' Ë , veu ‘ n « Le \ Het À th y H ÿ } ‘ ) à L 0 ' | À A AN A î de: À 4 d ! ARE V'éde RATE TEA AAA 1 ATX À EEE | ‘ . MAL) 46h 079,0 414 ANNE si " \ 0 COPROUNEUE CONTE TA ACTA vtr [Es i A AP QUE } UE ! 1 D ‘ N n \ 1712 a 1 , “4 CRRELC RES EE . , ; 4 i ‘ V4 \ j A RAIN l ‘ dote ls t H , ‘ , ll ' 1 L' \ * DE l 4 dt jet 1 à ' ñ « NN vote ' t 1 ‘ 1,4 mn ‘ ! 1 , *i Û A i \ ‘u t ri My L) 4 ! ' Vu da + \* r, L 0 it 14 } L PAR TS LARRC RONA T es HI HA LL [INA RATE Al x . 1 à \ pr tx OT É Nan TES he Ces a LR Ne a rt ÿ puit) Nr \r À pie sl du ét A} fi Eat 4 tar ou tel ' ALAN PS ju HAE RARE sn ni RAR ! foi 119 \EN IN HA î ÿ l LES TRTNAUPNEITU ra « ee | MAG late” ) } PARENT tr ) Fee tt \ ! 2 { (oi n A : 1 AAA COCA HE 24 CET [RP 414 w BA k \ nur \ P ï 4 VU À ù \4 A À \ F4) ! : EE ne AL A 44! AN 5 | IPS 1e) ar À 4 LA sant 0 4 [Hr er LP F4 j { \ ! \ oi ' | » C] n e x | | En D PE Ra M A pe Û ' Lu 1 at dus Lan "'ON N fa? 3 à 1 (] à ve 4 1] TA ane au te M hra | n ‘ PATES , , fs uit rit ‘ ali : 4 MONUTANS ‘ ‘ * L . Li # “ à L : “dé à 4 . “ . L'AUTUS / d Au . Ai A LE " 14 : : ù MN AT A 4] PRE AT PL 3 À AA, ; | Hi Fa il ARTE ' 4 n . En s \ L LA At il £ 4 ‘ A L'EU { À h Fe el 1€ { Un » | L * . . L n ; { ‘ 4: 1 3 d de ji , « % ‘ ? <' + / ‘ 4 } 1 t , bi } il ” ex } « 1} « ' “ n n « } ; \ ‘ { «1 ‘d à Fu L M UT UE LE CO PES Met at ES MN ES NS Re, {: MP CT ENS RO ANT UMR MONT M AT IE af, a 4 (| nl | ui h fa » . RATE Ne CRUE CET L] # m. E i ? ‘ “ ve L , 1: “ i 4 U n . ; k APE IP AVI Lu pete l'olie : Wir LOL h l'AS F D: M 4 712 1 \ n 24 L'MPN g ! ML n 4 7 A \. » LT sui A Fu hi 18 1424 LNIT à ut ‘ FRA ÿ » 1 ê TDH: ra N°4 LS PSP RE Re PR LP GLS PC en d TT BEAUTE ; pie cf + 35 L ' 0 F4 PL 4 5 k ° % : \ 4404 ; CP ' h "1 f Û i y ; | 20] n n 1,9 DE En s LU (ui + L # | LAN ' ’ RAT ‘ PE 1 it TT) 71 ox nl jt y" RCE MT ‘ 1” ,# - \ LU n CE CU TI AU 1 pa VA y UE) La Mad m9 014 da 74 à PET Ds ee er age d k. F F 4 af ANNALES DES _ SCIENCES NATURELLES HUITIÈME SÉRIE ZOOLOGTE ne - << DR a Le Fe uction réservés a # u: et de reprod cl Droits de traduc es RTOU ri à ? ul ar ne SR (1 ta . CRT Er FRL = ‘oi | i 2 4 5 Le ns “ FATAN : F d'u ht « K : 4x É “UE à ERA L p A be s | ANNALES DES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE ET PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. À. MILNE-EDWARDS TOME TROISIÈME PARIS MASSON ET C", EDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 420, Boulevard Saint-Germain 1896 505.dy NOTICE SUR LA FAUNE ORNITHOLOGIQUE ANCIENNE ET MODERNE DES ILES MASCAREIGNES ET EN PARTICULIER DE L'ILE MAURICE D'APRÈS DES DOCUMENTS INÉDITS Par M. E. OUSTALET, Les recherches de M. A. Milne Edwards, de sir Édouard Newton et de M. Alfred Newton, du docteur Gadow, de Schlegel, d’'Owen, de Strickland et Melville et d’autres naturalistes ont montré que la faune des îles Mascareignes élait jadis beaucoup plus riche qu’elle ne l’est aujourd’hui et qu'elle s’est successivement appauvrie par l'extinction de plusieurs espèces que la lourdeur de leurs formes et l’imper- fection de leurs organes de vol rendaient moins capables que d’autres d'échapper à la poursuite de l’homme. Ce n’est pas, en effet, à des changements survenus dans la nature du sol, dansle climat, dans la végétation, qu'il faut attribuer, en général, la disparition de quelques-uns des éléments les plus intéressants de la faune des îles Mascareignes; ce sont les équipages des navires hollandais, ce sont les premiers colons européens qui doivent être rendus responsables de l’anéantissement de ces Tortues géantes, de ces Drontes, de ces Founingos, de ces Colombes, de ces Perroquets, de _ ANN. SC. NAT. ZOOL. niv 2 E. OUSTALET. ces Oiseaux de proie, de ces Poules d’eau qui peuplaient jadis l’île Bourbon, l'île de France et l’île Rodrigue. Pour- chassés sans trêve et sans merci sur des terres d'une étendue restreinte où le déboisement les privait de leurs retraites naturelles, ces animaux, dont quelques-uns se recommandaient, du reste, par les qualités de leur chair, ont disparu avec une rapidité extraordinaire, en moins d’un siècle. Heureusement, grâce aux recherches auxquelles je faisais allusion tout à l'heure, leur histoire a pu être recon- stituée, dans beaucoup de cas, et quelques-uns d’entre eux sont même maintenant aussi bien connus que s'ils vivaient encore autour de nous. Dans ce travail de reconstitution on s’est servi principalement des ossements exhumés de divers gisements des îles Maurice et Rodrigue et l’on a fait usage aussi des documents fournis soil par les relations de F. Leguat et de quelques voyageurs français et hollandais, soit par les dessins et tableaux exécutés par des peintres qui avaient pu voir vivant en captivité quelques-uns des anciens Oiseaux des îles Mascareignes ; mais 1l est une source de renseignements à laquelle on n’avait point puisé jusqu'ici. Je veux parler des dessins faisant parlie de la série de documents manuscrits laissés par le célèbre voyageur Philibert Commerson et conservés à ia bibliothèque du Muséum d'histoire naturelle. En appelant mon attention sur l'intérêt que présentent ces dessins, M. Milne Edwards a eu la grande obligeance de meltre, en même temps, à ma dis- position des manuscrits qu’il possède et qui proviennent de Julien Desjardins, fondateur et membre de la Société d’his- toire naturelle de l’île Maurice, de 1829 à 1840. C’est à l'aide de ces matériaux qu'a été rédigée la Notice suivante. Quelques mots d’abord sur Desjardins et sur Commerson. Julien-François Desjardins naquit à l’île de France en 1799 el manifesta de bonne heure un goût très vif pour l’histoire naturelle, à laquelle il consacra sa vie entière. Pendant vingl ans il ne cessa de réunir, dans son habitation de Flacq, des collections d'histoire naturelle à l’aide desquelles il se FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 3 proposait de publier une Faune de l’île où 1l était né. En 1839 il vint en France dans ce but; mais, peu de mois après son arrivée, il fut enlevé à la science et à ses amis, le 18 avril 1840. Desjardins était membre de plusieurs sociétés savantes de France et d'Angleterre, entre autres de la Société cuviérienne de Paris, et élait en relations avec G. Cuvier, à qui 1lenvoya des ossements de Dronte qui firent l'objet d’une Note lue à l'Institut le 12 juillet 1830. De 1829 à 1839 il fil à la Société d'histoire naturelle de l’île Maurice, qu'il avait fondée, de nombreuses communications sur des Mammifères, des Oiseaux, des Poissons el des Insectes; mais de la plupart de ces communications il ne fut publié que de simples résumés dans les Procès-verbaux, aujour- d'hui presque introuvables, de ladite Société; quelques-unes même restèrent inédites ou furent simplement mentionnées, d’après les Rapports annuels rédigés par Desjardins, soit dans le Proceedings de la Sociélé zoologique de Londres, soit dans les Annales des sciences naturelles de 1830 à 1836. Grâce aux biographies publiées par M. P.-A. Cap (1) et par M. je D° F.-B. de Montessus (2), la vie de Commerson est aujourd'hui bien connue et nul n’ignore les services qu'il rendit à la science. Philibert Commerson ou de Commer- son (3) naquit à Châtillon-les-Dombes (Ain) le 18 novem- bre 1727 et pril ses grades à la Faculté de Montpellier, qui lui conféra le diplôme de docteur vers 1751. Sur la recom- mandation de Poissonnier et de l’abbé Lachapelle il fut attaché par le marquis de Praslin, ministre de la marine, à l'expédition autour du monde dirigée par M. de Bougain- ville, et s’embarqua sur la flûle l'Étoile, commandée par M. de la Giraudais, dans les premiers jours du mois de (4) Philibert Commerson, naturaliste-voyageur, in-8, Paris, 1861. (2) Martyrologue et biographie de Commerson, extrait des Bulletins de la Société des sciences naturelles de Saône-et-Loire, Chalon-sur-Saône, 1889. (3) Dans ses lettres, dans son testament, dans les titres de ses ouvrages, Philibert Commerson ne mit jamais la particule que le ministre et M. de Bougainville placaient devant son nom, sans doute parce que le père de Commerson, notaire et conseiller du prince des Dombes, était seigneur de Romans. 4 E. OUSTALET., février 1767. Par suile de quelques avaries survenues au moment du départ et durant la traversée de France en Amérique 1} ne put rejoindre que le 21 juin 1767, à Rio-de- Janeiro, M. de Bougainville qui était parti de Rochefort avec la Poudeuse dès le 15 novembre 1766. Les deux navires franchirent de concert le détroit de Magellan, visitèrent plusieurs îles du Pacifique, notamment les Nouvelles-Hébri- des et Taïti ou la Nouvelle-Cythère, puis les Moluques et quelques îles voisines de la Nouvelle-Guinée, et arrivèrent à l’île de France le 8 novembre 1768. Après une courte relâche M. de Bougainville remit à la voile le 12 décembre pour retourner en France (1); mais sur la demande qui lui fut adressée par Poivre, commissaire général de la marine, faisant fonctions d’intendant, il laissa à l’île de France Philibert Commerson qui devait s'occuper de recherches d'histoire naturelle tant sur cette île qu'à Madagascar. Commerson se mit à l’œuvre immédiatement. Il parcourut en tous sens l’île de France, visita une partie de l’île de Ma- dagascar, du mois d'août 1770 au mois de janvier 1771,s'ar- rêta à l’île Bourbon d'abord pour rétablir sa santé gravement compromise et ensuite pour répondre aux vœux des adminis- trateurs de la colonie qui désiraient la lui voir explorer avec son zèle accoutumé, et revint à l’île de France dans les premiers jours de février 1772. À partir de ce moment ses forces allèrent en déclinant. Le départ de son ami et protecteur Poivre, qui avait demandé à rentrer en France, l'arrivée d’un jeune médecin, Maillard du Mesle qui, loin de le seconder, s’employa, dit-on, à le desservir, l’injus- tice incroyable dont il fut victime de la part du ministre et qui se traduisit par la suppression de son traitement, avec effet rétroactif, ‘tous ces chagrins et ces déboires aigrirent le caractère de Commerson et hâtèrent sa fin. Il mourut le 13 mars 1773, à l'âge de quarante-six ans (1) Le voyage de Bougainville a été publié sous ce titre : Voyage autour du monde sur la frégate du Roi la Boudeuse ct la flute l'Etoile, en 1766, 67, 68 et 69, par M. de Bougainville, in-4°, Paris, 1771. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. b seulement, après avoir, dans sa trop courte carrière, pleinement justifié l’épigraphe empruntée à Virgile, qu'il avait inscrite sur quelques-uns de ses cahiers de notes et reproduite dans ses leltres : Quæ regio in terris nostri non plena laboris? C’est surtout dans le domaine de la botanique que s’élait exercée l'infatigable activité de Commerson qui, avant de quitter l'Europe, avait déjà constitué un herbier formant plus de 200 volumes in-folio (1). « Je rapporte déjà de mon voyage autour du monde, écrivait-il de l’île de France à un de ses amis (2), une fois plus de plantes que Tourne- fort n’en cueillit dans son voyage au Levant. Ma collection seule de fougères et de gramens surpasse celle de Scheu- schzer et de Plumier. J'ai enrichi en proportion toutes les autres parlies de lhistoire naturelle, sans compter les nouvelles récoltes que je vais faire dans cette île, dans celles de Bourbon et de Madagascar. » Commerson ne négligeait pas, en effet, les autres branches de l'histoire naturelle, la zoologie, l'anthropologie, la géologie et la minéralogie. En zoologie les Insectes et les Poissons paraissent avoir eu ses préférences (3), mais il (1) Il légua cet herbier au Jardin du Roi par son testament fait à Paris, avant son départ, le 15 décembre 1766. (Voy. Cap, op. cit., p. 4ti, et de Montessus, op. cit., p. 22.) (2) Cap., op. cit., p. 26. (3) « Infatigable au travail, plein d’ardeur et de sagacité, Commerson, dit G. Cuvier, fit des collections immenses dans les trois règnes et laissa, sur l’ichtyologie particulièrement, une suite de descriptions plus exactes, plus détaillées qu'aucune de celles de ses prédécesseurs ; elles embrassaient des Poissons de l’Atlantique, de la côte du Brésil, de tout l’Archipel des Indes, et spécialement de l'Isle de France et de Madagascar, au nombre de plus de cent soixante espèces, dont plus des deux tiers étaient nouvelles alors. Il y établissait quelques bons genres qui ont dû être conservés. Des dessins faits les uns par Sonnerat ou par Commerson lui-même, les autres par un peintre nommé Jossigny, accompagnaient le texte; et, pour que l'on püût toujours en vérifier l'exactitude, Commerson y avait joint les Poissons eux- mêmes, desséchés à la manière de Gronovius. » Une partie de ce qui con- cernait les Poissons fut employée par Lacépède ; mais ce fut Cuvier et Du- méril qui, ayant retrouté les échantillons et les descriptions de Commerson, rendirent pleine justice à cet excellent observateur. (Cuvier et Valenciennes, Hist. nat. des Poissons, 1828, 1. I, p. 124.) 6 E. OUSTALET., avait recueilli aussi un très grand nombre de spécimens de Reptiles, d'Oiseaux et de Mammifères dont il avait pris la description et qu'il avait fait dessiner sous ses veux. De cetle œuvre immense une faible partie malheureu- sement est arrivée jusqu'à nous. Le reste fut perdu ou dispersé. Quelques-uns des envois que Commerson fil pendant son séjour à l’île de France ne paraissent pas êlre parvenus à destination, et quoique l'État eût fait venir, en 1774, au Jardin du Roi, après la mort du malheureux voyageur, lrente-deux caisses contenant quelques-uns de ses manuscrits el ses dernières collections, il ne fut pas publié de travail d'ensemble sur toutes ces richesses qui furent en partie négligées, dispersées (1) ou mises à contribution sans qu'on prît toujours la peine d’en indiquer la source. Emporté par son zèle de collectionneur, Commerson ue prenait, d’ailleurs, pas toujours le temps de classer les maté- riaux énormes qu il rassemblait et remeltait à son retour en France de coordonner ses notes. Ceci nous explique d’une part pourquoi les quelques cahiers de notes qui ont élé sauvés et qui sont conservés à la Bibliothèque du Muséum sont incomplets, raturés, de l’autre pourquoi la plupart des dessins d'Oiseaux sont privés de la descriplion correspondante et ne portent plus que quelques lignes au verso, une brève diagnose, de la main de Commerson. Ces dessins d’Oiseaux, les seuls dont j aie à m'occuper ici, ont été exécutés par un jeune dessinateur nommé Jossigny, que Commerson avait emmené en quittant l’Europe et qui demeura certainement avec lui à l’île de France, les autres par Pierre Sonnerat, commissaire de la marine, qui était venu rejoindre Commerson à l'ile de France en 1768 et qui fut son compagnon et son collaborateur jusqu’au (1) .« Ses travaux eurent le même sort que ceux de Plumier auxquels ils étaient bien supérieurs, dit G. Cuvier (Hist. nat. des Poissons, t. I, p. 123). Les papiers et les collections qui les contenaient, envoyés après sa mort au ministère, furent remis à Buffon qui en inséra quelques lambeaux dans son Histoire des Oiseaux, et négligea le reste.» FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 7 29 juin 1771, époque à laquelle il s'embarqua lui-même pour la Nouvelle-Guinée (1). Les dessins de Sonnerat sont souvent coloriés, mais en général moins bons, moins artistiques que ceux de Jossigny, qui sont, pour la plupart, à la mine de plomb et représen- lent les Oiseaux de grandeur naturelle ou à peine grossis. Parmi ces dessins de Jossigny nous trouvons d’abord la Huppe de Bourbon où Huppe du Cap dont M. Milne Edwards et moi avons longuement parlé dans notre Voñce sur quel- ques espèces d'Oiseaux, actuellement éteintes, qui se trouvent représentées dans les collections du Muséum d'histoire naturelle, Notice qui a été insérée dans le volume commémoratif publié en 1893 à l’occasion du Centenaire de la fondation du Muséum d'histoire naturelle. Comme nous l'avons établi dans ce travail, la Huppe de Bourbon, appelée aussi impro- prement Æupve du Cap, n’est pas une Huppe, mais une sorte d'Étourneau, qui est originaire de l’île de la Réunion et qui, sous le nom de Fregilupus varius, doit prendre place dans les catalogues ornithologiques, non loin des Hartlau- bius de Madagascar et plus près encore de l'espèce éteinte de Rodrigue, que MM. Günther et Newton ont appelée Necropsar rodericanus (2). Comme nous l’avons dit aussi le Fregilupus varius vivait encore à l’île Bourbon {île de la Réunion) en 1835, mais il doit être considéré comme entiè- rement éteint à l'heure actuelle. Ceci donne une valeur toute particulière au dessin de Jossigny qui a été fait d'après (1) Pierre Sonnerat était le neveu de Poivre, intendant de l'ile de France et de Bourbon. Ce dernier désirant procurer aux colonies, en prévision d'une guerre prochaine, des secours en vivres, en effets de marine, expédia pour cet effet aux îles Philippines et aux terres des Papous la flûte l'Isle de France, commandée par M. le chevalier de Coëtivi, enseigne de vaisseau, et la cor- vette le Nécessaire. Sonnerat fut attaché à cette expédition. Il revint à l'ile de France en 1772 et en France en 1773, rapportant de nombreuses collec- tions, repartit pour l'Inde, en 1774, chargé d’une mission du gouverne- ment, visita la presqu’ile de Malacca et la Chine jusqu’en 1781 et séjourna ensuite quelque temps à l’île de France, à Madagascar et au Cap, avant de rentrer en France. 11 mourut à Paris en 1814. (2) Philos. Trans., 1879, t. 168, p. 427 et pl. XLIII, fig. 2; R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1890, t. XIII, p. 195. 8 E. OUSTALET, nature, probablement même en partie d’après le vivant, et qui concorde admirablement, pour ies dimensions, avec l'un des spécimens conservés dans les galeries du Muséum. En comparant ce dessin avec la figure qui accompagne notre Mémoire de 1893 (1) et dont nous croyons pouvoir garantir l'exactitude absolue, on trouve une similitude parfaite. Jossigny a parfaitement indiqué la structure délicate des Fig. 1. — La Huppe de Bourbon (d’après un dessin de Jossigny). (1/3 grandeur naturelle.) plumes érectiles du sommet de la tête, la légère courbure et la forme effilée du bec, les proportions des ailes, de la queue et des pattes; il a marqué le vigoureux contraste de la teinte foncée du manteau avec la teinte blanche de la gorge et de la poitrine et il n’a pas même oublié sur l'aile la tache blanche formée par les couvertures des primaires. L'Oiseau est représenté dans une atlitude plus horizontale que celle qu’affectent les spécimens montés dans nos galeries, (1) Volume commémoratif du Centenaire de la fondation du Muséum, pl. IT. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 9 mais cette attitude est tout aussi naturelle, car si les Élour- neaux perchés ont, comme l’Oiseau que nous avons figuré, la têle un peu avancée et le corps incliné, ils se tiennent, lorsqu'ils sont à terre, à peu près comme l'Oiseau dessiné par Jossigny. Dans une note inscrite au bas du dessin 1l est d’ailleurs recommandé au graveur de représenter le buste de l'Oiseau un peu moins droit (1). De ce fait même que Jossigny a figuré la Huppe sur le sol et non perchée, nous pouvons conclure que l'espèce se tenait fréquemment sur terre et cherchait volontiers sa nourriture dans les champs comme nos Étourneaux. Au verso du dessin nous lisons les lignes suivantes signées de Commerson : « Epops. — La Huppe de Bourbon, vide descr. Crista- tus; pallio dorsi et alarum fusco; corpore et collo sub- teriore cristaque incanis immaculatis. Nobis vel : «Ep. desuper fusco-nigricans, subterius albidus, crista incanâ immaculalà pennis setaruis diradialis. Nob. vel: « Ep. cristatus, desuper fuscus, subterius et in crista inca- nus immaculatus. Nobis ». Ces trois diagnoses que donne Commerson d’une espèce qu'il considère évidemment comme nouvelle, puisqu'il les fait suivre du mot nobis, coincident également avec la descriplion que nous avons donnée du Æfregilupus varius d'après les deux spécimens des galeries du Muséum. L'un de ces spécimens a, comme nous l'avons dit (2), été envoyé par M. de Nivoy en 1833 et l’autre esi de provenance inconnue. Ce dernier a servi de type pour la description et la figure publiées par Vieillot et Audebert (3) en 1802. Il figure donc dans les collections du Muséum depuis un siècle environ, sinon davantage, et comme ses teintes sont légèrement altérées, comme son élat de conservation laisse un peu à désirer, on peut se demander s’il ne faisait (4) « Nota : Pour plus d’exactitude il faudra que le graveur représente le buste de l'oiseau non pas si droitte (sic) mais d’un travers de doigt renversé sur le devant de la tête. » Cette note est de la main de Commerson. (2) Volume commémoratif du Centenaire de la fondation du Muséum, p. 206. (3) Hist. nat. des Oiseaux dorés, t. I, Suppl., Promérops, p. 12 et pl. IT. 10 E. OUSTALET. point partie de l’ancienne collection de Buffon, qui l'aurait reçu non de Sonnerat (puisque aucun Oiseau de ce genre ne ‘figure dans le catalogue de Sonnerat, que j'ai sous les yeux) mais de Commerson lui-même. Nous savons, en effet, par Georges Cuvier (1), que Buffon tira parti dans une certaine mesure des envois de Commerson pour rédiger son Âistorre naturelle des Oiseaux et il ne serait pas étonnant que son collaborateur Guéneau de Montbéliard ait eu entre les mains l'exemplaire même dont nous parlons quand il a écrit sa description de la Huppe noire et blanche de Madagascar (2). Dans ce cas ce serait le même spécimen qui aurait été figuré par Daubenton dans ses Planches enluminées de Buffon (3). J'ai fait tout à l'heure allusion à un proche parent du Fregilupus varius, au Necropsar rodericanus. C’est, si je ne me trompe, à cetle espèce éteinte qu'il faul rapporter ce que l’auteur anonyme de la Æelation de l'ile Rodrique (4) dans un passage cité in extenso par M. Milne Edwards (5) dit d'un Oiseau terrestre, un peu plus gros qu'un Merle, à plumage blanc, avec une partie des ailes et de la queue noire, le bec et les paltes jaunes, qui ne se trouvait que sur l’île du Mât, voisine de Rodrigue. Cet Oiseau avait, paraît- il, un ramage merveilleux, ou plutôt plusieurs ramages différents, et, en captivité, préférait aux graines la viande cuite hachée. Si l’on tient compte de ce fait que le Fregi- lupus varius élait aussi à peu près de la grosseur d’un Merle, qu'il avait le bec et les paltes jaunes et le plumage en partie blanc, et de ces autres faits que les Étourneaux, proches parents du Fregilupus et du Necropsar, ont un ramage varié et sont autant, sinon plus carnivores que granivores, on trouvera sans doute que l’assimilation que Je fais offre beaucoup de vraisemblance. : (1) Hist. nat. des Poissons, t. I, p. 123. (2) Hist. nat. des Oiseaux, édit. de 1779, 1. VI, p. 43. (3) T. VI, pl. 697. (4) Je reviendrai plus loin sur cette Relation de l'ile Rodrigue qui existe, à l’état de manuscrit, à la bibliothèque du Ministère de la Marine. (5) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6€ série, t. II, art. 4, p. 15. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 11 Deux aulres dessins de Jossigny représentent, dans deux poses légèrement différentes, la Perruche de Rodrique et cor- respondent à une description rédigée par Commerson el ainsi CONCuE : « La Perruche de Rodrigue, Psilacus rodriganus lon- gicaudus lotus è cinereo-cœrulescens collari nigro. No- bis vel : « Psittacus macrourus è cinereo-cœrulescens fasciis dua- bus semicircularibus nigris è gula ad collum torquis instar decurrentibus. Nobis. » Ces dessins et celte description présentent un intérêt tout particulier parce qu'ils se rapportent à une espèce qui, à l'heure actuelle, doit être considérée comme entièrement anéanlie, de même qu’un Perroquet indigène de taille plus forte. Voici, en peu de mots, ce que l’on sait au sujet de ces deux Perroquets. Comme M. Milne Edwards l’a fait remar- quer, à l’époque où François Leguat séjourna à l’île Rodri- gue les Perroquets étaient, nombreux. On lit, en effet, à la page 67 de la Relalion de son voyage (1) : « Cet arbre porte un fruit assez semblable à l'olive et les Perroquels en aiment beaucoup le noyau; » à la page 107 : Les Perroquets verts et bleus s’y trouvent en quantité et surtout de médiocre el d’égale grosseur. Quand ils sont jeunes, la chair n’en est pas moins bonne que celle des pigeonneaux; » et à la page 132 : « La chasse et la pêche étoient un peu trop aisées pour y prendre un fort grand plaisir. Nous en trouvions quelquefois à instruire des Perroquets dont le nombre, comme Je l'ai dit, est fort grand dans cette isle. Nous en portâmes un dans l’île Maurice qui parloit francois el fla- mand. » D'un aulre côté M. Milne Edwards a découvert, il y a une vingtaine d'années, dans un manuscrit conservé dans les archives du Ministère de la Marine, à Paris, manuscrit dont l’auteur est inconnu, mais qui date probablement de (1) Le voyage et les avantures de François Leguat, gentilhomme bressan, dans l'Amérique méridionale et autres lieux, Amsterdam, 1750, t. I. 42 E. OUSTALET. 1729 ou 1730 et qui a pour titre : Relation de l'ile Rodrique (1), un passage qu'il a cité intégralement et où il est question de trois espèces de Perroquets savoir : 1° des Perroquels plus gros qu'un Pigeon, à queue longue, à tête grosse, à bec robuste; 2° des Perroquets plus petits et beaucoup plus beaux, à plumage vert, varié d’un peu de rouge sur les ailes et à bec rouge; 3° des Perroquets de petite taille, tous verts, à bec noir. Comme le supposait sir Édouard Newlon (2) ceux-ci étaient probablement des Agapornis cana ou Psutacula ma- dagascariensis, dont le mâle a la têle grise, et dont la femelle est toute verte, mais dont le bec, je dois le faire remarquer, est gris et non pas noir. On admet généralement que cette Agapornis cana (3), la Petite Perruche de Mada- gascar de Daubenton (4), la Perruche à tête grise de Buffon (5), n'appartenait pas originellement à la faune de l’île Rodrigue, pas plus qu’à celles de la Réunion et de l’île Maurice, et qu’elle aurait été apporlée dans ces trois îles, de même qu à Anjouan, par des navires venant de Madagascar. Cela est fort possible, probable même, et, dans ce cas, l’in- troduction et l’acclimatalion de cette jolie Perruche ont dû s'effectuer bien plus tard à l’île Rodrigue qu'à l’île Maurice. Il faut remarquer, en effet, que le passage de Legual, que j'ai cilé ci-dessus et dans lequel il est question de Perroquels (1) L'existence de ce manuscrit avait été signalée par M. Rouillard, magistrat à l'ile Maurice, à M. Édouard Newton. Le frère de ce dernier, M. Alfred Newton, professeur à l’Université de Cambridge, donna, dans les Proceedings de la Société zoologique de Londres (1875, p. 39 et suiv.) quelques extraits de la Relation de Rodrigue dont M. Milne Edwards fixa la date et dont il reproduisit toute la partie relative à l'histoire naturelle dans ses Nouveaux documents sur l’époque de la disparilion de la faune ancienne de l'ile Rodrigue (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6° série, LME YarLs 4). F | (2) Proc. Zool. Soc. Lond., 1875, p. 41. (3) Agapornis cana, T. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus., t. XX, p. 507; Psitla- cula madagascariensis (Briss.), A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 17 et pl. 7 et 8 (Psittacula madagascariensis). (4) Planches enluminées, pl. 791, fig. 2. (5) Hist. nat. des Oiseaux, 1779, t. VI, p. 171. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 13 verts et bleus de médiocre et d'égale grosseur, ne convient guère à l'A gapornis cana et s'applique plutôt à un Pa/æornis, d’où l’on peut inférer que du temps de Leguat, c’est-à-dire vers la fin du xva° siècle, l'Agaporms cana n'existait pas encore à Rodrigue, qui élait d’ailleurs inhabitée au moment de l’arrivée de Leguat; mais nous savons d’autre part que les pelits Perroquets étaient aussi communs que les moyens et les gros à Rodrigue vers 1730, époque où fut écrite la Rela- lion anonyme dont M. Milne Edwards a donné des extraits. Donc c'est probablement au commencement du xvim° siècle que l’A gapornis cana à été apportée à Rodrigue, probable- ment de l’île Maurice où, comme je le montrerai tout à l'heure, elle existait déjà à celte époque. À la même date les Perroquets plus gros qu'un Pigeon, à la tête forte et à la queue très allongée, dont il est fait mention dans la Relation de l'ile Rodrique, vivaient certaine- ment encore et je suis surpris que Leguat, qui séjourna à l’île Rodrigue du 25 avril 1691 au 21 mai 1693, ne fasse pas mention spécialement de ces Oiseaux dont les affinilés _zoologiques sont désormais bien établies grâce à MM. Milne Edwards, A. et Ed. Newton et Günther. Le premier, M. A. Milne Edwards, a pu étudier d'abord une portion de la mandibule supérieure et ensuite une mandibule supérieure complète et un bec inférieur du grand Perroquet de Rodri- gue et d’après l'examen de ces pièces trouvées par sir Édouard Newton, alors auditeur général à Maurice, et par M. G.Jenner dans le même gisement que des ossements de Solitaire, il a démontré que l’Oiseau en question offrait certains caractères des Loris, mais se rapprochail davantage encore des Palæor- nis ou Perruches à longue queue de l'Inde et de l’Afrique tropicale, tout en méritant, par certaines particularités, d’être placé dans un genre distinct, sous le nom de ÂVe- cropsittacus rodericanus (1). Celle manière de voir a été (1) A. Milne Edwards, Mémoire sur un Psittacien fossile de l'ile Rodrigues (Ann. des Sc. nat., Zool., 1867, 5° série, t. VIII, p. 145 à 156 et pl. 7, fig. 1 et 2; C. R. Acad. des Sc., 1867,t. LXV, p. 1121 à 1125; Recherches sur la faune 14 E. OUSTALET. confirmée par l'examen que M. le D' Günther et sir Édouard Newton ont fait plus récemment d'un crâne et d'autres “ossements appartenant à la même espèce (1). Reste l’espèce de taille intermédiaire, celle que l’auteur anonyme de la Relation de l'ile Rodrique dépeint comme étant plus petite que la précédente et en même temps beau- coup plus belle, grâce à son plumage d’un vert pâle, un peu marqué de rouge sur les ailes. C'est probablement, comme le dit M. Milne Edwards, le Perroquet de médiocre grosseur, vert et bleu, dont Leguat et ses compagnons comparaient la chair à celle d’un Pigeonneau. Jusqu'en 1871 on considérait celte espèce comme absolument éteinte. Aussi quelle ne fut pas la surprise de M. le professeur Alfred Newlon quand, à cette époque, il reçut de son frère, qui habitait alors encore l'île Maurice, une Perruche dans l'alcool qui lui avait été donnée par M. Jenner, magistrat à l'ile Rodrigue, et quand il reconnut dans cet Oiseau un représentant des Perroquets verts et bleus de Leguat! Il donna de ladite Perruche, qui était une femelle, une description détaillée et proposa de désigner l'espèce ainsi restituée sous le nom de Palæornis exsul, pour rappeler l'exil du malheureux François Legual et de ses compagnons en une île déserte (2). Bientôt après, en 1875, il publia une figure de ce Palæornis exsul (3) sur lequel M. A. Milne Edwards venait de retrouver de nouveaux documents, soit dans le Journal manuscril de Pingré qui visita l’île Rodrigue en 1761 pour y observer le passage de Vénus (4), soit dans la ARelation de l'ile Rodrique datant de ancienne des îles Mascareignes (Ann. des Sc. nat.,Zool., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 16 à 18, et pl. 13, fig. 2, 2a, 20, 2c, 2d, 2e; A. Newton, Proc: Zool: Soc. Lond., 1855, p. #1 ; A. et E. Newton, Ibis, 1876, p. 287 et 289. (1) Günther et E. Newton, Phil. Trans., 1819, p. 429, pl. XLIL, f. K-N; E. Newton, Trans. Norf. and Norw. Nat .Soc., 1888,t. IV, p. 550; T. Salvadori, Cat. of the Birds of the Brit. Mus., 1891, t. XX, Psitéaci, p. 388 (note). (2) A. Newton, On a undescribed Bird from the Island of Rodriguez (Ibis, 1872, p. 31 et suiv.). (3) Note on Palæornis eæsul (Ibis, 1872, p. 342 et pl. VIT). Voyez aussi du même auteur : Additional evidence as to the original Fauna of Rodriguez (Proc. Zool. Soc. Lond., 1875, p. 42). (4) Dans ce journal, que M. Milne Edwards a consulté à la bibliothèque FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 15 1730 environ. Enfin, en 1875, M. A. Newton eut la grande satisfaction de recevoir de M. Caldwell un mâle de la même espèce (1), tué à Rodrigue par M. Vandorous, et de pouvoir ainsi compléter la descriplion de l'espèce (2). | La femelle, qui a été décrite la première, était d’un vert glauque légèrement grisâtre (couleur cendre verte) et un peu plus foncé sur les parties inférieures du corps. Elle avait la queue longue, élagée comme chez les autres Pa/æornis, avec les pennes latérales d’un ton un peu plus pâle que les autres el la face inférieure de toutes les rectrices tirant au gris jaunâtre, les ailes avec des lisérés clairs sur le bord externe des rémiges. Les côtés de la tête étaient ornés d’une strie mal définie d’un noir terne, partant de la commissure des mandibules et se prolongeant en arrière jusqu'aux oreilles en s'élargissant et en encadrant inférieurement les joues. Le bec était noir, les pattes d’une couleur difficile à appré- cier après le séjour de l'animal dans l'alcool, les ongles d’un brun de corne. La longueur totale de l'Oiseau était de 16 pouces anglais ou 0°,405; la longueur de l'aile de 7 pou- ces b/10 ou 0*,190; celle de la queue de 8 pouces 5/10 où 0°,215. Ces dimensions sont à très peu près celles du Palæorns Wardi des Seychelles. Le mâle différait de la femelle par la teinte verte plus claire et moins mélangée de gris du sommet de la tête, par la netteté de la bande noire du côté de la tête, bande qui allait presque rejoindre son homologue sur la nuque, par la présence d’une petite raie noire assez nette, au lieu Sainte-Geneviève, à Paris, et dont il a communiqué des extraits à M. A. Newton, Pingré s'exprime ainsi : « La Perruche me semblait beaucoup plus délicate (que la Chauve-Souris). Je n’aurais regretté aucun gibier de France si celui-ci eût été plus commun à Rodrigue : mais il commence à devenir rare. Il y à encore moins de Perroquets, quoiqu'il y en ait eu autrefois une assez grande quantité, selon F. Leguat, et en effet une petite isle au sud de Rodrigue a encore conservé le nom d’Isle aux Perroquets. » Ces derniers mots font probablement allusion au Necropsittacus rodericanus. (1) Voy. J. Caldwell, Notes on the Zoology of Rodriguez (Proc. Zool. Soc. Lond., 1875, p. 647). (2) Voy. A. et E. Newton, On the Psittaci of the Mascarene Islands (Ibis, 1876, p. 288 et 289). | 16 E. OUSTALET. d'un trait à peine distinct, entre le bec et l’œil, et surtout par la couleur rouge vif du bec supérieur, dont la pointe seule était couleur de corne, et la couleur rouge sombre du bec inférieur. Les dimensions étaient aussi un peu plus fortes que dans l'individu de l’autre sexe. Les yeux étaient noirs, cerclés de jaune (1). Contrairement à ce qu'il avait supposé, d’après lines tion de Leguat, M. Newton ne trouva chez le mâle aucune trace sur les couvertures alaires d’une tache rouge semblable à celle qu’on observe chez le Palæornis Ward. Les deux dessins de Jossigny auxquels je faisais allusion tout à l'heure et qui portent tous deux la mention manus- crite : « Perruche de Rodrique », représentent certainement le Palæorms exsul, posé sur le sol et, comme l'indique une note au recto, de grandeur naturelle. Dans l’un des dessins, celui qui porte la signature de Jossigny et au dos le visa de Commerson, l’Oiseau est un peu trop redressé, avec le cou un peu trop allongé, les pattes un peu trop hautes; dans l’autre, au contraire, qui semble êlre une figure corrigée, 1l a une pose plus naturelle, les pattes mieux pro- portionnées, mais comme les iraits sont beaucoup moins nets dans ce dessin à la mine de plomb que dans l'autre, c'est le premier que j'ai dû faire reproduire. Dans les deux dessins les sortes de moustaches noires du Palæornis exsul sont parfaitement indiquées et se prolongent en arrière jusque vers la nuque, en diminuant de longueur. On distingue en outre une petite ombre sur le bord du front et entre l'œil et le bec, mais pas la moindre indication d’épaulette rouge. Si nous pouvions affirmer, ce qui malheureusement n'est point le cas, que l'artiste n’a pas eu sous les yeux une femelle, nous aurions là évidemment une confirmation de l'observation de M. A. Newton tendant à prouver que chez le Palæornis exsul, contrairement à ce qu’on observe (4) Voy. aussi Hartlaub, Die Vôgel Madagascar's und benachbarten Inseln, 1877, p. 225, n°139; T. Salvadori, Cat. of the Birds of the British Museum, 1891, t. XX, p. 459. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 17 chez la plupart des Palæornis, les deux sexes sont égale- ment privés de taches rouges sur les ailes. Quoique le sexe du deuxième Oiseau étudié par M. Newton ait élé déterminé non par cet ornithologisle distingué mais par M. Vandorous, la couleur rouge du bec suffirait à prouver qu'il n'y à eu aucune erreur commise à cel égard; il est donc certain que. comme le dit M. Newton, le mâle du Fis. 2. — La Perruche de Rodrigue (d’après un dessin de Jossigny) = Le) (environ 1/4 grandeur naturelle). Palæornis exsul à les ailes d’une teinte verte uniforme à une certaine époque de sa vie; mais en est-il toujours ainsi, c'es ce qu'il me paraît un peu téméraire d'affirmer, surtout en présence du témoignage de l’auteur anonyme de la Relation de l'ile Rodrique, dont on a pu sur d’autres points contrôler la véracité (1). Le mâle du Palæornis exsul n'aurait-il point possédé, à l’âge adulle et en plumage de noces, les épaulettes rouges dont il aurait été privé dans son jeune âge? Chez un exemplaire mâle de Pa/zornis Wardi lué à Mahé (Seychel- (1) C'est en tenant compte de ce lémoignage que j'ai parlé incidemment, en 1878 (Bull. Soc. philomath., 1878, p. 116) des épaulettes rouges du mâle du Palæornis exsul, et, comme le fait observer M. Salvadori (Cat. B. Brit. Mus., t. XX,p. 459), J'ai omis, à cette place, de mentionner l’observalion, alors toute récente, de M. Newton qui est en contradiction atee ce témoignage. ANN. SC. NAT. ZOOL. - I, 2 18 ŒÆ. OUSTALET. les) par M. Lantz, en décembre 1877, je remarque déjà que ‘la tache écarlate de l'aile est peu marquée, surtout d’un côlé, où elle n’est indiquée que par des lisérés étroits au bord des couvertures alaires. Je disais tout à l'heure que l’A gapornis cana ou Petite Perruche à tête grise de Madagascar avait peut-être élé amenée à l’île Rodrigue de l’île Maurice où elle existait déjà depuis longtemps. Dans les notes manuserites de Julien Desjardins, à lasuite d’une description fort exacte d’un mâle d’Agapornis cana pris à Maurice en août 1828, j'ai trouvé l'extrait suivant des Ætelations véritables et curieuses de l’île de Madagascar, de François Cauche (1), extrait dont mal- heureusement je n’ai pu vérifier l'exactitude en recourant à l'ouvrage original qui n'existe pas dans la bibliothèque du Muséum : «Il y a de petites Periques à Maurice qui ont Le col jaune et le reste vert; 1l (sic) ne passe pas la grosseur d’une Alouette. » L’A gapornis cana existait donc probablement à l’île Maurice dès 1628, date de la visite de François Cauche, et y avait peut-être élé introduite par les Hollandais, qui avaient visité pour la première fois l’île Maurice, dite alors île de Cerné, en 1598, sous ia conduile de l’amiral Jacques Cornélisz ou Cornélius van Neck (2). L'île, découverte au commencement du xvi° siècle par les Portugais, en même temps que les îles Bourbon et Rodrigue, était alors inoceu- pée, les Portugais ne l’ayant considérée que comme un lieu de relâche et n’y ayant pas fondé d’élablissement régulier ; mais elle était peuplée de Tortues géantes, de Chauves-Souris et d'Oiseaux de différentes espèces. Parmi ceux-ci la Rela- tion ou plutôt les Relations du voyage de Jacques Cornélisz van Neck, Relations dont il a paru plusieurs édilions (3), (4) In-4, Paris, 1651. (2) Les Hollandais donnèrent à l’île découverte par les Portugais, vers 1502, 1505 ou, suivant Du Quesne, seulement en 1545, le nom d’ile Mau- rice, en l’ honneur de Maurice, prince d'Orange. Le vaisseau amiral de J. C. van Neck s'appelait aussi le Maurice. (3) Dans son Mémoire sur le Dodo (The Dodo and its kindred, Londres, 1848, 1re partie, p. 9), M. H. E. Strickland dit que la Relation la plus an- FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 19 mentionnent spécialement des Tourterelles, si nombreuses que les matelots en prirent cent cinquante dans un seul après-midi, et ils auraient pu en prendre encore davan- tage s'ils n'avaient été déjà trop chargés, des Hérons, quelques Oies sauvages, des Perroquels gris ou plulôt bleuâtres et des Oiseaux aussi gros ou plus gros que des Cygnes, aux ailes rudimenlaires, à la queue formée d’une touffe de plumes frisées, à la têle couverte d’une sorte de chaperon, Oiseaux qui n'étaient autre chose que les fameux Drontes ou Dodos. Quelques-uns de ces animaux sont représentés sur une planche annexée à une des premières éditions du Voyage de van Neck et reproduite dans le Mémoire de M. Strickland sur le Dodo. Sur cette planche, destinée à donner une idée de la facon dont les Hollandais ont fenu mesnage sur l'isle Maurice, on voit, à côté des Tortues géantes, un Dronte ou Oiseau de Nausée, puis, au-dessus d’un Dattier, deux Oiseaux volant dont l’un est peut-être une Tourterelle tandis que l’autre est, d’après l'explication de la planche, un ÆRabos Forcados, c’est-à-dire une Frégate ; sur un autre arbre est perché un Oiseau à bec énorme, surmonté d’une protubérance à la base, qui est désigné dans la légende sous le nom de cienne de ce voyage qu'il ait pu découvrir datait de 1601 et avait pour titre : Le second Livre, Journal ou Comptoir, contenant le vray Discours et Narration historique du voyage faict par les huict Navires d'Amsterdam au mois de Mars de l’'An1598 soubs la conduitte de l’admiral Jacques Corneille Necg, et du Vice-Admi- ral Wibrant de Warwick. Cette Relalion, due à Corneille Nicolas, se trouvait reliée, avec une autre édition de 1609, en un volume in-folio faisant partie de la bibliothèque Radcliffe. M. Strickland cite également une édition hollandaise publiée vers la même époque, deux édilions allemandes de Hulsius, l’une à Nuremberg en 1602, l’autre à Francfort en 1605; une tra- duction latine dans le cinquième volume de l’India orientalis de de Bry, en 1601 ; une traduction anglaise de la même date, des éditions in-4° parues à Amsterdam en 1648 et 1650. Enfin, dans le Recueil des voyages qui ont servi à L'établissement et aux progrez de la Compagnie des Indes orientales, recueil qui a été publié à Amsterdam de 1702 à 1706 (5 vol. in-12) et à Rouen en 1725 (10 vol. in-12) a été insérée, dans let. II, p.153 et suiv.,la Relation du second voyage des Hollandois aux Indes orientales fait sur une Flote de huit Vais- seaux, l’an 1598, sous le commandement de l’Amiral Jacques Cornelisz van Neck et du Vice-Amiral Wybrant de Warwyk. 20 E. OUSTALET. Corbeau Indien « ayant la grandeur plus d’une fois que les Perroquets, de double et triple couleur » et que M. Strickland considère comme un Calao (Puceros). Enfin sur un autre arbre encore, appelé Palmite, sont perchés un Oiseau à longue queue, de dimensions assez faibles, et un pelit Passe- reau. Le premier me paraît êlre une Perruche du groupe des Palxæornis, le second une sorte de Fringillidé, plutôt qu’un petit Perroquet. Il n’y a donc rien, ni dans cette planche n1 dans le texte, qui se rapporte à l’Agapornis cana, aucune mention que des individus de cette espèce aient été apportés à l’île Maurice par les Hollandais qui avaient touché auparavant à Mada- gascar, mais qui ne s’y étaient pas arrêtés aussi longtemps que dans un premier voyage. Je n'ai rien trouvé à noter dans la Relation du voyage aux Indes orientales de l’amiral Wolphart Harmansen (1); et dans celle du voyage de l'amiral Jacob van Heemskerk qui séjourna assez longtemps à l’île Maurice, il est question seulement, dans un passage cité par M. Strickland (2), de Tortues, de Walhchvogels ou Oiseaux de nausée, de Flam- mants, d'Oies, de Canards, de Perdrix ou plutôt de Francolins (3), de Corbeaux Indiens grands et petits (4), de Pigeons dont quelques-uns avaient la queue rouge et dont la chair rendit malades plusieurs hommes de l’escadre qui en avaient mangé, de Perroquets gris et de Perroquets verts à longue queue, dont on pril quelques-uns. Dans la Relalion extrèmement rare, et que je ne connais que par l'extrait, publié par M. Slrickland, du voyage de (1) Voiage de cinq vaisseaux hollundois aux Indes orientales, sous le com- mandement de l'amiral Wolphart Harmansen, les années 1601, 1602, 1603 (Recueil des voyages qui ont servi à l'établissement et aux progrez de la Compa- gnie des Indes orientules, t. TT, p. 415 et suiv.). (2) The Dodo and ils Kindred, p.15. Le journal du voyage de J. van Heems- kerk, rédigé par Reyer Cornelisz, a paru dans le recueil intitulé : Begin ende PR ar van de Vereenighde Nederlundtsche Geoctroyoerde Oostindische Compagnie, in-4°, 1646, t. I. (3) Velt- hocnders. (4) Soo groot as kleyne Indiuensche Ravens. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES,. 24 Willem ou Wilhem van West-Zanen (1), qui séjourna pen- dant longtemps à l'île Maurice, outre le Dodo qui est men- tionné à diverses reprises, les Oiseaux cités comme pullulant dans l'île sont : des Pigeons, des Perroquels, des Corbeaux Indiens, des Moineaux, des Faucons, des Grives, des Hiboux ou des Chouetles (2), des Hirondelles et beaucoup de petits Oiseaux, des Hérons blancs et noirs, des Oies, des Canards. Les mêmes Oiseaux, à peu de chose près, sont énumérés dans la Relation du voyage de Cornelius Matelief, amiral hollandais qui arriva à l’île Maurice avec onze vaisseaux le 1° janvier 1606 et s’y arrêta jusqu'au 27 du même mois. « L'Isle, dit ce navigateur (3), est remplie de volaliles de diverses espèces, de Pigeons, de Perroquets, de Corbeaux des Indes. d'Éperviers, de Faucons, de Grives, de Hiboux, d'Hirondelles, el d’une multitude de plus petits oiseaux, de Hérons, d'Oies, de Canards, etc., qui sont si privez qu'on peut les prendre avec les mains. « On y trouve encore un certain oiseau que quelques-uns nomment Jodarse, ou Dodaersen : d’autres lui donnent le nom de Dronte. » | Suit la description de Dronte, qui a été maintes fois reproduite dans les Mémoires consacrés à cel Oiseau. Dans la relation du voyage de l’amiral van der Hagen, qui relâcha à Maurice en 1607, il est fait encore allusion aux mêmes oiseaux dans les termes suivants (4) : « Pendant (1) Derde voornaemste Zee-getogt (der verbondene vrye Nederlanderen) ra de Oost-Indien, gedaun met de Achinsche en Moluksche Vloten, onder de Ammi- ralen Jacob van Heemskerk en Wolfert Harmansz. In den Jare 1601, 1602, 1603. Gétrocken Uyt de nuarstige unteekeningen von Willem van West-Zonen, Schipper op der Bruin- Vis, en met eenige noodige byvoeyselen vermeerdert, door H. Soete-Boom, in-4°, Amsterdam, 1648. Cité par Strickland, The Dodo and its Kindred, p. 13 et 14. (2) Vlen. (3) Voyage de Corneille Matelief le jeune aux Indes orientales, en qualité d'Amiral d'onze Vaisseaux, pendant les Années 1605, 1606, 1607 et 1608 (Re- cueil des voyages qui ont servi à l’élublissement et aux progrez de la Compagnie des Indes orientales, Amsterdam, 1702-1706, édit. in-12 en 5 vol., t. III, p- 214, et Rouen, 1725, édit. en 10 vol., t. V, p. 262). (4) Relation du deuxième voiage d'Estienne van der Hagen, amiral d'une 22 E. OUSTALET. tout le temps qu’on fut là, on vécut de Tortues, de Dodarses, de Pigeons, de Tourterelles, de Perroquels gris et d'autre chasse qu’on alloit prendre avec les mains dans les bois. Outre l'utilité qu'on en recevoit, on y trouvoit encore beau- coup de divertissement. Quelquefois, quand on avoit pris un Perroquet gris, on le faisoit crier, et aussitôt on en voioit des centaines voltiger autour de soi, qu’on tuoit à coups de bâton. Les’ Pigeons et les Tourterelles se prome- noient aussi à terre, le long des bois, d’une manière si privée qu'on les prenoit aisément... On vit encore des Hérons de diverses couleurs, et des OÜies sauvages, sur quoi l’on ne voulut pas Urer de peur de Iles effaroucher, aussi bien que les autres volatiles. » | Enfin dans un extrait du journal de P. W. Verhuffen qui toucha à Maurice en 1611 (1), extrait que j'emprunte au Mémoire de M. Strickland (2), nous trouvons encore énu- mérées les mêmes espèces. Voici du reste la fraduetion de ce passage : « Il y à là aussi beaucoup d'Oiseaux, tels que : Tourterelles, Perroquets gris, Rabos Forcados, Franco- lins? (3), Perdrix el d’autres oiseaux aussi gros que des Cygnes ayant la tête grosse, couverle d’une sorte de capuchon et privés d’ailes..……. ; on les nomme Tofersen ou Walckvoügel ; 11 y en a une grande quantité, etc... » Dans aucune de ces Relations, on le voit, 1l n’est fait la plus légère allusion à l'introduction vo/ontaire à l’île Mau- rice de petites Perruches malgaches à tête grise, par les Hollandais qui plantèrent dans l’île diverses essences d'ar- bres et y emmenèrent du bétail ; mais cela ne veut pas dire flote de onze Vaisseaux Hollandoïs, destinez pour les Indes orientales (Recueil des voiages, etc., édit. en 5 vol., t. HT, p: 495,'et édit. en 40 V0 MES RE, p.241 et 242). (1) La relation du voyage de P. W. Verhuffen a été publiée à Francfort, en 1613, sous ce titre : Eylffter Schiffurt, ander Theil, oder kurtzer Verfolg und Continuirung der Reyse, son von den Holl-und Seeländern in die Ost-Indien mit neun grossen und vier Schiffen vom 1607 biss in das 1612 Jahr, unter der Admiralschafft Peter Wilhem Verhuffen verrichtet worden, in-4°, 1643. (2) The Dodo and its Kindred, p. 18. (3) Feldhiüner. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 23 qu'il n’y ait pas eu, dès celle époque, introduction acciden- telle de l’'Agapornis cana. Cette jolie espèce a dù être recher- chée de bonne heure comme Oiseau de volière et quelques individus, échappés des cages dans lesquelles ils étaient transportés en Europe, ont pu gagner la campagne et se propager facilement dans un pays où ils trouvaient des conditions analogues à celles de leur pays natal. En tous cas les À gapornis cana élaient déjà communes à l’île Maurice au milieu du xvur° siècle. Une femelle de cette espèce est, en effet, représentée, de grandeur naturelle, et à l’aquarelle, sur un dessin de la collection Commerson. Ce dessin porte au dos ces quelques lignes, signées de Commerson : « Psittac. — Petite Perruche de l'Isle de France. Se trouve « aussy au Cap d’où vraisemblement elle aura été apportée « par les Hollandois (Prise aux plaines de Willem (1). » Celle courte nolice indique que l’Oiseau a été peint d’après nature. Les couleurs sont en général exactes, cependant la tête et Les ailes sont d’une nuance un peu trop foncée, tirant au brun verdâtre. En outre, si Commerson considère l'espèce comme n’élant pas indigène à Maurice, il commet évidemment une erreur en la faisant venir du Cap, erreur analogue à celle qui à été commise pour le Fregilupus varius de Bour- bon. Une autre erreur a été commise par Buffon, qui, tout en connaissant la Perruche à lêle grise, qu'il indique (2), d'après Brisson (3), comme étant originaire de Madagascar, a transporté (4) à la Perruche souris (Psiftacus murinus) c'est-à-dire à une espèce américaine, le Myopsittacus mona- chus (Bodd.) (5), le passage suivant extrait, dit-il, d’un (1) Ou plutôt Plaines-Wilhems, un des quartiers de l’île Maurice. (2) Hist. nat. des Oiseaux, 1779, t. VI, p.171.— Petite Perruche de Madagas- : car, Daubenton, Planches enluminées de Buffon, pl. 791, fig. 2. (3) Ornithologie, 1760, t. IV, p. 394, pl. 30, fig. 2 (Psittacula madagasca- riensis). (4) Buffon, Hist. nat. des Oiseaux, 1779, t. VI, p. 148. — Perruche à poi- trine grise, Daubenton, Planches enluminées, pl. 768. (5) Psittacus monachus, Boddaert, Tableau des plin hes enluminées, 1783, p. 48. — Myopsittacus monachus T. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus., 1891, 1: XASR24, 24 E. OUSTALET. a Voyage à l’île de France : « La Perruche verte à capuchon _gris, de la grosseur d'un Moineau, ne peut s’apprivoiser. » Celle Perruche verle à capuchon gris est évidemment J’A gapornis cana. En 1828 les Perruches à lête grise élaient encore très communes à l'île Maurice el J. Desjardins en avait dans sa collection un spécimen fué à Flacq, avec un autre exem- plaire venant de Madagascar. Il à laissé dans ses notes manuscrites une description très exacte du mâle. En revanche, pas plus dans ses notes que dans les dessins de Commerson, je n'ai rien découvert qui se rapportât au Perro- quel gris ou plutôt bleuâtre dont il est fait mention dans les récits des voyageurs hollandais : Cornélisz van Neck, Jacob van Heemskerk, Wilhem van West-Zanen, van der Hagen, etc... Ce Perroquel me parail être évidemment celui dont on a découverl de nombreux restes (mandibule inférieure, tibias, fémurs, métatarses, sternum), dans la Mare aux Songes etquia été décrit par sir R. Owen (1) etensuite par M. A. Milne Edwards(2), sous le nom de Psittacus mauritianus. En raison des caractères parliculiers que présente sa mandibule infé- rieure, le Psittacus mauritianus à été rapporté par M. Milne Edwards à un genre particulier qui a élé désigné bientôt après par M. A. Newton sous le nom de Lophopsitacus (3). Après avoir été rapproché par M. Milne Edwards des Aras el des Microglosses, il a é'é placé, immédiatement avant ces derniers, el en tête des Cacatuidæ, par M. le comle T. Salvadori, dans son Catalogue des Psittacidés du British (1) Transactions of the Zoological Society of London, 1866, t. V, p. 53; Ibis, 1866, p. 168, et Annales des Scivnces naturelles, Zoologie, 1866, 5° série, t. VI, p. 88 et suiv., et pl. I, fic. 4 et 5. (2) A. Milne Edwards, Observations sur les caractères ostéologiques des principaux groupes de Psittacides pour servir à la détermination des affinités naturelles du Lophopsittacus maurilianus (Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1866, 5e série, t. VI, p. 91 et suiv., et pl. IT et IIT), et Recherches sur la faune an- cienne des îles Mascareignes ; faune de l'ile Maurice (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 41874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 24 et pl. 45, fig. 1, 1a, 1b). (3) Proceed. Zool. Soc. Lond., 1875, p. 349, et Encycl. brilann., 1875, 9°-édi- tion, t. II, p. 732, fig. 44 et 46; A. et E. Newton, Ibis, 1876, p. 282 et 289. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNÉS. 29 Museum (1). Enfin, dans un Mémoire récent (2, sir Edouard Newton et le docteur Hans Gadow ont émis l'opinion, à mon avis un peu hasardée, que de nouvelles découvertes pour- raient conduire à réunir dans un seul et même genre le Lophopsittacus mauritianus au Necropsiltacus rodericanus. Quoi qu'il en soit les caractères ostéologiques, la confor- mation extérieure et même la coloration du Lophopsitiacus mauriianus sont désormais assez bien connus. Feu H. Schlegel à découvert en effet, dans le journal manuscrit d'un ancien voyageur hollandais, un dessin au {rait repré- sentant le Lophopsitlacus mauritianus. Cet Oiseau, d’un gris bleuâtre, devait avoir à peu près la taille du Cacatoës à casque {Cacalua galerita) d'Australie ; ilavait la tête ornée d’une touffe de plumes formant crête sur le front el les ailes si courtes qu'elles étaient, à ce qu’on croit, presque impro- pres au vol. Ceci expliquerait la rapidité avec laquelle l'espèce aélé anéantie par les marins et par les premiers colons de l'ile Maurice, qui, comme les exilés de l’île Rodrigue, devaient apprécier beaucoup la chair des jeunes Perroquets. La dale de l'extinction de Lophosittacus mauritianus ne peut être fixée avec certitude. Elle se place probablement dans la seconde moitié du xvr° siècle ou dans la première moitié du xvin° siècle el est certainement antérieure à la venue de Commerson qui ne paraît pas avoir eu connaissance du Lophopsittacus mauritianus. En revanche ce voyageur a dû certainement voir le Perroquet vert à longue queue qui a élé désigné par Brisson (3) sous le nom de Psittaca borbonica torquata, par Buffon (#4) et par Levaillant (5) sous le nom de Perruche à double collier, par Daubenton (6) sous le nom de Perruche à collier de l'isle Bourbon el qui est appelé Palæ- (4) Cat. B. Brit. Mus., 1891, t. XX, p. 102. (2) Transactions of the Zool. Society of London, 1893 , t. XIII, p. 282 et 283 et pl. XXXIIL, fig. 1 à 8. (3) Ornithologie, 1760, t. IV, p. 328 et pl. XX VIL, fig. 1. (4) Hist. nat. des Oiseaux, 1779, t. VI, p. 143. .(5) Hist. nat. des Perroquets, 1801, pl. 39. (6) Planches enluminées de Buffon, pl. 215. 26 EH. OUSTALET. ornis eques par les auteurs modernes, d’après Boddaëert (1). Peut-être même est-ce à cette espèce qu’il faut attribuer un dessin, exécuté probablement par Jossigny, à la mine de plomb, avec quelques indications de couleurs, qui repré- sente une Perruche à longue queue, au plumage de couleur uniforme, mais d’une nuance un peu plus claire sur la têle que sur les ailes, l'abdomen et la queue et avant le cou entouré d'un collier noir en avant, rouge en arrière où il va en s’élargissant sous la nuque, le bec supérieur rouge, le bec inférieur noir et l'œil précédé d’un petit trait noir allant rejoindre la mandibule. Les dimensions de la figure, indi- quée comme élant de grandeur nalurelle, correspondent, en effet, à celles que M. T. Salvadori attribue au Palæornis eques (2) et la coloration rouge du bec supérieur et de la parlie postérieure du collier est bien celle qu'on trouve chez les mâles de cette espèce. Malheureusement ce dernier n’est accompagné d'aucune description et, pour combler celle lacune, il nous faut recourir aux manuscrits de J. Desjardins qui trace en ces termes (3) le portrait de la Grosse Caleau verte de l’île Maurice d’après un individu tué en octobre 1829, à la Rivière Noire, par M. Bojer : « La couleur verte est celle qui domine ou même qui est générale chez cet oiseau. C’est un vert plus ou moins clair et qui devient même jaunâtre vers les parlies uropygiales inférieures, sur les tectrices inférieures des ailes et sur les flancs. Les tectrices supérieures sont brunes à la base du côté interne. « Les grandes pennes des ailes ainsi que les peliles sont brunes en dessous et du côté interne et n'ont que le bord externe qui est vert, ce qui dans l’état de repos ne laisse voir que le vert et c’est justement dans cette partie qu'il est plus foncé. L’arête des pennes est d’un brun notirâtre. La première (1) Tableau des Planches enluminées, 1783, p. 13. — Palæornis eques Gray, List Psitt. Brit. Mus., 1859, p. 20 ; T. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus., 1891, L. XX, p. 442. (2) Cat. B. Brit. Mus., 1891,t. XX, p. 442 et suiv. (3) Notes manuscrites, FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 27 penne a le limbe externe bordé d’un liséré jaune el les bar- bules sont plutôt jaunâtres que vertes, ce qui fait un fort joli effet. « Les ailes dépassent d’un pouce la naissance de la queue. Les pennes de la queue sont d’un jaune sale en dessous et d'un vert bleuâtre (en dessus) avec l’arête noirâtre. Cette queue fait un peu moins de la moitié de la longueur totale. La deuxième et la troisième (1) sont d'égale longueur et en même temps les plus longues de toutes. La première est un peu plus courte, la quatrième, la cinquième, etc., sont de plus en plus courtes. « Les deux pennes supérieures de la queue sont d’égale longueur et dépassent les autres de un pouce environ; les autres diminuent progressivement. _ « Les narines (sont) percées à la partie supérieure du bec. « Le bec est très fort, plus haut quelarge, la mandibule su- périeure, très arquée, offre de chaque côté une espèce de dent formée par une diminution brusque des bords. La partie concave de cette mandibule est finement striée en dessous, les siries étant disposées en chevron. « La mandibule inférieure très grosse n’atteint même pas cette petite protubérance cinlrée que lon voit au-dessus de l'autre mandibule quand le bec est fermé. « La couleur (2) est brun noirâtre avec les extrémités gri- sâlres. « Les pattes et les doigts réticulés sont de couleur noirâtre, ainsi que les ongles. « Longueur du bout du bec au bout de la queue, 13 pouces et demi français (3). « Longueur de la plus longue penne de l'aile, 5 pouces (4). (1) Il y a à un ou plusieurs mots omis ; probablement le mot rémiges ou les mots pennes des ailes. (2) Du bec. (3) NE (&) 28 E. OUSTALET. « Longueur de la plus longue penne de la queue, 6 pou- ces (1). » Desjardins suppose avec raison que l'individu qu'il décrit est une femelle, d’après l'absence presque totale du collier à peine marqué en dessous par une raie jaunâtre. Il ajoule : «Quoique je n’aie pas encore pu voir cel oiseau dans les forêts, je puis assurer qu'il s’y trouve et même assez communément, M. W. Bojer, mon collègue à la Société d'histoire naturelle de l’île Maurice, m’ayant dit qu'il en avait tué plusieurs dans le mois d'octobre 1829, dans le quartier de la Rivière-Noire, dans le milieu des forêts qui couvrent les montagnes de celte partie de l’île. « On les sert communément à la table des riches habi- tants... chez M. Genève on les voit quelquefois... En juillet 1836, Lépervanche et Sauzier ont compté dix grosses Cateaux vertes s’enlevant dans les forêts de la Rivière Noire. Il y en avait à collier et sans collier sur les mêmes branches. Ces Messieurs ont remarqué que le mâle avait un coller ; la femelle à, selon ces Messieurs, la mandibule inférieure noire et même les deux mandibules quelquefois (2). » Dans le calalogue manuscrit de la collection de Julien Desjardins je trouve citée également une Cateau verte luée à Flacq (île Maurice), en mai 1836, par M. Ed. Dupré. Si J'ai cru devoir reproduire tous ces détails c’est que le Palæorns eques, que les qualités de sa chair ont fail acti- vement rechercher depuis l’arrivée des Européens à l'île Maurice, paraît êlre en voie d'extinction rapide (3) et que ses dépouilles sont assez peu nombreuses-dans les musées. Le Musée de Brême, la collection Newton, le Brilish Museum en possèdent chacun un ou deux spécimens, mais le Muséum d'histoire naturelle de Paris n’en a pas un seul. (4) 0m,162. (2) Les iudividus sans collier à mandibule inférieure noire et mandibule supérieure rouge élaient probablement non des femelles, mais des jeunes mâles (E. 0.) (3) Voyez G. Hartlaub, Die Vôügel Madagascars, 1877, p. 224. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 929 Dans son Voyage pittoresque à l'ile de France (1) Milbert paraît citer deux espèces de Perroquets,en ces termes: «La perruche d'Alexandre ou la Grande perruche à collier ; la femelle n’a point de collier ; la perruche à collier jaunâtre » ; mais ilest probable qu’il prend les jeunes mâles du Palæor- ris eques pour des individus d’une autre espèce. Enfin c’est encore au Palæornis eques que fait allusion le passage suivant, extrait par J. Desjardins des lettres du P. Ducros, missionnaire, qui se trouvait à l’île Maurice en 1722 (2): « On y voit une infinité de Perroquels, les uns verts, les autres gris (3); quand on en fait crier un, Lous les autres se rendent au cri et l’on s’en saisit très aisément. » M. Alfred Newton, partant de cette idée que chacune des îles Mascareignes avait sa faune propre, avait cru pouvoir admettre que le véritable Palæornis eques élait spécial à l’île Bourbon et se trouvait remplacé à l’île Maurice par une forme très voisine qu'il avait proposé d'appeler Palæornis echo (4), mais cette opinion a été combattue par M. G. Hartlaub (5) et le P.echo a élé rejelé au nombre des synonymes du ?.eques par M. T. Salvaaor1i, dans son Cataloque des Psittacidés du Bri- hsh Museum (6) où ne se trouve mentionné d’ailleurs aucun exemplaire de cette espèce venant de l’île de la Réunion. Dans cette dernière île le Palæornis eques, qui élait encore assez commun du temps de Buffon, paraît être complètement anéanti à l'heure actuelle, et, chose surprenante, il n’exisle même, parail-1l, dans aucun musée des spécimens venant de celle localité. Ce sont probablement, comme l’a dit M. Milne Edwards(7), (1) 4812, L. IT, p. 239. (2) Arch. de l'ile de France, 1819, n° 30, (. IL, p. 121. (D'après J. Desjar- ee Perroquets gris étaient probablement des Perroquels à têle grise (Agapornis cana) plutôt que des Vazas qui ne paraissent jamais avoir existé à l’état sauvage à l'ile Maurice. () Ibis, 1876, p. 284. (5) Die Vôügel Madagascars, p. 22#4. (6) Cat. B. Brit. Mus., 1891, €. XX, p. 442. . (7) Observations sur les caractères ostéologiques des principaux groupes de Psitlacides (Ann. des Sc. ral., Zool., 1866, 5° série, t. VI, p. 101). 30 E. OUSTALET. les deux sexes de cette espèce que Dubois a considérés comme deux formes distincles dans son livre intilulé : Les voyages fais par le sieur D. B. aux îles Dauphine ou Mada- gascar et Bourbon ou Mascarenne, ès années 1669, 1670, 16071, 1672 (1). A côté de ces Perroquets verls, qui étaient gros comme des Pigeons et dont les uns avaient un collier noir tandis que les autres en élaient dépourvus, Dubois cile encore, parmi les espèces qu’on ne recherchait point comme gibier : 1° des Perroquets verts, de la même grosseur que les précédents, mais ayant la têle, le dessus des ailes el de la queue couleur de feu; 2° des Perroquets « de trois façons comme cy-dessus » qui n'étaient pas plus gros que des Merles; 3° des Perroquets un peu plus gros que des Pigeons, mais ayant le plumage couleur de petit gris, un chaperon noir sur la tête, le bec fort gros et couleur de feu; enfin il mentionne à part des Perroquets gris qui étaient aussi bons à manger que des Pigeons. Ces derniers ont été identi- fiés par M. Milne Edwards(2) au Coracopsis obscura ou Grand- Vaza qui de Madagacar a été introduit à l’île de la Réunion où il se trouve encore quoique en petit nombre (3), et les Perroquets verts, gros comme des Merles, ont élé rapportés par le même auteur à l’Agapornis cana, qui a élé aussi im- portée à l’île Réunion et qui s’y est mullipliée comme à l’île Maurice. Cependant ce que dit Dubois de la taille de ces Perroquets et de leur système de coloration (s'il faut traduire de trois facons par de trois couleurs)ne convient pas très bien aux petites Perruches à têle grise. Les Perroquets « un peu plus gros que des Pigeons mais ayant le plumage couleur de petit gris et un chaperon noir sur la lêle » étaient certainement, comme nous l’avons mon- (1) Ce passage a été reproduit dans les Ann. des Sc. nat., Zoolog., 5° série, ENT p.42. (2) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1866, 5° série, t. VI, p. 111. (3) « Le Perroquet noir, dit Bory de Saint-Vincent (Voyage dans les quatre principales îles des mers d'Afrique, t. I, p. 351), vit solitaire dans les bois les plus élevés (à l’île Bourbon); il mord cruellement ; la tristesse de ses mœurs répond à celle de son plumage. » FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES: 131 tré, M. Milne Edwards et moi, dans notre Notice sur quelques espèces d'Oiseaux actuellement éleintes(1), des Perroquets mas- carins (Mascarinus Duboisi). Restent les Perroquets verts « gros comme des Pigeons mais ayant la têle,le dessus des ailes et la queue couleur de feu ». Cette courte description ne peut guère convenir qu'à un Lori ou à un Palæornis. Si l’on lient compte de ce fait et de cet autre que M. Milne Edwards, par l'examen de quelques débris du squelette du Necropsittacus rodericanus, à été conduit à placer cette dernière espèce dans le voisinage des Palæornis et des Loris, ne pourrait-on pas admettre que Dubois à fait allusion à des Perroquets plus ou moins analogues à ceux de l'île Rodigue, Perroquets dont on retrouvera peut-être un Jour les restes dans les terrains ré- cents de l’île de la Réunion ? J'avais eu d’abord l'intention de me borner dans cette Notice aux considérations qui précèdent et dont j'ai présenté un résumé à l’une des dernières réunions des Naturalistes du Muséum (2); mais j'ai trouvé dans la liasse Commerson et 1 dans les manuscrits de Desjardins tant de renseignements intéressants concernant d’autres Oiseaux des îles Mascarei-. gnes que, suivant les bienveillants conseils de M. Milne Edwards,je me suis décidé à puiser de plus en plus largement à ces deux sources d'informations. J'ai été amené ainsi à passer en revue la plupart des es- pèces d'Oiseaux des îles Mascareignes et toutes celles de l’île Maurice. C'est le résultat de ce travail que je donne ci-après, en marquant d’une croix les espèces éteintes et d’un astéris- que les espèces introduiles. + 1. Lophopsittacus mauritianus M. Edw. Espèce propre à l'île Maurice où elle s’est éteinte dans la seconde moitié du xvn° siècle ou dans les premières années du xvr° siècle. (4) Volume commémoratif du Centenaire de la fondation du Muséum, 1893, p. 19 et 20. (2) Bull. du Muséum, 1896, t. IT, n° 6, p. 220 et suiv. ». E. OUSTALET. + 2. Palæornis eques Bodd. Cette Perruche, qui était jadis très commune à l’île de la Réunion comme à l'ile Maurice, a disparu de la première ile depuis le commencement du xix° siècle et est en voie d'extinction rapide dans la seconde. “3. Agapornis cana Gm. La petite Perruche a tête grise de Madagascar a été intro- duite aux îles Mascareignes, peut-être par les Hollandais, ou plutôt par les Français, et s’y est multipliée. 4. Falco peregrinus L. Une jeune femelle de Faucon pélerin fut tuée, il y a quelques années, au mois de décembre, à l’île Maurice, après un fort coup de veut. Sa dépouille fait partie de la collection Newton, à Cambridge (1). 9. Falco concolor Tem. Cette espèce de Faucon, dont le Muséum d'histoire natu- relle de Paris possède plusieurs exemplaires venant de Ma- dagascar (2), se montre aussi accidentellement à l’île Mau- rice. La collection Newlon en possède un exemplaire tué à Grand-Port, au commencement de décembre (3). 6. Tinnunculus punctatus Tem. La Cresserelle ponctuée habite exclusivement l'île Mau- rice (4), où elle est désignée par les colons sous le nom vul- gaire de Mangeur de Poules, et ne se rencontre à l'île de la Réunion que d’une façon tout à fait accidentelle. C’est à cette espèce qu'appartiennent les Faucons observés par la- miral C. Matelief et par d'aulres navigateurs hollandais du commencement du xvu° siècle. «Grant l’a désignée claire- ment en ces termes : « Il ya (à l’île de France) une sorle de Faucon, appelée le Mangeur de poulets, qui se nourrit, (1) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, 1877, p. 9. (2) A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Mada- gascar, Oiseaux, p. 37 et pl. 11, 12 et 12°. (3) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 16. (4) Falco punclatus, Cuv. ms., Temminck, P/, col., 1823, t. I., pl. 45, Schlegel et Pollen, Faune Madag., Oiseaux, 1868, p. 33, pl. 11, fig. 3; Tin- nunculus punctatus, E. Newton, Ibis, 1861, p.271; Gurney, Ibis, 1869, p. 447; Cerchneis punctata, R.B. Sharpe, Cat. B. Bril. Mus., 1874, t. 1, p. 434. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. E dit-on, de sauterelles. Il vit sur le bord de la mer et ne manifeste pas de frayeur à la vue de l'homme (1), » et Berna- din de Saint-Pierre l’a prise pour une sorte d'Épervier, tout en lui attribuant les mêmes mœurs et le même régime que Grant. L'abbé Lacaille en parle également et rapporte que les petits Oiseaux se réunissent quelquefois pour pour- suivre ce Rapace. Du temps de Desjardins, les Cresserelles ponctuées se trou- vaient surtout dans les grands bois du centre de l'île Mau- rice, où elles se nourrissaient surtout de Passereaux. Quel- quefois, cependant, on les voyait passer à une assez grande hauleur au-dessus des habitations et jeter ainsi l’effroi dans les basses-cours où ces petits Faucons exerçaient parfois des ravages, au moins dans les endroits écartés. Une Cres- serelle ponctuée vint, au mois d'avril 1830, visiter l’éta- blissement de J. Desjardins à Flacq et resta une quinzaine de jours dans la localité, planant au-dessus de la basse-cour et attrapant çà et là quelques Poulets. On parvint enfin à l’atteindre d'un coup de fusil et, comme elle n’était que lé- gèrement blessée, M. Desjardins la garda quelque temps en cage en la nourrissant avec de la viande crue. Le même obser- valeur vit au mois de septembre 1837 plusieurs Cresse- relles volant le long des flancs escarpés des basaltes pris- matiques qui forment le Cap à la Savane. Antérieurement, en décembre 1829 et février 1830, il avait reçu quatre Oiseaux de la même espèce tués par M. Tosté et M. Émi- lien (?) au Camp de Masque. En 1861, sir Édouard Newton trouva les Cresserelles ponctuées moins nombreuses à la Savane que sur d’autres points de l’île (2); il pense que ces petits Faucons nichent à la Savane en septembre. (1) « There is a kind of hawk, called the chicken eater, wich is said to feed on grass-hoppers. It dwells on the sea shore and discovers no appear- ance of alarm at the sight of man.» Ch. Grant, History of Mauritius, 1801, p. 66. Passage copié par J. Desjardins. Je n'ai pu malheureusement re- courir au texte original ni pour ce passage ni pour d'autres du même auteur. (2) Ibis, 1861, p. 271. ANN. SC. NAT. ZOOL: | I, 3 34 E. OUSTALET. Outre le type de l'espèce rapportée par l’expédition de l'Uranie, le Muséum d'histoire naturelle possède un spéci- men de Tinnunculus punctatus, donné par M. Dumont en 1804. + 7. Astur Alphonsi Newt. el Gad. Dans ses Recherches sur la faune ancienne des îles Masca- reignes M. À. Milne Edwards a signalé la présence, dans une collection d’ossements provenant de l’île Maurice, qui lui avaient été envoyés en communication par MM. Newton, d'un tarso-métatarsien parfaitement conservé provenant d’un Autour, d'espèce inconnue, mais probablement assez . voisine de l’Astur melanoleucus de l'Afrique australe (1). En étudiant de nouveaux restes de la même espèce, des tibias, des métalarsiens et des métacarpiens recueillis par M. Théo- dore Sauzier dans le gisement de la Mare aux Songes, sir Édouard Newton et le D° Gadow sont arrivés aux mêmes conclusions et ont désigné le Rapace, sur lequel M. Milne Edwards avait le premier appelé l'attention, sous le nom d'Astur Alphonsi (2). A cette espèce, qui a disparu depuis longtemps de la surface du globe et au sujet de laquelle je n'ai trouvé au- cun renseignement dans les papiers de Commerson, ni, à plus forte raison, dans les notes de Desjardins, il faut, comme le fait observer M. Milne Edwards, rapporter les Éperviers de CG. Matelief, peut-être une partie des Faucons dont il est question dans les Relations des anciens voyageurs hollan- dais, les autres étant des Tinnunculus punctatus, el probable- ment les Papanqgues dont parle Dubois et qui sont, dit-il, « gros comme des Chapons, faits au surplus comme des Ai- gles, emportant les petits des Cochons et des Cabris ». Quant aux « Pieds-jaunes ». de la taille et de la forme des Fauconé, et aux « Émerillons qui, quoique petits emportent les Poulets, » c'’étaient évidemment, à mon avis, les premiers des Faucons (1) Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 25 et pl. 15. fig. 2, 2a, 2b, 2c, 24, 2e. (2) Transact. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XIIT, part. 7, p. 285 et pl. XXXIIL, fig. 9 et 10, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1894, 7° série, t. XVIII, p. 222. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 35 concolores (Falco concolor), les seconds des Cresserelles ponc- tuées (Tinnunculus punclatus) où Mangeurs de poules. + 8. Scops Gommersoni Oust. J'ai découvert dans la liasse Commerson un dessin à la mine de plomb, exécuté certainement par Jossigny et re- Fig. 3. — Le Hibou commun ou Petit-Duc de l'ile de France. (D'après un dessin de Jossigny) (1/3 grandeur naturelle.) présentant un Rapace nocturne, qui devait être (si, comme tout porte à le croire, la figure est de grandeur naturelle) à peu près de la taille de l’Aso capensis, Var. major, de Madagascar, mais qui avait la têle surmontée d'’aigrettes beaucoup plus développées et qui portait une livrée com- plètement différente de cette de l'espèce malgache. Ce des- sin porte au verso celte légende, signée de Commerson : 36 E. OUSTALET. « Hibou cornu où Petit-Duc de l'Isle de France. » Or, à l’é- poque actuelle l’île Maurice ne nourrit plus aucune espèce de Hibou, aucune espèce de Petit-Duc, ni même aucune es- pèce de Rapace nocturne. Il n’en était pas de même autre- fois et même jusqu’à une date assez rapprochée de nous. Dans les Relations des voyages des navigateurs hollandais tels que Willem van West Zanen et Cornélius Matelief, qui visitèrent l’île Maurice dans les premières années du xvu° siècle, il est fait mention, en effet, de Chouettes ou de Hiboux parmi les Oiseaux qui peuplaient cette terre. Cette indication s'était déjà trouvée confirmée récemment par la découverte, faite par M. Théodore Sauzier, des restes d'un Rapace nocturne dans la Mare aux Songes, dans le gi- sement célèbre d’où M. George Clark avait exhumé, il y a une trentaine d'années, des ossements de Dronte et d’autres animaux disparus. À priori, on aurail même pu supposer que le Rapace nocturne dont le portrait a été tracé par Jossigny était identique à celui dont M. Th. Sauzier a recueilli les restes ; maisil n’en est rien. L’Oiseau de nuit dont les osse- ments ont été retirés de la Mare aux Songes, était. comme je le dirai plus loin, une véritable Effraye (Sérix Sauzieri), c'est-à-dire un Rapace nocturne dépourvu d’aigrettes ; au contraire, l’Oiseau représenté par Jossigny était, ainsi que Commerson l'avait parfaitement reconnu, un Hibou, ayant la même physionomie générale que nos Petits-Ducs, mais de taille beaucoup plus forte et égale à celle d’un Moyen-Duc. Ce Hibou a vécu jusqu’à une époque très rapprochée de nous; car c’est évidemment l'espèce de Scops que J. Desjardins a signalée dans une communication dont j'ai le manuscrit sous les yeux et qui a pour titre : « Note sur un oiseau de la famille des Chouettes qui habite l’île Maurice, lue à la So- ciété d'histoire naturelle de l'île Maurice dans la séance du jeudi 5 janvier 1837. » Cette communication n'était jus- qu'ici connue des naturalistes que par la mention qui en avait été faite en ces termes, par Desjardins lui-même, dans le Huitième Rapport annuel sur les travaux de la Société FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 31 d'Histoire naturelle de l'ile Maurice, lu à la séance du 2% août 1837 : « M. J. Desjardins a donné une description détaillée d’un oiseau de proie nocturne du sous-genre Scops Savigny, qui venait d'être tué dans les forêts qui couvrent encore certaines portions de la montagne du Bambou, au quartier de Grand-Port. Cette espèce, qui lui paraît nouvelle, n'est cependant pas inconnue des habitants de ce quartier. Depuis longtemps, il est fait mention d’un Hibou ou Chat- Huant qui vit dans ces bois écartés, et que l’on a peine à ren- contrer, bien que plusieurs personnes assurent en avoir tué quelques individus. « Cossigny dans sa réfutalion du chapitre de l'ouvrage où Sonnerat parle de notre île avait bien dit un mot au sujet de ces oiseaux, mais l'endroit où il en parle est écrit avec un tel esprit de dénigrement et avec tant d’animosité qu'il répu- gne de croire à ce qu'il dit. « À une époque bien plus reculée, en 1606, l’amiral Cor- neille Matelief qui était à Maurice avec une escadre de onze vaisseaux hollandais, dit que les Hiboux étaient communs dans l’île. Fidèle à la livrée des oiseaux nocturnes, le Scops de Maurice est bigarré de nuances assez agréables de cou- leurs fauve, rousse et brune. Tantôt ces couleurs se confon- dent, d'autrefois, elles forment des contrastes. La descrip- üon détaillée du plumage de l'oiseau se trouvant dans la note présentée à la Société, je ne m'étendrai pas davantage sur ce sujet. » L'intêret de ce passage n’a pas échappé à mon savant ami le D° G. Hartlaub qui l’a reproduit, au commencement de cette année, dans son mémoire intitulé : « Contribution à l'lastoie des Oiseaux qui ont été détruits dans les temps mo- dernes ou dont l'extinction parait imminente (1), en faisant remarquer que sir Édouard Newton n'avait pu découvrir (4) Ein Beitrag zur Geschichte der angestorbenen Vôgel der Neuzeit, sowie derjenigen deren Fortbestehen bedroht erscheint (Abhandl. des Naturwissen- chaftlichen Vereins zu Bremen, 1896, t. XIV, 1"° part., et tirage à part, 1896, p. 45). 38 E. OUSTALET dans les collections locales aucun exemplaire indiqué comme étant le Scops décrit par Desjardins, niaucunreste de cette es- * pèce dans les produits des fouilles pratiquées à l’île Maurice. D'un autre côlé, il y a quelques mois, M. E. Dupont, de Port-Louis (île Maurice), m'a écrit pour me signaler de nou- veau le même passage en me demandant si la description à laquelle il est fait allusion n'’existerait point parmi les pa- piers de d. Desjardins. Cette description existe, en effet, ainsi que je le disais tout à l'heure, et comme, elle ne paraît ja- mais avoir été publiée, je crois nécessaire de la reproduire iCI 2n exlenso : « Je ne donnerai, dit J. Desjardins, aucun nom au Scops que je décris, bien que j'aie tout lieu de le supposer nouveau. « Les doigts et même les tarses sont sans plumes, seule- ment à la partie antérieure de ces derniers, on voit des plumes courtes et serrées descendre en pointe jusque vers le milieu. Les doigts sont très forts, ils sont armés d'ongles crochus. | « Le bec est très fort, arqué depuis la naissance; la man- dibule supérieure, beaucoup plus longue que l’autre et la recouvrant, est comme coupée carrément à l'extrémité. « Les narines sont percées assez haut et dans la partie cornée du bec. Les yeux, dont Je n'ai pu voir la couleur, sont ronds, situés. comme dans toule cette famille, en avant. Ils sont entourés d’un cercle ou disque de plumes effilées et roides, qui est interrompu sur les côtés. « Une manière de collerette se fait apercevoir sous la gorge. Deux aigrettes, analogues à celles des Ducs et des Hiboux et bien apparentes, se montrent en arrière des yeux et vers le sommet de l’occiput. « Les ailes sont un peu plus longues que la queue, la 4 et la o° rémiges sont les plus longues, la 3° et la 6° sont ensuite plus courtes, la 2° l’est davantage, étant égale à la 8°, la 1°° est la plus courte de toutes. « La queue atteint au bout des doigts; elle est arrondie FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 39 et peu étendue ; toutes les rectrices sont de même longueur. Les aigrettes sont brunes, avec quelques nuances fauves, les plumes des disques oculaires sont blanches avec des nuan- ces fauves. Toutes les parties supérieures sont d’un brun foncé, les plumes de la tête, du cou et du dos ont le bord roussâtre, mais peu tranché; dans les scapulaires il l’est davantage et même quelques-unes ont au bord extérieur une ou deux taches blanchâtres entourées de brun. Les grandes plumes de la queue sont moins brunes et plus rousses avec quelques marbrures d’un roux plus clair mêlées de brun. « Les tectrices alaires ont une bande plus brune vers le milieu et leur bord extérieur est agréablement marqué de taches ou ocelles carrées ou de bandes irrégulières blanches, fauve clair et brunes. Les grandes rémiges ou pennes alaires offrent les mêmes ornements mais avec plus de développe- ment ei des taches d’un blanc fauve au bord interne, ce qui produit par dessous une large moucheture régulière sur un fond brun; le bout de ces grandes plumes est fine- ment moucheté de brun sur un fond assez clair; on voit en outre sous les ailes un espace blanc assez grand. « La gorge et le ventre sont très agréablement ornés de plumes d’un fauve assez brillant et dont le milieu est brun noirâtre et qui de plus ont 2 et 4 taches blanches arrondies et d'une largeur assez remarquable. « Les grandes plumes des cuisses sont blanchâtres avec un peu de fauve sur les côlés et la ligne du milieu plus brune. « Mais, en général, toutes les parties qui sont bien emplumées comme le dos, le ventre, les flancs, les jambes, offrent un duvet noirâtre extrêmement épais, puis recouvert par les plumes ornées que j'ai décrites plus haut. « La couleur du bec et des pattes est d’un brun roussâtre. « La longueur du bec aux ongles est de un pied un pouce et demi (1). (4) 0,365. 40 E. OUSTALET. « L'envergure du bec aux ongles est de un pied dix pou- ces (1). » La longueur de l’Oiseau, du bec aux ongles, est précisé- ment celle que je relève sur le dessin de Jossigny qui con- corde, jusque dans les moindres détails, avec la description de Desjardins. Celle-ci est précédée de quelques renseigne- ments relatifs à la capture de l'Oiseau. Desjardins rapporte que ce Scops à élé lué, à la fin du mois d'octobre 1836, dans les forêts qui couronnent les hauteurs voisines de l’anse des ‘Bambous et qu'il lui a été envoyé à peine vidé. Enfin dans quelques lignes ajoutées en post-seriptum, il s'exprime ainsi: « En septembre 1837 plusieurs habitants de la Savane me dirent qu'ils avaient vu des Hiboux dans leurs forêts; le docteur Dobson, du 99° régiment, m'a assuré en avoir tué un dans les bois de Curepipe. » Desjardins prévoyait du reste que l'espèce qu'il décri- vait aurait bientôt le sort du Dronte et du Pigeon hollan- dais : « Il pourrait bien se faire, disait-il, que, sous peu d'années, l'espèce, si c'en est une, disparût entièrement à cause de la destruction de nos forêts et de la grande quan- tité de braconniers qui parcourent les bois qui restent. » Cette prévision s’est réalisée et Le Scops n'existe certainement plus à Maurice depuis une cinquantaine d'années; Desjar- dins en a eu entre les mains un des derniers représentants. Heureusement que, grâce aux renseignements fournis par ce naturaliste zélé, grâce au dessin de Jossigny et à la note de Commerson, nous pouvons nous faire une idée très exacte de la physionomie de l’Oiseau, de ses dimensions el même de son mode de coloration. La découverte soit de quelques ossements de ce Rapace nocturne dans les couches récentes du sol de l’île Maurice, soit même d'un exemplaire empaillé conservé dans un Musée (2) et ignoré des ornithologistes (1) 0,594. (2) Il a été fait allusion à diverses reprises dans les Proceedings de la So- ciété zoologique de Londres à des envois de collections en Angleterre, faits par J. Desjardins. Il serait intéressant de rechercher ce que ces col- lections sont devenues. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 41 permettra bientôt peut-être de fixer la place que l'Oiseau dont je viens de publier la description devra occcuper dans la série; mais dès à présent je crois pouvoir affirmer que conformément à l'opinion de Commerson et de Desjardins, il appartenait bien au genre Scops. Ce genre, d’ailleurs, renferme déjà deux espèces de forte taille, le Scops cristatus de la Guyane et le Scops Stricklandi de l'Amérique centrale et une espèce à tarses en parlie dénudés, le Scops qymnopoda de l’Asie méridionale. C’est sans doute non loin de ce dernier qu'il faut ranger le Scops de Maurice que dans une Note insérée dans le Bulletin du Muséum (1)j'ai proposé de désigner sous le nom de Scops Commersom, nom que Desjardins lui-même eût ratifié comme un faible hommage à la mémoire d’un voyageur dont la valeur demeura trop longtemps méconnue. + 9. Strix Sauzieri Gad. et Newt. Comme je le disais tout à l'heure, M. Th. Sauzier a recueilli, dans le gisement de la Mare aux Songes, les restes d'un Rapace nocturne que MM. Édouard Newton et le le D'° H. Gadow ont reconnu appartenir au genre Strir et qu'ils ont proposé d'appeler Sérix Sauzieri (2). La des- cription et les figures qu'ils ont publiées d’un humérus, d’un tibia et d’un tarso-métatarsien ne laissent encore doute sur l'exactitude de la détermination de l'oiseau. Celui-ci appartenait à un tout autre genre que le Scops Commer- soni Oust., de Maurice, que l’Afhene murivora ou le Bubo (?) dont sir Édouard Newton a retrouvé dans les cavernes de l’île Rodrigue quelques ossements qui ont été étudiés par M. A. Milne Edwards (3). L'Afhene murivora, dont jusqu’à présent on n’a retrouvé aucun représentant vivant à l’île Rodrigue (4), esi en effet, comme son nom l'indique, une (4) Bull. du Mus., 1896, t. II, n° 6, p. 220 et suiv. (2) Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XIII, part. 7, p. 226 et pl. XXXII, fig. 11 à 18, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1874, 7° série, t. XVIII, p. 223. (Trad. Th. Sauzier.) (3) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 12 et pl. 11, fig. 2à2e. (£) M. Milne Edwards pense qu'il faut attribuer à l’Afhene murivora les pas- 49 E. OUSTALET. véritable Chevèche, différant par ses tarses plus courts de l’Afhene superciliaris (1) de Madagascar et le Bubo offre les caractères des Grands-Ducs dans la conformation de son tibia, moins fort que celui des Bubo madagascariensis. C'est à ces deux sortes de Rapaces nocturnes, qui différaient également de mon Scops Commersoni, que, comme M. Milne Edwards l’a rappelé, Leguat fait allusion (2) quand il parle des Hiboux qui coopéraient activement à la destruction des Rats dont l’île Rodrigue était infestée. 10. Guculus poliocephalus Lath. Un Oiseau de cette espèce a fait l’objet d’une Note qui fut lue par J. Desjardins le 5 octobre 1830 à la Société d’his- loire naturelle de l’île Maurice et mentionnée dans les Proceedings de la Société zoologique de Londres en 1832 (3). « Cet oiseau tué dans les forêts de Flacq vers la source de la rivière du Poste, le 25 septembre 1830, par un habitant de ce quartier (M. Caradec fils) m'a été envoyé le jour même, dit Desjardins dans la Note en question, dont j'ai la minute sous les yeux, et j'ai pu aussitôt qu'il a élé en ma possession en déterminer l'espèce... Il y avait plusieurs jours que ce propriétaire le voyait voler parmi les arbres du verger qui avoisine sa maison. » En vidant et dépouillant ce Coucou pour en faire figurer la dépouille dans sa collection, Desjar- dins trouva dans le gésier beaucoup de chenilles d’un pouce de long. En dépit de certaines différences qu'il constata entre l'Oiseau dont il donna la description et le Coucou vulgaire (Cuculus canorus), il le considéra non comme le type d’une espèce distincte, mais comme le représentant d'une simple variété locale du Coucou chanteur, variété dont il avait eu sages de la Relation de l'ile Rodrigue où il est question d’un Oiseau à peu près comme la Chouette, qui mange les petits Oiseaux et ies pelits Lézards (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6° série, t. IT, art. 4, p. 16). (1) A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. eb poli. de Madagas- car, Oiseaux, p. 126, et pl. 29 et 296. (2) Le voyage et les avantures de F. Leguat, 1750, t. II, p. 113. (2) Pl. 144. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 43 sous les yeux plusieurs spécimens venant de Madagascar et à laquelle il jugea inutile d'imposer un nom particulier, et c'est seulement trente ans plus tard que M. G. Hartlaub fit ressortir les dissemblances de taille plutôt encore que de plumage, qui séparent les Coucous de Madagascar de ceux d'Europe et donna aux premiers le nom spécifique de Cucu- lus Roch (1). Plus récemment encore le Cuculus Roch fut ramené par MM. Milne Edwards et Grandidier (2) au rang de simple variété du Cuculus polocephalus Lath., de l'Asie et des îles malaises, et finalement ful A assimilé à cette dernière espèce par M. G. E. Shelley (3). Assez communs à Madagascar, les Coucous poliocéphales ne se monirent qu'accidentellement à l’île Maurice. Outre le spécimen décrit par Desjardins, je ne trouve cité, comme pris dans cette dernière île, qu’un autre exemplaire, capturé en octobre 1845, sur le Piton du Milieu (4). + 11. Buceros sp.? La famille des Bucérotidés, dont l’aire de dipersion com- prend l'Afrique, l'Inde et la région austro-malaise, ne compte actuellement aucun représentant à Madagascar, ni dans les îles Mascareignes ; mais je me demande s’il en élait de même autrefois, au moins pour ces dernières îles. Dans les passages que j'ai cités à propos des Perruches et qui sont empruntés aux Relations des voyages de J. C. van Neck, de W. Harmansen et Willem van West-/anen, on trouve, en effet, des Corbeaux indiens mentionnés parmi les Oiseaux de l’île Maurice. Or, l’Oiseau qui est désigné dans les anciens ouvrages d'histoire naturelle et dans les traités d’Ornitholo- gie du xvu' et du xvur° siècle, tels que ceux de Bontius (5), de (1) Proceed. Zool. Soc. Lond., 1862, p. 224, et Die Vôgel Madagascars, 1871, p. 253. (2) Histoire physique, naturelle et politique de Madagascar, Oiseaux, 1879, Edo 1106%ebt: Il aflas, pl. 56. (3) Cat. B. Brit. Mus., 1891, t. XIX, Cuculidæ, p. 255. (4) Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagas- car, Oiseaux, 4819, &:0E, p. 178. (5) Hist. nat. et medic. Indiæ orientalis, lib. VI, publié par J. Pison dans ses Libri XIV de Indiæ utriusque re naturali et medicina, 1648. 44 E. OUSTALET. Ray et de Salerne {1}, sous les noms de Corbeau indien et de Corvus indicus, n’est autre chose, d'après Gmelin (2), que le Buceros hydrocorax de Linné, c’est-à-dire l’Hydrocorax planicornis où Hydrocorax hydrocorax des naturalistes mo- dernes. Et, effectivement, l’un des Oiseaux représentés sur une planche annexée à l’une des premières éditions du Voyage de van Neck et reproduite dans le Mémoire de M. Strickland sur le Dodo, a, comme je l'ai dit plus haut, tout à fait la physionomie d'un Calao et a été reconnu comme tel par Strickland. | D'autre part, les caractères que la légende de la planche attribue au Corbeau indien, c’est-à-dire la taille plus que double de celle d'un Perroquet et le plumage de deux et de irois couleurs, sont bien ceux des Bucérotidés du genre Hydrocorax, dont la livrée est noire et blanche ou noire, rousse et blanche. On peut donc supposer que l’île Maurice possédait jadis une ou peut-être plusieurs espèces de Calaos plus ou moins semblables à ceux qui vivent actuellement aux Philippines ; mais on doit admettre en même temps que ces Oiseaux ont été détruits avant l’arrivée de Leguat, qui autrement n'eût pas manqué de faire mention de vola- tiles aussi remarquables. Seules de nouvelles investigations dans les gisements de l’île Maurice pourront nous éclairer sur la valeur d’une hypothèse que je n'émets d’ailleurs qu'avec la plus grande réserve. 12. Eurystomus glaucurus Müll. Dans la séance du 15 janvier 1834 de la Société d’his- toire naturelle de l’île Maurice, Julien Desjardins lut une Note précédée d’un assez long préambule, au sujet d'un Rol- lier qu'il avait capturé dans les circonstances suivantes : « En 1826, à la fin du mois de novembre, j aperçus, dit-il, dans les bois qui avoisinent la Rivière Française, au quar- -(4) L'histoire naturelle éclaircie dans une de ses parties principales, l’ornitho- logie, etc. Trad. du Synopsis avium de Ray, par Francois Salerne, in-#, Paris, 1767. | (2) Syst. Nat., 1788, t. I, p. 359. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 45 tier de Flacq, un gros oiseau qui m'élait tout à fait inconnu. Un noir élant parvenu, après l'avoir poursuivi assez loin, à l’étourdir d’un coup de pierre, je l'emportai aussitôt. Je fus assez heureux pour le rappeler à la vie et le conserver en cage une dizaine de jours. Pendant cette courte captivité, je le nourrissais de pain et de riz cuit à l’eau, et j’ajoutais quelquefois un fruit qu'il mangeait avec le même plaisir que les aliments cuits. Son cri, qu'il faisait entendre plusieurs fois dans la journée, ressemblait, à un croassement assez fort et désagréable. Il mourut après avoir langui quelques jours et comme 1l avaitété mis dans une cage trop petite, où ses mouvements élaient gênés, parce qu'il cherchait à tout mo- ment à sortir, son beau plumage en souffrit. « Je fus à même de reconnaître que cet oiseau n’apparte- nait pas à noire faune et, après en avoir déterminé l'espèce, je vois aujourd’hui que tous les auteurs que j'ai pu consul- ter s'accordent à lui donner pour patrie la grande île de Ma- dagascar et l'extrémité australe de l'Afrique (1). « Depuis que je possède cel oiseau dans ma collection, j'ai consulté plusieurs voyageurs naturalistes, entre autres M. Dussumier et M. Sganzin, et tous m'ont assuré qu'il était commun à Madagascar. » J. Desjardins donna en même temps une description dé- taillée de cet Eurystome, d’où 1l ressort qu'il ne s'était pas trompé en l’attribuant à l'espèce malgache, £urystomus glau- curus Müll. Le même naturaliste relate du reste en ces termes, dans ses notes manuscrites, la capture de deux autres Eury- stomes : « À la séance du 5 janvier 1837, 1l a été présenté à la So- ciété d'histoire naturelle de l’île Maurice, par M. Autard, un Rollier qui avait été tué à la Savane, il y a quelques se- maines. « A la séance du 5 janvier 1837, pendant que Drouin était (4) L'Eurystome de l'Afrique australe appartient à une espèce voisine : _ Eurystomus afer Lath. 46 E. OUSTALET. en vacances à la maison, à Flacq, un Rollier semblable fut tué dans le voisinage et me fut apporté par un jeune homme; je l’achetai et il fait partie de ma collection. » M. S. Roch et sir Édouard Newton ont signalé égale- ment (1) la présence accidentelle à l’île Maurice de quel- ques individus de lÆurystomus glaucurus, espèce qui est, au contraire, très largement répandue à Madagascar (2) et se montre aussi à Anjouan. 13. Collocalia francica Gm. | Cette Salangane, dont l'habitat serait, d'après les re- cherches récentes de M. Hartert (3), beaucoup plus étendu qu'on ne le croyait primitivement et qui se trouverait non seulement sur les îles Mascareignes, mais en Australie, à la Nouvelle-Guinée, aux îles Fidji, etc., a élé décrite par Buffon sous le nom de Petites Hirondelles à croupion gris (4), d’après un exemplaire recueilli par Commerson à l’île de France, exemplaire qui a dû être délruit, 1l y a plus d’un siècle, car je n'en ai trouvé aucune trace dans les plus anciens registres du Muséum. Buflon ajoute, d'après des notes de Commerson (5), dont l'original ne nous a malheu- reusement pas été conservé, que cette espèce nouvelle d'Hi- rondelle est peu nombreuse à l’île Maurice (6), quoiqu'elle y trouve beaucoup d’Insectes, qu’elle à très peu de chair et n’est point un bon manger, qu’elle se tient indifféremment à la ville et à la campagne, mais toujours dans le voisinage des eaux douces, qu’on ne la voit jamais se poser et que son (1) Ibis, 1862, p. 270. (2) G. Hartlaub, Di Vôügel Madagascars, p. 67; A. Grandidier et A. Milne Edwards, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, 1879, t. I, p- 214 et pl. 80, 81 et 82; B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1892, t. XNIT, Co- raciadæ, p. 29. LL (3) Cat. B. Brit. Mus., 4892, t. XVI, Cypselidæ, p. 502. (4) Hist. not. des Oiseaux, 1779, t. VI, p. 690, et 1783,t. VII, p. 348. (5) Buffon parle, en effet, des dimensions de l’individu décrit par Com- merson. (6) F. Leguat avait déjà écrit antérieurement (Le voyage et les avantures de F. Leguat, 1750, t. II, p. 107) : « Nous n’avons vu que très peu d'Hiron- delles. » Ceci toutefois peut s'appliquer à la Phedina borbonica. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 47 vol est très prompt, enfin que M. le vicomte de Querhoent l’a trouvée fréquemment le soir à la lisière des bois, ce qui lui a fait présumer qu’elle y passait la nuit. À défaut du spécimen type de Commerson, le Muséum pos- sède trois exemplaires de Co/localia francica venant de l'île Maurice, d'où 1ls ont été rapportés par Dumont en 1804 et par Verreaux à une date plus récente, plus quelques spéci- mens obtenus à l’île de la Réunion par M. Lantz en 1870. L'espèce se trouve dans le nord de l’île de Madagascar, nous le savons par M. Grandidier {1}, mais elle doit, dans tous les cas, y être beaucoup moins commune qu’à l’île de la Réunion ou à l’île Maurice, où elle a été observée par sir Édouard Newton (2) et par F. Pollen. Ce dernier a recueilli sur le mode de nidification de la Collocalia francica des renseignements que M. G. Hartlaub a reproduits dans son livre sur les Oiseaux de Madagascar et des îles Mascarei- gnes. Ces observations sont confirmées par celles que je relève dans les Notes de J. Desjardins qui dit en parlant de l’'Hirundo francica : « C’est encore un oiseau extrêmement commun et qui détruit beaucoup d'insectes, surtout les teignes. _« Elle fail son nid dans des trous de rochers avec de la mousse qu'elle colle avec une pâte semblable à de la colle d’amidon; mais ce ne sont pas ces fameux nids d’hirondelle qui proviennent de la Salangane (Hirundo esculenta). « L’'Hirondelle est couverte de poux. » Suit une description de l’Oiseau, après laquelle J. Desjar- dins ajoute : « L'Hirondelle est presque toujours en mou- vement, voltigeant de manière irès irrégulière, formant mille tours et détours, y étant forcée pour attraper les insec- tes qui volent si irrégulièrement. Rarement, on la voit se poser, et c'est sur les endroits élevés. afin de pouvoir mieux s’enlever à cause de la longueur des pennes de ses ailes. » (4) Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 200. (2) Ibis, 1860, p. 201, et 1861, p. 116 et 271. 48 E. OUSTALET. J. Desjardins constate que ces Oiseaux étaient très nom- breux au Grand-Port et à la Savane, en septembre 1837. Il fait remarquer enfin que C. Matelief, dans un passage que J'ai cité plus haut, avait déjà signalé, en 1606, la présence d'Hirondelles à l’île Maurice. 14. Zosterops mauritiana Gm. 15. Zosterops chloronota V. Desjardins paraît avoir plus ou moins confondu ces deux espèces propres à l’île Maurice, la première avec le Zosterops madagascariensis (1) ou Cheric de Buffon (2), la se- conde avec le Z. borbonica (3), el dans ses notes il les désigne tour à tour sous les noms de Fiquiers et Gobe-Mouches. Ce- pendant, la note suivante, à en juger par la description qui l’accompagne (4) et qui a été prise sur un individu tué d’un coup de pierre, le 28 mars 1833, se rapporte au Zos- terops mauritana (5) : « Gobe-Mouche de Maurice (Musci- capa Cuv., I, 345), appelé dans l'île Oëseau-manioc, parce qu'on le rencontre fréquemment dans les champs de Ja- tropha manihot, quoiqu'il ne soit pas exclusivement attaché à ce végétal, car on le voit voler par troupes assez considé- rables dans les forêts et les plantations. Je pense que c’est le Figuier bleu (Motacilla mauritiana), que Buffon a décrit et fait représenter dans les P/anches coloriées, n° 705, fig. 1 et 3... Ilse met à piper (c’est ainsi qu'on appelle leur eri à l’île de France, lorsqu'il rencontre un rat, un gros oiseau ou même quelqu'un dans les champs; il s'approche de (1) A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Ma- dagascar, p. 291 et pl. 113 et 114. (2) Hist. natur. des Oiseaux, 1718, V, p. 279. (3) Gadow, Cat. B. Brit. Mus., t. IX, p. 195; le Figuier de l’isle de Bourbon, Brisson, Ornithologie, 1760, t. III, p. 510 et pl. 28, fig. 3; le Petit Simon, Buffon, Hist. natur. des Oiseaux, t. V, p. 260. (4) Desjardins dit en effet que l’Oiseau mesure 3 pouces et demi de long, qu'il est d'un gris uniforme en dessus et blanc en dessous, qu'il a la queue et le bout des ailes noirs, le bec et les pattes noirs, etc. (5) H. Gadow, Cat. B. Brit. Mus., 1884, t. IX, p. 194; le Figuier bleu, Buffon, Hist. nat. des Oiseaux, t. V, p. 282; le Figuier de l’isle de France, Daubenton, PI. enlum., pl. 705, tig. 1. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. | 49 très près de l’objet qui excite sa curiosité, sa surprise. » De son côté Milbert dans son Voyage pittoresque à l'ile de France (1) à fait allusion au ÆFiquier bleu qu'il accuse de faire de grands dégâts parmi les fruits el les grains et au Fiquier gris (Zosterops chloronota) (2) qui, dit-il, se plaît dans les bambous. Cette dernière espèce a été observée fréquem- ment aux environs de Souillac et sur les collines voisines de Saint-Martin par sir Edouard Newton qui a donné d'inté- ressants renseignements sur ses allures et son mode de nidification (3). Le même naturaliste a décrit également le nid etles œufs du Z. maurihana (4). Ces deux Zosterops élaient désignés autrefois à l’île de France sous le nom de Yeux-blancs (5) à cause du cercle de plumes blanches qui entoure leurs yeux en figurant des sortes de lunettes. Le Z. chloronota était appelé Tic-Tic , à cause de son El; 16. Ixocincla olivacea J. et S. Une note manuscrite de J. Desjardins renferme la descrip- tion incomplète d’un Merle olivâtre à bec et à pattes jaunes que je u’hésite pas à rapporter à l’/xocincla olivacea et non, comme le faisait Desjardins, au Merle vert de l'ile de France de Buffon (6) et de Daubenton (7). Cette dernière espèce. que Gmelin a désignée sous le nom de Turdus mauri- tianus, n’est ni un Merle, ni une /xocincla, mais probable- ment, comme l’a indiqué G. KR. Gray (8), une sorte de Calornis, originaire toutefois non pas de l’île de France, mais de quelque île de l'Océanie. Dear :p::257. ) H. Gadow, Cat. B. Brit. Mus., t. IX, p. 193. ) Ibis, 1860, p. 201 (Zosterops curvirostris),et Ibis, 1861, p. 272 ; G. Hart- , Die Vôgel Madagascars, p. 99. ) Ibis, 1860, p. 201, et 1861, p. 277 (Zosterops borbonica), et G. Hartlaub, 0p. cit. ,-p« 97. (5) Dumont, Dict. des Sc. natur., 1829, t. X, p. 202. (6) Hist. natur. des Oiseaux, t. II, p. 388. (7) Planches enluminées de Buffon, pl. 648, fig. 2. (8) Handlist of Genera and Species of Birds, 1869-1871, t. II, p. 27, n° 6387. | ANN. SC. NAT. ZOOL. Ill, 4 la (4 (2 (3 U (4 50 E. OUSTALET. L'Zrocincla ouvaceà est propre à l’île Maurice où elle a été observée par sir Edouard Newton (1). C’est le Merle auquel Milbert fait allusion dans son Voyage pittoresque à l'Ile de France (2) el dont il dit : « Cet oiseau est ici du nombre de ceux qui se mangent, cependant il a une saveur assez fade, qu'il faut relever à force de muscade et d'autres épiceries. » Les Grives dont C. Matelief fait mention parmi les Oiseaux de l’île Maurice, les Merles siffleurs dont parle Bernardin de Saint-Pierre dans ses ouvrages, étaient évidemment aussi des Îrocincla, car ces Oiseaux que Brisson, Buffon et G. Cuvier rangeaient parmi les Turdidés sont encore désignés sous le nom vulgaire de Merles dans les îles Mascareignes et l'espèce de Maurice, l’/xocincla olivaeca ou Hypsipetes olivaceus, fait entendre pendant la saison des nids, à ce que nous apprend sir E. Newton, un sifflement qui rappelle un peu celui de notre Grive musicienne. D'après M. G. Hartlaub l’/rocincla olivacea (3), comme l'Zrocincla borbonica Briss. (4) de l’île de la Réunion, est en voie d'extinction rapide. C'est à cette dernière espèce qu 'ap- perlenaient les Merles dont il est question dans le passage suivant du Voyage aux quatre principales îles des mers d'A frique, de Bory de Saint-Vincent (5) : « Nous avions fait halte aux Trois-Jours pour dîner avec des Merles que nous avions tués en route ; ces Merles ne sont pas les mêmes que ceux d'Europe (6) ; leur plumage tire sur l’ardoise el le (1) Ibis, 4860, p. 201 (Turdus ourovang?), et Ibis, 1861, p. 271; G. Hartlaub, Die Vogel Madagascars, p. 138. (2) T''AE pere (3) Hypsipetes olivacea, Jardine et Selby. Ill. Orn., t. IV, texte de la pl. IT; G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, p. 138 et 409; A. Newton, Rowley's Or- nith. Miscell., t. I, p. 51 et pl. XLIIL, fig. 3 ; Ixocincla olivacea, R. B. Sharpe, Cat. B.-Brit. Mus., 1887, t: NT, p-##0: (4) Le Merle de l’isle de Bourbon, Turdus borbonicus, Brisson, Ornith., t. I, p. 293, pl. XXIV, fig. 3; Hypsipetes borbonica, A. Newton, Rowley's Ornith. Miscell., t. 1, p. 50, pl. XLIL, fig. 2; Ixocincla borbonica, R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus.,t. VI, p. 46. (3) 1804, t. I, p. 308. (6) Bory de Saint-Vincent renvoie, en effet, au Turdus borbonicus de Gme- lin et de Brisson. + FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. )1 bistre ; ils font entendre un espèce degrincement chevrotant et aigu, qui m'a paru leur seul ramage ; ils sont d'un très bon goût et d’une stupidité incroyable. En certains endroits peu fréquentés on peut les tuer avec des gaules; à peine partent-ils au coup de fusil, et j'en ai vu tuer qu’on avail manqué d’un premier coup de feu sans qu'ils eussent bougé de place. » Ce que dit Bory de Saint-Vincent des qualités de La chair des Zxocincla de Bourbon et de leur naturel peu farouche s'applique probablement aussi aux /xocincla de Maurice et suffit à expliquer la diminution rapide et la disparition pro- chaine de ces Oiseaux. Le Muséum d'histoire naturelle de Paris possède un spécimen d’Zrocinela olivacea qui a été rapporté de l’île de France par Dussumier, en 1826, et qui avait été désigné primitivement sous le nom d'Æypsipetes atricilla Cuv. 17. Phedina borbonica Gm. Desjardins s’est contenté de copier les quelques lignes que le Dictionnaire de Dumont a consacrées (1), après lV'Aistoire naturelle de Buffon, à cette espèce, connue jadis à l’île de France sous le nom d’'Airondelle des blés (2), parce qu'elle vole surtout au-dessus des champs de blé. Peut- être n'avait-il pas eu souvent l’occasion d'observer la Phedina borbonica qui remplace la Phedina madagasca- riensis dans les îles Mascareignes, mais qui y est confinée dans certaines localités et qui, d’après Pollen, y devient de plus en plus rare (3). | Le Muséum d'histoire naturelle de Paris possède trois exemplaires de Phedina borbonica venant de l’île Maurice : le premier est sans renseignements et faisait peut-être partie (1) Dict. des Sc. natur., 1821, t. XX, p. 235. (2) Buffon, Hist. natur. des Oiseaux, t. VI, p. 694. (3) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 64; R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1885, t. X, p. 123. Voyez aussi, au sujet des mœurs et de la nidifica- tion de cette espèce à l’île Maurice, E. Newton, Ibis, 1861, p. 271, et 1863, p. 270. D'après cet auteur, les Hirondelles ont été presque anéanties à l’ile Maurice à la suite de l'ouragan de 1861. 22 E. OUSTALET. de l’ancienne collection, le second a été rapporté par . Dumont en 1804 et le troisième provient de la collection du prince Ch.-L. Bonaparte. | Trochocercus borbonicus Gm. Après avoir essayé, sans trop de succès, d'établir, d’après le /iclionnaire classique et le Dictionnaire des Sciences naturelles de Dumont, la synonymie de cette espèce que Brisson (1) et Buffon (2)appelaient le Gobe-Mouche huppé de l’isle Bourbon, Gmelin Muscicapa borbonica (3), J. Desjardins en donne une description succincte, mais exacte, accompa- gnée d’une figure coloriée qu'il qualifie lui-même de mau- vaise (4) et il ajoute les détails suivants concernant les mœurs de l'oiseau : « Le Gobe-Mouche, qu'on appelle ici Cog de Lois parce qu'il est presque toujours dans les forêts ou dans les buis- sons, et que jamais, ou bien rarement, on le voit voler dans les plaines, est très peu farouche et se laisse souvent tuer à coups de bâton. Il n’est nullement nuisible, bien au contraire, il détruit les insectes qui vous assailleraient dans nos climats chauds s’il n’en était pas ainsi. Le chant est très agréable; c’est un pelit cri plaintif qui laisse quelque chose de triste dans l'imagination de celui qui l'entend et c'est surtout au coucher du soleil ou pendant une heure ou deux après qu'il faut entendre cette chanson qui charme le voyageur qui se trouve à la nuit sur le bord d’un bois. Le chant du Coq de bois sera toujours présent à ma mémoire. Dans les Plaines Willem et à Flacq..… j'ai entendu souvent cet oiseau. « La femelle pond trois œufs blancs, mouchetés de roux, surtout aux extrémités, de 8 lignes de long sur 6. En octobre, novembre: et décembre elle couve, car c’est (1) Ornith., t. II, p. 240, pl. 39, fig. 5. (2) Planches enluminées, n° 573, fig. 1. (3) Syst. Natur., 1788, t. I, p. 939. (4) Voir pour la description détaillée et exacte de cette espèce, R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1879, t. IV, p. 302. NP REIN EE Æ FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 53 pendant ces trois mois que j'ai souvent pris des femelles occupées à pondre et elles sont si peu farouches qu'en mettant doucement mon chapeau dessus je les prenais. Le nid est posé solidement entre deux ou trois branches d’arbrisseau à 4 ou 6 pieds de terre, au milieu des bois, des buissons fourrés et même dans les vergers et les bosquets. L'ouverture du nid estronde et, en général, le nid ne consiste qu'en un simple creux de forme arrondie, mais {rès régu- lier. Il est composé de feuilles herbacées et garni en dehors de feuilles dont il ne reste que les nervures, de cocons blancs d’araignées, etc. « J'en ai trouvé sur des goyaviers, des sureaux, des manguiers, des bois de chandelle. » Ces renseignements concordent absolument avec ceux qui nous sont fournis par sir E. Newton qui a observé ces Gobe-Mouches, mais en petit nombre, dans les plaines de la Savane (1). | Comme l'avait remarqué Desjardins, Milbert, au contraire, les connaissait fort mal et n'avait à leur égard que des idées confuses, puisqu'il dit dans le même volume, qu'ils sont communs et qu'ils sont fort rares et qu'il Les rapporte ailleurs à deux espèces distinctes : le Tyran et la Moucherolle rousse à Lête noire surmontée d’une huppe (2). Le Muséum possède du Trochocercus borbonicus quatre spécimens : savoir un exemplaire rapporté de l’île Maurice par Maugé (expéd. Baudin), un autre rapporté de la même île par Dumont en 1804 ; un troisième venant de l’île Bour- bon où 1l à été recueilli par les naturalistes de l’expédition de la Favorite, el un quatrième indiqué comme originaire de Madasgascar, mais venant certainement de l’île de la Réunion et donné par le voyageur Bernier. 19. Lalage rufñiventer Sw. Desjardins désigne dans ses notes le Lalage rufiventer de (4) Ibis, 1861, p. 271 ; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 171. (2) Voyage pittoresque à l'ile de France, t. II, p. 63, 257 et 259. J4 E. OUSTALET. Swainson (1) ou Ozxynotus typicus de Hartlaub (2) sous le nom de Pie-grièche à ventre roux (Lanius ferrugineus L.), nom inexact et qui appartient à une espèce de Laniidé du Cap de Bonne-Espérance, le Dryoscopus rufiventris Sw.; mais la descriplion qu’il donne d’un Oiseau tué à la Mon- tagne Blanche, le 24 octobre 1829, par M. Bouton, ne prête à aucune équivoque. « Cet oiseau, dit-il, connu dans l’île sous le nom de Merle cuisinier pour le distinguer d'avec l’autre (3), est commun dans les forêts et dans les montagnes où, comme le dit Bernardin de Saint-Pierre, il vient à l’appel du chasseur se faire tuer au bout du fusil ; c'est avec raison que cet auteur dit que c’est un très bon gibier, En 1693 Leguat dit qu'il en a vu, mais cependant qu'il y en avait peu. « L'abbé de Lacaille se contente d'en indiquer une espèce. «Ces oiseaux se nourrissent de baïes et surtout d'insectes, particulièrement de charançons. Le gésier de celui qui a servi à ma description en était plein. » Peu de temps après avoir étudié ce premier spécimen, qui avait les parties inférieures du corps blanches el qui était par conséquent un mâie, Desjardins en reçut un autre qui lui fut envoyé le 15 février 1830 par M. Tostée. Ce second Oiseau, au sujet duquel il avait quelques hésitations, ne sachant si c'était le représentant d’une espèce ou d’une variété différente, ou simplement un jeune ou un individu d’une autre sexe du Lanius ferrugineus, avait le ventre roux et était, par conséquent, une femelle de Lalage rufiventer Desjardins a recopié également la description que Quoy et Gaimard, dans la Zoologie du Voyage de l'Uranie (4), ont donnée du Lanius ferrugineus Lath. ou Lanius rufiventer ou )‘Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1879, 1; EV, p.401. ) Die Vügel Madagascars, p. 182. ) L’Ixocincla olivacea. ) (1 (2 (3 (4) In-4°, 1824, p. 96 et 97 et pl. XVII. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 05 Pie-grièche à ventre roux et qui est précédée des lignes sui- vantes : « Cet oiseau que Latham a décrit et qu'il soupçon- nail être le Fiscal, mais que depuis il a reconnu former une espèce différente, en est, en effet, une très distincte. L'in- dividu qu'il a vu venait du Cap de Bonne-Espérance où se trouve aussi le Fiscal, le nôtre provient de l’île de France. Dans cette colonie on confond cet oiseau avec les Merles, malgré la différence de son plumage et de ses mœurs. Il ne va point en troupe comme ces derniers, vit seul, isolé, et traverse brusquement les grands bois; c’est dans ceux de moindre élévation qu'il paraît plus particulièrement se plaire. Cette pie-grièche est assez rare ; nous ne vimes que cet individu que l'un de nous tua dans une excursion autour de l’île ». À propos de ce que disent Quoy et Gaimard de la patrie du Lanius ferrugineus, Desjardins a cru devoir ajouter que cet Oiseau est originaire d'Afrique et qu’on le reconnaîl mani- festement dans ce passage de Bernardin de Saint-Pierre : « On a fait venir du Cap, dit-il, un oiseau bien plus utile. Les Hollandais l’appellent l’Amë du Jardinier. I est brun et de la grosseur d’un moineau; il vit de vermisseaux, de chenilles et de petits serpents (1); non seulement il les mange, mais il en fait d'amples provisions en les accro- chant aux épines des haies. Je n’en ai vu qu'un : quoique privé de liberté, il avait conservé ses mœurs et suspen- dait de la viande qu'on lui donnait aux barreaux de sa cage (2). » Contrairement à ce quesupposait Desjardins et conformé- ment à l'opinion de Quoy et Gaimard, l'Orynotus typicus est certainement un élément autochtone de la faune de l’île Maurice et c’est sans doute par suite d’une confusion entre le Lanius ferrugineus de Latham et le L. ferrugineus de Linné ou bien encore entre la première espèce et le Fiscal (4) « Je ne sais si Bernardin l’a vu se nourrir de petits Serpents dans notre île », écrit Desjardins. (2) Voyage à l’isle de France, 17173, t. I, lettre XV, p. 242. 56 E. OUSTALET, (Lanius collaris L.) qu'on a assigné à l'Orynotus une origine africaine. Je dois dire cependant que la note suivante de Desjardins semble indiquer qu’il y a eu, au siècle dernier, importation à l'île de France de Pies-grièches africaines : « Dans une gazette de l’île de France de 1774 on lit qu’on apporta du Cap le 14 janvier de cette année, d'après la demande du gouverneur, neuf de ces oiseaux (des Pies-griè- ches) pour détruire les loxies et gros-becs, qu'on les lâcha dans le quartier des Pamplemousses, qu'on devait en em- barquer au Cap sur tous les navires qui viendraient ici. Celte véritable Pie-grièche était, dit-on, un peu moins grosse que le Martin, sautait à peu près comme la Pie et avait un mouvement fréquent de la queue. Son plumage noir avait quelques taches blanches et cendrées. » En lous cas cette Pie-grièche était différente du Lalage rufiventer ou Oxynotus lypicus. Pour tout ce qui est relatif aux mœurs et au mode de reproduction de cette espèce je renverrai aux nolices si détaillées et si intéressantes que Pollen (1) et sir Edouard Newton (2) ont consacrées au Lalage rufiventer de l'île Mauriceel au L. Newton de l’île de la Réunion, espèces dont le Muséum possède quelques spécimens, recueillis de M. F. Pollen, acquis de M*° Verdey ou rapportés par Bélanger (3). * 20. Passer domesticus L. Le Moineau domestique a été introduit aux îles Mascarei- gnes, à une date relativement récente, il y a une cinquan- taine d'années (4). Il n’en est donc pas fait mention dans les” notes de Desjardins. * 21. Serinus icterus Bonn. et V. La liasse Commerson renferme deux dessins coloriés, (4) Ibis, 1866, p. 275 et pl. VII et VIT. (2) Ibis, 1865, p. 530. | (3) Peut-être était-ce un spécimen de Lalage rufiventer que Sonnerat avait rapporté de l'ile de France et qui est désigné dans le catalogue manuscrit de ses collections sous le nom de Pie-grièche de l'ile de France appelée le Ser- r'urier. (4) G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, p. 401 et 418. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. LS ÿ dont l’un inachevé, représentant de grandeur naturelle cette espèce de Serin, que Daubenton a figurée sous le nom de Serin de Mozambique (1). Le dessin inachevé, qui est signé de Pierre Sonnerat, porte au verso cette légende, signée de Commerson : « Passer. — Le Canari du Cap, vulgairement Oiseau du Cap à l’île de France. — Hist. nat. du Cap de B.-Esp. et de l'isle de France où cet oiseau naturalisé s’y est beaucoup trop multiplié. « | Comme le dit Commerson, le Serinus icterus n'est pas originaire de l’île de France; il a pour patrie l’Afrique tropicale et méridionale (2) etil s’est implanté aux îles Mas- careignes, où il avait été apporté probablement de la côte de Mozambique comme Oiseau de volière. « Le Tarin et le Gros-Bec de Java (3), dit Sonnerat (4), qu'on avait d’abord apportés comme des espèces curieuses et que l’on conservait précieusement dans des cages se sont tellement multipliés qu'ils dévorent presque toutes les récoltes. Pour les écarter * des champs ensemencés on est obligé d'y mettre plusieurs noirs en sentinelle, qui ne cessent de crier et de frapper des mâains. Chaque habitant est obligé d’en détruire une certaine quantité suivant le nombre de noirs qu'il possède et d’en- voyer au bureau de police les têtes des oiseaux qu'il a tués. » Presque à la même époque Le Gentil écrivait de son côté (5) : « Une espèce de Tarin, grand destructeur. Il vient dn Cap de Bonne-Espérance d’où l’on a apporté, dans la der- nière guerre, à l’isle de France par curiosité et pour faire des présents aux dames (quoique cet oiseau, qui est une espèce de Serinjauneel gris n'ait rien de curieux); mais c’est un des plus funestes présents qu'on nous ait fait à l’isle. » Le Tarin dont parlent Sonnerat et Le Gentil est évidem- ment le Serinus icterus qui a un peu la coloralion d’un Tarin. | (4) PI. enluminées, t. IV, pl. 364, fig. 2. (2) Voyez R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Museum, 1888, t. XII, p. 356. (3) C’est le Munia oryzivora ou .Padda. (4) Voyage aux Indes et à la Chine, 1782, t. II, p. 83. (5) Voyage dans les mers de l’Inde, in-8°, 1780, 1. V, p. T6. 58 E. OUSTALET. La même espèce à été mentionnée par Bernardin de Saint- Pierre sous le nom d’Oiseau du Cap et a élé citée dans un Mémoire manuscrit que Milbert a eu entre les mains au nombre des Oiseaux exoliques que le hasard ou l'impré- voyance a donnés comme compagnons aux Moineaux de l’île de France (c’est-à-dire aux Foudis) dévastateurs comme eux (1). D’après les documents que j'ai cités, cette intro- duction du Serinus icterus à l’île de France aurait eu lieu sous la domination française ; elle serait antérieure à 1770 et remonterait au milieu du xvur° siècle. Les notes de Desjardins renferment la description suc- cincte d’un Oiseau de cette espèce, qui, d’après F. Pollen et sir Edmond Newton, est encore très répandu à l'île de la Réunion et à l’île Maurice. Dans cette dernière île elle fré- quente surtout les endroits où croissent des Casuarina (2). “22. Serinus canicollis Sund. Dumont a rapporlé de l'île Maurice au Muséum d'histoire naturelle, en 1804, un exemplaire de celte espèce qui est, comme le précédent, originaire d'Afrique (3) et qui a été également introduit, peut-être accidentellement, à l’île de la Réunion où, d’après Pollen (4) elle est connue des créoles sous le nom de Moutardier, tandis qu'à l'île Maurice, en dépit de son origine exotique, elle est appelée Serin de Pays (5).Comme le Serinus icterus, le S. canicollis recherche surtout les fourrés de Casuarina. * 23. Munia oryzivora L. Le Gros-bec padda, que l’on voit aujourd’hui si communé- ment chez les marchands d'Oiseaux et qui a donné naissance à des variétés nègres ou albines, est, comme l’on sait, origi- (1) Milbert, Voyage pittoresque à l'île de France, t. II, p. 251. (2) E. Newton, Ibis, 1860, p.201 (Serinus icterus) et 1861, p. 272 (Crithagra chrysopyga) ; Pollen et Schlegel, Faune de Madagascar, Oiseaux, p.154; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 401 (Crithagra chrysopyga). (3) R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1888, t. XII, 350. (4) Schlegel et Pollen, Faune de Madagascar, Oiseaux, p. 154; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 402. (5) E. Newton, Ibis, 1861, p. 272. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 59 naire de Malacca et des îles de la Sonde {1). Il a été intro- duit à l’île Bourbon et à l’île de France dès le milieu du siècle dernier. À l’île de France il a été observé d’abord par Commerson qui le désignait sous le nom de Calfat et dont la diagnose : « Æ'mberiza desuper e cœruleo cinerascens ab occipite ad caudam ne alis quidem excepts, nec collo; capite, gulä et caudä, utrimque nigris; gens albis; macula latiuscula subovata ab oris sinu ad nucham usque », à élé reproduite intégralement par Buffon dans son Âistoire naturelle des Oiseaux (2). Celte diagnose accompagnait probablement un dessin colorié de Pierre Sonneral que j'ai retrouvé dans la liasse Commerson et qui portait au verso ces quelques mots, signés de Commerson : « Le Calfat ou Moineau à gros bec de Java et de l'Isle de France. Hist. naturelle de Java et de l'Isle de France où cet oiseau naluralisé fait déjà beau- coup de dégâts. —Voy. Fuuna borbonica (3). Emberiza. n° 5.» Les lignes suivantes, transcrites par Desjardins constatent également que les Calfats pullulaient dès cette époque à l'île Maurice : « On a apporté de Java et de la Chine, dit Le Gentil (4), des oiseaux connus sous les noms de Calfats et Moineaux de Chine.Ces oiseaux avaient multiplié, en 1765, à un point incroyable, ils tombaient par bandes de deux à irois cents sur un champ d’avoine ou de blé et l’avaient en peu de tems abymé sans ressource. » Le nom de Calfat, qui d’après Buffon se prononçait aussi Galfat, est encore celui par lequel le Padda oryzivora est communément désigné à l’île Maurice et à l’île de la Réu- nion. « Cet oiseau est ainsi nommé, dit Desjardins, à cause de son cri qui imile absolument le bruit que fait un calfat en frappant sur un navire; surtout lorsqu'ils sont plusieurs ensemble, on croirait entendre une suite de coups de mar- . (4) Voyez sur les caractères et la distribution géographique de l'espèce, R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1890, t. XIII, p. 328. (2) T. IV (1778), p. 371. Dans le t. III (1775), p. 463, de l’Hist. natur. des Oiseaux, la même espèce est appelée Padda ou Oiseau. de riz. (3) Titre d’un ouvrage dont Commerson projetait la publication. (4) Voyage dans les mers de l'Inde, in-8°, 1781, V, p. 77. 60 E. OUSTALET. teau (1). Il est aussi destructeur qu'il est joli... Cet oiseau a le.bec si fort et fait tant de dégât qu'en 1771, lorsque les habitants étaient obligés de fournir au gouvernement lant de têtes d'oiseaux par an, les têtes des Calfats comptaient pour deux. C'est ce que vient de renouveler la proclamation du 1% février 1825. » Bory de Saint-Vincent qui accompagna le capitaine Bau- din jusqu’à l’île de France a constaté également, dans son Voyage dans les quatre principales îles des mers d'A frique (2), la multiplication extraordinaire des Calfats dans notre an- cienne colonie et préconisait l'importation d'Éperviers pour en diminuer le nombre. A l’île Bourbon les Calfats n'avaient pas moins prospéré, mais aujourd'hui, d’après G. Hartlaub (3), leur nombre a singulièrement diminué. " 24. Munia punctulata var. nisoria Tem. Celte race du Capucin ponctué, qui est originaire de la péninsule malaise et de l’île de Java (4), a été introduite non seulement à l’île de la Réunion, comme le dit G. Hart- laub (5) d’après Pollen, mais à l’île Maurice. J'ai trouvé, en effel, dans les notes manuscrites de Desjardins une descrip- ton très exacte d'un spécimen du Munia punctulata var. nisoria pris à Flacq le 16 mars 1829. Cet Oiseau est désigné par Desjardins sous le nom de Marteau. A l’île de la Réunion la même variété est appelée vulgairement Coutil (6). * 25. Estrilda astrild L. J. Desjardins nous a laissé une description accompagnée d'une figure colorice très exacte d’un Bengali astrild qui s’élait pris dans une toile d’araignée, à Flacq, le 29 jan- vier 1827. Le même naturaliste dit avoir trouvé au mois (4) Ce bruit particulier n’est pas, comme le croyait Milbert (Voyage pitto- resque. à l'ile de France, t. IT, p. 250) produit par une série de coups de bec. (2) 1804, t. I, p. 225. (3) Die Vügel Madagascars, p. 404. (4) R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., t. XIII, p. 352. (5) Die Vôgel Madagascars, p. 403 (Munia punctularia). (6) G. Hartlaub, op. cit., p. 404. | 4 | FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 61 d'avril de la même année un nid de Bengalis qui était placé sur les branches d’un manguier et avoir observé, en 1837, de nombreux Oiseaux de cette espèce à la Savane. Enfin, dans le catalogue manuscrit de sa collection, il mentionne un Bengali albinos, ou presque albinos, ayant le bec et les yeux rouges, la poitrine à peine nuancée de roux.Ce Bengali, que Desjardins rapporte, peut-être par erreur, à l£strida aman- dava L., avait élé pris vivant dans un nid à Flacq, au mois de janvier 1831, et avait vécu plusieurs Jours en cage chez M. CI. Langlois. Il existe d’ailleurs dans les collections du British Museum et dans celles du Muséum d'histoire naturelle des spécimens d'Estrilda astrild venant de l'île Maurice où la présence de l'espèce a été signalée également par sir E. Newton (1). Un autre exemplaire se trouvait, d’après Desjardins, dans la _ collection Masséna. Enfin dans les livres de Bernardin de Saint-Pierre et dans le Voyage de Milbert (2) comme dans le Voyage à Canton de Cossigny (3) ou dans la Topographie médicale de Chapotin (4), il est fait mention des Bengalis, dont l'introduction à l’île Maurice date certainement du siècle dernier. L'Estrilda astrild se trouve aussi à l’île Bourbon (5) d’où Delessert avait rapporté quelques exemplaires qui furent déterminés par Verreaux (6). L'Æstrilda astrild à été men- tionnée par Buffon (7) et figurée par Daubenton (8) sous le nom de Sénéqali rayé, peut-être d’après des renseigne- ments fournis par Commerson, quoique les manuscrits de ce voyageur ne renferment plus rien au sujet de cet Oiseau. 26. Foudia rubra Gm. Il est impossible de savoir si c’est au Foudi rouge ou au Foudi malgache qu’appartenaient les Moineaux cités inci- Ibis, 1861,.p. 262. Voyage pittoresque à l'ile de France, t. II, p. 251. P. 50, d’après Desjardins. P. 23, d’après Desjardins. G. Hartlaub, Die Vôügel Madagascars, p. 403. Note de Desjardins. H PI (4 (2 (3 ( ( ( ( ist. nat. des Oiseaux, 1778, t. IV, p. 101. anches emluminées, t. IV, p. 157, fig. 2 (assez inexacte). ) ) 4) 5) 6) 1) 8) 4 62 E. OUSTALET. demment dans la Relation du voyage de Willem van West- Zanen,mais c'est évidemment à la première espèce, au Foudia rubra, qu'il faut rapporter ce que dit Leguat (1) des « petits oiseaux qui sont assez faits comme nos Moineaux excepté qu'ils ont la gorge rouge ». Ce Foudia ou Nesacunthis rubra (2) dont le Muséum d'histoire naturelle possède deux spécimens rapportés en 1804 par Dumont, est spécial à l'île de France, où il est connu des créoles sous le nom de Zozo banane, à ce que nous apprend sir Édouard Newton qui nous a donné d'intéressants détails sur ses mœurs et son mode de nidification (3). C'est le Moineau de l'Isle de France des Planches enluminées de Daubenton {4). 27. Foudia madagascariensis L. Le Foudi malgache (5) ou Foulimène de Flacourt (6) habite non seulement Madagascar, mais l’île Maurice et Piîle de la Réunion, où il est peut-être indigène, et les Seychelles où 1! paraît avoir été introduit. Desjardins nous a laissé une description sommaire, accompagnée d'un croquis inachevé, d'un individu de celte espèce qui, dit-il, pond en mars et avril dans les manguiers et les poivriers et le Muséum d’his- toire naturelle possède plusieurs exemplaires de Foudia madagascariensis rapportés de Madagascar par Sganzin, par Bernier et par M. Grandidier, des Seychelles par M. Lantz, de l’île de France par Maugé, etc. C’est évidemment à ce Foudi malgache que se rapporte ce que dit Milbert (7) du Cardinal (Loxria madagascariensis) qui est remarquable par la couleur de feu très éclatante de la presque totalité de son (1) P- . (2) Nesacanthis rubra, Sharpe, Cat. B. Brit: Mus., 41890, XP DANSE Sh harpe a cru devoir séparer le Foudi rouge et quelques autres du Foudi malgache et les placer dans un genre particulier. (3) Ibis, 1861, p. 272. (4) T. IV, pl. 665, fig. 1 et 2. (5) Foudia madagascariensis, R. B. Sharpe, op. cit., p. 433; Ploceus mada- gascariensis, À. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 449 et pl. 184. (6) Hist. de la grande isle de Madagascar, 1661, p. 163. (7) Voyage pittoresque à l'ile de France, t. 11, p. 250. Le voyage et les avantures de François Leguat, Amsterdam, 1750, t. II, FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 63 corps : « Lorsqu'il est perché sur une branche, exposé à la lumière du soleil, il ressemble à un charbon ardent. Les dégâts que fait cet animal Gans les {erres cultivées, lui ont fait donner le nom de Mangeur de riz. Les planteurs sont obligés de le faire chasser par des négrillons qui crient sans cesse autour de leurs champs. » Le Foudia madagascariensis est le Moineau de Madagascar de Daubenton {1) et le Foudi léhéméné de Buffon (2) qui ne paraît pas avoir reçu au sujet de celte espèce de renseigne- ments particuliers el qui l’a confondue avec les autres Foudis des îles Mascareignes. Parmi ceux-ci 1l ÿ en aurait un qui d’après Sharpe (3) aurait complètement disparu de la surface du globe, à une date relativement récente. Je veux parler du Bruant de l'île Bourbon de Daubenton (4), du Æringilla bruante du P. L. S. Müller (5), ou Æmberiza borbonica de Gmelin (6), ou Foudia borbonica de Reïchenbach (7) ou Foudia bruante de Newton (8). De cette espèce (?) qui a été considérée longtemps comme identique au Foudia ma- dagascariensis je n'ai pu trouver aucun spécimen dans les collections du Muséum qui ne renferment, en fait de Foudis venant de l’île de la Réunion, qu’un individu de F. mada- gascariensis ; je n'ai découverl non plus, au sujel de ce Foudia bruante ou borbonica, aucun renseignement ni dans les anciens catalogues, n1 dans la liasse Commerson, ni dans les manuscrits de J. Desjardins. À l'île Rodrigue vit encore une autre espèce de Foudi que sir Édouard Newlon a décrile d'abord sous le nom de Foudia flavicans (9) et à laquelle 1l a donné ensuite le nom ) PI. enluminées, t. IV, pl. 134, fig. 2 2) Hist. nat. des Oiseaux, 1775, t. III, p. 495. ) Cat. B. Brit. Mus., t. XIII, p. 484, note. ÿ PL. | Y, pl. 3, fig. 2. 5) Syst. Nat., Anh. , 76, P- 164 : Coues, Proc. Ac. Phil., 1864, p. 254. ) Syst. Nat. 1788, t. I, p. 886. (7) Singvügel, 1861, Le Lp. 69. ) Trans. Norfolk and Norwich Nat. Soc., 1889, p. 548. ) Proc. Zool. Soc. Lond., 1865, p. 47 et pl. I, fig. 1 et 2 et Ibis, 1865, 148 ; G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, in 21 EN 64 E. OUSTALET. de Foudia rodericana (1). Le Muséum d'histoire naturelle en possède, je crois, un spécimen. Il y a, en effet, dans la col- lection publique un Foudi, acquis à M. Canivet en 1835 et indiqué comme venant de la Réunion et comme appartenant à l'espèce malgache qui me paraît se rapporter plutôt au Foudia rodericana et êlre originaire de l’île Rodrigue. Cet Oiseau a la tête, la poitrine, l’abdomen et la croupe d’un jaune orangé vif, le manteau verdâtre, strié de noir, les ailes et la queue brunâtres avec des lisérés olivâtres, absolument comme le mâle figuré par sir Édouard Newton. C'est probablement à des Foudis (F. Aa que l’auteur de la Æelation de lle nel fait allusion quand il parle des Chardonnerets qui ont un Joli ramage et qui sont très nombreux (2). Ces Foudis sont avec des Fau- vettes (Drymæca rodericana) (3) les seuls Passereaux que sir E. Newton ait rencontrés à l’île Rodrigue en 1865 et il n’a plus observé les Lavandières dont 1l est question dans la même relation et qui étaient peut-être des Bergeronnetles à ventre jaune semblables à celles de Madagascar (4). * 28. Acridotheres tristis L. C'est à Pierre Poivre, à l'administrateur éminent qui s’occupa avec tant de zèle et de désintéressement de déve- lopper la prospérité de nos colonies de la mer des Indes, qu'on attribue presque toujours exclusivement le mérite d’avoir procuré à l’agriculture un auxiliaire précieux dans la lutte contre les Sauterelles en introduisant à l’île de France et à l’île Bourbon le Martin triste (5), mais pour être juste il faut reconnaître que l'un des gouverneurs de Bourbon eut une certaine part dans cette découverte utile et fit faire, peut-être à l'instigation de Poivre, qui se trouvait déjà à l’île (1) Proceed. Zool. Soc. Lond., 1875, p. 42. (2) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6° série, t. IL, art. 4, p. 16. (3) Proc. Zool. Soc. Lond. , 1865, p. #7 et pl. I, fig. 3. (4) Motacilla flaviventris, À. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 342 et pl. 133 et 134. (5) Acridotheres tristis, Bonnaterre et Vieillot, Encycl. méth., 1823, t. II, p. 688; R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1890, t. XII, p. 80. | FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 65 de France, les premières tentatives en vue de l’acclimatation de l’A cridotheres tristis. Cela ressorlait déjà du passage sui- vant de l'Æistoire naturelle des Oiseaux de Buffon (1): « IHn'v a guère plus de vingt ans que Desforges-Boucher (2), Gouver- neur général, et M. Poivre, [ntendant, voyant celte isle désolée par les saulerelles, songèrent à faire sérieusement la guerre à ces insectes et pour cela ils tirèrent des Indes quelques paires de marlins dans l'intention de les multiplier et de les opposer comme auxiliaires à leurs redoutables ennemis. » Mais les lignes suivantes extraites par Desjardins des Æssais plulosophiques sur les mœurs de divers oiseaux étrangers par Foucher d'Obsonville (3), sont encore plus explicites : « Comme les sauterelles ont quelquefois fait des dégâls con- sidérables dans les isles de France et de Bourbon, M. Bou- cher des Forges, gouverneur général de ces établissements, écrivit à la côte Coromandel pour avoir quelques couples de ces oiseaux; l'on lui en envoya, mais bientôt ils furent détruits, les colons ayant présumé qu'ils mangeaient leurs grains. Cependant l’imputation ayant élé reconnue hasardée, et les sauterelles ayant fail de grands dégâts, l’on ne tarda pas à se repenlir de cet acte de proscription. En conséquence M. Boucher des Forges écrivit, vers la fin de la dernière guerre, à M.le comte de Mandane, colonel, alors résident pour la nalion à Trinquebard (4), établissement danois de la côte de l'Inde, de tâcher de lui en faire passer un nombre assez considérable. M. de Mandane demanda à un officier nommé M. Beylier, et à moi, si nous pouvions l'aider à cet effet. La chose n'était pas fort difficile. Ce second envoi eut donc lieu, et il paraît n'avoir que trop bien réussi. En effet, le gouverneur général et ensuite M. Poivre, qui depuis fut Mie: t. JE p:499: { (2) Ou Desforge-Boucher suivant M. A. Milne Edwards, qui a eu sous les yeux quelques-uns des rapports de ce gouverneur (Voy. A. Milne Edwards, Nouveaux documents sur l’époque de la disparition de la faune ancienne de l’île Rodrigue, Ann. des Sc. nat., Zool., 1875, 6° série, t. IT, art. 4, p. 19). (3) In-8°, Paris, 1783, chap. des Sauterelles, p. 44 et 45. (4) Tranquebar (côte de Coromandel). ANN. SC. NAT. ZOOL. lt, Ô 66 E. OUSTALET. nommé inlendant de ces colonies, ayant cru, ainsi que leurs successeurs, devoir prendre les plus grandes précaulions pour assurer l'existence de ces oiseaux, ils ont tellement multiplié, qu'enfin ils sont devenus sérieusement à charge aux habitants. » Dans un article des Annales maritimes et coloniales de 1820 (1), dont J. Desjardins a pris un extrait, nous trouvons une confirmation des renseignements précédents. « Parmi les objets apportés à Caïenne par la Zélée, on doit remarquer le poisson appelé Gourami et l'oiseau destructeur des insectes connu sous le nom de Marlin (Paradisea tristis Linn.). Cet oiseau a élé introduit pour la première fois aux îles de France et de Bourbon en 1759, sous le gou- vernement de M. Desforges, pour opérer la destruction des sauterelles qui occasionnaient les plus grands ravages dans les plantations. Le Martin leur à fait une guerre si redoutable que ces insecles ont presque entièrement disparu ou du moins que leurs dégâts sont insensibles..…….. Originaire de l'Inde où il est très commun, il s’est multiplié considé- rablement dans la colonie où la loi le protège. Il fait par an plusieurs pontes de quatre œufs chacune et il place son nid, fail ordinairement très grossièrement, au sommet des grands arbres, sur le baquois, le latanier, quelquefois dans le grenier des maisons et dans les trous des vieilles masures. Il s'établit volontiers dans les endroits habités, lorsqu'on ne l’effarouche pas. » Ces renseignements concordent assez bien avec la notice que Buffon a consacrée au Martin, d’après des renseigne- ments qui lui avaient été fournis par Sonnerat et par M. de la Nux, correspondant du Muséum d'histoire natu- relle. Buffon cependant prétend que c’est M. de Morane qui, se prêtant aux idées du peuple, fit venir ou apporter à l'île de France quatre Marins, huit ans après que l'espèce eût élé anéantie, une première fois, en bloc, en moins de (1) 2° partie, n° 110, p. 811. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 67 deux heures, à la suite de l'arrêt du conseil qui la condam- nait comme espèce nuisible. En tous cas, à la suite de cette seconde importation, les Martins, prolégés d'un côté par la loi, de l’autre par les idées que les médecins contribuèrent à répandre et qui firent considérer la chair de ces Oiseaux comme nuisible à la santé, les Martins, dis-je, avaient si bien prospéré que, vers 1770, Commerson écrivait au dos d’un dessin de Son- nerat qui est parvenu jusqu'à nous : « Le Martin de l'Isle de France. — Histoire naturelle des isles de France et de Bourbon où cet oiseau s'est prodigieusement multiplié en délivrant ces deux isles du fléau des sauterelles qui les rava- geoient tous les ans. » Commerson, ignorant que cette espèce avait élé déjà signalée par Brisson (1) sous le nom de Merle des Philippines, se proposait sans doute de la décrire comme nouvelle, car à côté des lignes que je viens de iranscrire, il avait écrit : Calymnus soter nobis vel acridophagqus. Ce dessin colorié de Sonnerat et un autre moins fini étaient proba- blement accompagnés de renseignements recueillis par Commerson; mais tout cela a disparu ou s’est trouvé mêlé aux documents utilisés par Buffon. La description rédigée par notre grand naturaliste et les détails de mœurs dont elle est accompagnée ont été reproduils en parlie, avec quelques variantes, dans le Dictionnaire universel d'histoire naturelle de Valmont-Bomare (2), dans le Dictionnaire des sciences naturelles de Dumont (3) et dans le Dictionnaire classique de Drapiez (4). Presque à la même époque que Commerson, en 1769, Bernardin de Saint-Pierre constatait, de son côté, l’abon- dance des Martins qui, dit-il, se rassemblent les soirs au coucher du soleil par troupes de plusieurs milliers sur (1) Ornithologie, 1760, t. IT, p. 278, sous le nom de Merle des Philippines que,Daubenton a conservé (PI. enlum., t. IV, pl. 270). (2) Edit. in-8°, 1791,t. VIII, p. 308 à 310. (3) 1823, t. XXIX, p. 261 à 263. - (4) 1826, t. X, p. 219. 68 E. OUSTALET. des arbres qu'ils affectionnent (1). Bory de Saint-Vincent (2) et Milbert (3) font des remarques analogues en 1801 et en 1820, mais assignent par erreur les Philippines comme pays d’origine aux Martins de l’île de France et, en 1861, sir Édouard Newton trouve encore les Martins aussi nom- breux qu'autrefois à l’île Maurice. Ils se retirent par mil- liers, dit-il, dans un fourré situé près de la Mer Saint- Martin (4. A l'île de la Réunion les Martins n'étaient pas moins répandus, il y à quelques années (5). Les notes de Desjardins renferment une description sommaire et un croquis à peine ébauché d'un Martin tué à l’île Maurice le 6 novembre 1829. * 29. Corvus scapulatus Daud.? Bernardin de Saint-Pierre rapporte qu'on avait lâché plusieurs paires de Corbeaux dans les forêts de l’île de France pour tuer les Rats et les Souris, mais qu'à l’époque de son arrivée dans l’île, en 1760, il ne restait plus que trois mâles, les habitants ayant tué la plupart de ces oiseaux qu'ils accu- saient de tuer leurs poulets. Ces Corbeaux appartenaient, je suppose, à l'espèce commune de la côte orientale d’Afrique et de Madagascar, au Corvus scapulatus. C'est du reste de Madagascar qu’avaient été apportés les Corbeaux que J. Desjardins eut l’occasion de voir à diverses époques à Pile Maurice et celui qu'il garda lui-même pendant quelque temps à la campagne. En 1831 M. Hampton, assistant du capitaine du Port, fit encore venir de Madagascar, pour essayer de les multiplier, deux paires de Corbeaux qu'il offrit au prési- dent de la Sociélé d'histoire naturelle de l’île Maurice (6). (1) Études de la Nature, t. I, p. 305; voir aussi Voyage à l’isle de France, Lt. L, p. 243. (2) Voyage dans les quatre yrincipales iles des mers d'Afrique, 1804, CAE, p. 223 à 225. (3) Voyage pittoresque à l’île de France, 1820, t. IT, p. 234. (4) E. Newton, Ibis, 1861, p. 273. (5) Schlegel et Pollen, Faune de Madagascar, Oiseaux, p. 152; G. Hartlaub, Die Vogel Madagascars, p. 400. (6) Procès-verbal de la séance du mardi 20 décembre 1642 de la Société d'histoire naturelle de l’île Maurice. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 69 + 30. Alectrœnas nitidissima Scop. Je n'ai pas grand'chose à ajouter aux renseignemenlis circonstanciés que nous avons publiés en 1893, M. Milne Edwards et moi (1), au sujet de cette espèce qui est actuelle- ment éteinte et qui n’est représentée dans les collections que par trois spécimens : un au Muséum d'histoire naturelle de Paris, un au Musée de Port-Louis (île Maurice) et le troisième au Museum of Science and Art, à Édimbourg. Nous avons montré qu'il fallait attribuer à cette espèce les Aamiers de François Cauche (2) et quelques-uns de ceux dont parle l'abbé Lacaille (3), ceux dont la chair est inoffensive, landis que les autres, ceux dont la chair passait pour vénéneuse, devaient être rapportés à la Trocaza Meyeri. Nous avons cité également divers passages des œuvres de Bernardin de Saint-Pierre (4) où l'A lectrænas nitidissima est désigné sous le nom de Pigeon holandais qui lui avait élé donné par Sonne- rat soil à cause des couleurs du plumage de l’Oiseau, sem- blable à celles du pavillon hollandais (rouge, blanc et bleu), soit parce que les Hollandais avaient été les premiers posses- seurs de l’île de France; enfin nous avons montré que ce Pigeon hollandais (5) qui reçut successivement encore les noms de Columba Franciæ (6), de Columba nitidissima (1), de Ramier hérissé (8), de Colombe hérissée (9) et d'A/ectrœnas (4) Volume commémoratif du Centenaire de la fondation du Muséum, in-40, Paris, 1893, p. 224. (2) Relations véritables et curieuses de l'île de Madagascar, in-4°, Paris, 1651, p- 152. (3) Hist. de l'Acad. des Sc., in-4°, Paris, 1:59, p. 109. (4) Voyage à l’île de France, in-8°, Amsterdam, 1773, t. Il, p. 122; Études de lu Nature, Paris, 1784, et édit. in-8°, Paris, 1825, t. Il, p. 139; Harmonies de la Nature, Paris, 1796. (5) Sonnerat, Voyage aux Indes orientales et à la Chine, fait depuis 1774 jusqu'à 1781, in-4°, Paris, 1782, t. Il, p.175, et pl. 101, et édit. Sonnini, 1806 UND. 302: IGN GmEliN, SySC Nat, 1188, 1: 1) pe 119: (7) Scopoli, Deliciæ Faunæ et Floræ insubr., in-f., 1786-1788, t. II, p. 93. (8) Levaillant, Hist. nat. des Oiseaux d'Afrique, in-4°, Paris, 1799-1808, op. 74 et. pl. 267. (9) Temminck, His{. nat. gén. des Pigeons, avec figures, par M'e P. de Courcelles, in-folio, Paris, 1808, t. [, p. 50 et pl. XIX. 10 E. OUSTALET. nihidissima (1), a vécu à l’île Maurice au moins jusqu’en 1826, époque à laquelle fut tué dans les forêts de la Savane, par M. E. Geoffroy, un individu dont la dépouille fut conservée pendant quelque temps dans la collection de J. Desjardins et passa ensuite au Musée de Port-Louis. Enfin nous avons reproduit quelques passages du Voyage pittoresque à l'ile de France de Milbert (2) où se trouvent une description sommaire du Pigeon hoïlandais, et quelques renseignements plus ou moins exacts sur les mœurs de cet Oiseau qui passait déjà pour très rare. Dans un Mémoire récent sur le Dodo et les autres oiseaux éteints de l’île Maurice (3), sir Édouard Newton et M. H. Ga- dow ont mentionné la découverte faite par M. Th. Sauzier, dans le gisement de la Mare aux Songes, à l’île Maurice, d’un sternum de Pigeon dont ils ont donné les principales dimensions et qu'ils ont attribué à une espèce de Furingus, probablement à l’A/ectrænas niñidissima. On peul donc es- pérer que de nouvelles fouilles permeltront de reconstituer un jour le squelette complet de ce beau Pigeon qui ne nous est connu que par ses dépouilles. 31. Nesœnas Mayeri Marchal. A la suite des déboisements qui ont été pratiqués à l’île Maurice, la Colombe de Mayer (4), qui est particulière à cette île, est devenue tellement rare, que M. H. Slater a vainement cherché, il y a quelques années, à s’en procurer (1) G. R. Gray, List Gen. Birds, 1840, p. 58; T. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus., 1893, t. XXI, p. 163; A. Milne Edwards et E. Oustalet, Note sur quel- ques espèces d'Oiseaux, etc., Volume commémoratif du Centenuire de la fonda- tion du Muséum d'histoire naturelle, 1893, p. 224. (2). T: II, p.260. | (3) On additional bones of ‘the Dodo and other extinct Birds of Mauritius, obtained by M. Théodore Sauzier (Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XII, _ part. VII, n° 1, p. 282 et 295, et Ann. des Sc. nat., 1894, 7° série, t. XVIII, . 247). (4) Colomba Mayeri Marchal, Prévost et Knip, Hist. natur. des Pigeons, 1843, t. IT, pl. LX; Trocaza Meyeri (err.), Ch.-L. Bonaparte, Consp. avium, 1854, t. Il, p. 45; Columba Meyeri (err.), G. Hartlaub. Die Vôgel Madagas- cars, p. 265; Nesœnas Mayeri, T. Salvadori, Cat. B. Brit. Museum, 1893, t. XXI, p. 327. | | : 1 | | mm ar du FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 71 un spécimen (1). Le Muséum d'histoire naturelle de Paris en possède cependant, comme le Brilish Museum, trois spé- cimens, dont deux ont été acquisen 1837 eten 1873, tandis quele troisième est un don tout récent de M. Théodore Sauzier. Deux autres exemplaires existent dans la collection Newton(2). Dans notre Motice sur quelques espèces d'Oiseaux, actuelle- ment éteintes, qui se trouvent représentées dans les collections du Muséum d'histoire naturelle (3), nous avons eu l’occasion, M. Milne Edwards et moi, de parler incidemment du Ve- sænas Mayeri, et de montrer que quelques lignes de la Relation du deuxième voyage d’Étienne van der Hagen (4) concernent probablement cet Oiseau. Après avoir raconté que les marins de l'expédition furent atteints, durant une relâche à l’île Maurice, en 1607, d’une indisposition singulière, caraclé- risée par une extrême faiblesse, et avoir rapporté que quel- ques personnes attribuèrent cette indisposition à l’ingestion de la chair d'une certaine espèce de Poisson, l’auteur ajouie: « D'autres ont imputé cet effet à des Pigeons, qu'on y mange et qui sont rouges aussi bien par le corps qu à la queue, ce qui ne peut non plus avoir lieu ; car quelques-uns de nous qui en mangèrent ne furent point malades, et ceux qui, lPavoient été en mangèrent quantité après être re- levez de maladie, et trouvèrent que la nourriture en étoil bonne. » Or, le Nesænas Mayeri est le seul Pigeon de l'île Maurice dont le corps et la queue soient d’un rouge vinéux, l’A lectrænas niutidissima ayant, au contraire, le corps bleu et la queue rouge. Bernardin de Saint-Pierre dit d’ailleurs expressément dans son Voyage à l'isle de France (5): « Il y à un Ramier appelé Pigeon hollandais dont les couleurs sont magnifiques et une autre espèce d’un goût agréable, mais si dangereuse que ceux qu'en mangent sont saisis de (1) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 266. (2) G. Hartlaub, op. cit., p. 266. (3) Volume commémoratif du Centenaire de la fondaton du Muséum d'histoire naturelle, 1893. (4) Voir ci-dessus, p. 22, nole. (3) T. I, p. 123. 72 E. OUSTALET. convulsions. » Cetle autre espèce est certainement le /Ve- sænas Mayeri. C'est aussi la seconde sorte de Ramier dont parle l'abbé Lacaille, celle dont la chair est un manger fort délicat mais fort pernicieux. C’est encore le Pigeon sau- vage auquel Grant fait allusion (1) en ces termes, dans un passage copié par M. Desjardins : « There is one kind of wood Pigeon, whose flesh laken as food occasions convul- sions, but it is a bird of passage (2). » Les mêmes idées concernant les propriétés nocives de la chair du Nesænas Mayeri avaient cours encore à une épo- que récente, puisque Desjardins écrivait, il y a une soixan- taine d'années, à propos du Pigeon ramier qu'il distinguait du Pigeon hollandais : « Gel oiseau est rare, on assure qu'il faut lui couper la lêle aussitôt après l'avoir iué, ou autre- ment il empoisonne. » D'après le même auteur, la Société d'histoire naturelle de l'ile de France, dans les questions qu’elle dressa en 1806, et qui furent publiées par Mallae dans ses Archives en janvier 1818 (1, 6), demandait des obser- valions sur le Pigeon ramier qu'on dt être venimeux. Peut-être est-ce à la mauvaise réputation dont 1l jouissait, à tort ou à raison, que le Nesænas Mayer: doit d’avoir sur- vécu à l'A /ectrænas nitidissima, qui élait recherché à cause de sa chair délicate comme le sont les Founingos de Mada- gascar. En tous cas il était déjà rare du temps de Leguat qui dit à propos des animaux de l’île Maurice (3): « Il y a des Pigeons el des Merles, mais peu », et maintenant peut- être il est allé rejoindre dans la tombe le Pigeon hollandais. Des restes de ce Nesænas Mayeri ont été exhumés récemment par M. Th. Sauzier de la Mare aux Songes. et se trouvent mentionnés dans le Mémoire, déjà cilé, de sir Édouard Newton et du professeur Gadow (4). | (1) History of Mauritius, p. 58. (D’après Desjardins.) (2) « Il y a ici (à l’ile de France) une espèce de Pigeon de forêt dont la chair, ingérée comme nourriture, occasionue des convulsions; .mais c’est un oiseau de passage. » (3) Le voyage et les avantures de F. Lequat, 1750, t. II, p. 72. (4) Trans. Zool. Scc. Lond., 1893, t. XIII, part. VIE, n° 1, p. 295, et Ann. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 13 *? 32. Turtur picturatus Tem. Nous avons vu que dans les relations de C. van der Hagen, de Matelief el des autres navigateurs hollandais, il était fait allusion, tantôl à des Pigeons, tantôt à des Tourterelles qui étaient si familières qu'on pouvait les prendre à la main. Ces termes vagues s'appliquent aussi bien à l’A/ectrœnas ni- tidissima où au Nesænas Mayeri qu'à une vraie Tourterelle comme le Turtur picturatus. Je n'en dirai pas autant du passage que J. Desjardins à copié dans un ancien manus- crit de 1668, dans les Memorandums concerning India de J. Marshall. L'auteur y signale l’abondance des Tourterelles (Turtle Doves) à l’île Maurice, et raconte que des gens de l’é- quipage, s étant égarés dans les bois, furent forcés de se nourrir de Tourtlerelles qui se laissaient facilement appro- cher. Les mots Turtle Doves semblent indiquer qu'il s’agit bien ici d’une Tourterelle, et probablement du Turtur pictu- ratus. C’est aussi cette espèce que Milbert dit avoir rencon- trée dans son excursion au Grand-Bassin où les Tourterelles sont, dil-1l, à peu près les seuls Oiseaux qui interrompent par leur chant le silence du désert (1). Le Turtur piclturatus qui habile maintenant Madagascar, les Seychelles, l’ilot d'Aldabra, les Comores, l’île de la Réunion et l’île Maurice (2) et qui a donné naissance, dans quelques- unes de ces îles, à des races assez bien caractérisées (Turtur rostratus Bp., T. aldabranus Sclat.), existe sans doute aux îles Mascareignes depuis plus longtemps qu'on ne l’admet géné- ralement; peut-être même faisait-il déjà partie de leur an- cienne faune. M. A. Milne Edwards a attribué, en effet, sans des Se. nat., Zoolog., 7° série, t. XVIII, p. 238 (trad. Sauzier), sous le nom de Trocasa Mayeri. (1) Voyage pittoresque à l’île de France, t. I, p. 63. (2) Columba picturata Temminck, Pigeons et Gallinacés, t. I, p. 315 et 480 (d’après un spécimen venant de File de France); Turtur picturutus Blyth, Cat. B. Mus. As. Soc. Beng., p. 236, n° 1433 (spécimen de l'ile Mau- rice) ; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 268; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 460 et pl. 185 à 187; T. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus., t. XXI, p. 409. 74 E. OUSTALET. hésitalion (1), au Turtur picturatus Vos du pied d'un Colom- bidé qui lui a été remis par M. A. Newton, el qui provenait des fouilles exécutées sous la direction de sir Édouard New- ton à l’île Rodrigue ; d'autre part, il a rapporté à la même espèce d’abord ce que dit Leguat (2) de Pigeons un peu plus pelits que les autres, d’un gris ardoisé, qui nichaïent sur les arbres et qui étaient si peu farouches qu'ils venaient pi- corer autour de la table des pauvres exilés et se laissaient prendre à la main, ensuite la mention faite par l’auteur anonyme de la Æelation de l'ile Rodrigue de Tourterelles qui se tenaient principalement sur les îlots du sud et qui ne venaient guère sur la grande terre que pour s’y désallérer (3). En revanche M. Mine Edwards n’a pu découvrir, dans les récils de Leguat, absolument rien qui ait trail à une seconde espèce de Colombidé qui a dü vivre à l’île Rodrigue en même temps que la première. De cette seconde espèce M. Milne Ed- wards n’a pu éludier qu'un sternum provenant des fouilles de sir Édouard Newton, mais ce sternum, en très bon état, lui asuffi pour reconnaître que ladite espèce, qu'il a nommée Columba rodericana, différait des Tourterelles ordinaires, des Treron et des Founingos et qu'elle ne dépassait pas la taille de la Colombe tambouretle (Columba lympanistria), mais qu’elle devait avoir des ailes beaucoup plus développées (4). Il y avait donc jadis à l’île Rodrigue au moins deux espèces de Colombidés, dont l’une élait probablement identique au Turtur picturatus, tandis que l’autre, de taille beaucoup plus faible, ne se rapportait pas au même genre, el ne pouvait pas non plus être attribuée au genre Treron, au genre Funingus ou au genre A/ectrænas. Cela est établi de la façon la plus nette par les recherches de M. Milne Edwards dont M. Shelley et M. le comte T. Salvadori ne paraissent pas avoir suffi- (1) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 1£et pl: 30: fig. 2. (2) Édit. 4750, t. I, p. 104. (3) Ann. des Sc. nat., Zoolog. 1875, 6° série, t. IL, art. 4, p. 16. (4) A. Milne Ewards, Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX,. arf. dp.-dleetph 42, fig. 4. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. T9 samment pris connaissance. Tous deux en effet parlent d’un A lectrænas rodericana dont les restes auraient été trouvés par sir Édouard Newlon à l’île Rodrigue (1), et M. Salvadori attribue même (2) à cette espèce les restes de Turtur pic- turatus et de Columba rodericana que M. Milne Edwards avait si soigneusement distingués et auxquels sont venus s’a- jouter de nouveaux ossements rapportés de Rodrigue par l'expédilion anglaise du passage de Vénus et étudiés par M. Günther et par sir Édouard Newton (3). * 33. Turtur suratensis Gm. La Tourterelle de Surate de Sonnerat (4), qui a pour patrie l'Inde entière et l’île de Ceylan, n'avait pas élé, jusqu’à ce Jour, signalée aux îles Mascareignes, n1 à Mada- gascar ; Mais sa présence, au moins temporaire, à l’île Mau- rice, me paraît absolument démontrée par la description suivante, faite par Desjardins, d'un Oiseau tué le 10 avril 1834, sur sa propriété, par Lisis Bathilde : « Cet oiseau, sans avoir des couleurs bien vives, n’en est pas moins remarquable par son port élégant et par sa manière simple et à la fois naturelle, si l’on peut le dire, dont son plumage se trouve orné. Le bec brun ; les patles rouges ; les parties inférieures d’une couleur lie de vin clair, particulièrement sur la gorge et se fondant en blanc grisâtre sous le bec et en rosé sous le ventre. Les parties supérieures d'un cendré vineux, en général, mais remarquables par les détails qui vont suivre. « La tête, sans aucune tache, à quelques nuances d’un gris bleuâtre autour de l'œil. La parlie supérieure du cou, à sa jonction avec le dos, c’est-à-dire la nuque, offre une (4) Shelley, Ibis, 1883, p. 258, d’après Newton, Proc. Zool. Soc. Lond., 1879, p. #4. (2) Cat. B. Brit. Mus., 1893, t. XXI, p. 160, note. (3) Philosoph. Transact., 1879, t. CLXVIIT, p. 430. (4) Sonuerat, Voyage aux Indes et à lu Chine, 1782, t. IT, p. 179; Columba suratensis Gmelin, Syst. Nat., 1788, t. I, p. 778; Turtur suratensis Strick- land, Pruceed. Zool. Soc. Lond., 1842, p. 168 ; T. Salvadori, Cat. B. Brit.Mus., 1893, t. XXI, p. 444. 76 E. OUSTALET. large zone noire parsemée de petits points blancs quadran- gulaires ; ces points s’agrandissent vers la parlie posté- rieure et prennent une leinte rousse et sur les petiles plumes du dos et des parties scapulaires se changent en un bord d'un fauve clair. Les petites tectrices alaires supérieures sont d’un roux fauve avec une bande noire longitudinale fortement prononcée el le bord inférieur d’un fauve assez brillant ; mais les lectrices du bord sont d’un blanc cendré fort agréable, surtout à leur bord externe, ce qui fait sur chaque aile une zone blanchâtre qui contraste d’une manière fort agréable avec la couleur lie de vin du ventre et la couleur noirâlre des grandes rémiges, lesquelles ont cepen- dant un très petit liséré blanc. | « Trois rectrices ou grandes pennes de la queue de chaque côté sont noires à la base et blanches au bout: le blanc diminue dans ces plumes en Ss’approchant du milieu; la penne qui suit n'a plus qu'une teinte plus claire au bout ; les deux autres sont tout à fait brunes. La deuxième et la troisième rémiges sont égales en longueur et plus longues que les autres. La première égale la quatrième. « Longueur totale, 11 pouces (30 centimèlres). « Longueur de la penne, 4 pouces el demi (12 centi- mètres). | « La queue dépasse l'aile de 3 pouces et demi. « L'iris est noir et la conjonctive rosée. » Desjardins, qui avait du reste altribué lui-même l'Oiseau Lué sur sa propriélé au T'urtur suratensis, ajoute qu'il possède dans son cabinet une autre Tourterelle exactement sem- blable, tuée, en juin 1832, par Camille Desjardins dans le même quartier, à la Mare aux Choux, dans un champ récemment ensemencé en avoine. Peut-êlre cet Oiseau, qui est, en effel, mentionné dans le calalogue manuscrit de la collection de Desjardins, se {rouve-t-il maintenant au Musée de Port-Louis. Enfin je trouve encore dans les manuscrits de Desjardins une nole d’après laquelle des Tourlerelles auraient été | : 1 b 1 : | | | FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. ip introduites par Cossigny (1) du Bengale à l'île Maurice en 1781. D’après la provenance ces Tourlerelles étaient probablement des Turtur suratensis. * 34. Geopelia striata L. La Tourterelle striée (2) qui a été désignée aussi par les anciens auteurs sous les noms de Tourterelle barrée (3), de Tourterelle rayée des Indes (4), de Tourterelle rayée de la Chane (5), de Petite Tourterelle de Quéda (6) et qui a pour patrie le Ténasserim, la péninsule malaise, les îles de la Sonde et les Philippines, a été introduite, il y a longtemps, à Madagascar, aux Seychelles, à l’île de la Réunion, à l'île Ronde et à l’île Maurice. Dans cette dernière île son accli- malalion est probablement l’œuvre des Français et date au moins du siècle dernier, puisque Sonneral, dans son Voyage aux Indes ef à la Chine, en 1776, l'indique déjà comme une espèce introduite à l’île de France. Sir Edouard Newton dit (7) que les Tourterelles striées abondent à la Savane où elles nichent à la fin de septembre ou au commencement d'octobre. | + 39. Didus ineptus L. Grâce à M. Théodore Sauzier, le Muséum d'histoire natu- relle de Paris possède maintenant un squelette complet de Drontle de l’île Maurice. Je n'ai pas à retracer ici l'histoire de celte espèce éteinte (8) qui est désormais aussi bien (1) Joseph-François Charpentier de Cossigny, né en 1730, mort en 1809, fut chargé de fortifier Port-Louis en qualité de capitaine-ingénieur du roi. Il fut membre correspondant de l’Académie des sciences. Il a publié, entre autres ouvrages, un Voyage à Canton (Paris, an VI) et un Voyage au Bengale (Paris, an VIT). (2) Geopelia striata, G. R. Gray, List Gen. Birds, 1840, p. 58; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Histoire physique, naturelle et politique de Mada- gascar, Oiseaux, 1879, p. 469; T. Salvadori, Cut. B. Brit. Mus., 1893, L. XXI, p. 458. (3) Edwards, Birds, 1750, t. [, pl. XVI. (4) Buffon, Hist. nat. des Oiseaux, 1771, t. IT, p. 557. (5) Buffon, ibid. (6) Sonnerat, Voyage aux Indes et à la Chine, 1782, t. IT, p. 177. (7 1bis, 1861, p. 274. ) Voyez principalement, au sujet du Dronte de l’ile Maurice, les Mé- res de Strickland et Melville (The Dodo and its kindred, 1848), d'Owen, 78 E. OUSTALET. connue qu'une espèce quelconque de notre faune et au sujet de laquelle Desjardins avait réuni toute une liasse de docu- ments extraits des Mémoires et des Notes de D. de Blainville, de Cuvier, de Lyell, de Lesson, etc. Je rappellerai seulement qu'à l’île Bourbon le Dronte était remplacé par un Oiseau que Dubois, dans son Journal manuscrit, désigne sous lenom de Solilaire et que Schlegel a rangé également dans le genre Didus sous le nom de Didus borbonicus 1), tandis qu'à l’île Rodrigue vivait un autre Colombidé géant à ailes rudimentaires, le Pezophaps solitarius ou Solitaire de Leguat (2). Absolument aucun document relatif à l’un ou l’autre de ces Oiseaux ne se trouve dans les manuscrils de Com- merson qui n'est arrivé aux îles Mascareignes qu’assez long- temps après leur anéantissement lotal. Celui-ci a dû avoir lieu à la fin du xvrr° siècle. * 36. Francolinus chinensis Osb. Dans son Voyage aux Indes et à la Chine, Pierre Sonnerat a décrit cette espèce sous le nom de Francolin de l'isle de Mernoirs on the Dodo (Trans. Zool. Soc. Lond., 1866 et 1871), de A. Milne Edwards, Remarques sur les ossements du Dronte nouvellement découverts à l'ile Maurice (Ann. des Sc. nat.,Zoolog., 1866), de sir Edouard Newton el de H Gadow (Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1894, trad. Sauzier), les articles de M. Alfred Newton dans l'Encyclopédie britan- nique (1875 et 1877) et le Catalogue des Colombidés du British Museum de T. Salvadori (Cat. B. Brit. Mus., 1893, t. XXI, p. 632). (1) Aptercrnis solilarius de Selys, Rev. Zoolog., 1848, p. 293 ; Apterornis so- litaria, A. Milne Edwards, Ibis, 4869, p. 272; Didus (?) borbonicus, Schlegel, Mus. des Pays-Bas, Slruthiones, 1873, p. 3; T. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus.,.4893, t., XXI, p.635; A: ,Newlon, -Encycl. "britannica (MSP EP D: 792: | (2) Leguat, Voyage, etc., édit. Amsterdam, 1750, t. I, p. 98; X..., Rela- tion de l’île Rodrigue, passage reproduit par M. A. Milne Edwards, Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6° série, t. IE, art. 4, p. 13; Didus solitarius, Gmelin, Syst. Nat., 1708, t. I, p. 728, n° 2 ; Dodo, Desjardins, Analyse des trav. de la Soc. d’hist. nat. de l’île Maurice, etc., 1832, et Proc. Zool. Soc. London, 1832, p. 111; Pezophaps solitarius, Strickland, The Dodo, 1848, p. 46; A. Newton. Proc. Zool. Soc. Lond., 1865, p. 715; Ibis, 1865, p. 150; 1867, p. 146; 1868, p. 362, et 1872, p. 32; À. et E. Newton, Proc. Roy. Soc., 1868, p.428; Ann. and Mag. nat. Hist., 1868, 4° série, t. 11, p. 159, et Philosph. Trans., 1869, p. 327 et pl. XV à XXIV; T. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus., 1893, t. XXI, p. 029, elc. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 79 France (1) ignorant qu'elle avait déjà été signalée par Brisson (2) sous le nom de Perdrir de la Chine et par Osbeck sous celui de Tefrao chinensis {3). I est en effet bien démontré aujourd’hui que le Francolin de l'isle de France de Sonnerat, le Tefrao pintadeus de Scopoli (4), la Perdrix perlée de Buffon (5),le Tetrao perlatus et le T. ma- dagascariensis de Gmelin (6) constituent une seule et même espèce, qui est originaire de la Chine et de l’Indo-Chine (7) el qui à été importée par les Hollandais, ou peut-être, plus probablement, par les Français, à l’île de France où elle est connue sous le nom de Pintade ou de Perdrix pintadée. Sir Edouard Newton l'a trouvée assez commune aux envi- rons de Saint-Marlin et en a recueilli des spécimens pour sa collection. Un autre exemplaire de Francolinus chinensis venant de l’île de France existe également au Muséum d’his- loire naturelle de Paris qui le doit aux naturalistes de l'expédition de lUrame, un autre au musée de Vienne qui l'a reçu de E. Bojer. Le mâle et la femelle sont très exactement décrits dans une note manuscrite de M. Des- jardins, datée du 14 novembre 1829. * 37. Francolinus ponticerianus Gm. Le Francolin de Pondichéry, dont la patrie d’origine com- prend non seulement notre colonie indienne, mais l'Inde anglaise, le sud de la Perse et de l'Arabie (8), a été, comme le Francolin de Chine, introduit aux îles Mascareignes et y est retourné à l’état sauvage. Cette double acclimatation remonte certainement au milieu du siècle dernier, à l’époque (A) Voyage. aux Indes.et à la Chine, 1182, t: Il, p. 466 et” pl. 197. Un exemplaire de ce Francolin se trouve mentionné dans le catalogue manus- crit des collections rapportées par Sonnerat. (2) Ornithologie, 1760, t. I, p. 234, el pl. 28, fig. 1. ) Voy.. en Chine, AT, t. IL, p. 326. ) Deliciæ Floræ et Faunæ insubr., 1786, part. IF, p. 93. } Hist. nat. des Oiseaux, 1771, t. If, p. 446. (6) Syst. Nat., 1168, t. I, p. 756 et 758. | 7) Voyez O. Grant, Cat. B. Brit. Mus., 1893, t. XXII, p. 136. 4 (8) O. Grant, Cat. B. Brit. Mus., 1893, t, XXIT, p. 141 (Francolinus pondice- rianus). s | S0 E. OUSTALET de la domination française, car Cossigny, dans son Voyage à Canton (1), constate la présence à l’île Maurice de Perdrix de deux espèces et, plus récemment encore, Grant s’ex- prime ainsi : « Nous avons trois sorles de Perdrix, toules les trois différentes de celles de France, quoique quelques- uns de ces oiseaux se rapprochent des Perdrix à pattes rouges de notre pays. À cause de la chaleur du sol, elles sont forcées de se percher sur les arbres (2). » La (roi- sième espèce de Perdrix est probablement le Paroles ou Margaroperdir madagascariensis qui a élé également introduile à l'ile Maurice ; l'espèce à palles rouges est le Francolinus ponticerianus et l’autre le FÆ. chinensis. Cha- potin, dans sa Topographie médicale de l'ile de France (3), signale également, en 1812, deux espèces de Perdrix appor- tées de l'Inde, et Milbert dit de son côté (4) : « Il yen a deux espèces, de la taille de celles d'Europe. Celle qu'on nomme Perdrix pintade à cause de la bigarrure de ses couleurs est très belle et très rare. L'une el l’autre ont les palites très courtes et d'un marron roussâtre. » Milbert ajoule que « la Perdrix pintade est le Francolin originaire de Madagascar et plus grand que la Perdrix rouge ». il semble la confondre avec l’espèce suivante, avec la Margaroperdir madagascariensis. Plusieurs spécimens, d'âges et de sexes différents, de Francolinus ponticerianus ont été tués à Flacq (île Maurice) le 18 janvier 1829, le 20 mars 1830 et au mois d'août 1835, et ont été décrits par J. Desjardins. L'espèce a été également observée aux environs de Saint-Martin par M. Edouard Newton qui la dit plus rare que le Francolinus chinensis (5). " 38. Margaroperdix madagascariensis Scop. J'ai trouvé dans la liasse Commerson un dessin à la mine de plomb de celte espèce qui est plutôt un Francolin qu une Perdrix. Ce dessin, de grandeur naturelle, est signé de 0. (Passage cilé par J. Desjardins.) History of Mauritius, 1801.(Passage cité par J. pers ) Cité par J. Desjardins. Voyage pittoresque à l'ile de France, t. I, p. 253. (1) P (2) (3) (4) (5) Ibis, 1864, p. 275. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 81 Sonnerat qui devait plus tard décrire l’Oiseau sous le nom de Grande Caille de Madagascar (1). I porte au dos ces quelques mots de la main de Commerson : « Perdrix de Madagascar naturalisée aussi à l’île de France. » Ceci nous indique que la Margaroperdir madagascariensis, qui est, en effet, originaire de la grande île de Madagascar, a été importée à l'île de France en tous cas dès le milieu du siècle dernier, peut-être par les Français plutôt que par les Follan- dais. D’après M. G. Hartlaub ellene prospère pas aussi bien à Maurice que sur la petite île Agaléga (2). * 39. Perdicula argoondah Sykes. * 40. Excaliactoria sinensis L. D’après sir Edouard Newton /3) la faune de l’île Maurice s’est encore enrichie à une époque récente de ces deux sortes de Cailles asiatiques. La présence de l’une d'elles, du Coturniz ou Excalfactoria sinensis, avait déjà été signalée par Desjardins en 1836 (4). Enfin, sans vouloir insister ici les Gallinacés domesti- ques, je crois bon de rappeler que, dès 1598, quelques Poules furent laissées à l'île Maurice par amiral hollandais Wybrant van Waarwyck (5) et qu'en 1693, Leguat trouva les basses-cours des colons hollandais de la Rivière Noire à l'île Maurice très richement peuplées de volailles semblables à celles d'Europe (6). Cossigny nous apprend (7) que, de son (1) Voyage aux Indes et à la Chine, 1782, t. II, p. 169 et pl. 98. C’est aussi la Calle brune de Madagascar, du même naturaliste (Ibid., p. 171), le Tetrao madagascariensis de Scopoli (Deliciæ Floræ et Faunæ insubr., 1786, part. IL, p. 93, le Tetrao striatus et le T. griseus de Gmelin (Syst. nat., 1788, t. I, p.763 et 764), la Margaroperdiz striata de Hartlaub et des auteurs modernes (A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 487, pl. 199 à 205). (2) G. Hartlaub, Die Vügel Madagascurs, p. 279. (3) Ibis, 1861, p. 116 et 275. (4) Cinquième rapport annuel sur les travaux de la Société d'histoire natu- relle de l’île Maurice. Une analyse de ce rapport a paru dans les Proc. Zool. . Soc. Lond., 1835, p. 205. (5) Recueil des voyages qui ont servi à l'établissement et aux progrez de la Compagnie des Indes, édit. de Rouen, 1725, t. II, p. 163. (6) Le voyage et les avantures de François Leguat, Amst., 1750, t. IL, p. 9. (7) Voyage à Canton, p. 50 (cité par Desjardins). ANN. SC. NAT. ZOOL. Il, 6 82 E. OUSTALET. temps, on élevait déjà à l’île de France de nombreuses races de Poules parmi lesquelles il cite : 1° les Poules ordinaires, qui sont les plus communes; 2° les Poules à chair noire qui viennent de Madagascar et qui sont assez rares ; 3° les Poules. huppées; 4 les Poules frisées; 5° les Poules sans queue; 6° les Poules de Perse qui ont du poil au lieu de plumes; 1° les Poules de Batavia qui sont très petites ; 8° les Poules de Chafijan qui sont, au contraire, très grandes et presque aussi fortes que des Dindes. Ces races sont faciles à identifier : la première est la Poule de ferme ordinaire, la Poule gauloise, la seconde la Poule négresse (Silkey Fowl) qui est originaire, non de Madagascar, mais de l’Asie orien- tale et qui a été décrite, dès le milieu du xvr° siècle, par Gessner et par Aldrovande; la troisième est probablement l’ancienne race de Padoue d’Aldrovande ; la quatrième la race frisée dont Aldrovande a également faitmention et qui, d'après Temminck, a été élevée primitivement aux Moluques et aux Philippines ; la sixième la race sans queue où Walhhihi origi- naire non de Ceylan, mais de l’Indo-Chine ; la septième vrai- semblablement la race Bantam et la huitième la grande race malaise dite de Chitiagong. D'une note de Desjardins il résulte que cette dernière disparut de bonne heure en se mélangeant avec les autres. Au contraire la race nègre dont Bernardin de Saint-Pierre mentionne également la présence à l’île de France (1) continuait à y être élevée au commencement du xix° siècle, mais s’y présentait avec une livrée brunâtre (2) très différente par conséquent de la livrée blanche qui est actuellement recherchée par les éleveurs. Milbert qui cite des Poules nègres et des Poules frisées parle également d'une troisième race de très petite taille el à paites couvertes de petites plumes jusqu'aux doigts (3), qui était peut-être la race cochinchinoise naine. Les Dindons, qu'on élevait déjà en grand nombre au com- (1) Études de la Nature, t. II, p. 217. (2) Chapotin, Topographie médicale de l'ile de France, 1812, p. 22. (3) Voyage pittoresque à l’île de France, t. IF, p. 25#. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 83. mencement du siècle (1) et qui réussissaient surtout dans les parties sèches de l’île, constituaient encore, du temps de Desjardins, une ressource alimentaire très importante. Quel- ques habitauts des Trois-Islots, dans le quartier de Flacq, en possédaient des troupeaux de plusieurs centaines d’indi- vidus, à plumage gris, blanchâtre ou rougeûtre. Enfin les Pigeons de diverses races prospéraient fort bien à la même époque. 41. Squatarola helvetica L. Le Pluvier suisse, ou Pluvier varié (2) qui est presque cos- mopolite, se trouve non seulement à Madagascar et aux Seychelles, mais à l’île Maurice, où sa présence a élé signalée par sir Edouard Newlon (3). 42. Gharadrius Geoffroyi Wagl. Dans la séance du 24 novembre 1832, J. Desjardins donna lecture à la Société d'histoire naturelle de l’île Maurice de la deseription d’un Pluvier qu'il désigna sous le nom d’'(Ædicne- mus nesogallicus et qui me paraît identique au Pluvier de Geof- froy. Cette description, dont j'ai la minute sous les yeux et à laquelle il est fait allusion dans les Annales des sciences na- turelles de 1834 (4) et dans les Proceedings de la Société zoologique de Londres de 1835 (5), avait été faite,dit Desjar- dins, quelque temps auparavant d’après un individu que M. Wenceslas Bojer, ami et collègue de l’auteur, avait tué, au mois d'octobre 1829, dans Ja partie du quarlier de la Rivière (1) Chapotin, op. cit., p. 22; Milbert, op. cit., t. II, p. 255. (2) Vanellus griseus, V.varius et V. helveticus, Brisson, Ornith., 1760, t. V, p. 100, 103, 106; Charadrius helveticus, Seebohm, Geogr. Dist. of the Chara- dridæ, p. 100 ; Charadrius varius, À. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 506. (3) Ibis, 1860, p. 201; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 286. (4) Ann. des Sc. nat., 1834, 2° série, t. IL, p. 316 (Rapport sur les travaux de la Société d'histoire naturelle de l'ile Maurice pendant le courant de l'année 4833, par M. Desjardins). (5) Proc. Zool. Soc. Lond., 1835, p. 204. Compte rendu de la séance du 8 décembre 1835, dans laquelle il avait été donné lecture d’un Extrait du quatrième Rapport annuel sur les travaux de la Société d'histoire naturelle de l’île Maurice, par M. Julien Desjardins. L'Oiseau est désigné ici sous le nom de Charadrius nesogallicus. 84 | à: E. OUSTALET. Noire connu sous le nom de Morne Brabant. Elle s'applique fort bien au Charadrius Geoffroyi qui a élé observé d’ailleurs à Madagascar (1) et aux Seychelles (2) d’où le Muséum a reçu plusieurs exemplaires pris par M. Bernier et par M. Lantz. Ces spécimens sont en plumage d'hiver comme l'individu dé- crit par Desjardins, c’est-à-dire ont le manteau d’un brun grisâtre, les parties inférieures du corps blanches avec un peu de brun sur les flancs el du gris sur les côtés de la poitrine. « Quoique je n’aie vu que ce seul échantillon, dit Desjar- dins, je sais que cet oiseau est assez commun dans plusieurs endroits de cette île et que les chasseurs le connaissent même sous le nom de Pluvier. » 43. Strepsilas interpres L. D'après F. Pollen (3), quelques individus de cette espèce, si largement répandue à la surface du globe (4), se montrent isolément sur les côtes de l'île de la Réunion et de l'ile Maurice. J. Desjardins en avait dans sa colleclion un individu qui lui avait été donné par M. W. Bojer en 1835 et qui venait de l’île Agaléga (5); sir Édouard Newton arencontré un petit vol de Tourne-pierres sur l’île Rodrigue (6) et M. Gran- didier en a eu sous les yeux un certain nombre provenant Ne D de Madagascar (7). 4. Totanus glottis Bechst. s Totanus glottis ou Chevalier aux pieds verts avait déjà élé observé à Madagascar et aux Seychelles (8); mais sa (1) A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Mada- gascar, Oiseaux, p. 507. (2) E. Newton, On the Birds from the Seychelles (Ibis, 1867, p. 359) ; E. Ous- talet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 181 (Ægialitis Geoffroyi). (3) Schlegel et Pollen, Faune de Madagascar, Oiseaux, p. 130 ; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 293. (4) Voyez H. Seebohm, The Geographical distribution of the Charadriidæ, p- #10. (5) Cet Oiseau lui avait paru différer légèrement des Tourne-pierres or- dinaires par sa taille un peu plus faible, son front plus blanc et ses joues dépourvues de taches noires. (6) Ibis, 1865, p. 150. (Ar Milne Edwards et Grandidier, op. cit., p. 512. (8) E. Newton, Ibis, 1867, p. 346, 351 et 359; €. Hartlaub, Die Vügel Mada- gascars, 1877, p. 326 : E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 186; A. ‘ 4 : : FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 895 présence à l’île Maurice n'avait élé indiquée que par une très brève mention, faite dans les Proceedings de la Société zoolo- gique de Londres (1), d'une Nole de J. Desjardins. Cette Note, dont j'ai le manuscrit sous les yeux, fut lue à la Société d'histoire naturelle de l’île Maurice le 22 septembre 1831. Elle renferme la descriplion d’un Oiseau qui, comme le supposait Desjardins, se rapportait incontestablement au Totanus glottis L., ou Chevalier aux pieds verts. Cet Oiseau avait été tué par M. J. M. Lagesse en décembre 1830 au quartier de Flacq, dans les environs de la Rivière Sèche, où se trouvent, dit Desjardins, plusieurs grandes mares situées entre la montagne des Fayences el celle da Campde Masque ou Montagne Blanche. Ceci nous permet de supposer que le Chevalier que sir Édouard Newton aperçut un jour, le 27 septembre 1860, sur les bords de la Mer Saint-Martin (2), mais qu’il ne put atieindre et qui avait, dit-il, la taille d’un Greenshank (3), élait également un Chevalier aux pieds verts, de même que ceux qu’il observa les jours suivants. 45. Totanus ochropus L. Le Chevalier aux pieds verts ou Chevalier cul-blanc, qui niche dans le nord de l’Ancien Monde et qui hiverne dans le sud de l’Asie et en Afrique(4),n'avait pas encore été signalé sur les îles Mascareigues, ni même à Madagascar. Je crois cependant pouvoir affirmer que c'est un individu de cette espèce largement répandue qui a été considéré par J. Des- jardins comme le type d’une espèce nouvelle, Scolopax mau- ritiana, el décrit comme tel dans une Note lue à la Société d'histoire naturelle de l’ile Maurice, le 13 octobre 1829. Dans cette Note, dont j'ai le manuscrit sous les yeux, Desjardins dit, en effet, que la Bécasse de Maurice (Scolopax mauritiana) Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 630. (1) 1834, p. 117. (2) 1bis, 1861, p. 276. (3) Totanus glottis. (4) Voyez Seebohm, The Geographical distribution of the Charadriidæ, p. 368. 86 | E. OUSTALET. a la partie supérieure du corps, de la tête et des aïles d’un gris cuivré el agréablement nuancé de brun et de blanc sur le bord des plumes, le ventre et le dessous de la queue blancs, la poitrine et la gorge légèrement teintées de la couleur des parties supérieures du corps, les ailes marquées d’une raie blanche, très apparente lorsque l'oiseau vole, le dessous de la queue Ho la base et brun à l'extrémité, les pattes et le bec d’un brun noirâtre. Il ajoute que le bec est une fois et demie aussi long que la tête presque droit, sauf à l’extrémité qui est fé svpénent arquée, les narines allongées et situées dans un sillon, les pattes courtes, les doigts bien séparés, frangés latéralement, le pouce court, ne touchant à lerre que par son ongle. Enfin il assigne à celte Bécasse de Maurice les dimensions suivantes qui sont précisément celles LE Totanus ochropus : Longueur du bec à l'extrémité de la queue, 8 pouces fran- çais (1). Longueur du bec, 1 pouce 3 lignes (2). Longueur du tarse, 1 pouce 3 lignes. Longueur du doigt médian, 1 pouce (3). Desjardins ajoute, d’ailleurs, que cet Oiseau, assez com- mun sur le bord de la mer, porte à l’île de France le nom de Cul-blanc.Ce même nom vulgaire figure dans la mention qui à été faite, en 1831, dans les Praceedings de la Société zoologique de Londres (4), de la communication de J. Des- Jardins. Le type de la Scélopa mauritiana avait été pris vis-à-vis de l’île d'Ambre, à la Poudre d'Or, le 8 octobre 1829. C’est probablement à cette espèce et à la précédente (T. glottis) qu appartenaient les Bécassines dont parle Leguat (5). 02,027. premier Rapport sur les trav. de la Soc. d'hist. natur. de l'ile Maurice). (5) Le voyage et les avantures de F. Leguat, Amsterdam, 1750, t. II, p. 107. ‘#4 FAUNE. DES ÎLES MASCAREIGNES. 87 46. Tringa subarquata Güld. Le Bécasseau cocorli n’est pas rare sur les côtes de Mada- gascar (1) et a été rencontré aussi à l’île Maurice (2). 47. Tringoides hypoleucus L. La Guignelte vulgaire qui, d’après M. Grandidier (3), est très commune sur les côtes de Madagascar, se rencontre aussi aux Comores, aux Seychelles, à l’île de la Réunion, à l'île Rodrigue et à l’île Maurice (4). Sir Edouard Newton suppose que quelques petits Échassiers de rivage qu'il observa sur cette dernière île à Saint-Martin, à Jacoté (5) et aux en- virons de Port-Louis, à la fin de septembre et dans les pre- miers Jours d'octobre de l’année 1860, appartenaient à cette espèce (6). J’y rapporte aussi, avec quelque doute, la Bécasse élégante (Scolopax elegans) que Desjardins a signalée et à laquelle il a élé fait allusion, en 1834, dans les Annales des saences naturelles (7). Cette Bécasse élégante étail, paraît-il, connue des chasseurs de Maurice sous le nom d’A/ouette de mer qui est précisément le nom vulgaire que porte aux Sey- chelles Le Tringoides hypoleucus. Les Alouettes de mer dont parle Leguat(8) doivent évidemment être attribuées à la même espèce. J’en dirai autant de celles dont l’auleur anonyme de la Relation de l'ile Rodrique constate la présence, en petit nombre, sur les côtes du pays dont il décrit les Oiseaux ter- restres et aquatiques (9). (1) A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Ma- dagascar, Oiseaux, p. 624. (2) G. Hartlaub (Die Vôgel Madagascars, p.330) cite un exemplaire de cette espèce, venant de Maurice, dans la collection Newton. (3) A. Milne Edwards et A. Grandidier, op. cit., p. 624. (4) G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, p. 327; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 186. (5) Baie du Jacotet. (6) Ibis, 1861, p. 276. (7) 1834, 2° série, t. II, p. 316. Dans les Proceedings of the Zoological So- ciety (1835, p. 204) le nom de Scolopax elegans se trouve cité d’après le Qua- trième Rapport annuel sur les Travaux de la Société d'histoire naturelle de l'ile Maurice. (8) Le voyage et les avantures de F. Leguat, 1750, t. II, p. 107. (9) Voyez A. Milne Edwards, Nouveaux Documents sur l'époque de la dispa- rition de la faune ancienne de l'ile Rodrigue, Ann. des Sc. nat., Zool., 1875, 6° série, t. Il, art. n° #4, p. 10. 88 E. OUSTALET. 48. Numenius phæopus L. -Le Courlis Corlieu de nos pays se retrouve à Madagascar, aux Seychelles et aux îles Mascareignes où il est connu sous le nom de Corbijau, Corbijeau, Corbigo ou Corbijeu (1). Les manuscrits de J. Desjardins renferment de nombreuses cita- tions relatives à cette espèce et empruntées aux ouvrages de Sonnerat (2), de l’abbé Lacaille, de Bernardin de Saint- Pierre, de Grant (3), de Chapotin (4), de Lewis (5), de Mil- bert (6), etc. Tous ces auteurs s'accordent à dire, comme sir E. Newton, que les Corbijeaux sont très communs sur les côtes, mais qu'ils se laissent difficilement approcher et qu'ils constituent un excellent gibier. J. Desjardins avait dans sa collection le squelette d’un Vumenius phæopus qu'il avait trouvé mortsur lerivage, à la pointe de Canes, à Flacq, en 1829. Enfin je ne dois pas omellre de dire qu'il existe dans la liasse Commerson un dessin de Jossigny représentant un Courlis de grandeur naturelle, avec cette indication au verso, de la main de Commerson : « Numenius. Le Corbijeau de l'Isle de France, de Bourbon et de Madagascar. Vide descr. « Fusco griseo, alboque variegatus, gula, ventre, femori- bus uropygioque pure candicantibus. Nobis vel : « Num. fusco griseo albus, uropygio et corpore subteriore albis. | «Remigibus primarüs nigris, rachi nivea, secundariis albo guttatis, pedibus plumbeis. Nobis. » Commerson ajoute : « Il est figuré, je crois, dans Brisson sous le nom de Courlis de Madagascar. » (1) Voyez E. Newton, Ibis, 1861, p. 276, 1863, p. 457 et 1807, p. 346 el 359 ; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 185; G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, p. 322; A. Milne Edwards et Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, p. 621 ; H. Seebohm, The Geographical distribution of the Charadriidæ, p. 328. (2) Voyage aux Indes et à la Chine, t. 11, p. 87. (3) History of Mauritius, 1801, p. 65. (D’après Desjardins.) (4) Topogr. médic., p. 22. (D'après Desjardins.) (5) Holman's Voyage round the world, 1835, t. III, p. 180. (D'après une note de J. Desjardins, Lewis séjourna à l’île Maurice jusqu’en 1821.) (6) Voyage pittoresque à l’île de France, t. II, p. 253. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 89 Ceci est une erreur, car le Courlis de Madagascar, de Brisson, Numenius madagascariensis, est une espèce de taille notablement plus forte, correspondant à notre Courlis cen- dré. 49. Numenius madagascariensis Briss. Celle espèce, déjà plus rare à Madagascar que le Courlis corlieu, ne se montre qu'accidentellement aux Comores et dans les îles Mascareignes (1). M. E. Newton en a vu cepen- dant un individu à l’île Rodrigue (2). En outre, d’après un extrait publié en 1831, dans les Proceedings de la Société zoologique de Londres (3), d’une lecture faite à la première séance annuelle de la Société d'histoire naturelle de l’île Maurice, le 24 août 1830, par M. J. Desjardins, un Nume- nius madagascariensis aurait été pris à l’île de France; mais je me demande si cette indication ne doit pas plutôt être reportée au Numenius phæopus, seule espèce dont des exem- plaires soient mentionnés dans le Catalogue de la collection de J. Desjardins. 50. Ardea cinerea L. Des Hérons cendrés, semblables aux nôtres par le plu- mage, mais de taille un peu plus forte, ont été observés à Ma- dagascar par F. Pollen et par M. A. Grandidier (4). On en a trouvé aussi aux Comores et sur les îles Amirantes; la pré- sence de l’Ardea cinerea à l’île Maurice n'aurait donc rien d'étonnant; mais elle n’est démontrée jusqu'ici par aucun fait positif, à moins que les ossements d’un des quatre Hérons trouvés par M. Sauzier dans le gisement de la Mare aux Songes et mentionnés, sans description, par sir E. Newton et le docteur Gadow n’appartiennent à cette espèce (5). (1) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, 1877, p. 323. (2) Ds Le p. 450 (sous le nom de Numenius æ'quatus). (3 (4) Schlegel et Pollen, Faun. Madag., Oiseaux, p. 122; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, P- 295 : A. Milne Edwards et + Grandidier, Hist. phys., natur. el polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 544. (5) Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XIII, part. VII, n° 1, p. 282, et Ann. es Sc. nat., Zoolog., 1894, 7e série, t. XVIII, p. 217. 90 | E. OUSTALET. 51. Ardea garzetta L. Le Héron garzette, qui n’est pas rare à Madagascar et aux Seychelles (1), existait certainement aussi autrefois à l’île Maurice, puisque M. A. Milne Edwards a eu entreles mains un tibia de cette espèce, trouvé par sir Edouard Newton à la Mare aux Songes avec des ossements d’Aphanapteryx, de Flammant, etc. (2). 52. Ardea bubulcus Sav. Le Héron garde-bœuf, qui est extrêmement répandu à Ma- dagascar et aux Seychelles (3), existe aussi aux îles Masca- reignes, ou du moins y existait encore 1l y a quelques an- nées. Le Muséum d'histoire naturelle de Paris possède, en effet, un individu de cette espèce tué à l'île de la Réunion et envoyé par M. Lantz en 1865 et la collection Newton ren- ferme, d’après M. Hartlaub (4), un exemplaire venant de l’île Maurice. 53. Ardea (Butorides) atricapilla var. Rutenbergi Hart]. En comparant des Hérons à tête noire du continent afri- cain (Putorides atricapilla Afzel.) avec des Hérons à tête noire du nord de Madagascar, M. le D°G. Hartlaub a constaté que ces derniers avaient les côtés de la tête et du cou d’un gris moins pur, tirant plutôt au roux qu’au grisâtre, les bor- dures des tectrices alaires d’un fauve rougeûtre, le milieu de la poitrine nuancé de jaune ocreux, etc. En raison de ces différences il a considéré les Hérons à tête noire de Mada- gascar comme appartenant à une race distincte qu'il a nom- mée Ardea atricapilla var. Rutenbergi (5). C’est à cette race (1) A. Milne Edwards et A. Grandidier, op. cit., p. 549 ; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 187. (2) Recherches sur la faune ancienne des îles Mascareignes (Ann. des Sc. natur., Zool., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 24 et pl. 15, fig. 3, 3a, 36. (3) A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Ma-. dagascar, p. 554; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 190. (4) Die Vügel Madagascars, p. 304. (5) G. Hartlaub, Proc. Zool. Soc. Lond., 1880, p. 39 ; A. Milne Edwards et A. Grandidier, op. cit., p. 557 etpl.217 A; Ardea atricapilla, G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, p. 308. mt ED ET dE eur “me …— < FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. ga1 qu'il faut probablement rapporter aussi les Hérons à tête noire des Seychelles, chez lesquels j'ai retrouvé les mêmes particularités, quoique peul-être moins constantes, et les Hérons à lête noire de Maurice dont malheureusement je n'ai pu éludier aucun spécimen, mais que M. G. Hartlaub ne séparait pas autrefois des Hérons malgaches, après avoir étudié comparativement un exemplaire venant de Madagas- car et appartenant au Muséum d'histoire naturelle de Paris et un individu venant de Maurice et faisant parlie de la col- lection Newton. Les manuscrits de J. Desjardins renferment du reste une descriplion très détaillée de cette sorte de Hé- ron, sous le nom de Crabier de l'ile Maurice (1). À celle des- cription, dans laquelle, par une interversion singulière, l'auteur a considéré le plumage bariolé du jeune comme la livrée de l’adulle et le costume verdâtre et gris avec la calotte _noire comme la livrée du jeune, sont annexés les détails sui- vants : « Cet oiseau, très commun dans les forêts qui avoisinent les rivières et sur le rivage de la mer, est un gibier que l’on recherche peu quoique sa chair soit agréable. Il vil, comme tous ceux de son espèce, de Poissons, de Grenouilles et d'In- sectes. « On le connaît à Maurice sous le nom de Garce que l’on prononce quelquefois Guere pour plus de décence (2). Ce nom est une corruption de celui de Garcette que portent quelques espèces de Hérons des autres contrées ou peut-être est-ce Garça ou Sgarza qu'on à d'abord voulu dire. Le premier de ces mots veut dire Héron en portugais et le second en ita- lien. «On pourrait tenir ces oiseaux en domesticité en leur cou- pant les ailes el les prenant jeunes. J’en ai eu de cette façon (1) À Mayotteon donne également aux Hérons à tête noire le nom de Crabiers, parce qu'ils se nourrissent principalement de Crustacés du genre Gelasimus. (2) L'Ardea (Butorides) atricupilla porte aux Seychelles le nom de Gasse qui paraît être également une corruption de Garce (E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 189). 99 E. OUSTALET. æ pendant quelque temps et je les nourrissais avec des Pois- sons, des Grenouilles, des Insectes, etc. « Tous les habilants du quartier de la Savane à qui j'ai parlé de notre Crabier ne le connaissaient pas et ayant par- couru tout le quartier en 1837, je n’en ai pas vu. « Il existe dans l’île d'Agaléga un Crabier voisin de celui de notre île, mais il est plus particulièrement d’une couleur roussâtre et l’aigrette du capuchon au lieu d'être d’un vert noirâtre est d’une couleur brune avec des lignes longitudi- nales blanches et fauves. J'en possède deux individus dans mon cabinel. Ils m'ontélé donnés par MM. Bojer et Anglès qui ont visité celte île en 1835. « Des œufs que l’on m'a donnés en septembre 1830, au nombre de six, et que l’on m'a assuré appartenir à cette es- pèce, étaient de la grosseur des œufs de Pigeon, un peu plus pointus à l’un des bouts et mouchetés de brun roux sur un fond sale, particulièrement au gros bout. « Ces oiseaux nichent sur les vieux arbres. » Desjardins cite ensuite quelques passages des relations des voyages de C. Matelief et de van der Hagen(1) mentionnant la présence de Hérons à l’île Maurice au moment de l’arrivée des Hollandais. Il y joint les lignes suivantes empruntées à Grant (2) : « Les Hérons sont farouches et quand ils sont pour- suivis se perchent d’abord sur les arbres et ensuite dispa- raissent entièrement (3). » Enfin il rappelle que Leguat cons- tatait (4) qu'on voyait de son temps, à l'île Maurice, « de grandes volées de Butors ». Tous ces Hérons, ces Butors, pouvaient en effet être des Hérons à têle noire (Ardea ou Butorides atricapilla var. Ru- tenbergi), mais quelques-uns pouvaient aussi appartenir à l'espèce suivante. | (1) Ce sont les passages que j’ai reproduits au commencement de ce Mé- moire. {2) History of Mauritius, p. 22. (D’après Desjardins.) (3) « The herons were wild and, when they were pursued, first Poe on the trees and then entirely disappeared. » (4) Le voyage et les avantures de Francois Leguat, Amsterdam, 1750, t. I, pP-U2R TS a a mnt nada ii ant tapés + bo GE me hot ENT | FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 93 +54. Ardea (Butorides) mauritiana Newt.et Gad. Les fouilles exécutées dans le gisement de la Mare aux Songes sous la direction de M. Th. Sauzier ont amené la découverte d'ossements de Hérons (cubitus, radius, méta- tarses et coracoïdien) que sir Edouard Newton et le docteur Gadow ont reconnu, avec surprise, ne pouvoir appartenir à l’Ardea (Butorides) atricapilla Rutenhergi (espèce qu'ils dé- signent, par un lapsus calami, sous le nom de Butorides nigri- colis (1) et qu'ils ont attribués à une espèce éleinte, Butorides maurilianus (2). Cette espèce différait, paraît-il, par ses pro- portions, de celle que M. Milne Edwards a fait connaître sous le nom d’Ardea megacephala et qui existait autrefois à l’île Rodrigue (3) et, contrairement à ce que disent sir Edouard Newton et le D' Gadow, ne devait pas appartenir au même groupe, du moins si l’on accepte la détermination géné- rique de ces auteurs. Sir Edouard Newton et le D' Gadow n'hésitent pas, en effet, à attribuer au genre Butorides et à la catégorie des Hérons nocturnes ou Butors l'espèce dont les restes ont été exhumés par M. Sauzier et dont l'os du pied rappelle, disent-ils, par sa forme et ses dimensions, le tarso-métatarsien de certains Bihoreaux. Au conlraire, M. Milne Edwards fait remarquer expressément que l’Ardea megacephala n’élait pas un véritable Butor, qu'il différait des Butors et des Bihoreaux par la conformation de sa tête et qu’il offrait, dans son tarso-métalarsien, les caractères des Ardea, c'est-à-dire des Hérons diurnes, sans pouvoir être rap- proché d'aucune des espèces acluelles de ce groupe. Cepen- dant, par la grosseur de sa têle et la brièveté de ses pattes, il (1) Ge lapsus a été corrigé dans la traduction de M. Sauzier (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1894, 7 série, t. XVIII p. 229). (2) Transactions of the Zool. Soc. Lond., 1893, t. XIII, part. VII, n° 1, p. 289 et pl. XXXIV, fig. 6 à 8, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1894, 7° série, t. XVII, p. 229 (trad. Sauzier). (3) Recherches sur la faune ancienne des îles Mascareignes (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. Tet pl. 14, et Nouveaux documents sur l’époque de la disparition de la faune ancienne de l’ile Rodrigue (Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1875, 6e série, t. IL, art. 3, p. 14.(Extrait de la Relation de l'île Rodrigue.) 94 E. OUSTALET. ressemblait un peu extérieurement aux Butors el, d’après M.-Milne Edwards, tout ce que Leguat et l’auteur anonyme de la /?elation de Rodrigue disent des Butors de Rodrigue (1) s'applique en réalité à des Hérons de l'espèce susdite. ? 55. Platalea tenuirostris Tem. | La Spatule à bec grêle (2), le Vourongondrou de Fla- court (3), n'habite point l’île Maurice et s’y montre tout au plus d'une façon accidentelle. Le témoignage de Desjardins, invoqué par M. G. Hartlaub (4) en faveur de la présence à Maurice de la Platalea tenuirostris, est, en effet, précisément contraire à cette hypothèse. Dans l'Analyse des travaux de la Société d'histoire natu- relle de l’île Maurice pendant la seconde année, qui a été communiquée en 1832 au Comité de la Sociélé zoologique de Londres par J. Desjardins, et dont un extrait a été publié dans les Proceedings of the Zoological Society (5), Desjar- dins fait observer, en effet, que c’est par erreur que la P/a- lalea Telfairi (ou P. tenuirostris) a été indiquée comme ori- ginaire de l’île Maurice et que le type de l'espèce décrite par Telfair (6) était en réalité originaire de la province d'Emirne (Madagascar). Cette rectification se trouve répétée dans une note manuscrite que J'ai sous les yeux. La liasse Commerson renferme un dessin à la mine de plomb, exécuté par Jossigny et représentant la Spatule à bec grêle réduite de près de moitié. Ce dernier porte au dos cette courte diagnose, signée de Commerson : « Spathulio {s. Spathularius) vide descr. Le Spatulaire ou Bec en spatule de Madagascar. (1) Le voyage et les avantures de François Leguat, Amsterdam, 1750, t. I, p. 104 et 108; Relation de l'ile Rodrigue, passage cité par M. Milne Edwards, Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6e série, t. IL, art. 3, p. 14. (2) Platalea tenuirostris, Temminck, Man. d'Ornith., 2e édit., 1820, t. I, p. CIIT; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 524 et pl. 225, 226 et 227. (3) Histoire de la grande île de Madagascar, 1661, p. 164. (4) Die Vügel Madagascars, p. 314. (5) 1832, p. 111. (6) Proc. Zool. Soc. Lond., 1831, p. #1. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 95 « Ecristatus, toto corpore niveus, pedibus rubris. Nobis vel : « Sp... astephanus, corpore penitus candido, pedibus mi- nialis. » Cette diagnose, qui malheureusement n’a jamais été pu- bliée, est de. près d’un demi-siècle plus ancienne que celle de Temminck. +56. Aphanapteryx Brœckei Schleg. Aucun renseignement au sujet de cetle espèce ne se trouve dans la liasse Commerson ni, à plus forte raison, dans les manuscrits de Desjardins. Nous pouvons en conclure qu'elle avait déjà complètement disparu au moment de l’ar- rivée de Commerson à l’île Maurice, c’est-à-dire en 1768. D'autre part M. Mine Edwards a démontré (1) que les Todaer- ses que Jean-Chrétien Hoffmann observa de 1673 à 1675 étaient identiques aux Poules rouges à bec de Bécasse de Fran- çois Cauche (1628) et devaient comme elles être rapportées à l’Aphanapteryx qui se trouve figuré dans la relation du voyage de Pieter van den Brœæcke, datant de 1617 et, bien plus exactement et probablement d’après le vivant, sur un vélin de la bibliothèque de l’empereur d'Autriche, vélin qui fut exécuté vers 1610. On est donc conduit à admettre que l'extinction totale de l'Aphanapteryx Breœckei dont de nouveaux ossemenis ont été retrouvés par M. Sauzier dans la Mare aux Songes (2), a eu lieu vers la fin du xvr° siècle, une soixantaine d’années avant l’arrivée de Commerson. Tout à côté de l'A phanapteryx Breckei, mais dans un genre différent, se place l’Oiseau de Rodrigue que Leguat désignait sous le nom de Gelinotie (3) et dont les restes ont été éludiés (4) Observations sur les affinités zoologiques de l’Aphanapteryæ (Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1868, 5° série, t. X,p. 325 à 346 et pl. XV à XVIII. (2) E. Newton et H. Gadow, Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XIII, part. VII, n°1,p. 293 et pl. XXXV, fig. 12 à 20, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 7° série, t. XVIIL, p. 235. (Trad. Sauzier.) (3) Le voyage et les avantures de F. Leguat, Amsterdam, 1750 t.1I, p. 103. 96 E. OUSTALET. par M. A. Milne Edwards qui a proposé de désigner celte espèce éteinte sous le nom d’Erythromachus Lequati (1). Cette espèce se distinguait de l’Aphanapteryx par son bec droit, ses paltes plus courtes, ses formes plus ramassées. Elle diffé- rait, peut-être, spécifiquement d’un autre Oiseau de l’île Mau- rice, dont sir Th. Herbert nous a laissé le portrait, grossiè- rement tracé, et qu’il appelait une Poule (a Hen) (2). Enfin, suivant Strickland (3), il faudrait probablement rapprocher les Velt-Hoenders de J. van Heemskerk et les Fellhüner de Verhuffen (4) de ce Rallide de l’île Maurice dont jusqu’à présent on n'a retrouvé aucune trace (5). 57. Gallinula chloropus var. pyrrhorhoa A. Newton. M. A. Newton avait cru remarquer que les Poules d’eau de l’île Maurice se distinguaient constamment de celles d'Europe par la coloration rousse de leurs plumes sous-caudales etilles avait rapportées à une espèce distincte, Gallinula pyrrhorkoa(6) à laquelle furent attribuées plus tard les Poules d’eau de Madagascar et de l’île de la Réunion (7); mais, comme la particularité qui caractérise les Poules d’eau des îles Mascareignes et de Madagascar se trouve parfois déjà légèrement indiquée chez les Poules d’eau d'Europe, (1) Recherches sur la faune ancienne des îles Mascareignes (Ann. des Sc. nat., Zoologie, 1814, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 6 et suiv., et pl. 11, fig4et12 fig. 3 et 4. Il est fait allusion à la même espèce dans la Relation de l'ile Ro- drigue (voy. A. Milne Edwards, Ann. des Sc. natur., Zoolog., 6° série, t. IIX, art. 4, p. 14). Enfin de nouveaux restes de l'Erythromachus Léquati ont été rapportés de Rodrigue par l'expédition anglaise du passage de Vénus (Voyez Günther et E. Newton, Philos. Trans., 1879, vol. CLXVIIT, p. 431 et pl. XIV, et R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1894, t. XXII, P. 69). (2) Cette figure a été reproduite par Strickland (The Dodo and ils kindred, p.244: (3) The Dodo, p. 21. (4) Voyez ci-dessus, p. 20 et 22. (5) Voyez au sujet des caractères distinctifs et des affinités zoologiques de l'Erythromachus Leguati la communication faite par M. A. Milne Edwards au Congrès de Leyde en 1895 (Compte rendu des séances du 3° Congrès inter- national de Zoologie, 1896, p. 77 et suiv. et Ann. des Sc. nat., Zool., 1896, ssérie, &. EL p.12116t 125). (6) Proc. Zool. Soc. Lond., 1861, p. 18. (7) Roch et Newton, Ibis, 1863, p. 174; Sclater, Proc. AT Soc. London, 18650.4655 G Hartlab, Die Vôgel Madagascars, p. 348. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 97 il semble bien démontré aujourd'hui que la Gallinula pyrrhorhoa ne constitue ouf au plus qu’une variété locale de la Gallinula chloropus (1). C'est à Jacoté ou Jacotet (île Maurice) que sir E. Newton avait observé d’abord la Ga/linula pyrrhorhoa. M. Henry Slater l’a trouvée nichant en grand nombre dans les roseaux au Grand-Bassin et à la Mare aux Vacoas. A côté de plusieurs exemplaires obtenus à Madagascar par M. Grandidier, le Muséum d'histoire naturelle de Paris possède un exemplaire de cette variété venant de Mau- rice. Ce spécimen a été donné par Desjardins qui possédait deux autres exemplaires de la même espèce (2) et qui constate dans ses notes que les Poules d’eau sont fort communes à l’île Maurice. « Les rivières et les mares en nourrissent un grand nombre, dit-il. Les roseaux qui recouvrent ces eaux leur servent de refuge. Elles construisent leurs nids au milieu de cet épais feuillage et on les entend particulière- ment le soir pousser des cris qui imitent en quelque sorte la voix humaine, surtout à quelque distance, car ce cri est _ perçant el peut se distinguer à près d'un demi-mille. C'est particulièrement le bruit d'un arme à feu qui cause leur effroi et les fait crier... Dans ces moments d’an- goisse elles sortent de leurs paisibles retraites; elles aban- donnent au chien du chasseur leur couvée et même leurs petits... On voit alors les mères nager au milieu des eaux en tournant de tous côlés leur tête, comme si l'inquiétude la plus vive les tourmentait. Elles remuent constamment la queue, soit que cela leur soit nécessaire pour la natation, soit que ce tic n'existe que par caprice... Elles pondent cinq ou six œufs qu'elles couvent dans le mois de février et (4) Gallinula chloropus var. pyrrhorhoa, A. Milne Edwards et A. Grandi- dier, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 241 et pl. CCXL ; Gallinula chloropus, R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1894, t. XXII, p2169. (2) Une de ces Poules d’eau avait été tuée sur la rivière Cagnard. C'était un mâle que Desjardins trouvait légèrement différent des Poules d’eau euro- péennes. ANN. SC, NAT. ZOOL. ; HE 1 98 E. OUSTALET. de mars. Ces œufs sont beaucoup plus gros que ceux des Pigeons. Leur couleur légèrement rembrunie et les taches marron du gros bout les distinguent (1). » Les Poules d'eau de l’île Maurice ont été mentionnées également par Chapotin (2), par Cossigny (3) et plus ancien- nement par Leguat (4) qui dit qu'autrefois l’île en était remplie. Dans ses notes Desjardins croit pouvoir affirmer que les Poules d’eau sont inconnues à l’île Bourbon où cependant, dit-il, il se trouve, sur le territoire de la commune de Sala- zie, une mare assez considérable qui porte le nom de Mare aux Poules d'eau. Mais Desjardins, dans celte circonstance, était mal informé, car des Poules d’eau ont été observées par Maillard et par Pollen à l’île de la Réunion, principale- ment dans les marais de Saint-Paul (5). *?58. Porphyrio smaragdonotus Tem. Le Talève ou Porphyrion de Madagascar (6), qui est répandu également sur une grande partie de l'Afrique, devrait probablement, suivant sir Edouard Newton (7), être considéré comme une des espèces aborigènes de l’île Mau- rice. Cependant je n'ai absolument rien lrouvé dans les manuscrits de Commerson qui fût relalif à cette espèce remarquable dont il n’est fait non plus aucune men- tion dans l'ouvrage de Leguat. Bien plus, Milbert dit formel- lement (8) à propos de la Poule sultane : « Quelques voya- (4) Dans les Proc. Zool. Soc. Lond., 1831, p. 45, la Poule d’eau de Maurice a été citée, d’après Desjardins, sous le nom de Fulica chloropus. (2) Topographie médicale de l'ile de France, p. 22. (D'après Desjardins.) (3) Voyage à Canton, p. 50. (D’après Desjardins.) (4) Le voyage et les avantures de François Lequat, Amsterdam, 1750, t. IH, ÿ (5 G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 349. (6) Taleva, Flacourt, Histoire de la grande île de Madagascar, 1661, p.164; Le Talève de Madugascar, Buffon, Hist. nat. des Oiseaux, 1784, t. VIII, p. 198; Daubenton, Planches enlum., 1783, n° 810; Porphyrio smaragdonotus, Temminck, Man. d'Ornith., 1820, 2e édition, t. If, p.700; A. Milne Edwards et À. Grändidier, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 587 et pl. 242, 243 et 244. (7) Ibis, 1861, p. 116; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 346. (8) Voyage pittoresque à l'ile de France, t. IE, p. 256. . ot er FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 99 geurs en ont apporté de Madagascar ; on ne les multiplie que comme objet de curiosilé, à cause de la beauté du plu- mage et de l’élégance des formes, » et, à propos de ce pas- sage, Desjardins inscrit dans ces notes que «la Poule sultane n'existe pas à Maurice ». Quant aux Oiseaux bleus dont il est question dans les Voyages du sieur D. B. (Dubois) aux îles Mascareignes el qui vivaient autrefois à l’île Bourbon (1), il ne peut plus guère être question de les assimiler, ccmme l’a fait M. A. Newton (2), au Porphyrio Di TE Peul-être élaient- ce des ANotornis d’une espèce éteinte, comme le dit Schlegel. (3) + 59. Fulica (Palæolimnas ?) Newtoni A. M. Edw. Cette Foulque, qui était spéciale à l'île Maurice, n'existe plus depuis deux siècles au moins, car on ne trouve absolu- ment rien qui concerne un Oiseau de ce genre dans les manuscrits de Commerson, ni même dans la Relation du voyage de Leguat où il n'est question que de Poules d’eau. On ne la connaît que par les nombreux ossements qui ont été exhumés d’abord par sir Edouard Newton et ensuite par par M. Th. Sauzier et qui ont été étudiés les uns par M. A. Milne Edwards (4),les autres par sir Ed. Newton et le D' Gadow (5). D'après M. Milne Edwards elle atteignait (1) « Oyseaux bleus, gros comme des Solitaires, ont le plumage tout bleu, becq et les pieds faits comme pieds de Poulles ; ils ne volent point, mais ils courent extrêmement viste, tellement qu'un chien a peine d’en attraper à la course; ils sont très bons. » (Les voyages faits par le sieur D. B. aux îles Dauphine ou Madagascar et Bourbon ou Muscarenne, ès années 1669, 70, 71 et 12, etc. Paris, 1674.) Voyez à ce sujet Milne Edwards, Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1866, 5° série, t. VI, p. 42 et suiv. . (2) Proceed. Zool. Soc. Lond., 1865, p. 836; G. Hartlaub, Die Vôgel Mada- gascars, p. 346. (3) Ann. des Sc. nat., Zool., 1866, 5° série, t. VI, art. 3, p. 45. M. A. Milne Edwards à fait remarquer d’ailleurs que la description de Dubois n'est peut-être pas très exacte et que dans une lettre du P. de Brown, publiée _ dans les Lettres édifiantes en 1724, les Oiseaux bleus sont décrits comme des sortes de Ramiers (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1868, 5° série, t. X, p. 343). (4) Mémoire sur une espèce éteinte du genre Fulica qui habitait autrefois l'ile Maurice (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1867, 5e sÉe t. VIIL, p. 194 à 220 et pl. 10 et 13. | (5) E. Newton et H, Gadow, Trans. an à a Lond., 1893, t. XIII, 100 E. OUSTALET. la taille de la Foulque géante du Chili et montrait de grandes affinités avec une Foulque éteinte des îles Cha- tham, le Palæolimnas chathamensis Forbes, sans pouvoir cependant, comme le pensait M. Forbes (1), être rangée dans la même espèce (2). Suivant le même auteur elle n'était probablement pas confinée dans l’île Maurice, mais se trouvait aussi à l’île Bourbon et même à Madagascar où M. Georges Müller a trouvé un tibia presque exactement semblable à celui de la Fulica Newtoni de l’île Maurice. + 60. Leguatia gigantea Schl. Le Géant de Leguat que feu H. Schlegel a reconnu pour une sorte de Poule d’eau de taille gigantesque (3), n’existail plus à l’île Maurice longtemps avant l’arrivée de Commerson. Cetle espèce, au corps lourd, aux ailes courtes et par conséquent facile à capturer (4), a dû disparaître de l’île Maurice peu de temps après le départ de Leguat, c’est-à- dire à la fin du xvur° siècle. Elle devait être assez répandue au moment où les Hollandais abordèrent sur l’île de Cerné et je ne m'explique pas pourquoi il n’est fait mention d’un Oiseau aussi remarquable dans aucune des Relations des voyageurs des amiraux hollandais du xvr el du xvrr° sièele. Je comprends encore moins qu'on n'ait pas encore décou- vert d’ossements de Lequatia dans la Mare aux Songes ou dans d’autres gisements de l’île Maurice. Leguat dit avoir capluré un jour un Géant sur l'ile Rodri- oue. Etait-ce un individu égaré, jeté par le vent sur les côtes de Rodrigue, comme le suppose Leguat, ou n’était-ce pas le part. VII, n° 4, p. 292 et pl. XXXV, fig. 4 à 11; Ann. des Sc."nal., Zoo!., 1894, 7e série, t. XVIIL p. 233. (Trad. Sauzier.) (1) Ibis, 1893, p. 544. (2) A. Milne Edwards, Surles ressemblances qui existent entre la faune des iles Mascareignes et celles de certaines îles de l'océan Pacifique austral (Compte rendu des séances du 3° Congrès international de Zoologie, Leyde, 1896, p. 85, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1896, 8° série, t. II, p. 130). (3) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1866, 5° série, t. VI, art. 3, p. 32 et suiv., et pl. I, et Ibis, 1866, p. 146 à 168; Leguatia gigantea Shufeldt, Cent. Mag., 1886, p. 361 ; R. B. Sharpe, Cat. B. Brit. Mus., 1894, t. XXIII, p. 225. (4) Le voyage et les avantures de F. Leguat, Amsterdam, 1750, t. II, p.72, fig. | FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 101 dernier survivant d’une race autrefois largement répandue ? 61. Phœnicopterus roseus Barr. ? M. A. Milne Edwards à eu entre les mains un certain nombre d’ossements de Flammants provenant de l’île Mau- rice et parmi ces ossements il a {rouvé l'extrémité inférieure d'un métatarsien dénotant un Oiseau de la taille d’un Flam- mant ordinaire { Phænicopterus roseus où antiquorum.) 62. Phœnicopterus minor Geoff. Le Phænicopterus minor Geoff., la seule espèce de Flam- mant que l’on trouve à Madagascar (1), visite aussi l’île de la Réunion et l’île Maurice. En 1870 une bande d’une quin- zaine de Flammants séjourna pendant quelques Jours dans celte dernière île et la dépouille de l’un d’eux fut examinée par M. À. Milne Edwards qui la compara avec les ossements du même genre que lui avait envoyés sir Edouard Newlon. Cette comparaison lui révéla des différences de proportions assez considérables et 1l rapporta les ossements qu'il avait sous les yeux plutôt au PA. erythræus de l'Afrique australe qu'au PA. minor (2). Toutelois il ne présenta cette détermi- nation qu'avec beaucoup de réserves, en raison des difficultés que présente la séparation des diverses espèces de Phéni- copières de l'Ancien Continent, surtout quand on ne peutse servir des caractères fournis par le bec. Ces réserves étaient d'autant plus justifiées que la taille est sujette à certaines variations dans une même espèce de Phœnicopterus et que les auteurs n’ont pas toujours été d'accord au sujet du Ph. erythræus, pris ici comme terme de comparaison. Ainsi le PA. erythræus de G. Hartlaub (3) n’est pas le même que le PA. erythræus de J. et E. Verreaux; le premier n'est autre chose que le PA. minor Geoff. et le second est (4) Le Flamant, F. Cauche, Relation véritable et curieuse de l’isle de Mada- gascar, 1651, p. 130; Sambe, Flacourt, Histoire de la grande isle de Madagas- car, 1661, p. 164; Phœnicopterus minor, Geoffroy, Bull. Sc. Soc. philomath., 1798, t. I, part. IL, n° 13, p. 98 et pl.; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p.613, pl. 262 et 263. (2) Ann. des Sc. natur., Zoolog., 5° série, 14874, t. XIX, art. 3, p. 26. (3) Die Vôgel Madagascars, p. 355. 102 E. OUSTALET. considéré maintenant comme une simple race du PA. roseus ou même complètement identifié à ce dernier (1). Quoi qu'il en soit les Flammants, à quelque espèce qu'ils apparlinssent, devaient être jadis assez communs à l’île Mau- rice, et M. Clark, comme sir Edouard Newton, a pu recueillir un assez grand nombre d’ossements de ces Oiseaux que l'amiral Jacob van Heemskerk eut d’ailleurs l’occasion d’ob- server, au milieu du siècle dernier, à côté des Dodos, des Oies, des Canards, etc... (2). Maïs on peut supposer qu’à partir de l’élablissement des Hollandais dans ces parages les Phénicoptères abandonnèrent graduellement l’île Mau- rice où ils ne se montrent plus que de rare en rare. Leguat, qui les connaissait bien, sinon de vue, au moins de réputa- tion, ne les cite pas au nombre des animaux de Maurice et niles manuscrits de Commerson ni ceux de Desjardins ne renferment aucun renseignement sur une espèce quelconque de Phénicoptère. | + 63. Sarcidiornis mauritianus Newt. et Gad. M. Th. Sauzier a recueilli dans le gisement de la Mare aux Songes un métacarpien et un fragment de bassin d’un Anatidé que MM. Newton et Gadow ont rapporté à une espèce éleinte du genre Sarcidiornis, le S. mauritianus (3). Cette espèce, de taille plus faible que le S. melanonotus typique de l'Inde et que la variété (S. africanus) qui est largement répandue dans l’Afrique tropicale el qui se trouve aussi communément à Madagascar, paraît avoir été propre à l’île Maurice où l’on ne rencontre plus, à l’époque actuelle, aucun Oiseau de ce genre. On peut même supposer que le Sarcidiornis mauritianus avait déjà cessé d'assister au milieu du xvi° siècle, car Com- merson, qui donne une description latine très détaillée des (1) T.. Salvadori, Cat. B. Brit. Mus., 1895, t. XXVII, p. 9 et 18. (2) Voyez ci-dessus, p. 20. (3) On additional Bunes of the Dodo and other Birds of Mauritius (Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XIII, part. VII, n°1, p. 290 et pl. XXXIV, fig. 1 et 2, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1894, 7e série, t. XVIII, p. 230. (Trad. Sau- zier.) | FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNÉES. 103 Sarcidiornis de Madagascar, accompagnant un excellent dessin de Jossigny, ne fait aucune allusion à la présence de ce Sarcidiornis ou de l’un de ses congénères à l’île Maurice. Commerson désignait le Sarcidiornis sous le nom d'Anas ferus madagascariensis el le caractérisait en ces termes : « Anas rostro superne ad basin carinato, capite et collo ex albo et nigro variegatis, dorso nigro cœrulescente, ventre sordide ex albido ». Après avoir décrit minutieusement la coloration du plumage de l’Oiseau, la forme du bec, surmonté d’une caroncule assez molle, il ajoute que ce Canard se défend vigoureusement avec son bec et mord cruellement, qu'il a les mœurs des autres Canards et que sa chair est délicate et savoureuse. Le spécimen dont il donne Ia des- criplion a été rapporté, dit-il, de Madagascar au milieu du mois de novembre 1769. Or, c’est précisément en 1769 que Pennant a fait connaître dans son /ndian Zoology Y'Anser melanotus, la forme indienne du Sarcidiornis, et c’est seule- ment en 1840 que Sganzin a décrit la forme malgache sous le nom de Canard à bosse. Siles manuscrits et les dessins de Commerson eussent élé utilisés dès leur arrivée en France, en 1774, cetle forme malgache eût été connue des natura- listes soixante ans plus tôt, presque en même temps que la forme indienne. + 64. Anser sp. Dans les divers passages que j'ai cités plus haut des rela- tions des voyages de J. C. van Neck, de Willem van West- Zanen, de Cornélius Matelief et de J. van der Hagen, il est fait mention d’Otes sauvages qui vivaient à l’île Maurice au moment de l’arrivée des Hollandais. Ces Oies sauvages élaient même très communes au milieu du xvrr siècle, puis- que J. Desjardins a trouvé dans le Memorandums concerning India, de 3. Marshall (1668), à l'article Wauritius, les lignes suivantes : « They are many Geese; the halfe of their wings towards the end are black and the other halfe white; they are not large, but fat and good. Plenty of Ducks (1) ». (4) «Il y a là (à Maurice) beaucoup d'Oies ; elles ont la moilié terminale 104 E. OUSTALETT. Précisément à la même époque, des Oiseaux du même genre, et peut-être de la même espèce, se trouvaient égale- ment à l'ile Bourbon, puisqu'on lit dans les Voyages de Dubois, au paragraphe qui traite des Oiseaux de cette île : « Oyes sauvages. Un peu plus petites que les Oyes d'Europe; elles ont le plumage de même et le bec et les pieds rouges; elles sont irès bonnes (1). » Du temps de Leguat ces Oies étaient déjà devenues plus rares, au moins à l’île Maurice, car ce voyageur s'exprime ainsi (2) : « L’isle étoit autrefois toute remplie d'Oies et de Canards sauvages. » Au premier abord j'avais été tenté de croire que les Anatidés mentionnés par les divers voyageurs dont je viens de rappeler les noms étaient non de véritables Oies, mais des Sarcidiornis de l'espèce signalée par MM. Newton et Gadow (Sarcidiornis mauritianus), mais plusieurs raisons m’empê- chent de m'arrêter à cette hypothèse. Si l’on admet, en effet, que l’Oiseau dont les restes ont élé exhumés de la Mare aux Songes était un vrai Sarcidiornis, voisin de ceux de l'Inde, de Madagascar et du continent africain, il est naturel d'admettre aussi qu'il avait la même physionomie et à peu près la même livrée que ses congénères, qu'il avait le bec surmonté d'une protubérance, très développée chez les mâles en amour, le manteau noir, le bec et les paltes noirs ou gris foncé. Or aucun voyageur ne fait la moin- dre allusion au caractère pourtant si frappant d'une caroncule sur le bec des Oies de l’île Maurice ou de l’île Bourbon ; l’un d’eux les compare même à des Oies d'Europe et nous apprend qu'elles avaient le bec et les pieds rouges ; de l’aile noire et l’autre moitié blanche; elles ne sont pas grandes, mais elles sont grasses et leur chair est bonne. Il y a aussi beaucoup de Ca- nards. » (1) Les voyages faits par le sieur D. B. aux îles Dauphine ou Madagascar et Bourbon ou Mascarenne, ès années 1669, 70, 71, 72. Paris, 1674. Voyez, pour ce passage, l'extrait publié par M. A. Milne Edwards dans les Ann. des Sc. natur., Zoolog., 5° série, t. VI, p. 43, note. | (2) Le voyage et les avantures de F. Leguat, Amsterdam, 1750, t. I, p. 72. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 105 un autre qu'elles avaient les ailes mi-parties noires el blan- ches, ce qui n’est pas le fait des Sarcidiornis. Quant à ce que dit Milbert (1) en parlant des Oies de l’île Maurice : « On remarque parmi leurs diverses espèces, celles du Cap de Bonne-Espérance », il n’y a pas lieu d'en tenir compte puisque nous ne savons pas s’ils’agit d'Oiseaux sauvages ou d'Oiseaux domestiques. + 65. Anas Theodori Newi. et Gad. Un fragment de sternum, une paire de coracoïdes, huit humérus et une paire de tarso-mélatarsiens, trouvés par M. Th. Sauzier à la Mare aux Songes, ont été attribués par MM. Newton et Gadow (2) à une espèce de Canard, beaucoup plus petite que l'Anas Melleri de Madagascar et plutôt com- parable à l’Anas ou Mareca punctata d'Australie et de Nou- velle-Calédonie. Cette espèce était déjà complètement éteinte il y a une cinquantaine d'années et peut-être bien avant, car à propos de ce qu'avait avancé Milbert en écrivant (3): « Canards. Is sont sauvages, nombreux et variés. Celui des Manilles est très gros et bon à manger. Ces oiseaux détrui- sent une grande quantité d'Insectes, tels que scorpions, sca- rabées, etc. », J. Desjardins fait celte remarque : « C’est une erreur de dire que nos Canards sont sauvages, nombreux et variés, car ils vivent tous en domesticité el leur espèce est peu variée. » Mais les extraits que J'ai donnés ci-dessus des relations de quelques voyageurs hollandais et les mots plenty of Ducks, inclus dans le passage cité des Mémoran- dums de Marshall prouvent qu’il n’en était pas de même au xvir° siècle; alors les Canards, appartenant sans doute à l’es- pèce désignée par MM. Newton et Gadow sous le nom d’Anas Theodori, étaient fortnombreux ; mais comme ils constituaient un excellent gibier, ils ne tardèrent pas à parlager le sort des Drontes, des Poules d’eau et des Colombes hérissées. (4) Voyage pittoresque à l'ile de France, t. IT, p. 255. (2) Trans. Zool. Soc. London, 1893, t. XIII, part. VII, n° 4, p. 291 et pl. XXXIV, fig. 11 à 17, et Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1894,7 série, EVIL, p- 232 (Trad. RE (3) Op. cit., t.. Il, p. 255. 106 E. OUSTALET. * 66. Anas Melleri Sclat. D'après M. Newton cette espèce, introduite de Madagas- car à l’île Maurice, s’y est beaucoup mullipliée. M. Slater rapporte qu'elle niche communément sur les bords de la Mare aux Vacoas (1). Son introduction ne remonte cepen- dant pas à plus de cinquante ans, puisque, comme je le disais tout à l'heure, J. Desjardins dit formellement que, de son temps, il n’y avait point de Canards sauvages à l’île Mau- rICe! * 67. Anas boschas L. * 68. Anas erythrorhyncha Gm. “ 69. GCairina moschata L. | Ces trois espèces ne se rencontrent à l’île Maurice qu’à l'état domestique. La première a été importée d'Europe, la seconde de Madagascar, la troisième, dit-on, des Philippi- nes, où elle avait été introduite par les Espagnols, soit d'Europe, soit directement d'Amérique, sa véritable patrie. A l’île de France le Canard musqué élait connu sous le nom de Canard-Manille du temps de J. Desjardins qui décrit les produits des croisements de celte espèce avec le Canard do- mestique ordinaire, vulgairement appelé Patouwllard. Il existait déjà à l’île Maurice et à l’île Bourbon en 1781 (2). * 70. Dendrocygna viduta L. | * 71. Dendrocygna major Jud. D'après sir Édouard Newton, ces deux espèces, communes sur les côtes de Madagascar, ont élé introduites à l’île Maurice, où elles vivent, la première en partie à l’état sau- vage, en partie en domesticité, la seconde complètement en domesticité (3). + 12. Podiceps sp. inc. | M. Th. Sauzier a recueilli dans le gisement de la Mare aux Songes le cubitus d’un Grèbe qui, d’après MM. Newton (4) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, etc., p. 361 (2) Le Gentil, Voyages dans les mers de l'Inde, in-8°, 1781. (Cité par J. Des- jardins, notes manuscriles.) (3) Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 359 et 360. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 107 et Gadow (1), aurait été de taille plus forte que les Podiceps minor, Pelzelni et philippensis, de taille plus faible que le P. cristatus, et qui appartenait probablement à une race insulaire du Podiceps auritus. Celle race n'existe plus à l’île Maurice et je n'ai pu recueillir à son égard aucun renseigne- ment dans les récits des anciens voyageurs ou dans les manuscrits de Commerson et de J. Desjardins. 73. Puffinus chlororhynchus Less. 74. Puffinus obscurus Gm. Ces deux espèces de Puffins se trouvent sur les côtes de Madagascar, de l’île de la Réunion, de l’île Maurice, de l’île Rodrigue et des Seychelles (2). La première est désignée vul- gairement sous le nom de Petit Fou ou de Fouquet, la se- conde sous le même nom ou sous celui de Baleiner. Je crois que c’est au Puffinus chlororhynchus que se rapporte ce que l’auteur de la Relation de l'ile Rodrique dit du Fouquet, Oi- seau qui a le bec crochu, comme la Frégate, et qui est de même couleur que le Fo/ (assimilé par M. Milne Edwards (3) à la Pterodroma aterrima), mais un peu plus petit. D’après cet auteur les Fouquets nichaient en grand nombre sur les îlots voisins de l’île Rodrigue et s’y trouvaient parfois en compagnie des Fols ou des Équerets. Un de ces îlots avait même reçu, pour ce motif, le nom d'#/e aux Fols et aux Fouquets. 75. Ossifraga gigantea Gm. J. Desjardins nous a laissé la description manuscrite sui- vante d’un très gros individu de cefle espèce, tué au bord de la mer, à Flacq (île Maurice) après un coup de vent : « Tête et cou blanchâtlres avec quelques légères taches d'un brun noirâlre sur l’extrémilé des plumes. Ces taches deviennent plus considérables et occupent plus d'espace à mesure qu’elles approchent du dos où le brun domine. (1) Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XITT, part. VIT, n° 1, p. 289, et Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1894, 7° série, t. XVIIT, p. 228. (Trad. Th. Sauzier.) (2) E. Newton, Ibis, 1861, p. 361; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 369 et 370; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 191. (3) Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1875, 6e série, t. IL, art. 4, p. 9. 108 E. OUSTALET. Cette couleur brune est aussi très forte sur les ailes et un peu plus pâle sur la queue qui est très courte ; les ailes la dé- passeni un peu. « Les parties inférieures sont comme tachetées de brun roux clair sur un fond blanc ; c'est toujours la partie posté- rieure des plumes qui offre cette nuance qui se fond insensi- blement. « Le bord supérieur des ailes est blanchâtre. « Les grandes pennes alaires ont la moitié externe des plumes brune et la moitié qui avoisine le corps ou l’axe de la plume blanchâtre. « La seconde est la plus longue, puis la troisième et la quatrième ; la première et la cinquième sont égales. « Un ongle assez fort, servant de pouce, se fait remarquer à peu de distance des autres doigts. « Le bec, extrêmement fort, est remarquable par la protu- bérance qui forme les deux tubes de ses narines, lesquelles vont au delà du milieu du bec. « Ce bec est de couleur gris fauve, avec une légère nuance brune sur le bord de la mandibule supérieure. « Bec 3 pouces 1/2 (1). « Têle et cou 10 pouces 1/2 (2). « Doigt du milieu 5 pouces 1/2 (3). « Envergure 6 pieds (4). « Longueur totale 3 pieds (5). » Cet Oiseau, dont la dépouille, gardée par M. Desjardins dans une galerie ouverte, n’avait pas perdu, au bout de plu- sieurs années, son odeur pénélrante et désagréable, était certainement un Pétrel géant, un Ossi/raga gigantea. L’es- pèce n'avait, je crois, pas encore été signalée à l’île Maurice, mais on savait déjà qu’elle fréquentait les parages des îles Mascareignes et qu'il existait même au Musée de Saint- FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 109 Denis, un Pétrel géant pris sur les côtes de l’île de la Réu- nion. 76. Prion turtur Sol. | M. G. Hartlaub cite un exemplaire de cette espèce venant de Maurice et faisant partie de la collection Newton (i). 71. Diomedea fuliginosa Gm. Le 18 mai 1829, Julien Desjardins étant au Grand-Port, chez M. Virieu, rencontra sur le sable, à la Pointe du Bam- bou, un Albatros mourant. Depuis quelques jours il régnait nne forte brise du sud-est et l'animal, peut-être déjà malade, avait été jeté à la côte. En le vidant, J. Desjardins trouva l'estomac rempli d'une multitude de pelits Ascarides d'un pouce de long, de couleur pâle, nuancés çà et là de rougeä- tre; il trouva aussi deux mandibules et deux cristallins de _Poulpe. Voici la description que Desjardins donne de l’Oiseau : « Couleur : gris plus ou moins foncé selon les endroits que je vais décrire ; c’est la couleur totale de l'oiseau qui cepen- dant se renforce quelquefois et devient d’un noir assez foncé sur toute la tête, le bord supérieur de l'aile, les grandes plumes du fouet et les dessous des grandes plumes de la queue; mais cest la tête surtout qui est d'une couleur assez foncée et lirant même un peu sur le roux à la partie supé- rieure. Cette couleur brune diminue d’autant plus qu’on ap- proche du dos et du ventre et c’est le dos qui est la partie la plus claire de l'oiseau, c’est-à-dire d’un gris cendre. Cette partie contrasie assez agréablement avec les scapulaires des ailes qui sont très brunes. « À l'œil une ligne blanche de deux millimètres de largeur qui l’entoure presque, c’est-à-dire que la partie antérieure ne l’est pas, surtout à la paupière inférieure qui n’a que l'angle postérieur de blanc. Ces deux sourcils blancs con- trastent fort singulièrement avec l'iris et la pupille presque noirs de cet oiseau qui n’a que ces deux seuls points qui ne (4) Die Vôügel Madagascars, p. 377. 110 E. OUSTALET. soient pas gris ou noirs. Il faut aussi remarquer que le corps ou la parlie solide des grandes plumes des ailes est irès blanc, ce qui est fort joli lorsqu'on voit l'oiseau voler de près. La queue est en pointe arrondie sur les côlés. Le bec est noir ; les pattes sont d’un brun roux. » Cette description dont je n’ai retranché que quelques dé- tails oiseux sur la conformation des pattes, et qui est accom- pagnée d'un croquis au trait représentant la tête et le bee, montre clairement qu'il ne s’agit pas ici d’un Albatros chlo- rorhynque, mais d’un Albatros fuligineux. Cependant c'est le Diomedea chlororhyncha qui a toujours été signalé, avec le D. melanophrys, comme fréquentant les mers au sud de Ma- dagascar et comme s’égarant parfois sur les côtes des îles Mascareignes (1). Le Diomedea fuliginosa à toutefois des stations de reproduction sur l’île Saint-Paul et sur l’île Ker- guelen et l’on comprend que quelques individus puissent ac- cidentellement être transportés, en suivant le courant équa- torial du sud, jusque dans les parages de l’île Maurice et de l'île Rodrigue (2). La même remarque peut s'appliquer à l'Ossifraga gigantea (3). J. Desjardins rapporte qu'il possédait dans sa collection un bec d’Albatros qui avait dû appartenir également à un Diomedea fuliginosa et qui avait été trouvé sur le rivage des Quatre-Cocos (Flacq) en 1821. Il ajoute que des Albairos de cette espèce (?) viennent souvent voler à la surface de là mer et passent très près des bâliments caboteurs ; mais qu'on ne les a jamais observés communément sur les côtes de l’île de France quoiqu'il soit probable, dit-il, que ces Oiseaux se posent sur l’îilot des Rochers à l'entrée de la Grande- Passe. (1) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 378; À. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. nalur., phys. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 668 et DOS. LL" (2) A. Milne Edwards, Recherches sur la faune des régions australes (Ann. des Sc, natur., Zoolog., 1881, 6° série, t. XII, art. 7 et carte 2. (3) A. Milne Edwards, Recherches sur la faune des régions australes (Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1882, 6° série, t. XIIE, art. 4 et carte 4. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 111 718. Sterna Dougalli Mont. C'est certainement à celle espèce qui, d’après Pollen, forme des colonies nombreuses sur les rochers des Car- gados, au nord de Maurice et de Rodrigue (1), qu’il faut rapporter l’Hirondelle de mer que J. Desjardins attri- bue à l'espèce dite Pierre-Garin (Sterna hirundo) et dont il donne, dans ses notes manuscrites, la description sui- van(e : « Son bec est droit ; une pelite protubérance à la mandi- bule inférieure vers le milieu ; les pattes courtes ; le port très délicat. « Couleurs : Bec noir, rougeâtre à la base. Paltes d’un beau rouge. Parties supérieures de la tête et du cou noir foncé ; parties inférieures blanc rosé très pâle. Du gris cendré clair au dos et à la partie supérieure des ailes el de la queue. Grandes pennes des ailes bordées de brun extérieurement. Une tache noire à l’extrémité de la troisième qui a néan- moins le bord externe blanc. Les deux rectrices externes très déliées et dépassant les autres d'environ deux pouces, et plus longues aussi que les autres. « Longueur de la queue 6 pouces 1/2 (2). Gr du bec { pouce 1/2 (3). Co — de l'œil à l’anus 5 pouces (#4). » Cette Hirondelle de mer avait été donnée à M. J. Desjar- dins par Ch. Telfair qui l'avait reçue de Bel-Ombre, quartier de la Savane (île Maurice). La Sterna Dougalli a été observée également, du reste, à l’île Maurice par sir Edouard Newton (5), à l’île Rodrigue par Le Rév. H.H. Slater qui en a rapporté un exemplaire au (1) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 386 (sous le nom de Sterna Doug lasti). (2) 0,176. (3) 0,041. (4) 0,135. (5) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p.386; E. LS Trans. Norf. Soc., 1888, t. IV, p. 553. 112 E. OUSTALET.,. British Museum (1) et à Madagascar par sir Edouard Newton et par M. Grandidier (2). 19. Sterna anæstheta Gm. Le Muséum d'histoire naturelle possède un exemplaire de cette espèce qui vient de l’île Maurice et qui est le type de la Sterna antarctica de Lesson (3). La Sterna panayensis se trouve aussi sur la côte nord-ouest de Madagascar, aux Sey- chelles, à l’île de la Réunion et à l'île Rodrigue (4). D'après M. Milne Edwards (5) la Sterna anæstheta serait l'Équeret dont il est question dans la Æe/ation de l'ile Ro- drique . | 80. Sterna fuliginosa Gm. Le Musée de Leyde et le British Museum renferment des spécimens, pris à l’île Maurice, de cette Sterne qui a été rencontrée aussi à l’île Rodrigue, aux Seychelles, ete. (6). 81. Gygis alba Sparrm. La Gygis alba dont quelques individus isolés se rencon- trent sur les côtes de Madagascar el de l’île de la Réunion, est commune aux Seychelles, sur l'île d'Aldabra, aux Car- gados, à Mayotte et forme, sur les îlots coralliens voisins des côtes de l’île Rodrigue, des colonies que sir Ë. Newlon a eu l’occasion d'observer: elle se rencontre aussi sur les côtes de l’île Maurice, mais elle n'y niche point (7). Je crois que c'est à celle espèce que l’auteur de la Relation de l'ile Rodrigue fait allusion dans le passage suivant, cité par M. Milne Ed- (1) H. Saunders, Cat. B. Brit. Mus., 1876, t. XXV, p. 10 et 74. (2) E. Newton, Ibis, 1863, p. 460; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et molit. de Madagascar, Oiseaux, p. 657. (3) Traité d'Ornithologie, 1831, p. 621 (Cuvier, ms.). (£) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 388; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 194; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys. natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 658; H. Saunders, Cat. B. Brit. Mus., 1896, t. XXV, p. 101 et 104. (5) Ann. Sc. nat., Zool., 1875, 6° série, t. IL, art. 4, p. 9. (6) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 388; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 194. (7) E. Newton, Ibis, 1867, p. 343; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 200; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 389. : FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. Mug wards (1): «Il y a un autre pelit Oiseau, qui est de la gros- seur d’une Huppe, qui est toul blanc et Le bec noir ; ils sont aussi sur les îlots au sud de l’île: ceux-là sont en petit nombre. » 82. Anous stolidus L. J'ai trouvé dans la liasse Commerson trois dessins, deux à la mine de plomb et un à la plume, mais tous trois de Jossi- gny, représentant l’Anous stolidus exactement de grandeur naturelle. Les deux dessins à la mine de plomb portent la même légende, de la main de Commerson : « Larus fusco-nigricans, syncipite (2) incano, lunula oculos subcingens alba, apicibus alarum caudaque adæ- quatis. Nobis. Sterna stolida Linn. Syst., X, p. 137. » Sur l’un on lit en outre : « Larus 15 Brisson, Ornith., t. VI, p. 199 » et sur l’autre : « Petit Fou, Cordonnier, Diablotin, _ Mouette cendrée, nautorum vulgo. » Le troisième dessin est accompagné de plusieurs variantes de la même diagnose et de quelques indications bibliographiques et synonymiques : « Larus fusco-niger, syncipile incano, semicirculo oculis subjecto albo, alis et cauda adæquatis. « Larus e fusco nigricans, pileo cinerascente, lineola semi circulari oculos subcinginte alba; alarum caudæque apicibus adæquatis. Nobis. « Larus fuscus, etc., et Gavia fusca Brisson, Ornith., t. VI, p. 199, tab. 18, fig. 2. Mouette cendrée, &4id. « Sterna cauda cuniformi, corpore nigro, fronte albicante, Linn. Syst. Nat., édit. 10, p. 137. « Hirundo marina minor capile albo, Sloane, Hist. Jam. 8 at. « Passer stultus authorum (3) vulgo. « Gallice Petit Fou, Mouette cendrée, Diablotin et Cor- donner Nautorum vulgo. « Annotaliones : (1) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6° série, 1. ET, art. 4, p 10. (2) Sic. (3) Sic. | | ANN. SC. NAT. ZOOL. Il, 8 114 E, OUSTALET. « Figura hujusce avis quam dedit Brissonius licet nitida peccalt : | «1° In eo quod avem nostram magnitudine naturali mi- norem licet mediocrem representet ; « 2° Quod rostrum juste nimis abbreviatum el apices ala- rum cauda curtiores adpingat et describat. « De cætero charactero quem speciei huicce adscribit Brissonius per pleonasmum Bis. » Dans la même liasse il existe une quatrième figure, en couleurs, représentant également un Anous, mais un Anous d'une autre espèce, de taille plus faible et à bec plus grêle qui me paraît êlre, sans aucun doute, l’Anous leucocapillus Gould ou À . melanogenys Gray. Or cette figure portant comme légende : « Le Fouquet pris en mer », est l'original de la planche de Sonnerat (Voyage à la Nouvelle-Guinée, pl. LXXXV, p. 125) représentant « le petit Fouquet des Phi- lippines ». Cette espèce de Sonneral ne doit donc pas, comme l'ont indiqué MM. Finsch et Hartlaub (1), avec un point de doute, et comme l’a admis H. Saunders (2), être placée en synonymie d’Anous stolidus, mais doit être rapportée à À. leu- cocapillus (3). Cette reclification faile, grâce aux documents laissés par Commerson, revenons à l'A. stolidus. Je n’hésite pas à attri- buer à cette espèce les Ferrets dont parle Leguat et qui ont tant intrigué les naluralistes, à commencer par Bufion. Après avoir rappelé que le rocher, sur lequel il avait été exilé avec ses compagnons par le gouverneur de Maurice, était situé entre deux petites îles où l’on pouvait aller à ma- rée basse, quoique assez difficilement, et que l’un de ces îlots offrait quelques arbres, entre autres des Lataniers, tandis que l’autre était entièrement découvert, Leguat ajoute (4) : | (1) Beitrag. zur Fauna Centralpolynesiens, 1867, p. 235. (2) Cat. B. Brit. Mus., 1896, t. XXV, p. 137. (3) Saunders, Cat. B. Brit. Mus., t. XXV, p. 145 (Micranous leucoca- pillus). (4) Le voyage et les avantures de F. Leguat, t. Il, p. 44 et 45. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 1145 « C’est tous les soirs le rendez-vous général de quantité de certains oiseaux de mer qui sont de la grosseur d’un pigeon et à peu près semblables ; ils pondent leurs œufs sur le sable tout proche l’un de l’autre, et ils ne font qu'un œuf à chaque ponte. Si on leur enlève cet œuf, ils s’aparient de nouveau, et le remplacent d’un autre jusqu’à trois fois. Ces oiseaux, que nous appelions des Ferrets, parce que quelqu'un de nous croyoit les avoir entendu nommer ainsi ailleurs, ont encore ceci de particulier, que si on prend quelques-uns de leurs petits, les Pères et Mères des autres abandonnent entière- ment les leurs dans tout cet endroit là. Si l’on garde ces pe- tits en vie, et qu’on les expose à la vûe de Pères et Mères, ceux-c1 viennent voler tout autour, mais ils ne leur aportent jamais rien; et quoi qu'aparemment sensibles aux cris de ces pauvres petits animaux affamez, qui leur demandent inces- samment à manger, ils les laissent néanmoins périr sans au- cun secours. La première fois que nous allâmes dans cette isle nous apportâämes trois ou quatre douzaines de ces jeunes oiseaux avec quelques vieux. Comme les premiers étaient fort gras et avaient bonne mine, nous en fîimes rôtir et nous les trouvâmes à peu près du goût de la beccassine, comme ils en ont aussi la couleur; mais ils nous firent beaucoup de mal, et nous ne fûmes pas tentez d’en goûter depuis, les vieux ont un goût fort et sont très mauvais. Étant retournez en cette isle quelques jours après que nous eûmes enlevé ces jeunes oiseaux, dont je viens de parler, nous trouvâmes que tous les petits des autres, qui élaient en fort grand nombre, avoient été abandonnez de leurs Pères et Mères ; les uns déjà morts, les autres secs comme du bois et mourans. Si la chair de ce gibier étoit indigeste et malsaine, la délicatesse de leurs œufs nous récompensoit bien; J'ai calculé que pendant notre séjour nous en avons mangé pour le moins douze mille, et nous n’en avons Jamais été incommodez. Ces œufs sont tache- tez de gris et plus gros que des œufs de pigeon. Il arrive jus- tement que les irois mois que ces oiseaux pondent sont le temps que les cerfs sont en rut. De sorte que comme la chair 116 E. OUSTALET. de ces animaux, qui faisoit nôtre nourriture la plus ordi- naire, est d'une puanteur insuportable, et mal saine en cette saison là, nous nous dédommagions sur nos œufs, surtout quand notre pêche n'étoit pas heureuse. Quoique plusieurs de ces œufs fussent prêts à éclore, nous mêlions tout dans la fricassée, et nous croquions tout de bon apétit, encore qu'un pareil ragoût fasse horreur à ceux dont la cuisine se gouverne par la mode, et qui n'aiment ou n’aiment pas les choses, selon le caprice de la coutume et du préjugé. » Leguat avait déjà observé ces Ferrets, et les Plutons dont il parle ensuite, à l’île Rodrigue où, comme sur le rocher voi- sin de Maurice, ils couvaient dans le sable, sur les mêmes ilots que les Pigeons. J. Desjardins qui a reproduit dans ses notes le passage de Leguat que je viens de citer pensait que les Ferrets élaient des Cordonniers qu’il appelle aussi Larus cataractes et qui, dit-il, sont des Palmipèdes communs sur les côtes de l'île de France et des îles voisines, où ils pondent des œufs mouchetés de noir et de brun, un peu plus gros que des œufs de Pigeon. Cette opinion ne serait pas soutenable si Desjardins avait réellement entendu comparer le Ferret, Oiseau de la taille d’un Pigeon, au véritable Larus cataractes, c'est-à-dire au Siercoraire (Lestris catarrhactes L.), Oiseau qui est deux ou trois fois plus gros qu’un Pigeon et qui d’ail- leurs est propre à l'hémisphère seplentrional, ou même au Lestris antarctica Less. (L. catarrhactes À. et G.) qui est à peu près de même grosseur que le précédent, mais qui se ren- contre dans l'hémisphère austral et jusque dans les parages de Madagascar et des Comores (1). Toutefois, si l’on tient compile de ce fait que le nom vulgaire de Cordonnier est ap- pliqué, comme je l’ai dit ailleurs (2), aux îles Seychelles à l’'Anous tenuirostris, et qu'il est indiqué par Commerson parmi les désignations vulgaires de l’Anous stohdus ou Noddi mais, on voit que Desjardins a dû commettre une er- (1) H. Saunders, Cat. B. Brit. Mus., 1896, t. XXV, p. 315 et 319. (2) Bull. de la Soc. philomath. de Paris, 1878, p. 198. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 117 reur relativement au nom latin de Cordonnier et qu’en réa- lité son opinion est précisément celle que je soutiens. C. P. Claret Fleurieu, dans l’Æistoire naturelle du Voyage autour du Monde d'Étienne Marchand (1), a cru aussi recon- naître des Hirondelles de mer dans les Ferrets de Leguat, mais il n’a pu en déterminer l’espèce que, dit-il, il serait doublement utile de connaître, par rapport à la bonté des œufs de ces Oiseaux el à la mauvaise qualité de leur chair. -Cette phrase est copiée de Buffon qui avait considéré (2) les Ferrels comme des Hirondelles de mer, d'espèce indéter- minée. L'assimilation que je viens de faire du Ferret au Noddi niais (Anous stolidus) se justifie par les considérations sui- vantes : 1° Le Noddi niais est de la taille d'un Pigeon ordinaire ; 2° Ses jeunes portent, au lieu de la livrée noirâtre et blanche de l'adulte, une livrée tachetée de blanc et de jau- nâtre sur le dos et les ailes, livrée qui, à la rigueur, peut êlre comparée à celle d’une Bécassine ; 3° [1 pond des œufs plus gros que ceux d’un Pigeon et ces œufs sont tachetés sinon de gris franc, au moins de gris blanchâtre et de brun rougeâtre sur un fond crème; 4° Si, lorsque les circonstances le permettent, il niche sur les branches basses des arbres, il niche aussi, sur les îlots dénudés, immédiatement sur le rocher ou sur le sable (3) ; 5° Les nids sont très rapprochés, el chacun d'eux ne contient qu'un seul œuf ; 6° Ces œufs sont comestibles et très recherchés sur divers points du globe (4); (1) Voyage autour du monde pendant les années 1790, 1791 et 1792, par Étienne Marchand, précédé d'une introduction historique, etc., par C. P. Cla- ret Fleurieu, de l’Institut national des Sciences el des Arts et du Bureau des Longitudes, in-4°, Paris, an VII, t. IIL, p. 164. (2) Histoire naturelle des Uiseaux. (3) Finsch et Hartlaub, Beitrag zur Fauna Centralpolynesiens, p. 237. (4) Notamment dans l'Amérique du Nord, d’après Audubon. 118 E. OUSTALET. 7° Le Noddi niais se nourrit de Mollusques et de Pois- sons el sa chair, comme celle de toutes les Hirondelles de mer, des Goélands et des Pétrels, est d’un goût désagréable ; 8° Le Noddi niais ou Noddi vulgaire se rencontre sur les côtes de Madagascar, aux Seychelles, aux Comores, à l’île Rodrigue et à l’île Maurice. Le Ferret de Leguat était donc, si je ne me trompe pas, identique à l’Oiseau dont Commerson nous a laissé la des- cription et qui, d’après lui, était connu des navigateurs sous les noms de Perit Fou, de Mouette cendrée, de Diablotin et de Co:donnier, et il appartenait au même genre que le Fou- quet de Sonnerat. En revanche ce Fouquet de Sonnerat n’était pas identique au Fouquet dont parle l’auteur de la Relation de l'ile Rodrique et qui, ayant le bec crochu comme la Frégate, était certainement un Puffin et, probablement, ainsi que je l’ai dit plus haut, la Pu/ffinus chlororhynchus. 83. Anous tenuirostris Tem. Le Noddi à bec grêle, qui fréquente aussiles parages des îles Mascareignes et de Madagascar (1), et dont le Muséum d'histoire naturelle de Paris possède un exemplaire tué sur les côtes de l’île Maurice, en 1807, par M. Delisse et désigné autrefois sous le nom d’Anous senex, a été certainement con- fondu par les anciens voyageurs avec le Noddi niais sous les noms de Ferret, de Fouquet, de Cordonnier, ele. 84. Phaeton candidus Briss. 85. Phaeton phœnicurus Gm. Dans les portefeuilles de Commerson il y a plusieurs des- sins et croquis de Jossigny qui ont élé exécutés probable- ment à l’île de France, et qui représentent les uns le Paille- en-queue à brins blancs, les autres le Paille-en-queue à brins rouges. Ceci concorde avec les renseignements que le vi- (1) Pollen et Van Dam, Recherches sur la faune de Madagascar, Mammi- fères et Oiseaux, par Schlegel et Pollen, 1868, p. 150 ; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 392; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 198; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 665 et pl. 290 À et 290 B ; H. Saunders, Cat. B. Brit. Mus., 1896, t. XXV. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 119 comte de Querhoent avait recueillis, en 1773 et 1774, sur les Oiseaux de l’île de France, et qu'il avait communiqués à Buffon. « Le Paille-en-queue à filets rouges, écrivait M. de Querhoent (4), niche dans cette île aussi bien que le Paille- en-queue commun ; le dernier dans les creux d'arbres de la grande île ; l’autre dans des trous des petits îlots du voisi- nage. On ne voit presque jamais le Paille-en-queue à filets rouges venir à la grande terre, et hors le temps des amours, le Paille-en-queue commun ne la fréquente aussi que rare- ment ; ils passent leur vie au large et ils viennent se reposer sur la petite île du Coin-de-Mire, qui est à deux lieues au vent de l’île de France, où se trouvent aussi beaucoup d’au- tres oiseaux de mer. C'est en septembre et octobre que j'ai trouvé des nids de Paille-en-queue; chacun ne contient que deux œufs d’un blanc jaunâtre marquelé de taches rousses ; on m'assure qu'il ne se trouve souvent qu'un œuf dans le nid du Paille-en-queue ; aussi aucune des espèces ou va- riétés du bel oiseau du tropique ne parait être nom- breuse. » Les observations du vicomte de Querhoent ont été con- firmées, il y a une trentaine d'années, par celles de sir Édouard Newton qui a trouvé les Phaétons à brins blancs (Phaeton candidus) très communs à l’île Maurice dans le quar- Hier de la Savane et surtout dans les bois de Curepipe, où de nombreux couples nichaient au milieu des touffes de Fou- gères épiphytes, dans les excavalions des troncs des vieux arbres. Au contraire, dit sir Édouard Newton, les Phaétons à brins rouges {Phaeton phænicurus) ne déposent jamais leurs œufs dans de semblables conditions. Les deux espèces ce- pendant nichent côte à côte dans des fentes de rocher à l'île Ronde, sur l’îlot Coin-de-Mire et à l'île Plate; mais dans ces colonies ce sont des Phaétons à brins rouges qui forment la grande majorité. Lorsque sir Édouard Newton visita l'ile Ronde, en 1864, au mois de novembre, les Phaétons à brins (1) Buffon, Hist. nat. des Oiseaux, t. VIIL, p. 357. 120 | EE. OUSTALET. rouges étaient en tram de couver ou d'élever leurs petits. Les-œufs de ces Oiseaux sont d’un blanc légèrement nuancé de violet et parsemés de taches d’un brun rouge ou violacé, plus ou moins nombreuses el plus ou moins rapprochées ; ils mesurent 0,675 sur 0,470, tandis que ceux des Phaétons à brins blancs n’ont que 0,052 sur 0,038 (1). Bernardin de Saint-Pierre (2), Grant (3), Quoy et Gai- mard (4), Lesson (5) et Milbert (6) ont également signalé l'existence à Maurice de deux espèces de Phaétons, dont l’un, le Phaeton phænicurus, est plus rare que l’autre. Ce Porn phœnicurus, d'après Pollen, serait désigné à l’ile de la Réunion sous le nom de Paille-en-queue de Rodrigue. Cependant, en tenant compte de ce que disent le vicomte de Querhoent et sir Édouard Newton des habitudes différentes des deux espèces, il me paraît évident que les Paille-en- queue qui, suivant Leguat, faisaient leurs nids sur les ar- bres à l’île Rodrigue n'étaient pas des Phaétons à -brins rouges, mais des Phaétons à brins blancs, « Le Paille-en- queue, dit Leguat (7) est tout blanc et a le bec assez fort. Il a une (8) plume à la queüe longue d’un pied et demi, d’où il a pris son nom. Ces oiseaux nous faisoient une plaisante guerre, ou plutôt ils faisoient la guerre à nos bonnets. Ils nous surprenoient par derrière et nous les enlevoient de dessus la tête. Et cela étoit si fréquent et si imporlun que nous élions obligez d’avoir toujours des bâtons pour nous (1) E. Newton, Ibis, 1861, p. 276 et 280 ; G. Hartlaub, Die Vôgel Madagas cars, p. 393 et 394. (2) Har monies de lu nature, t. IT, p. 210 et 276. (3) History of Mauritius, p. 65. (D'après Desjardins.\ (4 ÿ Remarques sur les Oiseaux pélagiens (Ann. des Sc. natur., 1824, t. V p. 1#3,et Voyage de l'Uranie, Zoolog., 1825, p. 159. (5) Distribution géographique de quelques Oiseaux marins observés Hans le voyage autour du monde de la corvette la Coquille (Ann. des Se. natur., Zoo, 1825, t. VI, p. 96). (6) Voyage pittoresque à l’île de France, t. IT, p. 19 et 258. (7) Le voyage et les avantures de F. Leguat, Amsterdam, 1750, t. I, . 106. : (8) Il y a en réalité deux brins à la queue; l'erreur de Leguat vient de ce que ces deux brins sont très rapprochés et un peu superposés. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 121 défendre d’eux. Nous les prévenions quelquefois, lorsque nous apercevions devant nous leur ombre, au moment qu'ils éloient prêts à faire leur coup. Nous n'avons jamais pu savoir de quel usage leur pouvoient être des bonnets, ni ce qu'ils ont fait de ceux qu'ils nous ont attrapez. » - C'est du reste, et ceci tranche la question, au Phaeton candidus que M. A. Milne Edwards a attribué (1) les nom- breux ossements de Paille-en-queue, trouvés à l’île Rodrigue, qui lui ont élé envoyés en communication par sir Édouard Newton (2). l Comme l'avait fort bien remarqué J. Desjardins et comme il l’a consigné dans ses notes, c’est par erreur que Laplace, dans la Relation du Voyage autour du Monde de la Favorite (3), a prétendu que les Phaétons à brins rouges et les Phaé- tons à brins blancs (4) avaient leurs domaines respectifs dont ils défendaient avec acharnement l'accès aux indivi- dus de l’autre espèce. Il y a également quelques inexacti- tudes dans la description que M. Ravelet donne du Phaéton à brins rouges dans une lettre datée de Port-Napoléon, le 25 juillet 1807, et adressée à M. Épidariste Colin, lettre qui se trouve dans les manuscrits de Desjardins. Cette lettre est relative à la présence du Phaelon phænicurus sur la petite île Coëlivi ou Coëtivy, qui est située à 225 kilomètres au sud des Seychelles et qui constilue actuellement une dé- pendance de l’île Maurice. M. Ravelel dit avoir trouvé sur cette île plus de deux mille Phaétons à brins rouges, qui nichaient au bord de la mer dans des trous creusés en gé- néral à la base d’un arbrisseau nommé Veloutier. Chaque (1) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 21. (2) Il est question, il est vrai, dans la Relation de Rodrigue (Ann. des Sc. nat., Zool., 1875, t. IL, art. 4, p. 9) de Paille-en-queue, les uns blancs et les autres d’un blanc roux, mais il s’agit ici, je crois, de deux états de plumage de la même espèce. CNE Ip. 150 et 151. (4) Laplace dit qu’à Bourbon et à l’île de France les Phaélons ont les pattes noires et à Rodrigue les pattes rouges, mais comme le fait observer Desjardins, il doit y avoir une faute d'impression dans ce passage, et au lieu de pattes il faut sans doute lire pailles. 122 E. OUSTALET. trou ne renfermait qu'un œuf ou un petit. L'incubation « du Paille-en-queue de Coëtivi, dit M. Ravelet, est de vingt-neuf à trente jours. Le mâle ne partage point le soin de l'incu- bation et la femelle ne quitte pas son œuf. Le mâle a soin de lui apporter du poisson, el lorsque le petit a deux ou trois jours le père et la mère vont lui chercher à manger alterna- üvement. » Le Muséum d'histoire nalurelle a recu successivement des spécimens de Phaeton candidus pris à l’île de la Réunion par Quoy et Gaimard (1820), par M. de Nivoy (1833) et par M. Laniz (1871) et de Phaeton phænicurus lués à ns car par Milius et par M. Grandidier. + 86. Plotus nanus Newt. et Gad. M. Th. Sauzier a recueilli dans le gisement de la Mare aux Songes l'humérus, le bassin et le tibia d’une espèce d'Anhinga que MM. Newton et Gadow ont étudiée et qu'ils ont proposé de désigner sous le nom de Plotus nanus (1). La taille de cet Oiseau le distingue de toutes les espèces connues jusqu'ici. Il est assez curieux de constater que l’An- hinga qui vivait jadis à l’île Maurice n'était ni le Plotus me- lanogaster que l’on trouve sur la côte nord-ouest de Mada- gascar et qui se rencontre aussi dans l'Inde et en Malaisie, ni le Plotus Levaillanti du continent africain. En tous cas le Plotus de l’île Maurice doit être éteint depuis plus de deux siècles, puisqu'il n’en est fait mention ni dans le Voyage de Leguat ni dans les relations des anciens navigateurs hollan- dais. Aucun dessin d'Anhinga n’existe dans les portefeuilies de Commerson. 87. Phalacrocorax africanus Gm.? Le petit Cormoran africain qui est commun à Madagas- car (2), n'a pas, à ma connaissance, élé signalé aux îles Mas- carelgnes; je crois cependant que c’est à cette espèce qu'il (1) Trans. Zool. Soc. Lond., 1893, t. XIII, ox VIE, na 1,"p-22608, el pl. XXXIV, fig. 1 à5, et Ann. des Sc. nat., Zoolog., 7° série, t. XVIII, HE 226. (2) A > Milne Edwards et A. Grandidier, op. cit., if: 685, et pl. 272 et 273 (Graculus africanus). FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 123 faut probablement rapporter les P/ulons qui nichaient sur l’ilot où Leguat et ses compagnons avaient été relégués par le gouverneur Diodati, au sud de l’île Maurice. Cela me pa- raît ressortir de la lecture du passage suivant du Voyage de F. Lequat : « Il venoit aussi sur notre rocher d’autres oiseaux que nous appelions Plutons, parce qu'ils sont tout noirs comme des Corbeaux. Ils en ont aussi la forme et la grosseur, mais le bec est plus long et crochu par le bout; le pied est un pied de Canard. Ces oiseaux demeurent six mois de l’année en mer sans qu'on les voie paroître, et les autres six mois, ceux du voisinage venoient les passer sur notre rocher. Ils ont le cri presque aussi fort que le mugissement d’un veau; et ils font un fort grand bruit la nuit; pendant le jour ils éloient fort tranquilles et si peu farouches qu’on leur prenoit leurs _ œufs sans qu'ils se remuassent. Ils pondent dans les trous du rocher, le plus avant qu'ils peuvent. Ces oiseaux sont fort gros, de fort mauvais goût, puants extrêmement, et très mal sains. « Quoique leurs œufs ne soient guère meilleurs que leur chair, nous ne laissions pas d'en manger dans la nécessité : ils sont blancs et aussi gros que ceux de nos poules. Quand on les leur avait ôtez, ils se retiraient dans leurs trous et se bal- taient les uns contre les aulres, jusqu à se meltre lout en sang (1). » Ce que dit Legüuat de la grosseur, de la coloration et du cri des Plutons convient bien à des Cormorans. Buffon avait, du reste, déjà fait cette assimilation dont l’exaclitude ne pourra être démontrée que par la découverte d’ossements de Phalacrocorazx dans les gisements récents de l’île Maurice. Ni Commerson ni Desjardins ne paraissent avoir eu connais- sance d’Oiseaux de ce genre. 88. Sula piscatrix L. Le Sula piscatrix où Fou blanc de Brisson niche sur les (4) Le voyage et les avantures de F. Leguat, Amsterdam, 1750, t. Il, p. 45 et 46. | 194 E. OUSTALET. pelits îlots voisins de Madagascar (1) et n’est pas rare aux Seychelles où M. Lantz a capturé, il y a une vingtaine d'années sur l’île Plate et sur l’île Petite-Sœur, quelques spécimens bien adultes qu'il a rapportés au Muséum (2); il se montre aussi dans les parages de Mayotte et de l’île de la Réunion et a même été observé sur Les côtes du Bengale, de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, à Haïti et à Cayenne ; mais, d’après M. A. Milne Edwards (3), son lieu d'élection paraît être l’île de France, d'où le Muséum a reçu, en 1837, un spéci- men envoyé par M. Delisse et où il a été observé antérieure- ment par Quoy et Gaimard, dans le cours du voyage de l’Uranie. Ces naturalistes toutefois l'ont confondu, à causedes teintes de son plumage, avec le Fou de Bassan (Suwla bassana), avec le Sula serrator d'Australie et avec le Sula capensis du Cap de Bonne-Espérance, qui sont pourtant de taille beau- coup plus forte (4). L'abbé Lacaille rapporte que de son temps les Fous étaient, avec les Fouquets (c’est-à-dire avec les Puffins), au nombre des Oiseaux les plus vulgaires de l’île de France. Desjardins note à son tour que les Fous sont très communs sur les petits îlots qui entourent l’île de France et dont l’un, situé vis-à-vis le Grand-Port, a même reçu le nom d’ile aux Fous. Is nicheni, dit-1l, dans des trous de rochers. Comme l’a démontré M. Milne Edwards (5) c'est encore au Sula piscatrix qu'appartenaient les Fous observés par Leguat sur l’île Rodrigue (6) el c’est probablement la même espèce que l’auteur anonyme de la Relation de l'ile Rodrique a dési- (4) G. Hartlaub, Die Vôgel Madagascars, p. 397; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., nat. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 695 (Sula piscator). (2) E. Oustalet, Bull. de la Soc. philomath., 1878, p. 202. re (3) Recherches sur la faune des régions australes (Ann. des Sc. nat., Zool., 1882, 6° série, t. XIII, art. 4, p. 36). (4) Voyage de l’Uranie, Zoologie, 1824, p.155, et Ann. des Sc. natur., 1825, t. V, p. 138 et 139. (5) Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 22 el PL, gt 51à bc. (6) Le voyage et les avantures de F. Leguat, 1750, t. I, p. 10&et suivantes. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. 125 gnée plus tard sous le nom de 7ra-tra (1) M. Milne Edwards a trouvé la preuve de l’exaclitude de cette assimilation dans la découverte qu'il a faite, d’un tarso-métatarsien de Suwla piscatrix au milieu des ossements d'oiseaux qui ont été exhu- més des terrains récents de l’île Rodrigue et qui lui ont été envoyés en communicalion par sir Édouard Newton (2). Il attribue au contraire, avec quelque réserve, au Sula capensis, qui fréquente les côtes occidentales et méridionales de l'Afrique, ce que l’auteur de la Relation susdite dit d’un autre Oiseau de mer, plus gros que le précédent, ayant le plumage tout blanc, à l'exception de quelques plumes des ailes et de la queue qui sont noires, Oiseau qu'ildésigne sous le nom de Pœuf, à cause de son cri, semblable à un mu- gissement. 89. Tachypetes aquila var. minor Gm. Les collections du Muséum d'histoire naturelle renferment un certain nombre d'individus de cette variélé, assez mal ca- ractérisée, du Tachypetes aquila. Parmi ces spécimens plu- siers ont été caplurés aux Seychelles par M. Lantz, à Mada- gascar et à l’île Maurice par M. Goudot (3). J. Desjardins constate en ces termes dans ses notes, l'apparition fréquente des Frégates à Maurice : « Il en vient très souvent, comme dit l'abbé Lacaille, planer sur l'île, surtout à l'approche des mauvais temps ; elles cherchent alors un abri dans les montagnes », puis il donne une descriplion très détaillée de deux Frégates tuées aux Quatre-Cocos, le 27 mars 1830, par M. Olivary qui les lui avait envoyées. Ces deux Frégates étaient adultes et en livrée foncée : elles portaient un costume noir offrant des reflets blancs sur les parties supérieures du (4) A. Milne Edwards, Nouveaux documents sur l'époque de la disparition de la faune ancienne de l'île Rodrigue (Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1875, 6° sé- rie, t. IE, art. 4, p. 8). (2) Ann. des Sc. nat., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 22. (3) G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, p. 399; E. Oustalet, Bull. Soc. philomath. de Paris, 1878, p. 203; A. Milne Edwards et A. Grandidier, Hist. phys., natur. et polit. de Madagascar, Oiseaux, p. 705 (Tachypaetes aquila var. minor). 126 E. OUSTALET. corps et marqué, sur chaque flanc, de cette petile tache blanche que J'ai retrouvée chez les Frégates des Seychelles aussi bien que chez celles de la Nouvelle-Calédonie et qui m'a paru, comme à M. Hartlaub, constituer l’une des seules par- ticularités distinctives du Tachypetes minor (1). Les notes de Desjardins font mention d’un autre individu de même espèce, tué par M. Lepervanche-Mézière à Sainte-Suzanne, île Bour- bon, à la fin de mars 1838. Cette Frégate avait la tête jaune, comme une femelle tuée aux Seychelles par M. Lant(zetenvoyée par lui au Muséum. M.Lepervanche-Mézière, dans une lettre adressée à Desjardins, considérait comme un reste de la livrée d'enfance les teintes claires du plumage de l'Oiseau. Des Frégates (Tachypetes minor ?) ont élé rencontrées par sir Édouard Newton entre l’île Ronde et l’île Maurice (2) et, dans les ossements qui lui ont été envoyés par ce naturaliste et qui provenaient de l’île Rodrigue, M. A. Milne Edwards a trouvé l’humérus d’une petite Frégate (3). François Leguat (4), à la fin du xvu° siècle, et, une quarantaine d'années plus tard, l’auteur anonyme de la Æelation de l'ile Rodrique (5) avaient, du reste, admirablement observé et décrit les allures des Frégates qui paraissent être les ARabos {vrcados de François Cauche et des anciens navigateurs porlu- gais et hollandais. « J'ai veu, dit F. Cauche (6), dans l’île Mau- rice des oiseaux d'un excellent goust, ayant bec de bécasse, la queue extraordinairement grande et fourcheuë, subjet pour lequel nous lesnommames Ciseaux de cousturier, à l'imitation des Portugais qui les nomment Æabos forcados. Is sont si peu sauvages qu'ils se laissent prendre à la main el tuer à coups de bastons, ils ont la poitrine blanche, le reste noir ; ils vivent 1) E. Oustalet, Bull. Soc. philomath., 1878, p. 204. 2) Ibis, 1861, p. 182; G. Hartlaub, Die Vügel Madagascars, p.999: 3) Ann. des Sc. nalur. ., Zoolog., 1874, 5° série, t. XIX, art. 3, p. 4) Le voyage et les avantures de F. Leguat, 1750. ) A. Milne Edwards, Ann. des Sc. natur., Zoolog., 1875, 6° série, t. II, ap: 6: ) Relation véritable et curieuse, etc., 1651, p. 133 (d’après Desjardins), et ( { ( (4 (o art. (6 Strickland, The Dodo, pl. IL, et p. 10. FAUNE DES ÎLES MASCAREIGNES. F9 de poissons volans et d'oiseaux. » D'autre part on trouve sur la planche annexée à la relation du voyage de C. van Neck, planche à laquelle j'ai déjà fait allusion (1), une figure de Frégate, assez exacte, à cela près que le bec est représenté pointu et non crochu à l'extrémité. Cette figure est accom- pagnée de cette explication : « Esl un oiseau de nous nommé Rabos forcados, à cause de la queüe en forme d’une Force, fort domptez et quand on les extend ils ont bien la longueur d’une brassée, à long becq, tous quasi noirs, ayants une poictrine blanche, prennent du poisson volant qu'ils mengent, aussi les boyaux des poissons et oiseaux, comme nous avons expérimenté à ceux qu'avions prins, car quand nous les apprestames, et dejettames les entrailles, englou- tirent et devoroyent-ils les dictes entrailles et precordes de leurs confrères. Estoyent fort coriaces en cuisant. » Le Tachypetes minor clôt la série des espèces que j'avais à examiner. Évidemment je n’ai pas la prétention d’avoir cité dans cette Notice absolument tous les Oiseaux de la faune de l’île Maurice. Aux quatre-vingt-neuf espèces que je viens de passer en revue viendront probablement s'ajouter par la suite d’abord quelques Échassiers et quelques Palmipèdes qui fréquentent les côtes des Seychelles, de Madagascar et de l’île de la Réunion et qui n’ont pas encore élé signalés à l’île Maurice, ensuite quelques Oiseaux terrestres dont les restes pourront être découverts dans les dépôts récents de la même île. En tous cas, grâce aux documents que j'ai eus entre les mains je crois avoir réussi à retrouver, parmi les espèces mentionnées par Leguat, par l’auteur deia Æelation de Rodrigue, par F. Cauche, par Dubois ou par les anciens voya- seurs hollandais, la plusgrande partie de celles qui n’avaient pu être identifiées jusqu'à présent (2); j'ai pu donner une (1) Voyez ci-dessus, p. 19. (2) Il ne reste guère à identifier que l'Oiseau qui est désigné dans la Re- lation de l’île Rodrigue {texte reproduit par M. A. Milne Edwards, Ann. des Sc. nat., Zool., 6° série, t. IL, art. 4, p. 10)sous le nom de Sentinelle, « parce que dès qu’il aperçoit du monde venir, il prend son vol en criant sans cesse » et qui est dépeint comme étant un peu plus gros qu’une Huppe, et 128 E. OUSTALET. descripliou complète d’un Rapace nocturne, le Scops Com- mersoni, sur lequel on ne possédait que des renseignements très insuffisants; enfin je suis parvenu à établir la synonymie de quelques espèces décrites par Desjardins, notamment de la Scolopax elegans et de la Sc. mauritiana (1). Enfin j'ai pu fixer, plus exactement qu’on ne lavait fait jusqu'ici, la date de l'extinction de diverses espèces. Ces DE espèces, qui ont élé enlevées à la faune de l’île Maurice depuis moins de trois siècles, sont au nombre de dix-huit, en comprenant le Palzornis eques et la Nesænas Mayeri. Elles ont été en partie remplacées par des espèces introduites de Madagascar, de l'Inde, de l'Indo-Chine; mais celles-ci, qui sont au nombre de vingt et une ou de vingt-deux (suivant que l’on compte ou que l’on ne compte pas le Turtur pictu- ralus comme une espèce autochtone), ne sauraient être comparées aux espèces éleintes ni au point de vue de l'originalité des formes et de l'intérêt qu'elles offrent pour le zoologiste, ni même au point de vue de la valeur écono- mique. de couleur noirâtre entremêlée de gris blanc. Comme on nous apprend que cet Oiseau, d’ailleurs peu répandu, se livrait à la pêche sur le bord des ri- vières et des mares, nous pouvons supposer que c'était un Échassier de rivage, peut-être une sorte de Barge, quoique les Barges aient le fond du plumage plutôt brun que noirâtre et passant au blanc sur la partie infé- rieure du corps. (1) Dans le Catalogue des Limicoles du Musée britannique (Cat. of the Birds of the British Museum, 1896, t. XXIV, Limicolæ, p. 649), que je viens de recevoir (15 octobre 1896), alors que mon Mémoire était déjà imprimé, mon ami R. B. Sharpe a rapporté ces deux espèces à la Gallinago macro- dactyla (ou G. Bernieri), comme l'avaient fait précédemment MM. Milne Edwards et Grandidier (Hist. phys., nat. et pol. de Madagascar, Oiseaux, p. 637), qui avaient mentionné la Scolopax elegans et la Sc. mauritiana sous les noms de Gallinago elegans et de G. mauritiana; mais, après avoir examiné de nouveau la question, je persiste à croire que Desjardins à bien décrit deux Oiseaux différents et que ces Oiseaux n'étaient pas des Bécassines, mais des Chevaliers. Les dimensions que Desjardins assigne à la Scolopax mauritiana sont d’ailleurs bien plus faibles que celles de la Gallinago ma- crodactyla. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS Par E. DE POUSARGUES. INTRODUCTION. Nos possessions françaises du Gabon et du Congo, ou pour employer le terme collectif actuellement en usage, le Congo français est cette partie de l'Afrique occi- dentale, bornée à l'Ouest par l'Atlantique, au Nord par la rivière Campo et la ligne limite conventionnelle des possessions allemandes du Cameron, au Nord-Est par l'Afrique centrale, à l'Est par l’'Oubangui et le bas Congo jusqu'à Manyanga, enfin au Sud par différents districts rele- vant de l’État indépendant du Congo, par le Tchiloango, et les possessions portugaises de Landana. Dans ces limites sont englobés quelques bassins côtiers de peu d'importance, situés entre la rivière Campo et l'estuaire du Gabon, puis le vaste bassin de l’Ogôoué et celui du Quillou ou Niari, enfin, vers l’intérieur, les grandes vallées arrosées par les tributaires de la rive droite du bas Congo et de l’'Oubangui. Toute cette immense région a été, depuis plus de vingt ans, le théâtre de nombreuses explorations, et visitée par plu- ANN. SC. NAT, ZOOL. int, 9 130 E. DE POUSARGUES. sieurs voyageurs français, qui, tout en contribuant de tous leurs efforts à y asseoir et consolider notre autorité colo- niale, ont eu également à cœur d'y rassembler pour notre Muséum national, d'importantes collections d'histoire naturelle. Dès 1872, le marquis de Compiègne et M. Marche s’enga- geaient sur l’Ogôoué, et parvenaient, après deux années d'efforts, à remonter ce fleuve jusqu à son confluent avec la rivière [vindo. En 1875,le même M. Marche, en compagnie de M. Savor- gnan de Brazza et du D° Ballay, fournissait l’étape parcourue deux années auparavant et gagnait le haut Ogôoué. Pour- suivant leur course, MM. de Brazza et Ballay franchissaient la crête du bassin de ce fleuve à l’Est pour ne s'arrêter qu’en 1878 sur les rives de l’Alima, le principal affluent de la rive droite du bas du Congo, après un parcours de 1,500 kilomètres vers l'Est. | Vers la fin de 1879, M. $S. de Brazza entreprenait un second voyage, traçait définitivement la route entre les bassins de l’Ogôoué et du Congo, parvenait jusqu’à la rive droite de ce dernier fleuve où il fondait Brazzaville, et reconnaissait la vallée du Quillou. Ces premières expéditions, hérissées de difficultés de toute sorte et de dangers réels, ne pouvaient être très fructueuses au point de vue de l’histoire naturelle. Nous devons cependant à l’un de ces pionniers de la première heure, M. Marche, d'importantes et précieuses colleclions qui furent comme la primeur des abondantes récoltes qui suivirent. La route, en effet, élait ouverte, et bien des obstacles se trouvaient aplanis. Dès le début de 1883, une nouvelle expédition était décidée et entreprise; ce fut la fameuse Mission de l’Ouest africain dirigée par M. Savorgnan de Brazza, et dont le principal résultat fut, comme on le sait, l'extension de nos possessions congolaises jusqu'aux limites que j'ai indiquées plus haut. À cette mission avait été adjoint le frère du célèbre explorateur, M. Jacques de ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 1391 Brazza, docteur ès sciences naturelles, chargé tout spéciale- ment par le Ministère de l’Instruclion publique, de rassem- bler des collections scientifiques. Grâce au concours des membres de la mission, et activement secondé par un ami fidèle, M. Pécile, M. J. de Brazza fut à la hauteur de sa tâche, et parvint à réunir une quantité considérable de maté- riaux d’études, en particulier de nombreuses dépouilles de Mammifères et d'Oiseaux dont plusieurs d'espèce nouvelle ou d’une extrême rareté, et provenant, soit des différents postes échelonnés sur le cours del'Ogôoué (Madiville, Doumé, Franceville), soit des stations fondées sur l’Alima et la rive droite du Congo (Diélé, plateau d’Achicouya, Ngampo, Leketi, Nganchoun, Brazzaville et le pays des Batékés). Vers la même époque, d'autres explorateurs rayonnaient dans les districts côtiers du Nord, et rassemblaient des collections aussi précieuses, sinon aussi importantes. C’est ainsi que pendant les années 1883 et 1884, MM. Schwébisch et Thollon exploraient le cours inférieur de lOgôoué, que M. Masson parcourait le Gabon et le pays des Pahouins, et que, de son côté, M. Guiral fouillait activement les rives du San-Benito, mais succombait malheureusement sous les attaques du climat meurtrier de cette région. Durant les années qui suivirent ces multiples expéditions, de 1886 à 1891, M. Thollon resté comme chef de poste à Franceville, puis à Brazzaville, et M. Brusseaux cantonné entre les rivières Alima et Sanga, ne cessèrent de faire parvenir au Muséum de nombreuses dépouilles d'animaux parfaitement préparées. Enfin, le 10 mars 1891, M. Jean Dybowski s'embarquait à Bordeaux, chargé par le Comité de l'Afrique francaise de rejoindre la mission Crampell, et de percer la route du Congo au Tchad en remontant l’Oubangui et l’un de ses affluents Nord. A peine remis des fatigues de cette première mission, M. J. Dybowski repartait pour la côte congolaise, et explorait pendant la première moitié de l’année 1894, toute la zone cêtière encore peu connue, située entre Loango 132 E. DE POUSARGUES. et Fernand-Vaz. Je n’ai pas à retracer ici les péripéties de la première de ces deux expéditions qui dura deux années con- sécutives, et dont M. J. Dybowski a fait connaître les diverses phases, dans un magnifique ouvrage, paru récem- ment sous le titre : La route du Tchad; du Loango au Chari. Il me suffira de dire que, naturaliste expert, botaniste con- sommé, observateur scrupuleux, M. J. Dybowski était pré- paré mieux que personne à la mission qu'il devait remplir, avant déjà accompli, à son honneur, dans le cours des années 1889 et 1890, deux expéditions scientifiques dans le Sahara algérien. Par leur nombre considérable et la préci- sion rigoureuse des renseignements et des indications d’âge, de sexe, de dates et de lieux de provenances qu'ils m'ont fournis, les spécimens récoltés par M. J. Dybowski, joints à ceux des collections de M. de Brazza, forment la base la plus importante de cette étude. Seuls les Mammifères provenant des diverses missions que je viens de nommer, doivent nous occuper 1ci, et les quelques détails que j'ai donnés sur les itinéraires parcourus par nos explorateurs suffisent pour circonscrire nettement la région étudiée, laquelle comprend le Congo français, et s'étend vers le Nord-Est entre la rive droile de l’'Oubangui et les posses- sions allemandes du Cameron jusqu’à la crête méridionale du bassin du Tchad. Un grand nombre des spécimens que l’on trouvera énumérés au cours de cette étude, ont été montés avec le plus grand soin et figurent avantageusement dans les nouvelles galeries de zoologie du Muséum; cette heureuse circonstance m'a permis de donner pour les espèces que ces spécimens représentent, des mensurations presque aussi exactes que si elles avaient été prises sur les animaux en chair. D'autres exemplaires conservés dans l'alcool ne m'ont laissé rien à désirer pour la facilité de l'étude. Enfin, une troisième catégorie d’échantillons conservés en peau, ma été également d’un utile secours, soit pour l'examen détaillé du pelage, soit surtout pour le relevé des caractères du crâne et de la dentition, quand cette importante ressource m'a ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 133 manqué pour des spécimens de même espèce montés avec le crâne enfermé dans la peau. C’est donc, pièces en main, et muni de garanties sérieuses d’exactitude que j'ai pu entreprendre ce travail, avec l'inappréciable avantage d’avoir à portée, pour les comparaisons, les nombreux exem- plaires types qui font la richesse des collections du Muséum. Ce mémoire contribuera, je l'espère, à combler la lacune qui existe dans nos connaissances sur l’ensemble de la faune mammalogique de la côte occidentale d'Afrique. IL existe, en effet, pour la Sénégambie et la Guinée d’une part, pour l’Angoia de l’autre, de remarquables travaux qui nous ont fait connaître dans leur ensemble les faunes mam- malogiques respectives de ces diverses régions. Les Mammifères de nos colonies du Sénégal et de la Gambie ont fait l'objet d’un mémoire très documenté, publié récemment par M. le D° T. de Rochebrune (1). Temminck (2) a décrit en 1853, les importantes collec- tions rassemblées par le célèbre voyageur naturaliste Pel, pendant dix années de séjour à la côte de Guinée. Depuis, les récentes explorations accomplies le long des côtes de Libéria et de Sierra-Leone de 1880 à 1887, par MM. Büt- ükofer, Sala, et Stampfli, ont encore enrichi le Musée de Leyde d’un grand nombre de Mammifères intéressants, exa- minés et décrits avec le plus grand soin et une extrême com- pétence par M. Jentink (3). Pour terminer ce qui a trait à la Guinée supérieure, la Mammalogie des possessions alle- mandes du Togo et du Cameron nous a élé révélée depuis peu par d'importants travaux de M. Paul Maitschie (4). Pour l’Angola, M. Jentink (5) nous a également fait con- (1) De Rochebrune, Faune de la Sénégambie. (2) Temminck, Esquisses zoologiques sur la côte de Guinée. Leyde, 1833. (3) Jentink, Zoological researches in Liberia (Mammals), in Notes fr. Ley- den Museum, \ol. X, 1888, p. 1-58. (4) P. Matschie, 1. Ueber einige Säugetiere von Kamerun (Arch. f. Naturg., p. 352, 1891. 2. Sûugethiere des Togogebietes (Mittheil. d. deutsch. Schutzge- bieten. Bd VI, Hft 3, 1893). (5) Jentink, On Mammals from Mossamedes (Not. fr. Leyden Mus., vol. Ix, . 171-180, 1887). il 2 134 E. DE POUSARGUES. naître le résultat des recherches de M. van der Kellen sur le Cunéné dans le Mossamedes; mais l’histoire des Mammi- fères de l’Angola nous à été principalement divulguée par l'éminent zoologiste portugais M. Barboza du Bocage (1), dans une série de Mémoires où sont décrites les magnifiques collections du Musée de Lisbonne dues à l’activité d’un grand nombre d’explorateurs, Serpa Pinto, Capello et Ivens, Bayao, Toulson, et au zèle de l’infatigable voyageur d’An- chieta. Enfin le récent travail de M. Noack (2) sur les Mammifères recueillis par le D' Hans Schinz au cours de son expédition dans le Damara, l’Ovamboland et le désert de Kalahari jusqu'au lac Ngami, nous fournit comme un double trait d'union rattachant la faune d'Angola, d’une part à celle de l'Afrique australe, anciennement décrite par Smuts (3) et Andrew Smith (4), de l’autre à celle du Mozambique et de la côte orientale d'Afrique, si magistralement dépeinte par Peters (5). De la Sénégambie au Cap, il n'existe donc de lacune dans nos connaissances sur la Mammalogie de l’Afrique occiden- tale que pour nos possessions françaises du Gabon et du Congo. On ne trouve pas de mémoires généraux et de longue haleine, ayant trait à celte région, et pour avoir une idée forcément incomplète et morcelée de sa faune, il faut re- courir aux descriplions d'espèces nouvelles publiées par Pucheran (6), aux Mémoires de Du Chaillu (7), à différentes notes de Lecomie, Gray, Sclater, Peters, parues à des dates (4) Barboza du Bocage, Jorn. sciencias, math., phys. e naturaes. Lisboa, 1889 e 1890. (2) Noack, Beitrage zur Kentniss der Säugethierfauna von Süd und Sudwest Afrika{Zool. Jarhbucher, vol. IV, p. 94-261, 1889). (3) Smuts, Dissertatio zoologica enumerationem mammalium capensium con- tinens. Leyde, 1832. (4) A. Smith, Illustrations of the Zoology of South Africa. London, 1838. (5) W. Peters, Reise nach Mossambique (Säugethiere). Berlin, 1852. (6) Pucheran, Documents relatifs à la Mammalogie du Gabon (Arch. Mus. hist. nat.,t.X, p. 103-135, 1858-1861). (7) Du ‘Chaillu, Journ. of the natural history. Society of Boston, p. 296 à 358, 1860. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANGAIS. 135 très-espacées dans diverses publications périodiques (1), ou enfin à quelques récentes monographies de genres ou de familles de Mammifères africains, telles que celles de M. Jen- tink sur les Écureuils (2), de M. Oldfield Thomas sur les Mangoustes (3) et les Céphalophes (4), de M. de Rochebrune sur le genre Colobe (5), de M. Tycho-Tullberg (6) sur les Muridés du Cameron. J'ai donc cru faire œuvre ulile en mettant à protit les ri- chesses zoologiques collectionnées par nos voyageurs sur ce point de l’Afrique occidentale, pour tracer dans ses grandes lignes la faune mammalogique de nos possessions congo- laises, et l’étudier en détail, tant en elle-même que dans ses rapports avec celles des régions limitrophes. Nous verrons au cours de ce travail que si cette faune pré- sente certains traits communs avec celles des provinces zoologiques circumvoisines de l'Afrique occidentale, l'Angola et surtout la Guinée suvérieure, elle se rattache d'autre part et s’unit plus intimement, par l’Oubangui, avec celle de l’A- frique centrale, telle que nous l’ont fait connaître les collec- tions rassemblées par Schweinfurth (7) dans le Niam-Niam, Emin-Pacha (8) dans le district de Monbuttu, R. Bühm et Reichard (9), dans l’Ürua et le Haut Congo. Mais avant d'entreprendre l'exposé de cetle faune je dois exprimer ici ma profonde reconnaissance et mes plus sin- cères remerciements à mon éminent el vénéré maître M. A. Milne-Edwards pour la haute marque de confiance (4) Proc. Acad. nat. sc. of Philadelphie; Proc. Zool. Soc. London; Mo- natsber. Akadem. Berlin. (2) Jentink, On the african Squirrels (Not. fr. Leyden Museum, vol. IV, p. 1-53, 1882). (3) O. Thomas, On the african Mungooses (Pr.Zool. Soc. London 1882). (4) O. Thomas, On the Genus Cephalolophus (Pr. Zool. Soc. London, 1892). (5) De Rochebrune, Faune de la Sénégambie (Supplément), 1° fascicule, 1886-1881. (6) Tycho-Tullberg, Muriden aus Kamerun. Stockholm, 1893. (7) Schweinfurth, 1m Herzen von Africa, 1874. (8) Emin-Pacha (0. Thomas, Pr. Zool. Soc., 1888, 1890, 1891). (9) R. Bühm et Reichard (Noack, Beitrage zur Kentniss der Saugethier- Fauna von Ost und Central Africa in Zool. Jahrbucher, vol. IT, p. 193-302). 136 E. DE POUSARGUES. dont il a bien voulu m'’honorer en me chargeant de ce tra- vail, que les conseils si précieux de son inépuisable savoir m'ont permis de mener à bonne fin. Que M. Oustalet me per- mette également de l’assurer de toute ma gratitude pour la bienveillance avec laquelle il m’a aidé et encouragé dans mes recherches, en m’accordant le solide appui de la haute compétence que lui ont value en zoologie systématique, ses vastes connaissances, sa justesse de vues et son expérience. [°° ORDRE. — PRIMATES. FAMILLE DES SIMIIDÉS. GENRE TROGLODYTES. . TROGLODYTES NIGER. (E. Geoff.) Malgré le parfait élat de conservation des deux spécimens de Chimpanzés adultes rapportés du Congo par M. de Brazza, je ne puis à l’aide des documents qu'ils fournissent, précieux sans doute mais insuffisants, tenter de résoudre la question si controversée et encore si obscure de l’unité ou de la pluralité des espèces de Chimpanzés, quand des natu- ralistes éminents, en possession de matériaux d’études au- trement nombreux et variés, cherchent encore la solution de ce problème. « C’est à mes yeux, écrit Hartmann, une tâche très difficile que d'établir s’il faut se décider à admettre une seule ou plusieurs espèces de Chimpanzés. Les faits tels qu'ils se présentent actuellement m'ont affermi dans la conviction qu'on ne peut établir qu'une classification provisoire de ces animaux (1). » Partant de ce point, le savant zoologiste alle- mand ne reconnaît chez le Chimpanzé que deux races ou va- riétés bien distinctes, et accusant une certaine constance. Les deux spécimens rapportés du Congo par M. de Brazza répondent exactement à ces deux types, et je ne puis mieux faire que d’adopter cette division en me dispensant de don- ner ICI aucune synonymie. (1) R. Hartmann, Les Singes anthropoides et l'Homme (Bibl. scient. inter- nat. Paris, p. 168, 1886). 138 E. DE POUSARGUES. 1. TROGLODYTES NIGER. (E. Geoff.) g' adulte. M. de Brazza. Congo français, 18853. Tout le pelage est d’un noir profond, et à peine observe- t-on quelques rares reflets d’un brun rougeâtre sur la région lombaire. Le front et une grande partie du milieu du vertex sont complètement dépourvus de poils; c'esl là, comme on le sait, le principal caractère sur lequel Du Chaillu a fondé son espèce ?. calvus (1), dont la validité a élé immédiate- (4) Du Chaiïllu, Boston Journ. nat. Hist., p. 296, 4860. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 139 ment contestée par Gray (1), et depuis par un grand nom- bre de zoologistes, défendue au contraire par d’autres, parmi lesquels Bartlett (2) et tout récemment Beddard (3). La face noire est modérément prognathe, la lèvre supérieure assez haute ; les oreilles sont irès développées tant en lar- geur qu'en hauteur. Les favoris et les poils de la nuque | | L e ANTHROPOMORPHES | RÉGIONS a | TROGLODYTES » GORILLA AFRIQUE SEPTENTRIONALE. FR | | AFRIQUE | ORIENTALE Æ = < | = É S £ 25 D'ARTS = 2 [NS Eu de = = © [æ| = = SD NÉE Z = T. | T.niger. (E. Geoff.) 2 3 N [ea] a ul 20 S | 25 a , = LS 80 G. | G. gina. (TL. Geoff.) < 27 \ LA AFRIQUE AUSTRALE. j sont bien fournis, mais ne présentent qu'une longueur mé- (4) Gray, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 273, 1861. (2) Bartlett, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 674, 1885. (3) Beddard, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 119, 1892. 140 E. DE POUSARGUES. diocre. Ce spécimen mesure 0", 95 du bout du museau à l’anus, les membres sont relativement courts, mais ro- bustes. 2. TROGLODYTES NIGER, var. tschego. (Duvernoy.) cg adulte. M. de Brazza. Congo français, 1885. Ce second Chimpanzé mesure 0”, 92 du bout du museau à l'anus ; ces dimensions sont à peine inférieures à celles que nous avons indiquées pour Île précédent, mais chez la variété qui nous occupe, les membres sont plus longs et plus grêles, la face montre un prognathisme bien plus accusé, et les oreilles sont beaucoup moins développées en hauteur. Le front ne présente aucune calvilie ; les longs poils noirs qui couvrent la tête et la nuque arrivent jusqu’en bordure de la ligne sourcilière et descendent en avant des oreilles, le long des joues jusqu’à l’angle de la mâchoire sous forme d'amples favoris noirs, marqués de quelques filets d’un jaune rous- sâtre. Sur le cou, les épaules, les bras et la moitié antérieure du tronc, le pelage est également noir mais court. À parlir du milieu du dos, lès poils passent sans transition au gris jaunâtre clair sur les flancs, les reins et les lombes, et cette teinte ne s'arrête qu’à quelques centimètres au-dessus de l'anus, suivant une ligne limite semicirculaire d’un blanc presque pur. En arrière de celte ligne, le pelage qui entoure immédiatement l'anus reprend une coloration noir bru- nâtre assez semblable à celle de la région antérieure du corps. Sur les membres postérieurs, on trouve un mélange, en proportions égales, de poils noirs et gris jaunâtre. Cette livrée toute particulière et bien différente de celle que nous avons signalée chez le T. niger typique paraît pré- senter une certaine constance, car elle se retrouve, avec une similitude absolue, sur deux autres Chimpanzés de plus grande taille qui figurent dans les nouvelles galeries du Muséum, et avaient été rapportés autrefois du Gabon par Aubry-Lecomte. Selon plusieurs auteurs, Hartmann entre ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 141 autres, cetle livrée bicolore serail caractéristique de l'espèce ou variété T. Schweinfurthi(Gigl.) (1) découverte il y a quel- que temps dans l'Afrique centrale et abondante dans le Niam- Niam, mais ne se rapporterait pas au 7. tschego (Duv.); suivant d’autres zoologistes, au contraire, ces deux variétés seraient identiques. Dans l'impossibilité, faute de docu- ments, d'élucider cette question, j'ai adopté la dénomination spécifique créée par Duvernoy comme étant la plus ancienne, mais seulement à titre de variété. GENRE GORILLA. 3. GORILLA GINA. (I. Geoff.) Gorilla gina. Is. Geoffroy S.-H. Comptes rendus Académie des sciences, mai 1853. LE _ Arch. du Muséum, t. X, p. 1 à 100, pl.I à VII, 1858-1861. — Duvernoy. Compt. rend. Acad. des Sc., mai 1853. _ Archiv. du Muséuin, p. 4 à 248, pl. I à XVI, t. VIII, 1853-1855. a. Q très jeune. M. Marche, 23 avril 1876. Ogôoué. b. adulte (crâne). M. de Brazza, 1884. Congo francais. c. © très adulte (crâne). M. Thollon, 1884. Gabon. Les savants mémoires de Duvernov et d'Is. Geoffroy Saint- Hilaire publiés de 1853 à 1858, font encore autorité en ce qui concerne le Gorille, el je renverrai au travail de ces au- teurs, tant pour la description du crâne, du squelette, de la musculature et des particularités extérieures de ce grand Anthropomorphe, que pour la synonymie parfaitement dé- brouillée par I. Geoffroy et l'exposé des caractères qui ont motivé pour cette espèce la création d'un genre différent du Troglodytes. On trouvera également dans le beau tra- vail d'I. Geoffroy, comme une réfutation anticipée des ar- guments sur lesquels se sont basés MM. Alix et Bouvier (2) (4) Giglioli, Ann. Mus. civ. Hist. nat. Gen., vol. III, p. 56, 1872. (2) Alix et Bouvier, Sur un nouvel Anthr opoide (Gorilla mayema) (Bull. Soc. zool. de France, p. 188, t. II, 1877} 142 E. DE POUSARGUES. pour établir la distinction spécifique du Gorilla mayema. « Le Gorille, écrivait Is. Geoffroy, diffère considérablement de lui-même selon ies individus. Je ne connais même, chez aucun Singe, des différences plus marquées et plus considé- rables que celles que l’on observe chez le Gina, différences relatives, soit à la conformation du crâne, soit à la taille, . soit enfin à l’état plus ou moins velu de la peau, et à la cou- leur du pelage. » Le jeune spécimen femelle (a) ne diffère en rien, pour la taille, comme pour la coloration noirâtre du pelage, du jeune individu mâle, donné en 1852 au Muséum par l'amiral Penaud ei figuré dans l’une des planches qui accompagnent le travail de Is. Geoffroy. | Le crâne du mâle (6) trouvé par M. de Brazza dans la forêt ou dans quelque case d’indigène, avait sa denti- tion achevée, mais, par suite probablement d’une exposi- tion prolongée à l’air, et des alternatives de sécheresse et d'humidité, la plupart des dents, déchaussées, sont tom- bées et ont disparu. La crête occipitale est large et bien dé- veloppée, mais la crêle sagittale n’est pas encore formée. Les deux arêtes, servant de lignes d'insertion pour les muscles, el limitant en haut et de chaque côté les fosses temporales, convergent fortement en arrière à partir du bord supéro-externe des arcades sourcilières, circonscrivant entre elles une aire frontale triangulaire, et deviennent pres- que contiguës à partir de la suture pariéto-frontale; mais elles ne s’accolent et se soudent que vers leur point de ren- contre avec la crête occipitale. Il en résulte que, tout le long de la ligne supérieure médiane du crâne, se trouve ménagée entre les deux arêtes ou bourrelets d'insertion des muscles temporaux, une sorte de rainure assez profonde, large d'en- viron 4 à 5 millimètres, se continuant en avant avec l'aire frontale. Ce mode de conformation indique une période peu avancée de la maturité de l'animal, comme le prouvent aussi d’ailleurs les arêtes vives des quatre canines et de la première prémolaire inférieure gauche, et les tubercules à peine 1/ ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 143 émoussés de la deuxième molaire inférieure gauche, des deuxièmes prémolaires et des premières molaires supérieu- res, les seules dents qui ne soient pas tombées. Le second crâne (c), élant donnés ses dimensions el son vo- lume plus restreints, devait appartenir à une femelle; sa lon- gueur suivant la courbure supérieure (du bord postérieur du trou occipital à l’extrémilé des os incisifs) est inférieure de près de deux cinquièmes à celle du crâne du mâle (4) ; cepen- dant, la dentition indique par l’usure et l'effacement des tuber- cules des molaires, un âge pleinement adulte et même assez vieux. La crête sagittale est tout à fait formée, nettement des- sinée, mais peu saillante ; la crête occipitale est plus proé- minente, mais elle est loin de présenter la largeur et l’éva- sement que l’on voit sur le crâne du mâle (4) plus jeune cependant. Le Gorille doit compter parmi les animaux exclusivement propres à la faune congolaise. Jamais, dit M. Barboza du Bocage, on ne l’a rencontré au Sud du Congo, et ce grand fleuve semble opposer à sa dispersion vers le Sud une bar- rière infranchissable. Nous verrons que celte remarque du savant portugais s'applique à tous les Singes que l’on ren- contre entre le Congo et le Niger. La présence du Gorille, sur la rive droite immédiate du Congo et dans la vallée du Quillou, mise en doute par Is. Geoffroy, est aujourd’hui un fait acquis, mais c’est dans le bassin de l’'Ogôoué et au Gabon que ces animaux sont signalés le plus fréquemment. Leur aire de dispersion vers l'Est sem- ble étroitement limitée ; au Nord 1ls ne dépassent pas le Ca- meron et jamais ils n'ont élé signalés qu’à l’état de légende à l'Ouest du Niger sur les côtes de la Guinée supérieure. 144 E. DE POUSARGUES. FAMILLE DES CERCOPITHÉCIDÉS. GENRE COLOBUS. 4. COLOBUS GUEREZA. (Rüpp.) Colobus guereza. Rüppell. N. Wirbelthiere. Abyss., 1835-1840. Guereza Rüppelli. Gray. Catal., p. 19, 1870. Colobus guereza. Schlegel. Sing. Mus. Pays-Bas, p. 25, 1876. Guereza occidentalis. De Rochebrune. Faune de la Sénégambie (Suppl. ), p- 140, 1886-1887. Colobus quereza. O. Thomas. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 5, 1888. a. œ adulte. b. adulte..$ M. de Brazza, 1885. Bassin supérieur de l’'Ogôoué. Fa adulte. d. ç‘ adulte. M. Brusseaux, 1890. Bords de l’Ogôoué. À à in M. Thollon, 1890. Bords la rivière Alima. g. ci adulte. | M. Dybowski, 23 décembre 1891. Village de Bembé, pays des h. © adulte Banziris, rive droite de l’Oubangui au point extrême nord j l de son cours. Lat. N. 5° 6. i. œ à peine parvenu à la moitié de ‘sa croissance, mais possédant déjà la livrée de l'adulte. M. Dybowski. Mêmes date et localité que les pré- cédents. j. © adulte. M. Dybowski, décembre 1891. Makobou, au nord de Bembé. M. Dybowski, décembre 1891. Dans la grande brousse, près k. © adulte. de Yabanda. Lat. N. 6° 25’, vers la limite des bassins du l, çj adulte. Congo et du Chari, plus quelques peaux plates provenant du pays des Ouaddas. Cetie magnifique série de Colobes guérézas démontre combien les individus de cette espèce sont abondants sur la rive droite du bas Congo et dans le bassin de l’'Ogôoué. Leur pelage ne présente que très peu de variations ; chez la plu- part, le manteau blanc est bien développé, le panache blanc terminal de la queue très touffu, varie comme dimensions entre le quart et le tiers de la longueur totale de la queue. Ces ornements sont dont loin d'acquérir un épanouissement comparable à celui que M. 0. Thomas (1) a signalé chez le C. quereza caudatus, variété localisée sur les pentes du Ki- lima-Njaro. Tout au contraire, deux de ces exemplaires du (1) O0. Thomas, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 219, pl. XII, 1885. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 149 Congo (a, e) se font remarquer par des parures plus modes- tes encore que chez les représentants ordinaires de l’es- pèce en Abyssinie et, sous ce rapport, répondent à la va- riété C. occidentalis (Rochbr.). Les poils blancs du camail sont très-clairsemés et de faible longueur même sur la croupe, la queue ne présente pour ainsi dire pas de touffe terminale ; les poils qui garnissent son dernier quart prennent la teinte blanche habituelle, mais conservent la même longueur que les poils noirs des trois quarts proximaux. Sur quelques-uns de ces spécimens les mieux ornés, les poils noirs de la face externe des cuisses sont plus ou moins abondamment mêlés de poils blancs, comme chez le Colobus vellerosus (I. Geoff.). La dispersion du Colobus quereza sur le continent africain (1) offre un parfait parallélisme avec celle du Colobus angolen- sis. Ce dernier, comme nous le verrons, se rencontre dans la boucle du Congo, depuis l’Angola jusqu’à la région des Lacs, et la limite Nord de son aire de répartition paraît être le fleuve du Congo. Quant au Colobus quereza, depuis sa dé- couverte par Rüppell en Abyssinie, il a été signalé dans le Massaï, au voisinage et sur les flancs du Kilima-Njaro, par les voyageurs Thomson et Johnston; dans le Niam-Niam par Schweinfurth et Emin-Pacha; sur la rive droite de lOubangui et du bas Congo par tous nos explorateurs fran- çais et dans les possessions allemandes du Cameron (Mats- chie). Aucun représentant de ces beaux Colobes n’a été ren- contré dans l’Angola, du moins, M. Barboza du Bocage n’en fait aucune mention dans sa faune mammalogique de ces ré- gions ; le Congo serait donc la barrière Sud de la zone de dispersion du C. quereza et l'isolerail du C. angolensis. Cette aire d'habitat correspond à l'ensemble des aires par- tielles des trois variétés que quelques auteurs ont considé- rées comme spécifiquement distinctes; ce sont C. quereza var. {ypicus (Rüpp.) cantonné dans l’Abyssinie, C. querezu (1) Pour ce Colobe et les autres espèces du genre voir carte n° 2, p. 170. ANN. SC. NAT. ZOOL. LEFT, FU 146 E. DE POUSARGUES. var. caudatus (Thos.) spécial à la région du Kilimanjaro, et enfin le C. quereza var. occidentalis (Rochbr.), qui se rencontre dans des stations intermédiaires aux deux précé- dentes, et se répand de là vers l'Ouest jusqu’au voisinage de l'Atlantique. Ces prétendues espèces ont toutes un pelage fondamental noir, orné de longs poils blancs formant. des panaches et des. touffes qui affectent rigoureusement les mêmes formes et les mêmes positions. La seule différence appréciable, mais d'importance minime, que l’on a admise comme spécifique réside dans le plus ou moins de développement des panaches pleuraux et de la touffe terminale de la queue, atteignant leur maximum de longueur chez le C. caudatus, leur mini- mum chez le C. occidentalis; le C. typicus, sous ce rapport, élant intermédiaire entre ces deux extrêmes. Mais ce sont là des variétés locales, et non de véritables espèces; la di- versité de ces livrées doit être interprétée plus largement et envisagée comme le résultat de l'adaptation d’un seul et même type spécifique à des conditions d'existence variant. avec le régime climatérique, la nature etla configuration du sol des différentes régions comprises dans son aire d’ha- bital. 5. CoLoBus ANGOLENSIS. (Sclat.) Colobus angolensis. Sclater. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 245, 1860. — — SI du Bocage. Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2° série, n° 4, p. 9, 1889. ? — — Sclater. Proc. Zool. Soc. oi p. 97, 1892. — — De Pousargues. Ann. Sc. nat., p. 267, 1895. a. ç' adulte. M. Thollon, 1890. Rive gauche du Congo, en face de Brazza- ville. Les deux espèces décrites, l’une par Sclater, sous le nom de C. angolensis, l'autre par Peters sous le nom de C. pallia- tus, sont-elles réellement identiques, comme la plupart des auteurs l'ont admis jusqu'ici; ou bien cette dernière espèce, propre à l’Afrique orientale, ne doit-elle pas être regardée comme une forme représentative mais distincte du type que a ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 147 l’on rencontre dans le Sud-Ouestafricain ? C'est cette dernière hypothèse qui me paraîl la plus acceptable, après le sérieux examen comparatif que J'ai pu faire du spécimen (a) de C. angolensis de la rive gauche du Congo, que nous devons à M. Thollon, et de quatre exemplaires de C. palliatus de l'Afrique orientale, dont trois de provenance certaine, en- voyés au Muséum, l’un de Bagamoyo par les R.R. Pères de la Mission du Saint-Esprit, les deux autres par M. Gierra, du district d'Ousambara sur la rive nord du Pangani. On retrouve manifestement, chez ces quatre derniers individus, tous les caractères mentionnés et figurés par Peters chez son C. palliatus. Le bandeau frontal blanc est large etnettement tracé, et tous les poils de la tête sont couchés et dirigés d'avant en arrière. Sur le spécimen rapporté des bords du Congo, il n'existe pas la moindre trace de bandeau frontal blanc ; les poils noirs du dessus de là têle partent en rayon- nant d’un tourbillon placé au milieu du vertex entre les oreilles ; ceux qui se dirigent en avant se prolongent au delà des arcades orbitaires et leurs extrémités simulent des sour- cils rigides el horizontaux. Quant aux poils qui se dirigent latéralement, leur orientalion est perpendiculaire à celle des panaches temporaux blancs, qu'ils surplombent visible- ment. Ces parlicularités donnent à ce Colobe une physiono- mie bien différente de celle des spécimens du Zanzibar; il y à là comme une calotte, qui, sauf la coloralion, rappelle un peu celle des Macaques bonnet-chinois. Aucun de ces ca- ractères du pelage n’avait encore élé signalé depuis la courte description forcément incomplète donnée par M. Sclater du spécimen type du C. angolensis mutilé de la face. Une autre différence aussi importante existe dans les longueurs respec- tives de la queue chez les deux espèces. Chez le spécimen de C. angolensis qui nous occupe, la queue, mesurant 59 cen- timètres jusqu’à l’extrème pointe des poils blancs de la touffe terminale, est plus courte que la tête et le corps qui ensem- ble comptent 63 centimètres. Ces dimensions concordent bien avec celles que M. Sclater donne du type de l'espèce : 148 E. DE POUSARGUES. corps el tête mutilée 24 pouces, soit 61 centimètres, et au- tant pour la queue. Celle-ci est bien autrement développée chez les quatre spécimens de C:. palliatus du Zanzibar que jai pu mesurer. L'un d’eux a 68 centimètres de longueur pour la têle et le corps, et sa queue incomplète compte néanmoins 80 centimètres. Les deux dépouilles provenant de l’Ousambara, parfaitement intactes, m'ont donné 59 et 61 centimètres pour la tête et le corps, 79 et 83 pour la queue. Enfin, le quatrième sujet de Bagamoyo mesure 63 centimètres pour la tête et le corps, et la queue, bien complète, n'a pas moins de 86 centimètres jusqu’à l’extré- mité de la touffe blanche terminale, soit 27 centimètres de plus que celle de son congénère de même taille du Sud-Ouest africain. À un pareil écart dans les dimensions relatives de la queue doit certainement correspondre une différence notable dans le nombre des vertèbres caudales, mais je n'ai pas pu m'assurer du fait sur ces dépouilles dépour- vues de leurs squelettes. Si, d'autre part, les particu- larités que j'ai signalées pour l'orientation et les teintes des poils de la têle sont constantes chez le C. angolensis, on conviendra qu’il existe de sérieuses raisons en faveur de sa distinction d'avec le C. palliatus. Tels sont les faits que je n’ai malheureusement pu observer que sur un seul individu, mais que j'ai déjà signalés à l'attention des zoolo- gistes (1), car ils remettent en question le tracé des limites des aires d'habitat jusqu'ici confondues des deux Colobes noirs à panaches temporaux et scapulaires blancs. Vu le grand nombre de spécimens vivants de Colobus angolensis apportés par les caravanes venant de l'intérieur jusqu à Cas- sange, sur la rive gauche du Coango, M. Barboza du Bocage conclut avec raison à l'existence de cette espèce dans le Mouata-Yamvo, et les immenses régions arrosées par le Kassai et ses nombreux affluents, dont ces animaux descen- draient le cours pour atteindre la rive gauche du Congo, (1) De Pousargues, Sur quelques Singes appartenant aux genres Colobus et Cercopithecus (Ann. sc. nat., p. 267, 1895). ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 149 ainsi que le prouve la capture faite par M. Thollon en face de Brazzaville. Mais jusqu'où s'étend vers l'Est l’aire de distribution de cette espèce ? D'autre part, le C. palliatus reste-t-il confiné dans cette portion de l'Afrique orientale qui borde Ia côte de Zanzi- bar ? À laquelle des deux espèces doit-on rapporter les indi- vidus signalés par M. Sclater dans le pays montagneux de Kondé à l'extrême pointe Nord du lac Nyassa? Ce sont là autant de questions, qui, vues sous ce nouveau jour, récla- ment une solution soit différente, soit confirmative de celle que l’on a admise jusqu'ici sans preuves bien fondées. 6. CoLoBus sATANAs. (Wath.) -_Colobus satanas. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 58, 1838. — — Schlegcel. Simiæ. Mus. Pays-Bas, p. 27, 1876. -— — Peters. Monatsber. Akad. Berlin, p. 471, 1876. Stachycolobus satanas. De Rochebrune. Faune de la Sénégambie (Suppl.), p. 114, pl. VII, 1886-1887. a. çj très adulte. M. de Brazza, 1885. Station du Cap-Lopez, bas Ogôoué. Ce magnifique spécimen à pelage noir brillant mesure 75 centimètres pour la tête et le corps, et 95 pour la queue, c'est-à-dire à très peu près les dimensions données par Waterhouse. L'individu, type de l’espèce, décrit par cet au- teur d’après des peaux mutilées, provenait de l’île de Fer- nando-Po; mais la véritable patrie du Colobus satanas, comme celle de son congénère roux, le Colobus Pennanti, que Waterhouse a fait connaître à la même époque, est cette par- tie de l'Afrique continentale qui comprend le Cameron, le Gabon et le bassin de l’Ogôoué, où on les a toujours signa- lés proche du littoral. | 150 E. DE POUSARGUES. 1. CoLoBus THOLLONI. (A. M.-Edw.) (Nov. spec.) Colobus Tholloni. A. Milne-Edwards. Rev. scient., 3° sér., t. XII, p. 15, juil. | 1886. are Piliocolobus Tholloni. De Rochebrune. Faune de la Sénégambie (Suppl.), p. 110, pl. V, 1886-1887. a. œ semi-adulte. M. de Brazza. Congo, 1885 (prohablement rive gauche). b. © adulte. M. Thollon. (Rive gauche du Congo, près Brazzaville, 1890.) Le premier spécimen adressé au Muséum en 1885 par M. de Brazza, fut décrit succintement par M. A. Milne-Ed- wards, qui dédia cette nouvelle espèce à M. Thollon, l’un des plus actifs collaborateurs de M. de Brazza. C'était la dé- pouille d’un jeune mâle parvenu à la période du changement de dentition. En 1890, une magnifique femelle complète- ment adulle nous fut rapportée directement par M. Thollon. Ce deuxième exemplaire, différant du lype par le sexe et par l’âge, présente avec lui une ressemblance presque absolue pour la coloration du pelage. Cette heureuse circonstance venait confirmer de la manière la plus formelle, Les vues de mon savant et vénéré maître M. A. Milne-Edwards, en affer- missan! la validité de la nouvelle espèce qu’il avait créée. Le C. Tholloni prend place parmi les Colobes roux, mais se distingue facilement des espèces déjà connues de celte couleur. Le jeune mâle (a) type de l'espèce, mesure 1*,17 de lon- gueur totale, dont 59 centimètres, c'est-à-dire un peu plus de moitié, pour la queue. La tête est pelite, le museau mince et assez proéminent. L’oreille bien développée, complète- ment nue et noire, émerge totalement du pelage court et couché du dessus de la tête. Les membres sont longs et grê- les, el le moignon du pouce antérieur très peu saillant. Toutes les parties supérieures du corps, le front, la nuque, les épaules, le dos, les flancs, la face externe et postérieure des membres, présentent une teinte générale d’un roux ar- dent. Cette couleur est légèrement renforcée de brun sur la nuque et les épaules ; cet aspect est dû à la double colora- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 191 tion fauve à la base, brun marron sur le dernier tiers d’un grand nombre des poils qui couvrent ces parties. Sur les mains, à partir seulement de la région métacarpienne, et sur la moitié terminale de la queue, la couleur rouge brique s’as- sombrit également, et passe au brun marron vers leur extrémité distale. Aux membres postérieurs, les poils con- servent leur teinte rousse jusque surles phalanges ; à peine remarque-t-on une légère ombre brune sur la région méta- tarsienne. Le front est bordé en avant d’un étroit liséré de poils rigides, d’un noir profond qui tranche sur le fond roux du dessus de la tête. Ce bandeau part en divergeant de cha- que côté de la racine du nez, dessine les arcades sourcilières, et se prolonge sur les tempes en s’élargissant un peu jus- qu'à la base de l'oreille. Sur les joues, les côtés du cou, le devant des épaules et la portion inférieure des flancs, les poils sont d’une couleur roux orange qui passe gra- duellement au jaune blanchâtre sur le menton, la gorge, la poitrine, le ventre et la face interne des membres. Les fa- voris, d’un roux orangé, sont lrès-peu fournis et dirigés d'avant en arrière. La peau de la face est nue, de couleur brune; sur le bord des lèvres se trouvent quelques poils noirs irrégulièrement disséminés. Dérrière l'oreille, tout à fait à découvert, et tranchant sur le fond roux du sommet de la tête, on remarque une large plage complètement glabre, de couleur blanc jaunâtre sur la peau sèche, et d'autant plus visible que les poils qui la bordent ne s’allongent pas en une aigrette circumauriculaire comme c'est le cas chez le C. Pennanth, où ce même espace nu se trouve ainsi com- plètement masqué. Sur les parlies inférieures, lies poils sont très-clairsemés, principalement au menton, à la gorge, aux aisselles, à l’aine et sur la partie supérieure de la face interne des membres. Sur les parties supérieures du corps, le pelage est luisant, bien fourni, mais court et régulier. On ne trouve pas sur les épaules, le dos et les flancs, de ces longs poils formant camail ou manteau ; la queue, mince et cylindrique, manque également de touffe terminale. En fait d’ornements 159 E. DE POUSARGUES. en panache on ne trouve, chez le C. Tholloni, qu'une touffe anale formée par les poils qui garnissent le dessous et les côtés de la base de la queue. Ces poils prennent un grand développement, et atteignent 10 centimètres de longueur ; ceux qui ornent le dessous de la base de la queue sont roux sur toute leur longueur, mais la plupart des poils laléraux, roux dès la base, présentent ensuite, à partir de leur portion moyenne jusqu’à leur extrémité, une teinte brun noirâtre. L'ensemble de ces poils forme une sorte de houppe retombante dont l'aspect ne rappelle en rien celui des poils redressés et frisottants qui ornent les mêmes par- ties chez certains Cercopithèques, tels que le Grivet et le Callitriche. Pour avoir une idée exacte de la position et de la direction de ces poils, toute question de couleur étant écar- tée, qu'on se figure un C. quereza dont les longs poils blancs du manteau auraient disparu, à l’exception de deux mèches au croupion, séparées par la racine de la queue. Chez la femelle adulte (6)on compte 61 centimètres de lon- gueur pour la tête et le corps, et la même mesure pour la queue. Son pelage diffère à peine de celui du jeune mâle type. La teinte générale rousse du dessus du corps est un peu plus sombre, et la région métacarpienne plutôt fauve que brune. La teinte brun noirâtre est moins envahissante sur la queue et ne se distingue nettement qu’à parlir de son der- nier tiers. Au-dessus des yeux et de la racine du nez, les poils noirs du liséré frontal sont dressés et plus abondants ; par contre, les mèches anales sont moins longues et moins fournies. Cette particularité est-elle une conséquence de l'usure de ces poils par le frottement dans la position assise, ou bien ne faut-il pas plutôt en conclure que cet ornement n’acquiert toute sa beauté el son développement que chez les mâles? Une dépouille de mâle adulte pourra seule nous fixer sur ce point. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 193 Dimensions du corps en millimètres : Œ ? semi-aduile. adulte. Longueur du corps et de la tête 580 610 — de la queue 590 610 — du pied (du talon à l’extrémité du médius)..! 150 170 _ de la main (du poignet à l'extrémité du mé- dius) 100 | 130 Hauteur de l’o 28 30 Caractères cräniens. — Comme je l’ai signalé plus haut, l’'exemplaire mâle type est loin d’avoir atteint son complet dé- veloppement, ainsi qu'il ressort de l'examen de sa dentition. A la mâchoire supérieure, les incisives etles deux prémolaires de remplacement, et les deux premières molaires sont bien déve- loppées de chaque côté et en pleine activité fonctionnelle; mais les caninesde lait adhèrent encore solidement àla paroi alvéo- laire externe, et leurs racines, incomplètement résorbées, sont pressées et refoulées en bas et en dehors sous la poussée de la canine de remplacement, dont la pointe vient raser le bord érodé de l’alvéole. La dernière molaire est déjà bien formée, mais encore profondément enfouie dans l’épaisseur du maxil- laire très peu développé en arrière. À la mâchoire infé- rieure, la période du remplacement dentaire est moins avancée. Seules, de la seconde dentition, les incisives et les deux premières molaires de chaque côté fonctionnaient ; les canines et les prémolaires de remplacement sont encore re- couvertes par les dents de lait correspondantes dont les racines et les bords alvéolaires sont en voie de résorption. Quant aux dernières molaires, elles sont au même stade qu’à la mâchoire supérieure. Vu l’âge peu avancé de ce spé- cimen, je crois inutile d'insister sur les autres particularités de la têle osseuse, qui ne peut fournir que des caractères de transition et de faible importance, et je passe de suite à l'examen du crâne de la femelle bien adulte. Chez celle-ci, la portion encéphalique de la tête osseuse esl assez courte et ramassée dans le sens antéro-postérieur, mais elle est haute, bien renflée et très globuleuse surtout 154 E. DE POUSARGUES. t dans ses parties pariétale et occipitale. La face est plus al- longée et le museau plus proéminent que chez aucune autre espèce du genre. Cette particularité n’est qu'une consé- quence de la longueur des os nasaux, du grand développe- ment du diamètre vertical ou antéro-postérieur des orbites, qui égale le diamètre transversal, et de la forte saillie préna- sale des intermaxillaires. Cet allongement et cette proclivité se remarquent d'autant plus que la face est assez étroite par le travers des orbites, et que le museau est mince et comme pincé. Les canines sont peu développées tant en épaisseur qu'en longueur, comme chez la plupart des femelles du genre Colobe, aussi, la portion alvéolaire correspondante. des maxillaires ne présente-t-elle pas ces renflements volumi- neux qui, chez les mâles à fortes canines, augmentent de beaucoup la largeur du museau. De plus, par suite du déve- loppement des intermaxillaires, les incisives sont implantées suivant une ligne courbe de très court rayon, ce qui allonge mais en même temps rétréecit beaucoup la voûte palatine en avant de la ligne d'implantation des canines. La voûte pala- line est étroite, sa plus grande largeur est marquée par la ligne qui joindrait les milieux des deuxièmes molaires. De part et d'autre de celte ligne maximum, le palais va se rétré- cissant graduellement de telle façon que la ligne dentaire figure exactement une ellipse allongée, incomplète en ar- rière. Chez la plupart des autres espèces de Colobes, les inci- sives sont implantées suivant une courbe de grand rayon, lrès surbaissée, devenant presque rectiligne chez les vieux individus, les canines sont plus puissantes, la largeur maxi- mum de la voûte palatine se trouve suivant la ligne menée par les intervalles qui les séparent des incisives, et les lignes d'implantation des molaires sont très-peu convergentes en arrière. Par suite de ce mode de conformation, l’ensemble de la ligne dentaire simule presque un rectangle ouvert postérieurement. | Chez le C. Tholloni, la mâchoire inférieure est loin de ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 199 présenter la puissance qu’elle acquiert chez les autres Colo- bes, et sa forme est aussi bien différente. Le menton est très-fuyant, et la branche horizontale de la mandibule re- lativement faible et peu élevée. Quant à la branche mon- tante, elle ne présente qu'une médiocre largeur et forme avec la branche horizontale un angle très-ouvert. Cette obliquité est telle, que, si l’on suppose une perpendicu- laire abaissée du sommet de l’apophyse coronoïde sur le bord inférieur de la mandibule, cette perpendiculaire aboutit juste à l'angle de la mâchoire, et forme avec le bord posté- rieur montant vers le condyle un angle de près de 35°. Chez la plupart des autres Colobes, la branche montante de la mandibule est excessivement large et perpendiculaire à la branche horizontale. Le talon de la mâchoire est reporté bien plus en arrière, et la ligne menée perpendiculairement du sommet de l’apophyse coronoïde sur le bord inférieur de la mandibule est parallèle au bord postérieur montant vers le condyle. Comme à la mâchoire supérieure, les canines inférieures chez le C. Tholloni Q sont faibles, et les molaires manifes- tement convergentes en arrière. L’apophyse coronoïde est bien développée, sensiblement arquée de dedans en dehors, et séparée du condyle par une gorge profonde. En résumé, les caractères cräniens les plus saillants du C. Thollon sont : la grande sphéricilé de la portion céré- brale ; l’étroitesse, l'allongement et la proclivité de la face et du museau; la faible largeur de la voûte palatine; le peu de développement des canines ; la faiblesse relative et l’obli- quité de la mandibule. 156 E. DE POUSARGUES. Mesures du crâne en millimètres : @ œ adulte. semi-adulte. Longueur maximum du crâne (en ligne droite de la crête occipitale à l'extrémité des prémaxillaires) Longueur curviligne du bord postérieur du trou occipi- tal à la suture naso-frontale Longueur en ligne droite de la suture naso-frontale à l'extrémité des prémaxillaires Longueur des os nasaux — du museau (du bord antérieur de l'orbite à l'extrémité des prémaxillaires) Diamètre orbitaire vertical ou antéro-postérieur — — transversal Largeur maximum du crâne aux arcades zygomatiques. — — aux arcades orbitaires Espace interorbitaire Longueur de la face inférieure du crâne (du condyle oc- cipital à l'extrémité des prémaxillaires) Longueur totale de la voûte palatine Largeur du palais à l'extérieur des dernières molaires. _ — maximum à l'extérieur des deuxièmes molaires Longueur rectiligne de la mandibule (du bord antérieur de la symphyse au condyle) Longueur rectiligne de la mandibule (du bord antérieur de la symphyse à l'angle de la mandibule) Hauteur de la branche horizontale de la mandibule der- rière la dernière molaire Hauteur de l’apophyse coronoïde au-dessus du bord in- férieur de la mandibule Distance entre le bord postérieur de la dernière mo- laire et l’angle de la mandibule Hauteur totale de la tête osseuse au-dessus de l'angle de la mâchoire inférieure (1) Cette mesure est prise sur le bord externe de l’alvéole de la der- | nière molaire encore enfoncée dans l'épaisseur de la mâchoire. (2) La largeur maximum du palais chezle jeune mâle correspond aux | premières molaires. (3) Cette mesure est prise derrière la deuxième molaire. (4) Cette dimension est prise du bord postérieur de l’alvéole de la dernière molaire non apparue. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 197 Je ne puis malheureusement fixer d’une façon précise la provenance du jeune mâle type. Il n’en est pas de même du deuxième spécimen femelle que M. Thollon a capturé sur la rive gauche du Congo, en face de Brazzaville. D’après les renseignements très-précis que m'a fournis ce courageux explorateur qui depuis plus de dix ans parcourt nos posses- sions françaises du Congo, je puis affirmer que le C. Thol- loni n’a jamais élé rencontré sur la rive droite. 8. CozoBus PENNANTI. (Wath.) Colobus Pennanti. Waterhouse. P.Z. S. p. 57, 1838. — _ Ogilby. Menageries, p. 268, 1838. Piliocolobus Bouvieri. De Rochebrune. Faune de la Sénégambie (Suppl.), | p. 108, pl. IV, 1886-1887. Colobus Pennanti. De Pousargues. Ann. Sc. nat., p. 260, 1895. a. çj adulte. M. de Brazza. Congo français, 1885. b. © semi-adulte. — — Il est regrettable que ni Waterhouse, ni aucun autre auteur n'aient publié de dessin, pour faire mieux connaître cette belle et rare espèce. Faute de ce précieux renseigne- . ment, bon nombre de naturalistes, n’ayant à leur disposi- tion aucune dépouille de ce Colobe, l’ont confondu avec un autre, et malgré le soin prévoyant qu'avait pris Waterhouse de les mettre en garde contre cette assimilation erronée, ils en ont fait un synonyme Gu Simia ferruginea (Shaw.) ou Bay Monkey de Pennant (1). La dénomination spécifique choisie par Waterhouse a peut-être contribué à engendrer cetle confusion; mais, n'y a-t-il pas aussi à regretter dans le début de la description de cet auteur, l'emploi d’épithètes dans un sens trop absolu, nécessitant de nombreuses recti- fications? De là une certaine obscurité et des doutes que n’a fait qu'accroître la forme forcément hypothétique et réservée sous laquelle sont dépeintes les couleurs préjugées des mem- bres chez des exemplaires mutilés. (1) « This species C. Pennantü is the nearest yet found to the Bay Mon- key of Pennant, but differs, in having the throat and cheeks white. » (Wa- terhouse, P. Z. Si) p. 57, 1838). L 158 E. DE POUSARGUES. Il me paraît impossible de ne pas rapporter à l'espèce Pennanti de Waterhouse deux Colobes rapportés du Congo par M. de Brazza. Le spécimen (a) est un superbe mâle adulte, parvenu à son complet développement. Sa longueur totale est de 1*,41, dont 73 centimèires pour la queue. La tête est forle, les membres sont longs, mais bien musclés. Toute la portion antérieure du corps montre plus de puis- sance que chez les autres Colobes roux, et les longs poils retombants qui garnissent les épaules et la partie antérieure des flancs, exagèrent encore ce caractère. La coloration fondamentale du pelage des parties supé- rieures du corps est le roux, mais on ne trouve cette teinte dans toute sa purelé que sur les flancs et la région scapulaire qui sont d’un roux ardent, passant au roux orangé sur la face externe des membres. Sur le dessus de la tête, la nuque et la partie antérieure du dos, le roux s’assombrit et passe au brun marron foncé vers l'extrémité des poils. Au con- traire, à partir du milieu du dos jusqu à la base de la queue, les poils sont noir grisâtre à la base, roux jJaunâtre à leur extrémité; el du mélange de ces deux teintes résulte une coloration jaunâtre sale qui vient se perdre graduellement dans le roux orangé de la face externe des cuisses. La queue est épaisse, couverte de poils bien fournis et assez longs, mais égaux, el ne formant pas de touffe terminale. Elle est roux orangé dans son premier liers, mais cette teinte va s’assombrissant de plus en plus jusqu’au roux noirâtre sur le tiers distal. Sur la face postérieure des membres, à partir du coude et du jarret, les poils prennent une colo- ralion brun sombre enfumé, qui envahit la face supérieure des poignets, et se continue sur le dessus des pieds et des mains. Cette particularité permet de distinguer aisément le C. Pennanti du C. fuliginosus (Og.) et du C. Tholloni où les membres conservent leur teinte roux fauve jusqu à leur extrémité; et, sur ce point, les prévisions de Waterhouse se trouvent parfaitement d'accord avec la réalité. Sur le devant du front, court un étroit liséré de poils ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 199 d'un noir profond, rigides et dirigés en avant au-dessus des yeux et de la racine du nez. Ce bandeau se continue en s’élargissant sur les tempes, et ses longs poils terminaux, couchés d'avant en arrière, viennent masquer l’orifice de l'oreille. Immédiatement au-dessous de cette plage temporale noire, et à partir du bord latéral des orbites, les joues et les côtés de la têle sont garnis de poils d’un blanc pur, dirigés dans le sens antéro-postérieur. Ces poils, assez courts d’abord, s’allongent de plus en plus d’avant en arrière, et remontent sur les côtés du cou jusque derrière les oreilles en ailes falciformes analogues à celles que l’on remarque chez le Cercopithecus sabæus. D'autre part, les poils roux marron qui bordent en avant et en haut l’espace nu que l’on remarque derrière l'oreille, se développent beaucoup plus que ceux du reste de la tête, et débordent de tous côtés le pavillon, de telle sorte que l'oreille se trouve complètement entourée et en parlie masquée par ces longs poils marron, noir et blanc qui lui forment comme une aigrette circu- laire. La teinte blanche des côtés de la tête et du cou, se continue sur le menton, la gorge, le devant des épaules et des bras, la poitrine, le ventre et la face interne des mem- bres. Les poils ne présentent pas sur tout le corps une longueur uniforme. J'ai déjà signalé l’aigrette circumauri- culaire formée par les longs poils des côtés de la tête et du cou, et les favoris blancs falciformes. Sur la partie anté- rieure des flancs, la région scapulaire et la moitié supérieure des bras, les poils prennent un grand développement, mas- quent complètement les aisselles, et forment une sorte de camail retombant d'un rouge ardent sur les côtés, d’un blanc pur sur le devant des épaules et des bras. A partir du milieu du dos, sur tout le train postérieur, le poil redevient court et couché contre la peau. Sur les parties inférieures, les poils blancs sont assez longs, mais clairsemés. Ils sont même rares, à partir des aisselles, sur les côtés des régions thoracique et abdominale et sur la partie supérieure de la face interne des membres. Le visage est nu, noir brunâtre 160 E. DE POUSARGUES. autour des yeux et à la racine du nez, couleur de chair sur le reste de sa surface. Les lèvres sont garnies sur leurs bords de quelques poils blancs, rares et courts. Les callosités sont bien développées et de couleur brun grisâtre. La peau nue des oreilles et de la paume des mains est noire. Comme on peut s’en convaincre, la description précédente n’est que l’amplification de la courte diagnose latine donnée par Wa- terhouse, diagnose qui me paraît beaucoup mieux dépeindre l'animal que le texte qui la suit. Cette diagnose porte : « C. supra nigrescens, ad latera fulvescenti-rufus, subtus fla- vescens, cauda fusco-nigricante, genis albis. » Il faut donc se garder de prendre au pied de la lettre les expressions sui- vantes du célèbre zoologiste anglais : « The head, back of the neck, and the central portion of the back are black. » Du reste, ainsi que je le faisais remarquer au début de cet article, Waterhouse lui-même corrige ce que sa première description présentait de trop absolu, et en atténue consi- dérablement la portée quand ül dit: « The portion of the back which is described as black, partakes slighily of the rusty hue which prevails over the other parts of the body; it occupies but a narrow porhion of the back, and blends indistinctly into the rust colour. » En tenant compte de ces importantes restrictions, on trouve une concordance parfaite entre la description de Waterhouse et celle d’Ogilby qui s'exprime en ces termes : « Toutes les parties supérieures et externes sont d’un rouge ou marron pourpré vif, s’assombrissant sur la tête, le dos et la queue en une teinte brun foncé, mais d’une façon si insensible qu’il n’existe aucune ligne de démarcation bien nette entre ces deux couleurs. » Ceci répond exactement aux délails que j'ai consignés plus haut, avant même d’avoir pu prendre connaissance du tra- vail d'Ogilby; j'ajouterai, de plus, que l'étude attentive de la description si précise donnée par ce dernier auteur, ne laisse aucun doule sur l'identité spécifique du C. Pennanti el du Piliocolobus Bouvieri (Rochbr.). ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 161 Enfin, d'après des notes inédites de mon savant maitre M. A. Milne-Edwards, le spécimen monté de C. Pen- nanti du British Museum (de Fernando-Po, par M. Thom- son), ne diffère des exemplaires rapportés du Congo français par M. de Brazza, que par les teintes plus foncées du dos, et la nuance plus jaunâtre du pelage blanc des parties inférieures du corps; pour le reste, 1l y a similitude complète. Ainsi que je l’annonçais au début de cet article, le C. Pen- nanti a souvent été rapporté par les auteurs à l'espèce Simia ferruginea (Shaw), Bay Monkey (Pennant), mais les teintes sont différentes, et réparties d’une toute autre façon chez cette dernière espèce. Une autre différence entre ces deux types est celle de l’ha- bilat ; le Bay Monkey de Pennant provenant de Sierra-Leone, le type du C. Pennanti de Waterhouse, de Fernando-Po. On comprend cependant que ce fait ait paru d’une valeur négli- geable malgré l'importance que lui attribuail Waterhouse. Toutes les provenances de Fernando-Po sont en effet sujettes à caution, car, ainsi que l'écrivait Schlegel, « on apporte souvent dans cette île des Singes vivants de la côte opposée ». Mais l'existence maintenant reconnue et authentique du C. Pennanti dans le Congo français, constitue au contraire un argument péremploire en faveur de sa distinction d'avec le S. ferruginea (Shaw) et confirme les vues de Waterhouse. Il en est du C. Pennanti comme du C. satanas. Les types de ces deux espèces faisaient partie du même envoi de G. Knapp de l’île de Fernando-Po, et ont été décrits en même temps par Waterhouse. Depuis, le C’. satanas à été rencontré plusieurs fois au Gabon et dans le bassin de l'Ogôoué, si bien que ces régions sont actuellement considérées comme la véritable patrie de cette espèce. Les arguments que nous venons d’in- voquer en faveur de la distinction du C. Pennanti d'avec le C. ferrugineus, peuvent être employés au même titre contre sa fusion avec l'espèce €. /uliginosus (Og.); les aires d’ha- bitat, de même que les teintes diffèrent totalement; du reste, ANN. SC. NAT. ZOOL. nt LE 162 E. DE POUSARGUES. pour fixer les idées sur ce point, il ne sera peut-être pas inutile de jeter un rapide coup d'œil sur les espèces de Colobes roux actuellement connues, et sur leurs principaux caractères différentiels. RÉVISION DES COLOBES ROUX. On peut fixer à sept le nombre des Colobes roux et bruns; ce sont par ordre d'ancienneté : C. ferrugineus (Shaw) 1800, C. fuliginosus (Og.) 1835, C. verus (v. Ben.) 1838, C. Pennanti(Wat.) 1838, C. Kirk (Gr.) 1868, C. rufomitratus (Pet.) 1879, et LE Thollont (A. M.-Edw.) 1886. Vu la couleur brune dominante du pelage, les espèces C. verus et C. rufomatratus peuvent être distraites de cette liste pour former un groupe spécial, les Colobes bruns. Dans une note publiée récemment (1) j'ai montré, du reste, que par ses caracières crâniens le C. verus s’éloignait de tous ses congénères et devait constituer sous le nom de Lophoco- lobus (2), un sous-genre distinct dont le C. ru/omitratus pré- sente quelques-unes des particularités. Restent alors cinq espèces de Colobes roux proprement dits qui se différencient de la façon suivante : 1° COLOBUS FERRUGINEUS. (Sh.) Bay Monkey. Pennant. Hist. of Quadrup., 1793, 3° édit., vol. I, p. 213. Simia ferruginea. Shaw. General Zool., t. I, p. 59, 1800. Colobus ferruginosus. E. Geoffroy. Ann. du Muséum, t. XIX, p. 92, n°2. Colobus ferrugineus. Yliger. Prodromus, 1811. — ferruginosus. Ogilby. Menageries, p. 267, 1838. Cette espèce ne nous est connue que par la description de Pennant, relevée sur un spécimen provenant de Sierra- (4) Bulletin Mus. Hist. nat., n° 3, p. 98, 1895; Ann. Sc. nat., p. 250, 1895. (2) Ce terme subgénérique doit disparaitre pour faire place suivant la loi de priorité à celui de ?rocolnbus. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 163 Leone, reproduite textuellement par Shaw et d’autres au- teurs, et que je ne puis que transcrire ici : « Singe avec une couronne noire; dos de teinte bai som- bre ; face externe des membres noire; joues, parties infé- rieures du corps et des membres d’un bai lrès clair ; queue irès longue, grêle et noire. » Bien des Colobes roux ont été rapportés à tort à celte espèce, car aucun d'eux, que Je sache, ne présente une li- vrée qui corresponde exactement à la description de Pen- nant, description à laquelle on est tenu de s’en rapporter scrupuleusement, faute d’autres termes de comparaison (1). Sur ce point on ne peut donc aujourd’hui que répéter ce que Waterhouse (2) écrivait en 1838, à savoir que l’on doit laisser cette espèce telle, tant qu'on n'aura pas trouvé un animal qui s'y rapporte rigoureusement. 2° CoLoBus FULIGINOSUS. (Og.) Cette dénomination doit être étendue, à mon avis, à deux types qu'Ogilby avait cru devoir distinguer spécifiquement, mais qui ne sont en réalité que deux variétés, l’une plus claire, l’autre plus foncée d'une seule et même espèce. a. C. FULIGINOSUS, Var. RUFO-FULIGINUS. (Og.) Colobus Temmincki. Kuhl. Beitr. z. Zool., p. 17, 1820. — fuliginosus. Ogilby. Proc. Zool. Soc. London, p. 97, 1835. — rufo-fuliginus. Ogilby. Menageries, p. 270, 1838. — fuliginosus. Temminck. Esq. zool. côte Guinée, p. 24, 1853. Dessus de la tête, du corps et de la racine de la queue d'une teinte brun noirâtre enfumé qui descend sur la partie supérieure des flancs et la face externe des cuisses et des bras. Le reste de la queue, des flancs et de la face exierne des (1) Le type du Bay Monkey de Pennant faisait partie de la collection de Sir Ashton Lever, et avait été détruit depuis longtemps déjà à l’époque où Ogilby publia ses Menageries, p. 256, 1838. (2) « I think we had better let the Bay Monkey stand until we can find an animal agreeing with Pennant’s description.» (Waterhouse, Pr. Zool. Soc. Lond., p. 58, 1838.) 164 | .__ E. DE POUSARGUES. membres jusqu'aux extrémités, devant des épaules et favoris rouge brique. La ligne de démarcation entre le brun enfumé et le roux est des plus nettes. Sur la nuque, ou l’occiput, le brun se trouve assez fortement mêlé de roux ou de roux gri- sâtre, et cette teinte descend parfois jusqu'au-dessus des épaules (1). Toutes les parties inférieures sont d’un blanc jaunâtre sale. C'est à cette variété qu'il faut rapporter le C. Temmincki (Kuhl), et même, suivant la loi de priorité, cette dernière dé- nomination devrait être employée de préférence, s’il n’y avait des raisons sérieuses pour la rejeter. L'emploi de ce nom spécifique, en effet, renverrait néces- sairement à la description de Kuhl; or celte description ne peut que donner une fausse idée des teintes qui caractéri- sent le type du C. Temminchi et la variété qui nous occupe. Telle est l'opinion d’Ogilby, qui après avoir vu le spécimen de Kuhl écrivait : «... an error in the description of Kuhl, who says that the upper and outer parts are black, whereas they are really blue. » Ces raisons paraissent avoir été acceptées, au moins laci- tement, par Temminck, qui, quinze ans plus tard dans ses Esquisses zoologiques, adopta le nom spécifique de julgi- nosus, à l'exclusion de celui proposé par Kuhl. C'est d’ail- leurs pour obvier aux inconvénients de ces synonymies trom- peuses, qu'Ogilby avail repris sa première description et sub- situé aux deux noms Temmincki et fuliginosus en litige, l'épithète très judicieusement composée ru/o-fuligenus. Celle-ci, de même que celle de ru/o-niger qui s'applique à la forme suivante, méritent d'être conservées à litre subspé- cifique, car elles indiquent très clairement les particularités qui distinguent les deux variétés et comme l’écrivait Osilby, valent à elles seules toute une description. La variété rufo-fuliginus est, paraît-il, assez commune sur (1) Chez l'individu monté de C. Temmincki, du British Museum, cette teinte. rousse se mélange au gris depuis l’occiput jusqu’au-dessus des épaules. (M. A. Milne-Edwards, Notes inédites.) ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 168 les rives de la Gambie et s'étend probablement jusqu'à Sierra- Leone. * bd. G. FULIGINOSUS, Var. RUFO-NIGER (Og.) Colobus rufo-mger. Ogilby. Ménageries, p. 273, 1838. — ferrugineus. Sclater. Proc. Zool. Soc. London, p. 590, pl. XLVIII, 1890. Dessus de la tête et du corps, partie supérieure des flancs, face externe des cuisses et des bras d’un noir profond (1). Queue noire ou d’un roux sombre fortement lavé de noir, et presque exclusivement de cette dernière teinte vers son ex- trémité. Sur tout le reste du corps, les poils sont uniformé- ment colorés en roux marron intense. Celte variété présente les mêmes proportions que la précédente ; la distribulion des teintes est, sauf pour la queue, l’exacte reproduction de ce que nous a montré la variété rufo-fuliginus ; seule leur in- ‘tensité diffère notablement : le brun fuligineux est ici rem- placé par le noir, et les couleurs blanc jaunâtre sale des parties inférieures du corps et de la face inlerne des mem- bres ont disparu devant un envahissement complet de la teinte marron. À cette variété se rapporte l'individu femelle. représenté dans les Proceedings de 1890 sous le nom de C. ferrugineus, et l’on peut d’après celte planche se faire une idée irès exacte des particularités de coloration qui carac- térisent la variété ru/fo-niger. Cette sous-espèce est originaire de Sierra-Leone. Il en existe également des peaux plates mutilées au Musée britannique provenant de Fernando-Po, et données par M. Thomson et G. Knapp. Mais, ainsi que nous l'avons dit, l'authenticité de cette dernière provenance ne doit être acceptée que sous la réserve d'une importation probable. (1) Une preuve évidente de l’étroite parenté qui unit le C. rufo-niger au C. rufo-fuliginus, c'est la présence d'une tache grise nuquale sur certains exemplaires de la première espèce. « Chez le C. rufo-niger, de la collection du British Museum, acheté à Ste- vens en 1861, la tache rousse mêlée de gris apparaît sur l’occiput, tandis qu'elle manque sur les deux peaux plates de Fernando-Po, de G, Knapp. » (M. A. Milne-Edwards, Notes inédites.) 166 E. DE POUSARGUES. 3° CoLoBus PENNANTI (Wath.) Colobus Pennanti. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 57, 1838. — —— Ogilbv. Menageries, p. 268, 1838. Piliocolobus Bouvieri. De Rochebrune. Faune de Sénégambie (Suppl.), p. 108, _ pl. IV, 1886-1887. Je crois avoir suffisamment insisté sur la parfaite indé- pendance de cette espèce pour n'avoir plus à donner ici qu'une courte diagnose. Portion supérieure de la face externe des membres, flancs et région scapulaire d’un roux ardent, passant insensible- ment au brun marron sombre sur le dessus de la tête, du cou, des épaules et de la moitié antérieure du dos, au roux jaunâtre sale sur la moitié postérieure du dos et sur la croupe. Extrémité des membres brun enfumé à partir des coudes et des jarrets. Queue dans le tiers proximal d’un roux vif s’assombrissant graduellement en un brun marron sur le reste de son étendue. Favoris d’un blanc pur dirigés d'avant en arrière. Gorge, poitrine, ventre et face interne des mem- bres blanc ou blanc légèrement teinté de jaune. Pelage de l'avant-train long retombant et formant un peu camail. Pe- lage de l’arrière-train court et serré contre la peau. Patrie. — Fernando-Po? Gabon, bassin de l’'Ogôoué. 4° CoroBus Kirki. (Gr.) Colobus Kirki. Gray. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 180, pl. XV, 1868. — — Schlegel. Singes. Mus. Pays-Bas, p. 25, 1876. | Piliocolobus Kirki. De Rochebrune. Faune de la Sénégambie (Suppl.), p. 412, pl. VI, 1886-1887. Le dessus de la tête, le dos, les flancs et toute la queue sont d’un roux ardent. La région scapulaire, la face externe des membres antérieurs et des cuisses, le dessus des mains et des pieds d’un noir profond. Bandeau frontal, favoris, côtés du cou, parties inférieures du corps, et face interne des membres d'un blanc pur. A l'exception de la face externe ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 167 des jambes où se trouvent mêlés en proportion à peu près égale des poils blancs et noirs, il n'existe sur aucune autre parlie du corps ni demi-teinte ni dégradé qui permette de passer insensiblement d'une couleur à l’autre; les transi- tions ne sont pas ménagées, le roux, le noir et le blanc se heurtent violemment, et ce mode tout particulier de répar- üition des couleurs, rend le C. Xÿrki reconnaissable entre tous les Colobes roux. Cette robe singulière semble comme un assemblage hélérogène des diverses teintes que l'on trouve chez plusieurs autres Colobes et affectant les mêmes régions du corps; c'est, si l’on veut me passer cette épithète, une livrée éclectique. Ainsi le pelage blanc des parlies inférieures du corps de la face interne des membres et des favoris rappelle le C. Pennanti. La coloration rouge du dos et noire des mem- bres est celle du Bay Monkey — C. ferrugineus (Shaw); la queue semble empruntée du C. fuliginosus, var. rufo-fuligi- nus (Og.), et par l'existence d’un bandeau blanc en travers du front, le C. ÆXw'k1 forme un trait d'union entre les Co- lobes roux et les Colobes noirs. Patrie. — Zanzibar. 5° CocoBus THoLLont. (A. M.-Edw.) Dessus de la tête, de la nuque et des épaules d’un brun marron, passant insensiblement au rouge brique sur le reste du dessus du corps, et la face externe des membres, s’assom- brissant légèrement sur les mains et la portion terminale de la queue. Favoris et devant des épaules d’un roux orange. Gorge, poitrine, ventre et face interne des membres jaune blanchâtre. Pelage uniformément court, à l'exception de deux longues mèches bien fournies de chaque côlé et au- dessous de la base de la queue ; caractère tout à fait spécial à cette espèce. Patrie. — Congo, rive SE Si, comme j'ai tenté de le faire dans le tableau suivant, l'on cherche à rapprocher, suivant leurs affinités respectives, 168 E. DE POUSARGUES. ces différentes espèces de Colobes, on voit que la teinte, soit rousse, soit blanche des favoris, constitue un caractère d’im- portance primordiale qui permet de les ranger de prime abord en deux groupes bien distincts, l’un comprenant C. Tholloni, C. ferrugineus et les deux variétés du C. fuligi- nosus, l’autre constitué par C. Pennanti et C. Kirki. Pour ce dernier groupe, le blanc est également la teinte dominante du pelage des parties inférieures, tandis que chez les espèces du premier groupe la couleur fondamentale de ces mêmes parties est le jaune, avec des intensités variables jusqu’au roux. Sans présenter une fixité aussi parfaite et aussi absolue que le caractère choisi comme base, celui-ci a néanmoins une certaine valeur et mérile d’être pris en considération. J'ai ensuite utilisé comme caractères d'importance décrois- sante, les différences très appréciables que présentent Île mode de distribution des teintes noire, brune ou rousse, et l'allongement des poils sur certaines parlies du corps. Enfin ce tableau permettra de saisir dans son ensemble l'aire de répartilion géographique des Colobes roux, tout en indiquant les limites des zones particulières aux espèces qui, à part le C. Xirki cantonné dans l'Est, se trouvent régulière- ment échelonnées le long de la côte occidentale d'Afrique depuis la Gambie jusqu’au sud du Congo. 169 ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. nn "Ieq7UeZ ‘tte(49) WU SnQ0109 L0d-0puru ‘ 9n0080 G uoqen *‘°: soso (‘ueM) AJUDUUIT SNQ01017 ‘(049 -ne$ 94m) OBuorp ‘+++ *(-MP-"II °V) 2U0/IOYT SNQ0109 PAR UIUID | ÿ -O1d JIOU SUP 79 spoid ‘sassino S9P 79 SIndHHJUr S91QUI9 U S9p 2UI9YXE SOU ‘OUBIG TEJUOM NEOPUR | nd ouvrq | Li ee Rte SUOACJ ‘°°° gUNnJuo UNI SurBUu J9 SPald ‘XNOI S9IQUAU S9P 9U197X9 990] — ‘JIOU [UJUOIF NVOpUE{] ] ‘**** “ouaojrun onbsoud xnox un p S9IQUAU S9P 9UI9]X9 9907 J9 sd109 | *XNOI S24{0[07) np SNSSO — ‘’SO[CUE SOUIQUI S9(] ‘pns np (50) | SOJOTAIY ‘orquen Snubun/-o/n4 xeA ‘ossnoi anon) "JUS 9178504 aunt 9JjJu9A PR HO -nju9 UNnIQ SO(] (50) ; *XNOI STIOACI snsou1b | *OI10A nf SNQ0709 ‘‘'‘'''""XNOI s91q -IP 9109 ‘eq ‘(°30) -LU9U JUNJU9 UNI -1"] aU09"-CAI9IS 4obru-0/nt ‘ICA ‘o4jp1ou uniq no JIOU SJUCT 39 S0(] NO 9allOU 9n9n() ‘soeur *UOIIVU 91}U9 A SOU9QUI 9P SP *JIOU SO(J | "AUO9T-BAIOIS *‘""""""""""""""*(MOUS) SnoWÜNUI] SNQ0109 4 * ‘‘** * *SATOU S9IQUION ‘XNOI SJUBI] 79 S0(] 170 E. DE POUSARGUES. Cette carte permet de constater l'habitat exclusivement équatorial des représentants du genre Colobus; quant au mode de distribution des espèces dans cette zone qui ne dépasse pas 12 à 15 degrés au Sud et au Nord de l’Équateur, _il présente un caractère qui mérite d’être signalé. Si l’on écarte le C. quereza et ses variétés, dont l'aire de dispersion couvre toute l'Afrique centrale et chevauche sur l'Est et l'Ouest africains, on remarque que dans chaque province simienne cohabitent un Colobe à pelage noir et un à pelage roux, auxquels vient parfois s’adjoindre une espèce à pelage brun. Le fait peut paraître moins évident pour la province ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 171. située à l'Ouest du Niger. Il est à noter toutefois, que des trois espèces noires y signalées, l’une C. polycomus ne l’a été que pour mémoire et doit en réalité disparaître, soit comme synonyme du C. wrsinus, soit plutôt comme espèce hypo- thétique. Restent les deux espèces à queue blanche, C. wrsi- COLOBES REGIONS a — — BRUNS ROUX NOIRS AFRIQUE SEPTENTRIONALÈ = à ; P. | C. palliatus. (Pet.) 52 [R.|C. rufomitra-\K. | C.Kirki. (Gr) | ;G. |var. typicus. £ : tus. (Pet.) È (Rüpp.) S]G1.|var. caudatus. ER à (Thos.) 3 5 B. | C. Pennanti k G?.|var. occidentalis. = = (Wath.) (Rochbr.) Ë ne S. | C. satanas. (Wath..) = - | En) & | ils 5 F.|v. rufo-niger.|L. |C. vellerosus. Alès | | (Og.) (I. Geof.) a 5 / % IV.|C. verus. ES D des 2 |S = Een) = { U. |C. ursinus. (Og.) Sy ESS ‘ ES LE one = È o nus. (Og.) |Ut.|C.polycomus.(Zim.) ='E IT. |C. Tholloni. A. | C.angolensis.(Scl.) EE | (A. M.-Edw.) ( | | | AFRIQUE | | AUSTRALE nus, C. vellerosus, dont les étroites affinités réciproques sont bien connues. Mais, sans prétendre unifier ces deux iypes, je ferai observer que l'aire d'habitat du C'. vellerosus coïncide à très peu près avec celle du Colobe roux C. ru/fo- rniger, tandis que d'autre part, le C. wrsinus s'associe au C. rufo-fuliginus ; le Colobe brun C. verus étant commun à ces deux sous-provinces dela région située à l'Ouest du Niger. 179 E. DE POUSARGUES. GENRE CERCOPITHECUS. Avant de donner la liste des différentes espèces de Cerco- pithèques, si variées et si nombreuses, dans ces régions de l'Ouest de l'Afrique équatoriale visitées par nos voyageurs français, Je crois nécessaire de reprendre ici la révision d’un groupe renfermant un cerlain nombre de formes caractéri- sées par la présence, sur l'extrémité du nez, d’une tache pi- leuse de forme nettement circonscrite, et le plus souvent de couleur blanche. Comme il arrive souvent, les zoologistes ne se sont pas toujours entendus sur l'identité des divers repré- sentants de cette petite famille, et, soit à cause de l’excessive brièveté ou du défaut de clarté et de précision que l’on peut reprocher à certaines descriplions, soit par manque de ter- mes de comparaison assez nombreux et assez typiques, les mêmes espèces ont été souvent décrites sous deux et même plusieurs noms. Les importantes collections rassemblées par nos voyageurs ont notablement accru le fonds déjà si riche de la série des Singes du Muséum de Paris, et à l'aide de ces précieux matériaux d'études, j'ai pu entre- prendre la tâche de débrouiller la synonymie si obseure des Cercopithèques Blancs-nez. Cette diversion, sera ulile, en ce qu'elle fixera définitivement, je l’espère, le nombre et les affi- nités des espèces connues de ce groupe ; en tous cas, je la crois indispensable pour prévenir tout malentendu et déter- miner le sens précis des dénominations spécifiques que j'aurai à employer dans la suite de ce catalogue. RÉVISION DES CERCOPITHECI RHINOSTICTI. L'intéressante famille des Guenons à nez blanc, nommées aussi Blancs-nez ou Pains à cacheter par les voyageurs et les colons français, renferme un certain nombre de types bien distincts ; mais les zoologistes descripteurs se sont plu à les multiplier outre mesure, et il en est résulté dans ce petit groupe une inexprimable confusion. ÉTUDE SUR LES .MAMMIFÈRES DU- CONGO FRANÇAIS. 173 Déjà, en 1876, Schlegel(1) avait réagi contre cette funeste tendance, et en réduisant notablement le nombre des espè- ces, avait apporté quelquelumière au milieu de cette obscurité. Depuis cette époque, de nouvelles espèces, les unes valides, les autres défectueuses, ont été créées, et leur révision a été en- treprise tout récemment par M. Sciater (2) qui réunit tousles Cercopithèques blancs-nez dans une section spéciale sous le nom très judicieusement choisi de Cercopitheci rhinosticti. On peut distinguer deux parties dans le travail de M. Sclater, la première où sont décrites et rangées par sec- tions les espèces que l’auteur à pu contrôler de visu; la seconde, comprenant une liste avec l'indication des affinités” des espèces dont il n'a pu se procurer les dépouilles. Le savant Secrétaire de la Sociéte zoologique de Londres laisse ainsi aux naluralistes en possession de documents précis, le soin de combler celte lacune. On ne peut, certes, que le louer de cette sévère retenue, et chacun conviendra que cette méthode d'examen direct est le plus sûr garant de l’exacti- tude des observations. Mais c’est là une méthode oplima d’une application rigoureuse difficile, pour ne pas dire im- possible ; et j'ai tenté, en examinant avec soin es nombreux spécimens réunis au Muséum de Paris, ou en suppléant l’observation directe par l'étude sérieuse et approfondie des descriptions et des figures laissées par les auteurs, de com- pléter et de mettre au point la classification des Cercopithè- ques rinosticti (3). (1) Schlegel, Mus. des Pays-Bas (Singes), 1876. (2) Sclater, On the genus Cercopithecus P.Z.S., p. 243, 1893. (3) Au moment où je terminais cette révision des Cercopithèques Blancs- nez, M. Matschie faisait paraître, sur le même sujet, un travail qu'il eut l'extrême obligeance de m'adresser. (Ueber die weissnasigen Meerkatzen, in Sitz. Ber. Gesellsch. naturf. Freunde, n° 3, p. 95, 21 mars 1893.) J'ai été heureux de constater que, sur plusieurs points, ma manière de voir concordait avec celle de M. Matschie, et la priorité de certaines rectifi- cations introduites dans la synonymie de quelques espèces revient de droit au savant mammalogiste allemand. IL se trouve au contraire que quelques- unes des interprétations que j'ai émises, diffèrent de celles de M. Matschie. Quelques notes indiqueront brièvement sur quels points M. Matschie et moi sommes tombés d'accord, ou en opposition d'idées. 174 E. DE POUSARGUES. Comme leur nom l'indique, les Blancs-nez se distinguent de tous les autres Cercopithèques en ce que l’espace compris entre les narines, ou, comme le dit Schlegel, le champ nasal, est revêtu de poils ras, le plus souvent blancs, parfois jaunes ourouges, mais dont la teinte éclatante se détache toujours vigoureusement sur le fond sombre, soit noir, soit bleu violacé, de la peau nue du reste de la face. La forme de ce champ nasal varie : tantôt, il s'étend très peu vers le haut, et offre l'aspect; soit d’un triangle dont l’une des pointes des- cend comme un coin entre les deux angles inférieurs des narines, tandis que le côté basal opposé coupe transversale- ment la ligne du nez un peu au-dessus du niveau des angles supérieurs des orifices nasaux; soit d’un losange irès-sur- baissé à grand diamètre transversal, débordant sensiblement le nez; tantôt au contraire 1l est oblong, à grand diamètre vertical, présentant inférieurement la forme que je viens de signaler, mais remontant le long de la ligne nasale jusqu'au niveau des paupières inférieures. Chez les Cercopithèques dont la tache nasale présente cette dernière forme, la couleur dominante du pelage est le noir relevé sur certaines parties de fines piquetures blan- _ches. Cet ensemble de caractères les différencie nettement des espèces chez lesquelles le diamètre transversal de la tache nasale l'emporte sur le diamètre longitudinal ou vertical. Chez ces dernières, dont le pelage est de couleur brun olive plus ou moins sombre tiqueté de jaune ou de roux orange, la queue est tantôt fortement teintée de rouge sur une éten- due plus ou moins grande, el tant dessus que dessous ; tantôt au contraire la queue sur le dessus est de la couleur du dos, tandis que dessous elle présente une teinte d’un blanc grisä- tre pâle. Dans ce dernier cas, la tache nasale est nettement triangulaire et d’un blanc pur; dans le premier, le champ nasal est cordiforme ou losangique, d’un blanc plus ou moins lavé de jaune ou d’un rouge éclatant. En tenant compte de ces caractères, nous pouvons, dès à présent, admettre dans les Cercopitheci rhinosticti, trois séries à chacune desquelles ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 175 nous donnerons pour plus de commodité le nom de l'espèce la plus ancienne et pour ainsi dire type. Ces trois séries seront : 1° La série des Pétauristes, ayant pour type le C. petau- rista (Schreb.), comprenant les espèces à pelage brun olive pâle tiqueté de jaune, dont la queue présente au-dessus la couleur du dos et au-dessous une teinte blanc grisälre ; et dont la tache nasale, d'un blanc pur, offre nettemeni la forme d’un triangle. 2° La série des Ascagnes, ayant pour type le C. asca- nias (Aud.), dans laquelle viennent se ranger les espèces à pelage brun olive sombre tiqueté de roux orange, dont la queue est rouge rutilant et la tache nasale cordiforme ou losangique, blanche ou rouge. 3° La série des Æocheurs, ayant pour type le C. nictitans, dans laquelle il faut admettre les espèces chez lesquelles le diamètre transversal du champ nasal est inférieur au diame- tre vertical et dont le fond du pelage est noir sans en excep- ter la queue tant dessous que dessus. En répartissant chacun dans la série qui lui convient, el suivant leurs affinités respectives les divers Blancs-nez dé- crits jusqu’à ce jour nous aurons le tableau suivant : 1'e SÉRIE 2€ SÉRIE 3€ SÉRIE PÉTAURISTES ASCAGNES HOCHEURS C. petaurista. (Schreb.) ,|C. ascanias. (Aud.), 1799.|C. nictitans. /L.), 1766. 117. C. histrio.(Reich.),1863.|C. Martini. (Wath.), C. fantiensis.(Matsch.),|C. melanogenys. (Gr.), 1838. 1893. 1845. C. ludio. (Gr.), 1849. C. erythrogaster. (Gr.),|C. picturatus. (Sant.),|C. Stampfii. (Jent.), 1888. 1866. 1886. C. Buettikoferi. (Jent.),|C. Schmidti. (Mat.),1892. 1886. C. erythrotis. (Wath.), C. signatus.(Jent.),1886. 1838. Dans ces trois séries, quelques espèces présentent une validité incontestable, mais bon nombre d’autres sont défec- 176. E. DE POUSARGUES. tueuses et doivent disparaître. Pour mener à bonne fin ce travail d'épuration, il nous suffira de rappeler en quelques mots les caractères de chacune des espèces adoptées comme types, de discuter et d'établir ensuite la valeur et le degré d'importance des caractères différentiels admis par les au- teurs pour les espèces créées ultérieurement. PREMIÈRE SÉRIE. — PÉTAURISTES. La série des Pétauristes présente une homogénéité extrême, et les différentes espèces qui la composent ont toutes entre elles des analogies si parfaites, et des airs de famille si frappants, qu'il est impossible de se méprendre sur leurs affinités réciproques. . Aussi, en raison même de cette homogénéité, les coupes que l’on a établies dans ce groupe ne sont-elles basées que sur des différences dont la valeur est parfois assez minime, et que leur constance, jusqu’à ce jour incontestée, permet seule de considérer comme d'ordre spécifique. Les espèces de cette série sont au nombre de quatre : 1° CERCOPITHECUS PETAURISTA. (Schreb.) Simia petaurista. Schreber. Säugthiere, I, p. 103, n° 24, tab. 19 B, 1775. Cercopithecus petaurista. Erxleben. Syst. Regn. Anim. (Mamm.), p. 35, LINE Le Blanc-nez. ANlamand. Buffon (Suppl.), t. VII, p. 67, 1789. Ascagne femelle. Fr. Cuvier. Mamm., 1820. Cercopithecus petaurista. Schlegel. Mus. des Pays-Bas. Singes, p. 86, 1876. — —— Jentink. Not. f. Leid. Mus., p. 55, 1886. = _ Sclater. P. Z.S., p. 244, 1893. — fantiensis. (1) Matschie. Sitz. Ber. Ges. naturf. Freunde. Ber- lin, p. 64, 1893. Cette espèce, type de la série des Pétauristes, est parfaite- ment définie ; les descriptions des divers auteurs que Je (4) Le degré d'intensité de coloration des poils du dos, le plus ou moins de largeur de la raie blanche sous-auriculaire et des bandeaux noirs du vertex et des joues sont les seules différences sur lesquelles est basée la dis- tinction spécifique du C. fantiensis. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 177 viens d’énumérer sont des plus concordantes, et ne laissent pas subsister le moindre doute. Je me contenterai donc ici d'une courte diagnose, en renvoyant pour plus de détails aux ouvrages ci-dessus désignés. Les poils des parties supérieures du corps et de la queue sont annelés de brun olive et de jaune tirant plus ou moins au roux doré vers la portion médiane du doset de la croupe. Un bandeau noir ceint le front immédiatement au-dessus des orbites, s’élale sur les tempes jusqu’au-dessus des oreilles, et se continue au travers du vertex, sous forme d’une ligne transversale qui dessine et circonscrit comme une calotte sur le devant de la têle. Le ventre, la poitrine, la gorge, le menton et les côtés de la tête el du cou sont recouverts de poils blancs. Cetle teinte remonte jusqu’à l'oreille, mais elle est barrée, un peu au-dessous de celle-ci, par une étroite bande noire qui naît de l’angle externe de l'œil, et va se perdre en arrière dans le pelage sombre tiqueté du dessus du cou. En avant de ces favoris blancs, les joues sont garnies, sur une faible étendue, de poils noirs assez clairsemés que l’on retrouve sur la ligne du nez depuis le bandeau frontal noir jusqu’à la tache nasale pileuse blanche. Celle-ci est de forme triangulaire, la base tournée vers le haut, l'angle opposé se prolongeant en pointe jusqu'entre les narines. Le reste de la face est nu el noir. La face interne des membres et le dessous de la queue sont d’un blanc grisâtre. La ligne de séparation des teintes différentes du dessus et du dessous de la queue est nettement tracée dans les deux liers proximaux de cet organe, puis devient moins distincte et de plus en plus con- fuse dans le dernier tiers. On n'’observe jamais chez le C, petaurista, non plus que dans les autres espèces de sa série, la teinte rouge rutilant qui orne la queue des Cer- copithèques de la série des Ascagnes, et, comme je l’ai déjà dit, constilue pour ces derniers un caractère exclusif. La Côte d'Or est le seul habitat cerlain du C. petaurista. ANN. SC. NAT. ZOOL. I, 12 178 E. DE POUSARGUES. 29 CERCOPITHECUS ERYTHROGASTER. (Gray.) Cercopithecus erythrogaster. Gray. P. Z. S. p. 169, pl. XVI, 1866. = — Murnie- M 72S., p. 360, 1866. — — Schlegel. Mus. Pays-Bas. Singes, p. 69 et 80, 1876. _ -- Slater, P.2.15.,;1p. 252, 1893: 222 — De Pousargues. Mém. Soc. Zool. de France, p. 69, 1894. Le C. erythrogaster présente absolument le même pelage que le C. petaurista, avec cette seule différence que les poils qui garnissent la poitrine et le ventre sont de couleur rouge brique. Le blanc ne reparaît que sur la gorge, le menton et les côtés du cou et de la tête, bordé d’un étroit liséré de la teinte rouge qui remonte de la poitrine le long des côtés du cou, et vient remplacer la teinte blanche au-dessus de la li- gne noire qui barre supérieurement les favoris. La face externe des membres antérieurs est un peu plus sombre que chez le C. petaurista, el passe au noir sur les poignets et les mains. En raison de ce dernier caractère, et de l’absence de iache nasale blanche chez les deux jeunes exemplaires des Musées de Londres et de Leyde seuls connus de M. Sclater, ce savant Zoologiste avait classé le C. erythrogaster dans sa section des Melanochiri. Le spécimen mâle adulte que pos- sède le Muséum de Paris présente au contraire la tache nasale caractéristique; 1l en est de même pour ceuxdes Musées de Berlin el de Stutigard (Matsche). À ce critérium que vien- nent corroborer d’autres analogies de pelage d’une impor- tance indiscutable, il faut reconnaître dans le C. erythrogaster un Blanc-nez de la série des Pétauristes{1). Comme je l’ai déjà indiqué, l’absence de la tache nasale chez les spécimens des collections de Londres et de Leyde doitêtre attribuée au jeune âge, etil n'y a nul doute pour moi, que des découvertes ulté- rieures ne viennent changer cette présomption en certitude. (1) Les véritables affinités du C. erythrogaster avaient été entrevues par M. Matschie, qui en 1893 écrivait : « diese Meerkatze hat jedoch weisse « Wangenhaare, und ist den zur pelaurista-Gruppe gehôrigen Affen viel « ähnlicher. » (Sitzber. Ges. naturf. Freund., Berlin, p. 226, 1893.) ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 179 La patrie du C. erythrogaster est encore hypothétique ; les rares exemplaires des Musées de Paris, Londres, Leyde et Berlin n’ont aucune indication de provenance. Toutefois M. Matschie me signale l'individu de Stuttgard comme pro- venant de Lagos, d’où il aurait été rapporté par le mission- naire Mann. Il serait à désirer que des recherches soient entreprises dans le Togo, le Dahomey el le Bénin qui vien- nent confirmer cette indication tout à fait isolée. 39 CERCOPITHECUS BUETTIROFERI. (Jent.) Cercopithecus Büttikoferi. Jentink. Not. fr. Leyd. Mus., vol. VIII, p. 56, 1886. — Buettikoferi .Sclater. P. Z. S., p. 244, 1893. _. Büttikoferi. Matschie. Sitz. Ber. Ges. naturf. Freunde, n° 3, p. 99, 1893. La seule différence à signaler entre le C. Buettikoferi et le C. petaurista est l'absence chez le premier de toute trace de bandeau noir sur le vertex entre les oreilles ; pour le reste du pelage, il y a identité complète. Celle ressemblance presque absolue, et la proximité des aires d'habitat des deux espèces, porteraient à considérer le C. Buettikoferi (Libéria) comme une variété du C. petaurista (Côte d'Or). Le témoignage des auteurs, 1l est vrai, est unanime autant que formel sur la constance de la bandelette noire du vertex chez le C. petaurista, comme on peut en juger d’après les citations suivantes : « Fascia nigra trans caput ab aure ad aurem. » (ERXLEBEN. «_ Il part des oreilles une raie noire qui entoure circulaire- ment toute la parlie supérieure de la têle. » {[ALLamaxp.) « Quelques poils, plus noirs que les autres, entouraient le front, et passant au coin de l’œil et au-dessus des oreilles venaient se rejoindre derrière la têle. » (F. Cuvier. « La large bande noire de la base du front, qui s’étend jusqu'aux oreilles, se prolonge en outre à travers le verter, en sorte que cette portion antérieure du vertex et le front entier se lrouvent comme enclavés dans un cercle noir. » | (SCHLEGEL.) 180 E. DE POUSARGUES. Ces témoignages mérilent certainement d'être pris en considération, et on ne peut nier qu'ils militent en faveur de l'indépendance spécifique du C. Buettikoferi. Toutefois si le bandeau noir interauriculaire du vertex est nettement marqué chez le C. petaurista, il devient plus vague chez l’es- pèce que M. Maischie à distinguée sous le nom de C'. fan- fiensis. Celte circonstance compromet la stabilité et par conséquent la valeur du caractère admis comme spécifique par M. Jentink, car elle autorise à supposer que l'on peut trouver tous les intermédiaires entre le C. petaurista et le C. Bueltikoferi. Dès lors, suivant une hypothèse que j'ai déjà émise dans un récent travail, le C. Buettikoferi ne devrait-il pas être considéré comme une variété purement locale, occupant le long des côtes de Guinée un territoire nettement délimité, Sierra-Léone et Libéria? D'autre part, la forme typique C. petaurista dans laquelle serait englobé le C. fantiensis, s'élendrait du cap des Palmes à l’'embou- chure de la Volta. Enfin, lorsque l’on sera en possession de nombreux exemplaires de provenance authentique, peut-être devra-t-on ne considérer également que comme simple va- riété le C. erythrogaster dont l'aire d'habitat comprendrait les régions situées entre la Volta et Le bas Niger? 4° CERCOPITHECUS SIGNATUS. (Jent.) Cercopithecus signatus. Jentink. Not. fr. Leyd. Mus., VIII, p. 55, 1886. — Martini. Sclater nec Waterh. P. Z. S., p. 176, pl. XIV, 1884. — — Sclater.P,72: S:,5p.245, 4893: — signatus. Sclater. P. Z. S., p. 257, 1893. : — —_ Matschie. Sitz.-Ber. Ges. naturf. Freunde, n° 3, p. 100, 1893. Dans cette espèce entrevue par Schlegel et définitivement établie par M.Jentink,le bandeau noir céphalique est incom- plet et ne dessine qu'une demi-couronne interrompue en arrière à pariir des oreilles. Ce caractère lui est commun avec le C. Buettikoferi; mais le C. signatus s'éloigne de ce dernier aussi bien que des autres types de la série des Pé- tauristes par la teinte gris tiqueté de ses favoris dont les ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 181 poils sont annelés de blanc, de jaunâtre et de noir. Une autre différence à signaler est l'absence de la ligne noire qui, chez les espèces que nous venons de passer en revue, part de l'angle externe de l'œil, se dirige en arrière, et coupe les favoris un peu au-dessous de l'oreille; en outre, la face ex- lerne des membres, tant les postérieurs que les antérieurs, est d’une teinte beaucoup plus sombre. Pour le reste du corps, la livrée est semblable à celle du C. petaurista et du C. Buettikoferi; mais les différences que nous venons de relever, et qui ont élé bien mises en lumière par M.Jentink, constituent des caractères qui font du C.signatus une espèce nettement définie de la série des Pétauristes. Le Cercopithèque décrit et figuré dans les Proceedings de 1884, me paraît avoir été rapporlé à tort au C. Martini (Waterh.). Les particularités de pelage que l’on peut remar- quer sur cette planche et dans les courtes diagnoses données par M. Sclater en 1884 et en 1893, ne rappellent nullement les descriptions de Waterhouse, el, d'autre part, concordent trop avec le texte de M. Jentink, pour ne pas entraîner la synonymie de ce Blanc-nez et du C. signatus (1). Mais ,on ne saurait utilement entamer ici cette discussion, sans avoir, au préalable, rappelé les véritables caractères du C. Martini (Waterh.); aussi, trouverons-nous une solu- ton plus logique et plus aisée à cette question, après l'examen des espèces de la série des Hocheurs à laquelle le C. Mar- tin (Waterh.) se rattache par tous ses caractères. L'habitat précis du C. stgnatus dans l'Ouest de l'Afrique est encore douteux. M. Jentink indique comme provenance probable Banana à l'embouchure du Congo; d'autre part M. Sclater cile Fernando-Po et les côtes voisines comme patrie de son C. Martini. (1) La priorité de cette recüfication revient à M. Matschie qui, en 1893, dans le travail déjà cité, s'exprime de la manière suivante : «Ich vermuthe dass der von Sclater abgebildete C. Martini, wenn überhaupt zu den weiss- nasigen Meerkatzen, zu C. signatus (Jent.) gehürt. » f 182 E. DE POUSARGUES. DEUXIÈME SÉRIE. — ASscAGNEs. S'il n y a paslieu, du moins pour le présent, de réduire le nombre des espèces de la série des Pétauristes, il n’en est pas de même pour la série des Blancs-nez à queue rouge ou Ascagnes, dans laquelle règne la plus grande confusion. La cause en est peut-être dans la disparition prématurée du spécimen type de l'espèce la plus ancienne de cette série, le C. ascanias (Aud.), et dans la divergence des opinions d’Au- debert, de Lacépède et de G. Cuvier sur la nécessité de sa séparation spécifique d'avec le C. petaurista. Quoi qu'il en soit, trois espèces d’Ascagnes étaient déjà venues s’adjoindre à l'espèce type, quand Schlegel publia son Catalogue des Singes du Muséum des Pays-Bas. Ce savant zoologiste reprit et compléta la description du C. ascanias, rectifia ce que les diagnoses d’Audebert et de Lacépède pré- sentaient de défectueux, mit en pleine lumière les caractères d'importance primordiale négligés et laissés dans l’ombre par ces premiers auteurs, et, à l'exception de l’espèce C. ery- throtis (Waterh.) dont il reconnu la validité, réduisit par une logique rigoureuse le nombre des Blancs-nez à queue rouge au seul C. ascanias. | La question était magistralement résolue. Mais de nouvel- les complications ont surgit, par suite tant de la création de nouvelles espèces, que du rétablissement de l’un des tvpes supprimés par Schlegel. Dans celte révision qui de nouveau s'impose, je ne puis suivre M. Sclater qui, dans le but très-louable sans doute de faciliter les recherches, supprime, ou tout au moins, ne cite que tout à fait incidemment le C’. ascanias, auquel il subslitue une espèce de créa!ion récente. On ne saurait invo- quer en celte circonstance l’r//ogisme et la désuétude, les deux seuls motifs suivant [. Geoffroy Saint-Hilaire (1), qui légitiment l’abandon exceptionnel du nom le plus ancien; et ce serait, (4) I. Geoffroy Saint-Hilaire, Cat. des Mamm. Introduction, p. xr, 1851. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 183 dans les comparaisons qui vont suivre, renverser complète- ment les rôles que de subordonner l'espèce primordiale à celles de création postérieure. 1° CERCOPITHECUS ASCANIAS. (Aud.) Simia ascanias. Audebert. Hist. nat. Singes et Makis. Fam. IV, sect. II, fig. 13, 1799. — petaurista. Lacépède et G. Cuvier, nec Schreber. Menageries, texte et planche, 1801. Cercopithecus ascanias. Schlegel. Mus. Pays-Bas. Singes, p. 87, 1876. C'est le même individu, décrit et figuré d’après le vivant par Audebert sous le nom de Simua ascanias, qui servit de type à la description de Lacépède et G. Cuvier; mais ces derniers se refusèrent, bien à tort, à le distinguer spécifique- ment du C. petaurista et lui conservèrent ce dernier nom. L'animal n’appartenant pas au Muséum a disparu, et il n’en reste qu'un magnifique dessin sur vélin que l’on doit consi- dérer comme le type de l'espèce. Ce dessin dû au pinceau de Maréchal, a été reproduit en noir dans l'ouvrage de Lacé- pède et G. Cuvier. La teinte générale du pelage chez le C. ascanias est plus foncée que chez le C. petaurista (Schreb.). Les poils des par- lies supérieures du corps sont d’un gris ardoisé bleuâtre à la base, et sur le reste de leur longueur noir brunâtre, annelé de jaune paille sur le dessus de la tête, de roux orangé sur le dos, le haut de la face externe des membres, et le Lliers basal du dessus de la queue. Sur la face externe des mem- bres, les anneaux roux diminuent de nombre et d'importance à mesure qu on se rapproche des extrémités, el à partir du coude et du genou, le pelage prend une teinte noire pres- que uniforme. Le dessous du corps et du tiers basal de la queue, ainsi que la face interne des membres sont d’un blanc nuancé de cendré bleuâtre. Les deux tiers terminaux de la queue présentent une coloration rouge rutilant en dessous et sur les côtés, passant au rouge sombre le long de la ligne médiane supérieure. Audebert cet après lui Lacépède et 184 E. DE POUSARGUES. G. Cuvier indiquent pour la queue une couleur brune tirant sur l’olivâtre; mais, sur le dessin de Maréchal que j'ai pu consulter à la bibliothèque du Muséum de Paris, les deux tiers terminaux de la queue sont manifestement teintés de rouge. Un bandeau frontal noir passe au-dessus de la ligne sourcilière, se prolonge de chaque côté de la tête et s'arrête au-dessus des oreilles. Celles-ci présentent sur leur face interne des poils d’un jaune rougeûtre, assez clairsemés, mais plus abondants vers leur bord. Les côtés de la tête sont garnis de larges favoris formés de longs poils blancs, à peine nuancés, à partir de leur base, de gris bleuâtre, puis de jaune. Les plus inférieurs de ces poils présentent des extré- mités noires, qui par leur réunion tracent une ligne noirâtre bien apparente. Cette ligne part de la lèvre supérieure, se prolonge en {ravers des joues jusqu’au-dessous et en arrière de l'oreille et limite inférieurement les favoris qu’elle sépare du pelage blanc du menton. Des poils ras, blancs, recouvrent le champ nasal et figurent un triangle à base supérieure échancrée en son milieu par l’empiètement des poils noirs de la ligne du nez en continuité avec ceux du bandeau fron- tal. Autour des yeux, la peau nue est bleu teinté de violet. Le reste de la face est parsemé de poils noirs, rares sur le devant des joues, mais devenant de plus en plus serrés à mesure qu on se rapproche de la commissure des lèvres où ils se continuent avec la ligne noirâtre qui barre inférieure- ment les favoris. Les lèvres et la partie antérieure du men- ton sont presque complètement nues et de couleur gris vio- let pâle, légèrement rosé. Tels sont les caractères que l’on peut assigner au C. ascanias d’après les descriptions d'Au- debert et de Lacépède, mais surtout d’après le vélin de Maréchal. Quant à la patrie de cette espèce, nous y revien- drons après l'étude d’autres Blancs-nez à queue rouge, qu'il faut considérer comme synonymes du C. ascanias et qui nous fourniront des documents nombreux à ce sujet. En effet, à l'exception du C. erythrotis que nous éludierons plus loin, tous les autres Ascagnes que j'ai cités dans la liste qui ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 185 précède, ne sauraient êlre distingués spécifiquement du C. ascanias. Éliminons d’abord le Cercopithecus histrio (1) (Reich.). Les figures 256 el 257 de son travail, auxquelles Reichenbach renvoie pour cette espèce, ne sont que la re- production réduite et inexactement coloriée de la planche de Lacépède et G. Cuvier; et celle-ci, comme je viens de l’annoncer, n’est que la gravure du vélin de Maréchal. C'est assez dire pour prouver que le C. listrio n’est autre que le C. ascanias d'Audebert. Restent les trois autres espèces : C. melanogenys (2) (Gr.), C. picturatus (3) (Sant.), et C. Schmidt (4) (Maisch.); mais, avant de lesétudier parallèle- ment, je crois nécessaire, afin d'éviter tout malentendu, d'exposer brièvement l'historique de la première. Il n’existe en effet aucune espèce sur laquelle règne plus d'incertitude que le C. melanogenys (Gr.). En mettant en parallèle les descriptions que Gray a successivement données de ce Cercopithèque en 1845, 1849 et 1870, M. Jentink en a montré toutes les discordances. Il n'y a donc pas à revenir sur ce point, et nous nous en rapporterons à la diagnose que le savant hollandais a publiée d’après des renseigne- ments fournis par M. O0. Thomas, diagnose que M. Sclater reconnaît comme seule exacte. Mais il est un autre point qui reste à élucider, c’est celui de savoir lequel des deux Cerco- pithèques 7hinosticti, représentés sur la même planche par Gray, est le C. melanogenys oule C.ludio. L'un de ces Blancs- nez est de couleur brun olive, l’autre noir verdâtre. Mal- heureusement, ainsi que le fait remarquer M. Jentink, au- cune de ces deux figures n’est numérotée. J'ajouterai de plus, qu'il y a complet désaccord entre les indications du texte et celles de la légende de la planche. Le texte (Proc. Zool. Soc. of London, 1849, p. 7 et8) indique C. melanoge- nys, pl. IX, fig. £, et C. ludio pl. IX, fig. IL. Si l’on se reporte (1) Reichenbach, Die vollst. Naturgesch. d. Affen., p. 106, 1863. (2) Gray, Ann. and Mag... 1845;.et B2Z%S.;p- 1pl..1X, 1849. (3) M. Santos, Jorn. Sc. Lisboa, XI, p. 98, 1886. (4) Matschie, Zoo!. Anz., p. 161, 1892. 186 E. DE POUSARGUES. à la planche indiquée, on trouve la légende suivante : 2. C. melanogenys. 1. C. ludio. Cel oubli, et cette discordance dans les numérotations ont occasionné un quiproquo regret- table, source des méprises accumulées depuis près d’un demi-siècle ; et, il faut bien le dire, cette confusion existe encore. En 1863, dans son travail sur les Singes, Reichen- bach (1) donne une réduction retournée de la planche malheureuse de Gray. Suivant le zoologiste allemand, le C. melanogenys (fig. 254) est le Blanc-nez à pelage noir verdâtre. En 1876, dans sa Révision déjà citée, Schlegel renvoie pour le €. melanogenys à la figure 1 de Gray, mais sans Indiquer à quel numérotage il fait allusion. Toutefois, Schlegel fait du C. melanogenys un proche parent du C. niclitans, et ajoute que ces deux espèces ont les joues colorées de la même facon. Cette assimilation est absolu- ment contraire à la description de Gray, et le savant hollan- dais n’a pu commettre cette méprise que pour ne s'être inspiré que de la figure du Blanc-nez à pelage noir. La meilleure preuve de ce que j'avance est que Schlegel, pour juslifier sa manière de voir, se croit obligé de donner des explications sur le choix fait par Gray de l’épithète me/a- nogenys. « L'épithète de melanogenys, écrit Schlegel, paraît avoir élé choisie pour distinguer l’espèce du C. petaurista, el non pas du C. nichtans dont les joues sont exactement colorées comme dans le C. melanogenys. » L'intention de Gray était bien celle que lui prête Schlegel ; l’auteur anglais l’affirme d’ailleurs lui-même : « The black-cheeked Monkey is sepa- ralted from. C. petaurista by the blackness of its cheeks. » Mais de-la dissemblance qui existe, pour la coloration des joues, entre le C. melanogenys et le C. petaurista ne s'ensuit pas nécessairement, comme le pensait Schlegel, une ressem- blance sous ce même rapport entre le C. melanogenys et le C. niclitans. Gray reste muet sur ce point; et ce silence doit être (1) Reichenbach, loc. cit., p. 105, fig. 254 et 255. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 187 interprété à l'inverse des suppositions de Schlegel. Dans l'esprit de Gray, au contraire, la dissemblance pour la coloration des joues était telle entre le C. melanogenys et le C. nictitans, el ce zoologiste soupçonnait si peu pour l'avenir un rapprochement et une assimilation sous ce rapport entre ces deux espèces, qu'il ne s’est nullement préoccupé d’éveiller l'attention sur ce point. Aussi, pour la comparaison des fa- voris, ne fait-il pas intervenir le C’. nictitans, ce que Schlegel est obligé de faire à cause de sa fausse interprétation des figures. En 1886, M. Mattozo-Santos me paraîl avoir commis la même erreur; car il admet avec Schlegel des alfinités entre le C’. melanogenys et le C. nictitans, tandis qu'il rap- proche le C. ludio de son espèce C. picturatus. Enfin, pour M. Jentink comme pour les auteurs que je viens de ciler, la figure la plus sombre de la planche de Gray se rapporte au C. melanogenys. « The darkest coloured one is C. melano- genys. » Il est regrettable que M. Sclater, ayant à sa dispo- sition les spécimens types des deux espèces figurées, ait négligé de vider celte question liligieuse. Si mauvaises en effet que l’on suppose les figures données par Gray,—suivant M. O0. Thomas, elles sont pires que les descriptions (1), — elles n’en réclament pas moins des éclaircissements, d'autant plus qu’on ne saurait les détruire. J'ai revu avec la plus grande attention les diverses diagnoses qui ont été données du C. melanogenys, et, en ne tenant compte que des carac- tères qui n’ont donné prise à aucune controverse, il en est résullé pour moi cette conviction que les interprétalions émises par les auteurs sont complètement erronées. Le dé- saccord entre les figures et le texte de Gray n’est pas si considérable qu'on l’a jusqu'ici prétendu ; el s’il a été jugé tel, c'est que les zoologistes ont obstinément persisté à suivre l'une ou l’autre diagnose sur la figure qui ne lui correspon- (1) C'est également l’avis de M. Barboza du Bocage : « Nous n’arrivons même à nous faire une idée bien nette du C. melanogenys, tel est le désac- cord que nous trouvons entre la description et la figure de Gray. » (Jorn. Sc. Math. Phys. Natur. Lisboa, 2 série, n° 1, 1889.) 188 E. DE POUSARGUES. dait pas. Le C. melanogenys ne peut pas être le Blanc-nez à pelage noir verdâlre de la planche de Gray, mais au con- traire celui dont la robe présente une teinte brun olive sur les parties supérieures. À l'appui de cette manière de voir, je rappellerai les caractères suivants : pour le C. melano- genys, présence d’une tache iemporale blanche entre l'œil et l'oreille, et forme cordée de la tache nasale : « a large cordate spot on the nose and a small spot on each temple white » (Gray); existence d’un bandeau frontal noir et couleur rousse de la queue : « & band across the eye-brows, passing bachkiwards over the ear black... tail dark rufous » (Jentink). Dans la figure la plus sombre de la planche de Gray, on ne constate ni tache temporale blanche ni bandeau frontal apparent et dislinct du reste du pelage ; la tache nasale n'est pas cordiforme, mais allongée dans le sens vertical ou antéro-postérieur, la queue est noire : tous caractères qui concordent parfaitement avec la description du C. ludio : « General black tint of the fur, large size and erect oblong form 0; the white spot on the nose,..… absence of any white on thecheeks or temples. » Contrairement à l'opinion des au- teurs, c'est donc le C’. ludio représenté par la figure noir ver- dâtre qu'il faut rapprocher du C.nictitans, etnon pasle C. me- lanogenys qui doil être rangé dans la série des Ascagnes (1). Ce point une fois établi, et toute cause de malentendu élant écartée, nous pouvons aborder la discussion de la valeur des caractères sur lesquels sont basées les espèces C. melanogenys (Gr.), C. picturatus (Sant.) et C. Schnadt (Matsch.) pour les comparer à ceux du C. ascanias (Aud.). J'ai adopté pour cetle étude la méthode parallélique, et dans le tableau suivant j'ai relevé textuellement et mis en regard les unes des autres les principales particularités signalées chez ces trois espèces. (1) Sur ce point je me trouve en parfaite concordance avec M. Maischie, qui, le premier, a donné une interprétation vraie de la planche de Gray dans ces quelques mots : « Auf der Abbildung ist nun C. melanogenys links vom Beschauer, C. ludio rechts dargestellt. » Mais, partis du même point, nous arrivons, M. Matschie et moi, à des conclusions toutes différentes. ÉTUDE SUR LES —————— C. MELANOGENYS (Gr.) Dos finement tiqueté de noir et d'orange. (Jent.) Gorge, dessous du corps et face interne des membresblanchâtres. (Gr.) | Les membres sont gris sombre extérieure- ment, passant insen- siblement au noir sur les pieds et les mains. (Jent.) Une grande tache cor- diforme, blanche sur le nez. (Gr.) MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. C. PICTURATUS. (Sant.) C. scaminri. (Matsch.) Tête, nuque et dos som-| Dessus ondé de noir et de jaune roux brun, chaque poil ayant son bre tiqueté de jaune, chaque poil montrant des anneaux jaunes. tiers basal gris ardoisé pâle, le reste orné de trois petits anneaux jaune roux-brun. Gorge blanche légère- ment bleuâtre. Poi- trine, ventre et face in- terne des cuisses gris. Dessous du corpset face interne des avant-bras et des cuisses blanc pur. Face gris sombre. de la jambe gris d’ar- doise sombre. Face externe des mem- bres noire. Une tache nasale cordi-| Une tache nasale cordi- forme blanche, la! forme blanche. pointe tournée en bas. 189 interne des bras|Face interne du braset | Un bandeau noir sur les|Un bandeau frontal noir.|Uu petit bandeau noir sourcils passant en ar- rière au-dessus des oreilles. (Jent.) La région entre l'œil et| La partie postérieure des l'oreille blanchâtre.| favoris est jaune pâle, (Jent.) puis de là jusqu'aux oreilles blanc jaune bleuâtre. Bas des joues noir.|Favoris noirs. (Jent.). part du bord antéro- supérieur de l'oreille et traverse le front en s’élargissant au-des- | sus des yeux. | | Favoris larges, triangu- | laires s'étendant entre l'œil, Le coin de la bou- che et l'oreille, blancs légèrement teintés de jaunâtre. Une petite bande noire part du coin de la bouche et limite en bas le plus grand côté des favoris. Queue roux sombre. Queue rouge brun des-|Queue rouge; extrémi- Jent. sus et dessous, exceplé à la face inférieure de sa base où elle a la même couleur que le ventre. té noirâtre; racine, au-dessus de la cou- leur du dos, au-des- sous blanche. 190 E. DE POUSARGUES. Après une comparaison attentive de ces trois espèces en- tre elles et avec le C. ascanias (Aud.), les seules différences appréciables que l'on puisse relever dans les descriptions sont les suivantes : | Le pelage des parlies inférieures du corps est indiqué tantôt comme étant d'un gris foncé, C. ascanias (Audebert), tantôt comme étant d'un blanc pur, C. Schmudti (Matschie), ou enfin de teintes intermédiaires entre ces deux extrêmes. D'autre part, 1l faut signaler des écarts sensibles dans la lar- geur et l'étendue des favoris blancs, occupant toule ta joue entre l'oreille, l’œil, la commissure des lèvres et la bande noire limite inférieure chez le C. Schmidti (Matschie), ou réduits à une simple tache temporale par suite de l’envahis- sement de la teinte noire, d’où, élargissement :considérable de la bande noire inférieure, C. melanogenys(Gray), remon- tant le long des joues jusqu’à l'œil, « 4lack whiskers ». C. picturatus (M. Santos) et C. ascanias (Audebert). Ces di- vers aspects que présentent les favoris ont été très heureu- sement rendus par les diagnoses courtes mais précises de M. Sclater «genis late» ou «anguste nigris » (1). Mais ces dif- férences ont-elles une valeur spécifique réelle ? Pour en juger, je me permeltrai une comparaison avec une espèce bien dé- terminée, dont le pelage présente des analogies frappantes avec les espèces en hilige ; je veux parler du C. cephus. Le Muséum de Paris possède une magnifique série de cette espèce comprenant quatorze spécimens de tout âge et de sexes différents. En comparant tous ces exemplaires, on constate que le pelage des parties inférieures présente des différences très-appréciables selon les individus, et varie du blanc presque pur au gris bleuâtre foncé, suivant que manque ou prédomine la teinte bleue que mentionne M. Mat. Santos chez le C. picturatus ; «a blue colour. wlach appears through in the white and greyish regions ». (1) Dans le travail de M. Sclater s’est glissée une erreur involontaire due à une interversion des diagnoses. L’épithèle « late nigris » doit se rappor- ter à mon avis au C. melanogenys et non pas au C. Schmidti. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 191 Chez ces Mouslacs, les caractères des favoris ne sont pas moins variables. Sur certains exemplaires, la tache tempo- rale jaune est excessivement réduile, et largement bordée de noir ; chez d’autres, la teinte jaune montre plus d'amplitude et ne présente à sa limite inférieure qu'un étroit liséré noir parfois faiblement estompé; chez d'autres enfin, les poils noirs ne se remarquent que sur les lèvres, et cette teinte s'arrête à leur commissure. Ces différences ont été obser- vées et reconnues sur d’autres spécimens par bon nombre de naturalistes, car 1l est peu de figures du Moustac qui se ressemblent sous ce rapport ; je n’en puis citer un exemple plus concluant que les trois dessins de cette espèce que l’on trouve dans le travail de Reichenbach (fig. 251, 252, 253). Aucun auteur, pourtant, n’a songé, et avec raison, à aftri- buer à ces dissemblances une valeur spécifique; et l’espèce _C. cephus ne compte même aucune variété. On est en droit, dès lors, de se demander pourquoi il n’en serait pas de même pour le C. ascanias; et comment des variations absolument identiques, ont été jugées individuelles et de nulle valeur pour une espèce, au contraire d'une extraordinaire impor- tance pour une auire, au point d'amener les zoologistes à substiluer trois nouvelles espèces à l'espèce type mé- connue. M. Matschie invoque encore, pour la distinction spécifique du C. Schmidt, le pelage blanc des oreilles. Bien qu'Aude- bert admette chez l’Ascagne des oreilles couleur de chair mais nues, sur le vélin de Maréchal, elles sont manifestement bordées de poils d’un jaune rougeâtre, ainsi que je l'ai signalé plus haut, ce qui concorde suffisamment avec les épithètes « rufous » de Gray et « Zght brown » de M. Mat. Santos. Toutefois, une certaine variation dans la teinte de ces poils ne présente rien d'inadmissible; latache nasale elle-même, toujours décrite comme élant d’un blanc pur (sauf chez le C. erythrotis,) n’en est pas exempte, ainsi que j'ai pu le constaler sur plusieurs exemplaires où la base supérieure 192 E. DE POUSARGUES. du triangle nasal était teintée de jaune sur une largeur assez grande. Enfin M. Sclater se base, pour différencier le C. Schmidii du C. melanogenys, sur ce que cette dernière espèce présente un pelage moins tiqueté, et la queue d’un rouge beaucoup moins éclatant. Ces différences, certaine- ment très sensibles entre le C. melanogenys et le C. Schmidti adulte, disparaissent si on compare, comme il faut le faire ici, le €. melanogenys au C. Schmidh jeune, tel que nous le connaissons par la description de M. Matschie. Le spécimen type du C.melanogenys n'est en effet qu’un tout jeune indi- vidu, puisque, comme nous l’apprend M. Jentink, ses dents de lait sont encore en place, et que la première molaire est la seule dent permanente qui soit sortie de son alvéole. La fusion de toutes ces espèces en une seule me parait donc utile autant que nécessaire. Déjà en 1889, M. Bar- boza du Bocage (1) avait identifié le C. picturatus et le C. Schmidti, par conséquent à une époque antérieure à la publication de cette dernière espèce qui, circonstance peu commune, se trouve ainsi avoir été condamnée même avant que de voir le jour (2). « M. Sclater, écrit le zoologiste por- tugais, appela l’attention de la Société zoologique de Londres dans la séance du 23 juin 1887 sur un Cercopithecus du Tanganika (depuis C. Schmidt), facile à distinguer du C. petaurista par sa queue rouge dans les derniers deux tiers, lequel, d’après ces indications, nous sommes disposé à croire identique à notre individu C. picturatus. » Poussé par la logique même des faits, M. Barboza du Bocage va plus loin el pose nettement la question suivante : « Ces Cercopi- thèques (C. picturatus et C. Schmidti) sont-ils l’un et l’autre réellement distincts du C. ascanias? C’est seulement en (4) Barboza du Bocage, loc. cit. (2) L'espèce C. Schmidti est en effet de création plus récente que le tra- vail de M. Barboza du Bocage, elle était donc inconnue de ce naturaliste. Mais en introduisant, par une sorte d’anticipation et d’anachronisme, ce nom nouveau et en quelque sorte posthume dans le texte de M. Barboza, je ne crois pas dénaturer en quoi que ce soit l’idée de l’auteur, puisque le Cercopithèque innommé dont il parle a été assimilé depuis au C. Schmidti par MM. Matschie et Sclater eux-mêmes. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 193 comparant ces individus à un exemplaire authentique de C. ascanias qui manque à nos collections qu'il serait pos- sible d'arriver à un résultal définitif. » Le seul obstacle qui paraît avoir arrêté M. Barboza du Bocage dans l'assimilation du C. picturalus au C. ascantas est que, dans la figure du C. ascanias publiée par Audebert, la queue est indiquée comme élant couverte de poils de même couleur que ceux du dos. Inutile de répéter ici ce que nous avons dit à RADPOE de la queue dans la descriplion du C. ascamas. Les zoologistes se sont fait une fausse idée de cette espèce pour n'avoir consulté ou pu consulter que la planche du travail d'Audebert. Le vélin de Maréchal n’est jamais cité, et ne paraît connu d'aucun d'eux. L'original du C. ascanias ayant disparu, ce dessin doit, aumême lilre que celui d’Au- debert, être considéré comme le type de l'espèce. L’anté- riorité, de plus, lui est acquise, puisqu'il se trouve déjà cité, et même avec éloge, par Audebertlui-même, et on peut le regarder comme le seul document véritablement authenti- que que réclame M. Barboza du Bocage pour baser une comparaison irréprochable. S'il faut avoir une confiance égale dans les deux dessins coloriés du C. ascanias type (el rien n'autorise une préférence quelconque), il en ressort ce fait indiscutable que le même animal à été vu, d’abord par Maréchal avec la queue rouge, puis, quelque temps après par Audebert avec la queue de couleur olivâtre comme le dos (1). Dès lors, sans parler des variations individuelles dont les zoologistes n’ont pas tenu assez grand compte, ne doit-on pas admettre des influences d'habitat ou de saisons, et l’exis- tence de plusieurs livrées comme chez certaines espèces de Sciuridés africains, dont on a, de ce fait, passablement ré- duit le nombre ? Par suite de la fusion des espèces C. Austrio (Reich.), C. me- (4) Pour ces différences dans la coloration de la queue, voir plus loin l’article sur les Moustacs (p. 211). ANN. SC. NAT. ZOOL. » it, 15 194 E. DE POUSARGUES. lanogenys (Gr.), C. picturatus (Sant.)et C. Schmidti (Matsch.) en une seule, le C. ascamas (Aud.), on peut se rendre un compte exact de l'immense étendue de son aire de réparti- tion qui traverse l'Afrique tropicale depuis la rive Nord du Victoria-Nyanza (Murchison-bay) et la rive occidentale du Tanganika (Manyema), C. Schmidti, jusqu'aux posses- sions portugaises de la côte d’Angola (Quimpampala près d’'Ambriz), C. picturatus. MM. Thollon et Brusseaux en ont aussi rapporté des exemplaires de la rive gauche du Congo, en face des points de confluence de ce grand fleuve avec les rivières Alima et Oubangui. Toutes ces provenances absolument certaines, permettent donc d'affirmer que, suivant la latitude, l’Ascagne doit se rencontrer depuis le versant Nord de la ligne de partage des eaux des deux bassins Zambèze-Congo, jusqu’au fond de l'immense boucle formée par ce dernier cours d’eau qui l’ar- rêterait au Nord. 20 CERCOPITHECUS ERYTHROTIS. (Wath.) Cercopithecus erythrotis. Waterhouse. P. Z. S., p. 59, 1838, et p. 71, 1841. — — Fraser. Zool. typ., pl. IV, 1848. — — Schlegel. Mus. Pays-Bas. Singes, p. 70, 1876. — — Sclater. P. Z. S., p. 176, 1884, et p. 246, 1893. Le fond du pelage chez le C. erythrotis présente une grande ressemblance avec celui de l’Ascagne. Sur les parties supé- rieures du corps, les poils d’un noir brunâtre sont annelés de jaune clair sur la têle et les flancs, tirant au roux orange sur le dos. Les membres antérieurs sont noir grisâtre sur leur face externe, les postérieurs plus pâles et d’un gris va- guement tiqueté de jaune. Le menton et la gorge sont blancs, mais cette teinte passe au gris ardoisé bleuâtre sur la poitrine, le ventre et la face interne des membres. Un bandeau noir, interrompu en avant sur la ligne mé- diane, couvre le front et les tempes. Les joueset les côtés de la tête sont garnis de favoris d’un blanc légèrementjaunâtré, barrés inférieurement et séparés du pelage du menton par ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 195 une large bande noire pointillée de jaune qui semble la con- tinuation des longs poils noirs relativement abondants qui couvrent le bord de la lèvre supérieure. La tache nasale dif- fère, pour la forme et la couleur, de celle de l’Ascagne. Chez le C. erythrotis, le champ, couvert de poils ras d’un rouge de rouille, n’est plus à proprement parler exclusivement nasal ; il remonte le long de la ligne du nez jusqu’au niveau des paupières inférieures, mais en même lemps s'élale et déborde sur les joues en s’atténuant graduellement, el l’ex- trémité aiguë de ces prolongements latéraux arrive presque en contact avec les poils noirs qui forment un étroit liséré en avant des favoris. La tache nasale présente donc la forme d’un losange surbaissé dont la grande diagonale horizontale, coupe perpendiculairement la ligne du nez un peu au-dessus du niveau des narines. Un autre caractère permet encore de distinguer facilement le C. erythrotis du C. ascanias. Chez ce dernier, la teinte rouge rutilante ne se remarque que sur les deux tiers terminaux de la queue, tandis que chez le C. erythrotis, cette même teinte colore la queue dès sa base, et, inférieurement, s’élale sur la région anale et l’aine. Enfin les oreilles, plus développées que chez l’Ascagne, sont cou- vertes sur leur face interne de poils assez longs ei assez denses, d’une teinte rouge de rouille analogue à celle de la tache nasale ; de là le nom spécifique choisi par Waterhouse. On ne cite comme patrie du C. erythrotis que l’île de Fernando-Po (Waterh.) et le Cameron (Matschie). Par suite des nombreuses synonymies que nous avons admises, la classification des Ascagnes se trouve donc considérablement simplifiée, et la question ramenée au point où l’avait laissée Schlegel en 1876. Ainsi que l’avait reconnu le savant hollandais, le nombre des espèces de cette série se réduit à deux, le C. ascamas el Le C. erythrotis. Ces deux types, nettement définis, et reconnaissables entre tous les Blancs-nez par la teinte rouge de leur queue, nous ont éga- lement montré que le blanc n’est pas la couleur exclusive de ( 196 E. DE POUSARGUES. la tache nasale. À ce point de vue, l’épithète de rhinosticti choisie par Sclater répond mieux aux besoins de la classifi- calion et doit être préférée, car elle ne préiuge en rien de particularités de coloration, considérées comme fixes, au contraire sujettes à des variations, dont on ne connaît peut- êlre pas encore toule l'étendue. L’épithète de « Blancs-nez», vraie pour les Pétauristes el les Hocheurs, ne saurait être appliquée logiquement aux Ascagnes ; elle devrait donc être rejetée si un long usage ne l’avail pour ainsi dire consacrée, à Lel pointqu'en l’employant, l'intention est de signaler seu- lement la présence d’une tache nasale, complète abstraction faile de toute indication de couleur. Pour terminer ce qui a trait à la série des Ascagnes, il me reste à signaler une espèce qui présente avec eux des affinités incontestables, le C. cephus (L.} ou Moustac. Par le mode de coloration de la queue, le Moustac se rap- proche du €. ascanias; pour le reste du pelage, 1l ressemble d’une manière frappante au C. erythrotis, comme l'avait re- connu Waterhouse lorsqu'il décrivit celle dernière espèce. Mais il se distingue de ces deux types, par la singulière co- Jloration de la face dont le fond bleu est marqué, immédia- lement au-dessous des narines et au-dessus des poils noirs qui bordent la lèvre supérieure, d’une bande en chevron blanche et nue, simulant comme une moustache relevée. Dans la grande généralité des cas, la ligne nasale est pres- que complèlement glabre et teintée de blanc bleuâitre ; on n’y observe donc pas à proprement parler de champ nasal, dans le sens que nous avons attribué à celle expression, c’est-à- dire un espace bien circonscrit, couvert de poils ras et ser- rés, dont la teinte, quelle qu'elle soit, se détache vivement sur le fond sombre du reste de la face. On ne peut pas, en effet, considérer comme tache nasale les quelques poils blancs clairsemts que l’on rencontre sur le chanfrein de quelques individus de l'espèce C. cephus. Suivant Pucheran, il est vrai, la tache nasale pileuse ne manquerait pas à tous les âges et s’observerait parfois chez les jeunes. « Une jeune guenon, ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 197 écrivait ce naturaliste, appartenant au type C. cephus, nous est arrivée du Gabon (Aubry-Lecomte). Cet individu porte dans le milieu de sa région nasale, une {tache {triangulaire à base inférieure entièrement composée de poils blancs..., il est probable que, par les progrès de l’âge, la tache blanche médio-nasale s’évanouil. C’est un fait que des observalions ultérieures sont seules aptes à confirmer ou à infirmer (1). » Je n'ai pas pu, malheureusement, contrôler le fait sur le spécimen signalé par Pucheran, mais j'ai constaté la même particularité chez un C. cephus adulte faisant partie des collections rapportées du Congo par M. de Brazza. Cet in- dividu présente des poils blancs assez abondants sur le nez, depuis les narines jusqu'entre les yeux, plus clairsemés sur les joues; mais dont le groupement dessine visiblement une tache nasale assez bien circonscrile supérieurement, limitée en bas, en dehors des narines, par la tache blanche en chevron complètement nue de la lèvre, et qui par sa forme losangique à grande diagonale horizontale, rappelle le champ nasal rouge du C. erythrotis. Joints aux autres ressemblances de pelage, ces deux faits sont très suggeslifs ; mais 1ls sont trop exceptionnels pour autoriser l'admission du Moustac parmi les Blancs-nez proprement dits, et ne peuvent que contribuer à établir plus solidement les affini- tés que nous avons signalées entre le C. cephus et le C. ery- throlis. Il en est du Moustac comme du C. leucampyx (Fisch); à ces deux espèces manque la tache nasale pour être admises, la première parmi les Ascagnes, la seconde parmi les Hocheurs qu'il nous reste à passer en revue. TROISIÈME SÉRIE. — Hocxeurs. Les Cercopithèques appartenant à celte série se distin- guent au premier abord, par la forme de la tache biancice nasale, de tous les Blancs-nez que nous avons examinés ju:- (1) Pucheran, Rev. et Mag. de Zool., p. 195, 4857. 198 E. DE POUSARGUES. qu'ici tant Pétauristes qu'Ascagnes. Chez ceux-ci, quelle que soit la forme triangulaire, cordée ou losangique de la tache nasale, son diamètre transversal ou horizontal l’em- porte toujours, et parfois de beaucoup sur son diamètre lon- gitudinal ou vertical. Chez les Hocheurs, la forme du champ nasal est tout autre. Schlegel l’avait définie triangulaire à base inférieure, mais, comme le fait remarquer avec raison M. Jentink, c'est plutôt un carré et, pour préciser davan- tage encore, un losange, mais qui ne rappelle en rien la tache nasale du C. erythrotis. Le champ nasal des Hocheurs, toujours d’un blanc parfait, s'étend en effet angulairement en bas entre les narines, presque autant qu'il remonte le long du chanfrein jusqu’au niveau des paupières inférieures. C’est, si l’on veut, la tache nasale des Pétauristes et de l’As- cagne, augmentée d'un second triangle placé au-dessus du premier symétriquement par rapport à leur base com- mune. Partant, le diamètre longitudinal ou vertical du champ nasal s’en accroît d'autant, et il est plutôt supérieur qu'égal à son diamètre horizontal et transversal. Quatre espèces de Blancs-nez appartiennent incontestablement à la série des Hocheurs. Ce sont le C. nicütans (L.) type de la série, le C. Martini (Waterh.), le C. ludio (Gr,) et le C. Staumpjlii (Jent.). 1° CERCOPITHECUS NICTITANS. (L.) Simia nictitans. Linné. Syst. Nat., 19° édit., t. I, p. 40, n° 23, 1766. Cercopithecus nictitans. Erxleben. Syst. Regn. Anim. Mamm., p. 35, n° 43, LT La Guenon à nez blanc proéminent. Buffon. Hist. nat. (Suppl).), t. VIL p. 72, pl. XVIII, 1789. Le Hocheur. Audebert. Hist. nat. Singes et Makis. Fam. IV, sect. I, fig. 2, 1799. Cercopithecus nictitans. Fr. Cuvier. Mamm. (texte et planche), 1825. Schlegel.: Mus. Pays-Bas. Singes, p. 89, 1876. — — Sclater. P. Z.5$:, p. 246,4893: Chez le Hocheur, le noir est la teinte dominante du pelage. Sur les tempes, la nuque, les épaules, et les mem- bres antérieurs tant à leur face interne qu'à leur face ex- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 199 terne, les poils sont d’un noir profond et pur de tout mé- lange, ainsi que sur la partie distale des membres posté- rieurs et de la queue. A l'exception du menton et de la gorge qui montrent une teinte gris enfumé, les autres régions du corps présentent une couleur noir tiqueté de blanc plus ou moins jaunâtre suivant les individus, et rappe- lant la robe du C./leucampyx (Fisch). Cet aspect est dû à la présence de trois anneaux blancs assez étroits qui coupent la teinte noire sur la moitié apicale des poils. Sur la face supérieure du corps, ces anneaux blancs sont très nets, et se détachent franchement sur le fond noir ; sur la poitrine, le ventre et le haut de la face interne des membres posté- rieurs, les anneaux blancs n’ont au contraire que des limites vagues et se fondent insensiblement dans la teinte noire, ce qui fait paraître ces parties d’une couleur noir cendré à peu près uniforme. La patrie de ce Blanc-nez paraît limitée à cette partie de l'Ouest de l'Afrique comprise entre l'embouchure du Congo et le Cameron. On n’en cite aucun spécimen provenant des régions situées à l'Ouest du Niger. 2° CErcoPiTHECUS MaRTINI. (Wath.) Cercopithecus Martini. Waterhouse nec Sclater. P. Z. S., p. 58, 1838, et p. 71, 1841. — ludio. Gray nec Schlegel. P. Z. S., p. 8, pl. IX, 1849. — Martinii. Schlegel. Mus. Pays-Bas. Singes, p. 89, 1876. — melanogenys. Schlegel nec Gray. Mus. Pays-Bas. Singes, p. 90, 1876. _ Stampfi. Jentink. Not. f. Leid. Mus., p. 10, 1888. À côté du Hocheur proprement dit ou C. nictitans, vien- nent se ranger trois autres espèces, qui s'en distinguent par leur teinte moins sombre, surtout sur les parties inférieures du corps et le haut de la face interne des membres, où le blanc domine. Ces trois types doivent, à n'en pas douter, être séparés spécifiquement du C. nichtans, mais je doute quil existe des différences assez tranchées, pour autoriser entre eux la moindre distinction, | 200 E. DE POUSARGUES. Le plus anciennement connu, le C. Martini, fut décrit en 1838 par Walerhouse, qui compléta son étude en 1841 d'après des spécimens plus nombreux, mieux conservés, mais également mutilés de la face et des extrémités des membres. De là l'absence de toute indication de tache na- sale dans les écrits du savant zoologiste anglais. Quelques années plus tard, en 1849, Gray créa l’espèce C. ludio, pour un spécimen dont il publia la figure sur la même planche que le C. melanogenys. Je crois avoir suffi- samment démontré plus haut, comment la plupart des au- teurs avaient été dévoyés dans l'interprétation qu'ils ont donnée de cette planche, et je me conlenterai de rappeler ici que pour nous le €. ludio, est le Blanc-nez figuré par Gray avec le pelage noir verdâtre. Enfin la troisième espèce, le C. Stampflu, a été décrite récemment par M. Jentink d’après un spécimen adulte rap- porté de Libéria par M. Stampili, et un jeune mâle ayant vécu en captivité, el classé antérieurement par Schlegel sous le nom de C. melanogenys. Pour l'étude comparative des caractères de ces trois es- pèces, J'emploierai la méthode dont je me suis servi déjà pour l'examen des Ascagnes, en rassemblant parallèlement en un tableau les principales particularités de pelage obser- vées par les auteurs. “ ÉTUDE SUR LES C. Martini. (Wath) Chaque poil gris à sa|Noirâtre, cale noire marquée généralement de trois anneaux d’un jaune blanchâtre. 1838. MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. C. Lupto. (Gr.) finement queté de jaune. | Sommet de la tête et|Face, tempes, sommet membres antérieurs noirs. 1838. de la tête, épaules et membres antérieurs Face supérieure de la| noirs. tête, région occipitale, épaules et membres antérieurs noirs. 1841. Membres noirâtres, les poils n'étant que vague- ment annelés. postérieurs|Face externe des mem- bres postérieurs noi- râtre. La queue est d’un noir|Portion terminale de la uniforme excepté à la! queue noirâtre. base et près de la base où les poils sont va- guement anuelés de gris. 1841. Sous la base dela queue se trouvent quelques poils d’un brun rou- base à sa portion api- geàtre sombre. Gorge d’un blanc sale. couleur de suie gri- sàtre, vaguement an- nelés de blanchâtre. Chez les jeunes indivi- dus, le dessous du corps est plus clair. Croupion et face inté- rieure de la basé de la queue d’un brun rou- geâtre sombre. ti-|Poils du devant de la tè- Sommet de la tête, nu- 201 C. Sramprzri. (Jent.) te, du doset desflancs d’une teinte grise plus ou moins rousse ; Cha- que poilétantannelé de noir et de jaune roux. que etmembres noirs. Moitié basale de la queue d’une teinte grise plus ou moins rousse, moilié termi- nale noire. Gorge, partie supérieure|Menton, poitrine, por- de la face interne des bras, et face inférieure du corps, blanchâtres. tion antérieure du ven- tre et partie supé- rieure de la face in- terne des bras,blanes. Très proche parent du|Teinte générale du pe- C. nictitans, toutefois] lage noire. la teinte générale est légèrement grisàätre. Une large tache blanche oblongue sur le nez. — forme oblongue droite de la tache blanche na- Grande dimension et sale. Poils de la face infé- rieure du corps d’une Base du triangle for- mé par le champ na- sal tournée vers le bas, son angle opposé se prolongeant vers le haut en pointe jusque sur l’entre-deux du bord inférieur des or- bites. 202 E. DE POUSARGUES. En parcourant ce tableau, on peut se convaincre qu'il est difficile de trouver deux descriptions qui se ressemblent plus que celles du C. Martini et du C. ludio; c'est à un point tel, que l’une semble le décalque de l’autre. Les mêmes par- ticularités y sont signalées dans les mêmes termes et sous les mêmes épithètes. Cette identité absolue des dia- gnoses, entraîne de toute évidence celle des deux espè- ces et me dispense de m'arrêter plus longuement sur ce point. On trouve chez le C. Stampflii des teintes semblables ré- parties de la même facon que chez les deux espèces précé- dentes, et il n’y a à noter comme différences que la teinte plus ou moins rousse des anneaux Jaunes des poils, et l'absence de poils brun rougeâtre sous la base de la queue. Du moins, celte teinte particulière n’est pas signalée par M. Jentink, qui indique la moitié basale de la queue comme étant de même couleur que le dos. Cette légère différence entraîne- t-elle la distinction spécifique du C. Stamflu ? I est permis d’avoir quelques doutes à ce sujet, car la constance et la régularité de la tache rousse anale me paraissent soumises à des fluctuations dont on ne saurait encore fixer les limites. D'après Waterhouse, cette marque n'intéresse que le des- sous de la base de la queue chez le C. Martini; suivant Gray, elle remonte sur le croupion chez le C. ludio; enfin, j'en ai rencontré des vestiges de chaque côté de la base de la queue chez quelques C. nictitans. Je crois donc qu'il n’y a pas là matière à séparer spécifiquement le C. Stamp/flu du C. ludio, étant donnée l’exacte concordance de tous les autres caractères. Sur ce point je suis donc en complet accord avec Schlegel, qui avait catalogué comme C. me- lanogenys l'un des spécimens sur lesquels M. Jentink a basé l'espèce C. Stampflü. Ceci peut paraître paradoxal et quelque peu incompréhensible, mais, qu’on se rappelle le regrettable quiproquo occasionné par la discordance entre les numéros du texte et de la planche de Gray. Le C. melano- genys de Schlegel n’est autre que le C. ludio de Gray et vice ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 203 versa (1). Le savant hollandais, il est vrai, n’admetlait pas la synonymie du C. Martini et de son C. melanogenys (C. luaio de Gray); mais 1l me semble difficile de ne pas recon- naître le parallélisme rigoureux des descriptions de ces deux espèces, ce qui est une preuve péremptoire de leur identité et dispense de tout commentaire. Je proposera donc de fusionner les trois espèces en une seule qui, sui- vant la loi de priorité, porterait le nom de C. Martini (Waterh.). Les caractères de cette espèce dûmentétablis, 1l me reste à donner les explications, retardées jusqu'ici, sur la synonymie que j'ai admise entre le C. signatus (Jent.) et le C. Martini (Sclat. nec Waterh.). Le Cercopithèque figuré dans les Proceedings de 1884, pl. XIV, ne me paraît pas, en effet, répondre aux diagnoses du C. Martini données par Waterhouse. Ce dernier type appartient à la série des Hocheurs, et, comme l’affirme Waterhouse lui-même, est très proche parent du C. nichtans, « most nearly allied to C. nictitans ». Les caractères du Cercopithèque figuré par M. Sclater, montrent au contraire des affinités très _ prochaines avec le C. petaurista. Cette relation n'avait d’ailleurs pas échappé au savant secrétaire de la Société zoologique de Londres, car il reconnaît lui-même ce Blanc- nez a close ally of C. petaurista. C'est donc dans la série que j'ai nommée celle des Pétau- ristes, que ce spécimen doit prendre place; et si l’on exa- mine à laquelle des espèces de cette série l’on doit le rap- porter, le C. signatus me paraîl tout désigné pour ce rôle. On peut, en effet, suivre de point en point la description que M. Jentink a donnée de cette espèce, sur lafigure du C. Martin (Sclat.). Voici d’ailleurs cette description : (1) Cette conclusion, qui découle nécessairement de l'interprétation vraie de la planche de Gray, est celle à laquelle était arrivé de son côté M. Mats- chie qui, de ce fait, établit la synonymie entre le C. ludio (Gr.) et le C. Stampfii (Jent.). « Dieser C. Stampfii ist aber nicht anderes als C. ludio (Gr.) ». Mais M. Matschie conserve à cette dernière espèce son autonomie et la distingue du C. Martini (Wat.), dont il laisse d’ailleurs l'habitat indéter- miné, 204 E. DE POUSARGUES. « Les parlies supérieures du corps et de la queue, les par- lies inférieures du corps et la face interne des membres pré- sentent les mêmes teintes que le C. petaurista. Membres postérieurs de même couleur que les antérieurs, mais plus sombres que chez le C. petaurista etle C. ascanias. Face infé- rieure de la queue blanc sale. Poils des côtés de la tête gri- sâtres (chacun d'eux élant annelé de blanc, de jaunâtre et de noir), et nellement séparés de la Leinte plus rougeâtre du dessus de la Lêle par un bandeau noir qui court d’une oreille à l’autre en passant au-dessus des orbites. Ce bandeau ressemble exactement à celui que l’on trouve chez le C. pe- laurista, mais ne se continue pas en une bande noire cir- culaire traversant le verlex comme dans cette espèce. Les côlés du museau, et quelques poils sur le devant de la lèvre inférieure, sont noirs. La tête paraît plus élevée, la face el les mâchoires sont plus proéminentes que chez le C. pe- taurista (1). » Si l’on veut bien suivre cette description, empruntée textuellement de M. Jentink, en ayant en regard la planche du C. Martin, on sera obligé de reconnaître l'exactitude de mes suppositions. Ces deux espèces n’en font qu’une, le C. s1- gnalus. D’après ses exemplaires mutilés, Waterhouse na pas pu décrire la forme de la tache nasale ; toute compa- raison sur ce point serait donc hypothétique et sans fonde- ment ; loutefois on peut remarquer que, sur la planche du C. Martini (Scl.), la forme du champ nasal n’est pas celle qui caractérise les Hocheurs, C. nictitans et C. ludo; elle reproduit au contraire très exactement celle que M. Jenüink reconnaît au C. signatus, soit « base du triangle nasal tour- née vers le haut ». La méprise me paraît donc évidente, et le C. Martini figuré dans les Proceedings, serait, à mon avis, plus correc- tement désigné sous le nom de C. signatus (Jent.). Comme patrie du C. Martini (Waterh.) on peut indiquer (4) Jentink, Not. fr. Leyden Museum, VIIX, p. 55, 1886. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 205 la côte Nord du golfe de Guinée, depuis le Libéria (C. Stampfli) jusqu'au delta du Niger (C. ludio) d'après M. Sclater. L'ile de Fernando-Po ne peut être admise qu'avec doute, à cause des nombreuses importalions d’ani- maux vivants, provenant des côtes voisines (Schlegel). Pour résumer cette revision un peu longue des Cercopi- lhèques rhinostichi, J'ai réuni toutes les espèces examinées dans le tableau synoptique suivant. Le caractère choisi comme base de ce groupement, diffère de celui qu'a utilisé M. Sclater. A l'exemple de Schlegel, j'ai attribué plus d'im- porlance à la forme qu'à la couleur de la tache nasale; ce qui, à mon avis, permet de respecter scrupuleusement les alfinilés des espèces entre elles. Quant aux caracières de valeur décroissante, plusieurs ont été empruntés du système de M. Sclater, qui, malgré l'inconvénient qu'il pré- sente d'éloigner les uns des autres des lypes étroitement alliés, n'en resle pas moins une clef d’un facile usage pour la détermination des espèces. La synonymie entre les différentes espèces douteuses de C. rhanostich étant ainsi élablie, nous pouvons reprendre l'examen des diverses sujets recueillis par nos voyageurs au cours de leurs exploralions dans nos possessions françaises du Congo. | = (juor) ‘nydure]S ‘9 cnrs CuPeM) uuDTT ‘9 errors er: VO NbSIIS OUEIq sd109 np snossoq do ) ‘2847 onb ansuor snrd (A) MSUDIIDUUN |" en ne se ee * 0 ++ 99) ATOU NO JIOU SdI09 np snos$9q / ke | (qe) ‘suouyrhuo ‘9|-o5nox‘onbisurs ) *Inonsu0T ES 9,n07 Ans -O[ 9jeseu our) 9JeSEU oU2ET & (use) ‘Hpruyos se | = (rjues) ‘Shjvangord {..../. : FE er 3 Cyotoy) “orujstq | (‘pny) ‘sunosn ‘) . cesse eXNCUIUII9] 99n01 onon() < (-19) ‘s£ueSouejouwu ‘7, -109 ojeseu UE SI91} XN9P SOT JNS = ; © , . . “onsuor onb = (repos) ‘rune ‘D|:::+ {qjuor) ‘snzoubrs 9|--- ++ -93onb k s" el -1] SIIS SUOARJ('""""X9JI9A 9[ ANS Pre È JIOU neopurq 9P Std ; = (“juor) ‘z49/oyuang ‘)|::'sour|q suoavt] (sapsuunniod) (-19) ‘u99506oayphua *9|**:-*"*:"*98nou ‘e5n04 | sd109 np snossa( sewrel ononÿ | **::***JIOU NE9PUEG (-yosqen) “sisuonuez n|("qorgos) ‘vyssunmod ‘p|----:----ouerq |Un JEd 9S19A847 X9)I9 À sd109 np snossaq PA SAKANONAS SAD4dSA =) ‘ (ex ‘1J91]SOUIHI 199491409199 ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANGAIS. 207 9. CERCOPITHECUS NICTITANS. (L.) Simia nictitans. Linné. Syst. Natur., 12e édit., L. I, p. 40, n° 23, 1766. Cercopithecus nictitans. Erxleben. Syst. Regn. anim. Mamm., p. 35, n° 13, EU La Guenon à nez blanc proéminent. Buffon. Hist. nat. (Suppl.), t. VII, p. 72, pl. XVIII, 1789. Le Hocheur. Audebert. Hist. nat. Singes et Makis Fam., IV, sect. I, fig. 2, 1199. Cercopithecus niclitans. Fr. Cuvier. Mamm. (texte et planche), 1825. — — Schlégel. Mus. Pays-Bas. Singes, p. 89, 1876. ? — — Th. Noack. Zoologische Jahrbuch, p. 290, 2-1887. — — Sclater. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 246, 1893. a. Œ très adulte. M. Guiral. San-Benito, 1885. b © — — — 1885. c. © adulte. M. Thollon. Rivière Alima, 1890. MORT — Forêt de Mayumbe, 1890. Ce Sd == 1890. f. gt semi-adulte. M. Dybowski. Rive gauche de l’Oubangui, près Bangui, 1891. _g. © adulte. M. Dybowski. Bangui, 18 octobre 1891. h. çf semi-adulte. — Cette-Cama, février, 1894. îi. S semi-adulte. Rapporté vivant par M. Dybowski de la même localité que le précédent, et ayant vécu à la Ménagerie., Sur une peau plate provenant du premier voyage de M. J. Dybowski, non comprise dans cette énumération, et sur les spécimens (7, g.), on remarque à l'angle inféro-externe de chaque callosité, une touffe de poils d’un roux brunâtre tiqueté de noir bien différents du reste du pelage. Comme je l'ai fait remarquer plus haut, ce caractère, inconstant chez le C. nictitans, prouve néanmoins d’une manière indis- cutable son étroite parenté avecle C. Martini, espèce repré- sentative du même type sur la côte Nord du golfe de Guinée. L’aire de dispersion du C. nictitans paraît assez limitée en latitude et ne dépasse pas le Cameron au Nord et le Congo au Sud. Vers l'Est, le point extrême où M. Dybowski l’ait rencontré est Bangui; mais, s’il faut en croire Th. Noack, la dissémination du Hocheur en longitude serait bien au- trement vaste. Près de Manda dans le district d'Urua, sur la rive occidentale du lac Tanganika, le D'R. Bühm a pu se procurer une dépouille mutilée de Cercopithèque qu'ilrappor- tait à l'espèce C. pluto (Gr.) = C. leucampyx (Fisch), tandis 208 E. DE POUSARGURS. que M. Th. Noack, croit y reconnaître un C. rictitans. La présence du C. nichtans dans ces parages si éloignés de la côte occidentale d'Afrique ne présente certainement rien d’improbable, mais cette double interprétation et le manque absolu de détails sur les caractères de la face dans la des- cription de M. Th. Noack, laissent à supposer que la mutila- lion intéressait toute la portion faciale de celte dépouille, de telle sorte quon ne peut ni nier ni affirmer chez elle l'existence d’une tache nasale. Si tel est le cas, on ne saurait se prononcer qu'avec une extrême circonspection sur l'identité spécifique de cet exem- plaire, étant donnée la ressemblance presque absolue du reste du pelage entre le C. rctutans etle C. pluto. Sans mettre en nul doute la compétence de M. Th. Noack, il y aurait lieu, je crois, d'attendre que de nouvelles découvertes viennent confirmer sa manière de voir. En d’autres termes, dans le cas de mutilation de la face, l'interprétation donnée par R. Bühm est valable au même titre que celle de M. Th. Noack. Elle me parait même plus plausible puisque, tout récemment, M. Sclater (1) a signalé la présence du C. pluto sur la rive occidentale du lac Nyassa, d’après une dépouille recuallie par l'explorateur anglais A. Sharpe au cours de son expédilion entre le lac Nyassa et Le lac Moero, c’est-à-dire dans le voisinage Sud des régions visitées par le D' KR. Bühm. 40. CERCOPITHECUS ASCANIAS. (Aud.) Simia ascanias. Audebert. Hist. nat. Singes et Makis. Fam. IV, sect. Il, fig. 43, 4799. Simia petaurista. Lacépède et G. Cuvier. Ménagerie, planche non coloriée, 1801. Cercopithecus melanogenys. Gray nec Schlegel. Proc. Z. $. Lond. À. 7, pl. IX; 1849. — histrio. Reïchenbach. Vollst. Naturgesch. Affen, p. 106, 1863. — ascanias. Schlegel. Mus. Pays-Bas. Singes, p. 87, 1876, — ludio. Schlegel : nec Gray. — = — picturatus. M. Santos. Jorn. Sc. Math. Pa Natur. Lisboa, p. 95, 1886. (1) Sclater, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 97, 1892, et p. 253, 1893. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 209 Cercopitheeus Schmidti. Matschie. Zool. Anzeig., p. 161, 2 mai 1892. — -- Sclater. Proc. Zool. Soc.— Lond. p.245, pl. XVI, 1893. a. œ bien adulte. M. Brusseaux, 1890. Rive gauche du Congo. Confluent du Congo et de l'Oubangui. b. © adulte. M. Brusseaux, 1890. Rive gauche du Congo. Confluent du Congo et de l'Oubangui. c. cj jeune. M. Thollon, 1830. Rive gauche du Congo, en face de son confluent avec l’Alima. d. © adulte. M. Dybowski, 5 octobre 1891. Bangui. Les trois exemplaires (4, 4 etc) répondent exactement aux diagnoses que M. Matschie a données du mâle, de Ia femelle et du jeune du €. Schmidt, sauf pour la coloration de la tache nasale cordiforme. Chez le mâle (4), cette partie de la face est un peu endommagée, mais ce qu'il en reste permet de constaler que le chap nasal était leinté de jaune d’ocre dans sa moitié supérieure. Cette même particularité se remarque plus facilement chez la femelle (6), dont la tache nasale est bien intacte. Ici, la teinte jaune d’ocre vif occupe les deux tiers supérieurs du champ nasal; les poils d’un blanc pur ne constituent qu'un étroit liséré en forme de V, le long du bord supérieur des narines. Sur le jeune mâle (c), tout le champ nasal est Leinté de jaune, mais moins vif que chez la femelle adulle. Les quelques poils rares qui garnissent les oreilles sont d’un roux jaunâtre chez les spécimens (« et c), parsemés de quelques poils blancs au sommet de l'oreille chez l'exemplaire (4). La deuxième femelle {d) présente un champ nasal d’un blanc pur, mais ses favoris sont assez fortement teintés de jaune, bordés en avant, entre l'œil et les lèvres, de quelques poils noirs, et séparés de la teinte blan- che du menton par une ligne plus large et d’un noir plus intense que sur les {rois autres exemplaires. La poitrine, le ventre et la face interne des membres sont d’un blanc par- fait, mais le dessous du tiers basal de la queue présente une teinte d'un gris ardoisé sombre, due à l’envahissement sur toute la longueur des poils de la couleur bleue dont parle M. M. Santos pour le C. picturatus. J'ai déjà relevé plus haut l’aire de répartition de l’Ascagne, ANN. SC. NAT. ZOOL. ill, 14 210 E. DE POUSARGUES. je crois donc inutile de m'y arrêter de nouveau. Je ferai remar- quer toutefois combien les localités où ontété capturés les spé- cimens (&, b, c) sont rapprochées de Quimpampala et Ambriz que M. Mat. Santos indique comme habitat de son C. pic- turatus, et de Bembe et Encoche où, d'après Monteiro (1), l’on rencontre des troupes nombreuses de C. melanogenys (Gr.). Ce fait ajoute un nouvel argument à ceux que j'ai émis en faveur de la réunion de ces espèces. Quant à l’exem- plaire (c), je doute qu'il ait été tué à Bangui même, sur la rive droite de l’Oubangui; et je crois plus probable que M. Dybowskil’aura rencontré au cours d’une reconnaissance faite dans le voisinage de cette station, mais sur l’autre rive. Quoi qu'il en soit, ceci impliquerait la présence du C. asca- nias dans les contrées situées entre le Congo et l'Oubangui, jusque sur les rives occidentales des lacs Victoria et Tan-. ganika, patrie du C. Schmidh (Matsch.); car la largeur du Congo, dans cette partie la plus septentrionale de son cours, est considérable et atteint parfois 6 kilomètres, de telle sorte que ce fleuve constitue, malgré les nombreuses îles dont il est parsemé, un obstacle infranchissable pour les jure cantonnés sur sa rive gauche. 11. CERCOPITHECUS CEPHUS. (L.) Simia cephus. Linné. Syst. Nat., 12e édit., t. I, p. 39, 1766. Le Moustac. Buffon. Hist. Natur., t. XIV, p. 285, 1766. Cercopithecus cephus. Erxleben. Syst. nat., p.37, n° 16, 1777. Le Moustac. Audebert. Singes. Fam. IV, sect. IL, fig. 12, 1799. — Fr. Cuvier. Mamm., pl. 19, 1821. Cercopithecus cephus. Schlegel. Singes. Mus. Pays-Bas, p.91, 1876. — — Sclater. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 246, 1893. a. © adulte. M. Marche, 1876. Doumé-Ogôoué. b.œŒ — — 1878. Samkitta- _Ogôoué. HF = très jeune. M. Guiral, 1885. San Benito. d. G semi-adulte. — — — e. Q adulte. — — — f. Œ adulte. M. de Brazza, 1886. Ogôoué (2). (1) Monteiro, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 112 et 246, 1860. (2) Ce spécimen présente un indice de tache nasale pileuse blanche, dé- bordant sur les joues, et dont la forme losangique à grand diamètre trans- versal rappelle la tache nasale rouge du C. erythrotis. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 211 g. très adulte. M. Thollon, 1890. Forèt de Mayumbé. h. gf adulte. M. Dybowski, fin mai 1891. AA PO — 8 janvier 1894. Mayumba, près de l'Océan. ESA Ë . ï Je crois avoir suffisamment insisté sur les caractères pro- pres à cette espèce, pour n avoir pas à y revenir ici, etje me contenterai de signaler les particularités de pelage que pré- sente la queue chez certains individus. J’ai fait remarquer plus haut la complète ressemblance qui existe entre le C. ascamas (Aud.) et le C. cephus (L.) pour la couleur rouge rutilant caractéristique des deux liers terminaux de la queue. Îl existe des exceplions à cette règle pour les Mous- tacs, et sur les trois spécimens (4, à, j) la queue est de la même couleur que le dos; la leinte rouge ordinaire y est remplacée par un brun olive liqueté de jaune plus ou moins rougeâtre. Cette autre analogie remarquable avec ce qui a été observé chez le C. ascanias (type) est trop frappante pour être passée sous silence, et explique la discordance qui existe, pour la coloration de la queue, entre le vélin de Maré- chal et la planche d’Audebert. Cette même différence entre cette dernière figure el les quelques spécimens d’Ascagnes trouvés depuis pouvait laisser place au doute sur lidentité spécifique de tous ces individus, et ainsi s'expliquent les hé- sitations de MM. Sclater (1) et Barboza du Bocage (2) dont j'ai parlé plus haut, et la création des espèces C. picturatus (Sant.) et C. Schmidt (Matsch.). Les particularités que je viens de signaler chez les Moustacs lèveront, je crois, toute incertitude à cet égard, et seront la meilleure preuve du bien fondé de l'hypothèse que J'avais émise, à savoir: qu'il faut faire une large part aux variations individuelles chez ces espèces et. de plus, admettre chez le même individu des chan- gements de livrée sous l'influence soit de l'habitat, soit des saisons, soit de quelque autre agent modificateur. Ainsi, je (4) Sclater (C. ascanias?) Proc. Zool. Soc. Lond., p. 502, 1887. (2) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. natur. Lisboa, 2° série, n° 1, 1889 (Extrait). 212 _ E. DE POUSARGUES. me permeltrai de faire remarquer, sans toutefois vouloir tirer encore aucune conséquence cerlaine de ce fail, mais dans la seule présomption que des recherches poussées dans celte voie pourraient être fructueuses et donner la clef de ces mo- difications, que les trois spécimens remarquables par la teinte anormale de leur queue sont des femelles, dont deux (1,7) élaient incontestablement en état d'allaitement au mo- ment de leur caplure, comme le prouve l'allongement excessif de leurs mamelles. Cette belle et longue série de Moustacs n'ajoute aucun élément nouveau à nos connaissances sur la répartition géo- graphique de cette espèce, qui paraît canlonnée le long des côtes de l'Atlantique, depuis l'embouchure du Congo, Cabonda, jusqu'au Gabon, au San-Benilo, et au Cameron, sans pénétrer très avant dans l’intérieur. 12. CERCOPITHECUS POGONIAS. (Benn.) Cercopithecus pogonias. Bennett Proc. Zool. Soc. Lond., p. 67, 1833. — Erzxlebeni. Dahlbom et Pucheran. Rev. Mag. Zool., p. 96, 1856. _ — Dahlbom. Studia Zoologica, p. 109, tab. V. — nigripes. Du Chaïllu. Proc. Boston N. H. Soc., p. 360, 1860. — _— Gray. Proc. Zool. Soc. London, 1861, p. — pogonius. Schlegel. Singes. Mus. Pays-Bas, p. 82, 1876. — Grayi. Fraser. (sin. descr.) semi-adulte. M. de Brazza, 1885. Haut Ogôoué. adulte. M. Brusseaux, 1890. Safo, forêt de Mayumbé. — M. Dybowski, 9 octobre 1801 , près Bangui. — 45 octobre 1891 — — —* 2 janvier 1892. Ouadda, Han Oubangui. — janvier 1894. Cette-Cama, près du rivage de l’océan Atlantique. — _— Même provenance que le précédent, rap- porté vivant par le voyageur et ayant vécu à la Ménagerie du Muséum jusqu’au 25 janvier 1895 (1). 0 QXAO0Q | Le Muséum ne possédait encore de cette espèce, que la jeune femelle type du C. Erzxleben: (Puch. et Dahl.) et un magnifique exemplaire adulle provenant du voyage de (4) Voir à propos de ce spécimen, l’article publié par M. J. Dybowski, dans La Nature, n° 1101, p. 132, 7 juillet 1894 ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 213 M. de Compiègne au Gabon. Ces deux spécimens, joints aux sept ci-dessus énumérés, forment une magnifique série d’in- dividus variés, dont l'examen comparatif m'a permis de re- connaître que les trois espèces C. pogonias, C. Erxlebeni et C. nigripes successivement décrites par les auteurs, ne sont, ainsi que l'avait irès exactement observé Schlegel, que des varialions individuelles ou locales d’un seul et même type, Dans sa Revision des Cercopithèques, M. Sclater admet égale- ment la possibilité de ces variations, mais maintient néan- moins la distinction entre ces trois espèces ou sous-espèces, dont 1l forme sa section des Cercopithecti auriculati. Si l'on se range à celte manière de voir, il me paraît impossible toute- fois d'adopter la sous-espèce C. Erxleben: dans l’acception proposée par M. Sclater; et les différences qui existent entre le C. pogonias et le C. Erxlebeni types, ne me paraissent pas être telles que le savant naturaliste anglais les a établies. La seule distinction que l’on puisse reconnaître entre ces deux formes, réside dans la couleur du fond du pelage des parties supérieures du corps. Chez le C. pogonias, à part la face externe des membres postérieurs lavée de jaune « flavidis », la teinte fondamentale du dessus du corps est d’un noir ti- queté de blanc, « nigrescens, albo punctulatus », «haïrs black ringed with whitish, producing a grizzled appearance ». Chez le C. Erzrlebeni ces mêmes parties sont d’un brun olive tiqueté de jaune rougeûtre ferrugineux, « ofvaceo, fulvo, ferrugineo, griseo nigroque varieqalus ». Quant aux taches noires carac- téristiques du C. pogonias, « dorso medio, prymna, cauda superne et ad apicem, fasciaque temporali nigris », on les re- trouve bien marquées chez le C. Erxlebeni et décrites à peu près dans les mêmes fermes par Pucheran: « Vittis capitis tri- bus, regione lumbo-sacrali, caudæ parte supera et lolo apice nigris. » Tout comme chez le C. pogonias, la bande noire sacro-lombaire existe chez le C. ÆErxlebeni, el la rubrique « dorso concolore » ne saurait être pluslogiquement appliquée à l'un qu'à l’autre. Les individus à dos uniformément coloré conslituent une autre forme innomée, à laquelle mène insen- 914 E. DE POUSARGUES. siblement le C. nigripes à bande noire dorsale mal définie latéralement. Mais on ne saurait atltribuer une importance spécifique à toutes ces variations qui ne présentent ni fixité ni délimi- {ation précises; mieux vaut donner plus de latitude à la des- cription de Bennett, et à l'exemple de Schlegel fusionner toutes ces variétés en une seule espèce dont la diagnose serait la suivante : C. pogonias. Teinte fondamentale du dessus du corps variant du noir tiqueté de blanc au brun olive ondé de roux ferrugineux plus ou moins vif. Face externe des membres postérieurs toujours moins sombre que celle des antérieurs, qui peut être parfaitement noire depuis l'épaule jusqu'à l’ex- trémité des doigts. Une large bande longitudinale noire sur la partie postérieure du dos et les lombes, tantôt parfai- tement dessinée, tantôt indécise, tantôt absente. Dessous du corps, face interne des membres et pinceaux auriculaires d’un jaune rougeâtre plus ou moins vif. Sur la tête trois bandes longitudinales noires, dont deux temporales larges et une sagittale plus étroite formant crête, séparées par deux plages claires, d'un blanc plus ou moins jaunâtre légèrement tiqueté de noir comme les favoris. Queue noire sauf à la face inférieure de sa moilié basale où l’on retrouve la teinte fauve du dessous du corps parfois variée de noir. Bennett donne comme dimensions du C. pogonias lype un peu plus de 43 centimètres pour la tête et le corps, et 61 centimètres pour la queue; mais chez les individus parvenus à leur com- plète maturité, ces dimensions sont sensiblement plus gran- des. Ainsi le mâle adulte (f) compte 144 centimètres de longueur totale, dont 57 pour la tête et le corps et 87 pour la queue. | | Il est à noter toutefois que les proportions demeurent ri- goureusement constantes, el que pour ces deux exemples, les dimensions de la têle et du corps sont à celles de la queue, 9 exactement dans le rapport 3 L’aire de dispersion de cette ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 219 espèce paraît assez limitée; elle s’étend le long des côtes de l'Atlantique, de l'embouchure du Congo jusque dans le Ca- meron (Matschie). Vers l’intérieur, le point extrême où M. J. Dybowski ait signalé sa présence est Ouadda sur la rive droite de l’Oubangui, par 5° lat. N. et 16°, 47° 30 de longit. à l'Est du méridien de Paris. Aucun des spécimens (4,c,d,e) provenant de l’intérieur ne présente de tache dorsale, le dessus du corps est brun olive tiqueté de jaune rougeâtre pâle, et le dessous d’un blanc jau- nâtre. Lespécimen (4) provenant d’un point plusrapproché de la côte et plus Sud, revêt les teintes d’un roux doré vif du C. Erxlebeni typique et la bande noire sacro-lombaire appa- raît, quoique d’une manière assez vague. Quant à la livrée C. pagonias à large bande dorsale noire franchement limitée, elle paraît plus spéciale aux individus cantonnés le long des côtes, tels queles spécimens (/, g) qui ne présentent même aucune trace de jaune sur la face externe des membres pos- térieurs, tandis que le pelage des parties inférieures est d’un roux jaunâtre éclatant. L'hypothèse de l'existence de sous- espèces locales, émise par M. Sclater, paraît donc très plau- sible et sera, sans nul doute, confirmée par les découvertes ultérieures. Sur les spécimens (4, e), la bande sagittale sombre du front est excessivement étroile et si atténuée en avant, que les deux plages claires supraoculaires semblent se confondre sur la ligne médiane pour ne plus former qu’un large ban- deau frontal échancré en son milieu, mais ininterrompu et tel qu’on le remarque parois chez le C'. mona (Schreb.) et le C. Campbelli (Waterh.) (1). Ces deux espèces présentent d’ailleurs d’autres analogies, et de réelles affinités avec le C. pogonias, et la teinte brun sombre de la croupe et de la face externe des cuisses qui caractérise le C. Campbelli, sem- ble comme une diffusion de la bande noire sacro-lombaire du C. pogonias. _ (4) «This species (C. Campbelli) appears 30 be most closely allied to C. po- gonias of M. Bennett. » (Waterhouse, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 61, 1838.) D TON: E. DE POUSARGUES.. Une autre forme paraît êlre intermédiaire et servir de trail d'union entre ces trois espèces, c’est le Cercopithecus Grayi (Fras.) (1). Chez ce Lype, de même que chez les diffé- rentes variélés du €. pogonias, trois bandes sombres (deux temporales et une sagittale) limitent surle front deux taches supraoculaires d’un blanc jaunâtre. Suivant Gray, le C. Grayi présenterait comme la Mone une tache blanche sur les han- ches (2); M. Sclater (3) prélend au contraire qu'il n’en existe pas trace. En présence de ces deux manières de voir absolument contradictoires, il est impossible de se pronon- cer catégoriquement sans avoir vu le spécimen type de Fraser, que je soupçonne devoir être, suivant l’un ou l’autre cas, une variété soit du GC. mona, soit du C. pogonias. Mais ce point litigieux vient d’être définitivement élucidé par M. Sclater, qui, ayant eu récemment (4) l’occasion d’exa- miner le type du C. Grayi de Fraser, a reconnu son iden- lité avec le C. Erxlebeni. Le terme spécifique C. Grayi de date plus ancienne, doit cependant êlre abandonné, comme purement nominal, et ne correspondant à aucune description. 143. CercopirHecus BrAzzæ. (A. M.-Edw.) Cercopithecus Brazzæ. A. Milne-Edwards. Revue scientifique, 3° sér., t. XIT, | p. 15, juiilet 1886. — — Sclater. P. Z. $., p. 255, 1893. — — — P. Z. S., p. 443, pl. XXXIIL, 4893. a. çj vieux. M. de Brazza. Congo francais, 1885. b. très adulte. — = c. adulte. — a d. © semi-adulte. M. J. Dybowski. Poste des Ouaddas, Haut Oubangui. Lat. N.5°. Long. E. 16° 411808 Cetle espèce, sans contredit l'une des plus grandes et des plus belles du genre, à élé dédiée par M. A. Milne- (1) Fraser, Cat. Knowsl. Coll., p. 8, 1850. (2) Gray, Proc. Zool, Soc. Lond., p. 182, 14868. « C. Grayii. Haunches with a white spot.» (3) Sclater, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 256, 1893. « C. Grayi. There are no. white spots on the crupper. » (4) Sclater, Proc. Zool. Soc. Lond., p. 484, 1894. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 217 Edwards à M. de Brazza à qui l’on estredevable de sa décou- verte. Le courageux explorateur à doté le Muséum de trois magnifiques exemplaires de ce Cercopithèque, etrécemment M. J. Dybowski nous a rapporté la dépouille d’une femelle semi-adulte de cette espèce qu'il est facile de reconnaître aux caractères suivants : Le dessus et les côtés de la tête el du cou, le dos, les flancs, la croupe, le haut de la face externe des cuisses et des bras et la base de la queue sont gris pâle liqueté de noir. Les poils très serrés qui couvrent ces parties sont de deux sortes. Les uns constituant le sous-poil, sont courts, minces, duveleux et d’un blanc grisâtre vaguement annelé de noir ; les autres, beaucoup plus longs et atteignant jusqu'à 75 et 80 millimètres sur le dos, recouvrent et cachent complète- ment le sous-poil; ils sont d’un blanc grisâtre à parlir de leur base sur les deux cinquièmes de leur longueur, et mar- qués ensuite de quatre larges anneaux noirs, celui de l’extré- milé du poil compris, séparés par trois anneaux plus étroits, d’un blanc un peu jaunâtre. Ces anneaux blancs des poils diminuent de nombre el détendue à mesure que l’on descend sur la face antéro- interne des bras, et que l’on se rapproche de la ligne mé- diane inférieure ; 1l en résulte sur toute la poitrine et sur le ventre une teinte d’un noir grisâlre, les poils ne présentant plus qu'une légère teinte pâle près de leurs racines. Une étroite bande noire, bordée en avant d'un mince liséré blanc jaunâtre, naît vers l’articulation scapulo-humérale, descend en ondulant le long de la face antéro-externe des bras, el vers le pli du coude, se perd dans le pelage d’un noir pro- fond qui couvre la portion inférieure des bras, toule la face externe et postérieure des avant-bras et une grande partie de leur face interne et se continue sur les mains et les doigts. La face interne des cuisses el l’aine jusqu'au bord posté- rieur de l’anus el des callosités sont garnies de poils d’un blanc pur. Une bande étroite de poils de cette même couleur part de l’angle inféro-externe de chacune des callosités, 218 E. DE POUSARGUES, traverse la face extérieure de la cuisse de haut en bas et d’arrière en avant, et vient se perdre sur la face externe de la jambe un peu au-dessous du genou, après avoir décrit un arc à convexité antérieure qui tranche vivement sur la teinte grise environnante. Une tache noire oblongue se remarque vers le genou. Sur la face postérieure des cuisses, et sur les jambes, la teinte du pelage est d’un gris obscuré- ment tiqueté qui, en arrière, va s’assombrissant de plus en plus, à mesure qu'on se rapproche du talon. Le dessus des pieds et toute la surface de la queue à partir de 7 à 8 cen- - timètres de sa base sont recouverts de poils complètement noirs. Le pelage de la région céphalique chez le C. Brazzæ présente des particularités remarquables, et éminemment caractéristiques. Sur le devant du front, on observe un ma- gnifique diadème de poils roux, denses, assez longs, égaux, disposés en éventail, dressés et formant brosse. Ce diadème a exactement la forme d’un segment de cercle, dont la ligne soureilière, marquée par un mince liséré de poils noirs, serait la corde. Le long de son bord postérieur fortement convexe en arrière, on distingue une teinte plus pâle, due à l'extrémité blanc jaunâtre des poils roux qui garnissent son pourtour. Chez le vieux spécimen (a), le diadème mesure 4 centimètres sur la ligne médiane frontale, dans le sens antéro-postérieur. Ce diadème est séparé du pelage gris Hiqueté du dessus de la tête par un large bandeau de poils noirs, couchés d'avant en arrière. Ce bandeau traverse la région post-frontale, s'arrête de chaque côté au niveau supérieur de la région temporale, et de là, se prolonge en arrière sous forme d’ailerons (1) symétriques qui viennent masquer l’orifice de l’oreille. À l'inverse du diadème, c'est donc sur la ligne médiane frontale que ce bandeau noir présente, dans le sens antéro-postérieur, son développement minimum, qui est de 15 millimètres. (1) Cette disposition du bandeau a été représentée très exactement dans les figures jointes au travail de M. Sclater sur les Cercopithèques.(P.Z.S8., figure dans le texte, p.255, et pl. XXXIIL, p. 443, 1893.) ÊTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 219 Sauf un étroit anneau circumoculaire, la face est complè- tement velue. Les joues et les tempes sont garnies de poils gris tiquelé de noir analogues à ceux des parties supé- rieures du corps, mais plus courts. Des poils noirs et ras, en continuité avec ceux de la bande sourcilière, couvrent le nez depuis sa racine jusqu'au niveau de l'angle supérieur des narines. À partir de ce point, le reste du museau est revêlu de poils d’un blanc pur; cette teinte effleure obliquement la commissure des lèvres, et se propage sous le menton et la gorge pour aller se terminer en coin en avant de la poitrine. Sur la lèvre supérieure et l'extrémité du nez, ces poils blancs sont courts el assez peu fournis; mais sur la lèvre inférieure ils s’allongent et se multiplient considérablement à mesure qu'on se rapproche de la ligne médiane, et forment, sous le menton et la gorge, une longue barbe qui diffère de celle que l’on remarque chez la Diane, en ce qu’elle se prolonge en arrière jusqu’à la base inférieure du cou. Les oreilles sont nues, noires, petites, émergeant à peine au-dessus du pelage des parties environnantes; derrière elles on trouve un faible espace cunéiforme dépourvu de poils. | M. Sclater (1) a donné récemment une courte description où se {rouvent consignés les caractères les plus saillants du pelage du Cercomthecus Brazzæ. La teinte fauve pâle signalée par M. Sclater pour les parties supérieures du corps est à peine visible et pour ainsi dire nulle chez les spécimens types du Muséum de Paris, dont les parties supérieures sont gris pâle tiqueté de noir. La planche qui accompagne la description du savant naturaliste anglais, indique une teinte trop blanche sur la poitrine, qui en réalité est noir grisâtre ; cette figure ne donne également qu’une idée peu précise de la forme et de l’orientalion de la raie fémorale blanche. De plus, la ligne noire scapulo-humérale ne se trouve indiquée ni dans le texte, ni dans le dessin. Cette ligne présente (1) Sclater, loc. cit. 290 E. DE FOUSARGUES. cependant une constance et une nelteté remarquables. Elle descend de l’articulalion de l’épaule en décrivant le long de Ja face antéro-exlerne du bras une courbe onduleuse d’abord convexe, puis concave en arrière, borde en avant le pelage noir de la portion inférieure de la face externe du bras, et, comme je l'ai dit plus haut, se perd vers le pli du coude dans la leinte noire du pelage de l’avant-bras. Cetle raie noire humérale est, on peut le dire, l’homologue de la ligne fémorale blanche, et méritait d'autant plus d'être signalée qu’il n'en exisle aucun veslige chez les autres espèces de Cercopithèques connus. J’ai donc cru utile de reprendre avec détail la descriplion du Cercomthecus Brazzæ, tant pour corriger ces légères inexactitudes, que pour faire connaître d’une façon complète les spécimens types dont les dimensions, vu leur état de complet développement, exce- den! sensiblement celles données par M. Sclater. Dimensions du corps en centimètres. ‘1 i b d vieux. très adulte.| adulte. |semi-adulte Longueur de la tête et du corps... sul 69 66 60 = Vue la lqueue. sem Eee 17 67 66 58 — de la main (du poignet à l'extrémité du médius). 12 bi 10 0 — du pied (du talon à l'ex- trémité du médius)... 16 15 14,5 14 Il y a bien quelques rapports lointains de parenté entre le C. Brazzæ el le C’. leucampyx (Fischer, non Gray), mais par suite de la présence d’une barbe mentonnière et d’une ligne blanche fémorale, c’est avec le €. diana (L.) que le C. Brazzæ présente les affinités les plus étroites, et, avec juste raison, M. Sclaler a réuni ces deux dernières espèces dans une même seclion sous le nom de Cercomitheci barbat. Entre autres affinités probables, et même certaines, il faut encore signaler celle qui rapprocherait le C. Brazzæ du C. neglectus (Schlegel) ou C. leucampyx (Gray, non ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 221 Fischer). M. Sclaler incline même fortement à la réunion de ces deux espèces. Après le sérieux examen comparatif que le savant anglais a fait des peaux du C. Brazzæ et du C. neglec- Lus, 11 n'y à nullement à douler de leurs analogies. Mais, vu l'absence, chez l'unique dépouille mutilée du C. neglectus, de toute la portion faciale (parties si éminemment caracté- risliques et si particulières chez le C. Prazzæ), il y a lieu, je crois, d' hésiter avant de se prononcer pour la similitude com- plèle et l'identification des deux espèces. Gray décrit le pelage de son C. leucampyx comme gris brun finement liqueté de gris, « fur grey-brown minutely grey-grizzled », el M. Sclater admet également une coloration générale beau- coup plus brunâtre el une teinte jaunâtre pour la raie fémo- rale de ce même spécimen. Chez le C. Brazzæ la raie fémo- rale esl franchement blanche, et j'ai insisté plus haut sur la couleur grise et non fauve des parties supérieures du corps. Ni Gray, ni M. Sclater ne signalent chez le C. neglectus la ligne humérale noire si remarquable chez le C. Brazzæ. Devant ces divergences, et l'insuffisance de documents, pour la région faciale du C. neglectus, loute assimilation serait problématique. L’étroite parenté des deux espèces est incon- testable, par suite tant du mode de distribution des teintes, que de la présence d’une ligne fémorale, mais il est impos- sible d'invoquer autre chose que des hypothèses et des présomptions, en faveur de leur identité spécifique. Le crâne dans cetle espèce, n'offre aucune parlicularilé remarquable, il présente nettement tous les caractères du type Cercopithèque et je me bornerai à en indiquer quel- ques dimensions prises sur les trois spécimens adultes lypes provenant du voyage de M. de Brazza : 222 E. DE POUSARGUES. tr) b C œ vieux. |O'tr.adulte.| œ adulte. 0 Mesures du cräne en millimètres. | Longueur maximum du crâne en ligne droite de la crête occipitale à l'extrémité des prémaxmnNaires rs NET PE RCE 22 120 120 116 Longueur curviligne du bord postérieur du | trou occipital à la suture naso-frontale..| 120 120 128 Longueur en ligne droite de la suture naso- frontale à l'extrémité des prémaxillaires. 59 59 53 Lonsueur des tos nasaur ee MU tnt 26 28 30 Longueur du museau (du bord antérieur de l'orbite à l'extrémité des prémaxillaires).| 42 40 38 Diamètre orbitaire vertical 754 Let LUe 125 26 24 — — ÉPANSV CSA EE ere Cr 25 28 26 Largeur maximum du crâne aux arcades zygomatiques. SR ER RS RE ET ET 83 79 178 Largeur du crâne aux arcades Dane: à 68 63 (6) Longueur de la face inférieure du crâne (du condyle occipital à l'extrémité des pré- HAN EMAIECS) AE PEAR AIRE EUR SAR ORE 99 97 92 Longueur totale de la voûte palatine...... o1 49 47 Largeur du palais (à l'extérieur des der- niéresmrolaites)s. SALE Len Poster (EE 32 30 20 Largeur du palais (à l'extérieur des deuxièmes molaires)............ De PAL 39 33 32 Largeur du palais devant les canines...... 30 30 21 Longueur rectiligne de la mandibule (de la SmphysSe ancondyLe) Er. i RUN 84 86 81 Longueur de la symphyse à l'angle de la LOU A UOUT CAES SA tire Er Re de 73 16 10 | Hauteur de la branche horizontale de la mandibule derrière la dernière molaire. 19 18 19 Hauteur de l’apophyse coronoïde au-dessus du bord inférieur de la mandibule...... 42 41 39 Largeur maximum de la branche montante L rade ta manmdibnne se een PRE 34 31 29 : Hauteur totale de la tête osseuse au-dessus de l’angle de la mâchoire..... Mn 4 83 81 83 Les variations individuelles sont, comme on Île voit, à peine sensibles, et sous ce rapport, on ne peut signaler qu'une légère prédominance de la portion encéphalique du crâne chez le plus jeune de ces trois individus, et la brièveté relalive du museau et de la mandibule, Lu ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 223 1%. CERCOPITHECUS CYNOSURUS. (SCop.) Le Malbrouck. Buffon. Hist. nat., t. XIV, p. 224, 1766. Simia cynosuros. Scopoli. Delic. Flor. Faun. insub., pars I, pl. XLIV, 1786. Cercopithecus tephrops. Bennett. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 109, 1833. — cynosurus. Reichenbach. D. vollst. Naturg. d. Affen, p. 119, pl. 295 et 301, 1862. — tephrops. Reichenbach. D. vollst. Naturg. d. Affen., p. 120, pl. 296 à 300, 1862. — cynosurus. Schlegel. Sing. Mus. Pays-Bas, p. 72, 1876. —. — Sclater. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 247, 1893. — — Jentink. Not. f. Leyden Mus., p. 262, 1893. a. çÿj adulte. M. Thollon, 1889. Rive gauche du Congo, près Brazzaville. C'est un fait assez curieux que l’on ait ignoré st longtemps la provenance exacle du Malbrouck. Pourtant, depuis que Buffon a fait connaîlre celte inléressante espèce, de nom- breux individus, apportés vivants en Europe, ont figuré à diverses époques dans la plupart des ménageries, et leurs dépouilles préparées garnissent en grand nombre les vitrines des principaux Musées. Reichenbach incline beaucoup à croire que le C. flavidus de Peters n'est qu'un jeune du C. tephrops (Benn.) (1) et l'habitat de cette espèce serait dès lors la côte de Mozambique. Plus généralement, on assigne comme patrie probable au Malbrouck le Sénégal; mais cette autre hypothèse ne repose également que sur des données incertaines. Les choses en étaient encore à ce point en avril 1893, quand M. Jentink signala la présence certaine et authentique du C. cynosurus dans le Mossamedes à Cahama, localité située sur le Kakulovar, affluent de la rive droite du Cunéné. Le spécimen mâle rapporté par M. Thollon est des mieux caractérisés, et répond exactement à la description du C. tephrops de Bennett. La tête et le tronc sont couverts, au- dessus, de poils annelés de noir et de jaune roussâtre; sur la face externe des membres, la teinte jaune des anneaux clairs s’éleint et passe au blanc. Tout le dessous du corps est blanc, (4) Avec plus de raison M. Matschie considère le C. flavidus comme un jeune C. rufoviridis (I. Geof.). Sitz. Ber. Ges. naturf. Fr. n° 8, p, 214, 1893. 224 E. DE POUSARGUES. elles favoris sont très peu développés. La queue gris tiqueté de blanc jaunâtre en dessus, blanche en dessous, devient noire vers son extrémilé. Sur le front se remarque un étroit ban- deau sourcilier d’un blanc grisätre. La peau de la face pâle, est couverte de poils noirs courts et clairsemés, à l’exceplion d’un espace circumoculaire assez élroit. Aucune teinte d’un roux Jaunâtre ne s observe sous la base de la queue, et les poils qui entourent le scrotum et la verge sont de la même teinte blanche que ceux du ventre. Des faits que je viens d'exposer découle cette conséquence indiscutable, que le Malbrouck, €. cynosurus remonte du Cunéné jusqu'aux rives du Congo sous l'équateur à (ra- vers toutes les possessions portugaises de l’Angola. Il est à supposer toutefois qu'il est assez rare dans ces contrées, pour avoir échappé aux investigations des nombreux explo- rateurs portugais, qui n'y ont jamais signalé sa présence. Le Malbrouck se trouve-t-il sur la rive droite du Congo? M. Thollon dit ne l’y avoir jamais rencontré, et l’exemplaire dont il a doté le Muséum a été capturé au cours d’une excursion faite sur la rive gauche. Il est permis de supposer qu'il en est de cetle espèce comme du Colobus angolensis el du Cercopithecus ascanias, et que le Congo oppose une bar- rière infranchissable à sa dispersion vers le Nord. L'existence du Malbrouck dans la Sénégambie devient, de ce fait, tout à fait inadmissible. 45. CERCOPITHECUS SABÆUS. (L.) Simia sabæa. Linné. Syst. nat., p. 38, n° 18, 1766. Le Grivet. Fr, Cuvier. Mamm., 1819. Cercopithecus griseo-viridis. Desmarets. Mamm., p. 61, n° 27, 1820. Chlorocebus engythithia Gray. Cat. Monk., p. 26, n° 5, 1870. Cercopithecus sabæus. Schlegel. Sing. Mus. Pays-Bas, p. 74, 1876. — griseo-viridis. Sclater. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 247, 1893. a. cf très adulte. M. Dybowski, décembre 1891. Yabanda, dans la Grande Brousse, 6° 25° Lat. N. b. semi-adulte. M. Dybowski, 15 mai 1892. Poste de la Mission sur la ri- vière Kemo. Lat. N., 604 0/LenmtoE; 17415 ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 229 Comme pour l'espèce précédente, ces deux spécimens ajoulent des éléments nouveaux el précieux à nos connais- sances sur la répartition géographique du Grivet. La présence de celle espèce dans l'Afrique centrale, sur un point beaucoup plus rapproché de la côte occidentale que du rivage de l'océan Indien, constitue un fait, sinon inat- tendu, du moins inédit et très suggestif. Le C. sabæus n’avail en effet été signalé jusqu'ici que dans l’Abyssinie (Rüppell), sur le Nil blanc (d’Arnaud) et dans le Sennaar et le Kordofan (Clot-bey). On peut dès à présent, sans témérité, préjuger de sa présence dans les localités situées entre ces stations extrêmes, c’est-à-dire dans le Niam-Niam, bien qu'il n’y ait élé rencontré ni par Schweinfurth, ni par Emin-pacha. Cette aire de dispersion du Grivet paraît donc, à très peu près, coïncider avec celle du Colobus quereza, sans toutefois s’é- tendre aussi loin vers l'Ouest. Cette similitude d'habitat n’a rien qui doive étonner, vu l'extrême analogie que ces deux Singes, pourtant si différents, présentent dans leur manière de vivre. Si le Grivet est commun dans les parties basses de l’Abyssinie, 1l peut s'élever très haut sur le flanc des montagnes, et suivant Rüppell, jusqu'à 4000 pieds au- dessus du niveau de la mer ; d’aulre part les C. quereza sont nombreux dans les massifs monlagneux de ces mêmes ré- gions, el nous avons vu que le voyageur Johnston les avail rencontrés à une altitude de 3000 pieds sur les pentes du Kilima-Njaro. Il doit certainement exister de grandes analogies de pe- lage entre les deux Grivets rapportés par M. J. Dybowski et la jeune femelle de cette espèce, à teintes pâles, que Schlegel a signalée dans son catalogue (N° 4) comme provenant du Sen- naar. Sur les deux spécimens qui nous occupent, le pelage des parlies supérieures du corps présente également des teintes très pâles, et les anneaux clairs dont les poils sont marqués, légèrement jaunâtres chez le jeune mâle (&), sont d’un blanc presque pur sur l'adulte (a). Les favoris blancs falciformes sont extrèmement développés, et dépassent de ANN°. SC+ NAT. ZOOL,. . IE, A5 2926 E. DE POUSARGUES. beaucoup le sommet de la têle. De chaque côté et au-des- sous dela base de la queue, les poils blancs s’allongent beau- coup, et forment une touffe frisottante circumanale. La peau de la face et du menton assez glabre, est d’un noir profond qui fait ressortir la blancheur des favoris et de la bande sourcilière. La verge et le scrotum sont entourés de poils jaune orange vif, qui tranchent fortement sur le fond blanc des parties inférieures du corps. Dans la carte et le tableau ci-joints se trouve indiquée l'étendue de l'aire de dispersion des principales espèces du genre Cercopithecus. dl op pétitions ani ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS, 227 De cette liste ont été éliminés quelques types, les uns anciennement décrils, mais de provenance ignorée, tels que C. pygerythrus (F. Cuv.), C. Werneri (1. Geoff.), les autres de création récente et d'habitat inconnu, hypothéti- que ou imparfaitement déterminé, et dont les affinités, pour | CERCOPITHÈQUES RÉGIONS | Rs RHINOSTICTI MELANOCHIRI CHLORONOTMI ERYTHRONOTI BARBATI AFRIQUE SEPTENTRIO- NALE ORIÈNTALE a ire AFRIQUE .[C. albigu-|R.|C.rufoviri- laris(Syk..) dis(Geof.) À ————— ————— |0G.|C.sabæus.|P'|C. pyrrho-[N.[C.Braz- MEL nn) | es AS (H.| (ze. (A. = : 4 M.-Ed. É E.|C. erythro-|J. |C.pogonias ts) A M. e tis(Wat.) (Benn.) a | 210.10. cephus.|M.|C. mona.|T.|C.talapoin Ur ul (L:} (Schreb.) (Schreb.) & |.1£|H.|C.nictitans OL | a \£| |B.|C.petauris- Ée UE ta.(Schr.) K.|C. callitri- 4 MAS B'|C.Buttiko- chus. (E. S}2/5| |feri.(Jen.) Geuff.) ED |B?|C. erythro-|C.|C Campbel-|K1|C. tantalus\P.1C. patas.|D.|C. dia- NE gaster(Gr.) li. (Wat.) (Og.) | (Schreb.) na.(L.) © |Ht|C.Martini. | (Wat.) | E A.|C. ascanias|L.|C. leucam-|U.|C. ral Res (Aud.) pyx(Fisc.) rus (Scop.) | LE | = (7. C. saman-|V.I|C. Lalan- | £2 | go(Sund.) deilGeof.) | EE quelques-uns même la réelle validité exigent encore un sérieux contrôle. Dans cette catégorie se trouvent C. Wolf (Mey.), C. Boutourlin (Gigl.), C. Stuhlmanni (Misch.), C. Stairsi (Scl.), C. Moloneyr (Scl.), €. opisthostictus (Scl!.), C. albotorquatus (de Pous.). 2928 E. DE POUSARGUES. GENRE CERCOCEBUS 16. CERCOCEBUS CoLLARIS. (Gr.) Le Mangabey à collier blanc. Buffon. Hist. nat.,t. XIV, p. 248, pl. XXXIIH, 1766. Le Mangabey (var. a). Audebert. Singes et Makis. Fam. IV, sect. IL, pl. X, 17007 Cercopithecus æthiopicus. Fr. Cuvier. Mamm., p. 71, pl. XXIV. Cercocebus collaris. Gray. List., p. 7, 1843. — — I. Geoffroy. Cat. Prim., p. 24, 1851. _ — Schlegel. Sing. Mus. Pays-Bas, p. 96, 1876. a. g' presque adulte. M. Dybowski, février 1894. Cette-Cama. b* © semi-adulte. = = == c. Gtjeune. a <= = d.= Jeune individu rapporté vivant par M. Dybowski, en ne 1894, et ayant vécu à la Ménagerie du Muséum. Les trois spécimens (a, à, c) présentent des différences 1rès appréciables dans les dimensions relatives de la queue, comme on peut s’en convaincre par les mesures suivantes : Mesures en centimétres. Longueur de la tête et du corps.......... 15 40 54 — de FA QUES LE AE RO RANPRRE 67 35 60 Rapport entre ces deux dimensions....... 4112 1,14 0,9 | Chez ces trois exemplaires, la queue terminée par une parlie blanche est bien intacte ; chez les deux mâles («, c), sa | longueur équivaut environ aux neuf dxièmes des dimensions de la tête et du corps; chez la jeune femelle (6), ce rapport est absolument renversé. — Le Mangabey à collier blanc n’a été signalé jusqu'ici que dans le Congo français et le Cameron. 17. CERCOCEBUS ALBIGENA. (Gr.) Presbytis albigena. Gray. P. Z. S., p. 77, pl. XVI, 1850. Cercocebus albigena. Pucheran. Rev. Ma de Zool., p. 241, 1857. _ ÉTUDE SUR LES. MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 229 Cercocebus albigena. Schlegel. Sing. Mus. Pays-Bas, p. 97, 1876. Cercopithecus aterrimus. Oudemans. Zool. Gart. XXXI, p. 267, 1890. Cercocebus albigena. Jentink. Mus. d. Pays-Bas, Cat. syst., t. XI. Mamm., ‘ p. 26, 1892. Cercopithecus aterrimus. Sclater. P.Z. S., p. 256, 1893. Cercocebus albigena. Matschie. Säugeth. deutsch Ost-Afrikas, p, 6, 4895. a. G' adulte. M. de Brazza, 1885. Congo français. b. = semi-adulte. M. Thollon, 1890. Rivière Alima. ce. gt adulte. Rapportés vivants par M. Dybowski en avril 1894, et d.çf semi-adulte. ayant vécu à la Ménagerie. Tous ces exemplaires sont absolument typiques, et répon- dent scrupuleusement à la description de Pucheran. L’aire d'habitat de cette espèce paraît s'étendre vers l'Est beaucoup plus loin qu’on ne l'avait d'abord supposé; en effet, Le spécimen décrit par Oudemans sous le nom de C'er- copithecus aterrimus, provenait des Chutes Stanley sur la rive droite du Congo, en pleine Afrique centrale; et d’après M. Matschie, l’explorateur Neumann en aurait également rencontré des individus dans l’Ouganda entre les lacs Albert et Victoria-Nyanza. 18. CercoceBus AGiLis. (A. M.-Edw.) (nov. sp.)(1) Cercocebus agilis. (A. Milne-Edwards.) Rev. Sc., 3° série, t. XII, p. 15, juil- let 1886. a. ç adulte type. M. de Brazza, 1886. Congo français. b. Q à peine adulte. — — — c. œ adulte. M. Brusseaux, 1890. Confluent de l'Oubangui et du Congo. d. © très adulte. M. J. Dybowski, 4 janvier 1892. Poste des Ouaddas. e. © jeune à dentition incomplète. M. Dybowski, 4 janvier 1892. Poste des Ouaddas. Par son pelage tiqueté, ce Cercocèbe se distingue nette- ment des autres espèces du même genre cantonnées dans l'Ouest de l'Afrique, et dont les poils d’un brun plus ou moins foncé suivant les types, ne présentent jamais d’annula- tions claires. Sous ce rapport, c'est avec le Cercocebus qale- (1) Il existe actuellement (sept. 1896) à la Ménagerie du Muséum unindi- vidu mâle semi-adulte de cette espèce donné par M. Edm. Gauthier, chef de poste au Congo français. C’est le premier spécimen rapporté vivant en Europe. 230 E. DE POUSARGUES. ritus (Pet.) (1) de la côte de Zanzibar que le Cercocebus agihs présente le plus d’affinités. Sur toutes les parties supérieures du corps; les poils d'un gris brunâtre à la base, d’un brun sombre à leur extrémilé sont marqués sur leur tiers distal de deux anneaux jaune verdâtre, très nets sur la tête, la nuque et les membres antérieurs, plus vagues et beaucoup moins tranchés sur les joues, les épaules, le dos, les flancs et la face externe des membres postérieurs. Aux membres antérieurs, la teinte brune fondamentale s’assombrit à mesure qu’on se rappro- che des extrémités, les annulations disparaissent à partir du poignet, et les poils qui couvrent les mains et les doigts passent au noir assez intense. La queue relativement courte, : d'un brun noirâtre à peine tiqueté au-dessus, d'un gris brunâtre sale en dessous sur sa plus grande portion proxi- male, prend des teintes plus pâles à partir de son dernier tiers et devient d’un blanc grisâtre sur le dessus et le des- sous de sa terminaison. La poitrine et le ventre sont garnis de poils assez longs mais très clairsemés, blancs à la base, d’un jaune roussâtre à l'extrémité. Ces teintes passent au blanc grisâtre argenté sur la gorge et la face interne des membres. Sur_le dos et principalement le long des flancs, les poils sont assez longs et retombants. Les favoris, brun olive sombre tiqueté de jaune comme le dessus du corps, sont irès denses el dirigés obliquement de haut en bas et d'avant en arrière. Sur la tête on remarque une disposition analogue à celle que Peters a signalée chez le C. galeritus. Les poils divergent en rayonnant d’un lourbillon médian situé un peu en arrière de la lisière orbitaire; ceux qui se dirigent en avant se dressent sur le devant du front, où ils forment une frange sourcilière qui rappelle un peu celle que l'on re- marque chez le Cercocebus albigena (Gr.); sur les côtés, ils (1) Peters, Monatsb. Akad. Berlin, p. 830, pl. P et II, 1879. L'espèce C. galeritus, découverte à Mitole, au confluent du Tana et de l’Osi, sur la côte Nord de Zanzibar, n’est encore connue, je crois, que par le type. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 231 viennent se confondre avec le pelage de même teinte des tempes et des favoris; enfin, en arrière du tourbillon, les poils assez relevés, se dirigent d'avant en arrière, mais ne prennent pas un développement aussi considérable que chez le C. galeritus. Sur la face et le menton effiléset {rès proéminents, la peau d'un brun sombre est nue, sauf sur l’arête du nez où quel- ques poils bruns rares et courts forment un velouté qui descend jusqu’à la cloison inter-nasale. Les paupières supé- rieures sont couleur de chair livide. Les oreilles nues, et de même couleur que la face, sont arrondies et assez courtes, mais émergent néanmoins complètement du pelage du des- sus de la têle et des favoris. Les callosités sont larges, et sur une assez grande surface, la peau qui les enloure en dessous est presque complètement glabre. Le Cercocebus agilis se fait remarquer par ses formes svelles et légères et par la longueur de ses membres, ce qui lui a valu son nom spécifique. Chez cette espèce les di- mensions de la queue atteignent à peine celles de la tête et du corps, et ces proportions présentent une constance re- marquable. Un coup d'œil jeté sur le tableau ci-joint suf- fira pour fixer les idées sur ce point. M timètres s k É esures en centimètres. Frmel G e Pa-neur du corpset de la tête... LAURE 66 66 57 — DORE Nan diet see 6% 65 56 — CDD ADE mue dat donc semi Se 15 15 14 — derPavant-Dras 26:51 .R4 do ee 17 16 16 — de la main (du poignet à l'extrémité du UNIS) RER EPS RER Enr 11 11 10 — d'efOUISSB ie die Vo de AE 18 16 16 = del amDe 41 25 30e ROSE 24 21 19 — du pied (du talon à l'extrémité du mé- DNS 2 dom cile ee CR NE 16 43 413 La tête osseuse ne présente à noter que les quelques par- Ucularités suivantes : | 932 E. DE POUSARGUES. Les orbites sont plus ouvertes que chez les autres types du groupe, et leur diamètre vertical ou antéro-postérieur, égale leur diamètre transversal. Les crêtes sourcilières, très hau- tes et {très accusées sur le mâle adulie type, sont de niveau avec le point le plus élevé de l’os frontal. Par contre la saillie de l'os malaire est à peine sensible, aussi la fosse sous-orbitaire est-elle à peine indiquée et incomparablement moins profonde que chez le C. albigena. Ainsi chez le C. agihs (type) le point le plus antérieur de l’os malaire se trouve au niveau de l'intervalle qui sépare la deuxième et la troi- sième molaires, tandis que chez le C. albigena l’amorce an- térieure malaire de l’arcade zygomatique s’avance parfois jusqu'au niveau de la première molaire, comme j'ai pu le constater sur plusieurs crânes de cette espèce. Chez le C. agilis, les canines sont faibles, et par suite du peu de renflement de leurs parois alvéolaires, le museau reste mince, étroit et effilé. À la mâchoire inférieure, le cin- quième tubercule de la dernière molaire est bien développé; les canines ont moins de puissance encore que les supé- rieures, comme c'est l'ordinaire; aussi la symphyse menton- nière présente-t-elle la même acuité que le bord alvéolaire des intermaxillaires. Les branches montantes de la mandi- bule ne présentent que de faibles dimensions en hauteur comme en largeur, et leur direction est assez oblique sur celle des branches horizontales. Les apophyses coronoïdes sont sensiblement arquées de dedans en dehors. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 233 Mesures du cräne en millimètres. Longueur maximum du crâne en ligne droite (de la crête occipitale à l'extrémité des prémaxillaires).............. 120 Longueur curviligne du bord postérieur du trou occipital à re MnaAso Iron Enlentr, 24 LL UNE AR ie 135 Longueur en ligne droite de la suture naso-frontale à l’extré- CR O CTLEUER S 0 9 0 ee de de 52 Ce anna SauR Eur til 2e ed dise es das sd de 29 Longueur du museau (du bord antérieur de l'orbite à l’ex- oui des prémaxillaires ane. SCIE EU 44 D nee orbite Vértal ss 1. 28 nt a ut 21 — — PRIS MER SM es US Moda de diode ane 27 DEF NCE NI TANT MSA PEER ET ER ERA TRS ESS PETER D Largeur maximum du crâne aux arcades zygomatiques..... 75 TT de ALGATES CEDITTES AL AR SE EN 60 Longueur de la face inférieure du crâne (du condyle occipi- Mnalexirémité des Drémaxtilaires)s.:.. fs enes rent 90 onsteuntotale de la voûte palatine:.. 5: 0. 49 Largeur du palais en dehors des dernières molaires........ 32 -- —— — des deuxièmes molaires....... 36 — — devant lesteanines ur nt mn. 22 Longueur rectiligne de la mandibule (du condyle au bord Meur de laiSympEyse) As, EU. LS ANRT 81 Longueur rectiligne de la mandibule (du bord antérieur de PS muhyse a lanoaletde la machoire)..:....:220 67 Hauteur de la branche horizontale de la mandibule derrière EE OO SR Te due ne dote ie me de ae ve 18 Hauteur de l’apophyse coronoïde au-dessus du bord inférieur US 4. den 40 Largeur maximum de la branche montante................ 24 Hauteur totale du crâne au-dessus de l'angle de la mâchoire RE LE PP RS Late Ce roue. 80 Comme je l’ai indiqué plus haut, c’est avec le Cercocebus galeritus (Pet.) que le Cercocebus agilis présente le plus d’affi- nités, et il existe entre ces deux espèces des analogies nom- breuses et incontestables, mais un examen attentif permet de reconnaître chez chacune d’elles des caractères propres dont l'importance réelle milite en faveur de leur parfaite in- dépendance. Chez le C. galeritus type, du même sexe, mais plus vieux que le type du C. agilis à en juger d’après l’usure de la couronne des molaires (voir Peters, PI. IIP), la saillie de l’os malaire est très accusée et la fosse sous-orbitaire profonde ; 234% E. DE POUSARGUES. par contre les crêles sourcilières sont à peine indiquées. Chez ce même type, les canines sont puissantes, la voûte palatine est plus large et le museau moins effilé que chez le C.agulis, dont la mâchoire inférieure est du reste beaucoup plus faible. Si nous passons au pelage, nous constatons que chez le C. galeritus, le bonnet, de teinte plus sombre que le dessus du corps, ne présente dans sa configuration qu’une ressem- blance assez lointaine avec les poils ravonnants du sommet de la tête du €. agilis. D’après la planche qui accompagne la description du C. galeritus, les poils du bonnet plaqués sur le vertex se prolongent jusqu’en bas de la nuque et forment une sorte de capuchon qui masque complètement les oreilles et déborde de chaque côté en surplombant les favoris. Geux- ci sont d'une teinte claire semblable à celle de la poitrine et du ventre, et les pieds, comme les mains, sont de couleur sombre. Peters décrit et figure chez cette espèce une touffe terminale caudale dont on ne trouve pas la moindre trace chez le C. agilis. Enfin une dernière particularité qui permet encore de distinguer facilement le C. galeritus est l'extrême disproportion qui existe entre la longueur du corpset celle de la queue, comme on peut s’en rendre facilement compte en élablissant les rapports suivants : | CERCOCEBUS RS | GALERITUS AGILIS Longueur dmcorps et dé TATtelerRs PRAIRIES 02,49 02,66 — dE LA QUEUE TE sl 0m 0768 | Rapport entre ces deux dimensions ...... Re LE 0,644 1,045 EC Corner | Ce tableau montre de plus que les individus de l'espèce C. galeritus, n’atteignent qu’une taille assez faible et bien inférieure à celle des spécimens de C. agilis qui peuvent leur ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 239 être comparés tant au point de vue du sexe que de l’âge. Lors de la visite qu'il fit récemment au Muséum de Paris, M. Matschie fut également frappé des ressemblances qui existent entre le C. agülis et le C. galeritus. De retour à Berlin, le savant mammalogiste allemand m’adressa sur le Cercocèbe type de Peters les détails suivants que je dois signaler : « Les poils de la tête du C. galeritus sont disposés comme l'indique la planche; la couleur du pelage est très semblable à celle du C. agilis; mais le dessus des mains et de la tête est un peu plus foncé. » Ces renseignements concordent avec quelques-unes des conclusions aux- quelles m'avait conduit l'étude de la description et de la planche de Peters; mais les mesures données par ce dernier auteur n'étaient pas complètes, et _ voici celles que M. Matschie m'envoie après les avoir prises sur l'animal même : «Long. a naso ad caudæ basim 64°; long. ab occipitead caud. bas. 49cm, » D’après ces données, M. Matschie incline à admettre l'identité des deux espèces (1). Ces derniers détails, il est vrai, diminuent d'une manière sensible la va- leur du principal argument que j'invoquais en faveur de la distinction des deux Cercocèbes, car le tableau comparatif des proportions doit être modi- fié de la manière suivante : a ——————_—_—_—_—_— CERCOCEBUS TE D. EE GALERITUS AGILIS Poeueur du corps et dela tête :2...4 4.2... OCEAN, 0:06 _ HÉAENGUNE DO PAR EUR RENE Te ere 0,76 0,65 | Rapport entre ces deux dimensions................ 0,842 1,045 Toutefois, malgré ces correctifs, la disproportion bien qu'affaiblie sub- siste, de même que les différences assez tranchées que j'ai indiquées pour le pelage. Je crois donc devoir conserver au C. agilis son indépendance spécifique. L'examen de nouveaux spécimens de C. galeritus, capturés dans la vallée du Tana ou quelque autre point de l'Est africain, est nécessaire pour permettre de fixer définitivement le degré de variabilité des teintes et des proportions de cette espèce, et résoudre le dilemme suivant : Le Cer- cocebus agilis doit-il être identifié au Cercocebus galeritus, dont l'aire de dispersion s’étendrait ainsi à travers toute l'Afrique équatoriale, de l’em- bouchure du Tana sur l’océan Indien jusque sur la rive droite du Congo inférieur; ou bien ces deux espèces sont-elles représentatives, mais dis- tinctes, l’une spéciale à l'Est, l’autre à l'Ouest africain, comme les Colobus palliatus et Colobus angolensis nous en fournissent un exemple? (4) Matschie, Säugeth. Deutsch Ost-Afrik., p. 145, 1895. 230 E. DE POUSARGUES. GENRE PAPIO 19. Papio poGuERrA. (Puchr. et Schimp.) Cynocephalus doguera. Pucheran et Schimper. Rev. et Mag. Zool., p. 96, 1856, et p. 250, 1857. Papio doguera. Schlegel. Singes. Mus. Pays-Bas, p. 126, 1876. — thoth ibeanus. O. Thomas. Ann. Mag. nat. Hist., p. 47, 1893. — ibeanus. Matschie. Säugeth. deutsch. Ost Afrik., p. 11, 1895. — doguera. — — p. 146. a. Œ semi-adulte, M. Dybowski, 1891. Pays des Babembés, Congo français. L'étiquette portant l'indication précise de la date de la capture et de la localité s'est malheureusement égarée pen- dant le voyage, mais cet intéressant spécimen faisait cerlai- nement partie du premier envoi de M. J. Dybowski, comme le prouve une autre étiquette attachée à l’une des paties et porlant le N° 10. Les numéros immédiatement inférieurs et supérieurs indiquent comme localités le pays des Bas- soundis et celui des Babembès, sur la rive droite du Congo, non loin de son embouchure; ce qui nous permet de signaler ces contrées comme habilat très probable du P. doguera. I est également à présumer que c’est ce Cynocéphale auquel M. Dybowski fait allusion dans la relation de son voyage (1), et qu'il aurait rencontré par bandes nombreuses aux envi- rons de Lyranga, dans le pays des Afourous, un peu au nord du confluent de l’'Oubangui et du Congo. L’unique spécimen de la eollection de M. J. Dybowska répond parfaitement à la description que Pucheran et Schimper ont donnée de leur C. doquera; mis en présence du type de cetle espèce, il présente avec lui une ressem- blance absolue, sauf pour les dimensions qui sont sensi- blement inférieures ; mais cet écart doit être attribué à la non-maturité de l'individu, et les proportions sont presque identiques : | (4) J. Dybowski, La route du Tchad, p. 140, 1893. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 237 P,. DOGUERA TR — Type. a. Ponsuetr dela tète et du corps......i2e,......., 0m,933 | 0,64 — OPÉOAUONe RM, dat RUB So: 02,568 | Om,44 Rapport entre ces deux dimensions. .:.............. S'il faut en croire Schlegel, la distinction entre le P. do- guera et le P. anubis ne serait pas neltement tranchée. «Ilest bon de rappeler, écrivait le savant hollandais, que l’on ne parviendra guère à fixer d'une manière décisive les caractères des Papio doquera et anubis, qu'après l’exa- De men de séries complètes d'individus tués à l’état sauvage dans les deux principales localités qu'ils habitent. » Le P. anubis ne nous est malheureusement connu que par une courte description et une figure peu concordantes publiées par F. Cuvier; et les zoologistes sont loin d’être fixés sur l'identité de cetle espèce el sur son aire d’ha- bitat. Certains auteurs, Wagner (1) le premier, comparent l’A- nubis au Babouin dont il ne serait qu'une variété à pelage vert. Pucheran (2), au contraire, l'en sépare d’une manière absolue, ainsi que du P. olvaceus (1. Geoff.), distinction que Is. Geoffroy (3) n'admet qu'avec doute. Schlegel (4) est plus explicite et affirme au contraire nettement l'identité de ces deux espèces. Suivant cette dernière opinion, le P. anubis habiterait le long des côtes du Bénin, tandis que d’après Monteiro (5), on le trouverait à Cuio-bay sur un point de la côte d'Angola assez reculé dans le Sud ; ce qui auloriserail à rapprocher l’Anubis du Chacma P. porcarius (E. Geoff.) (4) Wagner, Schrebers Saugeth. (Suppl.), p. 63, 1855. (2) Pucheran, Rev. et Mag. de Zool., p. 244, 1857. (3) Is. Geoffroy, Catalogue des Primates, p. 34, 1851. (4\ Schlegel, Sing. Mus. Pays-Bas, p. 125, 1876. ( 4 5) Monteiro. P.Z.S. London, p. 238, 1863. 238 E. DE POUSARGUES. que d'Anchieta (1) a rencontré vivant par troupes nom- breuses près de Biballa, dans l’intérieur du Benguela et du Mossamedes, c’est-à-dire dans les contrées visitées par Monteiro. Quoi qu’il en soit, si l’on admet avec Schlegel la syno- nymie du P. olivaceus et du P.anubis; le P. doquera doit en être complètement distingué, car sa livrée d’un noir ver- dâtre largement ondé de fauve terreux ne présente rien (4) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2° série, n° 4, p. 42, 1889. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 239 de comparable à celle du P. olivaceus dont j'ai pu examiner le type. Le P. dogquera n'avait été signalé jusqu'à présent que dans l'Est et le Nord-Est africains (Kavirondo, lacs Natron et Manyara (Neumann) ; Abyssinie (Schimper) ; Takale et Schil- louck sur le Bahr-el-Abiad (Heuglin). Les captures faites par (E. Geoff.) GENRES ne — Te AS CERCOCEBUS | MACACUS THEROPITHECUS PAPIO (1) de a | M. inuus. fa B.| P. cynocepha- | £ lus. (E.Geoff.) | = |G.|C. galeritus. DE gelada. B‘| P: éhotn. (08-) | & HS | (RAphs) si P. hamadryas. Æ | (E. Geoff.) ; PLUS OUTRE OUR: S [G |C. agilis. (A. | [(Buels et Sch.) | | M.-Edw.) z | 8 M.|P. mormon. = | &|C.|C. collaris. (E. Geoff.) ue (Gr.) | L.| P. leucophæus. =\2|£21A.|C.albigena. (F. Cuv.) a F5 (Puch.) ! | = £ £ S 1e S15(5 Æ.iC. æthiops. | O.1P. olivaceus. a (© (L.) (I. Geoff.) SIS IF. |C. fuligino- S.[P. sphinx. 1 E sus.(Geoff.) (E.Geoff.) [æ) De ou Læ) Ë | A PSE fe P. porcarius. ATRIQUE AUSTRALE (1) Deux espèces de Papions, de validité douteuse ne figurent pas sur cette liste. L'un P. anubis (F. Cuv.) de provenance ignorée, n’est peut-être qu’une variété verdâtre sombre du P. cynocephalus ; l’autre P. rubescens (Tem.) de la Guinée supérieure vit dans l'hinterland des contrées dont le P. olivaceus occupe les côtes (Matschie). La distinction de ces deux derniers types ne me paraît fondée que sur des caractères de faible importance. 240 E. DE POUSARGUES. M. J. Dybowski démontrent que cette espèce s'étend très loin vers l'Ouest jusque dans le bassin côtier du Quillou. Ce mode de dispersion rappelle celui du Cof. guereza et du Cerc. sabæus. Ces trois espèces appartenant à autant de genres différenis, rencontrées primitivement dans l'Afrique Nord-Est, ont donc été prématurément considérées comme spéciales à cette région. 20. Papio morMon. (E. Geoff.) Le Mandrill. Buffon. Hist. nat., t. XIV, p. 154, pl. XVI et XVIL, 1766. Le Choras. Buffon. — (Suppl), t VIL p.143, pl. 1XS41789; Le Mandrill. Audebert. Singes et Makis. Fam. 2, sect. 2, pl. I, 1799. Papio mormon. E. Geoffroy. Ann. Mus., t. XIX, p. 104, n° 7. Cynocephalus mormon. Desmarets, Mammalosgie, t. I, p. 70, 1820. Mormon maimon. Gray. Cat., p. 36, 1870. Papio maimon. Schlegel. Singes. Mus. Pays-Bas, p. 130, 1876. Capturés non loin de Mayumba et rapportés vivants par M. J. Dybowski, en avril 1894; ont vécu à la Mé- nagerie du Muséum. a. semi-adulte. b. jf plus jeune. Ces deux spécimens, même le plus jeune, ont les proémi- nences latérales du museau marquées de sillons déjà bien accusés. La peau nue des fesses est uniformément colorée en violet lie de vin. Sur l’exemplaire (a) qui présente déjà une taille assez considérable, le tour des narines et le bord des lèvres commencent à prendre les teintes rouges carac- téristiques de l’âge adulte. Le pelage est sensiblement le même chez ces deux Mandrills, à peine plus foncé chez le plus âgé; la barbe mentonnière est au contraire plus lon- gue chez le jeune. Le Mandrill n a jamais été signalé qu’au Gabon, dans le voisinage des côtes. IT ORDRE. — PROSIMIENS FAMILLE DES LÉMURIDÉS GENRE GALAGO 21. GaLAGO (OTOLICNUS) ELEGANTULUS. (Lec.) Microcebus elegantulus. Lecomte. Pr. Acad. Nat. Sc. of Philadelphia, t. IX, D 10/4857 Otolienus apicalis. Du Chaïllu. Journ. Nat. Hist. Soc. of Boston, p. 361, 1860. — — Gray. Proc. Zool. Soc. London, p. 274, 1861. Otogale pallida. Gray. — p. 140, pl. XIX, 1863. — (Æuoticus) pallidus. Gray. — p. 860, 1872. _Galago (Otolicnus) elegantulus. De Pousargues. Nouv. Arch. Mus. Paris, 3e série, t. VI, p. 1#1,1894. — pallidus. Matschie. Säugeth. deutsch. Ost-Afrik., p. 14, 1895. a. O M. Dybowski, mars 1894. Peau plate, préparée par les indi- gènes du pays des Eschiras. La Monographie que j'ai publiée récemment sur les di- vers représentants du groupe des Galagos, me dispense d’in- sister sur cette espèce et sur celles qui vont suivre, et Je crois suffisant de rappeler brièvement ici les principaux traits caractéristiques de chacune d'elles, en renvoyant pour plus de détails à mon précédent travail. Le Galago elegantulus (Lec.) est plus connu dans les Cat:- logues méthodiques sous le nom de &. pallidus (Gr.), mais la priorité revient de droit au terme spécifique créé par Lecomte, antérieur de six ans à celui adopté par Gray et depuis par la plupart des zoologistes. La brièveté relative des oreilles, la teinte rousse du pelage des parties supérieures nettement séparée du ton gris ar- senté du dessous du corps et de la face interne des membres, la pointe blanche de Ia queue, grise en dessous, lavée de roux en dessus, sont autant de caractères extérieurs qui ANN, SC. NAT. ZOOL. Il, 16 249 E. DE POUSARGUES. jaissent facilement reconnaîlre cetle espèce d’entre ses con- génères (1). Les particularités crâniennes ne sont pas moins frappantes. De tous les Galagos, sans distinction subgénérique, le G. Otolicnus elegantulus est celui dont la tête est la plus élevée. Le museau fortement tronqué pré- sente une largeur considérable due au grand développe- ment des canines et des premières prémolaires canini- formes, et les incisives inférieures fortement proclives et presque horizontales semblent prolonger en avant le bord alvéolaire de la mandibule. Découvert au Gabon par Du Chaillu, le G. Orolicnus elegantulus a été considéré, jusque dans ces derniers temps, comme localisé dans le voisinage des côtes de l’Atlantique, au Cameron, au Gabon et dans le bassin de l’'Ogôoué ; mais son aire de dispersion s'étend vers l'Est jusqu'aux dernières limites du bassin du Congo. L’explorateur allemand Stubl- mann en a rapporté des spécimens de Kinyawanga à l'Ouest de la région des Grands Lacs, et M. Matschie indique sa présence comme probable dans le Rouanda. 22. GALAGO (OTozicnus) ALLENI. (Wath.) Galago Alleni. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. London, p. 87, 1837. — — var. gabonensis. Gray — p. 146, 1863. — — Sclater. — p. 375, pl. XXXTIT, 1865: — _ gabonensis. Mivart. —— _p. 647, 1864. Otolicnus gabonensis. Gray. — p. 860, 1872. Sciurocheirus Alleni. Gray. — p. 851, 4812: Galago Alleni, var. cameronensis. Peters. Mon. Kônig. preuss. Ak. Wiss. Berlin, p. #72, 1876. — (Otolicnus) Alleni. De Pousargues. Nouv. Arch. Mus. Paris, 3° sér., t. VI, p. 150, 1894: — Alleni. Matschie. Säugeth. deutsch. Ost-Afrik., p. 14, 1895. a Œ M. Dybowski, mars 1894. Peau plate préparée par les indi- gènes du pays des Eschiras. Le dessus du corps est d’un brun rougeâtre passant au 1) Un autre caractère extérieur d’une investigation facile, signalé par M. Matschie, réside dans le singulier mode de conformation des ongles. Ceux-ci présentent une forte carène longitudinale médiane dont la pointe acérée dépasse leur bord libre, d’où le nom de Spitznagel-Maki, donné par M. Matschie à cette espèce. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 243 roux vif sur le baut des quatre membres; les joues, la poi- trine, le ventre el la face interne des membres sont d'un blanc grisâtre lavé de jaune. La face postérieure des cuisses et le croupion offrent une teinte d’un gris ardoisé sombre qui se continue sur la moitié basale de la queue, et passe au noir fuligineux à son extrémité distale. Cette robe présente assez d’analogie avec celle de l'espèce précédente, mais il est toujours facile d'en distinguer Je G. Otolicnus Alleni, au grand développement des oreilles, à l’absence de toute tache blanche à l'extrémité de la queue et à la forme arrondie des ongles. Le crâne fournit, d'autre part, des caractères de différenciation encore plus probants. La boîte encéphalique est large, mais basse et surbaissée ; le museau étroit et pointu, rappelle comme forme celui des Hémigalagos ; enfin, les premières prémolaires sont normales et non caniniformes comme chez l'espèce précédente. Découvert à Fernando-Po, le G. Otolicnus À lleni a été vu depuis à maintes reprises au Gabon et au Cameron, et même, suivant Schlegel, sur les côtes de Guinée; mais cette dernière provenance est loin d’être confirmée. Je dois ajouter qu'il en est de cette espèce comme de la précédente. Le même explorateur Stuhlmann l’a rencontrée à l'extrémité N.-E. du bassin du Congo, dans les forêts pro- ches d'Andeboko, et suivant M. Maischie, elle doit égale- ment exister dans le Rouanda. | 23. GALAGO (HEMIGALAGO) Demiborri. (Fisch.} Galago Demidoffii. Fischer. Act. Soc. Natur. Moscou, vol. I, p. 24, fig. 1, 1806. Galagoides Demidoffii. A. Smith. S.-Afric. Journ. II, p. 32, 1835. Otolienus Peli. Temminck. Esq. Zool. Côt. Guinée, p. 42, 1853. Hemigalago Demidoffii. Dahlbom. Stud. zoologica, pl. X, p. 230, 1856. Galago Demidoffii. Gray. Proc. Zool. Soc. London, p. 148, 1863. _— — Peters. — pl. XXXV, p. 380, 1863. Hemigalago Demidoffii. Gray. — p- 858, 1872. Galago Demidoffii. O0. Thomas. — p. >, 1888. — (Hemigalago) Demidoffi. De Pousargues. Nouv. Arch. Mus. Paris, 3° sé- rie,t. VI, p. 154, 1894. gg K H. DE POUSARGUES. a-f (6 spécimens). M. de Brazza, 1885. Congo français. 9. M. Thollon, 1886, Franceville. h-l (5 spécimens). M. J. Dybowski, juillet 1891 et mai 1892. Brazzaville et rivière Kemo. Ce Galago est trop bien connu pour qu'il soit utile d'en donner ici une description, il suffit de parcourir les nom- breux travaux indiqués dans ia bibliographie, eten particulier l'excellente diagnose de l’'Orolicnus Peli donnée par Tem- minck, pour se faire une idée très exacte de sa forme, de ses dimensions et des teintes de sa livrée. Quant aux par- ticularités crâniennes qui ont délerminé les auteurs à créer un nouveau sous-genre pour cette espèce, je renverrai aux travaux de Dahlbom, Gray et Mivart (1) el au mémoire que j'ai déjà fait paraîlre à se sujet. On sait actuellement que le Galago de Demidoff n’est pas, comme on l’a cru longtemps, localisé le long du lhftoral Ouest de l'Afrique, depuis le Sénégal jusqu’à l'embouchure du Congo, mais qu'il se propage très avant dans l'intérieur ; Schweinfurth l’a rencontré en 1870 dans le Niam-Niam, et Emin-Pacha en {884 dans le district de Monbutiu. L'ex- trême limite orientale reconnue de son aire de dispersion, se trouve ainsi reportée jusque dans la partie Nord-Est du bassin du Congo. Les nombreux spécimens recueillis par les explorateurs français démontrent que cette espèce est très abondamment représentée dans nos possessions con- golaises. 24. GALAGO (HEMIGALAGO) ANoMURUS. (Nov. spec.) Galago (Hemigalago) anomurus. De Pousargues. Bull. Soc. Zool. France, te X VITE, p.151,4809: — — — De Pousareues. Nouv. Arch. Mus. Paris, 3e série, t. VI, p. 158, pl. II, 1894. # 4 fe Ja M. J. Dybowski, a ns | Poste de la Mission sur la HE es ne 17 mai 1gp2 | ivière Kemo. Dans le travail ci-dessus indiqué j'ai démontré que, par la (4) M. St. George Mivart, On the crania and dentition of Lemuridæ (Proc. Zool. Soc. Lond., p. 648, 1864). ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 249 forme et les proportions de la Lêle et du museau, la forte saillie des prémaxillaires et la dentition, cette nouvelle espèce constituait un second représentant du sous-genre Hemigalago et venaitse ranger zoologiquement à côté du &. Hemigalago Demidoffi. — Elle se distingue de cette dernière, par ses di- mensions un peu plus fortes, ses formes plus trapues, ses membres moins grêles, etles teintes plus clairesde son pelage, au-dessus d'un gris plus ou moinslavé de brun jaunâtre sui- vant l’âge etle sexe, au-dessous d’un blanc faiblement nuancé de gris bleuâtre. Mais c’est surlout parles proportionsrela- tives de la queue que le G. Hemigalugo anomurus se dislin- gue, non seulement du G&. Hemigalago Demidoffi, mais en général de tous les Galagos. Dans toutes les espèces jusqu'ici connues, les dimensions de l’appendice caudal présentaient avec celles du corps une relation si constante, qu'on Pa- vait exprimée sous forme de caractère générique : Queue plus longue que la tête et le corps. C’est l'inverse qui s’observe chez le G. Hemigalago anomurus, et la longueur de la queue est à celle de la têle et du corps dans un rapport qui varie de 4/5 à 3/5; de là le nom spécifique qui lui a été attribué. GENRE PERODICTICUS 25. PERODICTICUS POTTO. (Gm.) Lemur potto. Gmelin. Syst. Nat.,t. I, p. 42. Nycticebus potto. E. Geoffroy Saint-Hilaire. Ann. Mus., p. 165, vol. XIX. Perodicticus Geoffroyi. Bennett. Proc. Zool. Soc. London, p. 109, 1831. Stenops potto. Pel. Bijdrag., t. d. Dierkunde. Amsterdam, p. 41, et pl. 1852. Perodicticus potto. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 45, 1853. — — À. Milne-Edwards. Nouv. Arch. Mus. Paris. Bull., t. X, pi be pe 111, 187%; 2? — Edwardsi. À. Bouvier. Guide du Naturaliste, n° 4, p. 10, jan- vier 1879. a. Q adulte. M. J. Dybowski, janvier 1894. Cette-Cama. Ce spécimen femelle bien adulte mesure 39 centimètres pour la tête et le corps, et 10 pour la queue. Les teintes 246 E. DE POUSARGUES. sombres de sa livrée sont celles que Temminck a décrites comme caractérisques de la femelle de cette espèce. « La femelle adulte, écrivait le savant hollandais, se distingue par les teintes brunes dont le pelage est nuancé, tandis que la livrée du mâle porte différentes teintes rousses. La base des poils est d'un cendré foncé, puis d’un brun clair; ils passent au brun noirâtre, et leur fine pointe est d’un brun argentin ou lustré; celte teinte argentine est plus évidente sur la partieinférieure de l’avant-bras, ainsi qu'aux mains, vu qu'une plus grande étendue de l'extrémité est ainsi colorée ; toutes les parties inférieures, qui chez le mâle sont nuancées ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 241 de roussâtre portent une teinte blanchâtre terne chez la fe- melle. » Cette description s'applique de point en point à notre spécimen, ce qui semble corroborer l'opinion de Temminck sur l'existence d’un dichroïsme sexuel chez cette espèce, dichroïsme qui, paraît-il, se manifeste même de LÉMURIENS LATE GENRES REGONS | "a GALAGO cu : 3 Sr TE TR Otolemur. Otolicnus. Hemigalago. E.|0. elegantu-|X.|H.anomurus. A.|P.calabaren- lus. (Lec.) (De Pous.) sis. (Smith.) 16 Cor an ac. .|P. potto. ME sien Pa ail (Gm.) TIME fi. (Fisch.) Entre _Gongo et Niger. OUEST AFRICAIN S.10. senega- lensis. (E. Geoff.) S'|0. senna- PLENSISAU [Er (Kotzch.) O.zanziba- TiCUS. (Mtsch.) O.mossam- bicus. (Pet.) nus. ae ) S2 datus (Geof.) S Otolicnus : EST AFRICAIN is O. crassicau- E O0. Garnetti. | !S*|0. conspi- É ul (Gr.) cillatus. = | (EL. Geoff.) S5 (Smith.) M.10. Monteirti. (Bartl.) SUD-OUEST . AFRICAIN très bonne heure chezles jeunes. Cette livrée brune concorde comme coloralion avec celle que M. A. Bouvier assigne à un individu également femelle, décrit très brièvement sous le nom de Perodicticus Edwardsi, nouvelle espèce qui ne différerait du P. potto que par sa taille plus forte et sa queue plus courte. La différence des dimensions me 248 E. DE POUSARGUES. paraît toutefois trop peu accusée pour consliluer un carac- tère d'importance spécifique, car, bien des spécimens de Potto aileignent de 38 à 40 centimètres pour la tête et le corps seulement. Quant aux proportions moindres de l’ap- pendice caudal chez le P. Edwardsi, il est difficile d’en juger d’après la seule description de M. A. Bouvier qui ne donne comme mesure de son individu type, que la longueur totale, qui est de 425 millimètres. N'ayant pas eu l’occa- sion de voir ce spécimen, il m'est impossible de déterminer quelle partie de cette longueur totale doit être réservée pour la queue, et de savoir si celle-ci est complète, ou si sa brièveté n’est pas le résultat de quelque mutilation acci- dentelle. | L'exemplaire que nous devons à M. J. Dybowski pré- sente une particularité intéressante à noter : sur la base de la queue, et la ligne médiane du croupion et de la partie postérieure des lombes, les poils ont disparu et laissent voir à nu la peau brunâtre, fortement calleuse et plissée trans- versalement de distance en distance. Les observations et les excellentes figures prises sur le vivant et publiées par M. A. Milne-Edwards, nous fournissent une explication facile et toute naturelle de ce phénomène. Ces figures nous montrent en effet des Pérodictiques à l’état de repos, enroulés sur eux- mêmes, la tête ramenée contre la poitrine entre les quatre membres relevés et entre-croisés autour de la nuque pour s'appuyer ou se fixer solidement aux branches, de telle sorte que le poids du corps ne porte plus que sur les lombes et le croupion. C’est dans cette posture bizarre que l'animal passe la plus grande partie du jour dans une immobilité parfaite: de là usure et disparition graduelle des poils par suite de la compression et du frottement, et en même temps épaississement de la peau et formation de callosités sur ces parties du corps en contact fréquent et prolongé avec la surface rugueuse des écorces. La limite de l'aire de répartition du P. potto vers l'Est. est encore inconnue, et jusqu’à présent cette espèce de- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 249 meure exclusivement ouesl-africaine, cantonnée le long du littoral de l’Atlantique, depuis Sierra-Leone jusqu'à l’em- bouchure du Congo, qu’elle ne dépasse pas au Sud; M. Bar- boza du Bocage affirme en effet qu'aucun explorateur ne l’a Jamais rencontrée dans l’Angola. Sur la côte de Calabar, le Potto vit à côté d’un autre Lémurien qui lui est élroitement allié sinon congénérique, l'Arctocebus calabarensis (Smith). IL ORDRE. — CHEIROPTÈRES Depuis la publication du Catalogue des Cheiroptères de la collection du British Museum par G. E. Dobson, les ani- maux appartenant à cet ordre sont beaucoup mieux connus, et dans l'exposé des différentes espèces recueillies par nos explorateurs dans nos provinces du Congo et de l’Afrique centrale, je ne puis mieux faire que de renvoyer au travail du savant zoologiste précité en ce qui concerne les prinei- paux caractères de la denlition, du pelage, de la forme de la membrane alaire, des dimensions de la queue et de ses rapports avec la membrane interfémorale. Je me conten- terai de consigner ici les particularités que pourraient pré- senter certains spécimens, et d'indiquer si les exploralions récentes, postérieures à la date de publication du travail de Dobson, donnent lieu à des considérations nouvelles, sur la disiribution géographique de certaines espèces. Sous-Ordre. — MÉGACHEIROPTÈRES FAMILLE DES PTÉROPODIDÉS GENRE EPOMOPHORUS 26. Eromorxorus (HYPsIGNATHUS) monsrrosus. (All.) Hypsignathus monstrosus. Allen. Proc. Acad. Nat. Sc. Philadelphie, p. 156, 1861. Spyrocephalus labrosus. Murray. Proc. Zool. Soc. Lond., pl. I, p.8, 1862. Hypsignathus monstrosus. Dobson. Cat. of Chiropt., pl. I, fig. 4, 14, 2, p.6, 1878. — — O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 7, 1888. adulte. M. Marche, novembre 1875. Ogôoué. — M. de Brazza, 1885. Congo français. a. Q Jreÿ c. © dE 2 — = Es e Œ — M.J.Dybowski, 21 octobre 1891. Bangui. DC, — —_—— =— ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 291 Ce Cheiroptère réellement monstrueux est trop connu en raison même des singularilés, de la longueur et de la grosseur disproportionnées de sa lêle pour que je croie né- cessaire de m’y arrêter. Les six exemplaires ci-dessus énu- mérés concordent d’ailleurs parfaitement par tous leurs caractères avec la description de Dobson. On sait que l’absence de poches glandulaires humérales dans les deux sexes, la forme tuberculée des molaires el les curieuses expansions foliacées et nues qui garnissent le de- vant du museau ont nécessité la séparation subgénérique de cette espèce d’avec les autres Épomophores. L'A. monstro- sus n'a élé pendant longtemps signalé que le long du lit- toral de l'Atlantique depuis la Gambie jusqu’à l'embouchure du Congo, et la limile de sa dispersion vers l'Est restait à fixer. On peut avancer aujourd’hui comme cerlain, que cette espèce se répand jusque dans l’extrême partie orientale du bassin du Congo; l'explorateur Bohndorf l’a rencontrée en 1882 dans le Niam-Niam, et deux exemplaires ont été capturés en 1883 par Emin-Pacha à Tingasi, dans le dis- trict de Monbuttu, où on les trouve par vols de 50 à 60 in- dividus. Dans ces contrées les indigènes se nourrissent de la chair de ces animaux. Au Sud, le Congo semble opposer une barrière à leur dispersion, car on ne les a Jamais signa- lés dans l'Angola. 27. EPOMOPHORUS GAMBIANUS. (Og.) Pteropus gambianus. Ogilby. Proc. Zool. Soc. London, p. 100, 1835. Pachysoma gambianus. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, # 09 185% Fo os gambianus. Dobson. Catal. of Chiropt, pl. Il, f. 3a, n. 10, 1878. — Barboza du Becage. Jorn. Sc. Me Lisboa, 2e sé, nn ptet.14,1880; a. © adulte. MM. Schwébisch et Thollon, 1884. Franceville. L'aire d'habitat de celte espèce est autrement vaste que celle de Hypsignathus monstrosus; suivant Dobson, elle * comprendrait toute l'Afrique occidentale depuis la Gambie au Nord jusqu’à l'extrême Sud de la colonie du Cap, à Port- 252 | E. DE POUSARGUES. Élisabeth, dans la baie Algoa. Si l’on admet avec ce savant zoologiste l'identité spécifique de l’Æ. gambianus et de VE. cryplurus (Pet.) (1) il faudrait même prolonger celte zone en remontant la côte orientale d'Afrique à travers le Natal et le Mozambique jusqu'au Zambèze. Mais cette dernière opi- nion n’esl pas partagée par lous les auteurs, notamment par M. Barboza du Bocage (2), dont la manière de voir est basée sur de sérieux arguments. L’éminent naturaliste portugais a constaté en effet, chez une femelle adulte d’Epomophorus crypturus de Mozambique de provenance absolument cer- laine, que « les plis du palais étaient identiques, comme forme et comme position, non pas à ceux de l’Æ. gambianus, mais à ceux de l’Æ. macrocephalus (0g.), et que le 5° bour- relet présentait la forme caractéristique du 5° ph chez la der- nière espèce ». Comme ces mêmes caractères se retrou- vent absolument identiques chez l’£. minor (3) de Zanzibar et qu'on leur attribue non sans raison une importance émi- nemment spécifique, il y a lieu, Je crois, de prendre en très sérieuse considération la remarque suivante de M. Barboza du Bocage (4) : « Sous le rapportdes dimensions, l'£. cryp- turus nous semble intermédiaire à l’Æ. macrocephalus de l'Afrique occidentale, et à l’£. minor du Zanzibar. Il y aura peut-être lieu de considérer celui-ci et l’'£mopophorus de Mozambique comme variétés géographiques de l’£. macro- cephalus. » Il ressort de ces faits bien précis, que l'aire d’ha- bitat de l’'£. gambianus doit être restreinte à la côle occi- dentale d'Afrique; ce Cheiroptère serait, parail-il, très commun dans l’Angola, ainsi que l’a reconnu l'explorateur d'Anchieta, qui l’a rencontré dans presque toules les locali- tés qu'il a visitées. (1) Peters, Reise n. Mossambique. Säugeth., p. 26, pl. V et pl. XII, fig. 1 à 6, 1852. (2) Barboza du Bocage. Jorn. Sc. nat. Lisboa, 2° série, n° 1, p. 4, 4889. (3) Dobson, Proc. Zool. Soc. London, p. 715, 1879. (4) C'est également l'opinion de M. O0. Thomas, qui admet la validité spécifique de l'Epomophorus crypturus (Pet.) (Proc. Zool. Soc. Lond., p. 137, - 1894). ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 293 À l'Est, V£. gambianus, aurait été capturé par Bohn- dorff à Semmio dans le Niam-Niam (1), et cette localité serait l'extrême limite orientale incontestée de sa zone d’ha- bilat. M. Matschie rapporte à cette espèce quelques rares individus de l’Usaramo et de Zanzibar, mais en émettant quelques doutes sur celte délermination. Quant à l'identité spécifique du spécimen femelle ci-dessus mentionné, la forme et la disposition des bourrelets palatins ne laissent aucun doute, car ils sont la reproduction rigou- reusement exacte de la figure donnée par M. Dobson pour l'E. gambianus. | 28. EPOMOPHORUS MACROCEPHALUS. (Og.) Pteropus macrocephalus. Ogilby. Proc. Zool. Soc. London, p. 101, 1835. Pachysoma macrocephala. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 70, 1852. _ Epomophorus macrocephalus. Dobson. Catal. of Chiropt., p. 8, pl. LL, fig. 2, 1878. a. Q adulte. M. J. Dybowski, décembre 1891. Dans la Grande Brousse, entre Yabanda et Mpoko. Les dimensions de cet individu dépassent celles que Dobson assigne à la femelle de cette espèce, et atteignent presque les proportions du mâle. Mais à part cette légère différence, il n'y a pas à se méprendre aux caractères four- nis par la longueur et l'étroitesse du museau, la forte saillie et la divergence des narines, et surtout par le nombre et la disposition des replis du palais, dont le 5°très renflé, pré- sente à son centre la dépression losangique, signe critérium de l'espèce. « Nous ne connaissons, écrit M. Barboza du Bocage (2), aucune preuve authentique de l'existence de l'E. macrocephalus en Angola ni au Congo (3), » et c’est en effet la première fois que cette espèce est capturée dans nos (4) Jentink, Cat. system. Mus. Pays-Bas. Mammifères, t. XII, p. 137, 1888. (2) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. nat. Lisboa, 2° série, n° 1. Extrait, p. 14, 1890. (3) M. Noack signale cependant sa présence à Porto da Lenha sur la rive droite du bas Congo, dans le district de Cacongo. (Zoolog. Jahrbucher, p. 200, 1889.) 254 E. DE POUSARGUES. possessions françaises de l’Ouest africain. Je dois faire re- marquer toutefois, que la localité indiquée par M.J. Dybowski, «entre Yabanda et Mpoko », siluée environ par 7° de latitude Nord, et 17°50 de longitude Est, par conséquent dans l'Afrique centrale, est déjà très éloignée de la côte congolaise, et quelle ne se trouve même plus dans le bassin du Congo, mais dans celui du Chari, tribulaire du lac Tchad. | Aussi, cette provenance doit-elle être interprélée plutôt comme une extension vers l'Est de l'aire d'habitat reconnu de l’£. macrocephalus dans la Gambie et sur les côtes de Guinée et de Lagos, situées sous la même latitude. 29. EpomopHorus compTus. (All.) Epomophorus comptus. Allen. Proc. Acad. Nat. Sc. Philadelphia, p. 158, 1861. — — Dobson. Cat. of Chiropt., p. 13, pl. IL, fig. 5, 1878. a. ç adulte. M. Guiral, 1885. San-Benito. Chez ce beau spécimen mâle adulte, la touffe blanche de la base du bord interne de l'oreille est très développée, et le pelage d’un brun châtain vif, rappelle par son mode de distribution et par ses teintes celui de l'£pomophorus Fran- quel (Tomes). La ressemblance avec celle espèce est encore accrue par la présence de véritables épaulettes, un peu moins dévelop- pées peut-être, mais nettement dessinées. En effet une touffe de longs poils jaunes assez rigides, émerge de l’orifice de la slande claviculaire, et au-dessous de celui-ci, le pelage prend également une teinte jaune crème, formant une large plage ovalaire qui s'étend inférieurement jusqu’à la naissance de la membrane antébrachiale et tranche vivement sur le fond sombre du reste du corps. La configuration de la voûte pa- laline répond mieux à la description qu’à la figure qu'en a données Dobson. En arrière des trois crêtes transversales très élevées et indivises qui correspondent aux canines, aux prémolaires et aux premières molaires, on trouve six replis ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 255 semicirculaires, denticulés en avant, échancrés sur la ligne médiane, et de plus en plus serrés à mesure que l’on s’en- fonce vers l’arrière-bouche. A la mâchoire supérieure, deux incisives seulement sont placées au centre des prémaxillai- res, et séparées l’une de l’autre par un faible intervalle. Comme Dobson l’a très bien montré, un dernier carac- tère permet de distinguer l’Æ. comptus de son congénère le plus voisin l’£. Franqueti; en effet, la membrane alaire s’in- sère à l'extrémité distale et non au milieu de la face dorsale de la première phalange du second doigt. | L'Epomophorus comptus est assez rare dans les Musées zoologiques, et le spécimen recueilli par M. Guiral sur les bords du San-Benito est le seul qui figure encore dans les collections du Muséum de Paris. La distribution géographi- que de cetle espèce est encore mal connué. On la trouve au Gabon, mais, comme sa plus proche alliée l’£. Frangueti que l’on rencontre également dans ces parages, elle traverse le Niger pour se propager dans la Guinée supérieure jus- qu’à la Côte d'Or où elle est indiquée par M. Jentink (1). De plus, d’après ce même auteur, l’£. comptus s'étend à l'Orient jusque dans le pays de Niam-Niam où l'explorateur Bohn- dorff en a capturé plusieurs spécimens à Semmio, et M. Maischie le signale encore plus à l'Est, à Bukoba (Emin) et dans le Rouanda. 30. EPoMOPHORUS PUSILLUS. (Pet.) Pteropus schoensis Rüppell. Mus. Senck., III, p. 131, 1842. Epomophorus schoensis. Tomes. P. Z. $. London, p. 56, 1860. — pusillus. Peters. M. B. Akad. Berlin, p. 870, 1867. = == Dobson. Cat. of Chiropt., p. 14, pl. 2, fig. VI, 1878. — — Jentink. Not. f. Leyden Mus., vol. X, p. 51, 1888. — — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. nat. Lisboa, 2e série, DA D15, 1880. — — Noack. Zoolog. Jahrbuch., p. 206, 1889. — — O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p.446, 1890. adulte. MM. Schwébisch et Thollon, 1884. Congo francais. : — M. de Brazza, 1885. Congo francais. — — — RE 40 Q{4O — (1) Jentink, Mus. Hist. nat. Pays-Bas. Catalog. systématiq. Mammifères, t. XII, p. 137, 1888. 250 E. DE POUSARGUES. d. œ adulte. M. J. Dybowski, 1% avril 1892. Poste de la Mission, sur la Kemo. Pour la taille, ces quatre spécimens répondent aux di- mensions données par Dobson, et leur palais présente nette- ment le large sillon bifurqué en forme d’Y, caractéristique de l'espèce. J'ai pu constater, chez le spécimen mâle adulte (b), l'existence de poches glandulaires bien développées aux épaules, garnies jusqu'au fond de longs poils assez clairsemés et blanchâtres, dont les pointes émergent de l’orifice exté- rieur en boutonnière. C'est là, comme on le sait, un point que Dobson.n’avait pu élucider, n'ayant jamais eu à sa disposition que des femelles, et il est assez curieux et digne de remarque, que le mâle de cette espèce soit resté si long- temps introuvable. En 1888, dit M. Jentink, « on ne le connaissait pas encore » : du moins ne l’avait-on pas signalé, et les deux premiers spécimens de ce sexe que je trouve mentionnés par les auteurs, sont : l’un de la collection Hesse (Noack, 1889), l’autre de la collection Emin-Pacha (0. Tho- mas, 1890). L’aire de réparlition de celte espèce est extrêmement étendue et comprend toute l'Afrique intertropicale. On ren- contre en effet l’Æ. pusillus à l'Ouest depuis la Gambie et le Libéria (Jentink) jusque dans les possessions portugaises d'Angola, à Malange (von Mechow) et sur les plateaux de l'intérieur au Nord du Coanza (B. du Bocage); à l'Est, de- puis l’Abyssinie et le Choa (Rüppell) jusqu’au Sud du lac Albert-Nyanza à Kiriamo, où 1l vit côle à côte avec l’£po- mophorus minor (0. Thomas). : GENRE CYNONYCTERIS 31. CYNONYCTERIS STRAMINEA. (E. Geoîf.) Pteropus stramineus. E. Geoffroy. Ann. Muséum, t. XV, p.95,1810. — — Temminck. Monogr. Mammal, vol. II, p. 84, 1835- 1841. — — Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 54, 1853. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 297 Cynonycteris straminea. Peters. M. B. Akad. Berlin, p. 866, 1867. — — Jentink. Not. fr. Leyden Museum, vol. X, p. 52, 1888. — — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. nat. Lisboa, 2° série, n° 4, p. 15, 1889. «. Œ très adulte. M. de Brazza, 1885. Congo français. b. Q adulte. — = A Le magnifique mâle très adulle (a) présente sur les côlés et le devant du cou le demi-collier dont parle Temminck, formé de touffes de poils onctueux, assez longs, divergents et de teinte jaunâtre. Sur la portion la plus étroite des lom- bes, le pelage de couleur brune est nettement bordé d’une étroite bande de poils jaunâtres, qui marque la ligne de jonction de Ia membrane avec le corps. Cette espèce, la plus grande du genre après le C. Du- preana (Poll.), compte de nombreux représentants dissémi- nés à travers toute l'Afrique tropicale, depuis la Sénégambie el l’Angola jusqu à la côle de l’océan Indien. Leslimites Sud de son aire de dispersion seraient donc à l'Ouest le Coanza ou le Cunéné, à l'Est le Zambèze. Sous-Ordre — MICROCHEIROPTÈRES FAMILLE DES RHINOLOPHIDÉS GENRE PHYLLORHINA 32. PHYLLORHINA CommErsont. (E. Geoff.) Rhinolophus Commersoni. E. Geoffroy. Ann. du Muséum, t. XX, pl.V, p. 263, 1813. Phyllorhina gigas. Wagner. Archiv. Wiegm., p. 148, 1845. — vittata. Peters. Reise n. Mossambique, p. 32, pl. VI et XIII, 1852. = — Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 72, 1853. — Commersoni. Dobson. Catal. of Chiroptera, p. 133, 1878. a. gt adulte. M. de Brazza, 1885. Congo français. Ce beau spécimen n'offre rien de particulier à noter, et répond exactement comme conformation, comme taille et ANN. SC. NAT. ZOOL. 117, 27 258 E. DE POUSARGUES. comme pelage au {ype PA. Commersoni, tel que nous l'ont fait connaître les travaux de Geoffroy Saint-Hilaire, Peters et Temminck. Ce géant des Rhinolophidés se rencontre communément le long de la côte occidentale d'Afrique, depuis la Gambie et la Guinée {Phyllorhine polypheme (Tem.) jusque dans le Ben- guela. De là il se propage vers l'Est jusqu'aux rivages de l'océan Indien et se répand également dans les îles de ce liltoral : Zanzibar, Ibo, l’une des îles de l'archipel Que- rimba situé à quelques degrés au Sud du cap Delgado (PAyl- lorlana vittata (Pet.). Mais là ne s'arrête pas le vol de celte espèce, car elle traverse le large canal de Mozambique et, par les Comores, atteint Madagascar. Le même fait du reste a élé observé pour d’autres Cheiroptères insectivores, appar- tenant aux divers genres Vesperugo, Scotophilus, Mimopte- rus, Colëura, Taphozous et Nyctinomus, dont quelques es- pèces poussent même jusqu'aux îles Bourbon et Maurice. 33. PHYLLORHINA CAFFRA. (Sund.) Rhinolophus caffer. Sundevall. OEfv. Akad. Fôrh. Stockholm, II, p. 118, 1846. Phyllorhina caffra. Peters. Reise n. Mossambique, p. 39, pl. VIIL, 1852. — gracilis. Peters. — p.30, DL NMERNONE 1852. — caffra. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 78, 1853. — — Dobson. Catal. of Chiroptera, p. 140, 1878. a. adulte. M. Pobéguin, 1892. N'Djolé. Ogôoué. b. © - M. J. Dybowski, 8 janvier 1892. Bangui. Ces deux spécimens ont le pelage d'un brun marron in- tense sur le dos, plus pâle et jaunâtre sur la nuque, le dessus de la tête et la face inférieure du corps. Chez la femelle (4), toute la moitié supérieure de la face interne des oreilles est velue; chez le mâle (a) iln’existe qu’un mince liséré de poils le long du bord antérieur, analogue à celui que Temminck a signalé chez la Ph. fuliginosa ; mais la présence du sac glan- dulaire frontal s’ouvrant à l'extérieur par une boutonnière transversale très visible ne permet pas de l'identifier avec Eu ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 299 cette dernière espèce, où cet organe manque dans les deux sexes. La PA. caffra occupe à peu près la même zone d'habitat que la Ph. Commerson, Madagascar excepté. A l'Ouest on la trouve depuis les côtes de Libéria jusqu'à celles de Damara au Sud du Cunéné, et suivant M. Barboza du Bocage, elle est extrêmement commune dans les possessions portugaises d'Angola. A l'Est, elle a été signalée en Abyssinie et à Zanzi- bar, d’où elle descend le long du littoral de l’océan Indien jusqu’à la Cafrerie et le Natal. FAMILLE DES NYCTÉRIDÉS GENRE NYCTERIS 34. NYCTERIS THEBAICA. (E. Geoff.) Mycteris thebaicus. E. Geoffroy. Description de l'Égypte, II, p. 419, pl. fig. 2, 1812. — fuliginosa. Peters. Reise n. Mossambique, p. 46, pl. X, 1852. — angolensis. Peters. M. B. Akad. Berlin, p. 903, fig. 5, 1870. — damarensis. Peters. — p. 905, fig: 7, 1870. — capensis. Peters. — p. 904, fig. 6, 1870. — thebaica. Dobson. Catal. of Chiropt., p. 165, pl. XI, fig. 5, 1878. — — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2° série, n°1, p. 5 et 17, 1889. a. © adulte. M. de Brazza, 1885. Congo francais. b.Œœ — M.JI.Dybowski, 1°" avril 1892. Poste de la Mission, sur laKemo. Les nombreuses espèces que Peters a distinguées de la Nycteris thebaica n’en diffèrent en réalité que par de légères variations dans les teintes plus ou moins sombres du pelage, et dans la taille et la position plus ou moins interne de la 2° prémolaire inférieure. Pour Dobson, ces différences dues à l’âge et à la diversité des lieux d'habitat, sont trop peu importantes pour être admises comme spécifiques, et suivant M. Barboza du Bocage elles peuvent à peine servir à caractériser quelques variétés géographiques d’une espèce unique. | | Chez les deux spécimens ci-dessus mentionnés, l’un du 260 E. DE POUSARGUES. Congo, l’autre de la région de l'Oubangui, les teintes du pe- lage d’un gris brunâtre clair, passant au blanc presque par- fait sur la face inférieure du corps, rappellent la Nycteris damarensis ; mais la deuxième prémolaire inférieure très exiguë, placée tout à fait en dedans de la série dentaire, les rapproche des formes N. argolensis et N. thebaica tYpiques. Les oreilles bien développées présentent à leur surface de petiles éminences glandulaires puncliformes garnies de quelques poils comme chez la Nycteris hispida (Schreb.), mais la largeur du tragus, la convexilé de son bord interne, la présence d’un lobule bien dessiné à la base de son bord externe, la forme bifide des incisives supérieures et enfin la position tout à fait interne de la 2° prémolaïre inférieure, constituent un ensemble de caractères qu'on ne trouve réunis que chez la Nycteris thebaica el ses variélés, et qui, par conséquent, ne laisse aucun doute sur l'idenlilé spéciti- que de ces deux individus. Par suite de la fusion des nombreuses formes locales dé- criles par Peters avec la NV. fhebaica, on voit combien l'aire de dispersion de cette espèce devient étendue. Cetle aire comprend toute l'Afrique, depuis la mer Rouge, l'Égypte, l'Abyssinie, le Soudan oriental et le Gabon, jus- qu'au Cap. Aucun zoologiste jusqu’à présent n’a signalé la N. thebaica surles côtes de la Guinée supérieure, soit qu’elle ait échappé aux recherches des exploraleurs, soit au con- traire qu’elle soit réellement absente de ces régions où l’on rencontre d’autres espèces représentalives du genre, tels que N. haspida (Schreb.), N. grands (Pet.) et N. macrotis (Dobs.). FAMILLE DES VESPERTILIONIDÉS GENRE VESPERUGO 35. VESPERUGO (VESPERUS) TENUIPINNIS. (Pet.) Vesperus tenuipinnis. Peters. Monats-Ber. Akad. Berlin, p. 263, 1872. — — Jentink. Notes fr. Leyden Museum, vol. X, p. 54, 1888. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 261 ? Vesperus bicolor. Barboza du Bocage. Jorn. Sc. nat. Lishoa, 2e série, I, p. 5, 1889. — tenuipinnis. Noack. Zoologische Jahrbuch., t. IV, p. 218, 1889. a. © adulte. M. Thollon, 1889. Brazzaville, Congo. Le dessus du corps d’un brun sombre presque noir con- lraste fortement avec la membrane alaire transparente d’un blanc jaunâtre. Sur le menton, la poitrine etle ventre, les poils sont d’un cendré noirâtre sur leur tiers basal, et blancs sur le reste de leur étendue; mais ils sont uniformément blancs jusqu'à à la racine autour des orifices sexuel el analet sur les cuisses. Les oreilles sont courtes, à bord externe droil à peine échancré vers le tiers supérieur ; leur bord interne est forte- ment convexe à la base et ensuite rectiligne. Le tragus esl large, sécuriforme, avec une denticulation bien marquée à la base de son bord externe. Les dimensions de cet individu sont : 46 millimètres pour la têle et le corps, 29 pour la queue, 29 pour l’avant-braset 11 pour la jambe ; elles dépassent donc sensiblement celles que Dobson assigne à un mâle adulte, mais concordent pleinement avec celles relevées par Peters et M. Barboza du Bocage. Les incisives supérieures internes, indistinctement bifides près du sommet, sont larges et peu élevées, Les externes pres- que rudimentaires. Les canines sont fortes et extrêmement aiguës. On ne trouve pas trace de la première prémolaire supérieure; l’unique prémolaire est haute, très acérée et presque contiguë à la canine. Les incisives inférieures, à couronne trilobée et mousse, sont implantées perpendiculai- rement à la direction du bord alvéolaire de la mandibule. La première prémolaire est pelile, spiniforme, un peu écartée de la canine, serrée au contraire contre la seconde prémolaire de moitié plus élevée. Ce Cheiroptère assez rare paraît cantonné le long des côles du golfe de Guinée (1). On l’a signalé sur les DE du (4) Depuis la rédaction de ce travail, le V. tenuipinnis a été rencontré par 262 E. DE POUSARGUES. Quillou, au Gabon, à Lagos, et jusqu’au Libéria. M. Jentink l'admet également dans l’Angola. Dans la Faune mammalo- gique qu'il a publiée pour celle dernière région, M. Barboza du Bocage n'indique pas celte espèce, mais une forme repré- sentative, le Vesperus bicolor, dont les caractères différentiels sont si peu accusés qu’on peut hésiter à admettre sa distinc- tion spécifique d’avec le Vesperus tenuipinnis. 36. VESPERUGO NANUS. (Pet.) Vesperugo nanus. Peters. Reise n. Mossambique, p. 63, pl. XVI, fig. 2, 1852. — pusillulus. Peters. Jern. Sc. nat. Lisboa, p. 124, 1870. — nanus. Jentink. Not. fr. Levden Museum, p. 179, vol. IX, 1887. — — Jentink. — p.55, vol X "1888 D — Pagenstecheri. Noack. Zoolog. Jahrbuch., vol. IV, p. 220, pl. IT et V, 1889. — nanus. O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 548, 1892. a-e. 2% 30 M. de Brazza, 1885. Congo francais. f-h. 1 2Q M. Thollon, 1886. Franceville, Gabon. i-m. 2% 10 M. Dybowski, Janvier 1892. Bangui. Ces nombreux spécimens présentent quelques différences dans la taille et la coloration du pelage. Des cinq derniers (2-m) qui ont une teinte générale d'un brun roux ferrugineux, trois bien adultes ont des dimensions inférieures à celles des autres exemplaires 4-4 dont le pelage est d’un brun presque noir. Ces variations répondent netlement aux deux coupes spécifiques V. nanus, V. pusillulus, créées par Peters et que Dobson considère, avec raison, comme insuffisamment légitimées. A la forme V. pusillulus, paraît se rapporter le type décrit récemment par M. Noack sous le nom de V. Pagenstecheri, dont les teintes ferrugineuses plus claires et les dimensions plus faibles que chez le V. nanus sont assez comparables à à celles du V. pusi/lulus. L’aire de dispersion du V. nanus est extrèmement vaste. Ce Cheiroptère compte parmi les espèces qui passent de l'Afrique à Madagascar. Sur le continent on le rencontre l'explorateur Stuhlmann dans l'Est africain près du littoral Sud du lac Vic- toria-Nyanza (Matschie, Säugeth. Deutsch Ost-Afrik., p. 23, 1895). ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 263 partout, depuis la Cafrerie au Sud jusqu’à l’Abyssinie et la Sénégambie au Nord. GENRE SCOTOPHILUS 37. SCOTOPHILUS BORBONICUS. (E. Geoff.) Vespertilio borbonicus. E,. Geoffroy. Ann. Muséum, I, p. 201, pl. XLVF, 1800. Nycticejus leucogaster., Cretzschmar. Atl. Rüppell (Säugethiere), p. 71, | pl. XXVITILa, 1826. Scotophilus Dingani. A. Smith. Illustrat. S. Afric., pl. LIT, 1849. Nycticejus planirostris. Peters. Reise n. Mossambique (Säugeth.), p. 65, pl: XVII, fig. 1, 1852. Nycticejus viridis. Peters. Reise n. Mossambique (Säugeth.), p. 67, pl. XVIT, fig. 2, 1852. Scotophilus borbonicus. Dobson. Cat. of Chiroptera, p. 260, 1878. — — Jentink. Notes fr. Leyden Museum, p.180, vol. IX, 1887. — — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. nat. Lisboa, 2° série, n°4, p. 19, 1889. — — Noack. Zooloc. Jahrb., p. 226, vol. IV, 1889. a. cj adulte. M. Thollon, 1889. Brazzaville. 5.25 it De Dr % La couleur du pelage chez cette espèce semble sujette à des variations assez considérables, dues peut-être, comme chez l'espèce asiatique Sc. Temmincki (Horsf.) à des influences d'âge, de saison, et probablement aussi de localité. Dobson indique comme étant les plus habituelles, les teintes brun olive au-dessus, blanc jaunâtre en dessous, telles qu'elles sont représentées pour le Nycticejus leucogaster (Cretz.). Nous voyons ces couleurs passer au brun verdâtre et au jaune verdâtre chez letype du Sc. Dingani (A. Sm.), tandis que Peters figure son Nycticejus wridis avec une livrée vert olive bien accusée. Nos deux spécimens ont au contraire un pe- lage uniformément teint d'un roux marron intense et bril- lant, à peine plus clair sur la face inférieure du corps. Les dimensions de ces deux individus concordent rigoureuse- ment avec les mesures données par Dobson; mais il a été reconnu que la taille chez cette espèce n'était pas plus sta- ble queles couleurs; M, Jentink et, après lui, M. Barboza du 9 204 E. DE POUSARGUES. Li Bocage ont observé des spécimens provenant de l’Angola, dont les mesures, en particulier celle de l’avant-bras, excé- daient le développement ordinaire. Il en est donc du Sc. bor- bonicus comme du Sc. Temmincki dont les représentants cantonnés dans l'Inde archipélagique, sont généralement plus petits que ceux du continent asiatique. La zone d'habitat du Sc. borbonicus, en Afrique, coïncide avec celle du type précédent V. nanus; en dehors du conti- nent, elle s'étend plus loin vers l'Est et englobe l’île Bourbon. FAMILLE DES EMBALLONURIDÉS GENRE NYCTINOMUS 38. NYCTINOMUS LIMBATUS. (Pet.\ Dysopes limbatus. Peters. Reise n. Mossambique (Säugeth.), p. 56, pl. XIV, 1852. Nyctinomus leucogaster. Grandidier. Rev. et Mag. de Zoologie, p. 337, 1869. _ limbatus. Dobson. Catalog. of Chiroptera, p. 428, 1878. — — Noack. Zoolog. Jahrb., p. 229, vol. IV, 1889. — — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2° série, n°1; p.20, 1888 a. gt adulte. M. de Brazza, 1885. Congo. b-5. 9 individus dont 3 G;f et 6 ©. M. Thollon, 1892. Brazzaville. Ces individus, d’un brun roussâtre sombre sur la face supérieure du corps, ont tous la membrane alaire transpa- rente d’un blanc jaunâtre. Le pelage du dessous du corps est brun sur la gorge, la poitrine et les flancs, mais celte teinte est plus ou moins entamée etréduite selonles individus, suivant que la tache blanche abdominale remonte plus ou moins haut et s'étend plus ou moins latéralement. Chez quelques spécimens, les’ poils blancs ne dessinent au-dessus de la plage abdominale qu’une étroite bande médiane hasti- forme, dont la pointe supérieure ne dépasse pas le bas de la région sternale. Chez d’autres, la teinte blanche est plus envahissante, elle ne s’élève pas plus haut que chez les pré- cédents, mais s'étale latéralement de telle sorte que la cou- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 265 leur brune ne forme plus de chaque côté que deux étroites bandes pleurales, telles qu’elles ont été figurées par Peters. Comme chez l'espèce N. pumilus (Cretzsch.) une mèche de poils garnil la face postérieure de la lame membraneuse interauriculaire. Chez le mâle très adulte (a) cette mèche est extrêmement développée, longue et très fournie, elle se dis- tingue et s’isole du reste du pelage comme un fort pinceau de teinte plus sombre. Celle espèce a été rencontrée par M. Grandidier à Mahab au Ménabé, sur la côte occidentale de Madagascar; sur le continent elle parcourt la zone sud-équatoriale de l'Est à l'Ouest depuis la côte de Mozambique et de Zanzibar, jusque dans l’Angola, le Congo etle Gabon. Le N. limbatus ne se distingue du À. pumilus que par ses teintes, suivant Dobson, il le représenterait au Sud de l'Équaleur, et n’en différerait peut-être pas spécifiquement. IV ORDRE. — INSECTIVORES FAMILLE DES CHRYSOCHLORIDÉS GENRE CHRYSOCHLORIS 39. CHRYSOCHLORIS ALBIROSTRIS. (Wagn.) Chrysochloris albirostris. Wagner. Schreber Säugethiere (Suppl.), IL, p. 124, 1841. — leucorhina. Huet. Nouv. Archiv. Mus. Paris, 2° série, t. VIIE, p. 1-15, pl. I, 1885. — albirostris. Barboza du Bocage. Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2° sé- riétn2d, p:91»1889 a. M. J. Dybowski. Sans renseignements. Le pelage est brun chocolat avec des reflets irisés métalli- ques verdàälres, peu prononcés à sec, passant au vert doré et au violet pourpre d'une extrême intensité dans l’eau ou l'alcool. Tout le museau est d’un blanc légèrement lavé de jaunâtre et cetle tache présente très exactement la forme et l'étendue indiquées par Wagner dans les termes suivants : « À partir des bords de la lèvre supérieure et du cartilage nasal, s’élale sur la face une teinte blanche qui, de chaque côté et en dehors de la région oculaire, s'étend en arrière plus loin qu'entre les yeux où la couleur brune du reste du corps l’entame fortement. [len résulte que la Leinte blanche faciale se sépare de la teinte brune suivant un arc profondé- ment concave en arrière. La mâchoire inférieure et la gorge sont grisätre clair. » Les griffes antérieures fouisseuses sont pelites et relativement faibles pour la taille de l'animal. Je doute que l’on puisse séparer spécifiquement du Chr. albi- rostris les deux spécimens décrits par M. J. Huet sous le nom de Chr. leucorhina, et il suffit d'examiner l'excellente figure publiée par cet auteur pour constater qu'elle reproduit ri- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 267 goureusement la description de Wagner. Mais le mémoire de M. Huet renferme des délails précieux el intéressants sur les particularités crâniennes et dentaires de l'espèce qui nous occupe, ce qui permet de fixer d'une manière sûre son rang subgénérique. Sur ce point, je ne puis mieux faire que de renvoyer à ce travail, et il suffira de citer ici les quelques lignes dans lesquelles M. Huet donne le résumé de ses observations : « Par les caractères du crâne dépourvu de vésicules dans les fosses temporales, par un plus petit nombre de tubercules pointus à la base interne des molaires supérieures et par la présence d’une pointe postéro-interne à la canine el aux deux premières prémolaires inférieures, le Cr. leucorhina se rapproche des Chrysochlores à 36 dents ; d'autre part, il s’en éloigne en ce qu’il a 40 dents comme dans les Chr. aurea, Ch. villosa, Chr. Trevelyani, et en ce que les molaires sont dépourvues de la pointe postéro-interne qui se trouve chez le Chr. rutilans et le Chr. obtusirostris. Nous avons donc af- faire ici à une espèce intermédiaire qui doit prendre place entre les Chrysochlores à 40 dents, et ceux qui n’en ont que 36, car elle a des caractères communs avec l’une et l’autre de ces deux formes. » La disposition et l'étendue de la tache blanche faciale du Chr. albirostris, « faciei colore albo, postice lunatim exciso Wagn., » sont assez constantes, pour permettre de distinguer celte espèce de celles de ses congénères qui présentent égale- ment sur le museau des maculatures de cette même teinte. Je ne citerai que pour mémoire le Chr. hottentola (A. Smith) (1) « fronte, plus minusve albo varieqata » , et le Chr. damarensis (Og.) (2) « yellowish white semicirele extends from eye to eye, under the chin, covering the whole of the cheeks, lhips and lower jaw ». Comme l'ont dit avec raison Wagner et Peters, les diagnoses de ces deuxespèces sont tellement insuff- santes, qu'ellesne peuvent prêter à aucune comparaison mi- (1) A. Smith, Zoolog. Journ., 1V, p. 436. (2) Ogilby, Proc. Zool. Soc. London, p. 5, 1838, 268 E. DE POUSARGUES. nutieuse et efficace. Ni Smith ni Ogilby en effel ne donnent de détails sur la forme et les dimensions des griffes, de telle sorte qu'il est impossible de savoir s’il faut rapporter ces espèces soit au Chr. allarostris, soit au Cr. rutilans (Wagn.) (1). En effet, ces deux derniers types à museau blanc se distinguent l’un de l’autre par des différences con- (4) Dans Monograph of the Insectivora, p. 112, Dobson considère ces deux espèces comme probablement identiques, mais, dans la description que Wagner a donnée de la Chr. albirostris, rien n'autorise à supposer que cette espèce ait trente-six dents, plutôt que quarante; les deux hypothèses sont également permises. ben ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 269 sidérables dans les dimensions des griffes fouisseuses anté- rieures, qui chez le Chr. albirostris sont incomparablement LES NCRRTESS INSECTIVORES GENRES (|AFRIQUE NORD AFRIQUE EST AFR. OUEST AFRIQUE SUD | PETRO- T.lP.tetradactylus. : DROMUS (Pet.) | S.[R.Stuhlmanni. | | ( (Mtsch.) | P.|R. Petersi.(Boc.)| RHY NCHO- PiIR. chrysopygus. cxox (Günth.) a C.|R. Cirnei. (Pet.) a C1|R. macrurus. E | (Günth.) o R.|M.rufescens. L |M.Intufi(Suth. 2 (Pet.) L'IM. brachyrhkyn- ; RIM. Revoili. chus.(A.Smtb.) (Huet.) E. M. typicus(Smi.) acros- [M.| M. Rozeli| R°|M. pulcher. Et\M. Edwardi. | GELIDES (Duv.) (Thos.) (A. Smith.) | F.|M. fuscus. K.|M. rupestris. (Pet.) (A. Smth.) tente B. M. brachyurus. B!} M. fuscipes. (Thos.) (Boc). A.|E.alqirus| Æ.lE. ælhiopicus. (Dur. et Ler..) (Ehr.) erixaceus |Z.|E.auritus N.|Æ. Sclateri. D.E. fronlalis. (Gm.) (And.) (A. Smth.) O.|E.albiventris. (Wag.) POTAMOGALE | | | V.1P. velox. (Du Chail.) ni X.1C. aurea. (Pall.) - G.|C.villosa (Smth.) | G1|C. Trevelyani. CHLORIS .. m4 L1|C. Stuhlmanni. (Günth.) À (Mtsch.) L.,C. albirostris. (Wagn.) = | : ET eico- U.|C. obtusirostris. H.|C. rutilans. | caLons k (Pet.) (Wagn.) La carte de distribution géographique des espèces africaines du genre Erinaceus, a été dressée d’après la récente monographie publiée sur ce sujet par M. John Anderson. (Proc. Zool. Soc. London, p. 414-421, 1895.) plus faibles que chez des individus de Chr. rutilans de même taille ou plus petits. De plus, le CArysochloris rutilans n'a 270 E. DE POUSARGUES. que 36 et non 40 dents et de ce fait appartient au sous-genre Chalcochloris (Mivart) (1). Pour cette même raison, iln’y a pas lieu de confondre le Chr. albirostris avec le Chr. Chalcochlo- ris obtusirostris (Pet.) (2), chez lequel, d’ailleurs, la teinte blanche du museau reste latérale et n'entame pas la ligne médiane du chanfrein, mais par contre s'étend beaucoup plus loin en arrière Jusqu'au delà de l'oreille. Restent enfin les vraies Chrysochlores Chr. villosa (A. Smith) (3) et Cr. Trevelyani (Günth). (4) où la teinte blanche n’occupe que le bord des lèvres, et se prolonge un peu en arrière de leur commissure « labus, mento strigäque ex anqulo oris porrecta, albis » (A. Smith). Wagner signale la Cafrerie comme patrie du type de son Chr. alhirostris, mais l'authenticité de la pro- venance de cet individu, acheté chez un marchand nalura- liste, est loin d'être prouvée. On peut citer comme habitat plus certain les bords du Coango, à une grande distance du littoral de l’Angola (B. du Bocage), d'où von Mechow en rap- porta un exemplaire reconnu par Peters comme appartenant à celte espèce. Les spécimens types du Chr. leucorhina prove- naient de la côte de Loango, et l'individu recueilli par M. J. Dybowski prouve que l'espèce est réellement repré- sentée dans le Congo français, seule région visitée par cet explorateur. Le Chr. albirostris serait donc plutôt spécial au littoral Sud-Ouest de l'Afrique, et si l’on admet comme identique le Cr. hottentota (Smith), son aire d’habitat s’'étendrait depuis la rive Nord du Congo jusqu'au pays des Hottentots. Comme conséquence directe de ces faits, on peut conclure que le genre Chrysochloris n’est pas exclusivement localisé dans l'Afrique australe. Il en est de même du reste pour l'Est africain: une nouvelle espèce, proche alliée du CA. albirostris, originaire de l’Ugogo et de l’Usandawi, à quel- (4) St.George Mivart, Journ. of Anat. and Physiol., t. IT, p. 117, 1867. (2) Peters, Reise n. Mossambique, p. 70, pl. XVII, fig. 4 et 1b, pl. XXII, fig. 18 à 23, 1852. (3) A. Smith, Illustr. Zool. S. Africa, pl. IX, 1849. (4) A. Günther, Proc. Zool. Soc. London., p. 311, pl. XLIIT, 1875. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 271 ques degrés au-dessous de l’Équateur, a élé décrite récem- ment par M. Matschie sous le nom de CA. Stuhlmanni (1). FAMILLE DES POTAMOGALIDÉS GENRE POTAMOGALE 40. POTAMOGALE VELOx. (Du Chail.) Cynogale velox. Du Chaillu. Proc. Boston Soc. Nat. Hist., VII, p. 363, 1860. Potamogale velox. — — — Mythomys velox. J. E. Gray. Proc. Zool. Soc. London, p. 274, 1861. Bayonia veloæ. Barboza du Bocage. Proc. Zool. Soc. London, p. 402, 1865. Potamogale velox. Allman. Transact. Zool. Soc. Lond., VI, p. 1, pl. Tet I, 1866. — Allman. Proc. Zool. Soc. London, p. 256, 1867. 7 — Dobson. Monogr. of Insectivora, part. Il, p. 97, 1883. — — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2° série, n°1, p. 30, 1889. O adulte. M. Marche, 19 février 14876. Lopé, Okanda, Ogôoué. ® semi-adulte. M. J. Dybowski, 1°" mars 1892. © adulte. — 4er avril 1892.{ Poste de la Mission sur Q — — 27 mai 1892. la rivière Kemo. gf vieux. — A4 juin 4892. a. b. Ge d. é Découvert depuis une trentaine d’années seulement, le Potamogale est pourtant aujourd’hui l’un des Mammifères dont les caractères et les principaux traits d'organisation sont le mieux connus, grâce aux travaux des divers auleurs que je viens de citer. Le véritable rang zoologique de ce singulier Mammifère fut d’abord une énigme, il est vrai, bien vite résolue; mais les premiers auleurs qui se risquèrent à émettre une opinion sur ce point, à l’aide des seuls rensei- gnements fournis par des dépouilles incomplètes et sans le secours du crâne et de la dentilion, furent trompés par les apparences et complètement dévoyés. Du Chaillu faisait de cel animal un Carnassier, voisin du Cynogale, mais différant suffisamment de ce Lype pour constiluer un genre nouveau sous le nom de Potamogale. Peu de temps après, J. E. Gray (1) Matschie, Sitz. Ber, Ges. naturf. Freunde. Berlin, p. 123, 1894. 272 E. DE POUSARGUES. combattit cetle opinion, et se fiant {rop aux ressemblances que la queue présente avec celle de l'Ondatra, il fit du Pota- mogale un Rongeur, Mythomys, se rapprochant à ce point de vue du genre fiber, et par la nature du pelage et le mode de vie aqualique, des genres Castor el Hydromys. M. Barboza du Bocage, le premier, en fit connaître le crâne et la dentition complète, et tous les zoologistes, d'accord avec le savant portugais, reconnurent dans le Potamogale un Insectivore, voisin des Centetes et des Sorexr par certains caractères ostéologiques, mais s’éloignant de tous les genres connus de cet ordre par la forme toute particulière des molaires supérieures. Il n’y a rien à ajouter aux remarquables travaux des auteurs précités, et pour plus de détails, je renverrai particulièrement à la description du Bayonia velox (Boc.). Quant à la distribution géographique du Potamogale, voici l'opinion émise par M. Barboza du Bocage dans son récent travail sur les Mammifères d’Angola : « Sans qu'on puisse encore indiquer les limiles précises de son habitat, on sait déjà qu'il est largement répandu dans l'Afrique occidentale, depuis le Vieux-Calabar jusqu’au terri- toire d'Angola inclusivement : Le Vieux-Calabar, Cameron, le Gabon, le Congo, Angola, telles sont les circonscriptions géographiques où son existence a élé constatée. Son existence dans le Bas-Congo nous semble douteuse, mais M. Johnston a vu quelques peaux rapportées par les indi- gènes du Haut-Congo ayant toule apparence d’appartenir à cet animal. » La provenance des spécimenside M. J. Dybowski con- firme singulièrement cetle dernière assertion, et tout porte à croire que le P. velox, en remontant le cours du Congo et de la plupart de ses affluents des deux rives, doit envahir la plus grande partie de cet immense bassin et pé- nétrer ainsi jusqu'au cœur de l'Afrique équatoriale. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 273 FAMILLE DES SORICIDÉS GENRE CROCIDURA 41. CrociDuRA POENSIS ? (Fras.) Sorex (Crocidura) poensis. Fraser. Proc. Zool. Soc. London, p. 200, 1842. ? Sorex mariquensis. A. Smith. Ilust. Zool. S. Afric., pl. XLIV, fig. 1, 1838. ? — — Jentink. Not. fr. Leyden Mus., vol. IX, p. 178, 1887. a. gt presque adulte. M. Thollon, 1886. Franceville, Gabon. Ce spécimen, à peu près adulte, mesure 70 millimètres pour la tête et le corps et 38 pour la queue ; par ses teintes sombres, d’un brun noirâtre au-dessus, d’un gris de plomb foncé en dessous, et en même temps par ses proportions, il paraît se rapporter à l'espèce décrite par Fraser. Toutefois il est difficile de se prononcer avec cerlitude pour cet individu à peine adulte, d'autant plus que d’autres espèces décrites par les auteurs peuvent lui être assimilées aussi bien sous le rapport du pelage que des dimensions. Telle est en premier lieu la forme décrite par A. Smith sous le nom de Sorex mariquensis, dont les dimensions concordent avec celles de la Cr. poensis, type de Fraser, soit 83 millimètres pour la lête et le corps et 42 pour la queue, et qui ne paraît pas en différer davantage par les teintes sombres de sa livrée. Deux autres espèces très voisines, sinon identiques, Crocidura morio (Gray) (1) et Crocidura nigricans (Boc.) (2), se rapprochent également par leurs couleurs de l'individu qui nous occupe et n’en diffèrent qu’à peine par les propor- tions plus fortes de la queue qui excède en longueur la moitié des dimensions de ia têle et du corps. En effet, les mesures données pour chacun de ces deux types sont 71 mil- limètres pour la têle et le corps et 51 pour la queue. Bien que les oscillations fréquentes et assez étendues que l'on remarque dans la longueur de l’appendice caudal (4) Gray, Proc. Zool. Soc. London, p. 180, 1862. (2) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2° série, n° 1, p. 28, 1889. ATV. SC. NAT. ZOOL. ; HN AS 274 | E. DE POUSARGUERS. suivant l’âge ou le sexe, chez une même espèce de Crocidura, enlèvent à ces différences beaucoup de leur valeur, j'ai cru, cependant, dans la circonstance présente, devoir les uliliser pour la détermination spécifique de notre exemplaire, à défaut d'autre trait caractéristique plus prononcé. L'espèce C. poensis, à laquelle je me suis arrêté, quoique avec doute, n'a été signalée jusqu'ici que par Fraser à Fernando-Po, mais l’on sait que bien des types sont communs à cette île et aux terres continentales les plus rapprochées. Vu cette proximité d'habitat, l’on peut se demander si la Crocidura morio, signalée par Gray dans les montagnes du Cameron à 7,000 pieds d'altitude, diffère réellement du type insulaire. D'autre part, doit-on considérer comme simples variétés géographiques, ou comme espèces représentalives, mais distinctes, les Cr. mariquensis et Cr. nigricans trouvées de l’autre côté du Congo, l’une dans l’Angola (B. du Bocage), l’autre plus au Sud dans ie Mossamedes (Jentink) et sous le tropique du Capricorne (A. Smith)? Ce sont là autant de questions que l’insuffisance de sujets d’études provenant de ces diverses localités ne me permet pas d’élucider, mais que J'ai cru utile de signaler à l'attention des zoologistes. V ORDRE — CARNIVORES FAMILLE DES MUSTÉLIDÉS GENRE MELLIVORA 42. MELLIVORA RATEL. (Sparrm.) Mellivora ratel. Sparrmann. K. Vetensk. Akad. Handl., p. 49, pl. 4, fig. 2, LP11: Gulo capensis. Desmarest. Mammalogie, p. 176. Espèce 270, 1820. — Smuts. Enumer. Mamm. capens., p. 11, 1832. Mellivora capensis. Peters. Reise n. Mossambique, p. 111, 1852. — leuconota. Sclater. Proc. Zool. Soc. London, p. 98, pl. VIII, 1867. Ratelus capensis. Noack. Zoologische Jahrbuch., p. 255, vol. II, 4887. a. adulte. M.J. Dybowski, février 1894. À une centaine de kilomètres à l'Est de Cette-Cama. Je n’ai constaté aucune différence pour la taille, les pro- portions et la couleur du pelage entre cet individu bien adulte et plusieurs spécimens provenant soit de l'Afrique orientale, soit de l'Afrique australe. Une zone longitudinale médiane, d’un gris de fer, part du milieu du dessus du cou et va s’élargissant tout le long du dos pour se terminer sur le tiers basal du dessus de la queue. Cette zone est limitée en avant par une calotte céphalique et nuquale d’un blanc pur qui s'étend jusqu'entre les yeux, et bordée latéralement d’une bande également d’un blanc pur, assez large sur les côtés du cou et les épaules, devenant plus étroite d'avant en arrière le long des flancs, pour se ter- miner à la naissance de la queue. Le reste du corps est couvert de poils d’un noir profond et brillant. Je ne crois donc pas qu'il y ait lieu de distinguer spécifiquement les Ratels de l'Ouest africain. L’individu provenant de celte région, et décrit par M. Sclater sous le nom de Mellivora 276 E. DE POUSARGUES. leuconota, était loin certainement d’avoir alteint tout son développement et pris sa livrée définitive. Cette soi-disant espèce n'est autre un jeune M. ratel chez lequel la ca- RME /« EE lotte céphalique seule se fait remarquer par sa coloration d’un blanc plus pur, « back while, purer towards the crown », la teinte de la bande latérale ne s’élant pas encore différenciée de celle de la région médiane dorsale. Ces diffé- rences entre !a livrée du jeune et celle de l’adulle avaient été depuis longtemps observées par Smuts qui écrivait « s#ria autem illa candida in ee obsoletior est », et celte remarque ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 277 est rigoureusement applicable au type de M. leuconota. Le Ratel est assez rare dans l'Ouest africain, et sa présence n'a jamais été signalée, que je sache, le long des côtes de la oo ©" En MUSTÉLIDÉS ke a AFRIQUE OUEST | = AFRIQUE ge ss à nr, AFRIQUE AFRIQUE _ NORD Entre Ouest EST SUD (æ) Congo et Niger. du Niger. | si) | 1. libyca. É (H.et Ehr.) S.| Ictonyx zorilla. (Thunb.) 1 | | a R1|M.leucono- - | last) R.]|M. ratel (Sparrm.) % | | ê P.]| P. albinucha (Gr.) 5 | | < |B.|M. numi- Ë dica. = (Puch.) | | | A.| Lutra (Aonyt) inunguis. (F. Cuv.) | | H. | Lutra (Hydrogale.) maculicollis. | Sn Aonyx. LUTRA | | (Licht.) | 5 Hy Guinée supérieure ; il est, au contraire, très répandu sur tout le littoral Est jusqu’au Cap, d’où il remonte le long de la côte Sud-Ouest jusqu'aux provinces méridionales de l’'Angola. 278 | E. DE POUSARGUES. FAMILLE DES CANIDÉS GENRE CANIS 43. CANIS ADUSTUS. (Sund.) Canis adustus. Sundevall. Kongl. Vet. Akad. Forhandl., p. 121, 1846. —— — Peters. Reise n. Mossambique, p. 125, 1852. — — Peters. Proc. Zool. Soc. London, p. 400, 1865. — lateralis. Sclater. Proc. Zool. Soc. London, p. 279, pl. XXIIL, 1870. — — O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 220, 1885. — adustus. St. George Mivar!. Monograph of the Canidæ, p. 49, pl. XII, 1890. * très adulte. M. de Brazza, 1885. Congo francais. a. | b. ÿ très jeune. M. J. Dybowski, 10 juillet 4891. Brazzaville. c. © — — — — d. © jeune. — 9 août 1891 — ONE ne 28 mars 1892. | Poste de la Mission sur RO — —- la Kemo. Les jeunes individus de la même portée (4, c), âgés de quelques jours seulement, ont le corps entièrement couvert de poils assez courts, d'un brun de suie plus sombre sur la région mentonnière el la face postérieure des oreilles. La pointe de la queue est d’un blanc pur sur une longueur de près de 2 centimètres. Ces deux spécimens mesurent chacun 27 centimètres pour la tête et le corps et 8 centi- mètres de queue. Les deux sujets également jumeaux (e, f), un peu plus grands mais beaucoup plus massifs, comptent 32 centimètres pour la tête et le corps et 9 pour la queue. A cet âge plus avancé, le pelage plus fourni et plus long présente une coloration générale fauve plus pâle sur les flancs, plus vive sur la tête et les membres. Le long de la ligne médiane du dos court une assez large bande brunâtre entremêlée de longs poiis blancs, qui se continue sur la queue dont la pointe est d’un blanc sale uniforme. Le dessous du corps est blanc jaunâtre, sauf la région mentonnière qui a conservé dans toute son intensité la temte sombre du premier âge. Cette tache caractéristique se retrouve sur le ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 279 spécimen (d) plus développé, mesurant 44 centimètres pour la tête et le corps et 18 pour la queue. La teinte fauve domine encore sur la tête et la portion distale des membres, mais passe au roux brunâtre tout le long de la région médiane du dos. Sur les flancs, les épaules et le haut de la face externe des membres, la coloration jaune clair du pelage se nuance fortement de gris cendré. Le noir com- mence à prédominer dans la portion moyenne de la queue. Comme pour les deux individus précédents (e, f), la face interne des oreilles est abondamment garnie de longs poils blanchâtres ; sur leur face postérieure, le pelage ras a pris une coloration noirâtre finement tiquetée de blanc jau- nâtre. Chez le magnifique mâle adulte (a), la bande blanche latérale caractéristique de l'espèce se sépare nettement de Ja teinte rousse tiquetée de noir et de blanc qui occupe toute la zone médiane du dos. Quant à la ligne de poils noirs qui la borde inférieurement, elle est plus indécise el moins fortement accusée que chez le type du Kilima-Njaro qui a servi de modèle à la figure publiée par M. St. George Mivart ; il en est de même de la tache noire scapulaire, mais la bande fémorale est mieux définie. Le derrière des oreilles offre une teinte noire tiquetée de blanc qui diffère de la coloration fauve figurée dans la planche du C. lateralis type, mais concorde avec celle indiquée par M. St. George Mivart. La queue est fauve à sa base, noire le long de ses deux tiers médians plus touffus, et blanche à son extrémité. Les dimensions de cet exemplaire sont: pour la tête et le corps 80 centimètres, pour la queue 40 et pour le pied 17. Chez cet individu bien adulte, on retrouve, comme chez les jeunes que nous venons d'examiner, une aire mentonnière d'un brun noirâtre qui se prolonge en arrière sur la ligne médiane un peu au delà de la commissure des lèvres. Cette tache caractéristique commune à tous les âges n'avait pas encore été signalée, soit qu'elle n'existe pas, soit qu’elle ait échappé à l'observation sur les représentants de l'espèce 280 E. DE POUSARGUES. provenant des régions orientale et australe du continent afri- cain ; elle paraît cependant être assez constante sur les exem- plaires du Congo, el peut être considérée comme spécifique au même titre que la pointe blanche de la queue et la teinte foncée de la face postérieure des oreilles. | La têle osseuse du mâle adulte (a) frappe au premier coup d'œil par sa forme déprimée et beaucoup plus aplatie que chez le Chacal du Nord de l'Afrique C. anthus. La boîte encéphalique est beaucoup moins renflée et la crête sagittale des pariétaux très élevée; les frontaux sont, au contraire, très surbaissés et ne présentent pas la voussure que l’on remarque chez le C. anthus ; enfin la ligne nasale est droite et non ensellée comme dans cette dernière espèce. Il résulte de ce mode de conformation que, chez le C. adustus, le profil sagiltal du crâne est à peu près recliligne. La pointe postérieure très aiguë des os nasaux dépasse de beaucoup en arrière les sutures fronto-maxillaires. Les arcades zygoma- tiques sont un peu moins arquées en dehors et beaucoup moins relevées que chez le C. anthus; chez ce dernier, elles sont incomparablement plus puissantes et leur hauteur est deux fois plus considérable. Les bulles auditives sont un peu plus renflées chez le C. adustus et plus divergentes en ar- rière. Comme l’a observé M. St. George Mivart, le palais se prolonge un peu au delà de la ligne tangente aux bords postérieurs des dernières molaires et ses largeurs maximum et minimum sont inférieures aux mêmes mesures prises sur un crâne de C. anthus de même sexe et d'âge équivalent. La dentition du C. adustus est également moins puissante que celle du Chacal du Nord de l’Afrique, et j'ai relevé pour ces deux espèces des différences très sensibles entre les lon- gueurs respectives des dents similaires, la hauteur et la force des tubercules, différences très appréciables surtout pour la dernière prémolaire supérieure et la première molaire inférieure. Du reste, la mandibule est bien plus forte et plus massive chez le Canis anthus, et les hauteurs de la branche horizontale et de l’apophyse coronoïde l’emporlent nota- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 281 blement sur celles des mêmes parties de la (ête osseuse du C. adustus (1). C. ANTHUS C. ADUSTUS Mesures du crâne en millimètres. PR s adullel Longueur maximum du crâne de l'avant des pré- maxillaires au sommet de la crête occipitale.. 171 167 Largeur maximum aux arcades zygomatiques.. 96 88 Hauteur maximum de la tête osseuse du bord inférieur de la mandibule au milieu des os RL L'on La Jedi iniee 82 69 Longueur des os EU sur la ligne médiane... 58 69 Longueur PR SR ne PR ER A die 89 89 Largeur maximum du palais en arrière de PM+*. 58 53 Largeur minimum du palais en arrière de PM. 25 23 Hauteur de l’arcade zygomatique............... A1 6 EM 2 de une eau 19 16 EM I CR iii. 25 17 Largeur LE NULS NAN ENARE P OURTE EPP RENE 17 14,5 Longueur maximum de la mandibule de la sym- physe LL LION IE RSRRNREL RS RUE PEAR ER 128 127 Hauteur de la branche horizontale de la mandi- ne nivea de Mi... 0 ne a 19 16 Hauteur de l'apophyse coronoïde au-dessus du bord inférieur de la mandibule............... 47 43 L’aire de dispersion du Chacal à flancs rayés comprend toute l'Afrique centrale et australe, de l'Est à l'Ouest, depuis le Gabon et le Nord de la région des Lacs jusqu’au Cap. Signalé pour la première fois en 1846 dans l’intérieur de la Cafrerie par Sundevall, le C. adustus est indiqué quelques années plus tard, 1852, par Pelers à Makanga dans le dis- (1) Dans un mémoire très documenté, que je n'ai pu consulter que tout récemment, Ueber den Schädel von Canis adustus (Zoologische Jahrbu- cher (Systematik), p. 523, t. VI, 1892-93, M. le D' Ernest Schaff a parfai- tement mis en lumière et fait ressortir par d'excellentes figures les parti- cularilés que présentent le crâne et la dentition du C. adustus. Je ne puis que me ranger à l'opinion du savant zoologiste allemand qui conclut de ses recherches, que ie C. adustus doit être irrévocablement rayé de la tribu des Chacals, que l'on doit, ou créer pour cette espèce une nouvelle subdi- vision intermédiaire entre celle des Chacals et celle des Renards, ou plutôt, à l'exemple de Gray et de M. Trouessart, l'admettre définitivement dans la tribu des Renards dont le C. adustus a non seulement la plupart des carac- tères crâniens et dentaires, mais aussi la longue queue terminée de blanc, ce qui ne se remarque chez aucun Chacal. 2892 E. DE POUSARGUES. trict de Maravi au Sud-Ouest du lac Nyassa, où les indigènes le nomment Candüe. Le même auteur rapporte à cette espèce un Chacal capturé en 1865 par le D° Welwitsch à Golungo- Allo, un peu au Nord du Coanza dans les possessions porlu- gaises de Loanda. C’est, à n’en pas douter, le Wboyo des nègres du Gabon auquel Du Chaillu fait allusion dans le récit de ses voyages, ainsi que l’a démontré M. Sclater dans sa description de l'individu type du C. lateralis, lequel pro- venait des bords des lagunes de Fernand-Vaz à peu de dis- tance au Sud de l'embouchure de l’Ogôoué. L’explorateur Hesse (1) dit ce Chacal très abondant à Mase-Mandombe, un peu au-dessous de l'estuaire du Congo, et à Cabinda et Massabe au Nord de ce même fleuve, sur les côtes de Loango. Enfin, dans ces dernières années, 1890, le célèbre voya- seur anglais Johnston a rencontré le C. adustus à Moshi, à 5,000 pieds anglais d'altitude sur les flancs du Kilima- Njaro. Celle zone immense coïncide dans ses parties orien- tale et australe, avec l’aire de répartition du C. mesomelas, mais cette dernière espèce ne compte jusqu'ici aucun représentant dans l'Ouest africain. Au Sénégal, et peut-être sur les côtes de la Guinée supérieure, le C. adustus paraît remplacé par le C. variegatus de Rüppell, espèce que les auteurs rapportent au C. anthus. FAMILLE DES VIVERRIDÉS GENRE NANDINIA 44. NANDINIA BINOTATA. (Gr.) Viverra binotata. Gray. Spic. Zool., p. 9, 1828. Paradozæurus Hamiltonii. Gray. Proc. Zool. Soc. London, p. 67, 1832. — ? binotatus. Gray. — p. 68, 1832. — binotatus. Temminck. Monogr. Mamm., p. 336, pl. LXV, | vol. II, 1835. —— binotatus. Temminck. Esq. Zool. Côt. Guinée, p. 119, 1853. Nandinia binotata. Gray. Proc. Zool. Soc. London, p. 530, 1864. (4) Noack, Zoologische Jahrbucher, vol. IV. Syslemat., p. 165, 1889. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 283 Nandinia binotata. Flower. Proc. Zool. Soc. London, p. 683, 1872. — — Jentink. Not. f. Leyden Mus., vol. X, p. 16, 1888. — — Noack. Zool. Jahrbuch. (System.), t. IV, p. 176, 1889. a. jeune. M. Marche, 21 décembre 1875. Samkitta, Ogôoué. RARE — —- — — ce. Q — M.J. Dybowski, 20 mai 1892. Poste de la Mission sur la Kemo. d. gf adulte. — 10 janvier 1894. Mayumba. Congo. e © — — — — Peau plate mutilée, préparée par les indigènes. Sur lès jeunes spécimens (4, 4, c,) les trois bandes noires longitudinales de la nuque et du dessus du cou sont très bien marquées, et chez la jeune femelle (0) elles semblent se con- tinuer tout le long du dos par des taches presque confluentes, disposées suivant trois séries longitudinales, l’une mé- diane, les deux autres latérales et symétriques. Sur l'individu {c) les deux taches sus-scapulaires caractéristi- ques sont d’un jaune franc; chez les deux exemplaires (a, b) montés et figurant dans les nouvelles galeries de zoologie du Muséum, elles sont au contraire d’un blanc pur, mais peut- être décolorées par suite d’une longue exposition à la lumière. Les deux bandes noires latérales de la nuque sont très étroites et beaucoup moins nettes sur le sujet adulte (d), et sur la peau plate (e) elles ont disparu ; on n’en trouve plus comme vestiges que quelques maculatures noires, largement etirrégulièrement espacées. Ces variations montrent un ache- minement graduel vers la forme décrite récemment par M. O. Thomas sous le nom de Nandinia Gerrardi (1). Le type de cette espèce originaire du Nyassa-land et du bassin du Shiré ne diffère du AV. binofata que par l’absence com- plète des bandes noires de la nuque et du dessus du cou; sataille et sa coloration générale sont cellesdela Nandinia binotata, les maculatures du corps sont plus réduites et plus éparses, les bandes transversales de la queue plus étroites, plus serrées et mieux définies ; mais les deux taches jaunes sus-scapulaires, quoique peu distinctes, sont présentes. Ces légères différences constatées sur un seul individu, n'ont pas, je crois, une telle (4) O0. Thomas, Ann. and Mag. natur. hist., 6° série, t. XII, p. 205, 1893. 284 E. DE POUSARGUES. importance, qu'on puisse les considérer comme caractères réellement spécifiques ; elles autoriseront peut-être à main- tenir ce type comme sous-espèce locale de la Nandinia bino- tata, si elles présentent quelque fixité chez les spécimens du Nyassa-land ; mais, n'est-ce pas là plutôt une variété pu- rement individuelle et n'est-il pas préférable d'admettre avec Gray dans le nombre et les dimensions des macula- tures du corps, une assez grande variabilité (1), dont les bandes nuquales, la médiane elle-même, ne seraient pas exemptes ? On sait par les recherches de M. Flower que les Nandinia présentent des particularités anatomiques remarquables. Le tube intestinal n’a pas de cæcum; à la place que devrait occuper ce diverlicule, c’est-à-dire à 20 centimètres environ au-dessus de l'anus, on n'observe qu'un léger étranglement de part et d'autre duquel le calibre de l'intestin diffère nota- blement, et qui, par conséquent, marque le point de sépara- üon de l'iléon et du côlon. Les molaires des Nandinia sont plus petites et leurs tubercules plus aigus que chez les Para- doxures, caractère qui, tout autant que la différence d'habitat, a nécessilé la distinction générique de ces deux types. Enfin la chambre postérieure de la. bulle audilive resle cartilagi- neuse pendant toule la vie, parlicularité qu'on ne retrouve chez aucun Carnassier. La Nandinia binotata paraît spéciale à l'Afrique intertropicale, et on la rencontre très communé- ment tout le long des côtes de la Guinée et du Gabon, depuis Sierra-Leone jusqu'à l'embouchure du Congo. Son exten- sion vers l'Est est encore assez mal connue et le point extrême où ce Carnassier ait été signalé dans celle direction est pré- cisément le Nyassa-land, lieu d’origine de la forme N. Ger- rardi. Xl est douteux que cette espèce dépasse le Zambèze au Sud, du moins Peters ne la signale pas dans sa Faune de Mozambique. Du côté de la côte occidentale, elle n’a été (4) J. E. Gray. « Varies in the brightness and rufous tint of the fur and also in the size of the spots. In some they are much larger and apparently fewer than in others. » (Proc. Zool. Soc. London, p. 530, 1864.) ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 285 rencontrée qu'une seule fois par M. Monteiro (1), au Sud du Congo, à Bembe, dans les provinces portugaises d’Angola. GENRE VIVERRA 45. VIVERRA POoRTMANNI. (Pchr.) Viverra Poortmanni. Pucheran. Revue et Magasin de Zoolog., p. 304, 1855. — Arch. du Mus. Hist. nat. Paris, t. X, p.109, pl. IX, 1858 à 1861. — civetta, var. Poortmanni. Noack. Zoolog. Jahrbucher, vol. IV, p. 169, 1889. a. çj{ très jeune. M. Thollon, 1891. Brazzaville. Chez ce jeune spécimen ne mesurant que 59 cenlimetres de longueur totale dont 20 pour la queue, la livrée encore très imparfaile est loin d’avoir acquis ses teintes définitives, mais elle présente déjà certains traits qui permettent de rattacher sans hésitation cet individu à l'espèce décrite et figurée par Pucheran sous le nom de Viverra Poortmanni. Les quatre membres et la queue sont noirs, et ce n’est que sur le tiers basal inférieur de celle-ci que l’on découvre quatre pelites taches blanches régulièrement espacées, indices des demi-anneaux qui marquent cet appendice chez l'adulte. La base inférieure du cou, le thorax et la parlie antérieure de l'abdomen présentent également une colora- tion noire, mais légèrement mêlée de gris roussâtre. Le pelage du dessus du corps consiste en un mélange confus de longs poils, les uns gris jaunâtre, les autres noirs. Ceux de la première teinte sont plus abondants sur le haut des cuisses et les flancs, les poils noirs, au contraire, prédomi- nent le long de l’échine et sur toute la région scapulaire où leur réunion dessine comme une selle dont la portion infé- rieure se continue avec le pelage noir des membres anté- rieurs. Tout le pelage du cou est d’une teinte fondamentale gris jaunâtre irrégulièrement nuancée de noir, surtout dans (4) Proc. Zool. Soc. London, p. 247, 1860. 286 E. DE POUSARGUES. sa portion moyenne inférieure, mais on essaierait vainement, de même que sur les flancs, d'y démêler quelque indice des bandes alternativement noires et blanches qui se dessi- nent si nettement chez l'adulte. Sur le dessus et les côtés de la tête et sur le front, les poils, gris fuligineux à leur base et à leur extrême pointe, présentent dans leur portion moyenne un large anneau blanc; il en résulte une teinte gris clair fine- ment liquelée qui se continue entre les yeux et se prolonge sur la ligne du chanfrein jusqu'aux narines. La large bande noire qui enveloppe le dessous et les côtés du museau se trouve done coupée et interrompue le long de la ligne médiane supérieure, ce qui répond au caractère exprimé dans la courte diagnose de Pucheran: « vita oculari nasum non transeunte ». En avant de cette bande noire, de chaque côlé du museau, se voit une tache d’un blanc jaunâtre pur, le long de la bordure postérieure de laquelle s’insèrent de longues moustaches, les inférieures blanches, les supé- rieures noires. La Viverra Poortmann doit-elle compter comme espèce distincte, ou ne faut-il, à l'exemple deM. Noack, la considérer que comme une simple variété de la Civette ordinaire? C'est là une question que la non-malurité du spé- cimen qui nous occupe ne permet pas d'élucider; la seule conclusion que l’on puisse tirer de sa provenance et de celle de l'individu signalé par M. Noack à Banana, est que cette espèce ou cette race paraît localisée dans nos possessions françaises du Gabon et du Congo. GENRE GENETTA 46. GENETTA POENSIS. (Wath.) Genetta poensis. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. London, p. 59, 1838. a. © adulte. M. Dybowski, 1894. Mayumba. Sauf sa taille un peu plus faible, cet individu répond pour le pelage à la description du G. poensis, d’une manière si exacte et si rigoureuse, que l’on pourrait croire avoir affaire ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 287 au Lvpe même qui servit autrefois à Waterhouse. Sur le fond jaune sombre de la robe, sont disséminées en grand nombre de petites taches pleines et des lignes noires qui affectent la disposition suivante : Deux bandes noires symétriques, bien marquées, assez étroites à leur origine derrière les oreilles, mais s’élargissant graduellement, descendent obliquement, une de chaque côté du dessus du cou. Un peu en avant de l'épaule, leur divergence s’accentue, et chacune d'elles s’in- curvant en bas et en dehors, traverse la région scapulaire et vient se perdre en s’étalant derrière et au-dessous de chaque aisselle. Entre ces deux larges bandes latérales, on trouve trois autres lignes noires médianes, très étroites, serrées l’une contre l’autre et presque confondues sur la région occipitale, d’où elles descendent en divergeant légère- ment jusqu’à la base du cou. À partir de ce point, la ligne impaire médiane se continue, plus ou moins distincte et un peu morcelée entre les deux épaules; elle reparaît, plus nette, ininterrompue, mais toujours étroite sur le quart antérieur du dos, puis brusquement s’élargit, et court ainsi le long de l’épine dorsale pour arriver, en se retrécissant légèrement sur la croupe, jusqu’à l’anneau noir basilaire de la queue. Quant aux deux lignes latérales, elles se bifur- quent deux fois, à des niveaux différents sur la région sca- pulaire, et se résolvent, de chaque côlé d'une manière assez symétrique, en un faisceau de quatre bandes d’abord étroites, ininterrompues et divergentes, qui bientôt s’élar- gissent, prennent une direction parallèle, et courent Le long des flancs jusque sur les hanches et la face externe des cuisses, en se morcelant en un grand nombre (1) de pelites taches irrégulières parfois confluentes, surtout celles de la ligne interne supérieure qui côtoie immédiatement la bande spinale jusqu'à la naissance de la queue. Celle-ci bien déve- loppée est noire, coupée sur ses deux tiers proximaux de cinq anneaux blanc Jaunâire neltement dessinés, et de trois (1) Sur l’une de ces lignes parallèles, je n'ai pas compté moins de dix- huit taches, depuis l'épaule jusqu’au bord postérieur de la cuisse. 288 E. DE POUSARGUELS. ou quatre autres de plus en plus indislincts et incomplets sur son tiers distal qui est presque entièrement noir à sa face supérieure. Le front, les joues et les côtés du cou sont brun gris jaunâtre; entre les yeux bordés de poils noirs, se trouve une bande longitudinale noire assez peu accusée qui vient se perdre dans la large plage de même couleur qui occupe le dessus etles côtés du museau. Au-dessous de l'angle antérieur de l'œil, on remarque une large maculature d’un blanc jaunû- tre vif, et au-dessus, une petite tache sourcilière de même teinte, plus vaguement dessinée. De chaque côté du nez et en avant de la plage noire du museau, fa lèvre supérieure est marquée d’une zone blanchâtre. Le menton, la gorge et le dessous du cou sont teintés de gris jaunâtre. Sur les côtés du cou sont disséminées quelques taches noires, punctiformes en avant, oblongues en arrière, qui deviennent plus rares sur le devant des épaules, et disparaissent vers le haut des bras. La poitrine et le ventre d’un jaune sombre, sont aussi finement mouchelés de noir. Enfin la plus grande portion distale des quatre membres est leintée de noir brunâtre sombre. Comme le fait très Justement remarquer Waterhouse, la (renetta poensis ressemble, à beaucoup d’égards, à la Genetta pardina (1. Geolf.) (1). On trouve, en effet, dans la disposi- ton des lignes noires de la nuque et des épaules, et dans la configuration de la bande noire spinale et des anneaux de la queue, de grandes analogies entre ces deux espèces. Ajoutons de plus, comme autre caractère commun, que les maculatures qui marquent les flancs chez la Genelle pan- thérine sont également disposées de chaque côté, suivant quatre séries longitudinales parallèles. Mais, outre la forme annulaire et non pleine que présentent ces taches, ce qui a valu son nom à la Genetta pardina, leur nombre est beau- coup plus restreint, en raison même de leurs plus fortes dimensions, et celles des rangées supérieures avoisinant la bande spinaie ne sont nullement confluentes. D'autre part, (4) 1. Geoffroy Saint-Hilaire, Magas. de zoologie, 7° livraison, cl. I, pl. VIIT, 1832, ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 289 la couleur des membres diffère, surtout aux pattes anté- rieures sur la face externe desquelles on observe, jusqu’à la naissance des doigts, un pelage gris jaunâtre clair parsemé de mouchetures noires. Sans attribuer plus d'importance qu’il ne convient au plus ou moins d'intensité de la teinte jaune qui forme le fond de la robe, il y a lieu, je crois, d'êlre plus réservé en ce qui concerne la forme, les dimensions et le mode de distribution des taches : ce sont là autant de particula- rités sujettes, il est vrai, à quelques variations de détail, mais dont le plan général d'ensemble présente assez de fixité pour être considéré comme caractère éminemment spécifique. Étant donné l’état bien incertain et plus que provisoire dans lequel J. E. Gray (1) a laissé la classification des Genetles, j'ai cru devoir m'abstenir de toute synonymie pour les animaux de ce genre, et m'astreindre rigoureusement à la dénomination spécifique qui, d’après les descriplions, convenait le mieux aux individus que j'avais à examiner. J'espère de cette façon éviter tout malentendu, sans perdre l'occasion de fournir quelques documents précis qui puissent présenter nne utilité, si minime qu’elle soit, au travail de revision qui Simpose pour le groupe si intéressant des Genettes. Le spécimen type de la Genetta poensis provenait de Fer- nando-Po ; mais ce lieu d'habitat ne doit être admis que sous toute réserve, comme }j ai déjà eu l’occasion de le faire remarquer pour les Colobus Pennanti, Colobus satanas, Cer- copuhecus erythrotis et Cercopithecus Martini, décrits par Waterhouse d’après des peaux plates le plus souvent muli- lées, et très probablement importées dans cette île des côtes voisines du continent africain, où toutes ces espèces ont élé rencontrées depuis. Le spécimen de G. poensis qui fait l’objet de cet article (1) J. E. Gray, On the Viverridæ. (Proc. Zool. Soc. London, p. 518, 1864.) ANN. SC. NAT. ZOOL. il, 49 290 E. DE POUSARGUES. mesure 56 centimètres de longueur pour la tête et le corps el 46 pour la queue. 41. GENETTA GENETTOIDES. (Tem.) Viverra genettoides. Temminck. Esq. zool. Côt. de Guinée, p. 89, 1853. a. © très jeune, dans l'alcool. M. de Brazza, 1883. Congo francais. b. — très jeune. M. Thollon, 1892. Brazzaville, Congo francais. c. ® adulte. M. Dybowski, 10 mars 1892. d. © jeune. — 28 février 1892./ Poste de la Mission sur la ri- e. ® presqueadulte. — 2 mai 1892. vière Kemo. f. Œ semi-adulte. — 11 juin 1892. g . O très adulte (peau plate). M. J. Dybowski, 1894. Mayumba. Chez tous ces sujefs, sans aucune distinction d'âge ni de sexe, 1l existe dans le nombre, les proportions, le contour et l’arrangement des taches noires de la robe, une extrême analogie avec ce que l’on observe chez la Genetlla pardina: c'est-à-dire que ces taches sont moins nombreuses, plus grandes et moins confluentes que chez la Genetta poensis que nous venons d'étudier. La seule différence que l’on puisse constater entre leur livrée et celle de la Genelte panthérine consiste dans la forme pleine et non annulaire des maculatures des flancs. Il est à remarquer, toutefois, que sur certains exemplaires (d, e, f) quelques-unes des taches latérales supérieures présentent à leur centre quel- ques poils d’un roux jaunâtre irrégulièrement épars; l’on pourrait supposer, pour ces individus semi-adultes, que ces poils s’accroissant en nombre en même temps que les taches grandissent avec l'animal, finissent, en concentrant leurs teintes, par former dans chaque maculature noire une aire centrale plus claire et bien dessinée. Mais la forme nullement annulaire de ces mêmes taches chez les individus c et g parvenus à leur complet développement, contrecarre cette hypothèse toute vraisemblable qu'elle puisse paraître. La queue, en tout semblable pour les proportions et les teintes des anneaux à celle de la G. poensis, paraît sujette à d'assez grandes variations dans sa longueur ; chez quelques individus, elle atteint presque les dimensions de la tête et ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 291 du corps; Landis que pour d’autres, elle en dépasse à peine les deux tiers. Les dimensions de la têle et du corps, inférieures à celles de la G. poensis, concordent avec les mesures que Temminck a données pour les types adultes de G&. genettoides, et c'est celle simililude qui, jointe à la forme pleine et non annu- laire des taches de la livrée, m'a fait adopter de préférence le terme spécifique créé par le savant hollandais à l’exclu- sion de celui de G. pardina (I. Geoff.). En effet, les dimen- sions du type de celte dernière espèce sont assez fortes et plutôt comparables à celles de la G&. poensis ; je dois dire, toutefois, que ce spécimen monté me paraît avoir subi une élongation excessive au détriment de sa grosseur. Le crâne m'a malheureusement manqué pour m'assurer de ce fait, el faute de ce précieux document, malgré de grandes probabilités en faveur de l'identité spécifique de G. pardina et G. genet- loides, je suis contraint de laisser sans réponse la question autrefois posée par Temminck : « La Genetta pardina forme- t-elle une espèce distincte ? » GENETTA GENETTOIDES. Mesures en millimètres. [. Geoffroy. J (1) 25 S 4 Fe= me La Et © Ê Longueur de la têle et du corps | suivant la courbure 21245 1430! 460 |: Longueur de la queue 4118/1235 250 250 300 mate Il était intéressant d'étudier comparativement le crâne de l'exemplaire femelle (c) de Gr. genettoides et celui de la femelle de &. poensis que nous avons décrite dans le para- (4) La mesure donnée par I. Geoffroy pour le corps de la G. pardina est de 1 pied 6 pouces, soit 486 millimètres, mais cette mesure a été prise en ligne droite du bout du museau à la naissance de la queue, comme j'ai pu m'en assurer. 292 EE. DE POUSARGUES. graphe précédent. Le développement des crêtes osseuses et l'élat des denlitions dénotent la maturité complète et un âge équivalent pour ces deux individus. Cette circonstance donne donc une réelle valeur aux conclusions que j'ai pu ürer des différences que présentent ces deux têtes osseuses dans leurs dimensions absolues et relalives, et ces conclu- sions tendent à la complèle séparation spécifique de ces deux Geneltes. “27> 3 S NSI G. GENETTOIDE Mesures en millimètres. Ê- POP PROPRES © adulte. Q adulte. Re 1. Longueur maximum du crâve, de l'avant Le 9 des prémaxillaires au point extrême de l’un dés CONAyIes OCCIDIAUX LE RER . Largeur maximum aux arcades zygo- AQU LS Act TETE EUR TE trou MRC . Longueur totale du palais . Largeur minimum du palais en arrière 5. Largeur maximum du palais en arrière et cn dehprside PME SE «an Je CE 33 24 6. Longueur en ligre droite du canal ali- SPhéÉdOie ER ed A RoURSS ET N AMEN TR 6 2, 1. Longueur.des_ bulles auditives. .…....... 19 19 Rapport entre la longueur et la largeur mi- nimum du palais (mesures 3 et 4)........ 3/1 4/1 Rapport entre les largeurs maximum et mi- nimum du palais (mesures 4et5)......... 4/2 5/2 8. Longueur maxim. de la mandibule, du bord antérieur de la symphyse à l'extrémité du talon | On peut voir, d'après ces mesures, que le crâne de la (Grenetla poensis présente des dimensions sensiblement supé- rieures à celles du crâne d’une Genelta genettoides du même âge, ce qui est en parfait accord avec les différences de taille que J'ai déjà signalées entre ces deux espèces. Pour préciser en effet, je rappellerai que Waterhouse indique 26 pouces anglais, soit 66 centimètres, pour les dimensions de la tête et du corps du type de la G. poensis ; le maximum de taille que j ai observé pour la G. genettoides est de 51 cen- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 293 timèlres, et suivant Temminck, les sujets « 4rès vieux », types de cette espèce, ne comptaient pour la tête et le corps que 17 pouces 1/2, c’esl-à-dire 47 à 48 centimètres. Le tablau ci-dessus nous apprend également que le crâne chez la G. poensis est plus large, relalivement à sa longueur, que chez la G. genettoides. Pour le palais, cette disproportion est encore plus accusée ; d’où l’on doit conclure que chez la G. genettoides le museau est beaucoup plus étroit et plus effilé. D'autre part, l'orifice postérieur du canal alisphé- noïde est reporté lrès en arrière chez la G. poensis ; le pont osseux qui imite extérieurement ce canal est {rès peu étendu chez la G&. genettoides, et l'écart que l’on observe entre les longueurs respectives de ce canal chez les deux espèces est hors de toute proportion avec les différences de longueur des crànes, tandis que, d’un autre côté, on trouve exacle- ment les mêmes dimensions pour les bulles auditives. Ces caractères différentiels joints à ceux de la livrée nous amènent donc à distinguer spécifiquement la G. genet- toides de Ja G. poensis. Il reste au contraire à établir si la G. pardina différente elle aussi de la G. poensis, ne doit pas être considérée comme identique à la G. genettoides ; auquel cas cette dernière dénomination devrait disparaîlre suivant la loi de priorilé. Les nombreux spécimens recueillis par nos voyageurs démontrent que la G. genettoides est excessivement abon- dante dans le Congo français, le Gabon et la région de l’'Oubangui. Suivant Temminck, elle est très commune égale- ment sur toule la côte de Guinée, et si l’on admet l'identité de cette espèce avec la Genette panthérine, elle se répandrait jusque dans nos possessions françaises du Sénégal. 48. GENETTA SERVALINA. (Puch.) Genetta servalina. Pucheran. Rev. et Mag. de Zool., p. 154, 1855. — — _ Arch. Muséum, t. X, p. 115, pl. X, 1858-1861. — Aubryana. Pucheran. Rev. et Mag. de Zool., p. 154, 1855. — — Pucheran. Arch. Muséum, t. X, p.118, pl. XI, 1858-1861 — servalina. Matschie. Säugeth. deutsch. Ost-Afrik., p. 74, 1895. 294 E. DE POUSARGUES, a. © très jeune. M. J. Dybowski, 8 avril 4892. Poste de la Mission sur la : Kemo. b. O presque adulte. M. J. Dybowski, 1892. Congo francais. (Peau plate préparée par les indigènes.) Dans son essai de classification des Viverridés, Gray (1) ne cile cette espèce que comme synonyme de la Genetta pardina, et celte opinion erronée a malheureusement pré- valu jusqu'ici. La description très détaillée et la figure très exacle publiées par Pucheran me dispensent de m’arrêter (1) Gray, Proc. Zool. Soc. London, p. 518, 1864. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 295 longuement sur les particularités que présente le pelage de la G. servalina, et je crois suffisant, pour rétablir la validité réelle de cette espèce méconnue, d'attirer l’attention sur les caractères qui permettent de la distinguer de celles de ses FOTANA 2C SAT A ne | NANDINIA RÉGIONS PEUR à : | A poils courts. A poils ft EUROPE SUD G.|G. A ET L: ASIE OUEST ( ess.) Gt|G. afra. afra. (EF. (FA € Cuv.) CPE G?|G. MAT AE S tei. (Loch.) 230 PI Cr ongle Ed (H. et Ebr..) < T G*\G AS sis.(F.Cuv.)) A P.|G. par- OF ES QUE: dina. (l a NES Geoff.) È NUE EE LP he pie "ge OLENe RAA QUE THE notata. char - nettoi- e EN CPE (Tem.) dsoni . des. S et le (Th.) (Tem.) à. let © F.1G. poen- SE W. = SE) 5 sis. (W.) E He E.\G. serva- ee ml | € lina. € \a (Pch.) ) A RO |G|G.æquatoria. æquatoria- 25 [N!IN. Gerrar- lis. (Heugl.) 2Z di.(Thos.) ne felina. £ | | (Thunb.) fc: tigrinas (Sehreb. == | ES G1|G. rubigino- DE | sa. (Pch.) 22 G$ G. angolen- | sis. (Boc.) ! te en regard, au lieu de la lettre G sans exposant placée dans le Darfour, lisez G3, congénères qui présentent avec elle le plus d'affinités, G. pardina et surtout G&. poensis. Je dois signaler tout d'abord la petitesse et le nombre considérable des taches noires, plus abondantes même que chez la G. poensis et qu'on rencontre jusque sur le devant du cou et sur les joues. A l’inverse de ce que l’on remarque 296 E. DE POUSARGUES. chez les formes G. poensis et G&. pardina, les taches les plus pélites sont celles qui avoisinent immédiatement la rangée médiane supérieure. De plus, la disposition des maculatures du dos et des flancs est des plus irrégulières, et l’on y cher- cherait vainement, comme chez les deux espèces sus- nommées, une orientation suivant des lignes longitudinales parallèles. Le thorax et l'abdomen sont presque aussi noirs que les membres ; celte particularité, jointe à l'extrême mul- tiplicité des taches, contribue à donner à la robe une tona- lité générale très sombre. Mais le caractère le plus saillant peut-être de la livrée de la G. servalina est l'absence de la bande noire, plus ou moins large mais toujours bien dessinée et continue, que l’on trouve le long de l’épine dorsale chez toutes les autres espèces du genre. Pucheran sur ce point est très explicite. « Le dos, écrivait-il, ne présente pas de raie noire continue ; seulement, dans l’espace interscapu- laire, nous observons deux lignes étroites de cette couleur peu étendues en arrière de la région indiquée ci-dessus. Elles sont remplacées ensuile jusqu’à la racine de la queue par des {aches allongées quelquefois séparées de celles des parties latérales par la teinte rousse qui forme le fond de la coloralion du pelage, quelquefois se confondant avec elles. » Sous ce rapport, la G&. Aubryana ne diffère pas de Ia G. ser- valina, vu que chez cette espèce, dit Pucheran, « la partie médiane du dos est occupée par des iaches d’un noir profond, de forme allongée surtout dans l’espace interscapulaire où elles sont linéaires. Ces taches ne sont pas assez réunies pour former une véritable bande. » La G. Aubryana ne s'éloigne en réalité de la G. servalina que par la teinte plus claire et blanchâtre du fond de la robe, caractère trop peu important pour motiver la distinction spécifique de ces deux types. La queue, très développée chez l’une et l’autre, atteint presque la longueur de la tête et du corps el nous verrons plus loin qu’elle peut la dépasser parfois. Cette queue est régulièrement annelée de noir et de blanc jaunâtre jusqu’à son extrême pointe ; au contraire, chez la &. pardina et la ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 297 Gr. poensis, le Liers terminal de la queue est presque entiè- rement noir el indistinctement marqué à sa face inférieure d'anneaux bruns incomplets. Tous les caractères sur lesquels je viens d’insister, ont été parfaitement mis en lumière par Pucheran, et leur coexis- tence invariable et complète, constatée sur plusieurs indivi- dus, leur donneune valeur qu'on ne peut méconnaître. On les retrouve en effet dans toute leur intégrité, non seulement sur le tout jeune spécimen (a) et la peau plate du sujet semi- adulte (6) recueillis par M. Dybowski, mais aussi chez une belle Genette mâle, très adulte, rapportée du Gabon par M. Laglaize. Cet exemplaire, d’une taille supérieure à celle du type de Pucheran, démontre que l'espèce peut alleimdre des dimensions aussi fortes que la G. poensis. 5 © < 4 + SN < Z à % Le ME Er RE ET RER . « = + CT] Mesures en centimètres. EDS | Sn | gp | £S$é GE S < > un ee = ee 8. ae RENE LE < < Longueur de la tête et du corps en suivant RME ES Re NN DE US RENE. 62 57,4 51 43 42 La G. servalina qui n'avait été observée jusqu'ici qu'au Gabon, paraît se propager dans l’intérieur de l’Afrique (1), comme l'indique le jeune spécimen (a) capturé dans la région de l’Oubangui. (1) Cette hypothèse se trouve pleinement confirmée par les travaux ré- cents de M. Matschie, qui signale la G. servalina à l'Ouest immédiat du Sem- liki, et soupconne également sa présence dans le Rouhanda. 298 E. DE POUSARGUES. GENRE HERPESTES 49. HERPESTES GRACILIS, Var. MELANURUS. (Mart.) Cynictis melanura. Martin. Proc. Zool. Soc. London, p. 56, 1836. — — Fraser. Zoolog. typica, pl. IX, 1849. Herpestes melanurus. Temminck. Esq. Zool. Côt. de Guinée, p. 106, 1853. — gracilis, var. melanurus. O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p.68, 1882. a. © adulte. M, J. Dybowski, 11 mars 1892. Poste de la Mission, Haute Kemo. S Ce spécimen compte 33 centimètres pour la tête et le corps et 26 seulement pour la queue. Cetle dernière mesure est un peu inférieure à celle que Martin et M. 0. Thomas assignent à À. melanurus, maïs les particularités de colo- ration du pelage se rapportent très exactement à la des- cription de Martin. Le dessus du corps et la queue, sauf sa pointe noire, sont d’une teinte rousse tiquetée de noir bru- nâtre plus foncé sur la tête ; la poitrine, le ventre et la face interne des membres sont d’un roux jaunâtre uniforme. Sur la gorge et le dessous du cou, les poils jaunes au sommet sont marqués à la base de noir grisâtre. Le pouce manque à l’une des pattes postérieures, et à la place où 1l aurait dû se trouver, la peau complètement’ cicatrisée ne présente aucune solution de continuité. Cette anomalie n’est donc pas le fait d’un accident de préparation dans la mise en peau, mais est due à une mutilation survenue du vivant de l'animal, quelque temps avant sa capture. Il en résulte que, par l’un de ses pieds, le spécimen qui nous occupe est un Cynictis, par l’autre un Herpestes. La même anomalie avait élé signalée du reste par Temminck, et cet auteur soup- conne que Martin, en faisant de cette Mangousie un Cyniclis, « a été induit en erreur par l'examen d'un individu mutilé, manquant de cinquième doigt aux deux pattes postérieures ». La provenance de l'exemplaire capturé par M. Dybowski montre que la variété melanurus de H. gracihs qui, suivant M. O. Thomas, est cantonnée dans l'Afrique ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 299 occidentale depuis Sierra-Leone jusqu’au Cameron, se pro- page assez avant dans l’intérieur de l'Afrique centrale. 90. HERPESTES GALERA. (Erxl.) Mustela galera. Erxleben. Systema Regn. Anim. el. I. Mamm,., p. 453, PTT Ichneumon major. E. Geoffroy Saint-Hilaire. Descript. Egypt. Hist. nat., IT, p. 438, 1812. Herpestes pluto. Temminck. Esq. Zool. Guinée, p. 95, 1853. — loempo. Gray nec Temm. Proc. Zool. Soc. London, p. 551, 1864. — galera. O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 72, 1882, a. © adulte. M. Marche, 31 janvier 1876. Pays des Apingis. Ogôoué. b.Q — M. de Brazza, 1885. Congo français. ce. Q — (variété). M. Dybowski, 9 mars 1892. Poste de la Mission sur la Kemo. Le pelage de ces trois spécimens offre la coloration ordi- naire de l'espèce. Le sous-poil est brun grisâtre ; les longs poils soyeux du corps et de la queue sont d’un brun ferrugi- neux annelés el terminés de noir; enfin la teinte passe au brun noirâlre sur les quatre membres. Sous le rapport des dimensions relatives du corps et de la queue, les deux pre- miers spécimens (a et à) n’offrent rien de particulier à noter ; et l’on peut voir, dans le tableau suivant, que leurs mesures concordent assez exactement avec celles que M. 0. Thomas a reconnues comme constantes chez un grand nombre de représentants de l'espèce; à savoir que la longueur de la queue dépasse toujours la moitié des dimensions de la tête et du corps. Mais, tel n’est pas le cas pour l’exemplaire femelle (c), dont la queue présente une brièvelé tout à fait insolite pour un représentant du genre Herpestes proprement dit du continent africain. Chez cet indi- vidu, l’appendice caudal ne mesure que 20 centimètres de longueur, et dépasse à peine le tiers des dimensions de la tête et du corps: 1l est cependant parfaitement intact, de forme régulièrement conique, et ne présente aucune trace de mutilation à son extrémité. Les poils qui le recouvrent à la base présentent la même coloration que le dos, puis s’as- sombrissent graduellement à partir de son dernier liers, 300 E. DE POUSARGUES. pour devenir presque noirs à son extrémité; en d’autres ter- mes, tout se passe au point de vue de la coloration du pelage comme chez les Æ. galera à queue normale. ————_——————————— | HERPESTES GALERA ER | ASS n g = 5 Mesures en centimètres. É Ê a = (ee) > & > © = ee E Lonsueuride lastétetet duiconpsr menu 61 | 56 56 | bonguenrade aqueuse one 34 Ju 33 | Rapport entre ces deux dimensions. ......| 1,10 | 4,511 11,70 108280 La êle osseuse du spécimen (c) à queue anormale est un peu moins longue que celle des Æ. qalera typiques, sa largeur aux arcades zygomatiques est plus forte, et le museau par contre est plus étroit. Les crêtes sagittale et occipitale, si développées d'ordinaire vers leur point de rencontre, sont 1ci très réduites, principalement l’occipitale ; les frontaux sont beaucoup moins pincés en arrière des apophyses post-orbi- laires, enfin l’arcade zygomatique est très relevée vers son amorce temporale, et plus arquée en déhors, particularité d'autant plus visible que le museau est plus étroil. A la face inférieure du crâne, je dois noter la faible largeur du plan occipital par suite du peu de saillie de la crête; pour les bulles auditives, la chambre antérieure est très réduite avec une perforation centrale non confluente avec le cadre échancré du méat, à l'inverse de ce que j'ai observé sur le crâne de deux autres À. galera ; la chambre postérieure très globuleuse ettrès élevée se projette fortement en dehors, de telle facon que l’ensemble de la caisse audilive rappelle plus, par son mode de structure, l’Aerpestes ichneumon. Toute la portion post-dentaire du palais manque et je ne puis rien conJecturer de sa longueur, mais ce qu'il en reste permet de reconnaître qu'il est moins large que chez les 77. galera ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 901 typiques. La dentition, qui aceuse un état de vieillesse avan- cée, est moins puissante; la dernière prémolaire PM", bien développée suivantson diamètre maximum oblique, est moins épaisse, et présente des angles plus aigus, que chez les H. galera ordinaires; enfin la dernière molaire M? pré- sente une plus grande élendue dans le sens transversal. La mâchoire inférieure est également moins robuste ; la sym- physe mentonnière est sensiblement plus longue et moins fuyante. Le bord inférieur de la mandibule est presque rec- tüligne, le talon très peu relevé, de telle sorte que toute la portion postérieure est à peu près de niveau avec l’antérieure et la base de la symphyse. Chez les À. galera \ypiques, la ligne inférieure de la mandibule forme au contraire une courbe très prononcée, loute sa partie postérieure se relève fortement, ce qui donne à toute la mâchoire une forme en ba- teau qu'on ne retrouve pas chez le spécimen qui nous nu HERPESTES GALERA ana) | u Mesures du crâne en millimètres (1). aE | € 2 SÉ ea ca “È È Es uen LADITE ŒUL. Cr AMEN IE ALES D LT 106 108 102 Largeur HnUmAux arcades. À ann salsa if 60 64 ur maxime du palais 5%. 4% Dani 39 38 34 Longueur du palais, de l'avant des prémaxillaires au milieu de la ligne de largeur maximum pré- 2 EL ETES ER PRE RO A 40 41 38 Longueur de la symphyse en ligne droite........ » 24 26 Hauteur de l’apophyse COTONOÏTE. » 33 31 > a [Vi undulu- neus.(Rüp.) = S S F4 v. ochra-| à a S« 5 £ * ta. (Pet) IN 1H. Granti. ne Un) = (Gr.) 8 |» | à S hate = ses ee à Pot puluerue let LU RTS 5 = ; lentus. A 2 5 |V.\H. parvula. | (Wagn.) 'O3,v. badius. | = 5 (Sund.) | (A.Smith.) Se P!\H. puncta- à tissimus. (Tem.) pour les /chneunua de l'Afrique centrale, dont deux ont la queue noire et deux autres la queue blanche. L'aire de répartition de l’Zchneumia albicauda est extrè- mement étendue. Cette espèce se rencontre, à l'Ouest, depuis le Sénégal (7. nigricauda Pucheran), le long des côtes de Guinée (Temminck) jusqu'au Gabon ; elle s'étend de là vers ANN. SG. NAT. ZOOL. : il, 20 306 E. DE POUSARGUES. l'Est, à travers tout le Soudan jusqu’en Abyssinie (Rüppell) et descend ensuite vers le Sud, par la région des Grands Lacs, jusqu'au Mozambique (Peters) et au Natal (0. Thomas). Celte Mangouste passerait même, ou aurait passé autrefois en Arabie, car plusieurs explorateurs l’ont signalée dans les en- virons d'Aden. La carte précédente a été dressée d’après la Monographie des Mangoustes africaines publiée par M. 0. Thomas dans les Proceedings de 1882. Les seules modifications introduites depuis cette époque sont : l'extension de l'aire d'habitat de Ichneumia albicauda hors de l’Afrique (1), dans le Sud de l'Arabie jusqu'aux côtes du golfe d’Oman, et le rétablisse- ment comme espèce distincte de Âerpestes Granti (Gr.) = Herpestes Neumanni (Matsch.\ (2). GENRE BDEOGALE 52. BDEOGALE NiGRIPES. (Puch.) Bdeogale nigripes. Pucheran. Rev. et Mag. Zool., 2° série, t. VII, p. 111, 1855. — — — Arch. du Muséum, t. X, p. 120-124, 1858-1861. ? Ichneumia albicauda. (. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 75, 1882. ? Bdeogale nigripes. O. Thomas. — p.82, 4882: ? Bdeogale nigripes. Barboza du Bocage. Jorn. Sc. nat. Lisboa, 2° série, n° III, p. 180, 1889. a. = jeune. M. Masson, 1893. Gabon; nom local : Ewago. b. O adulte. M. Dybowski, 1894. Eschiras, Congo français. De toutes Les conclusions, rigoureusement logiques et irré- futables, énoncées par M. O0. Thomas sur l'unité spécifique des diverses variétés du sous-genre /chneumia, une seule doit être réservée, c’est la synonymie probable établie entre l'A. Ichneumia albicauda (G. Cuv.) et le Édeogale nigri- pes (Puch.). M. 0. Thomas n'avait malheureusement pas eu l'occasion d'examiner ie type de cetterare el intéressante es- pèce, mais on doit regretter aussi que ce savant zoologiste s’en soit tenu exclusivement à la courte diagnose prélimi- (1) Proc. Zool. Soc. Lond., p. 450, 1894. (2) Matschie, Süugeth. deutsch. Ost. Afrik., p. 80 et 146, 1895. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 307 naire publiée par Pucheran, et il est hors de doute qu'il aurait accepté sans conteste la validité du 2. nigripes, comme genre et comme espèce, si le second travail de Pucheran n'avait pas échappé à ses recherches bibliographiques. La question du rang générique de ce Carnassier, restée pendante depuis cette époque, réclamait une solution que les matériaux d’études rassemblés par nos voyageurs me mettent à même de fournir aujourd'hui. En effet le Muséum possède actuellement trois exemplaires de PB. nigripes. Le type de l'espèce, rapporté du Gabon en 1854 par Aubry-Lecomte, est un jeune individu qui, pendant près de trente ans, fut le seul spécimen connu. En 1883, M. Masson réussit à en capturer un autre exemplaire du même âge et un peu plus petit que l'individu tvpe, mais présentant exac- tement les mêmes particularités de coloration (a). Enfin, le (troisième exemplaire (à) provient du dernier voyage de, M. J. Dybowski; c’est la dépouille d’un sujet adulte, préparée en peau plate par les indigènes du pays montagneux d’'Eschiras près des sources de la rivière Ngounié, mais cependant, _ dans un état d’intégrité très salisfaisant, et sans aucune mu- tilation de la Lête ni des membres. Le pelage de ce dernier spécimen diffère, à certains égards, de celui du jeune (a) pour la description duquel je ne puis mieux faire que de rappe- ler 1c1 la diagnose rigoureusement exacte et très délaillée que Pucheran a donnée du type de l’espèce : « Cet individu est blanchâtre sur la tête, le dessus et les côtés du cou, le dos, les flancs et la face externe de la partie la plus supérieure des membres. Le menton est de la même teinte, maïs à la partie la plus postérieure du devant du cou se manifeste une teinte noirâtre, qui, devenant de plus en plus prononcée, occupe le thorax et la région voisine de l’abdomen ; le reste des parties inférieures est du blanchâtre des flancs, mais plus nuancé de grisâtre. Les pattes sont d’un noir uniforme en dehors comme en dedans; sur le membre antérieur, cette couleur occupe bien plus d’espace que sur le postérieur. Les ongles sont d’un brun corné. Les 308 E. DE POUSARGUES. oreilles sont, sur leurs deux faces, couvertes de poils sem- blables par leur couleur à ceux du reste du corps; ceux de la queue sont d’un blanc un peu jaunâtre. « Le pelage est ras sur le chanfrein el les côtés du museau où 1l est plus terne: à peine plus allongé sur le devant du cou, 11 le devient plus sur le dessus de la tête et du cou, sur les autres parlies du corps el surtout sur le prolongement caudal. Sur les flancs, le milieu du dos, les poils laineux sont d'uncendré jaunâtre ; les soyeux, d’un blanc un peu plus rous- sâtre à leur base, présentent ensuite un anneau noir, mais ils deviennent blanchâtres dans le reste de leur étendue. Sur ceux de la queue, doués de la même structure, règne sans mélange la couleur blanche. » Chez l'individu adulte (6), la queue est identique, pour la coloration et la longueur des poils, à celle des jeunes. Sur le reste du corps, le pelage présente aussi les mêmes leintes, réparlies de la même façon, mais il est beaucoup plus court, et partout aussi ras que sur la tête et le museau; aussi avais-je cru, au premier abord, que celte dépouille avait subi la préparation que les fourreurs pratiquent sur cerlaines peaux employées dans le commerce, et qu’elle avait été éjarrée. Il n’en est rien; les deux sortes de poils existent en parfaite intégrité sur le dos et les flancs. Le sous-poil laineux et feutré est excessivement court, et forme un véritable velours d’un blanc jaunâtre pur. Quant aux poils soyeux et brillants, ils offrent les annulations (blanc roussâtre, noir et blanc) signalées par Pucheran, et ne dif- fèrent de ceux des jeunes que par l'extrême brièveté de la pointe terminale blanche, ce qui rend plus apparent et visi- ble extérieurement l'anneau noir médian. De celte disposition résulte une coloration-générale d’un gris argenté, qui diffère quelque peu de la teinte blanchissante qui marque les jeunes. Cette robe à pelage ras est-elle spéciale aux adultes, ou n'est-elle pas plutôt une livrée de saison commune à tous les âges? C'est là une question que je ne puis résoudre à l’aide d'un seul spécimen. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 309 Il est incontestable que la livrée des B. nigripes jeunes ressemble, à s'y méprendre, à celle que revêtent certaines variélés de l’Zchneumia albicauda, celle, entre autres, décrite par [. Geoffroy Saint-Hilaire comme 7. «lbescens; mais ilne faut voir dans cette similitude qu'un simple cas de mimé- Uüsme. L'identification de ces deux espèces est en effet impos- sible, car, de l'avis unanime des habiles taxidermisles du Muséum qui, sur ma demande, en ont minutieusement exa- miné les dépouilles, nos trois spécimens de BP. nigripes sont tétradactyles des quatre membres et, sous ce rapport, présen- tent une parfaite similitude de conformation avec les deux Bdeogale de l'Afrique orientale, B. crassicauda, B .puisa(Pet.), que j'ai pu mettre en parallèle avec eux. Je ne puis, malheu- reusement, fournir à l'appui de cette assertion aucune preuve ostéologique, mais la concordance absolue des caractères extérieurs constatée sur trois individus suffil, Je crois, pour entraîner la certitude. On ne saurait cependant reprocher à M. O. Thomas son hypothèse de la pentadactylie du B. ni- gripes, toute gratuite qu'elle soit; à l’époque où le savant anglais fit paraître son Mémoire sur les Mangoustes afri- caines, le type du B. nigripes seul était connu, et je n’hé- site pas à reconnaître, avec cet auteur, l'extrême et fréquente caducité des doigt internes chez les Âerpestes, soit que cette mutilation survienne du vivant de l'animal, soit que l’on doive l’attribuer plus souvent à un accident de préparation pendant la mise en peau. On ne peut donc, sur ce point, se prononcer avec trop de circonspeclion, maisil serait in- vraisemblable et hors de toute probabilité de supposer que pareil cas se soit présenté pour les quatre membres de trois dépouilles préparées par des mains différentes, et cela, sans qu'il subsiste la moindre trace de mutilation. Du reste, les particularités que présente la tête osseuse du spécimen type du B. nigripes n'aulorisent pas davantage à assimiler cette espèce à l’Z. albicauda. Pucheran a décrit ce crâne et sa dentition avec un grand luxe de détails, et sur ce point, je renverrai à la description 310 E. DE POUSARGUES, de cet auteur. Je me permettrai seulement de signaler un fait, sur lequel Puchcran m'a semblé trop peu affirmatif, et qui pourrait rester obscur pour les zoologistes qui n’auraient pas l’occasion d'examiner le crâne lui-même. La dentilion, telle qu’elle est décrite par Pucheran, esl bien la première dentition ou dentition de lait qui se lrouve encore tout en- tière en place, sauf la paire médiane des incisives supé- rieures déjà tombées, ce qui permet d’apercevoir les deux dents de remplacement encore assez profondément enfouies dans les alvéoles. De la seconde dentition, on aperçoit aussi les premières molaires M' et M ; celles de la mâchoire infé- rieure, plus précoces, devaient être sur le point de percer la gencive ; pour les supérieures, plus lardives, les pointes de leurs tubercules antérieurs et les bords alvéolaires affleu- rent à peine, et leurs parties postéro-internes sont encore masquées sous une mince lame spongieuse de lissu osseux en voie de dégénérescence et de résorption. Ces quelques détails prouvent surabondamment l'extrême jeunesse de l'animal, et pourtant, la tête osseuse présente déjà un volume et des dimensions relativement considéra- bles. Je regrette de ne pouvoir donner ici la description du crâne de l'adulte, mais il ne sera peut-être pas sans intérêt de faire connaître les mesures que j'ai relevées sur le crâne du jeune type, et de les mettre en parallèle avec les mêmes mensuralions prises sur des crânes de P. puisa, B. cras- sicauda et 1. albicauda adultes. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 311 | Mesures en millimètres. B. nicripss. Type. Tr. jeune. B. puis. Adulte. < [=] E cie nt RE 4T = EE c IcH. ALBIGAUDA. Adulte maxillaires au point le plus postérieur de l’un des condyles occipitaux............ 106 Largeur maximum aux arcades zygoma- RL. PRE a te iron 09 Longueur maximum du palais, de l’avant des prémaxillaires à l'extrémité des pa- LEURS EE PRO ME RER CPR TRE 63 Largeur maximum du palais entre les points où PM+ et M! se touchent par leurs DRE Fopnes....:.....4... 7. 32 Longueur du crâne, de l'avant des pré- Longueur du palais, de l’avant des pré- maxillaires au milieu de la ligne de lar- geur maximum précédente............. 31 32 29 Largeur minimum du palais en arrière des | CL TUTURES ARR RE PRE 11 10 » On peut voir d’après ces mesures, que le crâne du Bdeo- gale nigripes jeune dépasse ceux des deux autres espèces de Bdeogales adultes sur toutes les dimensions, et n’est qu’à peine inférieur comme longueur maximum à celui d’un I. albicauda parvenu à son maximum de développement, ce qui permet de supposer que le crâne du B. nigripes adulte doit lui êlre notablement supérieur. On peut constater en même lemps que les proportions, très différentes entre l'Zchneumia et le Bdeogale nigripes, le sont beaucoup moins si l’on compare les Bdeogales entre eux, et cette particularité ne fait qu'accentuer les affinités génériques du B. nigripes ; que par exemple, la tête de l’Z. a/bicauda est moins massive et plus étroite relativement à sa longueur, que la dispro- portion est bien plus sensible encore pour le palais, car en établissant le rapport de la longueur à la largeur, on au- long. 6 — -, celte même le mire relation pour les Bdeogales pouvant être représentée par . rait pour l’Zchneunua albicauda L'examen des dimensions du corps, chez ces divers types 518 E. DE POUSARGUES., d'Herpestidés, nous conduit à des conclusions analogues. J'ai réuni dans le tableau suivant les mesures des trois B.nigripes jeunes et adulte de la collection du Muséum, celles des P. crassicauda et puisa, telles qu’elles ont été re- levées par Peters sur les deux types, qui, à en juger par les figures que cet auteur à données de leur dentilion, de- vaient être plus qu’adultes, enfin la taille maximum donnée par M. O Thomas pour l’Z. albicauda, et les mesures que j'ai prises sur le spécimen bien adulte de cette même espèce, dont j'ai donné dans le tableau précédent les dimensions du crâne. BDEOGALE (1) ICHN. ALBICAUDA | ——— NIGRIPES S k Êl L — 2 2 E Mesures en centimètres. S Be |lLS |A À à © on DE = E = ee) fe OT == Fe SSII NAT TON MORE < < 2 À La SE [Sr © : © = En =» en | [er << DEA > Lo > En A | ml Dir PEL MR ENTER En Longueur de la tête et du corps en suivant Maicourhures tr Rp hisal 501.42 | 70 | 40 15046648 longueur ide a queue: 74% 200 35 | 28 | 50 | 30 | 25 139,5! 41 NS Longueur du pied (sans les griffes).| 8,2| 7,5| 13 | 8,4| 7,7111,5| 12 Les prévisions de Pucheran se trouvent donc parfaitement justifiées par les faits : le P. nigripes ne le cède pas, comme taille, aux plus fortes Mangoustes, et se distingue générique- ment des Aerpestes, et en particulier de l’/chneumia albr- cauda, par ses membres tétradactyles. Ses fortes dimensions suffisent à le distinguer spécifiquement des autres Bdeoga- les, comme l’indiquait brièvement l’épithète maor employée par Pucheran dans sa notice préliminaire. Sans tenir compte du plus ou moins de longueur des poils suivant l’âge ou les saisons, la robe du B. nigrines paraît présenter assez de (1) Pour le B. puisa et le B. crassicauda, la mesure du pied est celle don- née par Peters, moins la longueur du plus grand ongle, sait 95 — 11 —84 pour le B. crassicauda et 90 —13—77 pour le B. puisa. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 313 constance dans sa coloration, à en juger du moins par les {rois exemplaires des collections du Muséum, et se trouve exactement décrile par ces quelques mots de Pucheran : « Corpore albescente, cauda candidissima, artubus nigris. » Toulefois, je ne voudrais pas affirmer d’une manière abso- lue que cette livrée ne soit sujelte à aucun changement dans ses teintes, étant donnée l'extrême variabilité que l’on observe sous ce rapport, non seulement dans Île genre si voisin des [chneumies, mais dans le genre Pdeogale lui- même. Comme je l’ai signalé au courant de cet article, cer- laines variétés de l’Ichneumie revêtent exactement la même robe que le B. nigripes, tel TZ. albescens ([. Geoff.) ; le même exemple nous est offert par une espèce de Bdeogale, et celte circonstance n’est pas sans atténuer beaucoup la valeur des caractères tirés de la coloration du pelage, au point de vue spécifique, caractères qui conservent toule leur imporlance en tant que communs à deux espèces appartenant à des genres différents, mais perdent de leur poids pour des types congénériques. Le Muséum possède en effet un curieux spécimen de Bdeogale (1), envoyé récemment par les RR. PP. de la Mission du Saint-Esprit à Mandéra sur le Ouami, dans le district d'Usaramo, près de la côte de Zanzibar. Il est impossible de ne pas rapporter ce sujet à l'espèce B. crassicauda (Pet.). La taille de cet individu très adulte et les dimensions de son crâne sont celles du type de Peters: le corps répond pour la coloration à la diagnose, « ex nigro canescens, pils nigre et albide annulatis, » avec une légère pré- dominance des anneaux blancs ; mais la queue est complète- ment blanche comme celle du B. nigripes et de certaines formes de l’'Ichneumie. A l'inverse de ce que Peters avait observé, c’est le blanc et non le noir qui devient envahis- sant de la base vers l'extrémité de la queue, et qui subsiste seul sur ses trois quarts terminaux. Cette variation n'avait (1) Ce spécimen est celui que M. Matschie signale dans-Säugeth. deutsch. Ost. Afrik, p. 146, comme synonyme du Galeriscus Jacksoni (Thos.). 314 E. DE POUSARGUES. pas encore été signalée chez les Bdeogales, dont les repré- sentants connus des diverses espèces sont du reste peu nombreux encore ; elle est extrêmement suggestive, car elle prouve qu'il existe entre les Ichneumies et les Bdeogales des analogies aussi étroiles sous le rapport du pelage que de la dentition, et autorise à supposer pour ces deux genres une série de variations de couleur absolument parallèles et ho- mologues, mais ne présentant aucune importance spécifique. Partant de ces faits, il serait possible d'identifier les deux espèces si étroitement apparentées, PB. crassicauda et PB. puisa ; ce dernier correspondrait dans le genre Bdeogale à la forme Z. /oempo dans le genre /chneumia, et l’autre à la forme Z. albescens. Cette hypothèse n'a contre elle que les différences dans les proportions de la queue chez les deux espèces, mais trouvera peut-être sa confirmation lorsque l’on sera en possession de nombreux spécimens de ces Herpes- tidés de l’Afrique orientale. Le PB. nigripes n'a élé jusqu’à présent observé qu’au Ga- bon, et les trois exemplaires du Muséum de Paris sont, je crois, les seuls représentants connus de l'espèce; à moins qu'il ne faille réellement rapporter à ce type un tout jeune spécimen pris dansledistrict du Duque de Bragança (Angola), déterminé d'abord comme tel par M. Barboza du Bocage (1), mais que cet auteur, d'accord avec M. O0. Thomas (2), consi- dère actuellement comme Z. albicauda. Ce sujet ne devrait-1l pas plutôt être rapporté au genre Cynictis, comme semble- raient le prouver sa provenance (3) et la pentadactylie, constatée seulement aux membres antérieurs? (1) Barboza du Bocage, Proc. Zool. Soc. London, p. 402, 1865. (2) O. Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p. 77 (note), 1882. (3) Plus récemment, en 1889, dans sa Faune d’Angola, M.'Barboza signale deux femelles d’un Herpestes qu'il distingue de l’1. albicauda, mais laisse indéterminé tout en l’indiquant avec doute en synonymie comme B. nigripes. Ces deux exemplaires sont {étradactyles à tous les membres, et leur pelage plus court que chez l’'I. albicauda, en diffère également par sa coloration « uniforme tiquetée de blanc sur un fond noirâtre ». Ces nouveaux détails, qui m'avaient échappé tout d’abord, concordent singulièrement avec ceux que je viens d'exposer au sujet du B. nigripes adulte, et confirment la par- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 9319 GENRE CROSSARCHUS 53. CROSSARCHUS ZEBRA. (Rüpp.) Herpestes zebra. Rüppel. N. Wirb. Abyss., p. 30, pl. IX, fig. 2, et pl. X, fig. 1, 1835. . Herpestes leucostethicus. Fitz. et Heugl. S. B. Akad. Wien. Abth. I, p. 561, 1866. Herpestes gothneh. Fitz. et Heugl. S. B. Akad. Wien. Abth. I, p. 560, 1866. Crossarchus zebra. O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 89, 1882. —. O0. Thomas. — p. 6, 1858. + — De Pousargues. N. Arch. Mus. Paris, 3° série, t. VI, p- 131, 1894. jeune. M. de Brazza, 1885. Congo francais. a. Œ b. O c. © adulte. M.J. Dybowski, 19 mars 1892. | Pasta EEE MEL SON Œ i e d: NE \ rivière Kemo. ee, — — 42 mai 1882. D Découvert en 1835 par Rüppell près des bords de la mer Rouge, dans le district côtier de Massaouah, cet Herpestidé à lèvre supérieure non fendue el à dos rayé transversalement avail jusqu'ici été considéré comme spécial à l’Abyssinie, et sa présence signalée par Emin-Pacha à Monbuttu, dans la partie Nord-Est du bassin du Congo, avait été jugée par M. O. Thomas comme très probablement due à un irans- port artificiel de quelques représentants de cette espèce d’un versant du district de Ladosurl’autre. Étant données l’extrème proximité de ces deux régions, et l’habitude qu'ont les indi- gènes de garder des Mangoustes captives à l’état de semi- domesticité, l'interprétation du savant zoologiste anglais était très acceptable, mais elle ne saurait valoir, lorsqu'il s’agit de points aussi éloignés du Lado et du Ouadelaï que le sont les contrées visitées successivement par MM. de Brazza et J. Dybowski. L'existence du C. zebra dans l’Oubangui et le Congo français ne peut s'expliquer que par une migration faite indépendance générique et spécifique de ces Herpestidés. Il faut en déduire également la présence certaine de cette espèce au Sud du Congo dans l’Angola. (Humbe, Caconda.) 316 E. DE POUSARGUES. el une dispersion naturelles et spontanées de ces animaux vers l'Ouest, à travers l'Afrique équatoriale. Le C. zebra ne doit donc plus compter comme espèce ex- clusivement abyssinienne ; son aire de répartition s'étend au Nord du Congo suivant une direction (E.-N.-E.) (0.-S.-0) d’une côle à l'autre, depuis la mer Rouge jusqu'à l'Atlantique. Tels sont les faits que j’avaisexposés dans un précédent tra- vail, mais sur lesquels j'ai cru utile d’insister de nouveau. Les cinq spécimens de l'Ouest africain présentent les mêmes caractères que les types abyssins. La teinte générale ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 317 du dessus du corps est brun tiqueté de gris jaunâtre, el les bandes claires transversales du dos sont étroites, unico- lores, el d’un jaune pâle sans aucune trace de roux. Le pe- lage de la face inférieure du corps présente une teinte rousse bien accusée chez les individus adultes c,d,e, et nettement AFRIQUE ÉQUATORIALE Le DUT Er eos st: AFRIQUE GENRES OCCIDENTALE Re PR cer More Ne ORIENTALE dust du Nice Entre Congo et = Iger. B.|B. puisa. BDEOGALE U.1B. nigripes. (Pet.) (PunBB Erasst- | act | , C.|C. penicil- | ar | | PA de | | é R.|R. Melleri. RHINOGALE | | (Gr.) FA | M.|C. obscurus. 1 NCzebra OPA CNrasciatus: (F.Cuv.) (1) (Rüpp.) (Desm.) CROSSARCHUS MAR ES LUN Aer un sit G.|C. gambia-|D.IC. Dybows-|Ft|C.somalicus. nus. (Og.) kii. (Pous.) (Thos.) S.|S. tetraduc- ne lyla.(Schr.) (1) Un spécimen de la collection d'Emin-Pacha a été rapporté avec doute à cette espèce, par M. O0. Thomas. Si cette hypothèse venait à être confirmée, il faudrait étendre l'aire d'habitat du C. obscurus jusqu'aux dernières limites N.-E. du bassin du Congo. (?M. séparée, sur les côlés du cou, de la teinte grise supérieure. Chez l’un de ces derniers (4), on trouve sur la poitrine et se prolongeant entre les membres antérieurs une tache longi- tudinale d’un blanc pur. Ces caractères. ne laissent aucun doute sur l'identité spé- 318 Ë. DE POUSARGUES. cifique de ces individus, et permettent de les distinguer de l'espèce représentative propre à l'Afrique orientale et australe, le C. fasciatus, qui remonte le long de la côte oc- cidentale jusqu'aux provinces portugaises de l’Angola. 54. CrossarcHus DYBOwWSKII. (NOV. Sp.) Crossarchus Dybowskü. De Pousargues. Bull. Soc. Zool. de France, t. XVII, p. 51, 4893. — — De Pousargues. N. Arch. Mus. Paris, p. 124, pl. KL, t. VI, 1894. a. © adulte. M. J. Dybowski, 1° mars 1892. IF'ete — 2 mars 1892. c. œ adulte-vivux. — 12 mars 1892.[ Poste de la Mission sur la d. çf adulte. — 4er juin 1892. rivière Kemo. INOGES — — ROUE — 25 juin 1892. , Ce pygmée du genre Crossarque est intermédiaire pour la taille entre ses congénères et les Æelogale, les plus petits représentants de la famille des Herpestidés. Comme pelage, c'est du Crossarchus obscurus (F. Cuv.) qu’il se rapproche le plus, et il semble n'être qu’une réduction de cette dernière espèce. Sa robe en effet ne présente aucune zébrure; sur le dessus et les côtés de la tête et du cou jusqu'entre les épau- les, elle est d’une teinte noire très finement pointillée de blanc grisâtre et passe au brun plus largement tiquelé de roux jaunâtre sur les épaules, les flancs, le dos, le haut de la face externe des membres et la queue. Le reste des extré- mités est garni de poils plus courts, brillants, non annelés et d'un noir parfait. Sur la face inférieure du corps, le pe- lage est assez clairsemé et d’un roux grisâtre. Pour la forme et les dimensions relatives des dents, le C. Dybowskn offre également des affinités étroites avec le C. obscurus ; il s’éloi- gne au contraire beaucoup de cette espèce, pour se rappro- cher du C. fasciatus (Desm.) par la faible longueur et la lar- geur relativement considérable de la voûte palatine. La taille maximum que peut atteindre le C. Dybowskn est de 33 cen- timètres pour la tête et le corps, et 18 pour la queue. Cet exposé rapide suffit pour donner une idée de ce nouveau ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 319 Crossarque et de sa parfaite indépendance spécifique. Ces renseignements peuvent du reste être complétés à l’aide de la description plus délaillée et de la figure que j'ai publiée récemment dans les Nouvelles Archives du Muséum. FAMILLE DES FÉLIDÉS GENRE FELIS 55. FELIS CALIGATA. (Temm.) Lynx botté. Bruce. Voyage, vol. V, p. 173, pl. XXX. Felis caligata. Temminck. Monograph. de Mamm., t. I, p. 123, 1827. — — Smuts. Enumer. Mamm. capens., p. 30, 1832. — — Peters. Reise n. Mossambique, p. 127, 1852. — cafra. Elliot. Monogr. of Felidæ, pl. XXXI, 1883. — culigata. O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 6, 1888. a. Fe jeune. M. J. Dÿbowski, 6 mai 1892. } Poste de la Mission sur la ri- _ — 9 mai 1892. vière Kemo. La livrée de ces deux jeunes spécimens (1) participe des caractères que Temminck attribue, d’une part au F. mani- _ culata, de l’autre au 7. caliqata : « L'occiput, la nuque, le dos, la face externe des mem- bres et la queue sont d’un cendré jaunâtre nuancé de fauve et de noir, chaque poil étant annelé de ces différentes tein- tes. C'est par la réunion des poils à pointes noires que sont produites sur l’occiput et la nuque sept ou huit fines bandes noires arquées ; la même cause fait que la ligne moyenne du dos et le dessus de la queue ont une tete sombre, tandis que les flancs et la face externe des quatre extrémités, et le dessous de la queue ont une teinte pâle d’un jaunâtre cen- dré. Deux anneaux noirs sont placés vers la pointe extrême et noire de cette queue. Les moustaches labiales et superci- liaires sont blanches, mais les plus courtes ont une teinte brune. Le museau, le devant du cou, la poitrine et les autres parties inférieures sont d’un blanc pur, mais la poitrine est (1) Ces deux sujets de même taille et très probablement jumeaux mesu- rent 36 centimètres pour la tête et le corps, et 19 pour la queue, 320 EE. DE POUSARGUES. faiblement nuancée de fauve. Au-dessus des yeux une tache blanche, séparée par une ligne moyenne fauve. Une bande étroite couleur d’ocre va de l'angle postérieur des yeux s'a- boutir au-dessous des oreilles. La plante des pieds et la par- tie postérieure du métacarpe et du métatarse ont une teinte noire lustrée. La face externe des pieds de devant porte quatre ou cinq pelites bandes transversales d’un brun noi- râtre et la face interne deux grandes taches noires. Cinq ou six petites bandes d’une teinte noirâtre sont disposées en anneaux sur les cuisses. » | Ces détails, empruntés textuellement de la description du [". maniculata donnée par Temminck, s'appliquent rigoureu- sement à nos deux individus, mais je dois y ajouter quel- ques particularités qui augmentent encore leur ressemblance avec le Chat ganté. Une seconde ligne couleur d’ocre, parallèle à celle qui part de l’angle postérieur de l’œil, naît du milieu de la joue et vient se perdre comme la première au-dessous de l'oreille. Deux autres bandes similaires étroites, également de couleur ocre pâle, traversent la base inférieure du cou. Ces caractè- res correspondent exactement à la description et à la figure du F. maniculata {ype données par Crelzschmar, « collo an- tico albo, lineis ochraceis duobus cincto » (1). Les deux spéci- mens qui nous occupent, ont les flancs zébrés transversale- ment de 8 bandes brunes assez accusées. Ces ornements, comme on le sait, s’observent principalement chez les jeunes, ils persistent parfois jusqu à la maturité, surtout chez les femelles, mais le plus souvent disparaissent avec les progrès de l’âge. Comme je lai dit, ces deux jeunes Chats se rappro- chent par d’autres caractères du F. caligata (Tem.). On re- trouve en effet au-dessus des yeux les « taches cendrées et rousses » signalées par Temminck, el, détail plus important, les oreilles, blanches en dedans, sont en dehors d’un roux vif (1) Cretzschmar, Atlas de Rüppell. Mammifères, p. 1, pl. T, 1826. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 921 et terminées par un petit pinceau de poils brunâtres. Cretz- schmar et Temminck nous apprennent au contraire que chez le Chat ganté, F. maniculata, les oreilles sont grises en dehors et ne portent pas de pinceau terminal. « Die Ohren sind auswending grau, inwendiq weiss und ohne Büschel.» Temminck fait également intervenir la taille comme carac- ère différentiel entre le Chat ganté et le Chat botté, celui-ci serail plus grand, celui-là plus petit que le Chat sauvage. N'ayant à ma disposilion que deux spécimens très jeunes, ce terme de comparaison m'a manqué, et en adoptant le nom spécifique créé par Temminck, j'ai eu surtout égard au mode de coloralion des oreilles auquel le savant hollandais attribue une grande importance, et qu'il regarde comme un caractère exclusif du F. cahigqata (1). On ne peut méconnaître cependant les nombreux {rails communs que présentent les livrées du F. caligata et F. maniculata, et de l'avis d’un grand nombre de zoologistes, les quelques différences que je viens de signaler n'ont pas la valeur que leur avait accor- dée Temminck. Quelques auteurs vont même plus loin, et ne considèrent les formes maniculata et caligata que comme deux des nombreuses variétés d’un seul et même type spé- clfique primordial. Ce type, Felis cafra (Desm.) (2), suivant la loi de priorité pour le nom spécifique, se serait répandu à travers toute l'Afrique depuis l’Algérie jusqu’au Cap. Au cours de cette dispersion, dont il est difficile de préciser le centre, la lailleet la coloration du pelage de ce Félin auraient subi des modifications variées, en raison même de la diver- sité que présentent les nombreusesrégions du continent afri- cain sous le rapport du régime climatérique, de la nature et de la configuration du sol; mais ses proportions seraient restées immuables, et quelques bandes et taches de la livrée, tantôt les unes, tantôl les autres, auraient conservé assez de fixité (4) C’est aussi l'opinion de Smuts qui écrivait, au sujet de la couleur rousse des oreilles : « Hæc videtur omnino esse constans ac characteristica nola ». (2) Desmarest. Mammalogie (Suppl.). Espèce 837, p. 540, 1822. ANN. SC. NAT. ZOOL. , in, 21 329 E. DE POUSARGUES. pour permettre de reconnaître dans chaque variété, tel ou tel trait caractéristique du type unique et primordial dont elles dériveraient toutes. Des races locales se seraient ainsi constituées, marquées de caractères spéciaux présentant une certaine constance. Toutefois, le fait étant admis de la descendance d’un type souche, on pouvait prévoir certaines formes de transition et s'attendre à trouver, sur un même in- dividu, un mélange de caractères spéciaux à sa race et de particularités propres aux variétés circonvoisines. Tel est le cas pour les deux spécimens de la région de l’'Oubangui ; et ainsi s'expliquent l'extrême ressemblance etles nombreux ca- ractères communsentre le F. maniculata et le F'. cahigata, dont les aires d'habitat coïncident sur une assez grande étendue. . Suivant Temminck et Smuts, le Felis caligata est extrème- ment abondant au Cap, et remonte le long de la côte orien- tale d'Afrique jusqu'en Égypte. Peters signale en effet ce Félin sur les bords du Zambèze à Tette, et plus au Nord, nous le retrouvons en Abyssinie, lieu de provenance du type de l'espèce, le Lynx botté de Bruce. Les spécimens recueillis par Emin-Pacha dans le distict de Monbuttu, et par M. J. Dy- bowski dans la région de l'Oubangui, mettent aussi en évi- dence la migration du Felis caligata vers les régions occi- dentales de l'Afrique équatoriale. : 56. FeLis cHRysOTHRIX. (Tem.) Felis aurata. Temminck. Monographies de Mammalogie, t. I, p. 420, 1827. — chrysothriæ. Temminck. — t. ED: 201, 182% — celidogaster. — — t. 1, p. 140, 1827. — calybeata. H. Smith. Griff. Anim. Kingd., vol. IT, p. 474, fig., 1827. — neglecta. Gray. Ann. and Magaz. natur. hist., I, p. 27, 1838. — rutila. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. London, p. 130, 18#2. — aurata. Sclater. Proc. Zool. Soc. London, p. 312, pl. XXVII, 1873. — chrysothrix. Elliot. Monograph. of Felidæ, pl. XXV, 1883. — neglecta. Noack. Zoologische Jahrbucher, vol. IV, System., p. 162, 1889. a. O M.J. Dybowski, 21 juillet 1891. Brazzaville (peau plate mutilée, pré- parée par les indigènes de la Sanga). b. O M. J. Dybowski, mars 1894 (peau plate préparée par les indigènes du pays des Eschiras). ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 323 Le fond de la robe chez ces deux spécimens est d'un « gris légèrement teint de rougeätre, » et répond, par cette coloration, à la forme Æ. celidogaster de Temminck; ces mêmes dépouilles se rapprochent au contraire du type F. aurata = chrysothrix du même auleur, par l'absence com- plète, sur les parties supérieures, de laches plus foncées que le reste du corps. Ce n’est que vers le milieu des flancs que commencent à percer vaguement de nombreuses petites maculatures d’un « brun couleur chocolat » qui augmentent de dimensions, et se détachent de plus en plus neltement sur le fond de plus en plus clair à mesure que l’on s'éloigne de la ligne médiane supérieure. Sur le dessous du corps et le haut de la face interne des membres, ces taches très foncées forment, ici des bandes peu étendues, là de larges plages arrondies qui ressortent vivement sur le fond blanc du pelage. La queue, sans aucune tache ni annula- tion, se rapporte également au type chrysothrir. Sa face su- périeure, de même teinte que le dos, est marquée le long de la ligne médiane d’une étroite bande d'un brun noirâtre, plus foncée que la couleur dominante du pelage, et qui vient se perdre dans la tache noire apicale. La plus grande de ces peaux (4) mesure 82 centimètres pour la tête et le corps, et 38 pour la queue. Le Felis chrysothrix n'avait été signalé jusqu'ici d’une manière certaine que le long des côtes de la Guinée supé- rieure; suivant Temminck, c’est dans le pays des Achan- tis qu'on le trouve le plus fréquemment. Mais la présence de ce Félin dans le Gabon et le Congo françaisne saurait plus actuellement être mise en doute; ce fait avancé par M. Noack, à propos d’une dépouille de F. neglecta achetée aux nègres de Banana, se trouve ici pleinement confirmé. Suivant M. Sclater, cette même espèce se rencontrerait aussi au Sud du Congo dans les possessions portugaises de l’Angola; il est à noter toutefois que cette assertion n’est basée que sur l'examen d'une seule peau plate, fai- sant partie d’une collection, rassemblée à Bembe par M. J. Monteiro, et que M. Barboza du Bocage n'indique pas cette espèce dans sa Mammalogie d'Angola. VI ORDRE. — RONGEURS TRIBU DES SCIUROMORPHES FAMILLE DES ANOMALURIDÉS GENRE ANOMALURUS 51. ANOMALURUS FRASERI. (Wath.) Anomalurus Fraseri. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. London, p. 124, 1852. — Derbyanus. Gray. Ann. of natural hist., X, p. 262, 1842. —_ squamicaudatus. Schinz. Mammalia, p. 58, 1844. — Fraseri. Fraser. Zool. typica. Texte et planche XXII, 1849. — Beldeni. Du Chaillu. Proc. Boston Soc. nat. hist., VII, p. 303, 1860. — Fraseri. Alston. Proc. Zool. Soc. London, p. 88-95, 1875. — — Huet. Nouv. Archives du Muséum, 2° série, t. VI, p. 281, 1884. — chrysophænus. A. Dubois. Bull. Soc. zool. France, t. XIIT, p. 23, 1888. — chrysophænus. Barboza du Bocage. Journ. Sc. math. phys. na- tur. Lisboa. 2° série, n°5, ID. MR a © adulte. M. Marche, 28 décembre 1875. Samkitta-Cyôoué. b, G'adulte. M. Dybowski, janvier 1892. Bangui. e. © adulte. M. Lecomte, mai 1894. Bords du Quillou. d. © fœtus à terme (en alcool). M. Lecomte, mai 1894. Bords du Quillou. Le spécimen (4) est le même dont M. Huet, dans son mé- moire sur le genre Anomalurus, a déjà signalé les parti- cularités de pelage dans les termes suivants : «Chez cette femelle adulte, le dessus de la tête, à partir du bout du nez, est gris foncé; les lèvres, les côtés du nez, le tour des yeux, la base supérieure des oreilles, ainsi que les joues el la gorge sont bruns, mais la tache blanche de la base inférieure de l'oreille, n'existe pas chez ce sujet : elle est cependant un peu indiquée par quelques poils d'un ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 9329 brun grisâlre; le cou en dessus ainsi que le dos sont roux marron lerne, la portion lombaire, les parachutes, les membres antérieurs el poslérieurs sont plus sombres, la pointe des poils étant plus foncée ; la partie inférieure du corps est blanc gris bleuté; les avant-bras, ainsi que les parachutes et les jambes, sont garnis de poils bruns, clair- semés ; le liers postérieur de la queue est brun, la por- lion terminale brun foncé se lermine par un pinceau, les poils s’allongeant de plus en plus vers l'extrémité; on compte 13 écailles gris jaunâtre; les incisives sont colorées en rouge orange. » Cette description s'applique exactement à l'individu mâle (4) chez lequel la tache claire sous-auriculaire est à peine indiquée, tandis qu’elle est au contraire des plus net- tes sur le spécimen (c) et presque en continuité avec les teintes blanches légèrement lavées de jaune qui marquent la poitrine. Chez ce dernier individu, les teintes du dessus du corps, mieux délimitées et plus brillantes, rappellent celles que M. A. Dubois attribue à un sujet provenant de Lan- dana, stalion très voisine du Quillou, et décrit par cet auleur sous le nom de À. chrysophænus. « La nuque et le dos sont d'un brun roux doré, les épaules blanchâtres ; le dessus des membres et la membrane alaire ainsi que le bas du dos sont bruns, mais les poils terminés de cendré. » L’espèce À. -chrysophænus ne diffère de l’Anomalure de Fraser que par l'extrême brièveté de la queue qui ne mesure que 11 centi- mètres, tandis que la longueur moyenne de cet appendice chez l'Anomalurus Fraseri est de 30 centimètres. Mais les détails de coloration consignés par M. A. Dubois dans sa courte diagnose, sont presque textuellement et sans modifi- cation, ceux que les auteurs s'accordent à reconnaître chez l'Anomalurus Fraseri. I est difficile, devant une ressem- blance aussi frappante, de séparer spécifiquement ces deux formes, et les faibles dimensions de la queue du spécimen qui à servi de type au savant conservateur du Musée de Bruxelles, doivent, à mon avis, être considérées comme 326 E. DE POUSARGUES. accidentelles et anormales, ou dues, peut-être, à quelque mulilalion. -Le spécimen (d) esl un fœlus femelle encore muni de son cordon ombilical terminé par un placenta discoïde. Il me- sure 27 centimètres de longueur totale, dont 11 pour la queue. Toute la face supérieure du corps est revêtue de poils très doux, d'un gris brunâtre, assez longs et abondants sur la tête et les épaules, devenant de plus en plus courts et rares à mesure qu on se rapproche des parties poslé- rieures du corps, pour disparaître à peu près complètement de la croupe, de la portion inter-fémorale du parachute, des extrémités des membres et de la queue sauf sa pointe garnie d'un bouquet de long poils noirâtres. Sur le bord antérieur du parachute immédiatement en arrière de la ba- guette carlilagineuse émanant de l’olécrâne, le pelage est déjà très fourni, mais il diffère par sa nature de celui du reste du corps, et consiste en longues soies, d’un noir profond sur leur plus grande étendue, roux à la pointe, très résistantes et en même temps très élastiques, et qui doivent probable- ment jouer un rôle protecteur, et amortir les chocs par leur élasticité. A la face inférieure du corps, la poitrine, le ventre, la face interne des membres et la portion inter-fémorale du palagium sont complètement glabres. Sur les lobes latéraux du parachute on ne trouve que quelques poils roux très clairsemés. Le menton,-la gorge, le dessous du cou jusqu’à la naissance des épaules, sont au contraire abondamment velus et d’un roux ardent. Le parachute est déjà bien déve- loppé et très ample ; j'ai pu sur ce jeune exemplaire, relever très exactement ses lignes d'attache. Les deux lobes anté- rieurs ou prébrachiaux naissent des côtés du cou, et suivent l’arêle antérieure du bras et de l’avant-bras : leur bord libre assez peu étendu rejoint en ligne droite la base interne du poignet, les mouvements d'extension du bras et de l’avant-bras sont, de la sorte, assez étroitement bridés. Chacun des deux lobes latéraux du parachute prend son origine à la base externe du poignet, au même ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 927 niveau que le lobe prébrachial, et s’insère le long de la face postérieure de l’avant-bras et du bras. Il est sous- tendu, dans cette région, par un long stylet cartilagineux renfermé dans son épaisseur, et qui partant de l’olécrâne, se prolonge obliquement en avant et en dehors jusqu’au bord libre du parachute. De l’aisselle au pli de la cuisse, le lobe latéral prend son attache le long des flancs mais à un niveau assez élevé, car, chez le fœtus qui nous occupe, sa ligne d'insertion vers le milieu du tronc et sur sa face dor- sale, n'est séparée de celle du côté opposé que par un in- tervalle de 16 millimètres. De la hanche, le parachute suit le bord supérieur de la cuisse, mais ne tarde pas à s’en écarter pour passer obliquement en dehors du genou qu'il laisse assez dégagé, puis revient longer l’arête antérieure de la jambe, et le côté interne du pied pour se terminer à la face supérieure du doigt interne. Dans sa plus grande lar- geur correspondant au milieu du tronc, chaque lobe laté- ral mesurait déjà 7 centimètres. La portion inter-fémorale du parachute prend naissance de chaque côté à la face externe de l’avant-dernière phalange du cinquième doigt postérieur. De là, sa ligne d'insertion passe sur la face supérieure du pied, puis file en dehors et au-dessus du ta- lon qu’elle laisse complètement libre et revient ensuite longer l’arête postérieure de la jambe et de la cuisse, pour arriver sur le dessus de la base de la queue. Les connexions de cette portion du parachute avec lPappendice caudal ne sont pas directes, mais s'effectuent à l'aide d’une lame membrane verticale perpendiculaire au parachute. Cette lame, qui mesure à peu près 5 millimètres de hauteur maxi- mum, s'insère, d'une part le long de la ligne médiane infé- rieure de la membrane inter-fémorale, d'autre part le long de l'arête supérieure de la queue depuis sa base jusqu’au niveau des dernières écailles sous-caudales, c’est-à-dire, pour le fœtus qui nous occupe, sur une longueur de 5 centimètres. La queue est donc plus dégagée et plus indépendante qu'on ne pourrait le croire au premier abord, et n’est nullement ren- 328 E. DE POUSARGUES. fermée dans l'épaisseur du parachute, à la manière du stylet olécrânien; elle est libre sur la plus grande partie de son pourtour et n’est rattachée à la membrane inter-fémo- rale que par cette sorte de frein assez lâche qui frange son arête dorsale, et se prolonge même en arrière un peu au delà du bord postérieur du palagium. L’envergure totale de la membrane inter-fémorale compte 14 centimètres d'un pied à l’autre, en suivant son bord libre. Les écailles sous-caudales, au nombre de 14, assez peu consistantes encore, sont cependant déjà bien formées et relevées en soc à leur extrémité postérieure. De la base de chacune d'elles, immédiatement sous la pointe redressée de l’écaille précédente, sortent deux soies raides et élastiques, dont la longueur égale celle des écailles. Les tubercules palmaires et plantaires offrent la disposi- tion décrite el figurée par Alston. Aux paltes antérieures on trouve cinq tubercules sous-articulaires des doigts, l’ex- terne petit et arrondi, les autres plus forts et ovalaires, l’interne renforcé sur sa face interne d’une petite excrois- sance cornée, sessile, seul vestige du pouce. Dans la région moyenne de la paume il existe deux petits tubercules ar- rondis, l’un central, l’autre près du bord externe. En arrière de ceux-ci, on remarque deux larges tubercules obliques, très développés, l’externe atteignant presque, en avant, le tubercule moyen externe, et se fusionnant parfois avec lui, comme il y a lieu de le supposer d’après la figure du mémoire de Alston qui ne représente qu’un seul tuber- cule moyen, le central. Aux paltes postérieures, on re- trouve une série transversale de tubercules sous-arliculaires des orteils, mais au nombre de 6, les deux extrêmes assez réduits et punctiformes, les quatre médians oblongs et à peu près égaux; puis, au milieu de la plante, un petit tubercule tout à fait central flanqué de chaque côté d’une large cal- losité sous-tarsienne qui s’étend depuis l'extrémité nue de la plante jusqu’à la base des tubercules sous-articulaires des orteils. Alston signale deux tubercules moyens plantaires ; ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 329 il est probable que sur certains sujels, comme le fœtus qui nous occupe, il y à fusion entre les lubercules médian- externe et postéro-externe, c'est-à-dire une modification inverse de celle que j'ai signalée plus haut pour les tuber- cules palmaires. Mais ce sont là des écarts de faible impor- tance, qui ne dénaturent en rien le plan général tracé par Alston. En arrière des surfaces nues palmaires et plan- taires, il existe une sorte de châtaigne ou pseudo-tuber- cule limité antérieurement par un repli de la peau, d'où s'échappe un bouquet de longues soies élastiques, analogues à celles que J'ai signalées dans l’interstice basilaire des écailles sous-caudales. Cette particularité, peu appréciable chez l'adulte, principalement sur les spécimens desséchés au milieu du pelage qui couvre le dessous des régions car- piennes et tarsiennes, s’observe au contraire avec la plus grande nettelé sur la peau encore glabre du fœtus (c). Un peu au-dessous de l’aisselle on constate déjà la présence de chaque côté de deux mamelles pectorales, très rapprochées l’une de l’autre. Depuis sa découverte à Fernando-Po, l’Anomalurus Fra- sert a été rencontré sur toutes les côtes avoisinant cette île : à Libéria, sur les côtes de la Guinée supérieure, au Cameron, au Gabon et dans tout le Congo français. La limite orientale de son aire de dispersion est encore à fixer, et la station de Bangui (specimen b) est jusqu’à présent le point extrême Est où sa présence ait été signalée. Au Sud, l'Anomalurus Fraseri ne dépasse pas le Congo; du reste, dit M. Barboza du Bocage, aucune des espèces connues de ce genre sin- gulier de l’ordre des Rongeurs, n'a encore élé aperçue sur la rive gauche de ce fleuve dans les possessions portugaises de l’Angola. 320 E. DE POUSARGUES. 58. ANOMALURUS ERYTHRONOTUS. (A. M.-Edw.) Anomalurus erythronotus. A. Milne-Edwards. C. R. Acad. des sciences. Paris, p.111, 4899; — — — Le Naturaliste, I, p. 134, 1879: — — J. Huet. Nouv. Arch. du Muséüm, 2° série, t. VI, p. 285, pl. IX et XXI, 1884. a. ç adulte. De Brazza, 1885. Congo français. Ce spécimen présente sur le dessus du corps, les teintes brillantes du type de l'espèce rapporté du Gabon par Laglaize et décrit par M. A. Milne-Edwards dans les termes suivants : « Cet Anomalure se rapproche par la taille de A. Fraseri, mais 1l est facile de l’en distinguer par ses caractères exté- rieurs. La tête porte en dessus, une large bande longitudi- nale d’une teinte qui rappelle celle de l'Écureuil petit-gris ; une bande noirâtre naissant en arrière des oreilles, entoure celle-ci, et s'étend jusqu’au museau. Les conques auditives sont grandes et entièrement nues. Les joues sont d’un gris plus foncé que le front. La nuque et le dos sont d'une couleur châtain très vif et lustré, due à la teinte de l’extré- milé seule du poil dont la base est ardoisée. Le manteau ainsi formé, est bordé sur les côtés et en arrière par une large zone d’un gris, noirâtre par places, qui occupe la face externe des pattes, les membranes latérales, et toute la région lombaire. Le lobe antérieur du parachute porte des poils foncés et très rudes, qui semblent jouer le rôle d'un revêtement protecteur. Les partiesinférieures sont blanches ; cette teinte se mélange de gris dans la région cervicale et sur la face interne des membres postérieurs. Les ongles sont robustes etenpartie cachés par de longs poils noirs qui s'im- plantent au-dessus d'eux. La queue est grise à sa hase, noire dans le reste de son étendue; les écailles sous-caudales sont fortes. et allongées. » Les affinités de cette espèceavec l'Anomalurus Fraserisont indiscutables, et même très étroites. Chez cette dernière es- pèce, le manteau dorsal brun marron sombre tranche moins ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 331 vivement sur le fond noir fuligineux de la croupe et du pala- gium, mais il n’en existe pas moins une différence bien sensible entre les teintes de ces parties, différence énoncée d’ailleurs par Waterhouse en termes très explicites dans sa description du type de l'espèce : « the fur on the upper parts is sooty black, but, excepting on the membranes, most of the hairs are rather broadly tipped with yellowish rust color ». Sous ce rapport, la figure donnée par Fraser ne peut que donner une idée fausse de la véritable livrée typique de l'A. Fraseri, car elle n'indique aucune différence de colora- lion entre le pelage du dos et celui du patagium, qui sont représentés comme uniformément teintés l’un et l’autre de brun roussâtre. La variélé décrite sous le nom de À. chry- sophænus paraît êlre la forme intermédiaire qui permet de relier entre eux À. Fraseriet À. erythronotus. D'après la diagnose de M. A. Dubois, la nuque et le dos sont d'un brun roux doré, c’est-à-dire moins brillants que chez l'A. ery- thronotus, mais plus vifs que chez l’A. Fraseri; d'autre part chez l’A. chrysophænus, la croupe, le dessus des membres _etla membrane alaire sont bruns comme chez l’A. Fraseri, mais les poils de ces parties, dit M. Dubois, sont terminés de cendré, ce qui constitue un acheminement vers les tein- tes grises marquées de taches noirâtres de la face supé- rieure du parachute et des membres de l'A. erythronotus. D'un autre côté, la teinte brune uniforme du dessus du corps et du parachute chez les sujets figurés par Fraser, présente une concordance singulière avec celle que Peters attribue à son espèce Anomalurus orientalis, et, abstraction faite de la teinte rouillée du pelage du dessous du corps chez cette dernière espèce, on pourrait croire avoir affaire à un A. Fraseri, dont les teintes brun jaunâtre du dos auraient envahi la tête et la face supérieure du parachute. Les affi- nités de ces deux types ont du reste été affirmées récemment par M. O. Thomas (1). Chez l'Anomalurus orientalis, il est * (4) 0. Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p. 446, 1890. 332 ËÉ. DE POUSARGUES. vrai, les dimensions de la queue (300 millimètres) comparées à celles du corps (215) l’emportent légèrement sur celles de l'A. Fraseri : mais cette discordance ne saurait être consi- dérée comme un obstacle sérieux à l'identificalion possible des deux espèces, si l’on tient compte de l’incomplète ma- turité du type de l'A. orientalis auquel se rapportent les mesures ci-dessus, circonstance qui peut influer sur les pro- portions relalives des diverses parlies du corps. Quant à la teinte de rouille de la poitrine et du ventre chez l'A. orienta- lis on la relrouve, suivant Temminck (1), chez cerlains individus d'A. Fraseri dont ie dessous du corps est « plus ou moins roussâtre »; el J'ai signalé plus haut un fœtus de celle même espèce dontle pelage du dessous du couétait d’un roux ardent. Devant ces considérations, on est en droit de se demander s'il ne faut pas regarder l’Anomalurus Fraser: commeune espèceéminemment variable, revêlant, suivantles localités ou sous l'influence de quelque autre agent modifica- teur, des livrées diverses dont les extrêmes seraient, d’une part la forme A. erythronotus à double coloration si nette et si brillante, de l’autre Le Lype À. ortentalis aux teintes fon- dues et à livrée sombre et uniforme; et les intermédiaires, la variété À. chrysophænus et l'Anomalurus Fraseri type. L’aire de répartition de l'espèce unique résultant de celte fusion s’'étendrait à travers tout le continent africain, du Sénégalel des côtes de Guinée (A. Fraseri) à l'embouchure du Congo (A. chrysophænus, A. erythronotus), jusque dans la région des Grands Lacs, Mis Nguru (A. orientalis). Malheureusement cette dernière espèce n’est encore basée que sur un nom- bre trop restreint d'individus (2), et dans l’état actuel de nos connaissances, il serait prématuré de tirer aucune conclu- sion définitive. Cette question ne pourra être tranchée, en \ (1) Temminck, Esquis. 2001. Coles de Guinée, p. 148, 1853. (2) Les seuls spécimens connus de l'Anomalurus orientalis sont : le type de l’espèce, de provenance incertaine, acheté par Fischer dans les rues de Zanzibar, et un second sujet tué à l’état sauvage par Emin-Pachä à Monda, sur le versant oriental des monts Neuru, limitant au Nord le bassin du Ouami, à environ 140 kilomètres de la côte de Zanzibar. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 333 faveur de l’unilé ou de la pluralité spécifique, qu'à l’aide de collections plus importantes et de séries de sujets de diffé- rentes robes rassemblées sur divers points de la zone d’ha- bilat que je viens de signaler. 59. ANOMALURUS BErCRoOFTI. (Fras.) Anomalurus Beecrofti. Fraser. Proc. Zool. Soc. London, p. 17, pl. XXXII, 1852. — laniger. Temminck. Esquis. zool. Côtes Guinée, p. 149, 1 853. — Beecrofti. Alston. Proc. Zool. Soc. London, p. 96, 1875. ;: -— laniger. Alston. — _ -—- Beecrofti. J. Huet. Nouv. Arch. Mus. Paris, 2 série, t. VI, p. 287, pl. XIX et XX, 1884. — Beecrofti. O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 121, 1887. «. © adulte. M. Marche, 28 décembre 1875. Samkitta-Ogôoué. b. S adulte. M. Guiral, 1885. San-Benito. c. cj' adulte. M. Brusseaux, 1890. Forêt de Mayombé. d. © adulte. M. J. Dybowski, 20 janvier 1892. Bangui. Après les descriplions si précises et bien concordantes publiées successivement par Fraser, Temminck, Alston, et les intéressants détails que M. Huet a donnés sur la den- lHilion de cette espèce, je crois inutile de m’y arrêter longue- ment. 11 me suffira de répéter que la nalure duveteuse et frisée du pelage gris jaunâtre des parties supérieures et les teintes d’un roux éclatant du dessous du corps, permettent de distinguer aisément l’'Anomalurus Beecrofti des autres espè- ces du genre, et en particulier de celles dont nous ve- nons de nous occuper précédemment. L'aire d'habitat de l'A. Peecrofli paraît coïncider avec celle de l'A. Fraseri. Découvert à Fernando-Po, il a été signalé ensuite tout le long des côtes du golfe de Guinée, depuis Libéria jusqu’à l'embouchure du Congo. Deux explorateurs anglais, Burton en 1862, et Johnston en 1887, ont capluré des exemplaires de cette espèce dans les montagnes du Cameron jusqu’à une altitude de 7 et 8000 pieds. Dans ces régions élevées, les seuls Mammifères que ces deux voyageurs aient rencontrés sont avec l'Anomalurus Beecrojh, le Mus univittatus (Pet.), le Sciurus lemniscatus (Lec.) et quelques Guibs (Tragelaphus) 394 ._ E. DE POUSARGUES. rares d’ailleurs, difficiles à approcher et dont Johnsion n’a pu malheureusement préciser l'espèce. La limite de disper- sion de l’A. Beecrofti dans l’intérieur de l'Afrique est encore inconnue, et, comme pour l’A. Fraseri, la slation de Bangui (spécimen d) est le point extrême Est jusqu'à présent indiqué. | Une espèce, qui paraît être à l'A. Beecrofh ce que l'A. orientalis de Peters est à l'A. Fraseri, a été récemment décrite par M. 0. Thomas; cette forme représentative, dénommée Anomalurus pusillus (1), a été découverte par Emin-Pacha dans l'Afrique centrale, à Bellima et Tingasi, district de Monbuttu. | FAMILLE DES SCIURIDÉS GENRE XERUS 60. XERUS ERYTHROPUS. (E. Geoîf.) Sciurus erythropus. E. Geoffroy Saint-Hilaire. Catal. Mamm. Mus. nat. Hist. natur., p.178, 1803. — albovittatus. Desmarest (partim.) Nouv. Dict. d'Hist. natur., t.: X, p. 10, 1817, et Mammalogie, 2° partie, p. 338, 545° espèce, 1822. — leucoumbrinus. Rüppell. Neue Wirbelth. z. d. Fauna Abyss. gehôrig, p. 38, 1835-1840. Xerus erythropus ou leucoumbrinus. Temminck. Esq. zool. Guinée, p. 121, 1853. — congicus. Temminck, non Kuhl. Esq. zool. Guinée, p. 125, 1853. — leucoumbrinus. Huet. Nouv. Arch. Mus., 2° série, t. HIT, p. 134, 1880. — congicus. Huet, non Kubhl. Nouv. Arch. Mus., 2° série, t. IE, p. 135, 1880. — erythropus. Jentink. Not. fr. Leyden Mus., vol. IV, p. 43, 1882. a — O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 10, 1888. Sciurus erythropus. Barboza du Bocage. Jorn. Sc. math. phys. natur. Lis- boa, 2° série, n° 5. Extrait, p. 3, 1890. a. © adulte. M. J. Dybowski, 14 décembre 1891. Grande Brousse entre Yàbanda et Mpoko. b.Œ — - 1er mars 1892. } Poste de la mission sur la PAODEUSS — —_ rivière Kemo. d. Q très jeune, — 41 mars 1892. / ; 4) 0. Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p. 8, pl. I, 1888 ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS, 399 Par leur pelage, la brièveté de leurs oreilles, la longueur et la puissance de leurs griffes presque droites, ces quatre spécimens présentent nettement tous les caractères propres au genre Àerus ou Ecureuil fossoyeur. Les poils qui recou- vrent le corps et les membres, très courts et clairsemés surtout à la face inférieure où ils laissent voir la peau, sont rigides, creusés sur leurs deux faces d’un sillon peu profond, et ont la forme d’un fuseau aplati. Sur leur face externe, les poils qui garnissent le dessus du corps (tête, dos et flancs), sont jaune brunâtre, sauf la pointe jaune blanchâtre; la face des poils tournée et appliquée contre la peau est au contraire d’un blanc brillant avec la pointe jaune brunâtre. Au milieu des poils ainsi colorés s’en trouvent d’autres beaucoup moins nombreux, irrégulièrement disséminés, et d’un brun noirâ- tre sur toute leur longueur. Sur les membres, jusqu’à l’extré- mité des doigts, la teinte de la face externe des poils passe au jaune roussâtre. Le long des flancs, à partir de l'épaule jus- qu'à la hanche, court une bande étroite et presque linéaire exclusivement formée de poils d'un blanc pur, dont la teinte brillante tranche fortement sur le reste du pelage. Sur tout le dessous du corps et la face interne des membres, les poils sont également blancs. La queue est longue, bien fournie, aplatie et distique. Les poils qui la garnissent, plus souples que ceux du corps et nullement comprimés, ont la forme de longues soies, d'un brun jaunâtre dans leur moitié ou leur tiers basal, ensuite annelées de blanc et de noir avec la pointe blanche. Chez le jeune exemplaire (d), la portion ter- minale blanche des poils prédomine de beaucoup comme étendue, de telle sorte que la queue paraît presque entière- ment de cette couleur sauf le long de sa portion axile d’un noir brunâtre. Les oreilles, revêtues de quelques poils jaunä- tres, courtes et comme tronquées le long de leur bord, pré- sentent néanmoins des dimensions appréciables. Ce carac- tère, Joint à celui de la teinte rousse de la base des poils de la queue, permet de distinguer de prime abord le Xerus erythro- pus de l’espèce sud-africaine Xerus capensis (Kerr.) ou setosus 330 E. DE POUSARGUES. (Forst.) qui présente exactement la même livrée à bande blanche latérale, mais manque totalement de conque auditive, el dont les poils de la queue ne sont jamais teimtés que de noir et de blanc. D'autre part, chez l'espèce du Cap, le crâne est large et ramassé, les quatre incisives sont constamment blanches, et à la mâchoire supérieure on ne compte jamais que quatre molaires. Chez le Xerus erythropus, au contraire, le crâne est étroit et allongé, les incisives supérieures sont nettement teintées de jaune sur la face antérieure, et les infé- rieures de jaune blanchâtre ; enfin, la mâchoire supé- rieure comple cinq molaires, l’anlérieure petite il est vrai et spiculiforme, mais constamment présente, ainsi que J'ai pu m'en assurer. La présence de cinq molaires à la mâchoire supérieure permet également de distinguer le Xerus erythropus d'autres Écureuils fossoyeurs de l'Afrique orientale, Xerus rulilus (Cretzs.) — fuscus (Huet.) et Xerus flavus (A. M.-Edw.), qui n'en ont que quatre, et dont la livrée assez semblable comme nature de poils et comme {einte gé- nérale à celle du À. erythropus, ne présente jamais de ligne latérale blanche. Quant à l'Écureuil fossoyeur de Barbarie, Xerus gelulus (Gessn.), qui lui possède cinq molaires supé- rieures, ses Incisives supérieures sont sillonnées, sa bande blanche latérale est plus large, et ses poils moins rudes que chez les autres espèces du genre ne sont pas cannelés. S'ap- puyant sur ces caractères et sur celui de la curvature plus forte des griffes, M. Jenlink refuse même à cetle espèce une place parmi les Xerus, pour la ranger dans le genre Sciurus proprement dit, à côté du Sc. congicus (Kuhl.). Le Xerus erythropus, esisans contredit l’Écureuil fossoyeur dont l’aire de distribution est la plus étendue. On le ren- contre avec un pelage sombre, X'erus congicus (Tem.), le long des côtes de Guinée, depuis la Gambie et Sierra-Leone jusqu'au Benin, et avec des teintes plus rousses, Xerus ery- thropus (E. Geof.), depuis le Niger jusqu’à l'embouchure du Congo. L'espèce ne paraît pas franchir ce dernier fleuve, et la localité la plus australe où elle ait été signalée par M. Bar- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 337 boza du Bocage, est Chinchoxo sur la côte de Loango. Des rives de l'Atlantique, le Xerus erylhropus se propage vers l'Est à travers le Soudan, le bassin du Tchad, l'Afrique équatoriale et le Niam-Niam jusque dans le Kordofan, le Sen- naar et l'Abyssinie (Rüppell), et se rencontre encore très communément sur les bords du lac Albert-Nyanza (Emin- Pacha). Dans ces régions orientales, comme dans l'Ouest africain, l'espèce revêt deux livrées bien distinctes, complè- tement indépendantes des changements de saison, ainsi que l’a observé M. O. Thomas, mais présentant une étroite con- nexion avec la nature du sol. Les spécimens d’Abyssinie, rap- porte Rüppell, ont un pelage sombre : au con{raire, ceux du Sennaar et du Kordofan ont une robe uniformément teintée de jaune paille clair ou livrée désertique, Xerus leucoumbri- nus (Rüppell); mais ces deux variétés conservent toujours comme caractères communs, la bande blanche latérale, et des proportions équivalentes. Dans l'Est de l'Afrique, le Xerus erythropus, vit côte à côte avec son congénère, X'erus ruti- lus (Cretzs.) = fuscus (Huet) ; mais cette dernière espèce ne paraîil pas s étendre très loin vers l'Ouest, et reste cantonnée dans le bassin du Haut-Nil. Le Xerus erylhropus est donc le seul Écureuil fossoyeur que l’on rencontre dans l'Ouest de l'Afrique. C’est en effet par méprise que les types de l'inté- ressante espèce Xerus flavus décrile en 1867 par M. A. Milne- Edwards (1), et remarquable par sa large tache dorsale d’un jaune pur, ont été indiqués comme originaires du Gabon, d'où ils auraient été rapportés en 1852 par le capitaine de vaisseau M. Guillain. Il paraissait assez inexplicable que, depuis cette époque, aucun autre explorateur n'ait pu se procurer de dépouilles de cette espèce sur les côtes occiden- tales d'Afrique pourtant si visitées, tandis qu'en 1881, M. Ré- voil en rapportait de son voyage aux Comalis plusieurs exemplaires exactement semblables aux lypes décrits par M. A. Milne-Edwards. Mais ce problème vient d'être (1) A. Milne-Edwards, Description de quelques nouvelles espèces d'Écu- reuils de l’ancien Continent. (Rev. et Mag. de Zoolog., p. 249, 1867.) ANN. SC. NAT. ZOOL. ie 22 338 E. DE POUSARGUES. complètement résolu par M. Oustalet qui, à laide de documents d’une authenticité indéniable, a démontré la complète inexactitude de la provenance indiquée pour la collection du capitaine Guillain. Dans cette collection figuraient également des Oiseaux, parmi lesquels plu- sieurs espèces appartenant exclusivement à la faune de l'Afrique orientale, et portant même sur leurs étiquettes des indications de localités situées sur la côte des Comalis. « EL en effet, écrit M. Oustalet, en nous reportant à la relation que M. Guillain a publiée de son voyage dans son ouvrage ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 339 intitulé : Documents sur l'histoire, la géographie et le com- merce de l'Afrique orientale, nous voyons que le brick Ducouédic, commandé par M. Guillain, effectua en 1847 et 1848, une croisière sur les côtes orientales d'Afrique, qu'il toucha ou relächa à l’île Bourbon, aux Seychelles, à Zanzibar, SCIUROMORPHES RÉGIONS MU rie ANOMALURUS XERUS AFRIQUE G.[X. getulus. (Gessn.) NORD | 2 e PAS Pet (TemA E 32 = S Ex T A A. Beecrofti. (Fras.) 8 A: 2) EL © |; A. Fraseri. (Wat.) LE nr One te el Eù EVE = S | IF Ma erythronotus. (A. M.- ES ne Edw.) | lé © | 21R.1A. fulgens. (Gr.) Nan | 8 El \ 6 LB: |A. pusillus. (Thos.) | | Ë F?| A. orientalis. (Pet.) D.IX. rutilus. (Cretzschm.) = F°|A. cinereus. (Thos.) DiIX. flavus. (A. M.-Edw.) & . AFRIQUE s | ; 1 ae X.IX. capensis. (Kerr.) à Mombas, à Socotra et, sur la côte Est du Comal, à Ras- Hafoun et à Galouin, d’où une excursion fut faite à Guelidi. On est donc en droit d'admettre, je dirais même d'affirmer que le type du Xerus flavus n’a pas élé pris au Gabon, mais dans l'Afrique orientale, et probablement à Guelidi ou à Ras-Hafoun dans le pays des Comalis Medjourtines. Ainsi 340 | E. DE POUSARGUES, s'explique l'identité de pelage qu'il présente avec les Écu- reuils capturés par M. Révoil en 1881, précisément dans la même contrée... (1) ». Ce point dûment éclairci, on peut remarquer que les divers représentants de l'intéressante famille des Écureuils fos- soyeurs, marquent pour ainsi dire les quatre points cardi- naux du continent africain. Uneespèce, Xerus getulus (Gessn.), se trouve confinée dans l'extrême Nord (Elats Barbaresques), et une autre, Xerus capensis (Kerr.), dans l'extrême Sud et plus particulièrement dans le Sud-Ouest (pays des Hotten- tots jusqu'au Damara). Au centre nous trouvons, à l'Est le Xerus flavus (À. M.-Edw.) exclusivement localisé dans le pays des Comalis, à l'Ouest le Xerus erythropus (E. Geof.) seul représentant du genre sur les côtes de la Guinée et du Congo, mais disséminé à travers tout le Soudan, et s’avançant vers l'Est jusque dans le bassin du Haut-Nil et le Nord de la région des Lacs, contrées qui forment la zone d'habitat de la cinquième espèce, Xerus rutilus (Crelzs.), interposée entre les deux précédentes. En un mot, trois espè- ces intertropicales dont deux orientales et une occidentale, et deux subtropicales, l’une australe, l’autre septentrionale. GENRE SCIURUS 61. SCIURUS STANGERI. (Wath.) Sciurus Slangeri. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. London, p. 127, 1842. — = Fraser. Zool. typica, pl. XXIIT, 1849. — caniceps. Temminck. Esquis. zool. Côtes Guinée, p. 127, 1853. — Nordhoffi. Du Chaillu. Proc. Boston Soc. nat. hist., p. 363, 1860. — eborivorus. — = p. 363, 1860. — Subalbidus. — — p. 365, 1860. — calliurus. Buchholz. (W. Peters.) Monatsb. d. kôn. Preuss. Akad. der Wissen. Berlin, p. 707, 1874. — Temmincki. Jentink. Not. fr. Leyden Museum, vol. IT, p. 65, 1881. — Stangeri. Jentink. — vol. IV, p. 6. 1882: a. jeune. M. Guiral, 1885. San-Benito. b. © adulte. = be el c. ' adulte. — _ De (1) E. Oustalet, Les Mammiféres et les Oiseaux d'Obock et du pays des Çoma- lis (Mém. Soc. Zool. de France, t. VII, 17e partie, p. 75. 1894. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 341 d. 3 adulte. M. de Brazza, 1885. Congo français. e. © adulte. M. J. Dybowski, 23 mai 1891. Sortie de la forêt de Mayumbé. f. Œ adulte. — = g. g' adulte. —— 17 novembre 1891. Bangui. h. S adulte. — 25 novembre 1891 _ i. çf adulte. — 30 novembre 1891 — J. © adulte. —— — == k. © adulte. — 3 décembre 1891 — . q adulte. — > janvier 1892. Pays des Ouaddas. Ce géant des Écureuils africains le cède à peine, pour les dimensions, aux grandes espèces de l'Inde archipélagique et continentale, Sc. bicolor (Sparrm.), Sc. giganteus (M. Clell.), Sc. maximus (Gm.). Il mesure en moyenne de 730 à 750 mil- limètres de longueur lotale, dont 400 à 420 pour la queue. Sa tête est haute, large el massive, son museau court, sa queue large et touffue; ses oreilles sont petites, et ses mem- bres longs et robustes. Sa livrée varie notablement suivant les saisons. Ce fait fut signalé par Temminck dès 1853 ; cependant le célèbre zoologiste hollandais crut devoir l’ap- puyer, ou plutôt l’infirmer, par une dénominalion spécifique nouvelle (Sc. caniceps) ; la description du Sc. Stangeri de Waterhouse élant à son avis #op succincte, et la figure publiée par Fraser trop peu soignée pour pouvoir servir de quide. Gel exemple fut malheureusement suivi plus tard par d’autres auteurs, comme on peul s’en rendre compte par la longue synonymie de cette espèce. Des nombreux exemplaires re- cueillis par nos voyageurs français, et principalement par M. Dybowski, deux seulement étaient en pelage presque par- fait à l'époque de leur capture (fin de mai 1891). Chez ces deux individus {e, /) de sexe différent, le pelage du dessus du corps est noir abondamment tiqueté de roux intense sur le dos, les flancs, la face externe des membres postérieurs, et la portion basale de la queue, de blanc pur sur le dessus de la lête, les joues et la face externe des membres antérieurs. La gorge, la poitrine et le devant des épaules sont blancs. Une bande de même couleur sépare les teintes sombres des flancs du pelage roux sale clairsemé du ventre et de la face 342 E. DE POUSARGUES. interne des membres. Sur les deux tiers proximaux de la queue, les poils sont marqués de larges anneaux allernative- ment noir et roux ardent, et leur pointe est aussi de celte dernière couleur. Sur le tiers distal de la queue la teinte rousse fait place au blanc pur. Les spécimens pris en novem- bre et décembre (9, 2, 1, j, Æ) ont au contraire la queue en- tière annelée de noir et de blanc pur sans aucune trace de roux. Chez eux, la croupe et les membres postérieurs sont fortement lavés de roux, assez vif chez les individus g et À; le dos et les flancs sont noir tiqueté de jaune blanchâtre, la face externe des membres antérieurs, le dessus des épau-. les et du cou, la tête et les joues, sont finement poinüllés de blanc pur sur un fond noir. À la face inférieure du corps, le pelage-très clairsemé est noir à la racine, jaune sale à la pointe et séparé de celui des flancs par une bande étroite d’un noir grisâtre tiqueté de blanc. Sur l'individu (d) de même pelage que les précédents, cette bande latérale est d’un noir pur et profond. Chez lespécimen (/) pris en janvier, également identique aux précédents pour la coloration du corps, la queue n’est distinctement annelée de noir et de blanc pur que dans son üiers basal; sur le reste de son étendue, les annulations claires et sombres se fondent les unes dans les autres en passant graduellement du blanc lavé de roux jaunâire au brun noirâtre. Tous ces exemplaires sans aucune exception, présentent immédiatement en arrière de la base de l’oreille une tache cunéiforme et comme une mèche d’un roux plus ou moins ardent, bordée inférieurement de noir. Cette marque distinc- tive, d’une constance remarquable, signalée d’ailleurs par Waterhouse et Gray (1), constitue un critérium excellent pour la délermination de l'espèce. | Le Sciurus Stangeri se rencontre communément dans l'Ouest africain, à une certaine distance des côtes de l’Atlan- tique, depuis la République de Libéria jusqu’à l'embouchure (4) Gray, Proc. Zool. Soc. London, p. 276, 1861. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 343 du Congo. Il devient excessivement rare sur la rive gauche de ce fleuve, et, suivant M. Barboza du Bocage (1), on ne l’a jamais observé au Sud du Coanza. Il se répand au contraire par toute l’Afrique centrale jusqu’à l'extrême limite Nord- Est du bassin du Congo : d’après Emin-Pacha il est extrê- mement commun dans le district de Monbuttu et connu des indigènes sous le nom de Mbonga (2). Du Chaïllu rapporte que le Sciurus Stangeri est très friand d'ivoire, et recherche les défenses d’éléphant fraichement tombées n'ayant pas encore perdu leur matière animale ; de là le nom d’eborivo- rus que lui avait donné cet explorateur. Ce fait, écrit M.Jen- tink, concorde parfaitement avec les habitudes observées chez d’autres Rongeurs avides de substance animale dure. Les naturels de l'Ouest africain affirment que les Porcs-épics de ces régions recherchent comme le Sc. Stangeri les dé- fenses d’éléphant, et en Europe, notre Écureuil commun s'attaque paraît-il aux bois des Cervidés, comme le prouve une ramure conservée à Stuttgard, portant des traces mani- festes des incisives de ce Rongeur (3). 62. SciuRUS EBI1. (Tem.) Sciurus ebii. Temminck. Esquiss. Zool. Côtes Guinée, p. 129, 1853. . — Wilsoni. Du Chaïllu. Proc. Boston Soc. nat. hist., vol. VIT, p. 364, 1860. — Wilsoni. Gray. Proc. Zool. Soc. London, p. 276, 1861. — ebü. Jentink. Not. fr. Leyden Mus., vol. IV, p. 10, 1882. a. œ adulte. M. Marche, 24 décembre 1875. Samkitta-Ogooué. b. Œ adulte. M. Dybowski, 31 janvier 1894. Cette-Cama. Ces deux spécimens, capturés à peu près dans la même saison, diffèrent néanmoins sensiblement de robe. Sur l’exemplaire (a) en changement de pelage, le dessus du corps, depuis le bout du museau jusqu'au milieu du dos, est couvert de poils courts, nettement annelés de noir et de (4) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. nat. Lisboa, 2° série, n° 5, p. 1, 1890. (2) O0. Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p.8, 1888. (3) Jentink, loc. cit. 344 E. DE POUSARGUES. jaune roussâtre ; mais, sur toute la région lombaire et pré- caudale, les poils beaucoup plus longs, indistinctement barrés de brun noirâire, sont envahis par la teinte rousse rutilante extrêmement vive que l’on remarque sur la face externe des membres et sur les joues. À Ja face inférieure du corps, les poils très clairsemés sont uniformément colorés, de la racine à l'extrémité, de jaune orange passant au jaune clair autour des parties sexuelles et au roux à la face interne des membres. Les oreilles sont bien développées et à peine garnies sur leurs deux faces de poils complètement roux. La queue plus courte que la tête et le corps, si l’on ne tient pas compte de la touffe terminale, parlicipe de la teinte rutilante du croupion sur le dessus de sa portion basale. Sur le reste de sa moilié proximale, les poils sont marqués de trois anneaux d’un noir brunâtre alternant avec des bandes d'un blanc jaunâtre, et leur pointe est de cette dernière cou- leur. À mesure qu’on se rapproche de l'extrémité, le nombre des annulations diminue et celles de nuance claire pren- nent une coloration roux jaunâtre ; enfin, les poils de la toulfe terminale sont entièrement d’un noir roussâtre, plus pâle à leur extrémité. Le spécimen (6) présente une livrée plus homogène; il ressemble au précédent pour le mode de coloration de la queue et de la face inférieure du corps et pour les teintes rutilantes des joues et des membres. Mais, la région lombaire, le croupion et la base de la queue ont leur pelage de même nature que celui de la région antérieure du corps, et toute la face supérieure, depuis le museau jusqu à la queue, offre une teinte fondamentale noire très régulièrement tiquelée de jaune roussâtre plus pâle que sur la région antérieure dor- sale de l’exemplaire (a). ; | Sous cette livrée, il est indiscutable que le Sc. ebu rappelle certains individus de l’espèce Sc. Stangeri, dont les pattes postérieures prennent à certaines époques une coloration rousse assez intense ; mais il sera toujours aisé de distinguer ces deux espèces aux caractères suivants : ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 945 Au point de vue de la forme, le Sc. ebii, de plus petite {aille que le Sc. Stangeri, à la tête plus longue mais moins large, moins haute et moins massive, le museau beaucoup plus allongé, les oreilles plus développées, les membres proportionnellement plus forts et plus longs, et la queue plus courte. Sous le rapport de la coloration, l’Écureuil ébien n'offre jamais la tache postauriculaire rousse bordée de noir, caractéristique du Sc. Stangeri. Chez ce dernier, si les pattes postérieures, à certaines époques, prennent une teinte rousse bien prononcée, cette coloration n’est jamais aussi vive que chez le Sc. ebu, et n'intéresse n1 la face externe des membres antérieurs, ni les joues, ni le dessus de la tête. La queue, plus longue chez le Sc. Stangeri, est plus distinctement annelée, et ses bandes claires sont, soit d’un roux ardent, soit d’un blanc tout à fait pur. Enfin, sur la face inférieure du corps, les poils sont blancs à la gorge, roux sur le ventre à certaines époques ; dans d’autres saisons ils sont noirâtres à la racine, blanc jaunâtre ou jaune rous- sâtre au sommet. À ces caractères extérieurs de différen- clation viennent s’en adjoindre d’autres plus importants tirés des dimensions et de la forme toute particulière de la tèle osseuse chez le Sc. eba. Sa longueur, suivant la ligne basale et surtout suivant la ligne sagittale, dépasse sensi- blement celle du crâne du Sc. Stangeri. Celte différence est due à l’allongement de l’interpariétal et des os nasaux et prémaxillaires, plus développés que chez aucun autre Seiu- ridé africain. Les os frontaux sont plus étroits au niveau des orbites que chez le Sc. Stangeri, moins pincés, par contre, immédiatement en arrière de la base des apophyses postorbitaires, lesquelles sont reportées très loin en arrière. Les arcades zygomaliques sont plus grêles et moins ar- quées, et leur amorce temporale est beaucoup plus faible. Toutes ces différences de dimensions et de forme entre les diverses parties constituantes du dessus du crâne chez le Sc. ebi et le Sc. Slangeri, entraînent nécessairement dans l'aspect général une dissemblance qui frappe au premier 346 E. DE POUSARGUES. coup d'æil; et, si l’on établit le rapport de la longueur à la largeur maximum du crâne aux arcades zygomatiques, on trouve qu'il est représenté environ par 3/5 pour le Sc. Stan- gert, par 2/5 chez le Sc. ebi. Les dissemblances ne sont pas moindres pour la face inférieure du crâne. Chez le Sc. ebu, les bulles auditives sont faibles, et leur grand axe longitudinal est inférieur de 4 millimètres à celui du Sc. Stangeri. Chez ce dernier, le palais dépasse à peine en arrière le bord pos- iérieur des dernières molaires ; il est au contraire plus reculé chez le Sc. ebii et intermédiaire comme élongation à ce que l'on observe d’une part chez les Xerus, de l’autre chez les Sciurus. Dans l'espèce Sc. ebü, la série des molaires est moins large et plus courte, et séparée du bord postérieur des incisives par un diastema plus considérable que M. Jentink ne l'indique pour les spécimens types de Temminck. Étant donné le développement des prémaxillaires chéz le Sc. ebu, les trous incisifs sont, comme on pouvait s’y attendre, plus longs que chez le Sc. Stangeri, mais, chez cette dernière espèce, ces orifices n'intéressent que les préxamillaires, tandis que chez le Sc. ebii ils entament les maxillaires sur une longueur d'environ 3 millimèlres en arrière de la suture, leur longueur totale atteignant à peu près 6 millimètres. Enfin les trous sous-orbitaires, chez l’Écureuil ébien, sont moins largement ouverts et plus canaliculés. Les molaires inférieures sont également plus faibles et séparées des inci- sives par un plus long espace que chez le Sc. Siangeri. La mandibule du Sc. ebi, du reste, est moins puissante et moins élevée, caractères d'autant plus frappants qu’elle est plus longue. Les incisives non sillonnées sont longues et grêles, sen- siblement moins larges que chez le Sc. Stangenri, et for- tement comprimées latéralement, surtout les inférieures qui sont réduites à l’état de véritables lames.—Il est à remarquer que, chez le Sc. ebü, les sutures crâniennes demeurent visi- bles jusque dans un âge avancé, à l'encontre de ce qui s’observe chez la plupart des espèces du genre Sciurus, où ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 347 la suture pariéto-frontale (1), la plus longue à s’oblitérer, disparaît même souvent de très bonne heure, toute la calotte crânienne paraissant n'être formée que d’un seul os depuis la suture interpariélo-occipitale jusqu'à la suture fronto- nasale. Sur le crâne du spécimen (6) parfaitement adulte, comme on pourra en juger d’après ses dimensions inscrites dans le tableau suivant, toutes les sutures de la face supé- rieure sont visibles, ce qui ma permis de relever très exactement les dimensions des diverses pièces osseuses qu'elles limitent. Il n’est pas jusqu’à la suture interfrontale, ordinairement de disparition précoce, qui ne soit très nelte- ment tracée sur toute sa longueur. Sur le crâne du spé- cimen (4), dont malheureusement toute la portion postérieure manque, la sulure interfrontale est oblitérée, mais la suture interpariétale se distingue très aisément. Le Sciurus ebu est encore d'une rareté extrême. Suivant M. Jentink, outre Îes deux types découverts par Pel à Dabocrom sur la Côte d'Or, on n’en connaît que deux autres spécimens au British Museum, provenant du pays des Achantis (Aubinn.), et enfin le type du Sciurus Wilsoni de Du Chaillu, capturé par cet explorateur près des sources de l’'Ovenga, c’est-à-dire au voisinage des régions visitées depuis par MM. Marche et Dybowski, dans une station intermédiaire aux deux localités (Samkitta, Cette-Cama) d'où proviennent les deux exemplaires du Muséum de Paris. (4) « Frontals ankylosed with parietals. » Alston, On the order Glires, genre Sciurus (Proc. Zool. Soc. London, p. 77, 1876). 348 E. DE POUSARGUES. SCIURUS EBII s Mesures en millimètres. —…— —— | SCIURUS Ga Gb STANGERI Longueur dela fête etudu corps. Ce. 310 310 330 — de la queue sans les poils terminaux.| 260 275 325 — — avec les poils terminaux.| 330 365 400 — du pied:sansiles srnuies LA re. 67 67 69 Hauteur maximum deorellle. "eme .: 20 20 1% Distance de l'extrémilé du nez au bord anté- rieur de d'oreille et ARR 67 63 61 Distance de l'extrémité du nez à l’angle anté- MO Le EU PE RRS ERNRER Le PERPNRR EMEA 33 30 | 28 Distance de l'angle postérieur de l’œil au bord ; | Jhbeniour de l'oreille rs ae ee 20 23 25 Longueur sagittale du crâne en ligne droite, de l'extrémité des os nasaux à la crête occipilale. » 72 66 Longueur des os nasaux (sur la ligne médiane). 22 22,5 17 —— des os frontaux — 30 31 28 — des os pariélaux — » 13 » — de linierpaneétal- ra nr » 10,5 » Largeur du crâne entre les orbites............ 18,5 19 21 —- — en arrière des apophyses | postorbitaires te .8 23 24,5 20 — — en dehors des arcades zy50- HAAIQUES be PARENT 36,9 sl 39 Longueur basale du crâne en ligne droite, de l'extrémité des prémaxillaires au bord anté- rieur du trou oveipitals 7 UE" be ries ha de » D150 56 Longueur totale de la voûte palatine, de l’ex- trémité des prémaxillaires au bord postérieur DO Se nat ee en can Cr OAES SL Axe longitudinal des bulles audilives.......... » 11 15 Distance entre le bord postérieur du palais et le bord antérieur du trou occipital............ » 20 23 Longueur de la série des molaires supérieures. 10 10,5 12 Largeur maximum des molaires supérieures... 3 3 4 Dis tement ee a, à Lee Me NII 7e 20 19,5 16 Distance de l'extrémité des os nasaux à la pointe de l’apophyse post-orbitaire................ 43 4 37 Distance en ligne droite du condyle à l’extré- mité de la symphyse mandibulaire......... 43 » 40 Hauteur du condyle au-dessus de l’angle de la mandibule 27002248 280 ER RES 22 » 2% Hauteur de l’apophyse coronoïde au-dessus du bord inférieur de la mandibule............ » | 1258 Longueur de la série des molaires inférieures. 10,5 11 12,5 Largeur maximum — +? 3 ne, nl 4 HAS Re... LÉ ONU ANR 12e ee a 9,5 ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 349 63. SCIURUS RUFOBRACHIATUS. (Wath.) Sciurus rufobrachiatus. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. London, p. 128, 1842 — rufobrachium. Waterhouse. Ann. and Mag. Nat. History, X, p. 202. 1842. — rufobrachiatus. Fraser. Zoolog. typica, pl. XXIV, 1849. —- muaculatus. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 130, 1853. — rufobrachiatus. Temminck. — D1960, 1899. -— Aubryi. A. M.-Edwards. Rev. et Mag. zoolo., p. 228, 1867. —— rufobrachiatus. Jentink. Not. fr. Leyden Museum, vol. IV, p. 14, 1882. a. œ adulte. M. Guiral, 1885. San Benito. Cet exemplaire est {rès nettement caractérisé. Ses incisives supérieures, d’un rouge orangé, présentent un sillon longi- tudinal bien marqué le long de leur tiers interne. Son pelage sombre présente, sur le dessus du corps et la face externe des membres jusqu'aux extrémilés, un fond noir finement et abondamment tiqueté de jaune. La queue n'offre pas les bandes transversales allernalivement claires et som- bres si bien dessinées chez le Sciurus Stangeri et le Sciurus annulatus (Desm.), son aspect général rappelle celui du dessus du corps el, sur ses deux faces, les poils longs et touffus, sont pluriannelés de noir et de blanc, avec la pointe blanche, sauf pour le pinceau terminal noir. Sur la gorge, la poitrine et le ventre, les poils sont noir grisâlre dans leur moilié basale et roux jaunâtre sur le reste de leur longueur ; mais, à la face interne des quatre membres, ils sont complè- lement d'un roux marron intense dont la nuance rappelle celle du pelage de l'extérieur des pattes du Sciurus pyrrhopus (F. Cuv.). Cette teinte colore également les poils qui fran- gent la face postérieure des bras et des avant-bras, mais s’arrête à celle limite et n'empiète jamais, que je sache, sur leur face externe, comme c’est le cas chez le Sciurus Stangeri pour les membres postérieurs et chez le Sciurus annulatus pour les quatre membres. Chez ces derniers types, du reste, le roux présente des tons de rouille qui diffèrent sensiblement de ceux qui caractérisent le Sciurus rufobra- chiatus. 390 E. DE POUSARGUES. A en juger par l'unique exemplaire ci-dessus mentionné, l'espèce quinous occupe ne doit pas être abondamment repré- sentée dans le Congo français; aussi, sa présence au Sud de ce fleuve indiquée par von Mechow (1) (R. Coango), me parail- elle bien hypothétique. Les côtes de Guinée, depuis le Libéria jusqu'au Cameron et l’embouchure de l’Ogôoué, sont, au contraire, l’habilat de prédilection du Sciurus rufobra- chiatus. De là, ces Écureuils se dispersent à travers le Soudan et l'Afrique centrale, pénèlrent dans le Niam-Niam, où 1ls ont élé signalés en 1883, par Bohndorf, à Semmio et Ndoruma (2), et s’avançent à l'Est jusqu'à Tingasi, dans le district de Monbultu, où Émin-Pacha (3) en a capturé plusieurs spécimens vers la même époque. 64. SCTURUS ANNULATUS. (Desm.) Sciurus annulalus. Desmarest. Mammalogie, 1'° partie, p. 338, 1820. — gambianus. Ogilby. Proc. Zool. Soc. London, p. 105, 1835. — multicolor. Rüppell. Neue Wirbeth. z. d. Faun. von Abyss. gehôrig., p. 38, pl. XIII, 1835 à 1840. — annulatus. Temminck. Esq. zool. côt. Guinée, p. 137, 1853. — bongensis. V. Heuglin. Reise N. O. Afrika, t. IT, p. 59, 1877. — annulatus. Jentink. Not. fr. Leyden Museum, vol. IV, p. 23, 1882. a. ç adulte. M. de Brazza, 2 décembre 1883. Diélé. ERGORÉE _ — — c. O — (en alcool). M. de Brazza, 2 décembre 1883. Diélé d.Œæ — M.J.Dybowski, 20 octobre 1891. Bangui. CR Lt —= 29 octobre 1891. — f.& — -- - - ETC — 15 novembre 1891. — RAGE = 30 novembre 1891. — COUR — — — J. G semi-adulle. — 10 janvier 1892. Poste des Ouaddas. k. Q adulte. — 12 mars 1892. Poste de la Mission sur la Kemo. Chez les 6 spécimens (a- i), la teinte fondamentale du dessus du corps est d’un noir légèrement teinté de brun vers la ligne médiane, el marqué d’un pointillé fin et serré d'un (1) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. nat. Lisboa, 2° série, n° 5, p. 3, 1890. (2) Jentink, Museum des Pays-Bas. Chalon systém. (Mammifères), t. XII, p. 33. 1888, Sciurus rufobrachiatus, exemplaires (s. t.). (3) Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p. 9, 1888. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 391 blanc presque pur, dû aux anneaux clairs sublerminaux des poils. Les oreilles portent un court revêlement de poils gri- sâtres; le dessus des pattes, les joues el l’anneau circumo- culaire sont d'un jaune de rouille. La gorge et la poitrine sont d’un blanc sale; le reste du dessous du corps et de la face interne des membres est coloré de jaune roussâtre. Sur son tiers basal, la queue est tiquetée comme le dos ; dans ses deux derniers tiers, elle présente des bandes alternati- vement noir et jaune roussâtre clair, mais l'extrémité des poils, sur une assez grande longueur, est toujours d’un blanc presque pur. Sur les individus («&, 7), l’un très adulte, l'autre n'ayant atteint que les deux tiers de sa taille, le fond du pelage du dessus du corps est d’un brun sombre, s’éclaircissant à mesure qu'on se rapproche des flancs, et tiqueté de Jaune brillant. La zone circumoculaire, les joues, les oreilles et le dessus de l'extrémité des membres ont pris une teinte d'un roux de rouille intense qui envahit même la face interne des quatre membres chez le jeune mâle (7). Le reste du dessous du corps est d’un blanc jaunâtre sale, plus pur sur la poi- trine et la gorge. La queue n’est que très indislinctement annelée el d’une couleur sombre, due à la prédominance considérable des anneaux noirs, et qui n’a respecté que l'extrême pointe des poils d’un blanc jaunâlre. Quant au sujet femelle (4), capturé sur les bords de la Kemo, par conséquent celui de tous les exemplaires men- lionnés dans la liste ci-dessus, dont la provenance est le plus orientale, sa livrée est de tous points conforme à celle que Rüppell attribue à son espèce Sciurus multicolor, et rappelle plusieurs spécimens provenant d’Abyssinie et donnés au Muséum de Paris en 1858 par Schimper. Ses teintes sont moins heurtées, plus fondues ; le pointillé, d’un jaune pâle, passant au blanc sur les flancs et la face externe des mem- bres postérieurs, Se détache moins vivement sur le fond plus clair du pelage d'un brun uniforme. Tous ces exemplaires, sans distinction de livrée, ont les 32 E. DE POUSARGUES. incisives d’un jaune de miel el complètement lisses. Suivant l’âge, leurs dimensions oscillent, pour la tête et Le corps, entre 260 millimètres (a, c, #) et 210 (7), et pour la queue, y compris la touffe terminale, entre 330 et 270. La femelle (c) conservée dans l'alcool m'a permis de relever exactement le nombre des mamelles, dont on compte trois paires, deux inguinales et une pectorale. Le Sciurus annulatus, actuellement bien connu dans toutes ses variations, occupe une aire de réparlion très vaste qui dessine sur le continent africain une large zone s'étendant de l'Ouest à l'Est, d’une côte à l’autre, à travers tout le Soudan. Suivant Temminck, cet Écureuil est excessivement commun au Sénégal (Sc. gambianus) (0g.) ; on le retrouve dans l’île de Fernando-Po, puis au Gabon et dans le Congo français d'où nos explorateurs l’ont suivi assez loin dans l’intérieur jusqu’au coude de l’Oubangui, région où il paraît pulluler, ainsi que le prouve la magnifique série de spécimens récoltés par MM. de Brazza et Dybowski. Plus avant vers l'Est, Emin-Pacha (1) l’a signalé dans le district de Lado et von Heuglin sur les bords du Bahr-el-Abiad (Sc. bongensis). Ces différents jalons nous amènent jusque dans les contrées de Tigré, d'Abyssinie et de Choa, visitées autrefois par Schimper et plus anciennement par Rüppell qui recueillit les types de son espèce Sc. multicolor dans la vallée de Kulla sur le ver- sant oriental de la chaîne côtière d’Abyssinie. Celle aire immense paraît avoir comme limile Sud-Ouest le fleuve du Congo; M. Barboza du Bocage ne cite pas le Sourus annulatus, dans sa faune mammalogique de l’Angola, mais d'autre part, suivant M. Jentink, ce même Écureuil aurait été vu près des rives du Coanza. Dans l'Afrique orientale, la zone d'habitat du Sciurus annulatus confine, au Sud, à celle d'autres espèces assez voisines, mais bien distinctes, telles que. Sciurus palliatus (Pet), Sciurus mutabilis Pet.) et Sciurus cepapi (A. Smith). (1) O. Thomas, Proc. Zocl. Soc. London, p. 9, 1888. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 909 65. SCIURUS PUNCTATUS. (Tem., Seiurus punctatus. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 138, 1853. — — Jentink. Not. fr. Leyden Museum, vol. IV, p. 21, 1882. _— — Noack. Zool. Jahrbücher., p. 127, pl. IL, fig. 6-8, 1889. — — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. math. phys. natur. Lisboa, 2e série, n°5, p. 2, 1890. | a. x adulte. M. Marche, 6 décembre 1875. Ogôoué.. b. Œ — M. Dybowski, 14 décembre 1891. ) Village de Bangoula, près ct — = TT de Zouli, pays des Da- d.ÿ semi-adulte. — — Jr = koas e. çj adulte. _ 2 février 1894. Cette-Cama. FO: — février 4894. Mayumba. . Cette petite espèce présente une extrême similitude de pelage avec le Sciurus annulatus, et les modifications de sa livrée ont une corrélation remarquable avec celles que nous venons de signaler chez ce dernier type. Chez les spécimens (a, e), le pelage du dessus de la tête et du corps, de la face externe des membres et de la base de la queue est de cou- leur brun noirâtre tiqueté de jaune roussâtre ; chaque poil noir grisâtre à la racine présente ensuite une large bande d’un roux terne, puis un étroit anneau noir et enfin une large zone subterminale d’un jaune brillant plus ou moins rous- sâtre, l'extrême pointe étant noire. Les trois quarts termi- naux de la queue offrent des bandes alternativement noires et rousses, avec l'extrémité des poils blancs, sauf pour le pinceau terminal d’un roux brunâlre. Sur le dessous du corps, les poils longs mais assez clairsemés sont gris à la base et blancs à l'extrémité. Sur l’exemplaire (/), l'anneau subterminal des poils du dessus du corps est d’un jaune très clair et chez les autres individus, particulièrement le jeune mâle (d), ce même anneau légèrement roussâtre sur le dessus de la têle et la région dorsale médiane, passe au blanc pur sur la croupe, les flancs et la face exlerne des membres. Cette livrée noire tiquetée de blane, rappelle à s’y méprendre celle de quelques Mangoustes africaines, entre autres Âerpestes pulverulentus (Wagn.). Quant à la queue, ANN. SC. NAT. ZOOL. : til, 29 394 E. DE POUSARGUES. elle ne difière de celle des exemplaires précédents que par la prédominance de l'extrémité blanche des poils. Malgré les ressemblances que, sous ses différentes livrées, le Sc. punctatus offre avec le Sc. annulatus, il sera toujours aisé de distinguer ces deux espèces à leur taille. Les dimen- sions de la tête et du corps peuvent atteindre 25 centimètres chezleS.annulatus,au contraire, elles n’excèdent jamais 20 à 21 centimètres chez les plus vieux spécimens de $. punctatus. Si d'autre part, chez ces deux types, la queue est plus longue que la tête et le corps, elle est mieux fournie et plus touffue chez le S. annulatus, au contraire étroite et grêle chez le S. punctatus et relativement plus longue. Cette intéressante petite espèce n’a été signalée jusqu'à présent que dans l'Ouest africain, et on la rencontre assez communément toul le long des côtes du golfe de Guinée, depuis Libéria jusqu à Banana, à l'embouchure du Congo. Suivant M. Barboza du Bocage, elle existerait également sur la rive gauche de ce fleuve, dans les possessions portugaises d’Angola, comme le prouve un spécimen du Musée de Lisbonne, envoyé par d’Anchieta de Rio-Cucé près de Caconda ; mais cette asser- lion appuyée sur un fait absolument isolé demanderait confirmation. A l'instar des espèces similaires que nous venons de passer en revue (S. Stangeri, S. rufobrachatus, S.annulatus), le S. punctatus se propage-t-il à travers l’Afri- que centrale jusqu’à l'extrême limite Nord-Est du bassin du Congo, c'est ce qu’on ne peut encore avancer que comme une hypothèse très vraisemblable que semble corro- borer la provenance assez orientale des spécimens (4, c, d) capturés dans la région de l’'Oubangui par près de 18° de longitude à l'Est du méridien de Paris et sur la limite occi- dentale du Niam-Niar. | Les différentes espèces de Sciurus que nous venons de passer successivement en revue, présentent ce caractère commun de n'avoir que quatre molaires à la mâchoire supé- rieure comme à l’inférieure et leur formule dentaire peut être représentée comme il suit : ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 999 Î Ù) 4 il 3 —, G.-, M -{p.m.-,m. 2 = 20. II, C ÿ' à (e m.-,m :)] * (D Chez les types qui nous restent à examiner, Sc. poensis (A. Smith) Sc. pyrrhopus (F. Cuv.) Sc. lemniscatus (Lec.), cette même formule devient : 0 2 3 . M. —, M. — = (e m. -, Im +] X 2 fi > CR c'est-à-dire qu'il existe à la mâchoire supérieure une pré- molaire de plus, très exiguë, de forme aciculaire, placée immédiatement en avant de la série des quatre autres mo- laires homologues de celles que nous ont présentées les espèces précédentes. À ce caractère tiré de la dentition vient s'ajouter, pour les espèces qui vont suivre, une différence très sensible dans la nalure du pelage qui est plus fin, plus doux au toucher, et plus fourni principalement à la face inférieure du corps. Enfin deux d’entre elles, Sc. lemniscatus et Sc. pyrrhopus, ont la robe marquée de bandes dorsales ou latérales alter- nalivement claires et sombres, plus ou moins franchement dessinées, suivant les individus, mais constantes. 2 | CT 66. SciuRus poENsIs. (A. Sm.) Sciurus poensis. À. Smith. South. Afric. Quart. Journ., XI, p. 64, 1830. — musculinus. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée, p. 142, 1853. — subviridescens. Lecomte. Proc. Acad. Philadelphie, p. 11, 1857. — olivaceus. À. M.-Edwards. Rev. et Mag. de zool., p. 228, 1867. — poensis. Jentink. Not. f. Leyden Museum, vol. IV, p. 28, 1882. a. Q semi-adulte. M. J. Dybowski, 29 mai 1891. Forêt de Mayombé. b. G;j' adulte. — 5 mars 1892. Poste de la Mission sur la Kemo. Cette espèce, de taille moyenne, se distingue nettement de tous les Écureuils africains, par sa livrée modeste, d’un gris noirâlre finement tiqueté de jaune roussâtre ou de jaune verdâtre olive. La queue, à peine plus courte que la tête et le corps sans compter les poils lerminaux, mais les 300 E. DE POUSARGUES. dépassant de trois à quatre cenlimètres avec sa touffe api- cale, est identique à la face supérieure du corps comme colo- ration. Au-dessous, elle présente une teinte jaune ochracée assez vive, due à la prédominance des anneaux clairs des poils. Sur Le dessous du corps, les poils sont gris ardoisé à la base, jaune roussâtre clair au sommet. Cette espèce paraît être assez rare au Gabon el dé le Congo français, très commune au contraire tout le long des côtes de la Guinée supérieure. Son aire de dispersion est donc assez restreinte ; elle devient au contraire considérable, si l'on admet, selon l'hypothèse de M. 0. Thomas (1), que lalivrée du Sc. poensis ne représente que le dernier stade d’une série de modifications subies par une seule et même espèce; modi- fications dont l’autre terme extrême serait la forme à bandes dorsales brillantes décrite par M. Reichenow sous le nom de Sciurus Boehmi (2) (Afrique centrale); et les termes moyens, d'abord le Sciurus congicus (3) (Kuhl) = Sc. flaui- vittis (4) (Pet.) (Afrique orientale, Mozambique et Angola.) puis d’autres représentants à bandes de plus en plus indis- tincles, signalés sans dénomination spécifique par M. O. Thomas, mais paraissant se rapporter à deux types très probablement synonymes décrils, l’un sous le nom de Sciurus ochraceus (3) par M. J. Huet (Zanzibar), l’autre. sous le nom de Sciurus Bayont (6) par M. Barboza du Bocage (Angola). Cette hypothèse me parait malheureusement prêter à de sérieuses objections. Pour expliquer en effet celte fusion d'espèces proposée par M. O. Thomas, il faut supposer a priori que l'intensité de coloralion des bandes dorsales est éminemment variable, et que cetle dégradation des teintes peut aller jusqu’à disparition et évanouissement (1) O0. Thomas, Proc. Zool. Soc. of London, p. 9, 1888. | (2) Sciurus Bochmi (Reichenow), Zoolog. Anzeig., p.315, 1886. (3)-Sciurus congicus (Kuhl), Beitrage zur Zoologie, p. 66, 1820. (4) Sciurus flavivittis (Peters), Monatsb. Akad. d. Wissensch. Berlin, p. 274, 1852, et Reise n. Mossambique, p. 128, pl. XXIX, et pl. XXXIT, ie Huet, Nouv. Archiv. du Muséum Par is, Pa 102 pl. VIL fig. 2, 14880. Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. nat. ne 2 série, n° à, p.73, 1890. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 997 complets de tout ornement. Il y a lieu, je crois, d’attri- buer au caractère spécifique tiré de la présence et de l'absence des bandes dorsales, plus d'importance que ne le fait M. O. Thomas. Chez le Scurus pyrrhopus, comme nous le verrons, la bande latérale claire beaucoup moins large et moins nettement circonscrile, persiste néanmoins au milieu des nombreuses modificalions de pelage aux- quelles cette espèce est sujette; c'est la marque qui pré- sente le plus de fixité et le seul critérium qui permette de rattacher la race Sc. pyrrhopus anerythrus à la forme pyrrhopus typique. L'hypothèse émise par M. O. Thomas oblige encore à admettre, ce qui paraît plus improbable, que ces mêmes bandes peuvent se déplacer. Chez le Scivrus Boehmi, comme l’a fait observer avec raison M. Reichenow, el comme on peut s’en convaincre sur la figure donnée par M. Leche sous le nom de Sc. lemniscatus (1), les bandes sont franchement dorsales, et, sans tenir compte des deux lignes noires internes si nettement dessinées, on ne mesure que 15 millimètres d'intervalle entre les deux bandes jaune clair. Chez le Sciurus congicus (Kuhl), non seulement les bandes sombres internes ne sont que peu ou point mar- quées, mais les bandes claires, plus larges que chez le Sciurus Boehmi, sont plutôt latérales et distantes l’une de l’autre de près de 3 centimètres. Les mêmes différences se retrouvent, du reste, dans la position des lignes des côtés de la face. Chez le Sciurus Boehmi, une bande noire, bordée dessus et dessous de jaune brunâtre clair, s'étend du nez à l'oreille en passant par l’æœ1l, et se termine à la base du bord supérieur du pavillon. Chez Le Sc. congicus (Kuhl), on retrouve entre l'œil et l'oreille une bande analogue à peine distincte ; mais, à un niveau plus inférieur, une autre bande sombre beaucoup plus apparente et partant du nez, s'étend le long des joues jusqu à la base de la conque auditive, bien au- dessous de l’œil dont elle est séparée par une large zone (4) W. Leche, Zoolog. Jahrbucher (Systematik.), p. 117, vol. IIL, 1888. ’ 398 E. DE POUSARGUES. d’un blanc jaunâtre. Étant données ces dissemblances bien tranchées, 1l me paraît hasardé d'admettre une identité possible entre ces deux espèces, de taille bien différente d’aiileurs. Par leurs proportions, la teinte fondamentale ochracée de leur pelage et leur mode de répartition géographique, les espèces Sc. ochraceus (Huet) et Sc. Bayonü (Boc.) se ratta- chent d’une manière assez naturelle au Sc. congicus (Kuhl), et ne sont peut-être, comme le pense M. Jentink, que des représentants de cette espèce, en livrée imparfaite. Le Sc. Boehmi offre, au contraire, des affinités plus prochaines avec le Sc. poensis qu'avec les irois espèces précédentes. Le fond du pelage, chez ces deux types, est gris brunâtre olive tiqueté de jaune verdâtre; si le Sc. Boehmi est de taille un peu inférieure, ses proportions du moins sont rigoureuse- ment semblables à celles du Sc. poensis, et, chez ces deux espèces, la queue est sensiblement plus longue que la tête el le corps, ce qui n’est pas le cas pour le Sc. congicus et ses formes dérivées. Enfin, la proximité de leur aire d'habitat (Oubangui, Afrique centrale) est une preuve de plus à ajouter en faveur de leurs affinités. Mais, les stades inter- médiaires manquent entre la livrée uniforme du Sc. poensis et la robe à bandes dorsales si brillantes du Sc. Bocehmi. C’est là une large et profonde lacune qu’il importe de combler avant que l’on puisse se prononcer catégoriquement sur l'identité spécifique de ces deux types, qui, dans l’état actuel de nos connaissances, conservent l’un vis-à-vis de l’autre une indépendance aussi entière que celle que l’on constate pour les mêmes raisons, et que l’on n’a jamais songé à nier, entre le Xerus erythropus (Geoff.) et le Xerus rutilus (Cretzsch.). 67. SCIURUS LEMNISCATUS. (Lec.) Sciurus lemniscatus. Lecomte. Proc. Acad. Philadelphia, p. 14, 1857. — Isabella. Gray. Proc. Zool. Soc. London, p. 180, pl. XXIV, 1862. — Sharpei. Gray. Ann, and Mag. Nat. hist., XII, p. 265, 1873. — Isabella. Huet. Nouv. Archiv. Muséum Paris, 2° série, t. III, p. 154, 1880. — lemniscarus. lentink. Not. fr. Leyden Museum, vol. IV, p. 36, 1882. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 9309 j' adulte. M. Marche, avril 1877. Doumé-Ogôoué. — M. de Brazza, 1885. Congo francais. — (en alcool). M. de Brazza, 1885. Congo francais. — M. Guiral, 1885, San Benito. œ AR Re jar TE EL AQU AQOQQQA OO | — — — (en alcool). M. Thollon, 1889. Franceville. — M. Thollon, 1890. Bacounié, forêt de Mayombé. — M. Brusseaux, 1890. Safo, riv. Moungi. Forêt de Mayombé. — M. Dybowski, 10 mai 1891. Forêt de Mayombé. _— — 2 novembre 1891. Bangui. — — 26 novembre 1891. — — — 5 décembre 1891. — Cetle magnifique série, comprenant quatorze spécimens adultes des deux sexes dont deux conservés dans l'alcool, m'a permis de constater le peu de variations que subit cette espèce. Les quaire bandes noires dorsales présentent leur maximum de largeur et de netteté sur l’exemplaire (7), leur minimum chez l'individu (4), bien qu’elles y soient encore irès apparentes. Quant à la teinte fondamentale du pelage, on trouve tous les intermédiaires entre le brun roux plus ou moins ochracé, et le brun fortement lavé de gris ardoisé. Il est à remarquer que cetle diversité de nuances ne dépend ni du sexe, ni des saisons; mais paraît plutôt résulter de la nature du sol. C’est ainsi que les spécimens (?,7, #), prove- nant de la forêt de Mayombé, ont tous trois une livrée brillante, fortement colorée de roux ochracé, principale- ment sur la têle et la face externe des membres. Cette teinte intéresse même le dessous du corps et la face interne des membres, dont les poils sont jaunes et passent même au roux sur la poitrine, le devant des épaules et les côtés du cou. Pour les individus provenant du Gabon et du bassin de l'Ogôoué (a-h), les couleurs du dessus de la tête et du corps sont celles des exemplaires précédents, quoique moins vives, mais toute la face inférieure du corps est d’un blanc pur, ou d'un gris cendré bleuâlre. Cette dernière teinte, qui se remarque même sur la face externe des membres postérieurs des sujets & et #, devient plus envahissante chez les trois derniers exemplaires (/, m,n) provenant de la région de 300 E. DE POUSARGUES, l'Oubangui, et dont la livrée est entièrement d’un gris bleu d’ardoise faiblement tiqueté sur le dessus du corps de jaune olive pâle. Les poils de Ja queue seuls ont conservé lets anneaux noirs et jaune d’ocre intense. | Le Scurus lemmscatus parait être cantonné, mais très abondant, dans cette portion de l'Afrique comprise entre l’em- bouchure du Niger et celle du Congo; aucun explorateur ne l’a, jusqu’à présent, signalé sur la rive droite du premier de ces deux fleuves, el un seul individu de cette espèce, suivant Peters, aurait été capturé au Sud du Congo par von Mechow sur les bords du Coango (1). C’est dire que la présence du Sciurus lemniscatus dans l'Angola resle tout aussi problé- matique que celle du Sciurus punctatus ; et il y a lieu, je crois, d'étendre cette restriction à l'espèce qu'il nous reste à examiner, le Sciurus pyrrhopus (F. Cuv.) signalé également par M. von Mechow sur le Coango. Le Sciurus lemniscatus est un des rares Mammifères que les explorateurs (capitaine Burton) aient rencontrés à une assez grande allitude, et jusqu’à 7000 pieds au-dessus du niveau de la mer dans les montagnes du Cameron. Dans l’intérieur, il s’avance jusque dans la région de l’'Oubangui, comme le prouvent les spé- cimens recueillis par M. Dybowski; plus à l'Est, dans l'Afrique centrale, cet Écureuil est remplacé par une espèce similaire mais bien distincle, plus petite, présentant égale- ment quatre bandes dorsales noires et à pelage jaune ver- dâtre, le Sciurus Boehmi (Rich. Bühm, Emin-Pacha) que M. Leché avait même confondu avec lui, ainsi que nous l’avons vu précédemment. 68. SCIURUS PYRRHOPUS. (F. Cuv.) Sciurus pyrropus. Frédéric Cuvier. Mammifères, vol. IV (texte el planche), 1833. — —— Jentink. Not. from Leyden Mus., vol. IV, p.31, 1882. — pyrrhopus anerythrus. 9. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 447, 1890. (1) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. natur. Lisboa, 2° série, n° 5, p. 2, 1890. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 301 a. © adulte. M. J. Dybowski, 20 octobre 1891. Bangui (var. Sc. pyrrhopus typicus). 6. cf adulte. r J. Dybowski, 29 octobre 1891. Bangui (var. Sc. pyrrhopus anerythrus). e. Œ adulte. J. Dybowski, 20 novembre 1891. Bangui (var. Sc. pyrrhopus typicus). d. Œ adulte. J. Dybowski, 2 décembre 1891. Makorou-Mpoko (var. Sc. pyr- rhopus anerythrus). e. ;' adulte. J. Dybowski, 8 décembre 1891. Grande Brousse entre Mpoko et Yabanda (var. Sc. pyrrhopus anerythrus). f. © adulte. J. Dybowski, 18 décembre 1891. Zouli, pays des Dakoas (var. Sc. pyrrhopus anerythrus). : g. Œ adulte. M. J. Dybowski, 6 mars 1892. Poste de la Mission sur la Kémo (var. Sc. pyrrhopus anerythrus). Les nombreux spécimens de cette espèce recueillis pendant ces derniers temps par différents explorateurs ont permis d'étudier toutes les modifications de pelage qu’elle présente, et grâce aux recherches de plusieurs auteurs, entre autres MM. Huet, Jenlink (1) et Oldfield Thomas, le Seiurus pyr- rhopus (EF. Cu.) est actuellement le type le mieux défini peut- êlre de tous les Sciuridés africains. Tous les zoologistes, en effet, sont d'accord pour ne reconnaître que comme simples variétés, soit individuelles soit locales, du Sc. pyrrhopus, plusieurs espèces, d’abord considérées comme distinctes, mais qui ne diffèrent que par la diffusion plus ou moins grande des teintes rousses qui, dans la forme pyrrhopus tYpique, ne se remarquent que sur la tête et la face externe des quatre membres. C’est ainsi que chez le Sc. leucostigma (Tem.) (2). la teinte rousse plus sombre envahit les flancs si bien que, chez les individus de cette espèce, toute la région latérale du corps (tête, flancs et face externe des membres) présente cette coloration. Chez le Sc. erythrogenys (3) (Waterh.), au contraire, la Lête seule est rousse et les flancs ainsi que la face externe des membres sont de la couleur du dos. Enfin la couleur rousse peut disparaître complètement, et on a alors une quatrième forme décrite récemment par M. O. (1) Pour la synonymie complète de la présente espèce, je renverrai au travail indiqué de M. Jentink. (2) Temminck, Esq. z90log. Côt. de Guinée, p. 133, 1853. (3) Waterhouse, Proc. Zool. Soc. London, p. 129, 1842. 302 E. DE POUSARGUES. Thomas sous le nom de Sciurus pyrrhopus anerythrus. Des sept exemplaires ci-dessus énumérés, deux (a, c), mâle et fe- melle, offrent la distribution typique des teintes du Sc. pyr- rhopus (st. s.) telles qu'elles ont été décrites et figurées par Fr. Cuvier. Le dessus et les côtés de la tête ainsi que la face externe des quatre membres sont colorés de roux ardent. Sur les flancs, comme sur le dos et le cou, le pelage est brun noirâtre tiqueté de jaune olive. La bande lalérale blan- che, légèrement lavée de jaune rougeâtre, est nettement des- sinée, bien que les poils qui la bordent extérieurement ne soient pas plus foncés que ceux du dos. Toute la face infé- rieure du corps, depuis le menton jusqu’à l'anus, est d’un blanc pur. Sur l’exemplaire (c) cette teinte blanche est assez fortement nuancée de roux à la face interne des membres postérieurs. Les cinq autres spécimens (4, d,e, f, q) répondent exacte- ment à la forme Sc. pyrrhopus anerythrus, décrite et figurée par M. O. Thomas. Les couleurs roux rutilant ont disparu de la tête et des membres, et à peine peut-on en recon- naître quelques vestiges bien atténués dans les teintes jaune olivâtre des côtés du museau et de l'extrémité des membres. Le reste du dessus du corps est couvert de poils d’un brun cendré tiqueté de jaune olive pâle. Sur les flancs, la bande claire encore distincte est très vaguement dessinée, sans aucune bordure plus sombre. Enfin le dessous du corps et la face interne des membres sont garnis de poils gris cendré à la base et blanc au sommet, avec une légère nuance orangée sur la région ventrale. Pour tous ces exemplaires, tant Sc. pyrrhopus typicus que Se. pyrrhopus anerythrus, la queue plus courte que la tête et le corps, varie à peine dans ses teintes. Sur le dessus, les poils sont noirs, annelés et terminés de blanc; dessous, ils ont un large anneau basilaire roux, puis une zone noire et l'extrémité blanc jaunâtre. Plusieurs opinions ont été émises pour expliquer ces varialions de pelage, mais il est certain que toule hypothèse de dichroïsme, dépendant du sexe ou de ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 363 la saison doit être écartée. L'examen de la liste précédente permet en effet de constater qu’il y à tantôt similitude, tantôt dissemblance pour les deux sexes, quelle que soit d'ailleurs la saison. Les deux exemplaires («, c) par exemple, de sexe différent, ont même livrée (pyrrhopus typicus), on peut en dire autant des individus (e, f) (pyrrhopus anery- thrus); au contraire les spécimens (4, c) de même sexe diffé- rent de robe. Les quatre exemplaires (4, c, d, e), tous mâles mais de teintes différentes, ont été capturés dans la même saison, entre le 29 octobre et le 8 décembre 1891 et plus particulièrement les deux mâles (c, d) tués à douze jours seu- lement d'intervalle. Enfin, l'individu (9) pris en mars 1892 ne diffère en rien de l’exemplaire (4) de même sexe, tué plus de cinq mois auparavant. Les diverses provenances des spé- cimens recueillis par M.J. Dybowski, et celles d’autres exem- _plaires faisant partie de la collection du Muséum paraissent, au contraire, corroborer l'opinion de M.0.Thomas quiregarde les quatre sous-espèces du Sc. pyrrhopus, non comme des variétés individuelles, mais comme des races géographiques, ayant chacune une aire d'habitat bien délimitée. La variété Sc. pyrrhopus erythrogenys (Waterh.) serait localisée dans l’île de Fernando-Po; le Sc. pyrrhopus leucostigma (Tem.) ne se rencontrerait qu'à l'Ouest etau Nord du golfe Biafra ; le Sc. pyrrhopus typicus (F. Cuv.) signalé d’abord sur les côtes du Congo et du Gabon, se répandrait dans toule l'Afrique centrale jusqu’au district de Monbuttu, enfin le Sciurus pyr- rhopus anerythrus (Thos.) constituerait la variété la plus orientale de l’espèce, et serait cantonnée dans la région des Lacs. Le Muséum ne possède aucun spécimen correspondant comme pelage à la race erythrogenys ; je ne puis donc rien avancer en faveur de l'exactitude de l'habitat fixé pour cette forme, sinon qu'aucun des nombreux exemplaires suivants ne provient de Fernando-Po; preuve toute négative, mais qui . a néanmoins sa valeur. En ce qui concerne la variété leuco- shqgma, je ne puis que confirmer l'opinion du savant mamma- logiste anglais : des quatre spécimens qui figurent dans les 304 E. DE POUSARGUES. galeries de Zoologie du Muséum, trois ont été capturés par M. Laurein en 1854 et 1859 sur les côtes de Guinée, entre le cap des Palmes et le Calabar; le quatrième à teintes plus claires, dû à M. Verreaux (1867), provient des rives du fleuve Casamance dans la Gambie. De la race pyrrhopus typicus nous avons, outre les deux exemplaires (a, c) recueillis à Bangui par M. Dybowski, quatre autres individus montés, dont un très jeune en tous points semblable aux adultes, collectionnés au Gabon par Aubry-Lecomte en 1853 et 1857 et par M. Laglaize en 4879. Seul le spécimen type de F. Cu- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 300 vier fait exception et est indiqué comme provenant de Fernando-Po. Mais devant ce fait absolument isolé, on est en droit de considérer comme très acceptable l'hypothèse émise par M. 0. Thomas : à savoir que ce spécimen ne serait SCIUROMORPHES. (Partim.) om AFRIQUE OUEST AFRIQUE —— mm AFRIQUE AFRIQUE NORD Ouest Eutre EST SUD du Niger. Congo et Niger. A.[S. Aubinni. U.[S. mutabi- (Gr.) I.1S. lemnis-| Ilis.(Pet.) catus. (L.) V.[S.minutus. | (Du Chaiïl).|0.[S. pulliatus. (Pet.) S. cepapi. (A. Smith.) K.|S. congicus. (Kuhl.) BUS: 2 6 (Tem.) F.IS. poensis. (A. Smit.) ee É: à (Cuv.) | e= E.'S. ebii. (Tem.) = S. À Se Water.) Le) u1 | N.I S. Bühmi. (Reich.) R.[S. rufobrachiatus. (Waterh.) D.ÏS. annulatus. (Desm.) pas originaire de Fernando-Po, mais aurait été importé vi- vant dans celte île de la côte opposée. La présence du Sc. pyrrhopus anerythrus à Bangui, dans la vallée de la Kémo et jusque dans le bassin supérieur du Chari, oblige à modifier les limites fixées par M. 0. Thomas pour l'aire de dispersion de celte dernière variété. Si le Sc, 306 E. DE POUSARGUES. pyrrhopus typicus s'avance vers l'Est jusqu’au district de Mon- buttu, il faut admettre d'autre part que la race anerythrus se propage vers l'Ouestjusqu'au coude de l'Oubangui, qu'elle pa-. rait mêmeabondamment représentée dans cetterégion, etque les aires d'habitat de ces deux variétés, l’une orientale, l’autre occidentale, chevauchent l’une sur l’autre et se con- fondent dans leurs porlions extrêmes, l’Afrique centrale. proprement dite leur étant commune. | Pour terminer ce qui a trait au Sciurus pyrrhopus, je dois signaler l'extrême similitude qui existe pour la coloration du corps, entre le Sc. pyrrhopus anerythrus, et un autre type de l'Afrique orientale décrit en 1880 par M. Huet (1) sous lenom de Sciurus ochraceus. Mais, outre que cette espèce présente des différences notables dans le mode de coloration de la queue, sa taille est plus exiguë, el la forme et les dimen- sions bien inférieures de son crâne en font un proche parent du Sciurus congicus (Kuhl.}, auquel il a même été assimilé par M. Jentink (2). TRIBU DES MYOMORPHES FAMILLE DES MYOXIDÉS GENRE MYOXUS 69. Myoxus (ELromys) MurRINUS. (Desm.) Myoxus murinus. Desmarest. Mammalogie (Suppl.), p. 542, 1822. Cap de Bonne-Espérance. — Coupei. F. Cuvier. Mamm., HI, p. 251 (jeune), 1822. Sénégal: — Lalandianus. Schinz. Cuv. Thierr., IV, p. 393. Cap. — erythrobronchus. A. Smith. Zool. Journ., IV, p. 438,-1829. Afrique australe. — murinus. Smuts. Enumer. Mamm. cap., p. 34, 1832. Colonie du Cap Est. — cineraceus. Rüppell. Mus. Senkenberg., Bd. IT, Hft. 2, p. 136, 1842. Port-Natal. — murinus. Peters. Reis. n. Mossamb. (Säugeth.), p. 136, 1852. Rives du Zambèze. (1) Huet, Nouv. Arch. du Muséum, p. 154, pl. 7, fig. 2, 1880. (2) Jentink, Notes fr. Leyden Museum, vol. IV, p. 34, 1882. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 367 Myoæus Coupei. Temminck. Esq. zool. Guinée, p. 151, 1853. Sénégambie et Guinée. Gräphiurus murinus. Alston. Proc. Zool. Soc. London, p. 317, 1875. Afrique Ouest. a 0 M. Guiral, 1885. San Benito. b. semi-adulte. M. J. Dybowski, 28 janvier 1892. Pays des Ouaddas, Haut Oubangui. e. g' semi-adulte. M. J. Dybowski, 10 mai 4892. Poste de la Mission sur la Kemo. Les deux spécimens (4, c) ont le pelage d’un gris cendré légèrement lavé de roux, à peine plus pâle sur le dessous du corps sauf vers le menton et la gorge où 1l est d’un gris blanchâtre clair. Chez l’un (6), la queue présente la même coloration que le dos, et cet individu répond exactement à la figure donnée par Fréd. Cuvier sous le nom de Lérot du Sénégal, Myoxus Coupei. Chez l’exemplaire (c), les poils de la queue sont uniformément d'un jaune roussâlre pâle, et rappellent la coloration signalée par Peters pour les spéci- mens du Mozambique. Du reste, comme l’a reconnu Alston, l'intensité de la nuance rousse du pelage dans cette espèce présente de très grandes variations ; certains individus sont entièrement d'un gris de souris sans aucune trace de roux, tandis que chez d’autres cette dernière teinte devient prédo- minante et envahit la face inférieure du corps, comme c'était le cas pour l'animal examiné par Alston. Entre ces deux extrêmes on trouve tous les intermédiaires, et ces livrées si diverses expliquent les nombreuses coupes spécifiques que j'ai signalées plus haut dans la synonymie, et que Smuts, Peters et Alston ont successivement et très justement inva- idées. Les quatre sections subgénériques Loir (Gls), Lérot (Eliomys), Graphiure (Graphaurus), Muscardin (Muscardinus), introduites dans le genre Myoxus, ne reposent, à vrai dire, que sur des différences assez subtiles observées dans la den- tilion ; et à tout bien considérer, le Muscardin seul, par la structure et les proportions toutes spéciales de ses molaires, mérite réellement cette distinction. 368 E. DE POUSARGUES. Les différences de dentition constatées entre les autres sous-genres n'ont assurément qu'une médiocre importance, et si des zoologistes éminents, tels que Fréd. Cuvier (1), Wag- ner (2), Peters (3)..., sont partisans de ce morcellement sub- générique, d’autres auteurs non moins célèbres, Ogilby (4), Temminck (5)..., rejettent toute subdivision comme un dé- membrement arbitraire du genre Myoxus. Quoi qu'il en soit, aucun des auteurs qui admettent ces distinctions n’a consi- déré l'espèce qui nous occupe comme un Graphiurus. F. Cuvier créateur de ce sous-genre regarde le Myoxus murinus comme un Lérot (Lérot du Sénégal); pour Smuts le Graphiurus capensis (F. Cuv.) et le Myoxus murinus ne sont pas congénériques, et Wagner dans sa classification range le Myorus murinus parmi ses espèces incertæ sedis. Par sa dentition et l’ensemble de ses caractères crâniens, le Myorus murinus me paraîl se rapprocher davantage du type Lérot (Eliomys) que du sous-genre Graphiurus dans lequel on l’a rangé récemment. | La série des molaires, quoique d’assez faible longueur, n'offre pas l’extrême réduction indiquée par F. Cuvier chez le G. capensis, et le célèbre naturaliste comprend le M. Mu- rinus == M. Coupei parmi les Myoxiens « dont la grandeur des quatre machelières est dans les proportions de la gran- deur du corps ». Sur deux exemplaires adultes en alcool que j'ai pu examiner, l’un de G. capensis que le Muséum doit à la générosité de M. le D° Holub, l’autre de M. rurinus rapporté du Gabon en 1854 par Aubry-Lecomte, les séries des molaires ont exactement les mêmes dimensions (4 mil- limètres), bien que ces animaux soient de tailles bien diffé- rentes; G. capensis mesurant 120 millimètres de longueur pour la tête et le corps, M. murinus 90. De plus, la prémo- (1) F. Cuvier, Des caractères propres au genre Graphiuwre (Nouv. Ann. du Muséum, t. I, p. 441, pl. 16 et 17, 1832). (2) J. A. Wagner, Schreb. Saugeth. (Suppl.), t. IIT, p. 265, 1843. (3) Peters, loc. cit. (4) Ogilby. Proc. Zool. Soc. London, p. 5, 1838 (5) Temminck, loc. cit. : ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 369 laire tant inférieure que supérieure, réduite à un « rudiment linéaire » chez le G. capensis, présente chez le M. murinus un volume très appréciable; elle est, relativement aux vraies molaires, dans les mêmes proportions que celles signalées el figurées par Wagner (1) pour le type du sous-genre £/omys (Æ. melanurus). Enfin, comme dans cette dernière espèce, les prémolaires et les molaires du M. nurinus ont leurs couronnes concaves marquées de quelques replis peu sail- lants. Les particularités crâniennes, indiquées par F. Cuvier comme caractéristiques du genre Graphiurus, ne se retrou- vent pas davantage chez le M. murinus. Les os nasaux s’é- tendent peu en arrière; les frontaux, beaucoup plus longs que larges, ne se terminent pas en arrière par une ligne droite transversale (G. capensis), mais par une ligne brisée sous un angle assez aigu. Les lemporaux se soudent en avant aux frontaux suivant une ligne oblique, dont la partie supérieure est plus avancée, à l'inverse de ce qui se voit chez le G. ca- pensis. Par suite de cette forme différente des frontaux et des temporaux, les pariétaux, chez le M. murinus, sont loin de former un parallélogramme presque régulier comme chez le G. capensis, mais vont ense rélrécissant en avant comme deux coins, entre les lignes de suture pariéto-frontale et pa- riéto-temporale. Enfin, l’arcade zygomatique ne descend pas au niveau de la partie dentaire du maxillaire, comme c’est le cas chez le G. capensis, mais reste plus relevée que celte ligne sur toute son étendue. On peut se faire une idée très exacte de ces diverses particularités, d’après les excellentes figures que Peters (2) a données du crâne et de la dentition du M. murinus, et se convaincre que ce mode de structure donne, en tous points, les traits caractéristiques du sous- genre Ehomys (3) tels qu'ils ont été relevés par Wagner. (1) Wagner, Abhandl. d. Kôn. bayer. Akad. d. Wissench. München., Bd. Il, p. 176, pl. IL, fig. 1 à 4, 4843. (2) Peters, loc. cit., pl. XXXV, fig. 1. (3) C'est d’ailleurs l'opinion émise récemment par M. le D‘ Reuvens, Not.f. Leyd. Museum, vol. XII, p. 67, 1891. ANN. SC. NAT. ZOOL. ; ui, 24 370 É. DE POUSARÇGUES. Le Myoxus (Eliomys) murinus (Desm.) se rencontre dans toute l’Afrique occidentale et australe depuis le Sénégal jus- qu'au Cap ainsi que dans le Natal et le Mozambique ; les spécimens recueillis par M. J. Dybowski montrent que cette espèce s’avance assez loin dans l'Afrique centrale. M Mats- chie la signale également dans de nombreuses localités de l'Est africain. Dans le Sennaar et la région des Lacs, le Lé- roi murin est remplacé par deux autres espèces, M. Elio- mys orobinus (Wagn.) (1) et M. Eliomys microtis (Noack) (2), qui offrent avec lui de grandes similitudes, mais s’en distin- guent toutes deux par la présence d’une raie dorsale som- bre. Celte particularité n’est pas d’ailleurs le seul trail commun à ces deux Myoxiens de l’Afrique orientale, et leur distinction spécifique me paraît assez douteuse et peu fondée. FAMILLE DES MURIDÉS GENRE GERBILLUS 70. GERBILLUS VALIDUS. (Boc.) Gerbillus validus. Barboza du Bocage. Mammifères d’Angola el du Congo. Jorn. Sc. math. phys. natur. Lisboa, "26e as p- 6, pl., fig. 1 et 1 a. (Tête osseuse.) 1890. a. Q très adulte. M. J. Dybowski, 12 décembre 1891. Yabanda. £ Sur le dessus de la tête et le dos, la couleur fondamentale est d’un roux Jjaunâtre varié de brun foncé. Cetle der- wière teinte diminue graduellement jusqu'à disparaître à mésure que l’on s'éloigne de la ligne médiane supérieure et les côtés de la tête et du cou, les flanes el la face externe des membres présentent üne vive coloration roux jaunâtre pres- que pur. Le long de la lèvre supérieure, sur tout le dessous du corps et sur la face interne des membres, les poils sont (4) Wagner, Archiv. f. Naturg., p. 182, 1848. (2) Noack, Zoolog. Jahrbuch. Systemat., II, p. 248, 1887. ÉTUDE SUR LÉS MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 371 franchement blancs jusqu’à la racine. La queue, plus courte que la tête et le corps, médiocrement velue et sans touffe terminale bien accusée, est de la couleur du dos sur sa face supérieure et blanche en dessous. Les oreilles de faible lon- gueur sont glabres, sauf le long de leur bord inféro-interne et supéro-externe. En arrière de leur base se trouve un espace nu, limité supérieurement par une touffe depoils d’un blanc légèrement jaunâtre. Le dessus des pattes estcouvertde poils rares, courts, etcomplètement blancs. Les griffes d’un blanc jaunâlre marqué de brun sont bien développées et un peu pluslongues et plusfortes aux pattes antérieures. « La plu- part des Gerbilles sud-africaines du sous-genre Tufera ne présentent entre elles que des différences extrêmement lé- gères, si bien, écrit M. O0. Thomas (1), qu'il est actuellement impossible d'établir si G.afer.(Gr.), &. montanus (A. Smith), G.leucogaster (Pet.), &. Boehmi (Noack) et G. validus (Boc.) méritent réellement toutes d’être distinguées spécifique- ment. » On ne peut nier en effet les singulières ressemblan- ces qui existent entre ces différents types, eten ce qui con- cerne les couleurs du pelage, la description qui précède s’appliquerait aussi bien à l’une qu’à l'autre de ces formes spécifiques, et plus particulièrement au G. leucogaster et au G. validus. Je me suis néanmoins arrêté comme détermi- nation à cette dernière espèce, vu les grandes dimensions du spécimen de la région de l’Oubangui. Sa taille, en effet, est encore supérieure à celle du tvpe d’Angola sur lequel M. Barboza du Bocage a basé son espèce G&. validus qui, ainsi que l'indique son nom, surpasse elle-même en force toutes les Gerbilles sud-africaines. Vu l’infériorité de la taille, les oreilles sont plus grandes chez le G&. leucogaster et la queue est plus longue proportionnellement à la lon- gueur de la tête et du corps. Enfin, un dernier caractère liré du nombre des mamelles ne m'a laissé aucun doute sur l'identité spécifique de la Gerbille qui nous occupe. « Dans (4) O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London., p. 549, 1892. 372 E. DE POUSARGUES. l'espèce &. validus, dit M. Barboza du Bocage, les femelles portent qualre paires de mamelles, une paire axillaire, une pectorale et deux inguinales. » Le savant portugais a constaté le fait chez deux femelles prises pendant l'al- Jaitement et j'ai relevé le même nombre et la même dis- position sur l’exemplaire recueilli par M. J. Dybowski. Au contraire, les femelles gravides de Gerbillus leucogaster étu- diées par Peters n'avaient que trois paires de mamelles, dont deux paires inguinales el une paire pectorale située immédiatement en arrière des coudes. Ces différences me paraissent acquérir une réelle valeur par suite de la con- stance qu'elles présentent, el justifient la séparation spécifi- que du G. validus de l’Angola et de l’'Oubangui d'avec le G. leucogaster de la côte de Mozambique. Dans le tableau suivant, j'ai mis en regard les diverses mesures données par M. Barboza et celles qu’il m’a élé possible de prendre. Ce parallèle permettra de constater que si les dimensions de la têle et du corps et celles de la queue offrent suivant l’âge une certaine variabilité, elles conservent néanmoins entre elles les mêmes proporlions relatives qui peuvent être re- présentées par le rapport 3/4. Pour les autres mesures, il y a concordance complète. GERBILLUS VALIDUS Mesures en millimètres. — — © Type & l'Oubans ui l’Angola. eue Longueur de la tête etdu Corps2252%0020nr ANUS. 190 — DANONE Fos PARA 150 — die IA TEE :280 an h een Bitte: Lada LE 4 Plante dupied Sans Tes Ongles". Tax ER ERREE 35 Hauteur de l’oreille..... ÉLRRETONELE.. CLS. REC 20 Largeur du crâne entre les arcades zygomatiques.... 22 Longueur des 65 masanx En nee EN ORRE 18 — +: Ye ATOME ehEfS. CR MODÉRER 15 — du maxillaire inférieur du condyle au som- met de 1 'Sympaiyse Lie Ven ne USE 2 — des molaïires imiériéures 422 A ER ce — SUPÉTICUTES TE ES NE ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 373 Le G. validus n'avait été signalé jusqu'ici que par l’explo- rateur d'Anchieta sur plusieurs points des possessions por- tugaises de l’Angola, à Caconda dans le bassin supérieur du Cunéné et à Ambaca au nord du Coanza. Sur l'itinéraire de M. J. Dybowski dans l'Afrique centrale, la localité de Yabanda, indiquée par le célèbre explorateur, se trouve située assez au Nord du coude de l'Oubangui, par 6°30° en- viron de latitude Nord, près de la ligne de partage des eaux qui sépare le bassin du Tchad de celui du Congo. Comme on le voit, la zone de répartition du G. validus s'étend considérablement vers le Nord et franchit le Congo et l’'Oubangui. De ce fait, cette Gerbille ne doit plus compter parmi les espèces exclusivement sud-africaines. 71. GERBILLUS EMINI. (Thos.) Gerbillus sp. 0. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, p. 10, 24, 1888. — Emini. O. Thomas. Ann. and Mag. Natur. Hist., 6° série, p. 78, 1892. a. © semi-adulte. M. J. Dybowski, février 1892. | b. G' adulte. —— 16 mais 1892. ! Poste de la Mission sur la C4 à oh — 20 mai 1892. \ rivière Kemo. FAST 2, 21 mai 1892. Le pelage des parties supérieures du corps chez cette es- pèce est doux et brillant, d’un jaune d’ocre pur sur les côtés de la tête et du cou, la face externe des membres et les flancs, mais passant assez brusquement au fauve abondam- ment tiqueté de noir brunâtre sur toute la région dorsale el le dessus de la tête, depuis l’extrémité du nez jusqu’à la ra- cine de la queue. Autour des yeux et sur les côtés du mu- seau existe une zone plus claire et blanchâtre; de l’angle postérieur de l'œil part une bande noire, étroite, assez indécise, qui va se perdre au-dessous de l'oreille. Derrière celle-ci on retrouve, comme chez un grand nombre de Ger- billes, une pelite touffe de poils duveteux, d’un blane pur à la base, jaunâtre au sommet. Tout le pelage du dessous du corps, de la lèvre supérieure et de la face interne des membres est d’un blanc pur, séparé suivant une ligne 314 E. DE POUSARGUES. bien nelte des teintes jaunes desflancs. A la face postérieure des cuisses et des jambes, les poils prennent une coloration d'un noir fuligineux. Les oreilles assez longues mais de lar- geur médiocre sont presque entièrement nues. Sur leur face interne on n'observe que quelques poils blancs, courts el irès clairsemés le long du bord inférieur; leur face externe ne présente qu'un maigre revêtement de poils brunâtres, sauf le long du bord inférieur et près du sommet de l'oreille où ils sont blancs comme sur la face interne. Les moustaches sont fines et bien fournies, les inférieures blanches, les su- périeures brunes ; les plus longues soies dépassent en arrière le sommet de l'oreille. La queue est plus longue que la tête et le corps : sur ses deux tiers proximaux, les poils qui la recouvrent, bruns à sa face supérieure, jaunes en dessous, restent courts el étroitement appliqués contre les écailles sous-Jacentes ; mais à partir du dernier tiers, ils s’allongent notablement et se relèvent en crête, surtout à la face supé- rieure ; leur longueur s'accroît de plus en plus, et en même temps la teinte brune envahit la face inférieure à mesure que l’on se rapproche de l'extrémité terminée par un pin- ceau assez long, mais peu souple et peu fourni. Les pattes sont assez grêles mais longues, surtout les postérieures dont les dimensions excèdent un peu celles du type de M. O0. Tho- mas. Les poils qui les recouvrent sont courts, rigides et d’un blanc pur. En avant, le pouce est atrophié et réduit à une phalange munie d’un ongle plat. La paume présente cinq bourrelets, les deux postérieurs très développés et con- tigus mais distincts, le sous-articulaire du doigt externe très réduit. Aux pattes postérieures, le pouce est faible et bien inférieur au doigt externe. Toute la sole de couleur brun sombre est dénudée depuis le calcanéum jusqu’à la base des doigts, sauf une bande étroite revêtue de poils courts et blancs qui la traverse de la base du doigt externe à celle du pouce. En arrière de cette bande velue, sur tout le dessous de la région tarsienne, la peau nue est lisse; en avant elle est visiblement grenue el renforcée de quatre tubercules, les ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 379 deux sous-articulaires des trois doigts médians forts et allon- gés, celui du doigt externe arrondi mais net et bien saillant, celui du pouce également arrondi, mais à contours vagues et déprimé. Ces particularités plantaires bien accusées surtout sur la jeune femelle (a) permettent, comme le dit avec raison M. O. Thomas, de distinguer le G&. Emini de toutes les espèces du groupe, et constituent un critérium infaillible pour la détermination. Sur le jeune spécimen (a) les cou- leurs sont plus vives et les teintes des flancs passent au roux ardent. La femelle adulte (4) possède quatre paires de mamelles dont deux paires pectorales assez distantes l'une sus-axillaire l’autre sous-axillaire, une paire abdominale et une paire inguinale. La tête osseuse, assez renflée dans sa porlion cérébrale, présente en avant une étroitesse et une élongation extrêmes surtout dans la région nasale. Le liséré sus-orbitaire est bien accusé, et se termine brusquement au point de convergence des sutures fronto-pariéto-temporales. Les trousincisifs sont normalement développés; quant aux trous palatins, ils s'étendent en avant jusqu’au niveau du bord antérieur des premières molaires el ne sont séparés des trous incisifs que par un étroit pont osseux, creusé d’une rainure profonde et ne mesurant pas plus de 1 1/2 millimètre dans le sens antéro-postérieur. Par suite de l’extrème acuité du museau, les incisives supérieures sont très étroites ; leur face anté- rieure offre une si forte convexité dans le sens transversal que le sillon qui marque le milieu de chacune d'elles est plus visible latéralement que de front. Les molaires tant inférieures que supérieures sont petites et étroites. Des {rois lamelles transversales qui forment les premières mo- laires, la postérieure reste indépendante, les deux autres sont confluentes et leur couronne présente l’aspect d’un trèfle. La mâchoire inférieure est faible et l’apophyse coro- noïde très peu développée. Les mesures réunies dans le tableau suivant donneront une idée plus précise des dimen- sions de la Gerbille d'Emin-Pacha, 370 E. DE POUSARGUES. GERBILLUS EMINI Mesures en millimètres. Mes Se Le à 0. Thomas. + Ponpueur de la té "et EErps MERE, . TRS 140 _ 140 — dedladquener 45 ASUS EC PRE A 2 Rép 155 160 — du pied'avec les res en. 29 32 Hauteur 'de Portlets te ME SR ERREURS 18 Longueur du crâne en ligne droite, de l'extrémité des os nasaux à la suture interpariéto- océipifale.. 2° 36 l'ongieurides Gsnasau ee. ce CHÉRNERERS LCA PURE 45: Largeur ININUN des) 0S DASAUX. Sn 20. Le 3,9 L'On SUEUT ES VOS FONDU UE ART 13 Largeur minimum des os frontaux................. 6 Lonpueur dés panElaux 27 -CE Tue... 6,5 — deTinterpariétalt. HAUTE RRANERS SPPE 4 — des. TOUS IMCISIÉS EL 55 22 Lbe CU LS ee 6,5 — dés Aronsipalahins. 2. VERRA MPRRERSEES 4 — du pont osseux qui sépare ces trous....... 1,6 Longueur de la série des molaires supérieures. ..... 5,9 DST. LAN SAS RME ARS PR ARE RUES 10 Longueur de la série des molaires inférieures....... 53 DAS tenta PET LOURDS ee Ce NES Re dE EE Ie 5,0 Longueur de la mandibule, du sommet du condyle à lexirémite.de Ti'symphysest 2.07 Lane nee 18 La découverte de cette charmante espèce est due à Emin- Pacha. D'abord simplement signalé sans détermination spécifique en 1888, le type ne fut dénommé et décrit qu'en 1892 par M. O0. Thomas qui le dédia à l'illustre explorateur. Les deux premiers spécimens provenaient du distriel du Ouadelai, mais les quatre exemplaires recueillis par J. Dy- bowski sur les bords de la Kemo prouvent que le G. Emini franchit la ligne de partage des eaux des deux bassins Nil- Congo et se disperse assez loin vers l'Ouest à travers le Niam-Niam en descendant le cours de l’Oubangui et de ses affluents. Vers l'Est, le G. Æmini paraît représenté par une espèce qui s’en rapproche beaucoup comme couleur et comme dimensions, le G. macropus (Heugl.\, mais s’en distingue par ses oreilles fortement velues sur leur face externe et par ses membres postérieurs (pattes et jambes), beaucoup plus longs. D’autres espèces du même auteur, G. stigmo- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 371 nyx (1), G. dongolanus (2), présentent également de grandes ressemblances de pelage avecle &. Emaini, maisleur taille est très exiguë et leur queue très longue comparée aux dimen- sions de la tête et du corps. Parmi les espèces sud-africaines, le G. tenuis (A. Smith) (3) se rapproche aussi du G. Emini, mais ses dimensions sont plus faibles, sa coloration est plus claire, et la queue ne présente qu’un très court pinceau ter- minal. Chez aucune de ces espèces, du reste, on n’a signalé la bande velue qui, chez le G. Emini, divise la surface plan- taire en deux parties, l’une sous-tarsienne, l’autre sous- métatarsienne. Je ne crois pas qu'elle existe, ni chez le G. tenuis, n1 chez le G. macropus ; mais il ne serait peul- être pas sans intérêt de vérifier le fait chez les deux petites espèces des bords du Nil, G. stigmonyx et G. dongolanus. et de constaler si les disproportions que l’on observe entre la longueur du corps et celle de la queue ne doivent pas être attribuées au Jeune âge des individus types. GENRE DASYMYS 72. Dasyuys nizoricus. (E. Geoffr.) Lemnus niloticus. E. Geoffroy. Catalog. Mammif. du Muséum, p. 186, 1803. Echimys niloticus. Audouin. Descr. de l'Égypte (Hist. nat., t. II, p. 734, pl. V, fig. IL, 1809). Arvicola niloticus. Desmarets. Mammalogie, 437° espèce, p. 281, 1823. Mus niloticus. I. Geoffroy. Mag. de Zool., 2° série, 2° année, pp. 5, 20, 45, 55, pl. 29, fig. 7-9, 1840. Mus abyssinicus. Rüppell. Museum Senckenberg, Bd. II, Hft. 3, p. 104, pl. VIL fig. 1, 1842. Mus discolor. Wagner. Arch. de Wiegmann, p. 9, 1842. ? Mus rufinus. Temminck. Esq. zool. Côt. Guinée. p. 163, 1853. Pelomys Reichardi. Noack. Zool. Jahrbuch., Bd. IT, p. 235, pl. IX, fig. 4-7, 1887. Isomys abyssinicus. O. Thomas. P. Z. S. London, p. 12, 1888; p. 448, 1890. Dasymys Reichardi. Tycho-Tullberg. Muriden aus Kamerun, p. 36 et 38, 1893. Mus abyssinicus. Matschie. Säugeth. deutsch Ost Afrik., p. 51, 1895. (1-2) Heuglin, Reise in Nordost Afrika, 2° partie, p. 78 et 79, 1877. (3) A. Smith, Ilustr. Zool. Suuth Africa Mammalia, pl. 36, 1849. 318 E. DE POUSARGUES. a. Œ semi-adulte. M. J. Dybowski. Bangui. b. O adulte. — Fr GG ir — — dŒg — — Pays des Ouaddas, Haut-Oubangui, 8 fé- vrier 1892. TORRES — Pays des Ouaddas, Haut-Oubangui, 8 fé- : vrier 14892. f. Q semi-adulte. — Poste de la Mission sur la Kemo, 2 mai 1892. Sur les parties supérieures du corps, le pelage présente une teinte brun noirâtre, abondamment tiquetée de jaune plus ou moins roussâtre suivant les individus. Des deux sortes de poils qui couvrent ces parties, les uns, formant le sous-poil, sont minces et duveteux, les autres sétiformes sont plus longs, plus épais, fusiformes, aplatis et légèrement can- nelés, brillants et rigides, mais très élastiques. Ces deux sortes de poils sont grisâtres dans leur moitié radicale, et, sur le reste de leur étendue, présentent une teinte brun foncé le plus souvent barrée à une petite distance de l’ex- trémité d’un large anneau jaune rougeâtre qui manque par- fois. Sur les côtés du nez et des joues et le long de la partie inférieure des flancs, la teinte jaune rougeâtre s’accentue sensiblement; mais elle prend une prédominance plus mar- quée et passe au roux franc sur la partie postérieure du corps, vers la racine de la queue et sur le derrière des cuis- ses. La face externe et supérieure des membres est jaune d’ocre finement tiquetée de brun. La queue, égale en moyenne aux 2/3 de la longueur de la tête et du corps, est brun sombre au-dessus, jaune grisâtre inférieurement ; les nombreux poils courts et raides qui la garnissent participent de la double coloration des écailles qu'ils masquent presque complètement; c’est-à-dire qu'ils sont brun noirâtre à la face supérieure, et gris plus ou moins roussâtre à la face inférieure de la queue. Les oreilles sont arrondies, assez longues et très larges, couvertes de poils courts les uns bruns, les autres roux, très abondants à la face interne, clairsemés à la face externe. Sur les parties inférieures du corps et la face interne des membres; le ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 379 pelage est clairsemé et laisse voir la peau; les poils y sont gris ardoisé à la base, très légèrement teintés de jaune ochracé dans leur portion moyenne, et blanc à leur extré- mité. Les pattes antérieures sont faibles ; le pouce est pres- que complètement atrophié et réduit à l’état d’un moignon muni d’un ongle plat ; le doigt externe est court, mais ter- miné par une véritable griffe aiguë et recourbée dont l’ex- irémité dépasse un peu la base du quatrième doigt ; celui-ci est un peu plus long que l'index et presque égal au médius. Les griffes sont assez longues, mais minces et très com- primées, jaune clair à la base et à l'extrémité, teintées de brun dans leur portion moyenne. Aux pattes postérieures, le pouce et le doigt externe insérés à la même hauteur sont bien développés et presque égaux, le pouce étant à peine plus faible. Le quatrième dépasse légèrement le second et égale presque le médius. Les griffes sont plus fortes qu'aux palles antérieures, mais présentent la même coloration. Autant que j ai pu m'en convaincre sur des exemplaires des- séchés, la plante des pattes postérieures, de couleur brune, ne porte que cinq bourrelets disposés comme chezle Golunda fallax (Pet.); une paire antérieure bien développée à la base du doigt médian, une seconde paire plus réduite renforce la base du pouce et du doigt externe, puis un cinquième plus fort, oblong, placé le long du bord interne du mé- tatarse. Si le sixième bourrelet existait, il serait de di- mensions très exiguës et aurait disparu par suite du retrait des tissus, car je n’ai pu en relever aucune trace sur les six exemplaires. Les femelles sont pourvues de huit mamelles ayant la même disposition que celle que M. Barboza du Bocage (1) a notée chez le Mus (Isomys) dorsalhis (Smith), c’est-à-dire deux paires pectorales, dont l’une sus-axillaire et l’autre sous-axillaire, une paire abdominale, et une inguinale. Chez les spécimens rapportés de l'Oubangui par M. J. Dybowski, (1) Barboza du Bocage, Mammifères d’Angola et du Congo (Jorn. Sc. math. phys. e natur. Lisboa, 2° série, n° 5, p. 16, 1890), 380 E. BE POUSARGUES. le crâne et Ja dentilion présentent rigoureusement la con- formation relevée par M. Noack sur les exemplaires types du Pelomys Reichardi des rives du Tanganika, et sur ce point je renverrai à la description détaillée qu'en a donnée cel auteur. IL est une question qui maintenant se pose, c’est celle de la détermination exacte du nom générique que l’on doit donner à l’espèce décrite par M. Noack, M. Tycho-Tullberg n'a fait qu'effleurer ce sujel; mais ce savant zoologisle me paraît être tout à fait dans le vrai en proposant de relirer le Pelomys Reichardi du genre où l'avait placé M. nos ét d'en faire un Dasymys. Par la conformation des paltes postérieures le Pelomys Reichardi se raltache aux genres Zsomys et Golunda; mais d'autre part, il s’en éloigne par la siruclure de ses pattes antérieures dont le doigt externe est normalement développé et muni d'une véritable griffe. Celte dernière conclusion que l’on peut tirer des caractères extérieurs fournis par les membres, se trouve confirmée par l'examen de la dentition. Chez le Pelomys Reichard les incisives sont lisses; cette particularité suffit à elle seule pour exclure cette espèce du genre Pelomys = Golunda où les incisives sont creusées d’un profond sillon sur leur face antérieure. D'autre part, ainsi que le fait remarquer M. Noack, « les molaires du Pe/omys Rei- chardi sont formées de plis transversaux d’émail comme dans le genre Meriones » ; celte disposition ne rappelle en rien la forme multituberculée des molaires des Golunda et. des Z/somys. Tous ces caractères concordent au contraire ri- goureusement avec ceux que Peters (1) assigne aux Dasymys. Dans ce genre, les incisives sont lisses, et il suffit de jeter un coup d'œil sur les figures des molaires du Pelomys Rei- chardi, pour se convaincre qu'elles sont la copie exacte, jusque dans ses détails, de la dentition du Dasymys Gueinzu type du genre, mais dans un état un peu moins avancé d'usure. (1) Peters, Monatsb. Akad. Wissensch. Berlin, p. 12, pl. 1 et 2, 1875. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 381 Avec les progrès de l’âge, la couronne du tubercule antéro-interne de la deuxième molaire supérieure, nette- ment détachée chez le Pelomys Reichard, deviendrail con- fluente avec celle de la lame transversale antérieure et principale, el lui donnerait cette forme bilobée intérieure- ment dont parle Peters pour le Dasymys Gueinzu ; il en se- rait de même pour la troisième molaire supérieure. De plus, le mode de conformation des pattes, tant antérieures que postérieures, la présence des soies rigides à la base des griffes, la largeur des oreilles fortement velues inlérieure- ment constituent autant de caractères communs qui per- mettent de réunir génériquement ces deux formes. Par la teinte brun sombre du pelage, par la disproportion moins accusée entre la longueur de la tête et du corps et celle de la queue presque glabre, le Dasymys ueinzi est facile à distinguer spécifiquement du Dasymys Reichard. De plus, Peters signale six bourrelets à la plante des pattes posté- rieures chez son espèce, et nous avons vu qu'il n’y en avait probablement que cinq chezle Dasymys Reichard. Des carac- tères de même nature séparent également celte espèce du Dasymys longicaudatus signalé par M. Tycho-Tullberg dans le Cameron. Comme dernière affinité du Dasymys Reichardi, il me reste à signaler l'extrême analogie de forme, de pelage et de proportions qui existe entre celte espèce et le Mus nilo- ñcus (E. Geoff.). La ressemblance est telle, qu'il y a lieu de considérer ces formes comme spécifiquement identiques. Je n'ai pas à insister sur les différents noms génériques sous lesquels on a successivement désigné le Mus niloticus, si- gnalé par E. Geoffroy Saint-Hilaire comme Lemnus, puis par Audouin comme Æchimys, enfin par Desmarets comme Arvicola. Dans son savant mémoire sur les Rats épineux, Is. Geoffroy Saint-Hilaire fit le procès de toutes ces appella- tions erronées, et démontra péremptoirement que le Lem- nus niloticus appartenait au genre Mus. Les détails cir- conslanciés que ce célèbre naturaliste donna sur le pelage et la dentilion du Mus niloticus suppléèrent amplement à ce 7 382 E. DE PFOUSARGUES. que les descriptions d’'E. Geoffroy et d'Audouin pouvaient présenter de trop brefet d’incertain. Cette espèce se trou- vait dès lors parfaitement établie quand Rüppell, par une méprise aussi inexplicable que malheureuse (1), préten- dit: 1° que l'animal visé par Audouin dans sa description n'était autre que le Rat épineux du Caire, Mus (Acomys) calhairinus (E. Geoffroy) (2), dont il aurait arbitrairement augmenté les dimensions, pour mettre son lexle d'accord avec la figure 2 de la Planche V qui accompagne son tra- vail; 2° que celte figure représentait au contraire une espèce décrite ultérieurement par Lichenstein (3) sous le nom de Hypudæus variegatus. C’élait Ïà une accusation toute graluile, que Rüppell n’eût certes pas lancée aussi inconsi- dérément s’il avait eu connaissance du travail d'[s. Geoffroy Saint-Hilaire, et qui se trouvait d’ailleurs réfutée d'avance par Audouin lui-même. On lit en effet dans la deuxième édition du travail sur l'Égypte la note suivante : « Desmarets en décri- vant le rat du Caire (Mus k£ahirinus) renvoie, par inadver- tance, à la figure de l'espèce que nous décrivons (4) » : ce qui prouve jusqu'à l'évidence, que la confusion dont parle Rüppell n'existait nullement dans l'esprit d’Audouin. Les auteurs paraissent n'avoir lenu aucun comple de ces recti- fications antérieures au travail de Rüppell; l'erreur de ce dernier s’accrédita, et la dénomination spécifique n#loticus tomba en désuétude, pour ne plus êlre citée que comme synonyme (5) du 7. variegatus (Licht.). Il convient, je crois, (4) Rüppell, Museum Senckenbergianum, Bd. IIL, Hft. 2, p.102 et 103, 1842, Jamais Audouin n’a désigné l’espèce qui nous occupe sous le nom d’Echi- mys du Caire comme le prétendait Rüppell. La figure porte Echimis d'É- gypte et le titre de la description est Echimis du Nil. (2) E. Geoffroy Saint-Hilaire, Cat. Mammif. du Muséum, p. 195, 1803. (3) Lichtenstein, Doublelt. Verzeichn. d. Berliner Museum, p. 2, n° 26, 1823. (4) Audouin, Description de l'Égypte, 2° édition in-8°, 1828, t. XXIIT, Hist. nat. zoolog., t. II, p. 189. Note. (5) C’est ainsi que M. le D' Trouessart (Cat. des Mamm.., fase. II, Ron- geurs, p. 07, 1881, s’est trouvé amené à n’admettre le M. niloticus que comme variété locale ou individuelle du M. variegatus, ainsi que l’indique la lettre (a) désignant une espèce nominale; à signaler à tort le M. variega- ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 383 de rendre au M. niloticus son autonomie. À supposer que cette espèce soit identique au M. variegatus (Licht.), la priorité n’en reviendrait pas moins à la dénomination n1- loticus de création bien antérieure et que rien n'autorise à rejeter (1). Mais tel n’est pas le cas; le Mus variegatus, par la pré- sence « d’une raie médiane dorsale noire » (2) se distingue nettement du Mus niloticus, chez lequel aucun auteur n’a jamais signalé cette particularité. Je mesuis d’ailleurs assuré de ce fail sur le spécimen type de E. Geoffroy. Le Mus variegatus (Licht.) se rapprocherait donc du Mus Isomys dorsalis (A. Smith) auquel il faudrait peut-être l'identifier ; au contraire, par certains traits d'organisation tels que la tus comme décrit par E. Geoffroy, dans la Description de l'Égypte ; enfin, à renvoyer aux mêmes sources (Descr. Égypte, pl. V, fig. 2), pour deux Ron- geurs : M. variegatus (p. 67), et Acomys cahirinus (p. 76), qui diffèrent même génériquement. (4) On pourrait encore objecter qu'il est difficile de se faire une idée précise du Mus niloticus, dont la queue est décrile tantôt comme étant presque glabre, tantôt comme fortement velue, ainsi qu’on peut en juger par les citations suivantes : « Poils de la queue très courts et raides. » E. Geoffroy, Cat. Mamm., p. 186. « Queue assez peu pourvue de poils et presque écailleuse comme celle d'un Rat. » Desmarets, Mammalogie, p. 281. « Queue recouverte de poils rares, fort courts. » Audouin, Description Égypte. « Queue couverte de poils assez nombreux pour cacher presque entière- ment les écailles. » I. Geoffroy, Mag. xoolog., 2° série, p. 45, 1840. On s’expliquera ces divergences si l’on veut bien se placer aux diffé- rents points de vue sous lesquels ces divers auteurs ont envisagé cette espèce. Leur facon de s'exprimer est en effet toute relative. Pour E. Geof- froy et Desmarets, le M. niloticus était un Campagnol, et, comme tel, il pou- vait être considéré comme ayant la queue assez glabre. Il faut interpréter de même les termes employés par Audouin. Pour cet auteur, le M. niloticus était un Echimys dont quelques espèces, rangées depuis dans le genre Loncheres, ont la queue si bien velue, qu’elles étaient autrefois considérées comme des Loirs épineux. Au contraire, avec I. Geoffroy, l’espèce niloticus passe au genre Mus, et de glabre, la queue devient par comparaison forte- ment pileuse. (2) Lichtenstein. La diagnose du M. variegatus donnée par cet auteur est la suivante : «Hypudæus corpore griseo, punctis nigris albisque adsperso, linea dorsali media nigra, cauda supra nigra, sublus cinerea, pilis rigidis vestita », Doublett. Verzeichniss der Berliner Zool. Museum, p. 2, n° 26, 1823. 304 E. DE POUSARGUES. conformalion des pattes et la structure des molaires, le Mus nuoticus vient se ranger dans le genre Dasymys. « Il faut ‘remarquer, écrivait Is. Geoffroy, que la queue du Mus nilo- lhicus couverte de poils assez nombreux pour cacher presque enlièrement les écailles, ses ongles épais, l’état tout à fait rudimentaire des tubercules qui représentent les pouces aux pattes de devant et quelques détails de la forme des mo- laires, tendent à écarter ce Rongeur des espèces de notre pays que l’on regarde généralement comme les types du genre Mus (1). » Ces détails de la structure des molaires qu'Is. Geoffroy ne fait que signaler, ont été figurés sur une des planches jointes à son mémoire. Ces figures mon- trent que les molaires du #7. niloficus présentent la con- formalion typique des Dasymys. Les pattes poslérieures montrent un égal développement pour le pouce et le doigt externe comme chez les Zsomys, mais le doigt externe des pattes antérieures est normalement développé et muni d’une griffe. Si le Mus variegatus (Licht.) diffère du A. niloticus (E. Geoff.), il n’en est pas de même du #7. abyssinicus (Rüpp.), et ces deux dernières espèces doivent être considérées comme identiques. Il suffit de comparer les descriptions qui ont été données du M. niloticus par les divers auteurs pré- cités (E. Geoffroy, Audouin, Desmarels, [. Geoffroy), à celle que Rüppell nous a laissée du A]. abyssinicus et aux détails plus précis que les zoologistes contemporains nous fournis- sent sur le pelage et les dimensions de cette espèce, pour ne conserver aucun doule à cet égard. Enfin, les quelques caractères indiqués par Temminck dans la courte diagnose de son Rat roussard, M. rufinus de la Guinée supérieure, paraissent, malgré le jeune âge des (4) Wagner (Arch. de Wiegmann, p. 9, 1842) paraît n'avoir pas eu con- naissance du travail d’Is. Geoffroy Saint-Hilaire, quand il décrivit le Mus discolor, car tous les arguments qu’il invoque pour différencier son espèce du M. niloticus se trouvent réfutés l’un après l’autre par le célèbre zoolo- giste français. Ces deux espèces doivent donc être considérées comme sy- nonymes. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 389 spécimens types, suffisamment concordants avec ceux du M. niloticus de l'Est africain pour entraîner la synonymie de ces deux types. Dasymys NILOTICUS (E. Geoff.) = TR — a. ABYSSINICUS | Fa _# SPÉCIMENS COLLECTION re, © © CR PAR E DyBowskr. Mesures en millimètres. 0 E _ 2 <Æ — — ET d nÆ Siret HS, beau |. ; #5 CRE «= d PAPE CAE ORAN nl RCE EP RS À CESR En | RS Longueur de la tête et du COPA SRUE PP 180 152 f 180 mr de queue... 120 L’aire de dispersion de l'espèce Dasymys niloticus ainsi comprise s’étendrait, du Nord au Sud depuis le Nil moven jusqu’à la rive occidentale du lac Tanganika en passant par l’Abyssinie et l'Est africain, et de l'Est à l’Ouest jusqu'aux côtes de la Guinée supérieure à travers le Niam-Niam et le Soudan central. Aucun de nos explorateurs n'a rencontré le D. miloticus ni sur la rive droite du Congo inférieur, depuis son embou- chure jusqu'à son confluent avec l’Oubangui, n1 dans le bassin de l’'Ogôoué ; tous les spécimens de la collection de M. Dybowski ont été capturés plus au Nord, dans le Haut- Oubangui et la vallée de la Kemo. GENRE DENDROMYS 73. Denpromys PEcicet. (A. M.-Edw.) (nov. sp.) Dendromys Pecilei. A. Milne-Edwards. Rev. scient., 3° série, t. XII, p. 16, juillet 1886. a. çj adulte. M. de Brazza. Congo français, 1884. b. Œ — — — Ces deux spécimens, lypes de l’espèce, présentent nette- ment tous les caractères propres au AE Dendromys (Smith). Q% ANN. SC. NAT. ZOOL. In 29 380 E. DE POUSARGUES. La lêle osseuse mesure 21 millimètres de longueur totale ; toute sa partie postérieure encéphalique est large, renflée et globuleuse ; au contraire, sa porlion antérieure nasale est élroite et allongée. Il n'existe aucune trace de liséré apophy- saire le long du bord supérieur de l’orbite. Les trous sous- orbitaires ne présentent qu'un rétrécissement à peine sen- sible dans leur portion inférieure, et, vus de face, ils ont une forme ovalaire à grand axe vertical. L’arcade zygoma- tique est légèrement déprimée de dehors en dedans dans sa portion médiane. Les bulles auditives sont assez fai- bles et l’orifice du méat est dirigé en arrière. Les trous incisifs longs et larges atteignent en arrière le niveau du milieu des premières molaires. Les incisives supérieures fortement arquées sont creusées d’un profond sillon qui marque le tiers externe de leur face antérieure teintée de jaune d’ocre. Les deux séries des molaires supérieures sont manifestement convergentes en arrière ; elles mesurent cha- cune 4 millimètres de longueur, dont 2 1/2, c'est-à-dire plus de la moitié, pour la première molaire seule. La couronne de celle-ci ne présente que sept tubercules dont les six prin- cipaux, disposés par paires, affectent une disposition longi- tudinale bisériée ; le septième peu développé renforce intérieurement les tubercules principaux de la deuxième paire. La seconde molaire supérieure n’a que deux paires de tubercules principaux et un tubercuie secondaire antéro- interne très faible. La troisième molaire très exiguë ne possède que deux tubercules dont l’externe à peine des- siné. À la mâchoire inférieure l’apophyse coronoïde est faible, mais l’angle de la mandibule arrondi et robuste est forte- ment projeté en bas et en arrière, et ne rappelle nullemënt la figure que donne A. Smith de la mâchoire du Dendromys typicus (1). (1) A. Smith, Ulustr. South Afrika, pl. XXI, fig. 2b et 2e. Il est à suppo- ser que sur la mandibule que représentent ces figures, l’angle postérieur était brisé. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 387 Les incisives lisses sont longues, grêles et teintées de jaune paille sur leur face antérieure. Les molaires présentent les mêmes proportions relatives qu’à la mâchoire supérieure et convergent également en arrière. La première comple six tubercules, la seconde quatre et la troisième deux, dis- posés par paires. A l'inverse de ce que l’on remarque à la mâchoire supérieure, ce sont les lubercules de la série externe qui sont les plus développés. Le pelage du D. Pecilei est excessivement doux et moel- leux. Sur la tête, le dessus du corps et la face externe des membres jusqu'aux talons et aux poignets, les poils sont d’un gris ardoisé bleuâtre sur les deux tiers de leur longueur à partir de la base, puis d’un brun jaunâtre pâle jusqu’à l'extrémité, ce qui donne à la robe un ton général jau- nâtre cendré. Sur la ligne médiane du dos, la teinte brun jaunâtre de l'extrémité des poils s’assombrit, passe au brun noirâtre el dessine assez vaguement une bande longitudinale qui naît vers les épaules, s’élargit sur le milieu du dos et la région lombaire, puis s’atténue et vient se perdre près de la racine de la queue. Au milieu de ce pelage on trouve aussi, en petit nombre et clairsemés, d’autres poils plus longs, plus forts et plus élastiques, dont la pointe d’un brun sombre émerge au-dessus des premiers. Sur le dessous du corps et la face interne des membres, le pelage est gris d’ardoise à la base et blanc au sommet. Sur le dessus des pieds et des mains, les poils deviennent rares, courts et blancs sur toute leur longueur. La tête est longue, le museau très proé- minent. Les moustaches sont longues et fines, d’un brun sombre à la base, passant graduellement au blanc jaunâtre vers l'extrémité. Les oreilles, arrondies au sommet, sont bien développées en hauteur comme en largeur, mais n’attei- gnent pas les dimensions de celles du . melanotis. Elles sont couvertes, sur la moitié distale de leurs deux faces, d’un revêtement de poils d’un brun sombre, courts et serrés. La conque auditive présente une disposilion singulière qui parait d’ailleurs commune à toutes les espèces de ce pelit 388 E. DE POUSARGUES. genre el que Smults (1) a signalée chez le Dendromys meso- melas (Brants). Un large repli charnu, semi-lunaire et tout à fait glabre, naît du milieu de la base de la face interne de la conque, el vient se terminer à l’angle inférieur du pavillon. Ce lobe peut s'appliquer comme un opercule sur l’orifice du conduit auditif et le fermer hermétiquement. Un autre repli homologue, mais beaucoup moins développé et membraneux, nait du même point que le précédent, mais se dirige en sens opposé formant une frange étroite qui vient aboutir à l’angle supérieur du pavillon. La queue, à peine plus longue que la tête et le corps, est couverte d'écailles très petites, disposées en anneaux serrés, élroits et très réguliers, des interstices desquels émanent des poils peu nombreux, fins, à peine plus longs que les écailles et d’un blanc grisâtre. Les extrémilés des membres offrent une structure tout à fait bien adaptée aux habitudes arboricoles de ces petits Rongeurs. Aux pattes antérieures, on ne voit du pouce que l’ongle plat qui le termine. Le doigt externe est également très court, mais plus dégagé cependant que le pouce et muni comme lui d’un ongle plat. Les trois doigts médians pré- sentent les proportions relatives ordinaires, l’index est le plus court, le médius le plus long ; les griffes d’un blanc sale qui les terminent, sont assez longues, fortes et très recourbées. La paume présente trois bourrelets sous-articu- culaires des quatre doigts externes, de grosseur médiocre, mais le poignet est renforcé de deux tubercules contigus, fortement développés surtout l’interne, et dont les masses coalescentes forment une saillie considérable et comme une sorte de talon, qui me paraît devoir servir de point d'appui et de résistance pour les griffes dans le mouvement ascensionnel le long des écorces. Aux pattes postérieures, les trois doigts médians seuls sont pourvus de griffes fortes et acérées; le (1) Auriculæ oblongæ, nudiusculæ, et intus, juxta cranium duabus val- vulis transversis membraneis, quarum inferior meatui auditorio externo superjacet. (J, Smuts, Enumeratio Mammalium capensium, p. 40, 1832.) ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 389 premier et le cinquième doigt ne portent que des ongles plats : il y a donc sous ce rapport similitude complète avec les mem- bres antérieurs. Le pouce est court et faible, quoique plus dé- gagé qu'aux pattes de devant; les trois doigts médians sont, au contraire, longs et forts, le médius ne dépassant que de très peu le second et le quatrième. Quant au cinquième doigt, il est presque aussi développé que les précédents; mais au lieu de suivre la même direction qu'eux et de venir se ranger le long de la face externe du quatrième doigt, il s’en écarte et ses dernières phalanges viennent se replier en dedans vers la face plantaire : comme le dit M. Barboza du Bocage (1), «il est opposable aux autres doigts, » et nul doute que ce mode d’articulation tout spécial ne lui permette, en effet, de jouer le rôle de pouce externe, si l’on veut bien me permettre d’ac- coler l’un à l’autre ces deux mots contradictoires et s’excluant mutuellement. La région tarsienne présente une élongation notable ; la plante est renforcée de six bourrelets arrondis, dont les deux postérieurs sous-tarsiens sont notablement moins développés que les quatre sous-articulaires des orteils. Parmi les espèces connues du genre, c’est du D). mela- notis (À. Smith) que le D. Pecilei se rapproche le plus sous le rapport de la coloration du pelage, et l’on ne peut guère signaler comme différence que l'absence de tache noire en avant de l’œil chez le D. Pecilei. Les dimensions de la tête et du corps sont à peu près égales chez ces deux espèces, mais, par contre, comme on peut le voir par les mesures comparatives réunies dans le tableau suivant, la longueur de la queue est bien inférieure chez le D. melanotis. Enfin, comme dernier caractère distinctif, je rappellerai que les oreilles présentent une brièveté relative chez le D. Pecile:. Sur l’exemplaire type (b) conservé dans l’alcool, la longueur de l'oreille est de 11 millimètres tandis que, sur un exem- plaire desséché de D. melanotis de la collection du Muséum, cette même mesure est de 15 millimètres. Une autre espèce (1) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. e natur. Lisboa, 2 série, n° 5, p. 8, 1890. 390 E. DE POUSARGUES. abyssinienne, le 2. pallidus, paraît également voisine du D. Pecilei, autant du moins qu’on en peut juger par la courle descriplion d'Heuglin (1); mais il y a entre ces deux types un écart inverse et plus accentué qu'entre le D. mela- notis etle D. Pecilei dans les proportions relatives de la queue qui est beaucoup plus longue que le corps chez le D. pallidus. Mesures en millimètres. D. Péciret D. MELANOTIS D. PALLIDUS Longueur de la tête et du corps..... 72 wir 62 -—- dela quèeme.ess 15 60,5 |81 (incomplète) — du pied (du calcanéum à l'extrémité de la griffe | | CNÉIMSER AP ANSE ES 18 | | Le genre Dendromys ne compte que peu d'espèces, dont quelques-unes assez douteuses, et n’est encore représenté dans les collections que par de rares spécimens ; il serait donc prématuré de fixer dès à présent l’importance qu'il faut attribuer à ces différences de proportions. Ainsi, Smuts (2) rapporte au même type D. mesomelas (Bts.) deux spécimens dont l’un a la queue plus longue, l’autre plus courte que la tête et le corps. On est tout aussi indécis en ce qui concerne les dissemblances dans le pelage, et c’est encore un pro- blème non résolu (3) que celui de l'identité ou de la distinc- tion spécifique du D. pumilio (Wagn.) et du D. mesomelas (Brants.), cette dernière espèce caractérisée par la présence d’une bande noire dorsale, l’autre n’en présentant aucune trace. Les expiorations ultérieures pourront seules fournir les documents nécessaires pour établir s’il faut réellement distinguer le Ÿ. Pecilei du D. melanotis et du D. pallidus, ou fusionner ces espèces en une seule dont l'aire de répartition (1) Heuglin, Reise Nordost Afrika, 2° partie, p. 74, 1871. ; (2) Smuts, Enumeratio Mamm. capens., p. 40, 1832. (3) O0. Thomas, Proc. Zool, Soc. London, p. 503, 1893. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 391 serait dès lors considérable et s’étendrait sur toute l'Afrique centrale et australe, depuis le Congo et l’Abyssinie jusqu’au Cap. Les mœurs des Dendromys sont, au contraire, bien con- nues, Leurs habitudes arboricoles, signalées par A. Smith, ont été atteslées depuis par beaucoup d’explorateurs, et Heuglin (1) affirme avoir trouvé de ces Rongeurs dans des nids de Tisserins. La conformation des pattes, sur laquelle j'ai msisté plus haut, ne fait que confirmer l’exactitude de ces observations. D'autre part, d'Anchieta (2) rapporte que ces petits Rats vivent dans des terriers à plusieurs entrées où, suivant Smith, ils cherchent un refuge lorsqu'ils sont menacés. Cette autre particularité de mœurs ne fournit-elle pas une expli- cation très plausible de la singulière structure operculée de l'oreille, sur laquelle j'ai également attiré l'attention? Le régime des Dendromys n’est pas exclusivement végétal, et, au besoin, ils ne dédaignent pas les araignées, les insectes et les tout jeunes serpents, même venimeux (3). GENRE STEATOMYS 14. STEATOMYS OPIMUS. (NOV. Sp.) Steatomys opimus. De Pousargues. Bull. Soc. Zool. de France, p. 131, t. XIX, 1894. a. adulte. M. J. Dybowski, 13 décembre 1891. Balao, pays des Dakoas. b. © vieille. — — Le genre Steatomys, créé par Peters en 1846, ne compte encore que trois espèces peu nettement différenciées les unes des autres : la première S4. pratensis (4) — edulis (5) (Pet.), (1) Heuglin, loc. cit. (2) Barboza du Bocage, loc. cit. (3) Fix, Anecdote of a Mouse (D. melanotis) and a Ringhals Snake (Sepedon hemachates). (Proc. Zool. Soc. London, p. 341, 1887.) (4) W. Peters, Bericht der künig. preuss. Akad. der Wiss. Berlin, p. 25 1846. (5) W. Peters, Reise nach Mossambique. Zool. Saugethiere, p. 163, 1852, 399 KX. DE POUSARGUES. type du genre, provenant du Mozambique ; la seconde St. Krebsi (1) (Pet.), de l’intérieur de la Cafrerie, qui, sui- vant O. Thomas, ne différerail pas spécifiquement he la pre- mière (2); la troisième Sf. Pocagei (Thos.), de l’Angola, considérée d'abord par M. Barboza du Bocage (3) comme une simple variété géographique du S{. pratensis, dont M. O. Thomas (4) l’a ensuite distinguée à cause de ses dimensions plus grandes et du nombre différent de ses mamelles. Ces trois espèces présentent entre elles de très grandes analogies de pelage; sous ce rapport, les spécimens de l’Oubangui ne font pas exception et, comme leurs repré- sentants sud-africains, possèdent ce que l’on pourrait appeler la livrée de famille. Mais, chez eux, la taille est beaucoup plus forte ; la queue, au contraire, relativement plus courte et le nombre des mamelles notablement plus élevé. La valeur de ces caractères m'a paru suffisante pour distinguer spéci- fiquement cette forme nouvelle sous le nom de Séeatomys opimus . Des deux individus capturés par M. J. Dybowski, l’un (a) est un mâle encore jeune, bien qu'adulte, comme on le verra plus loin d’après l’étude de la denlition; l’autre (6), une femelle très vieille, dont les dimensions données ci-après peuvent être considérés comme représentant la taille maxi- mum qu'atteint l'espèce. Ces deux peaux, en très mauvais état de conservation, mais complètes, justifiaient pleinement le choix du nom de Steatomys (5) (Fettmaus), fait par Peters, car il fallut leur faire subir une préparation toute spéciale pour les débar- rasser de l’énorme quantité. de graisse dont elles élaient imprégnées. Le pelage, très doux au toucher, présente sur le dessus du 1} W>Peters, 2014... 165, 4852 2) O. Thomas, Ann. Mag. natur. history, 6° série, vol. X, p. 264, 1892. (3) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. natur. Lisboa, 2° Série, te 5 17, p. 17, 1890. (4) 0. Thomas, loc. cit. (5) Steatomys, oteap, suif, lard ; uus, rat. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 393 corps une teinte d’un brun chocolat sombre, qui s’éclaireit un peu sur les flancs et passe au roux de rouille sur le dessus et les côtés de la tête et du museau. Les poils, d'un gris ardoisé bleuâtre sur la moitié de leur longueur à partir de la racine, sont ensuite marqués d’un large anneau brun roux plus ou moins foncé suivant les parties du corps, et ont, pour la plupart, leur pointe brun noirâtre, sauf sur le dessus de la tête où l’anneau roux occupe toute la moitié distale des poils. L’extrémité du nez, le bord de la lèvre supérieure, tout le dessous du corps, depuis le menton jusqu'à l'anus, et la face interne des membres sont revêtus de poils plus rares, plus courts et d’un blanc pur jusqu’à leur base. Les moustaches, médiocrement longues, sont formées de soies nombreuses el fines, les inférieures blanches, les supérieures brunes. Les oreilles, de longueur moyenne et arrondies au sommel, offrent un revêtement de poils d'un brun sombre, courts et clairsemés, sauf le long des bords inféro-interne et supéro-externe, où ils sont plus développés et plus fournis et forment une zone marginale assez large et bien velue. Les pattes antérieures et posté- rieures sont faibles et courtes, couvertes de poils d’un blanc jaunâtre légèrement lavé de brun sur la région tarsienne. La queue, dont la longueur égale à peine le tiers de celle de la tête et du corps, est conique, finement et régulièrement annelée, et garnie de poils courts mais serrés, brun noirâtre au dessus, plus clairs et grisâtres en dessous. Aux pattes antérieures, le pouce est complètement atrophié et ne laisse apercevoir qu'un petit ongle plat sessile. Les autres doigts sont bien développés, le médius Le plus long, le deuxième et le quatrième un peu plus courts et presque égaux, le cin- quième présentant les mêmes proportions que dans le genre Mus lype. Ces quatre doigts sont terminés par des griffes longues, à peine recourbées et fortement comprimées lalé- ralement en lames au-dessous de leur arête supérieure for- mant bourrelet. A leur face inférieure, elles sont tranchantes et à peine évidées en cuiller à leur extrémité. Aux pattes posté- 394 E. DE POUSARGUES. rieures, les doigts sont conformés suivant le {type Mus pro- prement dit, et les griffes qui les terminent {ous, sont moins longues et plus courbes qu’aux pattes antérieures. Il m'a été impossible, sur ces exemplaires desséchés, de bien déter- miner la disposition des bourrelets plantaires ; le sous-tarsien interne m'a paru de forme oblongue et moins rapproché de l'externe que chez le Sf. pratensis. Il est à remarquer que la région calcanéenne est assez bien velue. Sur les crânes, dont malheureusement toute la portion postérieure manque, je n'ai remarqué aucune trace de liséré sus-orbitaire. Les lrous sous-orbitaires, très ouverts dans leur portion moyenne, sont aussi larges en bas qu'en haut ; quant aux trous incisifs, ils sont larges, à bords externes fortement arqués, et se pro- longent en arrière jusqu’au niveau du milieu de la première molaire. La dentition répond rigoureusement à la description si précise de Peters, et dénote une étroite parenté entre les genres Stealomys, Dendromys et Deomys, si différents pour- tant par leurs formes extérieures. Chez la femelle (4), la couronne des molaires, fortement usée, ne laisse plus aper- cevoir que des traces informes de leur structure primitive. Au contraire, sur le mâle (a) qui nous servira de type pour la description qui va suivre, les tubercules des molaires, parfaitement intacts et à crêtes tranchantes, indiquent les débuts de l’âge adulte. Les incisives supérieures d’un jaune orange sont très recourbées et creusées sur leur face anté- rieure, le long du tiers externe, d’un sillon étroit mais pro- fond et nettement délimité. La première molaire, plus longue à elle seule que les deux dernières ensemble, présente six tubercules principaux, disposés suivant la longueur en trois paires consécutives, dont la deuxième est renforcée inté- rieurement d'un tubercule secondaire moins développé mais très visible. La deuxième molaire supérieure compte deux paires de tubercules principaux, faisant suite à ceux de la première molaire, le tubercule externe de la paire postérieure est peu développé; quant à la paire antérieure, elle présente un lubercule secondaire à son flanc interne ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 9399 et un faible talon antéro-externe. La troisième molaire supérieure n’est qu'indistinctement bituberculée et très- réduite. À la mâchoire inférieure, les incisives sont longues, étroites et sans sillon, leur teinte jaune antérieure est à peine plus pâle que celle des incisives supérieures. Les mo- laires sont un peu moins longues, mais ont entre elles les mêmes proportions relalives que les supérieures et, comme elles, divergent fortement en avant. La première est formée de trois replis transversaux, le premier unicuspide, les deux aulres bicuspides. La deuxième molaire ne compte que deux replis transversaux bicuspides et la troisième est simplement bituberculée. En arrière de chacune des deux premières molaires inférieures se trouve un petit tubercule médian, ou plutôt un talon formant pont entre deux dents consécutives. Ce mode de dentition est exactement calqué sur celui des Den- dromys et des Deomys ; les seules différences appréciables consistent dans la forme nettement bicuspide du premier repli transversal de la première molaire inférieure chez les Deomys et dans une indépendance bien marquée des tuber- cules chez les Dendromys et les Deomys. Chez les Steatomys, les tubercules sont visiblement contluents, de telle sorte que les molaires paraissent plutôt formées de replis transversaux bilobés. Le nombre des mamelles chez le Séeatomys opimus est considérable, et, sur la femelle (6), je n’en ai pas compté moins de seize réparties, depuis la poitrine jusqu’à l’aine, en huit paires régulièrement espacées, dont deux pectorales, quatre ventrales et deux inguinales. La formule mammaire chez la nouvelle espèce (2 + 4 + 2), diffère donc notable- ment de celle du Sf. pratensis qui n’a que dix mamelles (1 +2 + 2), et plus encore de celle du Sf. Bocagei qui n’en a que huit (1 + 1 +2). D'autre part, comme on pourra en juger d’après les mesures comparatives réunies dans le {ableau suivant, la taille du Sf. opimus l'emporte de 53 mil- limètres sur celle du S7. Bocagei et de 60 sur celle du St. pratensis. Par contre, ainsi que je l’ai déjà signalé plus 396 E. DE POUSARGUES. haut, la queue se fait remarquer par son extréme brièveté ; d'où résulte une différence très sensible dans les propor- Lions. Aïnsi, le rapport de la longueur de la queue à celle de la tête et du corps est d'environ 1/2 chez le Sf. pratensis et pluschezle St. Bocagei ; il tombe à 1/3 chez le Sf. opimus. Tels sont les caractères différentiels dont la valeur indiscutable me paraît militer en faveur de la distinction spécifique du Sfeatomys opimus, malgré la grande simi- litude de coloration que le pelage présente avec celui des espèces d'Angola et de Mozambique. Ce cas de mimétisme n'est, du reste, pas isolé chez les Muridés africains. Tout récemment, M. Tycho-Tullberg (1) a signalé une complète ressemblance, pour la coloration du pelage, entre le Mus hyporanthus (Puch.)et le Mus Anchetæ (Boc.); cette dernière espèce ne différant de la première que par sa taille plus grande et ses mamelles moins nombreuses et autrement placées. On peut en dire autantdes Mus maurus (Gr.) et Mus angolensis (Boc.); parfois aussi, des espèces appartenant à des genres ou sous-genres différents revêtent presque la même livrée et présentent la même conformation des mem- bres, comme c’est le cas pour Golunda fallax (Pet.) et Mus (/somys) dorsalis (A. Smith). Le Steatomys opimus a été rencontré par M. J. Dybowski près de Balao, au Nord du coude de l’Oubangui, dans le pays des Dakoas, par 5°,26° de latitude Nord et environ 17°,40° de longitude Est. (4) Tycho-Tullberg, Muriden aus Kamerun. Stockholm p. 31, 1893. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 397 2 £ = E ST. OPIMUS F © 2 —— ——— E O En Mesures en millimètres. 2,2 8 £ © ES ur Pb es | Longueur de la tête et du corps.......... 90 97 122 150 S. dehfquede 2: 2. ST ERR 2 : 42 57 40 44 Rapport entre ces deux dimensions....... 0,466 | 0,587 | 0,327 | 0,293 Longueur du pied (griffes comprises)..... SRE 18 20 Hauteur de Fareillé 29-21. £14.20mRE 1# 11,4 15 16 HHeUEUL des oS naSAUx....... 7 12.. 9,9 à: 11 12 = LS FOR. JR » » ÿ, » — nu Re D'ATIÉERUXE 24,04 PAUSE » » 5 » — HÉSNTTOUSAINGISLISS Le Reed 4,8 D 5 6 — de la série des molaires supé- RIERRES OR Su de. Red ER 3,8 4,4 5 b) RENE JON OR" 6,3 1e d 8 Longueur de la mandibule du condyle à la symphyse LCR Re MEME CE EE » Longueur de la série des molaires infé- GENRE LOPHUROMYS. 75. LOPHUROMYS siKAPUSI. (Tem.) Mus sikapusi. Temminck. Esq. zool. Guinée, p. 160, 1853. Lasiomys afer. Peters. Monatsb. Akad. Berlin, p. 109, pl., fig. 5-8, 1866. Lophuromys afer. Peters. p. 234, 1874. — sikapusi. O. Thomas. put Zool. Soc. non p. 13, 1888. —— — Jentink. Not. f. Leyden Mus., vol. %, P. 22, 1888. = afer. Tycho-Tullberg. Muriden aus Kamerun, P. 38, 1893. Tab. I, fig. #7 à 56. Taf. IL, fig. 10, 29 à 34. Taf. IV, fig. 43, 14, 21. a. ÿ semi-adulle. M. de Brazza. Congo français, 1885. b. Œ adulte. M. J. Dybowski. Poste de la Mission, haute Kemo, février 1892. Dans son récent travail sur les Muridés du Cameron, M. Tycho-Tullberg a soulevé une question qui ne manque pas d’intérêl, c'est celle de savoir si le Mus sikapusi de Tem- minck est identique au Lophuromys afer de Peters. Déjà, en 1888, M. Jentink avait résolu cette question par l’affir- mative. Pour le savant directeur du Musée de Leyde, les deux espèces n’en font qu'une à laquelle il conserve la déno- *) 398 E. DE POUSARGUES. minalion générique de Lophuromys proposée par Peters: mais qui, suivant la loi de priorité, doit prendre le nom spécifique de sikapusi créé par Temminck. Malheureu- sement, comme M. Tycho-Tullberg le fait observer avec juste raison, M. Jentink ne donne aucun argument pour élayer son assertion. D'autre part, suivant M. Tycho- Tullberg, 11 serait tout à fait impossible d'identifier les deux espèces pour les raisons suivantes : « D'abord, écrit le savant suédois, le Mus sikapusi est notablement plus fort ; sa longueur totale est de 7 pouces, soit environ 190 milli- mètres, landis que mes plus grands spécimens dépassent à peine 150 millimètres, la queue comprise. De plus, Tem- minck indique la couleur du dessus corps chez le 17. sikapust comme tout à fait semblable à celle de la Souris d'Europe, c'est-à-dire gris sombre mêlé de roussâtre, tandis que les teintes, chez les spécimens de L. afer que j'ai examinés, ne peuvent nullement être indiquées comme mêlées de rous- sâtre. Enfin, Temminck ne donne aucun détail sur la den- tition et le mode de conformation des pieds, organes qu'il est si important de connaître pour l'identification de l'espèce. Au contraire, la description de Peters est parfaitement dé- taillée, et elle s'adapte si bien à tous mes spécimens que, pour l'exactitude, je m'en suis tenu à la dénomination spé- cifique afer créée par cet auteur. » Je ne veux pas insister ici sur les inconvénients qui résul- teraient de l’application d'une méthode aussi rigoureuse. S'il fallait réformer tous les noms spécifiques basés sur des descriptions incomplètes (1) et, souvent même, moins satis- faisantes encore que celle de Temminck, ce serait un véri- table bouleversement dans la nomenclature zoologique actuel- lement admise. On ne-peut nier que la description du Mus (4) Pour ne citer qu’un exemple d’un cas tout à fait analogue à celui qui nous occupe, et sur lequel j'ai déjà attiré l'attention : la plupart des au- teurs sont d'accord pour n’admettre l’Ofolicnus Peli (Tem.) que comme sy- nonyme du Gal. Hemigalago Demidoffi (Fisch.), bien que la description de Temminck soit autrement complète que la diagnose superficielle donnée par Fischer. | ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 399 sikapusi ne soit des plus sommaires, mais Je ne la crois pas tellement insuffisante qu'elle ne permetle de reconnaitre sans trop de difficulté l'animal qu’elle désigne, et qu'il faille rejeter la dénomination spécifique choisie par Temminck. Du reste, les différences dans la coloration du pelage entre le Mus sikapusi etle Lophuromys afer ne sont pas aussi tran- chées que M. Tycho-Tullberg paraît le supposer. « Les nuances plus ou moins foncées de gris noirâtre mêlé de rous- sûtre » (Tem.) doivent par leur fusion intime donner une teinte uniforme (Tem.) très analogue au brun sombre lavé de brun olive, « ernfarbig dunkelbraun mit einem Anstrich von olvenbraun » (Tych.-Tullb,)}, ou au brun de rouille sombre, « dunkelrostbraun » (Peters). À part cette diver- gence, due à l'erreur d'interprétation que je viens de signaler, 1l y a concordance complète dans les descriptions des trois auteurs précités. Chez le Mus sikapusi comme chez le Lophuromys afer, la portion basale des poils du dessus du corps est plus claire et d'un roux jaunâtre semblable à la teinte du pelage des parties inférieures. Le dessus des pattes est de même couleur que le dos; les ongles sont blancs et les oreilles courtes, arrondies et à peine velues extérieurement. Si, d'autre part, on constate un léger écart, 3 centimètres, entre les dimensions du 7. sikapusi et celles du L. afer (1), par contre, il existe dans les propor- tions relatives des diverses parties une similitude incontes- lable qui autorise à supposer qu'aucun des exemplaires examinés par Peters et Tycho-Tullberg n’était parvenu à son état de complet développement. En effet, en comparant entre elles les mesures qui ont été données du A. sikapusi et du L. afer, on trouve que la queue est toujours sensiblement plus courte que la tête et le corps, el que sa longueur oscille, pour l’un et l’autre type, entre les 2/7 et les 3/7 de la longueur totale, ce qui ne constitue qu’une différence (1) Mus sikapusi. Longueur de la tête et du corps 5 pouces, soit à peu près 435 millimètres (Temminck). — Lophuromys afer. Longueur de la tête et du corps 105 millimètres (Peters). 400 E. DE POUSARGUES. négligeable. Enfin on doit, à mon avis, prendre en sérieuse considération le témoignage de M. Jentink. Le savant directeur du Musée de Leyde avait sous la main les cotypes (1) du Mus sikapusi; et il est impossible de supposer qu'un observateur aussi consciencieux ait négligé de les comparer avec la description de Peters avant de se pro- noncer d'une façon aussi catégorique. Toutes ces preuves me paraissent suffisantes pour justifier la réunion spécifique du L. afer au M. sikapusi, et sur ce point je ne puis que me ranger à l'avis de M. Jentink. La nomenclature des Muridés africains n’est déjà que trop surchargée ; 1l serait réellement regrettable de ne pas pro- fiter de toutes les occasions qui se présentent de la simplifier. Les éliminalions de noms spécifiques à double emploi, lors- qu'elles s’appuient sur des arguments sérieux, ne peuvent que tourner au profit de la science; et nous verrons plus loin, à propos du Mus maurus (Gr.), que M. Tycho-Tullberg a su parfaitement mettre en pratique ce précepte d'Ogilby(2), à savoir que l'identification d’une ancienne espèce, d'abord imparfaitement décrite, est plus utile que la découverte de vingt types nouveaux. Grâce aux mémoires de Peters et de M. Tycho-Tullberg, le Lophuromys sikapusi se trouve donc parfaitement déter- miné et, sur les deux exemplaires ci-dessus indiqués, J'ai pu constater l'exactitude des observations de ces deux zoolo- gistes. (4) Lophuromys sikapusi. (Temminck.) a) Femelle adulte montée, un des types de l'espèce (crâne b du Cat. Ostéol.) c) Individu monté jeune de la femelle (a), un des types de l'espèce. d) Très jeune individu monté, un des types de l'espèce. Jentink, Mus. Pays-Bas. Cat. systém. Mamm., vol. XII, p. 52. Leyde, 1888. (2) « M. Ogilby observed that the re-discovery of an old species was at all times more gratifying to him, and he considered more beneficial to the science of zoology than the original description of twenty that were new, because, whilst it equally added an authentic species to the substantive amount of our knowledge, it had the further merit of dispelling the many doubts and surmises which unavoidably obscured the subject. » Proc. Zool. Soc. London, p. 102, 1836. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 401 Chez le L. sikapusi, la tête est longue et le museau pointu. Sur le crâne, on ne trouve presque aucun indice du liséré sus-orbitaire, et les trous sous-orbitaires sont élargis dans leur portion inférieure. Les incisives supé- rieures sont lisses. Les deux séries des molaires supérieures, disposées presque parallèlement, présentent encore la forme propre aux Muridés proprement dits, mais on y observ: une certaine tendance à la disposition bisériée des tuber- cules par suite de la réduclion, comme nombre el comme volume, des tubercules latéraux internes. Aux pattes anté- rieures, le pouce est atrophié et muni d’un ongle plat, le doigt externe est bien développé et garni d’une griffe ; le deuxième et le quatrième sont à peu près égaux, mais de longueur moindre que le médius, et {ous trois présentent à leur extrémité une griffe très allongée et presque droite. Aux pattes postérieures, les griffes qui garnissent tous les doigts sont plus courtes et plus recourbées qu'aux membres antérieurs ; le doigt externe est à peine plus long mais plus robuste que l’interne; le deuxième et le quatrième sont égaux et un peu plus courts que le médius. La plante ne pré- sente que cinq bourrelets arrondis, dont quatre sous-arli- culaires des orteils et le cinquième plus fort près du bord interne du métatarse. Suivant M. Tycho-Tullberg, les femelles chez celte espèce n’ont que six mamelles, deux paires pectorales et une ingui- nale. Le L. sikapusi n'avait d’abord été rencontré que le long des côtes de la Guinée et du Gabon, maisl’examen des impor- {antes collections mammalogiques rassemblées dans ces der- nières années par Emin-Pacha(1) dans l'Afrique équatoriale a permis de reporter la limite orientale de l'aire de répar- tilion de cette espèce jusque dans le Nord-Est du bassin du Congo, à Gadda, district de Monbuttu. L'exemplaire recueilli par M. J. Dybowski sur les bords de la Kemo présente un (1) O. Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p. 13, 1888, ANN. SC. NAT. ZOOL. : Ill, 26 402 | E. DE POUSARGUES. réel intérêt, en raison de la situation intermédiaire de cette localité entre les deux stations extrêmes que je viens de signaler. Le L. sikapusi n'a jamais été vu au Sud du Congo. On ne connaît, jusqu’à présent, que deux espèces de Lophuromys, le L. sikapusi et le L. flavopunctatus (Thos.) (1) du Choa, et les affinités de ce genre sont encore mal défi- nies. Alston (2) le rangeait dans sa sous-famille des Den- dromyinæ, à côté du genre Steatomys (Pet.). M. O0. Thomas (3) le place, avec plus de raison je crois, proche des genres Saccostomus (Pel.) et Cricetomys (Wath.). GENRE CRICETOMYS 76. CRICETOMYS GAMBIANUS. (Wath.) Cricetomys gambianus. Waterhouse. Proc. Zool. Soc. London, p. 2,1840. Rivière Gambie. — — Rüppell. Mus. Senkenb. Bd. III, Heft. 2, 1842. Sierra-Leone, Kordofan (?). Mus goliath. Rüppell. Mus. Senkenb., pl. IX et X. Sierra-Leone, Kor- dofan (?) | Cricetomys gambianus. Fraser. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 51, 1843. Fer- nando-Po. — — Temminck. Esq. zool. Guinée, p. 168, 1853. Guinée. — — Peters. Reise nach. Mosambique, p. 169, 1852. Quilimane. — — Speke. Proc. Zool. Soc. Lond., p. 268, 1861. Zan- zibar. — — Peters. Monatsber. Akad. Berlin, p. #81, 1876. | Gabon. _— — Noack. Zoolog. Jahrbuch., p. 240, 1887. Marungu- Urua. — — O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London., p. 10, 1888. Monbuttu, lac Albert-Nyanza. — _ Jentink. Not. fr. Leyden Mus., p. 42, 1888. Liberia. _ — Barboza du Bocage. Jorn. Sc. natur. Lisboa, 2e sé- rie, n° 5. Extrait, p. 9, 1890. Angola, Mossamedes. — — O. Thomas. Proc. Zool. Soc. London, 1892, p. 550, 1893, p. 503, 1894, p. 142. Zomba, Nyassa-land. — — Tycho-Tullberg. Muriden aus Kamerun, p. 45, pl. IL et III, 1893. Cameron. (4) 0. Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p. 14, 1888. (Note.) (2) Alston, ibid., p. 82, 1876. (3) 0. Thomas, ibid., p. 503, 1893. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 403 a. © adulte. M. Guiral, 1885. San-Benito. db. Œ — M.J. Dybowski, 6 août 1891. Brazzaville. CHE — — — — 2 — — 18 décembre 1891. Village de Zougi. e Q. — — 2 janvier 1892. Bangui. f.Œ — — 9 janvier 1892. — HI == 4e mars 1892. O1, — — — Me — 2 mars 1892. Poste de la Mission sur la j. qsemi-adulte. — 5 mars 1892. Kemo. k. jf adulte. — 6 mars 1892. l. © semi-adulte. — — Par l’élongation considérable du museau, la conformation assez particulière des molaires (1), la forme arrondie du trou sous-orbitaire, la présence d’abajoues et le dévelop- pement des doigts latéraux aux pattes postérieures et du doigt externe aux pattes antérieures, ces Rats géants méri- tent à juste titre d'être séparés des Mus proprement dits pour former une coupe générique spéciale, et le nom de Crice- tomys, sous lequel on les désigne, explique parfaitement leurs doubles affinités avec les Hamsters d'une part, avec les Rats de l’autre. Waterhouse, Rüppell et, après eux, les nombreux auteurs désignés dans la longue synonymie ci- dessus, ont suffisamment insisté sur les principaux carac- tères de l’unique espèce de ce genre pour qu'il soit inutile d'y revenir, et tout récemment M. Tycho-Tullberg a donné sur sa dentition des détails très complets et si précis qu'il ne reste aucune observation à faire sur ce sujet. Je ne ferai que mentionner ici les principales variations que présentent la longueur et la coloration du pelage chez les nombreux spécimens recueillis par M. Dybowski pendant le cours de son voyage d'exploration à travers le Congo français et la: région de l’Oubangui. Certains individus (b, c) ont le pelage court, serré, brillant ; sur le milieu du dessus de la tête et du corps, il est brun {1) Alston (Proc. Zool. Soc. London, p. 83, 1876) indique par erreur le genre Cricetomys comme ayant les incisives supérieures creusées d’un sillon; ni Waterhouse, ni aucun autre auteur n’a signalé cette particula- rité, et tous les spécimens que j'ai pu examiner ont les incisives supé- rieures complètement lisses. 404 E. DE POUSARGUES. foncé, puis passe graduellement au jaune d’ocre clair sur les côtés de la tête et du cou, les flancs et la face externe des membres. La coloration d’un blanc pur du dessous du corps se sépare suivant une ligne nettement tracée de la teinte des parties supérieures. J’ai constaté les mêmes parti- cularités sur l’exemplaire (d) capturé cinq mois après les précédents. D’autres individus (e, j, g, j) ont le pelage exac- tement coloré comme celui des précédents, mais beaucoup plus long, plus souple et moins brillant. Enfin, dans une troi- sième catégorie comprenant les exemplaires (4, à, #, l), les poils sont longs, assez rudes, d’un brun grisâtre liqueté de jaune pâle sur le dessus du corps, un peu plus clair sur les flancs et passant au gris jaunâtre sale sur le dessous du corps sans que l’on puisse trouver aucune ligne de démar- cation entre ces différentes teintes. Les spécimens de cette dernière catégorie ont la queue fortement velue; les poils qui la recouvrent sont si longs et si serrés qu'ils masquent pour ainsi dire complètement les écailles sous-jacentes. Cette particularité rend bien pius nette et plus frappante la double coloration de l’appendice caudal, d’un blanc pur dans sa moitié distale, d’un brun sombre presque noir dans sa moilié basale. Chez les autres individus, les poils de la queue sont beaucoup moins nombreux et moins longs, et le revêtement squameux se trouve tout à fait à découvert. Chez cerlains même, les poils sont si rares et si courts que la queue paraît aussi glabre que chez le Rat ordinaire, et sa double coloration est à peine sensible. La teinte blanche de la moitié distale serait même complètement inappréciable si les écailles qui recouvrent cette partie ne participaient pas, dans une certaine mesure, de la coloration blanche des rares poils qui la garnissent. La teinte brun marron du dessus des pattes offre également de très grandes varialions d’étendue et d'intensité. Tantôt elle est extrê- mement vive et brillante, tantôt sombre et terne; parfois elle occupe toute la largeur du iarse, du métatarse et des premières phalanges, et ne respecte que l'extrémilé des ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 405 doigts d'un blanc argenté; parfois, au contraire, cette der- nière teinte devient prédominante et on ne distingue plus sur le larse qu'une bande médiane brun marron, étroite, irrégulière, plus ou moins entamée et même interrompue par l’envahissement des bandes blanches latérales. Ainsi que le faisait remarquer M. O0. Thomas pour les spécimens de la collection d'Emin-Pacha, ces variations dans la livrée ne paraissent dépendre ni du sexe, ni de l’âge, ni de l’époque de la capture des individus, mais plutôt des différences dans l’altitude, la nature du sol et le régime cli- matérique de leur région d'habitat. Les mamelles, chez cette espèce, sont au nombre de huit dont deux paires pectorales et deux paires inguinales ; les régions ventrale et abdominale sont totalement dépourvues d'organes de lactation. Cette disposition, assez rare chez les Muridés africains (1), cons- üitue ce que Temminck appelait très judicieusement un double appareil mammaire et peut se rendre par la formule (2 + 0 + 2). Pour ce qui regarde la distribution géographique du _ Cricetomys gambianus, les diverses provenances que j'ai préféré indiquer dans la synonymie, pour ne pas surcharger cet article, me-.dispenseront d’y insister longuement, et je ne ferai ici que résumer ces nombreuses données. En pre- nant les points extrêmes signalés par les auteurs, on cons- tate que l’aire de dispersion du Cricetomys gambianus est immense. Celle aire occupe en longitude toute l'Afrique centrale d’une côte à l’autre, et même quelques îles du lit- toral, et s'étend depuis le Sénégal et le Kordofan au Nord, jusqu'au Zambèze et au Cunéné au Sud, c’est-à-dire qu’elle est comprise entre le 16° degré de latitude Nord et le 18° de latitude Sud. En un mot, la zone d'habitat de cette espèce est essentiellement intertropicale. (4) On la retrouve chez le Mus Alleni (Waterh.), M. Isomys pulchella (Gr.), M. Isomys barbarus (L.), M. Isomys dorsalis (A. Smith.); mais dans ces es- pèces la double concentration de l’appareil mammaire est poussée moins loin; la seconde paire de mamelles est presque ventrale et la troisième abdominale. 406 E. DE POUSARGUES. GENRE GOLUNDA. 77. GOLUNDA DyBowskrr. (nov. spec.) Golunda Dybowskii. E. de Pousargues. Bull. Soc. Zool. de France, t. XVII, p. 163, 1893. a. œ vieux. M. J. Dybowski. Bords de la Kemo. b. adulte. — = (Le œ — La M" ROUE = LE e Œ — 2e Poste de la Mission sur la Haute Kemo. Le terme générique Golunda est ici employé dans l’acception que lui a donnée Blanford (1) et que lui ont reconnue la plupart des auteurs (2). L'expression Pelomys (3) (Peters), de création plus récente, doit en être considérée comme synonyme. Les caractères propres à ce sous-genre ont élé délimités de la façon la plus nette par Peters dans la diagnose suivante : « Dentes incisini superiores sulcati, mo- lares Muris sed latores, habitus externas Muris sed digitus anticus externus brenis teqularis, digiti postici laterales æquales. » Celte forme intéressante et toute particulière des Muridés est représentée dans les collections de M. J. Dy- bowski par les cinq spécimens ci-dessus énumérés, lesquels, par leurs fortes dimensions et d'autres particularités dont l'exposé fera l’objet de cet article, me paraissent différents des quatre espèces connues de ce groupe, deux asiatiques, Golunda Ellioti (Gr.) (4) et Golunda meltada (Gr.) (5) et deux autres africaines, Golunda fallazx (6) (Pet.) et Golunda Cam- panæ (1) (A. M.-Edw.). Dans cette nouvelle espèce, Golunda Dybowskü, comme chez les autres représentants du genre, les pattes anté- (4) Blanford, Proc. As. Soc. Bengal., p. 181, 1875. Id., Journ. As. So. Bengal, p. 165, 1876 et 1877, p. 292. + Di (2) O. Thomas, Proc. Zool. Soc. London, p. 11, 1888. Tycho-Tullberg, Ueber einige Muriden aus Kamerun, p. 25, 1893. (3) Peters, Reise nach Mossambique, p. 157, pl. XXXIIT et XXXV, fig. 9, 1852. (4) Gray, Ann. nat. Hist., X, p. 264, fig. 3, 1842. (5) Gray, Ann. nat. Hist., X, p. 26%, fic. 3, 1842. (6) Peters, loc. cit. (7) Huet, Le Naturaliste, p. 143, 1888. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 407 rieures sont faibles et pour ainsi dire réduiles aux trois doigts médians. Le pouce tout à fait rudimentaire con- siste en un petit tubercule muni d’un ongle plat; le doigt externe est également frappé d’atrophie ; ses dimensions dé- passent à peine celles du pouce et l’ongle qui le termine est plat comme chez ce dernier. Des trois doigts médians nor- malement développés et munis de griffes, l’index est le plus court et le quatrième égale presque le médius. Par contre, les pattes postérieures sont longues et fortes ; le pouce et le doigt externe, bien développés, sont insérés au même niveau et présentent sensiblement les mêmes dimensions; le deuxième et le quatrième doigt sont longs, égaux et à peine inférieurs au médius. Tous les cinq sont terminés par des griffes beaucoup plus fortes qu'aux paltes antérieures, mais présentant la même coloration, jaune à la base, brune à l'extrémité. La plante, d’un brun presque noir, est garnie de six bourrelets comme chez le G. Ellioti ; le bourrelet ex- terne de la dernière paire sous le métatarse est excessivement réduit, il manque même à l’une des patles postérieures de l’exemplaire {c) dont la plante présente exactement la configuration donnée par Peters pour le G. fallax. Le G. Duybowsku est de grande taille, et comparable sous ce rapport au Surmulot. Des cinq exemplaires recueillis par M. Dybowski, le plus développé, très adulle et même vieux à en juger par l'usure de ses molaires, mesure 230 milli- mètres du bout du museau à la naissance de la queue, et le plus petit 175 millimètres. Les oreilles, de longueur moyenne, arrondies au sommet et aussi larges que longues, sont recouvertes de poils jaunes barrés de brun, clairsemés sur la face externe, abondants et serrés sur la face interne. Les moustaches sont fines, courtes, peu fournies, brun noi- râtre à la base, jaune blanchâtre à l’extrémité. La queue, un peu plus longue que les 2/3 de la tête et du corps, est noir brunâtre au-dessus, gris jaunâtre en dessous; les poils assez longs et nombreux qui la garnissent participent de la colo- ration des écailles qu’elles recouvrent. La coloration géné- 408 E. DE POUSARGUES. rale est d’un jaune roux liquelé de noir brunâtre sur les parties supérieures du corps et d’un blanc unicolore sur les parties inférieures. Le dos, la nuque et le sommet de la tête sont couverts de deux sortes de poils : les uns très minces et courts forment le sous-poil ou bourre; les autres plus longs, plus forts, irès élastiques, constituent des espèces de soies brillantes, convexes d’un côté, creusées sur l’autre d’une cannelure longitudinale bien accusée. Tous ces poils, aussi bien la bourre que les soies, présen- lent les mêmes caraclères de coloration. Certains, mais en petit nombre, sont noirs sur toute leur longueur; la plupart sont gris ardoisé bleuâtre à la base, d’un noir profond et lustré dans leur portion moyenne, puis d’un beau jaune roux près du sommet dont l'extrême pointe est le plus sou- vent d’un noir plus ou moins brunâtre. Sous une certaine incidence des rayons lumineux, les zones noires et lustrées des soies se colorent, même sur les peaux sèches, d’un reflet vert et violet pourpré du plus singulier aspect. Cette particularité se remarque d’ailleurs chez les autres Golunda africains ; M. Huet l’a signalée chez le G. Campanz, et c'est à ce même phénomène d'irisation qu'il faut attribuer la couleur brun verdâtre que Peters in- dique pour le &. fallax. Sur la partie antérieure de la tête, les joues, et la face externe et supérieure des membres, la bourre disparaît et les soies sont plus courtes, mais colorées de la même manière que celles du dos. Le bout du museau, au-dessus et de chaque côté des narines, est revêtu de poils courts, raides et hérissés, roux jaunâtre à la base, et noir brunâtre au sommet; il faut en excepter toutefois quelques poils blancs qui forment un étroit liséré immédiatement au- dessus de la peau nue des narines. Sur les flancs, les teintes deviennent moins vives; à mesure que l’on s'éloigne de la ligne médiane dorsale, les zones noires des poils finissent par disparaître et avec elles les reflets irisés ; la teinte grise basilaire diminue peu à peu d'intensité et d’étendue, les couleurs jaunes s'étendent, mais pâlissent de plus en plus ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 409 sous le lavage des teintes blanches envahissantes, et l’on ar- rive ainsi, par des transitions bien ménagées. au blanc pur du dessous du corps et de la face interne des membres. Cette teinte blanche remonte sous la gorge et le long de la lèvre supérieure qu'elle borde au-dessous de la ligne d'insertion des moustaches jusqu'aux narines, et, comme je l’ai dit plus haut, on en aperçoit une dernière mais faible trace au-des- sus de la peau nue du nez. Sur le croupion et la face posté- rieure des cuisses et des jambes jusqu'aux talons, les poils gris cendré à leur base, présentent sur le reste de leur lon- gueur une teinte d’un rouge de rouille plus ou moins ardent suivant les individus. Celte coloration particulière des par- ties postérieures du corps n’est pas rare chez les Muridés afri- cains; Temminck l'a signalée chez son Mus rufinus, elle est très fortement accentuée chez le Mus hyporanthus (Puch. et le Mus marungensis (Noack), on la retrouve chez le Mus Isomys dorsalis (A. Smith) et le Golunda Campanz, enfin j'ai relevé sa présence sur deux exemplaires de Mus Isomys pulchella (Gr.) faisant partie des collections du Muséum. Il exisle du reste une grande similitude dans la coloration du pelage entre le G. Campanæ et le G&. Dybowskiü, à tel point que cette dernière espèce pourrait être consi- dérée comme n'étant que l’état adulte de la première. Mais l'examen du crâne et de la dentition du G. Cam- panæ m'a convaincu de la complète maturité du type de celle pelite espèce. Il est plus facile de distinguer le G. Dy- howskii de l’autre représentant africain du même genre, le G. fallax. Chez ce dernier, la teinte générale est plus sombre; d’où le nom générique de Pelomys choisi par Peters. la face ventrale est de couleur gris de fer ou blanc jaunâtre sale, le croupion et la face postérieure des cuisses ne sont pas colorés d’une façon spéciale, enfin le long de la ligne médiane du dos, on remarque une raie noire dont on ne trouve aucun indice chez le G&. Dybowsku. II existe également des différences notables dans la taille respective des deux espèces. Suivant Peters, les dimensions du G. fallax varient 410 E. DE POUSARGUES. pour la tête et le corps de 115 à 170 millimètres, tandis que chez le G. Dybowsku ces mêmes mesures oscillent entre 175 et 230 millimètres; c’est-à-dire que la taille minimum de cette dernière espèce dépasse encore la taille maximum de l’autre. La série des molaires, soit inférieures, soit supérieures, ne compte chez le G. fallax que 7 millimètres de longueur, ainsi qu'il ressort des figures données par Peters ; chez tous les exemplaires de G. Dybowski cette même mesure est de 8,5 millimèlres. L'examen des molaires nous fournit encore de précieux renseignements sur les rapports de la taille avec l’âge. Les figures du (. /allax type dénotent, par les tran- chants émoussés el la couronne arrondie et lisse des tuber- cules des molaires, un animal adulte et parvenu au terme de sa croissance. J’ai pu constater les mêmes particularités sur le crâne d’un G. fallax, provenant de la côte de Zanzibar, dont la dépouille ne mesurait que 140 millimètres, la queue non comprise. Au contraire, pour le spécimen de G. Dy- bowski mesurant 175 millimètres pour la tête et le corps, les tubercules des molaires ont encore les arêtes semi- circulaires excessivement tranchantes el très aiguës des débuts de l’âge adulte. M. Barboza du Bocage (1) rapporte au G. fallax des spé- cimens de l’Angola qui manquent de la raie noire dorsale, et à ce propos, le savant naturaliste portugais s'exprime de la manière suivante : « Le G. fallax et le M. dorsalis ont les mêmes couleurs, sauf la raie noire dorsale qui appartient exclusivement à ce dernier. » Je ferai remarquer que Peters s'exprime à ce sujet d’une façon moins catégorique, et qu'il reconnaît chez son G&. fallax une raie dorsale noire vague- ment délimitée (2). J'ai pu m'assurer de la présence de ce caractère sur une dépouille de &. fallax de la collection du (4) Barboza du Bocage, Jorn. Sc. math. phys. natur. Lisboa, 2€ série, n° 5. Extrait, p. 17, 1890. | (2) « Längs der Mitte des Rückens verlauft ein undeutlich abgegrenzter schwarzer Längsstreif ». Peters, loc. cit. ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 411 Muséum. Cette raie noire n’est pas comparable comme net- telé à celle que l’on voit chez le A7. dorsalis, parce qu'elle se détache d’une facon moins tranchée sur le fond sombre du reste du pelage ; mais si indécise qu'elle soit, elle ne l’est pas assez pour qu'il soit possible de nier sa présence. Si Peters ne fait pas intervenir cette particularité comme point de res- semblance entre ces deux espèces, du moins n’admet-il d'autre part comme seul et véritable caractère distinctif que la différence des dentilions; et l’on peut avec raison supposer que l’épithète de /allax a été choisie par le célèbre zoologiste allemand, comme allusion aux trompeuses similitudes de pelage qui existent entre son Pelomys et le M. Isomys dorsals. Les Pelomys de l’Angola signalés par M. Barboza du Bo- cage, par l’absence de raie noire dorsale et par d’autres particularités de coloration, me paraissent se rapporter au G. Campanæ, en admeltant toutefois que leurs dimensions n’excèdent pas celles du G. fallax, ce que le silence de M. Barboza du Bocage sur ce point permet de supposer. Je dois encore signaler l'extrême ressemblance qui existe sous le rapport des formes el des proportions du corps el de la queue, et de la coloration du pelage, entre le &. Dybow- sku et le Dasymys Reichardi (Noack). C’est encore là un de ces cas de mimétisme, si fréquents chez les Rongeurs, qui rendent si ardue l'étude systématique des divers représen- tants de cet ordre, et qui expliquent l'erreur commise par M. Noack rangeant sa nouvelle espèce dans le genre Pelomys. La ressemblance extérieure entre ces deux formes est poussée moins loin que celle que je viens de signaler entre le G. fallax et le Mus Isomys dorsalis, qui ont les pattes antérieures conformées de la même façon, ce qui n’est pasle cas si l’on comparele G. Dyborwski au Dasymys Reichardi. A celte première marque distinctive viennent s'ajouter des ca- ractères différentiels Lirés de la dentition dont l’importance mérite que nous nous y arrêlions, puisqu'ils ont nécessité la séparalion non seulement spécifique, mais même générique de ces deux formes de Muridés. 412 E. DE POUSARGUES. Sur aucun des cinq spécimens de G. Dybowskü, la tête osseuse n'a élé entièrement préservée, et je ne puis malheu- reusement donner aucun détail sur toute la portion posté- rieure du crâne à partir de la suture pariéto-frontale. Les os frontaux sont fortement pincés el très étroits immédiatement en arrière de la suture naso-frontale, et renforcés le long de leur arête orbitaire par un liséré assez élevé. Les os nasaux, très larges et très élevés en avant, dépassent un peu le niveau du bord alvéolaire des incisives. Le trou préorbitaire est grand, arrondi dans sa partie postéro-supérieure, et ter- miné en avant et en bas par un sinus vertical étroit et peu profond. Le palais est très étroit principalement entre les molaires antérieures, et les trous incisifs se prolongent en arrière jusqu’au niveau du tiers antérieur de la première molaire. Les incisives supérieures, fortes et larges mais de longueur médiocre, sont sensiblement arquées et leur tran- chant se dirige un peu en arrière. Leur face antérieure d’un beau jaune est creusée d’un profond sillon qui marque leur liers externe. | Les molaires ne se distinguent pas seulement de celles du genre Mus proprement dit par leurs plus fortes proportions, mais aussi par la forme et la disposition de leurs tubercules. Chez le plus grand des spécimens de G&. Dybowskü que j'ai choisi comme type, la couronne des molaires est usée jus- qu'au cingulum ; leur étude ne saurait donc donner une idée exacle de la dentition de l'espèce qui nous occupe, et ne présente d'intérêt que par comparaison avec celle des mo- laires de l’âge adulte. La première molaire supérieure, la plus forte, mesure 4 millimètres de long et 3 de large. Chez l’adulte, elle pré- sente le long de son axe {rois tubercules médians, nettement séparés, placés l’un derrière l’autre, ayant la forme de fûts semicylindriques assez élevés, dirigés obliquement d’avant en arrière, et présentant à leur sommet une fossette semi- lunaire à bords tranchants et convexes en avant. Ces trois tubercules médians principaux sontrenforcés extérieurement ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANCAIS. 413 par trois autres lubercules coniques, bien détachés, de moindre importance et d’inégal volume, dirigés également d'avant en arrière. Le premier se trouve placé en dehors de l'intervalle qui sépare le premier tubercule médian du second. Le deuxième et le plus fort des trois latéraux exlernes, vient s'appliquer dans l’angle que forment les deuxième et troisième tubercules médians. Quant au troi- sième tubercule latéral externe, il est de dimensions très exiguës et appliqué le long de la face externe du troisième tubercule médian. Du côté interne, on ne trouve que deux tubercules secondaires plus forts el plus anguleux que les externes, s’élevant perpendiculairement du bord alvéolaire et alternant régulièrement avec les trois tubercules médians. La deuxième molaire supérieure, longue de 2 millimètres et demi, large de 3, rappelle en tout la première diminuée de son tubercule antérieur médian. Ses deux tubercules mé- dians continuent la série de la première molaire, et son troisième tubercule latéral externe est excessivement réduit. La troisième molaire supérieure longue de 2 millimètres ne présente qu'un seul tubercule médian principal analogue à ceux dela première etde la seconde dont il termine la série. Le bord tranchant de sa couronne présente une légère den- ticulation au milieu de sa courbure antérieure convexe. Ce tubercule présente en arrière deux fossettes elliptiques que l’on peut considérer comme la couronne de deux tubercules rudimentaires. En dehors, on ne remarque comme vestiges de tubercule secondaire, qu’un étroit liséré basilaire à peine denticulé en avant. En dedans au contraire, on retrouve deux tubercules secondaires bien formés et semblables à ceux des deux premières molaires. Les deux séries de molaires supérieures sont légèrement divergentes en arrière etleur surface triturante est inclinée de dedans en dehors. C’est d’ailleurs le long de leur bord externe déclive que l'usure paraît avoir porlé davantage chez l'animal vieux. Sur la première molaire, les couronnes des 414 E. DE POUSARGUES. trois tubercules antérieurs (médian, latéral interne et laté- ral externe), sont devenues confluentes. Les deuxième et troisième tubercules médians entièrement confondus ont en même temps englobé dans leur couronne commune celles du tubercule interne postérieur et du deuxième tubercule latéral externe; de celui-ci, il ne reste plus que l’amorce interne. Quant au troisième tubercule latéral externe, il a complètement disparu sans laisser de traces. À la seconde molaire, la couronne du tubercule antéro-interne est restée nettement circonscrite et indépendante, mais il y a con- fluence entre le tubercule postéro-interne et le premier tu- bercule médian ; il en est de même entre le deuxième tubercule médian et le deuxième tubercule latéral externe. Comme à la première molaire, ce dernier est fortement en- tamé en dehors, et les premier et troisième tubercules laté- raux externes se sont évanouis. Enfin, à la dernière molaire le tubercule antéro-interne a gardé son indépendance comme dans la seconde molaire, et le postéro-interne a fusionné sa couronne avec celle du tubercule principal médian. À la mâchoire inférieure, les molaires présentent les mêmes dimensions relatives qu'à la mâchoire supérieure et vont en diminuant de longueur d'avant en arrière. La pre- mière, longue de 3 millimètres et demi, a sa couronne garnie de six tubercules, disposés par paires de chaque côté d'un sillon longitudinal médian. Les deux tubercules formant la paire antérieure sont très réduits et s'élèvent perpendiculai- rement au-dessus du bord alvéolaire. Les quatre autres tuber- cules constituant les paires moyenne et postérieure ont une forme analogue à celle des tubercules médians des molaires supérieures, mais à l'inverse de ce que nous avons vu chez cel- les-ci, leur direction est oblique d’arrière en avant et le bord tranchant de la fossette semilunaire qui les couronne anté- rieurement est convexe en arrière. Un pelit tubercule mé- dian s’observe entre les bases des tubercules formant la paire postérieure. La seconde molaire ne compte que quatre tu- bercules principaux qui, par leur forme et leur arrangement, ÉTUDE SUR LES MAMMIFÈRES DU CONGO FRANÇAIS. 415 reproduisent les deux paires postérieures de la première molaire ; elle présente également en arrière un petit tuber- cule adventif impair médian, et mesure 3 millimètres de longueur sur 3 de large. Enfin la dernière molaire n’est que trituberculée et répète la seconde moins le tubercule postéro- externe. Les deux séries des molaires inférieures sont sensi- blement parallèles et leur surface triturante n’est que très faiblement inclinée de dehors en dedans. Si l’on cherche à déduire quelques rapprochements de cette étude, on remar- que que le G. Dybowskii présente, sous le rapport de la den- lition, plus d’affinités avec l'espèce asiatique du genre, G. Ellioti, qu'avec les deux représentants africains, Île G. fallar el le G. Campanz. J'ai fait remarquer plus haut que le G&. Elliof et le G. Dybowskü offraient, comme autre caractère commun, le même nombre de bourrelets plantaires ; mais l’extrême différence que présentent les dimensions chez ces deux espèces, permeltra toujours de les distinguer. Du reste, on pourra juger des dissemblances qui existent entre quatre _ des représentants du genre Go/unda, d'après les mesures comparatives que j'ai réunies dans le tableau suivant. Les cinq spécimens de la nouvelle espèce, que j'ai dé- * diée à M. J. Dybowski, ont été recueillis par cet explorateur sur les bords de la Kemo ou dans les environs du poste qu'il a fondé sur cet affluent de la rive droite de l'Oubangui, par 6° 17’ de lat. Nord et 17° 15’ de longit. à l'Est du mé- ridien de Paris. Sur la carie que M. J. Dybowski a dressée de son itinéraire, cette conirée est indiquée comme couverte de marais boisés qui s'étendent entre la Kemo et l'Ombella, ce qui juslifie complètement le nom de Rat de marais (Sumpfmaus) sous lequel Peters a désigné les Rongeurs du genre Pelomys ou Golunda. 1 serait à souhaiter, pour com- pléter la diagnose du G. Dybowsku, que nos explorateurs puissent capturer quelques exemplaires femelles, qui nous permettraient de fixer le nombre et la disposition des ma- melles chez cette espèce. | 416 E. DE POUSARGUES. . |G. Erriori: (Gr.)|G. rarrax (Pet.)| à G. Dyeowsxur. a, nn — Z ES Mesures en millimètres. £ Ë e Ê É : É 5 d = 2 à | s à sa |[Ssal re |Scel cons = BE Net mere ASS = é A | = T | = Le e me | me | EEE Deseese Longueur de la tête et du COTHS In A ENT AR AS 155 | 420 | 1470 | 140 | 130 | 475 |"230 Longueur de la queue...... 105 | 80 5,| 130: | 4130/3020 — de l'ont CS RS pt joe 15 14: TIRE Largeur de l'oreille:....... 12 13 43 19504 Longueur du pied {du calca- néum à l'extrémité de l’on- SL duimédMuS) Se PANENT 28 34 | 34 |» 300 6800 Longueur des os frontaux... 14 12 12 14 14 — des os nasaux.... 11 13 12 15 17 Larg. maxim. des os nasaux. 4 4 4 5 6 Longueur des trous incisifs. 6 1 4 8 9 Distance entre les incisives et la 17° molaire supér.... paid 8 8 9 10 Longueur de la série des mo- | laires supérieures....... Me 7.|,, 6 JPUSSNSSSSS | Largeur des deux premières | molaires supérieures..... 2 2 2 3 3 | Largeur de la dernière mo- Le Aire SUpPÉrEUrE. 0. 1,5 LE 2 2 || | Distance entre les incisives e etlaire molaire inférieures. 3.0 4 4 4,5 5 Largenr de la série des mo- laïres inférieures... 2 2 2 3 3 || Longueur de la série des mo- laires inférieures ........ 6,5 7 6 8,5| 8,5 Largeur du palais entre les deux premières molaires. 2 2 2 2 2 Largeur du palais entre les deux dernières molaires.. 3 3 3 + mn (1) Dans la notice préliminaire que j'ai publiée sur le G. Dybowskiü, la lon- gueur du pied a été indiquée par erreur comme n'étant que de 34 millimètres. La suite de ce mémoire sera publiée dans le tome IV. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME Notice sur la faune ornithologique, ancienne et moderne, des îles Mascareignes et en particulier de l’ile Maurice, par M. Oustalet... l Étude sur les Mammifères du Congo français, par E. de Pousargues.. 129 TABLE DES ARTICLES PAR NOMS D'AUTEURS OusrTaLer. — Notice sur la faune ornithologique, ancienne et moderne, des iles mascareignes et en particulier de l'ile Maurice............ fl PousarGues (E. pe). — Étude sur les Mammifères du Congo français.. 129 ANN. SC. NAT. ZOOL. - 7 a —— 2 —— - Conseiz. — Imprimerie En. CRéré. . NS : , = : ax Cr, 2 à H “4 62° ANNÉE. — VIlre SÉRIE. : T: IIL.-N° 4. ANNALES DES | SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE ET PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. A. MILNE-EDWARDS TOME III. — N° 1. Ce cahier commence l'abonnement aux tomes III et IV. PARIS MASSON ET C*°, ÉDITEURS | LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE | | | 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 1896 Paris, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 32 FR. Ce cahier a été publié en Décembre 1896 Les Annales des sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels. Conditions de la publication des Annales des sciences naturelles NUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. Pu. VAN TIEGHEM. L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d'une année. ZOOLOGIE Publiée sous la direction de M. A. Mine-Epwaps. | L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d'environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d'une année. Prix de l'abonnement à 2 volumes : Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. HÉBERT, et pour la partie paléontologique, par M. A. MiIiNE-EbwaARDs. L'abonnement est fait pour un volume d'environ 300 pages, publié en plusieurs fascicules dans le courant d'une année. Prix du volume : Paris : 15 fr. — Départements : 16 fr. — Union postale : 17 fr. Le tome XXII est publié. Prix des collections. PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (/Aare) DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie 20 vol. 950 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie 20 vel. 250 fr. CINQUIÈME SÉRIE (1864-1873). Chaque partie 20 vol. 950 fr. SIXIÈME SÉRIE (1874à 1885). Chaque partie 20 vol. 250 fr. SEPTIÈME SÉRIE (1885 à 1894). Chaque partie 20 vol. 300 fr. GÉOLOGIE, D2VAIEMES LE... 1257 NME ENS SR CINE AS 330 fr. CPE O0 62° ANNÉE. — VIII‘ SÉRIE. FOR Ne ANNALES | DES SCIENCES NATURELLES 2UO0ES GE ET PALÉONTOLOGIE COMPRENANT | L’'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. A. MILNE-EDWARDS TOME III. — N° 2,3. PARIS MASSON ET C'* ÉDITEURS LIBRAIRES DE LACADÉMIE DE MÉDECINE 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 1896 PARIS, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 32 FR. Ce cahier a été publié en Janvier 1897 Les Annales des sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels. Conditions de la publication des Annales des sciences RaUreReE AUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. Pu. VAN TIEGHEM. L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d'une année. ZOOLOGIE Publiée sous la direction de M. A. Mine-Epwaps. L'abonnement esi fait pour 2 volumes, chacun d'environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d'une année. Prix de l’abonnement à 2 volumes : Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. HÉBEeRT, et pour la partie paléontologique, par M. A. MINE-EDWaARDSs. L'abonnement est fait pour un volume d'environ 300 pages, publié en plusieurs fascicules dans le courant d’une année. Prix du volume : Paris : 15 fr. — Départements : 16 fr. — Union postale : 17 fr. Le tome XXII est publié. Prix des collections. PREMIÈRE SÉRIE {Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (are) DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853), Chaque partie 20 vol. 950 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie 20 vcl. 250 fr. CINQUIÈME SÉRIE (1864-1873). Chaque partie 20 vol. 9250 fr. SIXIÈME SÉRIE (1874à 1885). Chaque partie 20 vol. 250 fr. SEPTIEME SÉRIE (1885 à 1894). Chaque partie 20 vol. 300 fr. GéoLocte, 22 volumes. .525.... 126 0e 330 fr. Lu En 4) QAR ne 4 # ER < TEE ee { AL io 1 \ * 1 Û 1 n,M | qu LR FAIM ot { Tan - [1 x 4] à 4 7 à , ci d 4 OU à RSER Ê 11 l 4 { M v s ui À - CE) 2 (2 Le ni | | 4 à . mr D? + f k i t Ê [A k j Lot À ga ÿ un 4 b | + i 4 U $ f « } Ù | A LA «17 AVE", y ’ i ; ' > À : : # | ‘+ { | N rvt l ‘ L. LU \ | Le : A 6 LM ' Las LOTS tés 24 À WA 01354 0976