibles p. 100 de la matière sèche du four- rage : Matière sèche Substance organique. Protéine brute . Matières grasses . Cellulose brute . Extractif non azoté . Albumine . FOIN PAILLE- 6.9 ‘09.1 62.4 52.5 6.1 OPA 1.6 0.6 17.4 26.5 37.3 25.3 6.7 12 Ces nombres, qui serviront de base aux calculs qui vont suivre, 236 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. sont ceux qu’on a déjà observés au cours des nombreuses analyses de foin de même provenance (domaine de Gross-Zschoscher, près Leipzig), publiées à plusieurs reprises dans ce recueil, Toutefois, à richesse égale en matières alimentaires, on a trouvé pour la digesti- bilité de l’extrait non azoté et des matières ligneuses des chiffres sensiblement plus élevés que ceux connus jusqu'ici pour les foins de toute première qualité; il est probable, et ce fait fera l’objet d’une publication ultérieure, que l'appareil digestif du bœuf agit sur ces substances avec plus d’énergie que celui du mouton, animal géné- ralement employé pour ces déterminations. On à vu que le bœuf B recevait un mélange de paille d’avoine et de foin, ce dernier aliment n'étant plus assez abondant pour suffire à lui seul à l'alimentation de l’animal. Pour déterminer la manière dont cette paille à été utilisée, il faut faire intervenir dans le calcul les coefficients de digestibilité du foin, observés chez le bœuf A et les résultats obtenus sont entachés d'une certaine incertitude. Ils sont cependant tout à fait normaux et correspondent à de la paille de constitution moyenne. Il faut Lenir compte d’un fait qui explique la faible valeur du coefficient de digestibilité des matières azotées de la paille (2.2 p. 100); c’est qu’il se forme dans le cours de la digestion des matières azotées qui s’ajoutent à celles rejetées dans les excréments ou contenues dans les déchets de l’épithélium digestif et diminuent ainsi la valeur de la portion réellement absorbée. Cette correction élève à 44.4 p. 100 le coefficient de digestibilité des matières protéiques brutes de la paille et à 1.5 p. 100 au lieu de 0.1 sa teneur en protéine brute digestible. Le dosage de l'acide carbonique dans l’eau de boisson a donné les résultats suivants par litre: Bœuf A Bœuî B 6 novembre 1894 . . 0*°,2835 25 octobre 1895. : . : 05°,2700 9 = EL UO EF ESD 29 — 10,0 5,2825 13 — oo 0 2809 17 novembre 1895. . 0 ,2960 16 Me 022609 4 En 0 2 GTU 20 — 0 ,2790 S — 0 ,2865 Moyenne: #72 0 a0t ab Moyenné:+ "40 0 28e Carbone correspondant. . © ,0753 Carbone correspondant. . © ,0761 ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 294 Enfin, on donaait chaque jour aux animaux 40 gr. de sel marin, bien exempt d’acide carbonique. Analyse de l'urine. L’urine émise par les animaux a été soigneusement recueillie par les procédés ordinaires et mesurée pendant toute la durée des expé- riences; on l’a analysée pour déterminer sa teneur en matière sèche, azote, carbone et acide hippurique. Les dosages de matière sèche, d’azote et d’acide hippurique ont été faits tous les jours, pendant la durée de l’expérience, de sorte que les moyennes qu’on en tire ont une grande précision. Le carbone, au contraire, n’a été dosé que huit jours sur quinze ; et il est permis de se demander si ce nombre d’analvses a été suffi- sant pour établir une moyenne qui représentât bien exactement la composition réelle de l'urine. Un calcul très simple permet de cons- later qu'il en est ainsi. Chez le bœuf À, on a trouvé, d’après les dosages directs de car- bone, faits pendant huit jours seulement, que l’animal avait rejeté, pendant ce temps, dans ses urines . .. 16255,7 decarbone Ce chiffre correspond à 32.06 p. 100 de la matière sèche ; on peut l'appliquer à la quan- üté totale d'urine rejetée pendant les sept autres jours, soit 4 4555%°,4 de matière sèche, tonauiatencore. vies il 0 ration 1499 de carbone SOIR LOTUS enr. RARE Ex DAT CRPOUTUN Or. > . . ; RAD, Or, la moyenne des di no égaré DU or mate re A REAE LP OEE 20302 Il y a donc entité entre le nombre réel trouvé et le nombre calculé. Chez le bœuf B, le calcul donne 1605,1 et le dosage 1615°,3. Les nombres sont très rapprochés et on peut, sans crainte d'erreur, considérer les moyennes relatives au carbone comme aussi exactes que les autres. 238 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Voici, d’après l’ensemble des dosages, la composition de l’urine rejetée pendant un jour par les deux animaux : BŒUF A. BŒUF B Quantités d'urine rejetées, kilogr. . . . . 13.675 8.343 MatièressecHe pr lI0O EE 4.63 6.50 AZOÉCID ADO MENACE EC 0.45 0.56 Carbone ;4p.H 00 ESRI ENCRES 1.49 1.93 Acide hippurique, DADO SE EE 1.06 1.51 Carbone dégagé dans les déjections gazeuses. L'étude des gaz rejetés par l'animal a été faite d’après les mé- thodes ordinaires, déjà décrites”, basées sur l'emploi de la chambre de Pettenkofer. On sait que cet appareil est une vaste capacité métallique close, dans laquelle l'animal introduit est à l'aise ; un courant d’air entraîné par un aspirateur traverse la chambre d’une façon constante et ré- gulière. Sur le tuyau d'arrivée est monté un grand compteur qui mesure les quantités totales d'air introduites dans la chambre. On a fait pour les recherches actuelles 100 mesures semblables en 1894, en dix séries réparties sur les points les plus divers du tuyau ; on en a fait, en 1895, 60 réparties en six séries. Au moyen de quatre pelites pompes à mercure installées sur le tuyau d'arrivée et de quatre autres sur le tuyau de sortie, on prélève pour les analyses des échantillons de l'air extérieur et de l’air de la chambre et chacun des prélèvements est mesuré avant l’analyse, dans un petit compteur dont on vérifie le volume chaque fois qu’on veut s’en Servir. De cette façon, on peut avoir à chaque instant quatre échantillons d'air extérieur et autant de l’air de la chambre dans lesquels on dose le carbone à l’état d'acide carbonique. A cet effet, une moitié des échantillons est soumise au dosage direct, tandis que l’autre moitié passe, avant l’analyse, sur du kaolin platiné incandescent, de 1. Die landw. Versuc'is-Sla'ion2n. Vol. 44. 4 ÈS pr, Ea 3 ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOŒUF ADULTE. 239 manière à brûler complètement les combinaisons organiques en amenant tout le carbone à l’état d’acide carbonique. Une série d'expériences préliminaires basées sur la combustion dans la chambre d’un poids connu de carbone, a permis de vérifier l'exactitude de la méthode employée ; on y faisait brûler des chan- delles de poids et de composition bien connus et les résultats trouvés en carbone brûlé d’après les analyses de l’air recueilli sont très rap- prochés des résultats réels. Les chandelles qui ont servi à ces vérifications se composent de 99.39 p. 100 de stéarine et 0.61 p. 100 de mèche; la stéarine con- üent 79.68 p.100 de carbone (moyenne de 7 analyses concordantes) et la cellulose de la mèche 44.44 p. 100, ce qui fait pour 100 gr. de chandelle, 75.49 p. 100 de carbone, correspondant à 2765,8 d'acide carbonique. Voici, d’après les nombreuses séries d’expé- riences préliminaires faites, les quantités de carbone retrouvées par l'analyse sur 100 gr. de carbone réellement brûlé. 1894. 1895. | | Système Y. | Système VI. Système VII, SystèmeVlil. | Système V. | Système VI. | Système VII. | SystémeYlll. ER CR SE CCR ONE RER Rs | CCE ESC PER i l 1 1 Dosage direct. 1° expérience | 100,2 | 100,5 | 100,3 | 100.4 | 100,5 ro » 22 — 100531995715 .9991" 99,5 » » Après combustion des hydrocarbures. » » » » 100,2 | 100,7 | 100,0 | 100,3 100,1 | 100,7 | 100,9 | 100,4 | 100,6 | 100,8 | 100,7 | 101,0 100,1 Moyennes .| 100,4 | 100,3 | 100,3 ! 100,1 | {09,4 | 100,5 | 100,3 | 100,8 La concordance presque absolue des résultats donnés par les diverses séries est une preuve de l'exactitude de la méthode ; elle a en outre le grand avantage de permettre l'exécution d’un très grand nombre de dosages, ce qui lui donne une haute précision. Après avoir ainsi vérifié le fonctionnement des appareils, nous ) 240 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. avons commencé nos expériences sur les animaux. Nous avons publié (en annexe de l'original) Loutes les observations faites au cours de cette série de recherches ; on en peut déduire les quantités de carbone rejetées par l’animal en combinaisons gazeuses ; elles sont rassem- blées dans le tableau suivant: DOSAGE DOSAGE DIRECT. après combustion des hydro- carbures. DATES. ———— Système | Système Système | Système Ve À , VIL. Vin AS VI. Moyenne. gr. gr. gr. ' : gr. I. — Bœuf À : 1894. Ration : 8k:,5 de foin de prairie. 6 novembre. . . .[ 1 703,6 | 1 699,7 | 1 701,6 | 1 825,8 | 1 829,9 9 +... . .[1700,3 | 1 701,8 | 1 701,0 | 1 814,0 | 1 819,8 13 . . . .|1 683,1 | 1 684,8 | 1 683,9 | 1 797,7 | 1 801,6 16 . « + .| 1 688,2 | 1 688,6 | 1 688,4 | 1 804,5 | 1 805,5 20 nel 160824-8-1011677 640681214795 72141280620 moyenne . { 691,2 II. — Bœuîf B : 1895. Ration : 4 kilogr. de foin et 5 kilogr. de paille d'avoine. octobre... 118218101826, 111 824 1901093399) 1005120 .. . . .|1 886,0 | 1 902,0 | 1 894,0 | 2 013,0 | 2 025,3 {er novembre . . .| 1 866,3 | 1 881,4 | 1 873,8 | 2 004,3 | 2 012,6 3 1 892,9 | 1 908,4 | 1 900,6 | 2033,7 | 2041,8 1 905,8 |1914,9 | 1910,4 [2 041,8 | 2 058,8 En moyenne . 1 880,6 Le passage de l’air vicié sur du kaolin platiné incandescent a donc sensiblement augmenté sa richesse en CO*; ce fait prouve que les animaux dégagent un hydrocarbure qui ne peut être que ‘du mé- thane. On peut évaluer en carbone l'importance de ce dégagement qui s'élève par jour à 118 et 131 gr. et le rapporter aux quantités totales de carbone rejeté dans les déjections gazeuses; on trouve ainsi que les animaux ont respectivement dégagé, à l’état de méthane : 6,56 ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 241 chez le bœuf A et 6,51 chez le bœuf B pour 100 du carbone total rejeté dans les produits gazeux. En se livrant au même calcul sur les résultats des recherches de Kübn', on trouve des nombres supérieurs à ceux que nous venons de donner ; la moyenne de sept expériences est de 7.8 p. 100 avec variations de 7.1 à 8.7 p. 100. Cette différence s'explique par la diversité de l’alimentation em- ployée par Kübn et par nous-mêmes, car Tappeiner* a démontré que la formation du méthane était en relations étroites avec les modifi- cations subies dans le tube digeslif par certains constituants de l’ali- mentalion. En rapportant les quantités de méthane dégagées au carbone digéré, nous trouvons qu'à 100 parties de carbone digéré corres- pondent : Chez le bœuf A. .o p. 100 de carbone dègagé à l’état de méthane. — REG A — — — Ces chiffres sont encore plus faibles que ceux que nous tirons des recherches de Kühn,; la moyenne de ses sept expériences, dans les- quelles l’alimentation était très riche en matières ligneuses, donne 6.9 p. 100 avec variations de 6.0 à 7.7 p. 100. Il est impossible, dans l’état actuel de nos connaissances, de savoir la part exacæ que prennent dans celte formation du méthane les divers constituants de l’alimentation et particulièrement les matières azotées et les matières grasses. Toutefois 1l paraît fort vraisemblable que les matières azotées ne jouent qu’un rôle très faible dans ce phénomène; ce rôle est si fai- ble qu’on n’a jamais pu le mettre en évidence, même pour des rations contenant jusqu’à 1“,327 de protéine digestible. De même, on ne voit pas du tout comment les matières grasses pourraient se transformer en méthane sous l'influence des ferments de la diges- Lion. C'est donc surtout aux autres groupes de matières alimentaires 1. Loc. cil. 2. Zeitschrift far Biologie, 1584 et 1886. ANN. SCIENCE AGRON. — 9° SÉRIE. — 1598. — !1, 16 242 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. qu'appartient la production de ce gaz et Kühn a prouvé, par des expériences directes, que les matières ligneuses et non azotées de la ration le fournissaient en grandes quantités. En admettant cette hypothèse, il est facile de calculer dans quelle proportion le carbone de la partie digérée de la ration s’est trans- formé en méthane, puisque la transformation n’a porté que sur la cellulose et les produits extractifs non azotés. é D’après les chiffres donnés plus haut pour le calcul de l'utilisation de la ration, on a: QUANTITÉS DE CARBONE en grammes. Bœuf A. Bœnf B. @) Dans ra lien Mi AU PET EUME 3 352,6 3 592,2 b)Dans les excréments ".1.4:.100. 1207,0 1500,1 c) Dans la partie assimilée (a — b) . . . 2 145,6 2 052,1 d) Dans les matières azotées asämilécs (53 p. 100 de ces produits) . . . . . —232.9 112,9 e) Dans les matières grasses assimilées (76.5 p. 100 de leur poids) . . . . . 87,2 56,6 Soit en tout (d+e).. sainte 320 ,4 169.5 Reste pour la partie digestible des matières ligneuses et non azotées (c-f). . . . . — 1 S25,2 1 882,6 D'autre part, la quantité de carbone dégagé à l'état de méthane s'élève à. . . . . 118,8 131,0 SOIF DAMLOO EM ERP NES 6,5 7,0 La concordance de ces chiffres avec ceux que nous avons tirés des recherches de Kühn confirme une fois de plus son hypothèse : Le formène dégagé par les animaux provient en grande partie des ma- lières non azolées el ligneuses de la ration. Bilans d'azote et de carbone. Toutes les analyses que nous venons de faire connaitre permettent de dresser le bilan de l’azote et du carbone chez les animaux en ex- périence. ‘ Il faut toutefois attirer l’attention sur une cause d’erreur dont il ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 243 importe de tenir compte. Presque tous les physiologistes" qui ont cherché à déterminer la composition des déjections d'animaux ont constaté que les excréments solides contiennent une petite quantité d’ammoniaque qui disparaît pendant la dessiccation des matières. Grouven a trouvé, par la méthode Schlæsing, de 0.0025 à 0.0694 p. 100 d’ammoniaque dans les excréments frais du bœuf; les résul- tats varient avec la nature de l’alimentation. Henneberg et Stohmann ont dosé l’ammoniaque indirectement en déterminant la richesse en azote d’excréments séchés à la mé- thode ordinaire ou traités, avant dessiccation, par l’acide chlorhy- drique qui détermine la formation de chlorhydrate. Ils ont trouvé dans la matière sèche : EXCRÉMENTS NATURE Frastés rare de l'alimentation. par Pacide re chlorhydrique. à l’air. p. 100 p. 100 Série 10, bœuf I, foin de trèfle. nv: 2340 2.52 Série 12, bœuf Il, CAO UBE EME 2.59 USE Série 18, bœuf Il, foin, paille de froment, etc. 1:92 1.94 soit une différence de 0.18 p. 100 de la matière sèche, en faveur des excréments traités par l’acide chlorhydrique, ce qui correspond à 68,87 par jour chez le bœuf I (3*#,815 d’excréments secs par jour) et 86,15 chez le bœuf If. MM. Grandeau, Leclerc et Ballacey ont observé les mêmes faits chez le cheval, mais Pfeiffer n’a pu les mettre en évidence chez le moulon. Il est cependant très vraisemblable qu’il se forme dans l'intestin, au cours de la digestion, de grandes quantités d’ammoniaque dont une partie seulement a le temps d’être résorbée avant l'expulsion des fèces. Pour vérifier ces faits et déterminer l'importance de l'erreur qu'ils entraînent, nous avons dosé l’azote, par la méthode Kjeldahl, 1. Grouven, Bericht der Versuchs-Slation zu Salzmünde, 1864. (Rapport sur les travaux de Ja station de Salzmünde.) — -Henneberg et Stohmann, Beiträge zur Be- gründung einer rationnellen Füllerung der Wiederkiauer, 1864. — Grandeau, Leclerc et H. Ballacey, Annales, 1S92 et 1893. — Pfeiffer, Zcétschrift für physiol. Chemie, 1887. 244 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dans les excréments frais et dans les excréments séchés à la façon ordinaire. Cette détermination n’a été faite que chez le bœuf B; nous avons prélevé chaque jour quatre échantillons d’excréments frais, dans lesquels nous avons dosé l'azote par la méthode Kjeldahl, après les avoir pesés. Voici les résultats des analyses : DSNOCLODIÉ 3557, 69 1° novembre . . . 415,88 DONNE CPE ee NAME 2 — 2 Cl TE DTA ONE FL EAS KR 04 3 Pan EN TRE ATEN 28 ele HO AA 4 ia ui 02 DO EE RAS TT 5 ue NS 0 A UE BUT RME etre NAS SDS 6 AT ne LU) D RE ET CONMAT ASIE 7 a AE AC ce À à 1 8 == ML LP ATOON Soit, en moyenne, dansles 3*#,086 d’excréments rejetés chaque jour : 455,09 d’azote — 1.461 p. 100, tandis qu’on ne trouve dans les excréments séchés à la manière ordinaire que 425°,90 — 1.390 p. 100, soit une perte journalière de 2#°,19 d’azote. Sans avoir été déterminée directement, cette même perte s'élève chez le bœuf A à 5 gr. par jour; c’est du moins ce qui résulte d’une autre série de recherches qui feront l’objet d’une publication ulté- rieure. Ceci posé, voici la balance des quantités d’azote et de carbone fournies par la ration. Bœuî A. Ration : 8ks,5 de foin et 40 gr. de sel. AZOTE. CARBONE. ! : Re : gr, gr. Entré dans la ration : 8,500 de foin contenant ñ 1963 deinatiererséche 04e re Re 116,2 3 352,6 Entré dans l’eau de boisson (26 kilogr.) . . . . » 2,0 ROtAMHESIENITTES LP TER 116,2 3 394,6 Sorti dans les excréments : 2K%,5717 de matière Seche NO M ARS Te PT Me De Net 48,7 1 207,0 SOTTNAANS IUTINE MR Eee Fe eee eee 61,3 210,4 — dans les dégagements gazeux . . . . . . » 1 810,0 Motalidesisorties 4004. 7 110,0 Se. 4 Différences en faveur des entrées . . . . . . . +6,2 +1 ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. Bœuîf B. 245 Ration : 4 kilogr. de foin, 5 kilogr. de paille d’avoine et 40 gr. de sel. 3“8,494 foin sec. 4K,146 paille sèche Entré dans l'eau de boisson (26K%,211). . . . . Entré dans la ration Total des entrées. . Sorti dans les excréments : 3X,086 de matière sèche . Sorti dans l'urine . NT dans les dégagements gazeux . Total des sorties. Différences en faveur des sorties 55,31 1 613,9 DT MN AIT ENS ) 2,0 77,08 3554,2 45,09 1500,1 16,63 169,1 » 2 011,6 91,72 3680,8 RTE Ces chiffres demandent quelques explications; ils montrent que les deux animaux se sont comportés fort différemment, car le bœuf A a légèrement gagné en azote et en carbone, tandis que le bœuf B vivait aux dépens de sa propre substance. Si nous cherchons à évaluer à la manière ordinaire en viande et en graisse les modifications subies par le poids du corps (en suppo- sant à la viande une richesse de 53 p. 100 de carbone et 16 p. 100 d'azote, et à la graisse de 76,5 p.100 de carbone), nous arrivons au tableau suivant : RELA- GAIN OU PERTE. — MATIÈRES DIGÉRÉES. POIDS | 2 — Se —_——— Matières non azotées. — — TION vif. ?rotéi nu:ri- ; \ - RER Total. Viande. Graisse, tive. kilogr. | kilogr. | kilogr. | kilogr. kilogr. | kilogr. A. — Par tête et par jour. Bœuf À. — SK,5 de foin . 11161958 0,440 | 4,253 | 4,693| —— |+0,039|+ 0,139 Bœuf B. — 4 kilogr. de foin et 5 kilogr. de paille d'avoine. 611,5|10,213 | 4,240 | 4,453 B. — Par jour et pour 1 000 kilogr. Bœuf À. — Foin . 0,710 | 6,862 | 7,572 0,348 | 6,934 | 7,282 Bœuf B. — Foin et paille. 9,6 OT EN 19,9 de poids vif. —+ 0,063|+ 0,224 19.9 — 0,149 — 0,167 246 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. En tenant compte des quantités de matières azotées provenant des produits de la digestion et qui se retrouvent dans les excréments, les animaux trouvaient dans leur ration 0,465 pour le bœuf A et 0,285 pour le bœuf B, soit pour 1 000 kilogr. de poids vif 05,750 et 05,460 de matières azotées. Il résulte donc de ce tableau que la ration du bœuf B ne diffère de celle du bœuf À que par une moindre richesse en matières azotées, ce qui ne peut suffire à donner la raison des pertes importantes de graisse subies par le premier animal, pertes telles qu’il y a entre les deux animaux une différence de (0,391 de graisse pour 1000 kilogr. de poids vif. Le bœuf B ne trouvant pas dans sa ration la quantité nécessaire de matières azotées devait diminuer de poids, mais sans que cette dimi- nulion portàt surtout sur les matières grasses ; il faut donc recourir à une autre explication. Or on a observé, dans le cours des recherches, que le bœuf B était beaucoup plus remuant que le bœuf À et avait besoin, par suile, d’une alimentation plus substantielle ; mais sa ration, à base de foin et de paille, contenait une proportion de matières ligneuses supé- rieure à celle du bœuf A et l’on sait que les matières ligneuses sont relativement beaucoup moins assimilables que les autres matières non azolées. Le bœuf B avait donc deux causes d’infériorité et l’on comprend très bien que sa ration ait été insuffisante. À part ces détails, les chiffres donnés sur le bilan de l'azote et du carbone concordent absolument avec les résultats des recherches antérieures de Henneberg et Stohmann' et de Kühn*° sur les exigen- ces des bœufs adultes. Quantités d'énergies représentées par les entrées et les sorties. On mesure la quantité d’énergie que représente un aliment ou un produit de la digestion en déterminant la chaleur dégagée par la combustion de la substance examinée. Cette détermination se fait à 1, #L00.t0cit: M ULOCSCE ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOŒUF ADULTE, 247 l’aide de la bombe calorimétrique de M. Berthelot, employée déjà avec le plus grand succès par Stohmann. La description de l'appareil et celle du mode opératoire ont été souvent données et sont trop connues pour qu'il soit nécessaire de les répéter ; il suffira d’en rappeler les traits essentiels. La combustion de la matière étudiée a lieu en atmosphère d’oxy- sène comprimé sous l'influence de la fermeture d’un circuit élec- trique. À cet effet, on a disposé à l’intérieur de la bombe et en contact immédiat avec ses parois, un creuset de plaline qui touche également d'autre part un fil de fer très fin, roulé en spirale, soigneusement isolé des parois de la bombe et terminé au dehors par une borne. On fixe à cette borne l’un des fils d’une batterie et il suffit de toucher avec l’autre fil la bombe en un point quelconque de sa surface pour fermer le circuit, porter la spirale de platine au rouge et enflammer la substance étudiée. On place la matière dans le creuset, on ferme la bombe, on la charge d’oxygène à 25 atmosphères et le tout est introduit dans le calorimètre de Berthelot, cylindre de fer-blane nickelé, rempli d’eau de manière que la bombe soit complètement noyée — on connait le poids et la température initiale de cette eau. — Le tout est placé sur un pied d’ébonite dans un deuxième cylindre de cuivre à doubles parois entre lesquelles on met de l’eau. Enfin, on introduit dans le calorimètre un agitateur en fer-blanc nickelé et un thermomètre de précision de Berckmann, soigneusement vérifié, qui permet d’appré- cier au 1/2,000 de degré. Tout l'appareil est placé dans une cave sans fenêtre, maintenue par un petit fourneau à gaz, à régulateur, à la température constante de 15 à 16 degrés; on admet que l’eau du calorimètre est plus froide d’un 1/2 degré que celle du vase extérieur. Une fois que l’agitateur est en place, on couvre hermétiquement le cylindre en cuivre et on met l'agitateur en mouvement, à raison de 70 tours à la minute; après cinq minutes, pendant lesquelles s'établit l’équilibre de température, on note à la fin de chaque minute et pendant cinq nouvelles minutes les indications du thermo- mètre; à la fin de la cinquième minute, on détermine la combustion en fermant le circuit, on lit de nouveau le thermomètre Jusqu'à ce 248 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. qu'il ait atteint son maximum et, à partir de ce moment, on fait cinq nouvelles lectures espacées d’une minute. | L'expérience dure donc chaque fois environ 19 minutes, savoir : 9 pour amener à la même température l’ensemble de l'appareil, 9 pour les premières lectures, 4 pour que l’eau du calorimètre atteigne la température maximum, 5 pour les dernières lectures. À l’aide de quelques formules qui ont été simplifiées par Stoh- mann, on déduit de Loutes ces observations l'augmentation de tem- pérature due à la combustion. Quand toutes les lectures sont faites, on ouvre avec précaution le robinet de dégagement des gaz, qui s’échappent lentement : on sort la bombe, on l’ouvre et on la lave soigneusement à l’eau distillée pour enlever el recueillir l'acide nitrique qui s’est produit pendant la combustion aux dépens des matières azotées ; on la dose par le carbonate de soude en solution titrée, avec réaction colorée du mé- thylorange. Pour déduire de toutes ces données” la quantité de chaleur déga- gée par la combustion de la matière étudiée, il est indispensable de connaitre ce qu'on à appelé la « valeur en eau » de tout l'appareil, 1. Pour faire cette détermination, il faut tenir compte des pertes de chaleur qui se produisent pendant que le calorimètre s'échaufe : à cet effet, on note avec soin la température de l’eau du calorimètre : 1° À la fin de chaque minute, pendant les cinq minutes qui précèdent la fermeture du circuit ; ‘ 2° Demi-minute après la fermeture du circuit, puis de minute en minute, tant que la température augmente ; 3° Une fois le maximum atteint, on fait cinq nouvelles mesures à la fin de chaque minute écoulée. Puis, on admet que les pertes de chaleur sont données par les lois empiriques sui- vantes : 1° Pour toute minute dont la température moyenne ne diffère pas du maximum de plus d'un degré, par la loi de décroissance des cinq dernières minutes après la com- bustion ; 2° Pour des différences de température plus considérables, on ajoutera encore 0°,055 par minute; 3° Pour la demi-minute de combustion, par la loi de variation de la température avant combustion. 2. Soit : à, l'augmentation de température due à la combustion; on connait : ?, poids de la substance étudiée ; p,, poids de la spirale en fer, et €, sa chaleur spécifique ; Aq, le ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 249 c'est-à-dire la quantité d’eau à laquelle correspond, au point de vue calorifique, tout l’ensemble de l'appareil. Stohmann a fait connaître’ un moven très simple de la détermi- ner ; 1l suffit de faire brüler un poids connu d’une substance chimi- quement pure, telle que du sucre, dont on connaît la chaleur de combustion C*. Voici un exemple de celte opération : Nous avons introduit dans la bombe 16°,4890 de sucre de canne cristallisé ; le calorimètre contient 2500 gr. d’eau, l'accroissement de température s'élève, après corrections, à 2,0409 — à. Le sucre de cannes dégageant, en brûlant, 8 955*!,2 par gramme (Stohmann), les quantités de chaleur dégagées pendant la combus- tion s'élèvent à : Combustion du sucre : 1 4890 XX 3955,2 . . . . . . 5 889-:a1,3 Incandescence du fil'de fer (6M4,64). . : . .. . . . . (DRAC ÉonMROnd AGE MPIQUEL LE AE. SNS RO Tee Quantité totale de chaleur dégagée (— W) . . . . . . 5 907c1,1 Ce qui correspond à un poids d’eau de: W 59071 Mao 2 — 92 $945r,3 Nr D 20 em Pour avoir la valeur en eau du calorimètre il faut retrancher de ce poids la quantité d'eau introduite dans l'appareil, soit. . . . . . . . 2 500 .0 HE a ee EE EE 3945",3 Nous avons obtenu de cette façon les résultats suivants en opé- poids d'eau contenue dans le ealorimètre et P, la valeur en eau de l'appareil; on con- nait aussi p.. poids d'acide azotique formé et ç, sa chaleur de formation. Il est évident que. X étant la chaleur dégagée par la combustion de la matière étu- diée, on a : ÿ à (Aq + P;) = pX+pic + pc, d'où EL Q (Ag Li) — (pics + pacs) P 1. Journal f. prakt. Chemie, 1889. 2. En appliquant la formule précédente, on a en effet : ô (Aq+P,) = pc+pc, +p,c = W + W W d'où Aq—+P, — ns et P, = ——Aq 250 rant avec trois substances différentes : camphre : ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. POIDS de la sub- QUANTITÉS DE CHALEUR DÉGAGÉES dans le calorimètre. = —— 1 par la par la par le | forma- AUGMEN- TATION de tempé- rature EAU conte- nue dans le calori- sucre, acide benzoïque et VALEUR en eau de l’ap- pareil NUMÉROS. sub- stance. tion Total. mètre fildefer.| d'acide azotique =) stance. AT. F2 calories | calories | calories | calories degrés Sucre de canne. 1,4890 | 5 889. : , 7.2 1,4918 6,4 ,5625 ,6 ,6 | 6196, ,112,0409 ,412,0451 21254 Acide benzoïque. 7513, 7 608,9 7636,7 6002621893; 0 ne 21593; D ne 8158,0 7935,0 8181,3 8180,4[2,8238 | 2 896,9] 2, 159766211492 > 894.5 2. b] F7? 8204,1|2,8353 | 2 893,6 396,9 5 394,5 ,900 | 393,6 RUN ee La moyenne des neuf essais donne la valeur de 394,4, chiffre très voisin du résultat des divers essais, ce qui met en évidence la précision extrême de la méthode Berthelot. L:s matières alimentaires et les excréments solides, préalablement desséchés, brèlent sans le moindre accident dans la bombe ; il n’en est pas de mème de l’urine qui laissait toujours au début un résidu de carbone à cause de sa richesse en sels fusibles. Il a fallu recou- rir à un artifice pour assurer sa combustion complète. Il suffit pour cela de ne pas brûler l’urine elle-même, mais bien de petits cubes de papier-filtre' imprégnés d'urine et qui donnent 1. Nous recommandons tout spécialement pour cet usage les petits cylindres extrè- mement poreux que nous a livrés le D' Gaspary, chimiste de la papeterie G. Schleicher et Schüll, de Düren. ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 251 une masse assez poreuse pour que la combustion soit complète. On retranche de la quantité de chaleur trouvée celle dégagée par la combustion du papier : la différence donne les chiffres relatifs à l’urine. Voici d’ailleurs le mode opératoire : on place dan; de petits récipients de verre tarés environ 20 centimètres cubes d'urine ; on pèse et on verse le liquide goutte à goutte sur de petits cubes de papier-filtre, pesés et placés dans de petites capsules de verre, jusqu’à ce que le papier soit bien imprégné. Le mélange est desséché avec précaution et on renouvelle plusieurs fois la même opération de manière à charger les cubes de papier de 10 à 15 gr. d'urine. Malgré les incertitudes de cette méthode indirecte, l'expérience a montré que les résullats ne s’écartaient pas l’un de l’autre de plus de 0.5 p. 100. Mais il importe d’opérer la dessiceation dans le vide, pour éviter une perte de carbonate d’ammoniaque. Les échantillons d'aliments et d’excréments, séchés et mis sous forme de petits cylindres, ont dégagé, par leur combustion, les quan- tités de chaleur suivantes : PAR GRAMME PAR GRAMMK de matière sèche. de nn —— - matières A. B. Moyenne. organiques. cal cal. cal cal Foy be 4 431,2 4 429,5 4 430,3 4 767,0 BŒuURARU TS 1 FA, 1e - D AI APE Excréments . 4 613,2 4613,7 4 613,4 5 292,4 Fine APTE A 16: ND A1S, LCA TGS Bœuf B. { Paille . . . 4427,1 4433,6 4430,3 4743,4 os a 4723,7 4722;,9 4 723,3 5 280,4 La concordance dés chiffres fournis par les diverses expériences sur le même produit montre la précision de la méthode; les plus grandes différences ne dépassent pas 8 calories, soit au plus 1/2 p.100 de la valeur calorifique de l’aliment étudié. Les résultats du tableau qui précède confirment également ceux de l’analyse chimique des deux échantillons du même foin, prélevés à un an de distance pour les deux séries d'expériences; la valeur calorifique des matières organiques des deux échantillons est presque identique (4767,0 et 4168,3 calories). 252 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Il est intéressant de rapprocher ces chiffres de ceux donnés dans les recherches de Kühn sur la respiration. FOIN. EXCRÉMENTS. © © © Matière Matières Matière Matières sèche. organiques. sèche. organiques. pe = cal. cal. cal. cal. [. Expériences de 1882: : 9 5 920 °E Bœuf [. . 3 410.2 17478 4 651,2 ù 359,5 Bœuf IL . . CARE U i 624,4 5 262,8 IT. Expériences de 18S5-1886 : œuf V ue € : Bœuf NL Se | Pa UE IV. Expériences de 1890 : But AXE QI Bœuf XXI . L'ensemble de ces résultats montre que la matière sèche et la partie organique des excréments ont sans exception une valeur calo- rifique supérieure à celle des mêmes substances dans la ration; cette différence s'explique par la richesse plus grande de la substance sèche des déjections en matières ligneuses. On sait déjà par les travaux des physiologistes” que le ligneux (cellulose brute) des déjections est plus riche en carbone que celui de l’alimentation et que sa valeur calorifique est plus élevée ; on a trouvé pour celte dernière les chiffres suivants :: FOIN. EXCRÉMENTS. cal. cal. I. Expériences de 1882 : Bœuf [I . . . 4 435 4731,8 IL. Expériences de 1885-1886 : Bœuf I. 4 390,7 4742,3 IV. Expériences de 1890 : Bœuf XX . . 4454,8 4 903,7 : I. Expériences de 1894 : Bœuf À . . . 4 423,0 4 742,6 Soit, en moyenne, une différence de 300 à 350 calories par gramme, en faveur de la partie ligneuse des excréments. Il faut, pour cela, que les liquides digestifs enlèvent aux matières ligneuses de la ration une substance moins riche en carbone et de 1. Henneberg et Stohmann, — Kühn, Schultz et Aronstein, — Dietrich et Kônig, loc. cit. 293 moindre valeur calorifique que la moyenne des produits réunis et dosés sous le nom de matières ligneuses du fourrage. On peut chercher à déterminer la nature de cette partie assimilable des matières ligneuses de la ration ; il suffit pour cela d’évaluer sa valeur calorifique, ce qui est facile d’après les données que nous avons posées sur l’utilisation de la ration. Le résultat est entaché d’une erreur due à ce que la matière ligneuse extraite des fourrages ou des excréments, à la façon ordinaire, contient toujours une certaine quantité de matières azolées, dont la valeur calorifique doit être retranchée des nombres trouvés. On peut considérer cette matière azotée comme de l’albumine et lui attribuer la valeur calorifique de ce produit (5 711 calories d’après Berthelot et Stohmann); le dosage par la méthode Kjeldhal de l’azote total du ligneux donnera la correction à faire, en supposant qu’on obtient la protéine en multipliant la teneur en azote par le facteur 6,95. On obtient de cette façon les chiffres suivants : ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOŒUF ADULTE. MATIÈRES APRÈS CORRECTION cellulosiques due aux matières brutes. azotées. EE gr. cal, gr. cal. { Dans le foin. DO DRND EL, DESDITS Bœuf I. Dans les excréments. . . . 1061 — 5 026,8 1034— 4 869,2 1882 | Dans la portion assimilée, . 1790— 7617,4 1798— 7 663,6 Valeur caloritique par gramme 4255,5 4 269,3 L'Dans:ie"fontL5#. 12 213991 0533;3 2 394 — 10 503,0 Bœuf Y. Dans les exeréments. . 845 — 4 007,2 822— .3878,1 1885/86 | Dans la portion assimilée. . 1554 — 6 526,1 1572— 6624,9 | Valeur calorifique par gramme 4 199,5 4 214,3 Dans de tfomiee 4 sr) 2 335 — 10 402,0 2229103671, Bœuf XX.) Dans les excréments. . . . 7190— 3 873,9 169=%3754;0 1590 | Dans la portion assimilée. . 1 545 — 6 528,1 1560— 6613,7 Valeur calorifique par gramme 41225;,3 4 239,6 Dans le foin. : 1991 — 8 806,2 19788730 Bœuf À. \ Dans les excréments. . 7133 — 3 476,3 116— 3479,2 1894 Dans la portion assimilée. . 1258 — 35 329,9 1226222 51252;6 4 236,8 4 162,3 Valeur caloritique par gramme La moyenne des chiffres corrigés attribue à la portion assimilée 254 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. des matières ligneuses de la ration une valeur calorifique de 4219,6 calories et Stohmann a trouvé pour la cellulose pure 4185,4. Ces deux chiffres sont très voisins ; leur faible différence s’explique fort bien par les nombreuses causes d'erreurs que présentent toujours des recherches longues et délicates sur l'alimentation. On peut donc les considérer comme identiques. Stohmann avait déjà démontré l'identité de composition de la cellulose pure et de la portion assi- milée des matières cellulosiques de la ration ; c’est une nouvelle confirmation de son travail, mais cela ne suffit pas pour caractériser un terme du groupe si vaste des hydrates de carbone. La partie digé- rée du ligueux est certainement très voisine de la cellulose, mais rien ne permet encore de l'identifier complètement à cette dernière sub- slance ; toutefois, ce résultat oblige à repousser l'hypothèse de Cross et Bevan, pour qui les oxycelluloses formaient la majeure partie de la portion assimilable des matières ligneuses. On peut faire les mêmes recherches sur l'extrait éthéré de la ration et des excréments; ici encore, les malières grasses des excréments ont une valeur calorifique supérieure, comme le montrent les chiffres suivants : La valeur calorifique de la partie soluble à l’éther est de : FOIX. EXCRÉMENTS. calories calories 1882 PEUR ENTER de ENS TANX 9 160,4 9 769,0 1885-1886 PEU D NUE NT 9 892,3 TS Mec TN Le Eee 9 864,6 LRO DEUT RSR Le RU Un 20 9 055,4 9 831,4 OA SN © PARU CUP DRM NE 9 106,2 9 764,0 MONGURESS ES MER PEUT UE 9 194,0 9 S24,3 La différence s'explique parce que dans les excréments se con- centrent certaines substances réfractaires à l’action des liquides digestifs comme les résines, la chlorophylle, etc., qui ont une valeur calorifique très supérieure à celle de la partie assimilée. Il est d'ailleurs possible de déterminer la quantité de chaleur représentée par les matières solubles dans l’éther absorbées dans le cours de la digestion. Les résultats seront plus incerlains que pour ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 255 les matières ligneuses, à cause de la diversité des substances réunies sous le caractère commun de la solubilité dans l’éther ; les unes proviennent de l’alimentation, tandis que d’autres sont produites dans l'appareil digestif lui-même, et il n’est pas possible de les séparer. Voici les résultats de cinq séries d’expériences : MATIÈRES SOLUBLES A L'ÉTHER VALEUR Calor ifique la re nn ts. Différence. den 1582 Quantités. :. . gr. 206,0 124,0 82,0 » Bœuf I. Correspondant à. Cal. 1 887,0 L211:4 675,6 8 239 1885-1886( Quantités. . . . gr. 147,0 107,0 40,0 » Bœuf V. Correspondant à. Gal. 1 370,6 1 058,5 SUD 7 802 1885-1886| Quantités. . . . gr. 146,0 99,0 47,0 » Bœuf VI. | Correspondant à. Cal. 1 361,3 976,6 384,7 18185 1890 Ounantités.s. "5.67 266,0 134,0 132,0 » Bœuf XX. Correspondant à. Cal. 2 408,7 IRON 1 091,3 8 267 1894 MOUALUIÉS PME NNEr: 187,0 73.0 114,0 » Bœuf À ! Correspondantä. Cal. 1 702,9 712.8 990, 1 8 685 Les chiffres de la dernière colonne sont trop variables pour qu’on en puisse lirer une moyenne ; il est préférable de faire la moyenne des chiffres absolus des diverses expériences, soit : Gr. Calories. Matières solubles à l’éther : dans la ration . . . 952 8 730,5 — dans les excréments . 537 TIGE Différence . . . . 415 3 453,8 Ce qui donne pour la valeur calorifique. . . . . 8 322,0 La quantité de chaleur dégagée par un gramme de la portion assimilable des matières solubles à l’éther, ou plus exactement par un gramme de la différence entre les matières solubles à l’éther de la ration et celles des excréments s’élève donc, en moyenne, à 8 322 calories. Ce nombre se rapproche beaucoup, si l’on tient compte de l’incer- titude qui pèse sur sa détermination, de ceux qu'ont publiés les au- teurs pour les matières-grasses. La valeur calorifique de ces matières s'élève à 9 500 calories par gramme pour les graisses animales, d’a- 256 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. près Stohmann ; elle varie pour les huiles végétales de 9439 (huile de lin) à 9 759 (huile de navette), suivant leur provenance, et, pour la partie soluble à l’éther des graines oléagineuses de 9 262 (graine de lin) à 960% calories (graine de navette). On peut donc, avec rai- son, attribuer aux matières solubles dans l’éther des fourrages con- centrés la valeur calorifique des matières grasses et s’en servir pour le calcul des rations. À part le ligneux et les matières solubles à l’éther, le reste des matières organiques de la ration et des excréments, c’est-à-dire les matières azolées et l’ensemble de produits désignés sous le nom fort vague d’extractifs non azotés, ne peuvent être isolés; on ne peut donc déterminer directement leur chaleur de combustion. On y arrive encore assez facilement et sans de trop grosses erreurs pour les matières azotées, car il est possible de doser à part les matières albuminoïdes et les produits azotés d’autre nature et on peut attribuer respectivement à ces deux groupes la valeur calorifique de l’albumine (5711 calories par gramme) et celle de l’asparagine (3511) qui est le type le plus répandu de matières azotées non albuminoïdes. Le calcul se simplifie d’ailleurs pour les déjections qui ne contiennent que des albuminoïdes ; les produits azotés fournis par les sécrétions digestives sont trop peu importants pour agir sur les résultats. A l’aide de ce calcul, on évaluera par différence la valeur calori- fique de lextractif non azoté de la ration et des excréments. Voici la composition centésimale des rations et des excréments dans les cinq séries d'expériences : RATIONS. EXCRÉMENTS. EE > a A Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf NX Matières albuminoïdes Matières azotées non albuiminoïdes, Matières solubles à l'éther . , Matières cellulosiques Matières minérales Matières extractives non azotées, . On connaît d’ailleurs la valeur calorifique de tous les principes “Be 'É ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 294 organiques de l'alimentation ; elle s’élève pour 100 grammes de matière sèche, en calories, à: RATIONS. EXCRÉMENTS, Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf | Bœuf LE \ XX. A IA V. XX: RARES Matières nn st 21121 02: 56.025| 49.743 69.617| 62.136| 75.899 Matières amidées. . , ., 1.755 .14 4.319| 4.529 Matières solubles à l’éther.| 21.527 .622| 28.434| 23.491] 34.875| 32.615| 41.340 Matières cellulosiques. . .|143.605 : 122.3291120.4381141.281|120.5021126.515 Au total. . . . .1219,999]203. 211.1071198.2041215.710|215.283/246.754/2 La valeur calorifique de la substance sèche est de .|441.02 D : 143.03 1465.12 |173.33 |465.64 Celle de l’extrait non azoté (par différence), . . . .[221,021|220.545|227.083|244.8261219.41 |258.047|218.886|236.074 Soit, par gramme . . . .| 4571,3| 4654,7| 4592,9| 4608,1 5283,4| 5421,2| 5105,8| 5 248,4 T° © |," Moyennes. . . . . 4.584 5.265 La moyenne des 4 séries d’expériences a donné 4584 calories par gramme pour la ration et 5 265 pour les excréments ; ces nombres surpassent ceux qu’on a trouvés pour les hydrales de carbone et même ceux que nous avons publiés plus haut pour les matières ligneuses, et ce fait confirme les recherches antérieures de Henneberg el Stohmann”, de Kühn et de L. Aronstein et Schultze”, à savoir que les matières extraclives non azotées du foin et des excréments sont bien plus riches en carbone que les hydrates de carbone et les cel- luloses correspondantes. Il est possible de déterminer, par des calculs semblables à ceux qui ont été faits plus haut sur les matières ligneuses et sur les pro- duits solubles dans l’éther, la quantité d'énergie fournie par la par- lie assimilée de l’extractif non azoté. En voici le résultat : Bœuf I. Bœuf V. Bœuf XX. Bœuf A. Coeficients de digestibilité. . . . . . . 65.9 60.1 70.1 70.3 Valeur calorifique de 100 gr. de produits extractifs non azotés de la ration. Cal. 457,13 465,47 450,29 460,81 Valeur calorifique de la partie rejetée dans lesercronems 0. : . .: . Gal. 180,16 216,3 152,66 155,88 Valeur calorifique de la partie assimilée. Gal. 276,97 249,16 297,63 304,73 SPA era. embase lens. (Cal. 4203 4 146 4 246 4 335 1. Beilrage, ctc. 2. Journal f. Landw., 1867, t. Il, ANN. SCIENCE AGRON., — 2° SÉRIE. — 1898, — ni, 17 258 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE, Les 4 séries d'expériences ont donné une moyenne de 4232 calo- ries, nombre fort voisin de ceux trouvés pour les polysaccharides : 4183 pour la fécule, 4185 pour la cellulose; il est permis de croire que ces chiffres se confondent et la légère différence qu'ils pré- sentent est certainement imputable aux nombreuses causes d’er- reurs des expériences de cette sorte. Ces résultats confirment les anciennes recherches du laboratoire de Weende : la partie assimi- lable des produits extractifs non azotés a tous les caractères de lamidon. ; Tous les calculs qui précèdent donnent la mesure des quantités de chaleur, c’est-à-dire d'énergie, représentées d’une part par les divers composants de l'alimentation, de l’autre par ceux des excréments ; ils permettent donc d’évaluer : 1° Les quantités brutes d'énergie que l'animal trouve dans un poids donné de foin et la part qui revient dans cetle production d’éner- gie aux divers composants de la ration : matières albuminoïdes, graisses, etc. ; 2 Les quantités totales d'énergie réellement utilisées par l’ani- mal; ce sont celles qui correspondent à la partie assimilée ; 9° La part d'énergie réellement utile fournie par les composants de la ration. Ainsi, voici pour les animaux en expérience les quantités d’éner- gie fournies par les diverses matières organiques de la ration ; elles sont exprimées en centièmes de la chaleur produite par toute la substance sèche du fourrage. 1882 1885-1886 1890 1894 p. 100 p. 100 p- 100 p- 10) Matières albuminoïdes . . . . 12.04. 11.86 12 #49 1129 — azotécsautres. . . . 0.40 0.94 0.99 1.02 EXITAUMON ZOÉ NET NE 50.12 52.46 51-81 55.927 Matières solubles dans l’éther . 4.88 ADM 6, 49 Da 0 Résidu(ligneux "4.410007: 22000 30.73 21102 27.18 Cela veut dire que les matières albuminoïdes chez le bœuf A, par exemple, ont fourni 11.23 p. 100 de la chaleur produite par toute la substance sèche du fourrage. ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 259 La partie assimilable de la ration a la composition suivante, pour 100 gr. de matière sèche : 1882 1885-1386 1599 1694 gr. gr. gr. gr. Matières albuminoïdes . . . . 4,46 4,70 5321 4,77 Se idées. de 1. 0 0,50 (ta 1,23 1,29 — exlractives non azotées. 31,43 30,61 35 ,60 37,30 — solubles à l'éther. .. 0,93 0,56 1,56 1,57 Résidu ligneux . . . . . . . 20,85 20,76 18,37 17,37 Et sa valeur calorifique s’évalue ainsi : Calories. Calories. Calories. Calories. Matières albuminoïdes . . . , . 25 471 26 842 29 754 27 241 — 1 "Hamidéeseiens. -h 120 1N/00 4 143 4 319 4 529 — extractives non azotées . 132 100 126 909 151 158 161 912 — solubles à l’éther . . . 7 662 4 369 12 897 13 635 RéSIUMIENEUX AT E n 88 869 87 189 717 881 72 299 SOID EAU LOL re 295 S57 249 752 276 009 279 616 On peut donc calculer la part qui revient aux divers composants de la ration dans cette production de chaleur. On trouve, en cen- tièmes de la chaleur produite par la partie assimilée : P. 100 P. 109 P. 100 P. 100 Malières albuminoïides . . . . 9.96 FOËTS 10.78 9.74 — amidées. . Re 0.69 1.66 HG 1.62 — extraclives non azotées. 51.63 50.81 DA TL 21.90 — solubles à l'éther. 27 99 LOTE 4.67 4,88 Résidu lgneu ee CE RE 131178 35.03 2822 25.86 Et voici les moyennes des 4 expériences : Matières albuminoïdes . . . . . . . 10.30 — Mn ar01éestautres: "71-00 1.40 ExÉnaitenon. 20120 2 EC RE: 53.80 Matières solubles dans l'éther . . . . 3.60 RÉSIQUAREN EU MER EN RNE TP" 30.90 109.00 Ces chiffres mesurent la part prise par la portion assinilable des 260 diverses substances alimentaires dans la quantité Lotale d’énergie réellement utilisée par l'animal. Pour déterminer d’une façon exacte le bilan des quantités d’énergie entrées chez l'animal dans sa ration et rejetées par lui dans ses déjec- tions, il faut ajouter aux données précédentes les quantités de chaleur représentées par les urines et par les gaz de la respiration et de la ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. perspiration. La valeur calorifique de l'urine a été déterminée directement à raison de deux mesures pour chacun des jours de l'expérience. Voici les résultats de ces déterminations : A VALEUR calorifique | d'un gramme | de matière sè:he, QUANTITÉ de chaleur représentée par l’urine émise en un jour. VALEUR calorifique d’un gramme de matière sèche. QUANTITÉ de chaleur représentée par l'urine émise en un jour. calories calories calories calories I. — Bœuî À : 14894. II. — Bœuf B : 1895. 29 octobre . 30 2 933,6 3 079,3 2 995,3 3 017,8 3 016,4 3016,4 3 180,8 2 011,0 2011,4 2 526,1 2 638,1 1 588,4 1 424,8 6 novembre 970,3 31 È 1° novembre. Î = 1 955,8 1 880,7 1 880,7 2 085,7 1 891,3 1 894,0 i i i i 1 i ae 024,9 333,0 492,1 875,6 939,3 780,0 989,1 938,4 746,4 D 1 © Qt # 02 19 9 0990 9 = Jay 4 Moyenne .| 3035,0 923,3 Moyenne . Il faut y ajouter les quantités de chaleur représentées par les pertes d'azote qui se produisent forcément au cours des manipula- tions de l'urine ; ces pertes, évaluées en urine, s'élèvent chez le bœuf A ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEBUF ADULTE. 264 à 86°,97 et chez le bœuf B à 65,50 d’urine représentant respective- ment 21,7 et 16,5 calories. — Avec ces corrections, on trouve que les quantités moyennes de chaleur représentées par l'urine émise en un jour s'élèvent à : Chez le bœuf À . = Be Modifications et rôle des quantités d'énergie fournies par l'alimentation. Les gaz rejetés par l’animal ne contiennent d’autres produits com- bustibles qu’un hydrocarbure qui ne peut être que du méthane et un peu d'hydrogène. Encore, la proportion de ce dernier est assez faible, d’après Tappeiner, pour qu’on puisse la négliger. On connaît l'importance du dégagement du méthane ; on connaît aussi sa chaleur de combustion ; il est donc facile d'évaluer la quantité de chaleur rejetée dans les produils gazeux. Ces diverses valeurs étant calculées, voici comment s'établit pour le bœuf A le bilan de l’énergie fournie à l'animal par son alimen- lation. VALEUR VALEUR calorifique calorifique Se ee brute, de la ration. Calories. Calories. Entrées : 7*8,263 matière sèche du foin à. . 4430,3 32 177.3 100.0 : 2k,547 excréments secs à. 4 613,4 11 750,3 36.5 Sorties dans les - REETR ; Fe 2 MD 0 ,6337 urine à . . . :. 1945,0 6.1 déjections : : : J ue 0 .1584 méthane à . . . 13 216,0 2 098,2 67 Sorties fixées 0,039: viande 42.2). o 693,0 220,5 Le par l'animal : | O ,139 matières grasses à. 9 500,0 1 320,5 ; Total des sorties, . . 17 334,5 53.9 Excès des entrées sur les sorties . . . . . 14 842,8 46.1 soit 46 p. 100 de la quantité totale fournie par l’ensemble de la ration. 1. On évalue les quantités de viande et de graisse fixées par le bœuf À d'après les 262 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On trouve de la même façon pour le bœuf B: 16 729 calories, soit 47 p. 100. Voici les chiffres : À QUANTITÉS QUNNELTES de chaleur totales en p. 100 de chaleur. de celles fournies par la ration. Calories. Calories. | 3k3 494 matière sèche du Fournies dans la, foin à . . . 4430,0 15 42°,4 ralion. | 4 ,146 matière sèche de la paille à. . 4415,1 18 368,0 ROUEN ER 33 794,4 100.0 Fournies par l’ani- (0 ,09{ de viande. . . 405,5 mal lui-même. 0 ,102 de graisse. . . 969,0 Total des entrées. . 35 168,7 2 3 .086 excréments secs 14576, 1 41.4 Sorties dans les DU à os de : Teëton {0 ,5425 urine. . . . . 1 549,4 4.4 s. 3 lo bTÉTRMENANe eee 2 314,1 6.6 Total des sorties . . 18 439,6 52.4 Excès des entrées sur les sorties. . 16 729,1 47.6 Avant de discuter ces résultats, il est utile de les comparer à ceux qu’on peut tirer des recherches exécutées par le professeur Kühn. Les travaux du professeur Kühn donnent tous les chiffres nécessaires aux calculs des quantités d’énergie entrées et sorties chez les ani- maux en expérience, sauf sur un point; nous re connaissons pas les quantités d’urine émises par l’animal, mais nous connaissons l'azote rejeté dans les urines et il sera suffisamment exact, pour ces calculs, d'attribuer à 1 gr. d'azote de l’urine la valeur trouvée par nous- même: 31740 calories. On trouvera toutes les données de Kübn dans le volume XLIV de Die landwirtschaflliche Versuchs-Stalionen. résultats du bilan d'azote et de carbone donné plus haut, en attribuant à ces produits la composition suivante : C. Az. p. 100 p. 100 VIANé RUN Et cu ed ne de 53 16 Graissess sé MA Et Sie SAN 76.5 » ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOŒUF ADULTE. 263 Voici les résultats des calculs que nous venons d'exposer : QUANTITÉS QUANTITÉS totales de chaleur de en pour 100 chaleur de celles on produites calories 1 pee = FC a ration. A. Bœuf IT : té, SZ Entrées d Si Ru Lst,384 mat. sèche du foin à 4 410%1,2, 36 975,1 100.0 la ration. : 3 ,357 excréments secs à 4 624,4. . 15 524,1 42 Sorties dans \ à PRE : 1 MEchons. | 0 ,06588 azote de l'urine à 31 740 cal. . 2 091,0 5.7 : : Üo 2351 méthane à 13 246 cal. . 3114,1 8.4 Fixées par [0 ,001 viande. . 5,7| 9.3 mena LS OL DÉSERT GRASSE Ne ES ee 845,5 | AE NOTA Tes ISUTIES RCE 21 580,4 58.4 Différence en faveur des entrées . . . . . 15 394.7 41.6 B. Bœuf V: Entrées dans LTHE,784 mat, sèche du foin à 4395%1,1. 34211,5 100.0 la ration. ide dans dE 235 excréments à 4 733°1,3. . . . lo 44.8 duos F 0636 azote de l'urine à 31 740 cal. . 2 018,7 ».9 [0 ,170 méthane à 13 246 cal. . . . . 2291:8 6.6 Fixées par ko ,053 viande. . 299%6 1e l'animal. RE NME UISSE ue nider une ee 1 178,0 J Total des-sorties. - . . . : . . 21 060,5 61.6 Différence en faveur des entrées . . . . . 13 191,7 38.4 C. Bœuf VI: Entrées dans | 7 D Gun | ,703 mat. sèche du foin à 4 13313. - 338554 100.0 SRE dans (2 ,984 excréments à 4615 cal. . . . 13 765,2 40.7 is Lo ,0671 azote de l'urine. . . . . . . 2 130,0 6.3 k MP TSS 9 méthane, de: 2 208,4 1 Fixées par (0 ,039 viande. . . . . . . . . . + 220,5 c : 4.9 l'animal. Qt graisse ;pi4r) 29 2) MAIS 2 1453,5 Total des sorties. . . . . . . . 20031,6 39.2 Différence en faveur des entrées . . . . . 13 823,8 40.8 264 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. QUANTITÉS QUANTITÉS d totales se : chaleur de en pour 100 chaleur de celles en produites ; par calories. la ration. D. Bœuf XX: ji w Entrées dans 8k,482 mat, sèche du foin à 4 381°19, 37167,3 100.0 la ration. UP 2 ,981 excréments à 4 656°1,4, . . . 13 880,7 37.3 Sorties dans \ ñ NES , les déjections É :0S253$azote détiorine CR 2 641,7 LA "10561983 méthane #1 ten conteste 2 626,7 721 Fixées por O('0021 -- viande. 0728 Denaise Tan. mine 11857 ere Pamimal. +}D1LO88 graisse .. les 21021 unelts 836,0 bi Fotal-des Sorbess 7 ee 2e CO O0S 54.1 Différence en faveur des entrées . . . . . 17 063,5 45.9 Ces nombres mesurent les quantités d'énergie utilisées par l'animal pour l'entretien de ses organes el nécessaires à l'exercice de ses fonctions vitales. Il est bien évident qu'ils doivent varier beaucoup suivant les individus et les circonstances et ce fait explique les écarts entre les divers nombres donnés ci-dessus. La comparaison des résultats fournis par les deux bœufs À et B donne la mesure des variations individuelles : voici deux animaux de même poids, qui ont vécu dans des conditions identiques: même température dans l’écurie, même quantité d’eau consommée ; leurs ralions ne diffèrent, sur l’ensemble des matières digestibles, que de 5 p. 100 et, malgré ces analogies, le bœuf A rejette par jour 196,848 d’excréments et 13*,675 d'urine, tandis que le bœuf B en rejette 165,827 et 8“,343 ; le bœuf À se lient tranquille et calme dans tout le cours des expériences, tandis que le bœuf B se remue sans cesse. Pour avoir une moyenne applicable à tous les cas, ilest donc néces- saire de ne pas tenir compte, dans les calculs que nous venons de faire, des petites quantités de matières albuminoïdes et grasses fixées dans le corps des animaux d'expérience — nous tirerons ainsi de l’ensemble des recherches la mesure des quantités d’énergie nécessaires au seul entretien de la vie chez un animal adulte à poids ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOEUF ADULTE. 265 constant. Elle est donnée dans le tableau suivant, pour un animal moyen. Quantités d'énergie nécessaires au maintien de la vie d'un bœuf adulte de 63048,3 à 15°,5, PAR POUR 109 à de PAR TÊTE. 1C00 kilogr. la valeur : de : calorifique poids vif. du fourrage. Calories. Calories. Entré dans la ration . . . . 33 812,8 53 693 100 Sorti dans les excréments . . 14 154,8 22 426 41.8 dans LUNMERA ASE 2 062,6 3. 272 6.1 — dans les gaz . DEL 3 931 180) OVCU ET RSR 18 675,3 29 629 55.2 RESTO RP RE ET ne 15 167,5 24 064 44.8 Des quantités d'énergie représentées par la ration, 55 p.100 sont donc inutilisées : 42 p. 100 disparaissent avec les excréments, 6 p.100 passent dans les urines et 7 p. 100 sont dégagées à l’état de méthane — 45 p.100 seulement restent disponibles pour l'exécution des fonctions vitales (élévation à la température du corps des ali- ments, de l’eau de boisson et de l'air inspiré — régulation de la température du corps, etc.). En nombres ronds, cela fait 24000 Calories par jour pour 1000 kilogr. de poids vif ou 1 Calorie’ par kiloheure. L'animal a donc besoin, pour vivre, sans travailler, ni s’engraisser, de 1 calorie par kilo et par heure. Henneberg et Stohmann”, Rübner”, ont prouvé que ce besoin était fonction de la surface du corps et qu'il variait en sens inverse de celle-ci; voici en effet sa valeur pour quelques animaux plus pelits 1. { Galorie représente la quantité de chaleur nécessaire pour élever de 0° à 1° Ja température de { kilogr. d'eau distillée et vaut { 000 calories. 2. Zeitschrift fur Biologie, 1863. 3. Zeilschrift fur Biologie, 1863. 266 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. que les bœufs ; elle est toujours supérieure à celle trouvée pour le bœuf adulte : Chien de SLR EEE EN RARE [ea 59 — 24 ,0. 122970 — 19 ,8. 1291 SET E 1 ,92 = AMP EE D ÉTI — (Tes 2 EU —— DZ. DT Lapin de - 2 ,7. 20031 — PARU 3 ,06 Il est également possible de calculer avec les chiffres publiés dans ce travail l’effel utile physiologique de la ralion ; 11 est donné par la valeur calorifique de la matière organique assimilée de la ration. Les moyennes de 6 séries d’expériences conduisent à 3 492 calories par gramme de matière organique sèche assimilable. Voici les résultats fournis par toutes les expériences : celles de Kübhn et les nôtres; les quantités de chaleur représentées par la matière organique digestible de la ration s’élèvent pour 1 gr. à: NET La. ER E AE ce 3 616,7 calories AM OpE AO HSE ARRET 3532.5 — lb retetéq st Es 3338,7 — Se EP PO à D 3341,4 — AN PQ Len DÉTIN ne D VACE hr en rie D 3 444,5 — Soit, en moyenne. . . 3 492,5 calories On peut donc admettre que chez le bœuf adulte, à la ration d’en- tretien, un gramme de matière organique assimilable a la valeur effective de 3 Calories 5. Rübner* a fait les mêmes calculs pour l'homme ; ses résultats sont très supérieurs aux nôtres ; il a trouvé par gramme de malière assimilable : 4°,1 pour l’albumine ; 4,1 pour les hydrates de carbone et 9,3 pour les matières grasses. La divergence s'explique par les différences d'alimentation et de régime de l’homme et des animaux. 1. Rübner et Tereg, Tierische Wärme, 1890. (La chaleur animale.) ÉCHANGES D'ÉNERGIE CHEZ LE BOŒUF ADULTE. 257 Les fourrages, d’une part, sont relativement riches en matières azotées non albuminoïdes, dont l'effet physiologique est très faible ; d’un autre côté, les herbivores rejettent dans leurs excréments de grandes quantités de méthane et d’acide hippurique, à haute valeur calorifique. Il y a donc, pour les herbivores, deux causes d’infério- rité et nos résultats enlèvent toute valeur aux déductions qu’on avait cru pourvoir tirer des chiffres de Rübner en les appliquant aux animaux de la ferme. Nous voici parvenus au terme de ce travail: nous avons déterminé la valeur calorifique des entrées et des sorties chez les animaux d'expérience, et ces résultats nous ont conduit à esquisser, dans ses grandes lignes, l’économie d’énergie du bœuf adulte, à la ration d'entretien, et à fixer la valeur réelle de quelques composés orga- niques. Nous connaissons la quantité totale d'énergie dépensée par l'animal pour le maintien de sa vie; il resterait à étudier le détail de cette consommation, utilisée pour porter les aliments à la tem- pérature interne des animaux et réparer les pertes de chaleur dues au rayonnement et au dégagement de vapeur d’eau. Mais, dans l’état actuel de nos connaissances, ces recherches sont impossibles, car nous n’avons aucune base pour apprécier l’impor- tance de ces phénomènes. ENCORE UN SALT-BUSH PAR J. VILBOUCHEVITCH —— 10 95 0 0 — Les « salt-bushes » — ce qui veut dire en anglais broussaille salée — sont des salsolacées fourragères australiennes ; un certain nombre d'espèces, préconisées par feu le baron F. de Mueller, bo- taniste du gouvernement à Melbourne, ont fait l’objet d’essais de culture en terrains salants, depuis une quinzaine d’années, princi- palement en Australie, au Cap de Bonne-Espérance eten Californie ; aucune ne paraît avoir jusqu’à ce jour acquis une importance pra- tique malgré tout ce qu'on à pu en dire. À un moment donné, il semblait que le rara avis était trouvé dans l’Atriplez nummularia, mais il y a longtemps qu’on n’en entend plus parler. Enfin, voilà qu’une nouvelle espèce semble tout de même avoir conquis droit de cité dans la culture agricole, en Californie ; à la fin de 1895, M. Hilgard, directeur des stations agronomiques de cet État, écrivait à un ami: «L'Atriplexz semibaccalum occupe chez nous déjà 4000 acres; nous avons récolté et distribué 200 livres de graines » ; el à la fin de 1897 : « Cette culture continue à s’étendre, nos fermiers utilisent la plante à peu près comme si c'était de la luzerne. » Arrêlons-nous donc un instant à cet Atriplex semibaccatum, après avoir renvoyé aux sources ceux qui désireraient des renseignements ENCORE UN SALT-BUSH. 269 sur les essais antérieurs faits avec ses congénères’. Nos données sont puisées dans divers bulletins de la station agronomique de Ber- keley et dans des lettres de M. Hilgard. L’Atriplez semibaccatum est un buisson vivace, étalé, à branches couchées, graciles, extrêmement nombreuses, disparaissant sous de petites feuilles courtes et étroites (un demi-pouce à trois quarts de pouce de long sur un huitième à trois seizièmes de pouce de large) ; la touffe isolée forme sur le sol une couche circulaire verte, épaisse de 8 à 10 pouces et dont le diamètre peut atteindre 16 pieds an- glais. Les fleurs sont fort modestes ; au contraire, les fruits, cordi- formes, rouges brunâtres, longs d’un dixième de pouce, jettent une note vive. Tout en sachant se passer de salant pourvu qu’on le cultive dans un sol profond et sablonneux ou simplement léger, l’Atriplex semibac- calum supporte le salant dans des proportions extraordinaires, ce qui ne veut pas dire que, pour lui aussi, il n’y ait pas une limite ; il y a limite à tout. Avec l’esprit de méthode qui les distingue, les sa- vants agronomes de Berkeley ont établi, pour la résistance de l’Atri- plez semibaccalum au salant, des chiffres précis que, cependant, je préfère ne pas donner ici; pour être bien compris, ils demande- raient des développements que je ne puis introduire dans celte notice ; ceux que cela intéresse à titre de comparaison avec des ter- rains salants dont ils auraient la charge dans le midi de la France ou dans l'Afrique. du Nord, trouveront les chiffres en question dans une étude parue cette année aux Annales de la science agronomique francaise et étrangère et dans une autre qui y est sous presse ; ils ont, d'autre part, tout ce qu’il faut pour juger ces chiffres, dans un (ravail paru dans le même recueil en 1893 et dans le beau mémoire de M. Gastine sur la Camargue, publié au Bullelin du ministère de {. J. Nivoucneviren : Les plantes utiles des terrains salés (Mémoires de la Sociélé nationale d'agriculture de France, t. CXXXIV, p. 653). — La question des salt-bushes. — L'Atriplex nummularia (Revue des sciences naturelles ap- pliquées, 20 février 1893 et > décembre 1894); et différents autres articles parus principalement dans les publications de la Sociélé nationale d'agriculture de France et de la Sociélé nalionale d'acclimalalion de France. Sacor et Raouz : Manuel des cultures tropicales, 1° volume. 210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. l'agricullure et également aux Annales de La science agronomique française el élrangere. Je passe à l’utilisation de l’Atriplez semibaccalum : en composant la ration de trois parties de ce salt-bush en vert et d’une partie de foin ordinaire, on peut en faire manger tant qu'on veut, parait-il, aux bœufs et aux chevaux. Les moutons et les porcs consomment le salt-bush en vert, tel quel, sans addition de foin. On peut faire du foin avec l'Atriplex semibaccatum, ce qui, si jai bien compris la lettre de M. Hilgard, ne leur avait pas encore réussi en Californie avec les autres salt-bushes. Ce foin (contrairement au fourrage vert, c’est tout naturel) peut arriver à être de goût trop salé, « même pour les vaches », s’il a été récolté sur un terrain salant à prédomi- nance de chlorure de sodium (sel marin); mais, provenant de ter- rains salants à prédominance de sulfates, il a le goût et l'odeur d'un foin quelconque. € Tous les autres salt-bushes dont il avait été question jusqu'ici, m'écrit M. Hilgard, donnent une récolte inférieure à celle de l’Atri- plex semibaccatum, ou bien sont moins volontiers mangés par les bestiaux à cause de leur port ou de la nature de leurs pousses, tan- dis que celui-ci est véritablement comparable à de la luzerne. » Dans le Bulletin n°105 de Berkeley, M. Jaffa donne toutes espèces de chiffres sur la composition et la valeur nutritive de notre salt- bush ; c’est très pareil à ce qui a élé trouvé pour d’autres espèces de la famille par M. Dickson (V. le Manuel de MM. Sagot et Raoul) ; d’autres analyses viennent d’être données par M. Boname, dans son dernier Rapport annuel de la Station agronomique de l'ile Maurice (culture en climat tropical, sur terrain pauvre en sel); cette étude n'offre qu’un intérêt purement scientifique. Rendements. — 1 est extrêmement malaisé d'obtenir, pour les plantes nouvelles, des réponses complètes sur ce chapitre; je n’ai pas été plus heureux pour lAtriplex semibaccatum ; voici le seul renseignement que Je liens et qui ne me satisfait pas, vu qu’on ne me dit pas la dimension exacte de la parcelle d’essai : « D’après une expérience faite sur une petite parcelle d’essai, on devrait obtenir, par coupe, 20 tonnes de fourrage vert à l’acre, ce fourrage conte- ENCORE UN SALT-BUSH. PE À nant 79 p. 100 d’eau ; il semble que l’on pourrait faire dans le cou- rant de chaque saison deux pareilles coupes. » Je répète, c’est vague. Cullure. — « Des personnes négligentes, n'écrit M. Hilgard, trouvent de la difficulté à faire lever les graines. C’est pourquoi je recommande de semer en caisses (ou sur plate-bande avec couver- ture très mince) ; mettre en place à six pieds en tous sens ou à huit pieds, selon climat et sol. D’habitude, le sol se trouve tout couvert dans le courant de l’année ; au printemps d’après, on a de nombreu- ses plantules nouvelles venues par le fait du ressemage spontané sur les endroits demeurés libre. » M. Hilgard n’a écrit à plusieurs reprises que des quantités relati- vement considérables de graines d’Atriplez semibaccatum ont été expédiées d'Australie à des marchands de graines de Paris ; je sup- pose donc qu’il en a été vendu en France, en Algérie, en Tunisie. Que ceux qui ont essayé la plante nous disent comment ils s’en sont trouvés. Et, surtout, s’ils ont échoué, qu’ils ne se gênent pas pour nous le raconter. En fait de nouvelles plantes agricoles, les désillu- sions sont plus utiles à faire connaître que ne le sont les louanges. EPUDE SUR L'ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES PAR LE GRAIN DE BLÉ ET SON INFLUENCE SUR LA GERMINATION PAR VINCENT PROFESSEUR À L'ÉCOLE D'AGRIQOULTURE PRATIQUE DE CLION La graine confiée aa sol, dans certaines conditions, germe ; elle utilise les réserves faites à son profit par la plante et donne nais- sance à un nouvel être, qui puisera dans le milieu ambiant les éléments indispensables à son développement. L'alimentation est liée intimement avec les apports de l'air qui sont indépendants de la volonté de l’agriculteur, et ceux du sol qu'il peut modifier, non sans limites toutefois ; mais de ce côté les res- sources sont souvent bien insuffisantes, soit par suite de la nature géologique des sols, soit par la culture vampire qui y a été faite et qui s’y fait encore trop souvent actuellement. Le jeune embryon, après avoir épuisé les réserves de la graine, devra donc trouver dans les milieux extérieurs tous ses aliments. La tigelle pourvue de sa chlorophylle décompose aisément lacide car- bonique de l'air et en fixe le carbone ; la radicule prend dans le sol ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. Fe l’azote, l'acide phosphorique, la potasse, etc...., nécessaires pour satisfaire au développement rapide de la plantule ; elle doit donc rencontrer autour d'elle, et en abondance, des aliments faciles à as- similer, mais les difficultés à vaincre sont parfois grandes : le sol peut être d’une pauvreté excessive et dans ce cas la plante est condamnée à végéter pendant toute son existence. S'il est riche, il peut arriver que ses éléments soient peu assimilables, et la plante, languissante à l’origine, attendra du développement de son syslème radiculaire son propre développement ; en outre, pendant les saisons d'hiver et de printemps, la nitrification est presque nulle et partant la nutrition azotée. Le sol, à ce moment de l’année, s’il n’a subi aucun apport, est faiblement pourvu en acide phosphorique et en potasse assimi- lables, les réserves ayant été en grande partie utilisées par les récoltes précédentes. Nous avons alors pensé qu’en augmentant les réserves de la graine en principes nutritifs, on pourrait jusqu'à un certain point favoriser son premier développement et par suite la mettre mieux à même de profiter des ressources du sol, et contribuer ainsi à l’augmentation des rendements. En résumé, le problème que nous nous sommes proposé à résoudre est celui-ci : Augmenter les réserves alimentaires des graines pour permettre aux jeunes plantes de résister plus facilement à la pénurie des sols el aux intempéries, el par là acquérir un développement plus rapide el fournir des rendements plus élevés. L'exposition de celte étude est divisée en deux parties: dans la première, on examine le pouvoir absorbant des grains vis-à-vis des dissolutions nutritives ; et dans la seconde, la faculté germinative des grains traités. Dans une seconde, nous étudions dans le champ d’expériences le développement des grains traités et nous examinons s’il y a lieu de modifier la pratique des semailles en y introduisant le trempage préalable des grains. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 189$. — I, 18 274 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. PREMIÈRE PARTIE ÉTUDE SUR LE POUVOIR ABSORBANT DU BLÉ Le seul moyen pratique pour augmenter la richesse de la graine, d’une façon durable, en principes fertilisants, est de la mettre à tremper dans des dissolutions de ces principes, et de l'y abandonner jusqu’à ce qu’elle en soit saturée. Nous avions pensé immédiatement recourir à l’action de la chaleur qui eût ramolli les tissus et favorisé l’endosmose ; mais cette méthode est assez dangereuse, car il ne faut pas dépasser 50°; elle serait dispendieuse dans la pratique, où l’on ne peut, sans appareils spéciaux, régler pour longtemps, à un degré près, la température d’une solution quelconque ; en l’appli- quant, nous avons trouvé qu'après une heure de trempage, le grain n’avait fixé que 9.43 p. 100 d’eau, quantité trop faible qui nous a fait rejeter ce procédé. Ne pouvant ainsi activer plus rapidement l'absorption de l’eau, nous avons ensuite étudié celte absorption après un trempage à froid de durée variable et connue. Les déterminations approximatives faites nous ont donné pour 100 de grains : DURÉE DU TREMPAGE EAU FIXÉE. 2$ heures 30-33 46 — 41.49 73 — 47.71 Nous nous sommes arrêlé à ce chiffre pour nos expériences ; celles d'Haberlandt montrent bien que l'accumulation devient supé- rieure avec le temps, mais l’osmose croît aussi, et nous avons pensé qu'il était préférable de s’en tenir à cette durée. Les expériences furent donc faciles à établir : les grains devaient tremper trois jours dans chaque dissolution de sels, mais comme l’on sait que les dissolutions salines sont nocives pour la graine, il a fallu les graduer afin de déterminer la résistance des grains et de pouvoir choisir plus tard la ou les solutions aux litres préférables. ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 279 Les sels étudiés sont: le sulfate d'ammoniaque, le nitrate de soude, le phosphate disodique et le sulfate de potasse. L’inégale so- lubilité de ces sels n’a pas permis de faire une suite égale de disso- lutions ; avec le sulfate d’ammoniaque et le nitrate de soude on a fait huit séries aux doses suivantes: 1/2, 1, 2, 4, 6, 8, 10 et 20 p. 100 de sels ; avec le phosphate disodique, huit séries égale- ment : 1/2, 1, 2, 4, 6, 8, 10 et 13.33 ; avec le sulfate de potasse, six seulement : 1/2, 1, 2, 4, 6 et 8; enfin avec le mélange du nitrate de soude, du phosphate disodique et du sulfate de potasse on a fait six séries comprenant pour chacune une égale quantité des sels aux doses : 1/2, 1, 2, 4,6 et 8 p. 100. Le blé mis en expérience appartenait aux variétés dites « blé bleu » et « rouge inversable de Bordeaux » mélangées en proportion que nous n'avons pas pu déterminer. Nous allons donner les tableaux se rapportant à chaque étude de sel, en indiquant les conditions d'expériences, et nous réserverons pour la fin la discussion des résultats obtenus. Les procédés de dosages employés sont les suivants : L’azote nitrique a été dosé par le procédé Schlæsing, avec la liqueur normale comme base ; l’azote ammoniacal a été obtenu par distillation avec la magnésie ; l’acide phosphorique a été pesé à l’état de pyrophosphate de magnésie et la potasse à l’état de perchlorate. Les dosages d’eau ont été faits sur 20 grammes de blé. La quantité de blé employée était de 50 grammes pour chaque série, baignant dans 100 centimètres cubes d’eau. La température, pendant ces recherches, s’est maintenue entre 18 et 20°. Étude des dissolutions de nitrate de soude. 8 séries aux doses : 1/2, 1, 2, 4, 6, 8, 10 et 20 p. 100 de nitrate de soude. Le blé a été mis tremper le 8 juillet, à 3 heures du soir; on a analysé les dissolutions le 11, à la même heure ; la durée du trem- page a donc été de 72 heures. Les dissolutions prennent une teinte uniforme légèrement jau- nître ; en débouchant les flacons, on perçoit des odeurs, un peu 276 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE,. variables avec chacun, mais indiquant nettement un commencement de fermentation. Dans cette étude, pour déterminer la quantité de sel que le grain a absorbé après le trempage, on a dosé la quantité d’eau prise par le grain et, par différence entre celle introduite dans le flacon, on avait l’eau restant, baignant le grain. Déterminant ensuite la compo- sition de cette solution et connaissant les quantités de sels introduites primitivement, par différence on a le gain fait par le blé. Le nitrate de soude employé dosait 16.13 p. 100 d’azote et le blé 14.26 p. 100 d’eau. Pour faciliter les comparaisons, les chiffres des tableaux corres- pondant à l'enrichissement des grains seront calculés pour 100. Voici, dans ces conditions, les résultats obtenus: Dosages d'eau. — Absorption d’eau par le grain. EAU dissolutions. 44 blé. node à la dissolution. baignant le PR 2e Grammes. Grammes. Grammes. Grammes. 1/2 as 21,0875 13,9575 86,0425 1 Id. 20,37 13,24 86,76 2 Id. 19,27 12,14 87,56 4 Id. 18,0875 10,9575 89 ,0425 6 Id. AT? 10,0825 89,9175 8 Id. 16,9195 9,7825 90,2175 10 Id. 16,37 9,24 90, 76 20 Id, 14,9475 7,8175 92,1825 Dosages de l’azote nitrique. — Absorption d’azote par le grain. AZOTE TITRES ©" des introduit dosé absorbé absorbé pour 100 L 4 dans les dans les 4 dissolutions. dissolutions. dissolutions. par le grain. de blé. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 1/2 80,68 76,77 3,91 7,82 1 161,36 153,46 7,90 15,8 9 322,72 303,81 18,91 37,82 4 645,44 615,50 29,64 59,28 6 968,16 890,17 Ti SR) 155,95 8 1290,88 1200 ,15 90,73 181,46 10 1613,60 1499 ,9 115,7 227,4 20 3227,2 2837,3 389,9 779,8 ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. Étude des dissolutions du sulfate d’'ammoniaque. 8 séries aux doses: 1/9, 1, 9, 4, 6, 8, 10 et 20 p. 100 de sulfate d’ammoniaque. Le blé a été mis tremper le 13 juin, à 2 heures du soir ; on a analysé les dissolutions le 16, à la même heure. La durée du trempage a donc été de 72 heures. Les liquides sont sans coloration, mais ils possèdent une faible odeur de fermentation. Le sulfate d’ammoniaque dosait 18.229 p. 100 d’azote et les grains 14.26 p. 100 d’eau. 277 Dosages d’eau. — Absorption d’eau par le grain. EAU TITRES = = des primitive contenue - prise par le grain restant baignant É : : dans le grain après à la le dissolutions. du blé. l'immersion. dissolution. grain. Grammes. Grammes. Grammes. Grammes. 1/2 7,13 29 ,0225 14,8995 85,1075 1 Id. 21,4475 14,3175 85 ,6825 2 Id. 20,9075 13,7179 86,2225 h Id. 19,585 12,455 87,545 6 Id. 18,1025 10,9725 89,0275 8 Id. 17,9475 10,517 89,1525 10 Id. 17,610 10,48 S9,52 20 Id. 15,955 8,825 91,175 Dosages de l’azote ammoniacal — Absorption d'azote par le grain AZOTE TITRES des introduit dosé absorbé absorbé pour 100 : : dans les dans les par à dissolutions. dissolutions. dissolutions. le grain. de blé. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 1/2 91,1476 1932 19,215 35,430 1 182,295 156,1949 26,100 52,9 2 364,59 324,361 40,225 80,45 4 T290L8 638,360 90,82 181,64 6 1093,77 973,7649 120,005 240,01 8 1458, 36 1289, 87 175,488 350,976 10 1822,95 1667,97? 154,98 ? 309,96 ? 20 3645,9 3281 ,408 364,50 729 Étude des dissolutions du phosphate disodique. 8 séries aux doses 1/2, 1, 2, 4, 6, 8, 10 et 13,33 p. 100 phosphate disodique. de 278 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le blé a été mis tremper le 1° juin, à 11 heures du matin; les dissolutions ont été analysées le 4, à deux heures du soir ; la durée du trempage a donc été de 79 heures. Les dissolutions prennent une coloration analogue à la bière ; elle est faible pour les séries 1/2 et 1 et plus foncée pour les autres où elle devient à peu près uniforme. Les deux premières séries sont légèrement troubles, les autres sont claires. Les dissolutions laissent dégager une odeur très nette de fermen- (ation. Le phosphate disodique dosait 18.46% p. 100 d'acide phospho- rique et le grain 46.27 p. 100 d’eau. Dosages d’eau. — Absorption d’eau par le grain. EAU TITRES des primitive contenue prise par le grain restant, baignant 4 É du dans le grain après à la dans dissolutions. blé. l'immersion. dissolution, le grain, Grammes. Grammes. Grammes. Grammes. 1/2 8,135 21,595 13,460 86,540 1 Id. 21,4625 13,3275 86,6725 L Id. 20,550 12,745 87,259 4 Id. 20,5225 12,3875 S7,6125 6 Id. 19,8675 11,7325 88,2675 8 Id. 20,005 11,870 88,130 10 Id. 19,3675 11,2325 88,7675 13.33 Id, 18,7575 10,6225 89,3775 Dosages de l’acide phosphorique, — Absorption de Ph0" par le grain. PHOŸ TITRES —— E— des introduit dosé : absorbé absorbé È À dans les dans les par p. 100 dissolutions. dissolutions. dissolutions. le grain. de blé, Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 1/2 92,32 85,29 7,02 14,04 184,64 171,95 12,68 25,36 2 369,28 397,39? 11,58? | 23,16? 4 738,56 690,38 18,18 96,36 6 1107,84 10235 ,66 82,18 164,3 S 1477,12 1378,49 98,63 197,26 10 1846,4 1677.06 169,4 338,8 13.33 2461,86 2144 ,92 316,94 633,88 ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 219 Étude des dissolutions du sulfate de potasse. 6 séries aux doses 1/2, 1, 2, 4,6 et 8 p. 100 de sulfate de potasse. Le blé a été mis tremper le 8 juillet, à 3 heures du soir ; on a analysé les dissolutions le 12, à 2 heures du soir ; la durée du trem- page a donc été de 95 heures. Les dissolutions, sans coloralion, possèdent une odeur manifeste de fermentation. Le sulfate de potasse employé était chimiquement pur et les grains dosaient 14.26 p. 100 d’eau. Dosages d’eau. — Absorption d’eau par le grain. EAU TITRES TT ———————" —— — des primitive contenue prise par le grain restant, baignant x k À dans le grain après à la À dissolutions. du blé. l'immersion. dissolution. le grain. Grammes. . Grammes. Grammes. Grammes. 1f2 113 21,8675 14,7375 85 ,2625 Î Id. 21,657 14,5275 85,4725 2 Id. 20,7379 13,607 86,3925 4 Id. 19,5125 12,3825 87,6175 6 Id. 18,6875 11,5575 88,4425 8 Id. 18,2125 11,0825 88,9175 Dosages de la potasse. — Absorption de la potasse par le grain. POTASSE TITRES EEE UE des introduite dosée absorbée absorbée, À 5 dans les dans les par p. 100 dissolutions. dissolutions. dissolutions. le grain, de blé. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 1/2 270,11 275,15 Ar 10, Le 1 540,229 548,27 — 8,05 it à 2 1080,458 1072, 09 + 8,36 16,72 4 2160,916 2106,73 54,18 108, 36 6 3241,37 3093, b1 147,86 295,72 8 4321,83 4178,40 ? 143,43? 286,86? Étude des dissolutions faites du mélange des sels. L'étude de chacun des sels étant terminée, nous avons voulu savoir comment se conduirait l’absorplion en présence de plusieurs sels. Comme nous avions en vue une application agricole, nous avons éliminé le sulfate d’ammoniaque, car il diminue sensiblement la 280 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. faculté germinative, comme nous le verrons plus loin, el nous avons fait choix des trois sels suivants : nitrate de soude, phosphate diso- dique et sulfate de potasse. Pour rendre les résultats comparables, on s’est placé dans les mêmes conditions ; on a disposé six séries de 950 grammes de blé dans 400 centimètres cubes d’eau tenant 1/2, 1, 2, 4, 6 et 8 p. 100 de chacun des trois sels; le numéro 1/2 contenait donc en totalité 1.5 p. 100 de sels et le numéro 8, 24. Le blé a été mis tremper le 18 juillet, à 9 heures du matin, et il a été retiré le 21 à la même heure; la durée du trempage a donc été de 72 heures. Pendant ce temps les dissolutions se soat colorées ; le maximum de coloration n’est atteint que le deuxième jour ; elle était faible pour les séries 1/2 et 1 et beaucoup plus forte pour celles suivant, où elle était sensiblement uniforme. Le blé dosait 143.47 p. 100 d’eau et les sels employés étaient les mêmes que précédemment. Dosages d’eau. — Absorption d’eau par le grain. TITRES RE ELLE ERREUR ee € des primitive contenue prise par le grain restant, baignant dissolnions du dans le grain après à la ee f : blé. l'immersion. dissolution. le grain. Grammes. Grammes. Grammes. Grammes. 1/2 6,735 21,225 14,490 85,51 1 Id, 20,455 13,720 86,28 2 Id. 19,7225 12,9875 87,0125 4 Id. 18,070 11,335 88.665 6 Id. 17,7675 110325 88,9675 8 Id. 17.080 10,345 89,655 Dosages de l'azote. — Absorption de l’azote par le grain. TITRES CNE AMAR SERA The Reg MORE EN IRNURE Er ous" des introduit dosé absorbé absorbé : : dans les dans les : A HARUIENSSS dissolutions. dissolutions. par le grain. p. 100 de blé. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 1/2 50,68 67,83 12,89 25,70 i 161,36 168,24 UGS — 13,76 9 322,72 320,38 on s4 + 4,68 4 645,44 578,09 67,35 134,70 6 968,16 839,72 135,44 270,88 8 1290 ,88 1097,37 193,51 387,02 ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 281 Dosages de l’acide phosphorique. — Absorption de l’acide phospiorique par le grain. TITRES PHO des A Te Em au Gr so dissolutions. HPees APE EE - le grain, >. 100 de blé. dissolutions. dissolutions. RES CI ERER I Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 1/2 92,32 95,223 — 2,90 — 5,80 1 184,64 162,344 + 29,30 + 44,60 2 369,28 325,216 44,07 88,14 3 738,56 651,438 87,13 174,26 6 1107,84 888,246 ? 219,60 ° ? 8 1477,12 1250 ,27 196,85 393,70 Remarque. — Dans la série n° 6 il est très probable qu'il y a erreur ; le chiffre trouvé dans la quatrième colonne doit être le double de celui réel. | Dosages de potasse. — Absorption de la potasse par le grain. PRISES POTASSE A = des FT Le absorbée absorbée dissolutions. dointions. tions par le grain. p. 100 de blé. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 1/2 270,11 273,63 — 3,52 — 7,04 Î 540,22 5 0,82 = A), — 41,2 2 1080 ,45 1014,55 + 60,90 —+ 131,8 4 2160,91 6 3241,37 2893 ,20 348,17 —+ 696,34 8 4321.83 4009, 36 ? 312,47? 624,947? En résumant l’ensemble de ces trois tableaux, nous aurons im- médiatement sous les yeux le gain fait par 100 grammes de blé. TITRES EAU des LT dissolutions. s2hapbee. Grammes. 1/2 28,98 1 27,44 2 25,975 4 22,67 6 22,065 8 20.69 AZOTE nitrique. Milligr. BEL — 13,76 LOUE 134010 270,88 387,02 ACIDE phosphorique. Milligr. LEA + 44,6 88,14 174,26 POTASSE. Milligr, SORA io f États ? 696,34 624,94? 282 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les analyses étant exposées, nous pouvons maintenant étudier les chiffres obtenus et voir les conclusions qu’on peut en tirer. Étude des phénomènes endosmotiques produits avec le blé. Les phénomènes endosmotiques sont curieux à observer, et pour meltre un peu d’ordre dans leur exposition, nous examinerons suc- cessivement l’endosmose : {1° de l’eau, ® de chacun des sels et 3° des sels employés en mélange. 4° Endosmose de l’eau. La quantité d’eau absorbée par les grains varie avec la durée du trempage ; elle varie aussi avec la dose des sels introduits. Ainsi 90 grammes de blé placés dans l’eau pure absorbent 15,245 d’eau au bout de 72 heures, tandis que dans une dissolution de nitrate de soude ils ne prennent, à la dose de 1/2 pour 100, que 135,957 d’eau et 75,8175 seulement à la dose de 20. Mais, à une variation constant: dans la quantité des sels dissous, ne correspond pas une variation de même ordre dans la quantité d’eau absorbée ; logiquement il ne devrait pas en être ainsi, puisque ce sont très neltement les sels qui règlent l’absorption. Dans les dissolutions de sulfate d’ammoniaque, par exemple, la différence entre les quantités d'eau absorbée est de : Pour lesssériest 119 1et LEE MR Ne 05,575 — 1) 77 0 ,540 — 2 et. 0 :,3225 — 4 et G. 0 ,483 = 6ets. 0 ,155 — Set 10e 0 ,337 ? Le graphique dressé ci-contre indique nettement la marche de ces phénomènes ; sur l’abscisse sont portées les quantités d’eau, et sur l’ordonnée les titres des dissolutions. En examinant les courbes, on voit qu’elles ont une marche ana- logue ; la quantité d’eau absorbée décroît assez rapidement dans les dissolutions pauvres et diminue lentement ensuite vers 6 p. 100, ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 283 où les courbes se redressent vers la verticale. Ce fait est à noter, puisqu'il est très net pour les trois sels ; il semble indiquer un phé- nomène caractéristique dans l’absorption dont on peut donner, à Absorption de l’eau par le blé baignant dans les dissolutions salines. LE SdB A HR EnNt u [T1] ER ER eos +. EMSELNMNERERE [| £| RARE ELLE [] ARE SHARE EEE EEE “HN RES He MU te cites VAERNIINRERNUE RÉPARER EEE REE (] \) À Li — FERMENT TETE EEE ENT VIE {\ 1 k HR TEEN crebeies 2 EH ENEREAE RHIN & Error EN reRoN EEnEEEit x. EE ÉRCÉRREERERRR ER EE EEE EE ER NTES ES na HE SÉRREEH AREA ER PATTERN a e[ 1 UT = \ ; TE DFE RHONE ATEN FACE RIRE RER EEE EH HR S DECO RER CRAN 4 = RÉÉFREEERERR REF LHÉHERERÈSSS. 7 3 3 10 14 15° notre avis, l'explication comme il suit : Si on considère les sels con- tenus dans le grain à l’état libre, c’est-à-dire sans combinaison avec la matière organique, ils forment avec l’eau du grain une dissolu- tion très concentrée ; celte dissolution mise en présence d’une autre moins riche empruntera de l’eau à celle-ci, pour qu’il puisse se 284 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. former un équilibre entre elles. À mesure donc que les dissolutions employées seront plus riches en sels, elles se rapprocheront de plus en plus de celle du grain, et l'importance des échanges dimi- nuera ; c’est sans nul doute ce qui arrive vers 6 p. 100 pour les sels et vers 12 pour le mélange des sels. La courbe du mélange des sels semble mettre en défaut la théo- rie exposée ci-dessus ; avec des doses supérieures en sels, on observe une absorption d’eau plus grande, alors que, logiquement, elle devrait être inférieure ; mais cette courbe n’est pas la moyenne des trois courbes des sels dont elle est formée comme on pourrait le croire, de prime abord; elle est plus grande. Ce fait ne peut trouver son explication que dans les modifications chimiques qui se sont faites entre les sels dissous, ainsi que le font prévoir les études de Malaguti sur les sels, et le trouble apporté par eux dans les phénomènes endosmotiques, indique nettement une diminution dans la quantité de sels accumulés dans le grain. En outre, cette absorption d’eau n’est pas identique pour tous les sels; elle varie avec chacun d’eux, ainsi qu’il est facile de s’en rendre compte en étabiissant les moyennes, pour 90 grammes de grain, eten ne considérant que les six premières séries de chaque sel. NATURE DU SEL. EAU ABSORBÉE Nitrater désert En 1155,729 Sulfate d'ammoniaque . . . . . . . . 121 872 Ptosphate/disodiques een 12-5987 sulfate de DOtnsse- 1e NL 0e 1241982 2’ Endosmose des sels-engrais. L’absorption des sels croit à peu près dans le même rapport que celui des sels introduits ; logiquement, il devrait y avoir égalité ; mais ici, il faut compter avec l’individualité des grains qui joue un rôle prépondérant ; chaque grain est une personnalité qui ne peut se dérober à cerlains phénomènes généraux, mais il est plus ou moins sensible à leurs actions ; c’est le sulfate d’ammoniaque qui donne les rapports les plus vraisemblables. Il est facile de constater, de même que pour lea, que l'asorp- ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 285 tion n’est pas la même pour chacun des sels; les moyennes trouvées pour les mêmes séries sont : NATURE DU SEL. ABSORBÉ, Nitrate de soude (Az) . . . . . . . 38m8r 18 Sulfate d'ammoniaque (Az) . . . . . 78 ,63 Phosphate disodique (Ph 0%). . . . . 49 ,73 Sulfate de potasse (KO). . . . . . . 56 ,78 Ces différences proviennent de la quantité inégale des sels exis- tant déjà dans les grains et aussi de leur nature propre. Sacchse a montré, en effet, depuis longtemps, que la diffusion du chlorhydrate d’ammoniaque est plus grande que celle du chlorure de sodium et celle-ci, plus grande que celles du nitrate de soude et de liodure de potassium. Les doubles décompositions qui peuvent se produire dans l’intérieur des grains et l’osmose qui peut en résuller contri- buent aussi à ce classement. En examinant les chiffres des dissolutions potassiques, on re- marque qu'aux doses 1/2 et 1 p. 100 il y a osmose de ces sels ; les dissolutions s’enrichissent. Ce fait n’est pas unique pour la potasse ; nous allons en rencontrer plus loin d’autres exemples, et nous en donnerons l’explication quand nous aurons parlé des phénomènes osmoliques. 3° Endosmose du mélange des sels. La marche de l’absorplion est toujours la même; elle croît avec la quantité des sels dissous, mais il est à remarquer que les doses absorbées sont plus fortes, pour certains sels, que dans les dissolu- tions simples et varient même du simple au double: exemple, le phosphate disodique et le sulfate de potasse. Il faut aussi noter l’importance des phénomènes osmotiques dans ces séries ; le nitrate de soude, le phosphate disodique mais surtout la potasse en don- nent des exemples ; il semblerait que l’un des sels mis en présence exciterait ces échanges, et tout porte à croire que ce soit le phos- phate disodique. Nous pouvons maintenant vérifier l’hypothèse, sur la forme des 286 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. combinaisons solubles ou non existant dans le grain ; l'examen des échanges qui se font dans les dissolutions permet de l’accepter. Considérons tout d’abord les dissolutions potassiques et plus par- ticulièrement les séries 1/2 et 2 p. 100 ; nous voyons immédiate- ment que, pour la série 1/2, le blé perd de sa potasse et qu’il en gagne au contraire dans la série à 2. En étudiant la concentration des sels, d’une part dans le grain et de l’autre dans la dissolution, on trouve facilement la raison de ces divergences. Supposons avec Woolf que le blé renferme 14.4 p. 100 d’eau et 0.52 de potasse ; si cette potasse est libre, si elle peut entrer entièrement en dissolu- tion, sa concentration dans le grain sera pour 100 d’eau, 3.61 ; ce grain mis à tremper dans la solution potassique prend 435,735 d’eau, sa concentration tombe alors à 1.18 ; pendant ce temps, celle du liquide extérieur devient 0,390 ; on voit donc, immédiatement, par l’examen de ces deux chiffres qu’il doit y avoir osmose. Pour la série à 2 p. 100 le contraire a lieu ; le grain dans ces conditions prend 416,475 d’eau et 16"",7 de potasse ; la concen- tralion des sels est devenue 1,29 et dans la dissolution 1,472, chiffre supérieur au premier, el indiquant qu'il devait y avoir endosmose, ainsi qu’on le constate à l'analyse. La vérification est donc faite pour le sel potassique. Dans les dissolutions phosphatées, on constate une absorption dans tous les cas; c’est donc, d'après notre hypothèse, que la disso- lution a un titre supérieur à la solution interne du grain. En effet, la concentration dans le grain, pour la série 1/2, est 1,82 en admet- tant comme richesse en acide phosphorique 0.79 p. 100 ; celle de la dissolution deviént 0,116. — Dans la série à 4 p. 100, à une concentration dans le grain de 2,04, correspond dans la dissolution une concentration de 0,917. Ces chiffres, par leurs écarts considé- rables, semblent détruire entièrement notre hypothèse, mais, à notre avis, on peut facilement expliquer ces divergences : tout d’abord, il se peut très bien que la richesse supposée pour le grain soit trop élevée ; dans ce cas le chiffre de concentration diminue- rait légèrement, mais ne deviendrait pas inférieur à 0,116 ; dans le grain l’acide phosphorique doit être combiné à la potasse, à la magnésie et peut-être aussi à la chaux ; si le fait est, il existe là des ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 287 combinaisons insolubles, le phosphate de chaux et d’autres qui le sont peu; le phosphate de magnésie ; il n’y aurait donc que le phosphate de potasse et un peu de phosphate de magnésie suscep- tibles d’entrer en dissolution, et dans ce cas, alors, leur concentra- tion doit être inférieure à celle de la dissolution, afin qu’il puisse y avoir endosmose. On peut alors, en s’appuyant sur les phénomènes osmotiques, dé- terminer la quantité d’acide phosphorique susceptible d’entrer en dissolution. Supposons qu'il y ait équilibre entre les dissolutions, après les trois jours d'expériences : la solulion interne sera au titre de 0,917 ; on peut donc calculer, connaissant la quantité d’eau ren- fermée dans le grain, le poids de lacide phosphorique correspon- dant à ce titre; en faisant le calcul, on trouve, en retranchant les 96"%,36 absorbés, 280 milligrammes. Si maintenant nous détermi- nons à la quantité de potasse existant dans le grain, le poids de l'acide phosphorique correspondant, on trouve 261 milligrammes ; il ne resterait donc que 19 milligrammes d’acide formant le phosphate de magnésie qui a été dissous. Les résultats obtenus par le calcul sont conformes à ceux prévus par l'expérience, et l’on peut donc, au moyen de dissolutions de litres connus, calculer le poids des sels pouvant entrer en dissolution dans les grains el reconnaitre aussi le partage d’un acide entre les diverses bases qui l’accompagnent. Conclusion. — L’acide phosphorique dans le grain n’est pas en- tièrement soluble ; un tiers l’est à peu près immédiatement, une autre partie doit le devenir par le temps et le reste est insoluble. Les grains dans les dissolutions nitratées présentent une absorp- tion dans tous les cas; il est difficile, ici, de déterminer le titre pri- mitif de la solution interne, car le nitrate n’est pas donné dans les analyses faites sur le blé et nous n’avons pas songé à le doser, mais nous pouvons le calculer aisément, d’après ce que nous avons dit plus haut. Le litre de la dissolution après l'expérience est de 0,1064 pour la série à 1/2 p. 100 ; celui de la solution interne doit être équivalent et, comme les grains renferment 495,175 d’eau, la quan- üté d'azote nitrique est de 37%%,05 p. 100 de blé (l'azote absorbé, 7,82, a été retranché.) 288 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Il est curieux de constater le peu d'azote nitrique que renferment les grains; tout l'azote contenu y est presque en entier à l’état organique. C'est que la graine édifie d’abord d'une tout autre façon que la plante ; elle dédouble, simplifie les matières azotées, les rend solubles pour nourrir les jeunes organes qui naissent d’elle; ensuite, comme la plante, elle fait la synthèse des principes immé- diats. Mais en quoi la plante parait être supérieure à la graine, c’est qu’elle peut créer ces matières azotées que celle-ci utilise, et les créer avec des substances minérales, ce dont l’autre parait incapable ; et, l’idée de considérer les nitrates renfermés dans les grains, comme dus à un fait accidentel, non déterminé par la nature, serait assez Juste d’après le parallèle que nous venons d'établir et réglerait ainsi l'importance de cette présence. Des recherches antérieures dues à Is. Pierre montrent, pour le blé, que la plus grande quantité des sels fertilisants qui sont contenus dans le grain ont été accumulés par l’appel puissant des ovaires au moment de la maturité, mais ces sels, d’après nos expériences, semblent être sous la même forme que ceux obtenus de l’évaporalion d’une simple dissolution ; ils peuvent se remettre en dissolution dès qu'ils ont une quantité d’eau suffisante et s'échapper du grain s’ils sont placés dans de certaines condilions. Puisque lazote mitrique est libre ainsi que la potasse et une grande partie de l’acide phosphorique de toutes combinaisons orga- niques généralement insolubles, on peut se demander quels rôles ces principes ont remplis dans la plante ? Les matières fabriquées par la plante ont utilisé certainement de ces sels ; mais auparavant les cel- lules en ont réduit quelques-uns, les nitrates entièrement et quelque peu des phosphates ; les sels potassiques semblent rester en dehors. On conçoit bien l'utilité de la réduction des nitrates pour la for- mation des principes albuminoïdes ; d’une partie des phosphates pour la production d’une certaine quantité de substances quaternaires phosphorées (nucléines) ; mais à quoi servent et le reste des phos- phates non employés et la potasse tout entière ? car il est intéressant de remarquer qu’on ne la rencontre jamais dans les combinaisons organiques bien définies. L’azole est un aliment pour les plantes tout comme le carbone, PT ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES,. 289 l'hydrogène et l'oxygène ; c’est un fait incontestable. L’acide phos- phorique et la potasse semblent être plutôt des auxiliaires des cel- lules, collaborant à leur travail d'élaboration en les débarrassant peut-être, par des doubles décompositions, de certains principes nuisibles qu’elles peuvent sécréter. I n’y aurait donc ainsi aucune spécialisation dans leur action ; leur concours serait égal pour la création de toutes les substances végé- tales. Mais, il ne faudrait pas croire qu’on augmentera la puissance de ces auxiliaires en les mettant en trop grande quantité à la dispo- sition des plantes. Les végétaux placés dans ces conditions les pren- dront, mais arrivés dans les cellules leur abondance deviendra nui- sible et le travail de celles-ci sera diminué. L’azote nitrique en léger excès se conduit de même et on peut citer à l’appui les expériences d’'Hellriegel et Wilfarth sur « l’alimen- tation azotée des graminées et des légumineuses » dans lesquelles, ces expérimentateurs montrent qu’à une dose plus que suffisante de nitrate, correspond une diminution sensible dans les rendements. Les analyses comparatives de la plante et de la graine indiquent, pour celle-ci, une plus grande richesse en sels minéraux ; ces diffé- rences ont été étudiées par Is. Pierre. La migration des sels vers la graine se fait quand la plante touche à sa maturité, c’est-à-dire quand les cellules ont rempli leurs fonctions et sont près de mourir, Alors, par une sage prévoyance de la nature, l’acide phosphorique, la potasse non utilisés dans le végétal, qui n’ont plus rien à faire dans les cellules, sont entrainés dans la graine qui en aura besoin pour germer, car elle serait incapable, à ce moment, de se les pro- curer au dehors. On peut donc, par ce mode d’explication du rôle des sels dans les plantes, comprendre leur migration et leur accumulation sous forme libre dans les grains. Osmose du blé dans l’eau distillée, Pour expliquer les phénomènes endosmotiques que nous avons signalés, nous avons été obligé d'étudier l’osmose du blé placé, soit dans l’eau distillée, soit dans une solution saline connue. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — [S9S. — 11. 19 290. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 1° Osmose dans l’eau distillée. 100 grammes du même blé ont été placés dans un ballon avec 200 centimètres cubes d’eau distillée ; ils ont séjourné du 8 au 12 juil- let. La durée du trempage a été de 4 jours. Le liquide possédait une odeur très nette de fermentation; analysé avec les procédés ordinaires, il a donné pour 100 de blé: HU ADSOLDÉR A et RE NL 30*",49 EXTRAIRE SEC Aa au ane lee nt ile 0 ,349 GCendes ONG UE HULL AVES. CES? Matières organiques. .. .!.:. . .. . 0257 Acide phosphorique. . . . . . . . 0 ,0405 POLASSO 2: EST T Per ER, 29 LS 0 ,05937 AVOTPPIUUNIQUE Re PT PC EN On OT La matière organique osmosée comprend un peu de matières azotées, du saccharose et de la dextrine ; il n’y a pas trace de glu- cose. 2% Osmose du blé dans une dissolulion saline. Il nous avait semblé que les échanges devaient varier en présence d'une solution saline ; nous avons choisi le phosphate disodique, surtout intéressant par son action sur la coloration des grains. A 500 grammes de blé on a ajouté 1000 centimètres cubes d’une dissolution à 2 p. 100 de phosphate disodique ; le contact a duré du 18 au 21 juillet, soit trois jours. Le liquide analysé a donné pour 100 de grains: EAN ADSOTDES Ms eee reed, ee 285,465 Extrait sec 2 ,718S Cendres. . $ 1.938 Matières organiques. . . 0 ,8408 AZOTO"OTPANTQUE +710 ee Me Le PReEnr 0 ,02046 Potasse. "lotte: re late 0172 Acide phosphorique. 0 ,033 Il v avait présence de chaux et absence de fer dans la dissolution; ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 291 elle a donné avec le réactif de Büdecker un léger précipité, indi- quant des traces de matières albuminoïdes. En comparant ces chiffres avec ceux du tableau précédent, on re- marque comme nous l’avons vu plus haut, une diminution dans l'absorption de l’eau. La matière organique dissoute est supérieure ; il y a solubilisation importante de certains principes que nous n'avons pas déterminés, mais nous avons observé que certains grains de blé étaient privés totalement de leur coloration, et pre- naient une teinte verdälre. Une coupe microscopique pratiquée sur ceux ne présentant rien de particulier à l'œil, montre une diminu- Lion faible ou sensible dans la coloration du testa. D’après le dosage de l’azote organique, on peut conclure que les matières azotées sont peu affectées, 127"",87; ce sont donc les matières hydrocarbonées qui ont été dissoutes en plus grande quan- lité. Il serait intéressant d'étudier spécialement ce point. ’ Par suite de la présence de l’acide phosphorique on a constaté une diffusion plus grande pour la potasse ; il se produit donc dans le grain des équilibres et des échanges chimiques, comme nous Île disions plus haut. La perte en acide phosphorique que nous constatons ici, contrai- rement à ce qui s'est produit dans les autres expériences, tient uniquement dans l'absorption d’eau qui a été plus grande dans ce cas, diminuant ainsi le titre de la solution interne du grain. Les phénomènes osmotiques sont donc facilement explicables maintenant ; il y a osmose quand la dissolution à un titre inférieur à celle du grain, et l’osmose concernant la potasse sera d’autant plus grande que dans la dissolution il y aura un sel phosphaté soluble de base différente. Il est aussi utile de faire remarquer en passant la perle qu'é- prouvent les grains en sels solubles, par suite du trempage : elle atteint le dixième de la totalité des sels et affecte surtout la potasse et l’acide phosphorique qui sont si indispensables à la nutri- tion, La matière organique est aussi solubilisée et toutes ces actions ont pour résultante une diminution dans la valeur marchande et alimentaire des grains et une dépression dans le pouvoir germi- natif. 292 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Stabilité des sels accumulés dans les grains. Pour terminer avec ces études chimiques, il restait à étudier la stabilité des sels accumulés dans les grains. Le blé séché à 100° a été réduit en poudre à l’aide du moulin, puis lavé sur filtre, soit avec de l’eau bouillante, soit avec de l’eau froide. Dans l'étude complète des séries au sulfate d'ammoniaque, on a remarqué que l'entrainement des sels était aussi rapide à froid qu'à chaud. L’épuisement des grains traités au nitrate de soude et au sulfate d'ammoniaque a été poussé jusqu’à absence de coloration avec les réactifs spéciaux, et pour les autres, de résidu salin dans l’évapora- Lion d’une certaine quantilé d’eau. Azole extrait des grains trailés au sulfate d'ammoniaque. 20 grammes de blé broyé ont été lavés avec 700 centimètres cubes d’eau, qui ont été distillés avec de la magnésie. Les chiffres ci-dessous correspondent à 100 de grains. SÉRIES. AZOTE ABSORBÉ. AZOTE EXTRAIT. Milligr. Milligr. 1/2 38,43 16,57 1 52,2 29,83 2 80,45 46,40 4 181,64 92,80 6 240,01 215,44 8 350,97 913,78 10 ? 258,53 20 129 450,77 Une grande partie de l'azote peut donc être enlevée par l’eau, la moitié environ ; le reste doit être retenu par la matière organique, car il est difficile d'admettre qu'il puisse se former des combinai- sons insolubles si importantes. L’azote introduit n’est donc fixe qu'en partie, mais nous avons constalé que la parlie fixée l’était bien, car lavée avec une solution à 5 p. 100 d’acide sulfurique, elle n’abandonne que 6 milligrammes d’azote. ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 293 Ces recherches ont été poursuivies pour chaque sel, mais nous n'avons considéré qu’un petit nombre de séries. Voici les résultats obtenus également pour 100 de grains. Azote nitrique. (Eau de lavage 420 centimètres cubes.) SÉRIES. ABSORBÉ, EXTRAIT. Milligr. Milligr. 6 159 ; GS 22270 Acide phosphorique. (Eau de lavage 709 centimètres cubes.) 10 338,8 360,96 Potasse. * (Eau de lavage 700 centimètres cubes.) 295,72 1003,66 8 286,86 975,6 En résumé, en lavant les grains trailés on extrait une quantité de sels plus grande que celle introduite, exception faite pour le sulfate d’ammoniaque. Ces résultats s'expliquent aisément : l’ammoniaque n’existant pas dans les grains et la matière organique semblant la retenir, on comprend donc qu’elle puisse s’accumuler. Les autres sels, au contraire, existent déjà en quantité élevée ; ils y sont accu- mulés en grande partie sous la forme soluble ; ils peuvent, en trai- tant les grains par l’eau, entrer en dissolution et augmenter ainsi dans les liquides d'extraction la quantité introduite artificielle- ment. Il est presque inutile de faire remarquer que, si l’on employait le trempage des grains dans la pratique agricole, jamais dans le sol il ne se trouverait des doses d'humidité suffisantes pour entraîner la perte complète des sels introduits. Toutes ces considérations étant exposées, il ne nous reste plus qu’à comparer l’enrichissement obtenu avec la teneur naturelle du grain en principes fertilisants. 294 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Enrichissement du blé en sels nutritifs. Notre étude est vraie pour tous les blés; les quantums absolus seuls peuvent varier, mais non les phénomènes en eux-mêmes : nous pou- vons donc prendre pour nos comparaisons la composition moyenne du blé d’hiver donnée par le professeur Woolf et rapportée à 100. HAUSSE ES RÉRRSRS 14.40 AZOTE Re Te) Cie 2,08 Acide phosphorique. . 0.79 Potasse . 0.520 En comparant successivement à ces chiffres ceux obtenus avec les divers sels on remarque, pour les dissolutions simples : 1° Que l’azote nitrique accumulé ne devient appréciable qu'aux doses élevées ; à 20 p. 100 il atteint les 2/3 de l’azote total ; 2° Que l'azote ammoniacal suit la même marche, mais l’accumu- lation est légèrement plus forte ; 3° Que l’acide phosphorique est presque doublé dans les grains trempant dans les dissolutions à 13,33 ; dans la série à 10 il y a une accumulation de plus de moitié ; à 4 p. 100 elle en est encore le cinquième; 4° Que pour la potasse l'absorption est moins grande ; à la dose maximum l'enrichissement obtenu n’atteint que la moitié de la teneur du grain; mais il est encore important dans la dissolution à 4 p.100. Enfin, pour les sels mélangés l’accumulation devient surtout considérable à partir de la 4 série. Il y a égalité entre lazote nitrique et l’acide phosphorique ; la potasse a une valeur double : elle égale la richesse du grain, tandis que les deux autres n’en sont que le dixième et le cinquième. On voit donc, en résumé, que les grains baignant dans les disso- lutions salines peuvent s'enrichir très notablement en principes fer- tilisants, et si on oubliait, pour un moment, leur influence sur la faculté germinative, on pourrait être amené à introduire le trem- page dans la pratique agricole. Nous allons donc maintenant, dans la deuxième partie qui va suivre, étudier la germination des grains trempés. DO) (s) ST ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. DEUXIÈME PARTIE ÉTUDE SUR LA GERMINATION DU BLÉ TREMPÉ DANS LES DISSOLUTIONS SALINES Le blé ayant servi à ces expériences avait été mis à baigner dans l’eau pour en retirer les grains légers susceptibles de ne pas germer, puis il a été séché au soleil. Pendant ce trempage, il s’était enrichi en eau et l’emploi, à diverses époques, qu’on en a fait, explique les différences trouvées dans les dosages d’eau. Au sortir des dissolutions, le blé gonflé par les liquides a été séché au soleil afin de le mettre dans les conditions pratiques des semailles, el la dessiccalion a été poursuivie jusqu’à ce que la teneur en eau ne füt plus que 15 pour 100 environ; celle ordinaire du blé. Pendant cette opération, on a constaté que les grains correspondant aux dissolutions riches : 8, 10 et 20 pour 100, ont laissé s’échapper à travers leurs enveloppes une quantité appréciable de sels, de sorte que les chiffres de germination à ces doses élevées ne sont pas la représenlalion exacte des phénomènes; ils sont supérieurs à la réalité. Il aurait donc fallu, si l’on n’eûüt pas en vue cette question agricole, mettre les grains en germination immédiatement au sortir des dissolutions, pour avoir l’expression réelle de l’influence des sels aux différentes doses étudiées. Après ces opérations préliminaires, on a disposé 200 grains dans un double de ouate du commerce épaisse de deux centimètres, et on à maintenu une humidité suffisante, pendant tout le temps de la germination, avec de l’eau distillée. Les grains germés ont été comptés chaque jour à la même heure. Dans ces conditions, que l’expérience nous a montrées n’être pas trop recommandables, par suite de la mauvaise imbibition de Ja ouate qui entretient mal l'humidité des grains, on voit la germination se poursuivre longtemps, et à la fin les grains moisissent, quelques- uns même pourrissent; mais rien ne prouve, ainsi que le témoigne l'expérience faite sur le grain sans traitement, que la germination 296 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ait été diminuée sensiblement. On constate aussi la naissance de vers blancs, de quelques millimètres de longueur, qui proviennent d'œufs d'insectes déposés soil dans la ouate, soit dans le blé; ces vers s’alttaquent aux grains qu'ils dévorent avec avidité. Malgré ces inconvénients, la germination a été réussie, et nous allons donner, en un tableau, les résultats obtenus pour 100 de grains mis à germer. Tableau de la germination du blé. GERMINATION, Le blé sans traitement . 4. 2... 94%5 Le blé ayant trempé dans l'eau . . . . . 90.5 SÉRIES NITRATE SULFATE PHOSPHATE SULFATE MÉLANGE F de soude. d’ammoniaque, disodique. de potasse. des sels. 1/2 90.5 78 94 78 57.5 1 85.5 65 S8 62.5 57.5 2 67.5 5S.5 73 Gien 30.5 4 GI 49 65 50.5 1.5 6 46.5 37 Go 46 » 8 48.5 37 58 45 » 10 37 34.5 47.5 20 39.5 20 13.33 p.100 42 Il est facile de constater que les grains ayant trempé dans l’eau ont vu leur facullé germinative diminuer ; cela tient sans doute à la perte d’une certaine quantité de principes organiques solubles du grain, comme le montre l’analyse chimique que nous avons faite. Il ne peut y avoir d'autres raisons apparentes que celle-ci. On remarque aussi que la germination va diminuant à mesure que les grains considérés ont baiïgné dans des dissolutions plus con- centrées. La grande quantité de sels qu’on peut accumuler dans les grains devient donc un poison pour eux, mais cet empoisonnement est différent de ceux occasionnés par certains autres sels: tels le chlorure de sodium, etc. Si nous comparons maintenant les sels entre eux, on voit qu'ils n’ont pas la même influence sur la germination ; le plus nocif c’est le sulfate d’ammoniaque. Dans un ordre décroissant nous voyons à la suite le sulfate de potasse, puis le nitrate de soude et enfin le ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 297 RICHE ER RARE EEFRCHEREDE AH RER EIRE EEE DEEE EEE EE EEE EEE FER ER PRNEEERR | COR EE ECHECS EEE Dee EH CEE él CRÉAS RER E SERA PNR AS RNA AURA ARE DECITRE (A LL Rene Om ISUNSSEONSENSENPNITERER SENTE OUT TNITNesEl CENTER ARURETENA EN TaNee À LE D A Le 1 a se . CP HE EEE SSSR DEREERE He FN En GENE 4e ei ie — mvIRe ] [En 1e SRRÉSRRRRRE ne A I CRDI (tonte ne CRsENuE DIE uE CEE MEET [1 EE [| - [| BE ÉCÉDEEEEEEE + D rm DRE Ex ESIER SELS EBER mes ED HE id Foan CTI THTTÈ oo a oo Se [BTE fe AE ou on MORIN CLASS TENNIS ORERSSERADUSU NE ER . DE DA 1] A u 1 ERA LEP pe pee Re EEE SE RSS SR SEE AR M CEE EEE LEE PRET BE E nu HS ca : JOURS SE É [| (ss J LTIK u \ Bus n = ü n Es : [ei \| FAN HE Fe + Lin ONE \ à EN LE le : HE : ; 0 11 JCHEC ' Æ fe el su 4 CI ami î à 298 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. phosphate disodique. Ge classement est lié avec celui de l’absorp- lion des sels ; il montre que ce n’est pas seulement par la quantité de sels accumulés que la germination est influencée, mais plutôt par leur nature chimique. L'action, d’ailleurs, du sulfate d’ammoniaque n’a rien qui puisse étonner : les sels ammoniacaux se sont toujours montrés défavorables aux plantes dans toutes les expériences faites jusqu’à ce moment. Dans les dissolutions renfermant les trois sels, la germination est beaucoup diminuée ; cela lient surtout dans la quantité plus forte de sels absorbés ; mais à cela il faut ajouter que l’importance dans l’ab- sorption de la polasse n’est pas sans influence particulière : nous avons vu, en effet, dans l'échelle de nocivité que nous avons dressée, le sulfate de potasse prendre la deuxième place. La comparaison de ces chiffres, avec ceux de germination des sels pris isolément, ne montre aucune relation et est l’indice d’une marche différente dans l’absorption et l’excrétion des sels. Ainsi, le pouvoir germinatif n’est que 4,5 pour la série à 4 p. 100 dans le mélange des sels ; la concentrâtion de la solution dans ce cas est 12 p. 100, eh bien, la germination est encore supérieure à 30 p. 100 pour chacun des sels à cette dose, montrant bien qu’il doit exister une différence très grande, comme nous le pensons. De ces expériences il est un fait curieux à remarquer, c’est que la germination puisse s’accomplir, malgré une concentration énorme de sels dans le grain. Ainsi, dans les séries à 6 p. 100, elle est, en supposant que les grains renferment 14.4 p. 100 d’eau : NATURE DU SEL. CONCENTRATION. Nitraterdessoude ee ce ES eee 6.69 Sulfate d'AMMONAUE SAN ER RER. CRE 9.15 PhOSDhAte ISO DIEM PRE RE RCE SUITATE AE DOLASSE MC EEE ENT RICA CRE 3.19 Si nous ajoutons à ces chiffres celui du grain normal qui doit être compris entre 6 et 8, on trouve que dans le blé trempé donnant une germination variant de 37 à 6 le titre de la solution interne oscille entre 10 et 16 environ. Les organes végétatifs du blé sont donc très résistants aux con- ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 299 centralions de certains sels ; ces expériences montrent de plus que, quoique le sulfate d’ammoniaque soit plus nocif que les autres sels employés, il ne l’est pas autant qu’on l’a voulu dire jusqu’à ce jour ; les chiffres sont là qui le prouvent. Il nous reste maintenant, pour finir cette étude, à déterminer s’il y a avantage à opérer le trempage des grains ; mais pour bien résoudre la question, il faut envisager successivement l’action des sels isolés et l’action du mélange des sels. Dans le cas des sels agissant seuls, on remarque que la germination est encore de 50 à 60 p. 100 jusqu’à la 4° série ; elle est sans doute bien diminuée, mais l’absorption des principes nutritifs devient déjà très appréciable et il faut voir s’il peut y avoir compensation. La question posée sous cette forme ne peut être résolue dès maintenant, car si on ne considère que les résultats donnés plus haut, on n’y verra aucun avantage puisqu'il y aura perte du grain que l’on est obligé de semer en plus, par suite de la diminution dans la germination, et que l’engrais qu’on introduit n’est pas gratuit. L’expérimentation faite dans le champ d'expériences peut seule amener une conclusion définitive ; elle permettra de juger si la présence dans le grain d’une plus grande quantité de sels-engrais joue un rôle aussi important que nous le croyons, nous rangeant d’ailleurs de l’avis de la nature qui prend le soin de les y accumuler. On peut se montrer sceptique, de prime abord, pour le côté économique de la chose, mais on n’a pas le droit de conclure avant d’avoir les chiffres que nous attendons du champ d’expériences. A notre avis, il ne faudra pas, pour les sels pris isolément, prendre, pour le trempage, des solutions de plus de 4 p. 100. Dans ces con- ditions, on peut calculer facilement l'enrichissement obtenu dans l’ensemencement d’un hectare. En admettant que 200 litres de blé soient suffisants pour la semence, que l’hectolitre pèse 76 kilogr., on aura donc semé 152 kilogr. de blé, qui trempé dans la série à 4 p. 100 aura prélevé en: Nante MitrIQUe.... ue à. 897,68 Âzote ammoniacal . . - . . TIRE Acide phosphorique. . . . . . 146 ,37 Botasse ha tn MEME 164 ,16 300 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Ces quantités sont bien faibles à côté de celles nécessaires pour amener à bien une bonne récolte, mais données aux débuts de la plante, elles peuvent jouer un rôle très important. Si maintenant nous étudions la question pour le mélange des sels, on voit immédiatement, par la germinalion ct les quantités d2 sels absorbés, que l’on ne peut guère appliquer cette méthode. Pratiquement, il n’y aurait que les séries 1/2 et 1 p. 100 qui seraient intéressantes, mais on conslate qu'il y a eu osmose; le résultat obtenu est à l'encontre de celui cherché, excepté pourtant pour l'acide phosphorique, dont la quantité totale introduite dans la se- mence serait de 666,88. Ce faible résultat ne pourrait compenser les dépenses auxquelles obligerait le trempage ; ce procédé doit donc être abandonné. Cette étude perd à peu près toute valeur au point de vue agricole; il devient douteux qu’on puisse améliorer sensiblement les rendements par le trempage des grains, pas plus d’ailleurs que par l’enrobage qui, lui non plus, ainsi que d’autres procédés proposés, ne permet pas d'accroître beaucoup les réserves nutritives ; en outre, ces réserves élant placées au dehors, peuvent s'échapper du contact immédiat des grains sous l'influence de nombreuses causes, et d’aclives qu’elles étaient primilivement devenir presque neutres, à la suite des modi- fications incessantes qui se font dans les sols. On ne peut donc recommander d’expérimenter que le trempage dans les dissolutions simples, en se basant, pour le choix des sels à employer, sur la richesse des sols qu’on cultive. Si le sol à ense- mencer est pauvre en acide phosphorique, c'est dans une dissolu- tion d’un de ses sels qu’on fera le trempage, en ayant soin de ne pas employer des dissolutions supérieures à 4 p. 100. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS [. — Les grains, suivant les lois osmotiques, absorbent les sels des dissolutions dans lesquelles ils sont placés, quand la concentration de ces dissolutions est plus grande que celle qui existe naturelle- ABSORPTION DES DISSOLUTIONS NUTRITIVES. 301 ment dans le grain ; il y a excrélion quand la concentration dans le grain est supérieure à celle de la dissolution. IT. — L’absorption des sels par le grain est d'autant plus grande que les dissolutions sont plus concentrées. DL. — L’absorption est variable pour chaque sel; l’échelle dé- croissante d'absorption est la suivante : sulfate d’ammoniaque, sul- fate de potasse, phosphate disodique et nitrate de soude. IV. — Le mouillage des grains est très préjudiciable ; il se traduit par une perte sensible en matière organique, en sels nutritifs el en une diminution dans la faculté germinative. V. — Le phosphate disodique accentue l’osmose des principes contenus dans le grain ; il est un dissolvant remarquable de la matière colorante des grains et de certains principes organiques. VI. — Il tend, dans tous les cas, à se produire un équilibre entre la solution interne et la dissolution externe. VII. — De l’étude des phénomènes osmotiques, on peut déduire approximalivement la nature des combinaisons qu’affectent les sels dans les organismes et connaître leurs poids, en ayant soin d'employer des dissolutions des mêmes sels à des titres connus. VIT. — Les sels absorbés ne forment aucune combinaison stable dans le grain; ils sont simplement accumulés par les phénomènes d’osmose ; ils peuvent être entraînés totalement par des lavages, ex- cepté l’ammoniaque dont une partie est retenue. IX. — L’enrichissement des grains est faible quand les dissolutions sont peu riches, mais il devient très important quand elles sont con- centrées ; la richesse des grains peut être doublée en certains prin- cipes : exemple, pour l’acide phosphorique. X. — Tous les grains trempés germent et la faculté germinative est d’autant moindre que les dissolutions employées étaient plus con- centrées. XIE. — L'action de chaque sel sur la germination est différente ; les plus nocifs sont : le sulfate d’ammoniaque, le sulfate de potasse, le nitrate ce soude et le phosphate disodique dans l’échelle décrois- sante. XIE. — Le mélange des sels est plus nocif que leur emploi in- dividuel. 302 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. XIII. — On a beaucoup exagéré l’influence nocive du sulfate d’ammoniaque, comme le prouvent les germinations dans ses dis- solutions. XIV. — La résistance des grains, vis-à-vis des dissolutions salines, est très grande ainsi que pour les concentrations internes. XV. — L’enrichissement des grains avant la germination ne doit pas être considéré comme devant procurer de grandes ressources aux besoins de la végétation à venir ; il a pour but simplement d’aider la jeune plante à lutter contre les obstacles naturels, et lui permettre de se développer plus complètement. Comme tel, le trempage peut jouer un rôle utile. RECHERCHES SUR LA CONSOMMATION D'ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BŒUFS ADULTES A L'ENGRAIS Par MM. KELLNER et KOHLER ‘ Traduit de l’allemand par M. A. COUTURIER LICENCIÉ ÈS SCIENCES, INGÉNIEUR AGRONOME L'un des auteurs du présent travail à déjà fait connaître autrefois ses observations sur les rations qu’il faut donner à des moutons par- venus au terme de leur engraissement, pour que le poids de ces animaux reste constant. Une première expérience portail sur deux moutons gras, de deux ans, appartenant à la race wurtembergeoise et pesant l’un 56,5 et l’autre 498,75 ; les deux animaux ont reçu pendant 75 jours une ration composée de 1,25 de foin de moyenne qualité et, au bout de ce temps, ils pesaient respectivement 54 kilogr. et D156,5 ; leurs poids vifs n'avaient donc pas changé d'une manière sensible et on a pu constater, quand ils furent abattus, qu’ils étaient encore gras. Une deuxième expérience portait sur 24 moutons gras, préparés par l’école de Hohenheim en vue d’un concours agricole. Les diffé- 1. Travail fait à la station de Môckern, avec la collaboration de MM. Zielstorff, Hering. Ewers, Lehmann et Wedemeyer. (Landw. Versuchs-Stationen, 1898,t.L, p.215 à 296.) 304 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. rences constatées pendant l’engraissement entre les animaux du troupeau ont permis de les classer de la façon suivante, en sept séries : Séries a, b el c. — Composées chacune de 4 moutons âgés de Tan 3 mois, dont le poids s’est accru pendant la période d’engrais- sement de 16%5,3 pour la série a, 18*8,1 pour la série b et 15,2 pour la série c. Série d : 4 brebis de deux ans, ayant gagné au cours de l’engrais- sement 14'6,8. Série e : 3 brebis de trois ans ; augmentation de poids : 14X6,8. Série f : 5 brebis de quatre ans ; augmentation de poids : 15%8,7. Série q : 2 brebis de quatre ans ; augmentation de poids : 13%6,3. Les animaux des six premières séries sont des wurtembergeois et ceux de la série g des southdowns allemands. L’engraissement était terminé le 16 mai 1881 ; les animaux furent exposés à Stuttgart, du 20 au 23 mai; ils servirent ensuite aux ex- périences à partir du 3 juin. Jusqu’à cette date, on les avait laissés dans une très grande bergerie où ils pouvaient se déplacer en toute liberté et leur ration se composait, par jour et par tête, de 2 kilogr. de regain additionné dans les premiers jours de 0,25 d'avoine ; la ration d'avoine alla en diminuant jusqu’à suppression complète. Pour la commodité des expériences, les animaux furent isolés dans des boxes de 1 mètre sur 0",80, limités par des claies. Leur ration était d’abord de 15,25 de regain (1“,50 pour les animaux de la série g) ; après quatre semaines de ce régime, on substitua au regain une même quanlité (1*,500) d’un foin nouveau, de qua- lité médiocre, mais les moutons l’ayant refusé au bout de trois se- maines, on dut le remplacer alors par un foin de meilleure qualité qu'ils consommèrent intégralement. Une très faible partie de la li- tière fut également dévorée par les moutons en expérience; on leur donnait de l’eau deux fois par jour et du sel deux fois par semaine. Quatre moutons ont été abattus au début de l'expérience et soi- gneusement pesés ; les autres l’ont été plus tard, du 5 au 17 août, de sorte que l'expérience a duré environ 2 mois 1/2. s Nous avons rassemblé dans le tableau I toutes les pesées faites à l'abattoir, CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 309 INDICATION de la série. a) Animaux abattus au début de l'expérience. a) Moutons . j) Brebis . . b) Animaux abaltus à lu fin de l'expérience. a) Moutons . b) Moutons . | c) Moutons d) Brebis . Le) Brebis . {| f) Brebis . | 4) Brebis . Tableau I. POIDS VIF en kilogrammes DURÉK a à la fin de de la période d’en- graisse- ment, 16 mai. au début de l’expé- rience, 4 juin. l'ex- périence, 58,0 57,5 53,5 66,0 46,0 49,5 57,9 59 ,9 49,0 57,0 56,0 48,5 91,9 62,5 61,0 63,0 61,5 60,0 59,0 66,5 71,5 65,5 63,0 75,5 47,0 48,5 o6,0 97,9 48,5 04,9 56,0 48,0 50.0 60,0 61,0 62,5 60,0 59,5 58,0 65,0 67,0 65,0 63,9 73,0 66 70 75 66 75 POIDS VIF avant l’abatage . 55,5 57,0 53,5 64,0 48,0 50,5 99,9 07,5 49,5 53,0 ANN, SCIENCE AGRON, — 2° SÉRIE. — 1898. — 1. EN CENTIÈMES du poids vif. du suif (des rognons et de l'intestin). (y compris lo suif et les rognons). P. 100. P. 100. Æ OO OO CG O1 Or ot mn © D ©Q OH ©-® © D = + D © © &@ or À — [SE] 306 . ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. En faisant la somme des poids vifs des moutons el des brebis aux diverses dates où on les a pesés, on cblient les nombres suivants : A LA FIN AU DÉBUT A LA FIN de la période de de d'engraissement. l’expérience, l'expérience. kilogr. kilogr. kilogr. 9.moutons.* 1: . 474,5 466,0 476,0 11 brebis. . . . . 709,0 694,5 690, 5 Ainsi, pendant toute la durée de l'expérience, les moutons n’ont gagné que 10 kilogr. sur l’ensemble de leurs poids vifs, pendant que les brebis en perdaient 4. Ces changements sont très faibles et on peut admettre que les poids vifs sont restés sensiblement cons- tants pendant l'expérience. Peur juger de l’état d’engraissement où se trouvaient les animaux à la fin de l'expérience, il est ulile de rapprocher des nombres du tableau I les chiffres donnés par Wolff, pour les brebis grasses ; ces chiffres représentent en centièmes du poids vif de l’animal le poids des 4 quartiers et celui du suif. ANIMAUX ee —— — demi-gras. gras. très gras. Poids des 4 quartiers (y compris les HoAD DA NE rognons et le suif) . . . . . . 49.4 52.8 CUT ROIS AU SUITE ACHETER LE 7.3 10.4 12.4 La comparaison montre que les moutons abaltus au début de l'expérience n'étaient pas encore parvenus au terme de l’engraisse- ment ; ils étaient « demi-gras ». On sait d’ailleurs que des animaux soumis en très bas âge à l’engraissement, comme c’est arrivé dans notre expérience, ne fixent Ges quantités importantes de matières grasses qu'à la suite d’une alimentation très substantielle et de pre- miêre qualité, mais l'expérience que nous venons de rapporter montre que ces animaux peuvent se maintenir à l’état demi-gras, sans avoir besoin d'autre chose que d’une ration d’entretien. Les brebis, qu’elles aient été abattues avant ou après l'expérience, mérilaient, à part deux exceptions, la désignation de grasses et même de très grasses, surtout pour les sections e, f et g. Il faut rappeler à ce sujet que les femelles donnent toujours à l’abatage des poids moindres que ceux des mâles de la même race et il est évi- dent, en outre, que l’âge exerce, à partir d’une certaine limite, une CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 307 influence dépressive sur ce résultat. Quoi qu’il en soit, la plus grande partie des brebis de l’expérience ont encore donné à l’abatage, après 70 jours de ration d’entretien, de 7 à 8*£,5 de suif. Il est donc pos- sible de maintenir à un poids constant des brebis grasses soumises à la seule ration d’entrelien, à condition d’assurer leur tranquillité. Un peu plus tard, Vossler à fail des expériences semblables sur des bœufs à l’engrais. Quatre bœufs ont été nourris à la ration d’engraissement, du 2 janvier au 9 mai 1882, el ils ont augmenté de poids pendant cette période. Ils pesaient en effet : BŒUFS © DO On OV no XTE MOTO XTV, our, Lilogt, Ligue, Lies: Avant l'engraissement . . . . . 745 805 820 770 À la fin de l'engraissement . . 916 932 930 925 A ce moment, deux de ces animaux (n° II et VIID) ont été abattus; les deux autres, après une période transitoire de dix Jours, ont été nourris exclusivement de foin de prairie pendant près de deux mois, du 15 mai au 30 juin; leur ration journalière était d'environ 185,6, contenant 85,815 de matières digestibles, soit 95,5 pour 1000 kilogr. de poids vif (relation nutritive = 1/8). Ils ont légère- ment augmenté de poids : le bœuf n° XIL est passé de 945 kilogr. à 972 et le n° XIV, de 947 à 962. Le 30 juin, les deux derniers bœufs ont été abattus à leur tour et, pour se rendre compte de leur état d’engraissement, on a déter- miné, comme pour les premiers, la proportion de graisse et de viande qu’ils donnaient à l’abatage. Voici les résultats obtenus; ils sont exprimés en centièmes du poids vif : BŒUFS n° III. no VIII. n° XII. no XIV. Poids des 4 quartiers (y compris D) à = = legraanons its cn sn an, 04 56,84 07,48 59,08 Poids du suif (du cœur, de l'in- testin et du dos). . . . . . 8,20 9,00 6,59 5,31 Wolff avait trouvé pour ces mêmes rapports les valeurs suivantes : ANIMAUX RS demi-gras. gras. Poids des 4 quartiers. . . . . 20.70 60,30 SRE Et. PNR CE 2,90 4,50 308 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les deux bœufs abattus avant l'expérience (n° IE et VIT) étaient donc demi-gras ; le n° XII l'était également après les 47 jours de l'expérience, tandis que le n° XIV était gras. Ces trois séries d'expériences montrent qu’il est possible de main- tenir au même poids des animaux engraissés, en les mettant à la ra- tion d'entretien ; mais ils ne permettent pas de savoir si la substitution de cette ration d’entretien à la ration d’engraissement est suivie ou non d’une perte de viande ou de graisse. On sait en effet que les corps des animaux gras contiennent moins d’eau que ceux des ani- maux maigres et que si la graisse disparaît à la suite d’une alimen- tation insuffisante, elle peut être remplacée par de l’eau, en telles quantités que le poids vif de l’animal et les poids proportionnels des diverses parties de son corps ne soient pas modifiés. Pour être exac- tement fixé sur ce point, il est nécessaire de déterminer, suivant une méthode que nous avons antérieurement décrite, les quantités totales de carbone et d’azote entrées dans le corps de l’animal et celles qui en sont sorties. Nous avons suivi exactement, dans ces recherches, la méthode dont nous avons éprouvé l'exactitude à notre laboratoire, depuis 1881. Les animaux sur lesquels ont porté nos observations avaient déjà servi de sujets d'étude pendant leur engraissement ; ils étaient donc parfaitement habitués aux conditions un peu spéciales de lexpé- rience, exigeant, en particulier, l'absence de lilière à l’étable, le stationnement dans la chambre respiratoire, etc. Les précautions habituelles ont été prises pour écarter toute erreur provenant de résidus de l’alimentalion antérieure ; les animaux ont été soumis pendant une semaine à la ration que nous nous proposions d'étudier et dont nous déterminions, pendant les 5 jours qui ont précédé le commencement des observations, la richesse en matière sèche. Les expériences se sont prolongées de 15 à 16 jours, pendant les- quels nous avons analysé l'urine toutes les vingt-quatre heures et les déjections solides toutes les douze heures. Pour l’étude des gaz rejetés, les animaux étaient introduits à quatre ou cinq reprises dans la chambre respiratoire, où ils séjournaient chaque fois vingt- quatre heures. CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 309 Les expériences se sont poursuivies avec une grande régularité : les animaux ont mangé presque intégralement leurs rations ; les urines ont été recueillies soigneusement, sans perte ni mélange avec les déjections solides ; l'appareil de Pettenkofer a fonctionné sans accident et les vérifications faites par la combustion de chandelles d’une composition connue nous en ont donné la preuve. Bref, nous sommes en droit d'affirmer l’exactitude et la précision: des résultats que nous avons obtenus et qui seront d’un grand secours pour la solution de la question étudiée. Description des expériences. Corrections à faire pour les quantités perdues de la ration et les portions d’excré- ments qui restent adhérentes aux parois de l’étable (S{and- korrektion). a) Bœuf n° I. Le bœuf I à été acheté en août 1895 ; c'était le résultat d’un croi- sement de la race bavaroise du pays avec la race de Simmenthal. IL a servi à différentes reprises de sujet d'expériences. Soumis d’abord à la ration d’entretien, il pesait, en octobre 1895 : 600“£,5 (moyenne de 3 pesées), en mai 1896 : 748 kilogr. Sa ration fut progressive- ment augmentée jusqu’au 13 août, date à laquelle commença la pé- riode d’engraissement avec une ration composée de 5 kilogr. de foin de prairie, 3'5,9 de sons de froment, 2 kilogr. de farine d’arachides et 2 kilogr. de farine de riz ; enfin, à partir du 29 septembre, on sup- prima les farines et les sons pour réduire la ration à des quantités croissantes de foin. On atteignit ainsi le 3 octobre la dose de 9 ki- logr., maintenue pendant toute la durée des recherches que nous exposons aujourd’hui, c’est-à-dire jusqu’au 27 octobre. Voici les chiffres donnés par les pesées de l’animal pendant les 9 jours qui précédèrent le début de nos observations : DATES DES PESÉES : Octobre. TT ——— A. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr, kilogr. kilogr. kilogr. POSE AUTOUR, Zoe 75600100 T5 LA 106 5 TT TEE 5 310 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Nous avons déterminé à partir du 9 la richesse du foin en ma- tière sèche et nous avons fait porter nos observations du 13 au 97 octobre. Pendant ce temps, l’animal a été introduit 5 fois dans la chambre respiratoire, les 13, 16, 20, 23 et 27 octobre et il y est resté chaque fois exactement vingt-quatre heures, il s’y est très bien comporté, restant aussi calme qu’à l’étable et tirant parti de la tota- lité de sa ration ; il s’est couché dans la chambre respiratoire pen- dant 5 h. 43 m. la première fois (13 octobre), 6 h. 28 m. le 16, 7 h. 10 m. le 20, 8 h. 54 m. le 93 et 11 h. 5 m. le 27. Au début de l’expérience, le 13 octobre, nous avons trouvé dans la mangeoire 13 grammes de foin que l’animal avait délaissés ; à la fin de l'expérience il y en avait 146,4; d’après ces chiffres, il y avait donc chaque jour une petite quantité de fourrage non utilisé correspondant à 8 grammes de matière sèche, dont nous aurons à tenir compte dans nos calculs. Le bœuf I recevait chaque jour 9 kilogr. de foin à 87.90 p. 100 de matière sèche, soit 7*#,311 de matière sèche dont 8 grammes restaient dans la mangeoire ; l’animal avait donc réellement absorbé: 7,311 — 0,008 — 75,303. De petites quantités d’excréments se fixaient aux parois de l’étable et de la chambre respiratoire ; elles ont été recueillies par lavage et pesées après dessiccation. On a trouvé : Provenant de la chambre respiratoire : Le 13 octobre. 41%,7 à 91.29 p. 100 de matière sèche — 385,1 Le 16 — 41 ,3 90.99 == = +, 374,6 Le 20 — 19",#1,,,90%81 — — =" T6 Le 25 — 2 OO EU ns ee MO LP 120,800 08 — — = 6672 Total, en » jours. — 179%°,4 Provenant de l'étable : En 10 jours. . 254%,0 à 91.47 p. 109 de matière sèche — 232 ,3 Total, en 15 jours. — 4115,7 Moyenne par jour: 27 grammes de matière sèche qu’il faudra ajouter aux poids des déjections recueillies directement. CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 311 b) Bœuf n° 11. Le bœuf n°11, de même race que le n° [, avait été l’un des sujets étudiés au cours de nos précédentes recherches, en 1895, sur les échanges de matière et d'énergie chez les animaux soumis à la ration d'entretien ‘. Il nous servit ensuite, pendant l’hiver 1895 et le prin- temps 1896, à des études sur la ration de travail, pendant lesquelles son poids s’éleva de 611,5 à 672%€,5 ; puis 1l reçut jusqu’au 13 août une alimentation moins riche et fut enfin engraissé de la même façon que le n° [. A la fin de l’engraissement, 1l pesait : DATE DE LA PESÉE : Octobre. 47. 18. 19: 20. 21. 22. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. Poids. . . 764 769 764,5 760,5 756 751,5 A partir de ce moment, nous lui avons donné la ration que nous voulions étudier ; elle se composait de 6 kilogr. de foin, 3 kilogr. de sons de seigle et 40 grammes de sel marin que l’animal absorbait sans laisser aucun reste. Il pesait alors : DATE DE LA PESÉE : Octobre. EE M 23. 24. 25. 26. 27. 28. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr, kilogr, Poids 10e 756 Toi 756 756 756 755,5 L'expérience a commencé le 29, cinq jours après que nous eûmes déterminé la teneur en matière sèche des fourrages de la ration ; eile s’est conlinuée jusqu’au 13 novembre, soit pendant 16 jours. L'animal a été introduit cinq fois dans la chambre de Pettenkofer : le 29 octobre et les 1°, 6, 10 et 13 novembre; il s’y est montré moins tranquille qu’à l’étable et ne s’est presque pas couché : pen- dant seulement 4 h. 36 m. le 29 octobre, 1 h. 55 m. le 1° novembre, 3 bh. 35 m., 4h. 8 m. et 6 h. 36 m. les autres fois. Mais il a totale- 1. Voir les Annales, 2° série, 1898, t. Il, p. 229 et suivantes. 912 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ment consommé sa ration; de petites quantités qu’il avait laissées (100 grammes le 29 octobre, 32 grammes le 6 novembre, 19 gram- mes le 10 novembre, 26 grammes le 12 novembre et 185,5 le 13 novembre) lui ont été données au repas suivant, de sorte qu’il n’y a eu de ce fait d'autre perte, sur les 96 kilogr. de foin qui ont été consommés pendant les 16 jours d'expérience, que 185,59 corres- pondant à 16 grammes de matière sèche qui restaient dans le râtelier le dernier jour de l'expérience. Voici comment s’établit le compte de l'alimentation donnée au bœuf n° IX : 1° Du 29 octobre au 13 novembre : 96 kilogr. de foin à 86.63 p. 100 de matière sèche. . — 834,168 NON LUTINSE st 0 ae ne PER EC PSE 0 ,0f6 Fourrage réellement consommé. 8348, 152 29 Du 29 octobre au ? novembre : 15 kilogr. de sons de seigle à 87.61 p. 100 de matière sèche. — 134,142 Du 3 au 7 novembre : 15 kilogr. de sons de seigle à 87.18 p. {00 de matière sèche. — 13 ,077 Du 8 au 13 novembre : 15 kilogr. de sons de seigle à 87.28 p. 100 de matière sèche. — 15 ,710 Soit en 16,jours. . ..….,. 415,929 Ce qui donne une moyenne quotidienne de : Matière sèche du foin. +; . . +21. . 55,197 Un seigle ee EE SR SD Gp quantités réellement consommées par l’animal. On a recueilli, par lavage, les quantités suivantes de déjections attachées aux parois de la chambre respiratoire et de l’étable : Pour les 5 jours de séjour dans la chambre de Pettenkofer . 342%,1 à 92.52 p. 100 — 316%,5 de matière sèche. Pendant les 11 jours de séjour dans l'étable. .".:, 7, .- 486,0 à 56.70 p. 100 — 471,7 — Soit en 16 jours, . . . . . . . 713,1%°,9 de matière sèche. Moyenne par jour : 46 grammes de matière sèche qu'il faut ajou- Ler aux quantités recueillies directement. CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 313 c) Bœuf n° LIL. C'était un croisement Simmenthal et bavarois, que nous avons acheté à la fin du mois d’août 1896. Après une alimentation formée exclusivement de foin, il pesait, vers la fin de septembre, 650 kilogr. Au cours de différentes expériences qui durèrent de décembre 1896 à fin mai 1897, son poids s’éleva jusqu'à 770%6,3. Il reçut alors une alimentation moins riche, puis fut mis à son tour à l’engrais, jus- qu’en septembre ; après quoi, sa ration fut progressivement rem- placée par la ration que nous voulions étudier; la substitution était complète le 9 octobre et, à partir de cette date, le bœuf n° IT a reçu chaque jour : 6 kilogr. de foin, 5 kilogr. de cossettes additionnées de mélasse (Melasseschnitzel) et 1 kilogr. de sons de seigle. Il pesait alors : DATE DES PESÉESs : Octobre. 14. 15. 16. Are 18. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. POidS NT 859,5 S50 860 857,5 858,5 Les observations commencées le 19 octobre se sont poursuivies sans accidents pendant 15 jours. L'animal n’a été introduit que quatre fois dans la chambre de Pettenkofer, parce que quelques parties du ventilateur qui l’actionne ont dù être remplacées ; il s’y est montré très tranquille, s’y couchant aussi bien qu’à l’étable, pendant 7 h. 4 m. la première fois; 11 h. 48 m., 10 h. 51 m.et 11 h. 98 m. ies autres. De très petites quantités de la ration, que l’ani- mal avait laissées dans la chambre respiratoire (618,5, 375,49 et 48 grammes) ont été rajoutées aux rations des jours suivants et con- sommées intégralement ; nous avons trouvé le dernier jour un résidu de 45 grammes qui doit être retranché de la quantité totale d’ali- ments offerts. L’animal a consommé pendant les 45 jours d'expérience : 1° Du 19 octobre au 2 novembre : 90 kilogr. de foin à 86.36 p. 100. — 77,725 de matière sèche. RESTE DONAUMISÉ ES 12 ra OUEN; O0 ,045 — Quantité réellement consommée . — 774,680 de matière sèche, 314 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 20 Du 19 au 23 octobre : 25 kilogr. de cossettes et mélasse à 86.60 p. 109. . . . . . . . — 216,652 de matière sèche. Du 24 au 28 octobre : 25 kilogr. de cossettes et mélasse à B6/S6 TN TOU> MP AE ET RAGE — Du 29 octobre au 2 novembre : 95 kilogr, de cossettes et mélasse à 86/50 pislOD some," DE ART — Total en 15 jours. . — 643,917 de matière sèche. 3° Du 19 au 23 octobre : 5 kilogr. de sons de seigle à 86.71 p. 100 — 4K%,335 de matière sèche. Du 24 au ?8 octobre : 5 kilogr. de sons de seigle à 86.58 p. 100 — 4 ,329 — Du 29 octobre au 2? novembre : 5 kilogr. de sons de seigle à 86.56 p. 100 — 4 ,328 — Total en 15 jours. . . . 123,992 de malière sèche. Soit, en moyenne par Jour : Matière sèche du foin . ee À 5) ml — de pulpe à la mélasse . . 4 :,328 — de sons de seigle . (6) Enfin, voici les quantités d’excréments recueillies après les parois de l’étable et de la chambre de Pettenkofer : + Pendant les 4 jours de séjour dans l'appareil de Pettenkofer. . . 177 gr. à 91.40 p. 100 = 1615%",8 de matière sèche. Pendant les {{ jours de séjour dPétables av EU SES 0er 2199M0/p.100=R33%8 — Total en 15 jours . . . . . . . 5153%",6 de matière sèche. Soit, par jour : 34 grammes. Nous avons rassemblé dans les tableaux placés en annexe du pré- sent mémoire toutes les observations relatives à la température de l’étable, aux modifications du poids des animaux, à la consommation d’eau et aux quantités de déjections rejetées". | 1. Ces annexes ne sont pas reproduites à la fin de cette traduction. CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DÉS BOEUFS ADULTES. 819 Utilisation des rations. Le tableau ci-dessous donne la composition des aliments que recevaient les animaux en expérience et celle de leurs déjections solides. é DÉJECTIONS. PULPE — FOIN. SON DE SEIGLE. et mé- Bœufs — — lasse, No III. Matières protéiques . extractives non azotées. grasses . ligneuses minérales (non compris G et Co Tres HE 4,3 12,01 Cabpone tr 5: ar h346398. |l 46 2 2: è 47,59 Azpke total 51.,..137% ù 3| « | 3,273 23 1,998 Azote des combinaisons autres que les albu- MINES RE 0 z 20° 0,338| 0,636 Matières albuminoïdes. 0 ST |18,36 | 6,81 En analysant les excréments des bœufs n° F, Il et If, nous avons constaté de nouveau que de petites quantités de matières azotées dis- paraissent quand on dessèche les malières vers 65 à 75° centigrades ; ces pertes sont attribuables en partie aux sels ammoniacaux : quand on distille les matières fraiches avec de l’eau, on observe bien un dégagement d’ammoniaque, mais il atteint au plus la moitié des quantités perdues pendant la dessiccation. De même, si on les dis- lille avec de la magnésie calcinée et de l’eau, 1l se dégage de l’am- moniaque pendant longtemps, mais sans que ces pertes approchent jamais de celles qui se produisent pendant la dessiccation. C’est qu’il y a probablement en dehors des sels ammoniacaux, 316 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dans les résidus de la digestion, des matières azotées décomposables par l’action prolongée d’une température de 65 à 75° centigrades, comme l’urée, par exemple, dont la présence dans les excréments paraît très vraisemblable. Quoi qu'il en soit, ces pertes n’entrent pas en ligne de compte dans le calcul de l’utilisation des aliments; ce sont des produits et non des résidus de la digestion et, s’il était facile d’en déterminer l’importance, il faudrait en tout cas les déduire des matières azotées contenues dans les excréments. Mais il est nécessaire de les déter- miner avec précision pour établir le bilan de l’azote, car elles peu- vent s'élever jusqu’à 10 p. 100 de l'azote total des excréments, dans le cas d'alimentation très aqueuse. Pour y arriver, nous avons dosé à plusieurs reprises l’azote con- tenu dans les excréments avant et après dessiccation ; voici les résul- tats obtenus avec le bœuflIlf ; ce sont, pour chaque jour, les moyennes de trois dosages. EXCRÉMENTS A — frais. secs. Azote p. 109 Azote p. 100 1eMOUT ALAN T AR 1.943 1.871 DO RIOUTE APENCNRE 2150 11992 3° jour. 2.161 1.998 4° jour. 22299 232 HCMIOUT.: 2.126 1.970 sommes. . . 10.679 9.963 _ Ainsi, 9.963 d’azote des excréments secs correspondent à 10.679 dans les excréments frais ; par conséquent à 100 grammes d’azote trouvé à l'analyse dans les excréments secs correspond une perte de 7619, et pour 735,39, movenne des quantités d’azote rejetées par jour dans les excréments solides, la perte est de 55,28. Les mêmes caleuls ont permis d'évaluer cette perte quotidienne d'azote, pendant la dessiccation des excréments, à 25,98 chez le bœuf I et 26°,84 chez le bœuf Il, quantités dont il nous faudra tenir compte pour établir les bilans de l'azote et de l’énergie, qu’on trou- vera plus loin. D'après les chiffres donnés plus haut sur la composition des , CONSOMMATION D ALIMENTS ET D ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 317% Cca0 | L8S'0 0991 | rco‘o | grrr || co9!o l'ycs‘o | ccço‘z =. à, « 68e 0 | 228'0 | 21107 | 68 1 l6cr'o | crs* SL& ‘Se RE 6 APS SE EEE GLRS Faso " © © « 108 °0 9690 | 810‘ | zLI'‘G — 8910 | 8cs‘0 860 ‘0 &yv'0 0100 | 91#‘0 001 8°r6 0°6S LU68 68 668 S°98 sys QUIL GE en 987‘o | 0g8‘r | 261‘ ce |'aiSonx * : : ‘II n04 00! LL 2°8ç 8'£r 8'19 0°06 0'66 CAC AIDO ER de 6600 | Ly£‘o | 998‘ 1900 | srg'a | ave‘o | sao‘r | r91°+ N'A « 8660 | Ti620 | 980 0 Mer tr Insyc'o | Monts MGeree PE à ? 6600 | sss‘o |zzi'a | egr‘e | 1o8‘e À vso‘o | cis‘o | gog‘z l'aSony * : : ‘1 fnog "SOPIOUUL |:sopourut | -oynaq “ojoze uou| ‘Sonbi97 5 ‘ A “onbraesio| ‘ous the. EE CT: Hs IL -od jus hi a mm — L SAYALLVIN ; TE NL L -N1749 -OVALXA SHHGILVH È SAYAILVA * ‘(1n0o7 ue) 9981( 7 7 7? ? * * SJuaox9 Sr SUP pJofoy a NO TU à 6 ‘0 | 998 0 — ‘Gil O[AIOS 0p su0S —* ] _ Ses y | 836‘ — * ‘asser odmd — c Li cl y ° © ol UOJ ‘ASOID 9 : UOIJEI P[ SUEP QUUO( °° 7 “AHANSAËIP 9p SJU191a07 * ‘ * 9[$I9S 0p SUOS S2p S29198Ip s9Jrjuen() D ET TT DT ET ENS TUUN OI SJUJINSpx Ssop soidep ‘uroy np Ssoga9$ip sajuenÿ os ee oaxs8 "tt * ‘ * ‘sjuougioxe so suep ‘aJafoy D ST INOEUNT UFG‘O | c6r'a | 1298 — ‘Go [IS 9P SUOS — € — * & oU UIOJ ‘IS0JIX 9 : UOUUI PJ SUEP QuUO0( RUE Ts, Reese 9JIIQUIS2 SIP 9P SJU919192017) 2 "a OAI 71 9 1 7 7 * SJU9MOXO Sof suep pJolay * à où UI0} ‘ASOIX G : UOIJUI E[ SUEP QUUO( "SUOTJEX S9P UOT)ESII)( — ‘II NCOIQUL 318 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. rations et celle des excréments, on peut calculer les quantités de matières alimentaires ulilisées par les animaux étudiés. Elles sont rassemblées dans le tableau n° If, à la page précédente. Nous pouvons en déduire les quantités de matières digestibles contenues dans les trois rations étudiées : BŒUFS A it IL. IL. kilogr. kilogr. kilogr. POSE VEEDRN Er Ne nl era 750, 1 858 Par jour et par tête : Matières protéiques . . . . . : 0,312 0,696 0,665 Extractif non azoté et matières grasses. x OM 4,515 6,235 HÉROS... etre. LER s 1/ii 1/6,5 1/9 ,4 Matières albuminoïdes . . . . . . . 0,347 0,657 0,587 Par jour et pour 1 000 kilogr. de poids vif : Matières protéiques . . . . . Da 0,457 0,928 0,775 Extractif non azoté et matières grasses. > ,049 6,019 13264 Matières albuminoïdes . . . . . . . 0,464 0,876. 0,684 C?s derniers chiffres se rapportent au poids vif des animaux en- graissés. Nous savons que la ration d’entretien d’un animal maigre doit lui apporter 05,7 de protéine digestible et 6,6 de matières extractives non azotées ; ces bases peuvent-elles nous servir pour les animaux engraissés, et la ration d’entretien d’un animal gras de 1000 kilogr. est-elle la même que celle d’un animal maigre du même poids ? En réponse à cette question, nous savons que l’aug- mentation du poids des animaux soumis à l’engraissement porte à peu près exclusivement sur la graisse *, c’est-à-dire sur une malière qui ne prend qu’une bien faible part aux fonctions vitales [certains auteurs l'ont même considérée comme un produit inerte ? ({odter Ballast)] et doit probablement exiger une alimentation bien moins abondante que les muscles ou les autres organes. Mais tous ces rai- sonnements ne permettent pas de dire, à priori, si la ration d'en- trelien est identique pour des animaux gras ou maigres, de même 1. Journal f. Landw. 26° année, 1598, p. 601. 2. Pflüger. Archiv f. d. gesammite Physiologie, 1893, p. 409. CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOŒUFS ADULTES. 919 poids. Si nous rapportons à 1 000 kilogr. du poids vif des animaux avant l’engraissement les quantités de matières digestibles contenues dans leurs rations, nous trouvons : POIDS DE EXTRACTIF vif. times non azoté. kilozr. Kilogr. kilogr. BŒULER Se. AU 603,9 0,566 6,254 AIR - HP. 607,8 1,145 7,498 ANS. 25 674,0 0,987 OPEN La suite de l’expérience nous a montré (par le bilan du carbone) que la ration donnée au bœuf I ne suffisait pas complètement à empêcher la disparition de graisse ; c’est pourquoi nous avons dù augmenter la valeur alimentaire de la ration du bœuf IT et pius encore celle du bœuf IIT, de sorte que nos expériences, et c’est un grand avantage, ont été bien plus variées que nous ne l’avions prévu. Parmi les autres composants de l'alimentation, l’eau de boisson a été analysée, au point de vue de sa richesse en acide carbonique, tous les jours où les animaux séjournaiert dans la chambre respira- toire. Nous avons trouvé, par litre : Première expérience. HASOCIDDrE ONG EEE CS 07,266 OR 2 à PO DS Te Graal DO EME EN CS SOSETENEU M 0 ,267 RENE sud gupenaiats - 0 ,285 DT + ae pe SESNRARN PTE OPUEUR 0 ,243 MEMCNNE SE EVENT MSMEMAERE 07,266 Carbone correspondant. . . . . . . 0 ,073 Deuxième expérience. 29 octobre 1896. 057,246 3 novembre 1896 . . . SUR E 0062206 6 — — .). , Una ArEN 0 ,242 TES — 0997 LIRE — 0 ,245 Moyenndharens nel aber 08 fente 05,239 Carbone correspondant. . . . : «+ . 0 ,065 320 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Troisième expérience. 22 octobre 1897 . ; 082227 DGMENIREES 0 ,243 fes ERP MO CS DRRRIER 0 ,250 2 MONEMDFEMBOMES M EE à CU 0 ,246 MOYENNE RENE EE 081242 Carbone correspondant. . . . . . . 0 .066 Ces chiffres sont assez voisins pour qu’on puisse admeltre que la composition de l’eau de boisson n’ait pas varié pendant la durée des expériences. Il était donc très suffisant de n’en faire l’analyse qu’à quelques jours d’intervalle. Les animaux ont reçu en outre de leur ration 40 grammes par jour de sel marin, exempt d’acide carbonique. Analyse de l'urine. Nous avons exécuté chaque jour, pendant la durée des expé- riences, les déterminations suivantes : Densité (sur 200 centimètres cubes), matière sèche (sur 10 centi- mètres cubes), azote (sur 20 centimètres cubes), acide hippurique (sur 200 centimètres cubes). Quelquefois seulement, l’urme de deux jours successifs a été mélangée pour les analyses. Les dosages du carbone et de l’acide carbonique libre et faiblement combiné ’ (sur 50 centimètres cubes) ont été moins nombreux el n’ont d’abord eu lieu que les jours où les animaux séjournaient dans l’appareil de Pettenkofer ; mais, à la fin de l’expérience, nous avons exécuté de nouveau le dosage du carbone sur l'urine évaporée à basse tempé- rature en faisant porter nos analyses sur les échantillons des jours pour lesquels le dosage d’azote se rapprochait le plus possible de la moyenne générale de l'expérience. 1. Par calcination avec le chromate de plomb. Les procédés par voie humide (acide sulfurique et acide chromique) donnent des résultats trop faibles. © LR … : + CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES, 321 Nos résultats sont très suffisamment concordants, puisque nous trouvons : Première expérience. Carbone dosé directement (5 jours) . . . . . . PRES 8815",2 Carbone calculé, en supposant à la matière sèche de ie une teneur de 30.31 p. 100, moyenne des dosages directs, soit ROUMO OO S de matiérersecheten iONOUrS M IN STIORE1 ÉDITER NE 2 ET ONE Moyenne calculée. . , . 180% ,0 Moyenne trouvée . . , . 176, ,2 Différence 0: 321,8 Deuxième expérience. Carbone dosé directement (8 jours) . ATE Re LOU APETOEA6 Carbone calculé sur 5 161,6 de ia de 4829202 A TARDE d'a LE En D 1 497 ,9 RDA EUR 0 LV, ne D ODSENS Moyenne calculée. . . . 185% ,5 Moyenne trouvée . . . . 183 ,8 Différence. . . . 18557 Troisième expérience. Carbone dosé directement (en 4 jours) . : CITUTE 7145,8 Carbone calculé, pour les autres jours Fe es sur 8 418 grammes de matière sèche à 23.07 p. 100 de carbone, SO SN LE TOUTS NE. PREMIERE RE NME) PAR ne LT 606,0 Moyenne calculée. . . . 197844 Moyenne trouvée . . . . 1783.57 Différence se 157,6 Les moyennes calculées concordent très suffisamment avec celles qui résultent des dosages. ANN. SCIENCE AGRON. — 2€ SÉRIE. — 1898, — II, D! 322 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Voici la composition moyenne de l'urine pour chacun des animaux en expérience : dre 2e 3e EXPÉRIENCE. EXPÉRIENCE. EXPÉRIENCE. Quantité d'urine émise par jour. kg. 7,898 8,322 10,836 Matière" seche PES er 594,2 639,5 768,5 Azote DR Ne Data 65,57 111,44 96,10 Garbonp RSR 180,0 185,5 LITE Acide hippurique . . . . . . — 116,0 94,5 96,2 Carbone des gaz rejetés par la respiration. Nous avons dosé le carbone rejeté à l’état d'acide carbonique et de méthane dans les produits de la respiration, de la perspiration et des gaz intestinaux par la méthode que nous avons décrite autre- fois" en utilisant la chambre respiratoire de Pettenkofer. Tout l’en- semble de l'appareil a été soumis, chaque fois qu’il devait servir, à des vérifications très soignées qui nous ont démontré qu’il fonctionnait parfaitement et que notre méthode donnait des résultats d’une grande certitude. Le grand compteur, destiné à mesurer les quantités d'air qui tra- versent la chambre, a été jaugé une centaine de fois, en dix séries d'expériences dans chacune desquelles on donnait à l’aspirateur des positions différentes. La même vérification a été faite sur les petits compteurs qui mesurent les échantillons d’air prélevés pour l’ana- lyse, à raison de deux vérifications avant et deux après chaque pré- lèvement. Enfin, nous nous sommes assurés que toutes les parties de l’appareil étaient en bon état. Pour savoir, maintenant, si les résultats de nos observations étaient exacts, nous avons à différentes reprises brûlé dans la cham- bre respiratoire des bougies dont nous connaissions la teneur en carbone et nous avons eu grand soin de nous rapprocher autant que possible des conditions de nos expériences, en faisant brûler chaque fois 14 bougies et non quelques-unes seulement, comme on le fait le plus souvent. La composition des bougies a été déterminée comme dans nos 1. Voir ces Annales, t. II, 1898, p. 229 et suivantes. * CONSOMMATION D'ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 9323 premières expériences’, nous avons dosé directement le carbone de la stéarine et nous avons attribué à la mèche la composition de la cellulose, soit 44.44 p. 100 de carbone. Dans ces conditions, nous avons trouvé que les bougies qui ont servi à nos vérifications conte- naient toutes 0.61 p. 100 de mèche ; d’autre part, la stéarine de ces bougies dosait : CALORIES. Première expérience . . … . :. . 715.68 p. 100 Deuxième eXpÉTIENCe Mu 15.80 — Troisième expérience . . . . . . 15.82 — En tenant compte des mèches, le dosage des bougies en carbone était donc de 73.49, 75.61 et 75.63 p. 100. Les observations faites au cours de ces vérifications (dont tous les chiffres ont été publiés en annexe du mémoire original : tableau VIT) montrent que, sur 100 grammes de carbone des bougies brülées dans la chambre, nous avons retrouvé par l'analyse des gaz re- cueillis : APRÈS PASSAGE Ÿ LRÈRS: PAR DOSAGE sur la 3 DATES mousse de platine. direct. des expériences. Séries Séries v YÉ. VII VIIT 1"° expérience : 6 octobre 1896. . 99 .6 99.8 JIÈT 100.0 20 — 29 — PRE 99.2 980 99.3 100.4 Moyennes... .. J9È6 99.85 1'° expérience: 7 octobre 1597 . 99.3 99.0 99.8 99.6 2e — 1412 — Ù 99.4 997 99.9 100.4 5 — #15) — ë 100.4 999 100.6 100.5 49 — A — : 99.6 90 9989 100.7 me" ©" Moyennes. "070" 99.6 100.2 Ces chiffres montrent que notre méthode donne des résultats d’une grande certitude; les écarts des diverses séries sont attribua- bles à de petites différences dans le débit des petits compteurs ; elles sont assez faibles pour être négligeables et on peut considérer les 1, Loco citalo, t. Il, 1898. p. 239. 324 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. moyennes tirées de nos observations comme très suffisamment exactes. Après nous être ainsi parfaitement assurés de la précision de notre méthode, nous avons commencé la série de nos expériences ; on peut tirer de tous les chiffres recueillis au cours des expériences (et rassemblés à la suite du mémoire original en annexe : tableau VII) les résultats suivants qui représentent les quantités de carbone reje- tées dans les produits de la respiration et de la perspiration. Première expérience. — Bœuf I. Ration : 9 kilogr. de foin de prairie et 40 gr. de sel marin. APRÈS PASSAGE sut la PAR DOSAGE DIRECT. mousse de platine. Systèmes SE + V. WT VII. VIII. grammes, grammes. grammes. grammes. 13N0C10bre MSIE 2180527 249187 F20293, 57201608 ERA ne oO 0 208 Sp LII8S-ARMAN OT ES 20 = do te 2 044,1 2057,6 -1934,0: 1919,7 De D JFEOONNSS * 2 011 YO 899,4 RSS. CRIE OT MNODO 2 PAIE AE ASF UN TI Moyennes MERE 0221005227 2 059 D 0 04 0 MOMIE Deuxième expérience. — Bœuf II. Ration : 6 kilogr. de foin, 3 kilogr. de sons (seigle) et 40 gr. de sel marin. 29 octobre 1896 2SDANO - ST PTIT NP INES 2 novembre — 2281 Lu 22823 0: AN 04 LUS 11870 6 — — 2:228,4 002020 202 104 RAT OT 10 RE . CR 2e OR CRE RE D ESA KT: 13 — — . LT 2 2019930 2108527 0/0 Moyennes. LUE N M2 00650000 19740420 Troisième expérience. — Bœuf III. Ration : 6 kilogr. de foin, 5 kilogr. de pulpe et mélasse, 1 kilogr. de son (seigle) et 40 gr. de sel marin. 29 octobre 1897 . … 2942,7 2956,4 2749,3 9 767,3 DER —. 7 1412866,8: 2871,5° 2660,5212659,2 DURE _ 2914,0 2907,8 2709,8 2694,5 2 novembre — :. « "2/890,0 22.846,91 21643 22020977 Moyennes, « . . 2890,0 2895,7 2690,7 2 694,7 CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 329 Enfin, en faisant les moyennes des systèmes de chaque expérience, on trouve : APRÈS PAR CARBONE passage ae sur l1 mousse dosage à l’état de platine. direct. de méthane. gr. gr. gr. {re expérience . . 2 057,3 1939,7 117,6 DOME Bern: à 2952,3 2128, 124,0 AE — 2 892,8 2100271 200,1 En nous réservant de revenir plus longuement, dans un mémoire spécial, sur les conditions dans lesquelles a lieu la production de méthane que ces chiffres mettent en lumière, nous nous bornerons pour l'instant à les utiliser pour établir le bilan de l’azote et du carbone. Bilan de l'azote et du carbone. Première expérience : En examinant les variations des quantités de carbone dégagées parmi les gaz de la respiration et de la pers- _piration pendant cette expérience, on s'aperçoit bin vite que la ra- tion du bœuf n° [ ne lui permettait pas de se maintenir à l’élat d’en- graissement où il se trouvait au début de l'expérience. Les quantités de carbonc dégagées ont été, en effet, en baissant ct elles sont tom- bées de 21325°,5, pour le premier jour où elles ont été détermi- nées, à 19915,8, quatorze jours plus tard : cette baisse est une preuve que les constituants de la ration n’ont pas été seuls à jouer un rôle dans les phénomènes digestifs, mais qu'au contraire l'animal a vécu aux dépens des réserves de graisse de son corps. En prenant pour bases des calculs les moyennes des observations faites pendant les cinq séjours de l’animal dans la chambre de Pet- tenkofer, le bilan de l'azote et du carbone s’établil ainsi : al Entrées. AZOTE, CARBONE. gr. gr. Ta 0iUe Ton Ve, EME. 109,40 3 101,7 21243000 EAU UE DOISSDIL 72. + Ne Lt - » 2,0 Soit, en tout. . . . 109,40 3 403,7 326 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. b) Sorties. AZOTE. CARBONE, 3k8, 139 excréments solides. » . . . ,.. . 57,66 1 506,1 Uri Azote et carbone combiné . . . . . : 65,97 180,0 Fe Acide carboniquelibre et faiblement combiné. » 3,9 Gaz de la digestion, de la respiration et de la DETSPINATIONS. Le TR Or de Er ce » 1 057,3 SOIENT TOUT ET Te 123,23 3 746,9 Il y a donc une perte de. —13,83 — 343,2 Cela revient à dire que l'animal a dù vivre à ses propres dépens et qu'il a consommé 84,5 de viande (en matière sèche) et 3915°,2 de graisse", prises sur les réserves accumulées pendant l’engraissement. On se rend mieux compte des variations dans la consommation d'azote et de carbone en divisant la durée de l'expérience en trois périodes de cinq Jours : pour chacune de ces périodes, les sorties s'élèvent à: AZOTE. CARBONE. gr. gr. DuniSauelTRoC Or 127,23 5 898,8 18 ARR TESTÉES A 123,89 3 710,4 DS HE RI TIENNE 2 NE, 30 118,65 3688,3 ce qui représente des pertes de : FRE A Fe gr. Du-13au 17 octobre. : = 7. 17,83 405,1 Bit DNS, AE AOEN 14,49 336,7 DD MÉPN ii unl le AE 9,25 284,6 soil ‘ VIANDE. GRAISSE. gr. gr. Dutstauifooctobreeemeu-4tue 108,5 455 ,4 TOR OL AS SR Se se 88 ,5 380,0 CE Se d'Agen re ct ee LA 56,5 333,6 Ainsi done, une ration composée, pour 1 000 kilogr. de poids vif, de 0,457 de matières protéiques (correspondant à 0,464 de pro- téine) et 5",049 de matières non azotées digestibles ne permet pas à l'animal qui la reçoit de se maintenir au même état d’engraisse- 1. En prenant les nombres indiqués par Stohmann pour la composition des graisses et de la matière sèche de la viande, à savoir : matière sèche de la viande, 52.02 p. 100 G et 16.37 p. 100 Az et graisses 76.5 p. 100 C. 4e De y HE i CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 321 ment et l’oblige, au contraire, à vivre aux dépens de ses réserves. A la vérité, cette perte de matière, de viande et de graisse élait très faible le 15° jour de l’expérience, mais, en supposant, ce qui n’est pas vraisemblable, qu’elle ait continué à diminuer dans les mêmes proportions, il eût fallu encore tout un mois pour que lé- quilibre s’établisse entre les entrées et les sorties. Deuxième expérience : Les considérations que nous venons d’ex- poser nous ont conduits à prendre comme base de cette deuxième expérience une ration plus nutritive que celle de la première expé- rience. Aussi, les quantités de carbone rejetées dans les déjections gazeuses sont-elles restées très sensiblement constantes pendant les 4 derniers jours où nous les avons déterminées et sans montrer au- cune tendance à la baisse: elles s'élèvent, y compris le carbone dégagé sous forme de méthane, aux nombres suivants, moyennes de deux observations: 2 jour: 22415,5; 3 jour: 292345,9 : e jour : 29506,7 et 5° jour : 22095°,2. Le 1* jour, nous avions trouvé le nombre sensiblement plus élevé de 2 325,7 et cette diffé- rence tient évidemment à l'agitation de l’animal qui pénétrait de nouveau dans l'appareil de Pettenkofer après une longue interrup- tion ; il est donc bon de rejeter comme entachée d’erreur cette pre- mière observation et nous nous en tiendrons aux quatre autres. Voici comment se chiffre le bilan de l’azote et du carbone : a) Entrées. AZOTE CARBONE gr. gr, Ti irde fomen 2. - soso Mes OUEURL Pr. 77,85 2 420,8 2 621 de sons de seigle n° 2 10 OU TUAPeT- 86,39 1122952 23 796 HeAntrCDOISSONER RENE NE NEURS » PTE Soitlenstouti. "1 4e us 164,24 3 651,6 b) Sorties. 647 /d'excréments solides LAN © 55,61 1 256,9 Ur (Azote et carbone combiné . . . . 111,44 185,5 ring A ponomebre cÉrahlenentencibiné. » 2,3 Gaz de la digestion, de la respiration et de la DOFSPITAIOA MEME TPS SP LUE Lier eee RAD à » 223359 SOI CMTOUtI Me eee 167,05 3 678,6 IRyrædonc'unenperte dés, 21e: 40 2301 LA 328 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Cette perte ne représente que 175°,2 de matière sèche de la viande et 238,7 de graisse ; elle est très faible et le bœuf IT a maintenu, à très peu près, l'équilibre entre les entrées et les sorties de carbone et d’azote ; sa ration contenait, pour 1 000 kilogr. de poids vif, 05,928 de matières protéiques (correspondant à 0,876 de pro- téine) et 6",019 de matières non azotées ; ces quantités suffisent donc pour mâäintenir un animal en bon élat. Les petites quantités de matières perdues peuvent être attribuées aux nouvelles formations épidermiques (peau, poils, etc.). Troisième expérience : Le bœuf n° IE à reçu une alimentation encore plus substantielle que les deux autres ; aussi son observation donne-t-elle des chiffres assez différents de ceux que nous avions obtenus au cours des deux premières expériences. Le bilan de l'azote et du carbone s'établit ainsi : a) Entrées. AZOTE, CARBONE, gr. gr. SE T9 de foi DOUTE LAN SONMEUR LE 76,80 2 384,4 4 ,328 pulpe et mélasse. . Entre te der 74,66 1901,3 0 ,:866:de/sonside seigle n°13 0.72 01 5402 28,56 407,2 . 9% -Sod'eau de boisson . . . . . ". : . .". » 2,3 DOI ON MOULE EVE 17987 4 695,2 b) Sorties. 3ks, 278 d'excréments solides . . . . . . . . 78,67 1.511,85 Urine Azote et carbone combiné. . . . . . . 96,10 LATE Acide carbonique libre et faiblement combiné. » 6,9 Gaz de la digestion, de la respiration et de la DETSDITATION A EN AIT EN Us SR ER TUE » 2 892,8 SOL ERMOUE CL MEME 174,77 4 588,3 Différence, en faveur des entrées. . . + 5,05 + 106,9 La ration apportait, pour 1 000 kilogr. de poids vif, 05,775 de matières protéiques digestibles (correspondant à 0*#,684 de pro- téine) et 7,267 de matières non azotées digestibles ; elle a permis à l’animal de fixer 305°,9 de viande (comptée en matière sèche) et 1185°,8 de graisse. dé À > ê CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUTS ADULTES. 329 Rassemblons les résultats de ces trois expériences pour les com- parer plus facilement. Nous obtenons ainsi le tableau suivant : RÉSULTATS TEM- COMPOSITION DE LA RATION de l'alimentation PÉRATURE _ — mm a — —— de Matières Matières ,& pro- non Protéine. Viande. Graisse. l'étable, téiques. azotées. : kilogr. kilogr, kilogr. gr. gr. Bœuf IL. . 15°9 0,457 >,049 0,464 — 113 — 523 PAPE. PE 0 UNSS PETITE 81600 M 2 0 PS — II, 16 1 0,775 7,207 0,684 — 36 — 138 Pour que ces chiffres soient comparables, il faudrail encore dé- terminer l’équivalent alimentaire des changements survenus, c’est- à-dire les quantités de matières alimentaires capables d'amener, quand on les ajoute à la ration ou qu’on les lui enlève, suivant les cas, équilibre entre les entrées et les sorties. Nous avons dès main- tenant toutes les données nécessaires à ces calculs que nous réservons pour des publications ultérieures. Les résultats vraiment pratiques de ces expériences sont fournis par les bœufs If et IT. On peut, sans arrière-pensée, faire la moyenne de ces deux expériences et on trouve ainsi que des bœufs adultes et en bon état d’engraissement peuvent être maintenus à cet élat si on leur donne, pour 1000 kilogr. de poids vif : 0,85 de matières protéiques (correspondant à 05,78 de protéine) et 6*6,64 de ma- uères non azotées. Celte ration laisse encore disponibles de petites quantités de protéine (13 grammes) et de matières grasses (106 gram- mes) qui peuvent suffire aux nouvelles productions épidermiques. Cette ration normale est presque identique à celle qui peut être tirée des travaux de G. Kübn! sur les bœufs adultes maigres, main- tenus en stabulation permanente, et qui se compose de 08,7 de ma- tières protéiques digeslibles et 6,6 de malières non azotées di- geslibles. | En pratique, on s’en tiendra à la ration d'entretien indiquée par Wolff (05,75 de matières azotées digestibles et 8*5,25 de matières non azotées digestibles), en ayant soin de choisir des aliments aussi 1. Landw. Versuchsstationen, 1894, p. 550. 330 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. appétissants que possible. De cette façon, les animaux gras se main- tiendront dans le même état et pourront même fixer encore de pe- lites quantités de graisse. Mais toute cause de trouble doit être évitée pour les animaux : il faut, en particulier, bien se garder de passer trop vite de la ration d’engraissement à la ration d’entretien; la période de transition doit durer de 4 à 6 jours. Les animaux seron! laissés dans les mêmes conditions que pendant l’engraisse- ment el il importe de leur éviter toute agitation ; c’est donc une bonne précaution que de les tenir à l’étable avec des litières abon- dantes sur lesquelles ils puissent se coucher en toute tranquillité. Quantités d'énergie représentées par les aliments et les déjections. Nous avons déterminé la valeur calorifique des aliments, des excréments et de l’urine en mesurant dans la bombe calorimétrique de Mahler les quantités de chaleur dégagées par la combustion de ces matières dans l'oxygène à 25 atmosphères; le principe et les détails d’exéculion de cette méthode ont été décrits tout au long dans notre premier mémoire’. Nous avons ainsi trouvé les chiffres suivants qui représentent les quantités de chaleur dégagées par la combustion d’un gramme de matière sèche des produits étudiés. CALORIES. PR seneio eE 4416,3 sons (seigle) n°2 . . . 4 638,8 B ue SE AE excréments du bœuf]. . 4 668,2 | =2: AIR 4 669,1 cu ae 4 400,0 sk. pulpe et mélasse, . . . 4 125,5 ‘ui Ha : E Se sons (seigle) n° 3 . . . 4 657,6 excréments du bœuf IT, 4 494,7 La détermination des mêmes valeurs pour l’urine nécessite l'usage d'un arlifice que nous avons décrit en détail dans notre premier mémoire ; il faut faire absorber l'urine par de petites masses de 1. Landw. Versuchsslationen, tome XLIV, p. 292, CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 931 cellulose sur lesquelles nous arrivons à fixer 8 à 12 grammes d’urine contenant de 05,6 à À gramme de matière sèche. La dessiccation se fait à basse température ; une fois qu’elle est complète, le bloc de cellulose chargé d’urine est traité comme les autres produits d'un maniement plus facile, mais il faut déduire de la quantité de cha- leur mesurée celle qui provient de la combustion des blocs eux- mêmes. Il est inutile de se livrer à de semblables déterminations tous les jours et nos observations nous ont donné la certitude qu'il suffit de mesurer la valeur calorifique de l'urine les jours où nous en avons déterminé la teneur en carbone. Nous avons d’ailleurs choisi pour ces recherches les jours pour lesquels les dosages d'azote de l'urine se rapprochaient le plus possible de la moyenne générale de l’expé- rience. Nous avons ainsi trouvé : Première expérience. QUANTITÉS de chaleur dégagées CR DATES. par 1 gr. par à: Ra r toute l’urine de l'urine. rejetée. calories. calories. 1100 10pTE 1690-00. 3031.95 1 805,0 iGioteo HSE 2 994,6 1 842,0 20 —— rence 2901:2 1759,6 23. — MAN 3 136,2 1 984,0 27 — HEAR 3 013,0 1 392,6 Moyennes , . . 2 956,2 1756,6 Deuxième expérience. 29/octopre F840,0.0.0 2913,1 1764,5 31 = AE PUS 2 970,2 912,5 1 novembre 1896. . . 2 970,2 1912,8 3 Tr si(s46 2 993,1 1 883,6 6 — Jet: dE 2 930,5 1 812,2 10 — ae 2 892,3 1932, 1 12 — ALERT 3 158,2 1938,5 13 + ŒATE 2 938,0 1935,6 Moyennes . . . 2 950,9 1 886,5 392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Troisième expérience. QUANTITÉS de chaleur dégagées RE DATES. par 1 gr. par de matière toute l'urine sèche CE. de lurine. rejetée. calories. calories. 22 octobre 1897. . . . 2 81332 1 807,3 TUE ER 2 385,0 1 834,8 29 , — Vas 2 302,9 1 802,7 2 novembre 1897. . . 2 268,4 1 760,7 Moyennes", 2 344,0 1 80f,4 Ces nombres doivent être corrigés d’une erreur due aux pertes d’azote qui se produisent pendant l’évaporation de l’urine, même à basse température ; nous avons déterminé l'importance de ces perles pour les différents jours d'expérience et calculé leur valeur calori- fique. Elle s'élève, en moyenne, à 33,3 calories dans la première expérience ; 32,1 dans la deuxième et 19,5 dans la troisième, ce qui porte aux chiffres suivants les quantités moyennes de chaleur repré- sentées par l’urine émise pendant un jour, pour les trois expé- riences : Première expérience”... . 1. 1 789,9 calories Deuxième expérience . . . . . 19186 — Troisième expérience. . . . . 1.820,99. — , . On voit que les corrections sont trop fortes pour êlre négligées. La transformation de l'énergie. Toutes ces données permettent de calculer les quantités d'énergie que représentent, d’une part les aliments, de l’autre les excréments solides, liquides et gazeux. La différence entre ces deux résultats, aliments et excréments, mesure exactement les quantités de force et de calorique nécessaires au maintien de la vie et employées à l’exé- cution des divers actes physiologiques : élévation à la température CONSOMMATION D'ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 333 du corps des aliments et de lair inspiré, travail de la digestion, solubilisation des matières contenues dans l'urine, maintien de la température du corps, mouvement du sang, etc. Mais nous man- quons de données certaines sur la dépense d'énergie attribuable à chacune de ces fonctions diverses et, pour ne pas sortir du terram solide des faits, nous nous bornerons à rester dans les généralités et à ne Lirer de nos observations que ce qu’elles donnent réelle- ment. Voici les nombres qui représentent la valeur calorifique des ali- ments et des excréments dans les trois expériences *. Première expérience. à OALORIES. Il est entré dans la ration : fus 3%5,303 de foin n° 2 à 4 416,3 calories. . . . … : .. 32125252 Il est sorti : Excréments solides, 3,139 gr. à 4 668,2 calories. . . 14 653,5 Azote perdu pendant la dessiccation. . . . . . . . 15,9 CR RER SN 1 789,9 Mélnane 196P.814715-.2200cal0riese. 05): 40 0 2, 00: 2077,0 SON EM IOU ENS FLE ATEN 18 535,9 Diférenceren faveur desientréest gré Le an = 13 716,3 If faut y ajouter : S4%7,5 de viande détruite, à 4 432 calories. . . . . . 374,5 391,2: de:graisse"détrute 419,500 — + .. . . : 3 716,4 Total nécessaire au maintien du poids vif {748 kilogr.) . 17 807,2 \ Soit, pour 1.000 kilogr) depoids vifn, %. + .2.1.. 23 807,0 1. Dans ces calculs, on attribue, d'après les recherches de Stohmann, une valeur de à 652 calories à la viande gagnée par les animaux et à celle qu'ils ont perdue la même valeur diminuée de 7,45 par gramme d'azote. — Voir les recherches de Stohmann : Zeitschrift für Biologie, 1895, tome 31, p. 372, et de Rübner, idem, 1895, p. 21. 334 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Deuxième expérience. , . CALORIES. IL est entré dans la ration : Cr 5k,197 de foin n° 2 à 4 416,3 calories. . . . . . . 22 951,5 2 ,621 sons de seigle n° 2 à 4 638,8 calories. . . . 12 158,3 Soit en: tout. 106 syfsrge tte 39 109,8 Il est sorti : Excréments solides, 2 641 gr. à 4 669,1 calories . . . 1299L,1 Azote perdu pendant la dessiceation . . . . . . . . 14,7 nt LA And épte A c Ce As Co Le À 1918,6 Méthane, 169%",4 à 13 246 es HE AMEN PISE 2490,9 DU ICRTON DANS en 16445,3 Différence en faveur des entrées pe Read 0 18 654,5 Il faut y ajouter : 17#,2 de viande détruite à 4 432 calories. . . . . 76,2 23 -,1 de graisse détruite à 9 500 "= =... + + .N, 229,1 Total nécessaire au maintien du poids vif (750K,1). . . 15 955,5 SO pour 000 KIoT ATOS PER MORE TUE 25 271,0 Troisième expérience. Il est entré dans la ration : 5kE 179-de foinsn°:5, à 4400 calories 1.20. 5 00 22MBLE 4 ,328 de pulpe et mélasse, à 4 125,5 calories. . . . 178552 866 sons de seigle n° 3, à 4 657, 6 calories, . . 4033,5 SOI ED HOUSE 2 dé cel 44 676,3 Il est sorti : Excréments, 3 278 gr. à 4 494,7 calories . . . . . . 14733,6 Azote perdu pendant la dessiceation . . . . . . . . 27,4 Urmersei ae nenile 1 820,9 Méthane, 267°° “09 à (3 246 En aire de ee 3 036,7 SOI ER DOUL. 0-1 eos 20 118,6 Différenceren fayventiAes entrées. tel ee ete 24 557,5 À déduire : a AR A ES Reste, pour le maintien du poids de 858 kilogr. . . . 22188 ,2 Soit pour 1 000 kilogr. de poids vif, » + 25 860 CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 339 Les résultats des trois expériences sont loin d’être identiques et cela se conçoit : les quantités d’énergie nécessaires à l’entretien des fonctions vitales doivent varier avec les individus d’abord et ensuite avec la nature et la quantité des aliments. C’est ce qu’avaient déjà montré les expériences faites sur des bœufs adultes à la ration d’en- tretien ; ces expériences ont donné les résultats suivants, rapportés à 4000 kilogr. de poids vif : QUANTITES d'énergie nécessaires . au maintien l’étahle. la ration. .. dun poids constant. TEMPÉRATURE MATIÈRE SÈCHE de de degrés. kilogr. calories, BŒUEAV LIRE 14,8 11961 21 466 BOL sc 14,7 122028 21 842 PEUDA TRE AT 151,9 1 T1 23 918 10211 0 CE EE 15,0 13,297 24 343 DUR OS ON 16,5 12,628 25 403 5,114 DR Diese LEE ë 27 35 Bœuf Ga | 6,780: Peon MoYenne2. ue 23 394 Voici rassemblés les résultats de nos expériences sur les animaux gras : REC. 1.2: 23 807 calories à 15°,9 (température de l’étable). Bœuf II. . . . ET À MR Sons Lu Bœuf III . . . 925 860 © — 16,1 E Moyenne. . 24 979 calories à 14°,7 En comparant les moyennes des deux séries d'expériences, on constate qu'il faut aux animaux gras, pour vivre et se maintenir au même poids, des quantités d'énergie un peu plus considérables qu'aux animaux maigres. (est d’ailleurs tout naturel, car il est évident qu'un animal gras est obligé de faire plus d’efforts qu’un animal maigre pourvu du même poids de muscles pour exécuter ses mouvements ordinaires ; il dépensera donc une plus grande somme 1. Paille d'avoine. 2. Les chiffres relatifs au bœuf B n'entrent pas dans le calcul de la moyenne; cet animal s'est montré trop agité durant ses séjours dans la chambre respiratoire pour qu'on puisse généraliser les observations auxquelles il a donné lieu. 330 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. d'énergie, même si les quantités de matière animale fixées pendant l'engraissement ont une valeur calorifique égale à celle d’un même poids de matière animale maigre. Mais cette différence est assez faible pour qu’on la néglige au point de vue pratique. On peut donc admettre que la ration d'entretien des bœufs adulles maigres suffira également à maintenir au même poids des animaux gras, à condition qu’on calcule cette ration sur le poids de l’animal gras et qu’on ob- serve au sujet du repos et des soins des animaux les précautions sur jesquelles nous avons déjà insisté. C’est vers la solution de cette question que nos recherches étaient dirigées et elles nous ont donné une réponse certaine. Mais, en outre, on peut tirer de nos observations un certain nombre de conclusions très intéressantes pour la pratique et sur lesquelles nous allons insister. Nous avons vu que la consommation d’énergie nécessaire à l’en- tretien des fonctions vitales augmente pendant le cours de l’engrais- sement à mesure que de nouvelles quantités de viande et de graisse sont fixées par l'animal ; en d’autres Lermes, à tout gain de viande et de graisse, qui est le but de l’engraissement, correspond une dépense supplémentaire d'énergie, destinée à entretenir ce nouvel accroissement, et comme la ration est la source d'énergie, une por- tion de la ration reste improduclive, absorbée par l'augmentation des dépenses d’énergie. Celte fraction inutilisée au point de vue pratique et qui est par suite une perte, croit d’ailleurs à mesure que l’engraissement est avancé, de sorte qu’un animal qui recevrait une ration d’engraissement conslante en profiterait de moins en moins à mesure que son poids augmenterail. La conséquence pratique de ce fait est qu’il faut augmenter la ration quand l’animal augmente de poids. Cette conséquence de nos observations concorde exactement avec ce qui se fait dans la pratique, où les éleveurs ont reconnu depuis longtemps la nécessité de donner aux animaux à l’engrais /« plus grande quantité possible de matières alimentaires digestibles. En choisissant des aliments appétissants et de digestion facile et en portant l’abondance de l'alimentation aux limites extrêmes de la saliété, on abrège très sensiblement la durée de l’engraissement et on réalise ainsi d'importantes économies. CONSOMMATION D’ALIMENTS ET D'ÉNERGIE DES BOEUFS ADULTES. 991 Nous pouvons tirer de nos observations des résultats intéressants sur la façon dont l’énergie contenue dans la ration d'entretien des animaux étudiés est utilisée. Les expériences antérieures sur des bœufs maigres, nourris exclusivement de fourrages (foins ou pailles), nous ont montré que, sur 400 parties de la quantité d'énergie repré- sentée par la ration, on retrouve: Dans les excréments. . . . . . . . . . 41. 1.8 Dans PUTINE:. VS NE OR re Re Le 6.1 À l’état de méthane . 713 Reste diSpODIeRERE SES RES" 44.8 44.8 p. 100 de l'énergie représentée par la ration sont employés par l’animal à l'exécution de ses fonctions. Dans nos expériences sur des bœufs gras, nous avons obtenu un chiffre très voisin du précédent avec l’animal n° I, dont l'alimentation était aussi composée exclusivement de foin. Pour les deux autres, les résultats sont différents : leur ration se composait, pour 100 par- ties de matière sèche, de 66.5 de foin et 33.5 de sons de seigle (bœuf Il) et 49.9 de foin, 41.7 de pulpe et mélasse et 8.4 de sons de seigle (bœuf III). Sur 100 d'énergie contenue dans la ration, on retrouve : ne EXPÉRIENCES É IL. III. antérieures, p- 100 p. 100 p. 100 p- 100 Dans les excréments . . . 45.5 JO 9910 41.8 DAnSUrINe MER NE re. De 5.4 4,2 6.1 À l'état de méthane . . . 6.4 6.2 129 Tes (4 Il reste donc . . 42.9 53.2 54.9 44.8 qui sont utilisés par l’organisme. Évalués par rapport à la partie digérée de la ration, ces résultats deviennent : PS Nr nr bear it à EXPÉRIENCES I. TE III. antérieures, p. 100 p.100 p. 100 p. 100 Dans l'urine ennTs. 9.5 8.3 6.3 10.0 À l’état de méthane. . . 1 Le 9.6 11.8 12.6 Soit, à déduire ZIP 17.9 18.1 22.5 Reste disponible . 78.8 SA 81.9 77.5 ANN. SCIENCE AGRON, — 2° SÉRIE. — 1898. — II. 22 338 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Ainsi, 48 à 22.5 p.100 de l’énergie représentée par la partie digérée de la ration sont perdus au cours des phénomènes nutritifs. Le reste représente l'effet utile physiologique de la ration ; nous pouvons en calculer l’équivalent calorifique. Il est par gramme de substance digérée : CALORIES, Bœuf Te RoIMmn 2.10 SAUAR ES ER CT ae GE 3 435 Bœuf I: —- — sons % seiglé n° 2 SSII che Etre 3 722 Bœuf IT : Foin n° 5 + pulpe de mélasse ie sons de RATE Is 3 593 La ration du bœuf Il ne diffère de celle du bœuf I que par l’addi- tion de sons de seigle au foin et nous pouvons calculer à l’aide des données ci-dessus et connaissant la digestibilité du son de seigle (voir au tableau H), son effet physiologique utile; on trouve ainsi 4109 calories, chiffre supérieur à 3 492°*!,5 qui représente (moyenne de 6 expériences) l'effet utile physiologique du foin. Il faut ajouter que ce chiffre n’a rien de définitif, puisqu'il repose sur l’hypothèse que le foin donné au bœuf IT avait exactement la même valeur que celui donné au bœuf I; il semble, en outre, d’après les travaux de G. Kühn!, que cet échantillon de seigle possédait un coefficient de di- gestibilité supérieur à son coefficient moyen, de sorte que le nombre que nous avons trouvé pour son effet utile est peut-être trop élevé. Quoi qu’il en soit, ce chiffre et celui qui se rapporte au foin sont fort éloignés des résultats obtenus par Rübner * sur l'alimentation humaine (pour 1 gramme de matières albuminoïdes, 4100 calories ; de matières hydrocarbonées, 4100 ; de matières grasses, 9 500) et ces écarts sont la preuve qu’il est faux de vouloir étendre aux rumi- nants les résultats de Rübner. Nous insistons en terminant sur l'insuffisance des résultats de nos expériences, dont on ne peut pas encore tirer d'applications pra- tiques, car rien n’est plus dangereux que les conclusions trop hà- tives de faits incomplètement établis. 1. G. Kühn. Zandw. Versuchsstationen, tome XLIV, 1894, p. 104. 2. Rübner. Zeitschrift fur Biologie, lome XXI, 1885, p. 377. 2 FVS-I— LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES ET LES FORMES D’HUMUS DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'AGRICULTURE ! PAR Le, D',; W-OLILN Y PROFESSEUR D'AGRICULTURE A L'ÉCOLE TECHNIQUE SUPÉRIEURE DE MUNICH Les matières organiques employées comme engrais sous forme de débris végétaux ou animaux (fumiers, composis) ou sous forme de plantes vivantes (engrais verts), et celles qui existent naturelle- ment dans le sol (déchets des récoltes, humus, cadavres d'animaux) ou à sa surface (couverture des forêts) subissent des modifica- tions chimiques diverses qui influent à un haut degré sur sa fer- tilité. La connaissance des réactions qui interviennent offre, à 1. Le D' Wollny, professeur d'agriculture à l'École technique supérieure de Munich, vient de publier un excellent ouvrage sur la décomposition des matières organiques et les formes d'humus dans leurs rapports avec l'agriculture *. Ge livre, dû à un savant qui a consacré sa vie à l'étude de ces questions et s’y est acquis un juste renom, esl un exposé méthodique, complet, clair et précis de tout ce que l’on sait aujourd'hui sur a. Die Zersetzung der organischen Stoffe und die Hum'isbildungen mit Rücksicht auf die Bodeneultur, par D' Ewald WoLLNy, ord. Professor der Landwirtschaft an der Kônig. Bayer. technischen Hochschule in München. Heidelberg. Carl Winter, 1897, 340 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. côté de son intérêt scientifique, une utilité pratique considérable, puisque, par des procédés divers, l’homme peut exercer une in- fluence capitale sur le cours de ces réactions et sur la qualité de leurs produits ultimes, où se rencontrent les principaux aliments des plantes. Dans leur ensemble, ces processus de décomposition des ma- tières vrganiques se classent en deux séries caractérisées surtout soit par la présence, soit par l'absence d’oxygène, donc par des phénomènes d’oxydation dans le premier cas, de réduction dans l’autre. PREMIÈRE PARTIE PROCESSUS CHIMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES I. — PROCESSUS CHIMIQUES La décomposition des matières organiques en présence de l'air atmosphérique donne naissance, sous certaines conditions, à de l'acide carbonique, de l’eau, de l’ammoniaque (et de l’azote libre) et les principes minéraux qui étaient en quelque sorte enfermés duns la matière organique et inassimilables à cet état deviennent libres et passent pour la plupart sous une forme assimilable. Il se produit donc, dans ces circonstances, des aliments essentiels immé- diatement absorbables (ammoniaque, principes minéraux) ou des - ce sujet. Nous avons obtenu de l'auteur l'autorisation de traduire son œuvre et nous en commençons aujourd'hui la publication, nous proposant de la continuer dans les fascicules suivants. Nous espérons que les lecteurs des Annales accueiïlleront avec intérêt ce travail où ils trouveront, outre les recherches inédites de l'auteur, l'indication et le résumé des travaux les plus importants consacrés à ces questions complexes et disséminés dans une foule de recueils en langues diverses qu'il est souvent difficile de se procurer. (La Ré- daclion.) DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 341 composés tels que l'acide carbonique dont l’action dissolvante sur les minéraux solubles du sol exerce une heureuse influence sur la fertilité. 4° Eremakausis. Ce mode de décomposition, que l’on désigne sous le nom d’EÆre- makausis *, est caractérisé par la volatilisalion de la malière orga- nique avec un résidu formé des malières minérales non volatiles passant, pour la plus grande partie, à l'état assimilable. L'intervention de l'oxygène de l'air est prouvée non seulement par ce fait que l’oxygène contenu dans les matières organiques serait bien loin de suffire à l'oxydation du carbone, mais encore par cette observation faite pour la première fois par Lévy et Boussin- GAULT et, plus tard, par J. von Fonor* que l’air occlus dans le sol s’appauvrit en oxygène d’autant qu'il s’enrichit en acide carbonique, si bien que les volumes d’oxygène et d’acide carbonique sont tou- jours sensiblement égaux. LÉVY et BOuSSINGAULT ont trouvé les rap- ports suivants : SOL. CULTURE. Co. 0. TOTAL. SICEU EMMA Mc » 9.74 221083 50220; 09 Siren. Hit Nil Vignes dr siènus 44106-41195 7120 1201178 Sable avec nombreux cailloux. Forêt. . . . . . (0,87 19,61 20,48 Sol siliceux fumé. , . . . . Asperges . . . . 1,54 18,80 20,34 Excavation avec terre de bois. » 3 64006 40002009 MuSehelRalR une 5250. © Betteraves rie AGI0GS De 1087 1H 205 58 AIG Dre. 2. 2-0. Topinambourst.<.© 0,66 219299 © 20,65 Soltumidefertie Es SOU Prairie 2,0) : 4; 11797 19,41: 21,20 J. von Fopor a obtenu pour le taux d’oxvcène et d’acide carbo- P LE 1. D'après E. W. Hircann. De fpeua, paisiblement, insensiblement, et de zxavsts, combustion. 2. Jahresbericht der Chemie, 1859, p. 783 ; Économie rurale, par BOUSSINGAULT, 2 volumes. 3. Deutsche Vierleljahrsschrift fur offentliche Gesundheitspflege, 1875, vol. VIL, p. 205-237. 342 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nique de l'air occlus dans le sol les chiffres suivants, moyennes de 19 analyses: co. 0, TOTAL. Air occlus dans le sol . 2,54 15,33 20,87 Air atmosphérique. 0,04 20,96 21.00 Le taux d'oxygène de l’air du sol diminuant dans la mesure où croit celui d'acide carbonique, on doit en conclure que l’oxygène de l’air prend une part prépondérante à l’oxydation du carbone. Les malières azotées des débris végétaux et animaux existent prin- cipalement sous la forme de principes albuminoïdes et d’amides et subissent des modifications dont le résultat est la formation d’ammo- niaque. D’après les recherches de E. MarcHAL', ce processus est lié à une forte oxydation en ce sens que pour former cette ammoniaque il faut des quantités considérables d'oxygène qui fournissent autant d’acide carbonique. L’oxygène attaque la matière azotée en transformant son carbone en acide carbonique, son soufre en acide sulfurique, et son hydro- gène en eau, l’'ammoniaque demeurant en quelque sorte comme le résidu. L'ammoniaque est dans tous les cas le premier produit de décom- position qui se présente comme aliment pour la plante. — Pourtant elle ne demeure généralement pas à cet état; elle s’oxyde en pré- sence de l’air atmosphérique et se transforme d’abord en nitrite, puis en nitrate, selon les formules : NH, + 0, — HNO, +H,0 Ammoniaque. Oxygène. Acide nitreux. Eau. Acide nitreux. Oxygène. Acide nitrique, Ces réactions qui constituent la nitrification se font très rapide- ment dans les sols perméables. Ce qui le montre c’est, d’une part, 1. Bulletin de l'Académie de Belgique, 1893, série 3, t. XXV, p. 727; Annales agronomiques, {. XIX, n° 10, p. 506. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. .843 que, dans de telles conditions, le sol arable n’accuse que de faibles traces d’ammoniaque ; c’est, de l’autre, l'observation, faite par di- vers expérimentateurs, de la nitrification rapide dans le sol de l’am- moniaque des engrais. Par exemple, W. Wozr” a trouvé par hec- tare dans une couche de sol de 0",20 d'épaisseur: GRAU- SCHISTE 2e : GRÈS AZOTE. Vicen eee DENTS En ADAsE ec kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr, Watemirique se 435,9 0 2971 DR ET 8) 28210, - 52116 K::552,6 Azoteammoniacal. 192 2672 27,3 6,3 89,4 27,9 Si l’on incorpore au sol un engrais ammoniacal tel que : fumier, purin, il survient très vite une oxydation énergique démontrée par ce fait que les eaux de drainage renferment de grandes quantités de nitrates. Des observations de ce genre ont été faites par H. MaRtÉ-Davy”, A. Lévy®, FrankLanD#, J.-B. LawEs, GizBerrT et R. WARINGTON*. Marié-Davy remplit un vase en verre de 2 mètres de hauteur avec un mélange de cailloux et de sable et il y versa chaque jour un litre d’eau d’égout. Les analyses de ce liquide et de l’eau qui s’écoulait du vase montrèrent neltement la transformation de l’ammoniaque en acide nitrique. Il trouva par litre dans: . JI'EAU EE d’égout. de drainage. milligr. milligr. Azote ammoniacal. . . . . . 20,6 IE AZOLEMITIQUERAMS MA ete 0,8 21,5 1 Les analyses faites par A. LÉvY des eaux d’égout répandues sur 1. Amtsblatt für die Landw. Vereine im Kônigr. Sachsen, 1872, p. {; voir aussi : von Fonor, Hygienische Untersuchungen über Luft, Boden und Wasser, 29 fasc., Braunschweig, 1882, p. 60. 2. Journal d'agriculture pratique, 1882, t. I, n° 24, p. 817, 3. Annuaire de l'Observatoire de Montsouris pour l'an 188%, Paris, p. 408. 4. River Pollution Commission, Reports of the cominissioners appointed in 1868 to inquire into te best means of prevenling the pollution of rivers. 5. Journal of the royal agricultural Society, vol. XVII, XVII et XIX, 344 . ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. le sol et des eaux de drainage s’écoulant de ce même sol sont aussi bien instruclives sous ce rapport : AVRIL JUILLET SEPTEMBRE. OCTOBRE MOYENNE. Azole ammoniacal. Hau d'égout "7 4 7 I U1t,2 21 8 Asnieres... 059 de 2 | Cases . DOM Co MIE) 0 ,i 0, 0, = Épinay 2 UP UN TOS E Moulin de Cage .| 0,9 | Azole nilrique. | Eau d'égout à Asnières. . . Ë ns SAS £ } Epinay é | Moulin de Cage. Le) CS - 19 1 © I mm 19 O1 = 19 © 19 © © 12 —1 _ o 19 = Ces chiffres montrent que l’azote apporté au sol sous forme d’am- moniaque s’oxyde presque entièrement en acide nilrique. Tandis que la solution primitive ne contient que de l’ammoniaque avec traces d'acide nitrique, c’est ce dernier qu’on rencontre presque exclusivement dans l’eau qui a filtré à travers le sol. En conformité avec ces résultats, LAwES, GILBERT et WARINGTON ont montré que le sol agricole perd beaucoup d’azote par les eaux de drainage. On n’est pas encore nettement fixé sur la question de savoir si dans la décomposition des matières animales ou végétales à l'air libre, il se dégage de l’azote, comme on l’a souvent admis. Divers essais ont été faits à ce sujet, mais dans des conditions qui affaiblis- sent l’action de l'oxygène et doivent donner lieu à des processus de décomposition forménique, c’est-à-dire à ces réactions qui se pas- sent dans un milieu où l’accès de l’air est limité. Si l’on mélange, DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 345 par exemple, les matières azotées en expérience avec une quantité d’eau telle que le tout forme une masse visqueuse, elles deviennent impénétrables à l'air. De même si l’on opère en vases clos, on ne se trouve plus dans les conditions normales. Quand bien même on y ferait pénétrer de l’air de temps en temps, le dispositif de l’expé- rience ne correspond pas aux conditions naturelles parmi lesquelles la ventilation, soit dans un sol perméable, soit dans une masse po- reuse de fumier, a tant d'importance. Les essais faits suivant ces méthodes par J. KôniG et J. Kiesow’, par À. MorGen et J. KôntG”, par DieTzELL* et par B. Gigson‘, ne sont dès lors pas concluants. La preuve que les matières soumises aux essais ne subissaient pas les processus d’oxydalion est l'absence d'acide nitrique dans les produits finaux, tandis qu’on voit par ce qui précède qu'il se produit en abondance dès qu’il y a oxydation énergique. En outre l’odeur pénétrante, désagréable, provenant sans doute d’acides gras, qui a été constatée dans presque toutes les expériences montre que ce sont les phénomènes de réduction qui ont prédominé. L'emploi de la méthode dite par différence, c’est-à-dire par pesée pour la détermination du taux d’azote dans la matière traitée avant et après l’expérience ne permet pas d’ailleurs de dire nettement si, dans l’eremakausis, de l’azote se dégage à l’état libre; cette méthode montre seulement s’il y a moins d’azote mais non si cet élément a disparu à l’état élémentaire ou sous forme de combinaison azotée (protoxyde ou bioxyde d’azote). Les essais faits dans cette voie n’ont pas donné de résultats concordants. Tandis que B. TAckE”* trouve que la nitrification dans un air fréquemment renouvelé a pour con- séquence une perte d'azote par dégagement d'azote gazeux, et que celle perte est liée à la production d'acide nitrique, les recherches 1. Landw. Jahrbücher, fase. Il, 1873, p. 107. 2. Landw. Versuchsstationen, fasc. XXX, 1884, p. 199-216. 3. Zeilschrift des Landw. Vereins in Bayern, 1882, fase. de mars. 4. Sur le dégagement d'azote libre dans la putréfaction, thèse, Baltimore, 1893 (en anglais). 5. Landw, Jahrbücher, fase. XVIIL, 1889, p. 439. 346 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. d'IMMENDORFF * montrent que ces pertes peuvent aussi se produire dans l’eremakausis avec aération suffisante sans qu’il y ait nitrifica- tion. L'analyse des gaz inspire une bien plus grande confiance que la méthode par différence; elle seule montre si l’azote perdu par la matière l’a été à l’état élémentaire et permet de constater des quan- tités d’azote extrêmement faibles. Les expériences faites par A. Eu- RENBERG * d’après cette méthode ont prouvé que, soit dans la décom- position directe des matières organiques, soit dans la transformation des sels ammoniacaux en nitrates, il ne se dégage pas d’azote libre quand l'oxygène est en quantité suffisante. Par contre, IMMENDORFF* a trouvé que dans la nitrification de l’ammoniaque soumise à une aéralion abondante, il peut y avoir perte d’azote à l’état d’azote gazeux. Quelques essais de B. TACKkE * et de E. Gopcewski® ont confirmé les résultats d’IMMENDORFrF. Comme lui GopcEwskt trouve que la nitrification de lammoniaque donne lieu à un dégagement d’azote sous forme d’azote libre et non sous forme de protoxyde. On voit que ces essais, faits d’après une méthode exacte, ne sont pas non plus concordants, ce qui tient surtout aux difficultés qu’on rencontre dans la conduite des expériences. Ces difficultés résident principalement en ce que l’on ne peut maintenir l'oxydation d’une façon continue et que, dans le cours des expériences, il y a des moments où la décomposition se fait suivant le mode forménique, lequel (on le verra plus loin) donne toujours lieu, dans certaines circonstances, à un dégagement d’azote libre. Du reste nous possé- dons actuellement trop peu d’observations pour considérer la ques- tion comme résolue. Sa solution ne sera possible que quand des recherches exactes auront précisé les conditions biologiques des microorganismes qui provoquent ces réaclions et la composition chimique de tous les produits de l’eremakausis. Tant qu’elles n’au- 1. Landw. Jahrbücher, vel. XXI, 1892, p. 281. 2. Zeitschrift far physiologische Chemie, vol. XL, 1887, p. 145 et 438. 3. Loc, cil., p. 300. 4. Loc. cit. 5. Anzeigen der Akademie der Wissenschaften in Krakau, décembre 1592. cie ENS DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 347 ront pas eu lieu, on devra considérer comme ouverte la question de savoir s’il se dégage ou non de l'azote libre dans la décomposilion des matières azolées, soil directe, soit après nitrification préalable”. Comme toutes les oxydations, la combustion lente (eremakausis) dégage une certaine chaleur, très variable suivant les conditions extérieures. Les recherches de U. Gaxon* montrent que l'élévation de température qui accompagne la décomposition n'a lieu qu’en présence de l'air. Il mit du fumier dans deux caisses d’un mètre cube dont l’une était percée de trous sur toutes les faces, l'autre ayant ses parois pleines. Voici les températures à diverses profon- deurs. CAISSE AÉRÉE CAISSE NON AÉRÉE | —— | | à | à à à à à À | À | 10 cent. |25 cent. |50 cent.|75 cent. |10 cent. |25 cent. |50 cent.|75 cent. {" jour midi . 190,0 | 12°,0| 122,0 | 13°,0|15°0| 15° | 15° | 17° = le soir . 165142160250 827" 0/ 2001719 18 20 2e jour midi. 59 ,0 | 68 .0| 64,01 52 ,0|15 ,0| 22 | 18 | 18 — Jesoir. 12 ,0172,0167,0|59,0117,0| 18 | 18 | 18 3° jour midi. 72 0170 ,0166 ,0| 60 ,0/12 ,0| 16 | 17 | 16 — Jesoir. . 12,069 ,5| 66,0! 59 ,0/12 ,0| 15 | 16 | 15 4 jour midi. . . … .| 68 ,0 | 66 .0 | 62 ,0155.0|12 ,0| 14 15 14 OUR Son: . -167,9/0€%6100,0/ 5307 12.0/ 7" 1Æ 15 14 5° jour midi. . . . .[ 63,5! 60 0|56,0151.5/11,5| 13 | 14 | 13 — Jlesoir. . . .|62 0158,0155.0|50.0{11,5| 14 | 13 | 13 6° jour midi. . . . .| 58,0 | 53 ,0| 47 ,0|44 ,0|11,5| 12 | 13 | 12 La température de l'air pendant l’expérience a varié entre 8° et 10° centigrades. Des chiffres qui précèdent il résulte nettement que l’échauffement {. D'après des recherches récentes de Burner et Srurzer (Centralblalt für Bakte- riologie und Parasitenkunde, vol. 1, 1895, n% 7 et 8, 9 et 10, 11 et 12) les ni- trates doivent pouvoir être détruits sous forme d'azote libre par le concours de cer- lains microorganismes, en présence de l'air; mais, comme on le verra ci-dessous à propos de la dénitrification, ce fait n'est pas encore prouvé. 2, Journal de l’agriculture, 1884, n° 781, p. 507; voir aussi Tu. ScaLæsiNe, C.R.,t. OVI, 1888, p. 1293. 348 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. remarquable du fumier est dû à l'oxydation puisqu'il ne se produit que dans la caisse aérée. Remarquons aussi que la température de la masse décroit de lex- térieur à l’intérieur, ce qui tient à la diminution progressive de l’arrivée de l’air et, par suite, de la combustion. Le refroidissement progressif s'explique par le desséchement de la masse, proporuüon- nellement auquel décroit la décomposition. Si l’on humecte le fu- mier, la température s’élève. La production de chaleur dépend en outre de la quantité des matières organiques, de leur aptitude à la décomposition et des facteurs extérieurs qui influent sur ce phénomène. D’après les recherches de Waçner', l’élévation de température dans la masse ou dans le sol additionnés de matières organiques est d'autant plus accusée qu’elles sont en tas plus volumineux, qu’elles sont plus aptes à la décomposition et que les conditions extérieures (température, humidité, accès de l'air) sont plus favorables. A l’aide de monceaux de fumier, les jardiniers obtiennent sur leurs couches des élévalions de température très importantes. La chaleur qui se dégage dans la fermentation de la poudre d'os doit être attribuée à ce que la matière organique s’y détruit très vite. La chaleur ainsi produite par les engrais a-t-elle quelque action sur la fertilité ? Les essais de Wacxer* ont montré que c’est seule- ment par l’emploi de grandes masses d’engrais (50 000 kilogr. à lhectare) facilement décomposable et soumis à des circonstances favorables (temps chaud et humide) que l’on a pu observer une augmentation de température du sol. Encore r’était-elle pas très importante et ne s’élevait-elle qu’à 0,1° — 0,4° centigrades environ. Il suit de là et de ce fait que dans la pratique on emploie de moin- dres quantités d'engrais dont certains (fumier de vache, engrais vert) sont rebelles à la décomposition et ne produisent qu'une aug- mentation de chaleur tout à fait minime, qu’en général la chaleur dégagée dans le sol par la destruction des matières organiques n’est 1. Forschungen auf dem Gebiele der Agrikullurphysik, publiés par Wozrny, vol. V, 1882, p. 373-382. 2. Loc. cil., p. 383-405. ds DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 349 pas suffisante pour avoir une influence notable sur la croissance des végétaux, d'autant plus que cette augmentation n’est que passagère, qu’elle va en diminuant progressivement et qu’elle est nulle pen- dant la saison froide où elle serait justement le plus utile. En horti- culture et pour quelques végétaux cultivés en grand, on emploie de telles quantités d’engrais qu’elles procurent une élévation de tem- pérature bien plus accusée et bien plus durable, pouvant hâter sen- siblement la végétation. 20 Décomposition forménique (putréfaction). Quand l’air, ou plutôt son oxygène, n’arrive plus à la matière ou n’y arrive qu'au-dessous de certaines limites, le mode de décompo- sition est tout autre que dans le cas précédent. 12 se forme alors beaucoup moins de produils gazeux qui sont principalement de l'acide carbonique, du formène, de l'hydrogène, de l'hydrogène sulfuré, de l'hydrogène phosphoré, du proloxyde d'azote, de l'azote, el la matière organique constilue une masse de teinte plus ou moins foncée, désormais très rebelle à la décomposition, qui, outre ses principes propres non azolés, renferme diverses combinaisons azotées (leucine, tyrosine, indol, scatol, amines primaires, acides amidés, etc.), de l’ammoniaque, quelquefois des nitrites, et, en outre, des acides gras volalils (acides formique, bulyrique, acélique, pro- pionique;, valérianique). La plus grande partie des principes miné- raux s’y trouve sous une forme inassimilable. En général, le déga- sement d’ammoniaque y est faible et la destruction des matières protéiques n’aboutit qu’à des combinaisons organiques très com- plexes. Les processus chimiques de la putréfaction n’ont été que peu étudiés en général. Les résultats obtenus jusqu'ici sont d’autant moins à négliger qu'ils donnent une image au moins approchée des réactions, comme nous allons l’exposer. L’acide carbonique qu’on rencontre sans exception dans les pro- duits de la putréfaction se produit d’une façon incomparablement plus lente que dans l’eremakausis, faute d’une quantité suffisante d'oxygène. Cela résulte clairement de la diminution considérable 30 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. constatée dans le dégagement de l'acide carbonique d’un sol dès que celui-ci est gorgé d’eau et se trouve par suite privé du libre accès de l'air. L’oxygène nécessaire à l’oxydation du carbone dans la putréfaction provient d’abord des matières organiques elles- mêmes, mais aussi des éléments réductibles qu’elles contiennent, notamment des nitrates, nitrites, du protoxyde d’azote et des sels de fer et de manganèse au maximum. Les matières organiques sous- traient énergiquement à ces diverses combinaisons leur oxygène, parfois en totalité. Aussi le processus dont il est question peut-il être caractérisé comme un processus de réduction à l'inverse de l’eremakausis où dominent les phénomènes d’oxydalion. On doit conclure de ce qui précède que la quantité d’éléments réductibles sera en rapport avec le dégagement d’acide carbonique. C’est ce qui arrive du moins pour les sels de fer et de manganèse comme le montre l'expérience suivante. 2 grammes de fumier de cheval en poudre furent intimement mé- langés à 400 grammes de sable quartzeux et humectés soit de 50 grammes d’eau, soit d’une même quantité d’une solution à 1/2 p. 100 de sulfate de fer et de manganèse. Le mélange était plongé dans une atmosphère d'hydrogène. Les quantités d’acide carbonique trouvées dans 1 000 volumes de gaz (à 0° et à la pression de 760 millimètres) furent (moyenne de 8 observations) : Avec Meme AT Ares de Le Ne 4,376 — le sulfate de manganèse, , . . . . 5,252 — MIE SUAC UEPIETE He de eee le 5,698 Ces sels avaient donc, en se réduisant, activé l’oxydation du car- bone. Cette réduction peut aller assez loin pour qu’il se forme des pyrites (FeS,), d’après les recherches de M. MArcker', par exemple dans les sols de tourbe. Comme conséquence de cette oxydation extrêmement lente, le dégagement de chaleur dans la décomposition forménique est mi- 1. Zeilschrifl des Landw. Vereins für die Provinz Sachsen, 1874, n° 2 el 5, p- 70. sé 1 nime et ne peut être mis en évidence, dans les conditions de la na- ture, par les instruments de mesure habituels. Une partie du carbone se transforme en formène (CU) et la masse reste alcaline à cause d’un certain taux de carbonate d’ammoniaque. D'après F. Horpe-Sevcer', la cellulose, sous l'action d’un schizo- mycèle largement répandu dans la vase, se transforme directement sous l’eau en acide carbonique et formène, suivaat l'équation : C9 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES... CH,0;,+H,0—= 3C0, + 3CH, Ceilulose Eau Acide Formène. carbonique Suivant P. P. DEHÉRAIN* cette réaction ne semble se produire que quand on introduit de temps en temps de l’oxygène dans la masse en décomposition. Avec absence prolongée de ce gaz le dégagement forménique cesse et il ne reprend qu'après l'addition de certaines quantités d'oxygène”. Outre les fermentations précédentes, 1l s’en présente encore par- fois une autre où, au lieu de formène, c’est de l'hydrogène qui se . dégage. Dans la décomposition du formiate de chaux F. Hopre-Sey- LER* en a montré un exemple. Place-t-on ce sel sous l’eau avec un peu de limon d’égout, il se décomposera en donnant de l'acide car- bonique et de l'hydrogène avec un résidu de carbonate de chaux. Celte réaction peut se représenter ainsi : CaG, H,0, +H,0 = CaC0, + CO, + 4H Formiate Eau. Carbonate Acide Hydro- de chaux, de chaux. carbonique. gène. La réaction acide de la masse mise en évidence par l'apparition simultanée d'acides gras volatils, notamment d’acide butyrique 1. Archiv der gesammten Physiologie, vol. XIL, p. 1; Zeÿtschrift fur physiolo- gische Chemie, vol. X, p. 422. 2. C. R., t. XOVIII, 1884, n° 6; €. XCIX, n° 1 ; Journal de l'agriculture, 1884, n° 781 ; Annales agronomiques, t. X, n° 9. 3. Voyez Horre-Seycer, Zeëlschréft fur physiologische Chemie, vol. VII, p. 214. ALOCA CT, x0l- X,1p.2492, 392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. (DEnÉrAInN)" est caractéristique de ce processus. La présence de cet acide se reconnaît aisément à la formation d’éther butyrique ainsi qu’à son odeur propre. Jusqu’alors on ne sait pas si, pour ce déga- gement d'hydrogène comme pour celui de formène, il est nécessaire que l’oxygène ait accès de temps en temps ou si ce processus repré- sente cette forme de décomposition à laquelle conduit l’absence complète d'oxygène. La putréfaction des matières protéiques? se fait sans doute con- formément à la décomposition de la molécule d’albumine qui donne lieu à des dérivés amidés de la série grasse (acides amidés), à un corps azoté de la série aromatique et à un résidu de matières peptoniques et autres encore inconnues. Les produits d’altération qui se forment tout d’abord et qui sont précisément ces mêmes combinaisons (amidées) existant primitive- ment dans les matières organiques non décomposées, se transfor- ment ensuite en partie, par exemple, les acides amidés en ammo- niaque et acides gras, ceux-ci se détruisant après par la mise en liberté d'acide carbonique, hydrogène et formène. C’est ainsi que pour la leucine on a établi qu’elle subissait une fermentation où pre- naient naissance de l’acide valérianique, de l’ammoniaque, de l’acide carbonique et de l'hydrogène. Le glycocolle et d’autres acides ami- dés subissent peut-être une décomposition analogue. Dans la fer- mentation de la tyrosine, il se forme, d’après Nencxi, de l’indol, de l'acide carbonique, de l’eau et de l'hydrogène. La décomposition des matières azotées est plus ou moins rapide suivant les circonstances extérieures; une assez grande partie ne se transforme sûrement que jusqu’à un certain degré; c’est ce qu’on doit conclure de ce fait que les matières soumises à la putré- faction s'accumulent sur leur lieu de formation et renferment de grandes quantités d’azote organique. L'’ammoniaque formée n’appa- raît d'ordinaire qu’en minime quantité et semble par là subir des décompositions ultérieures. Enfin, il est important pour l’agriculture que, parmi les produits {. Annales agronomiques, t. X, n° 1, p. f. 2. C. FLUcce, Die Mikroorganismen, Leipzig, 1886, p. 493. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 393 de la putréfaction, on ait signalé l’azote gazeux et les degrés infé- rieurs d’oxydation de l’azote (nitrite, protoxyde d'azote). La réduction des nitrates, voire des nitrites, nommée dénitrifi- cation, à été éludiée à fond. Th. SCHLŒSING avail déjà trouvé dans ses premières expériences que l'acide nitrique disparaissait du sol dès que l’air y était remplacé par l'azote. Plus tard, U. Gayon et G. Dupgrir' et aussi P. P. DEnÉRaIN et L. MAQUENNE* ont étudié expérimentalement ces réactions. Les premiers ayant mélangé de l'urine putréfiée à de l’eau d’un canal à laquelle ils avaient ajouté 05,02 de nitrate de potasse par litre, virent le nitrate disparaître peu à peu. Toute une série d’essais montra la possibilité de réduire Os, et même 06,2 de nitrate par litre. Au delà de ces limites l'eau du canal était insuffisante ; mais, si on la remplaçait par du bouillon de poule neutralisé avec une solution de potasse, on pouvait réduire complètement des solutions de nitrate à 9 p. 100. Il se dégagea de l’azote pur qui formait une grande partie de l'azote des nitrates ; le reste donna de lammoniaque et peut-être des dérivés amidés de la matière organique employée. L’oxygène du nitrate forma de l’acide carbonique restant dans la solution sous forme de carbonate ou de bicarbonate. Les nitrates de soude, d’am- moniaque et de chaux offrirent les mêmes réactions que le nitrate de potasse. D’autres recherches des mêmes auteurs ont montré que, dans certaines circonstances, la réduction des nitrales ne va que jusqu’à la formation de nitriles. Les essais de DEHÉRAIN et MAQUENNE sont en quelque sorte un complément des précédents. Ils prirent deux sols, un riche en ma- tière organique el naturellement salpêlré, l’autre pauvre en matière organique et dépourvu de nitrates. 300 grammes furent placés avec des quantités variables de ni- trates dans des flacons de 250 centimètres cubes hermétiquement bouchés et munis de tubes abducteurs ouvrant sous le mercure. La terre riche en matières organiques accusa, dans la pression inté- rieure, une diminution qui fut suivie d’un dégagement de gaz (acide , t: XOV, p. 644 et 1365. t. USSR > 2, C.R.,t, XOV, p. Gi. ANN. SCIENCE AGRON, — 2° SÉRIE. — 1898. — 11. 23 354 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. carbonique et azote). Dans la terre pauvre, la diminution de pres- sion à l’intérieur persista et ne fut suivie d’aucun dégagement gazeux. En conséquence, les nitrates peuvent exister dans les sols ordinaires en l’absence de l’air sans dégager de l’azote. Celui-ci n'apparait qu’autant que la quantité de matières organiques aug- mente ; alors on obtient bientôt de l’azote gazeux. Après avoir élucidé le fait au point de vue qualitatif, les expéri- mentateurs, dans une seconde série d’essais, mesurèrent et étudié- rent de plus près les gaz dégagés pendant la réduction des nitrates. Dans des tubes munis de robinets en verre tenant le vide, ils placè- rent 30 grammes de terre additionnée ou non de nitrates et de matières organiques. Au début de l’expérience, on mesura les gaz à deux reprises différentes en faisant chaque fois le vide à la trompe. Après 99 jours, on recueillit les gaz. Au lieu de l’oxygène et de l'azote que renfermaient les tubes tout d’abord, on trouva, à la fin de l'expérience, dans trois tubes remplis de divers mélanges, des proportions variables d'acide carbonique, pas d’azote et un résidu gazeux indiquant qu'il y avait eu dégagement de gaz. La proportion de gaz dégagée était plus influencée par l’abondance de la matière organique que par celle du salpêtre ; mais même quand la matière organique a été très abondante, on n’a jamais obtenu une quantité de gaz correspondant à celle qui existait dans le nitrate. On rechercha ensuite par la méthode eudiométrique si le gaz res- tant après l’absorption de l'acide carbonique ne renfermait pas de gaz combustible et, dans les trois tubes, les gaz provenant de la ré- duction des nitrates du sol accusèrent un taux remarquable de pro- toxyde d’azote. Des déterminations exactes en montrèrent 11.75 p. 100 dans un flacon qui contenait 300 grammes de terre de jardin et 9.35 p. 100 dans un flacon renfermant 300 grammes de terre et 10 grammes de salpêtre. Quand les quantités de salpêtre et de matière organique sont con- venables, la réduction des nitrates a lieu avec dégagement de pro- toxyde d’azote et d’azote gazeux. Les conditions dans lesquelles le gaz hilarant prend naissance sont assez particulières ; car non seule- ment il est arrivé assez souvent aux expérimentateurs de ne pas le, DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 309 rencontrer dans les gaz provenant de la réduction des nitrates ; mais, de plus, SCHLŒSING, qui avait prévu la possibilité du dégage- ment des oxydes inférieurs de l'azote pendant la réduction des ni- trates dans la terre arable n’avait pu déceler leur présence dans ses travaux de 1873. Le dégagement d’azote gazeux dans la décomposition forménique n’a pas élé seulement trouvé dans les essais précédents faits en l'absence complète de l'air; mais il avait déjà été établi par des re- cherches antérieures où l'air n’était fourni à la masse en décompo- sition qu’au-dessous de certaines limites. Ainsi J, Kônic et J. Kiesow' dans la putréfaction de la poudre d’os, de la viande et du fumier de vache, B. E. DierzeLr * dans celle du sang desséché, et dernière- ment À. MorGEn et J. KôniG* dans celle du sang, de la poudre d’os, de cuir et de corne ont trouvé qu’une plus ou moins grande portion de l’azote se dégageait à l’état libre ou, en tous cas, sous une forme telle que cet azote doit être considéré comme provisoirement perdu pour l’agriculture. On n’est pas d’accord sur les causes de cette perte d’azote. Il fau- drait avant tout savoir si l’azote gazeux se dégage directement de la matière organique ou bien de l’ammoniaque qui se produit en faible quantité, ou s’il est un produit de [a dénitrification. MorGEen et KÔNIG admettent que la perte d’azote est due en pre- mière ligne à l'oxydation ; l’'ammoniaque naissante serait brûlée par l'oxygène et il se formerait de l’eau et de l’azote suivant l'équation : ANNÉE OS SIL OPEN: Ammoniaque. Oxygène. Eau. Azote. Celle conception ne semble cependant pas admissible, car la quantité d'oxygène disponible dans une masse soustraite à l’action de l’air serait complètement insuffisante pour l'oxydation de l’ammo- niaque, étant donné que l’oxygène, comme on l’a vu, est tout d’abord réclamé par le carbone de la matière organique. 1. Landw. Jahrbücher, vol. Il, 1873, p. 107. 2, Zeilschrift des Landw. Vereins in Bayern, 1882, fase. de mars. 3. Landw. Versuchsstationen, vol, XXX, 1884, p, 199-216. 306 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Quant à la question de savoir si l’azote libre se dégage directe- ment des éléments azolés, d’après divers essais concordants, elle doit être résolue par la négative. B. Tacxe ‘ a trouvé que, dans la décomposition de matières orga- niques azolées, mais sans nitrates, en l'absence d'oxygène, il ne se dégageait pas d'azote. Même résultat fut obtenu par Th. ScHLŒsING* qui employa pour ses expériences de la viande de bœuf, des fèves broyées, du fromage de Roquefort, des filets de sole, du famier . de cheval mêlé d’urine et une culture d’Aspergillus niger en solu- tion nutritive. La perte d'azote gazeux fut, dans tous ces cas, si faible, qu’elle doit être considérée comme absolument insignifiante. À. EHRENDERG * soumit des matières organiques azotées (fumier de cheval) peu humides à la décomposition en labsence d'oxygène et ne put déceler dans les gaz qui se dégagèrent que l'acide carbo- nique et le formène. O0. KELLNER et T. Yosuir* se sont aussi occupés de cette question. Ils mirent à décomposer diverses substances, fèves de Soja finement moulues, farine de poisson et lait avec de l'urine putréfiée (les deux premières matières étaient mélangées d’eau) et les placèrent dans des flacons bouchés. Quelques-unes de ces matières étaient pourvues de petites quantités de gypse destiné à fixer l’ammoniaque. Dans aucun des huit cas on ne put observer une perte quelconque d’azote, bien que la putréfaction ait été poussée très loin. Il n’y eut jamais de nitrificalion. On doit conclure de tous ces résultats concordants que, dans la décomposition forménique des matières organiques, il n’y a pas de dégagement direct d'azote gazeux. Ce processus ne se montre que dans la désoxydation des nitrates et nitrites, comme le prouvent non seulement les expériences rela- tées ci-dessus, mais encore celles de À. EnRENBERG, 0. KELLNER et T. Yosmir. Le premier a trouvé que, dans des mélanges. organiques en {. Landw. Jahrbücher, vol. XVI, p. 917-937. 2, C. R., t. GVIII, p. 205 et 261. 3. Zeilschrifl fur physiologische Chemie, vol. XI, 1887, p. 438-471. 4, Zeilschrift fur physiologische Chemie, vol. XII, p. 95. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 397 putréfaction par manque d'oxygène, il y avait décomposition des nitrates grâce à laquelle une portion de leur azote s'était dégagée à l’élat gazeux et qu'il se formait du gaz des marais aussitôt après leur décomposition. 300 grammes de fumier de cheval et 500 gram- mes de fumier de vache furent humectés avec une solution renfer- mant à grammes de salpêtre dans 100 centimètres cubes d'urine et placés dans un ballon rempli d’acide carbonique. L'analyse des gaz, faite de temps en temps, donna les résultats suivanls : KUMIER DE CHEVAL. FUMIER PE VACHE. GAZ RECUEILLI —— ——cR—— ——— — —- Acide Acide CAES au bout de carbonique. Azote. Formène. carbonique! Azote. Formène. p.100. p.100. p- 100. p. 100. p.100. p. 100. MOMIUTS EN CLASSES E70 ) T4 0400925706 » DO re 69.53 30.47 » 53.18 46.82 » 30 =" 2 73.43 23.172 2 OS 47.64 49.04 3.34 COS 44.09 » 55.91 45.81 » 54.19 KELLNER el Yosuit ajoutèrent à une dilution d'urine humaine en . putréfaction de la terre provenant de la couche superficielle du sol pour introduire le ferment nitrique. Dans ce mélange, où la nitrifi- calion se produisit avec une grande intensité, il y eut ensuite un fort dégagement d'azote qui, au bout de 6 mois, alteignit 9.6 p. 100 et, au bout de 8 mois, 10.1 p. 100. Ces expériences établissent donc que, dans les mélanges en putré- faction, l'uzole se dégage à l'élat gazeux seulement en présence des niurales. Les processus aboulissant au dégagement de l’azole sont divers et varient vraisemblablement suivant qu'il se produit du formène ou de lhydrogène. (Voir les expériences précédentes de Hoppe- SEYLER.) Dans le premier cas c’est probablement l’action sur les combiuai- sons amidées de l'acide nitreux libre se dégageant du milicu qui donne lieu à la formation d’azote libre (DIETZELL ‘). C’est ainsi que 1. D'après les recherches de Muwrz, C. R., t. CXIL, p. 1142-1146, l'acide carbo- nique peut mettre en liberté l'acide nitreux en formant un carbonate. 398 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. la leucine en présence de l’acide nitreux se transforme en acide leucique avec formation d’eau, tandis que l’azote se dégage molé- cule pour molécule. Cette décomposition est si rapide, qu’elle est utilisée pour la détermination de l'azote de la leucine'. En faisant réagir l'acide nitreux sur les amines primaires, l'azote est mis en liberté * et, d’après E. Kern‘ et E. Scauzze *, les sels ammoniacaux sont détruits en partie, même à froid, par l’acide nitreux avec dégagement d’azote. Les amines primaires provoqueront aussi une élimination d'azote en chassant l’ammoniaque du nitrite d’am- monium. Dans le second cas, la formation de l’azote élémentaire se com- prend aisément si l’on considère que l'hydrogène à l’état naissant a une grande action réductrice et peut dès lors réduire les nitrates et nitrites en donnant de l’eau, des combinaisons moins oxygénées et de l’azote libre. Quand tout l'acide nitrique libre est détruit, il se forme de l'hydrogène. Les modifications subies par les matières organiques dans leur composition élémentaire et leur taux de principes minéraux quand elles sont privées d’air n’ont encore été que peu étudiées ; pourtant, grâce à quelques analyses élémentaires, notamment à celles de W. Deruer* sur de la tourbe de divers âges, nous pouvons nous en faire une idée approchée. Pour voir l'influence qu’exerce sur la composition de l’humus la durée de la décomposition, DETMER fit trois analyses de Ja tourbe de Jessbecker : I, sur de la tourbe brune de la surface; Il, sur de la tourbe noire prise à 2°,9; IT, sur de la tourbe noire prise à 4,4. Dans la tourbe I, les débris organiques étaient encore aisément reconnaissables ; dans IT et JE, ils étaient transformés en une masse 1. R. Sacusex, Landw. Versuchsstationen, vol. XVII, p. 327. 2. À. W. HormanN, Ann. d. Chemie und Pharmacie, vol. LXXV, p. 363; V. Meyer et F. Fonsren, Ber. d. deutschen chem. Ges., vol. IX, p. 536 ; V. Meyen, J. BanBient et F. Fonstenr, éd., vol. X, p. 130. 3. Landw, Versuchsslationen, vol. XXIV, p. 368. 4. Landw. Versuchsstationen, vol. XXV, p. 173, et vol. XXVI, p. 260. 9. Landw. Versuchsstationen, vol. XIV, p. 248. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 329 homogène. Les échantillons desséchés à 120° centigrades renfer- maient (cendres non comprises) : | I. II. ITI GATDONES ete Re 57,75 62,02 64,07 Hydrogéener PMAMPESMERUES 5,43 521 »,01 Oxygène oui RE 36,02 30,67 26,87 TT JE TEE 0,80 2,10 4,05 Cendres 212 7,42 9,16 Par les progrès de la décomposition la matière organique s’enri- chit donc en azote et en carbone, parce que les éléments azotés se décomposent plus lentement que les non azotés et parce que l’hydro- gène et l'oxygène se séparent de la masse en plus forte proportion que le carbone. Les matières minérales, si elles ne sont pas lavées, restent telles quelles, mais leur taux relatif augmente par la dimi- nution de la matière organique. De ce qui précède il résulte déjà qu'érémacausis et putréfaction sont deux processus de décomposition essentiellement différents et que l’on ne doit pas confondre comme on le fait encore souvent. La différence consiste surtout en ce que la matière organique se volatilise presque complètement dans le premier cas, tandis que, dans l’autre, la formation de produits gazeux est limitée et il reste un abondant résidu. À cet égard, l’érémacausis est caractérisée par la disparition et la putréfaction par l'accumulation. 3° Autres modes de décomposition. Divers modes de décomposilion, s’écartant à première vue de ceux qui viennent d’être décrits, rentrent après un examen attentif soit dans l’un, soit dans l’autre des processus étudiés ou bien, sui- vant les cas, circonstances extérieures, etc., se placent entre les deux. C’est le cas, par exemple, pour la pourriture qu’éprouvent dans un milieu aéré les matières pauvres en azote et suffisamment humides. Érémacausis et putréfaction peuvent se présenter simal- tanément dans la même masse, suivant que les diverses couches 360 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. reçoivent de plus ou moins grandes quantités d’air (fumier d’é- table). Dans ces autres modes de décomposition devrait tout d’abord rentrer la fermentation alcoolique depuis que les recherches de A. Münrz' ont montré que l'alcool se rencontrait dans les terres de jardin et dans les sols riches en matières organiques en assez grande proportion pour qu’on puisse l’extraire et le caractériser d’après ses propriétés essentielles. On n’a pas établi jusqu'alors si celte réaction se présente d’une manière générale dans la nature. L'alcool (éthylique), joint à l'acide carbonique et divers autres produits en moindres quantités (huile empyreumatique, acide buty- rique, succinique, glycérine, etc.), se dégage de diverses espèces de sucre (dextrose, lévulose et maltose) soit directement, soit après inversion (sucre de canne, sucre de lait) suivant les équations : C:4,0:=2CH;0 7200; L Sucre Alcool. Acide de raisin, carbonique. Ci: 0,, + H,0 — 4C,H,0 + 4C0, Sucre de canne. Eau. Alcool. Acide carbonique. La fermentation ammoniacale de l'urine est plus importante pour l'agriculture. On sait que l’urine normale de l’homme et des mam- mifères domestiques prend, quand elle séjourne à l’air, une odeur ammoniacale. Cela tient à ce que l'urine se transforme par addition d’eau en carbonate d’ammoniaque suivant la réaction : CH,N,0 + 2H,0 — 2(NH.)CO, Urine. Eau. Carbonate d'ammoniaque. L’acide hippurique, qui existe en grande quantité, avec l’urée, dans l’urine des herbivores, se dédouble aussi par addition d’eau, 1. C.R., t. XCH, p. 499. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 361 d’abord en acide benzoïque et en glycocolle. L’équation suivante rend compte de la réaction. C,H, NO, -E H,0 = C,H,NO, + C.0,0;. Acide Eau. Glycocolle. Acide hippurique. benzoïque. Le glycocolle considéré, d’après sa consiitution, comme acide amino-éthanoïque — CH° (Az) COOH, subit sans doute des chan- gements ultérieurs d’où résultent finalement des sels ammoniacaux. L’acide urique, qui existe abondamment dans les excréments des oiseaux, donne aussi finalement, comme l’acide hippurique, du car- bonate d’ammoniaque. Cette transformation a lieu par l’oxydation complète qui dédouble l’acide urique en acide carbonique et urée. La formation de l’ammoniaque se produit très rapidement dans l’urée, plus lentement dans l'acide urique et c’est l'acide hippurique qui se montre le plus résistant. L’oxydalion de maintes matières organiques azotées ou non abou- Uil à la production d’acides gras volatils. L’acide formique (GH,0.) est un produit de décomposition et d’oxydalion des matières albuminoïdes et de certains hydrates de carbone végétaux ou animaux; il se forme aussi par oxydation de l’alcool méthylique, tout comme lacide acétique dérive de l'alcool éthylique. L’acide acétique ou éthanoïque doit être compté parmi les pro- duits de décomposition des matières organiques el c’est à ce litre qu'il existe, quoique en faible quantité, dans la tourbe, l'humus et autres substances en voie d’altération. Il se forme très facilement par oxydation de l'alcool d’après la réaction suivante : CH,0+ 20 = CH,0, +H;0 Alcool. Oxygène. Acide Eau. acétique. L’acide propionique (C,H,0;) se produit avec d’autres acides gras dans la décomposition de beaucoup de matières végétales, particulièrement de celles qui sont riches en albuminoïdes et en tan- nins. 362 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. L'acide butyrique paraît être, comme les autres acides gras vola- tils, un produit d’altération de certaines substances végétales. Il se forme dans la fermentation du sucre par dégagement d’acide carbo- nique et d'hydrogène suivant l'équation : CH:0,— 2C0, + CH,0,+ 4H Sucre. Acide Acide Hydrogène, carbonique. butyrique. D’autres hydrates de carbone tels que: l’amidon, linuline, la dextrine, la dextrose, etc., se transforment d’abord en acide lac- tique qui se dédouble ensuite, à mesure que la fermentation pro- gresse, en acide bulyrique, acide carbonique et hydrogène d’après l'équation : 2C.H,0, — 2C0, + C,H,0, + 4H Acide lactique. Acide Acide Hydrogène. carbonique. butyrique. L’acide valérianique (G,H,,0;) est un produit de décomposition des corps albuminoïdes et des albuminates ; il en est de même de l'acide caproïque (C,H,,0,). Parmi les acides organiques importants il faut distinguer les aci- des lactique et succinique. Ce sont surtout les sucres de canne, de raisin, de lait, la mannite, la sorbite, l’inosite, etc., qui contribuent à la formation du premier. La réaction se représente ordinairement par l’équation : DS à D mag (EE EL Sucre. Acide lactique. qui ne semble cependant pas exacte, parce qu’on n’y tient pas compte de l’acide carbonique qui se dégage en même temps. L'acide succinique (C,H,0,) se produit dans la décomposition de la sève des plantes qui contiennent de l’asparagine et en faible quan- üté dans la fermentation de l’alcool. Les acides gras et les acides organiques végétaux subissent des fermentations diverses qui s’accomplissent au mieux quand ces DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 363 acides se trouvent dans le substratum sous forme de sels neutres, surtout de sels de chaux", Le formiate de chaux donne du carbonate de chaux, de l'acide carbonique et de l’hydrogène. L’acétate de chaux se décompose en carbonate de chaux, acide carbonique et formène. Le lactate de chaux subit d’après Firz quatre fermentations diffé- rentes : 4° La fermentation en acide propionique avec lequel on rencontre, comme sous-produits, l'acide acélique, l’aide succinique et l'alcool ; % Une fermentalion dans laquelle il se forme, avec de l'acide propionique, d'assez grandes quantités d’acide valérianique ; 3° La fermentation butyrique dans laquelle naissent, comme sous- produits, à côté du butyrate et du carbonate de chaux, des alcools éthylique et butylique ; 4° Une fermentation à laquelle est liée la formation des acides bu- tyrique el propionique. Le glycérate de-chaux donne, dans un cas, de l’acétate de chaux el de faibles quantités d’acide succinique et d’alcool éthylique, dans un autre, de l'acide formique et, comme sous-produits, de l’alcool méthylique et de l'acide acétique. Le malate de chaux fournit surtout de l'acide succinique avec un peu d’acide acétique et propionique. Mais il peut aussi subir la fer- mentation butyrique avec dégagement d'hydrogène ou lactique avec dégagement d’acide carbonique. Le tartrate de chaux donne, par la fermentation, de l'acide propionique ou butyrique et aussi, dans certaines circonstances, de l’acide acétique. Le citrate de chaux fournit, d’après Firz, de l’acide acélique en abondance, avec de l'alcool éthylique et de l’acide succinique. L’oxalate de chaux se transforme par la fermentation en carbonate de chaux. Les autres fermentalions de matières organiques n’offrent pas d'intérêt à notre point de vue et peuvent d'autant mieux être pas- 1. C. FLücce, Die Mikroorganismen, Leipzig, 1886, p. 489. 364 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. , sées sous silence qu’elles ont jusqu'alors été peu étudiées. Par contre, il y a encore à signaler, sous le rapport agronomique, deux modes importants de décomposition dans lesquels se séparent des corps inorganiques, notamment du soufre et de l’oxyde de fer. D'après S. WinoGrapsky”, il se sépare du soufre par l’oxydation de l'hydrogène sulfuré qui se forme lorsque le carbure d'hydrogène, tel qu'il s’en dégage dans la putréfaction, réduit, à l’état naissant, les sulfates, surtout ceux de soude et de chaux (gypse), suivant la réaction : CH, + CaS0;, = CGaG0 + HS 0 Carbure Sulfate Carbonate Hydrogène Eau. d'hydrogène, de chaux. de chaux. sulfuré. La production du sesquioxyde de fer dérive de l’oxydation du car- bonate de protoxyde de fer. Cette réaction est la cause des dépôts connus sous le nom de limonite, fer des marais, etc. Il. — ACTION DES MICROORGANISMES Jusqu'à ces derniers temps on croyait généralement que les phénomènes de décomposition des matières organiques étaient d'ordre purement chimique ; diverses recherches récentes ont mon- tré qu’ils sont d’ordre biologique, attendu qu'ils n’ont lieu qu'avec l’aide de microorganismes. Celle démonstration peut se faire de deux manières: soit en chauf- fant les substances en décomposilion ou en leur ajoutant des anti- septiques appropriés et en voyant si la décomposilion cesse, soit en isolant les divers microorganismes qui pullulent dans les matières en décomposition ou en putréfaction et en étudiant les réactions qu'ils peuvent exercer sur les différents éléments des débris animaux ou végétaux. En suivant ces deux voies on a cherché à pénétrer plus inti- mement dans les faits et, malgré les lacunes des recherches entre- prises jusqu'ici, on a obtenu d’ores et déjà des résultats qui fournissent des points d'appui solides et permettent des applications pratiques. J'ai fait, d’après la première méthode, une série d’essais dans les- 1. Botanische Zeitung 1887, n°° 31-37. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 369 quels les matières soumises à l’érémacausis ont été additionnées de divers antiseptiques ou soumises à des températures assez élevées. J'y ai déterminé les quantités d’acide carbonique qui se dégageaient, toutes autres circonstances égales ; elles pouvaient servir de mesure à l'intensité de la décomposition. Voici le mode opératoire que J'ai employé : Les sols riches en humus ou les mélanges de sols, imprégnés d’égales quantités de solution, furent placés dans des tubes de verre en U de 3,5 de diamètre et d’environ 700 centimètres cubes de capacité, dont chaque extrémité était fermée par un bouchon en caout- chouc traversé par un tube en verre courbé à angle droit. Les tubes contenant les sols étaient rangés verticalement les uns à côté des autres dans une caisse en zinc remplie jusqu'au bord d’eau constam- ment maintenue à 30° à l’aide du thermostat Soxhlet. Des deux tubes de dégagement, l'un fut relié par un tuyau de caoutchouc avec un flacon rempli jusqu’au quart d'acide sulfurique concentré, l’autre fut relié de la même manière avec plusieurs autres tubes remplis de chaux sodée. Entre le flacon d’acide sulfurique et l’espirateur des- tiné à extraire l'air des tubes, on plaça un tube d'absorption de PEr- TENKOFER rempli d’une solution de baryte. Entre les prises d'essai faites d'ordinaire à intervalles égaux (de 24 à 48 heures), les tubes restèrent nuit et jour dans la caisse de zinc à la même température et, pour empêcher larrivée de l’acide carbonique, furent fermés hermétiquement à l’aide de petites baguettes de verre placées dans les caoutchoucs des tubes de dégagement après qu’on avait enlevé les récipients à chaux sodée et à acide sulfurique. Ce dispositif offrait cet avantage que tous les facteurs de la dé- composition des matières organiques, tels que température, humi- dité, constitution du sol, etc., restaient constants pendant toute la durée d’une expérience. Pour enlever l'air des tubes de dégagement, au début de chaque prise d’essai, on pompait un demi-litre d’air, puis on plaçait le tube à absorption avec baryte et on extrayait l’air du sol durant une heure et demie ou deux heures dans la proportion de deux litres en bulles de la grosseur d’une lentille. Quand Pair avait passé en quantité suffisante dans la solution de 366 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. baryte, on enlevait la communication avec laspirateur et le flacon d'acide sulfurique et on versait la solution barytique dans un pelit flacon de 290 centimètres cubes, bien fermé, qu’on gardait dans un lieu tranquille et frais jusqu’à ce que le carbonate de baryte se fût complètement déposé. On prenait alors, à laide d’une pipette, 30 centimètres cubes du liquide clair et on Litrait. Pour les essais relatifs à l’influence de la température, on prit deux échantillons de 166,3 représentant la movenne d’une assez grande quantité de famier de cheval finement pulvérisé; on les humecta dans une capsule en porcelaine avec 34,7 d’eau distillée. L'un des échantillons fut placé dans un tube de verre en U, l’autre dans un tube de fer de même forme qui, à ses deux extrémités, était muni de deux robinets solidement vissés et fut plongé pendant six heures dans un bain d’huile à 115° centigrades. Puis les deux tubes furent portés dans le bain-marie à 30° et traités comme les essais précédents, avec cette différence qu’au point d'entrée de l’air d'aspiration, entre les tubes à chaux sodée et le récipient du sol, on intercala un tube de verre, de 80 centimètres de long, préalablement chauffé, et qu'on remplit de coton purifié à l’éther pour recueillir les microor- ganismes de l'air atmosphérique. Pour comparer les influences des divers moyens employés sur la décomposition des matières organiques, on représenta par 100 la quantité d'acide carbonique dégagée sous l’action de l’eau pure et les autres résultats (moyennes de 6-9 prises d’essai) furent inscrits en ordre décroissant dans le tableau suivant. Les quantités des produits antiseptiques employées se rapportent à 100 parties des matières essayées pesées à l’état humide. LA MATIÈRE ANTISEPTIQUE ACIDE a été additionnée de : ne run = à Pal CE Re Lot » 100.0 Acide salicylique . 0.030 98.4 Sulfate de strychnine 0.210 92:5 Brome , . 2 = 0.045 87.9 Benzoate de soude. «2. 1.050 87.0 Chlore . . 0.045 85.0 Salicylate de soude . . . 1.050 80.5 Valérianale de zinc 5. 14" 0,045 11.3 DÉCGOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 367 LA MATIÈRE ANTISEPTIQUE ACIDE a été additionnée de : 4e res st res IndofbEmMe:. F1. HA RARE 0.045 Tileet Acide borique . . 0.330 48.9 Sulfate de cuivre . 0.045 47.1 Acide borique . 0.670 44,9 GHIor 0 forme ANR Er » 44,3 Borate de soude . 1.050 35.6 Acide carbolique . 0.110 33.9 lode . 0.045 3929 Benzol . : 1.050 110 Nitrate d'argent. . 0.045 12 Acide eyanhydride. . 0,045 11.6 Acide chromique . 0.045 2 Thymol. : 1.050 7.8 Bichlorure de mercure . 0.045 6.8 » » ; 0.090 45 Bichlorure de mercure. 0.180 Gal » » 0.360 620 » » 0.720 6.8 Acide carbolique . ss 1.110 5.7 Température de 1150 G, . , . ) 2.3 Ces chiffres” montrent clairement que la production d'acide car- bonique est presque complètement arrélée si l’on a joute aux subs- lances organiques en décomposition des solutions de bichlorure de mercure, de thymol et d'acide carbolique (ce dernier assez concen- tré) ou si on les porte à une température de 115°. Ces influences ressortent encore plus nettement si l’on examine, non plus la moyenne des résultats, mais les derniers chiffres de chaque série d’expériences. Les malières analysées contiennent, en effet, souvent de l’acide carbonique provenant des processus de dé- composition antérieurs à l'addition des antiseptiques el cet acide est entraîné par l'air en quantités d’abord assez grandes, puis de plus en plus petites, si bien que l’air extrait ne renferme pas seule- 1. Ces chiffres ne peuvent naturellement donner aucune idée générale sur l'action spécifique des différents antiseptiques, parce qu'elle dépend essentiellement de la con- centration- de la solution, comme le montrent les essais avec les acides carbolique et borique, et que peu de substances ont été employées en mêmes proportions. Dans les essais précédents il s'agissait surtout de trouver un moyen de tuer les microorganismes et ce but devait pouvoir être atteint complètement. 368 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. . ment l’acide carbonique formé pendant la durée de l’expérience, mais encore une partie de celui qui a pu se dégager auparavant. Il est donc rationnel de considérer surtout les résultats finaux qui font mieux ressortir les influences étudiées et que nous donnons ci-dessous. Production d'acide carbonique. À la température ordinaire de. 100,0 Sans bichlorure de mercure. 100,0 AAA. Lt Rss Er CEE l,2hy'Avec — ‘ 4,5 On voit que l'oxydation du carbone, surtout par l’emploi de la chaleur, est presque réduite à 0. Les‘expériences précédentes ne décident pas si cette petite quan- uté d'acide résulte d’une faible réaction chimique ou plutôt d’un lent dégagement de gaz provenant de décompositions antérieures et retenu par la matière organique en vertu de son pouvoir extraordi- naire d'absorption. Pour le but que nous poursuivons, il suffit d’avoir prouvé que la production d’acide carbonique cesse presque complètement dans les substances en train de se décomposer, quand elles sont soumises à un traitement capable de tuer les microorganismes qui y pullulent. I faut donc conclure que l'oxydation du carbone dans la décom- posilion des malières organiques doit étre considérée comme étant surloul un fait de chimie physiologique, puisqu'il est lié aux condi- lions d'existence des microorganismes. La preuve de l'intervention des microorganismes dans l’oxydation des matières organiques à été fournie aussi par Th. ScaLœsiNG et À. Munrz' en ce qui concerne la transformation de l’ammoniaque en acide nitrique. [ls ont fait passer des vapeurs de chloroforme à travers un sol où la nitrification était active et qu’ils arrosaient en- suite de purin. Si la nitrification était influencée par des êtres orga- nisés, elle devait cesser après addition du chloroforme qui suspend 1. C. R.,t. LXXX, p. 1250 s t. LXXXIV, p. 301 ; t.LXXXV, p. 1018, ett. LXXXVI, p. 892. Déjà auparavant, Pasreur (1862) et Alex. Muzcen, Versuchsstationen, vol. XVI, p. 273, avaient exprimé l'idée que la nitrification devait être le résultat de l’activité de certains microbes, DÉCOMPOSITION -DES MATIÈRES ORGANIQUES. 369 leur aclivité ; c’est ce qui arriva. L’eau de filtration contenait de l’'ammoniaque en plus grande quantité, mais les nitrates et les nitrites avaient diminué. Dans le dernier essai, ScaLœsiNG chauffa le sol à 100°, ce qui arrêta toute production d’acide nitrique. R. WaRiINGTON' confirma les résultats de ScaLæsinG et Münrz el montra que le sulfure de carbone avait la même action. Le sol était contenu dans des tubes en U. Dans un des échantillons passait, par aspiration, de l’air privé d’ammoniaque, dans les deux autres, de l'air filtré sur une éponge imbibée, pour l’un, de chloroforme et, pour l’autre, de sulfure de carbone. L'analyse du sol donna les résultats suivants : Azote sous forme de nitrates et de nitrites par million de parties du sol desséché à l'air. E II. Existant primitivement. A ENAER » CORNE SERIE 6,12 8,91 Après ventilation avec air pur. . . . . . . RÉEL 40,87 50,86 Après ventilation avec air imprégné de sulfure de carbone. 6,70 9,75 — — de chloroforme . . . 9,48 7,86 Le fait que le sol fortement chauflé perd la faculté d’oxyder l'azote a été de même confirmé par des recherches de J. von Fo- por°. Celui-ci chauffa un échantillon de sol à la flamme d’un four- neau et l’arrosa chaque jour de 6 à 8 centimètres cubes d’urine bouillie étendue au dixième. Sol et urine furent, en outre, préservés des poussières atmosphériques et des bactéries qui s’y trouvent. Le liquide clair qui filtrait goutte à goutte était très différent de celui qui s’écoulait du même sol non chauffé. 100 centimètres cubes de la solution filtrée contenaient : SOL non chauffé, chauffé. milligr. milligr. Ammoniaque. . . . . . . 1,75 1,50 Matière organique. . . . . 19.20 84,04 Nitratétet-mitrite. 0.2.0 92,00 0 1. Journal of the Chemical Society, janvier 1878. 2. Hygienische Untersuchungen über Luft, Boden und Wasser Braunschweig, 1882. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1898, — 1. 24 310 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Dernièrement, H. PLaru’ a aussi établi, par des essais concluants que la terre stérilisée ne peut nitrifier l’ammoniaque et que, en l'absence de tout organisme, les substances alcalines sont incapables de provoquer loxydation de l’ammoniaque à l'aide de l’oxygène atmosphérique. | En présence des résultats acquis Jusqu'ici, il semble légitime de conclure que la nilrificalion de l'ammoniaque ne résulle pas de réactions purement inorganiques, mais est liée à l'intervention des microorganismes. Comme la formation de l’'ammoniaque dans la décomposition des malières organiques doit être considérée, d’après MARCHAL?, comme un processus d’oxydation, 1l y aurait encore à rechercher s’il doit être attribué à des microorganismes. Les essais concordants de A. Münrz et I. Coupon nous fournissent une réponse positive. Ils ont dosé, par le même procédé, l’ammoniaque dans de la terre qui avait été stérilisée en la chauffant à 120° et dans de la terre en- semencée avec une petile portion de terre non stérilisée. Il va de soi que tous les échantillons furent soumis aux condilions reconnues comme les plus favorables au maintien de lammoniaque formée. Le résultat fut que, après 67 jours, il ne s'était pas du tout formé d’ammoniaque dans le sol stérilisé, tandis que, dans l'autre, 400 grammes de terre avaient produit 41-110 milligrammes d’am- moniaque. Donc la formation de ce corps était complètement inter- rompue par l’absence des microbes, et des réactions purement chi- miques sont incapables, semble-t-il, de produire de lammoniaque. Même après deux ans et demi, la terre stérilisée n’accusait aucune augmentalion d’ammoniaque, tandis qu’elle se développait abondam- ment après l'addition d’un petit fragment de terre de jardin. C’est donc exclusivement aux microorganismes qu'il faut allribuer la formation de l'ammoniaque. Ceux-ci sont très résistants ; une tem- pérature de 110° prolongée pendant une heure n’a pu les tuer; ce n’est qu'à 120° que leur activité est sûrement détruite. . Landw. Jahrbücher, par H. Turez, vol. XVE, livre 6, pp. 891-915. . V. suprà. C. R., t. OXVI, 1893, p. 395. © 2 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. SE Les microorganismes interviennent aussi dans les processus de réduction, c’est-à-dire dans la putréfaction. Ce fait est démontré déjà par les recherches de P. P. Denérain : sur la décomposition du fumier d’étable et de la paille; la fermentation forménique y cesse totalement par l'addition de chloroforme ou par le chauffage à 85°. Le même la réduction des nitrates (la dénitrification) cesse, comme l'ont montré U. Gayon et G. Duperir*, quand la solution en expé- rience est additionnée de chloroforme ou de sulfate de cuivre, ou qu’elle est stérilisée par l'élévation de la température. Ges faits ne peuvent s'expliquer qu'en admettant que des microbes interviennent dans ces réactions. Pour être complet, citons encore l’observalion d'Alex, MuLLer*: la fermentation ammoniacale de l’urée semble liée à l’activité des microorganismes, puisque en ajoutant de l'acide sulfurique, de l’acide mitrique el de l’acide chlorhydrique, mais surtout de l'acide sulfu- reux, du chlorure de calcium, du sulfure de carbone et du chloro- forme, la réaction s’affaiblit dans une énorme proportion. Quoique, d’après tous les résultats précédents, on doive ad- mettre actuellement avec certitude que les processus chimiques qui se présentent dans la destruction des matières organiques sont influencés par des microbes, satisfaction n’est pas encore donnée, tant s’en faut, à tous les desiderata de la sci2nce ; on ira évidemment plus loin et, pour pouvoir porter un jugement sur les influences que l'organisme vivant exerce par ses processus vitaux, il faudra ap- prendre à connaître cet organisme lui-même; ses formes et ses pro- priétlés. Dans ce but, il sera surtout nécessaire d'approfondir les relalions qui existent entre les divers organismes et chacun des processus chimiques caractéristiques. On a, jusqu'ici, relativement peu travaillé dans cette direction; on n’a guère fait que donner une idée approchée des questions à résoudre. Pour simplifier l'exposition, il semble logique de parler d’abord des réactions qui se passent en présence de l’oxygène et de mettre CRUE RONDES En% 6. XCGIX n°. 1: 2. C. R., t. XOV, p. 644 et 1365. 3. Landw. Versuchsstalionen, vol. XXXII, 1885, p. 271. 312 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. à la suite celles qui entrent en jeu quand l'accès de l’air est entravé ou complètement supprimé. À l’exemple de PASTEUR, on pourrait désigner, au point de vue biologique, les organismes de la pre- mière catégorie sous.le nom d’aérobies et ceux du second groupe sous le nom d’anaérobies (voir le chapitre VD). L’érémacausis, qui est caractérisée, comme nous l’avons montré, par la formation d'acide carbonique, d’eau, d’ammoniaque, de nitrates et de sulfates, se fait, sans doute, avec le concours d’orga- nismes ayant une grande puissance d’oxydation. Les mucorinées n'interviennent que si la substance est faiblement acide; quand elle a une réaction neutre ou faiblement alcaline, certains schizomy- cètes jouent le rôle capital. Un petit nombre seulement a été étudié de près jusqu'alors ; ce n’est que pour la mitrification et la forma- tion de l’ammoniaque qu’on est arrivé à déterminer les organismes qui les provoquent. Th. ScuLæsinG et A. MÜünrz, qui ont montré les premiers que la nitrification dans le sol était due à des ferments organisés, se servaient de solutions dans lesquelles la nitrification se fait fort bien quand elles sont convenablement préparées et bien aérées. Ils ont employé des eaux d’égout claires ou stérilisées ou des solutions alcalines étendues auxquelles ils ajoutaient les principes minéraux nécessaires, un sel ammoniacal et de la matière organique. Les solutions étaient si claires, que l’on ne pouvait y découvrir au microscope aucun corps organisé et elles restaient telles indéfini- ment après avoir été chauffées à 110°. Mais si l’on y apportait une trace de terre en donnant un accès suffisant à l’oxygène (de l'air flambé et filtré), au bout de peu de jours, avec une température convenable, la nitrification commençait. On voyait alors au micros- cope de nombreux corpuscules allongés très petits qui offraient une grande ressemblance avec les corpuscules brillants trouvés dans les eaux par PasrEur et déjà auparavant par R. Kocx et F. Conn. Si l’on portail dans d’autres solutions stériles une portion des liqueurs en train de nitrifier, on obtenait des liquides où se formaient des nitrates sans que l’on püt y trouver d’autres organismes que ceux qui viennent d’être décrits. Il paraît donc hors de doute que cet organisme provoque l'oxydation de l’azote et ScnLæsinG et Münrz DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 313 l'ont considéré comme le ferment nitrique. Ils réussirent aussi à extraire du sol des bactéries qui avaient le pouvoir de transformer les sels ammoniacaux en nitrates. De ce fait que dans l'air il n’y a pas d'organismes nitrifiants, ces savants concluaient que toutes les espèces de bactéries n’ont pas cette facullé de nitrification et qu’elle est dévolue seulement à certaines espèces vivant dans le sol et dans l’eau. Dans des recherches ultérieures, A. MÜNTz' a trouvé que les orga- nismes nitrifiants ne donnaient lieu qu'à la formalion de sels nitreux et que, si les nitrites se trouvaient rarement dans le sol, cela tenait à leur rapide oxydation sous l’action simultanée de l’air et de l’acide carbonique, celui-ci mettant en liberté, par la formation d’un car- bonate, l’acide nitreux qui se combine directement à l’oxygène pour donner de lacide nitrique. On ne pourrait donc pas du tout con- clure de la présence des nitrates dans le sol à celle d’un ferment nitrique spécifique. ] J. M. H. Munro*? arrive, dans ses recherches, à cette conclusion que la mitrification s’accomplit sous linfluence de deux ferments dont lun opère la transformation des matières azotées en ammo- niaque et l’autre l'oxydation de l’ammoniaque formée en nitrites et nitrates. Th. LEONE”, s'appuyant sur des essais de cultures pures, est d’avis que ces mêmes organismes qui produisaient de l’ammo- niaque en présence des malières organiques donnent, en leur absence, les processus de la nitrification. A. CeLLr et F. MariNo-Zucco‘ ont conclu de leurs observations que les bactéries, notamment le Micrococcus cereus, pouvaient bien provoquer la nitrification, mais qu’elles la favorisaient seulement d’une manière très active, sans en être la condition indispensable. Les recherches de F, UrFELMANN* l’ont amené à ce résultat que l'acide nitreux de l’eau et du sol pouvait provenir de l'air, mais qu'il devait son origine première à un processus biologique, non à 0. R., ÉGAIPSISON D. 1149. . Journ. of the Chem. Soc., 1886, p. 632. . Gazella chemica italiana, t, X, p, 405. . Atli della R. Accad. dei Lincei, C. R., série 4, vol. Il, 18S6, p. 519. . Archiv fur Hyçiene, vol. IV, p. 82. Ut > C2 19 4 3174 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. une simple action chimique de l'oxygène. En opposition avec les résultats précédents, L. Apamerz' n’a pu trouver dans deux sols une bactérie qui eût la propriété de transformer de notables quantités d’ammoniaque en acide nitrique; il n’a pas trouvé le ferment ni- trique. W. Heraeus” à pu prouver que le Micrococcus prodigiosus, des bactéries radiciformes, le spirille du fromage, les bactéries de Fin- KLER, les bacilles du typhus et du sang de rate, le Staphylococcus cilreus transforment l’ammoniaque en acide nitreux. Il y aurait donc plusieurs schizomycètes capables de nitrifier. En connexion avec les résultats de HEerAEUS, F. Hugppe* a démon- tré qu'il y a certaines bactéries incolores qui peuvent, à l'obscurité, former à l’aide de carbonate d’ammoniaque un hydrate de carbone semblable à la cellulose; il se dégage de l'oxygène qu’on ne peut cependant mettre en évidence, parce qu’il est aussitôt utilisé pour l'oxydation de l’ammoniaque en acide nitrique. Les organismes dits purpurbactéries qui dégagent de l’oxygène à l'obscurité se com- portent de même. Des bactéries de cette sorte qui, en l’absence de lumière, assimilent du carbone et dégagent de l’oxygène posséde- raient donc, en somme, le pouvoir d’oxyder l'azote de l’ammo- niaque. Pour isoler les organismes nitrifiants, P. E. FRaNKLAND el G. C. FrankLAnD* ont fait, pendant trois ans, des essais infructueux jus- qu’à ce que l'emploi de la méthode par dilution leur eût donné une forme de Bacillococcus qui nitrifiait, mais qui, transporté sur la gelée de pepione, ne croissait plus, se développait pourtant abon- damment dans le bouillon de viande et, cultivé dans ce milieu, pul- lulait alors activement sur la gelée de peptone. Transporté dans les solutions ammoniacales, l’organisme isolé nitrifiait fortement. FR. WaRiINGToN° s’est occupé très activement, durant de longues 1. Untersuchungen über die niederen Pilze der Ackerkrume. Inaug. Dissert., Leipzig, 1886. 2. Zeitschrift fur Hygiene, vol. 1, 1886, p. 211. 3. Tagcblalt d. Naturf.-Vers. in Wiesbaden, 1887. 4, Chemical News, vol LXI, n° 1582, p. 135. ©. On nitrificalion Journ. of the Chem. Soc., 1878, 1879, 1884, 1891. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 319 années, de la nitrification et, après bien de vains efforts, réussit à obtenir, d’une part, un ferment organisé qui oxyde l’ammoniaque seulement en acide nitreux, mais qui, introduit dans les solutions nitreuses, ne peut former de nitrates, et, de l’autre, un ferment nitrique pur qui se développe dans les solutions minérales et trans- forme énergiquement les nitrites en nitrates, mais est incapable par lui-même de décomposer l’ammoniaque en nitrite ou nitrate. Ces découvertes ont été confirmées, dans leurs points essentiels, par les résultats de recherches très soigneusement faites par S. Wr- NOGRADSKY*. Il a établi que les organismes nitrifiants se multipliaient vite dans des milieux ne contenant que de l’ammoniaque et des sels minéraux sans trace de matière organique et qu'ils sont donc en état d’assimiler le carbone de l’acide carbonique. En s'appuyant sur cette notion, WiNoGrApsky réussit, par des cultures dans des disso- lutions de silice ou de silice gélatineuse auxquelles on ajoutait de l’ammoniaque et des sels minéraux nutritifs, à éliminer tous les autres microbes des matières organiques et à cultiver à l’état pur les organismes de la nitrification. De ceux-ci les uns pouvaient trans- former lPammoniaque en acide ritreux seulement, tandis que les autres avaient exclusivement la propriété de transformer les nitrites en nitrates, mais sans pouvoir provoquer l’oxydation de l'ammo- niaque sous forme de nitrite ou de nitrate. Dans une terre de Zurich, WiNocrapsky a pu distinguer deux formes parmi les organismes nitreux isolés, une monade et une z00- glée. La première consiste en corpuscules ronds, très mobiles, avec un court flagellum, qui troublent la solution et ne se montrent que quand la solution est riche en ammoniaque. La seconde forme, au fond de la liqueur claire, des masses floconneuses, immobiles, sphé- riques, réunies par une substance gélatineuse qui offre un aspect non moins caractéristique. Des sols provenant de diverses contrées de l’Europe, de l'Asie et de l’Afrique, traités de la même façon, ont donné aussi, comme fer- 1. Annales de l'Institut Pasteur, 1890, n° [V et V, pp. 113 et 257 ; 1891, n° IX, p. 577, C. R., t. GXIIT, 1891, n° 2, p. 89; Archives des sciences biologiques, pu- bliées par l'Institut impérial de médecine expérimentale à Saint-Pétersbourg, 1892, t. [, n° 1 et2, p. 86. 316 ANNALES-DE LA SCIENCE : AGRONOMIQUE. ments nitreux, des monades et des zooglées qui, sous les deux formes, offraient la plus grande ressemblance avec celles trouvées à Zurich. Seulement les monades de Java possédaient un plus long flagellum, ce qui rendait leurs mouvements moins actifs que ceux des monades d'Europe et spécialement de Zurich. Des sols de PA- mérique du Sud et de l'Australie ont paru contenir des nitrosomi- crobes d’une tout autre sorte; mais, faute de matériel, les obser- vations n’ont pu être faites jusqu’au bout. Seulement Winocransky a pu isoler les nitrosomicrobes d’une terre de Quito; ils étaient tou- Jours plus grands que ceux précédemment décrits, ne se coloraient pas, avaient une membrane gélalineuse assez épaisse et leur mobi- lité n’a pu être mise en évidence. WinoGrapsky les désigne sous le nom de Megalococcus; ces formes ont été rencontrées aussi dans des sols de Melbourne et du Brésil. Les organismes de la nitrification, qui consistent exclusivement en petits bâtonnets, sont très différents des précédents. Ce bacille possède à un haut degré, comme l'ont établi les récentes recherches de R. Burri et A. STUTzER, le pouvoir d’oxyder-les nitrites en ni- trates avec le concours de l'oxygène atmosphérique. Geci n’a pour- tant lieu que si le substratum nitreux est pauvre en malière orga- nique; car, dans le cas contraire, la quantité de nitrates reste la même et le bacille se multiplie aux dépens de la matière organique. € La transformation des nitrites en nitrates ne fait probablement que produire une source d’énergie que le bacille, en vertu d’un ferment spécifique qui lui est propre et mtimement lié au protoplasma, peut erschliessen quand font défaut les combinaisons azotées. WINoGRADSKY propose de désigner sous le nom de nitrobactéries tout le groupe des microbes qui transforment l’ammoniaque en acide nitrique. Les ferments nitreux de l’ancien monde formeraient le genre Nitrosomonas avec les deux espèces N, europœus et N. ja- vanensis; ceux du nouveau monde formeraient le genre Mitrosococ- cus. Le ferment nitrique s’appellerait Nitrobacterium. A. Moxrz et Il. Coupon‘ ont cherché à déterminer si la formation de l’ammoniaque dans la décomposition des matières organiques 1. C. R., t. CXVI, 1893, p. 395. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 311 était due à un ferment unique ou si plusieurs. des espèces abon- damment répandues dans le sol y contribuaient. Ils ont isolé, dans ce but, d’entre les microorganismes du sol les plus fréquents, cinq espèces (3 bacilles, 2 micrococcus) et les ont semées ainsi que deux mucorinées (Mucor racemosus et Fusarium) sur de la terre addi- tionnée d'engrais organique. Gette terre ne formait pas d’ammoniaque avant, tandis qu'après l’ensemencement des microbes elle en pro- duisit et sous l'influence de tous les organismes essayés, quoique en plus ou moins grande quantité. Cette réaction se différencierait par là nettement de la nitrification qui semble n'être due qu'à un organisme bien déterminé. Beaucoup des microorganismes qui habitent le sol peuvent former de l’ammoniaque. Des recherches de E. MarcraL”' il résulte que cette producthon se fait sous l’influence de divers microbes (bactéries, levures, muco- rinées) habitant les couches supérieures du sol. Dans la terre tra- vaillée, ce sont les bactéries qui dominent; dans les sols humiques, acides, ce sont les mucorinées qui contribuent surtout à celte réac- tion. Parmi les bactéries, le bacillus mycoïde (Erdbacillus des auteurs allemands), qui a été découvert par FLÜGGE et décrit plus tard très complètement par FRANKEL sous le nom de bacille en racine ( Wurzel- bacillus), s’est montré le plus actif dans celte formation d’ammonia- que. Les cultures faites avec ce bacille dans des dissolutions d’albu- mine à 10 p. 100 stérilisées ont montré que dans l'air du ballon il y avait absorption notable d’oxvgène avec un dégagement correspon- dant d’acide carbonique et que les produits gazeux de décomposition manquaient d'hydrogène comme d'oxygène. Dans la solution même, à la place de l’albumine complètement détruite, on trouva de l’am- moniaque et de l’acide carbonique avec de faibles quantités de peptone, leucine, tyrosine, acides gras et acide sulfurique. Les cultures avec d’autres substances azotées ont donné les résul- tats suivants. Les principes albuminoïdes, caséine, fibrine, gélatine, gluten, légumine, myosine et peptone, furent, tout comme l’albu- mine, oxydés par le bacille avec formation d’ammoniaque ; de même 1. Bullelin de l'Académie de Belgique, série 3, €. XXV, 1893, p. 727. 318 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. le sérum du sang. et le lait. Même les combinaisons azotées non albuminoïdes, leucine, tyrosine, créatine et asparagine, furent trans- formées en ammoniaque; mais l’urée, qui se décompose si aisément en carbonate d'ammoniaque, se comporta autrement. En solution stérilisée ensemencée avec le bacillus mycoïde, l’urée n’offrit pas à ce dernier un terrain de culture favorable ; l'Erd- bacillus ne s'y développa point, non plus que dans les solutions qui contenaient du nitrate d’nrée et des sels ammoniacaux. Quant aux mucorinées, MarcHAL' constata que, dans tous les essais où les diverses espèces expérimentées s'étaient développées abondamment, il y avait eu production d’ammoniaque. Mais dans aucun cas on ne put déceler la présence des nitrates, soit dans la solution albuminoïde, soit dans le mycélium. Les mucorinées ne peuvent donc produire des nitrates à l’aide des matières albumi- noïdes. Il se forma du reste aussi peu de nitrates dans les cultures où l’azole avait été fourni aux champignons exclusivement sous forme de sel ammoniacal. Suivant cet auteur, les mucorinées jouent un rôle considérable dans la transformation en ammoniaque de l’azote combiné à l'état organique dans le sol. Si divers expérimentateurs, comme, par exemple, L. FRANKEL (chap. V), ont trouvé si peu de mucorinées dans le sol, cela tient en première ligne à la réaction alcaline des milieux de culture qu’ils ont employés. Par l'emploi de solutions acides MarcHaL put isoler de divers sols un grand nombre de mucorinées différentes dont une espèce nouvelle d’aspergillus, très répandue, qu'il nomma Aspergillus terricola. Parmi les fermentations liées à la présence de l'air, il y aurait à citer ici la fermentation acétique qui est due à des microorganismes, au Mycoderma aceli (Micrococcus aceli, Bucillus aceli) d’après les anciennes données, à deux espèces de bactéries d’après Hansen, le Bacterium aceli et le B. paslorianum, auxquelles il faut ajouter, d’après PerErs, une autre bactérie et, d’après Larar, encore un hyphomycète. D'après les résultats acquis jusqu'alors, on doit admettre que les 1. Bulletin de la Société belge de microscopie, t. XIX, 1893, p. 65-74. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 319 processus de la décomposition, quand l'accès de l’air est limité, voire supprimé, sont, eux aussi, dus à l’activité vitale d'organismes infé- rieur. La fermentation forménique que l’on constate dans la putréfaction est due, comme l’ont montré P. P. DEnÉérain et U. Gayon', à des microbes dont les caractères morphologiques sont encore incom- plètement connus. D’après F. Hoppe-SeyLer”, c’est le Bacillus buly- rieus PRAZMOWKSY (Bacillus amylobacter VAN TiscHem, Clostridium butyricum) qui doit surtout provoquer cette réaction”. Le dégagement d'hydrogène observé par DEHÉRAIN et caractérisé par la présence simultanée de acide butyrique est également pro- voqué par des microorganismes qui doivent différer de ceux de la décomposition forménique, parce que leur activité n’est pas liée à l'accès de l’air, mais persisle sans interruption en l'absence de Pair. D’après DERÉRAIN, il doit y avoir deux fragments organisés dont l’un donne du formène, l’autre de l'hydrogène et de l’acide carbonique. On a soutenu, depuis, que l’un excluait l’autre, si bien qu’il arrivait rarement que les gaz dégagés dans la fermentation continssent en même temps du formène et de l’hydrogène : cela peut arriver ce- pendant. Selon H. TAPPEINER ‘, déjà dans la panse, le bonnet et le gros in- testin du veau, il y a une fermentation de la cellulose due à des bac- téries qu’on n’a pu réussir encore à élever en culture pure. Les autres hydrates de carbone subissent de même de nombreuses transformations (ou dédoublements) auxquelles prennent part main- tes espèces de bactéries. Pour l’amidon nous savons qu'il est dissous par diverses bactéries et transformé en principe sucré soumis en- suile à d’autres transformations ou brûlé en donnant de l’acide car- bonique et de l’eau. Parmi les processus en question, il faut penser d’abord à la fermentation laciique provoquée par le Bacillus acidi luclici ; outre ce bacille, il y a une série d'organismes (Pediococcus acidi lactici LiNDNER, bactéries lactiques de HuePre, Zopr, PETERS, . Journal de l’agriculture, 1884, n° 781 p. 507. . Zeitschrift für physiologische Chemie vol. X, 1886. . Le Vibrio rugula (Spirillum rugula) est aussi à signaler. . Zeilschrift fur Biologie, vol. XIX, p. 288 ; vol. XX, p. »2?. C9 29 CR CS 380 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. WEIGMANN, STORCH et QuiST) qui provoquent les mêmes réactions quoique à un plus faible degré. Le Bacillus bulyricus gouverne la fermentation bulyrique que d’autres bactéries encore, comme, par exemple, les bacilles butyri- ques de LiBorius et HUEPPE, paraissent capables de susciter. La fermentation alcoolique est due à l’activité de diverses levures (Saccharomices) parmi lesquelles il faut citer en première ligne : Saccharomyces cerevisiæ, S. paslorianus, S. ellipsoideus, S. Marzianus, S. exiguus et S. Ludwigii. | La fermentation des acides gras et des acides organiques végétaux est causée aussi par des organismes inférieurs et principalement par des bacilles dont il reste encore à déterminer les caractères mor- phologiques. Dans la décomposition des matières albuminoïdes et des combi- naisons amidées interviennent de nombreuses bactéries dont lin- fluence varie qualilativement et quantitativement. Il est, d’ailleurs, bien nécessaire d’arriver à préciser plus exactement leurs produits, bien que les recherches effectuées fournissent déjà à cet égard des repères importants. On sait que le Bacillus putrifici coli provoque des réactions à la suite desquelles il se produit des peptones, de la tyrosine, du phénol, de l’indol, du scatol, des acides gras, de l’am- moniaque, etc. Les peptones et les gaz fétides sont produits par Proteus vulgaris, P. mirabilis et P. Zenkeri. Le Bacillus butyricus HugpPpe provoque la formation de peptones, leucine, tyrosine, am- moniaque et de matières à goût amer, le Bacillus fluorescens lique- faciens celle de peptones, d’acides gras volatils et d’une couleur verte. Le Bacillus pyocyaneus et le B. janthinus donnent des pep- tones et de l’ammoniaque. La triméihylamine se forme sous l’in- fluence du Bacillus ureæ et du B. prodigiosus, Yhydrogène sulfuré et l’ammoniaque sous celle du bacille de MizLER, tandis qu’il se dé- gage des gaz fétides quand les circonstances favorisent la multipli- cation du Bacillus saprogenes I, IL, IIT, du B. coprogenes fœtidus, du B. pyogenes fœtidus, du Micrococcus fœtidus, etc. Les Bacillus magnus, B. spinosus, B. liquefaciens et les bacilles du chancre des fumeurs donnent dans la décomposition de l’albumine séreuse, comme gaz : de l'hydrogène et du méthylmereapten; comme acides DÉGOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 381 gras, loute la série; comme acides amidés, de la leucine et enfin quelques acides aromatiques. Dans la décomposition de la gélatine, les bactéries précédentes ne produisent ni tyrosine, ni indol, ni sca- tol, mais de l’acide benzoïque (NENCKkI”). Le Bacillus subtilis est à signaler ici seulement pour sa faculté de peptoniser l’albumine et la gélatine, ce qui prépare ces subs- tances à recevoir d’autres organismes. Depuis que l’on a réussi à élever en cultures pures les bactéries de la putréfaction, il faut s'attendre que les recherches ultérieures élargiront le cercle de nos connaissances sur la manière d’agir de chaque espèce. Provisoirement on doit se contenter des faits qui précèdent et qui montrent déjà très nettement que la décomposition des principes azolés des matières organiques doit être attribuée à l’action des organismes inférieurs. Au point de vue agronomique, le processus désigné sous le nom de dénitrification offre un grand intérêt. D’après les recherches de U. Gaxow et G. Dupenir?, il est probable qu’on doit le considérer de même que son inverse, la nitrification, comme d'ordre biologique. Ils ont trouvé dans leurs expériences faites sur des nitrates que ceux-ci disparaissaient peu à peu et que la liqueur se remplissait de microorganismes. Ces microbes sont bien la cause de la réduction des nitrates, car la solution restait claire et le nitrate inaltéré quand on la stérilisait en la chauffant ou qu’on y ajoutait du chloroforme et du sulfate de cuivre. | Outre ces organismes qui réduisent ces nitrates jusqu’à l’état d'azote, ces mêmes savants ont trouvé, ultérieurement, d’autres mi- crobes qui n’extraient des nitrates que les deux tiers de leur azote et les transforment en nitrites. À ces organismes appartient en première ligne un microbe qui a pu être isolé à l’état pur et consiste en petits bâtonnets mobiles don- nant peu de spores. Ce microbe (Bacillus denitrificans), désigné par la lettre a, fut ensemencé dans du bouillon de poule contenant 60 grammes de nitrate de potasse par litre, dans des tubes longs et 1. Monatshefte fur Chemie, 1889, n° 10. 2. Journal de l’Agricullure, 1884, n° 781, p. 507. 382 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. étroits et une atmosphère raréfiée ou d’acide carbonique ou dans le vide. À 35° l'organisme se développait rapidement et troublait la li- queur sans dégager la moindre quantité de gaz. En même temps tout le nitrate se transformait en nitrite, et une faible portion de l’a- cide carbonique formé pendant la réaction s'était dissoute comme carbonate de potasse. L’oxygène contenu dans l'acide carbonique formé était en plus faible quantité que celle qu’aurait dù donner le nitrate en se décomposant. Comme aucun gaz ne s’est dégagé, la différence d'oxygène a probablement été absorbée par le microbe pour son développement. Cet organisme vit très facilement et a une action réductrice énergique dans le bouillon de poule ; il y vit même quand le bouillon est saturé de nitrate de potasse et il peut détruire journellement 10 grammes de nitrate de potasse. Mais il se déve- loppe mal dans les solutions artificielles. Parmi les organismes donnant des nitrites, il y en avait un deuxième, b, en longs bâtonnets immobiles avec des spores, et deux microbes dont l’un, c, formé de longs filaments riches en spores, l’autre, d, de petits bâtonnets immobiles avec chacun une spore. Les quatre microbes ont dorné par jour dans du bouillon de poule à 10 grammes de nitrate de potasse par litre : à, 96°,6 de nitrite; b, Der 8 ; c. 65°,8 et d, 56°,6. Le microbe du choléra des poules mis à l'essai de la même façon a donné 05",5, la bactérie du sang de rate 05,1 et la bactérie septi- que 05,8. La plupart des microorganismes doivent posséder la même pro- priété, mais pas toujours à un aussi haut degré. Jusqu'ici les auteurs susnommés n’en ont trouvé qu’un seul qui, pouvant vivre dans le bouillon additionné de nitrate, ne fournisse pas de nitrite. Dans le même ordre d'idées, E. GizraY et E. H. ABERsON' se sont efforcés de trouver un microbe qui réduise les nitrates en nitrites, ammoniaque et azote. Le résultat de leurs recherches fut qu'à Wa- geningen (Hollande), dans l’automne de 1889 et de 1890, il y avait une bactérie très répandue dans le sol, l’eau et l'air, qui réduisait complètement les nitrates. Sa culture à l’état pur réussit facilement 1. Archives néerlandaises, 1891,.t. XXV, p. 341. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 383 en exposant à l’air ou additionnant d’un extrait de sol de la gélatine ou du bouillon avec une solution nutritive renfermant par litre 2 gram- mes de nitrate de polasse, 1 gramme d’asparagine, 2 grammes de sulfate de magnésie, 5 grammes d’acide citrique, 2 grammes de phos- phate monobasique de potasse, 08,2 de chlorure de calcium et quel- ques goultes de chlorure de fer et en neutralisant par de la potasse. Très remarquable est cette observation de E. MarcHaL' que le Bacillus mycoides (Erdbacillus), qui provoque (on l’a vu plus haut) la formation de lammoniaque dans des dissolulions d’albumine et de combinaisons amidées, produit dans des dissolutions avec nitrates une réduclion de ceux-ci en nitrites el ammoniaque. Si l’on cultive le B. mycoides dans une solution de sucre contenant 2 grammes de nitrate de potasse par litre, on constate dans les premiers jours un développement très lent du microbe ; mais, au bout de 2 ou 8 jours, d’épais et nombreux flocons apparaissent dans la liqueur, qui offre la réaction de l'acide nitreux et de l’ammoniaque, ce dernier en grande quantité. Ce processus de réduclion, déjà reconnu à ce mi- crobe par d’autres expérimentateurs, est si énergique, qu'après 10-15 jours tout l’acide nitrique est transformé en ammoniaque. Le même organisme agirait donc lantôt comme oxydant vis-à-vis de l’albumine, tantôt comme réducteur vis-à-vis des nitrates. Le B. mycoides, qui se développe en aérobie dans des dissolutions de blanc d'œuf, brüle l’'albumine au moyen de l'oxygène de l'air, tan- dis que dans les solutions sucrées de nitrates il brüle le sucre et emprunte l’oxygène qu'il lui faut aux nitrates facilement réductibles. Mais si réellement le B. mycoides peut extraire des nitrates l’oxy- gène à sa respiration, il doit pouvoir vivre comme anaérobie en pré- sence de ces sels et sans oxygène ; c’est ce que l'expérience a mon- tré. Cultivé en solution sucrée et nilratée, le Bacillus mycoides vit dans une atmosphère d'hydrogène ou d’acide carbonique aussi bien que dans l’air ordinaire. Le même cas a élé observé par Th. LEONE” pour les organismes 1. Bulletin de l'Académie de Belgique, série 3, t. XXV, 1893, p. 727. 2. Gasella chimica ilaliana, t. X, p. 505 ; Atli della R. Accademia dei Lincei, Rendiconti, série 4, vel. VI, p. 33. 384 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nitrifiants. Il a trouvé qu’en mettant dans de l’eau où la nitrification se faisait normalement un peu de gélatine nutritive ou d’autres subs- tances favorisant le développement du ferment nitrique, la réaction s'arrête et l’acide nitrique déjà formé est réduit en acide nitreux et celui-ci même en ammoniaque. Si au contraire la substance organi- que est employée en totalité, les microorganismes provoquent alors de nouveau loxydation de lammoniaque en acides nitreux et nitri- que ; les mêmes organismes agissaient donc soit comme oxydants, soit comme réducteurs. Ces phénomènes se manifestèrent aussi quand à une terre de jardin on ajouta du fumier frais. La nitrifica- tion fut arrêtée par les microbes dans la terre qui nitrifiait forte- ment, et il y eut réduction des nitrates et des nitrites avec formation d’ammoniaque. Plus tard la nitrification recommença aussitôt après qu'eut pris fin la production d’ammoniaque. Quant à l’explication de ce changement surprenant de fonction des organismes nitrifiants, LEONE pense qu’en raison du développe- ment rapide des germes, l'oxydation qu’ils provoquent est si intense que l’oxygène présent n’y suffit pas et qu’une partie doit être em- pruntée aux acides nitrique et nitreux. La dénitrification a été étudiée dernièrement par R. Burri et A. STuTzER’. Ils ont d’abord répété une expérience de P. Wacner? montrant que les fèces du cheval provoquent une destruction de nitrate. Dans un mélange d’eau (100 grammes), de crottin (5 grammes) et de nitrate de soude (08,32), il se produisit à 30°, généralement au bout de 24 heures, une fermentation spumeuse, et après quelques jours, tout le salpêtre disparut. Le gaz qui se dégage en même temps est de l'azote. Si, au lieu de nitrate on emploie du nitrite de soude, la décomposition du nitrite marche beaucoup plus lentement. Dans un mélange où n’entrent que du crottin et de l’eau, il n’y a pas de fermentation; mais elle apparait dès qu’on ajoute du nitrate de soude. La fermentation n’est 1. Centralblalt fur Bakleriologie und Parasilenkunde. Zweile Abtheilung, vol. I, 1895, n° 7-8, p. 257 ; n° 9-10, p. 350; n° 11, p. 392; n° 12, p. 422. 2. Deulsche landwirthschaftliche Presse, 1895, n° 14, p. 123. io e DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 385 pas arrêtée, mais seulement un peu réduite par la cuisson de la li- queur, d’où l’on doit conclure que les agents de la fermentation ap- partiennent à des espèces qui forment des spores ou qui sont très résistantes. Les auteurs susnommés ont réussi à isoler deux bactéries sous l’action simultanée desquelles s’accomplit la réduction du nitrate. Voici comme on a démontré que les deux bactéries (& et x) vivent en symbiose * : Des traces de a ont été semées dans du bouillon nitraté en même temps que des traces de x dans un autre vase d’égale contenance; les deux vases furent exposés pendant plusieurs jours à une tempéra- ture de 30°. Les solutions se troublérent, mais ne dégagèrent pas de gaz. Dès qu’on mélangea les deux solutions en évitant toute contami- nation, il se produisit dans l’espace de 12 à 24 heures un vif déga- gement de gaz avec formation d’écume. Dans un autre essai, on fit sur une plaque d’agar une culture de a en strie ; elle fut croisée avec une culture de x, et, quand elles eurent commencé à se développer, on porta sur du bouillon nitraté une parcelle prise à la sortie d’une strie, une autre parcelle prove- nant de l’extrémité d’une strie croisée sur la précédente et une troi- sième provenant du point de croisement. C’est dans ce dernier cas seulement qu'il se produisit de l’écume. De ces expériences il faut conclure que la destruction des ni- trates en présence du crottin est due à une symbiose’. En poursui- vant cette étude, on montra que x ne pouvait être remplacé par un autre organisme, landis qu’au contraire, au lieu de a, on put em- ployer une culture de Bacterium coli commune installée depuis longtemps au laboratoire sans qu’il y eût la moindre modification dans le cours de la fermentation. De même le bacille typhique, avec l'aide de +, amena la fermentation complète du nitrate. L'étude approfondie de l’organisme désigné sous la lettre 4 mon- tre qu’il est identique au Bacterium coli commune, sauf pour le 1. Sous le nom de Symbiose on désigne le fait très fréquent dans la nature de deux êtres d'espèces différentes vivant associés : l'un ne peut vivre sans l’autre. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1898. — 11. 25 386 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. mouvement actif des bactéries dans les jeunes cultures sur plaque, et celle mobilité seule ne suffit pas à différencier les deux espèces. Les deux auteurs précédents ne décident pas si l’on a donné à tort le nom de Baclerium coli commune à toute une série d'espèces diffé- rentes ou si la grande variabilité de cet organisme affirmée de divers côlés existe réellement; mais ils arrivent à cette conclusion que le B. coli commune, déjà signalé comme agent de nombreuses fermentations, possède encore, en symbiose avec certaines autres bactéries, la propriété de détruire d’assez grandes quantités de nitrates en dégageant de l’azole gazeux. La bactérie désignée par la lettre + qui, associée au Bacterium coli ou au bacille typhique et, sans doute, à d’autres espèces encore, peut détruire d'importantes quantités de nitrate ou de nitrite de la façon qui a été indiquée, a été dénommée par Burri Bacillus deni- trificans 1, cet organisme n’ayant pu être identifié avec aucun de ceux déjà décrits. D’après les observations de cultures pures, le B. denitrificans L fait parte des aérobies vrais (ou obligés), tandis que le B. coli est un anaérobie facultatif. Les résultats suivants, obtenus par les mêmes auteurs, montrent jusqu’à quel point cette propriété des deux espèces s’accuse dans les fermentations avec divers mélanges d'air. Dans du bouillon nitraté ensemencé avec le Bacterium coli et le Bacillus denitrificans, à travers lequel on avait insufflé de l’hydro- gène pendant 15 minutes, il n’y eut aucun dégagement d’azote libre : mais tout le nitrate disparut pour se retrouver, sous forme de nitrile surtout, avec un peu d’ammoniaque. Si cette expérience se répète de la même façon, mais dans un vase ouvert et à l’air libre, il y a fermentation active avec dégage- ment d'azote. On a aussi observé que tout l’azote du nitrate ne passe pas à l’état élémentaire, et qu’une partie (environ 20 p. 100) repasse dans la solution nutritive à l’état d’azote organique. Dans ces essais en présence de l’air, celui-ci n’avait qu’un accès très limité. Si l’on veut ne forcer en rien les résullats précédents, on pourrait seulement en conclure que le Bacterium coli associé au Bacillus denilrificans 1, amène dans les solutions nitratées des phénomènes DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 387 de réduction qui, en l’absence complète d’air, se limitent à la for- malion de mitrites, mais qui, si l’air pénètre en petite quantité, vont jusqu’à la destruction des nitrates, jusqu'au dégagement à l’état ga- zeux de la plus grande partie de l’azote qu'ils contiennent. Sous le rapport de l’accès de l'air, ces processus se passeraient dans des conditions qui correspondent à celles de la pourriture. Mais si Burri et STuTzER concluaient de leurs essais que les deux bactéries, dans un milieu abondamment aéré, décomposent les nitrates en dégageant de l’azote, ce ne serait pas admissible, attendu que rien dans les faits acquis n'autorise cette manière de voir et que sa preuve directe n’a pas élé fournie. Ce n’en est pas une que le B. denitrificans 1, en culture sur plaque, se soit comporté comme un aérobie obligé, parce que maints organismes réagissent très dif- féremment en présence de l'air et que le baalle en question, sil était un aérobie vrai, ne pourrait provoquer la fermentation du ni- trate dans une quantité très limitée d’air. Il paraît, du reste, bien invraisemblable qu'un processus de ré- duction qui ne se produit qu’en l'absence d'oxygène ou avec une faible quantité de ce gaz puisse avoir lieu dans des conditions qui, d’après toutes les observations précédentes, ne provoquent que des oxydations. Si la conclusion que Burt et STUTZER ont tirée de leurs recherches était exacte, 1l faudrait donc admettre que, dans les substances en décomposition bien aérées, 1l y a, d’une part, des or- ganismes transformant l’azote en nitrate, et, d'autre part, d’autres organismes qui attendent, pour ainsi dire, le moment de détruire les premiers. Une pareille interprétation est contredite non seule- ment par toutes les observalions failes Jusqu'ici, mais encore par des faits de diverses sortes, tels que la forte accumulation de nitrates dans les matières organiques azotées (composts, mélanges de fumier d’étable et d’engrais vert) en présence d’air en excès et aussi la concordance entre les quantités d’azote contenues dans les nitrates des eaux de drainage et celles qui se trouvent sous forme d’ammo- niaque dans les eaux d’égout répandues sur les champs d'épuration. On pourrait citer aussi cette observation qu’on ne constate que très peu ou point de perte d’azote dans la décomposition du fumier quand, par l’emploi de certains procédés de conservation, d’assez 388 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. grandes quantités de nitrates y ont été formées. Ces faits suffiraient à affirmer qu'une destruction des nitrates en présence d’air en excès ne peut être opérée par les organismes précédemment décrits ou bien que, si des recherches ultérieures démontraient l’existence de ce processus dans certaines circonstances, celte réaction serait sans importance. Le dégagement d’azote donné par les nitrates quand tout accès d'air est fermé est dû à un bacille, déjà trouvé par E. BréAL : sur de la vieille paille, ensuite isolé et bien étudié par R. Burrt et A. Srurzer”. On a réussi à retirer de la paille d’une vieille enve- loppe de bouteille un bacille qui prospère aussi bien au contact de l’air qu’en son absence, mais qui, à l'air, n’a aucun pouvoir de fer- mentalion. I se trouve aussi sur d'autres débris végétaux et sur le sol. Quelques recherches de H. B. Gigsox® semblent confirmer cette opinion. De la viande qu’on humecta d’une goutte d’une émul- sion très diluée de viande en putréfaction ne perdit pendant la dé- composilion que 2.1 p.100 d’azote en moyenne, tandis que la perte fut de 12.1 p. 100 après addition d’un extrait &e sol. Le bacille en question, désigné sous le nom de B. denitrificans Il, joue le rôle principal dans la destruction des nitrates en l’absence de l'air. Dans la fermentation ammoniacale de l’urée, l'urine claire se trouble par des organismes inférieurs, au nombre desquels peuvent se trouver divers champignons et bactéries. Le Micrococcus ureæ Coun a été d’abord découvert comme agent de cette fermentation. PASTEUR à montré le premier que ce Micrococcus, cultivé à l’état pur dans une solution nutritive contenant de l’urée pure, provoque la même fermentation que dans l'urine. Le Micrococeus ureæ découvert par LEURE paraît être identique au premier. FLUGGE a isolé de l'urine putréfiée un autre Coceus qui, comme le précédent, fait fermenter énergiquement l’urée, mais montre certaines différences dans la culture ; c’est le Micrococcus Î. Annales agronomiques, t. XVIIL, n° 4, p. 181. LOC ICI: 9 3. Sur le dégagement de l'azole libre dans la putréfac!'ion. Thèse. Baltimore, 1893 (en anglais). DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 389 ureæ liquefuciens. LEu&E a encore trouvé dans de l'urine vieille un Bacillus ureæ qui doit transformer l’urée en carbonate d’ammo- niaque plus énergiquement encore que le Micrococcus ureæ. Le même auteur à pu constater enfin que deux autres bacilles et une Sarcine exerçaient vis-à-vis de l’urée un pouvoir énergique d’hy- dratation. P. MiQuEL a découvert qu’à côté des Micrococcus il fallait aussi attribuer à certaines bactéries en bâtonnet et même à des moisis- sures la faculté de provoquer une fermentation ammoniacale éner- gique, et 1l donne une courte description d’un bacille qu’il a trouvé et qui est désigné sous le nom de B. Duclauxii ou B. urece 8. Dernièrement, R. Burri et A. STUTzZER’ se sont très activement occupés d'isoler les microorganismes qui produisent la fermentalion ammoniacale de l’urée. [ls sont arrivés à ce résultat intéressant qu'ils n'existent pas seulement dans l'air, mais aussi en quantité notable dans le terreau tourbeux. Ils ont pu séparer en cultures pures trois bactéries en bâtonnet qui, sans parler des caractères morphologiques, sont caractérisées comme il suil: B. UREÆ I. B, URÈZÆ Il. B. UREZÆ III. RerMeENtAtON 0 Modérée. Energique. Énergique. Gélatine (avec urée) . . . Liquéfie. Ne liquéfie pas. Liquéfe. MIGÉNITE TER EMILE RENE Existe. N'existe pas. Existe. Ces bactéries de l’ammoniaque sont de celles qui peuvent se mul- Liplier en présence d’une grande quantité d’alcali libre. Dans un substralum nutritif neutre et surtout acide, elles ne se développent pas et ne montrent aucun pouvoir hydratant ; elles n’y meurent pourtant point et peuvent s’y maintenir vivantes pendant des années ; 1l en est ainsi, du moins, de celles qui forment des spores (B. ureæ II et III). Ainsi s'explique facilement la présence des bac- téries de l'ammoniaque dans le terreau tourbeux qui est acide. Les Sulfobuctéries, parmi lesquelles il faut compter surtout, d’après les recherches de S. WinoGrapsky ?, Beggialoa alba Vaucn, 1. Journal fur Landwirlschaft, 42° année, 1894, p. 338. 2. Bolanische Zeilung, 1887, n° 31-37. 390 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. B. roseo-persicina Zorr (Clalhrocystis roseo-persicina Coun), Sar- cina sulfurata nov. sp., Ophidomonas sanguinea, Monas Okenii, Monas vinosa Eur, et quelques autres encore, amènent le dépôt du soufre par oxydation de Phydrogène sulfuré. Winograpsky a mon- tré que l'oxydation qui commence par la destruction de l’hydrogène sulfuré se continue dans les cellules, tandis que le soufre qui y est séparé s’oxyde même jusqu’à l’état d'acide sulfurique. Il a pu déter- miner par des réactions microchimiques l'acide sulfurique non seu- lement qualitativement, mais presque quantitativement. Les carbo- nales contenus dans l’eau sont transformés en sulfates par l'acide sulfurique que séparent les bactéries vivantes. Cet auteur pense que le processus d’oxydation chez les Sulfobac- léries correspond à la respiration et que le soufre y joue le même rôle que les hydrates de carbone chez les autres plantes. Par la com- bustion du soufre, ces bactéries acquièrent l’énergie nécessaire pour entretenir leurs processus vitaux. Elles peuvent ainsi se con- tenter d’une très faible quantité de matière organique ; car toutes les combinaisons carbonées leur servent exclusivement comme éléments plastiques, tandis que chez les autres plantes elles sont employées à la respiralion pour la plus grande partie. Les matières organiques nécessaires à la croissance des Sulfobacléries n'ont donc pas besoin d’être de bons aliments, c’est-à-dire des combinaisons dégageant beaucoup de chaleur dans leur combustion ; des corps tels que les acides formique et propionique dont d’autres organismes ne peu- vent rien faire, suffisent aux sulfobactéries. Le dégagement d'hydrogène sulfuré qui se produit par réduction des sulfates et nitrates de soude en présence du formêne à l'état naissant dans la putréfaction des matières organiques, est indépen- dant des Beggiatoacées, d’après WiNOGRADSKY. Celui-ci a étudié aussi l’action de certaines bactéries qu'il appelle des ferrobactéries? (Eisenbacterien) et qui sont surtout représentées par Cladothrix dichotoma Cou (Leptothrix ochracea KurzinG) et par Crenothrix Kühniana RaABENHoRsT. Ces organismes ont la 1. V. ante. 2. Bolanische Zeitung, 188$, n° 17. ef DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 391 faculté d’oxyder le protoxyde de fer en le séparant de sa combinaison carbonatée. Cette adjonction de protoxyde de fer indispensable à la croissance des filaments de Cladothrix est des plus remarquables. Tandis qu’ils végèlent très vigoureusement dans de l’eau contenant du protoxyde de fer et renouvelée deux à trois fois par Jour, ils ne s’accroissent plus si on laisse l’eau exposée d’abord quelque temps à l’air de façon qu’elle ne contienne plus de protoxyde. Celui-ci dont s’em- pare avidement le Cladothrix en croissance est oxydé dans le proto- plasma et probablement donné sous forme de combinaison oxydée soluble à l’enveloppe gélatineuse qui entoure la cellule et qui re- tient le sel. Ce dernier peut d’abord facilement se dissoudre dans l’eau, même vingt-quatre heures après qu’il s’est déposé ; plus tard oxyde de fer se transforme et devient difficilement soluble, même insoluble. Les autres ferrobactéries concordent dans leurs propriétés essen- üelles avec le Cladothrix étudié. Nous avons affaire ici à un caractère physiologique d’une classe de bactérie que WinoGrapsky comprend, pour ce motif, sous le nom de ferrobactéries. Ce caractère acquiert une assez grande im- portance par son analogie avec celui des sulfobactéries. Dans les deux cas, une substance oxydable est extraite par les cellules, portée dans leur plasma au maximum d’oxydation et ensuite excrétée. Ni le soufre ni le fer ne servent à la structure de ces organismes ; bien plus, 1ls soni rejetés par les cellules après transformation. Il s’ensuit que la proportion de matière modifiée chimiquement est très grande par rapport à celle des substances assimilées dans le même temps. Comme les ferrobactéries s’accroissent si lentement quand l’oxyda- tion du fer cesse dans leurs cellules, Winocrapsxy conclut que les réactions vilales de ces organismes sont entretenues principalement ou exclusivement aux dépens de la chaleur (ou énergie) devenue libre par l’oxydation du protoxyde de fer. Les faits que nous venons d’énumérer, tout incomplets qu’ils soient, permettent de conclure avec certitude que ces diverses réac- tions qui se présentent dans la destruction des matières organiques sont dues à toute une série de microorganismes. Elles ont lieu soit 392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dans le protoplasma vivant, soit sous l'influence de produits inter- médiaires excrélés par les cellules sous forme de ferments. (Voir chap. VE.) If ressort du court résumé que nous venons de faire que, suivant toute vraisemblance, chacun des processus constatés est dû non à la présence et à la multiplication d’un seul organisme, mais de plusieurs, au moins le plus souvent. Il semble légitime d’admettre que l’action de maints organismes peut être différente suivant les conditions extérieures. Pour le plus grand nombre des cas, la dé- composition n’est pas due dans toutes ses phases à une espèce déter- minée ; elle se fait par certains organismes jusqu’à une certaine limite à parur de laquelle elle se continue par d’autres. Parmi les microorganismes participant à cette destruction, il faut citer surtout les Schizomycêtes et les Mucorinées ; les levures n’ont qu’une importance secondaire, en ce sens que les réactions qu’elles déterminent ne peuvent s’accomplir dans la nature que dans un fai- ble rayon. Quand le substratum nutrilif a une réaction acide, la dé- composition est surtout l'œuvre des Mucorinées qui ont un pouvoir oxydant extraordinaire. À leur place on voit apparailre les Schizo- mycètes dès que le milieu présente une réaction alcaline. Ceux-ci interviennent principalement, sinon exclusivement, dans la putré- faction et dans toute une série de fermentations qui s’accomplissent en l'absence de Pair. En opposition avec les parasiles qui ne vivent qu'aux dépens d’êlres vivants plus élevés en organisation, tous les organismes dont il vient d’être question ne peuvent croître que sur des matières mortes ; depuis 1866 on les désigne sous le nom de saprophytes. III. — ACTION DES ANIMAUX. De nombreux animaux contribuent certainement à la décomposi- tion des matières organiques ; partout où elles existent en assez grandes quantités (terre, marais, couverture des forêts, fumier, elc.), des animaux se rencontrent en plus ou moins grand nombre el sou- vent en masse. Ce sont des Rhizopodes, des Anguillules (Némato- des), des Lombrics (vers de terre), des Crustacés, des Mollusques, DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 393 des Myriapodes (Julus, Polydesmus, Scolopendra, Geophilus), divers insectes, soit à l’état parfait, soit à l’état de larves. Ces animaux dilacèrent les débris végétaux et animaux, s’en nourrissent et déposent ensuite leurs excréments dans lesquels les matières se sont déjà partiellement transformées. L'action des ani- maux est extrêmement variable suivant les circonstances locales ; elle peut être très considérable ou insignifiante. La dilacération des matières par les animaux ne paraît avoir que peu d'importance d’après les rares recherches faites sur ce sujeL. Pour déterminer linfluence que peut avoir sur la décomposition la pulvérisation des débris végétaux par les animaux, P. Kosryrs- CHEFF * mit à décomposer dans des capsules de porcelaine deux lots de feuilles de diverses espèces (chêne, érable, bouleau) dont l’un avait été rongé par les vers de Lerre et, au bout d’un mois, les deux lots furent placés dans des tubes pour déterminer la quantité d’acide carbonique qui se dégageait dans le même temps. FEUILLES rongées. non rongées. Acide carbonique dégagé en 8 jours. . 0,934 0,833 Cette quantité provenait de 75 grammes de matière desséchée. Dans un deuxième essai KosTYTSCHEFF fit ronger du S{ipa pen- nala par des larves de Sciara. La quantité d’acide carbonique qui se dégagea de 75 grammes de matière sèche fut : STIPA D — rongé. non rongé. Pal Our, ER MOYENNE TE. 05°,1656 057,1698 Des feuilles de chène (60 gr.) rongées ou non par Julus terrestris ont dégagé FEUILLES DE CHÊNE © rongées. non rongées. NCIDE CAFDOMOREE NN TS LMP Ee 07,663 05,638 1. Annales agronomiques, t. XNII, 1891, p. 17-38. 394 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La pulvérisation n’a donc eu qu’une faible influence sur la décom- posilion des matières organiques. On connaît plus exactement les modifications que subissent les matières organiques quand elles passent dans l’appareil digestif des animaux terricoles, notamment des vers de terre. La nourriture de ces animaux se compose de matières végétales et animales et de terre”. Le suc intestinal des vers est de la même nature que la sé- crétion pancréatique des animaux supérieurs el peut, comme elle, émulsionner les graisses, dissoudre les matières albuminoïdes, trans- former l’amidon en sucre et même attaquer la cellulose. On peut en conclure à priori que les matières organiques absorbées par les vers subissent dans leur passage à travers le tube digestif des trans- formations chimiques multiples qui les rendent plus facilement dé- composables qu'avant. Pour le démontrer, j'ai fait les essais sui- vants : De la terre calcaire riche en humus, dont une moitié fut travaillée six mois par les vers de terre et l’autre resta intacte, fut séparée des débris en mélange à l’aide d’un tamis dont les mailles avaient 2 millimètres. On fit en mème temps une seconde expérience avec de la terre arable riche en humus qui fut, après un mélange intime, divisée en deux portions de 1000 grammes chacune qu’on plaça dans des bocaux. L’un d’eux reçut dix vers de terre. L'expérience dura trois mois pendant lesquels le sol fut arrosé d’eau distillée et l'humidité maintenue au même taux dans les deux vases. A l’au- tomne, les lots furent desséchés au soleil après qu’on eut enlevé les vers de terre, et analysés aussitôt aux points de vue de l’alté- rabilité des matières organiques et du taux en principes nutritifs solubles *. Pour le premier point, 150 grammes de sol séché à l’air furent humectés avec 34 grammes d’eau distillée et placés dans des tubes en U. Ceux-ci plongeaient dans un bain-marie constamment main- 1. Ch Darwin, Die Bildung der Ackererde durch die Thaätigkeit der Würmer, Stuttgart, 1882 ; consulter aussi V. HENSEN, Zeitschrift fur Wissenschaftliche Zoo- logie, 28° vol., 1877, p. 361, et Landw. Jahrbücher, par H. Triez, vol. XI, 1882, 2. Forschungen auf dem Gebiele der Agrikulturphysik, par E. Wozzny, vol. XI, 1590, p. 391-395. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 395 tenu à 30° par un thermostat Soxhlet. L’acide carbonique qui se forme dans le sol, peut, dans les conditions précédemment décrites, servir à mesurer l’aplitude à la décomposition des malières orga- niques. Déterminé suivant la méthode de PETTENKOrFER, le volume d’acide carbonique contenu dans 1,000 volumes d’air du sol fut : 1er ESSAI 2e ESSAI avec vers. sans vers. avec vers. sans vers. A. — (Du 7 au 16 novembre) Moyenne de 8 dosages, . 2,43 °3,88 8,0 3,08 B. — (Du 19 au 28 novembre) : Moyenne de 9 dosages. . 3,07 25e »,61 1,90 Le dégagement d’acide carbonique est beaucoup plus intense dans le sol muni de vers que dans celui qui n’en a pas, parce que les matières organiques s’altèrent plus facilement dans le premier cas que dans le second. On doit en conclure que la proportion d’élé- ments nutritifs des plantes qui se forment par décomposition dans la terre garnie de vers est plus grande que dans la terre dépourvue de vers. Pour déterminer les éléments solubles du sol, on mélangea 900 grammes de la terre en expérience avec 2 litres d’eau distillée soigneusement purifiée, à laquelle on avait ajouté une trace de bi- chlorure de mercure pour empêcher les transformalions qui auraient pu survenir dans les principes azotés (ammoniaque, acide nitrique). Ces 500 grammes restèrent pendant 14 jours dans un lieu modéré- ment chaud et furent souvent remués. Le liquide filtré fut partagé en deux portions, l’une pour le dosage de l’ammoniaque et de l'acide nitrique, l’autre pour celui des principes minéraux dissous. Les matières azotées ont été dosées par la méthode de W. Wic- LIAM'; les matières minérales, par évaporation de l'extrait du sol et la calcination du résidu. La solution était portée à ébullition avec un peu de magnésie dans un ballon muni d’un serpentin jusqu’à ce qu’il en eût distillé 250 centimètres cubes, dans lesquels on dosait l’am- 1. Transactions, 1881, 100. 396 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. moniaque avec une solution d'acide sulfurique titré. Le reste, étendu d’eau et versé dans un flacon à large col fermé par un bouchon, de- meurait 3 jours au bain-marie à 21-24°; la réduction des nitrates et des nitrites y était obtenue à l’aide d’une pile de cuivre et de zinc. Cette pile consistait en six bandes de zinc en feuille de 10 centimè- tres de longueur et 3°°,5 de largeur, sur lesquelles, après décapage de la surface, on provoquait un dépôt de cuivre en les plongeant dans une solution de sulfate de cuivre à 3 p. 100. Les lames de zine, après avoir été lavées à l’eau distillée et séchées, étaient mises dans le flacon de manière à y plonger complètement. Une partie de la so- lution était distillée après une exposition de 3 jours à une tempé- rature de 21° à 24, et dans ce qui était disullé on dosait l’ammo- niaque. e Voici le résultat des analyses, exprimé en pour-cent du sol sec : : AOTE FR M 4 | AT o Ads AZOTE SOUS FORME MA RES) ; x a :#2 RATES, minérales niaque. | uitrique. | d’ammo- d'acide niaque. uitrique. | RER ONCE | Creme | eee | eee | da mm p. 100. p. 100. p- 100. p. 100. p.104. p- 100. A. — Sol avec vers de terre.| 0 0200 | 0.0850 | 0.01647| 0.02204| 0.0385410.08672 | Sol sans vers de terre.| 0.0036 | 0.1144 | 0.00285! 0.02966| 0.032514 0.03267, Somme. | solubles. B. — Sol avec vers de terre.| 0 0140 | 0.0250 | 0.011147! 0.00648S| 0.0179510.15338 Sol sans vers de terrc.| 0.0060 | 0.0440 | 0.00494! 0.01141| 0.0163510.03362 On voit par ces chiffres que la quantité de matières azotées el minérales solubles est plus grande dans la terre habitée par des vers que dans celle qui n’en possède pas. La première renferme plus d’ammoniaque, mais moins d'acide nitrique que la dernière. En conséquence, ces recherches prouvent que la richesse du sol en principes nutritifs assimilables est augmentée par l’action des vers de terre. Cela tient à ce que les matières organiques du sol éprou- vent, en traversant le tube digestif, sous l'influence des sues intesti- naux, des modifications qui favorisent leur décomposition. Gelte ac- tion, toutes circonstances égales d’ailleurs, doit être plus accusée dans le cas où les vers se nourrissent des parties mortes des plantes (feuilles, tiges, racines, etc.). DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 397 En second lieu, les vers influent sur la fertilité du sol en contri- buant essentiellement à sa porosité et à sa mise en grumeaux, abstrac- tion faite des nombreux trous qu'ils y creusent. Pour le démontrer, J'ai rempli d’un sol arable humique, humide, finement tamisé, deux vases cylindriques en tôle de zinc de 8°",6 de diamètre et 4 centi- mètres de hauteur et dans l’un j'ai mis cinq vers de terre. Après avoir égalisé la surface j'ai saupoudré chaque vase du même sol pour empêcher lévaporation et la sortie des vers. Au bout de six semai- nes, la terre peuplée de vers non seulement était complètement mise en grumeaux, mais encore avait augmenté notablement de volume. Les chiffres suivants précisent les modifications survenues : DIAMÈTRE- AUGMENTATION PRES du HAUTEUR VOLUME de volume >vlindr du sol du sol « cylindre, - - absolue, p. 100. centim,. centim, cent. cub. cent. cub. Avec vers . 8,6 5,1 296, 24 63.9 97.5 ) 74 . Sans vers. . . 8,6 4,0 232,34 ; Afin de déterminer la capacité du sol pour l’air et l’eau, deux tubes de à centimètres de diamètre et de 35 centimètres de longueur fu- rent remplis sur 30 centimèlres avec un même poids de lehm hu- mide. Dans lun on mit 6 vers de terre au moment du remplissage. Après deux mois de séjour au laboratoire, la terre, garnie de vers était à l’état grumeleux et avait subi une augmentalion de volume de 6.9 p. 100. Alors on ajouta de l’eau par le dessus aux deux vases jusqu'à ce que des gouttes s’écoulassent de la partie mférieure fer- mée par une loile métallique, puis on laissa les vases en repos et cou- verts pendant 48 heures pour enlever l'excès d’eau. Ensuite on prit la terre dans les deux vases sur une hauteur de 36 centimètres, on la pesa après avoir Ôté les vers, et on la dessécha pour la repeser en- core. Connaissant le poids spécifique de la terre, on déduisit de ces pesées le volume du sol et sa capacité pour l'air et l’eau. Voici les résultats : SOL FACULTÉ D'IMBIBITION, a avec vers. sans vers. Pour 100%én volume. "10 28.69 48,13 Pour 100lenPpoids EME METEO 21.36 2989 398 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. soL SOL VOLUME. © A — EE ayec vers. sans vers. avec vers. sans vers, cent. eub. cent. cub. p- 100. p. 100. AIR Lunel 183,5 52,7 51/2 8.9 SOL rs ee 236,9 252,8 40.2 42.9 Eau 4 0e 169,0 283,5 28.6 48.2 lors 589,0 589,0 100.0 100.0 Grâce à la mise en grumeaux du sol par les vers de terre, la fa- culté d'imbibition est diminuée, mais le volume de l’air occlus est augmenté. Étant donné que les vides non capillaires sont multipliés et agran- dis par l’état grumeleux du sol, il n’y a rien d'étonnant à ce que la perméabilité pour l'air et l’eau soit sensiblement plus grande dans le sol pourvu de vers que dans l’autre. Pour le prouver, on remplit deux tubes de tôle de 5 centimètres de diamètre et de 33 centimè- tres de longueur fermés en bas par une fine toile métallique, avec du sable calcaire humide et riche en humus; l’un reçut 10 vers de terre. De mai en octobre les tubes restèrent verticaux, recouverts par une plaque de verre. Dans le dernier mois on fit passer de Pair à travers les deux tubes sous une pression de 40 millimètres d’eau el le volume d’air fut mesuré à l’aide du gazomètre. La quantité de litres d’air qui traversa le sol fut, par heure, de 432,27 (1° essai) et de 428,98 (2° essai) pour le sol peuplé de vers et de 3,65 (1% essai), 3,01 (3° essai) pour le sol sans vers de terre. Dans les mêmes tubes on détermina ensuite la faculté d’imbibition par la méthode de WeziTrscakowsky *. La quantité d’eau exigée pen- dant dix heures pour maintenir à la surface du sol une lame cons- tante de 90 centimètres fut de 74 000 centimètres cubes pour le sol habité par les vers et de 2950 pour l’autre. A la fin de l'expérience, les tubes furent vidés et l’on constata que tous les vers de terre étaient encore en vie, quoique le sol fût de mai en octobre devenu presque aussi sec qu'il peut le devenir à l’ar, fait qui montre, de la façon la plus frappante, la puissance de résis- tance des vers aux circonstances extérieures défavorables. 1. Forschungen auf dem Gébiete der Agrikullurphysik, vol, X, 1887, p. 203. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 399 Un autre essai fut fait dans les mêmes conditions avec du lehm. La quantité de litres d’air qui traversa le sol fut, par heure, de 464,51 èn moyenne (463,26 — 1° essai; 465,46 — 9° essai) pour le sol renfermant des vers de terre et de 181,96 en moyenne (180,53 — 1°" essai ; 183,39 — 2° essai) pour le sol dépourvu de lombries. Il résulte avec évidence de ces chiffres que l’état mécanique du sol est modifié par les vers de terre dans un sens favorable à la croissance des végétaux, parce qu'ils provoquent la formation des grumeaux du sol et le rendent plus facilement perméable à l'air et à l’eau. L'importance de ce fait frappe encore davantage si l’on con- sidère que c’est précisément dans ces localités où les vers existent en abondance (stations humides) qu’une plus forte proportion d’air coïincidant avec une diminution correspondante dans la faculté d’im- bibition est très utile pour la décomposition normale des matières organiques (érémacausis). L'influence des animaux sur la destruction de ces substances et la formation de l’humus paraît être beaucoup plus active dans les pays chauds que dans la zone tempérée. Ainsi G. KeLLER * rapporte qu'à Madagascar les vers de terre et le Geophagus Darwinii dé- ploient une activité extraordinaire, si bien que la terre rejetée par les vers atteindrait annuellement en chiffres ronds la somme de 1 mil- liard et demi de mètres cubes. A l’île de la Réunion, d’après le même auteur, le travail des vers de terre n’est pas si frappant qu'à Mada- gascar ; mais, par contre, les Julides (Julus corallinus) doivent avoir une grande part à la formation de l’humus. Celui-ci, du reste, se trouve déjà tout préparé, sous les tropiques, dans une large mesure, à la surface du sol, surtout par les fourmis qui attaquent les arbres vaincus par leurs concurrents dans la lutte pour l'air et la lumière, les transforment en humus et fournissent ainsi au sol de nouvelles sour- ces d'alimentation. D’après C. KELLER, c’est aux crustacés que revient la première 1. CG. Kezzer, Humusbildung und Bodencultur unter dem Einfluss thierischer Thätiglieit. Leipzig, 1887. Y. aussi P. E. Muzrer, Studien über die natürlichen Humusformen. Berlin, 1887, 400 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. place dans la formation de l’humus sur les récifs de coraux et sur les plages. Enfin, n'oublions pas de rappeler que les animaux plus élevés en organisation qui vivent dans le sol lui donnent en fouissant et creu- sant leurs galeries une perméabilité qui active la décomposition des matières organiques. RÉSISTANCE AU SALANT AN EL RS ee UT LEURS Suite des ÉTUDES SUR LES TERRAINS SALANTS DE LA CALIFORNIE PAR MM. E.-W. HILGARD, R.-H. LOUGHRIDGE, Joseph BURTT DAVY, E.-J. WICKSON, A.-B. LECKENBY et Charles-H. SHINN Résumé par J. VILBOUCHEVITCH D'après le « Partial Report » de la Station agronomique de Berkeley pour les exercices 1895-1896 et 1896-1897, daté de mars 1898. — 0-6 L0-0— Le résumé qui va suivre suppose, de la part du lecteur, la con- naissance des publications précédentes sur la matière de M. le professeur E.-W. Hilgard et de la Station agronomique de Cali- fornie ‘ ; autrement, il ne resterait plus assez de place pour raconter ce que le dernier volume paru nous apporte de neuf; car, sur les 450 pages du Partial Report, les terrains salants en occupent, dans divers chapitres, 66 (p. 38-75 ; 284-289 ; 998-301 ; 346-362 ; 384-389). IL y est question de différents objets relatifs au salant ; mais les recherches et observations sur le degré de résistance de différentes cultures et végétaux spontanés l’emportent sur le reste ; 1. Voyez Annales de la science agronomique française et étrangère, 1893 et 1898. ANN. SCIENCE AGRON. — 9° SERIE. — 1898. — 11, 26 402 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. c’est ce qui justifie le titre que nous avons choisi pour celle ana- lyse. Après avoir établi la théorie du phénomène même du salant : et élaboré une méthode qui rend à peu près comparables entre eux — du moins pour son pays — les résultats d’analyses?, M, Hilgard s'engage aujourd’hui davantage dans les applications pratiques dont nous avions déjà, de par son fait, quelques heureux exemples : le plätrage des terrains à salant « noir » ; la détermination des condi- tions de réussite de la betterave à sucre en terrain salant *, l’intro- duction d’une excellente halophyte fourragère exotique (lAtriplez semibaccalum, un € salt-bush » d'Australie *).… Quelques extraits d’une lettre de M. Hilgard, écrite en mars 1898, feront voir quels sont en ce moment les sujets qui préoccupent le plus la Station agronomique de Californie dans le ressort des ter- rains salants : « J'attire votre attention sur le chapitre de notre Report qui traite de la végélation spontanée des Lerrains salants et des indications qui peuvent en êlre tirées sur le degré de salure des terrains. Vous verrez que nous sommes déjà arrivés à certaines conclusions très neltes en ce qui concerne deux plantes dont la prédominance indique des sols pratiquement inutilisables, du moins dans les condi- tions économiques ordinaires du pays; ce sont le Salicornia et l’Allenrolfiu. Pour d’autres végétaux, nous avons démontré avec la même précision comment leur présence dans un terrain salant signifie que, par de simples procédés culturaux, et, au besoin, par le plà- trage, ce terrain peut être assez amélioré pour suffire à toutes les destinations usuelles. «Entre ces deux limites extrêmes, il y a quantité d’espèces qu’il 1. De l'influence du climat sur la formation et la composition des sols. (Voyez An- nales, 1893.) 2. Échantillonnage de terrains salants, par MM. Hilgard et Loughridge. (Annales, 1898 ) 3. Sur la possibilité d'une culture avantageuse de la betterave à sucre dans certains terrains salants, par MM. Hilgard et Loughridge. (Annales, 1898.) À. Journal d'agriculture pratique, 1898 ; Bull. de la Soc. nat. d'acclimalation de France, 189$, juillet. LS ARS RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 405 faudra continuer à étudier avant de pouvoir dire ce qu’elles signi- fient dans le sens qui nous intéresse. Quoi qu’il en soit, vous voyez déjà que, par ce procédé, nous arriverons à mettre le simple paysan à même de reconnaître si oui ou non il a des chances de réussir sur tel ou tel de ces terrains dont l’efflorescence saline n’accuse généralement que l'extrême richesse... Nous allons pour- suivre activement cet ordre de recherches ; notre prochain Report — peut-être même un « bulletin » détaché que nous publierons ayant — contiendra probablement quantité d’indications supplémen- tairés instructives et utiles. €... Notre succursale de Tulare va présenter cette année un intérêt particulier : Jusqu'à ce jour nous v avons énfoui, sur les 8 hectares, environ 60 tonnes de plâtre ; le carbonate de soude est presque entièrement neulralisé. Et voilà que la saison s’annonce comme devant être la plus sèche de tout ce qui s’est vu depuis vingt-deux ans ; nous sommes impatients de savoir comment, dans cette circonstance critique, les terrains salants vont se comporter comparés aux autres. Nous avons fait une grande variété de semis sur les parcelles d’essais amendées, et nous allons consigner les résultats au moyen de photographies qui seront publiées dans notre prochain Report. « Une autre branche de nos recherches acquiert de jour en jour plus d'importance : c’est la question de savoir jusqu’à quelle limite des eaux contenant des sels alcalins peuvent être utilisées pour l'irrigation. Au point où nous en sommes, je ne crains pas de per- mettre l'emploi de pareilles eaux à titre temporaire, à la condition d’en donner de temps en temps des quantités si considérables que le salant accumulé dans le sol soit forcé d’être emporté dans les voies de drainage générales de la contrée. « Dans certaine localité de la Californie méridionale, les plan- tations d’orangers ont été irriguées depuis trois ans aux dépens d’un lac saumâtre que j'avais cependant condamné comme impropre à cet usage ; à l’heure qu'il est, les orangers ont tellement dépéri que les gens du pays m’appellent pour que je vienne leur porter conseil. Je vais y aller aussitôt que ma santé le permettra et je pro- fiterai de cette belle occasion pour reconnaître les limites de salure 404 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE,. Csalant blanc » compatibles avec le bon développement de l’oran- ger ; autant que je présume, la limite sera basse, car je sais qu'un jardin d’orangers dont le sol accuse 15 000 livres de salant blanc à l’acre, soit 37 000 à l’hectare ?, est déjà en piteux état. » Le dernier volume de la Station consacre à l’apprécialion d’eaux d'irrigation une trentaine de pages, nous remettrons cependant l'analyse de ce sujet à une autre occasion. Avant de commencer l'exposé des autres récents travaux de M. Hilgard et de ses vaillants collaborateurs, rappelons que, con- trairement à une opinion reçue, mais erronée, les constatations faites en Californie sont parfaitement applicables même au midi de la France, sans parler des possessions françaises du nord de l'Afrique. Depuis la publication de la si remarquable étude de M. Gastine sur les terres de la Camargue ?, il n’est plus possible de contester que tous les types de salant reconnus en Californie se retrouvent en France ; nous ne voulons pas dire, d’ailleurs, qu’ils s’y retrouvent dans la même proportion; mais cependant, pour ce qui est plus particulièrement du salant alcalin — « salant noir » des Américains, voilà en quels termes M. Gastine apprécie déjà son importance pratique à la suite d’une étude qu’il déclare lui-même encore incomplèle : « Quoique les terres de la Camargue offrent manifestement, avec leurs salsolacées si abondantes, l'exemple du salant maritime ou salant vrai..., le salant alcalin apparaît quelquefois assez nette- ment pour que sa présence soit à surveiller. » Ceci dit, abordons l’analyse du Partial Report : 1. À la date du 22 novembre 1898, M. Hilgard nous écrit : « Toutes les fois que vous trouverez un chiffre de « salant total » rapporté à l’acre sans que l'épaisseur de la couche visée soit spécifiée, c'est que nous entendons l'ensemble de la provision de sels solubles qui évolue dans les quatre premiers pieds. » 2, Rapport sur la composition des terres de la Camargue ; la composition des sables du cordon littoral rhodanien ; la nature du salant de la Camargue, 9{ pages in-S°. Paru dans les Annales de la science agronomique française el étrangère, 1898. RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 405 Investigations sur la végétation spontanée des terrains salants. Dans une introduction, M. Hilgard dit du programme de ces recherches : « L'observation la plus superficielle suffit pour s’apercevoir que certaines plantes, lorsqu'elles occupent un endroit à elles seules, indiquent un sol extrêmement chargé de salant ; que d’autres corres- pondent à une prédominance de sel marin dans le mélange salin ; d’autres plantes encore, par leur présence ou par leur absence, constituent des indications précises ou plus ou moins vagues quant à la susceptibilité du terrain à être mis en culture sans recours aux moyens extrêmes tels que le délavage et le drainage artificiel. Les fermiers établis dans la région à salant connaissent plusieurs de ces plantes caractéristiques; cependant, le terme « alkali weed » (weed signifie mauvaise herbe) est employé pour désigner des espèces très différentes suivant le climat et la qualité du sol. « Eh bien — nous voulons préciser les choses : « Relever tous ces «alkali weeds », les déterminer, nous assurer, par des analyses, de la quantité et de la nature du salant circulant dans les sols où l’on constate chacune des espèces ; établir, en fin de compte, pour les différents districts, des listes accompagnées de descriptions et de figures à l’aide desquelles le cultivateur puisse : se débrouiller tout seul sans avoir à s’adresser à la Station. « Tel a été le but poursuivi par M. J. Burtt Davy qui a rédigé le mémoire que ces lignes.sont destinées à recommander à l'attention de notre public... La réalisation entière de notre projet exige une quantité énorme de travail botanique et chimique dont l'exécution prendra un certain nombre d’années, d'autant que la flore des différentes régions salantes de la Californie est loin d’avoir la même composition spécifique, et qu’en conséquence, il y aura à reprendre en quelque sorte tout le travail en passant d’un pays à l’autre. Cependant, l’objet à atteindre nous paraït présenter un intérêt pra- tique trop important pour qu’il soit permis de se laisser rebuter par les diflicultés matérielles d’exécution. » 406 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le travail de M. Burtt Davy représente une partie seulement des observations faites au cours d’une seule saison. D'ailleurs, à cause des différences de flore, les conclusions, même définitives, ne pourraient guère profiter directement aux pays qui intéressent l’agriculture française. Pour ces raisons, nous n’en don- nerons que juste assez pour permettre de juger l'importance du travail accompli et le plan général des recherches, à moins qu'il ne s'agisse d'espèces ubiquatères représentées en France et dans l'Afrique du Nord. Les instructions données à M. Davy comportaient les points sui- vants : Collectionner les végétaux caractéristiques en s’attachant plus spécialement aux taches d’alkali noir ; Prélever les échantillons de sol correspondants ; Profiter de l’occasion favorable pour rechercher les halophytes indigènes susceptibles d’une culture avantageuse. Il y eut trois voyages : le premier fin avril 1896 ; le deuxième en oclubre 1896 ; le troisième dans les premiers jours d’avril de 1897 : tous les trois dans la vallée du San-Joaquin. Il a été rapporté à Berkeley un herbier d'environ 2000 feuilles, une collection de graines et de racines, et près de 170 échantillons de sol ; sur ce nombre, M. R.-H. Loughridge en a analysé 57 au point de vue spé- cial du salant (total et composition). Dans les tableaux qui résument ces analyses, 11 y a, pour chaque échantillon, l'indication d’une plante (rarement deux) qui caractérise le point étudié ; des inven- laires Joints aux tableaux donnent la situation exacte, les condilions orographiques et les caractères physiques de chaque numéro. Le plus grand nombre de ces échantillons — onze — représentent le sol pris jusqu’à la profondeur de 1 pied anglais (12 pouces); neuf, jusqu’à 4 pieds; un, jusqu'à 3 pieds; un, 30 pouces ; un, 2 pieds; un, 18 pouces ; un, 14 pouces; un, 6 pouces; deux, à pouces. Pour quelques-uns des échantillons, les descriptions jointes per- mettent de conjecturer que le peu de profondeur du forage a été déterminé par le niveau de l’eau dans le sous-sol ; mais pour la plupart, faute d’explications, on en est réduit à se dire que les RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 407 conditions de l'échantillonnage ont été dictées par des circonstances étrangères ; n'oublions pas cependant, que neuf des échantillons ont été tout de même pris jusqu’à la profondeur de quatre pieds (et analysés le plus souvent en quatre portions de douze pouces chaque). À ce propos, rappelons qu’en Californie — M. Hilgard le répète encore dans l’article que nous sommes en train d'exposer — « à part des cas exceptionnels se présentant dans les milieux ou axes des vallées, on peut être sûr de trouver toujours dans les quatre premiers pieds l’ensemble du salant qui circule dans le sol; quel- quefois, la presque totalité est accumulée dans un «€ hardpan » (tuf alcalin) localisé à la profondeur d’environ trois pieds; d’autres fois (plus particulièrement vers la fin de la saison sèche), presque tout le salant se trouve remonté dans les six premiers pouces. » Il en résulte que, d’après l’enseignement même de M. Hilgard, seules les analyses qui représentent le sol jusqu’à quatre pieds de profondeur sont comparables entre elles. Cette réserve faite, voici les principaux résultats de la mission de M. Burtt Davy : Il distingue en premier lieu les halophytes « carac- téristiques » (197 espèces dont d’ailleurs la liste n’est pas encore donnée) ; ce sont les plantes strictement limitées à l’état naturel aux terrains salants; en deuxième lieu, les halophytes « non caraclé- ristiques » qui offrent une végétation presque aussi luxuriante, ou même meilleure dans les sols à peine imprégnés de salant ; ce sont, pour la plupart, des mauvaises herbes d’origine exotique telles que : Helianthus annuus ; Sonchus oleraceus ; Malva parviflora ; Meli- lotus Indica ; Plantago major ; Capriola Dactylon (« Bermuda- grass »); Erigeron Canadensis. « Ce qui rend les halophytes exclusives aptes à supporter le salant ce sont des adaptations spéciales qui facilitent l'absorption d’eau et en réduisent l’évaporation; ces mêmes particularités font que géné- ralement ces espèces se trouvent être mal adaptées aux conditions d’existence plus usuelles. « L’un des caractères les plus frappants des végétaux halophytes, est leur manière de se présenter en peuplements purs. Il y a bien cerlaines espèces rares limitées à des stations de peu d'importance 408 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. constituées seulement de quelques individus, ces stations mêmes étant souvent séparées les unes des autres par de grandes distances ; mais c’est l’exception; le cas caractéristique est bien la présen- tation en masse,-la répartition en zones dont chacune couvre de vastes superficies d’une seule espèce végétale. « Deux espèces cependant: Distichlis spicala et Frankenia gran- difolia campestris, tout en se présentant souvent en peuplements exclusifs, interviennent également, en plus ou moins grand nombre d'individus, dans la plupart des peuplements d’autres espèces. » Les zones se succèdent dans un ordre fixe: en passant des grès («cemented gravel and sands ») de l’est et du sud de la partie supé- rieure de la vallée du San-Joaquin, aux bas-fonds lacustres du nord et de l’ouest, on constate d’abord une première zone d’Atripleæ polycarpa, sur un sol léger de sable et de gravier (« sandy gravel »), puis une deuxième de Bigelowia venela coïncidant tantôt avec un sol identique à celui de la première zone, tantôt avec un sol plus lourd, zone où le gravier et l’argile alternent ; la troisième ceinture est constituée par du Suæda (suffrulescens et Torreyana); une quatrième, par du Sporobolus airoides ; V'Allenrolfea occidentalis vient ensuile si le sol est humide, et, plus bas encore, le cas échéant, c’est du Salicornia (ambigua et autres espèces) et encore des Suæda. Ces zones font plus ou moins irruption l’une dans l’autre ; sou- vent, telle fait défaut totalement : loutes ces aberrations étant déterminées par des circonstances inhérentes au sol. Quelquefois une dépression alcaline de peu d’étendue reproduit sur le petit pied la même succession de zones. Voici une description qui traite d'espèces exotiques, mais J'ai voulu la reproduire — d’autant qu’elle tient en quelques lignes — afin de fortifier dans nos lecteurs celte notion que les terrains sa- lants se présentent en Californie avec absolument les mêmes allures générales qu’en Camargue ou dans l’Aude, ou dans les Pvrénées- Orientales, ou dans l'Hérault. Dans chacune des zones caractéristiques, il a été prélevé des échantillons jusqu’à la profondeur de quatre pieds et, à l’aide de l’analyse de ces échantillons et d’autres répondant à là même plante RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 409 dominante, M. Burit Davy établit des tableaux dans le genre de celui-ci : Atriplex polycarpa : MINIMUM. MAXIMUM. SUATES RS SE TR dE traces 37 880 CARDONATES SEEN ET 240 19 000 CHIOTUTES TS RAS ane » 21 360 DAlANTIO 0 840 718 240 Les chiffres expriment des livres anglaises à l’acre-pied. Ceux qui se rapportent aux différents sels ne proviennent pas nécessairement du même sol ; ainsi, le maximum des sulfates peut avoir été observé dans tel sol, celui des carbonates dans tel autre et celui du salant total dans un troisième. En même temps, M. Burtt Davy donne la composition centésimale du salant qui lui paraît caractéristique pour la plante; ainsi, pour l’Atriplex : SULÉATES ES ERP REENSS 6 46.7 p. 100 CATDONATESR EEE 30.8 — CHIOLUTES RE EEE 22 ar — Il aurait été intéressant d’avoir, en regard de ces moyennes, les cas particuliers réels dont ces moyennes ont été tirées. Autre remarque: on ne comprend pas très bien de quelle ma- nière et dans quel intérêt les poids à l’acre ont été ramenés à l’épais- seur d’un pied. Ces réflexions seront mieux comprises si l’on cite, pour le même Atriplex polycarpa, les chiffres des tableaux de M. Loughridge qui ont pu servir à l'établissement de celui de M. Burtt Davy: TABLEAU. 410 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. pour 100. LIVRES A L’ACRE. COUCHES. 4 Sul- |Carbo-| Chlo- Car- Chlo- Total. | Sulfates. TOTAL. fates. |nates.|rures. bonates. | rures. Forages n° 73-76 de Bakersfeld. Atriplex polycarpa. De Où 12 pouces.| 0.25! 0.48! 0.53] 1.96] 38000! 19 200] 21 200| 78 400 De 12 à 24 pouces. | 0.65| 0.37|0.16| 1.18! 26 000! 14800] 6400! 47 200 || De 24 à 36 pouces.| 0.33! 0.30] 0.19] 0.82] ‘13 200| 12 000| 7600! 32 800 De 36 à 48 pouces. | 0.13) 0.211 0.09/0.43| 5200! 8400] 3600| 17 200 | Dans les 4 pieds. .[ 0.51| 0.341 0.24] 1.09] 82400! 54 400! 38 800| 175 600 Forages n° 18-20 de Bakersfeld. Atriplex polycarpa et Erodium cicutarium. | De 0 à 12 pouces.| 0.03! 0.01! 0.01 0.05! 1 200 400 400 2 000 | De 12 à 24 pouces.| 0.01! 0.01| 0.01! 0.03 100 400 400 1 200 }| De 24 à 36 pouces.| 0.00! 0.01] 0.01! 0.02 » 400 400 800 | Dans les 3 pieds. .|[ 0.01| 0.01|0.01[0.03[ 1600! 1200[ 1200! 4000 Forages n° 49 et 85-87! de Llano Verde. Atriplex. De 0 à 12 pouces.| 2.47] 0.02| 1.39| 3.88[ 98 S00 800| 55 600! 155 200 | De 12 à 24 pouces.| 2.15! 0.02] 1.34| 3.51] 86 000 800| 53 600| 140 400 De 24 à 36 pouces.| 1.67| 0.02! 0.79|2.48| 66 800 800! 31600| 99 200 || De 36 à 48 pouces.| 1.76| 0.02! 0.84] 2.62] 70 400 800! 33 600! 104 800 Dans les 4 pieds. .1 2.01| 0.02| 1.09] 3.12] 332 000| 3 200] 174 400! 499 600 Forages n° 37-38 de Rosamond. Atriplex polycarpa et Bigelovia venela. De O0 à 12 pouces.| 0.39| 0.01[ » |0.40! 15 360 520 » 15 880 De 12 à 18 pouces.| 0.02] 0.07| » |0.09 340| 1 360 » 1 700 | Dans les 18 pouces.|[ 0.26] 0.01! » |0.27| 15 700| 1 SS0 » 17 5850 1. Les quatre échantillons se rapportent bien au même endroit, mais le no 49 a été pris en mai et les nos 85-87 en septembre 1896. ë ci bite, 4 RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 411 En somme, l’esquisse de M. Burtt Davy ne nous représente pas encore un plan de travail absolument net et qui puisse être pris pour modèle. Attendons le rapport définitif. Avant de quitter les tableaux de MM. Burtt Davy et Loughridge, relevons deux analyses intéressantes : LIVRES A L’ACRE. POUR 100. , — COUCHE. Sul- Car- Chlo- Sul- Car- Chlo- Total. Total. fates. |bonates.| rures. fates. |bonates.| rures. I. — Sol salant sableux n° 35 de Rosamond, couvert de Larrea Mexicana : | 0 à 12 pieds. | 001 | oo | » | Eu #10 | 360 | » | 800 II. — Sol couvert de Yucca brevifolia; n%53 du Los Angelos County. | 0 à 12 pieds. | 0 Of | » | 001 | 0 02 Eu » | et 800 Ces deux indications sont utiles à retenir, car il s’agit là d'espèces ligneuses et qui devraient supporter parfaitement le climat de lAI- gérie et de la Tunisie ; les yuccas sont d’ailleurs suffisamment connus de tout le monde. Les arbres et arbrisseaux adaptés au salant, ne fût-ce que dans une faible mesure, sont rares et méritent d’être signalés, n’eussent-ils, comme dans ce cas, pas de valeur écono- mique. Il a été dit plus haut que M. Burtt Davy avait élé spécialement chargé de recueillir, en même temps que les matériaux pour l’éta- blissement d’une classification des terrains salants d’après leur vé- gétation, Loutes espèces de renseignements sur les plantes à cultiver dans ces terrains. Il y a des choses à glaner dans la partie de son rapport qui concerne cet objet: Et d’abord, cette réflexion d'ordre général : « Les particularités de structure qui font qu’une plante se trouve être adaptée au salant, sont souvent communes à plusieurs espêces du même genre et à plusieurs genres de la même famille ; du mo- 412 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ment que l’on a constaté une espèce halophyte, on a bien des chances, en cherchant dans le même genre et dans les autres genres de la famille, de trouver d’autres espèces qui seront limitées aux terrains salants ou simplement capables de les supporter... Il y a, pour cette raison, un intérêt pratique à relever toutes les espèces qui se rencontrent sur les terrains salants, n’eussent-elles, en elles-mêmes, aucune utilité économique. » Le grand soleil n’est que la forme sélectionnée et perfectionnée par la culture de l’Helianthus annuus spontané, très commun dans cerlains terrains salants des environs de Pomona et de Bakersfield. M. Burtt Davy a prélevé un échantillon du premier pied d’épais- seur d’un sol près Pomona couvert d’Helianthus sauvage, et voici quelle s’est trouvée être, d’après une analyse de M. Loughridge, sa composition au point de vue du salant : SULEATES LS RTS: 1 920! livres à l'acre-pied, CaATDONALCS RP RENE 1 400 — (hlorures- tee 920 — INIDTALES LA EN E 1 440 — JOLIE 5 680 livres à l'acre-p'ed. Le topinambour (Helianthus tuberosus) plus spécialement sa variété blanche, a fait preuve d’une résistance considérable au salant à la station dé Tulare et au champ d’expériences de Chino ; on ne donne pas de chiffres. M. Davy pense qu’il y aurait lieu d’expérimenter aussi, en fait de composées, l’artichaut (Cynara Scolymus), la chicorée, et peut- être aussi le Pyrethrum (la plante qui produit la poudre insecti- cide). Modiola decumbens. — Originaire du Chili ; s’est acclimatée toute seule, on ne sait comment, dans le Kern County et a été cons- tatée à l’état spontané à Bakersfield, :sur un terrain très chargé de salant ; un échantillon représentant l'épaisseur des douze premiers 1. Le Report donne un chiffre différent ; M. Hilgard nous écrit que c'est par erreur ; nous avons modifié Je total aussi, en conséquence. RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 413 pouces, envoyé à la slation par un correspondant, y a été analysé par M. Loughridge : SULATESN Me eee 6 800 livres à l’acre-pied. CarDONALES EE EE 4 760 — Ghiorures Me 40 540 — Salant total . . . 52 400 livres à l'acre-pied. La station agronomique recommande la culture de cette plante comme fourragère, tout en conseillant de la circonspection dans le choix de l'emplacement, car elle est traçante et, de par ce fait, fort dure à faire disparaître une fois qu’elle s’est établie quelque part. Dans le rapport annuel de M. Wickson, il y a, au sujet du Wodiola, plusieurs lettres de cultivateurs qui en ont essayé et, dans un autre chapitre du livre, la photographie d’une parcelle couverte de cette plante ; mais on ne voit pas la manière dont elle est utilisée, ni la quantité de fourrage qu’elle peut produire. Le Modiola est assez riche en substances nutritives : LAN RP CE SAVE DR AT er SO » p. 100. CeNALES RSS RER ET EAE e 2.87 — Protéine-brute Det aes- rite DAT — Cellulose (crude fiber) . . . . . . 3.24 — Matières extractives non azotées. . . 10.56 — Matières grasses (brut) ; . . . . + 0.61 — Toutes espèces de bétail mangent la plante avec avidité, paraît-il. Le chiendent (Agropyrum repens) a été constaté en parfait état dans un terrain (n° 6 de Bakersfield) qui contenait, dans l'épaisseur des premiers douze pouces (analyse de M. Loughridge) : Sulfates d'alcalis. 111... | 4 000 livres à l'acre. Carbonate de soude. . . . 10 400 — Chloruresi ee ART 800 — Totale ARE 15 200 livres à l'acre. On sait les difficultés qui s’opposent à la culture régulière de cette graminée qui, d’ailleurs, est connue de tous les temps comme un excellent fourrage. Sporobolus airoides (tussockgrass). — Graminée à panicule, vivace, d'aspect fort gracieux, dont il à été parlé à l’occasion des zones caractéristiques des dépressions salées; atteint le maximum 414 ANNALES DE LA' SCIENCE AGRONOMIQUE. de son développement au mois de juillet; est, paraît-il, recherchée: par le bétail et a été recommandée comme pâturage d’été, par Ia Station agronomique du Colorado qui en donne l’analyse suivante (matière sèche) : at Cendres . 8.98 p. 100. Matières grasses . 4 2.25 — Matières albuminoïdes. . 7.32 — CÉDUIDSE SE RC RE 0 RE 14.80 — Matières extractives non azotées. . . 66.65 — M. Burtt Davy fait observer qu'il faudrait expérimenter prudem- ment le « tussockgrass ».avant d’en faire consommer au bétail de grandes quantités, car la plante a été signalée comme un diurétique puissant. Quant à la résistance au salant, voici les chiffres de M. Loughridge : N°: 65-68 de Bakersfield, sol jaune, micacé, couvert de Sporobolus et de Distichlis spicala. Dans les 4 pieds : STANES EM reine 20 000 livres à l'acre. Gärbondtéss . . . «+ :, 28 200 — CHIDrUnES SRE EEE ET 6 400 — e Total. . . 49 600 livres à l'acre. Ceux du schéma de M. Burtt Davy‘indiquent, même si l’on admet l'interprétation la plus défavorable, une résistance incomparablement plus grande que celle qu’autoriserait à supposer l’exemple donné dans le tableau de M. Loughridge ; voici, en effet, le texte de M. Burtt Davy: « C'était un sol lourd, jaunâtre, argileux ; le maximum de saiant total était dans le premier et dans le deuxième pied ; de même celui des sulfates et des carbonates d’alcalis; les chlorures étaient accu- mulés surtout dans le deuxième et dans le troisième pied. Le Sporo- boluss’accommode des maximum et des minimum suivants, rapportés à l’acre et à chaque pied d’épaisseur (in any one foot per acre) : MINIMUM, MAXIMUM. pDulates hétens EE cette 3 440 98 920 livres. CATDONATES RP PRE NES 680 13 480 — Ghlorures s See 360 55 680 — Balant TO(R EM ETES ENENTAR 6 600 155 280 — RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 415 Dans le salant total : Sulfates. . 6.25 p. 100 CarbDonates RE RL 0 2 Et 4.8 — Chlorures, 32.6 La station du Colorado préconise avec conviction, pour les salants humides, le Beckmannia eruciformis, une belle graminée suffisam- ment connue en Europe et qui a élé constatée en abondance sur plusieurs terrains marécageux du Washington très chargés de sa- lant « noir » (on ne nous donne pas de chiffres). D’après le profes- seur Cassidy, dans les Montagnes Rocheuses le bétail préférerait cette plante à tout autre fourrage ; de même, dans la vallée du Honey Lake, Lassen County, Californie, elle serait très appréciée. Composition de la matière sèche, d’après la station du Colorado. Cendres rs ati rmtomcanen 6.21 p. 100. Matières grasses . MANOIR 3.05 — — albuminoïdes. . . . . . 8.53 — Gellulose . F “hi: 292,65 — Matières extractives non re 39.56 — M. Burtt Davy termine son rapport par une liste de végétaux à cultiver en terrain salant, liste préliminaire et en effet encore très imparfaite, mais dans laquelle il y a néanmoins plusieurs noms qui méritent d’être cités, savoir : 4° Pour terrains très chargés de salant: Kæœlreuteria paniculala (arbrisseau), Kochia Californica, K. eriantha, K.pubescens, K. vil- losa, fourragères ; % Probablement ne supportant pas les terrains les plus salés : oignon (Allium cepu)', Eleagnus angustifolius (petit arbre), Phy- salis Peruviana (fruits comestibles utilisés, entre autres, par la confiserie parisienne; voyez le Potager d’un curieux, de MM. Pail- leux et Bois. — J. V.). Fourrages : Leplochloa imbricatu, Sorghum halepense, Panicum 1. « N° 51 et 52 de Leonis Valley ; alluvion noirâtre produisant d'excellents radis, oignons et céleri, de semis. : « Eau à la profondeur de deux pieds. Échantillonné en mai 1896 : « Dans le premier pied, 4 000 livres à l'acre de sulfates d'alcalis et 400 de chlorures ; dans le deuxième, 1 200 de sulfates ; salant total dans les deux pieds, 5 600 livres. » 416 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. virgatum, Alropis laevis et À. Californica, Eragrostis obtusiflora, Elymus condensatus, Panicum bulbosum, Agrostis alba, Capriola Dactylon, Hordeum nodosum. Arbrisseaux fourragers : Leplospermum lanigerum ; Acacia pen- dula et A. homalophylla. Dans le même ordre d'idées, il y a lieu de reproduire un tableau de M. Loughridge, précédé des explications que voici : « Les analyses du salant du « ten-acre tract » ‘ et de la station de Tulare, où l’on cultive une grande variété de végétaux, nous per- mettent d'établir une liste préliminaire du degré de résistance de nombre de nos cultures. Il est hors de doute qu’en continuant les observations et les expériences, nous nous trouverons amenés à assi- gner à la tolérance de la plupart des espèces une limite plus élevée que la limite maxima donnée dans notre tableau. « Pour chaque sel, le tableau en donne la quantité maximum de livres à l’acre, constatée dans la couche du premier pied d’épaisseur de tous les terrains où la plante en question a été trouvée en bon état ; el ceci, sans rapport avec les autres sels ; ainsi, pour le « cow pea », le maximum de carbonate de soude a été trouvé dans un sol, celui des sulfates dans un autre, celui des chlorures dans un troisième. « Nous aurions pu donner aussi la contre-partie, en présentant un tableau analogue pour les terrains où les plantes en question ont péri; mais, pour le moment, un pareil tableau pourrait induire en erreur, car, dans nombre de cas, le dépérissement a été causé par des circonstances autres que le salant. Ainsi, nous avons eu du beau blé dans un sol qui contenait 7 000 livres de carbonate d’alcali à l’acre; et, cependant, le blé a péri dans un sol qui n’en tenait que 840. » 1. Champ d'expériences de Chino# voyez détails dans l'article sur la Betterave à sucre, Annales, 1898 ; 10 acres de terrains divisés en 169 carrés de 50 pieds de côté ; une analyse pour le centre de chaque carré, en échantillonnant l'épaisseur du premier pied ; il paraît (Report, 1895-96, 1896-97, p. 47) que, dans ce champ, « le gros du salant est localisé dans le premier pied et, par suite, il est inutile de s'em- barrasser de la masse considérable de travail qu'exigerait l'analyse du reste » ; au moment du précédent Report, il y avait déjà 65 carrés d'analysés, depuis il s’en est ajouté encore 33. Quand les 71 qui restent auront été analysés à leur tour, nous reproduirons la très curieuse carte que cela donne. J. \. RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 417 Tolérance pour le salant, DOSE MAXIMALE TOLÉRÉE, ‘EN LIVRES A L'\CRE, dans le premier pied d'épaisseur. PLANTES. Sulfates | Carbonate| Chlorure | Nitrate Salant d’alcalis. | de soude. | de soude. | de soude. total. GRAMINÉES, Agropyrum Japonicum . . .| 3 280 3 360 3 280 1 160 9 320 Agrostis slolonifera. . . . .| 2560 » » 3 080 o 640 BTONLUS ENCTINRESL NN. 0.0 01" 51920 2 520 920 3 080 | 12 680 Eleusine coracana . . . . .| 1920 2 320 200 120 4 560 FESTULG ONG AS 0 2, | 3 280 2 520 920 1 160 6 000 Festuca pratensis. . . . . .| 4400 640 1 040 2 640 8 720 Fesluca duriuscula . . . . . 880 2120 D 2 240 6 120 Pestuca elatior.. LE. 91101320 2 520 920 » 4 760 Milium multiflorum. . . . .| 1760 840 480 1 280 4 360 Paspalum dilatatum . . . .| 1760 2 120 » 2 240 6 120 HOICUSTIGNQEUS. C'MER. 5.1" 960 920 200 » 2 080 Lolium Ilalicum . . . . . .| 1760 920 480 1 280 4 360 Lolium perenne . … . … . .| 2560 2 320 480 3 080 5 640 Lolium temulentum. . . . .| 3 280 1 080 480 1 160 6 000 POGEDTAIERSISV AIN ET NT. 880 1 520 D 280 2 680 ROIS CT TRE LR 020 2 320 200 280 4 560 Dactylis glomerata . . . . .| 2200 23 Bromus Schraderi . 7 560 25 LÉGUMINEUSES. Anthyllis vulneraria . . . .| 2200 840 360 { 640 5 040 Cow pea (Dolichos catiang). .| 1920 | 2 320 200 120 | 4 560 Lentille(Ervum lens)largeblonde| 1 760 2 520 920 1 280 4 760 — petite rouge| 4400 2 520 1 040 2 640 8 720 — petite. . .| 3 280 2.520 920 1 280 720 Lupin bleu, d'Europe (Angusti- Ho} on 0: noie le 13280 25H20 480 3 0S0 6 120 Lupin bleu, d'Europe (Angusti- DOS ANAn ne. 7, Le 960 920 200 » 2 080 Lupin blanc (L. albus). . . .| 8920 2 120 920 2240 | 12 680 Lupin jaune (L. luteus) . . .| 2200 | 2120 360 | 2240 | 6120 Lupin de Californie (L. carno- sub} L'iop-Mateleo dh: li 22 960 3 360 3 280 320 9 320 Medicago turbinata. . . . . 960 920 200 ) 2 080 Trifolium incarnatum. . . . 1 760 2 120 » 2 240 6 120 ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1898. — 11. 27 413 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. DOSE MAXIMALE TOLÉRÉE, EN LIVRES A L'AORE, dans le premier pied d'épaisseur. PLANTES. Sulfates |Carbonate | Chlorure Nitrate Salant d’alcalis. | de soude, | de soude. | de soude. total. Primera lon D NNIITR mn eme SR mn + name LÉGUMINEUSES (suile). TE PrALEN SERRE ENRRES 880 1 520 » 280 2 680 TANEDERS RS TITRE CE LS 2 0 2 520 920 » 4 760 V. sativa . . 2 560 » » 3 050 o 640 de foie ALES . 22 Melo SD ET Chemie ee 1 680 » » » 1 680 DOLUSNUILTOSUS MAR CT EME 1 760 2 120 » 2 240 6 120 Hedysarum coronarium . . .| 2? 560 » » 3 080 > 640 Divers. pe TE Tree RAC 20 7 010 4 520 4320 | 20 520 RÉ AT D PR 20 7 040 4 520 4320 | 20 520 Pop-corn (variété du mais) . .| 2 360 3 360 3 280 5 040 9 320 Helianthus annuus'. . . . .| 1920 1 400 920 1 440 > 6S0 MODO OR ARLES NE 6 800 4760 | 40 S40 » 52 400 Betterave à sucre?. . . . . .| 7 160 3 340 3 280 1 680 » Salt-bush d'Australie (Afriplex semibaccatum), jeunes plants venus de semis *. . . . . .] 10 360 9 320 | 11 200 » 30 920 Coton EEE LM SOR T2 LARED089 » » » 1 680 Cannabis saliva var. japonica.| 1 680 » » » 1 680 Monet RE ra So 0 1 610 7 980 670 | 23 830 1, Les mêmes chiffres que plus haut, dans l’article de M. Burtt Davy. 2, Un terrain, contenant à l’acre, dans le premier pied, 3 040 livres de carbonate de soude, a fourni une betterave riche de 19 p. 100 de sucre, avec une pureté du jus égale à 90. La par- celle 53 du «ten-acre-tract », qui accuse 7 160 livres de sulfates, a produit des racines de 12.43 p. 100 et de 13.5 p. 100 de sucre avec pureté égale à 83.98 et 83. (Voyez p. 50 du Par- tial Report.) Les éhiffres donnés plus haut, dans le tableau, pour la betterave, ne sont pas ceux du tableau de la page 49 du Partial Report lesquels comportent des erreurs; ils nous ont été commu- niqués, de la part de M. Loughridge, à titre de rectification, en novembre 1898. 3. Ces chiffres avaient déjà été donnés dans le précédent « Report » ayec la mention: « Le salt-bush y languit autant que jeune »; voyez « Échantillonnage, etc. », Annales, 1898. Aux pages 46 et 47 du « Report » pour 1895-96 et 1896-97 il y a encore un certain nombre d’autres chiffres relatifs à la résistance de l’A. semibaccatum, à l’occasion d'analyses d’un sol de la | station de Tulare, mais ils sont assez difficiles à interpréter ; il est préférable d'attendre le prochain « Report ». Il y a quelque chose d’intéressant à la page 320, dans le compte rendu de la succurssle de Tulare rédigé par M. Charles H. Shinn: « Dans leur premier Âge, les À. semibaccatum'sup- portent facilement jusqu’à 31 000 livres de salant à l’acre ; une fois solidement établis, ils en | supportent même bien davantage. Ils ont généralement péri dans les endroits où les 25 p. 100 du poids de la croûte (épaisseur : un demi-pouce) étaient des sels solubles ; maïs dans un cas la plante s'est parfaitement établie sur un tas de fumier et d’eflorescences salines rapportées des champs ; c'est par les pluies du mois d'octobre 1896 que ces individus, qui y sont encore à l'heure qu’il est, ont germé, de graines venues on ne sait d’où, sur ce singulier milieu où, cependant, il nous a été impossible depuis de faire prendre de jeunes plants d'A. semibacca- tum que nous y transplantions. » Vicia villosa.: . .:.:,:,22 . 1:02 560 920 1 040 3 050 8720 | RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 419 Tout ce que nous avons cité n’épuise pas encore le contenu du « Report » relativement à ce problème si curieux de la résistance comparée des différentes plantes agricoles; ainsi, les pages 298-301 sont consacrées à un compte rendu des résultats de cultures d’essai d’un grand nombre de plantes fourragères faites par M. A. B. Lec- kenby, sous les auspices de la Kern County Land Company, près Bakersfield, principalement dans le but de s'assurer du plus où moins de tolérance des différentes espèces pour le salant; il n’y a malheureusement pas d’analyses du sol à l'appui. Il y a aussi, appuyé par la carte agronomique du salant, dont il a été question déjà à plusieurs reprises, le détail des expériences du « ten-acre tract » (p. 384-389): d'abord une liste d'ensemble, en- suite les résultats repris avec précision pour chacune des 15 par- celles ensemencées ; il suffira de donner un exemple du genre d’exposition : Carré 9 : Salant total . . . . . 0.195 p. 100. Dans ce nombre, point de carbonates, peu de chlorure de sodium, mais beaucoup plus de nitrates que dans les carrés 7 et 8. Le « Pop-corn » réussit aussi bien que sur le carré 8. Paspalum dilatalum : presque entièrement péri. Lupin indigène, graine tirée du San-Antonio Canyon: état très piteux. Medicago turbinata : échec partout où le salant est un peu fort ; sur le reste du carré, des individus nains. Trifolium hybridum : échec aux taches salantes; sur le reste, rabougri. Grand soleil de Russie : excellent partout. Arrêtons-nous davantage à un autre chapitre de M. Loughridge (p. 41-45 et p. 52-55), qui traite spécialement de la résistance de la vigne — sujet des plus intéressants pour l’agriculture des régions salantes françaises. — Nous allons ici traduire in extlenso ; nous allons aussi reproduire les trois tableaux ; car, s’il en a été donné 420 ANNALES DE. LA SCIENCE AGRONOMIQUE. déjà quelques-uns de semblables dans l’article : « Échantillonnage », ces trois nouveaux € profils chimiques du salant » n’en demeurent pas moins très intéressants, vu que ce genre d'inventaires du salant en séries verticales à petits intervalles est encore quaid même très rare, puisque seule la station de Berkeley en fait ; et d’ailleurs, dans le précédent € Report » il n’y avait pas de « profils » de sol aussi chargés. Le salant et la vigne à la succursale de Tulare. À Tulare, dans le vignoble, nous avons pratiqué, en janvier 1896 (lorsqu'il n’était encore tombé, depuis le commencement de Phiver, que peu d’eau) trois forages jusqu’à la profondeur de trois pieds ; au premier endroit, la vigne était en parfait état, malgré les signes manifestes de salant dans le sol; au deuxième, les ceps situés sur la tache de salant vivotaient tout juste ; au troisième, la vigne était morte, apparemment par le fait du salant. L’échantillonnage fut fait par colonnettes successives de trois pouces de hauteur chaque. L'analyse a élé opérée sur des extraits aqueux renfermant tout le salant de chaque échantillon... Les estimations en livres anglaises à l’acre, données dans les tableaux, sont faites sur la base de 4 000 000 de livres admis comme poids de | «acre-foot » (acre de sol épais d’un pied). Nous admettons que nos chiffres représentent l’ensemble de la provision de salant susceptible d’influencer la végétation ; car, à la suite des études publiées dans le précédent « Report », il a été re- connu que les quatre premiers pieds du sol renferment dans nos pays, dans la règle, presque tout le salant, et que, dans les terrains plats, non irrigués, la masse du salant est concentrée dans le deuxième ou dans le troisième pied ; rappelons qu’une irrigation par en haut, assez abondante pour que l’eau ait atteint le stock de salant caché dans la profondeur, peut, par le fait de l’évaporation superficielle qui suit, et du jeu de la capillarité, amener tout le salant à s’accu- muler à la surface du sol. LI (Où SUJETS. CE AU £EALANT ET AUTRES Ü REÉSISTAN 0€ G€ OF& SG 068 OLO I OSLT OL6 0679 O0TT OIST 06S TI 066 0€8 € 060 & O6 & 068 7 OYS FI *SOTATT ‘queues np 1%10L 0GL |0ÿ96 |0GSZ « 090 F | 07 & L 06 (0 4s « 0cG OLY « OL£ 068 « 0G OIS 08 009 OEL € € 0S OLS (ra 06 0&0 08 OGE 066 0Y OYI O6G I 0L9 |086£L | 0797 OL OL 090 } OL 00L 00€ O8I O9TT |068 0G£ OCLG | 08 *SOIAIT | ‘SOIAIT | *SOXATT *unipos| ‘unipos| ‘TUnIpOs o | om | oyuoq OYJEAJIN | -0[H) -18) “HUOV/I V SUUAIT 068 LT 0Y6T 097 06 O8S O7Y 08L7 006 086 OGE 08G OLG £Y 06 OF&T OGE € (4 *SOIATT "STTUOTE:P soyeypns ——————, —* Fr 114 LE 17 f LT4 (41 LE K 6 66 &S \ MA 6 G6 « 18 06 68 « G eg &y } 07 09 68 « G 06 cy & 9 L9 (gr Li 08 66 08 ra 1! &9 6à € Y£ 9 A £ PT IS S£ £ 0€ 6I G ‘e Ya M $9 ra 0Y « SG *unipos| ‘umipos| ‘Wuipos| ‘s1pe0 op C9 pe Le ie 9JUAIN | -09 -189) |soJuyins OO ——— — — “LNV'Iivs na A'IVRISYLNHY NOTLISOANON ‘queues up 18301, 800 |GG+r |VrG | LEC' « LG&0° |GGO° |8ÿ0' fe 600” r£Oh 970” « CCOME TL PDA IEC CUR “ LEO GS OS RECU G COURS IPTC OS NIUE 00 |GF0 |E€60° |S970' « G00 1660" LOCO &00' |600 |GOT' | 860 O0 À|G60 |£860° | 260 Y00' |Y10° :|£ScT" | 860 LV0O' |667 |070 |6€€° LOU /FLEOS GOT | CAUE LOOSAOLOP" FOEDEINT GE 810” ITS £&0° 666 GONG LG NC DUM EC TES “unipos| “wmripos| ‘UnIPOS| *grqeo se se ouas AENE OJBAIIN | -0[u9 -109 |sojryqns © _— ‘"I0S NG (QT HNO4 ‘spord g S2P 2JQUSUT "poid 4€ ND 2JQUUSUT | saonod 9€ Re ££ saonod ge & S29n04 0£ & L saon0d 13 t rà | | poid 4% ND 21QUOSUT MP ENINONL/Ta La * : *s99n0d JG BR SI *saonod ST RCI * sa2n0d GC] RP ZI ‘DOid 19f NP 91QUOSUT MSC Aon0d GT 6 *sa2n0d 6 B9 °soonod 9 r£ kr 0 * saonod g *SIB[8UE s09n0 L lof ‘SUAISSHON9NS SIHINON ‘9899 uoq u9 ouftA — ‘I neeIqe]z ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 422 020 LE! 060 & 006 LY OFLE 09Y 7 [070 068 067 086 | O£Z \OLY | 029 SG) 029 8 O8 EF) OS € 060 8 | 079 096 & | OCS OCI y | 078 0C06 | 0617] OS OF! 087 € OIL& |OFITI OYT€ |OYOT O6E 6 | OLOT OLG FI | OLT 00€ F | O£LF 079 OT? 01S 007 OËT 00€ 0ë 089 "SAIAIT | ‘SOIATT 079 OLT 06 OS (ra 06 OLY OL 0G OT « 08 06 000% | 00€ OST OL 00€ 06 OLG 06 OS&T | 06 ‘SOIAIT | ‘SAIATT |OLC |0EE 100€ 00€ | 0CL 1086 7 *SOIATT |‘quequs | ‘wnipos| ‘unipos| ‘unipos np ap 2È °P -I6,p ain ayeuoq È 18J0XL | 97e1JIN | -oIm9 -I8O | soyezqns I *SI[U9 ‘AUOV/I V SAYHAIT « ô GE 16 T6 07 16 YET' O6T" 0€T' GLO” 861” LE YI 68 96 &9 wniIpos| ‘unipos 2p op -1e 9p ent ayeuoq TEP OJEAIIN | -0[49 -189) SoyuJ[uS a "LNYIVS nd A'IVNISALNHO NOILISOaNON ‘wnIpos *SI[U9 "JUeTes np 1801 “‘UnIpOS ep AJEUIIN mm SpI1E & Sp a1quosuT ‘DAd 6 np ojquosuz ° * * *saonod 9g er ge *san0d £g 8 0€ *Saon0d 0£ & LG *Sa9n0d 23 e ya Dord ,% np 91quosuT RP RONTONIEZ UE IZ * ‘saonod JZ PR 8] * ‘saonod $J BG; * ‘saonod CI 8 ZI "poid ;3L NP 2)QUaSUT * * ‘saonod 3] 8 G * ‘saonod G * ‘saonod 9 * *saonod € *WNIpOs 2p aInx “0149 ‘unIpos op eyeuoq 189 *SITU9 -TGP saJeJins (‘ste[S ue soonoq) *SHAISSH99NS SYH9N09 ‘108 NG 001 XNn04 “1899 SIEANCUI U9 OUPIA — ‘II neeIqel 423 RÉSISTANCE AU SALANT ET AUTRES SUJETS. 086 £L 07S 97 066 & OTS & 008 7 006 y 079 08 098 7 O0L y 00 9 0Y0 S OGL 9€ OYT & OG& y 1096 G O7L 66 *SAIAIT “JUEIES np 18300 0GrF | 06807) 082 LE « 027 066 cr « 08& 008 & « 06 020 & « € O8L € « 06 066,6 07 0G0 } | O£Y YT « 07] OL & « OS& 06 & « 07 098 & 07 OGI 0C6 6 080 0276 | 0986 06 097 O9L TI 06 O6L O6S TI O8 OT& I | OGII 073 096 9 | 060 G *SOIATT | ‘SOTATT "SOIATT “nos ‘unipos ‘unIpos QU Mes Heu OJUAJIN | -0IU9 169) 079 7c OET € OC8 0G6 0OLO I 098 087 066 066 OYLT O9YT 66€ 97 063 OST OYTE 068 OT *SOTALT *SITUO -T8.p S0JeJIns om" ‘HUNV,T V SUUHATT & Sr 06 £E |979 |600 |760 |FrE° | SOC t € 8L 6Y |£r7' ; LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 445 cembre 1896, les nombres suivants d’existences de bétail bovin (nombres ronds). 1° Gros bétail : BŒDIS des TA AI LE ME ET". 2: 1 348 100 BŒUISF AT ONETAIS PAM Me 494 300 Vaches IHitiéress APPEL E 6 351 500 FÉES LAMPE ENS 511: 8 193 900 20 Élèves d'un an et au-dessus : BOUVELIONSOE CIS ENS PAT 971 600 ÉMIS ere TM re 1 542 200 Dotal er Rte Ht 2 513 800 30 Élèves de six mois à un an. . . . « .« - 1 263 600 49 Veaux au-dessus de six mois . . . . « . 1 059 200 soit, au total, un peu plus de 13 millions de têtes d'animaux de l'espèce bovine. Si on laisse de côté les animaux âgés de moins d’un an, on constate qu'il y a, en France, 10 700 000 têtes de gros bétail. Pour fixer les idées, je supposerai répartie, entre cette population bovine, la consommation des 11 400 000 tonnes de betteraves fourra- gères récollées en 1896 sur 428 000 hectares. La production moyenne à l’hectare est évaluée par la statistique officielle à 26 650 kilogr. et la valeur moyenne du quintal de betteraves fourragères ressort à 1 fr. 97 c. Dans cette hypothèse, la quantité de betteraves fourragères dis- ponibles par tête de bétail et par an correspond au chiffre très faible de 1 065 kilogr., soit un peu moins de 5 kilogr. par Jour. D’après la statistique officielle de 1896, la surface semée en bet- terave sucrière était de 270 000 hectares’, qui ont produit 8 485 000 tonnes de racines, soit 31 000 kilogr. à l’hectare, au prix de 1 fr. 84 c. les 100 kilogr.”. Les quantités de betteraves entrées dans la même année dans les fabriques de sucre n’ont été que de 6 760 000 ton- nes ; la différence entre le poids de la récolte et celui des livraisons à l'usine aurait été, d’après cela, de 1 725 000 tonnes environ, repré- sentant le décolletage des betteraves, les déchets et la tare, s’éle- 1. Au lieu de 231 000 hectares indiqués par la statistique sucrière. 2, Prix de la betterave brute non décolletée pour les sucreries. 446 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE:. vant ainsi ensemble à près de 20 p. 100 du poids de la récolte. Tels sont les chiffres qui résultent des statistiques officielles. Nous avons vu (page 443) que la production du sucre correspon- dant à 400 000 hectares de betteraves n’a pas trouvé, en 1896, son emploi dans la consommation française. N’y aurait-il pas possibilité d'utiliser très avantageusement la récolte de ces 100000 hectares pour l’alimentation du bétail? La question vaut d’être examinée de près. A raison de 31 tonnes de racines par hectare, cette surface pr'o- duirait 3 100 000 tonnes de betteraves qui peuvent être consommées presque sans déchet par les bœufs et vaches de nos exploitations. La betterave peut entrer dans la ration journalière d’une bête d’un poids vif moyen de 500 kilogr., à raison de 20 kilogr., soit 7 300 kilogr. par an, ce chiffre étant un minimum. La valeur alimentaire de cette ralion serait très élevée et son prix de revient rémunérateur. Le nombre de rations journalières fournies par ces 3 100 000 tonnes de betteraves sucrières serait de 424 657, soit, en nombre rond, 425 000 (chiffre de têtes de bétail qu’on pourrait nourrir par an). Si l’on se reporte aux constatations du recensement indiqué plus haut, on voit qu'il suffirait d'introduire dans l'alimentation d'environ 4 p. 100 du nombre des vaches et bœufs, la production des 100 000 hectares de betteraves sucrières, pour rétablir l'équilibre entre la production du sucre de betteraves indiquée et la consommation. Il y a lieu d’ajouter que, dans toutes les bonnes terres consacrées à la culture de la betterave sucrière, il serait aisé d’accroitre très sensiblement les rendements, le jour où, ayant en vue l'alimentation de son bétail, le cultivateur ne serait plus contraint de se préoccuper, avant tout, du haut titre de la racine en sucre. Des betteraves à 10 p. 100 de sucre constiltueraient une denrée alimentaire de pre- mier ordre pour le bétail, et l’on en pourrait récolter de 35 000 à 40 000 kilogr. à l’hectare. Il me semble, d’après ce qui précède, qu'il y a lieu d’examiner sérieusement l'emploi à l’étable de la betterave sucrière. Pour les bœufs de travail, introduction d’une quantité notable de sucre dans la ralion aurait les meilleurs résultats, le sucre étant, par excellence, l'élément producteur de la chaleur et de l'énergie animales. Pour EE RARTIL AT 6 FAR "AU ET FFC Han AMEN à à) data ue 63e 5 ENtte< LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 447 les animaux à l’engrais et pour les vaches laitières, les avantages de cette alimentation ne seraient pas moins considérables. IL est donc à souhaiter que des essais d'alimentation bien conduits, dans les exploitations où l’élevage occupe une place prépondérante, soient faits dans cette direction. Les résultats justifieraient, cela me paraît certain, les bons effets à prévoir de l’emploi de la betterave sucrière dans l’alimentation des animaux de la ferme. Le sucre con- tenu dans une ration alimentaire est intégralement utilisé par l'animal, sa digestibilité étant complète ; il en résulte qu’au point de vue écono- mique, la betterave présente de grands avantages sur les fourrages pauvres en malières sucrées. J'ai dit précédemment que la sucrerie française produit annuelle- ment environ 220 000 tonnes de mélasses qui renferment 44 à 46 p. 100 de leur poids de sucre. Dans les pays où les mélasses ne sont pas, comme chez nous, imposées, ce sous-produit est utilisé avec succès dans l'alimentation. du bétail (République Argentine, Alle- magne, etc.). Dégrevées de la totalité ou de la plus grande partie de l'impôt qui les frappe, elles trouveraient chez nous une large application à la nourriture des animaux de la ferme. Nous examinerons plus loin cette importante question, après avoir mis en relief la haute valeur alimentaire du sucre pour l’homme, pour les animaux de trait et pour l’engraissement du bétail. Il. — RÔLE DU SUCRE DANS L'ALIMENTATION Le sucre étranger et le sucre indigène. — Nécessité d'une réforme fiscale en vue de l'accroissement de la consommation du sucre en France. — Gampagne d'opinion pu- blique à mener dans cette direction. — Rôle physiologique du sucre. — Claude Bernard et A. Chauveau. — Le sucre source de la chaleur et de l'énergie animales. — Expériences du laboratoire de la Compagnie générale des voitures sur [a valeur du sucre au point de vue de la production du travail du cheval. — Conclusions importantes de ces expériences. — Le sucre et l'engraissement du bétail. Dans ce qui précède, j'ai indiqué d’un mot seulement le rôle que le sucre devrait jouer dans l'alimentation de l’homme et dans la nourriture du bétail. Or, il n’est pas de sujet plus étroitement lié ÉD ed 448 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. que celui-là à la prospérité de la culture betteravière, l’une des plus importantes pour la France, culture dont l’avenir peut se trouver menacé, si l’on n'arrive pas à augmenter considérablement la con- sommation du sucre dans notre pays. Quelle que soit l'importance, au point de vue budgétaire, des recettes éncaissées par l’État sous la rubrique «droits sur les sucres » (plus de 200 millions par an, en nombre rond), la recherche des moyens de dégrever cette denrée alimentaire de première nécessité, en vue d’en accroître la consom- malion, s'impose à l'examen du législateur qui commence à s’en préoccuper. L’annexion de Cuba aux États-Unis ne saurait manquer d’avoir un retentissement considérable sur le marché du sucre continental. Cuba et Porto-Rico exportaient, en 1889, 600 000 tonnes de sucre. Sous le régime nouveau qui a été la conséquence de la guerre his- pano-américaine, cette production sera triplée ou quadruplée si ce n’est plus, avant qu’il soit longtemps. Le marché de l'Amérique sera, fermé aux sucres coloniaux et indigène français. Les États-Unis qui, en 1890, importaient 1 254 000 tonnes de sucre, arriveront très ra- pidement à suffire à leur consommation, sinon davantage, d’une part, par la canne de leurs nouvelles possessions, de l’autre par le déve- loppement de la culture de la betterave sur leur territoire’. Par suite, les États européens verront leurs marchés fatalement encom- brés par la production indigène et par celle des sucres coloniaux. Il est donc urgent, si l’on ne veut pas voir péricliter la culture bette- ravière, de prendre les mesures nécessaires pour prévenir cet en- combrement. La solution qui consisterait à réduire la production du sucre indigène aux quantités qu’exige la consommation actuelle se- rait funeste pour notre agriculture. C’est dans le développement de la consommation du sucre, pour la mettre en rapport avec la pro- duction betteravière, qu’il faut chercher le salut de cette branche si importante de la culture et de l’industrie nationales. La betterave est la matière première de deux produits essentielle- 1. Le 3 octobre dernier, la première sucrerie est entrée en fonction à la Blanche dans l'État d'Orégon. 61 cultivateurs ont livré à la fabrique la récolte de betteraves de 14 000 hectares. On y travaille 420 tonnes de betteraves par jour et les dispositions sont prises pour porter à 700 tonnes le poids des racines traitées. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 449 ment différents : le sucre et l’alcool. Envisagés au point de vue phy- siologique, l’un est un aliment de premier ordre, l’autre un poison dont les ravages effraient à juste titre les hygiénistes et les législa- teurs : toutes les mesures qui auront pour effet d'augmenter la con- sommation du premier et de restreindre celle du second seront un bienfait pour la santé publique. Sans rien préjuger du résultat des efforts tentés en Allemagne et en France pour appliquer l'alcool à l'éclairage et au chauffage des ma- chines motrices, il parait très douteux, quant à présent, qu'il y ait là pour l’industrie betteravière un débouché aussi important que cer- tains inventeurs l’affirment. Il semble d’ailleurs que transformer un aliment de première valeur en un combustible médiocre ne consti- tuerait pas un progrès comparable à celui qui résulterait de la large introduction de cet aliment dans le régime de l’homme et dans celui du bétail. J’estime donc, de plus en plus, que c’est à l’accrois- sement considérable de la consommation du sucre par la population française et à l’utilisation des sous-produits, mélasse, etc., dans la nourriture du bétail, qu’il faut demander la solution de la crise qui menace la culture betteravière. L’obstacle le plus considérable à l'augmentation de la consomma- tion du sucre en nature est incontestablement le droit énorme (60 fr. par 100 kilogr.), plus que double de son prix de revient, qui frappe cet aliment et procure au Trésor 200 millions de recettes. Pour la mélasse, malgré la réduction récente des droits qui pèsent sur elle, étant données, surtout, les complications de toute nature dont la livraison aux éleveurs a été entourée par la loi du 14 juillet 1897, son introduction dans l’alimentation du bétail demeure chez nous lettre morte, tandis que, sous lempire d’une législauon plus libérale, l'emploi de ce résidu a déjà pris en Allemagne, comme nous le verrons plus loin, un développement considérable. Ce qui importe avant tout, pour préparer une réforme fiscale dans le régime des sucres, c’est d'amener l'opinion publique à la réclamer impérieuse- ment. Il faut créer en sa faveur une agitation basée sur la connais- sance du rôle physiologique du sucre et sur l'importance capitale des malières sucrées dans l’alimentation. La plupart des gens con- sidèrent le sucre uniquement comme un condiment agréable des ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1898. — rt. 29 450 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. mets et de certaines boissons, tandis que la physiologie et l’expé- rience s'accordent à le placer au premier rang des substances ali- mentaires, dans l’acception rigoureuse du mot, à côté du pain et de la viande et, pour être plus exact, à lui assigner une valeur physiologique plus élevée que celle de ces deux aliments. Les lecteurs des Annales me permettront, je l'espère, d’entrer en quelques détails sur l'histoire physiologique du sucre, afin de por- ter la conviction dans leur esprit et de leur mettre en mains les éléments essentiels d’une propagande devant aboutir, un jour ou l’autre, au dégrèvement de droits exorbitants et qui aura chance de se produire d'autant plus promptement qu’elle ralliera plus de dé- fenseurs parmi les consommateurs. Le jour, en effet, où ceux-ci seront pénétrés de celte vérité, aujourd’hui indiscutable, que le sucre doit être regardé comme une denrée de première nécessité, les réformes qu’appelle le régime fiscal du sucre dans notre pays seront singuliè- rement facilitées par l’accroissement énorme de la consommation que le législateur pourra envisager comme certain”. Le ciloyen an- glais consomme, par tête et par année, 40 kilogr. de sucre environ: le Français en consomme 13 kilogr. à peine *. Dans quelles limites cet écart de 66 p. 100 dans la consommation des deux pays peut-il être réduit par un abaissement des droits? Le sucre vaut en Angle- terre 25 centimes la livre ; il coûte chez nous 60 à 65 centimes, c’est ce que l’on ne peut pas traduire par un chiffre, mais il est cerlain que là est la voie dans laquelle doit être cherchée et pour- suivie, avec l'intention d'aboutir, la solution de la question sucrière. Laissant aux économistes el aux législateurs l'étude de ce délicat 1. L’Angleterre nous a donné, vers 1860, un exemple frappant de l'influence que le dégrèvement de l'impôt sur le sucre peut exercer sur la consommation de ce produit. À cette époque, la consommation par tête et par an était de 6 kilogr. en France et de 18 kilogr. en Angleterre. Avant la réforme du tarif anglais des droits sur le sucre, le trésor du Royaume-Uni percevait 130 millions par an pour une consommation de 210 millions de kilogr. livrés à la consommation. En 1859, après le dégrèvement, la consommation anglaise s'élevait à 450 millions de kilogr. et les recettes du trésor, à 148 millions de francs. L'Angleterre, il est vrai, dégrevait en même temps que le sucre ses principaux véhicules : café, cacao, thé, etc. La consommation d'un kilogr. de café 0] exige de 3 à 4 kilogr. de sucre. (B. Dureau, L'industrie du sucre depuis 1860.) 2. 438 000 tonnes pour 38 500 000 habitants. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 451 problème budgétaire, je voudrais, en me plaçant sur le terrain so- hide de la physiologie expérimentale, montrer d’une façon indiscu- table le caractère d’intérêt général, national je puis dire, qui s’atta- che à l'introduction, sur les bases les plus larges, du sucre et des mabères sucrées dans l'alimentation de l’homme et du bétail. Quand on sera arrivé à faire partager celle conviction par la masse des consommaleurs et que ceux-ci, pénélrés de vérilés que la plupart ignorent jusqu'ici, réclameront, au nom de l’alimentation publique, une réforme qui serait en même Lemps un bienfait pour l’agricul- ture, les pouvoirs publics trouveront dans celte manifestation une incitalion et un point d'appui qui les aideront puissamment dans l'accomplissement d’une réforme législative dont je suis le premier à reconnaitre les difficultés, mais qui, tôt ou tard, doit s’opérer. Nous allons chercher à résumer les traits essentiels de la question physiologique sur laquelle les beaux travaux de M. A. Chauveau ont jeté, dans ces dernières années, un jour si considérable. Comme préambule à cet exposé, je rappellerai en quelques mots la grande découverte de Claude Bernard, point de départ de nos connaissances sur le rôle du sucre dans l’économie animale. Vers le milieu du siècle actuel, on ignorait complètement la prin- cipale fonction du foie. Claude Bernard l’a découverte et démontrée de 1855 à 1855. Le foie est l'appareil où, sous l'influence des ali- mentations les plus variées, de celles même où manque absolument toute substance sucrée, s’élabore, à l’aide des matériaux du sang qui le traverse, une matière identique à l’amidon végétal, se transfor- mant presque instantanément, dans l'organe même, sous l’influence d’un ferment particulier, en sucre analogue au glucose. Claude Ber- nard a donné à celte variélé d’amidon le nom de glycogène, qui si- gnifie : matière qui engendre le sucre. Le sang qui sort du foie d’un animal nourri exclusivementde viande ou degraisse renferme toujours du sucre : il en est de même du sang de l’animal soumis à l’inanilion. La matière glycogène et le sucre qui résulte de sa transformation se produisent donc dans le foie sans le concours de matières sucrées introduites par l’alimentation, Tel est le point de départ fondamental de nos connaissances sur le sucre animal. Entrainé dans le torrent circulatoire, le sucre 452 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. est délruit et utilisé par l'organisme dans un temps assez court. Les expériences de M. A. Chauveau nous montreront, tout à l'heure, les causes et le processus de celte décomposition. Claude Bernard a en- suile établi que la fonction glycogénique est universelle : 11 Pa cons- tatée dans toute l'échelle zoologique, sans exception, non seulement chez l'animal né, mais chez l'animal à naître : le fœtus, les larves de l’insecte, l'œuf de l’oiseau, etc., contiennent de la matière glyco- gène dont la transformation en sucre sert à la nutrition de embryon ou de l'être qui va naïître. Chez l’homme et chez les animaux supé- rieurs, c’est au moment de la digestion que la formation glycogénique atteint son summum : mais elle est indépendante — c’est là un fait essentiel — de la nature des aliments. Au point de vue de la philosophie naturelle, cette découverte a une importance capitale : elle a réduit à néant le prétendu antagonisme des végétaux el des animaux. La dé- marcalion profonde que l’on avait établie entre les deux règnes, en ce qui regarde la nutrition, a disparu. La vie est une. Les végétaux, disait-on, ont la faculté de créer, avec les matériaux puisés dans Pair, dans l’eau et dans le sol, les principes dits immédiats, tels que l’amidon, les substances grasses ou azotées. Dans celte théorie, les animaux élaient regardés exclusivement comme des consommateurs utilisant les substances fabriquées par les plantes, dans l’impossi- bilité où ils seraient eux-mêmes d’en produire. On pensait alors que la graisse, l’albumine, etc., du corps des animaux provenaient directement de la fixation dans les tissus de ces matières élaborées par les plantes. On refusait à l’animal la faculté de les produire. La découverte de la fonction glycogénique du foie, corroborée par les nombreux faits établis par Claude Bernard, a détruit de fond en comble la vieille hypothèse de la nutrition directe des animaux par les matériaux élaborés dans le végétal. Gelte hypothèse a fait place à la doctrine, admise aujourd’hui sans conteste, de la nutrilion indi- recte. Par là, il faut entendre que l'animal fabrique, de toutes pièces, à l’aide des matériaux tirés du règne végétal, l’amidon, le sucre, la graisse et la chair qui forment le sang et les tissus ; il en est de même des principes sucrés azotés et gras du lait, qui ne préexistent pas dans l'alimentation et sont le produit de la rénovation incessante de la glande mammaire de la femelle. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 493 Revenons à la fonction glycogénique. Que devient le sucre formé dans le foie et porté sur tous les points du corps par le sang? Quel est son rôle dans l'organisme ? Le sucre, comme tous les composés organiques qui renferment du carbone, dégage en brûlant ou, ce qui est identique, en s’oxydant pour donner naissance à de Pacide car- bonique et à de l’eau, une quantité considérable de chaleur. Cette chaleur peut à son tour se transformer en une quantité équivalente d'énergie ou de travail. Le sucre est donc à la fois une source capi- tale, la seule peut-être, de la chaleur animale ; il est, par suite, l’élé- ment indispensable de la production du travail musculaire. C’est à M. A. Chauveau que revient l'honneur d’avoir, par de longues et délicates expériences, jeté, sur cette question du rôle du sucre, une vive lumière. Claude Bernard croyait que le sucre disparaissait dans le poumon. M. A. Chauveau a démontré, dès 1856, que le sucre répandu dans toul le système circulatoire, jusqu'aux plus fins vaisseaux capillaires de la circulation générale, s’y détruit pour produire la chaleur et l'énergie nécessaires à la vie et au fonctionnement des organes. [ a établi expérimentalement la proposition suivante : € L'énergie con- sacrée à la production du travail des muscles a sa source principale, sinon exclusive, dans la combustion du glycogène qui imprègne le tissu propre de ces organes. Le sang s’appauvrit en glucose dans les capillaires de la circulation générale et tout particulièrement dans ceux du tissu musculaire ». M. Chauveau et son collaborateur, M. Kaufmann, ont mis hors de doute la relation existante entre l'énergie musculaire, la production du glvcogène et la destruction du sucre du sang, dans des expériences sur le cheval devenues classiques et dont je ne puis qu'indiquer en quelques mots les résultats. Ces savants ont déterminé les échanges qui se produisent dans le sang qui traverse un muscle au repos et le même muscle en travail, entre une glande au repos et une glande en action. Le muscle qui sert à la maslicalion (masseter) et la glande qui sécrête la salive (parotide) ont servi à cette étude. La loi géné- rale déduite de ces expériences, loi qui résume l'influence exercée par le travail d’un organe sur la combustion organique et sur la consommalion de sucre de glucose correspondante, a été formulée 454 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. en ces termes par M. A. Chauveau: « Pendant le travail qui s’ac- complit dans les organes en état d'activité physiologique, la quantité de sucre qui disparaît dans le système capillaire devient plus consi- dérable qu’au repos. Elle est proportionnée à la suractivité des com- bustions, excilées par la mise en jeu des organes ». Deux chiffres donnent l’idée de l’intensité des phénomènes d’é- change et de destruction du sucre du sang dans le même muscle au repos et au travail. Le sang qui traverse le muscle masseter d’un cheval émet, dans un temps donné, au repos, c’est-à-dire en l’absence de mastication, une quantité d'acide carbonique égale à 20,4 ; pen- dant l’état d'activité el durant le même temps (mastication d’avoine) la quantité d'acide carbonique produite s’élève à 69,55 ; autrement dit, l'activité des combustions dans le muscle qui travaille est environ trois fois et demie plus grande que durant le repos. Or, en dosant les quantités de glucose disparues du sang qui traverse le muscle à l’état de repos et à l’état de travail, MM. Chauveau et Kaufmann ont constaté une combustion de glucose de 05,121 dans le premier cas et une destruction de sucre égale à 05,408 pendant le travail. Le muscle emprunte donc au sang qui le traverse trois fois et demie plus de sucre durant son activité qu’il n’en consomme au repos. Il existe donc une relation étroite entre la perte du sang en sucre et l’accroissement de combustion pendant le fonctionnement physiolo- gique du muscle. Ces faits démontrent, à l'évidence, que la fonction physiologique ou, si l'on veut, la matière sucrée est la source pri- mordiale de la chaleur animale et de l’activité musculaire. C’est en se basant sur l’ensemble des faits acquis dans ces dernières années que l’on a institué récemment des expériences dans l’armée alle- mande sur l'influence du sucre dans l'alimentation du soldat. Bien que les essais n’aicnt pas présenté les caractères d’une observation scientifique, les résultats n’en sont pas moins très intéressants ; j'en cilerai un entre autres : le médecin d'état-major, D' Schumburg, a constaté les bons effets du sucre dans les conditions suivantes : à la suite d’une fatigue exceptionnelle imposée aux hommes d’un régi- ment, il a fait donner à chacun d’eux une ration supplémentaire de sucre (30 grammes) qui a suffi pour rendre, pendant plusieurs heures, à ces soldats, l’énergie suffisante pour continuer la manœuvre. Lors LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 499 de la discussion du budget au Reichstag, un député, le D'Paasche, a demandé, en se fondant sur les faits observés par les médecins de ré- giment, qu’une place plus large fût faite au sucre dans le régime alimentaire du soldat. La matière sucrée que la fonction glycogénique met à la disposi- tion de l’organisme, nous pouvons la lui fournir en telle quantité qu'il conviendra par l'introduction du sucre ordinaire dans Pali- mentation. Sous l'influence des sucs digestifs, le sucre de betterave se transforme rapidement en sucre de glucose qui se répand dans le torrent circulatoire et va remplir dans le muscle et dans les autres tissus le même rôle que le sucre animal. Nous sommes donc maitres d'accroître pour ainsi dire à volonté la source de la chaleur animale et de l’énergie musculaire. D’où la haute portée de la consommation du sucre par l’homme et par l’animal. Dans l’engraissement du bétail, le sucre joue un rôle considérable ; j'y reviendrai tout à l'heure. Les progrès de l’expérimentation physiologique ont complètement modifié les idées qui régnaient sans partage, il y a une vingtaine d'années, sur les conditions de la production de la force musculaire et du travail. On attribuait à la matière azotée (chair, albumine, etc.) la source de l’activité musculaire. On avait été, en partant de celle idée, amené à conclure qu’une ration alimentaire doit contenir d’au- tant plus de matière azotée qu’on demande plus de travail uüle à l'animal qui la consomme, et l’on avait fixé la relation nutritive de la ration de travail à 1/5 ou 1/4,5, ce qui signifie que pour 46,5 ou 5 kilogr. de matière non azotée (amidon, matière grasse, cellulose, sucre, etc.) la ration devait contenir 1 kilogr. de substance azotée (albumine, etc.). L'enseignement de Claude Bernard, dont j'ai eu le bonheur de fréquenter assidûment le laboratoire pendant dix ans, m'avait ré- vélé le rôle prépondérant des substances hydrocarbonées dépour- vues d’azote dans la production de la chaleur animale et par suite du travail intérieur ou extérieur de l’organisme. Aussi, lorsqu’en 4871, M. Bixio me fit l'honneur de me demander mon concours et mes conseils pour l'étude de la ration alimentaire du cheval de 456 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. trail, mes premières préoccupalions se sont-elles portées sur l’abais- sement de la teneur de la ration des chevaux de la Compagnie géné- rale en matières azolées et sur l’augmentation des matières hydro- carbonées. En 1878, sur l’intelligente initiative de son président, M. Bixio, le conseil d'administration de la Compagnie générale décida la création, à la manutention de la Compagnie générale, d’un labora- toire de recherches qu'il me confia le soin d’instailer et de diriger. Le laboratoire fut ouvert en 1880 ; il est pourvu de toutes les res- sources nécessaires à expérimentation : stalles pour les chevaux en expériences permeltant la récolte des fèces et de l’urine, manège dynamométrique et voitures à odographe Marey, pour la mesure du travail effectué par les chevaux, etc... Depuis 1880 jusqu’à ce jour j'ai pu, avec le concours successif de collaborateurs distingués et dévoués, MM. A. Leclerc, Ballacey et Alekan, entreprendre des séries d’essais complets sur l’alimentalion du cheval envisagée au point de vue de l’utilisation de la ration dans les divers états par lesquels passe l’animal : repos, marche au pas et au trot, travail au pas et au trol, etc. Toutes ces recherches expérimentales, sans exception, ont abouti à me confirmer dans l’idée première qui les avait inspirées, à savoir que l'élément essentiel de la production de l'énergie et du traveil est la matière hydrocarbonée des aliments (amidon, cellulose saccha- rifiable, sucre, etc.), l’azote devant entrer dans la ration de travail pour couvrir les pertes résullant de Pusure légère du muscle, mais sans que la quantité que l’organisme en réclame pour son entretien soit, en aucune façon, proportionnelle au travail utile (extérieur) produit. Le résultat économique de cette démonstration est consi- dérable, en raison de la différence de prix très grande des principes amylacés des fourrages comparés aux principes azolés. Au mois de juillet dernier, j'ai entrepris avec M. Alekan une série de recherches spéciales sur l'influence du sucre introduit à diffé- rentes doses dans la ration du cheval de service. Je n’entrerai en aucun détail sur ces expériences, que nous publierons lorsqu’elles seront complètement achevées, mais je crois intéressant d’en faire connaitre dès aujourd’hui les principaux résultats, qui mettent en évidence, d’une manière saisissante, les relations du sucre avec la LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 497 production du travail et qui confirment absolument l’infériorité, à ce point de vue, des matières azotées, que j'indiquais tout à l’heure. Chacune de nos expériences a porté, comme nous l’avons toujours fait, sur trois chevaux aussi comparables que possible sous le rap- port de l’âge, de la taille, du poids et de l’état général. Comme dans tous nos essais antérieurs, les fèces et l'urine ont été soigneusement recueillies et analysées ; les poids et la composition des fourrages consommés ont été rigoureusement déterminés ; le volume d’eau bue exactement noté ; le travail au manège et à la voiture évalué au dynamomèlre. Les chevaux étaient, comme nous le faisons toujours, pesés régulièrement plusieurs fois par jour aux mêmes heures. En un mot, ces expériences ont élé conduites avec tous les soins pos- sibles et les données les plus complètes sur leurs diverses phases recueillies ponctuellement. Les quantités de sucre ajoutées aux différentes rations ont varié progressivement de 600 grammes à 26,400 par jour (taux actuel dans les essais qui se poursuivent). Les fourrages expérimentés soit seuls, soit associés au sucre, sont les suivants: loin, paille d'avoine, maïs; les aliments concentrés (ri- ches en azote) ont été la maltine, produit secondaire du traitement industriel du maïs, et les granules, excellent aliment préparé à la manutention de la Compagnie à l’aide de matières premières, riches en azote. Les tableaux suivants donnent les résultats obtenus dans l’appli- calion des divers régimes alimentaires ; ils sont des plus instructifs. MATIÈRE DIGESTIBLE MATIÈRE par cheval pts RS VALEUR RÉGIME !, RARSPAAPTES par calorifique. RE rem re A 2 1000 kilogr. Lutritive. 1 RAI, HU. fr vif. PR Fe _ _. Étiee LS At WérEpinisentoss .5f 322 26338 2 979,5 7 800 111,3 13 429,4 2 Foin et sucre. . . 318,4 4298,2. 11300 1/13:,6 19 070,7 SH MAIN set. | 778,1 4388,6 13 100 145 :6 21,572;,6 4 Granules seuls . . 870,5 4 692,1 14000 1/ 5,4 23 211,9 5 Granules et sucre. 395,7 5291,6 14 000 1/13,4 23 515,5 6 Maïs et sucre . . 243,0 5 422 13 900 1/22,3 23 339,6 1. Ghacun des régimes 3 à 6 comportait, outre les aliments ci-dessus, 2k#,500 de paille d'avoine hachée. 458 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les rations consommées par les chevaux dans ces six séries d’ex- périences ont été extrêmement différentes, on le voit, sous le rap- port de leur teneur en principes azotés digestibles ; en effet, la te- neur en matières azotées a varié de 243 grammes à 8708°,5 par vingt-quatre heures, soit une différence de 6278°,5, dans la ration: journalière; par suite, les relations nutritives extrêmes ont été 1/5,4 à 4/29,3. Quel a été le retentissement de ces énormes différences dans le régime alimentaire : 1° sur le poids de l'animal ; 2° sur les quan- tités d’eau bue par kilogramme de matière sèche ingérée; 3° sur le travail kilogrammétrique effectué ; c’est ce que les chiffres suivants vont nous indiquer. EAU BUE VARIATIONS TRAVAIL par kilogr. journalières RÉGIM2!, de du effectué. substance poids sèche. du cheval. kilogrammètres. kilogr. kilogr. 1OMEOIN Seul RE Te A: 230 189 3 833 — 0,300 D'AAROIL EL SUCTE Me NET ee 230 497 3 000 — 0,120 D'MMAITINE NES VER PRE vie 221 906 3 900 0128 ARE CGTAIUIES SCSI Me: Re 247 1358 3 000 —+ 0,013 HAGrTanulIes CASUCTe ee 254 381 2 700 + 0,053 CHOMAISIELSUC IE ee 262 920 1 900 — 0,200? La discussion des résultats consignés dans ces deux tableaux con- duit aux conclusions suivantes que je me réserve de développer lors- que nous publierons, M. Alekan et moi, le compte rendu détaillé de celte série d’essais : 4° Conformément à nos observations précédentes le foin* est de tous les aliments le moins favorable à l’entretien du cheval de ser- 1. Tous les chiffres de ce tableau se rapportent, comme ceux du précédent, à la moyenne des résultats fournis par les trois chevaux, résultats d'ailleurs très voisins de ceux qu'a donnés chaque cheval pris isolément. 9, Il importe de remarquer que la quantité d'eau bue par les chevaux au régime du maïs et sucre a été très sensiblement plus faible que dans tous les autres essais, et que par contre le travail a été plus considérable. Durant la période de 15 jours de travail à la voiture, le poids moyen des chevaux, au régime du maïs ou granules et sucre n'a pour ainsi dire pas varié; il était le pre- mier jour de 407k%,300, le dernier jour, 407K8,2 | 3. V. Études expérimentales sur l'alimentation du cheval de trait, 3° partie (An- nales de la science agronomique française el étrangère), t. I, année 1886. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 499 vice, el c’est à juste raison que l’on a renoncé depuis longtemps, à la Compagnie générale, à le faire entrer dans la ration. 2° Le travail maximum a été obtenu avec la ration la plus pauvre en matière azotée (243 grammes, ration n° 6) et la plus riche en ma- tière hydrocarbonée, notamment en sucre (5*#,422, ration n° 6). 3° Le travail produit a augmenté avec la valeur calorifique de la ration (rations 4, 9 et 6). 4° L'entretien du poids vif de l’animal a été assuré par les diverses rations: les rations riches en sucre l’ont le mieux maintenu (rations 4, 5: et 6). 9° Fait intéressant à noter, contrairement à l’idée préconçue qu’on aurait pu avoir, une dose élevée de sucre dans la ration n’augmente pas la soif de l’animal ; c’est avec la ration au sucre (4 à 6) que la quantité d’eau bue a été la moindre, à la fois par rapport au poids de la substance sèche et absolument parlant. Avec la ration paille, maïs et sucre, la quantité d’eau bue est tombée à 14,900 par kilogramme de substance sèche ; elle a atteint le maximum, 3*£,900 (n° 3), avec la ration la plus riche en matière azotée. Je discuterai ailleurs la part dinfluence qui revient dans la consommation d’eau à la température, au travail, etc. 6° Ces expériences montrent, avec une nelleté indiscutable, dans quelle proportion énorme peut varier la relation nutrilive d’un ani- mal sans porter préjudice à son entretien et à la somme d’énergie transformée en travail utile. C’est le cheval à la ration sucrée n° 6 qui a accompli le plus fort travail, alors que la ration n'avait qu'une relation nutritive de 1/22,3, et c’est le cheval à la ration la plus azotée, dont la relation était 1/b,4, qui a produit le moindre travail. Il n’est pas inutile d'indiquer, à ce propos, comment le cheval effectue libre- ment le travail kilogrammétrique indiqué dans le tableau ci-dessus. L'animal travaille pendant un temps égal pour chaque essai d’ali- mentation, soit une heure par exemple. Il parcourt dans ce temps, à l’allure qui lui convient, un espace dont la longueur, variable d’un essai à l’autre, mais exactement mesurée, sert avec l'effort de traction au dynamomètre à calculer le travail utile produit. Le résultat de ce calcul permet donc d’estimer la valeur de la ration au point de vue de l’énergie développée. 460 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La conclusion générale de nos expériences sur le sucre est la dé- monstralion rigoureuse de la haute valeur alimentaire de celte subs- tance. Cette conclusion est en accord complet avec les résultats des longues et délicates expériences de M. Chauveau sur l’importante question du rôle du sucre dans l’économie et dans l’alimentation. Nous sommes très heureux de la concordance des résultats généraux de nos expériences avec ceux que l’éminent professeur du Muséum a obtenus. Ils confirment notre confiance dans la méthode que nous appliquons depuis vingt ans à nos recherches sur l’alimentation, et nous encouragent à poursuivre nos expériences dont l’agriculture pourra, nous l’espérons, tirer profit pour l'alimentation de son bétail et pour la défense de ses intérêts, dans la réforme du régime fiscal du sucre. Pour compléter l’exposé qui précède, j'aborde dans le chapitre suivant l’examen des questions que soulève l'introduction de la mé- lasse dans le rationnement du bétail. Le sucre, en effet, n’est pas seu- lement la source principale ou unique de l'énergie et de la chaleur animales ; il est aussi un aliment de premier ordre pour l’engrais- sement des animaux. M. le professeur Märcker dont les efforts ten- dent, comme les nôtres, à provoquer un mouvement d'opinion en faveur du dégrèvement du sucre, a publié récemment un vpuscule très intéressant auquel je vais faire de larges emprunts qui mettront les éleveurs français au courant de l’état de la question. Il y a une véritable campagne à entreprendre pour amener la réforme du régime fiscal du sucre et de ses dérivés. Pour la faire aboutir, les seuls efforts des physiologistes et des agronomes se- raient insuffisants ; il faut que l'opinion publique s’y associe. La question est si importante pour les cultivateurs, pour les éleveurs et pour les consommateurs, qu’on ne peut douter, qu'éclairés par la science sur les bienfaits de la réforme, tous ceux qui ont souci du progrès auront à cœur d’en bâter l’avènement par leur revendication auprès des pouvoirs publics. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 461 III. — LA MÉLASSE ET L'ALIMENTATION DU BÉTAIL! Composition et valeur nutrilive de la mélasse, — Mélasse verte ou fourrages mélas- siques : tourteaux, tourbe, sons, cossettes, ete. — Introduction de la mélasse dans la ration alimentaire des animaux de trait : cheval et bœuf. — Mélasse dans l'en- graissement : bœufs, moutons, pores. — Vaches laitières. — Préparation des four- rages mélassiques à la ferme et dans les sucreries. — Le sucre et les produits secondaires de la sucrerie dans l'alimentation du bétail. — Expériences des pro- fesseurs Märcker et Albert à Lauchstædt. — La sucrerie de Guhrau. 1. — Composition et valeur de la mélasse. Chaque jour s'accroît le nombre des fabricants de sucre et des cultivateurs qui s'accordent à réclamer lallégement du marché sucricr par l'introduction, dans l'alimentation du bétail, de la mélasse dont les nouveaux procédés de traitement permettent de retirer 40 p. 100 du sucre qu’elle renferme, l'emploi agricole de la mélasse devant diminuer d’autant la surproduction du sucre. La propagande active faite en Allemagne dans cette voie n’est pas demeurée sans succès, el l'emploi de la mélasse comme fourrage s’est tellement répandu déjà, qu'il vaut la peine de résumer les expériences faites jusqu’à ce jour. On peut admeltre, pour la mélasse, la composition centésimale approximalive suivan{e : Hautes Moore 17:2 Protéine brute . ae 9.0 Principes extractifs non azotés. 61.3 dont 45 gr. de sucre Cendres. 8.3 La protéine brute de la mélasse est en très grande partie consti- tuée par des amides, mais il est encore trop fréquemment admis qu’elle renferme, à côté de quantilés considérables d’amides, des quantités notables de composés albuminoides. Cest ainsi que 1. Il m'a paru utile de donner la traduction presque intégrale de la partie du mémoire publiée par le professeur Märcker, directeur de la station de Halle, sous le titre : Die Verfütlerung vom Trockenschnitzeln, Melasse und den Nachproducten der Zuckerfabriken. 1898. Magdebourg, librairie À. Rathke. LG 462 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. J. Kübn' indique que sur 100 parties d’azote : 22.7 au minimum — 75.7 au maximum — 54.4 p.100 en moyenne, sont à l’état d’amides. Lorsqu'on réfléchit que le jus de betterave, avant l’addition de chaux, est porté à une température atteignant largement celle de la coagu- lation des matières albuminoïdes, et que, de plus, il est soumis pendant un temps assez long à l’action de 2.5 à 3 p. 100 de chaux, il semble, à priori, invraisemblable qu'après ces deux‘traitements, le jus sucré puisse contenir encore des quanlités notables de subs- tances albuminoïdes. L’albumine du jus de betterave, celle au moins qui n’est pas à l’état de peptone, est complèlement séparée par le chauffage du jus, et, s’il s’y trouvait des peptones en proportion appréciable, ce qui est peu vraisemblable, l’action de la chaux qui dé- double les composés protéiques en donnant naissance à des amides, les écarterait. Märcker et Büring ont fait sur les matières albumi- noïdes des mélasses des recherches qui toutes ont abouti à établir, — en appliquant la méthode connue de l’hydrate d’oxyde de cuivre — qu’à part quelques millièmes qui doivent être attribués à des im- puretés accidentelles, la mélasse ne renferme pas d’albumine. La mélasse doit donc être considérée comme un aliment non azoté, l'azote qu’elle renferme n’y existant qu’à l’état d’amides, qui, d’après leur valeur nutritive, doivent être, suivant les idées régnantes, classées à côté des hydrocarbonates, n’entrant pas en ligne de compte, dans les calculs, comme albumine. Les estimations qu’on a faites antérieurement, d’après lesquelles les deux tiers de l’azote de la mélasse étaient comptés comme ap- partenant à l’albumine, doivent être considérées comme erronées. Les substances protéiques ayant une valeur conventionnelle triple de celles des hydrocarbonates, la valeur de la mélasse se trouve donc, dans ce mode de calcul, estimée trop haut. A côté des amides, la mélasse renferme 45 p.100 de sucre et 16 p. 100 environ de diverses matières exlraclives non azolées : acides végélaux à l’état de sels, malières gommeuses de la betterave non précipitées par la chaux et produits divers de transformation résultant de l’action de la chaux sur les éléments de la betterave. 1. Die zweckmässigsle Ernährung des Rindviches. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 463 On peut donc admettre qu’y compris le sucre, la mélasse ren- ferme 61 p. 100 de principes non azotés auxquels il convient d'ajouter 9 p. 100 d’amides, ce qui fait qu’il faut considérer la mélasse comme un aliment contenant 70 p. 100 d’hydrocarbonates, et dans lequel les éléments azotés, envisagés au point de vue ali- mentaire, ne peuvent pas être comptés comme des albuminoïdes. On pourrait croire que la séparation des albuminoïdes par le traitement du jus diminue la valeur alimentaire qu’on doit attribuer à la mélasse; il n’en est absolument rien, car, on en arrive de plus en plus à cette vue, que la valeur nutritive des matières extractives non azotées peut être très différente de l’une à l’autre. La plus haute valeur alimentaire doit nécessairement être attribuée aux principes extractifs qui, à côté d’un équivalent calorifique élevé, ne demandent pour leur digestion qu’un travail physiologique nul ou le plus faible possible. Sous ce rapport, le sucre prime tous les autres composés hydrocarbonés. Soluble dans l’eau, il n’exige pas l’action de sucs digestifs dont la sécrétion entraîne une dépense de travail et d'énergie pour l’organisme. De plus, le sucre est diffusible et pé- nètre directement à travers la membrane du tube digestif dans le torrent circulatoire, tandis que les autres principes extractifs non azotés, comme l’amidon, les pentosanes, les différentes gommes, etc., doivent être modifiés profondément, ce qui demande un temps plus ou moins long. Le sucre, à la faveur de son pouvoir osmotique élevé, arrive dans le temps le plus court au sang et y accumule une si grande quantité de substance organique, que celle-ci, ne pouvant pas s’oxyder complètement aux dépens de l’oxygène du sang, met à la disposition de l’organisme une provision notable de substance des- tinée à l’accroissement des tissus et notamment à la production de la graisse. Les autres hydrocarbonales qui se transforment en sucre seule- ment au bout d’un certain temps, sous l’influence des sucs digestifs, pénètrent lentement et peu à peu dans le sang ; 1ls sont au fur et à mesure oxydés par l’oxygène du sang, de telle sorte que souvent le sucre formé est intégralement utilisé par la combustion et qu’il n’en reste point pour concourir à la production des tissus. Enfin, les hydrates de carbone peu digestibles et l’amidon lui- 464 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. même prennent part, d'après Kellner, à la formation de méthane dans l'intestin, tandis que le sucre, très rapidement diffusible, échappe à cette transformation et sert entièrement à la production organique. Ainsi s’explique la valeur extrêmement élevée du sucre pour la production de la graisse qu’a mis en évidence le grand dé- veloppement de l'emploi de la mélasse dans l’alimentation du bétail. Ce ne sont d’ailleurs pas les seuls résultats de l’alimentation à la mélasse qui ont révélé cette influence: le sucre consommé par l’homme est connu depuis longtemps comme un générateur de graisse el c’est la substance dont on restreint ou supprime le plus sé- vèrement l’usage dans le régime des personnes atteintes d’obésité ‘. En renonçant à tenir compte, comme on l’a fait jusqu'ici, des matières azotées, dans l’estimation de la valeur de la mélasse, pour ne considérer que le sucre et les autres hydrocarbonates, on arrive à attribuer à ce sous-produit une valeur alimentaire supérieure à celle qu’on lui a reconnue jusqu'ici. Dans l'hypothèse du coût de 3 fr. 79 c.; 5 fr. ; 6 fr. %5 ec. et 7 fr. 50 c. les 100 kilogr. de mélasse, l'unité nutritive (1 kilogr. de substance extractive non azotée) revient à 0 fr. 054, 0 fr. 071, 0 fr. 09 c. et 0 fr. 11 c., nombres ronds aux cours actuels. L’unilé nutritive coûte dans les fourrages suivants les prix ci-dessous? : PRIX HN UNITÉS \P ja x ed nutritives 100 “Rat par l'unité fourrage. 100 kilogr. nutritive. (CE A a me 161 25° 105 0f 155 OrreMnONUEC PPS 13 75 112 O0 123 Farinerderrizaii. AURAS LU 10 95 118 0 093 Sonde seieles Etre enr 12 50 113 0 110 Sonde Dé PR ER EL CEE 1190 109 0 109 Il résulte de là, que dans la mélasse coûtant 6 fr. 25 c. les 1. L'engraissement très notable des nègres pendant le travail de la canne aux colo- nies est un fait constant, les noirs se livrant à ce moment à une consommation énorme de cannes ou de sucre que les planteurs ont souvent de la peine à limiter. L. G. 2. Voir à l'appendice le mode de calcul appliqué à l'évaluation du prix de l'unité nutritive dans une denrée alimentaire du bétail. æ LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 465 100 kilogr.., le prix de l’unilé nutritive est encore inférieur à celui qu’il atteint dans tous les autres fourrages que nous lui avons com- parés, en raison de la digestibilité facile de leurs principes hydro- carbonés. C’est seulement lorsque le prix des 100 kilogr. de mé- lasse atteint 7 fr. 25 c. que l’unité nutritive y coûte plus cher que dans la farine de riz, tout en restant égale à celle qu’elle a dans les sons de seigle et de blé. Mais, alors même que l'unilé nutritive dans la mélasse coûte le même prix que dans les autres fourrages, cel aliment conserve une supériorité pour des buts déterminés, parce que les éléments non azotés, comme nous l’avons vu précédemment, sont eux-mêmes su- périeurs, en raison de la forte proportion de sucre qui entre dans leur composition. D’après les données précédentes, chaque consommateur peut se rendre compte des limites dans lesquelles le prix de la mélasse per- met son utilisation économique. Le professeur Märcker examine ensuite la question de savoir s’il est possible à un cultivateur d'alimenter son propre bétail avec les quantités de mélasse correspondant aux poids de betteraves qu’il peut récoller dans son exploitation. On peut, par un simple calcul, dit-il, montrer qu’il en est ainsi. Nous supposerons qu’il existe sur la ferme, par dix jours de terre (2,50), une têle de gros bétail à nourrir avec la mélasse. Chaque surface de 2,50 étant soumise à un assolement quadrienna!, 62*,50 seront, chaque année, plantés en betteraves, et si le rendement en racines est élevé, 40 000 kilogr. à l’hectare par exemple, le cultivateur récoltera sur les 62 ares, 250 quintaux de betteraves. En admettant qu’on retire de la bette- rave 2.50 p. 100 de son poids en mélasse, ces 2,50 fourniront 625 kilogr. de mélasse, qu’une tête de gros bétail aurait, par an, à sa disposition. Cela correspond à 1*,700 de mélasse par jour, quantité qui, en réalité, peut être consommée par elle. Mais on ne récolte pas toujours, en moyenne, 400 quintaux de betteraves à l’hectare; de plus, on ne cultive pas partout un quart de ses terres en betteraves ; de même encore, certains cultivateurs élèvent une tête de gros bétail, par moins de 10 jours (2,50). Sou- vent, dans les grandes exploitations belteravières, on entretient une ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1898. — II, 30 466 ANNALES DE LA: SCIENCE AGRONOMIQUE. tête de bétail par 2 hectares. Dans ce cas, on peut n'avoir alors que 500 kilogr. de mélasse, et si l’on entretient une tête par 2 hectares, on dispose à peine de 1 250 gr. de mélasse par jour et par tête. Ces remarques montrent que c’est seulement dans le cas d’une produc- tion exceptionnelle de betteraves, donnant des rendements élevés, et si l’on n’a qu’un bétail peu nombreux, qu’on peut ne pas arriver à consommer aisément la mélasse retirée des produits de l’exploita- tion. su L’expérience ayant mis complètement en évidence la haute valeur alimentaire de la mélasse, étant admis que la plupart du temps, le cullivateur devra tenir à faire consommer par le bétail la totalité de la mélasse retirée de ses betteraves, il lui faut prendre l’arrange- ment suivant avec la sucrerie à laquelle il vend ses betteraves : De même que chaque planteur retient par 100 quintaux de bette- raves livrées à la sucrerie, 45 à 50 quintaux de résidus de diffusion, il doit se réserver, en plus, 2 quintaux et demi de mélasse ou, en tous cas, la quantité de mélasse que l'usine retirera de ses bettera- ves. Quel est le cultivateur qui commencera? Là est la question. De même qu'aucun planteur n’est embarrassé de retenir la pulpe de ses betteraves, de même, quand il aura constaté les profits que lui donnera l'alimentation à la mélasse, il n’hésitera pas à s’en réserver la propriété. Lorsqu'il en sera ainsi, la question des mélasses disparaîtra d'un coup et la surproduction du sucre se trouvera cadenassée dans une certaine mesure, Seules pâtiront les usines qui retirent le sucre des mélasses. Aujourd’hui déjà, par suite de l’élévation du prix des mé- lasses résultant de son emploi dans l’alimentation (en Allemagne), cette industrie est moins rémunératrice qu'auparavant, mais en tout cas, devant l'intérêt général de l’industrie sucrière, des considéra- tions de cet ordre ne sauraient arrêter. 2. — Mélasse verte ou fourrages mélassiques ? La mélasse doit-elle être employée à l'état brut (mélasse verte) ou associée aux fourrages dans l’alimentation du bétail? Il est incontestable que l'emploi direct de la mélasse verte dans LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 467. l'alimentation des animaux est désagréable, Cette substance est à l’état de masse semi-fluide, poissante, difficile à répartir également entre les animaux ; elle adhère à tous les vases ou objets qu’elle touche ; il faut laver à l’eau chaude les fûts dans lesquels on la con- serve; bref c’est un aliment désagréable à manier. Dans les grandes exploitations, ces inconvénients ne sont pas insurmontables; lors- qu’on a à sa disposition de l’eau chaude ou de la vapeur à discré- tion, son maniement n'offre pas de difficultés, mais, pour le petit cultivateur, ces inconvénients subsistent. C’est pour y obvier qu’on préfère mélanger la mélasse avec les fourrages, procédé qui a, en outre, l'avantage de donner de meilleurs résultats, sans doute à cause de la facilité qu'il offre de mieux répartir la mélasse dans les ralions. Dans les essais d’alimentation que les professeurs Märcker et Albert ont faits à la ferme expérimentale de Lauchstædt, ils ont observé que mélangée soit aux sons, soit à la tourbe, la mélasse a mieux et plus régulièrement agi que là mélasse verte (bien que les différences w’aient pas été considérables), sans doute par suite d’une meilleure division : c’est du moins la raison qui leur a paru expli- quer les différences constatées. Mais, sans même tenir compte de ces différences, Märcker estime que le maniement plus commode de la mélasse associée aux aliments indemnise largement des frais de manipulation. En effet, la mélasse verte doit être transportée et conservée dans des fûts que le culti- vateur: est obligé de se procurer, tandis que les fourrages mélas- siques peuvent être expédiés en vrac ou en sacs; on pèse el on divise aisément la mélasse sous cette forme. On a d’abord préparé le mélange avec des tourteaux de palmes, parce qu’on peut ainsi obtenir un fourrage renfermant 60 p. 100 de mélasse et 40 p. 100 de tourteaux. Ce dernier est principalement employé pour l'alimen- tation des vaches laitières, mais 1l né peut pas s'adapter à toutes les rations ; aussi d'ordinaire préfère-t-on le mélange de 50 kilogr. de sons avec 90 kilogr. de mélasse, le son étant introduit avec avantage dans toutes les rations. ? Récemment, on a fait un mélange de 40 p. 100 de tourteaux de maïs et 60 p.100 de mélasse, les tourteaux de maïs riches-en graisse et en protéine constituant un excellent aliment. Enjin, on a pré- 468 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. paré un mélange de tourbe et de mélasse : 75 p.100 de mélasse et 25 p. 100 de tourbe. Ce mélange contient plus de mélasse qu'aucun autre ; il est très maniable et il n’y a d'autre reproche à lui adresser que celui de son prix. La tourbe mélassée coûte (décembre 1898) 8 fr. les 100 ki- logr. Si l’on compte à 3 fr. 75 c. (les 100 kilogr.) la tourbe fine qui entre dans cet aliment, ce qui est certainement un prix élevé, les 75 kilogr. de mélasse sont payés 7 fr. 06 c., soit 9 fr. 40 c. les 100 kilogr., prix beaucoup trop élevé. Dans les essais de Lauchstædt, faits par Märcker et Albert, l'action de la tourbe mélassée n’a pas différé de celle des sons mélassés, d’où ils concluent que le prix du premier de ces mélanges n’est pas jus- tifié d’après sa valeur alimentaire. Il faut cependant tenir compte, dit-on, des conditions diététiques de la tourbe mélassée, mais Märc- ker ne les a pas constatées: il ne les nie ni ne les affirme, mais de beaucoup de points cependant on lui a signalé ces qualités exceplion- nelles. Enfin, les cossettes desséchées sont un véhicule excellent de la mélasse. On fait le mélange avec 5 à 6 kilogr. de mélasse pour 100 kilogr. de cossettes pressées ; comme 100 kilogr.de betteraves don- nent 45 à 50 kilogr. de cossettes et qu’on y ajoute 2*#,500 de mé- lasse, on obtient des cossettes qui renferment exactement la même quantité de mélasse que 100 kilogr. de betteraves. La composition moyenne des cossettes mélassiques desséchées est la suivante : LEUR SR PE SEE LE AR RATES 8.50 PrUÉCIIE SDAUÉG NI Es ue male ere 8.75 Cellulosé:-Drute 2818847290 80 TE 14.00 Matières :pFasses, RER Enr sietée 0.25 Extrachismon 27016S 2 a EE: 62.00 CENCDFCS "tire mets se Nu se ee 6.50 LORS Se or 100.00 Il faut observer que la protéine brute dans les cossettes mélassi- ques se compose des matières protéiques des cosseltes et des ami- des de la mélasse; ces dernières doivent être déduites et comptées avec les matières hydrocarbonées. Si, à 100 parties de cossettes frai- ches, on ajoute 5 parties de mélasse et qu’on obtienne de ce mé- LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 469 lange 10 parties de cossettes sèches, il faut retrancher, de la matière azotée, 4,5 d’amides, de telle sorte que la cossette sèche renferme : Albumimels (rie 4.25 p. 100 Extractifs non azotés. 66.50 p. 100 en tout. correspondant à 22.5 p. 100 de sucre. 3. — Quelles sont les espèces animales qu’on peut alimenter le mieux avec la mélasse? Pour l’engraissement de Lous les animaux, la mélasse a une valeur maxima, à la condition sine qué non que la ration contienne des quantités suffisantes de matières azotées. Bœufs à l'engrais. — Par 1 000kilogr., poids vif, en été, 4kilogr. ; en hiver jusqu’à 6 kilogr., mais il faut être circonspect dans lappli- cation de cette dose maximum. Dans leurs essais, Märcker et Albert, lorsque cette dose maximum de 6 kilogr. a été atteinte, ont observé une sorte de ramollissement de l’ossature qui ne pouvait être altri- buée selon eux qu’à la mélasse ; une des bêtes en expérience à péri. La cause en est, d’après Märcker, dans la pauvreté en acide phos- phorique et en chaux de la mélasse et aussi dans la formation, par le sucre qu’elle renferme, d’une certaine quantité d'acides dans le tube digestif, cette acidité abaissant l’alcalinité du sang et pouvant dissoudre le phosphate de chaux des os’. Du jour où aux doses élevées de mélasse on a, sur le conseil de Märcker, ajouté à la ration, 50 gr. de phosphate précipité par tête de bétail, il ne s’est plus produit un seul cas de ramollissement des os, même avec les doses extrêmes de mélasse. Il est donc prudent, lorsqu'on administre plus de 4 kilogr. de mélasse (par 1 000 kilogr. de poids vif) à un bœuf adulte et, dans tous les cas où il s’agit d’ani- maux en croissance, d'ajouter 100 grammes de phosphate bibasique à la ration, par 1 000 kilogr. de poids vif. Cette remarque est assez importante, selon Märcker, pour être prise en considération d’une manière générale par les éleveurs". | 1. Je crois devoir faire des réserves au sujet de celte interprétalion, de même qu'en ce qui regarde l'assimilation des phosphates minéraux ajoutés à la ration. Des expériences décisives seraient nécessaires pour résoudre ces deux questions. L. G. 410 . ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Moulons à l’engrais. — On peut donner sans crainte 250 gr. de mélasse aux moutons à l’engrais et 125 gr. par tête, aux brebis mères. On ne conseille pas l'emploi de la mélasse pour les brebis en ges- tation. SES Porcs à l'engrais. — La valeur diététique de la tourbe mélassique dans la ration du pore à l’engrais ne peut être mise en doute : les fèces du porc soumis à ce régime ont une consistance et une régu- larité qu’elles ne possèdent que sous l'influence de la meilleure ali- mentation. Dans une porcherie alimentée à la tourbe mélassique, l'odeur bu- tyrique désagréable, bien connue, des fèces du porc, n’existe pas, soit qu'il ne se forme pas d’acide butyrique dans le tube digestif de l’animal, soit que les émanalions odorantes des fèces soient absorbées par la tourbe. Quoi qu’il en soit, l’action favorable de la tourbe mé- lassique est manifeste. On peut donner au porc 5 kilogr. de tourbe mélassique et même un peu plus, par 1 000 kilogr. de poids vif. Chevaux. — L'alimentation à la mélasse est tout à fait recom- mandable pour les animaux de trait, et particulièrement pour les chevaux. L'action excellente de la mélasse pour les animaux de travail s'explique aisément. Les recherches récentes ont montré que le sucre est un aliment qui rend l’organisme capable d’efforts inten- sifs et durables et qui, dans un travail prolongé, entretient régulière- ment l'énergie. Notre but, dit Märcker, n’est pas de traiter ce sujet, mais nous ne pouvons passer sous silence l'influence d’une ration de sucre sur l’accroissement de l’énergie observé récemment chez le soldat. On a fait l’expérience que la faculté de marche est accrue chez les troupiers par la consommation du sucre et que cette der- nière semble, avant tout, contribuer à la durée de l'énergie chez eux. De même s'expliquent les excellents résultats produits par la mélasse chez les animaux de trait. Chevaux de trait. — Chez les chevaux, le fourrage mélassé est également excellent, et Märcker en recommande expressément Pemploi, principalement celui de la tourbe mélassique. On en donne LE SUCRE.ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 471 1%5,500 à 2,500, par jour, ce qui correspond à 1,195 et 1*6,870 de mélasse. Les chevaux qui reçoivent ces doses, demeurent dans le meilleur état el conservent une grande énergie de travail. Ils se distinguent avant tout par un poil lisse et brillant, caractéristique du cheval en parfait état de santé, et cela de façon telle qu’on ne saurait trop recommander l'introduction de la mélasse dans la ration du cheval. La tourbe mélassique a cela de particulièrement recommandable qu’elle agit très favorablement pour préserver le cheval de coliques. Cette indication a élé si souvent donnée, dit Märcker, qu'il n’y a pas de doute à avoir à ce sujet, mais il reste à savoir si c’est à la tourbe ou à la mélasse que cette action favo- rable doit être attribuée. C’est à cette dernière substance qu’il paraît le plus vraisemblable à Märcker de rapporter l'effet produit, étant donnée la propriété stimulante de la mélasse sur les fonctions di- gestives. S'il en était ainsi, le son mélassique pourrait aussi bien que la tourbe être employé à alimentation du cheval. En tous cas, la tourbe mélassique agit très favorablement dans la direction que nous venons d'indiquer. Bœufs de travail. — Les bœufs de travail doivent recevoir 145,500 à 2 kilogr. de mélasse par 1 000 kilogr. de poids vif. Ils sup- portent et utilisent ces doses ; ilss’entretiennent dans l’état le meilleur, ce qu’on constate en comparant les bœufs de travail, aprèsles cultures ou les transports de betteraves, avec ceux des exploitations dont les animaux ne reçoivent pas de mélasse : ceux-ci sont maigres, en mauvais état. Un animal de trait auquel on demande de forts tra- vaux a besoin, avant tout, de trouver dans son alimentation des hydrates de carbone facilement transformables, tel que le sucre que leur offre la mélasse. Vaches laitières. — La mélasse leur convient pour produire et maintenir un bon état du corps, cependant, il faut éviter de Pappli- quer aux vaches près du vêlage, la parturition prématurée s'étant produite chezles vaches soumises à cette alimentation. Ilne faut pas davantage donner de mélasse aux vaches aussi longtemps qu’elles allaitent leur veau. Le petit lait des vaches alimentées à la mélasse 472 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. est, au contraire, très bien consommé par les veaux plus âgés. Märcker admet que la dose de mélasse chez les vaches ne doit pas dépasser 4*6,125 par tête. Il faut ajouter que le lait de vaches alimentées à la mélasse donne un beurre, dit-on, de qualité supérieure. Bemarque. — I est nécessaire de procéder avec plus de précau- tions lorsqu'on donne des mélasses très riches en sels que lorsque ce produit en est pauvre. La mélasse des raffineries de sucre et celle des usines où l’on emploie la défécation à la strontiane se distin- guent par une pauvreté particulière en principes salins ; par suite, elles sont plus riches en sucre et possèdent une plus grande valeur alimentaire que la mélasse provenant du sucre brut, dont la compo- sition peut d’ailleurs varier notablement suivant les méthodes de traitement. On ne doit pas négliger de faire doser les cendres dans les mélasses qu'on veut employer, afin de savoir si l’on doit apporter quelque at- tenlion particulière sur ce point, dans l'administration dela mélasse aux animaux. 4. — Est-il préférable d'acheter les fourrages mélassiques plutôt que de les préparer à la ferme ? Dans les fourrages mélassiques, la mélasse se paie naturellement plus cher que dans les mélasses vertes, puisque le fabricant de ces mélanges doit à la fois supporter les frais de fabrication et réaliser un bénéfice qu’on ne peut lui contester. | Les mélanges mélassiques sont d’un usage très commode, mais leur prix est très supérieur à celui auquel ils reviendraient au culli- vateur qui les préparerait lui-même. Cependant, cette préparation (à la ferme) étant très peu pratique, le mélange de mélasse aux fourrages qu’on aurait choisis devrait de préférence se faire dans les fabriques pour le compte des produc- teurs de betteraves qui, dans leurs marchés, auraient retenu la mé- lasse. Ce système commence à s’introduire dans les habitudes. Le mélange de mélasse avec les autres aliments n’exige pas d'appareils compliqués, un grand bac cylindrique muni d’un puissant agitateur (comme ceux destinés à la trempe) suffit. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 473 On chauffe la mélasse à 75° ou 80° centigrades, température à laquelle elle devient fluide, et on y introduit les quantités de four- rage qu'on y veut incorporer, 90 p. 100 de sons, par exemple. La sucrerie de Buckendorf opère ainsi, comme stalion centrale, les mé- langes pour un grand nombre de sucreries du voisinage. Cette orga- nisation doit se généraliser, ce qui multiplierait l'emploi si avanta- geux de la mélasse dans l'alimentation. 5. — Le sucre dans l'alimentation du bétail (utilisation des produits secondaires du sucre). En 1885 déjà, lorsque le prix du sucre était tombé très bas, Märcker et de Zimmermann ont fait des essais d’alimentalion afin de déterminer comment les produits bruts (sucre de 3° ou 4 jets) étaient utilisés par les animaux. Ils constatèrent qu'un kilogramme de sucre ajouté à une bonne ralion alimentaire du pore a produit une augmentation de 100 kilogr. de poids vif chez deux pores, tandis que celle qui résultait de la ration sans sucre n’était que de 61 kilogr. (essais d’une durée d’un mois : 14 janvier au 16 février). Il résulte de là que 500 gr. de sucre avaient accru le poids vif du porc de 05,700 par jour. Appliquée aux moutons et aux veaux, la ration sucrée avait moins bien profité ; ces derniers, en particulier, ne supportaient pas des doses même faibles de sucre ajoutées à leur ration. Au contraire, l'alimentation au sucre a été particulièrement avanta- geuse chez le porc ; en effet, le prix de 100 kilogr. de poids vif de pore, à celte époque (1885), étant de 125 fr., le quintal de sucre se trouvait payé à raison de 45 fr.; au prix actuel de 100 fr. les 100 kilogr. de poids vif, le sucre ne serait payé que 36 fr. %5 c. Ces essais d'alimentation ont été repris récemment par Märcker et Albert : ils ont donné des résultats dignes d’être notés. (Voir les détails à lappendice.) Comparativement à l'administration d’une ration d’orge concassé, de pommes de terre et de pelit Jait dans une proportion normale, on a employé la même ration addilionnée de sucre sans résultat bien sensible. 474 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. L'augmentation de 4 porcs soumis à ces deux régimes a été, en six semaines, le suivant : Ration normale : 96 kilogr., soit, par Jour et par têle, une aug- mentation de 0"5,570. Ration au sucre : 101 kilogr., soit, par jour et par têle, une aug- mentation de 0,600. Ces deux écarts étaient normaux et n'avaient rien d’exceptionnel, car on compte d'ordinaire une augmentation de poids vif de 500 à 625 gr. par jour pour le porc à l'engrais. On a alors augmenté un peu la teneur en matières protéiques des rations : les accroissements en quatre semaines des 4 pores ont été les suivants : Ration normale : 62 kilogr., soit, par jour et par tête, 0*5,550. Ration au sucre : 110"8,8, soit, par jour et par tête, 1 kilogr. Cette augmentation de 1 kilogr. par jour est si extraordinaire, dit Mürcker, qu’elle a fait entrer la question de l’alimentation du porc avec les bas produits du sucre dans une voie nouvelle. Il va de soi que, pour recevoir cette application, le sucre employé devrait être dégrevé d'impôt ; s’il en était ainsi, on se procurerait, de 20 à 21 fr. les 100 kilogr., les sucres de 5° et 4° jets, qui seraient un fourrage de haute valeur pour l’alimentation du porc. On n’en est pas encore là, mais la solution est d’une si grande importance pour l’agriculture et pour l’industrie, qu’il faut la pour- suivre très sérieusement. Si les excellents effets du sucre dans l’alimentation se confirment, ce dont on ne saurait douter, la sucrerie aura à examiner si elle n'aurait pas intérêl à préparer de préférence des sucres bruts et à les livrer à l’agriculture, au lieu de séparer le sucre pur de la mé- lasse. La dénaturation de ces produits, ajoute en terminant Märeker, qui serait naturellement nécessaire pour les livrer à l’agricullure, ne présenterait pas la moindre difficullé. On pourrait recourir à une in- terversion par l’addition d’une petite quantité d’acide; afin d’empê- cher l’extraction du sucre cristallisable des derniers jets, et faire le mélange immédiatement avec un fourrage convenable. C’est chose à voir plus lard. : LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 479 En attendant, nous nous trouvons en présence d’une question tout à fait neuve, si l’action extraordinairement favorable du sucre dans l'alimentation se confirme, ce qui ne peut faire doute. APPENDICE 41. — Calcul de la valeur de l’unité nutritive d’un fourrage. Pour établir la valeur argent d’un aliment, la plupart des agro- nomes allemands partent de la convention suivante, proposée par le professeur J. Kühn, de Halle. Une ration doit contenir, au minimum, une partie en poids de pro- téine digestible pour six parties de substances hydrocarbonées diges- libles, ce qui s’exprime par la relation nutritive de 1/6. On considère dans cette convention qu’un kilogr. de matière protéique digestible équivaut à six parties au moins des éléments non azotés digeslibles du fourrage qu’on donne à l’animal. (Nos expériences sur l'alimentation du cheval de trait nous ont con- duit, M. Alekan et moi, à démontrer que la relation nutritive peut varier dans des limites bien plus élevées : 1/13 et 1/22 (voir p. 457). Mais ce n’est pas ici le lieu de discuter les modifications qui pour- raient être apportées au calcul du professeur J. Kühn, en partant de nos essais d’alimentation.) Dans la convention proposée par M.J. Kühn, on admet pour le calcul argent d’une denrée alimentaire, qué 1 kilogr. de protéine digestible doit être compté au prix de 6 kilogr. de substances hydrocarbonées dans lesquelles entrent 80 p. 100 de la cellu- lose digestible et les composés azotés autres que lalbumime (amides, etc.). La graisse est estimée d’après sa teneur en substance oxydable. Le pouvoir calorique de la graisse étant égal à 2.44 fois celui de l’amidon, la valeur de la graisse sera donc, par rapport à celle de lamidon, comme 2.44 est à 1. (Ce rapport est un maximum.) Dans l’engraissement intensif, la malière grasse des substances oléagi- 476 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. neuses et celle de leurs résidus (tourteaux) devra être évaluée plus haut. J. Kühn propose de l’établir en partant du cours commercial de l'huile de colza. La valeur nutritive (argent) des trois groupes de principes s’éla- blit donc sur les bases suivantes : Î [er] Matière protéique digestible . Matière grasse digestible . Matière hydrocarbonée digestible. Î ] On est convenu de prendre comme unité, dansles calculs, le poids des substances hydrocarbonées : On a ainsi : {1 kilogr, amidon, sucre, ete. . — une unité nutritive, LORNORT. ETAISSE. . peu: UIMIeS, l'ENOST DEUIEINE, "#02 + = (0 MRES, Le professeur J. Kühn a proposé de prendre le foin moyen de bonne qualité comme terme de comparaison de l'établissement de la valeur argent d’une denrée alimentaire du bétail. Voici comment, en partant de cette base, il établit la valeur de l'unité nutritive de foin. Comme terme de comparaison, j'inscris les coefficients de di- geslibilité en regard de la teneur du foin en principes nutritifs : Digestibilité FOIN. Pour 1C0. p. 100. SUDSTANCEISC CCE LÉ RUE 85.7 » Protéine brutes .U. ut 264 10.» 57 Matière grasse brute . . . . . 2,9 53 Hydrpcarbonales er 0e 2182 64 Cellul0SC brute PRE EME 25.06 60 D’après ces données, on calcule aisément que 100 kilogr. de bon foin moyen, renferment 5,700 d'éléments azotés digestibles, dont il faut déduire les matières azotées autres que la protéime : amides, ete, qui entrent pour 12.8 p. 100 dans la teneur en protéine brute, ce qui correspond pour le foin à 1.98 : 100 kilogr. de foin contiennent donc seulement 5,7 — 1,28 — 4*6,42 de protéine réellement digestible. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 4717 La teneur en matière grasse digestible est indiquée par la relation suivante : 2.9 X 53 — 1hsUr 100 15,54. On trouve de même que 100 kilogr. de foin renferment 26*,37 de substance hydrocarbonée (extractifs non azotés) et 15*6,36 de cellu- lose digestible, dont 80 p. 100 seulement utilisés par l’animal*. J. Kübn établit le calcul du nombre d’unités digestibles que four- nissent 100 kilogr. de foin de la manière suivante : 4K5,42 de protéine digestible X 6. . . . . — 26.52 unités nutritives. 1 54 de matière grasse digestible X 2.4. — 3.70 — — 26 37 de matière hydrocarbonée digestible . 12 69 de cellulose utilisable. . . . . . . } — 39.94 — — 1 28 de matière azotée non protéique. . 100 kilogr. de foin renferment donc : 70.16 unilés nutritives. En divisant le prix de 100 kilogr. de foin par le nombre trouvé d’unités nutritives, on a la valeur argent d’une unité digestible. Valeur de l’unité nutritive. Prix du foin : 3! 50° les 100 kilogr. 0f050 = 4 5» — 0 057 2 Ep — 0 071 — 6 » — 0 086 Le même mode de calcul, appliqué aux différentes denrées alimen- taires, fait connaître, d’après les cours du marché, le prix de revient de l’unité digestible dans chacune d’elles. Ce mode de calcul empirique, malgré ses imperfections, rend de réels services dans le calcul du prix des rations. 1. Une partie de la cellulose digestible échappe à l'assimilation par suite de sa trans- formation dans l'appareil digestif en divers produits non utilisés : gaz acide carbo- nique, méthane, etc. C'est une des causes de la valeur relativement faible du foin pour l'alimentation du cheval de trait, L. G. 478 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 2. — Expériences sur l'alimentation au sucre (porcs). Au moment de mettre sous presse, Je reçois communication d’une note du professeur Albert concernant l'expérience dont je viens de donaer le résumé, d’après le mémoire de M. Märcker. J'en traduis les passages essentiels : L'ère des essais d'alimentation à la mélasse est close, dit le professeur Albert. Les résultats sont définitivement acquis. Dans tous les cas, l’ali- mentation à la mélasse sous diverses formes s’est montrée rémunératrice. Les mélanges sont préférables à la mélasse verte. La tourbe mélassique n’est pas supérieure aux autres mélanges. Albert pose en principe que chaque quintal de mélasse qui n’est pas consommé dans l'alimentation ne remplit pas son devoir (seinen Beruf verfehlt hat). Les essais au sucre pour l’engraissement des pores remontent à six ou sept ans, tous ont été très favorables. Les expériences faites à Lauch- stædt ont montré que la relation nutritive peut être beaucoup moins étroite qu'on ne l’admettait jusqu'ici. C’est ce que M. Alekan et moi avons égale- ment constaté dans nos expériences sur le cheval de trait. Les expériences de Märcker et Albert à Lauchstædt ont porté sur les deux rations suivantes : Porcs. 1% ration : par 1 000 kilogr. poids vif : 60 kilogr. pommes de terre. . . | | Contenant : 70 litres petit-lait. . . . . . . ? 5 kilogr. matières protéiques. 174:,750 orge concassé. . . . . | 28 kilogr. matières non azotées. 1 HT Augmentation journalière : 0K,500 par tête. 2 ration : par 1 000 kilogr. poids vif : 60 kilogr. pommes de terre. 70 litres petit-lait. 5. 2:42 plus mélange à parties égales d'orge concassé et de sucre de 3° jet : 17k5,75 orge concassé . 12 kilogr. sucre . Contenant : 5 kilogr. matières protéiques. 40 kilogr. matières non azotées... ol ad LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 479 Les essais ont été faits sur de jeunes porcs du poids de 50 à 55 kilo- grammes. Augmentation par jour dû à la ration] . . . . . . . KE, 514 — par jour dû à la ration Il au sucre . . . 0k,957 À la fin des essais d'alimentation, les résultats ont été légèrement troublés par l’état de maturation des animaux des deux séries : les aug- mentalions journalières furent à ce moment : Rativn ngrmale. . . . . . . . 0K5,562 RatiOnStCneMe PAMRE. EME 0K3,825 Cela tient à ce que les pores de la 2 série avaient été mürs bien plus tôt que ceux de la première et que les deux lots devaient être abattus en même temps. Le kilogramme de poids vif du porc valant 1 fr. 125, le quintal mé- trique de sucre se trouve payé 52 fr. 70 c. pour le commencement de l’engraissement et si l’on prolonge beaucoup l’engraissement, 23 fr. 375 seulement : il valait sur le marché 20 à 21 fr. 25 €. L'application du sucre à l'alimentation du porc permettrait à l’Alle- magne, dit le professeur Albert, de suffire à sa consommation en pores et préviendrait en même temps une crise sucrière. Le sucre dénaturé doit done entrer dans l’alimentation du pore. La mélasse excite l’appétit chez les animaux. La qualité de ces viandes n’est en aucune façon influencée défavorable- ment par l’introduction de la mélasse dans la ration (bœuf). Chez le pore, l'influence de la mélasse sur la viande est tout à fait favorable, Quelques particularités sont à noter : Les porcs au régime mélassique boivent beaucoup plus qu'à l'ordinaire ; il faut qu’ils puissent étancher leur soif. (Nous avons constaté l'inverse chez le cheval, voir p. 459.) On ne doit pas donner de sel en même temps que la mélasse qui en renferme assez déjà. Cette observation s’applique particulièrement aux mou:ons. [I convient d'ajouter à la ration une petite dose de chaux : le professeur Albert recommande 23 grammes de phosphate de chaux et 25 grammes de craie précipitée. C’est par économie surtout qu’Albert re- commande de donner moitié en craie précipitée; avec celte précaution, rien, dit-il, à redouter de l'emploi de la mélasse. L. G. 480 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 3. — La sucrerie et les fourrages mélassiques. Extrait d’une lettre à la Chambre d’agriculture de Silésie, de de M. V. Strube: La fabrication des tourteaux mélassiques, date, à Sallschütz, de 1895. Elle a été provoquée par la cherté des farineux. Les premiers mélanges ont été faits avec des mélasses à 48 p. 100 de sucre, à partie égale avec les tourteaux, 50/50. Plus tard, à 40 parties de tourteaux on a ajouté 60 parties de mélasse. l'addition de mélasse à d’autres fourrages a été abandonnée après des essais qui ont donné une absorption insuffisante de mélasse. Le mélange de tourteaux (palme) à la mélasse, mis dans un sac et con- servé dans un lieu sec n’a subi aucune altération au bout de cinq mois. Le tourteau mélassé à 60 p. 100 présente la composition suivante : HAUstE ne LEE 21.40 Matière azotée protéique . . 11.06 Matière grasse... 0.73 Extractifs non azotés . . . 53.50 dont 28 8 p. 100 de sucre. Cellulose brute. . . . . . 6.36 CÉDUTOS RSR EN RTE 6.95 Au commencement de 1896, a commencé la fabrication de la tourbe mélassique. Tourbe de Poméranie de 1° qualité. 20 kilogr. de tourbe ab- sorbent complètement 80 kilogr. de mélasse verte. Ce mélange s’ensache et se conserve très bien. La tourbe mélassique contient de 38 à 40 p. 100 de sucre. La tourbe employée renferme 1.54 p. 400 d’azote qui n’est sans doute pas assimilable, pour la plus grande partie au moins. Le développement de l'emploi de la mélasse a été beaucoup plus rapide que ne le pensait la sucrerie de Sallschütz. En 1895, on a consommé dans le ressort de cette sucrerie 4 653 quin- taux métriques de tourteaux mélassiques. Sur d’autres points, on a expé- dié-en 1895: Tourteaux mélassiques . . . 2 850 quintaux métriques. Tourbe mélassique. . . . . 6 000 Tr Le prix du tourteau mélassique a été de 8 fr. 12 c. les 100 kilogr., celui de la tourbe mélassique 4 fr. 05 ec. les 400 kilogr., sur wagons sta- tion de Guhrau. LE SUCRE ET L'ALIMENTATION DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. 481 L'année suivante, l’agriculture a consommé 4825 quintaux métriques de tourbe mélassique et 912 quintaux métriques de tourteaux mélas- siques. Dès la seconde année, toute la production en mélasse de la fabrique de Guhrau avait été employée pour l’alimentation du bétail. Résultats de l'emploi de la mélasse dans l'alimentation du bétail en 1895-1896, à la sucrerie de Guhrau Chevaux. — Tous les chevaux de l'exploitation reçoivent leur ration ordinaire d'avoine et de féveroles, dans laquelle 500 grammes du mé- lange sont remplacés par 1 kilogr. de tourbe mélassique. Au bout de trois jours, {ous les chevaux acceptaient.le nouvel aliment ; au bout de huit jours, tous s’en montraient avides, et il arriva un jour qu'ils mangèrent mal parce que l'addition de tourbe mélassique avait été omise. Les mêmes faits ont été observés dans les régiments de cavalerie : on a également constaté, comme à la sucrerie, que les coliques devenaient rares et que les chevaux qui y étaient sujets se trouvaient beaucoup mieux. Les poulains reçoivent dans leur ration, composée de tourteaux, de chenevis, de petit-lait et de carottes, 500 gr. à 1 kilogr. de tourbe mé- lassique. Sous l'influence du régime à la mélasse, le poil's’est partout amélioré. Les chevaux de culture ont le poil lisse, beaucoup d’appétit; pendant Jes durs travaux de charrois de betteraves à l'automne et en hiver, on a porté à 15,500 la dose de mélasse. Les coliques graves ne se sont pas manifestées depuis deux ans, un seul cas léger, qui a cédé en une heure, s’est produit. Par suite de ce bon résultat, on donne la tourbe mélassique aux che- vaux de selle et de voiture de la sucrerie. Bœufs de trait. — Après avoir constaté les bons effets des tourteaux mélassés, on a commencé à donner aux bœufs 1 kilogr. de tourbe mélas- sique. La ration des bœufs est composée de tourteaux de coton moulus, de bon foin, mélangés à des cossettes fermentées additionnées de trèfle et de décolletages de betteraves. On a progressivement porté à 2,500 de tourbe mélassique l'addition à la ration, par jour et par tête. A cette dose, la tourbe a produit quelques troubles digestifs : on a ramené la quantité de tourbe mélassique à 2 ki- logr. Les bœufs ont une allure excellente à la herse et à la charrue, comme à la voiture. Le poil est bien meilleur qu'antérieurement. Vaches lailières. — Les vaches de l’étable reçoivent, depuis 1896, 900 grammes de tourteaux de palme mélassique par tête ; la tourbe, à la dose de 1 kilogr., comme le tourteau à même dose, par jour, a provoqué quelques diarrhées. à 7 SVT RCA "à à MATR PTT + 482 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Depuis le mois de novembre, des vaches mises à l’étable après le vé- lage, ont été installées à part; elles reçoivent depuis cette époque (2 ans), en addition au fourrage brut, 4*,250 de farines de coton et 2 kilogr. de tourbe mélassique. La traite et le croît ont été particulièrement satisfai- sants à ce régime et les animaux sont en parfait état. Trois vaches pleines ont reçu par tête 500 grammes de tourbe mélas- sique, sans inconvénient. Les éleveurs qui ne laissent pas saillir leurs vaches, auxquelles ils ne demandent que du lait et plus tard de l’engraissement, trouveront, dans la tourbe mélassique, un excellent aliment : ceux qui, au contraire, font de l'élevage devront être aussi attentifs, du côté de la tourbe que de celui des farines de coton. Jeune bétail. — Le bétail de 2 à 3 ans qu'on veut engraisser reçoit avec profit jusqu'à 44,500 de tourbe mélassique, par jour et par tête. 80 têtes de jeunes bovins (2 à 3 ans), recevaient par tête 1 kilogr. de tourteaux mélassiques, avec de la farine de coton, des cossettes ou de la tourbe mélassique. L'addition de mélasse aux feuilles de betteraves n’est pas convenable, en raison de la trop grande quantité de sels que renferme cette ration, mais la tourbe diminue les cas de diarrhée ; — dose : 250 à 350 grammes de fourrage mélassique pour les jeunes. : CONCLUSION De l’ensemble des faits consignés dans les pages précédentes ressort très nettement la haute valeur alimentaire du sucre et des sous-pro- duits, mélasse, etc. Les efforts de tous : consommateurs, producteurs, éleveurs, doivent donc tendre à oblenir des pouvoirs publics une réforme aussi libérale que possible du régime fiscal auquel sont soumis le sucre et ses sous-produits. La mélasse destinée à l’alimentation du bétail devrait être exemp- tée de tout impôt et, dans tous les cas, la réglementation de 1897 concernant sa livraison aux éleveurs doit être débarrassée des exi- gences et des formalités qui s’opposent à l'introduction de ce pré- cieux aliment dans le régime des animaux. Paris, le 4° mars 1899. LPS ED ————— TABLE DES MATIÈRES DU TOME DEUXIÈME (1898) E. Rousseaux. — Études sur la vinification dans le canton de Neu- châtel, faites aux vendanges de 1897 RU ES à Pagnoul. — Observation relative au dosage des matières a dansries eaux: … . LEE ÉEES -— Quelques recherches anne aux matières ie 1e A. Müntz, Ch. Durand et E. Milliau. — Falsifications des graisses industrielles et comestibles. — Procédés à … pour les re- connaître . ; : L. Grandeau. — re cree Cote tee sur É Saba - et la consommation des céréales alimentaires dans le monde D' Kellner. — Recherches sur les échanges d'énergie et leurs rap- ports avec les échanges nutritifs chez le bœuf adulte à la ration d'entretien. Traduit de l’allemand par M. A. COUTURIER . . . . J. Vilbouchevitch. — Encore un salt-bush . Vincent. — Étude sur l'absorption des dissolutions nutritives par le grain de blé et son influence sur la germination. Kellner et Kohler. — Recherches sur la consommation d’ re et d'énergie des bœufs adultes à l’engrais. Traduit de l’allemand par MA. COUTURIER, °°. RTE D' Wollny. — La décomposition des iieres ones et 1. formes d’humus dans leurs rapports avec l’agriculture. E.-W. Hilgard, R.-H. Loughridge, J. Burtt Davy, E.-J. Wick- son, À.-B. Leckenby et Ch.-H. Shinn. — Résistance au salant et autres sujets. Suite des Études sur les terrains salants de la Californie. Résumé par J. ViLBOUCHEVITCH. me L. Grandeau. — Le sucre et l'alimentation de True # si ani- EU DNS PRE PET 2 Nancy, impr. Berger-Levrault et Cie, Pages. 399 401 432 LISE c+ susanite D: (2 gd 33 His PUR auf li | York Botanical Garden Libra New © # ©O À Ÿ (eh: © *: LN ee NI 2 (