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MARTIN, RuüE DE L'EscaLe, 2 1906 +, a, e 0 Ü 1 0 k (7 - * À < SA LS À ; = Sal Fe n { | Ve DATE LES . DE, } di ' À j { x ? È ï 5 ” l e ; ë 5 \ « \ à { (Ur 5 \ î L f 2 nl D : ï nt ; ; % ÿ + 5 : k À f 3 à 1 M - " ; >= VE 9 . ” 4 $ # 0 À : ; 4 #4 à .Æ R Le “ =. ’ ; ï < < ANNALES DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES LA CHARENTE-INFÉRIEURE ++ La Société des Sciences naturelles a été reconnue établissement d'utilité publique par décret du 4 septembre 1852. ACADÉMIE DE LA ROCHELLE SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES DE LA CHARENTE-INFÉRIEURE ANNALES DE 1902 À 1905 N° 34 MUS. COMP. ZGÙL. LIBRARY APR 24 5 HARVARD UMIERSITY LA ROCHELLE ImMPRIMERIE E. MARTIN, Rue DE L'EscaLe. 20 1906 GES GEO EUR SOC AD, COMPTE RENBU DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLES DE LA CHARENTE-INFÉRIEURE D'APRÈS LE REGISTRE DES PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES EE — Dans la séance de décembre 1901, le Bureau de la Société avait été ainsi constitué : Président. M. BERNARD. \ M. Meyer. ! M. Foucaup. Trésorier, M. COUNEAU. Conservateur, M. BERNARD. Conservateur adjoint, M. Basser. Archiviste, M. De RICHEMOND. Bibliothécaire, M. THIBAUDEAU. Secrétaire, M. GUILLEMIN. Secrétaire adjoint, M. le D' PINEAU. Vice-Présidents...... RG Pendant l’année 1902, sept candidatures de membres titulaires ont été acceptées à l’unanimité ; ce sont celles de : MM. Boutineau, pharmacien-major, à La Rochelle ; D' Baylac, Paul Carrière, pharmacien honoraire ; Dubourg, professeur départemental d’agriculture ; Martineau, président du Tribunal civil ; Saint-Yves, capitaine d'artillerie, et Soenen, pharmacien, à La Rochelle. Onze séances, avec une assistance moyenne de quinze membres, ont été tenues pendant cette année. De nombreuses questions ont été agilées et discutées ; des communications et des travaux ont été apportés, dont nous donnons ci-après un résumé succinct : Janvier. — Parmi les nombreuses publications reçues par la Société, nous devons signaler l'ouvrage offert par M. le Dr Gautier, de Melle, membre correspondant. C’est la traduction du 127 volume d’une remarquable chimie industrielle allemande. Notre collègue, M. Girard, fait également hommage de deux ouvrages dont il est l’auteur : l’Aunis et la Saintonge maritimes et la Normandie maritime. Févricr. — Compte rendu de travaux et analyse de diverses publications par MM. Eury, Guillemin et Vivier. Mars. — Notre collègue, M. Dollot, qui habite Paris, a représenté la Société des sciences naturelles à la remise de la médaille offerte par les paléologues à M. Gaudry, de l’Institut, notre membre correspon- dant. SE ir RS M. Couneau fait part des travaux de la Société de météorologie. Des appareils scientifiques ont été mis à la disposition de M. Proriol, directeur de l’écoie nor- male d’instituteurs. D’intéressants articles sur la transmissibilité de la tuberculose bovine à l’homme, sur la téléphonie sans fils et sur l’influence de la musique sur les moustiques, parus dans des revues savantes, sont analysés et com- mentés par M. Guillemin. Une séance extraordinaire à été tenue le 24 mars 1902, motivée par la question de la Flore de France. La Société des sciences naturelles étant libérée de ses engagements vis-à-vis des auteurs de cette vaste publication, il était nécessaire de savoir si nous con- tinuerions à patronner celle-ci et à quelles nouvelles conditions, en rapport avec notre budget. Devant les nouvelles propositions de M. Rouy et les considérations d’ordre financier développées par M. Couneau, la Société décide de continuer la publica- tion de la Flore de France. Mai. — M. Bernard fait une intéressante communi- cation sur la baleine échouée récemment sur la côte de l’île d’Oleron. De nombreux détails sont fournis par notre Président, qui a complété son travail par une étude historique de tous les animaux de ce genre échoués sur nos côtes. La photographie communiquée par M. Bernard est reproduite dans ce volume. Juillet. — Communication de M. Bernard sur « l'Hy- ponomenta Padinella » qui a envahi les feuilles de pommier de Rompsay. Octobre. — M. Couneau rend compte du Congrès mie scientifique de Montauban, où il représentait la Société des sciences naturelles. Une des curiosités qui ont le plus frappé les membres de ce Congrès est l’omnibus automobile à Trolley sans rails, surlequel notre savant collègue, M. Turpain, fournit des explications tech- niques. M. Turpain communique ensuite un très intéressant travail personnel, relatant les expériences de prévi- sion des orages entrepris par l’auteur, au moyen du cohéreur et des dispositifs qui ont été installés dans le domaine de Château-Pavie, à Saint-Emilion (Gironde). M. Turpain a pu ainsi être averti d’un orage, alors qu'aucun signe atmosphérique ne permettait de le déceler. Ces expériences peuvent recevoir une appli- cation pratique grandement utile dans les pays où la lutte contre la grêle au moyen du canon s’est généra- lisée. | M. Bernard a recueilli dans l’excursion mycologique de Vouvant des champignons non encore signalés dans - notre région. Il a reproduit ces espèces sur des planches dessinées avec une irréprochable précision et les com- munique à la Société. M. Guillemin présente à ses collègues des cendres éruptives provenant du Mont-Pelé. Décembre. — M. Eury analyse et commente les comptes rendus de l’Académie dessciences.—M, Meyer entretient la Société de l'influence des incisions annu- laires sur la végétation. Pendant l’année 1902, la Société des sciences natu- relles a fait les excursions suivantes : Lo iQ ent Le 20 avril, à Fouras (botanique et géologie) ; le 11 mai, à l’ile de La Diveet Saint-Michel-en-L’'Herm ; le 21 septembre, dans la forêt de Vouvant(mycologie). De nombreux sociétaires ont suivi ces promenades instructives, auxquelles la présence de plusieurs dames est venue ajouter son charme gracieux. ANNÉE 1903. Le Bureau pour cette année, nommé à la séance de décembre 1902, était ainsi composé : Président, M. BERNARD. ( M. Meyer. > à! M. Foucaup. Secrétaire, M. GUILLEMIN. Secrétaire adjoint, M. le D' PINEAU. Trésorier, M. CoUNEAU. Conservateur, M. BERNARD. Conservateur adjoint, M. BAsser. Archiviste, M. DE RICHEMOND. Vice-Présidents .. Une seule candidature de membre titulaire a été posée et acceptée à l’unanimité pendant l’année 1903, c’est celle de M. Senné, architecte. chevalier de la Légion d'honneur. Dix séances ont été tenues, et nous donnons ci-après le résumé des communications et travaux les plus intéressants. Janvier. — MM. Eury, Guillemin et Vivier analysent et commentent divers articles parus dans les Journaux scientifiques adressés à la Société. ED Février. — M. Dubourg présente un volumineux et intéressant travail sur les expériences de MM. Catraten et Benedict au sujet de l'étude qu'ils ont faite de l’alcool comme aliment. Mars. — M. Bernard présente trois animaux rares dans notre région, qui ont été naturalisés pour le Musée : un cochon de mer, une bécasse de mer, un capros aper. M. Couneau fait une intéressante communication sur le lirage en couleur des planches lithographiques et fait passer sous les yeux de ses collègues les remar- quables épreuves obtenues pour la reproduction d’une curieuse miniature du xiv® siècle, représentant l’élec- tion d’un maire à La Rochelle. M. Fournier traite la question de la télégraphie sans fil et décrit les appareils employés, leur puissance et les résultats obtenus. M. Guillemin donne connaissance des travaux de Marey sur les relations entre les mouvements et les muscles chez les animaux et des études du D' Nobé- court sur le rôle antiseptique et antitoxique de la levure de bière. Juin. — M. Couneau présente à la Société un curieux échantillon de collection, constitué par trois œufs con- tenus en un seul, chacun ayant sa coquille propre. MM. Eury et Guillemin donnent connaissance des articles scientifiques intéressants parus dans les comptes rendus de l’Académie des sciences et dans la Revue scientifique. Juillet. — M. Bernard communique un travail de == 41 — M. Dollot sur la Coupe géologique dans les travaux du Métropolitain, à Paris. M. Eury expose un procédé très sensible et très simple, dont il est l’auteur, pour la recherche du formol dans le lait. L’addition, dans ce liquide, d’acide sulfurique concentré renfermant du fer donne, en présence de traces de formol, une belle coloration vio- lette caractéristique. Octobre. — M. Turpain fait une communication des plus intéressantes sur les expériences qu'il a entre- prises au Puy de Dôme, en continuant ses recherches sur la foudre : avec un appareil de son invention, la présence, le rapprochement ou l'éloignement des orages peuvent être signalés à une grande distance du lieu d'observation. M. Meyer analyse un ouvrage de Mile Tsiklinski sur les microbes Thermophiles. M. Bernard présente quelques animaux et curiosités recueillis pour enrichir le Muséum Fleuriau. Novembre. — M. Thibaudeau donne connaissance d’un travail sur la foudre et les hêtres. M. Vivier fait une intéressante communication sur les divers phénomènes d’origine sismique observés depuis plusieurs années dans la Charente-[nférieure, et notamment sur la secousse de tremblement de terre ressentie, pendant la nuit du 26 au 27 octobre 1903, à La Rochelle et dans les environs. La Société s’occupe ensuite d’une question qui inté- resse vivement notre région ostréicole : l’accusation portée contre les huîtres de véhiculer le bacille typhique. PO Ne M. Guillemin analyse plusieurs publications scienti- fiques et expose à la Société ce que l’on connaît du sérum de Marmorek contre la tuberculose. Décembre. — M. Guillemin denne connaissance d’un travail de M. Héricourt contre le sérum et les théories de Marmorek, puis donne des extraits du long et inté- ressant rapport fait à l’Académie des sciences par M. Lacroix, sur les éruptions de la Martinique. Les excursions de la Société, très suivies, ont été les suivantes : 17 mai, environs de Saintes. — Visite du gros ormeau de la verrerie, de l’église et du château du Douhet, du gros roc, des sources et de l’aqueduc de Fontcouverte. 28 juin, à la plage des Mathes. — Visite des marais de Bréjat, aujourd’hui desséchés et mis en culture. 18 octobre, excursion mycologique dans les bois de Breuil-Magné et de Chartres. ANNÉE 1904 Le Bureau de l’année précédente fut tout entier réélu à la séance de décembre 1903. Deux candidatures ont été acceptées à l’unanimité, et MM. Musset, bibliothécaire de la ville de La Rochelle, et l'abbé Fanton, professeur au Séminaire, ont été élus membres de la Société des sciences naturelles. Dix séances ont été tenues, dont nous donnons un résumé succinct des travaux. Janvier. — M. Bernard, président de la Société, fait RSS fe à ses collègues une communication sur des champi- gnons récoltés par lui dans notre région et qu’il a des- sinés avec une précision remarquable. février. — M. Dubourg, professeur départemental d'agriculture, décrit les ravages occasionnés par les campagnols, dont il fait l’histoire zoologique et dépeint les mœurs. Le travail de M. Dubourg, par son actualité comme par sa documentation, est un de ceux qui ont le plus marqué dans l’année scientifique de la Société des sciences naturelles. A cette même séance, M. Guillemin met ses collègues au courant des progrès de la radiothérapie et de ses dernières applications. [Il donne des détails sur les phénomènes physiologiques qu’il a observés en prati- quant lui-même la radiographie. En mars, une note des comptes rendus de l’Académie des sciences, ayant trait à l'influence de la lune sur la pluie, amène M. le général Moreau à analyser un très intéressant article de M. de Lapparent, touchant au même sujet. M. Bernard communique un mode nouveau de re- cherches des perles dans les huîtres perlières de Ceylan. On emploie pour cela les rayons X, ce qui permet de gagner du temps et surtout d'éviter la destruction des mollusques. M. Bernard fait judicieusement observer que ce procédé pourrait êtreavantageusement appliqué aux mulettes perlières de la Seugne, car la méthode actuellement employée aux environs de Jonzac, pour rechercher les perles de ces mollusques, amène une énorme dépopulation. An er M. le D' Bobrie fait l’analyse d’une note sur lin- fluence des sanatoria dans la lutte contre la tuberculose. La séance d’avril est consacrée à l’analyse et à l’étude de diverses publications scientifiques reçues par la Société ; puis M. Bernard montre à ses collègues un champignon trouvé pour la première fois par lui dans notre région : le Peziza coronaria et quelques espèces dont les dessins sont toujours très admirés. Mai. — M. Guillemin fait une communication sur un sujet tout d'actualité : la maladie du sommeil et la mouche « Tsé-Tsé ». [l étend son étude aux moyens prophylactiques préconisés contre les fièvres des pays chauds. M. Boutineau donne des détails intéressants sur la chasse à la tortue de Sfax, dont les Arabes se nourris- sent volontiers. A ce sujet, M. Carrière signale la pré- sence à Dolus de la petite tortue noire aquatique, dont l’espèce tend beaucoup à disparaitre de nos contrées. Une observation de M. Guillemin, sur la soudure apparente des œufs de poule, amène M. Boutineau à signaler le danger qu'offrent parfois les œufs de cane, et qui serait dù à l'absorption des haunetons, dont ces animaux se montrent très friands. La séance de juin est marquée par une étude sur le paludisme aux colonies et dans notre région, notam- ment à Marennes, Brouage et Rochefort. MM. le général Moreau, Meyer et Guillemin donnent à ce sujet de nombreux renseignements. | Juillet. — M. Couneau fait une communication sur les procédés de photographie en couleurs, dont la vul- is garisation de plus en plus grande produit des illus- trations remarquables. Octobre. — M. de Richemond, archiviste départe- mental, donne lecture d’un travail sur le Dr Guillotin, né à Saintes en 1738, député en 1789, mort à Paris en 1814, à qui est dû l’emploi en France de la guillotine. Cette appellation de « guillotine » causa toujours une peine très vive au docteur, qui avait voulu doter la France d’un instrument de supplice « si doux que seule l’idée de la mort pouvait le rendre désagréable, car, si l’on ne s’attendait pas à mourir, on croirait n’avoir senti sur le cou qu’une légère et agréable frai- cheur ». Puis M. Alfred Vivier lit une note contenant la des- cription détaillée, d’après un témoin oculaire, d’un phénomène de foudre globulaire, observé dans une maison de la rue Massiou, à La Rochelle, pendant la nuit du 12 au 13 septembre 1904. Enfin, M. Guillemin donne lecture à la Société des sciences de son rapport sur les très remarquabies expériences entreprises par MM. Bernard, Dubourg, Mabille et Guillemin, au sujet de l’empoisonnement par la noix vomique des campagnols et autres ani- maux. Ces expériences, extrêmement bien conduites et con- trôlées, ont rendu de grands services, en permettant d'organiser judicieusement la lutte contre les ron- geurs, avec l’excellent agent de destruction que con-. stitue la noix vomique. Novembre. — M. Couneau entretient la Société des travaux si intéressants faits par un de ses membres, M. Dollot, de Paris, à l’occasion de la construction du Métropolitain. Puis M. Musset donne lecture d’un travail remar- quablement documenté sur le commerce et l'emploi des seiches au moyen âge. Les détails si curieux révélés par le savant auteur de ce mémoire sont très appréciés par les membres de la Société des sciences, qui pren- nent un vif plaisir à entendre cette communication. Enfin, en décembre, M. Martineau, le distingué pré- sident du Tribunal civil de La Rochelle, fait une courte conférence sur le principe de Lavoisier : « Rien ne se perd, rien ne se crée », appliqué à la richesse et à l’économie sociales. Parmi les curiosités qui sont venues, en 1904, enri- chir nos musées, nous devons citer l’envoi d’un de nos compatriotes, M. Piolet, capitaine au long cours et pilote du canal de Suez. | Voici la composition de cet envoi, que M. Piolet annonçait dans une longue lettre reçue au mois de mai : trois crocodiles du Nil blanc à différents âges, un lézard Varan (Varanus Arenarius, Duméril), venant de la Haute-Egypte, un fouette-queue, lézard à queue épineuse (uromastix Spinipes, Duméril), une tête de crocodile servant d’étui à trois poignards, une cara- pace de tortue de la Haute-Egypte (Trionyx Egyptia- nus), des cannes incrustées, des armes soudanaises, abyssiniennes, etc. Il y a là de quoi intéresser les nom- breux curieux qui visitent les musées rochelais. Excursions. — Les excursions de l’année 1904 ont été : le 18 mai, à Pont-l’Abbé et Saint-Jean-d'Angle; le 18 septembre, à l'ile d’Aix ; le 9 octobre, à Vouvant. Te ANNÉE 1905. BUREAU : Président, M. BERNARD. ( M. Meyer. | M. Jousser. Trésorier, M. COUNEAU. Secrétaire, M. GUILLEMIN. Secrétaire adjoint, M. SOENEN. Conservateur, M. BERNARD. Conservateur adjoint, M. BASSET. Bibliothécaire, M. CARRIÈRE. Vice-Présidents...... MM. Guillemot, secrétaire de la Préfecture de la Charente-Inférieure, et Cailloux, pharmacien à La Rochelle, ont été élus à lunanimité membres de la Société des sciences naturelles. Dix séances ont été tenues pendant l’année 1905, régulièrement suivies, dont voici le compte rendu brièvement rapporté : Janvier. — M. Meyer présente à ses collègues une collection de gros rats naturalisés. Ces rongeurs avaient depuis quelque temps envahi nos campagnes, à la suite des campagnols qu’ils dévoraient. M. l’abbé Fanton fait une longue et fort intéressante communication sur la photogravure en couleurs par le procédé dit « aux trois couleurs ». Ce procédé, qui ne serait que l’application de ce qui se passe dans la paiure, consiste dans la superposition rigoureusement repérée de trois épreuves : jaune, rouge et bleue. Les résultats obtenus sont des plus heureux. 2 nr un M. Couneau rappelle à ce sujet le procédé de photo- gravure de M. le D' Brard, notre compatriote, et expose les critiques que mérite le procédé aux trois couleurs. M. Vivier cite quelques curieux exemples de mani- festation d'intelligence chez les animaux. Février. — M. Soenen fait une communication sur la noix vomique, ses origines, ses usages et son com- merce dans les pays d’origine. Mars. — M. Couneau, à propos de la communication de M. l'abbé Fanton sur la photogravure en couleur, montre à ses collègues les clichés qui ont servi au tirage en couleur d’une planche de son volume La Rochelle disparue et donne d’intéressantes explica- tions techniques. En avril, M. l'abbé Fanton fait une communication sur la météorite américaine de Willamette, que ses dimensions classent au 4° rang des pierres géantes et qui occupe le premier par ses qualités physiques et chimiques. Cette énorme masse de 13,000 kilos appar- tient au type fer ; elle fut découverte en 1902, forte- ment encaissée dans une rivière, d’où son extraction ne fut pas opérée sans peine, courage, ni patience. M. Dubourg s'attache à démontrer à ses collègues qu’on exagère considérablement le rôle utile des oiseaux en agriculture. Les oiseaux ne sont pas du tout des auxiliaires indispensables, destructeurs d’in- sectes nuisibles. Il faut considérer qu’il y a de bons et de mauvais insectes, et que le rôle dévolu aux bons est généralement de dévorer les mauvais. Or, les — 419) — oiseaux détruisent indistinctement les bons et les mauvais, non sans détériorer souvent les végétaux. M. Boutineau à entrepris un vaste et difficile travail sur les prairies des environs de La Rochelle. Il com- munique à la Société des sciences les premiers résul- tats analytiques de ses travaux. M. Bernard lit un article sur les moules et la fièvre typhoïde. Mai. — M. Meyer communique un article sur l’émi- gration des lemmings pendant l’année 1903. L’ana- logie de cette émigration avec celle des campagnols donne à cet article un intérêt marqué. : Juillet. — M. Dubourg montre à ses collègues une pomme de terre qu’il avait surprise er voie de végéta- tion à l’air libre et qu’il avait placée sur un pot de terre pour en observer le développement. Il fait re- marquer des bourgeons ayant donné naissance à des tiges à feuilles et fleurs, tandis que d’autres, et en plus grand nombre, ont toujours été exclusivement tubéri- ières. Dès le bourgeon, il y aurait doncdifflérenciation, et cette constatation pourrait avoir quelque intérêt au point de vue de l’ensemencement et de la culture de la pomme de terre. Aussi l’auteur se propose-t-il de poursuivre ses études et expériences dans des condi- tions moins fortuites. M. Musset fait ensuite une très intéressante commu- nication sur divers documents relatifs, les uns, à la réglementation de la mise en vente à Paris, aux xve et xvie siècles, de la baleine et d’autres cétacés, comme produits alimentaires; les autres, à la pêche et au commerce, aux mêmes époques, dans le golle de Gas- op cogne, et notamment à La Rochelle, des mêmes cétacés, qualifiés alors poissons. Leurs produits, dé- composés sous le nom de lardon, graisse, chair, langue et même entrailles, étaient salés, mis en bar- rique et vendus pour la consommation, surtout en Bourgogne. Octobre. — M. Meyer communique un article sur la caséine et la caséinerie de Surgères, et M. Soenen fournit des explications et donne des détails sur cette nouvelle industrie régionale. La caséine, matière albu- minoïde du lait, est extraite du petit lait dans deux usines qui sont en pleine prospérité. Cette caséine est envoyée comme matière première à des usines trans- formatrices, qui l'utilisent soit pour l'alimentation, soit pour la fabrication des couleurs, soit enfin pour la fabrication de la galalith, succédané du celluloïd. M. Couneau communique un procédé pour faire dis- paraître sur le papier des dessins ou gravures les taches jaunes dues aux moisissures. Ce procédé, dû à M. Soenen, consiste à faire agir successivement sur le papier une solution aqueuse de permanganate de potasse et une solution aqueuse de bisulfite de soude. M. Soenen communique un intéressant article de M. Coutière sur les huitres et la fièvre typhoïde. Novembre. — M.le D' Bobrie donne communication d’un cas très curieux d’invasion du Mérulius. Ce cham- pignon avait envahi la boutique d’un limonadier, chez lequel tout était recouvert d’une poussière brune. Le limonadier accusait un peintre voisin d’être la cause du dépôt de cette poussière ; il lui intenta un procès. EN og On découvrit alors que la poussière était due à l’inva- sion du champignon. M. l'abbé Fanton fait une très intéressante commu- nication sur une des plus récentes applications de l'électricité : la télémécanique sans fil. L’honneur de cette découverte revient à M Branly, auprès duquel M. l'abbé Fanton a puisé les indications pour le travail qu’il présente à la Société. Décembre. — M. l'abbé Fanton fait une communica- tion sur le tremblement de terre ressenti à La Rochelle le 25 novembre dernier. M. Musset donne connaissance des résultats de la visite qu'il fit près de Jonzac, à Macqueville, d’un refuge qui devait être en communication souterraine avec le château des Bouchereau. M. Musset n’y a trouvé que des ossements de petits mammifères et des fragments de charbon, sans aucune trace de dépôt d’alimentation. Sur les parois, il a re- marqué des graphites analogues à ceux de l’époque mé- rovingienne. Non loin de là, notre collègue a trouvé un gros chaille (pierre volumineuse) qui lui semble avoir servi de polissoir, et aux environs de celui-ci un certain nombre de silex polis (grattoirs, flèches, etc.). Îl a découvert dans £e pays une douzaine de stations gallo- romaines, reconnaissables à des tombeaux et frag- ments de poterie. Ces divers objets sont soumis à l'examen des mem- bres présents à la séance. M. Bernard présente un coléoptère capturé par M. le général Moreau. C’est le Lamia OEdilis, ou Lamie A Charpentière, dont la larve cause de grands dégâts dans les forêts de pins. À cette séance de décembre, avaient lieu les élec- tions pour le renouvellement du Bureau. Le Bureau précédent fut réélu à l’unanimité. Deux excursions ont eu lieu en 1905 : le 30 avril, à Fouras, où de nombreux champignons ont été récoltés; le 28 mai, à Saint-Jean-d’Angle, avec visite de Saint- Sornin et de la tour de Broue. Ces excursions ont, comme toujours, été suivies par de nombreux socié- taires et plusieurs dames, dont la gracieuse présence ajoutait au charme de la réunion. Tels sont les principaux travaux qui ont occupé l’activité de la Société des sciences naturelles de la Charente-Inférieure depuis la publication de son der- nier volume d’Annalés, en 1901. Is justifient l'intérêt que l’on porte à notre Compa- gnie et la considération dont elle jouit parmi les sociétés savantes. Ces travaux montrent aussi que la Société des sciences naturelles continue les traditions de labeur que lui ont léguées ses illustres fondateurs et nos devanciers. Maurice SOENEN, Secrétaire adjoint. A ON Dee NECROLOGIE Depuis la publication de notre dernier volume d’Annales, nous avons le pénible devoir de payer, à ceux de nos collègues que la mort est venue frapper, le tribut de nos regrets et de nos douloureux souve- nirs. Nous devons une mention toute spéciale à notre ami Condamy, Adolphe, ancien pharmacien, membre de la Société depuis 1876. Il était spécialement chargé des comptes rendus analytiques des journaux de chimie et nous tenait ainsi au courant de cette science, dont les découvertes incessantes amènent chaque jour des révélations profondément intéressantes pour le progrès de l'humanité. Une cruelle maladie est venue interrompre ses travaux d’érudition, sans cependant porter atteinte à la charmante aménité de son carac- tère. Il s’est éteint doucement à Paris, où il était allé chercher auprès des maîtres de la science moderne un soulagement à ses souffrances. Sa disparition a été un deuil cruel pour notre Société, où il ne comptait que des amis. Notre collègue, Nadreau, Hector-Edmond, a, lui aussi, cruellement souffert avant de quitter la vie. Il était des nôtres depuis 1893. Sa profession de médecin- vétérinaire lui donnait des aptitudes spéciales que nous avons quelquefois utilisées ; il prenait souvent part à nos excursions. La mort de Foucaud fut une des pertes les plus irré- parables que pouvait faire notre Société. Foucaud était On Let notre vice-président. Ses connaissances profondes en botanique n'étaient pas seulement appréciées de ses collègues, mais sa notoriété scientifique s’était étendue dans le monde tout entier des savants. Nous ne sau- rions mieux faire pour rendre hommage à sa mémoire que de reproduire la touchante allocution que notre président, M. Bernard, a prononcée sur la tombe de notre regretté collègue : « Au nom de la Société des sciences naturelles de la Charente-Inférieure, dont il faisait partie depuis une trentaine d'années et dont il était actuellement vice- président, je viens dire un dernier adieu à notre regretté collègue, Julien Foucaud. » Simple instituteur, sans ressource scientifique à sa disposition, isolé au fond d’un humble village, il sut, grâce à son extraordinaire énergie et son amour obstiné du travail, s’assimiler une science qui lui tenait au cœur avec passion. » Son activité scientifique s’est d’abord manifestée par de nombreuses herborisations dans un rayon de plus en plus étendu ; son esprit observateur et sagace lui eut vite acquis une grande expérience dans la bota- nique spéciale, où il ne tarda pas à faire autorité. » Malgré les inépuisables recherches de Lloyd, Foucaud à encore su, après ce grand floriste, apporter un nouveau contingentde découvertes, quiluia permis de faire de nombreuses additions à la Flore de l'Ouest. Et la quatrième édition de ce manuel classique con- cernant la région qu’il embrasse a été augmentée, par lui, des départements de la Gironde, des Landes et du littoral des Basses-Pyrénées. one » Sous les auspices de la Société des sciences natu- relles de la Charente-Inférieure, il a fondé le Comité rochelais de botanique pour l’échange des plantes. Un brillant hommage lui fut rendu à cet égard par les princes de la science, lors de la réunion, à La Rochelle, du Congrès de l'Association française pour l’avance- ment des sciences. » Je n’énoncerai pas ses nombreuses notes, commu- nications et publications parues dans nos Annales et ailleurs, mais je ne puis taire la collaboration apportée aux trois premiers volumes de la Flore de France actuellement en voie de publication par notre Société et qui a conservé le titre- de Flore de France, par MM. Rouy et Foucaud. » Son érudition était d’un précieux appui auprès de nos botanistes, au cours de nos excursions ; sa con- naissance approfandie des diverses stations assurait la récolte de plantes qui fussent restées ignorées sans ses savantes indications. Aussi chacun de nous a-t-il pu apprécier les qualités de son cœur, la bonne obli- geance et l’extrême bonté avec laquelle il prodiguait aux plus ignorants, à l’occasion de déterminations qui lui étaient demandées, les trésors de sa connaissance profonde des espèces et de leurs variétés. » Malgré l’afireux mal qui paralysait ses efforts, Foucaud n’en poursuivait pas moins, avec une ardeur que la souffrance ne pouvait entraver, un important ouvrage que la mort prématurée de notre ami laissera malheureusement inachevé. » Il représentait si dignement la botanique dans notre Société des sciences naturelles que sa disparition causera un grand vide parmi nous. Mais son souvenir ne périra point, car il occupera dans cette science, à laquelle il avait consacré le meilleur de sa vie, une place qui restera à jamais inoubliable. » Adieu, Foucaud, au nom de tes collègues et amis de la Société des sciences naturelles de la Charente- Inférieure. » Adieu ! » Girard, Benjamin, consul de Grèce, commissaire de la marine en retraite, était un nouveau venu parmi nous. Ses longs voyages dans les pays d'Orient don- naient un intérêt tout spécial à ses entretiens. C'était un écrivain distingué. Ses études sur la Grèce, où il avait longtemps résidé, ses recherches sur la topogra- phie maritime de l’Aunis, la Saintonge et la Normandie lui permirent d'intervenir utilement dans les divers sujets que nous traitons d'ordinaire. | Dès que M. Martineau, juge d'instruction à Roche- fort, fut nommé président du Tribunal de notre ville, il s'empressa de faire partie de notre Société, mais la mort est venue l’atteindre rapidement le 9 octobre der- nier. En outre de ses hautes connaissances juridiques, il s'était fait une notoriété bien justifiée par sa science économique. Grace à l’autorité de sa parole, et avec la conviction d’un apôtre, il avait répandu dans toute notre région ses théories sur le libre échange. Les études, dans lesquelles il s'était spécialisé, lui permirent, par les communications qu’il nous présenta, de faire d’heureux rapprochements entre ses connais- sances approfondies et le genre de travaux dont nous nous occupons. D Ouen Signalons enfin, pour clore la nomenclature funèbre de nos chers disparus, la mort de M. Garnier, sénateur, maire de Royan. Sa situation et son éloignement ne lui permettaient guère de prendre une part active à nos études. Nous ne pouvons qu’apporter le faible tribut de nos regrets à la mémoire de cet homme de bien, dont toute la presse de notre région a fait un éloge unanime et mérité. TLENÉ TENNIS CONFÉRENCES SUR LA MATIÈRE RADIANTE TE R ADIU M Par A. FOURNIER Professeur agrégé de sciences physiques Directeur du Laboratoire municipal LL Les 5 et 11 Avril 1905 me LES RADIATIONS DU TUBE CROOKES Le se eee ee 00e ee 0 0e © ee + ee © + © + + © Je n’ai donc nullement la pensée de vous faire une conférence savante, ce serait contraire au but que nous poursuivons. J'ai tenu cependant à lui conserver quelque chose de son caractère scientifique, sa seule raison d’être. J'ai voulu, en particulier, non pas vous faire con- opus naître les procédés de mesure employés par les savants, mais simplement vous faire concevoir commentil était pessible de les réaliser. Pour cela j'ai dû m'abstenir de tout terme technique, modifier les expériences, les défigurer parfois au point de les rendre méconnais- sables. Fe. J’ai voulu surtout vous exposer les faits avec la plus grande clarté possible ; aussi, pour les enchaîner, je me suis appuyé sur les hypothèses qui me paraissaient le mieux convenir à ce but. En résulte-t-il qu'il n’y en ait point d’autres pour les expliquer ? Evidemment non. J'ai choisi celles-là, parce qu'elles s’éloignaient le moins de toutes de nos conceptions anciennes, ou plutôt parce qu’elles sem- blaient parfois en apporter une sorte de confirmation. D'ailleurs, si les faits bien observés sont indéniables, c’est, au contraire, un des caractères de l'hypothèse de n’être qu'une vraisemblance à laquelle on peut en substituer bien d’autres. CHAPITRE PREMIER. Décharge dans les gaz raréfiés. C’est Hittorf qui, en 1868, découvrit les rayons ca- thodiques en étudiant les tubes de Geissler. Les physiciens savaient que l’aspect de la décharge électrique se modifie avec le degré de vide du milieu dans lequel elle se produit et en poursuivaient l'étude dans des tubes à gaz raréfés. | Lorsque l’étincelle jaillit dans un gaz à la pression atmosphérique, elle est droite ou en zigzag, mais s’enfle à mesure que la pression diminue. Lorsque la pression est voisine de un centimètre de mercure, la décharge prend la forme d’un crayon lumi- neux appuyé sur l’anode (1) et n’atteignant pas la cathode. C’est la lumière anodique. La cathode alors n’est entourée que d’une faible gaine lumineuse, Lorsque le vide a été poussé jusqu’au voisinage de la pression de un millimètre de mercure, la lueur posi- tive remplit toute la section du tube, la gaine catho- dique s’est développée en auréole et a abandonné la cathode, dont elle est séparée par un intervalle obscur. La couleur de cette auréole varie d’ailleurs avec la nature du gaz contenu dans le tube. Elle est rose dans l'hydrogène, jaune pale dans l’oxygène, violette dans l’azote, verdâtre dans le gaz carbonique, etc. Dans un tube plus complètement épuisé, jusqu’à une pression de l’ordre de un centième ou de un millième de millimètre de mercure, la lumière anodique reste confinée au voisinage de l’anode ; au contraire, l’au- réole cathodique s’est développée et se fond dans l’es- pace sombre qui l’entoure. Il est intéressant de remarquer que, quoique lumi- nescents, les gaz dont la pression n’est pas trop affai- blie n’ont pas une température élevée. D’après les tra- vaux de M. Warburg, elle ne dépasserait guère celle de l’eau bouillante. C’est donc de la lumière froide, la lumière rèvée par les électriciens, obtenue, sans gaspillage d’énergie, sous forme de chaleur.Rappelez-vous que, sur 100 francs RE , machine électrique et cathode le fil communiquant avec le pôle négatif. Ho o d'électricité payés à l’usine et qui passent dans votre lampe, 5 francs et moins sont seulement utilisés sous forme de lumière, le reste ne servant qu’à mettre la lampe hors de service. Espérons que la lampe récente de M. Cooper-Hervit, simple tube de Geissler à vapeur de mercure, tiendra ses promesses d'économie prodigieuse, 90 0/0. Ancienne conception de la matière. C’est lorsque la pression est de l’ordre du millième de millimètre que se produisentles phénomènes dont je me propose de vous entretenir. Ce vide ne peut être obtenu qu'avec des soins tout particuliers, car, si on veut opérer sur des gaz purs, comme 1l est nécessaire de le faire pour étudier l’in- fluence de leur nature, il faut exclure de la construc- tion des appareils à vide tout lubréfiant des robinets, les graisses, les huiles, les pétroles émettant toujours assez de vapeurs pour altérer leur pureté. A ce degré de vide, le poids de la matière contenue dans les tubes est extraordinairement faible, une frac- tion de millième de milligramme. On ne voit pas évi- demment la différence qu’il y a entre cette quantité et rien du tout. Dire en effet qu’un pareil tube n’est pas vide, ce qui est exact, c’est dire qu’une barrique n’est pas vide parce qu'elle contient une goutte d’eau. Comme conséquence, le nombre des atomes contenus dans un même volume est 1,000,000 de fois plus petit que dans les conditions normales ; par suite, leur dis- tance est cent fois plus grande dans toutes les direc- tions, de sorte que leur mobilité se trouve accrue ; SE sans chocs, ils peuvent maintenant parcourir ces dis- tances plus grandes. Puisque je viens de prononcer le mot d’atome, je vous rappelle que l’étude des phénomènes physiques et chimiques avait amené les savants à considérer la matière comme non divisible à l'infini. La dernière subdivision des parcelles matérielles devait aboutir à des particules insécables, les atomes. On avait même déterminé, dans le cas des gaz, leur grandeur, leur distance réciproque, leur vitesse, dont le brusque arrêt dû aux chocs donnait naissance à la pression. Dire que l’atome était insécable, c'était dépasser la portée de l'expérience, car, du fait qu'aucune force physique connue ne pouvait le diviser, il n'en résultait pas qu'il fût insécable d’une manière absolue, mais simplement que dans aucune des expériences réalisées il ne se subdivisait. Afin d’être moins surpris par les résultats dont nous aurons l’occasion de parler, il est bon que je vous en fasse connaître le nombre dans ce tube. La connais- sance de leurs dimensions permet de les compter; mais il est plus intéressant d'exprimer ce nombre au- trement que par sa valeur arithmétique. Imaginez que chaque atome du gaz du tube repré- sente un grain de sable fin, la quantité en est tellement prodigieuse qu’il serait possible avec tous ces grains de constituer une plage de 1 mètre d'épaisseur, 100 mètres de large et 400 kilomètres de long. Et tout cela ne pèse pas un millième de milligramme. 3 Ron Phénomènes de phosphorescence. Un des premiers effets remarquables signalés par Hittorf dans des tubes ainsi épuisés fut la phospho- rescence de la partie de la paroi opposée à la cathode. Si cette dernière est plane, une tache lumineuse apparaît sur la partie du tube qui lui est placée nor- malement; et, ce qui est curieux. sa position ne dépend nullement de celle de l’anode, comme le démontre une expérience classique due à Crookes. Ce savant emploie deux tubes identiques, mais iné- galement épuisés, portant une seule cathode plane et trois anodes. Dans le premier (fig. 1), où la pression est encore de quelques millimètres de mercure, la décharge décrit une trainée lumineuse qui joint les deux électrodes (1). Dans le second tube (fig. 2), où le vide est poussé Jus- qu’au millième de millimètre, on observe invariable- ment la tache phosphorescente en T, c’est-à-dire sur la partie du tube opposée normalement à la cathode. Interprétation balistique. Crookes émit le premier une hypothèse qui explique bien l’ensemble de faits que nous rencontrerons. D’après ce savant, à ce degré de raréfaction, l’état de la matière différerait tout autant de l’état gazeux que celui-ci diffère de l’état liquide et serait caractérisé par des propriétés nouvelles ; en particulier, les parti- cules matérielles plus mobiles pourraient éprouver des déplacements plus considérables, et ce seraient les (1) Dans les figures, l'anode est indiquée par le signe +, et la cathode par le signe —. ose chocs de la matière lancée normalement par la cathode contre la paroi qui provoqueraient la phosphorescence du tube, de telle sorte que les rayons cathodiques ne sont alors que de simples lignes géométriques, les trajectoires rectilignes décrites par les particules pro- jetées. Pour employer le mot de Crookes, on se trouve en présence d’un bombardement de projectiles infini- ment petits que la cathode lance devant elle avec une vitesse considérable, dont nous aurons d’ailleurs à rechercher la cause. I] ne faudrait pas croire que ce pouvoir de phospho- rescence appartienne exclusivement au verre. Les corps les plus divers, atteints par le bombardement cathodique, s’illuminent des plus vives couleurs : le diamant, l'oxyde de zinc, en vert; le rubis, l’alumine, en rouge ; la craie, en orange ; le cristal, en bleu, etc. Les gaz eux-mêmes deviennent luminescents, mais faiblement. Cette propriété a d’ailleurs, dans ce cas, une importance capitale, puisque le sillon de feu tracé par la particule, comme la traînée lumineuse de l’aé- rolithe dans l'air, permet d'étudier la forme de la trajectoire décrite, c’est-à-dire du rayon cathodique. Effets mécaniques. Une pensée se présente tout naturellement à l'esprit. Ces projectiles, malgré leur petitesse, seraient-ils Ca- pables de provoquer un mouvement, quelque faible qu'il füt. Crookes a tenté l'expérience avec un plein succès. Il place un moulinet à ailes de mica (fig. 3) sur deux rails parallèles en verre. Dès qu'il est atteint par Île Shop en bombardement cathodique, il tourne en se déplaçant | dans le sens prévu, sens de la flèche dans le cas de la figure. Il est évident qu'une inversion des pôles change le sens du mouvement. Mais Crookes est encore allé plus loin. Si la cathode lance réellement des projectiles, elle subit une réaction de leur parten sens inverse, et, comme une pièce d'artillerie, elle doit éprouver un recul ; c’est ce qui confirme l’expérience. En constituant la cathode par une lame d'aluminium mobile dont la face arrière est recouverte de mica, afin que l'émission n’ait pas lieu par cette face, elle se renverse à chaque décharge. Ces projectiles invisibles sont même capables de traverser les corps et de se propager au-delà lorsque leur épaisseur n’est que de quelques millièmes de millimètre. M. Gouy a d’ailleurs montré que, s'ils sont incapa- bles d’en traverser de plus grandes, par exemple les parois du tube, ils n’en pénètrent pas moins à l’inté- rieur des corps atteints. En chauffant jusqu’à fusion du verre un tube resté longtemps en usage, ce savant a pu constater que la masse gazeuse qui avait pénétré était assez suffisante pour qu’en s’agglomérant elle formât de petites bulles visibles au microscope. Dans certaines conditions, la cathode projette aussi des particules arrachées au métal même qui la con- stitue. Un savant américain a pu, en la formant de métaux convenablement choisis, projeter assez de leur matière à l’intérieur des pierres précieuses pour les DC colorer. Et, ce qui est curieux, tandis que les agents chimiques sont sans action sur ces colorations, un simple renversement du sens du courant suffit pour les faire disparaître. De telle sorte qu’il est pos- sible de transformer un corindon incolore en un ma- gnifique rubis et même en émeraude quand le rubis a cessé de plaire. Eîfets calorifiques. Un autre effet bien connu des projectiles, c’est de produire l’échauffement des obstacles qu'ils frappent ; par exemple, le fer s’échauffe, sous les chocs répétés du marteau, au point de devenir brülant. Nous pou- vons donc prévoir que le bombardement cathodique doit élever la tempéräture du corps sur lequel on le dirige. Cette élévation peut être même considérable, comme le montre l’expérience suivante, due encore à Crookes. Dans un tube à vide il place une large cathode con- cave, et à son foyer, où viennent converger les projec- tiles, il met une lame de platine iridié. Quelques dé- charges suffisent pour la porter au blanc et même jusqu’à son point de fusion, supérieur cependant à 1,8000. Dans cette expérience, d’ailleurs, les effets calorifi- ques et mécaniques se superposent. Peu à peu la lame s’emboutit et finit même par se percer. On ne connaît pas de limite à la température qu'on peut ainsi atteindre. Crookes y a réalisé des expé- riences exigeant 3,600°, d’après M. Moissan, et ce n’est certainement pas la limite maximum. DRE AR Effets chimiques. Voici maintenant des effets d’un tout autre ordre. Grâce à leur énergie, les corpuscules cathodiques sont capables de produire des actions chimiques. La composition d’un grand nombre de corps se modifie. L’oxyde de cuivre, qui est noir, donne du cuivre rouge par perte d'oxygène; le cristal, qui estun verre à base de plomb, noircit par la mise en liberté de plomb métallique ; le silicate cuivrique, qui forme un verre vert, se transforme peu à peu en silicate cui- vreux et devient par suite rouge; les sels de potas- sium, de sodium, se colorent en donnant des sous- sels, etc. Pour effectuer ces réactions chimiques, il suffit de placer le composé sur le trajet du faisceau cathodique. Réflexion sur leur nature. Ce qui est tout à fait étonnant, c’est que les effets obtenus sont indépendants de la nature du gaz rési- duel contenu dans l’ampoule. Que ce soit de l’hydro- gène, de l'oxygène, de l'azote, etc., les produits de dé-. composition sont toujours les mêmes. Tous y sont actifs au même degré et semblent avoir acquis les mèmes propriétés chimiques. Tout se passe comme si, dans tous les cas, la cathode lançait une même sub- stance, ou, si on veut, comme siles rayons cathodiques étaient formés par une matière commune. Tels étaient à peu près les résultats acquis pendant la période qui s'étend de 1870 à 1890. ESC (0) EE Effets provoqués dans l'air. À partir de cette époque les physiciens sondent les ampoules dans tous les coins, scrutent le ‘faisceau cathodique dans toutes les directions, et les résultats importants s’accroissent d’une façon prodigieuse. Un savant allemand, Lénard, profitant de ce que les particules cathodiques peuvent traverser les lames minces, arrive à les faire sortir de l’ampoule dans laquelle seulement il avait été possible de les étudier jusque-là. Le procédé très simple qu’il emploie consiste à creuser une petite fenêtre sur la paroi du tube opposée à la cathode et à la fermer par une feuille d’alumi- nium de trois millièmes de millimètre. Les effets précédemment décrits subsistent, même dans l’atmosphère ; mais, à cause de la résistance pro- duite par le frottement de l’air, la distance parcourue par les particules projetées est bien plus faible ; leur vitesse est d’un autre côté réduite par le passage à travers la feuille d'aluminium. Un écran phosphores- cent, par exemple, ne s’illuminerä plus qu’à quelques centimètres de la croisée. De nouvelles propriétés sont alors découvertes, On observe que, sous l'influence du bombardement catho- dique, la charge des corps électrisés se dissipe L'air qui les environne devient subitement conducteur. Un effet plus singulier encore, c’est que, sous la décharge cathodique, l'humidité de l'air sursaturé se condense et la masse d’air transparent est peu à peu remplacée par un brouillard opaque. Ce résultat est le même que celui qu’on obtient avec de fines pous- UD — sières. Dans l’air pur, la vapeur ne se condense pas, mais la projection d’une fine poussière donne lieu à la formation d’un nuage, dont les gouttes d’eau ont pour noyau un des grains. Rayons X. — Leurs propriétés. Mais de toutes les découvertes, celle qui eut le plus grand retentissement et qui se montra la plus féconde en résultats immédiatement pratiques fut certaine- ment la découverte des rayons X. Rœntgen, qui s’'occupait de radiations cathodiques, avait été amené, pour étudier quelques-uns de leurs effets, à opérer dans l’obscurité. Toutes les fenêtres de son laboratoire étaient closes, l’ampoule elle-même était enfermée dans une boîte de carton, de sorte qu'aucune lumière ne pouvait en sortir. Il était donc dans une nuit complète. Naturellement, au voisinage de ce dispositif se trouvaient ces substances phospho- rescentes si éminemment précieuses pour l'étude du faisceau cathodique. Quand il excita sa bobine, quelle ne fut pas sa sur- prise de voir, à chaque décharge, des paillettes de pla- tino-cyanure de baryum disséminées autour du tube émettre autant d’étincelles! Un écran enduit de la même substance, approché de l’ampoule, s’illumina aussi à chaque décharge, et cela malgré les obstacles : livres, planches, etc., qu’il intercalait entre le tube et l'écran. Il arriva même que, sa main ayant été par hasard placée dans cet intervalle, il vit son propre squelette se projeter en noir sur la luminescence livide de l'écran. Mn RE La radioscopie était découverte. Il était évidemment impossible d'attribuer de tels effets à l’action directe des rayons cathodiques, puis- qu'ils ne peuvent franchir le verre de l'ampoule. Mais l'étude du nouveau phénomène lui montra que de la portion de paroi phosphorescente, c’est-à-dire de celle qui est atteinte par les projectiles cathodiques, émanent des radiations spéciales, immatérielles, qu’il baptisa du nom de rayons X. On ne connaît pas bien encore la nature de ce rayon- nement, qui semble cependantêtre une nouvelle forme du mouvement vibratoire de l’éther, et non une pro- jection de matière. C’est dans l’ébranlement de l’éther produit par le choc des particules cathodiques contre les obstacles que se trouverait la cause de ce rayon- nement. Ces rayons de Ræntgen traversent facilement des épaisseurs même considérables de corps légers : bois, papier, chairs, etc...; ils sont, au contraire, facilement interceptés par les corps lourds : minéraux, os, mé- taux, etc..., de sorte qu’un écran de platino-cyanure de baryum s'illuminera derrière les premiers et ne s’'illuminera pas derrière les derniers. Cela explique complètement les phénomènes radio- scopiques. Lorsqu'on place la main entre une ampoule et un écran, les chairs n’arrêtent que partiellement les radiations et l’écran s’illumine derrière elles, tandis que derrière les os qui les absorbent complètement aucune phosphorescence ne se produit. Ce que l’on observe en radioscopie, ce sont donc des ombres portées analogues à celles que l’on produit en intercalant la main entre une lampe et un mur. Les rayons Rœæntgen ont quelques-unes des pro- priétés des radiations cathodiques. Comme elles ils déchargent les corps électrisés, ils provoquent des actions chimiques. Ils agissent aussi sur les plaques photographiques ; de sorte que, dans l'expérience pré- cédente, en remplaçant l’écran par une plaque sensible, on obtiendra l’image de l’ombre portée, la plaque ne recevant aucune impression aux points où l’écran ne s’illuminait pas. C’est la radiographie. Personne n’ignore aujourd’hui combien a été pré- cieux l’appui apporté aux médecins par l'emploi des rayons X. Grâce à la radioscopie, à la radiographie, leur diagnostic à pu être complété. On a pu ainsi recon- naître directement les altérations morbides des tissus des organes intérieurs. Grâce à ces rayons, le scalpel du chirurgien peut être sûrement dirigé vers le corps étranger à extraire des parties profondes où il a péné- tré. les fractures des os, bon nombre de troubles pathologiques peuvent être ainsi nettement déter- minés. Rien n’est plus facile que de suivre les terribles progrès de la tuberculose par les maculatures pro- duites sur l’écran par les cavernes des poumons. Ils ont d’ailleurs une action physiologique directe. S'ils sont, en général, sans danger pour les patients qui ne les subisseat que pendant de trop courtes poses, il n’en est pas de même pour les opérateurs exposés longtemps et souvent à leur rayonnement. Les cheveux. blanchissent et deviennent cassants, les ongles s’ef- fritent, la peau s’enflamme et s’exfolie. Ce sont ces faits qui ont conduit les médecins à les utiliser en thérapeutique avec un certain succès ; en TOUS particulier dans le cas du traitement du lupus et du cancer. Parlant de leur efficacité, le docteur Desfosses s'exprime ainsi: ( La thérapeutique possède actuelle- » ment un merveilleux moyen de guérison des cancers » de la peau. Si jusqu'ici cette méthode a échoué dans » les cancers profonds, quelques essais permettent le » plus encourageant espoir. » Je ne m'étendrai pas sur la techniqueradiographique, malgré les curieux progrès qu’elle a faits. J’en ai exposé le principe, et une étude détaillée ne nous apprendrait rien de nouveau. Il me suffit de vous signaler que, malgré ses perfectionnements, elle à con- servé le caractère de simplicité qui fit son succès dès le premier jour. CHAPITRE IL. Electrisation des particules cathodiques. Voici maintenant des résultats qui vont nous dévoiler plus profondément la nature des rayons cathodiques. Un point d’une importance capitale, c’est l’électri- sation des particules qui les constituent ; elles portent une charge électrique négative. Quelques essais avaient été tentés pour le démontrer, mais la correction des expériences soulevait certaines objections et, en présence d’un pareil résultat, il était impossible de se contenter d’une demi-certitude. M. Perrin à mis le fait hors de doute par une expé- rience très élégante et très simple. Un conducteur relié à un électroscope est enfermé dans une enveloppe métallique, qui l’entoure sans le toucher. Cette enveloppe amincie sur une partie est 1/7 ensuite reliée au sol. Elle constitue alors un écran élec- trique parfait pour le conducteur intérieur ; c’est la disposition classique de la cage de Faradev. On sait que la plus puissante machine, en agissant sur cette enveloppe, ne provoquera aucun mouvement d'élec- tricité sur le corps intérieur. Si cependant on dirige sur ce dernier le faisceau cathodique à travers la partie amincie, on voit les feuilles de l’électroscope diverger et la divergence s’accroître à chaque décharge. Les particules qui ont traversé l’enveloppe avaient donc une charge électrique qu'ils ont cédée au corps intérieur. | Il est d’ailleurs facile de s'assurer par l’électroscope que cette charge est négative. Origine de leur vitesse. Un autre point intéressant est révélé par l'étude de la force électrique, du champ électrique à l’intérieur des tubes. L'expérience montre que cette force électrique, très faible dans ses diverses parties, est, au contraire, extrêmement intense au voisinage de la cathode. C’est évidemment la cause de la vitesse qui anime les particules. Chacune d'elles étant électrisée et se trouvant dans un champ intense prend ainsi une vitesse considérable. Afflux cathodique. Puisque les corpuscules cathodiques portent une charge électrique négative, on peut se demander où se trouve la charge positive équivalente qui a dû être ee également libérée, puisque l’expérience a mille fois montré dans d’autres cas l'impossibilité de mettre en liberté une charge d’une seule espèce. Les savants n’ont pas tardé à la découvrir dans l’af- flux. Lorsqu'on examine attentivement la cathode, on constate l’existence d’une sorte de gerbe violacée qui semble implantée sur elle, c’est l’afflux cathodique constitué par des particules matérielles chargées posi- tivement qui viennent alimenter l'émission catho- dique. Si la cathode lance des projectiles devant elle, elle est à son tour bombardée par les projectiles de l’afflux. La matière parcourt donc une sorte de cycle dans les tubes à vide. S'éloignant de la cathode dans le fais- ceau cathodique, elle y retourne dans lafflux. Les particules de ce nouveau rayonnement ont évi- demment les propriétés mécaniques de celles du rayon- nement cathodique. C’est pour cette raison que la tem- pérature de la cathode peut s'élever considérablement ; le verre peut même y fondre. Une expérience curieuse permet de séparer ces deux sortes de particules. Si l’on perfore la cathode en face du point d'impact de l’afflux, les particules de ce der- nier rayonnement, emportées par leur élan, fran- chissent l’ouverture et pénètrent dans l’espace situé derrière, où elles se trouvent isolées, formant ce que l’on a appelé les kanalstrahlen ou rayons de Goldstein. Comme les particules cathodiques, elles provoquent la phosphorescence, elles déchargent les corps élec- trisés, etc. En résumé, nous avons constaté trois sortes de En Dee radiations dans le tube Crookes : les rayons X, de nature immatérielle et mal connue ; les rayons catho- diques formés par des corpuscules matériels, chargés négativement et projetés par la cathode ; enfin l’afflux formé par des particules matérielles aussi, mais Char- gées positivement et dirigées vers la cathode. . Dans ce qui va suivre je ne m'’occuperai que de ces projections matérielles. à Action sur les particules des corps électrisés ou aimantés. L’électrisation des corpuscules aura des consé- quences qu’on peut immédiatement prévoir. Les masses cathodiques, chargées négativement, doivent être repoussées par les corps électrisés négativement et attirées par les corps à charge positive. Au voisi- nage de tels corps, leur direction doit donc changer et leur trajectoire cesser d’être rectiligne. Elle doit selon les cas s’infléchir dans un sens ou dans l’autre, c’est ce que l'expérience confirme. Mais il y a plus. Dans la géniale conception de la nature de l'électricité due à Maxwell, un corps élec- trisé en mouvement jouit des propriétés des courants Ce résultat a été vérifié expérimentalement par Rowland et, plus récemment, dans une expérience contradic- toire faite à la Sorbonne par deux physiciens français et américain qui avaient séparément abouti à des résultats contraires. Or, on sait que les aimants agissent sur les courants, les attirant ou les repoussant suivant leurs positions relatives ; les aimants doivent donc agir sur les rayons cathodiques et sur l’afflux. Te Rien n’est plus facile à montrer. En approchant ou en éloignant un aimant d’un tube en activité, on voit la tache lumineuse opposée à la cathode se déplacer, mon- trant ainsi la déformation de la trajectoire décrite par les masses cathodiques. Au moyen de champs puissants, on a pu donner à ces trajectoires des formes bien singulières pour des rayons, des courbes en arc, en forme de 8, en tire- bouchon, etc. Mesure de leur vitesse. Ce qui est extrêmement intéressant, c’est que de l’action des aimants sur les particules électrisées on a pu déduire la vitesse de ces dernières. Parmi les méthodes employées, je décrirai celle qui a été employée par M. Wiechert. Le principe en est des plus simples: déterminer l’espace parcouru pen- dant un temps connu. Imaginez un long tube de Crookes divisé en trois compartiments par deux cloisons percées d’une fente étroite O et O0’ (fig. 5). La cathode est disposée de telle facon que le rayonnement ne tombe pas sur l’ouver- ture de la première cloison O. En S se trouve une bobine de fil, un solénoïde. On sait que, lorsqu'une bobine de fil isolée est parcourue par un Courant, elle jouit des mêmes propriétés que les aimants. Ce solénoïde est placé de manière à rejeter sur la fente O le faisceau cathodique, quand seul il est traversé parle courant. La fente O’ de la seconde cloison est d’ailleurs réglée de manière à laisser passer alors le faisceau. Un second solénoïde S’ mobile le long de l’axe du HQE tube peut être parcouru par Ile même courant que Île premier. Faisons fonctionner le tube el lançcons simultané- ment un même courant pendant un temps très court dans les deux bobines, Dès que Ie courant passe, le faisceau cathodique rejeté par S traverse la fente 0; mais, si S’ est très voisin de O, ilnetraversera plus 0’, car le second solénoïde excité en même temps lui fait subir une déviation nouvelle, L'expérience moutre cependant qu'en éloignant len- tement $’ de O0, on arrive à une position telle que le faisceau passe de nouveau à travers 0”, comme si seul le solénoïde S était excité, Lorsqu'il en est ainsi, c’est que les particules cathodiques arrivent devant S?7 au moment précis où, le courantcessant de le traverser, il ne peut produire de déviation, [en résulte que lPespace compris entre O et la bobine S’ dans cette posilion est l'espace facilement mesurable parcouru pendant le temps qu'a duré Ie courant, Comme conception, c'est évidemment très simple. Seulement le tube ne peut être bien long et la vitesse est très grande, La durée du courant doit être très courte el pourtant mesurée avec précision, M, Wicchert, et c'est là l'originalité de sa méthode, a employé des courants dont il était facile d'évaluer Fa durée, bien qu'elle ne fût que de un quarante-millio- nitime de seconde, On conslale ainsi que la vilesse du rayonnement varié du simple au double avec l'état du tube, la puis- sance de la machine, ce qui s'explique aisément. Mais, dans tous les cas, celle vitesse est incroyable : OMS 50,000 kilomètres environ à la seconde pour les rayons ‘athodiques, et 10,000 kilomètres pour l’afflux. Rappelez-vous que la plus grande vitesse de notre artillerie ne dépasse guère le demi-kilomètre à la seconde, Energie de ces particules. A cette allure, l'énergie emmagasinée par les pro- jectiles est prodigieuse et pourrait produire de ter- ribles effets. Il est facilede calculer que, si l'expérience permettait à la cathode de lancer un gramme de matière, ce n’est pas seulement le tube qui serait pulvérisé, c'est La Rochelle tout entière qui serait réduite en cendres, L'énergie destructive de ce gramme de matière serait à peu près équivalente à celle que produisent les deux mille pièces d'artillerie russes et japonaises tirant à outrance pendant toute une journée, Il est remarquable que, dans les mêmes conditions. la vitesse acquise par les projectiles cathodiques est indépendante de leur nature, Les divers gaz: hydro- gène, oxygène, azote, etc., se subdivisent en particules ayant toujours même vitesse. Cela semble bien confirmer ce que nous avions déjà avancé, que le faisceau cathodique est formé toujours par la même substance, Si, à de telles vitesses, les plus petites parcelles de matière peuvent produire de si terribles effets, il faut que la masse des corpuscules projetés par la cathode soit infime, puisqu'ils en sont incapables, l pee Rapport de leur charge à leur masse. Il était intéressant de connaître leur grosseur. Les physiciens ont d’abord cherché le rapport de la charge électrique qu’ils portent à leur masse par un artifice que je vais essayer de faire comprendre. Un observateur assis au bord de l’eau s'amuse à repousser vers l’autre rive tout ce qui passe à sa portée, feuilles, branches, troncs, etc. Il est évident que plus fort il poussera, plus les objets serontrejetés; mais, d’un autre côté, plus ils seront lourds, moins il y réussira. Autrement dit les objets qui défilent devant lui seront d'autant plus déviés qu’ils seront plus légers et qu’ils auront été poussés plus fort. Si deux de ces corps ont subi la même déviation, c’est qu'ils ont même masse et qu’ils ont été également poussés, ou si l’un d’eux a une masse 10 fois plus grande, c’est qu’il a été poussé 10 fois plus fort, c'est-à- dire que, pour une même déviation, le rapport de la poussée à la masse est le même dans tous les cas. Or, une particule cathodique qui défile devant un corps électrisé négativement réalise ces conditions. Elle est d’autant plus repoussée que sa charge est plus forte et sa masse plus faible. Pour avoir le rapport cherché, il suffira donc de faire défiler devant le corps électrisé une parcelle de matière de masse connue sur laquelle on placera des charges différentes jusqu’à ce que l’on obtienne la même déviation que pour les par- ticules cathodiques. Il est vrai qu’on ne pourra pas donner à la parcelle considérée la vitesse que possèdent les particules ca- thodiques, ce qui cependant influe sur le résultat; us Rue car, si la vitesse de la parcelle est 100 fois plus petite, elle restera devant le corps 100 fois plus long- temps et subira, par suite, sa poussée pendant une durée 100 fois plus longue ; mais il sera facile d’en tenir compte, puisque l'expérience montre que les forces produisent des déviations proportionnelles aux carrés des temps pendant lesquels elles agissent. Interprétation du résultat trouvé. Le nombre qui exprime le rapport ainsi obtenu donne des résultats curieux. D'abord il est invariable et le même pour tous les corps. Il ne dépend en aucune façon de leur nature; ce qui confirme une fois de plus l’unité de la substance qui forme les rayons cathodiques Une même masse transporte donc toujours une même charge électrique. Il n’en est pas de même dans les autres cas de mor- cellement de la matière. Par exemple, dans les décom- positions électrolytiques, c’est-à-dire produites par les courants, les quantités d’électricité transportées par des masses égales dépendent de leur nature ; l’hy- drogène en transporte 8 fois plus que l’oxygène, 35 fois plus que le chlore. En outre, le rapport trouvé indique que les projec- tiles cathodiques transportent des charges électriques 2,000 fois plus grandes environ que celles qu’emporte la même masse d'hydrogène dans les phénomènes d’électrolyse, et c’est pourtant ce gaz qui en transporte le plus. De sorte que, si on admettait que les projectiles ca- thodiques sont tous de la grosseur de l’atome d’hydro- 6 — 1) —- gène, ils porteraient tous une quantité d'électricité 2,000 fois plus grande que ce gaz en électrolyse. xemarquons qu’adopter cette hypothèse, ce serait admettre la possibilité de diviser l’atome ; l'atome d'oxygène, par exemple, 8 fois plus lourd que celui de l'hydrogène, devrait se diviser en 8 parties égales pour pouvoir donner naissance à des corpuscules de «même grosseur. Mais les rayons cathodiques seraient alors constitués par une substance toujours identique à elle- même, ce qui concorderait parfaitement avec les ré- sultats précédemment obtenus. Mesure de leur charge et de leur grosseur. Un savant anglais, J.-J. Thomson, s’est proposé de vérifier l’hypothèse par une méthode extrêmement in- génieuse, [ a voulu connaître la quantité d'électricité réellement transportée par une particule. Pour cela il lui a suffi de mesurer d’abord celle qui est transportée par toute une décharge de la cathode et de compter ensuite le nombre de particules projetées, La première partie de l'expérience se réalise très simplement en lançant le bombardement dans un électromètre auquel il abandonne sa charge totale. La seconde est obtenue d’une manière pl us curieuse. Nous savons que les particules projetées dans l'air humide ont la propriété de provoquer la formation de brouillards; or, d’après ce que nous avons vu, chacune d'elles occupe le centre d’une gouttelette d’eau con- densée ; le problème est donc ramené à un autre : compter les gouttes d’eau du brouillard produit par une nouvelle décharge identique à la première. On y arrive en le laissant lentement tomber. De la vitesse de chute dans l'air que l’on mesure, le calcul permet de déduire le poids de l’une des gouttes. Comme d’un autre côté il est possible de peser la quantité de rosée qui se dépose, on en tire facilement le nombre de gouttes cherché. Les résultats donnés par cette méthode dépassent nos prévisions. Quel que soit le gaz en expérience, les particules ca- thodiques aussi bien que les particules de lafflux portent toujours la même charge, mais cette charge est la méme que celle que transporte l'atome d'hydrogène en électrolyse. Une conclusion alors s’impose. Les particules catho- diques sont donc 2,000 fois plus petites que nous l’avons supposé, 2,000 fois plus petites que l'atome le plus léger que nous connaissions, l'atome d'hydrogène, Des expériences analogues montrent que les parti- cules de l’afflux sont beaucoup plus grosses, compa- rables à cet atome. Leurs propriétés varient d’ailleurs avec la nature du gaz. Conclusion. Ainsi l’atome qu’on croyait insécable se trouve mor- celé dans le faisceau cathodique en fragments deux mille fois plus petits que le plus petit des atomes. Les particules infinitésimales auxquelles aboutit sa dernière division ont toujours les mêmes propriétés chimiques, la même grosseur, la même charge élec- trique, elc. Ces débris de l'atome forment donc une substance PARA toujours identique à elle-même, sans doute, la sub- stance unique, primordiale, rêvée par Davy, par Fara- day. Comment ne pas croire qu’on se trouve en pré- sence de la démonstration de l’unité de la matière”? Devant ce résultat merveilleux, il serait cependant attristant de penser que l’énormité de l’énergie exigée par cette dissociation nous empêcherait toujours d’at- teindre cette substance, si une autre de nos concep- tions, en s’écroulant à son tour, ne nous permettait au contraire d'espérer. Dans notre prochaine causerie, nous verrons en efiet que contre toute attente la matière n’est pasimmuable; elle n’est pas toujours en équilibre stable ; elle peut, au contraire, spontanément se dissocier, en libérant d'elle-même cette énergie. Elle paraît devoir être pour nous un réservoir presque inépuisable de forces, de nature mystérieuse encore, mais capables de réaliser les choses les plus étonnantes. ME LE RADIUM CHAPITRE PREMIER. Expériences de Becquerel. — Gonséquences. Après la découverte des rayons X émis par les substances phosphorescentes placées dans le tube Crookes, les physiciens se demandèrent si cette phos- phorescence n’était pas la cause même de leur produc- tion, ou tout au moins si des substances rendues ER ue phosphorescentes par d’autres procédés n'en émet- traient pas aussi. De nombreux essais furent tentés sur les corps qui, comme les suliures de baryum, de calcium, etc., expo- sés à la lumière, deviennent à leur tour luminescents. Seuls, les résultats avec l’uranium, obtenus par M. Henri Becquerel, furent décisifs. L’uranium est un métal lourd, presque aussi lourd que le platine, blanc de fer, qu’on extrait de la pech- blende, son principal minerai. Cette pechblende, dont les principaux gisements se trouvent en Bohême et en Saxe, contient 80 °/, environ d'oxyde d'uranium. Elle fut longtemps confondue avec d’autres minerais, en particulier avec ceux de zine. Ce précieux métal semblait vouloir nous dérober ses curieuses propriétés. Ce fut Klaproth qui, en 1789, découvrit que la pech- blende contenait une substance nouvelle, maïs il se trompa encore et prit pour un métal nouveau, qu’il appela wrane, ce qui, en réalité, n’était qu'un oxyde. Cette erreur se continua jusqu’en 1848, époque à laquelle un chimiste français, Péligot, isola réellement le métal, auquel il donna le nom d’uranium. Exposés à la lumière, les sels de ce métal prennent une magnifique fluorescence verdâtre, qui avait long- temps retenu l’attention d’un physicien français dont les travaux sur les corps luminescents sont demeurés classiques, Edmond Becquerel, justement le père de Henri Becquerel, dont nous allons décrire les expé- périences. Ce dernier savant, après avoir enveloppé une plaque photographique de papier noir, plaça au-dessus quel- MR ques cristaux de sulfate d'uranium et exposa le tout à la lumiére, Aprés 48 heures d'exposition, il développa sa plaque et constats qu'elle avait été impressionnée à l’endroit où étaient déposés les cristaux. Ils émettaient donc des rayons capables de traverser les corps opaques et d'agir sur les plaques sensibles. Ce fut en février 1896 que, dans une note adressée à l'Académie des sciences, il fit connaître ces premiers résultats. Il était persuadé alors que la fluorescence était in- dispensable 4 la production du phénoméne, mais il ne tardait pas, par une belle série de recherches, à dé- montrer qu'il n’en était pas ainsi. Non seulement le sulfate, mais tous les sels d’ura- pnium et ce métal lui-méme, conservés dans l'obscurité, émettent indéfiniment de pareilles radiations. : Cette dernière expérience eut un retentissement considérable ; elle posait, en effet, un probléme trou- blant, Nous avons déja vu dans notre première causerie la possibilité de subdiviser l'atome. Cela nous a bien un peu surpris, mais, somme toute, le fait était prévu. La nouvelle découverte, au contraire, entraînait des conséquences inattendues. Elle paraissait en contra- diction formelle avec le principe de Ia conservation de l'énergie, base sur laquelle repose toute la mécanique physique, Des milliers d'expériences avaient cepen- dant semblé établir définitivement l'impossibilité de toute création d'énergie, nos moyens d’action se bor- nant à de simples transformations de ses diverses manifestations. On avait donc le droit d'affirmer que { toute apparition d’une certaine quantité sous l’une de ses formes, chaleur, travail, lumiëére, etc., entrainait la disparition simultanée d’une quantité équivalente sous une autre. Or, les propriétés nouvelles de l’uranïum semblaient bien en opposition avec cette affirmation, puisque sans variation de poids, de température, sans variation d'aucun de ses caractères, il rayonnait de l’énergie depuis des siècies et paraissait n’en puiser nulle part. Les savants se mirent avec ardeur à l’étude de ce rayonnement, qu’ils baptisérent, à juste titre, du nom de rayonnement Becquerel. Mesure de l'intensité du rayonnement Becquerel. Les premières recherches eurent pour but d’étudier sa nature, ce qui était difficile à cause de son inten- sité trés faible. Cependant on parvint à les identifier avec les rayons X. Comme ces derniers, Je rayonne- ment de l'uranium est capable de décharger les corps électrisés sur lesquels il agit. Becquerel, en utilisant cette propriété, a méme ima- giné une méthode trés simple, qui permet de mesurer son intensité. Elle consiste à placer le corps à étudier à l’intérieur d’un électromètre, auquel on à primitivement commu- niqué une charge, toujours la méme, c'est-à-dire pro- duisant toujours la méme divergence des feuilles d’or. Sous l'influence du rayonnement, la charge de ces feuilles se dissipant, leur divergence diminue, et d'autant plus vite que son intensité est plus grande. La vitesse de cette diminution pourra donc servir de mesure à l'intensité du rayonnement. Pour avoir cette vitesse, il suffira de placer une petite règle graduée en face des feuilles, qui donnera à chaque instant leur distance, et d'observer de combien de divisions elle diminue pendant un même temps. C’est par un procédé analogue que Becquerel par- vint à montrer que, contrairement à ce qui a lieu pour la phosphorescence, l'intensité du rayonnement ura- nique ne dépend pas de l’état physique des corps con- sidérés, mais uniquement de la quantité d'uranium qu’ils renferment Qu'il soit pur ou impur, combiné ou libre, chaud ou froid, etc., une même quantité de ce métal émet toujours le même rayonnement. Par suite, l'uranium métallique pur est de tous les corps celui qui a le rayonnement le plus intense, à poids égaux. C'est le plus radio-actif, puisque tel est le nom qu’on leur donne. Autres corps radio-actifs. Les physiciens ne manquèrent pas d’essayer dans l’électroscope tous les corps connus, afin de savoir si, seul, l’uranium jouissait de telles propriétés ; mais ce ne fut que deux ans après la découverte de Becquerel que M. Schmidt, en avril 1898, fit savoir que le tho- rium était aussi radio-actif. Le thorium est un métal, lourd à peu près comme le plomb, dont l’oxyde forme la matière des manchons des becs Auer. Peu de jours après, Mme Curie retrouva les résultats de M. Schmidt, qu’elle ignorait, et signala même une anomalie singulière. Certaines pechblendes sont beau- en coup plus actives que l’uranium lui-même, ce qui est en contradiction avec la règle de Becquerel. Bien plus, les résidus de ce minerai, dont on a séparé par voie chimique tout l’uranium qu'ils contenaient, se montrent encore plus radio-actifs que lui. Ces faits n’admettent qu'une interprétation, c’est que dans la pechblende, à côté de l’uranium, existent d’autres corps jouissant de cette même propriété. Le pouvoir radio-actit de ces corps hypothétiques doit être même énorme, attendu que, s'ils existent dans ces résidus, cela ne peut être qu’à l’état de traces, puisque la composition de ces résidus nous est connue, et qu'aucun de ses éléments ne possède ce pouvoir. Préparation du radium. Mn: Curie n’hésita pas à tenter d’isoler un corps ou des corps présentant un aussi grand intérêt. L'opération était colossale, car, pour en obtenir une quantité appréciable, il fallait opérer sur des masses énormes de ces résidus. M®° Curie et son mari, qui vint lui apporter l’appui de sa profonde érudition, résolurent d’essayer sur une tonne, que le gouverne- ment autrichien, propriétaire des mines de Joachims- thal, voulut bien mettre à leur disposition. Ce traitement ne pouvait évidemment se faire dans un laboratoire, il exigeait le matériel d’une usine, car il devait exiger la manipulation d’une dizaine de wagons d’eau et de produits chimiques. Ce fut la Société centrale de produits chimiques qui s’offrit pour l’effectuer. Je ne parlerai pas en détail des opérations chimiques 60e par lesquelles on arrive à l’isoler ; elles sont identiques aux procédés généraux qu’on emploie pour les autres corps. Elles consistent à traiter la matière en expé- rience par un réactif chimique qui dissout quelques- uns de ses éléments et est sans action sur les autres. On filtre la dissolution, on l’évapore ; on a aussi divisé la matière primitive en deux parties, la partie inso- luble dans le réactif qui est resté sur le filtre et le résidu de l’évaporation de la partie dissoute, chacune d'elles contenant des éléments différents. En répétant avec des réactifs convenables les mêmes opérationssur ces nouvelles parties, on arrivera finalement à frac- tionner la substance primitive en tous ses éléments. Dans le cas actuel, chaque traitement doit conduire à deux portions, dont l’une sera dépourvue du rayon- nement, et l’autre, au contraire, aura un pouvoir radio-actif croissant à mesure que s’élèvera la propor- tion du corps cherché qu'elle contient, ce qui servira à les guider dans leurs recherches. C’est par un tel procédé que Me et M. Curie arri- vèrent à un résidu de bismuth extrêmement actif, et comme ce dernier métal ne l’est pas, ils en conclurent qu’à côté de lui s’y trouvait un corps de propriétés chimiques voisines, mais à rayonnement considérable, auxquels ils donnèrent le nom de polonium. Les propriétés de l'émission de ce nouveau métal différent beaucoup de celles de l'émission de l’ura nium.On peut mêmeencore élever des doutes sur l’exis- tence de ce corps nouveau, Car on n’a pas encore obtenu son spectre, ce caractère individuel de tous les éléments. Traçons une fente très fine dans un carton et pla- RUES cons-la devant une lampe à alcool à flamme incolore, ou mieux devant un bec de gaz brülant bleu. Plaçons- nous dans l’obscurité et observons-la à travers un prisme de verre, nous la trouverons sans éclat. Plaçons un morceau de sel dans la flamme, la fente nous apparaîtra alors sous la forme d’une éclatante raie jaune. Cette raie jaune constitue le spectre du sodium, métal contenu dans le sel. Introduisons maintenant dans la flamme un peu de .salpêtre ; on observera non plus une seule fente, une seule raie, mais un ensemble de raies de couleur difié- rente, en particulier une raie rouge. E’est à l’ensemble de raies ainsi obtenues qu’on donne le nom de spectre. La couleur et le nombre de ces raies sont caractéristiques des corps considérés ; aucun autre ne les donnera, ou, si on veut, deux mé- taux difiérents n’ont pas le même spectre. Le spectre est donc en quelque sorte la carte d'identité des élé- ments. Il permettra de les reconnaître dans tout mé- lange, dans toute combinaison. Or, dans le cas présent, on n’a jamais observé que les raies propres au baryum. Il se peut d’ailleurs que, quoique très sensible, puisqu'on obtient ces raies avec des fractions de millième de milligramme, cette mé- thode le soit encore moins que l’électromètre pour les corps radio-actifs ou encore que l'éclat du spectre du bismuth masque ici celui du polonium. Quoi qu'il en soit, ils obtinrent ainsi un second résidu formé en grande partie de baryum, mais ayant un rayonnement d’une intensité cinquante fois plus grande que celui de l’uranium. Mais ici encore la séparation du baryum du corps pou hypothétique radio-actif paraissait impossible, telle- ment sont voisines leurs propriétés chimiques. Heu- reusement ils découvrirent que le chlorure de baryum était beaucoup plus soluble dans l’eau que le chlorure du corps cherché. De sorte que par une série de disso- lutions faites à chaud, accompagnées de cristallisa- tions par refroidissement, ils obtenaient des cristaux de plus en plus riches en substance active, qui, exa- minés par M. Demarçay, donnèrent un spectre dans lequel apparaissaient des raies nouvelles mettant hors de doute l’existence d’un élément nouveau qu'ils appe- lèrent radium. Après un long travail, ils arrivèrent enfin, par cette méthode, à obtenir son chlorure pur, sous forme de cristaux, dont le pouvoir radio-actif est 2,000,000 de fois environ plus grand que celui de l’uranium, mais la quantité obtenue était extrêmement faible, de sorte que le traitement long et dispendieux dont nous venons de parler porte à plusieurs centaines de mille francs le gramme la valeur du radium. Familles des corps radio-actifs. Pour être complet, je vous signalerai que M. Debierne a découvert qu’une autre partie du traitement, riche surtout en thorium, a aussi un pouvoir radio-actif considérable, mais différent de celui du radium par quelques-unes de ces propriétés. Il admet donc qu’à côté de ce métal s’en trouverait un autre, dont les pro- priétés chimiques sont analogues, auquel il a donné le nom d’actinium, bien qu’on n'ait pas non plus obtenu son spectre. Ro ee Il est remarquable que les corps radio-actifs sont ceux dont le poids atomique est le plus lourd. L’atome d'uranium, le plus iourd de tous les atomes connus, pèse 240 fois plus que celui de l'hydrogène, celui du thorium pèse 233 fois plus, celui du radium 225 fois plus. C’est conforme aux prévisions de Mendeleff, suivant lesquelles les propriétés des corps sont en relation avec leur poids atomique. Ce savant, en s'appuyant sur cette idée, a même donné des corps simples une classification intéressante sur laquelle je n’insisterai pas, me bornant à faire remarquer deux points. D’une part, l’uranium avec le poids atomique alors admis, 120, se présentait comme une exception et n'avait pas de place dans cette division en familles. Il en avait une toute naturelle, au contraire, si on admet- tait que son poids atomique est double, 240 ; ce que l’expérience a confirmé depuis. D'autre part, d’après Mendeleff, les familles sont incomplètes; des corps dont on peut, à priori, prévoir les propriétés manquent, et, en effet, une série de corps découverts dans ces dernières années, le gal- lium, le germanium, etc., sont venus avec leurs pro- priétés prévues combler les lacunes signalées. Le radium est dans le même cas, et les lacunes qui l’entourent ainsi que le thorium, l’uranium, permettent d’espérer la découverte future de nouveaux corps radio-actifs. CHAPITRE Il. Effets produits par le rayonnement du radium. Les propriétés merveilleuses du radium vont nous dévoiler bien des mystères. Les effets de son rayonne- ge ment sont analogues à ceux que nous a déjà donnés le tube Crookes, mais amplifiés dans une proportion énorme. L'action photographique, la provocation de la phosphorescence, la décharge des corps électrisés, {a formation de brouillards sont autant de ses proprié- tés; mais ce n’est plus à quelques centimètres, c’est à plusieurs mètres qu’on peut les produire, L'action phy- siologique est si considérable que plusieurs physiciens en ont été victimes. Les doigts des opérateurs qui ma- nipulent cette précieuse substance durcissent, s’en- flamment. Les graines exposées à son rayonnement meurent et deviennent incapables de germer ; les bac- téries sont détruites, des souris ne tardent pas à périr. Tout le monde connaît l’accident survenu à M. Bec- querel. Ayant placé, pendant quelques heures, dans la poche de son gilet un tube contenant du radium, il s’apercevait, huit jours après, qu’une tache rouge s'était formée sur la peau, en face de ce tube. Peu après se formait une plaie suppurante, dont la gué- rison demanda plus d’un mois de traitement. Ce fut avec ardeur que les physiciens entreprirent l’étude de ce puissant rayonnement, qui leur parut tout d’abord très complexe. Nature de ce rayonnement. Une expérience de Becquerel va nous permettre de simplifier l’exposition de leurs résultats en nous dévoi- lant sa nature. Ce savant, en reprenant l’action des aimants, que nous avons vu utiliser à propos des rayons cathodi- ques, constata que dans un champ puissant un fais- pes mn ceau de rayons émis par le radium se divisait en trois autres. L’un de ees faisceaux conservait sa direction primitive, les deux autres étaient déviés de part et d’autre de celui-là. L'interprétation qui se présentait naturellement à l'esprit était d'admettre dans le faisceau radique l’existence de trois faisceaux de nature différente : l’un non dévié, analogue aux rayons X ; les deux autres formés de particules matérielles chargés d’électricité de nom contraire. Toutes les expériences effectuées sur les radiations du tube Crookes, répétées avec cha- cun des trois faisceaux que nous venons d'isoler, con- firmèrent cette hypothèse. On a donné le nom de rayons y (gamma)aux rayons non déviés. Ils sont identiques aux rayons X. Comme eux, ils ne sont pas formés par une projection de mutière et semblent plutôt un mouvement de l'éther ; mais leur pouvoir de pénétration est considérable ; ils peuvent produire des actions photographiques à tra- vers plusieurs centimètres d'aluminium. Les rayons chargés d’électricité négative ont reçu le nom de rayons 8 (bêta). [ls sont analogues aux rayons cathodiques. Ce sont des projections de fraction d’atome. Ils sont formés de corpuscules mille fois plus petits que l’atome d'hydrogène, lancés à la vitesse fabuleuse de près de 300,000 kilomètres à la seconde. Aussi ont- ils une pénétration supérieure aux corpuscules catho- diques ; ils peuvent en effet traverser plusieurs milli- mètres de métaux, de verre, etc. La troisième catégorie de rayons porte le nom de rayons z (alpha). Ils ont les propriétés des particules de l’afflux. Ils sont formés de particules de même gros- 2667 seur, à peu près, que l'atome d'hydrogène portant une charge positive. La grandeur de leur masse et leur faible vitesse, 20,000 kilomètres à la seconde, les em- pêchent de traverser les obstacles qu’on place sur leur trajet. Une. feuille de papier suffit pour les arrêter. Crookes à pu réaliser une expérience manifestant l’existence, non plus globale de ces particules +, mais bien l’existence individuelle de chacune d’elles. Il a remarqué qu’un fragment de radium, placé à quelques millimètres d’un écran de sulfure de zinc, le rend phosphorescent. Comme l'action cesse dès qu’on in- tercale une feuille de papier, il faut en conclure qu’elle est due aux particules + qui seules alors sont arrêtées. Or, ce qui, à l’œil nu, apparaît comme une lumino- sité continue, examiné à la loupe, se montre formé d’un nombre prodigieux de points scintillants, de brillantes étincelles apparaissant la durée d’un éclair. La rapidité est telle que, d’après Crookes, l’écran pré- sente l’aspect d’une mer lumineuse en furie. Chacune de ces étincelles serait l’effet individuel d’une des particules :; elle serait le résultat du choc de cette particule contre l’écran de sulfure de zinc, révélant ainsi son existence, comme le fait l’obus, en atteignant le sol par le nuage de poussière qu'il sou- lève. Nouvelle conception de la matière. Les étonnants résultats que nous venons d'exposer vont nous permettre de donner une explication du mystère dont s’enveloppe l’uranium. Ra Les atomes des corps radio-actifs ne sont pas, d’après ce qui précède, en équilibre stable permanent ; leur rayonnement est un morcellement spontané de la matière qui les forme. L'énergie radiée trouve tout paturellement sa cause dans le caractère en quelque sorte explosif de cet atome, comme celle des éclats de l’obus dans la charge de poudre qu’il contient. Ici, pas plus qu'ailleurs, il n’y a création d'énergie; il y a une simple libération de celle qu'avait demandée la forma- tion de l’édifice atomique qui se fractionne sous nos yeux. L’atome n’est plus pour les savants une masse de matière inerte insécable, c’est un univers plein de vie. Agrandi aux dimensions du nôtre, il nous apparaîtrait, d’après Lorentz, lord Kelvin, etc., comme un système solaire dans lequel nous verrions des milliers de cor- puscules cathodiques, gros comme la terre, tourner autour de la fraction d’atome à charge positive, à une distance voisine de celle qui nous sépare du soleil. Le nombre de ces planètes, le diamètre de leurs orbites, tels sont les caractères qui différencieraientles atomes. Ce serait l’ébranlement rhythmique de l’éther qu’elles produisent dans leur rapide révolution qui donnerait naissance aux rayons diversement colorés qui se sépa- reut dans le spectre /. De telle sorte qu’on peut pré- voir qu’en modifiant leur trajectoire, le spectre d’un même atome peut être modifié ; c'est ce que l’expé- rience réalisée par Zeemann a confirmé. C’est donc dans le rapide mouvement de cet infime tourbillon que se trouve l’origine de l'énergie apparue. Le bombardement du radium est le résultat de l’écrou- lement de ces mondes. Dale Durée de la vie du radium. Malgré cette énorme émission d'énergie, l'expérience n’a pu déceler la moindre variation de poids du ra- dium. Il ne faut pas s’en étonner; nous avons d’autres exemples. M. Berthelot estime qu’une graine de musc, qui répand pourtant autour de lui une odeur si intense, ne perd qu'un milligramme dans cent mille ans. Quelle que soit la manière dont on dirige le calcul pour se rendre compte de la quantité de matière rayonnée, le résultat obtenu est toujours très faible, malgré le nombre prodigieux de particules émises, que Mme Curie évalue à 100 milliards par seconde. M. Ramsay, qui donne pour cette perte le coefficient le plus élevé, l’estime à 1 milligramme par gramme et par an. Il ne faudrait pas se hâter de conclure que dans mille ans il n’existera plus de radium, car, lorsque la perte aura réduit le gramme de radium considéré à un demi gramme, l’émission ne sera plus que de moitié, un demi-milligramme par an. Un petit calcul, qui fait entrer cette considération en ligne de compte, montre que le résultat de Ramsay signifie que dans 2,000 ans il y en aura 10 fois moins ; ou, si l’on veut, il y a 2,000 ans, il y en avait 10 fois plus qu'aujourd'hui. Son énergie. Malgré la petitesse de la masse radiée, la valeur balistique du radium n’en est pas moins considérable. La curiosité m'a poussé naturellementà calculer quel PEO pouvait bien être ce que les artilleurs appellent son potentiel explosif, c’est-à-dire la quantité d'énergie projective utilisable. La voici: un kilogramme de radium équivaut à 30,000,000 de kilogrammes de mé- linite, l'une de nos poudres les plus puissantes. Et encore n’ai-je pas tenu compte de toutes les formes de l’énergie rayonnée. On voit combien le ravitaillement d’une armée en munitions serait facile si nous savions asservir une pareille puissance. Il est vrai qu’actuelle- ment il n’y a pas 20 grammes de radium isolé dans le monde entier, qu’il coûte des centaines de mille francs le gramme, et qu’une pareille demande ferait singu- lièrement monter son cours. CHAPITRE IIL. Propriétés lumineuses, calorifiques, électriques, du radium. Après avoir étudié les surprenantes propriétés de son rayonnement, il nous reste à étudier les pro- priétés plus miraculeuses encore du radium lui-même. Il est spontanément lumineux ; quelques centi- grammes permettent de lire dans l'obscurité. Sa lumière est visible, même en fermant les yeux ; cela tient à ce que le rayonnement franchissant les pau- pières, provoque la phosphorescence des milieux de l’œil et c’est cette phosphorescence qui agit sur la rétine. Comme d’ailleurs elle est due aux rayons à grande pénétration, l'effet produit serait encore le même si on enfermait le radium dans une boîte de carton. Il en serait encore ainsi pour un aveugle qui aurait Vo conservé intacte la fonction rétinienne, par exemple, pour un infirme atteint de cataracte. M. Curie a découvert qu’il est toujours plus chaud que le milieu dans lequel on le plonge. Dans l'air, par exemple, sa température est toujours supérieure de plusieurs degrés à l’air environnant ; il doit donc dégager de la chaleur, ce qu'il est facile de constater. On peut même la mesurer. On a trouvé ainsi qu’un poids quelconque de radium peut fondre un poids de glace un peu supérieur au sien par heure, Si on pré- fère, pendant le même temps, il porterait à l’ébullition un poids égal au sien d’eau qu’on aurait refroidie par un contact prolongé avec de la glace. Enfin, pour montrer qu'aucune forme de l'énergie ne saurait lui être étrangère, ce merveilleux radium s’électrise spontanément. Introduit dans une bouteille de Leyde, il en produirait la charge automatique. C’est encore M. Curie qui fit cette découverte, d’ail- leurs inattendue. S’étant proposé d'extraire, du tube scellé dans lequel il l'avait introduit, un fragment de radium, il saisit ce tube d’une main, et de l’autre appuya une lime pour produire une légère félure. C'était la disposition classique pour recevoir la dé- charge d’une bouteille de Leyde. Dès que la lime eut suffisamment mordu, il éprouva une vive commotion en même temps que se produisait une petite étincelle. On s’explique aisément la charge spontanée de ce tube. Les particules 5, libérées par la dissociation du radium, chargées négativement, franchissent aisément l’épaisseur du verre, emportant avec elles de l’électri- cité de ce nom. Au contraire, les grosses particules 2, impuissantes à le traverser, restent confinées à l’inté- Ne rieur et cèdent ainsi leur charge positive, qui va sans cesse croissant. M. Srrutt a combiné sur ce fait une élégante expé- rience qui réalise assez bien l'apparence du mouve- ment perpétuel. Une ampoule de verre mince R (fig. 6), portant deux feuilles d’or, est suspendue par un fil de verre dans un tube dans lequel on a fait le vide. En face des feuilles d’or sont disposées deux lames métal- liques L, en relation avec le sol par un fil de platine qui traverse le tube. Dans l’ampoule on place quelques fragments radifères. On devine ce qui se produit ; grâce à l’électrisation spontanée du radium, lesfeuilles se chargent d'électricité positive; leur divergence aug- mentant avec leur charge, elles arrivent à toucher les lames L. Brusquement ainsi déchargées, elles retom- bent jusqu’au contact, et le phénomène se reproduit. Radio-activité induite. La découverte de Becquerel a donc eu des consé- quences remarquables. Elle a été le point de départ d’une véritable révolution scientifique dans laquelle se sont écroulées nos vieilles conceptions de la matière. Le problème inquiétant qu’elle avait posé a donné lieu à cette magnifique série de découvertes, dont cha- cune d'elles est un sujet d’étonnement. Elle à désormais ouvert à nos investigations un champ immense à explorer. Un réservoir presque inépuisable d’énergie, sous une forme nouvelle, est à l’avenir à notre disposition ; mais l’asservissement de cette puissance exigera sans doute beaucoup de temps encore. Il semblait toutefois que c’en était fini avec les ques- tions déconcertantes, lorsque, en novembre 1899, Mme Curie fit la découverte de la propriété la plus étrange des corps radio-actifs, connue sous le nom de radio-activité induite. Tous les objets exposés quelque temps au rayonne- ment du radium, thorium, actinium, deviennent tem- porairement radio-actifs à leur tour. En particulier, avec le radium, ces objets devien- nent capables de provoquer la phosphorescence, l’ac- tion photographique, la décharge des corps électrisés, etc., et, ce qui n’est pas moins singulier, la nature de ces objets est indifférente; le rayonnement acquis s’affaiblit pour tous, suivant la même loi; son intensité diminue de moitié en une demi-heure. Une expérience très simple permet d’ailleurs de s'assurer que les rayons 6, +, n’interviennent pas dans le phénomène ; car, si le radium est enfermé dans un tube en verre mince qu'ils traversent facilement, au- cune radio-activité induite ne se produit dans les corps extérieurs. Faut-il dès lors l’attribuer aux particules +? Ce qu'il y a de curieux, c'est que cette propriété ne découlerait alors nullemeut de leur vitesse, comme le montre l’expérience suivante. Prenons deux enceintes closes, plaçons dans l’une d’elles un sel de radium, de préférence en dissolution, et dans l’autre un corps quelconque. Faisons ensuite communiquer les deux enceintes par un tube, très étroit si l’on veut, de forme quelconque. Au bout de quelques heures, le corps placé dans lenceinte est DANS complètement activé, il a acquis pour quelque temps les propriétés des corps radio-actifs. Emanation. Tout se passe, suivant l’ingénieuse hypothèse de M. Rutberford, qui a découvert que cette propriété appartenait aussi au thorium, comme si le radium dégageait un gaz, une vapeur subtile qui viendrait se condenser sur les corps qui sont placés dans le voisi- nage et leur conférerait la radio-activité. Les enceintes closes qui ont contenu récemment du radium en seraient saturées, et de fait, si on introduit dans l’une d’elles un corps quelconque, il s'active, bien que hors de sa présence. Aussi, bien que toute hypothétique, cette vapeur reçut-elle le nom d’émanation. D'ailleurs, l’analogie se poursuit très loin. Un corps activé ainsi cesse de l'être dès qu’on le gratte, tandis que la poussière obtenue a conservé son pouvoir, comme s'il s'était réellement produit une condensation à la surface. De même un courant d’air passant sur du radium peut activer un corps à grande distance, par une sorte d'entrainement de cette émanation. Ses propriétés. L’analogie est donc parfaite. Mais où elle cesse de l’être pour faire place à une propriété troublante, c’est dans l'existence éphémère de cette émanation. Lente- ment, mais avec une régularité He SRANUEs cette NT VE substance, en effet, toujours s’évanouit. Toujours sa puissance d'activation diminue de moitié en 4 jours, pour s’éteindre au bout d’un mois à peu près. Le fait devient encore plus déconcertant lorsqu'on a acquis la conviction que l’émanation, loin d’être une hypothèse, est au contraire une réalité. Introduisons, en effet, dans l’ampoule R (fig. 7) une dissolution de radium, fermons le robinet M et aban- donnons l'appareil pendant quelques jours. Peu à peu elle se sature d’émanation. Au bout de ce temps, ouvrons M, l’émanation se diffuse lentement dans les ampoules A et B enduites de sulfure de zinc, qui peu à peu s’illuminent. Fermons de nouveau M et plongeons B dans de l'air liquéfié dont la température est de 1900 au-dessous de 0°; toute l’'émanation s’y condense en une sorte de liquide, l’éclat de cette ampoule augmente, tandis que A rede- vient obscure. Enlevons maintenant B du bain réfrigérant et lais- sons l’appareil se réchauffer ; peu à peu l’émanation condensée redevient gazeuse et de nouveau remplit les ampoules A et B. Incontestablement c’est un gaz. M. Ramsay a pu s'assurer qu'elle suivait la loi ordi- naire de compressibilité des gaz, la loi de Mariotte. Ce qui est plus décisif encore, il a pu obtenir et étu- dier son spectre fugitif comme elle. Il a repéré la posi- tion d'une vingtaine de ses raies. Il estime son atome 160 fois plus lourd que celui de l’hydrogène et propose de l’appeler ex-radio. Mais, tandis que les bases, les acides, les hautes et TRUE les basses températures sont sans action, toujours il paraît s'anéantir spontanément. Que peut-il bien devenir °? Sa transformation. Une magnifique expérience de MM. Ramsay et Soddy va nous l’apprendre. M. Ramsay est l’illustre savant qui a redécouvert l’'hélium il y a quelques années. Grâce à la propriété qu'ont les corps de donner un spectre qui leur est propre, il est aussi facile de faire l'analyse du soleil que celle d’un échantillon dans un labora- toire. Or, un savant physicien, Lockyer, vers 1869, découvrit dans cet astre un élément inconnu à la sur- face de la terre, auquel il donna le nom de hélium. M. Ramsay, en poursuivant ses recherches sur l’argon, iut amené à constater sa présence, vers 1895, dans certains minerais, en particulier dans la cléveite; ce qui lui permit de montrer que ce corps est un gaz incolore, très léger, le plus léger après l’hydrogène, peu abondant, mais très répandu. Je reviens à l’expérience de MM. Ramsay et Soddy. Ces savants, en aspirant les gaz qui se dégagent d'une dissolution de bromure de radium, purent pré- parer une certaine quantité d’émanation qu'ils essayè- rent de rendre pure de toute trace de matière étran- gère. Après six mois de tâtonnements, d'opérations lon- gues et délicates, ils aboutirent enfin à ce résultat. Le spectre qu’elle donnait alors était d’une nettete parfaite. Ils ne tardèrent pas à constater, en abandonnant le DRTE ue tube à lui-même, que le volume de l’'émanation dimi- nuait régulièrement. Au bout de trois semaines, elle avait presque complètement disparu. Mais peu à peu, pendant ce temps, apparaissaient des raies nouvelles ; leurnombreetleuréclataugmentaient, et finalement ils obtenaient le spectre complet de l’hélium. Conclusions. Ils venaient donc vraisemblablement d'assister les premiers à la réalisation de ce rêve, hier encore absurde : la transmutation des corps. Un élément chi- mique venait sous leurs yeux de se transformer en un autre. Le radium, ce métal lourd, placé à l’une des extrémités de l'échelle chimique, venait de changer de nature, se transformant en un gaz léger placé à l’autre extrémité. L'énergie mystérieuse de l’émanation, telle serait alors la pierre philosophale. Nous comprenons bien d’ailleurs combien étaient vaines toutes les tentatives dans ce sens de nos prédé- cesseurs. | Le fractionnement des atomes, leur agrégation met- tent en jeu des énergies insoupçonnées auprès des- quelles nos moyens d’action sont bien faibles. Mais désormais il nous est permis d’espérer. La disso- ciation de la matière en libère des quantités inépui- sables qu’il sera possible, sans doute, d'obtenir un jour, sous une forme maniable, quand on saura la maîtriser. Quels seront les résultats de son utilisation? Les PENSE conquêtes de ces dernières années montrent qu’ il serait insensé d'essayer de les prévoir. Quel rôle peut-être ne joue-t-elle même pas dans l'inconnu qui nous enveloppe de toutes parts ? Car l’émanation n’est pas une rareté localisée autour de la pechblende ; elle est, au contraire, extrèmement ré- pandue, mais à l’état de traces. L’air en est imprégné. Les couches profondes du sol en émettent sans cesse. Partout, à peu près, l'expérience la décèle, dans les sables de certaines plages, les argiles de nos jardins, dans les sources de cerlaines eaux qui leur doivent peut-être quelques-unes de leurs propriétés miracu- leuses. Une question se pose encore. Que sont devenues les particules négatives du rayonnement, ces fractions infinitésimales de l’atome”? Elles ont disparu sans laisser de trace. Faut-il en conclure, avec Crookes, qu’elles sont re- tournées dans le sein de cette substance universelle et informe dont l’atome n’est qu’un agrégat. S'il en était ainsi, pourquoi cinq ou six corps seulement, le ra- dium, le thorium, etc., jouiraient-ils exclusivement de cet apanage de dissociation de la matière, de son extinction ? Pourquoi leurs produits de transformation seraient- ils en équilibre plus stable, plus permanent ? Faut-il croire que leurs atomes se morcelleront à leur tour et que la matière tend vers ce demi-néant, la matière dématérialisée ? RP£LSLSLSPRPSLSSI INVASION DES CAMPAGNOLS DANS LA SELARENGRE IN ATP DRE —— >= + — Le campagnol des champs (Arvicola arvalis) se caractérise par sa couleur gris fauve en dessus, blan- châtre sur les parties inférieures et marqué d’une ligne jaunâtre sur les flancs, avec une queue unicolore ; c’est le plus répandu et le plus nuisible de tous les membres de la famille des arvicolidés ; il mesure de 0,10 à 0,11 de longueur, porte une queue courte de 0,03 à 0,04. Cet animal vit dans les champs, où il détruit les récoltes de céréales, les racines, les prai- ries, elc., etc. (1). Ce fut au mois de janvier 1903 que les campagnols firent leur première apparition en troupes dans la commune de Chives, canton d’Aulnay ; au mois de février, on constata leur présence dans la commune de Dampierre-sur-Boutonne ; au mois de mars, ils se montrèrent en même temps à Mazeray, canton de Saint-Jean-d’Angély, et à Saint-Christophe, canton de La Jarrie. Au premier janvier 190%, cinquante-trois communes étaient en tout ou en partie envahies. Jus- que-là, la présence de ces rongeurs n’avait pour ainsi (1) On évalue à 5 millions l'importance des dégats. je dire rien d’anormal, Car on en rencontre toujours un. plus ou moins grand nombre. En 1884, ils avaient fait une apparition et ils disparurent comme ils étaient venus. L'année 1903 ayant été une année de grande récolte, on constata au moment de la moisson que les rats étaient plus nombreux que d'habitude sous les javelles. L'origine de l’invasion de 1903 n’est pas plus facile à expliquer que les précédentes ; Salys-Longchamp, cité par d’Orbigny et par les auteurs du Dictionnaire uni- versel d'histoire naturelle, dil qu'il a vu les campa- gnols devenir presque rares en certaines contrées, sans se rendre compte de la cause de cette destruction, ni de celle qui les ramène en si grand nombre une ou deux fois tous les dix ans. Si on peut considérer la commune de Chives comme contaminée par le canton d’Aigre, ce qui n’est qu’une supposition, on remarquera que La Villedieu ne fut envahie qu’au mois de septembre 1903, tandis que les communes de Mazeray et de Saint-Christephe, éloi- gnées du prétendu centre de contagion, la dernière surtout, reçurent la visite des rongeurs dans le mois de mars. On pourrait peut-être admettre que ces ani- maux, venus du département voisin, se sont tout d’abord fixés dans la forêt d’Auinay, qu'ils s’y sont multipliés pour se disperser plus tard. Le fait est admissible, étant donné l’humeur voyageuse de ces animaux, qui se déplacent surtout pendant ja nuit, allant droit devant eux, sans se préoccuper des obstacles, jusqu’à ce qu'ils trouvent un endroit à, leur convenance; les cours d’eau ne les arrêtent même pas. Il était curieux de les voir traverser le canal de Marans, nageant à la SE) PE manière des chiens, lorsqu'ils sont venus se fixer sur les glacis de La Rochelle. On peut aussi admettre que, sous l'influence d’une cause inconnue, l'invasion a pris naissance sur place, sur plusieurs points du départe- ment à la fois, à la suite d’une reproduction plus nombreuse que d'habitude, et que l’émigration est partie de ce point. En 1904, l'invasion s'étend de plus en plus; au mois de janvier,les campagnols occupent douze nouvelles communes ; au mois de février, 17 de plus ; en mars, 21 “en avril, 22; en mai, 27; en juin, 20; en juillet, 11 ; en août, 6. Soit en tout 156 communes envahies en huit mois. À partir de cette époque, l’invasion mazche lentement. Cette recrudescence de l’apparition des animaux sur de nouveaux points, en mars, avril, mai et juin, s’ex- plique parfaitement. Il y a deux portées, une au prin- temps, l’autre en automne ; chacune d’elles est de huit à douze petits; les primipares en font quelquefois moins. Comme les jeunes arrivent de bonne heure à l’état adulte, ils se reproduisent à leur tour, pendant la saison du printemps et de l'été. Si les nouveaux veauus restaient sur place, il y aurait encombrement et manque de nourriture. De même après la portée d’au- tomne, il y a un nouvel exode, mais moins important, les jeunes de cette portée arrivant à l’état adulte à la mauvaise saison. C’est sans doute cette reproduction des jeunes en dehors des époques normales qui a fait dire à quelques auteurs que les campagnols donnaient une portée par mois pendant dix mois de l’année ; en effet, pendant la belle saison, on rencontre toujours un plus ou moins grand nombre de nichées selon l'intensité de l'invasion. D’une manière générale, ces animaux sont toujours en mouvement et prêts à se déplacer. L’abondance de la nourriture peut aussi avoir une influence sur la reproduction, et plusieurs couples peuvent faire deux et jusqu'à trois portées au plus, pendant la beile saisou. Lorsque ces animaux sont fixés, ils tracent à la sur- face du sol des sillons qui conduisent aux galeries souterraines en zig-zag et dont le niveau n’est pas constant afin d'éviter les inondations dans la chambre où elles aboutissent, laquelle chambre a environ de 8 à 10 centimètres de diamètre, et qui, selon la saison, est située à une profondeur qui varie entre 12, 50 et même 60 centimètres. Les sillons servent de points de repaire aux rats pour se rendre dans les galeries lorsqu'ils sont déran- gés, aussi Ces sillons sont-ils toujours très unis etil est rare que les animaux s’y arrêtent pour manger. Lorsque les habitants des loges souterraines les abandonnent ou périssent, d’autres ne viennent pas s’y établir. Il suffit d’un mort dans une chambre pour que les autres membres de la famille déménagent. Dans nos recherches, nous n’avons jamais trouvé d’ani- maux vivants là où il y avait un cadavre. Ces mœurs expliquent pourquoi dans un terrain criblé de trous on ne voit quelquefois qu’un nombre restreint de rats. 0 Enfin, ces animaux peuvent spontanément être atteints d’affections qui les déciment ; lorsque le nombre des victimes est trop élevé, les survivants abandonnent ce milieu pour se porter ailleurs et quelquefois à des distances considérables. C'est ainsi que du soir au on ae matin on a vu disparaître les campagnols de toute une contrée à la suite de traitements divers, mais qui n'avaient pas été faits avec ensemble et simultanéité. La dernière invasion de l’arrondissement de Cambrai n’eut pas d’autre cause de dispersion. Pour assurer leur existence pendant la période de disette, les animaux emmagasinent des provisions dans les chambres, à côté des nids. Ce n’est pas tou- jours en prévision de l'hiver, comme on a tendance à le croire, l'instinct les pousse aussi à assurer leurs moyers d'existence pendant la période de sécheresse. C’est surtout dans les terres fraîchement remuées que nous avons trouvé des approvisionnements très abon- dants, consistant en grains et en tubercules d'avoine à chapelets (Arrhenatherium bulbosum). Il arrive sou- vent qu'ils se déplacent après avoir épuisé leurs ré- serves, et nous nous sommes même demandé si Île moment où ils font grenier n’était pas le signal d’un départ prochain, contrairement à ce qu'on avait affirmé. Quoi qu'il en soit, l'invasion a disparu subitement tant dans les communes traitées que dans celles qui ne l’avaient pas été; le fait a été général autant en Charente qu'ailleurs. Que sont devenus ces campa- guols ? On n’a trouvé aucun cadavre. On ne peut donc pas dire qu'ils ont été atteints d’une maladie qui les à fait périr. La disparition a été subite. Plusieurs modes de traitements ont été préconisés pour la destruction de ces rongeurs : MOYENS MÉCANIQUES. — On dépose dans les dérayures du champ envahi des pots en terre cuite, autant que possible vernissés à l’intérieur, d’une profondeur de Hors 25 centimètres environ et d’un diamètre d'au moins 15 centimètres, de manière que l’ouverture soit à fleur de terre ; on remplit ces pots à moitié avec de l’eau ; pendant leurs courses nocturnes, les campagnols vien- nent se noyer dans ces pièges. Dans les terres fortes argileuses, on peut remplacer les vases en terre par des trous faits au pal de 50 centimètres de profondeur sur 15 de diamètre, de manière que les parois de ces trous soient bien lisses. Ce procédé n’est pas applicable dans les terres friables. EMPOISONNEMENT. — On fait dissoudre 8 grammes d’arsenic dans un litre d’eau et on y fait macérer les grains qui doivent servir d’appâts. La pète phos- phorée peut être employée sur des tranches de pain, de carottes ou de betteraves. La poudre de scille maritime pourrait aussi être employée, mais nous préférons la noix vomique à toutes ces préparations, parce que, malgré la toxicité de cette substance, son emploi est encore celui qui présente le moins d'incon- vénients et de dangers, et dont le résultat est toujours certain. Sa préparation se fait de la manière suivante. On prend : ; EAU RTS RER RARE Rs 10 litres. Poudre de noix vomique. 1 kilog. Acide tartnque PACE 10 grammes. On porte à ébullition pendant une heure et demie ou deux heures, et ou verse le tout sur 10 kilos. de grain ; l’avoine, le froment et surtout le seigle con- viennent parfaitement. 11 n’y a plus, après avoir bien brassé, qu’à répandre le grain à la volée dans les champs infectés. Il faut éviter de placer l’appât ainsi GET empoisonné en masses plus ou moins fortes, car il arrive souvent que les campagnols les souillent de leurs excréments et alors ils n’y touchent plus. Autant que possible il faudrait varier la nature des appâts. ASPHYXIE. — On peut employer à l’entrée de chaque galerie quelques gouttes de sulfure de carbone ; les vapeurs qui se dégagent asphyxient presque instanta- nément les animaux qui s’y trouvent, à la condition que l’air ne pénètre pas. A la suite d'une expérience faite à l'asile de Lafond,en présence de MM. Mabille, directeur de l'établissement, Guillemin, docteur en pharmacie, Bernard, pharmacien militaire en retraite, président de la Société des Sciences naturelles de La Ro- chelle, nous avions placé sur le sol une nichée de campagnols asphyxiée par 20 gouttes de sulfure ; l’un des rongeurs était dans un tel état que de prime abord taus nous l’avons cru mort ; peu à peu les mou- vements respiratoires devinrent plus amples et bientôt ce rataurait été à même de se sauver, si nous ne avions mis à mort. Il y a là un phénomène qui nous paraît rappeler ce qui se passe dans les empoisonne- ments par l’oxyde de carbone. C’est pourquoi il est indispensable qu'après l'injection du salfure, le sol soit bien tassé, ce qui rend ce traitement coûteux et peu pratique. Virus. — Enfin vient la destruction par transmission d’une affection virulente mortelle. Ce procédé, disons- le immédiatement, nous a donné plus de mécomptes que de bons résultats. Voici, d’après les instructions officielles, comment doivent se préparer les appâts : « Pour préparer les DSC ER appâts, on commence par mélanger le contenu de chaque bouteille avec 5 litres d’eau ordinaire à laquelle on aura ajouté au préalable 5 grammes (une petite cuillerée à café) de sel par litre d’eau. Pour faire ce mélange, on peut se servir de vases quelconques : terrines, bassines émaillées, baquets en bois, aussi bien lavés que possible à l’eau chaude. (On doit éviter lPemploi de récipients en tôle galvanisée.) » APPATSs.— « Comme appât,on peut se servir de toute substance que le campagnol aime à manger et qui peut être facilement imprégnée de bouillon de culture. » Le meilleur appât est le pain rassis coupé en petits cubes de 1 centimètre de côté. Le pain absorbe rapi- dement le liquide et est entièrement mangé par les campagnols. En employant du pain, on n’a de déchets d'aucune sorte et les microbes qui ont pénétré à l’in- térieur des pores se trouvent à l’abri du soleil et des intempéries. » Dans les cas où la préparation de pain en grande quantité présenterait des difficultés sérieuses, on peut le remplacer par du grain, blé, orge décortiquée ou avoine grossièrement concassée. Mais, comme les grains absorbent relativement beaucoup moins de microbes que le pain; comme, d'autre part, la ma- jeure partie de microbes contenus dans le bouillon se déposent sur les enveloppes du grain que les ron- geurs ne mangent pas, il faut répandre relativement un peu plus de grains que de pain pour produire le même eftet. » Avec une bouteille de virus mélangé avec 5 litres d’eau, c’est-à-dire avec 6 litres de la dilution viru- Phone lente, on peut imprégner en moyenne 8 kilogrammes de pain rassis, coupé en petits cubes, ou 9 à 10 kilo- grammes de grains concassés. » Quelques minutes suffisent pour imprégner le pain. Pour imprégner le grain dans les mêmes pro- portions, il faut le laisser tremper pendant trois à quatre heures. » C’est en nous conformant strictement à ces insiruc- tions que nous avons entrepris les traitements. Au 30 2oût 1904, il avait été employé 25,595 litres de virus. Au début lestraitementssemblaient donner quelques ré- sultats, mais insuffisants. Bientôt les intéressés furent divisés en deux camps, les partisans etles adversaires du virus. Ces derniers, un peu timides d’abord, en pré- sence des résultats négatifs obtenus sur plusieurs points, notamment à Angoulins, sur les glacis de La Rochelle, où on avait employé du pain comme appât, finirent par prendre le dessus et à faire entendre leurs justes doléances. Il est une chose pénible à dire : c’est que le virus était devenu une chose sacrée, et quiconque mettait en doute son efficacité était consi- déré comme un adversaire du gouvernement. C’estcette crainte qui explique la grande consommation qui en à été faite. On a objecté que l’époque à laquelle les trai- tements avaient été faits n’était pas convenable. IL n’y a qu’une réponse à cette objection : Puisque vous re- connaissez que le moment n'était pas opportun, pour- quoi expédiez-vous ? Les mêmes insuccès avaient été signalés ailleurs, tant dans la Marne que dans la Haute-Marne. M. le Dr Chrétien, dont la compétence ne saurait être mise en doute, écrivait dans l'Ouest Républicain ds VOS fes du jeudi 21 juillet 190%: « Dans les régions les plus éprouvées, les agriculteurs ont traité leurs champs par le procédé du « virus » dont on a pu obtenir d'assez grandes quantités, grâce à des largesses gou- vernementales. Le résultat de cet effort est nul,et l’on peut aujourd’hui, sans crainte de passer pour un gaf- feur, dire que le virus est une vaste fumisterie qui coûtera plus de trois cent mille francs à l'Etat. A quoi tient cet échec? Je ne me charge pas de répondre ; d'ailleurs cela m'est indifférent ; mais ce qui ne l'était pas, c'était de savoir si oui ou non le virus était effi- cace. J’ai donc entrepris une série d'expériences pour m'assurer de cette efficacité ; tout le monde peut en faire autant. Il suffit de mettre dans une caisse des mulots, de les nourrir avec du pain arrosé de virus, on pourra, Comme moi, constater que, s'ils crèvent dans les laboratoires de l’Institut Pasteur, ils se por- tent à merveille et engraissent sous notre beau ciel des Charentes, ont un poil fin et luisant; ils donnent ainsi des signes de la plus florissante santé. Incontes- tablement cette nourriture leur convient. » C'est à la suite de ces insuccès compromettant tous les intérêts que furent entrepris les traitements à la noix vomique sur lesquels nous aurons à revenir. Au mois de novembre, de nouvelles expériences furent entreprises avec le virus, elles ne furent pas d’abord très heureuses. On a donné de ce nouvel échec une explication qui mérite d'être retenue: Trente mille litres de virus avaient été préparés à l’avance, afin de faire face aux demandes nombreuses et pressantes qui ne manqueraient pas de se produire, et on a déclaré que l’inefficacité des traitements ne pouvait être attri- Loue buée qu’à l’ancienneté des bouillons de culture. Alors pourquoi écrit-on dans les instructions: « Le virus, renfermé dans des bouteilles bien bouchées, et qui n’ont pas encore été ouvertes, mises à l’abri de la Gha- leur et de la lumière dans une cave, peut être conservé assez longtemps (dix à quinze jours) sans perdre de son activité ; mais il est prélérable de l’employer aussitôt après réception. Du reste, à la séance du 4 janvier 1905 de la Société nationale d'agriculture, M. Saguier disait avec raison : (Il est difficile de s'expliquer que l'institut Pasteur ait pu livrer du virus vieux de plusieurs semaines, alors qu’il dé- clare que ce virus doit être employé frais pour donner tout son effet mortel », et M. le sénateur Viger, ancien ministre de l’agriculture, ajouta : € Pourquoi l’Institut Pasteur prévient-il alors qu'on doit employer le virus dans les huit jours de sa fabrication ? » A la même époque (décembre 1905), des expériences comparatives avec le virus et la noix vomique furent preserites par M. le Miaistre de l’agriculture. Voici le résultat des expériences de Luçon, dont le procès-verbal officiel fut envoyé à notre signature. Sur une étendue déterminée traitée à la noix vomique, on avail compté, avant le traitement, 824 trous dans le blé et 3,053 dans la luzerne. Sur une étendue égale traitée au virus (1), on avait compté 248 trous dans le blé et 1,035 dans la luzerne. Le 9 janvier 1905, avant-veille des constatations finales, on compta, sur la parcelle à la noix vomique, 71 trous réouverts dans le blé et 338 dans la luzerne ; sur la parcelle traitéeau virus, 71trous (1) A raison de 140 litres par hectare. dans le blé et 150 dans la luzerne. Tous ces trous furent rebouchés le 9 janvier, et le 11 on en trouva 5 d’ouverts sur le blé et 2 sur la luzerne, dans la par- celle à la noix vomique, tandis que sur la parcelle traitée au virus il y avait 5 trous dans le blé et 48 dans la luzerne. Le prix de revient du traitement à la noix vomique, payée 110 francs les 100 kilogr., fut de 3 fr. 40 par hectare, et de 4 fr. 62 avec le virus. Nous n’avons jamais eu connaissance des résultats obtenus à Saint-Jean-d’Angély ; nous dirons qu’à la suite d’une erreur plus qu'involontaire, la comparaison n’était plus possible, la parcelle à la noix vomique n'ayant reçu en moyenne que 8 kilog. 500 de grain par hectare, tandis que la parcelle au virus en reçut 12 kilog. Les propriétés nocives du virus sont dues au bacillus typhi murium, bacille que Macé, dans son traité de bactériologie, considère comme étant pléomorphique ; en culture sur gélatine, il se conduit tantôt comme Île bacille d’Eberth, tantôt comme le bacille du choléra des poules ; il prend les couleurs d’aniline; une forme se décolore par le gram, l’autre ne se décolore pas. Est-ce là une modalité nouvelle du bacille de la septi- cémie hémorrhagique ? Ce fut le 24 octobre 1891, dans un mémoire daté de Greifswald, que Loëfler fit connaître la découverte du bacille du typhus des souris et qu’il annonça que ce bacille nous mettait en possession d'un procédé grâce auquel il devenait possible de maitriser le fléau des souris des champs. La première application en fut faite en Thessalie ; mais il s’éleva des contestations, et des missions furent chargées d'examiner à nouveau la virulence de ce bacille. Mereshkowsky fut désigné par pi), Le le gouvernement russe en mars 1893. De cette étude il résulte que le bacille, même cultivé sur gélose, con- serve sa virulence pendant six mois. Le savant russe expliqua les insuccès qu’on avait eus par la délicatesse des manipulations auxquelles on doit soumettre les plaques de gélatine, manipulations qui ne sont pas à la portée de tous. C’est alors qu’il eut l’idée d’ense- mencer des bouillons de viande peptonisés ; ces bouil- lons conservent la même virulence que les plaques ; des bouteilles ensemencées depuis un mois et demi furent expédiées en Sibérie ; après un parcours de six mille kilo- mètres, le contenu de ces bouteilles était aussi virulent qu'au moment du départ. Nous sommes loin de la viru- lence fugace des bouillons de culture que nous avons eu à employer. On voit que ce procédé de destruction des rongeurs est bien dû à Loëfler, mais qu’il a été modifié par Mereshkowsky. Mais il y a plus : lorsque les cultures ont perdu leur état de virulence aiguë, le bacille de- vient vaccinal, et les souris qu'on a tenté d'infecter avec ces cultures atténuées présentent encore le gon- flemènt du foie et de la rate cent trente-trois jours après l'infection ; malgré cela elles conservent leur gaité, prennent même de l’embonpoint et deviennent de plus en plus sémillantes. C’est donc une erreur d'affirmer comme on l’a fait que les animaux chez lesquels on trouve la rate gonflée sont fatalement voués à la mort. Voici, d’après Loëfler, les principales lésions qu'on trouve sur les cadavres des souris tuées par le bacille du typhus : le foie, la rate, l'estomac, l'intestin grêle, les glandes mésentériques, le poumon étaient le siège 09 d'inflammations ou de dégénérescences graisseuses, et souvent l’abdomen était rempli de sang vermeil sans qu'on püt découvrir le siège de l’hémorrhagie. Nous devons avouer que jamais nous n’avons rencontré ce corlège de lésions sur les souris tuées avec le virus que nous avons été chargé d'employer. La même année 1893, Mereshkowsky trouva sur le spermophile ou souslick un bacille analogue à celui de Loëfler, au point de vue de la grosseur et de la moti- lité, qui se développe indifféremment sur l’écureuil, le rat des champs, le rat des maisons et les campagnols. Les expériences faites avec ce bacille démontrent qu'il est indispensable que chaque souris absorbe une quan- tité déterminée de matière virulente ; celles qui n’en prennent pas suffisamment ne sont nullement incom- modées, Ce fait semble expliquer l'insuffisance des traitements avec 75 litres de virus par cent hectares. Enfin, Mereshkowski a aussi démontré que la farine de seigle constituait le meilleur des appâts. . On avait dit au début, on l'a répété dans les publi- cations périodiques de 1904 qui se sont occupées de cette question, que la maladie était contagieuse et'sus- ceptible de se transmettre de proche en proche. Nos observations nous permettent d'affirmer que la maladie n'est pas contagieuse. Du reste, la non contagion résulte aussi des expériences de Loëfler et de Meresh- kowsky, et c’est avec raison que M. le sénateur Viger, ancien ministre de l’agriculture, disait à la séance du 4 janvier 1905 de la Société nationale d’agriculture de France « qu’il est nécessaire de bien expliquer aux intéressés que la septicémie hémorrhagique consécu- tive chez les campagnols à l’ingestion du virus n'est pas contagieuse, et que les animaux de cette espèce peuvent cohabiter avec leurs congénères malades sans être incommodés ». L’innocuité du virus qui a été employé lors de la dernière invasion, vis-à-vis dugibier, demeure encore douteuse. Nous n’avons connaissance d'aucune expé- rience faite sur le lièvre ou le lapin. Dans la Marne, on a trouvé des lièvres morts porteurs d’un bacille ana- logue à celui de Loëfler, qui, cultivé et ingéré par les campagnols, a oceasionné la mort en quelques jours. C’est un fait qui demande à être vérifié et que nous Signalons pour mémoire. Comme conclusion en ce qui concerne le virus, nous dirons que c’est un moyen coûteux qui s’est montré trop souvent infidèle, pour qu’on puisse le considérer comme un spécifique à l’exclusion de tous autres moyens. La noix vomique lui est bien supérieure. Noix vomMiQquE. — Nous arrivons maintenant à un tournant de l’histoire de l’invasion difficile à franchir ; peut-être devrions-nous nous pénétrer de cette pensée de Fontenelle : « Si j'avais la main pleine de vérités, je me garderais bien de l’ouvrir à cause des ennuis que cela pourrait me susciter. » [Il est trop tard pour re- garder en arrière et déjà nous avons ressenti les coups d’épingles mesquins que nous a valus notre franchise. Nous resterons dans le domaine des généralités, car on ne doit préciser que lorsqu'on a des preuves. maté- rielles en main, quoique nous ayons suffisamment de preuves morales qui démontrent le parti pris. Un jour de marché du mois d’août, nous fûmes assailli par près de cinq cents propriétaires qui vou- 104 8 laient nous faire dire que le virus était inefficace ; ils étaient surexcités à un point qu'ils devenaient mena- cants ; car, malgré tous les traitements au virus, les épis tombaient chaque jour plus nombreux ;sur plu- sieurs champs on comptait facilement ceux qui res- taient debout. Plus tard nous fûmes menacé d’être passé à tabac (sic) pour n'avoir pas voulu indiquer des adresses où on pourrait se procurer de la noix vomi- que. Nous étions quand même resté fidèle au nouveau traitement devenu classique, malgré que depuis quel- que temps notre confiance commencçat à s’ébranler. Ce fut donc sous la pression de l’opinion publique que l'administration se vit obligée de céder et de prendre des mesures pour prévenir les accidents qu’on entre- voyait de toutes parts, craintes qui étaient exagérées comme on le verra. Les traitements n'étaient pas en- core comimencés que nous avions entre les mains une pétition d’un groupe de chasseurs affirmant en post- scriptum qu’on avait trouvé des moutons et des porcs empoisonnés. A la séance du Conseil d'hygiène à laquelle nous avions été prié d'assister, nous protestâmes contre l'emploi des poisons, et là nous eûmes une discussion assez vive avec un de nos meilleurs amis, qui, du reste, nous à rendu justice depuis, comme nous l'avons fail nous-même vis-à-vis de lui. Une commission, à laquelle nous fümes adjoint, présidée par M. le D' Mabille, di- recteur de l’asile de Lafond, composée de MM. Ber- nard, ancien pharmacien militaire, et Guillemin, doc- teur en pharmacie, fut chargée d'étudier les dangers que présentait la noix vomique pour le gibier, qu’on avait à cœur de protéger. Des poules, des faisans, des 2 op A pigeons, des lapins, des perdrix furent soumis à l’ex- périence ; les travaux de cette commission, qui ont une réelle valeur scientifique et qui mériteraient les honneurs de la publicité, conduisirent aux mêmes conclusions que celles déjà connues de Nothnagel et Rossback, que les gallinacés ont une résistance telle à la strychnine qu’on pourrait presque les considérer comme réfractaires. Un correspondant of the Chemist and Druggist écrit ce qui suit eu égard à la strychnine : « Dans mon registre des poisons, Je trouve un client qui eut, le 2 octobre 1883, deux douzaines de pilules de 1/8 de grain chaque, (0,0081 gr.), le 10 octobre, une douzaine de pilules de 1/2 grain chaque (0,0324), et le 4 novembre, deux douzaines de pilules de 1/4 de grain chaque (0,0142) Elles furent données chaque fois par tiers dans une journée à un coq malais qui était paralysé, il guérit et gagna le prix à Cristal-Palace. » Pendant qu’on faisait le traitement dans la com- mune de Benon, les faisans suivaient les hommes qui faisaient l’'épandage du grain, ils mangeaient à vo- lonté ; on ne trouva aucun cadavre. Cependant, 1 Ye une vieille légende qu’il est bon deramener à sa valeur réelle. Une compagnie de neuf perdrix fut levée par un chasseur de l’arrondissement de La Rochelle, ce chasseur les poursuivit; mais quel ne fut pas son étonnement, lorsqu'il les aborda de nouveau : elles étaient mortes ! Quelques jours après, à Saint-Jean- _d’Angély, encore une compagnie de neuf perdrix, etc. À Saintes, même légende. Le chiffre neuf était un chiffre fatidique. C’est là un curieux hasard, mais on ne citait ni le nom des chasseurs, ni l'endroit ; c'était — 96 — toujours là-bas. Il est probable qu'il y a eu desperdrix em poisonnées par des grains arseniqués où phosphorés qui avaient été répandus avant que l'usage de la noix vomique ne se füût généralisé. Nous nous sommes trouvés en présence d’une objec- tion qui paraissait irréfutable à ceux qui la faisaient. Pourquoi voulez-vous que la noix vomique, qui estun poison des plus violents, ne tue pas les gallinacés ? A cela nous répondons que le singe etle hérisson comme le coq offrent une immunité relative contre la strych- nine. Chez le cheval, 1 à 3 kilogrammes de tabac sec ne produisent que du dégoût et une évacuation uri- naire copieuse, tandis que chez les bovides une feuille suit pour provoquer l'empoisonnement. C’est qu’en effet les races diffèrent par leur pathologie comme elles différent par leur morphologie et leur physiologie. La susceptibilité à la morphine est plus grande chez les Européens que chez les peuples inférieurs. De légères différences entre animaux de même race ont parfois les conséquences pathologiques les plus inattendues. Les pores blancs sont tués par le /achnanthes tinctoria qui leur colore les os en rose et leur fait tomber les onglons ; les pores noirs s’en nourrissent impunément (Darwin). De même les moutons noirs peuvent manger sans danger l'hypericum ecrispum, qui tue les moutons blancs. Les moutons pyrénéens mangent sans inCcon- vénient les feuilles du quercus tosa, qui tue les mou- tons importés (Simon, Accoutumance aux médicaments, Congrès de Lille). De même la morphine, qui endort les Européens et agit sur les nègres, produit chez les Malais des phénomènes d’excitation qui les poussent vers l’homicide. EURE Malgré Lout, de prétendus chroniqueurs scientifiques ont affirmé que le manque de gibier, de perdrix sur- tout, provenait des empoisonnements par la noix vomique. Que ne fait-on pas passer sous le couvert de la science, mol magique, dit Frary, dans son Démagoque, qui lait passer les’ marchandises les plus frelatées”? Il est probable et même certain que les trai- tements, quels qu'ils soient, ont contribué à détruire le gibier, parce qu'on à détourné un très grand nombre de couveuses. Dans les départements où il n'y à pas eu de campagnols, qu'est-ce qui a provoqué la disparition du gibier”? Ce malheureux département de la Charente-Infé- rieure s’est couvert d'opprobres ; c'est ainsi que, Île vendredi 10 novembre 1905, on lisait dans un des journaux les plus répandus de la capitale : « En cer- laines régions, notamment dans les Charentes, on a fait usage de la noix vomique, mais ce produit a donné lieu à plusieurs mécomptes, car il était aussi nuisible aux Campagnols qu'aux oiseaux et pouvail être dan- gereux pour les oiseaux de basse-cour. » Mais plus loin on conseillait lemploi de l'arsenic, c’est-à- dire du poison le plus dangereux pour les oiseaux de toute espèce, On à même dit qu'on avait engraissé des campagnols avec la noix vomique ; ceux-là ne savaient probablement pas qu'il suflit de 0 gr. 00005 de strychnine pour luer une souris du poids de 25 grammes. Revenons aux expériences de la commission d’'hy- giène. Une perdrix préféra se laisser mourir de faim plutôt que de manger du blé empoisonné par la noix vomique. Deux autres de ces oiseaux mangèrent cha- 5 OS cun une dizaine de grains dans les 24 heures, sans être incommodés. Il en fut de même pour une poule. Un lapin préféra manger le papier sur lequel il reposait, ainsi que les barreaux de sa cage ; pressé par la faim, il mangea en une journée douze grains empoisonnés ; il eut quelques convulsions, mais il survécut. Lors- qu'on servit du grain frais, tous ces animaux se jetè- rent dessus avec avidité. Voici un phénomène psycho- logique digne d’être cité: Deux perdrix, dontune avait ingéré une solution de sulfate de strychnine titrée jusqu’à effet, et l’autre, encore neuve, furent placées chacune dans une cage, côte à côte. Lorsque celle qui n'avait pas été soumise à l’action du poison picorait pour manger le grain préparé qu’on lui avait servi, la seconde poussait un cri particulier comme pour pré- venir sa voisine du danger, et celle-ci cessait de man- ser. Nous ne voulons pas faire de sentimentalisme, ni discuter sur l'intelligence des animaux ; cependant, le fait est digne de remarque, et nous laissons aux philo- sophes observateurs le soin de l’interpréter. Ii est in- contestable qu’à l’état de nature, les animaux sont toujours à côté de substances dangereuses ; ils ne con- naissent ni la chimie ni la botanique, et cependant ils savent éviter le danger. Quant aux pigeons et aux canards, il était bien facile, en présence d’une telle calamité, de les tenir enfermés. On prescrit bien la fermeture des colombiers à une certaine époque de l’année. Le discrédit du virus était devenu tel qu'après que la commission du conseil d'hygiène eut déposé son rapport, les maires des communes envahies furent tous convoqués à La Rochelle, tous, sans exception, optèrent 200 2 pour la noix vomique et rejetèrent le virus. Pourquoi cette unanimité ? Un fait ignoré jusqu'ici montrera plus que toute dissertation la valeur des objections contre la noix vomique. A la suite d’un article publié dans un journal de Paris, on découvrit qu’il y avait un trust de la noix vomique, et qu'un personnage bien en vue de Ja Cha- rente-Inférieure y était intéressé. On s’empressa de venir nous glisser ce scandale dans le creux de l'oreille. Afin de ne pas laisser égarer les suppositions, nous dirons immédiatement que cette personne n’apparte- nait pas au Conseil général. Pour quiconque a la moindre idée du marché de la noix vomique, il est facile de comprendre qu’un trust est matériellement impossible. Il est vrai qu'il y a eu des abus; des ven- deurs peu scrupuleux ont fait payer jusqu’à 250 francs les cent kilos, alors qu’au maximum on ne devait pas dépasser 120 francs. La marchandise s'était faite rare sur le marché, ce qui n’empêche pas que les com- munes qui s'étaient syndiquées ne payèrent que 13 francs. Quel que soit le prix payé, onavait au moins la marchandise, tandis que certaines bouteilles, une fois 19 sur 24, n’avaient Jamais été remplies ni bou- chées, ailleurs 6 sur 24, etc., et celles qui étaient pleines n'avaient pas grande valeur ; consultez ceux qui les ont employées. Le plus grand des griefs qu'on à fait à la noix vo- mique, c’est de détruire les petits oiseaux, leschantres de nos bocages, ces précieux auxiliaires de l’agricul- ture ; aujourd’hui on cherche à protéger ces êtres sans défense, et c’est avec raison, car, comme tous les êtres — 100 — vivants, ils ont droit à la liberté. Un bocage qui n’est pas animé par le gazouillement des oiseaux est un cœur sans amour ou un bal sans musique. Si nous les avions détruits pour le plaisir de les détruire, on pour- rait nous incriminer. Laissons de côté la poésie et exa- minons le côté utilitaire sans parti pris. Il y a aujourd'hui moins d'oiseaux qu’ii n'y en à jamais eu. La cause de leur disparition est la consé- quence des progrès culturaux et des améliorations apportées au réseau de nos différentes voies de com- munication. Cependant, nous ne voyons plus ces in- vasions d'insectes qui, à différentes reprises, vers la fin de l’avant-dernier siècle et au commencement du dernier, détruisirent en tout ou en partie les récoltes diverses ; même en 1856, les céréales eurent beaucoup à soufirir, en France, d’une invasion de cécidomyes. Pourquoi sommes-nous moins éprouvés par les in- sectes ? Toute personne qui s’est occupée de cette question $ait fort bien que c'est principalement par des procédés culturaux qu’on combat et même qu’on prévient les invasions. Les insectes ne se développent pas directement, à quelques exceptions près, sur les récolles, mais bien sur les plantes adventices qui se trouvent dans les terrains vagues, aux abords des champs cultivés. On sait très bien que le seneçon favo- rise le développement de l’altise, sur lequel elle vit aussi bien et même mieux que sur les crucifères et les polygonées ; les taupins se plaisent sur les ombelli- Îères, y compris les ciguës. Tout en reconnaissant les services que nous rendent les oiseaux, nos récoltes seraient vite détruites, si nous n'avions qu'eux pour nous défendre. — 101 — C’est dans le monde des insectes même que nous de- vons chercher nos meilleurs amis, nos meilleurs protec- teurs; on ne saurait trop s'attacher à protéger certaines espèces qui, parleur voracité ou leur parasitisme, em pé- chent le développement des espèces nuisibles. Sans par- ler des carabides qui sont tant à l’état de larves qu'à l’état d’insectes parfaits presque touscarnassiers etexcel- lents chasseurs, nous ne devons pas ignorer les nom- breux ichneumons qui viennent pondre soit sur les œuis, soit sur les larves des insectes nuisibles. Ces petits animaux, par leurs dimensions, sont des proies faciles ; par leurs couleurs plus ou moins chatoyantes, ils attirent l’attention de leurs ennemis naturels, les oiseaux. Le cèphe des céréales n'a pas de pire ennemi que le pachymerus calcitrator ; lichneumon stipulæ, le platygaster, différentes espèces d’empis dévorent la cécidomye, qui fit tant de ravages en 1856. Et M. Bazin dit en parlant des cécidomyes : «Leur multiplication excessive sera mêmeordinaire- ment le présage de leur prochaine disparition, grâce à l'intervention des parasites. C’est le résultat d’une loi générale souvent observée dans l’étude des insectes. Le développement inquiétant de certaines espèces est arrêté par l’action destructive d’autres espèces nées pour les combattre. L’étyorinque qui endommage les vignes n'est-il pas arrèté dans son développement par les cer- ceris, qui, pour nourrir leurs larves, apportent plu- sieurs insectes, tels que sétoines apions, etc. ? Lorsqu'on fouille dans les nids des cerceris des sables, on est sur- pris du nombre considérable d'insectes qu’on y trouve. » — 4102 — Curtis dit en parlant des parasites des insectes : « Leurs services sont incessants èt inappréciables, et c’est une loi de la nature qu’à mesure que le fléau se répand, les parasites dont ils sont la proie augmen- tent d'autant et même davantage jusqu’à ce que le mal ait disparu » (page 385, édition 1883). Les différentes espèces d’aphis n’ont pas d’ennemis plus dangereux que certaines pentatomes et coréines, les araignées, différents coléoptères ; les larves des coccinelles, des syrphides, sucent impitoyablement les pucerons les uns après les autres ; un repas de 20 à 30 victimes n’est qu'un jeu pour une larve à maturité ; elle fait d’ailleurs un bon nombre de repas semblables dans la journée, car elle ne se repose que dans le milieu du jour. Et Curtis, déjà cité, dit avec raison : « J’encoura- gerai maintenant les agriculteurs à mieux connaître les instruments donnés par la Providence pour sou- mettre une tribu d'insectes qui, sans leurs parasites, pourraient, comme les plaies d'Egypte, couvrir toute la terre. » Tout récemment encore, n’avons-nous pas vu l’aphis papaveris résister aux différents traitements et ne disparaitre que sous l’action de divers insectes parasites, entre autres les larves de coccinelles. Nous pourrions ainsi passer. en revue toute l’entomologie agricole ; à côté de chaque espèce nuisible, nous trou- verions son ennemi. Estil permis d'accorder aux o1i- seaux l'intelligence nécessaire pour discerner les bons et les mauvais ? Combien de larves de coccinelles les oiseaux ne détruisent-ils pas, alors que, par une obser- valion superficielle, nous sommes tentés de supposer qu’ils dévorent le puceron lanigère auquel ils ne tou- chent jamais ! | Nous ne conclurons cependant pas de cette étude som- maire qu'il faut détruire les oiseaux. Loin de là, nous demandons au contraire qu’on les protège, et les gastro- nomes devraient aussi, de leur côté, faire quelques sacri- fices, car il n’y a aucune raison pour qu’on détruise la caille et la perdrix qui ne sont pas tuées par la noix vomi- que, alors que ces deux espèces, essentiellement car- nassières, se nourrissent aussi de larves et d'insectes parfaits. Les perdrix rendent les plus grands services dans les vignes, et ceux qui refusent de s'incliner de- vant une nécessité impérieuse, comme dans le cas des campagnols, pour être logiques, devraient aussi renon- cer à leurs exploits cynégétiques afin de conserver à l’agriculture un de ses meilleurs auxiliaires. Sans se chercher noise réciproquement, examinons la situation avec sang-froid, ne nous payons pas de mots, laissons la lyre aux poètes, la strychnine aux campagnols, et reconnaissons que le mal fait d’un côté, si toutefois mal il y a, est largement compensé par le bien qui nous vient d’ailleurs. Les oiseaux empoisonnés par la noix vomique de- venaient un danger public, et la preuve, c’est que les journaux de Paris avaient annoncé que le colportage du gibier avait été interdit dans le département de la Charente-[nférieure pendant la durée des traitements. Pour interdire le colportage du gibier, il fallait fer- mer la chasse, l’un ne va pas sans l’autre ; or, jamais interdiction de ce genre n’a existé. C'est de ce côté qu’il y a eu un véritable trust à la baisse, car les perdrix se vendaient à peine un franc ou un franc cin- quante la paire. Les alouettes trouvées mortes ont été mangées, personne n’en à élé incommodé ! Une brave — 104 — vieille femme, vivant de la charité publique, à déclaré que jamais elle n'avait fait si bonne chère que pen- dant les huit jours qu’avaient duré les traitements aux alentours de son habitation. On pourra se rendre compte de la valeur de toutes Îles accusations qui ont été portées contre la noix vomique lorsqu'on saura qu’il à été publié qu’on avait ramené à la vie des oiseaux et des lièvres empoisonnés en leur faisant prendre du lait; les toxicologistes, les médecins seront sans doute heureux d'apprendre que le lait est le contrepoison de la strychnine, voilà la Faculté prise en défaut. Un jour, nous demandions à une personne quelle était la raison pour laquelle elle avait pris une position si agressive contre l’emploi de la noix vomique, elle nous répondit simplement: Cela m'avait été conseillé ; je serais à le refaire, je le referai; voilà une conviction assise sur des bases scientifiques solides. Souhaitons que la récompense d’une telle obéissance passive ne se fasse pas longtemps attendre ; plaçons cette attitude à côté des couvées de campagnols qui avaient été obser- vées, sans donner la couleur ni la dimension des œufs, et nous aurons terminé notre étude. A.-W. DUBOURG. | LA NOIX VOMIQUE Communication faite à la Séance de Janvier 1965 PAR Maurice SOENEN PHARMACIEN NRA OGM EEE RE — La désastreuse invasion des campagnols a tout à coup placé au premier plan un produit peu cognu et inemployé dans nos contrées : la noix vomique. Tout le monde aujourd'hui s'intéresse à ce produit, suprême espoir de nos campagnards, qui en ont ré- pandu et vont en répandre encore plusieurs centaines de milliers de kilos sur les terrains envahis. Qu'est-ce que la noix vomique ? Où se trouve cette graine ? Y en a-t-il beaucoup ? Les pharmaciens, sup- posés compétents sur ce sujet, ont été interrogés. Ils ont fait appel à leurs souvenirs d'école et à leurs traités de matière médicale, mais les renseignements qu'ils ont pu donner ont été forcément très vagues, car rien de précis n’a été publié. Certes, les auteurs s'étendent sur la coupe microsco- pique et l’étude chimique de la noix vomique. Toul a nes élé dit là-dessus, et ce n’est pas ce dont je veux entre- tenir aujourd’hui la Société des Sciences naturelles. Mais il m'a paru intéressant d'acquérir sur la noix vomique d’autres renseignements. La production, la récolte, le commerce et les usages de cette drogue m'ont semblé des points d'étude cor- respondant à l'intérêt qu’on lui porte. Je me suis documenté et renseigné dans les pays producteurs et les grands ports d'importation, et ce sont les renseignements puisés à ces sources qui m'ont permis de faire cette communication. Origine et production. — La noix vomique est pro- duite par un arbre de la famille des loganiacées : le vomiquier, appelé aussi arbre à noix vomique. Le vomiquier estextrêémement répandu dans les pays orientaux : le Nord de l’Australie, la Cochinchine, Ceylan, l’Assam, la Birmanie, et surtout dans l'Inde. C’est un bel arbre, d'apparence imposante. IL fleurit de mars à mai et se couvre à l’automne de nombreux fruits, verts d’abord, puis prenant à leur maturilé une belle couleur jaune. Les feuilles sont décidues, c’est-à- dire tombent très vite. L'époque de leur chute est cependant variable. Dans l'Inde, elle survient à la fin de la saison froide, en Birmanie pendant la saison chaude. A leur maturité, les fruits du vomiquier ont la forme d’une poire. Ils sont constitués par une sorte de pulpe molle contenant de nombreuses graines rondes et plates, de couleur gris verdâtre. Ce sont cesgraines qui constituent la drogue appelée noix vomique. Récolte. — La récolte des noix vomiques commence — 107 — dans certaines régions au mois de novembre et con- tinue au fur et à mesure de la maturité des fruits jusqu'au mois de mars. Cette année, la récolte a été un peu tardive et n’a commencé qu'en décembre. Les concessionnaires envoient dans les forêts les indigènes chargés de cueillir les fruits. Comme la pulpe n’est pas utilisée commercialement, on débar- rasse par le lavage les graines de cette pulpe, puis on les met en tas au soleil pour les faire sécher, en ayant soin de remuer de temps en temps les tas. On obtient ainsi des noix vomiques de belle qualité, très propres, d'aspect argenté. Mais les indigènes de certaines tribus ramassent souvent sans scrupule les noix vomiques rejetées de leur pulpe par les oiseaux et les singes, car ces ani- maux, nous le verrons tout à l'heure, mangent la pulpe du fruit du vomiquier. Aussi trouve-t-on souvent, sur certains marchés européens, des noix vomiques terreuses et sales, beau- coup moins prisées que celles obtenues par cueillette et lavage. Commerce. — Le commerce de ces noix est très grand et se fait surtout dans l’Inde. La noix vomique est comprise dans les productions ordinaires des petites forêts situées sur les monts de l'Est, particulièrement dans les districts du Gange, Godavari et Nellore. Le droit de récolte est vendu chaque année au plus offrant, et l’acquéreur à une surface de territoire nette- ment déterminée pour exercer ce droit. Certaines mai- sons s'engagent alors, vis-à-vis des concessionnaires, à acheter toutes leurs graines. — 108 — Sur les hauts talus du Godavari, la récolte annuelle atteint environ 200,000 kilos par an. Les plateaux du Travancore surtout produisent des noix renommées pour leur apparence et leur qualité. Ces graines de la côte de l'Est, connues sous le nom de noix vomique de Cocanada, trouvent un débouché dans le port de Cocanada, d’où elles sont envoyées dans les ports d'exportation: Cochin, Calcutta, Madras, Aleppy et Bombay. Cochin fait un commerce considérable de noix vo- miques. Pendant le mois d'octobre, on serait surpris de voir les immenses tas de graines, assorties de qualités, séchant au soleil dans les cours de la maison Volkart frères. Une fois bien sèches, les noix vomiques sont embar- quées à destination des Etats-Unis, de l’Angleterre ou de l'Allemagne. Les deux grands marchés européens sont Londres et Hambourg. Quelques autres ports achètent de petites quantités de noix vomiques. On classe ces noix en quatre catégories : les noix de Cochin, de Tellichery, de Madras et de Calcutta. Les deux premières sortes sont préférées, car elles com- prennent des graines grosses et bien propres. Les autres sont des noix terreuses. La plus grande partie des noix importées est em- ployée pour en extraire la strychnine. Il y a des fabri- cants en Allemagne, en France et en Angleterre. Les Etats-Unis d'Amérique fabriquent aujourd’hui beau- coup de ce produit. La strychnine américaine est très prisée à cause le sa pureté. Un écrivain du journal indien The Capital pro- — 109 — posait récemment, comme une entreprise profitable, étant donné le bas prix de la matière première, de fabriquer la strychnine sur les lieux de récolte ; mais il paraît que des difficultés insurmontables rendraient au contraire cette entreprise impossible. Le prix d’achat de la noix vomique varie, dans l'Inde, de 5 à 10 francs les 100 kilos. En temps normal, on la vend sur les marchés de Londres et Hambourg de 18 à 24 francs les 100 kilos. Les quantités énormes employées pour la destruction des campagnols ont fait récemment hausser le produit, qui était coté 60 à 65 francs les 100 kilos. Mais cette hausse a peu duré; déjà les prix ont beaucoup baissé, étant donné la faci- lité avec laquelle on à pu faire venir de l’Inde de nou- veaux approvisionnements. Les prix que je viens d'indiquer sont pour des noix entières. Le broyage ou le ràäpage constituent une ma- nipulation coûteuse, dont le prix s'ajoute à celui de la matière première. Il y a peu de choses à dire sur l’emploi de la noix vomique en Europe. On utilise en médecine soit les noix vomiques en nature, soit des préparations obte- nues avec ce produit, soit enfin les alcaloïdes qui en sont retirés. Elle sert aussi communément dans certains pays pour la destruction des taupes, mulots et autres ani- maux nuisibles. Nous savons qu’occasionnellement cette année son emploi a été considérable. Mais j'ai recueilli sur les usages de la noix vomique aux Indes des renseignements fort curieux et fort ori- ginaux. Les indigènes de l'Inde, notamment les peuplades — 110 — du Gange et du Malabar, reconnaissent à la noix vomi- que les plus sérieuses vertus prophylactiques contre les morsures de serpents. Tennent, une autorité bien connue à Ceylan, dit que les émigrants du Malabar croient que les graines de goda-kudiru (noix vomique), prises d’une façon habi- tuelle, agissent comme préventif contre la morsure du cobra. Aussi les coolies de la côte indienne s’habi- tuent-ils à manger une graine par jour, dans le but d'acquérir l’immunité. Mais il faut un temps très long avant qu’une personne puisse s’accoutumer ainsi à consommer journellement une graine de noix vomique sans conséquences nuisibles. Cela représente en eftet environ 2 à 3 centigrammes de strychnine. On recommande, pour s’accoutumer, de commencer par une 64° partie de graine le premier jour, doubler le deuxième et augmenter ainsi graduellement pour arriver à la consommation d'une graine entière. On recommande aussi de mâcher la graine dans du bétel. Un auteur indien raconte comment on prépare, au Malabar, un remède infaillible contre les morsures de serpents. Une ouverture est faite dans le tronc d’un moringa bien sain ou dans un raifort. Une graine de noix vo- mique enveloppée de cotonnade blanche est insérée dans le trou, qui est ensuite herméliquement clos avec le morceau enlevé. Au bout de 80 à 90 jours, le trou est ouvert et l’on trouve la graine réduite en poudre. Cette poudre est prescrite par petite dose et agit d’une facon merveilleuse contre le venin. Du moins, c’est ce qu'affirme l’auteur de ce remède. Toutes les parties du vomiquier, bois, écorce, feuille, — All — graine, sont employées aux Indes dans la médecine indigène. Les noix finement broyées et mélangées avec de l'huile de Néem forment un remède tonique et as- tringent communément administré. Une décoction de feuilles est employée dans la paralysie et l’inflamma- tion rhumatismale. L’écorce forme le principal ingré- dient d’une huile médicamenteuse très employée en applications locales contre les éruptions syphilitiques et autres. Avec les graines fraiches, on prépare une huile essentielle administrée comme aphrodisiaque. Ajoutons que les usages si répandus de ce végétal éminemment toxique ne sont pas sans causer de fréquents accidents. Mais il n'y a pas que les indigènes qui fassent usage du vomiquier et de ses produits. Certains animaux en mangent volontiers. Les oïiseaux, notamment les perroquets et les corbeaux, et certaines espèces de singes mangent la pulpe du fruit et la graine, mais on a remarqué que ces animaux s’accoutument peu à peu à la consommation des graines, de façon probablement à acquérir l’immunité contre les effets du poison. Les bestiaux évitent les fruits du vomiquier, mais ils broutent les pousses et les feuilles très jeunes, c’est- à-dire lorsque ces parties n’ont pas encore de trop grandes proportions d’alcaloïdes toxiques. Les graines du vomiquier semblent avoir été intro- duites dans la médecine par les Arabes, qui auraient appris les usages de la drogue par les Nairs, tribu pri- mitive vivant sur la côte Sud-Ouest de l'Inde. Chez ces tribus, en effet, les usages du vomiquier semblent avoir été connus de tous temps. Les noix vomiques furent introduites en Europe au xvi® siècle, et en Angleterre vers le milieu du xvrr®, LE TREMBLEMENT DE TERRE DE LA ROCHELLE 25 NOVEMBRE 1905. tee ee ee Un léger mouvement de tremblement de terre s’est fait ressentir dans l'Ouest de la France. Des constata- tions nombreuses ont été publiées ; il m’a semblé utile de les grouper autour de l'observation que j'ai pu faire moi-même. J'étais à mon bureau, au troisième étage, lorsqu'un bruit sourd pareil au déchargement d’un tombereau plein de pavés se fit entendre, accompagnant un ébran- lement assez accusé. Je compris immédiatement qu’il s'agissait d’un tremblement de terre et tirai vivement ma montre. Grâce à cette circonstance je pus suivre la marche du phénomène avec allention et noter l'heure exacte. Je la convertis peu après en heure de Paris, en confrontant les indications de ma montre avec celles de l'horloge de la Bourse du commerce à La Rochelle. Cette horloge est en effet réglée sur Paris. Le phénomène commença à 10 h. 5% m. 52 s., temps moyen de Paris, et se termina à 10 h. 58 m. 6 s. Il dura donc exactement 14 secondes. Deux secousses furent ressenties, la seconde plus forte que la première. Deux petites trépidations très faibles furent également sensibles entre 11 heures et midi, mais il n’est pas impossible qu’elles fussent dues à des causes autres qu’un mouvement sismique. L'absence de sismographe n’a pas permis de déter- miner exactement toutes les circonstances du phéno- 9 nee mène; toutefois autant que le mouvement oscillatoire du bec de gaz suspendu au-dessus du bureau a permis de le remarquer, le plan des oscillations était orienté dans la direction N.-N.-0.—S.-S.-E. La première oscillation lança le bec-suspension vers le N.-N.-0. Une petite boussole, toujours auprès de moi, et sur laquelle je contrôlais aussitôt la direction, ne décela aucune perturbation magnétique. A la poste, où je me rendis, on ne s’était aperçu de rien, soit à cause du bruit occasionné par la circu- lation dans les rues voisines de l’immeuble, soit en raison à cette heure-là de l’affluence du publie. Toujours est-il que les appareils télégraphiques n’ont accusé aucune perturbation. Nul courant tellurique. Dans le port comme dans le canal de Marans, la vase remonta à la surface de l’eau, révélant une agitation du fond. A Rochefort-sur-Mer, une note de l'Observatoire de la Marine — également dépourvu de sismographe — donne une confirmation précieuse aux observations précédentes. L'heure est moins précise, mais la même, 10 h. 57 pour le commencement du phénomène. La direction du mouvement ne diffère pas beaucoup et encore l'observateur se défend-il d’une exactitude rigoureuse. Il a trouvé N.-0.—S.-E. Il a de plus re- marqué le grondement sourd et constaté au baromètre enregistreur deux oscillations verticales de 12/r 5. Toutefois il a trouvé un mouvement moins long : 2 secondes. Si l'appréciation a été faite après coup, rien de bien étonnant à cela, car on se trompe faci- lement si on n’a pas une montre en main. D'ailleurs, — 115 — dans ces conditions, on remarque le phénomène quand il est déjà très avancé. A Saint-Jean-d'Angély, M. Robert a signalé le phénomène au bulletin de la Société astronomique de France : Heure initiale du phénomène, 10 h. 57, gron- dement souterrain, direction S.-S.-0.—N.-N.-E., deux secousses. Rien sur la durée du mouvement. L'auteur ajoute qu’un cheval très doux donna des signes inso- lites de frayeur deux minutes avant le mouvement sismique. Nous avons peine à reconnaître là un phénomène de prévision instinctive, dû à une action inconnue, et précédant le mouvement lui-même, car un autre cheval, dans la même écurie, resta parfaitement calme. Le palefrenier duquel l’auteur tient l’observation a rattaché le premier fait au second, sans probablement qu'il y ait entre les deux autre chose qu’une cor- rélation d'heure. Faut-il ajouter que le même jour, mais à 3 h. 45 du soir, une secousse suivie de frémissements très sensi- bles a été ressentie en Angleterre, à Manchester et à Salford. D'autre part, le lendemain matin 26, à 7 h. 145 m. à Florence, à 7 h. 40 à Monteleone en Calabre, à 7 h. 45 à Naples, la terre a tremblé. Abbé A. FANTON. N. B. — Il y a peut-être lieu de remarquer que ces tremblements de terre se manifestent après des pluies torrentielles et prolongées et de rattacher ces mouve- ments sismiques à la théorie des effondrements de M. Marchand, directeur de l'Observatoire du Pic du Midi. 2 * # lé 4 0 : L LE 1e JA % 2007 FRET $ î i » . + 2 Le) rs be ,, ACTION DE LA STRYCHNINE SUR QUELQUES ANIMAUX COMESTIBLES : J.-H. GUILLEMIN, rapporteur. 4 A 4 — Au moment où le département de la Charente- Inférieure fut envahi par les campagnols, une com- mission prise parmi les membres du conseil d'hygiène et composée de : MM. Dr Mabille, Bernard et Guillemin, fut adjointe à M. le professeur départemental d’agri- culture Dubourg pour rechercher si les volailles ou gibiers, qui avaient absorbé du blé empoisonné par la noix vomique, étaient susceptibles d’être un danger pour la santé des personnes qui les auraient mangés. Les expériences auxquelles se livra cette commis- sion durent être rapidement menées, car le danger, s’il y en avait un, était immédiat, et la réponse à faire devait être fournie aussitôt que possible. C’est de ces expériences, succinctement relatées, que nous allons essayer de tirer quelques conclusions : mais, avant deles exposer, il est bon de rappeler que les savants ne sont point d'accord sur la nocuité pos- sible de la viande des animaux empoisonnés par la strychnine ; admise par les uns, tels que Tessandier, Heu et Bonnard, elle est niée par Lusset, qui * DpuIe - 418 — sur ses propres observations et sur celles de Feser, Harms et Frohner. Procédés d’'empoisonnement. Nous avons usé pour l’empoisonnement des animaux de deux procédés : le premier, employé par nos agri- culteurs, consiste à faire bouillir un kilo de noix vomique pulvérisée ou ràpée pendant vingt minutes dans six litres d’eau auxquels on ajoute ensuite six litres de blé, et l’on continue l'ébullition en agitant le tout jusqu’à ce que l’eau soit absorbée complètement. On à pris le soin dès le début d’ajouter dix grammes d'acide tartrique dans le but d'aider la solution de la strychnine. (Alcaloïde très peu soluble dans l’eau.) Dans ces conditions, le grain de blé est en partie en- touré comme d’une gangue de poudre de noix vo- mique (1). Pour le deuxième procédé d’empoisonnement, nous avons eu recours à la solution d'un sel de strychnine plus employé en médecine vétérinaire, c’est-à-dire le sulfate. ? Expériences. Empoisonnement par la solution de sulfate de strychnine. Quatre poules et un faisan reçoivent des doses diffé- rentes de solution de strychnine. (1) Mode d'emploi modifié postérieurement aux expériences relatées. — Faire bouillir, pendant une heure où une heure et demie,un kilog. de noix vomique, avec dix grammes d'acide tartrique, dans dix litres d’eau. — Jeter ensuile le liquide bouillant sur dix litres de blé ou d'avoine concassée, et remuer jusqu’à l'absorption complète du liquide par les grains. — Cette dose de un kilog. de noix vomique suffit pour traiter un hectare de terrain. — 119 — La première poule, du poids de 730 gr., reçoit 4 mil- ligr. S de sel par kilo d'animal et par goutte de 1/2 minute en 1/2 minute. Vingt-cinq minutes après le début de l’administration, l’animal est atteint d'accès de dyspnée intermittents, respiration incomptable à ce moment, tremblement des membres. L'animal refuse de marcher. La deuxième poule, du poids de 832 gr., est d’une autre race. Elle reçoit, elle aussi, 4 milligr. 8 de sul- fate de strychnine par kilo d'animal, etàaucun moment elle ne présente de phénomènes d’intoxications. La troisième poule, du poids de 880 gr., reçoit { cen- tigr. 13 de sulfate de Strychnine par kilo d’animail et présente les mêmes phénomènes d'intoxication que la première poule: dyspnée, tremblement dans les membres, refus de se tenir sur les pattes. La quatrième poule, du poids de 680 gr., reçoit 2 centigr. 9 de solution de sulfate de strychnine par kilo d'animal, et cinq minutes après elle présente les mêmes phénomènes de dyspnée queles poules nes 1 et 3, puis, aussitôt atteinte d’une crise convulsive, épilepti- forme, se dresse sur ses ergots, saute sur ses pattes raides et tombe sur le côté. Remise sur ses pattes, les convulsions tétaniques recommencent et se succèdent jusqu’à la mort, qui se produit onze minutes après le début des phénomènes d'intoxication. Un faisan, du poids de 885 gr., recoit 1 cent. 69 de solution de sulfate de strychnine par kilo d'animal ; cinq minutes après se déclare la dyspnée et vingt-cinq minutes après commencement des convulsions téta- niques. Pendant deux heures et demie, les crises tétaniques — 120 — se reproduisent, soit spontanément, soit provoquées par attouchement ou par un bruit violent et subit. Après chaque convulsion, l’animal est voisin du coma, mais finalement il se tire d’affaire, après être resté abattu pendant 48 heures. Empoisonnement par le blé bouilli avec la noix vomique. La dose de strychnine brute qui a été calculée con- tenue par kilo de noix vomique correspond à {i gr. Une poule, du poids de 1,095 gr., reçoit par gavage un certain nombre de grains de blé contenant 2 cen- tigr. de strychnine et présente alors les mêmes phéno- mènes que la poule n° 3 : dyspnée, démarche saccadée pendant une heure. Un faisan, du poids de 740gr., ayantreçu 4 centigr. 4 par kilo d'animal, ne présente que de l'abattement. Un perdreau, du poids de 703 gr., reçoit 7 centigr. 6 par kilo d'animal, refuse de marcher simplement, ne présente ni dyspnée, ni aucun phénomène d’intoxi- calion. Un perdreau, du poids de 135 gr., reçoit3centigr. 25 par kilo d’animal ; presque aussitôtil présente les phé- nomènes de dyspnée, tremblement des membres infé- rieurs, puis convulsions tétaniques intermittentes pendant une 1/2 heure. Il ne parait ensuite aucunement indisposé. Voici donc une poule, un faisan et deux perdreaux qui ont reçu des quantités relativement formidables «de sel de strychnine et qui n’ont cependant présenté que des phénomèmes excessivement légers d’intoxi- cation. Nous signalons ce fait dès maintenant, car l’inter- prétation en est encore inconnue. Ces doses, en effet, auraient dû amener la mort inéluctable et rapide. Mais voici une nouvelle série d'expériences qui reste à l’état de problème non encore résolu. Un moineau, du poids de 18 gr., reçoit 3 centigr. 6 par kilo d’animal ; il ne meurt qu’une heure après et subitement au moment où on lui donne deux gouttes d’eau à boire. Un moineau pesant 22 gr. reçoit3 centigr. 5 par kilo d'animal, 8 minutes après: dyspnée, tremblement pendant quelques minutes et retour à l’état normal. Si, trois heures après, on luiadministre deux 1/2grains de blé seulement, il est pris immédiatement d’une crise tétanique violente qui dure cinq minutes et se termine par la mort. Un pigeon, du poids de 258 gr., recoit 4 centigr. 26 par kilo d’animal avec quelques gouttes d’eau, pen- dant deux heureset demie, l'animal pe présente aucun phénomène ; si, après ce laps de temps, on lui admi- nistre une nouveile quantité de grains de blé, presque immédiatement les convulsions tétaniquessedéclarent, intermittentes, violentes, spontanées ou provoquées et finalement mort après dix minutes de crise. Un deuxième pigeon de 275 gr. reçoit 1! centigr. 6 par kilo d'animal. Pendant trois heures, il ne présente aucun phénomène et, sià ce moment on lui administre une nouvelle dose, il est atteint de petits tremble- ments, puis crises tétaniques comme le précédent, avec mort analogue. Enfin, un perdreau du poids de 143 gr., ayant reçu 6 centigr. de strychnine par kilo d'animal, ne présen- — 122 — tera que de l'abattement avec tremblement léger des pattes. Ces phénomènes seront passagers. Si, trois heures après, on lui administre une nouvelle dose de toxique, il présentera les phénomènes classiques de l’intoxication : convulsions tétaniques répétées, spon- tanées et mort. Il semble bien réellement que les premières doses de grains de blé empoisonnés soient restées chez tous ces animaux, pour ainsi dire, sans effet, ou tout au moins n'ont pu produire qu’un malaise en somme passager, sans réaction caractéristique de l’empoison- nement, et ils se seraient tirés d’aflaire rapidement si, quelques heures après, on ne leur avait administré une nouvelle dose de poison. C’est ici que le phéno- mène semble inexplicable, car cette seconde dose n’a pas le temps d’agir que déjà l’animal présente tous les symptômes classiques du poison tétanique et meurt. Les autopsies des animaux morts ont été faites, et dans le jabot de chacun d’eux nous avons retrouvé plus de 4/5 des grains ingérés, absolument indemnes, c’est-à-dire qu’une faible quantité de la première in- gestion avait été absorbée et que le restant semblait immobilisé dans cet organe. Les corps des animaux morts ne présentaient aucune trace apparente d'intoxication : ni marbrure, ni déco- loration, ni surcoloration, ni raideur cadavérique exa- gérée, et c’est là un fait important à signaler, car la croyance populaire était à ce moment que tout animal trouvé mort, ne présentant pas de tache à la peau, n’était pas un animal intoxiqué, et par conséquent pouvait être mangé. Expériences de blé bouilli avec la noix vomique donné à discrétion. Sept animaux ont été soumis à un jeûne de 24 heures pour ceux qui n'avaient pas encore été sujets, ou de 48 heures après leur retour apparent à l'état normal, pour ceux qui avaient déjà été intoxiqués. Dans ces conditions, nous nous sommes assurés que tous avaient bon appétit et c'est alors que nous leur avons offert à discrétion le blé empoisonné par la noix vomique. Nous avons cru, en agissant ainsi, et pourter- miner nos expériences, nous placer dans les conditions normales dans lesquelles ces divers animaux sont sus- ceptibles de se trouver lorsqu'ils rencontrent en plein champ ou dans les jardins le blé empoisonné répandu à profusion, mais à destination des campagnols. Une poule adulte, du poids de 885 gr., reçoit l'offre d’une certaine quantité de grain empoisonné ; comme elle est à jeun depuis 24 heures, elle se précipite sur la pâture, en avale rapidement dix-huit environ, puis son enthousiasme tombe ; cependant le jabot et le gésier réclament et ce n’est plus que par un ou deux grains à la fois qu’elle déjeune. Une heure après le début de l'expérience, la poule se couche sur le ventre, elle paraît triste, tout comme les perdreaux, les poules sus-cités, qu’ils aient été empoisonnés par la solution de sulfate de strychnine ou par les grains empoisonnés. Ce n’est qu’à contre- cœur et poussée par une baguette qu'elle se déplace pour se recoucher aussitôt, et pendant 48 heures elle se maintiendra dans cet état, en absorbant de temps en temps, mais rarement, un à deux grains recélant le poison. Au bout de 48 heures elle cesse complètement de manger, continue à être triste et abattue ; cependant, de temps en temps, elle se remet sur ses pattes et si, à ce moment, nous lui offrons du grain sain, c’est gloutonnement, voracement qu’elle l’absorbera, tout en faisant entendre une sorte de petit gloussement de contentement. Aurait-elle donc su reconnaître le grain nocif du grain régénérateur ? L'histoire des deux perdreaux peut se résumer en deux mots, mais chacun des sujets présente une carac- téristique différente. Le perdreau de 135 gr.se conduit absolument comme la poule, et ayant absorbé 50 grains, c’est-à-dire 11 milligr. ou 8 cent. 25 par kilo d'animal, il ne pré- sente d'autre phénomène que de l’abattement, de la tris- tesse et se couche sur le ventre pendant des heures. II n’a même pas de dyspnée. A partir de ce moment, il ne mange plus et si, douze heures après, nous lui offrons du grain sain, tout comme la poule, il se jette dessus, avec, pour chacun, un piaillement manifeste de satisfaction. Le second perdreau de 103 gr., beaucoup plus sau- vage et plus défiant, ne touche pas un seul des grains empoisonnés qu’on a mis à sa disposition. Le pigeon adulte agit tout comme la pouie et la per- drix, absorbe une trentaine de grains en 48 heures, sans autre phénomène que de l'abattement ; elle ne mange ensuite le grain sain qu'avec méfiance. Les deux faisans agissent comme les deux perdreaux: l’un, sauvage, ne touche à rien; l’autre, moins vif, met 48 heures pour absorber une petite quantité de grain empoisonné, qui lui donne les mêmes phénomènes de tristesse, et tous deux absorbent avidement le grain sain qu’on leur offre par la suite. Enfin le lapin. Après un Jeûne de 24 heures, il mange rapidement quelques grains empoisonnés, puis s'arrête et semble ne point vouloir continuer; une feuille de chou réveille son appétit, mais c’est avec méfiance qu’il absorbe à nouveau quelques grains. Si à 11 h. 38 il a été servi, à 1 h. 10 il éprouve une crise; couché sur le côté, il a quelques convulsions des pattes qui durent cinq minutes, une demi-heure après, nouvelle crise, véritable convulsion dans les pattes d’abord, dans l’arrière-train ensuite, finalement géné- ralisée pendant une demi-heure. Il se relève, s’accroupit sur le ventre et refuse de marcher quand on le pousse. Le soir, toute sa vigueur est revenue, mais ce n’est plus le grain empoisonné qu’il mange, c’est le carton de sa mangeoire et l’osier de sa cage. Dorénavant, il ne veut plus toucher au grain empoisonné, et si quelques heures plus tard on lui offre une nourriture saine : carottes, chou ou grain sain, il ne s'arrêtera de manger qu'après avoir tout dévoré. Conclusions. Et d’abord deux animaux de même espèce peuvent avoir des susceptibilités absolument différentes s'ils ne sont pas de même race, telles que la poule n° 1 et la = 1% = poule n° 2, ayant absorbé la même quantité de sulfate de strychnine. Nous pouvons dire qu'il faut un minimum de 18 milligr. de sulfate de strychnine par kilo d'animal pour tuer un faisan ou une poule, que, proportionnel- lement, pigeons, moineaux et perdreaux sont moins susceptibles que la poule, puisqu'il a fallu 2 centigr. seulement par kilo d'animal pour celle-ci, afin d’obte- nir en cinq minutes des accidents toxiques, tandis que les autres ont supporté de 3 à 7 centigr. pour présenter les mêmes phénomènes. Ensuite, peut-être la chose la pius importante que notre travail a relevée, c'est que, contrairement aux assertions de Tabourin et de Tes- sandier, les poules, pigeons, moineaux, ne présentent, après la mort, aucun phénomène apparent d’empoi- sonnement. Vous verrez tout de suite l'importance qu'il y aurait à faire connaître ce manque absolu de distinction entre un animal mort naturellement ou mort empoisonné par la noix vomique. Nous ne nous appesantirions pas tout particulière- ment sur ce point si, nous reportant uniquement à nos expériences, nous concluions, comme elles nous le per- mettent, qu'un animal à l’état de jeûne depuis 24 heures n'est pas susceptible de s’'empoisonner, quand il n’a à sa disposition que du grain empoisonné par la noix vomique. Cependant, nous pouvons dire, après les autopsies faites, qu'aucun des animaux que nous avons traités, à savoir : poules, moineaux, pigeons, perdreaux, faisans, lapins, ne sont susceptibles, s'ils ont été dépouillés préalablement de tous leurs organes viscéraux, d’occa- sionner une intoxication chez l’homme. Nous pourrons dire aussi que, si l’on a trouvé des moineaux, alouettes, et, en particulier, des campa- gnols empoisonnés par des grains bouillis avec la noix vomique, c’est que la petite quantité qu'ils absorbent dès le début, deux, trois ou quatre grains en une seule fois, suffit à occasionner leur mort, car, proportion- nellement au poids d'animal, ce sont des doses relati- vement considérables et qui ont un effet foudroyant. Que, de plus, campagnols, rats et souris ont une sus- ceptibilité tout à fait particulière aux poisons strych- niques. Par opposition, nous pouvons tirer cette con- clusion : que les animaux les plus gros, pigeons, poules, perdreaux, faisans, lapins, qui, eux, n’absor- bent pas la dose toxique du premier jet, sont rendus suffisamment malades par cette dose pour que l’abat- tement et l’inappétence envers le produit toxique les empêchent d’aller jusqu’à la dose qui occasionnerait leur mort. FE EUT EUAE LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES NATURELLE DE LA CHARENTE-INFÉRIEURE 1902-1906. 4— Bureau. Président, M. BerxarD (0 %, O. $). | M. L.-E. MEYER (I £ÿ). | M. Jousser. ( M. GUILLEMIN (#4, #4, ÉD). | M. SOENEN. Conservateur : M. G. BERNARD (0 *). Conservateur-adjoint : M. CH. BASSET. Bibliothécuire-archiviste : M. CARRIÈRE (A £). Trésorier, M. E. CounEAu ($ À £à). Vice-Présidents. Secrétaires..... M. Bernard est chargé du Muséum Fleuriau (Sciences naturelles et paléontologie du département, et du musée d’ostéologie). Membres titulaires. MM. Pagur, Eug., banquier. BASSET, négociant. BERGERAT, pharmacien. BERNARD (0 $&,0 $x), pharmacien principal de {re classe en retraite. BERTEAUD (%), directeur des cont. direct. (retraité). BogriE, docteur-médecin, — 130 — MM. BouTirox (£ÿ), docteur-médecin, conseiller général, à Saint-Xandre. BrARD (%, I {ÿ), docteur-médecin. BROSSARD, pharmacien. CAILLOUX, pharmacien de Îre classe. CARRIÈRE (I. £ÿ), pharmacien honoraire. DE COMMINES DE MaARSILLY, à Paris. ConpamyY, P. (A &), fils, docteur-médecin. CORBINEAU (A Éÿ, x), architecte. COUNEAU (%#, &ÿ), greffier du tribunal civil. DELMAS, Julien, propriétaire. DoLLoT (A &ÿ), correspondant du Muséum, à Paris. DusourG (0 fx), professeur départemental d'agriculture. EURY ($%), pharmacien. FANTON, directeur au grand séminaire. FARRAN (A £ÿ), propriétaire, à Aytré. FAUSTIN fils, (4), armateur. FLEURY ($ÿ), pharmacien, à Marans. FOURNIER, prof., direct., du laboratoire municipal. GATAU, négociant. GUILLAUD (%, I &ÿ), professeur à la faculté de Bordeaux, Saintes, conseiller général. GUILLEMIN (+K4, F4, &ÿ), pharmacien. GUILLEMOT, secrétaire général à la Préfecture. HILLAIRAUD, docteur-médecin. JOUSSET père, pharmacien, Rochefort. JoUSSET fils, étudiant. LAURENT (£ÿ), docteur-médecin. LÉRIDON, armateur. MARTIN (£), imprimeur. MARTIN, docteur-médecin. Meyer, Eugène (I #ÿ), courtier maritime. MopELskt (%), ing. en chef des ponts et chaussées. Moreau (C $), général du Génie en retraite. — 131 — MM. Musser (I £ÿ), bibliothécaire de la Ville. D'OrBIGNY ($, Eÿ, »H4), conseiller général, armateur. PÉRIER fils (£ÿ), courtier. PÉRIER père ($ÿ), courtier. PiINEAU, docteur-médecin. Rouvier (O0 %, $), prop., sénateur, conseiller généra!, Surgères. Rouy (%)}, botaniste, Asnières (Paris). SENNÉ (%), archiviste. . SOENEN, pharmacien de 1re classe. TurPAIN, prof. à la faculté des sc. de Poitiers. ViELJEUX, armateur. Vivier, Alfred ([ &ÿ, O »k4), juge honoraire. DA Membres Agrégés. BERNARD, inst. au Bois (ile de Ré). BoucHERIE, Michel, Chez-Merlet, .. de Bresdon, canton de Matha. Bouron, Rochefort. BuroT CE, I &ÿ), Dr à Rochefort. COoMBESs, Dr, sénateur, Président du Cons. gén. à Pons. COUILLIAUX, juge de paix, St-Genis. DELABARRE, Saujon. DE SAINT-MATHURIN, St-Jean d’Angély. Manës, Ad. ($), cap. retr. Saujon. com. MuRE (%), Surgères. PARENTEAU. Picez (A &ÿ, &, MC), docteur en méde- cine. ROMIEUX (0 &), capitaine de frégate, Rochefort. SIMON, receveur de l’enr., Rochefort. TESSERON, instituteur en retraite, Gra- zannes. VIGER, instituteur, à Dompierre-s/-mer. Vivier, Alphonse, avocat, à Cognac. Membres Correspondants. ALLENET (%#), officier de marine, Roche- fort. ALLENET (%), lieutenant-colonel en re- traite, Poitiers. BARINE, Arvède, (madame Ch. Vincens), Paris, 24, avenue Wagram. BAUDOUIN, pharmacien, Cognac. BÉpaRT (%, €}, 4), prof., à Lille. BEparr, docteur, Bordeaux. Baupry, docteur, prof. à la Faculté de médecine, Lille. BERGERET, pasteur à Vitré, Deux-Sèvres. BERNARD, Aue., Poitiers. BERTHAUD, prof. de physique, Mâcon. Bo1zor (I &ÿ), prov. du Lycée, Mâcon. BONJEAN, Félix, Lyon. BOULANGIER, ing. des ponts et chaussées. BOULLAND, H. , docteur, Limoges. BOUQUET DE LA GRYE (C %), ing. hyd. en chef de 1re classe en retraite, mem- bre de l’Institut, 8, rue de Belloy, Paris. . Bover, Alfred, Monthéliard. CAMPEAU, J.-R.-E., président de l’Insti- tut fr anc ais-canadien, Ottawa. CAMUS, pharmacien, Paris. CASTAN (%), officier d'artillerie. CHABERT (0 %), médecin principal de re DA en retraite, à Chambéry (Savoie). CHAMPENOIS, inspecteur des forêts. CHARLET, Luze (Basses-Pyrénées.) CHARTRON, recev. de l’enr. Luçon. CHAUVET, notaire, Ruffec. CLARET, docteur, Vannes. COSTE, Paris. CourçonNaIs (1 &ÿ), démie, Limoges. CRAHAY DE FRANGHIMONT, (#), ingénieur en chef des ponts et chaussées, 43, rue Saint-Pétershbourg, Paris (18e). DANGEARD, prof. Faculté, Poitiers. Dassy, préparateur de physiologie à la Faculté de médecine, Paris. DE CEssac (ÿÿ), Guéret. DE GRESSOT (0 #), général d’ artillerie. inspecteur d’aca- — 133 — DanGrBEAUD, Edouard (0 &), s-directeur honoraire de la us Paris. DELAVAUD (0%, LE, Co, 4), Insp. hon. serv. de a 85,rue dela Boëtie, Paris. DELAVOIE, sous-ingénieur, Rochefort. DELHOMEL, 40, rue de Verneuil, Paris. Des MEsxaRps, docteur, 19,rueSt-Vivien, Saintes. DocrEur, À., négociant, Bordeaux. Drouer, Troyes. DROUINEAU, G. (A £ÿ), inspect. général des serv. admin. au minist. de l’Int., 105, rue N.-D.-des-Champs, Paris. Duany-SoLER, docteur, directeur l’asile départemental, Niort. DurFFoRT, pharmacien, Angoulême. DuprÉé ($%, [. &ÿ), inspecteur d’acadé- mie, Paris. Ecx, André, pharm. Nogent-sur-Marne. FÉE, F. (&, &), méd. princ. de dre cl. 11e corps. Mines, docteur, Perpignan. FOURNIER, À., cons. histoire nat., GABORIT, pharmacien, Nantes. GALLES, conseiller de préfecture honor. GAMIN, instit., à Piedblanc, près Niort. GARIEL (G %), inspect. gén. des ponts et chaussées, m. de l’Académie de médecine, prof. à la Faculté de méde- cine, 99, rue Jouffrov, Paris. CAUDRY, Albert (C&, Léÿ), m. de l’Instit., Paris. GAUTIER, L., docteur, Melle. GiARD (%#), memb. de l’Instit., prof. à la Sorbonne, 14, rue Stanislas, Paris. GiLLoT, docteur, Autun. GIRAUDEAU, docteur, Pau. Goop, Paul, docteur, La Mothe-St-Héray. GUILLON (%), dir. Cont. indir., en re- traite, Angoulême. Gyoux, docteur, Bordeaux. Huaues, Edm. (O 5%, I &ÿ), aux Andelys. Hy, (abbé), Angers. Jouan (O0 %, I &), cap. de vaisseau, en Cherbourg. JOURDAIN (4), docteur ès- -sciences, Paris. de Niort. sous-Préfet r] JOUSSET, docteur, Lille. JOUSSET DE BELLESME (%, I &ÿ), 41, rue de Valois, Paris. LABEYRIE (à), insp. primaire, Tulle. LALANDE, Ph., Brives. LATASTE, à Cadillac-s/-Garenne (Gironde). LAVENTURE (A.), instituteur à Chérac. LEENHARDT, (docteur René), 7, rue Marceau, Montpellier. LEGOUIS, prof. de zool., éc. norm. Paris. LETELLIER, prof. Alençon. LIÉNARD, Verdun. LorIoL (de) P., géol. chalet des Bois, par Crassier, Suisse. LOURDE, ancien pasteur, Castres. Ly-CHa0-PÉE (A Eÿ, %), mandarin et lettré chinois, attaché à la mission scientifique, Paris. MALINVAUD, 8, rue Linné, Paris. MAIRAND empl. des pontsetchaus., Niort. MaANTov ANT, Paul, naturaliste, Rome. ManTovani, G., naturaliste, Rome. MARGAIS, 19, rue Ninau, Toulouse. MAUFRAS, E, Beaulieu, par Bourg-s/- Gironde (Gironde). MaZURE (%, 1%), insp. d’acad. en retraite. MiLA DE CABARIEU, H. (O0 $, I D), ancien préfet, Cabarieu nue -et-Garonne). MOULLADE, (%) Alb., pharmacien prince. de {re classe, Marseille. MOULLADE, pharmacien au Puy. NICOLLON. Opin, direct. du labor. de zool. marine, 10, quai Franqueville, Sables-d'Olonne, Papier, Hippone. Perrier, Edm. (C %, I &ÿ), l’Instit., dir. vier, Paris. PERSONNAT, Victor, receveur des cont. indir., Château-Thierry. PIÈTRE, professeur à Oran. PIOLET, cap. au long cours canal à Ismaïlia (Eg ypte). PORTAL (baron de), Louis, à Montauban. RAMONET, ag, ad. de la marine, Ruelle. RICHEMOND (Adolphe de), pasteur, à Vançais (Deux-Sèvres). memb. de du muséum, 57, rue Cu- pilote du Il — 134 — ROCHEBRUNE (A. de) doct., aide-nat. au muséum, Paris. Rousseau, Ph., instituteur, La Verrière de Bruffierie (Vendée). RouxEL (I &ÿ), prof. de physique. SABATIER, Armand, (%, [ &ÿ), doyen de la Faculté des sciences, Montpellier. STÉPHANI. SURINGAR, W.-E.-R. (0 5%), prof. Uni- versité, Leyde. TASLÉ ($#), ancien notaire, Vannes. TiLLET, Paul, professeur d'histoire natu- relle, Villeneuve-sur-Saône. TRIGANT de BEAUMONT, (Madame), bota- niste. VENDRIÉS, attaché au ministère de l’Ins- truction publique, Paris. VrauD-GRAND-MaraAiïs, docteur, Nantes. VAN DEN CRUYSSEN, P. {&ÿ), 16, rue de La Mothe-du-Pin, Niort. VINCENS (O0 %), sous-directeur hono- raire du miaistère de l’intérieur, 24, avenue Wagram, Paris. VINCENT, pharmacien, Angoulême. WŒLFFLE,agent-voyer d'arrondissement, Civray. ZaAvopxy, Dr, D. Brenntegasse, 24, à Prague, Bohème. "2 0) 0 —_——nnn ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES. FRANCE. ....... Ministère de l’instr. publique, comité des travaux scientifiques, (Envoi de 5 volumes d’Annales.) a . .. .. Musée Guimet (1 exemplaire d’'Annales). LEUR 5 a ORPI Académie des sc., agric., arts et b.-lettres, Bouches-du-Rhône. RE Société scientifique et littéraire. amiens .............. Société linnéenne du nord de la France. MES... Société d’études scientifiques. EL 6 SOPRANO Société d'agriculture, sciences et arts. RO A Société industrielle et agricole du Maine-et-Loire. LÊls oO Société d’horticulture du Maine-et-Loire. EN 0... Société d'histoire naturelle. PRXErre..... ....... Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne. MAONNE. .......... Société des sciences et arts. MAAURE. . ....... .. Société d'histoire, d'archéologie et de littérature. M OrC.. .......... . Société d’émulation. RAS... Société scientifique, archéologique et littéraire. RE Académie d’'Hippone. Haordeaux ........... Académie des belles-lettres, sciences et arts. Re. Société linnéenne. ! LL, SE RORRERPRERE Société des sciences physiques et naturelles. 2.1... .. Société d'anthropologie du Sud-Ouest. RE .. Société archéologique. DAUEO.............. Société des sciences naturelles et d'archéologie de l’Ain. ME... .......... Société des naturalistes de l’Ain. SE... .... Société acadéraique. RATES... .......... Société scientifique, histor. et archéo. de la Corrèze. Carcassonne ........ Société d’études scientifiques de l’Aude. _Ghâlons-sur-Marne. Société d'agriculture, sciences et arts de la Marne. Pmbery......:...! Académie des sciences, lettres et arts de Savoie. MMHETDOUrTS.......... Société des sciences naturelles. RE . .. Société de Borda. ‘Draguignan ........ Société d’études scientifiques et archéologiques. Mérenoble............ Académie delphinale. METEC Société des sciences naturelles et archéol. de la Creuse. MH vre ........... Société nationale hâvraise d’études diverses. LE 0 APRES Société des sciences et arts, agricoles et horticoles, PA AOTES .. ......... Société historique et archéologique. DEL y à GROUP Société des sciences naturelles de la Haute-Marne. . Société d'agriculture, sciences et arts. LE. ARE NRINENS Société agricole et scientifique de la Haute-Loire. Levallois-Perret... Association des naturalistes de Levallois-Perret (Seine). RE... Société géologique du Nord. — 16e LIiMOges..:...:...... Société Gay-Lussac. Los ASS Société de botanique: EYON:.:..:..:. den Société d'agriculture et d'histoire naturelle. 16 RNCS ANRENee er Société littéraire, historique et archéolozique. He Mañs:........0... Société historique et archéologique. Marseille............ Société scientifique Flammarion. Montauban ......... Académie des sciences, belles-lettres et arts. LR en Lire ... Société archéologique. Montbéliard. . Société d’émulation. Montpellier......... Académie des sciences. Moulins”. .:....... Revue scientifique du Bourbonnais ; M. Ollivier, directeur. Nantes: cuite icr cr Société académique. KG SRE A AS tee Société des sciences naturelles. NICE norte Rat Société des lettres et sciences. Nimes... .... Académie du Gard. (0 PS ART Société d’études des sciences naturelles. Niort...... EC ER Société de statistique. DORE ee ae .. Société de botanique. 15 DRM ARR TE Bibliothèque scientifique de l'Ouest. Paris..... De eee Association française pour l’av. des sc., 28, rue Serpente. LG RCE Ecole polytechnique. LORS RE Le tre Société géologique de France, 28, rue Serpente. 6 De A re Société zoologique de France, 28. rue Serpente. Mi TR don CES . Société botanique de France , 84, rue Grenelle-Saint-Germain 1 (0 ES AR EEE Bibliothèque de l Université, à la Sorbonne. TOR ON eee Minist. de l’instr. publ., commis. du répert. de bibliogr. scient. Paurrcr SR ER Société des sciences et lettres. Perpignan ....... ... Société agricole, scientifique et littéraire. PTIVAS bee ncrmeu Société d'agriculture, sciences et arts. Reims. Académie. LG MSA ARTE bee Société d’études des sciences naturelles. Rennes ...... ....... Bibliothèque de l’Université. Rochechouart . . Société des amis des sciences. Rochefort ...... ..... Société de géographie. Rouen". ee Société des amis des sciences. SAINteS Te LE ee .... Commission des arts et monuments historiques. SENS Linda ue Société archéologique. St-Etienne...... ... Société d'agriculture, sciences et arts. Toulon =..." Académie du Var. Toulouse. HN RE Académie des sciences, incriptions et belles-lettres. Id CEE EMSocIÉtEIdihiIStoirematunelle: (0 RSR PAR Société ar chéologique du or de la France. 1 rtmeeue ... Bibliothèque de l’Université, 2, rue de l’Université. 10 AMC ea Société Franco-Hispano-Portugaise. OR A ide Société des sciences physiques et naturelles. ADAM HAT ES Société de botanique, rue Ninau. LrOVes re 0" .. Société académique d'agriculture et sciences de l'Aube. — 137 — pannes... Société polymathique du Morbihan. Rerdun::.....1.... Société philomatique. Mersailles........... Société des sciences naturelles et médicales. | TC SN RTE Société des sciences morales, lettres et arts. Mesoul :............. Société d'agriculture, sciences et arts. Vitry-le-François... Société des sciences et arts. ALSACE-LORRAINE. BOIMAT.:.....4...... Société d'histoire naturelle. MTCEZ M US nn: Société d'histoire naturelle de la Moselle. : Strasbourg A UE Société d’horticulture de la Basse-Alsace. LA ne ee Société des sciences, agriculture et arts de la Bases Alsace, ALLEMAGNE. PBréme........... .. Société des sciences naturelles. IBrunswick.......... Société d'histoire naturelle. tGiessen .......... ... Société d'histoire naturelle et médicale. lKœnisberg.......... Société physico-économique. 1Halle-sur-Saale..... Académie impériale des naturalistes. 1Landshut ........... Société botanique de la Bavière. ANGLETERRE. pbondres.. .......... British museum (natural history), Cromwell road. 1Manchester....... . Société littéraire et philosophique. AUTRICHE. Wienne.............. Musée d'histoire naturelle, 1, Burgriny. RErague.............. Société entomologique de Bohème. BELGIQUE. HBruxelles........... Société royale malacologique. KO LORS eo ue Société royale de botanique. CANADA. Montréal............ Société d'histoire naturelle. AO um ee Société historique de Montréal. IDttawa ............. Institut Canadien-français. lQuébec...........:.. Université Laval. MEoronto............. Canadian institute. PEAlIAX :............. Nova scotian institute of sciences. CHILI. Santiago........... . Société scientifique. —- 138 — ETATS-UNIS. Cincinnati.......... Office of the Lloyd Museum and Library, 99 West: Gouri street. Davenport.......... Académie des sciences naturelles. New-Haven......... Académie des sciences et arts de Connecticut. | New-York..." Société historique. bouc | Philadelphie ........ Société philosophique américaine. LOpDeka eee Société historique du Kansas. 110 RASE NE PAR Académie des sciences. St-Louis, M O.. .... Missouri botanical Garden. Washington........ Société géologique ; Smithsonian institution. id. DAC Re Société des régents de l’institution Smithsonienne. id. DEC S Bureau d’éthnologie. Manille (Philippines).. Académie des sciences. LUXEMBOURG. Luxembourg........ Société de botanique. LOGE SR AE Société des naturalistes luxembourgeois. MEXIQUE. Tacubaya...... .... Observatoire astronomique. NORWÈGE. Ghristiania ......... Université royale. PORTUGAL. Fisponne 17 Société royale des architectes et des nat ane portugais. RUSSIE. Helsingiors ......... Société zoologique et botanique de Finlande. RAT Re Te Tee Société des naturalistes. Moscou 0 un Société impériale des naturalistes. SUÈDE. Goteborg............ Société royale des sciences et belles-lettres. Stockholm .......... Académie royale des belles-lettres, d'histoire et d’antiquités. Upsal ............... Institut séologique de l’Université a Upsal. SUISSE. Berne re Curertore Bibliothèque de la société bernoise des sciences naturelles, An Re SAR Société des sciences naturelles. 1 SAND A AR PRE EN ER Société des naturalistes. Eribourg:..:..... Société friburgeoise des sciences naturelles. Genève"... Société de physique et d'histoire naturelle. Lausanne ........... Société des sciences naturelles. Neuchâtel........... Société des sciences naturelles. Ghambézy Ce Herbier Boissier (M. Beauverd, conservateur). 5 URUGUAY. Montevideo......... Musée national de Montevideo. L'SBELE Procès-verbaux des séances de la Société des Sciences naturelles pendant les années 1902-1905........... NE GRO LOGE SRE En ARE ER LEP A NEA La matière radiante et le radium, conférences par MASSE QURNIER: teen ONE ea ete eut Invasion des campagnols dans la Charente-Inférieure, DAME WE DUBOUR GS EE TR M ARS La noix vomique, communication par M. M. SOENEN.. Le tremblement de terre de La Rochelle (25 novembre LOU) ADAM ADDÉ APP ANTON CIE AE MEN Action de la strychnine sur quelques animaux comes- tibless par MH" GUILLEMIN.-:.......... HD AE Liste des membres et des Sociétés correspondantes... LE Pages. AM rar AM Gi ALES HN AT EL (} te 1 PU Ne \Ù dE en a ELU | 3 2044 Loir ers re: (va 14 » HA # } Tor et t# re [ (A #2 ar RSS = r 14 4 } He 168 vent à : ARR Ds a Le ETS Rrreus HR an RATES HUE #4 ++ SH +4 y ds Ÿ trprpri «| 17 HR If: (7, 4 14 it “ sit #4 HA l rép: LEE Late] 4 rit er qie AIT diet ANG ide Led) Heat réels rs 4 te f#r À à ARR Te PIS AA; SRE % Mn ne VA HIPAOOONUTE er 910 + Ÿ Fr Eh me di un LE + none HOT A n MONET A d' + v y AUX COR AVENULE RS VA MATT CU ANIOUEX RTE TS LE st , LE L QUE RSS AO qu M to mr #7 ARIANE (pere tr) 4 EN (4 He if 1) ui FRET CE RE MOT ve ÿ Dos an Lors “1e t Lot) s" RS n ts MA d' td SU EAN + +27 Lo 7e: tt fi (A: Lis RARE UNE : pet fe jun ue Pal M rw etes ÿ is 4* ou HE vu CIRE #4 “ile : % 0 L fs 6 à ot 4 be: 22 ÉÉYES XX x HS SES Ent ré à + — fs À à - RE $ 7 r ÈS => LE | He LS 2 2114 CE D, d Tam st tale < : SE Sd = = ? 2. a Le +3 an L'ltet à LA ON ARE pr HO AAA (te 14 bre Nrr à Cornet LA M run HAUT UD LAIT AE ( Vi ACROSS À ABUS L ‘+ A US OL IETA y MAN MES Lt y : ' CM AR pue LOUP TE , Le 114 ve à Lis ah te NS re PA AA ta 'ude & d v,t ‘ ATEN CCC OU ES ER rt \ COTE DOC Let AUX u A \ à pe bi hd ‘s CELA 2 A WC Paru Leboé » , 2 ULAZT) ANNE , MAAF PFTANUILINA CMOUON » nn d'ées Lie : la COR L4 L + \0 AA ANT IN CORTE EST , A 2. 1