ANNALES DE L’ UNIVERSITÉ DE LYON VOLUMES PARUS AU 1^^^ JUILLET 1893 TOME I. — La doctrine de Malherbe d’après son commen- taire sur Desportes, par Ferdinand Brünot, docteur és lettres, ancien élève de l’Ecole normale supérieure, chargé d’un Cours complémentaire à la Faculté des Lettres, lauréat de l’Académie française. 1 vol. grand in-8 avec 5 planches hors texte. . . 10 fr. TOME II, Fascicule 1. — Recherches anatomiques et expé- rimentales sur la métamorphose des Amphibiens anoures, par E. Bataillon, préparateur de Zoologie à la Faculté des Sciences. 1 vol. in-8 avec 6 planches hors texte 4 fr. — Fascicule 2. — Anatomie et Physiologie comparées de la Pholade dactyle. Structure, locomotion, tact, olfaction, gustation, action dermatoptique, photngén'e, avec une théorie générale des sensations, par le D** Raphaël Dubois, professeur de Physiologie générale et comparée à la Faculté, avec 68 figures dans le texte et 15 planches hors texte 18 fr. — Fascicule 3. — Sur le pneumogastrique des oiseaux, par E. Couvreur, licencié ès sciences physiques, docteur ès sciences, chef des travaux de physiologie à la Faculté des sciences de Lyon. 1 vol. in-8 avec 3 planches hors texte et graphiques dans le texte 4 fr. — Fascicule 4. — Recherches sur la valeur morphologique des appendices superstaminaux de la fleur des Aristoloches, par M“® A. Mayoux, élève de la Faculté des Sciences de Lyon. 1 vol. in-8, avec 3 planches hors texte 4 fr. TOME III, Fascicule 1. — Sur la théorie des équations diffé- rentielles du premier ordre et du premier degré, par Léon Autonne, Ingénieur des Ponts et Chaussées, Docteur ès Sciences mathématiques, chargé de Conférences à la Faculté des Sciences. 1 vol. in-8 9 fr. — Fascicule 2. — Recherches sur l’équation personnelle dans les observations astronomiques de passages, par F. Gonnessiat, Aide-Astronome à l’Observatoire, chargé d’un Cours complémen- taire d’Astronomie à la Faculté des Sciences 3 fr. TOME IV. — Lettres intimes de J.-M. Alberoni adressées au comte I. Rocca, ministre des finances du duc de Parme, et pu- bliées d’après le manuscrit du collège de S. Lazaro Alberoni, par Emile Bourceois, professeur à la Faculté des Lettres de Lyon. 1 vol. in-8“ avec un portrait et deux fac-similé 10 fr. TOME V. — Le Fondateur de Lyon, Histoire de L. Muna- tius Plancus, par M. Jullien, professeur-adjoint à la Faculté des Lettres. 1 vol. in-8 avec 1 planche hors texte 5 fr. Quelques exemplaires sur hollande 8 fr. TOME VI, Fascicule 1. — Étude expérimentale sur les pro- priétés attribuées à la tuberculine de M. Koch, faite au labora- toire de médecine expérimentale et comparée de la Faculté de Lyon, par M. le professeur Arloing, M. le D*" Rodet, agrégé, et M. le D'' CouRMONT. 1 vol. in-8, avec 4 planches doubles en couleurs hors texte 10 fr. — Fascicule 2. — Histologie comparée des Ebénacées dans ses rapports avec la Morphologie et l’histoire généalogique de ces plantes, par Paul Parmentier, professeur de l’Université. 1 vol. in-8”, avec 4 planches hors texte 4 fr. — Fascicule 3. — Etude stratigraphique sur le Jurassique inférieur du Jura méridional, par Attale Riche, docteur ès sciences. 1 vol. in-8”, avec planches hors texte 12 fr. Paris. — Imprimerie L. Maretheux, 1, rue Cassette. — 1261. I 2 J/,iV 9 5 ♦ ANNALES DE L’UNIVERSITÉ DE LYON TOME NEUVIÈME. — l®*" FASCICULE ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA ET LA BILHARZIOSE PAR MM. LORTET et VIALLETON DOYEN DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE PROFESSEUR AGRÉGÉ A LA FACULTÉ DE LYON DE MÉDECINE DB LYON Chargés par M. le Ministre de ITnstruction publique d’une mission scientifique en Égypte (1893-1894). AVEC PLANCHES ET FIGURES DANS LE TEXTE PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE l’aCADÉMIE DE MÉDECINE 420, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 4894 ANNALES DE L’UNIVERSITÉ DE LYON TOME NEUVIÈME ( ZFetscicuLle ± ETUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA ET LA BILHARZIOSE PAR MM. LORTET et VIALLETON x DOA'EN DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE PROFESSEUR AGRÉGÉ A LA FACULTÉ DE LYON DE MÉDECINE DB LYON Chargés par M. le Ministre de l’Instruction publique d’une mission scientifique en Égypte (1893-1894). AVEC PLANCHES ET FIGURES DANS LE TEXTE PARIS G. MASSON, EÎDITEUR LIBRAIRE DE LACADÉMIE DE MÉDECINE 120, BOULEVARD SALNT-GERMAIN 1894 A SON ALTESSE LE KHÉDIVE ABBAS DONT LA HAUTE BIENVEILLANCE A FACILITÉ NOS TRAVAUX ET NOS RECHERCHES Les auteurs respectueux et reconnaissants. ETUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA ET LA BILHARZIOSE INTRODUCTION Depuis quelques années, un certain nombre de cas de Bilhar- ziose ont pu être signalés en France, à Toulon, Marseille, Paris et Lyon, chez des militaires ou des civils ayant séjourné un temps plus ou moins long en Tunisie ainsi que dans quelques parties chaudes de l’Algérie. Il a donc été possible de soumettre à une observation plus rigoureuse qu’ils ne l’avaient été jusqu’à présent l’anatomie et le mode de reproduction du singulier distome appelé Bilharzia hæmatobia qui, chez l’homme, peut amener des altéra- rations redoutables dans certains organes, suivies de troubles fonctionnels assez graves pour que la mort en soit très fréquem- ment la conséquence. Nous avons eu la bonne fortune d’observer à Lyon meme, et d’avoir constamment à notre disposition, un ancien soldat ayant Université de Lyon. — ix. a. .1 2 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA fait un service de plusieurs années à Gafsa, dans le sud de la Tuni- sie. Cet homme, comme nous le verrons plus loin en rapportant son observation détaillée, est atteint à un haut degré de cette redou- table affection parasitaire. Il nous a donc été possible d’étudier ce malade, non seulement au point de vue des symptômes cliniques, mais encore d’avoir, depuis près de trois ans, tous les jours, à notre disposition, des œufs fraîchement rendus avec les urines et renfermant des embryons encore pleins de vie. Ces circonstances exceptionnelles nous permettaient de faire et de répéter sans cesse ; les observations les plus délicates dans les conditions les plus favorables, c’est-à-dire aidés comme nous pouvions l’être, par toute ! l’instrumentation perfectionnée que nous offraient les laboratoires i si bien outillés de notre Faculté. Tel a été le point de départ de ces recherches qui, nous l’espé- | rons, auront élucidé cfuelques-uns des points les plus importants ! relatifs à l’organisation et au genre de vie de cet intéressant para- j site, quoique nous n’ayons point été assez heureux, ni en France, ni enFlgypte, pour déterminer sous quelle forme ce distome étrange I peut pénétrer dans le corps de l’homme. Mais si, à Lyon, les œufs ' et les embryons pouvaient chaque jour nous être fournis par mil- j liers, il n’en était pas de même des Bilharzia adultes que notre ' malade n’a jamais rendus ni avec les urines, ni avec les matières | fécales. ! I Il était donc indispensable, pour recevoir les matériaux qui nous | étaient nécessaires, d’avoir recours au pays où la Bilharziose est j endémique sur une vaste échelle; nous voulons parler de l’Egypte. j On sait que c’est dans ce pays que Bilharz, assistant du professeur I Griesinger, a découvert le Bilharzia^ qui est extrêmement fréquent | surtout chez les Fellahs ou habitants des campagnes. C’est donc en Egypte que nous avons trouvé d’aimables correspondants, parmi les quels je tiens à citer d’abord M. le D'' Schiess, médecin en chef de INTRODUCTION 3 rtiôpital civil d’Alexandrie et M. le D*" Innés, professeur à l’École de médecine du Caire, savant aussi consciencieux que modeste et qui depuis plusieurs années déjà a fait une étude très approfondie des nombreux parasites animaux qui peuvent hanter le corps humain dans cette partie du continent africain. Ces savants, auquels nous tenons tout particulièrement à témoigner notre reconnais- sance la plus sincère, ont bien voulu nous envoyer des pièces ana- tomiques ainsi que des Bilharzia adultes, mâles et femelles, qui nous ont permis d’entreprendre une monographie anatomique laquelle, nous l’espérons, sera sur bien des points infiniment plus exacte que celles qui ont été publiées jusqu’à ce jour. Mais ces premières études, faites seulement sur des pièces con- servées en alcool et par cela même souvent défectueuses, devaient être forcément complétées par des recherches sur des animaux vivants. Il était aussi de toute importance de pouvoir comparer les résultats que nous donnaient les expériences du laboratoire, avec ce que la nature même des choses devait nous apprendre dans un pays aussi infecté que la Moyenne et Basse-Egypte. C’était donc dans cette contrée qu’il fallait nous rendre pour tâcher de surprendre les derniers mystères relatifs au mode de reproduc- tion que ce distome de forme anormale semble cacher depuis si longtemps avec une désespérante obstination- C’est à ce moment-là que deux hommes dont on est toujours siir d’obtenir l’appui lorsqu’on doit être aidé dans certaines recherches scientifiques, M. Liard, directeur de l’enseignement supérieur et M. Xavier Charmes, directeur du secrétariat et de la comptabilité, ayant eu connaissance de nos travaux, ont bien voulu obtenir de M. le Ministre de l’instruction publique une mission qui nous permît de nous rendre en Égypte et d’y séjourner quelques mois, afin de compléter les recherches que nous avions pu commencer si heureusement à la Faculté de médecine de Lyon. 4 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA Dès notre arrivée à Alexandrie, nous devions cependant éprou- ver une certaine déception en apprenant que M. Leuckart, le célèbre professeur de zoologie de Leipzig, arrêté depuis plusieurs années dans la publication de son grand ouvrage sur les parasites j de rhomme, par les anomalies si singulières que présente le | Bilharzia , s’était décidé , avec l’aide du gouvernement aile- i mand, à envoyer en Egypte son habile assistant, M. le D’’ Looss. j A Alexandrie, on nous avertit que ce savant venait de commen- ! cer des expériences et des études dans le laboratoire très bien orga- ! nisé à l’hôpital civil et placé sous la direction du D’’ Schiess. Malgré l’accueil très amical de ce dernier, les convenances les | plus élémentaires ne nous permettaient point de travailler côte à | côte avec M. Looss. Ce sont donc ces circonstances malheureuses i à notre point de vue qui nous engagèrent à nous fixer au Caire et | qui permirent à l’observateur allemand de publier, dans l’ou- ! vrage du professeur Leuckart \ des dessins et des descriptions i corrects de l’embryon que bien avant lui nous avions étudié dans i ses moindres détails, dessiné et montré à un grand nombre de j savants dans nos laboratoires à Lyon. | Mais à quelque chose malheur est bon, car au Caire nous avons | été reçus en amis par les professeurs de l’Ecole de médecine, dont | plusieurs étaient pour nous d’anciennes connaissances. Grâce à ! l’éminent patronage du marquis de Reverseaux et à l’amitié du | D" Innés, le directeur de l’Ecole de médecine, M. le D'’ Ibrahim-Pacha | et le sous-directeur, M. le professeur Keatinge, ont bien voulu nous j organiser un laboratoire qui nous permit d’installer convenable- i ment toute notre instrumentation apportée par nous de France. M. le professeur Kauffmann, avec une obligeance dont nous ne saurions trop le remercier ici, voulut bien nous permettre de 1. Leuckart, Die Parasilen des Menschen, Rr volume, pages 519 à 528, marquées d’un astérisque. Ce carton, intercalé en janvier 1894 dans le corps du volume, ren- ferme le travail duD*^ Looss, exécuté, comme nous l’avons dit, à Alexandrie, dans le laboratoire du Schiess. INTRODUCTION prendre part aux autopsies qu’il fait pour les differents services de de l’hôpital Kasr-el-iVïn, avec une méthode et un soin admirables. Ces nécropsies, chaque jour assez nombreuses, faites rapidement, quelques heures seulement après la mort, nous offraient ce très grand avantage de nous permettre de recueillir des Bilharzia encore pleins de vie, ainsi que des fragments d’organes non encore altérés par la putréfaction qui arrive rapidement sous ce climat chaud, M. le D"" Milton, chirurgien en chef de l’hôpital Kasr-el- Aïn, MM. Keatinge Sandwith et Ibrahim-Pacha, médecins dans le même établissement, ainsi que M. le D** Fouquet, ont bien voulu nous laisser examiner les malades confiés à leurs soins et nous faire connaître avec la plus grande obligeance tous les faits clini- ques pouvant nous intéresser. Grâce aussi à la bienveillance du président du Conseil, M. Riaz-Paclia, du directeur de l’Instruction publique, M. Yacoub-Artin-Pacha, de M. Rogers-Pacha, directeur du service de santé, tous les hôpitaux, hospices, asiles, écoles, abat- toirs, etc., nous ont été largement ouverts, avec un empressement que nous ne saurions oublier et dont nous sommes tout particu- lièrement reconnaissants. Qu’il nous soit permis aussi de témoi- gner notre gratitude à M. Prompt, directeur des chemins de fer Egyptiens, et à M. Cook, directeur de l’agence et des services de bateaux à vapeur sur le haut Nil. Leur bienveillance à notre égard a considérablement facilité nos recherches. Le grand hôpital de Kasr-el-i\ïn qui touche à l’Ecole de médecine et qui renferme un nombre considérable de malades, nous a facilité l’examen de beaucoup de cas de Bilharziose, tandis que la salle d’autopsie du Kauffmann alimentait notre laboratoire de pièces nombreuses et intéressantes. C’est à ces conditions excep- tionnellement favorables que nous avons pu, en deux mois, faire un ensemble de recherches qui, partout ailleurs, eussent nécessité un séjour infiniment pins prolongé en Égypte. A notre retour en G ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA France, il nous a donc été possible de faire exécuter d’après nature et sous notre direction incessante, par M. Goujet, notre habile graveur, les magnifiques planches qui accompagnent ce mémoire et qui sont incontestablement plus exactes que tout ce qui a été publié jusqu’à ce jour sur l’intéressant distome qui fait l’objet de cette étude. t CHAPITRE PREMIER EXAMEN'-DÉTAILLÉ D’UN CAS DE BILHARZIOSE L’observation du malade que nous avons eu constamment sous les yeux, depuis trois ans, a déjà été publiée par M. le D"" Brault, ancien aide-major, surveillant à l’Ecole du service de santé mili- taire de Lyon, dans la Gazette hebdomadaire de médecine et de chi- rurgie^ en août 1891. Nous croyons cependant qu’il est indispen- sable de la reproduire en la complétant dans certains points qui peuvent intéresser tout particulièrement la durée, le genre de vie, et la disparition probable, smon certaine, du Bilharzia après un séjour très prolongé dans le corps humain. Voici ce que dit, en 1891, M. le D"‘ Brault, sur le malade qui a été le point de départ de nos recherches ; « G..., vingt-cinq ans, agent civil à l’Ecole du service de santé militaire, a fait un séjour de cinquante-huit mois en Tunisie, au 4® régiment de chasseurs d’Afrique, et au 13“ escadron du train. Il a été successivement en garnison au Kef, à Gafsa, Souk-el-Arba, Xïn-Draham, et n’a jamais habité aucun autre pays étranger. An- técédents héréditaires nuis, pleurésie à quinze ans, fièvre intermit- tente qui s’est caractérisée par cinq ou six accès quotidiens légers dans les deux derniers mois du séjour en Tunisie ; aucun accès depuis le retour en France; jamais de dysenterie. H y a trois mois, chancre mou avec huhon suppuré. Le malade nie absolument toute blennorrhagie. G... vient à la visite, à l’infirmerie de l’Ecole, le 21 juin 1891, et se plaint d’uriner le sang. Son hématurie date de loin. C’est, dit-il, il y a trois ans et demi, après huit mois de ser- vice au détachement de Gafsa, qu’il a commencé à s’en apercevoir. Chaleur et démangeaisons légères au fond du canal, mictions fré- 8 ETUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA quentes et douloureuses, ténesme vésical, hématurie légère au début et à la tin; tels sont les principaux signes que notre malade présentait alors. A son dire, il n’était d’ailleurs pas le seul dans cette situation au détachement, et quatorze autres de ses cama- rades urinaient aussi du sang. Dans le reste de la garnison, un cer- tain nombre de cas existaient également. « G... reste encore deux mois à Gafsa après le début de son affection, puis il séjourne successivement à Souk-el-Arba et à Aïn- Draham avant de rentrer en France. Pendant tout ce temps, il entre une seule fois à Fhôpital, après une marche très pénible, mais en sort après huit jours de repos. (( Depuis sa libération, notre malade a vu son affection demeurer à peu près stationnaire. Actuellement les démangeaisons siégeant au fond du canal sont plus supportables, mais il existe toujours un peu de douleur à la fin de la miction.. De plus, il se plaint, depuis quelque temps, d’irradiations douloureuses dans la région crurale, à la partie antérieure de la cuisse gauche. A part cela, la miction se fait bien; au lieu d’uriner toutes les heures pendant la journée, et cinq ou six fois la nuit, comme au début de l’affection, le malade a seulement trois ou quatre mictions par jour et ne se lève jamais la nuit. A aucun moment, il n’y a eu d’incontinence ou de réten- tion ; la quantité d’urine rendue est normale et le jet n’a aucune modification dans sa forme, son calibre ou sa projection. » C’est en janvier 1893, qu’ayant rencontré par hasard ce malade, nous eûmes l’idée d’examiner ses urines qui restaient toujours sanguinolentes en dépit du traitement auquel il avait été soumis à l’infirmerie de l’Ecole militaire. Les urines de cet homme conte- naient encore des milliers d’œufs de Bilharzia. Nous avons eu la bonne chance de pouvoir prendre G. . . comme garçon de laboratoire, ce qui nous a permis de l’avoir ainsi constamment sous la main, et de pouvoir facilement obtenir de lui, tous les jours, un grand nombre d’œuts, en parfait état, qu’il nous était possible d’utiliser pour nos recherches anatomiques ou pour nos expériences d’inoculation. Pendant tout le printemps de l’année 1893, la santé de G... fut évidemment mauvaise et sa maladie parut s’aggraver sensiblement. EXAMEN D’UN CAS DE BILHARZIOSE 9 I] était atteint d’une blennorrhagie aiguë qui le faisait beaucoup souffrir. Il était amaigri, très pâle, fatigué au moindre effort ; son état d’anémie profonde provoquait de l’essoufflement, des douleurs précordiales et des palpitations lorsqu’il marchait un peu trop vite ou s’il montait rapidement un escalier. Il accusait des douleurs sourdes dans la vessie, au col, dans le canal et quelquefois plus Fig, 1. — Caillot fibrineux rendu avec les urines sanguinolentes et renfermant de nombreux œufs de Bilharzia, (Lortet ad. nat. photogr.) profondément dans l’intérieur du bassin. Souvent une pesanteur très marquée dans la région prostatique. Les urines étaient ren- dues en quantité normale, mais elles étaient rouges ou brunes, toujours colorées par une assez grande quantité de sang que déce- lait très clairement l’examen microscopique. A la fin de chaque miction, la nuit et le matin surtout, le malade rendait toujours avec de vives douleurs, de cinq à trente caillots sanguins d’un rouge foncé et variant entre le volume d’une tete d’épingle à celui d’une lentille. 10 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA Le filtrage des urines fait aussi trouver chaque jour, au'milieu de ces caillots, d’autres coagulations entièrement fibrineuses et colorées en jaune plus ou moins foncé. En portant ces caillots sur Fig, 2. — Caillot rendu avec les urines et renfermant des œufs de Bilharzia. (Lortet ad. nat. photogr.) le porte-objet du microscope, on peut constater qu’ils sont formés de masses bbrineuses entourées par une zone quelquefois assez épaisse de globules sanguins agglutinés et retenant dans leur épais- seur un très grand nombre d’œufs de Bilharzia. Ces œufs sont quelquefois espacés, séparés les uns des autres, EXAMEN D’[JN CAS DE BILHARZIOSE II mais le plus souvent agglomérés en grande quantité et très serrés. Les œufs sont très facilement reconnaissables à leur forme en fu- seau terminé par un éperon très aigu. Leur couleur blanche tran- chant vivement sur la couleur rosée des caillots permet de les trouver facilement. En filtrant les urines, on peut recueillir tous les caillots que le malade a rendus. Puis en retournant ces filtres en papier et en les lavant dans un verre conique, on peut toujours constater que cette eau de lavage renferme encore un grand nombre d’œufs qui ont été rendus avec les urines, mais sans avoir été retenus dans les masses fibrineuses ou sanguines dont nous avons parlé plus haut. En raclant le papier avec le tranchant d’un scalpel à lame convexe, on peut encore recueillir beaucoup d’œufs qui res- tent facilement au milieu du réseau fibrillaire qui constitue le filtre Joseph. Ces observations répétées régulièrement chaque jour, nous ont montré que notre malade rendait ainsi avec les urines un nombre d’œufs de Bilharzia qui ne devait pas être inférieur à 3 ou 4,000 par vingt-quatre heures. A cette époque, l’analyse des urines faite avec beaucoup de soin parM. le professeur Crolas, a donné les résultats suivants : ANALYSE DES URINES D’UN MALADE ATTEINT DE BILHARZIOSE (Professeur Crolas, 22 février 1893.) Volume 1000 Densité. 1.026 Réaction Acide. Créé 21.40 Acide phosphoriqiie 2.04 En phosphates 4.45 Acide urique 0.75 é Globuline 0.157 Albumines. < Serine 0.225 ( Sucre Néant. Coefficient 0.74 Le spectroscope a donné les bandes d’absorption de l’hémoglo- bine. 12 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA I Les albumines observées sont évidemment fournies par le sang. Le sujet n’est certainement pas albuminurique. ; Dans les urines fraîches ainsi que dans les caillots, les œufs sont en parfait état de conservation : d’un blanc brillant, translucides, et | montrant par transparence à leur intérieur un très gros embryon, en parfait état, mais absolument immobile et ne donnant jamais signe de vie autant que les œufs sont en contact avec de Furine pure. i Jamais, dans nos milliers d’observations, nous n’avons vu dans l’urine pure les embryons libres et vivants ou même les embryons remuant à l’intérieur de la coquille en faisant vibrer leurs cils nata- toires comme ils le font au bout de quelques minutes, lorsqu’on ! les ôte de l’urine pour les transporter dans de l’eau pure. Nous ne | pouvons donc comprendre que certains observateurs aient vu des | embryons nager librement dans Furine, tandis que toutes nos obser- | vations et nos nombreuses expériences prouvent jusqu’à la dernière j évidence que jamais les embryons ciliés ne s’échappent vivants de la j coquille autant qu’ils sont plongés dans Furine pure. Nous pensons ' i que dans les cas dont il s’agit, la sortie de l’embryon vivant n’est j due qu’à une pression violente exercée sur les œufs par la lamelle j du porte-objet. La coquille peut être ainsi rompue sans que Fem- | bryon soit endommagé. Le petit animal peut alors nager pendant | quelques minutes, mais périt bientôt tué et déformé par le contact i du liquide urinaire. * Dans les urines de notre malade, les embryons restent bien | vivants dans Fintérieur de l’œuf, autant quelles ne sont pas putré- } bées. Dès que la fermentation ammoniacale se fait sentir, dès que | se déposent des cristaux de différentes natures, les embryons meu- | rent dans la coquille ; les vésicules internes perdent leur transpa- | rence, le corps semble devenir granuleux, les cils vibratiles gardent ! une immobilité absolue, et les œufs de blancs et de brillants qu’ils | étaient, deviennent d’abord bruns, puis d’un noir d’encre de Chine, j ce qui les rend absolument opaques. | Les embryons renfermés dans les milliers d’œufs que nous avons | examinés avec la plus grande attention, ont évidemment tous | I EXAMEN D’UN CAS DE BILHARZIOSE 13 atteint leur complet développement. Jamais ni à Lyon, ni au Caire, nous n’aVons trouvé d’œufs jeunes montrant un vitellus en voie de segmentation, ou un embryon non encore pourvu de tous ses organes. Pour expliquer ce fait on est donc forcé d’admettre, ce qui a déjà été signalé par Bilharz, à savoir que les embryons subis- sent très rapidement leurs évolutions primordiales dans le corps même de la femelle pondeuse. Chez le malade que nous avons eu en observation, les œufs ont été toujours rendus en nombre inliniment plus considérable au printemps qu’en été, en automne, ou en hiver. linons a semblé que la température jouait un rôle important au point de vue de l’inten- sité de la ponte car en hiver ainsi que pendant les fortes chaleurs de l’été les œufs ne sont plus rendus qu’en très petit nombre. Cette rareté des œufs, lorsque la température est trop élevée ou trop basse, tient-elle à une activité génitale moins grande de la femelle mère, ou bien les œufs se détachent-ils moins facilement du magasin vésical où ils sont agglomérés par millions? C’est ce que nous n’avons pu savoir, mais nous tenons cependant à signaler ce fait qui paraît concorder avec ce qui avait déjà été observé en Égypte par Bilharz. Au Caire, en décembre et en janvier qui sont les deux mois de l’année dont la température est la plus basse, nous avons pu constater ce fait vraiment remarquable, c’est que les malades atteints de Bilharziose et soignés à l’hôpital Kasr-el-Aïn, ne rendaient des œufs qu’en très petit nombre, tandis que l’autopsie des malheureux qui avaient succombé à cette affection nous fai- sait voir que la vessie urinaire était cependant tapissée par une muqueuse pénétrée par des milliards d’œufs. C’est là un point de symptomatologie qui ne pourra bien être étudié qu’en Egypte où les cas de Bilharziose sont si fréquents. A la fin de janvier 1894, à notre retour d’Égypte, nous avons pu constater que le malade G... rendait très peu d’œufs et presque pas de caillots. Pendant les mois de mai et de juin, le nombre des œufs expulsés avec les urines est plus considérable, et de petits caillots fibrineux et sanguinolents viennent aussi de temps en temps se montrer à la surface du papier à filtrer. Nous croyons 14 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HEMATOBIA cependant pouvoir affirmer, à la suite d’observations régulières et minutieuses exécutées chaque jour, que les œufs sont rendus en | nombre infiniment moindre qu’en juin 1893. 11 faudrait donc en I déduire, comme conséquence logique, que le nombre des femelles i pondeuses a diminué dans le système de la veine porte, ou peut-être i aussi que la provision d’œufs insérée dans les feuillets de la j muqueuse vésicale tend à s’épuiser sans pouvoir être renouvelée • par de nouveaux arrivages. j Le malade G... nous a aussi permis de constater un fait impor- i tant : le liquide spermatique de cet homme renferme toujours un ; nombre d’œufs assez considérable et en parfait état. Nous pensons i que ces œufs ne proviennent pas du canal contre les parois duquel | ils auraient pu rester accrochés. Ils sont trop lisses et le canal | est trop poli pour que cette supposition soit admissible. 11 est bien j plus plausible d’admettre que chez G... les vésicules séminales j sont complètement infestées d’œmfs et que ces organes, en se con- | tractant énergiquement, au moment de l’éjaculation, font partir un certain nombre d’œufs qui sont entraînés par le torrent sper- matique. L’explication nous paraît d’autant plus probable que nous avons toujours trouvé les vésicules séminales gorgées d’œufs lorsque la vessie urinaire était gravement atteinte. Ce point impor- | tant d’anatomie pathologique avait déjà été mis en lumière dans le travail de M. le D'’ Ghaker. Le malade G... a été très probablement infecté en avril 1885, au moment de son arrivée à Gafsa. Il y a donc aujourd’hui neuf ans et six mois qu’il est atteint de Bilharziose sans avoir pu subir | d’infection nouvelle puisqu’il n’a pas quitté la ville de Lyon. Il | est donc permis d’affirmer que la Bilharziose est une affection des j plus tenaces. | Dans des cas pareils, on est en droit de se demander comment les choses doivent se passer. On peut d’abord penser que les femelles fécondes ont une vie très longue et conservent la faculté de pondre pendant un très grand nombre d’années. Mais une lon- gévité de six, huit ou dix ans pour un distome de taille aussi res- treinte nous paraît une chose bien difficile à admettre, car c’est EXAMEN D’UN CAS DE BILHARZIOSE Ui une loi zoologique qui ne présente presque pas d’exceptions que les animaux de petite taille ont une vie qui, en général, est de courte durée. On pourrait admettre aussi, pour expliquer le phénomène si bizarre et si important, au point de vue pratique, de la persistance prolongée de la Bilharziose, que les pondeuses meurent au bout d’un très petit nombre d’années, mais que la masse des œufs ren- fermés dans les magasins de la vessie, des vésicules séminales, des urétères et du rectum mettent un temps très prolongé pour se vider de leur contenu. Si cette explication était admise, on n’en serait pas moins étonné de la longue durée de la vie de l’embryon renfermé dans sa coquille, si nous ne savions par les expériences de Davaine que les embryons de V Ascaris peuvent conserver leur vitalité pendant cinq ou six ans au moins. Lorsque les urines sont normales, les embryons du Bilharzia sont toujours et tous en bon état quelle qu’ait été la durée de la maladie. On n’en trouve aucun, du moins nous n’avons pu le constater, en voie de régression graisseuse ou calcaire. Ils paraissent tous du meme âge et jamais, ainsi que je l’ai dit plus haut, on n’en trouve en voie de développement. Tous ceux que nous avons pu examiner chez notre malade, et c’est par cen- taines de milliers que nous pouvons les compter, paraissent être arrivés au summum de leur développement, n’attendant qu’une goutte d’eau pure pour faire vibrer leurs cils et exécuter les mou- vements violents qui ne tardent pas à fendre l’enveloppe de l’œuf afin délibérer le prisonnier. On pourrait encore admettre, pour expliquer cette longue durée de la maladie, une reproduction sur place s’exécutant dans l’inté- rieur des organes ou dans le liquide sanguin lui-même. Nous croyons cette supposition difficile à accepter car elle serait en con- tradiction flagrante avec ce que nous savons du mode de reproduc- tion de tous les distomes connus. Elle serait aussi en opposition avec les résultats de nos expériences. Jamais nous n’avons pu ino- culer la Bilharziose en injectant des œufs ou des embryons dans les veines d’animaux vivants, d’ailleurs nous n’avons jamais pu 16 ETUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA parvenir à faire éclore des œufs dans les liquides organiques tels que le lait et le sang, même lorsque ce sang était défibriné avec soin et maintenu à une température convenable. Jusqu’à plus ample informé et quelle que soit l’explication de la persistance de la Bilharziose que l’on veuille admettre, on peut affirmer aujourd’hui, ainsi que le prouve l’observation du malade G..., que dans une ville comme Lyon, où toute infection secon- daire est impossible — à moins que Ton n’admette l’autoinfection — la Bilharziose peut persister pendant neuf ans et six mois au moins en présentant même après ce long espace de temps les symptômes les plus accusés de cette redoutable et tenace atfection. Au Caire même, M. le D’’ X..., professeur distingué à l’Ecole de médecine, nous a affirmé qu’il était atteint de Bilharziose depuis dix ans, qu’aujourd’hui encore il avait très fréquemment des hématuries légères et qu’il rendait chaque jour des œufs en abon- dance renfermant des embryons très vivants. Il a pris soin cepen- dant, depuis le commencement de sa maladie de ne boire que de l’eau parfaitement filtrée ou bouillie afin d’éviter toute nouvelle cause d’infection. Malgré les soins hygiéniques minutieux pris par le professeur X... son observation peut être considérée comme moins probante que celle du soldat G..., car dans un pays comme l’Égypte dont les habitants sont si largement contaminés on peut toujours être exposé, quelques précautions que l’on prenne, à boire une eau plus ou moins suspecte. Actuellement G... ne présente rien aux poumons quoique son faciès soit bien celui d’un homme placé sous l’imminence d’une infection tuberculeuse. Les crachats examinés nombre de fois ne nous ont jamais montré d’œufs de Bilharzia. Si j’insiste sur ce point c’est que, au Caire, nous avons pu autopsier plusieurs sujets dont les poumons atteints de tuberculose vraie étaient cependant en outre farcis de milliards d’œufs de Bilharzia que décélait facile- ment l’examen microscopique. Nous ne savons si dans les pou- mons la présence du distome peut donner lieu à des troubles res- piratoires perceptibles à l’auscultation. Lorsque les œufs sont très nombreux dans le parenchyme pulmonaire, la présence de ces EXAMEN D’UN CAS DE BILHARZIOSE 17 corps étrcingers semble mettre les organes de la respiration dans un état pathologique qui favorise l’introduction et la multiplication du bacille tuberculeux. Les autopsies que nous avons pu faire nous ont montré que, dans les cas dont il s’agit, l’affection est cependant bien une tuberculose vraie et non une fausse tubercu- lose semblable à celle que présentent les ouvriers qui travaillent sans précautions, à la meule tournante, des substances dures telles que le cristal ou l’acier. Il est bien certain, quoique notre trop court séjour en Egypte ne nous ait pas permis de le constater, que l’examen clinique des crachats permettra de diagnostiquer facile- ment sur le vivant la Bilharziose pulmonaire qui est évidemment beaucoup plus fréquente qu’on ne l’avait cru jusqu’à aujourd’hui. Pendant son séjour à l’infirmerie de l’École de santé militaire, on a donné au malade G... différentes substances telles que de la térébenthine, de l’acide borique, etc., qui n’ont servi absolument à rien si ce n’est à rendre les cuissons ressenties dans le canal et au col de la vessie un peu moins douloureuses. Mais ces tentatives d’une médication rationnelle n’ont jamais fait disparaître ni les hématuries, ni les œufs du Bilharzia. 11 faudra donc chercher d’autres substances qui introduites dans le sang pourront faire périr les femelles pondeuses dans le système de la veine porte. En résumé, aujourd’hui 1®"' août 1894, on peut dire que le malade G... est atteint de Bilharziose depuis neuf ans et six mois. Cependant, si l’on compte le début de la maladie depuis l’époque exacte où elle s’est manifestée par des hématuries, on peut affir- mer que cet homme est malade depuis huit ans au moins car les hémorragies n’ont commencé à attirer son attention qu’un an et demi après son arrivée en Tunisie. On peut donc voir par l’observation détaillée que nous venons de rapporter combien la Bilharziose est une affection de longue durée et d’une ténacité extrême. Université de Lyon. — ix. a. CHAPITRE II ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA Avant de commencer l’étude anatomique du Bilharzia, nous donnerons quelques détails sur la manière dont on peut se le pro- curer. Les vers se trouvent, comme on le sait, dans la veine porte et dans ses branches ; pour les recueillir nous avons vu employer par le professeur Kauffmann à l’Ecôle du Caire le procédé suivant : le cadavre étant largement ouvert, on soulève le bord antérieur du foie de manière à découvrir la veine porte, puis on fait à cette der- nière une incision longitudinale au niveau de laquelle on recueille avec une cuiller le sang qui s’écoule. Ce sang, versé dans une cuvette de porcelaine blanche à fond plat, ou dans un très large cristallisoir bas, s’étale en une couche très mince dans laquelle il est facile de distinguer les vers, surtout les mâles; les femelles, beaucoup plus fines, demandent, pour être aperçues, une plus grande attention. C’est là le moyen le plus rapide pour s’assurer dès le début d’une autopsie si le cadavre renferme des parasites, mais on peut pousser les recherches plus loin. Le foie est coupé en morceaux peu volu- mineux et lavé dans de l’eau en le pressant entre les mains, comme nous l’a indiqué le D"* Innés. Un certain nombre de vers qui étaient logés dans les ramifications intra-hépatiques de la veine porte sont, par ce procédé, entraînés dans l’eau de lavage dans laquelle on les retrouve. La fréquence des parasites est très grande, comme on le verra plus loin, dans le chapitre consacré à l’anatomie pathologique. Mais une chose que savent tous ceux qui ont recherché le Bil- harzia, et qui intéresse ceux qui veulent faire l’anatomie de cet ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 19 animal, c’est que le mâle est beaucoup plus répandu que la femelle. On peut faire jusqu’à vingt autopsies de sujets renfermant des vers mâles, avant de rencontrer un cas dans lequel on trouve aussi des femelles. Les vers recueillis dans les autopsies faites peu d’heures après la mort sont encore vivants. Les mâles ont alors une tendance à s’enrouler sur eux-mêmes comme un ressort à boudin, et forment un petit cylindre court, à l’une des extrémités duquel se trouve la portion antérieure du corps restée droite. On peut étudier les Bilharzia immédiatement après les avoir recueillis et sans Faction d’aucun réactif. Cette étude est même particulièrement recommandable pour les femelles; pour les mâles, plus volumineux, elle donne de moins bons résultats. En dehors des animaux étudiés ainsi pendant leur vie, nous en avons recueilli un grand nombre qui ont été fixés par différents réactifs : l’alcool à 90 degrés, la liqueur de Kleinenberg, la liqueur de Müller et l’acide osmique. Les meilleurs résultats nous ont été fournis par les animaux fixés à l’aide de la liqueur de Kleinen- berg. Pour l’étude, nous avons fait deux sortes principales de pré- parations : L des animaux colorés au carmin boracique étaient montés en entier dans la résine dammar; 2'’ d’autres individus étaient débités en coupes après inclusion dans la paraffine, et colorés avec divers réactifs. Nous avons beaucoup à nous louer des préparations d’individus entiers, particulièrement des femelles qui plus minces et plus transparentes que les mâles donnent des résultats parfaits pour l’étude. Forme du corps. Les Bilbarzia ont l’aspect de vers ronds, de nématodes. On en trouve qui mesurent 6 à 7 millimètres, d’autres atteignent 16 mil- limètres (mâles) ou même jusqu’à 20 millimètres (femelles) ; les femelles sont en général plus longues que les mâles, et comme elles sont beaucoup plus grêles (le diamètre transyersal de leur corps est à peu près la moitié de celui du mâle), elles paraissent beaucoup plus grandes que ces derniers. Malgré cet aspect fili- 20 ETUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA forme qui les rapproche des vers ronds, il n’est pas difficile, même à un examen sommaire, de reconnaître que ces parasites sont des trématodes, car on découvre facilement leurs ventouses. Ces der- nières sont situées dans la partie antérieure du corps dont l’une (ventouse orale) occupe l’extrémité, tandis que l’autre (ventouse ventrale) est située à peu de distance en arrière de la précédente. La partie du corps comprise entre les deux ventouses forme la partie antérieure de l’animal {Vorleihe^ Leuckart); elle est cylin- drique, et mesure environ 1 millimètre de longueur chez le mâle, moins d’un demi-millimètre chez la femelle. Cette partie est donc beaucoup plus longue chez le mâle que chez la femelle tant en réalité, que par rapport à la longueur totale du corps. Toute la longueur du corps de l’animal située en arrière de la ventouse ventrale constitue la partie postérieure {Hinterleibe ^ de Leuckart). Elle est différente suivant qu’il s’agit du mâle ou de la femelle. Chez la femelle, elle est à peu près cylindrique, bien que, par places, les organes internes faisant une légère saillie à l’extérieur, la coupe transversale du corps au lieu d’être un cercle devienne un triangle ou un quadrilatère à angles très arrondis, comme l’a indiqué Fritsch h De plus, cet auteur a signalé chez la femelle un sillon longitudinal peu profond qui s’étend sur la face ventrale sur j toute la longueur comprise entre la glande coquillière et l’ouver- i ture génitale externe. Fritsch compare ce sillon au canal gynéco- | phore du mâle, toutefois son peu de développement aussi bien en I longueur qu’en profondeur rend cette comparaison assez peu j probable. | Chez le mâle, la partie située en arrière de la ventouse ventrale j est formée par l’enroulement sur lui-même du corps réduit ici à j une sorte de lame. Cet enroulement est complet, il s’effectue | de telle manière que le bord droit du corps recouvre le bord gauche qu’il dépasse un peu en dessous (voy. fig. 22 pl. Y; 24 et 25, pl. YI). Cette disposition se poursuit jusque vers l’extrémité pos- térieure du çorps; elle détermine la formation d’une cavité 1. Zur Anat. der Bilharzia hæmatobia. Archiv für Mikroskopische Anat., 1888, t. XXXI, p. 206. ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 21 étendue dans toute la longueur de la partie postérieure du corps et que Ton appelle le canal gynécophore, parce que la femelle y est d’habitude enfermée. Il est facile de passer du canal gynécophore au dehors par l’intervalle compris entre les deux bords du corps qui se recouvrent, (voy. fig. 24 et 25, pi. VI). Par ses contractions propres le mâle peut élargir plus ou moins la cavité du canal gynécophore et écarter les lèvres de ce canal, mais il est probable qu’il ne peut pas l’ouvrir entièrement, car si Ton essaie de dérouler un animal récemment mort et de l’étaler à plat sur une lame de verre, on ne peut pas y arriver et le corps se rompt plutôt que de céder. Téguments. Les téguments consistent en une cuticule mince qui porte des prolongements fins, de formes et de dimensions variables. Nous décrirons aussi avec la cuticule des petites élevures particulières, les verrues^ qu’elle porte chez le mâle. La cuticule est une lame anhiste qui ne se colore pas par les réactifs. Elle n’est pas lisse, mais parcourue par une série de petits sillons transversaux très peu profonds et très rapprochés les uns des autres qui, sur les coupes longitudinales, donnent à la cuticule l’ap- parence d’être formée par une série d’anneaux très courts. Sur les préparations examinées de face ces sillons paraissent comme de légères stries parallèles les unes aux autres et disposées trans- versalement (fig. 14, pl. III). Les piquants de la cuticule sont de deux ordres. Les uns, assez forts, se colorent vivement par les réactifs; les autres, plus faibles, restent incolores. Les premiers sont répandus sur toute la surface du canal gynécophore et forment à ce dernier un revêment assez serré, surtout dans sa portion moyenne et postérieure (p\ fig. 24 pl.' VI), tandis qu’ils manquent dans sa partie antérieure, (fig. 25, même planche). Ces piquants se rencontrent aussi chez le mâle sur les verrues, mais là ils sont disposés avec une grande régularité, formant des petits bâtonnets égaux entre eux, qui couvrent la sur- face de la verrue, et qui sur les coupes sont placés les uns à côté 22 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA des autres à peu près comme les piquets d’une palissade. Leur coloration très vive est un caractère très intéressant; quelle qu’ait été la matière colorante employée ils se sont toujours teints aussi fortement que les noyaux. Les piquants du second ordre, beaucoup plus fins et toujours incolores, se rencontrent à la fois chez le mâle et chez la femelle. Chez le mâle, ils sont distribués sur la face externe du corps entre les verrues ; chez la femelle, ils existent également, i comme l’a signalé Fritschle premier’. Les verrues sont spéciales au mâle et ne se rencontrent que sur le contour extérieur du corps. On n’en trouve jamais dans Tinté- i rieur du canal gynécophore ni sur la lèvre de ce canal qui est re- I couverte par l’autre. Les verrues manquent sur la partie antérieure j du corps, (voy. fig. 22 et 23, pL Y), et ne se montrent qu’àpartir delà ventouse ventrale. Elles ont la forme de petits mamelons constitués par une masse centrale et par un revêtement cuticulaire. La masse centrale, continue avec la substance fondamentale du parenchyme, ne présente jamais dans son intérieur de corps cellulaire ni de noyaux. Elle est formée uniquement par une substance amorphe claire dans laquelle on aperçoit quelques granulations et quelques fibres que Leuckart a déjà vues^ et qui appartiennent évidemment au parenchyme du corps, ainsi que nous le verrons plus loin. Leur revêtement cuticulaire consiste dans la cuticule recouverte des piquants dont il a déjà été question plus haut. En somme, les verrues consistent en de petites élevures mamelonnées du paren- | chyme, au niveau desquelles les piquants de la cuticule sont distri- j hués plus régulièrement qu’ailleurs. Parenchyme. Le parenchyme est le tissu qui forme la masse principale du corps. Il est particulièrement abondant chez le mâle dont les vis- cères sont très peu développés et occupent une place très restreinte, tandis qu’il est beaucoup plus réduit chez la femelle dont les organes, tant de la génération que de la digestion, ont un volume 1. Frilsch. Loc. cit., p. 200. 2. Leuckart. Die farasiten des Menschen^ 2e édit., Leipzig, 1894, p. 473. ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 2:] considérable. Le parenchyme est constitué par des cellules rami- fiées, dont les prolongements multiples s’anastomosent avec les prolongements identiques venus des autres cellules, (voy. fig. 13, pl. III et 24 pl. YI). Ces prolongements anastomosés forment un réseau parfois à mailles très serrées et très fines, parfois à mailles plus larges circonscrites par des fibres assez longues qui ne sont autre chose que des prolongements fins, étirés. Sur ces fibres on distingue des granulations brillantes, très réfringentes, comme les fibres elles-mêmes, et qui, comme ces dernières, ne se colorent pas par les réactifs. Ce caractère permet de reconnaître toujours les fibres du parenchyme d’avec les fibres musculaires qui se colorent au contraire vivement par les différentes solutions de carmin. Les noyaux des cellules sont petits, arrondis, et se colorent bien. Entre les mailles du réseau parenchymateux est contenue une substance amorphe claire, qui se colore très lég.èrement par le acrmin, et que l’on voit très nettement lorsque l’on essaie de dis- socier le corps des vers. En effet, en cherchant à dilacérer avec des aiguilles des fragments du corps de Bilharzia, ayant macéré dans l’alcool au tiers, on n’arrive jamais à obtenir une dissociation véri- table des éléments qui le composent, mais on isole simplement des fragments de plus en plus petits, dans lesquels toutes les parties restent en place, maintenues par une substance unissante amorphe que l’on distingue aisément grâce à la très faible coloration rosée qu’elle prend après l’action du carmin. Sur ces fragments on aperçoit tout d’abord le réseau protoplasmique dont il a été impos- sible d’écarter les mailles, puis on voit des fibres musculaires, qui, dégagées du parenchyme, se continuent sur une certaine longueur en dehors du fragment considéré. Ceci indique que les fibres mus- culaires glissent librement dans le parenchyme et ne font pas corps avec lui. Au milieu du parenchyme on trouve çà et là de grosses cellules sphéroïdales, dont le noyau, plus volumineux que celui des cel- lules ordinaires, est entouré par une zone claire [c. n, fig. 2o,pl. YI). Quelle est la nature des cellules? Sont-ce des cellules glandu- laires? Leur éloignement de la surface cutanée ou des viscères ne 24 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA permet guère de Fadmettre; peut-être répondent-elles à ces élé- ments nerveux disséminés çà et là dans le parenchyme, dont parle Fritsch^? On trouve encore mêlés au parenchyme, dans certains points du corps, des groupes importants de cellules; ce sont : 1° des cel- lules situées autour de Fœsophage en arrière du système nerveux ; 2“ des cellules placées sur la terminaison du système aquifère. Nous reviendrons sur ces éléments en traitant du système nerveux et du système excréteur. Système musculaire. Le système musculaire est formé de fibres qu’il est facile de reconnaître aux caractères suivants : 1® leur coloration par les réactifs, 2“ leur réfringence, S"* leur indépendance relative d’avec le parenchyme, indépendance qui permet de les isoler au moins sur une certaine longueur. La plupart de ces fibres sont de longs fuseaux formés d’une masse contractile pleine, au sein de laquelle est contenu un noyau, les autres sont creuses, comme l’a déjà indiqué Leuckart^ et, sur les coupes se montrent sous la forme d’un cercle de substance contractile entourant un espace clair. La substance contractile n’est pas d’une égale épaisseur sur tout le pourtour de l’élément, et généralement, (m. rr, fig. 24, pl. YI), elle est plus abondante sur un côté de la fibre qui apparaît comme un croissant fortement coloré. Les fibres musculaires peuvent être réparties, d’après leur direc- tion, en plusieurs systèmes distincts, qui sont : 1® le système des fibres longitudinales, 2® le système des fibres transversales, 3° le système des fibres obliques, 4® le système des fibres dorso-ven- trales. Le système des fibres longitudinales est de beaucoup le plus puissant, il est formé lui-même de deux groupes distincts : le groupe des fibres longitudinales dorsales, et le groupe des fibres ventrales. Les fibres longitudinales dorsales sont placées immé- 1. Fritsch. Loc. cit., p. 214. 2. Leuckart. Loc. cit., p. 476. ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 2:; diatement au-dessous de la cuticule, où elles forment une couche plus ou moins épaisse suivant les individus et le point du corps considéré, mais qui ne manque jamais. Chez la femelle ces fibres sont disposées sur une seule couche (fig. 14, pl. III); il en est de même chez le mâle dans la région antérieure du corps, mais à partir de la ventouse ventrale ces fibres se disposent sur plusieurs rangs de manière à constituer une sorte d’écorce contractile qui peut être entièrement distincte du parenchyme dont elle est séparée par une ligne bien nette (fig. 25, pl. YI). Leuckart regarde cette disposi- tion comme fondamentale, et il fa représentée sur tous ses dessins. Cependant, dans nombre de cas, nous n’avons pas retrouvé une dis- tinction aussi nette entre la couche contractile et le parenchyme, et, comme le montre la figure 24, planche YI, les fibres longitudinales dorsales, après avoir formé une couche sous-cuticulaire continue, se distribuent ensuite dans toute la moitié supérieure de la coupe, et quelques-unes d’entre elles descendent même assez bas au-des- sous de cette moitié, de sorte qu’il y a pour ainsi dire un mélange du tissu musculaire et du parenchyme dans une grande partie de l'épaisseur de l’animal. Lorsqu’une sorte de séparation existe entre la couche musculaire et le parenchyme, la ligne de sépara- tion résulte sans doute de l’union des fibres du réseau parenchy- mateux, qui, se fondant les unes avec les autres dans le sens tan- gentiel, décrivent la courbe en question. Le groupe ventral des fibres longitudinales est beaucoup moins important, et comprend une seule couche de fibres sous-cuticulaires (fig. 24 et 25, pl. YI). Dans certains cas, même, ces fibres manquent par places, et ne forment pas une couche continue, comme cela se voit dans la figure 25, dans laquelle il n’existe surfe côté ventral que quelques fibres longitudinales coupées en travers. Les fibres transversales sont aussi peu développées, elles for- ment une couche à peu près continue sur la face ventrale où elles sont situées en dessus des fibres longitudinales (fig. 24, pl. VI). Les fibres obliques sont situées au voisinage des fibres longitu- dinales, au-dessous de la cuticule. Elles sont obliques par rapport à l’axe longitudinal du corps et se croisent suivant deux directions. 26 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA On les rencontre aussi bien chez la femelle [m. o, fig. 14, pl. HT) que chez le mâle, mais tandis qu’elles sont peu nombreuses chez la femelle elles sont bien plus répandues chez le mâle, et par leur entre-croisement dessinent au-dessous de la cuticule des figures losangiques. Chez le mâle dont la partie antérieure est représentée dans les figures 22 et 23, planche Y, on pouvait, avec un gros- sissement approprié, distinguer au niveau de cette région des fibres obliques aussi bien sur le côté dorsal que sur le côté ventral. Le système des muscles dorso-ventraux présente des particula- rités importantes, il est formé par des fibres spéciales constituant les muscles parenchymateux des auteurs. Ces fibres traversent le parenchyme verticalement en unissant la face dorsale à la face ventrale. Les muscles dorso-ventraux sont répandus sur toute la longueur du corps, aussi bien dans sa partie antérieure que vers le canal gynécophore. Sur la figure 13, planche III, on voit quelques muscles dorso-ventraux traverser la substance ponctuée du gan- glion cérébroïde, l’un d’entre eux, parti de la face dorsale s’arrête sur l’œsophage, sur la paroi duquel il s’insère. C’est là une dispo- sition des muscles dorso-ventraux sur laquelle Leuckart a beau- coup insisté’. Il pense qu’elle se reproduit très fréquemment dans toute la longueur du corps, et que les muscles qui la présentent peuvent servir de dilatateurs des viscères creux sur lesquels ils s’insèrent. Les muscles dorso-ventraux sont aussi bien indiqués dans les figures 24 et 25, planche YI. Dans la dernière on voit que les mailles du parenchyme s’ordonnent en quelque sorte par rapport à ces muscles sur lesquels elles viennent s’appuyer, et il en résulte une disposition régulière de l’ensemble qui a été bien des fois représentée par Leuckart. Système nerveux. Le système nerveux du Bilharzia a été représenté par Leuckart^ sous la forme d’une commissure transversale siégeant sur la partie moyenne de l’œsophage et réunissant deux cordons longitudinaux 1. Loc. cil., p. 475-416. 2. Loc. cil., fig. 214, p. 481. ANATOMIE DU BILHAUZIA HÆMATORIA 27 placés parallèlement à Pœsophage et s’étendant un peu en avant et un peu en arrière de la commissure, sans toutefois dépasser la ventouse ventrale. Fritsch^ avoue qu’il n’a jamais pu rencontrer un système nerveux central disposé sous la forme d’une masse péri-œsophagienne, et il pense que le système nerveux, au lieu d’exister sous la forme d’un appareil central situé au voisinage de l’œsophage est simplement représenté par des éléments nerveux diffus çà et là dans le parenchyme. De notre coté, nous avons vai- nement cherché sur les animaux examinés par transparence dans la résine dammar une disposition répondant à celle qu’a figurée Leuckart. Nous n’avons pas été plus heureux sur des coupes lon- gitudinales frontales (parallèles au plan d’application des ven- touses) de la partie antérieure du corps, telles que celle d’après laquelle Leuckart a fait son dessin. Il faut avouer d’ailleurs que de pareilles coupes sont excessivement difficiles à réussir à cause de la petitesse des objets, et aussi à cause de l’incurvation que pré- sente toujours cette partie, chez les animaux fixés; incurvation qui, si légère qu’elle soit, empêche toujours d’ohtenir des coupes totales. Mais les coupes transversales de cette région nous ont donné de bien meilleurs résultats. Sur tous les animaux examinés à ce point de vue nous avons trouvé la disposition représentée dans la figure 13, planche III. Au-dessus de l’œsophage on voit une espèce d’arcade constituée par une substance très finement fibrillaire et qui rappelle tous les caractères de la substance ponctuée des centres nerveux chez les animaux invertébrés. Il n’y a pas lieu de douter que cette substance représente une partie importante du système nerveux central de notre parasite, et en particulier la substance ponctuée des centres péri-œsophagiens. Les cellules de ces centres sont représentées à la fois par les noyaux fortement colorés par le carmin et que l’on trouve mélangés à la substance ponctuée (c. /z,fig. 13), et par quelques-unes des cellules situées aux deux extrémités inférieures de l’arcade constituée par la substance ponctuée. Toutefois ces cellules mal différenciées se distinguent 1. Loc. cit., pp. 214 et 221. 28 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA] mal des autres cellules du voisinage parmi lesquelles quelques- unes sont certainement des glandes unicellulaires annexées à Fappareil digestif comme nous le verrons plus loin. La substance ponctuée est traversée par un certain nombre de fibres musculaires dorso-ventrales, disposition qui rappelle celle que Delage a figurée dans les ganglions sus-œsophagiens d’un ver turbellarié, le Convo- luta Schultzii\ En somme, le système nerveux central est représenté chez le Bilharzia par une masse nerveuse sus-œsophagienne ayant la forme d’un croissant à concavité tournée vers la face ventrale. L’épaisseur de cette masse est très faihle, car dans les coupes en séries faites au microtome oscillant on ne la rencontre jamais que dans une seule coupe, la coupe qui précède et celle qui suit cette coupe dans laquelle se trouve le système nerveux n’en présentent pas de trace, ou en contiennent seulement une très faihle partie si la direction des coupes a été un peu oblique. A cause de cela il nous paraît assez difficile de dire si les nerfs longitudinaux que Leuckart a figurés en avant et en arrière de sa commissure trans- versale, laquelle répond bien évidemment à notre organe central, existent réellement. Dès lors, le système nerveux périphérique, au lieu de consister en des cordons assez volumineux comme le pense Leuckart serait plutôt formé d’éléments disséminés çà et là dans le parenchyme et reliés entre eux par des filets très fins qu’il est impossible de délimiter d’une manière suffisamment précise au sein du parenchyme. Système excréteur. Le système excréteur se compose de deux longs canaux longitu- dinaux qui courent parallèlement sur les côtés du corps et se réu- nissent en arrière en un tronc unique ouvert à l’extérieur par un pore excréteur. Ces deux canaux reçoivent une série de tubes transversaux qui, à leur tour, s’ouvrent dans le parenchyme, mais cette partie du système excréteur est très difficile à mettre en évi- 1. Yves Delage. Études histolog. sur les Planaires rhabd. acœles. Arch. de Zool expérim.^ 2° série, t. IV, fig. 9, pl. VU ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 29 dence. Sur les coupes transversales on voit bien çà et là des canaux semblables aux conduits longitudinaux du système aqui- fère, mais leur union avec ces derniers est très difficile à observer. Parmi ces canaux secondaires, les uns se portent d'un côté à fautre du corps, en décrivant une courbe identique à celle des muscles transversaux, les autres sont dirigés de haut en bas, du côté dorsal vers le côté ventral. Tous ne peuvent être suivis que sur de petites distances, et c’est surtout en se guidant sur leur structure que l’on peut être conduit à les rattacher au système aquifère. Ils sont, en effet, constitués par une enveloppe très mince de forme tubulaire, circonscrivant une lumière étroite dans laquelle on ne trouve pas d’habitude de produits figurés. Dans la portion moyenne du corps les grands canaux excréteurs se présentent comme dans la figure 10, planche II, sous la forme de tubes limités par une mem- brane très mince et qui paraît absolument dépourvue de structure. Leur calibre est irrégulier et ils sont tantôt cylindriques, tantôt étranglés par places et renflés à d’autres endroits, ce qui est dù évidemment à des contractions de leurs parois. Vers la partie postérieure du corps la paroi des canaux excréteurs devient plus épaisse et présente une série de corps colorés qui sont appliqués en dehors d’elle et qui ressemblent à des cellules plates accolées aux tubes aquifères et dont le protoplasma enverrait des pro- longements fins dans le parenchyme (fig. 15, pl. III). Que ces corps soient en réalité des cellules, cela est peu probable, car jamais nous n’avons pu déceler de noyau à leur intérieur ; il est plus probable que ce sont de simples renforcements de la membrane amorphe des canaux. Ces derniers présentent dans la partie postérieure du corps des dilatations et des constrictions plus marquées que par- tout ailleurs, ce qui conduit naturellement à penser qu’ils sont plus fortement contractiles à ce niveau que dans le reste de leur étendue. Sur la même figure on voit en dessous d’une dilatation vésiculeuse du canal deux constrictions successives, au niveau desquelles on trouve dans la lumière du canal un cylindre d’une substance hyaline renfermant de très fines granulations. Le canal unique qui résulte de la fusion des deux conduits excré- 30 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA teurs est très court et plus étroit que chacun de ces derniers. En | dehors de la membrane amorphe qui forme sa paroi, on remarque des cellules arrondies disposées régulièrement les unes à la suite des autres, à la manière des éléments d’un épithélium. C’est là une disposition tout à fait en dehors de ce que nous avons vu jusqu’ici pour le système excréteur. Il est clair, d’ailleurs, que cette portion j du système est tout à fait spéciale et, autant que l’on en peut juger, j est douée de propriétés particulières. Sur les nombreux animaux j chez lesquels nous l’avons examinée, nous ne l’avons jamais j trouvée pourvue des constrictions ou des dilatations qui, partout ! ailleurs, témoignaient de la contractilité des canaux excréteurs. | Appareil digestif. | L’appareil digestif est divisible en plusieurs portions distinctes j qui présentent des différences de structure importantes. On peut i lui distinguer une portion buccale, une portion œsophagienne, \ puis une portion intestinale proprement dite, laquelle se divise elle-même en deux parties, l’une qui est formée de deux branches parallèles, l’autre qui est constituée par un tube unique. La portion buccale du tube digestif répond à la cavité de la ven- j touse orale, elle a la forme d’une coupe et se continue avec j l’œsophage par un tube très effilé qui forme comme une filière j étroite (voy. fig. 22 et 23, pl. Y). Cette partie du tube digestif a une j structure très particulière. Son revêtement interne n’est pas j constitué par une couche de nature spéciale comme dans le reste du j tube digestif, mais bien par la cuticule externe qui s’est réfléchie i au niveau de l’ouverture de la ventouse et tapisse tout l’intérieur j de cette dernière. Cette cuticule présente exactement les mêmes ( caractères que sur la surface du corps, et montre une série de petits piquants analogues à ceux que nous avons décrits avec les téguments. En dehors de la cuticule interne, la paroi de l’intestin buccal est formé par le tissu musculaire et parenchymateux qui constitue la charpente de la ventouse. L’intestin buccal est donc constitué, en somme, par une fossette circonscrite par un repli circulaire de la substance du corps différencié en la ventouse ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 31 orale, et qui s’élève au-devant du rétrécissement en filière qui établit la communication entre Fœsophage et l’extérieur. L’œsophage (voy. fig. 22, et 23, pl. Y, fig. 13, pi. III) est formé par un tube (f’inégal diamètre, étendu de la filière mentionnée ci-dessus jusqu’à un élargissement marqué des voies digestives, formant une sorte de sinus transverse disposé exactement en avant de la ventouse ventrale et qui commence la partie intestinale pro- prement dite de l’appareil digestif. L’œsophage présente une paroi très mince, revêtue du côté de la lumière du canal d’une couche de nature spéciale sur laquelle Leuckart a déjà insisté. Cette couche est constituée, d’après lui \ par un rang de cellules épithé- liales de hauteurs différentes, et dont les extrémités internes, plus ou moins saillantes dans la lumière de l’œsophage, forment à l'intérieur de cette dernière comme une série de villosités. Malgré les réactifs colorants que nous avons employés et dont l’un, le carmin aluné, est un excellent réactif des noyaux, nous n’avons jamais pu mettre en évidence aucun noyau dans l’épaisseur de cette couche. Nous fondant sur cette absence de noyaux, et aussi sur le fait que la striation qui traverse cette couche est formée de stries trop serrées pour répondre à des limites de corps cellulaires qui seraient d’une minceur peu ordinaire si ces stries indiquaient leur largeur, nous doutons absolument de la nature épithéliale de cette couche, et nous sommes plutôt portés à croire qu’elle est due à une modification de la cuticule. Les petits prismes limités par stries indiquées dans cette couche au lieu de répondre à des élé- ments cellulaires répondraient à des sortes de prolongements cuticulaires colorables par le carmin comme les piquants décrits plus haut, mais infiniment plus robustes, et disposés tous au con- tact. Cette couche à villosités repose sur une membrane très mince en dehors de laquelle on distingue, sur les coupes transversales, la section de fibres musculaires longitudinales qui forment autour de la partie antérieure de l’œsophage une couche à peu près con- tinue. Yers la partie postérieure de ce dernier, en arrière du système nerveux, ces fibres longitudinales diminuent beaucoup de 1. Leuckart. Loc. cü., p. 483. 32 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBlA nombre et finissent par disparaître. Nous avons déjà vu plus haut . (système musculaire) que Ton trouve des muscles dilatateurs de j l’œsophage. Sur les vers examinés par transparence soit pendant leur vie, soit après coloration et conservation dans la résine dammar, on aperçoit un certain nombre de cellules accolées à la paroi de u l’œsophage et qui deviennent de plus en plus nombreuses vers la ! moitié postérieure de ce dernier où elles forment un groupe très facile à distinguer en avant du sinus transverse dont il a déjà été j . question plus haut (voy. fig. 23, pl. Y). Beaucoup d’entre ces | cellules ont la forme de poires allongées dont le pédicule s’insère j sur la paroi de l’œsophage, et à cause de cela elles ressemblent , beaucoup à des glandes unicellulaires qui seraient annexées à cette j partie du tube digestif. Cette opinion s’impose en quelque sorte | lorsqu’on examine simplement des animaux entiers, chez lesquels les particularités histologiques ne peuvent pas se suivre aussi aisé- ment que sur les coupes; elle est d’ailleurs adoptée par Leuckart‘, mais cet auteur fait remarquer en même temps qu’il est très difficile de voir ces éléments déboucher directement dans l’œsophage. Il est possible aussi qu’un certain nombre de ces cellules péri-œsopha- I giennes appartiennent au système nerveux central. La structure de j l’œsophage du Bilharzia s’éloigne beaucoup de celle du pharynx j musculeux à parois épaisses que l’on trouve dans d’autres tréma- j todes. Cette modification du type général est due sans doute à la | nature de l’alimentation de ce parasite, alimentation qui consiste j uniquement en le sang de leur hôte, dont on voit les globules j encore reconnaissables dans les premières parties du tube digestif, j tandis qu’en arrière ils sont fusionnés, fondus, et transformés en une masse noirâtre très aisément visible chez les femelles. L’intestin proprement dit commence immédiatement en arrière de Pœsophage par un large sinus transverse placé en avant de la j ventouse ventrale (fig. 6, pl. I; 20, pJ. lY ; 22 et 23, pl. Y). Des | deux angles latéraux de ce sinus partent deux branches qui, I embrassant entre elles le pied de la ventouse ventrale, se dirigent Loc. cit., p. 482. ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 33 en arrière. Ces branches sont beaucoup plus volumineuses chez la femelle que chez le mâle et se comportent aussi d’une manière un peu différente suivant le sexe. Chez la femelle elles poursuivent leur trajet sur une longueur répondant à peu près au sixième de la longueur totale (3 millimètres chez une femelle qui mesurait en tout 18 millimètres de longueur); puis elles se réunissent l’une à l’autre formant un tube unique, volumineux, qui occupe le milieu du corps. Cet intestin unique et médian se poursuit sur une grande longueur (13 millimètres à peu près dans la femelle susindiquée) et se termine au voisinage de l’extrémité postérieure du corps par une extrémité close en cul-de-sac. Sa longueur totale répond à peu près à quatre sixièmes de la longueur du corps. Son aspect est un peu différent suivant l’état de contraction ou de relâchement de l’animal. Dans le premier cas, lorsque l’animal a été fixé en con- traction, le tube digestif est légèrement contourné en spirale, ou vu sur une coupe optique se montre plié en zigzags (lig. 20, pL IV); lorsque le corps est relâché, il est droit ou à très peu de chose près. Chez le mâle, les branches intestinales sont beaucoup plus grêles, leur diamètre est environ six fois plus petit que celui qu’elles pré- sentent chez la femelle; elles poursuivent leur trajet parallèle et restent indépendantes l’une de l’autre bien plus loin que chez la femelle, et ce n’est qu’arrivées vers la partie postérieure du corps qu’elles tendent à se réunir; mais alors après s’etre fusionnées, au lieu de former un tube médian comme chez la femelle elles se séparent à nouveau pour se réunir un peu plus loin et recommencer à se subdiviser à peine réunies. Il résulte de cela que la partie pos- térieure du tube digestif du mâle, au lieu de consister, comme chez la femelle en un tube unique, est représentée par une série de boucles superposées résultant des anastomoses successives entre les deux branches intestinales, et se termine par un cul-de-sac impair et médian très grêle et très court (fig. 8, pl. II). Quelles que s'oient les différences que présente le tube intestinal dans ses dispositions macroscopiques, sa structure est toujours la même. Il est toujours constitué par une mince membrane d’enve- loppe sur laquelle reposent une couche musculaire et une couche Université de Lyon. — ix. a. 3 34 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA épithéliale. La membrane d’enveloppe anhiste, très mince, ne présente rien de particulier. La couche musculaire est constituée par des fibres annulaires (fig. 12, pl. III) qui forment une couche à peu près partout continue et que l’on distingue très aisément chez certains individus conservés dans l’alcool et dont l’épithélium intestinal est tombé. Quant à l’épithélium, il est très caractéris- tique et forme une couche continue dans toute la longueur du tube digestif. Cette couche est semée de noyaux plus ou moins rappro- chés. Les limites cellulaires sont très difficiles à mettre en évi- dence et nous ne les avons jamais trouvées indiquées avec netteté. L’épithélium commence exactement au niveau du point où fœso- phage débouche dans le sinus transverse et il se continue directe- ment sans aucune transition avec la couche à villosités de l’œso- phage. La netteté avec laquelle apparaissent les noyaux de l’épithélium sur les coupes qui succèdent immédiatement à l’œso- phage dans la couche interne duquel on ne pouvait en distinguer aucun, fait justement ressortir leur absence dans cette couche et confirme l’opinion que nous avons émise plus haut sur sa nature. Appareil génital. L’appareil génital a une disposition différente dans les deux sexes, et très compliqué chez la femelle, il est au contraire chez le mâle, d’une grande simplicité. Les organes sexuels du mâle consistent en un certain nombre de vésicules testiculaires placées au commencement de la partie pos- térieure du corps, un peu en arrière de la ventouse ventrale, et dont les produits de sécrétion s’écoulent au dehors par un canal très simple. Les glandes testiculaires, au nombre de cinq, sont placées à peu près sur la ligne médiane du corps ; elles ont la forme de petites poches piriformes dont l’extrémité amincie est tournée vers la ligne médiane, l’extrémité arrondie en dehors. Ces poches sont disposées sur deux rangées alternantes, les pointes de celles d’une rangée s’engrenant avec les intervalles laissés entre les vésicules de l’autre rangée. Comme l’a démontré Leuckart^ 1. Leuckart. Loc. cit., pp. 490-491. ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 35 ces vésicules communiquent toutes les unes avec les autres et débouchent finalement dans un large sac placé au-devant d’elles et qui s’ouvre lui-même au dehors par un canal court dont l’entrée est placée au commencement du canal gynécophore. Le sac dans lequel elles débouchent (vésicule séminale de Leuckart) peut être fortement bilobé et semble dès lors former deux vésicules assez semblables déprimé abord aux testicules eux-mêmes, ce qui pour- rait faire croire que le nombre de ces derniers est de sept. Mais en réalité, comme on le voit sur notre dessin (fig. 23, pl. Y), les vési- cules antérieures se distinguent nettement des glandes testiculaires par la nature de leur contenu qui est beaucoup plus clair. Le petit cordon foncé placé entre la vésicule séminale et les testicules cor- respond sans doute au canal étroit qui, d’après Leuckart, fait com- muniquer les glandes génitales mâles avec le réservoir séminal. Les glandes génitales présentent à considérer une paroi et un contenu; la paroi est mince et paraît sans structure, le contenu est formé par une masse de cellules au milieu desquelles on trouve certains groupes cellulaires avec une disposition toute particu- lière. On voit, en effet fig. 25, pl. YI), des cercles clairs limi- tés par une paroi cellulaire et qui correspondent, sans aucun doute, à la coupe de tubes épithéliaux. Sont-ce là des tubes testi- culaires que J. Chatin^ a décrit le premier dans la glande mâle? Il est difficile de le dire, attendu que la technique de cet auteur étant très différente de la nôtre — il faisait des dilacérations après macération dans un acide étendu — nos préparations ne sont pas comparables aux siennes. Les vésicules testiculaires communi- quent largement entre elles (fig. 2o, pl. YI) et lorsqu’on les exa- mine sur des coupes frontales, comme elles sont disposées alter- nativement de chaque côté de la ligne médiane, leur cavité forme, ainsi que l’a dit Leuckart, un canal très fortement bosselé sur ses côtés, ou, si l’on préfère, contourné en zigzags. L’appareil génital de la femelle est beaucoup plus compliqué, il comprend les deux sortes de glandes caractéristiques des plathel- 1. J. Chatin. Sur Tanat. de la Bilharzia. Comptes rendus de VAcad. des Sc., 1887^ t. LTV, p. 1004. i 1 1 1 36 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA minthes, le germigène et le vitellogène, munis chacun de leurs [ canaux excréteurs. Ces derniers se réunissent dans une glande coquillière d’où part un canal évacuateur unique et que l’on peut désigner indifféremment sous le nom d’utérus ou de vagin. I Le germigène est un sac allongé placé environ à l’union du pre- f mier cinquième de la longueur du corps avec le second cinquième, en partant de la ventouse orale. Sa forme est très constante ^ {grerm.y fig. 16, pl. III et 20 pl. IV), et rappelle celle d’une sorte de langue présentant en avant un lobe antérieur court, recourbé sur lui-même en manière de corne. La paroi mince s’écarte çà et là du contenu qui est constitué par des ovules de taille différente sui- vant les points de la glande que l’on envisage. Les ovules les plus petits sont placés dans le lobe antérieur, et à partir de là ils vont grossissant de plus en plus jusque vers la partie postérieure du germigène où ils sont très volumineux. L’extrémité postérieure du germigène est située à quelque distance de la bifurcation posté- rieure du tube intestinal, elle s’effile légèrement pour se continuer par un canal cylindrique, l’oviducte. Ce dernier se dirige d’abord en arrière, puis, arrivé sur la bifurcation intestinale, il se recourbe en avant et se place près du bord interne du germigène où il est en rapport étroit avec le canal du vitellogène. En avant du germi- j gène ces deux canaux oviducte et vitelloducte se placent entre les deux branches du tube digestif, s’enroulent autour l’un de l’autre j et viennent déboucher dans la glande coquillière ; ils sont consti- j tués tous les deux par une paroi très mince munie de fibres mus- j culaires annulaires, au moins en certains endroits, mais on ne peut pas leur distinguer de revêtement épithélial. Leur contenu j permet de les différencier aisément l’un de l’autre ; le vitelloducte renferme une substance finement granuleuse qui reste d’habitude colorée en jaune, l’oviducte au contraire renferme des ovules accompagnés' de granulations très fines, qui de même que les ovules se colorent vivement en rouge. Dans l’individu représenté figure 16, planche III, la partie antérieure des deux canaux était vide. Le vitellogène a en [volume une [importance considérable, ii ANATOMIE DU BILHARZIA ILEMATOBIA 37 s’étend depuis un point peu éloigné de la bifurcation du tube digestif en avant jusque vers l’extrémité postérieure du corps à une certaine distance de laquelle il s’arrête, il s’étend par consé- quent sur quatre sixièmes environ de la longueur totale du corps. Il est constitué (fig. 7, et 10, pl. II), par une série de glandes piri- fornies placées sur les côtés du tube digestif et qui s’ouvrent dans un canal longitudinal situé sur la face ventrale de ce dernier. Cha- que glande a la forme d’une massue courbée en demi-cercle et qui entoure la moitié correspondante du tube digestif, le manche de la massue étant situé du côté ventral, la tête du côté dorsal. Fritsch ^ a figuré cette disposition des glandes autour du tube digestif, mais son dessin dans lequel les glandes vitellines sont représentées comme multilobées en dedans est certainement incorrect, car elles sont toujours simples, comme on le voit dans la figure 10. Chacune des glandes élémentaires qui par leur réunion forment le vitello- gène est constituée par une tunique propre très mince et sans structure et par un contenu cellulaire renfermant de nombreux noyaux. Le canal excréteur de ces glandes élémentaires vient s’ou- vrir à peu près à angle droit dans le canal collecteur commun ou vitelloducte, mais avant de déboucher dans ce dernier il peut se diviser en deux branches qui s’écartent l’une de l’autre et s’ouvrent séparément dans le canal collecteur (fig. 7). Les glandes sont plus volumineuses dans la partie postérieure que dans la partie antérieure du vitellogène où leur extrémité dorsale ne présente plus le renflement quelle offre d’habitude dans les glandes posté- rieures, mais est au contraire étroite et allongée comme dans cer- taines glandes de la fig. 7, pl. II. Cette différence est très marquée et donne un aspect spécial à chacune des deux parties antérieure et postérieure du vitellogène. Le canal collecteur commun du vitellus doit être distingué en deux parties, l’une postérieure accolée à la partie médiane unique du tube digestif, l’autre antérieure allant de la bifurcation du tube digestif à la glande coquillière. Ces deux parties diffèrent beau- coup l’une de l’aütre par leurs rapports et par leur structure. La 1. Loc. cit.^ p. 206, fig. e. 38 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA partie postérieure consiste en un canal étroit limité par une mem- brane propre d’une extrême finesse et qui ne possède jamais de fibres musculaires. Ce canal est toujours placé sur la ligne médiane ventrale, et comme le montre la figure 7, planche II, il ne suit pas les inflexions du tube digestif ou ne s’y prête que très peu. La partie antérieure du vitelloducte abandonne le tube digestif et, devenue indépendante, s’approche de l’oviducte pour se terminer avec lui dans la glande coquillière. Dans cette portion de son trajet le vitelloducte est beaucoup plus volumineux, il décrit de nombreux tours de spire autour de Foviducte, et arrivé au voisi- nage de la glande coquillière, il s’effile beaucoup avant de pénétrer dans cette dernière. Nous avons vu déjà que dans cette partie le vitelloducte peut présenter des fibres musculaires, caractère qui le sépare absolument de sa partie postérieure. La glande coquillière est un petit sac ovoïde dont le grand axe est placé dans le sens de la longueur de l’animal. Son extrémité postérieure reçoit les conduits venus du germigène et du vitello- gène, son extrémité antérieure donne naissance au vagin. Elle est constituée par une paroi propre très mince, revêtue du côté interne par une couche de cellules épithéliales claires, cylindriques et d’une assez grande hauteur (fig. 21, pl. V). Ces cellules sécrètent la coquille de l’œuf. Elles ont été déjà vues et représen- tées par Fritsch h qui les regarde comme distribuées sur plusieurs rangs superposés. Nous n’avons pas trouvé cette disposition strati- fiée, et les cellules nous ont paru former une seule rangée. Leuc- kart ^ considère comme étant les éléments sécréteurs de la coquille de petites glandes unicelluJaires qui, situées dans le parenchyme, en dehors de la glande coquillière, déboucheraient dans la partie postérieure de cette dernière ; nous n’avons jamais rien observé de pareil. Le mode d’abouchement du vitelloducte et de l’oviducte dans la glande coquillière varie beaucoup suivant l’état de con- traction du corps, ainsi que la forme de la glande elle-même. Dans la figure 16, planche III, cette dernière est longue, ovoïde, avec 1. Loc. cit., pl. XII, fig. 9. 2. Loc. cit.^ fig. 223, p. 495. ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 39 son extrémité postérieure effilée. Les deux canaux glandulaires (vitelloducte et oviducte) débouchent côte à côte dans la portion effilée de la glande; que cette portion s’effile encore davantage, et il semblera que les deux canaux s’ouvrent dans un canal commun qui déboucherait lui-même dans la glande. C’est d’ailleurs la dis- position que Leuckart figure comme type ^ Si, au contraire, le corps est contracté, la glande est ramassée sur elle-même, elle prend la forme d’un ovoïde ou même d’une sphère et l’oviducte et le vitelloducte débouchent isolément dans sa partie postérieure. L’insertion du canal antérieur ou vagin, sur la glande coquil- lière varie moins. Cependant nous ne serions pas étonnés qu’il puisse se produire à son niveau des changements de position importants, avec les différents états de contraction ou de relâche- ment des parties ; les modifications que nous avons observées pour l’insertion des canaux postérieurs rendent au moins cette opinion très plausible. Fritsch - a émis l’idée que, dans certains cas, le vagin s’insérait sur le pôle antérieur de la glande coquillière, tandis que d’autres fois, il était implanté sur le côté de cette dernière, latéra- lement, et il ajoutait que cette différence dans l’insertion du vagin était la cause des différences de forme que l’on peut rencontrer dans les coquilles qui enveloppent les œufs qui, d’après lui, avaient un éperon terminal lorsque le vagin était placé dans l’axe de la glande coquillière, et, au contraire, un éperon latéral, lorsqu’il s’insérait latéralement, car le contour général de la coquille répon- dait à la cavité de la glande, tandis que l’éperon répondait au canal vaginal ouvert dans cette cavité. Leuckart ^ a fait remarquer que l’on trouvait dans le vagin d’un même animal, à la fois, des œufs à éperon latéral et des œ.ufs à éperon terminal, et que, par consé- quent, la forme de la coquille, dans ces deux cas, ne pouvait pas s’expliquer avec les idées de Fritsch. Le fait que nous avons relevé fréquemment de la différence considérable que peut présenter l’aspect de la glande coquillière suivant l’état de contraction du 1. Loc. cit., fig. 223. 2. Loc. cit., pp. 210-211. 3. Loc. cit., p. 509. 40 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA corps, pourrait permettre de comprendre la présence des deux sortes d’œufs dans le vagin d’un même animal. En effet, il n’y au- rait rien d’étonnant à ce que l’ouverture du vagin dans la glande coquillière soit reportée de la partie antérieure sur l’im des côtés de cette glande suivant l’état de contraction du corps. La partie de l’appareil génital femelle située en avant de la glande coquillière est représentée par un canal unique et médian, qui partant de l’ex- trémité antérieure de la glande, se dirige en avant et vient s'ouvrir sur la face ventrale immédiatement en arrière de la ventouse ven- trale. Ce canal a été divisé par plusieurs auteurs en un certain nombre de parties distinctes ; ainsi Fritsch* lui considère une partie antérieure courte, voisine de son extrémité antérieure et qu’il appelle le vagin; en arrière du vagin, il décrit une portion ampul- laire pourvue d’une paroi épaisse qui constitue pour lui Futérus, enfin la portion comprise en arrière de futérus est désignée par lui sous le nom d’oviducte. Leuckart ^ n’admet pas ces divisions, et il donne le nom d’utérus [Fi'uchthalter) à toute la longueur du canal, en décrivant avec ce dernier la glande coquillière à laquelle il donne le nom de capsule que lui avait déjà attribué Bilharz. Les auteurs français, Chatin ^ Blanchard^ admettent que sur ce canal existe en avant de la glande coquillière, un renflement qui fonc- tionne comme un réceptacle séminal. Sur toutes les femelles que nous avons examinées, nous avons toujours trouvé ^n avant de la glande coquillière un simple canal dont la lumière peut, sans doute, être inégale, et présenter des dilatations locales, mais nous ne sommes pas arrivés à différencier suffisamment d’après leur structure, des parties répondant aux divers organes distingués par Fritsch, et comme nous l’avons dit plus haut, nous considérons la partie des voies génitales située en avant de la glande coquillière, comme un canal unique que l’on ne peut pas diviser en régions distinctes et qui peut être appelé, avec Bilharz, le vagin, ou, avec Leuckart, futérus. Sur l’individu représenté dans les figures 6, 1. Loc. cit., p. 202 et pl. XII, fig. 8. 2. Loc. cxt., p. 499. 3. Chatin. Loc. cit., p. 1085. 4. Blanchard. Zool. méd., t. I, p. 642. i j i I I 1 I i ANATOMIE DU BILHARZIA HÆMATOBIA 41 planche I, et 11, planche II, ce canal est vide et rectiligne dans sa partie antérieure et rempli d’œnfs et légèrement sinueux dans sa partie postérieure. Dans cette dernière, les œufs ne sont pas revêtus d’une coquille, ce qui est dû probablement à ce que cet individu n’était pas encore en pleine période de maturité sexuelle; les œufs renfermés dans son utérus sont des œufs abortifs. D’ailleurs, la structure des parties est la même que chez d’autres vers en pleine activité sexuelle, dont Futérus renfermait dans toute sa longueur des œufs pourvus d’une coquille, et l’utérus se montre toujours constitué par une paroi mince amorphe, tapissée en dedans par une couche épithéliale dont il est très difficile d’apprécier la struc- ture. Le bord interne de cette couche n’est pas rectiligne, mais découpé en festons saillants qui s’avancent dans la lumière du canal et peuvent même, par places, la cloisonner complètement. Cette disposition, très marquée sur l’individu représenté dans les figures 6 et 11, nous paraît être en rapport avec l’état de non- maturité sexuelle de cet individu. Il est probable qu’au fur et à mesure que les œufs s'engagent dans le canal, son revêtement se régularise. Le vagin, arrivé près de sa terminaison, s’infléchit légè- rement en dessous sur un très court trajet et s’ouvre par un petit orifice, la vulve, situé exactement en arrière de la ventouse ven- trale (fig. G, pl. I). Couples. Nous avons dit que dans un grand nombre d’autopsies on ne rencontre que des Bilharzia mâles; lorsqu’on trouve des femelles, elles sont d’habitude accouplées avec un mâle, comme on le sait depuis la découverte de ces parasites faite par Bilharz. La position des individus accouplés est extrêmement variable, comme le prou- vent les figures de Bilharz', de Leuckart% de Fritsch% et celle que nous donnons planche IL En général, la seule chose qui soit constante, c'est qu’une certaine longueur du corps de la femelle est maintenue dans le canal gynécophore, le reste du corps étant 1. Bilharz Zeitschinft fiir wissens. ZooL, t. IV, 18o3, pl. V, fig. IK 2. Loc. cil., fijr. 226. Il s’agit dans ce cas de Bilharzia crassa. 3. Loc. cit., pl. XI, fig. 1. 42 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA enroulé sur lui-même ou autour du mâle. Il est probable qu’après la mort de leur hôte, les parasites, troublés dans leurs conditions d’existence, effectuent des mouvements qui changent plus ou moins les rapports des deux individus accouplés. Ces mouvements peuvent aussi se produire si les vers sont extraits encore vivants de la veine porte, par la simple excitation produite sur eux par le changement de milieu, et à plus forte raison par Faction des réac- tifs. Nous possédons un couple monté dans la résine dammar et dans lequel les deux individus sont si étroitement enchevêtrés qu’il est difficile de distinguer à première vue ce qui appartient à Fun de ce qui appartient à Fautre. Lorsque Fon vient de recueillir des individus accouplés, il n’est pas rare de les voir se séparer Fun de Fautre, soit sous la simple action de Feau de lavage qui les disjoint parce que leur union est très peu solide, une très faible longueur du corps de la femelle étant située dans le canal gynécophore, soit par suite des faibles mouvements qu’ils peuvent encore présenter. Il est probable que lorsque la copulation n’a pas été troublée, les deux individus sont placés ventre à ventre, l’extrémité antérieure de la femelle répondant à l’extrémité antérieure du mâle. Le sperme qui s’écoule de l’ouverture génitale de ce dernier arrive sur l’ouverture vulvaire dans laquelle les spermatozoïdes pénè- trent. Le léger sillon qui existe à la face ventrale de la femelle dans la région répondant au vagin peut, évidemment, servir à guider le liquide séminal vers Forifice génital de la femelle. Il n’y a pas d’organes de copulation proprement dits, l’extrémité du canal de la vésicule séminale ne peut pas se retourner et faire saillie en dehors, comme Fa dit Leuckart ^ ; d’autre part, pas plus que cet auteur, nous n’avons observé, chez la femelle, de canal do Laurer. I 1. Loc. cit.y p. 492. CHAPITRE III fl L’ŒUF ET L’EMBRYON Notre étude porte seulement sur les embryons rendus dans les urines par les malades et observés immédiatement après l’éclosion ou pendant les quelques heures qui suivent cette dernière. 11 est, en effet, facile de faire éclore les œufs récoltés dans les urines, en les mettant dans l’eau, et d’observer les embryons pendant plu- sieurs heures, mais ils ne se développent pas, et comme tous ceux que l’on trouve dans les urines sont exactement au même point de développement l’étude embryologique de ces êtres est encore bien imparfaite’. On trouve presque toujours des œufs dans l’urine des malades porteurs de Bilharzia, mais pour la recherche des embryons, il faut éviter de s’adresser aux cas aigus dans lesquels l’hématurie est très abondante et l’iirine très trouble, car les œufs que l’on trouve dans ces cas s’altèrent très vite s’ils ne sont déjà altérés. Au contraire, en choisissant des cas où l’hématurie est insignifiante et se traduit seulement par la présence de quelques petits caillots sanguins, on obtient des œufs en parfait état. C’est ainsi que, durant la longue observation à laquelle nous avons soumis notre malade, nous avons eu beaucoup plus de succès dans la recherche des embryons pendant les périodes de rémission de sa maladie. Pour se procurer des œufs, on filtre l’urine et on recueille sur le filtre les petits caillots sanguins que la filtration y a laissés. Ces caillots, comme le montre la photographie ci-jointe, renferment un grand nombre d’œufs. 11 est impossible d’évaluer, même 1. Bilharz a signalé ce fait que les premiers stades du développement des œufs se passent dans le vagin des femelles. Zeitschrift für iviss. Zool., t. IV, 1853, p. 72. I 44 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA approximativement, le nombre d’œufs pondus en vingt-quatre heures, mais il est certainement très considérable. Comme on l’a vu plus haut, bien que la présence des œufs dans les caillots soit constante, ces derniers ne s’observent pas toujours avec la même fréquence et il semble qu’il y ait une période favorable, suivie d’une période dans laquelle les œufs diminuent pour repa- raître ensuite en grande abondance. Est-ce que la saison exerce- Fig. 3. — Caillot sanguin rendu avec les urines et renfermant un grand nombre d’œufs. (Lortet ad. nat. photogr.) rait une action sur la ponte? La question est évidemment trop complexe pour qu’on puisse conclure de nos observations à une influence saisonnière sur la ponte ou à une sorte de périodicité de cette dernière. Cependant la diminution du nombre des œufs, puis leur augmentation ont suivi une marche trop régulière, pour que nous ne croyions pas devoir les signaler à l’attention des clini- ciens et à celle des naturalistes \ 1. Il ne faut pas confondre les variations dans le nombre des œufs expulsés avec L’OEUF ET L’EMBRYON 45 Les œufs peuvent être observés dans Turine, avec laquelle ils ont été émis ou bien dans l’eau. Il est bon de les examiner dans l’urine, car ils n’éclosent pas dans ce liquide et les embryons qu’ils renferment restent immobiles, ce qui donne tout le temps néces- saire pour les dessiner à la chambre claire et pour étudier bien des détails de leur organisation. Dans l’eau, ils ne tardent pas à éclore, et une fois sortis de leur coquille, les embryons se meu- vent, avec une telle rapidité, qu’il est bien difficile de les suivre. Aussi est-il bon, pour les étudier à son aise, de laisser dans la goutte d’eau qui les renferme, quelques menus brins de coton ou des débris des caillots sanguins dont ils sont sortis et dans lesquels ils viennent s’embarrasser et s’immobiliser au moins pendant quelques instants. En dehors de ces observations directes sur l’ani- mal vivant, nous avons fait aussi des préparations permanentes d’embryons fixés par l’acide osmique et colorés au carmin. Ces préparations ont, en plus d’autres avantages, celui d’être perma- nentes, et, à cause des excellents résultats qu’elles fournissent, nous nous étendrons un peu sur la manière de les obtenir. Il est à peu près inutile d’essayer de fixer les embryons renfer- més dans leur coquille ; les réactifs fixateurs pénètrent très lente- ment cette dernière, de sorte que l’animal qu’elle abrite se déforme totalement avant de mourir, les réactifs colorants pénètrent aussi très mal et leur emploi ne donne que des résultats très imparfaits. Après bien des tâtonnements, nous nous sommes arrêtés à la méthode suivante. On porte dans une goutte d’eau pure, sur une lame de verre, un certain nombre d’œufs extraits d’un caillot fraîchement émis. Les œufs ne tardent pas à éclore, comme on peut s’en rendre compte aisément, en observant la préparation avec un objectif faible, n“ 1 ou 2 de Yerick, sans recouvrir la goutte d’eau d’une lamelle. Lorsque les embryons sont tous éclos la prédominance de la maladie dans certains mois de l’année, signalée par quelques auteurs. Griesinger a fait remarquer que la Bilharziose sévit plus particulièrement pendant certains mois de l’année (juin, juillet, août), tandis qu’elle est bien moins fréquente d’octobre à janvier. D’après nos observations (voy. plus haut, chap. 1, p. 13), il s’agit non pas de la fréquence de la maladie, mais simplement des héma- turies et de celle des œufs rencontrés dans les caillots. 46 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA et nagent dans le liquide, on renverse la lame de verre sur laquelle ;■ ils sont placés sur Fouverture d’un flacon à large goulot, renfer- i mant une solution à 1 pour 100 d’acide osmique. Les vapeurs d’acide osmique se dissolvent dans la goutte d’eau et fixent d’une ! manière parfaite les embryons; la fixation est complète au bout ' de deux à trois minutes. Pendant ce temps, on a préparé une seconde lame de verre, sur laquelle on étend une très mince ; couche d’albumine préparée pour coller les coupes en série, et | tenant toujours en bas la face de la première lame sur laquelle i est déposée la goutte d’eau renfermant les embryons désormais fixés, on approche la goutte d’eau de la lame recouverte d’alhu- i mine, jusqu’à lui faire toucher cette dernière. L’eau s’étale alors j sur cette lame sur laquelle les embryons tombent entraînés par i leur propre poids. On attend quelques instants pour que tous les ; embryons aient eu le temps de tomber de la première lame sur la j seconde, puis on laisse un peu évaporer la goutte d’eau qui s’est ; étalée sur cette dernière, en ayant soin toutefois de mettre la pré- ■ paration à l’abri de la poussière. Lorsqu’il ne reste plus que très i peu d’eau sur la lame albuminée, on y fait passer un courant : d’alcool à 90 degrés qui coagule l’albumine et fixe les embryons ‘ sur la lame. Dès lors, on peut colorer les embryons ainsi collés à ' la lame de verre, et monter la préparation dans le baume ou dans la résine dammar. Cette méthode complète d’une manière très ^ heureuse l’ohservation des individus vivants, et seule elle nous a • permis de voir les ouvertures externes du système aquifère qui ! avaient jusqu’ici échappé aux auteurs. Pendant toutes les manipu- | lations qu’elle nécessite, un grand nombre d’embryons sont per- | dus pour différentes causes (non-adhérence à l’alhumine, écrase- ment, etc.), mais cela n’est pas un inconvénient sérieux étant ; donné le nombre presque illimité d’œufs dont on dispose. i Les œufs se distinguent en deux grandes catégories : les œufs à , éperon terminal et les œufs à éperon latéral. Nous n’avons jamais ! observé de ces derniers dans les urines de notre malade, nous n’en | parlerons donc pas ici, nous réservant d’en dire quelques mots à j propos de l’anatomie pathologique. i I L’OEUF ET L’EMBRYON 47 Forme des œufs. Les œufs à éperon terminal sont eux-mêmes de taille très varia- ble, comme on peut s’en rendre compte par la photographie ci-jointe. Les plus grands peuvent atteindre, d’après nos mensura- tions, un peu plus de deux dixièmes de millimètre de longueur (0““, 21), les plus courts dépassaient à peine un dixième de milli- Fig. 4. — OEufs de Bilharzia extraits d’un caillot. (Lortet ad nat. photogr.) mètre, (O""™, 13). Malgré cette grande différence de taille, l’em- bryon qu’ils renferment se présente toujours à peu près avec la même structure, c’est-à-dire au même stade de développement. Leur forme est celle d’un ovoïde légèrement aplati, ils présentent en effet deux diamètres transversaux inégaux: l’un, plus large, cor- respond à la largeur de l’œuf; l’autre, plus étroit, correspond à sou épaisseur. Ils ont donc, en somme, une strucfure bilatérale qui se retrouve, du reste, chez l’embryon. Une des extrémité de l’ovoïde, et en général la plus volumineuse se prolonge en une petite pointe i 1 48 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA fine qui est Féperon. L'éperon n’est pas toujours exactement axial, mais il peut aussi s’infléchir sur l’un des côtés, comme on le voit sur un des œufs de la photographie. La coquille est lisse, parfaite- ment transparente, assez élastique bien qu’elle se rompe facile- ment. Elle ne présente pas de fissure ou de sillon par lesquels se fasse d’habitude la rupture qui accompagne l’éclosion, elle n’a pas non plus d’opercule. Elle est assez épaisse et présente un double contour, l’éperon qui la termine est plein. Bien que l’embryon soit souvent surchargé de matières calcaires qui prennent sa place et le font périr, on ne trouve pas d’habitude dans la coquille des matériaux calcaires, et les œufs traités par des acides ne donnent lieu à aucun dégagement de gaz. En dedans de la coquille se trouve une couche molle très trans- parente, dans l’intérieur de laquelle on peut voir des petits tractus très fins représentés dans la figure 5, planche I, et qui semblent résulter de la présence d’une mince lame de substance interposée à deux vacuoles consécutives. En effet au sein de cette couche molle existent de grandes cavités vacuolaires aplaties. On y ren- contre aussi un grand nombre de petites sphérules ou de granula- tions très fortement réfringentes (lig. 1 et 5, pl. I). Sur le vivant, c’est-à-dire sur les œufs observés dans l’urine ou dans l’eau, nous n’avons jamais vu dans cette couche de corps pouvant être pris pour des noyaux, mais sur des préparations fixées nous avons pu observer des noyaux en dedans des coques brisées dont l’embryon était sorti. Ce fait est en faveur de l’opinion de Leuckart qui con- sidère la couche dont nous venons de parler comme correspondant à la membrane externe d’origine ectodermique dont la larve d’autres trématodes se dépouille à un ] moment donné dans l’œuf. L’embryon renfermé dans sa coquille a la forme d’un ovoïde aplati dont les deux extrémités se distinguent aisément l’une de fautre. L’une d’elles, plus effilée, forme comme une espèce de trompe, elle répond à la partie antérieure ou céphalique de l’embryon; l’autre, plus volumineuse, mousse, répond à son extrémité posté- rieure ou caudale. L’extrémité céphalique est généralement tournée vers le gros bout de la coquille, l’extrémité postérieure répondant L’ŒUF ET L’EMBRYON 49 au contraire à l’éperon terminal, mais la disposition inverse peut aussi s’observer bien qu’avec une fréquence beaucoup moins grande. Lorsqu’on examine l’embryon par sa surface pour observer les détails de celle-ci, le renflement considérable de la partie moyenne empêche de mettre au point en môme temps sa surface et les deux extrémités, de telle sorte que ces dernières se distin- guent mal l’une de l’autre. C’est le cas de l’embryon représenté dans la figure 5, planche I, et dans lequel l’extrémité céphalique se trouvait située par exception du côté de l’éperon terminal. Au voisinage de l’extrémité céphalique on aperçoit deux vésicules très brillantes (^/, fig. 5, pl. 1) placées de chaque côté d’une poche médiane renfermant un contenu sombre, granuleux. Ces vésicules permettent de marquer le plan de symétrie de l’embryon, c’est le plan vertical et médian qui passe entre elles à égale distance de l’une et de l’autre. La face dorsale est indiquée par la présence du système nerveux central. La face ventrale est celle qui lui est opposée. Brock a déjà indiqué la bilatéralité de l’embryon. La forme de l’embryon diffère beaucoup suivant les conditions dans lesquelles on l’examine. Tant qu’il est renfermé dans sa coquille, il est ovoïde, comme elle, et il semble qu’il est comprimé à l’intérieur de sa coque, car ses téguments présentent sur leur bord interne un plissement très fin et très régulier (fig. 5, pl. I). Dès que l’embryon sort de l’œuf, il perd sa forme ovoïde pour prendre celle d’un cylindre terminé, en avant, par une extrémité conique, en arrière, par une extrémité arrondie (fig. 2 et 4, pl. I). Malgré cette forme extérieure cylindrique, on peut cependant considérer l’embryon comme doué de symétrie bilatérale à cause de la position qu’occupent les principaux organes, et qui est restée la même qu’auparavant ; d’ailleurs, cette forme cylindrique n’est pas la forme définitive et permanente de la larve sortie de l’œuf, elle ne subsiste pas dès que l’animal meurt, et elle paraît résulter à la fois de l’action des cils vibratiles et de celie des muscles de l’embryon. Dès que ce dernier meurt, son corps qui s’était beau- coup allongé pour revêtir la forme cylindrique, redevient large et ovoïde comme on peut le voir dans la figure 3, planche I, quirepré- Université de Lyon. — ix. a 4 30 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA sente un individu chez lequel la fixation n’a pas été suffisamment rapide pour maintenir la forme qui existait pendant la vie et a permis au corps privé de la contraction de ses muscles de reprendre son aspect antérieur. Ces détails préliminaires donnés, nous passerons à l’étude des différents systèmes organiques que l’on rencontre chez l’emhryon. Système tégumentaire de Tembryon. Les téguments sont assez épais, comme on peut le voir aisément sur les points où il existe une cavité cœlomique entre eux et les organes internes. Ils consistent en une couche épithéliale recou- vrant des couches musculaires formées de fibres longitudinales et de fibres transverses, et ils portent des organes différenciés qui consistent en cils vibratiles et en petites pointes, les « Zàpfchen » ' des auteurs allemands, disposées en couronnes. | La couche épithéliale consiste en cellules polygonales aplaties extrêmement minces, et qui offrent l’aspect de celles que Leuckart a figurées pour l’embryon de Dist. hepaticum^ . Mais il est extrê- j mement difficile de les distinguer, nous ne les avons vues qu’une ; fois sous l’aspect que nous venons de décrire, et toutes les tenta- • tives pour les apercevoir plus distinctement ont échoué. Nous avons i fixé des embryons vivants par le nitrate d’argent, mais nous n’avons ! pas pu obtenir la réduction de ce réactif sur des lignes de contour ' marquant la limite de ces cellules. En dessous d’elles se trouvent i des fibres musculaires disposées suivant deux directions princi- : pales, les unes longitudinalement, les autres en travers. La pré- i sence de ces fibres se reconnaît aisément sur les embryons vivants ,■ par la striation qu’elles dessinent à la surface du corps (fig. l,pl. I). I Les fibres transversales ne sont pas rigoureusement annulaires et ( présentent de légères ondulations, comme si elles se moulaient sur ! des reliefs saillants. Un grand nombre de granulations réfringentes ; contenues dans l’enveloppe molle et décrites plus haut se pro- | jettent à peu près sur le même plan que les fibres, et le dessin les i 1. Parasiten^ 2° éd., 3® fasc., p. 72. j L’OEUF ET L’EMBRYON 51 a üdèlement représentées, mais il ne faut pas oublier qu’elles sont situées en dehors de l’embryon. Bien qu’on ne puisse dissocier les embryons pour mettre en évidence d’une manière indubitable ces fibres musculaires, leur présence, admise d’ailleurs par Loos, ne nous paraît guère contestable en raison même des mouvements que peut effectuer l’embryon. Il peut en effet se raccourcir beau- coup ou même se courber en arc, rapprochant son extrémité céphalique de son extrémité postérieure, ce qui est dû évidem- ment à Faction des fibres longitudinales. De plus, on voit fré- quemment l’embryon vivant présenter des étranglements plus ou moins profonds, tels que celui figuré planche VIII, figure 28, et qui ne peuvent s’expliquer que par la présence de fibres annu- laires puissantes. L’action de ces fibres doit être aussi examinée par rapport à leur rôle dans le maintien de la forme du corps. Nous avons déjà signalé ce fait que tant que l’embryon est contenu dans l’œuf il est ovalaire, et son tégument est légèrement plissé comme si l’animal était contenu dans un espace trop étroit pour lui. Après l’éclosion, le corps devient cylindrique probablement à cause de Faction des fibres annulaires qui se contractent avec la même force sur toute sa longueur. Lorsque l’embryon vient à mourir soit naturellement, soit par Faction des réactifs, il peut se présenter plusieurs cas dans chacun desquels la musculature se comporte d’une manière un peu différente : ou bien l’animal fixé en pleine contraction garde à peu près intacte la forme qu’iJ avait pendant la vie, ou bien il meurt après des contractions violentes de certains de ses muscles annulaires, et présente des étrangle- ments ou des déformations très marquées, enfin le tonus muscu- laire disparaît d’abord, les muscles se relâchent et le corps prend la forme ovoïde qu’il avait dans l’œuf, mais l’ovoïde qu’il repré- sente est plus large, comme gonflé, parce que la compression à laquelle était soumis l’embryon dans sa coquille n’existe plus. Nous avons insisté sur tous ces détails parce qu’il est important de bien les connaître pour pouvoir déterminer la nature des chan- gements qui se passent dans le corps de l’embryon soit pendant sa courte vie dans l’eau après l’éclosion, soit au moment de la mort. 52 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBTA et pour pouvoir discuter avec fruit la question si souvent soulevée par divers auteurs de l’expulsion par l’embryon de larves nouvelles qui auraient pris naissance dans son corps, comme le font les rédies dans les embryons d’autres trématodes. Les téguments portent des cils qui s’étendent sur toute leur sur- face, sauf au niveau de l’extrémité céphalique en forme de papille sur laquelle ils manquent, ces cils sont touffus et serrés. Chez l’em- bryon enfermé dans sa coquille et examiné dans l’urine, ils sont couchés sur les parois, d’avant en arrière et sont difficilement visi- bles ; chez l’embryon vivant ils sont implantés perpendiculaire- ment à la surface. Dans un embryon fixé par l’acide osmique (fig. 3, pl. I) et dont les cils étaient couchés, nous avons vu au niveau de chacune des ouvertures du système aquifère dont nous parlerons plus loin, un petit pinceau de cils restés droits, et très longs ; dans les autres embryons au contraire, où tous les cils étaient droits, nous n’avons jamais pu distinguer nettement un pareil pin- ceau autour des ouvertures aquifères. 11 est probable que ces cils restent toujours relevés, pour protéger les ouvertures en question, peut-être même sont-ils immobiles. A côté des cils nous devons décrire ces organes énigmatiques décrits par Loos sous le nom de pointes ou de bâtonnets {Zàpfchen), Lorsqu’on examine un embryon dans l’œuf, ils se présentent sous la forme de deux couronnes siégeant. Tune, au niveau du point où le cône céphalique se continue avec la partie cylindrique du corps; l’autre, plus bas, un peu au-dessous de l’équateur de l’œuf. Cette dernière couronne est représentée sur l’individu de la figure 1, planche I. Elle se compose, comme on le voit, d’une série de petits corps qui, examinés de face, paraissent ovalaires, et au niveau des- quels s’arrête la striation due aux muscles. Ces petits corps sont- ils des prolongements de téguments en forme de pointes très fines, comme les représente Loos? nous ne pouvons le dire, car nous n’avons jamais rien vu de pareil à ce dessin sur les embryons vivants; mais dans les embryons fixés et colorés, on trouve certains points spéciaux des téguments qui pourraient bien répondre aux corps en question. Ce sont de petits épaississements de la couche L’ŒUF ET L’EMBKYON 53 tégumentaire la plus externe, qui ont la forme d’une plaque légèrement saillante au-dessus du tégument et fortement colorée (2, fig. 4, pl. I et fig. 29, pl. VIII). Ces plaques s’observent en un point qui répond justement à la situation de l’une des couronnes dont nous avons parlé plus haut, et sont placées comme cette der- nière un peu au-dessous de l’équateur de l’œuf, en dessus des ouvertures aquifères. Il est vrai que ces plaques colorées n’existent pas exclusivement à ce niveau car l’on en trouve au-dessous de celles qui correspon- dent à la couronne inférieure [z, fig. 4, pl. 1). Mais les plus cons- tantes sont celles qui répondent à cette couronne. On voit aussi dans la figure 4, planche I, un petit point du tégument pourvu d’une modification spéciale au niveau de la place qu’occuperait la couronne supérieure. Si ces plaques colorées ne répondent pas aux pointes décrites par Loos, elles peuvent représenter autre chose, et nous nous sommes demandé si elles ne seraient pas tout sim- plement les noyaux des cellules superficielles. Mais la régularité de leur distribution, qui s’accorde bien avec la régularité de la po- sition des couronnes, et la saillie qu’elles forment au-dessus des téguments s’accordent mal avec cette manière de voir, et nous penchons plutôt à les considérer comme répondant aux pointes disposées en couronne. Si l’on en trouve au pôle inférieur de l’em- bryon (fig. 29), en une place où ces pointes n’ont pas encore été signalées, cela tient sans doute à ce que ces dernières ont échappé à l’attention des observateurs, et cette omission est particulière- ment facile à commettre dans cet endroit du corps. Après avoir ainsi décrit les téguments, nous passerons à l’étude des organes internes de l’embryon qui sont : le tube stomacal, les glandes voisines de ce dernier, le système nerveux, le système aquifère ou excréteur, et enfin les cellules germinales Tube stomacal. Le tube stomacal est un organe impair d’une forme à peu près pyramidale avec son sommet dirigé en haut vers l’extrémité cépha- lique et sa base tournée vers l’extrémité postérieure. Il consiste en 54 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA une sorte de sac qui s’ouvre en haut par un orifice arrondi (fig. o, pi. I), constamment rempli par une masse granuleuse qui s’élève un peu au-dessus de lui en lui formant comme un bouchon saillant. Examiné de face (fig. 3 et 4, pl. I), le tube stomacal est trian- f gulaire, et dans les animaux où le tonus musculaire a disparu il ; peut même présenter deux lobes latéraux, comme on le voit dans la figure 3. De profil il est également triangulaire, mais son bord ventral est beaucoup plus allongé que son bord dorsal (fig. 2, pl. I); en un mot le tube stomacal descend sur la face ventrale plus bas que du côté dorsal et se place ainsi au-dessous du système * nerveux, entre ce dernier et les téguments de la face ventrale. Exa- | miné sur le vivant, il paraît rempli par une matière finement gra- j nuleuse sombre; sur les pièces fixées et colorées on voit qu’il est | constitué par une paroi mince doublée en dedans de noyaux qui | vus de profil sont aplatis (/i, fig. 3), et qui, vus de face, se présen- j tent au contraire avec un aspect arrondi et munis d’un nucléole, j Toute sa masse est formée par une substance granuleuse au sein | de laquelle on distingue çà et là des fragments d’un réseau très j fm, et qui rappelle d’une manière parfaite le protoplasma de cer- j taines cellules glandulaires des animaux supérieurs, par exemple ! des cellules claires des glandes salivaires, A cause de cela, nous ! inclinons à penser que le système digestif de ces embryons est I formé par une masse pleine de nature cellulaire, comme c’est le cas ' pour certains turbellariés dont le tube digestif est imperforé et cons- i titué par un ensemble compact de cellules plus ou moins fusionnées. : La cavité du tube stomacal, remplie par le protoplasma des i cellules dont les noyaux sont rejetés contre sa paroi, est toujours i simple, et les apparences de subdivision, lorsqu’elles existent, | indiquent plutôt des lobes superficiels que des divisions véritables, i Ainsi la ligne oblique de la figure 3, qui semble séparer le lobe I droit du tube stomacal d’avec le reste de ce dernier nous paraît ; due simplement à un pli de la paroi vu de face. i On a beaucoup discuté pour savoir si la substance granuleuse | contenue dans le tube stomacal pouvait entrer et sortir par l’ou- | verture supérieure de ce dernier; nous n’avons jamais pu nous ! L’ŒUF ET L’EMBRYON 5o convaincre de l’issue réelle de cette substance. Nous l’avons bien vue faire hernie à travers l’orifice à la manière d’un bouchon sail- lant arrondi, mais cette portion saillante ne se détachait jamais de la masse interne et ne tardait pas à rentrer avec cette dernière dans l’intérieur du tube stomacal. Il n’y a jamais, à proprement parler, expulsion du contenu de ce dernier, ce qui est encore en faveur de l’opinion que nous soutenons, à savoir que le contenu du tube stomacal est formé par un protoplasma très semblable à celui des glandes salivaires. Glandes. Sur les embryons vus de face le tube stomacal se montre flanqué de chaque côté par deux éléments piriformes dans lesquels on peut distinguer une partie sphérique saillante, bien marquée, et un pédicule allongé beaucoup moins distinct. La partie sphé- roïdale de ces éléments est, sur le vivant, douée d’une grande ré- fringence ; aussi a-t-elle été vue par tous les auteurs, dont quelques- uns l’ont prise pour un appendice latéral du tube digestif qui se montrait alors trilobé (J. Chatin), le iobe médian répondant au tube stomacal tel que nous bavons décrit plus haut, et les lobes laté- raux à chacune de ces vésicules claires. En réalité, ces éléments sont, comme l’a montré Loos \ d’énormes glandes unicellulaires dont le corps volumineux et arrondi, muni d’un noyau (n. <7, fig. 3, pl. I), se continue en haut par un prolongement effilé qui repré- sente le canal excréteur de la glande et qui vient s’ouvrir, comme l’a figuré très exactement Loos % non pas dans le tube stomacal lui-même, mais en dehors, sur les téguments, de chaque côté de l’extrémité céphalique. Sur les embryons vus de profil ces glandes se voient moins bien, et l’on distingue seulement leur portion renflée. Après fixation et coloration, elles ne possèdent plus la grande réfringence qui les faisait si aisément distinguer chez le vivant, et elles se montrent formées par une substance très fine- ment granuleuse qui se colore légèrement en rose par le carmin. 1. Leuckart. (Notes fournies par le docteur Loos, p. 525*.) 2. Ibid., fig. 230 a et 230 b. 56 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA Système nerveux. Avec Loos’, nous considérons comme étant le système nerveux un organe sphérique placé sur la ligne médiane du corps au- dessous du tube stomacal, et sur le côté dorsal de ce dernier. Pour Loos, cet organe est constitué par un amas sphérique de petites cellules arrondies. Sur nos embryons fixés par l’acide osmique, nous lui avons trouvé une structure plus compliquée et qui se rapproche davantage de celle des organes nerveux tels qu’ils sont constitués chez les animaux inférieurs. En effet, on peut lui décrire une sorte d’écorce cellulaire formée par une ou deux rangées de petites cellules dont les noyaux se colorent fortement par le carmin, et une masse centrale finement granuleuse, et qui répond par tous ses caractères à la substance ponctuée des centres nerveux des invertébrés (fig. 2 , 3 , 4 , pl . 1) . A près l’action des vapeurs osmiques, cette substance ponctuée se colore légèrement en bistre. Le système nerveux de notre embryon est donc représenté par une petite masse ganglionnaire qui a la structure des ganglions ordi- naires et se compose, comme eux, d’une écorce cellulaire et d’un noyau central de substance ponctuée. Ce ganglion n’est pas rigoureu- sement sphérique ; lorsqu’on l’examine de profil, on lui distingue un petit prolongement ventral en forme de corne très courte. Peut- être ce prolongement est-il destiné à former l’une des cornes du croissant que représente le ganglion sus-œsophagien de l’adulte? Nous n’avons jamais vu partir de ce ganglion aucun filet nerveux pouvant représenter le système nerveux périphérique. Comme nous l’avons déjà dit, il est placé sur le côté dorsal du tube stoma- cal ; il est en contact en haut avec la partie renflée des glandes. Système excréteur. Le système excréteur, déjà indiqué par Cobbold, a été bien décrit par Loos % qui n’a pourtant pas pu le voir s’ouvrir à l’extérieur, très probablement parce qu’il n’a pas étudié d’embryons fixés. 1. Leuckart. Parasilen. (Notes fournies par !e D*' Loos, p. 525*.^ 2. Ibid., p. 525 *-526*. I/CEUF ET L’EMBRYON 57 Il consiste en une paire de canaux très fins entortillés sur eux- mêmes et qui s’ouvrent, d’une part, dans la cavité générale de l’embryon, d’autre part, à l’extérieur. Leurs ouvertures internes sont tournées du côté dorsal [p. fig. 2, pi. I), la portion du tube qui les porte repose sur la partie ventrale du tube stomacal et sur la partie inférieure des glandes. Cette partie du tube aquifère est renflée et se termine en entonnoir. On trouve également un enton- noir à la partie inférieure de chaque tube aquifère, soit quatre en tout. Lorsqu’on examine dans de l’urine un embryon vivant, le seul signe qui, en dehors de la transparence de ses tissus, permette de reconnaître sa vitalité, est un faible mouvement de petites flammes ondulantes placées dans ces entonnoirs. Ces flammes produisent l’apparence d’une onde se propageant sur les parois de l’entonnoir avec une grande lenteur. Ce mouvement, observé pour la première fois par Cahier, mais mal interprété par lui, a reçu son explica- tion véritable de Raillet. Le mouvement d’onde produit au niveau des pavillons en entonnoir du système excréteur devient bientôt très rapide si l’on fait arriver de l eau pure sur l’embryon; ensuite les cils vibratiles du corps se mettent eux-mêmes en mouvement, et l’éclosion ne tarde pas à avoir lieu. S’il est très facile d’observer les entonnoirs placés à la partie inférieure des tubes aquifères, en revanche, il est impossible de voir les orifices par lesquels ces entonnoirs communiquent avec l’extérieur, tant qu’on se contente d’observer des animaux vivants dans l’urine. Au contraire, sur les animaux fixés par l’acide osmique, on voit aisément deux petites ouvertures circulaires dont les bords sont plus ou moins écartés. Elles sont continues avec les pavillons inférieurs des tubes excré- teurs [o. exc^ fig. 3, pl. I). Ces ouvertures sont au nombre de deux, elles sont placées sur la face ventrale au niveau du tiers pos- térieur du corps de l’animal, et sont entourées de cils particuliers. La portion tubulaire du système excréteur consiste en un long canal très fin, entortillé sur lui-même. Il est difficile de dire si ce canal émet des branches latérales ou bien s’il reste unique sur toute sa longueur. Sur les animaux fixés par l’acide osmique, les o8 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA tubes excréteurs se voient assez difficilement, tandis que leurs extrémités ou pavillons se distinguent très bien. Dans la figure 2, on voit sur un embryon de profil, une assez grande longueur du tube excréteur. Ce dernier est formé d’une membrane mince et sans structure qui se colore bien par le carmin, mais qui ne pré- sente sur son trajet aucun noyau. Cellules germinales. A côté des organes que nous venons de décrire, l’embryon ren- ferme encore, dans sa moitié postérieure, un grand nombre de cellules qui forment une partie importante de sa masse. Ce sont ' des éléments volumineux, arrondis, pourvus d’un noyau fortement | coloré par le carmin et d’un protoplasma très réfringent. Ils ; répondent, sans aucun doute, aux cellules germinales des larves j de trématodes, à ces éléments mis en réserve dans le corps des \ embryons pour former les larves connues sous le nom de rédies. | Leur forme habituelle est arrondie chez le vivant, mais dans les individus fixés par les réactifs, ils prennent souvent un aspect anguleux par pression réciproque. Les cellules germinales se pré- j sentent sous des aspects assez différents : tantôt elles forment un | seul amas qui occupe toute la partie postérieure du corps (fîg. 3 ! et 4, pl. I), tantôt elles sont groupées en plusieurs petits amas plus 1 ou moins distincts les un^ des autres (fig. 2). Chacun de ces der- niers ressemble assez à une petite rédie comparable à celles que l’on | trouve dans le corps des embryons de certains trématodes et que | Leuckart a représentées ‘ , mais c’est là un cas rare et nous ne croyons | pas qu’on puisse se fonder là-dessus pour admettre que les em- | bryons de Bilharzia engendrent des rédies. En réalité la distribution | des cellules germinales en groupes distincts est due simplement à un j déplacement des cellules produit sous l’influence des mouvements j du corps. On voit, en effet, dans les figures que nous donnons ici, | que les cellules germinales ne forment pas une masse compacte j limitée par une membrane d’enveloppe, mais que placées les unes 1. Leuckart. Parasiten, 2^ éd., 3e fasc., fig. 38. L’ŒUF ET L’EMBRYON 59 à côté des autres et séparées par de tout petits intervalles, elles ne doivent être que très lâchement unies entre elles, et peuvent se prêter facilement à des déplacements plus ou moins étendus. Entre les téguments de l’embryon et les organes internes se trouve une cavité plus ou moins étendue (fig. 2 et 5, pl. I). Cette cavité est surtout développée dans la moitié antérieure du corps ; elle a la forme d’une fente traversée cà et là par des petits ponts de substance qui se portent des organes internes sur le tégument, et qui ont déjà été bien représentés par Loos. En arrière, les cellules germinales sont intimement accolées aux téguments et la cavité générale manque toujours. Ainsi, dans l’embryon figure 2, où cette cavité se prolonge très loin en arrière, le groupe le plus postérieur des cellules germinales est situé en dehors d’elle, c’est-à-dire est accolé aux téguments. Cette cavité répond sans doute à la cavité de segmentation de la larve, formée pendant les premiers stades du développement. Évolution de l’embryon ; sa destinée. Comme nous l’avons déjà indiqué plus haut, nos connaissances sur le développement de Bilharzia sont très incomplètes, car on ne connaît guère de ce développement que le stade que nous venons de décrire. On n’a pas suivi les premières phases du développe- ment qui se passent dans les voies génitales de la mère, et, fait très remarquable, tous les embryons rejetés au dehors par l’iiôte qui héberge les vers, sont toujours arrivés au même stade de déve- loppement; nous ne connaissons donc bien qu’un des états sous lesquels peut exister le Bilharzia avant l’âge adulte, c’est l’état de larve infusoriforme sous lequel il vit dans l’eau aussitôt après son éclosion. Comme il est impossible d’admettre que les œufs rejetés avec les urines aient tous le même âge, et aient séjourné pendant un même laps de temps dans les tissus de la vessie de leur hôte, on est conduit à penser que les embryons se développent jusqu’à l’état ci-dessus décrit en parcourant le vagin de la femelle, puis qu’ar- rivés dans les tissus de l’hôte ils restent au même état de déve- loppement pendant tout le temps qu’ils habitent ces tissus. C’est là 60 ÉTUDE SUD LE BILHARZIA HÆMATOBIA une période de vie latente plus ou moins comparable à celle d’un cysticerque de tœnia solium enkysté dans les muscles du porc. Cette période de vie latente peut avoir, bien entendu, une durée variable, mais elle paraît limitée cependant à un certain laps de temps au bout duquel le corps de l’embryon est envahi par les sels calcaires et transformé en un petit bloc de carbonate de chaux qui peut devenir le centre de la formation de véritables calculs, ainsi qu’on l’a déjà dit. C’est là un des modes de destruction des embryons : nous n’en parlons ici que pour signaler cette mort pos- sible des embryons au sein des tissus. Arrivés dans l’urine, les œufs ne se développent pas encore, et le seul signe de vie qu’ils présentent consiste dans les mouvements lents des flammes vibratiles des pavillons de leurs organes excré- teurs, et dont il a été parlé plus haut. Ils n’éclosent jamais dans l’urine, comme on l’a déjà dit bien des fois, mais comme plusieurs auteurs ont prétendu avoir trouvé des embryons libres nageant dans l’urine, nous avons porté spécialement notre attention sur ce point et nous avons fait des recherches très suivies pour voir s’il était possible de faire éclore, même artiflciellement, des œufs dans le liquide urinaire. Plusieurs fois nous avons fait éclore des œufs dans une goutte d’urine en provoquant la rupture de la coquille par de petits coups frappés sur la lamelle recouvrant la préparation à l’aide du manche d’une aiguille à dissocier, mais toujours l’em- hryon est mort peu d’instants après son éclosion; bien entendu, nous ne parlons que des embryons intacts et qui ne paraissaient pas avoir soufl’ert le moins du monde de la rupture artificielle de leur coquille. Voici, d’ailleurs, quelques détails sur nos expé- riences : des œufs reconnus porteurs d’embryons bien développés et dont les pavillons aquifères montraient les mouvements de leurs flammes vibratiles étaient rompus par le procédé décrit ci-dessus. Un certain nombre des embryons, qui n’avaient nullement souf- fert de cette éclosion anormale, se remarquaient dans l’urine, au voisinage de leurs coquilles brisées. Leur corps présentait sa forme normale sans écrasement ni déchirure, et leurs cils étaient animés de mouvements très lents, insuffisants pour déplacer le L’OEUF ET L’EMBRYON G1 corps, puis ces mouvements cessaient peu à peu, l’embryon per- dait son tonus musculaire et se gonflait comme cela arrive au moment de la mort. Jamais nous n’avons pu observer d’embryons éclos vivants, meme dans des urines très limpides, dans lesquelles l’embryon revêtu de sa coquille se conservait pendant plusieurs heures intact et prêt à éclore. Pour nous assurer définitivement de l’impossibilité, pour les embryons, de vivre dans l’urine, nous avons fait l’expérience sui- vante : Des œufs mis dans une goutte d’eau sur une lame de verre éclosent bien vite, on peut les observer aisément avec un objectif faible, n° 2 de Verick, sans recouvrir la préparation d’une lamelle. Lorsque les embryons sont sortis de la coquille et nagent avec une grande rapidité, si l’on vient à ajouter à l’eau dans laquelle ils se trouvent quelques gouttes de l’urine fraîche de laquelle les œufs ont été extraits, les embryons sont tués brusquement comme ils pourraient l’être par un réactif fixateur. Comme dans ces expé- riences on ne peut incriminer pour expliquer la mort des embryons, ni l’éclosion artificielle ni les traumatismes possibles dus aux mou- vements de la lamelle dans les cas signalés ci-dessus, il faut bien admettre que l’urine même diluée tue infailliblement les embryons. Il est donc probable que les auteurs qui ont dit avoir vu des embryons vivants nager dans l’urine se sont trompés, ou bien que les animaux qu’ils ont observés n’étaient pas des embryons de Bilharzia; peut-être étaient-ce des infusoires ciliés? Dès que l’on fait arriver de l’eau au voisinage des œufs, on voit l’embryon présenter quelques mouvements de contraction, puis s’agiter dans sa coquille, à l’intérieur de laquelle il peut même se retourner complètement. Enfin au bout de quelques minutes l’éclosion se produit par rupture de la coquille, rupture qui se pro- duit suivant une fente étroite sans siège fixe. L’embryon essaie de passer au dehors et engage son extrémité céphalique dans la fente ; il peut, si cette dernière est petite, rester retenu encore quelque temps par la partie postérieure de son corps, qui, plus volumi- neuse, ne parvient pas à se dégager, mais il ne tarde pas à sortir entièrement de son enveloppe et se met à nager dans l’eau en pre- 62 ÉTUDE SUR LE BILHARZEA HÆMATOBIA I nant la forme cylindro-conique que nous avons décrite. Il arrive parfois que c’est l’extrémité caudale qui s’engage la première dans J a fente de la coquille. On assiste alors à une scène curieuse : les cils, battant toujours dans le même sens, ne peuvent faire progresser l’embryon que d’avant en arrière, et l’animal, incapable de mou- vements de recul, reste pris dans l’orifice de sortie. Il fait alors de grands efforts pour abandonner sa coquille mais ne peut y parvenir qu’en rentrant de nouveau entièrement dans cette dernière et en engageant ensuite son extrémité céphalique dans le trou de la coquille. Observons un embryon ainsi éclos et voyons ce qu’il devient. A peine sorti de sa coquille , l’embryon , avons-nous dit , se met à nager, et il continue ce mouvement pendant plusieurs heures de suite. Nous avons fait éclore dans de petits cristallisoirs de verre de 5 centimètres de diamètre environ pour 2 cent. 5 de hauteur, un certain nombre d’œufs. En portant ces cristallisoirs sur la platine d’un microscope il était facile de suivre avec un objectif faible (n° 0 de Yerick) les mouvements des larves et de voir ce que ces dernières devenaient. Des œufs éclos le matin donnaient des embryons que l’on pouvait observer vivants pendant tout le reste du jour; mais lorsqu’on les recherchait le lendemain, la plus grande partie d’entre eux avaient disparu, et l’on ne trouvait plus au fond des cristallisoirs que quelques cadavres d’embryons encore très reconnaissables (examen avec un obj. n*" 6 de Yerick). Il est probable que les embryons disparus, morts de très bonne heure, s’étaient gonflés puis fragmentés en morceaux méconnaissables, tandis que les cadavres provenaient d’embryons morts depuis peu et dont le corps ne s’était pas encore dissocié. Ces expériences, répétées nombre de fois depuis deux ans, nous ont toujours donné les memes résultats, les embryons n’ont pas vécu au delà de quelques heures et ne se sont jamais transformés en larves douées d’une autre aspect. Nous reviendrons plus loin sur l’évolution des embryons; pour le moment, nous voulons ajouter encore quelques mots sur l’aspect des embryons morts ; cela ne sera pas inutile pour discuter la question de savoir si les embryons peuvent vrai- I I I i I j L’ŒUF ET L’EMBRYON G3 ment, sous la forme où on les connaît jusqu’ici, engendrer des rédies. Nous avons déjà fait remarquer qu’un des effets les plus cons- tants de la mort, c’est le changement de forme de l’embryon qui de cyiindro-conique qu’il était devient ovalaire. En meme temps la structure interne s’efface plus ou moins et les organes perdent leur aspect caractéristique. Si l’on fixe une larve morte afin de con- server inaltéré l’aspect qu’elle possède et d’arrêter la dissociation et la fragmentation du corps , on voit (fig. 28, pl. YIII) le corps rempli par un grand nombre de noyaux parmi lesquels on reconnaît encore ceux des cellules germinales à leur grosseur, mais ces noyaux, au lieu d’être groupés par organes comme pendant la vie, sont plus ou moins séparés et mélangés les uns aux autres. 11 semble que les cellules se sont dissociées et se sont répandues sans ordre au sein de l’embryon. En même temps que ces phéno- mènes se produisent, on assiste souvent, si l’on suit la mort de l’animal, à l’expulsion de boules sarcodiques qui se dissolvent dans le liquide ambiant. Nous avons assisté souvent, pour notre part, à la production de ces boules sarcodiques et nous ne pouvons pas comprendre que l’on ait pu les confondre avec des rédies qui auraient été expulsées au dehors, car elles sont toujours parfai- tement transparentes et incolores, et elles ne renferment jamais de noyaux. Le revêtement cilié des embryons peut aussi être entraîné en même temps que les boules sarcodiques et la même figure 28, planche YIII, montre justement une membrane ciliée, chiffonnée autour du corps et presque entièrement séparée de l’embryon. C’est sans doute un fait de cette nature qui a fait dire par certains auteurs que de l’embryon sortaient des boules sarcodiques ciliées. L’observation repétée d’embryons morts dans lesquels le corps est rempli par une masse considérable de noyaux, s’oppose aussi à l’opi- nion d’après laquelle les embryons pourraient émettre des rédies. En effet, bien qu’après la mort les organes perdent leur aspect carac- téristique il n’en n'est pas moins vrai que le nombre des noyaux ne paraît pas avoir été sensiblement diminué de ce qu’il était pen- dant la vie, ce qui ne manquerait pas d'arriver si un certain 64 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBTA nombre de cellules avaient abandonné le corps, sous la forme de rédies. Pour toutes ces raisons nous devons conclure que l’embryon infusoriforme ne vit que peu de temps dans l’eau et ne produit pas de rédies, au moins pendant ce court espace de temps ; il est donc probable qu’il doit passer dans le corps d’un nouvel hôte, jusqu’ici parfaitement inconnu du reste, ou bien qu’absorbé avec l’eau il peut se développer directement, mais ce sont là des hypothèses pures car le cycle de vie de l’animal échappe encore à nos connaissances. F CHAPITRE IV EXPÉRIENCES DE CULTURE ET DTNOCULATÎON Plusieurs observateurs ont depuis longtemps tenté de suivre les transformations du Bilharzia, et, pensant que le cycle biologique de ce dernier était semblable à celui des distomes, ont essayé de fournir à son embryon des hôtes dans lesquels il pourrait accomplir ses métamorphoses. Dans ce but, ils ont ensemencé d’œufs de Bilharzia des aquariums renfermant différentes espèces d’animaux aquatiques. Toutes les expériences ont été vaines. On a fourni à l’embryon les hôtes les plus divers, pris parmi des mollusques ou même parmi des arthropodes ; jamais on n’a pu voir l’embryon pénétrer dans ces hôtes et s’y transformer, de sorte que jusqu’ici, il y a une lacune complète dans l’histoire de cet intéressant parasite. Sa première phase larvaire (embryon infusoriforme) nous est connue, aussi bien que sa forme adulte et sexuée, mais le ou les intermédiaires qui existent entre les deux termes extrêmes échap- pent absolument à la science \ Nos expériences, comme toutes celles qui ont été faites jusqu’ici, ont eu des résultats négatifs; nous les reproduirons cependant, parce qu’elles nous paraissent avoir un intérêt dans la question, tant à cause de leur continuité, qu’à cause des divers procédés qui ont été employés pour obtenir une inoculation soit directe, par l’œuf ou l’embryon avalés tels que par les sujets, soit indirecte, en faisant manger à nos individus en expérience des animaux aquatiques qui, mis en contact avec les embryons ciliés, auraient pu servir d’hôtes à ces derniers, à leurs rédies ou à leurs cercaires. 1. Pour plus de détails sur ce point, voyez Leuckart, Parasiten, 2^ édition, pp. 515-518. Université de Lyon. — ix. a. 5 I 66 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA Expériences de culture des embryons dans Teau. Nous avons déjà vu plus haut (page 59) comment se comportent dans Feau les embryons éclos ; mais il est clair que le procédé de culture employé dans les expériences susindiquées, très bon pour ! permettre de suivre les embryons immédiatement après qu’ils ont i quitté leur coquille, est absolument insuffisant à toui autre point j de vue, car les embryons confinés dans une petite masse d'eau | pure, ne renfermant ni plantes ni animaux, ne se trouvent pas dans j des conditions normales, et peuvent fort bien ne pas se développer. ’ Aussi, pour fournir à nos larves des conditions de vie semblables à j celles qui favorisent le développement des distomes en général, ; nous nous sommes préoccupés de rassembler dans des cristalli- j soirs des plantes aquatiques sur lesquelles elles auraient pu j s'enkyster comme le font les cercaires des douves, et des animaux { dans lesquels elles auraient, au besoin, trouvé un hôte capable de ! les héberger elles ou leurs descendants. Pour cela nous avons ^installé sur des éviers bien éclairés un certain nombre de cristallisoirs larges de 20 à 30 centi- mètres, profonds de 10, et dans lesquels on a placé différentes plantes aquatiques: Lemna minuta^ Lemna gihba, Utricidaria I vulgaris^ Jussiœa, Mynophylhün, différentes espèces appartenant 1 au genre Potamogeton, ainsi que des touffes du Cresson commun, j De petites trompes d’Alvergnat faisaient passer de nombreuses j bulles d’air à travers la couche aqueuse et empêchaient ainsi j toute putréfaction de se manifester. Tous les jours des centaines j d’œufs de tilharzia, en parfait état, étaient jetés dans Feau des | cristallisoirs. Mais malgré toutes les précautions prises, les em- | bryons du distome ne vivaient dans cette eau parfaitement pure | que pendant 24 ou 48 heures au plus. Nous ne retrouvions ensuite | que les cadavres des embryons plus ou moins altérés. Mais dans ' aucun cas, nous n’avons pu constater une tendance à une transfor- i mation quelconque. Jamais nous ne les avons trouvés fixés aux j feuilles des plantes aquatiques ou à l’intérieur de leurs tissus. Ces expériences ont été faites au printemps de l’année 1893, I EXPÉRIENCES DE CULTURE ET D’INOCULATION 67 lorsque nous avions à notre disposition des œufs en quantité con- sidérable. Le laboratoire était, à ce moment-là, fortement chauffé, de telle sorte que jamais la température de l’eau des cristallisoirs n’est descendue à un minimum de 12". A la suite des insuccès qui furent le seul résultat de cette longue série d’expériences, nous avons pensé que peut-être, dans les cris- tallisoirs la masse des eaux était trop peu considérable pour per- mettre aux embryons de subir leurs métamorphoses*, et pour remédier à cet inconvénient nous avons installé un grand aqua- rium de la contenance de 70 à 80 litres, et dans lequel ont vécu bientôt une foule d’algues, de petits crustacés et d’animaux infé- rieurs constituant une faune peu différente, au moins au point de vue des genres, de celle qui anime l’eau des birkets dans lesquels se développe probablement le Bilharzia. Ce qui prouve d’ail- leurs que les conditions de vie, dans cet aquarium, n’étaient pas très différentes de celles que l’on observe dans ces sortes de mares, c’est que nous avons pu y faire vivre pendant quelques temps des coquilles fluviatiles rapportées d’Egypte. Nous avons ensemencé cet aquarium pendant deux années, en y jetant, chaque jour, un grand nombre d’œufs; puis nous avons recherché les embryons, soit en puisant de l’eau en différents points de son étendue, soit en y faisant des pêches au filet fin. A l’aide d’une petite pochette en soie promenée dans faquarium, nous ramenions une grande quan- tité de ses hôtes, algues, crustacés, infusoires, mais nous n’avons jamais retrouvé d’embryons de Bilharzia, ni d’autres formes ani- males qui puissent être regardés comme dérivés de ces embryons. Comme par ce procédé de recherche les embryons pouvaient nous échapper, bien qu’en réalité, s’ils s’étaient développés, ils dussent 1. On sait, en effet, que l’étendue de leur habitat a sur la croissance des animaux aquatiques une influence considérable, et que les animaux confinés dans de petites masses d’eau restent nains. (Voyez de Varigny, Recherches sur le nanisme expéri- mental, Journ. de VAnat., 1894). Les données de Seinper, rapportées par de Varigny dans le travail indiqué, montrent que l’auteur allemand attachait une valeur peut- être encore plus considérable à ce facteur ; l’étendue de l’habitat, aussi n’y aurait-il rien d’étonnant à ce que les embryons de Bilharzia, incapables d’évoluer dans un milieu confiné, devinssent capables de le faire lorsqu’ils sont placés dans une grande masse d’eau. 68 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA être en nombre considérable, nous avons pensé à faire profiter les embryons des avantages de ce milieu, tout en les renfermant dans un endroit limité où il nous serait facile de les retrouver. Pour cela, nous avons construit des sortes de pièges dans lesquels les embryons étaient retenus, et qui, placés dans raquarium, permet- taient au liquide contenu dans ce dernier de circuler dans leur in- térieur. Ces pièges consistaient en de petites pochettes de soie dans lesquelles on plaçait un grand nombre d’œufs, et qui, fermées par un lien circulaire, étaient plongées dans Faquarium. Les œufs y éclosaient très bien, comme nous avons pu nous en rendre compte, et Feau de Faquarium y pénétrait librement en passant à travers les pores de l’étoffe, d’ailleurs assez grands; en effet, examinée au microscope, la soie se présentait comme un lacis régulier de fils croisés à angle droit, et laissant entre eux des espaces quadrangu- laires mesurant environ de 2 à 5 centièmes de millimètre. Il est certain que quelques embryons pouvaient, en s’effilant, s’échapper par ces interstices, mais le plus grand nombre d’entre eux restait dans le piège, comme nous avons pu nous en convaincre plusieurs fois. Au bout de vingt-quatre heures, les pochettes étaient retirées de Feau, ouvertes, et en raclant leur intérieur avec un scalpel, on ramassait une infinité d’animaux microscopiques, rotateurs, infu- soires, qui s’y étaient introduits, en même temps que quelques em- bryons provenant des œufs qui y avaient été enfermés. Ces em- bryons, qui s’étaient trouvés au point de vue du milieu dans des conditions bien plus favorables que ceux élevés dans de petits cris- tallisoirs, s’étaient cependant comportés comme ces derniers, c’est- à-dire étaient morts sans s’être développés. Pensant que peut-être une aération insuffisante pouvait être la cause de nos insuccès, dans le même aquarium, nous avons jeté les œufs tout simplement dans de petits filets en soie placés à la surface même du liquide, et par conséquent en contact constant et facile avec l’air atmosphérique. L’éclosion des œufs se faisait par- faitement bien dans ces conditions, mais de même que précédem- ment, nous pouvions constater que les embryons ne tardaient point à périr au lieu de se transformer. EXPÉRIENCES DE CULTURE ET D’INOCULATION 00 On peut donc conclure de nos expériences répétées avec une grande persévérance pendant deux années consécutives, que l’œuf éclôt dans l’eau et que l’embryon vit dans ce liquide pendant plu- sieurs heures, mais que ne pouvant pas se transformer dans un pareil milieu, il ne tarde pas à mourir. Expériences de culture des embryons dans les liquides organiques. Nous avons vu que l’urine empêche l’éclosion des œufs et tue les embryons éclos. 11 importait de rechercher Faction d’autres liquides organiques, aussi avons-nous expérimenté à la fois sur le tait et sur le sang. Lait. — On stérilise du lait afin d’empêcher sa coagulation, et on le distribue dans plusieurs cristallisoirs de petite taille (b centi- mètres de diamètre pour 2 1/2 de hauteur) dans lesquels on introduit un certain nombre de caillots légèrement dilacérés, et renfermant des œufs vérifiés en bon état. Les cristallisoirs sont abandonnés dans l’étuve à 37 degrés pendant 24 heures. Au bout de ce temps on les retire, on verse le lait sur une large feuille de papier à filtrer à la surface de laquelle il est aisé de retrouver les caillots. Ces derniers, examinés au microscope, sont remplis d’œufs complets (formés par l’embryon et la coquille), pas une coquille ne se montre vide, il est évident qu’aucun œuf n’est éclos. Un examen répété a toujours confirmé ce résultat, les œufs n* éclosent pas dans le lait. Mais les œufs qui ont séjourné 24 heures dans le lait à 37 degrés renferment-ils des embryons encore aptes à éclore? Rien n’est plus facile à décider. Si l’on lave à l’eau les caillots extraits du lait, et qu’on les place dans une goutte d’eau pure, on ne tarde pas à voir éclore les embryons, et ces derniers nous ont paru aussi vivaces que ceux provenant de caillots retirés fraîchement de l’urine. Il faut donc conclure de ceci, que les œufs n’éclosent pas dans le lait, mais qu’un séjour de vingt-quatre heures dans ce dernier n’altère pas l’embryon qu’ils renferment. Contrairement à l’urine, le lait ne tue pas les embryons déjà éclos. Si après avoir fait naître 70 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA dans une goutte d’eau plusieurs embryons ciliés, on ajoute du lait, les embryons continuent à se mouvoir dans ce liquide sans paraître incommodés. On peut les observer dans le lait pendant deux ou trois heures, à la condition d’éviter la dessiccation, mais il est impos- sible d’avoir des observations aussi suivies que celles rapportées ci-dessus, page 60; en effet, il est impossible, à cause de l’opacité du lait, de retrouver au bout de vingt-quatre heures les embryons qui avaient été mis dans ce dernier la veille. Quoiqu’il en soit, on voit que les embryons qui n’éclosent pas dans le lait peuvent néanmoins y vivre pendant quelques heures. Sang. — Le sang donne les mêmes résultats que le lait. Nous avons fait à ce sujet de nombreuses expériences en nous servant de sang de veau, de mouton, ou de lapin, préalablement défibriné pour éviter la formation d’un caillot qui aurait arrêté les mouve- ments des embryons et aurait pu tuer ces derniers en les empri- sonnant dans son intérieur. Les œufs placés dans le sang n’éclosent pas, du moins nous ne les avons pas vus éclore en les observant pendant deux ou trois heures consécutives dans une goutte de sang. Il a été impossible de prolonger l’observation vingt-quatre heures, parce que le sang mis à l’étuve subit pendant ce laps de temps des modifications chimiques très considérables à la suite desquelles il s’y forme des flocons d’albumine au milieu desquels il est impossible de retrouver les caillots renfermant les œufs. D’ailleurs les œufs qui ont séjourné dans le sang donnent bien vite des embryons dès qu’on les met dans l’eau pure. Enfin, lorsqu’on place des embryons éclos dans du sang défibriné, ils continuent à se mouvoir comme s’ils étaient dans l’eau, et rien n’est curieux comme de voir leur corps transparent se déplacer avec rapidité en laissant derrière eux un sillage incolore dû à l’écartement des glo- bules rouges. On peut observer ces mouvements pendant un cer- tain temps. Ces résultats pouvaient être prévus, car, si les œufs éclosaient dans le sang les embryons se rencontreraient en grand nombre chez les individus atteints de Bilharziose, tandis qu’on n’en a jamais trouvé. Quoi qu’il en soit^ ces résultats expérimen- taux, quoique négatifs, étaient intéressants à signaler. EXPÉRIENCES DE CULTURE ET D’INOCULATION 71 Tentatives d’inoculation à différents mollusques de nos pays. Dans de grands aquariums, placés dans les conditions dont nous avons parlé plus haut, nous avons jeté au milieu des Lemna et d’autres plantes aquatiques, de très nombreux individus dos diffé- rentes espèces de Limnées qui vivent dans les sources, les ruis- seaux ou les mares des environs de Lyon. C’étaient les espèces suivantes, déterminées avec soin par notre savant ami M. Locard : Limnæa auriculata; — Hartmanni ; — lacustrma ; — succinea; — Pfeifferi; — roxa; — peregra. Tous les jours, trois ou quatre mille œufs, au moins, étaient jetés dans l’eau de ces aquariums, et chaque jour aussi, un certain nombre de mollusques étaient pêchés pour être autopsiés minu- tieusement. Dans l’eau des aquariums, sur les feuilles des plantes aquatiques, ou sur les corps même des Limnées, nous avons trouvé des coques nombreuses et vides d’œufs de Bilharzia, des embryons ciliés morts et déformés, mais jamais dans les organes ou les tissus de ces mollusques autre chose que les cercaires des différentes douves du Mouton ainsi que des kystes renfermant une forme d’un distome inconnu, mais qui ne peut être le Bilharzia^ puisque nous l’avons rencontré un très grand nombre de fois sur des Limnées provenant directement des sources de nos environs et n’ayant point encore été mis en contact avec les œufs ou les embryons de notre parasite. Espérant obtenir plus facilement Tinfection des Limnées en réduisant l’espace et la quantité d’eau, nous avons placé ces mollusques, accompagnés de Lemna^ dans de très petits cristalli- soirs. Tous les matins, de grandes quantités d’œufs en bon état étaient projetés dans ces aquariums en miniature dont l’eau était 12 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA soigneusement maintenue en bon état. Tous les jours, un certain ? nombre de Limnées étaient autopsiées avec soin, leurs organes * examinés au microscope; mais le résultat fut toujours négatif, \ comme dans les expériences précédentes. A des mollusques de la vallée du Nil. Au mois de janvier 1894, nous avons rapporté des environs du Caire un grand nombre de Vivipara tinicolor Oliv., qui pullulent dans les mares et les canaux de la basse et de la moyenne Egypte. Ces animaux, arrivés en parfait état, furent placés dans un aqua- rium où ils se multiplièrent rapidement, preuve que les conditions d’existence au milieu desquelles ils se trouvaient devaient leur être éminemment favorables. Chaque jour, depuis la fin de janvier un grand nombre d’œufs étant jetés dans cet aquarium. Au mois de juillet, les Vivipara furent autopsiées avec un soin minutieux, mais ne présentèrent jamais rien qui pût ressembler à un kyste, à une rédie ou à un cercaire pouvant être regardé comme une forme larvaire du Bilharzia. A des cobayes. Un lot de douze cobayes est distribué dans un certain nombre de cages de notre laboratoire. Tous les jours, depuis le 28 jan- vier 1893 jusqu’au 2 juillet de la même année, on leur introduit dans l’estomac une petite sonde œsophagienne. Par ce tube on fait péné- trer dans la cavité stomacale un grand nombre d’œufs de Bilharzia englobés encore dans des caillots sanguins ou tenus en suspension dans de l’eau. Ces animaux sont tous sacrifiés du 3 au 7 juillet. L’autopsie est faite avec le plus grand soin, mais on ne trouve aucune trace du parasite, sous la forme adulte ou larvaire, ni dans le foie, ni dans la veine porte, ni dans les veines mésentériques. Les vessies de ces animaux, examinées avec beaucoup de soin, ne montrent aucune trace d’œuls dans les couches superficielles ou profondes de la mu- queuse. Les poumons sont aussi parfaitement sains. EXPÉRIENCES DE CULTURE ET D’INOCULATION 73 A des lapins. Le 11 février 1894, on injecte à quatre lapins, par la veine saphène gauche, avec une fine seringue, des milliers d’œufs re- cueillis dans une urine rendue en 24 heures. L’examen microsco- pique avait montré que ces œufs, en parfait état de conservation, renfermaient des embryons encore vivants. La même opération est répétée six fois à quelques jours d’inter- valle, à ces mêmes lapins qui conservent toutes les apparences d’une santé parfaite. Ces animaux sont sacrifiés le 10 janvier, c’est-à-dire cinq mois après la première tentative d’inoculation. Ils sont autop- siés avec un soin minutieux, mais, ni dans les organes internes, ni dans la veine porte, ni dans la vessie, ils ne présentent rien qui puisse faire admettre qu’ils sont atteints de Bilharziose. A un singe du genre macaque. Le 21 février 1893, on fait avaler à un singe adulte et en parfait état de santé appartenant au genre Macacciis^ du riz cuit arrosé avec le dépôt filtré d’une urine contenant un grand nombre d’œufs mûrs de Bilhnrzia. Cette opération est répétée tous les jours jusqu’au 8 mai. A partir de ce moment, on fait avaler tous les matins à l’animal, une vingtaine de limnées de différentes espèces, vivant en très bon état dans plusieurs aquariums qui, chaque jour, sont ensemencés d’œufs mûrs de Bilharzia. Le singe est très friand de ces limnées dont on enlève avec soin la coquille sans endommager le corps même du mollusque. Le 1®' juillet, l’animal est sacrifié. L’autopsie est faite avec le plus grand soin; mais, malgré tous nos efforts, nous ne trouvons nulle part la moindre trace du para- site. A un bovillon. Le 15 février 1893, un bovillon fort et vigoureux, âgé de onze mois, soigné dans l’écurie faisant partie du laboratoire de patho- logie comparée, placé sous la direction du professeur Arloing, avale 74 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA avec du son mouillé vingt à trente limnées appartenant à différentes espèces et provenant des aquariums dont nous avons parlé plus haut. L’eau de ces bassins reçoit tous les jours plusieurs milliers d’œufs de Bilharzia^ rendus par le malade dont nous avons rap- porté l’observation. Tous les matins, le bovillon subit facilement les mêmes tentatives d’inoculation sans que sa santé paraisse pré- senter la moindre altération. De temps en temps aussi on lui fait avaler directement dans son barbotage un grand nombre d’œufs. Le 10 juillet, c’est-à-dire cinq mois après la première tentative d’inoculation, l’animal est sacrifié. Tous ses organes sont examinés avec le plus grand soin, macroscopiquement et avec l’aide de nom- breuses coupes microscopiques. Nulle part on ne trouva la moindre trace du parasite. Le foie renfermait simplement trois exemplaires de Distomum lanceolatiim. Comme on peut le voir par la lecture de ces expériences variées et multipliées à l’infini, toutes nos tentatives d’inoculation ou d’infection ont échoué. On peut donc tirer de ces insuccès la con- clusion logique que le Bilharzia^ lorsqu’il est à l’état d’animal in- fuser iforme, avant de pénétrer dans le corps humain, doit très probablement s’enkyster rapidement, au bout de quelques heures d’une vie indépendante, dans un animal aquatique encore inconnu, que nous n’avons pas eu à notre disposition en France et qui, en Egypte, a échappé à nos recherches si nombreuses et si minu- tieuses. Ce point important du problème reste donc encore à ré- soudre. Des tentatives plus heureuses, faites en Egypte ou en Tunisie, permettront certainement de trouver un jour la forme, probablement kystique, sous laquelle le distome peut être avalé facilement par l’homme qui s’abreuve avec une eau souillée ou mal filtrée. CHAPITRE IV LE NIL, LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE Le régime des eaux du Nil et celui des eaux potables ont, comme nous le verrons plus loin, une influence considérable sur le déve- loppement du Bilharzia et sur la diffusion de l’infection endémique qui sévit si cruellement chez les habitants des campagnes, surtout dans la moyenne et la basse Égypte. Le grand Nil, comme tout le monde le sait aujourd’hui, se forme à Kartoum, à 3,085 kilomètres d’Alexandrie, par la réunion de deux branches importantes, le Bahr-el-Abiad ou Nil Blanc à l’occi- dent, le Bahr-el-Azrak ou Nil Bleu à l’orient. Le Nil Bleu est une grande rivière torrentueuse dans la partie supérieure de son cours, et qui n’a qu’un très petit volume à certaines époques de l’année, tandis que, pendant la saison des pluies en Ethiopie, elle recueille des masses liquides énormes, tombées sur les hautes montagnes qui dominent et encaissent les profondes vallées de l’Abyssinie. Le Nil Blanc, au contraire, provient des immenses lacs, le Nyanza et le M’voutan-Nzig’ué, ainsi que de la rivière Semliki, qui prend ses sources dans les majestueuses montagnes neigeuses du Rouéven- zori, véritables Alpes de l’Afrique centrale, à une altitude de 5,000 à 6,000 mètres. Mais ce sont très probablement les nombreux affluents qui parcourent les grands plateaux herbeux ou boisés sé- parant le bassin du Congo de celui du Nil, qui déversent dans ce dernier la quantité d’eau la plus considérable. Ces nombreuses rivières prennent naissance dans cette région encore prescjue in- connue, couverte d’immenses et sombres forêts tropicales, où l’humidité est très grande et où, pendant quelques mois, chaque 76 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBTA année, très régulièrement, les courants viennent déverser, à des époques fixes, les masses liquides qu’ils ont pompées dans le bassin de l’Atlantique. C’est par le fleuve Bahr-el- Gazai et les marécages sans fin qui l’accompagnent que les pluies tombées dans cette immense région viennent s’écouler lentement dans le Nil Blanc par de nombreux canaux couverts d’une épaisse couche de végétaux aquatiques, à travers lesquels l’eau filtre peu à peu en se chargeant du produit des décompositions animales et végétales. Ce feutrage est formé par d’énormes touffes de Papyrus^ par des buissons d’Ambatch [Herminieria elaphroxylon)^ par le Pistia^ qui a la forme et l’appa- rence d’une laitue aquatique flottante, et par différentes espèces appartenant aux genres Ceratophylliim^ Uiriciilaria, Lemna^ Riccia et Azolla, Après avoir été entraînés dans le lit même du fleuve, ces végétaux forment des agglomérations telles que la navigation est complètement impossible pendant plusieurs mois et quelquefois pendant des années entières. C’est à ces marécages immenses qui, depuis l’exploration des centurions de Néron, ont arrêté tant de voyageurs, qu’il faut attri- buer les eaux vertes et malsaines que l’on observe au Caire dans la première décade de juin et souvent plus longtemps, pendant vingt à trente jours. L’eau du fleuve est alors remplie de cellules végétales, provenant des plantes en décomposition. Elle prend un goût marécageux des plus prononcés et devient alors très insalubre. Les premières crues du Bahr-el-Azrak et surtout celles de l’At- bara, qui vient du Tigré, font disparaître tous ces débris malsains et rendent aux flots du Nil leurs qualités si vantées depuis la plus haute antiquité. Dans la partie moyenne et inférieure de son cours, le Nil présente le phénomène unique au monde de ne recevoir aucun affluent sur une immense étendue. Le dernier tributaire de la rive orientale est l’Atbara, dont l’embouchure est encore à 2, bOO kilo- mètres de la Méditerranée. Sur cet espace, le Nil ne reçoit plus aucune rivière, ni à droite, ni à gauche. Les Wadys ou ravins qui débouchent dans la vallée ne roulent, au moment des rares 1 LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 77 averses, que des flots chargés de sables et qui ne tardent pas à dis- paraître au bout de quelques heures. Sur la rive occidentale, il faut parcourir 3,700 kilomètres, depuis Alexandrie, avant d(^ trouver un affluent formant un cours d’eau permanent et durant plus longtemps que les pluies d’orages. La crue du Nil, qui vient féconder chaque année les champs de l’Egypte, se fait presque toujours avec une régularité dont il est difficile, jusqu’à aujourd’hui, de comprendre les causes. C’est presque tou jours vers le 10 juin que le fleuve commence à croître. Les eaux, d’abord vertes et malsaines, sont dues, au début de la crue, à la chasse des eaux marécageuses que la poussée supérieure fait éprouver aux masses liquides, presque stagnantes, renfermées dans les immenses champs de Papyrus du lac Nô. Le fleuve se gonfle d’abord lentement, et ce n’est que vers le milieu de juillet que la crue s’accentue rapidement par l’arrivée des eaux rouges, qui sont dues aux apports des rivières torrentueuses de l’Abyssinie, telles que le Bahr-el-Agrak ou Nil bleu, l’x\tbara, etc. Ce dernier, lorsqu’il verse ses eaux dans le fleuve, a une masse assez considé- rable pour faire sentir brusquement, au Caire même, l’importance de son rôle par une élévation subite de la courbe, indiquant les oscillations de la nappe liquide. Vers le 20 août, la crue du Nil est à peu près dans son plein. Cependant, le volume du fleuve aug- mente encore légèrement jusqu’au 7 octobre, jour moyen où elles atteignent leur point culminant. La baisse des eaux se fait ensuite très régulièrement jusqu’à ce que la montée du flot recommence. Pendant l’année entière, le Nif déverse dans la Méditerranée 120 milliards de mètres cubes, et pendant les trois mois de crue seulement, plus de 90 milliards. Par suite de l’élargissement de la vallée, la hauteur de rinondation diminue progressivement du Sud auNord. A Assouan, elle atteint 11 à 12 mètres; au Caire, 6 à7 ; dans le Delta, elle n’est plus que de 2 mètres. Cette hauteur des eaux est en rapport direct avec celle des rives qui décroissent régulière- ment depuis la haute Égypte jusqu’à la mer. Les berges du fleuve ainsi que la plaine arable s’exhaussent donc indéfiniment, et pour comprendre comment le débordement du Nil peut se faire, on est 78 ETTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA bien forcé d’admettre que le lit du fleuve lui-même s’élève chaque année d’une quantité égale. Ce fait est prouvé par l’enfouissement graduel et de plus en plus considérable d’un grand nombre de cons- tructions anciennes que les Egyptiens avaient évidemment élevées bien au-dessus du niveau des eaux. On pourrait citer comme exemple les temples massifs de Louksor et de Karnak, inondés chaque année, ainsi que les colosses de Memnon dont les socles, hauts de plusieurs mètres, ont presque disparu par suite des apports réguliers des vases du fleuve dans la vaste plaine de Thèbes. Les limons déposés par le Nil sont d’un brun rougeâtre et d’une finesse extrême. Les pierres même les plus ténues ne s’y rencon- trent jamais; aussi, depuis l’antiquité la plus reculée, ont-ils tou- jours servi à la fabrication de la poterie et des briques. Dans les campagnes, ces dernières sont tout simplement durcies à la cha- leur solaire et offrent cependant, malgré cette cuisson rudimen- taire, une dureté suffisante pour les constructions si peu élevées qu’édifient les fellahs. Le chimiste Régnault a trouvé dans le limon du Nil : Carbonate de magnésie 4 — de chaux 18 Alumine 48 Eau 11 Carbone 9 Oxyde de 1er 6 Silice 4 Nous avons pu constater, à la fin de l’inondation, c’est-à-dire au mois de novembre, que ce limon en suspension dans l’eau était composé de particules si ténues qu’il restait flottant, en légers flocons, pendant fort longtemps, dans les aquariums servant à nos recherches. Ce n’était, le plus souvent, qu’après trois ou quatre jours d’une immobilité absolue que les eaux devenaient entière- ment limpides. Les berges du fleuve sont formées par ce limon desséché, durci, fissuré à la surface en polyèdres irréguliers mais déposé horizon- talement en strates parfaitement régulières qui ne présentent LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 79 jamais, comme nous l’avons déjà dit plus haut, le moindre petit caillou même de la grosseur d’un haricot ou d’un pois. En l’exami- nant au microscope, on y trouve des corpuscules calcaires et des grains de sables renfermant souvent de petits corps siliceux teintés en beau vert et ressemblant à des fragments d’émeraude. Certains jours, ces sables sont précipités dans le fleuve en grandes masses lorsque les vents soufflent avec violence. Sur les rives où se trouvent souvent des dunes provenant des régions déser- tiques, on voit le sable transporté par le courant d’air comme un léger brouillard rasant le sol et qui ne tarde pas à disparaître dans le lit du grand fleuve. Entre Louksor et Gisgèh nous avons été plu- sieurs fois témoins de ce singulier et intéressant phénomène. L’eau du Nil, excepté au moment où elle est verte, c’est-à-dire au mois de juin, a une saveur et une douceur tout à fait particu- lière et des plus agi*éables. Le filtrage en est très facile, même avec les appareils les plus élémentaires, gargoulettes et zirs, justement à cause de la grande quantité de fin limon qu’elle contient et qui augmente de beaucoup les propriétés filtrantes des cruches em- ployées dans le pays. Pendant la crue, l’eau du Nil contient quatre parties de limon sur mille parties d^eau. Les savants de l’expédition française avaient déjà constaté l’extrême pureté de cette eau au point de vue chi- mique. D’après Robinet, elle marque 7.50 à l’hydrotimètre. Les recherches les plus récentes, notamment celles de M. le professeur Kauffmann de l’Ecole de médecine du Caire, ont montré que les microorganismes sont relativement nombreux dans les eaux du Nil, moins nombreux, cependant, qu’on ne serait tenté de le croire lorsqu’on se souvient de la végétation en putréfaction qui encombre le lac Nô et les embouchures du Bahr-el-Gazal. Nos recherches nous ont montré que l’immense majorité des bactéries qui se développent dans les eaux du grand fleuve ne sont que des espèces aquatiles, absolument inoffensives, et ne pouvant avoir aucun rapport avec certaines épidémies qui ont été attribuées à l’usage des eaux du Nil. Ceci prouve une fois de plus, ce qu'on est tenté d’oublier trop souvent, que pour apprécier les qualités 80 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA bonnes ou mauvaises d’une eau potable il ne faut point se borner à compter le nombre de germes renfermés dans un centimètre cube ou un litre. La chose importante, que l’expérimentation seule est capable de déceler, est de rechercher si les bactéries pathogènes ou nocives sont abondantes ou rares. Le fleuve, ainsi que nous l’avons dit plus haut, ne reçoit aucun affluent depuis l’x^tbara, c’est-à-dire depuis 2,500 kilomètres de la Méditerranée. Durant ce long trajet, les bactéries sont roulées au milieu des fines vases que charrient les eaux. Beaucoup de micro- organismes doivent ainsi être précipités au fond, ou fixés aux berges. Un grand nombre, ramenés sans cesse à la surface par les oscillations rotatoires des différentes tranches de la masse liquide, sont exposés à une chaleur considérable, à une radiation lumi- î neuse d’une intensité sans égale, et sont, par conséquent, détruits avec une grande rapidilé. On peut donc légitimement affirmer que la pureté relative des eaux du Nil, au point de vue des microbes pathogènes, provient très certainement de l’énergie avec laquelle les rayons solaires viennent frapper la surface liquide. Depuis la ville de Berber, les eaux ne peuvent plus être contaminées par des substances patho- gènes, le fleuve ne recevant aucun affluent, mais seulement de rares [torrents temporaires qui coulent pendant quelques heures à peine, les jours d’orages, dans les Wadys qui descendent des plateaux désertiques arabiques ou libyques. Ces pluies torren- tielles sont, du reste, très rares puisque au Caire, à 210 kilomètres de la Méditerranée, elles ne tombent pas plus de deux ou trois fois par hiver, tandis qu’elles sont à peu près nulles à Louksor et à Assouan. La température des eaux du Nil, au Caire, oscille entre un mini- mum de 14 degrés en janvier et un maximum de 28 degrés en août. La température moyenne est de 2U,4. Elle est bien plus élevée dans l’eau des Birkets ou mares, ce qui est très important à cons- tater, comme nous le verrons plus loin, au point de vue du déve- loppement du LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 81 Eaux potables d’Alexandrie et du Caire. Les eaux potables d’Alexandrie et du Caire laissent beaucoup à désirer comme captage, filtrage et pureté. Les Anglais sont vrai- ment inexcusables, depuis dix ans qu’ils occupent l’Égypte, de n’avoir pas su améliorer un service dont l’importance ne saurait être méconnue par personne, dans ce beau pays surtout, qui, malheureusement, se trouve placé sur le grand chemin de la plu- part des épidémies qui nous arrivent de l’extrême Orient. Les eaux d’alimentation si défectueuses expliquent la facilité avec laquelle les habitants reçoivent les contages de toutes natures. A Alexandrie, les eaux potables qui servent à l’usage public ou privé sont puisées dans le canal appelé Mahmoudièh et qui est en rapport direct avec une des grandes branches du Nil. Ce canal peut être considéré comme un vaste égoul, rempli d’une eau excessivement trouble, presque boueuse à certaines époques de l’année et chargée d’une très grande quantité de matières orga- niques. Il est exposé, dans toute sa longueur, jusqu’à la prise des eaux de la Compagnie, à deo souillures de toute nature. Là vien- nent en effet tomber les résidus, les fumiers provenant de plusieurs villages de fellahs, les latrines des maisons riveraines, les déjec- tions des bateliers qui dirigent les innombrables barques qui navi- guent continuellement sur ces eaux impures. De plus, les filtres destinés à purifier les eaux potables, placés dans le voisinage de ia porte de Rosette, sont tout à fait insuffisants comme nombre et comme dimensions. L’entretien en laisse beaucoup à désirer et le passage de l’eau filtrée se fait trop rapidement. Aussi renferme-t- elle un très grand nombre de germes dont beaucoup doivent cer- tainement être pathogènes. Le professeur Kauffmann, dont nous avons cité déjà plusieurs fois les intéressantes recherches, y a trouvé plus de 600 microorganismes par centimètre cube. Mais, à une époque de l’année, le professeur R. Koch, de Rerlin, en a compté plus de 2,000. Il résulte de ces faits, ainsi que des dernières observations du Université de Lyon. — ix. a. î» 82 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA D*" Bitter présentées à la municipalité d’Alexandrie, que l’eau dis- tribuée à la ville doit être considérée comme une eau non fiUrée et que, par conséquent, elle présente les mêmes dangers au point de vue des infections qu’une eau qui serait puisée directement dans le canal Mahmoudièh. Au Caire, les réservoirs et les filtres sont placés sur les hauteurs de l’Abâsiyè, près de la porte appelée Bab-el-Nasr, presque en plein désert de sable. Les filtres et les canaux de distribution ont été établis par une compagnie française. Le fonctionnement des appa- reils est mieux surveillé et les eaux passent avec une lenteur con- venable à travers les assises de sable et de gravier; aussi, les résul- tats sont-ils meilleurs, car le professeur Kauffmann a constaté que ces eaux renferment moins de 100 germes par centimètre cube. La filtration peut donc être considérée comme excellente en temps normal. Cependant, au mois de janvier 1894, dans le laboratoire même que M. le Directeur de l’Ecole de médecine avait bien voulu mettre à notre disposition, plusieurs fois les robinets ne nous ver- sèrent qu’une eau absolument trouble et, quelquefois même, une véritable boue. On peut donc craindre que là encore il y a de grandes défectuosités dans la captation, la filtration ou l’établisse- ment des conduites. Ce fait ne manque pas d’une certaine impor- tance puisque le D'’ Kauffmann a constaté que dans la petite branche du Nil qui passe devant l’Ecole de médecine et l’hôpital de Kasr-el-Aïn, l’eau souillée de toute façon et avec une véritable impudeur par les habitations riveraines, renferme à l’étiage plus de 18,000 germes par centimètre cube h A Hélouan, près du Caire, charmante station thermale élevée en plein désert et aujourd’hui très fréquentée, M. le professeur Kauff- mann a compté en moyenne 5,000 germes par centimètre cube dans l’eau fournie par la Compagnie. Là, en effet, l’eau est distri- buée telle que, sans filtration ni décantation, de sorte qu’elle repré- sente, en quelque sorte, la teneur en bactéries de l’eau même du fleuve. Il ne faut cependant point oublier que dans une région aussi chaude la pulullation des germes aquatiles doit se faire avec 1. Df Bitler, Rapport sur la question des eaux^ Alexandrie, 1894, LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 83 une rapidité extrême dans la canalisation même servant à la distri- bution. Ainsi, à Lyon, où les eaux du Rhône sont relativement très pures, nous avons constaté, nombre de fois, que l’eau fournie par le robinet d’arrivée est toujours infiniment plus riche en mi- croorganismes que celle qui est prise à l’intérieur des galeries de filtration. Mais le grand vice de l’établissement du Caire est de puiser une eau dans un endroit, où le fleuve, à cause des remous occasionnés par les vents violents à certaines époques de l’année, peut être facilement et sur une très large échelle, contaminée par les résidus des abattoirs, des égouts, etc. La connaissance de ces faits pourrait paraître inutile au point de vue de la question qui nous occupe. Nous verrons cependant plus loin quelle est leur importance pour expliquer l’absence à peu près complète, la dissémination ou la fréquence du Bilharzia dans les différentes classes du peuple égyptien, puisqu’une eau aussi mal filtrée, dans certains cas, peut charrier, non seulement un grand nombre de microorganismes, mais encore des œufs de diffé- rentes espèces de vers, ainsi que nous avons pu le constater par des examens microscopiques répétés. Chez les Européens établis en Egypte, ainsi que chez les indi- gènes des villes qui sont quelquefois plus soigneux de leur hygiène^ l’eau filtrée une première fois par les appareils des différentes Compagnies d’Alexandrie et du Caire, est filtrée à nouveau par les Zirs, grandes cruches en terre poreuse, fabriquées avec le limon du Nil, puis ordinairement, elle est filtrée une troisième fois avec la bougie Cliamberland. Il est évident qu’à la suite de ce triple fil- trage les œufs ou les embryons du Bilharzia sont arrêtés facilement ainsi que la plupart des microbes pathogènes qui ne peuvent ainsi arriver jusque dans la gargoulette du consommateur. Mais dans les classes pauvres, l’eau fournie par les fontaines de la Compagnie n’est mise dans les Zirs que pour être rafraîchie et non point pour être filtrée; elle est souillée à nouveau par diffé- rents procédés dont nous parlerons plus loin, aussi renferme-t-elle toujours un grand nombre de microorganismes, de corpuscules étrangers, de débris organiques, et très certainement des embryons 84 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA du Bilharzia qui peuvent y vivre sous une forme que nous ne con- naissons pas encore, libres ou enkystés. Ceci explique pourquoi les familles riches sont à peu près indemnes de la Bilharziose, dans les grandes villes de FÉgypte, tandis que les classes populaires fournissent un contingent important à celte singulière et grave infection. Les eaux potables dans les campagnes. Les Birkets. La manière toute spéciale dont s’abreuvent les fellahs des cam- pagnes est très importante à connaître pour bien comprendre comment la Bilharziose peut se développer sur une si large échelle chez les habitants de la Moyenne et de la Basse-Égypte. Dans les villages placés aux bords du Nil ou des canaux dérivés du fleuve, deux fois par jour, le matin et le soir, on voit les femmes s’avancer en longues files, afin de chercher Feau nécessaire aux besoins du ménage.'Elles s’arrêtent sur la rive, déposent leurs cruches à terre, relèvent leur robe bleue jusqu’à mi-jambe et serrent les genoux afin de maintenir le vêtement relevé. Puis elles entrent dans Feau en barbotant comme des canards, soulevant ainsi autour d’elles une vase épaisse et noirâtre. En général, à ce moment-là, elles se lavent les pieds et les jambes souillés par la poussière grisâtre du chemin. Puis, lorsque Feau s’est un peu éclaircie, elles remplissent leur cruche qui contient environ 10 à 15 litres de liquide. Le vase est alors saisi par les deux anses latérales et traîné pénible- ment au rivage en le tenant suspendu entre les jambes. Arrivée sur le sol ferme, la porteuse d’eau laisse retomber les plis de sa chemise, puis prenant l’extrémité allongée de son voile en coton bleu, elle le tord en corde et s’en fait une couronne qu’elle place sur la tête. Cette précaution prise, et aidée d’une voisine, elle sou- lève sa charge. La cruche est posée sur la torsade de toile, non debout, mais légèrement inclinée sur le flanc, afin que l’extrémité inférieure du vase, qui est terminée en pointe, ne puisse blesser la région crânienne. Cette lourde amphore est maintenue habilement LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 8:> en équilibre pendant que la femme remonte péniblement l’escar- pement du rivage. La main alors ne sert plus à maintenir le far- deau mais s’abaisse pour relever légèrement la longue chemise qui gênerait la marche toujours souple, élégante meme de ces gra- cieuses mais malheureuses créatures. Cet exercice pénible, ainsi répété plusieurs fois chaque jour, force la femme fellah à se tenir admirablement droite et à marcher d’une allure dont la souplesse excite l’admiration des étrangers. L’eau de l’amphore, troublée toujours par une énorme quantité de vase, est jetée dans le zir, cruche rafraîchissante et filtrante placée elle-même à poste fixe dans un des coins de la maison, construite en boue desséchée. Dans les canaux à eau courante, dans les environs du Caire, les pêches au filet fin nous ont donné presque constamment les formes suivantes : Des œufs ou des jeunes nématôdes d’espèces indéterminées; Des infusoires de formes variées ; Cliotomus^ fréquemment ; Pediastruïïiy fréquemment; Des algues du genre Nostoc, formant des anneaux très réguliers ; Des Oscillanay rarement; De nombreux Cyclopes, des Daphnies, des fibres de végétaux, des trachées, des cellules épidermiques. Mais dans aucune circonstance, je me hâte de le dire, ni dans les canaux à eau courante ou stagnante, ni dans les Birkets, le filet fin ne nous a ramené une forme quelconque pouvant se rap- porter au Bilharzia. Et cependant, on ne saurait mettre en doute que c’est dans ce milieu qu’il faut le chercher, puisque ses em- bryons sont des animaux nageurs par excellence et qui ne peu- vent se développer que dans l’intérieur des eaux. Mais les habitations qui sont placées dans l’intérieur des terres, loin du Nil ou des canaux, emploient une eau encore bien plus impure puisée dans les bassins fétides que les Arabes appellent Birkets. Tous les villages non riverains ont, dans leur voisinage immédiat, une mare plus ou moins étendue, plus ou moins pro- fonde qui joue évidemment un rôle très important au point de vue 86 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA de la dissémination de la Bilharziose, de Fankylostomasie, de la fièvre typhoïde, du choléra, etc., puisque c’est avec ces eaux abso- lument impures, souillées par tous les procédés possibles, que les malheureux fellahs des campagnes égyptiennes sont forcés de se désaltérer. Dans toute l’Egypte, les maisons des fellahs ou paysans ne sont que de simples huttes, hautes de 3 ou 4 mètres au plus, rarement pourvues d’un étage. Les plus grandes, les plus confor- tables n’ont pour parquet que la terre battue et sont formées en général de quatre ou cinq pièces minuscules irrégulièrement annexées les unes aux autres et de quelques mètres carrés cha^ cune. Les petites maisons, que j’ai pu visiter dans les environs immédiats du Caire, ont 1“,50 de hauteur, de largeur et de lon- gueur. C’est dans ces véritables niches à chien que sont forcées de vivre souvent plusieurs personnes. Toutes ces constructions sont simplement élevées en houe mêlée de paille hachée ou en briques séchées au soleil. Cette boue et ces briques prises dans le voisi- nage immédiat du village, toujours au même endroit, finissent par donner naissance, dans le limon de la plaine, à une cavité plus ou moins grande, dans laquelle l’eau du fleuve arrive facilement au moment de l’inondation et dans laquelle elle pénètre aussi par infiltration lorsque cette dépression factice se trouve au-des- sous du niveau du fleuve, ce qui est le cas le plus habituel. Le Birket, comme on le voit, est donc une conséquence forcée du mode de construction des habitations rurales que le manque de pierres dans les plaines cultivables ne permet point d’édifier autre- ment. Les maisons des fellahs n’ont pas une longue durée; elles finissent par s’écrouler sous l’influence des agents atmosphériques. Les matériaux qui les constituaient sont toujours laissés en place, et c’est sur cette poussière et ces débris que le paysan va recon- struire, en prenant dans le Birket, ou sur ses bords, la quantité de boue nécessaire, ou en confectionnant des briques qui serviront à édifier une nouvelle demeure. Cette manière de procéder, toujours la même, depuis l’antiquité la plus reculée, a produit deux faits importants à bien connaître LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 87 pour qui veut se rendre un compte exact des conditions qui régis- sent l’hygiène du peuple égyptien : 1° Tous les villages sont placés sur des tells ou monticules qui dominent la plaine environnante de quelques mètres. Ces éléva- tions factices sont formées par les débris des anciennes habitations, comme nous venons de le dire, par les résidus des cuisines et par d’innombrables fragments de couches accumulées depuis des mil- liers d’années. 2° Près de chaque village, un Birket de plus en plus profond, de plus en plus étendu, sert à prendre le limon dont le village se construit. Il est rempli par l’inondation de la plaine ou par les apports souterrains, et sert de citerne commune où les habitants vont puiser leur eau d’alimentation. Malheureusement, ces mares à eau stagnante sont sans cesse souillées par les villageois. Le Birket sert de bain pendant la sai- son chaude, et c’est sur son pourtour que, le soir, les habitants viennent, au mépris des règles les plus élémentaires de l’hygiène, déposer leurs excréments. Les berges de ces cavités sont forcé- ment inclinées en pentes douces vers le niveau de Peau; cette dernière recevra donc immédiatement les urines, les œufs du Bilharzia, ceux des ankylostomes, les bactéries pathogènes de toute nature. Les eaux se chargent ainsi de matières organiques, de germes nombreux, et, la chaleur aidant, se peuplent d’animalcules infu- soires ou autres constituant une faune variée dont certaines espèces serviront peut-être d’hôtes intermédiaires à des parasites qui devront se développer sous une forme nouvelle dans le corps de l’homme. En 1891 , au printemps, lorsque la température était déjà élevée, l’un de nous a vu chaque jour des vingtaines d’hommes, de femmes et d’enfants, se baigner dans les mares servant à l’alimen- tation des villages de la plaine de Memphis et de la Basse-Egypte, tandis que les bords de ces Birkets, servant de véritables latrines publiques, étaient couverts de matières fécales déposées le soir ou pendant la nuit. Tous les jours, des millions d’œufs de Bilharzia 88 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA sont donc répandus sur la vase avec les urines et les déjections. Des quantités prodigieuses de ces œufs sont entraînées constam- ment dans Feau où ils éclosent rapidement, tandis que les em- bryons pourvus de leurs cils natateurs trouvent les conditions né- cessaires pour recommencer un nouveau cycle de leur existence. Les eaux des Birkets constituent donc un excellent bouillon de culture, où peut se développer une vie animale ou végétale intense, ainsi que des myriades de microorganismes. Voici la liste des animaux et des végétaux que nous avons ren- contrés dans les mares des environs du Caire et que nous avons examinés avec le plus grand soin, afin de rechercher la présence dans leurs tissus ou à leur surface extérieure de kystes qui pour- raient être rapportés aux transformations probables du Bilharzia. Malheureusement, nous sommes forcés d’avouer que nos recher- ches, dirigées dans ce sens, ont été absolument négatives. Animaux et végétaux dont la présence a été constatée dans les Birkets des environs du Caire. (décembre-janvier (1893-1894) INFUSOIRES Un grand nombre de différentes formes indéterminées. HYDROMÉDTJSES Des hydres d’eau douce très transparentes et renfermant des infu- soires dans la cavité digestive. PLATUELMINTHES Des Turbellariés pourvus d’un pharynx ressemblant à une ven- touse, et appartenant probablement au genre Schizostomum. D’autres Turbellariés indéterminés. CRUSTACÉS Des indéterminés. Très abondants dans quelques Birkets des environs du Caire. LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 89 Une espèce nouvelle d’Ostracode encore indéterminée : Daphnia magna ^ Strauss. Très abondant dans les mares des environs du Caire. Daphnia Schæfferi, Baird. Très abondant dans les environs du Caire. Estheria tetracera, Kryniki. Grande et belle espèce que nous n’avons rencontrée qu’une seule fois assez abondamment dans une mare des environs de Matâriyè, près du Caire. INSECTES De nombreuses larves d’Ephémères, indéterminées, très trans- parentes et de la taille du grand Cyclope. Des espèces du genre Co?'is2, indéterminées. Un Dilisque : Bidessus confusus^ Klug. Des Hydrophiles : Berosiis spinosiis^ Tab. MOLLUSQUES Unio Ægyptiaciis. Ter; très nombreux dans la vase. Corbicida consohrina, Caill ; dans les canaux. Physa acuta^ Drap'; dans les Birkets. Vivipara unicolor^ Oliv; dans les canaux et les Birkets. Lanistes carinatiis^ Oliv; dans les Birkets. Lanistes Boltenianiis, Chem; dans les Birkets. Melania tubercidata^ Müll; très fréquent dans les Birkets. Dans la plupart des Birkets, les petits crustacés ostracodes et les Daphnia se développent en quantités! considérable que l’eau paraît absolument lactescente. Des milliers de ces petits animaux sont ramenés chaque fois que le filet fin est retiré. Jamais, dans aucune de ces espèces qui sont très transparentes et très faciles à observer, nous n’avons pu constater la présence d’un embryon ou d’une redie pouvant se rapporter au Bilharzia. JXos recherches, dans ce sens, ont été faites avec un soin extrême, sur des milliers d’ani- maux recueillis dans différentes mares des environs du Caire. B nous paraît donc difficile de croire que ce soit un crustacé qui serve, en Egypte du moins, de véhicule à la forme larvaire encore inconnue du Bilharzia. 90 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA Les plantes, dont la présence a été constatée dans les Birkets, sont les espèces suivantes : Lemna paiicicostata^ Hegel; très fréquente. ^ Lemna gibha^ L.; très fréquente. Spirodela polyrrhiza^ L. ; rare dans certaines localités. Wolfia hyalina^ Del; fréquente dans certaines localités. Plusieurs espèces indéterminées appartenant au genre Char a. De nombreuses espèces d’algues d’eau douce, notamment V Hydrodyction et d’autres formes indéterminées. A la surface de ces plantes, ainsi que dans leurs tissus, nous n’avons jamais pu constater la moindre trace du Bilharzia. C’est dans ces Birkets, dont nous venons de faire un tableau fidèle et où barbotent encore des oies et des canards, que les femmes fellahs des villages éloignés du Nil ou des canaux d’irri- gation viennent chercher l’eau destinée aux besoins de la famille. Cette eau est versée dans le zir qui, chez l’habitant des campagnes, ne sert, quoi qu’on ait pu dire, nullement à filtrer l’eau. Ce n’est qu’un réservoir destiné à contenir et à rafraîchir le liquide. On comprend quelle quantité de germes de toute nature, l’eau prise et conservée dans de pareilles conditions, dans une contrée très chaude, doit faire pénétrer dans le tube digestif de celui qui la boit sans précautions. Dans les champs, pendant une grande partie de l’année, les hommes sont surtout occupés durant de longues heures du jour et de la nuit, à puiser l’eau des canaux d’arrosage avec l’instrument ingénieux, mais très primitif, appelé le Chadouf. C’est un balan- cier supporté par une colonne de boue desséchée et qui est muni h une de ses extrémités d’un panier servant à élever l’eau. Une grosse pierre fixée à l’autre bout du levier diminue l’effort du travail- leur. Ces hommes exposés pendant des journées entières aux rayons d’un soleil brûlant se désaltèrent en buvant sans aucune pré- caution l’eau boueuse qu’ils versent dans les rigoles destinées à irri- guer les champs. Ces eaux peuvent être contaminées non seulement par les larves des Ankylostomes mais encore par les embryons du LES BIRKETS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 01 Bilharzia. De cette habitude proviendrait, d’après certains observa- teurs, la plus grande fréquence de la Bilharziose chez l’homme que chez la femme. Cependant, à ce sujet, nous nous permettrons de faire quelques réserves. Il n’est pas encore bien démontré, nous semble- t-il, que la femme soit moins souvent atteinte que l’homme. Chez l’homme, en effet, les symptômes de l’hématurie attirent immédia- tement l’attention du médecin, tandis que chez la femme fellah, pour laquelle jamais aucun médecin n’est appelé lorsqu’elle est malade, et chez laquelle règne la plus grande insouciance des soins les plus élé- mentaires de l’hygiène et de la toi- lette, les hématuries peuvent passer absolument inaperçues ou doivent être attribuées au flux cataménial. Dans les nombreuses autopsies aux- quelles nous avons pris part à l’iiô- pital de Kasr-el-Aïn, au Caire, nous Fig. 5. — Le zir dans les villages. avons en effet constaté plusieurs fois, chez la femme, la présence de la Bilharziose qui avait été entièrement méconnue par les médecins traitants justement à cause de la non-constatation du symptôme si important de l’hématurie toujours si facile à vérifier chez l’homme. Le zir filtrant serait parfaitement efficace pour empêcher la pénétration dans le corps de l’homme du Bilharzia, quelle que soit la forme sous laquelle il arrive jusque dans les voies digestives. Malheureusement, chez les indigènes, il ne sert nullement à la filtration de l’eau comme chez les Européens habitant l’Egypte. 11 constitue tout simplement un récipient un peu plus réfrigérant qu’un vase imperméable, et il a surtout l’avantage de pouvoir s’acquérir à très bas prix; chez les fellahs, dans les campagnes et même chez les ouvriers habitant les faubourgs des grandes villes, le zir est enterré à moitié dans le sol de la chambre et n’est nettoyé que fort rarement, seulement lorsque le limon s’y est déposé en tro|) grande quantité. 92 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA Dans la classe bourgeoise un peu plus aisée, et chez quelques fellahs moins misérables, le zir est posé ordinairement sur un sup- port grossier en bois, ce qui permet à l’eau de se rafraîchir davan- tage, l’évaporation étant plus considérable et plus facile. Mais ce n’est pas le liquide qui filtre à travers l’argile qui est employé pour la boisson. La bonne eau ainsi purifiée est ordinairement abandonnée tandis que les habitants, lorsqu’ils veulent boire, pui- sent tout simplement dans le zir l’ex- trait concentré de microbe et de vase qui, suivant eux, est beaucoup plus nutritif et meilleur que l’eau pure. En ville, dans les quartiers popu- laires et tout près de la porte des latrines afin de pouvoir puiser l’eau plus faci- lement avec les mains sales, lorsque les indigènes se lavent les parties souillées par la défécation. On comprendra facilement, après les détails sur lesquels nous venons ^ . . de nous étendre longuement, que Fig. 6. — Le zu' dans les villes. ° ^ la première chose à entreprendre pour une administration intelligente et soucieuse de l’hygiène pu- blique en Egypte, serait de combler tous les Birkets, véritables foyers d’infection, et de pourvoir les villages des fellahs de pompes installées dans des endroits convenables, en amont des habitations. Ces appareils pourraient être placés à très peu de frais, vu la petite profondeur où se trouve toujours la couche aqueuse. Malheureusement, la question est moins simple qu’elle ne le paraît au premier abord. Il serait, en effet, très facile de combler les Birkets, car la plupart n’ont pas une étendue considérable. Mais où pourra-t-on trouver le sable ou la terre pour en opérer le remblaiement ? La plaine habitable de l’Egypte est si parfaitement nivelée par les inondations séculaires du Nil, que partout où l’on prendrait de la terre pour combler un Birket, on , le zir est placé dans la cuisine, LES BIRKEÏS ET LES EAUX POTABLES EN ÉGYPTE 93 donnerait forcément naissance à une mare nouvelle. Il faudra donc nécessairement, et à grands frais, faire venir par les voies ferrées, les canaux ou par d’autres moyens de transport, les roches ou les sables des chaînes libyques ou arabiques afin de faire dispa- raître entièrement ces cavités malsaines. L’administration sani- taire de l’Egypte ne devrait donc, pour le moment, n’avoir qu’un but, celui d’empécher l’usage de ces eaux, qui sont non seulement la cause de l’infection par le Bilharzia^ mais qui servent encore de véhicule à tous les microbes pathogènes qui font de cet admirable pays une des grandes voies par lesquelles les épidémies les plus redoutables ont si souvent pénétré en Europe. Il y a donc un intérêt de premier ordre, non seulement pour l’extinction de la Bilharziose, qui est si meurtrière en Egypte, mais encore pour la sécurité du monde occidental, à ce que l’admi- nistration sanitaire prenne des mesures radicales, dont la plus importante consisterait dans le remblaiement des Birkets servant à l’alimentation des villages. Ils seraient remplacés, au fur et à mesure de leur suppression, par de simples appareils élévatoires dont le bon fonctionnement devrait être surveillé avec soin par des inspecteurs sérieux. Nous sommes convaincus que des mesures pareilles, très faciles à réaliser en dépensant largement, il est vrai, auraient les consé- quences les plus heureuses, les plus importantes, non seulement pour la santé des pauvres fellahs, mais encore au point de vue de l’hygiène internationale qui préoccupe, à l’heure qu’il est, si juste- ment le monde européen. Les difficultés financières ne sauraient être un obstacle sérieux à l’accomplissement de notre vœu. Nulle dépense ne saurait être mieux justifiée, et l’Égypte est actuellement assez riche pour faire un sacrifice indispensable qui lui économiserait chaque année un grand nombre de vies humaines. Nous espérons vivement que ces améliorations si désirables pourront être bientôt réalisées grâce à la bonne volonté du Prince éclairé qui tient aujourd’hui entre ses mains les destinées de ce pays merveilleux. CHAPITRE VI ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE Nous avons vu plus haut quels sont les symptômes produits par i la présence des Bilharzia dans l’organisme de Thomme, nous exposerons maintenant l’histoire des lésions qui accompagnent cette maladie. Fidèles au plan suivi dans tout notre travail, nous 5 n’essayerons pas tant de donner un exposé complet de toutes les modifications organiques que peut amener la présence des para- sites que de signaler les faits saillants en les groupant suivant un ordre logique, et de faire ressortir les idées générales que nous ont suggérées nos observations personnelles. f La Bilharziose est endémique en Egypte, où on la rencontre dans le tiers ou même dans la moitié do la population indigène, et | particulièrement chez les fellahs qui s’adonnent à la culture. Le | taux des statistiques change d’ailleurs beaucoup, suivant que l’on f envisage l’un ou l’autre sexe, et, en effet, on sait depuis longtemps que les hommes sont beaucoup plus fréquemment atteints que les femmes. D’après des renseignements oraux communiqués par M. le professeur Kauffmann, la présence des parasites s’observe chez les hommes dans 40 à 50 p. 100 des autopsies, chez les femmes dans 13 p. 100 seulement U On a déjà fait remarquer que la plus 1. Les résultats des statistiques varient naturellement suivant le milieu où sont puisées ces dernières, c’est-à-dire suivant qu’elles sont faites sur les malades réu- nis dans les hôpitaux, ou bien sur l’ensemble de la population non hospitalisée. Mais peu importe le nombre exact des cas, ce qui n'est pas douteux, et les chiffres sui- vants en font foi, c’est l’extrême diffusion de la maladie. D’après Leuckart, Griesinger, sur 363 cadavres a trouvé 117 fois les lésions de la Bilharziose ; Sonsino les a rencontrées 13 fois sur 31 autopsies, et il a observé que sur 308 enfants des écoles de Tantah la maladie existait chez un tiers. Koch pense que la Bilharziose peut se rencontrer 9 fois sur 10 parmi les individus de la cam- pagne. (Cité d’après Frilsch.) ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE 95 grande fréquence de la maladie chez l’homme pouvait s’expliquer par son genre de vie qui le retient souvent éloigné des habitations, livré à un travail pénible pendant lequel il pourra lui arriver de se désaltérer avec une eau encore plus souillée, s’il est possible, que celle dont les femmes peuvent faire usage à la maison ^ . L’obser- vation du cas qui fait l’objet de cette étude montre que la Bilhar- ziose n’est pas cantonnée en Egypte; d’ailleurs on l’a signalée, depuis longtemps, dans d’autres parties de l’Afrique (toute la côte orientale jusqu’au Cap inclusivement, les bords du lac Nyassa et du Zambèze, le Soudan, le sud-ouest du Sahara, la côte d’Or) dont les conditions géographiques diffèrent beaucoup de celles si spéciales que présente l’Egypte. Dans l’étude anatomo-pathologique de la Bilharziose, il faut distinguer deux grands points qui doivent être envisagés à part : 1° la présence des parasites et leur siège; 2° les lésions causées par ces parasites, ou plutôt par leurs œufs. Par eux-mêmes les Bilharzia causent peu de désordres, leur présence est très bien tolérée, et nous n’avons jamais rencontré dans la bibliographie déjà étendue de cette maladie un cas dans lequel un ver ait, par lui-même, et par sa seule présence, causé quelque méfait notable. Mais il en est tout autrement des œufs. Ces derniers se répandent dans les organes du petit bassin dont ils infiltrent plus ou moins les tissus, amenant dans ces derniers des altérations plus ou moins graves, qui peuvent conduire à la mort du malade. La vessie est atteinte la première; sa tunique muqueuse se charge d’œufs qui, par leur présence, déterminent un état d’inflam- mation chronique; la muqueuse s’épaissit, perd sa souplesse, sa 1. G. Sandison Brock qui a observé la Bilharziose au Transvaal (Rustenburg), es- time que rintroductioii des parasites dans l’organisme se fait principalement pen- dant le bain, par les veines superficielles de la peau, de l’urèthre et du rectum. II se base pour soutenir cette opinion déjà émise antérieurement par Ilarley, sur cette observation clinique que les femmes sont beaucoup moins fréquemment atteintes que les hommes par cette maladie, — en trois ans ans il n’a ^observé la Bilharziose que chez les hommes — or, chez les Boërs, les jeunes garçons sont presque cons- tamment au bain, tandis que les jeunes filles y vont très rarement. G. S. Brock : On the Bilharzia hæmatobia. Journ. of Patli. and Bacteriol., t. 11, 1893, p. 53. ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA surface sécrète un mucus abondant chargé de petits filets de sang, et bientôt on a tous les signes d’une cystite plus ou moins pro- noncée. Journellement un certain nombre des œufs renfermés dans les parois vésicales sont expulsés au dehors, et leur issue s’accompagne d’hématuries plus ou moins abondantes qui sont l’un des premiers signes objectifs de la maladie. La surface interne de la vessie peut être aussi le siège de petites productions polypi- formes ou fongoïdes, rougeâtres, saignantes et remplies d’œufs de Bilharzia. Ces derniers ne s’éliminent pas tous, beaucoup restent dans la muqueuse et l’embryon qu’ils renferment ne tarde pas à se charger de substance calcaire. L’œuf constitue dès lors un petit corps dur qui peut devenir le point de départ et le centre de for- mation d’un calcul, et c’est ainsi que se forment chez les malades, des calculs vésicaux ou même rénaux. Les lésions ne restent pas limitées à la vessie et les œufs se répandent également dans les vésicules séminales et dans le rec- tum, amenant dans ce dernier des lésions très semblables à celles de la dysenterie chronique. Les urétères peuvent aussi se prendre, et, suivant le nombre des œufs qui s’y logent, leurs lésions restent bénignes ou peuvent aboutir à la mort. L’urétère est d’abord envahi dans sa partie juxta-vésicale ; sa tunique muqueuse peut, tout en renfermant beaucoup d’œufs, rester encore souple et mince, il ne s’agit alors que de lésions microscopiques qui n’ont pas un grand retentisse- ment sur le fonctionnement de l’organe, mais, à mesure que l’infil- tration par les œufs augmente, la muqueuse s’épaissit, devient rigide, des étranglements plus ou moins prononcés se forment, rétrécissant la lumière du canal, il y a rétention d’urine, dilatation de l’urétère (Zancarol ^ dit avoir vu un urétère du volume de l’in- testin grêle), et enfin hydronéphrose. Ce n’est là qu’une lésion rénale indirecte, c’est-à-dire, dans la production de laquelle les œufs ne jouent qu’un rôle éloigné; mais il peut y avoir aussi des lésions directes du rein, notamment de la néphrite interstitielle, résultant de l’inflammation chronique causée par la présence des 1. ZaQcarol. Arch. filr. pathol. A?iat., t. XGIX, 1885, p. 142. ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE 9 œufs au sein du parenchyme rénal. Il peut aussi se faire des calculs rénaux. Les graves lésions de l’hydronéphrose ou de la néphrite finissant toujours par entraîner la mort, et ces lésions étant la conséquence, presque forcée, d’une infection un peu étendue, on voit que le pronostic de la Bilharziose est loin d’être toujours bénin. On trouve assez souvent des fistules recto-vésicales, périnéales ou scrotales, consécutives à des abcès formés autour de masses d’œufs de Bilharzia répandus dans la peau de ces régions et dans le tissu cellulaire voisin. On observe aussi fréquemment la coïnci- dence de la maladie qui nous occupe, avec la tuberculose qui est beaucoup plus fréquente en Egypte que les Européens ne seraient tentés de le croire \ mais il serait tout à fait imprudent, pour le moment, d’établir quelque liaison entre ces deux affections. Telles sont les principales lésions de la Bilharziose. Après les avoir ainsi brièvement exposées, nous entrerons dans quelques détails sur les points que nous avons signalés dès le début de ce cha- pitre, à savoir : la distribution des parasites adultes chez leur hôte, et le mode de dissémination des œufs ou, si l’on veut, des lésions. Distribution des Bilharzia dans l’organisme de leur hôte. On dit communément que les vers se trouvent dans la veine porte et dans ses branches, cela est vrai; mais cette donnée est insuffisante si elle n’est pas éclairée par quelques réflexions cri- tiques. Nous avons déjà vu plus haut (ch. II, p. 18), que le moyen le plus sùr de se procurer des vers était d’ouvrir le tronc de la veine porte et de prendre le sang qui s’en écoule ; les para- sites se trouvent en grand nombre dans le sang ainsi recueilli. Faut-il en conclure que, pendant la vie de leur hôte, les Bilharzia habitent de préférence le tronc de la veine porte? Nous ne le pen- 1. La tuberculose se constate très fréquemment dans la population hospitalière du Caire, mais il faut remarquer que la plupart du temps elle frappe des individus qui ne sont pas nés au Caire même (nègres de diverses races, Nubiens, etc.), et qui venus quelquefois de très loin au sud, se trouvent dans des conditions climatériques nouvelles pour eux et peut-être aussi, de par leur race, dans de mauvaises condi- tions de résistance à la contagion. Université de Lyon. — ix. a. ^ 98 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA sons pas; nous croyons bien plutôt que ces animaux sont, pendant la vie, logés dans les branches d’origine du système porte et dans certains plexus veineux qui s’anastomosent avec ces dernières, puis, qu’au moment de la mort, ils se dirigent des petites veines vers les vaisseaux plus volumineux, peut-être pour suivre le sang qui se retire vers les gros troncs, peut-être aussi pour échapper au froid qui gagne peu à peu. En un mot, nous ne pensons pas que tous les parasites que l’on trouve dans le tronc de la veine porte y existent pendant la vie, nous admettons plus volontiers qu’ils y ont été apportés par le sang ou qu’ils y sont venus d’eux-mêmes, dès que la mort a mis l’organisme qu’ils habitaient dans des condi- tions nouvelles. D’ailleurs, on sait bien par les observations directes de Bilharz et d’autres auteurs, que les vers se rencontrent fréquemment dans les rameaux du système porte et même dans des veines de très petit calibre, mais il y a lieu de spécifier davan- tage quelles sont les branches d’origine de ce système, dans lesquelles les parasites ont été observés ; cela ne sera pas inutile pour l’explication que nous tenterons plus loin de la répartition des lésions de la Bilharziose dans les différents organes de la cavité abdominale. La veine porte, on le sait, est formée par la réunion de trois troncs veineux : 1® la mésentérique supérieure (grande mésaraïque) qui ramène le sang de l’intestin grêle et de la moitié droite du gros intestin ; 2® la mésentérique inférieure (petite mésaraïque) qui reçoit le sang veineux de la plus grande partie du rectum, de rS iliaque, du côlon descendant et de la moitié gauche du côlon transverse; 3® enfin, la veine splénique qui, née de la rate, se porte transversalement de gauche à droite et s’unit avec la mésenté- rique inférieure, formant avec elle un tronc très court, dont la réunion avec la mésentérique supérieure donne le tronc de la veine porte. Les veines de l’estomac se jettent dans la splénique ainsi que les veines du pancréas. La mésentérique inférieure mérite, dans la question qui nous occupe, une mention spéciale. C’est elle, en effet, qui, par quel- ques-unes de ses branches, établit des anastomoses entre le ANATOMTE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE 99 système porte et le système veineux des organes du petit bassin, anastomoses par lesquelles les vers primitivement contenus dans le système de la veine porte peuvent se répandre dans les veines de ces organes. Ces anastomoses s’effectuent principalement par l’intermédiaire de la veine hémorroïdale supérieure, branche de la mésentérique inférieure, et elles s’établissent, en général, sui- vant deux voies : premièrement, par les plexus hémorroïdaux qui, grâce aux veines hémorroïdales moyennes et inférieures (lesquelles se jettent dans l’hypogastrique, soit directement, soit par l’intermédiaire des honteuses internes), font communiquer la cir- culation veineuse du rectum avec celle des veines hypogastriques* ; secondement, d’une manière plus directe, par des troncs veineux étendus entre le réseau hémorroïdal, et les veines qui forment autour de la vessie, des vésicules séminales et de la prostate les plexus vésicaux, prostatique et séminal, si étroitement solidaires les uns des autres, que Testut* propose de les réunir en un seul plexus, auquel il donne le nom de pelvi-vésicaL Le plexus pelvi- vésical déverse son contenu dans les veines hypogastriques, il est anastomosé largement, en dehors du réseau hémorroïdal dont il a été question plus haut, avec tous les réseaux veineux du voisi- nage : le réseau de l’urétère, les veines des parois abdominales, les veines honteuses internes, les veines obturatrices, les veines spermatiques chez l’homme, utéro-ovariennes chez la femme. Ces données anatomiques nous laissent aisément comprendre quels sont les moyens de passage que les Bilharzia peuvent employer pour se rendre du système porte dans cette partie du système veineux général. Dans un exposé général comme celui que nous faisons ici, il est difficile de faire intervenir ce qui peut se passer dans certains cas d’anomalies, et pourtant nous ne résis- tons pas à l’idée de faire remarquer combien certaines anomalies veineuses déjà décrites, peuvent venir en aide à la migration des parasites. Hyrtl^ a signalé un cas dans lequel une veine de l’uré- Testât. Traité d’anat. hum., t. Il, p. 2o2. 2. Testut. Traité d’anat. hum., t. III, p. 893. 3. Testut. Loc. cit., t. II, p. 252. 100 ÉTUDE SUR' LE BILHARZIA HÆMATOBIA tère se jetait directement dans la veine colique gauche, branche de la mésentérique inférieure. Il est clair que, dans un individu porteur d’une anomalie de ce genre, des parasites pourront passer directement de la mésentérique inférieure dans les veines de Furé- tère, et que ce dernier pourra être pris, pour ainsi dire, isolément, ou du moins sans que le plexus pelvi-vésical renferme beaucoup de parasites ; contrairement à ce qui se passe d’habitude, les lésions rénales débuteront les premières et ouvriront la scène pathologique. Il est un fait remarquable et sur lequel on ne nous paraît pas avoir suffisamment insisté, c’est que la distribution des parasites n’est pas la même dans les différentes branches de la veine porte. On a trouvé des Bilharzia mâles et femelles isolés ou accouplés dans les veines mésaraïques et dans les veines vésicales, on n’a jamais trouvé que des mâles seuls (vidui^ Bilharz) dans la veine splé- nique. Ce fait, constaté par Bilharz lui-même ^ lors de ses travaux qui sont encore les meilleurs qui aient été faits sur la question, a été, pour ainsi dire, oublié depuis. Et pourtant, comment ne pas en être frappé, si Ton réfléchit que justement les seuls organes de la cavité abdominale dans lesquels on n’ait pas encore trouvé d’œufs, sont ceux dont le sang est ramené dans le tronc porte par par la veine splénique, c’est-à-dire la rate, le pancréas et l’esto- mac? Nous reviendrons plus loin sur ]a signification qu’il convient de donner à ce fait ; pour le moment, nous nous contentons de le mettre en lumière et d’attirer sur lui l’attention des personnes qui sont appelées à faire des autopsies de sujets infestés, afin de voir s’il se confirmera toujours. Les vers peuvent cheminer très loin dans les veines mésaraïques, Bilharz dit même en avoir trouvé jusque dans l’épaisseur de la vessie. Comme il s’agit d’une observation capitale et restée unique, nous citerons textuellement le passage ,'dans lequel elle est rap- portée ^ Dans une autopsie faite au Caire, le IS mars 1832, avec 1. Bilharz. Zeitsch. f. wissens. ZooL, t, IV, p. 62 : « In venis mesaraïcis repe- riuntur mares feminam in canali gynecophoro ge rentes, in venis intestinalibus, et hepaticis, in vena lienali semper vidui. » 2. Bilharz. Zeitsch. f. wiss. ZooL, pp. 71 et 72. (Note additionnelle. ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE JOl Griesinger, Bilharz rencontre une vessie tapissée intérieurement de ces petites excroissances molles dont nous avons parlé plus haut : « Je coupe la plus grosse des excroissances, et sur le cou- teau reste un filament blanc. Je l’examine de plus près, et je reconnais notre Distomiim hæmatobium. Je cherche dans la pro- fondeur de la coupe et j’en tire encore plusieurs vers. L’excrois- sance contenait dans son intérieur plusieurs cavités assez spa- cieuses communiquant entre elles et remplies de vers. Ces cavités avaient des parois lisses et s’ouvraient en arrière dans les vaisseaux, de telle sorte que je les regarde comme des capillaires très élargis. Les vers étaient des mâles et renfermaient presque tous des femelles dans leur canal gynécophore. Ces dernières se distin- guaient des femelles trouvées dans les veines intestinales par la grande clarté de leur structure interne, principalement par la grosseur et la netteté de leur ovaire, mais encore plus par leur prodigieuse richesse en œufs qui étaient à tous les stades de déve- loppement. » Nous ne croyons pas que l’observation de Bilharz ait été jamais répétée depuis lui; pour notre compte, nous n’avons jamais trouvé de parasites dans les veines de la vessie, mais les détails que donne l’auteur sont si circonstanciés et si précis qu’on ne peut les mettre en doute. Dissémination des œufs, répartition des lésions. En étudiant attentivement la muqueuse vésicale, nous avons réuni quelques faits qui, joints à l’observation de Bilharz rapportée ci-dessus, permettent de comprendre comment la dissémination des œufs peut s’effectuer. Nous joignons à nos observations des photographies de nos préparations. Ces photographies faites par l’un de nous permettront de se rendre compte de l’aspect des pré- parations et de la réalité des faits que nous allons avancer. Pour observer convenablement les vaisseaux de la muqueuse vésicale, nous avons disséqué cette dernière et nous l'avons déta- chée de la tunique musculaire de la vessie. Les lambeaux plus ou moins vastes, obtenus de cette façon, étaient tendus avec des 102 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA épingles sur de petits cadres en liège et placés dans le liquide de Müller qui les fixait, empêchant leur rétraction ultérieure gênante pour l’examen, et qui possède en outre l’avantage, bien connu des histologistes, de conserver les vaisseaux remplis de leurs glo- bules sanguins dont la présence donne lieu à une véritable injection naturelle qui indique nettement le vaisseau et permet de le distin- guer aisément. L’importance de ces injections naturelles, pour la question qui nous occupe, n’a d’ailleurs pas besoin d’être développée davan- tage. Après un séjour d’un ou deux mois dans le li- quide de Müller les frag- ments de la muqueuse qui ne revenaient plus sur eux- mêmes lorsqu’on les cou- pait, étaient lavés dans l’eau et montés directe- ment, sans coloration préa- lable, dans de la glycérine qui les éclaircissait suffi- samment , comme l’indi- quent nos photographies ; d’autres fragments étaient colorés après le lavage et montés dans la résine dammar. Dans la photographie ci-jointe on distingue très bien un réseau de capillaires sanguins présentant çà et là, sur leur trajet, des œufs de Biiharzia, tandis que d’autres œufs plus nombreux sont répandus entre les mailles des capillaires. Examinée à un fort grossissement, la préparation montre, à n’en pas douter, que les œufs sont bien véritablement contenus dans les capillaires et non pas seulement placés sur le trajet de ces derniers, comme on aurait pu l’objecter; en effet, dans un des points [x fig. 17, pl. IV), on voit un œuf dont une extrémité sortie du capil- laire fait saillie en dehors, tandis que l’autre extrémité, encore enfermée dans le vaisseau, est manifestement recouverte par la Fig. 7. — Muqueuse vésicale vue en surface. OEufs dans les capillaires. (Lortet. ad. nat. photogr.) ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE 103 paroi de ce dernier. En d’autres points, on voit des œufs plus ou moins comprimés et dont la coquille est quelquefois plissée, retenus dans l’angle formé par la convergence de deux ou de trois capillaires. Les capillaires sanguins sont complètement privés de globules rouges et paraissent vides. Leur diamètre est de beaucoup plus petit que celui des œufs; aussi, dans la plupart des points où des œufs se rencontrent dans les capillaires, ils distendent si for- tement la paroi de ces derniers que l’on ne peut l’apercevoir, accolée qu’elle est d’une manière parfaite à la coquille. Dans le point représenté figure 18, planche IV, la paroi se distingue aisé- ment parce qu’elle est un peu revenue sur elle-même à la suite de sa rupture et forme comme une sorte de collerette autour de l’extrémité libre de l’œuf. Cette observation, jointe à la description de Bilharz rapportée plus haut, suggère l’explication suivante de la ponte et de la dissémination des œufs ; la femelle unie au mâle ou bien isolée, ce qui lui permet alors de pénétrer dans des ramus- cules vasculaires plus grêles, arrive dans un vaisseau qu’elle rem- plit tout entier et où elle s’arrête. L’obstacle créé par sa présence détermine une accumulation du sang dans les vaisseaux situés en amont, et, par suite, une distension de ces derniers. La femelle pond alors, et bourre d’œufs ces vaisseaux déjà distendus, puis elle se retire; le cours du sang, bien que gêné par la présence des œufs, se rétablit ou tout au moins le plasma peut filtrer entre les œufs, les parois des vaisseaux reviennent sur elles-mêmes et, aidées peut-être aussi par les mouvements des organes voisins, chassent les œufs qui se répandent dans les capillaires environ- nants d’où ils ne tardent pas à sortir. Une fois dans les tissus, ils se comportent comme des corps étrangers durs et piquants et che- minent, poussés par les mouvements qui se passent dans leur voi- sinage. L’absence de globules dans les capillaires renfermant des œufs s’explique aisément : il est clair qu’entre le centre à partir duquel s’est faite la dispersion des œufs et les œufs arrivés le plus loin possible de ce dernier, il ne peut y avoir de globules sanguins, ces derniers ont été chassés au-devant d’eux par les œufs glissant dans les capillaires. C’est à la périphérie seulement que les capil- 104 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA laires doivent se montrer à nouveau remplis de globules. Peut- être notre préparation est-elle comprise tout entière dans Faire de dispersion des œufs d’une ponte, ce qui explique l’absence des glo- bules dans toute son étendue; peut-être aussi le sang contenu dans quelques-uns des capillaires s’est-il écoulé au moment de la dissection. C’est là un point sur lequel nous ne voulons pas dis- cuter; nous n’y attachons du reste pas grande importance, et nous ne l’avons indiqué que pour montrer comment on pouvait comprendre cette absence si mar- quée des globules san- guins. Lorsque les œufs ont abandonné les capillaires, on obtient des prépara- tions telles que celles re- présentées dans la photo- graphie ci-jointe, et dans la figure 19, planche IV, et dans laquelle on voit, en dehors des vaisseaux remplis de globules rou- ges, des œufs dispersés sans ordre dans le derme muqueux. Ces préparations de la muqueuse vésicale examinée en surface et dans toute son épaisseur sont très intéressantes ; elles nous font assister au début des lésions, en des points où au seul examen microscopique on ne soupçonnerait pas qu’il en existât, car en ces endroits la muqueuse a gardé sa minceur et sa souplesse normales. Sur des coupes d’une telle muqueuse, on trouverait à peine çà et là quelques œufs, et l’on ne pourrait certainement pas se rendre compte du mode de leur dispersion. Comme on le voit, la lésion consiste au début dans une infil- tration d’abord peu considérable du derme de la muqueuse par les œufs. C’est V infiltration bilharzienne ^ pour employer le mot de Fig. 8. — Muqueuse vésicale vue en surface. Ca- pillaires remplis de globules rouges; œufs en dehors des capillaires. (Lortet ad nat. photogr.) ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE 105 Sonsino (infar ciment o bilharzico). Plus tard, l’infiltration aug- mente ; les œufs, au lieu d’être dispersés, se resserrent de plus en plus jusqu’à se toucher tous et se répandent dans toute l’épaisseur de la muqueuse vésicale ; on a affaire alors à une infiltration abon- dante qui peut se présenter sous deux aspects : quelquefois les œufs sont répandus sur une assez grande surface de la muqueuse, avec une grande régularité. La muqueuse s’épaissit, elle devient deux, trois, quatre fois plus épaisse qu’à l’état normal; mais cette hypertrophie s’effectue uniformément sur toute l’étendue consi- dérée, l’infiltration peut être dite en 'plaques. Au niveau de cha- cune de ces plaques, la muqueuse devient dure et résistante, elle a perdu toute sa souplesse, elle crie sous le scalpel lorsqu’on la sectionne, car déjà la plupart des œufs quelle renferme ont subi la transformation calcaire. D’autres fois, l’infiltration se fait sur un point limité. On voit alors à ce niveau le derme de la muqueuse former une saillie conique (fig. 30, pl. VIII), qui peut atteindre quelquefois un assez gros volume, tandis que tout autour d’elle la muqueuse, à peine infiltrée, a conservé ses caractères normaux. Dans ce cas, on a affaire à une infiltration locale, limitée à un point, infiltration en verrue. On peut se demander si l’infiltration locale n’est pas le résultat d’une ponte effectuée isolément par une ou plusieurs femelles dans un point de la vessie qui n’avait pas encore été touché jusqu’ici, et l’observation de Bilharz, rapportée ci-dessus, est tout en faveur de cette manière de voir. Dans toutes les vessies que nous avons examinées, les œufs se trouvaient presque exclusivement dans le derme de la muqueuse et de préférence dans ses parties superficielles voisines de l’épi- thélium. Nous n’en n’avons jamais rencontré dans la couche mus- culaire et ils sont très peu abondants dans la couche sous-mu- queuse. Au contraire, leur nombre augmente rapidement à mesure qu’on se rapproche de l’épithélium; il n’est d’ailleurs pas rare de rencontrer des œufs à moitié enfouis dans ce dernier. Dans tous les points infiltrés d’œufs, on remarque un grand nombre de glo- bules blancs répandus dans le tissu connectif : c’est là un fait banal en rapport avec l’inflammation chronique dont ces points sont le siège. 106 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA La vessie nous a fourni le type le plus net des organes dans lesquels les œufs sont apportés directement par les femelles ; d’autres organes, les urétères et les reins, les vésicules séminales, le rectum sont aussi dans ce cas. Il peut paraître difficile de prime abord de comprendre comment les veines des urétères peuvent recevoir des parasites, mais les données anatomiques que nous avons rapportées plus haut lèvent bien vite cette difficulté, et, sans avoir besoin de recourir à l’ano- malie sus-indiquée (page 99) dans laquelle la mésentérique infé- rieure communiquait directement avec les veines de l’urétère, il est facile de comprendre comment, par les anastomoses qui exis- tent entre ces dernières et les branches du plexus pelvi-vésical, les parasites peuvent passer de ce dernier, qui paraît être leur séjour de prédilection, dans les parois du conduit excréteur du rein. D’autre part, on sait^ que certaines des veines de la partie supé- rieure de l’urétère communiquent avec la veine rénale et peuvent permettre à des parasites de passer dans cette dernière pour aller, par cette voie, déposer leurs œufs jusque dans le parenchyme rénal, mais c’est là un cas très rare. L’infiltration des vésicules séminales est intimement liée à celle de la vessie, et cela s’explique aisément, car les plexus séminaux et les plexus vésicaux communiquent si largement entre eux que le passage des parasites des uns dans les autres doit s’effectuer avec la plus grande facilité. Au point de vue de la distribution des œufs dans leurs tuniques, les vésicules séminales se comportent un peu différemment de la vessie. Tandis que dans cette dernière on n’observe presque jamais d’œufs dans la tunique musculaire, on en rencontre au contraire dans les muscles des vésicules toutes les fois que ces dernières en renferment, et il n’est pas rare de trouver, sur une même coupe (fig. 27, pl. VU), des œufs situés en plein tissu contractile, tandis que les autres, contenus dans les parties les plus superficielles de la muqueuse, sont prêts à tomber dans la cavité vésiculaire. Daus le rectum, les œufs ne forment jamais des amas aussi con- 1. Testut. Loc. cit., t. III, p. 868. ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE 107 sidérables que dans la vessie, ce qui tient peut-être à la mollesse plus grande de la muqueuse qui laisse plus facilement échapper les œufs qu’elle renferme et s’oppose ainsi à leur accumulation. Nous n’avons rien à dire de particulier sur les lésions rectales. Dans la figure 26, planche YII, on voit une coupe dans laquelle est situé un œuf à éperon latéral. Le revêtement épithélial des glandes de Lieberkühn, et de la surface de l’intestin est tombé, mais il s’agit peut-être tout simplement d’un phénomène cadavérique. Nous n’avons pas eu l’occasion d’examiner des fragments de peau provenant de fistules périnéales ou scrotales d’origine bilhar- zienne. A côté des organes qui reçoivent directement les œufs apportés dans leur intérieur par les femelles, il en est d’autres qui ne les reçoivent qu’indirectement par l’intermédiaire du courant san- guin, ce sont le foie, le poumon et peiit-être encore d’autres organes. Il est tout naturel dépenser qu’un certain nombre d’œufs pondus soient entraînés par le courant sanguin et amenés dans le foie, et lorsqu’on y réfléchit, on est tout étonné de ce que cet organe, qui devrait être un véritable filtre pour les œufs pondus dans le sang du système porte n’en soit pas absolument farci, mais, en réalité, il n’est pas très fréquemment atteint. D’ailleurs, lorsqu’il présente des œufs, il ne faudrait pas croire que toujours ces derniers Jui aient été apportés passivement par le courant sanguin. Leuckart ^ admet que des femelles peuvent se réfugier dans les ramifications intra-hépatiques de la veine porte et y pondre directement. En tous cas, le foie est incontestablement le dernier organe qui puisse être visité par des femelles et infesté directement par elles. On n’a, en effet, jamais trouvé de Bilharzia dans la veine cave où ils auraient pu arriver soit en traversant le foie, d’une manièr e indéterminée, soit et, plus probablement, en passant du plexus pelvi-vésical dans les veines hypogastriques et en remontant de là dans la veine cave inférieure. D’ailleurs, la présence de vers aussi volumineux que le Bilharzia, insignifiante tant qu’il s’agit d’un 1. Leuckart. Pai'asiten, 2« édit., p.533. 108 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA département vasculaire isolé de la circulation générale tel que celui de la veine porte, prendrait une signification plus grave dans une portion du système veineux communiquant avec la circulation générale; et, bien que l’on ne puisse pas comparer des corps vivants doués de mouvements, avec des corps inertes de même vo- lume (caillots sanguins, etc.), qui, eux, ne manqueraient pas de causer des embolies mortelles, il n’est pas douteux que la présence dans la veine cave inférieure de vers aussi volumineux et aussi nombreux que peuvent l’être les Bilharzia, pourrait amener des accidents redoutables. Il est donc probable que nos parasites ne sortent jamais du système de la veine porte et des veines vésicales plus ou moins directement reliées à cette dernière, mais il n’en n’est pas de même de leurs œufs. Ces derniers peuvent, en effet, se rencontrer en grand nombre dans les poumons ^ Ils y ont été tous apportés d’une manière indi- recte, c’est-à-dire par le courant sanguin, et ont pu y arriver par deux voies : premièrement, par les veines hypogastriques en par- tant du plexus veineux pelvi-vésical; secondement, parles veines sus-hépatiques après avoir traversé le foie. Deux hypothèses peu- vent expliquer le passage des œufs à travers le filtre hépatique : ou bien ils passent par des vaisseaux anastomotiques directs qui font communiquer le système porte avec les veines hépatiques sans l’interposition d’un réseau capillaire, vaisseaux que les phy- siologistes admettent volontiers (Cl. Bernard, Chauveau) ; ou bien, après s’être répandus dans les espaces de Kiernan et dans le parenchyme hépatique, ils cheminent à travers ce dernier et finis- sent par tomber dans une des veines sus-hépatiques qui les con- duit dans la veine cave. Une observation de Griesinger force aussi à admettre que les œufs peuvent arriver dans le cœur gauche. Il est probable que, 1. Dans le poumon les œufs se trouvent dans le tissu conjonctif interlobulaire en dehors des vaisseaux. Ils peuvent aussi exister dans le tissu cellulaire intra-lobulaire ou alvéolaire et même autour des bronches. Autour des œufs, il existe un peu de sclérose ou un peu d’infiltration par des cellules jeunes (Mohamed Chaker, Étude sur l’hématurie d’Égypte causée par le Bilharzia hæmatobia, Thèse de la Faculté de médecine de Paris, 1890, p. 45). ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE i09 pour arriver là, ils ont traversé le poumon, non pas en suivant les capillaires beaucoup trop étroits pour les contenir, mais en faisant un certain trajet à travers la substance même de cet organe. Du cœur gauche les œufs peuvent évidemment se répandre partout, mais, en réalité, on les observe très rarement au delà du poumon. Enrésumant les données acquises jusqu’ici, nous voyons que les différents organes dans lesquels on peut trouver les œufs les ont reçus par des voies différentes : premièrement, certains organes, la vessie, les vésicules séminales, l’urétère, le rein, la peau de la région génitale, le foie, l’intestin, en un mot, tous les organes con- tenus dans l’abdomen, sauf la rate, le pancréas et l’estomac, peu- vent recevoir directement les œufs par les femelles qui viennent les pondre dans leurs veines. Plusieurs preuves viennent appuyer cette notion de l’infection directe, ce sont : 1° la présence des vers dans les vaisseaux de quelques-uns de ces organes ; 2“ le fait que, si ces derniers ne recevaient pas les œufs directement, ils devraient les recevoir de la circulation générale par l’intermédiaire des artères. Or, s’il en était ainsi, ce n’est pas eux qui seraient infestés les premiers, de plus, on ne comprendrait pas comment certains organes tels que la rate qui reçoivent leur sang artériel d’un même tronc que le gros intestin, ne contiendraient jamais d’œufs alors que le rectum en renferme presque toujours ; 3° la possibilité du passage des parasites de l’un des vaisseaux du petit bassin dans les autres par les anastomoses multiples signalées plus haut. En second lieu, il est des organes qui peuvent être infestés secondairement d’une manière indirecte par le sang qui charrie les œufs tombés dans son courant. Ces organes sont naturellement ceux qui se trouvent les premiers sur le trajet du sang au sortir des veines du petit bassin, c’est-à-dire le foie et les poumons. Ces organes filtrent pour ainsi dire le sang veineux et ne laissent que rarement échapper des œufs qui peuvent ainsi arriver dans l’arbre artériel. Enfin, il est certains organes qui ne sont jamais infestés, ce sont la rate, le pancréas et l’estomac. Ces considérations jointes à l’observation de Bilharz. qui na 110 ÉTUDE SUR LE BILHARZIA HÆMATOBIA jamais trouvé que des mâles seuls dans la veine splénique, nous conduisent aux réflexions qui suivent. La distribution des lésions se fait pour ainsi dire d’une manière régulière ; la vessie, les vési- cules séminales et le rectum sont touchés les premiers et peut-être simultanément; viennent ensuite les urétères, le rein rarement, et enfin la peau du scrotum ou du périnée (le foie occupe une place à part parce qu’il est exposé à deux modes d’infection, directe et in- directe). La gradation suivie dans la distribution de ces lésions répond évidemment à la distribution des femelles qui se placent de préférence dans les veines des plexus vésicaux et dans les veines rectales. A quoi est due cette distribution très spéciale? Très pro- bablement à deux causes : la première, de beaucoup la plus impor- tante est le point par où se fait l’entrée du parasite dans le système veineux ; la seconde, un peu hypothétique peut-être, pourrait dé- pendre d’une sorte de choix fait par la femelle. Le point d’entrée des parasites doit être cherché au niveau des veines intestinales, c’est par l’intestin que l’animal, ingéré proba- blement avec l’eau, pénètre dans l’organisme ^ Arrivés dans les veines intestinales les parasites y restent en grande partie, quelques-uns d’entre eux toutefois gagnent par les hémorroïdales supérieures le plexus pelvi-vésical d’où ils peuvent se répandre, si leur nombre augmente, dans les veines de l’urétère et même dans celles du rein. Mais pourquoi les femelles ne pénètrent-elles jamais dans la veine splénique? Ce ne sont pourtant pas les moyens de passage qui leur manquent. La veine splénique forme avec la mésentérique inférieure, siège principal des parasites, un tronc court assez large, qui s’ouvre dans la veine porte où les parasites viennent aisément ; comment dès lors comprendre que ces derniers refusent de s’engager dans une voie qui leur est si largement 1. On a vu plus haut (p, 95, note) que pour Brock les Bilharzia pénètrent par les très fines veines superficielles de la peau, de Turèthre ou du rectum. 11 nous paraît impossible qu’un animal conformé comme l’embryon infusoriforme décrit ci-dessus puisse pénétrer à travers une muqueuse si fine qu'on la suppose, car il est facile de voir que ces embryons ont toutes les peines du monde à se dégager des caillots sanguins dans lesquels ils peuvent être contenus, et seraient incapables de percer un tissu même peu résistant. Aussi il nous semble probable que ce n’est pas sous la forme d’embryon cilié que le Bilharzia peut s’introduire dans le système veineux. ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA BILHARZIOSE 111 ouverte? Cela peut tenir à deux causes : ou bien la composition chimique du sang de la veine splénique, évidemment différente de celle des veines mésaraïques qui renferment tous les produits absorbés, exerce sur les parasites une sorte de répulsion qui n’affecterait d’ailleurs que les femelles, puisque ces dernières seules ne s'y trouvent jamais, ou bien, ce qui est plus probable, les femelles choisissent pour effectuer leur ponte, les vaisseaux d’où les œufs ont le plus de chances de sortir bien vite pour passer au dehors et perpétuer l’espèce. En un mot, la femelle choisit pour pondre ses œufs des surfaces par lesquelles ces derniers peuvent être facilement évacués au dehors. Cette sorte de choix n’a rien qui répugne à Tesprit, et les exemples sont nombreux dans lesquels on voit, au moment de la reproduction, des individus très inférieurs offrir des marques d’un instinct admirable au point de vue de la conservation de l’espèce. D’ailleurs, il ne faudrait pas croire que nous voulions entendre par le mot choix un acte conscient et réfléchi, nous voulons simplement exprimer par là une adaptation spéciale entre l’individu et le milieu qu’il habite, l’organisme humain, adaptation en vertu de laquelle le parasite vient pondre ses œufs dans des organes d’où ils peuvent facilement passer au dehors et assurer par là l’avenir de leur race. EXPLICATION DES PLANCHES LETTRES COMMUNES A PLUSIEURS FIGURES : c, cuticule; c. p, cellules parenchymateuses; c. 7?,, cellules nerveuses; c. ger, cel- lules germinales ; dig.^ tube digestif proprement dit ; exc., appareil excréteur ; germ., germigène; gl. c., glande coquillière ; gl., glandes; m. L, muscles longitudi- naux; m. t., muscles transversaux; m. 0., muscles obliques; m. d. v., muscles dorso- ventraux; o.d., oviducte; 0. exc., orifice de l’appareil excréteur; œs., œsophage; pi, piquants de premier ordre; p2, piquants de second ordre; p. ü., pavillons vibra- tiles; syst. ner., système nerveux central; sin., sinus transverse; test., testicules; t. t., tubes testiculaires; vgg., vagin; vd., vitelloducte; ver., verrues; vg., vitello- gène;ü^. 0., ventouse orale; vt. v., ventouses ventrales; z, pointes du tégument. PLANCHE I Fig. 1. — OEuf vu par transparence montrant les muscles de l’embryon et ses pointes, z. — Oc. 4. immers. Zeiss. Fig. 2. — Embryon fixé par l’osmium vu de profil. — Oc. 4 immers. Zeiss. Fig. 3. — Embryon fixé en état de relâchement, vu de face. — n, noyaux du tube stomacal; n. g, noyaux des glandes. — Oc. 4 immers. Zeiss. Fig. 4. — Embryon fixé ayant conservé l’aspect qu’il présentait pendant la vie, vu par la face dorsale. — Même grossissement. Fig. 5. — OEuf contenant un embryon vivant observé dans l’urine, un peu sché- matique, même gross. Fig. 6, — Partie antérieure du corps d’un Bilharzia femelle. — Oc. 1, obj. 6 Leitz. PLANCHE II Fig. 7. — Une partie de la région postérieure dn corps de Bilharzia femelle, pour montrer les glandes vitellogènes et le vitelloducte. — f, contenu du tube digestif. — Oc. 1, obj. 6 Leitz. Fig. 8. — Partie postérieure du mâle. — Oc. I, obj. 2. Vérick, réduit de moitié. Fig. 9. — Bilharzia mâle et femelle accouplés. — Oc. 1, obj. 0. Vérick. S 114 EXPLICATION DES PLANCHES Fig. 10. — Une partie de la région post. de Bilharz. femelle pour montrer le vitellogène et les canaux excréteurs. — /*, contenu du tube digestif. — Oc. 1, obj. 6, Leitz. Fig. 11. — Partie du corps de Bilharz. femelle comprenant la glande coquillière et le vagin. — Oc. 1, obj. 6, Leitz. PLANCHE III Fig. 12. — Muscles annulaires de l’intestin. — Oc. 1, obj. 9, Leitz. Fig. 13. — Coupe transversale de la partie antérieure du corps de Bilharzia mâle passant par le système nerveux central. — Oc. 1, obj. 9, Leitz. Fig. 14. — Cuticule et muscles sous-jacents vus de face. — St?\, stries transver- sales de la cuticule. — Oc. 1, obj. 6, Leitz. Fig. 15. — Partie postérieure du corps de la femelle. — f, contenu du tube di- gestif. — Oc. 1, obj. 6, Leitz. Fig. 16. — Partie du corps de la femelle comprenant le germigène et la glande coquillière. — Oc. 1, obj. 6, Leitz. PLANCHE IV Fig. 17. — Muqueuse vésicale vue de face et dans les capillaires sanguins de laquelle se trouvent des œufs. — x, point renfermant un œuf à demi sorti du capill. — Oc. 1, obj. 2, Vérick. Fig. 18. — Le point x de la fig. précédente grossi. — Oc. 1, obj. 6, Vérick. Fig. 19. — Muqueuse vésicale vue de face. Capillaires remplis de globules san- guins. OEufs en dehors des capillaires. — Oc. 1, obj. 2, Vérick. Fig. 20. — Bilharzia femelle en entier pour montrer l’étendue de diverses régions du corps. — Oc. 1, obj. 2, Vérick. PLANCHE V Fig. 21. — Glande coquillière. — Oc. l, obj. 6, Leitz. Fig. 22. — Partie antérieure du mâle vue par la face ventrale; gé., vésicule et ori- fice génital. — Oc. 1, obj. 2, Vérick. Fig. 23. — Partie antérieure du mâle vue par la face dorsale. Même gross. PLANCHE VI Fig. 24. — Coupe transversale du mâle au niveau de la partie moyenne du corps. — m. cr., muscles creux. — Oc. 1, obj. 6, Leitz. Fig. 25. — Coupe transv. du mâle, passant par les vésicules testiculaires. — Oc. 1, obj. 6, Leitz. EXPLICATION DES PLANCHES li'i PLANCHE VII Fig. 26. — Coupe transv. de la muqueuse rectale renfermant un œuf à éperon latéral, dans un capillaire. — l, glande de Lieberkühn; m. m, muscularis mucosæ; c, tissu conjonctif sous-muqueux. — Oc. 1, obj. 4, Leitz. Fig. 27. — Coupe transv. d’une vésicule séminale. — ep, épithélium, m, couche musculaire, pl, plis saillants dans la cavité de la vésicule. — Oc. 4, obj. 16 o™/“, Zeiss. PLANCHE VIII Fig. 28. — Embryon fixé déformé. — r. c, revêtement cilié détaché du corps. — Oc. 4, immers. Zeiss. Fig. 29. — Embryon fixé. — Oc. 4, immers. Zeiss. Fig. 30. — Coupe transversale de la vessie, passant par une petite excroissance de la muqueuse remplie d’œufs de bilharzia. — t. m, tunique muqueuse; ep, restes de l’épithélium vésical; o, œufs; m, tunique musculaire. — Oc 1, obj. 0, Vérick. fc - y.- * L*' ^ 'r j/îï ■■ . .4:. , .V .... . ,.■ vr.i,v •■ . w^, ■ -. :;■ ' 1- V ■' . . ' ■ : ■ . ■-'.; ^.'s?.:- ■ ■'■•■< ,r: -- { } ^ ' .-:, . "/■ ■ ■ ' -i . <4,r 'W ,.P K' r 4»- .» .*"4 f . , ''‘r’3' .- v- ■ :1 ‘■'f ' 1, •S. — fiï - '.:i‘ *' i-ij'"' .:i ‘-‘ '>,:#r . . ;■ ■■ . :à r,:-''"^\' il ' ...ife. Bilharzia.PL.I. Pana, G Masson. Lemepcicr, Paria Bilharzia. PL, 11 Üniv. de Lj'-on. Fig. 7 Pane G.Ma.aaon. I BilKarzia.PLÜI. Lem«i’cmr,P«iriC» I PL.V, Uriiv. de Lyon. Bilharsia, Fig^. 21 Imp‘®^Leniercier, Paris . Pans.G.Massor., I Univ. de Lyon. Bilharzia. PL. VI - _ . m cv. -H H s Fig. 26 -/ Univ. de Lyon. Bilharzia. PL. VIL i î ïi I £ r Fig. 27 Lemercier, Pans Paris.G.MaSvSoe. f' r syst Bilharzia. PL.VHl. Fig. 29 Fig. 30 Imp^®^Leinepcier, Paris. Paris.G.A'IavSson I % TABLE DES MATIERES Pages. Introduction ] CHAPITRE PREMIER. — Examen détaillé d’un cas de Bilharziose 7 CHAPITRE II. — Anatomie du bilharzia hæmatobia 18 Forme du corps 19 Téguments 21 Parenchyme 22 Système musculaire 24 Système nerveux 26 Système excréteur 28 Appareil digestif 30 Appareil génital 34 Couples 47 CHAPITRE III. — L’oeuf et l’embryon 43 Forme des œufs 47 Système tégumentaire de l’embryon 30 Tube stomacal 33 Glandes 33 Système nerveux 36 Système excréteur 36 Cellules germinales 38 Evolution de l’embryon. — Sa destinée 39 CHAPITRE IV. — Expériences de culture et d’inoculation 63 Expériences de culture des embryons dans l’eau Expériences de culture dans des liquides organiques Tentatives d’inoculation à différents mollusques de nos pays — — à des mollusques de la vallée du Nil — — à des cobayes — — à des lapins — — à un singe — — à un bovillon 66 69 71 72 “O 73 73 118 TABLE DES MATIÈRES CHAPITRE V. — Le Nil, les Birkets et les eaux potables en Egypte Eaux potables d’Alexandrie et du Caire Les eaux potables dans les campagnes, les Birkets Animaux et végétaux des Birkets CHAPITRE VI. — Anatomie pathologique de la bilharziose Distribution des Bilharzia dans l’organisme de leur hôte. . . Dissémination des œufs. — Répartition des lésions Explication des planches 2JAN i- Paris. — lmp. de la Cour d’appel, L. Maretheux, directeur, 1, rue Cassette. — 3840. t*J^‘p< ■TOjygy^ < W'’(^^ '^f'' *" ' ,'■.■'*•».■ Av.r; '.r r*^' ;■ ''" ', '•'i- ’^* • : -r..-. ■ -I ffwv^t‘S«ï:sw'Kï:;x,#'a •;■,■: • î::/ ■ Wy.- ' , rt ■ . 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Bataillon, préparateur de Zoologie à la Faculté des Sciences, avec 6 planches hors texte 4 fr. — Fascicule 2. — Anatomie et Physiologie comparées de la Pholade dactyle. Structure, locomotion, tact, olfaction, gustation, action dermatoptique, photogénie, avec une théorie générale des sensations, par le D" Raphaël Dubois, professeur de Physiologie générale et comparée à la Faculté, avec 68 figures dans le texte et 15 planches hors texte 18 fr. — Fascicule 3. — Sur le pneumogastrique des oiseaux, par E. Couvreur, docteur ès sciences, chef des travaux de physiologie à la Faculté des sciences, avec 3 planches hors texte et gra- phiques dans le texte 4 fr. — Fascicule 4. — Recherches sur la valeur morphologique des appendices superstaminaux de la fleur des Aristoloches, par M^‘® A. Mayoux, élève de la Faculté des Sciences, avec 3 planches hors texte 4 fr. TOME III, Fascicule 1. — Sur la théorie des équations diffé- rentielles du premier ordre et du premier degré, par Léon Autonne, Ingénieur des Ponts et Chaussées, Docteur ès sciences mathématiques . 9 fr. — Fascicule 2. — Recherches sur l’équation personnelle dans les observations astronomiques de passages, par F. Gonnessiat, Aide-Astronome à l’Observatoire, chargé d’un Cours complémen- taire d’Astronomie à la Faculté des Sciences 5 fr. TOME IV. — Lettres intimes de J.-M. Alberoni adressées au comte I. Rocca, ministre des finances du duc de Parme, et pu- bliées d’après le manuscrit du collège de S. Lazaro Alberoni, par Emile Bourgeois, professeur à la Faculté des Lettres, avec un portrait et deux fac-similé . » 10 fr. TOME V. — Le Fondateur de Lyon, Histoire de L. Muna- tius Plancus, par M. Jullien, professeur-adjoint à la Faculté des Lettres, avec 1 planche hors texte ........... 5 fr. TOME VI, Fascicule 1. — Etude expérikentale sur les pro- priétés attribuées à la tuberculine de M. Koch, faite au labora- toire de médecine expérimentale et comparée de la Faculté de Lyon, par M. le professeur Arloing, M. le D' Rodet, agrégé, et M. le D'’ CouRMONT, avec planches en couleurs ....... 10 fr. — Fascicule 2. — Histologie comparée des Ebénacées dans ses rapports avec la Morphologie et l’histoire généalogique de ces plantes, par Paul Parmentier, professeur de l’Université, avec 4 planches hors texte 4 fr. — Fascicule 3. — Etude stratigraphique sur le Jurassique inférieur du Jura méridional, par Àttale Riche, docteur ès sciences, avec planches hors texte 12 fr. — Fascicule 4. — Recherches sur la production et la loca- lisation du Tannin chez les fruits comestibles fournis par la famille des Pomacées, par M^^® A. Mayoux, élève de la Faculté des Sciences de Lyon. 1 vol. in-8® avec 2 planches . . . 3 fr. Paris. — Imprimerie L. Maretheux, 1, rue Cassette. -.'n~* .■■- -X'. sppsiWii»i iliSi iÿïSîSftfe mm SS iiÉi