F42 Dr я; ат iy "9 C sa PE лд, POL d D pre cT DR ART ESS УКЫЛА, бн: аре و‎ AM Tr RP TES ч aet De: ^ у © Эм PS 79 С; 3 ж K >з dae ^ Se ` een х Si = = 3 v. LES Las an ET а > z. - x st T 7 : s Ep 5 it Ran? اک‎ P 0 < " м Fae 2 - Q we g ^ бә» 2 f Pr P ui dos a AES Du ret ea om D EE "dp e. e کو جک‎ 6 5 2и Sie = c ‹ eS es cx a | — оу. QA . | ANNALES É LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE - | du département | | | DE MAINE ET LOIRE | 4 Ф | | 2e ANNÉE. — £858 سس‎ À GO — —— ANGERS | IMPRIMERIE DE COSNIER ET LACHESE CHAUSSEE SAINT-PIERRE , 13 е Ф X 2 K À 1859 S * C Yy ANNALES DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE du département DE MAINE ET LOIRE RATTAN: THOR А. t] ЯЯТО ТЯ FAAM Od ANNALES DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE du département DE MAINE ET LOIRE 3° ANNÉE. — 1858 IMPRIMERIE DE COSNIER ET LACHESE CHAUSSEE SAINT-PIERRE , 13 1859 SOCIETE LINNEENNE DÉPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE. BUREAU. MM. Soranp (Aimé de), président. Joannis (Léon de), vice-président. MABILLE , secrétaire- général. Farce (Emile), secrétaire. Conrapes (Edmond de), archiviste-trésorier. COMMISSION D'ADMINISTRATION (1). MM. Lacaëse (Adolphe). MoxrnEurL (Jules de). COMMISSION DE RÉDACTION. MM. LEMARCHAND. Vincetor (l'abbé). MEMBRES TITULAIRES. MM. Ахисхё (Aimé d’), ancien officier. Ахисҳё (Aimé d^), lieutenant de louveterie. ANDIGNÉ DE Mayneur (comte d’), maire du Lion-d' Angers. Banac (Raoul de). BELLEUVRE (Paul). Béraunière (comte de la), Bram (Frédéric), préparateur du cours d'histoire naturelle à l'école d'enseignement supérieur. (1) Les membres du bureau font également partie des commissions d'administra- tion et de rédaction. Ш MM. BECLARD (Philippe), avocat à la Cour impériale. Bzavier (Aimé), ingénieur des mines. Bourmonr (Lonis, comte de). Bricuer (Paul), avocat. Brisser, ancien gouverneur de Mayotte. Brunetiire (Charles). (HENET (l'abbé), chanoine titulaire du chapitre Saint-Maurice d'Angers. CHENUAU; juge au tribunal civil de premiere instance d'Angers. CorsuiN (Ernest, comte de). Contapes (Edmond de). Cosnter (Léon), imprimeur-libraire. Cumoxr (Vte Arthur de), rédact. en chef del Union de / Ouest. Desrais (Cyprien), négociant. DeLaLaANDE (Frédéric), avocat. DELHOMEL , avocat. EnaAurT, docteur en médecine. Farce-(Emile), docteur en médecine, directeur de l'Ecole d'enseignement supérieur. (rAIGNARD (Charles), maire de Marcé. Grav (Charles), agronome. (тпЁвтх—©ноплЁ (Lucien de). Guérin (Paul), avocat. (rum ory (aîné), président de la Société industrielle d'Angers. membre de plusieurs Sociétés savantes. Houpan (Eugene d’), membre de plusieurs sociétés savantes. Joannis (Léon de), ancien officier de marine. Lacnèse (Adolphe) , docteur en médecine. Lacnèse (Paul), imprimeur-libraire. Lainé (Eugene), imprimeur-libraire. LAREVELLIÈRE (Ossian), membre de plusieurs Sociétés savantes. ` [окто ре Barny, avocat. Laxpreau (baron du). Las-Cases (comte de), membre du Corps législatif. LeMARCHAND, conservateur-adjoint de la Bibliothèque de la ville d'Angers. Leroy (André), horticulteur, président du Comice horticole de Maine et Loire. ММ. ММ. ill Mamie, docteur en médecine. Merivier, proeureur-général près la Cour impériale d'Angers. Miter, ancien président du Comice horticole. MoxrnEviL (Jules de), membre de plusieurs sociétés savantes. Pavie (Victor). PirasTRE (Gustave), avocat. Prévosr (Emile), avocat à la Cour impériale. Pn£AULX (marquis de). Romans (baron de). Saint-Genys (marquis de). Ѕоглҳр (Aimé de), membre de plusieurs Sociétés savantes. SorAxp (Théobald de), substitut du procureur-général. 'Tuovis (Urbain), maire de la Meignanne. Vezins (baron de). VizLesois (comte de). VixceLor (l'abbé), chanoine honoraire, directeur de la pension Saint-Julien. MEMBRES TITULAIRES NON RESIDANTS. Acuarp, docteur en médecine, à Thouarcé. ACKERMANN, négociant, à ӨҢЕ Влоротх (l'abbé), aumónier des Incurables de Baugé. Bercer (Eugène), sous-chef du personnel au ministère de l'intérieur. BERNARD pu Port, agronome, à Mire. Bopanp (de), agronome à Saint-Clément, prés Craon. Briau, notaire, à Bécon. Briav, docteur en médecine, bibliothécaire de l'Académie de médecine. Cespron—Laveau, agronome , à Cholet. Courrier (jeune), directeur du cabinet d'histoire naturelle de Saumur. Crocnarp (de), à Milon. Desrats (Auguste), docteur en médecine, à Morannes. DrLAGENEVRAYE , chimiste. Decocne, conservateur du cabinet d'histoire naturelle, Drover, maire de Morannes. Dumas (Jules), pharmacien, à Limoges. IV MM. MM. Duseiexeur, de Brest, membre de plusieurs sociétés savantes. FovovET, docteur en médecine, membre de plusieurs sociétés savantes, à Vannes, Guitter (l'abbé), professeur d'histoire naturelle à l'institution de Combrée. GvirLov , administrateur de la caisse d'épargne de Cholet. Harana, ancien professeur de réthorique à Saint-Clément, près Craon. Hame (Victor), chef de division au ministère des cultes. Lampert (Paul), docteur en médecine. Lacnorx (de), desservant de Saint-Romain-sur- Vienne. Le Gris (Ludovic), membre du conseil d'arrondissement. Меміѓке (Prosper), médecin en chef de l'institution des Sourds- Muets, à Paris. Mester, docteur en médecine, à Saint-Georges-sur-Loire. Ragoux, docteur en médecine, à Saint-Florent-le-Vieil. Rocnarp (l'abbé), aumónier du collége de Saumur. horaxp, ingénieur civil, à la Ferté-sous- Jouarre. SOUBEIRAN (Léon), licencié és sciences naturelles. TovProrrE (Gustave), lépidoptériste. TrouizLarD (Charles), banquier, à Saumur. VIGER, agronome. MEMBRES CORRESPONDANTS ADMIS DEPUIS LA PUBLICATION DU DEUXIÈME VOLUME. ВовтЕввЕ, professeur de chimie à l'Ecole d'enseignement supérieur de Nantes. Bonn, directeur de l'Ecole d'agriculture de Rennes. Durocuer, professeur de minéralogie et de géologie à l'Ecole d'enseignement supérieur de Rennes. FLourexs, membre de l'Institut. Hazévy, membre de l'Institut. LATERRADE, directeur de la Société Linnéenne de Bordeaux. Maracurri, doyen de la Faculté des sciences de Rennes. Payer, membre de l'Institut, Rousseau, contrôleur, au Mans L'OISEAU PAR M. MICHELET. Parmi les auditeurs qui, dans nos dernières années de lutte , se pressaient aux cours du Collége de France, aucun sans doute n'a ou- blié M. Michelet, П nous semble, quant à nous, voir encore cette figure mélancolique et subtile, ce regard pénétrant, cette bouche fine, ce front pensif, tout cet extérieur empreint d'un caractère de rêverie ardenle el de méditalion passionnée. — La parole de l'éminent his- lorien répondait à sa physionomie. Il s'exprimait lentement, par phrases bréves et saccadées. Chacun de ses apercus prenait la forme impérieuse d'un axióme, le ton solennel d'une révélation. Tantót il appuyail sur certains mots avec une insistance singulière, comme s'il eût entendu leur communiquer un sens plus large et plus pro- fond que leur acception usuelle; tantôt il baissait la voix, comme le prophète d'une religion nouvelle qui veut se livrer aux seuls élus.— Mêmes étrangetés, même mystère dans la méthode. — M. Michelet ne professait pas l'histoire; il prédisait , songeait , s'inspirait à propos de l'histoire. Aucun ordre apparent ne reliait les diverses parties de son discours. Il sortait du sujet par tous les côtés, passait sans transition d'une idée a une autre, el revenait brusquement au point de départ, aprés avoir obéi, chemin faisant, aux fantaisies les plus imprévues de son esprit. Les événements, les traits de mœurs, les grands noms d'hommes et de peuples élaient pour lui des pré- textes, ou, comme il disait, des symboles, dont il s'emparail pour ouvrir sur le présent et sur le passé des perspeclives soudaines, sou- vent neuves, souvent lumineuses, mais plus souvent encore obscur- cies par un mysticisme singulier. — Parfois méme celle tendance mystique devenait si dominante, le ton du professeur s'éloignail à 1 D un tel point du ton ordinaire de l'enseignement, qu'on élait tenté d'oublier et le lieu, et l'époque, et le programme du cours, et tout cet audiloire si enflammé des passions contemporaines. On se serait cru volontiers devant quelque illuminé du dernier siècle, Jacob Boehm ou Saint-Martin exposant ses visions intérieures dans un cercle d'iniliés, ou mieux, devant quelque philosophe Alexandrin, Porphyre ou Jamblique, dévoilant ù ses disciples attentifs les arcanes de la théurgie. Selon nous , M. Michelet orateur expliquait M. Michelet écrivain. L'improvisation permettait d'étudier sur le vif les allures et les pro- cédés de sa pensée ; elle donnait la clef de cet esprit ingénieux, trou- veur, enthousiaste, extatique, hardi jusqu'à la témérité, impres- sionnable jusqu'à l'éblouissement et au vertige. — Qu'on ouvre un des livres auxquels l'auteur Du peuple doit sa renommée, livre d'histoire, de polémique ou de physiologie sociale, on restera frappé du rare et merveilleux instinct que révéleront certaines pages. — Ilya par moments une vraie puissance d'intuition dans la ma- nière dont M. Michelet saisit les figures , dont il recompose les épo- ques, dont il éclaire et pénètre les replis intimes du cœur humain ; mais à côté, au milieu même de ces lueurs brillantes de talent, combien on signalerait d'illusions et de mirages ! — Que d'étranges rapprochements, que d'interprétations hasardées , que d’aperçus où le rêve se substilue ouvertement à la réalité des faits ! — Pour tout dire, M. Michelet est un voyant, un homme armé de la précieuse et dangereuse faculté de plonger au fond des choses d'un seul coup d'œil, par une sorte d'inspiration divinatoire et soudaine. Malgré sa science de Bénédictin, il n'arrive pas, comme d’autres, à conclure d’après des discussions et des preuves ; il n'argumente pas, il ne rai- sonne pas, il voit. — Si sa vue reste lucide, si rien ne vient troubler le sens délicat et subtil dont il est doué, il découvre plus prompte- ment et plus profondément que personne. — Mais si, par malheur, une passion quelconque , politique ou religieuse , s'interpose devant ses yeux, alors son regard dévie, son jugement s'égare, el une fois dans le faux, il ne parvient pas à s'arréter. Trop ardent pour rectifier jamais sa premiére impression, il adopte une donnée imaginaire comme une vérité absolue. — Bien plus, il la développe, il la poé- lise, il la dramalise, il en tire inductions sur inductions, conjec- lures sur conjectures, et l'erreur s'augmente ainsi de toule la fé- condité de son cerveau. — Disposition funeste, qui est demeurée longtemps chez M. Michelet à l'état de simple tendance, comme le défaut corrélalif du genre spécial de son talent, mais que, dans les dernières années, les lulles, les allaques, l'esprit de parli, les 3 excitations du dehors ont déplorablement accrue. — Il suffit de parcourir les récents volumes sur la Ligue et sur Henri IV pour ap- prendre à quels écarts de pensée peut aboutir une puissante intel- ligence, quand en elle la réflexion ne contrôle plus l'instinct, et quand elle s'abandonne sans réserve à l'ivresse de ses rêveries. Hátons-nous de le dire, le livre de l'Oiseau ne mérite pas dans toute leur rigueur, cette apprécialion et ces critiques. S'il porte l'empreinte commune aux différents ouvrages de M. Michelet, s'il accuse bien nettement l'esprit aventureux que nous avons essayé de définir, du moins le montre-t-il sans fièvre, plus calme et presque apaisé. Evidemment le nouveau sujet adopté par l'illustre écrivain , sujet si étranger aux travaux et aux préoccupations de sa vie, а exercé sur lui une influence bienfaisante. Fatigué de l'humanité qu'il a fouillée dans tous les sens, dans le passé, comme dans l'a- venir , il s'est tourné vers la nature, et la nature, cette bonne et fé- conde mère, a souri à ses premiers efforts. Elle n'a pas seulement relrempé son slyle et rajeuni sa plume , elle a fait mieux; elle a ra- fraichi son ате, elle lui a permis d'oublier, un instant, ses com- bats, ses regrets, ses déceptions, ses rancunes dans la contemplation des ceuvres de Dieu. — M. Michelet raconte lui-méme en commen- cant, avec un charme infini et une émotion touchante, comment il fut conduit à cette. étude salulaire. — Homme de recueillement el de cabinet, voué par état et par goût aux travaux absorbants de l'histoire , il s'était partagé longtemps entre ses méditalions et ses livres, sans rien soupconner, ni regarder au-delà; mais un jour le besoin de repos, la nécessité de rétablir une santé compromise l'at- lirèrent à la campagne. — Aussitôt ses yeux s'ouvrirent; ce fut comme si un sens nouveau se réveillait en lui; le penseur hardi, le polémiste à toute outrance eut des joies d'enfant, des satisfactions naives — un rayon du soleil, une fleur des bois, un cri d’alouette le trouvèrent attendri et charmé. Peu à peu ce charme l'enveloppa comme une douce et forte passion que tout lui rendait plus chère, souffrances physiques , douleur de famille , revers et désillusions de parli. — Enfin une affection consolatrice qu'il nous est permis de deviner sous le voile transparent dont M. Michelet l'a recouverte, vint achever l'initiation. Dès lors lillustre écrivain aima les ani- maux comme il aimail naguère ses archives, avec feu, avec cons- lance, avec bonheur, appliquant aux mystères de l'organisme cette méme curiosilé insaliable qu'il portait, depuis tant d'années , sur les lénébres du passé. Les oiseaux surtout devinrent l'objet de ses ob- servalions favorites. Une sympathie croissante l'aitira vers ce monde ailé, image de la liberté souveraine, symbole vivant de l'aspiration 4 vers l'inconnu. Il l'aborda non pas en physiologiste, le scalpel et la loupe à la main, mais en poète, en artiste, à la Jean-Jacques, épiant le vol, prétant l'oreille au chant, et poursuivant son étude chérie partout où le conduisaient ses voyages: ici sur les bords de la Sèvre nantaise, là sur les côtes de la Manche, là sur le versant de l'Apennin. — L'hiver méme, revenu à Paris, il suivait de l'œil les ébats des rouges-gorges dans les allées du Luxembourg. — Insen- siblement, il en vint avec les oiseaux à une sorte d'intimité con- fiante, de familiarité affectueuse. — Comme St François d'Assises , il eût dit volontiers : « Mes petites sœurs les hirondelles. » — Et ainsi est née la meilleure partie de son livre, fruit de ses promenades, de ses recueillements, de ses réveries, œuvre spontanée où ses impres- sions apparaissent dans toute la grâce de leur première fraîcheur. Celle manière de décrire les oiseaux constitue une entreprise neuve el à peu près sans exemple dans notre pays. — Nous ёсагіопѕ bien vile les traités spéciaux d'ornithologie qui ne sauraient évidem- ment avoir de parenté avec le livre de M. Michelet, mais en nous at- lachant aux écrits où entre une part plus où moins large d'imagi- nation et de sentiment, nous n'en voyons aucun dont il procède. — Buffon parle des oiseaux avec la riche et ferme élégance de son ta- lent, mais sans jamais se départir d'une certaine roideur magistrale. — Dans la trame savante de ses périodes, il n'y a pas d'inlerstice , pas d'échappée par où se fasse jour soit une émotion soit un souvenir. On sent en lui l'orateur et l'historien bien plutôt que l'amant de la nature. D'ailleurs, comme artiste, Buffon a le goüt exclusivement aristocratique. — La plume en main, il reste toujours, quoiqu'il fasse, le seigneur un peu féodal de Montbard , le directeur du jardin du Roi. — Une prédilection marquée le porte vers le grandiose, le puissant, le majestueux.— Aussi s'arrélera-t-il complaisamment de- vant les dominaleurs et les souverains des airs , comme devant les nobles sujets d'amplificalion et de style, tandis qu'il se montrera froid, presque dédaigneux pour les espèces plus humbles, même quand elles rachétent Vinfériorité de la force par la supériorilé de l'intelligence et de l’industrie. — Mieux inspiré sur ce sujet, Chà- teaubriand a glissé dans le Génie du Christianisme , quelques pages touchantes sur l'instinct des petils oiseaux , sur les migrations et la couvée. — Mais ces descriplions viennent chez lui incidemment, à litre d'épisode, pour compléter et pour orner une démonstration philosophique. — Elles sont plus ingénieuses que vraies , plus ima- ginées que senlies; en un mot, elles semblent plutôt empruntées а la tradition et au sentiment littéraires, que puisées à la source vive de l'observalion personnelle. 5 Un essai curieux а été tenté, dans ces dernières années, par un homme d'invention et d'esprit, grand batleur de bois, chasseur in- faligable , naturaliste de premiere main, mais pour son malheur el le nôtre imbu des théories fouriéristes. — Nous voulons parler de M. Toussenelet de son livre, le Monde des oiseaux. Déjà presqu'oublié aujourd'hui, cet ouvrage n'a guère rencontré qu'un succès d'école. — L’intention visible de l'auteur , ses utopies sociales, ses puérilités humanitaires lui ont aliéné ce public qui fait seul, après tout, les réputalions sérieuses, et qu'on appellerait volontiers, en langue du xvi’ siècle, le public des honnétes gens. — Rebuté par l'attraction passionnelle et la série harmonique, on n’a pas pris garde que sous l'uniforme de phalanstére, se cachait un conteur plein de verve, un humoriste de bon aloi, et mieux encore un savant véritable, possé- dant son sujet pour l'avoir étudié de ses yeux , à la campagne , sous le taillis ou sur le guéret. — Seulement, M. Toussenel, bien Fran- cais par-là, pense toujours aux hommes en parlant des bêtes. Il décrit les oiseaux, comme Granville les a dessinés, en leur prétant nos costumes, en cherchant dans leurs différentes espèces, des types correspondants à nos variétés sociales. — Ce n'est pas assez pour lui de nous inilier à ses découvertes physiologiques ; il voudra en outre nous faire voir dans les mœurs du monde aérien la reproduc- lion et la parodie dela comédie humaine; la parodie, passe encore ! de grands , d'aimables esprils ont cédé à ce caprice. Mais M. Tousse- nel va plus loin. — Il aborde la politique. — Avec lui, l'ornithologie tourne au pamphlet. Ainsi, il se plaira à nous montrer dans le milan la personnification du noble, dans le hibou l'image du prêtre, dans le vautour le portrait du financier et du bourgeois. — Que sais-je ? — En feuilletant ce livre d'histoire naturelle, on retrouverail toutes les passions de nos dernières crises, lous les anlagonismes de notre temps, et jusqu'aux cris haineux de nos guerres civiles. Si l'on veut une étude des oiseaux vraie, naive, désintéressée , il faut quitter notre vieille Europe où l'homme а laissé partout Pem- preinte de ses dissensions et de ses rancunes, il faut passer l'Atlan- lique el fuir vers ces déserls du nouveau monde ой la nature appa- rait encore dans sa robuste virginité. — Grace aux belles études de M. Philarète Chasles, on connait aujourd'hui en France l'Américain Audubon, le voyageur, l'érudit, le peintre, le poète qui, pendant trente années, fit son bonheur et sa vie de l'observation du monde ailé. П y a quelque chose de simple et de grand dans l'histoire de ce planteur de Pensylvanie poursuivant son œuvre, sans souci de la renommée , par pur amour de la science, à travers les obstacles et les dangers. Avec le récit de ses courses au fond des savanes , de ses 6 navigations sur l'Ohio, de ses halles chez les Peaux-Rouges, on fe- rait un roman à la manière de Cooper, roman où respirerait tout l'esprit d'aventure de la race anglo-saxonne, mais dont l'énergie serait tempérée par le reflet d'une âme pleine de sérénité et de dou- ceur.— Audubon a étudié les oiseaux, comme on ne les avail ja- mais étudiés avant lui, vivant au milieu d'eux , ne les perdant pas de vue, surprenant avec une ardente patience les secrets de leur organisme el de leurs mœurs. Son ouvrage publié en Angleterre , il y a vingl-cinq ans, est à la fois la création d'un écrivain et d'un arliste. — Deux mille figures coloriées y reproduisent les ty pes aériens du nouveau monde, diaprés de toules leurs nuances, saisis dans toutes leurs allitudes, encadrés dans les merveilleux paysages qui les voient vivre et aimer, et toutes ces curieuses planches ont pour commentaires un des plus heureux essais de la littérature améri- caine. Le texte d'Audubon n'est ni une séche nomenclature , ni un discours d'Académie , ni un recueil d'allusions épigrammaliques. — C'est l'histoire naturelle animée, c'est l'épopée réelle des oiseaux, c'esl un enchainement de scènes et de peintures tour à tour calmes, en- jouées, sombres ou terribles, et qui savent passer en un inslant de la grâce familière à l'énergie des plus grandioses conceptions. M. Michelet a eu la bonne pensée de suivre la voie si heureuse- ment ouverte par Audubon. Il protesle, au début de sa préface, qu'il a voulu oublier l'homme, qu'il a fui avec soin toute velléité de rap- prochement ou d'analogie. Nous nous demandons cependant si sa plume a toujours servi ses désirs , el si, à son insu, ses opinions de philosophe et d'historien n'ont pas influé parfois sur ses vues d'orni- thologiste. Quelle est en effet l'idée primordiale de son livre? — C'est que la race humaine s'arroge à tort la royauté de la création; c'est qu'elle forme seulement le premier anneau de la chaine des étres, et qu'elle doit considérer les animaux , non plus avec dédain, mais avec une affectueuse sympathie , comme des fréres cadets trop longtemps déshérités et méconnus. Déjà, dans le Peuple, on avait pu lire un ingénieux plaidoyer еп faveur des bêtes, dont la cause était assimilée à celle des humbles et des petits. Aujourd'hui M. Michelet poursuit hardiment celte croisade égalitaire; il revendique pour tout ce qui respire la perfectibilité, l'intelligence, le droit au développe- ment et au bonheur. Ce n'est pas assez, à ses yeux, que les distinc- lions sociales disparaissent, et que les barrières tombent entre les nations ; méme dans le plan du monde, il ne laisse plus de privi- légiés , el il convie l'ensemble des créatures au grand banquet de la démocralie universelle. Ce méme sentiment de démocratie qui domine l'étude de M. Mi- 7 -chelet sur les oiseaux décide de ses préférences entre les diverses es- pèces. Au rebours de Buffon, il tient en médiocre eslime les races puissantes et guerrières. A son avis, l'aigle, le milan, le faucon ne sont pas ces héros, ces chevaliers que se plait à nous représenter l'admira- tion traditionnelle des poètes. Ce sont des brigands de haut lieu, des malfaiteurs couronnés qui descendent de leur aire, comme les barons du xr? siècle de leur donjon féodal, pour infester les routes et déva- liser les passants. L'aigle surtout est de la part de l'illustre écrivain l'objet d'une antipathie particulière. Une grande partie du chapitre des rapaces est consacré à prouver que cet oiseau tant vanté manque de noblesse réelle, qu'il s'arrangerait d'une grasse servitude , et que son prétendu courage est tout simplement le résullat de son mons- trueux appétit. M. Michelet n'hésite pas à lui préférer le vautour si décrié de temps immémorial ; il réhabilile méme à ses dépens le cor- beau, autre personnage méconnu qui lui paraît le type accompli des vertus bourgeoises, el dont il ne se lasse pas de louer la sagesse, le flegme narquois el la docte prud'homie. Maintenant, avons-nous besoin de le dire, toutes les sympathies, toutes les prédilections de M. Michelet sont pour les oiseaux faibles, petits, familiers, populaires qui courent dans nos sillons, qui chan- tent dans nos arbres, qui viennent se mêler à notre vie ou s'appri- voiser à notre foyer. — Ne lui parlez pas de ces splendides produits des régions tropicales, les colibris, les oiseaux-mouches, au plu- mage nuancé de mille vives couleurs. — Il aime mieux les habitants de la zóne tempérée avec leur robe terne et leur humble aspect. Voilà, selon lui, les vrais compagnons de l'homme, ceux-là seuls dont la vue éveille dans notre cœur des sentiments et des souvenirs. — Aussi quelles caresses de style il a pour ses chers favoris, le rossignol, le rouge-gorge, l'alouette, l'hirondelle! — Avec quel агі délicat, avec quelle sensibilité féminine , il nous raconte les in- cidenls de leur existence, depuis les premiers essais de l'aile, au sortir du nid, jusqu'aux lointains voyages vers les pays de la chaleur el de Ja lumière! Je citerais telle page sur les migrations du rossignol qui rappelle involontairement la fable des Deux pigeons. On suit avec anxiété le fréle et merveilleux artiste que l'hiver chasse de nos cli- mats; on s'apitoie sur son sort durant sa longue route. On craint pour lui et le froid , et la faim et le bec de l'épervier. — Que sais-je encore ? « Hélas! dit-il, il pleut! « Mon frère a-t-il tout ce qu'il veut? « Bon souper, bon gite et le reste? » 8 Et l'hirondelle ! quelles paroles ailées M. Michelet a su trouver pour décrire les courbes rapides et infinies de son vol, pour rendre le cri joyeux qui lui échappe, quand elle fend les airs dans l'ivresse de sa liberté ! et quels accents mélancoliques pour parler de son re- tour fidèle à la maison qu'elle aime, qu'elle a choisie, et où elle ne reverra plus peut-étre ses hótes du dernier été! — L'alouette n'est pas moins bien comprise; pour elle, la phrase de M. Michelet se fait vive, gaie, légère, saulillante, elle semble avoir plus de jeunesse, un sourire plus frais et plus doux. On sent alors que l'écrivain s'a- bandonne à ses souvenirs d'histoire et de poésie; il se rappelle l'alauda , cet embléme chéri des légions gauloises ; il pense à l’oiseau matinal qui chante sous le balcon de Juliette et l'avertit de l'heure des adieux. Ces espéces préférées reviennent sans cesse dans les études de M. Michelet. Elles lui fournissent presque tous ses exemples, quand il traite du nid, de l'incubalion, du vol et de l'instinct. Son ouvrage n'est pas en effet une série de portraits, une galerie des différents Ly pes, c'est l'observation générale , on pourrait presque dire la phi- losophie de l'oiseau. — Le monde ailé y est décrit, non pas dans ses variétés, mais dans son essence, dans ce qui le caractérise et ce qui le sépare du reste de la création. Sans doute, les arguments de l'auleur ne se présentent pas toujours suivant un ordre rigoureux el symétrique. Ils obéissent volontiers au caprice de l'inspiration ; ils sont entrecoupés d'épisodes, de récits intimes, de croquis de pay- sage ou d'intérieur; mais au milieu de ces charmants hors-d’ceuvre qui envahissent le livre, comme autant de lianes fleuries, il est aisé de déméler les idées scientifiques de M. Michelet. Nous avons déjà noté sa doctrine de l'àme des oiseaux. Un autre principe fondamental qui se rattache au premier par des liens étroits, c'est la théorie des formations successives, c'est la pensée que les différentes familles procèdent d'un type unique, modifié plus tard à l'infini, sous l'in- fluence de causes extérieures. —- On reconnaît cette thèse produite avec tant de bruit et d'éclat vers le commencement du siècle, et l'on sait à quelles disputes mémorables elle donna lieu entre Geoffroy Saint-Hilaire et Cuvier. — En présence de ces deux autorités con- traires, M. Michelet n'hésite pas. Il adopte avec toute l'ardeur d'un croyant le systéme de l'unité, et il en fait la base de ses opinions physiologiques. Partout il cherche à prouver que la nature n'a pas enfanté de prime-abord des espèces distinctes, mais qu'elle a procédé lentement, pas à pas, par transitions presque insensibles. Son cha- pitre sur l'aile lui sert principalement de cadre pour développer ses idées. Après avoir parlé de l'aile en général, de sa structure 9 particulière, de ses rapports mystérieux avec tout l'organisme de l'oiseau, il en suit les progrès à travers la série des genres, il montre cet appareil à peine ébauché dans certaines races, telles que le manchot, le pingouin, l'autruche, se dégager par degrés, se perfectionner, s'étendre, et arriver enfin aux dimensions inouies qu'on remarque chez l'aigle de mer, « l'audacieux navigateur qui ne ploie jamais la voile, le prince de la tempête, contempteur de lous les dangers. » L'œuvre de M. Michelet se rattache tout entière au double principe qu'il vient de poser: la réhabilitation moraledes animaux, l'unité de caraclére de la grande famille ailée. — On voit quelles perspectives infinies ces données doivent ouvrir à un espritaventureux. — Avec un pareil point de départ, le moindre phénomène n'est jamais un acci- dent isolé, c'est la manifestation partielle d'une loi générale du monde, c'est une lueur soudaine qui parfois peut éclairer l'homme lui-même sur les mysléres de son existence et de sa deslinée. — Ainsi, M. Michelet vient-il à constaler le redoublement de vie qui se manifeste chez les oiseaux à l'apparition du jour, il n'ira pas en chercher la cause dans les conditions spéciales de leur organisme — de rapprochements en rapprochements, il finira par proclamer comme un fail universel l'aspiration des créatures à la lumière. — La lumière, selon lui, voilà l'irrésistible attrait, voila l'invincible amour également ressenti par tous les êtres, et pour trouver des exemples, sa pensée s'élancera des plus humbles degrés de l'échelle animale jusqu'au plus hautes régions du monde intellectuel. — En regard de la fauvelte dont le cri joyeux salue l'aurore, en regard de l'enfant qui pleure à la tombée de la nuit, il nous montrera le grand Goélhe mourant chargé de gloire et demandant comme faveur su- préme, un dernier rayon du soleil. Le chant de l'oiseau est un autre théme qui permet à M. Michelet de déployer avec tous les prestiges de son style, tous les caprices de sa fantaisie. La musique de Mozart, Ja voix de la Malibran ou de la Sontag n'ont jamais fait naître une admiralion plus fervente et plus iniliée que celle qui vient s'offrir, dans ce livre, aux virluoses des sillons et des forêts. — L'auteur n'est pas seulement un poète sus- ceptible d’être ému par une note plaintive entendue dans la campa- gne. C'est un savant capable de pénétrer les secrets intimes de l'art des oiseaux, c'est un dilettante raffiné qui sait interpréter le chant comme un langage, et qui traduiten sentiments les moindres nuances d'une mélodie. Lisez son passage sur la cantilène du rossignol; vous y lrouverez le récit de toul un drame lyrique, l'analyse de toute une passion avec ses allernalives d'espoir, d'aballement, de lutte el de 10 triomphe. M. Michelet suit pas à pas cette douce églogue d'une nuit de printemps. — П n'en omet aucun détail , aucune phrase. D'abord c'est un long soupir mélancolique, un air plein de langueur comme celle sérénade « Que Don Juan déguisé chante sous un balcon, » puis insensiblement le ton se monte et s'anime — de timide il devient hardi, de tendre , il devient pressant; il a des élans soudains, des caresses brülantes, des ardeurs énivrées..... Quelques instants en- core , el un hymne radieux s'éléve, hymne d'amour et de victoire, le cantique des cantiques du monde ailé. Autour de ces sujets principaux, viennent se grouper des chapi- tres accessoires issus de la méme inspiration et liés aux mêmes théo- ries. Ce n'est pas seulement dans le chant, dans l'essor des ailes, dans le besoin de lumiére que M. Michelet découvre l'àme de l'oiseau, c'est encore dans l'activité industrieuse et bienfaisante de la plupart des espéces. D'aprés lui, les oiseaux ont une mission spéciale au sein de l'univers. Ils se sont constitués les grands épurateurs du globe, les ouvriers de l'homme chargés incessamment de combattre la dangereuse exubérance de la nature. — Aux premiers âges du monde, les familles aquatiques, le héron, le cygne, la grue ont, comme Hercule et le Thésée de la fable, purgé la terre d'une foule d'êtres malfaisants. — Aujourd'hui encore le travail des races aé- riennes se poursuit sous toutes les latitudes. En Asie et en Egypte, le vautour, la corneille , l'ibis protègent la santé des villes contre les exhalaisons des matières putréfiées. — Sous les tropiques , les coli- bris, ces saphirs ailés, ces pierres précieuses volantes, dont le seul but semblerait étre de charmer et d'éblouir, ont aussi leur ulilité pro- videntielle. — Ils pénètrent au plus profond des foréls , sans s'effra- yer de celle végétation étouffante el désordonnée. — Braves et alertes ils allaquent les serpents, ils tuent des légions d'insectes , ils se nourrissent des fleurs qui résorbent les poisons. — Dans nos pays d'Europe enfin, le moineau franc, les gallinacés, et mille autres modestes serviteurs méconnus par l'ingratitude humaine, détruisent les vermisseaux, préservent les plantes, et forment comme la garde domestique de nos champs et de nos vergers. Quelques pages délicates sur la construction du nid terminent le livre atlachant et varié dont nous venons de parcourir les grandes lignes. Nous serions heureux si notre analyse avail permis d'en saisir l'esprit général , mais comment donner une idée de ce qui fail avant tout son attrait et son mérite, de ce style plein d'un charme étrange el d'indéfinissables séductions? — M. Michelet, on peut 11 le dire , s'est créé une langue à lui pour parler de ses chers oiseaux, langue nuancée comme leur plumage, souple comme leur corps, légère et rapide comme leur vol. Sans néologisme , sans vaine re- cherche d'images, par le simple bonheur de l'expression , il est ar- rivé à des résultats dont la prose francaise ne semblait pas suscep- lible. En le lisant, on croit vivre de la vie aérienne, on fend les espaces, on s'énivre de lumière et de liberté. Tantót il court dans ses récits une brise caressante, comme celle qui soulève le duvet des cygnes ; tanlól c'est un souffle puissant auquel rien ne résiste, el qui emporte la pensée vers des régions inconnues. — L'auteur veul-il, par exemple, montrer les progrès successifs de l'aile, à tra- vers la série des espèces, il trouve une forme appropriée à chacun des degrés de ce développement. D'abord , sa phrase humble et tran- quille semble raser la terre; puis elle prend son essor , elle se déploie, elle s'élève, elle atteint les hauteurs éthérées , et elle s'y maintient avec une force, une ampleur, une envergure qu'on essaierail en vain d'imiter. — Tournez la page — vous rencontrez d'autres merveilles inaltendues. L'oreille du lecteur se remplit toutà coup de sons légers, de gazouillements infinis. — C'est une douce onomatopée où mille harmonies se mélent sans se confondre : le bruissement des feuilles, la plainte de l'oiseau amoureux, le babil des petits volelant sous la ramée. — Plus loin, l'illusion est différente; il semble que les yeux soient captivés à leur tour. — Est-ce d'une plume, est-ce d'un pinceau que sont sorlis ces paysages aux lignes si précises, aux cou- leurs si hardiment prodiguées? Des sites de toute physionomie passent et repassent devant la vue: vignes italiennes, bocages ven- déens, végétations de l'Inde ou des Antilles. Et pour éclairer celle succession variée de tableaux , que de teintes, de demi-teintes , que d'effets changeants d'ombre, de crépuscule, de lumiere! L'écrivain, par la magie du style, est arrivé à produire un véritable mirage ; for- сап! les limiles de son art, il a enveloppé les sens dans la fascina- lion de l'esprit. Mirage souvent trompeur, fascination souvent dangereuse! — ;elle forme est trop pleine d'enchautements pour vous laisser de sang-froid, tant qu'elle vous tient sous son empire. — Si l'on veut juger le fond desidées, il faut fermer le livre et attendre longtemps que le charme n'agisse plus. — Mais quand enfin ces théories dépouillées de leur manteau de fleurs et de diamants apparaissent dans la nudité de pures doctrines philosophiques , alors on s'aperçoit bien vile de tout ce qu'elles présentent de conjectural, d'erroné, de hasardeux. — Nous laissons de côté les queslions qu'il appartient à la science seule de résoudre, mais pour nous borner à la partie morale de l'œuvre 19 - de M. Michelet, à sa proclamation de l'àme des bêtes, à son dogme de fralernilé universelle, ne voit-on pas, du premier coup d'œil, combien on pourrait élever sur ce terrain d'objections et de criti- ques ? Il y a une vérité contre laquelle ne prévaudront pas les ef- forts de l'imaginalion la plus ingénieuse , c'est que si l'instinct des animaux est admirable, ce n'est malgré tout qu'un inslinct, une force bornée dans son développement, circonscrite dans son but, à peu près identique chez tous les individus de la méme famille. — M. Michelet peut décrire avec amour les merveilles de l'industrie des oiseaux, il ne fera pas que cette industrie ne tende exclusive- ment а la conservation de l'espèce. Il peut montrer leur rôle et leur ulilité dans l'économie de la nature, il n'établira pas qu'ils aient conscience de celle mission; il peut enfin, à propos de leur chant, broder de spirituelles et de délicates fantaisies, ce chant n'exprimera jamais aulre chose que des sensations et des besoins. — D'ailleurs une considération décisive, et qui était , ce semble, propre à tou- cher un penseur aussi pénétré de l'idée de progrès, c'est que l'oiseau, comme tout animal, n'est pas réellement perfectible. Educable dans cerlains cas seulement, el dans des limites très restreintes, il n'aug- mente ni ne transmet la science acquise, et chaque généralion nou- velle se trouve ramenée au point de départ des généralions précé- dentes. — Avant d'écrire, M. Michelet aurait dû méditer ces belles et sévères paroles de Pascal : « N'est-ce pas là trailer indignement la raison de l'homme que de » la mettre en parallèle avec l'instinct des animaux, puisqu'on en » Ote la principale différence qui consiste en ce que les effets du » raisonnement augmentent sans cesse, au lieu que l'instinct » demeure toujours dans un état égal. — Les ruches des abeilles » étaient aussi bien mesurées il y a mille ans qu'aujourd'hui, el » chacune d'elles forme un hexagone aussi exactement la première » fois que la dernière. П en est de même de loul ce que les animaux » produisent par ce mouvement occulte. La nature les instruit à me- » sure que la nécessité les presse, mais celte science fragile se perd » avec les besoins qu'ils en ont. Comme ils la reçoivent sans étude, » ils n'ont pas le bonheur de la conserver, el toutes les fois qu'elle » leur est donnée, elle leur est nouvelle, parce que la nature n'ayant » pour objel que de maintenir les animaux dans un ordre de per- » fection bornée, elle leur inspire cette science simplement néces- » saire et toujours égale , de peur qu'ils ne tombent dans le dépéris- » sement, el ne permet pas qu'ils y ajoutent, de peur qu'ils ne » passent les limites qu'elle leur a prescrites. » Voilà le sublime bon sens, la ferme clairvoyance du génie ! — En 13 montrant avec la vigueur magistrale de ce dialectique le vide et la faiblesse des opinions qu'il combat, Pascal les stigmatise à bon droit, comme dépouillant notre raison de son plus glorieux privilège. — Un autre résultat de ces théories, c'est qu'à force de trouver des fa- cullés morales dans tous les êtres , à force de découvrir chez l’oiseau el chez l'insecte des prodiges de sagesse et de discernement, on peut être conduit à oublier l'autorité créatrice et souveraine qui veille incessamment sur l'univers. — N’accordez aux animaux que l'ins- tinct, que le mouvement occulte dont parle Pascal , on sentira l’action de la Providence dans tout ce qu'ils accomplissent d'ulile. Recon- naissez-leur au contraire une mission spontanée, une activité libre el rationnelle , on s'absorbera dans la contemplation de cette multi- tude infinie d'intelligences , on se demandera si le don de la pensée ne s'étend pas plus loin encore, et s'il ne circule pas à travers le monde une ame universelle qui est à elle-même son principe et sa fin. Insensiblement, on perdra l'idée d'une cause supérieure, et bercé de rêves panthéistes, on bannira le culte de Dieu, pour lui substituer l'adoration de la nature. Un dernier moi. — En commençant, nous avons applaudi au sentiment de curiosité affectueuse qui a entraîné M. Michelet vers l'étude des races aériennes. Là en effet était le germe d'une inspi- ralion d’où sont nées quelques-unes des pages les plus vraiment nouvelles et les plus attachantes de son livre. — Mais comment le suivre dans ses sympathies, quand il les traduit en maximes philo- sophiques , quand il en tire une révélation , un dogme, une morale, un myslicisme ? — La fraternilé que l'écrivain réclame envers tous les êlres vivants fait sourire d'abord comme une fantaisie d'espril sans conséquence ; à la longue, elle irrite, comme un de ces faux devoirs dont s'éprennent les sociélés vieillies. Оп cherche par quel secret nolre puissance de lendresse pourra suflire à tant d'obliga- lions; on s'effraie surtout de ce que deviendraient nos vieilles el saintes affections, au milieu des élans de ceite sensibilité exubé- ranle. S'il nous faul avoir des effusions et des larmes pour l'oiseau qui passe, pour le ver qui rampe, pour le brin d'herbe qui croit sous nos pieds, que nous restera-t-il pour la famille et pour la patrie ? Prenons-y garde, notre cœur est un instrument délicat et suscep- lible.. On le fausse ou on le brise en essayant de le forcer. — Nous nous défions et non sansmolif, des amis du genre humain. — Mais Dieu nous préserve plutôt encore des amis de l'univers, ces brahmes ver- lueux, ces personnages candides, dont le regard se porle avec une bienveillance égale sur l'homme et sur la fourmi. — M. Michelet a dû en rencontrer quelques-uns dans l'histoire de la Révolulion, — 14 П ne manquait pas, sur les bancs de la Montagne, d'honnêtes rê- veurs, de doux philosophes qui n'auraient pas écrasé une plante ou versé le sang d'un animal, mais qui, pour le triomphe de leurs idées, votèrent tranquillement, sans hésitation comme sans remords, la loi des suspects et le règne de la guillotine. Après avoir obéi au charme étrange el puissant du livre del Oiseau, nous n'avons pas cru devoir taire la gravité des reproches qu'on est en droit de lui adresser. — Maintenant si l'on nous demande de ré- sumer nos impressions et de dire notre dernier mot sur l'ouvrage , aurons-nous la force de le condamner ? — Non. — Nous maintien- drons nos réserves el nos criliques; mais celte lecture nous a fail passer de trop douces heures, pour que nous puissions les oublier. — А côté du théoricien dont nous repoussons les systèmes , il reste un poète, un écrivain, un arliste, et à ces différents litres, M. Mi- chelet mérite ici, comme toujours, qu'il lui soit beaucoup pardonné. E. BERGER. ÉTUDES MÉDICALES SUR LES POETES LATINS Etudes médicales sur les poètes latins, par M. le D* P. MENIÈRE. 1 vol. in-8°. — Paris, Germer Baillère , 1858. Messieurs, Un de nos concitoyens, un ancien élève de nos écoles, M. le doc- leur P. Menière, aujourd'hui professeur agrégé de la Faculté de médecine de Paris, médecin en chef de l'inslitution des Sourds- Muels, n'a pas cessé, loul en parcourant une brillante el utile carrière , de chercher dans la lecture des meilleurs ouvrages la- lins un délassement charmant à ses travaux de tous les jours. Frappé depuis longtemps des nombreuses cilations médicales qu'il y trouvait, il fit une étude toute spéciale à cet égard des œuvres de Juvénal et publia, dans la Gazette médicale, une série d'ar- licles qui furent lus avec aulant d'intérêt que de plaisir. Encou- ragé par ce premier succes , convaincu que les poèles représentent très bien, en général, l'état actuel de la société au milieu de laquelle ils vivent, M. Menière ne voulut pas s'arréter là. Il résolut de met- Ire à exéculion un vaste travail dont il avait conçu le plan depuis longlemps, il entreprit de demander à la pléiade poélique des enfants de la Louve, ce que leurs ceuvres doivent à la médecine ou ce 16 qu'elles ont pu lui prêter. Il se proposa, comme il le dit dans sa pré- face, de rechercher dans leurs vers la trace de cette médecine qui а précédé les traités didactiques des hommes de l’art ; de recueillir les témoignages précieux de l'existence des idées médicales au milieu d'une nalion qui se vantait presque de ne pas avoir de médecins ; de voir ce qu'était celle médecine sans médecins ; de montrer comment la science s'est constituée peu à peu, à l'insu méme des hommes qui affeclaient de la mépriser ; d'indiquer la place qu'elle tenait dans le langage de la foule, dans les drames qu'on représentait sur le théâ- tre , dans les poèmes qui racontaient les antiques traditions des La- lins, en un mot, dans cette littérature populaire confiée à la mémoire de tous , el qui renferme les meilleurs documents de l'histoire pri- milive des peuples. Pour arriver à la solution de ce probléme , M. Menière a étudié et traduit dans tous leurs délails Ennius, Luci- lius, Plaute, Térence, Lucrèce, Virgile , Horace , Catulle, Tibulle, Properce, Gallus, Publius Syrus, Ovide, Sénéque le tragique , Lucain, Perse, Juvénal et Martial. Il a extrait de ces auteurs les pas- sages ayant trait à la médecine proprement dite ou aux sciences qui lui sont accessoires, puis il a mis ces nombreuses citations en ordre en les reliant entre elles de manière à former un lout pour cha- cun d'eux, et il est ainsi parvenu à faire le livre curieux dont vous avez bien voulu me confier l'examen. Ici, Messieurs, ma tâche devient d'une difficulté désespérante. Comment , en effet , analyser un ouvrage dont la table ferait presque un volume ? Comment analyser une série de cilalions diverses, privées de la causerie la plus spirituelle, d'apercus fins et ingénieux, de fails curieux et in- téressants? Loin de moi une semblable prétention, mais pour répon- dre le mieux possible à l'honorable confiance de notre président, j'ai choisi au milieu de ces cilalions plus ou moins spéciales à l'art de guérir , quelques- unes de celles qui, tenant à quelque branche de l'histoire naturelle, m'ont paru dignes d'intérét pour des hommes qui marchent sous la bannière du grand Linné. Par exemple : Nolre savant patron a donné un nom trés significa- lif à une plante que vous connaissez tous , à l'ivraie : il l'a appelée Lolium temulentum, el les auteurs de matière médicale disent, pour traduire celte expression , que l'ivraie a des propriétés véné- neuses trés prononcées, qu'elle enivre, cause des vertiges, des nau- sées et des vomissements. Eh bien ! Messieurs, Linné et nos auteurs modernes ne font que répéter ce que savaient fort bien les anciens , ce que Plaule dit d'une manière aussi élégante que spirituelle dans une comédie assez vieille, puisqu'elle date de 2,000 ans environ, dans le Miles gloriosus ou le Fanfaron, où un certain Scélédrius sou- 17 lient à son camarade Palestrion qu'il n'a pas vu quelque chose qu'il prétend avoir vu ; il lui donne ce conseil ironique : Juben "tibi oculos ecfodiri, quibus id, quod nusquam ’st, vides ? — Fais-toi crever ces yeux qui te causent de pareilles visions. — Scélédrius lui répond en lui reprochant de n'y voir goutte lui-même, el pour expliquer sa pensée il ajoute : Mirum 'st lolio victicare te tam vili tritico. — Je m'étonne que tu te nourrisses d'ivraie quand le froment est à si bon marché. — On connaissait donc dés celte époque les effets pernicieux du Lolium temulentum L. qui trouble la vue et donne des vertiges. Le même auteur parle aussi avec connaissance de cause du blanc de céruse, de l'ellébore. Il croit que la moutarde donne un mauvais caractère à ceux qui en mangent, et il dit en parlant d'un bourru qu'on ne sait par oü prendre : Si, ecastor , hic homo sinapi victitet, non censeam Tam esse tristem posse. — Par Pollux et Castor ! quand il se nourrirait de moutarde il n'aurait pas un esprit plus fâcheux. — M. Menière ne connaissait pas cette propriété attribuée par Plaute à la moutarde, et il le disait au savant doyen de la Faculté des Lettres de Paris qui, pour le persua- der que le poete lalin avail raison, lui a rappelé en riant le proverbe populaire : la moutarde lui a monté au nez , proverbe qui , par con- séquenL, peut remonter d'une manière plus ou moins direcle à Plaute et à ses comédies. Lucréce parle du veratrum , du castoreum ; i1 donne beaucoup de détails sur les odeurs et attribue méme à celle d'une lampe qui s'é- teint des effets qu'on ne peut admettre. L'ail était aussi bien connu des Romains qu'il l'est aujourd'hui. Horace le délestait , et sa troisième ode est tout entière consacrée à le maudire avec les expressions les plus véhémentes. Nous y lisons , par exemple : Parentis olim si quis impia manu Senile guttur fregerit , Edat eieutis allium nocentius, 18 — S'il est un monstre qui, de sa main impie, ait étranglé son père, qu'on le condamne à manger de l'ail, plus funeste encore que la cigüe ! — Tous les jours des milliers de Francais , d’Espagnols , protestent en mangeant leur frottée et leurs ragotits à l'ail , contre les invectives du poète latin et répondent à ses sarcasmes par les vers si connus d'un poéte moderne, M. le vicomte de Marcellus. On l'a dit et avec raison, il n'est pas de posilion sociale qui ne puisse profiter des leçons répandues dans les œuvres d'Horace. Ses odes sont remplies des plus nobles inspiralions ; ses épitres sont un miroir où se peignent toutes les physionomies, où se reflètent toutes les passions , el ses salires passent en revue tous les vices de son temps, toutes les faiblesses du cœur humain, mouvant tableau dans lequel chacun peut reconnaitre son portrait. M. Meniere devait né- cessairement faire une ample moisson dans de telles œuvres. Il y trouve, en effet, de très curieux enseignements sur les qualilés de l'eau, sur l'usage du vin, des champignons; en passant, il signale ces deux vers qui seront toujours vrais : Caule suburbano , qui viccis crevit in agris Dulcior : irriguo nil est elatius horto. — Le chou cultivé dans les faubourgs ( chez le maraicher) a moins de saveur que celui qui croit en plein champ. Rien de plus fade que le produit d'un jardin trop arrosé. — Il y a rencontré surtout la pre- mière indicalion d'une médecine qui , très employée en Allemagne, commence à se populariser chez nous : je veux parler de l'hydrothé- rapie. Horace rapporte qu'Antonius Musa, le plus célebre praticien de Rome, сопзеШа à l'empereur Auguste de renoncer aux eaux sulfu- reuses de Daia , qui ne lui élaient d'aucune utilité , et de se plonger dans l'eau froide, méme dans la saison la plus rigoureuse. Celle indicalion est précieuse, Messieurs, mais elle devient bien plus curieuse quand on la rapproche d'un des faits les plus importants de l'histoire de la médecine à Rome : c'est en effet avec le méme agent thérapeutique , avec l'hydrothérapie, que Musa guérit l'empereur Augusle qui, à son retour de l'expédilion de Biscaye, était affecté d'une très grave affection du foie. Les fomentations chaudes qu'on lui appliquait n'empechaient pas le mal de faire des progres ; l'em- pereur semblait voué à une mort cerlaine, lorsque Musa remplaça le traitement suivi jusqu'alors par un moyen contraire. L'eau froide in- tùs el extüs, triompha de la maladie, el Musa fut comblé d'honneurs el de richesses par son malade reconnaissant. L'empereur l'exempta de toutes les charges publiques, lui donna le droit de citoyen romain, 19 l'autorisa à porter un anneau d'or, et lui fit élever une statue de bronze dans le temple d'Esculape. Ce fut à l'occasion de cet heureux événement que la profession médicale sorlit du rang infime ой elle végélait ; ce fut une époque d’émancipation intellectuelle et sociale pour les enfants d'Hippocrate, el, sous ce rapport, le nom de Musa doil étre en honneur parmi eux. Pour revenir aux fails qui nous regardent plus spécialement, c’est-à-dire à ceux qui se rapportent à l'histoire naturelle, on trouve dans la Pharsale de Lucain une étade très curieuse des serpents ve- nimeux. Caton, après avoir recueilli les débris de l'armée romaine à Phar- sale, gagne l'Afrique. Parvenu en Lybie, il rencontre une multitude de repliles dangereux el le poèle donne des détails très élendus sur les effets de leurs morsures. Il signale d'abord l'aspis el le dipsas. Comme les soldats craignaient de boire de l'eau où s'agitaient ces horribles bétes, Caton les rassura : Noxia serpentum est, admixto sanguine, pestis ; Morsu virus habent, et fatum in dente minantur ; Pocula morte cavent. — Le venin des serpents n'est redoutable que quand il se méle au sang ; la morsure est empoisonnée, les dents donnent la mort, mais l'eau où ils nagent n’a rien de dangereux. — Celle opinion , long- iemps combattue , a été depuis confirmée par l'expérience. Quel est cet aspis dont parle Lucain ? Le terme est trés vague, car les Egypliens donnaient ce nom à un grand nombre de reptiles ; mais il ajoute un vers qui contient un signe propre à caractériser l'animal : Aspida somniferam tumida cervice levavit — Tumida cervice , le cou qui se gonfle appartient en propre au genre naja. — Des deux espèces de naja , dil M. Menière , l'une est originaire des Indes Orientales , c'est le fameux cobra di capello , le serpent à coiffe ; l'autre est le naja haje, commun en Egypte. Ces deux serpents ont la propriété de pouvoir projeter en dehors les pre- mières côtes, d'élargir la région cervicale , phénomène caractéris- tique el que l'on trouve figuré sur tous les monuments des Pha- raons. C'est à ce terrible animal que Cléopâtre eut recours pour se soustraire par une mort promple et douce à la honte que lui réser- vail Oclave, son vainqueur peu généreux, el Lucain affirme que les 20 Romains de son temps en faisaient venir beaucoup de la Lybie, pour échapper par une mort volontaire aux supplices dont les menacait Néron. Lucain ensuite dépeint la mort du jeune Aulus, qui est mordu par un dipsas ; celle de Sabinus, mordu par un seps, petit serpent des plus dangereux ; celle de Nasidius, atteint par le prester ; celle de Tullus, qui a ressenti la dent cruelle de l'hémorrhois , et chacun de ces terribles repliles, plus ou moins connus aujourd'hui, donne lieu, d'après lui, à des symplómes tout différents les uns des autres quant à leur nature, mais parfaitement identiques quant à la lerminaison, qui est toujours une mort prompte et süre. Jai choisi dans l'ouvrage quelques citations relatives à la botani- que, à la médecine en général, permettez-moi de terminer ces ci- lalions en m'occupant de l'homme , non pas de l'homme tel qu'il sort des mains de son Créateur, mais de l'homme civilisé , de l'homme trop civilisé, devrais-je peut-étre plutót dire. On trouve dans Martial une peinture parfaitement exacte des coutumes hygié- niques d'un peuple qui avait porlé au plus haut degré de perfection les raffinements de la civilisation. Les cosmétiques jouaient un grand róle chez les Romains, et les instruments de toute sorle trou- vés dans les ruines de Pompéia ont fait écrire des volumes sur cette matière délicate ; Marlial donne les détails les plus précis sur beau- coup de points intéressants. Il parle d'abord de Lælia qui abuse vrai- ment de la prothèse : Dentibus atque comis , nec te pudet, uteris emptis. Quid facies oculo, Lælia ? non emitur. — Dents et cheveux achetés par toi, tu n'as pas honte de t'en ser- vir; mais Lelia, comment remplacer l'œil absent ? on n’en vend pas. — ll y avail d'excellents dentistes, mais on ne savait pas encore fabriquer des yeux arlificiels ; c est dix-huit siècles plus tard qu'on a trouvé le moyen de placer les yeux d'émail. Porlait-on des perruques du temps de Martial? Il est certain que les femmes mellaient de faux cheveux, mais les hommes moins habiles , moins coquels , remédiaient à leur calvitie par un arlifice plus grossier , à en croire l'épigramme ой Martial dit que Phoebus couvrait son sincipul el ses tempes nus avec une peau de bouc. Voilà certes une singulière perruque , rudiment informe de ces édi- fices qui prirent un si majestueux développement sous Louis XIV. Marlial nous apprend encore qwalors , comme aujourd'hui, on avail des pommades pour teindre les cheveux , pour les rendre lui- sanls, mais on ne savait pas teindre la barbe. 21 Cana est barba tibi, nigra est coma; tingere barbam Non potes, һас causa est, sed potes, Ole, comam. Certains chauves qui ne pouvaient couvrir leur chef de cheveux pos- tiches et qui voulaient cacher leur infirmité, se peignaient la tête de manière à imiter une chevelure, car on trouve dans l'épigramme n? 47, liv. vr, la petite histoire que voici : Mentiris fictos unguento, Phoebe, capillos Et tegitur pictis sordida calva comis. Tonsorem capiti non est adhibere necessum : Radere te melitis spongia, Phoebe, potest. — Pour tondre cette chevelure menteuse qui couvre ta têle sale, ‘ce n'est pas un barbier qu'il te faut, mais bien une éponge. Dans un autre endroit, Martial parle d'ua convive qui se sert d'un cure-dents en bois de lentisque pour nettoyer sa bouche; et à Rome, dit M. Menière, on trouve encore aujourd'hui sur toutes les tables de petits instruments semblables ; en Espagne, en Algérie, les cure- dents en bois sont toujours de mode ; mais Martial connaissait aussi le cure-dents fait avec une plume laillée : Lentiscum melius est, sed si tibi frondea cuspis Defuerit , dentes penna levare potest. Je voudrais , Messieurs , vous faire suivre avec M. Meniére tous les détails que donne Martial pour tracer le portrait d’un homme élégant du beau monde d'alors, mais je craindrais d'abuser de votre bienveil- iante attention, je craindrais surtout de m'engager plus qu'il ne con- viendrait peut-être dans des détails qui vous amuseraient sans doute en vous inléressant, mais qui sortiraient trop de la spécialité de nos travaux. Encore une citation, cependant, Messieurs. Martial, aprés avoir dit que Gargisianus épile son visage, dit à l'aide de quoi : Psilothro faciem lævas et dropace calvam. Qu'est-ce donc que ce psilothrum ? Notre Quicherat dil : vigne blanche, employée comme épilaloire. Mais qu'est-ce que celle vigne blanche , vitis alba des annolateurs? « Pour peu qu'on ait herborisé dans les environs de Paris, dit M. Menière, on aura rencontré le long des haies , sur la lisière des bois, dans les terrains incultes , une plante grimpante qui couvre de ses longues tiges les arbustes des 99 environs , qui s'accroche à l'aide de ses vrilles à tout ce qu'elle peut atteindre et dont les fleurs blanches sont dioiques. C'est la bryone, bryona alba de Linné, dioica de Jacquin , et que le vulgaire connait sous les noms de couleuvrée, navet du diable, etc. Cette dernière dési- gnation se rapporle à la racine de cette plante , qui est de la famille des cucurbitacées et qui contient un suc âcre, violent purgatif et méme rubéfiant quand on l'applique sur la peau. Mais quelle est la patrie de la bryone dont se servaient les élégants de Rome pour épi- ler leur visage ? voilà ce que je ne sais pas, et je ne sais pas davan- lage sous quelle forme on en faisait l'application. » C'est ainsi, Messieurs , qu'un mot , une phrase , un vers devient pour M. Menière le texte de rapprochements spirituels et savants, d'enseignements utiles, diclés par la plus sûre érudition , la plus douce, la plus aimable philosophie, et c'est avec un charme toujours croissant, je vous assure, qu'on suit l'auteur dans l'étude compara- live qu'il fait à chaque ligne des mœurs, des connaissances, des pas- sions de deux sociétés qui ont vécu à vingt siécles de distance l'une de l'autre. Le style de M. Meniére est toujours clair, vif, original, plein d'images, et on peut appliquer à l'ouvrage enlier , sans crainte d'étre démenti par personne, ces deux vers si connus du législateur du Parnasse latin : Omne tulit punctum, qui miscuit utile dulci Lectorem delectando pariterque monendo. Ap. LACHESE. FAUNE DU MORBIHAN COLEOPTERES Catalogue des Coléoptères, Carabiques et Hydrocanthares TROUVÉS DANS LE MORBIHAN. . CARABIQUES. Cicindela campestris. Dromius glabratus. — hybrida. — spilotus. Rare. — germanica. Rare. — punctatellus. — littoralis. Lebia cyanocephala. — trisignata. Rare. Saint- — chlorocephala. Rare. Gildas de Rhuis. — hæmorrhoidalis. Odacantha menalura. Très-rare. Brachinus crepitans. Drypta emarginata. — explodens. Polistichus fasciolatus. — sclopeta. Demetrias atricapillus. — psophia. — elongatulus. — glabratus. Rare. Dromius linearis. Cymiudis lineata. — melanocephalus. Clivina arenaria. — A-signatus. Rare. — nitida. — A-nolatus. Rare. — polita. Rare. — 4-maculatus. — nea. Rare. Clivina gibba. Ditomus sulcatus. Très-rare. — fulvipes. Rare. — sphærocephalus ? Très- rare. Procustes coriaceus. Carabus catenulatus. — monilis. — cancellatus. — granulatus. Rare. — auratus. — purpurascens. — hortensis. — convexus. — cyaneus. Calosoma sycophanta. — inquisitor. — auropunctatum. Rare. Leistus spinibarbis. — fulvibarbis. Rare. — spinilabris. Trés-rare. Nebria brevicollis. — arenaria. Omophron limbatum. Rare. Elaphrus cuprens. Rare. — riparius. Notiophylus aquaticus. — biguttatus. Panagœus cruxmajor. — 4-pustulatus. Rare. Loricera pilicornis. Callistus lunatus. Rare. Chlœnius agrorum. — vestitus. — schrankii. Rare. — melanocornis. — nigricornis. — tibialis. Rare. —- holosericeus. Assez-rare. — sulcicollis. Très-rare. — festivus. Rare. Sarzeau. Oodes helopioides. Licinus silphoides. — depressus. Pogonus halophilus. Rare. Pagonus pallidipennis. Rare. — riparius. Badister bipustalus. — cephalotes Trés-rare. — peltatus. Rare. — humeralis. Trés-rare Prystonichus terricola. Calathus latus. Trés-rare. — cisteloides. — fulvipes. — fuscus. Sur les cótes. — rotundicollis. — melanocephalus. Taphria vivalis. Trés-rare. Sphrodrus planus. Rare. Anchomenus angusticollis. — memuonius. Très-rare — prasinus. — pallipes. — oblongus. Agonum marginatum. — modestum. — 6-punctatum. — parumpunctatum. — viduum. Rare. — lugens. Trés-rare. — lugubre. — nigrum. Très-rare. — pelidnum. Rare. — picipes. Rare. Olisthopus rotundatus. Feronia cuprea. — dimidiata. — lepida. — vernalis. — strenua. — erudita. Rare. — depressa. Rare. — melanaria. Très-rare. — nigrita. — anthracina. — minor. Rare. — concinna. — madida. — picimana. Très-rare. Feronia oblongopunctata. Rare. nigra. Rare. striola. parallela. Rare. terricola. Assez-rare. Cephalotes vulgaris Stomis pumicatus. Assez-rare. Zabrus gibbus. Amara eurynota. Acinopus megacephalus. Rare. obsoleta. trivialis. plebeja. communis. curta. familiaris. striatopunctata. ingenua consularis. Rare. patricia. Rare. apricaria. fulva. aulica. convexiuscula. Rare. Anisodactylus signatus. Rare. binotatus. : spurcaticornis. Harpalus sabulicola. oblongiuscula. Rare. chlorophanus. puncticollis. brevicollis. Assez-rare. signaticornis. Rare. mendax. Très-rare. germanus. dorsalis. pubescens. ruficornis. griseus. Assez-rare. œneus. distinguendus. honestus. neglectus. perplexus. Assez-rare. calceatus. л Harpalus limbatus. rubripes. Rare. semiviolaceus lardus. serripes. anxius. servus. picipennis. Stenolophus vaporariorum. vesperlinus. Acupalpus conspulus. ftare. dorsalis. brunnipes. Rare. meridianus. flavicollis. harpalinus. Trechus rubens. secalis. Rare. Bimbidium (onze divisions). blemus areolatum. T.-r. cillenum leachii. T.-rare. tachys rufescens. Rare. pumilio. Rare. bistriatum. nanum. Rare. Notaphus undulatum. 5° Div. 6° Div. ustulatum. Impressum. Trés-rare. orichalcium. Très-rare. Striatum. peryphus rupestre. fluviatile. Trés-rare. cruciatum. Rare. femoratum. Assez-rare. deletam. Trés-rare. ceeruleum. decorum. rufipes. Rare. elongatum. Trés-rare. celere. sturmii. Rare. pusillum. Assez-rare. assimile. Rare. obtusum. Trés-rare. guttula. Bimbidium biguttatum. — vulneratum. Rare. — lopha 4-guttatum. — laterale. Trés-rare. — 4-pustolatum. Assez-rare. Bimbidium 4-maculatum. Rare. articulatum. Tachypus pallipes. Très-rare. flavipes. 218 espéces. HYDROCANTHARES. Hygrobia hermanni. Haliplus ferrugineus. Dytiscus marginalis. — circumductus. Très-rare. — perplexus. Trés-rare. — circumflexus. Hare. — punctulatus. Trochalus rcselii. Acilius sulcatus. Graphoderus cinereus. Hydaticus transversalis. Trés-r. — hybueri. Trés-rare. Liopterus oblongus Cymatopterus fuscus. — striatus. — bogemanni. — dolabratus. Rantus notatus. Trés-rare. — agilis. Trés-rare. — adspersus. Trés-rare — collaris. Colymbetes ater. — 4-guttatus. — fenestratus. — fuliginosus. — bipustulatus. — bipunctatus. — subnebulosus. Trés-rare. — maculatus. — didymus. — brunneus. — paludosus. — femoralis. Laccophilus testaceus. — minutus. — interruptus. Noterus crassicornis. — sparsus. Noterus levis. flavicollis. lineatus. impressus. bistriolatus. caesus. Hydroporus 12-pustulatus. depressus. distinctus. picipes. piceus. 6-pustulatus. neglectus. planus. deplanatus. nigrita. tristis. pictus. geminus. minutissimus. lineatus. confluens. reticulatus. ( Extréme- ment rare.) granularis. flavipes. cuspidatus. incequalis. Hyphidus ovatus. variegatus. Gyrinus natator. marinus. Trés-rare. minutus. Rare. Orectochilus villosus Т1 espèces. D" FouQUET. CATALOGUE COQUILLES TERRESTRES, MARINES ET FLUVIATILEN QUI VIVENT DANS LE DÉPARTEMENT DU MORBIHAN. ANNÉLIDES SÉDENTAIRES. Sabellaria alveolaria. Spirorbis nautiloides. Serpula vermicularis. Vermilia triquetra. Arenicola picastorum. Dentalium novemcostentum, — dentalis. — leve. CIRRHIPEDES. Anatifa lovis. Pollicipes cornucopia. Balanus cylindraceus. — sulcatus. Creusia verruca. CONCHIFERES. Teredo navalis. | Pholas crispata. Pholas dactylus. | — parva. — candida. Solen siliqua. Solen vagina. — ensis. — legumen. — pigmeus. Solecurtus antiquatus. Gastrochomna modiolina. Mya arenaria. — truncata. Rare. Lutraria elliptica. — compressa. — solenoides. Rare. Tracia pubescens. — phaseolina. — corbuloides. Rare. — rupicola. Rare. Mactra stultcrum. — solida. — deltoida. — helvacea. Osteodesma corbuloides. Amphidesma lactea. Mesodesma donacilla. Rare. Corbula nucleus. — sulcata. Pandora rostrata. Saxicava rugosa. Petricola striata. — rupericola. — ochroleuca. — semilamellata. Venerupia perforans. — irus. Psammobia vespertina. — tellinella. — feroensis. Lucina lactea. Tellina crassa. — depressa. — tenuis. — carnaria. — donacina. — fabula. — solidula. — bimaculata. Rare. Cyclas cornea. Rare. 8 Cyclas lacustris. — pivicola. — fontinalis. Rare. Donax anatinum. — complanata. VENUS Divisées en 5 genres par Sowerby. Venus verrucosa. — EBRU — gallina. — casina. Cytherea chione. Arthemisia lunaris. — exoleta. Tapes decussata. — aurea. — geographica. (Variété) — bicolor. — virginea. — pullastra. == fionda: — pectinula. Rare. Circe (Pas d'exemplaires.) Cardium serratum. — tuberculatum. — rusticum. — edule. — crenulatum. — echinatum. — exiguum. == Oe: — aculeatum. Arca quayi. Petunculus pilosus. Rare. Nucula margaritacea. Unio littoralis. — pictorum. Anodonta anatina. — cygnea. — intermedia. Modiola adriatica. — barbata. — tulipa. Rare. Mytilus edulis. | Mytilus minimus, Pinna pectinata. Pecten maximus. opercularis. varius. pusio. Rare. (Genre Hin- niles de Defrance. ) Chiton fascicularis. albidus. Patella vulgata. pellucida. 99 Ostrea edulis. — hippopus. Rare. Anomia fornicata. — ephippium. Terebratula truncata. | MOLLUSQUES. Emarginula fissura. Pileopsis ungarica. Crepidula laevigata. Ancylus fluviatilis. Bulla lignaria. (Genre Akera de Gmelin.) : cornea. Bulla fragilis. Laplysia depilans. Testacella haliotidea. Helix maritima. Rare. aspersa. pisana. hortensis. nemoralis. hispida. rotundata. nitida. cellaria. sericea. corisopitensis Carocolla lapicida. Clausilia plicatula. rugosa. Bulimus acutus. Succinea amphibia. Auricula myosolis. Cyclostoma elegans. Planorbis согиеизѕ. carinatus. . Rare. Planorbis vortex. Lymneea stagnalis. — ovata. — palustris. — peregra. — auricularia. — leucostoma. — minuta. Alvania montagui. Rissoa grossa. — occidentalis. — costata. — exigua. Eulima polita. Rare. Valvata piscinalis. Rare. Paludina muriatica. Rare. Natica castanea. Rare. — palidula. — valenciennensii. Janthina communis. Velutina capuloidea. Rare. Haliotis tuberculata. Tornatella fasciata. Scalaria communis. Trochus couulus. — pyramidatus. — matonii. — magus. — umbilicaris. — cinerarius. Monodunta draparnaudi. — jussieui — corallinus. — veilloti 30 Turbo tuber. Triton cutaceum. Littorina littorea. Purpura lapillus. — rudis. Buccinum undatum. — neritoides. — recticulatum. — retusa. — cuvieri. — ccerulescens. — coccinella. Phæsianella vieuxii. — fasciolatum. — pulla. Columbella aurentia. Rare. Turritella cornea. Cyproa pediculus. Cerithium lima. — pulex. Murex cinguliferus. — coccinella. — erinaceus. 94 Genres — 206 Espèces. Îl existe , sans aucun doule, quelques coquilles qui ne sont pas nommées dans mon catalogue, mais je ne les ai pas vues dans 20 ans de recherches , et je n'ai pas voulu y admettre celles dont l'authen- licilé d'origine n'élait pas constante pour moi. Je n'ai pas trouvé, dans le Morbihan, un seul individu du genre Pupa; je ne serais pas surpris qu'il en existat cependant quelques uns, le Muscorum peut-être. Je ne connais pas assez les individus du genre Patella, pour affirmer qu'il n'y en a pas, dans le Morbihan, d'autres espèces que les deux que j'ai sigualées. Cependant, avec toules les imperfections que l'on pourrait trouver а mon calalogue , je ne pense pas qu'on puisse faire monter à plus de 220, le nombre des espèces de coquilles vivantes dans notre déparlement. Vannes, le 7 février 1858. р" Fouquet. ESSAI SUR QUELQUES. FAMILLES. D'HYMÉNOPTÈRES l'ai cru qu'en donnant un apercu des espéces de quelques famil- les d'hyménoptéres, observées dans les environs de Saumur, je pour- rais rendre service à ceux qui voudront se livrer à des recherches sur ces insectes. Гаі suivi la classification de Lepelletier de Saint- Fargeau. Il y a plusieurs espèces que je n'ai pas pu délerminer. Sont- elles nouvelles? Je n'en sais rien. Je me contenterai donc d'en don- ner la description en les désignant par une lettre de l'alphabet, pour ne pas allacher des noms nouveaux à celles qui en auraient déjà reçus et ne pas embrouiller davantage une nomenclature beaucoup ігор surchargée. FAUNE SAUMUROISE. HYMÉNOPTÈRES. APIS mellifica. BOMBUS lapidarius — interruptus — montanus — sylvarum — italicus — hortorum — terrestris — ericetorum — apricus. 32 ҮЕ$РА crabro — vulgaris — gerii —- rufa. POLYSTES — gallica — diadema — Geofroyi. ANTHOPHORA nidulans — albigena — bimaculata — binotata — squalida — flabellifera — crassipes — vara — pilipes fulvitarsis — intermedia — retusa — parietina — mixta. MACROSERA malvæ — alticincta. EUCERA longicornis — linguaria — distincta. XYLOCOPA violacea. PANURGUS dentipes — lobatus — ater. DAZYPODA hirtipes — plumipes. ANDRENA pilipes — nitida — cineraria — thoracica — velutina — lucida — albicans — fulva — flessæ — bicolor — fulvago — florea — cingulata — marginata. А. Tête noire; ses poils gris sur le bord du chaperon, noirs autour des yeux el sur le sommet de la têle. Poils du corselet roux en dessus, cendrés en dessous. Abdomen noir brillant, couvert de poils cendrés assez rares. Cinquième segment bordé de poils bruns, noirs au milieu. Dessous des segments bordés de poils cendrés. Les qua- tre pattes antérieures et les deux cuisses postérieures, noires. Les deux jambes postérieures et tous les tarses, ferrugineux. Point mar- ginal el nervures des ailes d'un jaune testacé. Longueur six lignes (1). Femelle. B. Tête noire; ses poils noirs avec un reflet roux: poils du corselet gris roussâtre, un peu plus foncé sur le dos. Abdonien noir : légè- rement couvert sur les trois premiers segments de poils cendrés assez longs, le quatrième couvert de poils roux et noirs, le cinquième entièrement noir ainsi que les poils de l'anus. Pattes noires, cuisses couvertes de. poils d'un roux clair, les poils des jambes et des tarses, roux foncés, à l'exceplion des deux jambes postérieures, dont les poils sont d'un roux vif sur les deux faces. Ailes transparentes, jau- nâtres. Nervures et point marginal testacés. Longueur six lignes. Femelle. (1) Pour suivre la marche indiquée par Lepelletier , j'indiquerai les longueurs en lignes, pour comparer plus facilement avec les espèces qu'il a décrites. 38 Un individu a les poils de la face complétements noirs et les qua- trième el cinquième segments couverts de poils noirs. C. Tête, corselet, abdomen et cuisses couverts de poils roux ; bords des quatre premiers segments largement décolorés et couverts de poils couchés qui forment quatre bandes assez marquées. Cinquième segment el anus couverts de poils hérissés noirs. Poils des jambes noirs, à l'exception des deux postérieures dont le dessous seulement est du méme roux que le corps. Les quatre derniers tarses roux tes- tacés. Ailes transparentes, avec le bord légèrement enfumé. Nervu- res lestacées. Longueur six lignes. Femelle. D. Ressemble à la précédente espèce; mais les poils de la tête plus noirs. Abdomen très-peu velu ; quelques poils blancs et rares sur le bord des segments qui ne sont pas décolorés. Poils des jambes posté- rieures cendrés en dessous. Taille un peu plus petite. Le mâle semblable. Poils du sixième segment et des jambes rous- sdlres. E. Semblable a la fulva, mais tous les poils du dessus du corselet et du dessus de l'abdomen, d'un beau jaune doré. Je n'ai jamais ren- contré celle espèce qu'au mois de mai, bulinant sur l'épine-vinette (Berberis vulgaris). La fulva paraît dès le inois de mars. F. Tête noire. Ses poils noirs. Dessus du corselet roux vif; le dessous presque noir; poils des deux premiers segments de l'abdomen d'un roux vif; les autres d'un noir profond. Pattes noires, leurs poils noirs. Poils des hanches, des pattes postérieures , d'un beau blanc, ainsi que quelques poils aux jambes des mémes pattes. Tarses ferru- gineux. Ailes transparentes, le bout un peu enfumé, nervures ferru- gineuses. Longueur cinq lignes. Femelle. G. Tête noire, tous ses poils noirs, ceux du verlex un peu roux cen- 3 34 dré. Corselet noir; poils du dessus roux cendré, ceux du dessous noirs. Abdomen noir; très-velu surtout sur les deux premiers seg- ments. Les premier, deuxième et troisième à poils cendrés, avec quelques poils noirs. Le quatrième presque tout noir, les bords légè- rement cendrés. Les deuxième, troisième et quatrième ciliés de poils blancs. Anus noir. Dessous des segments bordés de poils bruns cen- drés. Pattes : les quatre antérieures à poils bruns ferrugineux, les poils des palettes et des deux cuisses postérieures, blanc cendré. Tarses ferrugineux à poils ferrugineux. Femelle. Longueur cinq lignes et demie. Le mâle. Moins velu sur l'abdomen ; le bord des deuxième, troi- sième, quatrième el cinquième segments cilié de blanc. Anus fer- rugineux, poils de toutes les pattes d'un gris roussatre. H. Tête noire; les poils d’un noir roussalre, dessus du corselet roux vif, le dessous et les côtés, ainsi que le métathorax, roux cendré. Ab- domen noir; dessus des deux premiers segments couverts au milieu de longs poils soyeux, roux dorés; troisième et quatrième à poils courts gris roux, et légèrement ciliés de poils blanchâtres; cin- quiéme noir. Pattes noires, poils des palettes et des cuisses cendrés, ceux des tarses ferrugineux. Ailes transparentes, nervures ferrugi- neuses. Longueur cinq lignes. Femelle. Des mâles, que je crois apparlenir à celte espèce, ont les poils de la têle blancs mélés de noir sur le verlex. Les cils des deuxième, troisième et quatrième segments plus prononcés et les poils des jam- bes gris roussatre. Téte noire ; ses poils gris roux. Des poils de méme couleur, cou- vrent le dessus et le dessous du corselet, ainsi que les paltes et toutes les cuisses. Abdomen noir, trés-lisse sur les bords des quatre pre- miers segments, qui sont un peu décolorés ; le reste assez fortement ponclué et couvert de poils hérissés blanchatres, mais très-peu épais. Cinquième segment à poils ferrugineux. Poils des jambes postérieures noirs en dessus, blanchâtres en dessous. Aïles transparentes, nervu- res ferrugineuses. Longueur cing lignes. Femelle. 1. Ressemble un peu à la précédente, mais plus pelite. Tous les poils roussálres ; abdomen noir trés-lisse, les bords latéraux des deuxième, troisième el quatrième segments tres-finement ciliés de poils blancs, le cinquiéme ainsi que l'anus, bordés de points ferrugineux. Lon- gueur quatre lignes. Femelle. K. Téle noire; ses poils cendrés, ceux du vertex noirs. Dessus du corselet roux cendré. Dessous ainsi que les cuisses, cendrés. Abdo- men d'un noir bleu; le bord des qualre premiers segments cilié de poils touffus, d'un beau blanc. les poils supérieurs de ces bandes, un peu roux, ce qui leur donne un aspect ombré. Le cinquième seg- ment et l'anus à poils bruns ferrugineux. Les deux jambes anté- rieures à poils gris roux, les postérieures à poils fauves dorés. Ailes transparentes, le bout légèrement enfumé. Longueur cing lignes et demie. Femelle. L. Les poils de la téte roux, ceux du vertex noirs. Poils du dessus du corselet, entre les deux ailes, noirs, tous les autres roux. Abdomen noir ponctué : premier segment à poils roux hérissés, bord des deu- xième, troisième et quatrième segment finement cilié de blanc, cin- quième noir à la base, largement cilié de poils roux vif, s'éclaircis- sant sur les côtés. Anus roux. Poils des pattes roux, les tarses ferru- gineux, le dernier article pâle, le bout des crochets et la pelotte noirs. Ailes transparentes, nervures brunes. Longueur cinq lignes et demie. Femelle. Variété. Cinquième segment noir, un peu fauve sur les côlés. M. Poils de la téte roux, ceux du vertex noirs. Tous les poils du cor- selet roux. Abdomen noir, finement ponctué , nu. Les quatre pre- miers segments , bordés de poils roux. Ceux du premier relevés, les autres appliqués. Le cinquième couvert de poils bruns couchés. Anus noir. Tous les autres poils roux, ceux des deux jambes postérieures d'un roux plus vif. Longueur à peine cing lignes. Femelle. N. Poils de la téte cendrés, plus noirs sur le verlex. Ceux du dessus du corselet gris roux, mélés de poils noirs, ceux du dessous cendrés. 36 Abdomen noir, brillant, ponctué. Premier segment avec quelques poils hérissés blancs jaunatres, le bord légèrement cilié , les cils in- terrompus au milieu. Deuxième, troisième et quatrième segments ciliés de poils blancs jaunâtres, le cinquième à poils bruns, noirâtres au milieu avec une touffe de poils blancs jaunatres de chaque côté. Anus noir avec ses côtés blancs jaunâtres. Tous les poils du dessous et des cuisses blancs jaunâtres. Tarses ferrugineux, poils du dessous des premiers arlicles, fauves. Les crochets et la pelotte noirs. Ailes transparentes légèrement enfumées au bout. Longueur quatre lignes et demie à cinq lignes. Femelle. 0. Tête noire; ses poils gris roussâtres. Corselet ; le dessus et l'écus- son entièrement nus, couleur brun lie de vin, sans aucun reflet, le reste du corselet noir brillant et couvert de poils gris roussâtres. Abdomen noir, brillant; premier segment avec quelques cils blancs sur les cólés, deuxieme bordé de cils blancs interrompus sur le mi- lieu, troisième et quatrième, ciliés de blanc, cinquième, couvert de poils couchés, s’éclaircissant sur les côtés. Poils des cuisses, des jambes et des tarses, blancs roussatres : palette des hanches, blanche. Ailes colorées, transparentes, avec le bout plus foncé. Longueur quatre lignes et demie. Femelle. Male. Corselet velu, tous les poils cendrés, à l'exception du sixième segment de l'abdomen et du dessous des larses, dont les poils sont roux. Ailes également colorées en jaune. Longueur 4 lignes. J'ai pris cette espèce accouplée au mois de juillet. р. Poils de la tête roux, dessus du corselet d'un roux vif plus pale sur les côtés, ainsi que sur toules les parties inférieures, les pattes com- prises. Abdomen, noir brillant. Premier segment avec quelques poils hérissés, blancs jaunâtres. Deuxième et troisième, avec une bande largement interrompue, de cils blancs jaunâtres, le quatrième ayant la bande de cils complete. Cinquième, bordé de roux clair. Poils de l'anus roux. Longueur 4 lignes. Femelle. Q. Poils de la face roux pâle, ceux du vertex plus foncés. Corselet noir; poils du dessus et de l'écusson courts et comme veloutés, d'un 37 roux foncé, les poils plus longs et plus pâles sur les côtés. Metatho- rax couvert de points enfoncés et comme chagrinés, ayant quelques poils rares, d’un roux pâle. Abdomen plus étroit que dans les autres espèces, noir, couvert de points enfoncés fins et très-rapprochés, qui le rendent presque mat. Premier segment nu, deuxième et troi- sième ayant sur les côtés un filet de cils fins et serrés ; quatrième entièrement bordé de cils également très-fins, le cinquième ayant une bordure de cils roux s'élargissant un peu au milieu. Poils du dessous des segments et des pattes, roux. Ailes transparentes, le bout un peu enfumé. Longueur quatre lignes un quarl. Femelle. R. Tous les poils d'un roux cendré, un peu plus vif sur le corselet, un peu plus pàle sur les parties inférieures. Abdomen noir brillant, quelques légers cils sur les bords latéraux du premier segment, deu- xième segrnent ayant une bande de cils trés-interrompue au milieu, troisième, une bande continue amincie au milieu, quatrième, une bande complète, cinquième et anus garnis de poils d'un roux assez vif. Tarses des quatre pattes antérieures, ferrugineux , jambes et premier article des tarses postérieurs foncièrement fauves. Longueur quatre lignes et demie. Femelle. Varie : le premier article des tarses intermédiaires foncièrement fauve. Mâle. Poils de la face presque blancs, ceux du corps cendrés, bords des cils, interrompus sur les deuxième et troisième segments; une tache foncière noire sur le milieu des jambes postérieures. Un peu plus petit. S. Semblable à la précédente, mais poils généralement plus pales , cils des quatre premiers segments plus longs el moins serrés, le cin- quième, roux pale. Abdomen beaucoup plus étroit. Toutes les jambes foncièrement noires. Longueur quatre lignes. Femelle et mâle. T. Tête et corselet noirs, tous les poils blancs, trés-longs et peu touf- fus. Deuxième, troisième et quatrième segments de l'abdomen, bor- dés de cils blancs très-lâches, à peine interrompus sur le deuxième segment. Cinquième segment brun au milieu, blanc sur les cólés. 38 Poils des jambes très-longs et peu serrés. Longueur quatre lignes. Femelle. U. Poils de la tête et du corselet d’un roux gris et peu fournis. Abdo- men trés-brillant. Bord latéral des deuxième et troisième segments, ciliés de poils fins blancs. Chacune de ces bandes, surmontée d'un rang de cils beaucoup plus longs et formant un peu le cercle. Cin- quième segment cilié de poils un peu roux, surmontés également d'un rang de longs cils blancs. Poils du dessous des tarses un peuroux. Longueur trois lignes. Femelle. M: Semblable à l'espèce précédente, mais tous les poils plus pales, plus laches et plus hérissés. Un peu moins de trois lignes. Femelle. X. Téte noire, ses poils trés-touffus, blanc jaune; ceux du sommet noirâtres. Poils du corselet gris jaunâtre mêlés de quelques poils noirs. Les deux premiers segments de l'abdomen, couverts de poils hérissés gris jaunâtre ; les trois derniers de poils hérissés noirs, plus courls. Tous les segments bordés de poils blanc jaunâtre, demi-hé- rissés; le cinquième bordé plus finement que les autres. Poils des pattes, gris jaunâtre. Longueur quatre lignes еі demie. Femelle. Il me reste encore une grande quantité de mâles que je ne puis rapporter à aucune des espèces que je possède, PREMIERE SECTION. HALICTUS quadristrigatus — zebrus — sexcinctus — nidulans — interruptus. DEUXIEME SECTION. HALICTUS xanthopus — sexnotatus — leucosonius — lineolatus — levigatus — vulpinus - - levis — minutus. A. Noir ; tous les poils gris cendré. Extrémité du métathorax arrondie, au lieu d'être dentée comme dans le levigatus et bien 39 moins rugueuse. Abdomen brillant, base du premier segment ayant quelques poils hérissés ceudrés, base des deuxième et troi- sième segments ayant des poils couchés blancs ; quatrième et cin- quième entièrement couverts de poils couchés blancs, ces poils très- fins ressemblant presque à une poussière. Poils des larses un peu ferrugineux. Ailes transparentes. Longueur trois lignes et demie. Femelle. B. Poils de la tête et du corselet, roux vif, ainsi que ceux de toutes les pattes. Abdomen noir ; base де tous les segments couverte de poils roux, peu serrés et plus longs que dans les autres espèces. Ongles testacés. Ailes transparentes. Longueur trois lignes et demie. Fe- melle. TROISIÈME SECTION. HALICTUS virescens — seladonius — morio. C: Tête et corselet verts, leurs poils roux: abdomen vert, base du premier segment couverte de poils hérissés; le reste du premier seg- ment, ainsi que les quatre suivants, couverls de poils courts, cou- chés, roux , mais n'empéchant pas de voir la couleur foncière. Tous les segments bordés d'un rang de cils blanchâtres, sur lesquels vien- пеп! s'appuyer les poils roux des segments, се qui figure comme un second filet fauve, sur le bord supérieur des cils. Ailes fauves. Longueur deux lignes et demie. Femelle. QUATRIÈME SECTION. HALICTUS nigripes — albipes — interruptus. NOMIA diversipes. COLLETES hirta — fodiens. À. Tête noire , les poils de la face cendrés, ceux du sommet roussà- tres, poils du corselet roux en dessus, cendrés en dessous, abdomen noir, tous les segments bordés à leur extrémité d'une bande de 40 poils blancs ; anus noir; pattes couvertes de poils cendrés un peu roussâtres, aîles transparentes, longueur trois lignes et demie. B. Poils de la face gris jaunâtre, plus foncés sur le sommet, corselet noir, les poils roux en dessus, jaune cendré en dessous, abdomen noir, premier segment fortement ponctué, couvert à la base de poils hérissés, jaune pâle et d'une bande de poils fins et serrés de méme couleur au bord poslérieur; second segment couverl au milieu, ainsi que les suivants, de poils fins et serrés, d'un noirun peu ferru- gineux, ayant leur base et leur extrémité garnies d'une bande de poils jaune pâle. Toutes ces bandes disposées de manière à former des bandes noires et jaunes de méme largeur. Anus noir. Ailes transparentes et courtes, longueur quatre lignes. C. Téte et corselet, à poils cendré brunátre en dessus, gris en des- sous. Premier segment de l'abdomen, noir et couverl de trés gros points enfoncés : quelques poils cendrés hérissés à la base; le bord inférieur, terminé par un bourrelet d'une couleur foncière fauve et surmonté d'un rang de poils cendrés. Second segment finement ponctué ainsi que les suivants et ayant à leur base et à leur bord in- férieur, un rang de poils cendrés. Anus noir, palles noires, leurs poils cendrés. Ailes transparentes, nervures et point marginal noirs, longueur cinq lignes. CALICODOMA muraria. OSMIA cornuta — bicornis — fronticornis — emarginata —- bicolor — fulviventris — aurulenta == marginella — cœrulescens — adunca — spinolæ — hyalipennis — punclatissima. А. Téle noire, ses poils gris, corselet noir, ses poils blancs, abdomen entièrement nu, les trois premiers segments ferrugineux en dessus, les deux premiers seulement ferrugineux en dessous; le quatrième segment noir, finement bordé de ferrugineux ; cinquième noir, anus noir, bordé d'une villosité blanche, pattes noires, leurs poils blancs, palette ventrale blanche, longueur trois lignes. MEGACHILE willugby — pyrina — ericetorum — centuncularis — circumcincta — argentata, А. Téle noire, lous ses poils noirs, poils du corselet roux en dessus, presque noirs sur les côlés et en dessous. Abdomen noir hérissé de poils roux sur les quatre premiers segments, noirs sur le cinquième et l'anus. Jambes noires, à poils roux, palette ventrale rousse, noire sur les bords. Longueur cinq lignes, femelle. B. Téte noire, ses poils blancs sur la face, corselet à poils cendrés. Abdomen noir : premier segment, avec quelques poils hérissés cen- drés sur les côtés, les autres nus, mais tous bordés d'un rang de cils d'un blanc pur; ces cils beaucoup plus minces sur le dos que sur les côtés. Anus noir, palette ventrale à poils blancs; le dernier segment et quelquefois les deux derniers à poils noirs; poils des palles blancs. Longueur quatre lignes. Mâle semblable; les poils plus nombreux et d'un cendré plus roux. Dernier article des antennes peu comprimé, dernier segmentde l'ab- domen presque entier et sans dents, entièrement noir. ANTHOCOPA papaveris. ANTHIDIUM manicatum — oblongatum — punctatum — lituratum — strigatum. HERIADES truncorum — campanulorum, CHELOSTOMA maxillosa — culmorum. PSITHYRUS rupestris — frutetorum — campestris — vestalis. » MELECTA armata — punctata. Les Melecta armata et punctata me semblent les deux espèces que nous possédions, quoique la description que donne M. Lepelletier de l'armata, ne se rapporte pas entièrement à la nôtre. Dans tous les individus que j'ai été à méme d'observer, l'écusson est toujours cou- vert de poils noirs ainsi que la base des ailes. Un faisceau de poils blancs sous les premieres ailes el un semblable derrière les secondes, poils de l'abdomen entierement noirs, à l'exception des taches qui sont d'un blanc pur. Chez d'autres individus, les taches des deux premiers segments de l'abdomen, sont mélées de poils couleur de suie et les deux peliles taches des troisième et quatrième, sont de cette dernière couleur. On arrive ainsi à des individus d'un noir profond, sans aucune trace de poils blancs méme sur les jambes, 42 avec les larses plus ou moins ferrugineux, ce qui donnerait les Melecta testaceipes et aterrima. CROCISA ramosa — orbata. EPEOLUS variegatus. NOMADA fulvieornis — succineta — sexfaciata — solidaginis — brevis (Carcel) — germanica — jacobei — lineola — zonata — quadrimaculata — furva — ruficornis — panzeri. A. Têle noire; bouche, bord du chaperon et orbite antérieur des yeux, ferrugineux. Antennes noires en dessus, ferrugineuses en des- sous. Corselet noir : prothorax, point calleux, écusson et portécus- son, ferrugineux brillant. Abdomen : premier segment ferrugineux, deuxième ferrugineux en dessus, noir sur les côtés, troisième noir, offrant encore une teinle ferrugineuse au milieu; ces deux derniers segments ayant, de chaque cóté, chacun une grande lache ovale, d'un blanc pur. Quatrième et cinquième segments noirs, ayant cha- cun au milieu de leur bord postérieur, une grande tache blanche, en carré long. Anus noir en dessous; les trois premiers segments ferrugineux ; les quatrième et cinquième noirs. Les quatre pattes antérieures ferrugineuses, les hanches marquées de noir, les deux cuisses postérieures, presqu’enticrement noires; les deux jambes ayant une longue tache noire sur le devant, le reste ferrugi- neux. Ailes trés transparentes à reflets violets,le bord trés enfumé et uettement tracé. Longueur un peu plus de trois lignes. Plus large, proportion gardée, que les autres espèces. Cette belle espèce butine sur les fleurs d’Eringium. CERATINA cyanea -— albilabris. DIOXIS cincta. CŒLIOXIS conica — rufescens — punctata — elongata — octodentata. A. Tête noire, ses poils cendrés, mandibules ferrugineuses, noires à la pointe. Les deux premiers articles des antennes noirs, les autres fer- rugineux. Corselet noir, une ligne de petits poils blancs couchés, partant des épaulettes et dépassant la naissance des ailes. Plusieurs autres peliles laches sur le corselet et à la naissance de l'écusson, 43 dessous du corselet couvert de poils cendrés. Abdomen noir, les cinq segments bordés de poils cendrés, en dessus et en dessous ; ces lignes s'élargissant brusquement sur les côtés. Anus noir à la base, le reste d'un roux vif. Le cinquième segment ferrugineux en des- sous, toutes les pattes ferrugineuses. Longueur trois et demie à qua- tre lignes, femelle. STELIS aterrima — phœoptera — nasuta. PROSOPIS variegata — signata. SPHECODES nigripes — gibbus — maculatus — geofrellus. EUMENES olivieri — pomiformis. DISCŒLIUS zonalis. PREMIÈRE SECTION. ODINERUS spinipes — melanocephalus — crenatus — lindenii — minutus. А. Téle noire, un très pelil point sur le front et un autre plus petit derrière les yeux. Corselet noir, deux pelits points jaunes sur le pos- técusson. Abdomen noir, les deux premiers segments ayant à leur bord inférieur une bande régulière jaune, se continuant en dessous sous les deux segments. Pattes noires, le devant des quatre jambes antérieures ferrugineux, la base des deux jambes postérieures de la méme couleur, tarses noirs. Ailes presque noires près de la côte; écaille brune avec un point jaune. Longueur trois lignes, femelle. Le mâle. Tête noire, chaperon et base des mandibules jaunes, un très petit point derrière les yeux. Antennes noires, premier article jaune en dessous, les cinq derniers ferrugineux en dessous; le cro- chet entièrement ferrugineux. Corselet noir, deux taches jaunes sur le prothorax. Le second segment de l'abdomen en dessous, ayant seulement deux points latéraux jaunes. Jambes jaunes, avec un peu de noir à la partie interne des deux antérieures. Genoux el tarses ferrugineux. Ailes comme la femelle, écaille bordée de jaune. B. Téte et antennes noires, labre trés peu échancré. Corselet noir, armé postérieurement de deux pointes. Deux taches blanches, quel- quefois peu apparentes, sur le prothorax. Abdomen noir, les premier 44 et deuxième segments portant en dessus, à leur bord inférieur, une bande régulière blanche, ne se prolongeant pas sous le premier seg- ment el quelquefois réduite à deux taches latérales, sous le se- cond. Pattes noires, tous les genoux ferrugineux. Les deux jambes antérieures seules, ferrugineuses en devant. Ailes brunes, écaille brune bordée de blanc. Longueur trois lignes, femelle. Mâle. Labre et base des mandibules blancs. Antennes noires; pre- mier article et les six derniers, blancs en dessous, le crochet noir. Pattes noires, toutes les jambes blanches en devant, les tarses ferru- gineux. Longueur de deux et demie à trois ligues. C. Semblable à l'espèce précédente, mais premier segment de l'ab- domen ferrugineux, en dessous et sur les côtés, bord blanc du se- cond segment ne se prolongeant pas en dessous. Un mâle, que je crois devoir rapporter à cette espèce, à cause de l'absence de la bande blanche sous le second segment, a le premier segment de l'abdomen noir et les antennes noires. D. Mâle. Tête noire; chaperon blanc échancré, mandibules noires, anlennes noires, premier article blanc en devant, l'extrémité des antennes ferrugineuse. Corselet noir, deux petits points ronds sur le prothorax. Portécusson prolongé et très relevé. Les deux premiers segments de l'abdomen noirs, bordés de blanc, les suivants d'un noir fuligineux, un tache blanche sur le milieu des quatrième, cin- quième et sixième en dessous, le deuxième ayant un point blanc sur les côtés ; les suivants bruns ferrugineux. Pattes : les cuisses noires, les quatre jambes antérieures et les tarses blancs, les deux jambes postérieures, blanches à la base, noires à l'extrémité. Tarses bruns, le premier article trés renflé au milieu et aussi gros que le bas des jambes. Longueur un peu moins de trois lignes. DEUXIÈME SECTION. ODINERUS parietum — crassicornis — elegans — bifasciatus. ALASTOR atropos. CERCERIS labiata — ferreri — interrupta — arenaria — ornata — quadricincta — brevirostris. 45 PHILANTHUS coronatus — triangulum., PSEN ater —- atratus — equestris. NISSON interruptus — geniculatus — dufourii — wesmaelii — nigripes — panzeril. GORITES campestris — mystaceus. HOPLISUS quinquecinelus — lacorderii ? EUSPONGUS vicinus — laticinctus. LESTIPORUS bicinctus. PSAMMECIUS punctulatus. ARPACTUS levis — formosus. ALYSON bimaculatus — lunicornis. A. Tête noire ; chaperon, orbite interne des yeux et une ligne s'éle- vant entre les antennes blancs. Mandibules blanches, la pointe noire. Antennes noires en dessus; premier article blanc en dessous, les autres ferrugineux, le dernier seul noir. Prothorax ayant une ligne blanche interrompue. Du milieu de chaque angle exlérieur part une ligne blanche qui s'éléve jusque sur le point calleux. Ecus- son blanc, portécusson noir. Abdomen noir, une tache ovale blan- che à la base du deuxième segment, anus ferrugineux. Pattes, hanches noires, pàles à l'extrémilé, cuisses el jambes ferrugineu- ses, les quatre jambes antérieures, pâles en devant. Ailes transpa- rentes avec un nuage brun traversanl la partie caractéristique, écaille ferrugineuse. Longueur trois lignes, femelle. Celle espèce semble se rapprocher de la description de l'Alyson Ratseburgii de Dahlbom, mais ici les pattes sont toutes ferrugineuses. MELLINUS arvensis. CEMONUS lugubris — unicolor. PAMPHREDON minutus. CRABRO cephalotes — striatus — comptus — lituratus — chrysostomus — ornatus. SOLENIUS lapidarius — grandis — fuscipennis — vagus. BLEPHARIPUS signatus — quinquemaculatus. CERATOCOLUS phylanthoides — striatus. TYREOPUS eribrarius — patellatus, 46 CROSSOCERUS scutatus — varius — pallidipalpis — wesmaelii — gonager — podagricus — aphidium — leucostoma — niger — luteipalpis — palmipes ? — subpunctatus. LINDENIUS albilabris — pauzeri — apicalis — venustus — brevis — curtus. А. Tête noir, antennes noires, mandibules noires ferrugineuses au milieu. Corselet noir, espace subcordiforme rayé obliquement, abdo- men noir. Pattes noires, les deux jambes antérieures jaunes en de- vant, les quatre postérieures avec les genoux pales. Ailes transpa- rentes, écaille ferrugineuse. Longueur une ligne et demie à une ligne trois quarts. CORYNOPUS tibialis. OXIBELUS mucronatus — fissus — nigripes -- bellicosus — ruptor — quatuor- decim notatus — tridens — uniglumis. TRIPOXILON figulus. MISCOPHUS bicolor. DINETUS pictus. TACHITES obsoleta ? — pompiliformis — panzeri — pectinipes — unicolor ? Les Tachites unicolor, que j'ai rencontrés, se rapportent assez à la description qu'en font Lepelletier et Dahlbom ; cependant, dans tous les individus que j'ai pris, les tarses sont ferrugineux et la taille d'un liers plus pelite : il y aurait aussi suivant Dahlbom une différence dans la forme de la troisième cellule cubitale, dont l'angle extérieur est arrondi. Longueur de trois à quatre lignes la femelle, trois lignes le mâle. Je ferai la méme observation pour l'Obsoleta ; la longueur donnée par M. Lepelletier est de huit lignes et demie, nos plus grands indivi- dus ne dépassent pas six lignes et les poils fins el couchés qui re- couvrent l'anus, sont loujours ferrugineux et non pas noirs. Le mâle de notre espèce, a les pattes noires comme la femelle. Nous avons aussi une variélé, ou peut-être une espèce, ayant les mémes dispositions de couleur que l'Obsoleta : elle en dif- fère, en ce que les genoux, les jambes et les tarses, sont foncière- ment jaune fauve et revétus de poils dorés et les poils du dessus de l'anus, aussi brillants qu'une feuille d'or. Celle magnifique variété 47 ou espèce, se rencontre à la même époque elest à peu près de même taille. Le mâle est semblable, les poils un peu plus argentés. LARA anathema. ASTATA boops — Vanderlindenii. BEMBEX tarsata — rostrata. STIZUS tridens. SPHEX occitanica -— albisecta — flavipennis — proditor ? AMMOPHILA hirsuta — sabulosa — holosericea — affinis. MISCUS campestris. APORUS bicolor — femoralis. EVAGETES bicolor. PLANICEPS latreillii. CALICURGUS bipunctatus — variegatus — binotatus —- propinquus — exaltatus — vulgaris — affinis — apricus — ambulator — obtusiventris (Dahlbom). POMPILUS tripunctatus (Dahlbom) — albonotatus — gracilis — rufipes — fuscatus — pulcher — sericeus — micans. А. Entièrement noir, sans poils brillants; mandibules noires à la base el au bout, rouges au milieu. Ailes très brunes, l'extrémité presque noire. Longueur troislignes et demie, femelle. POMPILUS australis — viaticus — pectinipes — gibbus — gibbulus — infuscatus — lindenii. B: Tête noire, mandibules ferrugineuses, noires à la pointe. Protho- rax noir, ayant deux petites lignes blanches ne louchant pas le bord postérieur. Les trois premiers segments de l'abdomen ferrugineux, les autres noirs. Pattes : hanches, trochanters et base des deux cuisses antérieures noirs, le reste ferrugineux. Ailes transparentes à la base, toute l'extrémité, à partir de la troisième cubitale, brune. Longueur deux lignes et demie, femelle. ANOPLIUS apicalis — petiolatus — distinctus, 48 A. Noir; les deux premiers segments de l'abdomen ferrugineux ; prothorax court et trés échancré, pattes noires. Ailes transparentes, l'extrémilé brune, la parlie caractéristique un peu enfumée, troi- sième cellule cubitale , à peine rétrécie vers la radiale. Longueur trois lignes, femelle. Male. Le troisième segment de l'abdomen ferrugineux à la base, jambes antérieures et extrémité des cuisses, ferrugineuses ; jambes postérieures noires, l'extrémilé des cuisses ferrugineuse. Ailes gé- néralement enfumées ; un peu plus petit. NIGER unimaculata — bifasciatus — cinetellus — coccineus. CEROPALES maculata — histrio — variegata. SCOLIA bifasciata — quadripunctata. COLPA interrupta. TYPHIA femorata — morio — villosa — minuta. SAPYGA punctata — prisma. MIRMOSA brunnipes — atra. MUTILLA cœrulans — clausa — cyanea — ephyppium — bimacula — incompleta ? A. Ressemble au Bimacula, mais prothorax el écusson rouges. В. Semblable, mais prothorax et mesothorax rouges, écusson et mé- lathorax noirs. MUTILLA maura — rufipes — montana — calva. CHRYSIDES (Dahlbom). Voir la description des espèces, page 61. ICHNEUMONIDES (Gravenhorst). Jai suivi pour le classement des Ichneumonides l'ouvrage de Gravenhorst, malgré ses nombreuses erreurs; Wesmvel en a reclifié 49 un bon nombre, et même cherché à faire de nouvelles coupes. C'est une famille si nombreuse et si difficile à étudier, qu'il se pas- sera encore bien du temps avant qu'on puisse arriver à une méthode salisfaisante. PREMIÈRE SECTION. ICHNEUMON nigritarius — lincator — opticus — corruscator — tristis. — brunnicornis — annulator. TROISIÈME SECTION. ICHNEUMON fossorius — ochropis — fabricator — iridipennis — digramus — proteus — multiannulatus — fuscipes — semiorbitalis. QUATRIEME SECTION. ICHNEUMON extensorius — confusorius —- stramentarius — raptorius — gracilicornis — pallidicornis — sanguinatorius — sarcitorius balteatus (Wesmael) — vedatorius — laboratorius — octoguttatus — iocerus — zonalis — hostilis — cingulatorius — deceptor — lepidus — notatorius — multipictus ? — suavis ? — callicerus. SIXIEME SECTION. ICHNEUMON vaginatorius — xanthorius — occisorius — infractorius — fasciatorius — nicthemerus. SEPTIEME SECTION. ICHNEUMON flavoniger — luridus — luctatorius — defensorius — illuminatorius — glaucatorius — natatorius — albolineatus — xanthius. HUITIÈME SECTION. ICHNEUMON fusorius — divisorius — culpatorius —- ampulatorius — alticola — antennatorius — vacillatorius — sedulus — lanius — albicinctus. NEUVIEME SECTION ICHNEUMON melanocastanus — confector — fumigator — heemorrhoidalis — ischiomelinus — latrator — albilarvatus — semivulpinus — celerator — melanogonus — eques (Wesmael) — subtilicornis. DIXIÈME SECTION. ICHNEUMON violentus — incubitor. ONZIÈME SECTION. ICHNEUMON erythreus — lapidator. ORONOTUS (Wesmael) coarctatus. ISCHNUS truncator — filiformis — thoracicus. CRYPTURUS argiolus. STILPNUS gagates. MESOLEPTUS subcompressus — modestus — leptocerus — fortipes — sulphuratus — geniculosus — rufoniger — lœvigatus — filicornis — mundus —- regenerator — typha — seminiger. PREMIERE SECTION. TRYPHON pinguis — vepreterum — niger? -— prœrogator — compunctor. DEUXIEME SECTION. TRYPHON sexcinctus — marginellus — lucidulus — succinctus? — sexlituratus virgultorum. QUATRIEME SECTION, TRYPHON elegantulus — varicornis — elongator — brachiacanthus — varifarsus — rutilator — bicolor. EXOCHUS frenator — coronatus? — gravipes — crassicornis — femoralis — curvator — podagricus —- prosopius. SCOLABATES italicus. TROYAS lutatorius — flavatorius. ALOMIA ovator — nigra. OPLISMENUS perniciosus — albifrons — errabundus ? -— uniguttatus. PREMIERE SECTION. CRYPTUS macrobatus — cyanator — tarsoleucus — moscator -— bivinctus —+ anatorius — spiralis — brachicentrus — leucopsis ? — bilineatus — unicinctus. DEUXIEME SECTION. CRYPTUS viduatorius. QUATRIEME SECTION. CRYPTUS albulatorius —volubilis — assertorius — tuberculatus — perspicillator — ischioleucus. CINQUIEME SECTION. CRYPTUS obscurus — alternator — nubeculatus — albovinetus — peregrinator — incubitor — titillator — analis — diane — spinosus — perfusor — migrator — ornatus — rufulus. SIXIEME SECTION. CRYPTUS bimaculatus. PYGADEUON digitatus — oviventris? — eurvus — vagabundus — pufligrator — graminicola -— ovator? — quadrispinus. MESOSTENUS notatus — albinotatus — grammicus — gladiator. HEMITELES similis — palpator — areator — melanogonus — luteolator. PEZOMACHUS fasciatus — pedestris — festinans — agilis — nigrocinctus — vagans — bicolor. PHYTODIETUS calceolatus. NEMATOPODIUS formosus. GLIPTA teres — vulnerator — sculpturata — ceratites — mensurator — scalaris — bifoveolata. PREMIERE SECTION, LISSONOTA setosa — impressor — catenator — segmentator — sulphurifera — hortorum — arvicola. DEUXIÈME SECTION. LISSONOTA deversor — maculatoria — pectoralis — irrisoria. QUATRIÈME SECTION. LISSONOTA parallela — perspicillator. CINQUIÈME SECTION. LISSONOTA verberans — cilindrator — decinator — bellator. POLYSPHINCTA rufipes. 52 SCHIZOPYGA podagrica — tricingulata — minuta. PIMPLA flavicans — melanopyga — ornata — rufata — varicornis — roborator — colobata — graminella — stercorator — turionella — flavipes — spuria — alternans — scanica — examinator — viduata ? — instigator. EPHIALTES manifestator — carbonarius — varius — mediator. RHYSSA curvipes. METOPIUS sicarius — necatorius — dentatus. BASSUS rufiventris — elegans — festivus — sulcator — rufipes -— albosignatus — annulatus — insignis — latatorius. BANCHUS compressus — pictus — faleator. EXETASTES fornicator — guttatorius — nigripes — levigator — calabatus. PREMIERE SECTION. CAMPOPLEX difformis — albidus? — xanthostomus — lateralis — albipalpis — majalis — ebeninus. DEUXIEME SECTION. CAMPOPLEX orbitalis — armillatus — chrysostictus. TROISIEME SECTION. CAMPOPLEX multicinctus — fulviventris — longipes — rufiventris — maculatus ? QUATRIEME SECTION. CAMPOPLEX insidiator — carnifex — notatus — dolosus — ruficinctum — — Jatrator — rufimanus — nigripes — meestus — floricola — mixtus — pugillator — cultrator — perfidus. PANISCUS glaucopterus — virgatus — testaceus. ANOMALON cireumflexus — ruficorne — cerinops — xanthopus — armatum (Wesmael) — brevicorne — tenuicorne — flaveolatum — tenuitarsum — anomelas. OPHION lutus — ramidulus — merdarius — marginatus — obscurus. TACHINOTUS foliator. PACHYMERUS vulnerator — calcitrator. CREMASTUS bellicosus. AC(ENITES fulvicornis — arator — nigripennis — rufipes — dubitator. XILONOMUS pilicornis — filicornis. XORIDES collaris. ODONTOMERUS dentipes. TENTHRÉDINES (Lepelletier de Saint-Fargeau). LYDA flaviventis — inanita. А. Antennes noires, lestacées en dessous, face et derrière des yeux testacés, dessus de la lête noir. Corselet noir en dessus, testacé sur les côlés, sternum noir. Abdomen teslacé, premier et septième seg- ments noirs en dessus. Pattes testacées. Ailes très enfumées, parais- sant noires lorsqu'elles sont fermées; écaille testacée. Longueur trois lignes et demie. TARPA plagiocephala. CEPHUS satyrus — pygmaœus — tabidus — luteipes — nigripes — mandibularis. A. Antennes noires, tête noire, palpes et mandibules testacés. Cor- selet noir, abdomen noir, côtés des troisième, quatrième, cinquième et sixième segments testacés. Paltes : cuisses noires, genoux, libias eL tarses testacés. Ailes et écaille rousses. Longueur trois lignes. Mâle et femelle. b. Tête, antennes, corselet et abdomen noirs, bord du prothorax ayant une ligne blanche interrompue. Pattes : cuisses noires, ayant la base et l'extrémité blanches, les quatre jambes anlérieures el les larses blanc jaunâtre, les deux postérieures blanches à la base, rousses au milieu et noires à l'extrémité, tarses bruns. Longueur quatre lignes. Femelle. ATHALIA ancilla — cordata — lineolata — richardi — annulata — cintifoliæ. CIMBEX pallens — humeralis — femorata — amerine — nitens — nigricornis — jurinæ. HYLOTOMA caerulescens — ustulata — dimidiata — pagana — rose — enodis — thoracica. А. Semblable à l’ Enodis mais les deux jambes postérieures blanches un peu noires à l'extrémité. Mâle. CRYPTUS furcatus — angelica. LOPHYRUS pice. A. Antennes, lêle et corselel noirs. Abdomen noir en dessous et sur les cólés, extrémité noire. Pattes testacées: base des cuisses noire, tarses bruns, à l'exception de la base du premier article, femelle. Male. Semblable, mais abdomen tout noir. Vit sur le genévrier. В. Tout noir, les deux jambes antérieures testacées, les deux inter- médiaires lestacées en dessous, brunes en dessus, les deux postérieu- res lestacées seulement à la base, toutes les cuisses noires et les larses bruns. CLADIUS difformis — rufipes — morio. PREMIÈRE SECTION. PRISTIPHORA myosotidis — testacea — testaceicornis — pallipes. DEUXIEME SECTION. PRISTIPHORA atra. A. Antennes d'un brun ferrugineux, tête noire. Bouche d'un jaune ferrugineux, corselet noir, abdomen noir, l'extrémité un peu ferru- gineuse. Patles entièrement d'un jaune ferrugineux. Ailes rousses, écaille et nervure des ailes teslacées, femelle. Mâle, semblable, mais bouche noire et extrémité des jambes pos- lérieures et tarses bruns. b. Tête noire, bouche et une tache entre les antennes testacées. An- 55 tennes brunes en dessus, testacées en dessous. Thorax lestacé, ayant trois taches noires sur le dos, une tache longue oblique sous les ailes et le sternum noir. Abdomen et pattes teslacés; exlrémilé des jambes postérieures et leurs tarses bruns. Nervures et point margi- nal bruns. Femelle. PREMIERE SECTION, NEMATUS pallipes. DEUXIEME SECTION. NEMATUS Clitellatus. A. Antennes noires, téte noire, bouche ferrugineuse. Thorax noir, épaulettes jaune-ferrugineux. Abdomen et paltes jaune-ferrugineux ; ailes et nervures de la méme couleur. Femelle. B. Antennes noires, tête noire, bouche ferrugineuse. Corselet noir, épaulettes blanches. Abdomen noir en dessus, lextrémité ferrugi- neuse, dessous de l'abdomen blanc jaunâtre. Pattes : hanches et tro- chanters blanc-jaunâtre, cuisses, jambes et tarses jaune -ferrugi- пепх. L'extrémité des deux jambes postérieures et leurs tarses bruns. Nervures des ailes testacées. Femelle. С. Tête testacée, antennes noires, vertex noir. Thorax testacé, trois grandes taches sur le dos, un point noir sur le milieu de l'écusson, le postécusson, deux taches sous les ailes et le sternum noirs. Abdo- men testacé, les six premiers segments noirs en dessus. Paltes tes- lacées, toutes les hanches tachées de noir; les derniers articles des larses postérieurs, bruns. Femelle. TROISIÈME SECTION. NEMATUS septentrionalis. — histrio — suessionensis — vicinus — cinctus — interruptus — intercus — dorsalis — vittatus. D. Toul noir; palles brunes, genoux pâles. Ailes transparentes. Longueur deux lignes. 56 Е. Tête, antennes et thorax noirs, bouche ferrugineuse, abdomen testacé. Pattes : hanches, trochanters et base des cuisses noirs; le reste testacé. Ailes transparentes, nervures brunes, côte el point marginal testacés. Mâle. F. Antennes noires, tête testacée, front et verlex noirs, corselet tes- tacé : sur le dos trois grandes laches noires, deux petits points noirs sous la base des ailes. Abdomen testacé, tous les segments ayant en dessus une large tache noire. Pattes testacées, les deux jambes pos- lérieures et leurs tarses noirs ferrugineux. Ailes transparentes, ner- vures brunes , point marginal testacé , avec un point plus foncé au milieu. Femelle. G. Tête testacée, un seul point noir sur le vertex. Antennes testa- cées, les deux premiers articles noirs. Thorax, abdomen et pattes, lestacé pàle, quelques taches noires autour de l'écusson, du posté- cusson et sur les segments de l'abdomen. NEMATUS salicis dimidiatus — aflinis — ruficornis. DEUXIÈME SECTION. TENTHREDO alternans — pavida — ornata — neglecta — согуп — lahiata — lateralis — gracilis —- maura — atra — microcephala — rufipes — trichocera — nigrita — livida — dimidiata — viridis -— interrupta — scripta — duplex. A. Celle espèce a beaucoup de rapports avec le Duplex, mais elle est plus ramassée et a la lête beaucoup plus large. Le dessous du corps est presqu'entièrement noir; les paltes postérieures sont blanches, avec les genoux et l'extrémité des jambes noirs. Tous les tarses sont noirs. Femelle. b. Téle noire, antennes noires, les quatre derniers articles d'un beau vert, ainsi que toutes les parties de la bouche et les joues. Thorax 57 noir, vert en dessous à sa parlie postérieure. Abdomen : les trois premiers segments noirs, ayant une tache dorsale verte, qui va en s'élargissant du premier au troisième, les quatrième, cinquième et sixième verls, les aulres noirs, dessous de l'abdomen vert. Toutes les pattes vertes, rayées de noir; le noir plus étendu sur les jambes postérieures. Tarses postérieurs noirs, leurs articles dilatés. Ailes rousses, nervures brunes, point marginal verdâtre. Mâle. C. Tête jaune; front noir, deux taches jaunes sur le milieu, anten- nes noires en dessus, jaunes en dessous, thorax noir en dessus, jaune en dessous, épauleltes, quatre laches obliques sur le milieu, écus- son, porlécusson et deux points au dessous, jaunes. Pattes jaunes rayées de noir, extrémités des jambes et des tarses annelées de noir. Femelle. TROISIEME SECTION. TENTHREDO serophulari& — meridiana — captiva — luteiventris — vespiformis — marginella — confusa — cincta — vidua — succincta — rustica — viennensis. D. Antennes noires, premier arlicle jaune, tête noire. Mandibules, labre et chaperon jaunes, thorax noir, épaulettes et écusson jaunes. Abdomen : premier segment noir, avec une bande jaune au bord postérieur; deuxième, troisième, quatrième noirs, cinquième, sixième jaunes ; quelquefois le sixième presque noir, septième et huitième noirs, avec une tache jaune. Patles : les quatre antérieures jaunes; une petite tache noire à l'extrémité des jambes. Pattes postérieures : cuisses jaunes, presqu entièrement couverles par une tache noire. Jambes jaunes à la base, noires dans presque la moilié inférieure. Tarses noirs assez dilatés. Mâle. TENTHREDO strigosa — citreipes — abietis — scheferi — blanda — juvenilis. E. Ressemble au blanda, mais mandibules noires. Les deuxiéme, troisième el qualriéme segments de l'abdomen ferrugineux testacé, quelquefois même noirs en dessus. Un petit point blanc à l'extré- milé inlerne des cuisses intermédiaires, hanches postérieures sans laches blanches. Е. Tête noire; antennes noires, mandibules, labre, chaperon et palpes blancs. Thorax noir. Abdomen noir, les deuxième, troisième, et quatrième segments testacés, un peu marqués de noir en dessus. Cinquième et sixième noirs, ayant chacun une tache blanche de chaque cóté, septième noir. Anus portant une tache blanche. Pattes noires, les quatre antérieures rayées de blanc intérieurement, les postérieures toutes noires. Hanches noires, tous les trochanters blancs, ayant une petite tache brune en dessus. Nervures et point marginal bruns, Femelle. G. Tête noire très chagrinée, antennes noires, chaperon très échan- cré, labre jaune ferrugineux. Orbite intérieur et inférieur des yeux, blanc. Thorax noir très chagriné, une ligne blanc terne sur les épau- les et bordant le prothorax. Abdomen noir. Premier segment entiè- rement noir, les suivants ayant sur le bord latéral, une ligne blanc verdâtre, qui s’allonge successivement et forme une bande continue sur les deux derniers segments. Pattes noires. Cuisses antérieures blanches en devant à l'extrémité, les autres ayant seulement une petite ligne blanche. Toutesles jambes blanches en devant. Ailes très brunes; écaille et base des ailes d’un jaune ferrugineux vif, point marginal du même jaune à la base, l'extrémité noire, toutes les nervures d'un noir profond. Femelle. Cette remarquable espéce, vient d'étre prise le 20 mars, par M. Paul Lambert qui a bien voulu me la remettre. TENTHREDO punctum — hematopus — duodecimpunctata — maculosa — albamacula — luctuosa — albicincta — exalbida — ribis. H. Toute noire, à l'exception d'une petite ligne blanche, à l'extrémité interne des cuisses antérieures et d'une large tache blanche sur les hanches postérieures. Femelle. Longueur six lignes. QUATRIEME SECTION. TENTHREDO morio — albipes — cothurnata — fusca — tistis — hylotomoides — fraxini — hœmorrhoïdalis, Toute noire; pattes d’un jaune ferrugineux. Base des cuisses et larses noirs. TENTHREDO fuscipennis — melanosterna — fallax — luteola — costalis — ephippium. Jr Téte noire, antennes noires, palpes ferrugineux pàle ; thorax noir, épauleltes ferrugineuses. Abdomen ferrugineux, paltes ferrugineu- ses, hanches noires. Ailes transparentes, nervures brunes, jaunes à la base, nervure radiale noire en se rapprochant du point marginal, qui est noir et bordé de jaune extérieurement. K. Téte noire, antennes noires, mandibules, labre et chaperon ferru- gineux. Thorax noir, un peu ferrugineux sur les cólés, épaulettes ferrugineuses, abdomen et pattes ferrugineux. Nervures des ailes brunes, jaunes seulement à l'extréme base. Femelle. L. Antennes noires, les deux premiers articles jaunes, le reste comme l'espèce précédente. Nervures des ailes jaunes, à l'exception de la nervure radiale, qui est très-large, et presqu'enlierement noire. Peut-être le male de l'espèce précédente. M. Antennes et tête noires : thorax noir en dessns, ferrugineux en dessous, avec une tache noire à l'extrémité du sternum. Abdomen el pattes ferrugineux. Ailes entièrement noires lorsqu'elles sont pliées. Nervures noires. Femelle. N. Tête, antennes et thorax noirs. Abdomen : premier segment noir, les aulres ferrugineux. Pattes ferrngineuses, la base de toutes les cuisses noire el les tarses bruns. Ailes assez enfumées. Nervures presque noires. Longueur deux lignes. Femelle. 0. Entièrement noire y compris les ailes. Tous les segments de l'ab- domen, le premier excepté, finement liserés de blanc. 60 PREMIÈRE SECTION. DOLERUS togatus. DOLERUS cinctus — cingulatus — fasciatus — vicinus — leucopodus — testaceipes — varipes — luctuosus — pallipes. A. Tête nòire, antennes noires, bouche blanche, thorax noir, épau- lettes blanches. Une grande tache triangulaire blanche, sur les côtés au-dessous des ailes. Abdomen noir en dessus. Le milieu des qua- triéme, cinquième, sixième segments, ayant une lache triangulaire ferrugineuse; anus blanc. Dessous de l'abdomen blanc, à l'exception des deux derniers segments, qui sont noirs. Paltes entièrement blan- ches, ailes transparentes, nervures brunes. Mále. b. Tête et antennes noires, corselet noir, épaulettes et côtés testacés. Abdomen testacé. Pattes testacées, hanches et trochanters tachés de noir. Tarses et extrémilé des deux jambes postérieures, noirs. Ecaille el base des ailes leslacées, nervures ferrugineuses, point mar- ginal brun. Femelle. TROISIEME SECTION. DOLERUS germanicus. C. Ressemble au germanicus, mais beaucoup plus grand. Les genoux et la tariére sont noirs. Le premier segment de l'abdomen est sou- vent testacé ; l'écusson toujours noir. DOLERUS geniculatus — cothurnatus — tristis. D. Antennes, téte et thorax noirs. Abdomen : premier segment noir, deuxième, troisième , quatrième, cinquième et quelquefois la base du sixième, ferrugineux testacé. Le reste noir. Cuisses noires, jam- bes ferrugineux testacé. Tarses bruns, le premier article des quatre antérieurs ferrugineux. Ailes transparentes, nervures noires. Fe- melle. DOLERUS rufipes — gonager — niger — opacus. А. COURTILLER. Saumur, 1858. DESCRIPTION DES CHRYSIDES OBSERVÉES AUX ENVIRONS DE SAUMUR. TABLEAU DES FAMILLES DE L'ORDRE DES CHRYSIDES. 4. Màchoires et lèvres médiocres. {re Section, Abdomen convexe en dessus et en des- SOUS DIDÉHOTAXIONOIE Se. (05 151 2e. Mete . Are fam. Cleptidées. де Section. Abdomen convexe еп dessus, concave en dessous. {re Division. Ongles des tarses pectinés. ..... 2e fam. Elampidees. Qe Division. Ongles des tarses unidentés..... 3¢ fam. Hedychridées. 3e Division. Ongles des tarses simples. A. Troisième segment de l'abdomen ou mu- tique, ou ondulé, ou 1, 2,3, 4, 5, ou 6 депе 5: оН 4e fam. Chrysidées. B. Troisième segment de l’abdomen denté en Sele 14s ОГИ оО ТЕНЕ 5e fam. Euchrocidées. 2. Màchoires et lèvres longues, la lèvre inférieure prolongée en trompe, couchée sur la poitrine, dans le repos. Quatre segments à l'abdomen des males, , » dernier seg. crenelé.......... ен. бе fam. Parnopidees, PREMIÈRE FAMILLE. — CLEPTIDÉES (1). GENRE CLEPTES. 1. CLEPTES NITIDULA. Longueur cinq à six millimètres Q. Têle d'un noir bronzé bril- lant. Antennes souvent brunes, prothorax fauve, mesothorax bronzé brillant, écusson el mélathorax bleu. Abdomen : les deux premiers segments fauves, le troisième fauve à la base, brun à l'extrémité, le quatrième brun. Cuisses brunes, le reste des jambes fauve c. Tête et thorax bleu verdâtre brillant, les deux premiers segments de l'abdomen fauves, les derniers bruns. Jambes comme la femelle. 2. CLEPTES SEMIAURATA. Longueur six millimètres ©. Tête, prothorax, mesothorax el écus- son cuivreux doré brillant, métathorax et dessous thorax vert bleua- tre. Abdomen fauve, deuxième segment plus court que le troisième qui est brun à la base avec un léger reflet bleu. Pattes quelquefois entièrement fauves, ordinairement les cuisses noires ou bronzées сў. Tête et thorax bleu verdatre brillant; abdomen fauve, dernier seg- ment à reflet bleu. DEUXIEME FAMILLE. — ELAMPIDÉES. GENRE OMALUS. Milieu du troisiéme segment échaneré, les cótés de ce méme segment sans si- nuosités. 3. OMALUS AURATUS. Longueur trois à quatre millimètres. Tête et thorax bleu ou bleu verdâtre; abdomen doré cuivreux. Echancrure du troisième seg- ment en triangle obtus; porlécusson renflé presque hémisphérique. (1) Jai suivi pour ces descriptions, l'ouvrage de Dahlbom, comme étant le der- nier publié sur ce genre d'insectes. (O femelle, сӯ male). 63 4. OMALUS CŒRULEUS. Longueur 5 millimètres, entierement d'un beau bleu violet quel- quefoisun peu doré. Portécusson renflé, conique. Echancrure du troisième segment peu profonde. GENRE ELAMPUS. Bord du troisième segment échancré ; côtés de ce même segment unis ou bisinués. 5. ELAMPUS BIDENTULUS. Longueur trois à quatre millimètres, d'un bleu verdatre. Abdomen vert doré, le bord du troisième segment bisinué de chaque côté de l'échancrure ; porlécusson en cône pointu. Varie beaucoup pour la couleur. б. ELAMPUS TRUNCATUS. Longueur trois à quatre millimètres; semblable au précédent, mais le bord du troisième segment unisinué. Portécusson en cone obtus. “= 1. ELAMPUS SPINA. Longueur six millimètres. Tête et thorax bleu un peu violet; cha- peron vert brillant, abdomen vert bleuâtre brillant. Echancrure du troisième segment petite, les côté bisinués, postécusson ayant une longue pointe subtriangulaire. L'extrémité du lroisieme segment formant un bourrelel qui dépasse l'échancrure. 8. ELAMPUS PANZERI. Longueur qualre à cing millimètres vert bleuâtre brillant; abdo- men doré. Troisième segment bisinué de chaque côté de l'échan- crure, qui vue de face représente assez exactement la forme d'un fer à cheval. Postécusson ayant une longue pointe obtuse, reclan- gulaire. GENRE HOLOPYGA. Corps épais presque rond. Bord du troisième segment très entier. 64 9. HOLOPYGA PUNCTATISSIMA. Longueur cing millimèlres. Tête et thorax verts, cavité faciale très peu profonde; ocelles très gros et se touchant presque. Ponc- tuation fine et serrée, base de l'aréole intermédiaire du mesolhorax d'un noir bronzé et finement ponctuée ; abdomen rouge doré ; pat- les bleu verdâtre. Genoux, extrémité des tibias et tarses, testacés. 10. HOLOPYGA OVATA, Celle espèce est si variable. qu'il est impossible d'indiquer quel est véritablement le type qu'il faut choisir pour la description. Première division. — Téte et thorax bleu ou bleu verdátre. VARIÉTÉ А. Longueur cing millimètres. Tête et thorax bleu ou bleu verdâtre, abdomen doré. VARIÉTÉ B. Longueur six à huit millimètres. Tête et thorax bleu ou bleu verdátre, abdomen rouge cuivreux doré, base de l'aréole du milieu du mesothorax peu poncluée. VARIÉTÉ C. Longueursix à sept millimètres, semblable, mais base de l'aréole du milieu du mesothorax entièrement ponctuée. Deuxiéme division, — Téle et thorax vert brillant. VARIÉTÉ D. Tête et thorax vert brillant, abdomen rouge doré. Troisième division, — Prothorax seul doré. Je n'ai pas rencontré cette variété. Quatrième division. — Prothorax et mesothorax dorés. VARIÉTÉ б. Longueur cing à six millimètres, téle bleu ou bleu verdâtre, prothorax el mesothorax cuivreux doré, le reste du thorax bleu verdâtre. Abdomen rouge doré. 11. HOLOPYGA GLORIOSA. FAB. (variété à Dahlbom). Longueur cinq à cinq millimètres et demi Q. Tête bleue, pro- thorax, mesothorax, écusson el postécusson doré brillant, le reste . | aj Lith de ELBARASSE Angers. Hedychrum Solandii | Io du thorax el les pattes bleus. Abdomen doré brillant, à ponctuation très fine. cf très probablement. Longueur cing millimètres. Téte et thorax bleu, prothorax et mesothorax doré brillant; abdomen doré bril- lant à ponclualion trés fine : palles bleues, genoux au moins les deux antérieurs dorés; l'extrémité des libias et les larses testacés. TROISIÈME FAMILLE. — HEDYCHRIDEES. GENRE HEDYCHRUM. Dernier segment de l'abdomen entier ou légèrement sinué. Première division. — Dernier segment de l'abdomen légèrement sinué. 19 HEDYCHRUM SOLANDII. Longueur cinq à cinq millimètres et demi, entièrement bleu en dessus tournant au bleu-verdâtre sur les côtés etsur tout le dessous ; ponctualion épaisse el serrée qui le rend presque mat. Quelquefois le dessous des deuxième et troisième articles des antennes, lestacé. Cavilé faciale peu profonde, verte finement et fortement ponctuée. Chaperon vert brillant sans échancrure. Mandibules verles à la base, noires à la pointe et lestacées au milieu. Paltes : trochanters et base des cuisses vert brillant, extrémilé des cuisses, genoux, tibias et larses rose testacé. Ailes très légèrement enfumées, nervures bru- nes, écaille couleur des jambes. J'ai dédié cette espèce, dont je n'ai pas trouvé de description, à M. De Soland, président de notre Société, faible hommage rendu à son zèle. Deuxième division, — Troisième segment de l'abdomen entier. 19. HEDYCHRUM CHALIBŒUM. Longueur cinq millimètres, entièrement bleu verdâtre. Vertex et thorax fortement ponctués. Abdomen brillant, cavité faciale fine- ment et fortement ponctuée. Troisième segment ayant de chaque côté un angle obtus peu apparent et d'un angle à l'autre avant l'ex- trémilé une ligne légèrement enfoncée, qui fait paraître ce segment comme terminé par un léger bourrelet. Palles bleu verdâtre ; tarses bruns. Varie pour la couleur. 66 14. HEDYCHRUM CHLOROIDEUM. Longueur cinq millimètres, ressemble beaucoup au chalibœæum, mais cavité faciale [гёз brillante; deuxième et troisième segments de l'abdomen finement bordés de brun testacé. 15. HEDYCHRUM RUTILANS. Longueur cinq à six millimètres, tout le corps vert cuivreux avec des reflets rouges sur le bord des segments de l'abdomen, cavité fa- ciale très brillante. Pattes et dessous du thorax, bleu ou verdâtre ; larses bruns. 16. HEDYCHRUM LUCIDULUM. Longueur quatre à huit millimètres ©. Tête, écusson et métatho- rax bleu ou bleu verdâtre. Prothorax et mésothorax dorés un peu cuivreux. Dessous du thorax bleu. Cavité faciale brillante et fine - ment striée; abdomen rouge doré : troisième segment ayant de cha- que côlé, jusqu'à la base, un angle saillant assez prononcé et avant l'extrémité une ligne légèrement enfoncée. Dessous de l'abdomen brun. Bord de l'avant-dernier segment très-échancré, et au milieu de l'échancrure, une pointe presque à angle droit ауес ce segment. С A le thorax entièrement bleu ou bleu verdâtre. 17. HEDYCHRUM ARDENS Latreille ( Var. Lucidulum, Dahl. ). Longueur quatre à huit millimètres. Verlex, prothorax, mésotho- rax et écusson, vert cuivreux rulilant comme terni. Ponctuation comme usée. Cavité faciale mieux délerminée que dans l'espèce pré- cédeute, et plus profonde. Abdomen cuivreux doré. Dessous de l'ab- domen brun; bord de l'avant-dernier segment sans échancrure et sans pointe, mais simplement relevé par un pli. cf Semblable à la femelle, quelquefois un peu moins cuivreux. Variété cf. Abdomen tout vert, à reflets légèrement dorés. Vai rétabli cette variété comme espèce, ce qu’avail fait également M. Wesmael, et voilà pourquoi. La cavité faciale est bien plus pro- noncée que dans le Lucidulum ; les ocelles forment un angle beau- coup plus ouvert; le prothorax est plus étroit el beaucoup plus long, la ponclualion moins serrée el moins rugueuse, l'avant-dernier seg- ment, en dessous, ne porle jamais d'épine et n’est pas échancré. 67 Celle espèce, cerlainement la plus commune que nous ayons, pa- rait plus tard que le Lucidulum, quoiqu’on les trouve cependant ensemble. l'ai vérifié ces différences sur plus de cent individus, et J'aurais pu m'en procurer plusieurs centaines dans une seule chasse, sur les fleurs de l'Eringium. 18. HEDYCHRUM INTEGRUM. Longueur trois millimélres. Têle et thorax vert bronzé. Protho- rax el mélalhorax fortement ponctués. Mesothorax lisse, brillant et finement ponctué. Abdomen brillant, rouge cuivreux. Pattes vertes, larses lestacés. Ventre noir de poix, une grande tache dorée sur le deuxieme segment. 19 HEDYCHRUM CORIACEUM. Longueur trois millimètres. Tête, prothorax et mesothorax vert bronzé, finement et régulièrement ponclués. Mélathorax bleu, des- sous el cólés vert blenâtre. Dessus de l'abdomen rouge cuivreux. Des- sous noir de poix, deuxiéme segment sans tache ou avec une tache verte. 20. HEDYCHRUM FERVIDUM. Longueur cing à six millimètres. Tête, prothorax, mésothorax , écusson el dessus de l'abdomen, cuivreux doré resplendissant. Mé- lathorax el dessous du thorax bleu. Cuisses bleues, tibias rouge doré, larses bruns. 21. HEDYCHRUM ROSEUM. Longueur cing millimètres. Téte et thorax vert bleuâtre forte- ment ponclués. Abdomen rose teslacé. Pattes verles , tarses tes- lacés. QUATRIEME FAMILLE. — CHRYSIDEES. GENRE CHRYSIS. Première division. -— Bord du dernier segment parfaitement entier. 22. CHRYSIS AUSTRIACA. Longueur huit à dix millimètres. Thorax bleu, bleu violel ou bleu 68 vert. Abdomen rouge doré. Téle aussi large aupres des mandibules qu'au vertex. Cavilé faciale légèrement marquée , face très velue. Les fossetles du troisième segment peu marquées. 23. CHRYSIS BICOLOR. Ressemble beaucoup à l'Austriaca, mais la tête est plus étroite au- près des mandibules qu'au vertex, la cavité faciale plus profonde el moins velue, et les angles du métathorax plus grands. 24. CHRYSIS AERATA. Longueur huit millimétres. Téte el thorax verts ou bleus ; téte plus large que le prothorax. Cavité faciale peu profonde et trés- ponc- tuée, un très-petit espace brillant au fond et près des antennes. Les quatre premiers arlicles des antennes vert bleu. Thorax trés-ponc- tué. Postécusson prolongé en lubercule obtus. Pieds bleu verdâtre. Tarses bruns. Ailes transparentes à l'extrémité, la base et la côte en- fumées. Abdomen rouge cuivreux opaque, trés-ponctué, avec une lé- gère carène sur les trois segments. Dernier segment arqué à partir de l'endroit où commencent les fossetles, qui sont nombreuses et petites. Dessous du ventre rouge, or et vert brillant. 25. CHRYSIS C(ERULIPES. Longueur sept à huit millimètres. Téle, dessus du thorax et abdo- men pourpre doré, mélathorax, sternum et pattes bleus. Ailes trans- parentes, enfumées près de la côte et dans la cellule radiale. Dessous de l'abdomen rouge doré. 26. CHRYSIS DICHROA. Longueur six à sept millimètres. Vertex, métathorax, dessous du thorax et patles bleu verdatre. Cavilé faciale peu profonde, verte ainsi que le devant de la lêle. Prothorax, mésothorax, écusson et ab- domen, rouge doré brillant. Les deux premiers segments du dessous de l'abdomen, noirs а la base, dorés à l'extrémité; le troisième en- lièrement brun. Deuxième division. — Troisième segment de l'abdomen onduleux. 27. CHRYSIS ELEGANS. Longueur quatre à six millimètres. Thorax bleu, varié de vert ou 69 d'or. Abdomen rouge doré, le premier segment ayant sa base forle- ment échancrée et verte. Le bord du troisième segment bronzé ; ven- {ге vert. J'aurais encore à ajouter à cette division deux espèces qui se rap- portent assez, l'une au Crassimargo , l'autre au Versicolor, mais n'ayant qu'un individu de chacune d'elles, j'attendrai pour être plus certain. Troisième division. — Troisième segment unidente. 28. CHRYSIS SUCCINCTULA. Longueur quatre à six millimètres. Thorax bleu ou verdâtre. Deux taches sur le bord antérieur du prothorax. Le mésothorax et l'abdo- men, cuivreux doré. Cavité faciale profonde et brillante. Bord du troisième segment, brun ou violet bronzé © (Voir la planche à la fin de cet article, fig. 1). g Plus petit; cavité faciale très-finement ponctuée, bord du troi- sième segment sans sinuosilé (fig. 2). Quatrième division. — Troisième segment bidenté. Cinquième division. — Troisième segment tridenté. 29. CHRYSIS CYANEA. Longueur quatre à six millimètres. Entièrement bleu ou bleu ver- dâtre brillant, légèrement ponctué. Tarses bruns. Sixième division. — Troisième segment quadridenté. 30. CHRYSIS NITIDULA. Longueur dix millimètres. Entièrement bleu ou bleu violacé. Ca- vité faciale finement et fortement ponctuée, bordée supérieurement. Premier segment de l'abdomen fortement ponctué. Ponctuation du second plus fine et serrée. Troisième segment finement et légère- ment ponctué. 31. CHRYSIS FULGIDA. Longueur six à huil millimètres. Thorax bleu brillant. Premier segment de l'abdomen bleu, le deuxième et le troisième dorés. Le second segment bleu à la base dans le mâle, 70 32. CHRYSIS CYANOPYGA. Longueur quatre à six millimètres. Corps épais fortement ponctué. Thorax bleu ou vert. Les deux premiers segments de l'abdomen do- rés, le troisième bleu. Cavité faciale peu profonde, bordée supérieu- rement d'une ligne biarquée. Abdomen à peu près de la longueur de la têle el du thorax réunis. Dents de l’extrémilé du troisième seg- ment presque sur la même ligne, les deux du milieu plus rappro- chées (fig. 3). | 33. CHRYSIS SPLENDIDULA. Semblable à la précédente espèce, mais corps beaucoup plus grêle. Ponctuation plus fine et moins serrée; cavilé faciale assez profonde , bordée supérieurement d'une ligne droite réfléchie aux extrémités. Très-brillante dans son milieu et peu saillante. Le bord occipital а deux petits angles saillants à la hauteur du milieu des yeux. L'ab- domen est plus long que la téte et le thorax réunis, l'extrémilé du dernier segment rétrécie, les dents également espacées (fig. 4). 94. CHRYSIS BIDENTATA. Longueur sept à huit millimètres. Corps allongé, fortement ропс- tué, très-velu. Tête, dessous du thorax, mélathorax, troisième seg- ment de abdomen et pattes bleu ou bleu verdâtre. Dessus du tho- гах el les deux premiers segments de l'abdomen dorés ou rouge doré. Dents du troisième segment peu saillantes (fig. 5). д5. CHRYSIS ANALIS. Longueur cinq à six millimètres. Thorax bleu ou vert; abdomen, troisième segment bordé de bleu, les dents triangulaires peu pro- noncées. 36. CHRYSIS SCUTELLARIS. Longueur sept à huit millimètres. Téte et thorax bleu mêlé de vert. Trois points vert brillant, sur une ligne, au-dessous des ocel- les. Ecusson doré; postécusson vert; abdomen doré ou rulilant. Base inférieure du troisième segment, bleue; dents peu saillantes, comme dans le Bidentata. Troisième segment ondulé dans le mâle. 71 91. CHRYSIS SUCCINCTA, Longueur cinq à six millimètres. Tête et thorax bleu ou bleu vert. Prothorax ayant sur le bord antérieur, deux taches triangulaires vert brillant ou doré. Mesothorax et abdomen rouge doré. Bord du troisième segment brun vert, ou brun pourpré; les dents plus ou moins prononcées. 38. CHRYSIS INŒQUALIS. Longueur sept à huit millimètres. Tête et thorax bleu ; abdomen rouge doré. Cavité faciale assez profonde, velue, brillante, striée transversalement et bordée supérieurement d'une ligne arquée (fig. 6) à peine onduleuse. Troisième segment déprimé au milieu, à ponclua- lion semblable au deuxième segment. Dents du troisième segment inégales (fig. 7). 39. CHRYSIS DISTINGUENDA. Longueur sept à dix millimètres. Corps très large : thorax bleu ou vert; abdomen doré ou rouge doré. Cavilé faciale assez régulière- ment ponctuée, une ligne saillante au milieu. Bord supérieur sur- monté d'une ligne ordinairement légèrement irrégulière (fig. 8) ou déprimée dans son milieu (fig. 9). Abdomen large; ponctuation des derniers segments à peu près semblable. Dents du bord postérieur peu prononcées (fig. 10). 40. CHRYSIS IGNITA. Longueur cinq à neuf millimètres. Tête ou thorax bleu ou vert bleu. Abdomen doré cuivreux. Cavité faciale peu profonde et très- poncluée, surmontée d'une ligne irrégulière. Dernier segment de l'abdomen, déprimé dans son milieu, à ponctuation plus fine et plus serrée que le deuxième segment. Dents du troisième segment trian- gulaires, presque sur la méme ligne (fig. 11). Septième division. — Troisième segment à cinq dents. Huitième division, — Troisième segment à six dents. 41. CHRYSIS MICANS. Longueur sept à neuf millimètres. Tête et thorax bleu ou bleu 72 verdalre, fortement ponctués. Le fond de presque tous les points, pourpre cuivreux. Abdomen trés-ponctué, rouge cuivreux à reflets verts. Les six dents de l'extrémité, triangulaires el aigües. CINQUIEME FAMILLE. — EUCHRŒIDÉES. GENRE EUCHROEUS. Troisième segment de l'abdomen inégalement denté en scie. 42. EUCHROEUS PURPURATUS. Longueur huit millimètres. Tête vert doré ou dorée : sur le verlex une tache pourpre. Thorax : le fond de tous les points enfoncés vert doré, leur bord pourpre. Mésothorax ayant trois lignes longitudi- nales pourpre. Abdomen bleu violet. De chaque cóté du premier segment, une lache dorée et une autre реШе au milieu. Deuxième segment ayant une large tache dorée triangulaire de chaque côté, dont les angles viennent presque se toucher sur le dos. Cuisses vert doré, jambes et larses jaunes. SIXIÈME FAMILLE. — PARNOPIDÉES. GENRE PARNOPES. 43 PARNOPES CARNEA. Longueur neuf à dix millimètres. Corps large et fortement ponc- tué. Tête et thorax vert souvent aspergé de rouge cuivreux. Post- écusson prolongé en lame ordinairement trilobée et irrégulièrement dentée. Abdomen : premier segment vert cuivreux à sa base, le bord et les autres segments, d'un testacé un peu carné, ainsi que les jam- bes et l'écaille des ailes. Les cuisses sont vertes. Il reste encore probablement beaucoup de chrysides à découvrir dans notre département : j'espère que la description que je donne des espèces que j'ai recueillies , servira à faire compléter l'étude de ce genre d'insectes, le plus brillant de nos contrées. А. COURTILLER. COUP - DIL SUR LES RICHESSES MYCOLOGIOUES PU NORD-OUEST DE L’ANJOU, Le nord-ouest de Maine et Loire, comprenant l'arrondissement de Segré et la partie limitrophe de l'ancien Anjou, enclavée aujour- d'hui dans le département de la Mayenne, présente toutes les con- ditions topographiques et climatériques les plus favorables à la propagation et au développement de nos diverses espèces de cham- pignons, et en produil méme quelques-unes qu'on s'était trop hâté d'éliminer de notre flore, comme demandant une latitude plus chaude et étant de leur nature exclusivement méridionales. Rien de plus accidenté et de plus pilloresquement varié que l'aspect de celle contrée formée de champs de céréales séparés par des fossés et des haies vives, et plus ou moins boisés dans tout leur périmètre, de nombreuses chaînes de collines, de vallées étroites el peu pro- fondes, de prés, de taillis, de landes, de foréls, de terres vagues cou- verles d'ajones el de bruyères, mais qui disparaissent progressive- ment sous les efforls d'une culture éclairée; bocage immense, coupé d'un labyrinthe de sentiers verdoyants et sinueux, de chemins vici- naux sillonnés de l'empreinte des chars rustiques, et parfois encais- sés bien au-dessous du gisement des terres labourées, et de quelques 74 routes départementales et stratégiques qui en vivifient les bourgs et les villages groupés dans tous les sites et dont quelques points cul- minants du passage laissent voir au voyageur les clochers épars élancant leurs flèches au-dessus des massifs de chênes, d'ormes ou de chátaigniers. La partie orientale de l'arrondissement de Segré est particulièrement riche en pâturages et en terres à froment très productives, grâce à la Mayenne qui la traverse du nord au sud et féconde tout ce qu'elle arrose. Cette rivière a pour affluent un cours d'eau plus central, navigable à partir de Segré, et que grossissent successivement l'Usure, qui baigne le Craonnais, l'Arraise, la Verzée et l'Argos et beaucoup de petits ruisseaux qui en sont les tributai- res. Ce qui complète la diversité du sol, et en fait singulièrement contraster les points de vue, c'est, dans le vaste triangle formé par les villes de Craon, de Pouancé et de Segré, un mélange de monti- cules, de plaines, de mamelons, de ravins, d'herbages, d'élangs, de déclivités aux épais ombrages, de marais peu étendus, de terres soit granitiques, soit schisteuses, rebelles à toute culture, et de nom- breuses ardoisières, les unes depuis longtemps abandonnées, les autres en pleine exploitation. Cette variété de sites et d'expositions champêtres, qui divergent vers tous les rhumbs de l'horizon, et ce terroir tour à tour sablonneux, friable, argileux, compacte, gras, tourbeux et composé d'alluvions et de détritus de végétaux, se prêtent admirablement à toutes les vicissitudes atmosphériques qui favorisent l'éclosion des cryptogames curieux et bizarres, et spécia- lement à la reproduction de toutes ces plantes aphylles, anomales et polymorphes, d'une nature molle ou spongieuse, coriace, tubé- reuse, cornée et parfois semi-ligneuse, qui constituent l'innombrable famille des champignons. Les agents extérieurs de la végétation de tous les fongoides sont l'air et la lumière, la chaleur et l'humidité. Dans l'obscurité des caves et des cryptes ou catacombes, ils s'étiolent et s’allongent vers le moindre soupirail comme les autres plantes. Il suit de là que la prédisposition hydro-attractive des grandes masses végétales doit être éminemment propre à leur propagation, et que, plus une région est boisée, plus ces productions anormales doivent y étre abondan- tes. Or, la partie septentrionale de l'ancien Anjou nous offre, vers le nord-ouest, la vaste forêt d'Ombrée, puis, sur la limite qui nous sépare de la Loire-Inférieure, la forét de Chauveau et les bois de Juigné ; entre Pouancé et Craon, la forêt qui emprunte son nom de cette dernière ville, les bois de Saint-Martin du Limet, de Pourzai, de Beauchéne, des Echrennes ; vers Ille-et-Vilaine, un peu en de- hors du Craonnais, l'immense forêt de la Guerche; à l'est de notre 75 circonscription, la forêt de Valle, au nord de Segré, le bois de la Ferrière, au nord-est de ce chef-lieu d'arrondissement, les bois de Monguillon et de la Jaille, plus au midi, ceux de Chenillé et de Chanteussé; au sud-est, la forêt de Longuenée. Notre cadre nous force d'abréger celte nomenclature d'une longueur déjà fastidieuse. Une contrée aussi bocagére, dans une zóne de température moyenne, ne реп! manquer d'être extrêmement fertile en crypto- games el en champignons aussi variés qu’intéressants. De cel aperçu topographique , qui doit faire pressentir nos richesses en ce genre, passons aux caractères généraux des champignons pour éviter le malheur d'être, dans nos phrases descriptives, incompris des lecteurs étrangers aux études mycétologiques. Distinguons d'abord dans le champignon une partie souterraine ou hypogée et une partie saillante hors du sol ou aérienne. La parlie cachée sous l'humus se compose d'un tissu plus ou moins serré, d'une sorte de feutre blanchâtre formé de fils très déliés qui s'entrelacent et s’anaslomosent dans tous les sens : c'est ce qu'on nomme le blanc de champignon ou le mycelium , qui correspond au chevelu , au collet de la racine et à la tige des phanérogames , quel- que paradoxale que puisse paraître cette assertion. Ce mycelium est ce que les jardiniers entretiennent artificiellement sur des couches de fumier industrieusement préparées pour avoir en toute saison l'agaric comestible. Le champignon qui s'élève au- dessus du sol est proprement un fruit porté sur un stipe ou pédicule. Ce support basilaire, tantót vertical, tantót excentrique et latéral, se couronne d'une expansion spongieuse, arrondie ou ovoide, appelée chapeau, lorsqu'elle est développée, et, en latin, pileus, umbrella, umbraculum. L'épiderme de ce parasol végétal, diversement coloré, recouvre la substance alimentaire, la partie charnue qu'on soumet à l'apprét culinaire, et, au-dessous d'elle, un hymenium, le récep- lacle des globules reproducteurs du champignon, nommés gongy- les, spores ou sporules. Celle membrane fructifère, ou, pour nous exprimer avec plus de justesse, sporifère, s'épanouit en lames rayonnantes dans les aga- rics, se ramifie en plis entre-croisés dans les mérules, se creuse en tubes cohérents dans les bolets, s'allonge en cônes alvéolés dans les morilles, en milres, en langues et en spatules dans les helvelloidées, en papilles ou pointes cylindriques et pendantes dans les hydnes ; en massues plus ou moins branchues, en ramifications frisées, cor- nues ou digitées dans les clavaires. Le mycelium s'étend el se propage dans toutes les directions, et l'humus qui le recèle contribue à en élargir la circonférence ou pé- 76 riphérie par l'engrais que lui fournit la décomposition même des champignons. Il faut couper, et non arracher ceux-ci si l'on veut en conserver les propagules ou le mycelium reproducteur. Le développement ou l'extension circulaire du blanc explique un phénoméne que quelques mycologues regardaient autrefois comme un probléme insoluble, savoir, l'habitude qu'ont certains agarics sociélaires de se grouper en rond et de former ce qu'une crédulité superstitieuse appelait jadis des cercles magiques. On nomme sporanges les récipients des corpuscules ou sporules propagateurs dont la germination produit le mycelium, fait doréna- vant indubitable, qui prouve combien était absurde l'opinion de ceux qui croyaient que les champignons provenaient de générations spontanées, chiinère que l'observation tend de plus en plus à dis- siper dans les deux règnes organiques. Les botanistes qui, comme le baron de Munchaussen, ont vu dans ces cryplogames des espèces de polypiers, à raison des animalcules infusoires découverls dans leur poussière humectée, ne s'écartaienl pas moins de la vérité. D'autres novateurs (notamment Necker dans sa Mycétologie) ont prétendu avec aussi peu de fondement que les champignons doivent leur naissance au tissu cellulaire des plantes, transformé en un corps radiculaire produisant une substance nommée carcithe, qui n'est que le mycelium méconnu. De là ils ont conclu qu'il faudrait adopter, sous l'appellation de regnum mesymale, un règne intermédiaire entre le règne végétal et le règne minéral. La nature du blanc de champignon, aujourd’hui mieux étudiée, est la réfutation de leur système. C'est à tort, enfin, que quelques mycologues ont pris pour des racines le prolongement pivotant de quelques bolets et pézizes el les fibrillules de certains lycoperdons dont le byssus blanchâtre ne diffère en rien du véritable mycelium. Pour achever d'initier nos lecteurs à la connaissance élémentaire des champignons, expliquons trois mols qui peuvent fournir de bons caractères à leur détermination précise el des coupes ou divi- sions bien tranchées à leur classificalion : ce sont les termes bourse, collet et cortine. Une amanite naissante s'offre sous la forme d’un œuf, enveloppée d'une membrane molle qui se déchire pour livrer passage au cha- peau à mesure qu'il se dilate et approche de sa maturité ; c'est cette enveloppe légère qu'on nomme bourse ou volva. Tantôt elle est entière, et recouvre intégralement le champignon qui s'en dégage comme d'un maillot; tantôt elle est incomplete el adhérente à la base du stipe el au chapeau sur la superficie duquel elle laisse des 77 taches ou pustules dont la blancheur contraste avec la couleur gé- nérale de l'ombrelle. Le collet ou anneau (annulus) n'est qu'un voile parliel inhérent au sommet du pédicule et au bord du chapeau; il s'en détache ensuite et prend ia forme d'une membrane circulaire, fréquemment plissée et rabatlue aulour du stipe. La corline (cortina) est un anneau incomplet, arachnoide, réunis- sant, avant le développement du champignon, le bord du chapeau avec le pédicule par des fils soyeux qui disparaissent à sa maturité. La cortine distingue une seclion d'agarics qui en empruntent le nom de cortinaires. Le docteur Persoon observe qu'on peut rencon- {гег une amanite pourvue simultanément d'une bourse et d'un collet, mais jamais un agaric qui ail à la fois une cortine et un anneau. De ces notions préliminaires, passons au recensement des cham- pignons les plus intéressants et les plus curieux du nord-ouest de l'Anjou, dont nous avons ci-dessus déroulé la carte ou esquissé la lopographie. Dés que les pluies équinoxiales du printemps ont fait place aux beaux jours, on voit se développer dans les terrains argileux, au pied des ormeaux, la morille comestible, morchella esculenta, phallus esculentus de Linné, champignon sans volva, à pédicule cylindrique, surmonté d'un chapeau ovoide ou coniforme, à surface marquée de nervures jaunátres, réliculées, et d'alvéoles sporulifères affectant des formes polygonales. J'ai trouvé cette morille abondante près de Châteaugontier, dans les champs voisins du bois de Gaudré, et, non loin de Daon, sur le territoire de la commune de Sœurdres, en Maine et Loire. On la rencontre parfois à peu de distance de Combrée, centre de mes anciennes explorations, sur les communes de Saint-Michel, de Noyant-la-Gravoyère et du Bourg-d'Iré. Un phallus, aussi vénéneux que le précédent est salubre, se montre, dés la fin de mai jusqu'à l'automne, dans les parties humides el marécageuses des forêts d'Ombrée, de Valle et de la Guerche, limite extréme de la Brelagne vers le Craonnais : c'est le phallus impudicus. Je l'ai remarqué près de Craon, dans le pare de la Lande, commune de Niaffe. Cette mo- rille, qui doit sans doute sa qualification spécifique à sa forme et à son odeur nauséabonde, est un poison redoutable; mais la félidité repoussanle de celle espèce rend heureusement à son égard toute méprise impossible. Elle sort d'une valve blanche arrondie comme une boule, et offre un slipe creux, blanchâtre, lacuneux et une ombrelle ridée à sa surface, et couverle d'une gelée verdâtre d’où s'exhalent des miasmes si délétères qu'ils font périr, suivant Méral , 78 les oiseaux renfermés sous une cloche avec celte substance as- phyxiante. Au commencement de juin foisonne dans tous nos bois la mérule- chanterelle, merulius cantharellus, champignon de couleur jaune ou chamois, à pédicule plein, charnu, épais, à chapeau d'abord convexe, puis sinueux, creusé en entonnoir, déchiqueté sur ses bords, et à face inférieure marquée d'un réseau de plis bifurqués et décurrents sur le stipe. Quoique coriace el d'une saveur un peu poivrée, il est très recherché comme aliment. Le printemps fait aussi éclore sur nos pelouses et dans nos prai- ries Yagaric-mousseron, à chapeau d'un blanc sale, jaunâtre ou cendré, à chair ferme, cassante et blanche, et à pédicule court, gros el cylindrique. Le mousseron blanc de Paulet ou l'agaricus albellus de Decandolle annonce sa présence dans nos friches par la suavité de son arôme, el conserve, à l'état sec, une odeur musquée qui lui est particulière el ne permet pas de le confondre avec son congénère. A mesure que la température s'élève et que les chaleurs devien- nent plus intenses, nos grandes forêts et nos chálaigneraies élalent de nouvelles richesses mycologiques, savoir, de nombreuses tribus de bolets, la plupart alimentaires et les autres suspects ou notoire- ment vénéneux. C'est alors qu'apparaissent dans toules les clairiéres de nos bois et le long de nos chemins vicinaux, au bord de nos fos- sés, le bolet comestible, boletus edulis, qui déploie un chapeau sou- vent fort large, d'un jaune fuligineux ou légèrement brunâtre, quelquefois couleur marron, à chair blanche, compacte, ne chan- geant pas de couleur au conlact de l'air, à tubes d'abord blancs et imperceplibles, puis pàles ou d'un jaune clair, et enfin à pédicule réticulé, bulbeux et d'un blanc-roux ; le bolet bronzé, boletus ocreus, à chapeau d'un brun noiratre, nuancé de rouge, épais, à chair ferme et à pores courts et jaunalres; le bolet orangé, boletus aurantiacus, commun à l'orée des bois, dans leurs éclaircis, el dans les localités couverles de bruyéres, bolet susceptible d'acquérir un volume re- marquable , à stipe long, cylindrique, compacte, parsemé d'écailles rousses, à tubes blancs et allongés, à chapeau bombé et couleur de brique, à chair blanche, épaisse, mais pouvant prendre une teinte rouge ou vineuse. Couronnons celle énumération par le bolet rude, boletus scaber, à pédicule renflé à la base, hérissé, rude au tact, à chapeau charnu, hémisphérique, cendré ou fauve, à pores blancs ou gris, jaunissanls ou carnés, à chair tendre, acidulée; joignons-y le bolet marron, boletus castaneus, à slipe lisse, mou, cylindrique, quelquefois renflé et crevassé à la base, à chapeau orbiculaire con- vexe, de couleur marron comme son pédicule, un peu jaunátre sur 79 les bords, à aspect veloulé, se déformant dans sa vieillesse, à chair molle et cotonneuse el à tubes successivement blancs et jaunes. J'ai observé fréquemment toutes ces espèces dans la forêt d'Ombrée, dans celle des Echrennes el dans les bois de Beauchéne et sur le lerritoire des communes de Bonchamp, de Congrier el de Saint- Aignan, ainsi que dans les foréts de Valle, de Craon et de la Guerche. Nos châlaigneraies fournissent encore le boletus felleus et le pipera- (us, celui-ci à chair poivrée, et le précédent à ombrelle fauve, à chair amère, rosâtre à l'air, à tubes blancs, qui se colorent de rose dans leur vieillesse. Ce groupe nombreux de bolets ombrelliformes nous offre deux espèces trés dangereuses que j'ai souvent rencontrées autour de Combrée et dans lout notre Craonnais. Ce sont les bolels rubéolaire et indigolier, rubeolarius et cyanescens. Ce qui les différencie de tous les autres, c'est la variation de la couleur de leur chair qui se change en bleu au contact de l'air, indice non équivoque de leur qualité délétère. La section des bolets dimidiés, sessiles ou stipilés et diversement ombraculiformes, en renferme de rares et de curieux qui attirent par leur singularité ou par leur beauté les regards de toul promeneur botanophile. Ce sont encore des espèces estivales. Essayons de les décrire : le moins commun de ces bolets, le bole- tus sulphureus, trouvé par moi sur la commune du Tremblay, près de Combrée, et autour de Daon, sur les confins de Maine el Loire, ainsi que dans les environs de Craon, nail sur le chêne et est parfois d'un volume assez considérable, mais loujours d'un jaune soufré éclatant en dessous, et d'un jaune orangé, avec une leinle rosée sous le frottement à sa surface supérieure. On te dit linctorial. Un autre bolel de ce groupe, rare encore, c'est le bolet luisant, boletus lucidus, à slipe excentrique, à chapeau coriace, quelquefois jaune dans l'état de jeunesse, mais ordinairement d'un rouge ver- uissé, à l'époque de son complet développement, dont j'ai observé avec soin les diverses phases. Trés variable par sa forme el sa grandeur, selon la remarque de M. Desvaux, il adhère aux vieilles souches et constitue une de nos plus belles espèces. Un troisième bolet dimidié intéresse l’industrie, et est connu sous les noms de bolet amadouvier, de bolet ungulé, parce qu'on en confeclionne de l'amadou et qu'il a la forme d'un sabot de cheval. Il vient sur le chêne et généralement sur les vieux arbres. Nous ne nous arrêlerons pas au bolel obtus, boletus obtusus, plus реш et plus arrondi que le précédent, lisse à sa face supérieure et commun sur le prunier, ni au boletus hispidus, à chapeau fibreux- 80 charnu, jaune-brunâtre, noir à son dépérissement, espèce triviale sur tous les vieux pommiers d'une végélalion mourante. Mais nous ne saurions passer sous silence le bolet hépatique, boletus hepaticus, fistulina buglossoïdes de Bulliard, champignon d'une forme très bizarre, naissant au pied du chêne, d'une substance brun-rouge. zonée, mollasse, fibreuse, semblable à un morceau de jambon ou plutôt à la pulpe d'une betterave cuite. C'est, dit Persoon, un des plus singuliers que l'on connaisse. En Autriche, suivant Tratinnick, on le fait cuire avec de la viande de veau, en y ajoulant de la créme et du jus de citron. On peut l'appréler en fricassée de poulet. Trop avancé, ce bolet tend à l'état ligneux et cesse d'être alimentaire. Toutes ces espèces sont une parlie essentielle de la cryptogamie de nos contrées, qui produisent encore les dedalea labyrinthiformis el suaveolens, le premier sur le chéne, le second sur le saule, l'un assez rare, l'autre vulgaire. Au nombre des champignons qui pullulent en été dans nos cam- pagnes, il faut compter la variété blanche du champignon de couche, appelée boule de neige, espèce d'une saveur délicieuse ; je l'ai trou- vée abondante autour de Combrée, dans les prés riverains de la Verzée, el dans ceux qui bordenl ja roule de Cháteaugontier à Am- poigné. On doit y ajouter l'agaric odorant de Bulliard, agaricus odorus, à pédicule dilaté au sommet, plein, blanc, un peu courbé, à chapeau très large, verdâtre ou bleuálre, sec, à feuillets blancs, iné- gaux, décurrents sur l'ombrelle ; l'agaricus virgineus ou ericeus, petit champignon blanc ou roux, mou ou sec, à slipe nu, plein ou fistu- leux, plus gros au sommel qu'à la base, à chapeau à bords roulés inférieurement, parfois striés et diaphanes, à lamelles serrées et iué- gales, commun dans nos bruyères el nos pâturages; de plus, tous les laclaires, el spécialement l'agaricus piperatus, agaric acre ou poivré, à pédicule blanc, cylindrique, plein, d'une épaisseur presque égale à sa longueur, à chapeau charnu, d'abord convexe et régulier, puis sinueux et creusé en enlonnoir, à feuillets légèrement rougeà- Ires ou jaunâtres, nombreux, inégaux, souvent bifurqués, el ren- dant, quand on le rompt, de nombreuses gouttes d'un suc blanc, très poivré; l'agaric controversé de Persoon, agaricus controversus, variété du précédent, remarquable par l’énormilé de son volume; c'est un des plus gros champignons de l'Anjou. Il est vulgaire dans nos forêts et taillis, et borde de ses larges ombrelles d'un blanc sale ou d'un jaune terreux les fossés latéraux de notre route départe- mentale de Craon à Pouancé et à Châteaubriant. Les agarics dou- ceâtre et doré, subdulcis el lactifluus aureus, appartiennent à ce groupe, lequel comprend aussi le redoutable agaricus necator, qui 81 croit dans les bois à la fin de l'élé et que j'ai recueilli dans la forêt de la Guerche. Les russulus fournissent copieusement à notre con- trée, dans cetle même saison, l'agaric sanguin, agaricus sanguineus, le ruber de Decandolle, champignon dangereux, à saveur trés caus- lique, à slipe épais, nu, blanc, souvent marqué de stries noires ou roses, un peu courbé, creux dans sa vieillesse, à chapeau d'un rouge sanguin, comme l'indique son nom, successivement convexe, ar- rondi, concave, à bords un peu déjelés el à lames épaisses, blanches, quelquefois bifurquées et trifurquées ; et Pagaric pecliné, agaricus peclinaceus, ainsi que ses variélés, l'émélique el le rosé, emeticus et roseus, champignons trés communs daus tous les lieux boisés du Craonnais et du nord de l'Anjou, mais tres vénéneux. A loules nos espèces eslivales, je me hale d'ajouter les deux champignons les plus curieux el les plus inléressants que j'aie trou- vés aux environs de Combrée, tous deux d'une beauté frappante, mais de qualités bien opposées. L'un est le magnifique agaric oronge du Midi, agaricus aurantiacus : jen ai rencontré, à la fin d'un été très chaud, neuf ou dix échantillons groupés circulairement dans la parlie de la forét d'Ombrée, limitrophe de la commune de Bourg- l'Evêque ; j'en portai trois, de différents âges, au château de Cham- ріге, chez Mm Ја comtesse de Narcé, et en vérifiai minutieusement lous les caractères, à l'aide du grand Dictionnaire des sciences na- іагеПеѕ, afin de communiquer le signalement exact de l'heureuse découverte de ce champignon méridional à M. Desvaux, qui n'avait osé l'introduire dans sa Flore. L'autre est le clathrus cancellatus, qui, par la singularilé de sa forme, mérite ici une descriplion détaillée. A sa naissance, il pré- senle une enveloppe globuleuse ou ovoide et blanche, de la grosseur d'une bille; peu à peu la volve se rompt à son sommet, et laisse voir le chapeau, qui est ordinairement d'un beau rouge, et formé de ra- mificalions charnues qui s'entre-croisent comme un grillage, et s'arrondissenL en voûte, en émeltant de tous côtés un liquide ver- datre, visqueux, horriblement félide, dans lequel sont renfermées les graines ou sporules. Cette malière glaireuse tombe en déliques- сепсе el entraîne avec elle les gongyles. Nos cantons possèdent encore deux agarics dignes d'intérét, lagaric améthiste, vulgaire le long de nos champs, et l'agaric ara- neux, agaricus araneosus, espèce polymorphe dont les nombreuses variélés offrent trop de modifications pour que les bornes d'un rapide aperçu nous permettent de les décrire. Voilà une faible esquisse des richesses mycologiques de nos printemps et de nos étés, auxquelles j'ajoulerais, si j'en avais le loisir, toules les espèces de 6 82 lycoperdons comprises dans la Flore des environs de Paris par Bulliard. Le bovista plumbea foisonne dans nos prés el sur nos pelouses. L'aurantiacum, le coelatum, l'excipuliforme, le geastrum hygrometri- cum, le perlatum et le molle abondent autour de Saint-Saturnin et du châleau de Beauchéne. J'ai trouvé le giganteum près du pont de Barbrel, à deux kilomètres de notre ville. Mais c'est surtout sous l'influence encore chaude des premières pluies automnales qu'on voit se succéder ou éclore simultanément d'innombrables peuplades de champignons dont les précédents ne sont que l'avant-garde. Ils s'emparent de tous les sites, envahissent tous les terrains ой les travaux de l'homme ne troublent point leur prompte végétalion et leur apparition éphémère. Ils récréent la vue de l'observateur par l'indescriplible variété de leurs formes, de leurs nuances, de leurs poses, de leurs attitudes. Ceux-ci croissenl parmi les gramens, et ornent de leurs ombrelles élégantes et diversement colorées les tapis de gazon dépouillés de l'émail des fleurs, tant la nature se plait à diversifier les décoralions. Ceux-là surgissent comme des dames d'ivoire au milieu des lits de mousse de la plus lendre verdure, et s'en délachent gracieusement par l'éclat de leur blancheur. Les uns, comme les pézizes, élalent au bord de nos rou- {ез leurs cupules cériforines d'un rouge de brique ou sur la terre el sur les branches mortes des haies lalérales de nos champs, leurs cuveltes pourprées, leurs coupes de carmin. Les autres, plus volu- mineux, s'attachent à des troncs d'arbres séculaires qu'ils parent de leurs chapeaux imbriqués, bruns ou fauves, ou adhèrent à leur pied avec diverses convenances d'agrément: tel est le champignon qui végète à la base de l'aune, sous la forme d'un pétoncle. « Quelle est, » dit Bernardin de Saint-Pierre, la nymphe qui a placé un coquil- » lage au pied de l'arbre des fleuves? Cette nombreuse tribu paraît » avoir la destinée attachée à celle des arbres qui ont chacun leur » champignon qui leur est affecté, et qu'on trouve rarement ail- » leurs : tels sont qui ne croissent que sur les racines des pruniers » et des pins. Le ciel a beau verser des pluies abondantes, les cham- » pignons, à couvert sous leurs parapluies, n’en reçoivent pas une » goulle. Ils tirent toute leur vie de la terre et du grand végétal au- » quel ils ont lié leur fortune : semblables à ces petils savoyards qui » sont placés, comme des bornes, aux portes des hotels, ils établis- » sent leur subsistance sur la surabondance d'aulrui; ils naissent » à l'ombre des puissances des forêts, el vivent du superflu de leurs magnifiques banquets. » « La nature, dit quelques lignes plus haut ce grand écrivain, l’un = 83 м » de nos plus harmonieux prosaleurs, a dispersé les champignons » dans la plupart des lieux ombragés, où ils forment souvent les » contrastes les plus extraordinaires. Il y en a qui ne viennent que » sur les rochers nus, où ils présentent une forêt de pelits filaments, » dont chacun est surmonté de son chapiteau. Il y en a qui crois- » sent sur les matières les plus abjecles, avec les formes les plus » graves : tel est celui qui vient sur le crotlin de cheval, et qui res- » semble à un chapeau romain, dont il porte le nom. » La nature, qui se plait à voiler la laideur sous l'ornement de ses compensations végétales el à uliliser tout sol délaissé par la culture, fait pulluler sur nos engrais, sur nos fumiers, de nombreux cham- pignons connus sous le nom de coprins, qui s'y succèdent jusqu'à l'entrée de l'hiver, saison oü leurs fragiles et tremblanles phalanges périssent el se décomposent sous l'action destructive des frimas. Il en est dont la nature moins fréle, subéreuse ou coriace, brave les froidures. Ceux-ci envahissent nos chantiers, nos bois de construc- lion : des auriculaires papyracées, des théléphores jaunes, pourprés ou azurés, des bolets verlicolores revêtent ou incrustent les troncs d'arbres abaltus, les poutres, les planchers, tous les malériaux li- gneux. Des tuberculaires, des sphérocarpes, des capillines, des my- riades de champignons microscopiques les colorent d'opale, de jaune-doré, d’albatre, d'incarnat, de cinabre et de vermillon. Des mucédinées innombrables jellent les réseaux de leurs fils d'une extrême ténuité sur toutes les subslances fermentescibles. Des pézi- zes slercoraires, des spheeria, des byssoides ornent jusqu'à la fiente de nos quadrupedes herbivores el de tous nos animaux ruminants. Tous ces infiniment pelits du règne végélal étonnent l'observateur par leur immense fécondité, et ouvrent un champ sans bornes aux recherches du savant. , Ce grand travail organique de la nature, à l'approche d'une saison qui semble la frapper d'une stérilité absolue et d'un léthargique sommeil, tourne au profit des besoins de l'homme, et prouve par une harmonie de plus, qu'il est l'objet constant de la palernelle sol- licitude el de la prévoyance infinie de son sublime auleur. En effet, c'est alors que nos foréls prodiguent aux délices de nos tables des produclions fongoides dédaignées du vulgaire, mais aussi saines que savoureuses, telles que la clavaire coralloide, pareille à un énorme chou-fleur, l'hydne sinueux , hydnum repandum, qui croit à terre, l'hydne hérisson, hydnum erinaceus, champignon hérissé de pointes perpendiculaires, et naissant dans les cicatrices des vieux chênes, la clavaire tête de Méduse, clavaria caput. Medusæ, dont le tronc court, compacte, charnu, adhérent aux bois morts, se termine en = = = 84 une multitude de divisious simples, chevelues, réunies en touffes, verticales d'abord, puis pendantes; et le groupe alimentaire des hel- velles, dont une seule espèce, l'helvelle hérissée, helvella hispida, est rejelée, à cause de son odeur de punaise. C'est alors que se mon- trent de toutes parts dans nos taillis, dans les endroits herbeux et couverts de fougères, dans nos genéls, le long de nos champs et de nos roules, l'agaric élevé, agaricus procerus, si connu sous le nom populaire de potiron, et qu'on mange avec sécurité dans toute l'Eu- rope, champignon à stipe long, parfois de huit à douze pouces, bul- beux à sa base, creux au centre, marqué de larges squames sur sa surface et d'un collet mobile et persistant, à chapeau d'un bistre plus ou moins foncé, mamelonné au sommet el couvert d'écailles imbriquées ; l'agaric solitaire, agaricus solitarius, grande et belle espèce, dépassant en bon terrain trois décimètres de hauteur, à volva incompléte, à chapeau convexe et régulier, blanc-sale, à surface verrugueuse, à pédicule long, plein, épais, charnu, lisse, à base trés grosse, écailleuse et d'une aspérité remarquable, à anneau membra- neux, large el rabatlu , à chair blanche et ferme ; et une foule d'au- tres que nous supprimons, faule d'espace. C'est alors aussi qu'affluent dans les mêmes forêts et sur nos pelouses trois amaniles funestes chaque année à des familles entières : ce sont l'amanite bulbeuse blanche, amanita bulbosa alba, vulgairement appelée oronge cigüe blanche, et ses perfides variélés, l'oronge cigüe jaune, amanita ci- trina, et l'oronge cigüe verte, amanita viridis. Chacune de ces espè- ces répand, en se décomposant, une odeur cadavéreuse et est un violent poison. On les confond sous les noms collectifs d'agaries bulbeux, d'amanites vénéneuses. Elles abondent dans la forét d'Om- brée et dans les foréts de Valle et de la Guerche, ou foisonne encore un champignon superbe par le rouge éclalant de son ombrelle inou- chelée des pailleltes de sa volve, mais qui n'est pas moins redoutable que les précédents : c'est l'agaric fausse-oronge, agaricus muscarius, ainsi nommé, suivant M. Desvaux, de la propriété qu'il a de tuer les mouches par son infusion aqueuse. Ces qualités délétères, d'une minorité de champignons, inspirent pour eux une aversion exagérée à nos gens de campagne, qui se plaisent à les détruire sous leurs pas et ne respectent que le poliron. Tous ceux qui n'ont point voyagé partagent plus ou moins celle haine, qui devrait se restrein- dre aux espèces vraiment dangereuses. Ils ignorent que les cham- pignons sont un bienfail providentiel pour des populations entières au nord et au midi de la France, et forment un aliment lourd et indigesle quand on en abuse, mais très substantiel et fort nourris- sant, à raison de la quantité d'huile, d'albumine, d'adipocire et de 85 matière animale et azotée qu'ils contiennent. D'ailleurs, il est cer- taines préparations culinaires qui enlèvent à ces cryptogames leur principe vénéneux ou l’atténuent suffisamment pour qu'ils cessent d'étre mortels. Au reste, ne serait-il pas facile de rendre, dans le choix des espèces, les méprises presque impossibles par un tableau comparatif des champignons alimentaires et des champignons meur- triers, en plaçant en regard, sur deux lignes parallèles, les caractères spécifiques qui les distinguent respectivement de la manière la plus tranchée et la plus saisissante? Voici un spécimen de ces descriptions mises en contraste et propres à prévenir toute erreur. Agaric comestible. — Chapeau non visqueux, facile à peler et uni; feuillets rosés, qui brunissent dans leur vieillesse; anneau à bords déchiquetés ; stipe sans renflement à sa base; absence de volva sur le pédicule; odeur et saveur agréables; croissant spontanément dans tous les lieux aérés, herbeux et découverts. Oronge véritable ou alimentaire. — Volva trés complète; chapeau rouge-orangé, lisse, sans verrues ni enduit visqueux, strié sur les bords; feuillets jaunes; stipe jaune, lisse. Agaric alutacé, édule (espéce estivale oubliée par moi). — Pédicule plein, ferme, épais, blanc, droit, très vertical; chapeau d'un beau rouge, campanulé, puis presque plan, et à bords sillonnés; lames jaunes, larges, égales, souples; saveur nullement désagréable. Agaric bulbeux, le fléau des familles. — Chapeau souvent couvert de verrues, un peu visqueux, ne se pelant pas; feuillets toujours blancs; anneau à bords entiers ; stipe bulbeux à la base; volva en- veloppant la base du pédicule; odeur et saveur repoussantes ; crois- sant spontanément dans les bois humides et ombragés. C'est le méme champignon que l'amanite cigüe blanche. Fausse oronge, vénéneuse. — Volva incomplète ; chapeau écarlate, couvert de paillettes blanches ; débris de sa volve, un peu visqueux, sans stries sur les bords ; feuillets blancs ; stipe blanc, légèrement écailleux. Agaric sanguin, vénéneux. — Pédicule creux en vieillissant, sou- vent marqué de slries noires ou roses, un peu courbé; chapeau d'un rouge sanguin, d'abord convexe, ensuite concave, arrondi, 86 sans slries; lames fragiles, blanches, quelques-unes bi ou trifur- quées ; saveur âcre et caustique. Bolet comestible ow ceps. — Pédicule épais, surtout à la base, marbré de roux et de blanc pâle; chapeau épais, fauve, glabre; tubes très petits, arrondis, à demi-libres, blancs, passant au jaune ver- dâtre ; chair ferme, épaisse, blanche ou jaunâtre. Bolet pernicieux ou rubéolaire. — Pédicule long, presque égal, marqué supérieurement de quelques lignes rouges réticulées ; cha- peau bombé, à surface un peu cotonneuse, d'abord olivâtre, plus lard rougeatre et visqueux; tubes presque libres, très longs, jaunes, à orifice rouge ; chair jaune, devenant bleue au contact de l'air. HARANG. ESSAIS ETYMOLOGIQUES SUR L'ORNITHOLOGIE DE MAINE ET LOIRE “® Avant de passer au troisième ordre des oiseaux de la Faune de Maine et Loire, je ne puis résister au désir de raconter un fait qui corrobore mon opinion favorable aux pics, et combat les mé- fails qu'on reproche aux grimpeurs avec trop de partialilé et d'in- justice. Un de mes amis, grand amaleur d'histoire naturelle, loin de par- lager mon sentiment sur celte famille de proscrils, prenait plaisir à recueillir toutes les observations propres à augmenter la liste des ravages altribués aux pics. Ainsi que l'un de ses parents il se mon- trait disposé à mettre à prix, dans toute l'étendue de ses propriétés, les langues des Proglosses. Combien d’autres cependant, plus nuisi- bles et plus dangereuses que celles-ci, ne sont pas puuies avec le méme acharnement! Comme ce parent il eût désiré recevoir de temps en temps une pelile boite pleine des langues des grimpeurs. Celle boile élait expédiée d'une maniere tres régulière et une prime pour chaque langue élait accordée à l'heureux chasseur qui exécu- (1) Voir Annales de la Société Linneenne de Maine et Lowe, tome 11, page 44. 88 lait un ordre, dont pour lui l'importance se mesurait sur les béné- fices qu'il en retirait. Après un séjour assez long à la campagne, pendant lequel le mandat d'exterminer tous les pics avait été re- nouvelé aux gardes el aux fermiers avec une ferveur toujours crois- sante, mon ami vint me trouver, pressé en méme temps par un sentiment de joie et de tristesse. П s'agissait de m'annoncer d'un côté une perte qu'il venait d'éprouver et de l'autre une nouvelle preuve péremptoire justifiant sa haine contre les pies. Un des plus beaux arbres de sa campagne, un chêne magnifique végétait depuis plusieurs années; des branches et une partie de l'écorce s'étaient détachées du tronc, l'arbre paraissait languir et devoir bientót se dessécher entièrement. Les pics de toute la contrée semblaient s'é- {ге donné rendez-vous pour le percer dans tous les sens. Quelques personnes étaient portées à reconnaitre dans ce fait une croisade or- ganisée par la vengeance ; j'y trouvais au contraire un acte de géné- rosité exercé envers un persécuteur. Mon ami pensait que l'arbre périssait parce que les pies l'avaient perforé ; je croyais au contraire qu'ils le sondaient dans tous les sens pour lui venir en aide el pro- longer son existence. Le chêne est condamné et abattu, le tronc scié en plusieurs billes. Le charpentier, partageant les idées du proprié- taire, et convaincu que l'arbre n'était défectueux que dans les en- droils oü les pics l'avaient perforé, avait payé le chéneun prix assez élevé. Nouveau service rendu à mon ami par les grimpeurs. On re- marqua bienlót quesousl'écorcedont une partie avait disparu, existait une fissure pénétrant dans l'intérieur de l'arbre et offrant des rami- ficalions irrégulières, tantôt étroites, tantótlarges et se prolongeant dans la plus grande partie du tronc pour se terminer par une déchi- rure déguisée sous l'écorce. L'eau avail pénétré dans cette plaie el corrompu insensiblement les parlies voisines, et dés lors une quan- tité considérable de gros vers rongeurs s'y élaient installés. Là ils avaient élabli leur quartier-général d’où ils sortaient fréquemment pour exercer de terribles ravages. C'était à ces ennemis du chéne que les pics avaient déclaré une guerre incessante et non à leur per- sécuteur dont ils défendaient la propriété avec une persévérance payée par une noire ingratitude. Il fut constaté que le dépérisse- ment de l'arbre devait être attribué à la foudre qui avait, plusieurs fois, frappé le chéne et exercé quelques-uns de ces effels si bizarres et si capricieux, mais qui lui sont cependant si habituels et dont les conséquences n'avaient pas élé visibles immédiatement. Celle fois encore, dans le procès inlenlé aux pics, la déposition du témoin à charge non-seulement élait anéantie, mais lournait encore à la juslificalion complete des accusés. 89 La défense des buses, que je n'ai présentée que d'une manière superficielle, serait encore plus facile à soutenir que celle des grimpeurs. Il me parait en effet trés aisé de prouver aux proprié- taires qui déclarent une guerre implacable à ces rapaces, que leur acharnement n'est pas fondé. Les dégâts que peuvent exercer les buses sont bien loin de pouvoir étre comparés aux services que ces oiseaux rendent à l'agriculture en détruisant tous les petits mam- mifères et les gros insectes qui dévorent les semences. Depuis de longues années, M. Deloche, conservateur du Musée, а préparé et monté plus de cent cinquante buses; toutes, sans exception, con- tenaient dans leur intérieur des débris de rats, de mulols, de tau- pes, des pelotes composées de courtillières et de grillons et jamais aucune trace de gibier. Mon intention n'est pas de soutenir que les buses n'attaquent et ne mangent jamais de gibier, ce serait avancer une opinion fausse, mais elle se borne à constater que ce dernier grief n'est pas aussi fréquent qu'on le croit ordinairement et qu'il doit s'effacer en présence des services habituels rendus par ces ra- paces aux propriétés, surtout au commencement de l'hiver. C'est en effet vers cette époque que les buses se livrent à des pérégrinations continuelles, lorsque les semences ont le plus besoin d'élre préser- vées des ravages exercés par une multitude de petits rongeurs et d'insectes nuisibles. Зе ORDRE. — PASSEREAUX ®, Le troisième ordre des oiseaux porte dans la Faune de Maine et Loire le nom de passereaux , d'autres auteurs lui ont donné celui de sylvains. La première dénominalion me parait plus convenable que la seconde, en ce sens qu'elle est plus générale el qu'elle s'ap- plique mieux aux nombreuses familles renfermées dans cet ordre. L'élymologie du mot passereau se trouve dans le verbe passare, vieille expression laline signifiant aller d'un endroit dans un autre, sans s'y fixer longtemps el représentant d'une manière expressive (1) Je répète ce que j'ai dit : je n'ai nullement l'intention de composer une Faune, mon but est simplement d'expliquer par les habitudes des oiseaux, leurs noms scientifiques et vulgaires et de montrer l'action de la Providence, là où les naturalistes ne voient trop souvent que bizarrerie ou caprice, 90 les habitudes des oiseaux désignés par ce nom. Le plus grand nom- bre des passereaux émigre selon les saisons et va demander a de nouveaux climats la nourriture que d’autres lui refusent. Pendant leur séjour méme dans les pays qu'ils habitent, ils aiment par goût el par nécessilé à en parcourir les différents sites. Les bois, les plaines, les buissons, les bords des rivières sont tour à tour témoins de leurs excursions rapides et multipliées. PREMIÈRE FAMILLE. Latirostres, La 1" famille de l'ordre des passereaux a recu le nom de latiros- tres (de latum, large et rostrum, bec). Dieu, selon le dessein de sa providence, a procuré à ces oiseaux dans les dimensions de leur large bec, un moyen puissant et sûr de saisir les insectes ailés qui leur servent de nourriture. PREMIER GENRE. ENGOULEVENT ORDINAIRE. — Caprimulgus Europœus. L’engoulevent est un oiseau semi-noclurne. Pendant le jour il se tient régulièrement à terre, au milieu des taillis ou des bois de sa- pins. Si quelque cause le force à voler pendant le jour, la lumière fatigue ses yeux trop sensibles et dès-lors son vol est saccadé et in- certain. On le voit chercher un refuge sur les arbres contre lesquels il semble se heurter. N'ayant pas comme les oiseaux de nuit le moyen de se soustraire à ses ennemis en se cachant dans les cavités des arbres ou des vieux murs, il deviendrait facilement la victime des chasseurs ou des rapaces si la Providence ne lui avail pas donné en compensation un inslinct parliculier. L'engoulevent est avec le scops le seul oiseau de l'Europe qui se perche dans le sens de la longueur des branches. Sa couleur se ma- rie trés bien avec celle de l'écorce des arbres; il se confond ainsi avec la branche qui lui sert d'appui et se dérobe aux regards les plus clairvoyants. Quand le soleil disparait et que le crépuscule lui succède, l'engoulevent s'élance dans les airs el développe toutes les 91 ressources de son vol puissant. Il décrit des cercles en tous sens au- tour des arbres qu'il enveloppe d'une série de spirales dont le dia- métre se rétrécit et s'élargit tour à tour. Son vol tient alors de celui de l'hirondelle et de la chouette. Comme la première, l'engoulevent se joue dans l'air et glisse à la surface de la terre avec une grâce et une facilité remarquables. Comme 1а seconde, il semble soutenu par ses plumes fines et pressées et son vol s'accomplit sans bruit quandil ne chasse pas. Lorsque cet oiseau poursuit les insectes pendant les quelques heures du crépuscule, il ouvre un bec d'une largeur démesurée et garni à sa base de quelques poils longs et roides. Ceux-ci concourent à diriger les insectes dans le gosier de l'engoulevent. Ce latirostre ne le ferme que lorsqu'il est tapissé de victimes. Pour que ces dernières ne puissent sortir de cette pri- son quand elles y sont entrées, tout l'intérieur du bec est enduit d'une couche de glu naturelle que l'oiseau renouvelle selon ses be- soins. En volant avec une grande vitesse et le bec ouvert, l'engou- levent produit un bourdonnement sourd qui augmente ou diminue avec la rapidité du vol. L'air étant alors vivement déplacé vient s'engouffrer dans le large gossier de ce passereau et produit le méme effet que l'air dans le corps d'une toupie dont le ronflement est en rapport avec la puissance de rotation qu'on lui imprime. C'est à cette maniére de voler qu'il doit son nom d'engoulevent. Quelques instants avant de commencer la chasse, le mâle fait en- tendre un bruit trés sonore et semblable à celui d'un rouet à filer; il répète le méme bruit pendant les moments de repos qu'il prend pendant ses excursions crépusculaires. De temps en temps il inter- rompt son vol, pour se laisser tomber à terre avec !a rapidité d'une balle, et y saisir les bousiers et autres coléoptères qu'il a aperçus dans sa course, malgré la rapidité avec laquelle il l'accomplit. Les épithètes , ordinaire el européen, ajoutées au nom de l'engoule- vent, indiquent que cetle espèce est la plus commune. Partout elle se trouve répandue et cependant nulle part elle n'est mullipliée. Celle dénomination sert aussi à la distinguer de l'engoulevent à col - lier roux qui habite l'Afrique et se montre dans quelques contrées de l'Europe. Le nom scientifique caprimulgus dérive de caprea, chèvre et de mulgeo, téter et signifie dès lors: oiseau qui tette les chèvres. Celte hypothèse n'est nullement fondée et ne peuts'expliquer que parce que l'engoulevent se tenant à terre et étendu sur le ventre pendant le jour, a été nommé par les habitants des campagnes crapaud-volant. Ils l'ont comparé au erapaud à cause de son cri et de son large bec. Dès lors on lui a attribué l'habitude prétendue du crapaud, celle de 99 Jl téter les chèvres et ce préjugé est venu s'abriter sous la protection du nom pompeux adopté par la science. L'engoulevent habite le plus souvent les terrains sablonneux el plantés de sapins; il aime de préférence les lisières des bois. C'est là qu'il trouve une nourriture plus abondante et qu'il peut plus faci- lement élever ses petits. La femelle beaucoup plus grosse que le mâle, ne fait aucun nid, dépose à terre deux œufs oblongs dont le diamètre varie de 0™ 020 à 0™ 022, et la longueur de 0" 030 à Om 032. Leur couleur est d'un blanc marbré et couvert de taches brunes et cendrées. Des naturalistes prétendent que lorsque la femelle craint des dangers pour ses œufs, elle les roule ou les transporte méme dans son bec en des endroits où elle pense jouir de plus de sécurité. Quelquefois on trouve trois ceufs dans le méme nid, mais ce cas très rare s'est cependant présenté cette année à Bagneux, près Saumur. Tous les ans plusieurs couples d'engoulevent viennent se repro- duire dans la propriété de M. Boguais, au milieu des taillis encadrés par les bouquets de sapins situés sur les bords de l'étang Saint-Ni- colas. C'est là que pendant les mois de juin et de juillet, on peut, vers le coucher du soleil, étre témoin du vol, de la chasse et du bruit si curieux de l'engoulevent. DEUXIEME GENRE. MARTINET DE MURAILLES. — Gypselus murarius. Le martinet est de tous les oiseaux visitant l'Europe celui qui ar- rive le plus tard et qui part le plus tôt. En cela le martinet ne suit pas un caprice, mais l'instinct donné par la Providence qui lui in- dique le temps et le lieu oü il trouve en plus grande quantité les in- sectes nécessaires à sa nourriture. Chaque année il avance ou re- larde son arrivée et son départ selon les variations de la tempé- rature. Plus hirondelle que les hirondelles mémes, le marlinet est. com- pris dans leur genre par le plus grand nombre des naturalistes et porte le nom d'hirundo apus, dérivé de a et тоо, modos el signifiant hi- rondelle privée de pieds, de tarses. Celte particularilé est un des ca- ractères les plus remarquables du marlinet. En effet, malgré ses ailes longues el puissantes, cet oiseau ne peut se dérober à ses ennemis dès qu'il se pose à terre. La nullité de ses tarses ne lui permet pas 93 de prendre son essor, aussi évite-t-il avec le plus grand soin de se reposer sur un terrain non accidenté. Dans les airs il règne par la facilité et la rapidité de son vol et échappe par celte puissance à tous les oiseaux de proie. Afin d'obvier aux inconvénients qui résul- tent de celte privation de tarses, Dieu a doué le martinet d'une vue très perçante. Dès lors il distingue de très loin et au milieu de sa course rapide les plus petits insecles fixés sur les rochers ou le long des murailles, sans être obligé de parcourir, en s'y arrélant, les lieux qui lui fournissent sa nourriture. Le martinet doil peul-étre son nom à son vol. Ses ailes frappent l'air et les murailles avec la rapidité de l'instrument mû par la va- peur et les chules d'eau. La dénomination de martelet (petit marteau) sous laquelle il est connu dans l'Encyclopédie d'histoire naturelle semble favoriser celle explication. Elle me paraît d'aulant plus fondée que le martinet en martelant les murailles avec ses longues ailes se propose un but sérieux et caractéristique, celui de faire en- voler les insecles qui y sont attachés, afin deles saisir ensuile plus facilement dans leur vol ou leur chute. Nous pouvons constater celle habitude dans les mois de juin et de juillet. Lorsque la tempé- rature est élevée et le ciel serein, nous voyons les martinels se réu- nir en troupes nombreuses, voler avec une grande rapidité, pousser des cris stridents en parcourant tous les immenses contours de notre vieux chateau si riche en souvenirs. Ces cris sont deslinés à effrayer les insecles, à les faire sortir de leurs retraites ou du moins à les déterminer à changer de place pour se cacher et dés lors à les livrer plus sürement à leurs ennemis enlesrendant plus visibles. Les mar- linels baissent et élévent tour à tour leur vol, ils semblent se propo- ser de balayer avec leurs ailes toutes les parois de celte antique el magnifique forleresse. Une idée de percussion semble naturellement attachée au nom de martinet. Serait-ce un souvenir pénible de l'enfance ? Le mol viendrait-il de Mars el tinio (annoncer par ses cris le com- bat, la mort) ou de Mars, Martis et neo filer, tresser le trépas, la guerre? Ces deux élymologies pourraient s'adapter aux habitudes de ce latirostre. Il répand la mort parmi les insectes en accompa- апаш celle chasse dun cri de guerre strident. Dans toutes lessinuosi- tés de son vol, il рагай en passant el repassant au milieu des insectes qu'il immole, former un tissu comme la navelle lancée avec une grande rapidité dans des sens contraires. Vabandonne volontiers aux érudils la tâche de donner une solution à ce problème. Quoi- qu'il en soil, ces hypothèses ont l'avantage de faire connaître les habitudes du martinet qui le malin promène la mort parmi les in- 94 secles volligeant sur les prairies, et le soir poursuit dans les régions les plus élevées et avec la rapidité de l'éclair les insectes de haut vol. Le bec du martinet est lriangulaire et sécrèle une humeur vis- queuse sur laquelle vienuent se coller les viclimes qu'il saisit en vo- lant. Quand ce latirostre a des pelits et que son bec est rempli d'in- secles il passe devant son nid un grand nombre de fois et s'élance eusuile dans le trou qui y conduit avec la vilesse de la balle. C'est à celle habitude de nicher dans les murailles qu'il doit son épithete murarius et son nom scientifique gypselus de коче» dont la racine Кот» signifie cavité. Le martinel se retire dans les trous des murail- les, des clochers, des bords escarpés des rivières, pendant le milieu du jour, car il ne chasse que le matin et le soir. C'est dans ces cavi- tés qu'il fait assez grossièrement son nid avec les balayures des rues. La pelilesse des tarses du martinet ne lui permellant que très difficilement de saisir lui-méme ces débris à terre, il devient évident qu'il a recours à la ruse pour se les procurer. En effet, il pille les nids des moineaux dont il mange les œufs et s'y établit ensuite quand il croit pouvoir s'y maintenir. Mais le plus souvent il est immolé par les propriétaires du nid qui percent à coups de bec la tête du ravis- seur. Celle habitude du martinet me parait expliquer l'opinion de Ménage qui pense que le mol martinet est un diminulif du mot Mar- lin, nom d'homme, comme perroquet dérive du mot Perrot, Pierre ; sansonnet, de Samson elc. Car alors martinet signifierait petit Mar- tin, pelit maître, petit père Martin, individu qui ne se gêne pas avec ses voisins, qui s’installe chez eux volontiers, sans leur permission el qui s'y conduit en maître, malgré leurs légitimes réclamations et leur énergique opposilion. Quelquefois се latirostre dépose sur des brins de paille l'humeur visqueuse qui lapisse son gosier ; dès lors ces débris se trouvent liés entre eux et forment un lout qui en se durcissant présente l'as- pect des nids provenant de la fontaine Saint-Allyre, en Auvergne. Le marlinet enlève aussi la mousse qui recouvre les troncs d'arbres en s'y accrochant à la manière des pics. C'est la grande difficulté qu'éprouve cet oiseau à saisir à terre les malériaux nécessaires pour la construction de son nid qui a fail naître la pensée de prendre les marlinels à la ligne. En Grèce et dans les iles de l'Archipel où ces lalirostres sont trés nombreux, les enfants montent dans les clochers ou sur les terrasses élevées et laissent volliger une ligue dont l'ha- mecon est déguisé sous un morceau de colon ou d'étoffe. Le mar- linet saisit en volant cel appàt el se prend à l'hamecon. Un pêcheur exercé peut caplurer deux ou trois douzaines de ces oiseaux, par soi- rée, dans le temps de la nidificalion. Les marlinels sont recher- 95 chés dans ces pays, par les gastronomes, comme un mets délicat. Le martinet pond trois ou quatre œufs blancs, oblongs, dont la longueur varie de 0" 023 à 0" 026 el le diamètre de O" 016 à 0"018, TROISIÈME GENRE (1). HIRONDELLE DE CHEMINÉE. — Hirundo rustica, domestica. Tous les oiseaux compris dans le geure Hirondelle sont doués d'une grande puissance de vol. Le faucon se précipite avec plus de rapidité que l'hirondelle, mais celle-ci glisse avec plus de facililé dans l'air où elle poursuit les insectes en jetant un petit cri et en ouvrant un large bec, tantót dans les régions les plus élevées de l'atmosphère et tantót en rasant la surface de l'eau. Celte facilité de vol et celte habitude d'ouvrir à chaque instant le bec pour happer les insectes me semblent indiquer l'élymologie du mot hirundo. Il dériverait alors de hiare, bâiller, pousser un son avec effort et de undo, ondoyer et signifierait oiseau qui bâille, qui ouvre le bec en ondoyant dans l'air. Le deuxiéme verbe caractérise d'une maniere expressive la grâce du vol de l'hirondelle si bien décrit par Buffon el le premier s'appuie sur les habitudes de cel oiseau et l'autorité d'Illiger. Celui-ci dans son cours d'histoire naturelle désigne les hi- rondelles par l'épithète hiantes, les báilleuses et par extension les criardes. Peut-élre pourrait-on hasarder l'étymologie suivante : hiare el unda, oiseau qui ouvre ie bec en effleurant l'onde; quoiqu'un peu téméraire celle étymologie aurait l'avantage de faire connaître une parlicularilé de la vie des hirondelles qui dans leur vol rapide rasent la surface de l'eau, ouvrent le bec pour boire sans ralentir leur course ou pour humecter la terre destinée à la construction de leur nid. Enfin elles aiment à se plonger dans l'eau à plusieurs reprises, (1) Comme précédemment je vais continuer à énoncer quelques hypothèses sur les étymologies des noms des oiseaux. Parcourant une route inexplorée jusqu'à ce jour, je ne puis suivre aucun guide reconnu par la science ; mais si je m'égare et si dans ce travail, je m'éloigne de la vérité, j'espère du moins n'être pas condamné, car l'hérésie ornithologique comme l'hérésie religieuse suppose l'opiniàtreté dans la défense de ses erreurs. Or, je renonce d'avance à toutes celles qui seront signalées par les maîtres de la science. Les mœurs des oiseaux m'engageront peut-être aussi quelquefois à faire de petites excursions sur le domaine de la philosophie et de la morale, mais je pense trouver dans l'exemple du bon Lafontaine et dans le caractère dont je suis revêtu, une justification à ces digressions, 96 en jetant un petit cri de satisfaction, dans le but de noyer les insec- tes nombreux qui s’atlachent à leurs plumes el les tourmentent sans cesse. Gessner prétend que le mot hirundo vient de herendo, quia hi- rundo nidum componit tignis adherentem. Ainsi d'après cet auteur le nom @hirondelle aurait élé donné à cel oiseau parce qu'il construit un nid adhérent aux poutres, aux linteaux des croisées. Scaliger fait dériver hirundo de xe:4 d'où helundo et hirundo. La racine de xedav serait-elle alors xs, lyre el «dos, forme? Dans celte supposi- lion, cette étymologie s'appliquerait à la queue des hirondelles re- présentant assez exaclement une lyre et fournissant un des carac- tères les plus distinctifs de ces oiseaux, et qui servent à les classer. Quelques auteurs trouvent une racine du mot. hirondelle dans Фр» signifiant gazouiller, parler, élymologie qui se rapprocherait de celle que j'ai avancée. Enfin la vieille dénomination de l'hirondelle, aronde , nous présenterait un nouvel ordre d'idées, elle viendrait de zap, printemps et sapnos, pos, printannier, et signifierait alors oiseau du printemps, qui par son arrivée annonce le retour du printemps. Le nom de la chélidoine ne lui ayant été donné que parce que celte plante fleurit au printemps, viendrait fortifier celle dernière opinion et servir de trait d'union entre хед» el aronde. Partout l’arrivée des hirondelles est accueillie avec plaisir, car elle annonce le retour du printemps. En Espagne, une légende po- pulaire, répétée dans tous les foyers, donne un autre motif de cette bienvenue. La voici : Pourquoi l'hirondelle est-elle un oiseau aimé et respecté, accueilli en signe de bonheur? C'est que ce fut une hi- rondelle qui alla arracher les épines dans le front saignant du Christ. Les mémes légendes expliquent ainsi le chant étouffé du hibou et son éloignement pour la lumière : Le hibou était autrefois un des oiseaux qui chantaient le mieux. Il se trouva présent lorsque le Sei- gneur expira, et depuis ce moment il fuit la lumière témoin d'un si grand crime, et il ne fait plus entendre que son cri plaintif el étouffé où le peuple andaloux croit disünguer encore le mol Cruz, cruz (croix , croix). Les ressources du vol des hirondelles auraient dû résoudre plus 101 la question de leur immersion annuelle. Pendant plusieurs siécles on a cru que ces oiseaux ne pouvaient pas franchir les mers pour demander à d’autres climats la nourriture et l'hospitalité pendant l'hiver. On admettait qu'ils se reliraient dans des cavernes où ils passaient la saison des frimals, allachés aux parois des murs à la maniere des chauves-souris. Des naluralisles ont méme soulenu que les hirondelles se précipilaient dans les puils ou dans les marais 97 pour s'ensevelir sous la vase ou le sable et ressusciter au printemps. Cette opinion coutraire aux principes les plus élémentaires de l'or- ganisalion des oiseaux, élait tellement répandue que Buffon a con- sacré prés d'un demi-volume à la réfuter : si les cailles peuvent franchir la Méditerranée avec leur vol peu soulenu, ce passage ne doit pas être un obstacle sérieux pour les hirondelles. On a constaté depuis un certain nombre d'années que ces oiseaux se trouvent pendant l'hiver par troupes innombrables au cap de Bonne-Espé- rance et dans les autres régions du midi de l'Afrique. Circonstance qui explique l'absence des hirondelles au nord de cette méme contrée. L’hirondelle de cheminée a reçu les épithètes de domestique, de villageoise, de campagnarde (domestica, rustica). La première de ces expressions nous reporte à des temps bien éloignés de nous, à des meeurs, hélas ! qui n'existent presque plus que comme des souve- nirs. Cet adjectif me semble renfermer le sens de deux mols grecs, дела, maison dont la racine est 2и, signifiant fonder, bâtir, demeu- rer el ғгтга, foyer, banquet, et associer ainsi des idées bien touchantes. Dans le temps des mœurs patriarchales cette expression domestica, servante, domestique, ful employée pour désigner ceux qui appelés au banquet et au foyer de la famille, élaient considérés comme des membres de celle méme famille dont ils devaient partager les tra- vaux, les joies el les douleurs. C'était à eux qu'on confiait les mis- sions les plus délicates, comme la Bible nous en offre des exemples si mullipliés et si attachants. Les domestiques, les servileurs élaient d'autres soi-même, ils recevaient l'enfant naissant pour lui prodiguer les caresses les plus tendres, les soins les plus intelligents el les plus persévéranls; sans ambition, ils n'aspiraient après avoir élevé plusieurs générations et s'être dépensés en soins el en travaux continuels, qu'à rendre le dernier soupir dans la maison et au sein d'une famille qu'ils regardaient et aimaient comme la leur. Mainte- nant que le cours des siècles, l'indépendance des mœurs et le pro- grès des idées scepliques ont renversé et détruit le banquet et le foyer domestiques, ces derniers mols sont vides de sens. Ils ne rap- pellent plus ces réunions intimes, ces épanchements du cœur, ces causeries dans lesquelles plusieurs générations, maîtres el servi- leurs, puisaient tour à tour enseignement, espérance el gaielé, respect et douce confiance; el où les traditions de foi, de loyauté et d'hon- neur se transmellaientpures et intactes. Dès lors que chacun semble fuir le foyer domestique comme pour échapper à un ennui ou à un remords et cherche à s'étourdir dans ces réunions, décorées peut- être par un esprit malin du nom de cercles (sans principe et sans - í 98 fin), le mot domesticus, domestica a perdu sa véritable signification. Aujourd'hui il sert malheureusement trop souvent à désigner ceux qui comme les passereaux ne se fixent nulle part, voyagent de mai- son en maison au gré de leurs caprices, emportant ou laissant tour à tour de tristes souvenirs de leur passage éphémère sous le loit qui leur a donné l'hospitalité. Hérilière des vieilles traditions l'hirondelle de cheminée est véritablement domestique, dans la bonne acception du mot. Elle vient se reposer au foyer dela maison, elle s'y fixe, y établit son nid et y élève ses pelils avec une tendre sollicitude. L'an- née suivante, le méme foyer la verra revenir ; si le nid est demeuré intact, elle s'y installe immédiatement comme dans sa propriété; s'il est délruit, elle le rétablit. L'hirondelle ne quittera la maison de son choix que si elle y est contrainle par la force et dans ce cas méme son dernier chant en s'en éloignant sera un adieu d'amour et de reconnaissance el jamais un cri de malédiclion. Plus tard les jeu- nes viendront continuer la chaine de la tradition et le méme nid verra s'élever el se succéder bien des généralions. Chaque année le retour sera annoncé aux habitants de la maison par une série de pelits cris, expression de la joie et de la confiance et le rnoment du départ salué par des signes non équivoques de regret et de sympa- thie. Les cris que les hirondellesfont entendre à leur arrivée et à leur départ sont peut-élre pour elles l'expression des mémes sentiments que ceux que nous éprouvons lorsqu'aprés unelongue absence nous retrouvons les lieux qui nous ont vu naître ou lorsqu'il s'agit de quitter le toit paternel pour entreprendre un lointain et périlleux voyage. Les auteurs d'histoire naturelle viennent corroborer l'opi- nion que j'ai émise lorsqu'ils disent que le mot domestica а élé donné à cette hirondelle parce qu'elle est plus familière (de la famille) que les autres et qu'elle parait aimer et rechercher la société de l'homme. L’épithéte rustica fait connailre que ce latirostre est plus com- mun à la campagne que dans les villes. Est-ce parce que là il retrouve encore malgré le naufrage des mœurs et des saines tradi- lions, plus facilement le foyer et le banquet domestiques. Indépen- damment de celle hypothèse peut-être toute gratuile mais qui sourit à ceux dont l'intelligence et le cœur cherchent à saisir partout ой ils les entrevoient quelques pensées consolaules pour s'y reposer, l'hirondelle domestique trouve plus facilement à la campagne que dans le sein des villes des cheminées privées de feu dans lesquelles elle puisse établir son nid. Ce motif est le seul que lous les naturalistes aient donné pour expliquer la présence de l'hirondelle domestique dans les campagnes et son éloignement de plus en plus général du séjour 99 des villes. Cette raison ne me parait pas péremptoire et pour la for- бег el la compléter, je soumets les hypothèses suivantes. Les che- minées étant beaucoup plus larges à la campagne que dans les villes où leur diamètre se retrécit de jour en jour, ne contribuent-elles pas ainsi par leurs dimensions à préserver plus facilement les hiron- delles de l'incommodité de la fumée? En second lieu les cheminées des campagnes étant très rarement ramonées n'offrent-elles pas en- core sur ce point un précieux avantage aux hirondelles en leur of- frant par les aspérités dont les murs sont revêlus plus de facilité pour fixer leur nid, et surtout en conservant pendant de longues années le travail fait précédemment. Enfin, l'extrémité des chemi- nées de campagne n'est pas restreinte par des appareils plus ou moins élroils , et offre dès-lors à l'hirondelle plus d'espace pour ses évolutions, et concentre moins la colonne de fumée. Le nid de celte hirondelle est façonné avec de la terre détrempée et mélangée a du foin, il reçoit ordinairement une forme sphérique exceplé du côté par lequel il tient au mur de la cheminée. Souvent ce nid est établi sur celui de l'année précédente, et il n'est pas rare d'en trouver trois ou quatre superposés. L'intérieur garni de plumes et de débris de {оше espèce contient le plus souvent quatre ou cinq œufs d'un blanc parsemé de taches d'un rouge noir. Leur longueur varie de 0" 018 à 0" 020 et leur diamètre de 0" 012 à Om 01 4. La première ponte es! suivie régulièrement d'une seconde dont les œufs dépassent rarement le nombre trois. L'hirondelle de cheminée justifie encoreles noms qui lui ont élé donnés, par les soins et la lendresse avec lesquels elle élève ses petits. Quand ils commencent à voler elle les précède en leur présentant de la nourriture, comme une bonne mère s'éloigne de son enfant, en lui offrant des friandises, pour l'engager à essayer ses premiers pas. Plusieurs se sont précipitées dans les flammes qui dévoraient les maisons auxquelles étaient confiés leurs petils, aimant mieux se donner la mort que de se séparer des objets de leur tendresse. On a sulirer profit de ces sentiments affectueux de l'hirondelle et des meres enlevées à leurs pelils, ont élé envoyées à de grandes dislan- ces; rendues alors à la liberté, elles revenaient bientót sur leurs nids et messagères rapides, rapportaient le billet confié à leur larse. On lit dans le mémoire de M. le docteur Mabille sur Ja vie et les ouvrages de notre compatriote Bernier, un passage extrait de la Phi- losophie de ce célèbre voyageur qui offre, dans une touchante et naive peinture, une nouvelle preuve de la sollicitude avec laquelle l'hirondelle veille sur ses pelits. Voici ce passage : « П me souvient, » dil Bernier, de ce que me promenant un jour le long d'un chemin, 100 » j'apercus sur la branche d'un saule assez bas, trois petites hiron- » delles nouvellement sorties du nid, qui ne s'envolérent pas quoique » je passasse tout proche. Retournant sur mes pas et repassant pour » la troisième fois par-dessous la branche, j'étendis la main comme » pour les prendre, mais deux grandes hirondelles étant survenues » sur ces entrefaites el ayant gazouillé je ne sais quoi, les petits s'en- » volèrent aussitôt. Ce qui me fit juger premièrement que ces grandes » hirondelles étaient le père et la mere qui en les querellant les avaient » averlis de me fuir comme un de leurs ennemis, en second lieu » que la plupart des animaux ne nous fuient que parce qu’ils onl reçu » quelques dommages de nous. » HIRONDELLE DE CROISÉE. — Hirundo urbica. Les différents noms donnés à cette hirondelle indiquent qu'elle préfère la ville à la campagne et choisit souvent les croisées pour y fixer son nid. Celui-ci est composé avec de la terre que les lombrics rejellent aprés en avoir extrait les sucs et à laquelle ils commu- niquent une cerlaine viscosilé. Ici se manifestent encore les preuves de l'admirable instinct que Dieu, dans les desseins de sa providence, a donné à ces oiseaux pour qu'ils atteignent le but qu'il s'est proposé en les créant. Celte terre, en effet, est préférée à toute autre par la raison qu'elle se lie plus facilement. Mais comme elle se trouve en plus grande quantilé lorsqu'il tombe de la pluie, il est donc impor- tant de profiter de celle circonstance. Que feront les hirondelles? Un certain nombre se réuniront, meltront leurs efforls en commun elles nids se faconneront simultanément pour plusieurs ménages. Оп profite des matériaux précieux el la pelile société éloigne une perte de temps el une fatigue inutiles. Quelques-unes désirant se servir du travail des aulres sans se lasser elles-mêmes , comme cela arrive hélas ! trop souvent parmi les hommes, viennent chercher la terre au nid que l'on construit afin d'éviter un parcours beaucoup plus long. Peut-être aussi celles-ci ont-elles élé reléguées de la sociélé de leurs congénères, et sont-elles des prélendants malheureux. Dès lors la vengeance est-elle le mobile de leur conduite? Les hommes auraient-ils bien le droit de les blâmer ? Ces nids adhèrent à une croisée ou à un mur, ont une forme cy- lindrique et ne présentent en haut qu'une petite ouverture par la- quelle l'hirondelle pénètre en se diminuant de volume. L'exiguilé de celle entrée empêche les autres oiseaux de s'y introduire et per- met aux propriélaires de défendre plus facilement leur domicile. Les hirondelles recherchent surtout les grands murs el les rochers peu 101 éloignés des rivières, pour y accoler leurs nids. A Lyon, la facade de l'hópital situé sur le quai de la Saóne, est couverte de rangs innom- brables de ces nids formant plusieurs guirlandes suspendues les unes au-dessus des autres. L'hirondelle de croisée, plus sauvage que la précédente, arrive dans nos contrées quelques semaines avant sa congénère. Elle chasse les insectes sur le bord des eaux qu'elle effleure quelquefois pour y trem- per la terre destinée à son nid. Dans son vol, elle frappe de ses ailes les moucherons fixés aux pa- rois des murailles, afin de les en détacher et de les saisir ensuite au vol. Ainsi que la précédente, l'hirondelle de croisée chasse le bec fermé, et toutes les fois qu'elle apercoit une proie elle la saisit en faisant claquer son bec. Comme l'hirondelle de cheminée, elle rend de vrais services à l'homme en purgeant l'air d'une multitude d'in- sectes nuisibles ou génants. Elle fait deux pontes, la première de quatre à six œufs et la seconde de trois à quatre; ils sont d'un blanc lustré, sans tache et un peu piriformes. Leur longueur est de 0" 016 à 07018 et leur diamètre de 07011 à 07013. Quand les hirondelles de croisée ou de cheminée doivent émigrer, elles se réunissent en grand nombre. Quelques-unes, plus âgées ou plus expérimentées, semblent avoir recu la mission d'averlir les aulres que le moment propice pour le départ est arrivé ; pendant quelques jours on les voit parcourir les diverses parties d'une ville ou d'une campagne, faire entendre un petit cri très vif qui ressemble à un cri d'impalience, venir et revenir bien des fois sur leurs pas; on dirait des chefs s'empressant de réunir leurs soldats pour une expédition lointaine. A la voix de ces hirondelles, leurs compagnes se réunissent sur un arbre ou sur un édifice élevé et là par des petits cris multipliés marquent les différents sentiments qu'elles éprouvent au moment d'entreprendre un voyage long et quelquefois périlleux. A Angers, le lieu du rendez-vous est ordinairement le toit si vaste et si élevé du Musée. Pendant plusieurs jours elles se livrent à des exercices préparatoires el simulent un départ général; les chefs trouvent ainsi le moyen de reconnaitre celles qui par leur énergie et la puissance de leur vol, pourront être placées en première ligne et celles qu'il faudra mettre au centre et qui auront besoin d’être soutenues et encouragées. Après plusieurs jours d'attente et de préparatifs, quand les chefs croient être cerlains que toutes les hirondelles ont été averties et que toutes les dispositions sont prises, on entend un cri général qui parait être un assentiment unanime. On dirait une de ces anciennes assemblées parlementaires tumultueuses , acclamant un vole d'où 102 dépend le bien-être d'un grand peuple. А ces cris succède un silence général et toute la colonie part avec la rapidité de la flèche, au com- mencement de la nuit, selon le mot d'ordre donné par les chefs, afin d'échapper plus facilement aux oiseaux de proie et pour éviter l'action énervante du soleil et de la chaleur. C'est ce voyage exécuté pendant la nuit qui a contribué à jeter tant d'incerlitude sur l'émi- gration des hirondelles. HIRONDELLE DE RIVAGE. — Hirundo riparia. Celte hirondelle, plus petite que les espèces précédentes, est aussi plus vive et plus pétulante dans la chasse qu'elle fait aux insectes. Elle doit son nom aux lieux qu'elle habite et dans lesquels elle se re- produit. Elle ne quitte guère les bords des rivières et des fleuves et élablit son nid dans les trous des rats d'eau. Quand elle n'en trouve pas de convenables, elle cherche des terrains friables, choisit ordi- nairement ceux qui sont escarpés ou coupés à pie par des éboule- ments. Elle creuse avec rapidité un trou de 0" 50 de profondeur. L'ouverture en est étroite pour opposer un obstacle à l'introduction des ennemis de la petile famille, et afin de pouvoir être défendue au besoin avec plus de facilité. Le boyau qui y conduit est souvent en zig-zag et présente ainsi un nouveau moyen de sûreté. L'exlrémité au contraire se développe et offre une excavalion plus spacieuse el plus commode pour les différents mouvements de la couveuse. Le nid qui en tapisse le fond est garni de paille, de duvet, de plumes, etc. et contient cinq ou six œufs blancs, piriformes, trés fragiles et méme transparents. Ils ont ordinairement 0" 017 de longueur et 07012 de diamètre. L'hirondelle de rivage ne fait qu'une couvée et pour dissimuler la véritable entrée de son nid, elle s’y précipite de plein vol et sans ralentir la rapidité de sa course. Au moyen de ses ongles longs et crochus, elle peut se fixer aux bords de son nid ou aux flancs des rochers ou des rives escarpées jusqu'à ce qu'elle ait saisi la proie qu'elle y a apercue. HIRONDELLE DE ROCHER. — Hirundo rupestris. L’hirondelle de rocher vient rarement en Anjou, elle habite les pays de montagnes. C'est là qu'elle fait son nid de la méme manière que sa compagne de cheminée, avec cette différence toutefois qu'elle l'appuie le long des rochers et qu'elle emploie quelques petits mor- ceaux de gravier pour lier la terre, à la place du foin et de la paille. 108 La femelle ne fait qu'une ponte. Les œufs au nombre de cing ou six sont d'un blanc pointillé de brun; leur longueur ordinaire est de 0" 020 et leur diamètre de 0% 014. Ils se distinguent de ceux de l'hiron- delle de cheminée, par des proportions ordinairement plus forles et surtout par des taches plus larges et d'une couleur plus foncée. Cette espèce montre moins de tendresse pour ses pelils que ses congénères. Peut-être faut-il attribuer celle disposition aux lieux qu'elle habite. Offrant peu de dangers el fournissant plus de res- sources, ils exigent moins de précautions. Je termine ces notions par quelques renseignements propres à faire distinguer les quatre espèces d'hirondelles. Le manteau de l'hirondelle de cheminée est d'un noir à reflets bleuâtres , le dessous du corps est blanchâtre avec une légère teinte aurore. Les mâles ont les couleurs plus vives que les femelles. La gorge et le croupion de l'hirondelle de fenétre sont d'un beau blanc. Ce dernier caractère lui a fait donner le nom de cul-blanc. Le resle du corps est d'un noir lustré. Le collier et le manteau de l'hirondelle de rivage sont d'un gris de souris; les autres parties, d'un blanc pâle. Cette espèce est beaucoup plus pelite que ses congénères. Le male affecte une couleur plus sombre que la femelle et sa gorge reflèle une teinte jaunatre. L'hirondelle de rocher, la plus grosse des quatre espèces qui se montrent en Anjou, a toutes les plumes d'un gris bordé de roux. QUATRIEME GENRE. GOBE-MOUCHES. — Muscicapa. Les gobe-mouches complètent la famille des latirostres. La Faune de Maine-et-Loire comprend trois espèces de ces oiseaux. Dans les pays chauds où les insectes sonttrès multipliés et trés-incommodes, les gobe- mouches se trouvent en grand nombre et la force de ces auxiliaires de l'homme croît en proportion avec celle de ses ennemis. Ils ne viennent en notre département que pendant l'été, lorsque leur pré- sence est ulile et nécessaire aux hommes et même aux troupeaux qu'ils délivrent des insectes qui les poursuivent ou persécutent en plein air. Les gobe-mouches ont le bec comprimé à la base, presque triangulaire et garni de poils longs et durs, caractère qui se retrouve chez presque tous les oiseaux qui vivent d'insectes ailés. Ces lalirostres sont solitaires et querelleurs ; ils doivent leur nom aux peliles mouches qui composent leur nourriture ordinaire. Pour 104 les saisir, ils se tiennent souvent à l'extrémité des arbres, d'où ils s'élancent sur leur proie quand elle passe à leur portée. Ils voltigent aussi de branche en branche et descendent jusqu'à terre, selon que les varialions de l’atmosphère engagent les insectes à se tenir dans des endroits plus ou moins élevés. Les gobe-mouches recherchent les bois frais, les promenades publiques et les lieux dans lesquels viennent paitre les troupeaux. Le plus souvent ils saisissent les mouches au vol pour les manger ensuite sur la branche d'oü ils se sont élancés. Presque tous les mouvements des gobe-mouches sont accompagnés d'un balancement des pennes de la queue, habitude qui leur imprime une physionomie toute particulière el a contribué à faire de leur nom une épithète peu flatteuse. GOBE-MOUCHES GRIS. — Muscicapa grisola. Les deux dénominations, francaise et latine, données à cet oiseau, ont entièrement la méme signification. La première indique la nour- rilure (muscas capere, prendre les mouches) et la seconde la couleur de ce latirostre. Le gobe-mouches gris est commun dans notre département, pen- dant l'été. Il fait un nid assez grossier, qu'il appuie sur quelques iné- galités du tronc des arbres. D'autres fois, il le place sur des ceps de vigne. Ce nid contient ordinairement quatre ou cinq œufs d'un fond blanc ou jaune pâle, couvert de taches roussâtres ; leur longueur est de 0% 018 et leur diamètre de Om 014. GOBE-MOUCHES А COLLIER, — Muscicapa albicollis. L'épithéte à collier blanc sert à distinguer ce gobe-mouches du précédent. Les habitudes sont presque les mémes. Plus vif que les gobe-mouches gris, mais aussi stupide , il se tient ordinairement plus prés de terre ; il niche assez souvent dans les trous des sitelles , des (orcols , des mésanges , et aime à profiler du travail des autres. Ses œufs, au nombre de quatre ou cing, sont d'un bleu pâle ou d'un vert sale; leurs dimensions ordinaires sont 0" 019 et 0" 013. GOBE MOUCHES BEC-FIGUE. — Muscicapa luctuosa. Le mot luctuosa qui signifie sombre, couleur de deuil, indique la particularité distincte du plumage de cette espèce. Ce gobe-mouches , moins défiant encore que ses congénères, recherche les insectes qui vivent dans les figuiers et sur les fruits de ces arbres. La chasse 105 qu'il fait à ces insectes et les mouvements nécessaires auxquels il se livre pour les saisir, ont fait croire qu'il becquetait les figues. Mais celte opinion ne peut s'appuyer que sur quelques cas qui offrent plutôt une exception qu'une règle générale. Ce gobe-mouches niche comme le précédent; ses œufs, ordinaire- ment au nombre de quatre ou cinq, ont souvent une forme oblongue el sont d'un bleu verdâtre peu prononcé. Leur longueur est de 0" 017 et leur diamètre de 0" 012. Les deux dernières espèces sont beaucoup plus rares dans notre déparlement que le gobe-mouches gris. Elles ne font que le traver- ser à différentes époques de l’année sans s'y arrêter pour nicher. Dentirostres. La troisième famille de l’ordre des passereaux comprend les den- tirostres ; ceux-ci doivent leur nom à l’échancrure qu'ils ont au bec, caractère qui les rapproche des rapaces ; ce motest composé de dens , dentis , dent et de rostrum, bec et signifie dés lors bec avec des dents, bec dentelé. PREMIER GENRE. PIE-GRIÈCHE. — Lanius. Je donnerai l'étymologie du mot pie quand il s’agira de la vérita- ble pie, corvus pica et je me bornerai à expliquer maintenant l'épi- thète donnée au premier genre des dentirostres. La dénomination grièche , vient de greca , grec; elle a été attri- buée à ces oiseaux pour indiquer le pays oü ces passereaux sont très-communs el pour désigner parfaitement les mœurs des pies- grièches. Orlie grièche, perdrix grièche signifient orlie grecque, perdrix grecque. Autrefois les Français appelaient les cailles des grièches parce que ces oiseaux paraissaient venir des provinces de la Grèce. Dans notre langue, l'épithète grec, grecque conserve les signifi- calions altachées au mot greco, faire le grec, c'est-à-dire être hautain, persécuteur et de mauvaise foi, tendre des piéges aux fai- bles elc. Dès lors on a donné ce nom aux personnes auxquelles on supposail des habiludes désagréables, un caractère sans pitié, une lendance à des querelles incessantes joinle souvent à un bavardage 106 fatigant. En un mot l'épithéte pie-grièche est restée parmi nous comme une véritable injure. Toutes les mauvaises acceptions de cet adjectif conviennent entièrement au premier genre des dentiros- tres. Quoique pelites et armées de doigts peu redoutables, les pies- grièches luttent contre tous les rapaces, non seulement pour se dé- fendre, mais méme pour les éloigner quand elles pensent que les oiseaux de proie ne se tiennent pas à une distance assez considéra- ble des lieux ой elles ont fixé léur séjour. Les pies-griéches mettent en fuite les corneilles, les cresserelles et soutiennent méme avec avantage le combat contre les milans et les buses. Elles poursuivent les pelils oiseaux, les jeunes levrauts, leur crévent la téte avec le bec ou les étranglent avec les ongles. Leur audace est telle que dans les pays où l'on tend des piéges aux oi- seaux de passage, elles s'élancent au milieu des filels pour tuer et saisir les appeaux, méme lorsque ces derniers sont des chouetles chevéches. Elles immolent aussi des souris, des mulots et d'autres pelils mammifères. Le mot latin lanius signifie bourreau, boucher ; il peint ainsi d'une manière très expressive les mœurs des pies-grièches. Comme les bourreaux elles font un grand nombre de victimes et insultent en- core au malheur de celles-ci par des cris stridents et railleurs ; elles semblent vouloir couvrir leur voix et étouffer leurs plaintes. Non seulement les dentirostres tuent des oiseaux et des insectes en quantité suffisante pour assouvir leur appétit vorace, mais elles pré- voient encore à l'avenir en faisant des réserves abondantes. Les pies-grièches enfilent alors une série de gros coléoptères dans les épines des buissons élevés et touffus et se rapprochent ainsi des bouchers en faisant en quelque sorle un étalage des victimes qu'elles ont immolées. Cependant ces oiseaux qui sont en querelle incessante avec lous ceux qui les entourent prennent un soin affectueux de leurs petits, qu'ils nourrissent et défendent avec une tendresse et un cou- rage extraordinaires. Lorsque ceux-ci sont sortis du nid, ils restent avec leur père et leur mère et forment une espèce de sociélé dont les membres ne se séparent qu'à l'approche du printemps suivant. Quatre espèces de pies-grièches apparaissent et nichent en Anjou. PIE-GRIÈCHE GRISE. — Lanius excubitor. Cette pie-grièche, la plus grosse des quatre espèces, esl rare dans notre département. Elle se montre le plus particulièrement dans le Saumurois, où elle niche en petit nombre. L'épithete grise désigne 107 la couleur de son plumage et le mot excubitor (sentinelle) retrace une de ses habitudes les plus singulières. Cet oiseau aime en effet à se tenir àlapointe desbranches isolées et les plus élevées des haies ou des arbres, à y faire sentinelle jusqu'à ce qu'il apercoive une proie sur laquelle il se précipite pour l'immoler et reprendre ensuite sa pre- mière position. De temps en temps il pousse une espèce de cri, de qui vive, pour effrayer et faire sortir de leur retraite les gros insectes ou les petits oiseaux. Cette pie-griéche mange rarement sur place sa proie. Elle la dé- рёсе à terre et l'emporte ensuite pour la dévorer plus à son aise, à l'extrémité des arbres ou des buissons. Elle construit son nid sur la branche fourchue d'un arbre élevé; il est ordinairement composé de mousse desséchée, encadrée d'herbes longues et fines, et tapissé à l'intérieur de débris grossiers de laine. Les œufs au nombre de quatre à six affectent bien des formes; les uns sont piriformes, d'autres oblongs ou présentant une très- légère différence dans le diamètre des deux extrémités. Le fond de la coquille est ordinairement d'une couleur fauve ; quelques uns de ces œufs sont pointillés uniformément de taches d'un gris noir; d’autres sont parsemés de taches plus épaisses et fondues en quel- que sorte avec la nuance de la coquille. Leur longueur varie de 0" 025 à 0» 028 et leur diamètre de 0" 016 à 0" 019. PrE-GRIECHE A POITRINE ROSE. — Lanius minor. Les noms de cette pie-grièche, bien plus répandue en Anjou que la précédente sont fondés sur la couleur des plumes de sa poitrine et sur la proportion de sa taille inférieure à celle de la pie-grièche grise. Trés souvent aussi on l'appelle pie-grièche d'Italie parce qu'elle se tient presque toujours dans les peupliers d'Italie auxquels elle confie ordinairement son nid. Celui-ci est formé de petites ra- cines entrelacées ; l'intérieur est garni de mousse, de laine et quel- quefois de plantes odoriférantes. Cetle pie-grièche moins défiante el plus sociale que la précédente, s'éloigne moins des habitations de l'homme pour construire son nid. Il renferme de cinq à six œufs un peu oblongs, d'un vert clair et blanchátre, parsemé de larges taches brunes ou de couleur olive. Leur longueur est de 0" 024 à 0" 027 et leur diamètre de 0» 016 à 0™ 017. PIE-GRIÈCHE ROUSSE. — Lanius rutilus. Les deux épithètes latine et française font connaître la couleur du 108 plumage de cette espèce plus petite encore que les précédentes. La pie-grièche rousse imite el contrefait le cri ou le chant des oiseaux dans le voisinage desquels elle vit. Cette faculté lui fournitun moyen de tendre des piéges, d'attirer, tromper et multiplier ses victimes. Elle justifie encore ainsi la justesse du nom qui a élé donné à ces dentirostres. Le nid du lanius rutilus est fait avec plus de soin que celui de ses congénères. Formé de peliles racines liées entre elles avec art, son intérieur est garni de crins, de laine et de brins d'herbe trés-fins. Les œufs, au nombre de quatre à six, sont d'un vert très pâle, presque blanchâtre, parsemé de taches brunes et presque effacées. La pie-grièche rousse manifeste envers ses petits une tendresse encore plus grande que les autre pies-grièches. La persévérance qu'elle met à couver ses œufs est telle que la femelle se laisse faci- lement prendre à la main plutôt que d'abandonner son nid. Le grand diamètre de ses œufs varie de 0" 020 à 07023 et le petit de 0% 014 à 0" 016. PIE-GRIÈCHE ÉCORCHEUR. — Lanius collurio. Cette pie-grièche se plaît à briser la tête de ses victimes et à les dépouiller lorsque celles-ci sont des petits oiseaux. Le nom scientifique collurio peint d'une manière trés expressive cette habitude. Les Grecs appelaient cette pie-grièche Korrvpsay, Корола, dont la racine est ve, casque et »«o», broyer. Maintenant encore on donne aux pies-grièches et à l'écorcheur surtout, le nom picquoys, vieux mot francais signifiant pic dont on se servait en guise de ha- che. Cette dénomination indique que ces oiseaux usent de leur bec comme d'un pic ou d'une hache pour briser la tête de leurs vicli- mes. L'écorcheur est la plus pelite des pies-grièches de l'Europe; il niche dans les buissons épais et touffus et méme dans les ajoncs. Son nid à l'extérieur est composé comme celui de ses congénères, mais l'intérieur est ordinairement garni de malières plus molles et mieux choisies. Les œufs au nombre de cinq à six varient beaucoup de formes et de couleurs. Les uns sont ronds, d'autres oblongs, quelques-uns piriformes ; tous portent une couronne vers le gros bout formée de petits points pressés ou de taches rougeâtres assez régulières. La couleur dela coquille est ordinairement d'un blanc roux dont la nuance est plus ou moins foncée. Quelquefois elle a une teinte orange; elle revét aussi un brillant que ne présentent pas les œufs des autres espèces de pies-grièches. Ceux de l'écorcheur ont de 0" 020 à 0, 024 de longueur et de 0" 014 à 0" 016 de diamètre. 109 DEUXIÈME GENRE. MERLE. — Merula turdus. Le mot merle désigne un genre assez nombreux. Six espèces de merles habitent ou visitent l'Anjou. Le principe de ce nom est merula dont la racine me semble être merus, pur, sans taches et in- diquer que le plumage de cet oiseau est d'une seule couleur et sans aucun mélange. Merus signifie aussi solitaire el celte dénominalion aété donnée au merle quia vaga et solitaria pascitur. En effet ces oiseaux ne se réunissent jamais comme les corneilles, les pies, etc., pour chercher leur nourriture et lorsque plusieurs merles se trou- vent dans le méme champ, chacun d'eux s'éloigne de ses congénè- res el semble craindre de parlager avec les autres la proie qu'il peut découvrir. Celle habitude rentre dans le caractére du merle qui est d'une défiance excessive que l'on est trop souvent porté à admettre pour dela ruse. Quantau substantif ou à l'adjeclif turdus c'est le mot primitif employé par les Romains pour désigner d'une manière particulière les grives et dont on a élendu la signification à tous les oiseaux de ce genre. Peut-être pourrait-on en trouver la racine dans les noms des Turduli et Turdetani, peuples d'Espagne. Ce qui sem- blerait fortifier celle étymologie, c'est le grand nombre de grives qui se trouvent en Espagne et l'habitude des peuples de celle con- trée d'engraisser ces oiseaux pour les manger ou pour les vendre aux Romains; nam Turdetani et populi sunt qui turdos saginant et vendunt et qui turdorum avidi sunt (Lexicon Forcellini ). Enfin le nom d'i/ia- cus donné au merle mauvis parce que ce passereau se trouve en grand nombre aux environs d'llion, viendrait encore corroborer mon hy- pothèse en prouvant qu'on donnait autrefois aux oiseaux le nom du pays qu'ils habilaient. MERLE DRAINE. — Turdus viscivorus. L'épithèle draine peut avoir pour racine deux mots grecs : vé, chêne , el zos, Voix, d’ave, crier, el désigner ainsi une habitude ca- ractéristique de ce merle qui fait entendre un chant dur et sifflé en fuyant d'arbre en arbre. Elle peut aussi dériver de ало (дина) signi- fiant fuir avec rapidité, étymologie qui aurait l'avantage de peindre avec énergie la vie de la draine. vie qui s'écoule dans une fuile in- cessante accompagnée d'un cerlain cri d'inquiétude. 110 Dans le midi de la France, draie signifie chemin, et s'adrayer, in- dique l'action d'un homme qui travaille à s'habituer à parcourir ra- pidement une longue route. Peut-être à la pensée d'une opération qui prend depuis quelque temps des proportions colossales en France, serait-il permis de trou- ver dans le mot draine un rapport éloigné avec le drainage, dont la racine to drain veul dire épuiser, dessécher? Le merle draine vit d'insecles et de vers, il aime à chercher ces derniers dans la terre détrempée par la pluie. Quand l'eau est tombée en abondance et qu'elle a pénétré profondément le sol, on aperçoit des troupes de draines creusant avec leur bec et leurs pieds de petits sillons. Leur but est de trouver plus facilement les vers et de faciliter ainsi l'écoule- ment de l'eau qui les géne dans ce moment, aprés avoir été cepen- dant la cause de l'abondance de leur récolte. Le nom de draine, drenne, n'est peut-être qu'un mot qui retrace le chant saccadé de cel oiseau, dre, dre, trre, trre, qui lui a fait don- ner les épithètes vulgaires de traie el de criarde. L'adjeclif viscivorus relrace encore une des habitudes de la draine, celle de manger le gui du chéne et des aulres arbres (viscum, gui et vorare, manger, dévorer). Cet oiseau fixe ordinairement son nid à la bifurcalion des grosses branches des arbres, à une hauteur moyenne. Il parait rechercher de préférence les arbres fruitiers à tous les autres, probablement parce que l'extérieur de son nid se mariant mieux avec la couleur de ces arbres échappe plus facilement aux yeux de ses ennemis. En effet, ce nid dont les dimensions sont trés grandes et contribuent ainsi à le trahir, est composé à l'extérieur de racines et de pelites branches entrelacées, mélangées el revêlues de lichens blancs qui couvrent ordinairement en grande quantilé l'écorce des arbres frui- tiers. L'intérieurest garni de mousse ou d'herbes et de racines fines. Le nombre des œufs est de quatre à six; ils varient beaucoup de grosseur et de couleur. Le plus souvent le fond de la coquille est d'un roux parsemé de taches d'un violet lerne et presque effacé. Quelques-uns revétent une couleur uniforme et verdatre et offrent quelque ressemblance avec certains œufs d'étourneau. Leur lon- gueur est de 0" 025 à 0" 032 et leur diamètre de 0" 018 à 0" 022. MERLE LITORNE. — Turdus pilaris. Ce merle, plus petit que le précédent, apparait dans ies différentes contrées de l'Europe par bandes nombreuses pendant l'automne ou l'hiver el se relire ensuile au sein des forêts des régions du Nord, 111 dans lesquelles il se reproduit. Sa chair est jugée bien inférieure а celle des autres merles ; elle est imprégnée d'une amertume assez prononcée, provenant selon toute probabilité de quelques espèces de baies qui composent en partie sa nourrilure. Peut-être trouverail- on dans cette particularité l'étymologie de son пот, »7s, vil, pelit, et орис, oiseau, oiseau de peu de valeur. L'épithete pilaris indique que la litorne a autour du bee des poils plus longs que ceux des autres grives. Ce merle voyage en troupes innombrables et occasionne des ravages considérables dans les pro- priélés sur lesquelles il s'arrête. П mange avec une avidité et une gourmandise devenues proverbiales. Pour assouvir son appétit in- saliable, il abat encore plus de fruits qu'il n'en dévore. Son nom ne dériverait-il pas de pilo, pilare, voler, ravager? Dès lors le mot litorne ne s'expliquerait-il pas dans le méme sens par antiphrase? car aros signifie aussi frugal. Le merle litorne appuie sur les branches ou le tronc des arbres un nid ayant quelque ressemblance avec celui de la draine. Les œufs au nombre de quatre à six, sont le plus souvent d'une couleur verte, parsemés de pelils points roux, bruns ou noiratres el régulièrement plus gros et moins pointus que ceux du merle noir. Leur longueur varie de 0" 025 à 0" 03 et le diamètre de 0" 018 à 0" 022. MERLE GRIVE. — Turdus musicus. L’épithete grive me semble avoir été donnée à ce merle parce qu'il aime à fréquenter les vignes, à manger les raisins, à se griser. En effet, le mot se griser vient du latin grecari, signifiant faire le grec, se livrer à l'ivrognerie, à une gaîté bruyante, exploiter les autres en s'em- parant avec une adresse plus ou moins grande de ce qui leur appar- lient, elc. Les mots grec el gris étaient synonymes dans le moyen âge, comme il est facile de s'en convaincre par ces expressions du vieux roman d'Alexandre : Il fut bien escouté d' Alixandre et des gris. D'où le mot gris n'indiquail pas seulement la couleur désignée par ce nom, mais encore une conduite semblable à celle des Grecs, et pour représenter les habitudes de ceux qui se livraient aux exces du vin el à loutes les tristes conséquences de l'ivresse, on pouvait dire indifféremment qu'ils faisaient les grecs ou les gris. Du mot gris, on a formé, selon Génin, griu et le féminin griue et enfin grive. Ville- hardouin appelle la Grèce, la Grieve. L'adjectif grivois donné aux soldals ou aux personnes qui se livrent à une joie folle, fruit de l'ivresse, vient encore corroborer celle opi- шоп. П en est de méme du nom par lequel on désigne ces femmes 112 dissolues qui s'abandonnent à toute espèce de désordres, préparés, fortifiés presque toujours par l'usage immodéré du vin et des li- queurs. L'habitude du merle grive , de manger des raisins avec une avi- dité insaliable, juslifierait alors complètement la signification de l'épithete qui lui a été donnée. Grivelée signifiait autrefois petite vo- lerie. Enfin le proverbe populaire soil comme une grive, sanclionne encore la justesse de celle étymologie et s'appuie lui-même sur les fails recueillis par les chasseurs. Ceux-ci ont constaté chez les grives une véritable ivresse manifestée dans leur vol et dans l'ensemble de leurs mouvements pendant leur séjour dans les vignes. Quant à l'épithéle musicus, musicienne, elle a élé donnée au merle griveà cause de son chant, le plus agréable de Lous ceux des oiseaux de son genre. Le merle et la grive sont deux des plus délicieux chantres de la campagne. Leur voix pénétrante el fortement accentuée s'étend à plusieurs kilomètres de distance. Les notes de leur chant, ordinai- rement sur un diapason fort élevé, iranchent par leur intensité sur toules les autres voix el forment comme la haute-contre du concert harmonieux que les oiseaux nous donnent au printemps en fétant par un hymne d'amour l'œuvre de la création qui sans cesse se re- nouvelle. Cependant la grive a quelque chose dans ses notes de bien supé- rieur au merle dont le chant est plutót sifflé que chanté. Le rossignol avec les incroyables ressources de son gosier n'a rien d'aussi sonore que le zip, zip ou trhit, trhit de la grive. Les autres parties du chant de celle-ci ne se reproduisent pas d'une manière régulière, elles pa- raissent plutót résuller de l'inspiration du moment. Peut-être pour- rait-on admettre l'hypothèse que le nom de grive a été donné à cet oiseau par onomatopée el par corruption de son chant ти-ти, ou gri- gri. Le merle grive chante principalement lorsque le temps est frais el méme froid; il semblerait que plus la température s'abaisse , plus son gosier acquiert d'élaslicilé et de puissance. L'air plus dense transmet aussi son chant avec plus de netteté et ce chant est si allrayant que quand une grive se fait entendre on se sent porté a s'arréler pour en jouir. Ses phrases ne se touchent pas, elles laissent entre chacune d'elles quelques secondes d'intervalle, parlicularité qui dispose encore à préter l'oreille avec plus d'allention. Le merle niche dans notre département et établit son nid dans les laillis, les buissons épais ou sur les arbres peu élevés. Presque cha- que année plusieurs couples se reproduisent dans les taillis apparte- nant à M. de Boguais el situés derrière la chapelle des Marlyrs , c'est là qu'on peut facilement étudier les mœurs de celle grive et jouir de 115 la beauté de son chant. Le nid de cel oiseau est composé de terre gachée ; à l'extérieur il est revétu de mousse et d'herbes fines. Les œufs au nombre de quatre à six reposent sur la terre nue ; ils sont d'une belle couleur bleu de ciel avec des taches rondes, d'un noir foncé, plus ou moins grosses, répandues sur toule la coquille et formant quelquefois une couronne vers le gros bout. Ces œufs sont ordinairement beaucoup plus ronds que ceux des autres oiseaux de ce genre; ils ont de 0" 025 à 0" 028 de longueur et de 0" 019 à 0" 022 de diamètre. MERLE-Mauvis. — Turdus iliacus. Le nom scientifique iliacus indique que ce merle venait des côles d'Asie, des environs d'Ilion où il séjournait en si grand nombre qu'il semblait en quelque sorte y avoir acquis le droil de cité (Ласи). Quant au mot mauvis il dérive de mala, avis el signifie oiseau mal- faisant, désignalion justifiée par les ravages qu'il exerce dans les vi- gnes où il s'arréle pour assouvir sa faim insatiable. Ducange traduit mauvis par malvitius ek Génin l'interprète par le mot francais malvis, mauvais visage. La pensée resterait la même, car ce mot indique- rail que le mauvis esl semblable à ces êtres d’un visage sinistre, que l'on craint de voir à cause de leurs nombreux méfaits. Le merle mauvis établit son nid dans les buissons. Ses œufs, au nombre de quatre à six, sont d'un bleu verdatre, parsemés de pelils points noirs. Leur coquille est généralement plus luisante que celle des autres merles. Ces œufs dont le grand diamètre est de 0" 023 et le pelit de 0" 018, sont déposés dans un nid façonné avec des herbes grossières et de la mousse. Le mauvis niche en grande quanlilé aux environs de Dantzig; presque partout ailleurs, il ne fait que passer sans se reproduire. MERLE A PLASTRON. — Turdus torquatus. Les noms francais et latin donnés à ce merle ont le méme sens et sont fondés sur le plastron blanc qui décore sa poilrine. Ce plastron est plus ou moins prononcé selon lage de l'oiseau; il est toujours moins étendu chez la femelle que chez le male. Chaque année le merle à plastron visile notre département el un cerlain nombre de couples s'y arrélent pour nicher. Placé à une pelile élévation de lerre, au milieu ou au pied des buissons, le long du tronc des ar- bres, le nid est formé de feuilles sèches, de racines el de mousse liées ensemble par de la lerre argileuse. L'intérieur est garni de 8 114 mousse ou de foin. Les œufs d'un vert bleu sont parsemés de laches d'un brun rougealre, formant quelquefois une couronne vers le gros bout. Les taches sont régulièrement moins nombreuses mais plus larges que celles des ceufs du merle noir. Ils ont beaucoup de res- semblance avec quelques variétés de ces derniers, cependant leurs dimensions sont presque toujours plus forles. Ils pourraient aussi se confondre avec de gros œufs oblongs du теге draine. Leur lon- gueur varie de 0" 026 à 0 030 et leur diamètre de 0" 019 à 0" 022. MERLE NOIR — Turdus merula. Les épithètes données à ce merle s'expliquent d'elles-mêmes el sont fondées sur son plumage sans mélange el plus noir encore que celui du corbeau. Le merle noir, le plus commun des oiseaux de ce genre, est sédentaire eu Anjou. Il établit son nid tantôt à terre, sur les talus des fossés, habilude qui lui а fait donner le nom de merle terrier ; tantôt au pied des buissons épais, sur la tête des arbres émondés, le long des vieilles souches entourées de lierre. Ces nids, dont quelques-uns sont bien faconnés, présentent des dimensions assez considérables ; ils sont composés de racines, de feuilles dessé- chées, de mousse, de foin et revétus quelquefois à l'extérieur de terre argileuse. Les œufs au nombre de quatre à six présentent un grand nombre de variélés bien différentes les unes des autres. Quelques uns sont ronds, d'autres oblongs, piriformes , etc. Leur couleur se nuance du vert trés foncé au jaune d'ocre. Tous sont poinlillés de brun clair ou jaunatre. Quelquefois les points sont si pe- tits el si multipliés qu'ils semblent composer le fond de la coquille et forment une seconde couche qui couvre la première. Enfin quel- ques-uns présentent une couronne vers le gros bout ou une large lache en forme de calotte. Leur grand diamètre est de 0" 025 à 0" 032 el le pelit de 0" 016 à 0" 022. Le merle noir a une anlipathie extréme pour le renard, c'est lui qui souvent du haut des arbres indique aux chasseurs la retraile de cel animal el l'accompagne et le poursuit de ses cris, pendant plus d'un kilomètre de distance. TROISIEME GENRE. LE GRAND JASEUR DE BOHÈME. — Bombycilla garrula. Le grand jaseur doil son nom au gazouillement qu'il se plait à faire entendre et qui le distingue des oiseaux qui chanlent ou qui 115 parlent. L’adjectif grandsert à le séparer du jaseur d'Amérique auquel il ressemble sous plusieurs rapports, mais dont il s'éloigne par des proportions plus grandes. Errant et vagabond, cet oiseau n'a pas de patrie connue ; comme les bohémiens il semble suivre dans ses mi- gralions continuelles plutôt un caprice qu'un besoin. Partout on le trouve et toujours de passage. А cerlaines époques il apparail par bandes nombreuses dans quelques contrées pour ne plus revenir qu'à des dates éloignées et irrégulières. Le grand jaseur n'habite pas la Bohême, il ne vient dans cette province que d'une maniere accidentelle, et le nom de bohéme n'a été ajouté au sien que parce que les Autrichiens en voyant autre- fois des bandes innombrables de jaseurs s'abatlre sur leur pays du côté des frontières de celle province, avaient pensé que la Bohême était la véritable patrie Cu bombycilla. Le mot garrula signifie jaseur el l'adjectif bombycivora (de bom- byx , bombycis , vers à soie сі vorare , dévorer) indique que les vers à soie sont recherchés par cel oiseau. Peut-être trouverait-on dans ce кой! particulier, un molif des migrations incessantes du grand- jaseur. Cet oiseau estaussi trés souvent désigné par le mot bombycilla dont l'étymologie me parait êlre bombyx soie el cilium, cil. Dès lors cette épithèle indiquerait une particularité propre au grand- jaseur dont les narines sont cachées sous de pelites plumes soyeuses dirigées en avant. Ces plumes se relèvent en forme de panache et viennent ombrager ses yeux. Jusqu'à ce moment-ci (août 1858) les ornithologistes français n'a- vaient sur le lieu, le temps et le mode de nidification du grand-jaseur que des renseignements faux ou trés incomplets. Un naturaliste de l'Allemagne, M. Henr.-Ferd. Moeschler, que j'avais prié de vouloir bien faire exécuter des recherches sur celle question, par ses corres- pondants du nord de l'Europe, vient de m'adresser six œufs du grand- jaseur et quelques détails obtenus aprés plusieurs années d'invesli- galions incessantesel pénibles. Graces à la persévérance et à la bien- veillance de mon correspondant et ami, je puis donner sur le nid et les œufs du bombycilla garrula des nolions détaillées et précises. Le grand-jaseur se réunit en troupes assez considérables dans la Laponie vers la fin du printemps. Dés le commencement de juin le male et la femelle travaillent à la construction du nid, Ils choisissent de préférence les pins, les sapins el les bouleaux les plus élevés. Ce nid est appuyé ordinairement à la bifurcation de plusieurs branches. Le diamètre est d'environ 0" 14 et l'épaisseur des bords de 0" 03. La ` base ainsi que la partie extérieure sont composées de peliles branches 116 sèches de sapin ou d’autres arbres des régions boréales. Les vides entre ces branches sont remplis par des mousses telles que le bryum el l'Aypnum ainsi que par les feuilles aciculaires des pins et les flo- cons du colon des arbres. La coupe du nid a 0" 03 de profondeur; elle est formée presque exclusivement de filaments tres déliés de l'usnée barbue ou chevelue (usnea barbata), espèce de lichen qui croit ordinairement sur le trouc des vieux arbres el. pend en masses fila- menteuses pius ou moins longues et plus ou moins louffues. L'inté- rieur est garni de tiges fines de gramen mélées à des plumes de lago- pêde, ou à celles du grand-jaseur lui-même. Par sa forme et les ma- tières qui le composent, ce nid se rapproche de celui du casse-noix. La ponte a lieu ordinairement vers la fin de juin; elle varie de 4 à 6 œufs. Ceux-ci ont de 0" 022 à 07024 de longueur et de 0™ 016 à O” 018 de diamètre. Le fond de la coquille est d'un blanc bleuâtre ou d'un gris perle pâle, moucheté de taches rondes ou un peu oblongues d'un noir assez foncé surtout vers le centre, ou enfin d'un bleu gris pâle. Ces taches sont répandues régulièrement sur toute l'étendue de la coquille. Quelques-unes, ayant les mêmes formes mais une couleur plus pâle que les premières, semblent presque effacées ou fondues dans la teinte primilive de l'œuf. Elles représentent, en quelque sorte, une seconde couche plus foncée, mais incomplète el ne cou- vrant qu'irrégulièrement une parlie de la coquille. Les œufs du grand-jaseur affectent une forme assez allongée el un peu piriforme. Moins gros el moins ventrus que les œufs du gros-bec ordinaire (Fringilla coccothraustes), et d'une teinte plus vive, ils en diffèrent encore par leurs taches peliles el. presque rondes, tandis que celles des œufs du gros-bec sont formées assez ordinairement de larges points élendus en zig-zag. QUATRIEME GENRE, Le Lonior. — Oriolus galbula. Le loriot est un des oiseaux les plus beaux qui visilent notre con- tinent. Il habite le nord de l'Afrique et chaque année il se répand dans les contrées méridionales de l'Europe pour s'y reproduire. Le loriot doit, selon quelques auteurs, son nom à son cri : ouriou, ou- riou, que l'on traduit trop facilement par celui de louriou, louriot, loriot. Cependant la véritable étymologie de ce nom me semble se trouver dans son nom grec xpo» dont la racine xj signifie jaune, et désigue la belle couleur de la plus grande parlie du plumage du 117 mâle adulte. Le nom latin oriolus me paraît dériver de la même source. Quant à l'épithéte galbula , verdátre, elle peint la couleur de la femelle et celle des petits, car par une coincidence touchante, les petits dans presque toutes les espèces ressemblent par leur plumage avant la mue, à celle dont la sollicitude veille avec tant d'empresse- ment sur les premiers instants de leur vie. Le loriot choisit la bifurcation de petites branches, à l'extrémité des arbres les plus élevés, pour y établir son nid. Celui-ci est com- posé de brins de foin, de paille, arlistement entrelacés; il est assu- jetti aux deux branches par des galons, des fils, des rubans, des fila- ments de chanvre, des chaines de montre, des lacets recueillis sur les grandes routes. Ces tissus s'enroulent plusieurs fois autour des branches , pénètrent dans le nid en liant fortement les différentes parties entre elles. L'intérieur est garni de laine, de crin, du duvet des fleurs et méme quelquefois de papier fin. Ce nid présente un gracieux tableau, quand, semblable à un hamac, il subit les ondu- lations du vent, pendant que la femelle couve ses ceufs et que le mâle, dont la couleur jaune contraste avec la verdure du feuillage, se tient perché sur une branche voisine et varie de la maniere la plus douce possible son chant sifflé. Les ceufs, au nombre de quatre à six, sont d'un blane brillant, parsemé de taches noires et d'un brun rougeâtre. Lorsqu'ils sont nouvellement pondus, la coquille parait transparente et d'une belle couleur rose. Leur grand diamètre varie de 0" 027 à 0" 03 et le petit de 0" 018 à 0" 022, Le loriot arrive trés tard en Anjou, vers le mois d'avril, et repart dans les derniers jours d'août. CINQUIÈME GENRE. — LES TRAQUETS. LE TRAQUET MOTTEUX. — Saxicola œnanthe. Le genre traquet comprend des oiseaux brillants de couleurs et remarquables par la grâce et la rapidité 8e leurs mouvements. Qua- tre espèces visilent l'Anjou el trois s’y reproduisent. Ces oiseaux doivent leur nom francais au mouvement continuel de leurs ailes et de leur queue, qui les a fait comparer au traquet des moulins que le vent, la vapeur ou l'eau agile d'une maniere incessante. L'épithète motteux retrace l'histoire entière du traquet désigné par ce nom. Il se lient en effet dans les terrains dont les sillons n'ont pas encore recu la dernière facon, cherche les petits insectes qui s'y réfugient , voltige de motte en motte, et (опг à tour parait sur leur 118 point culminant ou se dérobe à la vue du chasseur en se cachant derrière leur épaisseur. C'est encore sous les mottes qu'il niche et éléve ses pelits. Le mot saxicola fait connaitre les lieux que les tra- quets fréquentent; il dérive de валит, rocher et colo, habiter et signi- fie dès-lors oiseau qui aime, recherche et habite les rochers. L'adjeclif enanthe vient compléter encore ces renseignements précis et y ajouter un caraclère nouveau, ons. vigne et zs, orne- ment. Les traquets, par leurs mouvements gracieux et rapides, par la beauté de leur plumage, embellissent et vivifient les vignobles dont la culture et l'aspect sont ordinairement plus sombres et moins animés que ceux des terres ensemencées. Le (raquet motteux se pratique un trou sous les mottes ou les pierres ; la, il réunit des débris de paille, de mousse, de crin , y mêle quelques plumes el pond quatre ou cinq œufs un peu obtus , d'un bleu pâle et régulièrement sans aucune tache. Grand diamètre de Om 018 à 0" 022, petit de 0" 012 à 0" 015. TRAQUET TARIER. — Saxicola rubetra. Ce traquet se montre dans toules les contrées tempérées de l'Eu- rope ; il aime les prairies, les bords des cours d'eau, des marais, re- cherche aussi les terrains incultes, les landes , etc. ; on le voit à chaque inslant à l'extrémité des bruyères ou des herbes les plus élevées, toujours en mouvement, agitant les ailes et la queue comme s'il devait reprendre immédiatement son vol. Ce balance- ment me semble cependant plutôt être commandé par la nécessité et fournir au tarier un moyen de se maintenir en équilibre dans une position très difficile. Ce charmant petit oiseau doit probablement son nom de tarier à son habitude de nicher à terre, habitude qui l'a fait surnommer ter- rasson. Peut-être pourrait-on , en admetlant le mot dans toute son acception, en fonder l'explicalion sur l'extréme facilité de cel oiseau à pénétrer dans les herbes touffues, pour s'y soustraire aux regards de ses ennemis et y trouver sa nourriture , avec la méme prompli- tude que la tarière pénètre parlout. Le nom scientifique rubetra signifie, d’après quelques naturalistes, oiseau rougedtre et s'expliquerait par le rouge bai de la poitrine du tarier. Mais je pense que la racine véritable pourrait bien être rubum, ronce, mûre, et que dés lors ce nom indiquerait que le tarier se plait dans les ronces et qu'il aime les mûres. Cette ély mologie se trouve forlifióe par le nom grec Bari appliqué au tarier el qui dérive lui-même de £2:« signifiant ronce, múre. Enfin rubetra pourrait dé- 119 river de rubus , buisson , ronces , mûres et de tero , piller, broyer, se frayer un passage et dès-lors cet adjectif pourrait se traduire ainsi : oiseau qui pille, qui mange les müres , ou qui comme une tarière se fait un passage au milieu des ronces. Virgile a dit : Terere iter, se frayer un chemin. Cette dernière explication viendrait forti- fier celle que j'avais précédemment énoncée. Le tarier fait le plus souvent son nid dans les prairies. Il le cons- truit trés simplement au pied d'une touffe épaisse d'herbe ; l'exté- rieur est composé de quelques brins de foin desséchés ; l’intérieur est garni de laine, d’aigreltes de chardon et de duvet des plantes. La femelle y dépose quatre ou cinq œufs d'un bleu-vert trés pro- noncé, parsemé de points d'un brun roux plus ou moins foncé et ré- pandus surtout vers le gros bout ; quelques-uns de ces œufs ne por- lent aucune tache; les uns sont entièrement ronds, les autres oblongs. Leur grand diamètre est de 0" 016 à Or" 018 et le petit de Om 012 à Om 014. TRAQUET PATRE. — Saxicola rubicola. Le traquet patre est le véritable ornement des pays qu'il habite ; il y répand la vie par ses courses incessantes el la gråce de ses mouve- ments. Toujours agité, il s'élève par pelites secousses et retombe en tournant sur lui-même, justifiant ainsi à chaque instant son nom de traquet. Ce saxicole aime les terrains arides, les landes, les bruyères, les contrées solitaires et sauvages ; 1а il devient le compa- gnon assidu du berger. Il égaie le jeune patre dans ses longues heures de solitude et d'ennui, par son cri et par la légèrelé avec la- quelle il aime à se reposer el à se balancer sur les tiges les plus éle- vées, les plus isolées et les plus flexibles des buissons ou des herbes. Par une heureuse pensée, pour l'identifier davantage encore au jeune pàtre dont il est le compagnon et l'ami assidu, on les a désignés tous les deux par le méme nom. L’épithete rubicola me semble dériver de rubum mûre et colo, habiter , et indiquer que le traquet pátre recherche ies ronces el les buissons. Peut-étre l'étymologie la plus vraie serait-elle rubum, rubi et color, oiseau couleur de müre, de couleur noire ; elle serait alors fondée sur les nuances du plumage de ce traquet, qui le font désigner par- loul sous le nom de petit charbonnier. Le pátre chasse les mouches et les insectes au vol; à terre, il poursuit les sauterelles avec une grande agilité. Le nid du rubicole, placé à terre, dans les champs en friche ou au 120 pied d'un buisson, est composé en dehors de foin, de filaments d'herbes sèches et garni en dedans de crin , de laine , de plumes. П contient quatre ou cinq œufs d'un vert très pâle et un peu gris, par- semé de pelits points roussatres formant assez souvent une couronne vers le gros bout. Le coucou y dépose fréquemment un œuf. Le grand diamètre varie de 0" 014 à 0" 016, et le petit de 0" 012 à 0" 014. TRAQUET OREILLARD. — Saxicola aurita. Chaque année ce traquet passe en Anjou pour se rendre dans les contrées où il doit se reproduire. Ce saxicole offre deux races très distinctes dont l'une est beaucoup plus grosse que l'autre. Il doit son nom d'oreillard (auritus) à la bande noire qui de chaque cóté du bec s'élend derrière les oreilles en passant sous les yeux. Il aime les contrées chaudes et recherche de préférence à tous les autres lieux, les collines, les montagnes les plus élevées et les terrains arides. L'oreillard niche à terre sous des moltes, des pierres ou dans les trous des vieux murs situés prés de terre. Son nid , faconné sans beaucoup de soin, est composé à l'extérieur de foin, d'herbe fine, et à l'intérieur de laine, de mousse et de plumes. Les ceufs dont le nom- bre varie de quatre à cinq, sont d'un bleu verdâtre pointillé surtout vers le gros bout de petites taches d'un noir rougeâtre formant une couronne. Leur grand diamètre est de 0" 018 à 0"02 et le petit de 0" 014 à 0" 016. SIXIEME GENRE. LES FAUVETTES. Les Fauvettes forment un genre trés nombreux. Dix-neuf espèces habitent ou visitent chaque année nolre département. Vives, agiles, gracieuses, elles embellissent de leur présence et charment par leur chant les taillis, les buissons, les vergers, les bords des rivières et les roseaux des marais. Aucun sile ne leur est étranger, aucune localité n'est privée du plaisir de les voir et de les entendre. Les unes semblent avoir pour làche de distraire dans leurs travaux les bergers et les moissonneurs; d'autres, de charmer les pécheurs et d'animer par leur chant et la rapidité de leurs mouvements les bords isolés et solitaires des rivières. Quelques-unes s’associent aux tra- vaux des bücherons, et ne les abandonnent pas même pendant les 121 journées sombres et froides de l'hiver. Quand toute la nature semble morte ou endormie, les fauveltes viennent apporter à ces travailleurs l'image du mouvement, de l'espérance et de la vie. Dieu, qui a été si généreux dans les avantages variés qu'il a prodigués à ces chantres de nos bois et de nos campagnes, parait avoir oublié de parer leur - plumage. Il est obscur et terne, et je pense que c'est à cette couleur sombre qu'ils doivent le nom de fauvettes. Belon le fait dériver de foveis , parce qu'il prétend que cette dénomination vient de leur ha- bitude d'entrer dans les fossettes et les murailles. Cette étymologie, qui me parait fausse, n'a pas méme l'avantage de s'appuyer sur les mœurs des fauvettes. À l'exception d'une ou deux espèces, toutes les autres nichent à ciel ouvert, et aucune ne passe sa vie dans les trous des murailles, pas méme pour y chercher sa nourriture ou son repos, FAUVETTE ROUSSEROLE. — Sylvia turdoides. Cette fauvette, la plus grande de toutes celles connues en Europe, doit son nom au brun roux et uniforme qui couvre sa queue et toutes les parties supérieures du corps. Les deux épithètes latine et fran- çaise, turdoïdes et turdoide, indiquent que la rousserole ressemble à la grive (turdus, grive, еі «x, ressemblance). Cette expression est peut-être simplement un diminutif de turdus, et signifierait alors petite grive. Ce qui forlifierait celle dernière opinion, c'est que la rousserolle a été classée pendant trés longlemps parmi les grives. Le nom générique sylvia, donné à toutes les fauvettes, dérive de va», bois, broussailles, taillis, et indique une partie des lieux que ces passereaux habitent. La rousserole, appelée moineau des marais, vient chaque année, en très grand nombre, animer les bords des rivières ou des marais plantés de roseaux. Elle grimpe avec rapidilé et avec gràce le long des tiges des joncs, pour y saisir les insectes. Elle poursuit aussi au vol les libellules qu'elle aperçoit. Son cri saccadé, cara, era, cara, auquel elle doit son nom vulgaire, trahit souvent sa présence. Ce- pendant, malgré celte indication précise, la rousserole est difficile à découvrir à cause de son habileté à se cacher et à se glisser derrière les roseaux el les herbes épaisses auxquelles elle reste suspendue très facilement. Pour composer son nid, elle choisit quatre ou cinq roseaux assez rapprochés, les unil par des filaments des plantes aqua- liques, qu'elle enroule bien des fois autour des joncs pour former une espèce de bourse grossière. Ce nid a quelquefois une hauteur de près de deux décimélres, el semble avoir élé ainsi fabriqué pour 122 arracher aux dangers de l'inondation les œufs ou les petits de la fauvette. Il ressemble alors à plusieurs nids superposés. L'intérieur est garni de débris fins et déliés de feuilles de roseaux; il contient ordinairement quatre ou cinq œufs dont le fond blanc verdâtre ou bleuátre est parsemé de points ou de taches noires ou brunes qui forment quelquefois une couronne vers le gros bout. Ces œufs sont - peu piriformes et le plus grand nombre sont oblongs; plusieurs seraient confondus facilement avec des œufs de moineau, dont ils ne diffèrent souvent que par leurs taches plus larges et une couleur plus foncée et plus bleuálre. Leur grand diamètre varie de 0" 020 à Or 023, et le petit de O" 017 à O" 019. FAUVETTE EFFARVATE. — Sylvia arundinacea. Cette fauvette, une des plus babillardes et des plus agiles de l'Eu- rope, a un caractère peu sociable. Elle éloigne du lieu qu'elle a choisi pour nicher non-seulement les oiseaux étrangers à son espèce, mais encore ses congénères. Elle semble avoir recours à un bruit assour- dissant pour arriver à ses fins. L'effarvate grimpe sans cesse avec une grande agilité le long des roseaux pour y saisir les insectes qui y adhèrent; elle redescend, remonte avec une grâce et une rapidité remarquables, s'arréte à l'extrémité des tiges, y reste un instant en observation, puis s'élance avec la vitesse de l'éclair pour saisir au vol un insecte ou une libellule, et continuer ensuite le méme exercice. Tous ses mouvements ont dans leur rapidité une apparence d'irri- talion et de colére. Dés-lors, son nom effarvate ou effervete pourrait dériver de efferveo, signifiant s'échauffer, s'animer. Quant à l'épi- théte arundinacea, de roseaux, elle indique les lieux dans lesquels celte fauvette vit et se reproduit. L'effarvate, comme la rousserole , établit son nid dans les roseaux qu'elle réunit au moyen de filaments de plantes aquatiques. Ce nid est construit avec plus de soin que celui de sa congénére ; l'extérieur est composé d'herbes et de feuilles entrelacées, et l'intérieur est garni de plusieurs couches de pelures sèches de roseaux très fines, trés déliées et trés molles. Il ressenible exactement, pour la forme, à ces petits paniers d'osier qui servent, en Anjou, à faire les crémets. Les ceufs, ап nombre de quatre ou cinq, varieut beaucoup dans leur couleur. Les uns sont d'un vert brun uniforme ou parsemés de taches d'une nuance plus foncée qui s'harmonisent avec la première teinte. Le plus souvent le fond de la coquille est d'un blanc sale ou verdâtre sur lequel se trouvent des laches brunes plus ou moins nombreuses el parsemées irrégulièrement Les œufs se rapprochent, 198 par leur couleur, de quelques-uns de ceux de la rousserole, dout Tef- farvate n’est en quelque sorte qu'une variété plus petite. Quand les eaux s'élèvent à une certaine hauteur, et que l'effarvate craint de voir sa jeune famille submergée, elle abandonne les roseaux et établit son nid dans les haies voisines des rivières ou des marais, et le pose à la bifurcation de plusieurs petites branches qu'elle unit de la méme manière que les roseaux. J'ai trouvé de jolis nids d'effar- vate non loin de l'étang Saint-Nicolas; ils élaient fixés à des petites branches d'aubépine. Le grand diamètre des œufs est de 0" 016 à 0" 018, el le petit de 0% 014 à 0" 017. FAUVETTE VERDEROLLE. — Sylvia palustris. La verderolle se rapproche beaucoup de l'effarvate, mais elle s'en éloigne cependant par ses pieds verdâtres et par les parties supé- rieures de son plumage légèrement nuancées de la méme couleur. Celle-ci la fait distinguer des autres fauvettes et lui a fait donner le nom qu'elle porte. Le véritable chaut de la verderolle est aussi très différent de celui de l'effarvate. Cependant, elle contrefait assez souvent la voix de sa congénère ainsi que celle du traquet motteux et des autres oiseaux près desquels elle séjourne. Son épithète pa/ustris indique que ce passereau aime et habile les marais. Celle fauvette niche, ainsi que les précédentes, dans notre département, mais en plus petit nombre. Son nid sphérique est placé prés de terre, dans les herbes élevées et les lieux humides. Formé à l'extérieur de liges d'herbes fines et desséchées, il est garni en dedans de crin, de filaments trés déliés et de duvet de plantes. Il contient de qualre à six œufs d'un. gris cendré, parsemé de taches brunes un peu verdatres, avec d’autres qui ne diffèrent de la cou- leur de la coquille que par une nuance plus foncée. Leur longueur est de 0" 018 à 0% 020, et leur diamètre de 0" 012 à 0" 014. FAUVETTE PHRAGMITE. — Sylvia phragmitis. Celte fanvette ressemble à l'aquatique par sa taille, ses habitudes el méme son plumage. Elle en diffère par sa gorge, qui est presque blanche, et par ses flancs qui ne portent aucune tache. On la dis- lingue assez facilement de a congénère par les nuances de l'en- 124 semble de son plumage qui est plus sombre et beaucoup moins jaune. Les deux noms de cet oiseau ont la même signification et viennent de ушт», signifiant oiseau qui vit dans les haies, les roseaux, elc. dénomination qui n'ajoute rien de spécial au nom de celte fauvette el qui pourrait convenir à beaucoup d’autres. La phragmite se reproduit en Anjou. Son nid a la forme d'un pelit panier; il est souvent fixé à quelques roseaux et le plus souvent à des tiges d'herbe ou méme de blé, surtout quaud l'inondalion éloigne celte fauvette des bords des rivières. Ce nid est composé de brins d'herbes souples et déliés entrelacés avec art; l'intérieur est male- lassé avec les mémes éléments, mais plus fins et plus mous. La femelle y pond quatre ou cinq œufs d'un jaune pâle et uniforme. Quelques-uns cependant sont d'un jaune verdatre et revétus d'une seconde couche non régulière et plus nuancée que la première qu'elle laisse entrevoir. Quelquefois aussi on remarque vers le gros bout un ou deux filets noirs très déliés et serpentant en zig-zag. Le grand diamètre est de 0™ 016 à 0" 018, et le petit de 0" 012 à 0" 014. FAUVETTE AQUATIQUE. — Sylvia aquatica. L'aquatique aime les lieux marécageux et humides; elle vil sur les bords des eaux auxquelles elle doit son nom. Sa nourriture con- siste en vers, en petits limaçons, en insectes qu'elle saisit à terre ou eu grimpant en travers, le long des osiers et des tiges d'herbe qu'elle fouille en tous sens. Elle redescend la téte en bas et remonte aussi- tôt pour redescendre encore, rappelant par ses habitudes el par la rapidité de ses mouvements sur les bords des rivières, la vie active des mésanges dans les vergers. L'aquatique se distingue de la phrag- mite spécialement par la bande d'un blanc roux qui sillonne sa tête et par les taches de méme couleur répandues au centre des plumes des flancs et de la poitrine. L'aquatique fait un nid semblable à celui de la phragmite. L'inté- rieur est peut-être composé de matières plus molles et plus délicates. Il renferme quatre ou cinq œufs d'un gris verdátre avec de trés pelits points olivâtres ; ils ressemblent à quelques variétés de la fauvette grisette, mais ils sont beaucoup plus petils; quelques-uns se rap- prochent aussi, pour la couleur el les taches, de certains œufs de la bergeronnette printanniére. Les marchands ont abusé de ces ressem- blances, et le plus grand nombre des œufs vendus par eux sous le nom de la fauvette aquatique, n'appartiennent pas à celte espèce. 125 Le grand diamètre est de O" 016 à 0" 017, et le pelit de O" 011 à 0" 015. FAUVETTE LOCUSTELLE. — Sylvia locustella. La locustelle est beaucoup plus commune en Anjou et dans les autres départements qu'on ne le pense ordinairement. Les habitudes de celle fauvelte servent à la dérober aux recherches des chasseurs et de ses ennemis. Elle se lient ordinairement cachée à terre la plus grande partie de la journée, dans les herbes el les endroits humides. Elle ne s'envole pas quand on approche, mais elle court avec rapi- dilé comme le rále de genét, el déconcerle ainsi ceux qui la pour- suivent. De toutes les fauveltes, la locustelle est la seule qui puisse marcher, privilége dont elle se sert avec avantage. La particularité qui lui a mérité son nom sert encore à la cacher. Celle fauvette fait entendre un cri semblable à celui des cigales ou des sauterelles (lo- custa), et, comme celle derniere, elle continue ce bruil pendant très longlemps. Les habitants des campagnes la désignent sous le nom de longue haleine, à cause de ce chant prolongé qui contribue à trom- per le chasseur en lui faisant confondre la locustelle avec les cigales. Enfin, elle niche plus tard que les autres fauvettes, et le plus souvent dans les plantes fourragères ou dans les champs de haricots, et échappe encore ainsi aux recherches des dénicheurs, car quand le moment de pénétrer dans ces cullures est arrivé, les pelils sont en- volés. Son nid repose assez souvent à terre; il est formé d'herbes entrelacées et garni intérieurement du duvet des plantes ou de paille très fine et bien souple. Les œufs, au nombre de quatre à cinq, sont d'un gris rose quelquefois uniforme , mais le plus souvent émaillé de petits points de méme nuance mais plus foncés ; quelquefois ces points varient du jaunâtre au rougeâtre. Le grand diamètre est de 0" 016 à O” 018, et le petit de 0" 012 à Om 013. Ici se termine la première subdivision des fauvettes, admise par un cerlain nombre de naturalistes el désignée sous le nom commun de calamoherpes, peignant tres bien les habitudes générales de ces fau- velles. Celle dénomination dérive de xarzuos, roseau , herbe, el sera, ramper, glisser, grimper, el signifie alors oiseaux qui se glissent entre les roseaux, qui grimpent le long des tiges. Celle derniere habilude est loul à fail caraclérisque, car les calamoherpes non-seulement parcou- renl les roseaux dans lous les sens avec une grande agililé, mais ils effectuent ces évolulions en s'élevant de cólé. Leur corps forme avec les roseaux un angle qui varie de l'aigu au droit, selon que l'oiseau a 126 : besoin de modifier l'inclinaison pour capturer sa proie ou se déro- ber à ses ennemis. Les fauvelles comprises dans la deuxième subdivision portent le nom de rubiettes, parce que toutes les espèces groupées sous celle désignalion ont quelque partie de leur plumage de couleur rou- geâtre. FAUVETTE PIT-CHOU. — Sylvia provincialis. Le pit-chou doit, selon quelques auteurs, son nom aux pelites di- mensions de sa taille. D'après Buffon et plusieurs naluralistes, cette dénominalion signifierait, en provençal, petit, menu. Elle serait alors très bien attribuée à un oiseau qui est l'un des plus petits de l'Eu- rope. Des ornithologistes avaient pensé au contraire faire dériver ce nom d'une habitude de celte fauvelte, habitude qui convient à beau- coup d'autres oiseaux. Le pit-chou se plail à parcourir les terrains plantés de choux, visite les feuilles dans tous les sens pour y saisir les insecles qui s'y trouvent attachés. Des-lors il picote, non les choux, mais la proie qu'il poursuit. Celle explication me рагай être la seule fondée. Dans la langue provençale, le verbe pita veut dire ramasser avec le bec sa nourriture grain à grain. On dil d'un avare c’est un pite dardennes. Dardenne est l'ancienne pièce de deux liards. L'avare esl donc un homme qui ramasse une à une les pièces de deux liards comme un oiseau recueille son grain. Pit-chou signifierail donc un passereau qui récolte sa nourriture grain à grain, petit à petit, sur les choux. Quelques écrivains avaient méme soulenu que celle fauvette se cachait sous les feuilles de choux, pendant la nuit, afin d'éviter les allaques des chauves-souris trés friandes de sa chair. Celle hypo- these ne peut être admise par la raison que la chauve-souris, du moins celle de nolre pays, ne vit pas d'oiseaux, mais d'insecles. L'épithete provincialis indique que le pit-chou est trés multiplié dans la Provence qui parail être sa patrie. Celle fauvelle se montre en Anjou, mais en pelit nombre, quelques couples y sont méme sé- dentaires et sy reproduisent. Vai rencontré le pit-chou dans les taillis formés de brosses (chêne lauzin, — quercus toza) plantés sur les bords de l'élang Saint-Nico- las. Le nid placé dans les buissons à peu d'élévalion de terre est com- posé à l'extérieur de gramen et garni à l'intérieur de crin ou de ma- tière cotonneuse. Il renferme quatre ou cinq œufs dont le fond de la coquille est d'un brun grisâtre parsemé de points bruns ou d'un jaune sale et pâle avec des taches effacées rougeálres, brunes ou 127 rousses, formant quelquefois par leur rapprochement une espèce de calotle. Ces œufs peuvent facilement être confondus avec les peliles variélés de la passerinette ou même de la grisette. Leur grand diame - tre est de 07016 à 07018 et leur petit de 0% 012 à 07» 014. FAUVETTE ROUGE-GORGE. — Sylvia rubecula. Сеце fauvette, la plus répandue de toutes et la seule qui soil séden- taire en Anjou, est presque méprisée dans toutes les contrées qu'elle habite. Le nom populaire qui lui est donné dans plusieurs campa- gnes vient ajouter encore au ridicule attaché à sa triste existence. On l'appelle la gadille. Cette dénomination cependant comme le nom commun et le nom scientifique du rouge-gorge, est fondée sur le plastron rouge qui couvre sa poitrine en remontant jusqu'à la gorge. En effet d'après Ménage, gadille dérive de rubiadilla, rubja- dilla, jadilla, gadilla, dès lors la racine serait rubia, rouge. Ce qui expliquerail pourquoi gadille est synonyme de roupie. Belon dit qu'on appelle le rouge-gorge , la roupie ou la gadille parce qu'on voit cel oiseau venir aux villes et aux villages lorsque les roupies pen- dent au nez des personnes. Ce qui signifierait que ces oiseaux vol- ligent même pendant les plus grands froids qui font rougir le nez des villageois. Cel oiseau vil de pelils insectes el de vermisseaux qu'il cherche dans les buissons. Peu défiant , il se laisse facilement approcher. Dans les pipées il est ordinairement une: des premières viclimes qui viennent se prendre aux gluaux. Sa pose, ses manières tout en lui semble dire à l'homme qu'il réclame une indulgence, hélas! trop souvent refusée. Malgré Vingratitude qui le poursuit sans cesse, le rouge-gorge reste ami de l'homme el s'attache aux pas du bücheron, dans les forêts solitaires. Par un chant plaintif, il pa- rail s'associer à ses labeurs et quand tout est тогі aulour de lui, cel oiseau est encore pour le bücheron une image de la vie. Il vient becqueter le pain du travailleur, se poser sur l'instrument de ses faligues el semble demander à faire parlie de la famille. Souvent aussi le villageois voil le rouge-gorge se percher sur l'arbre voisin de la chaumière el égayer par son pelit chant le repas du soir composé d'un pain trempé de sueurs. Il s'arréte longtemps sur le toil rustique el continue son ramage jusqu'à ce que l'heure du repos ail sonné pour la famille fatiguée, Et pour s'identifier davantage encore à la vie du labeur des gens de la campagne, il est de tous les oiseaux celui qui se réveille et chante le plus tot, qui s'endort el chante le plus lard, C'est à lui el nou au moineau que doivent se rapporter ces paroles : Sicut passer solitarius in tecto. Dans la saison des frimas , le rouge- 198 gorge se pose sur les maisons, sur les croisées еі réclame l'hospita- lité au foyer domestique. Si l'accueil fait à sa demande lui parait favorable, ce passereau s’enhardil, s'arréle quelques instants sur la porte entre- ouverte et pénètre à l'intérieur de la maison pour re- cueillir quelques miettes de pain; c'est un indigent qui a confiance dans la générosité de l'homme et dont l'espérance ne devrait pas être trompée. Ce qu'il demande est si peu de chose, son cri est si plaintif, sa confiance si naive! Puis lui-méme est souvent si géné- reux , si hospitalier! Que de fois il couve l’œuf que le coucou a dé- posé dans son nid et entoure de soin celui qui doit le payer d'ingra- оде! Le nid du, rouge-gorge est le plus souvent posé à terre dans les trous des vieux murs. Il est composé presque toujours d'un lit de feuilles desséchées sur lequel repose une espèce de coupe applalie formée de mousse , de bourre el de crins entrelacés. Il contient de cinq à six œufs dont la grosseur, la forme el les couleurs varient beaucoup. Souvent ils sont d'un roux uniforme parsemé de poinls imperceplibles et de couleur de brique. Quelques uns porlent sur un fond d'un blanc sale de larges taches rougeâtres réunies en plus grand nombre vers le gros році. D’autres sont d'un blanc mat strié de points noirálres formant une couronne et ressemblent à de petits œufs de la pie-grièche écorcheur. Le rouge-gorge élève ses pelils avec une tendresse remarquable ; le mâle partage avec la femelle le soin de l'incubation. Les inembres d'une famille malheureuse ne doivent-ils pas s'entr'aider ! Le grand diamètre des œufs est de 0" 017 а 0™02 et le pelit de 0" 014 à 0" 016. FAUVETTE GORGE-BLEUE. — Sylvia suecica. La fauvelle gorge-bleuese reproduit chaque année en Anjou. On la trouve principalement au dessus et au dessous des Ponts-de-Cé, dans les osiers qui bordent les iles de la Loire et dans les marais de la Baumelte. Cet oiseau, l'un des plus brillants de l'Europe, rap- pelle par ses couleurs vives et nuancées ceux des tropiques. Il doit son nom au magnifique bleu azuré qui couvre sa poitrine et sa gorge. Ce plastrou se développe avec l’âge de l'oiseau et encadre une tache d'un blanc pur et éclatant. Une bande d'un noir mat regne au dessous du bleu et fait encore ressorlir d'une manière plus sensible les autres couleurs. L'épithéte suecica , suédoise, indique que celte fauvelle est très commune en Suède. Quelques naturalistes ont distingué deux es- peces de gorge-bleue, l'une nommée suecica et l'autre cyanecula (de 199 cyaneus, bleu céleste). Selon l'opinion la plus probable , ce sont deux variétés de la même espèce et dont les légères différences peuvent dépendre du climat des pays habités par cette fauvelte. La gorge-bleue se tient en Anjou dans les osiers et les arbustes plantés sur les bords des rivières. Elle est difficile à trouver parce que se taisant la plus grande partie de la journée, elle se trahit dès- lors trés rarement par son chant. Puis elle reste à terre dans les grandes herbes ou dans les fourrés. Le nid composé en dehors d'herbes sèches, de mousse et de racines déliées, est revêlu en de- dans d'une couche de foin; de crin et de plumes. Ordinairement il est placé à terre, caché sous des racines, des branches d'osier ou des louffes d'herbe. Quelquefois comme celui du rouge-gorge il est confié à des excavalions praliquées dans la terre ou dans les fentes des troncs des vieux arbres. Les œufs, au nombre de quatre à six, sont d'un bleu verdatre, reflétant quelquefois plusieurs nuances. Ils res- semblent assez à ceux du rossignol, mais ils sont plus petits et pres- que toujours pointus des deux bouts. Leur longueur varie de0"016 à 07018 et leur diamètre de 0" 013 à O” 017. FAUVETTE ROUGE-QUEUE. — Sylvia tithys. Cette fauvelte ne fait qu’apparailre dans notre département. Elle y séjourne seulement quelques jours à l'époque de ses migrations , el encore ce passage n'a lieu que d'une manière irrégulière. Elle doit son nom vulgaire à la couleur des plumes de sa queue. Quant à celui de tithys , il me semble formé du mot s: qui ser- vail à désigner le même oiseau chez les Grecs et dérivé lui-même de vrča, pépier , piailler. Celle dénominalion convient bien à celle fauvette et la distingue naturellement de ses congénères, puisqu'elle n'a ni chant , ni ramage proprement dit, mais seulement un pelit son flûlé, composé de notes aiguës el empreintes d'un sentiment de tristesse, en rapport avec les lieux solitaires qu'elle habite. Le rouge-queue se plait dans les terrains rocaillenx dont il visite toutes les sinuosités pour y saisir les insecles; il parcourt aussi les bords des torrents et les terres nouvellement labourées et s'y nour- rit de vermisseaux. Celle fauvette fait son nid dans les fentes des rochers, entre les pierres tombées des montagnes et assez souvent sous les hangards isolés des habitations. Composé extérieurement de feuilles dessé- chées, de mousse , il est revétu à l'intérieur de plumes, de crin ou d’autres matières molles et flexibles. Il contient de quatre à six œufs d'un blanc pur et lustré ; ils se rapprochent des œufs du torcol, mais 9 ^ 130 on les distingue assez facilement de ces derniers parce que ceux de la sylvia tithys sont légèrement piriformes, tandis que ceux du torcol sont presque toujours oblongs. M. l'abbé Caire , ornithologiste éclairé et persévérant , a découvert une nouvelle espèce de fauvelte tithys. La femelle ressemble à celle dont je viens de parler, mais le mâle adulte est très différent de celui qui se montre en Anjou. Cette fauvette porte le nom de son observateur, el est connue sous le nom de sylvia ou ruticilla Cairii. Les œufs de cette seconde espèce sont également d'un blanc pur , mais un peu moins gros el plus ronds que ceux de la sylvia tithys. Quelques-uns sont pointillés de taches d'un brun roux. Le grand diamètre des œufs de la première espèce varie de 0" 017 à 07019 el le реш de 0" 012 à 0" 014. FAUVETTE DE MURAILLES. — Sylvia phenicurus. Ce passereau , trés commun en Anjou, est désigné sous plusieurs noms , selon les habitudes que l'on considère en lui. On le nomme rossignol de murailles parce qu'il se plait à se percher sur les ruines ou sur les toits, à y faire entendre son chant trés accentué, agréable mais mélancolique. Puis il se rapproche du rossignol en ce que comme lui il ne chante que le soir et le matin. Mais il s'en éloigne en ce qu'il se place dans des lieux élevés pour redire ses accents , landis que son congénére se dérobe le plus possible aux regards en cherchant les endroils bas et fourrés. La fauvette de murailles est en- core appelée hoche-queue à cause du mouvement qu'elle imprime aux pennes de sa queue de droile à gauche. Quant à sa dénomina- lion la plus ordinaire, elle lui a été donnée parce que cet oiseau aime à établir son nid dans les trous et les crevasses des vieux murs; enfin son nom de cul-rouge est fondé sur les nuances de sa queue el l'épithète phenicurus retrace la méme idée, puisqu'elle vient de œquvxovps dont les racines sont ео, rouge et opz, queue. Cette fauvelle , remarquable par la vivacité de ses mouvements incessants , est très répandue dans notre département et dans toute l'Europe. Elle fait son nid dans les trous des murailles et des arbres fruitiers. Il prend dès-lors toutes les formes de l'endroit auquel il est confié et devient tour à tour oblong , carré, triangulaire, pelit ou grand, selon les dimensions des excavalions qui le contiennent, Quelques-uns ont des proportions trés considérables ; ils sont com- posés de mousse, de plumes et de crin. Peu de nids offrent aux petits une couche plus molle et plus chaude. La ponte varie de qualre à six œufs d'un bleu brillant et d'un diamètre moins considérable or- 131 dinairement que celui des œufs de l'accenteur mouchet avec lesquels ils pourraient être confondus assez facilement; cependant ces der- niers sont moins allongés que ceux de la fauvette de murailles et d'une couleur plus terne. Le grand diamètre est de 0" 017 à 0" 02 et le petit de 0" 012 à Om 014. FAUVETTE ROSSIGNOL. — Sylvia luscinia. Le rossignol est de tous les oiseaux connus celui dont le chant est le plus varié, le plus harmonieux et le plus étendu. A lui seul il réunit toutes les ressources et toutes les beautés de la voix des aulres oiseaux chanteurs. Son nom français rossignol a été formé par corruption du latin lusciniana , mol qui dérive de luscinus , em- ployé par Plaute pour désigner celle fauvette. Luscinius ou luscinia est formé de lux, lucis, jour ou de lucus , luci, bois el de canere, ce- cini, chanter et signifie alors : oiseau qui chante au point du jour ou dans les bois ; qui canit sub lucem ou in lucis. Le rossignol parait en effet se complaire dans son chant et fuir tout ce qui pourrait s'op- poser à son éclat. C'est pour cela qu'il ne se fait entendre que le ma- lin et le soir lorsque tout se trait autour de lui et qu'il peut régner en maitre absolu. Il aime aussi à chanter dans les bois les plus som- bres et les plus solitaires , évitant tout ce qui pourrait le distraire , tout bruit qui enlèverait à sa voix quelque chose de son incompara- ble beauté. Cependant dés que les pelits du rossignol sont élevés, son chant si simple, si harmonieux, si étendu et si souvent admiré, est remplacé par un son rauque assez semblable au croassement du crapaud. Cel oiseau vient chaque année se reproduire en Anjou. Il établit son nid à lerre ou prés de terre, dans les fourrés et les taillis les plus épais , au milieu des haies touffues , sur la pente des fossés ombra- gés, Ce nid, régulièrement composé de feuilles desséchées, est assez profond et pénètre en terre dans un petit creux de quelques centi- metres , préparé par le rossignol pour donner plus de solidité à son travail. L'intérieur est garni de feuilles plus délicates que celles de l'enveloppe, de peliles racines et de crin. Les œufs au nombre de qualre à cinq sont d'un brun uniforme avec quelques reflets verdà- tres ou d'un brun olivâtre. La femelle seule est chargée des soins de V'incubation, et malgré la sollicitude qu'elle manifeste pour celte opé- ralion, elle abandonne son nid dès que le coucou y a déposé un œuf, Le grand diamètre est de 0" 018 à 0" 02, el le pelit de 0» 013 à Om 015. 132 FAUVETTE PHILOMÈLE. — Sylvia Philomela. La fauvette Philomèle se rapproche beaucoup du rossignol, ses ha- biludes sont les mêmes, elle en diffère cependant par la nuance plus foncée de son plumage et sa taille plus forte. En liberté on la recon- nail facilement à sa voix plus vibrante encore que celle de sa con- génère et surtout à ses roulades beaucoup plus prolongées. Son nom de Philomèle (гіхос, ami et wero, chant) rappelle l'histoire de la fille de Pandion, roi d'Athénes. Cette malheureuse princesse ayant subi d'indignes traitements de la part de son beau-frère Térée, cher- cha à s'en venger. Ne pouvant dévoiler de vive voix ses infortunes , puisqu'on lui avait coupé la langue , elle retraca au fond de sa pri- son , sur une toile, tout ce qu'elle avait souffert. Celte toile fut en- voyée à sa sœur Progné , qui, à la têle d'une troupe de bacchantes, délivra Philoméle. Par un mouvement de délire incompréhensible, Progné immole son propre fils, et dans un grand feslin, elle en sert les membres à son époux ; a la fin du repas , la mère coupable jette sur la table la tête du jeune Ilys, et lorsque son mari se précipite sur elle pour assouvir sa fureur, il se trouve changé en épervier, Progné en hirondelle, Ilys еп faisan et Philomèle en la fauvette qui porte son nom. Les habitudes de ce passereau , son éloignement pour la sociélé des autres oiseaux el surlout pour celle de l'homme , la mé- lancolie de son chant semblaient chez les payens favoriser la fable de la Mythologie. Depuis celle mélamorphose , l'épervier poursuit inulilement | hirondelle , et Philomeéle échappe aussi a ses serres par l'obscurilé et la solitude des lieux qu'elle habite. Selon l'opinion qui me semble la plus probable, la fauvette Philoméle se reproduit en Anjou. Son nid ressemble à celui du rossignol ; ses œufs ne différent de ceux de la précédente que par leurs dimensions un peu plus fortes et par une nuance assez souvent plus sombre. Grand diamètre de 0" 020 à 0» 022, petit de 0" 014 à 0" 016. lci se termine la section des rubiettes. Pour compléler la nomen- clature des fauvelles , il ne reste plus qu'à parcourir la subdivision comprenant les fauvettes proprement dites. FAUVETTE ORPHÉE. — Sylvia orphea. Si le nom de la fauvette Philoméle rappelle le souvenir de crimes alroces , celui de l'orphée ne fait du moins revivre dans notre esprit que celui d'un époux malheureux. Orphée, fils d'Apollon et de Clio, 188 jouait admirablement de la lyre. Son épouse Eurydice, ayant été pi- quée par une vipère le jour de ses noces, descendit dans le sombre sé- jour de Pluton. Orphée résolut d'arracher aux enfers celle qu'il aimait tendrement. La puissance de sa Туге triompha de tous les obstacles ; les lois immuables de la mort furent suspendues par l'harmonie du fils d’ Apollon , et Eurydice lui fut rendue. Malheureusement une condition était imposée : Orphée devait précéder Eurydice et ne la regarder que lorsqu'il serait sorti des noirs abymes. Déjà il franchis- sail le seuil de cet empire ténébreux, lorsque cédant à un désir bien naturel, il se détourne, voit Eurydice qui disparaît et lui est enlevée pour toujours. Inconsolable de cette perte, Orphée fuil la société des hommes et cherche dans les accents de sa lyre un soulagement à sa douleur. Les forêts, les montagnes, les animaux se montrèrent sen- sibles aux charmes de son harmonie ; mais elle ne put calmer le ressentiment des femmes dont Orphée avait repoussé l'union depuis la mort d'Eurydice. Le malheureux chantre ful massacré par les bacchantes en fureur, et sa tète jetée dans l'Hébre, murmurait encore le nom d'Eurydice. Tel est le sommaire de la vie mytholo- gique de celui auquel l'ornilhologie a emprunté le nom qu'elle donne à une des plus gracieuses fauvelles. L'orphée ressemble à la fauvette à tête noire ce qui l'a fail surnommer la grosse tête noire. Elle en dif- fere essentiellement par ses dimensions qui sont plus forles méme que celles du rossignol. Son chant est puissant et doux, mais moins étendu que celui des deux espèces précédentes. Il respire la mélan- colie et la trislesse, et fournit à cel oiseau un moyen d'échapper à la poursuite des chasseurs. L'orpAée jouit de la faculté de modifier son ramage de telle sorte que lorsqu'on est prés de cette fauvette, son chant parait venir de bien loin ou d'un côté tout opposé à celui qu'elle occupe. Ceux qui se guident sur ce renseignement pour capturer l'orphée se trompent toujours , el dans cette circonstance encore la voix de cet oiseau semble venir des entrailles de la terre ou se perdre dans ses profondeurs. Rapport qui n'a pas dà échapper à ceux qui ont uni par le méme nom la fauvette et l'époux in- fortuné. Non-seulement l'orphée traverse notre département chaque aunée, mais elle s'y arrête quelquefois pour s'y reproduire. Cette année j'ai recu de Charcé, par l'entremise de Mlle Chauveau, institutrice, un très beau nid d'orphée contenant cing œufs. Ce nid, très gros, est composé à l'extérieur de gramen , de paille et de racines , et de crin à l'intérieur. Les œufs, d'un blanc sale, sont parsemés de taches brunes ou d'un cendré jaunâtre ; le centre des taches est d'une cou- leur plus foncée que celles des bords qui semblent se fondre avec les 134 nuances de la coquille. Le nid est placé ordinairement sur les ar- bustes ou dans les haies et les buissons épais. Grand diamètre de 0" 017 à O" 019, et petit de 0" 013 à 0" 015. FAUVETTE А TÊTE NOIRE. — Sylvia atricapilla. Cetle fauvelte, l’une des plus communes en Europe, doit ses noms francais et latin au noir profond répandu sur le dessus de sa tête. Peu craintive, elle vient animer de son chant et de son vol non-seu- lement les campagnes, mais encore les jardins des viiles. Elle dissi- mule peu l'endroit qu'elle a choisi pour y construire son nid. Elle l'établit dans les haies, sur les bords des chemins, dans les groseil- liers, les rosiers et les autres arbustes. Il est composé à l'exlérieur de gramen, et garni à l'intérieur de quelques brins de crin. Arrondi en forme de coupe, il est trés peu épais el ordinairement transpa- rent. Les œufs qu'il contient, au nombre de quatre à cinq, varient beaucoup en grosseur et en couleur. Régulièrement ils ont des di- mensions fortes comparativement à la taille de l'oiseau. Les uns, presque arrondis, ont le fond de la coquille d'un blanc sale ou rous- sálre, parsemé de taches brunes dont le centre est. plus foncé que les bords; d'autres ont une couleur rougeâtre pointillée de noir. Quelques-uns paraissent recouverls de deux couches uniformes d'un jaune pâle et effacé, dont la seconde semble plus épaisse que la première. Enfin, on en trouve qui sont enliérement blancs. Pour celte fauvette, comme pour les autres oiseaux, cette grande variélé dans les couleurs des ceufs me semble provenir non-seulement de la différence d'âge des femelles el des lieux qu'elles habitent, mais surtout de la nourriture qu'elles trouvent. En effet, les mêmes oiseaux présenlant dans leurs couvées successives une grande mo- dification dans les nuances de leurs œufs, ce changement me semble ne pouvoir étre attribué qu'à la nourriture, qui varie avec le cours de l'année. Quelquefois il est très difficile de distinguer les œufs de la fauvette à tête noire de ceux de la fauvette des Jardins, si ce n'est par la pelile différence qui existe dans leurs dimensions. Les œufs de la première sont ordinairement un peu moins longs et moins blanchâtres que ceux de la seconde. La fauvette à tête noire fait chaque année plusieurs couvées. Elle rivalise avec le rossignol pour la fraicheur et l'harmonie de son chant; mais s'il est aussi doux et aussi flexible, il est moins élendu. Le mâle partage avec la femelle les soucis de l'incubalion ; il pro- digue à ses pelils les soins les plus tendres, et quand ils sont mena- 135 сёз par un ennemi, il cherche à l'éloigner des objets de son amour en feignant d'être blessé et de trainer Vaile. Puis, quand il pense avoir écarté le danger par cette ruse innocente, il s'envole et revient prés de ses pelits par une route détournée. Grand diamètre de 0™ 017 à 0" 020, petit de 0% 012 à 0% 014. FAUVETTE DES JARDINS. — Sylvia hortensis. Cette fauvetle aime à séjourner dans les jardins, à y chercher sa nourriture, à s'y reproduire, habitude qui justifie ses noms. Le nid de la fauvette des jardins, composé à l'extérieur de paille et de brins d'herbe, est garni de crin et confié ordinairement aux massifs el aux haies des Jardins. Le crin employé par la plupart des petits oiseaux dans la contexture de leurs nids me parait fournir une nouvelle preuve de l'instinct admirable que leur a donné Dieu dans sa tendre sollicitude pour tous les êtres de la création. Cette matière, tout à la fois chaude et flexible, se trouve facilement partout; par son élasti- cité, elle se prêle à lous les mouvements de la couveuse. Avec le secours de celle garniture intérieure, le nid se développe selon l’âge des pelits qu'il renferme, reçoit el conserve cependant toujours la forme ronde, la plus commode et la plus favorable pour lin- cubation. Ce nid contient ordinairement quatre ou cinq œufs dont la co- quille est d'un blanc jaunâtre parsemé de taches brunes dont le milieu est d'une nuance plus foncée, tandis que celle des bords semble presque effacée. Cette fauvette recherche les lieux ombragés et voisins des petits cours d'eau. Elle aime à nicher prés de ses congénéres, avec les- quelles elle vit en bonne harmonie. Son chant, varié el coulant, est moins éclatant que celui de la fauvelte à téte noire. Le grand diamèlre de ses œufs est de 0m 018 à 0" 020, et le petit de 0" 013 à 0" 014. FAUVETTE GRISETTE. — Sylvia cinerea. La couleur cendrée de cette fauvette lui a peut-être fait donner ses noms vulgaires et scientifiques. Cel oiseau se trouve en très grand nom- bre dans toute l'Europe. Il ne parait nullement redouter le voisinage de l'homme. Son chant, moins agréable que celui de la plupart de ses congénères, plail cependant par son excessive volubilité. Plus élan- cée dans ses formes qu'un certain nombre d’autres fauveltes, elle est aussi plus vive dans ses mouvements, Elle est sans cesse en aclivilé; 136 on la voit tour à tour voltiger de branche en branche ou courir de buisson en buisson, voler en piroueltant au-dessus des haies pour y pénétrer ensuite avec agilité et se livrer à toute sorte d'ébats qui semblent indiquer un caractère léger et folâtre. La gailé de la gri- sette, étourderie de ses mouvements, son chant saccadé, cette espèce de joyeuse folie qu'elle manifeste dans l'ensemble de ses habitudes, ne pourraient-ils pas faire supposer à son nom l'élymologie qui a été donnée à l'épithète grive? La fauvette grisette fait deux, trois el méme quatre couvées par an. Son nid, grossièrement façonné, est composé de petits brins de gramen et de paille; l'intérieur est quelquefois garni de flocons de laine ou du coton des plantes. Il est placé le plus souvent dans les haies peu élevées, sur le bord des routes, ou confié aux ronces qui s'étendent sur les fossés. Les œufs, au nombre de quatre à cinq, varient beaucoup en dimensions et en couleurs. Les uns sont d'un blanc sale et verdâtre parsemé de pelits points ou de larges taches noiratres toujours plus nombreuses vers le gros bout. D'autres sont tout ronds ou trés allongés. On en trouve dont la coquille, d'un blanc de lait, porte vers le gros bout une couronne de pelits points grisâtres. Enfin, quelques-uns revêtent la couleur jaunâtre avec des taches brunes. Malheureusement cette grande variété donne lieu à des erreurs involontaires ou à des fraudes calculées. Beaucoup d'œufs de la fauvette grisette circulent dans les collections et chez les mar- chands comme appartenant au pit-chou, à l'aquatique ou méme à la passerinette. Le grand diamètre est de 0" 015 à O" 018, et le petit de 0" 011 à 0" 014. FAUVETTE BABILLARDE. — Sylvia curruca. La fauvette babillarde doit son nom a son chant peu étendu et sans cesse répété. Cet oiseau aime les taillis et les endroits fourrés. Sans cesse en mouvement, comme les mésanges et les pouillots, il pour- suit et recherche dans ses chasses incessantes les insectes et les petites mouches qu'il rencontre sur les branches ou qu'il saisit au vol. Comme la fauvette grisette, il s'élève au-dessus des buissons en tournant sur lui-même pour y pénétrer ensuite avec la rapidité de la fléche. Dans ses évolutions, il retrace les ruses et les habitudes de l'épervier poursuivant sa proie. La babillarde enfle les plumes de sa gorge et de sa tête toutes les fois qu'elle reprend son chant monotone, habitude qui lui donne un air d'importance qui ne sied guère à sa petile taille, 137 Ce passereau, dont la présence а été signalée en Anjou, niche dans les buissons, les taillis ou sur les branches peu élevées des ar- bres. Son nid, composé à l'extérieur d'herbe ou de paille desséchée , est garni à l'intérieur de crin ou de plantes molles. Il contient qua- tre ou cinq œufs de couleur blanche, légèrement jaunâtre, parsemés surlout vers le gros bout de taches rousses ou olives dont le centre est beaucoup plus foncé que les bords. Ils reproduisent assez les nuances el la forme des œufs de la fauvette orphée, mais ils sont d'une dimension beaucoup plus petite. Leur grand diamelre est de 0014 à 0m 016 et leur petit de 0» 011 à 07013. FAUVETTE A POITRINE JAUNE. — Sylvia hippolais. Si explication du nom francais donné à cette fauvette est sim- ple et facile, dés-lors qu'il est fondésur les nuances de son plumage, il n'en est pas de méme du nom scientifique hippolaïs qui devrait, je crois, s'écrire hypolaïs. Cette dénomination vient ajouter une nouvelle preuve aux assertions de ceux qui pensent que pour arriver à la vé- rilable étymologie, à celle fondée sur les mœurs ou sur la nature, il est nécessaire de s'affranchir quelquefois des règles strictes des grammairiens. Ainsi hippolais dérive du grec iso»: dont les racines d’après les meilleurs dictionnaires, sont ura el лас, хаас, azos, aan rocher et dés-lors ce mot indiquerail que cel oiseau setient sous les pierres et les rochers. Cette explication est entièrement dépourvue de vé- rité car la fauvelte à poitrine jaune se plait dans les endroils plantés de haies épaisses et prés des cours d'eau ou des lieux humides. La pensée qui a présidé à la formation de ce mot a dà se proposer de rappeler une habitude caractéristique de l’hippolais, celle de contre- faire la voix, le chant, le cri de rappel de tous les oiseaux qui sont dans son voisinage depuis la rousserole des marais jusqu'à l'hirondelle des cheminées et depuis la pie-grièche jusqu'au moineau. Cette facilité ex- cessive l'a fait surnommer généralement fauvette polyglotte (mors, plusieurs et > агг, langue) oiseau qui fait entendre plusieurs chants, qui parle en quelque sorte plusieurs langues. En m'appuyant sur cette dernière élymologie et sur les habitudes de cette fauvelle , je pense que le mot тола pourrait dériver de ото, sens dessus dessous el de хамг pour хаос, babillard et signifier alors fauvette babillant à lort et à travers. Celte opinion me semble d'autant plus fondée que l'ensemble des auteurs traduisent vrorzis, par curruca. L'hippolais se reproduit chaque année, en Anjou; elle recherche ordinairement les buissons touffus et les haies impénétrables pour y établir son nid. Là, selon la méthode des rousseroles, elle réunit plu- 188 sieurs branches d'aubépine, de ronce ou d'arbustes par des brins de paille ou d'herbes sèches et déliées. Elle continue ensuite son travail en donnant à son nid une grande profondeur. L'intérieur est garni de crin , de laine, de coton des saules et autres matières sou- ples et molles. L'extérieur, assujetti par les bords à ces petites bran- ches, est composé de plantes entrelacées avec art. La femelle y dé- pose quatre ou cinq œufs trés jolis surtout lorsqu'ils sont nouvelle- ment pondus. Leur couleur est d'un rouge lilas ou violeté et parsemé de raies et de taches noires ou rougeâtres. Leur longueur est de 0" 016 à 07019 et leur diamètre de 0» 012 à 0" 015. Les naturalistes ont fait un genre hippolaïs qui comprend plu- sieurs espèces. L'une d'elles l'ictérine (de rsss jaune) me parait ve- nir chaque année dans notre département. Elle est d'autant plus fa- cile à confondre avec la fauvelle à poitrine jaune, qu'elle a les mémes nuances de plumage, les mémes habitudes que celle-ci. Le nid et les œufs des deux espèces se ressemblent entièrement. L’icté- rine diffère de l'hippolais proprement dite, par des proportions un peu plus grandes, un bec plus court, des ailes plus longues et une queue un peu plus fourchue au centre. Malheureusement ces fauveltes ainsi que la plupart des oiseaux qui ne visitent l'Anjou que pour s'y reproduire, arrivent dans un lemps oü la chasse est interdite, pour nous quilter vers l'époque à laquelle elle est ouverte. Dés-lors il est difficile de pouvoir étudier ces oiseaux, d'autant plus que presque tous ceux qui restent plus longtemps parmi nous, perdent leur voix aprés la nidificalion et échappent aux recherches en ne trahissant plus leur présence. Je pense que les fauvettes mélanocéphale, à lunettes, passerinette passent chaque année dans notre département, et que méme elles s'y reproduisent. Cette hypothèse devient presque une cerlitude, si l'on admet comme exactes les descriptions des nids et des ceufs de ces oiseaux, faites par MM. Dégland, Baillif et Crespon. Pour faciliter aux ornilhologistes de notre Anjou la vérification de mon assertion, je vais donner quelques délails sur ces trois fauvelles et sur leur mode de nidification. FAUVETTE MELANOCEPHALE. — Sylvia melanocephala. Les épithètes francaise et latine données à cet oiseau ont la méme étymologie ; toutes les deux, elles dérivent du grec (meras, мелаи, noire el «soa», tête) el signifient fauvette à téte noire. La melanocephale res- semble beaucoup à la sylvia atricapilla; ses dimensions sont infé - rieures à celles de sa congénère, de cinq millimètres seulement. La 139 couleur rougeâtre qui entoure ses yeux est le signe le plus caracté- ristique qui la sépare des autres sylvies. Elle vit el niche comme la fauvette à tête noire et peut ainsi être facilement confondue avec celle dernière. Ses œufs au nombre de quatre à cinq ont dix-huit ou dix-neuf millimètres de longueur, et treize ou quatorze millimè- tres de diamètre. D’après M. Crespon ils sont d'une couleur blan- châtre et parsemés de points noirâtres en forme de couronne vers le gros bout. Selon M. Dégland, leur teinte est d’un gris roussâtre, moucheté de petits points fauves ou d'un roux olivâtre, plus rap- prochés au gros bout et peu sensibles. Cette différence peut s'expli- quer par les variétés qui ont été communiquées à ces naturalistes. Quoiqu'il en soit, l'on trouve en Anjou des types se rapportant exac- tement aux œufs décrits par ces deux auteurs. FAUVETTE A LUNETTES. — Sylvia conspicillata. Cette jolie petite sylvie dont les différents noms ont la même si- gnificalion se distingue de la fawvette grisette par les plumes noires qu'elle porte en forme de lunettes autour du cercle blanc de ses yeux, par des couleurs plus pures et plus vives et par des dimen- sions plus petites. Elle а ordinairement trois centimètres de moins que sa congénére à laquelle elle ressemble par l'ensemble de ses habitudes et par son genre de nourriture. La fauvette à lunettes fait son nid avec les mêmes éléments que la grisette; il renferme ordi- nairement quatre ou cinq œufs dont la longueur varie de 0" 014 a 0" 016 et le diamètre de 0011 à 07012. La coquille de ces œufs est blanchâtre ou d'un blanc teint de grisâtre, avec de nombreux points ou de petites taches brunes, verdâtres, formant quelquefois une es- péce de calotte vers le gros bout. FAUVETTE PASSERINETTE. — Sylvia passerina. Le nom donné à cette fauvette est un diminutif du mot passer (moineau) et indique que la couleur d'une partie de son plumage se rapporte par ses nuances à celui du moineau. Le mâle a toutes les parlies supérieures d'un cendré couleur de plomb, inclinant au bleu, toutes les parties inférieures en général d'un roux de brique avec une légère teinte de violet. Le ventre et l'abdomen sont blanchâtres; deux petits traits blancs en forme de moustaches partent de la base du bec et descendent de chaque côlé du cou ; enfin la queue est noirátre. La longueur de la passerinetle est de 13 centimètres. La femelle 140 a le dessus du corps d'un cendré clair avec une très légère teinte olivâtre ; les parties inférieures sont d'un gris roussátre clair ou jau- natre , le ventre blanchâtre tirant un peu au roux, La bande blanche près le bec est peu apparente. La passerinelte a aussi les mêmes habitudes que la grisette ; elle conslruit avec les mêmes malériaux et dans les mêmes endroils un nid en forme de coupe, contenant quatre ou cinq œufs. Ceux-ci sont blanchâtres ou d'un blanc inelinant au verdâtre , avec des taches et des points lirant sur le violâtre, mélés avec quelques autres d'un cendré roux et très rapprochés sur le gros bout, où la couleur du fond s'aperçoit à peine. Quelques-uns sont d'un blanc cendré avec des points d'un gris roussátre plus nombreux vers le gros bout et se confondant avec la couleur de la coquille. Leur longueur varie de On 015 à Or 016 et leur diamètre de 07012 à 0" 013. Les différences qui existent entre ces dernières sylvies sont très difficiles à saisir et ont échappé pendant longtemps à un grand nom- bre de naturalistes. Maintenant encore , malgré les travaux récents et les nouvelles observations, plusieurs auteurs distingués et, parmi eux, M. Nordmann, ont soutenu quela fauvette grisette (sylvia cinerea), la passerinette (sylvia passerina), la fauvelte à lunettes (sylvia conspi- cillata), pourraient bien ne former qu'une seule espèce se manifes- lant par plusieurs variétés. J'abandonne aux savants la solution de ce probléme. Cependant je puis constater dés maintenant, quelle que soit leur décision, que l'on trouve en Anjou les différentes variétés d'œufs atlribuées aux trois espèces précédentes. SEPTIEME GENRE. POUILLOTS. Dans la Faune de Maine et Loire, aux fauvettes succèdent les pouillots. Pendant trés longtemps ces derniers ont été classés parmi les sylvies avec lesquelles ils ont beaucoup de rapport. Les pouillots sont avec le troglodyte et les roitelets, les plus petils oiseaux de l'Eu- rope. C'est aussi aux dimensions de leur taille qu'ils doivent leur nom de pouillot, formé de pullus, pusillus, petit. Ces passereaux vivent régulièrement en société ; on les rencontre quelquefois en troupes assez nombreuses. Sans cesse en mouvement , ils papillonnent au- tour des branches, des feuilles, afin d'y saisir les vers et les insectes. Ils parcourent les arbres dans tous les sens pour y trouver leur 141 proie et accompagnent cette chasse incessante d'un cri vif et perçant qui semble souvent être un eri de rappel. Quatre espèces de pouillots visitent Anjou et s'y reproduisent. La cinquième espèce, le pouillot à ventre jaune, admise par M. Millet, n'est, d’après la grande majorité des naturalistes , que le pouillot fitis , jeune аге et en plumage d'au- lomne. POUILLOT SIFFLEUR. — Sylvia sibilatrix. Les noms francais et latin du pouillot siffleur , le plus grand du genre, lui viennent de son cri de rappel qui est aussi son cri ordinaire. Ce cri perçant ressemble à un sifflement semblable à celui que fait entendre le bouvreuil , et sa puissance étonne de la part d'un oiseau si faible. Le siffleur établit son nid près de terre, dans les broussailles, dans les lieux humides , sur les bords de fossés. Des feuilles de fougère desséchées, de la guinche ( molinie bleuâtre , molinia ccerulea), de la mousse en forment l'extérieur ; des plumes, du crin et des matières molles en garnissent l'intérieur. Ce nid а la forme d'une grosse boule oblongue ou d'un four de campagne , selon les endroils dans lesquels il se trouve établi. Une pelite ouverture y est praliquée du côlé le moins exposé aux regards et est ordinairement tourné vers le fossé. L'entrée se trouve à peu prés au milieu du nid de manière ce- pendant que la partie supérieure puisse s'avancer pour former toit et préserver la mère et sa jeune famille de la pluie et de l'humidité de la rosée. Ce nid, par sa couleur et sa posilion, échappe facilement aux regards , mais il se trouve malheureusement trop près de terre pour n'être pas souvent visité et dévaslé par les lézards verts et les couleuvres. Les œufs dont le nombre varie de cinq à sept sont un peu oblongs ; la coquille est d'un blanc plus ou moins rosé et poin- lillé de taches d'un brun roux et rougeâtre, plus nombreuses et plus rapprochées à mesure qu'elles s'élévent vers le gros bout. Ces œufs se distinguent de ceux du nalterer par leurs dimensions un peu plus fortes et par le fond de la coquille toujours plus blanc; enfin les taches du siffleur sont ordinairement plus larges et plus séparées les unes des autres que celles des œufs du natterer. Le grand diamètre est de 0" 014 à 07016 et le petit de O" 011 à 0" 012. PotrLLOT Frris. — Sylvia trochylus. La difficulté de distinguer les différentes espèces de poullots, qui 142 ont lous des traits de ressemblance, a forcé les naturalistes à remar- quer cerlaines particularilés omises facilement dans le classement des autres oiseaux. Le cri triste et mélancolique de ce pouillot qui semble faire entendre ce mol fist-fist, a suffi pour que Bechstein lui dounal le nom de fitis, expression défigurée du chant du pouillot trochilus. Quant à cette dernière dénomination, elle convient à tous les pouillots ; elle dérive de төх»; dont la racine +4», tourner, vol- tiger avec vilesse , reproduit parfaitement le vol papillonnant et bruyant de ces oiseaux , lournant autour des petites branches avec la méme rapidité el le méme bourdonnement que le fuseau sous une main exercée. Le nid du fitis, beaucoup plus restreint dans ses dimensions que celui du précédent est composé des mêmes matières et souvent placé moins prés de terre ; on le trouve dans les bois ou les taillis , non loin des petils cours d'eau ou des fossés, suspendu à de grandes liges de fougére. On le prendrait facilement pour le nid du rat des moissons. П contient cinq ou six œufs moins gros et plus allongés que ceux du siffleur , d'un fond blanchâtre disparaissant sous des pelits poinls d'un rouge de brique trés multipliés, et recouvrant en quelque sorte entièrement le fond de la coquille. Ils pourraient être confondus avec quelques variétés des œufs de la mésange bleue, mais ces derniers cependant ne sont jamais si chargés de taches. Grand diamètre de 0" 014 à 0% 015 ; реш de O" 010 à Om 012. POUILLOT VÉLOCE. — Sylvia rufus. Les noms de ce pouillot offrent une nouvelle preuve de la peine que l’on éprouve à saisir des nuances dans les couleurs ou des diffé- rences dans les habitudes de ces pelils oiseaux. Les noms de véloce el de rufus, roux peuvent convenir à tous les pouillots, puisque tous sont d'une agilité remarquable et que leur couleur fauve les avait fail classer parmi les sycvies. En hiver on trouve le véloce en grand nom- bre dans les arbustes el les osiers plantés sur les bords des rivières et surlout des marais ou des étangs. De l'extrémité des branches qu'il visile en tous sens, il se précipite sur la proie qu'il apercoil fixée aux plantes aqualiques ou entraînée par les eaux. Quand celle proie est allachée à un débris ou à un objet capable de le supporter, il s'y fixe el dès-lors s'abandonne sur cette espèce d'esquif au cours de l'eau jusqu'a ce que sa faim ou son investigation soit salisfaile. On peut constaler ces habitudes du véloce près des bords de l'étang St-Nico- las, principalement à l'endroil où l'eau décrit une courbe entre les deux bouquets de sapins. Le véloce a la facullé de modifier sa voix et 148 de faire croire qu'il chante bien loin du chasseur lorsqu'il en est très prés. Ainsi , dans le mois de mai 1857 , J'étais occupé avec plu- sieurs jeunes gens à chercher un nid de pouillot véloce dans les petits taillis situés sur la rive droite du méme élang ; pendant nos inves- tigations, le mâle resta perché à l'extrémité d'un arbre, faisant en- tendre son cri d'inquiétude qui nous semblait devoir diriger nos pas. Après un certain temps consacré à des recherches inutiles, nous nous apercümes que nous étions les victimes du pelit ventriloque. Nous ne pouvions l'entrevoir lui - même , el lorsque nous pensions élre près de le découvrir, son chant nous paraissait venir de bien loin , pour se rapprocher quand nous nous éloignions et recommen- cer sans cesse une ruse qui nous faliguail sans procurer aucun ré- sultat. Le pouillot véloce est, en Anjou, le plus répandu des oiseaux de ce genre. Comme le siffleur, il niche trés prés de lerre, le long des talus des fossés et toujours du cóté de la route, espérant ainsi éviter plus facilement les regards des hommes. Pour le découvrir, en effet, on est non-seulement obligé de se courber profondément, mais méme de descendre dans les fossés. Ce nid réunit les mémes éléments que ceux des pouillols précédents, et contient de cinq à sept œufs variant de formes et de laches. Peut-être trouverait-on dans celle différence très sensible une preuve en faveur de ceux qui admettent une cin- quieme espèce de pouillot. Ces nuances très distincles mérilent de fixer l'attention des naturalistes. Quelques nids contiennent des œufs presque ronds, dont la coquille est d'un blanc parsemé de taches noires; d'autres présentent des œufs de forme allongée et couverts de taches plus petites et d'un rouge de brique. Grand diamètre de 0" 014 à 0" 017, petit de 0" 011 à 0" 013. POUILLOT NATTERER. — Sylvia nattereri ou bonelli, Се pouillot porte indifféremment le nom de natterer ou celui de bonelli. Il doit ces dénominations aux deux savants qui les premiers ont pu, par de minutieuses observations, le distinguer des auires es- peces. Les habitudes de cet oiseau sont les mêmes que celles de ses congénères. Il niche comme le véloce, en préférant toutefois les lisiéres des bois à tous les autres lieux. Son nid renferme cinq ou six œufs plus pelils que ceux du siffleur, el tellement chargés de points rou- geálres qu'ils paraissent se confondre et donner une nouvelle nuance а la coquille; celle-ci semble quelquefois êlre un peu violetée. Grand diametre de 0" 014 à 0" 017, petit de 0" 011 à Om 012, 144 HUITIÈME GENRE. ACCENTEUR PEGOT. — Accentor alpinus. Les inflexions brèves et saccadées du chant de l'accenteur ont dé- terminé les ornithologistes а donner a cet oiseau un nom qui repro- duisit cette particularité : accentor, celui qui entonne. On dirait qu'il annoncerail une antienne sur un ton mélancolique; c'est un chant commencé el subitement interrompu. Quant au mot pégot, il me semble pouvoir s'expliquer de deux manières. L'accenteur alpin vit sur le sommet des montagnes du midi de l'Europe, et en particulier sur celui des Alpes. Il se nourrit d'insectes et de graines, double avan- lage qui lui permet de séjourner presque en tout temps dans les mémes pays. Cet oiseau se plait dans les régions solilaires. Fixé sur une pierre, il s'y tient immobile pendant longlemps, regardant au- tour de lui d'un air hébélé tout ce qui s'y fait, ne paraissani pas re- douter l'approche de l'homme, par indifférence ou par ignorance du danger. Celte habilude, cet air stupide lui ont fait donner le nom de pégot, dérivé de pée, expression du pays de Comminges (Haute- Gascogne), signifiant hébété, imbécille. La couleur noirâtre du plumage de cet oiseau pourrait peul-élre faire admeltre que pégot vient du vieux mot francais pége, signifiant couleur de poix, noirátre. Cet ac- centeur niche à terre, dans les inégalilés de lerrain ou entre les pierres; son nid, composé de racines, de brins d'herbe et de paille, est très solidement construit. Ces différentes matières sont tellement unies et liées, qu'elles paraissent avoir été soumises à l’action d'une presse puissanle. Les bords du nid ont jusqu'à 0" 05 d'épaisseur. 1l conlient de quatre à six œufs bleus sans taches ; leur longueur varie de 0" 020 à 0" 024, el leur diamètre de 0™ 015 à 0% 017. Le pégot traverse l'Anjou trés rarement et n'y séjourne jamais. ACCENTEUR MOUCHET. — Accenlor modularis. Ce congénére du pégot est sédentaire dans notre département. On le trouve partout et en grand nombre. Il se tient dans les taillis et les haies épaisses, sans cesse occupé à recueillir quelques pelites graines, à saisir des vermisseaux, des insecles et surtout des mou- ches, habitude qui lui a fait donner l'épithete mouchet. Cet accen- leur est trés lent dans ses mouvements ; il saulille d'un air stupide el peu défianl dans les buissons; aussi a-t-il recu le nom expressif 145 de traîne-buisson. Son chant est bref, pen varié; il le fail suivre ou précéder de quelques sons plaintifs, tremblants, qu'il semble se plaire à moduler, ce qui explique sa dénomination latine modularis. L’accenteur mouchel établit son nid dans les arbustes et dans les haies, à environ un mètre de terre ; son nid, assez volumineux, est formé ordinairement d'une couche épaisse de mousse disposée en coupe, revétue à l'extérieur de quelques brins de paille ou de petites racines, et à l'intérieur de crin. Ce nid renferme quatre ou cinq œufs bleus, un peu ventrus, et se dislinguant de ceux du rossignol de murailles, par une forme moins allongée el par une couleur plus pâle. Grand diamètre de 0" 017 à 0" 019, petit de 0" 012 à 0" 014. NEUVIEME GENRE. ROITELET HUPPE (Regulus cristatus). — ROITELET A TRIPLE BANDEAU (Regulus ignicapillus). Deux fois chaque année notre département est traversé par des bandes de petits oiseaux dont le cri et le vol plaisent а ceux qui en sont les témoins. Ils parcourent, avec une vitesse et une grâce qui tiennent beaucoup de celles du papillon, les taillis et surtout les ar- bres verts, cherchant les pelites mouches, les insectes et leurs larves. Aucune partie des arbres n'échappe à leurs investigalions inces- santes ; on les voit suspendus à l'extrémité méme des feuilles agitées par le vent, le corps renversé, afin d'être plus certains de ne rien oublier sur leur passage. Ces oiseaux si vifs, si gracieux, sont des habitants des Alpes, qui, malgré leur faiblesse, entreprennent et exécutent de longs voyages. Les naturalistes les ont nommés roitelets, petits rois, à cause de leur huppe et de leur bandeau qui semblent êlre une couronne. En Europe, trois espèces forment ce genre ; deux seulement nous visilent. Celles-ci se distinguent entre elles par la huppe et le triple bandeau de vives couleurs, qui embellissent encore leur pelite tête. Celle particularité a délerminé leurs noms communs et savants. Pendant longtemps ils ont été confondus dans une seule espèce, et c’est M. Brehm, naturaliste saxon, qui le premier les a déterminés d'une maniére précise. Le roitelet huppé, male, porte sur le sommet de Ја tête une huppe d'uu jaune orange, encadrée sur les côlés et en devant par des plu- 10 146 mes effilées, noires à l'extrémité des barbes, et d'un jaune vif à V'in- térieur. Ces plumes font en quelque sorte partie de la huppe, car elles s'élévent avec elle. Le diadéme des femelles est moins brillant que celui des máles. Cet oiseau établit son nid dans les arbres élevés et touffus ; il a la forme d'une boule trés ronde dans laquelle on a pratiqué un pelit trou placé en dessous afin que l'eau n'y puisse pénétrer. Cette ou- verture est ordinairement dissimulée sous une branche. Souvent il m'est arrivé d'examiner ce nid dans tous les sens avant d'apercevoir l'ouverture qui donnail passage à la femelle. De la mousse, parsemée de petils lichens, et unie par des toiles d'araignée, en compose l'extérieur; des plumes et du crin garnissent l'intérieur. Ce nid renferme de six à huit œufs d'un blanc sale ou jaunatre, et dont le gros boul est ordinairement d'une nuance uniforme mais plus fon- cée; on dirait une seconde couche répandue sur la premiére en forme de calolte, Le grand diamètre est de 0" 012 à 0" 013, et le petit de O" 009 à 0" 010. Le roitelet à triple bandeau doit son nom aux différentes bandes blanches et noires qui sillonnent sa tête et encadrent sa huppe. Celle-ci est d'un orangé couleur de feu. Ses habitudes sont les mémes que celles du précédent, avec lequel il émigre et vit en bonne har- monie. Son nid est fait de la méme maniere et placé entre plusieurs petites branches qui, eu relombant, l'enveloppent et le cachent tout à la fois. Ses œufs diffèrent de ceux de son congénére par leur couleur rose et par de petits points d'un rouge uu peu effacé; leurs dimensions sont aussi un peu plus petites que celles de l'espèce précédente. Grand diamètre de 0" 011 à 0" 012, el le pelit de 0" 008 à 0" 009. DIXIÈME GENRE. TROGLODYTE D'EUROPE. —- Troglodytes vulgaris. Les anciens avaient donné le nom de Troglodytes à des peuples d'Afrique dont ils connaissaient peu les habitudes précises, et qu'ils supposaient devoir vivre en sauvages el habiter les cavernes et les bois. Selon une opinion admise par un cerlain nombre d'hisloriens modernes, le peuple des Troglodytes n'aurait jamais existé, et les an- ciens auraient vu des hommes là où il n'existait réellement que des singes. Quoi qu'il en soil, les ornithologistes se sont appuyés sur ces 147 données vraies ou fausses pour imposer à un très petit oiseau le nom de troglodyte, composé de троул», trou, caverne, el dua, Гои, entrer, habiter. Ce passereau aime en effet à visiler, à parcourir les fentes, les crevasses des vieilles murailles, les trous des arbres vermoulus, pour y saisir les insecles el les vermisseaux. En Anjou, on appelle communément le troglodyte, berrichot, beuri- chon et burrichon. Ce nom vulgaire dérive du vieux mol latin burri- chus, signifiant roux, dont la racine est az roux. Celte dénomina- tion, le petit roux, est parfaitement justifiée par la couleur uniforme des plumes du lroglodyte. Quant au mot robertaud, petit Robert, petit maitre Robert, il con- vient à ce pelit oiseau, qui fail acle de propriétaire en se glissant partout, même dans l’intérieur des maisons, pour y manger ou pour s'y reproduire, el sans demander aucun consentement. Ce mot a en outre le méme sens que beurichon, car Robert vient de l'allemand Rotbert, signifiant barbe rousse, et peut dès lors se traduire encore ainsi : le petit roux. Le troglodyte se plait aussi dans les haies touffues, dans les lierres qui tapissent les murs ou serpentent autour des arbres. Ses mouve- menls sont vifs et saccadés; son chant, assez agréable, est très étendu el trés perçant pour un si petit oiseau ; ce chant ne se compose que d'une seule phrase non interrompue qui dure cinq ou six se- condes. Celte parlicularilé, trés rare chez les oiseaux, mérite d'élre remarquée, car les phrases du rossignol ne se prolongent pas au-delà de deux ou trois secondes. Celles du merle noir durent trois ou qua- tre secondes, celles du merle grive deux ou trois; seule, l'alouelte l'emporte sur le troglodyte par un chant qui comprend de cinq à sept minutes. La queue du troglodyte est toujours relevée en éventail, el ses mouvements semblent indiquer une colère ou une irritation presque conlinuelle. On le voit sans cesse paraitre el disparaître derrière les branches ou les feuilles ; il trompe la vigilance de tous ses ennemis par celle espèce de fuile stratégique. Dans le temps de la nidificalion, le mâle se tient près de son nid, surveille tous ceux qui s'en appro- chent, et manifeste, par l'agitation de ses plumes et par ses cris in- cessanls, l'indignalion qui l'impressionne. Le troglodyte établit son nid le long des arbres couverts de lierre, sous les hangars près des fermes, dans les trous des vieux murs el quelquefois à une pelite dislance de terre, entre les branches d'un arbuste ou des charmilles. Ce nid, dont les dimensions sont très considérables, présente ordi- nairement la forme d'une boule oblongue; un petit trou très rond, placé sur le cólé ou vers le haut, donne passage à la couveuse. Celle 148 ouverture est fortifiée par de petites racines qui en assujeltissant la mousse, l'empéchent de céder sous la pression occasionnée par l'en- trée et la sortie de la femelle. Le haut du nid s'avance presque tou- jours, afin de servir de toit et de préserver l'intérieur contre les in- convénients de la pluie et les intempéries de la saison. Des feuilles desséchées de fougère ou d’autres plantes, de la mousse liée par des racines, forment l'extérieur ; le dedans est garni de plumes et de crin. Il contient de cinq à sept œufs trés gros pour les dimensions de l'oi- seau. Leur forme est un peu oblongue, le fond de la coquille est d'un blanc uniforme, et de couleur rose lorsque les ceufs ne sont pas vidés. Le plus souvent ils sont parsemés de points rougeâtres. Le nid du troglodyte est trés remarquable par la propreté qui y règne inlé- rieurement. Le père et la mère le purgent continuellement des in- secles qui s'y introduisent et des excréments de la petite famille. Le grand diamètre est de 0" 014 à 0" 016, et le pelit de 0" 011 à Om 012. ONZIEME GENRE. BERGERONNETTE GRISE. —Motacilla alba. Le genre des bergeronnettes, comprend un certain nombre d'oi- seaux inléressants par les habitudes auxquelles ils doivent leurs dif- férents noms. Ces passereaux vivent de vermisseaux, d'insectes et recherchent les lieux où ils peuvent les trouver plus facilement. Par gaielé el pour saisir au vol quelque insecte ailé, ils aiment à s'é- lancer à une pelite élévation au dessus des prairies, à tourner sur eux-mêmes et à retomber ensuite pour recommencer plusieurs fois les mêmes évolutions. On les voit courir avec grâce et agilité sur les bords des rivières, voltiger sur les feuilles de nénuphar ou sur les roseaux inclinés. Ils se plaisent à visiter les bassins dans lesquels sabreuvent les troupeaux et qui servent de lavoirs publics : cette habitude les а fait nommer lavandières. Le mouvement imprimé sans cesse de haut en bas à leur longue queue leur a mérité l'épi- thèle de hoche-queue ou de motacilles (motacilla, de moveo, agiter, remuer). Quant au nom de bergeronnette ils le doivent à leur habi- lude de suivre les cullivateurs et les bergers, de s'attacher à leurs pas sans craindre leurs attaques. Ils se liennent derrière la charrue qui trace les sillons, saisissent les insectes sous les molles renver- sées, ne redoulant ni les animaux ni ceux qui les dirigent. Dans les prairies, ils restent au milieu du troupeau, suivent tour à tour les 149 bestiaux, vivant des insectes оп des vermisseaux que les pas pe- sants des vaches ou des bœufs font sortir de leurs retraites. D’autres fois ils s'altachent au dos des moutons, des pores même et les dé- barrassent des insectes qui les tourmentent. Souvent on а vu une ou deux bergeronnettes fixées sur un seul animal, le suivre dans sa course furieuse déterminée par les piqûres qu'il ressentait et dont il ne comprenait pas le motifet ne l'abandonner que lorsque la visite générale était terminée. Les bergeronnettes se rapprochent beaucoup les unes des autres ; dés lors quelques naturalistes ont réuni plusieurs espèces en une seule, d'aulres au contraire ont fait un grand nombre de subdivisions. On admet généralement quatre espèces qui toutes visitent l'Anjou el dont trois s’y reproduisent. La bergeronnette grise doit son nom à l'ensemble de sa couleur, d'un gris blanchâtre; elle niche dans notre département. Composé de mousse, de crins el de plumes, son nid esl placé ordinairement dans les las de pierres silués sur le bord des eaux. П prend dès lors la forme du trou auquel ilest confié. Pour en dissimuler l'entrée, le père et la mère y pénètrent par différents passages. Ce nid contient quatre ou cinq œufs d'un blanc grisatre parsemé de petits points d'un brun noirâtre. Le grand diamètre est de 0% 020 et le petit de 0" 015. Quelques ornithologistes pensent que la véritable bergeronnette lu- gubre ne vient pas en Europe, et que celle à laquelle on a donné ce nom à cause des nuances plus sombres et plus foncées de son plu- mage n'est qu'une variélé de la grise. Quant à la bergeronnette Yarell, ainsi appelée du nom du savant Anglais qui l'a délerminée, elle est considérée par les uns comme une variété dépendant de la vieillesse du sujet, ou de l'influence du climat, d'autres auteurs l'ont érigée en espèce. Quoiqu'il en soit les bergeronnette lugubre et Yarel/ ont les mêmes habitudes que la grise. Leur nid est en tout conforme à celui de leur congénere et leurs œufs ne différent de ceux de la motacilla alba que par la couleur de leur coquille quelquefois plus foncée. Variété insuffisante cependant pour servir de fondement à une distinction d'espèces, puisque ces variétés se manifestent et d'une maniere en- core plus sensible dans les œufs de presque tous les passereaux. )ERGERONNETTE JAUNE. — Motacilla boarula. Celle bergeronnette, se distingue des précédentes non-seulement par les nuances de son plumage auxquelles elle doit un de ses noms, 150 mais encore par son caraclere. Ennemie de la sociélé, elle recher- che la solitude et attaque ses congénères qui se trouvent dans les lieux qu'elle parcourt. Elle accompagne son vol d'un petit eri plain- tif et vibrant qui l'a fait surnommer boarule (boarula de Ёоо, crier). Souvent elle traverse les villes pour s'arréter de jardin en jardin, de cour en cour, afin de visiter tous les endroits humides. On l'ap- perçoit solitaire et perchée sur le loit des maisons où elle fait enten- dre son cri perçant, et d’où elle semble rechercher les endroits les plus favorables à ses investigations. Son nid composé à l'extérieur de brins d'herbe et de débris de plantes, est garni à l'intérieur de plumes et de crin. Placé à terre et sous des pierres prés des cours d'eau, il conlient de quatre à six œufs d'un blanc sale, roussátre où méme isabelle. La couleur de quelques-uns est uniforme, d'autres sont couverts d'une. seconde couche presque effacée ou de petites taches grisálres et jaunátres. Grand diamètre de 0%018 à 05020, et le petit de 0m014 à 0m 015. BERGERONNETTE PRINTANNIERE. — Motacilla flava. Celle bergeronnette la plus sociable de tout le genre est trés ré- pandue en Europe. Elle arrive en grand nombre, dès les premiers jours de printemps, dans les pays où elle doit nicher. Elle parait an- noncer le retour de la belle saison et c'est celte particularité qui lui afail donner son nom francais. Quant au mol flava, jaune, il indique que son plumage approche de celui dela précédente. Elle niche à terre, dans l'herbe, près des rivières, et pond le méme nombre d'œufs que la boarule. Leur couleur est plus jaune, plus rousse et plus uniforme que celle des œufs de sa. congénere. Grand diamètre de 0»017 à 0018 et le petit de 0" 013 à 0" 014. Quelques naturalistes ont admis une bergeronneltle flaveole (mota- cilla flaveola, jaunatre) qui selon l'opinion la plus accréditée, n'est qu'une variété dela printanniére. Les œufs qu'on lui attribue sont d'un blanc roussatre ou jaunâtre uniforme et strié de petils points bruns peu visibles. DOUZIÈME GENRE. PIPIT RICHARD. — Anthus Richardi. Les pipits, ont élé pendant très longtemps confondus avec les alouettes dont ils se rapprochent par quelques traits de ressemblance 151 et dont ils s'éloiguent par plusieurs habitudes. Ces oiseaux forment la transition naturelle entre les bergeronnettes et les alouettes. Comme les premières ils vivent d'insectes et donnent à leur queue un mou- vement de haut en bas. Comme les secondes ils chantent en s'élevant dans les airs, et présentent des formes beaucoup moins élancées que les motacilles. Enfin quelques-uns se perchent très rarement. Leur nom générique pipit est la reproduction de leur chant pit- pit qu'ils répèlent sans cesse et qui semble être en méme temps un chant de joie et un cri de rappel. Leur dénomination latine anthus dérive du grec a:5«, signifiant fleur. Si le mot est pris au figuré, les pipits seront alors considérés comme l'ornement des lieux qu'ils habitent, par leur vol et leurs mouvements continuels. S'il est adoplé selon le sens propre il indiquera que ces passereaux vivent en général au milieu des terrains cullivés, el qu'ils se nourrissent de graines des fleurs et des plantes. Le pipit Richard le plus gros de tous, a été dédié par M. Vieillot au naturaliste de Lunéville qui l'avait signalé le premier. Comme tous ses congénères il niche à terre; son nid, se compose de petites raci- nes el de brins de foin ou de plantes, il renferme quatre ou cinq ceufs. Leur coquille d'un blanc gris sale, est revétue de taches d'un noir rougealre. Leur grand diamètre varie de 0022 à 0» 028 et leur petit de 0™018 à 0» 020, PIPIT SPIONCELLE. — Anthus aquaticus. L'épithéte spioncelle qui sert à désigner ce pipit, rappelle une des habitudes de ce passereau, celle de se plaire et de vivre dans les ter- rains plantés de buissons d'épines (spina, épine). C'est le même mo- lif qui l'a fait nommer spinoletta. Le deuxième nom aquaticus (aqua- lique) nous retrace une autre habitude de cet oiseau, celle de fré- quenter les lieux humides, et les bords des rivières et des marais. Le spioncelle manifeste une grande varialion dans ses goûts el c'est celle particularité qui a induit en erreur plusieurs naturalistes et lui a procuré des noms d'une significalion toute différente. A quel- ques époques de l'année et revêlu dun certain plumage on voit le spioncelle fréquenter les terrains marécageux el les bords des riviè- res, on le nomme alors anthus aquaticus. A une autre époque et avec une livrée différente, on l'a remarqué dans les endroits ro- cailleux, couverls de buissons, sur les montagnes, on lui a par con- séquent donné la dénomination d'anthus montanus. Ces pérégrina- lions dans des lieux si différents ne sont pas chez les spioncelles le résultat d'un caprice, mais elles sont dictées par un instinct raisonné qui les dirige dans les endroits qui selon les saisons offrent plus de ressources et d'abondance pour leur nourriture. Le Spioncelle fait à terre, dans les endroils rocailleux, un nid com- posé de racines et d'herbes. 11 conlient de quatre à six œufs ventrus, de teintes el de couleurs très différentes. Les uns sont d'un blanc sale, d'autres d'un gris un peu violet; on en trouve de rougeatres ; tous portent des taches brunes ou noirálres, toujours plus nom- breuses vers le gros bout. Quelques-uns paraissent avoir une seconde couche plus foncée que la premiere, et qui donne à une partie de l'eeuf une teinte toute particuliére. Grand diamètre de 0» 020 à 0" 023, petit de 0% 015 à 0" 017. PIPIT ROUSSELINE. — Anthus rufescens. Les noms francais et lalin de cel oiseau sont fondés sur les nnances de son plumage. Le pipit rousseline aime à s'élever à des hauteurs assez considérables en répétant son ramage un peu monotone, puis a se laisser tomber la lêle en bas avec la rapidité de la flèche, dont il prend la ressemblance en conservant ses ailes étendues sans leur imprimer aucun mouvement. Le nid, composé de mousse, de petites racines, d'herbe et de crin, reçoit ordinairement de quatre à six œufs dont la coquille, légère- ment blanchatre, est souvent striée de points, de taches et même de raies qui varient du violet au brun ou au roux foncé. Le grand diamètre est de 0" 020 à 0" 024, et le petit de O" 017 à Um 018. PIPIT FARLOUSE. — Anthus pratensis. Le pipit farlouse est très commun dans notre département ; il est le plus pelit du genre et ressemble beaucoup au pipit des arbres. Souvent il est désigné sous le nom d'alouelte des prés (prati alauda); ce sont ces deux derniers mots réunis el défigurés qui ont formé la dénomination farlouse, en subissant, d'aprés Le Duchat, les trans- formations suivantes : prati alauda, puis pralauda, fralauda , farloue, el enfin farlouse. L'épithete latine pratensis (de pré), représente la méme idée. Le pipit farlouse vit en bandes nombreuses, se tient de préférence dans les herbes et dans tous les lieux humides et arrosés ; il y poursuit les insectes el les petits vermisseaux. On le trouve en très grand nombre, pendant l'automne et l'hiver, dans les marais de la Baumetle el sur les bords de l'étang Saint-Nicolas ; à l'approche du chasseur, il s'élève à une hauteur peu considérable, par un vol incertain et saccadé, en faisant entendre un petit cri répété qui pa- rait être en méme temps un cri de rappel et de mécontentement. On voit qu'il s'éloigne à regret des lieux qu'il avait choisis pour y chercher sa nourriture, et dans lesquels il revient presque immé- diatement dés qu'il apercoit que le danger est passé. Le pipit farlouse fait son nid à terre, dans les champs ensemencés, dans les prairies, quelquefois dans les taillis ou au pied d'un buisson. Des herbes séches, des racines et un peu de mousse en composent l'extérieur; les ceufs, au nombre de quatre ou cinq, reposent sur une pelite couche de crin et de duvet des plantes ; ils varient en couleurs plus que les ceufs de tous les autres oiseaux. Ils présentent toutes les formes, les couleurs et les nuances les plus variées. Chez les uns, le fond de la coquille est d'un blanc un peu enfumé; chez d'autres, il varie du blanchátre au rougeâtre, avec des points ou des taches brunes, pourprées, violeltes. Les uns sont parsemés de pelils points couleur de brique, d'autres porlent de larges taches brunes effa- cées et se fondant dans les premières teintes de la coquille. Enfin, quelques-uns sont ronds, d'autres oblongs, el un certain nombre piriformes. Souvent les couleurs de ces œufs ont un éclat si vif qu'ils semblent avoir été recouverts d'une couche de vernis. Le grand diamètre est de 0" 018 à 0" 022, et le petit de 0" 014 à 0" 016. PIPIT DES ARBRES. — Anthus arboreus. Ce passereau doit son nom à quelques-unes de ses habitudes. Il se perche plus facilement que ses congénères, et fréquente plus volon- tiers qu'eux les lieux plantés d'arbres ou parsemés de buissons. Il niche cependant à terre, comme tous les pipits. Son nid, formé d'herbe, de foin et de mousse, est garni à l'intérieur de crin et de pelites racines très déliées. Placé dans les fourrages, les bruyères et les taillis, il contient de quatre à six œufs un peu oblongs. Leur co- quille est souvent d'un blanc grisatre strié de pelits points bruns ou noiratres. Elle offre des traits ou des taches rougeâtres ou d'un cen- dré violet sur un fond blanc recouvert d'une seconde couche rou- geatre. Ces œufs offrent les mêmes variétés que ceux du pipit farlouse. Grand diamètre de 0" 019 à 0" 020, et le petit de O" 014 à 0" 017. PIPIT OBSCUR. — Anthus obscurus, maritimus. La présence du pipit obscur a été signalée en Anjou; quelques na- luralistes même onl pensé qu'il s'y était reproduit. La couleur som- bre du plumage de cet oiseau, les lieux qu'il recherche de préfé- rence, justifient les épithètes obscur et maritime sous lesquelles il est désigné. Il habite ordinairement le nord de l'Europe, et se répand dans les régions plus lempérées. Ce pipit se tient sur les bords de la mer, où on le rencontre en trés grand nombre, et dans les joncs et les marécages situés à l'embouchure des rivières. On le voit, par troupes assez considérables, courir sur les terrains couverts el aban- donnés successivement par les flots de la mer, dans les marais sa- lants. Il cherche alors dans les terres humides et délrempées, des pelils vermisseaux. Le pipit obscur niche à terre, souvent dans les îlots, sur les bords de la mer, dans les touffes d'herbe ou entre les rochers. Le nid, formé d'herbes desséchées, de racines et de mousse, renferme de quatre à six œufs un peu oblongs, d'un gris verdâtre, strié de petits points bruns ou noiratres. Leur grand diamètre est de 0" 020 à 0" 022, et leur petit de 0" 015 à 0% 016. Ici se termine la deuxième famille de l'ordre des passereaux. L'ABBÉ VINCELOT , chan. hon. , directeur de la pension Saint-Julien. SUR L'HELIX ACULEATA EXERCICE MONOGRAPHIQUE L. В. S. Par son élégance et sa rareté, l'Hélice hérissée (Helix aculeata) peut être mise au nombre des Hélices intéressantes de France et méme d'Europe. Quoi de plus curieux, en effet, que les côtes ou lames symétriques dont cette coquille microscopique est ornée; et quoi de plus délicat et de plus bizarre en même temps que cette épine qui se dresse sur chaque lamelle, et qui, en se répétant régu- lièrement sur chacune d'elles, forme une gracieuse et élégante cou- ronne? Mais c'est surtout l'œil armé de la loupe qu'il faut examiner ces singuliers détails. C'est de cettefragile et trés petite coquille que je vais tracer ci-après l'histoire : aprés une courte introduction, j'établirai d'abord sa synonymie, aprés quoi je décrirai le test et le mollusque qui le construit; je parlerai ensuite de ses rapports et de ses diffé- rences avec les espèces les plus voisines, je ferai voir sa distribution géographique, son habitat е! sa station, el je terminerai par le ta- bleau historique de ce qu'en ont dit les principaux auteurs. Une planche, représentant l'espéce sous différents aspects, accompagne cet exercice monographique. Puisse ce mémoire, auquel je regrette de n'avoir pu joindre quelques descriptions anatomiques et physiolo- giques, el des détails relatifs à la reproduction, intéresser le lecteur indulgent et bénévole ! 156 I. INTRODUCTION. Potentiam Summi Creatoris in minimis quidem ejus deprehendimus operibus. (Soederberg, Cur. nat. § 2, infin. 1748), Le spectacle de la Nature est assurément le plus beau qui puisse être offert aux âmes avides de jouissances supérieures et de con- templations élevées. C'est le plus digne objet des méditalions du philosophe et des inspirations de l'artiste. Quelle puissance, en effet, quelle force, dans ce spectacle, et toul à la fois aussi quelle grandeur, quelle majesté, quelle sagesse, quelle harmonie ! Pour ne jeter les yeux que sur ce globe terrestre que nous habitons (partie minime de l'univers !), nous voyons les animaux soulenus el ali- mentés par les végétaux, les végélaux par les minéraux; les miné- raux puisent dans le sein de la terre un intarissable aliment. Ainsi les trois régnes de la nature se souliennent réciproquement; leurs parties élémentaires passent de l'un dans l'autre; partout et toujours règnent une vigueur et un équilibre parfait, que rien ne peut arré- ler ni suspendre un instant (1). Mais ce n'est pas seulement ce spectacle imposant et magnifique quil faut considérer. Tout, dans la nature, est digne de notre admiration. Depuis l'éléphant, dont les robustes épaules peuvent porter des tours, jusqu'à l'infusoire dont l'existence n'est révélée à notre œil que parle microscope; depuis le dragonnier colossal et aussi ancien que le monde jusqu'à l'oidium parasite el à peine per- ceptible; depuisles blocs énormes de granit qui menacent le ciel, jusqu'à la paillette précieuse que roulent les eaux des fleuves, toutes les choses créées appellent également nos regards et méritent de fixer notre attention. La structure de l'insecte le plus vulgaire est aussi admirable que celle des monstres qui nagent dans les mers, et l'or- ganisation de la mousse la plus infime nous confond tout autant que celle de l'arbre le plus gigantesque. C'est là ce qui faisait dire à Pline : « Nous admirons les mons- trueuses épaules des éléphants, la roideur du col des taureaux et l'usage terrible qu'ils font de leurs cornes, la cruauté des ligres qui ne vivent que de rapines, les crins hérissés des lions. Cependant la (1) Conf. Linné, Syst. nal., in introit. Imper. nat. 157 nature, en tout cela, est moins grande el moins admirable que dans l'ouvrage des plus pelils insectes (1). » Ecoutons aussi l’un des Pères de l'Église, saint Jérôme : « Nous n’admirons pas seulement le Créateur dans les ouvrages du ciel, de la lerre, du soleil, de l'océan, dans la forme des éléphants, des cha- meaux, des chevaux, des bœufs, des léopards, des ours, des lions; mais aussi dans la plus pelile espèce d'animaux comme la fourmi, le moucheron, les mouches, et tous ceux du même ordre dont nous connaissons mieux la figure que les noms. Enfin nous admi- rons en lout la sagesse industrieuse du divin ouvrier (2). » Et Linné, entendons-le s'écrier dans son enthousiame lyrique : « Dieu élernel, immense, sachant tout, pouvant tout! Je l'ai entrevu un inslant, et je suis confondu !... J'ai recueilli quelques-unes de ses traces dans les œuvres de la création; et dans toutes, dans les plus petites méme, presqu'imperceptibles, quelle force ! quelle sa- gesse ! quelle inexprimable perfection (3)! » Ce n'est donc pas sans raison que les naturalistes modernes, sans négliger les étres supérieurs de la création, tournent ardemment leurs regards vers les derniers degrés de l'échelle de la vie. Rien n'échappe à leurs invesligalions. Scrutaleurs avides de la nature, adeptes privilégiés admis à pénétrer dans le sanctuaire de ses mer- veilles les plus secrètes , ils consacrent toute leur vie, toutes leurs forces, à ces laborieuses mais délectables recherches. EL ceci parti- culièrement est remarquable : c'est que souvent une utilité pratique et actuelle ne s'attache pas toujours à l'objet de leurs études. Ne faut-il pas en conclure, avec un philosophe de l'antiquilé, que c'est là une marque évidente de la grandeur absolue du sujet de ces conlemplalions ? Tous les animaux, d’ailleurs, et tous les végélaux, quels qu'ils soient, ont leur ulilité. Tous concourent, dans la sphère de leur ac- livilé el de leurs relations, à maintenir à la surface du globe un équilibre parfait, une inaltérable harmonie. Cessons donc de répé- ler à lout propos : A quoi sert cet animal ? A quoi bon celle plante ?.., Songeons à l'excellence des lois qui régissent la vie, cherchons à suivre les rapports, difficilement appréciables, qui unissent tous les êtres entre eux, efforcons-nous de connaître et d'approfondir, et wac- cusons que la faiblesse de nos vues et l'imperfeclion de nos connais- sances. (1) Pline, Hist. nat., 1. xt., c. 2. (2) Si Jér., Epist. 22, 1. п. (3) Linn., Syst, nat., in introit. 158 Malheureusement, les naturalistes deviennent rares. La soif inex- tinguible de l'or, l'amour du lucre s'emparent de tous les esprits et menacent de tout envahir. Loin de chercher dans l'étude des mystères de la nature un aliment à notre activité, loin d'exercer nos forces dans la pénétration des secrets de celle mère féconde, nous ne songeons qu'à amasser des richesses dont nous ne savons même pas jouir. Le plus souvent la mort arrive avant que nous ayions pensé à vivre. EL pourtant, quelle distance sépare le philosophe, qu'une fleur met en communicalion avec l’auteur de toutes choses, de l'usurier qui palpe un rouleau d'or! Quelle diversité surtout dans leurs jouissances et dans leurs sensations ! — « Cette contemplation de la nature, dit Linné, nous fait éprouver un avanl-goüt des volup- lés célestes; Гате, en y parlicipant, savance comme environnée de lumière, et vit pour ainsi dire, dans un ciel terrestre. » Quant à vous, esprits d'élite, qui vous sentez comme invincible- ment entraînés vers ces études, réjouissez-vous de ces goûts. Deman- dez à la grande ombre des Linné et des Cuvier de vous donner en par- lage une étincelle de ce feu sacré quiles anima pendant leur vie. « Ai- mez la nature, comme elle vous serez simples et forts. » EL quand le sarcasme d'un ignorant ou le rire d'un indifférent parviendra jusqu'à votre oreille, consolez-vous en songeant à ces paroles si vraies de l'immortel auteur du Systema Natura : « La recherche des choses créées a toujours été appréciée par les hommes laissés à leurs penchants naturels, el toujours cultivée par les hommes vraiment instruils el savants ; mais les sols el les igno- ranls ont toujours eu celte étude en horreur. » « Scientia naturalis fundamentum est omnis economic, opificiorum, commerciorum, dicte, medicine. » LIN. Il. SYNONYMIE. HELIX ACULEATA Muller, Verm. Hist. 11, p. 81 (1774), eL in Naturf. XIX, t. 11, fig. 1-3 (1774). Trochus terrestris Pennant, Brit. zool., ed. 4, p. 292, t. 83, fig. 5 (1776). Trochilus terrestris Da Costa, Test. Brit., p. 166, L. rr, fig. 1-5 (1778). Helix spinulosa Lightfoot, Phil. Trans. LXXVI, p. 166, t. n, fig. 1-5 (1786). Helicella aculeata Férussac, Tabl. syst., p. 42 (1820). Teba spinulosa Leach, Brit. Moll., p. 100 (1831) teste Turlon. 159 Fruticicola aculeata Held, in Isis, р. 914 (1837). Helix Granatelli Bivona fil. in Occhio Giorn. Palerm. 1839, n° 9, fig. 2 (1839). Acanthinula aculeata Beck, in Verhandl. d. Vers. d. Aerz. u. Na- turf. in Kiel, 1846, p. 122 (1846). Helix nucleata Turton, Linn. Trans. IV, p. 520 (?) teste Mon- lagu. Helix delectabilis Solander Mss. (teste Montagu). Francais : Hélice hérissée, ou Hélice à aiguillons. Danois : Pig-Snekken (Muller). Anglais : Prickly-Snail (Gray). Allemand : Die stachlige Schnizkelschnecke (Kuster). Espagnol : Helice erizada (Graells). Porlugais : Caracol aculeado. Italien : Elice irla. ПІ. DESCRIPTION. 1° ANIMAL. Animal long de deux millimètres, large de 0™m 33 environ, trapu, rélréci aux deux extrémilés, arrondi antérieurement, diminuant insensiblement et oblus à la partie postérieure, d'un gris ardoisé en dessus, faiblement brun antérieurement, d'un gris ardoisé en arrière, par côtés eten dessous. — Collier large, bombé, finement boursouflé, d'un brun clair, bordé finement de noirâtre; points laileux trés pelils et très peu apparents. — Tentacules longs, gros, presque cy- lindriques, renflés à la base, médiocrement transparents, ardoisés , plus clairs vers le bout : les supérieurs très rapprochés à leur ori- gine, longs de 0"", 5, finement chagrinés et ponctués de noirâtre; gaine musculaire très peu distincte, se rétrécissant tout d'un coup à la base; boutons longs de 0"", 2, allongés, peu renflés en dessus, très dilalés en dessous, dirigés très faiblement vers le haut, un peu ré- trécis el arrondis à l'extrémilé. Tentacules inférieurs écartés à la base, dirigés presque horizontalement, longs de 0"", 33, faiblement rétrécis vers le milieu, lisses; boutons mesurant 0" 11 environ, assez globuleux. — Yeux placés à l'extrémité des boulons en dessus et un peu en dehors, saillants, un peu grands, ronds, noirs, apparents, —- Muffle petit, 1005 d'un peu plus de 0", 33, étroit, avancé, un peu bombé, pointu vers la base des lenlacules supérieurs, très rélréei el 160 arrondi en avant, dépassant du tiers de sa longueur les petits tenta- cules, d'un brun clair et presque jaunâtre antérieurement, très fine- ment ponctué de noirâtre. — Lobes labiaux grands, tout à fait diver- gents, presque réniformes, pointus en arrière et en dessus, saillants sur le pied el larges en dessous, transparents, d'un gris clair, trés finement et trés peu distinctement ponctués de grisâtre. — Bouche assez fortement dépassée par les lobes labiaux, linéaire, recourbée, assez courle, peu apparente. — Machoire.... — Cou long d'environ un millimètre, large de 0",16, cylindrique, bombé en dessus, à cô- tés étroils, se relevant vers sa naissance, très finement et peu dis- linclement chagriné, d'un gris brun ardoisé sale, plus clair poslé- rieurement, comme pointillé de noiratre, avec deux bandes longi- ludinales un peu infléchies, larges, presque parallèles, aboutissant à deux taches presque ovoïdes assez grandes, jaunátres; ligne dor- sale large, plale, assez distincte, grisâtre, dans un sillon peu mar- qué. — Pied non frangé, côtés pointus antérieurement, un peu en biseau, trés larges en arrière, distincts du cou qu'ils dépassent lé- gèrement, d'un gris clair assez transparent; points grisatres, serrés, peu distincts; sillons transversaux, grands, tres écartés, presque droits ; dessous du pied un peu anguleux antérieurement; points laileux très pelits et très serrés. — Queue longue de près de un millimètre, dépassant faiblement la coquille, assez large et forte- ment relevée à la base, triangulaire, un peu obtuse, très bombée, un peu carènée, transparente, d'un gris clair; points à peine apparents, sillons semblables à celui du pied. — Pédicule court, gros, cylin- drique, grisàtre. — Orifice respiratoire louchant presque l'avant- dernier tour, assez petit, rond, un peu évasé (Moquin-Tandon, His- toire naturelle des Mollusques de France, t. п, p. 190). 2° COQUILLE. Coquille globuleuse-conique, trochiforme, turbinée, presque aussi large que haute, de couleur de corne fauve, rougeâtre ou rous- sâtre, légèrement striée, mince, demi transparente, très étroitement ombiliquée. Spire composée de quatre à cing tours trés-convexes, arrondis, croissant graduellement, séparés par une suture fortement accusée, garnis (a l'exception du premier) de petites lames ou côtes sail- lanles tranversales, à peu près symétriques et parallèles, surmon- lées vers leur milieu d'une épine à large base, légèrement courbée en arrière, tres fragile. J'ai compté vingt-cinq de ces lamelles et de ces épines sur le dernier tour de spire, et la coquille en possède en 161 totalité cinquante-cinq ou soixante. Les lamelles se voient par trans- parence à l'intérieur de la coquille : Rossmæssler les compare avec quelque raison aux varices des Scalaria. Les lames et les épines sont de méme nature que le test el font corps avec lui : elles ne sont donc pas seulement épidermiques. Leur inspection au microscope ne laisse aucun doule à cel égard. Ouverture parfaitement ronde, à peine échancrée par le dernier tour de spire. Péristóme muni d'un léger bourrelet rougeàtre, inté- rieur, el un peu réfléchi. Ombilic très-étroit, recouvert le plus souvent, en parlie, par la ré- flexion du bord columellaire. Sommet arrondi, mamelonné, obtus, dénué de lamelles, souvent un peu grisâtre ou blanchâtre. Epiphragme très-mince, vitreux, brillant, plus solide sur les bords. Dimensions : hauteur : 2 millimètres; diamètre : 4 millimètre 374 (ou 8 dix-millimètres). Variations : B, cils allongés (Morelet, Moll. Port., p. 72); C, om- bilic large (Mauduyt, Moll. Vienn. , p. 55). Observations. Malgré sa taille exiguë, celte Hélice parait moins dé- licate que plusieurs de ses congénères. J'en ai envoyé de vivante dans le midi de la France, dans un tube confié à la poste, et elle est arrivée saine et sauve à sa deslination. Ses mouvements ne man- quent pas de vivacilé, ainsi que je l'ai plusieurs fois observé : en rampant sur la mousse ou dans le bois mort, elle balance sa de- meure à droite et à gauche, comme pour écarter les obstacles, el elle Ја porte de facon qu'on ne voit guère que ses tentacules supé- rieurs, qui sont fort allongés. Par instant, elle l'élève tellement au dessus d'elle, qu'on la croirait séparée du corps. Muller (Verm. Hist. Ir, р. 82), Draparnaud (Hist. Moll., p. 82), Nilsson (Moll. Suec., p. 16), el Rossmæssler (Iconogr., Vil, үш, p. 39) ont fait à peu près les mê- mes remarques. IV. RAPPORTS ET DIFFERENCES, On voit, par la description qui précède, que notre Hélice possède des caractères parliculiers qui la font aisément reconnaître au mi- lieu de ses congénères : sa très-pelite taille, sa forme lurbinée, ses cóles el ses aiguillons en sont les traits saillants et principaux. Tou- tefois, eL pour aller au-devant de lous les doutes el de toutes les hé- silalions, disons un mol de ses rapports et de ses différences avec 11 162 celles qui lui ressemblent le plus par la taille, par la forme ou par tout autre caractère. Si nous ne considérons que les Hélices propres au sol français, nous ne trouvons que les Helix rupestris et costata qui puissent êlre comparées à notre espèce. L'Helix rupestris (Draparnaud, Tabl. Moll., p. 71) est largement ombiliquée, globuleuse-déprimée, trés-finement striée, d'un fauve noirâtre, avec une ouverture arrondie, un péristome droit, simple et iranchant, et cinq à six lours de spire convexes, augmentant gra- duellement, séparés par une sulure profonde. Son diamètre est de 2 à 3, sa hauteur de 1 1/2 à 2 millimètres. Elle habite la plupart des contrées montagneuses de la France (on pourrait presque dire de l'Europe!), appliquée contre les rochers. D'où il suit que I Helix acu- leata en diffère par sa forme plus turbinée, par son ombilic moins ouvert, par son péristome légerement épaissi el évasé, par sa colo- ralion moins foncée, et enfin, au premier coup-d'œil, par ses côles el par la rangée d'aiguillons qui ornent le milieu de ses tours de spire. L'animal diffère également par sa couleur et la longueur des lentacules, qui sont courts et gros chez l Helio rupestris, tandis qu'ils sont plus minces et fort allongés chez Helix aculeata. L' Helix costata (Muller, Verm. Hist. II, p. 31) est sub-déprimée, lar- gement ombiliquée, ornée de cóles saillantes, grisâtre ou blanchâtre, avec une ouverture arrondie, à péristome réfléchi, à bords légère- ment épaissis, presque réunis, et qualre ou cinq lours de spire un peu convexes, à sulure peu prononcée. Elle mesure 2 à 3 millimè- ires de diametre, sur 1 à 1 1/2 de hauteur, et habile toute la France, dans les lieux humides. Dupuy fait remarquer qu'elle est plus com- mune dans le midi que dans le nord. Les différences que je viens de signaler entre Неа aculeata et Y Helix rupestris subsistent égale- ment entre celle-la et Heliz costata, en y ajoutant encore la colora- lion du test et la profondeur de la suture, qui sont distinctes. П y a bien encore I Helix ciliata (Venetz in Studer, Syst. Verz., p. 87), qui est une coquille sous-déprimée, très étroitement ombi- liquée, carénée et hérissée sur le milieu de sa carene de cils ou d'ai- guillons membraneux, cornée rousse, parsemée d'écailles membra- neuses el fugaces, avec une ouverlure ovalaire, un péristome réflé- chi, a peine épaissi el rosé, cinq à six lours de spire à peine con- vexes, séparés par une suture superficielle. Mais elle mesure 10 à 12 millimètres de diamètre, sur 5 à 6 de hauleur. Elle habile la Pro- vence, aux environs de Grasse, dans les localités un peu humides, el à la Sainte-Beaume (Dupuy), les montagnes de la Suisse, du Tyrol el de la Lombardie (L. Pfeiffer). Celte descriplion abrégée sutlira 163 donc pour montrer que Г Heli ciliata n'a de commun avec nolre es- pèce que les aiguillons, tandis que la taille, la forme générale, l'om- bilic, l'ouverture, la spire, l'habitat, tout en un mot diffère chez ces deux Hélices, et nous n'insisterons pas davantage sur ce point. Parmi les espèces exoliques, je ne vois que I Helix lamellata qui ait quelques points de ressemblance avec notre Hélice. L' Helix lamellata (Jeffreys, Linn. Trans., t. xvi, p. 333 ; —Hel. scar- burgensis, Turt.; — Hel. seminulum, Rossm.) est une petite coquille perforée, conoïde-globuleuse, à côles membraneuses, cornée, avec cinq tours de spire, une ouverture déprimée, lunaire, et le péris- lome droit, simple, tranchant. Son diamètre est de 2 1/2 millimètres, el sa hauteur de 2 millimètres. Elle habite le nord de l'Angleterre, dans la mousse (Gray), l'Ecosse, dans les feuilles de Г Acer pseudo- platanus (Macgillivray), et Kiel en Holstein (Rossmæssler). On voit, par celle simple diagnose, que Heliz aculeata présente des rapports de taille, de forme générale, de coloration méme avec l Helix lamel- lata ; mais là se borne toule la ressemblance. En effel, l'espece qui fait l'objel de cel exercice a une ouverture arrondie, avec un péris- lome évasé, bordé, et les bords presque réunis, landis que | Helix lamellata a une ouverture échancrée, en forme de lune, déprimée, avec le péristome droit, simple et les bords distancés ; I Hélice à ai- guillons est encore plus turbinée que I Hélice lamelleuse, qui a bien la forme dune pelile graine (seminulum), comme lindiquait Ross- mæssler; enfin celle-ci, quoique pourvue de côles membraneuses serrées, est absolument dénuée des aiguillons qui font le principal ornement de Heliz aculeata. De tout ce qui précède, il est permis de conclure que Helin acu- leata est une espèce à caractères bien tranchés, parfaitement dis- lincte de toutes ses congénères, el qu'il esl presque impossible de la confondre avec aucune autre coquille. V. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. $ 1. Station. De toutes les indications que j'ai pu rassembler sur notre mol- lusque, soil dans les livres, soil dans mes excursions, il résulle que Heliz aculeata hante de préférence les lieux humides et ombragés, comme les forêts et les bois, et qu'elle se plait dans les feuilles tom- bées à terre (Macgillivray cile en particulier celles de l'érable; — dans la forét d'Orient (Aube), ou le chéne domine, je l'ai vue dans 164 les feuilles mortes et à demi décomposées de cet arbre), sur le bois mort et à moitié pourri, dans la mousse qui couvre le tronc des arbres (sur le Jungermannia platyphylla, suivant Jeffreyss, sur le Neckera viticulosa, selon Moquin-Tandon), sous les pierres, dans le tronc des arbres el sous leur écorce, et jusque sur des os aban- donnés. On 1а trouve le plus souvent dans les lieux élevés, et quelquefois dans les endroits secs, contre les arbres, mais à l'ombre. C'est ainsi que je l'ai abondamment recueillie à Bar-sur-Aube (Aube), sur la colline appelée montagne Sainte- Germaine (1), sous un soleil ardent de septembre. La montagne Sainte-Germaine (pour me servir de l'expression consacrée) est un soulévement formé sur le terrain ju- rassique, et dont on évalue la hauteur à 349 mélres environ. Ce ma- melon est presque entièrement couvert de vignes à sa base, à mi- cole de cerisiers et d'arbres fruiliers de diverses sorles, au sommet d'arbres verts, d'arbusles et d'arbrisseaux ; sur la cime, on trouve une ferme entourée de tilleuls et de pommiers sauvages, et non loin de là les traces d'un camp romain. Au reste, la végélalion sponta- née l'emporle évidemment sur la cullure à l'extrême sommet, et l'on peut dire que le botaniste s'y trouve plus à l'aise que l'agricul- teur. L'eau suinte en quelques places et humecte légèrement les rochers et les senliers. Cà et là apparaissent quelques chênes rabou- gris ou des hélres noueux. Presque au sommet de la colline, du cólé qui regarde le nord-ouest, on rencontre une pelite plantation de sapins, entourée en partie d'une haie vive, en parlie d'un mur de pierres libres. Une mousse abondanle recouvre le tronc des arbres. (Ces mousses appartiennent aux espèces suivantes, selon M. des Etangs, bolanisle distingué : Hypnum purum, cupressiforme, scor- pioides, lutescens, triquetrum et splendens). C'est dans celle localité pittoresque, par un temps sec et chaud de septembre, que j'ai trouvé V Helix: aculeata, dans une excursion que je fis en société de M. Col- (1) Au commencement du ve siècle, vivait à Bar-sur-Aube (alors Segessera) une toute jeune fille du nom de Germaine, remarquable par la pureté de ses mœurs et par sa beauté. Elle remplissait les fonctions de diaconesse dans la chapelle de Saint- Etienne, bâtie au sommet de la colline qui depuis porte son nom. Rencontrée près d'une fontaine, où elle avait coutume de venir puiser de l'eau, par une horde de Vandales qui envahissait le pays, elle fut décapitée sur la colline même, pour ne point avoir voulu renier sa foi et céder aux désirs du chef des Barbares. Depuis, ce lieu est consacré, et la mémoire de la jeune vierge et martyre est en grande vénéra- tion dans la contrée (Voyez : Blampignon, Histoire de sainte Germaine, Troyes, 1855, in-12). 165 leau, géologue de mes amis. Il y avait un grand nombre d'individus morts dans les broussailles, dans les feuilles sèches; mais il y en avail aussi beaucoup de vivants dans la mousse au pied des arbres, sur les pierres, sur les branches tombées, el je me souviens d'en avoir pris quelques-uns sur un gros champignon. Bref, le premier jour nous en ramassámes une centaine environ en moins d'une heure, et le lendemain M. Cotteau en rapporta encore autant. Sans doule, aprés une pluie légère, nous en aurions vu davantage encore. Voilà une abondance tout à fait remarquable pour une coquille que tous les naturalistes considèrent comme une espèce rare ou du moins peu abondante. Peut-être la rareté de cette espèce (sinon dans la nature au moins dans les collections) tient-elle à son exiguilé, à sa couleur et à sa forme, qui rappellent les graines de certaines plantes, celles par exemple du Galium aparine, comme le fait judi- cieusement remarquer Rossmæssler. Peut-élre la distingue-t-on difficilement au milieu des feuilles mortes, des branches sèches et des broussailles. Toujours est-il que de tout temps et partout on a dil rare ou peu abondante cette élégante Hélice (1). Гаі donc pensé qu'il élait bon de signaler cette observation aux naturalistes ; d'abord parce que celle mulliplicité est vraiment extraordinaire, et ensuite parce que ce fait pourra donner l'éveil aux collecteurs habiles et mi- nutieux, qui retrouveront sans doute celle abondance ailleurs. Il est rare de rencontrer l'Helix aculeata dans les plaines, au fond des vallées, dans les lieux bas, et jamais on ne la voit ni sur le lit- toral marilime ni dans les landes. Ses stations privilégiées sont les lieux élevés, les collines, les côleaux el les montagnes, à diverses altitudes. Elle se tient parmi les mousses, qui lui servent tout à la fois d'abri, de retraile et de nourriture, et celles qu'elle préfère paraissent être les Hypnum purum et cuspidatum, les Neckera crispa et viticulosa, el encore quelques Orthotrichum. Elle a aussi une grande prédilec lion pour certaines jongermannes, entre aulres les Jungermannia platyphylla, complanata, tomentella et tamarisci. On la rencontre encore sur les troncs de certains arbres forestiers, tels que les chênes, les frénes, les hétres, les ormes, soit à méme sur l'écorce, soil au milieu des mousses qui les recouvrent. Elle s'a- brile aussi sous les feuilles de ces arbres, tombées à terre, desséchées (1) Je ne vois guère que M. Morelet et M. Bouillet qui aient indiqué Helin acu- leata comme une espèce plutôt commune que rare, l'un dans les bois des montagnes du Puy-de-Dóme, l'autre daus la province de Tras-os-Montes, en Portugal. 166 el méme en putréfaction. Mais jamais on ne la voit sur les arbustes, les arbrisseaux, les végétaux herbacés, les graminées, les gazons ou les plantes polageres. Les lerrains géologiques sur lesquels on la trouve plus particuliè- ment sont le calcaire tertiaire moyen, le terrain crétacé néocomien, le terrain jurassique, les dolomies ; on la trouve aussi sur les ler- rains schisteux primilifs el sur quelques roches pyroides, l'ophile, par exemple (1). Mais assez sur ce poinl : il est temps de passer à l'habitat de nolre mollusque. $ 2. Habitat. Suède. Parmi les feuilles mortes et humides d'un bois, pres d'Es- perod, en Scanie; du temps de Nilsson, l Helix aculeata n'avait. en- core élé vue, en Suède, que dans cette seule localité (Nilsson). Danemarck. La description de Muller parait avoir été faite sur des individus vivants capturés, aux environs de Copenhague, parmi les branches séches du hétre (Muller, Gmelin). Russie, Néant. Irlande. La plus grande partie de l'Irlande suivant Thompson ; as- sez communément répandue. Portmarnock, comté de Dublin; Ben Bulben, comté de Sligo; Miltown Malbay (Brown). Écosse. Trouvée par M. Dickie dans une grotte de Rubislaw (Mac- gillivray). Angleterre. Dans les forêts, sous les feuilles et les pierres ( Mon- lagu, Turton, Gray); Newcastle (Alder); la majeure partie de ce royaume, suivant Brown (Illustr. Conch., p. 68). Prusse. Les montages de Gans, les forêts sombres de Feldbacher, (1) Je dois une partie de ces derniéres observations aux obligeantes communica- tions de M. le Dr de Grateloup, de Bordeaux, qui en a fait son étude favorite et qui met la dernière main à un grand travail sur les stations botaniques et géologiques des mollusques. Cet ouvrage, fruit de longues et savantes recherches, dans les livres, dans la nature et dans les collections, a pour titre : Essai sur la nourriture et les stations botaniques et géologiques des Mollusques terrestres et fluviatiles, considérés au point de vue géographique et statistique. Le prospectus-préface, lancé l'année dernière, annonce qu'il formera 1 volume in-8° de 500 pages environ. Voilà un su- jet tout à fait neuf, extrêmement curieux et fort attrayant. L'ouvrage de l'honorable auteur, en plaçant la malacologie au niveau des autres branches de la zoologie, ouvre un champ nouveau d'études, et ne peut manquer d'être accueilli avec une faveur marquée par tous les naturalistes, 167 (Prusse Rhénane), rare (Sandberger et Koch); environs de Berlin (Stein). Allemagne. Le nord de l'Allemagne, sur les branches du hêtre (Bosc); — Augsbourg, Bamberg et d'autres localilés de la Bavière (Held, Kuster, v. Alten) ; — le Harz (Schmidt) ; — le duché de Mec- klembourg (Boll) ; — la Silésie (Scholtz) ; — la Hesse (C. Pfeiffer); le Hanau (Speyer); — Tubinge en Wurtemberg (Klees); — Neu- wied, en Prusse Rhénane (Sturm) — Tharand, Heilsberg, en Saxe, parmi des feuilles pourries de peuplier, de saule el de troéne, sur un sol humide (Rossmeessler). Suisse. Dans la mousse, aux endroils secs, inais à l'ombre; Dé- vens, Près-Nové, Gryon, Valorbe (de Charpentier, Anton, Studer); alluvions de la Versoye, du Lyon et du Rhône; bois de la Balie, a 400 mètres (Brot); sous Prégny, à 385 metres (Morlillel) ; environs de Lugano (Stabile). Savoie. Vetraz-Monthoux (Brot), Taninges, à 645 mètres (Dumont el Mortillet). Autriche. Les Alpes de Sophien, entre Dornbach et Hutlteldorf, rare (Zelebor) ; Hohervand (Parreyss). Portugal. Trés commune dans la province de Tras-os-Monles ; plus au midi dans la Serra d'Arrabida, avec les cils fort allongés (Morelet). Iles Açores. Vai trouvé l Helix aculeata à San Miguel des Açores, dans les bois de lauriers (Laurus indica) et de fayas (Myrica Faya), au milieu des feuilles mortes et sous les pierres; rare. Espagne. Suivant Albers, elle se trouverait en Espagne (Voy. Die Heliceen, 1850, p. 73); cependant le 0" Graells (Catalogo de los Molus cos observados en Espana, 1846) n'en fait pas mention. MM. Nunez» Paz et le 0" Elisalde ne Гу ont pas rencontrée. Corse. Bonifaccio (Shuttleworth et Requien, d'après Blauner). Italie. L. Pfeiffer indique l'Italie comme possédant nolre Hélice, mais sans désignation de localités : probablement la majeure parlie de celle contrée. Pavie (Strobel); Vérone (Menegazzi); l'Italie sep- tentrionale (Porro). Sicile. Environs de Panorme (Philippi); vallée de Nepitaloa (Pi- rajno). France, Entrant, comme il est naturel, dans de plus grands délails à propos de cel État, je dirai que Helix aculeata habite le déparle- ment de l'Oise, à la garenne d'Hondainville, sous des fragments de roche quarlzeuse épars au dessous des sapins, et à Morainval, sur un rocher dans les bois (Baudon) ; Le département de l'Aube, suivant mes propres observations, à 168 Bar-sur-Aube, ainsi que je l'ai annoncé tout à l'heure, et dans la forêt d'Orient, au pied des chênes dans les feuilles mortes ; La Meuse, à Sommedieue, Hardaumont, dans les bois, les haies, sous la mousse (Buvignier) ; La Moselle, dans les bois de la vallée de Mance (Joba) ; La Meurthe, а Nancy (Godron) ; Les Vosges, sur les feuilles pourries dans les bois des environs de Mirecourt (Gaulard) , surles hauteurs prés de Remiremont, contre les rochers, ainsi que je l'ai vu moi-méme en 1853, avec mon excellent ami Puton ; Le Bas-Rhin, à Chalampé, dans les alluvions du Rhin (Muhlen- beck) ; Le Maine-et-Loire, sous les feuilles tombées à terre, sous les pier- res, ainsi que sur le tronc des arbres, parmi la mousse, dans les bois d'Avrillé, avec l Helix fulva (Millet) ; La Sarthe, dans les lieux ombragés, parmi la mousse et les feuilles morles, а Avessé, Martigné, taillis de Noés de Paiche, au Mans, che- min des vignes, près les Arènes, à Vallon (Goupil) ; La Vienne, à la Vergne , sous les pierres dans les lieux frais , et à Poitiers, méme station (Mauduyt) ; Le Puy-de-Dóme, dans les bois des montagnes, au milieu des mousses, des feuilles mortes, abondante (Bouillet) ; Le Cantal, dans les bois auprès Mauriac (Bouillet) ; La Creuse, au Grand-Bourg, dans le bois de Celles (de Cessac) ; Le Jura, à Arbois (Draparnaud, Férussac); Le Rhône, à Lyon (Terver); Le Var, à Grasse (Panescorse) et à Hyères ; L’Agenais, sous les feuilles, les pierres et dans le tronc des arbres des bois montueux, à Tournon, Beauville, Cambes, Lécussau, Layrac; les alluvions de la Seoüne, du Gers, de la Garonne (Gassies); Le Gers, dans les bois montueux sous les pierres, les troncs d'ar- bres, à Beaulieu prés d'Auch, et au bois d'Auch (Dupuy). Enfin, elle a été recueillie dans les Pyrénées par M. de Saint-Si- mon, prés de Montpellier par M. Moilissier, aux environs de Langres sur les hauteurs par M. l'abbé Simonel, à Bavai dans le Nord par M. Normand, еп Alsace par M. de Laurens, aux environs de Lyon par M. Terver, dans la Dordogne à Lanquais par M. des Moulins, el par M. de Graleloup prés de Dax, de Caen, de Saint-Lô, el près de la fontaine de Vaucluse, sur l Hedwigia aquatica. Celte espéce est donc répandue sur toute l'étendue de notre terri- loire francais, el elle parait vivre dans toutes les contrées montueu- ses. Il est à remarquer toutefois qu'on ne l'a point encore vue aux 169 environs de Paris, el qu'elle a échappé aux recherches de Geoffroy et de Poiret: Brard n'en fait pas non plus mention. Tous les auteurs, à l'exception de M. Bouillet, l'indiquent comme rare ou trés-rare. On peut dire, en résumé, qu'elle habite toute l'Europe occiden- lale, du nord au sud, et l'aréa de cette espèce, pourrait, sauf quel- ques détails, êlre assez bien circonscrit par une ligne partant du ca- nal des iles Baléares, sur la côte orientale de l'Espagne, passant en- {ге la Corse et la Sardaigne, descendant vers la Sicile, doublant celte ile, remontant la mer Ionienne , le canal d'Olrante et la mer Adria- tique, traversant l'empire d'Autriche à l'est de Vienne, longeant la Pologne el la Prusse, pour venir rejoindre le nord de la Suède et la Laponie par la mer Baltique. Toute la région comprise à l'ouest de celle ligne, c'est-à-dire, la majeure partie de l'Europe septentrionale, centrale et occidentale (du nord au sud), formerait l'habitat de celle Hélice, qui parait ne pas avoir élé vue ni en Russie, ni en Grece , ni en Turquie, VI. HISTORIQUE. Exposer un historique complet de l'espèce de mollusque qui fait l'objet de cet exercice, c'est-à-dire, énumérer, sans en omeltre un seul, tous les auteurs qui en ont parlé, serait une lâche au-dessus de mes forces, et qui donnerait lieu sans aucun doule à des redites et à des inutilités. Dans cette histoire que je vais tracer de notre Hé- lice, je me conlenterai de citer les principaux auteurs qui en ont fait mention, depuis Muller jusqu'à nos jours, en m'attachant particu- lièrement à nos auteurs nationaux , el à ceux, parmi les étrangers , qui lui ont donné des appellations nouvelles, ou qui l'ont décrite et figurée avec soin ; et dans tous les cas, je ne citerai que ceux qui onl décrit cette Hélice ou qui ont parlé de ses mœurs, de ses habitudes. Dans cetle revue, je suis, cela va sans dire, l'ordre chronologique. le nole ici, en passant, qu'il est digne de remarque que le mollus- que qui nous occupe n'a pas été connu de Linné. MULLER 1774 (Verm. terr. et fluv. hist. 11, p. 81) le premier de tous, décrit fort exactement notre espèce et lui impose le nom d'HE- LIX ACULEATA, qu'elle doit conserver par droit de priorilé et par droit de convenance. L’épithéle spécifique d'aculeata , aiguillonnée, hérissée, s'adapte parfaitement à cette coquille. Voici sa description que je reproduis comme étant la première qui en ail élé faile el peut-être aussi la meilleure : « Tesla subpellucida, cinereo-fusca, supra convexa, anfractibus vix 170 quatuor rotundatis ac uti in Neritis elevatiusculis, subtus unico, wmbili- coque distincto. Anfractus extus et intus ornantur costis transversis, fili- formibus, albidis, 28 vel 30 in singulo. Extus e medio cujuslibet. coste spinula rigida coste concolor, basi triangularis, apice acuta, et reflexa erigitur. Apertura. sublunata, fere circinnata, labro subreflexo, mem- branaceo, albido, acutiusculo. Labrum in junioribus acutum quidem est, at nec albidum nec reflexum. » Limax maximam partem albus pellucens; caput et tentacula nigri- cant. Festive repit, testam dorso adeo erigendo, ш a corpore quasi remota videatur. » In ramusculis faginis, aridis, rara. » Il est impossible de faire une description plus courte et tout à la fois plus claire, plus précise, plus exacte ! | Muller mentionne également celte espèce dans le Naturforscher , (xix, р. 165, pl. 2, fig. 1-3), où il la figure, dans son Enumeratio Testaceorum indigenorum agri Fridrichsdalensis (1774), et dans le Zoologie Danice prodromus (1776) 2911. PENNANT 1777 (Brit. Zool. tv, p. 127, pl. 80, fig. 108) désigne cette Hélice sous le nomde Trochus terrestris, et il se contente d'ajouter que c'est une espèce nouvelle, découverte par M. Hudson dans les montagnes du Cumberland. Da Costa 1778 (Hist. nat. Test. Britann., p. 35) dit Trochilus terres- tris et donne une description un peu confuse. Suivant lui , celte co- quille aurait été connue de Lister ( Hist. Anim. Anglie, 1678, p. 123, lit. 9) et de Morton (Nat. Hist. of Northampt., 1712, p. 415), el ce dernier auteur l'aurait rencontrée dans les fentes d'un saule, dans un bosquet de saules, prés d'un étang. CHEMNITZ 1786 (Conchyl. 1x, p. 153, pl. 133, fig. 1209; Hel. acu- leata) aprés avoir reproduit la caractéristique de Muller, et donné quelques détails descriptifs sur la coquille seule, termine par les re- marques suivantes : « Parmi les mollusques terrestres, les coquilles épineuses sont considérées comme rares et curieuses. Celle-ci, décou- verte par Muller sur des branches desséchées de hétre, est remarqua- ble entre toutes. Il est seulement dommage qu'elle soit si petite et presque invisible. Elle a quatre Lours de spire, ayant au centre des stries saillantes terminées par des épines. La coquille est d'un gris cendré. L'ouverture est presque arrondie. L’ombilic est petit. Cette espèce est rare. » GMELIN 1789 (Syst. Nat. ed. 13; 1, 6, p. 3638) adopte l'appellation spécifique de Muller, dont il ne fait que reproduire la diagnose el tronquer la description. Sur les branches sèches du hêtre, en Dane- marck ; rare, 171 MonTAGu 1803 (Test. Brit. т, p. 429, pl. 2, fig. 10; Hel. spinulosa) aprés avoir briévement décrit celle coquille, sous la dénomination nouvelle d' He/iz spinulosa donnée par Lightfoot (Phil. trans. LXXVI, p. 166, pl. 2, fig. 1-5; 1786) et qu'ont adoplée la plupart des auteurs anglais, ajoute qu'on la trouve dans les bois, en Angleterre. MATON el ҢАскЕтт 1804 (Trans. Soc. Linn. Lond. vi, p. 17; Hel. spinulosa) aprés une courte diagnose laline, quelques synonymes , ajoutent : « Trouvée par M. Agnew, près de Bulstrode, comté de Buchs; par M. Montagu à Lackham et à Kingsbridge, comté de De- von; à Spetisburg, comté de Dorset, par le Rév. T. Rackett. » DRAPARNAUD 1805 (Hist. Moll., p. 82, pl. 7, fig. 10-11), suivant son habitude, donne de cette espèce, qu'il nomme Helix aculeata, une courte mais excellente description. М a remarqué, ce qui est exact, que l'animal porte sa coquille élevée lorsqu'il marche. Rare, trouvée aux environs d'Arbois. Maton et RackErT 1807 (Loc. cit., р. 201) adoptent la dénomina- lion d' Helix spinulosa, donnée par leur compatriote Lightfoot, et décrivent brièvement la coquille en latin. Cetle espèce a été trouvée dans le Devonshire, par Montagu, el par eux-mêmes dans le Dor- setshire. Милет 1813 (Moll. de Maine-et-Loire, р. 43), donne une bonne description de celle coquille, qu'il nomme Helix aculeata. Il la trouve dans les bois, sous les feuilles tombées à terre, avec T Helia fulva. к KLEES 1818 (Test. Tubing., р. 24; Hel. aculeata) donne une bonne diagnose de la coquille et de l'animal de celle espèce, qu'il a trou- vée parmi des branches mortes de hêtre. Turron 1819 (Conch. Dict. Brit., p. 55) conserve à notre mol- lusque la dénomination d’ Helix spinulosa. Sa description est en an- glais. Il le trouve trés rarement, sous le bois mort et dans la mousse. STUDER 1820 (Syst. Verz , p. 13) trouve! Helix aculeata à la lisière des hois escarpés, et sur les pentes des côleaux, plus rarement au pied du Jura, en octobre. NILSSON 1822 (Hist. Moll. Suec., р. 16) conserve à notre espèce le nom qui lui a élé imposé par Muller; il décril l'animal et la coquille avec son tact et sa précision habituels. Ses diagnoses sont des mo- leles. Voici celle de l'Helix aculeata : « H. testa conico-globosa, um- bilicata, fusca, lamellis transversis spiniferis aculeata ; apertura ro- (unda; peristomate patulo, subrefleco. » — On voit qu'il a examiné l'animal avec soin. « Quand il marche, dit-il, il porte sa coquille de manière à ce qu'on n'apercoit que ses tentacules. » Rien de plus juste. 172 JEFFREYSS 1828 (Moll. of Great Brit. in Trans. Linn. xvi, p. 317 ; Hel. aculeata), après une brève diagnose de l'animal et de son test et quelques citations synonymiques, ajoule : « N'est pas rare dans les taillis, à Newton, prés Swansea. L'animal se nourrit de Jungerman- nia platyphylla. » — Dans le supplément à ce synopsis (Trans. Linn. xvi, 1831, p. 505) le méme auteur dit encore : « Dans les bois hu- mides de Devon et de Wiltshire. » C. PFEIFFER 1898 (Naturg. тп, p. 24, pl. 4, fig. 24-25; Hel. acu- leala) , aprés une courte diagnose latine el quelques citations histo- riques, entre dans des détails assez circonstanciés sur l'animal el sur la coquille. Voici ce qu'il dit de celui-là : « Animal blanchatre ; tête, dos et tentacules d'un gris clair; les grands tentacules allongés comparativement aux petits; le pied court, regardant le sommet de la coquille : celle-ci s'avance beaucoup vers les tentacules. Cet ani- mal est vif, éveillé, mais très- craintif; il se retire dans sa coquille au moindreattouchement. Habite sous les feuilles mortes et les vieux troncs d'arbres. Sur le Koenigsberge, prés de Pyrmont, sous les pierres (Menke); près de Hofgeismar, dans la Hesse (Sandrock); sur le Taunus, prés de Francfort (v. Heyden); sur les Alpes bavaroises, jusqu'aux environs de Munich et d'Ausbourg (v. Voilh). » Sa dia- gnose est bonne aussi : « H. testa conico- globosa, umbilicata, fusca, costis longitudinalibus spiniferis ornata, apertura rotunda. » Bosc 1830 (Hist. Coq. 1v, p. 34), la mentionne avec une trés courte diagnose, sous le nom d' Helix aculeata. Elle se trouve, suivant lui, dans le nord de l'Allemagne, sur les branches du hétre. GouriL 1835 (Hist. Moll. Sarthe, p. 18), la décrit sous la méme dénomination avec exactitude et précision. « Animal blanchatre, léte et tentacules noirs. Coquille globuleuse-conique, brune, mince, transparente; spire de quatre tours convexes, garnis de lames sail- lantes portant dans leur milieu une pointe un peu recourbée, suture profonde, sommet oblus, ouverture arrondie, péristome simple, un peu évasé du côté de l'ombilic; celui-ci est peu ouvert. Habite les lieux ombragés, parmi la mousse et les feuilles mortes, elc. » BouILLET 1836 (Cat. Moll. Auvergne, p. 26), parait avoir vu de prés l'animal. Voici ce qu'il en dit : « Animal blanchátre ou gris cendré, plus foncé en dessus qu'en dessous. Tentacules foncés, assez longs; les supérieurs trés rapprochés vers la base. Yeux noirs, quel- quefois peu apparents, méme à la loupe. Il porte sa coquille élevée lorsqu'il marche. Plutót commune que rare dans les bois de la chaine des montagnes du Puy-de-Dôme. » Il l'appelle Helix aculeata. DE CHARPENTIER 1837 (Cal. Moll. de la Suisse, p. 10), sans décrire notre espèce, à laquelle il conserve sa dénomination première, an- 178 nonce fort judicieusement qu'elle se trouve dans les mousses, aux endroits secs, mais à l'ombre. DESHAYES 1838 (Anim. s. Vert., éd. 2, vim, p. 79; Hel. aculeata), reproduit la diagnose laline de Nilsson, qu'il fait suivre de cilalions historiques etsynony miques; il termine par les remarques suivantes : « Habite les lieux élevés, en France, en Allemagne, el l'Europe sep- tentrionale ; elle se plaît dans les endroits frais et humides, sous les feuilles pourries, dans la mousse, etc. Elle est trés facile à recon- nailre : elle est subtrochiforme, globuleuse, composée de cinq à six lours étroits et convexes, sur lesquels s'élèvent, à des distances ré- gulières, une strie membraneuse assez saillante, terminée, vers les deux liers supérieurs des tours, par une poinle courle mais assez aigué ; à sa base, la coquille est percée d'un ombilic assez large et profond ; l'ouverture est arrondie, le bord est évasé, mais mince et tranchant. » RossM&SSLER 1838 (Iconographie, үш, p. 38, pl. 39, fig. 536), adopte l'appellation Helix aculeata, donne une phrase diagnoslique latine avec les dimensions, cite plusieurs auteurs el quelques syno- nymes, décril ensuile en allemand la coquille, puis son habitant, et termine enfin par l'énoncialion des contrées où l'on a rencontré ce mollusque, contrées qui se trouvent êlre les mêmes, ou à peu près, que pour Heliz fulva, savoir : l'Allemagne, la Hesse, la Suisse, la Suède, le Danemarck, l'Angleterre. « Ce pelit animal, dit-il, est tres agile, el il balance avec vivacilé sa coquille à droile et à gauche, en marchant. J'ai trouvé cette espèce а Tharand , non loin d'Heils- berg, dans des feuilles mortes de peuplier, de saule et de hélre, sur un sol humide. Elle est difficile à apercevoir, el peut aisément èlre prise pour la graine de certaines plantes; elle ressemble parliculie- ment beaucoup, au milieu des délritus de plantes qui recouvrent le sol, aux graines du Galium aparine (1). » Son dessin est exact el donne une parfaile idée de notre coquille. Bivona fils 1839 (Occhio, Giorn. Palerm., 1839, n° 9, fig. 2), croil voir en celle coquille (on ne sail vraiment pas pourquoi), rencou- trée en Sicile, une espèce nouvelle. Il la décrit sous le nom d' Helix: Granatelli dans un journal de Palerme, el en doune une assez pauvre figure. MaAupuvr 1839 (Tabl. Moll. Vienn., p. 55), décrit fort exactement celle Hélice, qu'il nomme Zel. aculeata ; je remarque seulement dans (1) Le contraire arrive quelquefois, c'est-à-dire que l'on peut prendre les graines de certaines plantes pour des coquilles microscopiques. J'ai déjà plus d'une fois éprouvé ce désappointement, 174 sa description ce mol : « ombilic grand, un peu évasé, » qui ferait penser queles spécimens de la Vienne sont pius largement ombili- qués qu'ailleurs. Il ajoute : « Les lames dont celte coquille est héris- sée ne sont point épidermiques; mais, comme je m'en suis assuré, elles tiennent à la matière méme de la coquille. » Cette observation est juste; elle a élé confirmée, quoi qu'en disent quelques auteurs. A. Gnas 1840 (Moll. de l'Isère; Append., p. 5; Hel. aculeata), décrit nolre coquille, et indique les environs d'Arbois comme son habitat, sans doule d'après Draparnaud. П пе l'a pas vue dans l'Isère. Gray 1840 (Turlon’s Manual, édit. 2, p. 149, pl. 4, fig. 33; Hel. aculeata), aprés avoir donné la diagnose de la coquille et quelques indications synonymiques, entre dans quelques détails descriptifs au sujet de celle méme coquille, qui se trouve, dit-il, dans les bois, sous les feuilles et les pierres. « Suivant les observations de M. Jef- freyss, ajoute-t-il, cet animal se nourrit des feuilles du Jungermannia platyphylla. Son aréa est fort étendu, puisqu'on l'a trouvé jusqu'au nord de la Suède, » La figure qu'il en donne n'est pas mauvaise. Duruy (l'abbé) 1843 (Ess. Moll. du Gers, p.15 ; Hel. aculeata), après avoir brièvement décrit celle espèce, lui donne pour station les bois monlueux, sous les pierres, les troncs d'arbres, el pour habitat le bois d'Auch el Beaulieu, où elle est extrêmement rare. MACGILLIVRAY 1844 (Moll. of Scotl., p. 86; Hel. aculeata), se con- lente d'une courte mais suffisante description du test, trouvé, dit-il, par M. Dickie, bolaniste distingué, in the Den of Rubislaw ; il ter- mine par une courle synonymie. MonELET 1845 (Moll. Portug., р. 72; Hel. aculeata), annonce que celle espèce est tres commune dans la province de Tras-os-Montes. Plus au midi, dans la Serra-d'Arrabida, avec les cils fort allongés, caractère parliculier aux échantillons portugais. Brown 1845 (Illustr. conch., p. 68, pl. 7, fig. 22), la décrit assez au long sous le nom d'Zel. aculeata ; sa description est précédée d'une synonymie détaillée, el suivie de l'indication des localités nombreuses oü elle a été signalée en Angleterre, en Ecosse el en Irlande. Habite de préférence les bois et les lieux sombres, sous les pierres et les feuilles, STABILE (l'abbé) 1845 (Conch. Lugan., p. 32; Hel. aculeata), Га irouvée aux environs de Lugano (canton du Tessin, en Suisse), sous les pierres roulées et polies, jamais sous les pierres schisteuses, « Comme chez V Hel. ciliata, ajoute-t-il, les épines tombent apres la mort de l'animal. Elle est pius abondante en mai, landis que les Hel. obvoluta et ciliata sont plus communes en seplembre. On ne l'a pas encore renconlrée еп Lombardie. Assez répandue dans la pelile 175 vallée de Loreto, en compagnie des Drepanostoma nautiliforme, Pupa Ferrari, сіс.» Kuster 1846 (Chemn. Conch., édit. 2, 11, p. 209; pl. 33, fig. 11-12), la nomme aussi Hel. aculeata; il donne une diagnose latine bien faile, une synonymie détaillée el assez complete; il termine par une des- criplion allemande el par les remarques suivantes : « Animal bleu cendré clair, visqueux; tentacules et région dorsale un peu noirà- Ires; organes locomoteurs courts...» Рипиррг 1847 (Moll. Sicil., п, p. 107 ; Hel. aculeata), après l'indi- calion de quelques synonymes, dit que celle coquille a été décou- verle près de Panorme , en Sicile, par Andr. Bivona fils. Il copie la diagnose de Rossmæssler. L. PFEFFER 1847 (Monogr. Helic. viv., 1, p. 50; Hel. aculeata), parmi les quelques diagnoses bien failes que j'ai citées, a sa place assurée. Voici sa phrase : « T. perforata, pusilla, globoso-turbinata, corneo- lutescens, lamellicostis : costis in cilias elongatis ; anfr. 4 convexi; aper- tura rotundata; perist. membranaceum , subexpansum , marginibus approximatis. » Suivent les diagnoses et habitat. П place celle es- pèce entre Hel. Gundlachi, L. PF., et Hel. lamellata, Јеҝ. Puron 1847 (Moll. Vosg., p. 30; Hel. aculeata), donne une courte mais précise description ; il cite des localités de la Meuse, de la Meur- tbe el du Bas-Rhin, mais il n'en indique aucune du département des Vosges, où il ne l'avait pas encore vue; depuis, je la lui ai montrée non loin de Remiremont, sur les hauteurs, appliquée contre un ro- cher dénudé. GASSIES 1849 (Moll. Agen., p. 80; Hel. aculeata), donne une bonne descriplion de nolre espéce, qu'il trouve dans l'Agenais, sous les feuilles, les pierres et dans le tronc des arbres des bois montueux ; très rare. Il fail remarquer avec raison que celle très pelite coquille est une des plus gracieuses du genre. STEIN 1850 (Schneck. Berl., p. 41; Hel. aculeata), décrit celle co- quille en latin et en allemand, d'apres L. Pfeiffer, énumère les syno- uymes el dit qu'il l'a trouvée en pelite quantilé dans le Briesclang, prés de Berlin. Il a remarqué que sur les vieux individus les épines disparaissent. SPEYER 1850 (Moll. de Hanau, p. 50; Hel. aculeata), après une courle synonymie, annonce qu'elle habite le mont Taunus, près du château de Falkenstein. Il l'a trouvée sub -fossile dans le tuf calcaire d'Ahlersbach. ALBERS 1850 (Helic. geordn., p. 73), lout en adoptant, pour l'y placer, le sous-genre Acanthinula de Beck (Verh. vers. Naturf. in Kiel, 1846, p. 122), laisse à notre espèce le nom d Helix aculeata. « Celle 176 espèce, dit-il, est très répandue en Allemagne, en Angleterre, en France, en Espagne (Graells ne le dit pas), en Suisse et en Italie. Elle vit dans les bois, dans les endroits humides, sous la mousse el les feuilles morles.» Born 1851 (Schneck. Mecklemb., p. 15; Hel. aculeata), présente la répartition suivante de cette Hélice en Allemagne : Allemagne septentrionale : Mecklembourg-Holstein, Rugen, Berlin, Poméranie. Allemagne centrale : Wurlemberg, Harz, Prusse-Rhénane, Nassau, Silésie, Bavière. Allemagne méridionale : Autriche, Carniole, Alpes bavaroises. П dit aussi : « Rare dans le Mecklembourg ; remarquable par sa pelilesse. Se trouve à Schwerin, dans le Zippendorf, dans les bois de Steinfeld et de Fridrichsthaler, et aussi à Schelfunder, sur le sol riche en humus, parmi les ruines des vieilles églises, aux environs de Woldegk. Elle abonde à Stubnilz, sous le feuillage, dans les en- droils frais et ombragés. » Forges el HANLEY 1851 (Hist. of Brit. Moll., 1v, p. 74; Hel. acu- leata), aprés une courte diagnose el quelques synonymes, entrent dans de plus amples délails dans la descriplion de la coquille. Il est à remarquer qu'ils indiquent une dent à l'intérieur du péristome, dans les individus trés âgés. « L'animal est bleuâtre ou gris-verdatre, plus foncé à la lêle et sur le cou. De toutes nos petites espèces, celle- ci esl la plus singulière et la plus belle. Elle vit au milieu de la mousse, dans les bois, et a une distribulion géographique fort élen- due dans les Iles Britanniques.» Kuster 1852 (Moll. Bamb., p. 46; Hel. aculeata), a trouvé quelques exemplaires morts de celte espèce, toujours rare, au pied d'une haie, dans une prairie des environs de Damberg. SGHOLTZ 1853 (Schles. Moll. Suppl., p. 5 ; Hel. aculeata), donne une courte diagnose du test, d’après Rossmeessler, et décrit ainsi l'ani- mal : « Animal gris-clair bleuâtre, visqueux ; le dos et les tentacules un peu plus foncés ; extrémité du pied très courte. Cet animal est très vif, eL en marchant il agite sa coquille avec beaucoup de légè- relé. Habite les lieux humides, sous les feuilles mortes et les débris des végélaux. Appartient aussi bien aux plaines qu'aux montagnes. Trouvé sur le Langenberge, entre Donnerau et le Hornschloss, prés de Charloltenbrunn, sous des feuilles de hélre el des débris d'écorces. Trouvé encore sur le Fuchsberg, prés de Schwoilsch ; prés de Bres- lau, sous des feuilles de chéne en décomposition.» BAUDON 1853 (Descript. Moll. de l'Oise, in: Mém. Soc. Acad., 11, p. 288; Hel. aculeata), donne de celle espèce, comme de toutes celles 177 qu'il a dépeintes, une excellente description. On regrette seulement qu'il ne se soit pas davantage élendu sur les mœurs el les habitudes de ce mollusque, sur les localités qu'il hante, sur les sites qu'il pré- fère, surlout quand on a lu ses arlicles Vitrina pellucida, Helix lapi- cida, Helix fulva, Helix incarnata, Helix costulata, Helix candidula, Helix ericetorum, et plusieurs autres, qui donnent la mesure de son talent d'observation. Il serait à désirer que cet auteur eût des imita- leurs. Il décrit ainsi l'animal : « Très petit, délicat, tentacules supé- rieurs trés longs et déliés, les inférieurs tuberculeux; pied mince, aigu poslérieurement et blanchálre en dessous; partie antérieure du corps, dessus du cou, ayant une coloration grise assez foncée, qui disparaît peu à peu sur les cólés; ces parties sont demi-transpa- rentes.» Et plus loin, parlant de ses mœurs : « Nous pouvons ranger l'Hélice à aiguillons parmi nos especes rares. Non-seulement elle se trouve difficilement chez nous, mais aussi elle n'est pas fort com- mune dans les autres parties de la France. Elle se tient sous les pierres humides, dans les bois sombres situés sur des cóteaux élevés. Elle n'apparaît guère pendant les grandes chaleurs ; on la voil mieux vers le printemps, à la fin de l'automne, et quelquefois encore pen- dant plusieurs mois de l'hiver. J'ai recueilli celte espece en décem- bre, aux places les plus élevées de la garenne d'Hondainville, sous des fragments de roche quartzeuse épars au-dessous des sapins. Jen trouvai un seul individu à Morainval, sur un rocher, dans les bois. » Enfin MOQUIN- TANDON 1855 (Hist. Moll) тг p 189 pl: 45, fig. 5-9; Hel. aculeata) adopte, pour y placer solitairement notre espèce, le sous-genre Fruticicola (Held , in Isis 1837, p. 914). Après en avoir donné 1а synonymie, il passe à la descriplion de l'animal, descriplion qui est aussi délaillée et aussi achevée que possible. Désespérant, non seulement de rien faire de mieux mais de faire aussi bien, j'ai pris le parti de m'en emparer, et c'est elle que j'ai reproduite plus haut. La coquille est également fort bien décrite. « Habite presque toute la France, dit l'auteur, vil dans les bois, dans les endroits frais el humides, sous les feuilles mortes, les mousses, parliculièrement sous le Neckera viticulosa Hedw. Les tentacules et les lobes labiaux sont remarquables par leur développement. Le mufle est au contraire très-pelil el surlout fort élroit. Les lamelles de Ја co- quille sont épidermiques (?) et s'effacent avec la plus grande facilité. Examinée à une forle loupe, on découvre des stries longiludinales extrémement fines et trés serrées. » Celle derniere remarque esl juste : je l'ai faite également en observant V Hel. aculeata au micros- cope. 12 178 Voila tout ce que j'ai réuni sur l'histoire de notre Hélice. Si on lui connaissait quelqu'usage ou quelque propriété, ce serait ici le lieu d'en faire mention. Mais uu si petit animal échappe à l'industrie de l'homme : la Nature seule lui donne un emploi, secret pour nous, qu'il remplit constamment et invariablement. VII. EXPLICATION DE LA PLANCHE. Le premier dessin que l'on connaisse de l Helix aculeata appartient à Muller, qui le premier aussi fit connaitre l'espèce. Dès 1774, il l'a figurée dans le journal allemand le Naturforscher (Le Naturaliste) tome XIX, planche 2 , figures 1, 2, 3. Je n'ai pas vu celle planche. Depuis, cette espèce a été maintes fois représentée : en Angleterre, par Pennant, Da Costa, Lightfoot, Montagu, Dorset, Turton, Brown, Wood, Gray, Forbes et Hanley...; en France, par Draparnaud, Dupuy, Moquin-Tandon; en Allemagne, par Chemnilz, у. Alten, C. Pfeiffer, Rossmæssler, Kuster , et quelques autres; en Italie, par Bivona, elc. Les meilleurs dessins sont, à ma connaissance, ceux de Chemnilz, de Wood, de Gray, de Brown, de Rossmæssler, de Draparnaud et de Dupuy. La planche ci-jointe est due au crayon et au pinceau de M. le 0" Baudon (de Mouy-de-l'Oise), à qui j adresse mes félicitations el mes remerciemens bien sincères. Cet excellent ami, amaleur passionné de conchyliologie, est déjà bien connu des savanls pour son rare lalent d'observation et pour la délicatesse de son pinceau. Jai vu lous les mollusques de l'Oise, dessinés el peints par lui: il est im- possible de rien voir de plus fidèle, de plus fini, de plus parfait. Notre planche représente Heliz aculeata sous plusieurs aspects, savoir : Figure 1'°. Coquille de face, grossie. Figure 2*. Idein, grandeur naturelle. Figure 8°. Coquille vue par le dos, grossie. Figure 4°. Coquille en dessous , grossie. Figure 5*. Coquille en dessus , grossie. Figure 6*. Animal en marche et coquille grossis. Figure 7°. Fragment de coquille trés-grossi , pour mieux faire voir les cótes ou lamelles épineuses. Et sic Helicem aculeatam pro modulo ingenii noslri descripsimus, descriptam edimus , editam vero majorem in modum benevolo lec- lori commendamus. HENRI DROUET. Helix aculeata Muller CONSIDÉRATIONS SUR QUELQUES POINTS D'ÉCONOMIE RURALE ET SUR LES CAUSES QUI ACCELERENT OU RETARDENT LE PROGRES AGRICOLE. En l’année 1842, sur l'invitation de quelques-uns de mes confrères, je publiai un Traité d'agriculture pratique à l'usage des agriculteurs et des propriétaires de Maine-et-Loire. Le public accueillit favorablement ce pelil ouvrage; celle marque d'honorable bienveillance devait m'en- courager à recueillir avec soin el à faire connaitre, lorsque je croi- rais le moment arrivé, les nouvelles observations et les résultats utiles qui se présenteraient dans la suite de mes travaux. Aujourd'hui je viens accomplir cette tàche. Déjà, à celle époque, l'imporlalion du bétail à courtes cornes de la race anglaise, dite de Durham, avait commencé; le Gouvernement avail placé quelques laureaux de celle race dans les fermes-écoles ; un de ces animaux ful envoyé dans nolre déparlement, à la ferme de la Porte, située dans l'arrondissement de Baugé. Je fus des pre- miers à me procurer quelques-uns de ses produils, désireux de juger el d'apprécier par moi-même s'ils élaient doués des qualités émi- nentes dont on parlait, et s'ils réaliseraient mes espérances. Je ne négligeai aucun soin pendant leur élevage, et lorsqu'ils furent arri- vés à l’âge où ils pouvaient rendre quelques services, j'ordonnai de 180 les lier et de les faire travailler pendant quelques heures afin de les dresser. Je m'apercus bientôt que leur conformation ne leur permet- lait pas, à beaucoup près, de résister au travail aussi longtemps que les autres animaux dont je faisais usage, surtout ceux des races nan- taise el poilevine ; je renoncai de suite à leur demander ce qu'ils ne pouvaient me donner, et me contentai de les élever pour en faire des bêtes uniquement deslinées à l'engraissement. Je tins note exacte des dépenses de toute sorle qu'exigeérent les animaux mis à l'engrais, jusqu'au moment où je les envoyai sur le marché. l'avais également el en méme temps mis au méme régime deux animaux de race poi- levine, et je ne fus pas peu surpris de voir, après la vente des uns et des autres, que la balance élait en faveur de ces derniers. Cette dif- férence venait surtout de ce qu'ils m'avaient coûté beaucoup moins lorsque je les achetai. Cette premiere expérience me refroidit à l'é- gard de celle race étrangère si vanlée encore aujourd'hui par un grand nombre d'éleveurs. Ce n'esl pas cependant que je n'aie prêté la plus grande attention aux éloges et aux écrits de ses partisans. J'ai lu, je crois, en grande parlie loul ce qui a élé dil à leur sujet. Je connais leur conformation, je Vai éludiée ; je sais, à n'en pas douter, qu'elle réunit au plus haut degré les caractères propres à un engrais- sement prompt el facile ; mais l'expérience m'a aussi enseigné qu'elle exige beaucoup de soins et d'attention, et qu'elle a besoin de recevoir une nourriture riche el abondante si l'on ne veut pas qu'elle dégé- nere et si l'on désire qu'elle se maintienne dans un parfait élal d'em- bonpoint, el je n'ai pas cessé de parlager l'opiuion des cultivaleurs qui pensent que cette race doil êlre élevée dans les contrées de riche culture, là où les plantes fourragères el surloul les prairies sont d'ex- cellente qualité et où l'on croit généralement que les chevaux doivent remplacer avantageusement les bœufs dans le travail des champs, croyauce d'ailleurs que je ne puis encore parlager. Au reste, celle dernière raison n'est pas la seule qui m'ait fait renoncer à la race anglaise; d'abord, les vaches de cette race, tout le monde en con- vient, cotilent beaucoup plus el ne sont assurément pas les meil- leures lailiéres; la quantité el la qualité de leur beurre ne sont point supérieures à celles des vaches nanlaises ou poitevines. D'un aulre cólé, comme une exploitalion agricole est une véritable fabrique dont toutes les parties sont étroitement liées et qu'il convient de les main- tenir en parfait équilibre si l'on veut arriver au succès, je liens pour maxime qu'il faut éviter de trop sacrifier aux unes dans la juste crainle de nuire aux autres. De meme que le manufacturier, le cultiva- leur doit toujours avoir l'œil ouvert sur le produit nel de son entre- prise. Au premier apercu, il arrive quelquefois qu'une branche de 181 son industrie lui semble magnifique; soumis au calcul, l'ensemble de ses opérations lui démontre qu'il a cependant fail une fausse ap- plication de ses capitaux. Ses étables pourront être garnies de su- perbes durhams, d'admirables pores du Yorkshire; mais à quel prix les a-l-il achetés, que lui coûtent-ils à nourrir, à entretenir dans cet état de splendide embonpoint? puis, en fin de compte, quel sera le prix de la vente, non pas dans les concours de bestiaux, mais sur les marchés, aux foires de son pays? Car c'est là et là seulement que dans les offres de l'acheteur se trouve la véritable mesure de la va- leur des productions de l’agriculture. Je ne sais, mais je doute exlré- mement qu'il y rencontre la récompense de ses sacrifices. Dans les premiers temps des concours d'animaux gras, je me ren- dis à Poissy, on j'eus le plaisir de rencontrer un de nos agronomes les plus dislingués, un de ces hommes mûris par l'expérience, sur lesquels l'illusion ne peut mordre, et dont l'opinion se base sur le calcul et de rigoureuses observalions ; c'était M. рашу, ancien maî- tre de poste de Paris, propriétaire d'une trés grande et belle ferme située à Trape, prés Versailles, et dont il dirigeait l'exploitation. « Tous ces animaux, me dit-il aprés qu'il les eut passés en revue, sont vraiment fort beaux ; ils sont arrivés à un degré d'engraisse- ment rare; je les admire. Mais avant de me décider (il avail, je crois, refusé de faire partie du jury), si J'étais de la Commission, je vou- drais que l'on me fit connaitre le prix de revient de chaque ani- mal. Je voudrais non-seulement savoir son prix d'achat, s'il a été acheté, mais encore ce qu'il a fallu débourser ou dépenser en soins et en nourriture de toute sorte pour l'élever el le conduire au point où je le vois aujourd'hui. Sans cela, je vous le demande, à quelle fin celle exhibition, s'ils coûtent plus qu'on ne doit les vendre sur nos marchés dans les circonstances ordinaires? Pourquoi faire naitre dans l'esprit des éleveurs de périlleuses illusions? Convient-il méme d'exciler le zèle en éveillant l'amour-propre entre gens qui peuvent s'imposer des sacrifices, sil ne doit en résuller aucun avantage sé- rieux pour l’agriculture? Quel homme sage, quel père de famille pru- dent, quel cullivateur raisonnable et tant soit peu avisé voudra len- ler des essais sur de simples apparences, uniquement dans la pers- peclive fort chanceuse de recevoir une prime? Oui, tant que les con- currents ne seront pas obligés de produire aux Commissions les élé- ments indispensables pour apprécier le prix de revient de leurs ani- maux, tous ces concours ne pourront offrir de résultats positifs et concluants; ils seront toul au plus, pour notre bétail à cornes, ce que le turf a été el sera pour la race chevaline : on en parlera, ils seront l'occasion de beaux discours, de magnifiques comples-rendus, 182 mais rien de plus. Enfin, le dirai-je, je crains méme que cerlains enthousiastes n'arrivent à compromettre quelques-unes de nos belles et bonnes races, en prêchant, en vantant sur tous les tons leur croi- sement avec les durhams. Et si nous revenons de notre erreur, ce sera quand le mal aura grandi; car, vous le savez, nous autres Fran- cais, nous allons toujours d'un extrême à l'autre avec une déplo- rable rapidité. Souvent on cite l'exemple des Bakwell et des Collings, habiles éleveurs anglais qui, aprés de nombreux essais, de labo- rieuses ei ruineuses expériences, sont parvenus à oblenir de magni- fiques produits qu'ils ont vendus à des prix incroyables. Cependant, si beaux qu'ils fussent, devaient-ils espérer un si haut prix? Oui, dit-on, ils pouvaient compter sur la passion et l'enthousiasme de leurs riches compatrioles. Soil; ils en ont profilé, et cerles ils en avaient bien le droit. Mais attendez ; souvent la passion nous empéche de considérer les choses sous leur véritable aspect; en Angleterre, comme ailleurs, l'engouement est passager. Celle fureur se calmera, soyez-en sûr, lorsqu'on sera revenu à une plus juste appréciation des fails. » Ces observations, ces craintes de la parl de cet habile et judicieux observateur, dont les lumières et l'expérience étaient connues et gé- néralement appréciées, me frappèrent; elles sont restées gravées dans mon souvenir, et malgré la continuation de ces concours, elles me paraissent encore vraies el fondées. Je le dis donc, et, comme on vient de le voir, j'ai pour moi l'opi- nion de bons juges, les concours d'animaux de boucherie, tels qu'ils sont organisés, l'introduction dela race anglaise, ses croisements avec nos races justement estimées, autres que la mancelle, ne méri- lent pas d’être encouragés dans notre département. Je vais plus loin, el comme l habile agronome dont je viens de parler, je les crois com- promeltants. Ce que j'ai dit de la race bovine, je le pense également de la race des pores anglais; je redoute ses croisements avec les nôtres. Nous avons, dans la Mayenne et la majeure parlie de nolre département, une forle race de pores qu'il importe d'améliorer encore par elle- méine en faisant un bon choix d'animaux reproducteurs; des croi- sements mal entendus la feront indubilablement dégénérer. Je n'i- gnore pas ce qu'on a dit en faveur de ces croisements; mais l'élo- quence et le zèle infatigable des panégyristes n'ont point ébranlé ma conviction. Aux yeux de bien des éleveurs je passerai sans doute pour un rétrograde, un routinier. Гассеріе le reproche ; mais le temps est un grand maitre; ici comme en toutes choses il prononcera, et je consens d'ailleurs trés volontiers qu'il me donne tort. 183 Maintenant, continuerai-je mes réflexions puisées dans une pra- tique de chaque jour? Pourquoi non. Après l'aveu que je viens de faire, je mérite, je l'espère du moins, quelque indulgence. Eh bien! j'ose affirmer que depuis la publication de mon petit traité d'agricullure (encore bien qu'il se soit écoulé 13 années, es- pace de temps qui comple assurément dans la vie d'un homme) j'at- firmerai, dis-je, que mes travaux et mes lectures n'ont que faible- ment augmenté le fond de mes connaissances précédemment acquises. Cela vient, je le crois, de ce qu'en agriculture plus qu'en toute autre malière, il faut un laps de temps bien long pour que la pralique el la science enrichissent le domaine de l'art de fails el d'ex- périences dont les avantages soient incontestables et parfaitement démontrés. Nous semblons trop souvent oublier que parlout, et des les temps les plus reculés, cette premiere des induslries a élé et dà être le principal sujet des éludes ei des observalions d'un grand nombre de bons esprits, et que le nouveau et l'ulile ne se rencon- irent pas si facilement dans un champ depuis si longtemps et si laborieusement exploré. Je crains méme que celle multitude d'éerils sur les diverses parlies dont se compose l'art agricole ne jelte le trouble dans les esprits trop faciles à se laisser aller à la séduction, trop inexpérimentés pour déméler à temps le vrai du faux contenu dans de nouvelles théories, et ne fassent perdre de vue les principes immuables de cet art. Ce sont les jeunes praticiens qu'il faut surtout mettre en garde contre l'esprit de systéme et les innovations présen- tées sous les couleurs les plus séduisantes. Je voudrais qu'ils n'ajou- tassent foi aux théories, aux nouveaux procédés, aux amélioralions préconisées, qu'après des expériences bien faites et plusieurs fois répétées, el que les essais, qu'ils doivent tenter sans doute, ne s'é- lendissent sur une échelle de quelque importance qu'au moment оп ils agiraient avec la presque cerlitude de réussir, parce que je suis pénélré de celle vérilé qu'on ne saurail trop répéler, qu'il est rare que tout insuccés, toute tentative déjouée, ne fasse pas plus de mal qu'une méthode, un procédé, si bons quils soient, ne peuvent faire de bien. A côté de quelques esprits graves el consciencieux qui se livrent avec une louable ardeur à la recherche de vérités utiles et qu'ils ne proclament telles qu'après les avoir longlemps expérimentées, et parmi eux la reconnaissance nous fail un devoir de placer en pre- mière ligne les habiles chimistes dont les travaux utiles ont pour bul d'éclairer la marche du cultivateur, il y a des gens, poussés par un désir immodéré de faire parler d'eux, qui font sonner bien haut l'elficacilé de certains procédés qu'ils n'ont pas méme eu le temps 184 d'étudier et de vérifier. Ils ne reculent devant aucune crainte ; pour eux c'est un jeu, on le dirait du moins, de faire des dupes en s'a- dressant à des hommes ou trop avides ou trop crédules. Mais les revers en agriculture ont un retentissement trop prolongé et de trop funestes conséquences pour que les amis de cette indus- trie ne s'imposent pas le devoir de tenir l'attention éveillée sur les séductions du charlatanisme et surtout d'un enthousiasme irréfléchi d'autant plus dangereux qu'il est sincère. Je le sais cependant et le reconnais avec tout Je monde, des améliorations sensibles ont eu lieu depuis quelques années. Les instruments aratoires ont recu d'utiles perfectionnements ; quelques-uns ont été inventés, dont les avan- lages sont incontestables, et je n'hésite pas à placer ап premier rang des nouvelles améliorations le drainage et les irrigalions. Leur uli- lité pour les progrès de l’agriculture est réelle; mais quelque soit d'ailleurs leur degré d'imporlance, je n'y trouve point encore ce ca- ractère de puissance et d'impulsion, celle source de vie féconde et permanente qui manque à notre grande industrie. Un cullivateur peut être muni des meilleurs et de tous les instru- ments nécessaires; il peut avoir assaini, drainé, nettoyé, nivelé ses terres, que s'il n'a pas à sa disposition une quantité suffisante d'en- grais, ni le capital en rapport ауес son exploilalion et les circons- lances au sein desquelles il se trouve placé, il n'arrivera jamais au bénéfice, but constant de ses efforts. C'est là le point essentiel, je l'ai dit bien souvent et veux encore le redire. Non, sans la réunion de ces deux éléments indispensables, jamais il ne parviendra à la réalisation de ses espérances. Ce sera en vain qu'il se procurera des animaux de belle race; loin de les améliorer, ils resteront station- naires s'ils ne dégénèrent dans ses étables. En vain il mullipliera les facons données à ses champs; trop faible, i! succombera, il se rui- nera, et comme lui il laissera sa terre épuisée. Ici je m'arréte ; avant de continuer mes observations je dois faire remarquer que ce qui précède était écrit, lorsqu'en parcourant divers numéros du journal d'Agriculture pratique, je trouvai deux passages auxquels, je l'avoue, je ne m'allendais guère ; mais ils contiennent une sanction si explicite, si positive de mes sentiments, qu'il m'est impossible de ne pas les citer. Voici done ce que dit, dans le numéro de septembre 1857 de son journal, M. le directeur, en rendant comple d'un concours de bestiaux de la Société d'agriculture d'Ecosse, tenu à Glascow en 1857 : « Malgré les remarques de notre collaborateur, M. de la Trehon- » Mais, nous maintenons nos observations relalivement à la race » courles-cornes; elle ne prend pas, el elle ne peut pas prendre, ni 185 » en Angleterre, ni en Ecosse, ni en Irlande, l'extension que l'on » était tenté de lui attribuer, vu les efforts pour la propager en » France, à l'exclusion de toute autre. La Grande-Brelagne a raison » de vouloir conserver ses herefords, ses devons, ses hayrshires, ses » angus, ses highlanders. Elle ne cherche nullement à croiser tous » ces animaux avec les courles-cornes. Ces derniers ont incontesta- » blement leurs mérites : une grande précocilé, d'admirables formes » pour donner de la chair et beaucoup de graisse avec peu de char- » pente osseuse ; mais ils ne conviennent que dans des circonstances » spéciales, là ой des soins parliculiers et une nourriture choisie » peuvent être toujours donnés au bétail. Nous ajouterons qu'il y a » une réaction en Angleterre contre les animaux trop précoces et » {гор gras, dont la viande est sans saveur, où le lard domine. Nous » avons entendu dire plus d'une fois à des Anglais que la viande fran- » çaise est bien plus succulente que la leur, et qu'ils regretteraient » qu'on se laissât aller à engraisser trop vite et à produire une chair » flasque, noyée dans la graisse et sans goût.» Enfin, dans le numéro du 5 décembre 1857, M. le directeur, apres avoir cité une lettre que lui adresse M. Bandement, rapporteur de la Commission du dernier concours de Poissy, ajoute : « Ainsi donc, la viande des durhams est bien décidément moins » bonne que celle de plusieurs de nos propres races bovines pures » OU croisées. » Que penseront de ces criliques, qui me dispensent de tout com- mentaire, les ardents propagaleurs des croisements avec la race courles-cornes? A vrai dire, je ne m'en inquiète guère ; cependant ils reçoivent là un rude échec, et l'on conviendra qu'elles confirment en lous points les justes prévisions de l'agriculleur francais, dont J'ai cité les paroles au commencement de cet article. Dans le numéro du 5 octobre 1857, du méme journal, à l'occasion de la queslion des engrais liquides, si vivement débaltue depuis quelque temps, voici ce qu'un agriculteur Suisse, M. Risler, après avoir montré quelle confiance cette méthode devait inspirer, et signalé les noms de quelques-uns de ses champions, écrit à M. le directeur de ce journal : « Veuillez remarquer que tous ces Messieurs ne sont pas des agri- » culleurs qui vivent de leur métier. M. Mechi (1), par exemple, a » voulu s'amuser de sa ferme et des gens naifs qui le prennent au » sérieux. Aujourd'hui qu'il est shérif de la cité de Londres, il l'avoue (1) M. Mechi. riche fabricant de coutellerie, exploite une ferme de 60 hectares à quelques milles de Londres. 186 » lui-même, la farce est jouée. L'année dernière, un des meilleurs » cullivaleurs Suisses, M. de Gingnès, délégué à l'Exposition d'agri- culture de Chemesford, alla voir M. Mechi, et voici ce qu'il raconte » de sa visite dans son rapport, livre qui inléresserait beaucoup les agriculteurs francais : « Comme je me plaignais du peu de bétail que contenaient les écuries, » mon quide me demanda : — Vous n'avez donc pas vu la meilleure » vache à lait de la ferme? — Non, lui dis-je; où donc est-elle? — Dans le magasin de la cité, me répondit-il en souriant. » « Ainsi donc, aucun exemple sérieux ne peut élre cilé en faveur de la liquéfaction des engrais. » Nous avons cité ce passage de la lettre de M. Risler, non-seulement parce qu'il contient un avis salutaire et vient à l'appui de nos opi- nions, mais aussi parce que nous y avons trouvé l'arme de la plai- santerie spirituellement employée contre d'indignes manœuvres qu'il faut avoir le courage de dévoiler. L'agriculture fixe-t-elle les regards, y trouve-t-on un certain relief, un vernis de citoyen utile, un moyen enfin d'arriver à la po- pularité, puis aux honneurs qu'elle procure et qu'on ambitionne, on y court. Bientôt on écrit, on parle, on fait parler d'une nouvelle mé- Ihode dont on est l'inventeur et dont les effets sont merveilleux. Les enthousiastes, les sirnples, les naïfs, comme dil M. Risler, aussitôt d'arriver et de contempler d'un œil admiralif et d'envie les beaux, les magnifiques produits obtenus par l'application du nou- veau procédé. Dans leur aveugle ardeur, ils oublient d'en chercher les véritables raisons; et profondément mystifiés, ils deviennent sans y prendre garde d'excellents mystificateurs, et font des dupes de la meilleure foi du monde; ainsi de proche en proche se propa- gent en agriculture comme en tout de funestes erreurs. Il ne fau- drait pas cependant repousser d'une maniére absolue tous les procé- dés, toutes les nouvelles inventions que chaque jour voit éclore. Car l'histoire de la science nous apprend qu'il y a des hommes qui sans autre appui, sans autre aide que le génie d'observation et de recherches, dont ils sont doués et comme maîtrisés, parviennent a briser le voile et enrichissent le monde d'uliles découvertes dont la science ne se doutait pas, ou croyait impossible; mais dans un temps ой le charlatanisme touche effrontément à tout, loin de l'affaiblir il convient de forlifier le sentiment de la défiance. Mais, dira-t-on, si l'agriculleur , comme vous l'affirmiez loul à l'heure, doit avoir à sa disposition l'engrais nécessaire au succès de son entreprise, comment fera-t-il pour se le procurer? Devra-t-il l'acheter; allendra-t-il le moment où il pourra le recueillir dans ses = = = = 187 ses élables? Certes, Pobjection est sérieuse, et j'en conviens, ici se présente le plus redoutable des écueils; trouver à sa disposition une masse suffisante d'engrais, a toujours élé pour les cullivateurs le probléme le plus difficile et le plus important à résoudre, et une sorle de cercle vicieux dans lequel ils se voient renfermés. Car de deux choses l'une, ils ont ou n'ont pas le capilal suffisant pour ache- ler l'engrais qui leur manque : dans le premier cas ils ne devront pas balancer à s'imposer cette dépense, et dans le second, ils seront for- cés d'attendre, heureux s'ils peuvent arriver avant de suecomber au jour où ils se verront possesseurs de ce trésor , de ce dieu de l'agri- culture pour parler comme les Flamands, gens fort sensés et culti- valeurs consommés. Et cependant, ils ne chercheront pas ailleurs une compensation ce serait une pure et dangereuse illusion. Pour résister aux belles promesses, aux amorces des fabricateurs de nou- veaux procédés el de nouvelles recettes, ils serappelerontles maximes des sages praticiens, amis vrais de leur industrie. « Si tu veux du blé, » fais des prés. Deux hectares bien fumés rapportent plus que quatre » qui ne le sont qu'à demi. Veux-tu améliorer tes races, nourris- » les abondamment, car nourriture abondante et variée est presque synonyme de belle race dans le bon langage agricole. Ne fais de › croisements avec les animaux étrangers que pour corriger les » vices de tes races défectueuses ; si tu ne peux t'en procurer d'au- › {гез dans ton pays, choisis parmi celles dont le temps a consacré » la valeur et l'importance, des reproducteurs bien conformés , afin » d'en obtenir de plus beaux encore. Ne peux-lu te procurer de suite › tout l'engrais dont tu as besoin, saches te résigner et attendre, » et en attendant aies recours à des assolements judicieux ; fais mieux » encore, renonce à soulever un fardeau que tes épaules ne pour- › ront porter, n: dédaignes pas trop les conseils et la pratique des anciens. Pour eux, les prairies élaient le principium en fait de toute » bonne agriculture. 115 avaient créé le mot pratum, dérivé de para- » (ит, toujours prêt, afin d'exprimer l'imporlance qu'ils y atla- » chaient. L'expérience de chaque jour a confirmé la justesse de » leur vue. » Toute l'agriculture el ses progrès sont renfermés dans ces prin- cipes que le temps et l'expérience ont consacrés. Qu'on y fasse attention, et l'on verra que les pays où l'agriculture est lucralive et progressive, sont ceux où le cultivateur a pu el su réunir dans de bonnes proportions les deux éléments indispensablement néces- saires à la réussile de son entreprise. La Normandie, l’Angle- terre, la Belgique, le nord de la France, plus près de nous la Mayenne el la Vendée, ne sont-elles pas les contrées où ces deux = м = э 188 causes de prospérité se rencontrent plus fréquemment qu'ailleurs ? N'est-ce pas là aussi que l’on voit les plus beaux bestiaux, les plus riches rendements en céréales? Si nous quittons ces fertiles régions pour pénétrer dans ces pays où le sol est pauvre et le cultivateur misérable, quelle différence! Partout une agriculture languissante, пп sol épuisé, un bétail sans vigueur, rachitique attristent les regards. Que faut-il pour que la scène change, que la fécondité succède à la misère? Il faut une culture fourragère soutenue par les avances d'un capital suffisant. Ah! sans doute, nous nous garderons de conseiller à пох cultivateurs d'y aller, et de leur dire qu'ils trouveront süre- ment là une large rémunération de leurs peines et de leurs sacri- fices. Non! Ceux-là seulement qui peuvent disposer d'un capital considérable doivent entreprendre des travaux qui exigent un long lemps pour devenir féconds. Si nous avons dit et montré les dangers auxquels s'exposent les cultivateurs qui prennent des fermes d'une importance au-dessus de leurs moyens, les mêmes observations peuvent encore s'appliquer à plus juste titre à une foule de possesseurs du sol. Combien de per- sonnes, en effel, soit ignorance ou vanité, jalouses du renom de grands propriétaires, préfèrent à l'acquisition d'un domaine en rap- port avec leur fortune mobilière, celle d'une grande étendue de ter- rain qu'elles ne pourront améliorer et qu'elles seront méme forcées de négliger faute de ressources suffisantes. Tout entières au senti- ment qui les dominent, elles ne savent pas ou elles oublient que l'a- griculture est une véritable industrie qui comme toutes les autres a ses conditions de réussite, et que le détenteur du sol ne peut l'étre avec avantage et sûreté que s'il comprend et pratique les exigences de sa position. Nous le croyons fermement, la parlie la plus impor- lante de l'économie rurale, c'est-à-dire celle qui fait converger toutes les autres vers un résultat commun, l'administration en un mot a été jusqu'ici généralement mal appréciée; il est vrai aussi que pour la bien comprendre, pour avoir une idée claire et nelte de son im- portance, une longue pratique ou une instruclion bien dirigée sont absolument nécessaires. A notre sens, ce défaut de connaissance est la source de bien des craintes, d'un grand nombre d'erreurs et aussi de bien des mécompltes. lI. Parmi les causes qui retardent le plus les progrès de l’agriculture, je viens de citer les fausses théories, les erreurs propagées, soutenues 189 el encouragées par l'esprit de système, les tromperies et les hon- teuses manœuvres d'un charlalanisme éhonté, et surtout le manque et l'emploi peu judicieux des capilaux ; il y en a d'autres, fort graves assurément, qu'il importe de signaler, mais qui disparaitraient bien vile si nous avions soin de nos propres intérêts, si nous meltions en pratique la maxime souvent invoquée el peu suivie : Aide-loi, le Ciel l'aidera. Au dernier concours du Comice agricole du canlon de Seiches, dont j'ai l'honneur d'être le président, j'adressai comme d'habitude quelques paroles d'encouragement à nos cultivateurs, eL je saisis celle occasion pour dire à ceux m'écoutaienl : « Si nous voulons » vivre de celle vie indépendante, l'honneur el la dignité de l'homme » ici-bas; si nous aimons celle liberlé sage et vraie qui a loujours » élé l'apanage des grandes nalions, nous devons modifier nos goûts » el nos penchants. Vous savez, ajoutai-je, que les entreprises agri- » coles exigent plus que loutes autres de la persévérance. Si nous ne » pouvons revenir au séjour des champs, si nous ne prenons la ferme » résolulion d'encourager par nolre concours el nolre présence à la » campagne les honorables et uliles travaux de l'agriculture, eh bien! » је ne crains pas de l'affirmer, tous nos efforls seront vains, tous » nos vœux seront slériles. » Ceci m’amene à vous confier une pensée que je nourris depuis » longlemps. » Nos Comices, sans doule, onl exercé une heureuse influence sur » l'amélioration du sol dans diverses contrées de notre département, » mais les faibles ressources dont ils disposent ne leur permettent » pas d'agir avec loule l'eflicacité désirable; une association fondée » sur une plus large base offrirait le moyen d'atteindre plus sûre- » tuent et plus vile ce que nous cherchons. » Animés d'un méme sentiment, que les propriélaires de notre » département organisent au chef-lieu une société, un cercle, peu » importe le nom, dans le but d'encourager les progrès de notre art, » au point de vue pralique. Alors, une colisalion personnelle de peu » dimportance pour chacun, offrirail cependant une somme assez » forte pour faire une distribulion de primes nombreuses et capables » d'exciler sérieusement lémulation des cullivaleurs ; des concours » créés au nom de cetle société auraient lieu chaque année, tantôt » sur un point, tantôt sur un autre, et porleraient ainsi d'énergiques » slimulanls sur la surface entière de notre lerriloire. » Une pareille imilalion de ce qui a lieu chez nos voisins ne larde- » rail pas, croyez-le bien, à porter d'heureux fruits. » Je livre ces réflexions a vos méditalions ; elles me sont inspirées 190 » par le vif intérêt que j'ai toujours porté à la noble industrie dont je » m'honore; puissent-elles vous plaire, servir de texte à vos entre- » tiens et devenir la source de fertiles encouragements. » Ces paroles, je puis le dire, furent accompagnées d'un signe d'as- sentiment général. Cependant, répondra-t-on à mon appel? Je le désire plus que je ne l'espère. Quel singulier pays que le nôtre! Voyez, partout des voix s'élèvent eu faveur de l'agricullure, partout on dit qu'il est temps, plus que temps de ramener les capilaux et les bras vers les travaux agricoles ; puis on ne manque pas de citer l'Angleterre, qu'on nous offre en exemple. Là, dit-on, les grands propriétaires, les riches capitalistes, les fermiers méme se font un devoir, un honneur de s'imposer des sacrifices : ceux-ci passent la majeure parlie de l'année sur leurs domaines, ils y encouragent de leur bourse «t de leur présence les travaux el les essais de tout genre; des associations s'organisent, et le montant de leurs cotisations s'éléve quelquefois à plusieurs mille livres sterling, qu'ils distribuent en primes dans leurs concours. En Angleterre, celui qui se desline à la profession d'agriculteur n'a-t-il pas sous la main les capitaux nécessaires à la marche de son exploi- lalion, il n'hésite point à vendre ses propriétés pour se les procurer. Voilà ce que nous disons, ce que nous approuvons. Quand le ferons- nous? Hélas! je l'ignore, car nous semblons fort.douter de nous- mêmes. En effet, sentons-nous le besoin d'éveiller le zèle de nos cul- livateurs, nous nous adressons à l'Etat; c'est à l'Etat (mol consacré) que nous demandons de l'argent, des instruments, des animaux de race étrangère pour les distribuer aux lauréals des concours. C'est à lui et non à nous que nous avons recours pour remédier à nos perles. Nous le sollicitons de se faire banquier, préteur de fonds, assureur contre les fléaux de toule sorte qui viennent assaillir l'agriculture ; nous voulons le mettre en toul et pour tout en notre lieu et place. Un fermier a-t-il quelque peu réussi, amassé un pelil pécule, il n’a de repos que s'il a placé ses épargnes en achat d'un coin de terre. Il ne comprend pas qu'il lui serait infiniment plus avantageux d'avoir à sa disposilion une somme d'argent suffisante pour améliorer ses cultures el parer aux accidents. Il préfère êlre propriétaire mal aisé que fermier riche faisant bien ses affaires. C'est ainsi que nous imi- lons l'Angleterre. Oui, singulier pays que le nólre! Jadis, au temps du régime féo- dal, le seigneur prenait soin, venait au secours des malheureux, veillail à leur subsistance, donnail le taureau banal aux vaches de sa mouvance, el devait en un mol assistance à ses vassaux. Il est vrai qu'en relour ceux-ci devaient la corvée, moudre leur grain au mou- 191 lin, el faire cuire leur pain au four du château. Ces exigences, et autres, n'étaient pas toujours, on le pense bien, du goût des sujets; elles exeilaient et entretenaient entre le serviteur et le maitre des sentiments de haine que le lemps grossissait. Enfin 1789 fut l'époque où ils éclatérent; alors, au nom de l'égalité, de la fraternité et de la liberté humaine, tout ce qui restait encore debout de ce régime fut jeté bas. Puisque Dieu, disait-on, a donné la liberté aux hommes, c'est as- surément pour qu'ils en usent. C'est l'outrager que d'asservir la plus noble de ses créatures. Les peuples ne doivent relever que d'eux- mêmes; Cest pour eux el par eux que les affaires publiques doivent être dirigées; ils doivent veiller à leurs propres intérêts, c'est leur droit. Mais bientôt ces principes d'élernelle vérité s'éclipsérent sous les atrocités et les sophismes des fanatiques et des laches. Puis ils reparurent plus tard pour disparaîlre de nouveau; si bien qu'à cette heure on pourrait se demander si le Gouvernement ou l'Etat, comme on dit, n'est pas appelé à remplir à l'égard de la nation francaise le méme róle que le seigneur vis-à-vis de ses vassaux. Car, si la simi- litude n'est pas complete, l'on conviendra du moins qu'il y a nombre de traits qui se rapprochent et se ressemblent. De telle sorte, nous aurions délruit ce qui nous déplaisait en pelit, pour le reconstruire en grand. Enfin, grâce à l'absorbante centralisation du pouvoir, l'on pourrait assez justement nous comparer à ces enfants conduits à la lisière, qui sans cesse regardent derrière eux afin de s'assurer si leur bonne n'est pas là toujours prête à maintenir et guider leur démarche, Où allons-nous donc? Conlinuerons-nous à prendre l'Elal pour notre direcleur en toutes choses ; avons-nous renoncé à toute inilia- live? L'égoisme, l'insouciance, l'abnégalion ont-elles pour longtemps encore paralysé le ressort de la vie publique? Et s'il faut dans ce monde un aliment à l'esprit de l'homme, la génération qui s'avance est-elle condamnée a n'avoir pour mobile de ses actions que la passion du jeu, l'amour et les besoins abrulissanls d'un luxe écœurant ; el l'agricullure ne peut-elle décidément prospérer el grandir que par le concours et l'appui directs de l'Etat? Pour- quoi, je le demande, alors chercher des exemples en Angleterre et nous les offrir comme modèles? Ayons le courage d'avouer notre mal, nous aurons au moins le mérite de la bonne foi. Mais quoi! une impulsion secrete, le témoignage de la conscience nous le disent, rien de grand, rien de fécond et de longue durée ne se fail que par le concours et la libre volonté des citoyens. Et puis, il faut tenir comple des fails : les grandes forlunes industrielles et territoriales acquises par beaucoup de personnes sorlies de tous les rangs, lin- 192 fluence el la position qu'elles donnent dans le monde, confondront insensiblement dans une méme sphère d'action des éléments de nuance différente; ainsi la force des choses, plus puissante que la volonté des hommes, nous ramènera à cel élat de liberté justement équilibrée vers lequel aspirent tous les esprils élevés, qui admettent el acceptent les inodificalions profondes que le temps et des révolu- lions successives apportent loujours dans la constitution originelle des sociétés (1). Soyons justes aussi, reconnaissons que dans ces der- niers temps, M. le Ministre de l’agriculture a pris une excellente mesure, lorsqu'il a créé de larges primes pour les exploitations les mieux dirigées; cel encouragement est assurément bien entendu. ПҸ: Profondément convaincu que la vérité est le meilleur des argu- ments en faveur d'une cause que l'on veut servir et défendre, je dois encore appeler l'allenlion sur des exagéralions, des croyances erro- nées mises en avant par des théoriciens amis dévoués, je veux le croire, mais amis imprudents ou peu éclairés, et en tout cas fort dangereux. Depuis quelque temps, j'ai souvent lu, dans deux nouveaux jour- naux consacrés à la défense des intérêts agricoles, des articles où l'auteur affirmait que l'industrie agricole offrait, de méme que toutes les autres, les moyens d'arriver facilement à la richesse. Pour l'au- leur, l'agriculture élait une source de profils sûrs et magnifiques. Ces affirmations m'étonnaient, me faisaient sourire et ne m'alar- maient pas. Mais je n'ai pu me contenir lorsque, il y a peu de jours, jy trouvai la phrase suivante. Je la copie : « On compte les enrichis peu nombreux relativement de la finance » el de la Bourse qui ont récolté des millions ; mais il serait difficile » de compler, lant ils sont nombreux, les enrichis de l'agriculture » qui, de 1853 à 1857, onl bénéficié par dizaines ou par centaines de » mille francs; ce sont choses notoires, incontestables, » (1) Je ne désespère done point. Non, je ne ferai point à mon pays l'injure de le comparer à ces contrées déchues où rien ne se pratique que sous le contrôle et par les ordres d'un maitre. Dieu merci, il n'est pas à ce degré d'abaissement et de déca- dence ; toutefois, il n'est peut-être pas inutile de rappeler que partout et toujours les mêmes causes produisent les mêmes effets. 193 Par dizaines de mille, oui, cela est possible ; mais par centaines de mille francs, oh! assurément cela est fort peu noloire et trés con- testable, à moins qu'on ne veuille attribuer à l'industrie agricole les bénéfices d'autres industries, telles que les distilleries et les sucre- ries de betteraves, dont la plupart sont au compte et dirigées par des propriétaires faisant valoir leurs domaines ou des terres affermées. Mais nous contesterons ce chiffre si l'on prétend l'appliquer à l'in- dustrie purement et simplement agricole, et nous dirons : voilà de l'exagéralion propre à engendrer de funesles illusions. Non, il n'est pas si facile d'arriver, et surtout si promptement, à la réalisation de grands bénéfices en agriculture que dans une foule d'aulres industries. La raison en est simple et facile à donner. Nous prendrons un exemple pour mieux nous faire comprendre, pour meltre à méme de mieux apprécier l'exagération de ces paroles, la justesse ou l'erreur de nos conviclions ; car, avant lout, c'est la vérité que nous cherchons et voulons établir. Supposons donc qu'un cullivateur a pris à ferme un domaine de 200 hectares (nous prenons celte contenance parce que nous croyons qu'elle est la limile au-delà de laquelle on ne peut exercer une salu- laire surveillance). Nous admettons que le sol de ces 200 heclares est de différente nature, d'une exploitation facile cependant et d'un rendement moyen, el enfin susceptible d'être loué 70 fr. l'hectare, nets d'impóls. Voyons maintenant quelles seront les dépenses de ce culli- valeur pour les frais de toute nature, y compris le paiement du fermage. L'exploitation de 200 hectares exige au moins 4 charrues allelées de 4 à 6 bœufs chaque, 6 à 8 herses, 2 à 3 rouleaux, 1 machine à baltre, 1 ou 2 1агагеѕ, 2 charretles а bœufs, 2 à cheval, 5 chariots, un nombre de vaches et d'élèves de bêtes a cornes qui ne peut s'éle- ver à moins de 60 têtes, 4 à 5 chevaux, une dizaine de porcs dont 4 à 5 truies portières. Tel sera, à peu de chose près, le cheptel qu'il devra posséder s'il veut être dans de bonnes conditions. Récapitu- lons et voyons le prix de ces divers objets, afin de nous rendre compte du capilal engagé, el sur lequel nous prélèverons un intérêt de 10 pour cent. ZoGharrues, A OU fp. T Une. о. e verias es ueste Y IRE 240 ЕБОР 3.600, fr. а NAG vs ds aua Sn Же ОП) SAREES cd. AU I. ЛП sn aies ces a RAS a RU 240 2 Rouleaux en bois, 4:20 fr. LUD, a. aers eee sme Rint a 40 iA ерок ек INS doute лао) Reporta ли eet 7,720 1 Machine а batlre, avec ses accessoires............ 720 D'"Tdrarés; 220th l'US е PU UO BD PRIM 80 2 Charrettes'à boeufs; à 300. fr^ l'une; 22115 АЛИ, 600 9 Id. à cheval’ а ЗОО Panes: BAe! eee ee 600 5 Chariots id. at OO PATI DS E ne MAE d 1,000 60 Tétes de gros bétail à cornes, à 200 fr. l'une....... 12,000 (LU G9] des jc oe ase D OY CD ERE VO Eee ARR tr 600 5 Chevauxcde 500 fr: chatte... ns RIEN MM 2,500 Totaly d. wee ңе Pa A 25,820 DEPENSE ANNUELLE. Intérêts à 10 pour cent de 25,820 fr., capital engagé dans les objets détanllés an compte précedente" Du as oe 2.502 0 Domestiques. — 4 Filles de basse-cour, a 130 fr. de gagesichacune Tele 520 » = 2 Teneurs de charrue, à 200 fr ... 400 » — 2 Bouviers ou conducteurs, id.... 400 » — 2 Valets de bras, à 200 fr......... 400 » — 11 ROUHErS A 200 ЯГ ЕККЕНДЕ. 200 » — 1'Cuisinicre a 450 trees. eee 150 » Dans le cours de l’année, un certain nombre de jour- naliers pour le binage des plantes sarclées, le fauchage des foins, et autres travaux d’urgence............... 700 » Semences de céréales de toule sorte............... 3,000 » Total des frais annuels......... 8,352 » non compris le prix de ferme. Intérêts de cetle somme, à 5 pour cent............. 417 60 Fermage de 200 hectares, à 70 fr. l'un............. 14,000 > dolar eee Е 22.769 60 Voilà done, si notre compte est exact et basé sur une juste éva- lualion des choses, une dépense de vingt-deux mille sept cent soivante- neu[ francs 60 c. sur laquelle le cultivateur devra compter à peu pres chaque année. Quel sera le rendement, et par conséquent le bénéfice, en suppo- sant que l'opération a élé sagement et habilement dirigée, ei que lous les produils du sol se vendent à un prix moyen? Examinons. Admettons que l'assolement de 4 années a été suivi comme étant 195 le plus avantageux, et que les 260 hectares ont été ainsi répartis, savoir, 1'* année : 25 Hectares en pommes de terre, choux, navets et fumés.. 25 25 Id. еп betteraves, carottes et également fumés... 25 50 Id. еп blé, fumés par le cultivateur sortant l’année precedentes sens ses à oo 0 » DO 25 Idii en avamneravec trèfle... тооно uae Ws ЧОБ Id. en orge, avec tréfle.......... 2007.5, SE ВЭБ 25 Id en prairies олегпе et sainfoin... -eseese ae 25 25 Id. еп trèfle laissé par le précédent cultivateur... 25 Лоа. з. UE 29402900 RENDEMENT MOYEN. Le rendement moyen de 50 hectares semés en blé peut êlre éva- lué à raison de 90 doubles décalitres à l'heclare, soit pour les 50 hectares 4,500 doubles décalitres, qui, au prix moyen de 4 fr. Dumadaunent'- Р, па оса ae 18,000 fr. Le mou aes 25 dest semés en avoine, raison de 120 doubles décalitres à l'hectare au ut NOME Me ILI donnes: eeepc 4,390 fr. Le rendement des 25 hectares semés en orge, à rai- son de 120 doubles décalitres à l'hectare et au prix de Juin oU SOOO: АЙЫН ЖЫК dioe pco aa tie s eia АШСАН КН 3,250 fr. Nous ne ferons point entrer dans ce comple, les betteraves, les pommes de terre, les carotles, les navets ; il en sera de méme du rendement des prairies el des pailles, parce que tous ces produits doivent élre absorbés, les uns pour la nourriture, les autres pour la litière des besliaux. Observons toutefois que si le rendement de ces dernières cultures a été salisfaisant, les 25 hectares cultivés en betteraves el carotles, auront donné ей рола 724,000 kil. Les pommes de terre, navets et choux. ...... 20 uer eS PLATES Е OOS aE OO 150,000 ТОДА жык va ae SUD Pour être convenablement nourri, chaque animal, bœuf de tra- vail, vache, élève d’un an, devra recevoir par jour 25 kilog., soit belleraves, soit carolles ou navets, avec un mélange de 5 kilog. de foin sec au moins. Or, il y a dans les étables 84 têtes de gros bétail. 196 Ils devront donc absorber chaque jour une ration en racines pesant ensemble 2100 kilog., ce qui donne pour les 365 jours de l'année un pords-toialrde? 38.892408 HOLD ӨтӨ, an mine. .. 766,500 kil. Plus en fourrage sec, 451,200. ARE 151,200 Ce qui donne un total en poids de..... ......... 917,700 Qu'il.faut retrancher de... 980: 2928: Joss 95. 1:023.000 Ki]. 917,700 Restent. „зул; PE Inc pe 26,000 pour la nourriture des porcs et des chevaux. Les chevaux devront en absorber 12,000 au moins. Restera donc enfin pour les pores el l'engraissement des bœufs, si le cultivateur désirait l'entreprendre, 13,000 kilog. au plus, quantilé insuffisante. Mais nous supposerons qu'il a économisé sur la nourrilure de son bétail en général, afin de faciliter celle opération. П est facile de voir aprés cet examen ce qu'il peut converlir en argent pour faire face à toutes ses dépenses el payer son fermage. En effet, nous savons, d'une part d’après le compte précédemment établi, quelasomme deses chargess'éléveau chiffrede 22,769 fr. 60 5,000 27,769 fr. 60 D'une autre part nous savons également qu'il a récollé en blé une valeur de... RR NE CS UE S E Meee STORES OOO: О tn SORS ORE OE SUN n v sre Pria Азга 4,350 оогоо О A serous efits as NU E 3,250 Il pourra avoir en pores élevés et engraissés une valeur е кк Ера Акы anne epe DA Es © a 2.400 En bêtes à cornes, élèves ou animaux engraissés une valeur demre e a CSL Miel 3,200 valeur de.... 2,400 Entout 21083; 600 ir Enfin en élèves de divers âges, une Mais de ces 33,600 fr. montant de la recette, il faut retrancher la valeur du blé, de l'avoine et de l'orge mis en réserve pour les se- mailles, la nourriture des gens et des animaux, valeur qui ne peut être évaluée, d’après le calcul, à moins de 5,000 fr. Il lui resterait donc en fin de comple après toutes ses dépenses Soles rs urit sees nap MIEL redes PRES OUU 27,700 Resle...... 5,900 197 Nous avons négligé de faire entrer dans nos calculs le prix de quelques denrées, telles que le beurre, le lait, les œufs, les poulets, parce que nous n'avions pas fait figurer dans la dépense les mé- moires des ouvriers estimant que les uns pouvaient compenser les aulres. Eh bien! nous ne le dissimulerons pas, ce bénéfice de 5,900 fr. après une année passée dans de rudes travaux, paraîtra bien mi- nime, si l’on veut surlout le rapprocher des dizaines, des centaines de mille francs dont on nous parle ; el cependant combien de cul- livateurs s'en contenteraient, je n'en sais pas le nombre, mais j'af- firme qu'il serait bien grand. En cilant ces énormes chiffres, on n'a pas réfléchi que l'industrie agricole n'offre pas la méme élasticité que les autres. Le cercle dans lequel un agriculteur peut agir a ses limites. Si habile, si actif qu'on voudra le supposer, jamais il ne pourra étendre convenablement, utilement sa surveillance sur une étendue de 200 à 250 hectares au plus. Or, nous le demandons, n'est- il pas moralement impossible que sur une surface de celle étendue l'on puisse se promettre de créer des produits capables d'enrichir un cullivaleur en peu de temps? Disons-le donc, et nous dirons plus vrai, ce n'est qu'aprés plusieurs années de labeur incessanl, de sages el constantes économies, qu'il peut espérer parvenir à l'ai- sance, rarement à la richesse. Nous conviendrons cependant que si l'agricullure, quoique dirigée par des mains habiles et prudentes, offre moins de ces chances heureuses qui mènent rapidement à la forlune, les causes de revers et de ruine rapides y sont moins nom- breuses que dans les autres genres d’industrie el nous reconnaitrons encore que parmi les avantages qu'elle présente, il n'en est pas de plus vrais, de plus sürs que les amélioralions qu'elle apporte aux domaines des propriétaires cultivaleurs, lorsque ceux-ci savent en diriger les travaux avec intelligence. Voilà le langage que nous aulorisent à tenir trente années passées dans la pratique, et nous nous félicitons d'étre arrivé à ce point que les plus séduisantes théories, les plus belles promesses ne nous imposent plus. Nous terminons ici la tàche que nous nous étions imposée. En l'ac- complissant, nous n'avons eu qu'un seul but, un seul désir : Pré- munir contre l'exagéralion, esprit de système et les fausses théo- ries, dégager l'agriculture de ses entraves, accélérer ses progrès, en ramenant dans la voie de la prudence, de la raison et d'une saine pratique des esprits faciles à se laisser aller aux séduclions, en en- gageant les hommes que leur posilion mel à méme de faire quelques sacrifices, d'aider les cultivaleurs de leurs deniers, et de les encou- rager par un plus long séjour sur leurs domaines. Nous ne nous 198 flatlons point d'avoir réussi, nous sommes loin de le croire, nous nous estimerons heureux si l'on veut bien nous tenir compte de notre intention et de nos efforts, el reconnailre que nous avons ré- tabli sous leur véritable point de vue des fails importants trop sou- vent dénaturés. Janvier 1858. CH. GIRAUD. H.L. lith. Galles Lith.de E. BARASSÉ, Angers. trouvées sur le Quercus Pedunculata. DESCRIPTION DE ۹ DEUX ESPECES DE GALLES TROUVÉES SUR LE QUERCUS PEDUNCULATA. Les différentes espèces du genre Quercus sont sujettes à porter des excroissances parliculiéres résultant de la piqûre de certains insectes, el qu'on désigne communément sous le nom de galles. Celles que l'on emploie dans le commerce résultent de la piqüre sur les bourgeons encore jeunes; mais cependant ce n'est pas là la seule partie qui ait été ainsi atteinte; c'est ainsi que l'on trouve des galles sur les rameaux, les pélioles, les nervures des feuilles, tantôt à la partie supérieure de ces organes, tantôt au contraire à la partie inférieure. Dans quelques circonstances, comme nous avons eu occasion de l'observer, les modifications se présentent sur les racines de l'arbre, ou bien sur les organes de l'inflorescence, particulièrement sur le prolongement de l'axe qui supporte les fleurs. On peut, dans un certain nombre de plantes, trouver des galles seulement sur un organe quelconque; mais il arrive souvent aussi que les plantes sont attaquées en méme temps sur divers organes ; c'est ce qui se présente dans le fait que nous éludions aujourd'hui, et l'opinion généralement admise est que c'est à des espèces différen- les d'insectes qu'il faut reporter les galles produites sur les feuilles ou les organes de la reproduction el sur les racines. Laissant de côté cette question, sans contredit extrémement inté- 200 ressante, mais qui est plutôt du domaine de l'entomologis!e que du bolaniste, nous nous occuperons seulement de rechercher quelles modificalions ont été apportées à la structure intime du végétal sous l'influence de la piqûre de l'insecte. Dans le courant de l'été dernier, nous avons reçu du bois de Sou- don, près Cheffes (Maine-et-Loire), des galles récoltées sur le Quer- cus pedunculata, dont le plus grand nombre se trouvait sur l'axe des chatons males; une seule galle, au contraire, avait été récollée sur les racines de cette plante: c'était un corps fixé à l'une des racines les plus supérieures d’un chêne et presque complètement caché, nous a-t-on dit, par la terre et la mousse (figure 7); son volume était, à peu de chose prés, celui d'une de ces pommes que l'on désigne sous le nom d'api; sa couleur, d'un jaune rougeátre, rappelait celle d'un orobanche ; la surface externe, recouverte d'espèces d'aréoles, imitail très bien celle d'une truffe blanche ; mais en pratiquant la coupe, il nous fut facile de reconnaitre que nous avions affaire à une galle, car sa partie centrale était creusée d'un nombre assez considérable de petites cavités (fig. 2), une vingtaine environ, renfermant cha- cune une larve; la couleur de la galle (suivant la coupe) rappelail très bien celle du Monotropa hypopytis frais, principalement dans la partie intermédiaire aux cellules des larves; l'intérieur de ces cel- lules était d'un blanc trés pur; chacune de ces cavilés semblail for- mer un sphéroide d'environ quatre à cinq millimètres de diamètre; lorsque nous avons pu étudier la structure de celte galle, elle avail été exposée pendant quelques jours au contact de l'air; aussi sa couleur était beaucoup plus foncée. Examinée au microscope, cette galle nous a offert des cellules arrondies, volumineuses, remplies d'une matière abondante, à forme peu distincte, mais que la coloration en bleu par l'iode nous a fail reconnaitre pour de l'amidon. Les cellules les plus rapprochées des cavilés des larves étaient beaucoup plus peliles, de forme allongée, assez irrégulières, et semblaient disposées en rayonnant autour de la cavité; elles présentaient une grande adhérence entr'elles. De la base de la galle partaient quelques faisceaux fibreux qui s'ir- radiaient de toutes parts dans son tissu, mais qui semblaient abon- der surtout dans la région intermédiaire aux cavités des larves et à la-périphérie de la galle. Sur la même plante, on a récolté encore des galles très différentes et portées sur l'axe de l'inflorescence mâle (fig. 3); ce sont des ex- croissances arrondies, d'un volume peu considérable, variant entre celui d'une lentille et celui d'un fruit de cratægus, el fixées à l'axe sur une longueur d'environ un centimètre. 201 La forme généralement sphérique, lisse, sans aucune rugosité ni villosité, assez régulière, mais quelquefois modifiée par un ou plu- sieurs sillons cicatriciels, est quelquefois allongée el comme bosse- lée; mais alors elle est due à la soudure de plusieurs galles entr'elles (fig. 4, 5, 6); quelquefois cette réunion des galles voisines est opé- rée de telle sorte qu'en examinant le groupe méme qu'elles consti- tuent, on reconnail au premier coup-d’ceil qu'il y en a plusieurs soudées ensemble. Il est d'autres cas moins fréquents où il semble qu'on n'a affaire qu'à une galle unique (fig. 4), de forme plus ou moins allongée, présentant quelques irrégularités ou bosselures; mais rien ne per- met, avant d'en avoir opéré la coupe, d'affirmer qu'on ail là une galle unique ou le résultat de l'union intime de plusieurs. Avant d'aller plus loin, nous observerons que si un grand nombre des inflorescences sont ainsi alleinles par la piqûre de l'insecte, on en trouve au milieu d'elles qui n'offrent aucune altération patho- logique. L'observation nous a démontré que les organes essentiels de la reproduction ne sont point allérés par l'afflux plus considérable des sucs vers la partie lésée, méme pour les fleurs qui prennent nais- sance sur l'axe au point méme où la galle s'est formée et qui persis- lent à sa base, parfaitement conformées. La couleur de ces galles (du Quercus pedunculata) est d'un jaune verdátre clair; cependant, certaines d'entre elles sont colorées de rouge vineux sur leur surface. Quand on opère la coupe d'une de ces galles, on trouve au centre une cavité unique, du diamètre d'un centimètre environ, générale- ment sphérique, renfermant dans son intérieur une ou moins sou- vent plusieurs larves, et circonscrites par une couche de tissu plus serré et plus résistant. La teinte de l'intérieur de ces cellules est généralement d'un blanc verdâtre trés pâle; jamais on ne trouve qu'une seule cavité dans chacune des galles, à moins cependant qu'elles ne soient formées par l'union intime de plusieurs excroissances voisines ; dans ce cas, on trouve un nombre de cavités égal à celui des galles soudées. C’est ainsi que dans la figure 7 on trouve deux cavilés de dimensions égales et renfermant chacune une larve arrivée à peu prés au méme degré de développement; dans tous les cas analogues, le plus souvent une légère dépression au niveau de la soudure permet d'indiquer à priori qu'elle existe. Dans la figure 8, nous avons un exemple de la soudure de trois 202 salles ensemble, lesquelles restent distinctes, méme à l'extérieur, comme le démontre la figure. Dans la figure 9, nous avons un exemple de trois galles soudées ensemble, à peu peu prés également développées et renfermant des larves parvenuesau méme degré de développement ; dans ce dernier cas, comme l'indique la figure, les traces extérieures de la réunion de trois excroissances sont très peu apparentes. Le plus ordinairement, les galles les plus jeunes offrent une résis- lance plus grande, se rapprochant davantage de celle du bois, tandis qu'au contraire celles qui sont plus volumineuses, qui renferment les larves les plus avancées en áge, ont une consistance charnue et n'offrent qu'une faible résistance à l'instrument tranchant. En soumettant ces galles à l'examen microscopique, nous avons vu que la surface interne оп épiderme (fig. 10, 11. 19) est formée d'un certain nombre de cellules polyédriques, irés irrégulières, d'une forme sensiblement subtriangulaire, à parois assez épaisses, ne présentant entre elles aucune lacune, ne laissant pas distinguer trace de slomates de distance en distance, mais répandus sur la sur- face d'une manière assez irrégulière. En faisant une coupe transversale à la partie médiane d'une de ces galles, nous voyons vers la parlie intérieure une couche formée de cellules épidermiques trés aplalies, à parois trés épaisses, ne pré- sentant aucune trace de substance intercellulaire et ne laissant ren- trer sur aucun point la présence de stomales. La couche épidermique la plus interne se distingue facilement des couches sous-jacentes en ce qu'elle est d'une teinte plus foncée; au-dessous de l'épiderme sont des cellules polyédriques trés irréguliéres, à parois trés minces, et qui vont en diminuant de volume d'une maniére assez sensible, depuis une certaine distance de l'épiderme jusqu'à la partie la plus interne; à ce point, et surtout près la couche immédiatement en contact de la cavité interne, les cellules deviennent extrêmement petites, se rap- prochent beaucoup de la forme elliptique , et offrent immédiatement au contact de la cavité une couche de cellules quadrilatères trés serrées el opérant, chacune d'elles, une saillie dans la cavité, ce qui pourrait expliquer jusqu'à un certain point, son aspect velouté. Un coupe perpendiculaire , opérée à la partie médiane d'une galle, nous montre l'épiderme constitué d'une manière analogue à ce que nous l'avons vu dans la coupe précédente ; puis au-dessous des cellules à forme très-irrégulière présentant des angles toujours bien marqués , mais affectant d'une maniere générale une forme globuleuse ou elliptique. 203 C'est vers la partie médiane, intermédiaire à l'épiderme et à la ca- vité de la larve que les cellules atteignent la plus grande dimension. C'est à ce point également qu'on trouve cà et là quelques faisceaux fibreux el vasculaires qui semblent constitués principalement par des cellules allongées. Dans la parlie la plus inférieure de la galle, les cel- lules deviennent beaucoup moins grandes, ont un diamètre trans- versal beaucoup moindre, en conservant le même diamètre longi- tudinal. Elles sont très serrées entre elles, diminuent progressive- ment de volume et finissent par former un tout compacte de cel- lules quadrilatéres ou arrondies, très nombreuses. Si on a soin de prendre dans cette coupe perpendiculaire, l'axe qui porte ces galles, on voit que dans la parlie supérieure de cet axe quelques fibres s'é- cartent et pénètrent au milieu d'une quantité considérable de cellules arrondies el qui augmentent d'autant plus de volume qu'on s'éloigne davantage du point d'oü part l'encroissance. Si on examine l'axe au point où deux galles voisines sont soudées, on reconnaît parfaitement le point de départ de chacune des deux modifications, chacune d'elles se comportant comme si elle était seule et la soudure de leurs parties ne se faisant d'une manière nette qu'à une certaine hauteur au-dessus de l'axe florifère. Sans nous occuper de la délerminatiou des diverses espèces qui ont pu occasiouner ces phénomènes de nos galles, nous pouvons in- diquer que, par le caractère des larves, on est parfailement en droit de conclure que ce sont des larves d'insectes hyménoptères, appar- lenant au genre cynips ou à des geures provenant du genre cy- nips (fig. 11). Un des fails qui viendrail à l'appui de ces assertions, en dehors du caractère zoologique des larves, ce serait la formation d'une couche particulière à chacune des cavités tandis que les galles dues à la pi- qûre d'autres insectes, présentent ordinairement une cavité sans parois propres au milieu de la masse des tissus qui les conslituent. J.- LÉON SOUBEIRAN. TRIBULATIONS D'UN BOTANISTI L'heureux temps que celui où nos pères en botanique, les Bastard, les Béclard, les du Plessis, les Davy La Roche, les Guépin, exploraient le pays sous la conduite de Merlet La Boulaye ! C'était l’âge d'or de notre Flore. Je pourrais remonter plus avant dans le passé, alors que Dupetit-Thouars, à son retour des tropiques, voyait pâlir l'éclat de son herbier devant les fleurs de sa patrie; qu'une femme iniliaitaux mystères de la végétation l'un des trois maîtres de la France; que le baron de La Richerie consignait le fruit de ses conquêtes dans un manuscrit digne des Bénédictins; que Guettard s'égarait à la re- cherche de nos cistes sur le chemin de Nevers à Poiliers; qu'enfin l'ainé de tous, Dupaty, s'enivrait de science et d'amour au calice d'une Clandestine!... Mais limitons le passé pour mieux circonscrire les regrets. D'ailleurs ces tentatives isolées et partielles, ces progres- sives reconnaissances qui sont à Геге définitive comme les lueurs de l'aube au lever radieux du soleil, n'ont ni la plénitude, ni l'éclat, ni l'ensemble propres à la génération que j'envie. Plus merveilleuses peut-être à raison du caractère aventureux qui les distingue, des il- lusions charmantes dont nul berceau n’est dénué, des vagues et indécises régions où elles s'exercent, elles échappent d'elles-mémes à toute comparaison. — Ce n'est pas le moindre de leurs mérites ; car si je m'y arrétais, je ne m'en délacherais plus, étant de ceux qui donneraient pour les pénombres mystérieuses d'une chapelle by- zantine ou d'un cloitre roman les splendeurs de la période ogivale.... Laissons là nos aieux et revenons à nos péres. Quelque positive du reste que soit la date de leur début, ils n'en parlicipent pas moins largement aux bénéfices de l'ére antérieure. Ils avaient derrière eux le vieux passé , celte grande ombre qui n'a rien de commun avec la transformation successive du présent de chacun de nous en ombre et en passé. Un sol inexploré où les pas 205 rares des devanciers laissaient autant de prestiges que d'empreintes, sol vierge, ou à toul le moins si innocemment cullivé que ses pro- duils, commis à la garde du ciel, n'en altéraient point la nature: ici des landes sans fin, là des fondrières illustrées par l'un des épi- sodes les plus émouvants de la science ; des bois partout debout, des roches intégres, des étangs, des iles lourbeuses et flottantes où les plus intrépides jelaient leur boite, à l'instar de Condé, avant de s'y précipiler eux-mêmes. — Voilà par où les hommes de mil huit cent et tant confinaient à la création du monde. Ils différaient des autres par les indications premières qui leur déblayaient le champ et leur ouvraient des perspectives à perle de vue dans l'horizon, par les riches induclions que la zoologie naissante faisait foisonner autour d'eux. Ils différaient de nous par l'inappréciable ignorance de ces limiles auxquelles il faut s'aheurter 101 ou tard. Ils ne touchaient point le fond. Ils procédaient sans s'arréler avec la liberté opulente et pro- digue du moissonneur qui dit: à demain les glaneuses. Ils ne s'essouf- flaient point : La vie que nous mesurons au balancier d'une loco- motive se mesurait pour eux а la longueur de leurs pas. Le piéton marche dans les siècles ; la brièveté de la vie est une invention de la vapeur. Ajoutez à cela le cachel d'extrême insouciance que l'époque militaire imprimait à la généralion; car, sympathie à part, rien n'excelle à calmer les agitations d'un état comme la guerre. Là oü l'avenir n'est pas, d'où les préoccupations nailraient-elles? — Et quand au soir rentrail la bande gaie comme avril, jeune comme mai, sa gerbe sur le dos, l'œil tourné vers la ville plus pittoresque encore que les champs qu'elle avait quillés, — c'était à peindre. — Mais à peindre aujourd'hui; les choses hélas ! ne se voient bien qu'à la dis- lance d'un demi-siecle. Quel jeu nous leur faisons, lorsque nous arrivons, haletants, de la poursuite de ces espèces qu'ils cueillaient autrefois sous les batteries de nos remparts. Malheur, trois fois malheur à l'honnéle aspiraut de Flore qui herboriserail dans la banlieue avec Merlet La Boulaye pour cicerone ! Je ne répondrais pas qu'il ne revint de sa journée plus efflanqué el plus clique qu'une plante pressée entre les feuilles d'un herbier. Ce ful le point de départ des myslificalions d'un pauvre mien ami dont le souvenir ne se réveille jamais en moi sans un léger sourire recouvert d'une profonde tristesse. Un peu à la manière du respecta- ble Chevalier de la Manche qui, la lête farcie de romans de la Table Ronde, roinpait une lance avec les muleliers d'une auberge, ei me- паса Fier-a-bras entre les ailes d'un. moulin, il s'était exallé par l'herbier de feu son grand-oncle au point de chercher encore la Tulipe 206 à la Chalouère, la Chlore sur les fourneaux et le Ménianthe à Saint- Augustin. Quelle âme candide, quand j'y pense ! Il n'y avait d'égal au miracle de sa persévérance que le prodige de ses déceptions. Au moment où la fantastique Hellébore posait sa griffe sur l'hiver, sa campagne s'ouvrait pour ne se fermer qu'à l'heure où la dernière Colchique s'évanouit à travers les brumes des prairies. Autant de courses, autant d'échecs; mais contre les réalités de la veille que ne peuvent les éblouissements du lendemain ! Je l'ai vu à peine remis d'un deses mémorables mécomples qui sont le tombeau d'une vocation, se redresser plus vivace, et le doigt obstinément fixé sur le théâtre de sa défaite : « C'est égal, disait-il, elle a fleuri, elle fleurira. Pourquoi faillirait-elle là où nos maîtres l'ont cueillie? Il n'est pas réservé à la malice des hommes de prévaloir contreles semences du bon Dieu. » Puis il retournait à la charge seul, et trahi cette fois dans son héroïque constance par ses amis découragés. Schiller dit quelque рагі : « Marche, hardi navigateur, et cette ile que tu cherches, quand méme elle manquerait au monde, naitra pour toi du sein des flots. » Schiller en a menti. Car si elle existait, celle alliance qu'il proclame entre la volonté et la nature, elle eût infailliblement triomphé, gráce au courage de notre ami, d'un pacte plus réel, des terribles conjurations de la cupidilé et de l'industrie. Ni engins, ni clôtures, ni bâtisses, ni défrichements n'y eussent résisté, mon pauvre Théophile! Devant toi l'ingénieur eût brisé ses jalons, le mécanicien, de dépit, se fût fait poète. Ces espèces abolies , couronne anlique de notre sol, elles eussent refleuri pour toi entre les pierres du macadam, sous la dent blanche des bestiaux et jusque sous la dent noire des usines. Oui ! je l'accompagnai à sa premiere expédition à la recherche de la Тийре. Nous demandàmes le champ de la Motte. On nous montra une exploitation hérissée de murs et de haies, ой des barges de foin disputaient la place à des maisonnetles et à des vergers. Je frappe. Un gros chien vient nous mordre aux jarrels. — « Tulipa sylvestris? » — L'enfant auquel il s'adressait avec une gravité qu'il faut avoir vue pour y croire se réfugia en pleurant dans les bras de sa mère. Nous entràmes : ce ne fut qu'au bout d'une demi-heure, en butte à la dé- fiance et l'importunité des habitants que nous crûmes découvrir à la cornière d'un fossé quelques méchants cayeux dont trois feuilles au plus survivaient aux ravages de la béche. De fleur point. — Voilà donc ce qu'il restait de cette virginale Tulipe, à la tige flexueuse, au calice allongé et pointu, et qui est à l'orbése, lourde, prétentieuse Тийре de nos parlerres ce qu'est l'oiseau du ciel à nos volatiles de basse-cour. 207 « Allons, mon cher, patience, nous cueillerons demain le Ménian- the aux carrières de Saint-Augustin. » Je ne sais si le Ménianthe nous eût parfaitement consolés de l'ab- sence de la Тийре; mais trois cents hottées de terre, accumulées sur la flaque d’eau où, par une touchante et vénérable tradition, les Flores d'aujourd'hui le mentionnent encore, rendaient la question super- flue. A quelques pas de là s'ouvrait une excavation vierge dont l'effet ressortait sur les nivellements d'alentour. D'autres y eussent admiré la délicate ceinture qu'un cercle d'Hottonia formait autour d'une petite ile tissée par les entrelacements des Sphagnum. Mais l’ Hottonia court les fossés; el qu'imporlent d'ailleurs les sveltes filles d'Hotto- nius à qui cherche les fleurs de la lune ? (Ici une parenthèse à l’article Hottonia. Avez-vous observé cette hampe étroite et sans fin qui oblique sous les eaux pour se rattacher à la terre par une base fourchue comme le pied de Méphistopheles ? On dirail que celle plante dont la têle relève des cieux tire de l'enfer sa racine. Fermons la parenthése et retournons au Ménianthe). Je le cherchai cinq ans; car je ne puis compter cette pauvre feuille fanée, que larame du meünier d'Ignerelle sur le Loir fit sauter devant moi par une traversée d'octobre. La première fois que je le vis, — Théophile n'y était plus, — ce fut dans l'un des prés humides qui avoisinent l'étang de Beaucouzé. Là, sur la plus suspecte de ces émi- nences spongieuses oü le pied du botaniste ne se pose guére impu- nément, il trónail. Ses longs tubes dont une nuance rosée altérait seule la blancheur s'échappaient en thyrses de sa lige trifoliée. Plus loin et à distance, le groupe des Eriophores s'inclinail respeclueusement devant lui; on eût dit ses corolles filées avec les touffes soie et argent de leurs quenouilles. D'un bond je me précipitai sur le tertre.... Té- mérité ! Le Ménianthe se regarde et ne se cueille pas. Comme j'allon- geais la main en répétant que Salomon dans toute sa gloire n'était vêlu que d'oripeaux auprès de lui, je disparus dans l'eau jusqu'à la hanche. — Hàtons-nous de faire savoir à lous nos confrères à venir que grâce aux asséchements d'un propriétaire enlendu, le marais de Beau- couzé peul s'explorer à pied sec. Il n'y a plus désormais ni péril ni Ménianthe. Quand Théophile revint de chercher l'Orchis simia dans les prairies de la Papillaye, j'allai au devant de lui. Je lus son désappoinlement sur sa face. Il avail constaté l'existence du macula et du morio. Il avail méme respiré à la cime du maculata ce parfum de vanille qui trahit une auguste parenié. Mais pas le moindre simia dans tout le canton de la Papillaye. Cela ne m'élonne pas, en dépit des aflirma- lions de Merlet La Boulaye et de La hicherie. Que diable allais-tu 208 faire aussi parmi les graves synanthérées, sur nos schistes ternes et froids, 6 loi la plus espiègle, la plus folle des orchidées ! Le morio te rend les armes et te passerait jusqu'à son nom, si le lien n'exprimait encore mieux les grimacantes excentricités de ta personne. Quels lazzis, quels caprices dans le dandinement de ces bras, dans l'enrou- lement de cette queue faite des trois pans de ton label? Quand, par un vent d'avril qui les fait pivoter au soleil, entre deux pluies, tes petiles figures, groupées en faisceaux globuleux, arrondissent leurs bedaines et rabaltent leurs capuchons sur leurs têtes, c'est à désopiler un Anglais. Ta place n'est point là. Elle est à Soucelles, à Baugé, sur les talus des bois de nos régions calcaires, non loin du militaris, ton ami. Si je m'appelais Charles Nodier, je ne laisserais point tomber une si rare occasion de passer en revue les membres de cette étrange fa- mille émigrée sous nos cieux comme une bande de Bohémiens. Le viridis intrigue par l'aspect ambigu el bléme de ses fleurs couleur de feuille et de ses feuilles couleur de fleur. Le bifolia réveur a des arómes inouis qui ne s'éveillent qu'au soir pour ne se rendormir qu'à l'aurore. L'Aircina est un bouc fétide et barbu comme son nom. Qui n'a vu se consumer l'ardent et sombre ustulata pareil à un tison dans la prairie? Je n'ai pas de souvenir plus frais que celui du pyramidalis délachant par un ciel d'orage ses pélales carmin sur l'horizon de Fontevrault. Quant au conopsea, il représente assez bien, dans les enchevêtrements de son architecture flamboyante, le mo- dèle en petit d'une flèche gothique du quinzième siecle. Ciré comme une giberne, riche et touffu comme un plumet, droit comme un grenadier au port d'armes, l'Orchis militaris unit, dans son allure martiale, l'éclat bruyant des uniformes à je ne sais quel ton de ma- lamore puisé dans la fréquentalion des camps; c'est le tambour- major de la troupe. — J'aimerais, si j'étais poète, à faire bourdonner lour à tour l'araignée, la mouche et l'abeille sur la lige tendre des Ophrys. Si j'étais professeur d'esthétique transcendentale à Munich , jenseignerais, à propos de ces jeux de la nature, de quelle mailresse façon elle se parodie elle-même, comme elle invente en imilant, quel idéal préside aux allusions et aux emprunts qu'elle opère d'un règne à l’autre. — El les Epipactis, le nidus avis par exemple, qui re- chigné d'aspect, couve une merveille dans ses racines, pareil à un avare qui enfouit son trésor? Et ovata, svelte et mystique; el le palustris qui, traqué de marais en marais, n'aura bientôt plus qu'un herbier pour asile ? En parlant tout à l'heure de la tête encapuchonnée du simia, nous n'élions que véridique, et nous ouvrions sans y songer la porte 209 à une induction féconde: c'est que les moines de la Papillaye, abusés par ce déguisement hypocrite, eussent déféré à des considé- rations de symbolisme en acclimatant le joyeux compère dans leur enclos. Elle se fortifierait par la déposition d’un témoin qui a surpris naguères un échantillon de cette espèce sur la lerrasse de la Bau- mette. Il figurait bien là comme une tradilion vivante du faux moine Rabelais dont le couvent a gardé mémoire. Qui sait même si le malin auteur de Garguantua ne s’est point amusé à y planter quel- ques oignons de cette plante si commune dans sa patrie? Il n'en est pas moins vrai que la plus légère intervention de l'homme dans la production naturelle du sol est pour le botaniste une source de mécomples el de douleurs. Oh ! ne Vabusez pas par un déplacement arbitraire des tribus affectées aux localités res- peclives, suivant leurs facultés, leur caraclere, leur génie! Pour ceux que n’arrélerait pas l'enchainement logique des espèces, qu'à tout le moins il y ait une considéralion pilloresque puisée dans le rapport de la végétation avec les lieux. Une nole de Mozart dans le Barbier ou dans Tancréde , une retouche de Rubens à une Madone de Giolto ne violeraient pas plus d'harmonies qu'un Bluet dans les bois, que dans les moissons un Muguet, qu'une plante des schistes dépaysée dans les calcaires. A nos schisteuses argiles, terrains substantiels et froids, ces fleurs modèles à qui rien ne manque et qu'on dirait créées pour l'étude des commencants. A nos calcaires ardents les anomalies, les hardiesses, tous ces caprices de la forme qui ne révèlent leurs secrels qu'à la perspicacité des adeptes. J'assimilerais le schiste, avec ses compactes moissons , à ces conslitutions régulières el sages, amies du positif et que la raison protège contre les entraînements de la passion. Moins propre à la culture, plus riche en spontanéité, le calcaire me repré- sente ces natures magnétiques et fébriles chez qui la pauvreté du sang, unie à l'exaltalion nerveuse, ouvre une large porte à lous les phénomènes de l'intuition. Boileau était schisteux, Hoffmann étail calcaire. Dieu, qui n'est point injuste, a équilibré ses faveurs entre les lieux comme entre les hommes ; à chacun ses misères, à chacun ses splendeurs. La où les blés sont maigres, où l'herbe avorle dans les prés, où le gland qui est semé germe en sapins et en bruyères, il a permis qu'aux anathèmes du laboureur répondissent les béné- diclions du naturaliste. En face de Chaloche, de l'impériale de cette voiture d'où le spécu- lateurjette un sourire dédaigneux: — « Arrétez, conducteur ! » — Et pioche en main, boite sur le dos, voilà deux voyageurs qui s'élanceut comme si l'Eden s'entr'ouvrail surleurs pas. La expire la culture, et 14 210 l'herborisation commence pour s'étendre et se renouveler de bois еп collines, de tourbières en friches, dans cette région privilégiée dont Chaumont est le plateau central. Là le myodes bourdonne, l'arachnea file sa toile, l'Orobanche cruenta ensanglante le gazon parfumé d'une odeur de girofle ; l'arenaria de montagne ouvre de grands yeux sur les talus, tandis qu'au haut de la lande l’ Anémone pulsatilla, repliant sa fleur comme une palte, dressant en l'air son fruit comme une ai- grelle, ressemble à s'y méprendre à une grue du Sénégal. -— О ruisseau de la Jarrye quele sombre Aconit ombrage, Fourneux chaud comme l'Etna, tout couronné d'Helianthémes, et toi parc de Sou- celles où l'Epipaelis fail son nid !... Mais quelle fougue m’emporte! Aurais-je donc taillé cette plume pour chanter les délectations du botaniste ? — A d’autres : Paulo tristiora canamus. Je dis et je maintiens que la mention par les maîtres de bon nom- bre de localités sur les nomenclatures, n’est plus aujourd’hui qu'un hommage rendu au malheur. Allez chercher Г Urtica pilulifera près de Saint-Serge, derrière l'auberge du grand saint Michel! Encore trois coups de pioche, etla Gagea d'Erignés'en relouruera en Bohème d’où elle est venue. Que n'y est-elle restée pour le repos de celui à qui elle est une seule fois apparue, un jour de février, sous la forme d'une étoile d'or ! C'est à travers un champ de glayeuls que les ingé- nieurs ont lancé leurs wagons sur Nantes. — Si encore les ravages qui s'exercent autour de nous assuraient la sécurité du reste! Mais à dix lieues d'ici sur la frontière de l'Anjou, au point d'interseclion de Challains, de Loiré et d'Angrie, il est une tourbière immense, pé- rilleuse, hantée de courlis et defollels.Je compléterais ma description d'un seul mot: c'est la patrie de l'Abama, celte fleur hybride, orni- lhorinque végétal où les uns voient un jonc, les autres un lys. Eh bien! le marais se dessèche, la lande se défriche ; chaque année les épis s'avancent en bataillon serré sur ce sol, effroi de quarante siè- cles. Un engagement s'apprête ; un choc terrible et décisif dont il est impossible de se dissimuler l'issue: l'Abama meurt et ne se rend pas! J'en passe, et des plus tristes, pour terminer par un grand coup. Qui ne connait le Pont-Barré, sinon par l'épisode sanglant dont son arche a gardé l'empreinte, du moins par l'àprelé de ses gorges à dé- lecler le pinceau de Salvator? Il a, pour le chercheur du Trifolium Bocconi et de la rare Calepine. un mérile de plus el qui ne gàle rien ni à l'histoire, ni au paysage, celui d'avoir été entre La Revellière- Lépeaux et Bonamy le rendez-vous de notre Flore. Quel séide de Dombasle, quel intrépide semeur de choux colza resterait insensible à l'aspect de ces deux collines qui se répondent, l'une toule panachée de Tulipa celsiana, l'autre qui porte sur sa créle une. corbeille 211 d Anthericum liliago ? En assignant deux points à cette floraison pré- cieuse, la prévoyante nature lui а de même assigné deux instants, si bien que lorsque la première s'éteint, la seconde s'allume. П y avail mieux encore : sur la cime la plus ardue de ces escarpements trónait jadis la reine des graminées, l'illustre et infortunée Stipa. La Stipa ne s'herborisail pas, elle se chassait. Pour cueillir sa glumelle à pédi- celle long et soyeux, les gamins de la contrée, aux yeux de lynx, aux pieds de chamois, оп! causé plus d'une transe à leur тёге. Mais le but absolvait le moyen: on voyait chaque année, aux processions de ia Fête-Dieu, flotter sur le dais des paroisses quatre magnifiques panaches semblables à la queue d'un oiseau de paradis. Elle était devenue rare. Eh qui s'aviserait de se plaindre d'une rareté qui profite à Dieu ! Il étail réservé à de moins innocentes mains de la rendre complètement introuvable : le malheur a voulu que le calcaire où elle se plaisait fût doué de magnifiques propriétés hydrauliques. Indè ire. — Oui ! colère de l'homme qui n'opére qu'avec des ruines, qui dévasle pour édifier. C’est dans ces conjonctures funèbres que Théophile et moi nous nous aventurâmes un jour à sa poursuite. La journée s'avancail. Nous n'avions récolté encore que les rayons d'un soleil de juin qui, dardant d'aplomb sur nos boites, en faisait jaillir des étoiles couleur de saturne. La fatigue l'emporta, et une faim rouge aidant, nous desceudimes le cóleau en prenant pour point de mire un реш cabaret célèbre parmi les confrères et qui n'aurait cer- les pas volé celle inscription : « A la descente des botanistes. » Hélas ! il faut diner! Et la pire condilion de notre nature, c'est de se trouver pris de faim en face de cette végétation délicale, régal des élres inférieurs. Comme je mellais le pied sur la berge du che- min, un cri de mon compagnon resté à cent pas derrière moi me fit tourner la lêle en arrière. « La Stipa! la Stipa! » A peine avait-il levé les doigts dans la direction du cóteau que le rocher éclale avec une explosion terrible, et que la dernière des stipas disparaît à nos yeux dans un tourbillon de fumée. Ici arrétons-nous. Un pénible aveu se présente; dans celte nécro- logie des espèces, loul le crime n'est pas imputable à l'ennemi. La science a plus près d'elle un fléau plus redoutable que tous ceux dont nous avons abrégé le tableau, « Tu quoque fili mi!» Des fils plus élourdis qu'ingrals font la désolalion de leur mère en ravageant sous ses pas ce monde charmant qu'elle aime à énumérer et à décrire. О mailres, défiez-vous de la rapacilé des disciples! Là ой tombe leur essaim, il en est comme d'un champ d'Egypte visité par une nuée de sauterelles. Théophile a trouvé contre ce genre de péril un ingé- nieux préservatif dont l'exemple peut être utile. Le bruit courait d'une battue projetée par les élèves d’un pensionnat sur un point inédit où l'Ophrys apifera croit encore. Vile il prend les devants, et passant une revue rigoureuse de tous les sujets menacés, il en brise avec soin toutes les têtes. Nos gens désappointés en face de cette plante mutilée, dont leur collection ne pouvait se faire honneur, s'en retournèrent; en sacrifiant la tige, il avait sauvé l'oignon. — C'est pourquoi, dans la république que je rêve, le port de boite sera soumis à toutes les exigences du port d'arme. Le ministère des gardes- champêtres, si mesquinement borné aux vignes еі aux moissons, s'exercera avec plus de vigilance encore sur les rochers el sur les friches. Comme cela peut tarder, nous conjurons dès aujourd'hui tous les rédacteurs de la Flore de ne contier le secret de leurs indica- lions locales qu'à la feuille de leur herbier. Et pourtant de quels moyens , de quelles armes , de quelles ruses méme la Providence, qui veille aux jours du colibri et du ciron, n'a-Lelle pas investi ces chères plantes dans l'intérêt de leur défense ! Celles-ci empoisonnent, celles-là blessent. D'autres écorchent ou brülent à distance de quelques pas. Telle perche comme un aigle, telle se terre comme un lapin, telle s'abrite sous l'herbe, ou se con- fond avec le sol. Il y en a, comme le ciste, qui laissent tomber leurs pélales dans la main qui croit les saisir. L'impatiente Cardamine, la Momordique, le noli tangere soutiennent un vrai siège en faisant éclaler au loin leur pétillante arlillerie; d'aulres ont leur sosie, ou leurs apparences salutaires : son faux air d'Orobanche a plus d'une fois abusé l'herborisant de première année à la chasse du nidus avis. L'idée de chasse revient encore une fois sous nolre plume, par suile d'une assimilation involontaire de la plante au gibier et de l'or- ganisalion à l'instinct. D'où vient qu'à celle méme place ой vous cherchiez hier en vain, un autre aujourd'hui trouve et cueille? D'où celle migration dont il était parlé plus haut? D'où ces apparitions, ces relours, ces échappées qu'aucune raison n'explique el qui ne s'operent point sans une impulsion secrete? C'est ainsi que s'est mon- tré un Jour dans le bois de Parnay prés Saumur, le Serapias lingua à nolre ami le 0" Tochet, qui oncques пе l'a retrouvé depuis. C’est ainsi que le Liparis leselii, surpris un jour par MM. La Revellière el Guépin, a fait le plongeon dans le marais de Chaloché pour ne se montrer plus tard à M. Aimé de Soland qu'après un délai de quinze années. Théophile comparail à des oiseaux en mue les planles de nos champs acclimatées dans nos jardins, comme elles engraissées, stupides el difformes, comme elles sous les dehors d'une exubérante 213 santé. Henri Monnier, sansle savoir, lesa outrageusement turlupinées sous l'effigie d'un gros papa rond comme un pois, lisse et joufflu comme une cerise, aux pieds duquel il écrit: « Un bel homme, tradition populaire. » — « Passe encore » ajoulait nolre ami, « ces plantes exotiques dont le type nous échappe et dont nous ne sommes pas exposés à conslaler chaque jour l'épanouissement en lerre libre. Mais enfermer de plates-bandes, mais bécher, arroser ce qu'à deux pas de nous la main de Dieu nourrit et abreuve! » Aussi m'a- vouail-il n'avoir jamais pu comprimer un sourire en voyant chaque année, dans les jardins de botanique, certaines natures indomplables résister fièrement aux séductions du directeur; soit qu'une fla- quelle d'eau ingénieusement distribuée rappelât aux exilés les habitudes du berceau; soit qu'on mélàt de la chaux el des dé- combres à leur sol ; soit que la sollicitude füt poussée jusqu'à leur donner pour compagnon quelque enfant de la méme patrie. — En revanche son plus violent dépit était d'y rencontrer une fleur dont il n'avait pas eu la primeur en rase campagne. « — Et la science, Théophile ? — Ah ! oui, la science, j'oubliais. L'équilibre à maintenir entre la science et la nature est un probléme désespérant dont la solution nous échappe. On aurait plus tót fait de remonter à Adam, si la période d'intuition pendant laquelle il fut donné à l'homme de tout sentir et de tout connaitre n'élait séparée de celle-ci par le glaive flamboyant de l'archange. » On raconte l'histoire d'un Arum draconculus planté sur les coleaux dela Garenne pour mystifier un débutant. La forét de Fontainebleau, dit-ou, n'est pas tres sûre ; si riche qu'elle soit de son propre fonds, elle n'en cacherait pas moins dans l'ombre de ses bouleaux plus d'un piège tendu à la crédulilé parisienne. Charge de mauvais goût el qui plus est, irréparable. Tel qui repasserait, aprés dix années, sur le théâtre de ses exploits d'étudiant, essaierait à tout prix d'en effacer les traces. Peines superflues ! Ce qui est fail est fait. La plante incor- porée au sol y lève el y lévera jusqu'à la consommation des siècles. — La grande Pervenche, la Lunaire, soit dit sans accuser personne, sont des échappées de nos jardins qu'une flore erpurgata ne saurait décemment admeltre. Je n'ai jamais respiré l'odeur acidulée qui s'exhale du pollen de l'Ónagre sans me reporter aux temps où quelque navire d'Amérique déposa sur les rives de la Loire une de ses graines cachée dans une balle de coton. Vous avisez un soir, à la clarté des lustres, parmi les fraiches beautés dont regorge l'Anjou, une danseuse au teint mat, à la taille souple el élastique , aux yeux plus noirs que les cheveux. -- « Parbleu , il faut convenir que la patrie de du Bel- lay..... (Un voisin érudit) — Vous vous lrompez, Monsieur; celte 214 jeune fille est Créole. » C'est l'histoire de l'Onagre et de T Erigeron ca- nadense. Dieu nous garde d'assimiler à ces mauvais plaisants dont nous parlions tout à l'heure le botaniste vertueux qui entreprend de re- peupler de sa main une localité honoraire. Il se trompe, le digne homme ; il ressemble, dans sa candeur, à ce Bénédictus d'Hoffmann qui, la veille de Noël, disposait mystérieusement sur une table les jouets dont il se ménageait la surprise pour le lendemain. On n'a le droit de fréquenter et d'interroger la nature qu'à la condition de s'a- genouiller en amant devant elle. Nous avons vu d'ailleurs que ce que l'on prendrait pour un caprice n'est souvent de sa part que justice et châtiment. Elle marche, vous marchez ; vous restez là où elle s'ar- réte. La chlore manque aux fourneaux on elle se fauchait autrefois ? — Eh bien qu'y faire ? Tous les soins que vous mettrez à la faire refleurir ne valent pas pour moi cette éloquente épitaphe : Et campos ubi chlora fuit... Ici l'ami dont nous nous plaisons (trop peut-étre) à énumérer les goûts et les maximes allait plus loin. Il réprouvait l'intervention par laquelle des savants plus discrets assurent la reproduction des es- péces en secouant leurs graines sur place et en les propageant au loin dans le cercle de leur domaine: tant il avait le respect des libertés de la création. Et puisque nous l'avons entamé, vidons le sac de Théophile. Il croyait pouvoir retrouver dans les dénominations actuelles rap- prochées de celles d'aulrefois, un témoignage de plus de la supériorité des âges antérieurs sur le nôtre. Il citait pour exemple le prestige et la portée de tant d'appellations populaires dont la date se perd dans le passé. Des légendes séculaires, de mystérieuses conjonctions, des pa- tronages fameux, de fantasliques images y président. Quelquefois la religion semble conférer le baptéme, par le reflet gracieux de la Vierge ou des saints. Si ce n'est Francois d'Assise, c'est à tout le moins Bonaventure qui a reconnu de loin les Gants de Notre-Dame dans les cornets digités dela chaste Ancolie. Je ne saurais comprendre que l'on n'ait point songé encore à déposer sur l'autel, au mois béni de Marie, une gerbe parlante faite de toules les fleurs consacrées par son souvenir. Celui qui rencontra le Bâton de Jacob sur la terre est le méme, sans doute, qui découvril sa roule aux cieux dans les blan- ches lueurs de la voie lactée. La Paquerette. la Pentecôte, la Véro- nique, V Alleluia, se rattachent à ces traditions vénérables par les- quelles la création se fait tantôt l'horloge, tantôt la trompette de l'Eglise. Quel est le poéle inconnu dont l'imagination féconde а perçu les subtiles et idéales ressemblances du Lycopode, de la Vipé- rine, de la Quenouille, de la Bourse à pasteur , de la Monnoyére , de la Gueule de lion, du Cerfeuil? — Quand l'hermétisme vint, avec ses évocations et ses mystères, ébaucher dans le monde les germes de la science, on vit s'échapper du creuset tout un vocabulaire surprenant fait de la science d'Euphorbe, de l'influence de Mercure, de la malice de Circé, de la sagesse de Salomon. — Plus tard, lorsqu'à ces ombres ou à ces mémoires superslilieuses succéda la réalité des docteurs, ce fut avec je ne sais quelle heureuse transformation que le mot passa du personnage à la plante, comme s'il eût fait corps avec elle, comme si l'inventeur et sa découverte se fussent pénétrés réciproquement. Quels noms prédestinés que ceux de Wallemberg, Calepino, Bulliard, Hottonius , Matthiole ? — Les noms sont tout-puissants. Tel а fait plus d'une campagne sur la foi de quelque nom étrange et harmo- nieux, ou d'une poétique renommée, ou de certaines analogies parli- culiéres entre l'idée et le mot, qui n'existent que pour lui seul. A chacun son image ou sa résonnance favorite. Car l'un des plus grands charmes du monde végétal, ce par quoi, à certains égards, il semblerait l'emporter sur l'autre, c'est que, dénués de sensations, les étres qui le composent s'animent de notre vie, sentent et pensent en nous, et s'élèvent ainsi à une puissance didéalisation à laquelle pas, un de ceux du règne animal ne saurait prétendre. Aujourd'hui, qu'une découverte se présente, et le nouvel habitant ne pourra conquérir droit de cité que de deux manières : ou sous un nom technique , froidement emprunté à sa forme ou à sa cou- leur; ou sous un nom bourgeois, celui de son parrain traduit en style macaronique. Et voyez le succès de cette belle terminologie ! Les auteurs y déférent en dépit de leur goût, et sacrifient souvent les plus saisissanles images à la crainte de passer pour des poéles. Potentilla splendens ! А l'éclat d'argent. qu'elle jette dans les bois de Chaloché et de Fontevrault, quel écolier de huitième ne se fût écrié : C'est elle! On a trouvé le moyen de la rendre invisible sous le syno- nyme terne de Potentilla Vaillantii. Certes ce n'est pas ainsi que l'en- tendait Linné, notre patron, quand, avec sa flamme d'arliste, remet- lant en fusion le grec et le lalin, il les coulait dans le moule de ce vocabulaire immortel où le sentiment le plus vif se combinail si heureusement aux exigences de l'euphonie. Puissent du moins les adjonclions ne s'opérer qu'avec réserve et sous le coup d'une impérieuse dislinclion. Rien de pernicieux pour cerlaines natures d'esprit comme l'éreclion d'une variété en espèce: 216 c'est lout un monde qui s'évanouit. Vous croyiez jusqu'ici à des phy- sionomies tranchées qui n’excluaient nullement les communautés du sang, vous aimiez à saisir, à travers l’ensemble d’une race. des dis- tances normales, de permanentes spécialités créées avec le monde et que rien ne rapproche ni n’allére, — et point du tout ! Voilà que, par l'effet d'une introduction complaisante, vous vous prenez à douter de la volonté du Trés-Haut dans le maintien des caractéres; tout vous semble soumis à des conditions flottantes d'exposition et de milieu. Le genre absorbe l'espèce, la famille absorbe le genre. A l'activité libre d'une Providence agissante s'est subslitué pour vous le sombre protéisme d'un agent sans amour comme sans liberté. Avec cela, je vous le demande, était-ce un homme, Théophile, à trouver grande délectation dans un herbier ? Une mémoire à lui, la plus ardente et la plus rebelle tout ensemble qu'il fût possible de rencontrer, lui en tenait lieu. Elle s'ouvrait comme un cadre ой toutes les fleurs, celles du moins qu'il avait cueillies, se montraient à ses yeux dans l'intégrité du premier aspect. Elles y demeuraient avec une individüalité bien supérieure à celle que lui eussent conférée les termes d'une définition technique. — De degré en degré, il en était venu à ne plus oser cueillir. Il n'observait plus, c'est-à-dire il ne contemplait plus que sur tige. Un jour que son regard plon- geait plus avant que de coutume dans l'appareil reproduclif d'une fleur, il se sentit pris d'une miséricordieuse pudeur à l'endroit de ces mystères que ne sait pas s'interdire la science. La corolle devint dès lors pour lui comme un sanctuaire dont il se promit bien de ne plus franchir le seuil. Ces scrupules croissants, les soucis et les déceptions contractés dans le cours de ses campagnes, joints à la solitude inévitable oü la singularité de ses goüts le confinait, « agirent sur son cerveau » pour parler la langue des sages. Ce botaniste étrange, sans boile ni herbier, échappait à toute définition régulière, et ne trouvait sa clas- sification nulle part. Le rayon de ses promenades, ou plutót de ses voyages s'étendait chaque jour dans une proporlion inverse au résultat. Les impressions qui le dominaient formaient comme un bandeau autour de sa vue. Les grandes voies de la nature le détour- naient trop vite du sentier dans lequel il faut résolument se confiner pour arriver à quelque chose. Quelque atteinte qu'aient porlée aux herborisations les progrès de la société actuelle, les siennes assuré- ment lui eussent valu moins de mécomptes, si elles eussent été à l'é- preuve d'un paysage qui s'entrouvre entre les buissons , d'une haie ou d'un chant de coucou parti du fond des bois... C'est égal, Théo- 217 phile, il n'y en a pas moins entre le monde des fleurs et celui de la créalion tout un océan d'harmonie dont je ne saurais te plaindre d'avoir soupçonné les accords ! Quand 1848 éclala, il s'y rallia de toutes les répugnances que nous avons énumérées en son nom. Lui, l'adversaire né de la spéculation de l'industrie, il croyait voir en tête des libertés conquises figurer Ге- mancipation du sol; il avait à cet effet jeté les bases d'une association ayant pour but de remettre les plus belles localités en friche. — Un jour qu'il revenail de constater à Milly l'absence de l'Ophrys anthro- pophora, il aperçut devant l'église du Thoureil trois ou quatre ba- dauds occupés à déchiffrer un placard. C'était, — qui Petit pensé ? — une circulaire de M. Flocon pour le défrichement des landes. Ce projet l'indigna. De républicain qu'il était il devint légitimiste. Il s'exila d'une terre ой la vie lui devenait à charge, el s'en fut herbori- ser à Frohsdorf. Puisse-t-il y rencontrer la paix et le recueillement après lesquels il soupira vainement sous le ciel de France ! Dans les pages qu'il a laissées, confidenles tour-à-tour de ses chi- mères el de ses douleurs, se trouvent les vers suivants que nous re- produisons comme un échantillon de sa force centrifuge, dirait un humoriste Allemand. Le botaniste errant, que tout brin d'herbe affolle, А, du mont à la plaine et de l'aube au couchant, Glané , — douce moisson pour tant d'autres frivole , Sans que l'astre qui tombe à son ardeur qui vole Ait rogné l'aile ou clos le champ. Les grands bœufs échoués ruminent sous la crèche, Le chasseur a sifflé son chien poudreux et las , Et des flancs du clocher que la nuée ébrèche Déchainant les esprits sur la pelouse fraiche L'Angelus tinte comme un glas..... — N'importe, il poursuivra ! — Les parfums qu'il dénombre Se changent en clartés sur les bords du chemin ; Avec l'heure il s'incline , il s'allonge avec l'ombre , Disputant à la nuit, ce faucheur morne et sombre, Chaque épi tremblant sous sa main. La nuit a tout fauché, jusqu'aux fleurs triomphales Que la nielle arbore à la cime des lins , Jusqu'aux roses en feu des hautes cathédrales, Jusqu'aux vergues en croix dont les quatre pétales Rayonnent au front des moulins. 218 Dans un cercle élargi son regard flotte et rêve. Il frappe à l'horizon qui s'entrouvre; et soudain Pour un sol qui s'abime un sol nouveau se lève, Bleu, riche, étincelant de plus de perles qu'Eve N'en vit éclore dans Eden. — Va, contemple, étudie à l'abri du profane Ces germes, poudres d'or des déserts spacieux, Grains qu'hiver comme été la main du Seigneur vanne, Fleurs sans tige , que nul ne cueille ni ne fane..... — ЇЇ herborisait dans les cieux. VICTOR PAVIE. EXPOSITION D'HISTOIRE NATURELLE JUIN 1858. La Société linnéenne, qui ne compte que cinq années d'existence, n'avait pu jusqu'à ce jour prendre part aux diverses expositions qui ont successivement eu lieu dans notre pays ; mais aussitót qu'elle eut été informée de la décision de la Société industrielle qui fixait au 4er juin 1858 la 6° exposition agricole, industrielle et artistique, elle offrit un concours qui fut accepté avec un cordial empressement. Sous active impulsion de M. A. de Soland, notre président, une Commis- sion d'installation fut composée de MM. de Soland, de Joannis, vice- président; D* Mabille, secrélaire-général ; D* Farge, secrélaire; de MM. l'abbé Vincelot, de Montreuil, Aimé d'Andigué, d'Andigné Le Gris, Raoul de Baracé et Deloche. J'acceptai avec reconnaissance la mission de vous présenter un compte-rendu de ce qui se passerait, el par suile M. le président du Jury général me désigna pour être rapporteur de la section d'histoire naturelle. Immédiatement après ces mesures préliminaires, un appel fut fait à tous les membres de la Sociélé, et l'on s'aperçut bien vile que l'espace mis à notre dis- position par la Commission générale serait insuffisant pour toutes les choses curieuses qu'on allait y apporter. En pouvait-il être autre- ment, Messieurs, alors que nous comptons dans nos rangs tant d'hommes qui depuis longues années s'adonnent avec ardeur et constance aux plus intéressantes, aux plus utiles recherches sur les diverses parlies de l'histoire naturelle! C'est avec passion que plu- sieurs d'entr'eux se livrent à l'étude toujours si attachante des créa- lures de Dieu, qu'ils affrontent les intempéries des saisons, la fatigue de courses longues, difficiles, queiquefois dangereuses, pour se pro- curer l'animal, le nid, l'œuf, l'insecte, la coquille qui manque à leur collection. Et leurs travaux n'ont point été inutiles; ils possèdent maintenant de véritables foyers scientifiques. Pour mieux analyser les richesses exposées par la Société lin- néenne, permettez-moi, Messieurs, de ne suivre en rien l'ordre du livret et de réunir sous un même titre tous les objets semblables. Je désire éviter ainsi des redites qui rendraient plus long encore un travail qui me semble malgré cela devoir abuser de votre bienveil- lante attention. Anatomie comparée. — Sous le titre d' Ethnographie, Anatomie com- parée, nous trouvons une collection de têtes humaines présentées suivant le Norma verticalis de M. Blumenbach, par M. Farge; de plus, une tête d'Australien du détroit de Torrès, et une de Nouveau- Zélandais, moulées sur nature dans le dernier voyage de M. Dumont d'Urville, exposées par M. de Joannis, ancien officier de marine. Second à bord du bâtiment qui fut chargé d'aller arracher aux sables de l'Egypte l'obélisque de Louqsor, M. de Joannis nous à rap- porté de la nécropole de Thébes un squelette antique d'Ibis numenius, qui a été examiné par la foule avec le plus vif intérêt. M. Guittet, vétérinaire, avait exposé les squelettes d'un cheval ardennais, d'un bouc commun, ágé de 2 ans, une téte de chevreuil ; M. Deloche, une lête de marsouin; M. Martin-Montalant, des poissons et écrevisses sans organe visuel, pêchés dans les lacs souterrains des grottes de Mammouth, dans les États-Unis d'Amérique, et enfin M. le docleur Ponceau, le squelette d'un cygne chanteur, on ne peut mieux pré- paré, sur lequel on peut étudier la singulière direction de la trachée- artère dans cette variété. Nous savons que la très belle préparation de M. Ponceau lui a été demandée pour un des musées de la capi- tale, mais il a préféré la conserver pour notre cabinet d'histoire na- turelle. Chinoiseries, armes, vêtements de sauvages. — Plusieurs objets chi- nois, d'un travail digne de la réputation des ouvriers du Céleste- Empire, ont été exposés par M. le capitaine Brissel, enlr'autres un nécessaire, une corbeille, une boîte, une tabatière el surtout un album de la plus grande délicatesse; M. l'abbé Bodaire avait de son cólé exposé de charmants dessins chinois. Nous devons mettre dans la méme catégorie l'exposition algérienne faite par M. Girault- Lesourd qui, obligé de rester quelque temps à Alger, a eu la tres bonne idée de s'y procurer un grand nombre de produits des petites 291 EPA industries de ce beau pays désormais français, mais naguère encore si différent de nos mœurs, de notre industrie ; el plusieurs armes, vêtements el objets à l'usage des sauvages, exposés par MM. de Joan- nis, E. Lachese, Myionnet, Mabille, Ernest Desvarannes, A. de So- land. Nous devons une mention toute spéciale au tambour de la reine Pomaré, appartenant à M. Toupiolle, el rapporté de Taïli par M. l'amiral Bruat. Il consiste en un tronc d'arbre de 1 m. 55 de tour, el de 2 m. de hauteur, qui a été perforé dans toute sa longueur. L'extrémité supérieure de celte énorme büche creuse est fermée par une peau de chien de mer, forlement tendue au moyen de clous très rapprochés que relient entr'eux de jolies petites torsades en soie végé- lale; de la parlie supérieure d’autres torsades plus grosses faites avec tout autant d'adresse, vont à la partie inférieure, et une enfin beau- coup plus considérable encore entoure l'instrument à 40 centimètres du sol; au-dessous, le bois est fortement entaillé dans son pourtour pour que le son puisse se produire. Il se produil en effet, lorsqu'on frappe la peau avec le poing, mais sourd, monotone et trés peu ré- créalif, ce me semble. Conchyliologie. — La conchyliologie était dignement représentée par la collection de M. de Las Cases, par celle du genre ostrea de M. Joannis, par une très belle collection d'unios el d'anodontes a M. Drouet, au milieu desquelles on dislinguait une coquille nou- vellement décrile sous le nom d'unio Courtillieri; el surtout par l'exhibilion de M. Toupiolle, qui présentait de magnifiques exem- plaires de cônes el porcelaines, eulr'autres la cyprea thersite apportée d'Australie, ia galatea Leda, la conus vidua apportée de la Nouvelle- Calédonie : ces dernieres coquilles étaient connues des savanls, mais пе sont pas dans le commerce. Géologie. — La géologie avail soumis de précieux échantillons par- mi lesquels on doil signaier la pegmalite avec crislaux de lour- maline trouvée à Ernée (Mayenne), par M. le 0" Farge; des minéraux recueillis sur les flancs du Vésuve par M. Th. Jubin ; ип morceau de minerai des forges d'Orthès (Mayenne), par M. Aug. Meniere, bibliothécaire de la Sociélé industrielle, et surtout les échantillons minéralogiques exposés par M. Orsel, ingénieur des mines, et par M. de Las Cases. Propriétaire de mines de charbon de terre consi- dérables, M. de Las Cases a réuni des échantillons extrémement cu- rieux de lous les terrains, de toutes les roches qu'il a fallu traverser avanl d'arriver au terrain houiller lui-même ; c'est avec ces échan- lillons sous les yeux qu'on peut le mieux lire le travail de M. Roland sur le lerrain anthraxifere des bords de la Loire entre Rochefort el Chalonnes, travail qui a élé inséré dans le premier volume des 222 Mémoires de la Société linnéenne, ou l'excellent ouvrage de M. Ca- carrié sur la géologie de Maine-et-Loire. Fossiles. — Le département de Maine-et-Loire est riche en fossiles qui se trouvent dans le vaste bassin de son terrain de transilion. M. de Joannis avait exposé un spécimen intéressant de ces fossiles ; M. Th. Jubin, des fossiles de Ronca (Vicentin), des coprolites d'An- gleterre, des impressions sur grés du terrain terliaire de Maine-et- Loire; M. du Landreau, des fossiles du terrain falunien ; M. Raimbault, vétérinaire à Saumur, des fossiles du terrain falunien de Marligné- Briant; M. Guionis, des fossiles des environs de Doué, ce pays si curieux sous le rapport de la géologie; enfin M. Courliller, de Sau- mur, avail exposé, sous le nom d'ammonites paremplus (d'Orbigny), une ammonile non encore décrite. Deux objets excitaient au plus haut point l'intérêt; l'un était un morceau de palmier parfaitement conservé el extrait du fond des mines de Chalonnes, de M. de Las Cases; l'autre, une collection de pecten solarium Lamk, trouvés dans le terrain falunien de Chavagnes- les- Eaux. Cette collection, qui appartient à M. Aimé de Soland, est la plus complète qu'il y ait en France; elle comprend 24 individus différents d'âges et par conséquent tout-à-fait différents par leurs dimensions et leurs caractères exlérieurs. Le plus petit a un demi- centimètre de longueur, le plus grand au contraire, aux arêtes for- tement prononcées, mesure environ 22 centimètres sur 18. Botanique. — La bolanique ne tenait que trés peu de place à l'Ex- posilion, et il en devail élre ainsi, car exposer des plantes conser- vées élait impossible, et exposer des plantes fraîches n'était pas le róle de la Société linnéenne, mais bien celui qu'a si dignement rem- pli le Comice horticole. Deux objets seulement figuraient dans les vitrines de l'Exposilion : une curieuse collection d'algues apparte- nant à M. Edmond de Contades, qui prés de là présentait une si sa- vante application de l'électricité comme moteur, et plusieurs échan- lillons d'une plante nouvelle préparés par M. A. de Soland. L'endop- tera dioscoridis DC. ne se lrouvait qu'en Alsace jusqu'à l'époque du débordement de la Loire, en 1856; mais quelques mois aprés que l'inondalion eut cessé de couvrir les prairies voisines du Louel, M. de Soland en rencontra de nombreux sujets qu'il signala à M. Guépin. Pour êlre plus sûrs de ne pas se tromper, les deux bota- nistes laissèrent la plante se développer, se multiplier, et mainte- nant elle est naturalisée et vit en très grande abondance dans les prairies baignées par la Loire. Ornithologie. — Beaucoup de nos compatriotes, beaucoup plus qu'on ne le pense, charment leurs loisirs en faisant des colleclions 223 d'oiseaux ; à leur tête marchent M. l'abbé Vincelot, M. Raoul de Ba- racé et M. Deloche. M. l'abbé Vincelot a depuis son enfance la passion de l'ornitholo- gie; tout jeune encore, il courait sans cesse dans les îles de la Loire pour trouver des nids ou prendre des oiseaux, non pour le cruel plaisir de les détruire, mais pour étudier leurs mœurs, leurs espèces, leurs variétés. Toute sa vie, malgré la gravilé de ses études et de son ministère, il a conlinué ses recherches de prédilection ; il a collec- lionné, il s'est mis en rapport avec les ornithologues de tous les pays, et aujourd'hui il possède les connaissances les plus étendues, les plus complètes sur celte partie de l'histoire naturelle, et une ma- gnifique collection d'ceuts de tous les oiseaux sédentaires ou de pas- sage dans le département de Maine-et-Loire. Il a cédé à M. de Baracé, pour l’Exposilion, la spécialité de l'ovologie, et il s'est contenté d'exposer des nids excessivement curieux. Les premiers étaient deux nids de casse-noix, qu'il faut aller cher- cher dans les plus sombres foréts de la Savoie, el qui avaient coüté plus de quinze jours d'explorations aussi pénibles que dangereuses au milieu des neiges et des précipices. Venait ensuite celui du cincle- plongeur, qui ne se trouve au contraire que dans le voisinage des cascades, des torrents de la Suisse el de la Savoie. Le dernier enfin, élait un charmant nid de mésange-remiz. La mésange-remiz habite la Pologne, la Provence, tout le midi de la France, l'Italie et quel- ques parties de l'Allemagne ; elle construit, à l'extrémité des rameaux les plus déliés et qui penchent au-dessus de l'eau, un pelit édifice qui a la forme d'une bourse, et qui est tapissé à l'intérieur du plus fin duvet des fleurs de saule, de tremble ou de peuplier. Plus on l'examine, plus on admire l'élégance et la perfeclion de ce petit chef-d'œuvre. Plus étonnants encore élaient plusieurs nids d’oiseaux-mouches, que M. A. de Baracé a fait venir des contrées les plus chaudes du Nouveau-Monde; l'un d'eux contenait encore deux petits parfaite- ment conservés. Ces nids sont faits d'un coton fin et d'une bourre soyeuse recueillie sur des fleurs; ils sont attachés à des feuilles, à un brin de citronnier, d'oranger ou quelquefois à un fétu qui pend de la couverture de quelque case. Ils sont gros comme la moitié d'un abricot et ont aussi la forme d'une demi-coupe. Comme M. l'abbé Vincelot, M. de Baracé a travaillé toute sa vie à rechercher, à étudier les œufs el les oiseaux, et ce que M. Vincelot a fail pour le département de Maine-et-Loire, M. de Baracé est sur le point de le terminer pour l'Europe entière. Dans l'impossibilité, faute d'espace, d'exposer tous ceux qu'il possède, M. de Baracé avait 224 seulement exposé une collection complète d'œufs des oiseaux du dé- parlement de Maine-et-Loire. Il nous est impossible d'entrer dans le moindre détail sur celle réunion d'œufs appartenant, d’après le remarquable travail publié il y a deux ans par M. l'abbé Vincelot, à sept ordres, à vingt familles, à deux cent quatre-vingt-trois espèces sédentaires ou de passage périodique dans notre pays. Pour chaque espèce ils étaient assez nombreux pour démontrer combien, dans la méme espèce, ils peuvent différer de couleur et de grosseur. Pour être plus facilement soumis aux observalions, ils étaient placés sur une couche épaisse de graines de colza qui, par leur volume, leur sécheresse, leur couleur, conviennent parfailement pour les maintenir dans la posilion qu'on veut leur donner sans risquer de les casser, et font ressorlir les plus petites taches de leur coquille. Animaux empaillés. — Si MM. Vincelot et de Baracé ont élé seuls à exposer des nids el des œufs, il n'en est plus de méme pour les oiseaux empaillés, car nous trouvons deux sternes leucoparia exposés par M. Frédéric Blain, qui les a tués sur la Maine, vis-à-vis le bai- gnoir de la Blancheraie. Celte espéce de sterne, nouvelle pour notre déparlement, est assez commune, d'aprés Lemminck, dans les grands marais des parlies orienlales du midi de l'Europe ; elle ne se trouve qu’accidentellement sur les cóles de l'Océan. M. Guittet avail exposé une vilrine contenant des oiseaux de paradis; M. de Baracé, une oularde barbue. Les regards de la foule élaient surtout attirés par la vitrine dans laquelle M. Deloche avait placé une chouette har- fang, une chouelte laponne, une chouette de l'Oural, un grand-duc des Alpes, deux variétés de chouette hulotte ; par celles qui con- tenaient des oiseaux de proie diurnes, et entr'autres un aigle botté, une buse féroce (espèce nouvellement décrite), une buse blanche, prise par M. de Baracé, un gerfaut du Groënland, trois faucons pele- rins adultes ; trente-six oiseaux d'Europe et seize oiseaux exo- tiques. Nous devons une mention spéciale à la vitrine qui, outre un écureuil, variété grise, et un joli écureuil, variélé blanche (ce der- nier exposé par M. Le Gris), contenait un superbe gypaële barbu. Le gypaële barbu, dit le savant M. Bailly, auteur de l'Ornithologie de Ja Savoie, est le plus grand, le plus fort et le plus carnassier des oiseaux de proie d'Europe. La taille d'un vieux gypaële, tué en 1844, élait, du bec au bout de la queue, de 1 mètre 48 centimètres. 1l habite la chaine des Alpes et des Pyrénées, le Tyrol, la Sardaigne et l'Afrique. C'est par la ruse qu'il altaque et combat sa proie, sur- tout quand il a à lutter contre des animaux de forle taille. Pour cela, il épie l'instant où l'un de ces animaux s'écarte sur le bord des pré- 99! 22% cipices, puis il tombe sur lui de tout son poids et avec impétuosité, le culbute en le frappant à la téle avec sa poitrine, avec ses ailes munies de muscles puissants, et l'étrourdit au point de le faire tom- ber dans l'abime où il le suit pour le dévorer sur place. Le gypaële barbu tire son nom du bouquet de poils qu'il porte, lorsqu'il est adulte, sous la mandibule inférieure du bec. L'individu que M. l'abbé Vincelot a pu se procurer à grande peine, el qui a été si bien préparé par M. Deloche, élait dans la force de l’âge et pré- sentait tous les caractères du plumage le plus parfait; il a élé pris par M. l'abbé Caire, dans un piége à renard. Lorsque M. Caire s'avança pour s'emparer de l'oiseau captif, l'animal fit un effort im- mense et s'enleva, emporlant altaché à sa patte gauche le piége qui pesait 15 kilogrammes. Il monta à plus d'un kilomètre et se perdit dans les nuages, avant d'étre obligé de se laisser retomber : il avait près de 5 mètres d'envergure. Enfin la vitrine contenant quarante-cinq petits en duvet, appar- tenant à la collection des oiseaux d'Europe, était le véritable chef- d'œuvre de M. Deloche, et nous le disons avec d'autant plus d'assurance, que nous ne faisons que répéter ce que nous avons entendu dire par des hommes haut placés dans les sciences natu- relles. Ils ont élé émerveillés de l'habileté avec laquelle M. Deloche est parvenu à préparer ces petils animaux, qui ont une pellicule plutôt qu'une peau, el ils ont rendu pleine et entière justice à tant de patience et à tant d'adresse. M. Deloche n'est pas seulement un habile taxidermiste ; il veut conserver l'animal tout enlier. Pour cela il a passé une partie de sa vie au milieu des champs, au milieu des bois, pour étudier, dans loules les condilions de leur existence, ces oiseaux, ces animaux auxquels il sait rendre, non seulement la vérité de leurs formes, le lustre de leur plumage ou de leur fourrure, mais aussi les gestes, les attitudes qui leur sont le plus ordinaires. Lépidoptéres. — Deux personnes avaient exposé des lépidoptères. M. Guillet faisail admirer de très beaux lépidopléres exoliques, el M. Toupiolle avait, avec un grand désinléressement, placé dans une vitrine sa magnifique collection des lépidoptères des environs d'An- gers, classés d'après l'Index methodicus du docteur Boisduval. Pré- paraleur, naturaliste savant et actif pour tous les objets d'histoire naturelle, M. Toupiolle consacre surtout aux collections de lépidop- léres et de coléoptères, ses intelligentes recherches, ses travaux incessants. Mollusques perforants. — Pour faire mieux ressorlir toule la valeur de l'exposition de la Société linuéenne, j'ai omis bien volon- 15 226 tairement de vous parler d'un des premiers numéros du Catalogue, de la vitrine contenant des échantillons de gneiss, de calcaire et de granit perforés par des oursins, des pholades et des modioles, vitrine qui nous avait élé confiée par M. Caillaud, directeur-conser- vateur du cabinet d'histoire naturelle de Nantes. Jusqu'à ce jour, on pensait le plus généralement que les mollusques perforants creusent les pierres uniquement par un moyen chimique, à l'aide d'une sécrétion acidulée. M. Caillaud l'admet pour la plupart de ces animaux, en ajoutant toutefois à ce moyen chimique une action mécanique des coquilles en divers sens. Il avait la conviction que les pholades creusent leur singulière habitation exclusivement par un mouvement de rolalion dans lequel elles râpent les pierres ап moyen des échancrures que présentent leurs valves qu'elles ouvrent et fer- ment alternalivement. Celte conviction, M. Caillaud l'avait acquise aprés avoir visilé les divers travaux des pholades dans le gneiss, dans les roches de nature volcanique et dans les carriéres, à Lessines en belgique; mais il ne pouvait en démontrer l'évidence, lorsqu'à force de palience et d'adresse, une expérience aussi curieuse que con- cluante lui a fait voir le pholas exécutant sa perforation. Dans le gisement de pholades qui existe à la côte du Pouliguen, il a pris douze fragments du gneiss que perforent ordinairement ces mollusques; il les a équarris el y a pratiqué 14 trous de diverses grosseurs el profondeurs, dans lesquels il a introduit 14 pholas, les uns à moitié de leur coquille, d'autres aux trois quarts, d'autres la coquille entière, choisissant ceux qui offraient des aspérités inlacles, récemment sécrélées , propres enfin à entreprendre une perforalion prochaine. Il a transporté tous ces objets au Croisic, dans sa cham- bre à coucher, айп de faire des observations la nuit comme le jour. Il a placé les morceaux de gneiss, le inollusque dirigé verlicalement, dans de grands bocaux remplis d'eau de mer; un trou praliqué vers le fond de ces vases permettait de les vider sans les remuer, et on les remplissait aussi en conservant toute leur immobililé. Pendant sept jours on avait attendu en vain, aucun travail n'avait eu lieu ; mais le huitième, à huit heures el demie du matin, on vit une реше pholade de trois centimètres et demi se balancer d'abord, puis, semblant s'exercer à une manœuvre de rolalion, le mollusque tourner lentement avec sa coquille à droite, ensuite à gauche ; à neuf heures et quart, sa marche devint plus régulière ; à deux heures un quart, tournant à droite sur son axe en mouvement par- tiel, il avait fait cinq fois le tour de son trou, mettant une heure à chaque tour, rejetant de son siphon anal le produit de son travail triluré, aggluliné en forme d’excréments longs de quatre à cinq mil- 997 2l limétres et de couleur de gneiss; par son siphon branchial, il reje- lait la poussière plus grosse du schiste micacé et les fragments de feldspath el de quartz qui constituent la roche. Cetle irituration était encore rejelée par le vide entre la pierre et la coquille et s'ac- cumulait sur la roche autour du trou... : Je ne suivrai pas plus longtemps M. Caillaud dans la série d'ob- servalions qu'il a pu faire pendant les dix-huit jours qu'ont duré ses expériences; le probléme était résolu et l'opinion de M. Caillaud est maintenant une certitude de la dernière évidence. C'était avec une vive curiosité, avec un puissant intérêl, qu'on suivait dans les échantillons exposés par M. Caillaud, la marche de ces habitants des pierres, qui doivent par leur travail non seulement se creuser une demeure, mais de plus continuellement veiller à l'agrandir pour faciliter leur propre accroissement, comme c'est avec un sincère sentiment de leur insuffisance, que nous offrons à M. Caillaud nos félicitations et nos éloges, pour une découverte qui lui a mérilé les applaudissements des premiers corps savants. Auprès des perforations pratiquées dans le gneiss, le grès el le granit, par divers mollusques térébrants, il était inléressant de voir un morceau de la caréne d'un vaisseau perforé par les mémes mol- lusques. M. de Joannis, qui l'avait exposé, pense que l’action dissol- vante de tous les mollusques térébrants se compose d'une action chimique désagrégatrice, qui préside et accompagne toujours lac- lion mécanique, et de l'aclion mécanique elle-méme. Selon la nalure des mollusques, ces deux forces sont dans des proportions très différentes. M. Caillaud croit, pour les pholades surtout, qu'il n'y a qu'une action mécanique exécutée dans l'eau de mer. Objets divers. — П ne me reste plus qu'à citer les moulages de repliles, à M. Blain; une рое, concrélion extraite de l'estomac d'un bœuf, présentée par M. Lemarchand, des dessins délicieux d'arach- nides, de mousses, de chenilles et d'œufs, par M. de Joannis et je serai bien près d'avoir terminé ma tâche. Je veux cependant vous dire avec quel art la Commission d'orga- nisalion, si bien secondée par M. Deloche, avait disposé l'ensemble de l'exposition d'histoire naturelle. Tous les objets, méme les plus petits, élaient placés de manière à être observés sous leur meilleur et plus ulile aspect; des armoires et des vitrines les protégeaient contre le trop grand jour el surtout contre la poussière; mais au fond de la travée qui élail destinée à la Société linnéenne, il restait un espace considérable qu'il fallait orner et remplir le mieux possi- ble; ce résultat а élé atteint tout aussi heureusement que les autres. Au milieu se trouvait un buste de Linné ; au-dessus, dans des écus- 228 sons élégants, les noms des principaux naturalistes angevins , puis dans loute l'étendue disponible élaient placées des armes arabes, à M. Grenu, un superbe fusil donné au moment de la conquête d’AI- ger à M. le maréchal de Bourmont, et appartenant à M. le comte de Bourmont fils; un autre fusil arabe, non moins précieux, apporté d'Alger par M. Th. de Quatrebarbes; une peau d'aroui à M. le doc- leur Farge; une peau de panthère à M. J. Huard; des bois de cerf, des têtes de buffles de l'Inde et de bœufs de Sicile, exposés par MM. J. et Ch. Huard, Gontard, Aimé Duchesne, Deloche et Rousseau de la Brosse. MM. Baranger et Thouin, lieutenants de louvelerie, avaient fourni avec un légitime orgueil de chasseurs, des lapis énormes composés de peaux de renards tués par eux. Ces beaux lapis ont élé parfai- tement confeclionnés par M. Plesse. | Enfin, au milieu de ces objets, on voyait avec un vif sentiment de curiosité, la peau d'un lion tué par Jules Gérard , rapportée d'Afrique par M. le général Bedeau et offerte par lui à M"* la com- lesse de Quatrebarbes. Mais à celle curiosité se joignait un intérêt bien plus puissant encore, quand, en regardant avec attention, on apercevail dans la peau du fier animal des traces de coups de baion- nette, el qu'on savail que ce même lion est celui qui a opposé, en janvier 1847, au lieutenant Gérard, la plus longue et la plus ter- rible résistance. Frappé de quatre coups de feu, il pul encore se re- lever et charger un spahis nommé Rostain, le saisir dans sa gueule et ne le quitter qu'alors qu'il crut l'avoir tué. Les quatre incisives avaient percé la cuisse comme autant de coups de feu, el seize coups de griffes, dont quelques-uns étaient effrayants de profon- deur, avaient labouré les chairs du malheureux soldat. Après huit mois d'hópilal et une saison passée a des eaux minérales, Rostain en a élé quitte pour la perle d'une jambe. Trois Arabes furent encore alteints par l'animal dans sa marche désespérée vers son repaire, mais ils ne recurent que quelques coups de griffes sans gravilé, et l'un d'eux eut sa baïonnelle tordue en faisant les plaies dont la fourrure porte les traces. Ce n'est que quelques jours plus lard que les vautours commencèrent à planer au-dessus du massif, puis à descendre en rétrécissant peu à peu les orbes de leur vol : le lion était mort. Tei était, Messieurs, l'ensemble de l'exposition d'histoire naturelle qui, par les soins de notre Société, a fait partie de l'exposition géné- rale de 1858. Pendant un mois, je puis le dire sans craindre d'élre démenti par personne, elle a constamment captivé l'attention et reçu les applaudissements de la foule qui n'a cessé de parcourir les 229 galeries du Champ-de-Mars. Les hommes instruits y éludiaient avec bonheur un grand nombre d'objets curieux et rares, les autres exa- minaient avec une sorte d'admiralion ces oiseaux aux mille couleurs, ces animaux si bien conservés, ces coquilles précieuses, ces miné- raux utiles, car partout et toujours, l'homme, méme étranger à la science, aime à lire dans le livre admirable de la nature. Sur la proposilion de son Président, le jury général a offert une médaille d'or à la Société linnéenne en souvenir du concours fra- lernel que celte Sociélé s'est. empressée d'apporter à la Société industrielle pour l'exposition de 1858. Sur la proposition du jury spécial, une médaille d'argent a été décernée à M. Deloche et une médaille de bronze à M. Toupiolle. А. LACHÈSE. EXCURSION А LA BREILLE Le 23 juin 1857, les membres de la Société Linnéenne d'Angers, profitant de la douce température qui régnait alors, prirent à Angers le convoi de 5 heures 45 minutes du matin, pour rejoindre leurs col- lègues de Saumur. La réunion des naturalistes d'Angers et de Saumur, avait pour but d'explorer dans tout son parcours le ruisseau de Jarrie, depuis Brisset, près les Loges. Dans les vastes landes dominées par les bois de pins maritimes, bordant le contour de ce joli ruisseau de Jarrie, au milieu des Sapha- gnum et des Bruyères croît une grande quantité de belles plantes qui caplivérent l'attention des botanistes. Guidés par MM. Du Menil et Trouillard ils récollérent la Gentiana pneumonante, le Cirsium oleraceum, les Pinguicula Lusitanica et vulgaris, le Lappa major,le Parnassia palustris, et cueillirent en abondance l'Impatiens noli tangere, délicate fleur trouvée pour la première fois dans ces lieux, par M. D'Espinay, de regrettable mé- moire. Près la chaussée du moulin, les conchyliologistes remarquèrent quatre individus d'un Unio, qui leur parut nouveau pour notre pays. Cet Unio fut colligé par MM. Courtiller jeune, de Crochard el Cyprien Debrais. Soumis au baron Hattemann età MM. Springel, Nettorf et Schisner, ce mollusque a été reconnu pour n'avoir jamais figuré dans aucun ouvrage de Malacologie. Il portera désormais le nom d'Unio Courtil- lieri, et viendra augmenter la liste des belles découvertes dues à notre zélé naturaliste, M. Courtiller jeune. Non loin de la chaussée dont nous venons de parler, il fut trouvé dans la Filliére, une bien curieuse variété de la Crevette des ruisseaux, Gammarus pulex Fabr. 281 Accompagné d'entomologistes comme MM. Ackerman, Courliller jeune et Paul Lambert, on est toujours sûr de faire abondante cap- ture. La liste suivante montre combien la contrée de la Breille est abondante en insectes rares dans les genres Coléoptère, Tentredine, Ischneumonide, Orthoptère, Cicadaire et Lépidoptère. COLEOPTERES. Elaphrus Uliginosus, non encore trouvé aux environs de Saumur. — Leistus Ferrugineus. — Cryplocephalus Decem-punctatus. — Aphanistichus Emarginatus. — Un Lixus indélerminé venant se ranger près de l'Oscanii. — Colotes Trinotalus, charmant petit Ma- lachide du Midi de la France, nouveau pour le département. HYMENOPTERES. Dasypoda Hirlipes. — Plumipes. — Anthidium lituraturn. — Sphecodes maculatus. — Gibbus. — Pompilus Tripunctatus (Dahl- bom). — Oxibelus bellicosus. — Lindenius albilabris. — Tiphia villosa. — Lestiporus bicinctus. — Hoplisus quinque cinctus. — Psen ater. — Philanthus coronatus. — Triangulum. TENTHREDINES. Hylotoma..... espèce non décrite, voisine de Enodis. — Nematus nigricornis ? peut-être espèce nouvelle — Nematus..... de la deu- xiéme division; espèce non décrile. — Nematus..... de la troisième division; espèce non décrite. — Athalia lineolata. — Tenthredo ruslica. — Capliva (espèce nouvelle, division du Melanosterna). ICHNEUMONIDES. Ichneumon celerator. — Mesoleptus Typha. — Pesomacus bi- color (troisième variété). — Hemiteles palpator. ORTHOPTERES. Blalla laponica. — Barbistes punctatissima. 932 CICADAIRES. Cixius nervosus. — Aphrophora spumaria, — Tettigonia arun- dinis. — Ulopa obtecla. LEPIDOPTERES. Salyre Phoedra. — Polymale Arion. — Lytosie quadrille. La journée du 23 juin fut une journée agréable pour tous. L'heure du chemin de fer se fil trop Lêl entendre, on dut se séparer en se donnant rendez-vous à Angers, au mois de novembre, époque fixée pour la reprise des travaux de la Société Linnéenne. Chargé de son butin scientifique, chacun partit pensant à la cordialité qui avait ajouté un charme nouveau à celle intéressante excursion, et pou- vant répéter avec le poète : Oui, que la vanité, la basse jalousie . Méres de la discorde et de la calomnie Ne pénètrent pas dans nos cœurs. Bien qu'un terrain abonde en sues aimés des plantes , C'est quand il est purgé des herbes malfaisantes, Qu'il produit des fruits et des fleurs. DESCRIPTION DE L'UNIO COURTILLIERI. Coquille ovale, oblongue, enflée, bord supérieur plane, bord infé- rieur un peu relevé, sommets enflés, région du corselel dilalée, épi- derme olive taché de roux, nacre d'un blanc rosé, dent cardinale petite, triangulaire, épaisse, à la base striée. Dent postérieure de la valve gauche petite, lamelles fortes, assez élevées, enlieres. Impres- sions musculaires profondes. Baron HATTEMANN. faang- sure маца ши AINO. 3p arm EM "asset ЕШ OT OOOO DO TE Я ПУЛУМ LE DOCTEUR GUEPIN M. le docteur Guépin, président honoraire de la Société Linnéenne de Maine et Loire, est mort à Angers le 11 février 1858. Reçu docteur en médecine par la Faculté de Paris, le 17 ventóse an хит, il exerça sa profession à Angers avec distinction pendant longues années, fut professeur à l'école secondaire de médecine et de pharmacie de notre ville, directeur de la méme école, administrateur des hospices, cor- respondant de l'académie de médecine, premier adjoint au maire d'Angers, membre de plusieurs sociétés savantes francaises et étrangères, etc. Quel que soit le rare mérite avec lequel M. le docteur Guépin remplit les diverses fonctions auxquelles il fut appelé, ses prédilec- lions le porlérent surtout vers l'étude des sciences naturelles. Elève des écoles centrales, il suivit avec avidilé les cours de botanique pro- fessés avec tant de charme et de savoir par le célèbre naturaliste Merlet La Boulaye ; les progrès de M. Guépin furent rapides. П s'associa avec deux de ses amis pour parcourir à petites journées notre déparlement, et revint de ce voyage chargé de grandes richesses botaniques et de notes précieuses. Bientót M. Guépin fut appelé à professer l'histoire naturelle à l'école de médecine. L'excellence de son enseignement lui ага un audi- loire trés nombreux ; il sut dépouiller la science de cette aridité qui effraie les commencants, et eut l'art de rendre à tous l'étude agréable el facile. Chaque jeudi, pendant la belle saison, le docteur Guépin se mettait en roule dès le matin, en téle de sa petite colonne d'herborisants. Un 234 jour, il visitait les bois et l'étang de l'ancienne abbaye de Saint-Ni- colas, un autre jour, les landes du Perray-aux-Nonains, puis Chalo- ché, cette terre promise des naturalistes. Ce fut dans la vaste plaine de Malaguet que M. Guépin trouva le premier échantillon de l'Ophrys mouche, Ophrys myodes L. quifigura dans son herbier. Lorsque M. le docteur Guépin racontait la joie qu'il avait éprouvée, en colligeant cette curieuse plante, il ne man- quail pas de s'écrier avec Castel : Dieux ! avec quel plaisir, dans tes sentiers fleuris, Je vis, oh Chaloché! cet étonnant Ophrys, Insecte végétal, de qui la fleur ailée , Semble quitter sa tige et prendre sa volée. M. Guépin fit un trés grand nombre d'éléves, parmi lesquels on compte plusieurs femmes distinguées qui vinrent solliciter le docteur d’être admises à ses herborisations. Un de ses compagnons d'étude, M. Bastard, étant devenu directeur du Jardin des Plantes, songea à faire paraitre un ouvrage ayant pour titre: Essai sur la Flore du département de Maine et Loire; cet ouvrage, composé à la hâte, ne remplit point les vues des naturalistes. Aussi M. Desvaux, botaniste éminent, appelé à diriger le Jardin des Plantes, par suite de la retraite forcée de M. Bastard, publia en 1818 une Flore d'Anjou; cet ouvrage trés consciencieux, rempli d'érudi- lion, mais écrit d'une facon peu claire, ne put être mis à la portée de tout le monde. C'est alors que M. Guépin, dont la modestie empêchait les travaux de paraître, se vit en quelque sorte forcé par ses élèves de mettre au jour la Flore de Maine et Loire. La première édition fut publiée en 1830 (1); elle fut bientôt épuisée. L'auteur fut obligé d'en faire une seconde ; elle parut en 1838. A celte époque le docteur Guépin élait en correspondance avec tout ce que l'Allemagne compte de savants distingués; ne se fiant point à ses propres forces, il leur adressa les plantes sur lesquelles il avail des doutes, el n'admit aucune espèce qu'après une entière vérification. Il eut à sa disposition V Herbier normal de Reichenbach ainsi que l’Iconographia botanica, du même auteur. Aucuns sacrifices ne coûtèrent à M. Guépin pour se procurer les ouvrages utiles à ses études. C'est ainsi qu'il s'est formé une (4* Ce fut M. Louis Pavie, ami de l'auteur, qui se chargea d'imprimer cette première édition. Les suivantes le furent par M. Victor Pavie, zèlé botaniste. des plus belles bibliothèques botaniques qui soient en France (1), Le succès de la seconde édilion dépassa encore celui de la première, M. Guépin publia en 1842 un supplément qui devint insuffisant. Le goût de la botanique avail tellement été répandu par ce professeur, qu'à chaque saison lui ou ses élèves faisaient de nombreuses décou- vertes. Enfin, en 1845, M. Guépin sollicité de nouveau, fit paraître une troisième édition. Il parcourut encore jusqu'à ses extrêmes li- mites notre fertile pays, el reçut des communications de tous les naturalistes épars sur les divers points du département; qu'il nous suffise de citer les noms de MM. les abbés Baudoin, de dom Allaume, Benoist, Vallienne, Pantin du Plessis, Toché, Courtiller jeune, d'Es- pinay, Harran , Drouet, Lelièvre, Victor Pavie, Foret, Brouard, de Crochard, elc. Bien avant que l'heure de la retraite fût sonnée pour lui, M. Guépin abandonna sa clientèle et toutes ses fonctions pour se livrer entiè- rement à l'étude des végétaux. En 1852, plusieurs naturalistes Angevins se réunirent pour fonder une société d'histoire naturelle qui pritle nom de Société Linnéenne de Maine et Loire. M. Guépin s'empressa de s'adjoindre à cetle asso- cialion scientifique dont il fut le président ; ce fut dans les mémoires de cette société qu'il publia son Etude botanique sur Horace. (1) M. le docteur Guépin a légué par testament à la ville d'Angers ses magnifiques collections d'histoire naturelle et sa riche bibliothèque sans restriction. Ce généreux don comble une lacune qui existait dans notre bibliothéque munici- pale, déjà si riche en ouvrages littéraires et scientifiques. Voici la liste des collections du docteur Guépin : 1» Herbier de Plantes phranérogames, classées par le docteur Guépin ; 124 cartons. 20 Cryptogamie du docteur Guépin ; 19 cartons. 3° Plantes cryptogames de France, recueillies par Desmaziéres ; 47 fascicules, avec index. 49 Lichens de Suisse , recueillis par Schærer. 5° Stirpes cryplogame. Vogeso Rhenanæ, par J.-B. Mougeot et Nestter; 14 fascicules. 6° Monographie des rubus du docteur Philepp Virtgen; 4 fascicule. 7° Monographie des menthes, par le méme ; 1 fascicule. 8° Monographie des Verbascum, par le même; 1 fascicule. 90 De Brebisson , mousses de Normandie; 8 fascicules. 10° Robenhorst herbarium mycologicum ; 1 fascicule. 110 Plante cryptogamicæ quas in arduena collegit Libert ; 4 in-folio de 4830 à 1837. 12° Villiam Nilander herbarium lichenum parisiensium ; 3 fascicules; in-49. 13° Algues maritimes du Finistère, colligées par les frères Crouan, de Brest; 3 fascicules. 14° Lichens de France, par Delisle ; 1 fascicule. 236 Grâce aux encouragements donnés à chacun par le savant docteur, la Société Linnéenne a pris rang parmi les meilleures sociétés de province. Quoiqu'avancé en áge, la brillante santé, la gráce et la jeunesse de son esprit, faisaient espérer que de longs jours étaient encore réservés au docteur Guépin ; il travaillait à Ja quatrième édi- lion de sa Flore et à son Etude sur les mousses et avait pour ce der- nier et intéressant ouvrage. sans précédent dans la science, amassé des documents nombreux et importants. Nous souhaitons vivement que les notes de M. Guépin soient assez complétes pour étre publiées. Leur perte serait irréparable. Une partie de ce grand labeur est terminée et devait prendre place dans le troisième volume des an- nales de la Société Linnéenne. Les excellentes leçons de M. Guépin n'ont point été perdues. 1] laisse en Anjou plusieurs éléves qui se souviendront toujours de ses bons enseignements, et pourront marcher sur les traces du savant professeur qui vient d'étre enlevé à notre pays, mais dont le nom viendra naturellement prendre place dans l'histoire angevine, à cóté de ceux du baron de La Richerie, d'Aubert Du Petit-Thouars , de Tessier du Clozeau et de Merlet La Boulaye. AIMÉ DE SOLAND. CRYPTOGAMES DE MAINE ET LOIRE. GENRE UREDO. « Le genre Uredo comprend les cryptogames constilués par une simple poussière séminulifère, qui nail sous l'épiderme des plantes, et est composée de sporidies uniloculaires, libres, sessiles, ou rare- ment pédicellées, sphériques ou ovoides, dépourvues de cloisons transversales et d'articulations ou élranglements simples, jamais didymes, mais libres, déchirant irrégulièrement l'épiderme des plantes pour se mettre à jour, el celui-ci formant souvent une sorte de frange autour de la plante, mais jamais une espèce de concep- lacle comme dans l'OEcidium (1). » Aucun cryplogame ne mérite plus d’être étudié que l Uredo. Cette plante parasite attaque une multitude de végétaux dont elle cause la mort. Elle croit, avec une facilité prodigieuse, sous l'épiderme des tiges des feuilles, des fleurs et des fruits, qu'elle couvre de petites taches tantót jaunes, tantôt blanches, éparses ou conligues, rem- рез d'une masse qui se change en poussière colorée, poussière qui n'est qu'un composé de sporidies. Nous avons, pendant de longues années, étudié, avec le docteur Guépin, le genre Uredo, genre tres difficile à connaitre, car souvent (1) Dictionnaire des sciences naturelles, page 319, tome 56, verbo Uredo, 288 on ne peut délerininer certaines espèces que par les plantes sur les- quelles elles végètent de préférence. Nous sommes cependant arrivé, grâce à plusieurs sommilés de la science, à pouvoir signaler un grand nombre d'Uredo habitant notre département. Urepo muscArt Duby. — Le grand diamètre de la sporule est d'environ 0" 0025, la longueur du pédicelle généralement surpasse celle mesure. L'Uredo muscari est trés commun; on le trouve sur toutes les feuilles du Muscari Lelievrii. ll est abondant dans une prairie prés les bois de la Haie, où je l'ai récolté avec MM. Guépin, large et Béclard. U. QUERCUS Duby. — Ce qui caractérise |’ Uredo quercus, ce sont de peliles taches d'un rose pâle, auxquelles correspondent, à la face supérieure, des taches d'un jaune orangé. Lorsque la feuille perd sa couleur, les taches disparaissent, mais les pustules persistent, méme quand la feuille est entierement desséchée. Les sporules sont pyri- formes, d'un diamètre de 0% 0025; abondant sur les chênes de la forét de Longuenée ; observé avec le docteur Guépin. U. HYDROCOTYLES Bertero. — L'Uredo hydrocotyles, observé à Fon- lainebleau, au mois de septembre 1851, par MM. Roussel et Bertero, a élé trouvé en abondance dans les marais de la Baumette, par M. le docteur Guépin sur I Hydrocotyle vulgaris. Ses sporules sont ovoïdes; elles mesurent 0" 003 dans leur grand diamètre; elles sont pourvues d'un pédicelle hyalin, long de 0" 002 à 0" 0025. U. VEPRIS Desm. — L'Uredo vepris se développe de trés bonne heure sur nos Rubus, particulièrement sur le Rubus fructicosus. Il se fail remarquer par l'ampleur de ses pustules d'un jaune vif (Saint- Sylvain, assez rare). U. LEGUMINUM Desm. — Celle espèce, décrite par Desmazières, a élé observée par lui dans le nord de la France; elle est remarquable par ses grosses pustules presque toujours solitaires et qui n’ont pas moins de 4 à 6 millimètres de diamètre. Elle a élé trouvée en Maine et Loire par M. le docteur Guépin dans les jardins polagers, sur les haricots. Murs, Thouarcé, etc. U. EUPHORBILE Duby. — Pâtis de Beuzon; j'ai recueilli l'Uredo Eu- phorbiæ sur plusieurs euphorbes telles que Г Euphorbia esula L., Y Eu- phorbia cyparissias L., V Euphorbia exigua L., etc. On peut, à l'ail nu, facilement distinguer, sur les feuilles, sur les rameaux et sur les réceplacles des euphorbes, ce cryptogame. U. PRUNI Cost. — Cet Uredo, très commun, ne croit pas seulement sur les feuilles des pruniers; il croit aussi sur toutes les feuilles des arbres à noyaux. Trés commun. Vergers de Saint-Laud. U. canpipa DC. — Le Cirsium arvense a presque toujours les deux 259 faces de ses feuilles allaquées par l'Uredo candida, très commun. Murs, Briollay, Soucelles. U. concentricaA Desm. — Trouvé par M. le docteur Guépin, sur les feuilles du Muscari neglecta. Voici l'observation que fait Desma- zières sur cel uredo : « l Uredo concentrica occasionne sur la feuille des scilles, el surtout du Scilla nutans, sur lequel nous l'observons, une ou deux taches (quelquefois méme trois ou quatre) elliptiques, de 10 à 15 millimètres de longueur et d'un vert pâle ou jaunâtre. Un grand nombre de très petites pustules les recouvreut sur les deux faces el y sont disposées en plusieurs cercles allongés et concentriques; les sporules qu'elles renferment sont brunes, presque globuleuses ou pyriformes, semi-opaques, de 1/50 de millimètre environ de diamètre, el toules pourvues d'un pédicelle hyalin au moins aussi long. » U. ARTEMISIÆ Duby. — Il n'est pas un pied d' Artemisia absinthium qui n'ait ses feuilles allaquées au milieu de l'automne, par l’ Uredo ar- temisiæ. Jardins des vallées de la Loire. U. EPITEA Kunze. — Les saules des bords de la Loire ont, à l'au- tomne, leurs feuilles couvertes par l’ Uredo epitea. Ses sporulessont de deux natures : les unes pyriformes et longuement pédicellées, les aulres, moins grosses et dépourvues de pédicelles, sont ovoïdes. U. TROPOEOLI Desm. — Au mois d'août, nos capucines ont les feuilles allaquées par cet Uredo. Ses pustules sont d'un jaune pâle, contenant des sporules d'un jaune orangé. Observé daus le jardin de M. André Leroy. U. POPULINA Pers. — Les bouleaux du bois de la Haie ont, à l'au- tomne, leurs feuilles tachées раг l'Uredo popularina qui est très commun. U. UMBELLATARUM Chev. — Ecole du Jardin-des-Plantes sur les ombellifères (face inférieure), où il est abondant à l'automne. U. carpint Desm. — Les feuilles du Carpinus betulus sont toujours allaquées par cet Uredo observé à Murs, à Saint-Sylvain, dans le parc de Beaupréau ; trés commun. U. ARUNDINACEA Desm. — Sur les deux faces des feuilles du roseau commun, on remarque des pustules entourées d'une tache pâle, en forme d'ellipse, constituant l' redo arundinacea. Ses sporidies sont d'un brun pàle, ponctuées à leur surface, ovoides, d'inégales gros- seurs. Marais de l'Authion, bords de la Lys. U. GLUMARUM Rob. — L'Uredo Glumarum vient à l'intérieur des glumes et des bales du froment ; il fait prendre aux épilels qu'il atta- que une physionomie particulière ; ainsi, outre la teinte jaune qui s'aperçoit à travers les glumes, celles-ci s'éloignent du grain. Ses pustules sont arrondies ‚ les sporules dont elles sont remplies sont sessiles et globuleuses. U. POLYGONORUM Duby. — Le Polygonum convolvulus n'est jamais altaqué que par cet uredo. Le Polygonum convolvulus L., vulgaire- ment vrillée, est très abondant dans nos champs cultivés. U. svururri DC. — La face inférieure de la consoude officinale, Symphitum officinale L., est presque toujours couverte par l'Uredo symphiti. Il est rare de distinguer, sur la face inférieure de la con- soude, la couleur de la feuille; Г Uredo l'envahit entièrement. Murs, Mozé, Thouarcé, Chavagnes, elc. Trés commun. U. ARMERIE Duby. = L'Armeria plantaginea, qui croit à Briollay, sur les bords de la Loire, à Saumur, etc., a, au printemps, les deux faces de ses feuilles attaquées par l’ Uredo armeria. U. compransor, variété Tussilaginis, Desm. — L'été, le Tussilago farfara L., vulgairement pas-d'áne, a la face inférieure tachée par Г Uredo compransor. Je l'ai remarqué à Murs, à Chavagnes, à Saint- Sylvain, elc. U. ROSE Pers. — Abondant sur la face inférieure des rosiers, sur- tout en aulomne. U. PHASEOLORUM DC. — En automne, l'Uredo phaseolorum, se montre dans les champs de Saint-Laud, sur les pois vulgairement nommés feveltes. U. erst DC. — Sur le Pisum sativum, assez commun, jardins de Saint-Laud. U. rAB Pers. — Très commun, en été el en automne, sur les deux faces de la fève des marais. Nous l'avons observé dans les cul- Lures de fèves de Beaufort en Vallée. U. CYLINDRICA Strauss. — L'Uredo cylindrica, croit spécialement sur le Populus nigra L., vulgairement leiard, léard. Iles des Areaux, Ponts-de-Cé. U. PORTULACE DC. — Dans nos jardins, sur le pourpier. U. APICULOSA Chev. — Sur la face inférieure des feuilles de trèfle ; trés commun. U. xERCURIALIS Chev. — La mercuriale vivace, Mercurialis peren- nis L., a, sur ses feuilles inférieures, l'Uredo mercurialis; trouvé à Murs, La Haie, Soucelles, Thouarcé. U. RuiNANTHACEARUM DC. — J'ai trouvé avec le docteur Guépin l'Uredo rhinanthacearum à Eventard, à Saumur, à Angers sur le Rhinanthus hirsutus Lam. et sur le Rhinanthus major Ehrhart. U. PUsTULATA Pers. — Cour de l'évêché d'Angers sur les feuilles du Circoa lutetiana L. U. svonymr Mart. — J'ai remarqué I Uredo evonymi à Murs sur les 241 pétioles de l'Evonymus europaeus, la couleur des sporules est d'un jaune d’or. U. GERANII DC. — L'Uredo geranii se montre en été sur la face inférieure du Geranium molle. Commun aux environs d'Angers. U. anemones DC. — Trouvé au Jardin des Plantes d'Angers sur les feuilles, face inférieure el sur les pétioles de l Hepatita triloba. U. earr Duby. — Au printemps et en été à la face inférieure des Galium. Très commun à Saint-Nicolas. U. HYPERICORUM DC. — En automne sur toutes les feuilles des Hypericum, face inférieure. U. ovATA Strauss. — Cel Uredo aux sporules ovoïdes presque globu- leuses pourvues d'une pedicelle a élé trouvé par M. le docteur Guépin sur les feuilles languissantes du peuplier tremble, Populus tremula. U.nEcEPTACULORUM DC. — L'Uredo receptaculorum se trouve géné- ralement sur tous les réceptacles des chicoracées. 11 est très commun. Observé en Maine el Loire pour la première fois par M. le dt Guépin. U. SUAVEOLENS Pers. — Lasarrete des teinturiers, Serratula tinctoria L., a souvent ses feuilles couvertes par U Uredo suaveolens d'une cou- leur blanchatre. Je n’ai, ainsi que M. le docteur Guépin, remarqué l'Uredo suaveolens que sur la Serratula tinctoria. Forêt de Brissac près l'entrée de la route de Vauchrétien. U. POTENTILLARUM DC. — Abondant sur le Spirea ulmaria. Assez commun. Bords de la Lys. U. tint DC. — L'Uredo lini affecte de préférence le Linum cathar- ticum. Je ne l'ai du reste remarqué en Maine et Loire que sur cette plante. U. sepi Duby. — Cet Uredo particulier au Sedum se montre surtout sur le Sempervivum tectorum, vulgairement la joubarbe. Au Jaunay sur la toiture d'un four, commune de Saint-Sylvain. U. APICULOSA variélé Laburni Desm. — Jardin de M. André Leroy sur la face inférieure du Cytisus laburnum, facile à distinguer à sa couleur rugueuse. U. MACROSPORA Desm.— Cette espèce, créée par Desmazières, habite sur les feuilles de la Luzula pilosa. Trés commune daus les prairies de Mozé el Soulaines. U. LYCHNIDEARUM Desm. — Trouvé par M. le docteur Guépin sur les rameaux du Lychnis dioica ; vues au microscope, les sporules glo- buleuses de cet Uredo ont environ 1/50 de millimètre de diamètre. Les unes sont sessiles, les autres pourvues d'un pedicelle court. U. PÆONIARUM Desm. — Jardin de M. André Leroy, faces infé- rieures des feuilles de pivoines. L'Uredo pwoniarum se montre en été el en aulomne. 16 242 U. BETE Pers. — Dans nos jardins sur les feuilles de bettes. Trés commun. U. ricr. — Abondant sur la face inférieure du figuier, automne. U. LUZULE Desm. — Bois dela Haie. Au centre de chaque tache, qui a un millimètre environ, naît une pustule d'abord recouverte par l'épiderme soulevé et luisant: cet épiderme se déchire longitudinale- ment, et la poussière d'un roux jaunâtre se répand au dehors. Les sporules ont 1/50 de millimètre de diamètre. U. ZEE Desm. — M. le docteur Guépin, d’après les indicalions de Desmazières, a observé l’ Uredo zee sur les feuilles du mais, culture des environs d'Angers. U. canicis DC. — Feuilles du Carex vulpina, trés commun. U. vineæ DC. — Face inférieure du Vinea major. Murs, Мале, Chavagnes , Trémentines. U. vAcciNIORUM Johnst. — J'ai trouvé cet Uredo sur la face infé- rieure des feuilles d'un échantillon de Vaccinium myrtillus provenant de Combrée. U. YVIOLARUM DC. — Face inférieure du Viola odorata et autres es- pèces. Saint-Sylvain, Saint-Jean-de-la-Croix. U. VALERIANZ Duby. — Face inférieure des feuilles de la Valériane dioique, Pontigné, bords du Couesnon. U. ALLIoRUM DC. — Sur tous nos aulx. U. FALLENS Desm. — Pustules nombreuses, d'un brun pâle, spo- rules couvertes de pelites verrues d'une couleur foncée. Trés com- mun sur le triolet (Trifolium repens L.). U. CARYOPHYLLOCEUM Desm. — J'ai trouvé dans les haies des environs d'Angers l’Uredo caryophylloceum sur les feuilles du Stellaria holostea. Les sporules ont presque 0™ 025 dans leur grand diamètre. U. сосовлі Desm. — Trés commun sur les bords de la Loire; habite sur les feuilles du Cucubalus bacciferus. П. GENRE PUCCINIA. Les Puccinia sont des plantes très petiles , qui naissent en forme de taches sous 1 ёрійегте des végétaux vivants, qu'elles déchirent pour se meltre à Jour; alors elles ressemblent à des lubercules au amas en parlie compactes el en partie gélalineux, qui contournent 248 des sporides ou pelits pédicarpes pédicellés, divisés en deux loges ou plusieurs, par une ou deux cloisons transversales. PUCCINIA ANEMONES Pers. — Trés commune sur I’ Anemone nemo- rosa ; avril, bois de Saint-Sylvain. P. LINEARIS Desm. — Commun sur tous nos Bromus. On a long- temps confondu celle espèce avec le Puccinia sertata Preuss. Elle en diffère essentiellement, d’après la description donnée par Desma- zières, par ses sporidies entières et obtuses au sommet. P. SCORODONIÆ Link. — Croil sur nos Teucrium. Je l'ai observé à Pontigné, prés la chaussée du moulin de la Roche, sur le Teucrium chameedrys. P.sunci Desm — Très commune sur les joncs desséchés. Bords du Laon, prés Machelle. P. MENTHA Pers. — Commune sur le Mentha rotundifolia. Com- mune de Murs. P. comPosiTARUM Link. — Très commun sur la Centaurea pra- tensis. Commune de Murs, prairies. P. CORRIGIOLÆ Duby. — Abondant sur le corrigiola littoralis. Sa- bles des hords de la Loire. P. EPILOBII DC. — Sur l’ Epilobium roseum. Rocher de la Baumelte. P. LINEOLATA Desm. — Sur le Scirpus maritimus. Пе des Areaulx , bords de la Loire. P. ALLIORUM Dur. et Mont. fl. d'Algérie. — Sur l'ail commun. P. GLADIOL Cast. — Sur le Gladiolus Guepini. Champs St-Martin. P. sonca Desm. — Sur le Sonchus oleraceus. Fossés du Perray-aux- Nonains. P. cERASI Cast. — Face supérieure des cerisiers, assez rare. P. HETEROCHRA Rob. — Commun sur tous nos Galium. St-Nicolas. P. жєорори Link. — Sur l'/Egopodium podagraria; observé par M. le Dt Guépin; très rare en Anjou. P. LuzuLz Lib. — J'ai rencontré plusieurs fois cette espèce mêlée avec l'Uredo luzulæ; commune sur la luzula pilosa. P. PRUNORUM Link. — Très commun; face inférieure des pru- niers. Р. Buxı DC. — Sur le buis. Andard, Pruniers, Soulaines. Desma- zières prétend que ce cryplogame végète toute l'année sur les buis. P. vioLARUM Link. — Sur toutes les faces inférieures des feuilles de nos violettes. Saint-Sylvain, Thouarcé, Gonnord. P. UMBELLIFERARUM DC. — Face inférieure des feuilles du Sanicula europea Lin. et du Silaus pratensis Besser. Chaloché. P. rANACETI DC. — Levée de Belle-Poule. Sur le Tanacetum vul- gare. 244 P. CORONATA Desm. — Prairies du Louet, sur le Dactylis glomerata. P. BETONICÆ. — Face inférieure de la Betoine officinale. Forêt de Brissac. P. convozvuLi Cost. — Les haies des bords de la Loire, sur le Con- volvulus sepium. P. CRUCIANELLZ Desm. — Trés rare sur la Crucianella angustifolia. Pont-Barré, juillet 1850. P. ERYNGII DC. — Sur les deux faces de l Eryngium campestre, tres commun. P. AsrERIS Duby. — Sur les deux faces des Aster, Jardin-des- Plantes d'Angers. P. VIRGÆ AUREZ Lib. pl. crypt. — Ce cryplogame, que M. le doc- leur Guépin n'a remarqué que sur le Solidago virga aurea, est très abondant sur cette plante. Roche de Murs, roche d'Erigué. P. vVALANTLE Link. — Le Gaillet croisette, qu'on trouve aux mois d'avril, mai et juin, en fleur dans nos haies el nos prés, a ses feuilles envahies de bonne heure par le Puccinia valantiæ. P. srRIOLA Link. — Sur les feuilles et les tiges du Carex vulpina. Fossés près le Bon-Pasteur d'Angers. P. POLYGONORUM Link. — On trouve en abondance, dans tous nos marais, le Polygonum amphibium L. La face inférieure des feuilles de celte plante est toujours couverte par le Puccinia polygonorum. P. rHALICTRI Duby. — Ce Puccinia, que M. le docteur Guépin a remarqué sur le Thalictrum flavum, est abondant sur les Thalictrum de la prairie de la Baumetle. P. ciRC E Pers. — Face inférieure du T. Circea lutetiana. Bois de Bercy, Murs, cour de l'Evéché d'Angers. P. CARYOPHYLLACEARUM Desm. — J'ai observé cette espèce sur le Spergula pentendra et le Spergula arvensis. En automne, les feuilles, les liges et les pédoncules des spergules sont couvertes par le Puc- cinia caryophyllacearum. Ce cryptogame est abondant sur les sper- gules qui croissent dans nos vallées de la Loire; ainsi, je l'ai remar- qué à Murs, aux Ponts-de-Cé, à Saint-Jean-de-la-Croix, etc. P. RECONDITA Desm. — Tiges des seigles des vallées de la Loire. Plusieurs botanistes pensent que celte espèce est la méme que celle du Puccinia caricis DC., dont elle se rapproche par la forme des pus- Lules et des sporidies. Le savant cryplogamiste Desmazières est d'un avis conlraire. « Nous aurions, dil ce naturaliste, été disposé à réu- nir ce Puccinia au Puccinia caricis, si la considération du pédicelle très court (0™ 001 environ) et des pustules recouvertes par l'épiderme qui se déchire rarement el loujours très tardivement dans noire co- momycèle, ne nous avail engagé à conserver le nom proposé par 245 M. Roberge, qui а bien voulu soumettre son espèce à notre appré- ciation. » P. CORONATA Cord., Icon. fung. — Les dents dont est couronné l'article supérieur de la sporidie ne se remarquent qu'à sa maturité ; toujours cet article en est dépourvu par l'écartement de l'épiderme avant l'ouverture de la pustule. Croit sur U Holcus mollis, port Meslay, prés Angers; Bromus asper, prairies du Veau, commune de Chava- gnes-les-Eaux ; sur l'Arundo phragmites, bords de la Loire ШШ GENRE PEZIZA. Le caractère de ce genre est celui-ci : champignon en forme de cupule sessile ou stipitée, portant les seminules à la surface supé- rieure, renfermécs, au nombre de six à huit, dans des spores ou con- ceplacles propres. Les peziza varient dans leur grandeur, mais ils sont généralement pelits, de telle sorte qu'on les prendrait quelquefois pour des scu- telles de lichens. On compte plus de deux cents espèces de peziza. Nous allons donner la nomenclature de celles connues en Anjou el observées par M. le docteur Guépin, auquel nous devons la plu- part des notes qui nous ont servi à rédiger ce travail. PEZIZA DILUTELLA Fr. — Trés rare; observée раг M. le docteur Guépin sur le Cerastium pumilum à la Garenne de Saint-Nicolas, aux Fours à Chaux, à Juigné-sur-Loire , à Faveraye. P. LUTEO-VIRESCENS Rob. — Desmazières fait remarquer avec rai- son que la différence qui existe souvent dans la longueur du pédi- cule de cetle espèce parait due au lieu où se trouve l'individu. Le pédicule s'allonge jusqu'à ce que la capsule soit parvenue, à travers les obstacles qui l'entourent, à un endroit où elle puisse se dévelop- per en liberté. Le disque devient blanchâtre, quelquefois bleuâtre par la dessicalion; le dessous de la capsule conserve mieux sa couleur. Trouvé pour la première fois par M. le docteur Guépin , à Tiercé, sur le chèvrefeuille commun. P. ALBO TESTACEA Desm. — Celle espèce est trés fragile ; elle se brise à l'état frais aussitôt qu'on la touche. On la trouve en Anjou; sur les chaumes, au mois de septembre. P. nobERGE: Desm. — Les diverses espèces de chèvrefeuille qu'on trouve dans le Baugeois ont leurs rameaux couverts, au printemps, 246 par celle pezize, qui diffère de la première par sa couleur plutôt rousse que rouge, par ses poils beaucoup plus longs et par sa cupule quelquefois subpédicellée. P. pALEARUM Desm. — Les thèques de celle pezize n'ont guère plus de 1/20 de millimètre de longueur. On trouve principalement, dans les champs de Juigné-sur-Loire, la Peziza palearum Desm. sur les éteules de froment. P. rrERIDIS Fr. — Sur toutes nos fougères, au printemps et en hiver. « Les cupules, dit Desmaziéres, dans son Etude sur les plantes cryptogames de la France, naissent sous l'épiderme, lequel, en s'en- levant par lambeaux scarieux, les laisse à nu, de manière que, le plus souvent, elles paraissent superficielles. Elles ne dépassent pas, dans leur plus grand développement, de 1/3 à 1/2 millimètre de dia- metre. Leur intérieur est de couleur paille; l'extérieur, brunátre à l'état sec, palit par l'humidité et prend une teinte verdâtre. Il paraît que celle couleur est due à des cils extrêmement courts; ceux du bord sont blancs et le font paraître finement denté. Les théques sont presque cylindriques et n'ont pas plus de 1/25 de millimètre de longueur. P. FALLAX Desm. — M. le docteur Guépin a trouvé celle pezize dans les pépinières de M. André Leroy, sur le Pinus sylvestris. P. sALICARIA Pers. — Saint-Jean-de-la-Croix, dans les excavalions des vieux saules des bords de la Levée. Les thèques du Peziza sali- caria sont presque claviformes el ont 1/20 de millimètre de lon- gueur, quelquefois un peu moins. Les sporidies sont ovales-oblongues et n'ont guère plus de 1/200 de millimètre. P. UMBRINELLA Desm. — Sur l'Urtica dioica, aux environs d'An- gers. Les sporidies de cette Peziza ont environ 1/80 de millimètre de longueur. P. ALBIDA. — En été, les frénes de la prairie de la Baumette ont les pétioles tachées par la Peziza albida. P. EBURNEA Rob. — Prairies du Louet, sur les feuilles de nos bromes et du dactylis. C’est la plus pelite espèce connue en Anjou. P. seprum. — Route de Cholet, prés Pelit-Claye, sur les rameaux secs du Cralægus oxyacantha. P. numitis Desm. — Trouvé sur l’ Humulus lupulus, bords de la Lys, commune d'Aubigné-Briant. P. BRUNEOLA Desm. — M. le docteur Guépin a observé celle pezize dans les bois de la Haie, sur les feuilles sèches et tombées du quercus toza. Voici la description quen donne Desmazières : « Ce joli petit fungus a des rapports avec la Peziza fuscescens Pers. de la série Dasys- cyphæ stipitate Fr. Il naît sur les deux faces, et surtout à la face 247 inférieure des feuilles sèches et tombées du chêne. Dans son jeune âge, il est sessile el ne parait, méme à la loupe, que comme un point velu et brun. Il s'élève ensuite sur un pédicelle distinct, glabre, d'un blanc jaunâtre, formant à peu près le tiers de la hauteur totale de la plante, qui n'excède pas un millimètre. La cupule, à cette époque, s'ouvre en soucoupe plus ou moins étalée, avec les bords constamment relevés. Le disque est blanchatre et atteint environ un millimètre de diamètre. L'extérieur de cette pezize est couvert d'un duvet trés court, d'un brun roux, plus serré prés bords. Les théques sont tubuleuses, obtuses, et renferment des sporules oblongues; elles n'ont guère plus de 1/20 de millimètre, mais les paraphyses les dépassent de beaucoup en longueur et sont remarquables parce qu'elles sont très droites, fusiformes, pointues et d'une grosseur égale à celle des thèques. » P. corTICALIS Pers. — On trouve assez abondamment cette pezize sur les tiges de nos chèvrefeuilles. Pontigné (Lonicera xylosteon). P. PETIOLORUM Rob. — Trés rare. M. Guépin a constaté la pré- sence de celte pezize sur les pélioles des vieilles feuilles du Quercus robur. Les Banchais, commune de Saint-Sylvain. P. LACHNOBRACHYA Desm. — Jardin-des-Plantes d'Angers; feuilles de l Acer pseudo-platanus. P. BRUNEO-ATRA Desm. — Lieux tourbeux. Chaloché. Р. TAMI Lamy. — Sur le Tamus communis. Bois de la Haie. P. CULMICOLA Desm. — Tiges sèches des froments des basses vallées. Р. msiprosA Desm. — Sur les deux faces de l Hædera helix. P. NIGRELLA Pers. — Sur les terrains humides des bords de l'étang Saint-Nicolas. P. nipuLUs Fries. — Sur la tige du Convallaria multiflora. Perray- aux-Nonains. P. CORONATA Fries. — Sur le Cannabis sativa. Vallées de la Loire. P. рекѕооми Fries. — Sur U Equisetum telmateia. Thouarcé, bords du Layon. P. ATRATA Pers. — Bords de l'Aubance, sur le Spiræa ulmaria. Je lai aussi trouvé à Murs, sur le Sambuscus ebulus et sur le Plantago lanceolata. Р. SPHOERIOIDES Pers. — Sur plusieurs Lychnis. Briollay, Tiercé. P. VULGARIS Fr. — Commune dans les bois de Saint-Sylvain, en automne, sur les tiges du Corylus avellana. P. GRAMINIS Desm. — Sur le Triticum caninum. Commune au bord des routes, dans les haies des environs d'Angers. 248 P. NERVICOLA Desm. — Au printemps, sur la face inférieure des feuilles de chêne. Bois de la Haie. Р. CERASTIORUM. — Fours à chaux. Sur le Cerastium semide- candrum. Р. ARDUENNENSIS Mont. — Observée par le docteur Guépin, sur les feuilles de nos Rubus. P. PATULA Pers. — En automne, sur le Populus tremula. Forêt de Brissac. P. LABIATA Desm. — Trouvé aux fours à chaux par M. le docteur Guépin, sur l Eryngium campestre. P. acuum Duby. — Jardin de M. Leroy, sur les Abies. P. GLANDESTINA Fr. — Murs, sur les rameaux du Sambuscus nigra. P. DIMINUTA Rob. — Dans le Layon, près le gué du Berg, sur les joncs. P. FASCICULARIS Fr. — L'écorce des peupliers des pâtis de Beuzon est couverte par ce cryptogame. Il croît aussi sur le frêne. Mozé, Soulaines, Faveraye, Chavagnes, Marligné, elc. P. HERBARUM Pers. — Ce cryplogame est assez commun sur les liges de Rubus. Il vient en abondance sur les feuilles desséchées de nos bromes. Saint-Sylvain, Chaloché, Briollay, Beaucouzé. P. ANOMALA Pers. — Trés commun sur les saules de l'ile des Ai- raulx, près les Ponts-de-Cé. Ce cryptogame se trouve aussi sur les pins des bois de la Haie. Je l'ai observé sur les hêtres du parc de Beaupréau. P. misELLA. Rob. — Commune sur le Rubus radula. Haies de pruniers. P. JucUNDISSIMA Desin. — « C'est, nous dit Desmazières, qui a fait celle espèce, une des plus charmantes et des plus délicates pezizes que nous connaissions. Chaque houppe ou aigrette qu'elle produit se compose non pas d'un duvet, mais de poils ciliformes, trois à quatre fois plus longs que la cupule est. haute. Dans le jeune âge méme, les cils ont pris presque tout leur accroissement, et l'on dirait qu'ils composent la plante entière, si l'on ne distinguait, à leur base, une cupule extrêmement petite, infundibuliforme. Celte cupule, très mince, s’arrondit en dessous et prend la figure d'une coupe et d'un Bowel, puis elle se renverse, et son disque devient tout à fait plane. » P. PALUSTRIS Rob. — Machelle, ruisseau de l'Arcison, sur les jones. P. оЕрЕМА Desm. — Cette espèce se trouve souvent mêlée sur les feuilles de nos Rubus au Peziza dumorum. M. le docteur Guépin pré- tend qu'il faut humecter légèrement les échantillons pour bien dis- linguer lous les caractères de celle espèce. 249 Р. MELATEPHRA Desm. — Sur les jones secs, étang de la Haie (her- borisation de M. le docteur Guépin). Р. CARNEO PALLIDA Rob. — Au printemps, sur les vicilles feuilles des ormes de nos boulevards. Si l'on humecte le support, on verra aussitôt paraître les cupules par l'ouverture qu'elles ont faite à l'épi- derme et devenir presque superficielles. P. sPIREE Rob. — Trés commune sur les feuilles desséchées du Spirea ulmaria. Р. PAULULA Rob. — Cette espèce, à tort, a souvent été confon- due avec les Peziza palustris qui, comme elle, se développent sur le chaume des joncs. P. TimipuLA Rob. — Pare de Chanzeau, sur les feuilles de bou- leau. Il croit également sur les feuilles du bouleau le Peziza epi- phylla, mais il est beaucoup plus grand, de couleur d'ocre et sou- vent substipité. P. NERVISEQUA Pers. — Cette espèce croit sur les feuilles lan - guissantes du Plantago lanceolata. Je l'ai trouvée tout le long de la route de Seiches à Baugé. P. HEMISPHÆRICA Hoff. —Surla terre, octobre 1857, forêt de Brissac. P. BRUNNEA Fr. — Sur la terre, bois de la Haie. P. COMPRESSA. — Sur des copeaux humides, trouvée à Murs, au mois de décembre 1857. P. FRUCTIGENA Pers. — Assez rare. Je ne l'ai remarqué que sur les fruits du Corylus avellana L., commune de Murs. P. PHYLLOPHILA Desm. — Cette nouvelle espèce, créée par Desma- zières, a été trouvée en Anjou, par M. le docteur Guépin, sur des feuilles humides de l’ Acer campestre. P. GLUMARUM Desm. — Cette espèce a élé observée pour la pre- miere fois en Anjou par M. le docteur Guépin, sur des terrains hu- mides où se trouvaient des bales de froment. Cette pezize , dit Des- mazières, croit en groupes serrés, s'altachant aux bales du grain et quelquefois aux brins de paille. Dans sa jeunesse, elle est close, glo- buleuse, conique à sa partie inférieure, el entourée d'un duvel blanc et fugace. Elle s'ouvre ensuite et devient, de jaune pâle el blanchà- tre qu'elle était d'abord, d'un beau jaune orangé. Alors elle est glabre, plane ou légèrement concave, el a depuis quatre jusqu'à huit milli- mètres de diamètre. Ses bords sont blanchâtres, souvent flexueux, un peu frangés ou déchirés ; sa chair, très fragile, est blanche inté- rieurement. L'hyménium de celte espèce est composé de paraphyses entre lesquelles se trouvent des thèques hyalines, tubiliformes, con- tenant huit sporules ovoïdes ou un peu oblongues, disposées quel- quefois obliquement, sur une seule rangée. 250 P. caricis Desm. — Cette pezize a été observée sur tous nos carex. Elle croit principalement sur le Carex glauca. Perray-aux-Nonnains, P. CILIARIS Fries. — Assez commune sur les feuilles mortes du chátaignier. Propriété de Chandoiseau, commune de Faveraye. P. ALBOVIOLASCENS Fr. — Jardin de M. André Leroy, trouvé sur le Caprifolium hortense. P. sut PHUREA Fr, — Tige de l'Heracleum sphondylium, fossés des pâtis de Beuzon. P. GLAVELLATA Duby. — Tiges du Dactylis glomerata, prairies de Sainte-Gemmes-sur-Loire. Cetle espèce, longtemps confondue avec la Peziza cyathoides, s'en dislingue par sa couleur, sa petitesse, son pédicule épais el son réceptacle qui ne devient jamais plane. P. venustuLa Desm. — Sur les branches de Г Асе” negundo. Murs, P. ANOMALA Pers. — Commune en automne, sur l'écorce des saules, bords de la Loire. P. FRUCTIGENA Fr. — Sur les cupules du chêne; assez rare. Cha- vagnes-les-Eaux. P. rusARIOIDES Desm. — Au printemps, on trouve, dans les fossés du Mail, des tiges sèches de l’ Urtica dioica, sur lesquelles se montre la Peziza fusarioides. P. LACUSTRIS Desm. — Cette pezize, décrite par Desmazieres, croit sur les joncs secs des Mortiers, prés Angers. P. cyATHOIDEA Pers. — Abondant sur nos orges. Je l'ai trouvé sur le Bromus secalinus L. P. CARPINEA Pers. — Très rare. On ne l'a encore remarqué en An- jou que sur l'écorce du charme. Ferme de Chenaussin , commune de Villedieu-la-Blouère. P. PATULA Pers. — Commun, à la fin de l'automne, sur les feuilles du peuplier blanc. Rocher de la Baumette. P. pumorum Desm. — Sainte- Gemmes, sur les feuilles mourantes du Rubus cesius. P. HORRIDULA Desm. — Sur les paillers exposés au nord. Assez rare. P. viLLOSA Pers. — Ce cryptogame ne croit en Anjou que sur les tiges des luzernes et des sainfoins. Murs, Chavagnes-les-Eaux. P. BREVIPILA Rob. — Tige du Centaurea nigra. Chaloché. P. DIVERSICOLOR Fries. — En automne, sur les crottes de cheval el sur les bouses de vaches. P. ERUMPENS Grev. — Sur les pétioles de U Acer pseudo-platanus, fontaine de Martigné-Briant. P. POLYGONI Desm. — Très commun sur toutes les vieilles tiges de Polygonum persicaria et hydropiper, 251 P. vinosa Fr. — Les feuilles des ormes du boulevard d'Angers sont couvertes, au printemps, par celte pezize, confondue longlemps avec la Peziza rubella Pers. Celle espèce en diffère essentiellement par sa substance trémelloide ainsi que par ses bords très entiers et non sublaciniés. Р. ARENIVAGA Desm. — Très commun sur les feuilles du Calama- grotis epigeos. Murs, Saint-Sylvain, Chaloché. Je l'ai trouvé à Noir- moutiers, sur le Calamagrotis arenaria. P. EFFUGIENS Desm. — Au printemps, les vieilles tiges des plantes herbacées qui ont résisté à l'hiver, se couvrent de Peziza effugiens. Le docteur Guépin a remarqué cette pezize sur le Phragmites com- munis. P. VERSICOLOR Desm. — Très rare. Observé par le docteur Guépin sur les nervures de la fronde de Г Aspidium filix mas. Tiercé. Des- mazières prétend que celte pezize, d'un blanc de lait trés pur à l'état frais, passe subilement au jaune par le plus léger frottement ou la pi- qüre de la pointe d'une aiguille. P. BICOLOR Duby. — Trés commune, au printemps, sur les ra- meaux du chéne. Murs, Mozé, Soulaines, etc, Iv GENRE OIDIUM. L'Oidium est caractérisé par ses filaments rameux byssoides, flo- conneux, entrelacés en touffes, cloisonnés, et dont les extrémités sont composées d’arliculations qui, en se délachant, paraissent de- venir autant de conceptacles. Orpruw MONILIOiDES Fr., Syst. — Commun sur tous nos poa, abondant surlout sur le Poa pratensis, Celte espèce se développe sur les feuilles ; elle altaque d'abord leur sommet, puis progressivement elle descend jusqu'à leur base. О. EPILOBII Desm. — L’ Epilobium molle, si commun dans notre dé- partement, a, en élé, ses feuilles atlaquées par celte plante parasite. J'ai du reste remarqué celle espèce sur tous les épilobes qui croissent en Anjou. О. ERYSIPHOÏDES Fr., Syst. — J'ai remarqué pour la première fois cel Oidium sur un pied de Ballota nigra, croissant dans la rue 252 de Bouillou. Les Lamium album des bords de la Loire en sont couverts. О. rnuNoRUM Fr. — Sur les prunes, lorsqu'elles commencent à pourrir. О. cHARTARUM Link. — Le papier qui sert à dessécher les plantes est souvent couvert par cet Oidium. L'humidité est très favorable au développement de l'Oidium chartarum sur le papier buvard. AIMÉ DE SOLAND. HERBORISATIONS DE 1858 Chaque année, M. le docteur Guépin publiait le résultat des herbo- risations qui élaient faites en Maine et Loire. C’est ainsi que ce bo- taniste distingué a pu enrichir la Flore d'espèces et de localités nou- velles. Voulant continuer l’œuvre du docteur Guépin, nous nous sommes adressé à nos collègues en botanique. Aidé par eux, nous avons l'espoir de pouvoir donner assez prochainement un travail complet sur les plantes de l'Anjou. Nous devons à l'obligeance de M. Trouillard, de Saumur, la com- munication des espèces suivantes : FRAGARIA CoLLINA. Montreuil-Bellay, pelouses au-dessous du bois de la Ga- renne TR. LYCOPODIUM iNuNDATUM. TR. Courléon, dans les landes humides. POLYGALA AUSTRIACA. TR. Prairies des Ulmes, près Saumur. VERONICA spicata. TR. Courléon, chemins sablonneux. Herborisalions de M. l'abbé Baudouin, aumónier des Incurables de Baugé : POTAMOGETON PusiLLUs. Baugé. ARUM MACULATUM. Rare dans le Baugeois. Forêt de Chandelais. CAREX PANICULATA. Baugé. — PALLESCENS. Baugé. — KOCHIANA. Jarzé. CLADIUM mariscus. La Bouquetière. DIGITARIA FILIFORMIS. Baugé. AIRA С(Е$Р1ТО8А. Forêt de Chandelais. AVENA suLcATA. Chandelais. Mouliherne, JUNCUS oprusiFLorus. Baugé. — ACUTIFLORUS. Baugé. ORNITHOGALUM REFRACTUM. Baugé. ALLIUM unsiNUM. Montpollin. GALANTHUS wivALis. Vieil-Baugé. OPHRYS wvopEs. Pontigné. Je l'ai trouvé abondant près le dolmen appelé dans le pays Pierre couverte. OPHRYS APIFERA. Pontigné. — FUSCA. TR. Echemiré. Cette espèce est rare en France. CHENOPODIUM BONUS HENRICUS. Pontigné. UTRICULARIA NEGLECTA. Saint-Martin. Distré. OROBANCHE uticis. Chaloché, Mouliherne. — PICRIDIS. Vieil-Baugé. LINARIA PELISSERIANA. Cuon. ANTHYRRHINUM magus. Baugé, sur les murs. BARTSIA viscosa. Chandelais. SALVIA SCLAREA. Pontigné. — VERBENACEA. Vieil-Baugé. TEUCRIUM MOoNTANUM. Pontigné, Lasse. LITHOSPERMUM PURPUREO CŒRULEUM. Pontigné. CYNANCUM viNCETOXICUM. Baugé. PRISMATOCARPUS nmnvBnipus. Pontigné. ANDRYALA INTEGRIFOLIA. Chandelais. HYPOCH(ERIS MACULATA. Mouliherne. MICROPUS EnECTUS. Baugé, Pontigné, Lasse. CIRCIUM TUBEROSUM. Pontigné. XERANTHEMUM CYLINDRACEUM. Lasse. SENECIO ERUCEFOLIUS. Pontigné. VALERIANA pioICA. Pontigné. ASPERULA arvensis. Lasse. SCIUM ANGUSTIFOLIUM. Vieil-Baugé, Saint-Martin-d’Arcé. ADONIS JESTIVALIS. | — AUTUMNALIS.{ Pontigné, Lasse. — FLAMMEA. MYOSURUS minimus. Baugé, ANTHEMIS mixta. Mouliherne, DIPSACUS pitosus. Pontigné. LINUM ANGUSTIFOLIUM. Vieil-Baugé, Mouliherne. 255 HYPERICUM QUADRANGULUM. Baugé. FUMARIA VaiLLANTII. Pontigné, Lasse. ARABIS HIRSUTA. Baugé, Pontigné. LEPIDIUM LariFoLIUM. Vieil-Baugé. PARNASSIA PALUSTRIS. Pontigné. CERASTIUM BRACHYPETALUM. Baugé. ARENARIA SeGETALIS. Baugé, Mouliherne. — MONTANA. Saint-Martin-d’Arcé. DIANTHUS caARYvOPHYLLUS. Baugé. ILLECEBRUM vERTICILLATUM. Baugé. TILLEA MUSCOSA. Baugé. RIBES RUBRUM. Echemiré. POTENTILLA VaiLLANTH. Cheviré, Saint-Martin-d'Arcé. MELILOTUS OFFICINALIS. Vieil-Baugé. MEDICAGO AMBIGUA Jordan. Lasse. CORONILLA EMERUS. Chandelais. EUPHORBIA PILOSA. Seiches. SALIX REPENS. Seiches. ORCHIS INCARNATA. La Bouquetière. JUNCUS squarrosus. Chandelais. OPHIOGLOSSUM vuLGATUM. Vieil-Baugé. OSMONDA REGALIS La Bouquetière. CETERACH OFFICINARUM. Baugé. POLYSTICHUM THELYPTERIS. La Bouquetière, Chaloché, Saint-Martin-d'Arcé. — SPINULOSUM. Chandelais, La Bouquetière. ATHYRIUM FILIX FEMINA. Chandelais, La Bouquetiére, Saint-Martin-d'Arcé. BLECHNUM spicans. Chandelais, Montpollin. PILULARIA GLOBULIFERA. Chaloché, Saint-Martin-d'Arcé. FRITILLARIA MELEAGRIS variété alba. Prairies de la Meignanne. Trouvé par M. de Joannis. Quant à nous , nos herborisalions nous ont fait observer un assez bon nombre de localités nouvelles et plusieurs plantes très rares de l'Anjou. En voici la liste : SMYRNIUM oLusATRUM. Environs du pont Brionneau. RUTA GRAVEOLENS. Aubigné-Briant, 256 CONVALLARIA MAIALIS. Trémentines. BERBERIS communis. Route de Briollay. PAPAVER HYBRIDUM. Champs cultivés de Briollay. BRIZA minor. Liniéres-Bouton. ORNITHOPUS roseus Liniéres-Bouton LOTUS nispipus. Chavagnes-les-Eaux. TRIFOLIUM RESUPINATUM. Saint-Sylvain , prés la Singerie, Ce trèfle est abondant dans les prairies des environs de Cholet. — Pendant que les bœufs des mé- tayers de Cholet sont à l'étable ou aux pâturages , il se loge dans la cavité de leurs sabots des graines du trifolium resupinatum , qui à la longue se déta- chent sur les routes et c'est ainsi que depuis Cholet jusqu'à Paris on a remarqué cà et là, aux bords des fossés et des bermes, des échantillons du tréfle renversé. On prétend méme en avoir trouvé dans plusieurs embarcadères de nos gares. GENISTA SAGITTALIS. Liniéres-Bouton. ILLECEBRUM vERTICILLATUM. Ecoufflant. GYPSOPHILLA wuRALIs. Vallées de la Loire, les Ponts-de-Cé, HELIANTHEMUM GuTTATUM, variété immaculatum. Les Noyers, commune de Martigné-Briant. ARABIS nirsuta. Le Plessis-Grammoire. BARBAREA PrugCOX, Saint-Lambert-du-Lattay. ANDROSŒMUM OFFICINALE. Bécon. AVENA PUBESCENS. Landes de Brou. MUSCARI LELIEVRI. Prairies du Champ des Martyrs près Angers. POLYGONUM BRITTINGERI. Mars. MALVA NICŒENSIS. Thouarcé, Faye, Martigné. ACORUS Calamus. Etang du Pré, commune de Mozé. ROSA BATHOLOMENSIS. Les Chenaies , commune de Saint-Barthélemy. TR. KOELERIA CRISTATA. Au pied du tombeau du Chien, commune de Seiches, prés le cháteau du Verger. ROSA ARVINA. Mozé. — ANDEGAVENSIS. Моле. CHARA misPIDA. Mozé prés les Rochettes. — TRANSLUCENS. Thouarcé. ORNITHOGALUM REFRACTUM. Mozé, Soulaines, Thouarcé , Juigné-sur-Loire. ROSA COLLINA. Saint-Barthélemy. — PSILOPHYLLA. Chemin de Frémur. DIPLOTAXIS viMINEA. Les Coumons , commune de Chavagnes-les-Eaux. CARDAMINE sytyatica. Montreuil-Belfroi. 257 CARDUUS PYCNOCEPHALUS Jacq. Angers, quai des Luisettes. MYAGRUM PERFOLIATUM. Liniéres-Bouton. SAPONARIA OFFICINALIS. Chavagnes-les-Eaux. DIPSACUS piLosus. Varennes-sous-Montsoreau. LEONURUS carpiaca. Varennes-sous-Montsoreau. TUSSILAGO PESASITES. Varennes-sous-Montsoreau. RUBUS ARDUENNENSIS. Rochers de Pruniers, Murs. MERCURIALIS PERENNIS. Bords du ruisseau de Mozé. XERANTHEMUM CYLADRINCEUM. Briollay. CENTUNCULUS minimus. Serrant. MYOSURUS minimus. Sables des vallées de la Loire. PINGUICULA vuLGARIS. Noyant, Brain-sur-Allonnes. ANDROSACE wAxIMA. Fontevrault , Montreuil-Bellay. ORCHIS INCARNATA L. Variété Huardi R: Tubercules palmés-aplatis mêlés à des radicules cylindracées, ses feuilles sont immaculées. Ses fleurs purpurines-vio- lacées, en épi assez dense et allongé, sont entremélées de bractées uninervées dé- passant l'ovaire. Le label est glabre, ponctué de violet plus foncé, à trois lobes denticulés ; l'intermédiaire conique entier, les latéraux repliés ; l'éperon est co- nique absolument vertical ; il égale à peu prés l'ovaire. Chaloché , prairies du Jardin. — La deseription que nous donnons de ce bel orchis, a été faite par feu M. le docteur Guépin et devait paraître dans le troisième supplément de la Flore de Maine-et-Loire. AIMÉ DE SOLAND. 17 NOTICE SUR LA DREISSENA POLYMORPHA DU DÉPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE. Jusqu'au 14 juin 1848, la Dreissena n'avait point été tronvée dans les eaux du département de Maine et Loire; c'est à des recherches que j'ai faites l'été dernier pour découvrir des nayades, que je dois de l'avoir rencontrée, et je m'empresse d'en donner connaissance à la Sociélé. Depuis ma découverte de la Dreissena à Montsoreau, dans la Loire el sur divers points du Thouet, notre honorable collègue, M. Millet, l'a trouvée à Sainte-Gemmes attachée à une pierre du rivage, le 4 septembre 1846; et M. Ferdinand Bayan, de Rennes, l'a trouvée égale- ment le 6 septembre, méme année, aux Ponts-de-Cé. De plus, je l'ai reçue de M. de Senot de Thouaré, prés Nantes, de Mie Chalumeau, de Chinon sur la Vienne, de telle sorte qu'il se trouve établi que ce mol- lusque habite les eaux de la basse-Loire et que méme il remonte dans ses affluents. On pourrait se demander comment un animal qui passe sa vie attaché par un byssus peut remonter le cours des fleuves; je crois que la chose se fait tout naturellement au moyen des nayades, sur la coquille desquelles les dreissenes se fixent: les nayades les char- roient ainsi avec elles à contre-courant, leur permettent de se propa- ger sur des points de plus en plus élevés el de remonter ainsi à force de temps jusqu'à de fort grandes hauteurs. 259 Bien que ce mollusque ait été décrit par plusieurs auteurs, comme il est trés variable dans ses formes, j'ai cru bon de douner la descrip- tion de notre Dreissena. Pour étudier cette coquille, rappelens-nous qu'on doit la placer longiludinalement devant le spectateur, reposant sur son cólé plat qui est l'inférieur, les sommités en avant, c'est-à-dire plus loin du speclaleur que la parlie opposée qui est arrondie. L'animal de la Dreissena qu'on trouve dans la Loire et dans le Thouet, est d'un blanc grisátre; son manteau fermé de toules parts s'ouvre en arrière pour laisser passer les syphons respiratoires et ex- créleurs, lesquels, lorsque l'animal les étend, sortent légèrement hors de la coquille el laissent voir un pelit bourrelet noir qui les reborde el des cirrhes tentaculaires qui s'épanouissent loul autour et sur plusieurs rangs. Puis le manteau s'ouvre encore à la parlie antero- inférieure pour laisser passer le pied qui est pointu, blanchâtre et porle à sa base un pinceau de soie ou byssus rougeâtre, assez court, au moyen duquel le mollusque se fixe. Le corps de l'animal se ter- mine en avant par deux pointes qui remplissent les sommets et sont separées entr’elles par les demi-cloisons dont ils sont munis intérieu- rement et qui portent le muscle adducteur. La coquille ressemble extérieurement à une pelile moule, les sommels sont lerminaux, un peu recourbés en dessous, el se tou- chant presque; quelquefois on les trouve excoriés. En dessus, la co- quille est plus ou moins élevée et terminée en haut par un angle oblus formé par la rencontre de la ligne cardinale et du bord aperlural, qui est arrondi et tranchant; la coquille de la dreis- sena esl équivalve, mais inéquitalérale; les valves sont carénées, mais les earenes sont situées lout en bas el forment comme la limite de la parlie inférieure de la coquille qui est aplalie el déprimée dans sou milieu; la, les valves sont entrebaillantes et laissent passer le byssus qui fixe l'animal pour tout le lemps de sa vie. En dedans, les valves sont d'un blanc bleuàlre et portent au sommet un petit com- mencement de cloison sur leque! est attaché le muscle adducteur des deux cólés. En dehors, la coquille est d'un brun verdâtre plus ou moins foncé, lantót uniforme el tantól portant surtout prés des sommels, des bandes jauues, suivant régulièrement le contour des slries d’accroissement, ou bien formant des zigzags à angles assez vifs; quelques individus, mais rares , présentent une bande jaune vif, longitudinale de chaque côté un peu au-dessus de la carène des valves. Nolre Dreissena ne dépasse guere 35 à 40 millim. de longueur sur 15 millim. de hauleur et 20 millim. de largeur. ٤ o 260 Quoique la Dreissena soit le seul mollusque de son genre, on lui а cependant donné le nom spécifique de polymorpha, pour indiquer que la coquille présente une lrés grande variété de formes, puis aussi pour la caraclériser complétement parmi les autres Dreissenes qu'on pourrait découvrir par la suile. La Dreissena se rencontre presque toujours dans la Loire et dans le Thouet attachée sur des unios et le plus souvent sur le bord de la coquille. Sans être rare, elle n'est pas commune, mais on la trouve bien plus souvent dans le Thouet. L. DE JOANNIS. ÉTUDE SUR LES NAYADES DU DÉPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE. L'intérêt qui depuis plusieurs années s'est attaché à l'étude des mollusques, les ouvrages si remarquables publiés sur ce sujet par un grand nombre de savants et tout récemment encore par M. Moquin- Tandon, m'ont engagé à faire de nouvelles recherches afin d'élargir, s'il élait possible, le cercle de nos connaissances à cet égard, et de fixer au moins d'une manière plus complète les types que possède le département de Maine et Loire. Гаі déjà donné connaissance de la découverte que j'ai faite lété dernier de la dreissena polymorpha dans les eaux de la Loire et du Thouet. Je vais maintenant parler des nayades, famille d'autant plus intéressante que la Providence leur a assigné une fonction extrémement importante, celle de purifier les eaux en leur faisant absorber comme nourriture les matieres qui pourraient en altérer la pureté ou la salubrité. Cependant je ne veux point commencer ce travail avant d'avoir rendu un juste tribut dhommages aux travaux de celui qui m'a de- vancé dans la carrière, de notre honorable collègue, M. Millet, qui seul jusqu'ici dans notre contrée a publié des ouvrages sur le sujet qui nous occupe. M. Millet fit imprimer effectivement un premier opuscule dés l'année 1813, où il établit avec description l'existence de quatre-vingt- deux espèces de mollusques sur lesquelles quatre nayades seule- 262 ment. Vingt ans plus tard, en 1833, l'édition de 1815 étant épuisée, un second travail parut; cette fois M. Millet supprima toute descrip- lion et se borna à donner un catalogue avec synonymie et habitat. Ce catalogue signale quatre-vingt-dix-sept espèces sur lesquelles dix nayades: c'était quinze espèces nouvelles découvertes dans les vingt ans qui venaient de s'écouler Enfin en 1854, vingt et un ans encore après, M. Millet publia un nouveau catalogue avec synonymie et ha- bitat accompagné de tableaux dichotomiques oü il signale cent-seize espèces, ce qui donne encore dix-neuf mollusques découverts dans les vingt et une années passées, et sur les cent-seize espèces sept anodontes et huit unios. — Voilà certes des titres puissants à notre reconnaissance; car c'est à ces ouvrages intéressants que nous de- vons d'avoir vu s’entrelenir parmi nous le goût et l'étude de la malacologie. A ce devoir que la justice m'imposait, je veux en joindre un autre que la reconnaissance me dicte et que je remplis avec bonheur, c'est celui de remercier ici toutes les personnes qui ont bien voulu me préter leur bienveillant concours pour mener à bonne fin le travail que j'ai entrepris. Ainsi MM. l'abbé Baudouin, aumónier des Incurables à Baugé, M. l'abbé Ravain, professeur d'histoire naturelle au collége de Combrée ; MM. Moquin-Tandon, professeur à la Faculté de Médecine de Paris, Millet, Ludovic Le Gris, Henri de la Perrau- dière, Armand de Crochard, Charles et Louis de Senot, le docteur Chevalier de Baugé, Louis Bardin, éléve au collége Mongazon et MM. Cailliaud , conservateur du musée de Nantes, ainsi que le doc- teur Moriceau de la méme ville, m'ont ouvert leurs bibliothèques, communiqué leurs collections, et envoyé lout ce qu'ils ont peusé pouvoir intéresser la science; ils ont donc une vérilable part dans ce travail et j'aurai soin en temps el lieu de le rappeler à mes lec- leurs. PRINCIPES. Comme il se trouve beaucoup de naturalistes qui, quoique fort inslruils, ne se sont point occupés spécialement de malacologie , je crois nécessaire pour les meltre à méme de comprendre les descrip- lions qui vont suivre, de rappeler quelques principes et de convenir de quelques termes afin qu'il n'y ait pas de méprise possible. Les nayades sont des mollusques acéphales, lamellibranches, her- maphrodiles et leur hermaphrodilisme est suffisant, c'est-à-dire qu'un seul individu suffit pour reproduire l'espèce, Ils sont en outre ovo- 268 vivipares, c'est à dire que les œufs éclosent dans leur corps avant que de naître. Ces mollusques sont munis d'une coquille divisée en deux parties appelées valves, réunies ensemble par un ligament corné. Celte co- quille peut s'ouvrir et se fermer à la volonté de l'animal. Dans les nayades, chaque valve au lieu d’être une surface conique dont le sommet est plus ou moins élevé au-dessus de la base et plus ou moins recourbé et conlourné comme dans les isocardes, les arches et plusieurs autres genres, chaque valve est une surface conique écrasée dont le sommet s'est abaissé jusqu'à coincider avec un point du pourtour de la base. C'est le sommet de ce cône écrasé qu'on nomme le sommet de chaque valve et qu'on reconnait bien vite à la petite saillie qu'il forme sur le bord de la coquille. Ce sommet est parfois mousse et parfois très aigu, de même que dans cerlaines circonstances il est tellement érodé par l’action des eaux qu'il n'en reste plus trace, non plus que des naféces qui sont la parlie des val- ves qui vient immédialement après les sommets. Pour décrire une nayade nous la placerons horizontalement et longitudinalement devant l'observateur, dans la position où elle est quand elle marche pour s'éloigner de lui, c'est-à-dire les sommets en haut, le bord apertural en bas, et le ligament silué entre les sommets et le spectateur. D’après cette position, les bords supérieur et infé- rieur sont nalurellement définis. Le bord antérieur sera celui qui est le plus éloigné du spectateur et qui termine en avant le bord le plus court de la coquille, et le bord postérieur celui qui lui est opposé c'est- à-dire que termine en arrière le côlé le plus long. La hauteur de la coquille sera la dislance du bord supérieur au bord inférieur. Sa longueur, la distance du bord antérieur au bord postérieur, et sa largeur le plus grand diamètre transversal d'une valve à l'autre. La valve droite sera celle qui correspond au cólé droit de l'observateur, et la gauche à son cólé gauche. Lamarck, dans ses descriptions, place la coquille dans une position absolument contraire, c'est-à-dire le sommet en bas, le bord aper- tural en haut et le ligament en avant; mais cette méthode est entiè- rement abandonnée aujourd'hui. Nous nommerons corselet cette partie de la coquille située en arrière des sommets de chaque côté du ligament et qui est toujours plus ou moins séparée du reste des valves par des carénes plus ou moins saillantes ; et ventre la partie la plus hombée de chaque valve.. Le tèt des nayades se compose de trois parties bien distinctes : lextérieure qui est colorée diversement, mince el cornée, c'est l'épiderme; Vintérieure, qui est brillante et plus ou moins irisée, c'est 264 la nacre; et enfin la partie intermédiaire entre la nacre et l'épiderme qui s'appelle le cortex. Ce cortex constitue dans la plupart des nayades la majeure partie de la coquille. Le ligament est cette lame cornée recourbée en gouttière qui relie ensemble les deux valves en arrière des sommets et tend à lesécarter par son ressort lorsque les muscles adducteurs se délendent; ces mus- cles au contraire, situés à l'intérieur en avant et en arrière, servent à l'animal à serrer ses deux valves l'une contre l'auire en se contrac- tant. Nous appellerons fosse ligamentaire cette petite fossette oblongue creusée dans les deux valves à l'intérieur de la coquille, immédiate- ment à la suite et en arriere du ligament. Cette fosse ligamentaire joue un rôle assez important dans la délerminalion des espèces, et nous aurons plus d'une fois occasion d'en parler. L'animal des nayades a la forme de la coquille qu'il remplit; sa parlie charnue se compose d'un manteau formé de deux grandes lames minces plus ou moins transparentes et qui tapissent l'inté- rieur de la coquille de chaque cóté en y adhérant sur plusieurs points el notamment en bas suivant l'impression dite paleale à cause de cela. Les cótés supérieurs du manteau sont réunis sui- vant une ligne saillante nommée le raphé , qui règne longitudina- lement sur tout le dos de l'animal. Dans l'intérieur du manteau et à le toucher on trouve de chaque côté deux longueslames brunâtres arrondies à leurs extrémités et qui semblent recouvertes d'une fine gaze : ce sont les branchies, organes de la respiration. Les branchies extérieures sont simples, c'est à dire ne se dédoublent pas, mais c'est dans ces branchies que l'animal dépose ses œufs et que leur éclosion s'opère, de ia vient qu'on trouve souvent ces branchies extrêmement gonflées. Comment les petits éclos sorlent-ils de ces branchies? Voilà ce qu'on n'a pu encore découvrir. On sait seulement qu'ils en sortent réunis en petites masses. — Les branchies intérieures, qui sont toujours un peu plus grandes que les extérieures, sont doubles, c'est à dire qu'elles forment un sac où l'animal peut renfermer de l'eau au moment où il ferme ses valves. L'ouverlure de ce sac n'est point à son extrémilé mais au milieu de son cóté supérieur et intérieur à toucher le pied. Le pied est celte lame charnue et épaisse qui sort d'entre les branchies el peut s'allonger assez loin au dehors de la coquille. C'est l'organe de la locomotion et du lact, et il est en général de couleur jaune chez les nayades. Au-dessus du pied naît la région ovarique où s'opère la formation et la fécondation des œufs. Les muscles adducteurs sont ces deux gros muscles placés l'un en 265 avant, l'autre en arrière, qui sont fixés par leurs deux extrémités aux deux valves de la coquille et servent à la fermer en se contractant sur eux-mêmes. Ces deux muscles une fois détachés des valves laissent des traces arrondies qu'on nomme impressions musculaires. Au dessous du muscle adducteur antérieur, c’est à dire celui situé au côté le plus court de la coquille, se trouve la bouche munie depalpes labiaux en forme de lame repliée sur elle-même et placée aux angles de l'ouverture buccale. Ces palpes sont destinés à permettre l'entrée des aliments ou à les rejeter. La bouche n'est jamais saillante et pour la trouver il faut la cher- cher dans cet enfoncement qui se trouve au-dessous de l'adducteur anlérieur. Prés de l'adducteur postérieur et au-dessus se trouve l'ouverture anale. Tout à fait en arrière, le manteau est muni sur plusieurs rangs de pelites papilles ou cirrhes tentaculaires qui servent de tamis et ne permettent qu'à de l'eau propre de pénétrer dans les branchies. Ces cirrhes tentaculaires sont presque toujours d'une couleur brunâtre ou au moins portées sur un fond assez rembruni. La partie postérieure de la coquille prenant souvent un allonge- ment assez considérable par suite de l'allongement que prend l'a- nimal lui-méme, on a donné à cet allongement le nom de rostre. Nous dirons donc que le rostre est droit quand il sera coupé en deux parties égales par la ligne longitudinale et horizontale qui mesure la longueur de la coquille ; nous dirons qu'il est élevé quand il sera au-dessus de cette ligne el bas quand il sera en dessous. Nous avons dit que les nayades étaient munies d'un pied charnu que l'animal étend au dehors pour se mouvoir. Voilà comment s'o- père cette locomotion et comment se tracent ces torlueux sillons que tout le monde a observés au fond des eaux. L'animal est toujours placé sur le sol comme nous l'avons placé devant l'observateur, c'est à dire reposant sur le côté de son ouver- Iure, un peu penché sur le côté. Dans celte position il allonge son pied en avant puis en recourbe la pointe en bas; une fois qu'il a ainsi accroché le sol, le pied se contracte sur lui-même et fait ainsi avancer l'animal d'un pas, en faisant basculer en avant sa partie an- lérieure; puis quand le pied se détend et làche prise, la partie posté- rieure étant plus lourde, le mouvement de bascule en arrière s'opère, la partie antérieure se relève, le pied s'allonge de nouveau et la pro- gression continue, 266 DES VARIATIONS ET DES TYPES. Une question qui a longtemps divisé les savants et qui les divise peut-être encore est la fixation des espèces parmi les nayades. Ces mollusques vivant exclusivement dans les eaux, se nourrissant de malières qu'elles charrient, des substances que contient le sol sur lequel elles reposent, des matières salines que contient le liquide ambiant, étant en outre influencées par le plus ou moins de vitesse des courants au milieu desquels elles sont placées, doivent nécessai- rement présenter une grande variation dans leurs formes par cette raison très simple que tantôt elles se trouveront dans un milieu qui favorise la formation de la nacre et point celle du cortex, et dans un autre celle du cortex et point celle de la nacre. Celui-ci donnera l'é- piderme verdálre, cet autre le fera brun, dans un troisième il sera nul ou presque nul. Telles eaux favoriseront le développement lon- gitudinal et postérieur du manteau, alors vous aurez une coquille rostrée ; telle autre restreindra la hauteur des lames du manteau et alors le mollusque sera proportionnellement beaucoup plus allongé. Enfin chaque partie de l'animal pouvant prendre un plus grand ac- croissement ou recevoir un plus forl amoindrissement par l'in- fluence des corps ambiants , toutes les parlies correspondantes de la coquille en seront naturellement modifiées. Disons toutefois que cerlaines espèces semblent beaucoup plus faciles à influencer que les autres, puisqu'elles présentent un plus grand nombre de varia- lions. La difficulté a donc loujours été de déméler au milieu de toutes ces varialions, quelle est la coquille typique dont les autres пе sont que la transformation, el de fixer quelles sont les variations de chaque type. Dès l'époque où M. l'abbé Dupuy publia son grand ouvrage la ques- lion était posée dans toute sa nudilé, mais il ne chercha pas à la ré- soudre. Peu importe, disait-il, que les espèces que nous publions soient des types originairement créés par Dieu ou des variations de ces types; dés que ces variations sont constantes, elles méritent d'élre signalées à la science et décrites avec toul le soin possible : c'est ce qu'il a fait. M. Moquin-Tandon a fait plus. Ayant remarqué les variations in- cessanles que subissent les nayades, suivant la nature des eaux, ila recherché quelles étaient les espèces vraiment distinctes, les types en un mol autour desquels venaient se grouper toutes les autres va- 267 riations et il les a réduites à cing pour les anodontes. On concoit que M. Moquin-Tandon ait des opposants, mais on ne peut nier que les degrés insensibles par lesquels on passe d’une forme à une autre, ne soient une trés forte prévention en faveur de sa thèse. П a done cher- ché à distinguer parmi les nayades, celles qui participant à des carac- tères communs, différaient cependant des autres et d'après cela il a élabli ses types. Mais parmi les variations d’une même espèce quelle sera la forme qu'on choisira comme type? Il y a deux manières d'envisager celte question. Ou vous choisirez pour type la forme la plus répandue; ou bien vous prendrez l'individu dont les formes parailront les plus belles. Si le type que Dieu a créé originairement existe encore, et je le crois, il est naturel de penser que ses formes sont plus harmonieusement combinées que celles de toutes ses va- riétés. En somme, je crois que la pensée qui doit présider en général au choix d'un type, est de prendre la belle forme d’où peuvent dé- river toutes les autres par retranchements. Avant d'entrer dans les délails que comporte ce travail, qu'il me soit permis d’avertir mes lecteurs que je n'ai point fait mon œuvre à la légère, que c'est après avoir recu plus de dix mille nayades de tous les poinls du département que j'ai commencé ma classification, et enfin que toutes les espèces et variétés que je donne ont élé véri- fiées ou établies sur les échantillons authentiques de la collection de M. Moquin-Tandon, ou aprés avoir consullé les ouvrages originaux de Rossmassler, Michaud, Companyo, Massot, Gassies, Mauduit, Dupuy, Jacquemin, Draparnaud, Pfeiffer, etc., et enfin celui de M. Moquin- Tandon lui-méme dont j'ai adopté la nomenclature comme plus conforme, selon moi, à ce que l'étude et l'observation démontrent. Depuis plusieurs années effectivement il y a une tendance bien marquée à répudier toutes les espéces éphéméres créées sur les plus légères variations ; et MMoquin-Tandon a rendu un véritable service a la science en déblayant nos catalogues d'une multitude d'espèces nominales, et en les faisant descendre au simple rang de variété. Pour le type de chaque espéce, j'ai choisi la forme qui réunissail au degré le plus parfait les condilions suivantes: étre commune, être la plus belle de forme et de structure parmi ses congénères , et enfin correspondre le mieux possible à la description qu'en ont donnée les auteurs. Quant aux . variétés, j'ai exclu impitoyablement toutes les varia- tions mitoyennes qu'elles peuvent présenter, el j'ai fixé des types pour chacune d'elles, au moyen de figures très fidèles, comme il en exisle pour les espèces elles-mêmes, choisissant comme type de chaque variété la forme qui réanil au degré le plus élevé tous les 268 caractères de divergence un peu tranchés qu'elle présente avec le type de l'espèce, DESCRIPTION DES ESPÈCES ET VARIÉTÉS DU DÉPARTEMENT DE MAINE-ET-LOIRE. PREMIÈRE ESPÈCE. Anodonte des Cygnes (Anodonta Cygnæa). Мод. Syn. Anod. Cygnæa. Lam,, Dup., Drouet. Jar. 2 RADIATA Mog. pl. 1. Longueur de 150 à 460 mill., hauteur de 90 à 95 mill., largeur de 45 à 50 mill. Coq. grande, ovale, brillante, plus haute en avant qu’en arrière, assez solide: bord antérieur arrondi, avec un angle obtus à son rac- cordement avec le bord supérieur, qui est plus ou moins droit; bord inférieur bien arrondi; bord postérieur relevé en un rostre haut et portant une petite troncature oblique; les carènes extérieures du corselet bien marquées; le disque de la coquille sillonné profondé- ment dans toute sa moitié inférieure, et relevé de 4 à 5 bourrelets longitudinaux; les lames cardinales sont bien marquées et portent parfois des excroissances; la fosse ligamentaire est pyramidale. L'on voit, dans l'intérieur de chaque valve deux lignes saillantes en avant et deux en arrière, qui partent du sommet el vont se rendre au-dessous des impressions musculaires ; le ligament est fort et allongé, l'épiderme est d'un vert jaunâtre légèrement radié en ar- rière, maculé surtout en avant de taches noiratres assez grandes ; il lire un peu au brun quand la coquille est vieille. Les cóles sont plus jaunes el le fond des sillons plus vert, surtout en arrière. Les som- mets sont rouges et légèrement décorticulés. Nacre d'un blanc vio- leté en bas et d'un rose saumoné en haut, avec quelques taches d'un vert livide répandues cà et là. L'animal de notre cygnea, au lieu de la couleur grise du type mentionné dans les auteurs, est d'un jaune orangé très vif sur les bords et d'un jaune plus pâle dans le reste du corps. Les cirrhes 269 lenlaculaires sont d'un gris bleuâtre sur un fond brun ; les branchies sont d'un gris orangé, ornées de plusieurs bandes d'un violet bru- паге; une de ces bandes est а la base supérieure des branchies ex- lérieures, les autres ornent le bord inférieur des branchies inté- rieures; le pied esl grand, d'un bel orangé, et le raphé d'un jaune assez vif, surlout aux extrémités. Cet anodonle ne s'est rencontré, jusqu'à présent, que dans les élangs de la Guittonière, commune de la Meignanne, et notre va- riélé à rayons n'est pas le véritable type des auteurs qui ne s'est pas encore trouvé dans nos eaux; loulefois, notre cygnæa, à cause de la pureté de ses formes, doit êlre regardé comme un véritable Ly pe. Var. MINOR Nobis. Longueur de 100 à 110 mill., hauteur de 55 à 60 mill. L'Authion nourrit, dans sa partie inférieure, à Brain, un anodonte qu'on doit regarder comme une variété très proche de VA. cygnæa, qui pourtant ne vil jamais que dans les eaux slagnanles ; aussi la forme de celte variété est-elle beaucoup plus restreinte. Elle est d'un ovale presque régulier, assez épaisse, un peu ventrue à mi-hauteur, sommels et naleces déprimés , ligament entièrement caché par le prolongement des valves; surface un peu raboteuse, finement striée dans sa partie supérieure, assez largement sillonnée dans toute sa partie inférieure, bord antérieur atténué et arrondi, bord postérieur à rostre court, droit, et portant à son extrémité une pelite troncature presque verticale. Partie supérieure d'un jaunatre cendré, partie inférieure d'un vert assez gai, avec des bandes brunalres ; épiderme radié de jaune et de vert foncé. Lames cardinales assez fortes au mi- lieu et s’affaissaul en arrière. Fosse ligamentaire peu profonde, assez large et ovale. Nacre d'un beau rose violacé, à reflets verts sous le corselel et les sommets, le reste de la nacre d'un blanc bleuatre, nuancé de jaune doré qui forme une bande au bord intérieur de la coquille. Il n'y a en arrière, sur la nacre, qu'une ligne saillante al- lant jusqu'à l'impression musculaire ; il y en a deux en avant, l'an- lérieure, étant très forte, el la postérieure beaucoup moins mar- quée. La nacre porle souvent quelques taches livides. L'animal est d'un jaune oranger, plus pâle que celui de la cygnea. Var. s CELLENSIS Moq. PI. П. Syn. А. cygnæa. Drap. (mytilus eygnaus). L. Longueur de 160 à 170 mill., hauteur de 75 à 80 mill. Celle coquille, qui est grande et allongée, est ordinairement de 270 couleur brun verdâtre ou vert brunâtre plus ou moins foncé, peu brillant (1). Les bords supérieurs et inférieurs sont horizontaux, droits et parallèles entr'eux; quelquefois l'inférieur est un peu sinueux; le rostre se relève brusquement en arrière. Elle est sillonnée, comme celle du cygnea, et assez renflée; son bord antérieur arrondi, est comme subtronqué. La nacre, en bas, est d'un blanc blenálre, et d'un rose jaunâtre en haut, avec des taches d'un vert livide ou d'un blanc laileux éparses çà et là. Les sommets el quelques endroits du lêl sont décorticulés. L'animal est jaune, comme celui du cygnæa; il en diffère par Ја couleur de ses branchies, qui sont d'un jaune sale, et par les bandes violet noirâtre qui les décorent et qui sont beaucoup plus foncées, surtout celle qui est à la partie supérieure des branchies extérieures. Cet anodonte habite le haut Authion, près Longué et Vivy, et les étangs du Défoi, à Parnay. П est nouveau pour la Faune du dépar- lement. Var. VENTRICOSA Mog. PI. Ш. Syn. A. ventricosa. Pfeiff., Drouet. Longueur de 180 à 190 mill., hauteur de 80 à 85 mill. Coq. gonflée dans toutes ses parties, brillante, arrondie el assez large en avant, el se terminant en arrière par un rostre plus étroit, droit el tronqué; bord supérieur assez droil, bord inférieur un peu courbe et portant, un peu en arrière de son milieu, un sinus provenant d'une dépression des valves. Il est de couleur brun rougeátre, cendré en dessus et d'un jaune brunalre, avec des bandes brunes et vertes dans sa partie inférieure. Vieux, il est quelquefois tout brun, avec les sommets rouges. Les sommels sont loujours un peu excoriés; sillonné comme le cygnea, il l'est moins profondément, et ses côtes sont moins grosses et moins saillantes. La nacre est d'un blanc ar- genlé en dessous avec quelques reflels verls, mais on n'y trouve pas les taches livides des deux variétés précédentes. L'animal est celui du cygn@a, avec quelques variations légères dans la coloration, mais toujours d'un jaune orangé sur la frange et sur le pied. Cet anodonte habite le Couasnon, d’où me l'a envoyé M. l'abbé Baudouin; il y avait également été trouvé par le docteur Chevalier, de Baugé. Je l'avais trouvé au château de La Plesse, commune ФА - vrillé, dans le ruisseau de la Meignanne, dans les boires des bords de (1) Les lettres italiques indiquent les caractères capitaux de chaque espèce. 271 la Loire, à Turquant et Montsoreau, et M. l'abbé Ravain me l'a en- voyé de la Verzée, teinté d'une belle couleur verle, mais encore jeune. Le grand «апо de Malaguet, à Chaloché, nourrit une magnifique variation de cet anodonte : c'est la variation compressa ; elle a élé recueillie et m'a été apportée par M. Bardin, élève du collége Mon- gazon, qui n'a cessé de m'aider de ses recherches les plus actives et les plus obligeantes. Elle devient plus grande et beaucoup plus ros- trée que le type à rostre comprimé et à crête du corselet bien plus saillante. Sa coloration est plus gaie, la radiation plus sensible, le corselet rouge et la décorticalion du sommet plus large. A l'intérieur, l'animal ne porle au bord de ses brauchies intérieures qu'une seule bande brunatre festonée en dedans. Var. : INTERMEDIA Mog. Pl. IV, fig. 1. Syn. A. intermedia, var. b. Lamark; A. oblonga, Millet. Longueur de 120 à 140 mill., hauteur de 60 à 70 mill. Coquille de moyenne grandeur, de forme allongée, comprimée, à ros- tre droit, à bord supérieur presque droit, un peu montant, et presque parallèle au bord inferieur qui est légérement courbe. Bord antérieur arrondi, un peu atlénué, bord postérieur terminé par un rostre com- primé et tronqué obliquement. Surface irrégulière et non brillante, assez finement striée à sa parlie supérieure, el munie de bourrelets espacés à sa parlie inférieure, à la manière des cygnennes. Epiderme variant du vert olivalre ou grisálre, au brun rougeatre. Sommets et naléces excoriés, nacre bleuâtre nuancée de vert et de rose, par- fois maculée de taches livides ou blanc laiteux, el rose ou jaune ro- sálre sous les sommets. Animal semblable à celui du cygnæa, avec les différences sui- vantes : l'intérieur du bord du manteau est orné d'une large bande violet noirâtre, peu visible sur les individus jeunes. Le pied, orangé vif, porle souvent en arrière une tache brune, d’où part une bande brune horizonlale de chaque cólé, qui sépare le pied de la région ovarique, qui est rosàtre. Ses palpes labiaux sont bruns, bordés de jaune, et filelés de noir chez les individus adultes. La branchie exté- rieure, rougeatre, porle une bande jaune à son bord, L'intérieur, brun violacé, porle une bande jaunâtre fendue en deux par un filet brun ; le raphé est un peu cordonné. Du reste, ces caractères varient avec l’âge. ll habite la Maine, la Mayenne, le Couasnon, el probablement une 272 grande parlie des eaux du département. Je ne l'ai jamais rencontré dans la Loire. M. Millet avail fait deux espèces distinctes de ГА. intermedia de Lamark, et de ГА. oblonga; M. Moquin-Tandon réunissant ces deux espèces en une seule el méme variété du cygnaa, j'ai voulu voir d'où provenait cette différence et j'ai été aux sources. L'A. inter- media var. b. testa minore radiis nullis Lam. provenant du cabinet de M. de Lamarck, est à Paris dans le cabinet de M. Delesserl. M. Chenu, qui en est le conservateur, a eu la complaisance de me le faire voir; le numéro d'ordre y est encore écrit de la main de Lamarck. Cette coquille est absolument l'oblonga Millet. Quant au type porlant des rayons qui existait dans le cabinel de M. Dufresne et qui provenait de la Loire, il est en Angleterre el par conséquent hors de nos in- vesligalions. On se demande comment l'exemplaire du cabinet La- marck a pu ressembler à la figure qui est dans l'Encyclopédie, si différente pour la forme de l'exemplaire du cabinet de Lamarck au- jourd'hui chez M. Delessert. A cela il y a une réponse qui accordera tout le monde. C'est qu'à l'époque où Lamarck a fait son travail sur les mollusques il élail devenu presqu'aveugle et ne jugeait plus guère des formes que par le toucher; il est donc probable qu'il y a eu quel- ques erreurs commises par Lamarck lui-méme; ce qu'il y a de plus probable, c'est que la var. b. qu'il avait dans son cabinet n'élait point une variélé du type provenant de la Loire ой Гоп ne trouve jamais l'oblonga, el que ce type était, selon toule probabilité, une piscinale de la Loire qui a servi à M. Millet pour faire son intermedia. DEUXIÈME ESPÈCE. A. Anatina (A. des Canards) Мод. РІ. 5, fig. 3. Syn. A. Anatina Lamarck. Longueur de 50 à 80 millim. Hauteur de 40 à 45 millim. Coquille assez petite toujours trés peu ventrue, plus ou moins épaisse, assez fragite, sillons ordinairement assez marqués et irrégu- liers, et finement striés dans sa partie supérieure. Bord supérieur assez arqué et montant, bord inférieur peu arqué et parfois presque droit ou sinué. Bord antérieur atténué et très arrondi sans angle obtus à son raccordement avec le bord supérieur. Bord postérieur plus ou moins avancé en un rostre comprimé qui est plutót bas que haut, mais toujours terminé par une troncalure verticale. Surface un peu 273 brillante. Epiderme d'un brun olivâtre plus ou moins foncé et de teinte ordinairement uniforme avec des bandes plus noires longitudinales, et parfois une radialion obscure en arrière. Sommels pointus détachés de la coquille et ridés ondulés quand ils ne sont pas excoriés. Ligament assez fort, bombé et jaunatre. Fosse ligamentaire étroite et fusiforme. Lames cardinales courbes et presque nulles. Impressions musculaires très apparentes. Animal grisálre dans son ensemble, pied jaunâtre, frange du man- teau bordée de noir. Cirrhes tentaculaires noires, branchies d'un gris plus ou moins rosé. Les seuls vrais types de ces anodontes que j'ai trouvés dans le dé- partement, viennent de la Sarthe. Il en existe plusieurs variétés. Var. € CRASSIUSCULA Mog. PI. 5, fig. 2. Longueur de 90 à 95 millim. Hauteur de 55 à 60 millim. Coquille plus grande et plus épaisse que le type mais présentant les mêmes caractères. Cerlains individus ont les deux carènes exté- rieures du corselel trés marquées, tandis qu'elles sont presque effacées dans l'analina. Celte variélé esl aussi un peu plus ventrue que letype, et le bord supérieur moins montant el plus arqué. Elle habite la Sarthe. Cette variété est nouvelle pour notre Faune. Var.: COARCTATA Мод. РІ. 6, fig. 3. Syn. A. Coartata (Pot. et Mich.) A. parvula, Drouet. Longueur de 60 à 70 millim. Hauteur de 55 а 40 millim. Cette variété est un peu plus petite que le type et plus allongée. La partie antérieure est très courte, arrondie el atténuée. La partie postérieure est beaucoup plus haute par suite de l'élévation de la crête du corselet el de l'abaissement du bord inférieur. Le bord supérieur est légèrement arqué, le bord antérieur arrondi, le bord inférieur un peu sinueux et plus bas en arrière qu'en avant; le bord postérieur terminé par un rostre tronqué perpendiculairement. Le ligament presque recouvert présente vers son milieu une arcature très marquée , surtout chez les individus tout à fait adultes. Les sillons sont peu pro- fonds, quoique marqués. La surface de la coquille est un peu irré- gulière. Les sommets sont pointus, saillants, ridés-ondulés. L'épiderme est d'un jaune brun-grisatre, avec le fond des sillons bruns. La fosse ligamentaire est fusiforme, la nacre est d'un blanc bleuatre irisé de 18 274 blanc et de rose avec des taches livides sous les sommets et des ta- ches blanc lacté çà et là. Animal de l'anatina. Cet anodonle habite le Couasnon où il est commun et y vit en compagnie de l'oblonga. Il habite aussi plusieurs des ruisseaux qui avoisinent Baugé. Ce sont MM. l'abbé Baudouin, Bardin et Lu- dovic Le Gris qui l'ont recueilli et me l'ont envoyé. Cet anodonte avait été trouvé depuis plusieurs années dans une source ferrugineuse près l'étang de la Bouquetière où l'on en trouva des individus pres- que dénués d'épiderme, mais d'une épaisseur et d'une beauté re- marquables. Cel anodonte n'ayant point encore été signalé dans le département on l'avait pris pour ГА. minima de M. Millet. Laforme qu'a choisie M. l'abbé Dupuy pour type est assez rare dans le pays; celle au contraire que M. Drouet a recueillie dans le dépar- tement de l'Aube est la plus commune ici. Toutefois ces deux formes présentent deux varialions, l'une à peu près elliplique non sinuée au bord inférieur, l'autre à bord inférieur presque droit et à rostre trés bas. On trouve dans les affluents de l'Authion un anodonte qui a les plus grands rapports avec ГА. coarctata; il présente seulement un pelit angle oblus au raccordement du bord supérieur avec le bord an- lérieur, puis il est d'un vert gai radié, ou d'un jaune brunâtre avec trois ou quatre bandes brunes longitudinales, les sommets et les na- léces sont rouges. Var. $ ROSTRATA Moq. Syn. A. moulinsiona Dup. Longueur de 70 à 80 mill., hauteur de 40 à 45 mill. On trouve dans ГНугдте, dans l'Oudon et dans quelques autres lieux une variété de l'analina qui sans être la coarctata a cependant avec elle des rapports de forme. Cependant elle est toujours plus grande, ses sommets sont moins acuminés et trés largement érodés dans l’âge adulte. Son épiderme est d'un brun foncé, rougeâtre vers les flancs. Tantôt. le bord inférieur est presque droit, tantôt il se relève un peu en arriére pour former le rostre. Intérieurement la nacre est bleuátre tachée de livide. Celte forme qui se retrouve dans les environs de Laval d'ou l'a rapportée M. Ar- mand de Crochard, a été recueillie par plusieurs personnes dans notre département, entr'autres par M. l'abbé Baudouin de Baugé et M. Henri de la Perraudière, 275 TROISIÈME ESPÈCE. Anodonte comprimée (Anodonta complanata). PI. 6, fig. 2. Syn, A. Complanata. Drouet. Longueur 63 millim, Hauteur 40 millim. Coquille ovale comprunée, baillante en arrière, bord antérieur at- ténué, arrondi, et faisant rarement un petit angle avec le bord supé- rieur qui est à peu prés droit et montant. Bord postérieur partant du ligament et descendant subitement en ligne droite jusqu'au bas où il forme un pelit rostre arrondi avec le bord supérieur qui est presque droit. Elle est luisante et sillonnée peu profondément à des distances assez grandes. Les sommels et les natèces largement excoriés, le ligament assez large est presque noyé dans les valves. La fosse ligamen- taire trapézoidale. La région du corselet comprimé est relevée en créle. La surface des valves esl souvent pleine de dépressions et d'irrégularilés. Nacre d'un blanc bleuâtre en bas et rouge carné dans toute sa partie postérieure. Animal non observé. Cet anodonte vit dans la Loire où il reste toujours d'une taille fort restreinte. Je l'ai recueilli depuis les Ponts-de-Cé jusqu'à Sainte- Gemmes. — Mais il est assez rare. Var. ^ NORMANDI. Moq. PI. 6, fig. 1. Syn. A. Normandi Dupuy. Longueur de 90 à 100 millim. Hauteur de 45 à 50 millim. Coquille plus grande que le (уре, plus allongée, plus baillanle en arrière el plus comprimée proporlionnellement. Bord antérieur ar- rondi, bord supérieur légèrement arqué el un peu montant. Bord pos- lérieur descendant en ligne droite comme dans le type pour former le rostre, qui est moins bas, avec le bord inférieur qui se reléve un peu plus.Excorialions des natèces larges et profondes; sillons trés marqués, étroits el espacés, le reste de sa surface est brillant. Epiderme d'un vert olivàtre nuancé de brun avec des bandes étroites, moilié chamois, moitié brunes, suivant les stries d'accroissement. Nacre bleuâtre nuancée d'un rose violet et carné dans la parlie supérieure avec des taches livides et d'un blanc laileux. Fosse ligamentaire comme dans le type. 276 Animal ovale, manteau gris avec la frange jaune. Pied jaune d'ocre avec la base plus claire. Branchies d'un jaune doré mélangé de brun. Branchie extérieure beaucoup moins haute que l'intérieure. L'anlérieure bordée de blanc et de brun en dedans. — Palpes labiaux un peu accuminés et d'un gris jaunatre. Bord posté- rieur du manteau épaissi, brun en dehors et noir en dedans. Sur ce fond noir s'élèvent les cirrhes tentaculaires qui sont d'un rouge brun à pointes blanches. Le raphé est jaune presque linéaire dans toute son élendue. Cet anodonte vil dans la Loire et dans la Maine; on le pêche jus- qu'aux portes de Nantes; mais pour l'avoir bien adulte il faut aller dans les endroils un peu profonds. On le péche en grande quantité sur les bords de la Maine, mais on ne l'y trouve que jeune parce qu'on ne va pas assez avant dans la rivière. de l'ai trouvé adulte tout pres de Sainte-Gemmes. Ce bel anodonte est nouveau pour nolre faune. Var : ELONGATA. Moq. Syn. А, Elongata. Dupuy. Longueur 60 millim. Hauteur 50 millim. Celle variété est encore plus rare que le type, pourtant le peu d'individus que jai pu me procurer prouvent qu'elle existe dans nos eaux. Le bord supérieur et l'inférieur sont sensiblement paralléles : le bord antérieur arrondi et atténué ; le postérieur tronqué brusquement par une ligne droite qui va former le rostre, placé aussi bas que possible, avec le bord inférieur qui est presque droit. Les sommets chez les individus jeunes ne sont point excoriés, ils sont assez proéminents, délachés de la coquille, presqu'aigus et recourbés en avant et l'un vers l'autre. Ils sont en outre chargés de trois plis grossiers et ondu- leux terminés brusquement à leurs deux extrémités par des espèces de mamelons. Elle est peu bâillante en arrière et un peu moins com- primée que le type. Sa couleur est d'un vert brunatre, mais dans les jeunes elle est bien plus claire, parfois on la trouve jaune en bas et rose en dessus. La nacre à l’intérieur est d'un rose carné. Elle habite la Maine et la Loire. Je n'ai pas élé à méme de voir l'animal. DIT QUATRIÈME ESPÈCE. Anodonte piscinale (Anodonta variabilis). Moq. PI. 5, fig. 1. Syn. A. piscinalis. Dup. Drouet. Longueur de 80 à 110 millim. Hauteur de 50 à 70 millim. Coquille d'un bel ovale, ventrue et renflée dans tout son disque. Assez épaisse ct solide. Très finement striée et trés brillante dans sa partie supérieure, peu profondément sillonnée et moins brillante dans sa partie inférieure. Bord antérieur un peu atlénué ou subtronqué, arrondi et faisant un angle avec le bord supérieur qui est presque droit et trés montant. Bord inférieur d'une belle courbure bien ré- gulière, bord postérieur faisant un angle très vif à sa rencontre avec le bord supérieur en arrière du ligament et descendant trés rapide- ment pour fermer un rostre aigu ou du moins obscurément et faible- ment tronqué. Carènes du corselet peu marquées. Corselet assez comprimé et trés relevé en créte. Sommets onduloso-ridés trés sail- lants, plus élevés que le bord supérieur. Ligaments presqu'entière- nient recouverts par le prolongement des valves. Lames cardinales fortes, droites. Fosse ligamentaire large et longue, tronquée en ar- riére. Impressions musculaires peu profondes. Epiderme rouge sur les sommets, cendré plus ou moins foncé au-dessous et dans toute la partie inférieure d'un jaune verdálre rayonné de beau vert et portant ordinairement trois bandes brunes , une sur le bord , l'autre au liers de la hauteur et une plus faible au-dessus. L'épiderme en avant est légèrement exfolié. Nacre d'un blanc bleuâtre, légérement teinte de jaune doré el parfois d'une belle teinte d'or sous le corselet. Le creux du sommet est souvent rose. Manteau gris avec des bords ochreux, rebordé d'oranger assez vif et de noir tout à fait en arrière à l'endroit où sont implantés les cir- rhes tentaculaires qui sont d'un gris jaunátre, situés sur quatre rangs el disposés en quinconce et à se loucher. Raphé jaune ochreux, relevé en pointe en arriere ой il porle une lache d'un jaune oranger sanguinolent. Muscle adducteur fort et d'un blanc jaunátre. Branchies d'un gris verdatre uni, l'intérieure bien plus foncée que l'exlérieure. Pied jaune d'ocre, terminé à la base par une large bande d'un jaune bri- quelé. Palpes labiaux passablement acuminés, 278 Cet anodonte habite le bas Authion à Brain, seul lieu où je l'aie trouvé jusqu'à ce jour. Il est nouveau pour notre faune. Var. 2 SUBCOMPRESSA. Мод. Longueur 95 millim. Hauteur 60 millim. Celte variété diffère du type en ce qu'elle est bien moins ventrue; le bord supérieur presqu'arqué par suite de la chute du sommet de la crête du corselet qui dans l'état de jeunesse est séparée du liga- ment par un augle profond; par sa couleur qui est toujours d'un jaune chamois plus ou moins rouge en bas el d'un gris cendré plus ou moins rougeatre sur les naleces. Les sommets toujours rougeâtres. Elle est moins rhoniboidale que le typeet d'un ovale large presque parfait. Cet anodonte habite la Loire aux Ponts-de-Cé. Var. л. CRASSULA. Мод. PI. 7, fig. 2. Syn. A. piscinalis Gassies. Longueur 120 millim. Hauteur 65 millim. Coquille beaucoup plus allongée que le type, plus épaisse, le bord supérieur moins montant, parfois méme un peu arrondi et déprimé en arriere du ligament. Bord antérieur un peu atténué, bord inférieur très peu arqué, bord postérieur terminé par un rostre tronqué, assez allongé et un peu bas. Epiderme jaune brunátre assez clair, radié de vert en arrière, d'un gris cendré uniforme en avant. Le gris cen- dré est parfois peu marqué, d'autres fois il envahil toute la surface de la coquille et fait presque disparaitre la radialion, en méme temps que le rostre s'allonge. Parfois aussi sa hauteur devient plus grande, son rostre s'abaisse jusqu'au bord inférieur, qui est droit. Sa teinte toujours cendrée en avant devient un peu brune en arriére. Cetle dernière forme semble être l'A. piscinalis de Gassies. Il est effective- ment bien plus sillonné surtout en avant que le piscinalis 1уре et présente les mêmes contours que le piscinalis de l'Agenais. Les sommets dans cette variété sont assez largement excoriés. La nacre est dun beau blanc légèrement carné, irisé de rose et de violet sur le rostre. — Le ligament est assez fort et un peu plus sail- Jant. Cet anodonte se présente parfois avec une robe entièrement blonde. Il habite l'Authion où il est assez peu commun, 279 Var. LIGERICA Nobis. Syn. A. Intermedia. Millet. Longueur de 95 à 100 millim. Hauteur de 55 à 60 millim. On pêche dans la Loire une piscinale qu'il est nécessaire de men- tionner au point de vue de l’histoire de notre malacologie départemen- tale, parce qu'elle a servi à M. Millet pour établir son anodonta inter- media. Et puis en outre parce que c'est une des belles variétés de l'espèce. Comme le type qui a servi à Lamarck pour établir son А. intermedia est en Angleterre, et que du reste la description qu'il en donne ne cadre pas complèlement avec l'anodonte qui nous occupe, j'ai cru devoir laisser de cóté le nom d'intermedia pour l'affecter exclusive- ment à la cygnéenne provenant du cabinet de Lamarck et j'ai adopté l'épithéte /igerica, parce que celte piscinale est la plus commune dans la Loire et en est aussi une des plus belles nayades. Elle est à peu prés de la taille du type, peut-étre un peu plus petite, mais elle est plus généralement renflée, méme en arriére, d'une couleur brune uniforme avec plusieurs bandes longitudinales plus foncées. Le bord supérieur est un peu courbe, la partie du ligament un peu saillante et la radiation postérieure d'un vert brunâtre peu tranché. Du reste la nacre est d'un beau blanc bleuátre plus ou moins teinté de jaune doré. — Elle se trouve aussi dans le ruisseau qui se rend à l'étang Saint-Nicolas. Var. у. SUBINFLATA Moq. Syn. A. minima. Millet ? Longueur 90 millim. Hauteur 55 millim. On trouve dans l'Oudon et ses affluents une petite piscinale dont M. Moquin-Tandon a fait sa variété y subinflata, var. 2 de M. Drouet. — Cet anodonte ne dépasse guère 9 centimètres de longueur; son bord supérieur assez montant forme un angle avec son bord antérieur subtronqué. Son bord inférieur légèrement sinué, baisse en arrière, ce qui rend la parlie postérieure de la coquille beaucoup plus haute que l'antérieure. Enfin le bord postérieur est terminé par un rostre droit et faiblement tronqué. L'épiderme est d'un vert olivâtre foncé, presqu'uniforme avec quelques bandes noires longitudinales et les sommets rouges el excoriés. D’après les exemplaires que M. Millet m'a donnés de son A. minima, je suis resté convaincu que l'anodonle de notre honorable collègue 280 n'est que la piscinale de l'Oudon ayant vécu dans un milieu peu fa- vorable et maculant la nacre en brun. — Ce qui semblerait me le prouver, c'est qu'un des exemplaires jaunes de la minima que je pos- sede et qui me vient de M. Millet est, à n'en pas douter, la jeunesse de la piscinale var. subcompressa de la Loire. Les exemplaires noirs provenant de 1а méme source sont donc probablement aussi la jeu- nesse de la piscinale qui nousoccupe. — Les auteurs ont fait de ГА, minima de M. Millet une variété de l'anatina ; pour mon compte ce que j'ai vu me la fait regarder comme 1а jeunesse d'une variété de la piscinale. On péche cet anodonte dans tout l'Oudon; je !e dois à la com- plaisance de M. Henri de la Perraudiére. CINQUIÈME ESPÈCE. Anodonte pesante (Anodonta avonensis) Мод. Var. ? ELONGATA Мод. PI. 7, fig. 1. Syn. А. subponderosa. Dup. Longueur de 120 à 125 millim. Hauteur de 60 à 65 millim. Coquille grande, allongée, épaisse ventrue, sillonnée dans sa partie inférieure, lisse et brillante dans sa partie supérieure, sans bourrelets saillants comme dans les cygnéennes. Bord supérieur arqué, ne fai- sant point d'angle à son raccordement avec le bord antérieur qui est arrondi et un peu atténué. Bord inférieur droit ou presque droit. Bord postérieur se lerminant en un rostre allongé et tronqué verti- calement. Quelquefois tout à fait bas, plus rarement un peu relevé, Ligament assez fort, onduleux, brun, allongé et peu saillant. Epiderme d'un brun foncé devenant brun-rouge sur les natèces qui sont fortement excoriées. Cel épiderme est extrêmement exfolié dans toute la partie inférieure de la coquille et surtout en avant. Nacre d'un blanc bleuâtre, souvent marquée de taches livides qui envahis- sent parfois tout le fond des valves, quelquefois aussi de blanc lacté. Animal non observé. Habite le ruisseau de la Meignanne. Var. : COMPRESSA Мод. Syn. А. ponderosa Var. compressa. Garn. ? Longueur de 100 à 110 millim. Hauteur de 60 à 65 millim. Cette variété diffère de la variélé elongata en ce qu'elle est beaucoup 281 plus comprimée, surtout en arrière, qu'elle finit en un rostre mince largement tronqué et un peu bas; qu'elle est plus atténuée en avant et qu'elle est largement et profondément érodée jusqu'à l'extrémité du rostre. — Du peste sa couleur est la méme, peut-être un peu moins foncée. Elle vit dans le ruisseau de la Meignaune en compagnie de l'elongata et de la ventricosa. Var, y. ROSSMASSLERIANA Mog. Pl. 4, fig. 2. Syn, A. rossmasslerianu Dup. , Drouet., Longueur de 110 à 155 millim. Hauteur de 60 à 70 millim. Grande coquille presque reniforme. Ovale allongée. Assez renflé dans son milieu. Sillonné dans toute sa hauteur et jusqu'auprès des sommels. En bas les bourrelets sont plus larges que les sillons. — Plus haut les bourrelets sont minces et espacés. Bord antérieur subtronqué arrondi, ne faisant point d'angle avec le bord supérieur qui est presque droit jusqu'au bout du ligament. Bord postérieur descendant obliquement pour former un rostre arrondi un peu bas et rejoindre le bord inférieur qui esl sinué dans son milieu. Ligament assez fort et assez long, presqu'enliérement caché dans la coquille. — Fosse ligamentaire pyramidale. — Som- mels bien marqués et nullement excoriés. — Epiderme brun uni- forme dans les individus adulles, plus ou moins vert dans les jeunes individus. Impressions musculaires antérieures bien marquées; les posté- rieures peu profondes. — Nacre d'un blauc bleuátre brillant irisé de vert et de rose et maculée de taches livides et blanc lacté. Animal non observé. Cet anodonte a été recueilli par M. Henri de la Perraudière dans le Tary à Lué ; c'est donc delui que je l'ai recu. Je ne l'ai encore jamais trouvé dans la Maine où l'indique M. Millet, comme rare il est vrai. GENRE MULETTE (UNIO). Les mulettes différent des anodontes en ce que les branchies de l'animal au lieu d’être tapissées de vaisseaux sinueux imilant de la gaze sont à vaisseaux droils el croisés, et quant à la coquille en ce 282 qu'ils ont des dents à la charnière qui manquent complétement chez les anodontes, Jusqu’a présent le département de Maine et Loire n’a fourni a l'observation que quatre mulettes que nous allons successivement décrire avec toutes les variétés qu'elles présentent. PREMIÈRE ESPÈCE. Mulette littorale (Unio rhomboideus). Mog. PI. 18, fig. 4. Syn. Unio littoralis, Cuv. Dup. Drouet. Longueur de 80 à 90 millim. Hauteur de 60 à 65 millim. Largeur 50 millim. Animal d'un blanc légèrement teinté de gris, avec les bords du manteau plus jaune, pied jaunâtre, d'une teinte plus ou moins foncée. Cirrhes tentaculaires noirátres, assez fortes et peu allongées. Branchies rougeátres. Coquille extrémement variable dans ses formes, mais présentant toujours pour caractère constant une grande épaisseur de têt , un épiderme noir ou à peu prés noir, exceplé dans l'état de jeunesse où il est d'un jaunátre plus ou moins brun et radié, des dents cardi- nales exirémement fortes et jamais comprimées, sommets ondulés- tuberculés, les impressions musculaires et paléales trés marquées, la nacre d'un blanc bleuátre ou rose saumonné plus ou moins foncé. Forme en général ovale assez renflée. Notre type de la Loire est d'un ovale presque rond. Le bord infé- rieur est peu courbé et le supérieur trés arqué se creuse en avant des sommets. Bord antérieur court, arrondi, mais un peu tronqué dans sa partie supérieure. Le bord postérieur elliptiquement arrondi, mais portant en bas un rostre trés court, tronqué et plus ou moins infléchi par suite du sinus que présente la coquille dans sa partie postérieure. Parmi tous les types donnés par les auteurs, c’est celui que contient l'ouvrage de M. Drouet qui rend le plus exactement le type de notre département, qui du reste ne se rencontre guère que dans la Loire. Var. 6 PIANENSIS. Mog. PI. 8, fig. 2. Longueur de 80 à 90 millim. Hauteur de 60 à 65 millim. Largeur 50 millim. Coquille aussi grande et aussi érodée que le type, plus atténuée, plus rostrée en arrière, et le bord inférieur avec un sinus très mar- 283 qué sous le rostre. Nacre couleur de chair surtout près de l'impres- sion paléale. Habite la Loire et la Mayenne, où elle est beaucoup plus commune que le type. Var. • CUNEATUS Moq. PI, 8, fig. 3. Longueur de 70 à 75 millim. Hauteur de 45 à 50 millim. Largeur de 25 à 50 millim. Coquille presqu'aussi longue que le type. Beaucoup moins haute, plus atténuée encore en arrière que la précédente et par suite beau- coup plus rostrée ; sommels rouges extrêmement saillants, trés renflés et sans aucune excorialion, tandis que parfois on en voit quel- ques-unes sur le ventre de la coquille. Cette variété habite Je Loir où elle est toujours fort encroulée en arriere. Var. » ELONGATUS Мод. PI. 8, fig. 4. Longueur de 65 à 70 millim. Hauteur de 40 à 45 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille un peu moins grande que le type, aussi érodée, moins haute, plus comprimée et par suite plus rostrée ; le rostre arrondi, le bord inférieur presque droit, le pli postérieur du rostre souvent marqué par un sillon composé de lignes courbes brisées. Elle habite la Mayenne ой elle est peu commune. C'est la var. elongata de Dupuy. La Sévre, dans la Vendée, nourrit celle variélé presque exclusivement ; mais elle y est d'une érosion telle que les sommets et parfois la moitié de la coquille sont réduits à l'épaisseur d'une feuille de papier. La nacre y est plombée et l'ex- lérieur des érosions est noirâtre. Cette variété rapproche beaucoup du sceletus de la Creuse. Var.’ DRAPARNAUDI Moq. PI. 8, fig. 6. Longueur de 60 à 65 millim. Hauteur de 42 à 45 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille plus petite que le type, subtriangulaire, bord supérieur extrêmement arqué et tombant tout à coup en arrière pour y former le rostre , qui est trés bas. Bord antérieur atténué, bord inférieur plus ou moins sinué; sommets assez saillants, érodés ou complétement intacts, suivant la nature des eaux. Elle habite 1а Sarthe et le Loir. Var. TRUNCATULUS Nobis. Pl. 8, fig. 5. Longueur de 50 à 55 millim. Hauteur de 58 à 40 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille plus petite que le type, d'un ovale assez élevé, bord infé- 284 rieur presque droit et presque parallèle au bord supérieur. Bord postérieur tronqué verticalement, la troncature presqu’aussi haute que la coquille. Les sommets assez largement excoriés. Cette variété habite la Maine. Var. ê MINOR Moq. Pl. 8, fig. 7. Longueur de 58 à 40 millim. Hauteur de 52 à 35 millim. Largeur de 16 à 18 millim. Coquille plus petite, d'un ovale presque rond, le bord inférieur en général peu courbe. Sommets assez courbés en avant, rouges, ridés jusque sur les natèces, ne présentant presque jamais d'excoria- lion. Epiderme d'un brun rougeâtre plus foncé vers le bas. Elle habite les affluents de l'Authion et plusieurs des ruisseaux des environs de Baugé. Var. 3 SUBTETRAGONUS Mog. PI. 8, fig. 8. Longueur de 60 à 65 millim. Hauteur de 45 à 50 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille sublétragone, plus ou moins droite inférieurement, bord antérieur un peu plus atténué el acuminé que dans le type, plus petite que lui. Bord postérieur bianguleux arrondi. Sommets non ex- coriés, ridés trés fortement et assez loin sur les naléces. Cette variété est de la Sarthe et de la basse Loire, où elle est assez peu commune. Je l'ai également trouvée, mais rarement, dans la Mayenne. DEUXIÈME ESPÈCE. Mulette batave (Unio batavus). PI. 9, fig. 1 et 2. Syn. Unio batava Lam. Longueur de 50 à 65 millim. Hauteur de 30 à 40 millim. Animal d'un gris jaunátre, plus jaune ou plus rouge sur les bords du manteau. Pied jaune ou d’un rouge orangé très vif dans sa parlie inférieure, d'un gris plus ou moins foncé au-dessous de la région ovarique qui est rosée. Branchies d'un jaune grisâtre plus ou moins foncé suivant les eaux. Coquille assez variable dans ses formes, mais restant toujours d'un ovale gracieux , assez épaisse, d'une nacre présentant les teintes les plus variées suivant les eaux, tantót d'un jaune ou d'un rouge doré, tantôt d'un beau blanc алиге el tantôt d'un blanc rosé à reflets vert de mer. Ligament médiocre, jaunâtre, assez court et peu arqué. Dans le type, lames cardinales minces, entières el assez élevées. Dents car- dinales comprimées, assez épaisses, arrondies et crénelées, la dent postérieure de la valve gauche est toujours très développée. Impres- sions musculaires assez profondes surtout l'anlérieure. Sommets au quart de la longueur totale, plus ou moins enflés, ondulés, excoriés ou parfaitement inlacts suivant la nature des eaux. Bord supérieur régulièrement courbé, bord antérieur arrondi, bord inférieur plus ou moins arqué, bord postérieur un peu alténué el arrondi, rostre droit el un peu bas. Epiderme jaunâtre, olivàtre ou brunâtre, radié de verl plus foncé et porlant plusieurs bandes brunes longitudinales plus étroites el plus rapprochées généralement en bas qu'en haut. Elle habite la Loire, la Sarthe et la Verzée. Le ruisseau de Jary, commune de Brain-sur-Allonnes, nourrit trois variétés fort belles du balavus que nous donnons ci-dessous. Elles sont remarquables toutes les trois par la couleur vert olive de leur épiderme. Var. BARACEUS Nobis. Pl. 9, fig. 7. Longueur de 65 à 70 ші. Hauteur de 58 à 40 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille plus grande que le type, d'un ovale plus allongé. Bord supérieur droit, bord inférieur trés peu courbé et se relevant en arrière comine dans le type. Rostre droit ou presque droit. Ventre tantôt très renflé el tantôt comprimé. Ligament un peu moins développé que dans le type. Sommels non excoriés, rougeâtres et à ondulalions tres saillante, mais peu étendus. Arêle du corselet par- fois assez élevée, ce qui rend le bord poslérieur beaucoup plus tom- bant. (Je n'ai trouvé celle variation que dans le Thouel). Epiderme d'un vert olive assez foncé avec des bandes longitudinales noires et quelques radialions tres obscures. — Le ventre est toujours creusé d'un ou de plusieurs petits sillons peu marqués dans les adultes, par- fois assez profouds dans les jeunes. Ces sillons ou portions de sillons se dirigent des sommets vers le bord inférieur. Nacre d'un blane rosé ou légeremenl saumoné. Celle variélé habile le ruisseau de Jary, commune de Brain-sur- Allonnes el le Thouet. Var. COURTILIERI Nobis. Pl. 9, fig. 3. Syn. Unio Courtilieri Hattmann, Longueur de 55 à 00 millim. Hauteur de 35 à 40 millim. Largeur de 25 à 50 millim. Coquille un peu plus grande que le type, plus ventrue, plus dilatée 286 et plus arrondie en arrière avec le rostre plus bas. Partie antérieure plus atténuée, bord inférieur légèrement relus, forme générale sub- reniforme, ligament jaune, plus faible que dans le type. Sommets rougeatres et ondulés , non excoriés. Epiderme d’un vert olive par- fois taché de brun ou de noir avec des radiations peu apparentes. Nacre d’un blanc bleuatre ou rosé. Habite le ruisseau de Jary et celui du Moulinet, commune d’Eche- miré où elle a élé recueillie il y a plusieurs années avec la variété précédente par M. Ludovic Le Gris, qui la possédait sous un faux nom dans sa collection. C'est sur un seul individu jeune d'une variation mitoyenne de cette variété que M. le baron Hattmann a établi l'espèce unio Courtilieri dont la description a été insérée tout récemment dans les Annales de la So- ciété linnéenne. C'est entouré de plus de deux cents individus pris vi- уапіѕ de celte variélé el des variations mitoyennes qu'elle présente et apres avoir pris l'avis de M. Moquin-Tandon, que je ne balance pas à ne considérer ce mollusque que comme une variété du batavus. Si M. le baron Hattmann avail eu plus de sujels à sa disposilion, il n'eüt pas établi comme caracleres spécifiques d'une espèce des caractères que l'individu qu'il a vu présentail sans doute, mais qui ne sont pas le cas le plus commun dans celle coquille. Ainsi l'acuité de la dent de la valve droite se rencontre plus rarement que la dent mince el créne- lée du batavus. M. Courliller a pu s'en assurer lui-méme en ma pré- sence, car les deux individus qu'il possede ont la dent mince et relevée en créte du type; ia nacre n'est point constamment rosée, mais bien plus communément d'un blanc bleuâtre ou saumoné. En- fin la dent postérieure de la valve gauche n'est point pelile à l'ordi- naire, mais conforme au type. — M. le baron Hattmann donne par opposition le batavus comme une coquille assez pelite el peu renflée. Tout cela dépend de 1а nalure des eaux qu'habite celte espèce et no- (те batavus de la Loire ne diffère que de quelques millimètres de la var. Courlilieri. Je le répèle, M. Hatimann n'a eu à sa disposition qu'un individu peu développé, il ne pouvait pas avec aussi peu de ressources établir un diagnostic bien certain et capable d'établir une espèce. Var. a ARCUATUS Moq. PI. 9, fig. 5. Longueur de 65 à 75 millim. Hauteur de 50 à 35 millim. Largeur de 50 à 33 millim. Coquille beaucoup plus grande et plus allongée que le type, plus renflée, plus épaisse et plus rostrée. Bord antérieur plus ou moins tronqué inférieurement, bord inférieur arqué, bord postérieur sub- 287 tronqué se terminant en un rostre bas ; épiderme d'un jaune oli- vâtre, passant souvent au brun surtout en avant. Sommets trés éro- dés ainsi que la partie antérieure dans les vieux sujets. J'ai recueilli celle remarquable variété dans le ruisseau de Jary ой elle est trés rare. M. Ludovic Le Gris l'avait recueillie quelques années avant dans le ruisseau du Moulinet , commune d'Echemiré , et la possédait sans en connaître le véritable nom, — C'est certai- nement une des plus curieuses variélés que présente le batavus. Var. © MANCUS Mog. PI. 9, fig. 9. Syn. U. Mancus Dup. Longueur de 53 à 60 millim. Hauteur de 52 à 55 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille de méme taille que le type. Cunéiforme, ovale allongé, bord inférieur presque droit, sommets au sixième de la longueur lotale el trés gonflés , partie postérieure très rostrée, rostre bas ct lronqué, sommels excoriés, bord antérieur arrondi et atténué, bord supérieur trés arqué. Epiderme d'un vert noir sans rayon, habite la Sarthe et le Thouet. Var. s OVALIS Mog. PI. 10, fig. 2. Syn. U. Ovalis Dup. Longueur de 45 à 50 millim. Hauteur de 28 à 50 millim. Largeur de 20 à 25 millim. Coquille plus petite que le type, plus ventrue plus épaisse, un peu tronquée en arrière. Epiderme d'un vert brun unicolore avec des bandes brunes plus foncées , mais sans radiations. Habite le Loir oü elle est commune. Var. ACUTUS Nobis. РІ. 10, fig. 4. Longueur de 60 à 62 millim Hauteur de 52 à 35 millim. Largeur de 28 à 50 millim. Coquille de la grandeur du type, plus ventrue, plus épaisse el ter- minée en arrière par un rostre poinlu, court et bas. Epiderme d'un brun rougeátre uniforme avec des bandes plus foncées , mais sans rayons. Bord anlérieur subtronqué et souvent assez avancé , bord inférieur presque droit. Sommets assez largement excoriés , ainsi que la parlie antero-postérieure. Habite la Loire où elle est assez rare, Var. ^ NANUS Мод. PI. 9, fig. 8 et 10. Syn. U, Nanus Dup. Longueur de 45 à 48 millim. Hauteur de 26 à 28 millim. Largeur de 20 à 25 millim. Coquille plus ou moins élevée , plus pelite que le type, un peu 288 réniforme par suite de la légère sinuosité du bord inférieur, et la grande courbure du bord supérieur; un peu allénuée et arrondie antérieurement ou peu tronquée postérieurement avec le rostre plus ou moins bas. Sommels rouges un peu excoriés, épiderme d'un vert marron rougeâtre avec des bandes brunes et sans rayons. Habile les affluents de l'Authion supérieur, le Thouet, les ruis- seaux des environs de Baugé, le ruisseau du Moulinet et celui de la Rochette, communes de Fonlaine-Guérin et de Saint-Georges-des- Bois, descend aussi à Montsoreau , venant de la Vienne , mais alors elle est un peu plus étroite et présente le type parfait des auteurs. Var. SENOTIUS Nobis. Pl. 10, fig. 4. Longueur de 55 à 60 millim. Hauteur de 53 à 55 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille de la grandeur du lype, bord supérieur presque droit , bord antérieur arrondi, bord postérieur assez pointu, bord inférieur peu courbé, mais se relevant tout-à-coup en arrière pour former le rosire qui est droit. Sommels non excoriés, mais ondulés, tubercu- lés seulement en-dessus. Epiderme d'un vert de mer, avec une seule large bande noire au tiers inférieur de la hauteur et des rayons vert foncé sur le milieu du ventre. Ligament court. Habite l'Authion , à Brain, où il a été recueilli en pelite quantité jusqu'à ce jour. Var. SARRATINUS Moy. PI. 9, fig. 4. Longueur de 60 à 65 millim. Hauteur de 55 à 40 millim. Largeur de 25 à 28 millim. Coquille un peu plus allongée que le type et d'un ovale presque parfait, renflée, à sommets excoriés, rostre droit el légèrement tron- qué en arrière, épiderme d'un vert noir. Elle habite la Loire à Souzay. Var. LONGUS Nobis. Pl. 10, fig. 3. Longueur de 55 à 60 millim Hauteur de 50 à 33 millim. Largeur de 18 à 20 millim. Coquille plus longue que le type mais bien moins élevée , et par suite d'un ovale très allongé, presque parfait, mais un peu atlénué en arrière où le rostre est sublronqué. Dent postérieure de la valve gauche très développée ce qui retire cette variété des unios pictorum auxquels il ressemble el le place parmi les batavus comme une de ses variélés les plus remarquables. Epiderme brillant d'un vert jaunátre, gai, radié en arriere , d'un vert plus foncé avec des bandes longilu- 289 dinales, brunes , se touchant presque en avant, nacre brillante, saumonée el maculée de livide. ll atteint 60 millim. de longueur sur 30 millim. de hauleur. Habite la Sarthe où elle est peu commune. Var. MINIMUS Nobis. PI. 9, fig. 6. Longueur de 35 à 40 millim. Hauteur de 22 à 25 millim. Largeur de 15 à 18 millim Coquille de trés petite taille ne dépassant pas de 3 à 4 centimètres de longueur sur 24 de hauteur. — Renflée dans la région des som- mets qui sont assez ressortants el plus ou moins cariés suivant l'âge, Bords supérieur et inférieur droits, presque parallèles entre eux, bord antérieur allénué, arrondi , el peu éloigné du sommet. Bord posté- rieur tronqué presque verlicalement. Epiderme d'un jaune bruna- tre plus ou moins foncé, sans rayons el ordinairement sans bandes brunes longitudinales ; quelquefois il y en a de fort étroites ou une fort large. — Beaucoup d'individus présentent une certaine dila- lation à la partie postérieure. Le ligament est assez bombé. J'ai cru devoir séparer celle variélé du nanus qui est toujours sensiblement plus gros et plus arqué au bord inférieur. Elle habite la Vienne, près l'Ile Bouchard, et si je la joins aux nayades de Maine et Loire , c'esl qu'à cause de sa pelilesse elle est vraiment remarquable, el qu'à cause de sa proximilé on peut se la procurer facilement. TROISIÈME ESPÈCE. Mulette de requien (Unio requienii). Moq. PI. 10, fig. 5. Syn. U. requienii Dup. Longueur de 70 à 80 millim. Hauteur de 40 à 50 millim. Epaisseur de 25 à 30 millim. Animal d'un blanc jaunâtre avec les bords du manteau d'un jaune un peu brunálre. Cirrhes tenlaculaires noirâtres, brancbies d'un gris rougeâtre, pied jaune d'ocre loug et étroit. Coquille typique oblongue, cunciforme, ventrue, épaisse, trés so- lide , d'un vert plus ou moins brun , quelquefois toute brune , avec des bandes d'un brun plus foncé. Cólé antérieur assez arrondi, bord supérieur droit, jusqu'aprés le ligament, puis tombant subitement en arrière pour former le rostre qui est bas, et plus ou moins aigu. Bord inférieur à peu prés droit el paralléle au bord supérieur. Som- 19 290 mets enflés, assez près du bord antérieur et portant des ondulations tuberculeuses quand ils ne sont pas érodés , ce qui est le cas le plus rare dans la Loire, seul lieu où s’est rencontré le type jusqu'ici. — Ligament assez développé, reclo-sinueux, el assez long. Dents cardina- les assez fortes, comprimées, assez épaisses, demi-circulaires, un peu acuminées el dentées sur leur créte. La dent postérieure de la valve gauche un peu plus saillanle que la dent antérieure qui elle est plus longue. Lamelles, assez haules mais entières. Impressions musculaires antérieures très profondes, les postérieures presque superficielles. Impressions paléales visibles, nacre d'un blanc rosé jaune ou saumo- né, souvent taché de livide (An. var. Crassidens Rossmassler). Var. RHYNCOIDEUS Nobis. PI. 11, fig. 4. Longueur de 18 à 80 millim. Hauteur de 58 à 40 millim. Largeur de 30 à 32 millim. Coquille qui atteint la même grandeur que le type, et même la dépasse, mais atlénuée en arrière jusqu'à être presque subulée. Bord inférieur droit, ou un peu arqué, bord supérieur très arqué, bord antérieur atténué, dent postérieure de la valve gauche forte. Epiderme presque noir, sommets ordinairement beaucoup plus éro- dés que le type. Celle variélé ainsi que notre lype se rapprochent beaucoup de la variété Crassidens de Rossmassler. Elle habile la Loire, mélangée avec le type et le rostratus. Var. ABREVIATUS Nobis. Pl. 11, fig. 7. Longueur de 55 à 65 millim. Hauteur de 30 à 40 millim. Largeur de 18 à 25 millim. Coquille aussi haute mais un quart plus courte que le lype, épaisse, moyennement ventrue, à sommets érodés. Bord inférieur très peu courbé, bord supérieur trés courbé et tombant en arrière pour aller former un rosire bas et tronqué arrondi. Epiderme d'un brun rouge presque noir, ou quelquefois jaunâtre suivant les eaux; le bord an- térieur forme un angle trés marqué avec le bord supérieur. Les trois dents de la charnière sont forles et presqu'égales. La nacre est d'un blanc saumoné , avec des reflets verts et rouges sous le rostre. Elle habite la Loire dans les endroits profonds, ce qui la rend plus difficile à découvrir; on la trouve mais plus petile el à épiderme jaunalre dans le Loir. — La Vienne la possède également , mais plus pelite encore, plus comprimée, à épiderme brun rouge, el pré- senlant une flexuosilé а la partie postérieure. Les dents de celle pe- lite varialion sont fortes el profondément crénelées. 291 Var. ROSTRATUS Nobis. Pl. 10, fig. 6. Syn. An. B. rostrata (Gassies). Longueur de 85 à 90 millim. Hauteur de 45 à 45 millim. Largeur de 25 à 50 millim. Coquille plus grande que le type, moins enflée , bord supérieur tombant moins brusquement en arrière et à bord inférieur droit , mais se relevant un peu en arrière pour aller former le rostre qui est subtronqué et presque droil. Sommets érodés plus ou moins lar- gement, épiderme d'un jaune verdalre avec de larges bandes brunes longitudinales. Habite la Loire. On trouve celle méme forme dans le Thouet et dans la Mayenne, mais un peu moins grande, elle a de grands rapporls de forme avec 1U. pictorum, dont elle se dislingue, cependant, toujours par le développement de la dent postérieure de la valve gauche. Var. CUNEATUS Nobis. Pl. 10, fig. 7 Syn. An. E. Cuneata (Gassies). Longueur de 75 à 80 millim. Hauteur de 43 à 45 millim. Largeur de 28 à 50 millim. Coquille de la grandeur du type mais beaucoup plus haute en avant et beaucoup plus atténuée en arrière, ce qui la rend cunéi- forme. Epiderme d'un jaune roux avec des bandes plus foncées, sommets excoriés ainsi que plusieurs endroits de la partie antérieure de la coquille. Habite la Loire, à Saint-Gemmes. C'est une des plus belles va- riélés du requienii ; elle a élé recueillie par M. Millet. Var. ARCUATUS Nobis. Pl. 11, fig. 2. Syn. An. F. decurvata (Gassies). Longueur de 60 à 65 millim. Hauteur de 52 à 55 millim. Largeur de 22 à 25 millim. Coquille plus petite que le type, plus comprimée, bord supérieur plus courbé , bord inférieur arqué , bord postérieur se terminant en un rostre comprimé et trés bas, assez épaisse. Epiderme tantót d'un jaune vert, chargé de larges bandes noires , tantôt avec des bandes très pàles qui font paraître la coquille toute verte. Habite la Sarthe où elle est assez rare. Var. CALAMI Nobis. PI. 11, fig. 3. Longueur de 50 à 55 millim. Hauteur de 25 à 28 millim. Largeur de 15 à 16 millim. Coquille beaucoup plus pelite, allongée, comprimée, terminée en 292 arrière еп rostre bas, largement et verticalement tronqué. Epiderme d'un jaune verdâtre clair avec quelques bandes brunes peu foncées. Sommets excoriés. Habite l'Oudon et surtout la Vienne à Chinon , d'où elle descend jusqu'à Montsoreau el Candes. Var. ROSTRALIS Nobis. PI. 11, fig. 6. Longueur de 65 à 70 millim. Hauteur de 30 à 35 millim. Largeur de 25 à 30 millim. Coquille plus pelite que le type, allongée, très arquée inférieure- ment surtout en arrière sous le rostre qui est recourbé en-dessous el très allénué, Elle est assez enflée et les sommels sont profondé- ment érodés. L'épiderme est d'un vert plus ou moins noir, uniforme ou avec des bandes. Elle atteint 60 millim. de longueur. Celte variété habite l'Oudon et Ја Verzée où elle est commune, et l'Authion oü elle est assez rare et toute noire. Var. TURTONII Moq. Pl. 11, fig. 4. Longueur de 65 à 70 millim. Hauteur de 55 à 40 millim. Largeur de 25 à 28 millim. Coquille plus petite que le type, moins ventrue, bord supérieur plus arrondi et presque parallèle au bord inférieur qui est arqué , parlie postérieure plus dilatée que le type el plus rostrée ; le rostre bas et arrondi. Epiderme d'un roux noirâtre, plus foncé vers le bas. Elle alteint 65 millim. de longueur. Elle habite l'Authion oü elle est rare. Var. CUNEOLUS Nobis. Pl. 11, fig. 5. Longueur de 45 à 55 millim. Hauteur de 25 à 50 millim. Largeur de 15 à 20 millim. Coquille trés pelile ne dépassant guère 45 millim. de longueur, assez mince, très allongée , les sommets rougeatres el trés érodés , d'un ovale allongé presque régulier, cependant le bord supérieur plus courbe que l'inférieur qui est presque droit. La région du cor- selet assez élevée fail un angle trés obius pour descendre en arriere. Bord postérieur tronqué. Epiderme brun rouge avec des bandes brunes el les sommets rouges ; parfois le rouge du sommet se ré- pand sur toule la coquille. Celle jolie рее variété habite l'Oudon et la Vienne, se prend à Montsorean mais rarement. 293 QUATRIÈME ESPÈCE. Mulette des peintres (Unio pictorum). Moq. PI. 11, fig. 8. Syn. Mya pictorum L. Longueur de 60 a 100 millim, Hauteur de 25 à 45 millim. Epaisseur de 20 à 50 millim. Animal variant du roux au jaune grisálre suivant les eaux. Pied plus grand que celui de la Mulette de Requien, en forme de langue el d'un jaune plus ou moins roux. Cirrhes tentaculaires presque noires. Manteau liseré de brun ou de noir, branchies jaune grisâtre ou rougealres. Coquille d'un ovale trés allongé mais atténué en arrière, ce qui la rend cunéiforme; venlrue, épaisse ; épiderme d'un vert jaunâtre ou d'un jaune verdâtre avec des bandes longiludinales brunes. Côté antérieur arrondi, có'é poslérieur 1гёз allongé et terminé par un rostre quelquefois un peu tronqué. Les bords supérieur et inférieur sont presque de la méme courbure ou parfois tout-à-fait parallèles. Le bord inférieur est parfois un peu retus. Sommets ridés tuberculés situés à peu près au tiers de la longueur totale. Ligament de médiocre grandeur. Dents cardinales toujours moins saillantes que dans le requienii, et la dent postérieure de la valve gauche trés peu développée , parfois rudimentaire. Lamelles assez éle- vées et enliéres. Impressions musculaires bien marquées surtout l'antérieure. Nacre variant du blanc blenàtre avec des teintes rose violacé, au blanc rosé ou saumoné , parfois au jaune doré. Habite l'Authion à Longué el la Loire. Var. MILLETI Moq. Pl. 12, fig. 1. Longueur de 90 а 95 millim. Hauteur de 45 à 50 millim. Largeur de 50 à 55 millim. Coquille un peu plus grande que le type, bords supérieurs et infé- rieurs, droils et parallèles , la crête du corselet élant assez saillante. Epiderme vert brunâtre avec de larges bandes brunes ; elle atteint 95 millim. Habite l'Authion à Brain. Var. > RADIATUS Moq. Longueur de 80 à 85 millim. Hauteur de 35 à 40 millim. Largeur de 28 à 50 millim. Coquille de méme forme que le Milleti, à peu prés de la grandeur du type. Epiderme jaunálre avec des rayons verts, Habite la Loire et l'Authion à Brain. 294 Var. у FLAVESCENS Moq. Longueur de 60 à 65 millim. Hauteur de 28 à 30 millim. Largeur de 20 à 25 millim. Coquille de méme forme que le Milleti mais plus petite que le type et toute jaune parfois, obscurément radiée en arrière. Habite la Loire, atteint 65 millim. Var. ¢ LONGIROSTRIS (Ziegler). PI. 12, fig. 3. Longueur de 70 à 75 millim. Hauteur de 55 à 58 millim. Largeur de 25 à 25 millim Coquille plus petite que le type et daclyliforme par suite de la si- nuosilé du bord inférieur qui est plus ou moins forte. Bord supé- rieur un peu montant , bord antérieur atténué et sublronqué. Epi- derme d'un vert brunâtre ou rougeâtre suivant les eaux ; avec des bandes brunes longiludinales, les sommets rouges peu ou point ex- coriés. Habite le Loir. Var. NIGER Nobis. Pl. 12, fig. 2. Longueur de 60 à 80 millim. Hauteur de 50 à 40 millim. Largeur de 20 à 30 millim. Coquille plus petile que le type, surtout les individus provenant de l'Oudon qui n’atteignent guères que de 60 à 70 millim. de lon- gueur au plus. — Forme générale du type mais un peu plus rac- courcie, surtout ceux de l'Oudon qui sont proportionnellement plus ventrus. Sommet profondément excorié , érosions noircies sur Ja nacre et blanches sur le cortex. Epiderme d'un vert noir tellement foncé que la coquille semble toute noire, surtoul ceux de la Mayenne; ceux de l'Oudon sont un peu moins foncés. Habite la Mayenne el l'Oudon. Var. VINCELEUS Nobis. Pl. 12, fig. 4 et 5. Longueur de 60 à 75 millim. Hauteur de 50 à 40 millim. Largeur de 18 à 25 millim. Coquille plus petite que le type, mais d'un ovale plus large, plus comprimée. Partie postérieure terminée en un rostre droit et pointu ou très légèrement tronqué. Bords supérieurs et inférieurs à peu près également courbes. Epiderme d'un jaune un peu brunâtre, avec deux ou trois bandes brunes plus ou moins marquées, quelque- fois presqu'effacées , sommets érodés. Nacre d'un jaune plus ou moins saumoné ou doré ; elle atteint 70 millim. de longueur. Habite la Loire et la Verzée. — Le Loir en produit une variation plus pelile encore, qui n'alleinl guères que 60 millim. au plus, qui 295 a les sommets rouges el non excoriés , et qui est d'un jaune ver- dálre avec 6 ou 7 bandes brunes longitudinales étroiles, assez rap- prochées l'une de l’autre. Voyez pl. 12, fig. 5. Var. TUMENS Nobis. PI. 12, fig. 6. Longueur de 65 à 70 millim. Hauteur de 55 à 55 millim. Largeur de 25 à 30 millim. Coquille plus petite que le type, parfaitement cunéiforme , les bords supérieur et inférieur également peu courbés el se réunis- sant en arrière pour former un rostre droit, étroit et tronqué. Ventre enflé, sommets rouges non excoriés, trés près du bord antérieur, ligament trés saillant, trés courbe et trés fort. Celle curieuse variété habite le Loir. Elle alteint 70 millim. Var. COMPRESSUS Nobis. PI. 12, fig. 7 Longueur de 60 à 75 millim. Hauteur de 50 à 55 millim. Largeur de 18 à 22 millim. Coquille beaucoup plus petite que le type, plus allongée , très comprimée, mince mais cependant à peu pres de la forme générale du type, plus en pelit, sommets plus ou moins corodés suivanl les eaux. Epiderme d'un jaune roussalre ou verdâtre, avec deux ou trois bandes brunes longitudinales ou bien tout noir. La dent pos- térieure de la valve gauche très faible. Habite la Loire, l'Authion el l'Oudon, assez rare. L. DE JOANNIS. | NOTICE SUR Le Triton variegatus, le Pupa granum, le Planorbis levis et la Succinea arenaria. La Faune de Maine et Loire vient de s'enrichir de quatre sujels nouveaux, un de l'ordre des batraciens et de la famille des urodéles, le Triton variegatus, el trois de l'ordre des mollusques, le Pupa granum, le Planorbis levis et la Succinea arenaria. TRITON VARIÉ (TRITON VARIEGATUS). Longueur, un décimétre. Téle ovale, queue comprimée et mousse à l'extrémité. Quatre doigts aux pattes antérieures : le premier ou l'interne le plus pelit; le troisième le plus grand. Cinq doigts aux pattes postérieures; le premier ou interne le plus pelit; le deuxième et le cinquième plus grands et à peu près égaux, le troisième et le qualriéme les plus grands et égaux. Dessus du corps d'un vert plus ou moins foncé suivant les sujets, chagriné de points noirs en relief qui se répandent sur tout le dessus du corps. — Le milieu du dos porte une belle ligne jaune qui part de la nuque ой elle est assez large pour aller finir en s'amoindrissant sur le dessus de la caréne de la queue. Sur les cólés de cetle ligne jaune s'appuient, sur le milieu du corps, six taches noiratres de chaque cólé, moins grandes en avant el en arrière qu'au milieu. — Sur les flancs règne une large bande ir- régulière d'un noir rougeálre qui se prolonge sur toute la partie moyenne de la queue où elle est festonnée, dentelée en dessus. Le dessous de la queue, liséré de jaune, est couleur du ventre qui est livide, marqué de points jaunes s'étendant jusqu'aux flancs où ils se 297 transforment en taches jaunes irrégulières contigues à la bande noire. Les quatre pattes sont vertes avec une large bande rouge noirâtre à l'aisselle, une autre au coude, une autre plus large encore au poi- gnel et d'autres plus petites sur les doigts. La nuque porte une tache noire à l'origine de la ligne jaune du dos, puis une autre médiane en avant, puis une de chaque cólé au- dessus des yeux, qui portent une petite tache noirâtre en avant el en arrière aux angles. — Les lèvres sont d'un brun rouge livide mar- quées de points jaunes, et les deux narines sont chacune dans une tache noire qui va se fondre avec la couleur de la lévre supérieure. Sur les dix centimètres de longueur totale de l'animal, la queue a quatre centimètres de longueur, le corps cinq centimetres et la tête un seulement. Ce Triton a été trouvé sous une pierre dans la forét de Combrée par M. l'abbé Ravain, professeur d'histoire naturelle au collége de Combrée, qui a eu la bonté de me le communiquer. MAILLOT GRAIN (PUPA GRANUM ). Hauteur de 4 à 5 millim. Diamètre de 1 à t 172 millim. Coquille dextre, oblongue, à peu près cylindrique, un peu atténuée au sommet qui est un peu obtus. Un peu luisante et transparente, chargée de stries un peu flexueuses, presqu'égales et très fines. Cou- leur uniforme d'un corné jaunâtre ou vineux, de sept à neuf tours de spire; ils sont légèrement convexes dans la parlie inférieure, mais davantage dans la partie supérieure. L'ombilic qui est médiocre est en parlie fermé par le bord columellaire. L'ouverture ovale suban- guleuse a son bord extérieur légèrement rentré en dedans ou aplati et son bord columellaire droit. Le péristome légèrement interrompu par le dernier tour de spire el un peu évasé, mince, tranchant et blanchâtre, et l'extrémité du bord extérieur est très convergente en dedans tandis que le bord columellaire est droit. La bouche présente un fort pli immergé vers le milieu de la partie supérieure, deux plis columellaires assez profonds, le supérieur le plus grand et enfin quatre plis palataux qui n'arrivent pas jusqu'au bord du péristome, le troisième pli est le plus grand. On le trouve sous les pierres en hiver. Ce maillot, qui avait été regardé jusqu'à ce jour comme habilant exclusivement le midi de la France, se trouve à Champigny-le-Sec, où je l'ai recueilli el à Dampierre, où l'a recueilli M. Sacher, profes- 298 seur au collége de Saumur. — Il n'est pas très rare dans ces en- droits là. PLANORBE LISSE (PLANORBIS LOEVIS ). Hauteur 172 à 1 millim. Diamètre de 3 à 4 millim. Coquille dextre, lisse, mince, brillante, comme vitrée; parfois loute blanche, parfois un peu fauve, profondément ombiliquée en dessus, mais trés peu en dessous. Tours de spire très arrondis, sans trace de carène et très légèrement comprimés, le dernier tour dilaté près de l'ouverture qui est ovale, un peu échancrée par lavant- dernier tour avec le bord non réfléchi et tranchant. Ce panorbe qui n'a encore été observé jusqu'à ce jour qu'aux iles Chaussey prés Granville et en Corse, habite le petit étang des Landes, commune de Brain-sur-l'Authion, où l'a recueilli M. Henri de la Per- raudière qui a bien voulu me le communiquer. AMBRETTE SABLINE (SUCCINEA ARENARIA). Hauteur 6 millim. Largeur 3 millim. Coquille ovale, oblongue, le dernier tour beaucoup plus grand que tous les autres, réuni et trés ventru, mince, un peu transparent, lantót de couleur jaune d'ambre et tantôt un peu brune, souvent chargée de terre. Elle a de trois à quatre lours de spire, renflés el un peu tordus. Sa sulure est très profonde et le sommet est obtus. L'ou - verture de la bouche est arrondie, à peine ovaleet un peu plus grande que la moilié de la hauteur de la coquille qui est recouverte de stries très fines. L’épiphragme est mince, complet el irisé. L'ambretle sabline qui n'avait été trouvée jusqu'à ce jour que dans le midi de la France et à Boulogne-sur-Mer a été découverte dans notre département, à Saint-Barthélemy, par notre collègue M. Ar- | mand de Crochard, et à la Meignanne, par moi. On la trouve en hiver dans la mousse et un peu enfoncée dans le sable, elle n'est pas rare à Saint-Barthélemy. Les individus que nous avons rencontrés jusqu'à ce jour occupent la limite inférieure de la taille de la succinea arenaria qui alteint dans le midi de six à huit millimètres de hauteur. — L'ambrette sabline vit à Saint-Barthélemy en société de l'Helix fulva et de V Helix aculeata, et à la Meignanne, en société de Г Heliz pulchella et dela Zua lubrica. Dg JoANNIS. subuy ASS WAVE з эр MNT `түр1рЕл den 7%) eæubÂs e}uopouy WETA (ed) stud] ‘JA eeubh4 ү salu зүнүн 3 2B МАТ чүн DCE NT = - “+ аа -4 5. үт": (ә) "ESOL IPA ‘FETA у Tu | subuy "356 yaya 3 P ЧИТ NAYADES. - ngtrs. leriana.moq. 1 1 АСудпа a Var Elntermedia. mog, 2, À Avonensis, Var Rossnass P SM UN eX | ONE iW SN V \ \ \ à A‏ ا TNI T‏ ШАНГА‏ ҮШ] ҮШ RAT уч Ша КАМЕ lagers ^ 1, A.Variabilis, (ype). 2, AAnatina, (Var. Crassiuseula) тод. | 3, A-Anatina (droust) ape. | Lith E.BABASSE Angers. | nata Var Normandi (moq)2, À Complanata (mog) ле. DE |, A.Compla | З.А. Anatina Var. Coarctata ape) шод. ipe dq x LE le NAYADES. — ; ШКЕ, BARASSE, Angers. q. E A Avonensis\VarElongata) шод. 2 AVariahilis Var -Crassula mo ei 'sgoMeA sas ya 2% (Ang SELON) bow snaploquioyy orup) арау бууну 1 HT чошу ир} v ЕТЕТ | З ipneusedesq sey ا‎ ЕТ т А _ Snpneouni] IPA ‘> y \ Li 24 AC A М | Fe Var. mancus Unio Batavus et 7 de ses varietés. -* € var. Cuneatus ath E Зага, 5580 Fig |, 2, 3 4, var de lu Batavus fig 5. Unio requienii Fig. 6 7, Var de l'u. requienti u.pictorum. type Lith E.BARASSE Angers Fig. 1, 2,3,4, о, B. ] variétés de IU. Requienii Fig 8 Unio Pictorum zz". каш a NAYADES. ; ` Lith E BAISSE, Anger Fig. ] 2,3,4, 5, 6,7 variétés del Unio Pictorum. NOTICE STATISTIQUE SUR LA CHASSE ET LES ANIMAUX NUISIBLES EN MAINE ET LOIRE. Messieurs , Coupé de collines et de vallons, de bois et de plaines, le départe- ment offre aux chasseurs un vaste champ oü leurs exploits peuvent s'étendre. Ici ce sont d'immenses forêts giboyeuses, dont les échos répèlent les bruyantes fanfares, qui éveillent un si doux enthou- siasme au cœur de nos intrépides veneurs. Plus loin, la plaine so- litaire, où le chien d'arrét, ballant avec son instinct admirable, le nez au vent, les chaumes et les bruyères, s'arrête, immobile, sur la perdrix surprise au milieu de sa nombreuse famille. Si, contre mon habitude, je me suis permis de courre un lièvre ou un renard, j'ai trouvé qu'il y avait je ne sais quoi d'attrayant, à écouter la voix des chiens, tantót se perdant sous l'épaisseur du bois, tantót claire et vi- branle annonçant la vue. Mais j'oublie que mon but est simplement de vous faire connaitre les relevés de ces habitants des forêts qui ont été abattus depuis plu- sieurs années dans nolre département. Une superficie de 52,128 heclares de terrain est occupée par les forêts et les bois, en Maine et Loire, aussi les animaux nuisibles y trouvent-ils encore la faculté de pouvoir se reproduire avec une assez grande rapidité, malgré les ballues incessantes de nos officiers 300 de louveterie et les primes que l'on accorde pour la destruction des loups. J'ai pensé à mettre sous vos yeux, Messieurs, d'après des re- cherches certaines et qui ne sont nullement exagérées, le nombre des animaux abaltus de 1853 а 1857 inclusivement. Ces animaux sont les loups, renards, sangliers, blaireaux, putois, fouines, elc., etc., que j'ai classés par groupe el par année, en me permettant cependant de confondre dans un même chiffre les trois dernières espèces, sur lesquelles je n’ai pu me procurer des rensei- gnemenls exacts. Je ne parlerai que pour mention des sangliers, dont deux indivi- dus seulement furent {nés pendant celle période de cinq années dans la commune de Juigné-Béné. D'où venaient-ils? nul ne le sait; ce- pendant lout porle à présumer que, chassés de leurs fourrés de la Brelagne ou du Maine, ils étaient venus chercher un refuge dans nos contrées. C’est donc ainsi que nous pouvons nous expliquer leur présence et leur mort. J'arrive ainsi, Messieurs, à vous donner d'une manière exacte, les lableaux par année de tous ces animaux nuisibles. TABLEAU DES ANIMAUX NUISIBLES TUES EN MAINE ET LOIRE, Loups. 57 3 опре 8 \ Шооуее ere 3 \ Douves 56 5 )Louveteaux..... 15 " Louveteaux .... 20 ANNEE 1858... Renards....... 480 ANNÉE 1856..) Renards....... 466 Sangliers....... » | Sangliers ...... » Ате 451 Autres. zor Jo 402 952 901 lineaire 2 LE one 1 Mouves 2139, sco 196 | оозе arsi a 5.06 1 f / Louveteaux..... 5 ANNÉE 1857, . / Louveteaux. .... 5 a و‎ Renards..... .. 402 s Renards....... 506 Sangliers ...... » Sangliers ...... 2 INTROS a 2509 Ore Autres а 286 790 807 IBÉOUpS н" 1 OUPS ые ЕЕ: 21 Louves М.О. 4 Louves h. ZIT 19 i > Louveteaux..... 13 ; : Louveteaux.... 58 ANNÉE 1855. . \ Renards à 395 al Ret Ca Веда сая 2,249 | Sanele ane Sangliers ..... 2 Autres. 2 420 AUTOS агу, 1,984 833 4,283 301 C'est donc, Messieurs, pour les cinq années, un total de 4,283 ani- maux nuisibles qui ont élé tués, comme l'indique la récapitulation ci-dessus. Maintenant, Messieurs, si nous considérons le nombre des permis de chasse délivrés pendant l'année 1858, nous trouvons un lolal de 4,087, el que, pour chaque chasseur, nous meltionsen moyenne, 25 perdrix, nous arrivons au chiffre énorme de 102,175, ci. . 102,175 Plus, à peu près le méme nombre, s'il ne dépasse, celles tides puries/Braeoniers. р нр 0529824. HUE FAUNE 100.000 Les lapius peuvent figurer dans cette liste pour. . . . . 60,000 BRUNES DRE QUO NA ISL эпо. 2U0BU eager 5,000 Tolaldu gibier. tué en, 1858, аши ачин 267,175 Ces deux derniers chiffres se trouvent parfaitement corroborés par la notice si intéressante de notre savant collègue, M. le docteur Farge, sur les animaux à fourrure de l'Anjou (Annales de la Société Lin- néenne de Maine et Loire. — Année 1857). Peut-élre ces chiffres vous paraissent-ils amplifiés ; cependant, Messieurs, ils ne doivent point vous étonner, je connais une seule commune oü deux chasseurs ont tué, pendant la chasse de 1857, 600 perdrix el 130 lièvres. Vous le voyez, Messieurs, c'est sur des données cerlaines que j'ai établi celte statistique, el si ces documents vous paraissent ici de quelque importance, je me ferai un plaisir de vous rendre compte chaque année des animaux nuisibles tués dans le département de Maine et Loire. F. BLAIN. Angers, 4 février 1859. REMARQUES SUR LA NOTICE PRÉCÉDENTE. L'intéressant relevé statistique de M. Fr. Blain, puisé dans les do- cuments officiels de la préfecture de Maine et Loire, implique quel- ques observations que je me permeltrai de soumeltre à la Société, en suivant l'ordre méme du tableau. 1° De l'ensemble des animaux abattus en cing années, il ne semble 302 pas résuller une notable diminution dans celte population malfai- sante. Car la moyenne annuelle, 19 1/2 loups et 450 renards, est al- teinte ou dépassée en 1856 et 1857. C'esl méme dans ces deux der- nières années que se rencontre le maximum de loups adultes. Nous devons cependant émettre un doule à l'égard de celte dernière es- pèce. La plupart des officiers de louvelerie ou des ardents veneurs que nous avons consullés, nous ont affirmé qu'il n'existait plus de loups pur sang dans le département, autrement qu'à l’état de pas- sage ou d'immigration. Cependant quelques forêts contiennent en- core des métis de loups croisés avec des chiens de bergers еггапіѕ et devenus sauvages. Il faut donc accorder une large part à cette race bâlarde dans les têtes présentées à la prime; la reconnaissance est presque toujours faite par un employé peu chasseur et encore moins zoologiste, el un chien errant, tué à quelques kilomètres d'Angers, a recu encore l'année dernière son baptême et sa prime de loup. La question de prime qui fait la base et l'authenticité de ce document, permet donc de réduire d'une façon assez nolable la véritable popu- lation lupine de l'Anjou. Quant aux renards, la moyenne annuelle donne 450 tétes, c'est-à- dire une par 115 heclares 84 ares, ce qui doit être nolablement infé- rieur à la population vivante. Le gibier proprement dit donne lieu à d’autres réflexions. D'abord, 4,087 permis de chasse n'indiquent pas seulement l'abon- dance du pays au point de vue des espèces alimentaires, mais l'ai- sance générale des habitants. Ce nombre représente un 128e de la population totale (524,307), Or, si l'on extrait de cet ensemble le nombre des individus qui peuvent élre chasseurs, c'est-à-dire les hommes de 18 à 60 ans, on arrive à un maximum de 138,335. On trouve alors un permis sur un peu moins de 34 habilants. En admettant pour 1/5 les chasseurs sans permis, on arrive à un chasseur sur 27, dans la population ma- jeure de notre pays. Ne serait-il pas intéressant, Messieurs, d'établir les mêmes calculs dans divers départements, el de comparer avec une donnée de plus les ressources et l'aisance des populations? Le caleul de M. Blain nous démontre une moyenne de 102,175 perdrix tuées en Maine et Loire en 1858. Je commence par dire que je ne crois pas ce chiffre exagéré, mais je me permellrai une cri- tique de la base sur laquelle il est appuyé. M. Blain élablit une moyenne par chasseur, 25 perdrix, puis il mulliplie celte moyenne par le nombre de permis. Il n'y a pas de corrélalion nécessaire entre ces deux facleurs, le nombre des permis pourrait augmenter dans une année peu giboyeuse el diminuer dans une année féconde en 303 gibier ; or, avec la base du calcul adoptée, on arriverait à un ré- sullat tout-à-fait inverse et contraire а la vérité. Il faut donc chercher ailleurs la base du calcul et j'avoue que cela est difficile ; voici pourtant quelques éléments que j'apporte avec d'autant plus de plaisir qu'ils confirmeront les résultats annoncés par notre zélé collègue. En consultant les chasseurs véridiques que j'ai pu rencontrer, j'avoue dès l'abord n'avoir pu en rencontrer que trente, j'arrive a une moyeune de 72,7. Supposez, Messieurs, que j'aie choisi les meilleurs tireurs, je pourrais encore ajouler que beaucoup de mes chasseurs ne chassent que pendant les vacances, et réduisez de moi- lié vous aurez encore 36 perdrix par permis, moyenne bien supé- rieure à celle qu'admet notre collègue. Celte enquête trop superfi- cielle ne prouve que peu de chose, mais si chaque membre de la So- ciété voulait bien en faire autant pour l'année prochaine nous au- rions un véritable document. Les chasseurs proprement dits, vous le savez, mangent et don- nent leur gibier; ils le vendent en proporlion assez minime. Or, Messieurs, voici quelques chiffres bien authentiques qui me pa- raissent devoir êlre rapporlés pour la plus grande partie au bra- connage. Les conducteurs de diligence ont la spécialité de récolter sur leur route le gibier tué dans les campagnes. La seule voiture de Cholet à Saint-Florent expédie par la gare de Varades, le gibier recueilli aux marchés de Cholet pour partie, et à Beaupreau en lota- lité. Ces expédilions se font deux fois par semaine. Eh bien , Mes- sieurs ‚ le relevé fait à la gare de Saint-Florenl, donne pour 15 se- maines une moyenne de 300 kilog. par expédilion — 1200 livres par semaine ou 9,000 kilog. pour l'ensemble de la chasse. Faites la part large pour le poids aux lievres, soil 4,000 kilog., reste 5,000 kilog. pour les perdrix ; à 250 grammes chaque piece, nous voici au chiffre énorme de 20,000 perdrix pour une seule gare. Si le méme travail eût pu être fail à Angers el à Saumur, nous serions certainement arrivé à des chiffres égaux ou supérieurs à ceux de M. Blain, el comme ils eussent élé oblenus par une autre voie, ils auraienl eu une plus grande valeur confirmalive. Malheu- reusement beaucoup de paniers expédiés sont chargés d'objets mixtes, canards, volailles, gibier et la distinction eût élé hypothé- lique. Ces nouvelles ressources offerles à la consommalion par notre département pourront, si vous le désirez, faire l'objet d'une autre communication, D: E. FARGE, 14 avril 1859. PALEONTOLOGIE DU DEPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE, Notice sur un gisement d’ossements fossiles de la commune de Noyant (arrondissement de Baugé). Le troisième élage du terrain terliaire moyen, formé de coquilles généralement brisées , se montre sur plusieurs points des arrondis- semenls de Saumur et de Baugé. Dans le premier, le canton de Doué en offre l'azgloméralion la plus considérable ; dans celui de Baugé, les communes de Chavagnes et de Noyant présentent les exemples les plus saillants de celle formation géognosique. C'est dans la dernière de ces localités qu'ont été trouvés les restes fossiles de mammifères quadrupédes et autres, de balraciens, de reptiles et de poissons qui font le sujet de celte notice et dont la plupart des congénères, sinon tous, n'existent plus à l'état vivant dans la nature. Je n'essaie d'en donner une description, que mon ignorance en anatomie comparée rend nécessairement trés-imparfaite , que dans l'espoir qu'en les signalant, ils inspireront à quelqu'un de nos com- palrioles plus capable, le désir d'en continuer la recherche et de les classer avec méthode. Le sous-sol du bourg de Noyant, dans un périmètre à peu près circulaire de quatre à cing kilomélres d'étendue, se compose exclu- sivement de celle espèce de falun connu dans le pays sous le nom de Croix. — Dans les travaux que nécessila la route déparlementale de Saumur au Lude , on mit à découvert un vérilable ossuaire pa- 305 léontologique du plus grand intérêt. Il était contenu dans trois légères dépressions de ce terrain formant des espèces de fosses chacune d'environ trois mèlres de long sur un de large et cinquante centi- mètres de profondeur, distantes d’un mètre les unes des autres. Ils reposaient sur le calcaire et étaient recouverts d'une couche de lerre végétale d'un mètre de puissance , circonstance qui explique comment une de leurs faces se trouvait incruslée de chaux coquil- lière, tandis que l'autre en est à peu près exempte. Creusé de deux mètres, le terrain sur lequel ils gisaient, se trouva bientôt envahi sous la pioche des terrassiers , par l'eau qui sourdail de toules parls, ce qui semble annoncer une couche d'argile sous- jacente. La masse coquillière se composait de fragments eu général très-frustes, parmi lesquels néanmoins se trouvaient encore des es- pèces où on pouvait reconnaitre les suivantes : Pinna granulata , Trigonia clavellata, Lutraria jurassi , Ostrea cristagalli et plusieurs autres, Terebratula digona , et ornythocephala, le pecten Jacobæus, Gigus, diverses espèces d'Oursins de pelite dimension, une portion de volute bien conservée de /'Ancygloceras gigas (d'Orbigny), quel- ques Modioles d'espéces particuliéres , des Nérinées , des Zoophiles tels qu'Astrées, Serpules , Caryophyllées, etc. Le dépôt fossile se composait de parties osseuses , de dents et de défenses de mammifères quadrupèdes et autres et de dents de Squales d'espèces diverses , etc. Les principaux de ces os n'ayant pu êlre sauvés complels , nous ne pouvons que donner la mesure de leurs fragments , mais au dire unanime des terrassiers, quelques uns des entiers dont ils faisaient parlie, avaient des dimensions tout- à-fait extraordinaires. Cet état fragmentaire rend, pour plusieurs, la détermination ostéologique assez conjecturale; la conservation de quelques autres lui donne plus de certitude. Le premier et le plus apparent qui se présente à l'examen est l'extrémité inférieure bien entière et non douteuse d'un fémur de 0,19 centimètres de longueur, et 0,24 centimètres de circonférence à la base, puis plusieurs belles portions d'autres fémurs d'une énorme dimension. — Plusieurs portions (dont quelques-unes de douze à quinze centimètres de longueur) de côtes ayant appartenu à des individus de différentes grandeurs, parmi lesquelles il en est qui durent faire parlie de la charpente osseuse , soit de Lamanlins, soit de quadrupedes gigantesques , ces dernières mesurant jusqu'à 0,05 centimètres de largeur sur trois d'épaisseur. Leur couleur est le brun plus foncé à l'extérieur que dans la partie médullaire, Leur àge est évidemment postérieur à celui des dents qui se trouvaient dans le méme dépôt et dont la substance est entièrement agalisée , 20 306 landis que celle de ces côtes est encore à l'état d'un calcaire plus ou moins siliceux. — Des portions bien déterminables d'humérus d'un grand mammifère , partie supérieure et inférieure de 0,12 à 0,13 centimètres de longueur. — Une clavicule bien entière de 0,11 centimètres de longueur sur 0,03 centimètres de large , recou- verte d'une couche de calcaire zoophitique. — Un calcaneum de forte dimension (0,12 centimètres de long sur 0,06 de large), prove- nant sans nul doule d'un des grands quadrupédes auxquels appar- tenaient nos ossements et qui au besoin protesterait contre l'opinion qui tenterait d'attribuer exclusivement nos précieux restes à des Lamantins ou à des Phoques.— Une portion de radius de 0,22 centi- mètres de loag, dont la tête ne mesure pas moins de 0,09 centi- mèlres de large. — Des fragments présumés d’un pubis. — Un aulre fragment provenant d'un tibia. — Deux plaques osseuses dont une terminée en biseau, l'une et l'autre ayant appartenu à un sujet de première grandeur. — Un fragment présumé d'un péroné. — Deux phalanges d'un pied d'Hippopotame (Cuvier). — Deux aulres phalanges de pieds d'animaux d'inégale grandeur. — Une pièce osseuse que nous pensons êlre un cunéiforme. — Plu- sieurs parlies d'os de 0,08 à 0,09 centimètres de long , d'origine an- térieure aux autres et entièrement siliceux , dont quelques-uns minces et légers ont dû provenir de pelits quadrupèdes. — Un autre fragment d'os plus gros, mais plus léger, bien moins siliceux que les autres, de couleur chamois clair , formé de calcaire peut-être encore à l'élat de phosphate, d'une date évidemment plus récente quoique faisant parlie du même dépôl. — Plusieurs plaques osseuses dont les cellules sont infiltrées de carbonate de chaux provenant du milieu où ils gisaient. — Des fragments en forme de carrelel ou d'aléne plate, denlée des deux côtés, ayant peut-être appartenu à l'extrémité supérieure de la scie d'une espèce d'espadon. Presque tous ces restes sont immédialemenl recouverts, par pla- ques, d'une fine pellicule, d'une sorte de réseau formé de diverses espèces de Bryozoaires striées, maillées , croisées el ponctuées en creux ou en relief, probablement appliquées à leur surface avant le contact avee les débris coquilliers sur lesquels ils reposaient. Les dents qui se trouvaient parmi ces ossements, n'en sont pas la parlie la moins variée ni la moins remarquable (1). Au premier rang figure une magnifique dent de Mastodonte de 0,10 centimètres (1) La matiére qui constitue ces dents, indique suffisamment leur haute antiquité, puisqu'elle est passée par métamorphisme à l'état d'agate-jaspe, identique avec celui connu sous le nom de caillou d'Egypte. 307 dans le sens de son plus grand diamètre, sur 8 centimètres dans le petit. — Avec elle une vertèbre, présumée du même individu, de 0,20 centimètres de long sur 0,08 centimètres de diamètre et plu- sieurs fragments énormes, et indéterminables, mais qu'il est permis d'attribuer au méme colosse de la création. Une dent de Dynoterium. — Des dents de Phoques? — Une por- lion de 0,20 centimetres de long, d'une mâchoire de Rhinocéros, ayant conservé deux dents bien entières. — Une dent d'un Tapir gigantesque (Cuvier). Une autre d'un. mammifère quadrupède de première grandeur. — Des dents canines et molaires de pelits quadru- pedes herbivores. — Une molaire provenant d’un individu apparte- nant au genre Microlestes nouvellement formé (espèce très rare). — Défenses diverses de 0,01 à 0,02 centimètres, parmi lesquelles une défense de Narwal de 0,07 centimètres de longueur avec incrusta- lions diverses parmi lesquelles des serpules. — Une dent découron- née pouvant êlre attribuée à un herbivore, probablement un bœuf. — Des fragments et plaques d'incisives. — Une dent de Labyrintho- don (Owen), de l'ordre des Batraciens, grenouille gigantesque des temps primitifs (Lyell., fig. 437). — Des dents de Lepidotus Man- telli, poisson de l'ordre des Ganoides (Lyell). — Enfin des dents de Sauriens? du genre Megalichtys, espèce Hibberli ? Puis des dents de Squales de toutes les dimensions, depuis 0,01 centimèlre jusqu'à celle gigantesque de 0,14 et 0,15 centimètres (1), des genres Car- charias, Otodus, Lamna, espèce Elegans, Galeocerdo, espèce Lati- dens , el un trés grand nombre d'autres. — Une уегіёрге dorsale d'une de ces espèces de 0,03 cenlimélres de diamètre. Enfin, une sorle de langue ou palette de 0,03 centimètres de long, à stries con- vergentes vers le centre. La description sommaire que nous avons essayé de donner de ce pelit trésor paléontologique est bien imparfaite sans doule , mais en la supposant complète et rigoureusement exacte , ne nous resterail- il pas encore à rechercher la clé des circonstances merveilleuses qui ont concouru à sa formation? Là est de beaucoup le cólé de la question le plus difficile el sans contredit le plus intéressant à ré- soudre. Ainsi, voilà accumulés sur un même point , des restes d'a- (1) De quelle dimension devaient done étre les individus auxquels appartenaient ces dents formidables ? puisque nous possédons une mâchoire d'un jeune sujet d'une espèce actuellement vivante, dont les plus grandes dents des sept ou huit rangées qui la meublent, sont encore, faute d'espace el de développement, couchées les unes sur les autres, n'ont pas plus d'un centimètre et vont en diminuant de volume jus- qu'à l'état rudimentaire, et que cet individu avait onze pieds de long ! 308 nimaux de classes, d'ordres, de familles, de genres, de structures, d'habitudes, de mœurs et d'inslincls sans aucun rapport entre eux, répulsifs de toute idée d’associalion. Ces resles ont-ils été dans le principe déposés sur le lieu même où ils élé trouvés ? Produits sur différentes parties du globe, en ont-ils élé transportés à travers les révolutions et les cataclysmes qui ont si profondément modifié la nalure et la configuralion primitive de son écorce? Questions, comme nous le disions, d'autant plus difficiles à résoudre qu'elles se présentent hérissées d'objections presqu'insolubles (1). Et d'abord, comment comprendre la stabilité inallérée d'un imperceptible point de l'espace, quand surtout ce point se présente pour ainsi dire à fleur de terre et recouvert seulement d'une mince couche alluvion- naire? D'un autre côlé, comment supposer les hasards d'un trans- port produit par la perturbation des éléments en présence de deux ou lrois cents dents de Squales, surtout lorsque nous les voyons ac- compagnées d’autres parties de la charpente de ces mêmes espèces ? Dans la première hypothèse, on comprendrait encore, s'il ne s'agis- sail que de quadrupèdes, que les plus forts eussent dévoré les plus faibles dans le vaste repaire qui leur servait d'habitation, mais le moyen d'appliquer celte induction à la réunion hétérogène de monsires de terre et de mer dont la créalion fut séparée par des milliers de siècles, ainsi que le constate doublement et l'époque de leur disparition et l'examen de la composition intime de ces débris, dont les plus modernes ont encore gardé presque intacts lcurs élé- ments calcaires primitifs, tandis que d'autres sont passés à l'état de quartz le plus homogène d'agale, ce qui suppose une origine anté- diluvienne et nécessairement un long gisement antérieur dans des condilions propres à produire cette métamorphose, car évidemment ce n'est pas au milieu d'un dépót de calcaire coquillier qu'ils ont pu se saturer par subslitulion, du suc siliceux qui a si radicalement changé leur nature. Quelle est donc ja mystérieuse convocation qui les a réunis dans la méme tombe ? el que conclure de tout ce qui (1) La présence de restes d'animaux qui ne vivent actuellement que sous l'in- tluence de latitudes équatoriales, ne serait pas à la rigueur un obstacle pour les ex- pliquer dans l'état actuel de la température de nos contrées; on sait que dans les temps primordiaux, le peu d'épaisseur relative de la croûte terrestre encore refroidie, et les fissures nombreuses qui y existaient alors, еп réchauffant l'atmosphére, ren- dait sa température plus indépendante des latitudes diverses Cette chaleur disparue explique suffisamment comment ces animaux ont pu vivre longtemps daus les con- trées les plus septentrionales, où chaque jour on en exhume les plus magnifiques témoignages. 309 précède, sinon que chacun peut, sur ce grave el important sujet, accumuler les hypothèses sans arriver à rien de satisfaisant, el reconnaîlre en fin de cause que la solution de ces hauts problèmes d'histoire naturelle dépasse , comme beaucoup d'autres , les faibles bornes de notre intelligence et reste dans le domaine de ceux donl le dernier mol ne nous appartient pas. DELAGENEVRAYE. LES FOURMIS MAGONNES En descendant ce matin dans ma cour , mon attention fut attirée par un rassemblement assez considérable de fourmis qui s'était for- mé sur l’une des marches du perron de la maison. Curieux d’en connaitre la cause, je m'arrétai à les observer et tout d'abord, je vis qu'il ne s'agissait pas d'un festin ; aucune proie commune n'avait attiré là celte petite tribu. La mélée, quoique nombreuse et fort agi- tée, n'avait non plus aucun caractère hostile, rien n'annoncait une bataille, ce pouvait être pourtant un conseil de guerre , peut-être aussi un congrès pacifique. Cependant aux efforts désespérés que les derniers rangs faisaient pour percer la foule et arriver vers le centre , je commencai à soupçonner que peut-être s'agissait-il de quelque élection présidentielle, et que je pouvais bien avoir sous les yeux un meeting électoral dont les membres attardés essayaient à grand peine de parvenir à déposer leur bulletin. J'en étais là de mes conjectures , lorsque tout-à-coup l'assemblée parut frappée d'immobilité. Le moment était solennel ; une décision importante venait sans doute d'être prise. Bientôt la masse s'ébranla el commenca à rayonner dans tous les sens ; un mouvement de va- et-vient très-actif ne tarda pas à s'établir du centre à un périmètre d'environ cinquante centimètres , un grand travail était organisé , quel pouvait-il étre? Je l'ignorais et ce n'élait pas sans un vif mou- vement de curiosité que j'en attendais le résultat, lorsqu'à mon ex- trême surprise , je vis , assez rapidement, s'élever une cellule hexa- gonale , découverte , d'environ un demi centimètre de hauteur , à parois blanches, nacrées, trés-minces et d'apparence foliacée. Bien- lol une seconde lui fut juxta-posée; puis une troisième, enfin j'en complais déjà neuf lorsque j'abandonnai momentanément mes pe- liles travailleuses. Après quelques tours de jardin , singulièrement préoccupé de ce 311 que je venais de voir, je retournai à mon poste d'observalion, mais, û désappointement , loul avail disparu! — La servante, à laquelle je n'avais pas pensé, choquée de l'outrecuidance de mes pauvres fourmis, avait bousculé l'ouvrage et les ouvrières, et coupé court à une observation d'autant plus intéressante que nul auteur , que je sache, n'a encore signalé chez les fourmis celte aptitude à construire des cellules. Avec une patience de naturaliste, je parvins à relrouver quelques fragmenlicules des cloisons bouleversées. — Immergés dans quel- ques goulles d'alcool absolu, ils ne s'y dissolvaient ni à chaud ni à froid ; l'éther les allaquail faiblement et lentement, el ils disparais- saient instantanément dans la potasse caustique. DELAGENEVRAYE. 15 aoüt 1858. REVUE MINÉRALOGIQUE DE L'ARRONDISSEMENT DE SAUMUR. Remarquablement riches en produits paléontologiques et en co- quilles fossiles, les grandes formations géognosiques à base de chaux qui composent en majeure partie la charpente du sol de l'arrondis- sement de Saumur , sont pauvres en éléments minéralogiques pro- prement dits ; ce qu'indique du reste surabondamment la nature de ses roches. Quelques sels à bases diverses, solubles ou non ; les premiers en quantités inappréciables , si ce ne sont le sulfate de fer provenant de la décomposition des sulfures aciculaires de ce métal et le nitrate de polasse dont les efflorescences, qui se forment journellement sur les murs de nos habilations, n'ont rien de spécial à nos localités. Parmi les seconds, du carbonate de chaux pulvérulent, cristalli- sé el stalactitique, et quelques veines de sulfate de la méme base. Voilà pour les substances salines. Quelques dendrites d'oxide de manganèse déposées à la surface de roches calcaires ou siliceuses , ou lapissant cerlaines coquilles bivalves, et des traces de cuivre car- bonaté vert et bleu y témoignent seules de la présence de ces mé- laux. Sans y exister en quantité exploitable, le fer sy montre plus abondamment sous plusieurs étals dont le point de départ le plus fréquent est le fer sulfuré rhomboidal ou aciculaire radié , en boule ou en rognons allongés, qui se rencontre parfois en assez grande quantité dans la craie tufeau où il se décompose, soit à l'élal d'hy- droxide dans l'intérieur du calcaire, soil en sulfate quand il absorbe plus rapidement et en plus grande quantilé l'oxigene de l'air libre. Sous le premier de ces états, il s'altère assez rapidement, devient lerreux el s'unil dans de certaines condilions à des sables de toutes 313 grosseurs, auxquels il sert de ciment el constitue alors des conglo- mérats plus ou moins durs qui se rencontrent fréquemment sur presque tous les points de l'arrondissement de Saumur ; ou bien encore , il colore en jaune ou en brun les sables fins et les argiles d'une foule de localités. Le peroxide, qui ne s'y rencontre guère qu'à l'élat terreux, m'a pourtant fourni l'un des échantillons les plus rares de ma riche col- lection de fers; c'est un bel Oligiste d'un rouge vif, en petits rhom- boëdres surbaissés , groupés sur un quartz prismalique haché du schiste tégulaire. Là se circonscril assez brusquement la double série fort restreinte des métaux et des sels de l'arrondissement de Saumur, qui, comme on le voit , entre pour peu de chose dans la faune du département. Sans parler des blocs nombreux et puissants de nos grés à bátir el à paver, qui sont plus spécialement du domaine de la géologie, el en ne l'examinant qu'au point de vue minéralogique , une famille s'y montre pourlant avec exubérance ; c'est celle des Silicides , qui présente à l'observation plusieurs espèces du plus grand intérêt. Ce sont d'abord les quartz hyalins cristallisés , dont une espèce trés-curieuse en feuillets minces, se trouve à Marligné-les-Eaux. De beaux échantillons en cristaux dodécaèdres, puis la série des prismes héxaédres réguliers ou symétriques, d'une limpidité et d'une blan- cheur plus ou moins parfaite et dont les cristaux engagés dans Ja pàte siliceuse des géodes ой on les rencontre le plus ordinairement dans nos contrées, montrent très-rarement leurs deux sommets. Les agales s'y trouvent. assez fréquemment sur plusieurs points. L'espèce qu'on y rencontre davantage est la Sardoine mamelonnée, d'un jaune plus ou moins terne et aussi une autre espèce bien plus remarquable ; c’est l'agale incrustante, vernissant l'extérieur d'une sorte de tuf siliceux rouge , à la maniere de celle du Géyser en Islande. A l'ouest de Saumur , vers les hauteurs de Saint-Florent , appa- raissent des bancs de silex pyromaque , de quartz résinite blanc el jaune à cassure largement couchoidale, et d'une agate calcédoine de couleur bleu d'empois qui rappelle celle de la belle espèce de Tran- Sylvanie, mais dans laquelle j'ai vainement cherché des rudimens de la forme rhomboidale qui donne lanl de prix à celte dernière. Le silex molaire, de beaux gres lustrés , el une foule d'autres es- pèces intéressantes dont la description se trouve dans tous les trai- tés, s'y rencontrent fréquemment. Je les passerai sous silence pour arriver à une espèce à laquelle se rattachent des considérations d'un ordre qui se produil fort rarement, surtout dans les dépôts à base de 314 chaux qui liennent une si grande place dans l'arrondissement de Saumur. - Je viens de parler d'un quartz résinile, d'un jaune de miel vif el doré ; cette jolie espèce colorée par de l'hydroxide de fer, est très répandue dans le deuxième et dans le quatrième élage du terrain tertiaire moyen qui caractérise une parlie notable de notre rive gauche de la Loire. Plus ou moins modifiée dans sa couleur, elle s'y montre à peu près partout , soit en bancs d'une médiocre éten- due , soit en blocs et en galets de toutes formes et de toutes gros- seurs. Privée de l’eau à laquelle elle doit son éclat résinoïde , elle perd sa translucidité, sa cassure conchoïdale ou esquilleuse, et, tout en conservant la richesse de sa teinte, elle reste entièrement opaque et passe ainsi à l'état de jaspe dont la cassure fragmentaire ne per- met plus désormais qu'on le confonde avec l'hydrate de silice qui le précède. J'ai trouvé des échantillons de ce jaspe, dont la pate jaune élait brusquement coupée par des parties d’un beau brun-violet que plus d’un graveur en camées eût élé heureux de rencontrer. Enfin on le voit encore apparaître en veines engagées dans le silex pyromaque, ou bien traversé lui-même par de nombreux filets de ce même silex. Cette première modification du quartz résinile jaune n'est ni la seule, ni à beaucoup près la plus intéressante qui se produise dans les environs de Saumur. Il en est une autre qui, je crois, n'a pas encore été signalée et que je vais essayer de décrire el d'expliquer. On trouve au Puy-Notre-Dame des plaques plus ou moins épaisses d'un luf silico-ponceux , dont la face supérieure est recouverte d'une couche d'un jaspe jaune de miel un peu foncé. La forme qu'affecte ce jaspe est celle d'une croûte onduleuse, boursouflée, de deux à dix centimètres d'épaisseur, résultant de la jonction de ma- melons plus ou moins volumineux , dont un grand nombre isolés , parmi lesquels il en est qui offrent l'aspect guttulaire et ne tiennent à la masse que par un filet plus ou moins délié. Ces mamelons paraissent avoir surgi à l'état de fusion pâteuse au travers d'un sable ponceux évidemment chauffé par des feux sou- terrains , sur lequel a dà reposer la face inférieure de ces curieux morceaux qu'on trouve toujours au milieu de ce sable. Je dis que ces mamelons ont surgi; c'est en effet par une sorte de projection verticale de bas en haut, comme je l'expliquerai tout- a-l'heure, qu'ils ont dû apparaître à la surface primilive du sol ou ils se sont produits. Celle projeclion a dà se faire dans un milieu libre, caverneux 315 peut-être; car si elle eût eu lieu directement dans le sable , qui à une époque postérieure а accompagné cette matière, les mamelons à l'état mou se fussent imprégnés d'une couche de ce même sable qui n’eût probablement guère permis de reconnaitre le faciès de la roche qu'il recouvrait. Elle a dû s'exécuter rapidement, car les larmes projetées se fus- sent toutes affaissées et noyées dans la masse onduleuse en liqué- faction, si le contact d'un air tempéré ne les eût en quelque sorte figées subitement. Elle a dû encore s'exécuter de bas en haut, car si elle se fût pro- duite de haut en bas, obéissant aux lois dela pesanteur, loin de s'élaler en nappe, elle eût coulé en longs filets, à la manière des sta- lactites, et dans leur projection descendante, les larmes devenues cy- lindriques, eussent infailliblement, comme ces dernières, suivi une ligne verticale droite, de plus en plus effilée ; tandis que, dans notre espèce, les sommets globuleux se penchent et tendent toujours à retomber sur eux-mémes. Ce n'a dà étre que plus tard qu'un soulévement violent du ter- rain, en produisant le monticule sur lequel est assise la commune du Puy-Notre-Dame, aura brisé la couche de la roche fondue , dont les fragments se sont alors trouvés mélés parmi le sable ponceux oü on les découvre à présent. Essayons maintenant d'expliquer les fails que nous venons d'ex- poser et qui se rattachant à une action plutonienne , semblent d'a- bord difficiles à admettre puisqu'ils se produisent en plein terrain de craie (1). La topographie du Puy-Notre-Dame, situé au centre d'une plaine dont le sol appartient au terrain crétacé inférieur , n'offre rien à premiére vue qui la distingue de celle des communes limilrophes : il faut toutefois remarquer , que de quelque cóté qu'on y arrive , on est obligé de monter et qu'il repose sur le seul mamelon qui rompe la monotonie du pays. Il faut encore noter qu'une distance de quelques kilométres seu- lement le sépare de la commune de Cléré, dans le voisinage de la- quelle le terrain de craie disparaît pour faire place à celui de cristal- lisation du massif vendéen. Cela posé, voyons quels effels probables (1) Les soulèvements de roches cristallines en fusion, soit qu'ils ne percent pas entièrement la croûte extérieure de la terre, soit qu'ils donnent lieu à des épanche- ments par des failles de l'ancien terrain de transition , ne remontent pas à une époque bien reculée , car les couches de craie, méme les plus élevées, existaient avant qu'ils se produisissent. — HUMBOLDT, Cosmos, t. 1°, p. 280. 316 ч dû produire ce voisinage sur les assises fondamentales qui lui élaient contigués. Les modifications produites à la surface et dans les profondeurs de Ja terre, ont été nombreuses et variées. Contemporaines quel- quefois , séparées plus fréquemment par des intervalles et par des cataclysmes dont il ne nous est plus possible de préciser rigouren- sement les époques et les effets, souvent nous nous estimons trop heureux d’en pouvoir donner une explication rationnelle en nous appuyant sur des analogies qui heureusement ne manquent sur au- cune des grandes divisions du globe. Ainsi le massif granitique ven- déen sur lequel se trouve le canton de Cholet et qui se montre en Maine et Loire sur une étendue de plus de soixante kilomètres, de- puis la limite du département de la Loire-Inférieure jusqu'aux en- virons de la commune de Cléré, peut bien étre le point culmi- nant d'une de ces innombrables protubérances qui durent dans les temps primitifs constituer l'enveloppe immédiate de notre planète. Il se peut encore que plusieurs couches de matières fon- dues, en se superposant à différentes époques, aient donné naissance à се massif en produisant chaque fois de grandes perturbations dans les sous-sols qu'elles confinaient. Mais plus vraisemblablement, à une époque postérieure , par une de ces révolutions dont nous venons de parler et dont il existe de si nombreux exemples , s'échappant à l'état @incandescence fluide du grand réservoir central , il aura percé une superposilion déjà consi- dérable peut-étre , de terrains divers à la surface desquels il sera venu s'épancher. Quelle que soit celle de ces hypothèses à laquelle on veuille don- ner la préférence , il faut toujours reconnaitre qu'à une époque plus ou moins reculée, une roche cristalline en fusion est venue se mettre en communication avec le sous-sol de la commune du Puy- Notre-Dame, d'une distance qui n'en exclut nullement la possibilité et y produire les effets que nous avons décrits, car il n'en est pas des masses granitiques primitives comme de ces coulées basaltiques des volcans éteints du Vivarais ou des Orcades, qui s'étant produiles à l'air libre, ont été brusquement arrêtées dans leur marche par le contraste de la température ambiante, et se présentent à nos regards sous l'aspect imposant de gradins et de murailles à pic dont l'éléva- lion nous étonne , mais dont la production éruptive n'a aucune in- fluence sur les terrains sous-jacents. Les roches granitiques primordiales, au contraire , s'étant refroi- dies extrémement lentement , n'ont poinl ces formes anguleuses , brusques et heurtées ; elles tendent toujours vers la configuration 317 sphéroïdale, el ont en général une base qui s'infléchit plus ou moins loin sous les terrains oü on les voil disparaitre. C'est évidemment le cas du granit vendéen qui, à une profon- deur plus ou moins grande, doit s'étendre sous les autres formations qui l'ont successivement recouvert, puisqu'on le voit reparailre sur plusieurs autres points du département , notamment à Bécon , a Saint-Lambert-la-Potherie , à Saint-Jean-des-Marais et dans le canton de Chemillé. D'après tout ce qui précède, on peut donc, je crois, sans témérité, regarder comme trés probable , qu'à l'époque oü la chaleur de ces roches en fusion vint agir en le modifiant sur le sous-sol du Puy- Notre-Dame, elle y rencontra un banc de quartz résinite, trés-com- mun dans le pays, el qui se reliait peut-être au terrain de transilion qui confine la formation granilique dans les environs de Saint-Ma- caire ; qu'elle lui enleva son eau constitutive et le fit surgir à l'état de jaspe, sous la forme que nous lui voyons aujourd'hui. Les phénomènes de la nalure de celui que je viens de décrire, rares dans les pays plats, se présentent au contraire assez fréquem- ment dans les chaines élevées de nos continents , dans les contrées montagneuses qui les avoisinent el dans celles où se rencontrent des bouches ignivómes. C'est ainsi, pour en citer un exemple saillant, qu'aulrefois le cal- caire jurassique d'une parlie des Alpes dauphinoises, chauffé aprés coup, par des feux souterrains , a vu disparaître tous les témoins fossiles de sa constitution primilive, et est devenu la roche connue sous la dénomination de granit alpin. Je ne terminerai poinl celle revue minéralogique de l'arrondisse- ment de Saumur, sans parler de son terrain anthraxifère avec ses belles empreintes de fougères arborescentes et de bambusacées de loutes formes et de toutes grosseurs, exploré avec une sagacilé re- marquable par notre cher collègue , M. Courtiller, qui m'a signalé près de Soulanger , au lieu dil Minières, le plus riche dépôt de ces produils contemporains des temps primilifs. DELAGENEVRAYEg UNE COURSE AUX ILES D'HOUAT ET D'HOEDIC ( MORBIHAN ). Le désir d'étudier l'organisation de quelques mollusques, me fit entreprendre aux vacances dernieres le voyage de Belle-Isle-en-Mer, el chaque jour, du port de Palais, je voyais s'élever à l'horizon de- vant moi les deux iles d'Houal et d'Hcedie qui semblaient m'appeler à elles. Chaque jour je regreltais de ne pouvoir faire une excursion, ne füt-elle que de quelques heures, à ces deux localités qui devaient ine fournir l'occasion de trouver bon nombre de plantes intéres- sanles, au double point de vue de leur slation et de leur rareté : ce- pendant je devais supposer que là, comme à Belle-Isle, je trouverais la végélalion presque terminée, el c'est en effet ce qui m'est arrivé. Le 30 aoüt 1856, à 6 heures du malin, je m'embarquai sur le lougre le Furet, qu'on avait mis à ma disposition pour me conduire à Houat et à Hoedic : en temps ordinaire je ne devais compler que sur deux heures de traversée , mais nous avions le vent contraire , uous fümes contraints à courir des bordées en suivant la cóte de Belle-Isle et nous passàmes ainsi devant le Grand-Sable où quelques jours plus tard (5 seplembre), je recueillis le Bartsia bicolor DC., CCC, en fruits, le Melilotus parviflora en fruits AR. elle Linaria radicans, Le Gall, R., que MM. Grenier et Godron rapportent au Linaria greca (Fl. Fr., lome и, page 575), et qui me parait être une variété du Li- naria elatine. Aprés cinq heures de traversée nous arrivàmes en vue de Treach er Beniguet, où croissent au printemps l'Agraphis nutans, CC, et 319 l Asphodelus albus ССС. Des courants contraires nous forcèrent à louvoyer le long des îlots Glazic et er Valhuec, sur lesquels j'aperçus, malheureusement sans pouvoir les aller recueillir, quelques pieds de Lavatera arborea. Il nous fallut encore deux heures pour at- leindre ports Navalo d'Houat en prenant le passage de Beniquet, el à peine débarqués nous procédames au déjeüner, que prudem- ment nous avions emporté avec nous, car nous savions que, mal- gré l'hospitalité des Houalais, lant vantée par l'abbé Delalande, nous courions grand risque de ne pouvoir nous procurer même un morceau de pain. L'aventure arrivée, il y a quelques années, а MM. Lloyd et Hérouard (un de mes compagnons de course), élait faite pour nous instruire, et malgré tout le plaisir que devait me procurer mon voyage, je n'eusse élé que trés médiocrement flat- té d'en être réduit à me nourrir exclusivement de homards et de langousles pendant deux ou trois jours. Trop heureux se seraient trouvés ces Messieurs de pouvoir se procurer un morceau de pain de son, data-t-il de quinze jours (on ne cuit pas plus souvent au four banal d'Houat , non plus qu'à celui d'Hœdic). Installé au bord d'une pelile mare, tout en procédant à mon déjeuner , je reconnus autour de moi le Ruscus aculeatus CCC, et l Ulex Europœus CCC, qui couvraient presque toute la lande avec Г Asclepias vincetoæicum CCC, dont les capsules entr'ouvertes laissaient s'échapper leurs houppes argentées. Des rochers qui entourent le portz tombaient des touffes épaisses de Hedera Helix, mélées aux pieds nombreux de la perce- pierre, Crithmum maritimum CCC, du Static plantaginea CCC, Rubus fructicosus AR, Silene maritima CC, Anthyllis Vulneraria Var. Sericea, Brébisson , que je n'avais pas rencontrée depuis mon voyage a Tré- port et qui se tenail sur le sable calcaire, au pied des roches grani- tiques qu'il dédaignail. Autour de nous élaient quelques pieds non encore développés d Hyoscyamus niger, de Glaucium luteum, avec le Scilla autumnalis aux fleurs violettes.el quelquefois blanches CCC, le Jasione montana, Var. maritima CCC, V Anagallis arvensis tres ré- duit et très rameux R, le Trifolium fragiferum C, le Verbascum bla- tarioides R, el le Rosa spinosissima CCC. Dans le terrain humide qui enlourail la source et formait une pelite mare, je récollai l Hydro- cotyle vulgaris CC, l Heliosciadium ochreatum ССС, le Sium angusti- folium CC, le Samolus Valerandi CC, le Scirpus selaceus AC, les fruits d'un Iris, qui m'a paru être le fætidissima. En me dirigeant vers le hameau d'Houat, que l'on décore du nom pompeux de village, je recueillis U Helianthemum gultatum CC, forme très rabougrie, le Dipiotawis lenuifolia CCC, le Sarothamnus scoparius, dont je ne vis que deux ou trois pieds. Je descendis en route dans 320 une anse, Treach er gorlai, où nous fines lever deux perdrix rouges, et où je trouvai dans les rochers quelques feuilles radicales de Crambe maritima avec ` Ononis arvensis, Var. maritima, le Scilla au- tumnalis et une variélé naine de l'Anthoanthum odoratum, R. Le hameau d'Houat, assemblage irrégulier de quelques cabanes (il ny a que 220 habitants), n'offre rien qui charme l'œil, et semble dénoter, comme tous les villages de Bretagne, une grande misère. Il n'en est rien cependant , grâce au régime tout particulier sous lequel vivent ses habitants, qui forment une sorte de communauté régie par le curé qui remplit tout à la fois les fonctions de pasteur , médecin, juge de paix , commissaire el même de cabaretier , car il dirige une cantine où tous, étrangers el indigènes, vont sefournir des objets de première nécessité et de luxe : là seulement on peut se procurer quelques boissons et le tabac, charme de longues courses, el une sage mesure interdit toule consommation a lout individu qui commence à être ebriolus. Jamais, quoiqu'en ait dit certain au- leur, on n'a rationné les habitants à une chopine par repas, et les étrangers à une bouteille. Le clocher, fourni par une épave qu'on a sciée en deux parties sur lesquelles on a cloué des planches , prises aussi à la mer, emprunte aux matières mêmes qui le constituent un caraclére assez original , et qui doit plaire aux parlisans de l'a- dage : Le beau c'est le laid. Le cimetière est entouré d'une haie de Tamarix Anglica, dont les grappes rosées viennent cacher les restes desséchés de l’ Umbilicus pendulinus CCC et du Sedum Anglicum CCC. Apres avoir quillé le village pour visiter le port d'Houat, vaste plage sablonneuse en fer à cheval, que dàns le pays on nomme Treach er gourett, je trouvai dans la dune d’ Entall, V Ephedra distachya aux fruits rouges el sucrés CCC, le Raphanus maritimus AR, le Cheiranthus litto- ralis CCC,le Geranium maritimum AC, le Cakilemaritima CCC, el cà el là entre les touffes d'Ephedra quelques pieds de Lagurus ovatus parfaitement murs. Un peu plus loin à Tal er hah, croissaient en grande abondance les Convolvulus Soldanella, Galium arenarium el quelques pieds d'Orobanche galii, le Carex arenaria CCC, le Triglo- chin maritimum, R, les Plantago maritima, subulata et lanceolata, Var. lanuginosa CCC, l'Orobanche amethystea sur V Eryngium mari- timum CCC, le Phleum arenarium CC, le Festuca sabulicola R, Г Hor- deum maritimum CC, quelques pieds de Rottbollia incurvata. Enfin au milieu de toules ces plantes, s'élevait par touffes énormes le lys d'Houat, le Pancratium maritimum, dont les fleurs blanches exha- laient une odeur délicieuse, mais qui par une sorle de contrasle me présenta au milieu de ses feuilles deux magnifiques Bufo Calamita. Ses hampes et ses feuilles portaient un grand nombre d'He/iz erice- 321 Lorum et rhodostoma, ainsi que de Coccinella dont la présence m'ex- pliqua tout naturellement celle de mes deux captifs. Le désir d'em- porler cette plante, que je n'avais pas vue depuis 1847 , où je la récollai prés de Celte, me délermina à en tenter l'extraction avec mon couteau et mes doigls, puisque j'avais oublié ma pioche à bord du Furet. Aprés un bon quart d'heure de travail, je parvins à me rendre maitre d'un belle touffe bien fleurie , que j'emportai triom- phalement sur notre lougre qu'elle embauma. Malgré tout le désir que j'avais de prolonger mon séjour à Houat, je dus borner là mon exploration, car la nuit approchail rapidement, nous ne pouvions nous procurer dans l'ile des lits pour toute notre caravane et d'autre part il n'était pas prudent de faire la traversée entre les deux iles pendant l'obscurité, car la mer y est semée de nombreux rescifs. J'oubliais d'indiquer parmi les plantes que j'ai récollées à Treach er gourett, les Dianthus gallieus CCC, Silene inflata CC, Spiranthes autumnalis AR, une variélé trés velue el trés rabougrie d'un Ceras- tium que je crois le tetrandrum Curt. AR, le Linum angustifolium CC, les Euphorbia Peplis C, et Paralias CCC, le Silene otites, Var. nana C, le Matthiola sinuata, dont je n'ai vu qu'un seul pied presque en- tièrement défleuri, les Arenaria marina CCC, et peploides C, le Sa- gina maritima CCC, et le Frankenia levis C. Houat, situé a trois lieues nord-est de Belle-Isle, a à peu pres 4000 metres dans sa plus grande longueur, et 1100 dans sa plus grande largeur : au nord-ouest, c'est-à-dire de la pointe de Beniguet a Er Gok, la côte est défendue par d'énormes roches graniliques, sur les- quelles la mer vient déferler avec fureur; derrière sont des falaises abruptes, souvent hautes de 25 à 30 mètres, el qui offrent ça et 1a des excavations , lapissées d'Asplenium marinum : l'accès de ces grolles est souvent difficile et parfois méme n'est possible qu'à ma- rée basse. А Treach er gourett la plage est formée d'un sable fin qui renferme une grande quantité de calcaire, dû à des débris de co- quilles. Embarqués à six heures du soir, nous passâmes successivement en vue de Treach er gorlai , du hameau d'Houat, de la pointe de Tal er hah, de celle der gok, el Treach er gourett que nous venions de visiter. Le vent el la marée continuant à nous ёге contraires, nous ne pûmes arriver dans les eaux d'Heedic qu'a dix heures du soir ; malgré l’agilation des vagues et l'obscurité, nous nous fimes des- cendre à terre par le canot, et munis du panier d'Esope, nous primes nolre course vers le phare où nous devions trouver le couvert pour la nuit. Avant d'y arriver nous fimes plus d'une chule dans la dune, nous eûmes à traverser des landes dont les ajoncs nous piquaient 21 322 oulrageusement, mais enfin nous alleignimes notre matelas sur lequel nous nous jelàmes en gens harasses et pressés de réparer leurs forces. Mais nous n'élions pas seuls habilants de la chambre , el bientôt nous dûmes livrer un combat en règle à des ennemis in- сеѕѕапіѕ et trop fréquents dans toule la Bretagne. Aussi avant l'aurore chacun élait-il debout et prêt à partir. Je commencai mon herborisation à la lueur des étoiles, et avant le lever du soleil j'avais découvert une belle localité de Lagurus ovatus dans un terrain sablonneux, au milieu de touffes d’ Ephedra distachya CCC, entre Beg Lagatte et la pointe Dennorion, près d'un ancien fort détruit par les Anglais au commencement de ce siècle. C'est une particularité que j'ai observée dans celte course, que je n'ai jamais trouvé le Lagurus autre part qu'au milieu des touffes d'E- phedra , mais partout où, dans les deux iles, j'ai vu cette conifere , je n'ai pas lrouvé en méme temps la graminée. Au pied du menhir qui est dans la cour du phare, étaient un magni- fique pied de Crambe maritima et les Verbascum blattarioides, Poly- gonum aviculare, Var. maritimum, Linaria arenaria, Thrincia hirta, plantes du reste que j'avais rencontrées sur mon chemin en venant de la pointe Dennarion. Jy avais récollé le Pancratium maritimum CCC, les Convolvulus soldanella CCC, et arvensis Var. maritima CCC, les Euphorbia Portlandica CCC, et Paralias CCC. Y Asperula cynan- chica avec ses fleurs roses CC, le Buplevrum aristatum AR, Г Aspara- gus officinalis, Var. maritima AC, les Medicago striata AC, el marina R, quelques pieds desséchés d'Erythrea maritima R. En me dirigeant vers la Grande Pierre {menbir où le curé a fixé une effigie de la Vierge), je relrouvai le Lagurus ovatus AC, el Ephedra distachya, le Thrincia hirta, le Ruscus aculeatus CCC, le Pteris aquilina CCC, une variété de Trifolium suffocatum, le Trifolium littorale qui me parait n'élre qu'une forme de l'arvense, le Datura stramonium CC, VHeliotropium Europeum CCC, les Papaver arge- mone AC, et hybridum R, le Teucrium scordium. Autour du grand étang (Len Vras), croissaient en grande abon- dance le Tamarix Anglica, le Carex divisa CC, le Cyperus longus R, le Glaux maritima R, le Polygonum amphibium, ie Sonchus asper R, l'OEnanthe peucedanifolia AR, V Heliosciadium ochreatum CCC. Vers er Vas plate a goare se trouvaient les Statice plantaginea CCC, Polygonum maritimum AC, Glaux maritima C, Helychrizum stæchas CCC, Daucus hispidus AR, Crambe maritima AC, Ononis arvensis V. maritima C, Alriplex rosea AC, Statice Dodartii R (je l'ai vu depuis très abondamment à Port an dron prés Locmaria), et Asparagus ma- ritimus CC. A Cass pier a kiss, abondaient avec les plantes que je 323 viens d'énumérer les Asphodelus albus CCC, Plantago subulata €, Salvia verbenaca CC, Hordeum maritimum CC, Calamagrostis arenaria C, Carex arenaria CCC, et Medicago marina AC. Telles sont les plantes que j'ai trouvées à Hædic, el encore étaient- elles presque toules en forl mauvais élal, el indignes de figurer dans un herbier; mais ce que j'en ai vu me donne l'envie d'y retour- ner dans une saison meilleure où je pourrai faire d'abondantes ré- colles. En revenant à Palais, nous avons dû passer вер! heures sans avan- cer ni reculer, car nous avions calme plat, et si je regrellais de ne pouvoir continuer mon exploration des îlots voisins d'Houat et d'Hæ- dic, je ne regrellais pas moins notre libéralilé envers nos hôtes de ia nuit précédente, auxquels nous avions laissé le reste de nos pro- visions, de telle sorte que nous dûmes attendre pour salisfaire notre appélil que nous eussions débarqué à Belle-Isle, ce qui n'eul lieu que le soir après neuf heures. Ceci fut un enseignement pour moi qu'il ne faut pas se fier à vent ni à marée pour arriver exaclement. Heureusement pour nousle vent se leva sur les huit heures du soir et nous poussa rapidement au porl, en nous secouant violemment, mais c'était encore préférable à la perspeclive de passer loule la nuit à l'air frais el à jeun. J.-LÉON SOUBEIRAN. L'ÉLECTRICITÉ А L'EXPOSITION DE 1858. Qui eût pensé, Messieurs, il y a quelques années à peine, que l'élec- tricité, ce fluide que la nature nous présente comme une menace et un fléau, viendrait tranquillement prendre place au milieu des mer- veilles de notre industrie ? Qui eût dit qu'à celle source nouvelle, chacun viendrait puiser suivant les besoins de sa spécialité ; que l'horlogerie en relirerail une force pour entretenir les mouvements du pendule et propager l'heure à des centaines de lieues; que la médecine y rencontrerait parfois la guérison de maladies jusqu'alors déclarées incurables; que la mé- tallurgie lui confierait le traitement de ses minerais, la confection de ses moules, la dorure et argenture à toute épaisseur; qu'entre les mains du physicien et du chimiste, l'affinilé et la cohésion, ces forces inlimes des corps, seraient à jamais vaincues par celle nou- velle puissance d'où sortiraient en méme lemps el la lumière la plus vive el la chaleur la plus intense que l'homine ail jamais pu produire; que la pensée enfin, toute immalérielle qu'elle est, vien- drail prendre sa parl de la découverte en lui empruntant un mode de communication qui semble immatériel aussi, tant il se joue des distances, tant esl rapide son action? Tous ces faits pourtant nous sont acquis aujourd'hui, el s'accom- plissent chaque jour sous nos yeux. De pareils résultats qui dépassent ainsi, dès le début, nos pre- mières prévisions, ne pouvaient manquer de faire nailre d'autres prélentions, d'autres espérances, de reculer d'une manière presque indéfinie dans celte voie les bornes du possible. Aussi, que de problèmes posés aujourd'hui à l'électricité, que 325 d'efforts pour les résoudre, que de personnes retirées dans le labo- raloire inlerrogent le mystérieux agent, répèlent avec patience et minutie les expériences des Galvani, Volta, OErsted, Faraday, s'in- génient à en imaginer d'autres, toujours avides de rencontrer le fail nouveau d'où seul jaillit la vraie découverte, ou tout au moins de tirer des faits déjà connus toutes les conséquences utiles à l'hu- manilé ! Ce sont les spécimens de tous ces travaux qui viennent parfois se montrer, timides encore, dans nos exposilions industrielles. Notre exposition de 1858 élail trop complète pour ne pas en reproduire quelques reflets; l'électricité s'y est trouvée en effet traitée à diffé- rents points de vue. Une pile y a été présentée par M. Delalande. Un appareil de sonnerie électrique par M. Prud’homme. Des travaux de galvanoplastie par M. Chasteigneaux. Un électromoteur, Un appareil à mesurer les niveaux par l'électricité, s'y trouvaient aussi. PILE PRÉSENTÉE PAR M. DELALANDE. La pile présentée par M. Delalande, ne diffère de celle de Bunsen que par les liquides dont elle est alimentée. Comme celte dernière, elle se compose d'un vase extérieur, d'une lame de zinc amalgamé, d'un tube poreux pour diaphragme, d'un charbon; mais dans la case charbon on met de l'eau acidulée au 15* environ par l'acide sul- furique au lieu d'acide azolique, et dans la case zinc de l'eau or- dinaire au lieu d'eau acidulée. Voilà donc encore une pile à un seul liquide; comme toutes les autres, elle doit être affectée du défaut ca- pital de la polarisalion ou résistance au passage. Je veux dire que le courant qui en émane, énergique d'abord, diminuera promptement à partir de la mise en activité de l'appareil. Celte diminution, comme on l'a constaté, ne résulte pas de ce que l'acide manque à l'oxidalion du zinc, mais bien de ce que l'hydro- gène provenant de la décomposition de l'eau. vient adhérer au con- ducteur négatif, le sépare du liquide qui l'environne, restreint les communications, el a méme une tendance à faire naîlre un courant en sens contraire. Jusqu'ici, Bunsen et Daniel sont à peu près les seuls à avoir vaincu celte difficulté en entourant la lame négative d'un liquide qui, comme l'acide azolique el le sulfate de cuivre, ab- sorbe l'hydrogène par combinaison. 326 L'expérience pour fa pile de M. Delalande, n'a encore été que trop d'accord avec la théorie. En effet, ayant soumis au galvanomètre cel élément, je ne tardai pas à voir l'aiguille qui tout d'abord s'était écarlée de 87° du méridien magnétique , se rapprocher de plus en plus de ce plan, si bien qu'après une vingtaine de minutes d'expé- rience, elle ne marquait plus que 70». La pile de M. Delalande n'est donc pas à effet. constant. Examinons maintenant, malgré cet inconvénient, la quantité d'électricité qu'elle fournit dans les premiers instants de la ferme- lure de son circuit. Cette question, de la quantilé d'électricilé, étant la plus importante et la plus compliquée, je crois devoir vous expo- ser le détail des expériences que sa solution a nécessitées. Six éléments à la Bunsen, entièrement neufs, de méme surface , de zines parfaitement amalgamés, ont reçu chacun 750 centimètres cubes d'eau ordinaire dans leur vase extérieur, et 150 centimètres cubes du méme liquide dans leur vase intérieur ou tube poreux. Puis on en a formé deux piles séparées, montées en tension de trois éléments chacune. Dans chaque case charbon de l'une d'elles on ajouta 20 centimètres cubes d'acide sulfurique d'une densité 1,842 et correspondant bien à la formule SO^,HO, contenant par conséquent en poids 30 grammes d'acide sulfurique anhydre. D'un autre cóté, dans chaque case également du charbon de l'autre pile, on immergeait 93 grammes de sulfate de cuivre, poids caleulé de ce corps devant contenir aussi 30 grammes d'acide sul- furique anhydre. Nous avions ainsi deux piles, l'une montée à la manière de M. De- lalande, l'autre à la manière de Daniel, placées dans les mêmes conditions de surface, de nombre d'éléments, d'acide, de conduc- leurs en général, sur lesquelles nous pouvions par conséquent faire des essais comparatifs avec quelque chance d'exactitude. L'instru- ment qui devait nous servir à cela, était un galvanométre de Swei- ger, à fil moyen , à aiguille presque compensée. Comme les divi- sions n'y sont pas toujours proportionnelles aux intensités du cou- rant, il fallut chercher un autre moyen d'employer cet appareil que celui qui est usité ; en voici un apercu : Si on mel le diamétre 90^ du galvanomètre dans le méridien magnétique, au lieu de celui qui porte le 0° du cadran, l'aiguille aimantée sous l'action terrestre, s'y placera par une série d'oscillations que l'on pourra compter pendant un certain laps de temps, 30 secondes par exemple. Si quelques ins- tants aprés on fait passer le courant dont on veut savoir la valeur, dans le galvanometre , l'aiguille n'en sera pas déviée ; mais en écar- lant celle-ci de sa position, puis Vabandonnant à elle-même, оп 327 s'apercevra bientôt au plus grand nombre d'oscillalions qu'elle fera dans le même temps pour y revenir, qu'une nouvelle force agit sur elle. Celte force est produite par le courant méme qu'il s'agit de mesurer. Or, cetle aiguille suit les lois du pendule , les forces qui la sollicitent à rentrer dans le plan méridien sont entre elles comme les carrés des oscillations qu'elles font nailre dans le méme temps. Soient donc N le nombre des oscillations exéculées pendant 30 secondes dans la première expérience, c'est-à-dire sous l'influence seule de la terre, el N’ le nombre de celles exéculées aussi en 30 secondes dans la deuxième expérience, c'est-à-dire sous la double influence de l'action terrestre el du courant à mesurer , on aura : T9 9 NEAN ЗУ tes 192 Ж en prenant pour unité la force magnétique du globe, qu'il suffira de retrancher de X pour avoir l'expression de l'intensilé du courant mis en expérience. C'est en opérant ainsi que nous avons obtenu les chiffres sui- vants : Aiguille sous l'influence terrestre : 24 oscillations, force faile == 1. Trois éléments de M. Delalande : 71 oscillations, intensité — 7,751 Id. essai par déviation simple 87* Trois éléments à sulfate de cuivre 71 oscillations , intensité = 7,751 Id. essai par dévialion simple 87° Comme on le voit les intensilés des deux courants qui parcou- raient séparément le galvanometre , étaient parfaitement égales, On en conclurait immédiatement que les deux forces électromo- trices, ou les quantités d'électricité fournies par chaque pile étaient égales entre elles aussi, si le fil du galvanomètre formait à lui seul la totalité du circuit, en d'autres termes si les circuits parcourus par chacun des courants élaient de méme section, longueur el con- duclibilité. Mais l'électricité ne prend pas naissance aux extrémités zinc et charbon que l'on appelle pôles, c'est à la surface de contact du zinc el du liquide acidulé qu'elle se forme; elle doit donc pour se rendre au galvanometre traverser le liquide lui-même , le charbon, les conducteurs accessoires, en un mot, la propre résistance du couple qui lui donne naissance. Cette résistance peut être fort différente dans les deux piles , qui sont composées de liquides différents ; il faul nécessairement en tenir comple dans l'expression de la longueur du circuil, par conséquent la représenter en longueur de fil. Pour arriver à celle apprécialion, ou a ajouté au circuit d'une des 328 piles, successivement, des longueurs de fils variées, puis faisant à chaque fois passer le courant, on a déduit les intensilés, des oscilla- tions de l'aiguille, comme précédemment. Ainsi on a eu pour la pile de M. Delalande : 50 mètres étant ajoutés au circuit, oscillations 42, intensité 2,062 25 mètres étant ajoutés au circuit, oscillations 52, intensité 3,694 Parlant alors de cette loi: Les intensités sont en raison inverse de la longueur du circuit , on a pu poser ces proportions où X repré- sente la somme inconnue des résistances du galvanomélre el des trois couples: X:X + 503: 2,062 X= X =F 25 223,094 7,751. 7,751. Tirant la valeur de X dans chacune d'elles, on a pour la première X = 22,763: pour la seconde X — 18,122. Nombres, qui, comme on devail s'y attendre, différent entre eux d'une manière assez notable, parce que la polarisation dont est affectée la pile vient toujours charger sa résistance pendant l'expé- rimentation quelque rapide que soit celle-ci, mais dont la moyenne 20me 442 peut être cependant regardée comme très approchant de la longueur réduite du galvanomètre et des trois éléments de M. De- lalande. La méme méthode d'observation et de calcul nous a donné 46 mètres pour longueur réduite des trois éléments Daniel el du gal- vanomèlre. Si maintenant on se rappelle notre première expérience , où le courant de chaque pile présentait la même intensité, on en déduira facilement les forces électromotrices respectives : en effet, la for- mule de la pile en général étant I = р. Dans laquelle Zest l'intensité, E = la force électromotrice, R la ré- sislance des trois éléments, r celle du galvanomètre, on a dans le premier cas (celui de M. Delalande), 7,751 = x, d'où E = 158,446. Dans le second (celui de Daniel), 7,751 = = d'où E = 356,546. Ainsi l'électricité prise à sa source, dans l'intérieur méme de la pile de M. Delalande, est inférieure en quantité de plus de moitié à celle que fournit l'élément de Daniel dans les mêmes conditions. 329 Mais aussi, elle a bien moins de résistance à vaincre pour arriver aux conducteurs qui lui sont présentés, pour apparaître, se mani- fester en un mot. D'après cela, toutes les fois que le circuit à parcourir sera court el de grande section, l'élément à acide sera avantageux ; quand le circuit aura la valeur du galvanomètre qui nous a servi, l'une ou l’autre pile pourra être employée indifféremment ; au-delà de cette longueur de circuit, l'élément à sulfate de cuivre acquierra une supériorité d'autant plus marquée que les résistances deviendront plus grandes. Telles sont les conclusions auxquelles nous sommes arrivés par l'examen scientifique de la pile de M. Delalande ; mais puisque cel élément se trouve à l'Exposition d'industrie , il nous reste à voir s'il réunit les qualités d'économie et de facililé d'entretien qu'exige le commerce, sans lesquelles il ne saurait franchir encore le seuil du laboratoire. Celle question de la dépense , se restreint à connaitre la consom- mation en zinc, acide et conducteurs qui se fail pendant que l'ap- pareil ne fonclionne pas , car on admet généralement que dans une pile quelconque en activité, l'électricité fournie est toujours pro- portionnelle à l’action chimique , et par conséquent aux frais qui s'y produisent. Ce sont donc les frais d'entrelien , de conservation en état qui doivent nous occuper ; l'analyse chimique seule pouvail alors nous les faire connaitre. Pour cela on a versé goulte à goutte de l'ammoniaque dans le liquide de la pile, jusqu'à ce qu'il ne s'y formât plus de trouble , en prenant soin de ne pas dépasser ce point. Le sulfate de zinc formé a élé ainsi décomposé, le zinc précipité à l'état d'oxide, recueilli sur le filtre, lavé, calciné légèrement au creuset de plaline et pesé. Puis de peur que quelques traces de zinc aient échappé à la réaction , une petite quantité de sulphydrate d'ammoniaque a été ajoutée à la liqueur fillrée qui est restée limpide malgré ce mélange. Il est ré- sulté de ces opérations , que la pile de M. Delalande, 45 jours apres avoir été montée, n'avait dépensé, par élément, que : En zinc pur 10 gr. 40. En acide sulfurique anhydre 12 90. Ce qui fait en argent : Le zinc étant à 0 fr. 75 c., les 1000 gr., 0 c. 780. En acide sulfurique à 0 40 les 818 0 630. En tout... . 1 c. 410 par élément. Ou pour les trois éléments 4 c. 230. 330 Pendant les 45 jours, j'estime à 3 heures au moins le temps où le circuit a été fermé, soit pour les expériences que nous venons de citer, soit pour le service de mon laboratoire, et lorsqu'il fallut faire l'analyse , il restait encore 17 gr. 10 d'acide sulfurique libre , suffi- sant pour donner un courant capable de dévier l'aiguille du galva- nometre de 80°. L'élément de M. Delalande s'entretient donc presque sans frais , en dehors de son activité sa consommation est à peine appréciable. Il a sous ce rapport un incomparable avantage sur tous les autres sans exception. En effet, celui de Daniel, que l'on dit jouir de celle propriété, bien avant lui ne donnait plus signe de courant. Les 93 gr. du prix de 14 cent. de sulfate de cuivre que contenait chaque diaphragme , s'étaient complèlement décomposés au bout de 26 jours, entraînant forcément une consommation de zinc de 24 gr. 36, d'une valeur de 1 cent. 826. En tout par élément 15 c. 826, et pour les trois 47 c. 478. De plus, le tube poreux se trouvait presque hors de service, tant il était couvert d'inerustations de cuivre qui tendaient à chaque instant à réunir le zinc au charbon. Ainsi on peut dire, sans crain- dre d’être accusé d'exagération, que la pile de Daniel dépense dix fois plus que celle de M. Delalande. D'où vient celte énorme différence, puisque les deux piles ont leur zinc amalgamé , par conséqueul trés peu attaquable à l'acide sulfurique tant que le circuit n'est pas fermé ? C'est que dans l'une le sulfate de cuivre apporte au zinc en méme temps que l'acide, un second métal peu oxidable , le cuivre qui forme immédiatement un couple dérivé, lequel fonclionne constamment pour son propre comple, el accroît sans cesse sa dépense, parce qu'il augmente sans cesse aussi ses surfaces par ses propres réductions. Rien de pareil n'est à craindre dans la pile en acide sulfurique libre; le zinc amalgamé pourra y êlre faiblement attaqué, mais cette altaque sera toujours la méme, elle ne suivra jamais de progression, lant que l'amalgame n'aura pas disparu lui-méme. Le tube poreux , pas plus que le conducteur négatif, n'y seront embarrassés de celle quantité de réduclions si génante, qui oblige à un démontage fréquent de l'élément de Daniel, el le fait même sou- vent abandonner complétement. Ils pourront donc servir indéfini- ment, le zinc seul sera à renouveler. En résumé, Messieurs, la pile que nous venons d'examiner ne manque pas de quelque mérite. Elle ne coûte presque rien à entre- tenir, elle peut étre confiée aux personnes les moins expérimentées el les moins soigneuses , être reléguée , oubliée méme pendant des mois enliers dans un coin du laboratoire , d'un appartement quel- 331 conque dont elle ne troublera point l'atmosphère ; jamais elle ne refusera l'électricité pourvu qu'on n? la lui demande pas d'une ma- niére trop continue. La polarisation, dont elle est affectée, lui inter- dit complétement de prendre part aux grandes applications, telles que la galvanoplastie, la dorure, les moteurs, la lumière, etc.; mais renfermée dans le cercle modeste des usages domestiques, oü l'élec- tricité commence à pénétrer , elle y rendra sans frais des services que l'industrie s'efforce aujourd'hui de mulliplier. Elle ressemble assez à ces fontaines, que l'on rencontre fréquem- ment dans la nature, qui comme elle ne coütent rien, dont les eaux trop peu abondantes pour toute une contrée, n'en sont pas moins précieuses aux habitations voisines, s'abaissent rapidement il esl vrai, sous la main qui les puise , mais réparent leur perle dans l'in- lervalle des besoins. SONNERIES ELECTRIQUES-TELEGRAPHIQUES. Nous disions vers la fin de notre précédent mémoire, que l'indus- trie s'occupait d'employer la pile à des usages domestiques. Une de ces curieuses applications de l'électricilé et sans contredit la plus répandue de toutes, est le système de sonneries électriques té- légraphiques de M. Miraud, que nous rencontrons à l'exposition d'in- dustrie sous le nom de M. Prudhomme, successeur de celui-ci. Cet appareil est destiné à remplacer nos sonnettes d'appartement , dont le grossier mécanisme nécessite tout un dédale de fils mobiles, une série de leviers, difficiles à établir et à dissimuler, plus difficiles en- core à maintenir en bon état, et qui après toul ne répondent qu'im- parfaitement au besoin que l'on a de signaux à l'intérieur des habi- lations. L'appareil Miraud comprend trois parties bien distinctes : la son- nerie proprement dile qui donne l'éveil, le tableau indicateur qui désigne le lieu d’où l'appel est venu, la pile enfin, qui doit animer lout le systéme. La sonnerie proprement dile se compose d'un électro-aimant el d'un бтрге, fixés sur une Бойе l'un au-dessus de l’autre , à petite distance el en regard desquels se trouve le marteau , dont la tige en fer doux sert d’armature et est maintenue dans une posilion pres- que verticale par l'effort en sens contraire de deux ressorts. Ces res- sorts formant l'organe le plus important de ce mécanisme, leur posi- lion demande une attention spéciale. L'un d'eux, court el assez résislanl, porte directement la tige du marteau et lend à l'écarter du 332 timbre; l'autre, plus long et plus flexible, appuie sur celte tige par derrière , la presse de s'approcher du timbre , et peut la suivre jus- qu'à une très pelile distance de celui-ci. Comme il n'y a du reste ici ni rouages ni leviers, que l'électricité y suffit à tout, il nous sera facile de nous rendre comple de cet ins- trument en suivant le fil qui porte le courant. Parlons done d'un des póles de la pile, du zinc par exemple, et allons enrouler le fil qui y est attaché, aulour de ces petits barreaux de fer doux que l'on appelle électro-aimants , puis revenons toucher avec ce même fil le cuivre ou le charbon, c'est-à-dire l’autre pôle. Au moment du con- lact, le courant passe dans le fil, le fer doux devient aimant , allire à lui par conséquent la tige du marteau , un coup esl frappé sur le timbre. Faisons cesser maintenant le contact, l'effet inverse aura lieu, le courant et par suile le magnétisme disparailront, la tige alors obéissant au ressort qui la porte, reprendra sa posilion pre- mière. Ainsi à chaque contact correspondra un coup sur le timbre, et par une succession de contacts et d'interruptions nous aurons déjà une véritable sonnerie. Mais de méme que la machine à vapeur dirige elle-méme le jeu des tiroirs qui lui distribuent la force, de méme aussi le marteau de notre appareil peut opérer lui-méme les interruptions et les contacts nécessaires à la production de la sonnerie, que nous avons jusqu'ici faits avec la main. Il suffit pour cela de couper le fil dont nous nous servons, au sortir de l'électro-aimant, d'attacher l'une des extrémités qui proviennent de celte section à la base de la tige elle-méme , el l'autre au ressort qui appuie sur celle-ci. Par cette disposilion , le circuit reste métallique, l'électricilé y pourra circuler , mais à une condition nouvelle, c'est que le ressort touchera celte tige, condition qui précisément sera remplie el viendra à manquer tour à tour. Nous avons vu, en effet, qu'au moment oü le courant passe , la lige est allirée vers l'électro-aimanl , écartée par conséquent du res- sort en question. Ог, le ressort est réglé de manière à suivre celle- ci dans ce mouvement à une certaine distance, mais à l'abandonner très près du point où le marteau va toucher le timbre. Au dernier instant , il y aura donc interruption , cessalion de courant , le coup sera cependant frappé, mais il ne le sera que par la vitesse acquise el un reste de magnétisme qui survit toujours à l'électricité. Sitôt après , le marleau , grâce à cette interruption, voulant opérer sa re- traite , rencontre sur son chemin le ressort qui ferme avec lui le circuil, de là nouveau courant, nouveau coup sur le timbre et ainsi de suite, tant que les bouts de notre fil resteront attachés aux pôles de la pile. 333 Telle est la sonnerie que nous présente M. Miraud, et que Гоп a nommé trembleuse de ce que les mouvements en sont si rapides qu'ils ressemblent à des vibralions, des tremblements dont on ne saurait compter le nombre. Elle n'est autre chose que l'interrupteur de nos appareils d'induclion, auquel on a ajouté un marteau el un timbre. Veut-on maintenant l'uliliser pour le service d'une maison? La sonnerie élant placée dans un endroit déterminé et en relation cons- tante avec l'un des póles seulement de la pile , il suffira de pouvoir la réunir par un bon conducteur à l'autre póle, de l'intérieur méme des appartements d'ou l'on voudra sonner, ce à quoi on arrivera facilement au moyen de deux fils couverls de coton ou de gutta percha pour chaque appartement. L'un de ces fils venant du póle de la pile , l'autre de la sonnerie, dès qu'on en réunira les extrémi- 165, le circuit sera fermé, l'appareil fonctionnera. Pour opérer commodément cetle jonction qui doit se renouveler à chaque instant , M. Miraud se sert d'un petit instrument qu'il ap- pelle transmetteur, composé de deux lames de cuivre communi- quant chacune à chacun des bouls des fils, et dont l'une est sur- montée d'un bouton d'ivoire qui perce la paroi d'une boite où le tout est renfermé. A l'élat ordinaire ces lames sont maintenues à une cerlaine distance l'une de l'autre par leur propre ressort, mais eu pressant le boulon d'ivoire on produit immédiatement leur con- lact el la sonnerie se fail entendre. Ainsi, au moyen de deux fils pour chaque piece , que Гоп pourra fixer le long des murs, cacher sous la tapisserie, ou noyer dans le plâtre, toutes les parties d'une maison pourront s'adresser à un méme limbre. Mais , précisément , puisque celle sonnerie est unique, comment la personne appelée pourra-t-elle découvrir l'endroit où son service est réclamé ? Un aulre appareil est évidemment nécessaire , c'est le tableau indicateur , produit spécial de l'industrie de M. Miraud et pour lequel celui-ci a pris un brevet. Pour le former, M. Miraud prend un cadre d'une profondeur de quelques centimètres , fermé par une tenLure quelconque , à laquelle il fait autant de peliles ou- verlures qu'il y a d'appartements dans la maison où il veut le pla- cer. Aux premiers coups du marteau sur le timbre , le numéro de l'appartement d'où l'on a sonné se présente subilement à l'une de ces sorles de fenélres, el y reste jusqu'à ce que la personne de ser- vice en ayant pris leclure , le fasse disparailre au moyen aussi de l'électricité. Ce résultat compliqué est alteint par M. Miraud , d'une manière forl ingénieuse, à la faveur de ce principe; Toutes les fois qu'un courant qui traverse les spires dun électro-aimant vient à 334 changer de direction, les pôles de l'électro-aimant changent de nom. Une aiguille d'acier aimanlée , suspendue verlicalement sur un axe mobile, porte à son extrémité supérieure un numéro, et présente son extrémité inférieure, qui forme un de ses póles, entre les bran- ches électro-aimant. Ainsi placée, on comprend qu'elle soit attirée, dés qu'un courant passe, par la branche dont le póle devient de nom contraire au sien el qu'elle soit repoussée par l’autre, et, comme le nom des póles de l'électro-aimant change avec la direction du courant , qu'elle puisse recevoir d'un seul électro-aimant deux impulsions opposées l'une à l'autre. M. Miraud construit autant de ces petits appareils qu'il y a d'appartements dans la maison , il les fixe tous à l'intérieur de son tableau , chacun assez près d'une ou- verlure pour que l'aiguille par uue de ses déviations y laisse voir son numéro, tandis que par l'autre elle le cache derriere la tenture. П ne reste plus alors qu'à produire à propos les deux mouve- ments de l'aiguille ; pour celales électro-aimants font partie de deux circuils distincts et indépendants qui leur amènent le courant dans un sens opposé, parce qu'ils présentent aux fils de ceux-ci les pôles de la pile d'une maniere inverse. L'un de ces circuils, venant direc- lement de la pile par un seul fil, les réunit tous el peut être fermé par un bouton de pression placé au bas du lableau ; il renvoie en- semble el d'un méme coup tous les numéros qui se trouvent sortis. L'autre est celui que nous avons déjà établi. Chaque appareil y est sé- parément introduit au moyen du fil qui joint l'apparlement de même numéro que lui à la sonnerie, de sorle que tout courant qui arrive à celle-ci , indique par la sorlie dun numéro, le chemin qu'il a suivi pour y parvenir. Ainsi le but de nos sonneltes ordinaires se trouve déjà complétement atteint et même dépassé au moyen de l'électricité. Cependant, M. Miraud n'a pas voulu s'en tenir là, il ap- pelle ses sonneries télégraphiques , il pense en faire de vérilables télégraphes domestiques. On sait que le télégraphe Morse , en usage aujourd'hui sur loutes nos lignes, n’empleie pour son alphabet que deux signes, le point el le trait, qu'une sorte de stylet trace sur une bande de papier uniformément déroulée par un mouvement d'horlogerie. M. Miraud produil aussi ces deux signes, seulement il les adresse à l'oreille au lieu de les présenter au yeux: par un petit roulement de sa sonnerie il fait le point, par un roulement prolongé il figure le trait, et veul ainsi se servir de l'alphabet de Morse. L'idée est sans doute fort in- génieuse , mais il est évident qu'elle ne saurait avoir d'applicalion , surlout pour le service domestique ; l'alphabet Morse écrit, el à plus forte raison parlé , demande en effet une inilialion , une longue ha- bitude incompatibles avec le changement si fréquent du personnel d'une maison. Toutefois si M. Miraud n'est point parvenu , avec un simple bouton de pression et une sonnerie, à remplacer le récep- leur et le manipulateur de nos télégraphes , il peut du moins en- voyer par ce moyen une quanlilé de signaux convenus bien suffisants aux besoins les plus usuels d'une habitation. Arrivons maintenant à la source de l'électricité, à la pile qui met en jeu lout le système. Ici, M. Miraud semble ne s'élre pas assez préoccupé de ce que ses appareils devaient marcher à de courtes distances ; il y perd une partie de l'économie que pouvait lui procu- rer celte heureuse condition. La pile qu'il emploie est celle de nos télégraphes sans aucun changement, dont le conducteur négatif est un fil ou une trés pelite lame de cuivre, élément dont la longueur réduite est très grande, négligeable il est vrai, quand on la compare "aux circuils de nos lignes, mais fort appréciable lorsqu'il s'agit de faire traverser à l'électricité une maison ou un jardin tout au plus. C'était le cas de se servir de l'électricité, plutôt en quantité qu'en lension, d'augmenter les surfaces du couple, celle du cuivre surtout qui ne dépense rien, de couvrir les fers des éleclro-aimants, princi- palement ceux du tableau qui doivent étre parcourus tous par un méme courant, de fils suffisamment gros , pour ne présenter que le moins possible de résistance. Enfin, la pile au sulfate de cuivre qui se consomme elle-même au repos, dont l'entretien est incommode, ейі été avantageusement remplacée par quelques éléments à acide libre, tels que ceux de M. Delalande , puisqu'il n'était pas besoin d'un courant constant. Les appareils de M. Miraud sont au con- traire, y compris la pile, entièrement montés en tension, aussi de- mandent-ils 10 à 12 éléments au moins, autant qu'il en faul pour faire fonctionner de Paris le télégraphe d'Amiens , et dont les frais montent de 20 à 25 fr. par an. Sauf cet inconvénient, qui aprés tout n'est qu'un défaut d'écono- mie facile à corriger, ils sont tous parfaitement conçus, et exéculés avec solidilé el élégance. C’est pourquoi ils ont été accueillis par le public avec faveur et tendent à se répandre de plus en plus. Ils fonc- tionnent régulièrement depuis plusieurs années à Angers, au Cercle du Boulevard et à l'hótel du Cheval-Blanc, ainsi que dans plusieurs habitations du département. A Paris, les grands établissements, la plupart des ministères, des hôtels, des palais en sont déjà pourvus. L'avantage des sonneries électriques sur nos sonnelles ordinaires réside à la fois dans leur facilité d'installation et d'enlrelien, el dans leur effet plus complet: dans Ja facilité d'inslalallion, provenant principalement de ce que les fils peuvent étre fixés à demeure, 386 qu'en conséquence ils n'exigent ni leviers de renvoi, ni trous dans les murs; qu'ils peuvent élre dissimulés, rassemblés en fais- ceaux occupant peu de place, menés à la distance que l’on voudra, qu'ils échappent ainsi à presque toutes les chances de dérangement ou de destruclion comme l'expérience nous l'a prouvé. Dans leur effet, en ce que le coup de sonnerie laisse après lui sur Je tableau une trace permanente qui dispense la personne de service d'une présence aussi conlinue, et que pouvant êlre prolongé ou inter- rompu du doigt, il se prête facilement à l'exécution de tous les si- gnaux dont on voudra le charger. M. Miraud a déjà oblenu du jury des exposilions , plusieurs mé- dailles qui constatent le cas que fait l'industrie de cette belle appli- cation de l'électricité. La science lui doil aussi quelque reconnais- sance, car, mellant la pile entre toutes les mains pour des services journaliers, il a attiré sur elle de plus nombreux regards, et par là provoqué des éludes plus variées qui augmentent les probabilités de perfectionnement el d'avenir de ce merveilleux instrument. PRODUITS GALVANOPLASTIQUES. Prés des sonneries de M. Miraud, se trouvaient les produits galva- noplastiques de M. Chasteignaux. Je mets sousles yeux de la So- ciélé quelques-uns d'enlr'eux. Leur aspect, mieux que leur des- cription, saura les faire connailre el apprécier. M. Chasteignaux ne prélend pas les avoir obtenus par d'autres moyens que ceux em- ployés jusqu'ici; l'objet à galvaniser est comme d'habitude rendu conducleur de l'électricité, s'il. ne l’élait déjà, au moyen d'une ap- plication de plombagine ou d'un sel métallique dont on revivifie la base par un réducteur quelconque, tel que le sulfate de fer ou le phos- phore. Ainsi préparé, il est attaché au pôle négatif el placé avec lui dans une dissolulion concentrée de sulfate de cuivre, où plonge déjà une lame de cuivre aussi mise en communicalion avec l’autre póle. Dès que l'électricité traverse ce circuit, partie liquide, partie mé- lallique , une double décomposition chimique s'opère , les éléments de l'eau, ceux du sel dissous commencent aussitôt à se séparer. L'a- cide du sel, l'oxigène de l'eau se rendent au pôle posilif où se ren- contrant en présence de la lame de cuivre, ils forment le sulfate du méme mélal qui se dissout, tandis que la base el l'hydrogène des mêmes corps se portant ensemble au pôle négatif, produisent de l'eau, et le mélal à l'état de purelé qui recouvre bientôt entièrement l'objel soumis à l'expérience. 337 Ici done, l'électricité est la main qui travaille, mais si celle main est d’une habileté et d’une délicatesse sans égales, si elle fouille les replis des surfaces que l'œil peul à peine pénétrer, il n'en faut pas moins une intelligence qui la comprenne, lui prépare la route et Гу dirige, pour arriver aux résullals que nous avons sous les yeux. Trop de tension dans le courant, et le métal déposé n'est qu'une poudre noire sans cohésion ni usage; trop peu de tension, il devient granuleux et cassant. Entre ces deux limites, il faut savoir se main- lenir, en alimentant convenablement ia pile, en proporlionnant les surfaces de l'anode à celles de l'objet à recouvrir. M Chasteignaux a prouvé par les produits qu'il nous a présentés que ces connais- sances théoriques lui élaient familières, ainsi que ces pelils moyens pratiques qui doivent toujours les accompagner pour obtenir un succès complet dans les expériences. EDMOND DE CONTADES. 22 CONCOURS DE 1858 ÉLOGE DE FRANCOIS BERNIER RAPPORT DE LA COMMISSION 0 Messieurs, Le Conseil général de Maine et Loire, dans sa session de 1857, dé- cida, sur la proposition de M. le préfet Vallon, qu'une somme de 500 fr. serait accordée aux Sociélés savantes d'Angers, pour servir à l'établissement de concours annuels. Quant à la répartition de cette somme, deux systèmes se sont trouvés en présence : l'un qui admet- tail un concours unique dont chaque Société eût à son tour indiqué le sujet, l'autre qui entrainail le partage de la somme par parties égales, chacun restant maitre de son sujet et de son prix. Ce dernier mode prévalut dans la réunion des présidents et des secrélaires de nos quatre Sociétés. Sans revenir sur la chose jugée, nous regreltons un parlage qui réduit à la modique valeur de 125 fr. la médaille à décerner pour des travaux qu'on doit désirer importants et conscien- (1) MM. l'abbé Vincelot, de Montreuil, E. de Contades, Dr E. Farge, rapporteur. 339 cieux ; nous ferons surtout observer qu'en mullipliant le nombre des concours on réduit nécessairement celui des concurrenis, qu'on éparpille et divise l'effort intellectuel et qu'on amoindrit l'intérêt de la lutte. Nous ne chercherons point en dehors de celte enceinte, dans des concours ajournés el infructueux, la preuve de celle asser- lion, mais elle nous a paru nécessaire pour démontrer que la Société linnéenne, en recevant sans délai d'importantes el sérieuses réponses à son appel, jouissait d'un succès exceplionnel. En effet, Messieurs, votre Sociélé désigna pour sujel de prix, à dé- cerner en 1858, l'éloge de Francois Bernier, voyageur et philosophe angevin du хуп siècle. Parmi les essais tentés, un seul, par son étendue et son plan, con- venait à votre programme, el c'est pour statuer sur le mérite de celle œuvre que vous avez nommé une Commission composée de MM. l'abbé Vincelot, de Montreuil, E. de Contades el Farge, rappor- leur. Pour répondre à vos vues, nous avons soumis ce travail à une sérieuse étude, et ce rapport a pour but de vous démontrer les molifs de nolre apprécialion. | Le mémoire a pour titre : Etude sur Francois Bernier, médecin, philosophe et voyageur, et pour épigraphe celle phrase de Gassendi écrivant à Golius : « L'ombre de ia vérité que je poursuis partout » suffit à me remplir de joie, car pour la vérité méme Dieu seul peut » la connaitre. » L'œuvre est divisée en trois parties : un aperçu biographique, les ouvrages du philosophe, ceux du voyageur. Après quelques considérations générales sur les causes qui livren à l'oubli ou à la renommée le souvenir des hommes, l'auteur remar- que, à l'honneur de notre siècle éminemment critique, qu'après avoir réduit à leur valeur quelques réputalions usurpées , il a plus souvent rendu justice à des hommes d'un mérite réel injustement oubliés; c'est entrainé par ce courant d'efforts et d'idées qu'il ap- porte, travailleur modeste, sa pierre à l'édifice et son tribul d'éloges à l'Angevin dislingué trop peu prisé encore, trop peu connu peut- être, même dans son propre pays. Puis vient la biographie. L'auteur a trop bien exprimé lui-même (1) combien tout ce qui concerne un homme célèbre, son origine, sa vie, les délails méme les plus simples intéressent ses concitoyens, pour ne pas comprendre le regret que nous éprouvons d'abord en (1) Pages 2 et 4 du mauuscrit. 340 trouvant cette partie si courte (1), si peu remplie de faits et de pré- cises indications. Voltaire et, d'après lui, la Biographie universelle de Michaud et l Essai de Bodin font naître Bernier à Angers еп 1625. L'auteur de notre mémoire a suivi celle assertion erronée. Pourtant Eloy, le plus exact des biographes médicaux, qui l'ont souvent copié, Eloy (2) dit que François Bernier est né à Jouar, près Gonnord, en Anjou. Il est facile à un Angevin de lire Jouay, près Gonnord, surtout avec un guide comme Ménage, contemporain, compatriote et ami de Ber- nier, qui nous dit : « Jouay, près Gonnord, se glorifie de la nais- » sance de François Bernier, médecin, homme célèbre par ses ou- » vrages, par ses voyages, par la relation de ses voyages et par ses » livres de philosophie (3). » Entre ces témoignages et celui de Voltaire, le choix nous parais- sait facile; mais un savant admirateur de Bernier, qui sera bientôt, nous l'espérons, son biographe et son juge, a voulu résoudre défini- livement la queslion. Parmi les pièces intéressantes et nombreuses que l'érudit et judicieux inspecteur d'Académie a déjà recueillies, se trouve l'extrait de baptême authentique de notre philosophe. Nous devons a Ja bienveillance de M. de Lens la communication de ce document précieux que nous copions littéralement, en constatant le droit et le mérite de l'heureux possesseur. « Aujourdhuy vingl-sixiesme jour de septambre mil six cent vingt, » a eslé baplizé par moy, curé soubssigné, François, fils de hono- » rable homme Pierre Bernier et de Andrée Grimault; fut parrain » venerable et discret messire François Bernier, curé de Chantzaux, » el maraine honnesle fille Julliesne Bonnin, laquelle ma declarer » ne scavoir signer. » F. BERNIER. — GUYTTON. » Il résulte de cette pièce : 1° que Bernier est bien né à Joué, et non à Angers, et 2 encore qu'il avait cinq ans de plus que ne lui donne Voltaire, qui le fait naître en 1625 au lieu de 1620. Quant à la situation de sa famille, nous n'en pouvons rien inférer, le mot honorable homme étant usilé au xvn* siècle, méme à l'égard des arlisans ; mais en voyant Bernier dépenser longtemps au profit de ses éludes et de la science sans songer à acquérir, nous pensons (1) 5 pages sur 48, (2) Tome Ier. (3) Ménage, Hist. de Sablé, manuscrit de la bibliothèque d'Angers. 341 avec l'auteur du mémoire qu'il possédait au moins un petit patri- moine, sacrifié en enlier à sa généreuse passion. Bernier ne parle guère de lui; les documents angevins qu'a pu consulter l'auteur sont muets, de là l'absence de renseignements. Le biographe, qui s'en étonne et s'en afflige, ne voit à cet oubli que deux explications : « Bernier ne serait pas revenu en Anjou et n'y » aurait pas entretenu de relations... L'ami de Saint-Evremont , » de Ninon, de M™ de la Sablière, elc., aurait trouvé bien peu d'attrait » dans la sociélé angevine.» D'une autre part, Angers, «plus pédant » que leltré... envahi par les hommes de guerre et les hommes d'é- » glise... où les discussions élaient apres jusqu'à la violence et quel- » quefois la collision, » aussi incapable de l'apprécier que de le retenir, l'aurait à peine connu et bien vile oublié. Ici, Messieurs, nous nous permettrons de discuter une assertion passablement sévère à l'endroit de nolre Anjou, et nous trouverons bienlól assez de passages à louer et à ciler dans le mémoire pour qu'on nous pardonne de repousser celle interprélation inexacle et trop facilement acceptée. Les relations que peut conserver un homme avec son pays sont de deux sortes : celles de l'enfance et de la jeunesse, toutes naives et parfumées de frais souvenirs, vivaces, loujours sensibles el douces pour l'homme lui-même, mais toujours intimes, à peine dévoilées dans quelques épanchements secrels, répélées à l'oreille, discrete- ment dites et reçues, jamais déflorées par la publicité; si ce n’est de- puis la fureur de personnalité, qui a banni la pudeur des mémoires, et que nolre auteur flétrit quelque parl à bon droit. Or Bernier, qui nous est connu surtout par ses œuvres, Bernier, laconique par ca- raclére, qui raconte en dix lignes de longs voyages el de graves évé- nements, ne pouvait nous initier à celle parlie de sa vie. Puis viennent les liaisons de l’âge mûr, celles que les goûts, les événements font naître et que consolident la communaulé de but et de vues, la nécessité de l’action, l'estime des caractères; celles-là, Messieurs, où purent-elles nailre el se développer? Bernier quilte Anjou avant trente ans, séjourne deux ans à Mont- pellier, trois ans à Paris, voyage pendant douze à qualorze ans, et ne renlre en France qu'en 1670, vingl ans au moins aprés avoir quitté son pays natal. S'il y trouva des hommes dignes de le comprendre et s'il y entre- lint de sérieuses et fécondes relations, c'est ce que nous nous propo- sons d'étudier à propos de ses idées philosophiques. Suivons mainte- nant pour ses relations l'ordre chronologique qui nous ramène à la biographie, м = = 342 Un séjour dans le midi le mil en rapport avec L’Huillier-Chapelle, le collaborateur de Bachaumont, et par lui avec Villustre Gassendi , dont la science et la logique, révélées dans une intime familiarité, décidèrent la vocation de Bernier, et du jeune médecin firent un ardent philosophe. Puis Paris l'attire, et là de nouvelles connais- sances, celles qui firent de Bernier le joli philosophe, nous sont si- gnalées par tous les biographes, et l'auteur de l'étude nous les rap- pelle plus d'une fois à propos; mais je ne vois nulle part ce qui décida la vocation du voyageur. Permettez- moi donc une hypothèse; elle est trop angevine pour ne pas aider ma cause ou trouver du moins quelque crédit auprès de vous. Ce fut en 1652 que Bernier vint à Paris, où un aréopage qui re- présentait dignement l'Anjou et les lettres le recut et le Тапса dans ce grand courant d'idées el d’études qui animaient alors tous les savants et les penseurs. Il y avait des liltérateurs, des hommes d'es- prit, des philosophes; y avait-il aussi des voyageurs? Et oui, Mes- sieurs, et l'un des plus originaux, des plus actifs, des plus touristes, comme nous dirions aujourd'hui, un homme de verve et d'esprit, un Angevin surtout, qui avait vu toute l'Europe, une partie de l'Afrique et l'Asie principalement, un homme qui avait un entretien fécond, des notes immenses, et venait d’être presque forcé par le roi lui- méme de faire connaitre au public le résultat de ses pérégrinations. Vous avez nommé La Boullaye Le Gouz, le futur ambassadeur de Louis XIV auprès du Grand-Mogo!, le spirituel voyageur auquel notre infatigable historien, M. Godard, a consacré une intéressante notice. La Boullaye Le Gouz était de retour. П travaillait à son édition, dont l'épitre dédicatoire est de juillet 1652, et qui fut finie en 1656. En parcourant ce curieux amas, nous ne trouvons pas seulement les relations que la communauté de patrie nous permet d'affirmer entre les deux Angevins, mais des rapports de filiation. Par exemple, le souverain que Bernier trouvera à son déclin dans l'Inde , c'est celui qui resplendit dans la relation de La Boullaye, c'est schah Jehan. Cette princesse si puissante sur l'esprit du monarque, cette fille de Jehan, la belle Begum-Saheb, vous la retrouverez dans les deux ouvrages, en pleine lumière, sinon à la place d'honneur ; mais pour signaler ici le caractère des deux hommes, Bernier peint en quelques lignes le caractère moral, l'habileté, la haute influence de celle femme, Le Gouz nous donne un grossier dessin à la plume, appelle surtout notre attention sur la fidélité du costume molgolique, de l'évenlail, du sorbet, et croit avoir fait un portrait. Les religions diverses dans l'Inde el cent autres détails de mœurs dont Bernier 343 nous donne la raison et marquera les effels sont indiqués dans le verbiage du touriste Le Goux. En faut-il davantage pour nous révé- ler l'iniliation de Bernier dans la carrière des voyages, el n'etes-vous pas heureux comme moi, Messieurs, de constater cette parenté et de rapprocher ainsi de notre Anjou, par ses voyages mêmes, le judicieux observateur qui, pour l'auleur du mémoire, nous serait un peu trop étranger ? Depuis le départ de Bernier (1654) toute sa biographie se résume dans ses voyages. C'est là, Messieurs, que vous suivrez avec intérêt la judicieuse et claire analyse faile par Гашепг du mémoire. Ce résumé, qui forme la troisième partie des études sur F. Bernier, perdrait trop à étre condensé à nouveau. Les points les plus saillants de ces voyages sont perçus avec tact et signalés avec discrétion. L'auteur insiste avec chaleur sur tout ce qui peut faire ressortir l'élévation du caractère de l'homme; le goût dela science et non l'intérêt, a poussé Bernier aux extrémités du monde. Le peu de place que tient sa personnalité est démontré avec évidence contre quelques biographes qui avaient cru voir le contraire. Je prends dans le mémoire un seul exemple : Bernier eut la peste en Egypte et n'en fait pas méme mention. Nous trouvons sur cet accident une curieuse indication que nous nous permettrons d'ajouler aux preuves don- nées par l'auteur de l'élude, parce qu'elle jelte un jour de plus sur les relations de Bernier. Pendant son voyage, on s’entretenait de lui à Paris et d'un bout de la France à l'autre, el Guy Patin écri- vait à Lyon à son ami Ch. Spon, en février 1657 : « Je savois bien que M. Bernier avoit eu la peste en Egypte ; Dieu » le veuille bien ramener de si loin. Cest un bon garcon , il nous » donnera des nouvelles de la casse et du séné qui viennent de » ce pays-là.... (Lettre 297). » Le voyage de l'Inde est divisé par lettres, dont chacune traite un sujet particulier et s'adresse à la personne qu'il doit intéresser spé- cialement. Ainsi, tandis que |’ Histoire de la révolution des Etats du Grand-Mogol est dédiée au roi Louis XIV, la Lettre sur l'Etat de l'Indoustan, étendue, commerce, etc., est offerte à Мет Colbert. Inulile de répéter que ces deux parties importantes de l'œuvre de Bernier sont analysées et appréciées avec une grande justesse de vue ei un goût parfait dans le choix des cilalions. Vient ensuile une lettre de Bernier à Chapelle, le spirituel colla- boraleur de Bachaumont dans le voyage bien connu de vous. Les remerciements qui la terminent nous éclairent encore sur les rela- lions de notre voyageur. L'auteur de l'étude les cile avec raison (1), (1) P. 38 du mémoire manuscrit. 344 et nous nous associons à lui pour proclamer qu'ils honoren autant Chapelain que Bernier. Le voyage de Cachemyre comprend neuf lettres dont une seule longue; elles sont adressées à M. de Merveilles, sur lequel nos recherches comme celles de l'auleur sont restées pleinement infruc- tueuses. Vous trouverez là, Messieurs, de curieux détails sur l'indus- trie célèbre dont notre luxe nous a rendus tributaires. La matière, fabricalion. teinture, description, le prix même des châles cachemi- res, nous sont indiqués par Bernier. L'auteur de l'élude a signalé ici les nombreuses et brillantes descriplions, les piquants détails dont ce voyage de 120 lieues en 60 jours est semé à chaque page. Puis il termine en nous rappelant que Bernier semble avoir tracé la voie aux voyageurs modernes, parmi lesquels les Angevins comp- lent avec orgueil les Volney, Th. Pavie, Eug. Boré et Victor Godard. Ici, Messieurs, votre Commission ne peut que vous renvoyer à l'étude elle-même, dont le mérite lui paraît incontestable, et s'asso- cie à l'auleur pour vous engager méme à relire le texte de Bernier auquel les événements de l'Inde donnent aujourd'hui une valeur d'actualité. C'est à propos de ses voyages que Francois Bernier figure dans les bibliothéques médicales, et ce fut en effet le titre et les qualités de médecin qui lui servirent de passe-port dans les contrées lointaines elle maintinrent tranquille et respecté à la cour d'Aureng-Zeb. Aussi pensions nous trouver ici l'éloge ou l'apprécialion du médecin. A défaut d'un jugement pour lequel l'auteur de l'étude avait cepen- dant qualité, nous citerons le témoignage du plus célébre des bio- graphes médicaux. Haller, aprés une courte énumération des pays explorés par Bernier ajoule: « Multa, ut doctior, accuratius vidit, » quàm vulgó solent peregrinalores (1). » — « Plus savant il vit beau- » coup et avec plus de fruit que le commun des voyageurs. » Cette science étendue et profonde que chaque page révèle, permet d'affir- mer que notre Angevin ne ful point un médecin vulgaire, mais dans ses écrits le pralicien comme l'homme privé disparaît derrière le sa- vant. Il semble lui importer peu que nous sachions ce qu'il a fait, un autre médecin l'eàt pu faire; mais il tient à décrire, à répandre tout ce qui peut agrandir le domaine de la science. Entre les deux róles que Villustre Baglivi reconnait au médecin: Medicus nature minister el interpres (2), Bernier ne fait connaitre que le dernier. Sous ce point (1) Haller, Bibliotheca medicine pratice, Tom ut, p. 274. (2) Baglivi, Praxeos medic. 345 de vueses livres de philosophie sont aussi médicaux que ses voyages. La physique, les sciences naturelles sont la base de son système gé- néral, el c'est d'une physiologie plus savante et plus sûre que celle de ses devauciers que procède sa psychologie ; on relrouve le savant parlout, ut doctior ; mais la médecine comme toute autre branche de ses connaissances élendues ne se monire qu'à son heure et là seulement oü elle doit éclairer quelque question plus générale et plus élevée. Ce qu'il écril de plus médical peut encore se rapporter à cette branche de l'art que nous nommons aujourd'hui la médecine po- litique et pour ne citer que quelques exemples, s'il parle de la goutte, de la gravelle, des arthrites, c'est pour nous montrer combien la rare sobriété des Indous les préserve sûrement de ces tristes fléaux. Si le premier, il signale les preneurs d'opium, s'il en décrit avec un rare talent le fatal abrutissement, c’est pour montrer les ravages de la substance narcolique sur l'ensemble et l'avenir des populations. Le médecin méme dans Bernier nous décèle donc toujours le savant el le philosophe. Le philosophe, à son tour, puisa grandement dans la science positive du médecin. La seconde parlie du mémoire que votre Commission a examiné, s'attache surtout à la philosophie de Bernier, et partant à elle de Gassendi dont il adopta , défendit et vulgarisa les doctrines. Déjà, pendant son séjour à Paris, Bernier avait, dans une vive et spirituelle polémique, défendu Gassendi contre Maurin, et telle fut l'origine de l'Anatomia ridiculi muris et du Favilla ridiculi muris, où Maurin se trouvait changé en rat par un jeu de mots d'un goût assez douteux, mais alors fort à la mode. Bernier, du fond de l'Inde, restait gassendiste ardent et actif, et sa lettre à Chapelain est un encouragement à la défense des aló- mes d'Epicure et des propriétés de la malière. En rendant justice au talent déployé par l'auleur de l'étude pour replacer Gassendi à son véritable rang et montrer tous les cólés vrais, acceptables ou tout au moins ingénieux de celte philosophie animiste, qu'on nous permelte d'exprimer hautement le désir de voir paraître l’œuvre impatiemment attendue qu'un philosophe sa- vant dont nous vous avons déjà cité des travaux, doit bientôt consa- crer au gassendiste angevin. L'analyse du Gassendisme deviendra claire sous celle plume habile; l'érudition, des éludes spéciales donneront aux jugements de M. de Lens une aulorilé sur laquelle nous eussions élé heureux de nous appuyer. Privée de ce secours, mais sûre que la tâche sera bienlól remplie, votre Commission el surtoul votre rapporteur a cru devoir laisser sous toules réserves les doctrines philosophiques proprement diles, D'ailleurs nous avions 346 à juger non la philosophie de Bernier, mais les interprétations données par son biographe. L'auteur du mémoire s'attache bien plus à faire l'apologie de Gassendi е! de Bernier qu'à exposer et à soutenir leur doctrine. Nous acceptons pleinement que ces astronomes savants ne fussent astro- logues que de nom et par erreur d'appellation. Nous savons com- bien le neo-épicurisme s'éloigne du sensualisme grossier, combien la verlu, la morale, la religion méme y sont respeclées, et nous croyons qu'on ne peut se tromper sur les intentions de l'auteur qui a écrit le 8¢ volume sur la Félicité. Mais nous ne pouvons accepter la base prise par l'auteur du mémoire pour défendre la doctrine contre les conclusions déplorables tirées plus tard d'un animisme exa- géré. « En bonne critique, il faut juger une doclrine non par ses con- séquences extrêmes, mais par celles-là seulement que son auteur a avouées (1). » Nous croyons, nous, Messieurs, que celle réserve ne peut s'appliquer qu'au jugement porté sur l'homme, mais que la doctrine est responsable de ses conséquences, bien que souvent l'au- leur ne les ait pas aperçues. Avec ces prémisses, les bonnes inten- lions juslifieraient trop de systèmes funestes, dont les consé- quences ont échappé à des auteurs d'une science ou d'un jugement imparfait. L'auteur, du reste, s'attache surtout par des citations bien choi- sies à nous montrer avec quel esprit d'observalion, quelle étude de naturaliste et quel talent d'écrivain, Bernier soutient les thèses les plus controversées. Mais il n'adhére pas pour cela, à la certitude des eonclusions lirées par l'ingénieux gassendisle. Nous approuvons celle réserve que sans doute nous eussions portée plus loin encore. Cela fait, permeltez-nous de choisir quelques-unes des plus char- mantes cilalions. Elles vous feront connaitre l'esprit de Bernier et surlout sa méthode. Veut-il appuyer de quelque probabilité Рате sensitive végétale, il réduit la queslion à une curieuse observalion de physiologie bola- nique. « La nutrition et ce sucement d'aliment qui se fait avec choix, » semble marquer quelque sentiment de faim et d'appélit et une » espèce de connaissance sensitive : je dis qui se fait avec choix, car, » qu'un arbre soit disposé de telle manière qu'il ait de bonne terre » d'un cóté et de mauvaise de l'autre, i! ne poussera des racines du » côté de la mauvaise qu'autant qu'il lui est nécessaire pour se sou- (1) P. 12 du mémoire manuscrit. 347 » tenir el s'affermir, au lieu qu'il les poussera bien loin au-delà, en » travers des pierres et des murailles pour aller chercher la bonne. » Outre que ce verd vif, celte joye et celte vigueur qu'elles font pa- » raitre lorsqu'on les arrose et qu'on leur donne leur nourriture après » avoir beaucoup souffert, et cette gayelé printanière qui leur vient » en suite du sommeil de l'hiver, sont des marques de quelque sen- » timent de plaisir, etc. (1). » S'agit-il de l'àme des bétes, vous avez la prodigieuse histoire du hibou qui a donné le cadre d'une admirable fable de La Fontaine : « De plus, le sieur Gaffarel nous a depuis peu assuré qu'un certain » Auguslin réformé, de ceux qui habitent la forét de Fontainebleau, » lui avoit dit que revenant un soir de la promenade à son couvent, » il avoit apperceu un oyseau sorti d'un trou d'arbre qui étoit creux » et percé en deux endroits ; que le lendemain estant allé proche de » l'arbre avec ses fréres pour reconnoistre quel oyseau se pourroil » estre, l'oyseau sortit au bruit ; que taschant ensuite avec assez de » peine de fourrer quelque chose par le trou d'en haut pour voir ce » que c'estoit, ils apperceurent que le trou d'en bas estoit bouché, » et que l'ayant ouvert ils {trouvèrent dedans soixante el dix ou » quatre-vingls souris toutes vives, et des epys de bled pour remplir » deux ou trois chapeaux, mais que toutes ces souris avoient les » cuisses rompues. » Ces souris devoienl apparemment estre la provision du hybou, » qui leur auroit rompu les cuisses de peur qu'elles ne s'en fuissent, » et qui leur auroit apporté des epys de bled pour les nourrir quel- » que temps. cependant qu'il les mangeroit l'une aprés l'autre (2). » On connait assez de quelle manière La Fontaine a tiré la conclu- sion dans la charmante fable du Chat-huant et des souris (3) : Puis qu'un cartésien s'obstine А traiter ce hibou de montre et de machine, etc. Puis vient la gracieuse observation des hirondelles, qui ne serail reniée ni par Bernardin de Saint-Pierre , ni encore moins par Rousseau. « Je me souviens à propos de ce que, me promenant un jour le » long d'un chemin, j'aperçus sur la branche d'un saule assez bas » trois pelites hirondelles nouvellement sorties du nid, qui ne s'eu- » volèrent point quoique je passasse tout proche : retournant sur (1) Philosophie de Gassendi. Т. V, liv, IV, p. 237, 298. (2) Ibid. T. VII, ch. 7, page 674. (3) Livre XI, fable 9. 346 » mes pas el repassant pour la troisième fois par dessous la branche, » j'élendis la main comme pour les prendre, et loul cela ne les fit » point partir. Mais deux grandes hirondelles étant. survenues sur » ces entrefaites, et ayant gazouillé je ne sais quoy, les petits s’en- » volèrent aussitôt. Ce qui me fit juger premièrement que ces grandes hirondelles étaient le père et la mère qui , en les querellant, les » avoient averlis de me fuir comme un de leurs ennemis, et en » second lieu, que la plupart des animaux ne nous fuient que parce » qu'ils ont reçu quelque dommage de nous (1)..... » Nous pourrions y joindre encore la curieuse observation du sa- lut des fourmis (2). Le point capital de la morale gassendiste est de donner le bonheur ou plus textuellement la félicité pour but de la vie. L'auteur de l'étude pour affirmer cette doctrine se contente d'appeler en témoi- gnage Descartes qu'on пе soupconnera pas de partialilé et qui arrive aux mêmes conclusions. Ici, Messieurs, volre Commission, malgré sa réserve sur les questions philosophiques, ne peut passer sous silence une omission sans doule involontaire de l'auteur. Pour nous, il est très philosophique et méme tres chrétien d'accepter la félicilé comme but de nos actions el comme fin de la vie, mais celle félicilé doit élre définie, ne s'appliquer à la vie présente que dans les bornes qu 'imposent nécessairement l'infirmité humaine et la nolion du de- voir, et doit comprendre surlout la vie future. Sans cela, la félicilé pourrait êlre un but monstrueux, et la morale posée sur une pareille base se préterait aux actions privées et publiques les plus contraires au bien et à l'ordre social. Inutile d'ajouter que les définitions et les restrictions omises dans le mémoire sont longuement et nettement accusées dans l'ouvrage de Bernier, et vous nous pardonneriez peut-être celle disgression, si nous vous apporlions en preuve les belles pages 6, 17 et 146 du tome VIII, où il est traité de la Félicité. Enfin, Messieurs, pour étudier complétement notre sage mais libre penseur, il n’eûl pas élé inutile d'analyser son Traité du Libre arbitre et du Volontaire, imprimé à Amsterdam en 1685. A celle date el dans ce pays, l'in-12 de Bernier doit indiquer nettement l'attitude prise par les gassendistes dans la grave et brûlante question du Jan- sénisme. Les philosophes s'en émurent autant que les théologiens, et les questions soulevées par l’évêque d'Ypres ne passionnaient pas moins l'Europe lettrée que la philosophie de Descartes contre Aris- = = (1) Philosophie de Gassendi. T. VI, liv. Ш, p. 308, 309. (2) Ibid. T. VI, liv. Ш. p. 294. 349 tote. Mais cet ouvrage a sans doute manqué à l’auteur comme à nous-méme. Contentons-nous de le signaler, el pour terminer un rapport déjà trop long, hatons-nous de rentrer par la philosophie même dans la question biographique. En 1670, Bernier revenait de ses voyages. Il se trouva à Paris au moment des fameuses luttes pour et contre la philosophie de Des- cartes. La part qu'il y prit fut, vous le savez, de publier l'abrégé de Gassendi; mais pendant les dix années de celte ardente polémique, Bernier fut-il absent ou étranger à l'Anjou? C'était le temps alors des grandes batailles pour et contre Aristote, letemps aussi des persécutions contre la philosophie carlésienne. Angers, vous le savez tous, d’après le savant et attachant Essai de M. Cousin, fut l'un des principaux théâtres de celte lutte acharnée. L'auteur du mémoire pense que ces discussions, qui absorbaient toutes les puissances intellectuelles de l'Anjou, étaient peu propres a y rallacher le disciple et l'ami de Gassendi; peu s'en faut même qu'il ne les trouve arriérées et barbares, et comme telles indignes du Joli philosophe. L'examen de la question, Messieurs, nous conduit à deux conclu- sions diamélralemeut opposées. En voici quelques raisons : M. Cousin s’est grandement servi dans son Essai d'une publication faite à An- gers, vers 1676 à 1677 el qui a pour litre : Relation exacte de tout ce qui s'est passé à Angers, à propos de la philosophie de Descartes. L'exem- plaire possédé par M. Cousin était à peu près unique et fut jugé par lui digne d’être offert à la riche bibliothèque de l'Institut. Par un bonheur qui couronne bien rarement les recherches des biblio- manes, nous eûmes, deux ans après, la chance de rencontrer chez un revendeur de dernier ordre un second exemplaire de ce curieux pamphlet, qu'à notre tour nous offrimes à la ville d'Angers. En relisant dernièrement celte relation, nous nous sommes con- vaincu d'abord de l'importance des questions qu'elle soulève. Digne après 200 ans d'une analyse et d'un important chapitre de M. Cou- sin, la lutte put bien à son heure être digne de l'attention de Bernier. D'ailleurs, la question n'est point entre Aristote et Descartes seuls, mais entre la vieille philosophie de l'école et la nouvelle, représen - {бе par Descartes, mais aussi par Gassendi. Je n'en voudrais pour preuve que les proposilions incriminées dans les fameuses theses des peres Lamy et Villecrose, de l'Oratoire, et professeurs à Angers, ces hardis novateurs contre qui s'élève la tempête. Pour s'opposer à la soutenance de la thèse du père Villecrose, on lui objecte qu'elle contient des opinions erronées, comme celle de l'immortalité de l'àme des animaux. 350 On trouve en effet dans les propositions mentionnées celles-ci : N° 6. Prima principia nihil aliud possunt esse quam Democriti atomi. № 8:962 Immortalis est anima illa quá bellua sentiunt. N° 9. Vel omnino eripiendus est belluis sensus vel referendus est inna- turam malteriá superiorem, nec timendum est animam illis spiritualem adscribere , еі plusieurs autres qui sont les corollaires des pre- mières. La conclusion 10 dit formellement que la proposition 9 n'est pas de Descartes, elle en donne les raisons tout en la soutenant certaine et légitime (1). Le père Bernard Lamy, successeur de Cyprien Villecrose et pro- fesseur à Angers en 1674 el 1675, n'est pas moins animisle. Parmi les proposilions incriminées daus ses cahiers on trouve : № 11. Corpus non sentit, nec dolor est in parte lesa, sed in anima. № 12. Bruta, plante et metalla non differunt nisi diversà partium dispositione, etc., el par le corollaire n? 18, il indique la couleur, cha- leur , elc., comme des accidents des corps et non comme des qua- lités subjectives. La polémique continue de 1672 à 1676 el le père Pelaut, qui suc- céde au pére Lamy, est encore censuré comme fauteur de nou- veaulés (2). Vous le voyez, nou-seulement ces propositions sont gassendistes et non cartésiennes, mais encore la forme, le fond, les développe- ments sont presque la traduction liltérale de l'ouvrage de Bernier. Rappelez-vous l'histoire du hibou, des hirondelles, etc. ; la conclu- sion immortalis est anima illa quá bellue sentiunt, n'y est-elle pas puisée textuellement ? J'ose donc dire que celle lutte dut passionner Bernier,lerattacher à l'Anjou qui soutenail si vaillamment sa thèse. On ne peut le séparer de ses champions dans la bataille, si méme il n'en élait le promo- leur. En effet, le grand acle de Bernier en ces temps, son ceuvre presque capilale, est un pamphlet de vingl lignes, l'Arrét burlesque qui de par Aristote bannit Descarles et Gassendi. Vous savez que celle spi- rituelle et savante salire arrêta le Parlement prêt à condamner par arrêt la philosophie nouvelle. Or, la ville ой fut le plus tót répandu, publié, commenté l'arrét (1) Voy. la Relation : Extrait mot à mot du père Fromentin de l'Oratoire, profes= seur de philosophie, à Angers, de 1672 à 1673. (2) Voy. la Relation exacte. Loc cit, 351 burlesque, la relation nous l’apprend, ce fut Angers, et cela par les soins des fameux novateurs et jeunes gens de l'Oraloire, ces carté- siens maudits par notre Université, qui le connurent si tôt qu'on les en crut auteurs (1). Qui donc les mettait au courant si bien à pro- pos et leur envoyait ce célèbre arrêt tout friand de nouveauté? Élail-ce le supérieur de l'Oratoire, qui conseillait le calme et la pru- dence? le salirique Boileau, peu familier à l'Anjou, ou l'auteur lui- méme, Г Angevin Bernier? Je le retrouve partout, en effet, notre ardent el spirituel philosophe, dans les thèses angevines, dans les allures de la lutte, dans les vers méme composés el publiés à Angers par les gassendo-carlésiens el qui ne sont que 1а paraphrase rimée de l'arrét burlesque. « Ces messieurs, nous dit la Relation exacte, débilérent presque en » méme temps parmi le beau monde de la ville et aux personnes qui » leur élaient plus confidenles, une autre pièce qui peut-être né- » toit pas de leur facon.... On produit ici celle pièce pour faire voir » que les novateurs employoient tout leur esprit à éluder et à tra- » duire en ridicule les puissances qui les combaltoient. » Suit l'arrêt burlesque. Dans la longue pièce de vers que la relation nous a conservée, c'eslencore l’école moderne, la physiologie positive, telle que la com- prend et l’admel Bernier qu'on oppose à l'aulorilé vermoulue de l'école. Ni vos décrets, ni ves censures, Ni vos bruits, ni vos impostures N'arracheront jamais au cœur La prérogative et l'honneur De faire en ouvrier habile Beaucoup de sang et peu de bile. N'empécheront pas que le sang Aille par cent et cent canaux, Et par de semblables ruisseaux, Revienne enfin dedans sa source. Е ас ren Nous ferons (4) Relation. Loc. cit. (2) Relation exacte. 2* partie, 352 Tous les nerfs du cerveau descendre Comme autant d'utiles ressorts Dont se sert pour mouvoir le corps. La verve de l'arrét burlesque ne circule-t-elle pas dans ce pam- phlet angevin? La ville, où l'on défendait avec tant d'ardeur la circu- lation Harveyennne, ne devrait-elle rien de son instruction rapide au médecin philosophe et progressiste qu'elle avait vu nailre? élait- elle si barbare, si indigne de lui? put-elle lui rester étrangère et in- différente? La période philosophique de 1а vie de Bernier se relie donc pour nous à l'Anjou par la parlie capilale de son histoire, par le côté du progrès scientifique, intellectuel et moral, et c'est le point sur lequel l'auteur du mémoire nous parait s'étre pleinement mépris. Il y avait d'ailleurs, en dehors des Lamy, des Coupery, de Ville- crose, bien des Angevins dignes de comprendre leur savant compa- triote : Sigebert, Ménage, Guyet, Deroye, Petrineau des Noulis, De- Jaunay, Frain de Tremblay, Pocquet de Livonniére, Goureau et Tan- neguy Lefebvre, furent ses contemporains. Et quand Guy Patin, le sceptique Naudé et le savant Saumaiseavouent dans le méme temps leurs relalions angevines, nous croyons pouvoir proclamer 1а science, le goût et la dignité de notre société d'alors sans diminuer le mérite de Bernier. Ce mérile, Messieurs, fut celui de démonstraleur, de vulgarisateur par excellence de la philosophie du maître, de sage et habile critique, d'ardent et spirituel polémiste. C'est ce mérite que le mémoire qui vous est présenié mel en lumiére avec conscience et une re- marquable sagacité. Comme il a disculpé le voyageur des reproches mal fondés dont on obscurcit sa mémoire, de méme et plus encore il nous montre le philosophe bien éloigné de toules les exagérations ridicules et dangereuses dont on a rendu son système responsable. Le choix des citations, leur heureux rapprochement, s'ils ne vous rendent pas tout à fait gassendisle, vous font comprendre qu'on peut aimer et défendre cette philosophie, et qu'elle devenait une arme puissante, une base merveilleusement préparée pour un homme qui élait médecin, апаіотіѕіе, physiologiste, observateur et doué surtout d'un implacable bon sens. La philosophie du bon sens, est peut-être un titre un peu mal son- nant el surtout un peu terre à terre, mais il n'est pas sans mérite aux yeux de plus d'un bon juge et c’est celui que le mémoire nous porlerait à donner au système de Bernier. Si donc, Messieurs, après m'avoir pardonné mes incursions bio- graphiques, vous trouvez comme moi que justice soil rendue à Bernier et qu'il nous soit mieux connu, mieux apprécié après lec- ture du mémoire, vous n'hésilerez pas à couronner son auteur. D' E. FARGE Après la lecture de ce rapport et l'adoption des conclusions , M. le vice-secrétaire a été invité à décacheter la lettre jointe au mémoire. L'auteur, M. le docteur Mabille, membre de la Société, a élé pro- clamé lauréat du concours (séance du 9 décembre 1858). Деме, idee debe sikana i + Й Lo | tss | die A PRE А Poets E ped dus ty nd wr los Ке м PPT MENT n. 4 | ^ act ae rime an DATÉE А An TL ak MER кы "dn Ait CM iem cote Mol sedi: ^ Qu | " УУ ТЕЛИ А noy A D eus фий: »"! tout аа И (бо Were: mie Wi GA Pav ging | BE бое: ци; que ce og нй —À < EN LULA e | Z1. ЗИ 270 ken vl mae TABLE DES MATIERES contenues dans le 3° volume DES ANNALES DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DU DÉPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE, Liste des membres de la Société Linnéenne de Maine et Loire............ L'Oiseau, par M. Michelet. M. EUGÈNE BERGER........ .............. Etudes médicales sur les poètes latins, par M. le docteur P. Ménière М: AD LAGHESE 11... «noe соодо оа oie. wis ale se se Catalogue des Coléoptéres, Carabiques et Hydrocanthares trouvés dans le Morbihan , par M. le docteur FOUQUET... ............. ........... Essai sur quelques familles d'Hyménoptéres, par M. A. COURTILLER. . .. . . Description des Chrysides observées aux environs de Saumur, par M. A. (COU Ue ИККЕ К D e orem Rees Coup d'eil sur les richesses mycologiques du nord-ouest de l'Anjou, par E HARANG ЖО E EAM. So ou pr e з... Шут... 2.2 Essais étymologiques sur l'Ornithologie de Maine et Loire, par M. l'abbé СЕНО uelle док с сло io OW Ol кол ОЛ EIC IEEE CR EOS Sur l'Helix aculeata, étude monographique, par M. HENRI DROUET. .... Considérations sur quelques points d'économie rurale et sur les causes qui accélèrent ou retardent le progrès agricole, par M. CHARLES GIRAUD... Description de deux espèces de galles trouvées sur le Quercus pedunculata , par M.-DBoNASOUBEIRAN Reed. ensure Pages, eur ms ees are 204 Rapport sur l'exposition d'histoire naturelle de 1858, par M. AD. LACHESE. 219 Tribulations d'un botaniste, par M. VICTOR PAVIE.. Excursion à la Breille, раг M. AIMÉ DE SOLAND............,........... 230 Description de l Unio Courtillieri, par M. le baron HATTEMANN........... 232 Le docteur Guépin, par M. AIMÉ DE SOLAND .................. Mr oe . 933 Uryptogames de Maine et Loire, par M. AIMÉ DE SOLAND... ....... 5..2 231 Herborisations de 1858, раг M. AIME DE SOLAND..... ......... EE 253 Notice sur la Dreissena polymorpha du département de Maine et Loire, par MS Л DE IOANNIS ЕУ 258 Etude sur les Nayades du département de Maine et Loire, par M. L. DE JOANNIS RE АИА. EUR ХАМА. Cet E IA FIF ans oet 261 Notice sur le Triton variegatus , le Pupa granum, le Planorbis levis et la Succinearanenaria раг M- We DE JOANNIS. Е 296 Notice statistique sur la chasse et les animaux nuisibles en Maine et Loire, рагам hws WAIN. С Эу А АЛДА el ren Eee tae tet eae TS 299 Remarques sur la notice précédente par M. le docteur FARGE........... 301 Notice sur un gisement d'ossements fossiles de la commune de Noyant, par MADEPAGENEMRAVE (oie cede c ce DNE LEE 304 Les Fourmis maconnes , par M. DELAGENEVRAYE............... to 0 Revue minéralogique de l'arrondissement de Saumur, par M. DELAGENEVRAYE. 912 Une course aux îles d'Houat et d'Heedie, par M. LÉON SOUBEIRAN... .... 318 L’électricité à l'exposition de 1858, par M. EDMOND DE CONTADES......... 324 Concours de 1858. — Eloge de Francois Bernier. — Rapport de la commis- sion. == M. E. FARGE, ODDO M. RE э À СЕЕ Angers, Imp. €osnier ei Lachese. E — ب‎ c ROSE “جج‎ LE d'a ж” - ККА cx. id t SOLS Er PO D РЗ, 2 Sg anes s, F, T y 5 а Iris Aei f ШУРО > =, A Vm аа ni, 5 : а ^ СА enm E: Y ы E 5 2 * made yt » 1 “сне gr Ы ^ A ~ = ^ ef ر‎ 1 el ^ pose pa et 1 3 > ا‎ nd ам. › ^ > 2 2 PE TA Par Jr + „теже نر یھ کک‎ ARS VERSES IET 5 ; UC Roe Res area RS eo PAR Жынсы SRE 3 С Бон = Я ty and NS eer Faget жы Pha rm y Te Wu ed ae 8 р отаона Ee ue RO RNA а КҮ E ARE RE ARR RC PASS Sa 4 e ^2 Ue PSS ree D rn E ne CR RIT DES RAS CARS ne PUS SE EN ачасына т —— +. CA Le. Eae ب‎ PS PUS QUES PR PS e ES Xe d т, A ORCI y n KEERT E Ty OTN OES онно C e eI УЧ өү азу? сата ORE Pm atm EN tgs BOOED pre rea te hgh oe cue PAS С ын A Pr quaa tes RES EPS С . ur КОРИ ee Tr ACE E Pd Р um See 2 eee Sate Oro s EI mt 52 е) рате обе RE NUS Era 5 А ر س وک س کے کے کے ےک کک‎ Кг PORTES TER RP Gares SEE LT RAT RER TRE NT TT PR АЕ EI e HR Se PRES : RES ee 2 rm. 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