LPS CE ré DRE rx en, CR. LS Su 2 _vE ! h _ . 2 … nr ù a : - CE CNT . k : LA - + L) sq É Éd 3 , = u s * * > . ; … LI " = ni \ Æ « 1 … h 2 È _ La ‘ : Ÿ ANNALES DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE | À # SCIENCES , ARTS ET COMMERCE ee DU PUY He TOME XXII. — 1859 Ge , LE PUY Cho il 1} M.-P. MARCHESSOU , IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ Fee , inf Û 9 À — Boulevard Saint-Laurent, 23 4e (Q MDCCCLXI ANNALES SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DU PUY ANNALES DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE SCIENCES , ARTS ET COMMERCE DU PUY TOME XXII. — 1859 LE PUY M.-P. MARCHESSOU , IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ Boulevard Saint-Laurent, 23 MDCCCEXI Nota. La Société n'entend garantir les faits ni adopter toutes les opinions consignées dans les Mémoires que ren- ferment les Annales. Le Puy, imp. MakcnEssou. PROCÉS-UERBAUX DES SÉANCES DE L'ANNÉE 1839 a RE SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 6 JANVIER. SOMMAIRE Doxs au Musée : Grand modèle en plâtre de 1a statue de La Fontaine par Julien.— Ancien mors de cheval.—Ouvraces REÇUS : Procés-verbaux du Conseil général de la Haute-Loire, session de 1858—Revue des Sociétés savantes ; MM. Ber- trand de Doue et Aymard noumés membres Correspondants du Comité d'histoire et de la langue. — Revue archéologique signalant PA bu photographique de M. Malègue. — NécroLocrr : Hommage à la mémoire de M. Félix Pradier, architecte du Musée, — Acricucrure : Comaunication de la commission dite des Céréales; MM. Souteyran, de Fontpertuis, Plantade, au sujet de l'échelle 10bile. — Rapport de M. du Garay sur l’assolement des jardins potagers. — HisToire : Rapport de a. Hippolyte de Vinols sur un ouvrage de M. de Bastard, intitulé : Vie de Jean de Ferrières, vidame de Chartres. — PERSONNEL. DE LA SOCIÉTÉ * Candidature de M. Sarlandie ; nomination d’une Commission. * Présidence de M. Aymard, vice-président. La séance est ouverte à trois heures moins un quart. —Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal, qui est adopté sans réclamation. TOME XXII, L RÉSUMÉ DES SÉANCES. LA Doxs au Musée. — Le Président annonce à l’Assem- blée que le modèle en plâtre de la statue de limmortel fabuliste La Fontaine, qui décore le péristyle du palais de l’Institut de France, à Paris, a été déposé provisoi- rement, par les soins du conservateur du Musée, dans la salle des collections d'histoire naturelle. On sait que ce modèle est de la main de notre illustre compatriote le sculpteur Julien. Dans ce plâtre, qui est comme le premier jet de la pensée de ce grand artiste, on remar- que encore les clous indiquant, en termes d'art, la mise au point qui a servi à l'exécution d’un chef-d'œuvre de la sculpture moderne. La pose du poète, assis contre le tronc d'un arbre, son air méditatif, sa bonhomie proverbiale sont rendus avec un rare bonheur d’ex- pression. Jusqu'au renard qui est à ses pieds, tout vit, tout respire dans ce groupe de grandeur naturelle qui, non-seulement comme objet d’un grand prix, mais aussi comme un pieux souvenir, est une bonne fortune pour notre Musée. Nous devons d’abord des remerciments à l’adminis- tration municipale qui à bien voulu faire les frais, assez considérables, du transport et de l'emballage de cette pièce capitale que le Gouvernement a cédée à la ville du Puy pour le Musée. Elle était en dépôt dans une des salles de l'Ecole des beaux-arts; elle y avait été transportée probablement du Louvre, où l’on sait que Julien avait son atelier. Il a donc fallu avoir aussi l’au- torisation du conseil d'administration de l'Ecole et de son secrétaire-général, M. Vinit: cet habile adminis- trateur connait la valeur de nos collections artistiques, dignes d’une grande ville ; aussi a-t-il montré en faveur JANVIER. 5 de notre Musée des dispositions telles, que nous devons lui en rendre grâces. En cette circonstance, nous de- vons encore beaucoup à l’obligeance de M. Tournois, chef de bureau au Ministère d'Etat (division des beaux-arts), qui à fait expédier sans délai l’autori- sation de faire enlever la statue. Cest à M. Aymard, vice-président, que revient l'initiative des premières démarches heureusement terminées à Paris, aux der- nières vacances, par le secrétaire M. Béliben, aidé d'un jeune peintre notre compatriote, M. Louis Jouve, de la rue Raphaël. M. Aymard fait hommage à la Société d’un ancien mors de cheval, trouvé au château d’'Esplantas, au nom de M. le docteur Tardieu, de Saugues. OuvRAGES REÇUS. — Parmi les ouvrages et les publi- cations reçues par la Société, M. le Président signale un beau volume qui lui est adressé par le Préfet, M. Emile Paul de Rostan. Il à pour titre Conseil général, session de 1858, et ren- ferme le rapport du Préfet avec ses annexes et les pro- cès-verbaux des délibérations du Conseil général, ainsi que l'analyse des vœux des Conseils d'arrondissement et du Conseil départemental. Cet ouvrage intéresse notée Société à plus d'un titre. Le rapport de M. le Préfet, dont le Conseil général à voté l’impression en tête de ses procès-verbaux, est l'expression éloquente et fidèle de la situation des divers services et des besoins des populations du département. Plusieurs questions qui 4 RÉSUMÉ DES SÉANCES. ont occupé notre Société y sont traitées avec l’auto- rité d’un talent éprouvé. L'état de l’agriculture dans ce pays et tout ce qui se rattache à cette source princi- pale de la fortune publique éxcite surtout l'attention et les sympathies du premier magistrat du départe- ment. Sur ce sujet, sa parole vive et précise apporte d'excellentes appréciations. La statistique et l'ensei- gnement agricoles, les récoltes de l’année, les instru- ments perfectionnés, le drainage, le reboisement et la pisciculture, les races chevaline et bovine, le syndicat obligatoire appliqué aux chemins ruraux, la police de la pèche, ete., y sont l'objet de vues nettes appuyées sur des faits bien établis et sainement appréciés. M. Paul de Rostan n'a garde d'oublier, dans son rap- port, ce qu'il appelle la so/ennité agricole qui se pré- pare pour ce département, à l'époque de 1860, fixée pour le Concours régional, et il fait un appel au zèle de la Société qu'il encouragera en vue des résultals extrémement avantageux à l'agriculture que promet le Concours régional. C'est ainsi, qu'en plusieurs en- droits de ce livre, M. le Préfet exprime toute sa sym- pathie pour les travaux de notre Société, reconnaissant que c'est surtout à l'impulsion active et dévouée de cette Société qu'est dù le progrès qu'il remarque dans l'agriculture du département. «En outre, ce rapport rend encore justice à nos {ra- vaux dans l’économie publique, dans les sciences physiques et historiques, les beaux-arts et les lettres, et signale les résultats obtenus dans Les fouilles archéo- logiques faites au nom de la Société d'agriculture du Puy. JANVIER. D Dans les annexes du discours de M. le Préfet se trouvent des pièces justificatives dont la lecture serait écoutée dans cette enceinte avec un vif intérêt. Je veux parler du rapport annuel sur notre Société et son bud- get, écrit, cette année, par M. Ayvmard, vice-président, en l'absence de M. le Président; de celui de l'archi- viste du département, encore de M, Aymarä; de celui de M. Chouvon sur les résultats obtenus à la ferme qu'il dirige avec tant de succès et de talent. Les procès-verbaux des délibérations du Conseil général, qui sont la deuxième partie de cet ouvrage, nous font connaître tout le dévoûment et toute la dis- tinction avec laquelle notre Société était représentée dans les Conseils du département par quelques-uns de ses membres. M. Delmas, membre correspondant, fait hommage à la Société d’un travail sur la géologie de l'Ardèche. M. le Président signale encore, parmi les ouvrages recus, la Revue des Sociétés savantes, éditée sous les auspices du Ministre de l'Instruction publique. Ce numéro renferme la liste des membres correspon- dants du Comité qui siége au Ministère, parmi lesquels nous lisons les noms de MM. Bertrand de Doue et Aymard. La Revue archéologique du 15 novembre, 15° année, dans un article consacré à Album photographique d'archéologie religieuse, rend hommage aux talents des auteurs de ce beau travail, digne à tous égards, 6 RÉSUMÉ DES SÉANCES. dit la Revue, des encouragements que le Gouverne- ment accorde aux belles publications qui honorent la France. NÉCROLOGIE. — Avant de passer aux questions indi- quées par l'ordre du jour, M. le Président entretient l'Assemblée de la mort de M. Félix Pradier. Tous les hommes généreux de cette ville éprouvent de vifs re- grets de la perte prématurée de ce digne artiste, au cœur bon et loyal. Architecte de la reconstruction de notre Musée et de la fontaine Crozatier, il a été cruel- lement traité; car il est tombé avant de voir se réali- ser entièrement les plans auxquels il avait consacré tant d’études et tant de veilles. Mais son nom ne périra pas ‘ nous avons sa pensée tout entière, qui inspirera sans doute ceux qui seront chargés de continuer son œuvre et auxquels il laisse en même temps l'exemple du travail et du désintéressement. Le Secrétaire de cette Assemblée a déjà été l'organe du sentiment public, dans cette occasion, dans le journal la Haute-Loire. AGRICULTURE. — L'ordre du jour appelle une com- munication de la commission extraordinaire dite des céréales. , En l'absence de M. Charles Calemard de Lafayette, qui avait bien voulu se charger de rendre compte des travaux de la commission, M. Souteyran donne à l'As- semblée les renseignements suivants : La commission, après avoir pris connaissance de la lettre de M. Doniol père, et en avoir mürement déli- béré, a été unanime dans sa détermination, qui est un JANVIER. 7 ajournement ainsi motivé: {° ilne parait pas opportun à la commission d'appuyer auprès du Gouvernement le vœu relatif au rétablissement de l'échelle mobile, vu que dans ce moment les tableaux d'importation des céréales donnent, pour la France, un chiffre tout-à- fait insignifiant, tandis que l'exportation s'opère dans d'assez grandes proportions ; 2° la commission a pensé que la Société d'agriculture ne devait pas se hâter d'in- tervenir dans une questien qui paraît préoccuper au plus haut degré l'administration du pays. On ne saurait nier que le Gouvernement n'ait les yeux ouverts sur la situation de nos marchés, si désastreuse pour l’agricul-- ture. Sa vigilance est vivement excitée au sujet des questions qui touchent à l’économie publique. Un acte récent, le décret impérial sur la boulangerie, vient d’or- donner l’'approvisionnement, par les boulangers, d’un grand nombre de villes. Ainsi, pour la seule ville du Puy, nos marchés auront à fournir 45,000 doubles dé- calitres de blé dans un femps asséz limité; et inévita- blement, pendant quelque temps, la demande dépassera l'offre et le prix des grains retrouvera une fermeté au moins momentanée. Il faut donc attendre le résultat de cette mesure. Qui sait ce que le Gouvernement pourra faire encore pour concilier les intérêts, si opposés en apparence, du producteur et du consom- mateur ? A l'appui de ces conclusions, M. de Fontpertuis fait remarquer qu'à l'échelle mobile se rattachent de grands intérêts internationaux ; elle est une entrave à la liberté du commerce; elle tient par des rapports intimes à la question du libre-échange, qui est un des 8 RÉSUMÉ DES SÉANCES. plus vastes problèmes que puisse soulever cette science née pour ainsi dire d'hier, mais appelée à des desti- nées brillantes, et qui s'appelle l’économie politique. Jusqu'ici, les gouvernements qui, en France, se sont succédé n'avaient guère demandé leurs inspirations qu'aux usages, aux traditions, et la méthode empiri- que, celle des expédients, était l’ornière qu’ils suivaient de préférence. Aujourd'hui il faut marcher avec le progrès et demander des conseils de prévoyance aux théories scientifiques, auxquelles appartient le pouvoir de les donner. Au moment où le Gouvernement semble se recueillir sur ces questions vitales et paraît vouloir sortir de la routine, pour entrer dans la voie de la science et de la vérité, il serait prudent d'ajourner toute détermination. Cependant M. Plantade, que ses occupations ont em- pèché de prendre part aux travaux de la commission, considérant le côté purement pratique de la question, et devant l’abaissement du tarif de nos mercuriales, si nuisible à la production et partant à la ‘richesse publi- que, demande que la Société ne mette aucun retard à intervenir auprès du Gouvernement dans le sens d’une protection urgente à accorder à l’agriculture menacée. Il ne demande pas le rétablissement de l'échelle mo- bile. En ce moment les grands problèmes de la science des économistes le touchent peu, ses visées ne portent pas si haut; mais il voit l'agriculture en souflrance et il pense qu'il y aurait {out avantage à invoquer le con- cours du Gouvernement. Dans ce but, il propose à la Société d'adopter l'expression d’un vœu qu'il formule ainsi : JANVIER. 9 La Société d'agriculture du Puy, Vu le décret en date du 50 septembre 1858, et l’instruc- tion ministérielle y relative ; Attendu que si ce décret a pour principal objet de parer aux éventualités d’une disette, M. le Ministre, dans l’in- struction qu'il a adressée à ce sujet, se préoccupe de l’état de souffrance de l’agriculture et des moyens de la soulager ; qu'il laisse même percer l'intention d'entrer plus avant dans cette voie ; (1) Attendu que les hommes d'Etat ne sauraient porter leurs préoccupations sur un objet d’une actualité plus utile et plus urgente ; S'empresse d'adresser à M. le Ministre le témoignage de sa reconnaissance et fait des vœux pour que l’agriculture trouve, dans la persévérante sollicitude du Gouvernement, un soulagement à cet état de choses, sinon un remède complet. F Le Président met aux voix la proposition de M. Plan- tade, qui n’est pas généralement accueillie, par le motif que font valoir quelques membres, que la proposition formulée par M. Plantade ne répond pas tout-à-fait à la question soumise aux délibérations de la commis- sion dite des céréales et dont l’objet spécial était de savoir si la Société, conformément à la demande de M. Doniol, appuierait d’un vœu le rétablissement de l'échelle mobile. L'Assemblée s’en tient aux conclusions A) On y lit: Le Gouvernement ne s'exagère pas l'importance de cette mesure. 10 RÉSUMÉ DES SÉANCES. de la commission qui sont, non pour le rejet, mais pour l’ajournement et pour de nouvelles études de cette question. Dans les ouvräges d'agriculture, M. le Président signale un nouveau procédé de conservation des ruehes pendant l'hiver. Il le renvoie à l'examen de M. Chouvon. Conformément à l’ordre du jour, M. du Garay aîné donne lecture du rapport suivant sur l’assolement des jardins potagers. MESSIEURS , Chargé par M. le Président, dans notre séance du 4 no- vembre, d'analyser un extrait publié dans le Journal de la Société d'horticulture du Bas-Rhin, le 4er août 1858, sur l’assolement des jardins potagers, je viens, Messieurs, vous rendre compte de mes observations. M. James Rogers , l’auteur de cet extrait, nous indique un système détaillé complétant les conseils qui se trou- vent dans tous les ouvrages d'agriculture sur les divers as- solements à adopter, parce qu'il est rare que les auteurs qui s’oceupent d’horticulture présentent quelques données à cel égard. L'assolement étant sans contredit dans l’agriculture la base principale d'une bonne culture, puisqu'il à pour but de faire produire au sol le plus de denrées et les meilleures possible sans l’épuiser, il faut, avant tout, JANVIER, 11 se bien pénétrer de son importance, puis établir et adop- ter ce qui convient le mieux soit au climat, soit au sol, soit enfin aux débouchés. On arrivera ainsi à de bons et de grands résultats, surtout si l’assolement est pratiqué sur une lerre bien travaillée avec un engrais abondant et beaucoup d'eau. Le système présenté consiste à diviser le terrain à eul- tiver en six parties égales, sur lesquelles on peut obtenir, en un an, treize récoltes sans gêner en aucune facon la cul- ture de l’année suivante, Voulant savoir si les résultats qu'obtiennent nos marai- chers étaient au-dessous de ceux qu’on a obtenus dans le Bas-Rhin, je leur ai demandé quel était leur genre de culture et quels étaient leurs produits. D'après ce qu'ils m'ont répondu , je puis dire qu’au Puy la culture des jar- dins potagers est aussi avancée et même plus que dans le Bas-Rhin. La plupart de nos jardiniers ont l'habitude de diviser leur terrain en six carrés comme le recommande M. Ro- sers. Je n'indique pas son système d’assolement parce que je préfère celui de nos jardiniers, dont les résultats dé- passent ceux qui nous sont signalés , puisqu'ils ont de 15 à 16 récoltes sur les 6 divisisions au lieu de 13 ; mais il ne faut pas perdre de vue qu'il faut fumer après cha- que récolte pour arriver à ce résul{at. Vous voyez ainsi, Messieurs , que nos jardins potagers, cultivés avec discernement, donnent tout ce que la terre peut produire, et qu’il n’est pas nécessaire alors d’indi- quer un nouveau genre de culture ; mais il n’en est pas de même pour les jardins des particuliers et des gens de la campagne, qui sont excessivement négligés. Les proprié- 12 RÉSUMÉ DES SÉANCES. taires devraient commencer par leur donner l'exemple et pour cela prendre des conseils auprès de nos jardiniers. Leur profession est si ancienne dans le Velay, que l’on peut dire qu’elle existe de temps immémorial. Cette pro- fession se transmet ordinairement de père en fils, ce qui fait supposer qu’elle est assez lucrative, car ordinairement le fils regarde comme au-dessous de lui de continuer l'é- {at qu'a exercé son père. r Il est incontestable que ce genre de culture est loin d’être resté stationnaire, et c’est l’assolement qui a le plus contribué à ce progrès. La meilleure preuve que j'en puisse donner, c’est que la cartonnée de 169 toises s’afferme 40, 50 et même 60 franes, ce qui porte l’hectare de 600 à 900 franes, et malgré ce prix élevé, nos jardiniers vivent dans l’aisance et se font quelquefois une petite fortune. IL est donc inutile que j'entre dans de plus grands dé- lails sur le système présenté par M. Rogers, puisque nos maraichers ont une méthode aussi bonne et même meilleure. Ce rapport, rempli d'observations pleines d'intérêt, a été écouté avec attention. SCIENCES HISTORIQUES ET ARCHÉOLOGIQUES. — L'ordre du jour appelle la lecture d’un rapport de M. Aymard, en réponse à une communication de M. l'abbé Bernard sur le municipe Arisido. La parole est ensuite donnée à M. Hippolyte de Vi- nols qui, dans un article favorablement écouté, nous JANVIER. 15 donne une intéressante appréciation d’un ouvrage de M. de Bastard, ainsi intitulé : Vie de Jean de Ferrières, vidame de Chartres, seigneur de Maligny. Ce rapport , sera inséré dans les Annales de la Société. MESSIEURS , Le livre dont M. Léon de Bastard vous à fait hommage a pour sujet l’histoire d’un homme qui consuma sa fortune et sa vie dans les luttes religieuses du XVIe siècle. Quoique rarement nommé par les historiens, Jean de Ferrières, vi- dame de Chartres, seigneur de Maligny, n’en fut pas moins un des hommes les plus importants du calvinisme, qu'il servit également de sa plume et de son épée. Or, M. de Bas- tard, en retraçant la vie de ce guerrier diplomate, est venu apporter de nouveaux éclaircissements sur ces Lemps né- fastes où l'énergie des passions religieuses se traduisait en luttes sanglantes. | La partie La plus saillante et en même temps la plus in structive du livre est le récit des négociations du vidame auprès de la Reine d'Angleterre et de l'Electeur palatin. Le mauvais succès de la conjuration d'Amboise avait provoqué une réaction qui, habilement exploitée par les Guises et la reine-mère, mettait en péril l'existence des réformés. Ceux ci, pour relever leurs affaires, ne trouvèrent rien de mieux qu'un appel à l'Etranger. Ils suivirent en cela l'exemple des catholiques qui avaient déjà sollicité le roi d'Espagne. Le prince de Condé chargea le sire de Maligny d'aller de- mander à Elisabeth des secours d'hommes et d'argent. La marche de ces négociations, qui produisirent le traité 14 RÉSUMÉ DES SÉANCES, d'Hamptoncourt, est exposée par M. de Bastard avec netteté et précision. Les détails dans lesquels il entre, les docu- ments nombreux qu’il cite ou qu’il reproduit donnent à son œuvre un caractère véridique et consciencieux que les écrivains de nos jours sacrifient trop souvent aux séduc- tions de la forme et au triomphe de leurs idées person- nelles. La correspondance diplomatique du vidame, reproduite en longs fragments, fait connaître d’une manière intime quelques personnages célèbres de ce temps-là, et dépeint la situation précaire dans laquelle se trouvaient les agents du calvinisme, même auprès des cours qui étaient favora- bles à leur cause. Le caractère indécis du prince de Condé s’y montre à nu: les lettres de son négociateur sont rem- plies de conseils et parfois de plaintes sur l’insouciance du prince et sur le coupable dénuement où on le laisse lui- même. Outre l’infériorité de son chef, le diplomate avait encore à combattre les difficultés matérielles que susci- taient autour de lui les agents de Catherine de Médicis. Il natteignait son but qu’à force d’habileté et d’abnégation. Les affaires privées de Jean de Ferrières se ressentaient des orages de la vie publique. Dans cette partie de son livre, M. de Bastard mentionne, sur les mœurs de l’état social du temps, des faits que les histoires écrites sur un plan plus vaste laissent ignorer. Le vidame, deshérité par son père pour s'être fait calviniste, ne parvint qu'avec peine à en- trer en jouissance de l'héritage de sa mère, Louise de Ven- dôme, qui lui donnait le droit de s'appeler vidame de Chartres, titre affecté à cette illustre maison. 11 s’efforca, par des protestations secrètes et des ventes simulées, de soustraire ses biens à la confiscation décrétée {contre lui = JANVIER. 15 pour le fait de ses intrigues en Angleterre. Mais ce qu'il arrache aux atteintes de la justice royale est détruit par la guerre. Catholiques et huguenots ruinent ses seigneuries en cherchant à les prendre ou à les conserver. Un désordre aussi profond suffirait seul pour montrer dans quel état de faiblesse la royauté était tombée sous les derniers Valois, mais rien n’est plus significatif que le fait suivant. Charles IX et la reine-mère, soupconnant que Jean de Ferrières était, comme son frère, le jeune Maligny, un des instigateurs du complot par lequel les calvinistes vou- laient s'emparer de Lyon, ordonnèrent à Tavannes, gouver- neur de Bourgogne, de l'arrêter dans son château de Maligny où il se trouvait alors. Le gouverneur n’osa point exécuter l’ordre, et un simple gentilhomme4qui n’était ni grand vassal, ni grand officier de la couronne, retranché dans son manoir avec quelques hommes d'armes, bravait impunément cette aulorité royale que Louis XI et Fran- çois Ier avaient faite si absolue. Quelques années plus tard, le vidame résiste à main armée au lieutenant criminel de l’Angoumois; il s'échappe, après avoir soutenu un siége en règle contre les gens du roi. La loi, le droit, l'autorité étaient également méconnus, et ce beau royaume de France allait disparaître au milieu des passions politiques et religieuses, si la main puissante du plus grand des Bour- bons ne l’eut arrêté dans sa ruine. M. de Bastard a su tirer un livre instructif, une œuvre sérieuse d’un sujet en apparence peu fécond. En faisant re- vivre un nom presqu’ignoré, il montre que, parmi ces hommes qui menaient au combat les dévoyés de l'Eglise, Coligny, d’Andelot, Duplessis-Mornay n'étaient pas les seuls capables de sacrifier au triomphe d’une idée leur repos, , 46 RÉSUMÉ DES SÉANCES. leur fortune et leur vie. Le style de l’auteur est en tous points conforme à la nature de son sujet. Il réunit les deux qualités que doit rechercher le chroniqueur aussi bien que l'historien : la clarté et la simplicité. Le choix et l’abon- dance des documents dénotent des recherches aussi étendues qu'intelligentes ; en un mot, l'œuvre entière peut servir de modèle aux travaux qui, il faut l’espérer, couronneront quelque jour les efforts de votre commission des recherches historiques. PERSONNEL DE LA SocIÉtTÉ. — M. Gâtillon écrit à M. le Président pour l'informer qu'ayant cessé d'habiter la ville du Puy, il remet dans ses mains son titre de mem- bre résidant et sollicite en même temps la qualité de membre non résidant. M. Sarlandie des Rieux écrit pour solliciter le titre de membre résidant. Avec sa thèse de licencié en droit, il adresse un travail sur ce sujet : De l'influence jéné- rale des Sociétés d'agriculture. M. le Président nomme une commission chargée du rapport sur la candidature de M. Sarlandie. Elle est ainsi composée : MM. de Fontpertuis, Chouvon et du Garay aîné. A cing heures la séance est levée. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 3 FÉVRIER. SOMMAIRE. v Apres la lecture du procès-verbal, M. le Président entretient la Société du voyage qu'il a fait à Givors où il a accompagné Mgr de Morlhon, pour faire cesser le dissentiment élevé entre le sculpteur et :e fondeur de la statue de Notre-Dame de France ; quelques détails sur la réception faite par Sa Majesté Napoléon II à Mgr l'Evêque du Puy. — AGRICULTURE : M. le Président remet en déliberation la question de l’echelle mobile qui est renvoyée à un nouvel examen de la com- mission dite des céréales ; extension de cette commission et plein-pouvoir à elle accordé par la Société. — Nouvelle espèce de pomme de terre; planta- tion de ce tubercule. — Drainage : Utilité du drainage au point de vue de l'hygiène publique ; ses heureux eflets sur la mal die du goître dans quelques localités. — Arboriculture : Des essences d'arbres les plus favorables à la séparation des héritages. — SCIENCES HISTORIQUES : Document sur la prise de possess.on d'un canonirat de l’église de Notre-Dame du"Puy par le prince Hum- Lert, dauphin du Viennois, communiqué par M. l'abbé Sauzet. — Lecture d'un mémoire sur le nom des habitants du Velay, par M. Aymard. — PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ : Admission de M. Sarlandie des Rieux au titre de membre rési- dant, «près un rapport de M. de Fontpertuis, — AnmixisrraTion : Lecture de quelques propositions émanées du conseil d'administration. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. A trois heures, M. le Président ouvre la séance. — Selon l'usage, le Secrétaire donne lecture du procès- TOME XXIL. 2 18 RÉSUMÉ DES SÉANCES. verbal de la dernière séance. — IL est adopté sans réclamation. M. le Président prenant ensuite la parole, s'excuse de n'avoir pas assisté à la dernière séance. Le motif qui l'en a empêché n’est pas étranger aux plus chères préoccupations de la Société. M. le Président a accom- pagné Mgr de Morlhon à Givors et à Paris dans l’in- térèt de l’œuvre de Notre-Dame de France. A Givors, il s'agissait de mettre fin au dissentiment qui s'était élevé entre l'artiste auteur de la statue et le fondeur, au sujet de leurs attributions respectives. M. Prenat ne voulait admettre de la part du sculpteur d'autre contrôle que celui qui porterait sur l’ensemble de la statue amenée à son entier achèvement. Se retranchant derrière sa responsabilité , il prétendait faire ajourner tout examen de détail, et déniait à l'au- teur lui-mème le droit de s’immiscer dans l'opération mème de la fonte. Mais M. Bonassieux soutenait, non sans raison, qu'il lui appartenait de surveiller, où par lui même ou par son représentant, l'exécution suecces- sive des différentes parties de son œuvre; que ses conseils et son contrôle portant tour-à-tour sur cha- cun des détails de ce vaste monument, seraient bien plus efficaces et plus opportuns qu'au moment de la livraison définitive de la statue. Enfin l’heureuse et bienveillante médiation de Mon- seigneur de Morlhon, assisté de notre Président , à fait évanouir les obstacles et cesser les conflits ; et rien ne s'oppose plus à ce que, pour l’époque promise, l'image de la Vierge s'élève radieuse sur le rocher Corneille. FÉVRIER. 19 À Paris, il importait de connaître la nature des doutes élevés sur la solidité du piédestal déjà construit et du rocher qui le supporte. À ce sujet, le conseil des bâtiments civils n'ayant pu produire de conclu- sion définitive, M. le Ministre de l'Intérieur, suffi- samment édifié par le rapport de M. de Gisors, archi- tecte envoyé en mission spéciale pour venir vérifier l'état des choses, a rendu à la commission sa liberté d'action. ù Monseigneur l’évêque du Puy ne pouvait quitter Paris sans renouveler ses remerciements à l'Empereur qui, par le généreux don des canons pris à Sébastopol, a rendu immédiatement possible l'exécution d'un pa- reil monument. Monseigneur a été assez heureux pour entretenir longtemps le chef de l'Etat. Sa Majesté à accueilli avec affabilité un dessin photographique de la statue, que M. Charles de Lafayette lui a présenté. Elle à également témoigné à plusieurs reprises de toute sa sympathie en faveur de cette œuvre à la fois patrio- tique, artistique et religieuse, une des plus remar- quables de ce temps. Sa Majesté enfin a exprimé à notre éminent prélat combien elle serait heureuse d'assister à la fète d’inauguration, dans le cas où les circonstances le lui permettraient. Cette communication du Président, rendue dans le procès-verbal d'une manière sommaire, a vive- ment intéressé l’Assemblée. AGRICULTURE. — M. le Président, en présentant une analyse rapide des publications reçues par la 20 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Société, fait remarquer que les Revues agricoles se préoccupent des souffrances de l’agriculture provenant de l’abaissement du prix des céréales. La plupart de ces publications se sont rendues l'or- gane des Sociétés d'agriculture qui demandent avec instance au Gouvernement une protection efficace. Dans le département de la Haute-Loire, autant que partout ailleurs, l’agriculture à besoin d'appui. Dans cette conjoncture, M. le Président, après avoir pris l’avis de la Société, déclare qu'il réunira pour un jour très-rapproché, qu'il fixe mème au dimanche suivant, la commission permanente dite des céréales ; elle aura à décider si, à l'exemple des Sociétés d’agri- culture, notre Société n'a pas un vœu à formuler au- près du Gouvernement pour la protection des intérêts agricoles-en ce moment compromis. M. le Président croit devoir augmenter le nombre des membres de la commission et ajouter les noms de MM. de Brive, Chouvon, de Vinols Louis, Paul, à ceux de MM. le Président de la Société, Souteyran, de Fontpertuis, Balme, Plantade , Giron-Pistre. La Société consent en outre à s'en rapporter aux décisions de la commission ainsi recomposée. M. le Président signale une nouvelle pomme de terre, venue de semis dans les jardins de M. Lebrun, qui à déjà créé les variétés appelées Comice d’A- miens, la Généreuse et la Ferme picarde. C'est la Ren- neville, du nom d'un homme qui était un des plus émi- nents agronomes du département de la Somme. Son apparition est annoncée avec éloge par le journal de FÉVRIER, 21 la Société impériale et centrale d'agriculture, numéro de décembre 1858, p. 800. Le même numéro contient un rapport sur la planta- tion de la pomme de terre, d'où il résulte que la plan- tation de tubercules entiers, à un seul œil, réunit les conditions les plus avantageuses, la semence pouvant ainsi braver la sécheresse beaucoup mieux que de simples rondelles à un seul œil, qui cependant ont donné des produits plus considérables. LS Drainage. — Ya Revue des Sociétés savan tes, dans un article de la troisième livraison de septembre 1858, signale une très-bonne et très-inattendue application du drainage dont on ne sait pas assez apprécier tous Jes bienfaits dans ce pays. Dans un canton de la Lor- raine, au bord d’un marais tourbeux de 161 hectares où domine la marne irisée , se trouve la petite ville de Rosières, chef-lieu de canton de 2,300 âmes. Près du cinquième de la population, plus de 400 personnes étaient atteintes d’une fort triste infirmité, celle du goître. M. Perrot, membre de la Société d'agriculture de Nancy, entreprit de combattre ce fléau , et comme le constate le rapport du comité d'hygiène et de salu- brité publique du département de la Meurthe, il a ob- tenu des résultats qui ont répondu à ses constants efforts et à son dévoument éclairé. Au moyen d'un drainage complet et bien suivi, il est parvenu à dessé- cher le marais, et joignant à ce moyen préventif les moyens curatifs, distribuant lui-même l’iode aux ha- bitants atteints de la maladie, tantôt en substance à l'état de teinture administrée à l’intérieur , et tantôt 22 RÉSUMÉ DES SÉANCES. à l’état d'iodure, employé en friction sur le cou des enfants , il est parvenu d'abord à préserver toute la jeune génération et même à guérir la plupart des malades. La Revue des Sociétés savantes ajoute que M. Perrot a pratiqué cette médication sur une grande échelle, sous la surveillance du médecin du canton, et grâce au concours des instituteurs; et qu'il à été secondé par un ancien fonctionnaire de l'Université, M. Maire , ancien maître d'étude du lycée de Nancy. Arboriculture. — Au moment où le Gouvernement s'occupe avec activité d'un projet de code rural que les intérêts agricoles réclament avec instance , M. le Président fait observer qu’il serait opportun de savoir quels seraient pour la séparation des héritages les ar- bres qui pourraient être le plus utilement employés , quelles seraient les essences qui, par leurs racines ou leur ombrage causeraient le moins de préjudice aux récoltes. M. le Président pense que la question mérite d'être étudiée et il la confie aux lumières de M. Limozin, sous-inspecteur des eaux et forêts, Secré- taire-adjoint de la Société. SCIENCES HISTORIQUES. — En qualité de membre de la commission des recherches historiques, M. l'abbé Sau- zet fait à l’Assemblée une communication écrite qui est l'analyse d’un document historique à la date de 1339, faisant partie des titres de la maison de la Tour du Pin. Ce document, qui intéresse au plus haut point l'his- toire ecclésiastique de notre pays, a été extrait des FÉVRIER. 25 archives de la préfecture de Valence. M. Sauzet le doit à l'obligeance de M. de Chaulnes Gabriél, attaché à la préfecture de la Drôme. Cette pièce ancienne est le procès-verbal authentique de la prise de possession d’un canonicat de l'église Notre-Dame du Puy, par le prince Humbert, dauphin du Viennois (1). M. Aymard äonne ensuite lecture d'un fragment d’un mémoire considérable plein d'érudition, sur les transformations successives du nom des habitants et du pays du Velay. PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ. — Le dépouillement de la correspondance achevé, M. de Fontpertuis donne lecture du rapport suivant sur la candidature de M. Sarlandie. MESSIEURS , M. Sarlandie, secrétaire particulier de M. le Préfet de la Haute-Loire, a sollicité d’être admis au nombre des mem- bres résidants de notre Société. Il a présenté à cet effet et comme titre d'admission un travail intitulé : De l'influence générale des Sociétés d'agriculture. Nous avez nommé, conformément au règlement de la Société, pour l'examen (4) Voir le Bulletin des recherches historiques. — Juin 1859. 24 RÉSUMÉ DES SÉANCES. de ce travail, une commission composée de MM. du Garay, Chouvon et moi. Je viens, en qualité de rapporteur, vous présenter nos appréciations sur ce travail et notre conclu- sion sur la candidature de M. Sarlandie. Notre futur collègue (permettez-moi d'anticiper sur votre décision) constate d’abord l'importance économique de l’agriculture. Il nous montre tous les gouvernements préoceupés de ses progrès et rappelle à ce sujet le mot de Colbert, auquel on a imputé cependant une prédilection aveugle pour l'industrie : « L'agriculture est la mère-nour- rice de la France. » Mot qui me paraitrait bien être, ne fût-il pas authentique comme il l’est, le mot d'un grand ministre et qui me rappelle la parole de Sully, dans ses Economies royales : Le labourage et le pâturage sont les deux mamelles d’un Etat. La même pensée se retrouve sous la plume et dans la bouche de Turgot, un autre grand homme d'Etat, de Quesnay et de tous les physiocrates ; au point que ces hommes d'élite professaient la doctrine, sinon que la terre était la seule source de la richesse pu- blique, du moins qu’elle en était la première, la généra- trice de toutes les autres, s’il m'est permis d’user de cette expression, et qu’ils la tenaient comme la seule base rai- sonnable et juste de l'impôt. Négligée sous quelques-uns des gouvernements qui ont suivi 4789, moins par la faute de ces gouvernements peut-être que par la faute des circonstances, la cause de l’agriculture a été reprise de nos jours avec éclat et persévérance. L'Empereur Napo- léon IE ne fait au surplus que continuer, à cet égard, les traditions du gouvernement de son oncle l'Empereur Na- poléon Ier. Mais, dans l’œuvre sociale, les gouvernements n’ont FÉVRIER. 29 qu'une part et une fonction déterminée. Ils ont le droit de dire aux citoyens : Aidez-vous, je vous aiderai, En ce qui concerne l’agriculture, nous paraissons avoir compris celle nécessité, et l'on peut se féliciter de la réaction qui se manifeste en sa faveur. « Le premier effet de cette réac- tion à été, disais-je dans une autre enceinte, le premier effet de cette réaction a été le perfectionnement des mé- thodes agricoles, la percée de l’épaisse couche de préjugés el d'ignorance dans laquelle nos cultivateurs ont trop longtemps vécu. Là ne s'arrêtera point ce mouvement, et l'on verra l’agriculture solliciter de plus en plus l’activité d'hommes jeunes et capables, le capital se lasser de dé- serter une source de production qui l’implore et à laquelle il fait tant défaut. Les bras suivront le capital, » Depuis que j'ai écrit ces lignes, si le manque de bras a continué de se faire sentir, si les populations rurales ont continué d’obéir à l'attraction qui les pousse vers les villes, la mé- canique agricole est venue rétablir l'équilibre, en partie du moins, et remplir un rôle inconnu jusqu'ici aux machines. Dans l’industrie, les inventions de Watt, d’Arkwright, de Philippe de Girard, de Jacquard et de tant d’autres, bien- laisantes dans leur principe et leurs résultats généraux, quoi qu’en ait dit l'ignorance, ont eu pour effet immé- diat de rendre du travail disponible pour un instant. De là des perturbations qu'ont étudiées, de là des souf- frances auxquelles ne sont pas restés insensibles les écono- mistes les plus convaincus — et l’on me permettra de me ranger parmi eux — de l'excellence du principe de la liberté du travail, du commerce et de l’industrie, Les ma- chines agricoles, loin d’éloigner les bras, les ont au con- iraire suppléés, 26 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Le mouvement dont je parlais tout-à-l'heure, il appar- tient aux Sociétés d'agriculture de le féconder, elles qui l'ont en grande partie provoqué. « Fertiliser la terre, » détruire la routine, recommander les procédés utiles « qu'on néglige ou qu’on ignore, augmenter ainsi la for- » tune publique, en augmentant la fortune privée : c’est » Ta une belle mission qui doit irrésistiblement tenter » tout homme ayant le sentiment du beau, l'amour du » bien et le dévoûment à son pays. En agissant ainsi, vous » ne travaillez pas seulement au bien-être physique du » peuple, vous contribuez encore à son développement » moral. » Ces dernières paroles sont de M. Sarlandie. Il attache, vous le voyez, comme nous tous ici, une double importance à la prospérité de l’agriculture. Il voudrait que les efforts des Sociétés d'agriculture fussent assez heu- reux pour retenir le paysan sur la terre et pour lui rendre le travail plus facile, moins incertain et plus productif, en même temps que ces efforts, concurremment avec ceux des autres forces sociales, tendent à élever son niveau moral, à développer son instruction, à polir ses mœurs et ses habitudes. But difficile et élevé, mais qui n’est pas au-dessus du dévoñment des Sociétés d'agriculture. « Vous ne négligez » rien, en effet (c’est encore M. Sarlandie qui parle) pour » améliorer la culture et la condition physique et mo- » rale des populations rurales ; vos Sociétés, assemblées » d'hommes pratiques et dévoués, multiplient les expé- » riences, publient le résultat de leurs observations, » perfectionnent, inventent ou propagent des instruments » destinés à remplacer les bras que l’industrie nous en- » lève, enrichissent nos champs de plantes nouvelles et FÉVRIER. 27 » nos fermes d'animaux étrangers : des concours s’orga- » nisent, des expositions fréquentes entretiennent le zèle » et provoquent l’'émuation ; l’agriculture, enfin, sous vos » intelligents et symp thiques efforts, devient de plus en » plus en honneur, comme aux jours antiques où, avec la » guerre, elle était le seul exercice digne des hommes » libres. » Aujourd’hui, Messieurs, l'exercice d'aucun art, d'aucune industrie n’est réput indigne de l’homme libre. Watt et Guttemberg, la machine à vapeur et l’imprimerte, ont dé- trôné la force brutale. La terre est néanmoins restée la mère nourricière, Magna parens frugum ; l'agriculture, une des plus nobles parmi le occupations humaines. Ce sentiment parait à chaque ligne du travail de M. Sarlandie. Si j'ajoute que dans ce travail, ainsi que vous avez pu déjà en juger par mon analyse et les extraits que j’en ai tirés, si j'ajoute que dans ce travail l’auteur à fait preuve du talent d'écrire, réuni à la justesse des pensées et des vues, vous sanc- tionnerez volontiers la proposition que la commission vous fait par mon organe, d'admettre M. Sarlandie au nombre de nos membres résidants. Après cette lecture , écoutée avec intérèt, a eu lieu le vote, au scurtin secret, à la suite duquel M. Sarlandie a été proclamé membre résidant de la Société. ADMINISTRATION. — L'ordre du jour appelle le compte- rendu de l’état financier de la Société. Il est donné par M. l'agent comptable, 28. RÉSUMÉ DES SÉANCES. M. Plantade, rapporteur du conseil d'administration, donne lecture de plusieurs propositions émanées de ce conseil et qui toutes ont été favorablement ac- cueillies par la Société. | A six heures, la séance est levée. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 10 MARS. SOMMAIRE. Doxs au Musée : Poterie gallo-romaine donnée par M. Hector Falcon. — Tableau ‘'e calligraphie offert par M. Rabaly, directeur de l'école Normale primaire. — OUVRAGES REÇUS : Mandement pour le carême, de Mgr de Morlhon. — Annales scientifiques de l'Auvergne : Monnaies du Puy et Rapport de M. En- jubault sur PHistoire des classes rurales. — Bulletin monumental : Opinion de M. Ch. C. de Lafayette sur la conservation des collections épigraphiques. — Thèse pour le doctorat en médecire, par M. A. Vissaguet. — Procés-verbaux du Congrès scientifique de France, 24° session, tenue à Grenoble ; Section d'agriculture présidée par M. de Brive. — Prologée ou de la formation et des révolutions du globe, de Leign12, par M. le docteur Bertrand de Saint- Germain, — AGRICULTURE : Vœu formulé à l'occasion de la question de l'échelle mobile. — D'un rapport de M. Chouvon sur des expériences comparées de semences de fioment. — Rapport de M. Balme sur un ouvrage de M. Mones- tier, concernant les inondations. — SCIENCES HISTORIQUES : Du eartulaire de l'abbaye de Chemalières, par M. Pabbé Bernard. — Beaux-Arts : Des tableaux de M. Thuillier, du Centaure et du Lapithe de M. Barye, d’après M. de Brive. — SociËTÉS SAVANTES : Congrès scientifique de France, 26° scssion. — Pir- SUNNEL DE LA SOCIÉTE : Demande d'admission de M. Vinay ; Nomination d'une commissionz Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. A trois heures, M. le Président ouvre la séance. — Lecture et adoption du procès-verbal de la dernière séance. 50 RÉSUMÉ DES SÉANCES, Doxs au MUSÉE. Sur le bureau sont placés deux fragments de poterie rouge gallo-romaine, dite sa- mienne, avec figurines en relief, d’un assez beau des- sin. Elles ont été trouvées sur la plaine de Rome, près le Puy, par M. Hector Falcon, qui en fait hommage au Musée, par l'organe de M. Aymard. On remarque aussi beaucoup un grand tableau con- tenant le nom des membres de la Société, avec de belles enluminures à la plume et qui est un vrai chef- d'œuvre de calligraphie, exécuté à l’école Normale pri- maire de la ville. Par l'intermédiaire de M. Béliben, M. le Directeur l'offre en hommage à la Société, comme une marque de gratitude pour les encouragements que le cours d'agriculture pratique, nouvellement institué à l’école, a reçus de la Société. Il espère que ce souve- nir resserrera encore les liens qui unissent, dans ce pays, l'instruction primaire à la Société d'agriculture. M. le Président accepte avec plaisir l'hommage de M. Rabaly et charge le Secrétaire de le remercier de ces bonnes dispositions et de le prier d'y persister, ne pouvant en attendre que de bons effets pour la diffu- sion de l’enseignement agricole dans le département. OUVRAGES REÇUS. — Parmi les publications et les ou- vrages reçus par la Société, M. le Président fait remar- quer : 0 le Mandement de Monseigneur l’Evèque du Puy, pour le carème, dont le sujet, traité avec tout le talent qui distingue le digne et éminent prélat, pasteur de ce diocèse, roule sur l’œuvre de la propagation de la Foi ; MARS. 51 20 Les Annales scientifiques de l'Auvergne, renfer- mant une dissertation sur les monnaies frappées en Auvergne à toutes les époques, et dans laquelle se trouvent des monnaies du Puy; par M. F. Mioche, membre correspondant de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont. Ces Annales contiennent en outre un rapport de notre collègue, M. Enjubault, à l'Académie de Cler- mont, sur l'Histoire des classes rurales, par M. Henri Doniol. L'ouvrage, que M. Doniol a présenté comme ütre d'admission dans notre Société, est jugé dans ce rapport comme le mérite le talent de son auteur et cette imagination vive, ce sens droit qui distinguent le rapporteur, M. Enjubault , 3° Le Bulletin monumentil, de M. de Caumont, où se trouve relatée l'opinion que M. Ch. Calemard de La- fayette fit prévaloir dans une séance générale du Con- grès des Sociétés savantes qu'il présida, au sujet de la conservation des collections épigraphiques ; 4° Une Thèse pour le doctorat en médecine, dont fait hommage à la Société un jeune docteur que re- commandent de longues et de sévères études, M. Adrien Vissaguet, qui a traité avec succès de la cautérisation de l’épiploon, selon la méthode d’un éminent docteur de Lyon, M. Bonnet, bien connu dans notre pays el qu'une mort prématurée est venue arrèter dans une brillante carrière ; 5 L'ouvrage contenant les procès-verbaux de la ?e section de la 24e session du Congrès scientifique de France, tenue à Grenoble, au mois de septembre 1857. Nous aimons à trouver dans ces procès-verbaux 52 RÉSUMÉ DES SÉANCES. l'inspiration d’un de nos plus dignes et honorables col- lègues, M. de Brive, qui eut l'honneur, en qualité de Président, de diriger les travaux de cette section, sans contredit la plus importante de tout ce Congrès, et par le nom des membres qui la composaient, et par la na- ture des questions qui y furent traitées. Ainsi la ques- tion des inondations, qui nous préoccupe si fort, y a été débattue avec talent et sous toutes ses faces par de savants interlocuteurs, tels que MM. Emile Gueymard, ingénieur en chef des mines en retraite, de Ribbe, Mahias, Second, Crespe, Adrien Séneclauze, Robiou de la Tréhonnais, Paul Gariel, Reynaud, de Caumont et le Président de la section. La statistique agricole, la ques- tion «le l'écobuage, des engrais et du chaulage, la cul- ture de la betterave, du trèfle, du sorgho, le drainage, le crédit agricole, la sulfatisation des bois, toutes ces matières y ont été l’objet d'études neuves, approfon- dies et qui font de l'ouvrage où elles sont consignées, un livre intéressant et utile. La Société doit être heureuse de la haute justice rendue à celui de ses membres qui la représentait si honorablement à Gre- noble, et elle apprendra avec plaisir un dernier détail. M. Paul Gariel, secrétaire de la Section, répondant à la dernière allocution du Président et se.rendant l'organe de ses collègues, remercie (sic) M. deBrive de la direction sage, ferme et éclairée qu'il a su imprimer aux délibé- rations de la section, direction qui lui a permis de por- ter la lumière sur le plus grand nombre de questions posées par le programme du Congrès ; 6 M. le Président signale enfin un livre ayant pour titre : Protogée, ou de la forination et des révolutions MARS, 35 du Globe, par Leibnitz. Cet ouvrage, traduit pour la première fois, est de M. le docteur Bertrand de Saint- Germain, un de nos compatriotes. La traduction de la Protogée de Leibnitz est précédée d’une Introduction qui n'est rien moins que l'histoire de la géologie de- puis les temps les plus anciens, ceux de Moïse, de Pla- ton, etc., jusqu'à nos jours. Cet ouvrage, qui mérite d'être soumis à l'examen de M. Bertrand de Doue, qui est dédié à M. Elie de Beaumont, un des Secrétaires perpétuels de l’Académie des sciences, et à4M. Marrot, inspecteur général des mines, a été adressé en hom- mage à notre Société, par l'organe de M. le Président, qui s'est réservé le soin de remercier M. le docteur Bertrand de Saint-Germain. AGRICULTURE. — L'ordre du jour appelant une com- munication de la commission extraordinaire dite des céréales, M. le Président donne lecture du vœu formulé dans le sein de cette commission, vœu qu'il a déjà transmis à Son Excellence M. le Ministre de lAgricul- ture et du Commerce, d’après les pleins pouvoirs que la commission avait reçus de la Société à cet effet. La Société d'agriculture, sciences, arts et commerce du Puy, émue des doléances unanimes qui se sont produites dans son sein, ou qui lui parviennent de toutes parts sur les souffrances de l’agriculture, et vivement pr éoccupée de ce qu ‘il y à de désastreux dans l’avilissement toujours croissant du prix des céréales, a cru devoir nommer une commission chargée de formuler et de transmettre à Son TOME XXII. 5 RÉSUMÉ DES SÉANCES. ES Excellence Monsieur le Ministre de l'Agriculture et du Commerce de respectueuses observations sur cette question capitale. La commission convaincue, comme la Société, de toutes les sympathies du Gouvernement pour les intérêts agricoles, n’a pas douté que Monsieur le Ministre ne fût disposé à accueillir avec bienveillance, comme élément d'une utile enquête sur les besoins et les intérêts de chaque localité, l'expression des vœux qui se produisent en ce moment dans le sein de toutes les associations agricoles. En conséquence, elle prend la liberté d'adresser à Son Excellence l'extrait ci-joint de ses délibérations : « Considérant que la suppression du système dit de l'échelle mobile livre l'agriculture francaise à toutes les chances d’une concurrence par trop inégale et fatalement ruineuse : » Qu'un tel état de choses, en se prolongeant plus long- temps, ne saurait manquer de décourager complètement les cultivateurs, d’enrayer presque subitement la tendance aux progrès agricoles, partout si manifeste aujourd’hui, grâce notamment aux heureuses iniliatives de l'autorité supérieure elle-même ; » Que cette déprécialion aurait infailliblement pour ré- sullat de faire amoindrir, dans une notable mesure, la proportion des emblavures en faisant reconquérir à la jachère une large part de ce qu’elle à perdu dans ces derniers temps, au grand profit de notre production natio- nale ; « » Que, le travail agricole de la sorte amoindri, on verrait se développer encore cette tendance à l'immigration des populations rurales vers les grandes agglomérations MARS. 59 urbaines dont se préoccupent, à si juste titre, les écono- mistes et les hommes d'Etat ; » Que l’ouvrier agricole ainsi délaissé chercherait vaine- ment, sans doute, à trouver dans l’industrie la compensa- tion permanente de son travail perdu ; qu'il serait livré tout au moins à toutes les vicissitudes douloureuses du chômage intermittent et aux suggestions anti-sociales de l'oisivelé ou de la misère ; » Que, d'autre part, la diminution qui réswterait très- prochainement, dans la somme totale de nos récoltes, des nouvelles conditions de découragement et d’impuissance créées à l’agriculture pourrait évidemment compromettre un jour les plus sérieux intérêts de la consommation, et mettre un grand pays comme Ja France, si heureusement apte à se suffire en toutes choses à lui-même, à la merci de l'étranger ; » La Société d'agriculture du Puy constate que le prix actuel des céréales est, pour la Haute-Loire, notablement inférieur à la moyenne des prix de revient. » En conséquence, elle croit urgent, ne füût-ce que pour rendre aux transactions la sécurité et la sincérité qui leur sont si nécessaires, de revenir, dans le plus bref délai, au système de l’échelle mobile, remanié, si l’on veut, dans quelques-uns de ses détails et simplifié dans ses bases. » Le département de la Haute-Loire, en ce qui le con- cerne, le département de la Haute-Loire, dont l’industrie agricole est le principal et presque le seul instrument de vie, s’alarmerait vivement, et, la Société croit pouvoir le dire, s'alarmerait à bien juste titre de Ja prolongation du statu quo tout aussi bien que de l'incertitude qui pourrait durer encore en cette matière, A plus forte raison regarde- 56 RÉSUMÉ DES SÉANCES. . rait-il comme véritablement désastreuses, comme pouvant porter le coup le plus funeste à l'avenir agricole du pays, des tendances économiques qui, faisant sur l’agriculture leurs dangereuses expérimentations et proclamant plus ou moins radicalement l’imprudent principe de toutes les franchises commerciales, détournerait, d’une façon peut- être irremédiable, de l'agriculture déjà si cruellement éprouvée, les capitaux et les bras. » Dans le dessein d'appeler sur ces considérations, à ses veux si pressantes, toutes les sollicitudes du Gouvernement, la Société d'agriculture du Puy charge son Président de les transmettre sans retard à Son Excellence Monsieur le Mi- nistre de l'Agriculture. » M. le Président ajoute qu'il a dû, d’après l'invitation qu'il en avait reçue dans le sein de la commission, transmettre la rédaction de ce vœu au Journal d'agri- culture pratique, et il l’a fait en adressant à M. Barral la lettre suivante : MONSIEUR LE RÉDACTEUR EN CHEF, J'ai l'honneur de vous transmettre copie de la délibéra- tion adressée à M. le Ministre de l'Agriculture , au sujet de la question des céréales, par la Société d'agriculture du Puy, Société qui représente les intérêts agricoles du dépar- tement de la Haute-Loire tout entier. Me permettrez-vous, Monsieur le Rédacteur, d'ajouter qu'à notre connaissance un grand nombre d'hommes prali- C2 MARS. 51 q'ies el sérieux , accoutumés à voir en vous un défenseur aussi habile qu'autorisé de leur grande cause, s’étonnent de trouver dans votre journal, d’ailleurs si dévoué et si juste- ment apprécié, une indécision, des préventions peut-être, qu'il est permis de regarder comme bien fâcheuses dans la question dont il s’agit. Les conditions de l’impôt et de la main-d'œuvre en France ne suffisent-elles pas à créer pour l'agriculteur français une situation complètement à part, en vertu dé laquelle la concurrence étrangère et l'égalité sur le marché deviennent immédiatement ruineuses ? Après l'enquête ouverte dans vos colonnes , on a malheu- reusement déserté, faute d'éléments suffisants, d’investi- gations concluantes, l’utile étude des prix de revient de l’hectolitre de blé en France. Là est pourtant toute la ques- lion. Si l'étranger peut constamment nous fournir des grains à bas prix, ne füt-ce qu’à 44 fr. l’hectolitre (et il en produira à 6 fr.), tandis que nous ne saurions l'obtenir nous-mêmes au-dessous de 48 et 20 fr., quelles que soient les séductions de la théorie, rien ne pourra déterminer bien longtemps l'agriculteur français à fabriquer du blé pour le vendre constamment à perte, et quand alors les grains étrangers auront à combler un plus grand vide, croit-on qu'ils puissent suffire à tout? eroit-on qu'ils puis- sent maintenir les conditions du bon marché? et serons- nous bien plus près de la solution du problème que lon semble se poser : le pain à très-bas prix? N'entrevoit-on pas des alternations désastreuses de disette avec des prix exorbitants, et de surabondance avee des prix avilis, sui- vant que l’agriculture nationale osera ou n’osera pas tenter un grand effort de production ? 58 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Je sais bien qu’on nous dit dès-à-présent, en le prenant de haut avec nous, et en nous prodiguant des conseils quelque peu dédaigneux : cultivez mieux, vous produirez à meilleur marché. Mais est-ce donc à dire que produire à un prix de revient comparativement élevé soit la preuve absolue d’une infériorité digne de flétrissure? Sont-ce les hommes éminents par l'intelligence et par le cœur, les hommes voués comme vous-même aux interêts du progrès en tout genre , qui songeront jamais à déplorer que l’agriculteur français employant des bras libres soit obligé de rémunérer la main-d'œuvre à son prix; que l’ou- vrier ait d’autres exigences de salaire que le serf russe ou l’esclave des Etats-Unis ; que les prix se débattent enfin librement et de gré à gré entre le chef de l'exploitation et ses divers agents? — Si nous avions sous la main les in- struments dociles que donne à d’autres le servage, si les besoins de notre civilisation , de la force et de la grandeur nationales, n’imposaient pas à la propriété agricole des charges supérieures à celles qu’elle doit supporter partout ailleurs, sans doute nous produirions nous aussi du blé à meilleur marché; nous arriverions peut-être à supporter moins impatiemment la concurrence de la production étrangère; nous verrions avec moins de douleur les satis- factions de détail données à nos dépens aux théoriciens sys- tématiques et fantaisistes d’une certaine école économique: Nous trouverions moins dur, enfin, de voir expérimenter sur l’agriculture, tout comme x anim vili, ces systèmes, ces théories moins admissibles encore sur le terrain de l’agriculture que sur celui de toute autre industrie. —Mais est-il bien certain que la France du XIXe siècle fût ainsi moralement et même matériellement plus grande ? MARS. 39 Les économistes ont bien daigné pendant quelque temps, nous le savons, admeltre en faveur de l’agriculture une sorte d'exception, et formuler quelquefois cet aveu, que de toutes les industries c'était elle qui se prétait le moins en France à subir la rigidité de leurs principes. La propriété rurale, M. Rossi veut bien en convenir, recevrait un coup funeste de l’application générale des doctrines de libre- échange. On convient enfin que la libre entrée des produits agricoles étrangers fera déserter la culture, amènera le délaissement, l'abandon à la jachère éternelle de tous les terrains de qualité inférieure ; mais Les résultats généraux, en ce qui concerne l’industrie, notamment, seront si ma- gnifiques qu'il faut savoir subir quelques inconvénients et faire tout fléchir sous la loi des principes. Il semblait cependant permis , en vertu des aveux échap- pés à la bonne foi des théoriciens, d'espérer que l’agrieul- ture serait tout au moins la dernière des industries soumises aux douteuses expérimentations du système. Le système n'aurait dû nous froisser cruellement, nous producteurs agricoles, qu'après que nous aurions ressenti, comme consommateurs, quelques-uns de ses grands avantages. II semblait done bien rationnel, si on voulait absolument faire aux dépens de quelqu'un l'expérimentalion du libre- échange, de commencer par appliquer l'argument , les principes de liberté à l’industrie manufacturière, tandis que nous aurions tâché, nous, d'accomplir encore modes- tement quelques-uns de ces progrès qui nous sont jour- nellement conseillés par d’infaillibles oracles. Cela eût été rationnel sans doute; oui, mais l’industrie , puissamment organisée , sachant grouper ses forces, riche de capitaux, de hautes influences, disposant çà et là d’une large publi- 40 RÉSUMÉ DES SÉANCES. cité, et pouvant par la publicité donner à tous les siens de rapides mots d'ordre, l’industrie, depuis trente ans, ne laisse pas expérimenter sur elle, sans gémir très-haut et sans crier très-fort. Sitôt que d’entreprenants docteurs , pour son très-grand bien, sans nul doute, tentent de la soumettre à leur aventureux régime, elle sait porter au besoin jusqu’au trône ses respectueuses doléances; et c’est ainsi que, faute de pouvoir faire à tort et à travers du libre-échange industriel, on est réduit, comme pis-aller, à faire aux dépens de l’agriculture quelques petits essais dont elle se souviendra longtemps. Pour parler plus sérieusement dans un sujet si grave et pour en finir, un mot encore ! Sans qu'il y ait entre nous, agriculteurs des divers points de la France, aucun con- cert, aucune entente, nous disons tous probablement la même chose; nous répudions d'abord la compétence des agronomes de cabinet, et ceux-là éliminés, quand la pa- role sera donnée aux véritables producteurs, la conclusion formelle de tout ce grand débat sera celle-ci : Plutôt que de vendre longtemps du blé au-dessous du prix de revient, l’agriculture, découragée, se croisera les bras, la propriété agricole deviendra uné valeur secon- daire, les populations rurales, déjà si fatalement entraînées par les séductions décevantes des grandes villes, cèderont de plus en plus à ce dangereux entrainement: nous aurons pour fournisseurs attitrés et rentés par nous-mêmes ceux qui peuvent être demain nos ennemis. Viennent en- suite des circonstances où la France ait à défendre son indépendance ou sa dignité contre un seul ou contre plu- sieurs; la France devra subir ou les exigences hautaines de ses rivaux agricoles devenus ses maîtres, ou les angoisses MARS, LL _— douloureuses de la disette au temps de la guerre: tout cela parce qu'on aura renoncé à protéger en même temps l’agriculture nationale, la production nationale, le tra- vail national ; parce qu’on aura renoncé à sauvegarder la véritable force d'un grand pays qui devait pourtant à son climat et à son génie ce merveilleux privilége de pouvoir se suffire à lui-même, et de ne reconnaître à personne le droit de lui imposer le vasselage fatal de la nécessité. Agréez, Monsieur le Rédacteur en chef, les développe- ments que je me suis laissé aller à donner à cette lettre. Vous y verrez la preuve de la confiance que nous gardons en votre impartialité, et veuillez recevoir en même temps l'assurance de la haute considération avec laquelle j'ai l'honneur d’être votre tres-empressé serviteur. M. de Brive déclare qu'il n’a pu assister à la séance de la commission, mais qu'il donne son adhésion pleine et entière au vœu qui vient d'être formulé. Vient ensuite la lecture, attentivement écoutée , . d'un rapport fait par M. Chouvon sur des expériences essayées à la ferme-école de Nolhac, et relatives aux rendements comparés de différentes semences de blés étrangers et de blés du pays. M. Balme lit le rapport suivant sur un ouvrage de M. Monestier, ingénieur des ponts et chaussées, traitant un sujet d'un intérêt capital, les inonda- tions. 42 RÉSUMÉ DES SÉANCES. MESSIEURS , Un des problèmes les plus difficiles à résoudre qui ja- mais ait été proposé à la science, c’est certes bien celui qui a pour but de trouver un remède efficace au fléau des inondations, Sa solution est-elle même possible? Si l’on considère combien est complexe cette question, qui touche à la terre et à l'atmosphère, combien encore est incertaine la science des lois qui régissent les phénomènes météoro- logiques, on est tenté de cesser toute recherche et de ré- pondre par le mot : #npossible. L'un des plus grands esprits qu'ait enfantés l'humanité a écrit quelque part que ce mot ne devait avoir de sens dans aucune langue, lorsque l'homme était appelé à agir dans les limites de sa sphère, L'Empereur Napoléon IE, fidèle à cette maxime, après avoir visité les désastres occasionnés par l’inondation de 1856, posa la question dans la lettre si remarquable qu’il écrivit à son Ministre des Travaux publics. Non-seulement le sou- verain de la France y posait la question, mais, avec ce génie héréditaire qui vivifie tout ce qu'il touche, il la présentait - Sous un nouveau jour et exprimait le désir qu'elle fût sé- rieusement étudiée, « Je tiens à honneur, disait-il aux lé- gislateurs, qu’en France, les fleuves comme les révolutions rentrent dans leurs lits et qu’ils n’en puissent sortir. » Cet appel fait à la science par une voix si puissante n’a pas été vain, Les ingénieurs des ponts et chaussées, les So- ciétés savantes ont dirigé leurs études de ce côté, et bientôt divers travaux ont été publiés : tous tendent, sinon à faire disparaître les inondations, du moins à en atténuer consi- dérablement les effets. MARS, 15 Parmi ces matériaux entassés par les géants de l'esprit humain pour lutter contre le fléau, me sera-t-il permis à moi, fourmi de l'intelligence, d'apporter un grain de sable pour le joindre à la défense commune? La maxime du fabuliste : = En toute chose il faut considérer la fin, est connue de vous; cela me fait espérer, Messieurs, que vous aurez assez d’indulgence pour m'accorder quelques instants une bienveillante attention, et encourager par là une entreprise peut-être au-dessus de mes forces Un ingénieur des ponts et chaussées, M. Monestier-Savi- gnat, après cinq mois d’études, tant sur le terrain de cinq départements que dans son cabinet, a produit un livre in- titulé: Etude sur les eaux, au point de vue des inonda- lions, avec application au bassin de l'Allier, rivière à régime lorrentiel, affluent de la Loire. L'auteur y indique, pour combattre les inondations, différents moyens qu’il ne considère que comme les avant-projets d’un système plus complet qui se déduira d'observations plus nombreuses et plus générales. Vous rendre compte de l'ouvrage de M. Monestier, vous signaler, parmi les moyens de défense qu’il propose, ceux que l’on pourrait également appliquer au bassin supérieur de la Loire, si analogue à celui de l'Allier, puisqu'il est: vrai que ces deux rivières parcourent une partie de nos montagnes, tel est le but que je me suis proposé. Le livre de M. Monestier se divise en deux parties, l’une théorique, l’autre pratique. Guidé par cette rectitude de jugement que l’on rencontre chez tous ceux qui se sont spécialement occupés de sciences exactes, l'honorable 44 RÉSUMÉ DES SÉANCES. ingénieur à compris qu'avant de proposer un remède à un mal, il fallait en bien rechercher la cause. C'est ce qu'il. entreprend dès les premières pages de cette étude. Pour cela il fallait se rendre compte de l’origine des pluies et des vents, il fallait connaître leur intensité. La méthode expérimentale pouvait seule lui fournir les moyens d’ac- quérir ces connaissances : aussi le voyons-nous compulsant les tableaux d'observations météorologiques publiés par di- verses Sociétés savantes, les comparant les uns aux autres pour arriver à une conclusion qu’il formule ainsi : « Des observaiions, dit-il, tendent à prouver qu'il y aurait dans nos lois planétaires une certaine alternative de périodes sèches et humides. » Et, par l'historique des crues de PAI- lier, il trouve une périodicité décennale. Après avoir déterminé les lois probables qui régissent les phénomènes atmosphériques, il s'agissait de se rendre compte des quantités d'eau retenue, écoulée, évaporée. Nous le trouvons alors, le bâton du voyageur à la main, parcourant nos montagnes, pour étudier la géologie des bassins de l'Allier et de ses affluents, déterminer, d’après la nature des terrains, leur degré de perméabilité et d'hydroscopicité ; faire, à des différentes hauteurs, des ex- périences sur l'évaporation des eaux pluviales; caleuler enfin les débits des différentes rivières. Ces recherches l'ont conduit à admettre ce principe qui, selon lui, doit avoir une certaine exactitude approximative : « Les volumes d’eau des rivières sont proportionnels aux étendues des bassins, aux quantités de pluie et aux coeffi- cients d'écoulement. » Par coefficient d'écoulement, il entend le rapport géo- métrique entre la quantité de pluie écoulée et la quantité MARS. 15 tombée. Telles sont, Messieurs, les lois problématiques qu'il assigne aux causes immédiates d’où proviennent les crues d'eau. A côté de ces causes directes, il existe une série de causes médiates qu’il est également indispensable d'étudier, car elles ont une double conséquence désastreuse; d’une part, elles donnent lieu à l’appauvrissement des eaux bas- ses, de l’autre, à l'aggravation des crues. Je vous ai indiqué leur existence, et déja vous avez désigné la modification de culture, les dessèchements des lacs, marais, étangs, le déboisement, les défrichements, la confection de nombreux chemins. Nouvelle preuve de l’imperfectibilité des choses d’ici-bas, tous ces travaux sont dus à l’état progressif de notre civili- sation, et on les à entrepris sans en prévoir les funestes effets au point de vue des inondations. Faut-il renoncer aux avantages qu'ils produisent et revenir en arrière! Non. Après avoir indiqué le mal que produit chacun d'eux, M. Monestier cherche en théorie le remède que l’on doit opposer. Il le résume en ces termes: « Prolonger les crues torrentielles dans le but de réduire leurs maxima, de ré- gulariser le débit, de faciliter l'écoulement des eaux d’aval et d'éviter l'encombrement des lits inférieurs. » J'en finis avec l'analyse, sans doute trop rapide, de la partie spécu- lative de cet ouvrage, en vous indiquant que dans un cha- pitre spécial vous trouverez les différentes formules à l’aide desquelles on calcule le débit des cours d’eau. On ne peut, Messieurs, s'occuper des inondations sans se rappeler ce beau vers du poète latin : Felix qui potuit rerum cognoscere causos. 46 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Pensée sublime! à la condition toutefois que cette connais- sance profile à l'humanité. C’est ainsi que M. Monestier a compris la mission qu’il s'était imposée. Après avoir par- couru les champs de la spéculation, à la recherche des causes, il est descendu de ces hauteurs et a présenté un faisceau de moyens pratiques à employer contre Îles inon- dations. Ces moyens, il les diyise en trois catégories : en préventifs, mixtes et répressifs. Examinons-les successive- ment dans leur application. Comme moyens préventifs, le savant ingénieur preserit le reboisement de certaines parties des montagnes, la ré- glémentation des vaines pâtures, l'établissement de pacages et prairies, leur irrigation, la délimitation des défriche- ments, différents modes de culture et de labourage, le chaulage et marnage des terres, les murs de soutènement, les bourrelets en terre dans les pentes cultivées, les fossés horizontaux ou à faible pente, les puits d'absorption, le drainage. Il suffit, Messieurs, de parcourir vos publications pour se convaincre que ce sont aussi là vos conseils, en vue du progrès de l’agriculture; vous les trouverez donc d’une application facile pour notre bassin de la Loire. Nous en excepterons cependant les puits d'absorption dont la con- struclion exige un sous-sol très-perméable, qui n’existe presque nulle part dans notre département. Nous ne devons point, Messieurs, quitter cet ordre d'idées, sans vous présenter quelques observations sur le drainage, dont l'emploi est conseillé d’une manière absolue et générale comme remède aux inondations. £ D'importation étrangère toute récente, les bienfaits du drainage en agriculture lui ont promptement fait acquérir MARS. 47 droit de cité en France : une loi spéciale le protége. N’est- il pas à craindre ici que notre caractère, si prompt à se laisser séduire par la nouveauté, surtout lorsqu'elle paraît lucrative, ne nous porte à préconiser son usage d’une fa- çon immodérée. Vous le savez, souvent une chose excellente en soi devient nuisible lorsqu'elle est employée sans discer- nement. La science elle-même est-elle bien fixée sur 4e résultat du drainage, relativement à la rapidité de l’écou- lement des eaux? Certes, le doute à ce sujet est encore permis. Il y a peu de jours, nous avions en main diverses publications où des hommes, dont le nom fait autorité en cette matière, professaient à cet égard des opinions contrai- res. De quel côté se trouve la vérité? Selon nous, ce n’est point ici le cas d'appliquer la maxime « Qui dicit de uno negat de altero. » Bien que ces deux opinions soient diamé- tralement opposées, nous les croyons également vraies et fondées. Pour vous le démontrer, il nous suffira de vous rappeler un principe établi par des expériences constantes, à savoir que le drainage a pour principal effet d'augmenter la perméabilité du sol. Or, qu'arrivera-t-il si on applique le drainage à un terrain déjà fort perméable, peu profond, reposant sur un sous-sol imperméable? Cela est admis en principe, cette opération aura pour résultat d'augmenter encore la perméabilité du sol. D'où la conséquence que les eaux qui arrivaient au sous-sol imperméable, mais qui y arrivaient lentement, s'y rendront avec une très-grande vi- tesse ; que là, trouvant des drains collecteurs, elles s’écou- leront très-rapidement vers Les rivières. Ce terrain, avant d'être drainé, pouvait retenir entre ses molécules une certaine quantité d’eau qu’il enlevait au débit des rivières ; après le drainage, il ne pourra plus la retenir, puisque les 48 RÉSUMÉ DES SÉANCES. eaux passeront à travers le sol comme à travers un crible. Donc, appliqué dans ces conditions, le drainage, au lieu d’être un remède pour les inondations, en augmentera l’in- tensité; et ceux qui soutiennent celte opinion sont dans le vrai. Si, au contraire, on opère le drainage sur un sol peu perméable, mais profond, en partant de ce même principe on obtient un résultat tout opposé. Avant le drainage, les eaux ne pouvaient pénétrer dans le sol, elles s’écoulaient promptement à la surface et venaient en peu de temps donner une grande alimentation aux erues. Après le drai- nage, le sol devient plus perméable, et cela à une plus grande profondeur, et alors les pluies, au lieu de se rendre directement vers les cours d’eau, ne pourront s’y déverser qu'après avoir passé à travers le sol, qui en retiendra une grande quantité. Ceux donc qui pensent qu’il convient de se servir du drainage comme remède aux inondations sont également dans le vrai. Maintenant doit-on dire, drainez toujours, drainez partout? Tel n’est point notre avis ; pour nous, nous dirons à nos cultivateurs: drainez peu sur nos plateaux supérieurs, où le sol est généralement perméable, hydroscope, peu profond et reposant sur un sous-sol imperméable, mais drainez nos coteaux, drainez nos vallées, dont le sol est ordinairement peu perméable et profond. M. Monestier nous apprendra lui-même ce qu’il entend par moyens mixtes. « Sont compris, dit-il, sous la dénomi- nation de moyens mixtes ceux qui ont à trouver des appli- cations, soit pour empêcher la formation des crues dans les rivières, soit pour combattre et atténuer les effets de ces crues supposées formées. » Sous cette définition, il range les digues, levées avec vanne de fond ou orifice ou pertuis MARS. 49 pour réservoirs de retenue pour étangs et lacs, les barra- ges, déversoirs pleins, pour retarder la marche des crues, retenir les alluvions et éteindre les gravières et sablières, les bassins de limonage et de colmatage. Lorsque l’on doit combattre un puissant ennemi, la meilleure tactique à suivre pour vaincre, c’est de ther- cher à diviser ses forces et de les attaquer isolément,. L'ennemi que nous avons en face est des plus redouta- bles; tout ce système de digues ne nous paraît donc effi- cace qu'autant que nous l’appliquerons sur nos plus petits cours d’eau. À l'appui de cette opinion, permettez-moi, Messieurs, de vous rapporter une expérience qui me semble concluante. Ma propriété de Choussiol est séparée de la terre de Poin- sac, appartenant à M. le baron de Veyrac, par un petit ruisseau affluent de la Loire. Son parcours est d'environ trois kilomètres, c’est vous dire qu'aux jours de pluie il reçoit une assez grande quantité d’eau. Sur ses deux rives se trouvent des terrains glissants. Chaque fois qu'il pleu- vait, le petit ruisseau devenait torrent, emportail une cer- taine quantité de terre, creusait plus profondément son lit, facilitait le »lissement du sol. Les progrès du mal étaient si grands que l’on devait craindre qu'il ne finit par occa- sionner des dégâts irréparables ; il était urgent de prendre des mesures pour arrêter ces dévastations. Pour y parve- nir, mon père et M. de Veyrac eurent l’idée de faire con- struire, dans la traversée de leurs propriétés, une série de digues perpendiculaires sur le cours du ruisseau, et dis- tantes les unes des autres de dix à quinze mètres. Depuis 40 ans qu’elles existent, dans toute cette partie les dégâts occasionnés par les eaux ont complètement disparu, TOME XXII. Û 30 RÉSUMÉ DES SÉANCES. l'érosion des rives a été remplacée par des attérissements qui se gazonnent, les glissements de terres sont à peu près nuls. Dans la partie inférieure , où les proprié- taires riverains n’ont pas eu la même précaution, le tor- rent a continué et continue ses ravages ; à chaque nouvelle erue, il leur prend pierres et terres qu’il emporte à la Loire. Un travail de ce genre, étendu, par les soins de l’admi- nistration, aux plus petits cours d’eau, aurait, selon nous, de très-grands avantages. Il serait un remède efficace con- tre les gravières et sablières, produits des érosions des cours d’eau supérieurs; il retarderait la vitesse des eaux, par conséquent leur force ; faciliterait partout la confection des grands travaux projetés sur les principales rivières. Quant à la dépense qu'il occasionnerait, le plus souvent elle pourrait être mise à la charge des propriétaires rive- rains et serait pour eux peu onéreuse. En effet, ces digues sont construites avec des pierres sans mortier, le parement extérieur d’aplomb, vers la base une petite saillie sert à amortir la chute de l’eau. Leur proximité indique qu’elles sont généralement peu élevées. Dans la plupart des en- droits, les pierres, matériaux premiers, sont sur place; les propriétaires n'auraient done à fournir que la main- d'œuvre. Cette dépense serait amplement compensée par la non-érosion de leurs propriétés. Dans les parties du dé- partement où la pierre est rare, on pourrait construire ces digues avec du bois. Les movens répressifs sont, d'après M. Monestier, la ré- gularisation du lit des rivières en plaine, par des revête- ments de berge ou de ligne de rive ; la fermeture des bras; le traitement des plages recouvertes et dépouillées par des MARS. 3 | digues submersibles ; des lignes de rattachement, des plan- tations, des gazonnements; les digues insubmersibles, Les levées de routes et de chemins, le curage, balisage, le draguage. Tous ces moyens s'attaquent plus spécialement aux grands cours d’eau, lorsqu'ils sont entrés dans.les plaines. Ils sont donc peu applicables, dans notre département, aux bassins de la Loire et de ses affluents. Les dépenses que né- cessitent de pareils travaux sont d'ailleurs considérables et on ne peut, chez nous, les laisser à la charge des riverains que dans une minime proportion, surtout si on veut mettre l'importance des sacrifices en rapport avec la valeur des propriétés. Nous devons cependant appeler votre attention sur un de ces moyens, sur les plantations. Dans la Haute-Loire, elles sont en usage le long de tous les cours d’eau, quelle que soit leur force. Le désir que certains propriétaires ont de conquérir quelques centimètres de terrain fait que, par elles, on resserre tellement le lit des eaux qu'il arrive un moment qu'au lieu d’être utiles elles de- viennent une cause de destruction. Témoin l'écluse qui, à l’inondation de 4798, se forma sur la Loire, au pont de Goudet : le pont fut emporté et les propriétés en aval ra- vagées. Et plus récemment encore, les encombrements de bois qui, en 14846, se formèrent sur divers points du Do- laison et de la Borne et occasionnèrent aux propriétés ri- veraines de très-grands dégâts. Sans doute il faut planter le long de tous les cours d'eau, mais il faut aussi avoir soin de laisser un espace suffisant pour le libre cours des eaux. L'autorité devrait donc intervenir pour fixer à quelle distance de l'axe du lit doivent se faire les plantations 52 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Si on veut éviter les affouillements des berges, nous con- seillerions de planter des espèces flexibles que l’on taille- rait tous les quatre ou cinq ans. On vous a signalé avec raison au nombre des causes médiates des inondations la confection de nombreuses voies de communication. Les routes, en effet, ont un sol battu et empierré qui le rend imperméable. Dès-lors les pluies s’amoncellent vite dans les fossés et de là s'écou- lent rapidement vers les cours d’eau. Le remède nous semble iei posé à côté du mal, Ces mêmes fossés, au moyen de pelits barrages placés en travers, de distance en distance, pourraient servir de bassins de retenue et diminuer d’une manière sensible la rapidité de l'écoulement des eaux pro- venant des chemins. Celte étude, Messieurs, devait nécessairement renfermer un aperçu de la législation qui régit les eaux et forêts. Dans cette partie de son ouvrage, M. Monestier nous prouve qu'il a une connaissance approfondie du droit et de la jurisprudence ayant trait à celte matière. La seule critique que l’on puisse lui adresser, c’est sa tendance à étendre, pour cause d'utilité publique, la domanialité de l'Etat. Certes, le Gouvernement, sans attenter aux droits particuliers de chacun, à en main des lois et or- donnances lui conférant un droit de police générale sur tous les cours d'eau bien suffisant pour veiller aux inté- rêls de tous. Enfin nous devons appeler votre attention sur la partie économique de cet ouvrage. Toutes les personnes qui au- ront à faire exécuter des travaux sur les cours d’eau pour- ront y trouver des méthodes de construction réunissant deux qualités essentielles : la solidité et l'économie. MARS. D Tel est en résumé le travail de M. Monestier. La pralique Y chemine toujours côte à côte de la théorie. L'auteur a proclamé qu'il était fervent adepte de l'éclectisme, tous ses efforts tendent à soumettre à cette règle ses recherches. De plus, son livre est écrit avec l’impartialité et la convic- tion que l’on rencontre toujours après des études sérieyises, après des observations faites avec soin : voilà bien des titres pour le recommander à l'attention publique et lui servir d'introducteur dans le monde savant. Avant de finir, permettez-moi, Messieurs, une dernière réflexion. Enseigner dans les livres les moyens d’atténuer les effets des inondations, c’est sans doute faire beaucoup pour le bien public, mais cela ne suffit point; il faut en- core pousser à entreprendre les travaux que nécessitent ces moyens. IL Y à à peine trois ans que le fléau dévastait nos campagnes, renversait nos usines, emporlail nos villes. La terreur qu’il inspirait alors était à son comble, de toute part on réclamait des remèdes pour agir et promptement se mettre à l'abri d’une nouvelle invasion. Depuis, avee le emps, le souvenir des désastres semble s’évanouir el les populations paraissent s'endormir dans une complète sé- curilé, comme si, à chaque instant, nous n'étions pas ex- posés aux mêmes accidents. À voir la confiance générale en avenir, on dirait que Dieu a fait apparaitre un nouvel arc-en-ciel. Le nom sous lequel vous vous réunissez vous établit les sentinelles de l’agriculture. Fidèles à votre consigne, vous veillez dans notre pays à {ous ses intérêts. Répétez donc sans cesse le eri d'alarme. Votre voix rappellera à nos eul- livateurs que le danger, pour s'être éloigné, n'a point dis- Paru. Aidés de vos conseils, ils se mellront à l’œuvre: its 54 RÉSUMÉ DES SÉANCES. exécuteront, dans les limites de leurs ressources, les études dues à la haute et sage prévoyance de l'Empereur. Par vous, Messieurs, ces livres ne seront point lettre morte. * Cette lecture est suivie d'observations présentées par plusieurs membres qui donnent leur pleine adhésion aux conclusions de l'honorable rapporteur. SCIENCES HISTORIQUES. — M. l'abbé Bernard, en pour- suivant le cours de ses recherches dans le cartulaire de l'abbaye de Chamalières, excite de plus en plus la cu- riosité et l'intérêt de la Société. BEaux-aRTs. — M. de Brive fait connaître à la Société, qu'ayant eu l’occasion d'assister à la vente faite à Paris, après décès, des tableaux de M. Thuillier, les toiles, au nombre 'de trois, que possède notre Musée, ne sont nullement inférieures à aucune de ce Îles qu'il a vu mettre aux enchères. Tout même le porte à croire que nous avons un des meilleurs morceaux de cet habile peintre paysagiste, qui aimait tant à reproduire les beaux sites de nos montagnes. La mort est venue don- ner un prix nouveau à ces œuvres, parmi lesquelles il faut remarquer le tableau qui représente Les rochers des gorges de la route impérialë du Puy à Lavoüte. M. de Brive ajoute que l’on commence à apprécier notre Musée. Chez M. Barbedienne, dont il a visité les beaux magasins, qui sont comme une exposition per- manente des chefs-d'œuvre de toutes les époques, il à MARS. D) remarqué une reproduction de notre beau Groupe du Centaure et du Lapithe, de Barye. Là, il a su que M. Barbedienne faisait grand cas du moulage de Ja statue de La Fontaine et qu'il se proposait de la repro- duire un jour. SOCIÉTÉS SAVANTES. — M. le Président met à la dispo- sition des membres qui voudraient représenter Ja Société au Congrès général des Sociétés savantes, le programme des questions qui y seront traitées. Ce Congrès tiendra ses séances à Paris, du 23 avril au 4 mai.* M. le Président annonce que le Congrès scientifique de France tiendra sa 26e session à Limoges, au mois de septembre. Les questions les plus remarquables du programme roulent sur les émaux et les porcelaines. PERSONNEL LE LA SOGIÈTÉ. — M. le Président donne lecture d’une lettre de M. Vinay, qui demande à faire partie de la Société, en qualité de membre résidant, M. Vinay présente pour titre d'admission un Mémoire sur Ja maladrerie de Brives. La commission nommée pour rendre compte des travaux de M. Vinay se compose de MM. Béliben, de Vinols Jules et Paul Louis. Notre honorable ancien collègue, M. Azéma, avait chargé M. Aymard de faire agréer à la Société sa dé- mission de membre résidant et de demander que la 56 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Société voulüt bien lui réserver le titre de membre non résidant. Il a été décidé qu'il serait statué sur cette de- mande et sur une autre semblable, faite par M. Gâtillon, à la séance prochaine. Il est six heures, la séance est levée. Le Secrétaire , BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 7 AVRIL. SOMMAIRE Dons au Musée : Fragments de sculptures ; objets divers. — OUVRAGES REÇUS : OŒuvres de Jean-Georges Lefranc de Pompignan. — Bulletin mensuel dela Sociélé impériale d'acclimatation annonçant une distinction accordée par cette Société à M. de Causans. — AGRICULTURE : Lettre de M. Doniol au sujet de l'échelle mobile ; Observations présentées par quelques membres au sujet de cette lettre sur l'enquête organisée au Ministère de l'Agriculture. — SciENCESs NATURELLES. — Hydrographie : Des petites sources d’eau vive, d’après M. Fournet. — SCIENCES HISTORIQUES : Communication de M. Hippolyte de Vinols sur quelques pièces imprimées à Lyon, concernant la Ligue. — Rapport de M. Béliben, secrétaire, sur le travail de M. Vinay, ayant pour sujet la lépro- serie de Brives; Admission de M. Vinay, au titre de membre résidant. — MM. le docteur Bertrand de Saint-Germain, Azéma, Gatillon sont nommés membres ron résidants. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. L'Assemblée est nombreuse ; on y remarque M. Hedde Isidore, de Lyon, membre non résidant, ancien délégué de l'industrie française, lors de la mémorable ambas- sade de M. de Lagrenéc en Chine, et qui a fait don au 58 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Musée de plusieurs objets curieux recueillis pendant son long séjour dans le Céleste-Empire. Un autre membre non résidant , nouvellement élu, assiste aussi à la séance , M. Chaudier, instituteur pu- blic aux Villettes et placé à la tête d’une vaste exploi- tation agricole qu'il dirige dans le sens des nouvelles méthodes, dans un pays où les progrès en fait de cul- ture ne sont pas avancés ; il est encore l’auteur du rapport agricole adressé à M. l'Inspecteur primaire de l'arrondissement d’Yssingeaux , imprimé dans l’Al- manach de la Haute-Loire, année 1859. A trois heures, M. le Président ouvre la séance et donne la parole au Secrétaire pour la lecture du pro- cès-verbal de la dernière séance, qui est adopté sans réclamation. Dos Au Musée. — M. Aymard fait hommage de quel- ques fragments de sculpture, époque fin du XVe siècle, d’un moulage et d’un petit marbre portant une in- scription tumulaire, provenant de l’ancien prieuré con- ventuel de St-Pierre-le-Monastier au Puy, place du Plot, et trouvés dans la démolition de quelques vesti- ges des édifices religieux qui, avant 89, occupaient l'emplacement du tribunal de commerce actuel, d’une partie de l’hôtel-de-ville et de la halle. M. Aymard offre en outre quelques médailles ro- maines apportées d'Afrique par M. Chorand, membre: non résidant. AVRIL. D9 OGVRAGES REÇUS. — Parmi les ouvrages reçus et pla- cés sur le bureau , M. le Président fait remarquer les œuvres de Jean-Georges Lefranc de Pompignan, évé- que du Puy, acquises par la Société, à la demande de M. l'abbé Bernard. M. le Président signale encore le Bulletin mensuel de la Société impériale zoologique d'acclimatation numéro de février), qui annonce que M. le comte de Causans, notre honorable collègue, a obtenu, au con- cours annuel fondé par cette célèbre Société, une médaille de deuxième classe pour ses succès en pisci- culture. La Société se montre vivement touchée de cette distinction accordée à un de ses membres et pour une institution nouvelle, objet de ses incessantes préoc- cupations. Elle sera heureuse d'apprendre de la bou- che mème de M. de Causans les travaux si bien con- duits qu'il a accomplis dans cette industrie, qui promet des résultats avantageux pour les pays possédant comme le nôtre de nombreux cours d’eau. AGRICULTURE. — M. Limozin, secrétaire-adjoint , donne lecture d’une lettre d'un de nos collègues, M. Henri doniol, sur la question palpitante d'intérêt qui en ce moment divise les agronomes et les écono- mistes. M. Henri Doniol combat le rétablissement de l'échelle mobile avec des arguments écoutés avec une attention religieuse par toute l'assemblée. 60 ° RÉSUMÉ DES SÉANCES. Clermont-Ferrand, le 29 mars 1859. MON CHER PRÉSIDENT, Je viens voter après le vote. Tout tardif que soit mon avis, permettez-moi de l’émettre. En fait la question est toujours pendante dans le pays, peut-être dans l’esprit de plus d’un de nos collègues. En tout cas est-elle encore opportune à traiter ; il s’agit du bas prix du blé et de l'échelle mobile. La Société s’est décidée dans un sens que je regrette, et vous soutenez sa décision dans le journal de M. Barral par des raisons que je ne regrette pas moins de trouver sous votre plume. Vous demandez que l'échelle mobile soit rétablie ; vous le demandez à titre de protection pour la culture. — De longtemps on ne nous protégera jamais trop, nous autres remueurs de terre ; voilà mon premier sentiment et il est conforme au vôtre. Mais je voudrais être protégé autre- ment que par l'échelle mobile et par la douane; voilà où nous allons différer. L'échelle mobile est pour nous le leurre le plus com- plet. Il faut notre peu de lumières économiques et notre aversion endémique en France pour la science de lutile et même pour les informations qui touchent le plus nos intérêts, pour que les agriculteurs se fourvoient ac- tuellement à la suite de cette mauvaise législation. Parce qu’on à vendu ses blés à un bon prix on croit qu’on l’a dû à cette législation; parce qu'on a le vil prix maintenant on croit que c’est faute qu'elle fonctionne. La vérité est que l'échelle mobile ne nous a servi jamais qu’à tirer de AVRIL. 61 notre blé moins que le commerce libre n'aurait fait, Il Y a eu des années, en effet, où l'exportation nous eût donné de grands bénéfices, bien supérieurs à ceux que laissait le prix de vente intérieure ; l'échelle mobile est intervenue pour mettre à cette exportation des droits qui la para- lysaient. Du moins, a-t elle fait monter ou a-t-elle maintenu les prix de vente intérieure, en empêchant d'importer ? Pas un seul jour. En temps de disette on a toujours prudemment suspendu les droits d'entrée; en temps ordinaire elle n’a rien fait pour le prix, par la bonne raison qu’il n’y a pas de pays dont nous puissions tirer du blé à un prix moindre que ceux auxquels l’échelle applique d’abord ses droits d'entrée. Ces blés russes, dont nous avons tous si peur, nous ne saurions les avoir, nous ne les avons jamais eus à moins de 19 à 20 francs à Marseille, et c’étaient des blés très-inférieurs. En ceci tous les relevés de commerce sont d'accord ; il faut oublier ces prix fabuleux de 9 de 140, de 15 francs (vous-même dites encore 6 francs!) dont on se sert pour nous épouvanter. Ces prix ont pu se présenter autrefois, quand l'échelle mobile, existant par- tout, fermait tous les ports et que le commerce, pris à l'improviste, mis en perte, ne devait songer qu'à écouler coûte que coûte. On à vu ainsi, dans les grands entre- pôts, de ces queues de commerce produisant ces prix ex- ceptionnels même dans l’ancien état de choses. Mais dans le nouvel état, quand il n'y a plus que la France et les Etats-Pontificaux pour jouir de l'échelle mobile, ce sont là des prix déduits des conditions supposées du travail rural en Russie ou aux Etat:-Unis, et déduits sans faire acception d'aucun intérêt de commerce dans ces contrées. 62 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Je supposerai, si vous y tenez, que ces prix soient bien supputés, ce que ne permet guère au moins le peu d'accord qu’il y a à leur sujet chez les divers publicistes qui les allèguent, et je vous dirai : ajoutez à cela la hausse que le commerce apporte dès qu’il s'ouvre, et vous aurez pour la moyenne du prix du blé en Russie, depuis que ce pays en vend à l'Occident, un prix minimum de 45 francs pour des blés qui, mesurés au port français, donnent un quart de déchet et sont malgré cela de qualité mauvaise, des blés que, fret payé, on ne peut vendre sans perdre qu'entre 19 et 20 fr. et qu’il faut vendre au moins 4 fr. de plus pour rétribuer les intermédiaires. Pour rentrer dans les faits, ces blés valaient à Marseille, en 14858, 2 fr. 50 de plus que les blés de l’intérieur ; ils valent beaucoup plus à l'heure qu’il est. Ceci pour les qualités médiocres ; c’est bien autre chose si vous voulez les qualités supérieures. Après cela, placez-vous en présence d'une demande un peu active, d’un peu de disette, vous verrez tous les frais s’augmenter par le mouvement naturel qui élève les services à propor- tion qu’on les sollicite; vous aurez tout de suite des prix très-hauts pour ce blé réputé si peu cher ; et cependant il faut y ajouter encore les frais de transport à l’intérieur. Voilà pourquoi les importations récentes n’ont point fait baisser le prix de nos céréales au-dessous de 49 à 20 fr. ; voilà pourquoi l'échelle mobile a ‘été de nul effet ou à peu près contre l'importation. Quand on la eréa, on prédit qu’elle assurerait le bon prix. Voici de cela 59 ans, et dans les 54 années écoulées depuis 4819, où elle a vu le jour, jusqu’à 1855 où elle a cessé d’agir, il y a eu 47 an- nées de mévente, une année sur deux! Telle est la protec- tion de l'échelle mobile pour l’agriculture. Si, d'autre AVRIL, 65 part, l'on prend une période différente, celle de 4832 à 4858, afin de juger des effets d'une importation considé- rable, on arrive à des résultats non moins décevants. L’im- portation porte presque toute sur les années de disette 4855-1857), et vous savez si alors les prix ont été bons, comme nous le disons dans notre inhumanité malheureuse- ment très-excusable ! Eh bien, en répartissant cette grande importation sur toute la période, on trouve un peu plus d’un million d’hectolitres importés par an, ou en chiffres proportionnels le 1/40 de la consommation annuelle, Ce chiffre donne la mesure de ce que serait le régime de la liberté quant à l'importation. Or, tout commercant sérieux vous dira qu'un quarantième est une quantité insigni- fiante pour la variation des prix. Ce chiffre au moins prouve que dans l’état présent de notre culture nous avons besoin d'importer un peu, peut-être pour nous nourrir, mais certainement pour aviver notre commerce, pour l'amorcer çà et là. Faites que ce peu soit imposé en vue de la protection, et vous aurez tout de suite les mauvais effets de la protection : vie chère par insuffisance, consé- quemment ralentissement des affaires, du travail, des con- sommalions : misère. Mais l’échelle mobile a encore un effet, et ce n’est pas le moins fâcheux : elle nous prive d’un commerce de blé permanent, de ces grandes maisons de spéculation de cé- réales comme Livourne, Liverpool, Londres en comptent un grand nombre grâce à la liberté. Ce défaut de grand commerce fixe est une des causes de la grande mobilité du prix en même temps que des écarts excessifs qui se voient dans ce prix d’un moment à l’autre.— En temps ordinaire, n'ayant pas ces grandes maisons qui s’approvisionnent, qui 64 RÉSUMÉ DES SÉANCES. mettent de l’activité dans la circulation et qui tiennent naturellement les prix plus élevés, nous avons les stagna- tions si déplorables dont notre agriculture se plaint avec raison ; en temps de rareté nous avons l’état opposé, une concurrence excessive dans la demande parce qu’il n’y a nulle part de magasins fournis d'avance, un surhaussement de prix ajouté à la hausse normale parce qu'il faut détourner tout d’un coup le capital et les individus d’autres emplois pour les mettre coûte que coûte dans le commerce-céréale. Enfin quand l'abondance revient dans les récoltes, nous avons l'effet contraire, c’est-à-dire des approvisionnements au-dessus du besoin parce qu’on n’a pas eu le loisir de les calculer à l'avance; nous avons un certain encombre- ment et par suite ces chutes énormes des prix, qui por- tent le désordre dans tout le travail de l’agriculteur. Tout cela disparaîtraît avec un commerce spécial, permanent, sachant faire venir et renvoyer à point et peu à peu ses approvisionnements ; mais il n’y a personne nulle part qui voulût fonder un commerce pareil sous une législation aussi incertaine que l'échelle mobile. L’Angleterre en était juste à ce point avant qu'elle ne défit cette législation ; elle ne connaît les gigantesques maisons qui existent main- tenant dans ses grands ports, que depuis les lois de sir Robert Peel. J'ai donc raison de dire que l’échelle mobile est un leurre. On serait difficilement moins servi que notre cul- ture ne l’est par elle. Dans l’ordre d'idées où la Société s'est placée et où vous l'avez suivie, mon cher Président, il faudrait qu’on abaissät sensiblement les prix qui règlent les droits d'importation, pour faire de cette législation une protection. Mais alors on ne protégerait rien du tout que AVRIL. 65 le fise en temps dit d’abondance : et en temps de rareté, si On pouvait maintenir le droit, ce que personne à coup sûr ne croira possible, on n'augmenterait que la pauvreté pu- blique en diminuant toutes les consommations dans la Proportion même de cette augmentation artificielle du prix du blé, L'esprit ne fait jamais deux choses à la fois, celui des populations comme celui des individus. Il va au plus pressé et perd la faculté de voir tout le reste. Dans les grandes questions publiques nous nous détournons de l'étude logique des choses Pour nous user aux moindres côtés. Dans celle-ci, on se butte à l'échelle mobile, à la protection qu'on y croit attachée, comme à Ja pierre d'achoppement. Nulle part on ne s’est demandé s’il n’y avait pas d’autres causes au bas prix que la suspension de l'échelle mobile, On en a signalé une bien positive cepen- dant dans l'arbitraire de cette suspension, dans ces décrets rendus sans discussion aucune, pour des intérêts occultes Où par suite de manières de voir non discutées, décrets qui ont tenu tout commerce en suspens jusqu'au dernier jour, et qui ont fait ce jour-là juste l'opposé de ce qui eût servi efficacement la culture : ils ont fermé lexportation au mois d'octobre dernier quand il eût fallu l'ouvrir toute grande ; ils nous ont ainsi privés de fournir à temps ce grand marché anglais de 20 millions d'hectolitres, qui est à notre porte et toujours prêt pour recevoir nos céréales, Evidemment ces décrets ont été désastreux. L'arbitraire qui préside à leur émission est le plus odieux possible : il eût été à désirer que tout le monde se soulevät contre à la fois, pour conquérir à tout jamais la certitude de n'avoir plus à le subir. Mais encore tout n’est pas là. TOME XXII. ë) \ 66 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Sans doute les prix se fussent moins abaissés sans ce décret, beaucoup moins ; ils seraient tombés néanmoins. Les vraies causes de cette chute inévitable, c’est qu'il y a une moindre demande. Là est le nœud de cette grande question; je ne puis m’étonner assez qu'on l'ait aussi peu vu. Pour ce qui nous regarde, comment, mon cher Président, avec votre esprit juste et vos connaissances praliques, ne vous y êtes- vous pas attaché, de préférence à l’idée de la protection, aujourd’hui tant ébréchée par les faits après l'avoir été par la discussion ? Oui, il y a baisse des prix parce qu'il y à baisse de la consommation, baisse de la demande, et il y à à la fois abondance de l'offre, parce que tout le monde en même temps à besoin de vendre, cultivaieur et propriétaire. C’est un concours de circonstances qui, en tout temps et en fout pays, à eu pour premier effet l'avilissement des prix. On dit: «Il y à abondance de récolte quand on croyait qu'il y aurait déficit. » Erreur étrange, si l’on se rappelle l’état des récoltes sur pied et les diverses publi- cations des Comices et des Sociétés sur le rendement du dépicage et du vannage ! Si la demande et l'offre étaient normales, si elles étaient seulement ce qu'on les à vues de 1850 à 1856, il n’y aurait ni plus ni moins que rareté. Il y a abondance faute de consommation, l'abondance qui fait pauvre! — Nous sortons d'années de cherté par insuffi- sance de rendement. Cette cherté se compliquait de cherté de circonstance produite par une demande exceptionnelle : demande d’approvisionnements de guerre, toujours dou- bles des approvisionnements de paix ; demande d'énormes ateliers de travaux publics disséminés sur toute la surface du pays à la fois; demande d'une population en prospé- AE , AVRIL. 67 rité tout au moins accidentelle, c'est-à-dire trouvant partout de forts salaires longtemps continués et créant, à tous les étages de la société, une grande dépense de toute sorte d'objets. Si ce mouvement eut été régulier, nous n’au- rions pas aujourd'hui à souffrir de mévente : nous aurions des prix plus bas que ceux de ces années-Jà, sans doute, mais bien au-dessus des prix actuels. Mais le factice, l'ar- tificiel avait à ce mouvement une part énorme. La moitié de tout cela était surexcitation et n'a été obtenu que par de grands sacrifices de capital. De ce capital près des, deux tiers est perdu sans retour, enfoui à jamais ou repré- senté par des travaux inutiles qui ne donneront pas de revenu avant de longues années et sans le secours d’autres capitaux. Nous en sommes donc à la réaction inévitable, à l'épargne, à l'épargne forcée, excessive, à l'abstention de consommation ; de là la restriction de la demande. En ceci, je n'ai assurément pas besoin d'apprendre l’économie politique à la Société ; elle sait aussi bien que moi com- bien le mouvement d'arrêt s'étend vite, de proche en proche, à toutes les parties de l’activité sociale devant des circonstances de cette nature. Chacun a perdu ou à avancé son capital, chacun veut le refaire et se prive. De là tant d'ateliers fermés ou diminués, et partout une moindre consommation de toute chose, de blé avant toute autre. On prétendrait vainement qu’il y a le même nombre d'hommes à nourrir, dès-lors nécessité de la même consommation de pain : d’une part il se mange infiniment moins de pain qu’en temps de travail animé, et de l’autre, il se mange sur place, en sorte que la denrée circule peu et a d'autant moins de prix. Il se mange aussi infiniment moins de bétail, sinon il serait actuellement hors de prix après 68 RÉSUMÉ DES SÉANCESe l'énorme abattage qui en a été fait : on donne des-lors infi- niment moins de farine pour engraisser du bétail. Faut-il préciser ce que c’est que ce capital perdu ? Faut-il rappeler aux esprits les énormes frais de la guerre, en partie dépensés hors du pays pour des objets consommés sans rien reproduire, en partie ayant payé du matériel dé- truit? Faut-il amener chacun à supputer ce qu’il a dépensé de plus que d'habitude, pour vivre uniquement, dans ces quatre ou ein années précédentes où tout avait pris subi- tement une si haute valeur? Faut-il faire souvenir qu'il a éte fait des entreprises de travaux publics gigantesques, représentés aujourd'hui par des tronçons de terrassements ou des ponts qui ne servent pas, qui ne donnent aucun revenu, et qu'après avoir fait attribuer à ces travaux par le public des sommes énormes au moyen d'emprunts (d’obli- gations), on a encore exigé des actionnaires des compagnies anciennes le sacrifice d’une portion de leur capital pour racheter et finir de payer ces travaux ? Il n’est résulté de là rien moins qu'une vaste faillite qui a frappé infiniment de bourses, puisque le même capital qui se cotait en bourse 1,500 francs se cote à peine 1,100 depuis. Il y a donc une perte du capital ancien ; il y a plus, il y a une diminution de revenu pour le capital restant. — D'autre part, est-il besoin de remettre en mémoire les grandes faillites de l'Amérique ? Et faites attention qu'o.ure notre propre part à tous ces amoindrissements de richesse de- puis 1857, il faut encore compter, pour apprécier la situa- lion dans son ensemble, la part des pays voisins. Toute l'Europe, particulièrement l'Allemagne , a passé par les mêmes excitations, les mêmes causes de dépenses, puis par les mêmes chutes, De l'Océan à la Vistule, sur tout ce vaste AVRIL. 69 continent où des consommations si animées avaient en- fanté de si hauts prix depuis 1852 ou 4855, il règne depuis 1858 un même et énorme besoin d'économiser, de refaire le capital perdu. En France on porte ce capital aux appro- ches de deux milliards: croit-on done que cela ne suffise pas à réduire la demande de céréales? Que si vous consi- dérez tout cela et la crainte de voir ces dépenses impro- duectives se rouvrir, vous devez, mon cher Président, reconnaitre la vérité de ce que je dis, qu'il y a abondance faute de consommation, et que s'il y a bas prix, ce n’est pas à ce que l'échelle mobile soit suspendue qu'il faut s’en prendre. Voilà pourquoi je me suis permis de regretter que la Société ait émis son vœu en faveur de l'échelle mobile, el pourquoi je suis fâché de voir que vous avez mis à son service, en cette occasion, votre excellent esprit et votre plume non moins parfaite. Pour en finir, je vous prie de jeter les yeux sur les tableaux mensuels de Ja douane. L'an passé nous avons exporté S millions d’hectolitres contre quelques 500 mille seulement importés : supposez que le décret d'octobre dernier eût été pris en octobre 1 S57, et la mévente de cette année-ci aurait commencé alors. En réalité, l'échelle mobile est maintenue pour l'exportation par le fait de ce décret ; ce sont encore, malgré cela, nos exportations qui nous sauvent, parce que les prix sont trop bas pour que le droit de sortie soit prohibitif: mais nous aurions exporté une partie de notre trop-plein en novembre et décembre, si cette bienfaisante échelle mobile n'eut pas été rétablie juste au moment des grands achats, et les prix ne fussent probablement descendus guère au- dessous de ceux de l'hiver passé, 70 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Concluez donc avec moi, mon cher Président, que c’est d’un bien autre genre de protection qu’il convient d’alten- dre les bons prix pour notre culture. Je vois partout atta- quer les villes à cause de l’émigration de bras qui s’y fait et qui enchérit ceux de la culture ; vous-même revenez sur ce reproche. Remarquez en passant que c'est un argument contre la protection, ni plus ni moins. L'ouvrier court aux villes, pourquoi? Parce que la manufacture protégée qui s'y trouve, nous faisant payer ses produits très-cher, peut lui donner un salaire plus fort que le cultivateur; ôtez plus ou moins de cette protection, et, en ôtant par là-même du salaire une portion proportionnelle, vous diminuerez d’au- tant l'intérêt de l’ouvrier à quitter nos champs. Quant à nous protéger de la même manière, j'ai dit assez déjà qu'il n’y faut pas songer, sinon nous élèverions le prix de la vie, le prix de toute main-d'œuvre par suite, pour nous comme pour les autres. Mais ce n’est là qu’un détail de la question. La manufacture, toutes choses égales, donnera toujours des salaires plus hauts que ne le pourrait la culture dans son état présent, parce que la manufacture sait produire même en faisant beaucoup gagner à ses manouvriers, ce que agriculture en France ignore encore tout-à-fait. En atten- dant que l’agriculture ait appris ce grand art de nos voisins de Belgique ou d'Angleterre, pour Dieu, ne maudissons pas les villes! Laissons-les se peupler, füt-ce dix fois au- tant, sans quoi nos prix descendront bien plus bas et sans cesse, Les villes sont nos consommateurs , aimons-les beaucoup. Que serions-nous en Haute-Loire sans Lyon, Saint-Etienne, Nimes ? Que seraient, dans une moitié au moins de la superficie de la France, une foule de cultures sans Paris? Des économistes ont fait récemment la guerre AVRIL. 71 à cet accroissement anormal des villes: c’est par opposition politique plus que par conviction économique, soyez-en sûr, Accroissement anormal, je le veux bien; très-anormal à coup sûr, factice comme tant d’autres choses de notre vie sociale actuelle, irrégulier et partant bien moins profi- table qu'il ne serait autrement; mais il nous donne de grands centres de consommation, ne le blämons pas trop. Avec notre propriété divisée, en effet, si ces centres ne s'agrandissaient pas nous n’aurions bientôt qu'une circu- lation de plus en plus restreinte des produits. Chacun vivant de plus en plus de ce qu'il fait pousser, on échan- serait de moins en moins, tous les prix s’abaisseraient. Que les villes grandissent done, pour que nous puissions leur vendre beaucoup! Si elles nous éhlèvent nos tra- vailleurs ou si elles nous obligent à les payer cher, elles nous obligeront à y suppléer par la science et par la mé- canique, et elles nous rendront ainsi le service de nous enseigner à produire plus en proportion des frais. On nous protégera quand on nous fera des chemins, quand ces gigantesques ressources des fonds vicinaux, dont le tableau officiel a été publié il y a trois mois, cesseront partout d’être mal employées, quand notre blé ne nous coûlera pas 1 franc l’hectolitre pour lui faire faire trois lieues de nos campagnes à la ville. On nous protégera quand on ne nous fera pas payer tant d'impôt, à côté du capital qui en paye si peu et des citadins qui se sous- traient à si bon compte à quelques-uns des plus oné- reux pour nous. On nous protégera quand nous aurons à meilleur marché le fer que nos fabricants, protégés par la douane, nous vendent à si haut prix et en qualité si mé- diocre. On nous protégera quand on apprendra aux fils de 72 RÉSUMÉ DES SÉANCES, nos paysans les éléments de l'instruction avec un peu plus d'efficacité, à leurs filles l'ordre et le travail des ména- gères. Et surtout nous nous protégerons nous-mêmes infi- niment, quand nous aurons appris à porter dans la culture les procédés de l'industrie, à mieux proportionner nos am- blavures à la demande probable, et surtout à ne pas atten- dre autant des forces spontanées de la nature, mais à activer ces forces par ce que nos voisins d’outre-Manche appellent si bien l'ênfusion du capital. Arthur Young à changé la face agricole de l'Angleterre, à la fin du dernier siècle, rien qu’en enseignant aux propriétaires à dépenser de l'argent dans leurs terres. Il en est résulté une population bien sa- lariée, qui a beaucoup consommé et beaucoup demandé aux manufactures en même temps, et qui s’est répartie sur le terriloire dans les proportions les mieux trouvées pour le jeu le meilleur de l'offre et de la demande. L’Angleterre moderne tout entière est née de ces lecons d'Arthur Young. Ceux-là nous protégeront efficacement qui nous appren- dront les mêmes manières de faire et qui nous les feront suivre ! Mais, avec tout le respect que je dois à la chose jugée, mon cher Président, et avec le plus sincère désir de respecter votre opinion, combien nous serions mal pro- tégés, combien nous aurions à souffrir, j'ose dire, si l'on nous rendait définitivement la protection de l'échelle mo- bile, fût-elle plus ou moins amendée dans son action pro- hibitive! Excusez ce long et tardif bavardage : il vous attestera, j'espère, que, quoique loin de la Société, je suis ses tra- vaux et que j'attache à son action autant de prix qu'à me dire votre dévoué collègue. Hexry DONIOL. AVRIL. 15 Après avoir donné lecture de cette lettre, M. le Pré- Sident croit devoir ajouter quelques mots. € La Société, dit-il, pensera comme moi, qu'il n’y a pas lieu de rentrer en ce moment dans la discussion. Elle persiste sans nul doute dans les conclusions for- mulées en son nom et adressées à Son Excellence M. le Ministre et au Journal d'agriculture pratique. Notre Savant el éloquent collègue M. Doniol ne répond pas, en effet, à ce qui me paraît irréfutable dans les consi- dérations qui ont motivé le vote de la Société. En supposant même qu'au point de vue théorique, les Opinions très-controversables émises par lui pussent se Soutenir, rien, il faut le répéter, rien dans son argumentation ne saurait détruire les trois objections produites contre la suppression absolue d’une sage et intelligente protection. Le système libre-échangiste , indépendamment de toutes les considérations de détail qu'on peut retourner contre lui, implique nécessairement, quand on voudra quitter un instant les sphères de la spéculation pure pour en venir aux rigoureuses réalités de la pratique, implique, dis-je, l'existence de trois conditions indis- pensables : 1° La combinaison absolue de toutes les franchises de sortie avec les franchises à l'entrée ; 2e Un système général de réciprocité internatio- nale ; 3 La garantie, autant qu'elle puisse être donnée dans l’ordre des prévisions humaines, de la paix per- manente el générale. TOME XXII. 6 RÉSUMÉ DES SÉANCES. CA | _— En sommes-nous bien là? Pouvons-nous établir un système sur la probabilité de ces diverses conditions ? Qui osera nous garantir qu'après avoir ouvert nos libres frontières à l'importation, on ne les fermera Jamais, dans aucun cas, sous aucun prétexte, pour aucune raison, sous aucune pression de la nécessité, de la disette, de la famine, on ne les fermera jamais à l'exportation des produits indigènes ? Qui oserait demander à un gouvernement un enga- gement absolu de cette nature? Quel gouvernement serait assez insensé pour promettre qu'il ne laissera jamais fléchir le principe devant les grands besoins et les considérations d'alimentation et de salut public? Et alors n'est-il pas à redouter que nous ayons, que l'agriculture ait à subir tous les inconvénients de la liberté sans les avantages qui devraient être la com- pensation de ces inconvénients ? Au point de vue de la réciprocité internationale, ne suffit-il pas de connaître l'opinion économique de toutes les grandes nations nos rivales dans la produc- tion, pour être certain qu'elles ne sacrifieront jamais un intérêt matériel immédiat à la satisfaction plus ou moins problématique de voir triompher labsolu d'une théorie? Si le système de la liberté est une vérité absolue, ce beau privilége d'être la vérité lui appartenait hier aussi bien qu'aujourd'hui. Pourquoi donc alors l'Angleterre, devenue aujourd'hui notre docte et exigent professeur en fait de libre-tchange, a-t-elle attendu, pour inaugurer son infatigable pro- pagande, que la doctrine toute contraire de la protec- tion et de la prohibition eût amené graduellement son AVRIL. 7 industrie à ce degré de puissance où elle croit enfin pouvoir provoquer insolemment toutes les rivalités ? Ne voyons-nous pas, d'autre part, l’école utilitaire des Etats-Unis manifester, pour les principes purs, ce souverain dédain qui conclura évidemment, toujours de plus en plus, dans le sens d'une protection arro- gante, au profit de la production nationale ? Croit-on que nous puissions être jamais bien venus, après avoir reçu en franchise les céréales d'Amérique, à demander la réciprocité pour nos vins, et, en fait d'industrie, pour tant d’autres de nos produits de luxe ? Ceux qui pourraient nourrir une telle espérance, sont, je ne crains pas de le dire, cruellement illu- sionnés, et recevront, coup sur coup, dans un prochain avenir , d'accablants démentis. En ce qui touche enfin à la dernière des condi- tions que j'ai indiquées, comme la plus indispensable de toutes pour la pratique de quelque durée et sans danger, des aoctrines libre-échangistes, énoncer seule- ment cette condition, c’est en montrer la chimère ; et je me borne ici à formuler cette simple et naïve ques- tion : aux temps où nous sommes, la pacification per- pétuelle et générale de l'Europe paraît-elle complète- ment, infailliblement assurée ? Que si la moindre des chances de guerre peut subsister encore en ce moment, est-ce bien l'heure d’enrayer l'effort agricole du pays, de décourager cette agriculture. destinée peut-être, dans un temps pro- chain, à alimenter seule la consommation nationale? Est-ce l'heure d’écraser par une concurrence inégale nos usines nationales qui peuvent d’un jour à l’autre 76 RÉSUMÉ DES SÉANCES. avoir à suffire seules à tous les besoins civils et mili- taires de la patrie ? Je me borne, dit en terminant M. le Président, à poser contre les théories de M. Doniol ces considé- rations préjudicielles, et je crois qu'on peut, avec toute justice et sans entrer dans le débat doctrinal, opposer à l'opinion que je combats cette fin de non-recevoir préalable. » Après quelques courtes observations de plusieurs autres membres et conformément à la proposition de M. le Président, la Société décide qu’elle ne rentrera pas dans une discussion déjà épuisée au sein de la commission dite des céréales. Elle s’en réfère au vœu formulé en son nom dans un sens opposé aux vues de M. Doniol. Ce vœu, adopté par la majorité de l'Assemblée, est déjà parvenu à son adresse et l’on peut penser que, venant en concours avec tant d’au- tres vœux semblables formulés par le plus grand nombre des Sociétés agricoles, il a pu ne pas rester inutile. La loi sur l'échelle mobile, suspendue pen- dant quelque temps, vient en effet d'être remise en vigueur pour quelque temps encore, à la suite de l'enquête ouverte devant le Conseil d'Etat. Au sujet de cette enquête, dont-les résultats ont d’ailleurs répondu au vœu de la Société, M. le Prési- dent regrette qu’on n'ait pas appelé le département de la Haute-Loire à prendre part à l’imposante consulta- tion dans laquelle ont été entendus, trop exclusive- ment peut-être, les départements les plus riches en productions agricoles. AVRIL, F7 En maintenant le principe de l'échelle mobile , c'est-à-dire d’une protection variable, par des tarifs périodiquement proportionnés aux prix régulateurs, la Haute-Loire, et il importe sans doute de le con- signer ici, eût certainement demandé que de larges simplifications et de sérieuses modifications fussent apportées au régime actuel. On comprend très-bien qu'il soit facile, en faussant le principe même des droits variables, en le maintenant à la sortie et en le faisant fléchir pour ce qui concerne l'entrée, de faire de l'échelle mobile un instrument très-hostile à la pro- duction nationale, et de passionner contre un système ainsi faussé, ceux même qu'il devrait protéger et qui l'ont bien longtemps défendu. C’est ce qui arrive assez fréquemment aujourd'hui. Mais de telles anomalies ne préjugent rien contre le principe en lui-même, et il est permis de voir encore, dans les sages modifications qui pourraient y être apportées, la sauvegarde des in- térêts de l’agriculture, des vrais intérêts du pays. Une étude plus approfondie de la question, l'étude si importante et si incomplète encore de la question des prix de revient, eussent mis cette vérité en pleine lumière. 11 est regrettable à ce point de vue que l'heureuse initiative prise par M. de Brive, lorsqu'il a demandé dans le Journal d'agriculture pratique la convocation du Conseil général d'agriculture , soit restée sans résultats. Le Conseil général d'agriculture est le représentant légal et autorisé des intérôts agricoles de toute la France ; et il est permis de penser que les délibérations de ce grand corps auraient complètement élucidé cette grande question 78 . RÉSUMÉ DES SÉANCES. P de la protection, question, on peut le dire, capitale pour les intérèts de la production présente, et, ce qu'on paraît ignorer trop souvent , pour les intérêts de la consommation de l'avenir. SCIENCES NATURELLES ET PHYSIQUES. — /ydrograplne. — M. le Président signale un mémoire de M. Fournet sur l'hydrographie souterraine, inséré dans les Annales des sciences physiques et naturelles, d'agriculture et d'industrie, publiées par la Société impériale de Lyon, (3e Série, t. 1, 1855). M. Fournet y montre le parti que l’on pourrait tirer de ces modestes sources qui viennent sourdre au pied de nos collines. Elles sont en si grand nombre qu'on pourrait en faire, en les réunissant, de vrais petits cours d’eau vive. IL y a de l’à-propos à soulever une pareille question au moment où sont poursuivies avec ardeur des expé- riences qui doivent avoir pour résultat d'amener à la fontaine monumentale de la place du Breuil des eaux de qualité et de volume suffisants. En conséquence, M. le Président désirerait que M. Bertrand de Doue voulüt bien examiner l'ouvrage de M. Fournet et en donner son avis à la Société. SCIENCES HISTORIQUES. — M. Hippolyte de Vinols com- munique à la Société la copie de deux pièces impri- mées à Lyon, à la date de 1724 et 1726, assez impor- tantes pour l’histoire de la Ligue, qu’il a découvertes à l’église de Langeac, où elles étaient collées sur de vieilles boiseries. L AVRIL. 79 M. de Vinols donne, sur cette découverte, des expli- cations qui sont écoutées avec intérêt par l’Assemblée. M. Béliben, Secrétaire de la Société, se conformant à l'ordre du jour, donne lecture d'un rapport concer- nant un travail sur l'antique maladrerie de Brives près le Puy. Ce {ravail est offert à la Société par M. Vinay Avocat, comme titre d'admission. Plu- sieurs fragments, dont le Secrétaire donne lecture, excitent vivement l'attention de la Société. MESSIEURS , Vous avez nommé, par l'organe de M. le Président, une commission composée de MM. de Vinols Jules, Paul Louis et moi, pour examiner les titres de M. Vinay à la place de membre résidant qu'il sollicite. En qualité de rapporteur, je viens vous soumettre la pensée de la commission sur cette candidature. Je dirai d’abord, sans trop présumer des résultats du scrutin, qu'elle sera favorablement accueillie dans cette enceinte. Elle était attendue ; et depuis plusieurs années M. Vinay assisterait à nos séances, si des affaires nom- breuses, considérables, ne l'avaient empêché de s'occuper, autant qu'il l'aurait voulu, du travail intéressant qu’il s'était proposé d'offrir à la Société comme titre d'admis- sion. Nous avons enfin cette monographie de la léproserie de Brives, et la manière dont elle est traitée, tout en nous faisant regretter de n'avoir pas eu plus tôt M, Vinay pour 80 RÉSUMÉ DES SÉANCES. collègue, nous oblige de l’absoudre du retard apporté par sa composition à la bienvenue de son auteur au milieu de nous. Mais je ne veux pas irriter encore le désir que vous avez tous de connaître ce mémoire, dont je ne puis cependant vous donner ici qu'un résumé. Il porte pour modeste suseription : Aperçu historique sur la Léproserie de Brives. Le plan en est simple et bien coneu. Il comprend trois divisions : la prémière contient des notions générales sur la lèpre ; la deuxième traite de la fondation et de l’organisation de Ia léproserie de Brives, et la troisième de sa suppression. La première partie, puisée aux meilleures sources de l'histoire, nous présente, dans un résumé substantiel, tout ce qui a été dit avec quelque autorité sur la lèpre, sur l’origine, la nature et les causes présumées de ce mal hideux ; sur son développement et sa décroissance ; sur la création et l'établissement des maladreries et sur la séquestration des lépreux, avec les cérémonies d'usage en cette circonstance. Au sujet de la description pathologique de la lèpre, donnée d’après plusieurs auteurs du temps, M. Vinay n'aurait pas manqué d'ajouter que cette maladie ne fut jamais bien déterminée au moyen-âge ; qu’un grand nombre d’affections morbides de la peau, fort différentes, très- diverses, étaient classées dans la catégorie de la lèpre et que, dès la plus haute antiquité, dans les livres de Moïse, Lévitique, eh. xin et x1v, on distinguait deux sortes de ladres : l'incurable, sordidus et immundus solus habitans extra castra, et celui qui, après sa guérison et s'être présenté au prêtre, était déclaré purifié de sa souillure, AVRIL. 81 _ redditus munditiæ. Lévit., ch. XI, V. 7. Mais ne rien passer sur cette vaste question, c'eût été ne pas mettre des limites à ce mémoire qui renferme déjà près de 80 pages in-folio. Un point bien plus intéressant n’a pas été négligé par notre auteur. Au moyen de textes nombreux tirés des con- ciles d'Orléans (549), du troisième de Lyon (585), de la loi des Lombards, au septième siècle, des capitulaires de Pepin-le-Bref, de Charlemagne, du concile de Worms en S68, ete. M. Vinay établit, sans réplique, que la lèpre élait connue en Europe avant d’avoir atteint ces formida- bles proportions que lui donna, au temps des croisades, le contact des peuples d'Occident avec ceux de l'Orient, et qui furent telles que Louis VIE, le père de saint Louis, en 1226, léguait cent sous à chacune des deux mille lé- proseries qui existaient à cette époque. (L'Echaudé d’Anisy). Mais j'ai hâte de vous donner une idée plus précise de la manière d'écrire l’histoire de notre futur collègue en vous lisant quelques-unes de ses pages. « Nous ne pouvons énumérer ici les conciles, les ordon- » nances royales, les coutumes écrites des provinces du » nord de la France qui ont réglé Le sort des lépreux:; à » plus forte raison les dispositions législatives des autres » peuples. Il nous suffira de dire que l'Eglise environnait » généralement la séparation des lépreux d’entre les sains » de ses plus lugubres cérémonies. Lorsque les médecins » et chirurgiens avaient reconnu qu'un homme était » frappé de lèpre, sa séquestration était ordonnée. Le jour » fixé pour sa mise hors du siècle, une messe de morts » était célébrée en présence du lépreux, le plus souvent 82 RÉSUMÉ DES SÉANCES. » couvert d’un drap mortuaire. Plusieurs diocèses, entre autres ceux de Paris, Sens, Liège, Amiens, avaient une messe spéciale composée de prières touchantes pour la guérison du séquestré. Après la messe, le curé pronon- çait les défenses habituelles; les plus en usage sont celles-ci : » Je te défends de sortir sans ton habit de ladre ; » Je te défends de sortir nus-pieds; » Je te défends de passer par des ruelles étroites ; » Je te défends de parler à quelqu'un qui sera sous le vent; » Je te défends d’aller dans aucune église, dans aucun moutier, dans aucune foire, dans aucun marché, dans aucune réunion d'hommes quelconque; » Je te défends de boire et de laver tes mains soit dans une fontaine , soit dans une rivière : » Je te défends de manier aucune marchandise avant de l'avoir achetée ; » Je te défends de toucher les enfants et de leur rien donner. » Ensuite le curé prenait de la terre du cimetière et la versait-par trois fois sur la tête du lépreux, en disant : mon ami, c’est signe que vous êtes mort au monde, prenez patience. La cérémonie se terminait par la re- mise que le curé faisait au lépreux de l’habit, du baril, de la cliquette, des gants et de la pannetière, avec les recommandations d'usage pour se servir de ces différents objets. » Les défenses prononcées par le prêtre nous font voir combien étaient grandes les restrictions apportées à la liberté des lépreux; elles différaient peu en Europe. Les AVRIL. 835 » incapacités civiles résultant de cet état n'étaient pas » moins nombreuses et variées, Le rapprochement des lé- » gislations et des coutumes diverses à ce sujet offrirait » beaucoup d'intérêt; nous nous sommes déjà laissé en- » trainer trop loin, nous devons nous restreindre dans le » cadre de la maladrerie de Brives. Il suffira de dire , en » terminant, que, suivant les temps et les pays, la sé- » questration du lépreux a entrainé la mort civile, le di- » vorce, la séparation de corps, la privation de tout ou » de partie des biens au profit de la léproserie, l’incapa- » cité de tester, de s’obliger , etc. , etc. » Les deux autres parties, encore plus intéressantes pour nous, puisqu'il y est question de faits d'histoire locale, sont un véritable modèle de critique historique. Ce Mémoire, malgré son étendue, est cependant sobre de détails oiseux. On y reconnait, pour ainsi dire, les qualités de l'avocat qui défend une cause contre un adversaire redoutable. Il veut gagner cependant son procès. Aussi n’expose-t-il que des faits patents, incontestés, des textes authentiques, pré- sentés avec une méthode claire et saisissante. Dans ce plai- doyer, la partie hypothétique n’a qu’un rôle secondaire et encore mest-elle essayée qu'avec précaution, avec des réserves, des réticences qui laissent bien peu de prise à l'adversaire. Ainsi, sur la fondation et sur la première organisation de la léproserie de Brives, M. Vinay, malgré de longues et de persévérantes recherches, n'a pu parvenir à mettre la main sur des documents qui lui fournissent une date certaine. Les plus anciens qu’il a découverts remontent à 4209. C'est d’abord le testament d’un certain Raymundus Malmoros, 84 RÉSUMÉ DES SÉANCES. par lequel, entr'autres legs pieux, le testateur donne, en 4209, à la léproserie de Brives, la moitié de sa terre de Charensac. Ensuite, c’est, en 1210, la ratification de cette donation par Jousserand de Bouzols, seigneur haut-justicier de Cha- rensac, abandonnant par le même acte, à l'infirmerie de Brives, deux champs situés à la Malouteyre, que le même Raymond Malmoros lui a légués par déférence dans son testament. M. Vinay a encore en sa possession une pièce très- importante, c’est le règlement intérieur de la léproserie de Brives, par Guy Fulcodi, évêque du Puy (1) en 1259. Enfin il existe, à la date de 1291, un accord entre les consuls du Puy et le maître de la maladrerie de Brives, pour la réception des lépreux originaires du Puy. Ces quatre pièces sont du XIIIe siècle et cependant, de leur examen comparé, M. Vinay se hasarde, non sans res- triction, à faire remonter la date de la fondation de la lé- proserie de Brives, non pas aux premiers siècles de l’ère chrétienne, mais au Xe siècle, Je suis bien tenté de ne pas trop le chicaner sur cette date; d'autant plus qu'il a for- tifié sa thèse d'arguments qui paraissent assez solides. Dans l'acte de 1209, Malmoros exige un service funèbre pour le repos de son âme, ce qui suppose la maison de Brives déjà bien organisée, ayant son chapelain et son église. L'acte du seigneur de Bouzols, en 1210, mentionne la (1) Guy Foulques, sécrétaire de saint Louis, après la mort de sa femme, se fait prêtre. Pendant 3 ans il est évêque du Puy, puis archevêque de Narbomne, cardinal-évèque de Sainte-Sabine, légat en Angleterre; il est mort Pape, sous le nom de Clement IV, en 1265. AYRIL. 55 Malouteyre, petit hameau de quelques maisons, ayant en- core aujourd'hui ce nom et placé presque au-devant de la léproserie. Cette appellation, Malouteyre, dont l'étymo- logie concorde si bien avec le voisinage de la maladrerie, fait supposer que l'établissement, d'où le petit hameau avait tiré son nom, avait une date bien plus ancienne que celle du commencement du XIIIe siècle, » En 1259, un des plus éminents prélats de la cité d’Anis entreprend une réforme ne pouvant avoir lieu que pour une institution déjà ancienne. Parmi les statuts de la nou- velle règle se trouve, en effet, la recommandation de conti- nuer à séparer les personnes saines d’avec les malades, précaution observée, dit le texte, ab antiquo. On lrouve encore le mot anfiquitus fundata per non- nullos cives Anicit, et cet autre fuisse in usu et consuetlu- dine recipi in ipsà domo per nostros antecessores et fratres el donatos à longissimo tempore. Voilà, certes, de nom- breuses présomptions en faveur de la thèse qui met la fondation de la léproserie de Brives au Xe siècle. À cela ajoutez encore une transaction, en 1259, de la maladrerie avec le vicomte, à raison d’une digue sur la Loire, et une autre avec l’abbaye de Doue, où se trouve ce passage au sujet d'une vigne des lépreux : Æ tanto etiam tempore Cujus non slal memoria, el vous aurez tout l'arsenal des arguments dont: est environnée la timide hypothèse de l’auteur du mémoire, Eh bien! tant est prudente, ombra- geuse même si l’on veut, notre foi en matière de science archéologique, que nous ne pouvons nous dispenser de faire remarquer que, selon de bons historiens, ce n’est qu'après Les trois premières croisades, la première accom- plie au commencement du XIE siècle, dont il n'est revenu 86 RÉSUMÉ DES SÉANCES. en Europe que très-peu de monde, l’autre vers le milieu de ce siècle, et la troisième à peine. terminée au commen- cement du XIIIe, que le nombre toujours croissant des lépreux nécessite la création de maladreries sur tous les points du territoire français. Il nous semble, en outre, qu'aucun des textes que nous avons cités d’après M. Vinay né s'oppose à ce que l’on ne fasse remonter l’origine de la maladrerie de Brives qu'au XIIe siècle, une centaine d'années seulement avant la plus ancienne date recueillie par M. Vinay. La question se réduit done à savoir si l’on doit placer la création de la maison de Brives avant ou après les premières croisades. Qu'on veuille bien remar- quer que je ne me prononce pas, car je combattrais ici une hypothèse avec une hypothèse ; mais j’approuve pleine- ment les restrictions que M. Vinay apporte à son opinion lorsqu'il dit, page 24 : Jusqu'à présent, nous devons l'avouer, aucun document n'est venu corroborer notre conjecture. ) C’est, en effet, de cette manière que doit procéder l'his- torien jaloux de produire des œuvres de quelque valeur scientifique. Il n’est certes pas défendu d’aimer un sujet et de désirer pour l'institution, objet de nos recherches, une antiquité vénérable, de la faire remonter si l’on peut jusqu'aux premiers siècles de notre ère ou encore au-delà, en l’entourant de toutes les lumières que l'archéologie, la numismatique, la linguistique, l’épigraphie et les.fouilles peuvent fournir. Mais il ne faut pas dédaigner les règles de la critique historique, elles sont du domaine de la saine logique qui ordonne avant tout de se mettre en garde contre les idées préconçues, contre les préventions et la passion; d’être sobre d’interprétations hasardées, d’expli- AVRIL. 87 cations étymologiques absolues. De la prudence et du calme, MM. les Antiquaires ; vous avez une belle mission à remplir, celle de déméler, à travers les poésies de la légende, les faits et les événements d’une époque qui a laissé bien peu de documents authentiques ; mais prenez garde de compromettre vos recherches par de vaines sup- positions, En vain vous essaieriez de nous faire prendre le change; vous avez affaire aux temps modernes que, à tort ou à raison, vous ne ramènerez pas à la naïve crédulité du moyen-âge. À la voix de Bacon et de Descartes nous avons pris, en fait de science, pour critérium de certitude l'Evidence, dont les sciences historiques ne peuvent pas plus se passer que la physique et l’histoire naturelle; et quant à l'hypothèse, nous savons aujourd’hui qu’elle peut rendre de grands services, mais à cette condition qu'on la reconnaisse pour telle. Il est vrai que l'esprit de système est si subtil qu’il est très-difficile, même à l'intelligence Ja plus méthodique, de s’en débarrasser, et tel qui cherche à prémunir les autres en sera peut-être demain la première victime. Cependant nous devons convenir que M. Vinay, dans son excellent travail, n’a pas abusé de l’archcologie et qu'on y trouve partout de la bonne critique. Après avoir consacré quelques pages à la détermina- tion de l’époque de fondation de la léproserie de Brives, dans le deuxième paragraphe de ce chapitre , il traite de l'administration de cet établissement ; il nous en dit le personnel composé de lépreux des deux sexes appelés frères et sœurs, servis par des personnes valides sous le nom de donats et donates (donati, donatæ) qui a été pen- dant tout le moyen-âge celui des serviteurs des pauvres et des orphelins de l'Hôtel-Dieu. 88 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Un maitre, magister, élu en assemblée générale et pris parmi les malades, administrait les biens et revenus de la maison. M. Vinay nous donne le texte du serment d’instal- lation de ce maitre qui gouvernait la maison sous l’auto- rité de l’évêque et qui rendait ses comptes quatre fois par an à des époques fixes. La discipline, les exercices reli- sieux, la nourriture, les occupations, les jeux mêmes, les fonctions du chapelain, rien n’a échappé à M. Vinay qui peut nous dire, si on l'exige, tout ce qui s’est passé à la léproserie de Brives pendant plus de quatre siècles. En effet, dans ce deuxième chapitre, un nouveau paragraphe est consacré aux rapports de l’autorité religieuse avec la maladrerie, un autre à ceux de l'autorité civile avec cette maison qui était autant d'institution civile que d’institu- tion religieuse. En effet, l'accord du 5 mai 1291 entre les consuls et le maître de la maladrerie que nous avons déjà cité, consacre que la maison a été fondée par des citoyens du Puy pour servir d'asile à des ciloyens du Puy frappés de la lèpre; ils devaient y être nourris et logés sous la seule obligation de laisser à leur décès leurs biens présents et futurs à la léproserie et de prêter le serment d'usage de chasteté, de pauvreté et d’obéissance. Un document au- thentique reconnait le droit de la ville sur cette maison, c’est le procès-verbal de réception d’Elise Valence, lépreuse, originaire du Puy, à la date de 1588. ” Au deuxième paragraphe du même chapitre, M. Vinay nous fait connaître les ressources, les revenus, les dépen- dances et les droits seigneuriaux de la maladrerie ; ces derniers ont, pour ainsi dire, leur charte dans une transac- tion de 1291 consentie par le seigneur de Bouzols qui, se réservant les droits de haute justice sur les terres de AVRIL. S9 Charensae, laisse à la maladrerie les droits de moyenne et basse justice avec la moitié des clameurs, des émoluments, effusions de sang, bans et autres appartenances féodales. Comme constatant l'importance de ses droits seigneuriaux, M. Vinay cite une transaction survenue en 1551, à la suite d'une sentence arbitrale rendue par Armand de Polignac, abbé de Saint-Pierre-Latour, entre Pons Durand, maître de la maladrerie, et Bertrand, monétaire, chevalier, seigneur haut justicier de Brives; ce dernier obligé de payer un cens annuel de 20 sols pour son moulin situé en face de celui de la maladrerie ; par une chaussée il avait inter- cepté toute l’eau de la rivière. Ce cens, ajoute M. Vinay, a été payé pendant l'existence de la maladrerie et ensuite aux Chartreux. M. Vinay a réservé le sixième paragraphe, comprenant plus de 416 pages, aux faits historiques relatifs à la mala- drerie, qui le conduisent ainsi à travers les-siècles jus- qu'à la suppression de cet établissement au profit des Chartreux. Dans cet intervalle, la léproserie de Brives eut à traverser une époque critique, que M. Vinay n'a eu garde de passer sous silence, celle de la persécution or- donnée par Philippe V, dit le Long, contre les lépreux, en l'année 1521, Ce prince essaya de profiter de la haine excitée contre eux dans le peuple et qui se traduisait en violentes mais vagues accusations d’empoisonnement de fontaines , pour ordonner l'arrestation des lépreux dans son royaume et la confiscation des biens considérables qu'ils possédaient dans leurs maladreries. Celle de Brives fut préservée par l’évêque, mais non sans avoir eu à sup- porter une audacieuse tentative de la part des gens du vicomte de Polignac et surtout de Bertrand de Fay, ayant TOME XXII. 1 90 RÉSUMÉ DES SÉANCES. pris le titre de bayle de Polignac et de Bouzols. Notre auteur, que ce méfait émeut vivement, nous en donne les détails principaux, pièces en main, sur des notes qu’il doit, ajoute-t-il, à l’obligeante communication de M. l'abbé Bernard, aumônier du Lycée ; notes extraites de documents originaux qui sont entre les mains de M. Ch. Calemard de Lafayette. L'évêque du Puy, qui avait sous sa garde et sous sa juridiction la léproserie de Brives, obtint des lettres royales, à la date de 1521, par lesquelles son droit fut reconnu, et fit arracher les fourches patibulaires que Ber- trand de Fay avait fait planter devant la maladrerie, sur le terrain méme des franchises de cette maison. Ainsi procède M. Vinay dans l’exposé historique des faits, toujours pièces en main, citant des actes et des dates , indiquant les sources de ces emprunts, reconnais- sant à l'égard des auteurs qui lui fournissent des docu- ments, aimant à les nommer, parmi eux Dom Vaissette, l'excellent auteur M. Arnaud, et nos deux savants collègues M. Aymard et M. l'abbé Bernard. La troisième partie, qui traite de la suppression de la maladrerie de Brives, est renfermée dans deux paragraphes. Le premier contient les dispositions législatives qui pré- parèrent la suppression de la maladrerie. Ici nous trou- vons le jurisconsulte exercé, l'avocat docteur en droit, qui a su se faire une place distinguée dans notre barreau que la renommée a proclamé à bon droit le plus éloquent et le plus habile des barreaux de tout le ressort. M. Vinay manie avec une dextérilé merveilleuse les arrêts des parlements, ceux de la cour des Grands-Jours, les ordonnances royales, les décisions des juridictions locales ; et sa tâche n’est pas ANIRTT : 91 facile, car il s'agit de mettre d'accord des législations qui ne s'entendent pas toujours. Enfin, un arrêt du parlement de Toulouse, du 45 juillet 1619, réglant tous les conflits élevés sur Ja matière, nous donne des détails curieux sur les transformations que l’administration de la léproserie avait subies et nous fait entrevoir la chute de cet établissement de charité. L'acte de cession aux Chartreux est de 1627 : Dimanche, dix-huitième jour d'avril, à l'issue de Vêpres, il fut accom- pli dans la salle haute de l'évêché du Puy, par-devant Révérend Père en Dieu messire Just de Serre, évêque du Puy, comte du Velay, abbé et baron de Montebourg, con- seiller du Roi en son conseil d'Etat, assisté de messire Jean Mouton, docteur en droit, ete. Les Chartreux prirent done possession de la maladrerie avec les cérémonies en usage à cette époque dans la trans- mission de la propriété, Ils en ont joui, moyennant une rente annuelle de 240 livres à l'hôpital du Puy, jusqu’au temps de la révolution francaise ; mais non pas sans pro- testation de la part de l’auteur du mémoire, qui voit avec commisération les derniers habitants de la maladrerie expulsés de leur antique asile. CI dut être bien dur, dit-il, pour ces pauvres malheu- » reux le jour où, relégués dans Les parties les plus sombres » de la léproserie, ils virent l'Evêque, leur patron, leur » protecteur naturel, accompagné de tous les hauts digni- » taires de la ville, se faire ouvrir les portes de leur paisi- » ble demeure, introduire les Chartreux, leurs spoliateurs, »-parcourir avee ces nouveaux maîtres les lieux témoins 92 RÉSUMÉ DES SÉANCES. » de leurs souffrances et de leur résignation, et enfin » briser lui-même le faible lien qui les retenait encore à la » maladrerie, par la remise des clefs et la cérémonie » d'investiture. » Cette scène navrante se passait au-devant de leur » église dédiée à sainte Marie-Madeleine, leur patronne. » Désormais ils ne devaient plus entendre sous ces voûtes » saintes les exhortations pieuses d’un chapelain eompa- » tissant; l'entrée de ce sanctuaire où, pleins de foi, ils » allaient chaque jour chanter les louanges du Seigneur » qui les frappait si cruellement en ce monde, leur était » à tout jamais interdite. » Mais le son des cloches, qui sonnaient à toute volée en » signe de prise de possession des pères Chartreux, cou- » vrit leurs sanglots et résonna à leurs oreilles comme le » glas funèbre de la mort; l'heure d'abandonner cette » maison hospitalière était venue. » Ici se termine la tâche ingrate que j'ai acceptée, sans avoir le temps de la bien remplir, de vous faire connaître un mémoire dont la lecture vous eût bien plus intéressés que cette trop longue et trop pâle analyse. Heureux si je n'ai pas été contre mon but, qui était de vous faire con- naître dans M. Vinay un candidat qui écrit en très-bon style et qui comprend l’histoire à la manière de Cicéron pour qui elle était : Testis temporum, lux veritatis, vita memoriæ, magistra vilæ, nuntia velustatis. A cette précieuse qualité, M. Vinay, vous le savez tous, Messieurs, en joint d’autres qui ne sont pas moins appréciées dans cette enceinte, Il est grand propriélaire, agronome AVRIL, 95 et avocat distingué, et chez lui les vertus du caractère sont à la hauteur de celles du talent. L'unanimité de vos suffrages lui est due. À la suite de ce rapport, M. Vinay est nommé, au scrutin secret et à l’unanimité, membre résidant. Sont encore nommés, au scrutin et à l'unanimité, membres non résidants : MM. le docteur Bertrand de Saint-Germain, Azéma et Gatillon. À six heures, la séance est levée. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 12 MAI. SOMMAIRE. Dox au Musée : Planche de gravure sur cuivre représentant sainte Anne faisant lire la Sainte Vierge, do née par M. Poynot. — OuvraGes REÇUS : Le Journal d'agriculture pralique, numéro de mai 1859, soulève la question du prix de revient dans la produion des céréa'es. — Annuaire de la Sociélé métléorolo- gique de France, contenant quelques articles de M. Bertrand de Doue. — Eloge académique de M. de Chalaniat, par M. F. Grellet. — Annales de la Sociélé académique de Gratz, en Autriche, scumises à l'appréciation de M. Semmig, professeur d'allemand au Lycée. — La Société soumet au conseil d'administration la proposition d’une souscription à l'ouvrage la Vie des saincts et des sainctes d'Auvergne et du Velay et à l'encyclopédie d'agriculture de M. Molh. — Corresponpaxce : Lettre de la Société protectrice des animaux. — AGRICELTURE : Du sorgho, par M. le Président.— Etude chimique de cette plante par M. Isidore Picrre. — De ses produits comparés avec ceux de la fève, de la Lomme de terre, du maïs et de la betterave. — SCIENCES HISTORIQUES : Lecture dun fragment de la vie de Mgr de Béthune, par M. l'abbé Sauzet. — M. l'abbé Bernard continue l'analyse du cartulaire de Chamalières. — Opinion de M. Silvy sur l'origine des confréries académiques ; elle est partagée par M. le Président. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. À {rois heures la séance est ouverte. Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. Ce rapport est adopté sans réclama- tion. MAI. 95 Doxs Au Musés. — M. Poynot, receveur de l'enregis- trement, bureau des actes de l’état civil, place du Breuil, fait hommage à la Société, par l'intermédiaire de M. Aymard, d'une planche de gravure sur cuivre, représentant sainte Anne faisant lire la Sainte Vierge. Cette œuvre, signée Æieronimus Dumontheil sculpsit, au Puy, est intéressante en ce qu'elle nous montre, avec d’autres plaques gravées que possède le Musée, que l’art de la gravure sur cuivre était anciennement pratiqué au Puy. OuvraGEs REÇUS. — M. le Président fait encore remar- quer, comme il l’a fait à la dernière séance, que les nombreuses revues et publications agricoles que reçoit la Société sont remplies d’études, de discussions et de travaux relatifs à l’importante question de l'échelle mobile que le Gouvernement a résolue, au moins pour le présent, dans un sens favorable au vœu de la Société. Le Journal d'agriculture pratique, mois de mai 1859, lui fournit l’occasion de soulever le problème, si difficile à résoudre, du prix de revient dans la produc- tion des céréales. I! n’y a, dit M. le Président, qu'une comptabilité réglée avec le plus grand soin qui puisse faire connaitre, et encore d’une manière approxima- tive, ce que coûte à chaque cultivateur la production d’un hectolitre de froment. Tant que, sur nos marchés, les produits de la terre ne trouveront pas un prix suf- fisamment rémunérateur, l'agriculture sera en soul- france et avec elle tous les autres intérèts. Il est donc 96 RÉSUMÉ DES SÉANCES, de la dernière importance de pouvoir se rendre compte de tous les frais de culture et de préconiser l'usage de la comptabilité. Parmi les autres ouvrages, M. le Président signale d’abord : 10 l'Annuaire de la Société météorologique de France, renfermant un excellent article de M. Ber- trand de Doue, sur des observations de météorologie, faites dans notre département; 2e Féloge académique de M. de Chalaniat, prononcé par un de nos collègues, M. Félix Grellet, avocat à Riom; Plusieurs volumes d'une Société académique de Gratz, en Autriche, écrits en langue allemande, ren- fermant des travaux d'archéologie et accompagnés d’une lettre qui demande en échange les publications de la Société. M. Semmig, professeur d'allemand au Lycée impérial, sera prié de vouloir bien apprécier cette revue autrichienne, et d’après son avis, la Société statuera sur la demande qui lui est adressée. M. le Président donne connaissance à la Société d’un prospectus envoyé par M. Marmeisse, relatif à la pu- blication du livre de la Vie des saincts et des sainctes d'Auvergne et du Velay, par Dom Branche. Plusieurs membres appuient une souscription à cet ouvrage, publié par un homme dent la Société a plus d'une fois apprécié le zèle ; et le renvoi au conseil d’admi- uistration avec avis favorable est prononcé par la Société. MAI, 97 La Société renvoie aussi au conseil d'administration la proposition d'un abonnement à une publication faite par un agronome distingué, M. Molh. Cette publica- tion, tout entière consacrée à l’agriculture, formera comme une encyclopédie de 12 à 15 volumes à 7 fr. le volume. UORRESPONDANCE, — Dans le dépouillement de la cor- respondance, M. le Président appelle l'attention de l’As- semblée sur une lettre de la Société protectrice des animaux, qui lui est adressée de Paris, par l’intermé- diaire de la Préfecture. Cette Société, sérieusement or- ganisée, dispose de certaines ressources qu’elle destine à des primes d'encouragement pour les domestiques qui-se distinguent par les soins qu'ils donnent aux ani- maux confiés à leur garde. Il invite en conséquence ceux de MM, les membres qui, à ce sujet, ont des ren- seignements à fournir, à vouloir bien les transmettre, avec des détails, au Secrétariat. AGRICULTURE. — M. le Président occupe l’Assemblée d'une plante fourragère, le sorgho, à laquelle on attri- bue une haute valeur pour l'alimentation des bestiaux, mais que les agronomes expérimentent tous les jours, et que les uns exaltent, que d’autres déprécient. A ce sujet, M. le Président signale un excellent article, Mo- nileur des comices, 7 mai 1859, de M. Isidore Pierre, professeur de chimie à la faculté de Caen, et qui a pour titre ? Recherches analytiques sur le sorgho, fourrage. Des travaux et des calculs de ce savant chimiste, il res- sort: [0 que le sorgho exige près de trois fois autant 98 RÉSUMÉ DES SÉANCES, d'azote et de phosphates qu'un bonne récolte de blé (paille et grain réunis); 2° que pour donner de beaux produits, il exige une terre très-fertile, qu'il épuisera d'autant plus énergiquement que sa récolte aura été plus vigoureuse et plus abondante; et 3° que l’épuise- ment causé par une bonne récolte correspond à l’épui- sement occasionné, non par une, mais par trois bonnes récoltes de froment. Le prélèvement d'azote qu’elle exerce sur le sol, d’après M. Pierre, correspond à 1600 ou 1800 kilogrammes de guano. comme fourrage , il ne peut en aucune manière entrer en comparaison avec le trèfle, la luzerne , le sainfoin qui, après avoir produit, dit-il, des masses considérables de matières alimentaires pour nos ani- maux, loin de laisser nos terres impropres à la culture du blé, y laissent, par leurs racines et leurs débris fo- liacés, de nouveaux éléments de fécondité. D’où il con- clut que le sorgho, malgré son rendement considérable, n'est pas encore appelé à figurer économiquement dans ia production alimentaire destinée au bétail, et que d’ailleurs il est fort difficile de lui assigner une place rationnelle dans nos assolements. | Cette opinion avait pour ainsi dire déjà reçu la sanc- tion de l’expérience dans un essai de culture dont rend compte le Journal d'agriculture pratique pour le Midi de la France, janvier 1859, t. x. M. Caussé, vice-se- crétaire des Sociétés d'agriculture de la Haute-Garonne et de l'Ariège, avait disposé plusieurs sortes de semen- ces dans un champ homogène de deux hectares : des fèves, des pommes de terre, du maïs, des betteraves et du sorgho. Evaluant les produits de ces différentes MAT, 99 semences d'après les cours ordinaires, les fèves ont rendu, à 13 fr. l'hectolitre, 5 fr. par are; les pommes de terre à 3 fr. l’hect., 3 fr. 07 c., par are; le maïs à 12 fr. l’hect., 3 fr. par are, la betterave à 1! fr. 50 c. le quintal, 2 fr. 80 c. par are et le sorgho à ? fr. le quin- lb 910 Mpariare: Mais l’année suivante, ayant ensemencé la pièce tout entière en froment, le lot qui avait été occupé par le sorgho a rendu moitié moins que les autres: les fèves, 25 fr. 33 c.; pommes de terre, 23 fr. 74c.; maïs, 21 fr. 43 c.; betteraves, 23 fr. 33 c. et sorgho, 11 fr. 66 c. Le champ dont je fais le bilan, ajoute M. Caussé, se trou- vait sous mes yeux lorsque je sortais de mon habita- tion, et la bande de terrain stérilisée presque par le sorgho frappait péniblement les regards. D'autres expériences plus concluantes viendront sans doute nous édifier plus complètement sur les qualités d’une plante qui mérite qu'on ne la condamne pas sans l'avoir encore étudiée. Telle est la conclusion à laquelle s'arrête M. le Président. SCIENCES HISTORIQUES. — M. l’abhé Sauzet, se confor- mant à l’ordre du jour, donne lecture de quelques frag ments de la vie d’un de nos évèques les plus distingués, Mer Armand de Béthune. Les deux chapitres qui son entendus font vivement désirer que notre digne collè- gue réalise le projet qu’il semble avoir formé, d'écrire l'histoire de cet éminent prélat. Ils ont trait à la pro- tection que Mgr de Béthune accordait aux artistes, à sa mort et aux honneurs funèbres qui lui furent rendus. Sous ce titre, M. Sauzet donne à l'Assemblée des détails 100 RÉSUMÉ DES SÉANCES. pleins d'intérèt sur la magnifique galerie de tableaux que Mgr de Béthune avait formée à l'évèché, et surtout dans sa résidence de Monistrol; sur deux peintres du Puy qui avaient du talent et du renom et sur le sculp- teur Vanneau. M. l'abbé Bernard obtenant ensuite la parole, conti- nue, dans l'étude et l'analyse du cartulaire de l'abbaye de Chamalières, à signaler des documents précieux pour l’histoire du Velay. La baronie de Roche-en-Ré- gnier, ses origines, son développement font le princi- pal objet de sa communication. La Revue des Sociétés savantes des départements, publiée sous les auspices du Ministre de l'instruction publique et des Cultes (mars 1859. 2e série), fournit à M. le Président l’occasion de revenir sur un point très-intéressant pour notre histoire, celui de l'origine et de la fondation des anciennes confréries de Notre- Dame du Puy, que plusieurs savants antiquaires attri- buent à notre ville. Dans un excellent article de critique, M. Silvy, appréciant l'Histoire de l'Académie des Lan- ternistes de Toulouse, par M. Desbarreaux Bernard, combat avec toute raison l'opinion de ce dernier, qui prétend que les Puys de Normandie n’ont été fondés que peu de temps après la réformation, avec la mis- sion de défendre le culte de la Vierge attaqué par les protestants. M. le Président partage l'opinion de M. Silvy qui fait remonter jusqu'au commencement du XIIe siècle MAI. 401 l'existence de ces confréries académiques, mais il re- grette que ce savant critique n'ait pas cité la ville ani- cienne, à laquelle M. Aymard attribue, avec assez de fondement, l’origine des Puys. A six heures, la séance est levée. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SEANCE MENSUELLE DU JEUDI 6 JUIN. SOMMAIRE Lecture du procès-verbal de la dernière séance. — Doxs au Musér : Nouvel envoi d'oiseaux empaillés, par M. le docteur Moussier ; remerciment a M. Moussier. — M. le Président fait hommage, au nom de M. de Payan-Dumoulin, de quelques figurines en terre cuite de l’époque gallo-romaine. — OuyrAGES REÇUS : Deux volumes du Congrès scientifique de France, 25e session, tenu à Auxerre; M. Balme se charge d'en rendre comple. — AGRICULTURE : Renseignements donnés, à la demande de M. le Préfet, sur l’état de la récolte. — M. l'inspecteur des écoles primaires transmet un rapport de M. Chaudier sur des expériences d'agriculture ; M. de Brive se charge de l'examen de ces travaux. — Economie publique. — Alimentation : Du bœuvonage, par M. Henri Doniol. — Piscicul- ture : D'un rapport de M. de Causans sur la production de la truite. — Expi- riences faites au Charrouil par M. Blanc-Furnon. — SCIENCES PHYSIQUES. — Paléontologie : M. Robert accepte la mission de y siter les nouvelles fouilles faites à Vialette, dans une propriété de M. l'abbé Bernard. — SCIENCES HISTO- RIQUES : M. Louis de Vinols entretient la Société de quelques documents d'his- toire locale trouvés dans les bibliothèques de Paris et concernant le château de Polignac et le manuscrit n° 8002 dont il a été question déjà à la séance de no- vembre 1558. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. A trois heures la séance est ouverte. Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la dernière séance qui est adopté sans réclamation. JUIN. 105 Doxs AU MUSÉE. — En présence de l'Assemblée M. Ro- bert Félix fait ouvrir une caisse adressée à la Societé. C'est un nouvel envoi de M. le docteur Moussier, renfer- mant neuf oiseaux du département de la Haute-Loire , bien empaillés , placés sur un support blane , et dont quelques espèces manquaient au Musée ; en attendant qu'ils aillent enrichir nos galeries zoologiques, M. Ro- bert les place devant le bureau , fait ressortir la va- leur de ces rares échantillons et en détermine l'espèce, à la satisfaction générale. L'Assemblée décide, par l'organe de M. le Président, qu'il sera adressé à M. le docteur Moussier une lettre de remerciment pour le zèle soutenu et dévoué, la persistance scientifique qu’il met à compléter nos col- lections ornithologiques et pour le bon souvenir qu'il garde à notre Société et à son pays. Sur le bureau on remarque encore beaucoup quel- ques figurines en terre cuite de l’époque gallo-ro- maine. M. de Payan-Dumoulin , président du tribunal civil du Puy, en fait hommage à la Société, par l’inter- médiaire de M. Ch. Calemard de Lafayette. Les numéros du journal Fllustration (23 octobre, 28 novembre et 5 décembre) que M. de Payan à bien voulu adresser à la Société, renferment trois articles écrits par ce savant magistrat, avec le dessin des objets découverts dans les fouilles qu'il a fait exécuter avec tant de succès. Ces trois articles nous disent avec pré- cision et clarté l’importance de la découverte de ces objets d'art, à côté desquels M. de Payan a mème 104 RÉSUMÉ DES SÉANCES. trouvé des fours et tout un atelier de potier. C’est une bonne page de plus pour l'archéologie et la céramique gallo-romaine. -M. Ch. Calemard de Lafayette s’est chargé de re- mercier le nouveau président du tribunal civil, qui a su si bien acquitter sa dette de bien-venue dans notre pays OUvRAGES REÇUS. — Parmi les ouvrages reçus, M. le Président signale deux volumes du Congrès scienti- fique de France (25e session), tenu à Auxerre, qui lui ont paru renfermer des mémoires dignes d'intérêt. M. Louis Balme veut bien se charger d'en prendre connaissance pour en rendre compte à la Société dans une prochaine séance. AGRICULTURE. — M. le Préfet écrit à M. le Président pour demander des renseignements sur l’état de la récolte. Après avoir consulté ies membres présents à la séance, M. le Président coustate que, sur presque tous les points, elle promet beaucoup; que la floraison, cette année assez avancée, se fait bien, même dans la montagne ; que dans quelques localités on se plaint de la sécheresse, surtout pour les orges. Une autre lettre de M. le Préfet fait savoir que M. le Ministre de l'Agriculture et du Commerce a accordé à la Société d'agriculture du Puy, par Sa déci- sion du 28 avril dernier, un crédit de 2,500 fr. pour primes aux espèces bovine, ovine et porcine , cultures fourragères et instruments. JUIN. 105 M. Béraud, inspecteur des écoles primaires, en l’ab- sence de M. l’Inspecteur de l'Académie, transmet à M. le Président un rapport d'un de nos collègues , M. Chaudier, instituteur aux Villettes {commune de Sainte-Sigolène) et membre non résidant. Ce rapport à trait à des essais de culture de carotte et de betterave champêtre. M. de Brive a bien voulu se charger de rendre compte à la Société du travail de M. Chau- dier. Economie publique. — Alimentation. — A l'occasion d'un article du Bulletin de la Société linnéenne de Nor- mandie (3° volume), signalé par M. le Président, au sujet de la castration des vaches, autrement dit:le bæuvonnage, M. Henri Doniol ayant obtenu la parole, présente plusieurs observations intéressantes. I fait d'abord remarquer combien cette opération, exécutée d’après le mode inventé par M. Charlier , vé- térinaire à Paris, peut s'accomplir avec facilité, sans douleur et sans danger pour les animaux qui la subis- sent, Surtout si les sujets ne sont pas totalement épui- sés. Quant aux avantages qu'on en retire , ils sont tels que cette industrie devrait être vulgarisée sans retard. En effet, après l’opération, les vaches gardent le lait pendant plus de dix-huit mois. Ce lait double presque de valeur (il vaut, le litre, 20 cent. au lieu de 13) par la quantité de beurre qu'il acquiert : et aussitôt que la période de la lactation commence à passer, l’engrais- sement de la bête se fait avec plus de rapidité et à Meilleur marché que dans les cas ordinaires. M. Do- niol signale encore un avantage qui sera apprécié, c’est TOME XXII. 8 106 RÉSUMÉ DES SÉANCES. que la viande en acquiert une qualité au moins égale à celle du meilleur bœuf. Il serait donc à désirer qu'un vétérinaire dévoué aux intérêts de notre agriculture voulüt bien se mettre en rapport avec M. Charlier qui, en deux leçons et à peu de frais (environ 20 fr. par leçon), lui communi- querait sa manière de procéder. A Paris les sujets d'expérience ne manquent pas, ils sont fournis par les bouchers moyennant une faible rétribution. Il y aura inévitablement honneur et profit pour celui qui impor- tera cette industrie dans notre pays où la vache, sous le rapport de l'alimentation publique, joue un si grand rôle. Sur cette question, devant un intérêt si majeur, la Société paraît disposée à prendre, s’il le faut, l'initia- tive. Elle avisera aux moyens d'encourager l’introduc- tion du bœuvonnage dans le pays, soit par les primes dont elle dispose , soit de toute autre manière. Pisciculture. — M. le Président signale, dans le Bulletin mensuel de la Société impériale zoologique d'acclimatation (n° 4, t. vi), un rapport intéressant de M. le comte Maxime de Causans, lu dans la séance du 10 décembre 1858 de cette Société. Il a pour titre : Application des nouvelles méthodes de pisciculture à la production de la truite dans le département de la Haute-Loire. 11 frappe surtout par l'indication des ré- sultats que M. de Causans a obtenus de la fécondation et des frayères artificielles qui, appliquées au lac de Saint- Front, ont porté la production de ce magnifique bassin à 1,500 kilogrammes d'excellentes truites par année. JUIN. 107 A ce sujet, M. le Président cite les expériences faites avec suite et succès au domaine du Charrouil , com- mune de Loudes, par M. Blane-Furnon. Il fait remar- quer combien il deviendrait facile de repeupler nos ruisseaux et nos lacs, si, sur plusieurs points du dépar- tement, les exemples de MM. Blanc et de Causans étaient suivis avec quelque persévérance. SCIENCES PHYSIQUES ET NATURELLES. — Paléontologie. — M. le Président charge M. Robert , qui veut bien accepter ce mandat, de visiter les fouilles qui ont été faites à Vialette, dans un champ appartenant à la fa- mille de M. l'abbé Bernard, notre collègue, et qui ont amené la découverte de plusieurs fossiles d’un intérèt scientifique incontestable. M. Robert pourra acquérir pour le Musée les échan- tillons dont il conviendrait d'augmenter nos galeries, pourvu que leur prix ne dépasse pas les ressources assez modiques que la Société peut consacrer à ce genre d'acquisitions. SCIENCES HISTORIQUES. — Conformément à l’ordre du jour, M. de Vinols entretient l'Assemblée de quelques découvertes de documents historiques concernant l'his- toire locale, qu'il a faites à Paris, à la bibliothèque im- périale , département des manuscrits. Il fait connaître à l'Assemblée une lettre, entièrement inédite, de M. Bel- lidentis de Bains, écrite, à la date de 1759, au célèbre historien du Languedoc, Dom Vaissette. Cette lettre renferme une description fort curieuse d’un pré- tendu temple d’Apollon, tel qu'on l'avait conservé du 108 RÉSUMÉ DES SÉANCES. temps de l’auteur, au château de Polignac. La lettre donne des détails sur les dimensions de l'édifice, les sculptures et les fresques dont il était orné, sans ou- blier la pierre de l’oracle, l'autel du trépied, le masque d’Apollon et la crypte qui doit encore rester intacte sous les décombres du temple. Cette communication , qui met l'Assemblée sur la voie d'indications ignorées jusqu'ici, est écoutte avec intérêt et donne lieu à des observations faites par plu- sieurs membres. M. Bertrand de Doue fait connaître M. Bellidentis de Bains, qui, dit-il, avait la réputation d'un homme de beaucoup d'esprit et qui correspon- dait fréquemment avec Dom Vaissette. M. Doniol rappelle la description pompeuse et am- poulée du masque d’Apollon , faite en 89-90 par l’as- tronome de La Lande, dans le sein du comité féodal de l'Assemblée constituante : ce rapport est à la biblio- thèque impériale, département des manuscrits, sous la rubrique de la Haute-Loire. M. Aymard, à son tour, exprime le désir que des fouilles puissent mettre au jour cette crypte du château de Polignac, signalée dans la lettre de M. Bellidentis ; il espère que M. le prince de Polignac, dont on connaît le goût pour l'étude, fournira aux archéologues les moyens de connaître tout ce que cachent encore les ruines de ce château si ancien et si célèbre dans les annales de l'histoire du Velay. L'Assemblée, à l'unanimité, décide que la lettre de M. Bellidentis sera mentionnée au procès-verbal et qu'elle prendra place dans le Bulletin des recherches historiques. JUIN. 109 M. de Vinols, reprenant la parole, entretient l'Assem- blée du manuscrit 8002 de la bibliothèque impériale, qui traite des origines légendaires de l'établissement du sanctuaire de Marie sur les hauteurs d’Anicium. Comme l'avait déjà fait votre Secrétaire dans la séance de jeudi 4 novembre 1858 , M. de Vinols en fait res- sortir toute limportance et l'attribue à l'official de Notre-Dame, Pierre Odin. A la description qui en avait déjà été donnée, il ajoute la lecture de la dédicace de ce livre remarquable et en fait apprécier le style naïf et gracieux. M. Aymard présente quelques observations d'où il résulte que la légende contenue au manuscrit cité par M. de Vinols est, en partie, une sorte de traduction d'un document plus ancien écrit en latin et conservé par Médicis dans son recueil de chroniques. Quant à la date qu'il faudrait assigner à l'origine de la légende, on ne connait pas de texte antérieur à celui reproduit par nôtre chroniqueur et qui, d'après les détails du récit, ne paraît pas avoir été rédigé avant le XIIe ou le XIIIe siècle. BeAUx-aRtS. — À l'ouverture de la séance, une expo- sition de trois petits tableaux de genre et d’un grand portrait, que M. Emile Giraud avait bien voulu soumet- tre à l'appréciation de ses collègues, avait attiré l’atten- tion de la Société. Avant de se séparer, l'Assemblée, sur la propo- sition de M. le Président, a nommé une commis- sion composée de MM. de Brive, Chouvon, Balme, 110 RÉSUMÉ DES SÉANCES. = de Fontpertuis, du Garay aîné, Doniol Henri, char- gée, de concert avec le bureau de la Société, de trouver et de mettre en œuvre, dans la mesure de ses attributions, les moyens de faire figurer avec honneur le département de la Haute-Loire au grand concours régional agricole qui se tiendra au Puy au mois de mai de l’année prochaine. L'ordre du jour étant épuisé, la séance est levée à six heures. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE , DU JEUDI 7 JUILLET. SOMMAIRE. Lecture du procès-verbal de la dernière séance. — Hommage rendu par M. le Président à la mémoire de M, le docteur Hilaire de La Tourette, membre rési- dant. — Musée : Acquisition de Ceux pièces de paléontologie. — OUVRAGES REÇUS. — CORRESPONDANCE : Lettre de M le Préfet provoquant une enquête sur lPétat des récoltes dans le département. — AGRICULTURE : Rapport verbal de M. de Brive sur des expériences d'agriculture faites aux Villettes par M. Chau- dier, instituteur public dans cette commune ; adlésion de la Société aux travaux de ce genre. — Piscicullure : Des semis faits par M. Limozin sur les pentes du lac du Bouchet et du projet d'empoissonnement du lac. — HYGIËxE : Rapport de M. le docteur Balme du Garay sur une épidémie de Montagnac, commune de Vernassal. — SCIENCES HISTORIQUES : M. l'abbé Sauzet donne lecture d'une ana- lyse d’un document histor.que sur la prise de possession d’un canonicat au Puy par les dauphins du Viennois. — PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ : Lettre de M. de Payan Dumoulin demandant à faire partie de la Société ; Nomination d'une commission à ce sujet. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. A trois heures la séance est ouverte par la lecture du procès-verbal. — Il est adopté sans réclamation. Aussitôt après, M. le Président rend hommage à la mémoire d'un des membres résidants enlevé aux 112 RÉSUMÉ DES SÉANCES. travaux de la Société par une mort rapide. « M. le doc- teur Hilaire de la Tourette était un de nos doyens, un de nos collègues les plus assidus et les plus recomman- dables , dit M. le Président , son concours nous à été souvent utile, Des mémoires, insérés dans nos Annales, témoignent de la variété de ses connaissances. Ses études de botanique sur le département, qui ont été livrées à la publicité, offrent un véritable intérêt sur- tout pour ce pays. Get ouvrage donne des indications en langage vulgaire et même en patois, pouvant ser- vir à vulgariser la connaissance des plantes ; il indique aussi leurs propriétés hygiéniques et médicales. La So : ciété doit des regrets à M. de la Tourette; M. le Pré- sident en a transmis l'expression à sa famille. » Doxs au Musée. — Acquisitions. — Sur le bureau sont placés deux échantillons d'ossements fossiles : une partie de mâchoire de la grande espèce des mas- todontes avec des dents bien conservées et un calca- néum intact. Ces deux pièces importantes , acquises par M. Félix Robert au nom de la Société , ont été trouvées à Vialette, près Saint-Paulien , avec beaucoup d'autres qu'ont mises au jour des fouilles faites dans un champ appartenant à la famille de notre collègue, M. Bernard, aumônier du lycée. OUVRAGES REÇUS. — Parmi les ouvrages reçus par la Société, M. le Président signale : 1° les Annales archéologiques publiées par M. Didron, t. xIX, p. 27. Ce volume renferme un emprunt fait à l'Album pho- tographique par MM. Aymard et Malègue, relativement JUILLET, 115 au buste de saint Théofrede (XIIe siècle) ; 20 Dans les Mémoires de l'Académie des sciences de Dijon (1859), une étude de M. Henri Darcy sur les travaux hy- drauliques de la ville de Dijon; 3e un article sur l'éducation des abeilles dans le Moniteur des comices (11 juin 1859), essais de reboisement par Mgr le car- dinal Donnet. CORRESPONDANCE. — Une lettre de M. le Préfet, adres- sée à M. le Président, provoque, au sein de la Société, une enquête sur l’état des récoltes dans le départe- ment. Il en résulte que le bel aspect sous lequel se présentait la végétation ne tiendra pas toutes ses pro- messes ; la sécheresse extraordinaire qui règne depuis longtemps, quelques jours de vent du Midi précédés de brouillard, ont surpris le grain et l'ont arrôté dans son développement. La récolte des lentilles et des fèves parait compromise et la pomme de terre souffre beaucoup. AGRICULTURE. — M. de Brive, se conformant à l’ordre du jour, fait un rapport verbal sur des expériences d'agriculture faites aux Villettes, arrondissement d’Ys- singeaux , en 1858, par M. Chaudier, instituteur public dans cette commune, M. Chaudier , ancien élève de notre école Normale primaire, ayant pratiqué les nou- veaux procédés de culture à la ferme de Nolhac où il a passé quelques années en qualité d’instituteur et d'agent comptable, emploie les loisirs que lui laisse l'école qu'il dirige aux Villettes à la propagation des saines méthodes d'agriculture, 114 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Il ne se contente pas de les recommander, il les applique lui-même; et son exemple a déjà porté des fruits. Gette fois ses expériences ont été essayées sur la culture de la carotte et de la betterave champêtres, destinées à la nourriture des bestiaux. Les résultats obtenus sont on ne peut plus concluants et conseillent la production de ces deux espèces de racines comme très-avantageuse, pouvant donner un bénéfice assuré , surtout dans les années de sécheresse et de disette de fourrage. La carotte à collet vert et la betterave racine disette ou la blanche de Silésie, fournissent les pro- duits les plus abondants et pourraient ouvrir un bon assolement. L'Assemblée a reconnu la justesse des calculs de M. Chaudier, présentés avec ordre et lucidité par M. de Brive, et tout en approuvant le zèle pour le bien public dont s'inspire l'honorable instituteur des Villettes , elle est unanime à regretter que ces expériences n'aient pu être faites sur une plus grande échelle. Quelques membres ont fait remarquer que des cal- culs opérés sur la récolte de quelques ares de terre ne présentaient pas tous les éléments d’une précision suffisante. Toutefois, la Société donne son entière approbation aux essais de M. l’instituteur des Villettes, un de ses membres non résidants, ainsi qu'elle l'avait déjà fait pour un autre de ses membres, M. Ambert, instituteur de la commune de St-Julien-Molhesabate, canton de Montfaucon. Sous la haute impulsion de l'inspecteur d'académie de Clermont, en résidence au Puy, M. To- pin, par les soins assidus de M. l’Inspecteur des écoles JUILLET, 415 primaires de ce département, nos instituteurs entrent dans une voie d'honneur et de dévoûment où la So- ciété sera heureuse de les encourager et de les suivre ; car répandre au sein des campagnes les bienfaits de l'instruction, et en même temps par des conseils, et surtout par des exemples , y faire pénétrer le goût de la bonne culture , c’est se rendre deux fois utile , c’est s'associer à la pensée d'un gouvernement grand et généreux, qui place dans ses premières préoccupa- tions l'amélioration morale et le bien-être des popu- lations. En conséquence, la Société désirerait que M. le Pré- sident voulüt bien appeler encore l'attention et les encouragements du Conseil général sur des travaux modestes mais très-méritants et d’un très-bon exem- ple; surtout si, dans ses projets à venir, M. Chaudier faisait entrer une exploitation de terre d’une certaine étendue. M. le Secrétaire est chargé de provoquer quelques explications à ce sujet. Pisciculture. — M. Limozin, Secrétaire adjoint, donne à la Société, qui les écoute avec intérôt, quelques détails sur les semis et les plantations qu'il a fait opérer, l'année dernière, sur les pentes dé- nudées du lac du Bouchet. Les plantations nouvelles n'ont pas eu le succès qu'il en attendait. L'absence totale de neige, qui a signalé particulièrement l'hiver de cette année, les a laissées exposées à la rigueur de la saison. Plusieurs jeunes plants ont péri dans cette terre nue où le ‘gazon n’a pas encore atteint un déve- loppement suffisant. 116 RÉSUMÉ DES SÉANCES M.Limozin espère cependant que les mesures récentes qui défendent le parcours autour du lac auront pour effet le reboisement dans un bref délai. “Il persiste à croire qu'un établissement de piscicul- ture pourra y réussir pourvu qu'une maisonnette de garde puisse y être construite. Les poissons y vivent et bientôt les bords du lac, qu'il a fait planter de saules à grandes feuilles de laurier, pourront leur pro- curer une certaine pâture. Le vœu de la Société est, à l'unanimité, pour la continuation de ces travaux qui feront bientôt reparaître de belles forèts dans ces lieux où depuis si longtemps l'herbe même avait cessé de venir. Elle a encore montré le vif désir qu’il füt donné suite à l'établissement de pisciculture déjà inauguré par M. le Préfet et que l’on vit s'élever la petite maï- son du garde sur les bords de ce bassin si pittoresque, souvent visité par l'étranger, et qui pourrait fournir des bénéfices par l’empoissonnement aujourd'hui re- connu possible au moyen des procédés nouveaux. Hyciëxe. — M. le docteur Balme du Garay donne ensuite lecture d’un mémoire sur les causes les plus ordinaires de ces maladies épidémiques qui, à des pé- riodes assez rapprochées, viennent décimer quelqu'une de nos communes rurales. M. Balme du Garay attribue surtout leur apparition à la nature et à la configuration du terrain, à la disposition topographique des mon- tagnes, des lacs, des marais et des cours d’eau, se combinant avec la production fortuite de quelques phénomènes météorologiques tels que fréquence de JUILLET 117 certains vents, un état persistant de sécheresse ou d'humidité de l'atmosphère. Cette étude intéressante est fondée entr’autres faits sur celui tout récent qui s’est produit dans le village de Montagnac (commune de Vernassal), où, pendant l'hiver de cette année, a sévi avec violence la fièvre typhoïde. M. Balme du Garay , médecin des épidémies, appelé déjà tard, s'était rendu en toute hâte sur le point menacé, en compagnie du docteur Vissaguet qui lui avait généreusement prêté son concours. Il décou- vrit, après avoir attentivement étudié la topographie des lieux, que le marais voisin était desséché et que le vent du nord-est, qui n'avait cessé de régner, en avait apporté et accumulé les miasmes putrides sur le village de Montagnac. Ces explications sont accompagnées d'une carte bien faite qui passe de main en main. MESSIEURS , J'ai été si surpris et si flatté en même temps qu’on &c- eueillit avec tant de bienveillance, dans cette enceinte, une œuvre purement médicale dans sa deuxième partie, à savoir : la classification étiologique — ou des causes — des épidémies rurales dont j'ai entretenu la Société à l’occasion de la comparaison que je faisais du travail médico-admi- nistratif du professeur de l’école de Médecine de Besançon avec ce qui avait été fait administrativement à Vals-près- le-Puy, que je me suis vu obligé de vous faire cette 118 RÉSUMÉ DES SÉANCES. communicalion-ci, qui est une étude topographo-étiologique du village de Montagnac, qui a eu une épidémie de fièvre typhoïde en décembre 14858 et qui a duré jusque fin mars 4859. Cette étude est suivie de diverses considérations qui sont les corollaires ou déductions du précédent travail dont je viens de vous parler et que je vous ai soumis, il y a quelques séances, sous la présidence de M. Aymard, notre vice-président, et d’autres travaux plus anciens que j'ai fait connaître à la Société. La santé de l’homme des champs est tellement soumise au milieu dans lequel il vit, qu'il est atteint de beaucoup de maladies par infection ou épidémiques : animaux ma- lades, plantes malades, atmosphère malade; tout réagit sur lui, en sorte qu'il tombe malade au moment où il aurait le plus besoin-de son travail; en sorte aussi qu'il est bon qué Ta science d'hygiène publique s'occupe de sa santé, autant'du moins que les améliorations qu’elle solli- citera seront compatibles ec les ressources administra- tives; car, pour lui, il est incapable de rien accomplir sous ces différents rapports. Que les hommes qui s'occupent d'hygiène publique ru- rale ne laissent pas s’évanouir les données que fournit la science médicale ; car la science d'hygiène publique ne s'occupe pas seulement de fournir des préceptes pour vivre en bonne santé, mais elle cherche à faire des décou- vertes pour l'alimentation, surtout pour la classe des tra- vailleurs, citadins ou agricoles. Qui ne voit au premier coup-d'œil que la science de la piscicalture, que la science d’acclimatation des êtres, animaux, végétaux, se réduit, en dernière analyse, à des découvertes du genre de celles- ci; el je crois en avoir signalé une par l'observation CR 00 + De TOM. XXII PLAN FIGURATIF de Montagnac,| Ce Vernassal| 0} —_%E#£ D ne ME MOIRE de M°le D7 LL Carey TANT] AT nn. pe V2 | oi "e sur l'Epideme de #1) 2 Montagnac en, 1158-1050, Cheys £ = j Sy Î le DRE (K77) jp ) 1) 22 2, “7 S So cenel.. \\ | | a , il }i}} 1 Vu” At )) | AU! y 1) ) Annales de la Societe Moxdern que rer ip M n “url ) Lg | Ê Fo > € n. li Z. & se “lg 2 PES Æ D} ou W (a — — KVerns 4 7 ee es | 4 7 SN ES EN NS ÈS ÈS À ÈS XSS 4 “ ITA SI IT K AH A SRE ES HEAR AUGEÉ \ NX LE É fi; ! \il DO KE: ) D) D NL EN ii) Æ À Fuiss ess PE ©. : LEZ FE ZE as ap CZ 2 4 4, 2% on 2 C7 0) 7 ; fee "4 en de D, ii 724 2 a) 67 Fi 7 je | JUILLET. 4119 directe ; c’est-à-dire que j'ai vu plus de mille personnes s'être nourries des chairs cuites des animaux charbonneux se portant très-bien ; celles-ci nourrissent l’homme sans danger aucun ; et les Payen de l’Institut de France, dans un ZJraité des substances alimentaires ; et les Baudens, inspecteur général de santé de l’armée de Crimée, dans son ouvrage : Souvenir d'une mission en Crimée, qu'il a composé avant de mourir, n'auront pas dit une chose en vain en promulgant après moi ce que j'avais découvert en 1859 et démontré au Congrès scientifique qui se tint au Puy en 1855 (section de médecine). Reste donc à savoir si aujourd'hui je serai assez heureux pour vous faire accepter la démonstration que nous allons vous faire. P I ne s’agit de rien moins que de vous prouver, Messieurs : 10 Que la fièvre typhoïde qui a régné à Montagnac a pour cause (étiologie) le voisinage d’un lac ou marais, comme nous le croyons ; 20 Que la plupart des épidémies tiennent à la topogra- phie. Il Topographie de Montagnac (1). Le territoire de la commune de Vernassal, où est le vil- lage de Montagnac, repose sur un plan légèrement incliné 4) Voyez le plan ci-contre. 120 RÉSUMÉ DES SEANCES. et oblique du nord-ouest au sud-est. IL est limitrophe, au sud et à l’est, du territoire du village Freycenet, com- mune de Lissac, canton de Saint-Paulien. Au tiers supérieur avec le tiers moyen de cet espace, à l’ouest, s'élève la large montagne qu'on appelle la Garde-de-Montagnac ; plus au nord la montagne qu'on appelle Ze Gachas ; et plus à l'ouest encore il existe une chaine de collines séparées par le vallon de Montagnac, que nous appellerons Collines en face et à côté de Montagnac, parce qu'elles n'ont pas reçu de nom, je le crois du moins ; cependant l'existence de ces collines est très-intéressante au point de vue du problème que nous cherchons à résoudre. Toutes ces mon- tagnes garantissent Vernassal des vents nord-est, tandis que Moñtagnac les reçoit en plein, surtout par elles ou à cause d'elles, c'est ce que démontre la science topographique qui, nous l’espérons, ne fera pas défaut à des observateurs moins enthousiastes que nous. On aura la preuve du fait que nous venons de découvrir si, plus tard, on voit les maladies typhoïdes, fébriles à tous les types, se développer à Mon- tagnac (1). Le lac ou marais de Montagnac à 145 hectares 55 ares de superficie. Il sert de pâturage dans toutes les saisons. Il est un bien communal à trois villages de com- munes différentes. La portion de l’est appartient au village de Brassac; la portion sud-est appartient à Freycenet; la portion sud-ouest est à Montagnac , qui possédait , dans les temps anciens, tout ce communal. Le lac est en état de marais la moitié de l’année, surtout la portion inférieure (1) On disat que l'épidémie existait à Vernassal, ct quand nous y fûmes , accompag:.é du docteur Vissaguet, nous ne trouvämes que des malades affectés de bronchites. JUILLET. 121 qui est à l’est. C'est par là qu'il faudrait le dessécher , parce que avec un peu de drainage on ferait arriver l’eau du marais (1) dans le ravin de Freycenet, Du haut de la montagne de la Garde-de-Montagnac ce lac ressemble à un delta A: il devient infectant, je le sup- pose, quand les vents nord-est, est et sud-est soufflent en été et en automne et qu'il est en état de marais, On dirait que le village de montagnac baigne ses pieds dans l'angle sud-ouest: car il y à des temps en hiver et quand il à beaucoup plu, que les prairies de Montagnac et de Frey- cenet participent à l’état du lac, c’est-à-dire qu’elles sont pleines d’eau éôu de glaces en hiver, Nous admettons donc que les effluves marécageuses, comprimées qu'elles sont par la montagne de la Garde-de-Montagnac d’un côté, et la chaîne des collines du vallon de Montagnac de l’autre, par un temps see, comme cela a eu lieu l'été de 1858, et par les vents nord-est comme ils ont régné tout cet été-Tà, ont développé cette fièvre typhoïde de Montagnae pendant l'automne de 185$. III Descriplion sommaire de l'épidémie de Montagnac. Comme je viens de vous le dire, Messieurs, celte épi- démie a commencé à sévir dans le mois de novembre 1858 (4) Nous savons qu'on éprouverait quelques difficultés de la part des autorités locales, attendu que les sang-sues avaient la réput tion de tirer tout le mauvass TOME XXII. 9 422 RÉSUMÉ DES SÉANCES el s’est lerminée dans le mois de mars 1859. Les villages les plus voisins, tels que Vernassal, chef-lieu de Ia com- mune, Freyeenet, n'ont pas participé à l'épidémie. Elle a été remarquable dans ce sens, que sur quarante malades il y en a eu une vingtaine qui n'étaient âgés que de 5 ou 4 à 45 ans, une quinzaine de 16 à 25 ans, et cinq de 26 à 45 ans, qu’elle a eu une forme muqueuse, que les phé- nomènes nerveux, soit du côté du ventre, soit du côté de la tête n’ont pas prédominé, tandis que les membranes mu- queuses des voies digestives et respiratoires, des sens, lels que des oreilles et des yeux et de l’olfaction étaient ma- lades. Cette forme de fièvre typhoïde n’est pas aussi dan- gereuse que les autres ; mais elle est reconnaissable d’abord par le caractère d’hébétude, de surdité, des plaques len- ticulaires ou de pétichies qu'ont la plupart des malades, et ceux qui meurent ont tous les caractères de la fièvre typhoïde la plus prononcée (escarrhes ausacrum aux tro- chanters). Les voies digestives sont pour ainsi dire anéan- ties, car bien souvent on constate que la fièvre de la maladie typhoïde a cessé et que les malades meurent en conva- lescence pour ainsi dire ; c’est ainsi qu’est morte une jeune fille de cette épidémie, lorsque tout faisait espérer qu’elle guérirait. Sur quarante malades, six morts, c’est un hui- tième; c’est peu relativement aux autres épidémies de ce genre qui ont régné dans cet arrondissement. Presque tous les malades ont été des enfants, des adolescents. D'où est venu cela? Nous avons eu recours à cette explication-ci : sang des animaux qui y paissent. Il n'y a qu'un malheur, c’est qu’elles n’y vivent plus depuis que le lac est devenu marais les trois quarts de l'année, et cela . . . . LL par l’exhaussement du terrain, suite de pluies torrentielles. JUILLET. 125 la maladie typhoïde existe pour la première fois dans ce village et nous avons admis que la cause ou l’éfiologie de cette maladie tient au marais et que le miasme palustre avait plus de force contre la constitution des enfants que contre celle des hommes qui ont pu vivre et se bien porter en dépit du miasme. Tous les malades ont gardé la maladie de cinq à sept semaines, Lorsque nous sommes arrivé sur les lieux où sévissait la maladie depuis trois mois, nous avons administré des potions chlorurées et des tisanes béchiques ; tous les malades, moins un, sont revenus à la santé à dater de cette époque-là. IV Théorie de cette infection. La théorie de ce fait est bien facile à exposer, Messieurs : nous ne sommes pas ici pour vous faire une lecon d'hy- giène, c’est pourquoi nous dirons en deux mots que l’on sait, à ne pas en douter, que les marais dégagent, dans les saisons chaudes, des miasmes paludéens ou palustres. pro- venant de la décomposition soit animale (crapeaux, sangsues crevés, ele., elc.), soit végétale : on sait que les herbes, les plantes qui couvrent les marais conservent une humi- dité, dans les temps chauds, impropre à les faire végéter, trop grande pour qu’elles se dessèchent, et qui, les fai- sant dès-lors tomber en putréfaction, empoisonne l'air, 124 RÉSUMÉ DES SÉANCES, les hommes et les habitations à la suite; d'où, chez l'homme, les fièvres pernicieuses ou non intermittentes ; d’où les fièvres varioliques, thyphoïdes, scorbutiques, lo- cales. Vous voyez pour ainsi dire sous vos yeux le déve- loppement de ces miasmes lorsque, vous trouvant auprès d'un marais, vous voyez, dis-je des bulles qui traversent l’eau stagnante, qu’on a recueillies avec des éprouvettes plusieurs fois. et que l’on a dit être de l’acide carbonique, c’est-à-dire gaz impropre à la respiration. Ce que l’on connaît des effets de l'air surchargé de miasmes est très-peu de chose relativement à ce que nous ne connaissons pas sous le rapport des épidémies. Nous soupçonnons ainsi que la densité ou la raréfaction de cet élément est pour beau- coup dans la production de ces états pathologiques, quand nous voyons que le moindre changement de la colonne barométrique est perçu par tant de personnes en élat de santé, D'où il suit qu'on n'aura jamais des données cer- taines sur la production de ces maladies, tant que nous serons privés d'observations météorologiques dans chaque canton, que dis-je, dans chaque commune, dans chaque village ; car s’il est certain que ces données sont utiles pendant l'épidémie, c’est à fortiori avant que ces calamités se produisent. M. Aymard, notre vice-président et ancien maire de Vals-près-le-Puy, avait conçu l'idée, à un autre point de vue que celui que nous exprimons ici, de munir chaque instituteur, chaque greffier ou secrétaire joint au maire ou chaque maire d’un baromètre et d’un thermo- mètre, pour qu'il fût fait des observations météorologiques dans chaque commune, qui seraient consignées dans un registre qui serait envoyé chaque année aux archives de la préfecture. Je crois qu’à la mairie de Vals-près-le-Puy, où 1 JUILLET, 125 il a été maire, comme je l'ai dit, pendant quelques années, où il conserve une si juste influence, il est en mesure de faire adopter ce projet qui, quand il aura été mis en cours d'exécution dans toutes les communes, sera un bienfait pour la science en général et en particulier pour la science étiologique. Il n'est pas besoin, pour justifier la théorie que j'ai développée plus haut, de citer des exem- ples de fièvres palustres qui ont sévi sur nos armées de Crimée, de Rome, d'Afrique où les colons, parce qu'ils habitent des terres marécageuses, y contractent des fièvres palustres. On sait, en effet, que les trois quarts des colons vont passer la saison d'hiver à l'hôpital pour se refaire, avec des pilules de sulfate de quinine, des mauvaises fièvres qu'ils ont contractées pendant le reste de l’année. Ce point d'étiologie épidémique ou endémique est si surabondamment prouvé par les observations directes des médecins de toutes les époques que ce serait superflu à moi d’insister ici. Un de nos usages est donc de reconnaître la topographie du territoire dans lequel nous entrons, c’est-à-dire que nous nous informons quels vents ont régné quelque temps avant l'épidémie, au commencement de l'épidémie :; de tous les phénomènes topographiques, météorologiques , propres à nous éclairer (montagnes garnies de bois ou non, grêle, tonnerre, cours d’eau). En un mot, la science topographo-étiologique est, pour un médecin des épi- démies, un développement si nécessaire de la science étiologique, que nous nous sommes laissé conduire à regarder comme un axiome, une remarque faite pour les opérations de guerre. Il est dit dans les Mémoires de l’ar- chiduc Charles que « la marche des opérations de guerre 126 RÉSUMÉ DES SÉANCES. » dépend de la configuration topographique du terrain, » parce que la situation des montagnes et des rivières » détermine invariablement les lignes et les points sur les- » quels les armées doivent se rencontrer ; c’est pourquoi, » dit-il, les batailles décisives ont été livrées plusieurs » fois sur les mêmes lieux, quoique avec des armes et » dans des circonstances différentes. » Pour nous, les batailles décisives qui ont été livrées plusieurs fois sur les mêmes lieux, ce sont les épidémies qui sont venues s'abattre plusieurs fois aussi à Saint-Julien- d’Ance, canton de Craponne, à Brives, près le Puy, pour le choléra qui a sévi deux fois; à‘Saint-Pierre-Eynac, à Vals-près-le-Puy, pour la fièvre typhoïde et la petite vé- role, etc.,eic: Quand les miasmes agissent rapidement, c'est en été que nous voyons les fièvres typhoïdes, comme à Charentus en 185$, à Saint-Etienne-du-Vigan en 1854, etc. C’est, au con- traire, en automne et en hiver que la maladie se développe quand le miasme paludéen agit lentement, soit parce que les vents contraires règnent, soit parce que, comme à Mon- tagnac, les vents favorables régnant n’entraînent pas assez de miasmes pour que l'infection ait lieu instantanément. Aussi voyons-nous d’abord que l'enfance produit plus de malades que la portion virile : comme pour dire que le miasme n’a pas été assez fort pour ébranler la constitution des autres âges, façonnés pour ainsi dire qu'ils sont au miasme paludéen qui se développe toujours et qui produit dans ces cas des fièvres intermittentes. Ne pourrait-on pas dire que les fièvres pernicieuses intermittentes, tierces, quartes soient des fièvres typhoïdes, des fièvres varioliques avortées? C'est une vue de mon esprit, je la donne pour ce JUILLET, 427 qu'elle vaut. Quelques maladies épidémiques sont inhé- rentes à la topographie même du territoire où elles se développent, comme la maladie de Montagnac ; d’autres proviennent d’un état général de l'atmosphère, telles que celles qui ont existé en 1854 dans plusieurs villages de l'arrondissement. Nous appelons ces états, ou locaux ou généraux, constitutions médicales : ainsi la constitution médicale de Montagnac, pendant quatre ou cinq mois, a été à la fièvre typhoïde l'année 4858-1859. L'arrondisse- ment du Puy, en 1854, à eu une constitution médicale toute l’année à la fièvre typhoïde ; car cette fièvre existait dans beaucoup de villages à la fois ou successivement : par exemple, à Coujac, commune de Saint-Paulien ; à Moune- deyres, commune de Queyrières, canton de Saint-Julien- Chapteuil; à Saint-Etienne-du-Vigan, canton de Pradelles : à Barges, même canton, etc., ete. La constitution médicale de l'Europe était à la grippe lorsque cette maladie régnait à Paris, à Londres, à Vienne, ete. ete. Pourquoi ne pouvait-on pas dire sûrement au moins l’étiologie de ces constitutions ? Parce que tous les obser- vateurs sont pris à l’improviste à l'endroit des observations météorologiques qui ont précédé l'invasion de ces maladies. Cest de ce point de doctrine que viendra un jour la lu- mière qui éclairera la marche des épidémies soit générales soit locales ; et tant qu’il n’existera pas une correspondance entre les observateurs, basée sur ce point d'appui, la science étiologique restera comme elle l’est, dans l’en- fance : c’est-à-dire que le service des épidémies ne trou- vera pas une seule loi qui aura servi à l'épidémologie. Nous savons bien que le rapporteur sur cette matière, M. Trousseau, qui a fait à l'Académie de médecine le 128 RÉSUMÉ DES SÉANCES, rapport des épidémies qui ont régné en France pendant l’année 1850, se plaint ou plutôt voit d’un mauvais œil que les médecins des épidémies des départements s’oceu- pent trop des conditions météorologiques à l'exclusion pour ainsi dire de tous autres phénomènes, tels que du commencement et de la progression des foyers épidémi- ques, de leur propagation : quand le médecin des épidé- mies des départements voit quelques améliorations à faire sous quelque rapport, pourquoi ne pas le dire? alors sur- tout qu'il est dans l'impossibilité de satisfaire aux autres exigences du service par le mauvais vouloir de tous les rouages qui le font mouvoir. Quoi qu'en dise M. le Rapporteur de l'Académie de mé- decine, sans sortir des épidémies de notre arrondissement, dont j'ai la garde, je veux fournir à ma démonstration étiologique un surcroit de preuves. En effet, j'ai remarqué que les villages que j'ai nommés ci-avant sont tous dans des vorges surmontées par des montagnes très-élevées, ayant à leurs pieds des rivières ou des marais ou des flaques d'eau, même en temps très-chaud, et à l'exposition des vents du sud ou sud-est. Ces expositions jouent un si grand rôle dans la production de ces maladies que, même les villages perchés sur de très-hautes élévations, sans mon- tagne qui les surmonte et sans bois aux environs et où se trouvent toutes les autres conditions, sont sujets à de telles infections, Nous supposons qu'il vient s’y joindre dans ces moments-là une raréfaction insolite de l'air ambiant : pro- blème qui a encore été peu étudié jusqu’à ce jour, dans ces cas-là, à cause de l’imperfection des moyens pour y arri- ver: mais bien ecrtainement elles en jouent un : quand on voit le système nerveux trisplanchnique si sujet à des JUILLET, 129 malaises, par suite de la raréfaction de l'air atmosphé- rique dont la connaissance à si bien servi à M. Pravas fils pour constituer ses bains d'air comprimé ; nous connais- sons tous le mal des montagnes très-élevées, provenant de la raréfaction de l’air (1). Tout nous fait présumer que les considérations que nous avons développées ci-avant nous serviront pour résoudre ce problème. D'ailleurs, au risque de nous tromper, nous aimons mieux faire un effort pour rechercher la cause du mal que de rester continuellement dans l’inaction. Notre esprit se plaît dans de pareilles diffi- cultés qui ne seront pas toujours insurmontables. Nous ne croyons plus aujourd’hui à la colère des dieux quand nous sommes frappés par de pareilles calamités : que la science cherche autour de nous, elle trouvera ce qu’elle cherche. Malheureusement elle ne peut aller que d’hypothèse en hypothèse pour découvrir la vérité, surtout quand il est vrai que nous manquons des données barométriques et thermométriques. Les mêmes phénomènes producteurs des épidémies ont donc existé à peu près partout. Conclusion. Je ne demande à la Société qu'un peu de bienveillance pour les aperçus scientifiques nouveaux que j'ai reproduits dans ce mémoire, Le temps seul peut me donner raison. (4) Montagnac fait exception à tout ce que nous avons dit pour les vents ; mais parce qu'il fait exception, il n’en confirme pas moins la règle sur les autres ponts; car le système étiologique que nous avons adopté ne contient pas toutes les causes. Voir le plin annexe au rapport. 150 RÉSUMÉ DES SÉANCES. SIENCES HISTORIQUES. — M. l'abbé Sauzet donne con- naissance d'un document historique que lui adresse M. de Chaulnes, attaché à la préfecture de Valence. Cette pièce se rattache au sujet de la prise de posses- sion d’un canonicat au Puy, par les dauphins du Viennois (1). Cette communication en fait vivement désirer une autre sur l’origine de ce droit. PERSONNEL DE LA Société. — M. le Président donne lecture d’une lettre de M. de Payan-Dumoulin par la- quelle le savant magistrat, récemment appelé à la présidence du tribunal civil de notre arrondissement, demande à faire partie de la Société. « Mon vif désir d'étudier votre magnifique Velay, ses antiquités, son histoire et ses usages, dit M. de Payan-Dumoulin , donne un prix spécial à l'admission que je sollicite. » On ne peut certes présenter de meilleure grâce ses titres d'admission qui sont : 1° Une notice manuscrite sur le château de Grignan, célèbre par le séjour de Madame de Sévigné , avec des vignet- tes et plusieurs dessins d’antiquités du château, dus au crayon délicat de l’auteur de la notice ; 2° un mé- moire publié sur la législation du royaume de Naples, comparée à la législation française ; 3° une notice sur les volcans de l'Italie méridionale ; et 4 trois ar- ticles du journal l’Alustration sur la céramique gallo- romaine. 4) Voir le Bullelin des Recherches historiques (mai 1859). JUILLET. 451 Selon l'usage, M. le Président nomme une commis- sion ainsi composée : MM. le Président, Vibert et FT) Béliben. L'ordre du jour étant épuisé, la séance est levée à six heures. Le Secrétaire , BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 5 AOUT. SOMMAIRE. ExposiTioN ARTISTIQUE : L'Ange gardien de M. Tyr; Tableaux de M. Victor Robert. — Lecture du procès-verbal de la dernière séance. — OUVRAGES REÇUS. — CorresroNDAxcE : M, le Ministre de l'Instruction publique accorde une sub- vention de 200 francs. — AGRICULTURE : Nécessité d’expérimenter de nouvelles semences de froment. M. de Brive recommande le blé dit d'Australie, M. le Président celui dit de Noé : la Société fera venir à ses fra's deux hectolitres de chacune de ces deux espèces. — Etat de la récolte. — Pique-faulx du sieur Estable Georges, fils, maréchal-ferrant à Vorey. — Du Concours régional agri- cole ; M. le Président.—M. le Préfet a obtenu de la ville une somme de 10,000 fr. pour l'organisation de la solennité du Concours régional. — Dans ce concours et dans d'autres désormais, la race du Mezenc formera une classe séparée. — INDUSTRIE : Poterie décorative signalée par M. Chouvon. — BEAUx-ARTS : Féli- citations à M. Tyr et à M. Victor Robert pour les œuvres qu'ils ont exposées. — Vœu formé par plusieurs membres relatif à l'acquisition du tableau de M. Tyr par le Conseil général. — PERSONNEL D'E LA SOCIÉTÉ : Rapport de M. Ch. Cale- mard de Lafayette sur la candidature de M. de Payan-Dumoulin qui est pro- clamé, à l'unanimité, membre résidant. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. Avant l'ouverture de la séance, un grand nombre de sociétaires se trouvent réunis dans la grande salle du AOÛT. 455 Musée ; ils y.sont retenus pendant quelque temps par la belle toile tout récemment exposée par M. Tyr et par cinq ouvrages dus au talent de M. Victor Ro- bert, peintre. À côté du tableau de M. Tyr, de cette œuvre de mé- rite, d'un fini d'exécution remarquable, où l'inspi- ration s'élève à une hauteur que ne peut atteindre le vulgaire, de cette scène extatique dont l'artiste a , de parti pris et comme à dessein, adouci, effacé la couleur et les tons pour nous donner en quelque sorte une idée de la placidité contemplative de l’autre monde ; à côté, disons-nous, de l’Ange gardien aux traits si chastes, si purs et si calmes, était arrangée avec goût une exposition de cinq tableaux d’une expression bien différente. Ici règne le mouvement et l’action ; quelle chaleur , quelle fougue dans la composition, le dessin et la couleur de cette grande toile qui nous représente la dernière éducation de Bacchus ! Le tableau de la Nuit et son pendant, celui de l'Aurore, parlent aux sens et saisissent l'imagination. Le portrait en pied d’une dame, peint sur une toile de petite dimension, est fort remarqué ; il est traité avec un vrai sentiment de l'art ; mais ce qui enlève tous les suffrages, c’est un pastel représentant une jeune fille. Dans cette belle tête, dans ce buste charmant, l'artiste a, pour ainsi dire, atteint la perfection du genre ; aussi, en présence de ce petit chef-d'œuvre de couleur et de dessin, la critique faisait place à l'admiration. Généralement la Société paraît s'intéresser vivement aux travaux d'art qu’elle a sous les yeux et tous les membres présents sont unanimes 154 RÉSUMÉ DES SÉANCES. à proclamer les heureuses facultés de notre compa- triote M. Victor Robert. De toutes parts on lui promet un nom célèbre s'il veut bien tempérer par ce soin, ce travail, ce fini qui rendent son pastel si remarqua- ble, l'imagination ardente, spirituelle et originale dont la nature l’a doué. Vers trois heures et demie, MM. les Sociétaires prennent place dans la salle des séances. M. le Prési- dent présente l'analyse des ouvrages reçus et fait le dépouillement de la correspondance. OUVRAGES REÇUS. — Parmi les publications qu'a reçues la Société dans le mois de juillet, M. le Président signale le Recueil de l'Académie des Jeux floraux de 1858, où se trouve une pièce de vers de M. Blanchot de Brenas et une fable de M. Emmanuel de Miramont. Il signale à l'examen de M. de Causans un article de la Revue agricole du Tarn ayant pour titre : De la po- lice et de la réglémentation de la pêche. CORRESPONDANCE. — M. le Président donne ensuite lecture d’une lettre du Ministre de l'instruction publi- que du 22 juillet de cette année annonçant que, sur la proposition du Comité impérial des travaux historiques et des Sociétés savantes, M. Rouland a décidé qu’une subvention, dont le chiffre est fixé à 300 francs, serait attribuée, à titre d'encouragement, à la Société d’agri- culture, sciences, arts et commerce du Puy. AOÛT. 155 AGRICULTURE. — Après le dépouillement de la corres- pondance, M. de Brive ayant obtenu la parole , appelle l'attention de la Société sur l’exiguité des rendements de nos cultures, surtout en froment. Il désirerait qu’on fit l'essai de semences nouvelles : le froment dit du pays est de fort belle qualité, mais ne produit pas suf- fisamment. Il y a lieu de renouveler nos semences par l'introduction des blés étrangers déjà éprouvés. On pourrait mettre à l’essai le froment dit d'Australie, re- commandé par de bons agronomes comme réunissant la quantité et la qualité. Il peut réussir dans toutes les contrées de la zône tempérée et a rendu jusqu’à 50 hec- tolitres à l’hectare, au témoignage de M. Heuzé, pro- fesseur à Grignon, qui l’a cultivé avec le plus grand succès. M. le Président recommande à son tour, comme très- productif et d’une bonne vente, le blé bleu, dit de Noé, cultivé en Berry par M. de Gourcy. M. Chouvon, qui a déjà fait tant d'expériences inté- ressantes sur l'introduction de froments étrangers à la ferme-école de Nolhac, partage les mêmes senti- nents et, avec M. Doniol, qui se propose de récolter beaucoup de froment à Ronzet, il demande que la So- ciété prenne l'initiative dans cette importante ques- tion, en faisant venir du blé d'Australie et une certaine quantité de celui de Noé. Sur la proposition de M. le Président , l'Assemblée décide que la Société fera venir à ses frais deux hecto- litres de chacune de ces deux espèces, pour être distri- buées par mesures de décalitres et de doubles-décalitres aux sociétaires qui en feront la demande. Plusieurs 156 RÉSUMÉ DES SÉANCES. membres se font inscrire et promettent de rendre le double de la quantité qu'ils auront prise pour servir à augmenter la distribution de ces nouvelles semences pour l’année prochaine. Cette question des semences amène naturellement celle de la récolte de cette année. La moisson qui, dans l'opinion des membres qui ont eu la parole sur ce sujet, s'était présentée sous un si bel aspect pen- dant quelques mois, ne répond pas aux espérances qu’elle avait fait naître. On a moissonné beaucoup de paille ; mais le grain, surpris à la suite de quelques brouillards du matin, par la chaleur excessive et par l'extrème sécheresse qui règne depuis longtemps, ne rendra qu’une récolte médiocre , et de là grande dé- ception pour l’agriculteur. Un maréchal de Vorey, le sieur Estable Georges, fils, présente à la Société un instrument dit pique-faulr , destiné à ménager le temps de l’ouvrier en donnant promptement à la faulx le tranchant qui lui est néces- saire. M. le Président charge M. Chouvon de vouloir bien en faire l'examen et en donner $on avis à la Société. L'Assemblée s'occupe ensuite de la grande solennité du Concours régional qui se tiendra au Puy en mai 1860. M. le Président annonce qu’il fera convoquer pour mardi matin, à huit heures, 16 août, jour de foire, la commission dite du Concours régional. Cette commission aura à rechercher les moyens propres à AOUT, 157 donner la plus grande publicité possible à l'annonce de cette fète de l'agriculture. Elle aura, en outre, répondant au vœu formellement exprimé par la Société, à décider Ja tenue de notre Concours annuel pour l'époque mème du grand Con- cours régional et à s'occuper des mesures capables de donner de l'éclat à cette solennité ; telles qu'une grande exposition des productions industrielles et artistiques qui honorent ce pays et l'ouverture de séances pu- bliques que la Société n'a pas eues depuis 1855, époque de la 22e session du Congrès scientifique de France. M. le Préfet a déjà bien voulu réunir cette commis- sion et prendre son avis sur les allocations à deman- der à la ville et au département pour l'installation du Concours régional et pour les fêtes à offrir aux nom- breux étrangers attirés dans notre ville par le Concours. Prise dans son sein, une sous-commission désignée par le Préfet et composée de trois membres, MM. de Brive, Chouvon et de Fontpertuis, est chargée du projet relatif au choix de l'emplacement que doit occuper l'exposition du Concours régional et au plan de barra- quement destiné aux bestiaux exposés. M. le Président fait savoir en même temps à la Société, qui l’apprend avec une véritable satisfaction , qu'à la demande de M. le Préfet le Conseil municipal a répondu , dans une de ses dernières séances, par un vote de 10,000 fr. affectés aux dépenses que doit occa- sionner l'organisation de la solennité du Concours régional et qu'il abandonne la recette des entrées qui reviennent de droit à la ville. TOME XXII. 10 158 RÉSUMÉ DES SÉANCES. À la demande de plusieurs membres, M. le Président écrira à M. le Ministre de l'Agriculture pour que, dans le nouveau Concours, dont la circonscription a été changée, la race du Mezenc ne pouvant plus être clas- sée avec des races ses égales comme elle l'a été au der- nier Concours d’Alby, ne soit pas mise de nouveau en parallèle avec des races supérieures, telles que la race d’Aubrac et de Salers. Inousrrie. — M. Chouvon entretient l’Assemblée d'un nouveau genre de poterie décorative qu'il a vue à Toulouse. Elle imite le marbre, prend toutes les formes, devient ou console ou balustre ou frise ou corniche, etc., et peut admirablement servir à la dé- coration des maisons et des jardins, elle est acces- sible à toutes les bourses. Sur la proposition de M. le Président, un crédit de 40 fr. est ouvert à M. Chou- von pour qu'il veuille bien se procurer un spécimen de ces poteries et les mettre sous les yeux de la Société. Beaux-aRrs. — M. le Président prie M. le Secrétaire de vouloir bien consigner au procès-verbal l’impres- sion que l’Assemblée tout entière rapporte de sa visite à l'exposition de peinture à laquelle elle vient de con- sacrer un sérieux examen dans la grande salle du Musée. La Société, dit M. le Président, s’applaudit sans nul doute de voir des talents si élevés et si différents té- moigner parmi nous d'un mouvement artistique digne d’un vif éloge. AOÛT. 159 Plusieurs membres désireraient vivement que le tableau de M. Tyr, qui s’harmonise bien avec celui de l'Enfant-Dieu, dù au même peintre, ne sortit pas du Musée. M. Tyr, qui est notre compatriote, n'a pas eu sa part des encouragements que le département à accordés aux artistes du pays, il doit tout à ses faibles ressources. Ce pays lui est donc redevable. M. le Pré- sident espère que le Conseil général acquittera cette dette et nous conservera ce tableau de M. Tyr que la Société n’est pas en mesure d'acquérir. PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ. — Se conformant au règle- ment et à l’ordre du jour, M. le Président, aussitôt après le dépouillement de la correspondance, à lu, sur la candidature de M. de Payan-Dumoulin, le rapport qui suit. MESSIEURS , On a pu souvent remarquer, dans le sein de la Société, el j'ai eu moi-même plus d'une fois à signaler, non sans un juste sentiment de fierté pour elle, quelle attraction semblent exercer ses travaux sur la plupart des intelli- gences d'élite que de bons hasards ou d’heureuses circon- stances amènent dans notre pays. Nous devons nous-mêmes une vive sympathie aux hommes distingués qui, à peine arrivés dans notre centre 140 RÉSUMÉ DES SÉANCES. modeste, sous l'empire d'un sentiment de fraternité intel - lectuelle, très-cher d’ailleurs à tous ceux qui l'ont une fois connu, éprouvent et manifestent le désir de se mettre promptement en contact avec nous, de s'associer à notre œuvre, d'apporter au faisceau de bonnes volontés qui fait la force de notre institution le contingent d'étude et de savoir par eux antérieurement conquis dans des milieux différents. J'ai parlé de fraternité intellectuelle : n’est-ce pas à en effet, Messieurs, l’un des liens les plus précieux et les plus distingués qui se puissent former dans les sociétés humaines ? N'est-ce pas chose noble et excellente en soi que cette assimilation, cette sorte d’adoption réciproque réalisée, au nom des belles études, au nom de la science, des lettres et de l’art, réalisée immédiatement, presque infailliblement entre les esprits qui semblent se reconnaître dès la première rencontre, comme sur le mot de passe commun à {ous que leur aurait donné leur initiation aux œuvres de la pensée ? Je le répète, cette Société doit à son passé, à ses travaux, à la modeste, mais juste notoriété qu’elle s’est acquise, d'exercer sans effort cette attraction heureuse et d'appeler à elle quiconque venu dans ce pays veut rester fidèle à des communications et à des échanges d'idées, à la mise en commun des aptitudes morales, à des habitudes enfin de travail collectif contractées ailleurs et devenues une jouis- sance en même temps qu’un irrésistible besoin. D'autre part, il est naturel en ce moment de mentionner une fois de plus un fait caractéristique pour nous; fait jusqu’à un certain point exceptionnel quand on compare notre Association à bon nombre de celles qui sembleraient AOÛT, 441 d’ailleurs avoir avec elle le plus d’analogie : je veux parler de la diversité, de la presque universalité des études qu'il lui est permis de poursuivre pour ainsi dire à la fois, grâce également à la diversité des facultés scientifiques, toutes, à des degrés variables mais suffisamment encore, représen- tées dans son sein. Eh bien, jamais sans doute cette va- riélé, pour ainsi dire encyclopédique, de sujets d'étude, ne dut avoir pour un candidat plus vif attrait qu'aux yeux de celui dont j'ai à vous faire connaître aujourd’hui trop sommairement, cela est bien visible, les titres multipliés. M. de Payan-Dumoulin, le nouveau président du tribunal civil du Puy, semble, par la variété des œuvres qu'une in- telligence aussi vaste que flexible lui a permis d’embrasser, correspondre, autant que jamais qui que ce soit l'ait pu faire, à toutes les spécialités qui se trouvent groupées dans la Société elle-même. Aussi vient-il à vous les mains pleines, je le répète, de titres tellement divers, que, pour exposer convenablement devant vous le mérite intrinsèque de chacun d'eux, il faudrait sans doute un rapporteur encyclopédique aussi, encyclopédique comme le candidat lui-même et comme la personnalité collective de notre Société. Je me garderai donc bien de la prétention de vous parler avec une égale compétence de tous les travaux que M. de Payan-Dumoulin vous adresse comme titre d'admission, et qui fourniraient évidemment plusieurs titres à plusieurs candidats. J'ai, en effet, à remettre d'abord sous vos yeux des statuettes antiques découvertes dans des fouilles archéolo- giques par M. de Payan; et, à côté de ces précieux monu- ments, voici la publication aussi estimée que répandue 142 RÉSUMÉ DES SÉANCES. dans laquelle le chercheur habile se fait l’intelligent com- mentateur de sa propre découverte. Mais l’archéologue va, sans cesser de l’être, devenir sans effort artiste et littérateur. Voici trois dessins originaux et une lithographie, œuvre d’un crayon facile, habile et plein de goût; ils servent d'illustration à une notice élégante qui devient à son tour pour eux un ingénieux et attrayant commentaire. Enfin la même main qui a dessiné et décrit les anti- quités romaines, le château, la tour, les ornements héral- diques du château de Grignan, qui nous donne en même temps au crayon le portrait, d’après Mignard, de l’aristo- cratique châtelaine, à la plume le croquis littéraire de l’immortelle Sévigné, la même main nous offre encore deux brochures de sujets bien différents ; et le même écri- vain se montre à la fois, et toujours avec supériorité, — dans l’une, géologue au plein courant de la science, littérateur pittoresque, touriste intéressant, — dans l’autre, savant jurisconsulte, observateur sagace, publiciste et penseur élevé. N’ai-je pas grandement raison de me refuser à vouloir vous donner autre chose qu'une analyse superficielle et sommaire de tant d'œuvres relevant de spécialités si diverses ? II L’écrit sur la législation napolitaine et sur l’organisation politique, administrative et judiciaire du royaume des AOÛT, 145 Deux-Siciles est un exposé très-succinct et pourtant très- clair parce qu'il est méthodique. La comparaison de la lé- gislation napolitaine avec les lois françaises prête à ces aperçus une porlée et, pour ainsi dire, des conclusions naturelles, suffisamment démonstratives au point de vue des préférences de détail à donner à l’une ou à l’autre des deux législations. Souvent, en effet, M. de Payan formule en peu de mots sa propre appréciation. Il arrive aussi que, même en se bornant en apparence au rôle de rapporteur et en ne fournissant pas de conclu- sions directes, l'écrivain les laisse suffisamment pressentir ; et, dans l’un comme dans l’autre cas, ces jugements plus ou moins explicites portent l'empreinte d’une philosophie judicieuse, humaine, qu’on peut appeler libérale dans le sens le plus élevé, dans le sens modéré de ce mot. Quand les deux législations, sur un point déterminé, diffèrent complètement de système, M. de Payan conclut le plus souvent, avec un tact parfait et une raison clair- voyante, en faveur de ce milieu tempéré, ordinairement si cher au bon sens et à l'équité. Mais quand surgissent en nombre, entre les deux systèmes, des différences de détail ; et qu’on peut supposer que le juste et le vrai ne sont ni absolument ici ni absolument là, on est vraiment frappé de l’art merveilleux avec lequel M. de Payan sait discerner, sait prendre ici et là le butin choisi d'un éclectisme intel- ligent, pour former l’ensemble de ses propres préférences, et montrer, entre les deux lois, le desideratum que selon lui il conviendrait d'atteindre. Voilà, certes, Messieurs, des mérites dignes du plus sé- rieux éloge ; et notre éloge est ici aussi sincère au fond qu'il est réservé dans sa forme. Mais un esprit de cette 144 RÉSUMÉ DES SÉANCES. valeur dédaignerait à coup sûr le parti pris de la louange et y verrait certainement une atténuation blessante de ce que la louange peut valoir, si elle n’était relevée par les libres franchises d’une critique qui accuse avec la même sincérité ce qu’elle approuve moins et ce qu’elle estime le plus. Quelquefois, el nous l'avons regretté, en exposant deux systèmes opposés, M. de Payan se renferme aussi d'une manière par trop absolue dans le rôle de démonstrateur impartial des choses ; sa préférence alors garde un mutisme presqu'irritant et dont on est bien près de se plaindre. A celui qui le lit et qui veut voir en lui non-seulement un simple narrateur mais un arbitre, un écrivain de cette in- telligence et de ce savoir doit, en effet, non pas seulement le fait, mais l'appréciation du fait et l'autorité d’un avis que le lecteur sait déja compétent entre tous. Si, par exemple, dans la question des actes de mariage, la raison philosophique et: le sentiment religieux trouvent d’égales satisfactions dans le terme moyen que M. de Payan voudrait prendre entre le système napolitain ef le système français ; Si le regret tacitement contenu dans ce que dit M. de Payan du silence de la loi française sur le mariage de ceux qui sont liés par des engagements religieux ; Si toutes ses protestations en faveur des droits sacrés du père de famille, trop souvent entamés dans la loi na- politaine par une sorte d’usurpation de souveraineté de l'Etat ; Si toutes ces indications profondément sages, conformes à toutes les notions élevées des droits antérieurs et supé- rieurs, semblent l'expression absolue du juste et du vrai, AOÛT. 445 nous avons bien le droit de regretter que le jurisconsulte et le philosophe si bien inspiré ici ait quelquefois ailleurs négligé de conclure. Ainsi, dans la question du partage des successions, tout en pressentant sa préférence, naturelle à notre sens, hâtons- nous de le dire, naturelle et dictée par l'équité dans ce qu’elle a de spécial aux intérêts de l'individu, conforme d’ailleurs aux invincibles tendances de notre époque, tout en pressentant sa préférence pour le système français dis- posé à diminuer autant que possible l'inégalité des for- tunes dans les partages entre enfants d’un même père, nous aurions voulu devoir à l'esprit pratique et judicieux de M. de Payan l'indication des palliatifs, et il faudra bien en trouver, qui pourraient obvier aux désastreuses consé- quences sociales du morcellement, ou pour mieux dire, de l'émiettement de la propriété. Ailleurs, dans la question du contrat de mariage, entre le code Napoléon qui incline visiblement en faveur du ré- gime de la communauté, puisqu'il en a fait le droit com- mun, et le code napolitain qui, sous l'influence de Ja législation romaine, donne la préférence au régime dotal, nous aurions encore voulu voir M. de Payan manifester et motiver ses prédilections. Ailleurs enfin, et ceci n’est au demeurant qu’un simple détail, nous avons été étonné de voir notre auteur consi- dérer la suppression dans la législation napolitaine de l'hypothèque occulte, comme une modification secondaire. Hâtons-nous de dire qu'avec son sens si droit il ne pouvait point cependant n'être pas frappé des vices de notre légis- lation hypothécaire et qu’il appelait déjà de tous ses vœux d'utiles modifications à cet égard, 146 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Enfin, si, après avoir de la sorte émis quelque regret au sujet de ce que nous nommerons quelques légères imper- fections par omission, si nous cédions à la tentation d’aller un peu plus loin encore, avec toute réserve, avec la défé- rence que notre insuffisance doit naturellement en pareil cas à la compétence bien autrement autorisée de notre écrivain, peut-être aurions-nous à signaler timidement deux ou trois dissentiments un peu plus complets. Mais nous aimons mieux applaudir, en finissant, à des opinions, à des réflexions qui sont comme le spécimen de la philosophie morale et religieuse de l’auteur. On ne peut pas mieux dire que lui, toutes les fois qu'il défend, comme nous l’avons montré, les droits de la puis- sance paternelle; lorsqu'il félicite la loi napolitaine : D’avoir disposé que les frères et sœurs incapables de gagner leur vie par vice de constitution physique ou morale, ont droit à des aliments de la part de leurs frères et sœurs ; D'avoir édicté que le conjoint survivant qui n’a pas de fortune personnelle aurait droit à une pension alimentaire sur les biens de son conjoint prédécédé ; D'avoir supprimé, même avant nous, le carean et la marque comme des peines qui dégradent l'homme par une flétrissure ineffaçable, et posé en principe qu'aucune peine n’est infamante, que le crime seul est infamant ; — et que la flétrissure qui en résulte est purement personnelle pour le coupable sans pouvoir s'étendre à la famille... C’est ainsi, et c’est là surtout qu’en des lignes éloquentes apparaît tout entier Le vir bonus, — dicendi peritus. Au demeurant, comme on le voit, l'étude de M. de Payan est à la fois intéressante et instructive, non-seulement pour ceux que préoccupent habituellement les grands problèmes — AOÛT. 4147 de législation, mais encore pour quiconque tient à saisir à chaque pas, dans cette grande école d'instruction progres- sive qui, pour les hommes de quelque étude, dure toute la vie, bon nombre d’utiles notions de plus, sur des faits spéciaux trop souvent ignorés, notions sans lesquelles cependant l'histoire contemporaine reste bien difficile à juger. Ces réflexions s'appliquent également aux considérations sur l’organisation politique qui complète le travail de M. de Payan. £ Si l’auteur s'y montre plus sobre d'appréciations per- sonnelles, c’est qu'il peut laisser plus facilement ici au lecteur le droit de conclure lui-même. Mais les faits, je le répète, n'en sont pas moins instructifs; et si je devais me permettre de juger d’après moi-même le commun des lec- teurs, je dirais que le commun des lecteurs trouvera à apprendre dans ces pages consciencieuses et sincères plus d'un fait inconnu propre à apporter au moins d'assez amples perturbations dans des opinions préconçues. Sous ce rapport je me borne à mentionner une seule indication par laquelle d’ailleurs l'esprit peut se complaire à terminer un rapide voyage en pays étranger. « À Naples, écrivait M. de Payan en 4841, la peine de mort est appliquée dans des cas très-rares; et sous le règne du roi actuel il n'y a presque pas eu d'exemple d'exécution capitale, le roi ayant usé dans beaucoup d’occasions de son droit de grâce, en commuant la peine capitale en celle des travaux publics. » S'instruire quand on arrive aux bonnes sources, c’est apprendre ce qu’on ne savait pas, c'est bien souvent aussi rectifier ce qu'on croyait savoir. 148 RÉSUMÉ DES SÉANCES. III Les développements auxquels nous nous sommes laissé entrainer dans l'appréciation de cette première brochure nous font une loi d'aller plus rapidement au but; et en mentionnant ici la notice sur quelques volcans de l'Italie méridionale, nous pourrions, Messieurs, nous borner à vous dire qu’il serait bien plus agréable pour vous de la lire que d’en écouter ici l’analyse. Toutefois nous man- querions à notre tâche de rapporteur si nous ne signalions au moins, dans ce travail, la méthode toujours présente, et avec la méthode le goût, la mesure, les justes pro- portions. M. de Payan se montre géologue, juste autant qu’il faut l'être pour que le lecteur qui peut avoir oublié les notions même un peu élémentaires que fournit la science sur la formation des volcans, sache bientôt tout ce qu'il faut sa- voir pour suivre avec un vif intérêt el non plus en étranger totalement dépaysé, le guide éclairé qui veut bien le con- duire. La science minéralogique ici commente très-intelligible- ment la nature, et enseigne à l’ignorant lui-même, par une mention rapide et pourtant suffisante, l’usage et la valeur des produits (la pouzzolane, le soufre, l’alun, l’'ammoniae, le cinabre, etc.) que les régions volcanisées ou les volcans eux-mêmes fournissent à l’industrie. En somme, touriste bien doué du sentiment des beautés de la nature et de la valeur pittoresque des lieux, notre auteur mêlant avec un agrément plein de naturel la des- cription sans emphase aux notions scientifiques et aux AOÛT, 1449 indications historiques, donne à son opuscule le mérite, plus rare qu'on ne croit, d’une monographie en même temps courte et complète ; deux qualités qu'une même œuvre et qu'un même talent savent trop rarement cumuler pour l'agrément et le profit du lecteur. D’autres travaux d’une spécialité toute différente encore auraient besoin d’être appréciés maintenant par un autre que moi. Les études d'archéologie, que j'ai de même à signaler ici, sont évidemment pour M. de Payan des frag- ments d'étude qu’un incident a fait naître, mais qui, par une induction toute naturelle, permettent de constater chez l’auteur tout un ensemble général de connaissances en vertu desquelles il est évidemment de tout point à la hauteur de la science archéologique contemporaine. Dans les articles dont M. de Payan a enrichi les colonnes de l’Ilustration, il s'agit de fouilles exécutées sous sa di- rection ou sous celle de quelques savants de l'Allier et qui ont amené la découverte d'une fabrique de poterie artis- tique de l’époque romaine ou gallo-romaine. La descrip- tion des statuettes nombreuses trouvées, grâce à ces fouilles, permet, dans la publication de M. de Payan, d'apprécier l'importance des heureuses recherches dues à son initia- tive. Mais M. de Payan ne s’en tient point à une simple nomenclature descriptive ; et, dans l'attribution qu'il fait de ces différentes figures à des divinités du paganisme ro- main, il montre encore ici, dans le domaine de l’érudition archaïque, ces qualités de sagacité positive, cette mesure et cette modération dans l'hypothèse qui sont en lui l’ex- pression d’un sens droit et d’une parfaite sincérité. M. de Payan décrit une trentaine de sujets divers, sans compter un certain nombre de vases très-remarquables du 150 RÉSUMÉ DES SÉANCES. reste par le caractère artistique de leur ornementation : or, sa manière de procéder dans un tel examen offre toutes les garanties d’une irréprochable méthode. Sous le numéro spécial de chaque figure qu’il décrit, il signale avec une érudition patiente et prudente, soit dans les ouvrages autorisés, soit dans les comptes-rendus des fouilles récentes faites ailleurs, tout ce qui peut être analogue à cette figure ; et c’est après cette comparaison qui donne à sa propre conclusion la valeur de tous les faits antérieurement acquis el pour ainsi dire acceptés par la science, qu’il interprète lui-même la signification du sujet en déterminant sa qua- lité, en lui donnant un nom. En outre de ces notions sur les sujets découverts, M, de Payan consigne dans son travail des indications pleines d'intérêt sur la partie technique qui concerne la fabrica- tion de ces divers objets d'art, sur les procédés d'exécution, moulage, etc. Et cet ensemble intéressant de communica- tions est complété par l'étude, au point de vue de l’his- toire, de l’usage auquel, dans la vie privée des Romains, pouvaient être affectés ces produits d’une fabrication étendue. Au reste, Messieurs, quelque superficielle que soit notre appréciation, nous aurons atteint encore ici le seul but que nous puissions nous proposer si nous inspirons au plus grand nombre d’entre vous le désir de lire les articles dont nous parlons, et si nous faisons comprendre à tous combien nous devons apprécier le concours que la Société peut attendre des connaissances de M. de Payan, dans un ordre d’études qui intéressent vivement parmi nous ceux-là même dont les aptitudes se tournent plus naturellement vers d’autres spécialités. AOÛT. 151 IV * Le dernier travail, d'un double intérêt puisqu'il est à la fois artistique et littéraire, le dernier travail dont il me resterait à vous entretenir, est une étude encore inédite sur le château de Grignan. Grignan ! cette ancienne et aristocratique race des Adhémar de Monteil, seigneurs de Grignan; la châtelaine de Grignan, la fille de l’immortelle Sévigné ; l’objet de ces exquises tendresses condensées dans des pages inimitables comme un parfum d'Orient dans un merveilleux vase d’or; tout cet amour d’une mère devenu un trésor de grâces littéraires, un trésor cher entre tous au goût français et dont prennent et prendront à jamais leur suave part toutes les générations intellectuelles dignes de savourer quelque chose dans les plus délicieuses perfections des œuvres de l'esprit... Que de souvenirs! quel thème séduisant, quel sujet à la fois délicat, distingué, privilégié ce semble, et pourtant accessible et sympathique au plus grand nombre des intelligences lettrées ! N'est-ce pas déjà un bonheur, une inspiration supérieure et presque un talent que le choix d’un pareil sujet ? Et si l'œuvre tient par hasard ce que promet son titre, si elle est à la fois sobre, naturelle, élégante, si elle a du naturel dans le fini et de la simplicité dans l'élégance, on ne songera certes pas à se demander si c’est là un grand morceau de haute littérature, si on a mis beaucoup de temps et beaucoup d'efforts à l'écrire, si cela sent bien l'huile comme le voudraient les pédants, si c’est de la 152 RÉSUMÉ DES SÉANCES. littérature facile ou difficile comme sauraient seuls le dé- termnier les jurés peseur de la critique de poids. On se dira tout bonnement que c’est charmant; qu’après l'avoir lu on ne serait encore pas fâché de le relire plus tard; on donnera surtout à ceux qui ne l'auront pas lu le bon con- seil de songer quelque jour à le lire. Quant à moi, Messieurs, dans ma rapide excursion à Grignan à travers les pages attrayantes de notre auteur, ayant beaucoup à louer, je trouverais à citer bien souvent, ayant à citer beaucoup, j'aurais très-souvent à louer; et puisque, pour certaines œuvres, citer c'est encore louer, l'éloge justifié par la citation ne serait pas suspect de ba- nale complaisance. Mais si je commençais à ciler, je ne sais trop pourquoi je choisirais ici plutôt que là. Si je de- vais reproduire beaucoup ou presque tout, où el pourquoi m'arrêterais-]e ? N’ai-je pas bien mieux à faire et vous aussi? puisque au lieu d'écouter ici une plus ou moins satisfaisante analyse, vous pourrez, nous l’espérons bien, trouver à votre loisir, dans une de nos prochaines publications, cette notice dont vous aimerez comme moi le fond et la forme, la pensée non moins que l'expression. Là vous trouverez, comme je les y ai trouvés, et le sen- timent poétique du paysage et l'appréciation artistique de l'œuvre architecturale, et le jugement littéraire émané d’un goût sûr, et le sympathique enthousiasme pour une figure à jamais à part dans l'admiration du monde littéraire, et ces regrets sans aigreur qu’inspirent au sage, suffisamment résigné à la loi suprême des choses, toutes les mélancolies du passé, celles des ruines dans les monuments, celles des splendeurs effacées, celles même des gloires éteintes, AOÛT. 455 dans ce qui n’est plus aujourd’hui que le domaine de l'ombre. A tout cela il faut ajouter encore les dessins dont j'ai déjà parlé, œuvre, comme je l'ai déjà dit, d’un crayon habile et facile. C'est d’abord un croquis d’une large portion du château de Grignan découronné de sa toiture, hélas ! et couronné seulement de la majesté de sa ruine. C’est ensuite la tour, redevable de sa conservation au souvenir de madame de Sévigné qui l’a habitée et qui lui a laissé son nom. « Le génie de madame de Sévigné, dit M. de Payan, a protégé cette vieille tour ; car c’est en l’honneur de sa mémoire qu'on en à rétabli la toiture ; elle s'élève encore fièrement à l'extrémité de la façade renversée. » Ce sont encore trois dessins pris sur bas-relief, repré- sentant : les armes des Adhémar, une salamandre sculptée, sans doute un symbole de race ; et sur un élégant motif d’ornementation, une date d’une reconstruction partielle du château. Tout cela, dessins inédits, traduisant fidèlement, on n’en saurait douter, le sentiment, l'accent artistique, le style et le caractère architectural des modèles. Enfin, comme personnification la plus glorieuse de ce qu’il y a d'immortel dans ces souvenirs, un dessin toujours de M. de Payan lui-même, d'après un beau portrait de madame de Sévigné par Mignard : dessin qui n’a rien perdu en étant reproduit par la lithographie, au profit sans doute d’une publicité d'élite. TOME XXII. 11 154 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Vous le voyez, Messieurs, l’ensemble des travaux si re- marquables par leur valeur intrinsèque non moins que par leur diversité, l’ensemble des travaux dont je viens de vous entretenir d’une manière nécessairement trop incomplète. forme un bagage intellectuel qu’il ne nous est pas donné de rencontrer souvent en la possession d’un seul candidat. Ne semblerait-il pas, en effet, s’il était permis de s'ex- primer un moment avec une gravité moindre, ne semble- rait-il pas que c’est moins un seul collègue qui nous arrive aujourd’hui qu’une section d'académie tout entière ? Mais après avoir éludé en partie la difficile tâche de vous parler plus longuement et en juge compétent des œu- vres du nouveau candidat, après m'être fait trop insuffi- samment l'interprète de ses propres idées, n'aurais-je pas mauvaise grâce à substituer plus longtemps ma pènsée personnelle à la sienne? Il faut donc me hüter de dire, pour nous conformer à l’usage, de dire le dernier mot, bien inutile ici, des conclusions de ce rapport. Toutefois je ne voudrais et je ne dois pas finir sans vous retenir un instant de plus, pour mettre en pleine lu- mière et pour signaler avec toute sympathie ce qu’il y à de noblement persistant dans les belles passions de l’in- telligence. Vous me sauriez mauvais gré d’ailleurs de ne pas constater, de ne pa: honorer ici ce fait exemplaire, ce fait excellent de l’homme grave, du magistrat qui, surchargé des plus sérieuses sollicitudes, asservi aux austères devoirs eg a mr AOÛT. 155 de sa fonction, ne veut pourtant point déserter le champ, aimé aussi, des belles études et des pures spéculations de l'esprit; et comme d’autres magistrats éminents dont nous aimons à revendiquer et les noms et les œuvres, comme les du Molin, les Enjubault, les Mandet, ambitionne pour tout repos, au milieu des labeurs judiciaires, d’autres tra- vaux atirayants mais ardus encore. Noble enseignement, Messieurs, nobles besoins de l’ac- tivité intellectuelle, qui nous prouvent à propos, combien en ce temps même, lorsque tant d’intelligences enchai- nées au trivial souci des affaires, sans songer à se re- tremper jamais aux sources vivifiantes de la pensée, se laissent vulgairement et exclusivement envahir par les inférieures besognes de l'utilité matérielle, il y a toujours en des âmes d'élite, d’irrésistibles entraînements ou de méritoires fidélités pour les préoccupations de l’ordre moral ; — à ce point, Messieurs, qu’il soit toujours permis d'affirmer sur de nombreux et souvent glorieux témoi- gnages, que l'idéal et les fières aspirations vers le Vrai et le Beau conservent encore, conserveront longtemps, pour l'honneur de notre pays, pour sa grandeur même, leur sa- lutaire prestige, leur bienfaisante séduction, leurs saines influences. J'ai conscience, Messieurs, de traduire ainsi fidèlement le sentiment intime de la Société tout entière; il serait donc à peu près superflu d'ajouter ici que vous vous em- presserez d'accueillir dans vos rangs le nouveau candidat, un digne collègue. Il vient à vous, Messieurs, avec des titres qui, vous l'avez vu, sont des droits, et qui nous donnent déjà lieu de nous féliciter de notre acquisition, pour ainsi dire avant qu’elle ne soit encore accomplie. 156 RÉSUMÉ DES SÉANCES. » Aussitôt après cette lecture, écoutée avec un vif intérèt , le scrutin secret a donné l'unanimité au candidat, M. de Payan-Dumoulin, qui a été proclamé membre résidant. L'heure avancée ne permet pas d’épuiser l'ordre du jour, la séance est levée à 6 heures et demie. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 10 NOVEMBRE. SOMMAIRE. Lecture du preces-verbal, — Hommage rendu à la mémoire de M. Dumontat. — Doxs au Musee : Statuettes de bronze données par Son Exec. M. le Ministre d'Etat. — Exemplaires d'une gravure de la Vicrge noire du Puy, donnés par M. le chanoine Alirol. — Don du grand tab'cau de M. Tvr, acheté par le Conseil général. — OuvRAGEs REÇUS : le Bulletin de la Sociélé des Antiquaires de l'Ouest, sur les noms celtiques. — Le Pelil Pierre de M. Ch. Calemard de Lafayette. — AcricugTURE : Mcyen d’eloigner les chenilles par des plants de chanvre. — Rouleau économique du général Morin. — Lettre de M. &e Gourey sur l’état de l'agriculture en Angleterre. — M. de Brive est chargé de l'examen de quelques expériences de M. Ambert. — De l’organisation d’une exposition de produits artistiques, industriels et agricoles pour l'époque du Concours ré- gional, — Piscicullure : De l'empoissonnement du lac du Bouchet ct du projet d'une maison de garde.— EconoMIE PUBLIQUE : D'un concours d'animaux de boucherie. — De Putilité d'une détern inatio des champignons domestiques. — ScteNESs : Opinion de M. Ch. Lvell, géologue anglais, sur le fossile de Denise ; MM. Bertrand de Doue et Robert. — Littérature : M. Hedde Isidore donne lecture d'une pit ce de vers composée par son neveu M. Félix Hedde, mort a 17 ans. — PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ : MM. Natalis Rondot et Belln sant nommés membres non résidants. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. À deux heures et demie, M. le Président ouvre la séance en donnant la parole au Secrétaire pour la 158 RÉSUMÉ DES SÉANCES lecture du procès-verbal, lequel est adopté sans récla- mation. Après la lecture du procès-verbal, M. le Président, au nom de la Société tout entière, exprime de vifs re- grets au sujet de la perte qu'elle vient de faire dans un de ses membres, M. Marc-Antoine Dumontat, expert- géomètre, enlevé par une mort rapide à l'affection de sa famille et de ses nombreux amis, le 9 septembre de cette année, à l’âge de 73 ans. M. Dumontat était un des doyens et un des fonda- teurs de la Société; il en suivait les séances avec exac- titude et jamais sa vicille expérience et son dévoñment ne lui firent défaut. D'une honnêteté proverbiale, il employait surtout l'autorité d’un talent et d’une pro- bité éprouvés à concilier les parties dans les expertises nombreuses et difficiles dont il a été chargé pendant le cours de sa longue carrière. Bon nombre de plaideurs lui doivent le bienfait d’un arrangement toujours pré- férable mème à un procès heureux. Cette généreuse conduite n’était pas au profit de ses vacations et de ses honoraires ; mais son âme honnête et délicate ne pou- vait supporter le spectacle de ces discussions litigieuses où trop souvent, dans ces contrées, les familles com promettent leur fortune et leur tranquillité. La mort de M. Dumontat est autant pour le pays tout entier que pour la Société une perte irréparable. Dans les charges publiques qu'il a remplies, dans les conseils de la commune où il a siégé pendant de longues années, on retrouvait M. Dumontat désintéressé, plein de bon sens, toujours décidé pour le parti le plus libéral et le 2E dns NOVEMBRE. 459 plus généreux. Homme de goût et d'études, il unissait aux aimables qualités du caractère, à beaucoup d’amé- nité et de rare modestie, des connaissances solides et variées qu'il se dérobait pour ainsi dire à lui-même, mais dont la Société savait dans l’occa ion faire son profit. C'est.ce dont rendent témoignage de nombreux rapports publiés dans nos Annales (1). 4) TRAVAUX (RAPPORTS OU MÉMOIRES) DE M. DUMONTAT INSÉRES DANS LES ANNALES DE LA SOCIÉTÉ. Rapport sur une presse propre à retirer le miel des gâteaux de cire, par M. Du- montat. (Tome 1", 1826, page 42.) Notice su l'utilité d’une pepinière dans chaque exploitation rurale. (Ibid., p. 97.) Rapport sur les Annules de l'agr.culture française, cahier de novembre 1828. (Tome 1, 1829, p. 38, n° 1e.) Rapport su l'usage de la charrue de Roville. Tome vi, 1832-1833, p. 46.) Communicati n faite al Societe sur les produits des gra nes quelle a fait disiri- buer en 1837. (Bullelin agronomique et industriel, p.65, 4 vol.) Notice sur un semis de grai es de pomues de turre. (Tome xur, 1847-1848, p. 58.) Rapport sur la machin à battre le grain dont fait usage M. Queÿron, proprietaire à Escublac, commune de Saint Haon. (1bid., p. 84.) Observations sur la cul ure du melon. (/bid., p. 93.) Rapport sur les plantations des haies. Tome x1v, 1849, 4er sem., p. 118.) Rappo:t sur un travail concert ant le reboisement des montagnes, presenté comme titre d'admission par M. d’ l'Eguille, sous-inspecteur des eaux et forêts. {Tome xv, 1550, 1°" sem., p. 75.) Rapport sur les moyens de remédier à la maladie des pommes de terre, d’après la m:thode de M. Le Roy-Mabile. Tome xvr, 1851, p. 105.) Rapport sur l: blé dit Raganiou. (Ibid , p.138.) Rapport sur l'industrie de la briqueterie en ce qui touche à la fabrication des tuyau: de drainage. Tome xvit, 1852, p. 28.) Rapport sur la candidature de M. Lacombe au titre de membre résidant. (/htd., page 234.) = Rapport sur un moulin de meunerie à bras, inventé par le sieur Gimbert Claude, du Monastier. (Tome xvinr, 1853, p. 14.) Rapport sur la candidature de M. de Surrel au titre de membre résidant. (Tome x1x, 1854, p. 141.) Rapport sur un mémoire de M. Richond, concernant la maladie de la vigne. (Tome xx1, 4857-1858, p. 425.) 160 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Il est pénible, ajoute M. le Président, de voir ainsi disparaître de la Société des membres qui en sont le soutien. M. le Président transmettra à madame Du- montat l'expression des regrets unanimes de la Société. Doxs au Musée. — Sur une petite table placée devant le bureau sont étalées plusieurs statuettes de bronze représentant un zouave et des animaux dans des atti- tudes différentes. Ces objets d'art fort distingués sor- tent de l'atelier de M. Frémier, sculpteur spécialiste. Ils ont été adressés pour le Musée à M. le Maire du Puy, par Son Exc. M. le Ministre d'Etat. On remarque encore plusieurs exemplaires d'une gravure de l’ancienne Vierge noire du Puy avec le maitre-autel. Un de nos collègues, M. le chanoine Alirol, qui veut bien en faire hommage à la Société, les a fait tirer sur une plaque de cuivre découverte à Lyon. Ces gravures ont surtout une valeur historique. L'attention de la Société s’est un instant arrêtée sur une branche de vigne portant, sur le même cep, des raisins blancs et des noirs, et dans une même grappe des grains noirs et des blancs. Enfin M. le Président annonce que le Conseil gé- néral du département a acquis pour le Musée la belle toile que notre compatriote M. Tyr y avait exposée, et qu'ainsi se trouvait rempli un des vœux de la So- ciété. NOVEMBRE. 161 OùvRAGES REÇUS. — M. le Président signale un article du Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest (2 juin 1859), sur les noms celtiques, qu'il renvoie, à l'examen de M. Sauzet, avec un travail sur le même sujet, qui se trouve dans la Revue des Sociétés savantes à la même date. Une autre revue, le Moniteur des Comices (13 août 1859), renferme une note sur un excellent petit ou- vrage dont M. le Président hésite à dire le titre. Il s’agit d'un livre intitulé : Petit Pierre, que le Moniteur des Comices présente à ses lecteurs comme renfernfänt de très-bons conseils de moralité. Sa lecture instruc- tive et amusante en fait, dit ce journal, le véritable Simon de Nantua du laboureur et du métayer. Si M. le Président cite cette mention d’un de ses ouvrages, c'est pour en reporter tout l'honneur à la Societé elle- mème, au sein de laquelle il a trouvé ses meilleures inspirations. AGRICULTURE. — Les publications agricoles fournissent à M. le Président le sujet de plusieurs observations importantes. Ainsi la revue publiée par la Société ifnpériale d’horticulture donne comme un moyen in- faillible d'éloigner les chenilles des plantations de choux, l'usage de quelques plants de chanvre mäle dis- persés çà et là. — M. l'abbé Bernard fait remarquer qu'à Yssingeaux et dans son pays ce procédé est prati- qué et produit de bons résultats. — M. de Brive assure que le chanvre mäle éloigne aussi les charançons du froment. — M. Chouvon signale avec le chanvre, 162 RÉSUMÉ DES SÉANCES. l'oignon, la sauge, et M. Alirol l’'absinthe, comme ayant la vertu de faire disparaître les insectes nuisibles dans les sacs de grains où on en met quelques fragments. Le dernier Bulletin de la Société impériale et cen- trale d'agriculture signale le rouleau économique de M. le général Morin. On peut y adap‘er un cylindre denté, broyeur et aplatisseur. M. le Président donne ensuite lecture d’une lettre que lui a personnellement adressée M. de Gourcy, dont le“hom et l'autorité sont bien connus. Cette lettre, pleine d'intérêt, a été écrite au retour d’un voyage en Angleterre. Elle rend un compte exact et fidèle de la manière dont on entend et on pratique l’agriculture dans ce pays. Château de Chissay, par Montrichard, le 30 septembre 1859. Je veux, mon cher Monsieur, causer un peu avec vous, en arrivant d’un voyage agricole de quatre mois, dont le mois de mai a été employé à assister aux concours régio- naux de Nantes et de Saint-Lô, et ceux de juillet, août et septembre, à visiter l'Angleterre, l'Ecosse et un peu le nord de la France. Dans le premier de ces deux voyages, ce que j'ai vu de plus remarquable est la culture et le remarquable bon sens de M. Liazard, ancien habitant de Caen, qui, ayant perdu une partie de sa fortune dans un mauvais placement, a prié ses parents, qui n'avaient que lui, de vendre leurs biens près Nantes et d'acheter une NOVEMBRE. 163 terre dans un pays très-arriéré en culture. Il a trouvé son affaire entre Redon et Grand-Jouan, en Bretagne : une jolie habitation avec 500 hectares partagés en cinq mauvaises métairies, dont trois dans la basse-cour ; cela lui a coûté 140,000 francs. Il y avait plus de moitié en ajoncs venus après des défrichements de bruyères abandonnés à eux- mêmes après épuisement. Il a réuni ses cinq métayers et leur a dit : Si vous voulez rester avee moi, il faut que vous con- sentiez à ce que je réduise vos fermes à 50 hectares, à ce que je puisse vous renvoyer chaque année, en vous pré- venant six mois d'avance, si je ne suis pas content de vous ; il faut que vous vous engagiez à faire tout ce que je vous dirai et comme je vous le dirai; nous ferons estimer par experts ce que vous avez de reste année moyenne, après avoir vécu sur votre ferme, et je m’engagerai aussi, par- devant notaire, à vous indemniser si vous aviez moins de reste après avoir suivi mes conseils. Les trois les moins misérables sont partis ; il a acheté pour chacun des deux restant pour un millier de francs d'engrais : têtes de sar- dines, cendres, guano, chaux, os qu’il pulvérise après les avoir desséchés à la vapeur, suie, ete., ete. Il a repris toutes les terres restantes, s’est occupé de leur défriche- ment, culture et amélioration, à fait beaucoup de colzas en fumant fortement, a bâti cinq nouvelles métairies en pisé recouvert de chaume et en papier goudronné, a formé une très-grande étendue de prés irrigués, pour lesquels M. Rieffet, dont il avait fait la connaissance et suivi les bons conseils, lui à fourni son irrigateur ; et ses deux mé- layers si misérables, qui étaient restés avec lui ne pouvant pas mieux faire, en recevant chaque année tous les engrais dont ils avaient besoin pour avoir d'excellentes récoltes, 164 RÉSUMÉ DES SEANCES. avaient déja au bout de trois ans de superbes céréales, colzas, trèfle, vesces, incarnats, un nombreux cheptel; ce qui avait tellement modifié l’idée des métayers du pays, qu'il trouva à choisir dans un grand nombre de métayers pour chacune de ses cinq fermes; et non content de cela, il loua d’un de ses voisins deux fermes pour 2,500 francs, il y a quatre ans, et les organisa de même que les siennes : elles lui rapportent maintenant un bénéfice net de 5,000 fr. chaque année. M. Rieffet, qui nous a menés, MM. Gayaud, Jamet et moi, chez M. Liazard, qui venait de remporter la prime d’hon- neur à Nantes, nous a fait parcourir les fermes de M. Lia- zard, qui élaient couvertes, ainsi que ses propres champs, des plus belles récoltes en tous genres. Je pense que tout propriétaire, dans des pays arriérés, qui a des fermiers ou métayers, aurait un immense avantage à visiter M. Liazard en mai ou juin, afin de voir les récoltes de ses sept mé- layers sur pied, cela les déciderait à suivre l'excellent exemple qu’il donne. Un autre cultivateur, qui probable- ment aura à Vannes l’an prochain la prime d'honneur, et que j'ai visité le lendemain, cultive depuis dix ans, trois ans de plus que M. Liazard, une propriété du même genre, et a aussi chez lui de fort belles récoltes et prairies; mais il le fait d’une manière si dispendieuse, qu'aucun de ses métayers n’a cherché en rien à limiter. A Saint-Lô, où M. le comte de Kergorlay a eu la prime d'honneur, j'ai visité pour la seconde fois sa belle culture et en ai été fort content, ainsi que de celles de plusieurs autres cultivateurs qui se préparent pour le concours de la prime d'honneur à Caen. J'ai visité, en passant à Rennes, pour la seconde fois la culture de M. Bodin, qui malheu- NOVEMBRE. 165 reusement était absent avec sa famille; j'y ai vu, comme la première fois, des récoltes remarquablement belles en tous genres et sa fabrique d'excellents instruments de cul- ture, qui emploie plus de cent ouvriers. Maintenant parlons de la Grande-Bretagne. J'ai assisté au concours de Warwick, où j'ai vu un bétail remarquable en tous genres, des instruments d'agriculture en immense quantité et d’un perfectionnement extraordinaire. Ce qui m'a frappé le plus dans ce concours, que j'ai étudié pen- dant une semaine, c’est le concours des charrues à vapeur, dont sept de divers inventeurs étaient sur un herbuge de deux ans. Plusieurs d'elles peuvent être utiles, mais celle de Facoln, l'inventeur de la charrue à drainer et d’une immense machine à faire des tuyaux, est tellement supé- rieure aux autres que je ne vous parlerai que d'elle, qui à cependant un grand inconvénient, c’est d’être d’un prix abordable à bien peu de cultivateurs : la double eharrue dépasse 12,500 fr., celle à trois socs 17,595 fr., celle à quatre, avec une locomobile de dix chevaux, 19,500 fr. enfin la même, avec une force de douze chevaux vapeur, arrive à 21,875 fr.; elle laboure, ou défonce, ou pèle gazons el chaume, ou enfin scarifie à merveille à plat ou en côtes. Elle fait en terres ordinaires quatre hectares d’excellent labour par jour. 11 lui faut un chauffeur, un laboureur et deux gamins de quinze ou dix-huit ans. Je connais deux grands cultivateurs qui sont décidés à l'avoir en France. Je l'ai vue travailler dans trois fermes et j'étais dans l'admiration, et dans sept fermes que j'ai visitées, où elle avait été employée, on en était enchanté. J'ai assisté pour la troisième fois, à Edimbourg, à un concours de moissonneuses, les deux premières près Valen- 166 RÉSUMÉ DES SÉANCES. ciennes et à Gembloux (Belgique), l'an dernier. Jen ai vu travailler beaucoup en France et en Angleterre, et si j'en achetais une, ce serait celle de Hussey, améliorée par Dray. Elle a fait ses preuves depuis trois ans chez M. Der- vand, fabricant de ferronnerie à Condé près Valenciennes, qui cultive aussi 380 hectares, est fabricant de sucre et distillateur. Il a été si content de celle rapportée d’Angle- terre, qu’il en a fait faire deux chez lui. J'ai vu sa moisson l'an dernier, et elle se faisait à merveille. Les javelles posées derrière la machine exigent de lier de suite et de mettre en moyette pour éviter les pieds des chevaux ; mais c'est un usage bon à imiter, puisque les cultivateurs flamands le font derrière leurs piqueteurs ; j’ai trouvé par- tout qu’elle faisait mieux que les autres sept de divers in- venteurs que j'ai vues ensemble. Elle ne coûte que 625 fr., tandis que la plupart des autres en coûtent 4,100. Celle de Burgess, qui est de ce prix, ne fauche pas; il faut done lui ajouter une faucheuse qui coûte encore 800 fr., tandis que celle de Dray moissonne et fauche. Adieu, mon cher Monsieur; si vous vouliez bien me mander comment vont vos deux cultures, ainsi que celle de ce bon M. Chouvon, vous me feriez bien grand plaisir. Aurait-il à la fin de l’année un bon élève de sa ferme-école capable de tenir une comptabilité à placer? ne m'oubliez pas près de lui. Mon hommage respectueux à Madame et mon amilié à vous. DE GOURCY. je joins un bon pour deux exemplaires de mon dernier voyage imprimé, un pour vous, un pour M. Chouvon, que je vous prie d’accepter. NOVEMBRE. 167 M. l'Inspecteur des écoles primaires adresse à la Société un rapport sur des expériences de culture faites par l'instituteur public de Saint-Julien-Molhesabate M. Ambert. La Société, qui s'intéresse vivement à ces sortes d'essais, renvoie le travail de M. Ambert à l’exa- men de M. de Brive. Ensuite M. le Président entretient l'Assemblée d’un projet qui pourrait contribuer à l'éclat de la solennité . déjà prochaine du Concours régional agricole. Il s’agi- rait non-seulement d'organiser, pour cette époque, une exposition des produits artistiques et indus- triels de ce département, exposition déjà arrêtée dès le principe, mais d'y appeler les sept départements de Ja circonscription agricole et ceux des départements voisins auxquels nous lient des rapports d'intérêt, tels que celui de la Loire. Ainsi notre localité de- viendrait, pour cette époque, l'asile des produits de l'industrie et des beaux-arts d’une partie de la France centrale. La Société abandonne à la commission du Concours régional, qui a déjà fonctionné sous la présidence de M. le Préfet du département, le soin de concilier l’exé- cution de ce projet grandiose avec les exigences de son budget. Elle aura, au préalable, à prendre l'avis de l'autorité administrative. Pisciculture. — M. le Président a la satisfaction d'annoncer à l’Assemblée que M. le Sous-Inspecteur des eaux et forêts, vice-secrétaire de la Société, s’oc- cupe avec une grande et active sollicitude de l'empois- 168 RÉSUMÉ DES SÉANCES. sonnement du lac du Bouchet. D’après une de ses lettres, à la date du 13 août, 32 tanches ont été lancées dans ce lac. L'architecte, M. Eck, a présenté au Conseil général le plan de la maison du garde et de l'établissement de pisciculture qui doit féconder ce magnifique bassin. La seule difficulté qui s'oppose à la réalisation de ce projet est la détermination de la propriété de ce lac et des terrains qui le bordent. Economie puguique. — M. le Président fait remarquer que la Société d'agriculture du département de Vau- cluse se propose d'organiser un Concours d'animaux gras et de distribuer des prix. Une pareille institution lui semble pleine de promesses au double point de vue des intérêts de l’agriculture et de la consommation alimentaire. IL se propose donc, avec l’assentiment de l’Assemblée, de saisir la commission dite du Concours régional de cette question et de la consulter sur l'uti- lité et l'opportunité qu’il peut y avoir à ouvrir le con- cours aux engraisseurs et à les y attirer par des primes prises sur Les fonds de la Société. M. le Président occupe encore l’Assemblée d'éco- nomie publique sous un rapport qui n'est pas sans intérêt. Il désirerait qu’une personne dévouée voulüt bien donner tous ses soins à déterminer les dix-sept ou dix-huit variétés de champignons domestiques qui peuvent entrer sans aucun danger dans la nourriture de l'homme. Dans plusieurs villes, le marché des At NOVEMBRE, 469 champignons est considérable et dure des mois en- tiers. Les habitants de la campagne trouveraient des ressources dans la vente de ce comestible dont la ré- colte ne donne aucune peine, et l’art culinaire n’y per- drait rien. Il serait donc à désirer qu’un botaniste compétent consentit parmi nous à s'occuper de cette question. INDUSTRIE. — À la demande de M. le Président et conformément au vœu de l’Assemblée, M. Vinay rendra compte de ses éducations de vers à soie et des résultats qu'il a obtenus cette année. Ce compte-rendu sera plein d'intérêt surtout en l’état où se trouve cette in- dustrie, compromise par la maladie qui, depuis plu- sieurs années, attaque ces insectes si utiles. SCIENCES. — Dans l'analyse et le dépouillement des revues et des ouvrages reçus qui couvrent la table du bureau, une brochure in-4°, renfermant un travail sur le volcan de l'Etna, dont M. Charles Lyell, président de la Société géologique de Londres, fait hommage à la Société, donne à M. Bertrand de Doue l’occasion de revenir sur l’homme fossile de Denise et de faire con- naître à la Société le sentiment des savants voyageurs que cette pièce capitale des collections scientiques de notre Musée attire dans nos contrées. Voici sur cet intéressant sujet la traduction que M. Bertrand de Doue donne à la Société de l'opinion exprimée par le savant géologue anglais, M. Lyell, au Congrès scientifique d’Aberdeen. TOME XXII. 12 170 RÉSUMÉ DES SÉANCES D'abord, dès 1844, M. Aymard, paléontologiste distin- gué, annonce la découverte, dans les régions volcaniques de la France centrale, des débris de deux squelettes humains (crâne, dents, os) enfouis dans une brèche volcanique qui se trouve sur le mont Denise, aux environs du Puy-en- Velay : brèche antérieure en date au moins à une des dernières éruptions de ce volcan éteint. Sur le versant opposé de la même montagne on avait également rencontré, dans des couches de tuf, les restes d’un grand nombre de mammifères, la plupart d'espèces éteintes et qu’on croyait, à raison selon moi, être du même âge. L'authenticité de ces fossiles humains fut, dès l’origine, contestée par quel- ques géologues, mais admise par la majorité de ceux qui visitèrent le Puy et virent de Jeurs propres veux les pièces originales maintenant déposées dans le Musée de la ville. En outre, M. Pictet, si avantageusement connu par son excellent ouvrage de paléontologie, proclama, après une visité sur les lieux, son entière adhésion à l'opinion déjà émise par M. Aymard. Mon ami, M. Serope, dans Ja deuxième édition de ses Volcans de la France centrale qui vient de paraître, a également adopté les mêmes con- clusions ; mais je dois dire qu'après m'avoir accompagné cette année même au Puy, il a cru devoir modifier ses vues. Voici, en effet, le résultat de notre examen qui. si je ne me trompe, coïncide essentiellement avec celui auquel sont arrivés deux savants bien connus, MM. Hébert et Lartet, qui sont allés cette année même étudier la question sur les lieux. Nous ne sommes nullement disposés à soutenir que le spécimen existant dans le muséum du Puy (lequel ne fut malheureusement jamais vu en place par aucun observa- NOVEMBRE, 474 leur adonné aux sciences) est fabriqué, Au contraire, nous inclinons à penser que ces débris fossiles, ainsi que quel- ques autres échantillons provenant de la même colline. furent enfermés par des causes toutes naturelles dans leur sangue actuelle. Mais la roche où on les a rencontrés se compose de deux parties, l’une est compacte et en général finement lamelleuse, on n'y à jamais vu d'os humains : l’autre partie, où sont les fossiles, est une pierre légère bien plus poreuse, non lamellée, et que nous n'avons pu rapporter à aucune roche semblable sur le mont Denise, quoique nous ayons fait pratiquer, M. Hébert et moi, plu- sieurs excavations dans le prétendu gite des fossiles. Aussi M. Hébert a-t-il fait remarquer avec raison que celte pierre bien plus poreuse, qui se rattache par sa cou- leur et par sa composition minérale sinon par sa structure à différentes roches des vieilles brèches de Denise, pourrait bien avoir pour origine ces roches mêmes broyées, déta- chées, puis déposées de nouveau, ou, comme disent les Français, remaniées, ce qui leur assignerait une date bien plus récente ; c’est là une hypothèse qui mérite bien consi- dération ! Mais si je n'ai pu trouver dans les fossiles du Puy pleine évidence en faveur de l'antique origine qu'on prétend leur donner, je suis tout prêt à confirmer les découvertes de M. Boucher de Perthes, d'instruments de silex mélés à des bancs de cailloux vierges dans le nord de la France, et avec des os d’éléphants, à Abbeville et à Amiens. Les géologues de notre pays ne partagent pas tous cette opinion. M. Félix Robert, faisant ses réserves, à 172 RÉSUMÉ DES SÉANCES. soutenu, dans un mémoire écrit avec talent (1), que le terrain du gisement de l'homme fossile n'avait pas été remanié, et qu'il indiquait clairement l'apparition de l'homme sur la terre pour la fin de la période dite pliocène. De sorte que ce débat, que M. Bertrand de Doue animait de sa parole éloquente, qu'il a porté très- haut par des considérations neltes sur lancienneté probable de la race humaine, à tenu quelque temps suspendue l'attention de la Société entière. LirréraTuRE. — Un des épisodes intéressants de cette séance est la lecture d’une pièce de vers, faite par M. Hedde Isidore. L'auteur de cet opuscule, plein de poésie, est un jeune homme ravi par la mort à l'espé- rance de tous les siens, à l’âge de 17 ans, Félix Hedde, fils de M. Philippe Hedde, dont la Société regrette en- core la perte. PERSONNEL DE LA SOCIÈTÉ. — Avant de se séparer, l'Assemblée, à l'unanimité, sur le rapport de . le Pré- sident, décerne le titre de membre non résidant à M. Natalis Rondot et à M. Bellin, de Lyon. Vers sept heures, la séance est levée. Le Secrétaire . BÉLIBEN. A) Voir les Annales de la Société académique du Puy, t. XXI, p. CXY. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 8 DÉCEMBRE. SOMMAIRE. OUVRAGES REÇUS : À l'occasion du Bulletin monumental, M. le Président exprime les regrets de la Compagnie au sujet de la m rt de M labbe Croizet. — CoRREsPONDANCE : M. Béliben écrit pour ofrir sa démission de Secrétaire ; l'acceplation en est ajournée. — AGRICULTURE : Rapport de M. Balme sur la 25° session du Congrès scientifique de France tenu a Auxerre. — De la chaux considerée comme amendement ar M. de Brive. — Du morcellemint de la propriélé ; M. Ch, Calemard de Lafayette. — Drainage : D'un malaxeur à mettre à la disposition de M. Olivier du Chassagnon. — LirTÉRATURE : Lecture d'une pièce de veis de M. Blanchot de Brenas. — Histoire : M. Louis de Vinols donne encore lecture de quelques fragments d'un ouvrage sur les guerres civiles et religieuses dans le Velay. — Découverte d'un acte authentique ayant trait a la fondation du prieuré de Saint-Pierre-Eynac, par M. l'abbé Bernard. Présidence de M. Charles Calemard de Lafayette. A trois heures la séance est ouverte. OUVRAGES REGUS. — M. le Président énumère les ou- vrages reçus depuis la précédente séance et appelle en particulier l'attention de l’Assemblée sur quelques- unes de ces publications. 474 RÉSUMÉ DES SÉANCES, Les Annales de la Société d'émulation des Vosges contiennent d’utiles renseignements sur les travaux de drainage effectués dans ce département. M. le Prési- dent les signale à l'attention de la Société. Le Bulletin monumental annonce la mort de M. l'abbé Croizet, l'un des vice-présidents de la ?2e session du Congrès scientifique de France et l’un des membres correspondants de la Société. M. le Président exprime les regrets de la Compagnie pour la perte qu'elle a faite d’un membre si honorable et si distingué. Le Journal d'agriculture progressive contient une notice intéressante pour conserver le beurre. Cette méthode, d’une application facile, pourrait être utile- ment propagée. CORRESPONDANCE. — M. Béliben écrit à M. le Président pour offrir sa démission de Secrétaire de la Société. M. le Président fait connaître qu'il a quelques raisons d'espérer que M. Béliben pourra être conservé à la So- ciété et qu'il y a lieu d’ajourner toute décision sur sa demande. AGRICULTURE. — M. Louis Balme à la parole pour la lecture du rapport suivant, contenant le compte- rendu de deux volumes de la 25° session du Congrès scientifique de France, tenu à Auxerre le 2 septembre dernier. SL De DÉCEMBRE, | MESSIEURS , Dans une de vos dernières séances, M. le Président m'a chargé de vous rendre compte des deux volumes de la 25e session du Congrès scientifique, qui s'est tenu à Auxerre. Pour satisfaire convenablement à cette mission , il fau- drait avoir les connaissances les plus variées, il faudrait pouvoir approfondir dans ses plus intimes détails le fa- meux traité de Pic de La Mirandole : De omne re scibili et quibusdam aliis. Le titre de cet ouvrage eut toujours le privilége d'être pris pour une naïveté et d'amener le sourire sur les lèvres. Longtemps, je me suis demandé si l’on devait en effet y voir une de ces bonhomies du moyen-âge mêlée à un immense orgueil de savant, ou s’il renfermait au contraire une pensée sérieuse. L'étude que j'ai été obligé de faire pour essayer d'arriver à la hau- teur de la tâche qui m'était imposée, m’a convaincu que ce titre est tout un enseignement. — Pie de La Mirandole savait trop pour se croire arrivé à l'apogée de la science. Par le coin du voile qu'il avait soulevé, il avait vu que l'intelligence humaine avait de vastes horizons à parcourir avant de toucher à ce but suprême, si tant est qu'elle puisse jamais l’atteindre : il n’a donc pu jeter ainsi dans le titre d'un livre un défi à l'esprit humain. C’est ailleurs qu'il faut chercher la pensée de cet auteur. Les connais- sances variées que La Mirandole avait acquises lui avaient appris que toutes les sciences sont sœurs. Il en avait conclu, 176 RÉSUMÉ DES SÉANCES. avec raison, que l'étude des choses connues conduisait a la recherche et bientôt à la découverte de celles qui sont inconnues. C’est pour cela qu'il nous a dit : voici l’omne re scibili de mon époque, étudiez-le, vous arriverez au quibusdam aliis de l'avenir qu'il renferme. Heureux, Messieurs, si, me faisant disciple de ce grand maitre pour les res scibiles de notre temps, je parvenais à vous donner une exacte idée des travaux du Congrès, dans les diffé- rentes branches de la science. Le 2 septembre 1858, c'était fête dans la ville d'Auxerre. Les vailiants soldats de l'intelligence, qui chaque année se réunissent de toute part pour apporter à l'édifice scien- tifique le produit de leurs travaux annuels, venaient d'inaugurer, par une séance solennelle, leur arrivée dans cette cité. Fidèles aux souvenirs de leur glorieux passé, les Auxerrois avaient tout préparé pour donner la plus grande solennité à la tenue du Congrès dans leurs murs. Je devrais peut-être, pour rendre témoignage à leur accueil sympathique, vous raconter les fêtes qui ont eu lieu à cette occasion et choisir entre autres la retraite illuminée, Si vous ne trouvez point ici ces descriptions, c’est que j'ai hâte de faire passer sous vos yeux les expositions de l'industrie, des objets d'art religieux , et des beaux arts. Dans le département de l'Yonne , comme partout, l'in- dustrie est entrée dans la voie du progrès. Le rapport de la commission chargée de visiter l'exposition indus- trielle le constate. Parmi les inventions que cette commis- sion signale, j'ai cru utile d'appeler votre attention sur les suivantes : M. le baron Grand d'Esnon a inventé un appareil de pisciculture fort ingénieux, Les {uyaux de drainage exposés DÉCEMBRE, 477 par MM. Mauvage, Anforant et de Rebourseau sont d’une qualité telle que la commission les a déclarés supérieurs à tous ceux que l'on voit en France et en Angleterre, Les instruments de drainage de M. Léon Dugeix sont d’une solidité et d'un bon marché remarquables. Différentes charrues étaient exposées, celle qui attirait le plus l’atten- lion, c'était une charrue à défricher les bois. Un lit mé- canique pour malade, de M. Villat, à été l’objet d'un rapport spécial. On constate sa grande utilité pour certai- nes opérations. Son prix élevé fait craindre qu'il ne puisse être acquis que pour les établissements publics. Passons maintenant dans les salles destinées à l'expo- sition de l’art religieux. Là, étaient réunis de précieux dé- bris de ces richesses artistiques que possédaient autrefois en si grand nombre les évêques, les chapitres, les abbés et les couvents de l’Auxerrois. Au point de vue archéologique, les étoffes étaient la partie la plus curieuse de cette exposition. Sous cette dé- signation on comprenait les suaires, les chasubles et autres ornements sacerdotaux. La plupart de ces objets ont déjà été reproduits et décrits dans diverses publications, L'une des salles était décorée par les tapisseries qui servent à orner le chœur de la cathédrale : Elles repré- sentent la légende de saint Etienne; il y a près de deux siècles elles eurent le mérite de fixer l'attention du grand roi Louis XIV. Les objets d'orfévrerie, les émaux, les ivoires étaient placés dans cette salle. Espérons que tous ces objets seront un jour décrits et reproduits comme l'ont été ceux qui figuraient à notre exposition de 1855. L'exposition de peinture devait également avoir beau- coup d'attrait pour les artistes, Toutes les écoles y étaient TS RÉSUMÉ DES SÉANCES, représentées, et par des tableaux des maîtres. Je n’en veux pour preuve que les noms d'Albert Durer, Teniers, Wou wermans, Van Dick, Paul Véronèze, Le Guide, Le Do- minicain, Philippe de Champagne, Mignard Boucher, que je rencontre souvent dans le rapport de la commission chargée de l'examen des œuvres artistiques. Je termine cette excursion rapide dans le domaine de l’art, en vous signalant une miniature d’un rare mérite, intitulée Vénus et l'Amour. Elle est due au pinceau de la célèbre vé- nitienne La Rosalba. Nous nous complairions, Messieurs, à vous entretenir encore de quelques-uns de ces charmants spécimen de l'art que l’on trouve au nombre des richesses artistiques du département de l'Yonne, mais nous sommes rappelé au but de notre travail par la voix de ces courageux tra- vailleurs qui, tout près de là , étaient occupés à dresser le merveilleux inventaire de l'univers. Examinons donc les travaux de la première section du Congrès. Selon l'usage, elle s’occupe des sciences natu- relles et mathématiques. Les questions qui lui étaient posées, pour la plupart, intéressaient uniquement le département de l'Yonne. Nous croyons devoir vous indiquer sommairement les princi- pales. On demandait de déterminer la série des formations géo- logiques dont se compose le sol de ce département, un aperçu de sa paléontologie, l’origine et les caractères des roches d’arkose que l’on y rencontre. Je m'arrète pour vous signaler ici un fait qui, jusqu’à présent, paraissait avoir échappé aux géologues paléontologistes. Pendant longtemps l’arkose avait été réputé azoïque. A la suite de DÉCEMBRE, 4179 recherches minutieuses, M. Martin a découvert qu'une partie de l’arkose, qu’il nomme foie de veau, contenait des sisements de coquillages fossiles. Dans un mémoire fort remarquable il les a décrits, et à ce travail il a joint une série de planches où ils sont dessinés. On proposait égale- ment de faire une étude des calcaires de ce département. Cette étude, selon nous, offrait un plus grand intérêt à cause des divers usages pratiques auxquels on emploie les calcaires. Parmi ceux que l’on a cités, deux espèces nous ont paru devoir principalement mériter votre attention. La première, c’est le calcaire gryphée, fort riche en dé- pouilles marines, qualité qui doit le faire rechercher en agriculture comme amendement. La seconde est un calcaire bitumineux de couleur bleuâtre, dont le gisement se trouve à l'étage supérieur du lias, au-dessous du calcaire à entroques. Ce calcaire est encore innommé, bien qu'il soit employé à faire un ciment que l’on appelle ciment-Vassy, du nom du lieu où il a été découvert. Si les avantages qu'offre ce ciment n’ont point ébloui ceux qui l'ont trouvé, il est destiné à faire une ré- volution dans notre système de constructions. Il paraîtrait, en effet, que des ouvriers expérimentés peuvent exécuter avec ce produit des moulages, des bassins, des cuves, en un mot, tout ce que l’on peut confectionner avec de la pierre de taille, et cela à des prix infiniment plus modi- ques. De semblables découvertes sont de précieuses res- sources dans un pays comme le nôtre, où la pierre, par la grossièreté de son grain, se prête si peu à l’ornementation de nos édifices. Il nous semblerait done utile d'étudier si, parmi les calcaires dont notre sol abonde, il ne s’en trouve pas qui réunissent les mêmes qualités. 480 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Cette question des calcaires nous conduit à nous occuper des travaux de la section d'agriculture. Un agronome, dont le nom nous échappe, a prétendu que les seuls éléments essentiels à la végétation étaient l'eau et la chaleur. Sans doute, ces deux éléments sont indis- pensables à la germination des plantes, mais ils ne sont point les seuls. Il faut que la terre qui reçoit une graine dans son sein contienne les sues propres à sa subsistance, De nos jours, on a tellement compris qu’il fallait donner à la terre les sels que s’approprient les plantes, que l'on a créé la chimie agricole, dont le principal objet est l’étude des terres et des engrais. Pour éviter bien des tàtonne- ments aux agriculteurs, l'un des savants de notre époque, que l'en trouve à la tête de tout mouvement vers le pro- grès, l'honorable M. de Caumont, avait, dès 4840, proposé de dresser des cartes agronomiques ou telluriques de cha- que département. Elles auraient pour but, disait-il, de classer les terrains meubles qui forment la surface du sol cultivé, abstraction faite des plantes cultivées et des pro- cédés agricoles suivis. Il a dressé celle de Pont-l'Evêque (Calvados). Le résultat qu’il a obtenu fait regretter qu'un travail d'ensemble de ce genre n'ait point été fait dans toute la France. Il n’y a pas un seul cultivateur qui ne se plaigne à tout moment du manque d'engrais; il est facile de déterminer la raison de ces plaintes : c’est que généralement ils ne connaissent que très-imparfaitement la nature du sol qu’ils exploitent. S'il en était autrement, que de choses leur fourniraient les engrais qu'ils prétendent n'avoir pas. La marne, le plâtre, la chaux, le sable même sont, selon la nature des terrains, d'excellents amendements. Et cependant DÉCEMBRE. 184 voyez, déjà depuis longtemps on a recommandé l'emploi de la chaux comme devant servir à amender les terres: il a été constaté que, dans certaines localités, son emploi avait eu pour résultat de convertir des terres à seigle en terres à froment, Eh bien, il a été établi au Congrès, qu'en Normandie seulement, ce genre d’amendement était d’un usage fréquent, Le guano, le noir animal sont aussi d'excellents engrais lorsqu'ils ne sont point sophistiqués. Quelques agriculteurs rangent encore parmi les engrais le phosphate de chaux rendu soluble par 45 à 20 p. 0/0 d'acide sulfurique et le sel ordinaire. Il paraitrait qu'en Angleterre un mélange composé moitié guano moitié sel aurait produit d’excel- lents effets. Quant au sel ordinaire employé seul, les expé- riences faites jusques à ce jour ne sont point concluantes. M. de la Trehonnais, un agriculteur du département de la Sarthe, prétend avoir constaté que l'emploi du sel fortifie les pailles des blés et les empêche de verser. Selon lui, les betteraves acquièrent un développement prodigieux lors- qu'elles sont traitées par cet amendement. A Caen on a aussi expérimenté l'emploi du sel comme amendement, ais on n'y à obtenu aucun résultat. Une question qui se rattache à celle des amendements des terres, c'est celle de l'écobuage. Cette question a été souvent traitée, souvent on a parlé des excellents effets qu'il produisait dans le département de l'Isère, et l’on n’a pas encore conclu s’il pouvait être employé avec avantage dans les autres départements. Pour trancher définitivement cette question, nous croyons qu'il faudrait faire une étude comparée de la composition des terrains de chaque dépar- lement. 182 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Les revenus d’une ferme ne consistent point upique- ment dans les produits du sol; les animaux que l’on y élève proeurent encore de grands bénéfices. Aussi le culti- vateur vigilant doit-il mettre tous ses soins à améliorer les espèces qu'il élève. Depuis longtemps on conseille le croi- sement des races pour parvenir à cette amélioration si dé- sirable. La race bovine de Durham paraît être la plus apte à corriger les défauts que l’on reproche généralement à la race francaise. La race porcine ne se divise plus aujourd’hui qu’en deux espèces : la grande et la petite. La petite est préférable, parce que la même quantité de viande revient moins cher. Si on veut éviter la dégénérescence de l'espèce, on doit se garder d’accoupler les sujets de la même portée. Parmi les améliorations agricoles, une de celles qui pa- ra’ssent avoir le plus à lutter contre la routine des paysans, c’est le drainage. Les membres du Congrès ont constaté que les cultivateurs ne l’entreprenaient que lorsqu'ils en avaient vu les salutaires effets dans les grandes fermes. Une nouvelle plante est cultivée en France, le sorgho. Tout le monde a été d'accord sur l’abondance de la récolte : peu de personnes se sont plaintes des propriétés délétères qu'on lui reproche. Je dois vous signaler ici, Messieurs, les vœux que le Congrès a émis dans l'intérêt de l’agriculture. Vous le savez, le Gouvernement étudie une loi sur la police rurale. Di- vers points ont attiré l'attention du Congrès. Ainsi, il a signalé le mauvais état des chemins ruraux, par suite des empiètements dont ils sont l’objet, et a manifesté le désir qu'ils soient améliorés et bornés. Après une discussion assez longue, il s'est prononcé pour l’embrigadement des DÉCEMBRE. 185 gardes-champêtres et la suppression de la vaine pâture. La propagation de l'instruction agricole est un de ses plus vifs désirs ; le meilleur moyen d'y parvenir, selon lui, c’est d'établir dans les écoles normales primaires un cours d’agri- cullure. Vous avez déjà pu juger ici même des excellents effets que l’on peut attendre d’une pareille institution. L'un de nos collègues, l'honorable M. de Brive, avait écrit au Congrès pour lui demander d'émettre le vœu que le Gouvernement conférât l’exemption du service militaire aux élèves des fermes-écoles. Cette proposition a été lon- guement discutée, c’est assez dire qu’on en avait compris toute l'importance ; elle a pourtant été rejetée. Ce rejet, il faut l’attribuer à l'absence de M. de Brive qui n’a pu appuyer sa proposition de l’autorité de sa parole. Depuis quelque temps les agriculteurs se préoccupent vivement de l'avenir de l’agriculture en présence du mor- cellement toujours croissant de la propriété. Cette ques- tion, Messieurs, est de la plus haute importance, en ce que si, d’une part, elle touche à l'alimentation de la France, de l’autre elle se lie intimement à l’économie de notre droit civil et aux principes fondamentaux de notre ordre social actuel. Un coup-d'œil rétrospectif vers le passé nous démontre que les grandes propriétés n’ont point produit, au temps du régime féodal, les résultats que l’on pouvait en attendre. La première période du morcellement pro- duisit, au contraire, des avantages réels et absolus ; donc, en principe, le morcellement a de bons résultats. Ce que l'on redoute maintenant, c'est l'extrême division du sol cullivé, déjà l’on en signale les inconvénients matériels et moraux. La panique est si grande que l’on va jusqu’à pro- poser des mesures législatives qui ne tendent à rien moins 184 RÉSUMÉ DES SÉANCES. qu’à supprimer l'égalité des partages. Les moins peureux songent déjà à former des associations agricoles. Cette crainte ne vous paraît-elle pas être l'histoire des bâtons flottants ? De loin c’est quelque chose et de près ce n’est rien. Pour moi, Messieurs, je ne redoute point ce morcelle- ment indéfini dont on s’effraie, parce que je ne le crois pas possible ; j'y trouve un obstacle dans notre législation et dans l’état prospère de notre industrie et de notre com- merce. Il est vrai, en principe le législateur a proclamé l'égalité des partages, mais à côté il a écrit l'exception de la licitation, lorsque les immeubles ne peuvent se diviser commodément. J'ai ajouté la prospérité de notre indus trie et de notre commerce. L'homme, quel qu’il soit, tient à la terre; c’est elle, en effet, qui lui offre le placement le plus solide pour ses économies. Voyez ce négociant dont les affaires sont prospères, quelle est son ambition? n’est-ce pas d’acheter un champ, de joindre à ce champ ce bois, ce pré, de manière à former un petit héritage où, quand il quittera les affaires, il viendra se reposer en faisant de l'agriculture. Sans doute le temps des grandes propriétés seigneuriales est passé, mais le désir d’être propriétaire de la classe qui vit dans l’aurea mediocritas est trop vif, pour que l'avenir de l’agriculture soit compromis par le morcellement indéfini du territoire. Je terminerai, Messieurs, ce compte-rendu des travaux de la section d'agriculture par l’analyse d'un intéressant mémoire de M. Guichard, ayant pour tilre : Ce qu'on laisse perdre en agriculture. W a obtenu les honneurs de DÉCEMBRE. 185 la lecture en séance publique et a été imprimé séparément pour être distribué aux instituteurs du département de l'Yonne. Prenant pour base de son travail les chiffres officiels de la statistique, M. Guichard émet en principe que le produit moyen du sol est de 12 hectolitres à l'hectare, sur lesquels il en faut prélever deux pour la semence. Cette production est au niveau de la consommation. De là la conséquence, que le déficit d’un douzième amène une mauvaise année el l’excédant d’un douzième une bonne année, Un treizième hectolitre par hectare changerait donc le niveau des années, Or, ce treizième hectolitre, dit-il, nous l'avons et nous le perdons volontairement, Cette assertion semble tout d’abord assez étrange, mais en parcourant ce mémoire on est bien= tôt convaincu de l’énormité des pertes que font les culti- valeurs peu soigneux, Ainsi, l'emploi d'une semence mal nettoyée fait qu'une partie de la terre, qui devait produire du bon grain, ne pro- duit que des plantes parasites. La semence jetée sur le sol, une partie sera dévorée par les oiseaux, une autre sera ou trop peu ou trop profondément enterrée et ne lèvera point. Ailleurs elle sera noyée faute d'avoir songé à l'écoulement des eaux. Au printemps on ne sarele point, et les mauvaises plantes se nourrissent aux dépens des céréales. Le blé par- venu en tuyaux souffre des animaux que l’on laisse vaguer, Vienne la moisson, les pertes sont encore plus considé- rables, el cela parce qu’on moissonne toujours lorsque les grains sont trop mürs. Voulez-vous, dit-il, avoir du grain de première qualité et éviter Ja perte occasionnée par la ‘moisson, moissonnez dès que la paille se dessèche par le Pied et laissez ensuite mürir en javelle. TOME XXII. 45 186 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Vient ensuite ce que mangent les souris et les charan- cons. Le battage au fléau fait perdre d’un dixième à un vingtième, suivant la surveillance qu’exerce le propriétaire. Enfin, la méthode généralement employée pour vanner le grains est défectueuse et une eause infaillible de perte. Toutes ces pertes, Messieurs, on doit faire tous ses efforts pour les éviter. Nous en excepterons pourtant celle qu'occasionnent les oiseaux. En Angleterre, on avait mis à prix la tête des moineaux dans l'intérêt de l'agriculture. Aujourd’hui on accorde une prime pour favoriser leur im- portation : on a reconnu qu'ils se nourrissaient d'insectes qui détruisent les récoltes. Chez nous, si l’on se plaint si fort des dégâts occasionnés par les chenilles, ne faut-il pas l'attribuüer a ces oiseleurs impitoyables qui, en tout temps, font une guerre acharnée à ces petits habitants de nos forêts. Et les animaux, continue M. Guichard, de quelle ma- nière sont-ils traités? que de sujets de perte : mauvaise stabulation, mauvaise nourriture, espèces peu appropriées au sol qui doit les nourrir. Pour les fumiers, on peut estimer l’étendue de la perte que fait celui qui ne les soigne pas, par l'opinion émise tout récemment par M. Bousingault. Ce savant chimiste prétend que sur la bouse de vache l’eau peut entrainer 960 parties sur mille. A toutes ces pertes, permettez-nous d’en signaler une à laquelle M. Guichard n’a pas pensé sans doute, par suite de son habitude continuelle du travail : nous voulons parler de la perte du temps. Les cultivateurs, du moins la plupart de ceux de nos montagnes, semblent ignorer que le temps est pour eux un précieux capital. DÉCEMBRE. 487 Reste à vous dire le moyen de remédier à cette série de pertes et d’avoir ce treizième hectolitre qui doit prévenir toute disette. Ce remède M. Guichard l'indique, il n’est autre que l'instruction. Je craindrais, Messieurs, de m'attirer les foudres de la Faculté si, tout profane que je sois en semblable matière, je ne vous entretenais de quelques-unes des questions qu'a traitées la seclion des sciences médicales. Dans le programme on demandait quels seraient les meilleurs moyens de prévenir l’aliénation mentale. Les moyens préventifs, M. le docteur Rousseau, médecin d’un asile d’aliénés, les trouve dans l'éducation. Prenant l'en- fant à sa naissance et le conduisant jusqu’à l’âge adulte, il veut qu’il soit soumis à des procédés toujours doux et bons, qu'on écarte de lui toutes occasions de terreurs et d'idées de sortilége, tous ces faux préjugés qui frappent l'enfance et ne s’effacent jamais. L'un des membres qui prirent. part à la discussion eroit trouver la cause des troubles cérébraux dans l'éducation publique ; il pense qu'aujourd'hui les travaux que l’on exige dans les lycées ne sont point en rapport avec l'âge et l'intelligence des élèves, il voudrait que l'éducation fût toute de famille. Cette opinion à été combattue par M. le docteur Bailly. L'expérience lui a appris que la majorité des cas d’aliéna- tion prend sa source dans l’orgueil et l'ambition, trop sou- vent et de trop bonne heure nourris dans la famille. S'il nous était permis d'émettre une opinion, nous di- rions que l’on ne doit point être si exelusif que l'ont été ces Messieurs. Le meilleur est, lorsque cela est possible, de réunir l'éducation de famille à l'instruction des écoles 188 RÉSUMÉ DES SÉANCES. publiques. Ce qui nous parait avant tout indispensable, c’est de ne point trop hâter le développement de ces jeunes intelligences, dans la crainte de déterminer, par des excès de travail, les premiers accidents de ces fatales maladies. On s’est ensuite préoccupé de la thérapeutique et on a constaté que les améliorations introduites dans les hospices d’aliénés avaient produit d'excellents résultats. L'étude de la musique, dans certains cas, est un remède certain. Chez tous les aliénés la musique apporte un soulagement à leurs souffrances. La création des médecins cantonnaux est une organisa- tion toute récente; on ne peut encore bien apprécier les avantages qu’en retireront les classes pauvres des cam- pagnes. Il faut le dire, à la louange du corps médical tout entier, jusqu’à ce jour l’assistance volontaire et gratuite des médecins n’a jamais fait défaut aux pauvres. L'assistance légale sera-t-elle plus réelle et plus efficace ?.... Ce qui manque le plus souvent aux indigents, c’est la possibilité de se procurer des remèdes. Il serait donc plutôt à dé- sirer que l’on établit dans chaque canton des pharmacies gratuites. Devons-nous , Messieurs, abandonner la vaccine de crainte de voir les générations futures décimées par la fièvre typhoïde, l’angine, la suette, le choléra, etc. Les uns disent oui, les autres non. Et adhuc sub judice lis est. Espérons que l’on reconnaîtra d’une manière positive que la vaccine est étrangère aux modifications qui se pro- duisent depuis quelque temps dans la santé publique, et que nos populations continueront par son emploi à se préserver de la variole et des traces si redoutables pour la beauté humaine qu’elle laisse après elle. DÉCEMBRE, 189 Le grand naturaliste Cuvier, avec un seul os fossile a su reconstruire les animaux antédiluviens, écrire leurs mœurs et leur histoire. Cétte méthode, les archéologues l'ont em- ployée avec succès pour écrire l’histoire des générations qui nous ont précédés. Avec une pierre sculptée, une inscrip- tion exhumée de terre, ils reconstruisent un édifice, un temple, une ville ; ils nous donnent le degré de civilisa- tion auquel étaient parvenus les habitants. À Auxerre, par exemple, quelques inscriptions votives et funéraires, quel- ques chapiteaux ont permis de reconstruire la ville que les Romains vainqueurs étaient venus établir autour de l’an- cienne ville gauloise d’Autrie, située sur le sommet d’une colline. L'utilité des études archéologiques est si constante que le Gouvernement à voulu leur donner une nouvelle impulsion en invitant les Sociétés savantes à dresser une carte de la Gaule au Ve siècle. Pour arriver à ces fins, le meilleur moyen n'est-il pas de rechercher les voies ro- maines qui généralement mettaient en communication les principaux centres de population ? Cette idée vous l'aviez conçue depuis longtemps et exécutée en partie par l'étude de la via Bolena, étude qui fut complétée par notre col- lègue M. Bretagne. Votre exemple a été suivi à Auxerre. M. Quantin, aidé par MM. les agents-voyers, a donné le tracé de la voie romaine d'Auxerre à Entraines. Avant de quitter ce livre de pierre où chaque siècle à écrit sa pensée sous l'inspiration du génie, permettez-moi de vous dire deux mots de la cathédrale d'Auxerre, qui est une des belles pages de ce livre. Ce monument a été com- mencé vers les premières années du XIVe siècle et n’a été terminé que vers le milieu du XVIe. Deux siècles et demi pour bâtir une église ! Cela nous paraît incroyable à nous 190 RÉSUMÉ DES SÉANCES, qui voyons les monuments les plus somptueux s'élever comme par enchantement. Mais à cette époque un édifice ne pouvait se construire aussi vite. Alors toute construction était la manifestation d’une idée, et pour qu’une idée entre dans l'esprit des masses il faut le travail de plusieurs générations. Quoi qu'il en soit, la cathédrale d'Auxerre est remarquable par le grand nombre et le fini des sculptures qui ornent ses portiques et les chapiteaux de ses colonnes. s L'architecture et l’histoire se complètent l’une par l’au- tre. La première, pour le plus souvent, reproduit les ten- dances religieuses d’une époque ; la seconde enregistre toujours ses tendances politiques et sociales. L'étude appro- fondie de nos monuments religieux viendrait confirmer la première partie de notre proposition ; quant à la se- conde, il suffit, pour la justifier, d'examiner un instant quelques-unes des monographies insérées dans ces vo- lumes. Lorsque, par exemple, on nous apprend qu'au IXe siècle Gérard de Roussillon chassa les Sarrazins d'Arles, qu'il dé- livra le littoral du Rhône des excursions des Normands, que tour-à-tour il prit parti pour Charles-le-Chauve ou pour ses ennemis;.ne doit-on pas en conclure qu’il fut du nombre de ces puissants seigneurs que Charlemagne avait courbés sous le joug impérial, qui profitèrent de la fai- blesse de ses successeurs pour se rendre indépendants et fonder le régime féodal? L'histoire de Guilhaume de Grimoar, de cet abbé de Saint-Germain qui, né à Chirac, dans l’ancien Gévaudan, fut, en 1562, sacré pape sous le nom d’Urbain V, ne nous fournira-t-elle pas aussi son contingent de données? Lorsque DÉCEMBRE, 491 nous saurons qu’il transporta de nouveau le siége du chef de l'Eglise d'Avignon à Rome, ne verrons-nous pas, dans cet acte qui consacre la puissance lemporelle des papes, l'inauguration en Europe d’un nouveau système politique international ? Ajoutons que dans l’histoire on trouve un fidèle tableau de l’état moral et intellectuel des sociétés. Nous en avons une preuve dans un intéressant mémoire de M. Fayet, in- specteur de l’académie de Chaumont, sur l'historique de l’enseignement primaire. Les recherches qu'il a faites éta- blissent que ce n’est, ni à la révolution de 41789, ni aux décrets du premier empire, ni aux ordonnances de la res- tauration, ni à la loi de 4855 qu'il faut, comme cela a été dit, faire remonter l'instruction primaire, Dès 1701, il a trouvé que sur 4,000 actes de mariage, les époux en avaient signé 457 et les épouses 200. Il y avait donc, à cette époque, des écoles où l’on apprenait à lire et à écrire. Cette pre- miere donnée lui à fait découvrir que dans toutes les pa- roisses, à côlé du presbytère se trouvait l’école. Et ne croyez pas que le maître y exerçât ses fonctions sans aucun contrôle de capacité et de moralité, En 1501, des capitu- laires et des statuts soumettaient le choix du maître d'école à l'approbation du curé. En 1695, une déclaration royale ordonnait une imposition générale sur les paroisses, pour subvenir au traitement du maitre d'école. Cessons donc de nous attribuer le mérite d’avoir créé l'instruction primaire. La voie de progrès dans laquelle nous l'avons poussée, les heureux résultats que nous avons obtenus sont de nature à satisfaire suffisamment notre légitime orgueil. Et, sans être d'obstinés laudatores temporis acti, laissons à chaque âge ce qu'il à fait en faveur de la civilisation, à 192 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Laissons encore à nos aïeux le mérite d’avoir rangé au nombre des institutions publiques l'assistance judiciaire. Ce qui se pratique de nos jours n’est qu'une réminiscence des procureurs et avocats des pauvres, nommés dès le XVe siècle auprès des siéges judiciaires de la Provence. Nous arrivons, Messieurs, à la partie de ces volumes con- sacrée aux travaux de la ÿe section. Elle s’occupait, comme vous le savez, de philosophie et de littérature. Faut-il espérer avec quelques savants, lui demandait-on, que le progrès général des sciences puisse doter l'humanité d’une nouvelle philosophie? quels seront le caractère et les tendances de cette nouvelle philosophie ? Avant tout, permettez-nous de vous dire notre pensée sur le mérite de cette question qui, tout d’abord, semble avoir une portée immense. Pour nous, son utilité, son op- portunité est plus fictive que réelle. Vous le savez tous, la philosophie est la science de l'absolu ; à ce titre elle n’a pu vieillir, par conséquent, elle n’a pas besoin d’être rempla- cée. — Depuis que l'esprit humain cherche à trouver l'explication de Dieu, de la nature et de lui-même par la philosophie, cette science a recu bien des définitions, elle a revêtu bien des formes différentes, et cependant elle est toujours restée la même. Etudiez chaque école, examinez chaque systéme, au fond vous trouvez que toutes ces diver- gences proviennent ou de la suprématie donnée à l'esprit sur la matière, ou réciproquement, de la suprématie don- née à la matière sur l'esprit. C'est-à-dire, d'un côté le spiritualisme, de l’autre, le matérialisme. La sociélé de notre époque se préoccupe beaucoup des vérités scientifiques. Cette préoccupation devait se faire senir dans le domaine de la philosophie: cela a eu lieu, DÉCEMBRE. 1935 Il s'est déjà trouvé des hommes qui, prenant pour point de départ la certitude des calculs scientifiques, veulent re- trancher de l’ensemble des doctrines philosophiques tout ce qui est inexplicable par la raison. Pour eux les opéra- tions de l'intelligence ne sont plus que de simples phéno- mènes matériels, des modifications observables du cerveau pensant. Ils remplacent la psychologie par la physiologie. Il fallait inscrire un mot de ralliement sur ce nouveau dra- peau, ils y ont écrit le mot posilivisme. Ce simple aperçu suffit pour vous convaincre que le positivisme n’est qu'une nouvelle transformation du matérialisme , qu’il ne peut donc pas être la base d’une nouvelle philosophie. Procédant du matérialisme, il en a tous les inconvénients au point de vue social. De plus, soumis à un examen série1x, il n'offre point le degré de certitude des sciences mathématiques et physiques qu'il prend pour type, et il est impuissant à donner une solution aux phénomènes moraux qui inté- ressent le plus vivement l'humanité. Dans ce siècle, où le positivisme cherche à s’ériger en principe, la plupart des hommes se préoccupent unique- ment de leurs intérêts ; cependant à côté de la foule, pour qui toute félicité se résume dans la satisfaction des appétits matériels, il est encore des personnes sensibles aux plaisirs de l'intelligence. De là ce goût de quelques-uns pour les lettres; de là ces recherches sur l’origine, le développe- ment et les transformations successives des littératures. À Auxerre, le Congrès avait à caractériser l'influence d'Amyot sur la littérature française. Il suffit de jeter un coup d'œil sur les ouvrages du savant prélat, de les comparer aux œuvres de ses contemporains, pour se pénétrer de l'heureuse impulsion qn'il donna à notre littérature, 194 RÉSUMÉ DES SÉANCES. A Amyot revient l'honneur d’avoir transformé le langage, et, par cette transformation, d’avoir commencé l'esprit français, plus noble et plus brillant que l'esprit gaulois. À lui revient encore l'honneur d’avoir popularisé Plu- tarque et d’avoir par là réglé l'avenir littéraire de notre histoire. Jen ai fini, Messieurs, avec cette analyse évidemment trop rapide et trop sommaire des travaux du Congrès. En terminant, permettez-moi de soumettre à votre apprécia- tion l'impression générale que m'a laissée la lecture de ces volumes. Nous vivons, cela est incontestable, à une époque où tous les peuples, poussés par l'influence libérale de Ja France, aspirent à une marche progressive vers la civilisation. Qui trouve-t-on en effet à la tête des grands travaux en exécution, des grands projets à l'étude qui intéressent l'humanité toute entière? des Français! Ici, M. de Lesseps entreprend le per- cement de l’isthme de Suez ; ailleurs, un ingénieur propose de réunir l'Océan à la Méditerranée par un canal qui tra- versera notre patrie. Et tant d’autres que je passe! Mais, bien au-dessus de tous, toujours et partout, l'Empereur Napoléon UE, ce type du génie français, qui se fait Le con- stant protecteur de toutes les idées grandes et généreuses. Celte impulsion civilisatrice prend naissance dans notre sol, c'est doäc à la population française d’en ressentir les premiers effets ; tels sont, Messieurs, la cause et le but des congrès annuels auxquels la France, usant du droit d’ini- tiative qu'elle s’est attribué, appelle les savants de tous les pays. Dans cette communion de pensées, elle puise de nou- veaux éléments pour sa propre civilisation qu’elle aime tant à propager. Par les volumes que l’on publie à la suite DÉCEMBRE. 195 de ces réunions, elle se crée des archives où elle enregistre, chaque année, le pas qu’elle a fait vers le progrès. Lisons donc, Messieurs, ces volumes périodiques, car ils sont la chronologie et l’histoire de la civilisation. La lecture de ce rapport a captivé l'attention de l'Assemblée et provoqué de nombreux applaudisse- ments. Au nom de la Société, M. le Président adresse des remerciments à M. Balme pour son intéressant travail. M. de Brive fait remarquer que l'utilité de la chaux comme amendement est déjà bien connue dans la Haute-Loire et que nos agriculteurs en font, suivant les sols , un usage assez fréquent. M. le Président fait aussi, au nom de la Société, quelques réserves au sujet des appréciations de M. Balme sur le morcellement de la propriété. La question du morcellement préoccupe les esprits les plus graves. Sans doute la loi, en permettant la lici- tation des immeubles qui ne peuvent se partager sans perdre de leur valeur, laisse une voie ouverte à la con- servation de parcelles importantes ; sans doute en- core l'attrait que présente la propriété pour l'industriel ou le négociant enrichi sera assez fréquemment une cause de reconstitution du sol. Mais il n'en est pas moins vrai que le partage est dans la loi et se conti- nue de nos jours. Ce partage peut être avantageux lorsqu'il s'applique à la grande propriété , c’est-à-dire 196 RÉSUMÉ DES SÉANCES, aux tènements de 1,000, 2,000 et 10,000 hectares ; mais il est vraiment inquiétant lorsqu'il a pour objet de très-petites parcelles. Tout en reconnaissant que sur ce point M. Balme a donné de très lumineux aperçus, M. le Président croit devoir réserver l'opinion de la Société. DRaiNAGE. — M. le Président fait connaître que M. Olivier, du Chassagnon, a proposé de faire fabri- quer des tuyaux de drainage à prix réduit. M. l'Ingé- nieur en chef metrait à la disposition de la Société une partie des fonds non encore employés sur le crédit spécialement affecté au drainage par le ministère de l'agriculture. La Société pourrait acheter un malareur pour le mettre à la disposition de M. Olivier. M. le Président, après avoir consulté l’Assemblée, annonce que cette proposition sera comprise dans laffectation des fonds destinés au drainage. LITTÉRATURE. — M. Louis de Vinols donne ensuite lecture d’une pièce de vers qui à pour titre : Le Pin, et dont l’auteur est M. Blanchot de Brenas, membre non résidant de la Société. Cette gracieuse production d’un auteur déjà connu et apprécié de la Société excite le plus vif intérêt. Histoire. — M. Louis de Vinols a encore la parole pour la lecture de quelques fragments d'un ouvrage sur les querres civiles et religieuses dans le Velay. Avant de faire cette lecture, l’orateur fait connaître, en quelques mots, le motif et l'esprit de sa publication, DÉCEMBRE. 197 Deux auteurs, MM. Mandet et Arnaud, ont déjà écrit sur le Velay ; leurs ouvrages, justement appréciés, ont jeté de vives lumières dans le pays, mais ils laissent une place à d’autres travaux. D'ailleurs l’ou- vrage de M. Mandet est épuisé et M. Arnaud, qui s'était d'avance enfermé dans certaines limites, a laissé quel- ques points non traités. De nouvelles et plus complètes études ne sont donc pas inutiles. M. de Vinols s’est surtout attaché à raconter les faits et à peindre les mœurs aussi fidèlement que possible. Ses récits seront appuyés de nombreuses pièces justificatives qu'il a réunies de divers côtés ou qu'il est allé chercher jusque dans les archives de l’ancien parlement de Toulouse. L'histoire a trop souvent été une arme de parti ; elle a manqué au public autant qu'à la vérité. Les faits sont plus éloquents que les jugements d’esprits prévenus ; de fidèles récits laissent au lecteur le soin de conclure sans l’égarer. Là est la véritable impartialité En écri- vant pour le triomphe d'idées préconçues, on a accré- dité des erreurs ou de grandes exagérations. Ainsi Ja France d'avant 1789 n’était pas une société sans droits et sans devoirs comme le feraient croire grand nombre d'écrivains. Sans doute la France d'aujourd'hui vaut mieux, mais la France d'autrefois était aussi glorieuse et grande. M. de Vinols lit quelques pages de son histoire, Cette lecture est écoutée avec un intérêt soutenu et M. le Président exprime la vive satisfaction de l’Assem- blée pour cette communication. Il annonce que suivant 198 RÉSUMÉ DES SÉANCES. l'usage il consultera le conseil d'administration pour l'insertion de ce travail dans les publications de la Société. M. l'abbé Bernard fait connaître qu'il a découvert un acte authentique ayant trait à la fondation du prieuré de Saint-Pierre-Eynac en 1070. 11 fera une communication à ce sujet à la prochaine séance. M. le Président remercie M. l’abbé Bernard. A six heures et demie la séance est levée. Le Vice-Secrétaire , H. LIMOZIN. ANNEXES RAPPORTS ET MÉMOIRES RAPPORTS ET MÉMOIRES LE CHATEAU DE GRIGNAN (DRÔME) Pan NM. DE PAYAN-DUMIOULIN Président du Tribunal civil du Puy et Membre résidant de la Société académique —_—_———— DS Grignan, c'est le Midi qui commence avec son beau ciel bleu, ses forêts d’yeuses, ses oliviers et ses collines où la lavande, le thym et mille plantes arômatiques répandent dans l'air de suaves parfums. La route de Grignan naît à la grande voie qui unit Lyon à Marseille, ces deux reines de l’industrie et du commerce français ; elle conduit à Nyons, serre-chaude du Dauphiné, et de là se prolonge, en traversant les Alpes, jusqu’à la frontière italienne. À Grignan, on peut vivre de souvenirs, exhumer les grands noms d'autrefois, et reconstruire par la pensée ces ruines mutilées, mais si belles encore. Que de noms illustres résonnent à vos oreilles, quelles images diverses des temps passés viennent jeter à votre âme leurs fugitives impressions ! TOME XXII. 14 202 LE CHATEAU Lorsqu'on arrive au sommet de la montagne du Colombier, après avoir gravi la route qui douze fois enlace de ses replis une barrière formidable de ro- chers, on aperçoit dans une lointaine perspective le château de Grignan environné de ses remparts ; il domine comme un géant les nombreuses habitations qui se groupent autour de lui sous sa féodale pro- tection. Puis tout-à-coup le château, les remparts, la ville de Grignan disparaissent au détour de la route ouverte au milieu de la vaste forêt d’Aiguebelle, et vous ne voyez plus Grignan qu’en arrivant sous ses murs. Pour arriver au château de Grignan, solidement assis sur un massif de rochers qui s'élève au milieu de la ville, il faut parcourir une route serpentant le long d'une côte encaissée dans des parapets à demi dé- truits. Lorsqu'on parvient à une assez vaste plate-forme, on aperçoit ce qui fut le château de Grignan, ce qui n’est plus aujourd'hui que le débris d’un vaste monument renversé par la main de l’homme, plus dévastatrice encore que celle du temps. Cet immense amas de ruines imposantes révèle en effet la révolution dont l'édifice fut atteint. La solidité des constructions, dont une partie re- monte au siècle de Louis XIV, semblait devoir lui as- surer une durée moins éphémère ; mais une époqne de nivellement arriva, brisant tout ce que la féodalité avait péniblement élevé : la révolution de 1789 dé- truisit à la fois les vieilles croyances et les vieux mo- numents. DE GRIGNAN. 205 A peine le tiers-état eut-il conquis ses franchises civiles, qu'abusant d'une situation nouvelle pour lui, il franchit les bornes que la justice et la modération devaient lui assigner. La destruction du château de Grignan fut le résultat d'une décision précipitée dont rien ne démontre la justice, et que déplorent aujourd'hui les amis des arts. L'administration du district de Montélimart ordonna en 1793 l'enlèvement des toitures du château de Gri- gnan, considéré comme un château-fort appartenant à un émigré; cependant le général du Muy qui en était le propriétaire, se trouvait alors en Suisse, chargé d'une mission diplomatique. l'administration départementale ‘de la Drôme se hâta de réformer la décision du district, mais il n’était plus temps ! Déjà la toiture avait disparu, l'antique et splendide mobilier du château était vendu et dispersé ! Quelques jours ont suffi pour renverser cet édifice féodal qu'un siècle avait eu peine à élever. Le temps a presque consommé l’œuvre de destruction de 1793. Le cœur se serre à la vue de ces décombres amon- celés auxquels chaque jour ajoute quelque nouveau fragment du château. La paix et la solitude de cet édifice renversé éveillent des sentiments profonds et de tristes pensées, combien d'utiles leçons et de réflexions touchantes n’offrent- elles pas à l'esprit. Le château de Grignan, par sa belle construction, par ses nombreux souvenirs, par sa situation admi- rable, était l’un des plus remarquables du midi de la France. 204 LE CHATEAU Aussi Walter Scott, cette gloire de la littérature an- glaise, a-t-il dit avec raison dans son introduction de Quentin Durward : « Toute personne qui se trouve à » quarante milles du château de Grignan, demeure de » la fille chérie de madame de Sévigné, et où elle ré- » sidait elle-même fréquemment, ne peut se dispenser » d'y faire un pèlerinage. » Ces excursions sont très-fréquentes ; chaque jour de nombreux visiteurs de diverses contrées se rencontrent sous les vieilles tours du château, et interrogent ces curieux débris des siècles passés. La plupart inscrivent sur l'album quelque pensée mélancolique. Cet album offre d’intéressantes pages à parcourir, c'est une véritable et curieuse mosaïque de l'esprit hu- main, disparate et mobile comme les impressions di- verses de chaque touriste. L'entrée du château est commandée par deux tou- relles dont la construction paraît remonter au XIVe siè- cle, elles formaient une des principales défenses de cette place en 1395, lorsque Amblard de Sédat et Guillemin-le-Normand s’emparèrent, dans une nuit d'avril, traîtreusement et par surprise, de la forteresse de Grignan, et firent prisonnier le seigneur du lieu. Charles VI nomma par lettres-patentes Talabar, cham- bellan de la généralité de son armée, pour attaquer les rebelles. La forteresse, après un long siége, capitula, et les assiégés furent reçus à composition. Les conditions de cette capitulation n'étant pas stric- tement observées, une curieuse correspondance, qui retrace les mœurs de cette époque, s'établit à ce sujet entre Guillemin-le-Normand et Guillaume d’Autun ; DE GRIGNAN. 205 elle est conservée dans les archives de la mairie de Grignan. Les bornes de cet article ne permettent pas de la reproduire. Nous sommes bien loin de ce temps où le pont-levis du château abaissait devant quelque noble chevalier son armature de fer, qui résonnait sous les pas du coursier. Aujourd'hui le pont-levis n’est plus; il a été rem- placé par un pont de pierre grossièrement construit dans le XVIIIe siècle. A une époque où chaque suzerain s'était arrogé le droit de paix et de guerre, dans un pays sans cesse dé- chiré par les discordes civiles et par les luttes reli- gieuses, ce château, placé entre la Provence, les Etats du Pape et le Dauphiné, offrait une forte position militaire. Situé au sommet d’un vaste mamelon qui com- mande toute la plaine, dominant la ville de Grignan qui lui sert de ceinture, ce château n’est accessible que du côté du nord. Un pont-levis l’isolait sur ce point, et un fossé profond séparait les assaillants du château ; les tourelles pouvaient donner passage au feu des ar- quebuses par des meurtrières ménagées avec art. Si ces premières défenses étaient enlevées, une se- conde grille formée d'énormes barres de chène offrait une nouvelle et sérieuse résistance. Les traces de cette grille sont encore apparentes ; aussi est-il à remarquer que si le château fut enlevé en 1395, ce fut par sur- prise, traitreusement, et à l’aide d’intelligences que le rusé Guillemin avait ménages dans la place. Attaqué ouvertement et sans artillerie, le château de Grignan 206 LE CHATEAU eût été presque imprenable s’il eut été pourvu d'une suffisante garnison. Des souterrains pratiqués dans le roc pouvaient per- mettre à la garnison de faire pénétrer dans la place des renforts et des vivres par une issue secrète. Cette voie était aussi utile pour ménager des sorties que pour favoriser une retraite devant des forces trop con- sidérables. Une partie de ces passages mystérieux a été décou- verte dans les fouilles récentes que M. Léopold Faure, propriétaire actuel du château, a fait pratiquer. Après avoir traversé la porte d'entrée et le passage voûté qui lui fait suite, on arrive à une vaste cour d'honneur aujourd’hui transformée en gracieux jardin. A l'extrémité de cet espace existait une magnifique façade dont il ne reste plus que de beaux vestiges. On pénétrait dans le château par un immense esca- lier d’un style plein de noblesse, occupant le centre de la façade. Deux vastes tours extrèmement élevées bor- naient à l’est et à l’ouest ce corps-de-logis principal. L'une de ces tours a longtemps servi d'asile à une femme célèbre, Marie de Rabutin Chantal, marquise de Sévigné, qui, à une glorieuse époque de nos fastes littéraires, sut illustrer sen nom. Madame de Sévigné, née le 5 février 1627, doit sa renommée à ses lettres inimitables. Elle maria, en 1669, sa fille Françoise-Marguerite de Sévigné avec François Adhémar de Monteil, comte de Grignan, lieutenant général du roi en Languedoc, puis en Provence. C'était cette Françoise de Sévigné que DE GRIGNAN. 207 sa mère appelait la plus jolie fille de France, dont les charmes avaient brillé à la cour de Louis XIV. Benserade, alors le poète à la mode, l'avait célébrée en 1663 dans les vers suivants : Déjà cette beauté fait craindre sa puissance, Et pour nous mettre en butte a d’extrèmes dangers Elle entre justement dans l’âge où l’on commence A distinguer les loups d’avecque les bergers. Après ces vers on peut lire ceux que madame de Sévigné a inspirés à un poète moderne : sssssossesssesr.... Cette femme immortelle Qui seule dans son art, sans rivaux ni modèle, Puisa tout son génie au foyer de son cœur, Et qui, dans ses écrits, mère bien plus qu’auteur, Consacrant à sa fille et ses jours et ses veilles, Orna sans y songer le siècle des merveilles. L'enthousiasme excité par les lettres de madame de Sévigné s’est un peu refroidi, cependant plusieurs cri- tiques de notre époque l'ont jugée avec une certaine faveur. Il ne sera pas sans intérêt, en parcourant le château de sa fille, où madame de Sévigné a habité et terminé sa carrière, de rappeler quelques lignes brillantes de MM. Charles Nodier, Sainte-Beuve et Thomas. Le lecteur sera heureux, au milieu des ronces qui recouvrent les ruines, de retrouver quelques roses effeuillées sur la tombe d'une femme aussi admirable 208 LE CHATEAU par son excellent cœur que par ses productions litté- raires. « .…..... Cest l’abandon, l’effusion, la spontanéité, la négligence enfin, si requise au gré de La Fontaine, et qui prête au style de madame de Sévigné une beauté plus belle encore que la beauté, plus belle que la grâce même. » Voilà pourquoi ses lettres, si intéressantes pour l'histoire des mœurs et des personnes, sont surtout d’une importance inappréciable pour l'étude de notre langue, pour la connaissance de ses tours, de ses délicatesses, de ses libertés; voilà pour- quoi rien n’est à leur comparer, ni comme en- seignement ni comme modèle. Quand on a bien lu madame de Sévigné, c’est-à-dire avec un désir inexprimable et avec un ferme dessein de la relire encore, on sait de français ce qu'il faut en savoir. » (Gx. NopiEr.) Après Nodier qu'il me soit permis de citer M. Sainte- Beuve : » » « On vit surgir à cette époque trois esprits excel- lents, trois génies diversement doués, mais tous trois d’un goût naïf et pur, d’une parfaite simplicité, d'une abondance heureuse, nourris des grâces et des délicatesses indigènes , et destinés à ouvrir un àge brillant de gloire où nul ne les à surpassés : Mo- lière, La Fontaine et madame de Sévigné appartien- nent à une génération littéraire qui précéda celle » » » y ) DE GRIGNAN. 209 dont Boileau et Racine furent les chefs, et ils se dis- tinguèrent de ces derniers par divers traits qui tiennent à la fois à la nature de leur génie et à la date de leur venue. » Thomas, dans son Essai sur les Mœurs et le carac- tère des femmes, s'exprime ainsi : € Madame de Sévigné , avec des lettres écrites au hasard , à fait, sans y penser, un ouvrage enchan- teur ; dans son style plein d'imagination elle crée presque une langue nouvelle; elle jette à tous mo- ments de ces expressions que l'esprit ne fait pas et qu'une âme sensible seule peut trouver , elle donne aux mots les plus communs une physionomie du cœur ; tous ses tours de phrases sont des mouve- ments, mais des mouvements abandonnés et qui n'en ont que plus de grâce, les mouvements qu’elle peint se fixent sous son pinceau et on les voit en- core. Comme elle s’accuse , se loue , Se plaint ! Comme sa joie est douce et que sa tristesse a de charmes! Comme elle intéresse toute la nature à sa tendresse ! » À la suite de ces lignes, dans lesquelles madame de Sévigné est si bien apprécice, il serait difficile de trou- ver pour elle un éloge nouveau : aussi me hâterai-je de terminer cette digression pour revenir à la tour consacrée par le nom de Sévigné. Elle a dû sa conser- vation au souvenir de celle qui l'a habitée : car c'est 210 LE CHATEAU en l'honneur de sa mémoire qu'on en a rétabli la toiture. Le génie de madame de Sévigné a protégé cette vieille tour, elle s'élève encore fièrement à l'extrémité de la facade renversée. Au levant s'étend un autre corps-de-logis d'un style plus moderne ; il fut construit sous Louis XIV, il est connu sous le nom de Façade des Prélats, en souvenir du coadjuteur d’Arles et de l'évêque de Carcassonne, tous les deux de la maison de Grignan , qui le firent élever à leurs frais. Les dessins en ont été tracés par Mansard. Ce qui donne surtout un caractère de noblesse au château de Grignan , c’est sa position très-élevée, sa construction au centre d’un vaste plateau ; il est par- tout environné d'immenses terrasses, qui règnent même au-dessus de l’église de Grignan. La collégiale de Saint-Sauveur, dont la toiture sert de terrasse au château, est aussi un monument remar- quable. Sa coupe élégante offre un spécimen inté- ressant de l’époque de transition du style ogival à celui de la renaissance. La principale façade est ornée de tours carrées ; le vaisseau, divisé en quatre travées , est terminé par un chevet polygonal à cinq faces. C’est dans le chœur que se trouve le tombeau de madame de Sévigné. La lar- geur de l'église dans son œuvre est de douze mètres trente-cinq centimètres , sa longueur est de quarante mètres trente-neuf centimètres, sa hauteur sous la clef de voûte est de dix-sept mètres vingt centimètres. L'entrée principale de l’église est précédée par un DE GRIGNAN. 211 large parvis auquel on accède par un escalier à deux rampes semi-circulaires. Le portail de l’église princi- pale est du style de la renaissance. Les sculptures gra- cieuses de l'archivolte et des chapitaux corinthiens en embellissent l'entrée. Au-dessus de la porte se trouve cette inscription : DEO OPTIMO SALVATORI TRANSFIGURATO LUD. GAUCHERIUS ADHEMAR COMES GRIGNANI PORTICUM CALVINISTRARUM RABIE DIRUTUM RESTITUIT. CID ICO LIV. Les harmonieuses proportions de cette église la pla- cent parmi les plus belles du département de la Drôme. Elle à été classée au nombre des monuments histo- riques. Le curieux qui vient visiter les ruines du château est frappé d’admiration lorsqu'il est parvenu à la ma- gnifique terrasse recouvrant l’église : bâtie en larges dalles de pierre, elle est entourée par une élégante balustrade sculptée. Cette terrasse a été bâtie sous le grand siècle de Louis, qui a élevé de si impérissables monuments. De ce point élevé la perspective est fort belle ; l'œil plonge avec délices dans la vallée qui entoure Grignan; on aperçoit au midi Chamaret, Valréas, Grillon, an- cienne forteresse papale, Suze, Montségur et une foule d'autres bourgs ou villages ; au nord , d'immenses 212 LE CHATEAU forêts d'yeuses faisant autrefois partie des propriétés seigneuriales devenues aujourd'hui communales ; au levant, les montagnes de la Lance , prolongement des Alpes, et le mont Ventoux , cachant dans les nues sa tête fréquemment couverte de neige. La surface aride de cette montagne forme un remarquable contraste avec la plaine verdoyante de Grignan. Madame de Sévigné, dans l’une de ses lettres, célèbre le panorama de Grignan. « Toutes vos vues sont admirables, je connais celle » du mont Ventoux. J'aime fort tous ces amphithéä- » tres et suis persuadée que si jamais le ciela quelque » curiosité pour nos spectacles, ses” habitants ne choi- » siraient pas d'autre lieu que celui-là pour les voir » commodément, et en même temps vous jouiriez du » spectacle le plus magnifique du monde sans con- » tredit. » Si l’on abandonne un instant cette délicieuse vue qui embrasse cinq provinces, le Comtat, le Dauphiné, la Provence, le Languedoc, le Vivarais, et qu'on abaisse les regards au-dessous de la terrasse, on aper- çoit Grignan à cent pieds en contre-bas du château dont les murs semblent suspendus sur un précipice effrayant. Faisant allusion à cette situation élevée, madame de Sévigné compare le château de Grignan au palais d’Appolidon, château féerique du roman d’Amadis. L'antique mobilier du château de Grignan était, avant 1789, l’un des plus riches du midi de la France; DE GRIGNAN. 215 quelques-uns de nos rois l'avaient orné de leurs pré- sents, les manufactures royales avaient envoyé plu- sieurs de leurs admirables tapisseries; des tentures brodées en soie et or reproduisaient, sous la main dé- licate et patiente des châtelaines , les merveilleux paysages environnants et décoraient cette somp- tueuse demeure. La peinture et la sculpture s’associaient pour rendre plus splendide encore cette presque royale habitation. La riche galerie de Grignan contenait, avant la révolu- tion, d’après un ancien inventaire, des tableaux des premiers maîtres, des Poussin , des Mignard , des Le- brun. La collection des portraits des Adhémar de Monteil était, dit-on, des plus curieuses et servait d’or- nement à la grande galerie ; elle se composait de 144 tableaux, dont plusieurs étaient des présents de prin- ces sous le règne desquels les Adhémar et les du Muy avaient occupé les premiers postes de l'Etat. Cest à l’aide de longues recherches que M. Léopold Faure est parvenu à réunir quelques débris de ce mo- bilier dispersé par les orages révolutionnaires. [la retrouvé aussi quelques-uns des tableaux les plus remarquables de l’ancienne collection ; il a recouvré la plus précieuse perle de cette galerie, le portrait de madame de Sévigné, peint par Mignard. Ce portrait, dont nous donnons le croquis, est d’une grâce inimi- table, d’un coloris exquis, on peut le placer parmi les œuvres les plus remarquables de-son auteur. Marie de Rabutin Chantal porte cette coiffure qui a conservé son nom; sa figure révèle une âme impres- sionnable et tendre, sa bouche légèrement relevée et 214 LE CHATEAU ses yeux brillants dénotent un esprit vif et délicat, sa main est d’une grâce admirable, les demi-teintes sont d’une vérité parfaite, les draperies sont larges quoi- que un peu maniérées. Le peintre de Louis XIV s'est inspiré de son modèle, qu’il a reproduit avec bonheur. On remarque au château de Grignan un portrait de Françoise-Marguerite de Sévigné, qui brilla parmi les plus belles à la cour de Louis XIV; la figure fine et gracieuse trahit la manière de Rigaud; le coloris est brillant, le dessin affecte une certaine mollesse, les draperies sont tourmentées et peu naturelles. Tout un salon est tapissé des portraits des Adhémar, des Grignan, des Simiane, des du Muy. Ces nobles personnages ont retrouvé un asile dans les ruines du château dont l'orage de 1789 les avait expulsés. Dans le centre du salon des portraits, on remarque une console de la renaissance d’une exquise délica- tesse ; les armes de l’une des branches de la maison de Grignan, surmontées d’une couronne de perles et de pierres précieuses, sont incrustées dans le marbre; des gerbes de fleurs entourent cet antique blason : des nè- gres armés de flèches supportent la table de marbre, dont ils semblent les gardiens. Ce riche travail est dû à l’art des Florentins, qui ont toujours excellé dans lornementation des meubles. Je n'ai pas encore décrit la galerie, salle de la renaissance, plus particulièrement destinée aux bals et aux festins : on y remarquait autrefois les portraits en pied des Adhémar, vieux chevaliers chargés de leurs lourdes armures de fer, dont les sombres figures se DE GRIGNAN. 245 reflétaient dans de grandes glaces biseautées de Venise, placées aux entre-colonnes des fenêtres. Au-dessus de la galerie régnait une terrasse élevée , belvédère du château. Sur les dernières pierres sculptées encore debout, on peut lire le chiffre, à demi-effacé, des Adhémar de Grignan. Les premiers ouragans du nord, si impétueux dans ces contrées, renverseront ces derniers débris ; l'écus- son des Adhémar sera brisé et périra comme la famille dont il était destiné à perpétuer l'illustration. Elle est silencieuse et muette aujourd’hui cette salle où tant de fois a circulé la coupe des festins, où une musique enivrante faisait retentir les échos. Ces jeunes femmes qui brillaient aux lueurs du bal, qui s’'animaient à ses joies ne sont plus! Que de généra- tions se sont évanouies depuis elles ! Aujourd'hui il n’y a plus d’Adhémar, plus de Sé- vigné , plus de Simiane ; Rochecourbière est désert; le château d’Appolidon jonche la terre. Malgré cette destruction, le château, comme lécri- vait le savant Expilly, « est une des plus belles an- » tiquités de France. » L'on n’est pas étonné que madame de Sévigné, ha- bituée au luxe de Versailles, ait dit, dans une de ses lettres à Bussy : « Cette maison est d’une beauté, » d’une grandeur, d’une magnificence de meubles » dont je vous entretiendrai quelque jour. » La destinée de ce splendide palais serre le cœur ; l'œuvre de destruction de l’homme a précipité celle du temps. 216 LE CHATEAU La famille Adhémar de Monteil est l’une des plus an- ciennes de France; elle était déjà illustre à l’époque des croisades ; elle y fut représentée par un prélat qui occupa avec gloire le siége épiscopal du Puy en Ve- lay; elle reçut de l'empereur Frédéric, dit Barberousse, divers priviléges souverains; elle commanda dès lors à plusieurs villes des environs : on lui attribue la fon- dation de Montélimar, Mons ou Montiliwm Adhemari. Elle a fourni des officiers généraux et des diploma- tes à la France. Girard ou Giraud de Grignan fit, au XIIe siècle, hommage de sa baronie à Raymond Bé- ranger. En 1512, Gaucher Adhémar fonda le chapitre des chanoines de St-Sauveur et l'église collégiale de Gri- gnan. Sous François Ier, Louis Adhémar, premier comte de Grignan, fut employé comme ambassadeur et successivement comme lieutenant-général dans les gouvernements de Provence, Lyonnais, Forez et Beaujolais. | Francois Adhémar, abbé d’Aiguebelle et évèque de St-Paul-trois-Châteaux, puis archevèque d'Arles, mou- rut en 1689, Plusicurs membres de sa famille occupè- rent, après lui, les mèmes siéges. La descendance mäle des Adhémar s’éteignit en 1704 par la mort de Louis Provence, fils de François Adhémar, lieute- nant-général du roi en Provence, et de Françoise-Mar- guerite de Sévigné. A l'époque des Adhémar, les fêtes, les banquets se succédaient presque sans interruption au château de Grignan. Le comte pouvait offrir aussi à ses hôtes = DE GRIGNAN. 217 les plaisirs de la chasse, car la terre de Grignan était extrèmement giboyeuse. Arrivons maintenant à la description de la grande salle du chäteau avec ses fenêtres gigantesques, sa cheminée chargée de sculptures où brillent les armes de la famille Adhémar , entourées d'une pieuse lé- gende ciselée dans la pierre : « Christus rex venit in pace et Deus homo factus est. » Cette cheminée est une de celles du bon vieux temps où des arbres entiers se consumaient dans l’âtre et permettaient à soixante personnes assises en demi-cercle de braver les frimats auprès d’un feu de chêne vert. A quelques pas de la salle de bal, des fouilles récentes ont amené la découverte de lugubres ca- chots pratiqués dans le roc; une seule meurtrière étroite, percée obliquement de bas en haut dans le mur épais de trois mètres, permettait aux prisonniers de recevoir quelques faibles et douteux rayons de lu- mière. Des fragments de chaînes, fixés au mur par des an- neaux, des ossements, des inscriptions rongées par le temps et par l'humidité , sont les seules traces qui subsistent, dans cette prison féodale, des actes de cruauté ou de justice des seigneurs. Je ne mentionnerai pas les boulangeries , les fours , les offices, les cuisines ; car toutes ces pièces, construi- tes dans les bas étages, sont presque détruites. Le puits est creusé dans le rocher, il a soixante-trois mètres de profondeur ; il avait été comblé pendant la révolution. Plusieurs des beaux débris d'architecture que M. Faure à réunis et dont il a formé une espèce de TOME XXN. A5 218 LE CHATEAU musée lapidaire dans la cour de François Ier, ont été trouvés dans ce puits. Une immense citerne , pratiquée dans le rocher, re- cueillait les eaux pluviales, si utiles sur le plateau de Grignan , desséché par les vents et le soleil du Midi. Derrière la galerie s'élevait une chapelle bâtie par les seigneurs qui construisirent aussi l'Eglise de Gri- gnan. Une tribune élégante , ouverte dans les jardins du château, permettait à ses habitants d’y entendre les Offices. Les débris de ce vaste édifice attestent sa magnifi- cence passée : un habile ciseau en a sculpté les colon- nes , les frises et les bas-reliefs, la terrasse, dont les balustres à jour ont une grande légèreté. Ce monument a été construit à diverses époques , la fortune d’un seul comte n’eût pas suffi à l’élever. Les intervalles qui ont séparé les diverses constructions sont signalés par les styles d'architecture employés dans les différentes parties du château. La portion la plus ancienne est celle de la porte d'entrée, dont les tours, récemment restaurées avec élégance, remontent au XIVe siècle. La galerie, la façade du sud-est, la partie inférieure de la tour de l’Horloge et la cour du midi ont dû être construites dans le XVIe siècle par Louis Adhémar qui, en 1545, était ambassadeur de France en Allemagne et assistait en cette qualité à la diète de Worms. Cette date mémorable pour la maison de Grignan s’est retrouvée gravée sur l’une des frises dont l’édi- fice était surmonté ; elle fait partie des débris curieux qui ont été réunis dans la cour du sud-ouest. DE GRIGNAN. 219 Le style gracieux de cette partie de l'édifice rappelle la brillante époque de François Ier, alors que ce prince, ami des arts, enlevait à l'Italie le Primatice et tant d’autres artistes éminents. Une belle salamandre entourée de flammes, sculp- tée en bas-relief , prouve encore que cette partie du château à été construite sous ce prince dont les armes et la devise y sont reproduites. Cest dans cette cour qu'on a réuni tous les dé- bris découverts dans les fouilles : ce sont les blasons des Grignan, un chevalier armé de toutes pièces, des salamandres, des chevaux marins, des bas- reliefs représentant des châtelaines et des paladins, œuvres d'art dont l'incorrection n'exclut pas la grâce naïve. Ce petit musée architectural n’est pas sans poésie : on peut, en l’examinant, reconstruire par la pensée le château dans toute sa magnificence passée. La terrasse Adhémar et la facade des Prélats au le- vant, élevées sous la direction de Mansart, pendant le règne de Louis XIV, sont les parties les plus modernes du château. Madame de Sévigné et se fille en consta- tent, dans leur correspondance, la ruineuse construc- tion. | Les comtes de Grignan, grands seigneurs dans toute la force du terme , étaient criblés de dettes, car cette manie de représentation dont les châtelains faisaient parade, cette maison montée sur un train princier , étaient hors de proportion avec leurs revenus. Aussi là terre de Grignan fut-elle vendue le 5 avril 1732, pour payer des créanciers (rop pressants. 220 LE CHATEAU M. Félix du Muy, maréchal de France, ministre de la guerre sous Louis XV, devint propriétaire, pour la somme de 290,000 livres, du fief, terre et seigneurie de Grignan, avec le titre de comte, « consistant en la » » » haute, moyenne et basse justice, mixte-imposance, droit d'établir un baillif pour connaître en première instance des causes civiles et criminelles de tous les nobles et roturiers, de nommer aussi un baillif des appellations, pour connaitre des appels des sen- tences des baillifs de Grignan, de ceux de Colonzelles, de Chantemerle, de Salles, les appels duquel baillif des appaux ressortissent nuement à la cour du par- lement de Provence, des lieutenants de baïllif et juges, des greffiers, procureurs, notaires et autres officiers du patronage laïcal, avec droit de collation des prébendes, dignités, chanoïinies et autres béné- fices de l’église collégiale de Grignan, en la directe universelle et dans toute l'étendue dudit fief et sei- eueurie, comté et dépendances, avec droit de préla- tion et rétention féodales, et de percevoir les droits de lots à raison de deux sols florin dans tous les cas de mutation, transport et succession, aux droits de cens, services, corvées et autres droits et devoirs seigneuriaux et uliles, honorifiques et féodaux en dépendant. » Ces priviléges avaient été concédés, dans l’origine, à la famille de Grignan, par l'empereur Barberousse, Frédéric Ie, lors de ses guerres avec l'Italie. Is avaient reçu diverses modifications ou extensions successives, suivant les alternatives subies par la féodalité, tour-à- tour fortifiée par certains princes où enchainée par DE GRIGNAN. 221 quelques autres, qui, comme Louis XI, l’'asservirent à l'autorité royale. Aujourd'hui la nomenclature de ces priviléges n’a plus qu'un intérèt historique, Ia loi et la philosophie ayant sagement fait disparaitre toutes les barrières que l'orgueilleux esprit de caste avait péniblement élevées entre des hommes libres et égaux. Le maréchal du Muy donna la terre de Grignan à son neveu le général comte du Muy. Sous ces divers maitres, le château fut encore une splendide résidence. On se rapelle dans toute la contrée les fètes que donnait, avant la révolution, M. du Muy et l'excellente musique du régiment de Royal-Soisson- nais dont il était colonel. Alors, le grand siècle de Louis n'était plus, et le château avait déjà décliné; mais c'était encore une époque brillante, un siècle de plaisir, et la riche galerie s'ilumina plus d’une fois pour éclairer des bals et des festins. Aujourd'hui ces temps sont loin de nous, le chà- teau a été abandonné par le dernier représentant de la famille de Félix du Muy, dont la devise se lit encore sur les murs de l'édifice et se compose de trois F entre- lacés {Felices, Fuere Felices). Heureuse famille, si elle ne fait pas mentir son écusson. Les tristes pensées que réveille aujourd'hui ce sé- jour contrastent avec la joyeuse devise de ceux qui en furent autrefois les maîtres. Quelle disparate entre la nudité des ruines actuelles et ce vaste château éclairé par trois cent soixante-cinq fenêtres, contenant des logements pour cent maitres 222 LE CHATEAU et pour une nuée de domestiques, meublé de tout ce que les arts avaient de plus précieux ! Riches tentures de soie, de brocart, de cuirs dorés de Flandre, représentant les scènes les plus intéres- santes de l’histoire; tableaux des grands maîtres; glaces de Venise encadrées dans ces bordures ciselées à l'épo- que de la renaissance avec une rare perfection, por- celaines de Sèvres, de la Chine et du Japon; meubles travaillés avec ce goût naïf et patient des XIIIe et XIVe siècles; cuirasses de Milan, armes du moyen- âge, qu'ètes-vous devenus? Le souffle populaire a tout dispersé ! Tout ce qui échappa au ravage révolutionnaire fut vendu administrativement et à vil prix. Le procès-verbal de vente constate que le produit de cette aliénation s’éleva à 29,260 livres. Cette vente eut lieu le 27 frimaire an IT; elle ne porta que sur une partie du mobilier; car l'inventaire de 1760 indique une foule d'objets précieux qui ne figurent pas dans la vente, et qui sans doute avaient été antérieurement enlevés. Depuis la révolution de 1789, le château avait été li- vré à un cruel délaissement. Chaque jour entassait de nouveaux décombres, augmentés encore par le van- dalisme de certains touristes. Chez les Anglais surtout c’est une rage; l'un brise les chevaux marins des terrasses, l’autre l’écusson féo- dal des comtes de Grignan, un troisième emporte le chapiteau qui surmonte une colonne corinthienne , presque tous gravent leurs noms obscurs sur les murs pour signaler leur passage ; il en est qui in- DE GRIGNAN. 223 serivent une triste pensée inspirée par la vue des ruines. Depuis quelques années, le propriétaire actuel , ami des arts, a voulu soustraire à une destruction complète ce qui restait encore du château de Grignan; il a apporté à cette œuvre de conservation la plus grande sollicitude; le vieil édifice semble renaître sous sa main : le curieux et l'artiste pourront encore, grâce à lui, entreprendre le pèlerinage de Grignan et dépo- ser une couronne sur l’admirable portrait de madame de Sévigné, merveilleuse peinture-de Mignard. Le 4 octobre 1857, la ville de Grignan et les ad- mirateurs de madame de Sévigné lui ont érigé une statue de bronze sur l’une des places de la ville. L’Ilustration à reproduit ce remarquable monument, œuvre de MM. Rochet frères, sculpteurs, de Paris. Madame de Sévigné est assise, sa tète est d’une gra- cieuse noblesse, elle tient d’une main la plume qui l'a immortalisée, de l’autre une lettre. Cette statue fait le plus grand honneur aux artistes qui l’ont exécutée, et à M. Ducros, maire de Grignan, dont les efforts persévérants et dévoués ont doté cette ville d’un monument remarquable. Une foule immense, accourue de toutes les contrées voisines , assista à l'inauguration et témoigna de la po- pularité qui entoure le souvenir de la marquise de Sévigné. Ab DES POLIGNAC DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC - 1461-1510 — fs — Les grands, qui avaient aimé et servi Charles VIT, savaient qu'ils étaient odieux ou suspects à Louis XI,. et presque au lendemain de l'avènement du nouveau roi, ils formèrent cette ligue d'autant de peurs que d'ambitions (1), qui porte dans l'histoire le nom quel- que peu usurpé de Ligue du Bien-public, et que le sombre et habile précurseur de Richelieu dénoua dans le traité de Conflans, moins par les armes que par la politique, selon le génie de tout son règne. Au témoignage de Dom Vaissette (2), la ligue du Bien- (4) Philippe de Comines, Mémoires ; de Baranté, Histoire des ducs de Bourgogne. (2) D. Vaissette ; Histoire du Languedoc , t. Y, p. 31 ct 932. 226 DES POLIGNAC public agita à peine le reste du Languedoc; mais elle eut, en Velay, un caractère sérieux et des conséquences graves pour la maison de Polignac. Le grand évêque qui, depuis l’année 1443, avait succé- dé à Guillaume de Chalencon, ne pouvait manquer d’en- trer dans une guerre dont le duc de Bourbon, son neveu, quoique marié à Jeanne de France, sœur de Louis XI, était un des principaux chefs; et, par une circonstance assez rare pour être remarquée, la vicomté-et l'église du Velay vivant alors en parfaite harmonie, il y entraina Guillaume Armand, naturellement porté, d’ailleurs, à faire cause commune avec tous les autres grands seigneurs du royaume. Il n'en pouvait être de même pour les barons de Montlaur et d’Apchier qui, en restant fidèles au roi, restèrent surtout fidèles à leur mauvaise humeur contre les Polignac; car l’un venait de perdre, au parlement de Paris, le fameux procès de succession, et l’autre n'était pas pour abandonner en cette occasion d’an- ciennes et constantes rivalités en Gévaudan. Deux partis s’organisaient donc dans le pays et une prépondérance décisive devait rester à celui pour le- quel se prononcerait la ville du Puy. Sans doute, l'évèque et le vicomte, cette fois réunis, y étaient puissants ; mais l’hôtel-de-ville, plus accoutumé à leur résister qu'à leur obéir, hésitait, et il semblait difficile d’intéresser des bourgeois non plus que la population des campagnes, à cette révolte féodale et princière. On y employa un moyen qui n’a presque ja- mais failli aux agitateurs. La taille était déjà devenue permanente et lourde; on fit publier au Puy une DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 27 1S défense de la payer au roi, au nom même du jeune duc de Berry, son frère, le drapeau, sinon la force de la ligue, dont l'évèque venait de recevoir les envoyés dans son château d'Espaly. De son côté, le vicomte ne s'était pas contenté d’unir ses forces à celles du duc de Bourbon, son voisin et son ami; il avait prescrit aux sujets de ses vastes domaines, qui se composaient alors des terres réunies des maisons de Polignac et de Cha- lencon, de ne payer aucuns subsides aux receveurs des deniers royaux. Depuis 1463, le duc de Bourbon avait remplacé les derniers Lévis-Lautrec, comtes de Villars, dans la ba- ronie de Roche-en-Reynier. Il y avait là des places fortes pour la ligue, qui en pressait ou en occupait d'autres, parmi lesquelles un des historiens du Velay (1) mentionne celle de Saint-Vidal. Pour ne pas lui laisser le temps de s’y établir solidement, Louis XI comptait avec raison sur la fidélité et le zèle de ses lieutenants en Languedoc. Par leurs ordres, en effet, Rauffec de Balzac, sénéchal de Beaucaire, se mit à la tète des milices de la sénéchaussée, et, du château de Bouzols où il était venu se réfugier, la peste régnant à Nimes, les distribua dans les places les plus voisines de la ville du Puy, l’'empèchant ainsi de se déclarer contre le roi. Mais la garnison du château et les habitants du bourg d'Espaly, plus engagés dans la révolte, vaine- ment sommés de venir prêter serment de fidélité dans (1) Arnaud ; Histoire du Velay, t.1 p.226. 228 DES POLIGNAC les mains du sénéchal, restèrent en défense malgré son approche. Ils lui répondirent, au nom de leur seigneur évèque, qu'ils n’ouvriraient leurs portes qu'au roi en personne où sur son très-exprès Commande- ment: On voit, par cette réponse évasive, que Jean de Bourbon n'était qu'à demi-rebelle et commençait à douter de sa cause. Pour de Balzac, ce refus n’était pas la soumission , et il allait livrer l'assaut, lorsque les habitants, inti- midés devant ses troupes et voulant échapper au sac qui les attendait, l’introduisirent dans le bourg. Restait le château où s'était retiré le trésorier de la cathédrale, neveu de l’évèque, qui salua d’un coup de canon l'armée de siége devenue maîtresse d'Espaly, bravant, sans leur faire grand mal, les six cents arba- létriers qui en formaient l'élite. On combattit pendant cinq jours et la résistance n’était pas encore décou- ragée ; mais enfin Pierre de Very, qui commandait dans le château, ayant été tué, la garnison ma- nifesta le désir de capituler, et, après plusieurs con- férences dans une maison du bourg, entre le neveu de l'évêque et le sénéchal, la place lui fut remise et oc- cupée au nom du roi, Cet événement se passait dans les premiers jours d'octobre 1465, au moment même où Louis XI signait à Conflans son premier traité avec la ligue du Bien- public. Celui de tous les princes qu'il était le plus jaloux d'en détacher était le due de Bourbon, son beau- frère, et, dès le mois de novembre, il y avait déjà si bien réussi, que le duc, aussi sensé que puissant, devenait son lieutenant-général en Velay et dans DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 229 quelques autres pays voisins, en attendant le gou- vernement du Languedoc qui lui fut confié l’année suivante. Le grand évêque, impatient de réparer l’unique faute de sa vie, et qui n'était entré dans la ligue que par attachement pour son neveu le duc de ‘Bourbon, s'en retira avec lui et devint même, le 7 juillet 1466, son lieutenant-général an gouvernement de la pro- vince. Guillaume Armand, qui avait désarmé et fait sa paix en mème temps que le duc et l’évêque, devait s'atten- dre à être comme eux relevé de toute disgrâce. Il en aurait été ainsi quoique le roi qu'il avait offensé s’appelàt Louis XI, et que ce roi ne lui dût pas la même faveur qu'à des princes de sa maison; mais des intérêts domestiques vinrent singulièrement compli- quer la situation, et ici on entre à la fois dans l’intri- gue et dans le roman. De son mariage, contracté en 1441 avec Amédée de Saluces, qui lui apportait, outre un grand nom, plu- sieurs seigneuries en Piémont et cette terre de Coppet, sur le lac de Genève, que la famille Necker devait pos- séder et illustrer à la fin du XVIIe siècle, Guillaume- Armand n'avait pas moins de onze enfants, cinq fils et six filles, dont l’ainée, Jeanne de Polignac, mariée de- puis le 1? janvier 1465 à Jacques, seigneur de Tournon, devait être un jour la glorieuse mère du cardinal Fran- çois, non moins homme d'Etat qu'homme d'Eglise, et un des beaux esprits de la renaissance. On le com- prend, celui qui réunissait en sa personne le sang, le nom, la richesse et l’orgueil des deux maisons de 230 DES POLIGNAC Polignac et de Chalencon, pouvait avoir de hautes pré- tentions pour l'établissement de Claude, son fils ainé » et aussi n’avait-il accueilli qu'avec une extrème froi- deur des ouvertures d'alliance avec la fille du comte de Dammartin, quoique les Chabannes, descendus des an- ciens comtes d'Angoulème (1), eussent incontestablement le droit de méler leur blason à celui des Polignac, même avant d’avoir fait reculer de Provence le con- nétable de Bourbon, et associé leur gloire à celle de Bayard. Antoine de Chabannes, grand-maître de France, plus connu sous le titre de comte de Dammartin, s'était élevé à l’école de Lahire et rendu redoutable aux Anglais et aux Bourguignons. Tantôt mécontent, tantôt dévoué , il fut tour-à-tour l’objet des disgrâces et des faveurs de Charles VII et de Louis XI, en leur rendant néanmoins les plus signalés services dans les négocia- tions et dans la guerre. S'il n'avait mérité le sobriquet de Capitaine des écorcheurs, s'il n'avait, à un autre mo- ment de sa vie, présidé la commission qui jugea Jac- ques Cœur et acquis à vil prix des terres du condamné, il aurait laissé dans l’histoire une des plus belles re- nommées de son siècle. Revenu de l’exil, dépouillé de tous ses biens et de toutes ses charges , enfermé à la Bastille, il trouva heureusement le moyen d'échapper à la miséricorde de Louis XI en allant se jeter dans la ligue du Bien-public, et bientôt après, il recouvrait par le traité de Conflans, avec la confiance du roi, plus de (A) Bouillet, Nobiliai'e d'Auvergne, t. 1, p. 59. DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 251 charges et de biens qu’il n’en avait eu avant d’avoir été déclaré criminel de lèse-majesté (1). Le moment était favorable pour contraindre le fier vicomte à agréer l'alliance de son fils avec Jacqueline de Chabannes, presque veuve de Louis de la Chambre, mort en fiançailles en 1463; il suffisait d’y intéresser les ressentiments du roi. Le comte de Dammartin n'eut pas de peine à lui faire entendre qu'il serait bon de ne pas laisser impuni le rebelle du Velay qui, plus qu'aucun autre, avait marqué dans la prise d'armes du duc de Bourbon, et Louis XI qui , au dire d’un histo- torien du temps, ne dédaignait pas, pour les fins de sa politique, les mariages forcés, expédia coup sur coup, en janvier 1467, trois commissions au grand-maître pour faire apréhender au corps le vicomte de Polignac et son fils et commettre gens à la garde de leur chà- teau (2). Pour le succès mème de ses desseins, Antoine de Chabannes ne pouvait pas exécuter en personne ce que ces ordres avaient de plus odieux. Il en chargea donc le seigneur de Saint-Romain, Gilbert de Lafayette, en lui donnant une compagnie de cinquante maîtres, et pendant que ce jeune et hardi gentilhomme allait en Velay pour se saisir des vicomtes, lui, se réservant en apparence la seule mission de justice, venait à Clermont avec un président et un conseiller du parle- ment de Paris, pour se constituer en commission de jugement. (1) Michaud, Biographie universelle, dernière édition. (2) Chabron, Histoire manuscrite de la maison de Polignac. 252 DES POLIGNAC Ce n'était ni avec sa compagnie de cinquante maîtres ni avec les ressources de guerre du pays que Gilbert de Lafayette aurait pu forcer une place où nul, en aucun temps, n'entra par la brèche. IL sy prit d'autre sorte. Après quatre ou cinq jours passés au Puy en informations et en dispositions mystérieuses, après avoir mis sous sa main et en prison quelques officiers où amis du vicomte, il se présenta un soir avec sa suite , c'était le 14 de janvier, à la porte du château, demandant qu’elle lui fùt ouverte au nom du roi. Que faire ? Comment se refuser à recevoir un sei- gneur voisin apportant des ordres de Louis XI, dont, après tout, on ne pouvait que soupçonner la rigueur ? Le sire de Lafayette fut donc introduit, et la vicom- tesse, entourée de l’essaim de ses jeunes filles, de sa belle-sœur la dame de Roche-en-Reynier et de quel- ques autres parentes où amies, l'accueillit en couvrant ses inquiétudes de la plus exquise bonne grâce. Cour- tois encore, mais inflexible dans l'exécution de ses ordres, il prit les clefs du château et, le lendemain, Guillaume-Armand qui, jusque-là, s'était excusé de paraître sous prétexte de goutte, dut se livrer avec son fils, mettant quelque confiance dans l’amnistie qui avait effacé sa révolte et dans la loyauté de celui-là mème qui était venu l'arrèter. Hélas! en emmenant les vicomtes, l’audacieux capi- taine laissait son cœur au château. Poursuivi, pendant qu'il cheminait vers Clermont, de l’image d’Isabeau de Polignac, à peine entrevue, mais dont les charmes naissants l'avaient enflammé d'une soudaine passion, il déposa ses prisonniers aux mains des consuls de la DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC, 233 ville d'Issoire et, dans une course effrénée de cinq heures, disent les vieux mémoires, revint près de la vicomtesse, à cette heure prise du mal d'enfant dans une maison du bourg, se présentant à elle comme messager des plus heureuses nouvelles, et lui annonça, avec le prochain retonr des siens, le bonheur de sa maison par suite du double mariage convenu de son fils Claude avec Jacqueline de Chabannes, de lui sire de Lafayette avec sa fille Isabeau. Par ce mensonge, car le vicomte ignorait tout, espé- rait-il de surprendre le libre consentement de la mère? Le Seigneur de Saint-Romain obtint-il au moins celui de la jeune fille? ou aux séductions ajouta-t-il la vio- lence ? La procédure l'en accuse et l'en défend à la fois. On peut croire, d’après les enquêtes, qu'il l’enleva d’auprès de la vicomtesse, la conduisit au château où un prêtre, sous menace de mort, bénit à la hâte, sans autres témoins que des serviteurs trop dévoués ou trop intimidés, un mariage qui eut toutes les apparences d'un rapt. Isabeau de Polignac n'avait pas encore douze ans {1}. Au lendemain, le sire de Lafayette s'étant pourvu, selon le naïf langage du chroniqueur, dut pourvoir à son tour le comte de Dammartin, et laissant cette jeune fille à la vicomtesse mourante d’effroi et de douleur, vint reprendre ses prisonniers à Issoire pour les con- duire à Clermont devant les commissaires qui, déjà, instrumentaient à grand bruit sur un fait de révolte que personne ne songeait à dénier. (4) Chebron, Hist. manuscrite de la maison de Polignac. TOME XXII. 16 254 DES POLIGNAC Tout cet appareil de justice n'était que jeu d’intimi- dation. En réalité, il ne s'agissait que de contraindre le vicomte au mariage de son fils avec la fille du grand- maître, et on lui fit si bien entendre par le seigneur de Tournon, son gendre, ce qui pourrait advenir si, après jugement, il était conduit à Paris et livré au compère Tristan, que, pour racheter sa vie et ses biens menacés de confiscation, il consentit enfin à tout ce qu'on exigeait de lui. La comédie se cacha sous le drame. Il fallut que Guillaume-Armand payàt lui-mème la dot de sa belle- fille. Le comte de Dammartin qui, comme juge, le condamnait à 15,000 livres d'amende, se les fit adjuger par le roi, et Jacqueline de Chabannes ainsi fictivement pourvue, n’entrait dans la maison de Polignac qu'avec sa couronne de roses. Ces arrangements étant arrètés, le grand-maître et les autres commissaires ramenèrent les deux vicomtes dans la ville du Puy, et c’est devant le grand-autel de l'église des Cordeliers, le 12 avril 1469, que furent signés les articles de ce mariage, presque aussi étrange quoique moins sommaire que l’autre, en présence de Jean le Boulanger, président, et Pierre Allegrin, con- seiller, les deux envoyés du parlement, de messire Ruffec de Balzac, le sénéchal de Beaucaire, et de son frère, moine religieux de l’ordre de Saint-Benoît, de Jacques, seigneur de Tournon, d'Arnaud de la Gorce, baron de Loudes et seigneur de Vaux, de Guillaume, sieur de Châteauneuf et de Rochebonne. Le jour suivant les vicomtes rentrèrent enfin à Poli- gnac au milieu de cette compagnie, et là, plus libres DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 255 en apparence, ils ratifièrent un contrat qu'il n'était plus possible de rompre. À ces premiers moments, Guillaume-Armand parut même oublier à quel prix il payait sa délivrance, car peu après son retour, dans cette procession célèbre faite au Puy à la demande de Louis XI, pour que Dieu, à l'intercession de la Vierge, donnät un dauphin au royaume de France, lui et le seigneur d'Allègre portaient le trône d’or sur lequel était placée la sainte image (1). Plus coupable, mais aussi plus excusable par les ardeurs de la jeunesse et de la passion, le sire de La- fayette n'aurait pas osé affronter la maison vicomtale, outragée sinon trahie, et il n’assista point à ces joies du retour mêlées de tant de larmes. Il plaidait en ce moment sa cause aux pieds du roi qui, tout bien dis- posé qu'il était en sa faveur, néanmoins touché des malheurs d’une grande maison trop punie, ne pouvait s'empêcher de dire qu'il ne lui avait pas commandé d'en agir ainsi. Guillaume-Armand, en effet, à qui on avait caché longtemps la scène à la suite de laquelle Isabeau avait été, par ses tantes, conduite en Savoie, éclatait alors en plaintes violentes et en accusations injurieuses contre l’audacieux qui était venu surpren- dre l’innocence et laisser le trouble au foyer domesti- que. I demandait justice au parlement de Paris pour cette enfant séduite et contrainte, pour sa femme succombant au désespoir, pour le déshonneur de sa maison et même, car sa colère ne s’écoutait plus, pour (1) F. Théo lore, Hist. de Notre-Dame du Puy, p. 364. 256 DES POLIGNAC de précieux bijoux et d'immenses provisions dont le château aurait été dépouillé pendant son absence par les gardes que le sire de Lafayette y avait placés (1). Disons-le tout de suite, ce procès était une faute et ne pouvait que donner plus de retentissement à un scandale qu'il aurait mieux valu éteindre en silence. Le seigneur de Saint-Romain, en demandant au parle- ment qu'on lui rendit Isabeau de Polignac par lui ré- clamée au titre de sa femme légitime, offrait la seule réparation raisonnable qu’on püût exiger de lui et, en lordonnant ainsi, le parlement prononçait un oracle de sagesse ou peu s’en faut. Mais le vicomte n’obéissait qu'en frémissant aux ordres de la justice. Il répondait qu’en eüt-il la vo- lonté, il n’aurait pas le pouvoir de livrer sa fille au sire de Lafayette, parce qu'elle était en Savoie, chez les dames de Villars et de Miolans, ses tantes. Et comme il affirmait qu'Isabeau elle-même, malgré les exhorta- tions de sa famille, refusait de rentrer en France pour le rapprochement qu'on avait en vue; le parlement envoya deux conseillers auprès d'elle pour s'assurer de ses véritables intentions. Mais cette mission n'eut aucun succès. Gilbert de Lafayette restait sous le charme et savait bien ce que l'honneur lui commandait. Muni de lettres du roi pour le pape et pour Yolande de France, du- chesse de Savoie, qui les priait de s'intéresser à cette réunion, il se rendit à Rome et obtint du Saint-Père 4) Chabron, Hist. manuscerile de la maison de Polignac. DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 257 que l’évèque de Verceil se transporterait auprès de la fugitive, l'interrogerait sur le fait du mariage et, s'il y avait lieu, lui prescrirait d’obéir sous peine d'excom- munication. La duchesse de Savoie se prèta de son côté à favoriser les vœux d’un jeune seigneur de France si ardent à la conquête de sa femme. Mais, pour y réussir, il comptait encore plus sur lui-même que sur le zèle et l'autorité des grands du monde et de l'Eglise. S'il en faut croire les mémoires domestiques aux- quels nous empruntons les détails de ce récit, il obtint de l'évêque de Verceil d'entrer à sa suite, en habit de cordelier, dans la maison où celle qu'il allait revoir, grandie et plus belle encore, attendait, émue peut-être de quelque trouble inconnu, le prélat chargé, au nom du pape, de pénétrer les secrets de son jeune cœur. Ce qu'elle persistait à refuser aux sollicitations de l'évêque et de la duchesse de Savoie, le faux moine, jetant son froc et tombant aux pieds d’'Isabeau de Polignae, l'ob- tint d’un noble mouvement de repentir et de tendresse, car, au fond, elle aimait son ravisseur. Peu de jours après, la femme de Gilbert de Lafayette entrait heureuse avec lui au châteatt de Saint-Romain, Mais sans avoir désarmé le ressentiment de son père qui, en mourant, la déshérita. Guillaume-Armand qui, le premier de la maison de Chalencon, s’en allait reposer, le 12 août 1473, au tom- beau des vicomtes de Polignac, dans l’église des Jaco- bins, laissait derrière lui un nouveau ferment de haine. Qu'est-ce autre chose que ce testament où, pour priver sa fille de toute part dans ses biens, il lui reproche 238 DES POLIGNAC de s'être mésalliée? Certes, Gilbert de Lafayette, premier chambellan de Louis XI, gouverneur et séné- chal de Boulogne, seigneur de Saint-Romain, de Pont- gibaud et de Rochedagoux, troisième fils d’un illustre maréchal de France, et d'aussi bonne race que qui- conque, avait pu épouser Isabeau de Polignac. L'exhé- rédation était aussi injurieuse qu'injuste. Dieu n'avait point écouté ces malédictions pater- nelles. Il bénissait, au contraire, ce mariage, surpris sans doute, mais ratifié par l'amour et dont sortit une plantureuse famille de quinze enfants. Le parlement ne leur donna aucune sanction. Le roi qui, chez le père, excusait, jusque dans ses égarements, une irritation dont moins que personne il ne pouvait ignorer la cause, la blâämait ouvertement chez le fils devenu vicomte sous le nom propre et dy- nastique de Claude-Armand. Prenant en main les inté- rêts de son chambellan, il obligea l'héritier de la maison de Polignac à donner à sa sœur, la dame de Lafayette, non-seulement la même dot qu'avait eue sa sœur aînée, la dame de Tournon, mais encore deux mille écus de plus pour les frais du procès. Plusieurs générations, en y compromettant leur repos et leur fortune, se raidirent dans ces tristes dé- bats judiciaires : il faut aller jusqu’à l'année 1550 pour trouver aux archives de la vicomté la quittance finale de la dot d’Isabeau de Polignac. Sans ériger en système les fatalités historiques, ne serait-il pas permis de demander aux vieillards der- niers témoins des événements qui se sont accomplis à trois siècles de distance, si ces deux grandes maisons, DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 259 dont un relief du sol séparait à peine le berceau (1), n'étaient pas comme prédestinées, même après avoir mêlé leur sang et leur blason, à ne jamais se rencon- trer sous le mème drapeau et à rester éternellement désunies ? L'intelligence et la virilité du vicomte Claude-Armand, ébranlées au choc des malheurs où s'était heurtée sa Jeunesse, ne retrouvèrent plus leur équilibre. Rien ne lui réussit, ni la vie extérieure, ni la vie domestique. Dans de longues et ruineuses discussions avec ses pa- rents maternels, ses terres de Savoie lui échappèrent, et quand il n'aurait pas fallu démembrer ses terres de France pour les dots de ses tantes et de ses sœurs, pour faire face à d’interminables procès, il les aurait ven- dues à vil prix, rien que pour n'avoir pas à les régir. Toutes ces contestations judiciaires qu’il ne savait ni abandonner ni conduire, devenaient en ses mains agi- tées et débiles d'amères déceptions. Un tel désordre se fit autour de lui qu'il fallut, par une interdiction clamée à son de trompe dans la ville du Puy, protéger ce qui restait des biens de Polignac et jusqu'aux do- maines de la vicomté. Cette mesure rigoureuse, mais indispensable, il ne la pardonna jamais à ceux qui de- vaient ètre ses successeurs dans l’ordre de la nature et de la loi. Traitant ses frères en ennemis, il n’admit plus auprès de lui que’ses cousins, les sires de Roche- baron, à qui il essaya même de transmettre ce vieux (4) Touchard-Lafosse, La Loire historique, 1. 1, p. 433 ; Mandet, l'Ancien Velay, p. 314. 240 DES POLIGNAC et noble patrimoine heureusement substitué. Le vio- lent exercice de la chasse, dans lequel il cherchait à se distraire de ses ennuis et de ses souffrances, lui man- qua bientôt, car il perdit la vue mème avant d’avoir épuisé ses forces. Esprit concentré et maladif, sorte d'Hamlet moins le génie, il vécut pendant trente-six ans avec le souvenir amer de l'insulte faite à sa maison. Ce souvenir lui avait rendu odieux son propre mariage presque autant que celui de sa sœur, et du premier au dernier jour il refusa à sa femme l'honneur de la rendre mère. Le château de Polignac ne lui rappelant plus que des tristesses, il l'avait déserté, et dans le château de Lavoüte, devenu sa résidence préférée, si cette âme en peine s’attachait à quelque chose, on les voyait lui et la vicomtesse, lorsqu'ils entraient dans l’église, se saluer comme des étrangers et puis chacun aller lentement s'age- nouiller dans sa chapelle, où la douce et pieuse Jacque- line de Chabannes trouvait les seules consolations de sa vie. Deux fois veuve sans jamais avoir eu de mari, sé- parée de sa propre famille qui la frustrait injustement de ses droits dans le comté de Dammartin, mal à l'aise dans celle de Polignac où aucun choix personnel ne l'avait appelée, elle fut la victime la plus innocente et la plus résignée de la guerre du bien public et des hu- miliations qu'un roi ennemi des grands seigneurs du royaume voulut infliger à l'orgueil d’une maison trop puissante. Mais malgré ses vertus, ses soins et ses prières, la vicomtesse n'eut cependant pas le mérite de rendre la vue à Claude-Armand. Jacques Branche nous DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 241 raconte ({) qu'il la perdit par une punition et la re- couvra par un miracle. L'histoire qui en fait foi avait été écrite depuis peu, lorsque le prieur de Pébrac, grand colligeur de légendes, vint lui-même en dévo- tion à Chamalières. Nous n’affirmons pas que cette his- toire paraisse suffisamment authentique aux croyances de notre temps. I faut d'abord savoir que l'église de Saint-Gilles de Chamalières possédait un des quatre clous de la croix de Notre-Seigneur, celui-là même que sainte Hélène avait fait convertir en mors de bride. Arrivé là en passant d’un empereur de Constantinople à Charle- magne, de Charlemagne à l’abbaye d'Arles en Pro- vence, à qui Dalmace, abbé de Saint-Chaffre, l'avait dérobé pour en doter notre prieuré, il guérissait in- failliblement des incommodités de la vue tous ceux qui en approchaient leurs yeux avec une foi vive et une offrande. Or, le vicomte Claude, bien dolent que sa mule la plus aimée eût perdu la vue, s’oublia jusqu’à dire un jour en manière de raillerie : Si le clou de Chamalières a tant de vertu, qu'il quérisse ma mule et je le croirai! Aussitôt la mule vit clair, mais, par contre, le maitre devint aveugle. S'il fut puni et repentant, on l’aurait été à moins. Et le voilà s’en allant à Chamalières tout contrit, demander pardon à Dieu de son irrévérence et prier le saint clou de lui rendre la vue. Ses vœux furent écoutés et, selon les termes mêmes de la 4) Vie des saints de l'Auvergne el du Velay, p. 286. 242 DES POLIGNAC légende, il fut soudain illuminé du corps et de l'esprit. Seulement la pauvre mule retomba dans son aveugle- ment. « Ce qui obligea ce seigneur de faire à cette » église un présent d’un bel et riche reliquaire d’ar- » gent doré et de cristal, pour y loger la sainte relique, » où l’on a gravé le nom de ce seigneur et l'année de » cette merveille, en lettres gothiques, qui arriva le » ter juin 1481. » Il existe en ce lieu d’autres témoignages de la piété des vicomtes. Un terrier renouvelé à Craponne, au mois d'août 1569, nous apprend qu'ils entretenaient à Chamalières une chapelle sous le vocable de Notre- Dame de Chalencon, fondée par leurs prédécesseurs, les premiers seigneurs de Beaumont. Avant ses infirmités, Claude-Armand avait eu quel- ques meilleurs jours. Lorsque par la mort de son père, en 1473, il prenait possession de la vicomté et allait porter seul le gouvernement de sa maison, rien encore ne faisait pressentir que la tâche excéderait ses forces. Marié depuis trois ou quatre ans, il avait tout ouvert devant lui un long avenir où la main de la Providence pouvait à son gré semer les prospérités ou de nouvelles infortunes, et, rentré en grâce auprès de Louis XI par la faveur du comte de Dammartin, qui prolongea sa vieillesse jusqu’en 1485, il dépendait en quelque sorte de lui d’obliger la destinée à lui sourire. Ce roi étrange, qui mélait tant de desseins politiques à ses dévotions, venu au Puy en mars 1476 pour accomplir unê neu- vaine, logea dans sa maison et, quelques jours après, lui demanda, par une lettre que tout le monde connait, de cautionner de son scel et de sa foi le traité qu'il DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC, 2435 avait conclu avec le duc de Bretagne. « Cette lettre et » la réponse, dit le brillant historien du Velay qui en » a publié le texte, montrent combien grande était la » défiance de ceux qui traitaient avec Louis XI, et de » quelle haute estime jouissait alors la maison de Po- » lignac (1). » Claude-Armand eut une autre occasion de s’enor- gueillir. L'assemblée de la noblesse de la sénéchaussée de Beaucaire le nomma pour assister aux Etats généraux du royaume, convoqués à Tours en 1484, et il y siégea le septième parmi les vicomtes (2). On sait avec quelle hauteur jalouse la noblesse de France, toujours si brave et si brillante, mais si peu politique, se dispu- tait, dans ces assemblées, les rangs et les préséances. Pour ces rudes seigneurs du XVe siècle qui ne con- naissaient pas les doux loisirs de l'aristocratie mo- derne, la vie n'était qu'un long combat, et leurs procès véritablement épiques ne sont encore que des guerres où le bénédictin de notre âge trouve à peine refroidies les passions qui les agitaient. C’est là qu'on voit les alliances entre les Polignac et les Miolans se changer, sous ce vicomie, en ardentes inimitiés. Les Miolans, deux fois fondus dans la maison de Saint-Chamond en Forez, étaient originaires de Savoie. L'un d'eux, Anthelme de Miolans, s'était marié avec Gilberte de Polignac, et un fils né de ce mariage avait épousé Marguerite, fille du marquis de Saluces. Aussi (1) Mandet, Ancien Velay, p. 314. (2) Dom Vaissette, Histoire du Languedoc, t, v, p 66; Arnaud, Histoire du Velay, t. 11, p. 496. 244 DES POLIGNAC bien du chef de sa tante que du chef de sa mère, Claude-Armand avait donc de gros intérèts à défendre contre les Miolans, plus puissants que lui en Savoie et en Piémont et qui, en gens habiles, profitèrent de son éloignement et de leur crédit pour retenir à peu près tous les biens qui lui revenaient dans la maison de Sa- luces, « malgré la dépense de mulets d'amble que fit » le vicomte, disent les mémoires, pour offrir en pré- » sents aux juges et avocats de Chambéry, qui les Jui » demandaient avec importunité (1). » Il nous est resté un curieux témoignage de ces que- relles et d’une ligue dont elles devinrent l’occasion entre Claude-Armand et Louis de la Chambre, celui-ci voisin et ennemi des Miolans : « Nous, Louis, comte » de la Chambre, et Armand, vicomte de Polignac, » promettons par la foy de nos corps et sur les sainets » Canons et Evangiles de Dieu d’être ensemble bons et » loyaux amis tant que vivrons, sans faire ni entendre » fraux baral ni mal engin et de procurer le bien aider, » servir de corps et de biens et de tout notre pouvoir, » l’un l’autre subséquemment parents alliés et bons » amis l'un de l’autre et, particulièrement promettons » comme dessus de servir l’un l’autre à l'encontre de » Anthelme, seigneur de Miolans, subséquemment ses » enfants, parents et alliés tenant leur party et leur » procurer et porter dommage d'honneur, de corps et » de biens ainsi qu'ils nous ont fait et procuré et de » tout notre pouvoir et puissance et de non jamais (1) Chabron, Histoire manuscrite de ia maison de Polignac. DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 245 » faire ny avoir appointement avec ledit de Miolans ni » sesdits enfants qu'il ne soit du bon vouloir et con- sentement l’un de l’autre, réservant ez-dites pro- » messes le roi et Monsieur de Savoie (1). » On ne cachait pas ces haines vigoureuses et les li- gues conclues pour les satisfaire ; on les écrivait dans des actes solennels en engageant sa foi, la main « sur les saints Canons et les Evangiles de Dieu. » Faut-il s'étonner si elles étaient héréditaires ? ÿ Les Polignac et les Miolans eurent des conflits par un autre côté. Béraud, dauphin de la maison d'Auvergne, laissait en mourant deux jeunes filles, Louise, née de son pre- mier mariage avec Clauda de Chazeron, Françoise, née d'un second mariage contracté en 1478 avec Antoinette de Polignac, dont la tutelle, en cas de convol de la veuve (ce qui arriva), devait appartenir au vicomte Claude-Armand. C’étaient deux riches héritières, car, selon le testament de Béraud, leur père, elles avaient à se partager par moitié, outre la belle seigneurie de Combronde, les terres de Saint-Ilpise, de Saillans, de Saligny, de Tréteau et quelques autres (2). Si Jacques de Miolans qui, contre la volonté de sa famille et par lirrésistible intervention du roi, avait obtenu la main de Louise, l’ainée des deux dauphines, s’en était tenu (4) Chabron, His/. manuscrite de La maison de Polignac. (2) Baluze, Hist. de la maison d'A uvergne ; Chabrol, Coutumes, t. 1v, p. 207 tt suivantes. 246 DES POLIGNAC là, le vicomte de Polignac n'aurait eu qu'à veiller dans les partages aux intérêts de sa nièce. Mais Jacques de Miolans avait de plus ambitieuses visées : il exigeait que la plus jeune dauphine cédât à sa sœur, à vil prix, tous ses droits dans cette opulente succession. Et Louis XI, après avoir six mois durant retenu à Paris le vicomte pour l'y contraindre, ne lui donna congé que sur la promesse qu'il en serait ainsi. Des assem- blées de parents, à Tournon et à Romans, travaillaient à cette cession, lorsque la dauphine Louise mourut de regret de son mariage avec Jacques de Miolans, en * laissant à Françoise, sa sœur, tous les biens de leur maison paternelle. Cette nièce était presque devenue la fille du malheu- reux Claude-Armand. Sa mère, Antoinette de Polignac, déjà veuve de Jacques de Montbel lorsqu'elle avait épousé Béraud, dauphin, s'était mariée en troisièmes noces avec Hugues de La Pallu, seigneur de Châtillon, maréchal de Savoie, et un arrêt du grand conseil ayant placé la jeune dauphine sous la tutelle de son oncle, elle fut ramenée de Savoie au château de Polignac par les soins du seigneur de Tournon et y resta jusqu'à son mariage avec Guy d'Amboise qui forma ainsi une nouvelle maison de Combronde où les Miolans n’eurent aucune part. Les documents historiques ne fournissent rien de plus entre les Mitte de Miolans et les vicomtes de Po- lignac. Mais, sur quelque vague tradition de ces an- ciennes querelles, la Revue lyonnaise a brodé, en 1842, une chronique de fantaisie qui appartient à notre sujet et que nous reproduisons en l’abrégeant ; DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 247 Un jour, le seigneur de Saint-Chamond venait s’ac- quitter d'un vœu à Notre-Dame du Puy. L'arrivée du pèlerin fit bruit dans la ville et l’évèque dit à son sacristain : la puissante et pieuse maison de Saint- Chamond n’a jamais dévié, mais son chef, comme sei- gneur de Mons, ne peut entrer à Notre-Dame qu'après avoir déposé son épée. À sa sortie tu la lui rendras avec tous les honneurs qui lui sont dus. Ainsi parla l'évèque. Donc lorsqu'il entrait sous les voûtes de Notre-Dame, « Seigneur de Mons, lui cria le sacristain, votre épée! » Le seigneur de Mons déboucla son ceinturon, remit sa lourde épée, ordonnant à sa suite d’en faire autant, puis à la file ils entrèrent dans Notre-Dame pour faire leurs dévotions, qui furent longues. A leur sortie, le sacristain, qui se tenait à la porte, s’inclina avec respect devant le seigneur de Mons, lui rendit son épée et en fit de même à ceux de sa suite. Et pour continuer sa pénitence, le vieux seigneur ra- conta ainsi à ses gens comment un Saint-Chamond était obligé, pour le fief de Mons, de déposer son épée en entrant à Notre-Dame. « Mes bons gentilshommes, leur dit-il, je vous re- » mercie d'avoir, pour l'amour de moi, consenti à » laisser vos armes aux mains de ce bedeau. Nous de- » vions le faire en mémoire d’un meurtre que Pierre » Mitte, mon trisaieul, fut accusé d’avoir commis » dans cette église, sur la personne d’un vicomte de » Polignac. » Un jour que, dans une grande assemblée, Pierre » Mitte avait recu du vicomte un offensant démenti, 1l 248 DES POLIGNAC voulut sur-le-champ en avoir raison, mais les autres seigneurs l'en empêchèrent et, pour s’en laver par les armes, il fut obligé d'attendre une autre occa- sion. » Vous ne le voudrez pas croire : provoqué de toutes manières et à chaque rencontre, le vicomte reculait toujours. Force fut à Pierre Mitte d'en appeler au roi en lui demandant humblement d’ordonner au seigneur de Polignac de lui donner satisfaction. » Le roi, qui en prévoyait les suites, refusa, témoi- gnant vouloir ouir leurs raisons et faire droit en justice. » Qui n'était pas content de ces retardements ? c'était le seigneur de Mons. Il n’en vivait plus. Jamais, disait-il, je ne sauverai l'honneur de ma maison, si je ne touche de ma dague le corps du vicomte ! Et il le cherchait partout la nuit et le jour. 11 voyait bien que ce n’était pas de lâcheté, mais de mépris, que le sire de Polignac refusait, et Pierre Mitte ne pouvait plus longtemps dévorer un si cruel affront. » ]l savait que le vicomte ne passait pas toute sa vie comme un hibou, derrière ses créneaux, et qu'il viendrait droit à Notre-Dame le vendredi-saint pour faire ses stations. Grande joie pour le seigneur de Mons de l'y trouver. « Ha! ha! je te rencontre enfin, lui dit-il en brandissant son épée. Pensais-tu donc, orgueilleux vicomte, que Pierre Mitte dormirait toujours sur ton outrage? je ne bois ni ne mange depuis que tu m'as démenti; défends-toi!... » 19 DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC. 249 » Le vicomte de Polignac avait aussi tiré l'épée, mais » le seigneur de Mons le poussa si vivement qu'il l'éten- » dit raide mort sur les dalles. » Par malheur, mon trisaieul en poursuivant sa » vengeance avait oublié le respect dû au saint lieu. » Il avait oublié que c'était le jour où Notre-Seigneur » avait souffert mort et passion pour le salut des » hommes. » Après ce coup, sortant de Notre-Dame par les » grands degrés, il monta sur un cheval d'Espagne qui » l’attendait et se rendit à Venise, où il servit honora- » blement dans les guerres. Mais ses biens furent saisis -» et confisqués. Il ne resta à ses héritiers que la terre » de Mons pour l'hypothèque de la dot d'Odette, sa » femme, fille du seigneur de La Batie, terre malheu- » reuse dont la haute justice fut retranchée et donnée » à la maison de Polignac. Voilà pourquoi les seigneurs » de Mons ne peuvent entrer à Notre-Dame sans laisser » leur épée aux mains du sacristain. » Et si, ajouta en finissant le seigneur de Saint- » Chamond, je vous ai ainsi exposés à être séparés de » vos armes, c’est que j'espérais qu'après tant de gé- » nérations et le grand pardon survenu, la faute de » Pierre Mitte aurait été remise à sa famille, qui l'a » expiée par trois siècles d'œuvres pies. » Rien ne serait plus difficile que d'accorder cette chronique avec l’histoire. Ancun vicomte de Polignac n’a été victime d’un meurtre dans l'église de Notre- Dame. La terre de Mons, voisine du Puy, qui tomba TOME XXII. 47 250 DES POLIGNAC dans la maison de Saint-Vidal au XVIe siècle, était le fief d'Antoine, seigneur de Mons, baïlli de la vicomté, un des plus sages gentilshommes du pays de Velay, étranger aux seigneurs de Chevrières et de Saint-Cha- mond, et qui avait été le gouverneur de Claude-Armand dans ses jeunes années (1). Ce vicomte lui-même, malade, aveugle, fléchissant sous le poids d’une destinée fatale, ne pouvait pas mourir les armes à la main. Il succomba tristement à Lavoüte, le 24 août 1509, à la cinquante-neuvième année de son âge. Son corps, déposé dans le prieuré de Viaye, ne fut transporté au tombeau de ses ancêtres, dans l'église des Jacobins de la ville du Puy, qu’en l’année 1518, lorsque ce tombeau s’ouvrait pour un de ses SUCCESSCUrS. L'arrêt du parlement de Paris de l'année 1464 qui, après plus d’un demi-siècle de contestations, évinçant les Montlaur, attribuait aux Chalencon-Polignac tous les biens de la vicomté, avait élevé cette maison à l'apogée de sa puissance. Une faute d’un instant l'en fit descendre ; et lorsque, aux premiers jours de la re- naissance, la noblesse française allait, à la suite de Charles VIII, de Louis XIT et de François Ier, chercher en Italie et jusqu'au fond du royaume de Naples tant de gloire et de revers, ces fiers vicomtes qu'on devait cependant saluer encore du titre de rois des monta- gnes, n'avaient pas un capitaine de leur sang et cin- quante lances de leur chevauchée à Marignan et à (A) Chabron, Histoire manuscrite de la maison de Polignac. DANS LA LIGUE DU BIEN-PUBLIC, 251 Pavie. Ils couraient après les membres épars de leur patrimoine échappés aux folles mains de Claude- Armand, et essayaient de se relever chez eux des malheurs de toute sorte qui les accablaient depuis la guerre du Bien-public, DU MOLIN. t t = È : 5 D 2 È Ls F î 4 ! k 1 L : L L PC , \ 3 , rer x ï si { nr Cat a LS 11 : 4 PE Le ” . e à 4 nr 21 { M Ur‘ { : - i L M ‘ Se ’ # ! Fr à As i » frtt's À : , eut à * 2 y ’ É: $ + 11 4 : f ti f rt y Yi tvaré 1 Î 2 1} ee ÿ | v [ ; à h E 118 , | - RE à d æ : ; : 4 L Lo ; 3 È 4 À e- « LL E L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY Par M. ERNEST VISSAGUET Avocat ——"6 -8-—— La vie des municipalités à formé les vieilles générations du tiers-état. (AUGUSTIN THIERRY, Considéralions sur l'Histoire de France.) De toutes les grandes époques de notre histoire na- tionale, il en est peu qui offrent un plus vif intérêt que la période comprise entre la fin du XIe siècle et le commencement du XHIe. C'est alors en effet que, se dégageant pour la première fois des ténèbres épaisses qui avaient enveloppé le monde ancien depuis l'inva- sion germanique et qu'avait à peine illuminées un instant la grande figure de Charlemagne, l'esprit du peuple français éclate en mille manifestations, diverses 254 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. de forme, mais unes dans leur but, c’est-à-dire une puissante aspiration vers la liberté civile et politique, comme aussi vers l’affranchissement intellectuel. — Jamais peut-être les hommes n'avaient été plus mal- heureux que pendant le X- siècle; jamais, depuis qu'il existait des sociétés civilisées, la vie ne semblait davan- tage s'être retirée de l'humanité : le XIIe siècle fut le réveil qui suivit cette longue nuit. L'immense entrainement des croisades, arrachant à la fois et les seigneurs à leurs châteaux et les serfs à leurs chaînes, agrandit le cercle des idées de tous les peuples confondus sous l'inspiration d’une puissante idée. Dans le midi de la France s'établit et brille du plus vif éclat la civilisation des troubadours, destinée bien- {ôt à périr noyée dans des flots de sang ; au nord, l'in- telligence s’éveille à la voix d’Abeilard sur la montagne Sainte-Geneviève; enfin l’art splendide du moyen-àge, l'architecture ogivale, commence à dégager ses sveltes colonnes des lourds piliers romans. Comment à une pareille époque l'esprit de liberté aurait-il pu som- meiller plus longtemps ? C’est de cet enchainement de circonstances que na- quit le grand mouvement désigné de nos jours sous le nom de révolution communale. L'école historique mo- derne en a compris toute la portée, éclairée qu'elle était par le spectacle des événements contemporains. Là où leurs devanciers n'avaient vu qu'une stérile agi- tation ou de sanglantes émeutes, des chartes concédées ou bien arrachées par la force pour être bientôt reti- rées, nos historiens modernes ont aperçu un fait plus ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 255 durable; maîtres du secret de ce grand drame, presque témoins de son dénoûment, ils ont reconnu dans les bourgeois du XII: siècle les précurseurs et les ancêtres de l’assemblée constituante et les vrais fondateurs de ce tiers-état dont Sieyès, huit siècles plus tard, procla- mait la souveraineté. Ne soyons pas ingrats pour ceux qui furent les pre- miers citoyens de notre pays. Sans doute leur patrio- tisme était moins large que le nôtre; pour eux l'horizon de la liberté politique ne dépassait pas l’étroite enceinte de la cité; ils ne l’envisagèrent souvent que comme une conquête exclusive au profit d'une ville et d'une classe de la société. Ne leur reprochons pas cet esprit inséparable de la constitution sociale sous laquelle ils vivaient, car leurs franchises municipales, chèrement achetées, ont été en grande partie anéanties; ce pre- mier essai de vie civile et politique à péri dans le tra- vail de construction de l’unité monarchique, et pour arriver à la France actuelle il a fallu traverser plusieurs siècles d’asservissement. Mais si nos libertés ont mis si longtemps à grandir, la faute en est-elle à ces com- munes qui furent leur premier berceau? Et nous, si fiers de notre unité, n’avons-nous pas à regretter quel- quefois d'avoir laissé dans notre organisation si peu de place à la vie municipale, si bien mise en tutelle sous la main puissante du cardinal de Richelieu et de ses successeurs ? Il n’y a qu'une aveugle doctrine de fatalisme historique qui puisse applaudir à la ruine des franchises municipales et y voir le gage de la gran- deur future de la France et de sa liberté. J'aime mieux dire avec Augustin Thierry : © Etudions les mourve- 256 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. » ments de cette révolution, qui est loin de nous, à la » vérité, mais qui fit battre de nobles cœurs et excita » de grandes émotions que depuis soixante ans nous » avons ou ressenties où partagées. » (Histoire de la commune de Laon.) Ce que cet illustre maître à fait pour les cités du nord, on pourrait le faire pour plus d’une ville de la France méridionale. Pour moi, plus d’une fois en par- courant les rues jadis si animées, maintenant presque désertes, de notre vieille ville, j'essayais d'y faire re- vivre quelques traces du passé; dans l'enceinte de ces murailles çà et là encore debout, à l'ombre du cloître de Notre-Dame, j'aurais voulu ranimer quelques scènes de cette vie si orageuse du moyen-àge, lorsque les bourgeois du Puy arrachaient à leur évêque ces fran- chises que nous n’apprécions déjà plus, ou bien s’es- sayaient à la pratique de la liberté dans ces élections de leurs magistrats si souvent agitées et parfois même traversées de querelles sanglantes. Mais le temps a tout emporté; il n’a guère plus res- pecté les choses que les hommes; quelques lambeaux de légendes, quelques noms obscurs, quelques chartes, voilà tout ce que la mémoire de nos ancêtres a légué à leur postérité. Si nous nous rapprochons des temps modernes, les monuments historiques sont plus nom- breux et plus complets, mais on sent que l’histoire, au lieu d’être partout, a transporté ailleurs le théâtre de ses grandes scènes. Et cependant tout ce qui a vécu mérite, à ce titre seul, notre respect ; aussi est-ce avec intérêt que j'ai recueilli quelques traits épars de la vie de nos ancêtres, de leurs mœurs et de leur adminis- ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 257 tration, surtout aux deux derniers siècles. Si les com- mune$ du nord ont acquis plus de célébrité par les récits des historiens modernes, si, grâce à MM. Guizot et Thierry, tout le monde sait aujourd'hui l’histoire de Laon, de Beauvais, de Reims au XITe siècle, les com- munes du midi ont sur les premières l'avantage d’avoir vécu de leur vie municipale jusqu'au dernier jour de la monarchie ; sans doute leurs franchises ont été beaucoup altérées ; il serait ridicule de rechercher au XVIIe siècle ces villes jadis presque rivales des fières républiques italiennes; mais du moins leur adminis- tration était une tradition de l’ancienne liberté politi- que ; la vie locale qui va chaque jour s’anéantissant dans la vie d’une grande nation, y avait plus d'énergie que de nos jours; on songeait moins à devenir un des rouages d’une puissante organisation gouvernemen- tale, mais on ambitionnait avec ardeur une distinction populaire dans une ville de province. Si ces temps sont loin de nous par les événements plus que par les années, j'ai cru qu'il n’en serait que plus intéressant de chercher à retracer quelques traits de ce tableau complètement effacé, appelant de tous mes vœux l'historien qui voudra suivre à travers sept siècles nos annales municipales tout entières. 258 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. ESSAI SUR L'ORIGINE DU CONSULAT Urbica turba strepit, machinantur el oppida bellum. (SALOMONIS, episcopi, versus.) L'histoire de la formation et des progrès du régime municipal en France est aujourd'hui parfaitement connue. Les travaux de MM. Raynouard, Augustin Thierry, Guizot ont désormais permis d’en suivre le développement complet, et les principes qu'ils ont posés ont acquis une autorité incontestable. Il n’est donc plus possible de révoquer en doute la persistance, dans la Gaule méridionale, des traditions romaines; il est certain que, si les communes du nord durent leur affranchissement soit à la lutte violente des bourgeois contre leurs seigneurs, soit aux conces- sions volontaires que ces derniers accordèrent à plu- sieurs villes ou bourgs, au contraire, dans la région qui s'étend au midi de l'Auvergne, de la Marche et du Berry, celle où se développa le régime consulaire, la persistance des traditions municipales romaines est le fait dominant dans la formation des communes. Il suffit de relire à cet égard les preuves que M. Ray- nouard à recueillies en ce qui concerne les villes de ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 259 Périgueux , Marseille, Arles, Toulouse, Narbonne, Nimes : on y verra ces villes conserver à toute époque dans leurs administrations des vestiges non interrom- pus des traditions romaines; entre autres signes vivants de la liberté municipale qui s'y était maintenue, on peut citer, après lui, l’exemple de Périgueux dont les citoyens-seigneurs, ainsi qu'ils se qualifiaient , avaient des magistrats de leur choix et rendaient di- rectement hommage au roi pour leur cité, dans les mêmes termes que le comte de Périgord faisait hom- Mage pour le comté; celui de Marseille, que des mon- paies désignent sous le nom de cité dès le temps de la première race; celui d'Arles, qui avait en 962 des Magistrats municipaux sous le nom de chefs et de juges et un corps de citoyens libres; et enfin celui de la grande cité de Toulouse, dont les magistrats dispu- taient souvent Ja ville aux comtes et s’entouraient d’un appareil presque souverain. On peut done répéter avec M: Henri Martin : « Dans le midi, l'attachement à Ja » liberté civile, jamais prescrite, les souvenirs non- » seulement d'administration, mais de justice munici- » pale, ininterrompus depuis l'empire romain, se » mêlent à des réminiscences de pleine liberté poli- » tique, remontant par-delà l'empire aux républiques » de la Grèce et de l'Italie. » Notre ville, aussi bien par sa situation géographique que par les monuments qui nous révèlent son passé, doit être classée dans la mème catégorie de cités mu- hicipales. L'importante inscription récemment mise au jour par M. Aymard vient ajouter une preuve de plus à celles que fournissaient déjà d’autres débris de 260 ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. monuments, ainsi que les vagues traditions sur la do- mination des Césars consignées par Médicis, pour éta- blir l’origine gallo-romaine du Puy. Si notre ville a été une colonie, si elle a eu son sénat de décurions et ses duumvirs à l’image de la métropole, ainsi que l’attestent les inscriptions que le temps a respectées, son histoire pendant les siècles qui ont précédé le pre- mier établissement connu du consulat, doit à peu près ressembler à celle de toutes les cités provençales. Tout, d’ailleurs, concourt à fortifier cette hypothèse : le Puy, ville épiscopale, échappe de bonne heure à la domination féodale des seigneurs laïcs pour passer sous celle de l’évêque; or on sait que la puissance tem- porelle des évêques a pour première origine leur im- mixtion dans les fonctions municipales; c’est par la création de la magistrature populaire du défenseur de la cité, que s’introduisit dans les municipes un premier élément démocratique; c’est par là aussi que se fonda l'autorité des évêques. On les vit partager, puis envahir ces fonctions, avec l’assentiment populaire. À mesure que la vie sociale se concentre dans une enceinte plus restreinte, leur influence s’accroit dans cette étroite sphère. Augustin Thierry à parfaitement démontré comment, grâce aux immunités dont les rois de la première race entourèrent le clergé, cette puissañce même fut un moyen de conservation du régime muni- cipal, au moins dans sa forme et ses traditions, sinon dans sa véritable indépendance. Sous la seconde race, cette immunité change de caractère, elle revêt une apparence féodale ; les grands dignitaires de l'Eglise se transforment en grands feudataires, et cette révolution, ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 261 tout en altérant le vieux fond romain, ne l’anéan- tit pas entièrement, dit M. Augustin Thierry en citant précisément la charte qu’en 923 l’évêque du Puy ob- tint de Raoul, à côté d’un diplôme analogue de Charles- le-Chauve en faveur de l’église de Narbonne. Cette charte, qui concède à l’évêque tous les droits régaliens sur la ville du Puy, nous révèle une double tendance : d’une part, le roi s'empresse de faire acte d'autorité en abandonnant à l’évêque ce qui lui appartient peut-être en droit, mais nullement en fait, préférant d’ailleurs avoir pour vassal un seigneur viager au lieu d’un comte héréditaire; d'autre part, l’évèque Adalard solli- cite du roi un titre à l’aide duquel il pourra affermir et légitimer une autorité encore naissante et échapper à la suzeraineté des comtes d'Auvergne et de Velay. Ses successeurs n'oublièrent pas de se conformer à la même politique. C’est dans cet esprit que Gothescalk obtient, en 955, de Lothaire la confirmation de la charte de Raoul ; ainsi encore l'évêque Humbert solli- cite de Pons, comte de Tripoli et de Toulouse, l'aban- don des droits que celui-ci avait eus dans le Velay et s'en fait faire donation en 1132 ; le mème évèque fit renouveler en 113% par Louis-le-Gros, ce prétendu fondateur des communes, les concessions de ses pré- décesseurs. Il est à remarquer que c’est le premier acte d'autorité des Capétiens dans notre pays, de même que la charte de Lothaire y fut la dernière que les Carlo- vingiens accordèrent. Enfin on connait la donation plus explicite encore de Louis-le-Jeune en 1146. Sans doute ces titres ne doivent pas faire croire à une autorité réelle des rois de France, qui n'auraient pas été si empressés 262 ESSAI SUR L HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. de concéder les droits régaliens s'ils en avaient eu la possession effective ; l’évèque le savait bien, mais il voulait un titre pour régulariser une autorité de fait. Désormais il put prendre le titre de comte de Velay et y dominer sans être astreint à aucune dépendance féo- dale vis-à-vis de ses puissants voisins. Du reste, la mème marche fut suivie par les autres évêques de la province ; ainsi l’évêque de Viviers profita de la mino- rité du comte de Toulouse pour demander à l’empe- reur Conrad IT l'investiture de sa ville, et il en obtint en effet les droits régaliens, la monnaie, le péage, sans qu'il en coûtàt rien au donateur, en échange sans doute d'une prestation d'hommage illusoire; de même en- core, en 1161, l’évêque de Mende va à la cour de Louis VIT pour lui jurer fidélité, et le roi lui con- cède les droits régaliens dans tout l’épiscopat du Gé- vaudan. Que devenaient cependant les traditions municipales et quelle était la condition des habitants de la ville? Sans doute là comme ailleurs les fonctions de la cité devinrent des offices conférés par le seigneur évèque, les magistrats changèrent de nom, le caractère féodal s’introduisit de plus en plus dans leur nomination ; ils paraissent porter le nom de procuratores dans un titre du Xe siècle. Mais toute indépendance civile n’est pas perdue ; la ville du Puy à un corps de bourgeoisie li- bre, ainsi que l’atteste un traité de 1173 entre l’évêque et le vicomte de Polignac, où l’on s'exprime ainsi : « Sed omnes Burgenses Anicii ab hoc pedagio immu- » nes existant; » aussi au Puy comme dans toutes les villes épiscopales du midi de la France, on peut affirmer ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 265 l'existence de la liberté des personnes et des biens antérieurement au XII: siècle; la liberté civile Jui ap- partenait, restait à acquérir ou tout au moins à déve- lopper la liberté politique. Le XIe siècle fut pour l'Italie une ère complète de rénovation municipale ; chaque ville se dégageant des liens de la féodalité conquiert son indépendance et se transforme en république. Ce mouvement ne tarda pas à se propager dans le midi de la France et à se com- biner avec les débris de l'organisation municipale romaine pour y donner naissance au consulat. On a recueilli les dates auxquelles apparaît pour la première fois ce litre dans le midi de la Gaule; il est fait men- tion du consulat à Arles en 1131, à Béziers en 1131, à Montpellier en 1141, à Nimes en 1145, à Narbonne en 1148, à Toulouse en 1188. Les institutions libérales de ces villes ne tardèrent pas sans doute à être appré- ciées de leurs voisins. Les habitants du Puy durent essayer de suivre les villes du midi dans la voie d’af- franchissement où elles étaient entrées, et, tout en tenant compte des obstacles qui naissaient de la situa- tion reculée de notre ville et des difficultés des rela- tions sociales à cette époque, on peut affirmer que les premières tentatives de gouvernement municipal eurent lieu à la fin du XIIe siècle au plus tard. Dès l'année 1192, il est certain que les habitants du Puy avaient essayé de se soustraire à l'autorité de leur évêque. Nous voyons Philippe-Auguste ordonner aux Aniciens d’obéir à leur seigneur évêque Aymard, de lui porter tout honneur et révérence à lui et à son église, sans contredit en aucune chose. Etait-ce encore 264 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. afin d'éviter la propagation des idées d'indépendance municipale ou celle des hérésies, qu’en 1141 le pape écrit à l’évêque du Puy, pour défendre toute commu- nication entre les habitants de son évèché et ceux de Montpellier ? Quoi qu'il en soit, le consulat du Puy ne dut s'établir qu'après de longues luttes ; on ne peut pas dire des évêques de Puy, comme de ceux dont parle Augustin Thierry, que dans le midi ils se montrèrent en géné- ral amis des libertés bourgeoises et protecteurs des communes. Au contraire, nos historiens ecclésiastiques ne sont pas plus favorables à la commune du Puy que les chroniques de Saint-Denis ne le sont aux villes du nord. C'est à 1218 que remonte le plus ancien document de notre histoire municipale. La seconde année de l’épiscopat de Robert de Mehun (1215) éclata l'insurrection des habitants contre leur évêque ; comme à Laon et comme à Reims, ils profi- tèrent de son absence pour secouer le joug, et la lutte ne fut ni moins vive, ni moins sanglante que dans ces grandes villes. Quelle en fut l’occasion? C’est ce qu'il nous est impossible de préciser aujourd'hui; tout ce qu'il est permis de supposer, c’est que l'élection de l'évêque, emportée par le chapitre malgré le peuple, devait avoir laissé dans les esprits un premier levain de haine, que vinrent accroître des querelles survenues à l’occasion de la levée des tailles ; sans doute les bour- geois avaient à se plaindre de quelques exactions de la part des officiers de l’évêque ; peut-être celui-ci, dont le caractère altier n’était pas de nature à se plier à des ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 265 ménagements, avait-il méconnu quelques-uns des droits dont jouissaient déjà les Aniciens. Quoi qu'il en soit, un jour de l’année 1214, ils atta- quèrent les gens de l’évèque, les poursuivirent jusque dans l'évêché, mirent au pillage et incendièrent plu- sieurs maisons qui lui appartenaient ; puis restés maï- tres de la ville, se donnèrent des magistrats et jurèrent entre eux de fermer à jamais les portes au retour de leur seigneur. La lutte continua entre eux et le cha- pitre, qui maintenait dans l'enceinte du cloître l’auto- rité de l’évèque et pouvait de là inquiéter la ville. La fermeté des habitants ne se démentit pas durant trois années ; ni‘la bulle menaçante que Robert avait obtenue du Souverain Pontife, ni la crainte de voir tourner contre eux les armes du comte de Forez, son allié, ni les efforts des évèques de Mende, de Mâcon et de l'abbé de Cluny, envoyés comme médiateurs par le pape, ni même les foudres de l'Eglise, si redoutées au moyen-âge, et l’interdit lancé sur la ville entière par les légats ne purent venir à bout de la résolution des magistrats que le Puy s'était donnés. Le pape Honorius s'adressa enfin au roi de France, et sous la médiation de Philippe-Auguste fut conclu l’acte connu sous le nom de traité de Vernon {1). Quoique le diplôme qui en fait foi paraisse émaner de l'autorité royale, il n’en est pas moins évident que c’est un contrat où les deux parties traitent d'égal à égal, et que le roi n'intervient que pour revêtir d'une sanction apparente les droits reconnus aux habitants du Puy. (A) Voir le texte de cet acte dans l'Histoire de M. Mandet. TOME XXII. 1S 266 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. Cette charte ne fit-elle que consacrer un état de choses existant antérieurement, ou bien, au contraire, légitimait-elle les conquêtes de l'insurrection ? Chacune de ces deux hypothèses a, je crois, sa part de vérité; d’un côté, les habitants du Puy sont confirmés dans la possession des biens dont ils jouissaient depuis quarante ans, preuve incontestable que les franchises municipales ne sortirent pas tout d’une pièce de l'insurrection de 1218, mais que le corps de bourgeoisie existant anté- rieurement jouissait de la liberté civile et probablement aussi de quelques priviléges politiques. Il est à remar- quer aussi que c’est tout-à-fait accessoirement qu'il est question du consulat à cette époque, à laquelle on fait communément remonter l’origine du consulat avec le texte des vieux récits cités par Médicis : Æt aquel an donna lou rey lous priviléges à la villa del Peu. « Les » citoyens, y est-il dit, ne pourront faire des conspi- » rations, des conjurations, ni des consuls, contre » nous ou contre l’évêque du Puy, tant que l’évèque et l'église se conduiront envers nous comme ils le doi- » vent. » 11 semblerait donc possible d'inférer de là qu’une communauté et des consuls auraient déjà existé au Puy; mais l'absence de toute indication à cet égard ne permet pas d'affirmer le droit antérieur des habi- tants délire leurs magistrats ; j’interpréterai plutôt ce texte dans le sens d’une allusion à ce qui s'était passé lors de l'insurrection ; les habitants, ainsi que cela s'était fait dans toutes les insurrections municipales, avaient fait une conjuration (le mot employé à cette occasion est trop connu pour avoir besoin d’être expli- qué), puis ils s'étaient donné des consuls ; c’est là sans Ÿÿ ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 267 doute ce que veut dire le traité. D'ailleurs, d’autres dispositions importantes du même acte semblent éta- blir un droit complètement nouveau et reconnaitre aux citoyens des priviléges dont ils n’avaient aucune pos- session avant 1218; la plupart des communes du nord nous donnent des exemples analogues ; nous voyons à Laon, à Reims, à Cambrai, les habitants se faire OC- troyer, à la suite d’une insurrection victorieuse, des libertés toutes nouvelles, et les seigneurs ecclésiasti- ques, quelque peu disposés qu'ils fussent en général aux concessions, contraints de les sanctionner. C’est ainsi, je le crois, que l'évêque Robert dut reconnaître à la ville le droit d’avoir des consuls, un sceau, signe du droit de juridiction et d'existence légale, et celui de s'imposer des tailles dans l'intérêt de la communauté. Le traité est, du reste, complètement muet sur l’admi- nistration intérieure de la ville ; rien des rapports des citoyens entre eux, de l'élection de leurs magistrats, des fonctions qui leur étaient attribuées pour la police et la juridiction ; rien non plus du mode de répartition des charges publiques ; à cet égard tout est laissé aux conjectures. Sans doute il a existé dès cette époque des statuts municipaux particuliers à notre ville; elle ne dut pas rester en arrière des autres cités méridionales , étnous Savons que nulle part on ne trouve de plus vastes monuments de législation municipale; ces statuts sont parfois de véritables codes dont on ne peut mécon- naître la science et la méthode, dernière empreinte de la puissance qu'avait exercée sur les esprits la légis- lation romaine. 268 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. On possède un titre de 1192; c'est une ordonnance du comte de Toulouse, qui contient un règlement eur le consulat de Nimes; le peuple, universus popu- lus, convoqué dans chaque quartier , doit choisir dans chacune de ces divisions de la ville cinq électeurs qui, au nombre de vingt, nomment à leur tour qua- tre consuls. « Les consuls et les bourgeois de Toulouse, dit Dom » Vaissette, depuis leur établissement, prirent part au » gouvernement des villes de la province, sous l'au- » torité des comtes, des vicomtes et autres seigneurs » qui en avaient le domaine; ils assistèrent souvent » aux plaids et y prirent séance après les chevaliers; à » Toulouse ils formaient la cour des comtes, et ces » princes ou leurs viguiers, en leur absence, prési- » daient à l'assemblée qu’on appelait du commun con- » seil des bourgeois ; cette assemblée, dont les consuls » étaient les chefs, administraient une partie de la » justice, surtout les matières de police. » La puissance municipale de Toulouse, en particu- lier, était fort étendue; la ville allait jusqu’à faire la guerre ou la paix en son propre nom sans la participa- tion du comte; on voit les consuls commander l'ar- mée communale, stipuler des traités de paix et de commerce ; ainsi en 1202 ils assemblent les citoyens et marchent contre la ville de Rabastens; en 1203 ils assiégent le château d’Auvillars. Plusieurs fois les comtes confirmèrent ces priviléges; ainsi en 1247 le comte Raymond reconnut expressément que la pro- priété et la possession du consulat appartenaient de fait et de droit à la communauté et universalité présente ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 269 et future de Ja ville de Toulouse; en 1152 le comte confirme un règlement fait par le commun conseil sur la police et la justice criminelle, la justice civile étant réservée au comte et à sa cour. Ge règlement, fort étendu, est rapporté en entier dans le tome IV de l'Histoire du Languedoc. A Montpellier, nous voyons en 1204 le roi d'Aragon, seigneur de la ville, décider que le gouverneur ne peut rien statuer sur l'administration de la ville sans l’assen- timent des douze consuls élus tous les ans, et qu’il n’a aucun droit de taille, de queste ni de prèt, sans la volonté et le consentement des habitants. Dans la deuxième rédaction des coutumes de Nar- bonne (1232), on voit que les consuls rendaient des ordonnances sur tous les actes de la vie civile, les ma- riages , les baptèmes, les funérailles, le luxe des fem- mes, les hôpitaux; le vicomte Aymery prète serment, en 1271, de garder et. de défendre les habitants de Narbonne, leurs femmes, leurs enfants, ainsi que leurs coutumes, leurs usages et leurs franchises; ce n'est qu'ensuite que les consuls, au nom de la commu- naulé, jurent de lui être fidèles ainsi qu'à son héritier. De pareils exemples sont assez nombreux dans le Languedoc pour qu'on puisse, sans témérité, se per- mettre de conjecturer quelle était l'étendue de nos franchises municipales à ce premier moment de leur pleine existence. IL est hors de doute que le Puy ne jouit à aucune époque de priviléges plus étendus qu'a- près le traité de Vernon; par une loi inévitable de toute révolution, la réaction devait promptement arri- ver et les privilèges être en partie ravis; aussi n’est-ce 270 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. pas aller trop loin que d’assimiler les libertés du Puy en 1218 à celles des autres villes, et je crois qu'on peut les limiter ainsi : Là, comme dans les autres communes, le seigneur évèque, outre les cens, rentes et droits seigneuriaux , l'host et la chevauchée, ne peut exiger d’autres tailles que celles qui sont librement consenties et réparties par la communauté; celle-ci a en outre le droit d’en imposer pour son propre usage. Elle est tenue seule- ment d'en faire connaître la quotité à l'évèque. Les consuls sont élus par le suffrage à deux degrés, selon toute probabilité, de la bourgeoisie tout entière , sans que l’évèque intervienne d'aucune façon dans leur élection. Aux consuls revient le soin de toute l’admi- nistration municipale, le maniement des fonds de la communauté , l'entretien de ses édifices et de ses biens patrimoniaux, la surveillance des approvisionnements, la police des corps de métiers, et enfin toutes les mesures d'ordre qui intéressent la sécurité des habi- tants. Ils ont certainement une juridiction, mais elle se borne probablement aux matières de police, car, d'après le traité de Vernon, l'évèque paraît avoir le droit de faire saisir les meurtriers et les voleurs partout où ils se trouveront. Les consuls réunissent le peuylle au son de la cloche lorsque celui-ci est appelé à délibé- rer sur les affaires communes, et ces assemblées, s’il faut en juger par ce que nous savons de celles de la ville de Toulouse, sont si nombreuses qu'elles doivent se tenir en plein air. Les consuls ont la garde des clefs et des portes de la ville, commandent les milices de la commune ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 271 lorsqu'elles s’acquittent envers l’évêque des devoirs de l'host et de la chevauchée, ou quand il les requiert de l'aider à prendre les voleurs de grand chemin, ou ceux qui ont pillé les biens de l’église. Le traité inter- dit à la communauté de prendre les armes contre le roi, mais il permet aux habitants de conduire des soldats au secours de leurs amis. Enfin les consuls re- présentent la ville dans toutes les contestations qui peuvent surgir entre elle et son seigneur. Nos aïeux attachaient le plus grand prix aux fran- chises consulaires ; il suffit, pour s’en convaincre, de lire quelques pages seulement de nos chroniqueurs ; du reste, il est certain que le XIe et le XIIIe siècles furent l’époque du plus rapide accroissement de la ville, qu’alors furent construites les fortifications, puisque Médicis rapporte qu'en 1236 il en fut élevé une portion considérable, et que les habitants purent jouir avec plus de sécurité derrière leurs murailles de la prospérité compatible avec ces temps malheu- l'eux. On sait quelle fut la fin tragique de l’épiscopat de Robert de Mehun; ses démèlés et ceux de ses succes- seurs avec le sire de Montlaur ne rentrent pas;directe- ment dans notre sujet; mais un fait important pour l'existence des franchises méridionales s’accomplit bientôt après. Au lieu d’une suzeraineté toute nomi- nale, le roi de France acquiert, par le traité de Meaux (1229), la souveraineté d’une grande partie du Langue- doc, et se fait céder, entre autres droits, par le comte de Toulouse, les prétentions que ce dernier peut encore faire valoir sur le Velay. 272 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. Quoique ce ne fût guère pour notre pays qu'une vaine formalité, ce traité et la création de la séné- chaussée de Beaucaire eurent pour effet d'implanter l'autorité royale au cœur du Languedoc, et la suite des événements prouva bien que si l’évêque trouvait une protection plus efficace contre ses vassaux dans le pouvoir royal, peu ami des libertés municipales, il eut bientôt lui aussi à compter avec son protecteur et à l’admettre à partager les droits dont on lui avait jadis fait abandon. Mais nous n’en sommes pas encore là. Le traité de Meaux, tout en plaçant le Velay sous la juridiction du sénéchal de Beaucaire, laisse à l'évè- que ses droits de justice et de seigneurie, comme il laisse la commune en possession de ses franchises. En 1236 fut élevé au siége épiscopal un homme qui, par la noblesse de son origine et les hautes dignités dont ses proches parents étaient revêtus, comme aussi par son caractère ambitieux, semble rappeler Robert de Mehun; c'était Bernard de Montaigu, frère des grands maîtres des ordres de Saint-Jean et du Temple. « Il chercha bientôt, dit Théodore, à rétablir ses » droits et à relever l'autorité de sa justice, si abaissée » depuis Robert qu’elle en demeurait presque inu- » tile. » C'est-à-dire, sans doute, qu'il entreprit de détruire les libertés municipales fondées par le traité de Vernon. Une seconde fois la lutte éclata entre les habitants du Puy et l’évêque; fuit gquerra inter cleri- cos et laicos civitatis Anicii, dit un vieux récit rap- porté par Médicis. Pour se préparer à la soutenir avec avantage, Bernard , de concert avec son chapitre, avait fait construire des fortifications depuis son palais jusqu'à OL ESSAI SUR L’HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 274 l'église Saint-Vosy. La sédition, provoquée probable- ment par quelque empiètement des officiers de l’évêque sur les priviléges de la ville, fut des plus violentes : l'official de l’évêque, poursuivi par les habitants de la ville , n'échappa qu’en se réfugiant dans le chœur de la cathédrale, et, chose extraordinaire à cette époque de respect pour les objets du culte, le peuple pilla les églises de Saint-Pierre-le-Monastier et de Saint-Nicolas d'Aiguilhe. L’évèque ne se crut pas en sûreté derrière ses fortifications, il quitta la ville en lançant l’interdit sur ses habitants et s’en fut demander aide et protec- tion au roi saint Louis. Grâce à ce puissant appui, il put revenir dans sa ville épiscopale ; les chefs de la sédition furent contraints de prendre la fuite et les habitants furent condamnés à payer à leur évèque une somme considérable à titre de dédommagement. Cette seconde lutte avait duré deux années. C’est sur de tels événements qu’il faut déplorer la sécheresse des documents historiques qui nous restent encore , ou la perte de ceux qui ont pu exister. On aimerait à retracer le tableau complet de ces quelques années et à y retrouver les hommies du XII° siècle avec toutes leurs passions, violentes sans doute, mais parfois vives et généreuses. Lorsque Gui Falcodi passa du siége du Puy à celui de Narbonne, l'élection de son successeur fut vivement disputée ; le doyen et le prévôt de la cathédrale vou- laient faire élire Simond , trésorier de Saint Martin- de-Tours ; le reste du Chapitre donnait sa voix à Guilhaume de la Roue : celui-ci, que les chroniques qualifiaient d'homme de cœur et dont la famille était 274 ESSAI SUR L'HISTGIRE MUNICIPALE DU PUY. d’ailleurs puissante, l'emporta sur son compétiteur , et le diacre qu’Alexandre IT envoya pour trancher la question se prononça entièrement en sa faveur (1260). Sous son épiscopat. Philippe IT envoya deux commis- saires, Florent de Varennes et Guilhaume de Neuville, pour prendre possession du Languedoc après la mort d'Alphonse de Poitiers , et quoique. depuis 1229 le Velay fût réuni à la couronne, les deux commissaires , à leur retour en France, s'arrèêtèrent au Puy, réuni- rent les consuls et les principaux habitants et reçurent, au nom du roi, leur serment de fidélité, sous réserve, sans doute , ainsi que cela s'était fait dans toutes les autres villes, de leurs priviléges et de leurs libertés ; le procès-verbal de prestation de serment des consuls de Toulouse est une véritable charte de tous les droits de la ville : « Protestantes quod sibi et universitati » urbis et burgi jus suum sit salvum in facto consulatus «et cognitionum criminum et pedagiis et leudis, et » libertatibus et bonis et approbatis consuetudini- » bus. » L'épiscopat de Guilhaume de la Roue est bien autrement fameux dans les annales municipales du Puy, par la sédition qui amena la suppression du con- sulat, priva la ville de ses franchises pendant soixante ans et ne les lui laissa reprendre qu'amoindries. Cet événement a laissé de profondes traces dans l'esprit de nos ancêtres ; à la fin du XVIIe siècle les consuls, dans un mémoire qu'ils publient contre l'évêque, en parlent en disant qu'il est fâcheux pour eux de rappeler ce souvenir douloureux ; les circon- stances accessoires ont pris dans la tradition locale ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 275 toutes les couleurs de la légende et quand on lit cette touchante histoire dans Médicis ou dans Burel, on sent plus vivement quelles furent les douleurs de nos ancètres et de quel prix inestimable était pour eux la vie municipale. » « Etant évêque, Guilhaume de la Roue, par son baïllif Guilhaume de Rochebaron , qui a violé la belle bouchère du Mazel Soubeyrol , l'ayant mandé quérir dans sa maison par fausses enseignes, par un domestique ; dont la pauvre jeune épouse fut violée ; dont venant à sa maison bien triste et bien dolente de la violence de ce vilain baillif ; dont son mari, boucher, ayant vu la tristesse de sa femme qui ne faisait que pleurer nuit et jour, pensant qu'elle n'eut pas contentement, s'en va plaindre chez sa belle-mère , disant : Venez faire découvrir la tristesse de ma mye, qui n’a rien mangé de trois ou quatre jours. La violence étant découverte par la fille à sa mère, la mère est venue vers le mari bien triste et bien dolente disant : Mon ami tel tort a été fait à votre femme ; alors la fille se prosterne de- vant son mari disant : Mon ami pardonnez-moi , je suis été viollée par grand force, vous plaira me prendre à merci. Alors le mari lui a dit : Levez- vous, car nous en aurons bien vengeance. Alors va inviter tous les bouchers : Mes amis , je vous invite pour faire bonne chère, venez me lever la main d'avoir vengeance d'un tel tort qui m'a été fait ; dont tous le promirent; et l’allaient attaquer toutes les nuits et lui se tenait en sa garde étant averti. 2 76 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. » Vint une compagnie de gendarmes à la porte Saint-Gilles, là où les paysans venaient crier, l'un : Faictes-moi rendre ma cavalle, un autre mon bœuf, dont les enfants de la ville se bandaient contre ceux et en mirent en déroute ; là où le capitaine nommé le capitaine Flombert, s’en alla plaindre à Monsei- gneur du Puy, disant : Vous plaira me faire justice, Voilà vos habitants qui m'ont blessé de mes gens. Monseigneur du Puy li envoya son baille pour faire information ; quand les bouchers avertis que ledit baille était dehors le sont allés attaquer ; lui ayant vu venir les bouchers s’est sauvé aux franchises aux Cordeliers, dont les franchises n’ont pas servi beau- coup, car ils se sont mis à enfoncer la porte. Le liseur de là dedans est sorti avec le Corpus Domini, mais pour cela n'ont pas laissé d'entrer dans ledit couvent et y ont trouvé le baïilli caché au clocher là où chacun lui à baïllé son coup de poinyar et l'ont rué du clocher en bas, là où Monseigneur du Puy a fait grandes informations. Aucuns des conseils fu- rent pendus en Ronson avec des chaînes de fer et les autres condamnés à une amende de trente mille livres pour réparations des Cordeliers, pour faire le dortoir et audit évêque et autres pour la réparation du meurtre commis par les bouchers aux Cordeliers desdits bailli, viguier et sergent et le consulat oté aux habitants du Puy et lesdits consuls furent enterrés en un cimetière au-devant de la porte des Jacobins et une messe fondée pour le défunt baïlli. (BUREL.—1277.) » ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 2 … On peut remarquer par ce récit combien la force du peuple s’affaiblissait à chacune de ces insurrections ; la première est couronnée par un triomphe complet ; après une lutte de trois ans, l'évèque Robert de Mehun est contraint de confirmef les anciens priviléges et d’en accorder de nouveaux ; vingt ans ne se sont pas écou- lés que déjà, après une guerre de deux années, la cité, pour conserver ses priviléges, est-obligée de payer une forte amende et d’exiler quelques-uns des me- neurs ; enfin la dernièrre lutte se borne à une effer- vescence passagère, pendant laquellle le peuple se fait justice à lui-même ; mais l’évèque, se sentant mieux soutenu sans doute par le pouvoir royal, fait peser sur la ville tout le poids de sa colère et venge sur ses magistrats et ses habitants son ambition contrariée et son autorité outragée, Il ne faut pas chercher à cette marche des événe- ments d'autre explication que l'extension de la puis- sance royale, qui elle-même voyait avec déplaisir les franchises municipales et appliqua plus d’une fois tous ses efforts à les détruire; l’arrèt du parlement de Paris qui déclara la ville désormais inhabile et in- capable d'avoir grand consulat , fait partie d’une série de mesures analogues prises contre les com- munes. En 1505 les huit consuls de Narbonne sont condamnés à la potence, la ville privée de son consulat et condamnée à soixante mille livres d'amende. Les habitants de Clermont-Lodève avaient été condamnés, pendant les guerres des Albigeois , à la perte de leurs libertés : cette sentence est confirmée en 1306 ;: à la même époque le roi fait mettre la main sur 278 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. le consulat du bourg de Narbonne ; les habitants de la ville de Pamiers sont aussi condamnés à perdre leur consulat et à quatre mille livres d'amende ; ils essaient d’en obtenir le rétablissement en offrant deux mille livres au roi, mais l’évèque et le comte de Foix en ayant offert vingt mille, le rétablissement de la com- mune est révoqué et sa juridiction cédée à l’évèque et au comte. Enfin à Toulouse même un arrêt du parle- ment condamne la ville à la confiscation de ses biens et à la suppression de la communauté , parce que les consuls ont condamné à être pendu un étudiant qui avait assassiné un capitoul, et il faut payer au roi cinquante mille livres pour obtenir le rétablissement de l’ancien état de choses. Les bouchers condamnés comme auteurs de la sédi- tion n'étaient pas encore exécutés que déjà l'arrêt du parlement était publié dans la ville et que le peuple avait appris que son administration municipale lui était enlevée au profit de l’évêque. Cet événement, qui fut d’une grande amertume aux habitants, dut laisser de profondes semences de haine entre l’évèque et la population ; mais l’émeute n’avait été amenée que par une vengeance privée ; la ville avait perdu ses chefs , elle était sous le poids de la terreur et on comprit sans doute qu'une révolte contre l'autorité royale n’abouti- rait qu’à amener de nouvelles rigueurs. Cependant le Velay n’était pas complètement pacifié. En effet, à la mort de Guilhaume de la Roue (9 août 1282) ,.Je successeur qui lui fut élu par le Chapitre, Pierre d’Estain, refusa cette dangereuse élévation, et ce ne fut que le 11 septembre 1284 que Frédol accepta ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 279 la mitre épiscopale. Cette longue vacance du siége n’est- elle pas un indice des troubles qui agitaient peut-être encore la ville et des craintes que pouvait inspirer à l'évêque l'irritation des Aniciens ? Le consulat né fut rendu à la ville qu’en 1343. Médicis nous a conservé, sur le rétablissement des libertés municipales, des détails précieux : « Ce que voyant les habitants du Puy, la grande désolation et opprobre en quoy ils étaient constitués , à cause que une si noble communauté ne pouvait exécuter ni faire choses sans le consentement de l’évèque , et sentant la caressance des grandes libertés desquelles paravant Jjouissaient paisiblement , leur causait une maxime erreur et regret ; ce que bien ennui tollérait, con- sidérant les villes circonvoisines du Puy qui n’es- taient pas de leur estoffe, qui estaient doublées de consulat par lequel entre eux communiquaient leurs affaires politiques. » Dans ces circonstances, les bourgeois se réunireut secrètement et résolurent d'envoyer des délégués au roi Philippe VI, pour obtenir d'être réintégrés en leurs pristines libertés et rédiger des mémoires à l'appui de cette demande. La requête des habitants du Puy devait d'autant mieux réussir auprès du roi que la trève conclue entre lui et Edouard IIT était sur le point d’expirer et qu'il était dans un pressant besoin d'argent pour faire face aux nécessités de la gnerre. C’est là ce qui explique facilement la conduite du pouvoir royal en 1343, si contraire à celle qu'il avait tenue en 1277 : « Laquelle réintégration et liberté par le moyen d’auleuns qui furent intercesseurs et vrais amis de la 2$0 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. ville, facilement obtinrent du prince moyennant tou- tefois la sonune de cinq onille cinq cents livres tour- nois. » La charte de rétablissement du consulat est de Ja plus haute importance pour notre histoire locale. Cet acte, écrit dans le latin barbare du XIVe siècle et avec toute la prolixité des documents de cette époque, peut se résumer ainsi : Après avoir rappelé dans quelles circonstances la ville avait été privée de son consulat, du droit de former une communauté, du sceau, de la bourse et de la maison communes, de la garde des portes et des clefs et de plusieurs autres droits dont elle jouissait depuis longtemps, le roi expose les mo- tifs invoqués par les habitants pour obtenir d'être relevés du châtiment qui avait frappé leurs ancêtres. Annoncçant alors qu'il est disposé à la clémence, il s'y détermine parce que les habitants du Puy sont dans l'impossibilité de pourvoir à leur défense et que leurs ressources ne suffisent plus pour s'acquitter des sub- ventions dont ils sont tenus envers lui et aussi à cause de la dévotion qu'il a pour le sanctuaire de la Vierge Marie. En conséquence il restitue aux citoyens de la ville, pour eux, leurs successeurs et tous les habitants du Puy, les droits et la liberté dont ils jouissaient pré- cédemment, c’est-à-dire la faculté d’élire des consuls, d'exercer le consulat, de former une communauté, université et confraternité, d’avoir un sceau , une bourse commune, une maison de ville et tous les autres priviléges qui appartiennent au consulat. Les citoyens se rassembleront quand ils le voudront pour élire leurs consuls, et ceux ainsi élus, ainsi que ceux ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 281 qui le seront à l'avenir, d’année en année, préteront le serment accoutumé entre les mains du bailli de la cour du Puy ou de ceux qui le remplaceront, ou, à défaut de ceux-ci, devant le bailli ou juge du Velay; les consuls pourront avoir, dans le cas où la communauté le jugerait utile, des conseillers pour traiter avec eux des affaires communes, réunir la communauté, lui procurer et défendre les droits qui lui appartiennent , imposer des tailles aux citoyens et hahitants pour l’u- tilité commune et en faire la perception, avoir deux ou plusieurs serviteurs et messagers; ils veilleront à ce que les affaires publiques soient administrées avec équité et sans fraude et exerceront toutes les charges qui seront dans les attributions des consuls des autres villes importantes de la sénéchaussée de Beaucaire : ils pourront acquérir dans la ville du Puy une maison commune pour s'y réunir et traiter les affaires com- munes. Cette charte avait été rendue sans le consentement de l'évêque Jean de Chandorat, qui protesta contre l'enregistrement, prétendant qu'elle préjudiciait à ses droits : À la demande des habitants du Puy, le pape Clément VI rendit une bulle confirmant et approuvant la grâce accordée par le roi, nonobstant la question el procès pendant à Paris entre l’évéque et les citoyens (1346). Il s'ensuivit une transaction qui régla la situa- tion respective des parties : la ville devait être admi- nistrée par six conseillers, dont le premier à la nomination de l’évêque et jouissant des mèmes droits et honneurs que les cinq autres, le sceau de la commu- nauté portant pour légende : Sigillum conciliarorum TOME XXII. 19 282 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. aniciensium ; toute juridiction était enlevée à ces magistra(s ; ils avaient le droit d'imposer et de lever des tailles dans l'intérêt de la communauté et de maintenir dans chaque corps de métier l’observation des règlements. Cet acte mit fin à la période de lutte de l’établisse- ment du consulat. Désormais la commune est consti- tuée sur des bases de liberté civile assez larges, mais considérablement restreintes quant à ses libertés poli- tiques. Ses querelles avec l’évêque sont loin d’être terminées ; mais les temps'ont bien changé et c’est aux divers degrés de la juridiction royale qu’il appar- tiendra de décider ces contestations. Du reste la liberté municipale se trouve en face d’une autre puissance plus redoutable pour elle, c’est le pouvoir royal qui marche à pas de géant vers la centralisation monar- chique et qui fait subir aux franchises des communes le même sort qu'aux souverainetés féodales. La liberté municipale décline rapidement à partir du XVe siècle : Les villes qui conservent quelque auto- rité militaire la perdent complètement ; la législation du XVE: siècle réunit les justices des villes aux justices royales (édit de Moulin) et soumet leurs élections au contrôle des juges royaux et leur administration inté- rieure à l'inspection de fonctionnaires pourvus de charges vénales. (Edit de Crémieu , 1536, édit de Henri I, 1547, création des greffiers des hôtels-de- ville, 1622 et 1633). Le tiers-état s’attachait désormais avec moins d’ar- deur à ce qui avait fait jadis sa force , parce que d'au- tres voies étaient ouvertes à son activité. ESSAI SUR L HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 285 J'ai cru cependant qu'il y aurait quelque intérèt à étudier la vie municipale dans les dernières années de la monarchie et à rechercher ce qu'étaient devenues aux XVII et XVIIe siècles ces franchises que j'avais vues conquises au prix de tant d'efforts avant que le pouvoir royal , si absolu depuis, exerçât dans notre pays autre chose qu’une autorité purement nominale. I LE CONSULAT AUX XVIIe ET XVIIIe SIÈCLES Depuis la restauration du consulat jusqu'aux der- nières années du règne de Louis XIV, les habitants du Puy avaient exercé le droit d'élire leurs magistrats ; une seule exception paraît y avoir été apportée en 1598, après la pacification du Velay ; pour cette année seulement, Henri [V se réserva la faculté de choisir les consuls sur une liste de candidats présentés par la ville. Mais les guerres ruineuses de Louis XIV inspi- rèrent au gouvernement l'idée de s'emparer des char- ges municipales , pour les transformer en offices héréditaires et les vendre au plus offrant, ou aux villes elles-mêmes si elles consentaient à les racheter , ou, comme on disait alors, les réunir au corps de ville et rentrer ainsi dans le droit délire elles-mêmes leurs magistrats. De tous les expédients financiers de l'ancien 2N4 ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. régime c’est sans doute un des plus déplorables et cependant un de ceux auxquels on avait le plus sou- vent recours ; les annales des états du Languedoc sont remplies, pendant les deux derniers siècles, de délibé- rations ayant pour objet d'obtenir le rachat d'offices nouvellement créés, la plupart inutiles, parfois ridi- cules ; et bien souvent encore le gouvernement, au mépris des conventions intervenues entre lui et la province, ne se faisait pas faute de rétablir des charges déjà rachetées. On s'épuiserait à énumérer tous les offices qu'avait pu inventer l’ingénieuse fiscalité de l’ancien régime : courtiers et commissionnaires pour les vins et liqueurs, jaugeurs des futailles, jurés-mon- treurs, visiteurs, compteurs et peseurs des bois à brü- ler et des charbons, commissaires généraux pour la vérification des étapes, receveurs des deniers des sai- sies réelles, contrôleurs des actes, commissaires aux prisées de meubles, ete. Jusqu'en 1692 le gouverne- ment avait respecté les charges électives ; mais à cette époque un édit créa dans chaque ville et communauté du royaume des maires perpétuels et assesseurs de maires. Les motifs réels de cette mesure sont dissi- mulés avec soin dans le préambule de cet acte et enveloppés de prétextes politiques : on ne parait se proposer que le bien des communautés ; on veut remédier à la cabale et aux brigues qui entourent les élections et à la partialité que montrent dans leur administration des magistrats redevables de leurs chargés aux suffrages de leurs concitoyens, c’est pour ce motif que le roi veut créer des maires qui pourront exercer leurs fonctions sans passion et avec toute la ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 285 liberté qui leur est nécessaire pour conserver l'égalité dans les charges publiques. Plus tard, dans un édit de 1722, sur le même objet, le gouvernement montre plus de franchise et avoue sans détour qu'il a recours à la création des offices afin de pourvoir au payement exact des arrérages et au remboursement des dettes de l'Etat. Quoi qu'il en soit, à partir de 1F92, les villes muni- cipales durent se résigner à voir passer leur adminis- tration entre les mains de fonctionnaires qui ne devaient guère leurs charges qu'à leur richesse. Les nouveaux maires furent complètement substitués aux honneurs, aux droits et aux fonctions des anciens magistrats électifs. Aucun motif politique n'avait dé- terminé le gouvernement; il ne redoutait plus rien de l'esprit d'indépendance municipale et il est à remar- quer que le pouvoir favorisait au contraire la tendance des villes à réunir au corps de ville les offices hérédi- taires. Pendant toute la durée du XVIIIe siècle, le Languedoc et la Provence votaient chaque année des sommes énormes pour le rachat des offices de toute nature et surtout pour celui des offices municipaux. A la mort de Louis XIV, on voyait des villes où les fonctions communales étaient électives, d’autres au contraire où elles étaient la propriété des particuliers, d'autres municipalités encore composées en partie d’offices rachetés et redevenus électifs et d’offices pos- sédés à titre de propriété privée. Un des premiers actes du régent fut de supprimer tous les offices, qu'ils eussent été acquis par des particuliers ou réunis aux villes; on put croire à la restauration du régime 286 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. municipal; mais ce ne fut pas pour longtemps, car dès l’année 1722 toutes les charges créées par Louis XIV furent de nouveau mises en vente. Supprimées en 1724, elles furent encore une fois rétablies en 1733. Depuis ce troisième édit jusqu'en 1764, les villes ne jouirent du droit d'élection que lorsqu'elles furent assez riches pour acquérir les titres d’offices. L'administration populaire du duc de Choiseul essaya de reconstituer sur des bases uniformes l'administra- tion des villes ; deux édits de 1764 et 1765 , rendus après une longue enquête, établirent dans toutes les villes de plus de 4,500 âmes une administration élec- tive composée d’un maire , quatre échevins , six con- seillers et quatorze notables ; le maire seul était nommé par le roi sur une liste de trois candidats ; les offices héréditaires étaient supprimés sans pouvoir Jamais étre rétablis sous aucun prétexte. Un édit parti- culier au Languedoc fut promulgué dans le même but au mois de mai 1766 : il devait donner à cette province une administration municipale conforme à ses an- ciennes franchises et un peu différente de celle que les édits de 1764 et 1765 attribuaient aux autres villes du royaume. Le préambule de l’édit s’exprimait ainsi : Les sages dispositions de l'administration établie dans les villes de notre province de Languedoc faisant déjà jouir ces communautés d'une partie des avantages que nous procurions à nos sujets, nous nous sommes dé- terminé à excepter notre dite province desdits édits (de 176% et 1765). Mais cette exception laissant sub- sister, dans plusieurs villes, les charges levées et possédées par des particuliers, dont l'existence et la ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 287 permanence est un obstacle à la liberté anciennement accordée aux citoyens de choisir leurs officiers mu- nicipaux, nous avons jugé à propos de rétablir celles des dispositions de nosdits édits qui peuvent s’y adap- ter sans changer l’ordre de son administration actuelle. Vaine promesse ! Cinq ans après, le ministère de l'abhé Terray faisait dire au roi dans le préambule d’un édit de 1771 : Nous avons reconnu qu'au lieu de l'avantage que nous nous étions promis de l’exécution desdits édits, elle devenait dans toutes les villes une source d’inimitiés'et de divisions, par le désir que des gens souvent inca- pables avaient de participer à l'administration et par la cabale et les brigues qui s’'introduisaient souvent dans l'élection , donnaient lieu à des procès ruineux pour lesdites villes, retardaient l'expédition de leurs affaires communes et jetaient le trouble et la confusion dans leur administration. En conséquence, le gouver- nement érigeait pour la troisième fois les charges municipales en titre d'office, faisait défense d’élire aucun maire ou autres officiers faisant les fonctions attribuées à ceux qui auraient acquis les charges nou- velles, même dans les villes qui avaient obtenu à prix d'argent la réunion des offices créés en 1733. Ces offices donnaient droit, pour ceux qui les possédaient, à des gages calculés sur le pied du denier vingt de la finance payée pour leur acquisition et prélevés sur les revenus des villes. Enfin, pour clore cette longue série de mesures législatives contradictoires qui nous montre le pouvoir se faisant un jeu des droits de ses sujets, vendant, puis retirant, et vendant encore les fonctions les plus 288 ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. importantes, il faut dire qu’à l'avènement de Louis XVI les offices héréditaires furent supprimés en Languedoc par édit du 27 octobre 1774 ; mais on saura à quel prix; puisque la province dût payer 2,500,000 livres pour le rachat des offices qui n'avaient pas été acquis par des particuliers, et rembourser un million cinq cent soixante-cinq mille quatre cent quatre-vingt-sept livres aux acquéreurs des autres charges. Lorsqu'on voit un gouvernement réduit à employer de tels moyens et méconnaître ses véritables intérèts au point de bouleverser toute lorganisalion d'un royaume dans une de ses bases les plus essentielles, et cela sans aucun plan préconçu , uniquement pour fournir des ressources à une administration financière obérée, n’est-on pas en droit d'appliquer au régime municipal ce que M. de Tocqueville dit des états pro- vinciaux : Une partie de la persévérance et des eflorts que les princes ont mis à abolir ou à déformer cette institution aurait suffi pour la perfectionner et l’adap- ter aux nécessités de la civilisation moderne, si ces princes avaient jamais voulu autre chose que devenir et rester les maitres. Après avoir suivi le régime municipal jusque dans son extrème décadence , revenons en arrière pour rechercher quels étaient les règlements particuliers au consulat de la ville du Puy ,le mode d'élection des consuls, leurs attributions et l'administration muniet- pale pendant les deux derniers siècles. ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 289 III ÉLECTION DES CONSULS En 1343, lorsque la ville obtint d’être rétablie dans le droit de nommer ses magistrats , elle élut dix con- suis, les deux années suivantes huit seulement, puis neuf, ensuite huit jusqu'en 1389; pendant les quatre années suivantes il n'en fut nommé que quatre, et enfin à partir de 1393, leur nombre fut fixé définiti- vement à six, et {el état a duré et a été entretenu jus- qu'à présent et sera tant qu'il plaira à Dieu et à la vierge Marie, patronne du Puy. (Ménricis.) Jusqu'en 1553 l’élection eut lieu le 2 février de chaque année ; à cette époque, par avis et délibération de toute lu commune, les consuls alors en charge obtinrent des lettres-patentes qui les autorisaient à faire procéder à l'élection le 25 novembre, jour de la Sainte-Catherine. Médicis, contemporain de ce change- ment, nous en donne les motifs, et ils ‘sont précieux à recueillir pour l'administration de la ville, Au 2 février, le premier quartier des impôts dus au roi était déjà presque échu ; les consuls , au moment de leur entrée en charge, s'en trouvaient débiteurs et il arrivait sou- vent qu'ils étaient molestés par le receveur général du diocèse et qu'il leur était nécessaire de fournir argent 290 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. de leur bourse. Au contraire,'en entrant en charge le 25 novembre, ils avaient le temps d'établir l'assiette des contributions avant le commencement de l’année. L'élection avait lieu dans la maison commune. On sait qu’elle était située dans la rue qui a gardé le nom de rue du Consulat ; jusqu’en 1361 les assemblées com- munales se tenaient tantôt au couvent des Cordeliers , tantôt dans un autre couvent ou dans une maison parti- culière ; pour remédier à cet inconvénient, Les consuls acquirent , au prix de 320 francs d’or, une maison située rue Villeneuve ; en 1380 ils en firent construire une nouvelle sur le même emplacement ; elle conserva sa destination jusqu’en 1643, époque à laquelle elle fut vendue mille livres et démolie pour faire place à un jardin. Le corps-de-ville se transporta alors dans un nouvel édifice construit sur la place du Martouret où, le 11 novembre 1643 , eurent lieu les premières élections d’auditeurs des comptes. Jacmon, dont les mémoires rapportent cette date, se plaint de ce changement, car nos devanciers, dit-il, avaient bien autant d'esprit que nous et s'étaient bien contentés , pendant deux cents ans, de l’ancienne maison consulaire. La maison con- struite en 1643 fut presque complètement incendiée le 10 novembre 1653. On sait que la plupart des archi- ves de la ville fut perdue lors de cet événement. Les statuts des élections consulaires, réglés en 1472, furent renouvelés en 1646; en voici les principales dispositions : on dressait préalablement un rôle com- prenant les noms de tous les habitants susceptibles d'être nommés consuls ; il fallait qu'ils fussent domi- ciés dans la ville, y payant la taille tant pour leur ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 294 industrie que pour leurs biens immeubles , d’une in- struction suffisante et d’une réputation intacte. Aucun officier du roi, de l’évêque ou du vicomte de Polignac ne pouvait être appelé à exercer une charge municipale quelconque ; la même exclusion s’étendait à ceux qui avaient procès avec la ville, à ceux qui tenaient en ferme quelque justice seigneuriale ; nul ne pouvait exercer en même temps deux charges munici- pales ; un intervalle de quatre années devait s’'écouler entre la sortie de charge et la réélection du même indi- vidu, à l'exception des fonctions de conseillers, qui pou- vaient être exercées pendant deux ans. Les fils et les frères des consuls sortants ne pouvaient être élus à leur place ; on ne pouvait élire en même temps deux parents jusqu'au troisième degré. Le 25 novembre au matin , les vingt-trois corps de métiers de la ville , réunis séparément, nommaient chacun trois chefs de métiers qui se présentaient dans l'après-midi à l'hôtel-de-ville ; le sort désignait, parmi ces trois personnes , laquelle devait remplir les fonc- tions électorales ; aussitôt après, ces vingt-trois élec- teurs prêtaient serment par-devant les officiers de la cour commune et procédaient à l'élection conjointe- ment avec les six consuls sortants. Toutefois l’un de ceux-ci, accompagné du secrétaire-greffier de l'hôtel- de-ville , portait à l'évêque la liste des éligibles , afin que celui-ci püt ajouter certains noms ou en suppri- mer quelques autres. Les électeurs ne nommaient pas directement les consuls , c'était le sort qui devait les désigner parmi quatre candidats élus choisis au scrutin ; on appelait 292 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. cela faire l'élection par le sort des pommettes. Les électeurs nommaient successivement quatre sujets pour chaque place : pour le premier rang on dési- gnait les gentilshommes, les docteurs et licenciés et les bourgeois ayänt été deux fois consuls ; pour le second rang, trois marchands et un notaire ayant été consuls ; pour le troisième et le quatrième, trois marchands et un notaire ; pour le cinquième quatre notaires ; toute- fois il fallait qu'il n’y eût pas plus d’un de ces officiers parmi les consuls ; enfin pour le sixième rang , tous les autres éligibles qui n'avaient jamais été consuls. Voici les noms des en 1646, dans l’ordre vingt-trois corps de métiers de préséance : 1e Avocats et bourgeois. 2 Drapiers et procureurs. 3° Notaires. 4» Merciers. 5° Apothicaires. 6° Orfévres. 7e Cellatiers et ferratiers. 8° La saulnerie. ge Pottiers et fondeurs. 10° Hôteliers et taverniers. 11° Savatiers , cordonniers et corrieurs. 12° Blanchers et pelletiers. 13° Bonnetiers et chapeliers. 14° Boulangers et pâtissiers. 15° Teinturiers. 16° Maréchaux et couteliers. 17° Chirurgiens et barbiers. 18° Selliers. 19° Tondeurs. 20° Bouchers. 21° Macons et charpentiers. 22 Laboureurs. 23° Tisserands. Un arrêt de règlement, rendu en conseil d'état, le 18 octobre 1683, nous donne des détails plus précis sur Je mode d'élection qu'il modifie en outre sur quel- ques points. Sur la demande des consuls, un arrèt du ESSAI SUR L HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 2935 conseil avait chargé M. d’Aguesseau , intendant du Languedoc, de se transporter au Puy pour y recueillir tous les règlements et statuts concernant le consulat et l'administration de la ville ; dans l'impossibilité où les consuls se trouvaient, après l'incendie de 1653, de fournir aucun titre original, l'intendant fit inviter les particuliers à lui remettre tous les mémoires et docu- ments qui seraient en leur possession et qui pourraient faire connaître les formes anciennement observées dans l'élection des magistrats municipaux. Entre autres pièces qui lui furent remises, se trouvait un règlement de 1625, arrêté par les députés de la villé et autorisé par délibération des habitants as- sernblés en conseil extraordinaire. L'intendant réu- nit séparément les officiers de la sénéchaussée Ë ceux de la cour commune et les consuls et dépu- lés de la ville , leur comuniqua ce règlement et leur demanda d'y ajouter leurs observations : après en avoir conféré plusieurs fois avec les dé'égués de ces trois corps, il mit fin à cette espèce d'enquête admi- nistraiive , et sur le vu du procès-verbal qu’il en transmit au conseil d'état , fut rendu l'arrèt de règle- ment qui nous occupe. Le nombre des corps de métiers se trouve à cette époque porté à vingt-cinq ; chacun d’eux élit un cer- lain nombre de chefs de métiers qui sont pris, savoir : cinq du premier rang , c’est-à-dire un gentilhomme, deux avocats ou médecins et deux bourgeois ; deux de chacun des second , troisième, quatrième , cin- quième et huitième rang, un du sixième, un du sep- tième, et un autre des sixième et septième rangs 294 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. alternativement, et enfin un de chacun des autres corps de métiers ; en tout, les chefs de métiers élus sont au nombre de trente-cinq. Le jour de la Sainte-Cathe- rine, avant deux heures après midi, ils sont conduits par le baile de chaque corps à l'hôtel-de-ville, ils y prêtent serment en présence des consuls, par-devant les officiers de la cour commune; l'élection commence aussitôt, et pendant qu’on y procède les portes de la maison commune doivent rester fermées, nul ne doit assister à l'assemblée électorale, si ce n’est le greffier de la communauté et un valet de ville, ni même entrer à l’hôtel-de-ville ; il est de même interdit à tout élec- teur d’en sortir avant la fin de l'élection. Le greffier donne lecture du rèle des habitants éligibles ; les électeurs ont le droit de demander qu'on y ajoute ceux qui auraient été omis (il n’est plus question de la présentation de ce rôle à la sanc- tion épiscopale) et ils vont ensuite aux voix pour dé- signer quatre candidats pour chaque place de consul ; sont seulement admis au premier rang , les gen- tilshommes d'extraction , ou anoblis par lettres ou par charges, les avocats, les docteurs en médecine, les bourgeois qui auront été second consul ; au second rang, ceux qui auront été troisième ou quatrième consul ; au troisième, les bourgeois et ceux qui auront été cinquième consul ; au quatrième, les marchands drapiers, les procureurs et ceux qui auront été sixième consul ; au cinquième, les notaires, les au- tres marchands, apothicaires, chirurgiens, orfévres ; au sixième, enfin, tous ceux qui n'auront pas été consuls, gens de bien et dignes de la charge. Les ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 295 consuls en charge vont voter les premiers et après eux chacun des chefs de métiers, en présence de deux électeurs qui veillent à ce que chacun vote pour quatre candidats différents ; le secrétaire procède ensuite au dépouillement du scrutin et arrête la liste des quatre candidats à chacune des six places. Immédiatement après ces candidats sont mandés à la maison de ville, dont les portes sont ouvertes aux habitants, et on tire publiquement au sort les noms de ceux qui doivent ètre élus; cette dernière opération se fait d’une ma- nière assez bizarre ; on introduit dans l’assemblée un enfant âgé de dix ans au plus, on lui remet quatre boulettes blanches creuses et vides, il met dans l’une d’entre elles un billet sur lequel se trouve écrit le mot de consul, les jette dans un sac, les mêle et les retire l'une après l’autre pour en donner une à chacun des quatre candidats, qui sont tenus de les ouvrir en présence de tous les assistants ; celui auquel est échue la boulette pleine est proclamé immédiatement consul. Il est expressément défendu aux consuls encore en charge et aux électeurs de s’immiscer directement ou indirec- tement au maniement des boulettes , à peine d’être exclus de l'entrée des conseils et charges publiques et de poursuites extraordinaires. Tel était le système d'élection en vigueur lors de la création des maires perpétuels en titre d'office. On voit qu'au Puy comme dans la plupart des villes du Languedoc la noblesse et la bourgeoisie étaient à peu près placées sur le même rang ; on sait que dans cette province les bourgeois avaient toujours pu acquérir des terres nobles ; aussi ces deux classes de la société 296 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. furent souvent guidées par les mêmes intérèts, et les règlements municipaux de notre ville sont une preuve évidente que la noblesse n’attachait pas moins de prix que la bourgeoisie à la conservation de ces charges consulaires qu'elle fut fréquemment appelée à remplir. Malheureusement on voit aussi par ces mêmes statuts, en combien de fragments était divisée la bour- geoisie elle-même, et combien de petites vanités ve- naient y semer la division. C’est ainsi qu'on voit distinguer avec soin les marchands des bourgeois, et par cette dernière qualffication on entend désigner ceux des membres de la classe moyenne, qui ne s’a- donnent à aucun travail lucratif et trouvent dans leur fortune le moyen de vivre avec bienséance. Nous avons encore un autre exemple de l'acharne- ment avec lequel les corporations revendiquaient leurs droits de préséance les uns sur les autres, dans la grande lutte que le corps des procureurs soutint à ce sujet contre celui des notaires et des marchands. En 1635 un arrêt du parlement et une ordonnance de l'évèque les autorise à passer les premiers aux pro- cessions : protestalion des notaires ; nouvel arrêt, et à la procession de la Fète-Dieu les procureurs prennent triomphalement le pas sur leurs adversaires. On peut voir dans le curieux procès-verbal des élections con- sulaires de 1766, publié par la commission des recher- chcs historiques, un autre épisode de cette même lutte. Les élections consulaires furent encore deux fois ré- glémentées par le pouvoir royal, avant la révolution de 1789. ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 297 L'édit de 1766, qui supprimait les charges hérédi- taires, simplifia le mode d'élection et attribua la nomi- nation des magistrats municipaux aux conseils de ville renforcés, sans aucun tirage au sort; nous verrons bientôt, en parlant des conseils politiques, comment étaient composées ces assemblées : qu’il suffise de dire, quant à présent, que toutes les fois qu'il s'agissait d'éliré les consuls, l'assemblée du conseil politique renforcé était présidée par le premier officier du roi dans les siéges de justice ; au Puy, c'était le juge-mage à la sénéchaussée, et le procureur du roi au même siége y remplissait les fonctions de ministère public. Le procès-verbal de 1766 est le premier qui constate une élection faite d'après ce nouveau règlement. L'édit du 27 octobre 1774, portant suppression des charges créées en 1771, décida, dans le but de procurer aux villes une administration éclairée et suivie et pour remplir le vœu des états du Languedoc, que le premier consul élu ayant titre de maire, en exercerait les fonc- tions pendant quatre années, le second, ayant le titre de lieutenant de maire, pendant trois années: tous deux devaient ètre rééligibles. Quant aux autres con- suls, ils devaient à l'avenir être réélus par moitié seu- lement chaque année. Entin des lettres patentes du 11 avril 1783 décidèrent que la place de premier consul serait occupée alterna- tivement par un gentilhomme et par un avocat ou un médecin, _ On a vu que, dans la transaction de 1349, l'évèque se réservait la nomination au premier chaperon con- sulaire ; il ne paraît pas que le prélat ait joui longtemps TOME XXII. 20 298 ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. de ce droit, qui finit par lui être définitivement enlevé. En effet, nous avons des lettres de Louis, duc d'Anjou, gouverneur du Languedoc, du 27 avril 1382, adressées au parlement de Paris, par lesquelles il lui fait con- naître que le pape a interdit à l’évêque d'inquiéter les consuls, et requiert la confirmation de l'édit du roi sur la restitution du consulat au Puy; le parlement lui-même, par un arrêt du 19 juillet 140%, décida, sur la contestation pendante entre l’évêque et les consuls, que la ville créerait ses consuls, conformément aux lettres du roi Philippe VI. A la fin du XVIII siècle, l’évêque et le vicomte de Polignac revendiquèrent encore le droit de nommer chacun alternativement le premier consul; de longs mémoires furent publiés de part et d'autre; pour l’évê- que et le vicomte, on invoquait les termes de la trans- action de 1349, qui attribuait au prélat le droit de nommer le premier consul, et le traité de pariage qui, en transmettant au roi la moitié des droits de l’'évèque, l'avait associé à celui dont il est ici question. On pré- tendait, en outre, qu’en 1694 la communauté ne cher- chait pas à contester ce droit; en 1739, disait-on, quelques avocats ayant porté plainte de ce qu'au pré- judice de l’édit de 1683, l’évêque et le vicomte faisaient alternativement choix du premier consul, le comte de Saint-Florentin adressa par ordre du roi une lettre aux consuls du Puy, dans laquelle il leur rappelait qu'un arrangement avait été conclu par l'intermidiaire de M. de Bâville, intendant du Languedoc, que cet arran- gement avait été approuvé par arrêt de 1717 et que le roi entendait qu’il fût désormais suivi; en conséquence, CI ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALA DU PUY. 299 les droits de l’évèque et du vicomte devaient être res- pectés. Toutefois, les avocats, qui pouvaient aspirer au premier chaperon, devaient y ètre admis concurrem- ment avec les gentilshommes et autres qui avaient droit d'y prétendre. Mais après l’édit de 1766, qui ren- dait aux villes le droit d'élection, la communauté, s'appuyant sur les termes de cet acte, refuse de nou- veau de présenter à l’évêque trois sujets parmi lesquels il aurait à choisir le premier consul; en 1766, ainsi que le constate le procès-verbal dont j'ai parlé plus haut, les électeurs, auxquels avait été signifié un acte de protestation, à la requête du vicomte de Polignac, nommèrent d'abord un sujet pour le premier chaperon, puis trois candidats qui devaient être présentés au vi- comte, maäis on décida que provisoirement Me de la Croix Duchamp, élu premier consul, en ferait les fonc- tions jusqu'à ce que la contestation serait décidée par la justice. En 1768, sur la protestation qui lui avait été adressée par l’évèque, le roi donne des lettres patentes qui ordonnent au conseil de ville de présenter, chaque année alternativement, trois gradués et trois nobles, C’est sur ces prétentions que s’engagea un procès de- vant le parlement de Toulouse : il fut terminé par arrêt du 30 mai 1770 (V. Arnaud), qui rejetait la demande de l'évèque et du vicomte de Polignac. Au nom de la communauté, on avait produit divers titres qui établissaient par leur pratique constante que les élections consulaires s'élaient, de toute ancienneté, faites en la forme indiquée par les statuts de 1646 et le règlement de 1683. On citait à l'appui deux arrêts du conseil, du 11 juin 1657, décidant qu'on continuerait à 500 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. observer le règlement de 1625, de tous points con- forme à ce que j'ai dit plus haut en analysant l’acte de 1646; on ajoutait que si le roi, en 1694, avait voulu faire cesser quelques troubles passagers, il n'avait pas entendu porter atteinte aux franchises de la ville; les évèques eux-mêmes avaient reconnu le peu de fonde- ment de leur prétention; car, en 1669, Armand de Bé- thune, alors évèque, dans une lettre écrite aux consuls, proteste de son éloignement à se mêler de l'élection des consuls : « Je n’ai rien souhaité, dit-il, que de vous procurer un règlement pour vous rétablir la liberté des suffrages et vous donner lieu de choisir vos consuls. » Enfin, la communauté invoque en sa faveur la posses- sion constante du droit d'élection, depuis 1684 jusqu’en 1739 ;-quant à ce qui s’est passé depuis, jusqu’en 1765, cela ne peut tirer à conséquence, les élections consu- laires ayant été alors suspendues. IV DROITS HONORIFIQUES DES CONSULS CEREMONIAL Les magistratures municipales furent toujours, en Languedoc, entourées d’un appareil solennel qui se conserva jusqu'à la fin de leur existence, et qui con- trastait fréquemment avec la position sociale et les ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 501 occupations journalières de ceux qui en étaient re- vêtus. Chacun de nous a pu voir, soit dans le tableau de la procession de la peste, à la cathédrale, soit dans l’église de Saint-Georges, nos six magistrats munici- paux dans leurs longues robes rouges, telles qu'ils les portaient depuis 1393 dans les jours de grande céré- monie. On doit bien penser que l'installation des nouveaux magistrats se faisait en grand appareil. Aussitôt après leur élection, ils reçoivent la visite des principaux ha- bitants de la ville et du peuple qui vient les saluer au son des violons, trompettes et tambours, /e peuple ayant toujours beaucoup honoré et aymé lesdits con- suls, dit un acte de 1660. Û Le 26 novembre, lendemain de l'élection, chacun des consuls sortants va prendre son successeur pour le conduire à l’hôtel-de-ville, d’où ils se rendent tous en corps à la cour commune, les anciens en robe rouge et les nouveaux en robe bourgeoise, pour y faire prèter par ces derniers le serment de maintenir le peuple dans l’obéissance du roi et le service du seigneur évê- que. Aussitôt après, ils vont entendre la messe dans l’église de Notre-Dame et, en sortant, ils rendent visite à l’évêque, au juge-mage et aux conseillers de la séné- chaussée, réunis dans la chambre'du conseil; enfin ils retournent à l'hôtel-de-ville où les consuls sortants re- mettent les clefs de la ville à leurs successeurs. Le lendemain 27 novembre, les anciens comme les nouveaux consuls vont entendre une messe dans la chapelle de l’hôtel-Dieu et faire des aumônes aux pau- vres. Les jours suivants, revètus de leurs chaperons 502 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. seulement, ils se rendent aux couvents des Cordeliers, Pères Prècheurs, Carmes et Sainte-Claire. Il était encore d’autres occasions solennelles où les consuls paraissaient en public dans tout l'appareil de leur dignité. Aux processions de la Fête-Dieu, les six consuls por- taient le dais, escortés par les valets de ville portant six flambeaux de cire avec des écussons aux armes de la ville. Une transaction du 20 mars 1478 leur avait accordé ce droit, à moins qu'il n’y eüt d’autres nota- bles. seigneurs où barons qui voulussent le porter. Leur rang dans toutes les cérémonies religieuses était soigneusement désigné et maintenu. En 19572, les officiers de la sénéchaussée et ceux de la cour commune étant en contestation avec les sonsuls sur la préséance, un arrèt du parlement de Toulouse donna le pas aux officiers de la sénéchaussée, décida qu'immédiatement après viendraient, du côté droit, les baillis et juges de la cour commune, et à gauche les consuls, et conserva aux consuls le droit de porter le dais aux processions. Le jour de Noël les consuls faisaient des visites, ac- compagnés par le capitaine général, le syndic et le panetier, afin de maintenir la livrée plus redoutable aux méchants et considérable aux gens de bien. Le lendemain, le capitaine général, accompagné du roi des arquebusiers, s’en allait visiter les consuls dans leurs maisons, H#archant en armes par la ville: le premier consul recevait le roi des arquebusiers et Jui mettait l'épée au côté. Médicis s'occupe assez longuement du costume des ESSAI SUR L HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 505 consuls ; il nous raconte minutieusement en quelles occasions ils prenaient leurs robes rouges : c'était d’abord à toutes les fètes et les jours de dimanche, à l'entrée dans la ville d’un prince ou d’un légat, d’un cardinal ou même d’un seigneur de haute dignité, aux processions, aux funérailles de l’un d’entre eux. Notre vieux chroniqueur se plaint avec amertume que, de son temps, « les choses soient tombées en cette insta- » bilité, déraison et mépris que les consuls ne daignent » porter à grand'peine leurs chaperons, ni à moitié du » temps leurs robes rouges, mais vont par la ville » comme gens égarés, ne records de la tradition et » enseignements des honorables costumes de leurs » devanciers. Mais ils font aujourd'hui leurs robes » consulaires rebrassées encolletées, que semblent » plutôt à leurs barbiers où ménétriers qu'à leurs » prudhommes, et leurs bonnets comme un soudard » de guerre, oubliant qu'un consul est entre tous au - » tres habitants esleu modérateur pour régir et admi- » nistrer, comme prudent, pacifique et débonnaire » citoyen, les affaires communes et publiques et n’est » digne de son sens rassis de se ainsi forvoyer et dé- » guiser. » Médicis nous rapporte également que le roi Char- les VI permit à l’hôtel-de-ville d'employer vingt livres au lieu de dix à l’achat des robes des consuls; dans les derniers temps, chaque consul avait droit à cent cin- _ quante livres pendant la durée de ses fonctions, pour subvenir à cette dépense. Le premier consul recevait trois mille livres de la province pour les frais de son voyage pendant la session des états. Les consuls étaient 504 ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. exempts du logement des gens de guerre, charge qui fut très-lourde pendant la plus grande partie de ces derniers siècles. ADMINISTRATION MUNICIPALE Sous Louis XIV et Louis XV les villes étaient admi- nistrées par des maires, échevins ou consuls, tantôt électifs, tantôt à la nomination du roi, tantôt encore remplissant leur charge moyennant finance, qui com- posaient ce qu’on appelait le corps-de-ville, et par une assemblée plus ou moins nombreuse de notables qui y siégeaient, soit en vertu d’un droit qui leur était pro- pre, soit à titre de délégués choisis par les corporations et les corps de métiers. Dans notre ville en particulier, le corps-de-ville, chargé collectivement de l'administration de la cité, se composait de six consuls, d’un procureur du roi à l'hôtel-de-ville et d’un secrétaire greffier ; à côté d’eux se trouvait placé un conseil de trente personnes prises parmi les gentilshommes, avocats, médecins, bour- geois, marchands, notaires et anciens consuls. Gette assemblée était nommée chaque année, trois jours après l'élection consulaire, par les électeurs qui avaient procédé à celle-ci ; à cet effet ils élisaient dix-huit ÉSSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 505 . conseillers nouveaux qui, avec six autres pris parmi les membres sortants et les six consuls de l’année précé- dente, élus de droit, formaient le nombre total de trente. (Règlement de 1683.) En outre de cette assemblée qui se réunissait fré- quemment, il y avait encore le conseil général auquel étaient portées seulement les affaires extraordinaires, et qui se composait de trente conseillers ordinaires, des chefs de métiers électeurs pour l’année courante et de tous ceux qui avaient exercé les charges consu- laires. C’est là ce qui depuis bien longtemps avait rem- placé l'assemblée générale à laquelle tous les habitants étaient convoqués. A l’époque où nous sommes arrivés, ce n’est plus le peuple entier qui nomme ses magistrats et donne son avis sur les affaires publiques; les charges municipales tendent de plus en plus, surtout dans les petites villes, à devenir le partage exclusif de quelques familles, même dans le Languedoc où les anciens règle- ments, maintenus autant que possible par l’administra- tion des états de la province, conservent plus de vitalité aux priviléges municipaux, et où les conseils des villes, au lieu d'être composés de membres-nés, sont en géné- ral le produit de l'élection, les communautés d'un ordre inférieur suivent cette loi commune ; ainsi, je vois divers arrêts du parlement de Toulouse, ceux entre autres du 29 avril 1710, du 14 décembre 1732 et du 17 décembre 1738, défendre aux conseils de chercher à se continuer en place pendant plusieurs années, à la faveur de prétextes plus ou moins plausibles, de com- poser les conseils des communautés de gens illittérés ou placés sous leur dépendance, et de soustraire du 506 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. ‘ greffe les délibérations ; je vois encore une ordonnance de l’intendant, du 24 février 1724, rendue à la requête du syndic de la province, condamner à dix livres d'amende les conseillers qui négligeront d'assister aux assemblées. IL est donc probable que la masse de la population, écartée de plus en plus des affaires publiques, cessait d'y porter un aussi vif intérêt que par le passé et en abandonnait plus volontiers la direction à la haute bourgeoisie ; aussi on voit par la composition du con- seil ordinaire, telle que la prescrit l'ordonnance de 1683, que les artisans en devaient être à peu près ex- clus, quoiqu'il se trouvât des hommes de cette classe parmi les électeurs qui le nommaient. L'édit de mai 1766 apporta quelques modifications dans l'organisation municipale du Languedoc. Le con- seil politique ordinaire fut désormais composé, outre les consuls, de vingt-quatre personnes prises parmi les plus forts contribuables de chaque classe des habi- tants domiciliés, et renouvelable chaque année par moitié; il nommait lui-même annuellement un nom- bre de notables égal à celui de ses membres, choisis d’après les mêmes règles et pour. une année seulement. Ceux-ci, réunis au conseil politique ordinaire, for- maient ce qu'on appelait le conseil politique renforcé. Le lendemain de son élection, cette assemblée ainsi composée nommait les officiers municipaux, puis pro- cédait au renouvellement de la moitié du conseil poli- tique ordinaire, et à la fin de l'année elle désignait ceux qui devaient, dans le courant de l’année suivante, faire partie du conseil renforcé. ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY, 507 Cette nouvelle organisation, malgré la recommanda- tion de choisir les conseillers parmi les habitants de toute classe, était plus favorable à l'oligarchie munici- pale que celle du règlement de 1683, puisque c'étaient les membres de l'administration qui étaient appelés à désigner eux-mêmes leurs successeurs. Mais c'est surtout l’assujétissement absolu au pou- voir central, représenté par l’intendant de la province, qui est le fait dominant de cette époque. Déjà d’après le règlement de 1683, aucune assem- blée du conseil ne pouvait avoir lieu sans l'assistance d'un juge de la sénéchaussée, à peine de nullité des délibérations; divers édits rendus dans le courant du XVIIe siècle avaient défendu aux villes d'établir aucune taxe nouvelle, aucun octroi, de vendre leurs biens, d'en acquérir de nouveaux, de faire emploi de l’excé- dant de leurs recettes, de contracter un emprunt, d'intenter ou de soutenir un procès sans une autorisa- lion de l’intendant et le plus souvent un arrèt du con- seil d'état. On connaissait donc complètement, avant 1789, le régirme de la centralisation et de la tutelle administrative. Toutefois, quelque restreint que fût devenu le pou- voir des magistrats municipaux en face des représen- tants de l'autorité centrale, il ne sera peut-être pas inutile d'essayer de rappeler quelques-unes de leurs attributions et de rechercher par-là si la ville n'avait pas encore intérêt à conserver à sa tête des élus de son choix pour maintenir ses droits, veiller à son adminis- lration et proposer tout au moins les mesures les plus conformes aux besoins des habitants. 508 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. Et d’abord, les consuls avaient conservé un droit politique des plus importants, attaché à leurs charges quoique étranger aux fonctions municipales ; le pre- mier d’entre eux etait député du tiers-état pour le Velay aux états généraux de la province, où il siégeait après les consuls de Toulouse, Montpellier, Nimes, Carcassonne et Narbonne; les six consuls faisaient de mème partie des états particuliers du Velay. Quoique ces fonctions ne fussent pas remplies en vertu d’une délégation spéciale, l'histoire du Languedoc prouve facilement que les députés du tiérs tenaient aux états une place importante, et que c’est à leur initiative et au concours que leur prètait souvent le clergé que la province fut redevable des bienfaits de cette adminis- tration à peu près unique en France. Dans l’intérieur de la cité, les fonctions des consuls, à part la qualité d’officier de l’état civil dont ils n'étaient pas pourvus, différaient peu de celles des maires ac- tuels ; seulement, au lieu d’une administration con- centrée entre les mains d’un seul fonctionnaire, on avait une administration collective présidée par le pre- mier consul. Les fonctions des consuls étaient principalement relatives à la police de la ville; ils ne prenaient pas eux-mêmes d'arrêtés réglémentaires, mais ils assis- taient, avec voix délibérative, aux conseils de police tenus par les officiers de la sénéchaussée, et les de- voirs de leur charge les obligeaient à surveiller l’exé- cution de toutes les mesures d'ordre arrêtées par cette assemblée, à maintenir la propreté et la salubrité des rues, police des marchés, à veiller à ce qu'aucun | | | | | | | ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 509 bâtiment ne menaçàt ruine, à prendre toutes les dispo- sitionS exigées par les circonstances en cas d'incendie ou de maladie épidémique ; ils devaient également pourvoir au logement des gens de guerre et maintenir les règlements des différents corps de métiers; c’étaient eux qui fixaient le prix du pain et devaient vérifier l'exactitude des poids. Dans ces différentes fonctions ils étaient assistés de deux officiers nommés par eux, et dont les charges furent supprimées par le règlement de 1683, le capitaine général et le panetier; ce dernier s'en allait, accompagnant l’un des consuls et portant une balance, dans toutes les boutiques de boulangers pour procéder au pesage du pain, dont la confiscation était prononcée au profit de l’hospice quand le poids était défectueux; le capitaine général, sous l'autorité des consuls, avait la garde des clefs des portes de la ville. Les consuls étaient encore’ juges de police, et en cette qualité pouvaient prononcer des amendes et jusqu'à huit jours d'emprisonnement. La tour de la porte St-Gilles à longtemps servi de prison munici- pale. Les six valets de la maison de ville étaient nom- més par eux, et on peut, dans le tableau de la peste, les voir accompagnant les consuls revêtus de leur costume. Deux des consuls étaient membres des bureaux de lhôtel-Dieu, composé de onze personnes, dont l’évè- que président, et deux bourgeois. Les consuls choisissaient celui d’entre eux qui de- vait exercer les fonctions de receveur municipal , c'était ordinairement le second. 10 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. Ils passaient les baux des octrois de la ville et affer- maient ses biens patrimoniaux; ils procédaient à l’ad- judication publique des travaux que la ville avait à faire exécuter; si le chiffre de la dépense excédait cent livres , elle devait avoir lieu en présence. du juge- mage. Les consuls ne pouvaient ni directement ni in- directement se rendre fermiers ou adjudicataires, les fermiers ne pouvaient se dessaisir du prix des baux que sur un mandement signé de deux consuls au moins, mais un édit du trente avril 1697 leur défen- dait de se charger des sommes destinées à solder les dépenses ordinaires des villes. La science de réglémen- tation administrative était allée loin en cette matière. Les magistrats municipaux avaient dû, à la suite d'un édit du 28 novembre 1681, remettre à l’intendant un état des revenus de la ville, sur lequel celui-ci dressait un budget de ses dépenses ordinaires et l’arrè- tait lui-même si le chiffre n’en excédait pas 4,000 liv., ou 2,000 liv., ou 1,000 liv., suivant l'importance des villes; dans le cas contraire, le règlement était rendu par le conseil d'Etat. Les dépenses ordinaires des villes devaient être soldées avec les revenus de leurs octrois et de leurs biens patrimoniaux; les fermiers, sur le mandement des consuls, pourvu qu'il fût relatif aux dépenses fixées par les lettres patentes, remettaient les prix de leurs baux aux collecteurs qui étaient char- gés d’acquitter les dépenses, conformément au préam- bule du rôle des impositions; s’il n’y avait aucune affectation spéciale de ces revenus, ils étaient portés à titre de moins imposé sur les tailles à la charge de la communauté. ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 11 Il en était de même quand les villes avaient été au- torisées à contracter un emprunt ou à établir un impôt pour une dépense extraordinaire; les deniers empruntés ou levés sur les contribuables devaient être versés par les collecteurs, en présence des consuls, entre les mains de ceux à qui ils étaient dus. Les consuls avaient encore à adjuger la collecte des tailles ou à nommer des collecteurs forcés. La part de cet impôt, assignée par les états du pays à chaque communauté, était d’abord répartie entre les contri- buables par quatre calculeurs d'assietfe ou co-équa- teurs choisis par les électeurs chefs de métiers. Les consuls faisaient ensuite publier la levée des tailles pendant trois dimanches consécutifs , et si per- sonne ne voulait se charger volontairement de ces fonctions, ils désignaient , le premier dimanche de mars, les habitants qui seraient tenus de les remplir, à raison d’une remise proportionnelle. Les consuls étaient responsables de la levée de la taille aussi bien que les collecteurs, et cette responsabilité n’était pas toujours purement comminatoire; on voit en effet un arrêt du conseil d'état du 13 janvier 1722 qui per- met aux receveurs des tailles de faire exécuter leurs contraintes contre .les collecteurs, leurs cautions, les consuls perpétuels ou électifs des villes, et même contre les membres du conseil politique, qui avaient charge d'admettre les cautions des collecteurs , qu'ils eussent ou non assisté aux délibérations (édit du 20 septembre 1689); et plusieurs arrêts de la cour des aydes de Montpellier confirment ces droits aux rece- veurs des tailles (arrêts du 5 mars 1705, 12 avril 1709) 512 ESSAI SUR L'HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. contre le premier consul de Pézenas ; sauf aux consuls à recourir contre les collecteurs, s'ils étaient reli- quataires, ou, dans le cas contraire, contre la com- munaulté. Les consuls rendaient leurs comptes à quatre audi- teurs élus par les mêmes électeurs et pris parmi les anciens consuls, les chefs de métiers et les conseillers, et non parents ni alliés des consuls. Quinze jours après être sortis de charge, les consuls remettaient leurs comptes au greffier de la ville, et après avoir été transmis au procureur de la cour commune, ils étaient vérifiés par les auditeurs, ainsi que toutes les pièces justificatives produites à l'appui. Après la clôture des comptes, le juge-mage et les officiers de la cour commune se rendaient à la maison consulaire, et sur les réquisitions du procureur du roi et le rapport des auditeurs, rendaient leur sentence d’homologa- tion. Les consuls réunis formaient, avec le procureur du roi à l’hôtel-de-ville et le greffier, l'assemblée du corps-de-ville; les membres du conseil ordinaire avaient le droit d'assister à toutes leurs délibérations, mais la convocation du conseil entier n'était obliga- toire qu’une fois par mois; les consuls devaient lui soumettre toutes les affaires ordinaires de la ville. Ses délibérations devaient être signées de tous les membres présents, sauf à ceux qui auraient été en minorité à adresser un mémoire au contrôleur général des finances. Quant aux affaires extraordinaires, elles étaient por- iées au conseil général, remplacé depuis par le conseil ESSAI SUR L' HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. 5415 politique renforcé. C'était à lui qu'il appartenait de décider les questions d'emprunt, d'aliénation de biens communaux, d’acquisitions, d’éfablisèment d’octrois ou de taxes nouvelles , de procès à entreprendre ou à soutenir, toujours sous la réserve de l'approbation ultérieure du pouvoir central. L’édit de 1681 défend d’ailleurs aux communautés tout emprunt qui n'aurait pas pour but de pourvoir à la subsistance des troupes ou au rétablissement des églises paroissiales, des pres- bytères, aux constructions de chemins, portes, mu- railles ou autres travaux publics, aux frais des procès et aux dépenses nécessitées par les épidémies. Le conseil général avait encore à entendre les comptes du produit et de l'emploi des deniers commu- naux. Enfin c’est lui qui nommait ie greffier et le pro- cureur du roi à l'hôtel-de-ville, lorsque ces charges n'étaient pas érigées en litre d'office. Le greffier était nommé pour un espace de temps indéfini, le procu- reur du roi pour six années seulement; ce dernier assistait à toutes les assemblées avec voix délibérative, mais il n’exerçait par lui-même aucun acte d'admi- nistration ; son rôle se bornait à surveiller et à contrô- ler les administrateurs, et à remplir auprès d’eux les fonctions du ministère public. L'administration municipale dépendait en outre , à certains égards, des Etats de la province, qui exercaient aussi un contrôle actif sur la situation financière des communautés comme des diocèses. Les syndics géné- raux du Languedoc pouvaient intervenir, au nom des états, dans toutes leurs affaires particulières et for- mer devant l’intendant ou les cours de justice toutes TOME XXII. 21 ol4 ESSAI SUR L HISTOIRE MUNICIPALE DU PUY. les demandes qu'ils jugeraient nécessaires à leurs in- térêts. Tels sont les principaux traits de notre organisation municipale aux dernières époques de la monarchie. Je crains que l'aridité de ces détails administratifs n'ait paru quelquefois fastidieuse ; il y a loin en effet de cette société si fortement réglémentée dans tous les actes de son existence publique aux luttes émouvantes et aux naïves légendes de l’âge héroïque du consulat. Mais n’est-ce pas à l'étude approfondie des institutions, depuis le sommet de l'échelle jusqu'aux derniers dé- tails de l'administration d’une ville de province, qu'il faut demander le secret des générations passées et les enseignements que l’histoire garde pour l'avenir ? Si modestes que soient les limites de ce travail, c’est là le but que je me suis proposé en réunissant quelques documents sur les communautés du Languedoc et spécialement sur la ville du Puy aux deux derniers siècles. LE GÉANT LU ROCHER DE CORNEILLE AU PUY-EN-VELAY PAS NI. AY VIA ED Vice-Président de la Société académique du Puy — Ses ——— La ville du Puy est, en partie, assise sur les pentes du mont Anis que surmonte le rocher volcanique de Corneille. Ce vaste dike, dont le sommet est à 132 mè- tres au-dessus du fond de la vallée, présente, sous tous ses aspects, des masses énormes et abruptes qui ont un véritable cachet de grandeur. Largement démantelé au sud-ouest par la main du temps et par celle des hommes, le roc, en d’autres points, parait avoir mieux conservé son ancienne 516 LE GÉANT configuration ; à l’est surtout il semble n'avoir subi, depuis bien des siècles, aucun changement notable, et l’on y voit d’antiques anfractuosités que les lierres ta- pissent de leur sombre feuillage. Sur ces fonds obscurs se détachent de grandes roches qui, teintées en clair par les lichens, produisent, sous les rayons du soleil, d’énergiques oppositions d'ombre et de lumière. Vu à distance, un de ces accidents de structure pro- voque particulièrement l'attention : il dessine une tête colossale dont le profil semble accuser les traits mâles de quelque personnage héroïque; on nomme cette figure la tête d'Henri quatre. Une certaine ressemblance s’y révèle, en effet, dans le galbe du visage: c’est sur- tout le nez aquilin; ce sont aussi, mais moins accen- tués, l'œil, la bouche, la moustache, le menton un peu allongé, tels que les offre sur les monnaies l'effigie du bon roi. Toutelois, cette tète qui se relève et regarde fièrement l'horizon, a, dans sa pose, je ne sais quel air de suprême noblesse qui n'existe pas au mème degré dans les portraits d'Henri IV. Naguères, l'illusion était plus complète, alors qu’on y voyait la barbe et la colle- rette, ou fraise, que formaient des buissons et les hauts branchages de quelques arbres aujourd’hui détruits. Cette image, dont la hauteur est d'environ dix mètres, a été signalée souvent dans les descriptions de la ville du Puy, mais seulement à titre de curiosité pittoresque, comme on cite l’image de Napoléon dans les glaciers du Mont-Blanc, le Vercingetorix de Royat, le Capucin du mont Dore, etc. Toutefois, dans une localité riche en souvenirs de tous les âges, on se demande si, avant d’avoir reçu son DU ROCHER DE CORNEILLE. 517 appellation actuelle, ce monument de la nature, qui porte l’empreinte en quelque sorte indestructible d’une haute antiquité, n'avait pas frappé l'imagination popu- laire, s'il n'avait pas sa légende et s'il ne serait pas possible de le rattacher, au moins par son ancien nom, à quelque lointaine tradition des origines locales. L'intéressante énigme qu'éveille ainsi l'induction, nous sollicitait à interroger d'anciens documents, et des textes nombreux nous ont bientôt appris qu’en effet cette figure surhumaine devait être connue long- temps avant le règne d'Henri [V, nous autorisant à y voir une image de ces géants très-populaires sur tous les points de la France et dont la mystérieuse tradition remonterait, dit-on, jusqu'à l’époque celtique. Aucun témoignage, il est vrai, ne mentionne l’image elle-même ; mais son appellation ancienne est dévoilée, dans les documents, par le nom aujourd'hui oublié de l'endroit que ce jeu de la nature a rendu depuis long- temps remarquable. Ce lieu est très-bien désigné dans un acte que relate un inventaire des titres de l’université de Saint-Mayol, et dont voici le sommaire : « Vente faite à l’universite de St Mayol par Jean » Guitard chanoine de 40 sols assignes sur une maison » du chapitre au terroir de Corneille dict del geant 518 LE GÉANT » confrontant du dessus et dung coste avec la muraille » de la ville du Puy du dessous avec le vergier de » leglise St-Agrepve un passage au milieu. le 6 jan- vier 1496 (1). Il est facile de reconnaître ici le terroir occupé au- jourd’hui par la partie supérieure des jardins du Sémi- naire, qui est située au lieu même où le roc représente la tête d'Henri IV : au-dessus et d'un côté, c’est-à-dire au nord et à l’est, on voit encore la muraille de la ville ; au-dessous, c’est-à-dire au sud, le verger est représenté par une partie du jardin et de la cour du séminaire où existent des vestiges de l’église Saint-Agrève, église qui est, d’ailleurs, indiquée au mème point sur un plan conservé au secrétariat de l'évêché (2). Le passage au milieu dut être supprimé lorsque le Séminaire eut ac- quis, dans le cours du XVIIe siècle, la collégiale Saint- Agrève. À sa place existe une terrasse, à l'extrémité de laquelle on retrouve une ancienne porte de ville, au- jourd'hui murée, à laquelle conduisait ce passage et dont nous avons à examiner aussi la curieuse dénomi- nation. Le cloître, dans lequel était compris le terroir du géant, formait autrefois la partie la plus haute de la y ÿY (1) L'inventaire est de 1621. Voir page 2. (Archives départementales.) (2) Ce plan, qui parait avoir £t£ fait dans le cours de la première révolution, mentionne, en effet, la ci-devant Église cathédrale, le jardin du citoyen Lam- bert, etc. Il fut motivé, sans doute, par un litige qui nécessita l’application exacte d'anciens titres, d'après lesquels sont relatés, à diverses dates, les noms des possesseurs de maisons, les églises, établissements religieux, les quartiers, rues et ruelles, situés au voisinage de la cathédrale. DU ROCHER DE CORNEILLE. 519 ville qui, distincte de la communanté urbaine, était soumise à la juridiction du chapitre de la cathédrale, et défendue par une enceinte particulière de murailles. Outre les portes établies entre le cloître et la ville pro- prement dite, il y en avait trois qui donnaient issue dans la campagne: c’étaient « le portal Saint-Robert, le portal Saint-Agreve et la porte en Jayant. » C’est vers l'an 1545 que notre chroniqueur Médicis a consigné cette dernière donnée dans son livre ma- nuscrit de Podio (tom. 1, fol. 87). Gissey, dans ses Dis- cours historiques de Nostre Dame du Puy (1620, p. 115, et édition de 1644, p. 120), relate également, mais dans un ordre plus conforme à leur position respective, ces « trois portes et yssues sur les champs qui sont, dit-il, » les portes de Sainct Robert, de Jayant, de S. Ag- » greue. » Or, le mot ayant n’est ici qu’une variante de géant, comme le prouve la chronique de Jean Burel sur la ville du Puy: « Audit an (1574) arriva au Puy ung grand homme » comme ung jayant de grandeur de neuf pieds et » demy... que faloit donner un sol pour le veoir… » (1). On remarquera que la même forme du mot, sauf une légère variante, se retrouve dans celui de Gayant que les habitants de Douai donnent à une image gi- gantesque qu'ils promènent en triomphe dans leurs fètes communales et qu’ils appellent, en outre, Jéhan Gélon. 1) Chronique manuscrite, tom. 1, p. 93. (Bibliothèque du Musée. 520 LE GÉANT Déterminons maintenant la position qu’occupait la porte en Jayant dans l'enceinte claustrale. Si nous in- terrogeons notre chroniqueur Médicis, il nous répond qu'au jubilé de 1524 les consuls de la ville, ayant arrêté des mesures de police pour faciliter la circulation des pèlerins, décidèrent que ceux-ci, après avoir fait leurs dévotions dans l’église cathédrale, « sortiraient par la » porte devers St Jehan, passant les uns vers la grande » escole, tirant vers la maison de Chalancon et cha- » pelle de St Pierre le Vieulx et tireraient oultre, pre- » nant le chanton à main gauche, allant vers la porte » en Jayant, prendraient le violet ou ruete qui des- » cend vers la porte St-Agreve, et de la out bon leur » semblerait (1). » L'ilinéraire est clairement tracé, et avec l’aide du plan conservé à l'évêché, à l’aide des restes encore re- connaissables de la chapelle de Saint-Pierre-le-Vieux, autrement dite chapelle Sainte-Catherine (2), et des vestiges de deux ruètes conduisant l’une à la porte Saint-Agrève, l’autre se dirigeant vers le passage men- tionné dans l’acte de 1496 déjà cité, on arrive à une ancienne porte de ville qui est aujourd'hui murée, C’est là, sans doute, la porte en Jayant, c’est-à-dire en ce terroir du Géant, où l’on voit la tète d'Henri IV (3). (1) Chronique manuscrile , &. 1, fol. 98. (Bibliothèque du musée.) (2) « En ladite année (1605) fust fondee en cette ville la religion de madame > Ste Catherine de Seyne en lesglise de St Pierre le Vieulx. » {Chronique de Burel ,t.1, fol. 428.) (3) Nous insistons sur le sens précis de cette dénomination qui s’'appliquait bien plus au terroir qu'à la porte elle-même. Ordinairement on l'appelle /a porte DU ROCHER DE CORNEILLE. 521 La mème appellation Jayant apparaît également en 1428, dans un texte écrit en langue romane. C’est une délibération des consuls de la ville, concernant aussi des mesures de police pour un jubilé, et que nous à fidèlement conservéenotre chroniqueur Médicis: « Item » entre tous lous autres luocs de la viala (ville) et claustra (cloître) den lon advisar que longara a cor- » nilio (Corneille) a lostal de monseignor lo viscomte » et que sia refortada la posterla et aya garda en » Jayant (1). » À une date encore antérieure, en 1395, on trouve mentionnées des maisons situées « au pied des seps du lieu de St Agreve confrontant avec les maisons de messire Pons de Crottes appelées de Jayant et avec la muraille du cloistre du Puy (?). » * Deplus amples recherches fourniraient probablement ÿ EN Jayant plutôt que DE Jayant. C'est que la porte avait fini par prendre le nom du terroir. On s'explique ainsi pourquoi, dans des textes antérieurs, notam- ment dans un accord de 1343, entre l’évêque et le chapitre, on voit la même porte nommée portale de Baudo. Nous bornant à signaler ici cet ancien vocable, sans en rechercher l’étymologie, il sufira de remarquer l’analogie qu'il offre avec celui d’un mont situé vers les limites du Vivarais et du Velay: Lauzon dérivé de éaudon par permutation du 4 en 4, comme nous l’avons montré ailleurs pour dolezon, appelé doledon dans de très-anciens documents. Baudo ou baudon avec sa syllabe finale don ou dun (mont) évidemment celtique, si- gnifie donc le ont bau. La diphtongue au répondrait-elle ici à 47, comme dans sausac plus anciennement appelé salsac, et aurions-nous ici un souvenir de bal, bel, belus ? nous n'oscrions l’afirmer. (1) Manuscril de Médicis, t. 1, fol. 44. (2) Inventaire des titres de MM. du chapitre de l'Eglise St Agrepve. 1633. Il y est dit que le document cité est une « peau parchemin receu par M. Jean Fonthonae netaire, en 1395. » (Arch. dép.) 922 LE GÉANT d’autres exemples de cette variante de géant, appli- quée au même territoire. Mais ce vocable même, suivant les règles qui, dans le cours des siècles, prési- dent aux modifications successives du langage, déri- vait sans doute d’un mot emprunté à un idiome plus ou moins primitif et dont il serait plus intéressant de retrouver quelques traces dans les anciens docu- ments. x Nous croyons avoir découvert cette antique appel- lation dans un autre nom que portait le même terri- toire. e Le plan conservé à l'évêché mentionne, à la date de 1592, une « rue allant à la muraille de ville, quartier appelé de Ganat, » qui, d’après ce document, était à la même place que le terroir del Géant. La désinence at ou ac, qui, dans le celtique, ex- prime, dit-on, l’article le, est si fréquente en France, et surtout dans le Velay, pour désigner un lieu, qu'il devient inutile d'établir par des exemples cette incon- testable signification. Quant au radical gan, celtique également, il peut se traduire par géant. On en voit la preuve dans le nom du Kimri morgan (mor-gan, géant où génie de la mer), personnage qui, d'après M. Henri Martin, vers les premières années du Ve siè- cle, «ayant traduit son nom en celui de Pelagius, quitta le culte, mais non l'esprit druidique (1). » (1) Henri Martin, Hist. de France. 1855. Tom. 1, p. 347. Il est remarquable que dans /es grandes et inestimables cronicques, on trouve la fée Morgain avec les noms d’autres fées, des anciens rois bretons, de Merlin, de Mélusine, ete, DU ROCHER DE CORNEILLE 525 Ce n’est pas, sans doute, fortuitement que le mème radical existe dans les génitifs grecs et latins yryayros (ys-yay-ros) et gigantis (gi-gan-tis). On le retrouve éga- lement dans le nom du géant légendaire Gargantua (gar-gan-tua), dont la science fait remonter l’origine jusqu’à l'ère celtique , comme on le verra dans la suite de ce mémoire. C’est encore la mème signification que nous offre la pierre gante, située près du château de Tancar- ville, et « qui s'élève à deux cents pieds au-dessus'du niveau de la Seine, comme un immense toit qui sur- plombe (1). » Cet ancien nom ganat persista au moins jusqu'au XVIIe siècle pour désigner, comme son synonyme jayant, le territoire du géant. On le retrouve, un peu altéré par l'addition d’une lettre, dans le mot ganhac qui, par doublement de la particule, devient celui de deganhac et mème de deganhanc mentionné en 1589 par le chroniqueur Burel, à l’occasion de réparations faites aux fossés de la ville (2), dans le mème territoire appelé ailleurs del Géant, en Jayant et de Ganat. qu'on regarde comme remontant à une époque reculée. Brunet, Nofice sur deux romans intitulés : les Chroniques de Gargantua. 1834. p. 13, cité par M. Bourquelot, Nofice sur Gargantua. {Mém. de la Soc. des antiy. de France, tom. XVII, p. 435.) Ne pourrait-on pas signaler aussi le radical celtique gan dans le latin genius, sauf la permutation de la voyelle & en e qui a lieu quelquefois, surtout quand un mot passe d’une langue dans une autre. (1) M. Bourquelot, Notice sur Gargantua, p. 415. () Chronique d“jà cit'e , t. 1, fol. 192, 524 LE GÉANT . Une estime générale du cloître (1), écrite en 1599, relate également le terroir de deganha. Enfin nous avons trouvé la variante degaignac dans un titre de 1608. Ces variations d’un mot inconnu alors à la langue française, et par conséquent sans orthographe fixe, tenaient soit à l’inadvertance de l'écrivain, soit à la prononciation qui lui était propre. S'il était né en Au- vergne, il devait, suivant l'usage de son pays, pro- noncer ganhac, alors qu’au Puy on disait ganac ou ganat. Aussi retrouvons-nous à peu près cette dernière forme dans le nom de la porte de Canat (porta de Canatus) synonyme de la porte de Jayant, que men- tionne un cérémonial latin manuscrit de l’église cathé- drale, dont l'écriture parait être du XVIIe siècle (2). Le lecteur nous excusera d’avoir multiplié les cita- tions; elles étaient nécessaires pour établir, par leur nombre, par la diversité des variantes du même nom et par le type celtique de l’une d'elles, la persistance de la tradition. Il est donc croyable que, bien des siècles avant le règne d'Henri IV, le rocher de Corneille o (1) Arch. dép. : (2) En voici le passage : « In festo ascensionis hæc specialiter servantur. Finita 34 sacerdos indutus paramentis missa cum diacono et subdiacono.…..... pergit processio per elaustrum juxta portam capituli transit juxta monasterium Stæ Catharinæ, descendit juxta crucem quæ est ante portam de canatus, vadit ante januam ecclesiæ Sti Georgii et ad cireuitum cœmeterii Sti Georgii, sisti- tur ante crucem et in ingressu ejusdem cœme:esii et ibi cantatur respons et... quo functo reditur ad forum teloneum....… » Cérémonial de l’église du Puy, p. 10. — (Au secrétariat de l'évêché.) DU ROCHER DE CORNEILLE. 925 offrait, comme aujourd'hui, la représentation natu- relle d’une tète colossale , image d’un géant qui avait donné son nom au territoire. HI Les géants, on le sait, ont joué de tous temps et dans les fabuleuses origines de tous les peuples, des rôles plus ou moins héroïques. En France, il semble que le type populaire est surtout « le fameux géant » » éternisé par Rabelais, Gargantua, qui passe parmi nos villageois pour avoir eu une influence très- grande sur les destinées de leurs pères, partageant avec les fées le privilége d'établir son patronage sur les pierres druidiques et. sur les monuments na- turels de forme gigantesque et singulière (1). » « Bien que sa nature, dit M. Bourquelot dans sa sa- vante Notice sur Gargantua, soit une de celles aux- quelles notre imagination attribue une supériorité physique ou morale sur les hommes, le peuple songe à lui sans terreur et parle de lui avec une sorte de bienveillance respectueuse. C’est une puissance éteinte, mais qui vit encore dans les souvenirs. » La popularité de Gargantua est grande surtout Lt (1) Mie Amélie Bosquet. La Normandie romanesque et merveilleuse. 1845. Page 177, 526 LE GÉANT dans les campagnes, au fond des villages et des » hameaux. Sur tous les points de la France, les » paysans ont à conter au voyageur des prodiges » incroyables de sa force, des miracles de son appétit. » son nom est resté attaché à une foule de monu- » ments, et particulièrement à ceux que l’on appelle » monuments celtiques ou druidiques. » (1). « Allez du Midi au Nord, dit ailleurs M. Bourque- » lot (2), de l'Est à l'Ouest, vous trouverez répandus çà » et là ses drues, ses galets, ses bottes, son fauteuil, » sa soupière, ses lunettes, sa pierre à repasser. » On a signalé aussi ses galoches, sa hotte, ses dents canines, ses fientes, son tombeau. Partout ce ne sont que dolmens, peulvens ou menhirs , pierres tournantes , roches trouées, tumuli, buttes et pics d’un aspect fantastique. Des montagnes qu’on appelle en France et en Italie monts gargans ont retenu son nom. Ce mot, dont un des radicaux gan, comme on l’a vu, signifie géant, explique pourquoi notre personnage ne porte parfois que cette dernière qualification , tandis que très-sou- vent il a conservé aussi celui de Gargantua. Ii serait trop long de rappeler toutes les joyeusetés du géant, tous les épisodes de sa bizarre histoire. Nous n'en citerons que certaines particularités qui, sauf des détails plus où moins variés, se rapportent à notre pays aussi bien qu'à d’autres contrées. Souvent on a vu y (A) Notice sur Gargantua. (Mémoires de la Soc. des antiquaires de France, l. XVII, p. 413.) (2) Description des monuments celtiques de Liours. Bulletin de la Soc. biblioph. hist. Août 1838. DE ROCHER DE CORNEILLE. 521 Gargantua franchissant à grandes enjambées monta- gnes et vallées, et parfois, comme à Hanz dans le pays des Grisons, « dans l'attitude du colosse de Rhodes, » debout sur deux rochers et se penchant pour boire » d'un trait la rivière qui coule à leur base. Il s’est » trouvé dans la mème position près de Beaugency, et » l'on prétend qu’il posait jadis l’un de ses pieds sur » la pierre tournante et l'autre sur la pierre d'Our- » cières, qui en est distante d'environ trois lieues. Les » Francs-Comtois racontent aussi qu’en se désaltérant » dans les rivières du Doubs et de la Drouvenne, Gar- » gantua les mettait à sec (1). » « Sur la Creuse, aux limites du Berry, dit Georges » Sand dans l’une de ses spirituelles pages des Lé- » gendes rustiques, on retrouve Gargantua enjam- » bant le vaste et magnifique bassin où la rivière » s’engouffre entre le clocher du Pin et celui de Ceaul- » mont, plantés sur les bords escarpés de l’abyme. » Un bac rempli de moines vint à passer entre les jam- » bes du géant. Il crut voir filer une truite , se baissa, » prit l'embarcation entre deux doigts, avala le tout, » trouva les moines gros et gras, mais rejeta le bateau » en se plaignant de l’arête du poisson (2). Au Puy on dit aussi que Gargantua, poursuivant sa course Sur nos montagnes , posa un pied sur la plaine de Rome et l'autre sur Corneille et, se penchant, il () M. Bourquelot. Notice sur Gurgantua, p. 417. (2) Georges Sand. Légendes rustiques, avec planches, dont les dessins très-intelligemment exécutés, sont dus à M. Maurice Sand, p. 18. 528 LE GÉANT ingurgita la rivière de Borne et, de même qu'en /yan- tant, pour nous servir du mot de Rabelais, le géant avait formé le mont Gargan, à peu de distance de Nantes (1), il donna naissance, par un semblable procédé, au pic pyramidal d’Aiguilhe. Les meuniers, étonnés que l’eau manquât subitement à leurs mou- lins, constatèrent le fait qu'ils ont transmis à la pos- térité. Une autre fois la Loire fut aussi agoutée, suivant l'expression des habitants de l'£mblavès, large et belle vallée, à peu de distance de la ville du Puy, que signa- lent à l'attention des observateurs de curieux vestiges des époques celtique et gallo-romaine (2). Le géant, après avoir exterminé, dans le vallon des Seuils, une horrible bête unicorne, et délivré du diable le village de Lavoüte, avait mis un pied sur le mont la Borie, un autre sur Ccurant, les deux mains l’une sur Ja- laure l'autre sur Clairgot et « la gorge sur Gour- gaillat, » profonde échancrure entre les rochers qui donne passage à la Loire (3). Le fleuve, grossi par une inondation, entrainait un chargement de bois épineux. (1) D'après M. Bourquelot. Notice sur Gargantua, p. 419. (2) Voir la note à la suite du mémoire. (3) C'est aussi à Gourgaillat que Les sorciers, lorsque par un temps sombre l'orage menace l'Emblavès, se débattent sur la direction à donner aux nuages. Au reste, de ce point de la vallée, les vents du sud-ouest, aussi inofensifs que le sont les sorciers , n’amènent dans la plaine que très-rarement des orages. M. l'abbé Roche a consigné cette donnée météorologique dans une intéressante communication lue au Congrès scientifique de 1855 et nous devons à M. Avi- nain, instituteur public à Vals, originaire de l’Emblavès , la eurieuse légende concernant cette localité, DU ROCHER DE CORNEILLE. 529 Le géant avala tout : char, bois, bœufs et bouvier, di- sant : ce n’est qu'une borde (brindille). Le même fait est raconté au village de Peyredeyre, dans les abruptes gorges de la Loire que dominent, à une grande élévation, les escarpements granitiques de Saint-Quentin. La légende du géant, qu'ici on nomme Samson, s'associe, dans les contes de la veillée, à celles des fées, de la trève et autres apparitions noc- turnes ainsi qu'à diverses dénominations curieuses ou fantastiques, telles que /& Fount des Roumis, fontaine sainte, lieu d’antique pèlerinage comme son nom l'in- dique, le fer du diable, fer de cheval artistement sculpté en creux dans une roche, à cinq mètres au- dessus du niveau du fleuve et en regard d’un vaste rocher à crête aiguë et comme crénelée, qu'on ap- pelle le château des Sarrasins, au-dessous duquel nous avons observé des vestiges d’antiquités gallo- romaines. | On à vu aussi le géant les pieds posés sur deux hautes gardes (monts volcaniques isolés) et buvant {a Borne, amouré au vieux pont du village du même nom, près d’une de ces bornes (cavernes) très-proba- blement celtiques dont la haute antiquité est attestée par la dénomination qu’elles ont imposée de temps immémorial à la rivière et au village. Non loin de là apparaît l'ancien et pittoresque chà- teau de Larochelambert où les siècles ont laissé des souvenirs de tous les âges, depuis les grottes ou bornes (celtiques probablement aussi), dans l’une desquelles un bloc énorme et isolé de la roche volcanique, jadis peut- être roche branlante, n'est, dit-on, que la trempe de TOME XXII. 22 550 LE GÉANT Gargantua (|), depuis ces cavernes, mystérieux séjour des fées ou dames que rappelle le nom de Aoches-Dames donné à cette partie du terroir, depuis la voie romaine dite Bolène (voie des boles ou colonnes) et les vestiges d’un antique campement, jusqu’au château réédifié en partie au XVe siècle, et qu'embellit vers la fin du XVIe une de ses châtelaines, Hélène de Lestrange (2). Enfin le fleuve et ses affluents ne suffisant plus sans doute à étancher sa soif, le géant se piqua le petit doigt avec une épingle et il en sortit une eïe (une Loire). IV. Quelle est dans notre pays l’idée traditionnelle qui se rattache à ces récits naïfs ainsi qu'au souvenir du géant empreint sur le rocher de Corneille, ou plutôt quelle est la commune origine des traditions analogues répandues sur tous les points de la France? Cette der- nière question a exercé la sagacité des érudits. Suivant l'opinion de M. Bourquelot, qu’il appuie de raisons concluantes, « Gargantua n’est pas né au XVIe siècle, 1) Tremye, mot dificile à traduire : les uns l’appliquent à chacune des tran- ches de pain que nos campagnards mettent dans leurs soupes, d’autres à la soupe elle-même. (2) Notre honorable ami M. Vinay, avec qui nous avons soigneusement étudié cette intéressante localité, nous a, le premier, signalé le dernier trait de la légende de Gargantua que racontent joyeusement les habitants du canton de Saint-Paulien. _— DU ROCHER DE CORNEILLE. 551 » dans la féconde et railleuse imagination de Rabe- » lais. » C'était aussi l'avis de M. Eloi Johanrieau dans son édition de Rabelais, et Georges Sand pense égale- ment qu'avant le curé de Meudon, il y avait « une lé- » gende populaire de Gargantua, dont le grand satirique » se serait emparé comme Gœthe de la légende de » Faust, comme Molière de la légende de la statue du » Commandeur (1). » Quant à l’origine des souvenirs attribués à Gargan- tua , au lien qui peut en ramener la fable à un ordre de faits plus ou moins réels, M. Bourquelot est conduit à admettre « que la tradition du géant est antérieure » à la domination romaine et qu'elle remonte aux » Celtes... On trouve, ajoute-t-il, en dehors des restes » druidiques, certains objets décorés du nom de Gar- » gantua, mais les monuments celtiques n’en restent » pas moins les plus importants et les plus nombreux, » soit des hommes, soit de la nature, auxquels le » peuple rattache le souvenir de son géant favori. » il est plus difficile « de découvrir ce que représente » le personnage de Gargantua parvenu depuis l'ère » celtique jusqu'à nous... Peut-être l'Hercule gaulois » est-il une première forme de notre Gargantua ; peut- » être le géant des traditions représente-t-il quelque » autre héros dont le souvenir n’est conservé dans au- » cune histoire écrite ; peut-être enfin Gargantua doit-il » être regardé comme une sorte de personnification de » la race gauloise en lutte avec les Romains. » ÿ (1) Légendes rustiques, p. 17. 592 LE GÉANT Les données acquises à la question ne l'ont pas com- plètement résolue. Toutefois serait-il impossible d’éta- blir un rapprochement satisfaisant entre le héros des traditions et ces figures de géants qu'aux fêtes commu- nales de Douai et de différentes villes de Flandre et des Pays-Bas, on promène en triomphe sur des chars déco- rés aussi des images d’autres personnages? Ne sait-on pas que ces solennités ont une origine inconnue et per- due dans la nuit des temps? Tout porte à croire qu’elles remontent à un àge plus ou moins reculé. On en trou- verait une intéressante preuve en comparant le char triomphal du géant de Douai à un très-curieux groupe de figures en bronze qui, en 1551, fut découvert avec d’autres débris antiques pieusement enfouis dans un tumulus à Judenburg en Styrie (Autriche). Iei égale- ment c’est un char sur lequel sont placées plusieurs figurines debout et tenant divers attributs, et au milieu desquelles est l'image d’une femme d’une taille beau- coup plus élevée, une sorte de géante, héros principal de la scène (dont le sexe exclut l'hypothèse du mythe d'Hercule). La plupart des autres objets trouvés dans cette sépulture par incinération rappellent, d'après leurs formes, des antiquités recueillies en France et qu'on regarde comme étant d’une époque voisine de l'ère celtique (1). A voir ainsi chez différentes nations des représen- tations analogues, à les voir au nord de la Gaule 1) Dr. M. Robitseh. A/terthümer von ausgrabungen bei judenburg mitthet- lungen des historichen vereines für steiermark drittes heft. Graz. 1852, ps 67 et planches. e DU ROCHER DE CORNEILLE. 299 se perpétuant à travers les siècles jusqu'à nos jours, ne semblerait-il pas que, dès le principe, les géants qu'elles offraient à la vénération nationale auraient pu ètre des personnifications de peuples, ou plutôt, suivant l'usage des anciens, des images de leurs génies tutélaires ? La mème conjecture n’expliquerait-elle pas égale- ment l'existence, dans les traditions de la Grande-Bre- tagne , d’un semblable génie dont la qualification gurguntum où gerguntum est approchante de celle de notre Gargantua ? C'était, dit-on, «un roi qui passait pour avoir fondé le château de Norwich et dont les habitants de cette ville faisaient figurer l’image gigan- tesque dans leurs cérémonies publiques » (1), par un remarquable rapport avec les solennités de Douai et d’autres villes. Les mots gan, jayant, gargantua, et gerguntum, ne pouvant être que des expressions qualificatives éga- lement appliquables aux génies de différents peuples, nous invitent dès lors à rechercher le vocable patro- nymique qu'aurait eu , dans notre hypothèse, le génie national de la Gaule. A cet égard les noms de certains géants traditionnels appellent l'attention par leur physionomie celtique .. tels sont, entre autres , le Druon Antigon , d'Anvers ; (1) M. Bourquelot, Notice sur Gargantua, p. 127 des Mémoires de la Societé des Antiquaires de France, t. xvir , d’après Nichols, Progresses f. 4. Elisabeth, Vol. 11, p. 5.616, cité par M. Brunel /Essais d’études bibliogr. Sur Rabelais. M. Brunet cite également Nathdrake (Shakspeare and his times, 1817, t. 1, p. 199). 554 LE GÉANT l'Ommegan de Bruxelles, Jéhan Gélon de Douai (1), appellations mystérieuses aujourd'hui, mais qui, dans le principe, durent avoir une signification. Le dernier de ces noms semble prêter surtout à une explication plus ou moins plausible. Sans nous arrè- ter au prénom Jéhan, qui probablement n’est qu’une variante du mot géant, Gélon peut offrir deux radi- caux (gél-on), qu'il y aurait lieu d'examiner. La désinence on signale d’abord une de celles parfois em- ployées par les Gaulois vers le [er siècle de notre ère pour les noms des génies locaux , témoin l'appellation de la divinité tutélaire de notre ville, Adidon , d'après une antique épigraphe (2). Les inscriptions en men- tionnent d'autres tels que Jliron, Dunsion , Ageiïon, Larrazon, Abeillion, etc., qui étaient en même temps, pour la plupart , des noms de lieux et de génies to- piques. Nous aurions encore dans gélon le radical gél, contraction très-approchante de gael, nom primi- tif des Gaulois. Le géant de Douai pourrait donc rappeler par son nom le vrai type du génie de la Gaule. Ce n’est là, sans doute, qu'une simple conjecture ; il faut cependant con- venir que tout paraît l'appuyer dans la représentation (1) M. Quenson, dans sa Nofice historique sur le géant de Douai, a supposé que ce nom serait d'invention moderne, parce qu'il aurait paru pour la première fois dans un drame imprimé e1 1801 à Dozai. Mais ce nom pouvait être connu auparavant comme celui de Gargantua l'était avant le XVI: siècle, époque où Rabelais Pécrivit pour la première fois. (2) Ce nom fut probablement celui du lieu divinisé. Adidon (adi-dun) mont Adi se retroyve en effet, sauf la permutation du 4 en », motivée par des exemples, daas l'appellation actuelle du mont Ant. DU ROCHER DE CORNEILLE. 339 du héros : sa structure gigantesque, son équipement guerrier, le cortége de figures secondaires qui com- prend sa famille, diverses corporations de métiers et surtout les différents ordres de FEtat (hormis le clergé) (1), le tout combiné non-seulement pour pro- duire un grand effet d’admiration et de crainte , mais peut-être aussi pour symboliser la nation (2). Le génie de Ja Gaule prendrait ainsi son rang hié- rarchique dans cette nombreuse famille de génies topiques qui, d'après les idées religieuses de nos ancè- tres, protégeaient tous les lieux: les villages, villes, pays et nations. La mème hypothèse trouverait enfin comme une confirmation dans l’un des actes les plus solennels de la Gaule, alors que, nouvellement conquises par les Romains, ses soixante cités (ou pays) consacraient près de Lyon un temple à Rome et à César Auguste et que, dans ce sanctuaire dédié &insi aux génies suprèmes de l'empire , elles personnifiaient aussi leurs génies tuté- laires par soixante statues devant lesquelles s'élevait la statue colossale de la Gaule (3). {1) M. Quenson, Notice historique sur le géant de Douai, p. 497 et suivantes. Ce travail offre des notions nombreuses et remarquables par une solide éru- dition. (2) L'épouse du héros est appelée Marie Gagenon. Elle est escortée de ses trois enfants, auxquels le peuple a donné les naïves appellations de Jacquot , Filion et Binbin. Serait-ce encore une allasion aux /rois divisions de la Gaule indépendante ? (3) Strabon. liv. 1v. Tit. Liv., Epitome, Liv. Lxxxvir. Henri Martin. Histoire de France 1855, t. 1, p. 198. Les notes tironiennes paraissent avoir conservé les noms de ces soixante génies de la Gaule. Ils sont éerits au maseulin , par exemple: Vellaus, Sequsiavus, Gabal, ete, d'où Fon peut croire qne le génie 556 LE GÉANT Si cette représentation nationale, qui est attestée par des témoignages historiques, fait supposer que la Gaule en s’érigeant une statue, figurait ainsi son génie principal , si cette image avait des proportions colos- sales en rapport avec la grandeur de la nation, serait-il impossible d'admettre que tous ces géants tradition- nels, si connus en France soit par des légendes, soit par des représentations et des fêtes extraordinaires , répondissent à la même pensée symbolique qu'avait exprimée dans le temple la statue de la Gaule ? Dans cette supposition, qui n’a rien d'invraisemblable , on comprend combien serait curieuse laltière et gran- diose image qui est empreinte au Puy, sur le rocher de Corneille, puisque l'imagination des Gaulois en aurait fait un type monumental de leur nationalité. Rien ne s’opposerait, d’ailleurs, dans la localité, à ce que cette personnification remontât, comme d’autres traditions de géants, jusqu’à l'ère celtique , suivant les données émises par M. Bourquelot. N’avons-nous pas au Puy même d'intéressants souvenirs de ces temps reculés : des grottes taillées dans le roc, dont certaines ont été trouvées sous un amas de matériaux gallo- romains au jardin de l'évêché, des médailles gauloises découvertes au mème endroit, une sépulture exhumée dans le sol de la prairie du Breuil, et que nous , des Gaulois était aussi masculin comme le géant de Douai. On avait déifié éga- lement les trois Gaules, /a Belgique, la Celtique et l’Aquitanique, dont on voit les figures sur une médaille de l'empereur Galba, avec la légende tres galliw, ce sont aussi trois têtes d'hommes couronnées de lauriers. (Voir dom Martin, tome 11, p. 155.) DU ROCHER DE CORNEILLE. 391 avons fait connaître dans un précédent mémoire , enfin d'autres monuments connus soit par de curieux restes, soit par des légendes qui semblent imprimer à la localité comme un caractère de centre druidique ? C'est surtout le dolmen du mont Anis, dont nous avons fait ailleurs l'historique (1), cette très-grande pierre en forme d'autel (petra prægrandis ; lapis in modum altwris prominens) (2), cette pierre naïve, cet autel des sacrifices (3) dont parlent les légendes sur l'église du Puy, monument d’une telle importance qu'après avoir été très-probablement respecté par les Romains et conservé dans un magnifique temple, et par les premiers chrétiens, dans l’église qui lui avait suc- cédé, il fut maintenu longtemps à la même place, vers le milieu du chœur de cette cathédrale. La grande table du monument, brute et de nature phonolithique, qu’on désignait sous les noms de pierre sainte, pierre aux fièvres, transférée ensuite dans le pavé d’une nef latérale, fut placée, vers la fin du dernier siècle, à l'état de fragment, dans le pavé du palier supérieur de l'escalier principal, où l’on voit encore ce dernier débris. Parlerons-nous du nom que les siècles ont conservé au rocher de Corneille (Cornelia en l'an 1130 , Cornilio en 1428, Cornille au XVI: siècle) et dont la physionomie (1) Ann. de La société acad. du Puy, tome xVIrIT, p. 237 et Mémoire sur les origines de la ville du Puy dans les Comptes-rendus du Congrès scientifique de France de 1855, tome 11, p. 330 et 407. (2) Légende rapportée par le chroniqueur Médicis de Podio, tome 1, fol. 5. 3) Légen’e dan: la chronique de Médicis, tome 11, fol. 239, 252. 338 LE GÉANT gauloise se révèle par une évidente analogie avec des appellations bien connues sous ce rapport : les Carneilloux qui, en Bretagne , ont paru indiquer des cimetières; Carnac, localité célèbre où d'immenses rangées de peulvens « offrent, suivant la légende, les soldats de César vaincus et changés en pierres par saint Corneille, » sous l’invocation duquel est l’église de Carnac; la forèt de Carnoet (Finistère) où l’on a signalé de curieuses sépultures de l’époque celtique (1); la Cornoucille de France et la Cornouaille d'Angleterre, pays intéressants par leurs monuments celtiques (2) ? Au lieu même où des textes déjà nombreux rappel- lent, comme on l’a vu, le terroir du géant, dans la roche de Corneille , existent ces vastes anfractuosités dont le fond ténébreux , ainsi qu'il a été dit, découpe en silhouette le portrait du géant. Au moyen-âge la partie inférieure de ces cavités avait reçu une destina- tion d’une certaine importance : on en juge par une sorte de nef voütée, de structure ancienne et correcte, dont les restes éveillent l'idée d’un édifice religieux. On peut croire aussi, à l'aspect du roc, brut en certaines parties et taillé dans d’autres, qu'à une époque antérieure la caverne devait former comme un antre mystérieux qu'on avait peut-être approprié aux pratiques d’un culte plus ou moins primitif. (1) Alfred Maury, Des grandes forêts de La Gaule. (Mémoires de la Soc. des anliq. de France, tome x1x, p. 271.) ) C'est probablement à un lieu dénomm* comme notre rocher que la famille, Cornelia, Wès-connue dans l'antiquité romaine, devait avoir emprunté son ap pellation. DU ROCHER DE CORNEILLE. 559 Au dehors la paroi verticale du roc présente égale- ment, un peu au-dessous de l’image du géant, de lon- gues rainures et d’autres traces de la main de l'homme, et dans le sol que nous avons rapidement fouillé, ont été mises au jour des substructions, lesquelles, à considérer divers fragments de poterie et de tuiles à rebords {tegulæ hamatxæ), pourraient bien rappeler l'antique existence d’un monument gallo-romain. A ces données qui, dans la ville du Puy, concordent avec d’autres preuves concernant l’oppidum gaulois, devenu ensuite, comme on le sait, colonie romaine, qu’on ajoute les prestiges du site, l'étendue du paysage qui de ce point se déploie jusqu'au lointain horizon formé par les hautes cimes du Mezene, et l’on com- prendra qu'un tel lieu puisse évoquer dans l'esprit du spectateur d’antiques souvenirs. Dès lors serait-il téméraire de supposer qu'ils seraient confirmés par la qualification et l’image du génie gigan- tesque à l'honneur dnquel auraient pu être consacrés par un culte, d’abord la sombre caverne, puis auprès d'elle un édifice gallo-romain auquel aurait succédé une chapelle (1)? Si nos inductions sont plausibles, elles in- vitent à interroger encore les documents et les profon- deurs du sol pour en exhumer de nouvelles indications (1) On a signalé en France de semblables transformations des monuments religieux. Probablement il en fut ainsi au village de Ceyssac où l’église, de style roman, est enfermée, en presque totalité, dans une caverne produite par une grande anfractuosité du haut rocher volcanique aux pieds duquel est situé le village. On sait que la roche offre aussi de nombreux vestiges de grottes taillées dé main d'homme et indiquant un curieux ensemble d'anciennes habitations. Dans l'une êe ces hornes, M. le général Pellion a recueilli un instrument 340 LE GÉANT DU ROCHER DE CORNEILLE,. sur cet intéressant sujet. Ges recherches, peut-être un jour, résoudront plus complètement le curieux pro- blème dont nous avons essayé l'examen. Un fait, au moins, reste acquis à la science : le souvenir authen- tique, dans la ville du Puy, du géant qui, d'après d’érudites observations, vit dans les traditions des lieux remarquables par des monuments naturels de gran- diose structure et surtout par des monuments de l’épo- que celtique. de pierre en forme de hache et semblable à plusieurs autres qui nous ont été remis par des habitants du village. Quant à l’église, il paraît bien qu'elle a succédé à un édifice gallo-romain, à en juger par des débris architecturaux d’un certain caractère qui ont été trouvés au voisinage de cet édifice. On peut donc croire qu'un temple l'avait précédée à peu près sur le même emplacement, et qu'il aurait succédé lui-même à quel- que sanctuaire primitif et formé par la caverne. NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS DANS LA HAUTE-LOIRE PAR M. AYMARD Vice-Président de la Société académique du Puy La vallée de l'Emblavès offre, comme beaucoup de loca- lités de la Haute-Loire, des traditions et des monuments antérieurs à l'introduction du christianisme dans la con- trée. Entr’autres vestiges qui paraissent évoquer des souve- nirs de l’âge celtique, citons le peulven dit La pierre du donat, les caves ou bornes dites des Sarrasins à Mazey- rat, les roches nommées de Saint-Martin et des haches ou coins de pierre (cellæ) qu’on rencontre fréquemment dans le sol. À l’époque gallo-romaine se rattachent des restes de voies attestées surtout par des inscriptions telles qu’un dé- bris de colonne milliaire au nom de l’empereur Claude (1) d) Ce débris a été trouvé près de Beaulieu , au terroir appelé Curlande. Les travaux de culture ont fait découvrir au même endroit un pavé de route. Il était formé, nous a-t-on dit, de petites pierres taillées carrément et finissant en coins. Nous en avons retrouvé des spécimens de nature volcanique dans un mur voisin. L'inscription est fort incomplète. Néanmoins ce qui subsiste, com- paré à d’autres textes analogues, en permet la restitution av moins partielle, 542 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS et une autre inscription qu'on voyait autrefois à Lavoüte . et qui, dédiée par la cité des Vellaves à l'épouse de l’em- pereur Marc Antoine Gordien, devait être placée sur une route, peut-être celle dont le nom s’est conservé dans ce- lui de vio d'Antone (À). On connait les résultats intéres- sants des fouilles -effectuées à Margeaix par les soins de M. de Becdelièvre et qui mirent au jour de belles sculptu- res , un fragment de labrum, des dauphins, des têtes de Voici ce fragment qui semble indiquer la même date que l'inscription de Poli- gnac, également au nom de l'Empereur Claude : DRUSIF Tiberius Claudus DRUSI Filius GERMA Cœsar Augustus GERMA MAX nicus pontifez MAXimus rSTV tribunitiä potESTate V Il est regrettable qu'on n'ait pas la fin de l’épigraphe, qui aurait surtout donné le nom (encore celtique) de la ville, à partir de laquelle on comptait les distan- ces sur cette route. (1) Cette inscription, qui est également inédite, avait été vue, vers les pre- mières années du XVII® siècle, dans l’un des coins de dehors de l’église pa- roissiale de Lavoûte-sur-Loire (probablement à l'angle de l’apside, sur une face de retour aujourd’hui cachée par un mur de la sacristie) , par Ghabron, auteur d’une histoire manuscrite de la maison de Polignac. Notre savant ami, M. Du- molin, président à la Cour impériale de Rouen, ayant déconvert ce manuserit, a bien voulu nous envoyer la copie suivante de l’épigraphe telle que l'avait re- levée Chabron : CONIVGI IMP D.N.MARCI AN TONI GORDIA NI PER FEL AVG CIVITAS VELLAVORVM LIBERA. DANS LA HAUTE-LOIRE. 545 nymphes et des statues entières ou en débris de quatre vénies des saisons et des eaux (1). Sans mentionner bien d’autres restes qu’on observe en différents points de la vallée : tuiles à rebords, poteries, médailles , etc. , signa- lons encore des morceaux de cippes funéraires et des pierres d'appareil antique encastrés dans les murs de l’an- cienne église de Lavoüte (2), et des pierres analogues que nous avons trouvées au village de Beaulieu (5). Mais de toutes ces antiquités les plus curieuses sont, sans contredit, les roches à bassins, dites de Saint-Martin : mystérieux témoins des plus anciens âges dont elles ont gardé un des secrets, vénérées depuis des siècles, elles nous révèlent un type remarquable d’une classe de monu- (1) Annales de la Soc. académique du Puy, 1835-1836, p. 38. (2) On y reconnaît surtout deux ou trois cippes, dont l’un offre un reste de bas-relief. C’est la partie inférieure d’un personnage en marche, traité dans un bon sentiment de dessin et de sculpture. Dans un mur d’une maison partieu- lière, nous avons observé également un morceau de corniche sculptée qui nous a paru provenir aussi d'un monument gallo-romain, ainsi que des tuiles à re- bords et autres objets qu’on trouve fréquemment dans la localité. (3) Entre autres un cippe quadrilatère qui servait jadis de support au bénitier de l'église et qui a été placé récemment au-devant du portail. A la face anté- rieure de ce petit monument est sculpté en bas-relief le buste du défunt, sup- porté par une guirlande de feuillages. Nous avons trouvé dans le cimetière un plus grand cippe qui porte l'inscription suivante : DM D. M. el memorit Lucenti. an. XXXI. Aux Dieux Manes ET ME et à la mémoire de Lucentus. [Il a vécu) 31 ans. MO..I AE LV Il n'est pas rare de rencontrer aux environs de Beau- CENTI lieu des tuiles à rebords, des poteries, médailles, meules AN XXXI de moulins à bras, ete... 544 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS ments connue pour la Bretagne, l'Angleterre, etc., mais jusqu’à ce jour inédite dans le Velay (4). Ces roches, qui sont granitiques comme la montagne dont elles font partie (5), couronnent une très-haute colline boisée de chênes et de pins, et du point solitaire et sauvage qu’elles occupent vers le milieu de la ligne de erête des monts dits de Saint-Quentin ou de Malavas, la vue em- brasse un immense et riche paysage. Il y en a trois groupées à peu près en triangle. A leurs faces supérieures existent des cavités assez régulières et taillées de main d'homme, les unes rondes, d’autres ovales, presque toutes ouvertes d'un côté par une rigole atteignant le fond du creux et communiquant avec deux des bords de la roche, comme si ces creux, coupes ou bassins avaient été destinés à recevoir des liquides qui, en s’épanchant au dehors, se seraient écoulés du sommet à la base de la roche. Sauf ces cavités qui sont parfaitement intactes et qui, en général, affectent des formes constantes et évidemment in- tentionnelles, le granite est brut, ne laissant voir ni sur ses faces, ni à sa base aucune autre trace d'outil qui en aurait modifié la structure naturelle. Le sol environnant, sur les pentes duquel surgissent (4) Notre honorable ami M. Titaud, secrétaire général de la préfecture, nous à signalé ces curieuses roches, qui sont dans l’une de ses propriétés, aux limites des:communes de Saint-Quentin et de Chaspinhac. La curieuse légende qui s’y rapporte et qu'il nous avait aussi racontée, nous a été répétée dans les mêmes termes par plusieurs personnes des localités voisines. (5) En employant, dans le cours de ces études, les mots granile, granilique, qui sont plus connus de la plupart des lecteurs, nous n’entendons nullement décider ici la question géologique des granites et des gneiss dans son applica- tion à notre pays. DANS LA HAUTE-LOIRE. 345 d’autres saillies du granite, ne paraît également avoir subi aucun travail de nivellement ou d’appropriation quel- conque. La plus importante des trois roches est à l'angle est du groupe ou triangle. Elle forme, dans sa partie la plus éle- vée, comme un grand autel irrégulièrement quadrangulaire, haut d'environ deux mètres et dont la face supérieure peut avoir neuf mètres carrés. Les cavités qu'on y voit sont de véritables bassins ou coupes. On en compte quatre dont la principale atteint le diamètre de 4 mètre 50 centimètres ; les trois autres ont au plus 0,80, 0,40 et 0,20 centimètres. Elles sont, d’ail- leurs, uniformément caractérisées par leur profondeur de 0,15 centimètres, par leur configuration assez bien circu- laire, les parois de pourtour à peu près verticales, la rigole d'écoulement et par leur remarquable conservation. 11 fau- drait un dessin pour traduire les dispositions du roc et surtout les bassins dont les rigoles communiquent soit directement, soit par les anfractuosités naturelles du gra- nite, avec les deux faces de la roche qui regardent la vallée de l’Emblavès, laissant ainsi libres les deux côtés opposés. La deuxième et la troisième roche semblent avoir eu, relativement à la première, une importance secondaire. L'une, encore assez haute (1 mètre 59 centimètres à 2 mè- tres), est étroite au sommet (0,60 centimètres sur 4 mètre 60 centimètres de long). Les creux, au nombre de cinq ou six, sont très-petits {0,06 à 0,10 centimètres sur 0,05 cen- timètres de profondour) ; ils paraissent comme ébauchés et trois seulement ont la rigole se dirigeant, suivant la pente du sommet, vers l’un ou l'autre des deux bords externes. TOME XXII. 25 546 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS La troisième roche, située à quatre mètres environ de la précédente, dans le sens de la pente du sol, est encore plus petite et presque à fleur de terre. Sa face supérieure, in- clinée en dehors du groupe, n’a environ qu’un mètre carré et une seule cavité oblongue de 0,40 et 0,60 centimètres de diamètre sur 0,15 centimètres de profondeur. Du reste, c’est une coupe correctement taillée, pourvue d’une rigole et intacte, le tout comme à la roche principale. A quelle époque et dans quel but les hommes ont-ils ap- proprié à leur usage ces monuments empruntés à la nature? Si l’on interroge les paysans, les uns répondent que leurs ancêtres « au temps où ils étaient sauvages, cuisinaient dans ces vases. » D’autres racontent une merveilleuse lé- sende : saint Martin, disent-ils, patron de Rosières, vint un jour visiter le sommet de la montagne. L’enceinte des trois pierres fut le lieu de son ermitage ; la longue anfractuosité et les cavités de la plus grande ne sont autres que sa vais- selle, c’est-à-dire la crémalière, le chaudron, la marmite, la casserolle et l’écuelle. Persécuté par le démon, le saint gravit avec son chien la seconde pointe du rocher, et, y laissant des empreintes de pieds, franchit d’un saut un immense espace. Le lieu de Claudette, qu'il atteignit, au bas du mont Zchouvin où Tjouvin (4), et près des caves (1) Il est essentiel de se baser pour l'orthographe actuelle des noms de lieux, non sur les désignations souvent fautives que donnent les cartes, mais sur la prononciation usitée dans le langage du pays. Or, ici le son de la première syllabe semble tenir autant de {jou que de {chou. D'ailleurs tj ou plutôt j aurait pu permuter en ch. Jupiter où Joupiter, par métaplasme de Jou-pater, avait des autels à la cime des monts les plus élevés, témoin le mont Jou dans les Alpes, où le culte de RE DANS LA HAUTE-LOIRE. 547 des Sarrasins (qualification curieuse), à gardé sur un rocher deux marques profondes : l’une du pied de son che- val, l’autre de la patte du chien (4) et en témoignage de ce dieu subsistait encore au Xe siècle. On sait que Bernard de Menthon, archi- diacre d’Aost, y renversa le premier l’idole de Jupiter, vers 980, lorsqu'il fonda l'hospice dit aujourd’hui du Mont-Saint-Bernard. (Du Mont-Jou, par M. Man- gourit, édit. de l’an 1x, p. 39 et 40; et Ga/2. christ. t. x11, p. 730.) Nous avons un autre mont Tehouvin ou Tjhouvit près du village de Montferrat. C'est une haute montagne, presque isolée et boisée de pins, sur l’ancienne route (probablement voie romaine) du Puy à Lyon par Corsac. (1) Cette roche est une lave basaltique irrégulièrement tabulaire, qui, dans un pâtural, fait partie, à fleur de sol, d’une coulée disposée en petit plateau sur un massif de brèches volcaniques, dans lesquelles sont creusées les caves des Sarrasins. Le trou principal, qui imite assez bien un pied de cheval dépourvu de fer, est oblong, long de 0,16 centimètres, large de 0,12 sur 0,06 centimètres de profondeur. Il serait difficile dé dire s’ilest l’œuvre dela nature ou de la main de l’homme. L'autre trou est beaucoup plus petit, moins régulier et a bien pu donner l’idée d'une empreinte de patte. A peu de distance de ces trous et vers l'extrémité ouest du plateau, on voit un cercle de pierres brutes afleurant le gazon, sauf une de ces pierres qui a 0,50 centimètres au-dessus du sol. Nous avons observé une semblable enceinte ayant, comme celle de Claudette, environ 3 mètres de diamètre, dans une autre localité où parait avoir existé un monument celtique. Ce dernier cercle est dans un communal autrefois boisé qu'on appelle /a Coste de Paliére, au-dessus duquel s'élève le haut rocher phonolithique de Huche-Pointue et d'où la vue s'étend au loin. A côté du cerelé sont trois blocs, débris peut-être d’un peulven. Au sommet de l'une de ces roches, irrégulièrement triangulaire, une partie de la surface très-polie offre de fines rayures, parmi lesquelles on voit deux traits plus marqués et se joignant sous un angle aigu. Entre eux il y a des traces de deux noms à terminaisons latines : ...ETA et ….DVS ou DIS. Sous une petite échancrure, au bord de la partie polie, d’autres traits, peut-être postérieurs, dessinent trois petites croix. Les paysans expliquent le tout par la légende qui suit : un effroyable serpent ravageait le pays ; son corps, depuis le ruisseau de Rodéz qui coule au bas de la colline, entourait de ses replis toute la montagne. Saint George (premier évêque du pays) arrive, monté sur un vigoureux coursier, et, à coups de sabre, coupe sur cette picrre le corps du monstre. L'échancrure »18 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS dévotion, on y porte des enfants infirmes de bas âge. De là, le saint, poursuivi encore par son opiniâtre ennemi, franchit d’un autre saut une deuxième partie très-vaste de la vallée et parvint à Rosières où, après avoir expulsé les lutins des villages voisins, il mourut en paix, Ne dédaignons pas ces récits naïfs. Ne sait-on pas que, sous le merveilleux qui les voile, les légendes recèlent souvent des lueurs de vérité? Si réellement celle-ci a un sens, laisserait-elle entrevoir la lutte de la foi évangé- lique contre les rites tenaces d’un culte antérieur dans un lieu, dans deux peut-être, d’où l’on n'aurait pu qu’à grand peine les extirper ? Sans attacher trop de valeur à cette conjecture, rappelons cependant que le culte des pierres, à les considérer comme autels ou comme simula- cres informes de divinités, ainsi que le culte des arbres et des fontaines, persista en Gaule longtemps après l’établis- sement du christianisme. C’est un fait établi par les prédi- cations des plus anciens évêques, les actes des saints et les défenses des conciles, entr'autres du second concile d'Arles, tenu en 442, et du concile d'Auxerre, en 585, et jusqu'au est l'empreinte du pied du cheval et les croix en indiquent la place. D’autres rayures sont les marques des coups de sabre. Il paraît cependant que la lutte ne fut pas sans péril, car on a trouvé, ajoute on, les os du cheval dans le sol du cerele des pierres. Ici, comme à Claudette, on amène en dévotion des enfants en bas âge. Il est permis de supposer que cette allégorie exprime la lutte du chris- tianisme contre de superstitieuses croyances et probablement aussi la destruction d'un monument du culte druidique. C'est sur les indications de notre honorable confrère M. Lacombe, maire de Saint-Etienne-Lardeyrol et membre de la Société académique du Puy, que nous avons visité cette curieuse localité. DANS LA HAUTE-LOIRE. 349 [Xe sièele, au moins, par les capitulaires de Charlemagne (1). A l'égard de notre pays, une légende écrite et qui parait fort ancienne, nous apprend qu'au Vile siècle un évêque d’'Anis (le Puy), saint Agrève ayant voulu détruire l'adora- tion des idoles dans une localité de nos montagnes, fut martyrisé par les sectateurs de ce culte (2). (1) « Aux environs de Luxeuil, célèbre par le culte de Luxovius, dieu qui » présidait à ses eaux thermales, s'étendaient des forêts qui furent longtemps >» le théâtre du druidisme: Zi imaginum lapidearum densitas, écrit Jonas, » vicina saltus densabat quas cultu miserabili rituque profano velusta pa- » ganorum lempora honorabant. » Nita s. Columbani, ap. acta ss. ordinis s. Bened. 11, p. 13. A. Maury, Des grandes foréts de la Gaule et de l'an- cienne France. (Mém. de la Soc. des antig. de France, t. XIX, p. 286. 1849). Le concile de Nantes que des auteurs placent à la fin du IXe siècle et d’autres au VII*, s'exprime ainsi : Lapides quoque, quos in ruinosis locis el silvestri- bus, dæmonum ludificationibus decepli venerantur, ubi el vota vovent et defe- runt, funditus effodiantur atque in tali loco projiciantur, ubi nunquam à cultoribus suis inveniri possint. (Labbe, t. 1x, col. 466.) On pourrait multi- plier les citations de ce genre. (2) ...Romam profectus ad pontificem Agrippanus, cum indé suum ad ovile se reciperet, tn IDOLORUM CULTORES éncidil vigesimo feré ab anician& civilate milliario : contra eorum rilus sacrilegos invehitur. Undèé in vincula detruditur, tertioque post die, hortante loci domin@, capile lruncalur, cum Ursicino fa- mulo. (Vila ex Officio ecclesiw podiensis. Boll., Acta Sanct., tom. 1, 1658, p. 295.) .… Undè oppidum in quo membra quiescebant, antiquo nomine repudiato, quod Chinacum erat, à S. Agrippano nomen fecit… (Translalio S. Agripp. ex eodem Officio podiensi. Boll., 4cta Sanct., p. 295.) La désignation des »illiaires sur la route que suivait l'évêque en revenant de Rome pour se rendre à Anicium et qui conduit encore aujourd’hui de la ville du Puy dans le Dauphiné par Saint-Agrève, assigne à la légende une époque an- cienne. Ajoutons que cette donnée intéressante, jointe à plusieurs autres, établit l'existence d’une voie antique sur laquelle il paraît que ces milliaires marquaient les distances à partir de notre ville {ab anicianà civitate}, nouvel et précieux souvenir de la colonie romaine vers laquelle, nous le croyons, convergeaient cinq routes principales, 590 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS © Aussi les auteurs sont d'accord que tous les efforts furent souvent impuissants à détruire des croyances immémoriales et antérieures au polythéisme des Romains, lesquels, eux- mêmes, n'ayant pu les éteindre, se les étaient appropriées. Plus d’une fois on dut tolérer des lieux vénérés par les po- pulations; seulement on les plaça sous l’invocation des saints « pour substituer ainsi le nouveau culte aux an- » ciennes superstitions qui avaient, chez le peuple plus » particulièrement, de si profondes racines (1). » On s’ex- pliquerait ainsi dans la vallée de l'Emblavès, longtemps adonnée à d’idolâtriques superstitions, le vocable des roches de Malavas et de Claudette, placées, comme le village prin- cipal (Rosières), sous le patronage de saint Martin, cet an- cien évêque qui avait rempli le monde par la renommée de ses vertus et de ses persévérants efforts à détruire, dans les campagnes de la Touraine, les arbres, les pierres et les tem- ples voués aux dieux du paganisme (2). De là les dévotions dont la pierre à creux de Claudette et d’autres roches à bassins, comme certaines fontaines, auraient continué d’être l’objet dans plusieurs localités de nos montagnes. De là, 1) M. Baudot: Rapport sur les découvertes archéologiques failes aux sources de la Seine, cité à l'appui de la même opinion par M. l'abbé Cochet : Sépullures qauloises, romaines, franques, ete. , 1857, p. 85. (2) On comprend que, dans la légende, saint Martin représente l'église de Rosières dont un des anciens pasteurs aurait entrepris la destruction des pra- tiques de l'idolàtrie. L'hagiographie du Velay, en effet, ne mentionne aucun saint de ce nom. Le choix de ce vocable pour quelques églises de notre région pourrait bien avoir été motivé par la même raison qu'a Rosières; indice dont on aura à tenir compte dans la recherche des derniers vestiges du culte des pierres sur nos montagnes. DANS LA HAUTE-LOIRE. 51 sans doute aussi, des récits légendaires qui, perpétuant jusqu’à nos jours la vénération pour ces pierres, en au- raient assuré la conservation. Mais questionnons le monument lui-même dans les dé- tails et l’ensemble de ses curieuses dispositions. Un fait tout d’abord frappe l'attention, étrange au premier aspect, et cependant explicable : la réunion sur ces roches de ca- ractères dont les uns rappellent les usages druidiques et. d’autres ceux du paganisme proprement dit. C'est, en effet. aux siècles de simplicité primitive que les monuments du culte ont cette structure brute et informe; au contraire , les cavités régulièrement façonnées dans le granite donnent l’idée de sacrifices et libations tels que les faisaient les Romains sur des autels parfois creusés de bassins ou cra- tères (1). En Bretagne, où existent des roches analogues situées également sur des éminences et dans les régions les plus remarquables par leurs monuments celtiques, on les à considérées comme des autels (2). On se demande, cepen- & (1) Ces sortes de cratères servaient aussi à brûler de l’encens et on y allu- mait du feu. Les uns ont des rigoles et les autres, comme sur nos roches à bassins, en sont dépourvus. « Quelques autels antiques, dit Mongez, sont » creusés en dessus ct percés de côté pour recueillir et laisser écouler ensuite » les libations. On en voit cinq pareils représentés sur les vases étrusques » de la bibliothèque du Vatican. » {Encycl. méthod., Dict. d'antiqg., p. 377.) Ant. Rich /Dicl. des antig. grecques et romaines au mot 4ra), donne les figures de deux semblables autels, l’une prise d’une peinture de Pompéi, et l’autre d’un vase d'argile. Dans cette dernière, on voit le liquide s’échappant par une ouverture placée vers le haut. (2) J. Mahé, chanoine de la cathédrale de Vannes {Essai sur Les antiquités du département du Morbihan, 1825) signale surtout (page 105) un rocher énorme nommé /a pierre de Menezy, au Sommet duquel sont deux bassins circulaires 392 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS dant, si la présence de coupes ou bassins n'exclut pas cetté opinion : les druides, dit-on, à l'exemple des plus anciens peuples de l'Asie, à l'exemple des Hébreux, dont la Bible nous apprend les usages primitifs, sacrifiaient au sommet des montagnes, sur des pierres brutes, sur des autels informes que le fer n'avait pas souillés (1). Cétait ® trop réguliers pour n'être pas artificiels et d'où l’eau s'écoule par une rigole. À l’occasion d’un bloc dont la partie supérieure offre seize à dix-sept cavités et diverses rigoles, cet auteur émet une conjecture que nous reproduisons sous toutes réserves : « Après avoir bouché, dit-il, avec de la cire les extrémités » des petits canaux, le druide répandait dans les seize bassins autant d'espèces » de liqueurs, telles que de l’eau, du lait, du sang des victimes, etc., et après » que les génies, suivant les croyances des anciens, avaient humé les espèces >» de libations qui étaient à leur goût, on débouchait les rigoles pour laisser » couler les liqueurs sur la terre. M. le docteur A. Fouquet a découvert un assez grand nombre de roches à bassins qu'il a signalées surtout dans deux de ses intéressants ouvrages, intitulés : Des monuments celtiques et des ruines romaines dans le Morbihan, 1853, p. 20 et suiv.; et Guide des touristes el des archéologues dans le Morbihan, 1854, p. 9 et suiv. Entre autres caractères que l’auteur assigne à ces autels, citons les suivants : « Position constante sur des lieux élevés d’où l'on peut embrasser un vaste » horizon ; » Singularité de ne se trouver que dans les régions où l'on rencontre des mo- > numents druidiques : >» Gradin ou parvis régnant à la base du rocher dont il fait partie ; » Partie supérieure du rocher-autel souvent creusée de euvettes, de coupes >» et de rigoles qui ne se trouvent jamais sur le gradin. » Il paraît aussi que des monnments analogues existent en Angleterre. On in- dique surtout « une pierre énorme dans la presqu'île de Purbeck, en la province de Dorcester… Il y a trois cavités à la surface supérieure. » (Dict. d'antiq. de l'Encyclop. méthod., art. AGGLESTON.) {1} Voici, entre autres, deux passages de la Bible : Si {u m’éléves un autel de pierre, tu ne le feras point AVEC DES PIERRES TAILLÉES; SI TU Y METS LE FER, IL SERA SOUILLÉ. — (Exod. ch. xx). — Tu éléveras un autel au Sei- gneur {on Dieu, DE PIERRES AUXQUELLES LE FER N'AURA PAS TOU( HÉ ET DE DANS LA HAUTE-LOIRE. 299 la, sans aucun doute, une pratique transmise par la tradi- tion. Mais avee le temps les usages changent : peut-on aflir- mer que, dans le cours des siècles, la tradition ait été constamment respectée? La religion druidique elle-même avait-elle si bien conservé dans toute leur pureté ses dogmes primitifs que les Celtes, d’abord adorateurs d’un dieu unique, n’eussent pas fini par mêler aux doctrines reli- gieuses de leurs pères et par suite aux pratiques de leur culte, celles du polythéisme? Ne sait-on pas qu'au temps de César, et sans doute auparavant, ils adressaient leurs hommages à diverses divinités que cet historien assimile à Mereure, à Apollon, Mars, Jupiter, Minerve et Pluton ? Des lors est-il invraisemblable d'admettre que, pour les sacrifices, ils eussent partiellement approprié les autels de leurs ancêtres, d’abord entièrement bruts, à des usages admis chez d’autres peuples? Les bassins peuvent dater d’un siècle plus ou moins rapproché de l’époque gallo-romaine, attestant ainsi les transformations successives du culte. A l'appui de cette opinion, d’autres monuments, certai- nement celtiques, portent aussi l'empreinte du fer qui les avait souillés. Les dolmens, qu’on les considère comme tombes ou autels, ou même comme ayant eu parfois ces deux destinations successives et également sacrées, présen- tent quelquefois « des rigoles, des bassins, des formes » étranges profondément gravées dans la pierre formant » Ja table (1), » entre autres les ornements bizarres de la - ROCHES INFORMES ET NON TAILLÉES, el sur cet aulel Lu ofriras des holo- causles au Seigneur. (Deuter. ch. xxvir). (1) M. l'abbé Mouillard. Essai sur Les monuments druidiques. (Bulletin de Ja Soc. archéol. du Morbihan, année 1858, p. 17 294 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS table des marchands, près de Loemariaker, et il y en a dont la pierre du fond est complètement traversée par une ouverture ronde ou par des échanerures (1). Il y a des peulvens qui ont reçu des entailles et orne- ments, telle est surtout la pierre des environs de Pleucadeue « où, d’après le chanoine Mahé, l’on distingue très-bien » sept cercles concentriques, tels que les anciens représen- » taient les neuf cieux, et, dans les intervalles des cercles, » des étoiles parsemées. » Deux peulvens à Tendion offrent des figures humaines grossièrement sculptées ; d’autres à Theix, à Haut-Brambien, ete., paraissent avoir été plus ou moins taillés et « c’est une preuve, dit encore le chanoine » Mahé, qu'il ne faut pas donner une rigoureuse généralité » au principe qui exclut du nombre des monuments cel- » tiques ceux qui ne sont pas entièrement bruts. » Enfin dans le galgal de Gavr-Inis qu'a savamment dé- crit M. Mérimée, un souterrain formé de pierres brutes, comme un vaste dolmen, offre aux parois des supports de bizarres ornements dessinés en creux et que l’auteur eom- pare au tatouage des insulaires de la Nouvelle-Zélande. Ce sont des courbes, des lignes droites, brisées, des zigzags , et triangles diversement combinés, et on y voit aussi, repré- sentés en relief (peut-être en signe de distinction ou de (1) M. de Villemeureuil vient encore de décrire, dans le Bulletin de la Société Dolymalique du Morbihan, 1860, p.13, une allée couverte ou grotte située dans la lande de Grooch, où l'on voit deux orifices, l'un, ovale, dans une cloison qui sépare les deux compartiments de la grotte, l'autre, presque rond, au milieu de l’une des parois latérales de la deuxième chambre. Leur dimension semble appropriée au passage du corps d’un homme, comme si cette grotte eut servi de refuge on d'asile. DANS LA HAUTE-LOIRE. 399 vénération religieuse), des coins ou haches celtiques, une serpe ou crochet et des serpents. Sur une des pierres du même souterrain, M. Mérimée fait aussi remarquer une gorge profonde creusée dans le bloe , au-dessus de laquelle ont été évidés deux anneaux pris dans la masse , à la facon de semblables anneaux que nous observons aussi dans les antiques bornes de nos pays (1). Sur ces monuments les pierres ne sont pas toutes com- plètement brutes, et dès lors la présence de creux ou cou- pes ne s'oppose nullement à ce qu’on assigne également aux roches de Malavas une destination celtique. Mais à quelle intention avait-on choisi trois proémi- nences du rocher, au lieu d’une seule, au lieu de plu- sieurs autres , comme l’auraient permis diverses saillies du granite? Ce n'est pas sans doute fortuitement qu'apparait ici ce nombre (rois, éminemment saint chez les Celtes. Nous le retrouvons sur un autre monument légendaire : les trois pierres près de la ville du Puy, et peut-être aussi sur des roches qu'on voyait autrefois près de St-Etienne- Lardeyrol et qu’un terrier sur parchemin, de l'an 1464, nomme las trapeyras (2). Différent du lichaven ou trilithe, formé aussi de trois roches, mais disposées en porte rusti- que, notre monument symbolisait-il, dans son plan triangu- laire, l'essence même de la divinité suprême, «ternaire divin » des druides d’où découle un vaste système de ériplicité » sur lequel sont moulées toutes les institutions des (1) Note sur le monument de l'ile de Gavr-Inis. (2) Ce document nous a été obligeamment communiqué par M. Lacombe, maire de St-Etienne-Lardevyrol. 56 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS » peuples gaulois (1)? » Cette hypothèse, que nous sommes porté à admettre, amènerait aussi à croire que l'enceinte formée par ces roches aurait pu être un de ces sanetuaires primitifs ou nemets où s’accomplissaient les rites mysté- rieux du druidisme (2). L'idée qui aurait présidé à l'érection de ces sortes de sanctuaires serait « la pensée religieuse de l'Asie dans les » siècles antérieurs à Moïse, pensée qui a été conservée (1) H. Martin. Hist. de France, 1854,t. 1, p. 75.— L'auteur cite Ze Mystére des bardes de l'ile de Bretagne, recueil de triades dont voici les deux pre- mières : « Triade 1. Il y a trois unités primitives, et de chacune il ne saurait y avoir > qu'une seule; un Dieu, une vérité, et un point de liberté, c’est-à-dire le » point où se trouve l'équilibre de toute opposition ; » Triade 2. Trois choses procèdent des trois unités primitives : toute vie, tout bien et touté puissance. » M. H. Martin ajoute: « Le nombre /rois do- » mine tout chez les Gaulois : les trois cercles de l'existence, les trois ordres » de la hiérarchie druidique, les trois classes de la nation, les triades où tous L2 » les enseignements sont distribués trois par trois, les tiercets des chants bar- » dides, les trois rangs de la chevalerie. » Il semble aussi qu'on aurait adopté quelquefois le même nombre pour les pierres érigées sur les tombeaux : Ossian , l'Homère écossais, déplorant le tré- pas du brave Fillan, s'écrie : « trois pierres lèvent ici leurs têtes grisâtres au- » dessus de ce chêne courbé par les vents, et sous ces pierres gît un héros. » (2) « Les Celtes paraissent avoir désigné sous le nom de remet ces sanctuaires » forestiers. Ce mot entre, en effet, en composition dans plusieurs noms de » sanctuaires et de temenos gaulois (ApUYLETOY, Strab., x11, 17. VERNE- > METIS fanum ingens. Fortunat. carm. 9.) et l’épithète de »imideæ, par laquelle » étaient désignées les forêts où s’accomplissaient les rites païens au temps de » Leptines, paraît en être dérivée. » (A. Maury, Des grandes foréts de la Gaule.) Ces nemets « rappellent les {emenes où les Grecs plaçaient des autels, comme » on le voit dans Apollonius de Rhodes : Dans un bois obscur, üls firent un »> leméne et ils y placérent un autel sous l'ombre des arbres. » (Le chanoine Mahé, Ess. sur les antig. du dép. du Morbihan, 18%5, p. 288.) DANS LA HAUTE-LOIRE. 9971 » chez le peuple hébreux jusqu’à Salomon. » De là elle se serait « répandue dans la Germanie et le pays des Celtes, » où elle était en application longtemps avant l'invasion » romaine et même longtemps après, jusqu'à l’arrivée du » christianisme (4). » À Enfin veut-on savoir à quelles puissances divines pou- vaient être consacrés ces autels dont la structure parti- culière éveille si bien l’idée de libations et de sacrifices ? Laissons parler Lucain. Après avoir, dans sa Pharsale, mentionné la population qui, sur nos hautes montagnes, habite les Cévennes : ee Quû montibus ardua summis Gens habitat canà pendentes rupe gebennas. le poète, plus loin, dans un langage empreint toutefois d’une hostile exagération, nomme ces divinités des Gaulois riverains de la Loire : Et nunc tonse Liger (2), quondam per colla decora Crinibus effusis toti prælate comatæ : Et quibus immitis placatur sanguine diro Teutates, horrensque feris altaribus Hesus, Et Taranis scythicæ non milior ara Dianæ (5). (1) M. l'abbé Mouillard. Essai sur les mon. druidiques. Bulletin déjà cité, p- 49. (2) Il paraît que certains manuscrits portent Zigur et d'autres liger. Cette dernière leçon nous a semblé probable. (3) M. An. Lucani, Pharsaliæw, lb. 1, vers. 435 ad 454. 528 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS Nous venons de décrire un type de roches à bassins aussi intact qu'on puisse le désirer. Citons maintenant d’au- tres exemples attestant, dans leur ensemble et par la situa- tion de monuments analogues à de grandes distances les uns des autres, que leur usage s’était généralisé sur notre sol, et, d’après une certaine diversité de formes, qu'ils devaient avoir été appropriés à différentes pratiques du druidisme. C’est probablement une de ces roches qu'avait remarquée, vers 4807, Hr Dulac de Latour, — auteur d'ouvrages de sta- tistique, estimés pour l’époque où ils ont été publiés, — au milieu d’une plaine située sur les limites de la commune de Saint-Just-Malmont à Rambert. Cet auteur, dans des no- tes manuscrites que nous avons recueillies (1), signale, comme une preuve de l’ancien culte des pierres, « ce ro- » cheroû, dit-il, l’on voit des trous. La dévotion y conduit » de nombreux pèlerins qui le nomment /a pierre de saint » Martin. Mais ce n’est qu'après le coucher ou avant le » lever du soleil, que l’invocation du saint produit d’heu- » reux résultats. C’est en vain, ajoute-t-il, que les curés » de Saint-Just et de Jonzieux ont voulu détruire cette su- » perstition. » Nous n'avons pas visité cette localité, mais la présence de trous sur le rocher et le nom du saint sont des motifs de rapprochement avec les roches de Malavas. L'indication des moments propices pour l’invocation est encore une donnée qui jette un jour nouveau sur ces sortes de monuments ; le (1) Ces notes ont pour titre: Tombeaux gaulois. Elles ont surtout pour objet les dolmens observés par l’auteur dans la Haute-Loire. DANS LA HAUTE-LOIRE. 399 clergé a raison de s'opposer à ces pratiques superstitieuses : les pèlerins, en réalité, n'invoquent pas saint Martin; leurs hommages semblent bien mieux s'adresser à l’une des divi- nités de la théogonie gauloise, par exemple à « Koridwen, » déesse de la lune, qui règne dans la nuit; » ou bien à Gwyon-Teutatès, ordonnateur de l'univers (de l'univers dont Esus est le créateur) « qui, comme Koridwen, règne aussi » dans la nuit, dans cette nuit d’où il a tiré ses enfants, » les Gaulois... Nuit cosmogonique d’où émane le » monde... (1) » Près de la ville de Pradelles, dans un lieu appelé Longe- sagne, M. l'abbé Johanny, dont l’érudite sagacité est égale à la parfaite obligeance, nous à fait remarquer, au versant sud-ouest d’une assez haute colline, en partie couverte par un bois de pins, un ensemble de roches granitiques, for- mant sur Île roc des saillies plus ou moins apparentes et qu'on croirait alignées sur deux rangs, irrégulièrement parallèles, suivant la pente du sol. Trois de ces pierres of- frent à leurs faces supérieures des trous arrondis et, comme à Malavas, beaucoup mieux accusés à la roche principale qui, au sommet de la colline, figure un fort massif à peu près quadrangulaire, commandant tout le groupe des roches et d’où la vue embrasse un assez vaste horizon. M. l'abbé () M. Henri Martin: Hist. de France, tom. 1, p. 57. L'auteur ajoute : « C’est > la nuit qu'il (Gwyon) a évoqué notre globe du chaos ; c'est pourquoi l’astro- > nomie gauloise compte par nuits et non par jours, par lunaisons et non par > mois solaires. À ces sombres caractères, César le prend pour Dis, dieu des » enfers, pour le triste Pluton: il ne sait pas qu'il n'existe ni Pluton, ni en- > fers pour la théologie gauloise. Dans nos campagnes, les paysans disent encore aneui /à cette nuit), pour aujourd'hui. 560 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS Johanny y avait compté cinq cavités ; mais récemment on a exploité le rocher, et le plus grand bassin, qui avait environ un mètre de diamètre, a disparu. Une autre coupe, en par- tie détruite, laisse juger, dans ce qui subsiste, de son dia- mètre qui est de 0,80 centimètres; les trois autres sont intactes et leur diamètre varie de 0,18 à 0,50 centimètres. Leur profondeur est de 0,09 à 0,15 centimètres. A l’opposé de la roche précédente, la pierre qui termine la rangée a seulement deux ereux ronds, l’un de 0,10, l’au- tre de 0,15 centimètres. La troisième est vers le haut de la deuxième rangée. Celle-ci n’a qu’une cavité subarrondie de 0,25 et 0,28 cen- timètres. Longesagne, comme Malavas, Claudette et Rambert, doit avoir eu sa légende. Le peuple, qui l’a sans doute oubliée, frappé de la disposition des cavités, se borne à les nommer les mesures de Pradelles. Mais il ne serait pas impossible que ces roches formant comme une enceinte sacrée ou német, se rattachassent par quelque antique tradition, au Drevet, terroir situé près de la Vio dous Romanous, et que d'anciens titres appellent d’un nom significatif et oublié aujourd’hui : {a Pierre sainte (4). La même localité offri- rait, d’ailleurs, aux recherches d’autres lointains souvenirs, parmi lesquels nous signalerons ceux qui se rapportent aux grottes souterraines de Saint-Clément et aux vestiges d’an- tiquités gallo-romaines qu’on y observe. On voit aussi, aux environs de Pradelles, d’après ce que nous a appris M. l'abbé Johanny, d’autres cavités plus ou (1) Ces documents sont aux archives de la mairie de Pradelles. DANS LA HAUTE-LOIRE. 61 moins analogues à celles de Longesagne, en particulier trois au rocher de Chenelette, et une au rocher de /a Barrique, sur la route entre Pradelles et Langogne. On raconte que, dans cette dernière cavité qui est assez grande, les moines de Pradelles venaient chaque année égorger un porc. Le peuple confond parfois diverses traditions : les moines ne seraient-ils pas ici les ministres d’un plus ancien culte, et l’immolation du pore ne rappellerait-elle pas des sacrifices druidiques ? Nous n’affirmons rien, n'ayant pu nous assurer par nos yeux si ces cavités offrent les caractères si remar- quables des roches précédemment décrites. Ces curieux monuments nous sollicitaient à poursuivre des recherches qui peuvent éclairer les lointaines origines de la contrée. Nous fümes ainsi amené à étudier au même point de vue le haut rocher volcanique de Corneille dont la masse imposante, qui domine une notable partie du Velay, couronne le mont Anis, sur les pentes duquel est assise la ville du Puy. Cette localité offre, on le sait, d’inté- ressants souvenirs des âges celtiques, et nous ne fûmes pas étonné de voir sur des roches adhérentes au massif volca- nique, des signes probables des pratiques du druidisme. Sur le plateau supérieur, aux bords duquel surgissent plusieurs proéminences du roc, trois de ces saillies, situées à l’est, frappèrent surtout notre attention par des particu- larités de structure difficiles à expliquer sans le secours de l'hypothèse que nous avaient déjà fournie les roches de Malavas. On y retrouve, en effet, le trait distinctif de ces monuments : des creux en coupes ou cratères (larges de 0,15 à 0,40 centimètres sur 0,08 à 0,20 centimètres de profondeur), parfois avec échancrure sur un point de leur périmètre et restes de rigoles. À voir aussi les lichens qui TOME XXI. 24 562 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS couvrent presque toutes les surfaces des pierres, on juge que les cavités, rongées elles-mêmes par les intempéries, doivent avoir été façonnées à une époque ancienne. Les deux roches extrêmes du groupe ont, comme les principales de Malavas, environ deux mètres de haut. Sauf certaines parties grossièrement taillées en gradins pour fa- ciliter l'accès du sommet, elles sont brutes, irrégulière- ment pyramidales et assez étroites en haut. La première à gauche n’a au sommet qu'une coupe avec échancrure pour la rigole d'écoulement ; la dernière à droite en compte trois très-rapprochées entre elles à la face supérieure, dont deux ovales et l’autre plus grande qui figure un carré allongé (0,40 centimètres sur 0,50 et 0,10 centimètres de profon- deur). On voit, en outre, sur un ressaut inférieur du roc, une cavité ronde, assez profonde et échancrée en rigole. La roche intermédiaire qui est contiguë à la première, se caractérise par des détails de forme plus curieux. Elle à 0,80 centimètres de haut, 4 mètre S0 centimètres de long et 0,60 centimètres d'épaisseur. À peu près brute vers le bas, elle a été grossièrement taillée, à la partie supérieure, en forme d’autel quadrangulaire avee cette autre singula- rité, qu’elle est évidée dans la moitié environ de la lon- gueur et de la hauteur, pour figurer comme un assez large radin ou petit autel inférieur. A chacune des deux faces planes du haut se trouve un bassin, à peu près carré, avec rigole à la supérieure et rond avec échancrure à l’inférieure ; enfin les faces ver- ticales présentent, immédiatement au-dessous de chaque coupe, une niche cintrée, l’une de 0,40 centimètres, l’autre de 0,50 centimètres de largeur ; toutes les deux ayant 0,20 centimètres de hauteur et 0,16 à 0,48 centimètres de DANS LA HAUTE-LOIRE. 265 profondeur. La plus petite, en partie fracturée, est cepen- dant bien reconnaissable. I faudrait un dessin pour traduire les dispositions si évidemment intentionnelles du monument, lesquelles pa- raissent indiquer une phase de transformation des pierres brutes dans les pratiques du culte. A cet effet, les niches qui, comme les cratères, donnent l'idée d’usages religieux, pourraient avoir été faites à l’époque gallo-romaine pour recevoir de petites idoles semblables à celles en terre cuite découvertes à Toulon- sur-Allier et dont notre savant confrère M. de Payan- Dumoulin a généreusement enrichi le Musée de la ville du Puy. Il est certain, d’ailleurs, que Fusage de ces figurines était connu dans le pays des Vellaves, d’après un mor- ceau que nous avons trouvé à Saint-Paulien, l'antique kKevession. Peut-être encore devrait-on voir dans les mêmes cavités. des réduits où, pour honorer les divinités, on placait des luminaires, comme le prouve ce passage d’un capitulaire de Charlemagne : « A l'égard des arbres, y est-il dit, des » pierres et des fontaines où quelques insensés vont allu- » mer des chandelles et pratiquer d’autres superstitions, » nous ordonnons que cet abus soit aboli. » (Cap., liv. 40, titre 64.) (1). C'est du moins plus probablement dans ce but que furent creusées deux petites niches assez régulières, mais peu () Voir aussi au sujet des chandelles et flambeaux qu’on faisait brûler de- yant les pierres, Regino, lib. 17, édit. Baluze, p. 312; Burchard, lib. x, cap. 1, 2, 3, 10. 564 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS profondes qu'on voit au revers de la léte dite d'Henri quatre, monument de la nature auquel nous croyons avoir restitué, dans un autre écrit, son appellation la plus an- cienne et sans doute celtique : La tête du gan où géant. Une autre des roches de Corneille est remarquable par sa configuration approchante de celle de l'autel principal de Malavas. Elle existe au bord d’une esplanade naturelle entourée de roches abruptes et formant, au nord, comme un vaste gradin vers le milieu de l’escarpement plus ou moins vertical du rocher. De ce lieu solitaire, auquel on n'arrive que par un étroit sentier taillé dans le roc, la vue embrasse un assez vaste horizon. La roche en forme d’autel, qui semble consacrer le caractère némé- tique de cette enceinte, est irrégulièrement quadrangu- laire, haute d'environ 2 mètres, sur 2 mètres de long et 1 mètre de large. La face supérieure ou table est un peu inclinée en dehors et on y voit une cavité circulaire de 0,40 centimètres de diamètre sur 0,18 centimètres de pro- fondeur. Deux rigoles sinueuses et plus ou moins longues, taillées, comme la coupe, de main d'homme, naissent vis- à-vis l’une de l’autre, de chaque côté de cette cavité, et suivent la pente de la table dans le sens de sa plus grande longueur jusqu'aux deux extrémités de la roche. Ces étroits canaux qui n’atteignent pas toute la profon- deur du bassin, diffèrent, sous ce rapport, de ce qu'on observe à Malavas. Ils offrent aussi une variante curieuse dans la présence de la rigole supérieure évidemment desti- née à amener des liquides dans la cavité ; dispositions qui, comparées à toutes celles des roches à bassins de notre pays, aideront à nous éclairer au sujet des sacrifices et libations dont ces monuments peuvent avoir été l’objet. DANS LA HAUTE-LOIRE. 965 Enfin à sa base nord, la roche offre une sorte d’évidure qui semble naturelle et à laquelle on arrive par des saillies du roc figurant comme des marches d’escalier (1). C'est dans la même classe de monuments qu'il convient de comprendre encore trois roches granitiques qui existent aux environs de Chomelix. Celles-ci, néanmoins, diffèrent des précédentes par des signes encore plus prononcés de transformation. Ici, le roc brut n’a pas seulement reçu la cavité caractéristique ; ce creux, dans l’une des pierres, offre une disposition nouvelle, un véritable perfectionne- ment et la roche à subi, en partie, des recoupes qui ont eu évidemment pour but de l’embellir. Deux de ces pierres qué nous a obligeamment fait voir l'honorable maire de la commune, M. Garde, au terroir des Landes, jadis terrain communal, partagé depuis 4795 entre les habitants de la section de Chadouard (2), gisent écartées l’une de l’autre par une distance d’une vingtaine de mètres. La première, débris peut-être d’une plus grande roche, est placée au bas et à la naissance d’un mur qui sépare les deux sections de Chomelix et de Chadouard, Sa face supé- ricure, qui semble avoir été grossièrement taillée, a un trou rond de 0,10 centimètres de diamètre sur 0,0% centimètres de profondeur. Du bord de ce creux part une assez longue (1) Nous devions nous demander si la cavité W'aurait pas été faite pour recevoir une croix. Mais cette supposition ne paraît pas probable en présence des rigoles qui ne s'expliquent que dans l'hypothèse d’un rocher-autel. En outre, tout concourt en faveur de cette dernière conjecture : la forme de la roche, sa position dans un lieu si bien approprié à un #émet, et en présence du vaste et beau paysage qui se déploie au-devant du monument. 2) D'après ce que nous a dit M. le Maire. 566 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS et sinueuse rayure presque parallèle à une autre semblable qui, d’un autre côté de la cavité, naît à l’un des bords de la pierre. L'autre roche est plus importante : c’est un assez gros bloe, de forme irrégulièrement ronde. À demi-enfoui, dans une position inclinée, vers le milieu du pâtural de Cha- douard, il est ereusé d’un bassin large, profond et parfaite- ment cireulaire, dont il y a lieu de remarquer la singulière conformation : large dans le haut de 0,68 centimètres et profond de 0,15 centimètres, ce bassin offre au fond une seconde coupe de 0,40 centimètres de diamètre sur 0,08 cen- timètres de profondeur. La roche présente en outre une structure particulière : la moitié environ de la face supé- rieure, à l'exclusion absolue de tout le surplus du bloc qui est brut, a été taillée en deux plates-bandes concentriques au bassin, la première horizontale, la deuxième déclive suivant le talus naturel de cette face de la roche. Nous n'avons à citer aucune tradition sur ces deux pierres, dont la réunion dans des landes solitaires et sau- vages n’est probablement pas sans motifs. Seulement le peuple, les rattachant dans sa pensée à des souvenirs moins anciens et le mieux empreints dans sa mémoire, appelle lune d'elles la carta, ajoutant que là où elle git, les seigneurs prélevaient la dime ; attribution imaginaire qu'aucun document connu n'autorise, et que ce monument partage dans notre pays avec d’autres pierres extraordi- naires, telles que des dolmens, peulvens, etc. Enfin non loin de Chomelix et sur le bord du chemin du Monteii, on voit a pierre plantée. Sa hauteur hors de terre est de 4 mètre 60 centimètres et son diamètre de 0,85 centimetres. Cette roche, en partie brute et quadran- DAXS LA HAUTE-LOIRE. 367 gulaire, à été, dans le haut, dégrossie en pans coupés par un certain rapport avec la roche principale des Landes, et au milieu de la face supérieure existe un petit trou rond et peu profond (0,18 centimètres de diamètre sur 0,06 centi- mètres de profondeur). Impossible de supposer que cette pierre ait servi à supporter une croix : le creux eût été in- suffisant pour la recevoir. Sa structure demi-brute, sa forme approchante de celle des peulvens, la cavité placée au som- met, sa position sur un très-ancien chemin que bordent, en quelques points, des vestiges d’antiquités gallo-romaines (1), et jusqu’au mystérieux silence de toute tradition, tout paraît bien assigner à ce monument une antique origine. Mais à quel usage l’avait-on érigé? Assimilable à un peulven, élait-ce une marque de limites, le symbole commémoratif d’un événement, un signe de sépulture, le grossier simu- lacre d’une divinité? ou bien encore était-ce un autel (2)? A défaut de notions plus directes, ces diverses hypothèses seraient également plausibles ; nous les indiquons afin de provoquer de nouvelles recherches. Outre les roches que recommandent à lattention leurs creux et coupes régulièrement façonnés et les légendes (1) Notamment près d’Arsac, commune de Saint-Pierre-Duchamp, où nous avons observé, sur un assez grand espace, des vestiges d'habitations gallo- romaines, tels que médailles, tuiles à rebords, poteries et débris divers de constructions. (2) Peut-être avons-nous iei un monument plus ou moins analogue à celui appelé La pierre du serment au bourg de Plougoumelin en Bretagne. Sa hau- teur est « d'environ cinq pieds. A son sommet elle offre une cavité en forme » de carré long. L'opinion de la commune est que ce cippe était autrefois un » objet sacré devant lequel on prêtait serment. » (Le chanoine Mahé, Ess. sur les antiq. du départ. du Morbihan.) 568 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS et dévotions qui s’y rapportent, il en existe probablement bien d’autres qui, pourvues de cavités naturelles ou gros- sièrement taillées, peuvent avoir eu aussi une destination celtique. IL est, sans aucun doute, plus difficicile de les re- connaître et, à moins d'indices particuliers, leur examen commande une grande circonspection. Aussi n’indiquons- nous qu'avec réserve un groupe de trois roches qui, situées dans la commune de Vals-près-le-Puy, au sommet et vers l'extrémité ouest du haut rocher volcanique dit Za Sar- moune (1) et sur un aride terrain communal, domine, dans toute son étendue, la fertile vallée du Dolezon. Ces saillies du roc, peu élevées au-dessus du sol, offrent les creux ordinaires des tufs scorifiés. Toutefois auprès de ces cavités, à la face supérieure de chacune des roches, est creusée en rigoles une sorte de croix dont les quatre bran- ches égales sont certainement évidées de main d'homme. Que penser de ces marques figurées sur trois pierres brutes à l'exclusion des roches voisines et, par un curieux rapport avec celles de Malavas, laissant entre elles un espace suffisant comme pour former une enceinte en trian- gle? Aurions-nous ici des signes de limite communale ? Mais la situation de ces pierres éloignées des limites de (1) Une estime du lieu de Vuls de l’année 1712 appelle cette éminence Le roc de la Salamoune où de las Alamounes, et le terroir /a Girounette. Il serait d'autant plus intéressant de retrouver les formes anciennes de ees noms, que le roc présente au bas de l’escarpement vertical es£ un ensemble curieux de cavernes taill‘e, de main homme, lesquelles éveillent la pensée, comme beaucoup d’autres bornes de nos pays, d'habitations celtiques. Citons également le nom du champ de Do (de forme peut-être celtique et rappelant la dénomination des dol-mens), que porte une pièce de terre la plus voisine du groupe des trois pierres. DANS LA HAUTE-LOIRE. 569 la commune et sur un terroir qui était compris autrefois dans le mandement de Vals et qui fait encore partie du territoire communal, semble exclure cette hypothèse. Y verrions-nous plutôt, sous une forme particulière, de véri- tables rigoles pratiquées pour le même usage que celles des roches déjà décrites, ou bien encore faut-il reconnaitre dans ces marques le symbole chrétien qui, placé sur des pierres précédemment paiennes, auraient eu pour objet de consacrer la destruction de pratiques superstitieuses et, suivant les idées admises aux premiers siècles du christia- nisme, d’en expulser le démon (1)? Nous attendrons qu'une étude comparée de roches analogues nous permette d'opter entre ces différentes hypothèses. Aux exemples qu'on vient de signaler, on pourra vrai- semblablement en ajouter d’autres que semblent nous révéler différentes indications de prétendues empreintes de pieds dans quelques localités. Nous aurons à les décrire dans un travail plus complet. Rappelons seulement deux de ces empreintes qu’on voyait autrefois au sommet du roc pyramidal d’Aiguilhe, près le Puy, sur « une pierre en » laquelle, dit le P. Gissey, sont gravées deux plantes de » pieds que l’on dit ordinairement y avoir esté imprimées » par une pucelle, sautant du haut en bas pour tesmoignage » de son pucelage et virginité : ce qu'ayant faict par deux » fois sans se blesser ; à la troisiesme, poussée d’un vent (1) Un dicton traditionnel des enfants de Vals viendrait peut-être à l'appui de cette dernière hypothèse. Ils vont, le soir, sur le chemin qui conduit au lieu des trois roches et, narguant le démon, ils crient : Roubi (rouge), prends ta lance et viens ici. 510 NOTE SUR LES ROCHES A BASSINS » de vaine gloire elle se tua (1). » Légende naïve dont le sens mystérieux nous échappe, mais qui aurait pu se rap- porter encore à des cavités semblables à celles d’une des roches de Malavas où, comme on Fa dit, le peuple voit des empreintes de pieds. Récemment nous avons observé, dans les gorges de la Loire, deux creux réunis par une rigole à la face supérieure d’une roche adhérente au vaste rocher à pointes aiguës et comme cerénelées que le peuple appelle Ze château des Sarrasins. Au-dessous, dans un petit bois de chênes, exis- tent quelques vestiges de constructions gallo-romaines et l’on sait que, dans les traditions populaires, les œuvres des Gaulois et des Romains, c’est-à-dire des paiens, sont sou- vent attribuées aux Sarrasins. C’est un lieu sinistre dans les récits du peuple : ami des païens, le démon les visitait souvent. Un jour ils se brouillèrent et le démon essayant, contre leur volonté, de franchir la Loire qui le séparait du château, lança du haut d’une roche son coursier qui le précipita dans le fleuve. Ce fantasque récit se rattachait-il aussi aux cavités que nous avons indiquées et serait-ce en l’honneur de la lé- sende ou dans tout autre but, qu’on a gravé artistement en creux un fer de cheval sur une autre roche située au bord (1) Discours hist. de Nostre Dame du Puy, 1627, p. 274. En Bretagne (comme dans notre pays) « ces sortes d'empreintes, dit le chanoine Mahé, re- > viennent souvent dans les histoires populaires. » Cet auteur cite la marque de la main de saint Rivalin sur les bords de la Sare, celle de saint Gildas sur un rocher de la côte de Saint-Gildas, formée lorsque de ce point il s’élança dans l'ile de Houat. « Un conte pareil, ajoute Mahé, avait cours parmi les > anciens : ils disaient qu'Hercule avait laissé sur un rocher l'empreinte de son > pied et qu’elle avait deux coudées de long. » (Hérodote, 1v, 82.) DANS LA HAUTE-LOIRE. 571 - de la Loire, à cinq mètres au-dessus de son lit? Le peupla n'hésite pas à expliquer cette dernière empreinte : il l'appelle Le fer du Diable (1). Cette légende, dans un lieu sauvage et jadis d'accès diffi- cile, rappelle évidemment, sous d’autres formes, le même ordre d'idées que celle de Malavas et elle fait voir aussi combien les traditions, jointes à l'observation des monu- ments et, s’il est possible, aux témoignages des documents écrits, pourront être utiles à consulter dans une étude plus complète des roches à bassins. (1) Un document officiel, le Procés-verbal de délimitation de la commune de Blanzac, du 15 mai 1811, mentionne cette « empreinte en forme de fer de cheval, » laquelle, y est-il dit, porte le nom de fer du diable. » Le rocher sur lequel elle est gravée a servi à fixer un point de délimitation entre les trois communes de Blanzac, de Lavoute et de Polignac. Le même procès-verbal indique aussi, comme point limitant, un « gouîre de la Loire appelé Gour de Bernard, > et Situé près du même rocher. C’est dans ce « gouffre, » dit-on, que le démon fut précipité. Il ne serait pas impossible que le fer-du-diable eût marqué précé- demment une limite de mandements. Mais aurait-il été gravé dans ce but et l'imagination populaire y aurait-elle rattaché la légende plus ancienne des paiens ? Sans vouloir expliquer cette énigme, bornons-nous à signaler une pierre plantée qui, dressée à la limite de la commune du Monastier et de celle de Coubon, où notre ami M. Vinay nous a indiqué ce monument près de son chà- teau de l'Herm, laisse voir aussi, dit-on, comme une empreinte de fer de cheval. On nous a signalé également deux pierres plantées, l'une près de Séneujols, Pautre près des Rayaules, entre la Sauvetat et Pradelles, sur lesquelles existe- raient, dit-on, des marques semblables en fer-de-cheval. Ajoutons que c'est à M. Bonenfant, instituteur publie à Lavoûte, que nous devons la légende des Sarrasins, recucillie par lui avec une consciencieuse précision. 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GESERNATIONS rdinaire à zéro en contact. | extérieur | a minima = | ordinaire a zéro, | encontact. | exériour, | à maxina Ë supérieur. | inférieur. | | | | EE | —— | — | — | ——— | | —_—_—_—— = contigr centigr. | contigr. lceutigr. | centigr, | contigr. | | 7ÜS050 TUGoS 900 | —4100 plusieurs nuages. 709060 70705 | 1000 600 9105 plusieurs nuages. xo plusieurs nuages pendant toute la journée. 70S.70 707.0 7,0 | couvert. 705,50 705,8 | 5,0 5,0 95,0 couvert, neige vers | h. du soir. 0 couvert, neige vers À h. du soir. 705,50 705,8 7,0 | vouyert, grésil pendant la nuit. 705.0 705,1 | 5,0 95,5 neige à différentes reprises. N couvert, neige à différ. reprises pd toute la journée, 6,0 neige à plusieurs reprises. 710,2 TÜ6,S | 91,5 quelques éclaircies. N neige à plusieurs reprises pd la nuit el la matinée. 6.0 | découvert, 701,8 699, 9 89,0 plusieurs cumulus. E découvert, plusieurs cumulus vers le soir. 6.0 quelques éclaircies. 694,9 | 92,5 couvert. S presque couvert pendant la journée. 5 neige pendant la nuit et pendant le jour. 696,2 | | 95,0 id. 0 neige pd la nuit et la matinée, couvert pd le soir. découvert. 697,8 | 90,0 découvert. so découvert pendant le jour. brouillard qui se dissipe. 704,0 702,5 | | | 90,0 découvert, quelques cyrrhus. E déc., br. qui s'est diss. vers 10 h., pl. cyrr. vers 4 hs. couvert, vent. 704,4 | | 95,5 plusieurs éclaircies, vent. s vent, couvert pd la matinée, qqs rcies vers le soir. id. 105,7 | | 95,0 |couvert, qqs éclaircies vers midi. vent. s | vent, couvert, quelques éclaireies vers midi. 96 0 | couvert, pluie pendant la nuit. 705,1 | | 96,0 couvert. s | couvert, pluie pendant la nuit. 96,0 presque couvert. S 704,9 | 96,0 id S | couvert, quelques éclaircies vers 10 h. du matin. 96,0 couvert, neige pendant la nuit. 0 706,5 | 95,0 plusieurs éclaircies, qqs eyrrhus. 0 couv., neige pd la nuit, qqs éclaire. dep. F1 h., qqs evrr. 94,5 couvert, quelques éclaircies. N 709,4 | | Ù 94,0 plusieurs éclaircies N plusieurs éelaireies pendant le jour. 11,0 | quelques eyrrhus, plusieurs nui N TA ANA | st 94,5 couvert, pl. éclaircies vers N quelques eyrrhus v 10 h., couvert vers 4 h. 94,5 | couvert. N TAA,S | A 6,0 94,5 couver N couvert pendant le jour. 95,0 id. N 712,0 | S,0 94,5 plusieurs éclaircies, petite pluie. N couvert le matin, pl éclaircies dans la journée, | quelques éclaircies. N 712,0 | ; 5,0 | 94,0 pl. éclairei il vers | h. N pl. éclaireies pd lei jour, pelite pluie, grésil vers 4 h. soir, | plusieurs nuages. E 711,1 | S,0 2,9 89,5 plusieurs nuages, qqs cyrrhus. E plusieurs nuages, quelques eyrrhus. | découvert, quelques eyrrhus. E TAIE AN ÿ |» 4,0 S8,5 découvert. E découvert, quelques ey rrhus le matin. | découvert. E 2 07 O0 86,5 id. E découvert pendant toute la journée. couverl. dE Mr 1,0 S9.0 couvert. NE couvert pendant le jour. quelques eyrrhus, découvert. l THE 0 8,0 3,0 Tab ss.0 découvert. 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Scouvert. couvert, plusieurs eyrrhus vers le soir. couvert, quelques nuages vers le soir. couvert, quelques nuages pendant le jour. uvert pluie vers 11 heures du matin. ielques éclaircies dans le jour. ielques nuages le matin, découvert pendant le soir. uvert depuis 11 heures. ige pendant la nuit et pendant le jour. uvert, petite pluie pendant la nuit. ouillard qui se dissipe à 40 h., pl. eyrr. pd t. le soir, uie ‘pendant la nuit, brouillard sur les montagnes. ésil pd la nuit, plusieurs éclaircies pd le jour. uvert depuis F1 heures du matin. uvert pendant toute la journée. tite pluie vers les 9 h. du matin. 1elques nuages pendant la matinée. tnt, quelques nuages pendant toute la journée. fand vent, couvert de midi à 1 heure. nnerre, éclairs, orage pd la nuit; forte pluie la nuit. ige pendant la nuit, jusqu'à 9 h. du m., qqs giboulées. hASSCIAuMMOoIs, 18 107... 5° élevée, id. OS RE Re 22, plus au OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. % MABS. 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NE N peige pendant la nuit et pendant le jour. id. NE NE 20 F 712,4 » 10,000 id. NE E couvert, petite pluie pendant la nuit. découvert. NE E IL 2j 7079 705.3 | | » 0,700 mi-couverl. so 0 brouillard qui se dissipe à 10 h., pl. evrr. pd t. le soir. couvert. No On 192 7064 | 8 | 1,900 4,500 couvert. xo EN | pluie'pendant la nuit, brouillard sur les montagnes. presque couvert. N N 25 707,7 | | » » presque couvert. NE | N grésil pd la nuit, plusieurs éclaircies pd le jour. mi-couvert. NE E 24 7091 | | » » couvert. NE N convert depuis {1 heures du malin. | couvert. NE x 25 TOSS 706,9 | » » | id. NE N couvert pendant {oute la journée. id. N N 26 707,2 TO5,T | » | » id. no x petite pluie vers les 9 h. du malin. | presque découvert. Î| ne NOR 27 TÔS,4 706,2 » | Û | découvert. NE E quelques nuages pendant la matinée. à | quelques nuagés. SE s 28 707 1 705,8 | » | » quelques nuages. SE s vent, quelques nuages pendant toute la journée. = | id. SE s 29 699,1 697,15 » » couvert. s S grand vent, couvert de midi à | heure. ; : û 695,4 couvert. à 0 50 69 692,77 16,109 16,500 quelques éclaircies. no 0 lonnerre, éclairs, orage pd la nuil; forte pluie la nuit. 51 | 700,8 HU NO No 51 ñ TO1LTS 11,875 5,100 plusieurs éclaircies, xo o neige pendant la nuit, jusqu'à 9 h. du m., qqs giboulées. X.M.M, | 708,14 —0,27| 90,29 “nl RE DOS | M.M.S. 698,02 15,75 | 55,521 54,800 90,46 Température La plus Less 1e ne | | | Hygromètre. ——_—_—_—_—_—_—_———— == = AVRIL. OBSERVATIONS. -couvert pendant le jour, grésil. isieurs cyrrhus le matin, mi-couvert pd la soirée. ée blanche, pl. eyr. pd le jour, qqs cumulus le mat.\| sieurs eyrrhus pendant le jour. l couvert. qqs eyrrhus. Le coucou à chanté. CR depuis midi, pluie vers 4 heures du soir. ite pluie pd la nuit, qqs grosses gouttes pd. Le jour. te à différ. reprises vers le soir, gr. écl. pd la nuit. || ite pluie pd toute la soirée, arc-en-ciel Le soir. Lite pluie à dif. reprises pd le jour. pendant la nuit et le matin. hie à différentes reprises pd le jour. | grésil le soir. lée blanche, petite pluie pendant la soirée, ige pendant la nuit. s eyrrhus le matin, couvert depuis 4 h. du soir. and vent du sud, qqs gouttes de pluie le soir. gros nuages très-épais et éclairs. hie à partir de 11 heures du matin. lite pluie après 6 heures du soir. | hie dans la matinée. Lie pd la mat., orage avec tonn. et grêle à 5 h. du s. nt du sud très-fort. lie à plusieurs reprises pendant la journée. s gouttes de pluie à 5 heurés du soir DASSeAUMNOIS le 22. ........ S ’ : lus élevée, id. NET IEEE OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, AVRIL, n HANOMÉÈTHE THENMOMÈTRE ; BANOMÈTRE THENMOMÈRE g É £ Ê — —— me F1 a 2 8 1 ÉTAT DU CIEL A 10 H. DD MATIN l 5 | Ê ÉTAT DU CIEL À 4 IH, DU SO 2 | Ê | l'E) | “| 3 MEL A 4H, DU SOIR : £ E# | £ Ë ÿ ONSERVATIONS, Ë ordinaire, | atéro en contact, | cxtéricur, | à minima, | = supericur. | inférieur. E | ordinaire. a zé0. | en cuntact. | extérieur. | amaxüas.| au Puy. | à Y:singeaux. Ë | upérieur inf ie È | Se) | | = supérieur. rieur. | | | | CR RS RE, RE Re PEN FOUR ROUES EE EN ER 1 —— Er ns | conige, | center. | entr, | | ceutigr. | centigr | cenuigr. millim. millim. “ | : j ‘ | | j 70908 Jo 105 — 400) 0005 ! presque couvert. NE NE [| 5 | 0,547 » eur: y g l 2 FN | 5,0 6,0 |90,0 | LéCOuvarlL x = 2 10,5 14.0 ss 5 DATES se NE N micouvert pendant le jour, grésil. 5 | ñ | 10,0 2,5 90,0 | mi-couverl. 0 5 | 10 200 a I ses ert, no N plusieurs eyerhus le matin, mi-couvert pd la soirée, | | Cod | uec plce nl Ü 4 7 125 0,5 91,0 | découvert. 6 F ; | 12,0 Sÿ 0 : [ ES no (0 gelée blanche, pl. eye. pd le jour, qqs cumulus lo mat. 5 1 | | 14,0 0,5 | 91,0 id. NE E 5 | 711,7 | 15,0 | 20.0 5 | id, dE £ POSTS eyrrhus pendant le jour, ñ 2 | 160 | 455 | 91,0 id. NE x 6 | | | 44,5 il + ; _e [Peu HS ; | » g 4 SOUYEr 7 B | 16,0 5,0 | 90,5 id. Ne. || E r 15,0 F) | M D = découvert. K | 10,5 | 7,0 90,0 mi-couvert. so | »o 8 | 714,0 16,0 | | £ El NE E id, qqs cyrrlus, Lo coton à chanté, { | 14,0 |44,0 | 91,0 couvert. x 0 708,6 | 705,5 | 45,5 » o10 | id. e = couvert depuis midi, pluie vors 4 heures du soir, 10 | 5,5 2,5 |91,0 découvert, pl. eyrrhus. x0 x0 | 700,6 698,09 FM IUES 90,0 fl ie _ petite pluie pd la nuit, qqs grosses goutles pu, lu jour. 11 5 | | | 8,0 2,0 10,0 couvert, | 0 | mn 695,0 690,5 2547 | “ 90.0 il No 0 pluie à différ, reprisos vers lo soir, gr, del, pd ln nuit, ki A 5 25 | 00,0 roi ET “a | a br à : Sntonl à ei ee 0 0 pelite pluie pd toute la soirée, are-unsciol la soir, 15 | 6900 6964 115 10 |910 COvOT F : | 699.2 52 : | < 895 mi-couvert, no 0 petite pluie à dif, reprises pd le jour, ja | 696,9 694,5 10,0 5,5 | 92,0 couvort. CAES | 698,7 | 6961 | 5172 | ; 120 couvert. No 0 id, pendant ln nuit ot le matin, | 4 690,2 697.2 105 0,5 91.0 mibouvart, à a | 699,8) | 697,2 | a | ; 910 presque Utes | 8 0 HE ll SRENS roprisos pd lo jour, | 16 018 699 00 T1 id à | | 014 RTE | BAS mI-COUvert. so LU 14, gresit 10 soir, ; | {E j ; 0 | 701,4 | 699,2 | { ou va È , 17 TOI AIT 0 | 1,0 | 90,0 id Ko Ê | 01,4 ; duun À Ho couvert, NO 0 gelée blanche, petite pluie pendant la soirée, 18 | 702,8 6085 | 5 : OT n. 3 | 7012 10,515 | » de mi-couvert. | No 0 neige pendant la nuit. 2; { 2,! ù x 2 | | ASS < ! é 19 608 5 696,0 | 6.0 Convert ne > | 3 | 86,0 | couvert. | NE | E qqs cyrehus Le matin, couvert depuis 41 h, du soir, »ÿ 696,0 692.9 Lg il CO “a e | | 6946 | » | >» id, | SE x grand vent du sud, {gs gouttes do pluie le soir. »| 6060 | 6029 I | #9 Cest 4 pe | | Es [l | » | » presque couvert. se s id, gros nungos trèsépais ot éclairs, 2 6, 02, $ ‘ À s | | » » couvert | s s oluie à partir de 11 heures d i 20 607 2 too | Ft + || | e . | I à partir de euros du malin, 2 TS ne . | Fe je id, \ NE. | pont | » 15,900 | id, | \ NE »} 702.8 69 | ATEN 29 a ROSES CRU à | à | 7026 ts 1,000 = se id 0 No pelile pluie après 6 heures du soir, à 705 7 10.0 CH LACEUELELUE ce | Ein 705,0 > 0,600 grandes éclaircies, cumulus à l'ouest.| so se pluie dans lu matinée, 0,1 ; , dun | , , 1 j 78 i | Î +070 [Ras ' n CAE #0 5 | e 10 i ee En 5 6,078 »500 | id, | su m pluie pd lu mat, orage avec tonn, ot grêle h 5 hi, du s, 1090 | IGUN 14; découvert. so s | 709, 707,5 21,0 | 22,0 1,578 0,700 presque couvert, cumulus, 8 N 702, | 2 9,0 urandes éclaircic s | 704,6 7017 ® STE » CUT de | ;! grandes éclaircies. S s | 7 J L rl Se ni | A ai L ’ = presque couvert, s | N vent du sud très-fort, 9,0 | 12,5 presque couvert. so s (Re T TOI ,S8 1,0 | 20,0 | » » | couvert, so 0] pluie à plusieurs reprises pendant ln journée, | 15,8 | 5,0 pus découvert (très-beau), » SE | FE | 19,0 | 20,0 | 12,641 0,900 presque couvert, très-beau. 0 n É S 92 w à $ ,6 | ich 5 f | | 15,0 | S,5 0 couvert, so s 704,6 | 14,0 | 1 | » » que couvert, cumulus. so # qqs gouttes de pluie à 5 heurés du soir Il | | AE or e. | | [es 5 3 " nn _ | MM. Baromètre À zèrc TÜl°3 | | | les | 701,49 | 5,56 | 91,15 Thermomètre ext 10,40 | | [MMS 701,78 17,44 | 42,459 19,600 90,98 | Température Ja plus | Passe du mots, la 9. | | | | Hygronètre, .:.... e u105 | | | | » HOUR T élevée, Hd Je 7. E. RDS — — == — = ets À : È —— 0 0 MAI. OBSERVATIONS. pluie pd la nuit, tonnerre à 4 h. du soir, grosses gouttes de pluie à midi et {onn. à 2 h. du soir. couvert pendant toute la journée, pluie pendant toute la nuit et la journée. petite pluie à 4 h. du soir. nuages gros et épais. id. id. id. plusieurs éclaircies à midi. petite pluie à 7 h. du matin. pet. pl. dans la mat., pl. et éclairs suiv. de tonn. à 4 h.s. petite pluie dans la nuit. plusieurs cyrrhus pendant le jour. petite pluie dans la soirée. pelite pluie dans la matinée. couvert pendant la journée. quelques gouttes de pluie à S h. du matin. quelques gouttes de pluie à 8 h. du soir. plusieurs eyrrhus à l'horizon. pluie à 4 h. du soir. plusieurs eyrrhus pendant le jour. éclairs dans la nuit, pluie et tonn. à 4 h. du soir. pluie dans la nuit et à 1 h, du soir. pluie et éclairs suivis de tonnerre à 4 h. du soir. pluie pendant la matinée. petite pluie le matin à 14 h. et le soir à 4h. qqs gouttes de pluie la nuit et la matinée, brouill. le mat. plusieurs cyrrhus à l'horizon. ( petite pluie à 9 h. du matin. ( pluie à 4 h. du soir. LR ee À — ed — M LS LS LL PPS SEE en (DASSERAUMMOIS, JeM5.--.......- 20 ture la plus | élevée, id. le 2 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. BARONÈTRE THERMOMÈTRE 3 VENTS BAROMÈTRE THERMOMÈTRE | UDOMÈTRE | VENTS £ u Re | = [= | D ÉTAT DU CIEL À 40 H, DU MATIN | D Pre eu | À ÉTAT DU CIEL À 4 H, DU SOIR. Ron OBSERVATIONS. = ordinaire. azéro: cn contact. | extériour, | a minima: | Supérieur. miereur, ë drdinuire à zero, | en contact. | exterieur. | à maxima: | au Puy. | a Yssingeaux supérieur. | inférieur. Ë | | NP Sen CN CC Ps a ln — centigr centigr | centigr. | centigr: || centigr. mil, | millim. | | | | 700069 Go5 | 920$ qqs éclaircies, cumulus. so | 0 [ | TÜSu2 7 1405 1600 | 1800 | 14,800 12,400 9105 presque découvert. SO $ pluie pd la nuit, tonnerre à 4 h. du soir, 2 700,46 7,0 92,5 couvert. GO |. & 2h) T0 700,41 16,5 MIT, ON 20,0 » » 90,0 couvert. s s grosses gouttes de pluie à midi et Lonn. à 2 h. du soir. 5 nil 699,60 8,0 92,2 id. SE s 5 Tüi,1 698,55 | 14,0 10,5. | » » 9172 id. SE s couvert pendant toute la journée ; 698,1 7,0 91,7 id. s S 4 | 698,1 695,60 | 15,5 11,0 12,5 15,844 8,400 | id. so pluie pendant toute la nuit et la journée. . 01.1 6,0 | 92,0 id. | \ 5 [705,5 | 44, 22,5 || » 16,100 | | presque couvert. no petite pluie à 4 h. du soir. 6 707,0 9,0 | 92,0 id. x GMT OT SIT 05 275 20,0 1,400 1,000 | id. NE nuages gros el épais. 7 707.8 7,0 ç | mi-couvert. | E 7 107,8 | 705,27 | ) 2169) » | » | mi-couvert, NE N id. ç 707.8 92,8 quelques éclaircies. | NE 8 | 707,7 704,92 250. » » | presque couverL. NE N id. 7071 | 95,0 mi-couvert. E 9 | 707,0 TO4,1T | 20,0 | » » | couvert. NE E id. 708.2 95,0 presque couvert. N ll 410 707,8 704,95 Û » » mi-couvert. NE NE plusieurs éclaircies à midi. 7ÜT,S 94,5 ini-couvert E IL 41 || 7os,2 704,98 | 25,0 » | » id. NE petite pluie à 7 h. du matin. 707,2 95,0 id. N N 12 | 704,9 701,941 | 27,0) |: 1,000 | ” couvert. E pet. pl. dans a mal., pl. et éclairs suiv. de tonn. à 4 h. s. 704,5 95,5 | id. SE E 157022 1 60055 | 2201075150 » | mi-couvert. NE NE pelite pluie dans la nuil. 701,5 | | 90,5 | découvert. | » NE 14 696,66 16,0 D 5 | id. NE E plusieurs eyrrhus pendant le jour. 700,6 697,7$ s9,0 mi-couvert. | NE N 15 700,2 699,51 17,0 | n | » id. x | N petite pluie dans la soirée. 700,2 697,51 S9,6 presque couvert. | no N 16 700,2 697,64 18,0 | 0,094 » || 1S9,7 presque couvert. x0 x pelite pluie dans la malinée, F04 701.72 90,0 couvert. N0 x0 17 701,80 | IS,0 | » | » | 90.0 couvert. No No couvert pendant la journée. 705.5 700,92 || 94,5 id. x0 no 18 700,95 | 18,0 | » » | 92.0 à id. no 0 quelques gouttes de pluie à 8 h. du matin. 705,7 701,00 | 9152 mi-Couvert. xo NO | 19 | 700,9 | 26,0 | ù » | 91,0 mi-couvert. x0 0 quelques gouttes de pluie à 8 h. du soir. 704,4 701,64 | 91,0 couvert, | No 0 | 0 Mur 015 2. 27.0 | » | » 91.0 id. » A) plusieurs eyrrhus à l'horizon. 705.1 700,15 VASON| mi-couvert. so o || 21 700,04 | 229 y | » | 91,0 | id. xo 0 pluie à 4 h. du soir, 705,5 700,55 17.0 91,5 id. so o 92 700.68 28,0 » » MORTE couvert. [0] 0 plusie urs cyrrhus pendant le Jour 704.0 701.05 17,0 JS | id | » $ | 25 | 702.67 25,5 » » | id. » $ éclairs dans la nuit, pluie ettonn. à 4 h. du soir. 704.6 701,58 1785 | 91,8 | couvert. 1 0 N 2} | | 50,0 » » mi-couvert. no N pluie dans la nuit et à 1 h. du soir. 704,6 701,52 18.0 9 | mi-couverL. (NT) 0 25.| 701,65 | 20,500 | 6,000 couvert. x0 0 pluie eLéclairs suivis de tonnerre à 4 h. du soir. 704.6 701.61 17.0 16,0 10.0 couvert. x0 \ 26 TU ,S4 10,485 | 6,500 ii-couverl. no x pluie pendant la matinée. 704,8 701,72 | 18,0 17,0 6,0 | mi-couvert. NE N 27 | 704,5 | » | » id. NE N petite pluie le matin à 14 h. et le soirà 4h. 704,5 701,47 16,0 15,0 10,5 | couvert. » F || 28: |. 702:8 | » » id. » 0 qqs gouttes de pluie la nuit et la matinée, brouill. le mat. 29 | 705,6 700,65 | 17,0 | 17,0 6,0 mi-couvert. No x 29 | 705,6 700,69 | | 1,000 Ù id. » Q plusieurs cyrrhus à l'horizon. 50 702.0 | 69893 is.0 17.0 $.0 ui so 5 50 |" 702,0. |" 69912 » » id. so S petite pluie à 9 h. du matin. 51 | 705,7 | 700,98 | 4165 | 165 7.0 couvert. » s 51 à Tom | MT (1010 S » » id. » S pluie à 1 h, du soir. | | | | - ne “a. | 0125 ee | el | ro | soc | 75,270 | 55,100 | 1,85 rempérature La quus | Ml ms, Je LE ou | | | | HYBrOMEÈTE EE EN OIL | | | SR JUIN. OBSERVATIONS. rs eyrrhus pendant la journée. | endant la matinée et une partie de la soirée. luie à S h. du matin. e et pluie, nuages gros et épais. scumulus dans -la journée. seyrr. le matin, tonn. et pluie à 2 h. du soir. :r0s et épais, quelques cyrrhus. heures du soir. e et pluie à 5 h. du soir. Padant a nuit, qqs gouttes DEN le jour. 15 heures du soir. s cyrrhus pd le jour, pluie dans la soirée. | s eyrrhus pendant le jour. | uouttes de pluie à 4 h. du soir, tourbillons. | tonnerre et pluie dans la soirée. luie à 11 heures du matin. 's eyrrhus pendant la journée ttes de pluie dans la journée. ns la matinée. luie dans la matinée. s éyrrhus pendant la journée. | *s cumulus dans la matinée. | ages pendant la journée. rds sur les montagnes à 8 h. du matin. s cyrrhus pendant touie la journée. rs cyrr., qqs gouttes de pluie dans la journée. luie pd la journée, brouill. sur les montagnes. 1rds sur les montagnes dans la matinée. basse du mois, les 12 et 22...... 6°0 élevée, 4, LOTS ENAR CREER 35,0 2 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. JUIN | BARONÈTRE TUERMOMÈTRE | VENTS BANOMÈTRE | LHERNOMÉTRE UDOMÈTIE . VENTS. | een = ÉTAT DU CIEL A OH. DU MATIN. | | | | 3 E Dec ÉTAT DU CIEL À 4 H, DU SOIR, ÉpiER OBSERVATIONS. | ‘ es conte | erutitur | twiim.| © | | supérieur. | inférieur. ordinbire: à 2610, | en contact. | extéricur, | maxhna aù Puy. à Yssingeaux. É supérieur, | inféricur. | | | | | | | | — —— ——— ——— —— ——— — — —— ——— | ——— ———— ——— ——— —— | — ——— | —— | —— | | ——— centigr centigr conter. | | | | | centigte Lontigre conligr. anillim. millim, 700000 1Soû 1900 1000 couvert. SE s 1 | 70206 | 1705 1900 2005 » » couvert, | s $ plusieurs eyrrhus pendant la journée. | 695,96 17,5 12,0 id. IL S 2 | 698,2 (“22,0 » » id. II pluie pendant la matinée et une partie de la soirée. 695,55 15,0 10,0 id. so S 5 2 ,14 IS,0 | 6,458 | » mi-couverl. so 0 | petite pluie à S h. du matin. 699,09 18,5 7,5 presque découvert. | » S 0 Mr TE 698,69 | | 49,5 » » id. so o tonnerre et pluie, nuages gros el épais. 702,68 19,0 s,0 mi-couvert. l 0 jh | li 702,26 21,0 » » id. x0 N plusieurs cumulus dans -la journée. 704,21 19,0 ! 7,5 id. NE \ 6 707,5 704,15 20,0 5,900 » couvert. NE E plusieurs eyrr. le matin, tonn. et pluie à 2 h. du soir. 705,22 8,5 découvert. » N f lb 706, 705,16 | | 22,5 » | » mi-couvert. | » \ nuages gros el épais, quelques eyrrhus. 700, 11,5. couvert. xo | à S 705,7 700,57 18,0 » | 5,000 id. xo x pluie à 4 heures du soir. | 699 s,0 mi-couvert. x0 0 9 | 700,4 697 | | 47,0 10,000 | 6,000 id. » 0 tonnerre el pluie à 5 h. du soir. 698,5 10,0 id, » 0 10 7O1,S 698,84 15,0 | 17,516 2,500 id. xo N pluie pendant la nuil, qqs goultes pendant le jour. 700 9,0 couvert. » |. 10 11 T00,T2 | IL 18,0 n | 4,000 couvert. No xo pluie à 5 heures du soir. | 6,0 découvert. xo N 12 705,15 | 18,0 » 1,200 mi-couvert. No x plusieurs eyrrhus pd le jour, pluie dans la soirée. 7,0 id, | » \ 15 705,95 21,0 15205 | » | id. » x plusieurs eyrrhus pendant le jour. 9,0 id. | no | 0 14 702,29 » | 41,000 id. xo 0 grosses gouttes de pluie à 4 h. du soir, Lourbillons. 10,0 id. | x0 0 15 702,52 0,955 | 4,000 couvert. No o éclairs, tonnerre et pluie dans la soirée. 10,0 mi-couvert. | » 0 | 416 | 505,0 701,92 10,000 | 0,400 id. | » s | id: ! s,0 couvert. | xo N 17 | 706,8 705,71 11,815 | 1,000 mi-couverL. | x x peile pluie à 44 heures du matin. s.0 id. | xo \ Te 710,8 707, 0,125 | 2,000 id. 10 x | plusieurs eyrrhus pendant la journée. 9,0 id. | \ N 19 707,6 704,65 » | 5,400 couvert. x N | qqs goultes de pluie dans la journée. 7i 10,5 id. | ne x :0 | 705,2 7,469 5,100 id. x x | pluie dans la malinée. 705 10,0 | id. | TO N 21 | 704 » | » id. No No petite pluie dans la malinée. . 707 6,0 | mi-couverL. | N° N 22 TûS,10 | 0,754 » | mi-couvert. NE N quelques cyrrbus pendant la journée. 709,57 11,5 | id. | | » 25 709,65 » » découvert. NE E plusieurs cumulus dans la malinée. TÜS,9$ 15,5 | découvert. | $ 24 709,04 » 0,600 id, SE s gros nuages pendant la journée. : | TÜS. 0 | id. s s 25 | 708,91 | » | » id. | s s brouillards sur les montagnes à S h. du malin. | 2 708,7 17,0 mi-couverl. (SF: s 26 | 707,44 | » » mi-couvert. | ù s plusieurs eyrrhus pendant toute la journée. | 2,1 708$ 17,0 | découvert. | » s 97 OT | » | » découvert, » s id. : | 28 11,0 706,88 16.0 mi-couvert. | s s 2s 707,01 29,0 » 10,600 couvert. so o plusieurs eyrr.. qqs gouttes de pluie dans la journée. | > 710,7 706.62 couvert. \o N0 29 707,22 15,0 7,065 | 4,900 id. No o petite pluie pd la journée, brouill. sur les montagnes. 5û 709,2 706,04 | id. Ion 0 50 T{ 20,0 0,891 » id. xo o brouillards sur les montagnes dans la matinée. | | | SE — | | - _| | xx 705,64 10H |NO1:S0 RUN PANIER ES ATOS Ets | ne (T0 43.1 24,58 | 78,105 | 46,700) | 91,68 Température la plus | PASSe A Hnois, les 19 el 2 | | | Hygromètre............. | , JUILLET: OBSERVATIONS. tonnerre à 6 h. du soir. rosée. id. rosée. rosée, qqs gouttes de pluie et {onn. dans la soirée. | rosée. id. tonnerre et grain de pluie pendant la nuit. id. id. pendant la journée. | tonnerre et pluie pendant la nuit. grain de pluie à 5 h. du soir, tonn. et pluie pd la nuit grain dans la matinée. = et E _ IMDASSEIAULMOIS Mer2...... .:… 1095 (os la plus \ élevée, id. PS6 CL 15... 41,0 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. Qi JUILLET, ne, BAROMÉTIE | THERMOMÉÈTRE Jon VENTS BAROMÈTRE THERMOMÈTRE | UDOMÈTRE | VENTS : RS ——— | ———— À rar où c1EL À 40 1. pu main. = —— firm M me ÉTAT DU CIEL À 4H. DU SOIR. f ü| OUSERVATIONS, £ | ordinaire, a zéro, | en contact, | extérieur, | h minima, | supérieur. imférieur, ordinaire azéro, en contact. | extérieur, | à maxima, au Puy. | à Yssingéaux. supérieur, in'érieur, 1.) | | | | nn Ge RE EU — | _— Re ur — RL ——————_— | | centigr, | centigr, cootigr centigr. centigr. centigr- | millim. | millim. y | 705 | 706082 | 2100 2000 | 1100 9200 | très-beau, qqs cr. NE x l 71005 2100 5000 » » très-beau. NE \ D A LP D CIE MP PT PT 15,5 très-beau, qqs cr. NE E 2 715,1 25,0 54,0 » | » id, qqs er. k à 5 715,1 709,25 | 24,0: | 29,0 16,0 id. » E 5 745,5 9,57 26,0 54,0 56,0 » | » id. qqs cr. ù 3 1 715,0 709,00 25,0 29,0 16,0 id. » E 4 745,5 709,50 28,0 58.0 | 40,0 » » | id. » 5 715,7 | 741,89 | 25,5 | 52,0 18,0 id. » NE 5 745,7 741,50 26,5 » » id. qqs em. nl | ( 715,8 | 711,66 26,0 | 52,0 19,0 id. N E 6 715,7 26,5 » » id. qqs cm. \ . 7 TI4,4 | 710,22 | 24,0 | 27,0 15,0 id, x EN 7 715,5 709,57 | 26,0 » » id. qqs CM. N 8 | 712,6 | TO8,48 | 26,0 | 27,5 15,0 id. NE N 8 712,6 TOUS ,54 25,5 | » | » id. qqs CM. N (1 712,4 708,40 ? 24,5 16,0 |! id. plusieurs CM, » NE 9 711,5 707,50 25,0 | v | » id. qqs CM. NE 10 712,0 708,00 25,0 |M4,0N |] id. qqs CM. | NE E 10 711,8 707.87 » » id. qqs CM. NE 11 742,0. | 708,26 | 25,0 |415,0 | id. qqs er. NE N 11 712,0 » | » S6,0 id. qqs cr. NE 12 715,0 710,99 | 29,0 | 15,0 très-beau, qqs cr. N x 12 714,6 710,4 » | » S5,0 id. er à 4, NE E 15 | 715,0 710,88 29,0 id. » NE 15 715,0 710,86 | » | » 81,0 id. N rosée, 4 | 715,0 711,12 28,5 | id. | » NE 14 TA4,T 740,57 | » | » 79,0 id. er à hz. à N 15 714,5 712,29 50,0 id. » N 15 714,0 709,87 | » | » mi-couvert, » No rosée, qqs goultes de pluie et Lonn, dans la soirée, 16 714,2 710,15 25,0 | id. N x 16 744,2 710,20 » | » très-beau, er à hz. N N rosée, 17 | 744,0 | 709 id. » N 17 | 744,0 740,00 | » » id, ceràhz. NE \ id, 18 | 71,0 706,82 87,0 id. qqs CMN. se E 18 711,0 705,05 » » id. qqs CMN. SE s 19 | 741,0 706,95 | id, qqs CM. xo N 19 710,6 706,61 » | » id. qqs CMN. No N 20 712,2 708,08 | | | id, qqs CMN. SE E 20 71,5 706,99 | » 0,700 id. CM. SE s 21 712,0 707,88 | id, » E 21 711,5 | » 5,400 | id, » s tonnerre ol grain de pluie pendant ln nuit. 22 708,0 | 704,45 | 24,0 | | couvert, so 0 22 707,8 | 1,472 10,100 86,5 couvert, so 0 id. id, pondunt la journée, 25 707,0 705,22 25,5 | | découvert. so 0 95 TÜS,9 7,528 7.000 84,0 ussez beau, GM. 0 0 lonnerre ot pluie pendant fu nuit, 24 708,8 705,14 225 | couvert. 80 0 24 7145 | 707,56 D 6,000 couvert. 0 N grain de pluie à 5 hi. du soir, tonn, et pluie pd la nuit 25 710,4 707,09 19,5 | id qqs CM. NE N 25 705,82 5,544 2,200 id. vo 0 grain dans In matinée, 26 715,1 19,5 | id. plusieurs CM. NE x 26 709,01 » » 1 CM. NE N 21 | 75,1 20,5 très-beau, NE E 27 709,75 50,5 | » » beau, qqs er. N# N | 744,0 21,0 s-boau, qqs er à hz, NE E 28 710,41 55,0 | » y id. N N | TI8,0 25,0 | id. E E 29 709,89 59,0 | » : id. qqs er à hz, NE N | 709,0 24 id, qqs CM. NE E 50 705,66 ; | » » beau, qqs er. NE NE 709,5 24 | id. x » 51 687,17 | 40,0 » » beau, qqs er. No 0 | Au x. 708,75 15,22 5 MMS. 707,71 55,88 | 15,844 29,400 85,02 Température Ja plus ALT ie PAU NE 1 … AOÛT. OBSERVATIONS. |et pluie à 5 hé du soir, à 10 h. du mat., em. avec tonnerre dans la soirée. m à 10 h. du matin. urs em dans la journée. ke gouttes de pluie à 5 h. du matin. ts, tonnerre et pluie. pendant la journée. Ilard le matin, CM et stratus à hz. rosée, em et stratus à l'horizon. pluie à 10 heures. le matin. + em et stratus parsemés. puttes de pluie à % h. du soir, crst. pendant la nuit, pluie, em, nb à l'Est. s de pluie à 7 h, du soir, CM à hz. à 1 h. après midi, em au Sud, erst à l'Est. hz, temps couvert, cr. basse du mois, les 7, 19 et 23... | élevée, id. DÉS OR TOR OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. Fe. = AOÛT, EE — "EEE | & BAROMÈTRE THERMOMNÈTRE UDOMÈTRE V | Te | ÉTAT DU CIEL A 40 H. DU MATIN. = È ÉTAT DU CIEL À 4 H. DU SOIR. TRS PE OBSERVATIONS. dataet. | CXteriCUr. | à minima, | | supérieur. inférieur. É ordinaires à zéro. en contact. | extérieur. | a maxina. au Puy. à Yssingeaux. = supérieur inférieur. | es ee CO | 2] QUI cptigr | centigr. centigr. ccbligr. millim. millim. = | 1 | 7099 70509 2405 | 4405 découvert, ce » 1 70209 2405 | 2600 | 2800 » » découvert. » NE | 2 ra LR) 706,8 id, | » | 2 706,9 25,0 26,5 28,5 » » mi-couvert. p NE 5 711,0 | mi-couvert. 5 706,9 25,0 26,0 27,5 » 2,500 couverL. 0 s tonn. et pluie à 5 bé du soir, à 10 h. du mat., em. j TILS | id. ni 4 707,1 24,5 26,0 27,0 6,094 » mi-couvert, em au Sud, » NE pluie avec tonnerre dans la soirée. 5 712,0 | découvert. » 5 704,0 25,0 25,0 28,5 4,156 12,800 couvert, so o 6 | 715,5 id. » 6 708,0 25,0. |" 26,0: 1 54,0 » » qgs em à l'horizon. s SE F 715,5 id. E ÿi 707,5 27,0 28,0 58,0 » » qqs em à hz. so so 710,0 id. E 8 | 704,0 29,0 | 28,0 | 59,0 » | » découvert. s SE qgs em à 10 h, du matin. id. s s 9 | 705,0 27,5 | 28,0 | 56,0 » » découvert. s » plusieurs em dans la journée. mi-couvert. s s | 705,7 27,0 27,0 1,565 | 4,500 mi-couvert, em. s » grosses gouttes de pluie à 5 h. du matin. 25.0 couvert. | s SE | 705,1 24,0 25,094 | 14,000 id. em. s » éclairs, tonnerre et pluie. 21,5 | | couvert, petite pluie. | » | s | 708,2 255 S,000 | 17,700 id. GM. s » pluie pendant la journée. 22,0 | | découvert, brouilkrd. s s 715,9 25,0 1,000 » découvert. s » brouillard le matin, CM et stratus à bz. 2 | | découvert, forte rosée. » | SE 705,6 24,0 » » id. so forte rosée, em et stratus à l'horizon. 22,5 | découvert, Po RUNE | 706,5 25,5 » | » découvert, em etstà hz. N 0 21.5 mi-couvert. NE | E TÛS,2 25,0 » » id. em à hz. N N petite pluie à 10 heures, 2 découvert. E | E | 707,7 | 0,156 » id. er et st à hz. N N rosée le matin. id. NE MANE | 706,6 | » » id. er à bz. NE NE id. NE E | 705,0 » » id. em à hz. NE E rosée, découvert, rosée, E | E | 706,2 » » id. em à hz. E E rosée. découvert. N | \ | 707,4 » | » id. x N rosée, em el stralus parsemés. mi-couvert. NE | NE 707,5 » | » id. em à hz. NE NE découvert. | E E 705,5. | » | » id. E E Ç | id. | E E 706.1 | » I » ss,0 découvert, très-légers er à hz. » s | id. | » E 704,9 | » » 88,5 découvert. er à bz. » s ; | mi-couvert. | so s | | 708,8 705,0 » » s8,0 couvert, so s qqs gouttes de pluie à 4 h. du soir, crst. | id, | so E | | 709,6 705,8 2,000 » presque découvert. so so orage pendant la nuit, pluie, em, nb à l'Est. | | id. | xo SE | 706.0 | » » mi-couvert. SE SE gouttes de pluie à 7 h, du soir, CM à bz. | | id. No | no | 705,5 » » id. SE SE pluie à 1 h. après midi, em au Sud, erst à l'Est. | id. so | vo | 7080 704,4 6,889 8,600 couvert. 0 0 €m à hz, temps couvert, er. | légèrement couvert. NE NE 706,0 702,7 » 0,700 mi-couvert, nb. NE NE : Ed Le. _ EURE | = 706.78 | 15,12 ee Ms.) 7û6,10 28,87 | 52,952 | 57,600 | s8,u Température la plus | Hesse tunis, les 7, IOelS LOS | | Hygromètre 88,45 | | | È RE ce ET Ce me Om SEPTEMBRE. OBSERVATIONS, qqs gouttes de pluie à 6 h. du soir, nb. forte rosée. id. id. rosee. gelée dans les bas-fonds. id., petite pluie entre 9 et 40 h. du matin. rosée. rosée. pluie toute la journée. petite pluie à diverses reprises dans la journée. qqs gouttes de pluie dans la soirée. forte rosée. rosée. rosée peu abondante. pluie à 10 h. du matin avee tonnerre. brouillard. basse du mois, le 14............ a À ND a said le 4... OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. f EPTEMBRE, [ BAROMÈTRE | THERMOMNÈTRE = VENTS ë BAROMÈTRE THERMOMÈTRE UDOMÈTRE È VENTS A ‘| 5 ÉTAT DU CIEL A 40 H. DU MATIN |] de = "Radiere LÉ à ÉTAT DU CIEL À 4 H. DU SOIR RE T à OBSERVATIONS. rinaire. ur eu contsel. | extérieur. | à minima. A supérieur. | inférieur. 3 ordinaires a zéro. en contact. | extérieur. | a maxima. au Puy. à Yssingeaux. 2 supérieur. | inférieur, | | | EE À ——— — — |__| —_ | —_ —— | —————……—…"…”…"…". …"…" "—…" …" "… —. |" | —… … — — — -——_——_]—_] centigr. centigr. centigr. centigr. millim. millim. | 1 70600 | 1005 couvert, CM à bz. E E | 704028 1900 2200 » » S805 couvert, E SE ggs gouttes de pluie à 6 h. du soir, nb. 2 709,0 ; 10,5 couvert. stem. E E 2 706,05 20,0 0,750 » 90,0 découvert, nb à hz x0 N 5 | ZA | 707,05 | 12,0 mi-couvert, Cm, o No 5 707,48 | 20,5 | 1,051 » 89,5 mi-couvert. stem. No N ñ TH, 1 707,05 | 10,0 découvert, er. N No 1 705,08 21,5 26,0 » » 89,0 id. nb à hz. s so 710,7 707,04 | 15,0 couvert, stem. NE NE 5 707,05 20,0 22,0 | » 2,800 89,0 découvert, qqs em. NE NE 6 7091 705,94 | 7.0 découvert. » SE 6 704,98 19,0 | | » » 85,0 id. qqs cm. x0 \ forte rosée. 7 709,5 706,08 | 7,0 découvert, cr à hz. so Oo 7 706,24 | 19,5 | » » 86.0 id. er à hz. » No id, $ 710,4 705,00 | 7,5 | couvert. 0 NE 8 | 19,0 | | » » 86,5 id. cm. No 0 id. 9 11 707,94 | 7 | découvert, er à hz, E NE 9 19,0 | » » 86,5 découvert. » | E 10 711.0 707,8S | 7 découvert. » E 10 19,5 | » » 87,0 découvert. qgs em. No NE rosée, M 7158 710.6 | découvert, crem à hz. NE NE 11 1,0 | » » 86,0 id. crcm à bz. NE NE 12 715.9 710.8 | découvert. » E 12 17,5 » » 85,5 découvert. » NE gelée dans les bas-fonds. 15 708,7 | | mi-couvert. No 0 15 17,0 | » » 87,0 couvert. xo No id., petite pluie entre 9 et 40 h. du matin. 14 704,5 | | | qqs cm à by. SE SE 14 16,0 » » 87,2 id. s SE rosée, 15 706,9 704,07 | 87,0 presque couvert. s SE 15 16,0 » 4,000 86,0 presque couvert. s SE rosée, 16 | 697 16 90,0 couvert. o so 16 697,2 694,59 16,0 15,200 92,0 couvert. o so pluie toute la journée. 5,11 | | 94,0 id. o No 17 694,81 | 16,0 5,700 90,0 id. o NO | | 941,0 id. n0 No 18 704,64 14,5 ME M,5 id. 0 No petite pluie à diverses reprises dans la journée. 91,0 mi-couvert, cm. No o 19 707,16 16,0 » » 91,5 cm. o No | stcm. so 0 20 706,65 17,8 » » 92,2 cn. so 0 | | découvert. so s 21 705,68 19,0 ù » 92,0 couvert, s0 s | couvert. s 0 22 706 18,8 20,0 0,797 » 92,0 id. s 0 qqs gouttes de pluie dans la soirée. 706,79 | découvert. E SE 25 707 20,0 23,5 » » 90,0 mi-couyert. E SE forte rosée, 7ÜS,20 id. E SE 24 707,15 20,0 » | » 95,0 découvert. E SE! | rosée” 708,77 | id. » SE 25 TOS,SS | 20,5 » » 92,0 id. E s | rosée peu abondante. | id. » SE 26 710,01 21,0 » » | 90,0 id. » s | id. » s 27 21,0 20,0 » y 91,0 id. » s | | presque couverl. em. s SE 28 20,5 20,2 » 91,5 presque couvert. cm. s SE | | | couvert. so 29 17,0 16,0 16,100 91,5 mi-couvert. s so | pluie à 40 h. du matin avec tonnerre. | | découvert. s 50 18,0 18,0 » » 92,2 découvert » SE | brouillard. | | | | | | | | e l | aromètre à Zéro....... E= X.M.M, | 705,95 89,76 | ne ne BU 5 MMS. 706,47 22,1 50,984 45,800 89,57 Température la plus RENE, le ir 5 | | Hygromètre RSS ou on OCTOBRE,. \RC Er | OBSERVATIONS. puillard. te rosée. k , Quelques nuages pendant la journée. sée, plusieurs nuages. tie pendant la matinée, CM. ée blanche, em à hz. tie à 5 h. du mat. et pluie et tonn. à 2 h. du soir. isieurs stratus à hz, pluie à 7 h. du soir. isieurs crst, forte rosée, CM à hz. | | pommelé à hz, gros cumulus, rosée, it et grand vent, qqs gouttes de pluie. iie et tonnerre à 1 h. et demie. pd la nuit avecéel.etton., pl.lem.àSh.etles.à5h. elques cyrrhus. s cumulus à hz, forte rosée. S eyrrhus à hz, rosée. s gouttes de pluie, forte rosée. s gros nuages, pelite pluie à 9 h. du matin. tie à différentes reprises pendant la journée, tie pendant la nuit et la matinée. tie mêlée de neige, brumeux. , gelée pendant la nuit. , vent très-fort. lite pluie, gros nuages à hz. ages. rhos-stratus, gelée pendant la nuit. te rosée, petite pluie, cumulus. ie pendant la soirée. à by. = === basse du mois, les 24 et 25...... élevée, id. ERA RENE plus OBSERYATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. OCTOBRE, a n BANOMÉTRE THERMOMETHE “ ’ | VENTS é | BAROMËTRE | TUERMOMÈTRE | UDOMÊTIRE £ gi 11 É | 4 EE = h 1e ] ÉTAT OÙ CIEL À 10 H. DU MATIN. | i L £ = | ; | | È ÉTAT DU CIEL À 4 H, DU SOIR, É ONSERVATIONS. ÿ ordinaire 11610, en contact, | extériour, | a minime, | & | supérieur. | inférieur. £ ordinaire. à téro. en contact. | extéricar. | à maxisa.| au Puy à Yssingesux. ë supérieur, | intérieur. “ | ” | k _—_—. |. —_. ..——- ....—. "1... | ns | ns) es ES | ee a ———————————— — …———…—…—…"…—…—…"…"—…—………—… —…"… ——— contigr contigr, | entier, | | | ceutigr. centigr. | centigr mille. millins. 1 78070 | 1800 2000 1100 o() découvert. SE E | Fe 7li 707087 | 2000 | 2100 | 2500 | » » découvert. SE s 2 18,2 17, #,0 05,0 id. » | E [03 | 717,6 714,16 19,0 17,0 25 » » id, » x brouillard, $ 17,8 15,2 | 8,0 id. | » | E 5 714,9 707,61 » » id. » * j 18,0 | 241,0 10,0 id. » E | 712,0 701,54 » » id. s » forte rosée, S ÿ 20,0 19,0 | 7,0 id, D | » 5 710,8 » | » id. so s id, quelques nuages pendant la journée, ü 20,5 19,5 | 6,0 id. | s , | 6 710,2 » | » sS,5 mi-couvert. s s rosée, plusieurs nuages. dl 19,0 19,0 11,0 couvert. 8 s 7 7 10,000 90,0 découvert. so so pluie pendant la matindo, CM, 8 | | 19,5 10,5 7,5 découvert, $E se | 8 707,5 » | mi-couvert, s s gelée blapohe, em ù lu 0 | | 18,5 18,0 10,0 couvert. s s on: 701,5 | 10,500 id. s se pluie à & hi, du mat, ot pluie ot lonn, à 2 h, du soir 10 | 18,0 | 15,0 7,0 découvert. | s SE | 40 700,9 » | découvert. s s plusieurs stratus à he, pluie à 7 hi. du soir, il 695,04 18,0 17,0 #,5 id. $E se | 41 702,9: | » | | id. se sk plusieurs orst, forte rosée, CM à li, 12 701,12 18,0 19,0 0,5 #0,0 presque couvert x x 12 705,9 | » presque couvert. so N ciel pommelé à hr, gros cumulus, ronde, 15 700,88 15,0 0,0 4,0 91,0 brouillards. xo x0 5 » | mi-couvert, s se orst ot grand vont, qqs gouttes do pluie, (nl 005,25 16,0 | 146,0 11,0 12,0 découvert. SE s 14 | 10,600 | convert. SE sk pluie ot tonnerre à L h, ot domio, 1ù 008,66 | 45,0 | 145,0 10,0 05,0 couvert. so so 15 | 10,500 id. so no or, pd la nuit avec del, ot ton, pl om, 8h, et lo sh 5 hi, 10 7ü1,02 18,0 | 48,0 0,0 découvert. s s | 16 » id. s s quoliques cyrrhus, 17 706,68 18,0 15,0 7,0 id, s s 17 » découvert, 8 s qqs Cumulus à y, forte ronde, 18 | 708,2 705,66 | 46,0 12,0 7,0 brouillards, couvert. SE SE 18 | id. se sE qqs eyrrhus à br, rosée, 10 TÜ8,0 705,10 16,0 12,0 s,0 id. NE NE | 19 » ouvert. NE » qqn goutlos de pluie, forte rogu, 20 | 705,0 701,20 15,0 11,0 8,0 couvert. x \ “0 | » mi-couvert. x x «ds gros nunpon, petite pluie à 9 h, du matin, 21 | 604,0 | 602,40 | 15,0 15,0 8,0 id. xo 0 21 | 6,500 | couvert. x N pluio à différanton roprisos pendant lu journée, 22 GUS,0 | 096,54 14,0 0,0 5,0 id. so so 22 | | | 7,00û id, \ N pluio pendant Ja nuit ot ln matinée, 25 600,0 600,00 12,0 4,0 2,0 id. SE SE 25 9,700 id. N N pluie mêlée do noigo, brumoux, 24 | 607,0 | 60 5,29 12,0 6,0 0,0 12,0 ° id. x x 24 | | » mi-couvert, | x no CM, gelée pondant ln nuit. 25 690,5 ÜUS8 08 15,0 s,0 0,0 1,0 mi-couvert. s s | 25 | | | 5,000 90,0 id. s s CM, vont très-fort, 20 | 608,0 j 11,0 11,0 s,0 91,0 couvert. No x0 26 700,0 | | » 91,0 | couvert, s N pelile pluie, gros nungos h li. 27 705,0 | 609,51 15,0 0,0 1,5 mi-couvert, | N | N 27 706,0 | 10,0 12,0 » » n,0 | id. s s nuugos, é 28 | 707,4 706,07 12,0 7,0 0,1 id. s s og | | 10,0 | 15,0 | » » 91.0 id. s s rhos-stratus, polie undant la nuit, 20 | 701,5 | 099,17 15,0 11,0 6,0 presque découvert, so so 29 | 10,0 | 15,0 | 9 | » id. | -xo so forte rosée, petite pluie cumulus. 50 | 7020 56 s,0 1,0 id, xo xo 50 s,0 10,0 , | 6,560 id. so so pluie pendant la soirée, 51 | 600,5 607,60 14,0 s,0 couvert, | so xo 5 | 14,0 15,0 1,205 | » id. xo so orh hr, TT : UE | | : 0ûn ; 0" MN | 701,88 ACTE LEA SE | (us. | 700,47 16,58! 64,560 | 78,560 | 91,18 Température la plus | Va dos, Host BEM np Æ | Hygromètre ” : 91,29 | | : Le SF Le PORT À NOVEMBRE. OBSERVATIONS. cumulus à hz. id. G'nb et em à hz, vent très-violent. G nmb à hz, pluie pendant Ia nuit. stratus. G nmb à hz, rosée, pluie. nimbus el er à hz et petites gouttes de pluie. nmb-stratus, Mezene couvert de neige. gelée. temps brumeux, forte gelée. |forte gelée. forte gelée, beau soleil. stratus. |plusieurs strato-em, pelite neige pd la nuit. (la terre est couverte de neige. stratus, beau soleil, forte gelée. strato-cumulus, gelée, soleil. ciel pommelé, très-beau. éclaircies à hz, stratus. grand nombre de strato-cumulus. st-Cm, rosée. rosée, très-beau le soir. stem, pluie pendant la matinée. strato-cumulus. erts cm, dernières feuilles, neige pd la nuit. couvert. couvert, neige. id., qqs erts-cm. basse du mois, le 13 élevée, id. a plus OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. BAROMETIF me ordinaire, h zero, 70005 698006 709,9 707 7us,0 697,0 705,5 704,0 711,0 709,91 701,50 706,25 709,2 706,61 710,8 707,02 715,0 7 716,1 715,4 710,0 709,66 709,65 707,41 704,57 707,95 680,19 705,26 cn contaet cobtigr 1500 15,0 15,0 15,0 14,0 15,0 17,0 0 15,0 11,0 10,0 10,0 10,0 extérieur, contigr. 1600 10,0 6,0 à minima, contigr. 1200 9500 95,0 92,0 92,0 94,0 94,0 92,0 91,0 91,0 90,0 20,0 90,0 90,0 90,0 91,0 91,0 91,0 91,0 90,0 89,0 ETAT DU CIEL A 40 H. DU MATIN presque découvert. id. couvert mi-couvert, id. découvert id. brumeux, brouillard. découvert brouillards découvert il, couvert. id. couvert, brouillard. découvert. id. presque découvert. vouvert, brouillard. il, id, couvert découvert. id. couvert. M. M, Baromètre à zb) Toro Thermomètre extérieur Gl Hygromètre 92,00 supéricur. BAROMÈTRE ordinaire, 70208 7064 710,0 705,0 700,50 THERMOMÈTRE UDONÈIRE à e——— à Maxima au Pay. cncontuet. | extérieur centigr mnillim millim, 1500 1400 1,800 11,0 15,0 » S,0 12,0 » 16,0 12,800 14,0 5,000 17,0 19,0 centigr, | centigr. 709,21 70 1,97 708,41 716,51 709,0 702,0 709,8 709,5 TÜS,5 706,0 7û 711,5 7û£ 710,50 712,0 708,0 707,0 706,7 707,0 706,0 707,5 TÜS,0 709,0 707,4 TO8,0 698,0 702,14 706,09 700,06 707,78 707,55 76,49 1,18 2,75 10,0 9,0 | 8,500 15,0 » 10,0 | j 2,100 9,96 | 16,610 : | a Yssingeaux. 9500 92.0 91,0 92,0 95,0 94,0 92,0 95,0 92,0 90,0 90,0 90,0 90,0 90,0 90,0 91,0 90,5 91,0 ETAT DU CIEL À 4 H. DU SOIR couvert. découvert. couvert. id. découvert. id. couvert. il, id. id. découvert. id. brumeux. découvert. id. couvert, id. id. presque découvert. id. id. id. couvert, id. id. id. découvert, couvert. presque couvert. couvert, VENTS supérieur. inéruur, Température la plus { NOVEMBRE, OUSERVATIONS, eumulus à hz, id. G'ob et em à hz, vont très-violent. G nmb à hz, pluie pendant In nuit. stratus, G nmb à hz, rosée, pluie, nimbus et er à hz el potites gouttes de pluie, runb-stratus, Mezenc couvert de neige, gelée. temps brumeux, fonte gelée. forte gelée, forte gelée, heau soleil. stralus, plusieurs stralo-em, pelile neige pd lu nuit. la Lorre ost couverte de neige, status, boau soloil, forte gelée, strato-cumulus, golte, soleil. ciel pommelé, très-bonu, éclaircies à hz, stratus. grond nombre de strato-cumulus, st-em, rosée. rosée, très-boau le soir, slem, pluie pendant la matinée, strato-cumulus. orts on, dernières fouilles, neige pd la nuit, convert, couvert, neige. id., qqs erts-cm. basse du mois, le 1 élevée, id, le 2 DÉCEMBRE. )MËTRE | | | OBSERVATIGNS. 69e È ge pendant toute la journée. 69l €] e pd la soirée, à gros flocons, éclaircies. e, éclaircies. el de midi à 5 h. em, dégel toute la journée, à hz. cm. Tllre, brouillard pd toute la journée. Tikme très-épaisse pd loute la journée. Tikem à hz. T0ksil vers le soir. GIke pd toute la journée. 69] Ge dans la matinée, éclaircies, soleil. G%em, soleil, forte gelée. Coke pd la nuit, pluie le matin. 69, soleit 10Pil, très-beau, brouillard le matin. T0ke le matin, très beau Le soir, str-em. très-beau. 69 em, très-beau. G9{t très-fort. GS, pluie pendant la nuit. GSlem pendant toute la journée. 69K beau, brouill. le matin, gelée pd la nuit. 69 pluie de 1 h.àS h. TO beau. MBDASSeNIU MOIS, le 17... ....... t élevée, id, ICONE eue OBSERVATIONS M £ONOLOGIQU DÉCEMBRE. BARONEÈTRE THERMONÈTRE EE | » eucontact.f extérieur, | à minmo. ceutigr. | senigr. | cinugr. 900 Hygromèire. 710.0 7û1.0 697,5 697,4 69$ 0 695.0 695,0 69 69 701,5 705,0 704,4 700.0 696.0 696.0 üss.0 21 0y0,2 » 686.5 2 704,0 708,2 51 711,0 90,0 8 | MM. 91,08 | ÉTAT DU CIEL couvert, neige, convert. id. découvert. id. couvert, brouiflar couvert, brouillards, givre brume très-épaisse. id. presque couvert. couvert, brumeux. couvert, neixe. id. mi-couvert, noise, brumeux. couvert, pluie, couvert. couvert, brumeux, découvert. id. id. presque découvert. id. couvert, qqs éclairei pommelé, nuag découvert. couvert. id. découvert. Baromètre Thvrinonètre Hygromèlre HE 5000 exÉrIUUr. A 10 1. DU MATIN. supérieur iofériour. Jours du mois, UN — SCC Urg — 1 1 1 1 14 15 1 1 1 BAROMETRE ——— ordinaire. 69400 694,6 698,0 698,0 707,0 706,5 7ûs,0 TI ,5 714,5 712,9 THAT 712,8 706,0 697,6 697,0 696,0 696,0 695,8 692,8 703,5 705,5 702,0 699,4 691,6 688,6 C91,0 696.2 699,0 706,4 709,2 709,8 THERMOMNETRE _——_—— | —— —— — à zûr0, 69202 695,1 697,0 697,0 704,1 711,5 705,0 696,6 696,1 701,5 699,9 698,1 690,0 ü 707,85 700,15 | | on contact. centigre 800 SRE: z | exéricurs | centigr. (HU —2,0 —10,0 —7,0 —7,0 A 5,0 8 ämaxiina. | au Puy | a Yssigeuux. | À | conligr mi [lim mmillim: | 500 » 6,500 9105 —(5 » » 91,0 0,0 » 16,500 90,0 » » 90,0 » » 90,0 6,500 ». 90,0 | on » 900 | » » 90,5 » » 91,0 » » 91,0 | ; » 91,5 | » » GIE | » | » 92,0 » » | » 4,500 | » 9,400 | » 2,500 » » » Î » » | » SS,5 » » S8 2) » » SS,T | » | » 90,0 | » | » 9152 11,250 | » DI2MI 2,219 » 910 | 5,047 » 94,5 » 1,500 94,6 | 5,781 » 94,0 | ñ » 95,7 » » 92,0 2,48 | 2$,797 15,500 90,85 ETAT DU CIEL À 4 H, DE SOIR. CoHvert, id. id. uès-beau. très-beau, découvert. découvert très-beau. id. id couvert. id. E découvert. couvert id. id. id. couvert, pommelé. presque découvert. découvert. presque découvert. découvert. presque découvert. découvert, id: couvert. id. couvert, pluie. couvert. couvert, qgs éclaircies. qqs nuages, éclaircies. supérieur, inféricur. OBSERVATIONS. | | ; | neise pendant toute la journée, | neige pd la soirée, à gros flocons, éclaircies. neige, éclaircies. | dégel dé midi à 5 h. | str-em, dégel toute la journée. | em à bz. | str-em. | givre, brouillard pd toute Ja journée. | brume très-épaisse pd loute la journée. | str-em à hz. | id. grésil vers le soir. neige pd Loute la journée. neige dans la malinée, éclairetes, soleil. str-cm, soleil, forte gelée. neige pd la nuit, pluie le malin. stre, soleil soleil, très-beau, brouillard le matin. | neige le malin, très beau Le soir, str-em. em, très-beau. | str-cm, très-beau. | vent très-fort. id., pluie pendant la nuit. | str-em pendant toute la journée. très beau, brouill. le matin, gelée pd la nuit. em, pluie de 1 bash. | très-beau. | id., cicl pommelé, | Température la plus y basse du mois, le 17 Lélevée, 1d lle 39. MERCURIALES DE LA HAUTE-LOIRE Par M. CH. PELLISSIER pe LOM Employé à la Préfecture. 1859 TOME XXII. 1Ù = t 406 MERCURIALES. JANVIER ET FÉVRIER. MARCHÉS | PRODUITS. ER en YSSIN- | BRIOUDE | GEAUX. | freuc-|ir- nc lire: froment, 18 68| 17 12] 46 25 1.1) méteil 17 15 » » Sheet He 13 45] 12 99) 45 » |Lorge, à 81| 414 25| 414 » avoine , 9 97] 9 06! 140 58 | PRIX MOYEN one pois , 24 » | » » pour le mois }[l ] lentilles, cr ; ] d baricots, 53 22 » » e JANVIER. [pommes de terre[lhect.]| 5 50 » » bœuf, » » 80 » Fm ivaches » 90! » 8S0| » 8ù is veau , 4 » » 80| » 95 1} mouton, » 90! » 85| » 95 porc, 1 60| 4 » » froment, 48 04| 17 42| 17 2%5 cle méteil, 16 81 » » | ee seigle 42 87| 12 49| 12 50 | Rene 12 58| 11 36| 11 87 | ayoine , 40 29| 9 49| 9 41 | Le . pois, 25 75 » » + “heet.]. lentilles , 32 25) » | FEVRIER. | haricots, 52 75 » » pommes de terre[lhect.]| 3 68 » » bœuf, » » 85 » viandes Jane PA IEEE [le kil.] veau, 4 >» » 85| » 95 * ‘1) mouton, » 90| » 95] 4 » | porc, 4 60 MERCURIALES. A07 MARS ET AVRIL, MARCHÉS | PRODUITS. Re Te | re DE | D'yssiN- BRIOUDE| GFAUX. | FC IUT Nc fre. froment , A7 97| 16 58| 16 52 céréales méteil , 16 57 » » | [l'hect.] seigle, | 42 67| 42 49) 42 35 ‘7 Jorge, 12 42] 41 43| 141 86 avoine , 9 50! 974, 9 82 DR OTEN légumes pois, 23 62 » » pour le mois [(l'hect.] lentilles , 44 » » » d haricots , 52 42 » » e MARS. pommes de terre [Phect.]| 35 34 » » bœuf, , » 95 » HT vache, » 90! » 85| » 85 LT veau , lo » 92! » 85 REA A mouton , » 90! 4 45] 4 05 | porc, 4 60! 1 10! » froment , 417 94| 16 18) 16 62 LR meéteil 16 51 » » | | et seigle, 12 48| 42 12] 12 50 | Jorge, 12 08| 10 56| 10 61 | É avoine, 9 53| 9 50! 10 05 | lé pois ; 925 54 » » Cheet. 7 lentilles, 44 US) » AVRIL. ‘= Uharicots, 5229 » » pommes de terre [Phect ]! 5 25 » » : | bauf, » » 95] 4 20 | EE M vache, 4 0510 » 95] » 95 | le kil, 1 YEAU À » » 15| À» | Fax] mouton , »y 95] 4 20] 4 40 pore, 4 60! 4 10 » A0$ MERCURIALES. MALI ET JUIN. | L | MARCHES | PRODUITS. ST onr DE |D'YSSIN- © | BRIOUDE | GEAUX. foetus) froment, 19 79! 47 68| 17 55 Reneales méteil ñ 17 44 » » | [l'hect.] seigle, 412 67| 42 67| 13 16 ‘1 | orge, 42 51| 10 81] 12 42 avoine, 9 68] 9 25| 10 25 RS EXOMEN légumes pois’, 25 62 » » | our le mois ». lentilles 45 51 » » | E d FEI nedes Sans » » e | MAI. pommes de terre [l'hect.]| 2 99 » » bœuf, » » 90! 4 2 . EE D vache, 1 02] » 90! » 95 [le kil.] veau, 1 10] » 80| 1 » 1] mouton, 4.221" 4 20. 1» porc , 4 64] 4 40 » froment , 18 78| 16 62] 16 50 céréales scies 16475 . d [l'hect.] seigle û 42 0ù 42 18| 12 47 ‘Jorge, 11 87| 10 87| 41 15 avoine , 9 75| 9 57| 10 04 légumes pois , 25 57 a à (L'heet.]" lentilles, 43 » » » JUIN. ‘2 haricots, 32 12 » » pommes de terre [l'hect.]| 2 ! pore, MERCURIALES 409 JUILLET ET AOÛT. MARCHÉS PRODUITS, ° DE | D’yssiN- DUR sRIOUDE | GrAUx. | fo Cp TE froment, 17 65! 16 55| 16 » fl. Én méteil , 415 92 » » Hu seigle , 41 94! 41 97| 42 01 Al = Jorge, 41 55] 10 144] 10 91 |! LE avoine , 8 95| 8 76| 9 55 {| pour le mois a pois, 26 » » ; { : gum | lentilles, | 45 50! » » À £ (ne: 1) haricots, 27 50 » pu | JUILLET. pommes de terre[Phect.]| 5 12] » | bœuf, » » 90 » viandes | vache, 1» » 90! » 90 À [le kil.] { veau, 4 » » 75| 4 » | | mouton , * 4 40 4» 4». porc, 4-60! 1» DE | froment, | 48 89| 17 68| 46 27 À restos méteil : 16 55 » Yu | l LE i] seigle, 14 80| 42 06! 42 56 | RS D pe 10 95| 8 95| 40 52 1 avoine, 8 51| 6 87| 8 95 | AOÛT légumes pos 20 37 de 9 | . ll t.] lentilles, 40 12 » » ERSE haricots, 21 87 » » pommesdeterre[Phect.]| 4 48 » dd | bœuf, » » 95 » | | viandes | vache, 41 05! » 95] » 90 [le kil.] { veau, À» »n 90| 1». mouton, 1 55| 4» A» porc, À l MERCURIALES SEPTEMBRE ET OCTOBRE. | céréales viandes PRODUITS. [l’'hect.] PRIX MOYEN pour le mois légumes de [l'hect.] [le kil.] jme , froment, méteil, seigle, orge, avoine, pois, lentilles, haricots, | SEPTEMBRE. Jpommesdeterre [lhect.] bœuf, vache, mouton, porc, DE BRIOUDE céréales [Phect.] OCTOBRE. { [Phect. viandes [Phect.] légumes froment , méteil , seigle, orge, aveine, pois, lentilles, haricots, pommesdeterre[l’hect.] bœuf , vache, veau, mouton, porc, MERCURIALES. ” AAA NOVEMBRE ET DÉCEMBRE. EF MARCHÉS | | | | PRODUITS. EN AM Tec | | ee DE | D'YSSIN- | BRIOUDE| GEAUX. ! | | CIN fr nc: | froment, 48 40! 17 56 céréales | Méteil, ALI [l'hect.] seigle, #4 95! 11 87 ‘7 orge, 11 49| 10 31 avoine , 8 » To PRIX MOYEN légumes pois, 21 48 » r I is [hect.10 lentilles, 40 50 » 4 À LEE haricots, 21.95 » e NOVEMBRE. {pommes de terre [Phect.]| 5 06 » | | bœuf , » » 90 viandes | “èche, 4 05] » 90 le kil.] veau , 4 42) 4» | [ ‘2 | mouton, 1 40! » 90 porc, 4 60 4 » » | | froment , 48 81| 15 81! 16 75 ARE méteil , 46 10 » » | ch . Lo 12 02] 44 56| 12 50 eee] 11 42] 40 87| 41 34 Le GG) RTNSA ENT 54 légumes pois , 21 29 ” ù : [l'hect.] lentilles , 40 85 » » DECEMBRE. haricots, DD » » pommes de terre [l’hect.]| 3 37 » » | bœuf, » » 90 » LE vache, 4 » » 90! » 90 [le kil.] veau, 4 05! » 95] 1» | #01) mouton, 147! » 90! 4 » | porc, Ent: | d' l MERCURIALES, oi Etats dressés par le même, et présentant : 1° le résultat des expériences faites en décembre 1859, dans le département, pour constater le poids légal des grains de la méme année; 2° la conte- nance en litres et décilitres du quintal métrique de ces grains : FROMENT . SEIGLE. © ELLE" Are qualité. 2e qualité. 5e qualité. dre qualité. 2e qualité. 5° qualité. a ES EE A + En" | Poids |contenancel Poids |contenance Poids loontenancel Poids [contenance| PCid8 |contenance] Poids |contenance moyen | moyenne | moyen | moyenne | moyen | moyenne | moyen | moyenne | moyen | moyenne | moyen | moyenne du quintal du quintal du quintal d du quintal du quintal du quintal de en litres de en litres de en litres | 6 en litres de en litres de en litres l l'hectolitre|et déailitr.|l’hectolitre|et décilitr. |J’hectolitre et décilitr.|l’hectolitre|et décilitr. IPhectolitre ! et décilitr. J’hectolitre et décilitr. ms nee || ncmnmenmens | eee nm kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres, kilog. litres, kilog. litres. kilog. litres. 78 982! 426 6 | 75 641] 452 4 | 75 137) 456 7 | 72 287| 158 5 | 69 520! 145 8 | GG 977] 149 3 EE pe ORGE. AVOIN kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres, kilog. litres. kilog. litres. 59 729| 167 4 | 56 G16| 176 6 | 54 273] 184 2 | 49 089| 205 7 | 44 525] 224 5 | 41 270| 242 5 PRET TIEICEE ATOME EL LE SNS TETE UE 2 RE CRE ELLE CO TRE LOI SERRE CSORATEES OUVRAGES REÇUS PAR LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE PENDANT L'ANNÉE 1859 A , Annales archéologiques de Didron, 1858-1859. Annales scientifiques, littéraires et industrielles de l'Au- vergne, 1858. Annales des sciences physiques et naturelles d'agriculture et d'industrie, publiées par la Société impériale d’agri- culture de Lyon, 1856. Annales de la Société d'agriculture de la Gironde, 1858. Annales de Ia Société impériale d'agriculture, industrie, sciences, arts et belles-lettres de la Loire, 1858-1859. Annales de l’Académie d'archéologie de Belgique, 1859. Annales de la Société académique de Nantes et de la Loire- Inférieure, 1858, mme dé a hs à 417% OUVRAGES RECUS Annales de la Société d’émulation des Vosges. Annuaire de la Société météorologique de France (2€ partie, Bulletin des séances), 1859. Avantages (des) du concours appliqué au recrutement du personnel administratif et judiciaire, par Antoine-Gas- pard Bellin. B Bon [le) cultivateur de Nancy, publié par la Société centrale d'agriculture de Nancy, 1858-1859. Bulletin de la Société d'agriculture, industrie, sciences et arts de la Lozère, 1859. Bulletin du Comice agricole de l’arrondissement de Saint- Quentin (Aisne), 1858-1859. Bulletin de la Société impériale des Antiquaires de France, 185821 859. Bulletin de la Société centrale d'agriculture et des Comices agricoles de l'Hérault, 1858-1859. Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, 1859. Bulletin mensuel de la Société d'agriculture et de commerce de Caen, 1858-1859. Bulletin de la Société académique d'agriculture, belles- lettres, sciences et arts de Poitiers, 1858. Bulletin de la Société linnéenne de Normandie, 1857-1858. Bulletin de la Société de médecine de Besancon, 1858. Bulletin de la Société protectrice des animaux, 4859. Bulletin de la Société d'encouragement pour l’agriculture et l’industrie dans l'arrondissement de Bagnères-de- Bigorre (Hautes-Pyrénées). PENDANT L'ANNÉE 1859. 415 Bulletin de la Société archéologique de Béziers, 1859. Bulletin de la Société impériale et centrale d’horticulture de la Seine-Inférieure, 1859. Bulletin de la Société d'agriculture de l'arrondissement de Boulogne-sur-Mer, 1858-1859. Bulletin de la Société d'agriculture et d’'horticulture du Gers, 1859. Bulletin agricole du Puy-de-Dôme, 1859. Bulletin de la Société d'agriculture, sciences et arts de la Sarthe, 1859. Bulletin de la Société d’horticulture de la Sarthe, 4859. Bulletin des séances de la Société impériale et centrale d'agriculture, tome x1u7, 1859. Bulletin des travaux de la Société d'agriculture d'Alger, 1859. Bulletin de la Société d'agriculture du Cher, 1858-1859. Bulletin de la Société zoologique d’acclimatation, 1859. Bulletin de la Société des sciences, belles-lettres et arts du Var, 1857-1858. | Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest, 1858- 1859. : Bulletin de la Societé archéologique de Sens, 4858. Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie, 4858. Bulletin historique de la Société des antiquaires de la Morinie, 1858. Bulletin monumental, 4859. Bulletin du Comice agricole de l'arrondissement d’Alais, 1859. Bulletin de la Société d'agriculture et d’horticulture de Vaucluse, 1859. 416 OUVRAGES REÇUS C Catalepsie (de la), par le docteur Puel, chevalier de la Légion-d'Honneur. (Mémoire couronné par l'académie impériale de médecine; prix Civrieux, 4855.) Cabinet (le) historique, 1858-1859. Calendrier agricole, par Victor Borie. Catalogue raisonné des phanérogrammes de la Dordogne (supplément final), par M. Charles des Moulins. Cautérisation (de la) de l’épiploon dans l'opération de la hernie étranglée, comparée aux autres méthodes: réduc- tion, excision, ligature, abandon dans la plaie. Thèse pour le doctorat en médecine, présentée par P.-L.-Adrien Vissaguet, docteur en médecine, interne des hôpitaux de Lyon. Chrysanthèmes (des) d’automne de nos jardins et de quel- ques plantes qui leur sont congénères, par M. Charles des Moulins ; brochure in-8o. Circulaire de Monseigneur de Morlhon, évêque du Puy, sur les conférences ecclésiastiques de son diocèse en 1857. Comparaison des départements de la Gironde et de la Dor- dogne, sous le rapport de leur végétation spontanée et de leurs cultures, par M. Charles des Moulins. Compte-rendu des travaux de la Société littéraire de Lyon, 1857-1858. Congrès archéologique de France. — Séances générales tenues à Périgueux et à Cambrai, en 1858. Congrès archéologique de France. — Séances générales tenues à Mende, à Valence et à Grenoble, en 1857. PENDANT L'ANNÉE 1859. 447 Congrès scientifique de France, 24e session, tenue à Gre- noble, en 1857. — Procès-verbaux de Ja 2e section. Congrès scientifique de France, 25€ session, tenue à Auxerre, septembre 1858. Considérations sur l’organisation politique, administrative et judiciaire du royaume des Deux-Siciles, et sur la lé- gislation napolitaine, comparée avec les lois françaises, par M. de Payan-Dumoulin, président du tribunal civil du Puy. D Description d’un nouveau genre d’édenté fossile, renfer- mant plusieurs espèces voisines du Glyptodon. Atlas publié par l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, par L. Nodot. E Eloge biographique de M. Edouard Rodde de Chalaniat, membre de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, par M. Félix Greilet, membre de l’Académie, docteur en droit, avocat à la cour de Riom ; brochure in-8o, Echelle mobile. — Mémoire adressé à M. le Président du Comice agricole de Provins; brochure in-So. Emploi thérapeutique des Corps gras phosphorés, extraits de la moëlle allongée des mammifères herbivores, par M. Baud, inspecteur des eaux minérales de Contrexéville. (Extrait des comptes-rendus des séances de l’Académie des sciences, tome xLvn, séance du 3 mai 185$.) 418 OUVRAGES REÇUS Essai historique et liturgique sur les ciboires et la réserve de l’Eucharistie, par M. l'abbé Corblet ; brochure in-8°. Exposé des travaux de la Société des sciences médicales de. la Moselle, 1858. Exposition critique des principes de l'école sociétaire de Fourier, par Antoine-Gaspard Bellin. F Faucheuse-moissonneuse normande, par Mazier, docteur en médecine, brochure in-8°. Fête annuelle du Comice agricole de l'arrondissement d’Agen.— Discours et rapports lus à la séance solennelle tenue à Astaffort, le 26 septembre 1858. G Géologie de l'Ardèche, par M.J.-B. Dalmas; brochure in-8. Journal d'agriculture pratique, 1859. Journal d'agriculture progressive, 1859. Journal de la Société impériale et centrale d’horticulture, 1859. Journal de la Société d’horticulture du Bas-Rhin, 1859. Journal de la morale chrétienne, tome vin, 1859. Journal d'agriculture pratique et d'économie rurale pour . le midi de la France, publié par les Sociétés de Ja Haute-Garonne et de l'Ariège, 1858-1859. PENDANT L'ANNÉE 1859. 449 ‘L Lettre sur la végétation des environs de Saïda (Syrie), adressée au docteur Puel, par M. Gaillardot, docteur en médecine. M Mandement de Monseigneur de Morlhon, évêque du Puy, pour le carême de 1859. Mémoires de la Société académique de Maine-et-Loire, 41858. Mémoires de la Société d'agriculture , commerce , sciences et arts de la Marne, 1858. Mémoires de l’Académie impériale des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, 1856. Mémoires de la Société impériale des sciences, de lagri- culture et des arts de Lille, 1857. Mémoires de l’Académie impériale des sciences, belles- lettres et arts de Lyon. — Classe des lettres. — Classe des sciences, 1857-1858. Mémoires de l’Académie impériale de Metz, 1857-1858. Mémoires de l’Académie d'Arras, 1858. Mémoires de la Société d'agriculture, des sciences, arts et belles-lettres de l'Aube, 1858. Mémoires de l’Académie impériale des sciences de Tou- louse, 1858. Mémoires de la Société des sciences morales, des lettres et des arts de Seine-et-Oise, 1859. Moniteur des comices et des cultivateurs, 1859. 420 OUVRAGES RECUS Note sur quelques volcans de l'Italie méridionale, par M. de Payan-Dumoulin, président du tribunal civil du Puy. Note sur quelques espèces litigieuses du genre trifolium , par le docteur Puel. (Extrait du Bulletin de la Soc. bot. de France.) Note sur l’arenaria Gouffeia, par le docteur Puel, bro. in-8°. Note sur une cloche fondue par M. Morel, de Lyon, par M. l'abbé Corblet. (Extrait de la Revue de l'art chrétien.) Notice des travaux de la Société de médecine de Bor- deaux, 1858. Notice sur l'édification du grand théâtre et du palais de justice, à Lyon, par Antoine-Gaspard Bellin. Notice historique sur la Société littéraire de Lyon, par Antoine-Gaspard Bellin. 0 Observations sur le but et l’utilité des sessions départe- mentales, présentées à la Société botanique de France par le docteur Puel. Observation d’anesthésie de la moitié gauche du corps, sans paralysie du mouvement, par le docteur Puel. OEuvres complètes de Jean Georges , archevêque de Vienne et ancien évêque du Puy. (Acheté.) Ouvrage sur le mont Etna, par sir Charles Lyel, savant anglais. (Texte anglais.) PENDANT L'ANNÉE 1859, 421 Position (de la) d'Aquis callidis (eaux chaudes) sur la table de Peutinger, par P. P. Mathieu; ancien professeur au lycée impérial de Clermont-Ferrand. Précieux sang (le) a-t-il été réservé dans les siècles primi- tifs et au moyen-âge, par M. l'abbé Corblet. Protogée ou de la formation et des révolutions du globe , par Leibnitz, ouvrage traduit pour la première fois par le docteur Bertrand de St-Germain. Publications agricoles et horticoles de la Société impériale d'agriculture, sciences et arts de Douai, 4857-58-59. Publications de la Société pour la recherche et la conser- vation des monuments historiques dans le grand-duché du Luxembourg, 1857. Puy (le vieux). — La porte et la rue Pannessac, par M. Fourtier, payeur. R Rapport fait à l’Académie des inscriptions et belles-lettres, au nom de la Commission des antiquités de la France , par M. Paulin Paris, lu dans la séance publique du 12 novembre 1858. Rapport présenté au Jury du Concours régional de Carcas- sonne, au nom de la Commission chargée de visiter les exploitations du département de l’Aude, concourant pour la prime d'honneur, par M. Jusseraud. Rapport sur les travaux de la Société impériale de Mos- cou, 1859. TOME XXII. © QC 422 OUVRAGES REÇUS Recherches généalogiques et héraldiques sur la famille Nicolazo de Barmon et ses alliances, par M. de Pontau- mont; in-80, broc. Recueil agronomique publié par les soins de la Société des sciences, agricultüre et belles-lettres de Tarn-et-Ga- ronne , 1859. Recueil des travaux de la Société d'agriculture , sciences et arts d'Agen, 1858. Recueil des actes de l’Académie impériale des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux, 1858. Recueil de l’Académie des Jeux floraux. Recueil des publications de la Société hâvraise d’études diverses, 1837-1858. Recueil des travaux de la Société libre d'agriculture, sciences , arts et belles-lettres de l'Eure, 1857-1858. Recueil agronomique, industriel et scientifique, publié par la Société d'agriculture de la Haute-Saône, lomes 5, Heu Revue de l’art chrétien , 1859. Revue des Sociétés savantes, 1858-1859. Revue des beaux-arts, 1859. Revue agricole , industrielle et littéraire de la Société im- périale d'agriculture, sciences et arts de Valencien- nes , 1859. Revue du Lyonnais, recueil historique et littéraire. n Société archéologique de Zurich (Suisse). Société de statistique de Marseille. — Séance publique PENDANT L'ANNÉE 4959. 425 tenue en 1856. — Compte-rendu des travaux des années 1854-1855-1856. Société d'agriculture, des belles-lettres et arts de Roche- fort, 1857-1858. Société d'encouragement pour l’industrie nationale. — Musées d’art et d'industrie. — Rapport fait par M. Gau- thier de Rumilly au nom du comité du commerce. — Rapport fait par M. Natalis Rondot à la chambre de com- merce de Lyon et délibération de cette chambre , 27 septembre 1858. L Société historique à Gratz, en Silésie. Société académique des sciences, arts, belles-lettres et agri- culture de St-Quentin (Aisne), 1855-57. Sud-Est (le), journal agricole et horticole, 41859. T Tradition (de la). Discours de rentrée prononcé à l'audience solennelle du 3 novembre 4859, par M. Ancelot, avocat général à la cour impériale de Riom. Travaux de l'académie impériale de Reims, 1855-56-1856- 1857. Trône (le) et les lettres, à Sa Majesté Guillaume IV, roi de Prusse, par M. Servan de Sugny ; broch. in-8o, V Vérité (la) sur les femmes, par M. Bidaut. ——— "rs ——— TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME Procès-verbaux des Séances de l’année 1859. SÉANCE DU 6 JANVIER 1859. — Sommaire........ Dons au Musée, — Grand modèle de la statue de Lafontaine, par Julien Ouvrages reçus. — Parmi les ouvrages mentionnés est le volume intitulé : Conseil général, session de 1858, adressé à la Société par le Préfet M. Emile Paul de Rostan........... Nécrologie. — M. Félix Pradier, premier archi- tecte de la fontaine Crozatier............... Agriculture. — La Société ajourne l'expression de son vœu dans la question dite de l'échelle mo- He adm areroucasonotovececo ds rononeie — Proposition de M. Plantade à ce sujet........ — Rapport de M. du Garay sur l’assolement des jardins potagers...... Rec ceote 19 6 26 TABLE Sciences historiques. — Appréciation de l'ouvrage de M. de Bastard, intitulé : Vie de Jean de Ferrières, par M. Hippolyte de Vinols........ SÉANCE DU 5 FÉVRIER. — Sommaire ........ ... M. le Président expose les motifs de son absence. Sa visite à Givors, à Paris, où il a été reçu, avec Monseigneur l’Evêque du Puy, par Sa Ma- jesté l'Empereur .................:. Fo Agriculture. — M. le Président demande une nou- velle décision de la commission dite des céréales, au sujet de l'échelle mobile ................ — Drainage heureusement employé comme moyen puissant d'hygiène et contre le goitre......... Sciences historiques. — M. Sauzet analyse un do- cument sur la prise de possession d’un eanoni- cat de l’église Notre-Dame du Puy............ Personnel de la Société. — Rapport de M. de Font- pertuis sur la candidature de M. Sarlandie des Rieux, qui avait présenté, à titre d'admission , un mémoire sur ce sujet : De l’Influence géné- rale des Sociétés d'agriculture .......... .. SÉANCE DU 10 MARS. — Sommaire. . . RTE Dons au Musée. — Ouvrages reçus mentionnés. . — Parmi ces derniers est l'ouvrage contenant les procès-verbaux de la 2e section de la 24€ ses- sion du Congrès scientifique de France, tenue à Grenoble (septembre 1857). Cette section était présidée par M. de Brives........ re ce 15 Lo) [ DES MATIÈRES. On remarque &ussi la traduction d'un ouvrage de Leibnitz, par M. le docteur Bertrand de St-Germain. Agriculture. — Vœu formé par la commission dite des céréales et adopté par la Société dans le sens du maintien de l'échelle mobile ......... — Lettre de M. le Président de la Société à M. Bar- ral, directeur du Journal d'agriculture prati- que, sur la question des céréales. ........... — Rapport de M. Balme sur un ouvrage de M. Mo- nestier, traitant des inondations. ......,...... Beaux-arts. — Des tableaux de M. Thuillier.. .... SEANCE DU 7 AVRIL. -— Sommaire. . +... 24e Quelques dons au Musée. — Analyse d'ouvrages MÉCUS EE enr oties een SE bIAE SE Agriculture. — Lettre de M. Henri Doniol contre le rétablissement de l'échelle mobile ,.......... — Réserves faites par M. le Président sur la même ŒUESTON EEE Crete A EAN STAMAITIARE Sciences naturelles et physiques. — Des cours d’eau VINONS RER RSR ELLE HOME TER RTE Sciences historiques. — Rapport de M. Béliben sur un travail de M. Vinay, ayant pour sujet l’anti- que maladrerie de Brives. — Ce mémoire est présenté, comme titre d'admission, par M. Vinay, admis à l'unanimité membre résidant. ........ SEANCE DU 12 MAI. — Sommaire ............... Dons au Musée. — Ouvrages reçus. — Correspon- LED EE SFR Re AA LE à & 428 TABLE * Agriculture, — Du sorgho; son rendement comme plante fourragère, d’après M. Isidore Pierre, Sciences historiques. — Lecture d’un fragment de la vie de Mgr de Béthune, par M. l’abbé Sauzet. — M. l'abbé Bernard analyse le cartulaire de l’abbaye de Chamalières ............... “jee Opinion de M. Silvy sur l’origine des anciennes confréries académiques. .......... SRE ANE e 2 SÉANCE DU 6 JUIN. — Sommaire. . ...... HAROAGe Dons au Musée. — Nouvel envoi d’un lot d'oiseaux par M. le docteur Moussier. — Don.de figurines antiques en terre cuite, par M. de Payan-Du- moulin... se ee reIel eve eee DD Agriculture. — De la castration des vaches, d’après le procédé de M. Charlier. SOMME TE Pisciculture. — Succès Ro par MA. le comte de Causans et Blanc-Furnon . HO OTC UE Sciences historiques. - — M. are Le Yinols donne communication d’une lettre de M. Bellidentis, — 4759, — sur la description d'un prétendu tem- ple d'Apollon à Poliena eee: Beaux-arts. — Exposition de trois petits tableaux de genre et d’un grand portrait, par M. Emile Giraud ee. RES RE LE SÉANCE DU 7 JUILLET. — Sommaire. ........... : Hommage rendu à la mémoire de M Hilaire de La- tourette, membre résidant... ............. Musée, — Acquisition d’ossements fossiles trouvés aNialetienserrr ere ee ne TE Le 106 107 109 112 DES MATIÈRES. Agriculture. — Rapport de M. de Brive sur les ex- périences . agricoles tentées par M. Chaudier, instituteur public aux Villettes.... ........ : Pisciculture et plantations au lac du Bouchet .. … Sciences médicales. — Hygiène. — Rapport de M. le docteur Balme du Garay, sur l'épidémie de Montagnac....... RARE Se ee de sb SÉANCE DU 5 AOÛT. — Sommaire... ..... AT Beaux-arts. — Musée. — Exposition de peinture par M. Robert Victor, peintre... ...... SR Agriculture, — De l’exiguité du rendement de nos cultures, surtout en froment. — Moyens d’y re- MÉUIEL. 2... Oo nina aan RER — Des préparatifs pour la solennité du Concours régional qui se tiendra au Puy en mai 1860 .… Beaux-arts. — D’un tableau de M. Tyr.. ....... Personnel. — Rapport de M. Ch. de Lafayette, sur la candidature de M. de Payan-Dumoulin . ad- mise à l’unanimité. .,...,...., a le ci . SÉANCE DU 40 NOVEMBRE. — SOMINAITE 7... Hommage rendu à la mémoire de M. Dumontat.…. . Musée. — Dons de statuette de M. Frémier, — d'une gravure de la Vierge noire du Puy, — du tableau de M. Tyr, acquis par le Conseil général. Agriculture. — Lettre de M. Gourey adressée à M. le Président au retour d’un voyage d’Angle- COLE AR Re Ne LH, notes — D'un concours d'animaux gras — Des champi- GhONS dOMESQUES Er sue “CON joie 157 158 460 162 168 130 TABLE DES MATIÈRES. Sciences. — Opinion de M. Lyell sur l’homme fossileide Denise sc. her aies Jde SÉANCE DU 8 DÉCEMBRE. — Sommaire .......... Compte-rendu de M. Louis Balme des deux volu- mes du Congrès scientifique de France tenu à Auxerre (25e session) 4 Beaux-arts. — Le Pin, poésie par M. Blanchot de BrenasE eee APE DE do 5 Histoire. — Des querres civiles et religieuses du Velay, par M. L. de Vinols.....,... dde ble SE — Fondation du prieuré de St-Pierre-Eynae...... Rapports et Mémoires. Le Château de Grignan, par M. de Payan-Dumoulin. Des Polignac dans la ligue du Bien-public, fragment de l'Histoire des baronies du Velay, par M. du Molin, président de chambre à la Cour impériale de Rouen , membre de la Société aca- détique JuPuyes F0 : ERRATUM. — Page 239, ligne 21, au lieu de : ce qui restait des biens de Polignac, lisez : des biens de Solignuc. Essai sur l’histoire municipale du Puy, par M. Ernest Nissaguet, Avocat..." 0% ERRATUM. — Page 276, ligne 20, au lieu de : conseils, lisez : consuls. Le Géant du rocher de Corneille, par M. Aymard... Note sur les roches à bassins dans !à Haute-Loire, par M. Aymard 5. ACUN Narauatiinie hi 20 196 198 1 Do) Ot TABLE DES MATIÈRES. Poésies . .... nie Dai. RE. Ne OU Le Pin, par M. Blanchot de Brenas............. C'est le printemps! idylle, par M. F. Bernard... Une Maisonnette aux environs du Puy-en-Velay, idylle, par M. F. Bernard....... PR see Epitre à Francisque Mandet, par M. Vibert ..... Prima Vera, par M..Aimé Giron- 2... La Chartreuse de Bonnefoy, par M. Aimé Giron... Hipsments/de poésies edasm 1.53. Dies mei sicut umbra....,.. Reese Un Cerceau sur la tombe d’un enfant. .... EE Tableau des observations météorologiques faites au Puy, à dix heures du matin et à quatre heures uESOTs par ME NICOlAS 5 2 AS ue Mercuriales de la Haute-Loire..........,.."..... Ouvrages reçus par la Société d'agriculture pendant l’année 1859....... A ce FIN DE LA TABLE. 4 JUN. 98 2 eZ Gp Tor 2 | » ER he: © 2 cÂERÉRMÉ oo Res C. ANNALES : AA NAN TAN 0 1 À ( be] 9 1e) ë RS g pà FA = CA = SK 473 Le: ZE: É) DE LA D. SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE ED UE LEE t NE F SCIENCES , ARTS ET COMMERCE DU PUY LE PUY M.-P. MARCHESSOU , IMPRIMEUR DE LA SOCIËTÉ | Boulevard Saint-Laurent, 93 MDCCCLXII DE L (©) { TES a aUQO) FR cesse ANNALES SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DU PUY L : SALE Ne . | BAUTE AAA TAPIE L ê H 4 A k è % 4 « 4 4 Ë FeR?r à ATLE \ > 1 iL & ÿ à f z 25 4 | « 0 #H APE ” ’ Oral 104 de, À ANNALES DE LA SOCIÈTÉ D'AGRICULTURE SCIENCES , ARTS ET COMMERCE DU PUY TOME XXII. — 1860 LE PUY M.-P. MARCHESSOU , IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ Boulevard Saint-Laurent, 23 MDCCCLXII Nora. La Société n'entend garantir les faits ni adopter toutes les opinions consignées dans les Rapports et les Mémoires que renferment les Annales. Le Puy. — Imp. MARCHESSOU. PROCES-UERBAUX DES SÉANCES DE L'ANNÉE 1860 SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 5 JANVIER > SOMMAIRE Lecture du procès-verbal. — Musée : Pierres sculptées ; Fragment d'inscription | lapidaire du fronton de la porte de l’hôtel-de-ville du Puy. Rétablissement de | l'inscription. Découverte de niches tombales dans les terrains de l’ancien cimetière de Saint-Pierre et Saint-Hilaire. — OuvraGes REÇUS : Dans le Journal d'agriculture pratique : Presse à comprimer le foin. — Etudes chi- miques de M. Isidore Pierre {Société d’agricullure de Caen). — 598 variétés de pommes de terre {Société impériale et centrale d'horticulture). — De la production de la morille, au sujet du Bulletin de la Société impériale d'agri- culture. — De l'amidon du marron-d’Inde {Société industrielle de Mulhouse. — Mémoires de géologie et de paléontologie du Quarterly Journal, revue anglaise. — Fouilles exécutées sur tous les points de la France pour la topo- graphie de la Gaule, d’après la Revue des Sociétés savantes. — De la Bible de Théodulphe, dans les Mémoires de la Société impériale des antiquaires. — Peintures murales relevées par M. Anatole d'Auvergne à Saint-Michel d'Aiguilhe {Actes de l'Académie des sciences de Bordeaux). — Quelques 6 RÉSUMÉ DES SÉANCES. anciennes maisons du Puy, au sujet d’un article des Annales archéologiques de M. Didron. — Du discours de M. Charles Dumoulin, sur le respect qu’on doit aux monuments. — D'une notice de M. Henri Doniol sur le déplacement de la population. — Du volume des procès-verbaux des délibérations du Conseil gé- néral, année 1859. — CorrEsPONDANCE : Lettre de M. le Préfet, demandant des renseignements sur les drainages exécutés sdus l'impulsion de la Société. — Nouveau genre de tuyaux de drainage pouvant se pénétrer, employé à Dieppe, d'après M. de Brive. — Circulaire de M. le Ministre de l’Instruction publique sur la formation du Réperloire archéologique de la France. — Lettre de M. Le Directeur de l’Institut des provinces, sur l’organisation de l'enseignement agricole dans les écoles primaires, par les Sociétés d’agri- . culture. — EcoxomIE PUBLIQUE : Lecture d'un mémoire de M. le docteur du Garay sur une espèce de boisson à l'usage de la campagne. — ARCHÉO- LOGIE : Communication de M. Vinay sur les fouilles effectuées par lui dans sa propriété de Corsac. Nomination d’une commission chargée de faire à la Société un rapport sur ces fouilles. Présidence de M. Aymard, vice-président. A trois heures, la séance est ouverte. Musée. — Après la lecture et l'adoption du procès- verbal, M, le Président fait placer sous les yeux de l'Assemblée diverses pièces sculptées et un fragment d'inscription lapidaire qu'il a acquis pour le Musée. L'une d’elles est un chapiteau roman en pierre vol- canique, qui provient d'une ancienne maison de la rue Roche-Taillade, au Puy. Trois autres, en grès, offrent des sculptures dans le style de la renaissance. Elles ont été trouvées par suite JANVIER. 7 des démolitions effectuées récemment à l’'hôtel-de-ville du Puy. Le morceau d'inscription faisait partie d’une épi- graphe qui avait été dégradée par les injures du temps, et qui vient d'être rétablie à l’hôtel-de-ville, au-dessus de la porte d'entrée. A ce sujet, M. le Président entretient l’Assemblée des restaurations intelligentes qui s'effectuent en ce mo- ment à l'hôtel de la mairie, et qui ont donné lieu de restituer cette inscription. Ce qu'il en restait laissait voir seulement trois des six noms des consuls sous l'administration desquels l’hôtel-de-ville avait été édifié. Il s'agissait donc de compléter la liste par l'addition des noms que le temps avait effacés. On sait que le consulat était renouvelé tous les ans, et le millésime 1766 qui est gravé dans le haut de la façade de l'hôtel indiquait la date où la construction de l'édifice pouvait avoir été terminée. A la prière de M. l'architecte Compagnon, nos confrères MM. Aymard et Béliben firent des recherches dans les différents dépôts d'archives; elles furent complétées par la dé- couverte de la liste des six consuls que fit M. Compa- gnon dans un document intéressant qu'avait conservé un autre de nos honorables confrères, M. Bertrand de Doue, dans ses archives personnelles. Cette pièce est un acte de vente consentie à la ville, le 4 juin 1764, par dame Marie-Elisabeth Pons, épouse de M. Joseph Lan- tenas, d’une maison « pour ne faire qu’un seul et mème corps avec l’hôtel-de-ville. » Tous les consuls sont cités dans cet acte, et l'identité des noms de trois de ces 8 RÉSUMÉ DES SÉANCES. magistrats, les seuls qui subsistaient dans l'inscription, ayant été constatée, il fut reconnu que cette liste devait être celle des consuls en exercice à l’époque où fut décidée la construction de l’hôtel-de-ville. A l’aide de ces renseignements, ainsi que des restes de l'inscription conservés dans la liste, l'inscription a été ainsi rétablie : 1764. REÆDITA LUD.XV REG. COSS. ANICIENSIBVS . NOBILI. F.DE VACHON FRAN.CHAVCHAC.FRAN. GANIROL. GUILH.SOUTEYRAN.J.P.HALAVY.J.ENTIER Cette habile restitution d’une épigraphe intéressante pour l’histoire de la cité, perpétuera désormais la mé- moire des citoyens éclairés qui dotèrent la ville d'un édifice dont l'architecture n’est pas sans mérite. Il est juste d'ajouter qu'aux termes de l'acte de vente, cette construction avait été arrêtée d’après « le plan et devis de l'architecte Portal. » Le fragment de l’ancienne inscription, qui sera Con- servé au Musée, attestera la consciencieuse exactitude que M, Compagnon a apportée dans la reproduction de cette épigraphe. M. le Président dit ensuite que les démolitions et fouilles faites à l’hôtel-de-ville ont mis au jour, dans la partie postérieure de l'édifice et au nord, une muraille établie dans le système des constructions du XITTesiècle, et qui paraît indiquer un reste d'ancienne église que les documents du moyen-âge font connaître sous le vocable de Saint-Blaise. JANVIER. 9 A la paroi sud de cette muraille se trouvaient des niches tombales, dans l’une desquelles étaient enfer- més des squelettes ; au-devant on a exhumé du sol beaucoup d'ossements qui dénotaient la présence de l'ancien cimetière Saint-Pierre et Saint-Hilaire. La seule particularité digne de remarque qu'aient offerte ces ossements, c'est que plusieurs squelettes étaient accompagnés de valves de pecten trouées comme les coquilles des pèlerins. OUVRAGES REÇUS. — Il est ensuite donné communica- tion des ouvrages reçus depuis la précédente séance et parmi lesquels M. le Président signale surtout les sui- vants 3 Le Journal d'agriculture pratique numéro du 20 dé- cembre 1859). Dans un article de M. Barral est figurée une machine employée par l'administration de la guerre et destinée à la compression du foin. On sait que cette opération a pour but de faciliter le transport des fourrages et d'éviter l'encombrement qu’occasionne le foin dans son état naturel. On conçoit toute l'importance d’une pareille machine, qui nous permettra de nous débarrasser des fourrages surabondants que pourrait produire notre pays, lorsque nous serons assez heureux pour jouir de ces rail-way qui vivifient déjà tant de contrées de la France. Du reste, les avantages de cette machine sont incon- testables. Cette presse donne une compression de 100,000 kilogrammes et amène le foin à avoir une 410 RÉSUMÉ DES SÉANCES. densité comparable à celle du bois. Les frais, y com- pris le liage et l'intérêt de la machine, ne se mon- tent pas à plus de un franc par cent kilogrammes de foin. Outre l'avantage que présente pour les transports le foin comprimé, il faut encore ajouter que le four- rage dans son nouvel état ne se charge pas de pous- sière, ne se mouille qu'à l'extérieur, est très-peu combustible, conserve sa graine et n’acquiert aucun mauvais goût. On le coupe facilement pour le diviser et le donner au bétail. Le Bulletin mensuel de lu Société d'agriculture et du commerce de Caen (avril 1859). M. Isidore Pierre, secrétaire de cette Société, fait un cours qui a pour objet des études chimiques sur la culture des céréales, des plantes fourragères et des plantes industrielles, et a consigné des résumés de ces cours vraiment instruc- tifs dans le Bulletin mensuel de cette Société. Dans le numéro que nous avons sous les yeux, l’au- teur passe en revue les plantes fourragères amélio- rantes dont voici les noms : luzerne, herba medica, medicago sativa, sainfoin, onobrychis sativa, trèfle rouge ordinaire, ajonc lande, ajonc marin. Il cite les suivantes comme plantes épuisantes trèfle incarnat-lupuline ; minette, petit trèfle jaune, vesces, pois gris, ivraie vivace, moha de Hongrie, sorgho à sucre, moutarde. L'auteur donne des détails nombreux sur les di- verses cultures, indique la composition chimique des plantes et en analyse les éléments aux divers états de JANVIER. 411 leur croissance, ce qui constitue un travail d’une véri- table importance pour la science agricole. Le Journal de la Société impériale et centrale d'hor- ticulture (vol. 5, novembre 1859). Cette livraison ren- ferme un rapport de la commission chargée de l'étude de la collection des pommes de terre de cette Société, par M. Courtois-Gérard (page 701). Le point de départ des travaux de cette commission avait été la création d’une collection composée de toutes les pommes de terre qui avaient figuré à l’expo- sition de 1855 et qui elle-mème ne comptait pas moins de vingt-cinq collections plus ou moins consi- dérables. Le premier travail de la commission fut de classer toutes ces pommes de terre d’après les caractères phy- siques des tubercules, c’est-à-dire d’après leurs formes et leurs couleurs. Le catalogue qui fut dressé compre- nait 180 variétés jaunes rondes, 81 variétés de jaunes rouges et 41 variétés de pommes de terre violettes, soit ensemble 528 variétés. Toutes ces variétés furent plantées dans le jardin de la Société et des études suivies ont été faites et se con- tüinuent. Elles ont permis de constater le mode de vé- gétation de chaque variété, son époque de maturité et son rendement en tubercules. Un fait que la commission regarde comme étant d'une haute importance quant au choix des variétés dignes d'être adoptées de préférence aux autres dans les cultures, fait déjà constaté par des observations antérieures, c’est que les variétés hâtives ont été ou 12 RÉSUMÉ DES SÉANCES. totalement épargnées ou beaucoup plus faiblement atteintes par la maladie que les variétés tardives. Notre Société, dit M. le Président, ne peut que s’in- téresser très-vivement aux efforts de la Société impé- riale d'horticulture, et il y aura lieu de solliciter auprès de cette savante Compagnie l’obtention de quelques- unes des variétés de pommes de terre qui lui auront paru les mieux appropriées à notre sol et à notre climat. Le Bulletin des séances de la Société impériale et centrale d'agriculture (tome xiv, 1859, p. 599). Dans une note sur la protluction des morilles, lauteur, M. Gustave Celeyron, d’Ambert (Puy-de-Dôme), s’ex- prime ainsi : « La morille est la truffe de nos monta- gnes ; elle y est relativement abondante. Chez nous, la morille ne se trouve que dans les forêts de pins et de sapins, principalement sur les points où le détritus des vieilles souches est devenu terrain. Il s’en rencontre parfois de monstrueuses. » L'auteur en à rencontré quelquefois au pied de vieilles charmilles et il en à cueilli lui-même une qui, fraiche, recouvrait une assiette, car on sait que la morille se réduit considéra- blement par la dessication. « La petite ville de la Ghaise-Dieu, célèbre par sa vieille abbaye, en fait un commerce relativement im- portant; elles sont cueillies dans les forêts de sapins qui l'entourent. » M. Celeyron pense que la présence de l'orme, con- trairement à ce qui avait été dit dans une autre séance JANVIER. 15 de la Société impériale d'agriculture, n’est pas une preuve pérempioire de la station des morilles dans nos montagnes. Il ajoute qu'il est convaincu qu'on ne trouverait pas un seul orme dans le canton de la Chaise-Dieu. M. le Président fait observer que, sans vouloir se prononcer sur la question relative à la station véritable de la morille, il existe auprès du bourg de la Chaise- Dieu une propriété appartenant autrefois au général de Boissieu, qui porte le nom de l’Orme, où l’on voit encore une belle plantation d’ormes et de frènes; on peut donc en conclure que le climat de la Chaise-Dieu n'exclut pas la culture de l’orme et que cet arbre pourrait se trouver aussi sur d’autres points du même canton. Divers membres rappellent la qualité supérieure de morilles récoltées dans le département, notamment aux environs de Saugues, d’Allègre et dans quelques communes du canton de Paulhaguet, où elles sont aussi l’objet d’un commerce plus ou moins considé- rable. À ce propos on cite aussi l'exploitation d’un champignon qui a lieu sur une assez grande échelle dans l'arrondissement d'Yssingeaux, appelé vulgaire- ment bolet (cep). Le parfum de la morille, qui est très-prononcé lors- qu'elle est fraiche, s’affaiblit par la dessication. Mais les gourmets de nos montagnes, qui en font ample pro- vision pour l'hiver, savent leur rendre une partie du parfum en les faisant revenir dans de la crème fraîche, et on les sert alors seules comme plat d'entremets. 44 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Le Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse (no 149, 1859.— Rapport par M. Schæffer sur l’amidon du marron-d’Inde, page 478). L'auteur s'attache à dé- montrer l’utilité de ce fruit dans certaines applications industrielles. « Plusieurs industries, dit-il, et notam- ment la fabrication des tissus de coton, absorbent des quantités considérables de substances alimentaires. A la suite de mauvaises récoltes, lorsque les céréales atteignent des prix très-élevés, le désir de trouver une substance non alimentaire qui puisse fournir les ma- tières amilacées à l’industrie se fait surtout sentir bien vivement. » Le rapporteur, après diverses expériences infruc- tueuses qui lui ont prouvé que l’amidon de marron- d'Inde ne saurait trouver un emploi comme épaississant de couleurs, ni pour l'impression au rouleau, ni pour l'impression à la main, ne s’est attaché qu'aux essais d’apprêt, et il a acquis la certitude que cet amidon pourrait parfaitement, pour l’apprèt des tissus impri- més et pour l’usage des blanchisseuses, remplacer la fécule de pommes de terre et l’amidon. Il à même un avantage sur ces produits, en ce sens qu’il donne aux tissus un toucher plus doux et que l’apprêt ne marque pas sur l’étoffe : inconvénient qui, pour certains tissus et couleurs, se présente assez souvent. « IL est évident, ajoute-t-il, que, si la fabrication de l’amidon du marron-d’Inde devait enlever à l’agricul- ture des terrains propres à la culture des substances alimentaires, la substitution de ce produit aux ma- tières amilacées employées jusqu’à présent ne serait d'aucun bénéfice pour l’économie sociale. Mais si, JANVIER. 45 comme le proposent MM. Thibierge et Romilly dans un ouvrage publié par eux sur ce sujet, on plantait le marronnier le long des routes, dans les forêts, sur les talus des chemins de fer, etc., et que le nouveau pro- duit pût être livré en quantités suffisantes et à nn prix au plus égal à celui payé pour la fécule de pommes de terre, on doit reconnaître que la fabrication de l'ami- don en marron-d’Inde mériterait toute l’attention du publie. MM. Thibierge et Romilly ont donc fait avancer la question, et une médaille leur à été décernée. Parmi les nombreux ouvrages qui ont été envoyés à la Société, on remarque encore les publications des Sociétés géologiques de Londres et de Dublin, que ces illustres Associations ont transmises par l'intermédiaire de M. Aymard, vice-président. Le Quarterly Journal renferme surtout de savants mémoires de géologie et de paléontologie, dont plu- sieurs intéressent comparativement les études qui ont été faites sur la géologie de notre sol. Dans un mé- moire lu à la séance de la Société géologique de Lon- dres, du 20 mars 1857, un éminent paléontologiste, M. Owen, après avoir décrit un nouveau genre de mammifère lophiodonte, qu'il nomme pliolaphus , donne la série des animaux fossiles à proximité des- quels doit être classé ce genre, et il cite à ce sujet des genres qui ont été signalés par M. Aymard dans les calcaires palustres des environs du Puy, tels que Fam- phitragulus (auj. gelocus Aym.), le bothriodon et l'en- telodon. 46 RÉSUMÉ DES SÉANCES. M. le Président dit à ce sujet que les belles planches qui accompagnent ce travail signalent, entre autres parties importantes du squelette, une tête à peu près entière (ce qui est fort rare) du pliolophus vulpiceps et que, sans se prononcer sur les dissemblances dentaires qui pourraient exister entre ce genre nouveau et le bothriodon des calcaires de Ronzon, le galbe général de cette tête, et en particulier toute la partie crânienne, offre des rapports remarquables de ressemblance avec ce qu’on observe dans la tête du bothriodon. La Revue des Sociétés savantes, publiée sous les aus- pices de M. le Ministre de l’Instruction publique (2esérie, t. 1, 1859). Dans un rapport sur les mémoires de la commission des antiquités du département de la Côte- d'Or, M. J. Quicherat signale un travail intéressant de MM. Mignard et Coutant sur les fouilles de la colline de Vertant, page 554. « Il a pour objet, dit le rapporteur, l’une des découvertes les plus importantes qui aient été faites en ces derniers temps. » I s’agit d’une ville inconnue dans l’histoire, une ville dont aucun auteur ancien n’a parlé et dont on re- trouve cependant des vestiges considérables, occupant une superficie de vingt-cinq hectares au sommet de la colline qui domine le village de Vertant, voisin de Châ- tillon-sur-Seine. M. le Président dit à ce sujet que les recherches qui s’effectuent en ce moment sur tous les points de la France pour la topographie de la Gaule, ont donné occasion de signaler à la commission impériale une JANVIER, 147 foule de localités, ou vestiges de villes, bourgs et villa- ges, et voies antiques qui ne sont mentionnés dans aucun des auteurs, d’ailleurs très-peu nombreux, dont les ouvrages historiques et géographiques sont parve- nus jusqu’à nous. Ces exemples de découvertes inté- ressantes onvrent donc un vaste champ aux espérances que l’on peut concevoir dans notre pays, comme dans les autres contrées de la France, des explorations qui s’y font sous les auspices de la Société. Les Mémoires de la Société impériale des antiquaires de France (3e série, t. 1v, 1859). Au procès-verbal de la séance du 17 juin 1857 de cette Société, page 109, M. Bourquelot à communiqué une note qui lui a été adressée du Puy. Elle à pour objet le manuscrit pré- cieux qui est connu sous le nom de Bible de Théodulphe et qui fait partie du trésor de la cathédrale, « Il serait inutile, dit l’auteur de la note, d'insister sur l'importance historique et paléographique de cette Bible, dont un second exemplaire tout semblable et également désigné sous le nom de Bible de Théodulphe, existe à la Bibliothèque impériale de Paris. » L'auteur désirerait qu'on apportât les plus grands soins à la conservation de ce beau manuscrit, lequel était déposé, à l'époque où il fit cette communication à la Société des antiquaires, dans un local peu conve- nable. M. le Président s’empresse d'informer la Société qu'aujourd'hui la Bible de Théodulphe est conservée, par les soins de notre honorable confrère M. l'abbé TOME XXII. 2 18 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Alirol, aux archives du secrétariat de l'évêché, en attendant qu’un local soit spécialement affecté au trésor .de la cathédrale. Les Actes de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux (21e année, 1859. 2e trimestre 1859). Dans un mémoire qui a pour titre : Essai sur l'histoire de la peinture murale, par M. Joseph Villiet, Pauteur s'exprime ainsi à la page 217: « Il existe au Puy-en- Velay une petite église romane bâtie au sommet d’une immense aiguille de Basalte. Les murs de ce monu- ment ont été recouverts de peintures à trois époques différentes. La décoration la plus ancienne remonte au XIe siècle; elle fut, au XIIe, cachée sous un enduit peint et historié, qui fut lui-même badigeonné au XVe siècle pour recevoir de nouveaux dessins et de nouvelles couleurs. Les portefeuilles des archives des monuments historiques renferment des dessins très- précieux et inédits de ces curieuses peintures décou- vertes et relevées par M. Anatole d'Auvergne. » M. le Président dit qu’il s’agit ici de la chapelle qui couronne le rocher volcanique de Saint-Michel, au vil- lage d’Aiguilhe, près le Puy. Dans une communication qu'il fit au Congrès scientifique tenu au Puy en 1855, il signala deux époques parfaitement distinctes dans les constructions de cette chapelle. La partie carrée et comportant une abside hémi-circulaire sur trois de ses faces est bien antérieure à la fin du Xe siècle, époque où la nef avec son collatéral, ainsi que la facade actuelle, furent construits. JANVIER, 49 De son côté, M. Anatole d'Auvergne, ayant opéré avec les plus grands soins le grattage des parois intérieures des murs, mit au jour les couches successives des peintures qui furent l’objet d’un rapport au sein de la Société. La peinture la plus ancienne, qui a été con- servée, est bien visible et il est facile d'en reconnaître le sujet. Dernièrement encore, M. d'Auvergne à décou- vert sur un des murs de la même chapelle le nom de l'un des artistes qui avaient travaillé aux peintures. I] a bien voulu donner au Musée le morceau d'enduit sur lequel ce nom est peint. Les Annales archéologiques publiées par M. Didron aîné (t. xx, octobre 1859). Sous ce titre : Archéologie laïque, M. F. de Guilhermy a publié dans cette livraison des Annales archéologiques un compte-rendu remar- quable d’un ouvrage publié par MM. Aymar-Verdier et Cattoir et qui concerne l'architecture civile et domes- tique. Les auteurs ont signalé, pour les maisons, le contingent de chaque pays et de chaque siècle et se bornent à indiquer, dans la ville du Puy, quelques dé- tails de maisons du XIIe siècle. M. le Président fait observer à ce sujet qu'il existe, dans les différentes villes du département, des restes assez nombreux d’arciennes maisons ; non-sculement il y a au Puy des détails du XITe siècle, mais encore des facades curieuses du XVIe siècle, dans la rue Pan- nessac ; des intérieurs de maisons des XVe et XVIe siè- cles, notamment une cour intérieure qui, grâce à d'intelligentes restaurations, est la plus complète et la 20 RÉSUMÉ DES SÉANCES. plus élégante qu'on puisse signaler dans le départe- ment. On veut parler de la maison de notre confrère M. le comte de Miramond. Dans le même mémoire sont indiquées des maladre- ries situées en dehors des villes, comme celles qui existaient autrefois aux environs du Puy. L'un de nos confrères, qui nous à fait une importante communica- tion sur ces sortes d'établissements, trouvera dans le travail de M. Guilhermy d'intéressants sujets de com- paraisons. L'Ecole du respect et Notice sur l'Eglise et les sei- gneurs de Couze, 1859. Tel est le titre d’une brochure que nous à adressée l’auteur, M. Charles Dumoulin, membre non résidant de notre Société. Notre savant confrère s’est surtout proposé, dans cet intéressant travail, d’inspirer le respect que l’on doit et dont on se dispense d’une façon si fréquente et si légère, aux monuments et spécialement aux monu- ments religieux que nous ont légués les siècles précé- dents. « Ce n’est assurément jamais, dit-il, la mauvaise volonté, l'intention irrespectueuse, le projet distincte- ment connu de violer cette loi, qui ont dicté certains actes et fait sortir d’une armoire bien voisine de l'autel, soit la brosse malencontreuse du badigeonnage, soit le marteau de la démolition, ce marteau terrible qui, comme les animaux célestes vus par le Prophète, ne re- vient jamais sur ses pas. » L'auteur signale, dans un style éloquent, toutes les causes de destruction ou de dévastation auxquelles JANVIER. 21 donne lieu trop souvent un zèle immodéré et, après avoir cité des exemples regrettables d’incurie, il donne de sages conseils qui trouveront leur application dans toutcs les contrées de la France. M. Henri Doniol, membre résidant, a fait hommage à la Société de deux brochures, l'une ayant pour titre : Note à propos d'une statistique du département de l'Ain el du déplacement de la population, et l'autre contenant un document très-instructif : le texte d’une vente sous forme d'échange faite en 1569 entre deux communautés de cultivateurs de l’ancienne Auvergne. M. le Président exprime les remercimens de la So- ciété pour cet envoi. M. le Préfet a adressé à la Société un volume conte- nant les Procès-verbaux des délibérations du Conseil général du département, ainsi que les derniers numé- ros du Recueil des actes administratifs. Ces publications seront conservées avec soin dans les archives de la Société. CORRESPONDANCE. — Drainage. — Par lettre du 27 dé- cembre 1859, adressée à M. le Président, M. le Préfet a demandé des renseignements aussi explicites que pos- sible sur les drainages exécutés au nom ou sous l'im- pulsion de la Société. M. Nicolas, membre résidant, est chargé de faire un rapport à ce sujet. À cette occasion, M, le Président fait connaitre que des travaux importants de drainage s’exécutent en ce 22 RÉSUMÉ DES SÉANCES, moment, par les soins de l’administration des ponts et chaussées, dans les terrains communaux de Laroche, près le Puy. Ces travaux ne peuvent qu'intéresser au plus haut degré la Société. En conséquence, une com- mission composée de MM. de Brive, Chouvon et Balme est nommée pour les visiter et en rendre compte. M. de Brive fait counaître, au sujet du drainage, qu'il a vu dans un voyage qu'il a fait à Dieppe, un système de drains qui paraît présenter de grands avantages. Les parois des tuyaux de drainage sont amincies à cha- cune de leurs extrémités, mais l'amincissement a licu à l'extérieur d'un côté et à l’intérieur de l’autre, de telle façon que les tuyaux étant posés bout à bout peu- vent se pénétrer et former, sans autre système de join- ture, un tuyau continu. M. de Brive pense qu'il serait ulile d'écrire à Dieppe pour prendre des renseigne- ments au sujet de ces drains. Le bureau tiendra compte de cette observation. M. le ministre de l’Instruction publique et des Cultes a adressé à M. le Président, à la date du 10 décembre, une circulaire contenant des instructions pour la for- mation du Réperloire archéologique de la France. Un spécimen contenant la description d’un certain nombre de communes du département du Morbihan est joint à cette circulaire; ce spécimen complète les indications déjà fournies par le programme publié dans la Aevue des Sociélés savantes, numéro de février dernier, pour l'exécution de cette grande entreprise. M. le Ministre, connaissant le patriotisme éclairé qui anime les mem- bres des Sociétés savantes des départements, compte JANVIER. 25 sur le concours” de la Société et demande que M. le Président veuille bien lui faire connaître la part de collaboration qu'il peut en espérer. M. le directeur de l’Institut des provinces de France a adressé aux Sociétés d'agriculture une circulaire au sujet d’un vœu exprimé par le Congrès scientifique de France en 1859, pour que des notions d'agriculture soient données dans les écoles primaires. Le vœu du Congrès est ainsi conçu : « Le Congrès invite les Sociétés d'agriculture et les » Comices à organiser l’enseignement de l’agriculture » dans toutes les écoles primaires de France, en indi- » quant aux instituteurs les notions élémentaires très- » courtes qu'ils devront donner à leurs élèves ; en » inspectant les écoles et interrogeant les élèves » comme l'ont fait les Sociétés agricoles d'Ille-et- » Vilaine; en distribuant aux instituteurs des livres » élémentaires qui pourront, dans chaque circonscrip- » tion, convenir à cet enseignement limité. » M. le Président fait observer que la Société est déjà entrée dans la voie indiquée par le Congrès et qu'elle a fait tous ses efforts pour propager l'enseignement agri- cole dans les écoles primaires du département. EconouIE PUBLIQUE. — L'ordre du jour appelle la lec- ture du rapport suivant, par M. le docteur du Garay, sur un mode de préparation d’une boisson à l'usage de la campagne. 24 RÉSUMÉ DES SÉANCES MESSIEURS , Le mémoire qui a donné lieu au rapport que je vais avoir l'honneur de vous lire est de M. Oudart, pharmacien à Troyes, membre du jury médical et de la Société d'agricul- ture de l'Aube. Il est intitulé, dans les mémoires de cette Société d'agriculture : De la méthode dite de déplacement appliquée aux tisanes d'hôpital, mémoire très-bien fait avec une simplicité admirable et qui a séduit notre Pré- sident. Permettez-moi de vous dire, Messieurs, en quelques mots, en quoi consiste cette méthode, et plus loin nous verrons si, comme l’a pensé notre honorable Président, il y a lieu de faire, par cette méthode, une boisson à l’usage des ou- vriers bien portants de la campagne, surtout quand ils tra- vaillent dans les champs aux mois de juillet et d'août. Cette méthode consiste done à soumettre à l’action dissol- vante d'un liquide approprié un corps quelconque à l’état d'extrême division, afin d’en extraire plus facilement les principes solubles dans le liquide choisi. Le plus souvent on humecte à froid la substance divisée avec un peu de liquide; on fasse le tout dans un vase ad hoc ayant à sa partie inférieure une ouverture armée d’un robinet pour faciliter l'opération, la ralentir ou l'activer. Après quelques instants de contact, suivant la dureté ou la porosité du corps soumis à l’action du liquide, on dé- place, par le robinet s'entend, ce dernier qui coule dans JANVIER. 25 un autre vase pendant l'opération ; on verse encore tout doucement, à la partie supérieure du premier vase, une nouvelle quantité du même liquide, de l’eau froide comme dans le cas présent, et ainsi de suite jusqu’à épuisement complet. C'est-à-dire que la matière sucrée ne vient plus. Par cette méthode on épuise à froid tous les principes solubles, et on obtient des liqueurs très-chargées, ordinai- rement limpides et surtout sans mélange de corps étran- sers. C'est ce que font les enfants, quoiqu'ils emploient une espèce de méthode de déplacement, lorsqu'ils mettent de la réglisse et de l’eau dans une fiole pour se désaltérer. Il y a de quoi boire et de quoi manger. I ne s’agit plus que d'utiliser le produit, ou en l’évapo- rant par une ébullition prolongée, suivant le cas des teintures, ou en l’allongeant de beaucoup d’eau pure, si on se propose d'obtenir une boisson comme la tisane d'hôpital dont il s’agit actuellement, ou bien une boisson à l'usage des ouvriers de la campagne, si elle est adoptée dans la suite. Voilà ce que nous avions à dire sur la méthode de dépla- cement, qui est bien supérieure, dans des cas donnés, par conséquent bien préférable à la décoction et même à Finfu- sion chaude. La méthode de déplacement à froid rend les boissons plus agréables : d’une part, parce que nous savons qu'elles renferment tout juste assez d'air pour que l'estomac les supporte bien, tandis que l’on sait que l’eau tiède faci- lite les vomissements, parce que cette boisson est dépourvue de la quantité d’air nécessaire à la tolérance de l'estomac : et de l’autre, qu'elles sont moins susceptibles de décom- position, parce que le déplacement à froid n’agit pas sur les autres principes qui rendraient la boisson indigeste 26 RÉSUMÉ DES SÉANCES. comme si elle avait été formée avec le déplacement à chaud, c’est-à-dire l’infusion chaude ou décoction. Prenons un exemple dans le sujet qui nous préoccupe dans ce moment. La réglisse est composée 1° d’une matière sucrée, 20 d’une matière âcre qui se trouve dans l’écorce, 5° d’une matière gommeuse, 4° d’une matière amilacée ou amidon qui est très-difficilement digérée par l'estomac. Faites le déplacement à l'infusion chaude et mieux par décoction ; toutes ces substances s’y trouveront en quantité plus ou moins notable, d’où une mauvaise boisson, puisque l’ami- don s’y dissout, Au contraire, si vous agissez à froid, vous n'avez que la matière sucrée et une très-petite quantité de la matière âcre qui se trouve dans l’écorce. Aussi, d’après la méthode de déplacement, on doit ratisser le bois de réglisse qui doit être employé à l'opération, et alors vous avez une excellente boisson. Voyons à présent si, avec ces données que fournit la science pharmaceutique, nous sommes en mesure de donner à bon marché une boisson tempérante et qui tien- dra toutes les espérances que nous avons conçues en lisant le travail de M. Oudart. D'abord ce pharmacien distingué ne parle que d’une tisane d'hôpital qui à toutes les pro- priétés d’une bonne boisson qui étanche parfaitement la soif des malades pauvres et à peu de frais. A ce titre seul, il aurait rendu un service aux pauvres malades et surtout aux établissements qui ont soin d'eux. Il est certain que, par la méthode de déplacement à froid, ils obtiendront presque pour rien ce qui leur coûte encore cher pour plus mal faire. Car avec 410 centimes de réglisse divisée, M. Ou- dart obtient facilement et presque sans travail 50 litres de boisson de bonne qualité. JANVIER. Pr Mais reste à savoir si cette tisane d'hôpital, c'est-à-dire une boisson sucrée et arômatisée qui s'adresse à des ma- lades dans des établissements de bienfaisance, pourra s'adresser à des ouvriers de la campagne bien portants, tra- vaillant aux ardeurs du soleil? Il est clair qu’elle vaudra mieux que l’eau pure; mais vaudrait-elle de l’eau avec addition de vinaigre, de la bonne eau-de-vie? C’est une expérience à faire. Mieux qu’à tout autre elle incombe à notre Président. À l'époque de la fenaison et de la moisson, il lui sera facile de la faire. Les ustensiles propres à faire cette boisson ne sont pas chers; la matière première n’est pas chère ; la plus grossière des ménagères aura assez d’in- telligence pour faire cette boisson en faisant les apprêts des repas des moissonneurs, une fois qu'on le lui aura appris. En effet, que faudra-t-il désormais à l’expérimentateur pour faire chaque jour cent litres de tisane ? 4° un vase en étain de la capacité de quatre litres, où se trouve un demi- kilogramme de réglisse ratissée et pilée, et armé d’un ro- binet à sa partie inférieure ; 2° au-dessous, une terrine d’égale capacité, le tout placé dans un coin de la cuisine, sous un filet d’eau provenant d’un réservoir commun que la ménagère, tout en circulant, occupée d'autre chose, arrétera ou laissera tomber doucement à la partie supé- rieure du vase renfermant de la réglisse pilée ou concassée, comme je viens de le dire, suivant qu'il sera nécessaire au besoin de la consommation. Si le tassement de la poudre de réglisse humectée à été convenablement fait, l'écoulement du liquide devra être lent, et c’est ce que la pratique indiquera bien vite. Plus tard on mélange cette espèce de sirop de réglisse avec cent 28 RÉSUMÉ DES SÉANCES. litres d’eau pure, et vous avez cent litres d’une boisson agréable. La manie des petits est d’imiter les grands, c’est dire que si la méthode réussit entre les mains d’un grand, les petits, c’est-à-dire les ouvriers des campagnes, imiteront le grand, et vous les aurez dotés d’une boisson très-agréable, bonne pour la santé, très-rafraîchissante. Je conclus à ce qu'il soit fait des expériences ad hoc ; que les personnes qui auront fait des expériences viennent les soumettre à la Société, qui jugera si elle doit patroner cette boisson en faveur des ouvriers des campagnes. Après avoir terminé cette lecture, M. du Garay con- clut à ce qu'il soit fait des essais tendant à vulgariser cette boisson. Les propriétaires aisés devraient, suivant lui, donner l'exemple en faisant usage de cette prépa- ration dans leurs maisons de campagne. M. le Président remercie M. le docteur du Garay pour ce travail. ARCHÉOLOGIE. — M. Vinay fait la communication sui- vante qui est relative à des fouilles archéologiques effectuées par lui dans sa propriété de Corsac, com- mune de Brives-Charensac. MESSIEURS , Des défoncements opérés par mon père, il y a quinze ans, sur divers points de sa propriété, avaient mis au jour JANVIER. 29 une quantité considérable de tuiles plates à rebords, du fer oxidé, des fragments de vases, des morceaux de plomb et quelques médailles romaines ; des fondations de murs dont l'existence était jusque-là restée ignorée furent détruites, et parmi les pierres extraites du sol on en remarqua deux qui portaient trois ou quatre lettres d'inscriptions ; mal- heureusement les maçons les employèrent pendant une absence de mon père. Instruit de ces faits après mon retour de Paris où je ter- terminais mes études, je pus recueillir encore un morceau de plomb d’une forme particulière et deux médailles de la colonie de Nimes. De nouveaux défoncements exécutés plus tard en ma présence, pour les besoins de l’agriculture, ont également exhumé des tuiles plates à rebords, des briques et d'anciennes fondations. Ces nombreux vestiges laissés par le peuple-roi dans le sol de Corsac et des recherches historiques sur la commune de Brives-Charensac m'ont peu à peu convaincu qu'il a existé sur notre plaine un établissement romain d’une cer- taine importance, vivifié par une voie très-fréquentée. Nos légendes signalent ce lieu comme intimement lié à la dédi- cace du temple de la Vierge d’Anis. Saint Vosy et saint Nec- taire, se rendant à Rome après l'achèvement de l’église, font à Corsac (dit la légende) la rencontre de deux saints vieillards qui les invitent à retourner au Puy, où la main des anges a tout préparé pour la consécration et la dédicace du sanc- tuaire. Mangon de La Lande et, après lui, M. Mandet disent avoir reconnu les traces d’une voie romaine sur le chemin actuel qui descend de Belle-Vue dans la plaine de Corsae, franchit la Loire sur le pont de Villeneuve, et paraît s’en- gager dans la gorge de Fay-la-Triouleyre. 50 RÉSUMÉ DES SÉANCES. La savante notice de M. l'abbé Sauzet, lue au Congrès scientifique de France de 1855, nous fait suivre cette voie jusqu'à Vienne en Dauphiné. Elle traversait la Vellavie par les cantons de Saint-Didier, Montfaucon, Yssingeaux, passait à Montferrat, Blavozy, Fay-la-Triouleyre, le pont de Ville- neuve de Corsac et arrivait au Puy par les Trois-Pierres. M. l’abbé Sauzet en a suivi lui-même les traces dans tout son parcours. Il cite à l'appui de la dernière partie de la voie, un titre de 1642 que je lui avais communiqué, où le chemin du pont de Villeneuve est encore désigné sous le nom significatif de Strata via. Pénétré de l'importance de ces données historiques, j'ai résolu, cette année, d'entreprendre des fouilles sur la partie de mon enclos la plus rapprochée du pont de Villeneuve de Corsac; les tuiles plates à rebords s’y trouvaient du reste répandues à profusion à la surface du sol. Les fouilles ont été commencées le 27 décembre 1859. Le terrain où elles s’opèrent est planté de müriers en quin- conce, espacés de 6 mètres 50 centimètres. J'ai fait ouvrir, entre les lignes d'arbres, des tranchées d’un mètre environ de largeur sur un à deux mètres de profondeur. Ces tran- chées sont dirigées parallèlement au lit de la Loire, du nord au midi. Elles ont amené d’abord la découverte un peu prévue d’un ancien chemin, ou plutôt d’un supplément au chemin actuel, présentant tous les caractères d’une voie romaine avee ses différentes couches, telles que les décrit Vitruve. Dans les tranchées où il est le plus facile de l'observer, la partie supérieure de la voie est composée de pierres de grès d'inégale grandeur juxta-posées avec soin, quelquefois entremélées de cailloux roulés basaltiques. Cette première couche est tantôt à 0,50, 0,60 et 0,70 centimètres de profon- JANVIER. 51 deur, suivant que le terrain supérieur a été plus ou moins surexhaussé. Au-dessous se trouve une deuxième couche composée d’un mélange de terre franche et de gravier; on Y remarque quelquefois des fragments de tuiles ; la troisième couche est un blocage de petites pierres concassées mêlées à de la terre; enfin la quatrième couche est formée de moëllons de grès assez grands, posés à plat et rangés à sec les uns à côté des autres. Ces diverses couches sont très-faciles à observer; la seconde, moins distincte, se confond souvent avec la troi- sième. Elles forment toutes ensemble une hauteur totale de 0,50 à 0,60 centimètres. On à de plus trouvé, perdus dans le sol, des pavés de grès taillés en forme de dés carrés, les uns se terminant en pointe comme des coins, les autres comme des pyramides tronquées. A ces signes, peut-on ne pas reconnaitre tous les carac- tères du statumen, du rudus, du nucleus et du summum dorsum qui constituaient la voie romaine ? Jusqu'à présent il m'est impossible de déterminer la largeur de la voie, puisqu'elle va se perdre sous le chemin actuel. Avant peu les fouilles entreprises sur d’autres points permettront de la fixer exactement; on peut juger déjà que c'était une voie d’une certaine importance. La troisième tranchée à coupé diagonalement un mur de 0,60 centimètres d'épaisseur. Je lai fait découvrir sur une longueur de vingt mètres, il se dirige à peu près à angle droit vers le chemin actuel du pont de Villeneuve. Les plantations ne m'ont pas permis de vérifier s'il se pro- longe sur la voie. Du côté opposé, à 1 mètre 50 centimètres de son extrémité, un autre mur de même épaisseur vient se relier à lui à angle droit et se dirige du levant au cou- 52 RÉSUMÉ DES SÉANCES. chant. Ce second mur a une longueur de trois mètres. Ces murs sont construits à chaux et sable, mais le ciment n’a pas de cohésion, les pierres, d’inégale dimension, s’enlèvent facilement. Il serait téméraire, quant à présent, d’asseoir une opinion sur l'âge et la destination de ces substruc- tions. A portée du premier mur et en deçà de la voie, nous avons trouvé une quantité considérable de fragments de poterie de toute nature. Des briques de toutes dimensions depuis 0,10 centimètres d'épaisseur jusqu’à 0,02 centimèe- tres, des tuiles plates à rebords ; des anses et des parties d'amphores:; des clous à tête plate et carrée de 0,08 à 0,12 centimètres de longueur, des fragments ligneux y sont encore adhérents ; de la terre mélangée de charbons, de cendres et d'os calcinés ; des dents de cheval ; une défense de sanglier; des morceaux de coupes en verre. Je dois signaler surtout des fragments de vases en poterie rouge, dite samienne, avec ornements en relief d’une très-belle exécution. On y remarque des entrelacs de feuilles et de branches, des torsades et des rinceaux d’une grande élé- gance. Sur l’un de ces fragments un oiseau est en action de becqueter. Le fond des vases porte la marque de fabrique. Nous n'avons rien pu recueillir d’entier ; ces divers objets ont été brisés avant l’enfouissement. Recueillis avec soin, la place où ils sont trouvés est notée dans un procès-verbal journalier des fouilles. Je me propose de les décrire en détail après l’exploration complète du terrain. En présence de ces nombreux débris de poterie noire, blanche, grise et rouge, les uns très-grossiers, les autres d’une extrème finesse, trouvés dans la circonscription des deux murs et en dehors de la voie. des clous. des cendres, JANVIER, 55 des os, du charbon, ete., etc., la conclusion est forcée, nous sommes sur l'emplacement d’un ancien cimetière à ustion gallo-romain, bouleversé à une époque plus ou moins reculée. Mes premières conjectures se sont confirmées hier par la découverte d’une tombe à peu près intacte. Elle était atte- nante au mur de trois mètres de longueur signalé plus haut, entourée de pierres brutes posées sur champ sans mortier et formant une enceinte de 0,80 centimètres de long sur 0,70 de large. Sa présence nous à été signalée par un double rang de briques et de tuiles à rebords symétri- quement arrangées. Le fond d’une urne est ensuite apparu à nos veux; elle était placée à l'envers, c’est-à-dire lorifice en bas. Brisée par la pression des terres et des briques, elle pourrait être en partie reconstituée à l’aide des mor- ceaux recueillis. Son contenu est un composé de cendres, d’ornements, de charbon, de débris de vases samiens et autres, amalgamés ; il est possible qu'au milieu de cette agelomération d'objets divers, ne formant pour ainsi dire qu'un seul bloc, se trouve la pièce de monnaie qui accom- pagnait d'habitude ce genre de sépultures. Non loin de l’urne se trouvaient trois clous à tête carrée ; au-dessous, de la terre mélangée de charbons et enfin un lit de petits cailloux roulés et de sable. Ce sont là les caractères évidents d'une tombe à ustion, comme les a si bien décrits l'abbé Cochet dans son remarquable ouvrage de la Normandie sou- terraine. L'ouverture de la tranchée fait déjà pressentir qu'à côté de cette tombe il en existe deux autres qui n'ont pas été violées. J'ai suspendu les fouilles pour réserver à ceux d’entre vous qui voudront bien se transporter à Corsac le plaisir TOME XXII. 3 54 RÉSUMÉ DES SÉANCES. d'assister eux-mêmes à la visite des deux autres tombes. Cette communication sommaire n’a point d'autre but, mais elle peut déjà vous donner une faible idée de l'importance de la découverte pour nos origines historiques. Après cet exposé, qui a vivement intéressé l’Assem- blée, M. le Président exprime à M, Vinay les remerci- ments de la Société pour les recherches si fructueuses, au point de vue de l’histoire locale, qu'il a généreuse- ment entreprises à ses frais, et après avoir consulté l'Assemblée, M. le Président, conformément à la de- mande de M. Vinay, nomme une commission chargée d'examiner les lieux et d'en faire un rapport à la prochaine séance. Cette commission est composée de MM. de Payan, l'abbé Sauzet, Marthory, de Vinols, Balme, Sarlandie et Vinay. A cinq heures, la séance est levée. Le Vice-Secrétaire, H. LIMOZIN. SÉANCE EXTRAORDINAIRE DU JEUDI 26 JANVIER SOMMAIRE INpusrrie ET Beaux-Anrs : La Société décide, après délibération : 19 que pour l’époque du Concours régional l'exposition des produits industriels et artistiques sera limitée au seul département de la Haute-Loire; 2 qu’il sera fait un appel aux fabricants de dentelles des départements où cette industrie est en vigueur, pour l'organisation d’une exposition de ce genre de produits au chef-lieu de la Haute-Loire. — P£nsonNNez DE LA SocrÉrtÉ : M. Gabriel de Chaulnes demande à faire partie de la Société. — Ancnforogre : M, de Payan-Dumoulin fait don de deux fragments de poterie @ite samienne. — Fragment de statue trouvé à Taulhac. Présidence de M. Aymard, vice-président. La séance est ouverte à {rois heures. M. le Président fait connaître à MM. les Membres de la Société d'agriculture qu'ils ont été convoqués extra- ordinairement pour entendre la lecture d’une lettre que M. le Préfet de la Haute-Loire vient d'adresser au Président de la Société. 56 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Ce magistrat l’informe de l’insuccès des démarches qu'il à faites, conformément au désir de la Société, auprès des sept préfets dont les départements com- posent la région, dans le but de provoquer, en même temps que l'exposition régionale du mois de mai, une exposition générale industrielle et artistique. En présence de ces résultats négatifs, M. le Préfet demande si la Société persiste dans son intention. M. le Président ouvre la discussion. Un membre pense qu'une exposition générale artis- tique et industrielle ne pourrait aboutir dans notre dé- partement, par ces motifs que les frais et les dangers du transport, le retour fréquent des solennités régio- nales dans des centres d’un accès plus facile, l'indiffé- rence enfin des artistes et des industriels, indifférence signalée unanimement par les sept préfets de la région, sont des obstacles d'autant plus infranchissables que nous avons à peine le temps de les aborder. Un autre membre appuie cette opinion : En tenant compte des difficultés qu’on a eues pour organiser une exposition de ce genre dans le département de la Drôme, je crois, dit-il, le succès impossible, par ce motif sur- tout que les expositions industrielles et artistiques ne peuvent être improvisées, qu'il faut aller se mettre en rapport, et longtemps à l'avance, avec les artistes et les industriels, et qu'il est impossible, durant les trois mois qui nous séparent à peine de l'exposition, de tenter des démarches de ce genre dans les sept dépar- tements composant la région. SÉANCE EXTRAORDINAIRE DE JANVIER. 57 L'honorable membre propose done de restreindre au seul département de la Haute-Loire l'exposition indus- trielle et artistique. \ Nos amateurs, comme nos divers artistes, nos éta- blissements religieux surtout, si riches en œuvres d'art, s'empresseront, dit-il, de répondre à votre appel, et, d'un autre côté, les industriels voudront montrer que la rubanerie, l’ébénisterie, la saboterie, les mégisseries du département, comme la fabrication du plâtre et de la chaux, et tant d’autres industries, dépassent, dans la Haute-Loire, le degré de perfection atteint dans les autres départements. Mais, se demande l'honorable membre, devons-nous, en ce qui concerne l’industrie dentellière, devons-nous maintenir le projet d’une exposition générale et faire nos efforts pour provoquer les départements où elle fonctionne à apporter leurs produits au Puy, et engager avec nos tissus une lutte pacifique ? 11 ne le pense pas : d’après lui, la jalousie empèchera les industriels étrangers de venir affronter une com- paraison qui leur serait désavantageuse ; ils hésiteront en outre à mettre sous les yeux de nos ouvriers des dessins dont ceux-ci pourraient profiter ; peut-être même seront-ils seulement indifférents. Il y aurait alors quelque chose de fâcheux et de com- promettant pour la dignité de notre société, si nous faisions hautement un appel qui ne serait pas entendu, peut-être même non écouté. Un membre, tout en regrettant l'insuffisance des moyens officiels, les seuls malheureusement employés jusqu’à présent pour faire connaître aux départements, 38 RÉSUMÉ DES SÉANCES. de la région notre dessein de provoquer une exposition générale artistique et industrielle, reconnaît que le temps nous manque pour faire un appel efficace aux fabricants, mais il est d'avis qu’on fasse une exposition générale de l’industrie dentellière, exposition à laquelle seraient vivement pressés de prendre part les départe- ments qui fabriquent ces tissus ; il demande tout au moins, qu'avant de rejeter cette idée on attende la ré- ponse des quatre préfets de l'Orne, des Vosges, etc., qui ont été consultés sur les chances plus ou moins probables de la participation de leurs fabricants à notre exposition. La dentelle, ajoute-t-il, est notre première industrie, el il nous importe au plus haut point de provoquer des concours qui doivent démontrer encore davantage son degré de perfection. Les fabricants étrangers viendront, car ils ont intérêt à venir ; du reste, attirons-les par l’appät des récompenses ; que des médailles d’or ou d'argent, si recherchées par le commerce, leur soient spécialement affectées. Plusieurs membres prennent part à cette discussion. M. le Président met aux voix les trois questions sui- vantes, qui sont adoptées à la majorité. lo La Société d'agriculture est d'avis de renoncer à établir, en même temps que le Concours régional, une exposition générale des produits industriels et artis- tiques des sept départements formant la région. Cette exposition sera limitée au seul département de la Haute-Loire. SÉANCE EXTRAORDINAIRE DE JANVIER. 359 20 La Société décide qu’une exposition générale de l'industrie dentellière aura lieu, et que les préfets des départements qui fabriquent ces tissus seront vive- ment priés d'user de leur influence pour provoquer leurs fabricants à prendre part à notre exposition. 3° La Société arrête qu’un programme de récom- penses à décerner à ces exposants lui sera soumis par le bureau dans une de ses plus prochaines séances. La discussion est close. PERSONNEL DE LA: SOCIÉTÉ. — M. le Président lit une lettre de M. de Chaulnes qui demande à se faire rece- voir membre résidant. Une commission est nommée pour faire le rapport sur le travail que ce candidat a présenté comme titre d'admission. ARCHÉOLOGIE. — La parole est ensuite donnée à M. de Payan-Dumoulin, qui fait connaître à la Société des détails très-intéressants sur des fouilles archéologiques entreprises récemment à Toulon (Allier). Dons au Musée. — A la suite de cette communication, M. de Payan offre au Musée deux beaux fragments de poterie antique, dite samienne, sur lesquels sont figurées en relief des chasses d'animaux qui rappellent des sujets analogues découverts au Puy sur des pierres romaines. Ces fragments proviennent des fouilles archéologi- OI ques faites à Toulon. 40 RÉSUMÉ DES SÉANCES. M. le Président met sous les yeux de l’Assemblée un fragment de statue en grès qui a été trouvé au Riou, commune de Taulhac. C'est un pied plus grand que nàture, dont le style de sculpture semble dénoter une origine romaine. Du reste, le lieu où il a été découvert offre d’autres débris, tels que des pierres de grès, tuiles à rebords, et diffé- rents vestiges qu'on doit rapporter à la mème origine. Ce fragment a éte donné à M. Aymard par le pro- priétaire du lieu et par la bienveillante entremise de M. Pons, ancien maire de Taulhac. À quatre heures et demie, la séance est levée. Le Sociétaire faisant fonction de Secrétaire, SARLANDIE. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 2 FEVRIER. SOMMAIRE. Lecture du procès-verbal. — OuvraGEes REÇUS : En faisant hommage, au nom de M. Lecoq, du grand ouvrage de cet éminent naturaliste, intitulé : Etudes sur la géographie botanique de l'Europe, M. Béliben remercie la Société de lui avoir conservé les fonctions de secrétaire. — AGRICULTURE : Mélange de la chaux dans les fumiers. — Drainage d’un communal de Saint-Christophe- sur-Dolaison ; MM. de Brive et Chouvon. — Travaux de drainage exécutés à la ferme-école de Nolhac par M. Chouvon.— 4rboriculture : Gfaines d'arbres demandées à la sécherie impériale de Haguenau. — SCIENCES HISTORIQUES : Exemplaires de dessins sortis des presses de M. Marchessou, pour le Mé- moire de M. de Payan-Dumoulin sur les fouilles de Toulon-sur-Allier. — Explorations archéologiques, par M. Paul Leblanc, à Courbevaysse, près Craponne, aux environs de Saint-Jean-d'Aubrigoux, à Zazinde, à Saint- Ilpize, ete. — Liste des consuls de la ville du Puy de 1700 à 1775. — Rapport de M. Louis de Vinols sur la candidature de M. Gabriel de Chaulnes. — M. Mauras, avocat, présente, à titre d'admission, un mémoire avec ce titre : Recherches sur les insinuations laïques. Présidence de M. Aymard, vice-président. À trois heures, la séance est ouverte par la lecture du procès-verbal de la dernière séance, faite par M. le 42 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Vice-Secrétaire. — M. le Vice-Secrétaire donne encore lecture du procès-verbal de la séance extraordinaire tenue le 26 janvier, à l’occasion de l'exposition artis- tique projetée pour l’époque du Concours régional. OuvrAGEs REÇUS. — M. le Secrétaire, chargé de faire hommage à la Société d’un ouvrage qu'il apporte de Clermont, saisit cette occasion d'exprimer à ses collè- gues tout le bonheur qu'il éprouve à se retrouver au milieu d’eux. Loin du pays où il a passé les meilleures années de sa vie, qu'il regarde comme son pays, il se considérait comme exilé. La capitale de l'Auvergne, dit-il, est bien sans doute une ville importante, située au milieu de riches contrées, dotée de plusieurs éta- blissements scientifiques ; elle possède un lycée très- florissant, une belle bibliothèque ouverte tous les jours et des Facultés où de nombreux auditeurs viennent écouter les leçons de professeurs distingués; elle a bien des ressources pour un membre de l’enseigne- ment public... mais le Puy n’est pas à Clermont, et il est difficile de le quitter sans de vifs regrets, après l'avoir habité pendant vingt-cinq ans. M. le Secrétaire remercie donc toutes les personnes qui, dans le sein de la Société ou au dehors, ont fait des vœux pour son retour. Il n’oubliera jamais la marque de confiance que lui ont donnée ses collègues en n’acceptant pas sa démission et lui conservant le titre de secrétaire mal- gré l’arrêté qui l’appelait à la chaire de logique du lycée impérial de Clermont. Dans cette ville, qu’il vient d'habiter pendant près de trois mois, il a pu juger de FÉVRIER. 15 l'estime et de la renommée dont jouit la Société acadé- mique du Puy chez nos voisins. Il en à recueilli l'éloge partout : au chef-lieu de l’Académie universitaire, aux Facultés, chez les membres les plus distingués de la Société impériale des sciences et arts de Clermont et de la Société d'agriculture, auprès de plusieurs magistrats et membres de la cour impériale de Riom, où nos col- lègues et nos compatriotes MM. du Molin, F. Mandet, Enjubault, Assézat de Bouteyre, Félix Grellet représen- tent si honorablement la Société. C'est, dit-il, en témoi- gnage de son estime pour elle que M. Lecoq, professeur des sciences naturelles à la Faculté des sciences de Clermont, et aussi notre collègue, m'a chargé de vous offrir un ouvrage qu'il vient de faire paraître en neuf volumes grand in-octavo et qui à pour titre : £tudes sur la géographie botanique de l'Europe. Dans ce livre, un des plus beaux monuments scientifiques de notre époque, plusieurs pages sont consacrées à la flore de ce pays, pour lequel l'auteur à une prédilection mar- quée. M. Lecoq s’est en outre dépossédé en faveur de ses collègues du Puy de douze volumes qu'il avait en double des Annales des premiers temps de notre Société. La Société, par l'organe de M. le Président, charge M. le Secrétaire d'exprimer à l’éminent naturaliste de Clermont toute sa gratitude pour le don qu'il a bien voulu lui faire. AGRICULTURE. — Au sujet d'un article du Bulletin agricole, la question des engrais occupe un instant la 17 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Société. La question soulevée est celle du mélange de la chaux dans les fumiers. M. Chouvon est d'avis, d'après M. Payen, que le mélange ne doit être fait que lorsque les engrais sont frais, autrement la chaux les décompose et leur enlève leurs principes fertilisants. Drainage. — M. Chouvon rend compte de vive voix d’un essai de drainage exécuté, d'après les ordres de l'ingénieur en chef du département M. Coumes, par M. Nicolas, membre résidant de la Société, conducteur des ponts et chaussées, chargé des travaux de drainage et professeur d'agriculture à l'école Normale. Cette expérience a été faite tout près de la ville, dans un communal de Saint-Christophe-sur-Dolaison, dé- pendant du hameau de Laroche et compris entre la grand'route, entre le nouveau et l'ancien chemin de Laroche au chef-lieu de la commune. Le terrain drainé est d’une étendue d’un peu plus de deux hectares (ou environ trente-deux cartonnées du Puy). L'opération n'a présenté d'autre difficulté que celle provenant de la trop faible pente du terrain, qui est d’ailleurs de bonne qualité, avec de la terre arable jusqu’à plus d'un mètre de profondeur, ayant à sa surface une couche de vingt-cinq centimètres de détritus organiques. Ce travail, commencé dans les premiers jours de décem- bre, a duré pendant tout le mois et a coûté 385 francs de main-d'œuvre. Les drains ont été pris dans les dépôts de la Société; l’écartement des petits, placés en lignes parallèles, est de 8 mètres; ils n'ont que 0,03 centimètres d'ouverture, sont à la profondeur d'un mètre et aboutissent au drain collecteur qui FÉVRIER. 45 repose sur le sous-sol formé de pierres perdues et de roches basaltiques. Les tuyaux qui le composent ont 0,08 centimètres de diamètre intérieur et 0,33 centi- mètres de longueur ; placé en écharpe, il recoit les eaux des petits drains à la profondeur de 1 mètre 15 centimètres, sur un développement de 70 mètres. Ainsi, en évaluant à près de 150 francs le prix des drains (les petits, dont il fallut 6,000, sont à 20 francs le mille, et les grands à 30 francs), on a une dépense de 535 franés, soit 270 francs par hectare : somme peu considérable devant les avantages qu'offre un drainage bien fait. Aujourd'hui le communal drainé peut deve- nir un champ de très-bonne qualité et propre à pro- duire toute espèce de céréales. MM. de Brive et Chouvon qui, par un temps affreux comme nous l'avons eu pen- dant tout le mois de février, se sont rendus sur les lieux, ont constaté le succès d’un essai qui fait honneur à l'administration des ponts et chaussées et à son man- dataire. Tandis que dans les communaux voisins on remar- que des flaques d’eau croupissante, le terrain drainé est sec et déjà recouvert d'herbe dans toute son éten- due. L'opération avait immédiatement produit son effet, comme on en pouvait juger par l'écoulement du drain collecteur d’où s’échappait l'excédant d'humidité de la terre. Un autre avantage de ce genre de travaux est de faciliter, dans le sein de la terre, la formation des sels indispensables à la production de ses fruits. Elle devient poreuse, perméable, plus friable, plus propre à la culture. On peut mème dire qu'elle res- pire : car ce système de tubes artistement disposés lui 46 RÉSUMÉ DES SÉANCES. fait comme une espèce d'appareil respiratoire dans lequel le drain collecteur sert comme de trachée-artère. La vapeur d’eau s'y condense et s’y entretient de telle sorte qu’en débarrassant le sol de son excès d'humidité, l'opération du drainage peut lui en conserver assez pour maintenir les récoltes pendant les plus fortes sé- cheresses. Les rases pierrées produisent bien une partie des mêmes effets, mais non encore d’une manière aussi prompte et aussi sûre. Dans l’intérieur, l’eau n’y dé- coule pas facilement, trouvant à chaque instant des obstacles qu’elle est forcée de contourner. Elles ne sont pas d’ailleurs reliées entre elles et ne forment pas ce système général que présente le drainage. Il est vrai qu'elles ont un immense avantage, inappréciable dans ce pays : celui de purger le sol de pierres ; mais rien empêche d'en déposer plusieurs couches dans tous les canaux creusés pour la pose des drains. Votre commission pense donc que l'expérience qui vient d’être faite aux yeux de tous et pour ainsi dire aux portes de la ville, doit engager les agriculteurs de ce pays à recourir sans délai au drainage qui, à peu de frais, assainit, fertilise les terres et en double la valeur. Depuis plusieurs années la Société les encourage à en- trer dans cette voie ; elle leur en a ouvert l'accès en achetant des machines à fabriquer les drains. Ces ma- chines fonctionnent et remplissent ses caves de drains de toute dimension, qu’elle délivre à des prix réduits. En agissant ainsi, la Société s’est associée aux vues éminemment progressives du gouvernement de l'Em pereur. On sait qu’animé d’une sollicitude inconnue jusqu’à ce jour pour les intérêts de l’agriculture, l'Etat JANVIER AT a ouvert un immense crédit aux agriculteurs pour les opérations du drainage. Non-seulement il accorde pour cette institution nouvelle des allocations considérables, mais il a encore organisé auprès des bureaux de l’In- génieur en chef, dans chaque département, un service spécial où les propriétaires et les fermiers trouvent tous les renseignements nécessaires aux travaux de drainage. À ce service est assigné un employé capable et spécialement chargé de se rendre sur les lieux, de dresser des plans et d'indiquer toutes les dispositions nécessaires aux succès de l’entreprise. I suffit de s'adresser à M. le Préfet pour obtenir sans délai un concours efficace. L'expérience de Laroche n’est pas le seul argument qui parle en faveur de ce procédé si fécond. Déjà nos agronomes les plus distingués en avaient fait d’heu- reuses applications. MM. C. de Lafayette, père et fils, à Senilhac et au Villard ; MM. de Brive dans la commune de Coubon ; M. le rapporteur lui-même en avaient obtenu de bons résultats. M. Chouvon expose encore qu'à la ferme-école de Nolhac existe une assez vaste étendue de terre avec des pentes qui amenaient l’eau vers le milieu où elle for- mait comme une espèce de marais. La récolte était souvent compromise. Une année entr'autres, la pluie endommagea totalement une belle moisson de colza. Aujourd'hui cette pièce de terre, assainie au moyen du drainage, est une des plus productives de la ferme. Les élèves qui, depuis cette époque, se sont succédé à la ferme-école pourraient témoigner an besoin les bons effets du drainage. Les pluies abondantes n’ont plus 48 RÉSUMÉ DES SÉANCES. sur cette terre aucune action funeste, De que les champs environnants sont noyés. Il faut, ajoute énergiquement M. le Directeur de la ferme-école de Nolhac, que les gens de la campagne soient bien méfiants à l'endroit des procédés nouveaux, pour s’obstiner ainsi à fermer les yeux à la lumière et à ne point voir les avantages incontestables que pro- cure à l’agriculture un drainage bien conduit. Arboriculture. — M. Limozin, sous-inspecteur des eaux et forêts, informe la Société qu'il a demandé à la sécherie impériale 130 kilogrammes de graines d'arbres. SCIENCES HISTORIQUES. — M. de Payan-Dumoulin fait savoir qu'il a retouché notablement son mémoire pu- blié par le journal l/lustration, sur les découvertes archéologiques de Toulon (Allier). Quelques exem- plaires des dessins qui accompagneront son ouvrage passent sous les yeux de la Société. Ils font honneur aux presses de M. Marchessou qui les à tirés sur des clichés gravés sur cuivre et exécutés à Paris avec une rare perfection. M. Paul Leblanc, de Brioude, membre non résidant, entretient l'Assemblée des fouilles et des découvertes qu'il a faites sur plusieurs points du département. C'est d'abord au lieu de Courbevaysse, commune de Cra- ponne, une motte féodale mérovingienne ou tertre, appelée le château, d'une élévation de six mètres sur mi FÉVRIER. 49 un rayon de 28 mètres, entourée de fossés avec escar- pement. Au centre sont quelques vestiges qui indiquent la place occupée par la vigie qui avait mission de veiller sur la voie par laquelle on gagnait le Forez et dont il reste des traces évidentes. Entre Douspix-Freideville et le Colombier, dans la commune de Saint-Jean-d'Aubrigoux, se trouve un dolmen ayant servi de sépulture à un chef gaulois. C'est une chambre dont les parois sont des pierres levées, ayant deux mètres de large sur une longueur de cinq mètres. Ce monument, selon l'opinion de M. Leblanc, est le plus remarquable du diuidisme dans nos contrées. À quelque distance de ce lieu, sur les bords de l’estrade romaine qui se dirige vers le pays des Ségusiaves, on découvre les ruines jusqu'alors mal déterminées de la chapelle d’une très-ancienne mala- drerie; elle est située à Tranchebourse, près de Bou- gerne, commune de Craponne. Des fouilles faites sur d’autres points, dans l’arron- dissement de Brioude, ont révélé à M, Paul Leblanc l'existence de deux anciens cimetières. Le premier, à Zazinde, près de Villeneuve-d’Allier. Des verres brisés, des fragments de poteries samiennes en terre blanche avec ornements et reliefs, d’une assez bonne époque, des urnes funéraires indiquent clairement la place d’un cimetière romain par ustion. Un vase entier en verre améthiste, avec un filet s’enroulant tout autour, est l’objet le plus précieux de cette découverte impor- tante. L'autre cimetière est un cimetière par inhumation ; il n’est pas loin du prieuré de Saint-Ilpize. Des fouilles TOME XXII. 1 50 RÉSUMÉ DES SÉANCES. y ont mis au jour plus de cent vingt tombes qui pa- raissent dater du VIe siècle. Les squelettes décomposés qu'on y trouve ont les pieds tournés vers l'Orient. Avec les ossements on rencontre des poteries samiennes d'une facture grossière, portant en saillie des feuilles de lotus. Les tombes de ceux qui étaient les person- nages les plus élevés du pays sont creusées dans des pierres d'un seul bloc, extraites de la carrière volca- nique de la Chomette ; d’autres se composent simple- ment de pierres plates placées sur champ et formant un réduit à la taille du mort. La disposition de ces tombes, les objets qu'on y retrouve, le site sauvage, désolé, presque inaccessible, la violation dont ce cime- tierre porte des marques, tout indique que ce lieu a été, dans nos montagnes, le dernier refuge du paganisme expirant. M. le Président remercie M. Leblanc de cette inté- ressante communication. À son tour, il signale à la Société la découverte de nouvelles picrres milliaires dont la disposition jette quelque lumière sur le réseau des voies romaines qui sillonnaient le pays des Vel- laves. Pour en constater l’authenticité et la valeur historique, M. le Président nomme une commission composée de MM. de Payan-Dumoulin, Sauzet, Vinay et de Vinols. M. Balme donne la liste des consuls du Puy depuis 1700 jusqu'en 1775. Gette liste, dressée d'après des pièces authentiques, est une précieuse découverte; elle comble une lacune de l'ouvrage de M. Arnaud. FÉVRIER. 51 NOMS DE MM. LES CONSULS DE LA VILLE DU PUY DEPUIS 1700 JUSQU'EN 1773. 1700. MM. Gabriel Dugone, avocat. MM. Jean Pons. Auguslin Porral. Simon Girard, apo'*, Isnace-Pascal Lamye. Jean Roux, boulanger. 1701. MM. Pierre du Noyer D'Ozon. MM. Claude-Francois Arcis. Jean-Pierre Sahuc. Claude Dubois, André Nolhac. Claïde Sanial. 1702. MM.André-Georges de Pandraud. MM. Jean Longeon, drapier. Jean Marie, Armand-Francois Vacheron. François Richond. Jean Portal, boulanger. 1705. MM. Jacques de Colin des Roys. MM. François Goy. Jean Faure, m° drapier. Georges Marin. Estienne Mège. Antoine Montanhae. 1704. MM. Vital Bellidentis d'Alandes, MM. Francois Pradier. baron de Bains. Pierre Giraud. Pierre Moisset. Pierre Delort. Jacques Bertrand Guerre. 52 MM. MM. MM. MM. MM. MM. MM. RÉSUMÉ DES SÉANCES. 1705. Hyacinthe Meyronnenc. MM, Jean Pons. André Legal. 4706. Benoît du Noyer de Ville. MM. Pierre Faure de Livinhac. Antoine Balme. 14707. André-Gabriel de Pandraud. MM, Vital Geneslet. Pierre Besqueut. 1708. Ignace-Pascal Lamyc. MM Pierre Pelissier. Claude Dubois. 1709. André Denis d'Alemance. MM. Jean Longeon. Ignace Genestet. 4710. Benoît Valantin de Frey- MM. deville. François GOy. Jean Cormail. 4711. Jean-Nicolas de Pauche. MM. s' de Cordes. André Nolhac. Pierre Lafont. Jean Roux. Pierre Lafont. Jacques Bonnet, boulanger. Louis Rostang. Jean Martin. Jean Faugeas. Jean Layes, bourgeois. Georges Bonnefoux. Jean Riou, menuisier. . Jean-Claude Morel. Louis Lyotard. Jacques Legal. Just Bergoin. Pierre Pomerenc. Benoist Soulier. Jean Portal, boulanger. Gardès, procureur. Claude Romeuf, tanneur. Georges Nolhac. Pierre Bonnet. Pierre Assezard. FÉVRIER. 4712. MM. De Sigaud de Loudes, baron MM. Chapot. de Chadrac. Antoine Proffit. François Roche. Jean Dalzon de la Coste. Roche, granetier. 4715. MM. Frédéric de Morgues, baron MM. Thomas-Antoine Gaillard. de St-Germain. Jean-Jacques Marcon. Claude-François Arcis. Guilhaume Laurens. Antoine Constant. AT 4. MM. Fri du Fayt de Combres. MM. Joseph Tallegros. Marcelin Espanhon. Jean Laporte. André Galland. Jean-André Benoît. 4715 MM. Brunel d'Allentin. MM. Jean-Antoine Pichot. Claude Dubois. Gaspard-Chrétien Clet. Jean Gras. Grégoire Boissière. 17416. MM. Bernard de Jalavoux. MM. Jacques Legal. Jean Roux. Vital Bohet, perruquier . Georges Marin. Antoine Chanut. 17417. MM. Antoine de Chabanacy. MM. Claude Bois, notaire. Antoine Proffit. André, marchand toilier. Georges Breymand. André Rabaste. 1718. MM. Vital Irail, con®. MM. Jean-Antoine André. Jean Rocher. Barthélemy Legal. Jean-Bruno Layes. Sébastien, gantier. “ ÿS: _— 4719. MM. André-Georges de Pandraud. MM. Thomas-Antoine Gaillard, Pierre Bonnet. MM. De Sigaud de Loudes,baron MM. de Chadrac. , Antoine Conslant. Jean-Gabriel Porral. 1721 MM. De Fillère du Charrouil. MM. Benigne Pons. Pierre Genestet. 1722. RÉSUMÉ DES SÉANCES. Antoine Johanny. André Reynaud. Jean Sabadel. Antoine Garnier, pro“ureur. Jean Servel. Jean Bon, pailleur. André Brunel, procureur. Antoine Crouzet. Hedde, traiteur. Nommés par le roy. MM. Antoine Faure, avocat. MM. George Nolhac. 4725. MM. Jean Chilhac, avocat. MM. Pierre Lafont. Michel Monterremard. 1724. MM. Jean-Nicolas de Pauche, MM. s' de Cordes. Just Bergoin. Barthélemy Legal. 1725. MM. Pierre-Vital Bellidentlis. MM. s' de Bains. Gaspard Dugone. Clet, imprimeur. Antoine Lantbenas. Jean-Baptiste Fabre. Louis Tourreilhes. Antoine Filhol Lassaigne. Caze, perruquier. Jean-Mathieu Rome. Al-xandre Chalbos. Jean Reboul, Jean-André Benoit. Joseph Marcon. Pierre Rome, boulanger. MM. MM. MM. MY. MM. MM. MM, FÉVRIER. Frédéric de Morgues, sde MM. Mathieu Reynaud. St-Germain. Jacques Sahue. André Reynaud. Etienne-Vital Irail, con. Antoine Lantbenas. Joseph Berard. De Clamouze. Louis Tourreilhe. Benoît Richond. De Marssan. Georges Marin. Pons Monteyremard. De Glavenas. Jean-Antoine Pichot. Pierre Lassalles. De Montredon. Mathieu Reynaud. Antoine Lyotard. de Villemont. Marcon. Balme. VT2T. MM. Antoine Lyotard. Jacques Tallegros. Pierre Laurenson. Etienne Malosse. Antoine Quinqueton. . Jean-Guilhaume Faure. Barthélemy Galice. Jean-Laurent Dulac. Jacques Soüchon, procureur Jean Furnon. Charles-Denis Jurie. . Fabre, notaire. Jean Meynadier. François Entier. Antoine Vallet. Chauchat. Claude Alirol. Esbrayat. Dupont. Illaire, hôte. 56 RÉSUMÉ DES SÉANCES. 1755. MM. Dela Rochette St-Germain. MM. Legal. Johanny. Rey. Bruyère. Fournier. 1751 MM. De Clamouze. MM. Dubois, fondeur. André. Montagnac. Cossange, Pelissier, cordonnier. 1755 MM. Lanthenas. MM. Marlin. Geneslet. Montagnac. Dupont. Buffet, peintre. 1756. MM. Lanthonas." MM. Pagès. Richond. Montagnac. Dupont. Pierre Giraud. 1757 Les mêmes. MM. Bellidentis, s' des Pradels MM. Maltrait. et de Bains. Benoît, fondeur. Bertrand Langlois. Marcet, boucher. Rey. 1759. MM. Valentin de Mombreuil. MM. Alirol, boulanger. Dubois, fondeur. Falcon. Marcon. Olivier, perruquier. MM. MM. MM. FÉVRIER. AT 1740. De Marcilbac. MM. Tallegros. Faure. Chappon. Meynadier. Barthélemy, dit Malaure. 1741. Porral, avocat. MM. Nolhac. Esbrayal. Blanc. Bertrand. Avinenc. 1742. Richioux, d'Adiac, avocat. MM. Dubois. Berard. Blanc, orpheuvre. Nolhac. Astier. 1745 Les mêmes. Les mêmes. 1745. M. Louis Vanneau, 1® consul, et les autres cinq ci-dessus 1746. 5 M. Polier et les mêmes ci-dessus. 1747. M. Vanneau et les mêmes ci-dessus. 1748. M. Polier et les mêmes ci-dessus 3$ RÉSUMÉ DES SÉANCES. 1749. M. Vanneau et les mêmes ci-dessus. M. Polier et les mênes ci-dessus. 1751. M. Vanneau et les mêmes ci-dessus 1752. M — 1755. . Polier et les mêmes ci-dessus. M. Vanneau et les mêmes ci-dessus. 1754. M. Polier et les mêmes ci-dessus. 4755. MM. De Cussac. MM. Dupont. Benoit, fondeur. 1756. L MM. De Vachon d’Agies. MM. Liotard. Chossat. 1757 MM. Barthélemy, avocat. MM. André, ancien procureur, Faure. Imbert, procureur. Malosse. Rabast, boulanger. rcymand, procureur. Lambert. Morin, chapelier. Morel. Clet. Dessagne. MM MM. MM. MM. MM. MM. MM. FÉVRIER. 1758. . Allirol, avocat. Esbrayat, n° drapier. Esbrayat de la Bouritte. MM. 4799. Larochette de St-Germain. MM. Christophe Genestet. Mareschal, bourgeois. 1760. De Labatie du Voullier. MM. Bertrand Langiois. Porralde St-Jarques,bour- geois. 1761. Rousson, avocat, MM. Inbert, procureur. Lossac, bourgeois. 1762. De Fontfreyde, médecin. MM. Blanc d’Alantin. Malosse de St-Paulien. 1765. De Vachon, baron d’Artias. MM. Chauchat. Ganirol, chirurgien. 1764 Des Roys de la Salveta. MM. Faure, marchand. Blanc l'aîné, orfévre. Chabalier, mi drapier. Ganirol, chirurgien. Arnaud, traiteur. Marcon, marchand. Parrel l’ainé. Parat, blancher. Laurens, procureur. Bresson, chirurgien. Entier, dit Eustache. Marthory, procureur, Tholence, chirurgien. Dulac, fondeur d’étain. Astier. Lavialle. Fabre, cabaretier. Souteyran, procureur. Alary, marchand, Entier, maréchal. Paul cadet, marchand. Montagne, marchand, Bousquet, pâtissier, 60 1765. MM Reboul de Lavée, avocat. MM. Laurens, procureur. Lambert, chirurgien. 1766. MM. Duchamp-Lacroix, avocat. MM. Marcon, mé drapier. Tholance, chirurgien. 4767. MM. De Girardin, chev" deSt-L. MM. Morel, négociant. Paul l'aîné, bourgeois. 1768. Les mêmes. 1769. Les mêmes. 1770. MM. De Girardin. MM Chabalier, m° drapier. Duchamp, notaire. 4771. MM. Arnaud, médecin. MM. Maurin, marchand. De Ladevèze, puis Brun, notaire. Nora. Les mêmes sont restés pendant les années 1772, 1773 et 1774. RÉSUMÉ DES SÉANCES. Saint-Fioland, procureur. De Ladevèze, marchand. Tallegros, boulanger. Maurin, marchand. Hedde l’ainé, marchand. Fabre l'aîné, fondeur. Esbrayat, m° drapier. Lyotard, m* de dentelles. Dubois, fondeur. . Eustache Entier, hoste. Malaval, m‘ de dentelles. Megne, m‘tanneur. Corlial, procureur. Gay, marchand. Lafond, bonnetier. FÉVRIER. 61 41775. MM. Demourgues des Farges. MM. Parris, procureur, Blanc, orfévre. Parrel-Durivaux, marchand Montagne, marchand. Soulier, dit Dupont, teinte. PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ. — Immédiatement après le dépouillement de la correspondance, M. Louis de Vi: nols, en qualité de rapporteur, Et le rapport suivant sur la candidature de M. de Chaulnes. MESSIEURS . Votre commission m'a chargé de vous faire son rapport sur le travail présenté par M. de Chaulnes comme titre d'admission au sein de votre Société. Ce travail avait un double intérêt pour moi; d’une part, il révèle dans son auteur l'amour de l’étude, la connaissance de notre his- toire, le désir de prendre place parmi ceux qui s’en oceu- pent ; de l’autre, il se rattache directement à une époque et à des événements qui ont été, depuis quelques années, l'objet principal de mes recherches. Le 146 octobre 1594, Messieurs, quelques habitants du Puy furent surpris au milieu des préparatifs d’une conju- ration qui avait pour but de livrer la ville aux troupes royalistes commandées par le sénéchal de Chaste ; les chefs de cette conjuration subirent le dernier supplice, leurs biens furent confisqués, leur mémoire flétrie, leur souvenir livré à l’indignation et au mépris de la postérité. 62 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Le 20 août 4596, c'est-à-dire moïns de deux ans après, cet arrêt de la cour du Puy fut cassé et annulé par un juge- ment du parlement de Toulouse ; la mémoire des suppliciés fut réhabilitée avec un apparàt de solennité extraordinaire ; on rendit à leurs dépouilles la sépulture honorable dont ils avaient été privés, et leur tentative pour livrer la ville à de Chaste fut déclarée un acte vertueux accompli par de bons citoyens et digne de louanges. C’est de cet arrêt de réhabilitation que M. de Ehaulnes, destendant par sa mère de l’une des victimes, vous offre aujourd'hui une intéressante et judicieuse analyse. Je n’en- trerai point avec lui, Messieurs, dans le détail des mesures qui furent prises alors pour relever aux yeux de la posté- rité la mémoire de ceux qu'un jugement contraire avait flétris quelques mois auparavant. Ces détails appartiennent à l’histoire ; M. de Chaulnes a pu relever, à l’aide des pièces originales, quelques erreurs de nom commises par le consciencieux Arnaud, et sous ce rapport, son travail, en prenant place dans votre galerie historique, rendra de vé- ritables services. Mais je ne puis m'empécher d'appeler votre attention sur le point de vue philosophique qui res- sort des deux jugements contradictoires rendus sur le méme fait, presque par les mêmes hommes, à deux années de dis- tance. Que s’était-il done passé dans cet intervalle de deux années? La morale avait-elle changé de lois? De nouveaux principes étaient-ils entrés tout-à-coup dans la conscience humaine ? Non, seulement les vaincus de la veille deve- naient les vainqueurs du lendemain. Henri IV régnait; la ligue avait disparu. Et ainsi s'expliquent, Messieurs, avec la réhabilitation des condamnés de la ligue, quelques-unes des attaques passionnées dont la ligue elle-même a été FÉVRIER. 65 l'objet et la victime. Ce grand mouvement national et mu- nicipal n'a trouvé que des détracteurs, il attend encore des juges. Situation unique peut-être et cependant facile à comprendre ; les uns, écrivant sous l'empire des préoccu- pations révolutionnaires, l'ont calomnié par aversion pour le germe catholique qui lui donne la vie; les autres, dé- voués à l’idée monarchique et ne voyant dans les ligueurs que des rebelles à l'autorité du roi, l’ont traité avec une . égale sévérité. Tel fut le malheur de ce temps qui, par son double caractère, par son caractère catholique et libéral à Ja fois, a encouru la haine de tous les partis. Il ne m'appartient pas, Messieurs, en un rapport de réception comme celui-ci, d'entrer dans de plus amples développements ; l'historien et le juge de la ligue viendra à lFheure marquée, comme viendra aussi l'historien et le juge de la révolution fran- caise. Ces erreurs, ces défaillances, ces contradictions, ces manquements à limpartialité et à la justice ne sont pas rares aux époques de discordes civiles, tous les temps pé- rilleux en ont donné l'exemple. Qu'en devons-nous con- elure? Deux choses, Messieurs: la première, c’est que le devoir le plus impérieux pour celui qui veut raconter lhis- toire, est de ne pas troubler par des jugements passionnés la conscience de l'avenir ; la seconde, c’est que ni le succès, ni la défaite ne peuvent et ne doivent être la règle de nos jugements ; qu'il y a une juridiction supérieure qui casse et annulle tous les arrêts portés sur cette faible base, et que les événements et les hommes veulent être pesés non dans la balance ou Brennus jeta son épée, mais suivant la loi durable et seule obligatoire du vrai, du beau et du bien. 64 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Votre commission, Messieurs, vous propose, à l’unani- mité, l'admission de M. de Chaulnes. Cette lecture est suivie du scrutin secret, qui donne à M. de Chaulnes la très-grande majorité des suf- frages. M. le Président le proclame membre résidant. M. le Président donne ensuite lecture d’une lettre de M. Mauras, avocat, qui se présente aux suffrages de la Société avec un mémoire ayant pour titre : Recherches sur les insinuations laïques. L'examen de sa candi- dature est renvoyé à une commission composée de MM. Vinay, Marthory et Sauzet. A cinq heures, la séance est levée. Le Secrétaire , BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 1‘ MARS. SOMMAIRE. Doxs au Musée : Intérieur de la cathédrale de Sainte-Cécile d'Alby, de Dau- zat; intérieur de l’église de Saint-Etienne-du-Mont, accordés au Musée du Puy par Sa Majesté l'Empereur, à la demande de madame la marquise de Fay de Latour-Maubourg. — Liste des objets précieux que le Musée doit aux libé- ralités de la famille de Latour-Maubourg. — Lecture du procès-verbal de la dernière séance. — Hommage rendu à la mémoire de M. Marcel Odde du Villard, juge et membre résidant. — Drar ace : M. le Président fait savoir les raisons qui l'ont déterminé à désigner l'emplacement des communaux de Laroche. — Acnreurrure : Des moyens propres à désinfecter la vidange, au moyen du sulfate de fer. — Emploi de la chaux et son mélange avec les fu- miers. — Du plâtre répandu sur les terres après le pareage des moutons. — Hisroime et AncHéoLoGte : Rapport de M. Vinay sur la candidature de M. Mauras, avocat, dont l'admission est proclamée.— Des fouilles de Corsac, de leur occasion. — Rapport de M. Sarlandie sur les fouilles de Corsac. — Communication de M. Aymard sur des briques anciennes cannelées recueillies par M. C. Falcon; Opinion de M. de Payan-Dumoulin à ce sujet. — Des fouilles exécutées près de la plaine dite de Rome; Conjectures de M. Ay- mard à ce sujet. — Du diplôme de Charlemagne sur l'institution des cha- noines de pauperie. Présidence de M. Charles Calemard de Lafayette. Avant l'ouverture de la séance, la plupart des mem - bres se trouvent réunis dans la vaste salle du musée des tableaux. Ils y sont retenus quelque temps par TOME XXII. 5 66 RÉSUMÉ DES SÉANCES. l'examen d’un nouveau don fait par le Gouvernc- ment. Il consiste en d2ux grands tableaux d'intérieur d'église. Le Musée les doit à l'obligeance de madame la marquise de Latour-Maubourg, qui les a demandés à l'Empereur. L'un, peint par Dauzat, représente l’intérieur de la cathédrale de Sainte-Cécile d'AIBY ; l’autre, œuvre con - sciencieuse de Renoux, reproduit l’intérieur de l’église de Saint-Etienne-du-Mont. Ce dernier tableau, d’un mérite réel, avait été distingué par M. Vibert à l’expo- sition du Louvre de 1824. Depuis cette époque, il déco- rait une résidence impériale avec celui de Dauzat. C’est là une marque évidente de l'importance du don que nous devons aux généreuses sollicitations d’une famille envers laquelle notre ville est si redevable. Nous re- produisons la liste exacte de tous les objets précieux que le Musée doit aux libéralités ct aux suins de la famille de Latour-Maubourg. M. le Conservateur du Musée l’a publiée dans un dernier numéro de la Haute-Loire. En 1829 : Quatre Canopes en albâtre oriental, apportées de Constantinople et données par M. le marquis de Latour- Maubourg, ambassadeur. En 1852 : Portrait d'Henri IT, peinture du XVe siècle, donné par le même. En 1855 : Paysage, de Renoux, obtenu du Gouverne- ment par le même. — Dessin à la plume, d'Albert Durer, donné par madame la marquise de Latour-Maubourg. MARS. 67 En 4855 : Brique avec caractères cunéiformes, provenant des ruines de Babylone, donnée par M. de Latour-MaubBurg, ambassadeur. En 1856 : Milon de Crotone, groupe en bronze, d'après Puget, obtenu du Gouvernement. En 1857 : Réduction du Moïse, par Michel-Ange, bronze obtenu du Gouvernement. En 1845 : 1451 médailles en or, argent, billon, bronze, etc., données par M. de Latour-Maubourg qui en avait recueilli la plus grande partie à Cons'antinople. En 4847 : Momie égyplienne, donnée par le même. En 1850 : Canope en bois peint, apportée de Thèbes et donnée par M. Just de Latour-Maubourg. En 1852 : Le beau groupe en bronze du Centaure et du Lapithe, par Barye, obtenu du Gouvernement par M. le marquis de Latour-Maubourg, député actuel de la Haute- Loire. En 18535 : les moulages suivants : Diane à la biche, Faune portant un chevreau, Gladiateur. En 4854 : Vénus de Milo, Muse Polymnie, Diane de Gabies, Enfant à l'oie : deux crands bas-reliefs du Par- thénon ; vase de la villa Albani, vase de Benvenuto Cellini ; la Baigneuse, de notre célèbre Julien, et le marbre funé- raire taillé pour son tombeau, obtenus du Gouvernement par M. de Latour-Maubourg, député de la Haute-Loire, sur les indications de M. Aymard, notre collègue infatisable, qui fit les démarches nécessaires auprès de l'administration du Louvre : démarches gracieusement accueillies par M. de Longpérier, conservateur des statues, et surtout par M. le comte de Nieuwerkerke, directeur général des Musées im- périaux. 68 RÉSUMÉ DES SÉANCES. En 1855 : Deux vases étrusques et un magnifique collier en ofetivoire, donnés au Musée, conformément aux der- nières volontés de madame la marquise sa mère, par M. de Latour-Maubourg, député de la Haute-Loire. En 1856 : Un petit vase étrusque, provenant de Pom- peï, offert par le même. Cet objet fut donné par le roi de Naples à M. de Latour-Maubourg père, ambassadeur à Naples. En 1859 : Les deux tableaux mentionnés plus haut. A trois heures, la séance est ouverte. L'Assemblée est nombreuse et animée. — Le Secré- taire a la parole pour la lecture du procès-verbal de la dernière séance. I est adopté sans réclamation. Aussitôt après cette lecture, M. le Président n’oublie pas de rendre hommage à la mémoire d’un des mem- bres de la Société. Le 13 janvier dernier, M. Marcel Odde du Villard à été ravi à l’affection de sa famille. Il emporte dans la tombe l'estime et les regrets de ses collègues avec ceux de la ville tout entière. Il était né à Craponne, le 31 janvier 1789, d’une de ces anciennes familles chez qui les traditions d'honneur et de noblesse sont des titres d’une authenticité établie. A l'âge de vingt-sept ans, il était juge au tribunal civil du Puy; et depuis cette époque, jusqu'au moment de sa retraite, il est resté modeste, sans ambition, au milieu MARS. 69 des changements politiques, content de servir son pays dans des fonctions où l'étude, le désintéressement et l’abnégation tiennent pour ainsi dire lieu d'hono- raires. Aussi M. Odde du Villard, pendant tout le cours de sa carrière, a-t-il été aux yeux de ses concitoyens le modèle du magistrat modéré, juste, intègre. Chez M. du Villard, la connaissance de notre légis- lation était servié par un goût prononcé pour la litté- rature ancienne; il possédait à fond les auteurs latins, et jusque dans un âge avancé il était resté familier avec la langue de Cicéron et de Virgile. Sa bibliothèque est une des plus remarquables de ce pays par les éditions rares el précieuses qu’il collectionnait en bibliophile distingué. 11 laisse aussi un choix d'émaux, de gravures et de tableaux qui ne sont pas sans valeur. C'est surtout à l'étude de la botanique que M. du Villard aimait à consacrer les loisirs que lui laissaient ses fonctions ; il ne connaissait pas d’autres distrac- tions. Cet esprit droit et ferme s'était passionné pour ce côté de la nature qui offre tant d’attraits à la curio- sité. On sait quelles vives et pures jouissances la plante garde pour ceux qui aiment à surprendre ses secrets. Dans ce règne plein de mouvement et de vie où regarde inutilement le vulgaire, notre savant botaniste savait trouver chaque jour des motifs d’admiration. La dé- couverte de plüsieurs espèces nouvelles, dont il avait enrichi la flore du département, lui avait fait un nom parmi les naturalistes. La description qu'il en a donnée dans plusieurs mémoires estimés, publiés dans nos Annales, lui valurent le titre de membre de la Société générale des botanistes de France ; à l'Académie des 70 RÉSUMÉ DES SÉANCES. sciences on appréciait ses {ravaux et plusieurs savants étrangers venaient consulter son herbier. La mort de M. du Villard laisse dans nos rangs un vide difficile à combler. Membre de la Société depuis la fondation, il était un de nos vénérés doyens; dans ses travaux, dans son exactitude ct dans les conseils de sa vieille expérience la Société trouvait de précieuses ressources. Pourquoi faut-it qu’en aussi peu de temps tous ces biens nous aient été ravis sans pitié? mais à vrai dire ils ne le sont pas entièrement; car le passage d’un homme de bien qui a honoré sa vie par l'étude et par la pratique des vertus laisse toujours une trace lumineuse et féconde. Et déjà ses fils et ses neveux, dignes représentants de son nom, continuent les tra- ditions de talent et d'honneur qui sont depuis long- temps dans la famille du Villard. Ces sentiments, dont nous ne donnons que l'expres- sion affaiblie, sont partagés par l'Assemblée tout entière. Elle charge son Président d'être auprès de madame du Villard et de ses enfants l'interprète des vifs regrets qu'elle a ressentis de la perte d’un de ses membres les plus distingués et les plus utiles. Draxace. — Le procès-verbal de la dernière séance ayant appelé l’attention de la Société sur une expé- rience de drainage exécutée, sous ses auspices, par l'administration des ponts et chaussées, au moyen de fonds alloués par le Gouvernement, fournit à M. le Pré- sident, qui n'avait pu assister à cette séance, l'occas'on MARS. 71 de compléter ces renseignements par l'indication des motifs qui ont déterminé le choix de l'emplacement. D'abord M. Charles de Lafayette exprime son vif regret de n'avoir pu prendre part aux travaux de la Société dans les deux derniers mois. Il avait été retenu loin d'elle par le malheur si inopiné et si regrettable qui avait enlevé M. le général Carel, son oncle, à l’affec- tion des siens. Mais dans son absence et pendant son séjour à Paris, fidèle à l'esprit et aux traditions constantes de la So- ciélé, son Président n’a pas perdu de vue les intérèts du pays. Il a cu l'honneur d’être reçu dans plusieurs ministères. Auprès de Son Excellence le Ministre de l'Agriculture et des Travaux publies, M. Rouher, il a exposé, au point de vue de l'intérêt agricole de nos contrées, combien seraient utiles chez nous les che- mins de fer, et même quelles chances de bénéfice y trouveraient les compagnies par le transport des pro- duits de première nécessité dont la Haute-Loire rem- plit les marchés de Saint-Etienne. Pour revenir à la question du drainage, M. le Pré- sident, avant son départ, consulté par M. l'Ingénieur en chef sur le choix du terrain, avait exprimé le désir, au nom de la Société, que l'expérience se fit non loin du Puy, dans un des communaux de Saint-Christophe. La raison de ce choix est dans l'étendue considérable des terrains de cette espèce qu'on rencontre dans un grand nombre de localités de notre département. En ce moment, gâtés par les eaux stagnantes, ils ne pro- duisent que de maigres pâturages; tandis que, défri- chés et assainis par le drainage, ils donneraient de 72 RÉSUMÉ DES SÉANCES. belles récoltes qui se maintiendraient longtemps, grâce à l'énorme quantité de détritus végétaux accumulés à la surface depuis des siècles. AGRICULTURE. — Dans l'analyse des ouvrages reçus, M. le Président signale une lettre de M. Liébig, le sa- vant chimiste d'Allemagne, sur l'emploi d: la vidange et les moyens les plus propres à la désinfecter sans rien ôter à l'énergie de cette espèce d'engrais. I suffit de mèler dans les fosses quatre kilos de sulfate de fer par mètre cube de matières. Cette addition culève en- tièrement l'odeur et conserve à l’engrais les propriétés qui le font rechercher des agriculteurs. Ge procédé est entré dans la pratique dans plusieurs villes. C’est ainsi notamment qu'à Grenoble on a pu, en plein midi, nettoyer une maison dans le quartier populeux de la Halle, sans que personne se soit aperçu de lopéra- tion et en ait été incommodé. Au Puy même, dans les casernes, le génie militaire fait appliquer ce procédé avec un grand succès. Rien qu'au point de vue de l'hygiène et de la salubrité publique, ce procédé de- vrait être prescrit. Il préviendrait de graves accidents trop communs avec les moyens employés de nos jours. Le sulfate de fer n’est pas rare, ne coûte que 24 fr. les 100 kilos ou près de { fr. 25 c. la livre, et sa production pourrait devenir considérable à me- sure que l'emploi s’en répandrait. Le seul obstacle que ce procédé rencontre est celui qui, dans les pays peu éclairés, arrète à chaque mo- ment l'essor du progrès et entrave toute amélioration, MARS. 19 la routine, protégée dans l'espèce par cette opinion enracinée dans le publie, que le mélange du sulfate de fer te aux engrais leurs principes fécondants, tandis quele contraire arrive, ainsi que cela fut reconnu, après une discussion approfondie, il y a trois ans, au Congrès scientifique de Grenoble, dans la section d'agriculture, présidée par M. de Brive. On peut se servir, au lieu de sulfate de fer, d’autres substances qui, mélangées à propos, ajoutent à la va- leur des engrais. M. Ch. G. de Lafayette, dans sa ferme de Senilhac, fait usage de chaux, mais cet excipient si actif ne désinfecte pas aussi promptement et d’une facon aussi radicale. D'ailleurs, le mélange de la chaux avec les fumiers exige des précautions : il doit être fait avant leur prompte et rapide fermentation; autrement la chaux, au lieu de leur donner de l'énergie, hâte la décomposition et le dégagement des matières azotées qui perdent äinsi la plus grande partie de leur action fécondante. Telle est l'opinion de M. le Président, qui cependant fait un grand usage de chaux, mais avec les précautions voulues. Il recommande encore un autre procédé analogue, dont il croit pouvoir s’attribuer la première idée, et qui a obtenu l'entière approbation de l'inspecteur général de l’agriculture, M. Rendu, à l’époque de la visite des propriétés pour le concours de la prime d'honneur. .Ce procédé consiste à répandre du plâtre sur les terres après le parcage des moutons, lorsqu'on ne peut immé- diatement employer la charrue et enfouir lengrais. On conserve ainsi au parcage toute son énergie en pré- venant l'évaporation. RÉSUMÉ DES SÉANCES, Le: + Le Monileur des Comices fournit à M. le Président l’occasion de revenir sur un sujet qui est dans les préoccupations de la Société, celui de la comptabilité agricole. Il désirerait que les fermiers et les proprié- {aires pussent se rendre compte d’une manière quel- conque de leurs dépenses et de leurs recettes. Des cahiers imprimés avec des cadres qu'on n'aurait qu'à remplir au moyen de chiffres, et dans le modèle de ceux dont se servent les maïtresses de maison soi- gneuses de leur ménage, pourraient être d’une grande utilité dans une ferme. Ces questions ayant trait au premier de tous les arts, l'agriculture, discutées par MM. Bertrand de Doue, de Brive, Chouvon, le Président, excitent l'attention constante de l'Assemblée. HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE. — Après l'agriculture, l'his- toire locale et l'archéologie ont les honneurs de la séance. M. Vinay donne lecture d'un rapport sur la candi- dature de M. Alcide Mauras, avocat, dont l'admission a été proclamée immédiatement après le vote au scru- tin secret. MESSIEURS, Lorsqu’en 1816 le docteur Arnaud publiait son Histoire du Velay, pleine de faits et de renseignements utiles chronologiquement elassés, notre savant et laborieux compaltriole ne prévoyait pas que le sillon qu'il venait MARS. 75 d'entrouvrir serait un jour creusé plus profondément par une nouvelle génération ardente à interroger le passé, dési- reuse, comme lui, de faire connaître à tous ce petit pays, objet de nos constantes prédilections. Beaucoup d’entre vous se livrent à des études historiques qui, malgré leur variété, tendent néanmoins au même but. Chacun semble s'être divisé le travail. Les uns, archéolo- gues patients, interrogent Ics monuments, les bas-reliefs, les inscriptions, les médailles, déchirent peu à peu le voile épais que les siècles ont étendu sur la période celtique et . la période romaine daps nos contrées. Les autres, scrutant les chartes et les vieux manuscrits, en font ressortir les faits saillants de notre histoire locale et revendiquent éner- giquement la part prise par les habitants de nos montagnes dans les grands événements qui ont préparé notre unité nationale ; à eux appartient le récit de nos luttes sanglantes et des hommes qui les ont dirigées. À l’exemple d'Alexis Monteil, quelques autres, curieux de connaître les institu- tions et les mœurs de nos pères, s’attachent surtout à mettre au jour les documents qui nous font pénétrer dans la vie privée du seigneur féodal, du moine, du bourgeois des villes et de lhumble vassal des campagnes: prenant pour ainsi dire nos ancêtres sur le fait, ils nous transpor- tent au milieu de ces siècles de naïve croyance et de rude simplicité, si étrangers à la société moderne. Enfin, certains, nous a-t-on dit, préparent le récit des événements qui se sont passés dans ce pays vers la fin du XVIIe siècle. Cette partie de notre histoire, palpitante de souvenirs, aurait pu réveiller, il y a quelques années, des haines et des passions à demi éteintes, mais depuis lors les hommes et les gouvernements se sont succédé, les 4 76 RÉSUMÉ DES SÉANCES. nobles scrupules qui arrêtaient des cœurs généreux ont dû disparaitre, bientôt, nous l’espérons, cette lacune sera comblée. Chacun apportant sa pierre à l'édifice commun, un jour viendra, le vœu en a déjà été exprimé dans cette enceinte, où les divers matériaux, accumulés par de consciencieuses investigations, seront assez nombreux pour permettre à un esprit généralisateur d'écrire une histoire bien complète de notre pays depuis les temps les plus reculés jusqu’au XIXe siècle, Malheureusement les recherches sont longues, difficiles : il suffit de s'être occupé de la moindre question historique pour savoir combien d’embarras on rencontre sur sa route. Les parchemins, les chartes, les terriers, autrefois rangés avec soin dans les archives des châteaux, des couvents et des villes du diocèse, dans les greffes de nos cours de jus- tice, où sont-ils aujourd’hui ? Le vent révolutionnaire les a presque tous dispersés, ct une partie de ceux qui existent encore sont journellement détruits par des mains igno- rant{es. C'est done pour nous une bonne fortune de découvrir des sources nouvelles où nous pourrons puiser des rensei- unements précieux. A ee titre, Messieurs, le mémoire présenté par M. Aleide Mauras, qui sollicite lhenneur de jrendre part à vos tra- vaux comme membre résidant, mérite toutes vos sympa- thies. Une communication bienveillante a permis à M. Mauras le parcourir les registres d’insinuations laïques conservés dans les bureaux de Fenregistrement et des domaines ; plu- sieurs actes ont frappé son attention et il s’empresse de MARS. 11 vous signaler tout le parti qu'on pourra tirer, au point de vue historique, des importantes indications contenues dans ces registres. Ici, Messieurs, permettez-moi une légère excursion juri- dique. Avant 4791, l'insinuation était une sorte d’enregistre- ment, dans un registre particulier destiné à cet usage, des actes qui devaient être rendus publics, afin d'éviter toute surprise au préjudice de ceux qui n’en auraient pas eu connaissance. L'insinuation était en usage chez les Romains, diverses lois avaient exigé celle des donations. De plus, des actes reçus par les tabellions n’entrainant pas foi pleine et en- tière, on évitait l'embarras d'une vérification par témoins ou d’une comparaison d'écriture, en faisant volontairement insinuer et publier apud acta tous les contrats et testa- ments. L'insinuation se faisait à Rome et à Constantinople apud magistrum census, dans les provinces, devant les gouverneurs, qui avaient chacun près d'eux un scribe ap- pelé ab aclis seu acluarius, où bien devant les magistrats municipaux auxquels, pour la commodité du publie, on attribua ensuite le pouvoir de recevoir les actes. En France, l'insinuation des donations se pratiquait, dans les pays de droit écrit, conformément aux lois de Jus- tinien. Elle ne fut point usitée en pays coutumier jusqu’à l'ordonnance de François Ier, de 1559. Régularisée par l'ordonnance de Moulins de 4566 et par les déclarations de juillet 4566, mai 4645, et novem- bre 1690, cette matière fut réglémentée d’une manière plus spéciale par l’édit du mois de décembre 1705, appelé l’édit des insinuations laïques, et par la déclaration de 18 RÉSUMÉ DES SÉANCES. juillet 4704. La formalité de l’insinuation fut alors étendue à presque tous les actes translatifs de propriété en y joi- gnant les séparations de corps et d'habitation, les actes d'admission au bénéfice d'inventaire sans lettres, les actes par lesquels les père et mère mettaient leurs enfants hors de leur puissance, les lettres de réhabilitation, de noblesse et celles d’érection de roture en fief, ete. L'insinuation était indispensablement nécessaire pour la validité des donations et des substitutions, un très-petit nombre en était affranchi. L'insinuation des autres actes n'était que bursale, et la peine de la nullité n'avait pas lieu à leur égard ; l’absence de cette formalité n’entrainait alors qu'une ‘amende pécuniaire contre ceux qui l’avaient négligée. Dans l’origine, les insinuations se firent d’abord au greffe des bailliages et sénéchaussées royales où l'acte devait être rendu publie, mais comme les greffiers ordinaires se trou- aient trop distraits par ces insinuations, on établit des bureaux particuliers qui furent comme une annexe du greffe, et des grefliers particuliers pour les faire. L'insinuation ecclésiastique au contraire était celle qui se faisait au greffe de là juridiction ecclésiastique pour certains aûtes, tels que les provisions de bénéfices, les pro- visions d’official, de vice-gérant, de promoteur, les révo- cations de ces actes, ete. On ignore si ces registres ont été conservés au Puy. Le recueil des insinuations laïques décrit par M. Mauras est composé de 47 volumes in-folio ; il commence le 45 juillet 4704 et va sans interruption jusqu’au 15 février 47941. M. Mauras en a feuilleté quelques-uns ; à ses yeux, les plus importants de ces actes insinués sont, sans MARS, 19 contredit, les donations et testaments faits en faveur soit de l’'Hôtel-Dieu du Puy, soit du chapitre de Notre-Dame, soit de nos congrégalions religieuses ; du reste, je vais le laisser parler lui-même, vous jugerez mieux, Messieurs, le travail soumis à votre examen et l'esprit dans lequel il est conçu. Ainsi, après avoir relevé en entier, avec l’énumération des legs particuliers qu'il contient, le testament olographe de Monseigneur de la Roche-Aymon, évêque du Puy, insinué en 4721, par lequel le généreux prélat institue pour ses héritiers universels l'Hôpital-général (deux tiers de ses biens) et les Dames de la Charité du Bouillon (un tiers), M. Mauras continue en ces termes : « Je n'ai pu résister au plaisir de donner x extenso » une pièce qui gratiliait notre ville de sommes si impor- » tantes, et qui certainement met Monseigneur de la Roche- » Aymon au nombre des grands bienfaiteurs du Pur. » Javais d'autant plus intérêt à la conserver que je ne » trouve nulle part indiqué, comme cela arrive pour les » actes authentiques, le notaire chez lequel on doit déposer » le testament. » En énonçant les différents actes translatifs de pro- » priété qui se rencontrent dans les registres, j’indique le » profit que l’on pourrait en tirer pour l'étude de la modi- » fication de la propriété, ou tout au moins pour connaitre » quelques acquisitions de la ville, ainsi cette insinuation » que je trouve au registre n° 20, page 70 : « Reçu de MM. les consuls de la ville de Puy la somme » de quarante livres à-compte de linsinuation de Ja L » quittance d'amortissement par eux payé le 1 juillet S0 RÉSUMÉ DES SÉANCES. dernier pour raison de l'acquisition par eux faite de M. de Laval (?) au prix de 18,000 livres, d'une maison et jardin pour servir de caserne. » » Je ne fais qu’effleurer, en prenant presque au hasard, tous les documents importants qui se rencontrent à chaque page, et qui sont de précieux indices pour re- monter aux sources originales qui peuvent donner les renseignements complets sur des questions qui inté- ressent les arts ou les familles historiques au Velay. » Que de fois dans notre Musée du Puy n’est-on pas embarrassé pour attribuer à telle ou telle maison, tel ou tel sujet curieux, que rien cependant ne désigne comme devant lui appartenir. La maison de Polignac, par exemple, dont le luxe devait au moins égaler’la for- tune, a été pour les collectionneurs une riche mine qui n'est peut-être pas encore complètement épuisée. Com- bien d'objets ne lui attribue-t-on pas aussi sans preuve, qui ne lui ont jamais appartenu. » Dans le registre n° 29, page 99, je trouve une indica- tion qui nous met sur la voie d’un document précieux et qui pourra servir à élucider cette question : c’est l’in- ventaire des meubles du chäteau de Polignac et du chà- teau de Lavoüte. Cette indication est ainsi conçue : « Du 25 septembre 1756. » Inventaire des meubles et effets mobiliers délaissés aux châteaux de Polignac et Lavoûüte par dame Diane Adélaïde Zéphyrine Mazarine de Mancini, épouse de M. le vicomte de Polignae, fait pour la confirmation MARS. SI des droits de demoiselle Diane Louise Augustine de Polignac et M. Jules François Armand, et Auguste Apol- linaire Armand de Poligrac, ses trois enfants. Recu M. Assézat le 20 septembre 1756. Reçu pour tous droits > livres. » » Avec cette indication, je trouverai aux minutes de M. Assézat, notaire, cette pièce capitale que le temps ne m'a pas permis de consulter encore, et dans laqueile doit certainement se lire un dénombrement curieux du mobi- lier des Polignac, dénombrement dont tout le monde sentira l'importance. » Dans cet aperçu rapide, je n'ai voulu qu'indiquer sue- cinctement les richesses que l’on peut trouver dans le dépouillement des registres que la bienveillance de M. Poynot a mis à ma disposition. Je ne les ai en ma possession que depuis quelques jours, et déjà j'ai pu en comprendre le mérite ; ee sont des sources où de plus expérimentés, j'en suis certain, trouveront largement à butiner, où moi-même j'espère puiser encore beaucoup ; pour le moment, qu'il me suflise de soumettre à l'hono- rable Assemblée le fait seul de la recherche, heureux si, dans cette tentative, commencement de travaux plus considérables sur notre pays, elle veut bien voir et approuver les efforts du modeste travailleur qui ose briguer ses suffrages. » Prenons acte, Messieurs, de l'engagement de M. Mauras, qu'il porte sur un point ou sur un autre de notre histoire, cette intelligente activité, cet esprit de recherches et de saine critique dont il à fait preuve dans la rapide esquisse TOME XXII. 6 82 RÉSUMÉ DES SÉANCES. des registres des insinuations de la sénéchaussée du Puy, et la Société académique sera heureuse aussi de le compter au nombre de ses membres, Son mémoire est déjà un véri- table service rendu au pays. Votre commission est d'avis, à l'unanimité, de recevoir M. Mauras comme membre résidant. Ce rapport, accueilli avec une faveur marquée, est suivi d’une observation présentée par le Secrétaire et relative aux registres d’insinuations laïques qui ont fait l'objet du travail de M. Mauras. Déjà l’année der- nière, dit le Secrétaire, M. Aymard et lui en ayant obtenu la communication de l’obligeance de M. Poy- not, avaient fait prier M. le directeur de l’enregistre- ment de les sauver de l'arrêt qui les plaçait dans les papiers de rebut prochainement destinés à la vente. M. Juhellé, qui s'intéresse avec tant d'esprit et de goût à tout ce qui touche aux sciences et spécialement à l'histoire de notre pays, fit immédiatement les démar- ches nécessaires auprès de l'administration supérieure pour obtenir que ces documents du siècle passé res- tassent en dépôt dans les archives du bureau de l’enre- gistrement des actes de l'état civil. Ensuite est venue la lecture du rapport sur les fouilles de Corsac fait par M. Sarlandie et dont voici l'occasion. Dans la séance de janvier dernier, M. Vinay annonça à la Société une découverte bien capable d'émouvoir les savants archéologues ; il ne s'agissait de rien moins que de la mise au jour d’un cimetière MARS. S5 gallo-romain, par incinération, et d’une voie romaine d’une certaine importance, Une foule d'objets antiques, tels que tuiles à rebords, des anses, des parties d'am- phores, des clous à tête plate, des monnaies romaines, des fragments de poteries samiennes, des cendres car- bonisées, etc., trouvés après quelques défoncements, avaient, depuis plusieurs années, éveillé l'attention de M. Vinay père. M. Vinay fils, à l'intention de son père, et dans un sentiment de piété filiale autant que par amour de la science, a continué à fouiller le sol. Le 27 septembre 1859, il a fait pratiquer des tranchées d’un mètre de large sur un mètre ou deux de profon- deur, dans un sens parallèle au lit de la Loire. Ses travaux n’ont pas été perdus. D'abord les quatre cou- ches superposées qui constituent les voies romaines, ont été mises à nu, et sur les bords de cette antique route si solidement macadamisée, à côté de quelques substructions, se sont trouvées des sépultures tout-à- fait conformes aux descriptions que donne le savant abbé M. Cochet, dans son ouvrage de la Normandie souterraine. M. Vinay était évidemment sur les traces d'une découverte aussi considérable au moins que celles qui, chez nous, ont fait le renom des Mangon de Lalande, des Becdelièvre, ete. En fragments d'urnes funéraires, de poteries samiennes, M. Vinay possède déjà dans ses collections de quoi reconstituer plusieurs centaines cle vases antiques. Avec un désintéressement peu commun chez MM. les archéologues, il n'a pas voulu jouir seul de ses découvertes. Il a convié toutes les personnes de sa connaissance à venir y prendre part, ménageant aux nombreux visiteurs que sa 84 RÉSUMÉ DES SÉANCES. eracieuse hospitalité attire à sa propriété de Corsac des surprises nouvelles. A peine ces recherches avaient-elles commencé à produire quelques résultats, que M. Vinay, les plaçant sous le patronage de la Société, dont il est un des membres les plus actifs, demandait qu'une commission prise dans son sein voulüt bien se transporter sur le lieu des fouilles, afin d'en constater l'importance et l'authenticité. Le 5 janvier, la commission était nom- mée; elle se composait de MM. Aymard, Sauzet, de Payan-Dumoulin, Balme et Sarlandie, et peu de temps après, elle se trouvait réunie sur le terrain exploré. C'est en qualité de rapporteur de cette commission que M. Sarlandie se fait écouter pendant une heure avec une attention soutenue par l'auditoire en ce moment fort nombreux. MESSIEURS . Au nom de la commission nommée par vous, j'ai l'hon- neur de vous présenter le rapport que vous avez demandé sur les fouilles archéologiques que notre honorable col- lègue, M. Vinay, à récemment effectuées dans sa terre de Corsac. En acceptant cette délicate mission dont mon inexpé- rience est fort embarrassée, j'ai hâte de le dire, je me suis flatté que vos esprits bienveillants n’exigeraient de moi que le récit fidèle de ce que j'ai vu : j'ai donc cru pouvoir satisfaire votre légitime curiosité, quelque peu autorisé que je fusse à prendre la parole, comptant d'avance sur MARS. 82 l'indulgence de la Société comme sur les conseils éclairés des membres de la commission qui ont daigné me choisir pour rapporteur. Un autre doit venir après moi, qui, traitant cette ques- tion avec une autorité que je ne saurais donner à ma pa- role, satisfera complètement les esprits qui demandent plus qu'une narration. Vous n'ignorez pas, en effet, que M. Vinay prépare une monographie de la commune de Brives, et que son œuvre doit nécessairement contenir, élaborées avec le soin et le talent que nous avons déjà admirés, au sein de cette Assem- blée, dans un extrait anticipé relatif à ancienne léproserie de cette localité, les quelques questions que je ne fais qu'aborder ici. Ce rapport que je vous présente, n’est done qu'une sorte d’avant-propos destiné, je le répète, à satisfaire pour un moment votre légitime curiosité. Des découvertes archéologiques effectuées chez M. Vinay, il en est résulté pour nous ces deux convictions : 40 La confirmation de l'existence et de la direction d'une voie romaine venant du Puy, et dont notre savant collègue, M. l'abbé Sauzet, nous avait déja indiqué le parcours jus- qu'à Vienne (1). 20 L'existence d’un cimetière par incinération sur les bords de cette même voie, établi dans le voisinage de la Chartreuse de Villeneuve. Nous allons vous dire comment nous sommes arrivé à ces deux convictions. 1) Congres scientifique de France tenu au Puy en 1855, L. 1, p. 649. S6 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Mais tout d’abord, nous le déclarons, €’est après une étude attentive de quelques ouvrages d'archéologie, et sur- tout de ceux de l'abbé Cochet, dont le nom est bien connu dans la scicnee, que nous nous sommes hasardé à arrêter et à formuler notre opinion. Nos paroles, nous ne le perdrons pas de vue, sont im- puissantes à faire autorité, aussi nous appuierons-nous sur le témoignage de cet illustre archéologue, et aurons-nous le soin d'indiquer, chaque fois, la page où nous aurons puisé nos preuves où nos arguments. Dans la partie nord-ouest de sa propriété de Corsac (nom très-ancien et qu'on retrouve dans la légende chrétienne de saint Vosy, premier évêque du Puy), M. Vinay, en faisant défoncer le sol, avait remarqué que la pioche des ouvriers amenait à la surface une quantité considérable de briques à rebords, de fragments de poterie dite de Samos, et de débris divers qu'on devait forcément rapporter à une épo- que très-ancienne. Avant lui, son père avait déjà recueilli, outre de nom- breux fragments de ce genre, des médailles romaines et des cubes de grès tailles. Ces indices ne faisaient que confirmer en M. Vinay cette opinion que MM. de Lalande et Sauzet ne s'étaient point trompés, en mentionnant l'existence d’une voie romaine proche de la Chartreuse de Villeneuve, et sur les bords de laquelle avaient dû s’élevèr des constructions dont on retrouvait encore les débris. Mettant à profit les loisirs et les moyens que lui donne une grande et honorable fortune, et pour satisfaire au- tant son ardente curiosité que pour enrichir peut-être MARS. S7 d'éléments nouveaux sa monographie de Brives, M. Vinay résolut de fouiller avec méthode cette terre qui semblait conserver, ensevelis dans son sein, quelques mystères d’un antique passé. Au mois de décembre dernier, il a mis la main à l'œuvre. 200 mètres environ de tranchées ont été ouverts par lui sur une profondeur de deux et trois pieds et sur une lar- geur de 0,90 à 0,95 centimètres, et le résultat, hâtons- nous de le dire, à dépassé ses espérances. La commission que vous avez nommée (1) et dont j'ai eu l'honneur de faire partie, fut réellement surprise lors- qu'elle arriva à Corsac, de trouver déjà réunis en si grande quantité, ces documents matériels si divers, que labhé Cochet nomme Les chartiers des siècles, et qui attestent l'état avancé de la civilisation de notre pays à seize cents ou dix-huit cents ans de nous. Sur un billard recouvert d’un tapis, M. Vinay avait fait disposer, rangés avec autant de méthode que le temps l’avait permis, les divers produits des fouilles déjà exécu- tées, et qui sont en assez grand nombre pour constituer, selon nous, les preuves indubitables de lexistence d’un cimetière par incinération. C'est là, Messieurs, ce que nous allons, tout d’abord, chercher à vous démontrer. « Après la conquête romaine, et sous l'empire des (1) La commission était composée de MM. Aymard, vice-président de la Société ; l'abbé Sauzet, chanoine de la cathédrale ; de Payan-Dumoulin, prési- dent du tribunal civil; Balme, avocat; Sarlandie des Rieux, chef du cabinet du Préfet. — MM. Marthory et'de Vinols, également nommés membres de la com- mission, ne purent prendre part à sCs travaux. ss RÉSUMÉ DES SÉANCES. Césars, dit l'abbé Cochet (1), nous voyons apparaitre deux phases diverses et bien distinctes de sépultures : l'ineiné- ration et l’inhumation. » Cet usage de brüler les corps se prolongea jusqu'au règne de Constantin ; mais à partir de cette époque et jus- qu'a Augustule, c’est-à-dire pendant les deux derniers siècles de la domination romaine, qui disparut du Velay vers l'an 476, les Gallo-Romains revinrent à l’inhuma- tion. Comment donc se faisait, le plus généralement, et jus- qu'au IVe siècle environ de l’ère chrétienne, la cérémonie des funérailles dans la Gaule ? Comme toutes les pratiques religieuses, cet acte suprême s'accomplissait avec beaucoup de solennité. Après les ablutions et l'exposition, le corps, placé sur une litière, précédé des images des aïeux fixées à de lon- gues perches, et suivi de la foule des parents et des amis, était solennellement porté par les affranchis ou quatre mercenaires vers le lieu de la sépulture. « Ce lieu, dit Bâtissier dans son Arf monumental (2), était hors de la ville, » et (j'insiste sur ce point) proche de Fustrinum, c’est-à-dire de l’endroit où s'élevait le bûcher. Le bûcher funéraire était formé de bois très-inflammable et avait plus ou moins d’élévation, suivant le rang du dé- funt : on plaçait le corps sur sa partie supérieure ; les parents embrassaient une dernière fois le cadavre et 1) Des sépullures gauloises, romaines, franques et normandes, page 3441. 2) Page 303, édit. 1845. MARS. S9 allumaient le feu avec une torche en détournant la tête. Seylla, dit-on, est le premier qui, à Rome, ait été enseveli suivant ce mode de sépulture, venu de Ia Grèce. 7 On livrait en même temps aux flammes quelques objets qui avaient appartenu au défunt et qu’on savait lui avoir été plus particulièrement agréables. Après la crémation du corps, on éteignait le feu; on répandait du vin sur les charbons, et les plus proches parents recueillaient les os et les cendres qu'ils renfermaient dans une urne; cette urne était déposée dans une boîte en bois et ensevelie ainsi dans la terre. Mais, nous dit l'abbé Cochet (p. 559), si « toutes les na- tions du monde ont différé sur leur mode de sépultures, si les unes ont brülé les corps, si les autres les ont simple- ment rendus à la terre ; si on les a exposés sur les grands chemins ou enfouis dans les cavernes, cachés dans des catacombes ou sous des montagnes de pierres et de gigan- tesques pyramides, aucune d’eiles n’a oublié de placer, à côté des restes de ses pères, un vase de terre ou de verre dont nous cherchons aujourd’hui le sens et le mystère. » .…L'archéologie à beau étendre le domaine de ses re- cherches et de ses investigations, elle n’a pas encore réussi à rencontrer un coin du monde qui ait échappé à celte coutume, qu'on peut considérer comme une des premieres lois religieuses des peuples primitifs. » Elle à traversé les siècles avec la grande famille humaine... et il y a deux cents ans à peine que cette cou- tume à quitté le sol de la France. » Tout ce que nous possédons de plus beau et de mieux conservé des produits de l’art antique provient des tombeaux,.. car les vases qu'ils contenaient nous ont 90 RÉSUMÉ DES SÉANCES. rendu intacts les dépôts qui leur furent confiés par la piété superstitieuse des peuples. » Pendant les trois siècles que dura chez nous l'ustiop gréco-romaine, on peut dire que ce fut le règne exclusif de la céramique : pas une créature humaine ne descendit dans la terre sans un fragment de poterie. Les pauvres eux- mêmes, qui ne pouvaient trouver un vase dans leur réper- toire culinaire, emportaient avec eux, une simple tuile, et les enfants morts avant l’âge de sept ans et qu'on ne brülait point, gardaient leurs joujoux en terre ou en verre. » Aussi, que trouvons-nous à Corsac ? Suivant cette coutume universelle et constante de lem- pire romain, comme l’a dit l'abbé Cochet (p. 414), outre une quantité considérable de tuiles à rebords, nous avons vu plus de cinq cents fragments de poterie samienne ou de poterie moins fine, appartenant au moins à deux cents vases différents. Dans ce musée de céramique, si vite improvisé, et qui est destinée à s’accroître bien davantage encore, on dis- tingue des anses et des cous d’amphores, des boules de verre d’un bleu elair, qui portent avec une évidence indis- cutable les traces d’une fusion ignée ; des pierres dites de petit appareil romain ; certains objets en bronze, des mé- dailles romaines, des clous qui fixaient, dans l’origine, les planches des boîtes où les urnes étaient enfermées ; des dents de sangliers, des silex, une corne de cerf, et surtout, en grande quantité, adhérentes à des briques ou à des frag- ments de poterie, des cendres carbonisées mélées avec des os humains à demi consumés; enfin, comme je lai dit, tous ces documents que l'abbé Cochet appelle les chartiers MARS. M des siècles, et qui attestent évidemment l'existence, à Cor- sac, d’un cimetière par incinération. Entrons dans le détail, et, usant de la méthode de classe- ment adoptée par M. Vinay, suivons une à une les décou- vertes faites dans chaque sépulture. Durant les premiers jours, les recherches furent exécu- tées dans un terrain qui avait été évidemment fouillé, si l’on en juge par le désordre où se trouvaient les poteries qu'il renfermait. Cette partie du cimetière, ainsi que l’a fait remarquer M. Vinay, devait être la plus riche, car les poteries samiennes y sont très-nombreuses : une seule mé- daille, il est vrai, celle de Marc-Aurèle, y a été recueillie ; mais il est probable qu'il devait y en avoir bien d’autres, avant que ces cendres de nos pères n’eussent été violées pour satisfaire l’ardente cupidité de nos devanciers, plus destructive, on le sait, que l’action des siècles. Toutefois, cette idée d’un cimetière ne vint à M. Vinay que, lorsqu’en prolongeant ses tranchées, il fut arrivé vers un point où la pioche des ouvriers rencontra des débris carbonisés, con- stamment enfermés entre les parois brisées de poterie d’une remarquable finesse. Il redoubla alors de vigilance pour acquérir une certitude sur la nature inespérée de la fouille qu'il avait entreprise. Nous avons déjà dit qu'on était dans l'usage de brüler, en même temps que le défunt, quelques objets qui lui avaient appartenu et auxquels il avait été plus particulière- ment attaché. Ces objets étaient mis avee ses cendres dans une urne qu'on recouvrait d'une assiette : cette urne elle-même était enfermée dans une boite en bois de 0,70 à 0,80 centimètres sur chacune de ses surfaces et entourée d'une ferrure qui 92 RÉSUMÉ DES SÉANCES. les rattachait entre elles. (Nous avons découvert une do ces ferrures à Corsac.) Par-dessus cette boîte et en dessous d'elle, on étendait, dans la terre, une couche de sable qu’on recouvrait de briques ou de pierres plates. Mais on ne se bornait pas à enfermer seule l’urne conte- nant les débris carbonisés du défunt : la boîte qui devait la contenir recevait le plus souvent plusieurs autres vases : un laerymatoire, une urne pour les parfums, un autre vase destiné à recevoir du miel; quelquefois même on Y plaçait des assiettes chargées d'aliments. L'abbé Cochet nous apprend aussi que, bien souvent, les vieux vases étaient mis de préférence dans les sépul- tures (p. 46), et il appuie son opinion sur les marques d'usure qu’il a constatées à la partie inférieure d’un grand nombre de poteries. IL n'était pas rare aussi qu'on brisât, devant le bûcher où l’on allait placer le corps, la coupe qui avait plus par- ticulièrement servi au défunt. Cette coutume me rappelle la cérémonie du mariage des Bohémiens : après le bris d’un vase, vous le savez, les deux fiancés étaient indissolublement unis. Et qui sait si la destruction mystérieuse de ce vase chéri du défunt qu'on brisait sur l'ustrinum, à ce moment suprême, ne symbolisait pas chez les Romains, ce peuple au culte symbolique, Pindissolubie union qu'il contractait avec Ia mort ! Quoi qu'il en soit, Messieurs, e’est à ces divers carac- tères qu'on reconnait les cimetières par incinéraltion ; voyons, en détail, si les fouilles faites chez M. Vinay ne sont pas propres à entrainer, sur ce point, vos Convic- tions ? MARS. 95 Je vous lai dit : mon honorable collègue et ami a déjà pu réunir (et ses recherches commencent à peine) cinq ou six cents fragments de poterie qui devaient constituer plus de deux cents vases. Ces poteries, qui comprennent plusieurs variétés, nous ont paru pouvoir être rapportées à quatre espèces : La première comprend les poteries fines, dites de Samos: La deuxième, les poteries blanchâtres, dont la matière est assez semblable à la terre de pipe ; La troisième, les poteries noires, qui étaient certaine- ment employées pour les usages grossiers du ménage : La quatrième comprend les poteries rouges qui consti- tuent les briques à rebords et les grandes amphores. Les poteries de la première espèce, connues sous le nom de poteries samiennes, sont à peu près semblables à celles qui ont été découvertes à Toulon (Allier) dans l'atelier même de céramique où elles étaient fabriquées, et sur lequel un de nos honorables collègues, M. de Payan- Dumoulin, nous à déjà donné des renseignements si pleins d'intérêt. Elles sont excessivement fines et conservent encore leur vernis primitif : le long des bords courent des guirlandes, des rinceaux, des feuillages ornés d'oiseaux. Mais ce qui nous à le plus vivement intéressé, ce sont les lettres que nous avons lues sur certains de ces fragments et qui consti- tuent la marque de fabrique. De nos jours aussi, nos porcelaines et nos faïences por- tent des estampilles gravées sur leur surface inférieure, qui indiquent le nom du lieu où elles ont été faites ou de leur fabricant; en était-il de même chez les Gallo-Romains, et les noms tronqués que nous lisons sur cinq des fragments 94 RÉSUMÉ DES SÉANCES. de poterie samienne découverts chez M. Vinay, sont-ils des noms de ville ou des noms de potiers ? Sur un premier fragment, nous voyons, écrit en capitales romaines : NIS Une malencontreuse cassure a coupé ce morceau de po- terie et le nom qu’elle porte, comme pour en faire une énigme qu'on est involontairement tenté de résoudre par un nom de lieu. Ce secret désir trouve encore à se donner carrière sur un autre fragment qui porte l’estampille AI à sorte d’anagramme formé de lettres conjointes, qu’on peut lire Avi ou Ani. On se prend, dis-je, d’une certaine tentation lorsqu'on lit ces caractères, surtout lorsqu'on se souvient que le nom de ville Alesia s’est trouvé à Alaise, dans les environs de Besançon, sur un fragment de poterie romaine (1). Sans doute, et l'abbé Cochet nous l’apprend, les potiers latins avaient l'habitude de signer leurs ouvrages ou d’in- diquer le nom de leur fabrique. Nous en voyons même la A) Ce fragment est conservé au musée de Besancon. MARS. 95 preuve dans deux autres fragments qui portent les estam- pilles : ee USFE (uusifecit.) ....IOFE (#2: .40) feeil:) Le dernier porte AIRA ou AIBA. Quoi qu'il en soit, nous croyons ne pas devoir formuler ici d'opinion à ce sujet, de peur de prendre le Pirée pour un nom d'homme, ou réciproquement ; peut-être notre honorable collègue et ami, M. Vinay, sera-t-il assez heu- reux pour découvrir de nouveaux fragments dont l’estam- pille complète lui permettra d’élucider cette importante question. : La seconde espèce de poterie découverte est faite d’une terre blanchâtre qui, je l'ai dit, est à peu près semblable à la terre de pipe : elle comprend plusieurs variétés, en gé- néral moins fines que la poterie samienne, mais qui cepen- dant se produisent sous la forme de vases très-élégants, si l’on en juge par plusieurs fragments et surtout par des anses à côtes très-bien conservées et sur lesquelles on voit un très-grand luxe d’ornementation. Quant à la poterie noire, qui est la plus nombreuse, et dont la couleur lui vient, au dire de Brongniart, du charbon qui entre dans sa composition ; elle constitue des vases communs qui devaient évidemment servir aux usages gros- siers du ménage. Tous ces fragments, je vous l’ai dit, ont été trouvés dans la partie antérieurement fouillée du cimetière : ils ont été 96 RÉSUMÉ DES SÉANCES. retirés des tranchées pêle-mêle avec des débris divers et mélangés avec des cendres carbonisées. Mais quand on fut parvenu au milieu de sépultures intactes, M. Vinay, redou- blant de soin, donna l’ordre aux ouvriers de placer dans des paniers séparés les débris découverts dans chacune d'elles. Pour ne pas abuser de vos moments, je vais donner ici l'inventaire rapide des fragments découverts dans les di- verses tombes : MM. les membres de la commission ont assisté à l'ouverture de quelques-unes : les deux dernières surtout, si intéressantes par leurs résultats, ont été ou- vertes dans des conditions que j'aurai l'honneur de vous faire connaître plus loin. Dans une première sépulture, au-dessous d’un lit de gravier et entouré de briques à rebords, on a découvert les fragments d'un vase très-riche, en poterie samienne, ren- fermant entre ses parois brisées des cendres carbonisées, des fragments de charbon et un os de carnassier. Une autre tombe a été ouverte, qui, croyons-nous, ne devait point appartenir à une personne riche, si lon en juge par la poterie grossière qu’elle renfermait, et qui adhère encore à des cendres et à des os à demi consumés. Dans une autre sépulture, ouverte en présence des mem- bres de la commission, outre des cendres et des fragments de poterie samienne, la pioche des ouvriers à amené au jour un fragment de bois de cerf (andouillet) assez bien conservé, de la longueur de 0,20 à 0,25 centimètres. Ce n’est pas la premiere fois que cet objet se trouve, en France, dans des sépultures antiques : M. l'abbé Cochet nous l’a signalé dans ses ouvrages, et, chose remarquable, les fouilles de M. Vinay viennent confirmer les prévisions MARS: 97 de ce savant archéologue, contenues dans le passage sui- vant (p. 20): € I paraitrait bien, dit-il, que l'usage d’inhumer un bois de cerf avec les morts n’était pas seulement pratiqué à l’époque franque ou saxonne, comme le prouve le bois trouvé à Envermen en 4851 (et qui était parfaitement con- servé, quoiqu'il eût mille à douze cents ans d’enfouisse- ment), et celui de Dale-Pare en Angleterre, découvert en 1810. Cette coutume avait une origine plus ancienne, puisque nous la retrouvons jusque chez les Gaulois. Nous n'en connaissons pas d'exemple à la période romaine, mais je ne serais nullement surpris d'apprendre qu'il en à été rencontré quelque part. » Les prévisions de M. l'abbé Cochet se sont réalisées deux fois dans la Haute-Loire : une première fois dans les fouilles faites à l’Arbouisset, commune d’Espaly, et relatées par M. Aymard; on découvrit, en effet, une triple sépul- ture par inhumation du temps de Constantin (elle renfer- mait entre autres une médaille de cet empereur), et à côté des trois squelettes en débris on recueillit des morceaux de corne de cerf. A Corsac, je viens de vous le dire, une corne de cerf a également été trouvée, en présence des membres de la commission, au milieu de sépultures par incinération dont la date, déjà indiquée par l'histoire, le sera encore surabon- damment par des médailles. Du reste, M. l'abbé Cochet signale avec raison cette cou- tume d’ensevelir des cornes de cerf avec les sépultures humaines, comme ayant une origine très-ancienne. Dans le IVe livre d’Ossian, ce barde du IIIe siècle qui représente l’ancienne poésie du Nord, comme Homère TOME XXII. 7 98 RÉSUMÉ DES SÉANCES personnifie la poésie des temps épiques de la Grèce, nous lisons ces paroles du héros à son fils Oscar, à qui il donne ses dernières volontés : « Le premier et le plus sanglant dans la mélée, mon bras doit t'apprendre à combattre ; mais si je meurs, sou- viens-toi, mon fils, de placer cette épée, cet are et le bois de mon cerf dans cette étroite et sombre demeure que marque une pierre grisatre! » Cette coutume, on le voit, si fort répandue vers les commencements de notre ère, et qu'Ossian, ce barde inspiré des peuplades druidiques de l’Ecosse, recommande à son fils, était, à peu près à la même époque, fidèlement suivie dans nos montagnes ! D'où vient ceci? d’où vient ce silex, cet autre symbole gaulois, découvert également chez M. Vinay dans une autre sépulture, et qui nous met en mémoire ces trois exhuma- tions gauloises faites au Breuil en 4849, dans le jardin de notre Société, et qui amenèrent la découverte de plusieurs autres silex semblables (1)! Ah! Messieurs, les druides étaient tout-puissants alors, chez les Vélaunes, et peut-être reste-t-il dans les tombeaux de nos pères que nous interrogeons aujourd'hui, comme dans certaines traditions locales mal interprétées, les traces de leur puissance et du culte mystérieux qu'ils leur avaient imposé ! Une autre tombe a fourni, outre les fragments habituels de poterie et de tuiles à rebords, un verre coloré en bleu (1) Annales de la Société académique du Puy, t. XIV, p. 97. Notice et dessin par M. Aymard. MARS. 99 clair qui a été évidemment fondu par le feu, ainsi qu'un moule à filet en bronze ; une médaille d’Antonin s’y trou- vait également, mélangée à des débris carbonisés, et dans un état satisfaisant de conservation. Voila donc déja deux médailles découvertes : une de Marc-Aurèle, l’autre d’Antonin, c’est-à-dire des deux em- pereurs sous le règne desquels l’histoire place l'apogée de la civilisation romaine dans les Gaules, la Bretagne et la Germanie. Vous n'ignorez pas, Messieurs, à quelle idée religieuse des anciens il faut rapporter la présence des médailles dans les sépultures : l’obole grecque, comme Ja médaille romaine, était, vous le savez, le prix du passage que chaque mort devait donner à Caron, le sombre nautonnier des enfers. D'ordinaire, c'était la médaille du prince régnant qui était déposée dans les tombeaux. M. Vinay à encore été assez heureux pour recueillir à Corsac deux autres médailles dans des circonstances qui ajoutent à leur valeur, et que je crois utile de vous faire connaitre. Après la première visite de la commission à Corsae, M. le Préfet de la Haute-Loire, ayant entendu parler des découvertes effectuées, manifesta le désir de se rendre sur les lieux. M. Vinay s’empressa d'inviter quelques amis de l'archéologie à s’adjoindre à notre premier magistrat, et il leur offrit à Corsac une hospitalité des plus gracieuses et surtout des plus intéressantes. M. de Payan-Dumoulin, M. le Directeur de l’enregistre- ment, notre honorable Vice-Président, M. Paul Le Blanc, bibliothécaire de Brioude, et le rapporteur de votre com- mission composaient cette réunion. 400 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Après avoir visité en détail les divers fragments réunis dans la salle du billard, ces Messieurs se rendirent sur les lieux : les ouvriers se mirent à l’œuvre et retirèrent du sol, comme la commission l'avait déjà vu faire, de nombreux fragments de poterie samienne et de tuiles à rebords. Toutefois, les résultats ne répondaient point aux désirs plus exigeants des visiteurs. Une ou deux sépultures furent ouvertes, mais n’amenèrent rien de nouveau. Enfin, M. Paul Le Blanc descendit dans la tranchée, et, après avoir enlevé une couche de terre, il sentit sous sa pioche une résis- tance. Elle provenait d’une large pierre de grès de la Char- treuse, qui fut bientôt soulevée et qui se fendit en deux portions dans le sens de sa largeur, laissant voir dans son intérieur un grain jaunâtre, évidemment désagrégé par l'infiltration de l’eau ; au-dessous de cette pierre apparu- rent, sous une couche de grès, des fragments d’un beau vase en terre blanchâtre qui avait dû contenir, avant que l’affaissement ne l’eût écrasé, les cendres carbonisées qui se montraient entre ses parois ; nous trouvàmes en outre, dans cette sépulture, un fragment de verre fondu et une dent de sanglier proche d’un point verdâtre qui arrêta tout d’abord nos regards ! M. Paul Le Blanc y porta subitement la main et en retira une médaille qui, sous l’oxydation dont elle était recouverte, laissa apparaître les insignes de la colonie de Nîmes. Je n'insisterai pas davantage sur ce point; vous com- prendrez facilement, Messieurs, quelle importance acquiert une découverte de ce genre, faite de nos propres mains, et en présence de témoins aussi respectables. MARS. 101 Après le départ de M. le Préfet, M. Juhellé et M. Paul Le Blanc, accompagnés de M. Vinay, revinrent sur les lieux et ils recucillirent encore, dans une nouvelle sépulture, la moitié d’une autre médaille de la colonie de Nimes qu’on avait coupée volontairement; circonstance qui s’est déjà produite ailleurs et que M, l'abbé Cochet a signalée dans un de ses ouvrages. Emporté par l'attrait de mon sujet, je le vois, Messieurs, j'abuse de votre patience : aussi vais-je tout simplement conclure qu'en présence des résultats produits par les fouilles de Corsac, il est impossible de ne pas admettre l'existence d’un cimetière gallo-romain par incinération, Il me reste maintenant à établir que la voie romaine signalée par M. labbé Sauzet venait bien, en sortant du Puy, traverser la Loire, comme cet archéologue nous l’ap- prend, à peu près dans la direction du pont actuel de Ia Chartreuse de Villeneuve (1). « C’est sur les bords des voies, dit l'abbé Cochet (p. 107), que l’on à toujours rencontré les sépultures antiques, sur- tout les incinérations. » C'était, en effet, un usage constant chez les Romains, afin, dit Varron, « que les passants pussent lire les éloges des morts et se rappeler fréquemment qu'eux aussi étaient mortels! (2). » Les Romains, vous le savez, Messieurs, pour assurer leur universelle domination, faisaient exécuter par leurs légions, et surtout par les peuples domptés, d'immenses . (1) Congrès scientifique de France, 2X session, {. 1, p. 631. (2) Linqu& latinä, t. vr. 402 RÉSUMÉ DES SÉANCES. voies de communication destinées, chez nous, moins à desservir ces huit cents villes de la Gaule, dont parle Plutarque dans sa Vie de Jules César, qu’à relier entre eux des centres militaires. Bergier nous apprend qu'on doit estimer à trente-quatre mille lieues environ la longueur des voies construites par les Romains en Europe, en Afrique et jusque sur les bords de l’'Euphrate, en Asie-Mineure. « La construction et la réparation des routes, dit Bâtis- sier, était regardée comme un fait assez important pour qu’on en conservât le souvenir sur des médailles : les em- ployés romains des ponts et chaussées se nommaient les Curatores viarum, et leur charge était regardée comme une haute dignité, car Dion nous apprend que le peuple voulut faire honneur à César en lui conférant le titre de Curator. » César, en effet, avait fait sillonner de routes l’intérieur de Italie ; après lui, Auguste entreprit de les prolonger jusque dans les provinces et confia, en Gaule, l'exécution de ces grands travaux à son gendre Agrippa. Quatre grandes voies furent donc construites à partir de Lyon, métropole stratégique, où l’on plaça, comme à Rome, une colonne milliaire dorée, à partir de laquelle étaient comptées les distances. On arrivait d'Italie à cette ville par le val d’Aoste, à tra- vers les Alpes. La première de ces grandes voies conduisait dans lAqui- taine : elle passait dans le pays des Ségusiens où elle se bifurquait, formant un premier embranchement qui se dirigeait vers l'Auvergne ; l’autre traversait notre pays, comme l'indique la carte de Peutinger. MARS. 105 La deuxième voie conduisait au Rhin, près de l’embou- chure de la Meuse; la troisième à Laon, par la Bourgogne et la Picardie; la quatrième à Marseille, par Narbonne. Ces différentes voies se reliaient entre elles pour former le premier et le plus ancien réseau indiqué par la carte de Peutinger. Dans notre département, M. l'abbé Sauzet a signalé la direction d'une voie postérieure à ce premier réseau, ve- nant de Vienne au Puy et aboutissant de là à Saint-Paulien, station militaire sur la grande voie de l’Aquitaine ; les fouilles effectuées chez M. Vinay sont encore venues donner raison à son opinion. En effet, en prolongeant ses tranchées vers le chemin de la Chartreuse-Villeneuve, notre honorable collègue ne fut pas surpris de mettre au jour une voie romaine, avec ses trois couches (s{atumen, rudus et nucleus) parfaitement accusées. Vous n'ignorez pas, Messieurs, le procédé employé par le$ Romains pour établir leurs voies importantes. € On indiquait d’abord, dit Bâtissier, la largeur de la chaussée par deux sillons parallèles et on enlevait le ter- rain meuble compris entre ces deux sillons jusqu'au sol résistant. Si celui-ci n'offrait pas un lit assez solide, on le battait avec des pilons ferrés, et on établissait ensuite sur lui la première couche du chemin, nommée séatumen : elle se composait de pierres, de moëllons plus ou moins volumineux, posés à plat, noyés dans du mortier, mais le plus souvent rangés à see les uns à côté des autres. » Le second lit, rudus, était un blocage de petites pierres concassées et mélées avec deux parties de chaux contre cinq de pierrailles; le troisième lit, aucleus, était un 404 RÉSUMÉ DES SÉANCES. mélange de gravier et de chaux, battu avec des tuiles concassées et de la terre franche. Toutefois, ce mode de construction n’était pas exactement le même dans tous les pays, et en faisant ces routes, les Romains obéissaient autant à leur caprice qu'a la nécessité, soit dans le choix des matériaux, soit dans les dispositions des couches. » Sur le nucleus était placée la summa crusla, composée de pierres généralement taillées en coin, avec une surface supérieure carrée et aplatie, à peu près comme les pavés de Paris, et sur laquelle s’effectuait la circulation. » Tous ces caractères constitutifs des voies romaines, à part quelques légères modifications nécessitées par les cir- constances locales, nous les retrouvons dans les fouilles de Corsac : les trois couches sont d'autant mieux accusées et distinctes, qu’elles traversent un terrain noirâtre complè- tement dépourvu de pierres. Le sammum dorsum, il est vrai, a disparu, paree qu'il offrait des grès tout taillés qui ont dù plus tard être enlevés comme très-propres aux constructions ; mais dans les deux ou trois tranchées faites sur la voie, M. Vinay à pu re- cueillir huit de ces pierres, c’est-à-dire des cubes presque réguliers, à face supérieure aplatie, d’une longueur de 0,20 à 0,25 centimètres. La voie, qui a été recouverte par l’action du temps et de l’agriculture, se dirige vers le pont de la Chartreuse, et elle est à deux pieds environ en-dessous de la surface du sol. Tels sont, Messieurs, les renseignements que j'avais à vous présenter. Je les résume : Près d’une voie romaine qui, venant de l’autre côté de la Loire, traversait le fleuve, comme nous l'ont dit MM. de MARS. 405 Lalande et l'abbé Sauzet, à l'endroit même où est aujour- d'hui le pont de la Chartreuse (bâti, comme ils l'ont dit, sur des fondements d’origine romaine), nous trouvons un cimetière par incinération qui se présente à nous avec ses caractères indiscutables. Eh ! Messieurs, ce que les fouilles de Corsac viennent de nous apprendre, voyez, la tradition nous l'avait déjà transmis, sous la forme d’une énigme, il est vrai, dont nous trouvons aujourd’hui la solution. En effet, la voie romaine, vous le savez, arrivait au Puy en passant à Bellevue, c’est-à-dire près des men-hirs qu’on nomme les 7rois-Pierres ; elle suivait l’ancienne route de Lyon et traversait le Dolaison sur un pont, dont le nom très-anciennement connu dans nos vieux titres, ne va pas vous surprendre, maintenant que vous connaissez le cime- tière par éncinération placé sur les bords de cette voie : ee pont se nommait le Pont-des-Cendres! (4) Ah! Messieurs, quelques personnes ont douté que notre cité ait eu de l'importance avant l'introduction du christia- nisme dans nos montagnes ; mais si le Puy ne fut pas connu sous la période romaine (et je suis de ceux qui croient le contraire, en présence surtout de ces nouvelles découvertes), on voudra bien me eoncéder que les Gallo- Romains sont au moins à nos portes ! (2) Il y à quelques années, c'était à Espaly qu’on décou- vrait une immense villa romaine ; aux Rioux, commune de (1) Mémoire sur les Origines de la ville du Puy [Congrès scientifique de France, 1855, t. 1. p. 640). (2) Les deux derniers paragraphes qui suivent n'ont été lus ni à là commis- sion, ni à la séance de la Société : le rapporteur a cru pouvoir les insérer 1ci, sous sa seule responsabilité, pour mieux faire connaître sa pensée. 106 RÉSUMÉ DES SÉANCES Taulhac, nous avons trouvé des substructions, des briques à rebords, des fragments de statues; hier, nous faisions sortir du sol qui les recelait, des sépultures du Ile ou Ille siècle ; aujourd’hui, nous exhumons de nouveaux ves- tiges romains, au-dessous de {a plaine de Rome, nom assez significatif, on me l’accordera. Peu à peu, la ville du Puy, dont l'antiquité est attestée par des documents lapidaires si nombreux et si divers, trouvés dans son sein et déposés à quelques pas d'ici, dans le Musée, la ville du Puy, dis-je, est resserrée dans un cordon de découvertes qui nous autorisent à vous dire ceci : Oui, l'artiste Bozio a eu raison de donner à la statue qui, sur la fontaine Crozatier, représente notre chère cité, les insignes des villes romaines, car, comme on l’a déja dit, il n’a fait que rendre à César ce qui lui appartient ! Aperiam vestra sepulcra, et educam vos e sepulcris vestris, dit Ezéchiel ; aussi, vous le voyez, suivant les pa- roles du prophète, nous avons tiré des tombeaux d’utiles enseignements, et, nous l’espérons, nous le désirons même de tous nos vœux, un jour prochain va venir où, sous ce mont Anis, il nous sera encore donné d'interroger d’autres sépultures que le sol recèle, de nouvelles chartes lapidaires que nos yeux voient ou que nos intelligences devinent, et qui entraineront, en faveur de nos antiques origines, les opinions même les plus rebelles ! Je n'arrête, Messieurs : aussi bien aifje trop longtemps abusé de votre bienveillance. Mais avant, qu'il me soit encore permis de soumettre une proposition à la Société. Elle n'ignore pas qu'un travail, commandé par l'Empe- reur, s'effectue depuis deux ans, qui doit établir exacte- ment la topographie de la Gaule : à notre avis, les fouilles MARS. 407 faites par M. Vinay constituent des éléments de ce travail officiel. Au nom de la commission, je demande donc que la So- ciété, après avoir vivement remercié M. Vinay de son dé- voüment éclairé aux intérêts de la science, veuille bien informer M. le Préfet de la Haute-Loire des fouilles archéo- Jogiques effectuées à Corsac ; qu’elle appelle spécialement son attention sur cette voie romaine qu'il a mise à décou- vert ; qu'elle prie notre premier magistrat, dont nous connaissons tous les vives sympathies pour les arts, de solliciter du Ministre d'Etat un secours suffisant pour con- tinuer des recherches qu'un de nous à commencées et qui sont de nature à fournir d’utiles éléments à la science et, par suite, au travail officiel entrepris par ordre de l'Em- pereur ! M. le Président félicite M. Sarlandie au nom de la Société, et, à l’unanimité, l'Assemblée, adoptant les conclusions de M. le rapporteur, charge M. le Président de transmettre le rapport à M. le Préfet et de le prier de vouloir bien solliciter auprès du Ministre d'Etat un secours suffisant pour continuer efficacement les fouilles entreprises par M. Vinay. Après la lecture du rapport de M. Sarlandie sur les fouilles de Corsac, M. Aymard obtient la parole pour plusieurs communications. M. Aymard avait déposé sur le bureau, avant l'ou- verture de la séance, plusieurs briques fort anciennes, lrès-curieuses par les traits si variés dont elles sont 108 RÉSUMÉ DES SÉANCES. creusées. Extraites du sol, tout près du village de Saint- Georges-Lagricol, elles ont été recueillies par M. César Falcon qui, dans ses voyages dans le département, ne néglige aucune occasion de faire des recherches utiles à l’histoire et à l'archéologie. M. Aymard est d'avis que les différentes lignes dont ces briques étaient rayées servaient dans les bâtisses à leur donner plus d'adhésion. On en fabriquait aussi des tuyaux de cha- leur de forme carrée. A l'appui de cette opinion, M. de Payan-Dumoulin fait savoir qu'à Bourbon-l'Archam- bault, où l’on a reconnu des traces évidentes de bains romains, des fouilles ont mis à découvert des briques de dimension considérable, de deux à trois pieds de longueur, striées comme celles de Saint-Georges-Lagri- col, avec des dessins divers, tels que serpents, triangles, losanges, cercles, ovales, etc. Elles étaient solidement encastrées dans la maçonnerie à cause de ces rayures et formaient des tuyaux de conduite communiquant avec l’hypocauste, espèce de foyer souterrain, de calo- rifère, d’où la chaleur se répandait dans les étuves. M. de Fayan-Dumoulin offre de faire venir un échan- tillon de ces briques pour les collections archéologi- ques de notre Musée. La Société remercie M. de Payan-Dumoulin par l’or- gane de son Président et accepte l'offre qui lui est faite. Une autre communication porte encore sur une dé- couverte d’antiquités faite aux environs de la ville du Puy, dont M. Aymard a fait dresser un procès-verbal qu'il dépose sur le bureau avec plusieurs objets, tels que tuiles à rebords, tuiles convexes, fragments de MARS. 1409 poteries, ete. Dans un champ situé sur le territoire de la commune de Cheyrac, à proximité de la plaine dite de Rome (dénomination significative), les travaux de culture ont mis à jour des substructions assez consi- dérables par l'épaisseur et l'étendue de la maçonnerie. De nombreux fragments de tuiles plates à rebords, de tuiles convexes et des morceaux de poteries diverses mélés à des os d'animaux domestiques, ne laissent aucun doute sur l’ancienneté de ces bâtisses. M. Ay- mard, d’après l'inspection des lieux, exprime l'opinion que ces murailles auraient fait partie d’un ensemble de bâtiments plus ou moins vastes, si l’on en croit les cultivateurs qui assurent avoir trouvé, dans le sol des champs voisins, des substructions analogues. Aucun souvenir n'est resté dans la localité relative- ment à l’époque où ces bâtiments auraient été ruinés. On peut présumer seulement une destruction par le feu, d’après la présence de nombreuses parcelles de charbon de bois qui sont enfouies et mêèlées avec les débris de tuiles. Peut-être avons-nous ici un nouvel exemple de ces dévastations générales qu'amenèrent, aux IVe et Ve siè- cles, les invasions des barbares, et dont la riche vallée du Puy n'aurait pas été exempte comme l'ont fait sup- poser déjà les ruines du palais gallo-romain d'Espaly. Le mème membre annonce, en finissant, qu'il solli- citera, auprès du propriétaire du champ, l'autorisation de faire des fouilles suivies et qu'il en rendra compte à la Société. En attendant, il engage ses collègues à visiter ce point intéressant de la topographie archéolo- gique des environs du Puy. 410 RÉSUMÉ DES SÉANCES. M. Aymard donne ensuite communication d'un mé- moire ou factum imprimé qui est intitulé : Titre d'établissement des chanoines de pauperie ou copie et vérification d'un diplôme original de Charlemagne portant création de dix chanoines pauvres dans l'église cathédrale de Notre-Dame du Puy, brochure in-4° de 17 pages, qui porte à la fin de la dernière la signature Piales, de l’auteur du mémoire. Cet imprimé, aujourd'hui très-rare, appartient à la Société, et a été signalé par M. l'abbé Sauzet dans sa Bibliographie du département de la Haute-Loire. 1] contient la copie d’un diplôme en latin, attribué à Charlemagne, et par lequel cet empereur aurait institué dix chanoines dits de pauperie, dans l’église cathédrale du Puy. Cette copie est la plus ancienne que l’on con- naisse ; car avant 1766, aucun de nos chroniqueurs et historiens n'avait reproduit, ni même cité le fameux diplôme. M. Mandet est le premier qui l'ait de nouveau publié en 1842, dans ses Documents relatifs à l'histoire du Velay, et en 1846, dans l'Ancien Velay. Le savant auteur de ces ouvrages a contesté l'authenticité du diplôme et il semblerait aussi que l’apparition de cette pièce, à la suite d’un procès des chanoines de pauperie contre le chapitre, n'aurait pas inspiré une grande confiance, car le diplôme fut envoyé à Paris pour être soumis à l'examen des connaisseurs, ce qui motiva un essai de vérification contenu aussi dans le factum. Cette pièce est suivie d’une délibération également en latin, du chapitre du Puy, datée du 11 juillet 1194, qui mentionne le même diplôme, avec ces mots : Ex- tractum ex arce capituli aniciensis, mais le mémoire MARS. 411 ne dit pas que l'authenticité de cette seconde pièce ait été vérifiée. Le factum est terminé par l'avis de l'auteur, le juris- consulte Piales, seul signataire de l'écrit, sur diverses questions de droit posées dans un mémoire des cha- noines de pauperie ayant pour titre : Instruction abre- gée de la manière dont l'office se célèbre dans l'église Cathédrale du Puy. Il résulte de cette dernière partie du mémoire que le factum fut rédigé seize ans après le procès dont nous avons parlé. Il s'agissait, dans la cause, de préroga- lives que-revendiquaient les chanoines de pauperie et que le chapitre de la cathédrale refusait de reconnat- tre. Ils n'avaient pas produit alors le diplôme attribué à Charlemagne, lequel, au dire du factum, retenu par le fait de la partie adverse, se trouvait dans les archives du chapitre, tandis qu’un arrèt du parlement de Tou- louse, du 5 juillet 1740, avait statué contrairement à leurs prétentions. « L'auteur du factum, entre autres avis, conclut : que » les chanoines dits de la mense de pauperie n’ont » point d'autre parti à prendre pour rentrer en pos- session des droits qui leur appartiennent que celui de se pourvoir par la voie de la requête civile contre » l'arrêt du parlement de Toulouse qui, par erreur ou » faute d'instruction suffisante, les a dégradés et dé- » pouillés de leurs véritables droits. » Quelle suite eut cette affaire? a dit en terminant M. Aymard. Les chanoines de pauperie suivirent-ils la voie de l'appel qui leur était conseillée? Le chapitre publia-t-il aussi un factum ? ÿ ÿ 412 RÉSUMÉ DES SÉANCES. jomme le savant rapporteur, la Société paraît dé- sirer vivement que ces questions ne restent pas sans réponse. Il y a là un point d'histoire ecclésiastique à éclaircir. Et d’un autre côté, les documents relatifs à la suite de ce procès diraient si les chanoines pauvres sont parvenus à faire admettre par le parlement de Toulouse l'authenticité du diplôme de Charlemagne avec celle de la délibération du chapitre de Notre- Dame du Puy, qui le mentionne à la date de 1194. Dans cette séance, la Société, suivant sa louable habitude, s’est bien gardée d'engager son opinion dans un sujet si controversé. Elle à paru désirer seulement que la conmission des recherches histo- riques, qu’elle a créée dans son sein, provoquàt la recherche de tous les documents pouvant éclairer la question. A six heures, la séance est levée. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 19 AVRIL (1) SOMMAIRE Lecture du procès-verbal. — Doxs au Musée : Molaires d’un petit cerf, trouvées au milieu de débris de tuiles romaines, données par M. F. Robert. — Ou- VRAGES REQUS. — AGRICULTURE : De la v che dans les travaux agricoles de la ferme. — De la vigne en espalier. — SCIENCES HISTORIQUES : Documents adressés par M. G. de Chaulnes à la commission des recherches historiques. L'un a trait aux instituteurs en 1665. — Titre ayant trait à la fondation du prieuré de Saint-Pierre-Eynac en 1070. — Observations sur la juridiction de la justice royale de Montfaucon. — De la 27 session du Congrès scientifique. — ECOLES INDUSTRIELLES : M. Gerbier appelé à la chaire de mathématiques appliquées, en remplacement de M. Papon; opinion de M. Bertrand de Dove au sujet de cette nomination. — Modification sur l’époque de l'ouverture des cours de la ville. — PERSONNEL DE LA Société : M. Marthory nommé membre du conseil d'administration. — ADMINISTRATION : Lecture du compte d'administration. — Distribution de graines d'arbres forestiers. Présidence de M. Charles Calemard de Lafayette. A trois heures, la séance est ouverte par la lecture du procès-verbal de la dernière séance. Ce rapport est adopté sans réclamation. (1) A cause de la semaine sainte et des vacances de Pâques, la séance du premier jeudi du mois avait été indiquée pour le troisième jeudi 19 avril. TOME XXII. 8 4114 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Dons au Musée. — M. Félix Robert fait hommage d'une phalange du grand daim ; de deux molaires d'un petit cerf se rapprochant des cerfs de Vialette, trouvées dans les dernières fouilles de Cheyrac. Ce fragment serait, d’après M. Robert, un indice important pour l'histoire des fossiles, puisque sa découverte, faite au milieu de débris de tuiles romaines et autres objets antiques, semble indiquer que ces espèces d'animaux, aujourd’hui disparues et réduites à l'état de fossile, existaient encore vivantes à l’époque gallo-romaine. C'est à ce titre que M. Robert a offert ces fragments à la Société. OUVRAGES REÇUS. — AGRICULTURE. — Dans l'analyse des ouvrages reçus, M. le Président signale dans le Bulle- lin agricole du Puy-de-Dôme (mars 1860) un article intéressant signé Bartin, vélérinaire. L'auteur y traite avec humeur et verve des avantages de la substitution de la vache an bœuf dans les travaux agricoles des fermes. Un article du Journal de la Société impériale et centrale d'agriculture (février 1860) sur la vigne en espalier, attire encore l’attention de la Société. M. E. Forney, auteur de la notice, prétend que la méthode des cordons, usitée comme la plus parfaite et dite à la Thomery, s'accorde mal avec le mode de végétation de la vigne. Elle ne pousse pas ses rameaux horizontale- ment et en forme de T; cette position est forcée et contre nature. La direction verticale n’est pas bonne AVRIL. 415 non plus, puisqu'elle tend à porter la séve aux extré- mités. La plus favorable, celle que la nature indique pour la vigne et en général pour les espaliers, est la position inclinée, sous un angle d'à peu près 45 degrés ; alors la branche conserve sa vigueur et fructifie conve- nablement et longtemps. La séve circule modérément et avec liberté tout le long de la tige penchée ; depuis la base jusqu'au sommet, se développent sur la partie supérieure des coursons chargés de fruits; si on espace les tiges à une distance de 0,50 centimètres, comme dans la nouvelle méthode préconisée pour le pêcher par M. Dubreuil, au bout de quelque temps le mur est entièrement garni, et dans l’espalier aucune partie n’a un rôle inutile. + SCIENCES HISTORIQUES. — M. le Président annonce l'envoi de plusieurs pièces historiques fort impor- tantes, adressées par M. le vicomte Gabriel de Fages de Chaulnes à la commission permanente des recherches historiques. lo Un arrêt contradictoire du conseil privé, du 26 août 1653, par lequel l’évêque du Puy est maintenu au droit d'entrer dans le monastère des religieuses de Sainte-Claire de la réforme de sainte Colette dans la même ville, pour y visiter la clôture, nonobstant leurs priviléges et exemptions. 2° Deux autres pièces prises à la même source : une lettre écrite par le chapitre de la cathédrale du Puy à saint Louis, et un diplôme de saint Louis au sujet de Ja régale dans l’église du Puy. Diploma $S. Ludovici, 416 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Francorum regis, de jure regaliæ regum Franciæ in ecclesiam aniciensem. 3° Encore deux pièces accompagnent cet envoi : la première est un extrait des registres du parlement, du livre Olim, intitulé : Registres d'enquêtes depuis 1355 jusqu'en 1373. Elle traite des usages de l’église du Puy-en-Velay dans le XIIe siècle, pendant la vacance du siége épiscopal, pour la jouissance des fruits en régale. ‘ L'autre pièce est la copie d’un arrêt du conseil d'Etat, du 18 septembre 1665, portant que les consuls des pa- roisses des diocèses de Vienne, Viviers, Valence et du Puy présenteront dans huitaine aux archevèques et évèques desdits diocèses, des maîtres d'école qui soient capables ; qu'à défaut d'y satisfaire, lesdits archevèques et évêques en établiront dans les licux où il en sera besoin ; et que lesdits consuls et habitants des paroisses seront tenus de les payer ; et pour cet effet, permis de lever sur eux jusqu’à cent ou six vingts livres par an. Par les titres de ces différentes pièces on comprend l'importance des découvertes de M. G. de Chaulnes ; c’est une bonne fortune pour la Société et pour sa commission des recherches historiques. M. le Président félicite M. de Chaulnes de son zèle, le remercie d’avoir si heureusement payé sa dette de bienvenue parmi nous et l’engage à suivre une mine aussi féconde, qui promet tant de richesses historiques pour le Bulletin des recherches. Conformément à l’ordre du jour, M. l'abbé Bernard donne lecture d’une analyse d’un titre du moyen-âge AVRIL. 117 ayant trait à la fondation du prieuré de Saint-Pierre- Eynac, qui, d’après ce titre, remonterait en l’an 1070. Il est déposé aux archives de l'évêché du Puy, où l’on se fera un plaisir d'en donner communication aux personnes qui voudraient le consulter. Ce travail, qui peut dignement figurer dans le Bulle- tin des recherches historiques, est écouté avec atten- tion. Il est suivi d'observations présentées par quelques membres, au sujet de la juridiction de la justice royale de Montfaucon ; d’où il ressort que cette juridiction ne s'étendait pas sur le Puy, mais sur Annonay. Le document analysé par M. Bernard a aussi de l'intérêt au point de vue de la langue, puisqu'on y irouve répandus çà et là, au milieu de l’idiome latin, des termes de la langue vulgaire, tels que le garayt de la gleyse, etc. M. le Président annonce à la Société la publication du programme de la 27e session du Congrès scienti- fique de France, qui tiendra, cette année, ses assises à Cherbourg. Il n’espère pas, à cause de la distance qui nous sé- pare de cette localité, que la Société soit représentée à ce Congrès, quoiqu'il le désire, en souvenir du Congrès de 1555, des liens qui attachent notre Société à l'œuvre de M. de Caumont et de la manière distinguée dont la Société a été représentée au Congrès de Grenoble et à différents Congrès des Sociétés savantes, à Paris, et dans d’autres réunions scientifiques. 118 RÉSUMÉ DES SÉANCES. ECOLES INDUSTRIELLES. — M. le Président fait connaître le changement qui s’est opéré dans le personnel des professeurs des écoles industrielles de la ville, placées sous le patronage et sous la direction immédiate de la Société. Par suite de la démission de M. Papon qui, depuis plus de trente ans, occupait la chaire de mathémati- ques, M. Gerbier, agent comptable de la Société, à été appelé à remplir les mêmes fonctions auxécoles du soir. Ses études antérieures, ses succès dans la partie scien- tifique l'ont convenablement préparé à cet emploi. Les émoluments de la charge de comptable réunis à ceux de professeur de mathématiques appliquées ne constituent pas, il est vrai, une position brillante sons le rapport matériel, mais ils suffisent, quant à présent, à rattacher plus intimement à la Société un fonction- naire dont elle n’a qu’à se louer. En désignant M. Ger- bier au choix de MM. les Directeurs, M. le Président n’a fait que remplir une promesse faite à l'époque où la Société prit la détermination de donner une plus grande extension aux fonctions d'agent comptable. A ce sujet, M. Bertrand de Doue fait savoir à la So- ciété que la nomination qu'il a faite, de concert avec -son collègue M. Vibert et avec l’assentiment de M. le Maire de la ville, a servi à donner une impulsion nou- velle aux travaux des écoles. On sait, dit-il, tous les services que cet enseignement a rendus à l’industrie des bâtiments et à l’art du dessin. Il y a trente ans, on ne connaissait au Puy qu’un seul AVRIL. 119 ouvrier capable de construire un escalier d’une façon régulière. Aujourd’hui, nos ébénistes, nos menuisiers, nos charpentiers, nos maçons, plâtriers, serruriers, tourneurs, ete., ne le cèdent pas aux bons ouvriers des grandes villes. Sans parler des artistes distingués qui sont sortis des écoles, l’année dernière, un des élèves remportait au concours la bourse Crozatier et, à l'heure qu’il est, le jeune Martin compte parmi les bons élèves de l’école des Beaux-Arts, section d'architecture. Ce résultat a été obtenu sans moyens artificiels, sans ostentation et sans bruit, par la seule action d'un enseignement bien organisé et surveillé avec un dévoüment à toute : épreuve. Cette œuvre, la Société doit en être fière; et M. Bertrand de Doue qui, en qualité de son manda- taire, lui donne des soins assidus depuis trente ans, croit devoir payer une dette de reconnaissance en rap- pelant le nonr de ses deux premiers directeurs et fon- dateurs, MM. Ruelle et de Becdelièvre, qui sont aussi les fondateurs du Musée. Avec l’assentiment de la Société, les Directeurs se proposent d'introduire une modification dont ils atten- dent un bon effet. Le cours dure six mois, depuis les premiers jours de novembre jusqu’à la fin d'avril. Dans ce dernier mois, la journée est longue, on ne veille plus, et plusieurs élèves-ouvriers, restant dans les ateliers, cessent de fréquenter les écoles ; il semble- rait donc plus convenable de fixer l'ouverture des cours au commencement d'octobre, à l’époque de la rentrée des classes dans les établissements d'instruction, au moment où la journée de l’ouvrier se raccourci : alors 120 RÉSUMÉ DES SÉANCES. le cours se terminerait à la fin de mars. Ce change- ment aurait lieu à dater de l’année prochaine. Il n’est fait aucune objection à cette modification proposée par M. Bertrand de Doue. M. le Président est heureux de la circonstance qui lui est offerte de remercier, au nom de la Société, MM. les Directeurs, du zèle et du dévoûment qu'ils ne cessent d'apporter depuis si longtemps dans le gou- vernement d’une des plus utiles et des plus éprouvées institutions de la Société. La Société tout entière s’as- socie aux sentiments exprimés par son Président. PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ. — Immédiatement après le dépouillement de la correspondance, un scrutin secret par bulletins écrits, ouvert pour la nomination d’un membre du conseil d'administration, en remplace- ment de M. du Villard, décédé, a donné l’unanimité à M. Marthory, avocat, qui a été aussitôt proclamé membre du conseil. ADMINISTRATION DE LA SOCIÉTÉ. — M. l’Agent compta- ble, en l'absence du secrétaire du conseil d’adminis- tration, donne lecture du compte d'administration. M. le Président fait remarquer que les finances de la Société sont dans un état qui permet d'affronter les nécessités que nous annoncent les grandes fètes de l'agriculture qui se préparent. Vers la fin de la séance, il a été fait une distribution de graines d'arbres forestiers : épicéa, pin sylvestre, AVRIL, 121 mélèze. MM. les Membres qui se proposent d’avoir des pépinières de ces espèces voudront bien rendre compte de leurs essais. Le lundi suivant, seront distribuées à toutes les personnes qui en feront la demande, les graines qui resteront après la distribution faite aux membres de la Société, La Société espère que ces se- mences ne seront pas perdues. À cinq heures et demie, la séance est levée. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 3 MAI SOMMAIRE Lecture du procès-verbal de la dernière séance. — OuvRAGEs REÇUS : M. de Payan-Dumoulin fait hommage de sa brochure sur les antiquités gallo- romaines découvertes à Toulon-sur-Allier. — Compte-rendu de cet ouvrage. — Ouvrage de M. Comarmond sur les antiquités du Musée de Lyon. — Cuemis DE FER : M. de Brive fait connaître les résultats de la démarche faite auprès de Sa Majesté l'Empereur au sujet de la continuation du chemin de fer de Firminy au Puy. — AGricuLTuRE : M. de Brive rend compte d’une séance du Congrès des Sociétés savantes de Paris où il a représenté la So- ciété académique du Puy et présidé une séance de la section d'agriculture. — La question des défrichements a été le principal objet de cette séance. — SCIENCES HISTORIQUES : Lecture d’un mémoire de M. l'abbé Bernard sur lévangélisation du Velay. — Mémoire de M. de Chaulnes sur un imprimé de 1669 : Transaclion du dixme abonné du mandement d’Agulhe. — Apmi- NISTRATION : Des travaux de barraquement pour la fête du Concours régional, par M. Chouvon. — Décision portant que le concours départemental annuel coïncidera avec la solennité du Concours régional. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. A trois heures, la séance est ouverte par la lecture du procès-verbal de la dernière séance. Ce procès- verbal est adopté sans réclamation. a MAI 425 OUVRAGES REÇUS. — Parmi les ouvrages reçus par la Société, M. le Président signale une notice sur les anti- quités gallo-romaines découvertes à Toulon-sur-Allier. M. de Payan-Dumoulin, son auteur, en fait hommage à la Société, dont il est membre résidant. M. le Secrétaire s'exprime ainsi à ce sujet : Il ya trois ans, notre savant président était procureur impérial à Moulins lorsque son attention fut attirée par quelques fragments de poterie rouge ; il y reconnut la mar- que de la vénérable antiquité ; aussitôt, de concert avec M. Esmonot, architecte du département de l'Allier, il fit fouiller la localité d’où provenaient ces débris. Le travail des fouilles, conduit avec suite et activité, eut des résultats capables de remplir les vœux du plus insatia- ble des antiquaires. Quelques journées de recherches avaient mis M. de Payan-Dumoulin en possession d’un grand nombre d'objets précieux pour la connaissance de l'art céramique et de la fabrication des statuettes chez les anciens. .Ce ne sont pas seulement des figures en terre cuite, des vases dits samiens, d’une forme élégante et pure, qu'ont donnés les recherches faites au village de Toulon- sur-Allier ; elles ont mis au jour un atelier complet de poterie, avec plusieurs fours de potier, l'aire servant à préparer l'argile et une certaine quantité de moules dont quelques-uns portaient à. l’intérieur, gravées en creux, des inscriptions apparaissant en relief sur quelques statues. M. de Payan-Dumoulin, devant tant de richesses archéo- logiques, ne devait pas se taire et garder, comme on dit, La lumière sous le boisseau, À l’instigation de quelques amis 124 RÉSUMÉ DES SÉANCES. de Ja science, en 4859, il publia un aperçu de ses décou- vertes dans un des journaux de Paris les plus à la mode, l'Illustration : aujourd’hui il nous en donne une étude complète dans un mémoire de plus de 100 pages, extrait des Annales de la Société académique du Puy (tome xx1, en cours d'impression) et avec ce titre : Antiquités gallo- romaines découvertes à Toulon-sur-Allier et réflexions sur la céramique antique. Nous avons sous les yeux cet extrait des Annales de la Société : il est dans le format grand in-8°, sur beau papier et d'une exécution typographique irréprochable, ainsi que l’a fait remarquer M. le Président de la Société. L'ouvrage est accompagné de quatre planches où sont réunies plus de quarante figures représentant les principales pièces mises au jour par les fouilles de Toulon. Elles ont été dessinées par Fellmann et sortent des presses de M. Marchessou. Elles ont été tirées sur des clichés cuivrés par le procédé galva- noplastique ; et tel est le fini de l'exécution qu'on les à prises à Paris pour des lithographies faites à la plume. Quant à l'ouvrage lui-même, sur lequel nous pouvons dire notre opinion en toute liberté, il est une de ces bonnes productions de ce temps si fécond en travaux d’archéolo- gie ; il est divisé en dix chapitres ayant chacun son titre, et cette division permet de distinguer et de saisir facilement les différentes parties du sujet. Le style en est clair, à la fois élégant et simple, coupé par de nombreux alinéas ; et l’on arrive au bout sans s'être aperçu de la longueur de la route toute semée d'objets curieux, de vases antiques richement ornementés, de statuettes aux formes variées, quelquefois grotesques, souvent pures et gracieuses. On Y rencontre des observations intéressantes et neuves sur la MAI. 425 céramique des premiers peuples, des Celtes, des Etrusques, ainsi que sur la destination des vases antiques et des sta- tuettes. M. de Payan-Dumoulin a très-heureusement payé sa dette de bienvenue dans notre Société académique. Son travail consciencieux et bien exécuté sera recherché au moment où s’accomplit, par l’ordre et par l'initiative personnelle de l'Empereur, une grande entreprise scientifique, la restitu- tion historique de la Gaule, par l'étude de l’ancienne topo- graphie. Il sera particulièrement accueilli dans notre pays, encore tout plein d'émotions savantes, excitées par la ques- tion des origines de notre cité. De tous côtés, chez nous, on interroge le sol, on lui demande le secret des temps antiques ; on fouille au For, jusque dans les fondations de la cathédrale, sur la plaine dite de Rome, à Corsac près de Brives, dans la propriété de M. Vinay, etc. D'heureuses découvertes viennent tous les jours récompenser les efforts de nos infatigables archéologues. Ils trouveront dans l’ou- vrage de M. de Payan-Dumoulin un modèle de cette mé- thode à la fois lumineuse et circonspecte dont ne doit pas se départir celui qui a la noble ambition de ranimer le passé au moyen des débris que le temps à épargnés. La Société académique a reçu dans le même jour un magnifique volume avec planches, ayant pour titre : Description des antiquités et objets d'art contenus dans les salles du Palais des Arts de la ville de Lyon, par M. Comarmond, ancien conservateur des musées ar- chéologiques de la ville. Cet ouvrage, grand in-4° d’un millier de pages, imprimé avec un grand luxe, est un 1426 RÉSUMÉ DES SÉANCES. don fait à la bibliothèque de la Société par l'éminent magistrat, le sénateur M. Vaïsse, qui administre le dé- partement du Rhône. CHEMINS DE FER. — Après une analyse rapide d’autres ouvrages d'histoire, de sciences physiques et naturelles et d'agriculture, M. le Président prie M. de Brive de vouloir bien faire connaître à la Société les résultats de la démarche faite auprès de Sa Majesté l'Empereur Napoléon II par la députation chargée de demander la continuation des travaux du chemin de fer de Firminy au Puy. M. de Brive s’en rapporte entièrement au compte-rendu du Woniteur de la Haute-Loire, numéro du 24 avril, ainsi conçu : Voici quelques détails sur l’audience impériale qui a été accordée récemment à la commission des délégués. Cette commission était composée de MM. de Romeuf, dé- puté de la Haute-Loire ; Balay de la Bertrandière, député de la Loire; de Brive, membre du Conseil général de la Haute- Loire ; Vibert, membre du Conseil municipal du Puy ; Ay- mard, vice-président de la Société d'agriculture ; et Vinay, avocat. Les autres membres de la commission et M. le marquis de Latour-Maubourg, retenus, celui-ci par une indisposi- tion grave et les autres par des affaires impérieuses, avaient exprimé leurs regrets de ne pouvoir se réunir à leurs col- lègues, dans cette solennelle occasion. M. Paul de Rostan, préfet de la Haute-Loire, était arrivé la veille pour présenter lui-même la commission à Sa Majesté. MAI. 427 Dimanche 15 du courant, à une heure, elle était réunie, ainsi composée, dans le grand salon destiné aux réceptions de l'Empereur. Sa Majesté, en grand costume militaire et accompagnée de ses aides-de-camp et de plusieurs hauts fonctionnaires de la cour, n’a pas tardé à paraitre, et, s’arrétant successi- vement devant les diverses députations qui avaient obtenu l'honneur d’être admises à son audience, est arrivée devant celle du Puy. M. le Préfet s’est alors avancé et a dit à l'Empereur qu'il avait cru de son devoir de se mettre à la tête d’une com- mission que le Conseil municipal de la ville du Puy avait chargée de présenter à Sa Majesté une adresse, pour de- mander que les délais fixés pour l'exécution du chemin de fer de Saint-Etienne au Puy fussent abrégés, et que les tra- vaux en fussent commencés prochainement ; il a dit que son département et la ville du Puy en particulier avaient le plus grand intérêt à être reliés avee le département de la Loire et la ville de Saint-Etienne ; que les retards que mettait la compagnie concessionnaire à entreprendre les travaux avaient soulevé dans tout le pays des craintes sur la réalisation de ce projet, et que la ville du Puy, chef- lieu du département de la Haute-Loire, avait cru devoir, ant en son nom qu’en celui de tout le département, de- mander que le chemin de fer qui doit donner la vie à ces régions jusqu'à ce jour en quelque sorte déshéritées, soit compris dans le nombre des lignes dont l'exécution ne peut souffrir aucun autre délai. C'est alors que l’un des membres de la commission a remis à Sa Majesté l'adresse du Conseil municipal, en ajou- ant verbalement quelques-uns des principaux motifs sur 128 RÉSUMÉ DES SÉANCES. lesquels s’appuyait la demande de la ville du Puy. Il a in- sisté particulièrement sur la nature des divers besoins qui lient les intérêts de la Loire et de la Haute-Loire, l’'impor- tance des échanges entre ces deux pays, dont l’un est essentiellement producteur et l’autre si grand consomma- teur, importance qui augmenterait dans des proportions incalculables le jour où des communications faciles et économiques seraient créées entre eux, et enfin sur l’énor- mité des prix actuels de transport, qui doublent et triplent quelquefois la valeur des objets échangés, au grand détri- ment des populations. M. le député de la Loire a ensuite remis à Sa Majesté l'adresse votée également par le Conseil municipal de Saint- Etienne, et dans le but d’obtenir le même résultat. Il a principalement fait valoir la nécessité de donner de nou- veaux débouchés aux houilles de la Loire, qui vont subir une dépréciation par la concurrence que lui feront les charbons étrangers ; il a cité comme l’un des plus impor- tants celui que lui offrirait le chemin de fer du Puy. Au point de vue de l’industrie stéphanoise, il a fait observer à Sa Majesté qu'aucune communication ne pouvait lui être plus utile pour satisfaire à son besoin d'expansion, que celle qui devait la mettre en relation avec un pays qui est à ses portes et qui possède des moyens d'action à la fois si nombreux et si économiques. Ces motifs et plusieurs autres qui ont été présentés par les divers membres de la commission ont paru produire une impression favorable sur l'esprit de Sa Majesté, qui a daigné répondre avec une grande affabilité : qu’elle appré- ciait toute l'importance de la ligne de fer qui venait de lui être signalée ; qu’elle-avait déjà donné des ordres à son MAI. 129 ministre pour qu'il veillât à ce que les compagnies de che- mins de fer remplissent tous leurs engagements, et qu’il lui recommanderait de donner une attention toute parti- culière à ce que l'exécution du chemin de fer de Saint- Etienne au Puy n’éprouve pas de retards. La commission a remercié l'Empereur des bonnes pa- roles que Sa Majesté venait de lui faire entendre, et s’est retirée pour se rendre immédiatement auprès de M. le Mi- nistre des Travaux publics, qui à bien voulu la recevoir de suite. Son Excellence était déjà instruite du but du voyage de la commission, de l'audience qu’elle venait d'obtenir de Sa Majesté, et des promesses qui lui avaient été faites. M. le Ministre s’est empressé d'assurer la commission que les ordres de l'Empereur seraient exécutés, et qu'il ferait tout ce qui dépendrait de lui pour obtenir de la com- pagnie de Paris à la Méditerranée que les travaux du che- min de fer de Saint-Etienne au Puy soient commencés et exécutés sans de nouveaux retards. La commission s'est également présentée chez plusieurs membres des conseils d'administration des compagnies houillères ; elle à trouvé auprès de tous ceux qu'elle à pu voir, et notamment dans MM. Baude, Gérard-West et Séguin, l'accueil le plus bienveillant et les dispositions les plus sympathiques. La commission n’a pas voulu quitter Paris sans connaître les dispositions de la compagnie concessionnaire du chemin du Puy, et, accompagnée de M. le Préfet, elle s’est rendue auprès de M. Talabot, ingénieur en chef de la compagnie de Paris, Lyon et Méditerranée. Elle a été heureuse d’ap- prendre de sa bouche que la compagnie était décidée à exé- cuter prochainement Ja ligne de Firminy au Puy; qu'elle TOME XXII. 9 150 RÉSUMÉ DES SÉANCES. avait divisé les trayaux de cette ligne en deux sections, dont l’une de Firminy au pont de Lignon, et la deuxième du pont de Lignon au Puy; que les études définitives de la première section étaient terminées et allaient être envoyées à l'approbation du ministre. M. Talabot a ajouté que les travaux ne pourraient en être commencés cette année, parce que les ressources disponibles de la compagnie étaient exclusivement absorbées par la ligne si importante du Bour- bonnais, dont le chemin du Puy était du reste une suite, mais qu'il comptait bien que dès la campagne prochaine les travaux du chemin du Puy pourraient être commencés et qu’une fois entrepris, ils seraient continués avec activité et sans relâche. M. de Brive revient plein d'espoir, avec l'assurance formelle que dans les hautes régions du pouvoir nos grands intérêts matériels ne sont pas délaissés, et que la ligne du Grand-Central sera poursuivie sans relâche, dans nos contrées, à partir de l’année prochaine. Il s'est plu en même temps à proclamer la sollicitude et le dévoñment de M. le Préfet qui, dans cette cir- constance comme en tant d’autres, n’ont pas fait défaut au pays. Grâce à son active et puissante intervention, les difficultés ont été aplanies et le premier magistrat du département a porté aux pieds du trône l'expression des vœux de nos populations avec une chaleur et une conviction capables d'assurer le succès. AGRICULTURE. — M. de Brive fait en outre savoir qu’il a représenté la Société académique du Puy au MAI. 151 Congrès des Sociétés savantes à Paris. Il a même été appelé à l'honneur de présider une des séances, celle de l’agriculture, qui sans contredit à été une des plus intéressantes. La question des défrichements a été discutée en pré- sence de plus de cent cinquante délégués de toutes les Sociéiés de France. L'assemblée tout entière s'est arrêtée à cette conclusion : que le défrichement n’était pas, quant à présent, d’une nécessité générale et abso- lue; qu'au lieu d’éparpiller ses forces, il fallait les concentrer sur les terrains déjà en culture; et qu'il importait avant tout, par l'application des méthodes nouvelles et par l'introduction des instruments perfec- tionnés, d'élever le niveau de la production. En effet, il est bien au-dessous de celui qu’elle à atteint chez nos voisins. Tandis qu'en Angleterre l'hectare produit en moyenne vingt-deux hectolitres de céréales, en France, la moyenne atteint à peine à quatorze. Amé- liorer les terres, les assainir dans l'intérêt de lagri- culture et de la santé publique, tek est le but qu’on doit présentement s’efforcer d'atteindre avant d’aug- menter l'étendue du sol arable. SCIENCES HISTORIQUES. — Après cette communication, ättentivement écoutée par l'Assemblée, M. l'abbé Ber- nard donne lecture d’une partie d’un mémoire inti- tulé : Etudes sur l'évangélisation du Velay. La question historique traitée par M. Bernard est digne d’exciter le plus vif intérêt, c’est ce que fait re- marquer M. le Président. La Société apprécie certaine- ment toute l’érudition que M. Bernard a su y répandre. 152 RÉSUMÉ DES SÉANCES. D'autre part il sera désirable que, dans des diseussions ayant pour objet l’histoire et la science pure, on se garde avec soin de toute allusion irritante. Le Président se permet donc de recommander à tous le calme et la modération que commandent le respect de chacun et le sentiment d’une bonne-confraternité. M. Gabriel de Chaulnes, tout nouvellement élu membre résidant, fait entendre un rapport sur un im- primé de 1669, intitulé : Transaction du dirme abonné du mandement d'Agulhe. Gette pièce, qui est un com- promis entre les habitants du mandement d’Aiguilhe et la collégiale de Saint-Agrève, a fourni à M. de Chaulnes l’occasion d'écrire sur cette collégiale qui était au cloître, dans la grande cour du séminaire, plusieurs pages d’un très-bon style qui ont été ac- cueillies avec une faveur marquée. MESSIEURS , En dépouillant de vieux titres rongés par la poussière, j'ai eu la bonne fortune de mettre la main sur un docu- ment de quelque intérêt pour l'histoire religieuse de notre pays. Ces pièces deviennent aujourd'hui plus rares; les guerres civiles, l'insouciance des possesseurs, parfois le vandalisme étourdi du jeune âge, et surtout le temps, ce terrible destructeur de toutes choses, semblent rivaliser de zèle pour hâter la destruction de ces précieuses annales où se reflète la vie de nos pères, annales si imparfaitement LS MAI. 153 remplacées par les légendes, les inseriptions et les docu- ments de l’histoire générale. La pièce que j'ai l'honneur de mettre sous vos yeux appartient à notre collègue M. de Causans, c’est un im- primé de 41669 ; mais le compromis dont il est fait mention, les noms qu'elle nous signale, les usages que l’on invoque comme en passant, tous ces détails qui au premier abord paraissent insignifiants pour un lecteur superficiel, ac- quièrent de l'importance, parce qu'ils dépeignent la vie, les mœurs, les coutumes et les prétentions d’un autre âge. Cet imprimé est intitulé : Transaction du dixme abonné du mandement d'Agulhe. En d’autres termes, c’est un compromis entre la collégiale de Saint-Agrève et les hahi- tants du mandement d’Aiguilhe, qui faisaient partie de la paroisse desservie par ce chapitre. Avant de nous livrer à l'examen de cette pièce, pérmettez- moi, Messieurs, de vous dire en quelques mots l’histoire de cette collégiale. Ici les documents sont rares: ni la Gallia christiana, ni Odo de Gissey, ni le frère Théodore, chez les auteurs anciens, ne nous parlent de l’origine des chanoines de Saint-Agrève. Les auteurs modernes, Arnaud, le biographe de l’abbé de Lantage, l'abbé Caillau, ne sont pas plus ex- plicites. Il faut donc se livrer aux conjectures ; je me vois obligé de vous donner sous toutes réserves l'opinion sui- vante qui m'a paru la plus vraisemblable. Lorsque Agrippanus ou Agrève, dix-huitième évèque du Puy, d’après l’Almanach de l'abbé Laurent, eut reçu la couronne du martyre à Chiniac, dans le diocèse de Viviers, en 658, suivant Odo de Gissey, Dulcidius, son successeur. demanda avec beaucoup d'instance les reliques de son 134 RÉSUMÉ DES SÉANCES. prédécesseur, qui furent apportées en grande pompe et dé- posées provisoirement dans l'église souterraine de Saint- Etienne ; mais ces précieuses reliques ne restèrent pas longtemps dans ce lieu, suivant le même chroniqueur. En la cité du Puy, écrit-il page 175, se solemnise le jour du transport du bienheureux martyr Agreve evesque du Puy auquel comme l'on eust basti un temple neuf, et les veilles et devotions qu'on fesait devant l'autel Nostre- Dame étant parachevées il fut reporté en son propre siège aux hymnes et cantiques tant de ceux qui devancaient que de ceux qui suivaient la chasse ef ses reliques. N'est-il pas probable, Messieurs, qu'après la construc- tion de cette église fut érigée la collégiale de Saint-Agrève, lorsque la piété des fidèles eut établi des fondations suffi- santes pour son entretien. Cette création ne fut pas le résultat d’un jour ni d’une année. Mais les chanoines ont- ils primitivement mené la vie monacale ? A quelle époque faut-il fixer leur sécularisation? c’est ce qu’il m'a été im- possible de préciser. Rapportons-nous-en sur ce sujet aux savantes recherches dont nous a fait part, dans la dernière séance, notre érudit confrère M. l'abbé Bernard, dans son rapport remarquable sur la fondation du prioré de Saint- Pierre-Eynac. Quant à l’époque de la dissolution du cha- pitre de Saint-Agrève, le biographe de l'abbé de Lantage nous en donne la date certaine. Suivant cet auteur, les lettres patentes de la suppression furent expédiées en 1680, par conséquent sous l’épiscopat de Mgr de Béthune, Mais rentrons dans notre sujet, j'ai hâte d'arriver à la pièce qui doit spécialement fixer notre attention. MAI. 1435 Je constate d’abord dans cet acte une convenance et une dignité de langage, je dirai même une impartialité bien éloignée de la passion qui respirait quelquefois dans des documents analogues: passion qui inspira à notre inimitable Boileau une de ses plus spirituelles boutades : boutade du reste qui s’accordait peu avec le précepte d’'Horace : Ficta voluplatis causa sint proxima veris. Mais pardon, Messieurs, il ne s’agit pas des chanoines de la sainte chapelle, mais bien de ceux de la collégiale de Saint-Agrève. Voici en deux mots l'historique de la contes- tation : les chanoines de Saint-Agrève qui avaient chargé un vicaire perpétuel de faire les fonctions curiales, levaient un dixme (c'est l’expression usitée) dans le mandement d’Aiguilhe ; ce dixme était destiné aux honoraires du vicaire perpétuel et à l’entretien de l’église. Plusieurs fois les pro- priétaires d’Aiguilhe s'étaient récriés contre les droits pré- tendus exorbitants qu'ils payaient ; les chanoines, jaloux de leurs droits, étaient restés sourds à ces réclamations : le débat avait franchi nos montagnes, et le parlement de Toulouse, saisi de l’affaire, avait donné gain de cause au chapitre. Enfin, après de longs pourparlers, sans doute pour éviter des frais considérables et des longueurs inter- minables, les parties transigèrent. C’est de cette transaction dont il s’agit. Je vais vous signaler les passages dignes d’in- térêt. L'an mil six cent soixante neuf et le troisieme jour du mois de decembre après midi, rapporte le notaire, par devant moy notaire royal du nombre réduit de la ville du Puy soubssigné, et témoings bas nommés : personnellement 1356 RÉSUMÉ DES SÉANCES. establys Messieurs maistre Jean Beaunoit doyen, Benoiet Solier, Armand Bergounhon, Michel Bernard, Jacques Fosse sçyndic, Alexandre Fosse et Jean Pays, tous cha- noines de l’église collégiale St Agrepve du Puy d'une part, et noble Marcelin de Fillere seigneur du Charouil, le Chey- lou et autres places, juge-mage et lieutenant général en ‘la sénéchaussée du Puy, Messieurs maistre Antoine Mom- brac doyen, et Pierre Bernard sieur de Jalavoux conseiller en ladite cour, Michel Pandraux lieutenant en la cour royalle et commune du Puy, Anthoine Valentin prestre et administrateur de l'Hotel Dieu Notre Dame du Puy, Jean Farigoules prestre, R. P. Hyacinthe Sausin scyndic des Dames religieuses Ste Catherine de Sienne de ladite ville, sieur Pierre Armand sqr de Combec, Jean Denis, Antoine Dugone, Mathieu Gevolde, Jean Francois Ma- reschal docteurs et avocats en ladite cour Mres Guilhaume Fouthume, Barthelemy Corailhe, Jacques Bellangreville et Pierre Ganereau docteurs en medecine, Jean Valentin, sieur de Mongiraud, ete. Cette nomenclature de person- nages terminée, le notaire rédacteur fait l'historique des prétentions des chanoines d’une part, et de celles des ha- . bitants d’Aiguilhe d'autre part. Je passe sous silence les premières ; elles figurent la plupart aux conclusions du compromis. Les secondes me paraîtraient assez spécieuses, s’il était permis de juger un procès sur une seule pièce. 1o Lesdits sieurs chanoines ni leur vicaire n'avaient jamais fait fonctions curiales au-delà de la rivière de Borne et du pont d'Agulhe où la plupart des fonds desdits paroïs- siens sont situés. Remarquons en passant ce, point de MAI. 457 repère pour la topographie des anciennes paroisses ; c’est la Borne qui est la limite. 20 Les habitants d’Aiguilhe refusent le dixme pour un motif qui n’est pas flatteur pour les propriétaires vinicoles de ces quartiers. En tout cas, dit le rapporteur, la plupart dudit man- dement d'Aquihe estait prè ou planté en vigne sur Les- quelles possessions lesdits sieurs chanoines ne pouvaient prétendre aucun dixme n'étant pas de l'usage dans ce pays ni lieux circonvoisins de dixmer sur les vignes ni sur les près. Cette dernière exception m'a paru assez diffi- cile à expliquer, et lesdits habitants se fondaient sur un arrêt rendu en faveur des Pères Jésuites contre le prioré de Polignac. Mais arrivons aux conclusions finales, en signalant toute- fois la hardiesse de langage du notaire rédacteur qui affirme que l'arrêt de la cour souveraine en faveur du chapitre avait élé rendu par collusion et intelligence. On transigea donc en ces termes : Ont lesdites parties mutuellement renoncé à tous proces, sous le bon plaisir de ladite court de parlement de Tolose, et au principal lesdits sieurs chanoines ont convenu de ladite coutume approuvée et ratiffiée comme par ces pré- sentes approuvent et ratifient les anciens abonnements dudit lieu et territoire d'Agulhe et ses dépendances ; d'autre part lesdits sieurs de Fillere juge mage etc. ont promis comme par ces présentes promettent de payer an- nuellement et à chaque feste saint Michel archange aux- dits sieurs chanoines, leurs scyndic ou fermier la quantité 158 RÉSUMÉ DES: SÉANCES. grains, vins ou argent portée par lesdits abonnements ; de plus la quantité de quatre vingt cartons froment pour toutes.les terres qui ont été défrichées et nouvellement ou- vertes. Suivent enfin, les signatures. des parties qui ont su écrire, et celle du notaire clôture l'acte. En résumé, Messieurs, la.coHégiale: dont. je vous ai esquissé, bien imparfaitement l’histoire, a: eu son impor- tance; nous la retrouvons dans cette pièce, je l’ai constatée bien des fois dans des reconnaissances, féodales. que j'ai eues entre les mains. Sans doute elle n’est pas entourée de: l’auréole glorieuse qui plane sur notre vénérable chapitre cathédral, les:souverains. et les princes de l'Eglise n’y ont pas leur placé marquée ; mais si des documents plus nom- breux étaient exhumés de la poussière et livrés à la publi- cité, la monographie de la collégiale de Saint-Agrève aurait de l'intérêt pour tous ceux qui s'occupent de l’histoire du Velay. Il ne reste plus, Messieurs, qu'à, vous remercier de l'attention bienveillante que vous -axez.prêtée à la lecture de ce modeste travail ; cette indulgence est la plus douce récompense.et le plus précieux encouragement pour votre jeune collègue au milieu de.ses recherches historiques. Avant la fin de la séance, M: Chouvon a bien voulu dire quelques mots de la belle fête de l’agriculture à laquelle nous allons bientôt assister. Sous la haute impulsion de M. le Préfet du dépar- tement, les préparatifs s'avancent rapidement, et nulle part en France il n’y aura de Concours régional aussi MAI. 139 bien installé. On peut déjà en juger par le tableau si pittoresque, si animé que présente cette suite de cha- lets, suivant la courbe gracieuse de notre promenade du Fer-à-cheval. Du perron du Musée, la vue embrasse, à droite et à gauche, sur une étendue de plus de cinq cents mètres, les barraquements construits dans, une forme élégante et commode ; tandis qu’en face, au-delà du rond-point, se déroule un des plus beaux sites que l'imagination puisse rêver. Sur le premier plan est l'hôtel de la préfecture, du côté de sa plus belle façade, à demi-voilée par un rideau de verdure naissante; à travers les grands arbres de la promenade, se laissent apercevoir quelques échappées de la grande place du Breuil, ainsi qu'un petit nombre de maisons de la ville, couronnée dans le lointain par le rocher Corneille que colorent les feux du soleil couchant. Que le temps nous continue ses faveurs, il en a été assez avare dans les mois que nous venons de traverser, et le Puy se sou- viendra du Concours régional de 1860. Nous espérons que la photographie ou un dessin à vol d'oiseau nous en rendra toute la physionomie. On avait craint jusqu'ici que le nombre des concur- rents étrangers ne répondit pas aux magnificences du programme de la fête, mais le chiffre des déclarations aujourd'hui connues dépasse de beaucoup les prévi- sions des ordonnateurs du Concours qui, au lieu de 190 loges, ont dû en faire construire 220. Le Concours départemental annuel que la Société, de concert avec l'autorité supérieure, a eu l'idée de faire coïncider avec le Concours régional, l'exposition 140 RÉSUMÉ DES SÉANCES. artistique et industrielle qu'elle prépare avec une solennité inaccoutumée, la distribution des primes, des prix et des médailles, qui aura lieu dans la séance pu- blique du vendredi 25 mai, ajouteront de l'éclat à cette grande fête de l’agriculture organisée déjà avec succès. La séance publique qui aura lieu le 25 mai, à l’occa- sion du Concours régional, tiendra la place de la séance mensuelle de juin. {Voir le compte-rendu de la séance publique aux Rapports, après la séance de décembre.) A sept heures et demie, la séance est levée. Le Secrétaire, BÉLIBEN. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 5 JUILLET. SOMMAIRE. AGRICULTURE : Ensemencement du blé en lignes. — De l'utilité du rouleau et du foulage des terres après les semailles. — Des magnaneries de MM. Chas, Vinay, de Brive. — Commission nommée pour la visite de la magnanerie de M. Chas. — Echantillons de blé en tiges vertes provenant des semences de froments de Noé et d'Australie données par la Société ; détails donnés par M. de Brive sur leur épiage. — Communication faite par M. le Président sur le concours agricole national de Paris : Race du Mezence ; Exposition de ma- chines. — Hy@iène : Communication de M. le docteur du Garay sur une épidémie observée à Cohade. — Sciences HisroniQu's : Communication de M. Aymard sur des découvertes archéologiques faites au couvent des Dames de l’Instruction (intérieur de la ville). Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. En l’absence de MM. les Secrétaires, M. Sarlandie prend place au bureau. M. le Président fait le dépouillement des ouvrages reçus. AGRICULTURE. — À propos d’un article de M. Bodin, une discussion s'engage sur la question de savoir S'il 142 RÉSUMÉ DES SÉANCES. vaut mieux semer le blé en ligne qu’à la volée. Les membres qui y prennent part concluent à ce que le semage en ligne donne, il est vrai, des produits supé- rieurs, mais il en résulte en même temps une dé- pense en plus de la main-d'œuvre, ce qui diminue et compense même peut-être la plus value du rende- ment. Il suit de là qu’on ne peut guère semer en ligne avec avantage que dans les petites cultures, comme on le fait en Auvergne et dans le Bourbonnais. Un membre qui, dans son exploitation a fait attentivement des expé- riences à ce sujet, évalue que par le semage en ligne on obtient 1/3 de plus de récolte, et qu’en outre on écono- mise moitié de la semence. M. le Président manifeste le vœu qu'un semoir soit acheté et placé à la ferme-école, pour permettre de confirmer le résultat des expériences faites. Il est, en outre, un autre moyen aussi efficace peut- être d'accroître le rendement. Il consiste à fouler le sol après les semailles, et à faire pour les blés ce que font les jardiniers pour leurs légumes. La plante germe plus rapidement, elle acquiert une plus grande force, un plus grand développement qui se traduit en épis plus grands et plus lourds. Il serait donc utile que le paysan perdit de cette répugnance maladroite qu'il a pour le foulage, et que quinze jours après avoir passé la herse sur son champ en fumure, il employât le rouleau. Les principaux agronomes usent de ce procédé, et il serait à désirer qué le campagnard suivit leur exemple. JUILLET 143 A propos d'une lettre d’un membre du Comice d’Alais sur les vers à soie, des observations sont échan- gées entre plusieurs membres sur les trois magnane- ries créées récemment au Puy. Elles appartiennent à MM. Chas, Vinay et de Brive. Un membre informe la Société que l'éducation de 7 onces appartenant à M. Chas, d’après les évaluations du propriétaire, lui rapportera 900 onces, résultat tellement extraordinaire qu'il paraît incroyable, puis- qu'à raison de {8 francs l’once, ainsi qu'on a voulu la lui acheter, il obtiendra un bénéfice net de 18,000 fr. environ. En faisant la part de l'exagération et de la difficulté où l’on est de pouvoir établir à l'avance, et même à la veille de la récolte, le produit d’une éducation , sou- mise, comme chacun le sait, à fant d’éventualités fâcheuses, les résultats obtenus n'en sont pas moins très-concluants;, en mème temps qu'ils sont de nature à arrêter le découragement de quelques sériculteurs qui avaient déjà arraché leurs müriers, ils assignent le rôle que doivent se proposer dans le département ceux qui se livrent à la culture du ver à soie. Ce qu'ils doivent faire, s'ils ne veulent pas encourir de déceptions, c’est de produire seulement et exclu- sivement de la graine ; en Europe, aussi bien qu’en Asie, une maladie est venue s’appesantir sur la séri- culture et vicier ses germes. Notre département sem- ble appelé, par les conditions climatériques où il se trouve, à relever et à régénérer cette industrie; dans nos montagnes, bornons-nous à de modestes exploita- lions : notre sol produira, non pas de ces müûriers 444 RÉSUMÉ DES SÉANCES. pleins de séve, qui se couvrent de feuilles charnues, larges et abondantes, mais de ces arbustes, peut-être en apparence chétifs, malingres, mais aux feuilles soyeuses et savoureuses qui communiquent aux vers qui les mangent une force et des propriétés régénéra- trices. Une commission est nommée pour aller visiter l’édu- cation de M. Chas. Quant aux magnaneries de MM. Vinay et de Brive, elles se font remarquer surtout par une grande égalité dans les: vers, et si elles n’inspirent pas d’aussi riches espérances à leurs propriétaires, elles n’en viennent pas moins confirmer cette opinion que notre départe- ment est admirablement propre à la production de la graine. — Des perfectionnements importants ont été introduits dans ces magnaneries. M. de Brive présente des échantillons de blé vert, provenant de semences données par la Société. Ces semences proviennent de froment de pays, de froment de Noé et de froment d'Australie. Quoique semés en même temps, ils n’ont pas atteint un égal degré de croissance. Le froment de pays con- tient de 35 à 40 grains, mais il est moins précoce que le froment de Noé, qui contient 40 à 45 grains. Il est à remarquer que cette espèce renferme 1/5 environ d’épis carrés, ce qui donne à penser qu'il aurait dû peut-être avoir été semé plus tôt. Quant au froment d'Australie, ses épis contiennent 55 grains environ; il est très-vigoureux, mais il est JUILLET. l _— plus tardif; les deux autres espèces étaient en fleurs qu'il n’était pas encore sorti de sa gaîne. _ On ne peut encore tirer des conclusions définitives sur l'avantage que présenterait la culture de ces trois espèces de froments; mais ils se présentent actuelle- ment sous un tel aspect, qu'on peut sans témérité en conclure que leur propagation dans le pays peut offrir de très-grands avantages. M. le Président fait à la Société une communication sur le Concours national qui à eu lieu à Paris, au mois de juin. Cette exposition, d’après lui, est sans contredit bien plus belle, et elle a bien plus de valeur que celle de 1855; les spécimens de races anglaises y sont encore très-nombreux, mais il faut le reconnaître, cette année, sous le triple rapport de la production du lait, de la viande et du travail, les races françaises peuvent soutenir la concurrence. La race du Mezenc, dont nous avons enfin obtenu la classification, était dignement représentée à l'Expo- sition. Elle a été l’objet de primes très-honorables, et M. le Directeur de l’agriculture a bien voulu , en ren- dant justice à ses qualités multiples, déclarer à notre Président que cette catégorie, qui avait si rapidement et si honorablement pris sa place dans notre exposi- tion nationale, serait désormais conservée. Quant aux expositions des machines, M. Ch. C. de Lafayette signale encore une amélioration des plus sensibles. Selon lui, elle se rapproche des conditions TOME XXII. 10 446 RÉSUMÉ DES SÉANCES, de la pratique, au triple point de vue du prix, de la solidité et de l’usage usuel. Il à remarqué particulièrement des faucheuses, d'origine anglaise, avec lesquelles, il faut le dire, sont entrées bravement en lutte des faucheuses françaises. Les expériences ont eu lieu à Vincennes; chaque concurrent avait à faucher un espace de 20 ares, si- tués dans d'assez mauvaises conditions, et en quelques endroits hérissés d’aspérités. La machine qui à obtenu le prix est d'origine anglaise. Elle a fauché l’espace qui lui était réservé en 25 minutes, c’est-à-dire qu’en deux heures elle eût fauché un hectare. Cette machine coûte environ 5 à 600 fr., et malgré l'élévation du prix, des commandes nombreuses ont été faites. M. Ch. C. de Lafayette a pu également assister à des épreuves de labourage faites au moyen de machines à vapeur. Deux de ces machines peuvent labourer dix hectares dans une journée; malheureusement, leur prix est peu en rapport avec les ressources de nos agriculteurs. Elles coûtent 10,000 fr. environ, et il faut en outre avoir des chevaux pour les trainer. Ces instruments ne pourront s’utiliser dans nos pays que lorsque le gouvernement, le département, l'arrondissement ou la commune voudront se décider à établir une organisation de matériel agricole, ou que celte entreprise sera confiée à des compagnies. HYGiÈèxE. — Conformément à l'ordre du jour. M. le docteur du Garay lit à l'assemblée une communication sur une épidémie charbonneuse observée à Cohade, JUILLET, 147 et qui à donné lieu à un rapport de M. Andrieux, de Brioude. La Société écoute avec le plus vif intérêt la commu- nication de M. du Garay. SCIENCES HISTORIQUES. — M. Aymard prend ensuite la parole et fait un rapport sur des découvertes archéolo- giques faites dans l’intérieur de la ville du Puy, au couvent des Dames de l’Instruction. Ces investigations sont de nature à éclairer davantage la question de plus en plus lumineuse des origines de notre cité, et la Société écoute avec la plus grande attention la com- munication de notre savant Vice-Président au zèle intelligent duquel nous sommes déjà redevables de renseignements aussi nombreux que concluants. MESSIEURS , Les Dames religieuses de l’Instruction au Puy, se pro- posant d'accroître leur établissement, ont acquis et fait démolir une maison limitée au nord par la rue de Vienne, et à l’ouest par la ruelle dite du Musée. Des tranchées profondes, motivées par les nouvelles constructions, ont été ouvertes sur l'emplacement de cette maison et du jardin attenant. Elles permettent d'observer des restes de bâtisses dénotant par leur superposition bien caractérisée que différents édifices se sont succédés à la même place, et que les plus inférieurs de ces vestiges, et par conséquent 448 RÉSUMÉ DES SÉANCES. les plus anciens, doivent remonter à une époque plus ou moins reculée. jo La muraille ouest de la maison est bâtie sur un reste de mur plus épais dont la date peut être déterminée approximativement par des dispositions particulières. On y remarque, en effet, trois arceaux ayant 5 mètres 70 centi- mètres d'ouverture, et qui donnent entrée à des caveaux si- tués sous la ruelle. Le mieux conservé de ces arceaux est légèrement ogival, et l'appareil de la construction est formé de pierres volcaniques bien taillées, de hauteur moyenne et disposées correctement par assises régulières. Le mur nord , en retour du précédent et qui est de même structure, offre une arcade analogue , avec la seule différence qu’elle se dessine plus décidément en plein cintre. À ces signes distinctifs d’une époque où l’ogive commençait à rempla- cer l'arc roman, on reconnait le XIIe siècle, qui a produit dans notre pays de nombreuses églises et d’autres édifices où l’on observe les mêmes caractères. L'existence d’un édifice antérieur est, en outre, attes- tée ici par les caveaux ‘contre lesquels les arceaux du mur ouest ne sont qu'appliqués et dont les ouvertures ne con- cordent pas exactement avec la courbure des voütes. On voit, d’ailleurs, que ces caveaux, l’un en cul-de-four, un autre en berceau, furent, en partie, détruits lors de la construction de la muraille. Il serait difficile d'indiquer l’époque de ces voûtes. On remarque seulement que les pierres d'appareil, plus petites qu'à la muraille et grossièrement taillées ,‘ sont disposées par assises plus ou moins irrégulières. Du Xe au XIIe siècle, les constructions sont généralement plus soignées, et peut- être faudrait-il remonter jusqu’à la période mérovingienne JUILLET, 149 pour trouver des exemples d’une structure si incorrecte. Sans préciser une date plus ou moins conjecturale, bor- nons-nous à constater, d’après tous les détails précédem- ment décrits, que ces voûtes sont certainement antérieures au XIE: siècle. Le sol offrait aussi, à différentes profondeurs, comme une succession de débris formant deux ou peut-être trois couches ou amas distincts : à la partie supérieure, des gravois et matériaux divers se caractérisaient surtout par quelques morceaux de pierres sculptées des XIVe et XVe siè- cles; au-dessous on distinguait des restes plus anciens, parmi lesquels j'ai recueilli des pièces de monnaies , et surtout des méréaux et enseignes de pèlerinage des XIIe et XIIIe siècles, et dont les types inédits seront le sujet d’in- téressantes études; il y avait aussi quelques rares fragments de sculptures. On y à trouvé également des morceaux de ces cornels en terre cuite dont l'usage dans notre ville, d'après ce que rapportent d'anciennes chroniques, remon- terait à l’antiquité paienne (1). A laide de divers frag- ments qui ont été remis à notre confrère M. Vinay et à (1) Un manuscrit que possède notre confrère M. l'abbé Sauzet, contient ce qui suit : « Il est marqué dans un mémoire qu'a M. Gerentes avocat que > lorsque anciennement on venait en procession du peyron de Coursac le jour » de la Dédicace Notre-Dame tout le clergé même la cathédrale y allant alors, > un enfant de chœur, lorsque la procession passait devant Saint-Georges et »> Saint-Vosy, montait sur une grande pierre qui est garnie de figures d’ani- > maux sur laquelle il y a maintenant une croix de pierre à l'entrée du cimetière » Saint-Georges, vis-à-vis l’église Saint-Vosy, lequel enfant de chœur tenant > en main #2 cor de chasse de terre sonnait trois fois dudit cor, faisant allu- > sion aux faux prêtres des idoles qui se servoient d’un cor pour appeler les » infidèles au sacrifice du rocher de Corneille et ensuite ledit enfant rompait 150 RÉSUMÉ DES SÉANCES. moi, il sera possible de restituer la forme de ces curieux instruments. Puis venaient, au-dessous de la muraille, d'autres matériaux et gravois, parmi lesquels on à ren- contré une quantité de morceaux de tuiles plates à rebords et convexes {{egulæ et tmbrices), les unes et les autres épaisses, très-solides et semblables à celles qu’on trouve à St-Paulien (Revession) et dans le sol de l'antique villa d'Espaly près le Puy. A cet égard, les spécimens que j'ai l'honneur de mettre sous les yeux de la Société peuvent servir aux comparaisons. L'un de ces morceaux que m'a remis M. Léon, entrepreneur des travaux, se fait remarquer par un détail qui me semble avoir quelque importance : la face supérieure offre des demi-cercles concentriques » et jetait à terre le cor de terre pour marquer que le paganisme était entière- > ment détruit. » ” Hugues dAvignon, dans son poème La Velleyade imprimé en 1630, rapporte que cette cérémonie avait lieu de son temps le 1er mai; et c’est également le même jour qu'indique notre chroniqueur Médicis en 1533, à l’occasion de « la venue ou entree du roy (François Ir) en la ville du Puy. » Cet auteur nous apprend que le roi s'étant arrêté au château de Polignae, examina »oult de semblables cornets qui y étaient conservés comme souvenirs curieux des pratiques du paganisme. « Et na peu estre extirpee ceste maniere > de cornement par apres car puis ce temps a dure que on vend les cornets au »> Puy ce quils tiennent par inveteree consuetude car pour le pelerinage Nostre » Dame se ne pourroit estre à propos. Non obstant ce que leglise par long » temps apres ordonna pour abattre ceste folie de ces cors faire procession et » sur les statues de cette sottise antique rompre ilceux cors. » L'auteur rapporte ensuite la cérémonie des cors brisés par un clerghon sur « les pierres entaillees a lantique » devant les églises Saint-Georges et Saint-Vosy. Il est, en outre, intéressant de remarquer que l'endroit où ont été recueillis nos fragments de cornets est très-rapproché de celui où avait lieu la cérémonie que je viens de rappeler. Ces débris auraient donc pu provenir des cors que l’on brisait à cette occasion. JUILLET. 151 dessinés en creux, ornement ou peut-être marque de fa- brique qu’on observe également sur les tuiles romaines trouvées à Espaly, à Cheyrac, etc., et que j'ai remarquée aussi sur quelques-unes de celles extraites des fouilles du For ou trouvées en plusieurs autres endroits de la ville. Nos confrères MM. de Payan-Dumoulin et Vinay m'ont, en outre, signalé des poteries rouges vernies du genre de celles appelées samiennes lesquelles ont été trouvées dans la même couche et, avec de semblables morceaux, j'ai re- cueilli moi-même des mains des ouvriers un fragment d’anse d'assez grand vase en poterie grise dont on trouve des ana- logues à Saint-Paulien, et trois médailles petit bronze très- oxidées qui m'ont paru se rapporter au bas-empire. Des pierres, débris de tous genres en grès, brèches vol- caniques et scories étaient entassés avec les gravois:; il y avait surtout des moëllons cubiques de petit appareil, les uns en brèche volcanique, d’autres en tuf scorifié noir et pareils, pour la forme et la matière, à ceux qui forment les substructions de la villa romaine d’Espaly. Parmi tous ces matériaux, on à exhumé deux fragments en grès sculpté qui, d’après les moulures, les ornements et leurs proportions, accusent, l’un la partie supérieure d’une architrave, l’autre un morceau inférieur de corniche absolument semblables à d’antiques débris exhumés précé- demment des fouilles du For et que j'attribue au temple principal de la colonie. Ces curieux restes, qui nous ont été offerts par l'entrepreneur, sont placés au Musée. Enfin des morceaux de charbon de bois étaient mélés à ces matériaux, indice probable de dévastation par le feu, que j'ai constaté également dans les fouilles du for et au- tour de la ville, à Espaly, à Cheyrac, Corsac, ete. 152 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Dans le prolongement de la tranchée, vers le sud et à peu près au même niveau que ces derniers débris, on a exhumé presque tous les os de quatre squelettes humains. Ajoutons que, sur différents points et à la plus grande pro- fondeur du sol, on a observé aussi d’autres restes épars de semblables squelettes, indiquant peut-être que primitive- ment ce lieu aurait fait partie d’un champ de sépulture. 20 Les fondations du mur sud de la maison démolie in- terrompaient la tranchée. Elle a été reprise au-delà dans le sol du jardin, lequel a offert, en différents endroits, des restes d'anciennes substructions. Cette muraille sud, vue dans le sens vertical, est for- mée de deux parties bien distinctes : la supérieure, sans caractères bien déterminables, montre, à une certaine pro- fondeur, la naissance d’une voûte indiquant une des sub- structions dont j'ai parlé. Cette partie du mur avait été bâtie, elle-même, sur un reste de muraille dont les assises régulières et le petit appareil, comparés à ce qu’on voit au-dessus, ne laissent aucun doute à l’égard de leur antériorité. Le même mur, dont la structure dénote une époque fort ancienne, peut-être même gallo-romaine, limitait de ce côté un amas de matériaux et de gravois analogue à ce- lui que j'ai décrit précédemment : couches supérieures dans lesquelles on a rencontré, entre autres, un grand chapiteau sculpté, du XIVe siècle, et des méréaux, mé- dailles et monnaies des XIIe et XIIIe siècles, puis, au-des- sous, des débris de tuiles plates à rebords et convexes, des fragments de poteries, et notamment l'extrémité inférieure d'une amphore que m'a remise l'entrepreneur, des moël- lons cubiques de petit appareil, fragments divers en grès, JUILLET. 155 charbons de bois et restes de squelettes humains, enfin deux médailles romaines, petit bronze, au type des empe- reurs Constantius et Decentius , qui ont été recueillies par notre confrère M. de Chaulnes. Mais ce qui à surtout fixé mon attention, c’est qu'au- dessous des gravois et matériaux ainsi accumulés, à 5 me- tres S0 centimètres de profondeur, et limité au nord par le mur en petit appareil dont j'ai parlé, apparut un pavé formé de galets basaltiques, solidement établi sur un lit de chaux qui, lui-même, reposait sur un terrain argilo- marneux constituant le sous-sol. La largeur de ce pavé n’est pas moins remarquable que sa structure et sa posi- tion : il a 11 mètres et pénètre même sous le mur de clôture sud du jardin, en sorte qu’on peut le supposer plus large. Une autre tranchée parallèle à la précédente, dont elle est distante de 41 mètres, nous a offert le même pavage. On l’a rencontré ici à 8 mètres 20 centimètres de profon- deur. Il est également limité au nord par la fondation du mur sud de la maison démolie. Quant à la tranchée qui, au sud, réunit en retour les deux autres, elle a laissé voir, en partie, d'anciennes sub- structions, entre autres les fondations d’une tour, qui, descendant à une très-grande profondeur, ont sans doute fait disparaître le pavé. La différence de profondeur sur les deux points où j'ai observé ce pavé est de 2 mètres 10 centimètres, et dans la supposition très-probable qu’il existait également dans le sol compris entre les deux tranchées et qui n’a pas eté ex- ploré, il aurait eu de l’est à l’ouest une pente assez notable qui, toutefois, ne l’est pas davantage que pour certaines rues de la ville accessibles aux charrois, 154 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Du reste, cette pente exclut l’idée d’une cour ou d’une aire quelconque qui aurait nécessité un plan horizontal, et l'on peut raisonnablement admettre que le payé indi- que l'existence très-ancienne d’une rue ou d’une voie , laquelle me paraît, en outre, démontrée par l’état d'usure des cailloux , comme dans nos rues les plus fréquentées. Mais à quelle époque aurait servi cette large voie, bordée probablement de sépultures, dont le tracé ne répond à au- cune des rues actuelles, et au sujet de laquelle vainement on interroge les plus anciens documents? La position du pavé sur le sous-sol, les matériaux antiques qui le recou- vrent, le mur probablement antique qui le limite au nord, la direction de la voie, de l’ouest où nos recherches anté- rieures ont placé l’arx, le castrum de la colonie, vers l’est, c’est-à-dire vers le faubourg de la ville conduisant aux routes de Lyon, de Vienne et de Valence qui, elles-mêmes, nous le croyons, ont succédé à des voies romaines, tout ici semble fournir matière à la solution de cet intéressant pro- blème (1). Je ne voudrais pas trop insister sur ce point que viendront, sans doute, éclairer d’autres découvertes ; il faut bien remarquer, cependant, que cette voie, comparée à ce qui existe aujourd’hui, révèle un changement très- notable dans la topographie de cette partie de la ville, par- ticularité qui reporte la pensée au-delà du moyen-âge. On sait, d’ailleurs, que les pavés de rues n’ont pas été usités dans tout le cours du moyen-âge, M. Cheruel nous apprend, dans son savant Dictionnaire des institutions, 1} On sait que la plus importante de ces voies, dont notre savant confrère M. Vinay a mis au jour la chaussée dans sa propriété de Corsac, avait envi- ron 13 mètres de largeur. JUILLET. 455 mœurs el coutumes de la France, 1855, au mot pavage, qu’on ne commença à élablir le pavage de Paris qu'à la fin du XIIe siècle, vers 1185, sous le règne de Philippe-Au- guste. « Les rues, dit-il, étaient tellement fangeuses, qu'on » y semait de la paille ou du foin. C'est de là, dit-on, » qu'est resté à une de ces rues le nom de rue du Fouare. » L'usage du pavage des rues , ajoute-t-il, s’étendit ensuite » aux autres villes de France, comme le prouvent plu- » sieurs ordonnances des rois de France, » (Voyez Rec. des ordonnances , L. 1, p. 79 et 158). Ces données importantes limitent done le champ des investigations à deux hypothèses d’après lesquelles notre pavé ou serait postérieur au XIIe siècle, ou bien signale- rait l’ère gallo-romaine, époque où les pavages étaient généralement usités. Or, on a vu par les matériaux accu- mulés sur ce pavé et par les plus anciennes murailles, que la voie doit être antérieure au XIIe siècle, et dès lors on est conduit à remonter jusqu'aux temps gallo-romains pour assigner la date de cette ancienne route. La Société jugera, par ces précieux indices, des révé- lations que promet à la question des origines de la cité l'exploration attentive et persévérante du sol dans notre ville. Les nombreux débris d’antiquité , inscriptions lapi- daires et sculptures de tous genres qui ont été recueillis jusqu’à ce jour se compléteront, n’en doutons pas, par de nouvelles découvertes, à l’aide desquelles il sera possible de restituer un jour et la topographie antique de la ville et les principaux édifices dont une foule de débris ont déjà démontré l'existence. Ces considérations nous imposent donc le devoir de suivre sur le même point les fouilles qui comprendront encore un certain espace de terrain et dont 156 RÉSUMÉ DES SÉANCES. j'aurai l'honneur de vous rendre compte à mesure qu’elles s’effectueront, afin que les connaisseurs puissent, dans le cours même des travaux, vérifier eux-mêmes l’exacti- tude de mes observations. L'ordre du jour étant épuisé, à six heures la séance est levée. SARLANDIE. Chargé du rapport en l'absence du Secrétaire. SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 2? AOÛT. SOMMAIRE. Lecture des procès-verbaux des deux précédentes séances. — Dons au MUSÉE : Un vase de bronze donné par madame Marguerite de Latour-Maubourg. — Instrument en silex, des fouilles d'Abbeville. — Coffret artistement travaillé. — OuùvrAGEs REÇUS : Du Concours régional du Puy, d’après le Bulletin de la Société d'agriculture de la Lozère. — AGRICULTURE. Industrie sérici- cole : Lettre de M. Chas sur les succès de sa magnanerie. — Arboriculture : De l’érable à sucre, du Canada. — Sciences Hrs10RIQUES : Des baronies du Velay par M. du Molin. — D'une statue de la Vierge du Puy, d’après un Almanach de la Creuse. — PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ : M. le prince Alphonse de Polignac présente lui-même, comme titre d'admission en qualité de membre non résidant, un mémoire sur un nouveau mode de transmission de mouve- ment dans les machines à vapeur. — M. G. de Chaulnes donne lecture d'un mémoire sur un document relatif à l'histoire de la maison de Polignac. Présidence de M. Aymard, vice-président. - A trois heures la séance est ouverte et la parole est donnée , pour la lecture du procès-verbal, à M. Sarlan- die des Rieux, qui, dans la séance de juillet, avait bien voulu tenir la plume en l'absence de MM. les 458 RÉSUMÉ DES SÉANCES, Secrétaires. Le procès-verbal est adopté dans toute sa teneur. Il en est de même du procès-verbal de l’avant-der- nière séance lu par le Secrétaire. Doxs au Musée. — M. le Président fait remarquer sur le bureau un vase de bronze d’un beau caractère, d'un type assez connu, qui décèle l’art antique. C’est un don que madame Marguerite de Latour-Maubourg a ajouté à tous ceux que le Musée doit à cette noble et généreuse famille. M. Aymard fait hommage d'un instrument tran- chant en silex, trouvé dans les fouilles d'Abbeville, et qui est contemporain des ossements fossiles d’élé- phant. La découverte de ces sortes d'objets, dont l’authen- ticité a été reconnue par les plus savants géologues , MM. Hébert, Lartet, Lyell, Poulett-Scrope, etc., vient à l'appui du fossile de Denise pour établir l’antiquité de la race humaine. M. le curé Trinqual offre à la Société, par l’intermé- diaire de M. Aymard, un coffret assez artistement tra. vaillé, qu'on croit avoir appartenu au cardinal de Rohan. OUVRAGES REÇUS. — Parmi les publications adressées à la Société dans le mois de juillet, M. le Président si- gnale le Bulletin de la Société d'agriculture, indus- trie, sciences et arts du département de la Lozère, tome 11, juin 1860. Cette publication, rédigée avec soin par une société à laquelle nous lient intimement des AOÛT 159 rapports de bon voisinage, renferme, outre le remar- quable rapport de M. Roussel sur la prime d'honneur du Concours régional du Puy, une appréciation de ce même Concours par M. Vincens. Nous en extrayons le passage suivant, qui montre avec quelle sympathie nos excellents voisins ont jugé ce qui s’est fait chez nous à cette époque mémorable. « Une disposition surtout, au nombre de celles qui » sont l'œuvre de l’habile administrateur du départe- » ment de la Haute-Loire, m'a paru mériter un éloge » tout spécial. Je veux parler du local destiné à rece- » voir les animaux du Concours, qui s’est trouvé éta- » bli dans des conditions si heureuses, qu'il n’y a pas » lieu d'espérer qu’elles puissent être reproduites d’une » manière aussi satisfaisante dans aucune autre loca- » lité. » AGRICULTURE. — {ndustrie séricicole. — M. le Préfet de la Haute-Loire, dans une lettre à la date du 28 juillet, demande que la Société désigne une commis- sion chargée de suivre les travaux de M. Chas-Plantin, et d'apprécier leurs résultats au sujet de l'éducation des vers à soie qu'il a conduite avec un grand succès dans sa propriété du pont Saint-Laurent. M. Chas écrit lui-même à la Société une lettre rem- plie d'enthousiasme, conviant la Societé à se rendre dans ses magnaneries, et cela dans un intérêt public. Les vers à soie venus d’une graine choisie dans Ja localité ont donné de magnifiques produits. Le grai- nage vient de commencer, et on peut déjà en conce- voir les plus belles espérances. 160 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Les affirmations de M. Chas sont soutenues par le témoignage de plusieurs membres de la Société qui ont déjà visité l'exploitation du pont Neuf-Saint- Laurent. M. le Président de la Société, le Secrétaire, MM. de Brive, de Payan-Dumoulin, Vinay, Balme, du Garay aîné, ont constaté , à plusieurs reprises, le succès des opérations déjà accomplies. Deux de ces membres, M. de Brive et M. Vinay, qui ont aussi des éducations dans leurs propriétés, pensent que les résultats obte- nus, non-seulement chez M. Chas, mais aussi chez eux , et chez d’autres propriétaires, MM. Pichot, Ey- raud-Lafont, au Bon-Pasteur , etc., suffisent déjà pour établir la bonne qualité de la graine de nos montagnes du Velay. Il semblerait que notre coin de terre aurait échappé à la désastreuse épidémie dite Pébrine, qui a envahi toutes les contrées séricicoles de l’Europe et de l'Asie, n'épargnant pas même la Chine, cet antique ber- ceau de l’industrie de la soie. De sorte qu'aux montagnes du Velay serait dévolue la mission de régénérer les races de vers à soie en ce moment atteintes par la maladie. Dieu le veuille ! Soit que le climat de ce pays et la nature des terres volcaniques offrent ensemble ou séparément des éléments favorables à l'éducation du précieux in- secte, toujours est-il reconnu que la soie qu’il nous donne est de qualité supérieure. Pourquoi n’aurait-il pas aussi chez nous le privilége d’avoir pu résister au fléau ? C’est ce que les faits semblent démontrer, si on en juge par les succès déjà obtenus par M. Chas. D’autres expériences du même genre n’aboutiraient à rien moins qu'à généraliser dans ce pays une industrie nouvelle. AOÛT. 461 Le grainage des vers à soie, organisé sur une grande échelle, serait bientôt une source de richesse et de bien-être pour les populations agricoles de quelques- unes de nos contrées. Il y à là un intérèt qui mérite bien d'attirer l’atten- tion de la Société. Par l'organe de son Président, elle charge tous les membres déjà cités de se réunir en comité, de visiter les magnaneries, spécialement celle de M. Chas, et de mettre à l'étude toutes les questions que soulève en ce moment cette industrie au point de vue de l'intérêt local. Elle nommera elle-même son rappor- teur. Arboriculture. — Economie publique. — M. le Pré- sident signale, d’après le Bulletin mensuel de la So- Ciélé impériale d'acclimatation , existence d’un arbre cultivé au Canada, en Amérique. C’est une espèce d'éra- ble dont les habitants de cette ancienne province fran- çaise tirent une grande quantité de matière sucrée, facilement cristallisable et d’une qualité égale à celle que produit la canne à sucre et la betterave. L'introduction de l’érable à sucre dans nos contrées noffrirait pas des difficultés sérieuses, puisque le Canada est exactement placé sous la même latitude que la France, entre le 42e et le 52e degrés. La Société, par l'organe de son Président, deman- dera à la Société impériale d’acclimatation, à laquelle nous lient de bons rapports, quelques sujets de cette espèce d'arbre, dont l'éducation sera confiée aux ha- biles arboriculteurs, nos confrères. TOME XXII. ul 162 RÉSUMÉ DES SÉANCES. SCIENCES HISTORIQUES. — M. le Président entretient l'assemblée d’une s70onographie de la baronie de Ro- che-en-Régnier, dont l’auteur, un de nos collègues, a bien voulu lui confier le manuscrit. M. du Molin poursuit avec ardeur l'histoire des dix-huit baronies du Velay. Dans le courant de l'année 1860, au milieu des travaux de sa présidence à la cour impériale de Rouen, l'éminent magistrat a trouvé le temps de com- pléter trois nouvelles baronies : Lardeyrol, Saint-Vidal, Roche-en-Régnier. Vienne la publication de ces belles et consciencieuses études d'histoire, et notre Société, par le mérite d’un de ses membres, aura conquis un nouveau titre de considération et d'honneur. Bien que ces travaux intéressent plus spécialement l'histoire lo- cale, ils franchiront le modeste horizon de ce pays, et seront accueillis avec faveur dans le monde savant. Les sujets abordés par M. du Molin sont traités avec une si soigneuse érudition dans les détails, avec une telle ampleur de conception dans l’ensemble , qu'on a peine à comprendre comment ils pourraient être mieux traités. Notre auteur est réellement en possession du secret des maîtres dans l’art d'écrire l'histoire. Cha- cune des monographies est un Livre plein d'instruction qui intéressera autant à Paris qu’au Puy. Au récit des faits , à la peinture des mœurs, il a su mêler, avec un sentiment exquis, la description des lieux, des sites pittoresques dont la nature est si prodigue dans ce pays du Velay. Aucun ouvrage moderne ne fait mieux connaître l’état des personnes dans la France du moyen- âge et des temps modernes. Sous des dénominations privées, sous quelques noms propres, l’auteur à su AOUT. 163 faire revivre le haut et puissant baron tel qu'il était et guerroyait sur tous les points du sol de notre France de l’ancien régime. Il nous fait assister à l'édification et à la décadence de sa maison féodale. En lisant la baronie de Lardeyrol, nous voyons dans le marchand Lamic de la rue Saint-Gilles la bourgeoisie aux prises avec la vanité, essayant de s'approprier les armoiries du seigneur baron. Saint-Vidal nous montre le type de ces terribles condottieri des guerres religieuses, de ces chefs de partisans à qui tout est prétexte pour rétablir dans leur plénitude les droits et priviléges féodaux fortement minés par la royauté; tandis que les anti- ques ruines de Roche-en-Régnier nous présentent l'image désolée de ces demeures seigneuriales aban- données de leurs possesseurs et dont les titres et les prérogatives nominales passent successivement dans plusieurs maisons, dont quelques-unes portent de grands noms historiques et ont peu de souci du donjon de la baronie. Telle est la méthode large et féconde suivie dans ces études d'histoire, écrites dans un style à la fois élégant et ferme, où se remarque un grand sentiment d’impar- tialité dégagé de toute idée de caste ou de parti. M. le Président, au nom de la Société tout entière, exprime le vœu que de tels travaux puissent bientôt arriver à leur terme et recevoir la publicité dont ils sont si dignes. Le Secrétaire, se conformant à l’ordre du jour, donne lecture d’un article de l'Almnanach de la Creuse, 1852, communiqué par M. Marchessou. Il y est question 164 RÉSUMÉ DES SÉANCES. d'une statue de la Vierge du Puy, donnée aux Tem- pliers de Bourganeuf dès les premiers temps des croi- sades. Ce document, pouvant mettre sur la voie de recherches historiques importantes pour notre his- toire religieuse, doit être cité in ertenso dans le procès-verbal. Le flambeau de la foi projetait à peine quelques faibles rayons de lumière à travers Les ténèbres de lidolâtrie qui couvraient une grande partie de la Gaule, que déjà la foule des fidèles se rendait en la ville du Puy-en-Velay pour y vénérer deux statues miraculeuses de la sainte Vierge. | Si l’on en croit les vieilles chroniques, ces images y avaient été portées sur l'aile des anges, et, par les mira- cles qu’elles opéraient, contribuèrent autant à la conver- sion des païens que la parole des ministres de l'Evangile. Longues années après cette époque, le sire Raoul de Montgeniers , seigneur de celte contrée , avait joint sa ban- nière à celle de Philippe-Auguste et suivi son souverain dans les plaines de Ja Palestine, où ce prince avait réuni son armée à celle de Richard d'Angleterre, pour affranchir le saint Sépulcre de la domination des Musulmans. La fortune trahit le courage du noble seigneur de Mont- eniers : fait prisonnier sous les murs de Ptolemais, il resta dans les fers des infidèles jusqu’au jour où Engerrand de Beaumanoir, grand-maitre des chevaliers du Temple, brisa sa chaîne en échangeant ce preux défenseur de la Croix contre un favori du soudan que le sort des armes avait mis en sa puissance. AOÛT. 165 En reconnaissance d’un si grand bienfait, Raoul , de re- tour dans sa patrie, fit présent à son libérateur d’une des statues de Ia mère de Dieu. Le grand-maître députa quatre chevaliers en la ville du Puy, à qui remise fut faite du don précieux de l’illustre croisé. Le château de Bourganeuf, situé près la rivière du Thaurion , était une des principales commanderies de l'or- dre; c’est dans les murs de cette citadelle que fut déposée l’image de Notre-Dame. La garde et la sûreté du château mettait obstacle à ce que les fidèles pussent venir présenter leurs vœux et leurs adorations à la vierge divine. Il fut décidé par le chapitre de l’ordre qu’une chapelle serait élevée dans la forêt qui Joignait la forteresse, et qu'un prêtre, entretenu aux frais du Temple, chaque jour célébrerait la messe devant la mi- raculeuse image. Celte sainte statue est la même que celle que les âmes pieuses honorent aujourd’hui sous le nom de Notre-Dame du Puy. Plus de six cents ans se sont écoulés depuis que les vœux, les prières et les offrandes des nombreuses géné- rations qui se sont succédé ont véneré la sainte Vierge dans l’humble chapelle qui s'élève à l'extrémité supérieure de la ville de Bourganeuf, Après que le Souverain-Pontife et Philippe-le-Bel eurent anéanti les chevaliers du Temple, l’ordre de Saint-Jean-de- Jérusalem, qui s'enrichit d'une partie de leurs dépouilles, joignit à ses vastes domaines la riche commanderie de Bour- ganeuf, qu’il créa chef-lieu de la langue d'Auvergne, Ces nouveaux possesseurs dotèrent la chapelle d’une rente assez considérable, pour assurer l'existence du 166 - RÉSUMÉ DES SÉANCES, ministre chargé d'y célébrer les saints mystères, et d'y faire entendre la parole de l'Evangile. Les ornements de l’édi- fice et les frais de culte furent laissés à la, dévotion des fidèles, les nombreuses offrandes déposées dans le sanc- tuaire étaient plus que suffisantes pour faire face à ces dépenses. Aussi, la chapelle possédait un petit trésor qui était administré par un syndic nommé par le grand prieur d'Auvergne. Cet antique monument, bâti par les cheva- liers du Temple, n’existe plus. La main du temps avait lé- zardé ces murailles élevées à l’époque des croisades, et, depuis 1746, un nouvel édifice a remplacé l’ancien. Pour faire face aux dépenses que nécessitait la réédifica- tion de la chapelle, tous les habitants de Bourganeuf, sans en excepter les plus indigents, déposèrent sur l'autel de la sainte Vierge une offrande proportionnée à leur fortune; ceux qui ne purent fournir de l'argent , donnèrent leur travail ou des matériaux nécessaires à la construction du nouveau temple. En peu de mois la chapelle s’éleva sur d’autres fondements, et plus vaste et plus brillante qu’elle n'avait été à son origine; et les fidèles purent lire sur le frontispice du lieu saint cette inscription qui y avait été gravée par les premiers fondateurs : Virgini Dei parenti miseris succurrenti. Jusqu'en 1795, Notre-Dame du Puy reçut les vœux, les prières et les hommages des nombreuses populations qui venaient s’agenouiller au pied de ses autels, et chanter des cantiques à sa louange. A cette époque, de funeste mémoire, son temple fut profané ; les iconoclastes révolutionnaires portèrent la — AOUT. 167 hache jusque dans le sanctuaire, et foulèrent aux pieds la statue de celle qui, depuis tant d'années, est l'objet d’un culte sacré. Mais il est écrit dans les livres saints que l'enfer ne pré- vaudra jamais et que la lumière de la foi, comme un autre soleil, brillera sur l'univers jusqu’à la consommation des siècles. L'image échappa miraculeusement au marteau des profanateurs. Une pauvre femme s’en empara et courut la cacher dans son humble demeure, qui devint le temple où les fidèles allaient secrètement et à travers les plus grands dangers célébrer les mystères de notre religion. Lorsque la France eut brisé le joug de fer qui la tenait courbée sous la hache, et que chacun put librement suivre la foi de ses pères, la population entière de Bourganeuf et des campagnes environnantes relira l’image de la Vierge de l’asile où la dévotion l'avait cachée , et la rapporta pro- cessionnellement sur l'autel que lui avaient élevé les va- leureux chevaliers du Temple. (Extrait de l'Amanach de la Creuse, 1852. PERSONNEL DE LA SOCIÉTÉ. — M. le prince Alphonse de Polignac, qui depuis quelques jours est heureux de se trouver dans le pays qui fut le berceau de sa famille , a désiré, ainsi que son ami M. Vincenot, capitaine d'artillerie, venir prendre part aux travaux de la séance. M. le Président lui adresse quelques compliments de bienvenue, auxquels le prince répond avec émotion , affirmant avec chaleur que la Haute-Loire et le Puy, au- quel le rattachent tant de souvenirs, sera désormais son pays d'adoption. Le prince a été profondément touché 168 RÉSUMÉ DES SÉANCES. de l'attention que la Société a donnée à ses travaux, et a vu avec plaisir qu’on n'avait pas attendu sa visite pour apprécier, comme elles le méritent, les études qui donnent à son nom un éclat nouveau. La lecture d’un passage du procès-verbal de la séance mensuelle du 3 juin 1858, faite par M. le Président, lui a montré avec quel intérêt la Société s’enquiert de tout ce qui touche au nom historique qu'il porte. Sur sa demande écrite, M. le Président a nommé une commission chargée d'apprécier sa candidature au titre de membre non résidant. L'ouvrage offert comme titre d'admission, entre au- tres nombreux ouvrages, est une notice sur un nou- veau mode de transmission du mouvement relatif aux machines à vapeur. M. de Payan-Dumoulin, nommé rapporteur de la commission, composée en outre de MM. Robert Félix et du Garay, voudra bien rendre compte à la Société de l'ouvrage de M. le Prince. Avant la fin de la séance, M. Gabriël de Chaulnes donne lecture d'un mémoire écouté avec faveur et qui a pour titre : Echange de la terre de Saint-Paulien avec celle de Mercœur, passé par le seigneur de Poli- gnac avec Mgr l'évéque du Puy. Ce sujet lui fournit l’occasion de complimenter spirituellement M. le prince de Polignac. A six heures, la séance est levée. Le Secrétarre , BÉLIBEN. SEANCE MENSUELLE DU JEUDI 8 NOVEMBRE SOMMAIRE Lecture du procès-verbal. — Musée : Dons de quelques fragments de pierres gothiques ; d’un ancien instrument ; de quinze belles médailles historiques lrappées à la monnaie de Paris. — Ovvraces Reçus : Notice sur /e vert de Chine, par M. Natalis Rondot. — De la poésie au XIX® siècle, par M. le vicomte de Saint-Poncy. — AGRICULTURE : Expériences sur l'emploi des engrais phosphatés. — Dépôt de cette précieuse substance indiqué par M. Bertrand de Doue. — Lettres de l’Inspecteur d'académie M. Topin enga- seant les instituteurs à s'occuper de quelques travaux pratiques d'agriculture. — Encouragement accordé à l'instituteur de Chaspinhae M. Ambert. — Rap- port de M. de Brive sur le rendement des semences de froment distribuées par la Société ; Expériences faites par MM. Ch. C. de Lafayette, Chouvon et Nicolas. — Vacherie-modéle de Chadenac : Allocation accordée à cette institution. — Piscicullure : Du vote du Conseil général pour l'organisation d’un établissement de pisciculture au lac du Bouchet. — Arboriculture : Renvoi à l'examen de M. Chouvon d’un travail de M. le docteur Pigeaux sur la taille des arbres. — EcoNoMIE PUBLIQUE : Travail de M. Best sur les biens communaux. — Rapport de M. du Garay sur la question mulassière. — PERSONNEL DE LA Société : Rapport de M. dè Payan-Dumoulin sur la candidature de M. le prince de Polignac, admis à l'unanimité comme membre non résidant. — M. Dubois, de Saint-Etienne-de-Lugdarès, et M. l'abbé Sire, demandent leur admission dans la Société; Commissions nommées pour l'examen de ces candidatures. — Socrérés savanres : Echange des publica- tions de la Société avec celles de la Société générale de l'Yonne, 470 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. La séance s'ouvre à trois heures par la lecture du procès-verbal qui est adopté sans réclamation. Doxs au Musée. — Devant le bureau sont disposés plusieurs pierres ou fragments de pierre destinés ‘au Musée lapidaire : un chäpiteau gothique du XIVe siècle, donné par M. Alexandre Souveton, maître-maçon ; Deux fragments de figures en pierre calcaire du XVe siècle, trouvés dans les réparations de la maison de M. Perrin, boulanger, et donnés par lui; Instrument ancien, de la forme de l’aissette, décou- vert près de Nirande, commune de Cayres, par le maire M. Chanial; Plusieurs pierres provenant des fondations de la maison des dames de l’Instruction au Puy, offertes au Musée par M. Léon, entrepreneur. M. le Président fait passer sous les yeux des mem- bres de la Société quinze belles médailles, frappées à la monnaie de Paris, ayant trait à l’histoire contempo- raine et adressées au Musée par le Gouvernement. M. le Maire de la ville est l'intermédiaire du don de ces médailles, dont la plupart sont d’une magnifique exécution. Ouvraces REcus. — M. le Président signale dans le nombre considérable des publications et des ouvrages que la Société a reçus depuis le mois d'août : lo Une notice sur le vert de Chine et sur la teinture en vert, par M. Natalis Rondot, membre non-résidant; 2° Un NOVEMBRE. 174 ouvrage intitulé : La Poésie au XIXe siècle et impres- sions d'un poète, par un compatriote, M. le vicomte de Saint-Poncy. AGRIÇULTURE. — Le Bulletin des séances de la Société impériale et centrale d'Agriculture de France, dans le compte-rendu mensuel (2e série, t. xv), renferme une note relative à des expériences sur l'emploi agricole des engrais phosphatés, par M. le marquis de Vibrais. M. le Président fait remarquer que tout ce quise rat- tache à ce sujet est digne d'attention. De savants chi- nistes, parmi-lesquels M. Elie de Beaumont, ont montré combien était utile à la production des céréales et des plantes légumineuses l'acide phosphorique. Ils ont pré- vu qu'un jour cetélément, si essentiel au sol arable, pourrait bien s’épuiser; mais en même temps, ils ont porté leur pensée sur les amas de cette matière pré- cieuse que la nature, toujours si généreuse, tient en réserve, en plusieurs endroits, dans le sein de la terre. Il serait donc d’une importance extrème que l’on connüt bien les lieux favorisés qui possèdent ces mo- dules de chaux phosphatée, qu’on dit provenir d’an- tiques dépôts de coquillages et de fossiles, et qui se trouvent le plus souvent dans les assises inférieures des terrains crétacés. Il serait donc à désirer, pour que notre agriculture püt jouir d’une exploitation de ce puissant engrais naturel, que nos géologues voulussent bien indiquer, dans ce pays, les localités qui le con- tiennent. A l'appel de M. le Président, un membre cite les terrains calcaires de Chavagnac près Paulhaguet , 172 RÉSUMÉ DES SÉANCES. comme riche en phosphates de chaux. Mais M. Ber- trand de Doue dissipe cette illusion en faisant remar- quer qu'on a confonduet qu'on à pris des fluates de chaux pour des phosphates. Il ne connaît d’autres dépôts de phosphates que dans la commune d'Alleyras, répandus dans des couches d'argile dont se servent les potiers. Quant à l'emploi de cet engrais; il doit être fait avec discernement. Ainsi les phosphates de chaux ne produiraient aucun effet dans un sol renfermant déjà des principes phosphatés. Il importe done, pour régler l'emploi non-seulement des phosphates, mais de tout amendement et de tout engrais, de bien con- naître les éléments dont une terre se compose, et l'on n'y parviendra qu'en soumettant à l'analyse chimique le sol qu’on prétend féconder : à cette condition seule nous aurons une bonne agriculture, une agriculture rationnelle. _Ces considérations ramènent naturellement l'éternel sujet de l’organisation d’un cours d'analyses chimiques au sein de la Société. Il faut de toute nécessité en venir là; cette question est müre, les données en sont connues, elle attend une prompte solution. IL y va de la dignité d’un corps à qui revient la mission de guider le pays dans la voie du progrès. M. le Président donne lecture de deux lettres de M. Topin, inspecteur de l’Académie de Clermont en résidence au Puy. Ces lettres, qu'il a reçues en com- munication, ont été adressées, l’une aux deux inspec- teurs des écoles primaires du département, et l’autre NOVEMBRE 475 à l'institnteur public de la commune de Goudet; en voici la teneur : ; Au Puy, le 5 juin 1860. MONSIEUR L'INSPECTEUR , Dans les magnifiques fêtes qui viennent de se célébrer au Puy, en l’honneur de l’agriculture, et dans les comptes- rendus de la Société qui encourage si efficacement l'appli- cation de cette science dans nos montagnes, quelques-uns de nos instituteurs ont honorablement figuré et participé aux récompenses accordées, Nous ne saurionstrop engager leurs collègues à entrer dans cette bonne voie et à inspi- rer aux familles rurales le goût des améliorations et des bonnes méthodes. Retenir les enfants du peunle sur le sol qui les a vusnaitre, leur apprendre à l'aimer et à le fé- conder, combattre ces tendances de déclassement qui sont comme la fièvre de notre siècle, arrêter lémigration si désastreuse de nos campagnes; €’est travailler pour l’ordre, le bien-être et la moralilé des masses. Je ne saurais donc trop, Monsieur l’Inspecteur, vous re- commander de me signaler d’une manière toute particulière les maîtres qui comprendront et mettront en pratique les sages conseils que vous leur donnerez à ce sujet; du reste, ils exécuteront ainsi les préceptes reçus à l’école Normale el dans les conférences que j'ai eu occasion de leur faire. Vous ne manquerez pas de les engager à consigner par écrit et dans des rapports détaillés que vous m’adresserez, 174 RÉSUMÉ DES SÉANCES les résultats des utiles applications qu’ils auront faites de leurs connaissances en agriculture ; et, de mon côté, je m'empresserai d'adresser ces rapports à l'honorable Société du Puy, dont les encouragements ne font jamais défaut à ce qu'il ya de bon et d'utile dans le département de la Haute-Loire. Agréez, Monsieur l’Inspecteur, l'assurance de ma consi- déralion très-distinguée. L'Inspecteur d’Académie , TOPIN. Au Puy, le 5 juin 1860. MONSIEUR , Vous m'étiez signalé comme un des Maîtres qui s’occu- paient avec le plus de goût et de succès dans l’enseigne- ment de l'agriculture; vous paraissiez disposé à faire d’utiles applications de cette science que nous avons tant à cœur d'encourager et de propager par les soins et par l'influence des hommes qui inspirent et dirigent le peuple de la Haute-Loire. À mon très-grand étonnement, je ne vous ai pas vu figurer parmi ceux de vos collègues que la Société d'agriculture du Puy vient de récompenser, et ce- pendant, je vous ai fait particulièrement nommer à Goudet, résidence qui offre toutes sortes de ressources pour les ex- périences agricoles. D ne re — NOVEMBRE. 17 J'aime à espérer que vous allez faire de louables efforts et que vous marcherez résolûment dans une voie qui offre aux Instituteurs intelligents honneur et profit. Cette lettre ne s'adresse pas seulement à vous seul, mais à ceux de vos collègues qui ont manifesté les mêmes dispositions que vous. Veuillez, dans l’occasion, la leur communiquer ; engagez-les de ma part à faire d’utiles expériences et à constater les résultats par un mémoire qu'ils m’adresseront, et que je serais heureux de trans- mettre avec mes observations à l’honorable Société qui encourage nos Instituteurs avec un si généreux empresse- ment. Agréez, Monsieur, l'assurance de ma considération dis- linguée. L'Inspecteur d'Académie , TOPIN. Ces lettres témoignent les bons rapports qui unissent la Société d'agriculture et l’Instruction primaire. Plusieurs instituteurs étaient déjà dans les dispositions dans lesquelles M. l’Inspecteur désire voir ses subor- donnés de l'instruction primaire au sujet de cette partie de l’enseignement qui a rapport à l’agriculture. La Société compte quelques auxiliaires dévoués dans les écoles rurales. Elle reçoit d'eux des rapports inté- ressants,sur des expériences entreprises dans la mesure des moyens que le temps et le lieu leur permettent de mettre en œuvre. Ces expériences agricoles, bien 476 RÉSUMÉ DES SÉANCES. que peu étendues, ne sont pas perdues comme ensei- gnement; elles servent parfois de modèle. Dans les modestes travaux agricoles de l’Instituteur, les popu- lations des campagnes trouvent l'exemple à côté du précepte; l’un et l’autre est nécessaire pour les déter- miner à quitter l’ornière de la routine. M. le Président exprime sa satisfaction de tels com- mencements etse charge, au nom de la Société qui l'y invite unanimement, d'écrire à M. l’Inspecteur pour le remercier de son généreux concours à l'œuvre “ommune. A la suite de cette communication, qui a excité l’in- térèt, M. le Président a donné lecture d’une lettre de M. Chaudier, instituteur public aux Villettes, et mem- bre non-résidant. Cet honorable confrère remercie la Société de la part qui revient à cette dernière dans l'accueil bienveillant qu'il a trouvé auprès du Conseil général du département. Le Conseil a apprécié ses travaux agricoles et lui continue l'allocation que M. de Brive avait demandée pour lui. M. le Président appelle encore l'attention de la So- ciété sur un autre instituteur, non moins dévoué aux travaux de l’agriculture qu'à ses modestes fonctions, M. Ambert, que l'autorité universitaire a rapproché du chef-lieu eta placé à Chaspinhac. Dans la commune de Saint-Julien-Molhesabath, ilavaitsuivisur une petite échelle des expériences agricoles d’un bon exemple, ayant lui-même défriché dans un pâtural le terrain qui servait à ses études. Aujourd'hui, plus rapproché de nous, il se propose d'appliquer dans sa nouvelle NOVEMBRE 477 résidence, avec plus de suite, les connaissances qu'il possède. M. le Président demande pour cet instituteur capable et zélé, une faible allocation de 30 francs qui lui sera donnée à titre d'encouragement et pour l'achat d'un instrument d'agriculture. Cette proposition obtient l'adhésion de l’Assemblée. L'ordre du jour appelle la lecture d’un rapport de M. de Brive sur le rendement de semences de fro- ments dits de Noé et d'Australie, comparés avec le froment du pays, MESSIEURS . La Société d'agriculture, justement préoceupée de la fai- blesse du rendement moyen que donnent nos blés dans le département, a pensé que l’une des causes de cette infério- rité pouvait être l'espèce du blé généralement ensemencé par nos cultivateurs. Elle à done voulu tenter l'expérimen- lation successive des diverses espèces de blés cultivés sur les divers points du territoire, et renommés pour leur ren- dement. À cet effet, elle a fait distribuer, dans l'automne dernier, à divers de ses membres, du froment d'Australie et du froment de Noé, en les invitant à les semer compara- tivement avec l'espèce usitée dans le pays et à lui faire con- naître le résultat de leurs expériences. J'ai été l’un de ces membres, et c’est pour satisfaire à un devoir et à vos désirs que je viens vous faire le rapport des faits qui ont accompagné mon expérimentation. TOME XXII. 19 178 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Une surface d’un hectare, ayant produit un très-beau trèfle l’année précédente, avait été préparée pour mon se- mis. Dans les premiers jours d'octobre, je semai, aux deux extrémités de ce champ, 1 hectolitre, 60 litres de froment, à raison de 2 hectolitres à l’hectare, qui représentent la quan- tité de semence que je répands habituellement par hectare, Au centre, côte à côte et dans les mêmes conditions, j'ai semé les 20 litres de froment d'Australie et les 20 litres de froment de Noé qui m’avaient été confiés par la Société. Ces trois espèces de froment ont levé également bien, mais elles ont pu être distinguées presque immédiatement par la cou- leur plus ou moins foncée de leur végétation. Le froment d'Australie présentait la couleur la plus foncée, qui est or- dinairement le signe d’une plus vigoureuse végétation. Le froment de Noé avait une couleur pâle et terne et le froment du pays une couleur plus jaune. Ils ont parfaitement résisté les uns et les autres aux froids de l'hiver. Au printemps, ils ont tous poussé vigoureusement, le froment d'Australie conservant toujours sur les deux autres une apparence de végétation plus luxuriante. Le froment de Noé a épié le pre- mier, huit jours avant le froment de pays et douze jours avant celui d'Australie. À ce moment le froment d'Australie avait une hauteur de 1 mètre 40 centimètres, tandis que les froments de pays et de Noé n'avaient atteint que 1 mètre environ. La paille du froment d'Australie était plus grossière et plus forte, celle du Noé plus fine et plus blanche que celle même du froment de pays. Le premier et le second avaient des épis sans barbes. C’est à cette circonstance que j'attribue principalement la faculté qu'ont eue ces deux espèces de résister à plusieurs pluies qui avaient couché presque complètement le froment de pays. On concoit, en NOVEMBRE, 479 eflet, que la charge des gouttes d’eau qui s'attachent à cha- que arète forme un poids, relativement considérable, qui entraine vers la terre notre froment. Le froment de Noé a atteint le premier la maturité, le froment du pays ensuite, etle froment d'Australie le dernier. Le froment de Noé, à raison sans doute de sa précocité, s'égraine facilement et me paraît devoir être récolté de bonne heure. Les épis du froment d'Australie contenaient en moyenne de 55 à 60 grains, ceux de Noé de 45 à 50, et ceux du pays de 40 à 45. Le froment de Noé présentait plus d'un dixième d’épis cariés. Malgré cette circonstance, les rendements à l’hectare ont été dans la proportion suivante : ErOMENUAeANOE EE 26 hectolitres DOM DAYS Le chat cr truc 24 nan AUS TAN. 2. nie heiel-reust 16 — Quant à la qualité, vous pourrez en juger à la vue par les échantillons que je soumets à votre appréciation. Les grains du blé de pays sont plus gros et plus longs, ceux de Noé sont un peu plus petits, mais plus ronds et plus fins, ceux de l’Australie sont petits, retraits et ridés. Je les ai pesés {ous avec soin, el j'ai trouvé les poids suivants : Froment de Noé....... 78 kilog. 500 gr. l’hectolitre. —"ude pays. ....: 78 kilog. — — d'Australie. ... 76 kilog. 500 gr. — Ces résultats ne peuvent être considérés comme définitifs, une infinité de circonstances peuvent en effet modifier les rendements relatifs; mais ils peuvent servir de base à de nouvelles expériences qui, en confirmant ou en modiliant 180 RÉSUMÉ DES SÉANCES. les résultats que j'ai obtenus, finiront par porter la lumière sur une question agricole importante et qui, avec raison, avait appelé l'attention de la Société d'agriculture. La différence entre le produit du froment de Noé et du froment de pays est peu considérable, Mais ce qui me ferait douner la préférence au premier, c’est la faculté qu'il pos- sède de résister mieux à la verse et de donner par consé- quent, à la longue, un rendement moyen supérieur à tous les autres. Pour que mon expérience fût complète, je sais qu’il aurait fallu encore soumettre ces divers blés à la mouture et ap- précier la différence en quantité et en qualité de leur ren- dement en farine. J'ai ensemencé, cette année, un hectare entier de froment de Noé. Cette expérience, sur une plus grande échelle, de- vra être plus concluante et je la pousserai jusqu'au bout, en faisant apprécier à la mouture le mérite de ce blé. Cette nouvelle expérimentation donnera lieu, Messieurs, à un nouveau rapport, que je m'empresserai de vous soumettre l’année prochaine. M. Ch. C. de Lafayette adopte les conclusions de ce rapport, autant qu'il en à pu juger par les apparences de la récolte sur pied, n'ayant pu encore la faire battre. De ces conclusions, quelque peu contredites cependant par M. Chouvon, il résulte que le froment de Noé mé- rite d’être répandu de préférence à celui d'Australie et concurremment avec le froment du pays et d’autres froments étrangers déjà éprouvés, tels que le froment Doniol (Hickling), etc. NOVEMBRE. 4181 Les expériences faites par M. Nicolas à la ferme de Malaval confirment cette opinion; elle est fondée sur les résultats consignés ci-dessous. MESSIEURS , Les blés de Noé et d'Australie qui nous ont été remis par la Société d'agriculture, ainsi que le blé Hickling que nous cultivons depuis quatre années, dans la propriété de l’école Normale, etqui a donné à chaque récolte des résultats très- satisfaisants, ont été ensemencés, dans les mêmes condi- tions, dans un champ de 410 ares 10 centiares de superticie, et nous ont donné les résultats suivants : Le blé de Noé à produit 6 doubles décalitres, 5 litres sur 5 ares 24 centiares de surface, ce qui porte le rendement d'un hectare à 58 hectolitres 60 litres; celui d'Australie à produit 6 doubles décalitres 45 litres, sur 5 ares 56 cen- tiares, soit 40 hectolitres 16 litres par hectare; et enfin le rendement du blé Hickling s’est élevé à 7 doubles décalitres sur 5 ares 50 centiares, ou, par hectare, 40 hectolitres. Si maintenant on établit une proportion entre la quantité de grain ensemencée pour chaque variété, qui a été de 9 li- tres pour les blés de Noé et d'Australie et de 10 litres pour le blé Hickling, et la semence employée généralement par hectare, c’est-à-dire 2 hectolitres et demi, on obtient les chiffres suivants pour le rendement de ces mêmes blés : Pour le blé de Noé, 54 hectol. 72 litres par hectare. — d'Australie, 57 hectol. 50 litres = — Hickling, 55 hectolitres. — 482 RÉSUMÉ DES SÉANCES. D'après ces résultats, le blé d'Australie donne le plus fort rendement, mais son grain, moins lourd et moins beau que celui de Noé, ne se vend pas autant que ce dernier, de sorte qu'il n°y a pas compensation entre la différence de rende- ment et celle du prix de l'hectolitre. Le blé de Noé a de plus le grand avantage d’avoir une végétation très-régulière et d'arriver plus vite à maturité. Notre blé Hickling aurait, sans doute, donné plus de pro- duit que les deux autres et aurait pu se vendre au même prix s’il n'avait pas été atteint de la rouille, maladie qui l'a fait mürir inégalement et qui a rendu la récolte inférieure en qualité à celle des autres variétés. Les expériences que nous recommencons celte année nous permettront de donner une appréciation plus exacte sur ces diverses variétés de blé. En présence de pareils essais, les agronomes de l'Assemblée sont d'avis de pousser vigoureusement l'expérience, de ne s'arrêter qu'après s'être mis en possession de semences capables d'améliorer sensible- ment la production, à moins qu'il ne devienne avéré que cette faiblesse de rendement que nous déplorons, provient non de la semence mais de l'insuffisance de la culture; ce que M. Chouvon est assez porté à croire. Vacherie. — M. le Président annonce à la Société que le Conseil général, sur la proposition de M. le Préfet, a maintenu l'allocation accordée à la Vacherie de la ferme de Chadenac, placée dans les mains des frères de ee — NOVEMBRE. 1S5 Saint-François-Régis. M. le préfet Emile Paul, qui ne reste étranger à aucun des intérèts de ce pays, a voulu juger par lui-même de l’état de cet établissement, et après une visite qui lui a permis de tout examiner avec détail, il a donné au sein du Conseil général des renseignements qui ont amené un vote favorable, En accordant son appui à l'institution de Chadenac, le onseil à exprimé le désir de la voir placée sous le patronage et la surveillance de la Société d'agriculture, et qu'une commission prise parmi les membres de la Société lui présente, chaque année, un rapport sur la situation de la Vacherie. Pisciculture. — La Société apprend encore avec un vif intérêt que le Conseil général a voté des fonds pour faire commencer les travaux d’un établissement de pisciculture au lac du Bouchet, déjà inauguré au mois de mai de l’année 1859, par M. le préfet, M. Paul de Rostan, qui a lancé le premier poisson dans le lac; cet établissement était depuis longtemps dans les vœux de la Société. Il est vrai qu’elle subit une réduction de 200 fr. à l’article de son budget intitulé Agriculture ; mais en revanche, elle voit la réalisation d’un projet dont elle attend beaucoup pour le bien-être du pays. Arboriculture. — M. le Président renvoie à l'examen de M. Chouvon un travail de M. le docteur Pigeaux sur la taille des arbres. ECONOMIE PUBLIQUE. — M Best, membre résidant, fait hommage à la Société d'une dissertation qu'il vient de 184 RÉSUMÉ DES SÉANCES. publier sur les biens communaux de la Haute-Loire. Bien qu'il ne soit pas dans les habitudes de la Société de provoquer un jugement critique sur les travaux de ses membres, cependant la question soulevée par M. Best a tant d'actualité, elle offre un intérêt si grand, que par dérogation l’Assemblée décide avoir sur l'ouvrage de M. Best l'opinion d’un autre de ses membres qui a écrit sur le même sujet et qu'elle charge M. de Fontpertuis de lui rendre compte de la Dissertation sur les biens communaur. M. le Président fait ressortir tous les avanfages que certaines localités pourraient retirer d’un meilleur usage des terrains communaux, et à ce sujet il cite l'heureuse entreprise de M. Philip, ancien maire de St-Paulien, qui, à force de persévérance et de dévoü- ment, est parvenu à rompre de très-vives résistances , et à transformer , en peu de temps, un mauvais pâtu- ral toujours foulé, incapable de fournir aux troupeaux une très-maigre pitance, en une belle terre, qui est aujourd'hui pour la commune une précieuse ressource, et lui fournissant un reveuu annuel de 1,400 fr. ; là, ajoute M. le Président, est le modèle de ce qui devrait ètre fait dans plusieurs localités. L'ordre du jour appelle la lecture du rapport de M. Balme du Garay sur la question mulassière. MESSIEURS, Dans notre dernière séance, Monsieur le Président me chargea d’analyser le rapport de M. Brossard, Président de NOVEMBRE. 185 la commission chargée de l'exposition mulassière au con- cours régional de Poitiers, tenu du 44 an 15 mai 4860. Je remercie Monsieur le Président de s'être souvenu que je m'étais déjà occupé de cette question avec un vif gntérôêt. Je savais, par les résultats obtenus dans l'arrondissement et par des expériences personnelles, que le cheval Anglais el tous les types analogues, trop délicats pour nos climats rigoureux et pour l’incurie de nos éleveurs, pas assez sobres pour notre département, ne pourraient jamais réussir, sauf quelques exceptions fort souvent citées à l'encontre, et que je pourrais comparer à desplantes rares élevées avec soin en serre chaude. Aussi ai-je entrepris ce travail avec plaisir, espérant que la Société d'agricuiture du Puy. qui cherche avant tout à améliorer la position de nos cultivateurs . voudra bien imiter l’exemple de la Société de Poitiers qui, par une importante innovation, a recu dans son concours régional les animaux de la race mulassière, jusqu'alors exclus des concours régionaux, et suivra l'impulsion donnée par M. le ministre de l’agriculture, qui a fait venir à Paris les baudets exposés à Poitiers, pour les comparer aux baudets de la Gascogne et des Pyrénées. Le rapport de M. Brossard, dans lequel j'ai puisé ces renseignements, quoique très-long en lui-même, n'offre cependant que très-peu de choses à notre analyse, deux pages au plus dans lesquelles il nous fait la description de trois espèces de baudets, et donne quelques conseils sur le choix de la jument. Je passe sous silence ce qui ne peut intéresser que le département de la Vienne, ainsi que le signalement des baudets lauréats que vous n'avez point vus, et les noms et 186 RÉSUMÉ DES SÉANCES demeures des propriétaires que vous ne connaissez pas davantage. Pour compléter le rapport de M. Brossard, j'ai puisé dans un article de M. Eugène Gayot, inséré dans le Journal d'agriculture pratique, sur l'industrie mulassière ens Poitou, de nombreux détails d’autant plus précieux, pour nous autres peu au fait de ces’sortes de choses, qu’ils sont élémentaires. On distingue trois espèces dans les baudets du Poitou, considérés généralement comme les plus beaux de tous. 10 Le baudet de race pure, qui a le poil fin même à l’encolure et à la queue, le paturon court, le boulet gros, les oreilles larges, longues et garnies de longs poils. 20 Les baudets, dits bourailloux, ont les poils longs et frisés, de manière que les nouveaux s’entrelacent avec les anciens qu'ils retiennent, et leur forment une pelisse qui les couvre du garrot à la queue et descend souvent jusqu’à terre. Ce sont les plus recherchés au dire de M. Gayot, qui les appelle quenilloux. 3° Le baudetà poil ras, au ventre et à la poitrine blanche, résultat de la race pure avec la petite espèce noire du com- merce. | Cette race bâtarde, quoique donnant des étalons plus beaux et plus vigoureux que la race pure, est moins recher- chée comme ne donnant qüe des produits inférieurs. Toutes les mules venant du Poitou sortent de l’une de ces trois races. Le prix seul de cet animal, qui varie de cinq à huit mille francs, montre combien ses produits sont précieux. Après avoir parlé du père, donnons, avant de parler de la mère, la jument, quelques détails empruntés à M. Gayot NOVEMBRE. 187 sur le langage particulier qu'a fait naître l’accouple- ment de l'âne et de la jument. Ces termes, quoique peu sonores à l'oreille et inapprouvés par l’Académie, sont né- cessaires pour nommer les choses qu'ils désignent. L'industrie mulassière prend le nom de mulasse: Vâne étalon s'appelle baudet, la jument mulassière, le poulain en généralmuleton, et fédon le muleton quidoit devenir un baudet, c’est-à-dire un étalon reproducteur. Parlons maintenant de la mère, la jument, et voyons si, avec les éléments qui sont dans notre département, et des baudets que nous aurions, comme nous avons déjà des chevaux, ce qui permettrait aux agriculteurs de choisir, nous n'obliendrions pas des produits aussi beaux que ceux amenés du Poitou par les maquignons qui, remarquez-le bien, n’amènent que les moyennes qualités. Et d'abord, je me hâte de dire que loin de conseiller la jument du Poitou, race particulière à ee pays et provenant d’étalons dits ru lassiers, pour l'élevage du mulet, je la déclare impossible chez nous, parce que originaire des marais et faite pour vivre dans les marais, elle s’abätardirait chez nous, puis parce que € lourde, très-commune, molle et de moyenne taille » elle ne rendrait pas grands services à nos agricul- teurs qui, du reste, ne voudraient pas essayer de l'élevage du mulet, s’il fallait commencer par changer leurs juments et s’en procurer d’autres. Dans cette difficulté, je ne renonce pas à mon système, parce qu'on peut très-bien faire naître des mulets avec d’autres juments que celles du Poitou, et que celles de notre département, plus que de tout autre, sont capables de donner de bons produits. 188 RÉSUMÉ DES SÉANCES. A l'appui de cette opinion, je citerai M. Gayot qui, après avoir dépeint la mulassière et rendu compte des soins pris pour en conserver la race intacte, s'exprime ainsi : « Ailleurs » qu’en Poitou, on ne prend pas tant de précautions pour » obtenir des mulets; un baudet quelconque, de race poi- » tevine si on le peut, et une jument la première venue, » si pauvre ou défectueuse qu’elle soit donnent des pro- » duits dont le débouché ne manque jamais. » Or toutes nos juments ne sont paspauvres et défectueuses, grâce aux soins de notre Société d'agriculture, qui voulant faire naître de beaux chevaux, n’a jamais primé que des poulinières sans tares trop apparentes, étant au moins d’aplomb et bien membrées. Voilà pourquoi j'ai dit que nos juments plus que toutes autres pouvaient donner de bons produits. Je l'ai dit encore parce qu'il ne manque pas de juments « fortes et bien développées, aux membres larges, » au paturon court, au sabot évasé, au talon garni de poils » abondants. » Ce sont là précisément les qualités que M. Brossard re- commande de chercher dans les juments poitevines que l'on veut livrer au baudet. D'un autre côté le sang anglais n’a jamais pu s'établir chez nous malgré tous vos soins, ce qui sera très-favorable pour la race mulassière, puisque ce sang est proserit en Poitou, où on le traite de race maudite et où il n’est connu que par la mguvaise influence qu'il sème autour de lui, ainsi que le dit en propres termes M. Gayot. Pour prouver par un irrésistible argument la possibilité de faire naître des mulets avec des juments autres que celles dites mulassières, spécialement propres à ce genre NOVEMBRE. 1S9 de production; nous n'avons besoin que de vous lire une phrase de M. Ayrault, vétérinaire à Niort, l’homme de France qui, au dire de M. Gayot, sait le mieux cette ques- tion de la production du mulet, et qui s'exprime ainsi : « L’éleveur poitevin qui cherche chez la poulinière de gros » membres et beaucoup de crins, et qui ne les trouve pas » toujours chez la poulaine du marais, achète les plus » fortes juments bretonnes de trois à quatre ans, qui sont » amenées dans le pays. » Nos juments ne sont-elles pas pour la majeure partie bretonnes, berrichonnes, suisses, types se rapprochant fort de la race bretonne et offrant l'ampleur et l’étoffé que ré- clame la mulasse: puisque le produit de l’âne et de la ju- ment tend toujours à devenir trop grèle avec des jambes minces et des sabots trop étroits? Ayant démontré que les juments poiteyines ne sont pas les seules à pouvoir produire, et à produire des mulets, et que les nôtres peuvent sans crainte être livrées au baudet, il reste à savoir si nos herbages seront suffisants pour nour- rir le muleton. Je crois inutile de vous prouver cela, à vous Messieurs, qui aviez jugé nos pacages assez abondants pour élever le pur sang anglais et oriental. Pouvant élever des mulets avec avantage, pourquoi ne ferions-nous pas comme les habitants du Gers qui, eux aussi, après avoir vainement tenté l'élevage du cheval, en sont revenus depuis 4857 à leur première industrie, la mulasse. Vous savez, Messieurs, que notre département, avant d’avoir des haras, se livrait Lui aussi à l’industrie mulas- sière, industrie qu'il à négligée pour l'élevage du cheval, croyant avoir de plus grands bénéfices. Puisque cet essai 190 RÉSUMÉ DES SÉANCES. ne réalise pas toutes vos espérances, ne ferions-nous pas bien d'encourager nos agriculteurs à revenir au mulet, qui ne peut manquer de réussir. Que ceux qui veulent élever des chevaux en élèvent; mais qu’ils pensent à ce que me dit un jour M. le directeur d'Aurillac, à l'issue de l’un de nos concours: « Votre pays n’est pas dans les conditions voulues pour vous livrer sé- rieusement à ce genre d'industrie, et vous n'aurez jamais que des résultats peu satisfaisants. » En 1854 j’eus l'honneur de vous adresser un rapport pour vous faire observer que nous aurions plus d'avantage à faire de la mulasse qu'à élever des chevaux. Je vous donnais à celte époque des chiffres établissant que les quatre dernières années avant 1848, époque où la monte fut la plus suivie, avaient donné deux mille quinze saillies et 1167 naissances. Ces 1167 naissances auraient produit cent quatre mille sept cent soixante francs, en faisant naître des mulets, tandis qu'elles n'avaient rendu que 25,000 francs en s’adonnant à la race chevaline. Ces chiffres, vrais en 1854, le sontencore plus maintenant que six années d'expériences infruetueuses ont démontré l'élevage du cheval à peu près impossible chez nous, et font renoncer la plus grande partie de nos éleveurs à ce genre d'industrie. Gom- bien, en effet, désertent nos haras, puisqu'en 1848 le nom- bre des saillies était en moyenne de 291 par an, tandis que dans les trois dernières années qui viennent de s’écouler, elles ont à peine atteint le chiffre de 150, c’est-à-dire presque la moitié moins. Vous voyez, Messieurs, que l’agri- culteur, qui ne cherche que son intérêt, n'a pas attendu que l’on se soit prononcé sur cette question. Pourrendre ces essais encore plus prospères, il suffirait de votre impulsion ; NOVEMBRE, 194 du reste, la dépense à faire pour le département ne serait pas très-considérable, puisqu’un seul baudet pouvant fé- conder deux cents femelles, il yen aurait assez d’un par arrondissement; et pensez, Messieurs, que vous auriez des mules pour le moins aussi belles que celles de nos ma. quignons, qui ne conduisent jamais la première qualité, comme nous le dit M. Gayot: « Les moyennes qualités » sont achetées par la Lozère, l'Ardèche, les Pyrénées » orientales, la Haute-Loire, et dans toutes les montagnes » du midi. » Ces moyennes qualités donnent cependant des bénéfices à nos agriculteurs, qui en élèvent en assez grande quantité, il suffit pour s’en convaincre d'assister à nos foires de la Toussaintet de la Saint-André. Permettez-moi de vous dire, Messieurs, que Thomas Simon, fermier à Malfray, canton de Cayres. possède un baudet que vous avez déjà primé. Ce baudet, de la race des guenilloux, quoique laissant beaucoup à désirer, donne cependant avec des juments médiceres des produits qui se vendent ordinairement, à cinq ou six mois, de 240 à 280 francs. En visitant cette ferme cette année, j'ai vu dans ce village deux muletons issus de ce baudet, qui se sont vendus à la Toussaint, l’un 500 francs et l’autre davan- lage. Je n'ai pas besoin de vous détailler les grands avantages qu'offre le mulet au point de vue agricole, Ces avantages me paraissent suffisamment démontrés par la sobriété et la robusticité qui sont ses caractères essentiels. par les services qu'il rend dans les plus rudes travaux, et par le choix qu’en à fait l'administration de la guerre pour le transport du matériel. 192 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Voilà pourquoi, Messieurs, je me suis permis de vous faire ces quelques réflexions, pensant que notre Société, en favorisant l'élevage du mulet, augmenterait le bien-être de nos éleveurs. Le Président, M. Ch. Calemard de Lafayette, n’est point d'avis qu’on doive abandonner la production du cheval, et porter tous ses efforts sur la race mulassière. Il admet bien que les résultats de la protection qu’on a donnée jusqu'ici à la race chevaline sont à peu près nuls, et que les dépenses qu’on a faites depuis plus de 20 ans, pour l’amélioration de cette race, l'ont été à peu près en pure perte. Il partage l'opinion de M. Balme du Garay, que ce pays ne convient nullement à l’élève du cheval de race pure, espèce délicate, plus exposée dans nos montagnes à l'influence pernicieuse de la fluxion périodique. L'air vif de nos vallons, les matinées froides et brumeuses, les brusques et si fré- quents changements de température, les rosées glacées qui, pendant nos hivers si longs, s'étendent sur les prairies et sur les pacages, ne nous permettent pas le luxe du cheval de sang pur. C’est là une opinion par- faitement établie, et qui ne laisse aucune place au doute, devant les résultats si médiocres de nos con- cours annuels. Mais est-ce à dire qu'il faille ne plus s'occuper de la race chevaline , lui ôter toute espèce d'encouragement , pour se tourner exclusivement du côté de la race mulassière, si sobre, si rustique , et qui offre chez nous tant de chances de succès, et se tient si bien sur nos marchés ? Telle n’est point la pensée NOVEMBRE 195 de M. le Président, ni celle de la majorité des mem- bres de l’Assemblée. Personne ne saurait nier l'utilité de ce bel animal, qui est entré dans les besoins de Ja ferme , et qui est employé à des services auxquels on ne saurait assouplir le mulet. Mais jusqu'ici la bonne voie n'a pas été suivie, ce qui explique les mécomptes qu'on à subis jusqu’à ce jour. M. le Président désirerait qu'on encourageàt la ten- dance à la production du cheval rustique. La race per- cheronne et bretonne réussirait à merveille dans nos contrées; c’est de ce côté que doivent tendre les efforts de la Société. I ne s’agit plus que d’arrèter définitivement ce qu'il convient de faire à ce sujet. PERSONNEL DE LA SOCIÈTÉ. — M. de Payan-Dumoulin dofine lecture du rapport sur la candidature de M. le prince de Polignac. MESSIEURS . La commission que vous avez chargée de vous soumettre un rapport sur la candidature de M. le prince Alphonse de Polignae à examiné. les travaux qu'il a publiés sur les mathématiques transcendantes, qui ont fixé l'attention des spécialistes savants se livrant à ces difficiles études. M. de Polignac fait déjà partie, en qualité de membre correspondant, de l'Académie des sciences de Toulouse, Cette Société a publié dans ses Mémoires de 4857, p. 508, une savante étude de M. de Polignac sur quelques formules TOME XXI. 13 19% RÉSUMÉ DES SÉANCES. très-générales qui se présentent dans la théorie des nom- bres premiers. M. de Polignac est ancien élève de l’école Polytechnique, officier distingué d'artillerie; il parle plusieurs langues étrangères; les difficultés les plus ardues des hautes ma- thématiques lui sont familières, il l’a prouvé par une série d'ouvrages soumis à l’Institut impérial de France, et dont le rare mérite à été reconnu par l’Académie des sciences. De 1849 à 1858, M. de Polignac a succéssivement publié six opuscules in-4°, contenant des recherches nouvelles sur les nombres premiers. Plusieurs de ces ouvrages, sou- mis à l’Académie des sciences, ont été insérés dans les 4n- nales de cette Société, t. xxIX, séance du 15 octobre 1849 ; t. XLV, séance du 21 septembre 1857. M. de Polignac a publié un traité, sur la suite médiane, et sur les suites constantes qui tendent à se former dans les suites diatomiques, écrit inséré dans les nouvelles An- nales mathématiques, t. vin, p. 425. M. de Polignac, utilisant les problèmes qu'il avait réso- lus dans la sphère élevée des mathématiques transcendantes, s’est récemment occupé de la mécanique appliquée aux machines à vapeur. Il a soumis à l’Académie des sciences un travail remarquable sur un nouveau mode de transmis- sion du mouvement relatif aux machines à vapeur, fixes ou mobiles. Il a été rendu compte de cette invention dans la séance de l’Académie des sciences, du 8 novembre 1858, t. xLvI. (Voir Mémoires de l'Académie des sciences.) M. de Polignac continue la série de ses expériences sur ce sujet, si intéressant pour nos chemins de fer, nos ma- chines à vapeur fixes, et nos navires à vapeur. NOVEMBRE. 195 Il est utile que les savants descendent quelquefois des hautes régions des sciences purement spéculatives aux études plus modestes d'applications industrielles des dé- couvertes scientifiques nouvelles. Tout fait espérer que les expériences continuées par M. de Polignac seront couron- nées du succès, et qu'il aura résolu un problème de méca- nique dont la solution permettra d'introduire de sensibles améliorations dans le régime des machines à vapeur. De cet ensemble de travaux scientifiques, que votre com- mission s’est bornée à mentionner, sans se permettre d’en discuter, d’une manière approfondie, la portée scientifi- que, qui à déjà été appréciée avec éloges par d’autres Aca- démies, il est permis de conclure , que le concours de M. de Polignac serait fort utile à la Société d'agriculture, sciences et arts de la Haute-Loire. M. de Polignac, par les profondes études scientifiques auxquelles il se livre, montre qu’il a compris le mouve- ment intellectuel du XIXe siècle, ila su donner ainsi un nouveau lustre au glorieux nom qu'il porte si noblement, La Commission dépose sur le bureau les divers ouvrages de M. de Polignac qu'elle a mentionnés, et elle vous pro- pose, à l'unanimité, d'admettre ce candidat comme mem- bre de la Société académique de la Haute-Loire. Ce rapport est suivi d’un vote au scrutin secret qui donne, sur 24 votants, 24 boules blanches pour l’ad- mission du prince, en qualité de membre non résidant. M. l'abbé Sauzet fait hommage, de la part de M. Du- bois deSt-Etienne-de-Lugdarès, des Annuaires statisti- 196 RÉSUMÉ DES SÉANCES. ques et administratifs de l'Ardèche, et demande pour M. Dubois le titre de membre non résidant. La Société nomme, pour examiner cette candidature, une com- mission composée de MM. Sauzet, Marthory, Martel M. l'abbé Sire, directeur au séminaire de St-Sulpice, désire faire partie de la Société. Deux membres ap- puient sa candidature, dont l'examen est soumis à une commission composée de MM. Sauzet, Alirol, Bernard. SociéTÉS SAVANTES. — La Société générale de l'Yonne propose l’échange de ses publications avec les nôtres. M. le Président conseille d'accéder à cette demande, par cette considération que M. Léon de Bastard , que tant de liens et de souvenirs unissent à notre pays, est un des membres les plus actifs de cette Société. La séance est levée à six heures. Le Secrétaire , BÉLIBEN. Ge ui SÉANCE MENSUELLE DU JEUDI 6 DÉCEMBRE SOMMAIRE Lecture du procès-verbal. — Ouvrages Reçus : M, le Président signale : 1° un fort volume publié par le Comité de la langue au ministère de l'Instruc- tion publique et des Cultes, renfermant le mémoire considérable de M. le comte de Bastard sur une crosse d'évêque du XIIe siècle; 2 la Revue des Sociétés savantes publiée sous les auspices de M. le Ministre de l’Instruction publique, qui contient une analyse des travaux scientifiques de la Société. — AGRICULTURE : La faucheuse-moissonneuse Wood-Pettier. — 4rboriculture : Rapport de M. Chouvon sur le travail du docteur Pigeaux, intitulé : Influence de la taille et de la forme dans leurs rapports avec le développement et la longévité des arbres. — EcoNomte pugLiQue : Du mémoire de M. Best sur les biens communaux, par MM. de Fontpertuis et de Brive qui s'occupent à ce sujet de la péréquation de l'impôt. — ScrENCES HISTORIQUES : Document cité par M. le Président; il intéresse la ville du Puy et se trouve dans l’in- ventaire des titres : Auvergne el Poitou, que le Cabinet historique à publié en avril 1860. — Rapport de M. Sauzet sur la candidature, au titre de mem- bre non résidant, de M. Dubois, de Saint-Etienne-de-Lugdarès, qui est admis à l'unanimité. — Autre rapport de M. Sauzet sur celle de M. l'abbé Sire qui reçoit aussi le titre de membre non résidant. — M. de Chaulnes lit un travail sur la vie et les œuvres du cardinal de Polignac. — PERSONNEL DE LA S0- CIÉTÉ : M. l'abbé Vissac demande à faire partie de la Société au titre de membre non résidant; Nomination d'une commission dont M. de Chaulnes est rapporteur. — ADMINISTRATION : M. le Préfet informe la Société que la ville a élevé son allocation au Musée. — SocrÉrTÉs SAVANTES : M. Aymard de- mande l'échange des publications avec la Société archéologique du Morbihan. — M. de Payan-Dumoulin exprime le même désir au sujet des Mémoires de la Société impériale académique du Gard. 198 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette. La séance est ouverte à trois heures. Le Secrétaire donne lecture du procès-verbal, qui est adopté sans ré- clamation. OUVRAGES REÇUS. — Parmi les ouvrages reçus, M. le Président signale à l'attention de la Société un fort vo- lume, avec ce titre: Bulletin du Comité de la langue, de l'histoire et des arts de la France, institué par le Ministre de l'Instruction publique et des Cultes, tome iv, nos 9, 10, 11, 12 (année 1857). Ce volume renferme un rapport fait à la section d'archéologie, le 28 juillet 1856, par M. le comte Auguste de Bastard, membre du Comi- té, sur une crosse du XIe siècle, trouvée dans l'église de Tiron, arrondissement de Nogent-le-Rotrou. Sur ce sujet, M. de Bastard a écrit un livre considérable, de plus de 500 pages grand in-8°, d’une écriture fine et très-compacte. (Ge rapport va de 401 à 539 et les an- nexes et les noles s'étendent jusqu’à la page 912.) La crosse de Tiron fournit à l’auteur une occasion féconde d’études intéressantes sur les crosses anciennes, sur les sculptures qui les ornent, sur les figures d’ani- maux, de personnages, sur les fleurs dont elles sont émaillées. Une immense érudition anime et soutient ces longues recherches. L'histoire, la mythologie, les arts du moyen-âge, la symbolique chrétienne, les bes- tiaires, etc. , contribuent pour une large part à l'intérêt du livre, qui est un véritable monument d'archéologie religieuse. DÉCEMBRE. 199 Le Puy-en-Velay devait avoir sa place dans ces études archéologiques. En effet, on peut y remarquer, entr’au- tres passages intéressant l’histoire locale, le dessin, ré- duit au quart, d'une crosse de l’église Notre-Dame du Puy; la mention de la Bible de Théodulphe, avec deux dessins extraits decelivre; une appréciation de l’histoire du père Odo de Gissey. Au sujet des Vierges miracu- leuses, M. de Bastard nous donne un beau dessin de la Vierge noire du Puy, calqué sur la gravure de Sarret. A ce sujet, nous trouvons dans ce livre, orné de 8? gravures, le dessin d’une statue d'une Vierge du Puy,représentée droite et portant l'enfant Jésus au bras. D’après un titre authentique du XVIe siècle, cette statue aurait été portée, en 1447, du Puy-en-Velay en l’Ile- de-France, à Sigy près de Montereau, par Antoine du Roux, écuyer, originaire du Velay, échanson du roi Charles VIT. Elle est encore aujourd'hui l’objet de la vénération des fidèles, sous le nom de Notre-Dame du Pu ou du Peu; elle est placée, dit M. de Bastard, dans un délicieux monument érigé naguère dans l’église de Sigy, par les soins de Mademoiselle Marie du Haut, fille du petit-neveu et héritier du dernier des du Roux. M. le Président appelle encore l'attention de la Société sur la Revue des Sociétés savantes des départements, publiée sous les auspices du Ministre de l'Instruction publique et des Cultes (2e série, t. 1v, oct. 1860). Les deux numéros qui ont précédé renfermaient une ap- préciation des travaux de la Société pendant les an- nées 1855-56, au point de vue historique. Le numéro d'aujourd'hui contient une avalyse de ses travaux 200 RÉSUMÉ DES SÉANCES. scientifiques, pendant les mêmes années; elle est signée par M. Hébert, professeur de gologie en Sorbonne, à la faculté des sciences de Paris, et membre du comité. Le savant professeur s’est attaché surtout à la partie géo- logique. Dans une note très-succincte, il donne son opinion sur les fossiles de Denise et s'exprime en ces termes: « Nous avons constaté, avec M. Lartet, que ces ossements humains sont enfouis dans un limon adossé à la montagne, et qu'ils doivent être, par conséquent, considérés comme d'une époque postérieure à toutes les éruptions volcaniques de la contrée. » Mais il consacre quelques pages à la critique de la Notice géologique sur un gisement de serpentine, près de Lempdes, Haute-Loire, par notre collègue, M. Justin Dorlhac. Les dernières lignes de ce travail, avec les con- seils si autorisés qu’elles renferment, méritent une place dans nos Annales ; les voici textuellement : En somme, le travail de M. Dorlhac mérite à un haut degré l'attention des géologues: il nous à paru le résultat d’études approfondies, et tout nous porte à croire à la par- faite exactitude des observations qu’il renferme. Mais quelque intérêt que présente le travail de M. Dor- Ihac, nous ne pouvons nous empêcher de trouver que la partie géologique est bien restreinte dans ce volume qui renferme les travaux de deux années de la Société savante du Puy. Sans doute, comme le titre de cette Société l'indique, les sciences n’y viennent qu’en second ordre; les applications agricoles, les procès-verbaux des séances en font foi, sont DÉCEMBRE. 201 le principal objet des occupations des membres, et certes c'est une matière importante à traiter, et que nous ne pré- tendons nullement rabaisser. C’est donc un simple regret et non un blâme que nous exprimons. Mais ce regret n’en est pas moinstrès-vifquand on pense qu’il est certainement peu de contrées plus propres à provoquer les recherches géologiques. Iei des volcans éleints avec leurs cratères de scories et des coulées de laves gigantesques offrant des co- lonnades basaltiques d’une hauteur prodigieuse. Là, d’im- menses murailles de basalte ou de brèches basaltiques plus anciennes, sorties à travers le granite qui forme la base du sol de la contrée, par des crevasses plus ou moins larges et conslituant ces rochers si connus: la Roche-Corneille, qui domine la ville du Puy ; cette élégante pyramide de Saint- Michel; cette masse imposante qui porte l'antique château de Polignac, forteresse d'où les puissants seigneurs du moyen-âge mettaient à rançon toute la contrée, et qu’un roi de France dut à plusieurs reprises assiéger en personne. Il n’est besoin d’être géologue pour être saisi d'étonnement à la vue d’une nature si étrange et si majestueuse. Ajoutez à cela el les masses trachytiques du Mezene, du Megal, elc., et les dépôts lacustres, gypseux et calcaires, qui ont fourni aux persévérantes recherches de M. Aymard, l’un des digni- taires de la Société savante du Puy, la plus riche collection qui existe de mammifères des premiers temps de la période miocène (partie moyenne de la période tertiaire), et des alluvions remplis tantôt de cailloux roulés de phonolite. de basalte ou de quartz, véritables galets littoraux indiquant des mouvements répétés d’une masse d’eau dont le niveau atteignait de 8 à 900 d'altitude au-dessus de la surface ac- tuelle des mers, tantôt ces énormes ossements brisés de ? 202 RÉSUMÉ DES SÉANCES. maslodontes, d’éléphants, de rhinocéros, toutes espèces perdues et colossales qui semblent avoir occupé en troupes immenses ces régions si pittoresques, à la fin de l’époque tertiaire, Tous ces objets si variés des plus intéressantes études ne peuvent être connus à fond que par des recher- ches longtemps prolongées sur les lieux mêmes : leur his- toire est à peine ébauchée. Cependant, dès 1825, un disciple d'Al. Brongniart, en- fant du pays, M. Bertrand de Doue, à publié une descrip- tion géologique des environs du Puy, qui était, pour cette époque, un véritable chef-d'œuvre, et qui, de tout temps, conservera le cachet d’un travail de premier ordre. Ajouter à ce travail tout ce que les recherches de près de quarante années ont fait connaître de nouveau serait un immense service rendu à la science. Nous nous permettons de signaler cette lacune à la So- ciété savante du Puy, et nous l’engageons à encourager ceux de ses membres qui seraient en mesure de diriger leurs efforts de ce côté. AGRICULTURE. — À l'occasion d’un article du Journal d'agriculture progressive, 1e décembre 1860, M. le Président entret'ent l’Assemblée de la faucheuse-mois- sonneuse Wood-Pettier, et cite tous les bons certificats qu’elle a reçus d'agronomes praticiens distingués. M. de Brive paraît douter qu'on puisse l’'employer très-heu- reusement dans les prairies naturelles où l'herbe doit être rasée très-bas, puisque aussi bien c'est dans le pied de la plante que se trouve la meilleure partie du foin, dt — DÉCEMBRE. 205 M. Ch. C. de Lafayette assure qu'il a vu lui-même la machine à l'œuvre, et qu'elle travaille d’une manière irréprochable. Il cite l'opinion de M. le marquis de Selve qui écrit de Villiers, à la date du 13 novembre, que « la » faucheuse a étéadmirable, qu’elle a coupé des regains » de trèfle qui paraissaient si menus que, assurément, » un faucheur en aurait laissé les trois quarts, et là où » on estimait retirer une centaine de bottes, la fau- » cheuse à coupé si près, si ras, qu'on en à retiré » 400 bottes. » Arboriculture. — Gonformément à l'ordre du jour, M. Chouvon donne lecture du rapport suivant. MESSIEURS , Dans votre dernière séance, vous m'avez chargé de vous rendre compte de quelques articles publiés par le docteur Pigeaux, dans le Journal de la Société impériale et centrale d'horticulture. Ces articles portent pour titre : /n/luence de la taille et de la forme dans leurs rapports avec le déve- loppement et la longévité des arbres. Je suis fâché, Mes- sieurs, d'être forcé de me taire sur le premier numéro, qui ne m'a pas été remis. Il doit cependant contenir des en- seignements bien différents de ceux qui nous sont donnés par les maîtres, puisque, dans son second numéro, le doc- teur Pigeaux nous dit: « Nous avons crié anathème contre les tortures et la mutilation des arbres dans leur jeunesse. » Enfin, force est de passer outre et lâchons de nous 204 RÉSUMÉ DES SÉANCES. dédommager, par les deux dernières parties du travail, de ce que nous perdons de la première. Suivons l’auteur et ne perdons pas de vue qu’il ne donne pas des conseils aux ignorants, mais qu’il s'attaque aux maitres. « Le vice radical, nous dit-il, de l’arrachage des arbres dans la plupart des pépinières, porte les jeunes pousses à se mettre spontanément à fruit, avant même d’avoir con- stitué leur charpente. Hélas ! combien ai-je vu de jeunes arbres trop admirés pour avoir rapporté avant trois ans une dixaine de fruits sans saveur et sans prix, languir énervés, stérilisés, puis mourir. » Nous répondrons à notre auteur: parce qu'un homme qui s'appelle quelquefois un amateur, parce qu'un jardi- nier ignorant s’extasieront, comme on le voit trop souvent, devant un arbre qui se tue par ses productions fruitières, cela infirme-t-il la science horticole qui, dans son ABCD, indique les moyens d'arriver à un résultat contraire ? « À ce sujet, ajoute notre auteur, je dirai que les années de grande fertilité pour les arbres fruitiers sont, à mon avis, de grandes calamités pour nos jardins. Malheur à ceux qui ne savent pas, en pareille occurrence, restreindre le plus possible le nombre de leurs fruits pour les avoir meilleurs et plus beaux. Cette abondance de fruits, abandonnée à elle- même, tue presque à coup sûr les arbres trop vieux ou trop jeunes. » Que ces paroles soient données comme un con- seil à un élève, je le comprends, mais que signifient-elles dans la bouche d’un homme qui s'adresse aux maitres et qui a quelques prétentions de faire école? Qu'il ouvre les livres spéciaux! en trouvera-t-il un seul qui n’apprenne à réduire une trop grande production fruitière pour le profit des années suivantes et pour la santé de l'arbre? Mais c’est DÉCEMBRE. 205 là ce qui constitue Le fond de l’art de la taille des arbres. de cet art que l’auteur traite de barbare. Continuons : « Tous les arbres greffés ne vivent que par la séve du sujet qui leur sert de support. Généralement aujourd'hui on greffe fort bas. » Et après avoir démontré les inconvénients de cette méthode, l’auteur arrive à con- seiller pour hauteur 5 ou 6 centimètres au-dessus du collet. Ces paroles, en vérité, me feraient croire que cet auteur, qui trouve tant à redire à la science arboricole moderne, n’a lu aucun des ouvrages qui la représentent. Qu'il ouvre donc ces livres ! les vieux lui diront : greffez à 6 pouces : les nou- veaux, greflez à 40, à 8, à 5 centimètres: mais quel est sem qui conseille de greffer plus bas? Qui a done tort ici, si ce n’est notre docteur qui prend comme règle ensei- gnée la pratique des pépiniéristes qui, pour se débarrasser au plus vite de leurs arbres, sont intéressés à greffer très- bas. à Maintenant qu'il deviendrait fastidieux de relever encore des banalités de ce genre, tâchons d'arriver à quelque chose de plus sérieux. L'auteur traite de procédé barbare celui qu'on est convenu de nommer la faille des arbres. Il pros- crit le sécateur, surtout, dit-il, depuis ns connait les procédés du pincement et de l'éborgnement. « Aux qualités chimériques qu'on attribue à Ja taille et que nous nions formellement, ajoute-t-il, nous opposons la brillante santé et la bonne conformation de certains vieux arbres à haute tige, que leur élévation à soustraits aux sécateurs arbori- cides Nous leur dirons que nous avons vu en Orient de beaux abricotiers de 42 à 45 mètres de haut, également bien garnis de branches et de fruits dans toute leur’ hauteur, sans différence appréciable. » Ces paroles sont à peu près de la 206 : RÉSUMÉ DES SÉANCES. force de celles qui ont précédé ; mais enfin il faut bien que j'y réponde, Messieurs, puisque votre ordre du jour m'en fait un devoir. Les arbres à haut sent dont parle notre auteur sont assez nombreux dans nos vergers, pour que nous puissions 4 priori être édifiés sur leurs avantages relatifs et leurs in- convénients. Assurément, en les tenant débarrassés de vieux bois et de branches inutiles, nous pourrons obtenir des sujets vigoureux, mais là précisément est l'échec. Ces ar- bres poussant d'autant plus à bois dans leur jeunesse, qu'ils sont dans un bon terrain, ne commenceront à donner du fruit que lorsque cette vigueur commencera à faiblir, e’est- à-dire vers vingt-cinq ou trente ans. La vie n’est pas assez longue pour faire fi! de cette attente. Les fruits, d’un autre côté, seront relativement inférieurs, par des raisons qu'il serait trop long d’énumérer. Le procédé barbare de la taille dans les jardins n’a pas d'autre but que celui d'obtenir du fruit plus vite, du fruit plus beau, sur des arbres tenant moins de place. Alors à quoi bon cette comparaison de vieux arbres à haute tige? On ne sait trop non plus pour- quoi l’auteur veut nous conduire en Orient, mais puisque tel est son désir, suivons-le. Un barbare de France, j’en- tends de ces barbares qui ont lu et médité un arboricide tel qu’Alexis le Père, Hardy ou Dubreuil, sait toujours que la taille du pêcher, par exemple, est basée sur ce principe : que la branche ne donne de production que l’année qui suit sa naissance. Si cette branche n’a pas été aidée par des procédés particuliers à conserver les productions dont il convient de la garnir, elle restera à tout jamais dégarnie. Pourquoi? Parce que notre climat est trop rude pour laisser développer les yeux qui restent inertes sur le vieux DÉCEMBRE. 207 bois. En Orient, au contraire, la douceur du climat permet à ces mêmes yeux de naître-et de prospérer. Que penser done de cette comparaison de notre auteur, d’un arbre d'Orient qui peut être garni naturellement et entièrement de productions fruitières, avec le même arbre d'Europe qui se dégarnit toujours du bas quand l'art n'intervient pas ? Autant vaudrait nous dire : en Orient je n’ai pas vu de vitres aux fenêtres, pourquoi en met-on en Europe ? Mais le grand cheval de bataille de notre docteur, c’est qu'il ne veut pas de taille. « Non, cent fois non, dit-il, il ne faut couper ni branches, ni membres. » Réduit en ces termes, nous serions peut-être de son avis; mais comme l’auteur n’a pas l’air de se douter de la portée de ces pa- roles, tàächons de débrouiller le fond de son système, si système il y a. Ce n’est certes pas chose facile à qui ne se contente pas des mots anathème, a:boricide, barbare et autres gracieusetés de ce genre. « Il faut éviter avanttout, dit le docteur, de créer aux arbres une tige centrale et re- porter à leur circonférence les tiges qui doivent porter immédiatement les lambourdes. En faisant partir toutes ces tiges à peu près du pied de l'arbre, on parviendra aisé- ment à les maintenir dans une juste proportion de séve et de développement. Dès lors plus de nécessité de tailler, etc. » Cela est bientôt dit; mais en quoi cette forme, qui peut être bonne comme une autre, dispensera-t-elle de tailler? Ah! mais l'auteur pincera, ébourgeonnera, ébor- gnera, taillera en vert; voila, il vous donne tout son dé- volu. Mais de qui a-t-il appris (outes ces pratiques, si ce n’est des barbares arboricides ? Ces derniers font-ils autre chose en été que pincer, ébourgeonner, tailler en vert, et de plus coucher les branches fortes, relever les faibles, 208 RÉSUMÉ DES SÉANCES. mettre à l'ombre ou à la lumière, employer tous les moyens propres à utiliser, à diriger la séve, à réduire enfin autant que possible la taille d'hiver que notre docteur redoute tant? Est-ce la peine de faire tant de bruit pour citer à l'appui de son opinion, les pêchers à deux branches verticales, les pêchers obliques, les pommiers à cordon, toutes les pratiques enfin qui ont cours aujourd’hui? N’est- ce même pas un contre-sens à lui de louer des méthodes qui ont bien la prétention de faire jouir plus vite le pro- priétaire du produit de ses arbres, mais non celle de faire vivre ces arbres plus longtemps? Est-ce bien à lui, enfin, dont les idées sont si confuses dans le sujet que nous venons de traiter, à jeter à la tête de nos savants arboricul- teurs cet anathème qu'il nous reste à citer ? « Malheureu- sement, c'est notre docteur qui parle, ces nombreuses et incessantes mutilations sont trop souvent le savoir faire de la plupart des professeurs d’arboricullure, et quand on ouvre les traités où cet art estexposé, on croirait lire le bulletin d’une bataille livrée contre nos pauvres arbres qui n’en peuvent mais, et qui sont bientôt plus propres à garnir le bûcher qu’à approvisionner le fruitier. » On par- donnerait au docteur Pigeaux d'adresser ces reproches aux ignorants, malheureusement trop nombreux, qui se donnent mission de tailler les arbres fruitiers ; mais il nous permet- tra de faire une immense distinetion entre eux etles émi- nents professeurs qui ont poussé de nos jours cet art à un suprême degré. EcoNomi£ PUBLIQUE. — M. le Président fait savoir à l’As- semblée que, conformément au vœu du Conseil général — DÉCEMBRE, 209 et à la décision délibérée et prise dans la dernière séance de la Société, il s'est mis en rapport avec M. le Directeur des Haras d’Aurillac, et lui a demandé si l'administration pourrait fournir au département les étalons capables de donner des produits tels qu'il en faut dans ce pays. Dans le cas d’une réponse négative, l'allocation affec- tée aux saillies se trouverait réduite et l’on aurait à déterminer l'emploi de cet excédant de recettes dans l'intérêt de notre race chevaline. L'ordre du jour appelle une communication de M. de Fontpertuis sur la dissertation de M. Best, ayant pour sujet les biens communaux de la Haute-Loire : MESSIEURS . Notre confrère M. Best a présenté à la Société un mé- moire intitulé : Dissertation sur les biens communaux. Vous avez bien voulu me charger de vous faire un rapport sur ce travail ; je viens m'acquitter de ce soin. Le travail de M. Best s'ouvre par des consilérations his- toriques sur la naissance, le développement et les progrès de l'institution communale. II nous montre la eurie romaine, devenue si oppressive pour les populations, si onéreuse pour ses propres membres, se transformant au contact des nouveaux principes de gouvernement et d'établissement territorial des Francs ; les anciens curiales partageant l'administration de la justice avec les comtes francs; les , évêques se soumettant les defensores ou S'y substituant TOME XXII. 14 210 RÉSUMÉ DES SÉANCES tout-àa-fait. Ce fut, à tout prendre, un temps favorable à la liberté municipale. Les villes, sans doute, avaient perdu de leur éclat et de leurs richesses, et la prépondérance passait aux campagnes. Mais n'était-ce pas une grande compensa- tion, comme le fait observer M. Henri Martin, que la rupture de la terrible charge de la curie, disparue avec le système d'impôt de l'empire? « D'une autre part, continue cet his- » torien, la condition des vingt-cinq arpents de terre était » tombée en désuétude, et les cleres, les petits proprié- » taires, les membres des corporations industrielles avaient » fait invasion dans le corps municipal démocratisé. Non- » seulement les magistratures étaient devenues toutes élec- » lives et le plus souvent annuelles, mais la cité délibérait » parfois en assemblée générale sous la présidence de » l’évêque. » Sous Charlemagne, une première atteinte est portée au principe électif par l'institution des échevins (Skepnee, Scabini), chargés de rendre la justice, et qui ne sont pas élus par le peuple seul, mais choisis de concert entre lui, le commissaire royal et le comte. Mais ce n’est que sous les successeurs de Charlemagne que commence et se précipite la ruine du régime municipal sorti de l’inva- sion franque. L'ère féodale est venue : les évêques et les comtes se tranSforment en seigneurs ; ils usurpent les offices et les priviléges ; ils s'emparent des impôts et des biens communaux. Tout est entre leurs mains : la propriété, la liberté du serf et du citoyen. Il n’y à plus de justice ni de magistrats. Au commencement du XIe siècle, le désordre est au comble et l'oppression aussi. C'est aussi l'heure de la révolte populaire : le Mans et Cambrai s’érigent les premières en conununes. Communes, nom nouveau pour une chose nouvelle aussi, Sous une DÉCEMBRE. 244 forme plus large et modifiée suivant les besoins du temps et les traditions gallo-romaines, c’est l’association jurée, la Ghilde germanique. La commune se propage au nord de la Loire avec une merveilleuse rapidité : toutes les villes veulent une charte ; elles l’arrachent à leurs seigneurs ou Pachètent. En même temps, dans le Midi, éclate la révolu- tion consulaire, différente dans ses moyens et dans ses principes de la révolution communale. Le consulat est un souvenir direct des anciennes institutions romaines et un fruit de la liberté civile, qui n'avaient jamais entièrement disparu chez les populations au sud de la Loire. Malheu- reusement, l’affranchissement des communes, pour me servir du nom beaucoup trop modeste, comme le dit M. Augustin Thierry, qui a été donné à cette grande époque de notre histoire, ne fut pas au bout de ses destinées et ne produisit pas tous ses fruits. Cet énergique réveil de l'esprit démocratique au milieu de la société féodale n’était pas venu à son heure. Cette heure ne devait sonner qu’en 4789. Si la royauté parut d’abord le favoriser, si, depuis Louis- le-Gros jusqu’à Louis XIV, elle seconda avec habileté et persévérance la formation de ce téers-élal qui a joué un si grand rôle dans notre histoire, ce fut surtout dans son in- térêt propre et non dans celui de la liberté et de la civili- sation. Quand la royauté se sentit assez forte, elle dit nn jour : l'Etat c’est moi. À partir de ce jour, les états géné- raux ne sont plus convoqués, même à ces lointains inter- valles qui séparaient d'habitude leurs réunions. Qu'étaient devenues à la fin du XVII siècle les franchises locales du XIIe, et surtout l'esprit démocratique dont elles étaient nées et qui à laissé des traces si vives dans les chartes communales? Les villes ont bien encore des maires, des 212 MÉSUMÉ DES SÉANCES. échevins ; le Puy avait un consul. Mais ce sont là désormais des mots, des noms. La liberté communale est tombée, avec la liberté civile, avec la liberté religieuse, avec la liberté politique, dans le gouffre sans fond de la monarchie absolue. Notre honorable confrère a très-bien saisi le but, le caractère et les effets de l'association et des franchises communales du XIe siècle. « Ces franchises, dit-il, avaient » pour but la sûreté des personnes et des propriétés, la » garantie solidaire de chacun des membres de l’associa- » tion, l'abolition des biens de main-morte. » M. Best ajoute : « Les villes devinrent ainsi en quelque sorte de » petites républiques. » Observation parfaitement juste appliquée à des villes qui élisaient leurs magistrats, levaient des troupes et des impôts, faisaient la paix et la guerre, rendaient la justice civile et criminelle, pourvoyaient aux besoins et défendaient les droits de leurs habitants. Le mot lui-même est parfois employé par les historiens du moyen- àge pour désigner une commune. Mais je ne puis, ce que j'ai déjà fait presséntir, être de l’avis de notre confrère en ce qui touche le rôle de Louis-le-Gros et même de la royauté en général dans le mouvement communal. M. Best me paraît avoir beaucoup agrandi le rôle que ne pouvait pas, que ne voulait pas prendre Louis-le-Gros. Territoria- lement parlant, son autorité directe ne s’exerçait que sur une bien petite zône de la France actuelle, les pays compris entre Somme et Loire. Cependant la commune se trouve dans les Flandres, la Champagne, la Franche-Comté, la Nor- mandie, l'Anjou, le Maine. Ajoutons que les institutions municipales et consulaires des pays au sud de la Loire ont précédé les chartes des communes jurées. Le fait est que le = = — DÉCEMBRE 245 nom de Louis le-Gros ne figure que dans sept ou huit de ces chartes ; que si ce souverain ratifiait assez volontiers les chartes arrachées aux seigneurs d'église, parfois il se retournait-contre les communes et qu’il n’en souffrait pas l'établissement dans ses propres domaines, L'histoire de la commune de Laon est instructive à cet endroit. Elle dévoile le motif ordinaire de l'intervention de Louis-le-Gros dans les affaires des communes. Il avait garanti et scellé de son sceau la charte laonnoiïise. Au bout de trois ans, l’évêque Gaudri et les nobles de la ville solli- citent du roi la rétractalion de son engagement. Pour le faire maintenir les communiers offrent au roi et à ses gens 00 livres d'argent; l’évêque et les gentilshommes en offrent 700, et le roi se parjure. Dans leur fureur, les bourgeois de Laon massacrent Gaudri et les nobles ; quelque temps après c’est le tour des nobles, qui égorgent et pendent les bour- geois de Laon ! C'est plus haut et ailleurs que dans Pinitiative de Louis- le-Gros qu'il faut chercher le secret du grand mouvement du XIIe siècle avec tous ses caractères. La charte de 1814 à pu présenter ce prince comme le fondateur des communes ; l'histoire ne peut ratifier cette flatterie ou ce caleul de Louis XVII qui, lui aussi, concédait et n’entendait que concéder une charte à la nation. La conduite de Louis-le- Jeune à légard des communes paraît avoir été dictée par des considérations supérieures à celle de l'argent. Il cher- chait à faire prévaloir le principe que toute commune rele- vait directement de la couronne. Cependant il ne fut pas très-favorable, en somme, à l’établissement de communes. L'affranchissement fut toujours moins complet dans les villes de la couronne que dans les villes seigneuriales 214 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Orléans fut rudement châtiée de sa tentative d’érection en commune. Les communiers de Sens et de Vezelay ne reçu- rent pas de Louis-le-Jeune un traitement moins sévère, pour ne pas dire cruel. Philippe-Auguste commença par casser cette commune de Laon, à qui le parjure de son aïeul avait coûté si cher. Il voulait éviter ainsi (je cite les termes mêmes de l'acte d'abolition) « toute espèce de péril pour » son âme, et agissait par amour de Dieu, de la bienheu- » reuse Vierge Marie, en vue de la justice et pour l'heu- » reuse issue du pèlerinage qu’il devait faire à Jérusalem. » Un an plus tard, les scrupules de Philippe-Auguste se tai- saient devant l’emploi de l'argument tant aimé de Louis- le-Gros. Les Laonnoïis rachetaient leur paix. Saint Louis lui-même, si grand comme roi, et comme roi si supérieur en général aux préjugés de son temps et si animé du senti- ment de la justice, prenait parti contre les bourgeois de Reims en contestation avec leur évêque. En revanche, quand M. Best place l’action de la royauté et celle de l'Eglise au premier rang des causes qui ont fa- vorisé dans les campagnes le progrès de la liberté person- nelle, je ne puis qu'être entièrement de son opinion. Au XIIIe siècle, le servage avait presque disparu. Les main- mortables étaient en bien plus grand nombre que les serfs, dont Beaumanoir et son contemporain, l’auteur du Myrror of Justice, ont dépeint, en termes plus émouvants encore parce qu'ils sont plus naïfs, l’épouvantable condition : « Que lor sires por peure, dit Beaumanoir, quanques que » ils ont à vie et à mort et les cors tenir en prison toutes » les fois qu'il lor plest, soit à tort, soit à droit, qu'il n’en » est tenus à respondre fors à Dieu ; » qui ne peuvent, dit l’écrivain anglo-normand, « rien purchasser (acquérir) DÉCEMBRE. 215 » fors qu'à l'œps (ad opus) de leur seigneur; » qui ne savent « le vêpre de quoi ils serviront le matin ; » que leurs maitres ont le droit de « firger (fustiger), emprisonner, » battre et châtier à volonté, sauve à eux la vie et les » membres entiers, » Mais la condition personnelle des main-mortables restait encore bien dure et bien précaire. M. Best lui-même en a signalé le caractère essentiel : l’héri- tage par le seigneur des biens du main-mortable. Celui-ci, en outre, ne quiltait le lieu de sa résidence obligatoire que sous peine de contrainte par corps, el aussi de saisie des biens dont il jouissait, Il payait un droit (c'était le for- mariage dans la langue de l’ancien droit) pour épouser une femme libre ou appartenant à un autre maitre. L’affranchissement était donc un grand bienfait pour les main-mortables. Mais tant les lois que les mœurs féodales y étaient peu favorables, et la liberté de laffranchi restait soumise à de nombreuses gênes et restrictions. Au XIIIe siè- cle, un grand pas est fait dans la voie de la liberté per- sonnelle : la couronne et l'Eglise émancipent en masse leurs main-mortables, qui passent à l’état de vilains. Les actes généraux d’affranchissement abondent dans le recueil des ordonnances. M. Best a cité principalement l’ordonnancee de Philippe-le-Bel (1296) affranchissant les serfs du Lan- guedoc, et de Louis-le-Hutin (1515) rendant libres les serfs de tous les domaines royaux ; l’affranchissement, par Louis-le-Jeune (1180), de tous les serfs d'Orléans, exemple suivi en 4224 par le chapitre de la ville, et en 1229 par l'évêque de Meaux. Cet aperçu est suivi de recherches sur l'origine de la propriété communale et ses (ransformations succes- sives. 216 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Sur la question de l’origine, M. Best avait à choisir entre deux systèmes : la propriété communale avait-elle com- plètement disparu dans les Gaules, à la suite de l’invasion barbare ? Son origine se perd-elle dans la nuit des temps et découle-t-elle de ce droit primitif que la généralité des habitants est présumée avoir sur les biens compris dans son territoire et qui sont à l'usage de tous ? Le premier système a été soutenu par M. Troplong; le second par un autre grand jurisconsulte, M. Proudhon. Entre deux autorités aussi imposantes il est permis d'hésiter. M. Best se range à l’opinion de M. Proudhon, et c’est aussi, à notre sens, la plus rationnelle et la plus con- forme à la vérité historique. Il nous paraît certain que le régime municipal n’a pas ressuscité en France au XIe siè- ele, mais qu'il a revêtu seulement de nouvelles formes correspondant à de nouveaux besoins et aux modifications profondes qu'avaient subies la société civile et la société politique, sous la double influence du christianisme et de la conquête, Quant au midi de la France, du moins, le fait a été mis hors de doute par les savants travaux de M. Rey- nouard. N’est-il pas naturel de croire, se demande M. Best, que partout où des habitants se sont établis, ils ont cu pour leurs services et leurs besoins communs, des biens, soit en bois, soit en terre, en propriété et en jouissance commune? Oui, une telle supposition est bien naturelle : elle prend même à nos yeux le caractère de la certitude, quand nous nous rappelons qu’à l'origine des sociétés, la propriété, surtout celle de la terre, a affecté la forme col- lective, et que l'appropriation privée, à part les circon- stances historiques qui ont pu en favoriser ou en retarder le développement, a marché du même pas que la civilisation DÉCEMBRE. 217 et l'industrie, sa fille. Disparu des législations grecque et romaine, le principe de la communauté du sol était resté dans les lois des Germains et des peuples gaéliques et kimriques. Le seul propriétaire, à l’origine, c’était la tribu. Le chef de tribu répartissait les lots entre les familles, et le chef de famille les subdivisait entre les membres de la famille. L'esprit d’individualité, plus remarquable chez nos ancêtres que chez nous, ne modifia cependant que très- peu les conditions de ce régime. « La forêt, la lande, la » prairie, le marais, dit M. Henri Martin, qui forment la » plus grande partie du territoire, demeurent en commu- » nauté dans les mains de la tribu. Au moment de la conquête romaine, la constitution de la propriété gauloise avait changé de caractère : le peuple est tombé en clientèle, presque en servage : Plebs in ser- vilio penè habetur. C’est le mot de César. Le chef de tribu a usurpé la propriété commune. Mais les villes avaient certainement des propriétés, un domaine publie, comme on dit aujourd'hui. M. Best penche à croire que ce genre de domaine n’était pas inconnu dans les campagnes. Adhuc sub judice lis est ; mais il serait téméraire de trancher ce procès sur la seule autorité de César, dont les Commentaires, si admirables qu’ils soient, sont, après tout, d’un Romain destructeur de l'indépendance gauloise, plus occupé natu- rellement de guerroyer contre l'ennemi que d’en étudier les mœurs et les lois. Quoi qu'il en soit, la conquête ter- minée, la Gaule devint, pour ainsi dire, une image, un reflet de Rome. La curie, le droit public romain, l’organi- sation municipale romaine, bien entendu tels qu'ils exis- {aient du temps des empereurs, passèrent dans la Gaule. Narbonne, Arles, Bordeaux et bien d’autres villes avaient 218 RÉSUMÉ DES SÉANCES, une eurie, autrement dit sénat local. 11 y a de la ressem- blance entre les attributions des sénats gaulois et celles de nos conseils municipaux. Ceux-ci règlent, en effet, le mode d'administration des biens communaux ; le mode de jouissance et la répartition des fruits et pâturages commu- naux ; les curiales romains étaient investis de ces attribu- tions. La propriété communale survit à l'invasion franque. Menacée aux IXe et Xe siècles, elle se fortifie au XIe. Dès lors elle est à l'abri des attaques, sinon particulières, du moins systématiques. Elle se défend par elle-même ou par l'intervention de la loi et du roi. J'ai analysé, au pas de course, les chapitres IT, IT, IV, du travail de M. Best. C’est dommage, ces chapitres veulent être lus èn extenso. Notre confrère y a fourni de nom- breuses preuves d'intelligence et d’érudition. Garantie en droit, aujourd’hui, la propriété communale l'est-elle en fait? Juge plus compétent que personne, M. Best fait plus qu’en douter ; il constate à la fois la mul- tiplicité des usurpations et l'impuissance de la répression. S'il n’aborde point cette question de principe, de savoir si les domaines publics sont en eux-mêmes avantageux ou désavantageux, il déclare très-nettement que le domaine communal est en général, et dans la Haute-Loire particu- lièrement, mal administré et peu pro luctif. Cependant, les biens communaux, dit-il, occupent, dans le département, le treizième de sa superficie; il demande donc la cessation d’un aussi mauvais régime, par voie, soit d’amodiation, soit d’allottissement, soit d’aliénation. Ces mesures au- raient à ses veux, comme aux miens, cet effet d'augmenter la richesse publique des communes, de leur permettre de DÉCEMBRE. 249 réaliser des améliorations réclamées impérieusement au- jourd'hui, mais dont la satisfaction est écartée ou ajournée par la pénurie des budgets municipaux. Vox clamans in deserlo. aime à ne pas le croire; en tous les cas, cette crainte ne doit être écoutée de personne, et M. Best a bien fait de n’y pas céder. En résumé, la Dissertation sur les biens communaux est un excellent travail plein de faits et d’idées. C’est une suite bien honorable aux travaux de l’auteur : la Métro- logie et V'Estimation des biens-fonds de la Haute-Loire. que vous connaissez si avantageusement. Après la lecture de ce rapport attentivement écouté, M. de Brive fait remarquer l'utilité des tableaux qui se trouvent dans le corps de l'ouvrage de M. Best, et qui occupent plus de 25 pages. Ces tableaux montrent, avec la certitude du calcul, les différences qui existent dans le rapport de l'impôt foncier et du revenu réel de la terre, pour les biens communaux, entre les cantons du département. La disproportion qui y règne, et qui va de 6,20 à 12,55, lui suggère l’idée du projet, tant de fois mis en avant, de la péréquation de l'impôt. M. de Brive la croit utile et juste dans ce département, où certains cantons supportent un impôt foncier trop éle- vé, relativement à la valeur vénale de la propriété, tan- dis que d’autres localités se trouvent beaucoup moins imposées. Plusieurs membres, entre autres M. le Président et M. de Fontpertuis ne se montrent pas les partisans de la péréquation de Fimpôt. Ils pensent qu’elle tendrait à : 220 RÉSUMÉ DES SÉANCES. aggraver les charges de la propriété terrienne. D'ail- leurs, dans certaines localités, par l'effort de l'homme les propriétés ont été transformées. Les pénibles défri - chements, les soins de la culture, le travail incessant de l’agriculture ont doublé, triplé même la valeur vé- nale d’une terre. Par une nouvelle répartition de l’im- pôt on atteindrait évidemment le progrès agticole dans sa source la plus pure. Les améliorations, on le sait, n'arrivent qu'après des déceptions souvent ruineuses et tout au moins coûtent des frais énormes; en faire le motif d’une augmentation de contribution n'est-ce pas les faire payer deux fois? La question de l'assiette de l'impôt, celle de sa péréquation présentent donc un côté fort délicat, et la Société aurait vu avec plaisir quel- qu'un de ses membres !les traiter sous leurs différents aspects. SCIENCES HISTORIQUES. — M. le Président signale la découverte d'un document historique intéressant la ville du Puy. Il s’agit du Vidimus d'un jugement donné par le roy en sa cour, contre ceulx du Puy-Anicium, pour raison d’extraordinaires violences par eux commises contre les officiers et autres ministres de justice; et furent condamnés à 30,000 liv. tournois; scavoir : 12,500 liv. au roy, 12,500 à l’évêque, 5,000 aux héritiers de ceulx qui avaient été assassinés, et aux Frères Mineurs, etc. (1277). M. le Président demande que le bureau soit au- torisé à obtenir une copie de ce document, signalé par le Cabinet historique, 4° iv. (avril 1860), page 76, à l'inventaire des titres: Auvergne et Poitou. 2 DÉCEMBRE. 291 La Société adhère à la proposition de M. le Prési- dent. Conformément à l’ordre du jour, M. l'abbé Sauzet a la parole pour donner lecture d’un rapport sur la can- didature de M. Dubois, de Saint-Etienne-de-Lugdarès (Ardèche). MESSIEURS . M. Dubois, juge de paix du canton de St-Etienne-de-Lug- darès (Ardèche), demande son admission dans votre Société comme membre non résidant. Dans votre dernière séance, une commission fut nommée, chargée de faire un rap- port sur les titres d'admission de ce nouveau postulant. M. Dubois, que j'ai l'honneur de connaître , est un homme instruit, s'occupant avec autant de zèle que de succès ; d’études historiques et d'archéologie. À ce point de vue, il ne peut être qu'un membre très-utile pour notre Société, d'autant plus utile que nous n'avons pas le moindre corres- pondant dans le Vivarais, contrée qui a tant d'affinité avec la nôtre. M. Dubois a publié plusieurs volumes des Annales du Vivarais, sous le nom d’'Annuaïre adminis- tratif, hislorique et statistique du département de l'Ar- dèche. Dans les trois volumes dont il vous a fait hommage, il se trouve plusieurs articles très-bien faits, mais d’un intérêt tout local. Un seul m'a frappé , il mérite de fixer votre attention d’une manière toute particulière, parce qu'il intéresse à un haut degré notre histoire locale, 222 RÉSUMÉ DES SÉANCES. l'histoire du Velay, dont votre Société s'occupe dans ses travaux d’une manière toute spéciale. Il porte ce titre : Histoire des croisés illustres du Vivarais. Si M. Dubois s'était contenté dans son travail de prendre son bien où il se trouvait, il n’y aurait rien à dire; mais chercher à ravir le bien des autres, jeter sa faulx dans la moisson de son voisin, ce procédé-là, quoique assez com- mun aujourd’hui, laisse beaucoup à dire. Le malheureux ! pour grossir le catalogue de ses croisés, ne va-t-il pas re- vendiquer, sans façon ainsi que sans remords, comme étant à lui, nos noms les plus historiques, ceux dont le Velay a le plus de droit de se glorifier , les d’Agrain , les Pons de Capdeuil, les Chanaleilles, les Turenne de Bouzols, les Cha- lancon, les Montlaur, les Astorg de Chambarlhac, les Fay de la Tour, tous gens du Velay, de notre connaissance et de nos traditions. Et s’il nous prenait un jour la fantaisie de faire un pareil ouvrage, historiens spoliés de cette ma- nière, que nous resterait-il alors? Quand l'univers entier, et Je pense, Messieurs , que l’univers nous laissera tranquilles pour débattre cette querelle, quand l'univers entier abon- derait dans le sens de M. Dubois, je protesterais toujours ; eliamsi omnes, ego non. Et pour prouver que M. Dubois a tort, qu’il s’est fourvoyé dans ses diptyques, qu’il y passe à à côté de la vérité historique, je vais examiner un peu ses prétentions. Je prends un des premiers noms, un des plus importants qu’il met en avant. Vous prouver qu'il s’est trompé sur les d'Agrain, qu'il veut nous enlever, suffira pour que vous jugiez ce que vous avez à penser sur les autres que je viens de vous nommer, et qu'il veut nous en- lever encore. Messieurs, les deux plus illustres, les deux plus historiques croisés dont notre pays doive se glorifier , DÉCEMBRE. 295 c’est, sans contredit, l’évêque Adhémar du Monteil, et le fameux Eustache d’Agrain , l'épée et le bouclier de la Pales- tine, prince de Sidon et de Césarée, connétable et vice-roi de Jérusalem. La famille d’Agrain appartenait-elle au Vivarais? appar-- tenait-elle au Velay? Eustache d’Agrain était-il né au chà- teau des Ubacs, près de St-Etienne-de-Lugdarès, comme le pense M. Dubois, ou au château d’Agrain, sur les bords de l'Allier, comme je le crois? Les différents membres de la famille d’Agrain, qui furent successivement en Palestine, partirent-ils du Vivarais ou du Velay? Là est toute la ques- tion. Les quelques raisons qui me portent à penser le con- traire de ce qu’avance M. Dubois, je vais les soumettre à vos appréciations. Vous les jugerez. Le Château des Ubacs a bien pu appartenir à quelque membre de la famille des d'Agrain, une branche des d’Agrain a bien pu se fixer au biteai des Ubacs , comme une autre branche s'était établie au château qui porte le nom d’Agrain, dans le haut Vivarais . près de Satillieu, et une troisième dans la Bourgogne, sans que pour cela on puisse en conclure que le berceau de cette famille, que la famille-chef se trouyât là. Le département de la Haute-Loire possède encore les ruines considérables de deux châteaux portant l’un et l’au- tre le nom d’Agrain, l’un dans le canton de Craponne , l’autre dans l’ancien Velay, sur la limite du Velay et du Gévaudan, vis-à-vis et tout près du village d’Allevras. Ce dernier était très-fort, Pris et repris plusieurs fois dans nos suerres religieuses, il était à cette époque, comme il l'é- lait antérieurement, comme, sans doute, il devait l'être dans là période des croisades, la propriété, Le lieu d° habita- lion, le titre féodal des barons d° Agrain. 2 24 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Un pays à élé celui d’une famille quand elle y a eu ses alliances, ses terres principales , ses dignités , ses privilé- ges, sa résidence. Or tel a été le Velay pour la famille d’Agrain : l’histoire locale, les titres, les traditions sont là pour l’attester. 40 Béraud d’Agrain, petit-fils d'Eustache d’Agrain, fut, par testament d’Alix de Solignac , en date de 1560, institué hé- ritier universel de la maison de Solignac. Remarquez, s’il vous plaît, ces mots importants qui se trouvent dans le testament : Béraud d'Agrain, héritier de la maison de Solignac, ses ancêtres naturels. N'est-il pas à présumer , d’après cela, que les d’Agrain n'étaient qu’une branche détachée de la maison de Solignac? Ne pourrait-on pas même penser qu'on vit, peut-être, alors, dans les maisons de Solignac et d’Agrain, ce qui se fit dans la maison de Po- lignac et de Chalancon , un cadet de la maison de Solignac entrer dans la maison d’Agrain, épouser l'héritière des d’Agrain, en prendre le nom et les armes pour en perpé- tuer la race? Ces mots héritier naturel ne font-ils pas présumer quelque chose de ce genre? 20 Julien d’Agrain, comte de Sidon et de Césarée, autre petit-fils d'Eustache d’Agrain, envoie de Jérusalem toutes les reliques dont parle Odo de Gissey, à Notre-Dame du Puy, sa patrie. Remarquez encore ces mots : sa patrie. Tous les biographes qui ont résumé l’histoire et les mémoi- res de cette époque, Chaudon et Delandine, comme le Dictionnaire universel et historique, par une société de sa- vants et de gens de lettres, comme Michaud, dans la Bio- graphie universelle , ont tous inscrit ces mots capitaux et décisifs : à Notre-Dame du Puy, sa patrie. Pleine de reconnaissance pour les grandes choses que Julien avait faites en Palestine, et les présents qu'il Jui DÉCEMBRE. 225 avait faits, l’église du Puy lui accorde, avec le titre de ba- ron de Notre-Dame, le droit d'assister à la procession de [a Fête-Dieu, l'épée nue à la main, devant le Saint-Sacre- ment. Ce privilége, tous ses descendants le maintiennent sans interruplion. Pour n’en citer qu'un seul, en 4444, Pierre d’Agrain assiste à la grande procession de Ia Fête- Dieu, à côté duSaint-Sacrement, l'épée nue à la main. Plus tard, en 1656, nous voyons un autre baron d'Agrain allant à la rencontre de M. de Béthune, à la tête de quatre cents jeunes gens des premières familles du Puy. Les alliances, les mariages de la maison d’Agrain furent constamment avec des familles du Velay : les Polignac, les Chalancon. les Solignac. les d’Allègre, etc. : comme les Polignac, les Beaufort, les Turenne, les d’Allègre, Îles Montlaur, les Saint-Vidal, la famille d'Agrain eut toujours hôtel et pignon dans la ville du Puy; elle possédait deux hôtels dans le mandement et juridiction du cloître. Dans les fastes capitulaires, dans le relevé des grands vicariats du diocèse, nous voyons constamment des d’Agrain chanoines et grands vicaires. Que la famille d'Agrain ait été originaire du Velay, apres tant de raisons, qui pourrait en douter? C'est avec celte phalange de croisés Vélauniens que partirent de la ville du Puy Eustache d’Agrain avec Adhémard du Monteil, Héracle de Polignac, Roger de Turenne, Pons de Fay, Hugues et Pons du Monteil, Bernard de Chambarlhae. Pierre de Cha- lancon, Guillaume de Chanaleilles, Reymond d'Aiguilhe. Pierre et Pons de Capdeuil, tous enfants du Velay, formant ce bataillon de quatre cents guerriers dont Le plus grand poète épique de nos temps modernes, le Tasse, à célébré la valeur et la gloire. Adhémar, pasteur des peuples. avait TOME XXII. 15 226 RÉSUMÉ DES SÉANCES, amené de la ville du Puy quatre cents querriers parfaite- ment montes. Votre commission, ne conservant aucune rancune des erreurs et méfaits historiques dont s’est rendu coupable, au préjudice des gloires de notre pays, le candidat M. Dubois, rendant, au contraire, toute justice à son honorabilité et à son érudition, vous propose, à l'unanimité et avec plaisir, son admission parmi nous comme membre non résidant. Il conclut à l'admission du candidat, en qualité de membre non résidant. 27 boules blanches, sur 28 vo- tants, sont pour les conclusions du rapporteur. M. Sauzet donne encore lecture d’un autre rapport sur la candidature de M. l'abhé Sire, directeur du sé- minaire de Saint-Sulpice. MESSIEURS . I n’est pas facile de vous faire le rapport sur le tra- vail que présente M. l'abbé Sire, ancien directeur au séminaire du Puy, aujourd’hui directeur au séminaire de Paris, comme titre d'admission dans votre Société. La collection de tout ce qui à été écrit et publié dans le monde catholique, dans tous les temps, pour et contre le dogme nouvellement défini de l’'Immaculée Conception, M. Sire a entrepris de la faire et l’a exécutée. Cette collection . d'une étendue effrayante, sera un monument unique, et ce monument nous appartiendra, nous le possédons. Elle DÉCEMBRE. 227 doit être déposée dans la bibliothèque qu'on a le projet de former dans l’église cathédrale. Difficilement vous vous feriez une idée de ce qu'il a fallu à M. Sire de patience, d’ardeur, d'industries, de peines, de recherches, de cor- respondances, pour arriver au terme de son entreprise. Il s’est adressé à tout le monde, à toutes Les parties du monde catholique. Depuis les traités de la plus profonde théologie jusqu'aux articles les plus éphémères des journaux, tout à été recueilli; l'Europe comme l'Asie, comme dans l'Amé- rique centrale et méridionale, toutes les langues mortes et vivantes ont fourni leur tribut : la francaise, l'italienne, l’espagnole. l’allemande, la suédoise, la polonaise, l’ar- ménienne, la portugaise, la flamande, la hollandaise, la danoise, celle de la Bohême, de la Hongrie, de la Russie, de la Grèce, de la Turquie, tout a été recueilli. Que dirai- je. peut-être six, peut-être dix mille pieces : les actes du Saint-Siége, les actes épiscopaux, les ouvrages théolo- giques, les sermons, les articles des journaux et revues. les publications hostiles , les récits des fêtes et les descrip- tions des monuments commémoratifs, les poésies et les chants. M. Sire a eu l'heureuse idée de former une collection de gravures publiées dans les diverses contrées du monde à l’occasion de la définition du dogme de !'Immaculée Con- ception. Il est parvenu à composer deux a/bums: lun, plus grand et du plus beau format, qui renferme les planches de prix; l’autre, moins grand et moins beau, qui ren- ferme les planches plus communes et de plus petite di- mension. Ces deux albums, très-richement reliés, et dont une des planches, formant frontispice, peinte à l’aquarelle, portant dans desniches gothiques. lune les armes de Mer de 228 RÉSUMÉ DES SÉANCES. Morlhon, et l'autre celles de la ville du Puy, seront déposés a la bibliothèque de Notre-Dame, dont nous venons de parler, et seront un de ses plus riches trésors. Aecordons conséquemment, à titre de reconnaissance, à M. l'abbé Sire, le titre de membre non résidant de no- tre Société, qu'il demande, C’est le sentiment unanime de votre commission, auquel je vous propose de vouloir bien adhérer. Le dépouillement du scrutin donne 14 boules blan- ches, sur 14 votants, et M. Sire est proclamé membre non résidant, conformément aux conclusions du rap- porteur, applaudi et félicité par l'Assemblée entière. M. Gabriel de Chaulnes lit un mémoire, écrit avec élégance, sur la vie etles œuvres du cardinal de Po- lignac. Le temps ne lui permet que la lecture de la première partie. À une autre séance, nous aurons le jugement de notre jeune collègue sur la philosophie de l'Anti-Lucrèce. PERSONNEL DE LA Soci£ré. — M. l'abbé Vissac, aumô- nier du collége de Thiers, demande à faire partie de Ja Société, en qualité de membre non résidant, et envoie, à l'appui de sa candidature, un discours sur Putilité de l'étude des lettres. La demande de M. Vissac, déjà connu par plusieurs travaux, notamment par un mémoire sur l'industrie des os broyés, est appuyée par MM. le Président et le Secré- taire. Une commission composée de M. de Chauines, DÉCEMBRE. 229 rapporteur, et de MM, Limozin et Béliben, est chargée de l'examen des titres de M. Vissac. ADMINISTRATION, — M, le Président informe l'Assemblée que le Conseil municipal du Puy a donné pleine satis- faction au désir de M. le Préfet qui, au sein du Conseil sénéral et avec l’assentiment de ses membres, avait fait remarquer que l'allocation accordée par la ville à son Musée n'était pas en rapport avec celle qui nous était allouée par le Conseil général. En conséquence, Ja Société doit des remerciments à M. le Maire de la ville et au Conseil municipal qui ont bien voulu géné- reusement élever de 500 fr. l'allocation du Musée. SOCIÉTÉS SAVANTES. — M. Avmard désirerait qu'on demandät à la Société archéologique du Morbihan l'échange de ses publications avee les nôtres, et qu'on sollicitàt les bulletins de l'année 1858, publiés en 1860. M. de Payan-Dumoulin indique, comme dignes d’in- térèt, les mémoires de la Société impériale académique du Gard, dont il est membre, et désirerait que la de- mande en füt faite par le bureau. La Société adhère. La séance est levée à six heures. Le Secretaire, RÉLIBEN. ANNEXES RAPPORTS ET MÉMOIRES SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE DU VENDREDI 25 MAI 1860 Le Concours régional agricole, qui s'ouvrait le 22 mai, allait être une grande fête pour le pays tout entier et surtout pour la ville du Puy, qui devenait cette année, pendant quelque temps, le centre d’une région de sept départements (1). La Société d'agriculture, sciences, arts et commerce du Puy était trop intéressée au succès de cette mémorable solennité, pour qu'elle ne fit ce qui élait en son pouvoir pour ajouter à l'éclat des fêtes qui devaient se succéder pendant plusieurs jours. 1 fallait montrer aux regards des étrangers, que le Concours alüirait en foule dans notre ville, que ce pays est digne de quelque attention. Pour les sites, pour les beautés naturelles, il peut soutenir la comparaison avec les contrées les plus favorisées. La France à beaucoup de villes du second ordre plus peuplées, aux rues larges et commercantes ; mais ces chefs-lieux se ressemblent à peu près et ne diffèrent guère que par le nombre des 1) La région agricole se compose des départements suivants : Haute-Loire, Ardèche, Lozère, Hautes-Alpes, Basses-Alpes, Drome, Isère. i} SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. habitants, par la hauteur des maisons et l'étendue de l'enceinte, tandis que le Puy à son cachet propre, sa physionomie spéciale. Son aspect, au mois de mai, offre des perspectives d’une variété ravissante, et sous ce rapport, nous n’avons entendu que l'expression de l'admiration. D'autre part, le Concours est installé aussi bien qu'il ait pu l'être partout ailleurs, grâce aux libéralités de la commune et du département, auxquelles la Société a pu joindre ses faibles ressources. Par les soins d’une commission de trois membres (1), les baraquements destinés à recevoir les bêtes du Con- cours sont disposés avec élégance et commodité. Une suite de deux cent vingt loges se développent, à droite et à gauche du Musée, sur une longueur de près de cinq cents mètres, suivant la courbe gracieuse de la promenade du Fer-à-cheval, qu’elles enserrent tout entière dans leur contour. Du centre, on aperçoit la ville couronnée par le rocher Corneille; la cathédrale romane avec sa coupole angélique et son haut clocher, les maisons assises en amphithéâtre qu'on entrevoit à travers les éclaircies des grands arbres, tout cet (1) M. le Préfet de la Haute-Loire, M. Paul de Rostan, avait coufié lorga- nisation des fêtes et l'installation du Concours régional à la commission des primes, souvent réunie sous sa présidence. Trois membres pris dans le sein de cette commission, MM. Chouvon, de Brive, de Fontpertuis, s’occu-- vent de l’établissement des baraquements et de la décoration de la place du Breuil et de la promenade du Fer-àa-cheval, tandis qu'une autre sous-commis- sion, composée de MM. Balme, du Garay, ete., fait décorer l’ancienne salle du Musée, où aura lieu Le banquet. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. li] ensemble offre le coup-d’œil Le plus gracieux que l'ima- gination puisse concevoir. Pour arriver jusqu'aux portes triomphales de l'en- ceinte réservée, établies avec goût aux deux bouts de la promenade du Fer-à-cheval, au lieu des anciennes barrières, il faut traverser la grande place du Breuil toute décorée d’allées régulières de jeunes arbres de pin reliés par des guirlandes de feuiilige, tandis que du sein de cette décoration sylvestre s élèvent très- haut, de distance en distance, de nombreux mâts vérii- tiens au sommet desquels ondulent des flammes aux mille couleurs; c’est là un très-gracieux encadrement pour la fontaine Crozatier, d’un effet original et pitto- resque, dont la disposition pleine d'art fait honneur à l'habileté des ordonnateurs de La fète et surtout à M. Chouvon nommé second vice-président du Con- cours (1). (1) JURY DU CONCOURS RÉGIONAL. M. le Préfet de la Haute-Loire, Président d'honneur. dre Seclion, chargée d'apprécier les animaux. M. Rendu, inspecteur général de l’agriculture, premier vice-président du jury, président de la section. le Sous-seclion, pour juger les animaux de l'espece bovtne. MM. Crapon fils, à Estrablin (Isère); — Allier, directeur de la ferme école de Berthaud (Hautes-Alpes); — Servan, à la Roche-de-Glun (Drôme): — De Tallobre, président du comice agricole de Brioude (Haute-Loire. de Sous-seclion, pour juger Les animaux des especes ovine el porcine el les animaux de basse-cour. MM. Raybaud-Lange, directeur de la lerme-école de Paillerols (Hautes iv SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. De son côté, la Société d'agriculture, pour contribuer à la solennité agricole du Concours régional dans la limite de ses attributions, et mettre en même temps le pays en mesure de montrer au grand jour sa puissance de production, au point de vue agricole et industriel, Alpes); — Grousset, directeur de la ferme-école de Recouiettes (Lozère); — Vachon, à Tèche-Beaulieu (Isère); — Allier, à Gap (Hautes-Alpes). de Seclion, chargée d'apprécier Les instruments et les produils agricoles. M. Chouvon, directeur de la ferme-école de Nolhac (Haute-Loire), deuxième vice-président du jury, président de la section. 1re Sous-section, pour juger les instruments d'extérieur de [erme. MM. Ch. Girou de Buzareingues , à Buzareingues (Aveyron) ; — Dode de la Brunerie, à Grenoble (Isère); — Roussel, à Mende (Lozère); — Doniol, à Ronzet (Haute-Loire). de Sous-seclion, pour juger les instruments d’interieur de ferme. MM. E. Robert, à Saiute-Tulle (Basses-Alpes); — Coche, sous-directeur de la ferme-tcole de la Bâtie (Isère); — De Beaumefort, à Beaumefort (At- e " . , - me ’ . dèche); — Coumes, ingénieur en chef du département de la Haute-Loire. 3e Sous-section, pour juger les produils agricoles. MM. Dorel, à Annonay {Ardèche); — De Larnage, à Tain {Drôme ; — Blanchon (Ardèche) ; — Lacombe-Tharin , membre de la Société d'agriculture du Puy (Haute-Loire). Commissaire génerul. M. Rendu, inspecteur général de l'agriculture. * NOMBRE DES EXPOSANTS. ESpécesDOVINe 2 LE ie ercnereect Ce res Er Ces 220 >) CONTE OR A AE EME Er PE EE 56 —HMDOICINC Eee CFE cc EEE 43 Animaux de basse-cour................. NRC EURE CE 23 Instruments eLMACRINPS NEA EP ER RE ERA Ce cCe 117 PEOAUIS ASUICOT ES EE RER REC ei AR Cp rere 86 SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, \ avait fixé son Concours annuel au 2% mai, et décidé qu'une exposition de tons les produits industriels du département aurait lieu pendant la tenue du Concours régional. Conformément à cette décision, le jeudi 24 la Société ouvre le concours annuel départemental. Le jury d'examen se compose, sous la présidence de M. Ch. Calemard de Lafayette, de M. Béliben, secré- taire, et de douze autres membres de la Société, dési- gnés par elle pour former la commission des primes. Les agronomes étrangers qui sont venus prendre part aux luttes pacifiques du Concours régional, et un nombreux public se pressent autour de la commis- sion de la Société, désireux d'apprécier les efforts que le pays a faits pour répondre à l'appel de la Société d'agriculture. Le programme des prix avait subi quelques modifi- calions en raison de la circonstance loute particulière du Concours régional. La Société avait annoncé des primes et récompenses à décerner aux mules, aux bœufs gras, aux bœufs de travail, aux vaches et aux génisses, et de beaux spécimens de ces divers animaux sont amenés par les agriculteurs de la Haute-Loire, En examinant les mules, la commission, tout en constatant l’infériorité relative de ces produits, peut pressentir quelle serait la force de production du pays, sous ce rapport, le jour où l'amélioration de l'espèce chevaline dans la Haute-Loire mettrait à la disposition des agriculteurs de bonnes juments. Parmi les bœufs gras amenés au Concours, il faut citer la belle paire appartenant à M. Descours, proprié- vi SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE taire à Tombarel. Ces bœufs, à peine âgés de trois ans et appartenant à la race pure du Mezenc, font res- sortir les qualités que la Société a préconisées depuis longtemps dans cette race, et le public peut constater et la finesse de ces animaux et le degré d’engraisse- ment précoce où ils sont parvenus. A côté des bœufs gras sont des bœufs de travail qui, par leur taille ainsi que leurs formes, annon- cent une force plus que suffisante pour répondre aux besoins de l’agriculture de notre pays. Les vaches et les génisses présentent également des sujets remarquables sous divers rapports. Le passage suivant d’une lettre de M. Gustave Heuzé, professeur d'agriculture à Grignon, membre du jury dans le Concours régional, fait connaître la manière dont ces Messieurs ont apprécié les divers produits agricoles qui figurent dans l'exposition de la Société. « Chaque étranger, dit M. Heuzé, a inscrit sur ses tablettes que les truites de M. le comte de Causans étaient de vraies rivales des traites du lac de Garde ; que les fromages fabriqués par MM. Simon, Chanial, Bonnaud et Chorand sont appelés à faire une concur- rence aux fromages du plateau du Larsac; que les vins rouges de M. Pebellier avaient un cachet spécial qui permet de croire qu'ils acquièrent beaucoup de qua- lité en vieillissant (1); enfin on a constaté que les 1) Au mois de -eptembre 1859, une commission composée de MM. de Brive, Calemard de Lafayette père, le docteur Martel, Chouvon, du Garav, Nicolas, le Président et le Secrétaire de la Société, avait visité le vignoble de Pebellier et félicité Le propriétaire du elos-Pebellier de ses succès dans la SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, vii marrons glacés de M. Barthélemy-Dumas répondent par la finesse à leur réputation. » Ces paroles, que la Société d'agriculture s’'empresse de porter à la connaissance des agriculteurs de la Haute- Loire, peuvent donner une juste idée de la valeur de leurs produits, et leur faire comprendre ce que la Société ne cesse de répéter, que le pays doit entrer sérieusement dans la voie de progrès vers laquelle il est poussé, et qui sera pour lui une source de prospé- rité et de richesses. L'exposition industrielle, tout en constatant l’état de prospérité de certaines industries, montre les efforts et les tendances de celles qui veulent s'implanter sur notre sol. Les produits de la dentelle ont, de l'aveu de tous, dépassé ceux que le public avait admirés dans les ex- positions précédentes. L’observateur s'arrête avec une satisfaction bien marquée devant ces vitrines élalant, à côté des magnifiques chefs-d'œuvre destinés au luxe et à la richesse, l’humble tissu de soie ou de laine dont le prix, accessible à toutes les positions sociales, assure à ces produits un écoulement facile, ef aux ouvrières un travail lucratif. culture de la vigne. Une notable partie du vignoble, nouvellement planté tout entier en plant dit Pinot de Bourgogne, offrait un bel aspect et promettait une récolte abondante, de qualité exceptionnelle pour le pays. C'est avec le vin même de l’année, eueilli par M. Pebellier dans la vigne plantée en pinot, que la Société à fait les honneurs d’un déjeuner offert le jeudi 24 à M. le Préfet et a MM. les membres du jury du Concours régional. M. Pebellier ne pouvait être oublié dans la commission des primes et des récompenses qui lui a décerné deux médailles, une d'argent ct l’autre de vermeil pour l'excellente qualité de son vin provenant du plant qu'il a introduit dans ce pays. vii] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. On aime aussi à considérer ces spécimens d’étoffes de soie, de rubannerie, de velours, les uns envoyés des maisons connues et depuis longtemps prospères, les autres produits par des fabriques dont l’établisse - ment encore récent peut ajouter un nouvel élément à la prospérité du pays. La marbrerie, l’ébénisterie, la tannerie, en un mot toutes les industries sont représentées à l'exposition et attestent le mouvement progressif, le travail inces- sant qui feront enfin sortir la Haute-Loire de l'espèce d'infériorité dans laquelle elle semblait reléguée pour longtemps encore. Enfin lexposition des beaux-arts à produit une impression exceptionnelle qui sera appréciée plus tard. Une somme de 5,710 francs à été répartie de la ma- nière suivante : Pour médailles d’or, d'argent ou de bronze, 1,500 fr. Aux serviteurs, servantes, garde-champètres, 145 fr. Pour améliorations agricoles et instruments perfec- lionnés, primes en argent, 335 fr. Primes en instruments agricoles, plantes fourragères et à enfouir en vert, 1,150 fr. Race chevaline, 840 fr., dont 560 aux poulinières pensionnées, 230 aux pouliches, et 50 aux étalons. Espèce mulassière, 380 fr., dont 220 aux baudets et 160 aux mules. Race bovine, 980 fr., dont 350 aux bœufs, 450 aux vaches et 180 aux génisses. Industrie, 380 fr., dont 210 à l’industrie de la den- telle et 170 aux diverses industries. SÉANCE PI BLIQUE EXTRAORDINAIRE, ix Le lendemain vendredi 25 imai, la Société décernait en séance publique les primes et les récompenses hono- rifiques aux lauréats de l'exposition départementale. A deux heures, la vaste salle du musée des tableaux est remplie d'une foule animée. Autour de l’estrade d'honneur viennent prendre place tous les principaux fonctionnaires de la ville et du département; plusieurs rangs de dames dans leurs belles toilettes offrent un aspect gracieux et varié. La séance est présidée par M. le Préfet, assisté de M. Badon, maire de la ville, du Président de la Société M. Ch. Calemard de La- favette et de M. Avmard, vice-président. M. Béliben , secrétaire de la Société, siége au bureau avec M. Li- mozin, inspecteur des eaux et forèts, vice-secrétaire, et M. Vibert, conservateur du Musée. L'assemblée en- lière accueille en se levant la venue de Mer de Morlhon, le digne premier pasteur du diocèse, qui vient s'asseoir à la droite de M. le Préfet. L'Orphéon du Velay fait son entrée dans la salle, bannière déployée, et ouvre la séance par les joyeux sons de la fanfare et par des chœurs exécutés avec en- train et précision. M. Ch. Calemard de Lafayette prend ensuite la parole et s'exprime en ces termes : \IESSIEURS . Lorsque, il y a quelques années à peine, après la session du Congrès scientifique de France qui avait mis si heureu- sement en relief les efforts de tous genres accomplis dans ce DOME XXIIT. b X SEANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. pays au prolit de tout progres : lorsque la Société décida que les solennités semblables à celle qui nous rassemble aujourd’hui ne se reproduiraient plus aussi souvent que par le passé, elle voulut particulièrement deux choses : Elle voulut d'abord que ces réunions ne fussent point exposées à perdre, dans une périodicité trop fréquente, une part du prestige qu’on leur accordait si volontiers parmi nous; elle voulut en même temps que les récompenses décernées par elle, pour conserver tout leur prix et toute leur influence. fussent à la fois plus importantes el moins nombreuses. Ces résultats. elle les aura cerlainement atteints tous deux. Qui done en douterait ici ? lei, Messieurs, la présence du premier magistrat du dé- partement qui, en ce moment méme, par la place qu'il veut bien occuper au milieu de nous, témoigne de sa sympathie si éclairée pour nos travaux, el de son précieux dévouement pour tous les intérêts que nous aimons à servir : La présence du vénéré prélat qui a prodigué à la Société assez de preuves du protectorat moral dont il veut bien l’ho- norer pour que ces manifestations soient devenues en notre faveur comme une sorte d'encouragement permanent : L'affluence qui se presse dans cette enceinte ; avec l’au- torité civile et religieuse, avec l’autorité militaire et nos diverses magistratures, et tautes les administrations, l'élite entière de nos concitoyens se rendant toujours si volontiers à notre premier appel, tout nous dit, tout dit aux hôtes passagers que nous possédons en ce moment dans nos murs. combien le pays accepte avec bienveillance pour RE SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. NI nous, la solidarité de nos œuvres, et quelle part de son honneur intellectuel il veut bien nous donner à garder. D'un autre côté, ce n'est pas au moment où celte brillante assistance vient de traverser notre galerie toute rayonnante des splendides chefs-d'œuvre exposés par la fabrique de la dentelle, gracieuse et puissante industrie qu'on peut dire vraiment nationale pour notre petite patrie, qui, dans sa flexibilité prodigieuse, fournit avec une égale aisance de la dentelle à deux sous et de la dentelle à six cents francs, et dont les produits charment à la fois le goût des impéra- trices et la naïve coquetterie d'une simple paysanne : Ce n'est pas après avoir jeté un coup-d'œil même super- ficiel sur le reste de l'exposition industrielle, dont l'en- semble satisfaisant atteste, à coup sûr. partout un effort méritoire. el pour quelques objets un progrès réel et se rieUX : Ce n'est pas en examinant dans une autre salle les œu- vres remarquables, et en plus d'un point hors ligne, par lesquelles nos artistes locaux ont bien voulu s'associer à cette utile manifestation de toutes les forces vives du pays : Ce n'est pas enfin lorsqu'un autre art charmant, la musique, vient par la voix harmonieuse que lui prète l'Orphéon, demander nos couronnes et justifier si com- plètement sa demande : Ce n’est point, dis-je, en de pareilles circonstances que nous aurions à douter du prix qu'attachent tous les esprits les plus éclairés aux récompenses si minimes qu'elles soient, en raison de l'insuffisance de nos ressources, aux récompenses même secondaires dont il nous est possible de disposer. xij SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Et quelle plus belle occasion de montrer dans un groupe d'ensemble toute l’activité méritoire de ce pays si digne de l'intérêt qu'il inspire, digne par son glorieux passé, digne par sa déchéance ultérieure, digne par ses efforts actuels, digne enfin par le délaissement même dans lequel il à trop longtemps vécu ! Quelle plus belle occasion que ce Concours régional, réunissant dans nos murs les hommes les plus distingués, les plus compétents à juger une œuvre agricole: à leur tête, l’agronome éminent, M. \. Rendu, dont le nom, appartenant à celte aristocratie des plus longs et des plus honorables services publics, garde à lui seul tout une signification de Fordre moral le plus élevé ! Certes, devantsde tels juges, devant de tels maitres, nous devions attacher un bien grand prix à ce que le pays fit un puissant effort. Nos espérances n’ont pas élé déçues, et nous avons la ferme conviction que le témoignage qui, par suite du Concours régional, sera rendu à notre cher pays, vaudra grandement plus que sa modeste renommée. Vous vous associez, sans nul doute, Messieurs, au senti- ment 'e vive satisfaction que j'exprime à la vue du résultat acquis: ce serait, vous le comprenez aussi, avec un vil plaisir que nous insisterions davantage et que nous entre- rions dans un examen détaillé des œuvres qui nous ont été soumises. Mais le temps à visiblement manqué pour ce travail définitif qu'on retrouvera dans nos publications. Le devoir de nos traditions m'impose une autre tâche, J'ai à présenter devant vous le rapide résumé des travaux accomplis par notre Société dans la période, déjà longue, écoulée depuis notre dernière séance publique. Ce résu- mé, j'en demande mille fois pardon à l'assemblée, aux SEANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIKE, li] dames surtout. ne sera trop souvent qu'une aride nomen- clature. Mais au risque d'écourter, d’amoindrir, dans une men- tion sommaire les travaux quelquefois d’une ‘haute valeur de bon nombre de nos collègues, je tâcherai, et je leur en fais d'avance mille exeuses, d’être court, trop court sans doute pour rester, toujours en ce qui les concerne, suffi- samment juste et vrai. On ne saurait supposer que la tâche de la Société d’agri- culture puisse s'amoindrir où même cesser de grandir à une époque où le Gouvernement et l'administration supé- rieure qui le seconde, semblent entourer d’une sollicitude toujours plus active ces grands intérêts agricoles dont tous les autres sont si manifestement solidaires. L'importance de notre mission s'accroit done sans cesse. et il serait sans doute oiseux d'y insister, Mais me serait-il interdit de dire en même temps que la Société reste tou- jours à la hauteur de cette mission même accrue? C’est un droit pour le président de la Société, un devoir peut-être de constater ici combien le zèle et Fassiduité de ses mem- bres, combien la variété de ses travaux, la diversité des aptitudes représentées dans son sein, et qui lui permettent de ne rester complètement étrangère à aucune des branches de l’activité intellectuelle, lui font une place, dont il lui est permis d'être fière, parmi les plus utiles et les plus appréciées des institutions du même genre, Ce sont là des affirmations que nous hésiterions certaine- ment à produire si nous n'avions à fournir à l'appui de précieux témoignages. Ces témoignages venant s'ajouter à bien d'autres nous font une loi plus pressante toujours de lustifier de plus en plus, par de nouveaux efforts, Fopinion xiv SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, qu'on veul bien se faire de notre association dans les sphères officielles où elle peut être jugée de plus haut. A ce point de vue, je suis heureux de répéter à mes collègues, heureux de rapporter en présence du premier magistrat du département, de bon nombre des membres du Conseil général, et de celte assemblée tout.entière, des pa- roles que je recueillais, il n’y a pas bien longtemps encore, de la bouche de M. le Directeur général de Pagriculture : € Nous faisons pour la Société du Puy, me disait-il un » jour, en répondant à de nouvelles demandes que je lui » adressais, nous faisons pour vous ce que nous faisons » pour bien peu de Sociétés. Ce n'est pas un reproche du » reste, el si nous avons un regret, c'est celui de ne pou- » voir faire davantage, » Consigner publiquement ici de tels encouragements. cest, il faut le redire el nous savons le comprendre, c’est nous soumettre plus étroitement à l'obligation de les mé- riler encore. Pénétrés commefnous le sommes de la pensée du Conseil sénéral, et fideles à ses inspirations périodiques, nous de- vons accorder et nous accordons toujours à l’agriculture le premier rang, un rang à part dans Fordre de nos préoceu- pations et de nos travaux. Celle année, comme les années précédentes, par les études spéciales, par les rapports spé- claux, par nos entretiens et nos discussions fréquentes, nous avons cherché, nous avons réussi sans doute à nous tenir constamment au courant des progrès généraux qui se manifestent dans le monde de la science comme dans celui de la pratique agricole. Les importantes questions déja indiquées dans les dis- cours antérieurs analogues à celui-ci, indiquées souvent SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. XV avec des développements et des détails qu'il serait sans doute superflu de reproduire, et pour lesquelles nous croyons pouvoir renvoyer aux précédents exposés : ces questions nombreuses, d'un intérêt pressant pour la plu- part, sont constamment, pour ainsi dire. restées à notre ordre du jour. C'est ainsi que nous tenons l'œil constam- ment ouvert sur tout ce qui concerne, par exemple, la piabilité rurale, le drainage, les engrais et amendements, les maladies des végétaux, l'invention, l'esnploi et la propagation des machines agricoles, le reboisement, la pisciculture, la zootechnie rurale, l'amélioration surtout de nos races indigènes, la comptabilité, la chimie, la me- féorologie agricole, les conditions de la domesticité dans les campagnes, l'émigration des ouvriers ruraux et ses conséquences naturelles et immédiates, telles que le man- que de bras, les prix exorbitants des travaux les plus obligatoires, ele, etc. ; toutes ces questions et beaucoup d'autres pour lesquelles, on le répèle, il suffit sans doute de renvoyer à l'étude de nos diverses publications, ont fourni matière à des communications souvent étendues et dont la valeur ne saurait être méconnue. Dans cet ensemble de faits et d’études visiblement inte- ressants poyr la prospérité agricole du pays, nous voudrions nous borner à signaler plus particulièrement celles des matières énumérées qui se recommandent plus particu- lièrement aussi par l'urgence des solutions qu'elles exigent où par la gravité des besoins qui S'y rattachent. Quelques mots donc sur les sujets généraux qui ont pris la plus large part dans nos travaux de tous les jours, Un rapide examen nous permettra de dresser ainsi le bilan de nos efforts, el, pour ainsi dire. notre état actuel de situation. x\} SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, Drainage. Le drainage, dont le développement dans le pars a subi [l \ par le fait de manque de fonds un temps d'arrêt, moins. regrettable sans doute en raison des deux années d'extrême sécheresse que nous venons de traverser, le drainage va de nouveau, nous l’espérons, conquérir par les résultats qu’on peut en espérer, une place plus importante dans les amé- liorations agricoles. Le bon vouloir intelligent de M. l'Ingé- nieur en chef nous facilitera sans doute la création de ces spécimens de drainage dont un premier a été exécuté sur la route de Bains, aux frais de la Société, et servira. sur différents points. d'enseignement et d'exemple à tout le département. Chimie agricole. — Analyse des terres et étude des amendements. Ainsi que cela à été indiqué sommairement dans de pré- cédents rapports, la Société attacherait le plus grand prix à voir Îles connaissances chimiques prêter à l'agriculture leur précieux concours. L'analyse des terres, et par elle. la notion exacte des gisements plus ou moins visibles d’amendements divers : — l'étude de l'emploi plus ou moins convenable, relati- vement aux sols et relativement aux cultures, de ces amendements; — toujours, grâce aux mêmes analyses, Ja formation dans le Musée d'une collection d'échantillons. ou spécimens de {fous les sols du département, tout cet en- semble de moyens, pronres à donner au cultivateur intel- ligent les indications précieuses qui lui manquent encore, SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. x\i] et qu'aucun bon vouloir particulier ne saurait lui fournir. nous semblerait devoir réaliser pour le département un bien désirable progres. Si cette pensée trouvait accueil, dès cette année même, auprès du Conseil général, malgré les autres préoceupa- tions agricoles dont nous avons nous-mêmes constaté la juste prééminence, peut-être rencontrerions-nous dans le personnel distingué du Lycée un concours à peine onéreux pour le département et digne d'être vivement apprécié de tous. Enseignement agricole. — Ferme-ecole de Nolhac. L'enseignement agricole donné par la ferme-école de Nolhac continue, sous l'habile direction de M. Chouvon, à mériter ces éloges réitérés que nous voyons, avec une vive satisfaction, constamment confirmés par les plus hauts té- moignages. Dire que M. Chouvon. après la visite des Inspec- {leurs généraux. à recu maintes fois de M. le Ministre de l'Agriculture des félicitations toujours exceptionnelles, c’est s'exposer encore à se répéter. Cours d'agriculture à l'école Normale. — Enseignement agricole par les instituteurs primaires. Le professorat intelligent exercé ailleurs par un autre de nos collègues, par M. Nicolas, conducteur des ponts et chaussées, chargé du cours d'agriculture auprès de école Normale et de la direction de la petite ferme expérimentale de Malaval, ne peut aussi qu'avoir des résultats précieux auxquels nous nous intéressons vivement, Ces résultats xvii] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. sont surtout appréciables à nos yeux quand nous voyons quels services peuvent rendre à la propagation des bonnes méthodes, à la cause générale du progrès agricole, les insti- tuteurs déja nombreux qui apportent tout le zèle et Loute l'aptitude désirables dans cette partie si importante de leur mission. Au nom de M. Chaudier, instituteur aux Villettes, qui a déjà pris sous ce rapport un rang à part, et reçu les récompenses du Conseil général avec les félicitations les plus flatteuses ; au nom de M. Narce, il nous sera permis d'ajouter bientôt d'autres noms signalés avec honneur par les hauts fonctionnaires de l’enseignement, et auxquels nous avons été heureux de décerner de modestes, mais très-sympathiques récompenses. Nous manquerions à un devoir de justice si nous ne té- moignions ici explicitement combien nous sommes heureux de nous trouver, dans cet ordre d'idées, en si parfait accord avec les vues et les tendances de M. lInspecteur d'académie Topin. dont l'indispensable concours et le zèle si éclairé et si progressif vivifient constamment notre action. Comices. Les communications plus où moins régulières qu nous sont transmises sur les travaux des comices du département nous fournissent la conviction que ces utiles institutions étendent progressivement leurs effets en aceroissant leur effort. . Boisement el reboisement. Les avantages si nombreux et si divers de l’œuvre du reboisement sont toujours trop présents à notre pensée SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xIX pour que nous puissions cesser de seconder de tous nos efforts le zèle et les intelligentes initiatives de notre col- lègue M. le Sous-Inspecteur des forêts, C’est avec le plus vif intérêt que nous suivons le succès de ses plantations: et si des années comme les deux dernières laissent forcé- ment quelque chose à désirer dans l’ensemble de Ia réus- site, nous sentons que c’est un motif de plus de redoubler d'efforts : nous sentons, sous le poids du souvenir des dé- sastres {rop récents encore causés par les inondations, que l'œuvre préservatrice du boisement de nos sommets ne doit pas chômer un instant, puisqu'on ne saurait jamais sy être pris trop à l'avance pour s'assurer de nouvelles défenses contre les assauts trop fréquents et toujours pos- sibles des cours d'eau révoltés. Piscicullure. Pour un intérèt visiblement moins grave el moins im- médial, nous gardons encore une vive sympathie aux efforts d'un autre genre tentés par le même collègue. La pisci- culture nous parait toujours une question pleine d'avenir pour la Haute-Loire. En attendant la réalisation complète des vœux plusieurs fois exprimés par la Société pour le repeuplement de nos cours d’eau, nous ne saurions trop vivement manifester le désir que les projets combinés de boisement et d'empoissonnement à exécuter au lac du Bouchet, projets primitivement formés sous le patronage et d'après les inspirations de M. le Préfet Tui-même, trou- vent enfin, grâce à des allocations spéciales et suflisantes , toutes les chances d’une réussite bien désirable. XX SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAITRE. Nous ne saurions omettre de consigner ici l'attention toute particulière et l'honorable ‘distinction accordée par la Société impériale d’acelimatation aux œuvres si intel- ligentes et déjà si fructueuses de pisciculture de notre collègue M. Le comte de Causans. Rareté de la main-Lœuvre. — Elévalion des salaires agricoles. Préoceupés comme nous le devons être de toutes les crises fâcheuses que traverse l'agriculture ,; nous avons surtout à nous attacher à l'étude des moyens qui peuvent le plus immédiatement en atténuer quelques-unes. Le haut prix que viennent d'atteindre, dans les années précé- dentes, les salaires des ouvriers employés à la moisson : ces exigences exorbitantes, Si subites et néanmoins par nous bien prévues, de la main-d'œuvre agricole, qui ten- dent encore à mettre les prix de vente dans une proportion d'infériorité toujours plus désastreuse"vis-h-vis des prix de revient, nous font certainement un devoir d'attacher une importance croissante à la propagation des machines agri- coles dont le travail rapide tend si opportunément à se substituer aujourd'hui à l'œuvre des bras qui font défaut. A ce sujet, tout n’est plus à faire. Les machines à battre, par evemple, ont, dans la Haute- Loire. droit de bourgeoisie définitive, un droit publique- ment conquis par la force d’un premier exemple. Nous nous sentons sérieusement encouragés ainsi dans ce mode utile d'influence pratique, en vertu duquel une machine nouvelle, acquise aux frais de la Société, et fonc- tionnant successivement sur des points différents et suivant SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xt} l'exigence des lieux, des cultures, des usages, effectue avec une rapidité merveilleuse, la meilleure, la plus irrésistible des propagandes, une propagande en ‘action. Race bovine du Mezenc. À mesure qu'on se pénétrera plus sérieusement de la triple nécessité existant pour nos cultivateurs de demander à la fois à l’espèce bovine le travail, le lait et la viande. on appréciera mieux les services qu'il est permis d’atten- dre d'une race de montagne, sobre, docile. patiente, dénuée peut-être de toute supériorité absolue dans une spécialité, mais très-aple à répondre d'une manière suffisante aux trois exigences de notre agriculture, Et maintenant, si, tout en reconnaissant les qualités solides, invétérées, profondément fixées, presque indélé- biles, il faut le croire. dont cette race est encore douée, si on se pénètre des conditions déplorables de l'opération agricole au milieu de laquelle elle se continue: si l’on observe que les éleveurs de la montagne, loin de suivre pendant plusieurs générations l'œuvre du perfection- nement, en choisissant el en accouplant avec un soin judicieux les reproducteurs, n’ont Jamais peut-être cher- ché une seule fois à les corriger Fun par l’autre: si l'on réfléchit que le producteur du Mezene, n'ayant que faire de son taureau adulte, dont son agriculture ne trouve pas l'emploi, vend le jeune animal à l'âge de douze ou quinze mois , laissant le marchand étranger choisir tous les sujets les mieux conformés, el ne conservant pour son usage que ce qui n'a pas trouvé d'acheteurs: si l'on songe enfin qu'en cel état de choses, et aussi en raison de la liberté du Xi] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. pacage, la reproduction se fait entièrement sous la seule direction du hasard, et que c'est le plus souvent l'animal le moins fort, le moins étoffé qui, par la saillie devient le père d'une nombreuse descendance; si lon se pénètre bien de toutes ces conditions, tout en s’étonnant qu'une race ait pu résister et conserver des mérites nombreux malgré de si vicieuses pratiques, tout en faisant honneur de cette puissance de résistance à la fermeté, si on peut le dire, de sa constitution primilive, n’est-on pas conduit à penser combien, une méthode scientifique se substituant énergiquement à la vieille routine, l'amélioration la plus capitale, et pour ainsi dire subite, serait infailliblement assure, du jour où la persistance etle savoir domineraient l'œuvre de la reproduction ? Travaux intellectuels. Après avoir bien incomplelement et cependart très-lon- euement encore développé l'ensemble des idées qui parais- sent devoir être l'objet de nos plus vives sollicitudes, au point de vue agricole ; après avoir insisté sur ces questions de l'amélioration et de l'accroissement des produits, qui prennent, à si juste titre, la plus grande part dans nos tra- vaux, il nous reste à dire ici quelques mots de ce qui touche aux intérêts intellectuels, Les études historiques, archéologiques et littéraires , non moins que la poursuite des travaux scientifiques en cours d'exécution, ont, comme par le passé, fructueuse- ment occupé la plupart des hommes spéciaux que la Société a l’avantage de compter dans son sein. Notre vénérable doyen, M. Bertrand de Doue, continue à occuper SEANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE Xxii] le monde savant de ses recherches météorologiques dont nous recueillons les prémices et qui lui donneront dans une science nouvelle ce beau rôle d'initiateur qu'il con- quérait, il y a quarante ans, dans la géologie. Etudes historiques et paléographiques. Après les études générales qui, par les soins d'un cer- täin nombre de nos collègues, ont abouti à d'importantes publications; après les recherches intelligentes qui ont découvert et mis en œuvre tous les documents ou la plu- part des documents intéressants que pouvaient contenir les archives publiques ou les collections connues, il a semblé qu'il y avait lieu de provoquer le dépouillement et la mise en lumière, s'il était possible, de toutes les pièces de quel- que valeur oubliées, enfouies et souvent exposées à loute espèce de dégradation dans les archives privées ou dans les collections inexplorées jusqu'à ce jour. Dans ce but. une commission dite des études et recherches historiques a été formée, et ses efforts ont été déjà couronnés de très- heureux succès. Des pièces importantes, vieux titres ou manuscrits de différentes époques, ont été communiquées au sein de la commission, ou soumises à une intelligente analyse qui permettra d'en tirer un ‘parti précieux, tant pour l'histoire générale que pour les monographies parti- culières, Une publication spéciale donnera désormais à celle nature de travail une publicité durable et suffisante. En ce point, comme sous tant d’autres rapports, lé pré- sident ne peut se refuser le plaisir de rendre ici le plus sympathique témoignage à Paction si intelligente et si dévouée dont la Société est redevable au zélé secrétaire x\i SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. qu'elle a eu l’heureuse fortune de conserver, dans la per- sonne de M. Béliben, censeur au Evcée. Archéologie. Grâce au concours si bienveillant et si éclairé de M. le Préfet et aux allocations accordées à cet effet par M. le Ministre, par M. le Préfet lui-même et par la ville, de nouvelles fouilles ont été entreprises à l’un des abords de la cathédrale, sous la direction de M. Aymard, vice- président de la Société, qui, dans la même période quin- quennale, à découvert également bien d’autres curieuses antiquités, et entre autres la grande inscription de la cathédrale. Les résultats obtenus, les découvertes faites dans ces explorations, quelles que soient les conséquences qu'il sera ultérieurement possible d'en tirer, justifient amplement par leur importance le zèle et les prévisions qui les ont sollicitées. La Société, en constatant les sacrifices qu’elle s'impose pour de tels intérêts, doit adresser également ici de vifs remerciments à MM. de Romeuf et de Latour-Maubourg. nos deux députés, dont les noms seront justement associés à ceux de M. le Préfet et de S. E. M. le Ministre, dans l'expression de notre gratitude pour les sommes qui nous ont été si généreusement accordées. Des travaux de même nature, accomplis avec une intel- ligente initiative par l’un de nos collègues, M. Vinay, ont également ouvert de nouveaux horizons à l'étude de l’his- toire et procuré à la Société le plaisir d'entendre l’intéres- sant travail de M, de Sarlandie, rapporteur. SEANCE PUBLIQUE EXTRAORDINANRE. XXY. Publications. — Annales. Du reste, la trace de cette active et utile collaboration de la plupart de nos collègues se retrouvera plus ou moins complète dans nos Annales, qui ont continué à reproduire el à répandre aa loin les plus importants de nos travaux. La faveur qu'on veut bien accorder à cette publication témoigne de la continuité du zèle collectif mis au service de la cause du progrès et de toute espèce d'améliorations dans ce pays. Je regrette, il faut le répéter encore, de ne pouvoir donner qu'une mention bien insuffisante à ces rapports, notices ou mémoires, qui font passer sous les veux de nos lecteurs, après d'attrayantes ou instructives études, les noms de MM : Bertrand de Doue (Météorologie, géologie, paléontologie, etc., communica tions diverses). De Brive (Inondations, drainage, emploi du guano, rapports sur divers con- grès, rapports sur diverses candidatures, ORANEEDE Aymard (Fouilles archéologiques, inscriptions antiques, tissus anciens, ta chape de Pébrac, etc., Album d'archéologie religieuse, cte., ete.\. Vibert (Communications diverses sur les beaux-arts, sur divers dons faits à la Société). Béliben (Etudes sur la philosophie cartésienne, communication et analrse de vieux documents, terriers, compoix, etc., rapports sur diverses candida- tres). Ghouvon (Rapports sur divers concours, sur un ouvrage concernant l’agricult- ture de la Lozère, par M. de Morangiès, sur les résultats de diverses cultures, notamment de céréales comparées, et sur diverses candidatures, ete., ete.). Robert Félix (Fouilles du paits de Polignac, communications diverses sur des recherches minéralogiques, géologiques et paléontologiques). Regimbeau (Analyse des terres). Souteyran (Caisse d'épargne, mont-de-piété, ete.). Marthory Paul (Etudes historiques, rapports sur des candidatures, utc.). Bonnet Oscar {Etude sur le camp romain du mont Milau). TOME XXII. ‘ XX Yj SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. L'abbé Bernard (Communication et analyse de documents divers, cartulaire de Chamalières, — abbaye de St-Pierre-Eynac). Bretagne (Etudes archéologiques, fouilles à St-Paulien, etc). Le chanoine Sauzet (Documents divers, fragment de la vie de Mgr de Béthune). De Fontpertuis (Etudes sur les enfants assistés, sur les communaux, études littéraires, etc.). Docteur Borie (Etude des divers systèmes de panification). Docteur Martel (Diverses communications sur les maladies contagieuses des bestiaux). Gire (Rapport sur la péripneumonie). De Vinols Louis (Fragments d'histoire’. Comte de Causans (Expériences et observations de pisciculture). Giron (Economie publique, assurances). S Calemard de Lafayette père {Communication sur la question des eaux pour l'approvisionnement de Ja ville du Puy, communications et observations di- verses). Ch. Calemard de Lafayette (En outre des communications périodiques sur l'ensemble des questions dont se préoccupe la Société, rapports sur la Société impériale d'acclimatation, sur la création d’une Commission des recherches historiques, sur les congrès des délégués des Sociétés savantes. sur les condi- tions pratiques du progrès agricole, sur la législation des céréales, sur une candidature, etc., etc.). Doniol Henri (Avantages de la culture du topinambour, communications sur diverses cultures). _ Docteur du Garay (Rapports et observations sur les épidémies). Du Garay aîné (Sur la culture maraïchère aux environs du Puy. Richond Ernest (Institutions de crédit, ete.). Vinay (Etudes historiques sur la maladrerie de Brives, rapport sur une candidature). Balme Louis (Communications diverses, rapport sur le Congrès scientifique d'Auxerre). De Pavan-Dumoulin, président du tribunal (Antiquités gallo-romaines, études sur la céramique antique). Sarlandie des Rieux (Rapport sur les fouilles de Corsac). Hippolyte de Vinols et Gabriel de Chaulnes (Communication d'anciens documents, etc., ete.). Bernard François (poésies diverses). Parmi nos correspondants, un grand nombre nous ont en outre adressé d’intéressants travaux inédits ou des publications souvent remarquables. C’est ainsi que nous avons reçu de MM. du Molin, Francisque Mandet, Enjubault, SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xxvil Bretagne, Léon de Bastard, des travaux jouissant ailleurs de la plus haute estime; de M. Dorlhac, ingénieur, de savantes notices géologiques ; de M. le docteur Bertrand de St-Germain , une étude, accueillie avec une juste faveur dans le monde de la science, sur des travaux veu connus de Leibnitz; de MM. Blanchot de Brenas, Achille Eyraud, Gaubert, etc., des œuvres littéraires dignes de leurs succès. Enfin, dans les procès-verbaux de nos séances, nous trouvons à chaque pas, au sujet d’utiles communications, la plupart des noms qui précèdent et ceux encore de bou nombre de nos collègues, MM. Louis Paul, Jules de Vinols, Giron-Pistre, Plantade, Lacombe, Limozin, etc. Avoir cité ces noms, même d'une facon si sommaire, ce sera, nous devons l’espérer, avoir du moins inspiré à plu- sieurs d’entre vous le désir de parcourir ces volumes dont la collecuon, s’il nous est permis de le dire, devient dé- sormais bien rare parce qu’elle est visiblement recher- chée. Beaux arts, Musée, dons aux collections diverses. Le Musée, appelé à recevoir prochainement, grâce au patriotique souvenir de notre regrettable et illustre Croza- tier, à recevoir dans une transformation complete les nota- bles accroissements dont le besoin s’est fait depuis long- temps sentir, continue à être l’objet des soins intelligents de ses divers conservateurs. Nos collections s’enrichissent chaque jour de dons nouveaux et nous avons à constater fréquemment avec reconnaissance le sentiment pieux de patriotisme qui, sur les rives les plus lointaines, au milieu méme des périls de la guerre et des pérégrinations les plus xxvii] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. aventureuses, inspire aux enfants de Ja Haute-Loire le désir de témoigner par quelque envoi précieux qu'ils se souviennent toujours de la pelite patrie. Après les noms de nos députés, MM. de Romeuf et de Latour-Maubourg, dont l’heureuse intervention continue à provoquer à notre profit les dons généreux du Gouver- nement, après celui de Madame de Latour-Maubourg elle- même, qui s'associe à la sollicitude pour nos intérêts qui semble une tradition héréditaire parmi les siens, la recon- naissance nous fait un devoir de mentionner ici, au moins dans une nomenclature sommaire, les noms de MM. de Maire de la ville du Puy, Seguin Joseph, Mile Ida de Bosberg, Madame veuve Crozatier, M. Richond Jules, docteur Mathieu, Poulett Scrope, de Latourette, Aymard, Souteyran, Chouvon, Avond, Rogucs, Parron Victor, Che- valier-Lobeyrac, Couguet, Gallien, Boyer, le chanoine Montlezun. L'espace et le temps nous manquent également pour apprécier, comme il conviendrait, les objets les plus im- portants dont se sont enrichies nos collections. Mais en dehors mème de cette catégorie d'œuvres d'art, nous ne saurions omettre de mentionner spécialement le monu- ment élevé à Saint-Paulien, sous les auspices de la Société et avec la généreuse participation du Conseil général, à la mémoire de notre grand statuaire Julien. Tous les hommes que peuvent passionner le souci pieux et le respect de nos illustrations locales, ont applaudi à cette création qui fait honneur à la ville de Saint-Paulien et au jeune et intelli- gent magistrat, notre collègue aujourd'hui, M. Prosper Philip, qui marqua sa courte administration dans cette importante commune par les plus heureuses initiatives. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xxIX Et de même, sans que nous puissions suivre au dehors chacun de nos collègues en toutes les tâches qui rappellent leurs noms, puis-je ne pas fixer exceptionnellement votre attention sur la mission patiente ct fidèle que s'est donnée l’un des vélérans de la Sociélé, et qu'il continue à aëécom- plir avec un zèle si éclairé dans une de nos églises ? Je veux parler des travaux de restauration, de complé- ment, d'achèvement que M. le curé Eynac poursuit, sans so lasser, à Saint-Laurent. Pourquoi done altendrait-on toujours que la mort ait enlevé nos plus intrépides travailleurs pour leur rendre toute justice? Pourquoi ne pas donner, de son vivant, au dévouement désintéressé la seule récompense digne de lui, le témoignage de la gratitude publique? Un jeune maire a fait le bien avec une habileté adminis- trative, une fécondité de ressources, une ingéniosité de moyens véritablement hors ligne ; Un vénérable curé a, pour ainsi parler, sans argent, réalisé la transformation la plus complète, je devrais dire la transfiguration du monument confié à ses soins ct auquel il a voué tout son amour et toutes ses sollicitudes ; Faudra-t-il donc attendre que l’un de nous n'ait à ro- connaître de telles'œuvres qu'en en faisant l'éloge sur une tombe? N'est-ce qu'aux morts qu'il faut garder une bonne parole, une parole d'encouragement trop inutile dès lors, de sympathie presque dérisoire à force d’être tardive ? Eh non, Messieurs, trois fois non; ne rejetons pas si loin les échéances de l'équité. Applaudissons les œuvres de progrès, quand notre applaudissement peut encore arriver à l'oreille et au cœur de celui qui les accomplit. XXX SÉANCE PUBLIQUE ENTRAORDINAIRE. Sachons donc le dire tout haut, ce n’est pas seulement une puissante et durable empreinte que M. Eynac aura laissée dans son église, c'est sa vie tout entière depuis trente ans qui, jour par jour, y aura pris Corps, Se sera faite œuvre. Après cette façade qu’on a bien pu critiquer (rien au monde n'étant absolument parfait et tout au monde pou- vant être eritiqué, fût-ce la perfection, si la perfection resplendissait quelque part), mais qui à eu ce succès sans réplique de tromper les archéologues même les plus émi- nents, lesquels ne voulaient pas y reconnaître une création récente ; — après la façade, sont venus le tambour inté- rieur, les chapelles de Sainte-Anne et de la Vierge, les fonts baplismaux (j'en passe et ne m'arréte pas aux détails d’un intérêt moindre), et enfin aujourd'hui la chaire. La chaire, une œuvre encore dont, sans doute, on ne dira pas qu'elle soit irréprochable, mais dont on peut dire à coup sür qu’elle est charmante. Et quand on songe au tour de force d'économie que re- présente chacune de ces créations successives ; quand on sait que tout cela s'est fait à peu près sans argent, on comprend qu'avec M. le curé de Saint-Laurent le zèle, le dévouement et l'intelligence sont devenus de grands eréa- ieurs., et on est bien aise de le lui dire. Mais si jaloux que je puisse être, au nom de la Société, de montrer tous ses membres à l’œuvre, je dois savoir me restreindre aux proportions de mon cadre ; j’abrége done, Messieurs ; ou plutôt je reviens aux impressions plus ac- fuelles que suscite cette réunion, SEANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRF. 1x1] Yecrologie. De telles solennités laisseraient sans doute à la penséo des satisfactions trop complètement sans mélange, si, après avoir constaté avec une bien naturelle complaisance, dos triomphes et des efforts, justification de nobles espérances, nous n'avions le douloureux devoir de rappeler à vos sou- venirs et à vos regrets les redoutables fragilités de la vie humaine, Il nous reste à dire, une fois de plus, combien sont vulnérables les associations eomme la nôtre, toujours périodiquement entamées par la mort ; il nous reste à dire quels vides cruels et profondément sentis se sont faits dans nos rangs. Peu de jours après la dernière séance publique tenue durant la session du Congrès, peu de jours après l'époque où l'honorable prédécesseur dont je suis heureux de suivre la trace et dont je serai fier d'avoir continué l'œuvre. M. de Brive, s’acquittant de l'office douloureux que je remplis aujourd'hui, provoquait parmi nous un juste hommage pour la mémoire de M. Mandet père, nous devions appren- dre encore une perte nouvelle, dont la date restera consi- gnée comme une date d'ineffaçable deuil dans les annales de notre existence. Becdelièvre était enlevé à l'affection publique, au res- pect reconnaissant de la cité et du pays. Ce nom prononcé dans cette enceinte dit tout, et l'éloge qui se résume en lui vaut déjà tous les commentaires. Combien à ce nom se rattachent de fécondes réminis- cences! Ne voyons-nous pas apparaître comme le cortège naturel d'un seul souvenir, le souvenir de presque toutes xxxi] SÉANGE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE,. les institutions de progres intellectuel dont le pays est justement fier, — et constatons-le pour l'enseignement do tous, dont il recueille aujourd’hui les fruits incontestés ? © Ici, Messieurs, mes perplexités sont grandes, la vie de Becdelièvre voudrait une biographie complète. Cette bio- graphie, déjà bien tardive, sera faite prochainement; et le pays l'accucillera avec faveur sur le nom seul de l’homme auquel elle sera consacrée. Mais en attendant comment écourter sans irrévérence l'histoire d’une carrière où le bien accompli tient tant de place? — Becdelièvre, cela veul dire un dévouement de tous les jours, un zèle à toute épreuve; l’ardeur sacrée du bien qui triomphe de tous les obstacles, qui lasse les résistances inintelligentes lorsqu'il ne peut pas les briser, qui pousse en avant toujours, sans songer si le pas de la foule suit son pas généreux; — l'ar- deur qui se résigne à cheminer vaillamment et pendant longtemps s’il le faut, avec le petit nombre, — à rester nomentanément seule s’il le faut encore, seule sur Ja brèche, et debout, et luttant toujours, — jusqu'au triom- phe, jusqu’à la fin, jusqu'au dernier jour même. Mais au bout de la vie, au bout de cette vie si pleine, la récapitulation de la gratitude publique, venue tardive- ment, peut-être, et néanmoins venue, trouve dans le bilan d'une mémoire honorée ces ertations émanées d’un seul homme ou auxquelles un homme à donné, sans compter jamais, le plus précieux, le plus indispensable concours : Un musée dans une ville qui trente ans avant ne savait ce que c'était qu'un musée; des écoles industrielles dans une ville qui voit chaque jour désormais ses ouvriers monter en grade et devenir artistes ; une caisse d'épargne dans un centre où l'épargne restait jusque-là inféconde : SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xxxii} un mouvement artistique qui se traduit en magnifiques succès industriels, qui dans la fabrication d’un produit élégant développera toutes les conditions d’une prospérité et d'un progrès unique, unique entendez-vous, Messieurs, unique en ce moment en France... — Oui, à Paris, — il y a deux mois à peine, je recueillais cet aveu-même, — et j'en élais fier, el vous le serez comme moi : les fabricants des autres régions déclinaient la lutte courtoise que j'avais mission de leur offrir au nom de la dentelle du Pur, et répondaient, non sans humeur, que notre dentelle du Puy prospérant seule en ce moment, ils n'avaient que faire de venir constater le contraste de cette prospérité avec la dé- faillance des autres fabrications. Tant il est vrai, Messieurs, que ces choses d’art, ces choses intellectuelles qui semblent un luxe inutile à quel- ques-uns, se traduisent infailliblement un jour en honneur non stérile, en profit, en Iuere, puisqu'il faut appeler les choses par leur nom. Sans doute et nous le savons assez, de tels résultats ne sont point obtenus sans qu'on ait suscité quelque part la critique, sans qu'on ait froissé les susceptibilités ombra- geuses d’un statu quo trop cher à plusieurs : linertie, même intelligente, la routine plus ou moins raisonnée ne veulent pas être troublées dans leur sommeil ou dans leur torpeur ; et à qui veut marcher, elles crient volontiers qu'on veut tout envahir. . Eh bien, oui! cela est vrai. l’œuvre des Becdelièvre ne se fait pas sans qu’on ait pu, sans qu'on ait dù, à un moment donné, envahir indüment quelquefois quelque chose. On a envahi un édifice inoccupé pour y placer le premier novau si humble de ces collections, aujourd’hui admirées, XxxiV SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, qui sont la sous vos yeux: on a envahi les corables de notre hôtel-de-ville, en demandant l'hospitalité pour des écoles, prodigues depuis lors de bons enseignements ; on a envahi encore la commune en y portant la caisse d'épargne et ses bienfaits. On a fait pis que cela, Messieurs, on à envahi bien autre chose vraiment : on a envahi l'esprit publie ; oui, on l'a conquis ; il s’est rendu et il s'en applaudit ; el c'est avec autant de gratitude que de patriotique orgueil qu’il acclame ce nom, destiné à rester vivant toujours dans cette enceinte. ce nom que vous saluez tous de votre sympathie enthou- siaste : le nom de Becdelièvre ! Après avoir perdu un tel homme, la Société semblait n'avoir pas besoin de dire combien profonds ont été ses regrets : il semble, en même temps, qu'elle payait en une seule fois à la mort un trop large tribut; et néanmoins, coup sur coup, d’autres pertes encore, bien sensibles aussi. sont venues, pour ainsi dire, aviver constamment ses pre- mieres blessures. Dans cette courte période quinquennale, la Société à eu successivement à rendre les derniers devoirs à MM. Richond des Brus. Lobeyrae, de lEguilhe, docteur Borie, de La Tourette, Dumontat et du Villars. Chacun de ces noms demanderait une ample notice, où nous ne pouvons mettre qu'un souvenir. Durant le cours d’une carrière laborieuse, et tour-à-tour occupée par de hautes fonctions, M. Richond, l’un des plus anciens membres de la Compagnie, lui avait toujours gardé une part considérable de ses sollicitudes et de ses travaux. Après avoir longtemps rempli dans son sein les fonctions de secrétaire, il n'avait jamais cessé de donner à nos publi- SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. XAxY cations une collaboration assidue. Les Annales de la Société contiennent bon nombre de mémoires ou notices où se révèlent, tant au point de vue littéraire que scientifique, les hautes aptitudes de son esprit. En outre des écrits spécialement destinés à la Société, M. Richond avait également enrichi la science médicale d'importants ouvrages qui ne sont certainement pas ou- bliés. Appelé à l'honneur de représenter la Haute-Loire, M. Ri- chond des Brus n'oublia jamais les intérêts de notre Société, et nous manquerions à l’un des premiers devoirs d’une association comme la nôtre, si nous ne consignions ici, en méme temps que l'expression de nos regrets, celle de notre gratitude pour tous les dons du gouvernement que [a So- ciété dut à l'active intervention de M. Richond. Le jour même où mourait M. Richond des Brus, M. Eu- gene Lobeyrac, juge au tribunal civil du Puy, lui aussi un de nos collaborateurs assidus, trouvait, à Fâge de cinquante ans, une mort encore plus prématurée. Comme pour M. Richond, il semblerait presque inutile d’énumérer en détail les travaux par lesquels cet honorable membre avait constamment contribué à alimenter fruc- {ueusement nos séances et nos publications. Jurisconsulle appliqué, également doué d'ardeur et d'in- telligence, M. Lobeyrac, prenant une part active dans la discussion des questions générales, avait surtout apporté d'utiles lumières dans l'étude de celles qui rattachent plus particulièrement l’agriculture à la législation. Sa perte sera surtout bien sensible dans le sein de la commission chargée d'étudier et de recueillir tous les documents concernant les usages locaux. XXXV] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. M. de l’Eguilhe avait rendu à la Société et au pays tout entier, par des soins intelligents donnés à la silviculturo et à la pisciculture, des services que nous regreltons de ne pas pouvoir apprécier comme ils mériteraient de l'être au moment où l'heure nous dit de nous hâter. MM. Borie, Dumontat, de La Tourette, du Villars, étaient aussi des anciens parmi nous; ailleurs, leurs œuvres, leur importante collaboration, seront plus équitablement con- signées, el la justice qu’on leur doit n’est que momentané- ment ajournée. A tous ces douloureux souvenirs, il faut ajouter celui d’un homme dont le noble effort pour la régénération du pays se rattache à la période d'action et aux œuvres fé- condes de M. de Becdelièvre. M. de Bastard a, dans cette enceinte, un monument qui conservera aux généralions à venir la pensée de son de- vouement aux arts et la juste gratitude due à l’adminis- trateur éminent sans lequel Les belles initiatives de M. de Becdelièvre et de ses collaborateurs n'eussent jamais abouti. Glorifions la mémoire de teis hommes, elle est un exemple, un enseignement, une féconde leçon. Apprenons d'eux à faire le bien sans songer à l'obstacle, et à ne de- mander qu'au temps la consécration qu'il donne tôt ou tard aux inspirations da dévoñment et du patriotisme. Admission de membres nouveaux. Mais après vous avoir attristé par la pensée de nos pertes, j'ai hâte, Messieurs, de mettre sous vos yeux les compensations du présent. Ce n’est pas sans fierté que la SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Xxxvij Société doit voir se reproduire toujours un fait déja signalé biendes fois. Siquelques hommesd'intelligences’abstiennent de nous apporter leur concours, ce sont là, Messicurs, et nous avons le droit de l'indiquer, de très-rares exceptions, et Ics plus nouveaux venus parmi nous ne sont pas les moins empressés à se rallier à notre modeste drapeau. La Société a fait de nombreuses recrues, je suis naturellement bien aise de citer des noms à l'appui de mon affirmation. MM. l'abbé Bernard, Béliben, Paul Louis, le comte de Miramon, Nicolas, Philip, Doniol Henri, de Vinols Jules, Limozin, Sarlandie des Rieux, Vinay, de Payan-Dumoulin, de Chaulnes, Mauras, Ont déjà comblé les vides faits dans nos rangs, et plu- sieurs d’entre eux vous ont fourni, dans des œuvres du plus haut intérêt, la preuve de ce que vaudra le concours qu'ils sont difposés à donner à nos multiples efforts. C'est ainsi, Messieurs, c’est en demandant promptement au présent de lui rendre ce qu'elle a perdu, que la Société continuera à remplir sa mission avec cette conviction profonde qu’elle comprend sérieusement, qu’elle comprend tout autant qu'elle les aime, les grands intérêts du pays, et qu’en voulant, comme elle le veut, les servir, elle justifie en même temps la haute bienveillance dont l’au- torité supérieure l’a toujours honorée, les généreuses lar- gesses du Conseil général et celles du Gouvernement. C'est ainsi également, c’est ainsi que nous accomplirons envers l'avenir, l'avenir, ce mystérieux inconnu, auquel chaque génération doit son contingent d'œuvres, d’ini- tiatives, de projets et de progrès, c'est ainsi que nous accomplirons tous notre devoir — un grand devoir. xxxwIi] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Alors, Messieurs, vienne cette immense bonne fortune après laquelle nous soupirons tous, cette fortune auprès de laquelle, dans l'ordre matériel, tout autre intérêt semble en ce moment secondaire; — vienne le chemin de fer dont la haute équité de l'Empereur a décrété la création, ce chemin de fer dont la prochaine exécution était naguère encore confirmée à notre premier magistrat par une promesse auguste et formelle ; Que les grandes œuvres locales soient enfin terminées : Que la magnifique fontaine, dont la munificence d’un concitoyen illustre et généreux a doté notre place prinei- pale, s'épanouisse en gerbes ruisselantes ; Que le nouveau Musée, dû aux mêmes largesses, se commence et s’achève : Que la statue monumentale de Notre-Dame-de-France se dresse, protectrice de la cité, se dresse dan$ la triple im- mortalité de l’art, de la gloire nationale et de la religion, et l'ère du vrai progrès, l’ère de tous les progrès matériels, couronnés par l'indispensable auréole du progrès religieux et moral, l'ère d’une régénération bienfaisante pour notre petite et bien-aimée patrie, s'ouvrira largement devant nous. C’est la le but, Messieurs, un but, même dans une sphère bien restreinte, digne de grands et de constants efforts; — un but vers lequel, il faut marcher résolument toujours, dût-on n'être pas toujours applaudi de tous, dût-on défaillir avant de l'avoir atteint, — dût-on, fils respectueux aux œuvres de ses pères, n'avoir, en conti- nuant leur tâche, conquis un meilleur avenir qu’au profit des générations qui viendront après nous. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. XXxix Ce discours, tout d'un jet, écrit en deux heures, qui exprime en une forme si heureuse l’âme entière de l’orateur, est fréquemment interronipu par des applaudissements enthousiastes. M. Langlois donne ensuite lecture d’une pièce de vers de M. Vibert père, intitulée : Mon pays (1). * L’auditoire, charmé de la diction et de l'harmonie des vers, s’unit de sentiment avec le lecteur et le poète, et éclate, à la fin du morceau, en bruyants témoignages de satisfaction. Les applaudissements accueillent aussi la lecture d’un mémoire de M. le Secrétaire, sur un document de la commission des recherches historiques, un terrier à la date de 1408 qui représente avec fidélité la ville du Puy au moyen-âge. Une pièce de vers intitulée : Le Printenps, écrite avec grâce et pureté par un membre de la Société, M. Fran- çois Bernard, et lue par M. Charles Calemard, ravit l'auditoire, qui trouve trop courte cette séance acadé- mique. La proclamation des principaux prix qui la termine ét qui est faite par le secrétaire intéresse encore l’as- semblée. Un morceau d'ensemble, exécuté par l’Or- phéon du Velay au moment où M. le Préfet attache à la bannière la médaille d’or dont l'institution a été ho- norée, produit un effet émouvant. L'assemblée couvre d'applaudissements plusieurs noms aimés et connus du public, proclamés pour des distinctions honorifiques, tels que ceux de MM. Pittarch (1) Voir aux Poésies dans le présent volume. NI SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. et Bay, si dévoués à l’œuvre de }'Orphéon; de M. Blan- chot de Brenas, l’auteur des Velaviennes, vainqueur pour la seconde fois aux concours de poésie ouverts par la Société ; de Madame Arnaud qui, dans un sen- timent de piété filiale, poursuit avec un zèle que les ans ne peuvent ralentir les travaux de botanique com- mencés par M. Marcelin Arnaud, ravi à la science par une mort prématurée; de MM. Charies Robert-Faure , Falcon frères, Breysse-Laugier, Experton, Martin- Rogues, ete., tous fabricants, qui ont exposé sous les yeux du public une admirable collection des produits de la dentelle du Puy et montré par ces échantillons de leur talent que la fabrique du Puy est au moment de devenir la première de France ; de M. Escomel , pro- fesseur du cours de dessin de dentelies régulièrement organisé pour la première fois dans Ja ville du Puy, au lycée impérial, par les conseils et par l'initiative du secrélaire de la Société, ancien professeur de philoso- phie et censeur des études dans cet établissement. L'assemblée écoute encore avec sympathie les noms de nos artistes peintres et graveurs : de MM. Victor Robert, Emile Giraud, Daniel Vincent, Camille Ro- bert, etc., dont les travaux n'ont pas peu servi à donner du relief à l'exposition des œuvres d'art, où brille aussi l.{/bum photographique d'archéologie reli- gieuse de M. Malègue, sorti des presses de M. Mar- chessou. A cinq heures, M. le Président lève la séance, en re- mettant à demain samedi, pour dix heures du matin, la suite de la proclamation des prix. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xl] Le public se répand dans les salles de l'exposition départementale et bientôt envahit la promenade du Fer-à-cheval. A partir de ce moment, le Concours régional a pris un aspect plus animé. Les belles dames qui sortent du Musée ne dédaignent pas de s’arrèter devant les loges des lauréats du Concours agricole. Mer de Morlhon honore de sa visite le Concours dont M. Rendu Jui fait les honneurs. Il examine les animaux primés, les instruments perfectionnés et félicite les agriculteurs de leurs succès. Mais déjà le public connaît le nom de l'heureux pro- priétaire à qui le jury vient d'attribuer à l'unanimité la prime d'honneur, et chacun s’empresse de féliciter l'heureux concurrent, M. le marquis de Ruolz, pro- priétaire agriculteur à Alleret. M. le docteur Olivier, à qui une grande médaille d'honneur doit être accor- dée, reçoit aussi de nombreuses félicitations. Les prix seront proclamés dimanche, à midi, sur une magni- fique estrade déjà dressée, qui s'adosse au mur du jardin de la préfecture, occupe un vaste espace au mi- lieu du rond-point de la promenade du Fer-à-cheval. En effet, au jour et à l'heure déterminés, les membres composant le jury d'honneur du Concours régional prennent place sur l’estrade, sous la présidence de M. le Préfet. Sous la vasie tente, qui abrite des ardeurs du soleil, on remarque Mgr l'Evèque, le Maire de la ville, le Président de la Société académique, M. Rendu, inspecteur, et une foule de notabilités. La compagnie des sapeurs-pompiers, un bataillon de troupes de ligne, la gendarmerie départementale TOME XXHI. d xli} SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. maintiennent l'ordre dans la fouie qui se presse der- rière les places occupées par l'élite de la population. Avec ce ton de bienveillante dignité qui le distingue, M. Emile Paul de Rostan, préfet de la Haute-Loire, prononce l’allocution suivante, qui est couverte d'ap- plaudissements : MESSIEURS , Une des pensées les plus fécondes qui aient reçu leur application dans ces derniers temps est sans contredit la création des Concours régionaux. A toutes les époques, sous tous les gouvernements, on à compris la nécessité d'encourager l’agriculture; et, il faut le reconnaître, les efforts de nos devanciers n'ont pas été stériles, Que d’admirables perfectionnements n'a-{-on pas apportés aux instruments de travail! Que d'ingénieuses pratiques n’a-t-on pas introduites dans lassolement des terres ! Leur culture est devenue une science dont d'innom- brables publications ont formulé les principes et enseigné l'application. Mais à part quelques hommes d’élite, parmi les riches possesseurs de nos grands domaines, quel est le petit pro- priélaire, quel est le fermier entièrement absorbé par les soins quotidiens d’une exploitation laborieuse, qui ait le temps d'aller puiser à ces sources fécondes pour les uns el quelquefois dangereuses pour les autres ? Qui ne connaît les déceptions cruelles que l'application des théories mal comprises a fait éprouver à l’agriculteur SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, xliij téméraire qui les a adoptées, sans tenir compte des mille et une différences qui résultent de la nature du sol et des conditions climatériques, Il est sans doute de ces principes généraux qui sont vrais pour toutes les exploitations, mais il eu est un plus grand nombre qui ne peuvent s'appliquer que dans des régions déterminées, si bien que certaines pratiques qui sont acceplées comme excellentes dans une contrée, ne constilueraient pour d’autres que de fatales erreurs. Tout en poussant les agriculteurs dans là voie du pro- grès, par l’aiguillon des récompenses, il fallait done guider leurs pas par l’enseignement des faits accomplis dans les pays qui les entourent; tout en les excitant par la séduc- tion des exemples utiles, il fallait Les isoler de la contagion des exemples dangereux. De là, Messieurs, la grande et populaire institution des Concours régionaux, si heureuse- ment préparée dans le département de fa Haute-Loire par l'action intelligente et dévouée de notre Société d’agricul- ture et des honorables présidents qui ont successivement dirigé ses travaux. Ce ne sera pas une des moindres gloires du second Em- pire, d’avoir donné ce gage éclatant de sa sympathie à l’agriculture du pays, et lorsque l’ordre rétabli sur des bases inébranlables, l'honneur national restauré par la victoire, et le drapeau de la France flottant sur le sommet des Alpes semblaient ne devoir laisser aucun aliment à l’activité de notre glorieux Empereur, il inaugurait l'ère de cette paix promise, comme la conséquence logique de l'Em- pire, par l’abaissement des barrières qui, en arrétant l'essor de l'expansion humaine paralysaient tout à la fois l’écou- lement des produits industriels el des produits agricoles. xliv SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Et, il y a quelques jours à peine, au moment où l'on croyait notre bien-aimé Souverain absorbé par les préoccu- pations des graves questions qui s’agitent en Europe, calme et serein, il allait, comme un simple propriétaire soigneux de ses intérêts, respirer l'air des champs au milieu de ses terres de La Motte-Beuvron, et apporter par son exemple son contingent personnel au progrès de la plus féconde de nos industries. Mais ce n’est pas seulement à l’agriculture que l'Empe- reur accorde cette protection éclairée : sa sollicitude re- monte jusqu'aux agriculteurs eux-mêmes. Qui mieux que lui connaît leurs besoins et apprécie leurs labeurs ? Aussi est-ce pour eux qu’il réserve ses plus vives sympathies ! N'est-ce pas, en effet, dans les campagnes que se trouve la majorité de la nation, cette force numérique et morale tout à la fois, qui est devenue la base de notre Constitution politique’et la gardienne des institutions qu’elle a fondées par le suffrage universel? N'est-ce pas là que se trouve la plus abondante pépinière de ces héroïques soldats qui naguère, sous les yeux de leur intrépide souverain, arrosaient de leur sang les champs de bataille de Magenta et de Solférino ? Les mains calleuses de nos jeunes et pacifiques labou- reurs, habituées à manier la faulx et la charrue, ne sont- elles pas les mêmes qui sont destinées à se servir de cette terrible baïonnette, la gloire de nos soldats et l’effroi des ennemis de la France? N'est-ce pas enfin dans nos populations agricoles que se conservent pures et intactes ces traditions de vertu dont la vigoureuse empreinte, si elle ne résiste pas toujours au contact des vices qui débordent dans nos grandes cités, SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, xlv reprend son relief primitif par la seule influence du retour à la vie des champs ? N'est-ce pas là que la religion domine avec le plus d’au- torité, et que ses divins principes sont le mieux observés ? N'est-ce pas parmi nos agriculteurs qu'elle recrute le plus grand nombre de ses ministres, de ces bons curés de cam- pagne que nos populations agricoles aiment et respectent, parce qu'ils sont tout à la fois leurs pères, leurs guides et leurs consolateurs ? Quelle est, Messieurs, la cause de la différence considé- rable qui existe sur ce point entre la ville et la campagne ? Faut-il la chercher dans les conditions d’existence si oppo- sées qui sont faites à l’ouvrier des champs:et à l’ouvrier des manufactures? Non, Messieurs, la supériorité morale que lun a sur l’autre, n’est ni dans la séparation plus ou moins complète des deux sexes ni dans la facilité plus ou moins grande des rapports qui se lient entre eux : elle git uni- quement dans cette considération capitale que, dans les champs, ce qui se manifeste le plus aux yeux, c’est le doigt de Dieu, et que, dans les manufactures, c'est le doigt de l’homme. En effet, par le développement graduel des semences qu'il confie à la terre, l'agriculteur assiste, pour ainsi dire, chaque jour aux mystères de la création ; par le besoin continuel qu'il à de l'intervention divine qui lui dispense tour-à-tour avec tant de générosité l'humidité qui alimente ses récoltes, et le soleil qui les vivifie, il apprend à l'aimer, comme il apprend à le craindre par le spectacle terrible des phénomènes atmosphériques qui viennent quelquefois ruiner ses espérances. xlv] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Témoin journalier de ces miracles, comment l'homme des champs ne se replierait-il pas sur lui-même pour en bénir l’auteur, et pour fortifier sa foi dans les vérités que la religion enseigne ? Les merveilles de l’industrie sont sans doute bien faites pour exciter l'admiration, mais elles manifestent d’une manière trop directe la puissance du génie de l'homme, pour ne pas faire oublier un peu que Dieu prend encore la plus large part dans la création de ces chefs-d'œuvre dont il fournit la matière première, presque toujours par l'inter- médiaire de l’agriculture elle-même. Est-il étonnant que le sentiment moral de louvrier in- dustriel s’affaiblisse graduellement et que le culte des inté- rêts matériels domine dans son esprit, quand, pour fortifier ses erovances, il n’a habituellement sous les yeux que les produits qui sortent de ses propres mains ? Qu'on ne se demande donc pas pourquoi nous donnons tant d'éclat à cette fête ; qu'on ne soit pas surpris que Île Gouvernement envoie au milieu de nous un des hommes les plus éminents de la science agricole pour présider notre Concours, et qu'il désigne, pour en être les juges, les plus grands propriétaires et les plus habiles agriculteurs des dé- partements qui composent celte région. Qu'ils soient les bienvenus parmi nous, car ils sont à nos veux les représentants les plus distingués de l’agricul- {ure régionale qui leur doit tant de progrès. Heureuses les populations qui peuvent s'inspirer de leur exemple et pro- liter de leurs leçons! Leur présence parmi nous, quelque passagère qu’elle soil, n’aura pas été sans influence sur j'avenir de notre agricullure, et leurs conseils, joints à SEANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xlvii l'irrésistible éloquence des résultats obtenus par nos ha- biles agronomes, laisseront des traces profondes et des germes de prospérité dont nous ne tarderons pas à recueillir les fruits. Messieurs les exposants, il ne m'appartient pas d’appré- cier vos travaux, je laisse à des juges plus compétents que moi le soin de vous rendre la justice qui vous est due : mais dès à présent, je puis vous rendre ce témoignage que , rien n'égale la beauté des animaux reproducteurs que vous avez eXPposés. La race indigène du Mezene, dont les qualités multiples sont si merveilleusement appropriées au sol du pays, vient de conquérir un rang honorable parmi les belles races dont se glorifie notre production nationale. Grâces soient rendues à ces agriculteurs dont les persévérants efforts ont amené ce résultat: grâces soient rendues aussi à ces hommes intelligents et énergiques qui ont vaincu la stéri- lité de nos montagnes et y ont obtenu ces beaux produits qui peuvent rivaliser avec ceux dont sont si justement lières les contrées Les plus fertiles de la France. En vous décernant, au nom de l'Empereur, ces récom- penses justement méritées, permettez-moi d'être l’inter- prète de sa pensée : s’il veille avec tant de sollicitude sur le maintien de l’ordre dont il est le restaurateur, s’il dé- joue avec tant d’habileté les intrigues des partis, s’il donne aux travaux publics une si vigoureuse impulsion, si, par une politique forte et habile, il devient l'arbitre des desti- nées de l’Europe, s'il donne enfin à nos armées de terre et de mer cette puissante organisation qui force à se taire les ennemis les plus redoutables de la France, c’est qu'il veut réaliser le vœu le plus cher à son cœur et que nous xlvii SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. partageons tous avec lui, celui de faire régner la prospérité dans nos villes et l’abondance dans nos campagnes. Hon- neur donc à l'Empereur, honneur au protecteur de lagri- culture française ! Vive l'Empereur! Vive Napoléon HT! L'assemblée entière acclame ce nom à jamais lié au progrès agricole. Peu à peu le silence se rétablit et l'honorable M. Roussel donne lecture de son rapport sur la prime d'honneur. MESSIEURS . Dix propriétaires et un fermier se sont présentés au Concours pour la prime d'honneur agricole qui doit être décernée dans le département. De ces onze concurrents, trois ont dû être écartés préa- lablement à la visite des exploitations. Deux d’entre eux n'avaient pas fourni le mémoire descriptif exigé par le pro- gramme du Concours, et le troisième n'offrait à l'examen de la commission qu'un enclos de 96 ares détendue. Chez un quatrième concurrent, M. F. Robert, à Cussac, sur un domaine de 70 hectares, la commission à eu à exa- miner seulement une petile réserve cullivée par ce pro- priétaire et, bien qu'elle ait pu se convaincre que M. Robert avait tiré un bon parti de son domaine en le divisant en deux fermes, il n’était pas possible de trouver à Cussac les conditions requises pour le concours de la prime d'honneur. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. xlix La commission a dû ainsi concentrer son attention sur sept exploitations, dont quatre sont situées dans l’arron- dissement de Brioude et trois dans l'arrondissement du Puy. 2 Aer, — LA DARNE. Elle a visité, en premier lieu, dans la vallée de Coubon, la propriété de [a Darne, appartenant à M, Albert de Brive: Auprès d’une maison de maitre entourée de jardins bien tenus, elle à vu des bâtiments ruraux, les uns en voie de reconstruction, les autres déjà améliorés ; une belle prairie bien arrosée ; un essai de drainage dans une terre voisine ; sur plusieurs points, une culture qui révélait la présence d'un propriétaire distingué et ami du progrès. Malheureu- sement, sur l’étroite surface d’un domaine de 15 hectares, le temps à manqué à M. de Brive, comme l'étendue, pour fonder une exploitation complète et pour lamener à ce degré de prospérité qui contribue, en éveillant Pémulation, à propager les bonnes pratiques. 4 2. — SENILHAC. Des rives de la Loire, la commission s'est rendue sur le plateau volcanique qui domine le cours de la Borne, pour visiter le domaine de Senilhac, propriété de M. Charles Calemard de Lafayette. Cette propriété, d’une étendue de 127 hectares, formait autrefois quatre fermes séparées. Après en avoir opéré la réunion, M. Ch. C. de Lafayette à distrait de nouveau de son faire valoir un certain nombre de terres incultes pour les livrer à des colons qui en SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, operent le défrichement, Il à réduit ainsi son exploitation à 80 hectares en prairies, labours ou lerres encore à dé- fricher, et se trouve en voie d'augmenter la valeur de ses terres sans cesser d'en tirer un loyer et en s’exonérant d’un travail coûteux. Mais une pareille combinaison, dort le mérite n’est pas douteux, exigeait une situation favorable, et l’on trouverait sans doute bien difficilement dans ces montagnes, où la main-d'œuvre rurale devient plus exi- seante chaque jour, des colons pouvant, comme à Senilhac, exécuter à leurs frais d'aussi pénibles défoncements. Sur ces hautes terres, si voisines du Puy, on ne connais- sait pas, il y à douze ans, le trèfle, le sainfoin ni la luzerne, et l’on y voyait à peine quelques récoltes de jarousses ou de vesces. Les meilleurs champs étaient réservés pour la pomme de terre ou la rave, auxquelles succédaient l'orge ou l’avoine, suivies à leur tour par le méteil ou le seigle. Le reste du terrain eullivé était soumis à l'alternat misé- rable du seigle et de la jachère. C'est dans ces conditions que M. de Lafayette a pris successivement des mains de ses fermiers les terres de Senilhae, Ces terres étaient en outre encombrées de pierres dont l'enlèvement a été la première condition de l’établis- sement d’un système de culture raisonné. Substituer le froment au seigle dans les sols les moins légers ; dans les autres, le méteil au seigle ; supprimer entièrement l’ancienne jachère inculte, et ne conserver qu'exceptionnellement la jachère bisannuelle ; amener enfin l’ensemble de Fexploitation à un assolement dans lequel les fourrages artificiels eussent une large part, tel est le but des efforts de M. Ch. C. de Lafayette, et la com- mission à pu s'assurer que le succès les récompense déjà. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. |] Elle a vu à Senilhac plusieurs belles récoltes, notamment des feveroles et des lentilles sur un champ récemment créé par des défoncements à bras au milieu de la roche volcanique, et un beau froment qui succédait à des pommes de terre faites sur une défriche de luzerne et fumées avec des chiffons. Elle à remarqué la bonne culture des pommes de terre, dont le plant est en général trop rapproché dans ce pays. Enfin elle à admiré deux prairies naturelles bien arrosées, bien tenues et peuplées de plantes excellentes. Les vieux bâtiments de Senilhac étaient défectueux comme la plupart des constructions rurales anciennes, et aujourd'hui encore, malgré d'importantes améliorations, les étables et la bergerie sont basses et étouffées ; Ia por- cherie, quoique vaste, est loin d’être convenable, et l'on est d'autant plus fondé à désirer une meilleure installation du bétail, que M. de Lafayette possède en genéra! de bons animaux, notamment ses bœufs et ses vaches du Mezenc. Le propriétaire de Senilhac exprimait à la commission, en la recevant chez lui, l'espoir qu'elle constaterait wn effort de bien faire. Ce mot, trop modeste, permet d’ajou- ter que la commission à constaté à Senilhac non-seulement un effort, mais déja de bons résultats, prouvant une suite d'efforts bien dirigés, et révélant l’action personnelle d'un homme également capable, par l'intelligence et par un vif sentiment du bien publie, de rendre d'importants services à l’agriculture de son pays. D. — AUTEYRAC. NN Avant de quitter l'arrondissement du Puy, la commission a visité, dans le canton de Cayres, le domaine d'Auteyrac. lij SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. situé sur un plateau d'environ 1,100 mètres d'altitude et au pied de l’arête principale qui sépare le bassin de la Loire du bassin de l'Allier. Dans cette région sévère, la culture n’est possible que pendant la moitié de l’année. Les travaux extérieurs se succèdent ainsi avec une grande rapidité pour faire place à une longue inaction. « Entre la fin d'octobre et le mois d'avril, nous disait le propriétaire d’Auteyrac, on ne fait plus rien : on bat le grain au fléau et on se chauffe. » Il a fallu certainement beaucoup d’énergie à un homme des villes pour entreprendre de restaurer et de faire valoir un domaine placé dans de telles conditions, et au milieu d’une sorte de désert sans arbres et sans chemins. En 1852, lorsque M, Trintinhae quitta Saint-Etienne pour s'établir à Auteyrac, les bâtiments étaient en ruine ; les prairies, partie capitale de l'exploitation, étaient livrées aux taupes, qui en avaient couvert la surface de monticules gazonnés parmi lesquels la faulx ne pouvait plus se mouvoir. On en retirait à peine 60 à S0 chars de foin qui devaient suffire, avec les pailles, à alimenter, pendant sept mois de stabu- lation forcée, le bétail qui trouvait ensuite sa nourriture au pâturage. Quelques champs exceptionnels recevaient sans interruption, comme à Senilhac, des pommes de terre ou des raves, puis de l’orge ou de Favoine, enfin du seigle, La rotation biennale traditionnelle (seigle et jachère) occu- pait le reste. | Un petit nombre d'années à suffi, dans ce milieu difficile, pour opérer de grands changements. La commission à vu une bonne étable: une très-bonne bergerie avec des crèches mobiles: des parcs mobiles bien établis pour le pareage des veaux pendant la belle saison ;: un beau grenier à SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIKE. liij fourrages, plusieurs bons chemins, des clôtures. une large avenue plantée d'arbres. Quant à la culture proprement dite, M. Trintinhae a dû, comme partout dans ce pays, y préluder par de grands épierrements, dont le produit a servi à l'établissement des chemins ruraux qui manquaient. Il a par-dessus tout le mérite de se préoccuper de la production fourragère, en laquelle réside tout l’avenir de ces plateaux élevés. Il à d’abord consacré tous ses fumiers à ses prairies, et une fois les anciens prés améliorés. il en a créé de nouveaux. La commission à vu sur l’un de ces derniers une récolte de fromental à sa deuxième année, qui offrait dans son en- semble un foin dépassant un mètre de hauteur. Cet accroissement de production, qui permet à M. Trin- tinhac d'accroître chaque année son cheptel et les bénéfices qui en proviennent, parait être encore loin de son terme. si le propriétaire d’Auteyrac consent, sans trop tarder, à abandonner certaines pratiques, celle notamment de faire revenir deux fois le trèfle sur les mêmes terres dans un assolement de sept ans. A ces conditions, Auteyrac doit dévenir, entre les mains énergiques de M. Trintinhac, une exploitation prospère par le développement de l’industrie du bétail, pour laquelle ce canton voleanique est favorablement situé. Des quatre domaines présentés au concours dans l'arron- dissement de Brioude, trois sont groupés autour de Paulha- guet; le quatrième, le Chassagnon, est situé dans le canton de Langeac, mais il appartient en réalité à la même con- trée agricole que les trois premiers, et s'étend sur lextré- nité sud de la plaine dont Ælaghac occupe à peu près le liv SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. centre, tandis que la Boryte et Allerel sont assis sur les collines qui bordent la même plaine vers l'ouest. Le sol de ce petit pays, qu'on nomme le Chaliergue, est tantôt volcanique, tantôt siliceux, argilo-siliceux ou tour- beux : le sous-sol y est presque partout imperméable, et cette circonstance, jointe à la configuration du terrain et à sa faible inclinaison vers le cours de l'Allier qui recoit les eaux de la plaine, explique l'existence d’un grand nombre de lacs et d’étangs qu'on exploitait pour la vente du pois- son, et de marais dont le fond mal desséché est resté jus- qu'à ces derniers temps un foyer de miasmes pernicieux. C'est sur ce fond, aujourd'hui assaini, que Flaghac et le Chassagnon nous ont offert leurs plus belles récoltes. Le Chaliergue, en général, semble plus prospère et plus avancé, sous le rapport de la culture, que les cantons pré- cédemment parcourus par nous, et nous avons rencontré à la Boryte, pour la première fois, le nom et les traces de l’homme de bien qui préluda, au commencement de ce siècle, par Fexemple, à la régénération de cette partie de la Haute-Loire. DA TBORETE: ns PS Le domaine de la Boryte appartenait à M. de Macheco. C'est lui qui construisit l'habitation principale et commenca les travaux d'améliorations, continués, depuis 1853, par un de ses gendres, M. de Morteuil. Il est nécessaire de noter que ce domaine, d'une étendue de 70 hectares, était loin d'offrir les ressources qui ont pu décider M. de Macheco à concentrer ses forces sur les terres d'Alleret. son domaine SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. IV principal. Le sol y est plus maigre ; les pentes sont beau- coup plus rapides ; Les expositions plus froides, et lon doit expliquer sans doute, à l’aide de ces circonstances, comment il se fait qu'en prenant sous sa direction, en 1855, cette partie de l'héritage de son beau-père, M. de Morteuil n’y a trouvé d'autre assolement que la solation biennale du seigle et de la jachère. Cette vieille routine à déjà fait place à un assolement meilleur, et la Boryte se transforme rapidement, grâce aux moyens de la culture moderne, que M. de Morteuil appelle à son aide. La commission y à vu de bons instruments : une belle étable: une bonne bergerie: une porcherie très-bien établie; et ces soins pris pour l'installation des animaux faisaient regretter davantage que ceux-ci n’y ré- pondissent pas tous suflisamment par la qualité. Un petit troupeau de moutons south-downs faisait exception ; mais cette importation d'animaux anglais ne soulève-t-elle pas des objections dans une situation où les meilleurs profits se tirent de l’engraissement, toujours plus rémunérateur que l'élevage, à condition, toutefois, de prendre ses élé- ments autour de soi et dans la population animale qu'on se procure au meilleur marché. Une excellente pensée de M. de Morteuil à été de tendre à réduire les surfaces labourées, et il a déjà le mérite d’avoir créé de bons herbages sur des pentes où lon n'ob- tenait que de maigres céréales. En 41855, il v avait à la Boryte 8 hectares de prairies naturelles contre 41 hectares de labours. En 4859, M. de Morteuil possédait 21 hectares de prés naturels contre 53 hectares de champs. Ces chiffres valent mieux que tout autre éloge. lv) SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, ? D. — FLAGHAC. Flaghac est un des grands domaines du Chaliergue. Sans parler de la réserve du propriétaire, qui comprend à elle seule 135 hectares de bois, on y compte 486 hectares de labours et 55 hectares de prairies, qui forment l’exploita- tion confiée depuis 4856 à un fermier, lequel n’a pas craint, dès la deuxième année de son bail, de s'inscrire au nombre des prétendants à la prime d'honneur de la Haute- Loire. Mon but en notant cette circonstance est bien moins d'accuser ce concurrent, M. Guittard, de témérité, que d'indiquer le trait saillant de son entreprise, je veux dire le zèle exceptionnel avec lequel il s’est mis à l’œuvre pour cultiver de vastes surfaces et achever en même temps, de concert avec son propriétaire, M. de Flaghac, les améliora- tions foncières commencées par ce dernier. Une partie des prairies de Flaghac et 74 hectares des meilleurs champs étaient autrefois des étangs. Vers 1850, cette terre ne produisait encore qu’une rente modique que les fermiers payaient à l’aide de coupes de bois taillis, de la vente d’une certaine quantité de foin et de la vente du poisson des étangs. M. de Flaghac résolut de changer har- diment ces conditions. Dessécher les étangs, assainir les terres marécageuses:; purger les champs des pierres qui les encombraient: refaire et irriguer les prairies, telle à été la l'ude entreprise dans l'exécution de laquelle, avec un sen- timent qui l’honore, M. de Flaghac aime à rappeler qu'il à été puissamment secondé par un régisseur polonais, que la mort à frappé dans le cours de ses travaux. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. lvi] On aura une idée de ces travaux si l’on remarque qu’il a fallu, sur de grandes étendues, couper la lave ou le granit par des tranchées dont la profondeur a dù assez souvent dépasser deux mètres. Ce drainage colossal, l’épierrement des champs, l'irrigation des prés, n'étant pas terminés lorsqu'il à pris en main l'exploitation, M. Guittard, avec un courage peut-être sans exemple parmi les fermiers de cette région, à voulu s'associer à ces réparations foncières : il à augmenté ou construit plusieurs bâtiments sans ré- elamer d'autre contribution du propriétaire que celle des matériaux de construction ; il a créé une prairie irriguée dans des circonstances difficiles, et à montré qu'il n’était pas indifférent à la réputation acquise au domaine qu'il exploite par les succès des animaux de M. de Flaghac dans les concours agricoles. La commission à vu dans ses étables de bonnes bêtes à cornes de la race de Salers. Dans le ma- tériel agricole elle a trouvé de bons instruments dont l'emploi habituel était révélé par de bons labours. Mal- heureusement, il faut le dire, M. Guitiard nous à paru céder dans sa culture à un zèle impatient qu'il n’est peut- être pas sans péril d'encourager. Rien n’est plus funeste en agriculture qu'une ardeur emportée, mise au service de faux principes. Tandis que M. Guittard Iui montrait plu- sieurs belles récoltes et notamment de magnifiques céréales qui succédaient sans intermédiaires à d’autres céréales, la commission ne voyait pas sans crainte l'excès de confiance produit par cette apparente prospérité. Elle redoutait pour M. Guittard, après les faciles succès d’une eulture à son début, sur des marais desséchés, l'heure où le décourage- ment vient remplacer le zèle et compromettre le succès définitif. TOME XXHI. ‘ lviij SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. ? O6. — LE CHASSAGNON Après la ferme de M. Guittard, la commission a visité le Chassagnon, situé, sous le rapport du terrain, dans des conditions analogues à celles de Flaghac, mais noloirement plus défavorables. C’est ici cependant, Messieurs, que nous avons trouvé l’ensemble de résultats le plus propre à frapper utilement les esprits, en montrant ce que peut faire un véritable agriculteur, dont l'activité prudente s'emploie, profitant de tout et sans perdre une occasion ni un jour. à surmonter les obstacles qui l'entourent. Le domaine du Chassagnon, d’une étendue de 102 hec- tares, était comme perdu, il y a douze ans à peine, au milieu des terres vaines et du sol pestilentiel des marais. L'eau pure y faisait défaut si complètement que les ani- maux n'avaient pas d'autre abreuvoir que l'étang le plus voisin, et l'insalubrité y était telle qu'on disait comme un proverbe : « que nul n'allait au Chassagnon sans voir au coin du feu un homme ayant le tremblement de la fièvre. » En arrivant dans ce milieu, M. le docteur Olivier voulut pourvoir au besoin le plus urgent, celui de vivre. Le dessé- chement du principal marais à exigé, comme à Flaghac, un fossé taillé dans le roc, à une profondeur de 2 mètres sur une largeur de 0,60 centimètres au fond et d’un mètre et demi à l'ouverture. Un drainage général proportionné à l'importance de ces grandes voies d’égouttement a fait dis- paraître partout les eaux croupissantes, tandis que par d’ingénieux travaux, l’eau vive dérivée du ruisseau qui ali- mentait les élangs est venue affluer partout à leur place. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. lix Après avoir examiné dans ses détails cet ensemble d’ingé- nieux travaux, la commission les a admirés sans réserve comme un modèle à suivre dans de semblables situations. Le système d'irrigation des prairies n’est pas moins re- marquable, et l'importance des résultats brille encore da- vantage par la simplicité des procédés employés. Je citerai comme exemple un canal de 0,65 centimètres de profon- deur, servant à conduire l'eau du canal principal vers une prairie de création nouvelle, et qui a été creusé par l’em- ploi successif d'une charrue et d’une fouilleuse, suivies par une bande d'ouvriers qui enlevaient à la pelle la terre remué par ces puissants ins{ruments. Par cette entente habile de l’arrosement exécuté presque partout par reprises d’eau, M. Olivier a déjà triplé, aux dépens de ses plus mauvais terrains, l'étendue de ses prai- ries ; il a amélioré les prairies anciennes et, en résultat final, il a sextuplé Ia quantité de ses fourrages naturels. En 1847, il trouvait au Chassagnon 7 hectares de prés aigres, donnant vingt voitures de 15 quintaux chacune de mauvais foin et ne donnant pas de regain : il engrange aujourd’hui environ 2,000 quintaux de fourrages de ses prairies. Par des dispositions non moins ingénieuses, l’eau vive, inconnue autrefois dans ce domaine, ruisselle à volonté dans les cours, les étables et la maison d'habitation, et peut servir de moteur à un moulin très-simple que sur- monte un grenier à blé bien établi. Pour asseoir une meilleure culture sur ce sol assaini, il fallait, comme dans toutes les exploitations de ce pays dont nous avons dû mentionner les débuts, pratiquer un épierre- ment très-laborieux. M. Olivier a poursuivi celte opération Ix SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, sans relàche, utilisant les petites pierres tantôt à remplir les tranchées de drainage, tantôt à macadamiser un réseau de chemins d'exploitation établi sur les proportions des chemins de grande vicinalité. Après l'enlèvement des pierres libres à la surface, il a fait extirper, partout où il l'a jugé avantageux, la croûle volcanique superficielle, dont les débris ont servi à la construction des murs de clôture qui bordent les chemins d'exploitation. L'impor- tance de ces travaux peut s'exprimer par quelques chiffres : il y a au Chassagnon plus de 47,000 mètres de tranchées empierrées ; plus de 6,000 mètres de chemins macada- misés et environ 14,000 mètres de murs de clôture de 0,60 centimètres de hauteur. L'art de concilier la simplicité avec l'ampleur se montre encore dans les bâtiments du domaine, qui sont en général spacieux et trèes-bien appropriés à leur destination. Les écuries et les étables sont pourvus d’abreuvoirs et de ri- soles pour recueillir le purin, qui est entrainé sans déper- dition dans une fosse ou directement dans les prés. Les fumiers sont bien traités et la fosse à purin est munie d'une bonne pompe. Un grand ordre préside à la distribution des fourrages qui sont tous bottelés, soit au pré au moment des fenai- sons, soit plus tard dans la grange, où la commission en a trouvé encore une provision considérable pour la saison. Il existait également dans un hangar voisin un tas de pailles d'environ 250 mètres cubes, et de tels restes d’ap- provisionnements, au 50 juin, après une année peu abon- dante en fourrages, sont une preuve sans réplique que la culture est bonne. Le plan de culture suivi au Chassagnon prouve en effet A ÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, Ix} des calculs aussi sages que ceux qui sont manifestés par les dispositions des bâtiments et des fumiers, l’aménage- ment des eaux et le changement dans l'état du sol. Sur un terrain aussi peu profond, c'est avec raison que, voulant placer une culture sarclée comme point de départ d’un assolement, M. le docteur Olivier a préféré la rave ou tur- neps à la betterave et aux autres racines. IL accorde au turneps une sole de 5 hectares et, grâce à l'association du raifort au turneps, et aux grands soins donnés à cette cul- ture, il tire de cette sole une énorme quantité de nourri- ture dont il peut disposer dès les premiers jours d'octobre, où le raifort commence à fournir, jusqu’au mois de février. où les raves s’achèvent. Les détails de cette culture mé- ritent d'obtenir une attention particulière dans les pays montagneux voisins du Chassagnon, et qui semblent ne pas connaitre tout le parti qu'ils pourraient tirer du tur- neps. L'assolement des terres améliorées du Chassagnon com- prend une rotation de cinq ans, dans laquelle la récolte sarclée est suivie d’une orge avec trèfle; au trèfle succède le froment, el la rotation s'achève par une avoine ou par des vesces qu’on fauche souvent en vert. Sur les terres que le temps ou d’autres obstacles n’ont pas permis d'amener à un degré suffisant de puissance pr'o- ductive, l'assolement débute par une céréale sur pacage, après laquelle se placent des vesces ou du trèfle: une avoine vient ensuite, et la jachère remplit la quatrième année et termine Ja rotation. La partie du domaine soumise encore à ce régime et plusieurs échantillons des récoltes qui en proviennent constituaient, lan dernier, ce que l’on peut appeler la partie faible du Chassagnon., et montrent Ixii SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, ce qui reste à faire pour que cet intéressant domaine pré- sente une œuvre agricole achevée. De beaux froments que la commission à vus sur des terres qui n'avaient produit que des seigles, et dont plusieurs ont été acquises par M. Olivier, au prix de 150 francs l’hectare, nous ont semblé une garantie que cette transformation ne tardera pas à s’accomplir. On ne saurait demander à des propriétaires qui spécu- lent presque exclusivement sur l’engraissement, d’attacher une très-grande importance au type des animaux. L'essen- tiel pour eux est de vendre leurs fourrages aux animaux qui les paient au meilleur prix. Cette circonstance explique cette variété de types et de provenances qui caractérisent le troupeau du Chassagnon, comme ceux de Senilhac et de Flaghae, où les animaux ne font pour ainsi dire qu'une station, — où ils arrivent maigres pour être vendus après quatre et cinq mois d’engraissement. Pour l'espèce bovine, qui lui fournit des bœufs de tra- vail et des vaches à lait qu’il engraisse et vend lorsqu'ils sont vieux, M. Olivier, comme M. de Morteuil et plusieurs autres propriétaires, semble préférer la race vigoureuse d’Aubrac. Les bœufs étaient les meilleurs animaux de celte race que la commission eût rencontrés dans la Haute- loire. C'est encore au Chassagnon, Messieurs, que, pour la pre- mière fois dans le cours de ses visites, la commission à trouvé des écritures tenues depuis le début de lexploita- tion, avec fa suite nécessaire pour former un système de comptabilité suffisant. L'examen des chiffres, à partir de 1847, établit que le produit net total de cette exploitation a presque doublé. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE Ixii} M. le docteur Olivier a done ainsi le rare mérite d’avoir. en peu d'années, réussi à créer dans une plaine malsaine et sur des terres mauvaises ou médiocres, une culture qui non-seulement peut servir de modèle à son voisinage, mais qui fournit la preuve à tant d'hommes qui semblent décou- ragés avant d’avoir agi, que si nous ne pouvons demander à l’agriculture de nos contrées d'ouvrir, comme dans les vignobles du midi, ces carrières si riches que le Concours régional de Montpellier metiait naguère en lumière, l’ex- ploitation de notre sol montagneux peut au moins, sous des mains courageuses et prudentes, procurer non-seulement un des plus honorables emplois de la vie, mais encore devenir une industrie féconde et rémunératrice, 2 T. — ALLERET. Pour terminer notre mission dans la Haute-Loire, il restait à visiter un domaine fameux dans ce département et dans les pays voisins de la Haute-Auvergne et du Gévaudan., Je veux parler d’Alleret. Le nom d’Alleret ramène involontairement celui de M, de Macheco, qui fut tout à la fois le créateur des magnificences agricoles qui ont fondé la réputation d’Alleret, et le pro- moteur des progrès auxquels ce département est parvenu. La commission comprenait, en approchant d’Alleret, que l'étranger ne pût se défendre qu'avec peine d’une impres- sion favorable, à l'aspect de cet amphithéâtre de cultures, distribuées avec tant d'harmonie sur les flancs d'un vaste cratère, couronnées par des bois et des vignes, et parsemées de fabriques pittoresques, car il faut emprunter ce mot au langage des artistes pour rendre l'effet produit par ces Ixiv SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. constructions éparses qu'on est tenté de croire élevées pour le plaisir des yeux, plus encore que pour des usages TUTAUX. Ai-je besoin de dire que la commission a fait la visite d’Alleret avec un esprit entièrement libre de cette séduction prévue du premier aspect? Après avoir vu au Chassagnon une terre amenée en douze ans, par le travail d’un seul, à un état si remarquable, nous sentions au contraire la né- cessité d’être très-attentifs dans l'examen d’une œuvre col- lective, qui a absorbé le travail de deux générations, et peut-être étions-nous disposés involontairement à être difficiles dans l'appréciation des détails de l'exploitation actuelle, que dirige, depuis 1852, le gendre de M. de Ma- checo, M. le marquis de Ruolz. Un Jong historique et une description nouvelle d'un do- maine plusieurs fois décrit et bien connu, serait sans utilité dans ce rapport déjà long. Je me bornerai à rappeler qu'au point de départ primitif, vers 1802, lorsque M. de Macheco entreprit pour son compte l'exploitation dont il ne s’est séparé qu'en mourant, les fermiers d’Alleret ne pouvaient pas payer une rente fixée à 2,400 francs. Transformer le sol par un procédé de défoncement qui s'est rapidement propagé dans le pays: épierrer; assainir : changer en prés les fonds marécageux ; eréer d'excellentes terres de labour et des vignes sur des landes ou à la place de bois médiocres ; après avoir ainsi refait le sol, importer la charrue de Dombasle ; enseigner à ses voisins, qui en ont si bien profité, à labourer mieux, à récolter sur leurs champs épierrés le trèfle et la luzerne ; leur donner entin cette série de bons exemples dont le souvenir a dicté, dans une des pièces soumises à la commission, cet aveu, je me SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Ixv trompe, cet hommage reconnaissant : Je dois reconnaitre, dit M, de Flaghac, que si dans ce département nous avons fait quelque chose en agriculture, c'est au bel el noble exemple de M. de Macheco que nous le devons. Toute l'impulsion a été donnée par lui, et sans lui, malgré le progrès universel de l'agriculture, le Chalierque serait loin de ce qu'il est aujourd'hui. Telle à été la carrière agricole du créateur d’Alleret, et nous ne craindrons pas de rapporter la remarque que nous avons entendu faire, non sans intention critique, que M. de Macheco avait englouti dans sa terre plusicurs centaines de mille francs. Remarquons seulement, à notre tour, qu'à la mort de M. de Macheco des expertises contradictoires fixè- rent à 500,000 fr. la valeur du domaine, qui ne donnait pas même autrefois une rente de =,400 francs. C’est ainsi, Messieurs, que la terre prouve que, loin d’engloutir l'argent, elle sait, même en le restituant, justifier la conduite de ceux qui ont su lui prêter. Quoi qu'il en soit, M. de Macheco laissait, en 1851, un difficile héritage à celui qui voudrait l'accepter avec la ré- solution non-seulement de terminer les améliorations fon- cières inachevées, mais encore de maintenir Alleret au niveau de sa réputation et des progrès rapides de l’agricul- ture. La commission à reconnu, sans avoir à hésiter, que M. de Ruolz à réussi pleinement dans cette tâche ardue, où la piété filiale a prêté à ses forces un heureux soutien, car je ne saurais oublier la part qui revient à la fille de M. de Macheco, dans la prospérité présente d’Alleret. Pendant les huit années écoulées sous la direction de M. de Ruolz, les améliorations du fonds et d'importantes transformations ont été opérées. 18 hectares ont été drainés. Ixvi SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, La création de nouveaux prés a introduit un équilibre meilleur dans les forces de l'exploitation. En 4854, il n’y avait à Alleret que 55 hectares de prairies pour 422 hec- tares de terres labourables ; M. de Ruolz à diminué de 27 hectares ce champ immense de la charrue, et il a aug- menté de 25 hectares l’utile domaine de la prairie. En ce moment, les proportions relatives des diverses parties de l'exploitation s'expriment par les chiffres suivants : sur une contenance générale de 240 hectares, on trouve 95 hec- tares de champs; 65 hectares de bois: 65 hectares de prés ou de luzernes: 11 hectares de vignes et 6 hectares de jardins, vergers, ele. Bien qu'il existàt des vignes à Alleret avant 1854, la commission à pu reconnaitre que le vignoble actuel de ce domaine est une création exclusivement propre à M. de Ruolz, et qu'on doit citer comme un modèle de culture viticole dans cette partie de la France centrale. La tenue générale des terres n’est pas moins remarquable et constitue un ensemble cultural d'une rare beauté. Par- tout nous avons, vu des labours qu’on pourrait appeler parfaits; partout des récoltes altestant une eulture excel- lente. Les trèfles, les luzernes, les vesces, les colzas, les maïis-fourrages offraient partout, comme les céréales, un développement splendide. Parmi ces dernières, nous de- vons nommer plusieurs récoltes hors de comparaison, non- seulement par le luxe de la végélation, mais surtout par le choix des espèces cultivées, très-supérieures à celles du pays. Tels étaient un blé fin de Hongrie de deux mètres de hauteur avec des épis magnifiques ; un blé Hickling dont le rendement pourrait être estimé au minimum à 55 hec- tolitres à l'hectare ; des avoines de un mètre et demi de SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Ixvi] hauteur, des orges et divers seigles non moins surprenants, notamment un seigle de Rome, avec des épis extraordi- naires sur des tiges très-vigourouses. Toutes ces céréales étaient remarquables par une propreté exceptionnelle dans le pays. Les cultures de haricots, de fèves, de lentilles, de pois semés au semoir ; les pommes de terre travaillées avec la houe à cheval; toutes les cultures sarclées, en un mot, étaient irréprochables. En 1851, l’ancienne solation biennale était en vigueur sur lesedeux tiers du domaine de M. de Macheco et un assolement quadriennal, avec une forte fumure en tête. s'appliquait à peine sur le tiers de ce domaine, Aujour- d'hui, la routine ancienne à complètement disparu, et grace aux ressources de l’assolement quadriennal, jointes au produit des luzernes et des herbages nouveaux, M. de Ruolz est arrivé à une stabulation à peu près permanente, en même temps qu'il assure pouvoir fumer chaque année, à la dose de 72,000 kilogrammes par hectare, le quart des terres en culture. Le matériel agricole est en rapport avec le soin et l’in- tensité du travail rural, et il est presque inutile d'ajouter qu'une très-grande partie de ce matériel était inconnue à M. de Macheco. L'aménagement, les fumiers, la distribution des eaux, les dispositions intérieures des bâtiments ont recu de M. de Ruolz de notables améliorations. Le beau hangar des ma- chines est son œuvre, ainsi que la porcherie qui est un vrai modèle. L'établissement pour la volaille, la buanderie, la laiterie, le fruitier, le bâtiment réservé, par la recon- naissance des maîtres, comme un asile aux vieux servi- teurs, un immense jardin admirablement tenu et peuplé Ixvii] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. des meilleures espèces, offrent, grâce aux soins de madame de Ruolz, la fraicheur et le charme de créations nouvelles. Les contemporains de M. de Macheco ne s'inquiétaient pas encore, au moins dans nos pays, de la question des races et de l'amélioration du bétail, et M. de Ruolz a cédé à des préoccupations nouvelles en changeant la population animale d’Alleret, à l'exception toutefois du troupeau, qui offre la même confusion de types el de provenances que nous avions observée partout, depuis Senilhac jusqu’au Chassagnon. Le reste, chevaux, vaches et bœufs dæSalers, pores de Hampshire ou de New-Leicester, se présente avec un ensemble de qualités qui place encore Alleret, sous ce rapport, au-dessus des exploitations précédemment visitées. Il n’est pas jusqu'à la partie forestière qui ne se dis- tingue par la supériorité de la tenue, Les bois sont non- seulement bien ménagés, mais les pentes qu’ils occupent sont utilisées pour créer de nouvelles ressources à l'irri- ation. Des tranchées ont été creusées de manière à arrêter les eaux dans leur descente pour les recueillir dans de vastes puisards, d’où, après y avoir déposé la terre végé- tale entrainée et qu'on vient leur reprendre, elles sont dirigées par des canaux empierrés dans des bassins qui les tiennent en réserve pour l'irrigrtion. Enfin, Messieurs, une comptabilité rigoureuse, qui fait partie de la tâche de M. de Ruolz, permet de mettre inces- samment en évidence les faits nombreux qui se rapportent à cette exploitation compliquée. Tel est l’ensemble de ce magnifique domaine dont le premier aspect charme l'œil de l'étranger et dont Pétude attentive a conquis les suffrages de la commission. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Ixix Partout, jusqu'à Alleret, à côté de parties excellentes, de détails séduisants, d'efforts bien réussis, nous avions trouvé des lacunes, des parties négligées par force ou par manque de temps. Ce qui caractérise Alleret c'est une su- périorité d'ensemble qui s'impose de plus en plus, à mesure que par l'examen des détails on s'assure que dans cette grande exploitation rien n’est négligé et que rien n'échappe à la sollicitude du maitre, S'il m'était permis de conduire le jury et le publie lui- même à travers les impressions par lesquelles la commis- sion à passé dans l’accomplissement de sa mission, je dirais qu'en quittant le Chassagnon pour nous rendre à Alleret, qui s’offrait avec le prestige, mais aussi avec le poids de sa renommée, il nous semblait presque que nous n'avions plus à chercher le lauréat de la prime d'honneur, tant l'habile agriculteur, en la personne de M. Olivier, nous semblait, par ses œuvres, à la hauteur de cette récompense. En quittant Alleret, Messieurs, le mérite personnel du créateur du Chassagnon n'était pas moindre à nos yeux, mais C'était décidément à la grande exploitation de M. de Ruolz qu'appartenait le premier rang dans l'agriculture de la Haute-Loire. Dans quel domaine, en effet, non-seulement de la Haute-Loire, mais de plusieurs départements, pour- rait-on rencontrer des résultats plus complets d’une longue série d'efforts, constamment dirigés vers un seul but, celui de créer une exploitation modèle ? Deux générations sans doute ont concouru à cette brillante réussite, et nous n'avons pas oublié que la pre- mière part, et si je puis ainsi dire, tout le travail prépa- ratoire, appartiennent à un homme qui n'est plus. Mais c'est au propriélaire actuel qu'apparliennent en propre Ixx SÉANCE FUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. l’éclatante prospérité d'aujourd'hui, et ces admirables cul- tures qui seules pouvaient maintenir Alleret à ce premier rang que lui assigne la renommée et dans lequel la com- mission a rencontré, en M. de Ruolz, le digne successeur de M. de Macheco. Et je n'ai pas à dissimuler, Messieurs, qu'au spectacle de l'amour exalté avec lequel M. et Mme de Ruolz se sont voués au développement de l’œuvre pater- nelle, considérant comme un devoir sacré de ne pas la laisser dépérir en leurs mains, la commission a été heu- reuse de pouvoir, en couronnant les continuateurs de M. de Macheco, couronner ses propres enfants et faire en quel- que sorte remonter jusqu’à lui ce dernier hommage. La lecture du rapport de M. Roussel souleva des applaudissements prolongés. La distribution des prix commença immédiatement. M. Rendu proclama les deux vainqueurs du Concours. M. le Préfet remit, au nom de l'Empereur, le pre- mier prix à M. le marquis de Ruolz qui l'avait glo- rieusement obtenu. M. Rendu délivra le second à M. Olivier, du Chas- sagnon. Ces lauréats se retirèrent au milieu des bravos et des acclamations des assistants. M. de Bec remplaça M. Rendu dans la proclamation des médailles et primes des exposants de l’agriculture. La fanfare de l'Orphéon saluait de temps à autre les lauréats dont les noms étaient acclamés plusieurs fois. SEANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Ixx) Nous empruntons au journal le Moniteur de la Haute-Loire le compte-rendu, si complet et si bien écrit, des fêtes du Concours régional, auxquelles la Société à pris une grande part. A trois heures et demie environ, cette imposante cérémonie se terminait au milieu de la satisfaction gé- nérale. La foule s'écoulait avec lenteur où s’arrètait curieusement à examiner les animaux, les machines et les produits agricoles exposés à ses regards. A cinq heures et demie, M. le Préfet, Mgr l'Evèque, M. le Maire, M. l'Inspecteur général Rendu et les di- verses sommités du Concours prenaient place avec MM. les lauréats, dans la salle de l’ancien Musée, à un banquet que leur offrait la ville. La facade du vieux bâtiment s'était mise en frais de coquetterie pour recevoir dignement ses hôtes illustres. Des guirlandes entouraient les colonnes de la porte d'entrée. La charrue et les gerbes qu'on remarquait sur le fronton du vieux monument indiquaient assez que les gracieusetés de l’intérieur s’adressaient uni- quement à l’agriculture et à ses amis. La salle du banquet, dans laquelle on avait créé une obscurité factice, resplendissait de l'éclat féerique de huit cents bougies et verres de couleur. A la faveur de cette splendide lumière, les yeux charmés des convives, abandonnant un instant le mi- raculeux ensemble qui s'offrait à eux, s'arrétaient Ixxi] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, “fascinés devant les allégoriques beautés que trahis- saient les moindres détails d’ornementation de cette salle pleine de prestiges. En face de la porte d'entrée, au-dessous d’une aigle immense, on remarquait d'abord un admirable fais- ceau d'instruments d'agriculture artistement groupés, enlacés qu’ils étaient sans la moindre confusion. L'autre extrémité de la salle, celle qui domine la porte d'entrée, offrait aux regards un éloquent hom- mage rendu à l’immortel créateur des Concours régio- naux, à l'Empereur Napoléon IH. Immédiatement au-dessus de son buste, un soleil, aux rayons supérieurement façonnés avec des lames de sabres d'infanterie, lançait aux deux colonnes brillantes de fusils qui le flanquaient ces éclairs d'acier d’un effet si noble et si imposant. Les trois tables immenses du banquet reproduisaient assez bien l'aspect d’un gigantesque trident. Un lustre, véritable prodige de patience, de grâce et de fraicheur, inimitable composé d’un mélange inouï de fleurs, de mousse et de lanternes d'une exécution et d'un travail incroyable, projetait doucement ses pris- matiques lueurs sur les convives. Les parois de la vaste salle, entièrement tendues de draperies blanches et rouges, laissaient lire, en lettres d’or, des noms chers à l'humanité, à l’agricul- ture ! C'étaient, à droite, ceux de Blakwel, de Parmentier et de Dombasle. A gauche, ceux de Thaer, d'Olivier de Serres et de Macheco. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Ixxiij Les glorieux noms de ces sincères amis des hommes vous amenaient naturellement à l'inscription centrale vers laquelle ils semblaient converger. On voyait, en effet, immédiatement au-dessous du trophée élevé à l'agriculture, briller les noms des sept départements de la région agricole placés dans l’ordre suivant : HauTe-LoiRE. ARDÈCHE. DRÔME. LOZÈRE. ISÈRE. HAUTES-ALPES. BASSES-ALPES. Une foule de drapeaux et d’oriflammes rehaussaient encore, S'il était possible, la splendeur de ce magique tableau. M. Emile Paul a ainsi formulé le premier {oast : Les agriculteurs sont des gens simples et bons qui n'aiment pas les discours et qui en font encore moins, mais ils sont reconnaissants et aiment cordialement ceux qui leur font du bien. A la santé done de leur auguste protecteur ! A la santé de l'Empereur! Vive l'Empereur ! Après ce cri, répété avec un vif enthousiasme, le Préfet a continué en ces termes : Les agriculteurs ont encore une bonne qualité, c’est, lorsqu'ils aiment le père, de comprendre dans la même affection sa femme el ses enfants. TOME XXII. Î Ixxiv SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. A la santé donc de l’Impératrice et du Prince Impérial ! Vive l’Impératrice ! Vive le Prince Impérial ! Dans ce toast, expression simple et fidèle des sen- timents qui l’animent, l'administrateur éminent, si justement populaire parmi nous, tenait un langage de père à ces délégués et à ces lauréats de la grande famille agricole. Le touchant à-propos de ces nobles et simples pa- roles, parties du cœur, a simultanément frappé les esprits et ému l'assemblée tout entière. M. Rendu à ensuite pris la parole et s’est exprimé de la manière suivante : MESSIEURS , Tout concours est une œuvre collective à laquelle chacun apporte sa part d'expérience el de bonne volonté, je croi- rais manquer à un devoir si je ne m’empressais de remer- cier tout d’abord les exposants, heureux ou malheureux. Qu'il me soit permis maintenant d'adresser, sans réserve, mes félicitations à ceux dont les efforts ont été couronnés de succès. Amis sincères de l’agriculture, ils lui dévouent leurs labeurs ct leur intelligence et contribuent ainsi à réhabiliter dans les esprits l’art le plus moral, le plus sa- lutaire, le plus vraiment libéral, celui de tous peut-être qui peut le mieux sauvegarder la virilité des peuples et les relever quand ils penchent vers leur déclin. Les lauréats, Messieurs, sont une des forces vives de la nation, ils ont done droit à notre reconnaissance. Leur triomphe ici ne SÉANCE PUBLIQUE EXTRAOMDINAIRE, Ixxy sera pas stérile; ils laissent derrière eux une trace lumi- neuse que de nombreux émules ne perdront pas de vue. Buvons à la santé de ces vaillants champions de l'agricul- ture, ils sont à la fois et nos amis et nos maitres : Aux lau- réais du Concours régional ! J'ai encore un autre toast à vous proposer, Messieurs, et celui-là s’échappera sans peine de tous les cœurs. Notre fête agricole, accueillie avec tant de sympathie, n’est que humble prélude de la grande solennité qui se prépare dans ces murs. Puisse bientôt la ville du Puy, déjà placée sous le plus auguste des paltronages, voir s'accomplir ses heureuses destinées, nous y applaudirons tous; je crois être l'interprète de tous ses hôtes charmés et reconnaissants en lui souhaitant, selon le vieux langage francais, longue vie et prospérité : Messieurs, à la ville du Puy! L'émotion visible de M. le commissaire général l’a souvent troublé dans cette allocution; il en a été dé- dommagé par une bienveillante attention. Bientôt après M. le marquis de Ruolz s’est levé et, par quelques mots bien sentis, il a pris l'engagement de répondre à l'honneur insigne qu'on Jui avait fait en couronnant dans sa personne le continuateur de l'œuvre de M. de Macheco; il a été couvert d'applau- dissements. Enfin, M. Ch. Calemard de Lafayette, au nom des lauréats et de la Société d'agriculture dont il est le digne président, a remercié le jury du soin scrupuleux avec lequel il avait procédé à ses opérations délicates ; il a rendu hommage à son impartialité et a exprimé la reconnaissance dont tout le monde élait animé pour xx) SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. les autorités qui ont donné tant d'éclat à cette grande fête agricole. Les paroles pleines de feu et de cordialité de l'honorable président ont provoqué les bravos de toute l'assemblée ; M. Ch. Calemard de Lafayette est habitué depuis bien longtemps à ces suffrages bien mérités. Pendant toute la durée de ces agapes de l’agricul- ture, un corps nombreux de musiciens appartenant à l'exiernat des Frères, se tinrent aux portes de la salle el y exécutèrent de brillantes symphonies. La séance a été levée à huit heures du soir. En rendant à MM. Sauveur de la Chapelle, d’Aude- ville, Sarlandie des Rieux, Louis Balme, du Garay, Paul, substitut, et de Chaulnes, commissaires dn ban- quet, la justice qui leur est due, notre devoir est aussi de ne pas oublier les ouvriers intelligents et habiles qui ont si bien compris et si merveilleusement rendu la pensée de ces messieurs. M. Félix Bernical, tapissier au Puy, chargé par MM. les Commissaires, de la décoration de la salle, a déployé, dans cette circonstance où l’amour-propre local était en jeu, une activité et un zèle artistique au- dessus de tout éloge. Il a été puissamment secondé dans cette tâche in- grate par MM. Clerget, sergent-major, et Thomas, caporal, appartenant l'un et l'autre au 8me de ligne. Ces deux militaires, on ne saurait trop le répéter, ont fait preuve d'un tact et d’une intelligence du beau réellement supérieurs. Sur les neuf heures du soir la place du Breuil avait un aspect féerique. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, Ixxvi] Une mer houleuse de promeneurs roulait à grand bruit ses vagues humaines dans l'étendue de l'immense place. La ligne de maisons et de cafés qui fait face à l'hôtel de la préfecture était littéralement noire de spectateurs. Le quadrilatère dessiné par les mâts vénitiens et les pins aux cimes élevées resplendissait de toutes les cou- leurs du prisme. On eût juré de prime abord avoir sous les yeux une multitude de corps célestes lancés dans l’espace par une main invisible pour la glorifica- tion de la fête de l’agriculture. Nous ne savions, en vérité, où fixer nos regards : L'illumination de la fontaine Crozatier offrait un coup-d'œil unique et merveilleux. Les urnes des quatre statues de la Loire, de l'Allier, de la Borne et du Do- laison semblaient déverser dans leurs bassins lumineux de véritables cascades de diamants. Les portes d'entrée et de sortie de la promenade du Fer-à-cheval, vivement estompées par les lampions, brillaient dans la nuit. Leurs transparents laissaient lire en caractères de feu les mots: Concours régional agricole. Les armes impériales formaient à ces portes une couronne flamboyante. L’élégant hôtel de la préfecture, avec ses innom- brables fenêtres resplendissantes de lumières, son aigle au vol déployé et se détachant hardiment au sommet de l'édifice, captivait à juste titre l'admiration univer- selle. Les facades des deux ailes de cet hôtel étalaient en outre aux regards de la foule étonnée l'éclairage au gaz des deux lettres initiales des noms de LL. MM. l'Em- Ixxviil SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. ] pereur et l’Impératrice, surmontées de la couronne impériale. Plus loin, la masse sombre du Palais-de-justice voyait sa façade morose se charger de lampions et essayait de sourire à la fête. Bon nombre de maisons particulières de cette place avaient illuminé. Le Cercle Saint-Hubert s’est réellement distingué dans cette circonstance par le bon goût qui a présidé à sa sympathique manifestation. La rue Porte-Aiguière, avec ses guirlandes et ses mille lanternes aux couleurs irisées, formait aux flots de curieux qui la parcouraient incessamment une voûte de verdure d'un effet fort agréable. Deux raies de flammes courant sur les corniches de l'Hôtel-de-ville mettaient en relief sa façade ragaillar- die, surmontée de son cadran lumineux. De chacun des angles de ce bâtiment, allant aboutir à deux mâts de Venise plantés à l'entrée de la rue Chaussade, partaient deux lignes multicolores qui rappelaient, quoique sur une échelle moindre, les effets d'optique de la place du Breuil. Partie flânant et partie observant, nous regagnämes, sur les dix heures, le véritable théâtre de la fête. La population, lassée de l’inconcevable conduite de l'aéronaute, croyait à une audacieuse mystification de sa part et fulminait contre lui d’énergiques impréca- tions. — À notre avis, la foule n'avait pas tort. Si, dans la soirée du samedi, le vent violent qui s'était subitement déchainé avait ajourné d'autorité le départ de M. Godard, la masse, qui s'était écoulée sans SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Ixxix impatience et sans rancune, n'avait certainement pas les mêmes raisons de se montrer aussi indulgente à son égard. En effet, si on veut bien remarquer d’une part qu'un spectacle de cette nature est quelque chose d'excessi- vement rare dans nos contrées, que d’un autre côté, M. Godard, en faisant convoquer aux sons du tambour la population pour dix heures du matin, avec un temps de tout point favorable à l'ascension, avait contraint cette foule à se passer de boire, de manger et à s’exté- nuer en attendant son bon plaisir pendant douze mor- telles heures, on se fera une idée approximative de la sourde colère qui grondait dans les rangs de cette fourmilière. Franchement, il y avait vraiment de quoi damner des saints, etces bruyantes natures méridionales ne brillent pas précisément au point de vue de la longanimité. La curiosité l'emportait néanmoins en cette occur- rence : les uns s’agitaient fébrilement, pérorant à voix haute sur le degré de confiance que méritaient les allures indécises et suspectes de Godard; d’autres, plus avisés, S'installaient sur des chaises qu'ils avaient transportées en plein air; d’autres encore, el notam- ment les gens des campagnes, s’asseyaient tout bonne- ment à la place qu'ils occupaient. On les voyait groupés par familles ou par tribus, partie sur la place mème et partie sur les trottoirs et les marches de pierre qui bordent les cafés. Cette multitude n'avait eu, pour tromper les longues heures de l'attente, d’autres distractions que les exer- cices des mâts de cocagne terminés à cinq heures, et, Ixxx SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. la nuit venue, quelques innocents sinistres qui s’allu- maient çà et là dans le pourtour étincelant de l'immense parallélogramme, et dévoraient rapidement soit une lanterne éphémère, soit un bout de guirlande. La dernière vibration de l'horloge du Palais-de- justice sonnant dix heures venait à peine de s'éteindre dans les airs, qu’un grand mouvement fit osciller tout- à-coup cet océan de spectateurs. En un instant tout fut debout et attentif. Chacun put voir le majestueux ballon s'ébranler enfin, emportant, au moyen du filet qui l'enveloppait, la nacelle dans laquelle M. Godard venait d'entrer en bras de chemise, sans doute afin d'attirer plus aisément les regards et de prouver aux esprits prévenus que son ascension était réelle. Ayant atteint la hauteur de quarante à quarante- cinq mètres environ, il descendit lentement la place et ne tarda pas à disparaitre dans l'obscurité. Le bruit court que l’aéronaute a pris terre sans en- combre dans la commune de Coubon, à deux lieues environ de son point de départ. . Cinq minutes après la disparution de Godard, deux bombes qui éclatèrent coup sur coup vinrent annoncer au public que Ruggieri entrait en scène à son tour. Pendant une demi-heure consécutive que dura ce feu d'artifice, sans exemple dans les annales des ébat- lements et réjouissances publiques et particulières de la bonne ville, les spectateurs éblouis, fascinés, suivi- rent d'abord d’un œil ravi les fusées et les chandelles romaines traçcant dans les nues leurs sillons dorés el retombant sur la place, qui en une véritable pluie de paillettes diamantées, qui en gerbes éclatantes d’où SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Ixxx) s'échappaient gracieusement et en profusion des étoi- les filantes aux couleurs variées. Les grosses pièces offrirent ensuite un coup-d'æil magique: ce ne fut, pendant quelques minutes, qu’en- grenages fantastiques tournant en sens contraire avec une rapidité vertigineuse, feux roulants de mousquet- terie et transformations impossibles. L'un de ces moulins à flammes étala soudain aux regards de la foule émerveillée un mur composé de losanges rutilants d'une désespérante régularité. Quelques fusées précédèrent le tir de la pièce prin- cipale. Qui décrira l'admiration enthousiaste du publie à l'apparition de cette pièce d'artifice d'un à-propos saisissant et d’une irréprochable exécution ? Nous avions sous les veux, sur son piédestal Iumi- neux, un immense demi-cercle de forme convexe, où se lisaient en caractères incandescents : HoNNEUR 4 L'AGRICULTURE ! une faulx et un râteau croisés, surmon- tés d’une faucille, flamboyaient en trophée au sommet du demi-cercle. Ruggieri prit congé des spectateurs d'une facon tout- à-fait convenable et bien digne de lui. Une formidable détonnation lança dans les airs des myriades de paillettes rouges qui éparpillèrent sur les assistants, comme autant de fleurs gracieuses, des centaines de blanches étoiles. Cette fête pyrotechnique à fait parmi nous le plus grand honneur au célèbre artificier. Qu'il nous per- mette de le féliciter sincèrement ici, au nom de tous, et pour le remarquable talent qu'il a déployé, et pour les moments si agréables qu'il a fait passer à nos com- patriotes el à nous-même en particulier. Ixxxi] SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. Que MM. les commissaires ordonnateurs, et parmi eux MM. Chouvon et de Fontpertuis, nous permettent également de leur offrir nos félicitations respectueuses pour le bon goût et le tact si intelligent qu'ils ont dé- ployé dans l'organisation de cette fète splendide. Nous ne sommes en cela que l'interprète incolore des senti- ments universels. Cette fète à jamais mémorable se termina à dix heures et demie, au milieu de la satisfaction la plus cordiale, et sans que le plus léger incident soit venu troubler l’ordre parfait qui ne cessa de régner dans les rangs de cette multitude composée d'éléments si hétérogènes. C'était bien là la véritable physionomie d’une fête de famille ! Le Corps municipal et le Conseil général n’ont pas lieu de regretter les sacrifices considérables qu'ils se sont imposés à cette occasion. D'une part, la dignité de la ville et du département les exigeaient impérieuse- ment ; de l’autre, les heureux résultats qu'entraine toujours pour l'avenir d’un pays le passage de ces cours du progrès ne leur permettaient pas d'hésiter et les dédommageront au centuple. Du reste, la recon- naissance publique ne sera pes pour eux un mot vide de sens. DÉFRICHEMENTS DE SENILHAC (1 Lorsque le Gouvernement annonce sa résolution de tirer parti des terres incultes dont l'étendue attriste encore une si grande partie du sol de la France, il n’est peut-être pas sans intérêt de voir ce qu'ont fait dans certaines circonstances analogues des hommes intel- ligents, animés d'un véritable amour pour leur pays. Je ne connais à cet égard aucun exemple plus re- marquable à citer que les travaux accomplis depuis quelques années aux environs du Puy, dans la Haute- Loire, par M. Charles Calemard de Lafayette. Sa propriété de Senilhac, à côté de terres d’allu- vion de bonne qualité, offre, sur les hauteurs, de nombreuses étendues de terres qu'on avait toujours regardées comme impropres à la culture, tant Ja couche arable était superficielle, encombrée de roches et semblait opposer un obstacle invincible aux instru- ments; M. Calemard de Lafayette a prouvé que c'était là un étrange préjugé, et que ces terres vaines ou buges, souvent calcaires ou d'origine volcanique , 1) Cette notice de M. Rendu, président du Concours, inspecteur général de l'agriculture, sur les défrichements de Senilhac, annexée au compte-rendu de la séance publique de la Société, sera le avec un vif intérêt, car elle renferme d'excellents conseils d'une application facile et immédiate dans nos contrées Ixxxiv SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. réputées de nulle valeur, pouvaient payer utilement les avances qui leur étaient faites avec intelligence. Son premier soin a été de débarrasser les buges des pierres el des rochers qui les encombraient ; en un mot, de procéder à l’épierrement et au défonce- ment. À l’aide d'un vigoureux bêchage où la pioche, le pic et le bident, instruments parfaitement appro- priés au sol pierreux, ont joué un grand rôle, la couche arable, dès ce premier travail, a doublé de profondeur ; elle a été comme drainée, partout où le tuf scellé du sous-sol à été rompu et a ouvert aux eaux un écoulement facile dans une couche sou- terraine plus perméable : l'amélioration foncière a été complète, là surtout où l'on à été assez heureux pour ramener à la surface des veines de marne ou de terre volcanique qui, soustraites à l’action de lat- mosphère, restaient enfouies sans bénéfice pour la végétation. C’est donc par le défoncement que le propriétaire est arrivé au défrichement de ses terres vaines; il emploie la bêche concurremment avec la pioche, comme le moyen le plus économique d'atteindre son but. Pour mener son œuvre à bien, il avait le choix entre deux procédés bien connus : le travail à la journée et le travail à la tâche. Mais le premier con- vertit le propriétaire en un véritable esclave qui ne peut perdre un seul instant de vue les ouvriers, ser- vitude odieuse à tous et presque toujours inefficace dans ses résultats ; le second semble, à première vue, laisser plus de liberté au propriétaire ; mais si celui- ei ne surveille pas fréquemment ses travaux, 1l risque SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. IXxxY fort de n'avoir qu'une ébauche au lieu d’une opération sérieuse et définilive. Comme tant d'autres, M. Cale- mard de Lafayette adopta d’abord le travail à la tâche pour la conversion de ses terres vaines en terres arables, mais il ne tarda pas à s’apercevoir que chaque fois qu'il quittait ses chantiers, la pioche devenait paresseuse, elle ne descendait plus qu’à 18 ou 20 centi- mètres, et quand ses ouvriers rencontraient un sous- sol pavé de roches, ils se gardaient bien de l’entamer . le bident courait dessus. C'était là un grave inconvé- nient : car, par ce labeur frauduleux, le sol, impar- faitement et inégalement fouillé, restait sous l'influence de son vice originel : le peu d'épaisseur de la couche arable le laissait exposé, tour-à-tour, aux effets désas- treux de la sécheresse ou de l'humidité, il était con- damné à ne porter ni luzerne ni sainfoin, tout au plus de chétives récoltes de trèfle. Le problème qu'il s'agissait de résoudre était celui- ci : intéresser l’ouvrier à faire aussi bien en l'absence du propriétaire que si ce dernier l'eût surveillé sans relâche; en d’autres termes, amener l’ouvrier à tra- vailler aussi consciencieusement que s’il se fût agi de sou propre patrimoine : on sait que dans ce cas il n’é- pargne ni soins, ni sueurs. a Nécessité d'industrie est mère, » dit le proverbe. M. de Lafayette eut l’idée de payer spécialement l'ex- traction des pierres du sous-sol (25 centimes par charretée de pierres); c'était trancher le nœud gor- dien ; il était évident que, par cette convention bien simple, l’ouvrier n'aurait plus intérêt à épargner dé- sormais les roches du sous-sol dont sa pioche pourrait Ixxxvi SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. faire justice. À partir de ce moment, la cause fut ga- gnée. Grâce à ce contrat d’une extrème simplicité, qui n'exige ni clerc ni procureur, tout propriétaire, en face d’une population qu'il désire moraliser par le travail, peut entreprendre, sans bourse délier et sans le sacrifice de sa liberté , le défoncement des terrains qui g'ont d'autres défauts que d'être encombrés de pierres et de n'avoir qu'une couche arable superfi- cielle. Un pareil traité, fidèlement observé de part et d'autre, était une véritable conquête. M. Calemard de Lafayette ne s’en est pas contenté ; toute capitale qu'elle fût, ce n'était encore pour lui que la première période de ses défoncements. Ii avait rendu , il est vrai, à la culture 33 hectares de buges absolument incultes avant lui. Ces buges épier- rées, défoncées et débarrassées, dans leur sous-sol, d'énormes quantités de rochesqui s’opposaient à l’action des instruments de labour, lui avaient coûté 150 à 300 francs de travaux d'amélioration par hectare ; mais désormais elles étaient susceptibles d’une culture ac- tive et profitable ; ilen avait retiré de belles récoltes ; celles-ci, dans sa pensée, devaient servir de prospectus pour appeler à la continuation de son œuvre des associés libres que le gain intéresserait à bien faire. D'ailleurs, l'étendue des terres vaines qui restaient à défricher était trop considérable, pour que le propriétaire pût en entre- prendre seul la régénération ; elles se trouvaient relé- guées sur les points les plus éloignés et les plus ingrats de son domaine ; il lui fallait de toute nécessité des pionniers de bonne volonté pour faire disparaître de sa propriété ces restes de barbarie qui la déshonoraient ; SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, Ixxx vi] le colonage temporaire fut alors un moyen puissant de salut. Les premiers bècheurs de M. de Lafayette avaient sollicité quelques parcelles de buges à défoncer pour leur propre compte ; ils voulaient essayer s’il leur se- rait possible, par un défoncement énergique, d'obtenir de ce terrain une récolte de pommes de terre. Que fit le propriétaire ? « j'étais trop intéressé, dit-il, à leur succès, pour ne pas l'aider de tout mon pouvoir. Je leur fournis la semence et, quant à la fumure, je donnai à chacun d’eux, pour 13 hectares, 100 kilog. de chiffons trempés pendant une quinzaine de jours dans du purin et saupoudrés de plâtre au sortir de ce bain. La récolte de pommes de terre fut relativement fort belle pour l’année ; sur un sol de troisième classe, on obtint environ 160 hectolitres à l'hectare ; mon but était atteint; le système que je voulais inaugurer ne pouvait manquer de réussir après un essai aussi en- courageant. Il avait fait du bruit dans le pays, parmi la classe ouvrière. L'hiver suivant je n’eus à offrir ni semence, ni fumure. Cinq familles me demandèrent mes mauvaises terres à bêcher, aux conditions qu'il me plairait de leur imposer. Comme je tenais à faire une chose à la fois équitable, durable et profitable pour tous, j’abandonnai deux récoltes consécutives à pren- dre sur le défoncement opéré ; j'eus la vive satisfac- tion de voir mes pièces de terre épierrées, défoncées et travaillées avec autant de soin que si mes colons eus- sent été eux-mêmes propriétaires du terrain concédé : ilest bon de dire que jamais mes fermiers n'avaient voulu entreprendre ces défrichements, et les avaient déclarés à tout jamais impossibles. » Ixxxvii} SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, Pour ces sortes de travaux préliminaires, base de toute l’entreprise, M. Calemard de Lafayette prête ses bœufs aux colons, et parfois aussi il les aide d’un homme ou deux pour l'enlèvement des pierres ex- traites du sol que des vaches ne pourraient conduire hors du champ. Si le travail est héroïque et a donné lieu à de véritables tours de force, une gratification dont le chiffre varie de { à 5 fr. par demi-hectare, est accordée comme indemnité : là se bornent les frais du propriétaire. On le voit, chacun trouve son compte à cette association improvisée. L’ouvrier, élevé à la di- gnité de travailleur libre, et usufruitier temporaire du sol que ses sueurs fécondent en l’arrachant à l'impro- duction, se met avec cœur à l’ouvrage, il travaille réel- lement pour son propre compte ; le propriétaire, de son côté, par cette combinaison aussi simple qu'ingé- nieuse, en même temps qu'il fait le bien autour de soi, améliore économiquement sa terre et rend ainsi un double service à sa conscience et à sa bourse. Pour- quoi de pareils exemples ne sont-ils pas plus fréquents parmi nous? Ils seraient, à coup sûr, la meilleure jus- tification de la propriété aux yeux de ceux qui la con- voitent avec tant d'ardeur, comme une proie dévolue. Au printemps , sur le bêchage d'hiver, les colons sèment des lentilles ou plantent des pommes de terre; l’année suivante, ils prennent une récolte de seigle. Dans cette céréale, le propriétaire se réserve le droit de semer une graine fourragère, trèfle ou lupuline, qui , de prime-saut, contribue à la fécondité du sol et le met en voie de bonne rotation. Telle a été le succès de cette heureuse initiative de colonage temporaire sur les terres vaines des environs SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, Ixxxix du Puy, que plusieurs propriétaires l'ont introduit chez eux avec les résultats les plus satisfaisants ; quel- ques-uns même, dans ces deux dernières années d’ex- trème sécheresse, où les fourrages étaient fort rares et très-chers, ont pu se faire abandonner gratuitement la paille des lentilles et du seigle sur les terrains défri-- chés : la récolte pure et simple du grain paraissait aux colons une compensation suflisante de leur pénible labeur. On devine sans peine que la vogue aujourd'hui est complètement acquise à ce mode de mise en culture des terres vaines dans l'arrondissement du Puy. Non- seulement il ne manque pas de colons qui se présen- tent pour entreprendre de pareils défoncements et épierrements, mais plusieurs de ces valeureux pion- niers, un peu moins besoigneux que leurs devanciers, mettent de leur bourse et sans y être tenus par les conventions, quelques voitures de fumier, du plâtre ou des cendres dans le sol défriché : ils comprennent, d'instinct, que c'est là de l'argent bien placé, et qu'ils retrouveront leurs avances grossies d’un bon intérêt dans les deux récoltes qui leur reviennent de droit. Le colonage temporaire, dans le système de M. Cale- mard de Lafayette, forme la seconde période de ses défoncements ; mais il n’en fait pas le couronnement de son œuvre, il l'emploie simplement comme transi- tion à un troisième mode d'exploitation à plus longue échéance, le métayage à moitié prix, destiné, selon lui, à alléger singulièrement le fardeau de la gestion du propriétaire. Le personnel de cet ordre d’exploita- tion, plus élevé, est pris parmi les colons temporaires qui ont montré le plus d’ardeur et d'intelligence dans TOME XXII. 7 XC SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. leurs travaux de défrichement et de culture première. M. Calemard de Lafayette choisit, au centre d'un can- tonnement qui, plus tard, doit constituer un petit domaine, autant de terrain que peut en défricher une famille dans l'intervalle d’un hiver à l’autre. Toutes les récoltes provenant des terres défrichées sont parta- gées également entre le métayer à mi-fruit et le pro- priétaire, qui paie en outre à ce nouveau preneur, au fur et à mesure de sa tâche accomplie, la moitié de ce que le défoncement aurait coûté si le propriétaire l'a- vait fait exécuter pour son compte, à prix fait. Lors- qu'une certaine étendue de terrain a passé par le dé- frichement, le propriétaire fait à chaque métayer à mi-fruit l'avance de la semence et d'une paire de vaches, en lui affermant une portion de pré sur le pied de 200 fr. par hectare. L'an dernier, plusieurs de ces petits domaines étaient en pleine voie de création. Les métayers rivalisaient à qui mieux mieux d’ardeur dans ces travaux, qu'on ne croit possibles qu'autant qu'on en a été témoin, et qui, une fois achevés, doivent trans- former de pauvres ouvriers en cultivateurs ayant leur bétail, leur ferme, leurs terres, et, de plus, riches de toutes les espérances que donnent des bras vigoureux et un confortable chez soi. Bientôt M. de Lafayette aura sur les points extrêmes de sa propriété quatre métai- ries de ce genre, de 10 à 12 hectares chacune, là où ne croissaient naguère ni le genêt, ni la bruyère des landes. Au fur et à mesure que le travail, l'ordre et l’économie font prospérer une métairie, le propriétaire y ajoute le vol du chapon, pris sur les défrichements accordés aux colons temporaires qui sont partis après SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE, xC) avoir joui de leurs deux récoltes : la part qui lui revient dans le partage des fruits de ces petites métairies re- présente amplement la rente que payaient les anciens fermiers pour la totalité du domaine : on a donc bien raison de dire qu'une bonne action porte avec elle sa récompense ! Inutile d'ajouter que le propriétaire, dans ce système de faire valoir, se réserve vis-à-vis de ces métayers la complète direction de leur travail ; il ne serait pas sans danger, dans les commencements surtout, äe les af- franchir de toute tutelle ; celle-ci, du reste, est aussi paternelle qu'éclairée ; l'autorité morale dont jouit le propriétaire, prèchant d'exemple par ses succès agri- coles, la rend aussi douce que facile : tout le monde Y trouve son compte, et, dans cette république agricole, nul ne sent le joug d'un gouvernement despotique. Je ne sais si je m'abuse, mais je crois que l’heureuse initiative prise par M. Calemard de Lafayette pourrait recevoir une heureuse application sur bien des points de la France. On s'étonne et l'on se plaint, non sans raison, de la rareté, de plus en plus inquiétante, de la main-d'œuvre dans les campagnes. C’est un mal sans doute, mais qu’a-t-on fait pour retenir le journalier dans les champs.et l'empêcher de grossir Le torrent qui l’entraîne vers les villes’... Quand on songe à la condition si précaire de l’ouvrier, dénué de toute avance, sans autre Capital que ses bras, incertain chaque soir du salaire du lendemain, on comprend sans peine qu'il se laisse séduire à l’appât d'une émi- gration qui se présente tout d’abord à ses yeux sous le prestige de journées payées deux fois plus cher qu'à xci} SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE. la campagne. Les doléances, ici, ne suffisent pas pour conjurer le mal, il faut quelque chose de plus: il faut du cœur, il faut aimer sincèrement l’ouvrier, et imiter M. Calemard de Lafayette, qui prend le pauvre prolé- taire tel que la providence le lui envoie, l'élève à la condition d'homme libre et indépendant. Voyez aussi quelle merveilleuse métamorphose s'opère sous vos yeux! Hier, cet ouvrier était sans gîte, sans travail, n'ayant ni amour ni souci de rien ; aujourd'hui le voilà dans sa ferme, vivant du lait de ses vaches, travaillant avec sa charrue et son bétail; suivant des yeux de l'espérance la récolte qu'il a semée dans le sol dé- friché et conquis par ses bras; il n’est plus inquiet sur le sort de sa femme et de ses enfants; il sait que le ciel ne manque jamais à ceux qui s’aident de leur bonne volonté ; la pauvreté ne lui fait plus peur, le voilà riche dans le présent, plus riche encore dans l'avenir, et ne craignez pas qu’il songe jamais à déserter les champs! La terre qu'il cultive vaut pour lui tous les royaumes du monde, son ambition ne dépasse pas sa métairie, il vit heureux de sa reconnaissance envers la Providence : qui n’envierait un tel sort? Heureux les hommes qui, comme M. Calemard de Lafayette, savent répandre autour d’eux la moralité par le travail, et le modeste bien-être qui ne lui fait jamais défaut ! Heureux aussi ceux qui sauront imiter un si noble exemple ! 5 9 C—— NOTICE SUR LES COQUILLES PERLIÈRES QUI SE TROUVENT DANS LE DÉPARTEMENT DE LA HAUTE-LOIRE ET DANS LE DÉPARTEMENT DE LA LOZÈRE Par M. DE PAYAR-DUMOULES Président du Tribunal civil du Puy, oficicr de l'Instruction publique Membre résidant de la Société académique du Puy Les perles se trouvent dans les diverses parties du monde. Les plus belles se pêchent dans la mer, à lorient de l'Afrique et en Asie. La mer Rouge en produit surtout une abondante quantité ; l'océan Indien, le golfe Persique, l'ile de Ceylan, la côte de l’Arabie-Heureuse et l'ile d'Ormus fournissent aussi beaucoup de perles. James Bruce, voyageur anglais, dans le tome Ier de son Voyage aux sources du Nil, donne des détails inté- ressants sur la pêche des perles et sur les lieux princi- paux de production. L’archipel de Dalhac, dans la mer Rouge, est aussi fertile en perles et, chaque année, de nombreuses bar- ques viennent s’y livrer à la pèche. xCiV DES COQUILLES PERLIÈKES Plusieurs coquillages produisent la perle, notam- ment : les huîtres on arondes perlières, les patelles, les moules, les oreilles de mer, etc. Les lacs et les rivières d’eau douce nourrissent aussi, mais plus rarement, des coquillages à perles. Bruce nous apprend que toutes les rivières qui sor- tent des lacs de l'Ecosse, surtout dans le nord, produi- sent des coquillages à perles nommés russels ; ces perles sont d’une qualité supérieure, mais rarement grosses ; elles se vendent souvent aussi cher que les perles orientales marines. Elles sont recherchées à Londres; on les monte en colliers, en bijoux, comme les perles d'Orient. Le prix des perles dépend de leur grosseur, de la beauté de leur forine arrondie, de leur couleur et des teintes différentes qu'elles présentent. Les anciens estimaient beaucoup les perles. Suétone rapporte que Gésar donna à Servilie une perle qui valait une somme supérieure en monnaie actuelle à un million de francs. La célèbre perle de Cléopâtre passait pour être d'une valeur quadruple. Pline-l’'Ancien prétend que les perles sont les plus parfaites et les plus précieuses de toutes les pierres fines. ” Le département dé la Haute-Loire et celui de la Lozère produisent, comme l’Ecosse, des coquillages à perles. Ces deux contrées offrent assez d’analogies : des montagnes renfermant de vastes plateaux fort élevés et coupés de petites vallées arrosées par des ruisseaux d'une eau glacée; c'est dans ces petits cours d'eau que DANS LA HAUTE-LOIRE ET LA LOZÈRE. XCV se rencontre la moule perlière, qui est, je crois, connue des naturalistes sous le nom d’unio-elongalta. Ce coquillage affecte une forme à peu près ovale; il ressemble beaucoup aux moules de mer comestibles, mais il est plus grand; quelques-uns atteignent huit centimètres de longueur sur trois de largeur ; mais en général leur grandeur est moindre d'un tiers. Quelques unio-elongata sont encore plus petites. Les perles ne se trouvent en général ni dans les très- petites, ni dans les très-grosses coquilles, mais plutôt dans les moyennes. Les perles n'existent presque jamais dans les coquilles dont la forme est régulière ; mais on en trouve, au con- traire, fréquemment dans celles qui ont subi quelque compression ou fracture, et dont la forme a subi une défectuosité naturelle ou accidentelle. Je crois que ces difformités de la coquille peuvent ètre produites par le passage des bœufs et des chevaux qui paissent dans les pâturages voisins et qui traver- sent les ruisseaux dans le lit desquels se trouvent les coquilles à perle. C’est dans ces ruisseaux que s'abreuvent les nom- breux troupeaux qu'on élève dans le canton de Sau- gues. La coquille perlière se trouve en abondance dans les rivières de la Dance et de la Virlange ou Verdicange ; ces deux ruisseaux se réunissent et viennent ensuite mêler leurs eaux glacées à la rivière d’Allier, dans le voisinage de Monistrol-d’Allier (Haute-Loire). C'est à environ vingt kilomètres de Saugues, près de Saint- Symphorien (Lozère) et près des sourecs de la Dance, xCY) DES COQUILLES PERLIÈRES que se trouvent en assez grande quantité les wnio- elongata. Il en existe dans tout le cours de la Dance et dans la Virlange jusques à quelques kilomètres de Saugues, mais en très-petit nombre. Ce coquillage recherche pour s’y fixer les points de la rivière où l’eau a une assez grande profondeur, où le sable tapisse le lit, et où les eaux sont calmes. Il s'attache au sol et s'y fixe avec une certaine soli- dité dans les endroits où il peut se procurer plus faci- lement une abondante nourriture et qui sont fréquentés par beaucoup de petits animaux vivant dans l’eau. La coquille perlière est peu voyageuse ; cependant elle a la faculté de se mouvoir lentement et, après avoir fait certains mouvements très-lents, elle se laisse en- trainer par le courant de l'eau et paraît se diriger vo- lontairement vers un but qu'elle veut atteindre. Pour manger, elle ouvre sa coquille bivalve, qui se meut au moyen d'une espèce de charnière en carti- lages, elle fait sortir de la coquille une partie de son corps analogue à celui des moules comestibles ; cette chair sortant d’un ou deux centimètres de la coquille sert d’appât à de petits animaux aquatiques qui vien- nent pour s'en nourrir et qui sont victimes de leur voracité ; car alors le coquillage se referme et empri- sonne les imprudents qui sont dévorés. J'ai trouvé dans toutes les coquilles perlières un corps semblable à un ver blanc, rond, long de trois à quatre centimètres. Ges vers servent-ils de nourriture à la coquille perlière, sont-ils au contraire de vérita- bles parasites vivant à ses dépens, comme les vers qui DANS LA HAUTE-LOIRE ET LA LOZÈRE, xCvi] existent dans les entrailles de l’homme ou de certains animaux ? L'ensemble des observations que j'ai faites me porte à penser que le prétendu ver existant dans chaque co- quille perlière est un organe de cet animal; je laisse aux naturalistes le soin de préciser avec plus de certi- tude que je ne pourrais le faire, ce fait sur lequel je dois me borner à proposer des conjectures. Comment se forment les perles ? Si on en croyait les Arabes de la mer Rouge qui se livrent à la pèche des perles, elles auraient une singu- lière origine. Ils croient que les coquilles perlières s'élèvent à la surface des eaux dès qu’elles pressentent qu'un orage est sur le point d'éclater, et qu'alors en- ouvrant leurs valves frémissantes, elles y reçoivent une rafraîchissante goutte de pluie, qui, renfermée dans leur sein, s'y condense lentement et se transforme, à l'aide du temps, en belle perle précieuse. La brillante imagination des Arabes a inventé cette absurde origine des perles, et l’on ne saurait les dis- suader de cette grossière erreur. Je pense que deux principales causes produisent les perles. L'unio-elongata, comme la plupart des coquillages, sécrète une liqueur nacrée et brillante au moyen de laquelle elle forme et agrandit chaque année sa co- quille, qui lui sert de maison et qui doit s'étendre à mesure que l'animal prend de la croissance. Lorsque le coquillage, cherchant à prendre sa nourriture, s'en- tr'ouvre et se met ainsi à l'affût des petits animaux dont il fait sa proie, il peut arriver qu'un grain de sable xcviil DES COQUILLES PERLIÈRES graveleux entrainé par les eaux s'engage dans les chairs entre la coquille et les cartilages de l'animal, qui, ne pouvant plus s’en débarrasser et étant blessé par les aspérités de ce corps étranger, prend le parti de le recouvrir de la liqueur nacrée qu'il sécrète, pour l'arrondir et le rendre ainsi inoffensif pour les chairs avec lesquelles il est en contact. Lorsqu'une coquille à été blessée ou à été un peu brisée par une grosse pierre entraînée par les eaux ou par le piétinement d’un quadrupède venant s’abreuver dans le ruisseau où elle est placée, l’animal cherche à réparer sa coquille, à la raccommoder avec la liqueur qu’elle sécrète; il y parvient, et si quelque fragment de coquille a pénétré entre ses chairs, il le couvre de sa sécrétion et l’arrondit pour ne plus en être blessé. Ces observations ne sont pas de simples conjectures ; car j'ai trouvé dans l’intérieur de quelques coquilles de petits grains de terre ou de gros sable qui commen- caient à peine à être recouverts de la sécrétion nacrée, d’autres couverts en entier, mais dont les angles et les rugosités n'avaient pas disparu et permettaient de voir la forme du noyau de la perle, enfin d'autres petits grains non encore couverts de matière perlière et en- gagés fortement dans les chairs de l'animal. J'ai recueilli aussi des coquilles ayant renfermé une ou plusieurs perles qui avaient été brisées ou dépri- mées par le choc de corps étrangers d’un poids assez considérable et où les traces de raccommodage de la coquille avec le suc perlier étaient fort apparentes. Les Hollandais, qui s'occupent dans leurs colonies orientales de la pêche des perles marines, paraissent DANS LA HAUTE-LOIRE ET LA LOZÈRE. xCix êlre parvenus à forcer les coquilles perlières à pro- duire des perles. Ts emploient dans ce but un procédé artificiel ; ils pêchent des huîtres perlières, puis ils entouvrent la coquille, ÿ insinuent un petit corps étranger que l'animal ne peut facilement expulser. Is placent alors le coquillage ainsi préparé dans un fond de mer convenable, ils pêchent de nouveau ces co- quilles au bout de deux ou trois ans et obtiennent ainsi artificiellement des perles magnifiques, l'animal ayant recouvert d'une couche brillante de sa sécrétion le corps étranger introduit dans sa coquille, qui est lransformé en perle. Toutes les coquilles ne renferment pas des perles, j'en ai quelquefois pêché cent sans trouver une perle. En moyenne, on en peut trouver dans la Dance deux sur cent coquilles, car j'ouvris environ dix-huit cents coquilles pour trouver une trentaine de perles, dont quatre ou cinq de forme ronde, d'une belle couleur azurée et assez grosses, et le surplus ou petites, ou noires, ou difflormes. J'explorai avec quatre personnes la rivière sur un parcours de plus de quatre kilomètres. Les coquilles sont quelquefois isolées ; mais aussi quelquefois par espèces Ce bancs, dans les endroits où l’eau est calme et profonde. Pour les pècher, on les saisit soit avec le bras, lorsque la profondeur de l’eau le permet, soit avec un filet dans lequel on les fait pénétrer avec les pieds. On les ouvre ensuite avec un couteau, on enlève la chair et l’on trouve la perle entre la coquille et la partie des chairs de l'animal qui est adhérente à la coquille. C DES COQUILLES PERLIÈRES J'ai fait trois courses dans le canton de Saugues et dans la Lozère pour cette pêche. Le 4 août 1861, j'ex- plorai la Virlange, à huit ou dix kilomètres de Sau- gues; nous trouvämes une douzaine de coquilles et pas une perle. Je ne fus pas découragé par cet insuccès, et, le lende- main 5 août, j'entrepris une nouvelle exploration sur les hauts plateaux qui séparent la Haute-Loire de la Lozère et qui forment un des points les plus élevés de la chaîne montagneuse de la France centrale. J'allai près des sources de la Dance, je parcourus les bords de cette rivière, dans la Lozère et dans la Haute- Loire, pendant plusieurs kilomètres, et, aidé par quatre personnes qui m'avaient accompagné, je pus trouver et ouvrir dix-huit cents coquilles perlières et recueillir une trentaine de perles; mais les perles mal formées, rougeûtres, noirâtres, grisâtres, dominèrent par leur quantité, el quatre ou cinq belles perles seulement furent recueillies. L'une d'elles est fort curieuse par sa forme, elle re- présente un gland de chène renfermé dans son enve- loppe. Le gland a une belle couleur de perle orientale, la partie qui imite l'enveloppe du gland est au contraire noire. Cette perle est extrêmement curieuse par sa forme aussi rare que bizarre. La rivière de Dance nourrit des milliers de truites dont la peau est tachetée de noir et d'or ; elles sont délicieuses et je les crois supérieures à celles du Jac de Saint-Front qui jouissent d’une véritable célé- brité. CR Re es SP +: sf $ DANS LA HAUTE-LOIRE ET LA LOZÈRE, €] En quelques heures, nous fimes une pêche abon- dante de truites qui termina les occupations de cette agréable journée. Ainsi la Haute-Loire est fertile en pierres précieuses. Le Riou-Pezouliou, près d'Espaly, roule des saphirs et des zircons-hyacinthe aussi brillants que des rubis, et la Dance ainsi que la Virlange, produisent des perles rivales de celles de l'Orient, merveilleuses productions qui naissent au milieu des plus splendides paysages que le poète puisse rêver et que l'artiste est si heureux d'admirer. POÉSIES POÉSIES MON PAYS Par M. VIBERT MEMBRE RÉSIDANT ; DIRECTEUR DU MUSÉE Poësie ne à lt séance publique de la Société d'agriculture du Puy, le 25 mai 1860 Proche du ciel, au sommet de la France, Est un pays, coin de terre ignoré ; Pays d'air pur, de thym et d'espérance ; Pays qu'au loin tous ses fils ont pleuré. Au flanc d’un roc assis dans la verdure, S'étend du Puy l'indolente cité ; De cent coteaux l’éternelle tenture S'élève autour de son lit abrité, civ POÉSIES. Comme son ciel beauté capricieuse, De son climat elle subit le sort : Elle eut des jours de clarté radieuse, Des heures d'ombre et des sommeils de mort. Elle renaît, joyeuse et printanière, La vieille Anis au cœur renouvelé : Ses jeunes fils relèvent la bannière Des troubadours de l’antique Velay. Eveillez-vous, mystérieux génies, Echos de Bar, du Mezence, du Mégal ! Redites-nous les fières harmonies De nos aïeux, Capdeuil et Cardinal. Monts qui touchez aux voûtes éternelles, Jadis aux rois vous serviez de jalons : La foi couvrait vos sentiers de fidèles, Et le Pactole arrosait vos vallons. La faulx du temps heurta la foi naïve Et les vieux murs de l’Anis crénelé : Des vents nouveaux ont desséché la rive Où l'or du monde a jadis ruisselé. Mais les autans qui dévastent la plaine, Sur les rochers se brisent à leur tour ; Le grain perdu qu'y porte leur haleine. En sureté germera quelque jour. \ POÉSIES. cY Ce noble grain sauvé de la tempête, C’est la patrie au fond d’un souvenir ; C’est le passé dont chaque âge répète La vieille histoire au seuil de l'avenir. Preux dont lAnis a vu naître la gloire, Dans vos tombeaux tressaillez de bonheur ! Comme autrefois, les échos de la Loire Chantent encor la patrie et l'honneur. Entendez-vous, au loin, sur la montagne, Ces longs accents qui montent dans les airs ? C’est le berger dont la voix accompagne L'hymne que Dieu murmure à l'univers : Au sein des bois mélodieuse gamme, Qui pour le cœur n’est que la voix du vent, Mais qui, le soir, fait vibrer dans notre âme Des mots secrets qu'elle écoute en révant. Avec l'oiseau le pâtre se réveille ; Avec le jour leur ramage finit : Demain sera pour eux comme la veille : Tous deux au bois retrouveront leur nid. Quand vient la faim, le montagnard s’exile Du chaume ingrat qui ne peut le nourrir, Mais, sur la rive étrangère et fertile, I rève encor son rocher pour mourir. cv] POÉSIES. Oui, tout ressent l'amour de la patrie ! Par cent détours indécis, le ruisseau Avec lenteur sillonne la prairie : C’est qu’à regret il quitte son herceau. Ils ont perdu leur séculaire ombrage, Les fronts géants de nos monts orgueilleux ; Mais leurs flancs nus, déchirés par l'orage, Gardent encor la cendre des aïeux. Vous dont les fils conservent la mémoire, Dans vos tombeaux tressaillez de bonheur ! Comme autrefois, les échos de la Loire Savent chanter la patrie et l'honneur. LE HANNETON BALLADE PAR M. F. BERNARD Membre résidant de la Société académique du Pus Häanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc !.… (Dicton populaire. Hanneton ! viens donc voir la diligente abeille Du mois de mai fleuri butiner la corbeille. Entends-tu le grillon Chanter dans le sillon ? Sur l'onde le soleil balance son image. Abandonne un moment ta sieste sous l'ombrage… Ecoute le dicton : Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc ! Cviij POÉSIES. Hanneton! ne crains pas qu’à la troupe indiserète Des bambins étourdis je livre ta retraite. Près de moi, sans danger, Ami, viens voltiger. Quand l'heure qui s'enfuit, peut être ta dernière, Donne encore un baiser à la fleur printanière. Ecoute le dicton : Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc ! Hanneton ! un enfant, créature mutine, De son bâton frappait une blanche églantine : | La pauvre s’effeuillait, Et le cruel raillait. Un autre ayant surpris la rouge coccinelle, La piquait d’une épingle et déchirait son aile. Ecoute le dicton : Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc! Hanneton ! l’autre soir, le long de la prairie, J'entendais de deux sœurs errer la causerie. Sous l'herbe, un ver lu:saint Brillait, phosphorescent. L'une d'elles le prend, le met sur son épaule... St le pauvret s'éteint avec son auréole… Ecoute le dicton : Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc! POÉSIES. Hanneton! certain jour, un papillon superbe Folâtrait sur les eaux, sur les épis, sur l'herbe ; L’éclat de ses couleurs Faisait pàalir les fleurs. Survient un écolier qui lui donne la chasse : Sous un coup de mouchoir, cette splendeur s'efface… Ecoute le dicton : Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc! Hanneton! du blé d’or sortait une voix douce : C'était un nid d'oiseaux chuchotant dans la mousse ; Mais un rustre distrait, Sans savoir ce qu'il fait, Pose son pied brutal sur l’heureuse famille ; Puis revient, fredonnant, dormir sous la charmille.…. Ecoute le dicton : Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc! Hanneton, hanneton ! combien de tes semblables Dans de mignonnes mains succombent misérables : On vous tue à milliers, Insectes familiers ! Pauvres jouets! qu’on met, vivants, dans une boîte ! Pour le faible, ici-bas, souvent la Pitié boite… Ecoute le dicton : Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc! ex POÉSIES. Et vous, jeunes enfants, qu’une ballade étonne ; Qui répétez en chœur son refrain monotone ; Pour réveiller mes chants, Cessez d’être méchants. Laissez en paix la fleur, le grillon, l’alouette, Tous les petits amis que Dieu donne au poète! Retenez le dicton : - Hanneton, ton, ton, Vole, vole, vole donc ! LES CIVILISATIONS (ÉTUDES) Par M. AIME GIRON Membre résidant de la Société académique du Pux Quand tout était matière, inertie et silence, Au néant Dieu jetant le mot de l'existence, Dit : — Que le monde soit !... Mouvement! vie! accord ! Un souffle créateur, un principe, la force Déchira le chaos; et de sa rude écorce Jaillirent des soleils... et des soleils encor. En ce temps-là, le feu fat la première vie De l’univers sorti d’un effort tout-puissant ; Une terre montant par une autre suivie, Court folle dans l’espace et les cheveux en sang. uxi] POÉSIES. L'amour emplit le vide; alors tourna la ronde Des astres gravitant chacun autour d’un monde, Monde perdu parmi ces satellites d’or. Et la force motrice, attirant l'harmonie, Fit à tous les soleils chanter la symphonie Qui limite leur course et règle leur essor. Force, harmonie, amour errant sur la matière Engendrèrent l'esprit. âme humaine, lumière, Animant la nature et l’homme toutes deux ; Et lorsque s’enfeuilla, puis se peupla la terre, Depuis bien des mille ans s'était fait le mystère ; Plus d’un astre déjà s’éteignait dans les cieux. Il Ainsi que le soleil, l'humanité féconde Se lève à l'Orient, au jardin éternel; Et les peuples s’en vont par les sentiers du monde, Jeunes et pleins de vie aux quatre vents du ciel. L'un, comme l'aigle fauve, aux flancs des monts s’en- Ou, comme le lion, se tapit aux déserts; {[ferme, Un autre, aventureux, quittant la terre ferme, Fait son nid sur le fleuve entre les roseaux verts; Lorsque ceux qui portaient le Progrès dans son germe, « Descendent plus avant au sein de l'univers. POESIES. exii] En avant! — Le progrès, à mesure qu’il marche, Couvre le sol élu de monuments, d’aïeux ; Puis, la terre épuisée, il lève sa grande arche Et sc transforme ailleurs, ne laissant dans ces lieux Qu'un désert où paîtront les bœufs d’un patriarche, Désert plein de tombeaux, de gloires et de dieux. En avant! en avant, à caravane errante! Vivace Humanité ! toi qui plantes ta tente Pour des siècles perdus dans ton éternité, Sous les palmiers du Nil, les lauriers de l’Attique, Les orangers du Tibre et les pins d'Amérique, Sous le chêne du Nord par la neige argenté; A En avant! Dieu te guide, à grande Humanité ! II L'ÉGYPTE — Qui vient le long du Nil boire avec la gazelle Du côté du soleil? — L'Egypte jeune et belle, Qui vit libre et ne sait que pècher au flot clair. Le Nil, comme un serpent, sort des plaines de sable, Et court, pour étancher sa soif intarissable, De sept bouches en feu s’abreuver à la mer (1). (1) Le Nil se jette à la mer par sept bouches : Canopique (Edkou), Bolbitine ‘Rosette), Selénytique (Bourlos), Phatnitique (Damiette), Mendesienne (Dibeh), Tanritique (Om-Fareg, et Pélusiaque ‘Tineh). TOME XXIII. h ExIiV POÉSIES. Sous les monts de Lybie elle ouvre des cavernes, De feuilles de lotus se voilant jusqu'aux veux (1); Des bouquets de dattiers ombragent ses citernes ; Et ses lourds monuments montent voir dans les cieux. Elle élève, à Djizeh, ses lourdes pyramides (2) [déserts; Couchant, quand vient la nuit, leur grande ombre aux Et baigne dans le Nil Thèbe aux palais splendides, Thèbe qu’elle peuplait de dieux roses et verts (3). D'immenses lacs, du Nil gardent les eaux amies (4). De vastes souterrains sont remplis de momies Où les prètres, aux murs de briques écrivaient Annales du passé, sciences inconnues, Vers ces temples traçant de longues avenues Que gardaient de grands sphinx accroupis qui rèvaient. Dans les déserts s’en vont ses lentes caravanes Portant gomme, parfum, poudre d’or, diamant ; Au moindre vent, semblable au sein des courtisanes, Le lin de ses vaisseaux se gonfle doucement. Le Nil bourbeux inonde et féconde ses plaines ; Et court au loin, bercant les palmiers qu’il endort, Mesurer sa hauteur aux digues de Syènes (5) ; 1) Le lotus est représenté sur un grand nombre de monuments égypliens ; il était un des attributs du soleil, parce que cette fleur montait sur l’eau au lever de cet astre et disparaissait avec lui. (2) Chéops, Chéphrem et Mycérinus. 3; En marbres d'Egypte. (4) Le lac Meæris, destiné à recevoir le trop plein des eaux du Nil, afin d'inonder au besoin les terres d'Egypte. i (5) Syènes, où se trouvait un nilomètre. POÉSIES. BA Puis flottent des moissons sous les chaudes haleines Des brises, mürissant leurs blondes vagues d’or. Toi qui jugeas les rois de trente dynasties (1), Refusant leur cadavre à ces tombes bâties Par cent mille sujets. tombes moins que palais ! Pour l'âme tu rêvais d'existence future, Dans ses forces, sans choix, adorant la nature, Mettant au crocodile anneaux et bracelets. Prètres aux mitres d’or, qui chaussiez les sandales De mince papyrus dont votre fleuve est plein ; Vous qui meniez en chœur, au bruit de vos cymbales, Les Ibis embaumés dans des bandes de lin ! Sciences, médecine, arts et justice, histoire, Symbolysant la lettre en traits mystérieux (2), Vous confiiez l'esprit à la seule mémoire, Et cachiez le flambeau sous l'autel de vos dieux. Baisse la voix, Egypte, au bord de ce grand fleuve, Il te féconda trop pour ne pas te tarir. Il ne te reste plus, comme à la femme veuve, Que le temps d'oublier et le temps de mourir. (\ Les rois d'Egypte étaient jugés après leur mort et recevaient où non la sépulture, suivant le jugement bon où mauvais qui en était porté. (2) Les hiéroglyphes. — Les grands préceptes de morale, d'arts et de sciences W’étaient connus que des adeptes et confiés à la seule mémoire. exy] POÉSIES. IV LA GRÈCE Qui grandit maintenant? — Toi qui nais de la terre, Ton nom ? — Grèce ! — Salut, mère de la beauté Qui chantes, sculptes, peins sous l'olivier austère (1); Comme ton dieu Bacchus montes une panthère, Découvrant au soleil ta chaste nudité. Elle porte en bijou la cigale autochtone (2), Et fait teindre de noir les sourcils de ses yeux ; Elle a sandale haute et sait, sous sa couronne, Arrondissant ses bras, poudrer d’or ses cheveux. C’est Sparte la frugale, à sa table publique Recevant peuple et roi. Ses soldats citoyens Font, pour cacher leur sang, empourprer leur tunique, N'ayant portes ni murs qui défendent leurs biens. Aux bords de l’Eurotas plein de lauriers, de cygnes, Ses monuments étaient les tombes des plus dignes. C’est Athènes la riche, où l’on trouve en chemin Pour premier édifice un temple à la Vistoire ; () L'olivier était en grande vénération chez les Grees; ils en avaient fait le symbole de la sagesse, des arts et de la paix. (2) Bijou et ornement des jeunes filles grecques. | | | ( ù | | POÉSIES, Cxvi] Le Parthénon gardant la Minerve d'ivoire Que sculpta Phidias d’un ciseau surhumain ; La colline de Mars où, par les nuits sans lune, Jugeait l'Aréopage, et la vaste tribune Dans le roc, d'où parlaient les bruyants orateurs ; Le Pnyx où délibère une plèbe sacrée ; L’Acropole ; et le long du chemin du Pirée Le tombeau des soldats et des législateurs. Corinthe aux pieds des monts, la ville du commerce, Ouvre sur les deux mers, dont chaque flot la berce, Deux ports jamais battus par les vents orageux. Elle se ceint les flancs d’une muraille immense D'où l'on voit dans la brume où l'horizon commence, Athènes, le Parnasse et l'Hélicon neigeux. De tes nombreux penchants, bons ou mauvais, d Grèce, Tu faisais quelque dieu, créais quelque déesse. Ta langue harmonieuse avait des bruits si doux Que tout en était beau. — Laïs, la courtisane (1), En ruinant l'Asie, aux autels de Diane Souriait dans l’encens d’Ephèse à ses genoux. Périclès, à qui Zeus donna par fantaisie La tète de Bacchus, couvrait de monuments Athènes, et dormait sur le sein d’Aspasie Qui faisait des héros, des rois de ses amants. (1) Laïs, en vêtement de déesse et représentant Diane, fut promenée en procession à Ephèse et au milieu de lencens et des adorations. exvii] POÉSIES. Le bel Alcibiade, élève de Socrate, Trainait nonchalamment son péplum écarlate; L'Etaire Phryné posant pour les Vénus (1), Offrait de rebâtir Thèbes dans la détresse, Phryné qui n’échappait aux juges de la Grèce, Qu'en leur montrant son corps et ses beaux charmes nus. Phidias le sculpteur, grand et fort de science, Représentait des dieux l’écrasante puissance ; Lysippe, la nature; et les beautés du corps S'incarnaient finement aux doigts de Praxitelle (2), Lui, dont Cos choisissait la Vénus la moins belle, Parce qu'un chaste voile envoilait ses trésors. Apollodore peint la nature idéale ; Et l'opulent Zeuxis, couvert de pourpre et d'or, Sur la ile créait la femme sans égale, Quand avec plus de goût, d'élégances encor, Apelle copiait les rois. où Bucéphale. Eschyle inspirait-il la haine des tyrans, Euripide rendait la scène plus touchante, Montrant l'amour terrible et de vieux rois errants En haillons, sous les fûts au feuillage d’acanthe. Sophocle, grand, moral, toujours religieux, Sentait le cœur humain battre dans sa poitrine, Et pressentait déjà la vérité divine, Alors qu'il écrivait sous les temples des dieux. 1) Phrvné, maîtresse de Praxitelle, posait pour ses statues de Vénus. yné, 2) Praxitelle brillat par la grâce et la finesse de ses œuvres. POÉSIES. exix Périclès, au sortir d’une nuit de débauche, Imposant, convaincu, se frappait le sein gauche. Démosthènes tonnait la fougue et la raison ; Aristophane aux mœurs criait la trahison. Thucydide pleurant aux récits d'Hérodote, Pindare s’échauffait pour chanter un vainqueur ; Et quand Anacréon sous les roses radote, A Leucade, Sapho s'enfuit guérir son cœur. Des dieux, de l’homme, Homère escaladait la cime. Socrate dans le ciel trouvait le Dieu sublime, Et buvait la ciguë au grand soleil couchant ; Platon, dans la raison comme dans un abime Sut découvrir l’Idée ; et flattant le penchant De la matière humaine et sensible, Epicure Pensait que le bonheur gît dans la volupté. : Quand Aristote, au vrai cherchant la route sûre, Expérimentait l'homme ainsi que la nature, Pythagore en Dieu seul crut trouver l'Unité. Terre du goût, des arts, à Grèce, Grèce antique, Tes temples brillants d’or, de marbre Pentélique Par des peuples vainqueurs sont déjà renversés. De luxe et de splendeur ta terre est assouvie ; Entends naître là-bas les bruits d’une autre vie; Couche-toi pour mourir; tes siècles sont passés. CXX POÉSIES. V_ ROME Rome tète sa mère. — En mordant la mamelle De ta louve du Tibre entre les jones verdis, On ’entendait de loin hurler déjà comme elle. Au fond d’un bois sacré, sauvage tu grandis Sans loi, sans Dieu, sans ville, ayant pour sœur jumelle En {on sein vigoureux la force aux coups hardis. Dans ton mur fratricide une cité se dresse .Oue tu peuples du sac de vingt peuples divers. Quand tu voulus aimer, dans tes bras entr’ouverts Tu ravis à ton choix ta femme ou ta maîtresse ; Il te plait d’être riche et tu pilles la Grèce ; Il te plaît de régner, tu voles l'univers. Tes fils ont dans leur sang le Vésuve et sa lave, Et le courage fou des hommes sans aveux. Tes grands sont insolents. — Vètus du laticlave, Tes sénateurs ont tous la sagesse des vieux ; Et ta plèbe ne sait, bête de somme, esclave, Qui redouter le plus, ses maîtres ou ses dieux. Du fer tu ne forgeais que des armes. — Le monde Avec l'or des vaincus, ton châtiment fut là! Riche, tu devins lâche, et de ta lèvre immonde POÉSIES. CXX] Tu baisas jusqu'au sang des poignards de Sylla ; Et tu déifias dans ta honte profonde, Claude, ton idiot ;-ton fou Caligula. Les esclaves courbés portent sur leur épaule Cette grandeur romaine : et personne n’y croit; Un seul le devina, Spartacus dans sa geôle. Mais à qui veut oser, Rome montre du doigt Le roc Tarpéien auprès du Capitole ; Le peuple de la forre avait créé le droit. À Rome on sait mourir; mais sa mort est un crime, Crime contre la vie et la Divinité ; Elle a quelques éclairs de morale sublime Et donne dans son ciel grande hospitalité Aux dieux abandonnés des peuples qu’elle opprime : Son large Panthéon préparait l'Unité. Elle fait sabler d’or le sol de ses arènes Sur le sang répandu par les gladiateurs, Sang des bêtes des bois et des bêtes humaines ; Quand les parfums jetés en pluie aux spectateurs, Rafraîchissaient le sein des matrones romaines, Et le front ennuyé, chauve des sénateurs. Il faut à sa grandeur des milliers de statues, Des temples dédiés à tous les dieux humains. Enjambant de leurs ares les montagnes pointues, Les aqueduces en l'air élèvent des chemins ; Et ses routes de fer sont sans cesse battues Par les peuples vaincus et les soldats romains. exxi] POÉSIES, Ce peuple vit et meurt grand jusque dans ses vices ; Il avait fiancé la mort avec l’amour, Inventant pour son corps des douceurs destructrices, S’enivrant de Falerne et de sang tour-à-tour ; Rome se livrait nue à l'amour, aux supplices, Vendant au plus offrant l'empire pour un jour. Mais là-bas, en Judée, un Dieu qui s’est fait homme, Jette comme un défi sa mort à l'univers; On entend un bruit sourd dans les fanges de Rome : Et la croix, châtiment des étrangers pervers, Infamie épargnée au Romain qui se nomme (1), Cette croix brille aux cieux sur les fronts découverts. Peuple, peuple, à genoux sous le myrte et la rose (2) ; La croix seule est debout sur l'univers entier ; Ta Rome en ses débris meurt et se décompose. Comme sur l'arbre mort vient nicher le ramier, Le Christ ressuscité sur tes tombes se pose ; Une fleur d'avenir fleurit dans ton fumier. VI LA GAULE Un peuple doit mourir quand un peuple va naître. De la fange de sang, Rome, où tu te vautrais, ) I suflisait d'invoquer le titre de citoyen romain pour échapper au chàti- ment infâme de la croix. Exemple : saint Paul. 2) Le myrte et la rose étaient consacrés à Vénus. POÉSIES. exxii] L'âme prit son essor au froid pays du hêtre ; Et lorsque tu cherchais la croix du divin Maitre (1), La Gaule était déjà vieille sous ses forêts. Dans les bois chevelus les blanches druidesses, Du chène autour du front, les jambes, les seins nus, Livrant aux vents des monts leur corps vierge et leurs De leurs faucilles d’or aux lettres charmeresses [tresses, Coupaient le gui sacré sur les arbres connus. Mais le druide entend sur sa harpe qui gronde Les cordes se briser d’une plaintive voix; La lumière pénètre en sa grotte profonde ; Et le christianisme envahit le vieux monde, Bâtissant humblement ses huttes dans les bois. La foi vient féconder au fond de ses artères Le vieux sang de la Gaule; et l'esclavage ancien Disparut lentement parmi les hommes frères ; Chacun eut au soleil sa joie et ses misères, Et ne suivit de lois, de penchants que les siens. La paix couvrit de l'aile et moisson et chaumière. Chacun put travailler et penser sous le ciel ; Si quelque ombre se fit pendant l'heure première, L'idée allait toujours, traçant vers la lumière Dans sa fatalité son sillon éternel: Le monde est racheté. — Les passions humaines S'épurent en passant par la tête d’un Dieu ; 1) L'impératrice Hélène fit chercher sur Le calvaire la croix du Christ. CXXIV POÉSIES. Et du sein des forêts les églises romaines (1) Dressent la croix de fer de leurs cimes hautaines Ainsi qu’une prière, au fond du grand ciel bleu. De ce qu'avait su Rome, et l'Egypte et la Grèce, La Gaule en un seul jour avait presque hérité ; Elle eut de plus les pleurs de humble pécheresse, La charité qui tend sa robe à la détresse Et les troubles du cœur devant la liberté. Son peuple fut légiste et soldat comme à Rome ; Comme en Grèce, en Egypte, artiste, agriculteur ; Mais à sa dignité la foi rappela l'homme, Dans le monde moral rendant son vrai royaume, Au Dieu @e la raison, de l'esprit et du cœur. L’eselave fut un homme et l’homme fut un frère ; Le bonheur et la paix fleurirent au milieu Des peuples que le Christ de son sang régénère ; Et chacun désormais apprit que sur la terre, C’est de Dieu qu'il venait et qu'il allait à Dieu. Du mouvement recu, Gaule, ta vie éteinte Court encor dans tes flancs comme au jour du réveil. — Tu meurs? — Qu'importe au monde! Il aspire sans Au bien-être, à la paix, à la lierté sainte, [crainte Et, gravitant vers Dieu, monte sous le soleil. Gaule, l'âme du monde a déjà d’un coup d’ailes Laissé ton sol. —- Où donc va-t-elle rajeunir ? ‘d) Architecture romane on romaine dégénérée. POÉSIES. CXXY Regarde ces vaisseaux sous les brises fidèles, S'enfuir imposants, hauts comme des citadelles , Ils s’en vont aux lointains pays de l'avenir. VII L'AMÉRIQUE Le Progrès conduisant ses longues caravanes Aux jeunes régions des bois et des savanes, S’'incarne industrieux au profit du travail. On peutsurleurs grandslacsnaviguer huitcentslieues (1); Des monts Alléghanis et des Montagnes-Bleues, Plus de cent fleuves vont à la mer, leur bercail. Franklin dans l'univers poursuivant l'équilibre, Rendit la foudre esclave et l'humanité libre ; Au peuple, Wasingthon apprit la liberté, Nourrice du génie et des intelligences ; Et pour faire une place aux sages indigences, La hache, des forèts sapa l'éternité. Les raïls-way de fer sillonnent l'Amérique ; Leurs machines rälant d’un souffle pulmonique, Courent toujours, toujours le poitrail en avant. Elles lassent le vol tout-puissant des grands aigles, S’éclipsent sous les monts, s’envolent dans les seigles, Infatigables, comme un tourbillon de vent. () Chiffres contrôlés. CXXY) POÉSIES. Elles vont, rapprochant les choses et les liommes, Servant la république et servant les royaumes, Unissant les besoins, liant les intérêts. Et la locomotive en fatiguant le monde, Sert à fonder la paix et l'unité féconde, lluminant d’éclairs les ombres des forêts. — Porte-moi ce message, à fluide électrique! Et la foudre obéit à la jeune Amérique, S'élançant d’un seul bond le long d’un fil ténu, Et quand l'oiseau léger qui s’y repose et chante, Sent le frissonnement, l’étincelle pensante, En parcourant le monde, est déjà revenu. Battant les eaux des lacs des planches de sa roue, Comme un oiseau mouillé qui dans l'air se secoue, Le vaisseau fait claquer sa voile en frémissant ; La fumée à son front flotte comme une plume; Et le sifflet salue en passant dans la brume Ou le bateau qui monte ou celui qui descend. Pour l’homme industrieux travaille la machine, Qui mouvant de grands bras, levant sa lourde échine Broirait sans conscience en sa fatalité Le maître qui la guide. — Une cheville mince Emprisonne sa force ; et qu’elle pleure ou grince, Un enfant à son gré la met en liberté. Elle gronde en sueur et siffle avec furie ; Elle mord, tord le fer, au fils de l’industrie Economisant l’homme et la vie et le temps. POÉSIES. CXXVi] Au service du monde et de l'intelligence Mettant sa force aveugle et sa vaste puissance Elle, qui sans repos travaillerait cent ans. L’Américain commerce et cependant défriche De la bèche et du feu sa terre vierge et riche Où les houilles et l'or se montrent au travers ; Hardi spéculateur, il sait toute science Et néglige les arts... Mais sans cesse en partance Ses lourds vaisseaux marchands vont fatiguer les mers. Là, tout veut être libre ainsi que la pensée ; Et la vie est de feu. — L'heure bien dépensée Y fait apprécier le temps comme un trésor. Chacun peut dans sa foi s'adresser au grand Etre, Et tendant au bonheur, à la paix, au bien-être, Prise sa liberté plus que ses pièces d'or. Et pourtant dans le Sud, il faut à la culture, Prèche le maître, il faut le Noir déshérité ! — La loi peut-elle donc donner l'investiture De quelques hommes ? — Tous, dans l’or, la pauvreté, Devant Dieu sont égaux et devant la nature, Le travail n’est fécond qu'avec la liberté. L'avenir s’y transforme. — Il s’incarne et s’agite En ses flancs pleins de vie; et le monde gravite Autour de l'Amérique au bord de son réveil. Le monde ancien est mort et s'éteint solitaire. Vive le renouveau de l’âme de la terre ; Salut au jeune esprit comme au jeune soleil. EXXVII] POÉSIES. VIII Qui dira maintenant (lorsque le Nouveau-Monde Dans des siècles verra sa mamelle inféconde) Où l’âme du progrès rallumera le feu ? La terre a sur son sein, du couchant à l’aurore, Pour semer l'avenir, des sols vierges encore ; Ne tentons pas le ciel; l'avenir est à Dieu! OUVRAGES REÇUS FAR La SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE PENDANT L'ANNÉE 1860 Académie des sciences et lettres de Montpellier. (Mé- moires de la section des lettres; — de la section de médecine; — de la section des sciences.) Actes de l’Académie impériale des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux ; 1859. Agronome {l\ praticien, journal de la Société d'agri- culture de l'arrondissement de Compiègne. Mémoire à Sa Majesté l'Empereur sur les causes de l'émigra- tion des ouvriers des campagnes vers les villes et sur les moyens propres à la combattre ; broch. in-8e.. Annales archéologiques de Didron; 1859-1860. Annales de l'Académie d'archéologie de Belgique , 1859-1860. TOME XXII. î exxX OUVRAGES RECLS. Annales de la Société de médecine de Saint-Etienne et de la Loire; 1857-1858. Annales de la Société académique de Nantes et de la Loire-Inférieure ; 1859. Annales de la Société d'agriculture de la Gironde; 1859. Annales de la Société d'agriculture d’Indre-et-Loire ; 1857. Annales de l'Académie de la Rochelle. — Section des sciences naturelles; 1859. — Atlas des plantes mari- times de la Charente-inférieure. Annuaire des cinq départements de la Normandie, publié par l'Association normande; 1860. Annuaire de la Société météorologique de France; 1859. Annuaire administratif, historique, statistique et com- mercial de l'Ardèche ; 3 vol., 1855, 1856, 1857. Antiquités gallo-romaines découvertes à Toulon-sur- Allier, et réflexions sur la céramique antique, par M. de Payan-Dumoulin, président du tribunal civil du Puy, membre résidant. Art (l’) au dix-neuvième siècle, organe de la Société libre des beaux-arts; 1860. B Bon (le) Cultivateur de Nancy, publié par la Société cen- trale d'agriculture de Nancy; 1859-1860. Bulletin de la Société impériale et centrale d’agricul- ture ; tome x1v, 1860. Bulletin de la Société impériale zoologique d’acclima- tation ; tome vy, 1860. OUVRAGES REÇUS. Cxx\) Bulletin de la Société d'agriculture et d'horticulture du Gers; 1860. Bulletin des travaux de la Société libre d'émulation du commerce et de l'industrie de la Seine-inférieure ; 1857-1858. Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse ; 1860. Bulletin de la Société d'agriculture et de commerce de Caen ; 1859-1860. Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest ; 1859-1860. Bulletin de la Société impériale des antiquaires de France ; 1859-1860. Bulletin agricole du Puy-de-Dôme ; 1860. Bulletin de la Société protectrice des animaux ; 1860. Bulletin de la Société d'horticulture de l'Aube ; 1859-60. Bulletin de Ja Société d'agriculture, industrie, sciences et arts de la Lozère ; 1860. Bulletin agricole publié par la Société centrale d’agri- culture du Pas-de-Calais ; 1860. Bulletin de la Société d'agriculture et d'horticulture de Vaucluse ; 1860. Bulletin monumental ; 1860. Bulletin historique de la Société des antiquaires de la Morinie ; 1860. Bulletin du Comice agricole d’Alais ; 1860. Bulletin de la Société d'agriculture de Boulogne-sur- Mer; 1859-1860. Bulletin de la Société des sciences, belles-lettres et arts du Var, séant à Toulon; 1859. Bulletin de la Société industrielle d'Angers et du dépar tement de Maine-et-Loire ; 1858. EXXXij OUVRAGES REÇUS. Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie; 1859. Bulletin de la Société impériale et centrale d’horticul- ture de la Seine-Inférieure ; 1860. Bulletin de la Société d'horticulture de la Sarthe; 1860. Bullétin de la Société d'agriculture, sciences et arls de la Sarthe ; 1859-1860. Bulletin des travaux de la Société d'agriculture d'Alger ; 1859. Bulletin du Comice agricole de Saint-Quentin (Aisne); 1859. Bulletin de la Société centrale d'agriculture et des Comices agricoles de l'Hérault; 1859-1560. Bulletin de la Société centrale de l'Yonne pour l'encou- ragement de l’agriculture ; 1859. Bulletin de la Société de statistique des sciences nalu- relles et des arts industriels de l'Isère. Bulletin de l’Académie delphinale ; 1857-1858. Bulletin de la Société centrale d'agriculture du Cantal ; 1860. Bulletin de la Société académique d'agriculture de Poi- tiers, 1859. Bulletin de la Société d'agriculture du Cher ; 1860. Bulletin de la Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers ; 1860. Bulletin du Comité d'histoire et d'archéologie de la pro- vince ecclésiastique d’Auch; 1860. Bulletin de la Société d’émulation de l'Allier; 1858. Bulletin du Comité de la langue, de l'histoire et des arts de la France, institué près le ministère de l'Instruc- tion publique et des Cultes; 1857. OUVRAGES REGUS. cxxxiij Bulletin de la Société archéologique, historique et scientifique de Soissons; 1858. ( Cabinet (le) historique; 1860. Caisse d'épargne et de prévoyance des Bouches-du- Rhône. Rapport sur les opérations de l’année 1859. Compte-rendu des travaux de la Société littéraire de Lyon pour l'année académique 1857-1858, par An- toine-Gaspard Bellin. Conseil général du département de la Haute-Loire, session de 1860. Congrès (les) des vignerons français, par Guillain ainé ; 1860. Délibérations des Comices agricoles de Lille et de Pro- vins; 1860. De descriptionibus apud Homerum, auctore À. Grenier, in Claromontii Iycæo professore. Description des antiquités et objets d'art contenus dans les salles du palais des arts de la ville de Lyon, par M. Comarmond. Discours sur l'utilité de l'étude des lettres, prononcé à la distribution des prix du collége de Thiers par M. l'abbé Vissac, aumônier et professeur, licencié ès-lettres. Dissertation sur les biens communaux du département de la Haute-Loire, par M. Best, membre résidant. exxxiv OUVRAGES REÇUS. E Ecole (l) du respect et Notice sur l’église et les seigneurs de Couze, par Charles des Moulins ; broch. in-8o. Etudes sur la géographie botanique de l’Europe et en particulier sur la végétation du plateau central de la France, par Henri Lecoq, professeur d'histoire natu- relle à Clermont-Ferrand ; 9 vol. in-8°. Ouvrage offert par l'auteur. Exposé des travaux de la Société des sciences médicales de la Moselle ; 1859. F Fertilisation du sol par le phosphate de chaux fossile, par M. de Molon; broch. in-8e, Feuille du cultivateur forézien. — Comptes-rendus des travaux et séances de la Société d'agriculture et des sciences de Montbrison ; 1859. J Journal d'agriculture pratique; 1860. Journal d'agriculture progressive ; 1860. Journal de la Société impériale et centrale d’horticul- ture ; 1860. Journal de la Société de la morale chrétienne; 1860. Journal d'agriculture pratique et d'économie rurale pour le midi de la France, publié par les Sociétés de la Haute-Garonne et de l'Ariége; 1859-1860. OUVRAGES REÇUS. CXXXY Journal de la Société d'horticulture du Bas-Rhin ; 1860. L Législation des céréales. Les Comices agricoles et le Conseil d'Etat, par le comte de Tramecourt; in-8e. M Mandement de Monseigneur de Morlhon, évêque du Puy. Mémoires de l’Académie de Stanislas, 1858. Mémoires de la Société impériale des antiquaires de France ; 1860. Mémoires de l’Académie du Gard; 1858-1859. Mémoires de la Société archéologique de Touraine; 1858. Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Chàlons-sur-Saône ; 1857. Mémoires de la Société d'agriculture de la Marne; 1859. Mémoires de l'Académie impériale des sciences, arts et belles-lettres de Caen ; 1860. Mémoires de l'Académie impériale de Metz; 1858-1859. Mémoires de l’Académie impériale de Dijon; 1855. Mémoires de la Société d'agriculture, des sciences, de l'Aube ; 1859. Mémoires de la Société impériale d'agriculture, des sciences et arts séant à Douai; 1858-1859. Mémoires de l'Académie impériale des sciences, Inscrip- tions et belles-lettres de Toulouse ; 1860. CXXXY OUVRAGES REÇUS. Mémoires de la Société des sciences, agriculture et arts du Bas-Rhin ; 1860. Mémoires de M. le prince Alphonse de Polignac sur les nombres premiers. Mémoires de la Société académique d'archéologie, sciences et arts de l'Oise ; 1859. Moniteur des Comices et des cultivateurs; 1860. Nobiliaire de Belgique, par M. J. Vander Heyden. Notice du vert de Chine et de la teinture en vert chez les Chinois, par Natalis Rondot. Notice historique sur la Société littéraire de Lyon, lue en séance par Antoine-Gaspard Bellin. Notice rédigée d’après le Nobiliaire de Belgique sur la très-ancienne noble maison de Kerckove dite Vander- Varent ; 1899. Notice des travaux de la Société de médecine de Bor- deaux ; 1859. Notice sur la collection des documents relatifs à la dé- finition du dogme de l’Immaculée Conception de la sainte Vierge qui sont conservés dans la basilique de Notre-Dame du Puy, par M. l'abbé Sire, directeur au séminaire du Puy, membre non résidant. P Poésie (la) au dix-neuvième siècle, où impressions d'un poète, par le vicomte de Saint-Poney OUVRAGES REÇUS. CXXX I) l'récis analytique des travaux de l'Académie impériale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen ; 1857- 1858. Procès-verbal de l'audience solennelle de rentrée de la cour impériale de Lyon, le 3 novembre 1860. — De la procédure criminelle en Angleterre, et des justices sommaires : discours prononcé par M. de Lagrévol, substitut du procureur général. Publications de la Société géologique de Londres : The Quarterly journal of the geological Society of London address delivered at the anniversary meeting of the geological Society of London; 1855-1857-1858. Journal of the geological Society of Dublin; 5 vol., de 1839 à 1851. () = Question du sucre indigène considérée sous le rapport de la marine française, par M. Le Mesle du Porzou. R Rapport fait à l'Académie des inscriptions et belles- lettres au nom de la commission des antiquités de la France, par Léon Remier. Recueil des publications de la Société havraise d'études diverses ; 1859. Recueil de l'Académie des Jeux floraux ; 1860. Recueil des travaux de la Société d'agriculture, sciences et arts d'Agen; 1859-1860. exxxvii] OUVRAGES REÇUS. Recueil agronomique publié par les soins de la Société des sciences, agriculture et belles-lettres de Tarn-et- Garonne ; 1860. Répertoire des travaux de la Société de statistique de Marseille, 1860. Revue agricole et industrielle de la Société impériale d'agriculture, sciences et arts de Valenciennes; 1860. Revue des Sociétés savantes ; 1859-1860. Revue de l’art chrétien; 1860. S Société agricole, scientifique et littéraire des Pyrénées- Orientales ; 2e vol. Société des sciences naturelles et archéologiques de la Creuse ; 1859. Société littéraire et scientifique de Castres ; 1860. Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Séance générale du 28 mars 1860. Société d’émulation de l'Allier. — Fragments du car- tulaire de la Chapelle-Aude, recueillis et publiés par M. Chazaud, archiviste de l'Allier. Société d'agriculture, des belles-lettres, sciences et arts de Rochefort; 1859-1860. Ÿ Traités (les) de commerce et l'Angleterre, par M. Marc de Hant, président du Comice agricole de Provins; broch. in-8°. Travaux de l'Académie de Reims; 1857-1898. OUVRAGES REÇUS. CXXXIX V Vie (la) et les poésies de saint Grégoire de Nazianze. Thèse pour le doctorat ès-lettres, présentée à la Fa- culté de Lyon par À. Grenier, professeur de rhéto- rique au lycée de Clermont. TABLEAU OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES AU PUY, À 10 HEURES DU MATIN ET A 4 HEURES DU SOIR Par M. NICOLAS Professeur d'agriculture à l'Ecole Normaie du Puy et Membre résidant de la Société 1859 LÉGENDE EXPLICATIVE DES ABRÉVIATIONS EMPLOYÉES DANS LES OBSERVATIONS CM cm Cumulus : nuages blanchätres ressemblant à des balles de coton. CM grands cumulus ; em petits cumulus. er Cirrhus : nuages frangés ressemblant à des hachures ou à des balayures. st Stratus : nuages disposés en forme d’im- menses tables, de bancs ou d'assises hori- zontales. exlij nb erst, ele. STN stn qqs hz OBSERVATIONS Nimbus : nuages orageux, de couleur grisâtre ou foncée, se découpant brusquement dans le ciel. Cirrho-stratus : nuages tenant à la fois des cirrhus et des stratus. Strato-nimbus : nuages tenant à la fois des stratus et des nimbus. Quelques. Pluie. Neige ou nuit, suivant la nature de l’obser- vation. Léger ou légèrement. Vapeurs. Supérieur. Inférieur. Nord. Sud. Est. Ouest. Depuis. Pendant. Matin. Soir. Grand. Ce signe signifie : au-dessous de zéro ou de la glace fondante, c’est-à-dire des degrés de froid. Ce signe indique des degrés au-dessus de zéro ou de chaleur ; même signification quand il n’y a point de signe. Horizon. or tonn gb écl MMM MMS Les autres abréviations se devinent aisément. MÉTÉOROLOGIQUES. Heure. Soleil. Eclaircies. Brouillard. Atmosphère. Orage. Tonnerre. Gelée blanche. Eclairs. Moyenne mensuelle matin. Moyenne mensuelle soir. exlii) Suivent les Tableaux. | JANVIER. MÈTRE RE OBSERVATIONS. az EE 70:lard dans la matinée. 7oimulus à hz. 69pendant la nuit. 69! 69pendant la journée. 14) 7luvert le matin. 70 70!lard dans la matinée. 70! 71! 7limulus à hz,. 70. pluie à 9 h. du soir. 701 pluie à 5 h. du matin. 70brouillard le matin, 69'e matin. 695luie à 4 h. du soir. 69à 6 h. 4/2 du matin. 69à 5 h. du matin, très-beau à 5 h. du soir. G69assez forte depuis 44 h. du mat. jusqu’à 1 h. dus. 69eau depuis 10 h. du mat. jusqu’à 4 h. du soir. 70:pendant la soirée, 690au à midi. 70 pluie à S h. du matin. 70 69 pluie à 10 heures. 69à 5 heures et demie. FOMMbASSeUAMOIS, Je 95" 0." —50 | élevée, id. 69dans la matinée, CM. 70 lard. rat A 7Jouvert dans la soirée. OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, JANVIER. | THERNOMNÈTRE Le | VENTS BAROMÈTRE THERMOMÈTRE UDONÊÈTRE à VENTS = | | ë ÉTAT DU CIEL À 40 H. DU MATIN. x à Nr ane RS eu er ur mes = (O7: © £ ÉTAT DU CIEL À 4 I, DU SOIR. = OBSERVATIONS. = aire. à zéro. en contact. | extérieur. | à minima. = supérieur. | inférieur. ordinaire, à zéro. en contact. | extérieur, | à maxima. au Puy. à Yssingeaux. = supérieur. | in‘érieur. | | RE EE ——— 2 À#" || —_—_—_——— | — —— EEE ELLE ——— | cenugr. |l centigrs | - centigr. | centigr, | centigr. millim. willim. 1 71005 70So6 20 |—400 | 9400 | couvert. N » 1 Tûsol 1200 4500 1400 » » 9200 découvert. x N brouillard dans la matinée. 2 | 710, û [—1,0 | 90,0 id. SE » 2 701,9 11,0 9,0 10,5 » » 91,0 id. xo x0 id., cumulus à bz. 5 699.2 | 94,0 id. so 0 5 696 11,0 9,0 11,0 » 92,0 so so pluie pendant la nuit. A 694,9 | 94,0 id. s sso i 692,7 6,5 | 40,0 8,891 95,0 so s 5 694,9 | 94,0 id. | s so 5 692,5 5,0 7 5,047 94.0 couvert. CM. so so pluie pendant la journée. 6 696,6 | 94,0 | beau, em, pluie jusqu'à 9 h. s SE 6 695,5 15,254 1,0 presque découvert, x x0 pluie dans la matinée, CM. : 709$ | 92,0 couvert. N 0 7 709,1 » mi-couvert. N $E brouillard. s 716,5 || 91,5 assez beau, stem, brume, E NE $ 715,6 » » très-beau. NE NE beau. , 90,0 | strem. | s 712,8 » » couvert. | s SSE ciel couvert dans la soirèe. = crstr. s S 717,6 » » id. s s id. mi-couvert. s so 716,6 714,8 » » nimbus et stratus. | se SE ciel couvert le matin. CM, brume. s s 710,4 708,7 » 11,600 cumulus. s s | brouillard. | s s | 709,8 707,9 » à] beau. Ines s brouillard dans la matinée. 709.6 | brouillard épais. s s | 708,9 707,5 » » brume. | s s id. 708,4 beau, lég. brouillard. s S 712,0 710,0 » » lég. couvert, beau. 0 so id. 714,0 beau, em. | N 10 | 716,4 714,6 » » couvert. o o id., cumulus à bz. 709.5 couvert. | so so 707,4 705,7 » 1,500 id. s so légère pluie à 9 h. du soir. 705,7 id. | sso so M r01,7 700,1 2,000 2,700 Stratus, beau. Lu 15) o légère pluie à 5 b. du malin. 700,6 assez beau, brume. s s | 704,0 702,1 » » 94,5 cirrhos-stralus. | so Q léger brouillard le matin. 701,9 | très-beau, CM. | s so 699,7 » » 94,0 couvert, STN. | 0 so beau le malin. À 700,1 | . beau, em. Oo "MU 699,4 697,7 ” » 94,2 très-couvert. |" Lo 0 forte pluie à 4 h. du soir. | ; CM: [NO so | 701,5 699,7 0,500 5,500 95,0 couvert, CM. 0 so pluie à 6 h. 1/2 du matin. . x | couvert. n. o 0 | 701,0 699,2 1,455 92,0 mi-couvert. sin. N xo pluie à 5 h. du malin, très-beau à 5 h. du soir. | très-beau, ggsem. | E SE | 692,0 | 690,4 5,000 | 94,0 beau. | N ] x pluie assez forte depuis 41 b. du mat. jusqu'a 1 h. da s. | 95,5 couvert. 0 0 | 694,9 695,4 8,406 » 95,0 brumeux, couvert. x XXO | très-beau depuis 10 h. du mat. jusqu'à 4 b. du soir. 95,5 id. cmn. N N 705,5 105,1 | » 5,100 94,0 pelite pluie, on. o 0 neige pendant Ja soirée. 95,0 | pluie assez forte. 0 so 701,0 699,0 1,000 5,400 91,5 couvert, SIN N x très-beau à midi. ! | 704.4 95,5 | assez beau. | N NNO | 706,0 704,5 9,469 2,400 94,0 id. x x petite pluie à S h. du matin. | 940 | beau, CM, brume LES 0 29 | 706,9 705,5 » 4,000 | 95,5 mi-couvert, o 10: 1 || Rene ; | | 95,0 | pelite pluie. | x x0 50 | 696,4 692,8 4,000 5,700 couvert, xo à petile pluie à 10 heures. 95,5 || couvert, CM, n. | N x 51 697,9 696,2 | 5,400 0,700 id. x N pluie à 5 heures et demie. | L : | | = _—| | | TA 704,58 | CR REG EE AO eee) M. 5. 702,00 l 7,05 | 62,100 | 85,500 | 05,52 Température la plus { BASSE lu mois, le 2. re | | Hygromèlre .… 9349 | | es A —_—_———…—……—…… ns FÉVRIER, OBSERVATIONS. neige à 5 h. du matin. qqs atomes de neige à 5 h. du matin. gelée. très-beau pendant toute la soirée. gelée. gouttes de pluie à 5 h. du soir. | neige à 8 h. du matin. très-beau toute la journée, gouttes de pluie à 6 h. du soir. [is neige le soir et dans la nuit. forte gelée. neige dans la matinée. à id. id, gelée, givre. neige à 6 h. du soir et la nuit. [à neige le matin. assez beau à midi. rès-beau toute la soirée, dégel, 4res véroniques agrestes. neige la nuit et dans la soirée. neige abondante à 10 h. du matin et la nuit. meige à midi. neige le matin, et le soir à 4 h. légel. très-beau toute la journée. dégel. pluie à midi et à 4 h. beau toute la soirée. pluie le matin à 7 h. basse du mois, le 24............ —10° a plus élevée, id. TONER eee es 12,5 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. FÉVRIER. Jours du BAROMÈTRE ee ——— ordinaire. azéro 708,12 710,78 709,42 697,49 699,47 699,21 698,12 701,72 699,0 700,9 700,8 699,5 702,8 705,7 707,5 705,8 700,4 705,7 706,0 691,6 694,6 696,1 704,0 707,4 710,5 710,5 700,5 708,7 708,4 709,09 708,95 698,58 707,24 706,59 THERMOMÈTRE © en contact. | extérieur. | à minima. centigr. | centier. | contigr, 91,5 91,5 92,0 92,0 92,0 92,5 92,2 ÉTAT DU CIEL A 10 H. DU MATIN. assez beau, sin. id. CM, n. couvert, lég. brumeux. couvert, sin. beau, lég. brumeux. couvert, id., strn. beau au moment de l'observ., qqs CM. très-beau, brouill, à l'ouest. couvert, brume beau, CM. très-beau, qqs em à hz. couvert, brouillard léger. couvert, qqs atomes de neige. couvert, neige. couvert, qqs atomes de neige. couvert, neige. couvert. id. id. id. st. CM. couvert, nei couvert. id. stem, très-beau, qqs em., brume. id. très-beau, crst. couvert, sin. id. crst, beau, CM. 702°68 —0,66 92,21 M. M. Baromèlre à zéro Thermomètre extérieur. Hygromètre.. supérieur. inférieur, Jours du mois, 11 æ— CENTS BAROMÈTRE ——_ — ——— ordinaire. à zéro. 69702 696056 704,1 699 705,0 705,62 711,5 710,12 714,0 709,68 706,6 705,05 715,5 710,61 706,8 705,04 696,0 694,45 705,2 701,66 700,6 700,8 700,7 704,5 707,5 699,0 701,8 705,5 705,6 695,6 695,4 697,0 505,2 708,2 710,4 698.49 700,87 704457 706,76 708,96 707, 706,19 702,0 700,59 708,0 706,46 708,5 706,59 THERMOMÈTRE ——. —— ——— en contact. | extérieur, | à maxina. centigr. centigr. | centigr. 705 500 592 3; ns UDOMÈTRE —_— — au Puy. | à Yssingeaux. millim. CRE = LR RE Hygromètre. 9505 95,0 92,8 92,0 92,0 92,5 92,5 95,0 95,0 91,5 91,0 90,0 90,0 91,0 90,0 91,0 91,5 92,0 91,8 92,0 92,5 92,7 92,0 92,8 91,5 94,0 95,5 95,5 94,0 55,200 ÉTAT DU CIEL À 4 H. DU SOIR. couvert, brume. couvert, id. très-beau, lég. erst. couvert au moment de l'observation. couvert, cr, très-beau, n. très-beau, très-clair. couvert. couvert, neige l'après-midi, très-beau. couvert, brume, couvert, brume, qqs atomes de n, couvert. id. n. qqs atomes de neige, sin, couvert. CM. id. assez beau, couvert, neige. couvert. mi-couvert. stn. couvert, brume, neige. très-beau, brume. très-beau, couvert. couvert, légère pluie. beau, n. assez beau. sin. em. sin. CM. VENTS. ——_———__— supérieur, inférieur, OBSERVATIONS. neige à à h. du malin. qqs atomes de neige à à h, du matin. gelée, rès-beau pendant loute la soirée. gelée. gouttes de pluie à 5 h, du soir. neige à 8 h. du matin. très-beau toute la journée, gouttes de pluie à 6 h. du soir, neige le soir et dans la nuit. forte gelée. neige dans la matinée. id. id. gelée, givre. neige à 6 h. du soir et la nuit. neige Le matin. assez beau à midi. très-beau toute la soirée, dégel, 4res véroniques agrestes. neige la nuit et dans la soirée, neige abondante à 10 h. du matin et la nuit. neige à midi. neige le malin, et le soir à 4 h. dégel. très-beau toute la journée, dégel, pluie à midi et à 4 h, beau toute la soiré pluie le matin à 7 h, Température la plus basse du mois, le 24 élevée, id, le 29 MARS. OBSERVATIONS, légère pluie depuis 8 h. jusqu'à 11 h. pluie à 40 h. giboulée le matin et à 4 h. du soir. giboulée à 4 h. du soir, neige. neige abondante dans la nuit. neige Ja nuit et dans la matinée. neige à 8 h. du matin. forte gelée. premières feuilles du groseiller. dégel, pluie à 5 h. du soir. pluie pendant la nuit. giboulée à 2 h. 1/2 du soir. giboulée, neige pd une grande partie de la matinée. légère pluie dans la soirée, giboulée, lég. pluie à midi et à 4h. giboulée à 8 h. du matin , à 2 b. el à 5 h. du soir. neige à 4 h. du malin. premières fleurs de l’abricotier. basse du mois, les 11 et 12...... —10°0 la plus Herentidi le 31.25.1000 17,5 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. MARS. ] BAROMÈTRE | THERNOMÈTRE : VENTS ë BAROMËTRE THERMNOMÈTRE UDOMÈTRE : VENTS | 5 a E © —— | | E | proue | À À | à k : Ce : ÉTAT DU CIEL À 40 H. DU MATIN, = Al ÉTAT DU CIEL À 4 H. DU SOIR. OBSERVATIONS. ordinaire. à zéro, en contact. | extérieur. | a minima. | supérieur. | inférieur. 3 ordinaire, à zéro. en contact. | extérieur. | à maxima. au Puy. à Yssingeoux. E supérieur, | inférieur. | | | a ——— — ——— = ———————————_—_—_—_—_— | ———© ——— © ———— — — — —— —— — | ——— | — | —| ————— centigr. | centigr. cenligr. contigre millim. millim. | 70802 00 | couvert. xo N 70708 805 700 » » beau, er. so s | 707,67 | | couvert, brume, erst. s s 7 709,4 707,50 8,6 10,0 » » id. CMN, N N | 711,56 | | très-beau. NE N 5 711,6 709,78 8,0 6,0 » » beau, qqs n. N No | 714,74 | très-beau, brume. x0 No 1 715,4 TI ,5T s,0 6,5 » » id, er à hz. so N légère pluie depuis $ h, jusqu'à 41 h. 710,00 couvert, pluie. N N 5 711.6 709,76 8,2 4,2 » » très-beau, qqs N à hz. N N pluie à 10 h. | 741,07 | assez beau, emn, s SE 6 714,2 712,57 8,0 » D couvert, giboulée, N 0 giboulée le matin et à 4 h. du soir. | beau, qqs n. (sn N 7 704,0 702,44 6,0 5, » » couvert, giboulée, neige. » o giboulée à 4 h. du soir, neige. couvert, st. | so o $ 702,02 ÿ » » couvert, giboulée. N so neige abondante dans la nuit. 9 697,69 | couvert, neige. NE No 9 700,0 698,55 » 52,700 beau, qqs atomes de neige. N N neige Ja nuit et dans la matinée. 10 699,99 | couvert, | N N 10 706,4 vil » | » 90,0 couvert, 0 N neige à 8 h. du malin. 11 696,01 90,0 | très-beau, qqs cm épars. N N 11 699,5 { » » 88,5 très-beau. s NE forte gelée, 12 694,94 90,0 | très-beau. SE s 12 696,4 » » id. er à hz. so xo premières feuilles du groseiller. 15 695,25 95,0 assez beau, crem. s so 15 » » couvert, crem. N N dégel, pluie à 5 h. du soir. 14 697,54 92,5 très-beau, ere. N N 14 2,000 » assez beau. N No pluie pendant la nuit. 15 | 701,71 95,5 beau. CMan, | N NO 15 6,000 » couvert, n. N NE giboulée à 2h, 4/2 du soir. 16 702,74 92,5 couvert, giboulée, neige. n0 N 16 » » il. sin N No giboulée, neige pd une grande partie de la matinée. 17 | 740,25 95,2 | couvert, CM N 0 17 0,750 » : beau, stem. N NO 18 714,45 96,0 | beau. No NE 1S » » couvert. N No 19 711,86 | cm. N NE 19 » » très-beau. No N 9 712,26 | | | E 20 » » gas cr. s so 710,1 | | très-beau, qqs EM. | à 0 21 708,5 2,095 » qqs erem. 0 N ke £ de 707,6 couvert, n. | so o 22 707,0 705,08 » » couvert, n. N No légère pluie dans la soirée. 708,6 | très-beau, qqs em à bz. N N 25 702,7 700,45 » » très-beau, cr à bz. A] s50 F Tr ee CTP er 6,88 | assez beau, erem. so o 24 698.8 696,74 5,000 7,900 couvert, pluie. N no giboulée, lég. pluie à midi et 4h. , 697. | irès-beau, crn° N No 95 1,109 5 très-beau, o No giboulée à 8 h. du matin , à 2 h. et à 5 h. du soir. 701.2 699,01 | beau, cr. x x 26 | 705,8 » » couvert, N N neige à 4 h. du matin. 704,5 702,51 | très-beau, CM. N N 21 704,8 2,000 ” très-beau, x0 N premières fleurs de l'abricotier. 707 704,92 95,0 id. A0 N 28 702,4 700,09 Ü 0 id, N NE 704,45 95,8 couvert, em. 0 No 29 705,0 700,75 » ù id. SE S 701,51 95,8 id. n. s QT 50 705,6 701,46 » » id, N No 698,80 95,0 trés-beau, er, N No 51 698,5 695,81 h » couvert, °N 0 Ms 705,98 | 0,28 M 0285 | riermonire extérieurs 4er | M. S 705,14 8,81 | 16,952 | 40,600 | 92,56 Température la plus {| PS le Je he nie 10 | | Hygromèlre....... Donc 92,59 AVRIL, OBSERVATIONS. gouttes de pluie à midi. pluie pendant la nuit. pluie pendant la nuit. pluie dans la matinée et à 4 h. 1/2 de l'après-midi. pluie pendant la nuit. pluie pendant une grande partie de la journée. pluie jusqu'à 4 h. de l'après-midi. légère pluie après 4 h. du soir, premier coucou, pluie pendant la nuit et après 4 h. du soir. neige pendant la nuit, jusqu’à 8 h. du matin. gelée. légère pluie dans la nuit et pendant la matinée. pluie pendant la nuit et après 4 h. du soir. | neige et tourmente à 2 h. et à 5 h. 1/2 du soir. | neige pendant une partie de la journée. ; neige à 4 h. du soir, première hirondelle, ; grésil, neige à 5 h. du soir. l, pluie à midi. ! pluie à 1 h. du soir. basse du mois, 16. 20......1...... —2°8 élevée, id. le rer 18,0 e la plus OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. AVRIL, Ro —— | | BAROMNÈTRE | THERMNOMÈTRE : VENTS ÿ BAROMÈTRE THERMOMÈTRE UDONÈTRE 2 VENTS. É S 4 © —_—_— | FANTTARCS ÉTAT DU CIEL A 40 H. DU MATIN. a —— Ë —— TT RS te ë ÉTAT DU CIEL À $ H, DU SOIR. OBSERVATIONS. | Fa E2 disaire azéro jen contact. | extérieur. | à minima. Supérieur. inféricur. 2 orilitaire. à 2ér0. en contact. | extéricur, | 3 maxina. au Puy. à Yisingeaux. 4 supérieur, inférieur. | | | A NS ms EEE À —_—————_— ÉERtEr | A DUErS) | ROUES | coutigr. centigr. contigr. anillim. millim: 1202 | 1005 9200 mi-couvert. | N No ( 70006 G98045 1202 1200 1505 » » 9200 couvert, em. N N goulles de pluie à midi. 11,6 10,0 | couvert, n. | o No 2 702,7 700,26 15,0 15,2 15,0 1,141 » 91,5 beau, CM. NE N pluie pendant la nuit. 11,0 id. N. |L No o 5 702,0 699,80 A1152 11,0 11,6 » » 92,4 couvert, D, N x 59,27 12,0 | très-beau, CMn. | s s 1 697,5 12,0 14,0 » » 95,0 très-beau, n. $E E pluie pendant la nuit. 695,51 11,0 | couvert, cm. || vo N 5 701,0 11,6 11,5 2,052 25,400 94;2 couvert, cmn. s s pluie dans la matinée et à 4 b. 1/2 de l'après-midi. 700,62 | 12,5 beau, cr. S s 6 701,6 699,51 11,8 11,5 10,016 8,100 couvert, pluie, n. s s pluie pendant la nuit. 69$.,61 11,0 couvert, pluie. so o 7 701,4 698,80 11,4 HP? 5,047 » couvert, crn. E N pluie pendant une grande partie de la journée. 700,62 11,0 | | EE 0 x0 $ 704,9 701,74 11,0 10,0 1,500 25,000 mi-couvert, erst. N s pluie jusqu'à 4 h. de l'après-midi. 700,00 11,0 couvert. | N so 9 702,2 700,40 11,2 6,469 2,100 couvert. * N s0 légère pluie après 4 h. du soir, premier coucou. 11,0 | couvert, CM. | N No 10 702,9 699,71 11.0 2,078 2,400 id. N No pluie pendant la nuit et après 4 h. du soir. | S,5 | 94,5 id. CM. | N no 11 700,6! 698,79 s,0 » 1,900 qqs éclaircies, CM. N No neige pendant la nuit, jusqu'a S h. du matin. | 10,0 90,0 très-beau, qqs CM. NE E 12 TUS,4 706,26 10,5 » » id. CM. NE NE gelée. 9 0 90,5 beau, stem. NE N 15 706,4 704,25 9,0 » 1,100 couvert. No N s,0 90,0 couvert, stem. | N | NE 14 706,1 704,16 | 9,0 » » id: strn. N NE légère pluie dans la nuit et pendant la matinée. | 9,5 90,5 id. CM. so no 15 707,5 704,80 | 11,5 » » très-beau, CM à hz. so s pluie pendant Ja nuit et après 4 b. du soir. 11.0 90,5 beau, cm. | NE NE 16 10,2 » » beau, stem à hz. NE NE | 10,0 couvert, CM. | s so 17 10,4 » » couvert, sin. s so | 12,0 beau, stem. s SE IS 701,05 | 12,2 » » très-beau, cerem. No o | 11,2 couvert, er. s s 19 699,80 10,0 » » assez beau, n. N N eige el tourmente à 2 h. et à 5 b. 12 du soir. | | | 85 couvert, giboulée. | 0 SE 20 697,8 696,05 AD 1,000 » couyerl, neige. N so neige pendant une parlie de la journée. | s.0 qgs éclaircies, CM. | so s 21 705,8 705,96 8,2 5,000 » couvert, CMn. N SE neige à 1h. du soir, première hirondelle. | 705,2 8,0 couvert, emn. | x M 22 || 706,4 704,79 7,0 15,100 beau, . cràz. No No grésil, neige à 5 h. du soir. | 707.0 | s0 beau, CM. x so 25 706,8 » 92,0 beau, qqs éclaircies, CM, s s pluie à midi. | 699 4 g 2 | couvert. s s 24 GITE TE | » 15,500 95,0 beau, crn. s so pluie à 1 h. du soir. 7008 | 90 beau, CM. x N 25 || 70078 1,156 » 92,0 qgs éclaircies, er. x N 5 | 701,01 9,2 très-beau, em. SE s 26 | 705,8 » » \ très-beau, CM, cr. N No 5 704,68 s,0 couvert. xo NE 27. | 307,0 5,469 » couvert, em. so SE 702 7,4 id. emn. SE NE 28 | 704,0 » 5,200 6e de SE NE 702,56 | 822 couvert. NE so 29 | 710,4 » Ë gs éclaircies, CM. SE so 707, | 9.0 beau, cm. | s SE 50 TUS,7 » 95,0 |. lrès-beau, qqs CM à bz. s SE | omètre à zéro 70197. hasse du mois, le 20.. —8 | 701,95 | 2,52 || 92,26 [tac RE Re AE M.S s 701,54 12,05 | 49,557 99,100 92,51 Température la plus Hs de le 30. 80 | Hygromèlre.--.....-. LETE OBSERVATIONS. 7 DA A PPA I L DL D Pluie à midi. Pluie pendant fa nuit, et jusqu’à 4 h. du soir. Légère pluie à 9 h. du soir. : Pluie à 4 h. du soir. 6 [ 5 L 5 Pluie depuis midi. D Pluie pendant la journée. ñ Pluie dans la matinée, 5 ù Ê , nl ] 5. ). » RDS ee ef . OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. MAL BAROMETRE THERMOVÈTRE 3 VENTS ” BARONÈURE THERMOMÈVRE UDONETRE Ê 5 Ê re ms | ÉTAT DU CIEL À 40 H, DU MATIN 2 et É Ë ù ) 5 6 N: | 5 l 5 ÉTAT DU CIEL A 4 H, DU SOIR. OBSERVATIONS. ordinaire. | azéro Federal extérieur. | à minima. supérieur. inférieur. 2 ordinaire. ü zéro excontact. bextérieur. [fa maximas | au Puy- ä Yssingeiux. = : supérieur. | infériour, | | | | CCHIIET cents | | centigr. || centigr. millim. iillim. | | Te | ne | eee cm. (M NE ! 70405 1000 | 110 M _» 93 couvert. CR Pluie à midi, | | ; : De 3 SA ie, $ so 2 704,5 10,0 PO 8,469 7,500 { 5,0 couvert, crem. so Pluie pendant fa nuit, el jusqu'à 4 h. du soir. L Ë NE NE 3 705,6 11,0 1,516 » 96,0 il, Ë T 15,0 | très-beau, NE N 1 16,6 | » » rès-beau, s so 2 T0: | 17,0 | L » E 5 17,0 | Ù » beau, qqs er hz. E | N | 13 | ; É 6 16,0 » » très-beau. » E | +. . | | 119,2 CM. s 0 T 1$,0 » » très-beau, CM. s S | e pluie à 9 hu soir, | | 15,0 | beau, qqs éclaircies, CM. so s 706,12 19,0 » » très-beau, qys éclaircies. em. so NO | | 19,0 | beau, crst. $ s 709,8 706,60 | 190 | » » très-beau, CM bz. SE so 710,8 18,0 | très-beau; str. A ë TUO MOTTE | MOIS » 6,000 beau, CM. s $ TI 1,4 (2100 très-beau, stem. s s 710,4 706,82 21,8 » 4,600 id. s S 707,6 20,0. | 19,0 | mi-couvert, strn. s s 708,0 704,78 | 190 || 6,109 » couvert, pluie. s so Pluie à 4 h «lu soir. 708 { 5 couvert, n. | N N 7ÜS,4 16,0 | » » couvert, emn. NE N 708,5 | très-beau, s s 708,6 20.0 » » lrès-beau, qqs CM. so N 106,0 | id. s s 706,2 » » couvert, nn. o N 711,0 | | très-beau, qqs CM. N No TI1,4 » » très-beau, qqs CM. NE i 708,0 | 704.78 | très-beau, qqs er. N N 705,0 701,80 » h beau, crst. $ S 700,51 | | très-beau, str. A s | 7ois | 698,56 | » » coùvert, em. | s S 699,15 | couvert, CMN. v fs 705 I 700 | 14,547 » | N 0 Pluie depuis midi. TOS,41 | | couvert, pluie, o 0 709,9 707,19 20,000 18,500 N \ | Pluie pendant la journée, 100 je ë ; 714,0 710.98 20,500 5 emn. N \ Pluie dns la matinée, 709,99 beau. CM. x NE 7157 T0, » 5,200 qqs CM: F NES 708,42 | très-beau. » NE | | 710,4 707,05 | v » 92,0 CL: 3 | 710,00 qqs CM. x x IUT M T0 02) | » » 92,0 si en: 707,95 très-beau, sler. hz. N x0 708,9 707,25 n à 92,5 qqs str. sl 9 | l mi-couverl, n. N No 704,51 0,052 » 92,0 cm; à je | | (reseau: N N 706,05 | | » » 99,5 qqs cr. à Sean | couvert. CM. NE x | TÜS,04 » | on 89,0 qus CN: ù see | | très beau, qqs. CM. N N 710,65 0,141 D) 51,5 : SUQUE à de | | 19.0 17.0 irès=beau, CM. | N 706,25 » » S7,0 très-beau, em à hz. N NE | 180 17.0 90.0 lég. couvert, pluie. e È - MNT 9. û » ù 90,5 lég. couvort, strn. S | so Fate =] | | 20 | | | | “ : | 705,66 | | | 92,68 In ns. IMO 58 NT 1,554 | co,soo | 95,02 Thipérature 1 plus Me es | | | Hygromètre - = = LR JUIN. OBSERVATIONS. Quelques gouttes de pluie, à 4 h. 1/2 du soir. Tonnerre et gouttes de pluie dans l'après-midi. Gouttes de pluie à 8 h. du matin. Pluie pendant la nuit. Forte pluie pendant la nuit: {onnerre et pluie à midi. Pluie pendant fa nuit et le matin. 4 Pluie à 4 h. du matin. { Pluie pendant la nuit et plusieurs fois dans la journée. Ù pi { : Orage à 4 h. du matin, tonnerre. grélons. | MDASSENLUMIOIS, ESC... —(6°0 | , la plus élevée, id. OMR PE ONE ES 34,0 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, | j ne 2 | DANOMETRE TUBRMOMETIH | VENTS | BAROMETRE THERNOMNETRE UDOYETE ë VENTS | | Ê em, | — | ' a — EE e * SS Me z | | ÉTAT DU CIEL À 40 H. DU MATIN. | | ua) ÉTAT DU CIEL À 4 H. DU SOIR, | QRSERVATIONS F | | | E | SERVATIONS ordinaire | habro | on contact. | extérieur, | a minima, | | supérieur inferieur. | | ordimaire à 110. en contset. | extérieur. | à maxima au Puy à Y sngeaux = supérieur, | intérieur, u | | | l'es | | | | | EN RE: | | one mme mec cer pren | ——— "| —————— ———— © ——— — ———— ——— ———— | ——— — | centigr, | conter | | | | ceutigr. | center. | centigr œittin wilim. | | | | | | | r 0506 02005 DIT 2500 9000 mi-couvert, em. | 7060 | jo 210% $ x d . L +? « j TUbu 702005 | 2100 d jen | ve { s so 1 70Goû 2100 | 2105 » 1,800 couvert, strem, N \ Quelques gouttes de pluie, à 4h, 1/2 du soir, 2 702,5 | 699,89 | 25,0 90,5 trés-boau, qqs CM. s $ 2 19,0 11.0 » 1,100 id. D. s so = = = ,, 51 © { éclaircies, strn. | = 29 6 00 SEA : Fe, s 18S UN OU A RUN RUES Es : ou ù L 22,0 20,0 “A 0,80€ très-beau. NE \ Tonnerre ot gouttes de pluie dans laprèsemidi. ñ 707,0 | 705 0 19 | 87,5 beau, CM. x \ | 1 708,5 20.0 21.0 0,52S 6,600 id. crsir, | x . 5 710,2 706,98 | 19,0 | 87,0 lrèsbeau, qqs cm. hi. N N | 5 710,0 21,0 22,0 0 » id. EM. \ | \ CT “0% 04 » y i Û | n : 07 ! | € 9: Û or ere | . 14 : (L 7US,0 7û j 04 | 20,0 Hu ; a QUE s SE | 6 707 0 1e 49 ; pe à ie Qi rt, crom. s | s { Gouttes de pluie à 8 hi, du matin, [ 706,25 | 47,0 | 90,5 couvert, emn. x N 7 710,4 IS, 20,0 5,46 8,90 très-beau, qqs CM. N N Pluie pondant ln nuit, K 706,45 | 20,0 | 89,5 trés-beau, sir, liz. s | s $ 709,6 1,0 25.0 ’ » id. sir, SE | x ÿ 704,15 | 21,0 | 49,0 id. sir. s s 9 | 707 22,0 » | » | beau,* emstr. se s = “ |: 02 ; | 2 7 dr rl ju 701,07 20,0 | 92,0 beau, N° 0 so 10 1S,2 11,000 1,000 couvert, crnn, s s , : the 2 , = | V Forte pluie pondunt la nuits tonnerre ot pluie à midi, il 705,05 | 20,0 92,0 lès-beau, qqs CM. | s s | 44 | 708,6 | 21,0 | 12,65 11,000 | très-hean, sir, CM, N x l l I 12 | 702,91 | 22,0 | couvert. SE s | 42 706,4 704,00 22,0 | » » beau x = IT | 700,90 très-boau, cmn, | SE s 15 | 704,4 700,82 22,0 | » » couvert, sirn. | s so 14 | 701,08 | | couvert, | x 0 14 704,5 20,0 | | 7,58 25.600 très-bonut, CM x, \ NE : 15 | cm. x0 0 15 702,0 20.0 | | » p | couvert, n. mn 80 Pluie pendont En nuit ot le matin, 16 | | CM hi. N \ 16 705,0 19,0 | ü,828 6,800 très-boan, qqs CM li, No mn 17 | 705,0 | id, CM. N N 37 | 705,6 18,0 | » » couvert, emn, 0 xo 18 | 707,8 | id. CM. s | %& 18 | 707,4 705,05 | 21,0 | » » beou, sir, 4 19 7U8,0 | couvert, cmn. 0 s0 19 | 707,8 704,29 | 21,4 | » » | id. # 20 706,7 id slrom. so np | 707,8 704,75 91,0 | 1,000 2,900 couvert, so . | Re » = { i : S I RE 706.02 pie ï 2 172 10700 id cmi 0 ) Pluie à 4h, dumatin, 2 NE Tube Le RE no je 21 Jar Le js je Et se | LE Pluie pendant la nuit ot plusieurs fois duns la journte In oo 7102 706,78 très-bean, CM. hz. SE $ 29 709,8 706,45 | 20,0 1,06: 1,900 | très-boau qqs CM. | x 0 Ho ponun [ALL LALUC 0 25 71,8 | id, » \ | 711,8 » » | id. sir. N x 24 711,0 id. rs. , SE l SE » " id. | \ 0 25 712,0 id. sir hi. so xo » » id. sir. biz, \ so 26 ADIEU il. » SE 7üs,01 » » | id. CM, ha, s so IB27 711,2 | | | id. N o | 706,01 » » id. qqs CM. so “o 28 712,8 70S id. CM. N N 707,87 9,205 » id. ste, so N " F Ar s al | | 5 6 | : x | Orage à 4h, du malin, tonnorre, grôlons, | 20 | 745,4 709 couvert, emn. x | NN 709, » 15,200 id. CM. hz, x N ( # 50 | 712,8 70 90,0 dircies, em. N N | » » couvert, em, N No | | | | | | | | . | | | el LE sa | | es LE | g | | | | #g | MM. Baronièlre à zër | - = ; = = ñ j'hasee du mois, ln H,, — (0 CRAN 704,79 | 10,58 | Thermomèlre ext ITS 704.97 | 2 96,500 90.05 Température la plus 1; ovéo, Id, 102 1,0 | | | Hygromèlre | JUILEET. OBSERVATIONS. Orage et tonnerres à 4 h. 1/2 de l'après-midi. Pluie pendant la nuit. | Goutte de pluie pendant la nuit. Pluic à 4 h. 4/2 du soir. Pluie pendant la nuit et le matin. 5] | Pluie de 5 h. 1/4 à 5 h. | ( Id. lesoir. { basse dumois, les 2661-27... 1°5 ure la plus féjevée, id. ‘le 9........... 31.0 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. JUILLET, £ BAROMÈTRE THERMOMÈTRE | VENTS £ BAROMÉTIRE THERMOMÈTRE UDOMÈIRE ; ë VENTS À —— | ——— —| ER | ; : PE ee a z | l | ETAT DU CIEL À 10 H. DU MATIN | = = ETAT DU CIEL A 4. DU SOIR. OBSERVATIONS E onlinaire. a zéro [ensene et. | extérieur, | à minima. | supérieur, inférieur. 5 ordinaire. à zéro en contact. | extérieur, | a maxinia au Puy. à Yssingeaux. supérieur, | inéreur. Mer ES) | | RS EEE nn nmen——_— — —#{ À ——————..…—— | cenigr. | centigr | centigr. centigr. coutigr. millim. imillim, | 70964 | 2000 | 1400 couvert, emn. No x0 I Ti0o27 | 18 1905 » » 88°0 couvert, CM: n ce 2 7 710,69 | 16,0 beau, CM. N N 2 710,18 22,0 2{;0 » » très-beau, em. hi. N N 5 7 | 740,88 | 18,0 très-beau. » N 5 710,61 | 21,0 24,5 » » id. » N ! Û 7 710,09 21,0 10,0 id. > » N f 709 22,0 27,5 Ù D id. sir. hz N No > «| xos | 12,0 | très-beau, qqs strem. N x 5 25,0 28,0 » D il. sir, NE x 6| 7 | id. » x 6 22.0 26.0 » » id. » s T 1 a beau, ster. N N 7. 22,0 26,0 » » id. str. No NO à Es très-beau, str, hz. SE s $ 22,0 29,5 » » S9,5 id. er, s so | 9 7 | éclaircies, cm. s s m 24, 51,0 ») » 90,0 couvert, CM. S S 10 7 | CAO É RL % NO 10 708% | | 25,2 6,266 18,900 92 2 NL em. N xo Orage el tonnerres à 4 h. 4/2 de l'après-midi. 11 7 0$ | HAL. N N 11 709.0 0 6,000 4,500 éclaircies EM. N NE Pluie pendant la nuit, | 12 7 | id. em. N N 12: 707,6 » » couvert, emn. N No 15 7 | | id. CM. N No 15 706,4 702,94 » » variable, ermu éparrs. No No 14 |) 708; | | grandes éclaircies, CM. à N 14 | 78,7 705,05 » » sez beau, crsl. N XE 15 A0S | beau. N NE 15 710,8 707,19 » | » beau, qqs sem. so no 16 709,6 | qqs er s s 16 707.6 705,58 » » S6,5 id, stem. S S 6 À 17 709,8 | Det Ti A cN fl SE 17 708.0 704,02 » 5,700 94,0 présque couvert. s ss0 Goutte de pluie pendant la nuit. 18 | 709,7 | it ee #2 SE SE IS 709,0 » » 94,6 couvert, pluie. x0 0 Pluie à 4 h, 1/2 du soir. 19 | 7087 | | sert MER e No 19 | 7092 7,828 » ss,0 il. CM. ù no 20 709,0 | At EMstr Vo \ 20 | 709,8 » » très-beau, qqs creM. N N | L £ DA] T08;S | id 2 ; 0 E 21 707,0 » » beau, erem, no so | Pluie pendant la nuit et le ma | 22 ||. TO9 2) UT rem N E 22 709,2 1,000 » lég, couvert, CM, str. N x0 | 25 709,5 (| 706.01 fn ; € SE L \ 0 25 TÜ9,8 6,609 5,100 beau, CM, ob, er. N No | | 94 | 7090 | 705,40 aus les eu xo x0 24 || TO75 2 MINS CONVRTE Se oil 55 | 709,4 705,99 Re AE . à 25 7084 2,515 4,900 g. FETES, em, crts. à | u | 26 | 706,6 RTE Le ET \ 0 26 703:6 ù n id. ï | F | grandes FAR is, FR à KO S EE 705,65 20,1 » » 90,5 peites éclaircies, id. NO NE es . Fr a | e | gr, éclaircies, CMcr. o 0 56055 T0 01 N2IE2 » L 925 il. crem. 0 | SA ro VE 29 HET no o 29 | 706,8 705,41 | 20,4 7 8,500 | 92,2 id. si à no s S = 702.09 | 198 AS x no 50 | 705,6 702,68 | 16,7 2,906 9,450 a 5 SAUT è St A] | - = 20 | € & 4 ee LAIT 7 5. 1 11H 11 Gr S | À | 104,29 | 1950 | mi-couvert. N NO 51 706,0 | 705,10 16,5 À 4 K _| | 1h I} 2 | | | || € EE 50575 | | PEER = ET basse du mois, les 26 € 75 NN. M 706,01 | | 11,21 | SI, | ro trel ere te ME | Is 705,50 | 25,86 || 52,922 57,050 90,52 Teinpérature la plus | élevée, id. ‘le D ARS EN | | Hygromèlre | ACGÛT. OBSERVATIONS. Pluie de 4 h. du soir à 8. Pluie à 4 h. 1/2 du soir, Î } 3 Î j 5 Petite pluie le matin. = WE Pluie à 2 h. 1/2. DE CD le D Dm I] ss er *; Pluie à 4 h. du matin. basse AU MOIS 18025... -....-- 6°8 ? la plus À élevée, id. le 26............ 31,8 OBSERVATIONS ME EONROLOGIQUES, AOÛT, BAROMÈTRE TUERMOMÈTRE | | VENTS BAROMÈTRE | THERNOMÈTRE UNOMÈTIE SR La Es ms Se St = ——— —————_— — | —_—_—__———— : __. : —— | | | | GTAT DU CIEL A 10 H, DU MATIN. | ÉTAT DU CIEL À 4 H, DU SOIR. OSEO vrdinaire à zèro en contact. | extérieur. | à minima | supérieur. | inférieur. E ordinaire. avé. Joncontet, extérieur. Pamaxinas | au puy à Yssgeaux, supérieur || inéricur, EE Ro EEE — | ceutig GE | À ceutigr. | centigr. | cotigr ill. millim. an 1904 | | | couvert, cr. x E 1 70905 707048 | 1800 | 1706 » » 9501 couvert, N 0 - | 2 15,2 | CMVNCT. DEAN AUS T0S,65 | 16,0 | 16,2 » | » 90,5 CM. No No 5 17,6 couvert, CM. NO | 5 | 708,2 705,02 MS ,T MI GS | » | » 95,2 couvert, CM. ° 0 N | ; 18,9 id. NO 4 | TOû,l 702,80: | 19,1 | 20,2 5,078 95,0 CM. 0 o ; 20,5 5 | em. o | 5 | 705,0 701,76 | | 26,5 ; 92,0 cr. 0 0 6 20,0 14,0 | | l6g. couvert. em. N | 6 707,2 5 | | 2254 | » 91,1 couvert. 0 No Pluie de 4 h, du soir à 8. 7 19,1 | | | CM. x 7 | 7095 10,000 90,2 CM. No Ko S | CM. | ro $ » » SS,3 très-beau. xo No 9 mi-couverl, CM. 0 0 9 | | » 1,800 S9,2 couvert, 0 0 Pluie à 4 h. 1/2 du soir. 705,49 à | couvert, CM. N | N 10 TUS,17 | 5,906 » 90,8 qqs éclaircies, CM. 0 0 : 706,09 | 9,1 beau, CM. 5 | © ji 705,82 | » 0,500 59,2 assez beau, erCM. 0 so 705,15 | | 15,0 couvert, CM. N b © 12 704,01 » 5,100 91,0 beau, CM. 0 0 705,12 S,5 | mi-couvert. | » N 15 706,5 705,05 » 0,500 S9,8 CM. 0 so 704,65 | CM. | o ln 50 14 706,7 705,54 » 0,700 92,5 mi-couvert. em. o 0 Petite pluie le malin. CM beau. 0 s 15 705,0 705,25 » » S9,0 très-beau, qqs em hz. » s | beau, OM. S | s 16 709 706,19 » 15,700 95,0 couvert, CM. s o Pluie à 2 h. 1/2, | | | | ide 9 alle 17 702,22 6,078 | NS 87.8 CM. 0 0 | ail 0 0 18 | 706,4 705,16 » 1,500 id. 0 s très-beau, CM. 0 SE 19 | 707,5 704,05 » » . beau, em. 0 SE | id. cr. 0 No 20 710,1 » » mi-couvert, CM. 00 SE | | très-beau. x no 21 709,5 » 0,100 beau, CM. N xo | 705,29 | 8,2 | beau. CMer; 0 No 22 | 709,8 » » id. 0 0 707,79 S,7T | très-beau. » 0 25 710,9 » » très-beau, » No I T1 id. crem. 0 SE 24 710,2 » | » id. qqs CM. » Q | 6,8 id. s SE 25 709,9 » | ». » NE É | | 12,9 très:boau. s SE 26 710,1 » » s SE 709,0 | 705,06 | 15,1 | RGO. GEb 0 se 27 | T08,9 705,10 » » » s 708,2 | 704,18 | 14,0 | MS MCE n ir, No N 28 | 707,6 705,75 » 5,100 J N NE 707 6 705,60 | | 45,0 | nent 00 29 | 707,1 705,58 26,0 » » CM à hz. NO 0 707,1 705149 15,8 | très-beau, CN. so $0 50 705,5 701,40 50,0 » 5,700 ; so s = : 704,2 700,50 16,0 | assez beau, presque couvert. TT 50 51 705,4 699, 26,5 6,281 | » assez beau, CM à bz. s so Pluie à 1 h. du matin. | Ur = | —— - Pas MM. | 704,99 | | 0,92 | 90,26 | TE Eu DR 25,82 | 29,545 | 61,400 89,71 Température la plus dE ot nos. He FES | | | | Hygromètre 89,98 | | | nr a ——— SEPTEMBRE. OBSERVATIONS. . . , . 7] Pluie pendant la nuit avec éclair el tonnerre , ondée] de pluie dans la journée. Pluie pendant la journée et dans la nuit. | | | Pluieentre 4 h. et 5 h, du soir et après 5 h. | Bruine après 2 h. du soir. » . . , } Pluie pendant presque toute la journée. } | " | | | Pluie pendant la nuit. | Bruine à midi. | Pluie pendant la nuit, brouillard le matin. | | Brouillard. | }_ Tonnerre à 5 h. 1/2 et pluie dans la soirée. | Pluie dans la nuit et pendant la journée. Brouillard. | Id. | Pluie pendant la nuit et jusqu’à 14 h. du matin. | | Pluie pendant la matinée, ondée dans la soirée. || Pluie après 5 li. du soir. l . \ . | ! Pluie après 4 h. du matin. Bruine vers 7 h. du soir. | l Pluie pendant la nuit. basse du mois, le 2 É SE {basse au , 1 ; 18 Ja plus rélevée, id. ONU SSP anont 21, OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. SEPTEMBRE. DAROMÈTRE THERMOMÈTRE x VENTS 5 BAROMÈTRE THERMOMÈTRE UDOMÈTRE 5 VENTS | Es a “ —— ———_——— | ————————_— 3 É ; = _ Se — — £ a —— | Ë ÉTAT DU CIEL A 10 H, DU MATIN 2 de Hour (y: WA dec | El ÉTAT DU CIEL A 4 H. DU SOIR. OBSERVATIONS, | Ë e & | ordinaire. | azéro. en contact. | extérieur. | à minima. 5 supérieur. | inférieur. a ordiiaire. a zéro en contact. | extérieur. | amaxima. | au Puy, à Yssingeaux. ES supérieur. || inférieur. | | # | | | | | ——— — — | — | ———— —— | —__————_—_—_—— —— | — | — | | RRQ | centigc- IN cenugr cenligr. centigr. | centier. | ccntgr millim. muillim. | | | AR || : Se | 12] | 702005 | couvert. so SE j 703010 1700 11,205 50,100 OUVERT so s | Pluie pendant la nuit avec éclair el tonnerre, ondée l 07 à D 07e : SA PT TEE Fe 2 707 DO | 89,5 presque couvert, CM. s SE 2 | 708,10 20,50 18,50 | 12,078 » NP AE CUT so so) | de pluie dans la journée. 5 70 : | : . g s écla ; CM: x à D 709,40 91,0 mi-couvert, qqs CM. SE Q 5 | 707,80 19,10 14,60 2 16,500 très-couvert, CM : s0 4 708,70 90,0 TE s | | 15 5,000 É 2e E NE | Pluie pendant la journée et dans la nuit. | 1 | 708,7 90, couvert s SE 4 18,0 5,0 2) 2) très-couvert P | pe J EE - 1 er s : ; | RU 90,0 presque couvert, CM. à NE 5 4,000) |} 2,700 grandes éclaircies, CN. ÿ dE : : ce | 6 | 712,80 | 89,5 couvert N NE (3 | » » ot No NE Pluie entre 4 h. et 5 h, du soir et après 5 h, 7 | 740,00 | | y,0 | S9,0 te N NE 7 | 6,281 | 1,400 RC N | NE Bruine après 2 h. du soir. Ë | 410,0 | 89,5 id N NE 8 706,80 | 5,109 » id. \ NE | Pluie pendant presque toute la journée. 9 8 704,05 7.0 id. XE NE 9 | ro6,50 | » 2,800 id. ee RE 10 | 704,90 702,01 7,0 très-beau, qqs CM NE s 705,70 » » Couvert CM Ar s | SE Pluie pendant la nuit. 11 705,10 7 } 14,0 presque couvert 0 0 707,10 » 4,500 RL é No 0 Bruine à midi. : , 12 710,00 707,29 9,5 couvert dl No NE 710,80 » 5,750 très-beau N NE Pluie pendant la nuit, brouillard le matin. 15 141,70 708,60 5,2 très-beau, CM à hz. No NE 710,90 » » très-beau, qqs CM. N N Brouillard. ÿ : \ 14 710,20 707,10 10,5 très-beau, qqs CM No so 706,20 705,11 » » RAD No , NO Tonnerre à 3 h. 1/2 et pluie dans la soirée. | 15 701,80 697,86 12,5 MATE s s 705,90 701,01 11,000 18,750 et ü N \o Pluie dans la nuitet pendant la journée. | 16 708,40 706,65 8.0 Ares De NON IN, N x0 707,50 704,60 » 6,000 Sion. N N RUE | 17 707,00 6,0 SO Ra N 703 70 704.54 » 5 so S d. : 3 700.5 . id. < à LCbue ane 14,815 5 assez beau. so Pluie pendant la nuit et jusqu'à F4 h. du matin. 18 100,50 14,0 couvert No ° 101,70 2 5,100 presque couvert, stCM. mL HA RESRUE né 19 700,90 12,0 qqs & dec cm so 50 700,50 » » PT 0 Pluie pendant la matinée, ondée dans la soirée. À , ; ca , CM. 5 e "ne Q AfTR ; É 20 704,80 10,0 presque couvert. NO No 706,80 e 0,900 couvert. à EE des RS = 21 707,40 9,0 très-beau NE \ » 0,800 Ssse Dec OM 1 | Bruine vers 7 li, du soir. ES % L a Et “ee » 22 go très-beau, ciel pur. E E N beau, ciel très-pur, ë | 25 5 se C s s L » e7 > ' 5 | pe assez beau CM = ee | » » assez Heu S | Pluie après 5 li, du suir. 34 9,5 couvert. S Q l 5.300 mi-couvert. e E | 9 A id SE SE ul al 4,600 couvert. Fe : | Se J DE 3 24,14 » x © : | 26 8,0 assez beau, CM. E E en $ = beau, CM. s so | 27 ne presque couvert. en SE res | 5,172 5 mÉCOUVON, ce 0 s0, | Pluie après { h, du matin. 28 14,2 mi-couvert, C so s 702,50 | | = Sa peu couvert, CM. a ë | 29 | ; LÉ 0 s 707,50 LE couvert, CM. : te 2992 peu couvert. 71080 6,422 8.000 ui E s | Pluie pendant la nuit, 50 | 711,80 presque couvert. E N « 710,8 ) pluie. | | E = | mr E L basse du mois, le : 53 | | Asse S, 10 Ji MM. Baromètre à zéro........ | 2 IP 97 21300 9.97 Température la plus! Gjovée id. - le 1,5 lus y 9,52 | 90,75 Thermomètre extérieur. M. M. S.| 705,89 | 18,57 102,719 124°500 89,97 élevée, id * Hygromètre. …. — = OCTOBRE,. OBSERVATIONS. Pluie pendant la nuit etdepuis midi jusqu’à 5 h. 1/2. id. Petite pluie à 4 h. du soir. Pluie pendant la nuit: neige. Petite pluie avant et après midi. Rosée. Brouillard le matin. Rosée, brouillard le matin. Id. Brouillard le matin, pluie avant midi. Pluie pendant la nuit, brouillard le matin. Brouillard le matin. Brouillard le mat., pluie pend. la nuit et jusqu'à 8 h. m.| Brouillard très-épais le matin. Rosée id. 3 > 2. — . — (basse du mois, le 13. -.......... —]05 la plus (élevée, id. OT SR ee 21,2 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. OCTOBRE. | BAROMETRI Jours du 1 69008 1506 2 j 691,69 14,5 5 691,51 24,0 \ 70 20,5 5 71 (n 71 1 71: 15,0 $ 71 16,5 9 70S 15,4 712 15,8 70 12,0 | 11,0 11.6 42,5 11,8 15,4 710,54 14,8 741,47 15,0 740,45 | 14,8 15, THERMOMÈTRE ordinaire a zêro cn contact cojorie 1 | 1 =ust a 19 ot == cos DEC n M, M. Baromèlre à zéro Thermomètre extérieur 10, Hygromètre.--.......... 90,48 ÉTAT NU CIEL À 10 H. DU MATIN. brouillards. couvert, CM. brouillards. CM. très-beau couvert. irès-beau id. couvert. grandes éclaireies, CM. légèrement couvert couvert. très-beau, CM à hz couvert, CM. id. très-bean, cr. très-beau, couvert, CM, qgs éclaircies. convert, CM. beau, CMer. très-beau, em très-beau très-beau, CM. {rès-beau, CM à hz très-beau couvert, CM mi-couvert, CM. couvert, qqs aircies, CM couvert, CM. très-beau. brouillards épais. Jours du mois. BAROMETRE ordinaire. 69209 696,5 708,2 714,8 715,9 714,0 744,5 712,8 708,5 TA5,7 699,8 705,6 702,4 706,8 708,7 TOS,T 702,6 710,9 714,5 745,6 ——— — ——— à zéro. 690047 695,88 710,75 706,65 712,02 698,16 702,20 700,92 705,58 707,18 706,87 710,65 708,98 TO0S,68 710,91 719,55 709,51 710,77 709,95 710,12 709,55 709,52 708,29 708,85 707,85 705,51 707,66 THERMOMETRE ———_ ————— en contact. | extérieur. | amaxina. ceutigr. || centigr. | contigr 1505 | 1500, | 1900 14,5 | 10,4. | 19,5 A —_—— ë ETAT DU CIEL A 4 H, DU SOIR. couvert, CM à hz. peu couvert, CM. id. CM. très-beau. couvert, CM. (CD CM. couvert, CM. assez beau, CMCR. légèrement couvert. légerement couvert, CM. beau, CMer. couvert, CM. qqs éclaircies, CM. très-beau. très-beau, qqs CM à hz. très-beau, erst. couvert, CM. id. au, beau, CM. très-beau id. couvert, qqs éclaircies, CM. beau, CM. couvert, éclaircies, CM couverl, CM. très-beau, qqs CM à hz. beau, CM. EE —— —— OBSERVATIONS Pluie pendant la nuit etdepuis midi jusqu'à id. Petite pluie à 4 h, du soir. Pluie pendant la nuit: neige. Petite pluie avant et après midi. Rosce. Brouillard le malin. Rosée, brouillard le matin. Id, Brouillard le matin, pluie avant midi. Pluie pendant la nuit, brouillard le matin. Brouillard le matin. Brouillard le mat., pluie pend. la nuit et jusqu Brouillard très-épais le matin. Rosée id. 8 h.m. Température la plus {basse du mais, le L (élevée, id. le NOVEMBRE. M OBSERVATIONS. Gouttes de pluie le mat., forte pluie avant et après midi. 6 Grouillard le matin, pluie l'après-midi. Pluie pendant la nuit et le malin; brouillard. 2{ômes de neige après 4 heures. R è | 0 roullard ; à outtes de pluie dans la soirée. Hu | rouillard Le matin. Vouttes de pluie à 4 h. 1/2. “elite pluie à S h. du matin. etite pluie à S heures du matin. etite pluie à à heures du matin. “leige la nuit jusqu'à 8 h. 5/4; neige de 4 h, du soir à 9. Mlelée. «< Di CRUE : = rouillard très-épais le matin. F luie toute la soirée. L L rouillard le matin. P [d. f Id. 9 91 2 luie pendant la nuit. L, tbasse“du-mois, le 10:-..-.- es 10 PRE lélevée, id. JEAN PR. 1725 | OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. NOVEMBRE, D ———_—_—_———— | BAROMETRE M E THERMOMÈTRE VENTS À BAROMËTRE THERMOMÈTRE UDOMETRE US — 2 — |. — _—_—— ETAT DU CIEL À 10 H. DU MATIN ÉTAT DU CIEL À #4 H. DU SOIR. OBSERVATIONS, el contact. | extérieur j Ÿ d | dl à minima. supérieur. inférieur. ordinaire. cn contuet. || extérieur, | 4 Maxima au Puy. à Yssingeaux. supérieur, inférieur, —— ——_—————_—_—_— | © —— — — centigr. || cenüg cenlig Ë nier entigr. centigr. (|'centigr. || conter. millim. millim, 705092 704,79 705,01 704 7ü 704, 7ûG 707 706,96 705,05 699,07 696,88 696,96 698,95 1000 902 | 9207 couvert, CM. 1 70706 705004 1102 15,000 9204 couvert. s | Gouttes de pluie le mat,, forte pluie ayant et après midi. 7,0 | 92,8 grandes éclaircies, CM. 705,95 5 41,6 ë 92,9 id. | : id. 705, 12,5 ,3 | 90,5 beau, CM à hz. très-beau. 705,09 5 | 40,4 D 00,0 beau. s beau, CM. 705,01 ï 10,5 { 96,0 couvert, CM. Brouillard le matin, pluie l'après-midi. légèrement couvert. 705,00 4,0 5 5,955 | 3 91,4 id. à S Pluie pendant la nuit et le malin; brouillard. grandes éclaircies, CM. 707,12 0,5 x | 90,2 id. h Alômes de neige après 4 heures. beau, CM. 706,78 0 |—1,0 5 couvert, CM. couvert, CM. 705,06 |—10,S : beau, erem à hz. très-beau 701,87 | 7,0 très-beau, CM à hz, s s Brouillard. id, CM. 700,75 ; 8,0 7,5 CM. couvert, CM. 705,65 5 couvert, CM. s Û Gouttes de pluie dans la soirée, très-grandes éclaireies, ; quelques éclaircies, CM. S mi-couvert, CMer. beau, CM S Brouillard le matin. mi-couvert, crst. s ÿ 701,0 698,20 couvert, S ë Gouttes de pluie à 4 b. 1/2. couver ÿ 702,2 700,05 couvert, crsl. ; Pelite pluie à S h, du matin. grandes éclaircies, CMerst. 698.8 696,61 > 2,400 4,7 id. Petite pluie à S heures du matin. mi-couvert, CM. s 699,0 696,88 5 | 2 » ; couvert. à Petite pluie à à heures du matin. beau, CM. 707.05 Û î 1,800 fx. couvel, éclaircies à hz. à Neige la nuit jusqu'à 8 h. 5/4: neige de 4 hi, du soir a 9. très-beau, emer à hz. 704,55 À 2,6 b » rement couvert, cr. ; Gelée, brouillard. 705,72 {ON || 2,200 très-beau, cr. ; couvert, CM. 700,05 ÿ ; couvert. Brouillard très-épais le matin très-beau, emer. 707.0 705,18 couvert, CM, éclaircies à hz. S | Pluie toute la soirée, couvert, CMnb. 697,9 696,10 id. ; beau, CMer, ? 694,7 ; couvert, CM. « D ; 3rouillard le matin, très-beau, crem à h 694,8 692,87 À lég. couvert, grandes éclaircies, CMer..| à $ Id. très-beau, erst à hz, 6924 690,16 { 9,2 Fr 0,065 légèrement couvert, CM à hz. | js | Id, beau, cr. 701.9 699,71 2,906 très-beau, cr, à assez beau, lég. couv. gr. 701,9 ) De couvert, CMnb. couvert, CMnb. 702,2 5,815 ù mi-couvert CM. CCE 701,71 TUG,S0 696,05 699,49 704,90 Pluie pendant la nuit. * lu mois, le 10 Re a) A US, ON Baromètreñ zéro... Tor | | Re Ie De PEN | basse 40 MMM. TON 5 AD | | 2,55 | 91,66 TherMometre lex LÉrIEUT 05,86 M. M. $.| Tol,15 | 9,17 55,40 | 55,40 88,22 ure Ja plus ie mide le 4 17,5 | | Hygromètre à 89,94 | | | | _ É : DÉCEMBRE, OBSERVATIONS: re e blanche. ,#luie pendant la nuit et après midi. 1 rluie fine à 8 h. du matin. Pluie après midi. Neige le matin. ,Srains de neige pendant la journée. | Quelques grains de neige pendant la nuit. 9 1,8 ñë Quelques grains de givre: neige le soir. 9 À | Dégel : quelques grains de neige à 4 h. 1/2 du soir. > Degel; quelq 5 ë | ;ONeige à 40 heures. AL |'Neige pendant la nuit, le matin et tout le jour. | Souelques grains de neige le matin. l, Neige la nuit, le matin. »SDeuel, vend S très-fort la nuit. ju ri pendant la nuit el «près midi. AL plu: ; ' >"Pluie pendant la journée. Pluie le soir. EE — Œ . [basse du mois, TOP Eee — 80 | à plus Lélevée, id. Jen SEL 13,0 rouillard très-épais toute la journée, gelée blanche. .Jluie pendant la nuit. ,8luie de 6 à 8 h. du soir. ,Aluie pendant la nuit, le matin et après midi. | _ - OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, DÉCEMBRE. BAROMÈTRE THERMOMÈTRE | VENTS a BAROMÈTRE THERMOMÈTRE UDOMÈTRE s VENTS = S £ : El —— | Re ———— | : ET A OST ARE ——_—— —— 3 Rite cl Nr rar ae ë ÉTAT DU CIEL À 4 H, DU SOIR OBSERVATIONS 3 ordinaire a zéro en contact, | extérieur. | à minima, 5 supérieur. | inférieur. 2 ordinaire. azëro. l'encontact, |extériour. [a maxina au Puy à Yssingeaux È supérieur (|L inférieur, È | E — — —_— —— ——— — —— | —_————————__—_———— | ————— ————— — | —————_—_ | —— | — | ——————————…—…”…"…"…"…"…"…"… …"…"…"…" …"…."— —. — …" …"…."…........ — | | centigr centigr | cenugr. coiligr. centigr. | centigr. | willim. millim. | | | : | 1 | 70606 704066 | 900 00 |—20 | 924 Dronqunt ” s 4 | 70502 704035 | Sea | 100 500 » | » brouillard. » s Brouillard très-épais toute la journée, elée blanche 2 701.8 699,75 | 10,0 1,9 0,1 92,0 RAS DEN ER | » so 2 701,9 699,71 | 7,6 9,9 » » | couvert, CM s S Pluie pendant la nuit. k : 5 700,11 | 41,0 11,0 0,0 89,4 | couvert, grandes éclaircies, CMerst. s 5 695,62 | 41,0 | 10,5 15,0 » » couvert, grande SSE s Pluie de 6 à 8 h. du soir, [ | 14,0 101 | 7,6 | pe Les ee s 4 692,50 | 10,4 7,9 12,7 1 ue » grandes éclaircies, erst. s s Pluie pendant la nuit, le matin et après midi. < | « 11,4 7,9 4,5 | peau, crONL a nz: o 5 696,54 11,6 s,0 10, 11,109 » couvert, cret. 0 s0 6 6 10,5 fi 1,0) | Beau, légèrement couvert, crst 0 6 692,52 | 11,0 1,5 | 6,5 » » couvert, s & dE © Gelée blanche. : 102 5 10,1 | couvert sin: $ : SE 7. 10,0 7,0 10,8 | | couvert, eclair bz, erst. o so lluie pendant la nuit el après midi. $ | | SA couvert, gr, éclair ës à bz stnem. SE E $ 9,7 7,0 8,4 lég. couvert, crst. s s 9 5,2 couvert, ereM, 0 0 9 9,2 1,7 7,8 mi-couyert, id. 0 0 1,8 | id. 0 0 10 10,0 4,8 | S;l » beau, m., crst. 0 0 Pluie fine à $ h. du matin 4,2 | couvert, crst. No 0 11 | 8,5 1,1 1,5 | 8,200 | couvert, emst. No 0 Pluie après midi. 22 couvert. No No 42 697,94 7,6 2,0 1,5 1,800 | couvert, CMst. No No Neige le matin. | 42 couvert, erst NO No 15 701,46 Dr2 1,8 0,9 » » couvert. No No° Grains de neige pendant la journée. 0,0 | couverL. E SE 14 70445 | 4,5 F4 | OT » 2.500 id. No N Quelques grains de neige pendant la nuit. brouillard N NE 15 707,42 1,5 5,0 1,5 » | » | quelques nuages. \0 E | | couvert, erst. | N NE 16 705,49 1,0 1,0 » » | couvert. No NE CM, brouillard. 10 \ 17 696,76 9,0. 1,0 » ù id, N xo Quelques grains de givre; neige le soir. 698,0 | 696,76 95,0 couvert. N no 18 696.79 |—5,0 » » très-beau, st à hz. » No 695$ 692 2 50 légèrement couvert. 0 so 19 697,8 696,5 4,8 » couvert, éclaircies, CMnb. 0 0 Dégel:; quelques grains de neige à 4 h. 4/2 du soir. 699.6 | couvert, neige. ta No 20 698,0 696,76 | [5 » 5,700 beau, CM à hz. 0 0 Neige à 40 heures. 700.8 | | couvert, erCM. 0 No 700,6 10,4 » 1,500 er CM à hr. No SE 696 | couvert, neige. 5 No 396 | » » couvert, neige, N No Noige pendant la nuit, le matin et lou le jour. 699.7 | 91 ( éclaircies, CM. N No | | » | » légèrement couvert. N N Quelques grains de neige le matin. 695.0 8 couverL. | x x0 | | | » 2,400 | couvert. N x0 Neige l'a nuit, le matin. 6e | [m5 7 celaireies, erCM. 50 s 684,78 » 1,800 \è couvert, lég. ereM. 0 s Degel, vend S très-fort la nuit. 6.8 beau, crCM. G so 699,1 697,54 16,141 5,700 mi-couvert, erst. so s 698.6 6,0 légèrement couvert. o s 69,2 696,79 | | ï 1,000 couvert, id. so so Pluie pendant la nuit el après midi. 699.1 | beau, brouillard. | » s 7005 698,79 | | » 1,200 | couvert, crsl. Aù s 740,6 | LL 5 beau, CM N. N 711,0 709,49 7 | ») | érement couvert à hz, nb, a NE | 7ÛSS couvert, erst. no s | 707,12 | 10,000 » couvert, sler. No s0 Pluie pendant la journée. 706 1 ra | beau, erst. \o x0 704,15 #,000 » | couvert. NO po) Pluie le soir. | | us |] RE | | | re ; | JR NT = EE RP —| . | | | HS j _—$ 696.98 | | 0,52 | 92,74 L D aromètre à zéro | Mis PU | Apt 2,100 92:65 | Température la plus ete É ts es 0 | Hygromètre _ | EEE |] —_]——"—"—"———]————]—]—————————————————————————————————— MERCURIALES DE LA HMAUTE-LOIRE PAR M. CH. PELLISSIER DE LOM Employé à la Préfecture. 1860 TOME XXII, exlv] MERCURIALES. JANVIER ET FÉVRIER. MARCHES PRODUITS. ic PRE à | DE D'YSSIN- DU PUY. BRIOUPE | GEAUX. D ERNEST ER TMSRE TON RENE SEE MON NT NT (e froment, 48 41! 17 65| 16 » LATE méteil 16 05 » » EPect ] seigle, 41 45) 41 95] 49 57 ‘l} orge, 41 95| 40 06! 44 25 avoine , 50 | MAT 20 MIRE | pour le mois }[l RUE ; û » » P s he] haricots, 52 46 » » e JANVIER. [pommes de terre [l'heet.]| 5 51! 4 D0 » | bœuf, » » 90 1 20 2 vache, 4 » » 90 » 90 dons en. 1 05 » 90| 4 ‘1 ] mouton, In 18| n 951 1» porc, MU 5 0); | 20 froment , 48 71| 18 25 » Screnles méteil , 16 0ù » » [l'heet.] seigle , 14 85| 11 T5| 12 50 ‘| orge, 41 43| 10 18| 11 25 avoine , 1005 \N710|MSMG lé pois, 25 67 » » feet.) lentilles , 30 65| » FEVRIER. ‘1, haricots, 57 60 » » pommes de terre [l’hect.] 3 81| 4 50 » | bœuf, | v » 90 » | de vache , 4 02| » 90! » 90 | [le kil.] vean , 4 47|1 » 90! À» ‘1 ) mouton, 1 50! 4 » 1 40 porc, 4 40| » 90| 4 20 MERCURIALES. exlvi] MARS ET AVRIL. PRODUITS. froment , Fo méteil , céréales ps [Phect.] | 6 € orge, avoine , PRIX MOYEN À, - . légumes | POIs À pour le mois [l'hect.] lentilles , il d 3 haricots , e MARS. pommes de terre [Phect.] bœuf , : vache viandes pos (HT; eur mouton , \ porc, froment , céréales me ù [Phect.] | "6 € | orge, avoine, légumes) POS: | [l'hect.] lentilles, AVRIL, ‘{ haricots, viandes [le kil. | | pommes de terre [lhect ] bœuf, vache, veau , mouton , porc, MARCHES 0 ms, à DE D'YSSIN- DU PUY. js BRIOUDE!| GEAUX. OA I EN TER 18 94! 18 GS| 16 92; 16 19 » » À 12 15! 12 06| 12 62À 11 91! 140 45| 12 24} 8 50! 7 15 8 A5$ | f DST » » 40 87 » » 51109 » » 4 28] 4 50 » L » 8 » | 1 05 » 8) » 90 1 20 » 80 1» 14 30 4 05 1» | 1 40! » 90! 4 20} 21 08! 20 » 17 T5 17 67 » » 45 85! 15 56| 15 40! 43 16! 10 31| 13 » 8 45| 7 sol 8 51 25 46! » » 10 87 » | à 58 41 » | » 4 50 4 50| 2 50 | » » 90 » | À Où » 90 » 90 1 20 » 80 14» 1 50| 1 » exlvii] MERCURIALES. MAI ET JUIN. | MARCHÉS PRODUITS. TT DE |D'YSsIN- © |BRIogDE | GEAUX. oo se | CS | ae 4 | JC: tr ne: | c. | froment, 20 90! 20 06 » | | céréales méteil ; 18 12 » » | | Hheet | Scile 13 25| 43 56| 13 50 | | 1] orge, | 45 94| 40 95 » avoine , | 8 40| 8 43| 8 50 PRIX MOYEN lb pois , | 5 52] : ; pour le mois (L'hect.] lentilles , 41 » » CE haricots, 58 60 » » | de Î MAI. pommes de terre [l'hect.]| 4 62] 4% 25| 2 95 bœuf, » » 95 » | a 7 | vache, 4 07] » 95] » 90! [le kil] | 40 1 10] » 90! 14 » | j 1) mouton, 4 40! 4 29| 1» pore , 1 40] 4 » | 4 95 —— UDpDppCp—— = —— à — froment , 20 57| 19 76! 417 50 de méteil, | 47 59 » » HI seigle , | 49 82) 49 24] 15 62 ‘Jorge, | 43 50] 11 40! 44 50 ayoine , 8 91| 8 46/8 95 lé pois , 23 26 n » : flhect || lentilles, 57 55 » » | JUIN. =} haricots, 57 25 » = pommes de terre [lhect.]| 5 » À » 2 80 bœuf, viandes nee [le kil.]) "°°" mouton MERCURIALES exlix JUILLET ET AOUT. MARCHES PRODUITS DE | D’yssi\- © |BRIOUDE | GEAUX. MC TES THIN (0 froment , 19 77| 19 74| 48 51 | 1 méteil , 17 05 » | » ne seigle , 12 52| 42 87| 45 62 7 l'orge, | 42 87| 10 56! » PRIX MOYEN svoinés, ME BRUIT X MOYE) | | | pour le mois lé (p ois, SE] = = d nt allie 54 68 » » E [r D 1] haricots, 59 96! » » JUILLET. pommes de terre[lhect.]! 5 99, 4 » | 3 50 bœuf, » » 90! » viandes | vache, 1 05! » 85, » 95 [le kil.] { veau, 4 07| » 80| 1 10 mouton , 4 551"4,95| "40 porc , 41 40| 1» 4 50 froment , 20 41! 19 95! 17 50 pommes de terre{l’hect.] bœuf, viandes | vache, [le kil.] | veau, pales méteil , 16 94 » | » Mheet 11 sigle, 15 52| 42 45| 45 66 DEAN EE 12 81! 40 51) 45 50 avoine, 8 56| 8 51| 8 85 )OIS , AOÛT. legumes less hect.] haricots, mouton, pore , el MERCURIALES SEPTEMBRE ET OCTOBRE. MARCHÉS PRODUITS. HART | pu eur. DE | D'YSSIN- BRIOUDE | GEAUX. _—_—————— | | LBIT NC: |A fr. c. froment, | 19 54] 19 08! 19 50 CCE 14 méteil , 47 06 » » | het | seigle, 19 87| 12 64| 15 25 7 | orge, 41 58| 10 25| 42 » BALL D avoine, 8 50! 8 06| 8 62 i il 22 98 pour le mois lépumes pois, se 95 » A [L'hect.] lentilles, 23 66 » » de haricots, 54 45 » » SEPTEMBRE. [pommes de terre [l'hect.]| 5 81! 5 73) 2 01 , bœuf, » » 90 » viandes Moue 1N071 0800) [le kil] | veau, 1 07] 1 02] 4 10; | mouton, 4 55| 4 » 4 1 | pore, 1 40| 4» 1125 froment, | 21 15] 20 55) 19 25! l'éaréales méteil , 48 15! » ul » © à | (l'hect.] seigle, | 1% 69 15 51 13 31k orge, 13 93) 40 37! 12 ».|f aycine, 9 31] 8 24| S 58! légumes pois, oh , 4 OCTOBRE. [bec 14 lentilles, | 2442)» » à haricots, 54 02 » » pommesdeterre[Pheet.]| 3 » 5 50| 1 86} bœuf, » » 95 » Viandes Vache, 02] » 95] 4 » ['e kil.] { veau, 1107/0005) 420 mouton, Ce) à 4 i0 GE 1 40] 1» 1 55 MERCURIALES. el] NOVEMBRE ET DÉCEMBRE. 2 MARCHES PRODUITS. Ta \ DE D'YSSIN- BRIOUDE| GEAUX. Reg | MR | nmmmem a FC fr Cr et froment , 20 75| 20 68| 18 87 ccrales méteil, ITR » » l'hect.] seigle, I 15 85 15 74 15 40 Let. | orge, 15 18) 41 62] 14 7à avoine , 8 45], 845] 8 17 PRIX MOYEN légumes { POÏS ; 25 » » pour KL mois |lhect. lentilles, 24 86 » » d haricots, 52 82 » » ë | NOVEMBRE. [pommes de terre [l’hect.]| 2 15! 5 50! 2 47 bœuf, » 4 » » D vache, 4 05] 4» 4» | ù kil veau , | 4 05 110 HE EI mouton , 4 161 4 » 4 10 porc, | 4 40! 1» 4 55 — —— = ee "re mi — ! froment, 20 27| 20 50! 48 75 rsla méteil , AT 45 » » Dhect 1) sise, 15 69] 15 66) 13 50 (lhect.] orge, | 43 42| 114 79! 49 25 avoine , DS 42)"28105 8195 légumes pois , 22 81 a a : [lhect.] lentilles , 24 65 » » DECEMBRE. haricots , 32 57 » » pommes de terre [l’hect.]| 5 20! 5 » 2 50 bœuf, » 4» »” viandes vache , ee Le ARS. [le kil.]{ veau, TAN ‘7 ] mouton, 14 40! 14 40! 4 40 porc, 41 40! 14 » 1 50 Etats dressés par le mème, et présentant : 19 le résultat des expériences faites en décembre 1860, dans le département, pour constater le poids légal des grains de la méme année; 2 la conte- nance en litres et décilitres du quintal métrique de ces grains : FROMENT. SEIGLE, © om Ro dre qualité. 2e qualité. 5e qualité. Are qualité. 2e qualité. 5e qualité. ER . AT — EE —— & Poids |contenance] Poids |contenancel Poids ‘lcontenancel Poids contenance] Poids \contenancel Poids contenance = moyen moyenne | moyen | moyenne | moyen moÿenne | moyen | moyenne | moyen moyenne | moyen | moyenne < du quintal du quintal du quintal d du quintal du quintal du quintal me de en litres de en litres de en litres e en litres de en litres de en litres G l’hectolitre|et décilitr.|l’hectolitrelet décilitr. l'hectolitre et décilitr. Vhectolitre et décilitr. | Phectolitre et décilitr. Jhectolitre et décilitr. Æ ES — —- A kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres, kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres, 18 920| 126 7 | 75 G14| 152 2 | 75 107, 156 7 | 72 195] 458 5 | 69 452| 144 » | 66 S90| 149 4 EEE EEE ORGE, AVOINE, kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres. kilog. litres. 59 275| 168 7 | 56 171| 178 » | 53 790| 185 8 | 48 S99| 204 5 | 44 5341 225 5 | 41 085] 245 6 D | TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME Procès-verbaux des Séances de l'année 1860, PAGES. SÉANCE DU JEUDI 5 JANVIER. — Sommaire... 5 De la nouvelle restauration de l'hôtel-de-ville, d'après les plans de M. Compagnon, et de la restitution complète de l’épigraphe qui avait été placée sur le fronton du portail de cet édifice en 1766.—(Dans l’épigraphe, au lieu de HALAVY, il faut lire HaLary, qui est le vrai nom du cin- quième consul.).,....... Here one 7 Découverte de niches tombales et d’ossements avec coquilles de pèlerin dans les fouilles et les dé- Dans les ouvrages recus sont mentionnés : une presse à comprimer le foin eee ee < STE 9 — Une étude chimique des plantes, par M. I. Pierre 10 Des variétés de pommes de terre, — le champignon appelé morille, — l'amidon du marron-d'Inde. | | cliv TABLE Mention de genres fossiles des calcaires palustres des environs du Puy, par le journal anglais le Quarterly:.......:... CLEMENT LE , De la topographie de la Gaule en cours d'exécution. De la Bible de Théodulphe, dans les Mémoires de la Société impériale des antiquaires de France. Des peintures murales relevées par M. Anatole d'Auvergne à Saint-Michel d’Aiguilhe..... ES De quelques anciennes maisons et intérieurs de maison du Puy........ ee mise se Du respect dû aux monuments................ Brochure de M. Doniol sur le déplacement de la population dans le département de l’Ain...... Drainage. — Travaux exécutés par les soins de l'administration des ponts et chaussées dans les communaux de Laroche, près Le Puy......... Du Répertoire archéologique de la France. ..... Circulaire relative à l'enseignement agricole, adressée aux Sociétés d'agriculture par M. le Directeur de l'Institut des provinces. ........ Economie publique. — Rapport sur un mode de préparation d’une boisson à l'usage de la cam- pagne, par M. le docteur du Garay........... Archéologie. — Communicalion sur des fouilles archéologiques par M. Vinay............... __Nomination d’une commission chargée de l’exa- mentides Aie MRENE CPE RERAUEEC EE SÉANCE EXTRAORDINAIRE DU 26 JANVIER. — Som- MAÏTO ST AN RARE EN RTE LEE En cie EU Industrie et beaux-arts. — Délibération sur une PAGES, 20 DES MATIÈRES. cv exposition générale industrielle et artistique à organiser au Puy pour l’époque du Concours LEBIONAL :4... #0 ce Ne ann fee du RRAPUNE. SE 56 Personnel de la Société. — Nomination d’une com- mission chargée de l'examen de la candidature JeMMGMAENCRAUIT ES PEER EE HA ent 39 Dons au Musée. — Dons de quelques fragments de poterie antique par M. de Payan-Dumoulin. — Fragment de statue en grès trouvé au Riou, près SÉANCE DU JEUDI 2 FÉVRIER. — Sommaire... Ouvrages reçus. — M. Béliben fait hommage, au — — nom de M. Lecoq, du grand ouvrage de cet émi- nent naturaliste, intitulé : £fudes sur la géo- graphie botanique de l'Europe............. 12 Agriculture. — Du mélange de la chaux avec les IUUAIERS PEER ET DA OP EE CEE 45 Drainage. — Rapport de M. Chouvon sur le drai- nage exécuté dans un communal de Laroche. près le Puy, et des avantages du drainage. .... 11 Sciences historiques. —Du mémoire de M. de Payan- Dumoulin sur les découvertes archéologiques de Toulon. — Fouilles et découvertes faites par M. Paul Le Blanc sur plusieurs points du dépar- tement" nt en eieineteleleie ele nie ice ete 48 —Liste des consuls du Puy de 4700 à 1775, donnée DARIMEMBAlMe rene ire MOPRRRNES. PE 50 Personnel de la Société. — Rapport de M. Louis de Vinols sur la candidature de M. G. de Chaulnes. == AAUMISSION ESS ARS TER à Ce ENS ANR 61 clvj TABLE PAGES. —Nomination d’une commission pour l’examen de la candidature de M. Mauras............... 67 SÉANCE DU JEUDI 1er MARS. — Sommaire. ...... 65 Dons au Musée.—Intérieur de la cathédrale d’Alby, grand tableau de Dauzat; un autre, de Renoux, représentant l'intérieur de Saint-Etienne-du- MONTE CE PS CR ETES Er rer AG: 0 0 65 —Liste des objets précieux dus aux libéralités et aux soins de la famille de Latour-Maubourg... 66 Hommage rendu à la mémoire de M. Marcel Odde AUMITIATAEReEr ARE ARE ete MONS dE 68 Drainage. — M. le Président indique les motifs qui l’ont déterminé à choisir, pour les essais qui viennent d’être faits, les communaux de Laroche. 70 Agriculture. — Moyen de désinfecter la vidange sans rien ôter à l'énergie de cet engrais. Ce mode peu coûteux (0,25 centimes le kilogr.) devrait être prescrit dans les villes... ...:.... ÉTEINT 2 — De la chaux comme moyen de désinfection. ... 75 —Du plôtre répandu sur les terres après le par- Cage des MOUIONS AE Er CU CRETE Too cbbiee 75 —De la comptabilité agricole. ................ 74 Histoire et Archéologie, — Rapport de M. Vinay sur un mémoire de M. Mauras ayant trait à un recueil d'insinuations laïques de 1704 à 1791, et présenté comme titre d'admission. ......... 74 —De la conservation de ce document historique par M. Juhellé, directeur de l'enregistrement... 82 —Des fouilles exécutées à Corsac, dans la propriété de M: NINaY ee ae» eee meer TS Re ; s2 DES MATIÈRES. —Rapport de M. Sarlandie des Rieux sur ces fouilles. .... Na SOC DO DO DD SDS ee —Communication de M. Aymard sur des briques anciennes cannelées. recueillies par M. César EalGonRe Ages ns An re Et es — Opinion de M. de Payan à ce SUITE AE 4 —Fouilles exécutées près la plaine de Rome. . —Diplôme de Charlemagne sur l'institution des chanoines de pauperie. . ........ SOUDE NE Ae SÉANCE DU JEUDI 19 AVRIL. — Sommaire... PRE Dons au Musée, — Phalanges du grand daim et molaires de cerf trouvées au milieu de débris de tuiles romaines par M. Robert... ED © Agriculture. — Opinion de M. Forney contre l« disposition en cordon des treilles de vigne. ... Sciences historiques. — Documents adressés par M. G. de Chaulnes à la commission des recher- ches historiques. (Voir le Sommaire.) —De la 27e session du Congrès scientifique de France qui se tiendra à Cherbourg. ....,..... Nomination de M. Gerbier Ecoles industrielles. en remplacement de M. Papon.............. — Modification de l’époque de l'ouverture des cours de la ville proposée par M. Bertrand de» Dour D AS D 6 O0 © 00 DD DO TOUS no Personnel de la Société. — Administration, — .M. Marthory est nommé membre du conseil d'administration, .......... D OO D DRE Lecture du compte d'administration. ........... Distribution de graines d'arbres forestiers... ... 107 108 108 110 119 120 120 120 elvii} TABLE SÉANCE DU JEUDI 5 MAL. — Sommaire. ........ Ouvrages reçus. — Du mémoire de M. de Payan- Dumoulin sur les antiquités gallo-romaines dé- couvertes à Toulon-sur-Allier............... Chemins de fer. — Résultat de la démarche faite par la députation chargée de demander la conti- nuation du chemin de fer de Firminy au Puy.. Agriculture. — Congrès des Sociétés savantes tenu à Paris, où M. de Brive a représenté la So- ciété. La question agricole résolue est celle-ci : augmenter la production en améliorant le sol arable plutôt qu’en l’étendant par des défriche- HONTE obbocodesceccadne ou DOPonebomce Sciences historiques. — Des études sur l’évangéli- sation du Velay, par M. l'abbé Bernard... s% —Mémoire de M. G. de Chaulnes sur vne truns- action du dixme abonné du mandement d’Ai- quille: 4-steser eee SHRDE MATE Administration. — De l'installation du Concours régional. Des moyens de donner de l'éclat à cette PSM 00 5 Once . loto it ct SÉANCE DU JEUDI 5 JUILLET. — Sommaire. . ...…. Agriculture. — Ensemencement du blé en lignes... —De l'utilité du rouleau........... HERNOSÈE —Des magnaneries de MM. Chas, Vinay et de BIC LCL EE écrase ie ne —Echantillons en vert de blé provenant de se- mences données par la Société. Détails donnés par M. de Brive sur leur épiage ...... LEC —Communication faite par M. le re sur le 144 DES MATIÈRES, Concours national agricole de Paris, sur la part qu'y à prise la race du Mezene; exposition des MaCIDESRE rs. Las 0m Te TOUR Hygiène. — D'une communication de M. le docteur du Garay sur une épidémie observée à Cohade, Archéologie. — Communication de M. Aymard sur des découvertes faites au couvent des Dames de MaStuctions ee M RARE SÉANCE DU JEUDI 2 AOÛT. — Sommaire........ Musée. — Vase de bronze donné par madame Mar- guerite de Latour-Maubourg..... xd. sl Ne —Instrument en silex des fouilles d’Abbeville.... Ouvrages reçus. — Bulletin de la Société d'agri- culture de la Lozère : du Concours régional du SO OI TE CE AE RE DIE AE TE Agriculture. — Des succès de l'éducation des vers à soie de la magnanerie de M. Chas.......... Arboriculture. — De l’érable à sucre du Canada. , Sciences historiques. — Des baronies du Velay par Neue président du: Molin:..,2.2.1., 0040 — Une statue de la Vierge du Puy donnée aux Tem- pliers de/Boursaneuf."- "1". SIREN Personnel de la Société. — M. le prince de Poli- gnac, présent à la séance, offre, à titre d’admis- sion, plusieurs savants mémoires.—Nomination UNE COMMISSION CE EL STE CL re —Document sur un échange de la terre de Saint- Paulien avec celle de Mercœur passé par le sei- gneur de Polignac avec l’évêque du Puy, par MAG deiChauInes ee Pr et eE JR Er clix PAGES, 168 elx TABLE PAGES. SÉANCE DU JEUDI $ NOVEMBRE. — Sommaire... 169 Musée. — Dons de fragments de pierres gothiques et de quinze médailles frappées à la monnaie de'Parise RO RE Are es ist 170 Ouvrages reçus. — Le Vert de Chine, par M. Ron- dot.—La Poésie au XIXe siècle, par M. le vi- comte de Saint-POnCY...................... 470 Agriculture. — De l'emploi des engrais phospha- tés. Indication de leurs gisements par M. Ber- trand de Doue.............., . Jets 174 —Deux lettres de M. Topin, dt d’Acadé- mie, aux instituteurs, pour les engager à s’occu- per d'Agriculture pralique................. 472 — Rapport de M. de Brive sur le rendement com- paré des semences de froments dits de Noé et d'Australie avec le froment du pays. Opinion de M. Ch. Calemard de Lafayette et de M. Chou- VON. ARR RU ER Te enterrer HT —Expériences faites sur le même sujet par M. Ni- colas à la ferme de Malaval. ...... SERRE 181 —-Vacherie de Chadenac. — De l'allocation accor- dég par le Conseil général à cet établissement. . 182 Pisciculture. — Du vote du Conseil général pour faire commencer les travaux d’un établissement de pisciculture au lac du Bouchet............ 183 Usage qu’on peut tirer des COMMunaux. ........ 184 Rapport de M. Balme du Garay sur la question mu- lassière.—Opinion de M. Ch. C. de Lafayette... 184 Personnel de la Société. — Rapport de M. de Payan- Dumoulin sur la candidature de M. le prince de Polignac. Admission...................... 495 DES MATIÈRES. SÉANCE DU JEUDI 6 DÉCEMBRE, — Sommaire... Ouvrages reçus. — D'un mémoire de ‘M. le comte de Bastard sur une crosse du XIe siècle. . ..... —La Revue des Sociétés savantes sur les travaux dé : la Société Men enr re \gricullure. — De Ja faucheuse-moissonneuse W60d PO LIOR EME AR PNEU AR RNA en Reise Arboriculture. — Rapport de M. Chouvon sur le mémoire du docteur Pigeaux relatif à la taille tlolletels el eterela ee tuis sur la dissertation de M. Best sur les biens COMMURAUX A MMM ser ee eines © —De la péréquation de l’impôt. ........ re Sciences historiques. — Document intéressant le PUY ROME EMEr STATE Ho ation —Rapport de M. l'abbé Sauzet sur la candidature de M. Dubois, de Saint-Etienne-de-Lugdarès. — AUMISSLOD MM EU MANIE SEMAINE —Rapport du même sur la candidature de M. l'abbé Sire. — Admission. ...... DESTIN th Administration. — La ville a élevé l'allocation du MIHS COR MANUUReRe CR PE Ad ch to —Echanges de publications. ................. Rapports et Mémoires. SÉANCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE DU VENDREDI 25 MAL 1860, à l’occasion du Concours régional. Commission de l’organisation des fêtes et de l’in- stallation du Concours régional............. TOME XXII. k cixj PAGES. 197 198 205 209 219 elxij TABLE PAGES —Jury du Concours............ SR EN PE iii Concours départemental et exposition des pro- duits industriels et agricoles du pays....... \ Séance publique académique.— Distribution des primes et des récompenses du Concours dé- partemental ...... UD ee EN ec OR ix —Discours du Président M. Ch. C. de Lafayette. ix Séance de distribution des primes du Concours régional ........ ET GE dés T0 xlj _—Discours de M. le Préfet Emile Paul de Rostan. xli] —Rapport sur la prime d’honneur par M. Rous- Sel Es PR RNA MNT Faeoe Ms misxlvi] Fête du Concours régional. — Banquet et toasts. Ixx} —Jllumination, ascension de l’aéronaute M. Go- dard, feu d'artifice de Ruggieri............ Ixxvij Défrichements de Senilhac, par M. Rendu, prési- dent du Concours régional............... Ixxxii} Notice sur les coquilles perlières qui se trouvent dans le département de la Haute-Loire, par M. de Payan-Dumoulin ..... Hier CÉTÉASS SET se xeii] Passies: 2. diner re te S'OORONERNEEE #: ciij A mon pays, par M. Vibert..... NAN El DS D cii] Le Hanneton, ballade, par M. F. Bernard... ... evij Les Civilisations, études, par M. Aimé Giron.:. ex) Ouvrages reçus par la Société d'agriculture pen- dant l’année 14860..........-...... ge ce clore HEXTIX Tableau des observations météorologiques, par M. Nicolas set need MN TTERCEREE exli Mercuriales de la Haute-Loire................. exlv FIN DE LA TABLE. 4 JUN. 98 LAS A M USE CRE TR é De 2 4 Le ER tetes SAM ER ONTS ss cher