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MARAGE INTRODUCTION Tous les anatomistes qui se sont occupés jusqu'ici du sympathique des oiseaux ont donné de ces nerfs des descrip- tions très exactes, mais qui ont l'inconvénient de ne pas fixer d’une façon nette les rapports du sympathique et du système cérébro-spinal. C’est qu’en effet 1l était impossible, avec les méthodes qu'ils employaient, d'obtenir des résultats plus précis. Pour déterminer, par exemple, les rapports qui existent au niveau du thorax entre les ganglions spinaux et sympa- thiques, il est indispensable de faire des coupes en série, qui puissent mettre en évidence les rameaux communicants. Le travail que nous publions aujourd'hui n’est donc pas un travail d’histologie mais d'anatomie pure; si nous avons pu obtenir des résultats nouveaux, c’est grâce aux méthodes nouvelles que nous avons employées. Cette tâche eût été difficile, si nous n'avions eu pour nous guider les savants conseils de nos maîtres, MM: Milne- Edwards et A. Dastre. Qu'il nous soit permis d'inscrire. f. noms au début de cette étude, comme un faible tribut de notre reconnaissance. DIVISION. Nous pouvons diviser le sympathique des oiseaux en quatre parties : ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. Vi, À. — ART. N° À, 2 R. MARAGE. 1° La portion céphalique partant du ganglion cervical supérieur et comprenant les anastomoses de ses branches avec les nerfs de l’encéphale; 2° La portion cervicale, comprise entre le ganglion cervical supérieur et le premier ganglion thoracique; 3° La portion thoracique limitée en haut par le premier ganglion s’unissant aux nerfs du plexus brachial; en bas cette partie se terminera à la dernière côte. 4° La portion abdominale, qui, comme nous le verrons, acquiert chez les oiseaux une grande importance. Notre travail comprendra donc quatre chapitres bien limités. Chacun de ces chapitres se subdivisera à son tour dans l’ordre suivant : | 1° Nous étudierons d’abord les travaux déjà faits sur la question qui nous intéresse. Nous aurions pu métire l'historique en un seul chapitre au commencement de notre travail; mais nous croyons que, subdivisé en quatre parties, il deviendra plus clair; il sera plus facile en effet, pour le lecteur, de suivre le résultat de nos recherches lorsqu'il n'aura à se souvenir que d’un nombre de faits relativement restreint. | 2° Nous avons pris, comme type, un oiseau facile à se procurer, le canard domestique. Nous commencerons donc d'abord par décrire le sympathique de cet animal, et nous étudierons ensuite : 3° Les modifications que présente, chez les autres oi- seaux, la portion décrite déjà chez le canard. Cette étude comprendra deux parties, l'anatomie descrip- tive et la description des coupes microscopiques. L'anatomie seule en effet ne permet pas de faire une étude complète; les filets nerveux les plus petits, les anas- tomoses les plus délicates échappent à l’œil armé d’une loupe montée très puissante. C'est en faisant des coupes méthodiques au moyen du microtome de Dumaïije, que nous avons pu arriver à trouver LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. à certaines anastomoses, certaines dispositions qui nous avaient d’abord échappé. 4 Nous comparerons les résultats obtenus à ceux que l’on a trouvés chez les mammifères et les reptiles. En résumé, notre travail se divisera de la façon suivante : CHaPirREe L°. — Sympathique céphalique. 1° Historique ; 2° Description chez le canard; a. Anatomique ; b. Histologique ; 3° Modifications chez les autres oiseaux ; 4° Comparaison avec les mammifères et les reptiles. CHAPITRE IL. — Sympathique cervical, mêmes subdivisions que précédemment. NS CHAPITRE Il. — Sympathique thoracique, mêmes subdivi- SiOns. CHAPITRE IV. — Sympathique abdominal, mêmes subdi- visions. Avant d'aller plus loin, nous croyons utile d'indiquer les méthodes que nous avons suivies. En effet la dissection seule au scalpel et à la loupe ne suffit pas : tantôt un gan- glion semble intimement uni à un filet nerveux, alors qu’il Jui est réuni simplement par du tissu conjonctif; sans qu’il y ait entre eux aucune communication nerveuse; tantôt les neris se trouvent placés au milieu du tissu adipeux, il faut les faire apparaître : nous allons indiquer brièvement les différentes méthodes que nous avons employées. TECHNIQUE. Non seulement il faut avoir soin de faire les dissections en maintenant les pièces dans l’eau, mais encore il est nécessaire d'employer certains réactifs qui donnent des résultats variables, et que nous allons discuter. a. L'acide azotique fait très bien apparaître les nerfs en blanc, mais il a trois grands inconvénients : d'abord 1l 4 _ HE. MARAGE- attaque 5e scalpels, ce qui leur enlève leur tranchant: el 54e surtout 1] rétracte les tissus. : C'est ainsi qu'il faut bien se garder d'étudier” avec ce Fe liquide les nerfs du mésentère, si importants chez les oiseaux; il y a une rétraction tellement considérable que les intestins viennent pour ainsi dire se coller. Le: ur de la colonne vertébrale. Ce réactif nous a cependant été utile pour one: des nerfs crâniens. : | Nous laissions pendant six jours au plus tremper la tête de l’animal dans un liquide formé de quatre parties d’eau en volume pour une d’acide azotique ordinaire (Az0*,4H0). Les nerfs se coloraient en jaune paille et acquéraient une consistance plus considérable, le tissu osseux était détruit, les muscles s’enlevaient très facilement. Mais il ne faut plus songer à examiner les nerfs au microscope, car les fibres et les cellules ont été complètement dé- _ truites. C’est ainsi que nous avons pu enlever du canal verlébral toute la moelle thoracique avec les nerfs rachi- _ diens, leurs racines, leurs branches, et le sympathique tout entier. Mais cette méthode ne peut convenir quand on veut faire l’histologie. | b. Dans certains cas nous nous sommes très bien trouvé de la méthode conseillée par M. le professeur Mathias a nous le rappelons 1c1 : 1° Vingt-quaire heures dans la glycérine et l'acide acé- ea concentré, parties égales; il faut prendre l’acide con- centré pour que la décalcification soit complète ; Fe « 2° Quarante-huit heures dans le liquide de Müller ; « 3° Huit jours dans l’acide chromique érès étendu. » M. M. Duval n’indiquant pas les quantités d'acide chromi- que, nous avons soin d'ajouter érès étendu, c'est-à-dire que pour 1 litre d’eau nous mettons 2 à 3 grammes d’acide chromique. Lorsque la pièce à été ainsi préparée, les nerfs acquièrent une grande résistance, ils deviennent plus visibles. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. D c. Une autre méthode très simple dont nous avons obtenu d excellents résultats est la suivante : Au moyen d’une canule nous faisons passer d'une facon 2: | continue pendant vingt-quatre heures ou dusrane =huit _ heures dans les carotides un courant d’eau très lent. Le tissu musculaire s’enlève alors avec de simples pinces : de dissection, on n’a pas besoin de se servir de scalpel, et les nerfs laissent très bien voir leurs anastomoses. C’est en suivant ce procédé que nous avons pu voir les ramifications si nombreuses du pneumogastrique dans le cœur (1). . d. On peut aussi laisser les pièces pendant huit jours dans une solution saturée à froid de ichromate d'ammoniaque, où d'acide picrique : ce qui présente deux avantages; les nerfs apparaissent mieux et il est facile de les isoler, de plus ils se trouvent durcis pour l'étude histologique. | Mais pour bien étudier les nerfs encéphaliques, il faut : hé des animaux très Jeunes, dont le crâne ne soit pas encore ossifié, c'est le meilleur moyen d'obtenir de belles . préparations ; au contraire, pour les portions thoracique et: abdominale, les animaux d’un certain âge sont préférables. Pour l'étude du nerf intestinal, il faut avoir des oiseaux absolument maigres. No: TECHNIQUE HISTOLOGIQUE. Bien que nous ayons obtenu de bonnes préparations chez un Ccasoar mort depuis un mois au moins, et en pleine décomposition, il est bien préférable de prendre des animaux très frais; c’est indispensable lorsque l’on ne veut pas se contenter simplement d'étudier la disposition générale des fibres et des cellules, et que l’on veut voir les prolongements des cellules multipolaires. ñ C’est du reste cette raison qui nous a fait prendre comme type le canard domestique, que l’on peut se procurer faei- (4) Thèse de doctorat en médecine, 15 déc, 1887, p. 39 à 47. ( R. MARAGE. lement : on le sacrifie soi-même el l’on a des pièces que. l’on peut fixer immédiatement avant la déformation des tissus. a. Avec les chromates (bichromate de potasse ou d’am- moniaque) on obtient d'excellents résultats; les cellules apparaissent avec une grande netteté; mais ce n’est qu’au bout de huit jours que la préparation peut être utilisée, et l'on doit changer plusieurs fois les liquides. b. Le liquide de Müller donne également des pièces d’une très grande netteté. c. Nous nous sommes servi souvent de la liqueur de Flemming (chromo-acéto-osmique); nous avons obtenu d'excellents résultats : en effet l’acide osmique colorait en noir les fibres à myéline, qui apparaissaient ainsi très nelte- ment; aussi allons-nous indiquer rapidement la marche que nous avons suivie : la pièce est laissée pendant vingt quatre heures dans la liqueur de Flemming, puis, après lavage à l’eau distllée, elle est placée dans le carmin aluné pur; nous la laissons dans ce liquide un temps quelconque, car, comme on le sait, nous n'avions pas à craindre la surcolo- ration qui se produit avec le picro-carmin. La pièce déshy- dratée par les alcools successifs, puis laissée pendant vingt- quatre heures dans l'essence de cèdre, était ensuite incluse dans de la paraffine, ayant un point de fusion variable avec la température; elle était coupée au microtome de Dumaije, puis montée dans le baume du Canada. d. La dissociation des ganglions, soit après macération dans l'alcool au tiers, soit après injection avec une solution d'acide osmique, est rendue fort difficile par la présence d’un tissu conjonctif épais et résistant qui entoure les ganglions : il envoie des prolongements nombreux au milieu des fibres nerveuses qui constituent le nerf. Qu'il nous soit permis d’adresser ici tous nos remercie- ments à M. Vignal, ses conseils ne nous ont jamais manqué, et ils nous ont rendu les plus grands services. —1{ LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 1 — PORTION CÉPHALIQUE S 17, — Historique. C'est certainement la partie du sympathique qui à été le mieux étudiée, tous les auteurs, en effet, qui se sont occupés de cette question ont dirigé leurs premières recherches sur le ganglion cervical supérieur, et ses anastomoses avec les nerfs crâniens. Cette étude est fort difficile, même avec les méthodes beau- coup plus précises que nous possédons aujourd’hui. En effet, les nerfs sont très petits, à peine visibles à la loupe montée, et surtout ils se trouvent logés au milieu de masses musculaires et osseuses, volumineuses. Ce qu'il est surtout important de noter, ce sont les connexions avec les nerfs crâniens, aussi voyons-nous tous les auteurs qui se sont occupés de cette question s'adresser à des animaux de forte taille, oïe, cygne, héron, autruche, aigle, etc. Dans ce cas, nous avons de bonnes études et d'excellentes des- criptions. Les travaux de Bischoff, de Weber, de Bazin sont très complets; mais aussitôt qu'ils dissèquent des animaux plus petits, faucon, pigeon, poulet, ils se contentent simple- ment d'indiquer les origines du glosso-pharyngien et du pneumogastrique et leurs rapports avec le ganglion cervical supérieur. C'est qu’en effet 1l est absolument impossible, quelles que soient les méthodes que l’on emploie, d'obtenir de bonnes préparations avec la loupe montée et le scalpel seul. Pour que cette dernière soit présentable, il faut, croyons- nous, employer la méthode suivante, qui nous a le mieux réussi : | Faire passer pendant vingt-quatre heures un courant d'eau très lent et sous faible pression dans les carotides. Après un ou deux jours les fibres musculaires sont com- plètement dissociées et s’enlèvent facilement. Mais, de plus, il faut que l'animal soit très jeune pour que les os du crâne, non S R. MARAGE. encore ossifiés, se laissent facilement entamer par le scalpel. Cette méthode est excellente pour l'étude des nerfs crâniens, mais est difficilement applicable à celle du sympathique. En effet, les nerfs suivent les artères et forment des plexus nombreux autour d'elles; mais le passage de l’eau a rendu très fragiles les tuniques artérielles ; elles se rompent faci- lement lorsqu'on y fait passer une injection, et l'étude des plexus sympathiques devient ainsi plus compliquée. | Si l’on durcit les nerfs par l'acide azotique très étendu, l'acide picrique ou les chromates, on a l’avantage de pou- voir bien suivre le système nerveux sympathique; mais alors les dissections deviennent plus difficiles, car les fibres mus- culaires ont, elles aussi, acquis une résistance plus grande. Nous avons pu cependant, chez le canard, le poulet, le fai- san, obtenir d'assez bons résultats, mais il était encore diffi- cile de bien voir les rapports. Ainsi un fait que tous les observateurs ont constaté est le suivant : le glosso-pharyngien est toujours uni plus ou moins intimement au ganglion cervical supérieur, et même, dans certains cas, 1l semble ne faire qu'un avec lui : ou, pour me servir de l'expression de Bischoff : 27 1/0 (le gan- lion cervical supérieur) nervus glosso-pharyngeus fere totus dissolvitur … Quand le ganglion cervical acquiert son maximum d’in- dépendance, il est placé à la partie interne du glosso-pha- ryngien et appliqué sur le nerf directement ; tandis que tou- jours 7/ est indépendant du nerf vaque. Pour fixer ces rapports, il fallait donc employer d’autres moyens ; voici celui que nous avons choisi : Nous avons détruit la substance osseuse par la méthode de M. Mathias Duval, durcei les tissus au milieu desquels se trouvaient le vague, le glosso-pharyngien, le sympathique avec ses racines et ses branches, et nous avons fait des cou- pes en série suivant une direction parallèle au plan dans lequel sont compris ces deux nerfs. C'était, croyons-nous, la seule méthode à employer. Mais avant de rapporter les résul- LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 9 tats que nous avons trouvés, il nous faut résumer les travaux des savants sur cette question. D’après Weber (1), le ganglion sympathique chez l’oie est intimement uni au glosso-pharyngien, et il envoie quatre branches, deux vers la tête et deux vers le cou; elles suivent toujours les artères. | Bischoff (2) étudie le sympathique céphalique successi- vement dans la cigogne, l’oie, le faucon, le pigeon, le coq. Les figures que nous trouvons dans les planches IE et IV donnent une idée très exacte des rapports qu’affectent entre eux le glosso-pharyngien, le vague et le ganglion cervical supérieur ; la disposition est du reste absolument la même que celle signalée par nous un peu plus loin chez le canard, le coq et le poulet. La seule différence, c’est qu’à l’ori- gine les deux nerfs, le glosso-pharyngien et le pneumo- gastrique, se confondent, tandis que, d’après Bischoff, ils sont indépendants. Le ganglion cervicalest lié plus ou moins intimement avec le glosso-pharyngien, et même chez le faucon ce nerf semble se dissoudrecomplètement dansle ganglion cervicalsupérieur. En 1835, Swan (3) reprend l'étude faite par Bischoff, et comme lui il s'adresse à des oiseaux de forte taille, l'oie. le cygne, le héron, le pélican. Cet auteur insiste peu sur les rapports du ganglion cervical supérieur, et il s’occupe sur- tout des anasiomoses existant entre le sympathique et les nerfs encéphaliques. Il se contente simplement de décrire en quelques mots la disposition indiquée sur les magnifiques planches de son ouvrage; il faudrait reproduire toutes les figures, pour en donner une description exacte. Swan se demande pourquoi le sympathique s’unit plutôl avec le glosso-pharyngien qu'avec le vague : est-ce parce que le glosso-pharyngien fournit au pharynx et au larynx des branches plus nombreuses que chez les mammifères, (1) Weber, Anatomia comparata nervi sympathici, 1819. (2) Bischoff, Commentarium nervi accessorii Willisii, 4832. (3) Swan, Illustrations of the comparative anatomy of the nervous system. 10 R. MARAGE,. et que ces organes ont chez les oiseaux une importance con- sidérable pour la formation du chant? Swan pose la ques- Lion sans la résoudre. Bazin (1), dans sa thèse inaugurale en 1839, a étudié le sympathique céphalique chez l’autruche et l'aigle. Dans l'aigle, le pneumogastrique et le glosso-pharyngien ont une origine commune; puis les deux branches se sépa- rent, et le ganglion cervical supérieur se trouve comme chez les autres oiseaux intimement uni avec le glosso-pharyn- sien : du ganglion cervical supérieur partent deux branches, l’une qui suit la carotide en formant un plexus autour de cette artère, l’autre qui se dirige vers le canal vertébral. Sur la carotide primitive, Bazin a noté la présence d’un ganglion. Nous n'avons trouvé dans son ouvrage aucune indication sur le sympathique cervical de l’aigle. Dans l’au- truche le ganglion cervical supérieur est beaucoup plus indépendant, il est situé entre le glosso-pharyngien et le pneumogastrique ; il est joint à chacun de ces nerfs par trois ou quatre filets nerveux; un très beau plexus sympathique entoure la carotide interne. Du reste, Bazin, comme plus tard M. le professeur Sap- pey (2), nie l'existence du sympathique : en effet, à la page 5 de son ouvrage, Bazin s'exprime ainsi : « Ce nerf (le sympathique) n'existe réellement pas, et le filet continu qu’on observe depuis le cou jusqu’au bassin n’est autre chose qu’une suite de communications nerveuses, une série de branches que des ganglions placés les uns au- dessus des autres s’envoient réciproquement, et non un nerf partant du cerveau et de l’épine. » Il -est certain que, au point de vue anatomique pur, et tous les auteurs qui ont étudié la question jusqu'ici ne se sont placés qu’à ce point de vue, 1l est absolument impossi- (1) Bazin, 1839. Thèse sur l'unité propre au système nerveux de la vie animale et à celui de la vie organique, et sur les rapports physiologiques et zoologiques qui existent entre eux. (2) Recherche sur l'appareil respiratoire des oiseaux, 1847. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 11 ble de distinguer ce qui appartient au sympathique de ce qui appartient au système cérébro-spinal. C'est une remar- que que nous avons faite dans notre thèse inaugurale de médecine. Mais en présence de ce résultat inattendu, nous avons cru qu'il était indispensable d'étudier non pas à la loupe, mais au microscope, les rapports des deux systèmes nerveux. Et les résultats de nos recherches ultérieures, comme nous le démontrerons plus loin, nous amèneront à la con- clusion que le sympathique existe chez les oiseaux comme chez l’homme, et qu'il se différencie du système cérébro- spinal non seulement par sa disposition anatomique, mais encore par ses rapports et la constitution de ses cellules et de ses fibres. Mais revenons aux travaux des anatomisies qui se sont occupés de cette question. Pendant ces dernières années, il n’a paru, à notre connais- sance, aucun travail sur le sympathique céphalique des oi- seaux. Les recherches anatomiques et physiologiques de Charles Rouget (1) sur les appareils érectiles, les leçons de physio- logie de Vulpian (2) sur le système nerveux, montrèrent tous les services que la physiologie pouvait rendre dans cette question difficile. Mais les expériences sont excessivement difficiles, il survient des hémorragies rapidement mortelles. Si l’on étudie le sympathique thoracique et abdominal, on est obligé de déterminer de graves désordres, car il faut détruire les sacs aériens du thorax; si l’on veut pénétrer par la région dorsale, il faut détruire une partie des insertions des muscles de l'aile; dans la région abdominale le sympa- thique se trouve enclavé dans les reins, qui ont une grande longueur et recouvrent complètement les plexus lombaires. (4) Comptes rendus de l’Acad. des sc., t. XLIT, 1856, p. 937-941 ; l’inst. XXIV, 1856, n° 1169, p. 193-194. (2) Vulpian, 1866. Lecons sur la physiologie générale et composée du système nerveux. 19 R. MARAGE. Ce ganglion cervical supérieur est situé profondément, et toujours uni intimement au glosso-pharvngien. Restent donc les régions cervicale et intestinale. Malgré de nombreuses difficultés, des expériences du plus haut intérêt et de la plus grande portée ont été faites sur le sympathique cervical par nos savants physiologistes Vulpian et Dastre. | Nous ne croyons pas que l’on ait encore cherché le rôle du nerf intestinal ; il semblerait facile d'y parvenir, car sou- vent on enlève aux poulets les ovaires ou les testicules, et l'animal se rétablit rapidement en deux ou trois jours, la plaie abdominale étant à peine grossièrement suturée par un fil de chanvre. Dans ces dernières années, en 1885 et 1886, dé communi- cations ont été faites à l’ AT des sciences par MM. Ma- gnien (1) et Rochas (2). Malgré tout l'intérêt de ces travaux nous n'insisterons pas, parce qu'ils s’éloignent du sujet traité par nous aujourd’hui. En effet, ce travail que nous publions aujourd’hui a été commencé, en 1883, au laboratoire de notre savant maître M. Milne Edwards. Malgré tous les travaux qui avaient déjà paru sur le sympathique céphalique, nous avions entrepris l'étude de ses rapports avec les nerfs crâniens chez le canard et le faisan. Nous avions acquis déjà un certain nombre de faits nouveaux, ces espèces n’ayant pas encore été étudiées, lorsque nous apprimes que MM. Magnien et Rochas s’occu- paient du même sujet, nouvelle qui nous fut confirmée par la publication des communications citées plus haut. Ce fut alors que, pour ne pas marcher sur les brisées de nos col- lègues, nous limitâmes notre travail sur le sympathique (1) T. C, 1885. Ganglions géniculés des oiseaux, p. 4505. (2) T. CII, 1886, p. 1028. De l'existence, chez les oiseaux, d’une série de ganglions céphaliques de naturé *sympathique correspondant.aux nerfs crà- niens. T. CIX, p. 573. Des nerfs qui ont été appelés vidiens, chez les oiseaux. — Du mode de distribution de quelques fibres sympathiques et de l'existence de racines sympathiques. LE SYMPATHIQUE , DES OISEAUX. F5 céphalique aux rapports du ganglion cervical supérieur, esti- mant qu'il y avait encore assez de recherches à entreprendre sur les portions cervicale, thoracique et abdominale. Telle est la raison pour laquelle nous avons peu insisté dans lhis- torique sur les travaux si complets de Bischoff, de Swan et de Bazin touchant les nerfs crâniens et leurs anastomoses avec le sympathique. $ 2. — Anatomie descriptive (PI. 1). Que le glosso-pharyngien et le pneumo-gastrique soient unis ensemble à leur origine apparente, ou qu'ils soient séparés, le ganglion cervical supérieur est toujours placé au- dessus du glosso-pharyngien, l’animal étant supposé couché sur le côté, et dans le triangle formé par le glosso-pharyn- gien en avant, le pneumo -gsirique en arrière, et la commis- sure qui unit ces deux nerfs en bas. Le ganglion cervical est lié intimement au glosso-pharyn- gien et souvent même, chez le faucon, par exemple, il sem- ble y avoir confusion entre les deux nerfs. Y a-t-il réellement, comme l'ont dit les zoologistes, con- nexion intime entre le ganglion cervical et le nerf de la neuvième paire ? Pour résoudre la question, nous avons fait durcir en même temps tous les tissus compris dans le triangle décrit plus haut, et nous avons fait des coupes en série, en commen- çant par la partie interne, c’est-à-dire par le ganglion cervi- cal supérieur ; nous pouvions être certain de ne laisser passer ni une branche nerveuse ni une anastomose, nous sommes alors arrivé à un résultat absolument différent de celui que nous attendions ; il n’y à pas de communication nerveuse entre le glosso-pharyngien et le ganglion cervical supérieur. En effet, la coupe qui porte sur les parties les plus rapprochées du crâne a une forme un peu allongée, et l'on en voit presque immédiatement partir deux nerfs volu- mineux qui se dirigent l’un vers le canal vertébral en passant 14 R. MARAGE. sous le pneumo-gastrique, l’autre vers la tête en suivant la carotide externe. Nous rencontrons ensuite un filet nerveux qui se Ditinete et se dirige vers la face en suivant la carotide externe ; nous décrirons plus loin ses anastomoses ; enfin deux nerfs par- tent de la partie la plus externe du ganglion cervical, l’un se dirige en avant, l’autre en arrière. | On voit dans la figure 6 l’origine d’un de ces nerfs; il est formé de fibres nombreuses qui partent du milieu du gan- glion en formant plusieurs faisceaux différents. Au contraire lorsque la coupe passe au milieu du ganglion cervical, on aperçoit un grand nombre de cellules multipo- laires entourées de fibres qui s’entre-croisent (fig. 5 et 6) et se dirigent dans tous les sens ; mais il n’y a aucune commu- nication nerveuse directe entre le ganglion cervical supérieur et les nerfs de la neuvième et de la dixième paire. Nous avons dit que le glosso-pharyngien et le pneumo- gastrique avaient une origine commune : on le constate nette- ment dans les figures 3 et 4. On voiten effet en G un ganglion volumineux ; il est formé de fibres à myéline parallèles entre elles; les antérieures vont former le glosso-pharyngien, les postérieures le nerf vague ; mais entre elles et disposées suivant des séries parallèles, se trouvent des cellules ner- veuses sympathiques (fig. 4’), ayant des volumes variables : elles sont contenues dans une gaine de tissu conjonctif ; ces cellules sont très nombreuses. ; Un peu plus bas le glosso-pharyngien se bifurque, et en ce point (fig. 7) nous trouvons un ganglion formé de grosses cellules sphériques analogues à celles que l’on rencontre dans les ganglions spinaux. Ainsi, bien que les nerfs de la neuvième et de la dixième paire ne reçoivent pas directement de filet nerveux du ganglion cervical supérieur, ils contiennent cependant des fibres à bords minces qui ont probablement pour origine les cellules nerveuses contenues dans le gan- glion supérieur, et le pneumo-gastrique, qui envoie au cœur des branches si nombreuses, sera formé de fibres à bords LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 15 minces et de fibres à bords foncés, les unes qui modèrent le cœur, les autres qui en provoquent la suractivité, dispo- sition qui confirme absolument l'opinion de mon maître, M. le professeur Dastre, lorsqu'il disait que le nerf n'est pas une unité physiologique. Mais revenons à la description des branches du sympa- thique qui se dirigent vers la face. Qu'on étudie le faisan (fig. 1), le canard (fig. 2), ou un rapace, le busard, le nerf sympathique suit toujours l’artère carotide en formant un plexus autour d’elle; chez le canard, il envoie une branche nerveuse qui revient s’anastomoser avec le glosso-pharyn- gien, puis vers son extrémité D des filets nombreux ; trois de ces nerfs se dirigent vers le globe oculaire, les autres s’anas- tomosent avec les branches du trijumeau. Chez le faisan la disposition est identique; la seule diffé- rence consiste en ce que le rameau carotidien ne part pas du ganglion cervical supérieur, mais de la branche nerveuse qui se dirige vers la tête ; il en est de même chezle busard. En résumé, le glosso-pharyngien et le pneumo-gastrique sont complètement indépendants du ganglion cervical supé- rieur, mais à leur origine commune se trouve un ganglion contenant un grand nombre de cellules nerveuses, de vo- lume variable, et présentant une disposition spéciale. IL. — PORTION CERVICALE $ 17, — Historique. Cuvier (1) a, le premier, signalé dans le canal vertébral la présence de la portion cervicale du grand sympathique; mais il n'avait pas poursuivi jusqu'au ganglion cervical su- périeur, et il croyait qu'il n’y avait pas de communication entre le ganglion cervical supérieur et le ganglion cervical inférieur. 1) Cuvier, Liv. Ier, t. IL, p. 282. P 16 It. MARAGE. _ Tiedemann (1) indique qu’un filet nerveux unissait ces deux ganglions, Emmert (2) confirma ce fait. Weber (3) a étudié le sympathique cervical avec plus de détails : « Le ganglion cervical, dit-il, ne recoit aucun rameau des nerfs spinaux, etil est joint à chaque nerf cervical par un ganglion ; ce n’est pas le plus petit rameau des nerfs cervicaux qui est reçu dans ces ganglions, mais presque tout le nerf cer- vical, bien que deux filets transversaux semblent indiquer que les nerfs transversaux ne disparaissent pas complètement dans les ganglions du sympathique. Il n’y a pas de gan- glion cervical inférieur ; le nombre des ganglions dépend du nombre des vertèbres, qui est très grand chez les oi- seaux. » | Swan a étudié également le sympathique cervical chez le cygne, l'oie et le pélican. Du ganglion cervical supérieur par- tent deux branches, l’une qui passe dans le canal vertébral, l’autre qui accompagne les carotides. Un seul filetnerveux réunit ensemble les ganglions, qui exis- tent toujours au point de rencontre avec les nerfs spinaux. Le grand sympathique, au niveau du cou, présente donc la disposition suivante : une branche sans ganglions part du sanglion cervical supérieur et suit les carotides; l’autre, logée dans le canal vertébral, accompagne l'artère vertébrale. Ce filet nerveux présente des renflements ganglionnaires aux points où il s’unit avec les nerfs spinaux. Certains auteurs ont noté des communications entre ces deux branches du sympathique. $ 2. — Anatomie descriptive (PL I, fig. 1 et 2. PI II). CANARD. Les études de Tiedemann, Emmert, Weber et Swan nous montrent bien qu'il existe dans le sympathique cervical deux (1) Tiedemann, Zoologie, t. I, p. 242. 2) Emmert, Archives de physiologie, B. XI, p. 117. (3) Weber, Anat. comparat. nervi sympathici, 1817. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. a 7 parties, qui toutes les deux suivent les vaisseaux, l’une qui accompagne les carotides, l'autre l'artère vertébrale. Le filet nerveux qui sert de satellite aux carotides part du gan- glion cervical supérieur, comme nous l'avons vu; ilest moins volumineux que le nerf qui se trouve dans le canal vertébral; et il ne présente pas de ganglions. Tout autre est l'aspect de la branche vertébrale : c’est un véritable chapelet, formé de ganglions très allongés, paral- lèles à l'axe du cou, et unis entre eux par un filet nerveux. Ils sont situés dans la même gaîne conjonctive que le nerf spinal et lui semblent très intimement unis, fait qui du reste avait été remarqué par Weber, puisque d’après cet auteur le nerf spinal semble disparaître dans le ganglion sympa- thique. L'artère est située entre le nerf sympathique et ‘la colonne vertébrale; tous les deux se trouvent du côté de la racine antérieure. Les deux systèmes, sympathique et cérébro-spinal, sont- ils aussi intimement unis qu'ils en ont l'air? Pour résoudre cette question, nous avons fail des coupes suivant deux directions, l’une perpendiculaire, l’autre parallèle aux ra- eines partant de la moelle épinière. Nous voyons d’abord apparaître le nerf spinal coupé per- pendiculairement à son axe; au-dessus de lui se trouve le ganglion sympathique; ce ganglion est très allongé et formé par un grand nombre de cellules multipolaires : il y a des fibres qui traversent le ganglion d'une extrémité à l’autre, réunissant ainsi la commissure supérieure à la commissure inférieure, d’autres en nombre relativement assez restreint partent du nerf spinal et forment. les rameaux communi- cants : mais entre les deux systèmes nerveux il n'existe Jamais la confusion que nous trouverons au niveau du thorax. Les quelques fibres à bords minces qui constituent les rameaux communicants se voient irès bien avec un gros- sissement de 500; elles sont perpendiculaires à ia direction du nerf spinal; mais le ganglion sympathique n’est pas con- fondu comme Weber l'avait indiqué. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 2. — ART. N° À. - 18 R. MARAGE. Si la coupe porte dans un point plus rapproché de la moelle, nous voyons apperaître les cellules du ganglion spinal, qui augmentent de nombre à mesure que celles du gan- olion sympathique diminuent, mais à ce niveau apparaît un nerf parallèle au nerf sympathique; il naît à la fois des deux racines antérieure et postérieure (fig. 3 et 4 N’) et appartient nettement par sa disposition anatomique au système cérébro- spinal, il contient cependant des fibres à bords minces. Cette deuxième commissure, car il a tout à fait la dispo- sition du nerf auquel nous avons donné ce nom, fait-elle communiquer les ganglions spinaux entre eux ? Nous avons alors fait des coupes suivant une direction perpendiculaire à la première, par conséquent parallèle à l’axe du nerf spinal. Si le nerf va d’un ganglion à l’autre, nous devons trouver dans noire coupe deux nerfs séparés par l'artère vertébrale; or dans la figure 6 il n’y a absolu- ment que le nerf sympathique ; si la coupe se rapproche du ganglion, nous voyons apparaître peu à peu (fig. 7, 8) le gan-- glion sympathique, le ganglion spinal, ses deux racines et toujours l’artère vertébrale, mais pas le nerf. Dans la figure 9 nous voyons ce nerf qui est bien situé là où nous l’avions trouvé dans notre première coupe suivant g g'etenfin (fig. 10) nous avons le nerf sympathique avec quelques cellules, le filet nerveux parti du nerf spinal, entre les deux, l'artère vertébrale. Nous pouvons en conclure que le nerf N'se perd dans les tissus voisins et ne fait pas com- muniquer les ganglions spinaux entre eux. Le sympathique cervical est donc formé par un filet unique présentant des ganglions allongés dans les points où il se trouve en rapport avec les nerfs spinaux. Nous relrouverons du reste ce nerf qui part du gan- glion spinal, lorsque nous éludierons les nerfs du plexus brachial; il semble formé uniquement par des fibres qui partent de la racine postérieure, mais un grossissement de 500 permet de voir qu’il reçoit de nombreux filets venant de la racine antérieure. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 19 En ce moment nous n’insisterons que sur la marche géné- rale des fibres, c'est l'anatomie microscopique que nous faisons ; plus loin nous décrirons la nature des cellules et des fibres, lorsque nous aurons vu les nerfs du plexus brachial et les ganglions thoraciques. Les rameaux communicants sont relativement peu nom- breux, cependant nous trouvons dans toutes les coupes des filets nerveux mettant en communication les nerfs spinaux et sympathiques. Le ganglion sympathique est toujours contenu dans la même gaine conjonctive que le nerf spinal, dans lequel s'enfoncent des fibres conjonctives, parties du ganglion sympathique. Le nerf spinal naît de la moelle par deux racines qui se subdivisent en pénétrant dans le trou de conjugaison en plusieurs filets. La racine antérieure glisse au-dessus du ganglion spinal, mais elle en recoit immédiatement de nombreux filets ner- veux (fig. 4); ces nerfs ont souvent une direction perpendi- culaire à celle des fibres de la racine antérieure. La racine postérieure pénètre dans le ganglion spinal, mais nous n'avons que rarement des fibres qui traversent direc- tement (fig. 7, 8, 9). IL arrive parfois que les cellules sont rangées en séries: entre elles passent des fibres qui proviennent des cellules situées plus près de la racine postérieure de ces fibres, les unes vont directement dans le nerf spinal, les autres se rendent dans la racine antérieure. | Les rameaux communicants proviennent-ils de la racine antérieure ou de la racine postérieure? La question est diffi- ile à résoudre, car le ganglion sympathique est silué très loin du ganglion spinal, et les ramifications communi- quantes partent du nerf mixte. Ce qu’il y a de certain, c’est que l’on rencontre des fibres à bords minces dans les racines antérieures et postérieures ; dans cette dernière elles sont plus nombreuses, et même (Gg. 7) il arrive que le nerf soit formé de deux séries de 20 R. MARAGE. fibres bien distinctes : des fibres à bords foncés à la partie supérieure; des fibres à bords minces à la partie infé- rieure. FAISAN. Après l'étude que nous venons de faire sur le canard il nous suffira de noter les différences qui se présentent chez les autres oiseaux. Dans le canal vertébral, le sympathique offre la même disposition que chez le canard, mais de plus il existe un très beau plexus autour de l'artère vertébrale. Ce nerf sympa- thique part du ganglion cervical supérieur el finit au pre- mier ganglion thoracique. Le rameau qui suit les carotides est beaucoup plus volu- mineux que celui qui est logé dans le canal vertébral; il ne part pas du ganglion cervical supérieur, mais d’une branche que ce ganglion envoie vers la tête. Ce filet nerveux se divise, comme nous l'avons vu, en deux branches, la plus grosse qui suit les carotides, la plus fine qui suit la jugulaire externe en même temps que le nerf vague ; elle n’envoie pas de filet nerveux au pneumogastrique qui suit également la veine jugulaire. Ces deux nerfs sympathiques ne présentent pes de gan- glions apparents. On a dit qu'il y avait des communications entre ces nerfs sympathiques; nous n'avons pas trouvé d’anastomoses entre les rameaux carotidiens et vertébraux. En effet le nerf qui accompagne l'artère vertébrale est rectiligne, n’envoie pas de rameau; il n’en part pas non plus des ganglions; or quand même nous n’aurions pas pu suivre le filet nerveux mettant en communication le rameau vertébral avec le rameau caro- tidien, nous aurions dû au moins le trouver à son origine en faisant des coupes en série; or nous avons vu que les gan- glions sympathiques ne donnaient naissance qu'aux connectifs. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 21 CIGOGNE. Chez la cigogne la seule différence que nous ayons à faire remarquer est la suivante : le nerf sympathique, situé dans le canal vertébral, semble simple, comme chez les palmipèdes el les gallinacés; mais après dissection sous le microscope avec de fines aiguilles, nous l'avons trouvé composé de deux filets nerveux contenus dans la même gaîne conjonctive. Les pigeons et les rapaces ne présentent rien de parti- culier. IT. — PORTION THORACIQUE $S 17. — Historique. Weber (1) a le premier étudié le sympathique avec détail. Il prend l'oie commune pour type. « L'origine du nerf splanchnique, dit-il, n’est pas la même chez tous les oiseaux : parfois 1l est formé par tous les nerfs thoraciques (pic-vert), parfois (oie) Les trois premiers ganglions thoraciques n'ont fourni aucun rameau. « Quelles que soient les racines du sympathique qui des- cend le long de l'aorte, il y a presque toujours division en deux troncs, dont l’un, naissant des cinq ganglions supé- rieurs, descend au tronc cœliaque, l’autre, formé des deux ou trois derniers ganglions thoraciques, monte au ironc cœliaque. «Chaque tronc, près du tronc cœliaque, envoie une anas- tomose à l’autre : au point de réunion, il y a un ganglion qui n'est pas le ganglion cœliaque. » Carus (2) a étudié les rapports du nerf vague et du sym- pathique chez le perroquet (psittacus). D’après cet auteur, les deux pneumogastriques s'unissent au-dessous du cœur, (1) Weber, Anat. comparat. nervi sympathici, 1817. (2) Tabulæ anatomiam comparativam illustrantes quas exhibuit 0. Gustavus Carus. Tab. sexta, fig. 9, 1828. 29 R. MARAGE. descendent en avant du ventricule succenturié el, arrivés au niveau du gésier, ils se-divisent en plusieurs branches qui vont à cel organe. Les ganglions thoraciques du sympathique sont unis entre eux par deux filets nerveux : l’un passant en avant de la côle, l’autre en arrière. [ls s'’anastomosent avec les nerfs spinaux. Des 3°, 4°, 5°, 6°, 7° ganglions partent des filets nerveux qui vont former des plexus envoyant des rameaux au tube digestif et aux reins. Le travail de Swan (1) est très considérable : c'est cet auteur qui le premier a donné une monographie intéres- sante et complète du sympathique. Il a étudié ce système nerveux chez trois oiseaux irès voisins les uns des autres dans la classification, l'oie (anser palustris), le cygne (cygnus olor) et le héron (ardea cinerea). Au bas du cou, le sympathique émerge du canal vertébral, pénètre dans le thorax el, dès son entrée dans celui-ei, il . commence à former une double anastomose avec les nerfs spinaux, une branche passant d’un bout à l’autre de chaque côté, l’autre par-dessous la tête de chaque côle. Les gan- glions sont réunis aux ganglions des nerfs dorsaux. Le sym- palhique envoie un filet qui s’anastomose avec le nerf vague et accompagne les gros vaisseaux sanguins au cœur. Le premier grand nerf splanchnique est formé par la portion thoracique du sympathique, il fournit des branches au tronc cœliaque, au foie, à la porlion supérieure de l'intestin grêle el au gésier; sur celui-ci il s'anastomose avec les divisions du nerf vague. Le second grand nerf splanchnique est formé par les branches parties des ganglions thoraciques suivants : il se distribue à la capsule surrénale avec laquelle il est inli- mement uni, el alors envoie des rameaux à l'intestin grêle el à l'ovaire ou au testicule. Les deux troncs du nerf vague, après avoir fourni des branches nombreuses à Ja trachée, à l’œsophage el aux poumons, se réunissent en- (4) Swan, Illustrations of the comparalive anatomy of the nervous system, LA APMMEL NX. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 24 semble et le tronc unique ainsi formé passe devant l’œso- phage pour se terminer sur le gésier après s'être anastomosé avec les branches du nerf splanchnique qui accompagnent l’arlère cœliaque. Le nerf vague présente les mêmes dispositions chez le héron cendré (ardea cinerea). Comme nous le voyons, les recherches microscopiques n’ont pas encore été faites. M. Vignal (1) a eu le mérite, dans son travail sur l'appareil ganglionnaire du cœur des ver- tébrés, de se livrer le premier à ce genre d’études. Nous ne saurions faire mieux que de citer n extenso le passage qui a trait aux recherches faites par lui sur le pigeon. « Chez les oiseaux, les nerfs cardiaques forment dans la concavité de l'aorte, près de la bifurcation de la trachée, un plexus fort compliqué, duquel partent un grand nombre de rameaux quise ramifient sur toute la surface des oreillettes, dans l'épaisseur et en dessus du péricarde viscéral : ces branches s'anastomosent un grand nombre de fois entre elles et forment un plexus fort serré qui émet de fins rameaux qui vont se perdre dans les fibres musculaires des oreillettes. « Sur les branches de ce plexus, on trouve un grandnombre de petits ganglions, généralement sphériques, formés par quelques cellules, quelquefois par une ou deux; mais par- ticubèrement au voisinage des veines pulmonaires, on rencontre quelques ganglions plus volumineux formés de 50 à 100 cellules. « La base du ventricule est enveloppée par un plexus fort compliqué, dont les fibres viennent du plexus de la base de l'aorte, et de celui des oreillettes ; ce” plexus se trouve, comme chez l'homme, situé au voisinage et sur les artères et veines coronaires, et accompagne les branches de ces veines et de ces artères qui se dirigent vers la pointe du ventricule. Dans le sillon auriculo-ventriculaire et un peu au-dessous sur les branches du plexus il y a un grand (1) Arch. de phys. normale et pathol., n° 6, p. 917, 1881. 24 R. MARAGE. nombre de ganglions nerveux, presque tous formés seule- ment de quelques cellules. Ces cellules sont unipolaires : elles ont de 30 à 40 w; le protoplasma est peu granuleux, presque homogène, sauf près du noyau qui est très petit, elles sont recouvertes d’une mince membrane sous laquelle se trouvent quelques noyaux endothéliaux. Les ganglions du pneumogastrique et du sympathique ne présentent aucune différence. » En un mot les connaissances que nous avons sur le sym- pathique thoracique se résument à ceci : Les ganglions sont unis intimement aux nerfs spinaux, et donnent naissance aux deux nerfs splanchniques. Ils sont mis en communication par des commissures. Les pneumo- gastriques s'unissent en avant du ventricule succenturié et s’anastomosent avec le sympathique au niveau du gésier. Les pneumogastriques forment un plexus fort compliqué au niveau du cœur. Nous allons étudier les dispositions du sympathique chez le canard. $S 2. — Anatomie descriptive. Nous avons abandonné Ie nerf sympathique au moment où il sortait du canal vertébral. À ce niveau il se porte brus- quement en dehors sur les parties latérales des vertèbres thoraciques et il entre immédiatement en connexion avec tous les nerfs spinaux. Il existe toujours un ganglion volumineux, sphérique, au niveau de chaque nerf du plexus brachial ; généralement ce ganglion n’envoie pas de filet nerveux; il est toujours um aux ganglions voisins par une seule branche nerveuse, volu- mineuse. C’est en effet à ce niveau que le sympathique et ses ganglions acquièrent le volume le plus considérable ; dans le cou et dans l'abdomen, il y à un nombre de branches beaucoup plus grand. Nous verrons bientôt, en faisant l’étude microscopique, que les ganglions thoraciques reçoivent des filets nerveux LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 2h importants partis de la moelle épinière. Du reste, nous ren- contrerons cette disposition non seulement chez les autres palmipèdes, mais encore chez tous les oiseaux, sauf chez les coureurs. Les autres ganglions thoraciquessont situés entre les côtes sur les parties latérales de la colonne vertébrale, généralement les ganglions sont unis entre eux par deux filets nerveux : l’un qui passe au-dessus de la tête de chaque côté, l’autre qui passe au-dessous. Cependant cette disposition est loin d'être constante : en effet, si elle se présente pour les trois premiers ganglions thoraciques, elle n'existe plus pour les suivants qui ne sont unis ensemble que par un seul filet. Il y a du reste une remarque générale que nous pouvons faire dès à présent : Lorsque le sympathique n’est pas tout & fait au contact d'une artère, auquel cas il forme des plexus, 1l tend toujours à cons- fituer un tronc unique, présentant des ganglions au niveau des points où il se trouve en rapport avec les nerfs spinaux. Ce tronc ne devient double que s'il rencontre un obstacle, côte, apophyse osseuse, artère ou veine, et encore le nerf reste-t-il parfois simple même dans ce dernier cas. C’est ainsi que les derniers ganglions thoraciques ne sont unis ensemble que par un seul filet nerveux, la disposition est la même pour tous les ganglions abdominaux, sauf le 4°etle 5°, le dernier et l'avant-dernier qui sont unis ensemble par deux filets nerveux séparés par une artère venant de l'aorte. Une autre disposilion que nous avons rencontrée chez tous les oiseaux est la suivante : Le premier ganglion situé au-dessous” du plexzus brachial est toujours uni au dernier nerf de ce plexus par deux filets nerveux; en ne tenant pas compte du trone sympathique lui-même qui, à ce niveau, devient unique, comme nous l'avons dit : l’un a une disposition absolument normale el passe sous la tête de la deuxième côte; l’autre, beaucoup plus long, passe au-dessus du corps de la deuxième côte et va se perdre dans le dernier nerf du plexus brachial. 26 R. MARAGE. Aïnsi le sympathique qui, au niveau du plexus brachial, élait représenté par un tronc unique volumineux, avec de gros ganglions, se divise immédiatement après en un grand nombre de branches. Le grand nerf splanchnique est formé par des filets ner- veux partis des quatre premiers ganglions thoraciques qui s'unissent aux nerfs intercostaux. Les ganglions qui s’unis- sent au plexus brachial ne fournissent jamais de branches nerveuses au nerf splanchnique. Le plus souvent les nerfs partent directement des ganglions, quelquefois ils émergent d’un conneclif établissant la communication entre deux gan- glions successifs. Ces filets nerveux, au nombre de cinq ou six, passent sur la parlie antérieure de la colonne vertébrale et convergent tous vers le tronc cœliaque; à ce niveau ils forment un plexus fort compliqué, ne présentant jamais de ganglions apparents et s’unissant avec des nerfs du petit splanchnique. Ils entourent l'artère qui se rend au gésier et viennent se perdre dans cet organe. En ce point, et c'est une disposition que l'on rencontre encore chez tous les oiseaux, le grand splanchnique mêle ses fibres nerveuses avec celles des deux pneumogastriques, dont les troncs se sont unis ensemble en avant du ventricule succenturié. Les deux derniers ganglions thoraciques fournissent des nerfs au petit splanchnique que nous étudierons dans le quatrième chapitre de ce travail. Lorsqu'on enlève avec soin les poumons de manière à les laisser adhérents au tronc de la branche correspondante, on voil quelquefois, des filets nerveux qui se rendent à cet organe, ils partent des premiers ganglions thoraciques; cette disposition que nous n'avons pas constatée chez le canard est très apparente chez le poulet et chez le pigeon; nous Insisterons du reste tout à l'heure sur ce sujet, INNERVATION DU CŒUR (PI. I; fig. 8). Le cœur est innervé à la fois par le pneumogastrique et par LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 97 le sympathique, le nerf vague après avoir envoyé le récurrent qui embrasse la crosse de l'aorte émet un double filet qui enserre l'artère pulmonaire; au point d'origine du récur- rent naît un nerf qui descend le longde l’œsophage (fig. sché- matique 1}. Ce pneumogastrique envoie ensuite un filet nerveux qui passe dans le sillon auriculo- ventriculaire, suit ce sillon en envoyant des branches nom- breuses aux oreillettes; au ni- veau du sillon interventricu- laire, il émet des nerfs qui suivent les artères. Le pneumogastrique droit envoie un filet idenlique qui se trouve daus le sillon auriculo- ventriculaire postérieur. Du reste cette disposition, signalée par M. Vignal chez le pigeon, se rencontre également chez le faisan (phastanus gallus). Elle est un peu différente en ce sens que les branches inter- ventriculaires sont beaucoup plus nombreuses (1). Les rameaux envoyés au cœur par les deux nerfs va- gues sont toujours excessive- ment nombreux et très im- portants. Le pneumogastrique envoie également des nerfs à Fig. schématique 1.—1,trachée ; ?, æso- phage; 3 et 4, troncs brachio-cépha- liques ; 5,aorte ; 6, veine pulmonaire ; 7, 8, 10, 11, oreillettes et ventricules droits et gauches; a, pneumo-gastri- que droit; b, récurrent ; d, branches du pneumo-gastrique enserrant Ja veine pulmonaire; e, f, g, plexus sui- vant la séparation des oreillettes et du ventricule; g', nerfs suivant la ligne de séparation des ventricules ; h', pueumogastrique gauche; k, nerf parti du récurrent. la trachée et aux bronches, au niveau du hile du poumon. (1; Thèse de doctorat en médecine, p. 46 et 47. 28 R. MARAGE. D'ailleurs à la base du cœur, au point d'origine des vais- seaux ef au niveau de la bifurcation de la trachée, il existe ün plexus fort compliqué formé par le sympathique et les branches du nerf vague. Les deux pneumogastriques s'unissent au-dessous du cœur, en avant du ventricule succenturié, mais ils se divi- sent de nouveau pour se réunir ensuile et se ramifier dans le gésier en s’anastomosant avec le grand nerf splanchnique. L'union intime des deux nerfs vagues avec les nerfs sympa- thiques au niveau du gésier est une disposition générale que nous avons rencontrée chez tous les oiseaux. Les branches que le sympathique envoie au cœur sont beaucoup moins nombreuses que celles qui lui sont four- nies par le nerf vague. Mais il ne faut pas oublier que nous avons rencontré un grand nombre de cellules nerveuses à l’origine du nerf de la dixième paire : il est probable, comme nous l'avons fait remarquer, que les nerfs modérateurs et accélérateurs sont confondus. Ainsi s'explique le petit nom- bre de filets nerveux fournis directement au muscle cardiaque par le grand sympathique. EXAMEN MICROSCOPIQUE. Comme nous avons pu le constater par la description pré- cédente, l'anatomie descriptive ne nous indique pas d’une facon précise les rapports du sympathique et du système cérébro-spinal; jusqu'ici nous ne pouvons dire qu’une chose, c'est que les ganglions sont intimement unis avec les nerfs spinaux. Cette union est-elle aussi intime qu'elle le paraît ? N'y a-til qu'un seul système nerveux chez les oiseaux? comme l'avait dit M. le professeur Sappey. C’est la ques- tion que l’histologie va nous permettre de résoudre. Nous étudierons d’abord un de ces ganglions volumineux qui se trouve situé sur le nerf du plexus brachial et intimement uni avec lui. C’est en effet à ce niveau que le nerf sympathi- que acquiert le volume le plus considérable. Ce tronc est LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 29 devenu unique; pour bien voir la disposition des fibres, nous ferons deux séries de coupes, l’une suivant l'axe du nerf brachial, l’autre perpendiculaire à cet axe; ce qui nous per- mettra de voir non seulement les rameaux communicants, mais encore de distinguer si le sympathique lraverse le gan- glion en tout ou en partie. NERF DU PLEXUS BRACHIAL. COUPE PERPENDICULAIRE A L'AXE DU NERF (PI. II, fig. 2, 3, 4,15, 6). On aperçoit d’abord (fig. 6) un grand nombre de fibres dont l’axe est perpendiculaire au plan de la figure. Elles sont constituées surtout par des fibres à bords fon- cés; cependant au centre on trouve un certain nombre de fibres à bords minces. Lorsque les coupes se rapprochent de la colonne verté- brale on voit apparaître à la partie supérieure du nerf ie gan- lion sympathique, qui est uni avec lui très intimement par du tissu conjonctif, que l’on rencontre en grande quantité entre les fibres nerveuses. | | Le ganglion sympathique augmente de volume, de manière à venir même enchâsser la moitié de la circonférence du nerf; les rameaux communicants n'existent pas à ce ni- veau; le nerf semble appliqué simplement sur la partie su- périeure du nerf brachial; mais 1l lui est fixé d’une façon très solide au moyen de tissu conjonctif qui pénètre entre les fibres nerveuses (comme des clous dans du bois), les di- vise en un certain nombre d'ilols, et parvient même jus- qu'aux ganglions de la racine postérieure; c’est cette dispo - sition qui est indiquée dans les figures 2 et 3. Nous avons donc dans la figure 3 les parties suivantes : en bas la racine postérieure avec les cellules du ganglion qui commencent à apparaître, au, milieu la racine antérieure dont les nerfs sont partagés en différentes parties par le pas- sage des fibres de tissu conjonctif, et en haut enfin le gan- glion sympathique. Ce ganglion s’est modifié ; en effet il y a 30 R. MARAGE. fort peu de cellules. On en rencontre quelques-unes à la partie inférieure, d’autres plus nombreuses se trouvent à la partie supérieure, quelques-unes même se présentent en ç' à l'origine du nerf (fig. 3). Mais ce qu'il est important de faire remarquer, c'est que le nerf qui sert de conneclif traverse presque en entier le ganglion d’une extrémité à l’autre. RACINES. Les nerfs des deux racines ne communiquent pas ensemble à ce niveau. Les cellules du ganglion sont nombreuses et entre elles on voit apparaître deux sortes de fibres; les unes perpendiculaires au plan de la figure vont, soit se terminer dans les cellules situées plus loin de la colonne vertébrale, soit passer directement; les autres, parallèles au plan de la fi- gure, vont donner naissance à un nerf N. Ce fait que, parmi les fibres de la racine postérieure, les unes passent directement, les autres se terminant dans les cellules, se présente toujours très nettement chez tous les oiseaux; c'est ainsi que nous aurons l’occasion de noter ce fait non seulement dans les ganglions des racines posté- rieures, mais encore dans les ganglions du sympathique. Il se présente d’une facon très nette chez le canard, le poulet, le pigeon, le casoar. Bientôt (fig. 5) les cellules diminuent de nombre et l’on se trouve en présence des deux racines qui se séparent l’une de l’autre, mais la racine antérieure commence déjà à se diviser en nerfs secondaires. Enfin la racine antérieure se continue par deux racines secondaires complètement indépendantes subdivisées elles- mêmes en d’autres nerfs. Quant à la racine postérieure, cette division est beaucoup plus accentuée. NERF DU PLEXUS BRACHIAL. COUPE PARALLÈLE A L'AXE DU NERF (PL IL, fig. 7, 8, 9). Nous diviserons l'étude de ce nerf en deux parties : dans LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 31 la première nous étudierons le ganglion de la racine posté- rieure, sa racine, ses branches, ainsi que la raciné anté- rieure ; la seconde sera réservée à l'étude du ganglion sympa- (hique. NERF SPINAL. DESCRIPTION. Ce nerf naît de la moelle par plusieurs racines; la racine antérieure et la racine postérieure, qui se subdivisent en un grand nombre d’autres nerfs, lorsqu'elles arrivent dans le canal médullaire ; elles sont identiques jusqu’au moment où elles se réunissent, alors seulement on voit apparaître un ganglion (G) extra-rachidien sur le trajet de la racine posté- rleure. Le ganglion sympathique (GS) est situé un peu plus loin, il est appliqué directement à la face antérieure du nerf spinal, par conséquent 1l se trouve du côté de la racine anté- rieure (RA). Quelquefois le ganglion sympathique est plus rapproché des racines, alors 1l se trouve directement au- dessus du ganglion de la racine postérieure, dont il est sé- paré par la racine antérieure. RACINE POSTÉRIEURE. La racine postérieure présente un grand nombre de fibres à bords foncés mélangées avec des fibres à bords minces ; les premières sont plus nombreuses que dans la racine an- térieure. Arrivées au ganglion, ces fibres se glissent entre les cellules, et celles-ci ne semblent pas leur envoyer de pro- longement. Ces cellules sont sphériques, volumineuses, ne présentant pas de prolongements apparents, elles sont du reste tout à fait identiques à celles que l’on rencontre dans les ganglions de la racine postérieure chez les mammifères, et comme nous le verrons, elles présentent les différences les plus tranchées avec les cellules de la moelle et celles du ganglion sympathique. 32 R. MARAGE. RACINE ANTÉRIEURE. La racine antérieure est surtout formée par des fibres à bords foncés; cependant on y rencontre toujours des fibres à bords minces. Les nerfs qui en émanent se trouvent situés au-dessus du ganglion postérieur, mais ils ne communiquent jamais avec lui. | | NERF BRACHIAL. Ce nerf ainsi constitué est donc formé par des fibres à bords minces et des fibres à bords foncés. GANGLION SYMPATHIQUE (GS). Le ganglion sympathique présente un degré d’indépen- dance beaucoup plus grand qu’on ne pourrait le croire au premier abord, il est en effet complètement indépendant du nerf spinal et il ne lui est fixé que par des fibres de tissu conjonc{if. CELLULES. Ces cellules sont tout à fait différentes de celles que nous avons rencontrées dans la racine postérieure. Elles sont umpolaires, bipolaires, mais surtout multipo- laires ; elles donnent naissance à des fibres nombreuses qui vont former le nerf N, ce nerf va donc être constitué unique- ment par des fibres de Remak, qui vont avoir deux origines : l’une, la plus importante, les cellules nerveuses multipo- jaires ; l’autre la moelle, par l'intermédiaire des rameaux communicants, qui prennent leur origine dans les parties de la moelle sifuées au-dessous du plexus brachial. En effet, comme nous allons le voir en étudiant les gan- glions thoraciques, un grand nombre de fibres passent de la moelle dans les ganglions sympathiques et de là dans les commissures. C’est donc au niveau de la moelle thoracique que se trouveront les racines du sympathique ; car jusqu'ici LE SYMPATHIQUE DES UISEAUX. 59 le sympathique affecte la plus grande indépendance par rap- port aux nerfs du système cérébro-spinal. CELLULES. Les cellules sympathiques ne ressemblent pas à celles que l'on rencontre dans les ganglions spinaux. En effet, les cellules des ganglions spinaux sont analogues à celles que l’on rencontre chez les mammifères : elles ont généralement une forme sphérique et sont entourées d’une capsule doublée de noyaux endothéliaux ; dans cer- tains cas, à la suite de la préparation, elles ont subi un re- trait et présentent des dentelures sur Fou parties sphé- riques (fig. 11). Elles sont massées surtout à la périphérie du ganglion; quelquefois elles se présentent sous forme de traînées; leur volume est variable, on en rencontre souvent qui sont deux et trois fois plus grosses que leurs voisines. Tout autre est l'aspect des cellules sympathiques; celles- ci sont nettement multipolaires et dans certaines coupes on aperçoit très nettement leurs prolongements, de telle sorte qu'il est très facile de distinguer un ganglion spinal d’un ganglion sympathique. Cette différence est très importante; en effet, les ganglions spinaux des nerfs thoraciques sont confondus avec les ganglions sympathiques correspondants, mais la nature des cellules nous permettra de reconnaître ce qui appartient au sympathique et ce qui fait partie du sys- tème cérébro-spinal. Du reste cette différenciation des cellules est absolument générale et nous l'avons trouvée dans le ganglion cervical su- périeur, dans les autres ganglions cervicaux, ainsi que dans toute la région thoracique. Les oiseaux ne présentent donc sous ce rapport aucune différence avec les mammifères, et on peut leur appliquer la description qu’en a faite M. le professeur Ranvier dans son traité technique d’histologie. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 3. — ART. N° 1. 24 IR. MARAGE. En résumé, le nerf du plexus brachial est formé par deux sortes de fibres, des fibres à bords foncés en majorité, et des fibres à bords minces. [Il naît de la moelle par deux racines, la postérieure munie d’un ganglion ; le ganglion sympathique lui est Intimemeent lié par des fibres de tissu conjonctif qui s'enfoncent entre les fibres nerveuses. Il contient un grand nombre de cellules multipolaires et est traversé par les fibres des connectifs. GANGLION THORACIQUE (PI. IV, fig. schématique 2). Le ganglion ou plutôt les ganglions, car le ganglion sym- pathique et le ganglion de la racine postérieure sont réunis, se trouvent placés sur les parties latérales de la colonne vertébrale. À la loupe on n’apercoit qu'un seul ganglion donnant naissance à deux nerfs, l’un allant former le nerf intercoslal, l’autre se rendant au grand sympathique ; des commissures que nous avons étudiées unissent ce ganghon aux ganglions voisins. Les deux racines, antérieure et pos- {érieure, sont identiques, ce qui nous avait amené à penser que les deux ganglions devaient être confondus. Cette confusion n'était-elle qu'apparente ? ou bien existait- elle réellement”? L'étude histologique nous a permis de ré- soudre cette question. RACINE POSTÉRIEURE ET GANGLION. Le ganglion de la racine postérieure est situé au-dessus du genglion sympathique, il est plus volumineux que lui, ear dans les premières coupes (2, 3) et dans les dernières (9) nous n'apercevons que ce ganglion. Il est formé par de grosses cellules unipolaires, entre lesquelles passent direc- tement un certain nombre de fibres venant de la racine postérieure. Nous avons étudié plus haut la nature des cel- lules. y a une partie des fibres qui se perdent dans les cellules du ganglion postérieur, d’autres qui traversent direc- 39 OISEAUX, DES à. d LE SYMPATHIQUI Fig. schématique ?. — RA, racine antérieure ; GS, ganglion ; N, nerf spinal. postérieure ; RP, racine sympathique; G, ganglion spinal sympathique; S, nerf 36 R. MARAGE,. tement, mais on voit parfaitement dans les dernières figures qu'il y a un grand nombre de fibres nerveuses naissant du ganglion de la racine postérieure. Les cellules sont surtout nombreuses à la périphérie : au centre on trouve un grand nombre de fibres nerveuses. Ces cellules sont tout à fait analogues à celles que l’on trouve chez les mammifères dans les ganglions de la racine posté- rieure. RACINE ANTÉRIEURE ET GANGLION SYMPATHIQUE. Le nerf part de la racine antérieure, se glisse entre les deux ganglions, le ganglion spinal et le ganglion sympathi- que, on le voit nettement apparaître dans les figures 4 et 5. À la périphérie il n’y a absolument aucune communication entre le nerf spinal et le ganglion sympathique, qui semble simplement déposé à sa surface, bien qu’il soit contenu dans la même gaine conjonctive. Mais bientôt des fibres, des rameaux Ccommunicants, vont apparaître dans la racine antérieure, passer dansle ganglion sympathique, et plusieurs de ces fibres traverseront directement, sans s’arrêter dans le ganglion. Ces rameaux communicants deviennent de plus en plus nombreux, et dans les coupes 6, 7 qui passent par le milieu du ganglion, 1l y a un véritable mélange entre les fibres du ganglion sympathique et celles de la racine antérieure ; tandis que le ganglion de la racine postérieure se laisse nettement délimiter à la partie imfé- rieure. Dans les figures 6 et 7, il y a un véritable entre-croi- sement des fibres, et l’on peut même apercevoir des fibres perpendiculaires à la direction du nerf spinal et s’enfonçant directement dans le ganglion sympathique. Tandis qu’à la périphérie le ganglion sympathique est bien distinct, il tend, ,vers le centre, à se confondre de plus en plus avec le système cérébro-spinal. Nous avons vu, en effet, que les cellules des ganglions sympathiques étaient nettement mullipolaires et qu’il était LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 31 facile de les distinguer de celles du ganglion spinal, qui sont sphériques et unipolaires. Dans les figures 6, 7, 8, ces deux sortes de cellules sont confondues, et l’on voit à côté les unes des autres des cellules unipolaires et des cellules multipo- laires. Ce mélange n’a lieu cependant qu'au centre du ganglion ; à la périphérie on voit nettement en bas des cellules unipo- laires, en haut les cellules multipolaires. Le système grand sympathique est donc ainsi bien moins indépendant du système spinal que chez les mammifères ; cette confusion n’est pas seulement apparente, elle existe et se trouve surtout marquée dans les parties centrales. RAMEAUX COMMUNICANTS. Les nerfs qui se rendent en très grand nombre dans le ganglion sympathique partent surtout de la racine anté- rieure : 1l suffit, en effet, de considérer la figure 5 pour se rendre compte de cette disposition. Mais vers le milieu du ganglion (fig. 7), alors que les fibres très nombreuses passent entre les cellules et qu'il est diffi- cile de dire si les fibres appartiennent à la racine antérieure ou à la racine postérieure, on voit des fibres se diriger nette- ment de bas en haut vers le ganglion sympathique : ces fibres partent du ganglion spinal ; mais hâtons-nous de dire qu'elles sont en nombre très faible. Nous avons du reste trouvé ce résultat en étudiant les nerfs cervicaux. Quelle est l'importance des rameaux communicants, par rapport au ganglion sympathique ? Telle est la question que nous devons étudier maintenant. Si l’on examine plusieurs coupes passant vers le milieu du ganglion, on voit qu’il arrive dans le ganglion sympathi- que un grand nombre de nerfs et qu’il en part un nombre moins considérable : quelques-unes des fibres nerveuses traversent directement, landis que les autres naissent des cellules multipolaires qui se trouvent dans le ganglion. Voilà 38 R. MARAGE. le fait anatomique : la physiologie va nous permettre d’in- terpréter ce résultat. | = En effet, les expériences faites par mon savant maître, M. le professeur Dastre (1), ont montré que « plus on se rapproche de la moelle, plus les vaso-dilatateurs deviennent évidents, plus ils tendent à l'emporter sur leurs antago- nistes. Leur action disparaît ou s’amoindrit à mesure que l’on descend du côté des vaisseaux. Is se perdent donc dans les ganglions interposés, et ceux-ci auraient, en conséquence, pour fonction de mettre en rapport les vaso-dilatateurs avec les constricteurs pour permettre l'effet inhibitoire, ou inter- férence de ces filets les uns sur les autres. » : sat Nous allons, du reste, retrou- ver cette disposition anatomi- que chez tous les autres oi- seaux que nous avons étudiés : elle est donc générale; aussi nous nous contenterons de si- gnaler les quelques différences que nous avons notées ANSER CINEREUS (oiel (fig. schématique 3). Lesganglionsthoraciques pré- sentent exactement la même disposition que chez le canard. Les trois premiers s'unissent BE-schématique 5.496788 ‘avec les nerts CNE Etre slions spinaux et sympathiques à ; AE confondus; B, B', B', B”, nerfs Chial : ils sont joints ensemble allant former le grand splanchni- $ D a ee ne par une seule commissure. Les | suivants sont réunis le plus souvent entre eux par deux commissures, ils donnent nais- (4) Recherches expérimentales sur le système nerveux vaso-moteur, p. 45. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 39 sance au grand nerf splanchnique. Il n’y à donc pas de différences importantes entre ces deux palmipèdes, l’oie et le canard. Aussi n'insisterons-nous pas, et nous passerons immédiatement à l'étude des échassiers. ÉCHASSIERS. CIGOGNE (Ciconia alba). La portion thoracique est beaucoup plus développée que chez les palmipèdes ; mais elle présente toujours la même disposition générale. Les ganglions sympathiques et spinaux sont intimement unis ensemble; les premiers sont Joints le plus souvent aux ganglions voisins par des commissures, l'une qui passe au-dessus, l’autre qui passe au-dessous de la tête de chaque côté. Les ganglions sympathiques, en rapport avec les nerfs du plexus brachial, sont plus volumineux que les autres gan- glions thoraciques, mais ils sont joints ensemble par des nerfs très rapprochés l’un de l’autre el suivant le même chemin : l’un, volumineux, correspond à celui que nous avons décrit chez le canard : l’autre, beaucoup plus petit, sert de satellite au premier. C’est une disposition analogue à celle que nous avons trouvée au niveau du cou chez le même animal ; mais alors les deux nerfs n'étaient plus indépen- dants, ils étaient réunis dans la gaine de tissu conjonctif, et pour les mettre en évidence, il fallait une dissection avec de fines aiguilles. Nous ne regardons pas cette différence comme ayant une grande importance, puisque les deux filets suivent le même trajet, peu importe qu’ils soient contenus ou non dans la même gaine conjonctive. GALLINACÉS. Phasianus qgallus. Description des branches. — Le grand nerf splanchnique est formé par des rameaux partis des deux, trois, quatre et cinq premiers ganglions thoraciques. Le filet qui part du 40 R. MARAGE. deuxième ganglion descend le long de la colonne vertébrale, il vient s'appliquer sur les apophyses qui partent de la partie an- térieure des corps vertébraux, et il se joint à l’aorte au niveau de la quatrième côte : les autres filets viennent se joindre à celui-ci, et leur réunion constitue un tronc nerveux qui forme un riche plexus autour de l’aorte. À leur origine les filets nerveux qui constituent le nerf sphanchnique s’anastomosent entre eux, mais sans former de plexus. Ces filets ne partent pas toujours des ganglions; le plus souvent ils partent de la commissure qui passe en avant de la tête de la côte ; cepen- dant il serait plus exact de dire que cette commissure se divise en deux branches, l’une qui va au ganglion suivant et l’autre qui contribue à former le nerf splanchnique. Description des commissures. — Ces commissures ont une forme très variable; le plus généralement l’un des nerfs passe en avant de la côte, l’autre en arrière ; cependant cette disposition n’a rien de constant, et c’est la commissure antérieure qui subsiste le plus souvent. Le premier et le deuxième ganglion sont unis ensemble par une seule commissure volumineuse qui passe en avant de la côte; mais de plus il existe toujours un filet nerveux qui unit le deuxième ganglion au nerf le plus inférieur du plexus brachial. Faut-il regarder ce nerf comme l’analogue des rami communicantes que nous trouvons chez l’homme ? Peut-être. En tout cas les ganglions sont unis aux nerfs spinaux d’une façon tout à fait spéciale. Même avec une loupe composée il est impossible de dis- tinguer le ganglion qui paraît en être l’origine, et le ganglion ne semble être que la partie initiale renflée, de sorte que grand sympathique et nerf spinal semblent former un:tout unique. En était-il réellement ainsi? telle était la question. Pour la résoudre nous avons employé la disposition sui- vante : Nous avons mis pendant trente-six heures la portion thoracique d’un poulet dans de l'acide azotique marquant 120° à l’aréomètre de Baumé. Au bout de ce temps, nous LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 41 avons soumis la pièce à un courant d’eau, les nerfs avaient été durcis par l'acide : au contraire, les autres tissus avaient été presque complètement détruits, de sorte qu'il reslait uniquement la moelle épinière et ses branches, ce qui nous a permis de déterminer exactement Les points suivants : a. L'origine des nerfs spinaux et leurs rapports avec la moelle ; b. La forme des ganglions sympathiques ; c. Leurs rapports avec les nerfs spinaux ; Les nerfs du plexus brachial naissent de la moelle épi- nière par deux racines: l’une antérieure, sans ganglion; l’autre postérieure, munie d’un ganglion volumineux; aussi- tôt après le ganglion ces deux racines s’unissent pour for- mer un nerf volumineux qui sort du trou de conjugaison; à la partie supérieure de ce nerf et faisant corps avec lui se trouve alors un ganglion, c’est le premier ganglion du sympathique thoracique; mais on voit ici que la disposition est tout à fait différente de celle que l’on rencontre chez l’homme : en effet, chez les mammifères en général, un gan- ghion sympathique est uni au nerf spinal supérieur et au nerf spinal imférieur au moyen d’un filet nerveux, et l’on a don né à ces filets le nom de ami communicantes. Chez les oiseaux ces nerfs communicants n'existent pas, ou, si l’on préfère, leur longueur est nulle, et par consé- quent le ganglion fait partie intégrante du système spi- nal : celte disposition se rencontre pour tous les nerfs spi- naux. Il y a donc des différences avec les mammifères : 1° les ganglions ne sont pas situés entre les nerfs spinaux, mais à un nerf spinal corespond un ganglion ; 2° Les rameaux communicants sont réduits à zéro et le ganglion sympathique fait partie intégrante du système cérébro-spinal. Nous avons ensuite examiné avec la plus grande atten- tion un nerf spinal et thoracique, nous avons eu alors l’expli- cation de la disposition spéciale que présente le sympathi- 49 R. MARAGE. que et le nerf lorsqu'ils sont appliqués sur les parties laté- rales de Ia colonne vertébrale. | Ce sympathique est situé en avant du ganglion spinal, Il fait corps avec lui, il a une forme sphérique, tandis que l’autre a une forme ovoïde; ce dernier, Le nerf spinal, naît de la moelle par deux racines identiques, qui s'unissent au ganglion spinal en deux points différents, et c’est alors, mais alors seulement, que le sympathique se joint au spinal. Nous trouvons ici une disposition tout à fait différente de celle que nous avons rencontrée tout à l'heure dans le nerf du plexus brachial : Cetle union intime du sympathique et du système céré- bro-spinal explique pourquoi les commissures unissent soil les ganglions entre eux (poulet, canard), soit un ganglion du nerf spinal supérieur, comme nous le verrons chez le pigeon. En faisant l'étude histologique, nous avons trouvé les mêmes résultats que chez le canard. C'est toujours l'union intime des deux ganglions à la périphérie, et leur séparation au centre par le nerf spinal antérieur qui envoie un grand nombre de filets nerveux dans le ganglion sympathique; il n’y a pas plus d’indépen- dance chez les palmipèdes que chez le canard, les disposi- tions anatomique et histologique sont identiques. PHASIANUS COLCHICUS (FAISAN COMMUN) (fig. schématique 4). Le faisan commun, appartenant à la même famille que le Phasianus gallus, ne devait pas présenter de grandes dif- férences. C’est en effet ce que nous avons trouvé à la partie supérieure du thorax, où les cinq premiers ganglions ont toujours une disposition identique; les trois premiers, en rapport avec trois nerfs du plexus brachial, sont unis entre eux par une seule commissure très volumineuse ; le qua- trième est uni d'un côté au troisième ganglion sympathique par une commissure et au cinquième par deux nerfs qui e «< LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 43 embrassent la tête de la première côte : nous trouvons toujours le nerf qui unit le quatrième ganglion aux nerfs du plexus brachial, puis un phénomène particulier se pré Fig. 4. — 1, bronche ; 2, poumon; 3, œsophage; 4, gésier ; 5, intestin grêle ; 6, gros intestin; 7, mésorectum; 8, aorte; 9, ovaire gauche; 10, aorte abdominale ; 11, rein ; 12, nerf du membre postérieur ; 13, nerf du membre antérieur; 14, côtes: 15; tronc cœliaque; a, pneumogastrique ; b, uerf allant au poumon; c, nerf allant au gésier, d, grand nerf splanchnique ; e, second nerf splanchnique s’anastomo- sant avec le pneumogastrique et le nerf intestinal; f, g, h, nerf intestinal ; 2, tronc du sympathique abdominal envoyant des branches à l'ovaire et au rein; 7, des uerfs se rendant également à l'aorte (ils partent de chaque ganglion, ils n’ont pas été marqués sur la figure); k, nerf se rendant au ventricule succenturié. sente ; les ganglions tout à l'heure si apparents sont à peine indiqués ; le sympathique n’est plus représenté que par un simple filet nerveux, glissant le long de la colonne ver- 44 R. MARAGE. tébrale et s’unissant au nerf spinal par deux rameaux. . Du reste cette disposition anatomique n’est pas constante chez le faisan; en effet, d’autres dissections faites chez ces mêmes animaux nous ont montré qu'il y avait la plus grande analogie avec le poulet. Le grand nerf splanchnique, après avoir formé un riche AT [2 nl 17] 010 01] Ty IT] Ur) 171 en 5 } nl 7} } y HP, PDT ee Fig. schématique 5.— 1, trachée; 2, crosse de l’aorte ; 3, tronc brachio-céphalique gauche ; 4, ventricule succenturié; 5, gésier; 6, aorte; 7, ovaire ; 4, pneumogas- trique gauche; b, récurrent; c, g, nerfs allant au poumon; d, h, à, nerfs allant au cœur ; e, f, récurrent et pneumo-gastrique droits; 7, branche allant au ventri- cule succenturié; k, union des deux nerfs vagues; /, union du sympathique (#, n) et du nerf vague ; o, sympathique de l'intestin ; p, nerf se rendant à l'ovaire ; g, branche unissant le plexus brachial au nerf vague; », nerf allant au poumon. plexus qui entoure le tronc cœliaque, vient s’anastomoser au niveau du cardia avec les deux pneumogastriques. En effet, les deux nerfs vagues se sont unis au-dessous du cœur, en avant du ventricule succenturié. et ils sont venus LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 45 s’anastomoser avec les nerfs du grand splanchnique. Mais avant de se réunir, ils ont envoyé au cœur un grand nom- bre de filets nerveux; les uns, partis des deux nerfs vagues, sont venus se réunir en avant du cœur, où ils ont formé un riche plexus dans le sillon interventriculaire; les autres ont Fig. schématique 6.— Dans la figure 7 on voit la face antérieure du cœur et en poin- tillé les deux pneumogastriques qui viennent se réunir en arrière de cet organe. —4, pneumogastrique gauche ; b, récurrent gauche; c, d, e, branches que le récur- rent envoie à la trachée (2) et à la carotide (7); g, h, à, branches que les pneumo- gastriques envoient au cœur; e, récurrent droit. La figure inférieure représente la face postérieure du cœur, avec les nerfs envoyés par les pneumogastriques. n suivi une marche analogue à la face postérieure du cœur (fig. schématiques 5 et 6). Ces nerfs ne sont pas les seuls qui aient été fournis par 46 B. MARAGE. les deux pneumogastriques; un grand nombre de nerfs ont été fournis au ventricule succenturié et aux poumons; une branche nerveuse assez volumineuse faisait communiquer le pneumogastrique gauche avac le dernier nerf du plexus brachial : cette anastomose est absolument analogue à celle qui unit chez tous les oiseaux le premier ganglion sympathi- que intercostal avec le dernier nerf du plexus brachial. On voit immédiatement l’analogie qui existe entre les nerfs du cœur chez le canard et chez le faisan. PIGEONS (fig. schéinatiques 7 et 8). Chez le pigeon, nous avons deux différences curieuses à signaler : la premiére se rapporte aux ganglions sympaihi- ques, la seconde à leur mode d'union. | Les ganglions sympathiques sont beaucoup plus indépen- dants des nerfs spinaux que chez les palmipèdes, les échas- siers et les gallinacés : cette indépendance se remarque à l'œil nu, et de plus elle n’est pas partout la même. Tantôt on croirait avoir sous les yeux le nerf d’un canard, tantôt les deux ganglions se touchent à peine, tantôt enfin 1ls sont réunis ensemble par un nerf qui sert de rameau communi- cant (fig. schématique 8). Mais l’élude histologique nous a montré que la disposi- lion des fibres des deux ganglions était analogue à celle qui se rencontre chez le canard et le poulet; le ganglion sympathique apparaît nettement au-dessus de la racine antérieure, il lui est réuni par des faisceaux nerveux, les rameaux communicants, qui sont, soit très courts, lorsque les deux ganglions sont très rapprochés, soit plus longs lorsqu'ils sont situés à une certaine distance l’un de l’autre. Les ganglions sympathiques sont unis ensemble de deux façons : d'abord par un filet nerveux qui passe au-dessous de la tête de chaque côle (nous ne parlons pas du nerf qui passe au-dessus de la côte, car il est loin d’être constant); puis par un nerf qui part du ganglion inférieur, passe au- LE SYMPATHIQUE DES. OISEAUX. 47 dessous de la côte, se bifurque et immédiatement va s'unir non pas au ganglion, mais au nerf spinal correspondant ; à lorsqueles ganglions sym- né pathiques sont situés sim- plement au-dessus du nerf spinal sans être intime- ment liés avec lui, les commissures réunissent non pas les ganglions sympathiques, mais les nerfs spinaux. Nous sa- vons très bien qu’on peut Fig. schématique 7.— 1, 2,3, 4, 5, côtes; 1, foie; Fig. schématique 8. — 1, ?, 3, 8, veutricule succenturié; 9, gésier; 10, 11, 4, 5, côtes; 6, poumons; @, b, paeumo-gastriques ; 12, aorte; 13, rectum; c, d, e, f, ganglions sympathi- a, grand splanchnique ; b, e, branches du ques. petit splanchnique ; c, ganglions du sympa- thique unis aux nerfs spinaux par des ra- meaux commumecants; d, rameaux commu- nicants. faire rentrer ce cas particulier dans la disposition géné- rale en supposant que ces commissures traversent le nerf spinal pour se rendre au ganglion sympathique, mais nous 48 R. MARAGE. croyons qu'on pourrait plutôt donner l'explication suivante. Les ganglions sont d’abord unis entre eux par un filet ner- veux, unis au nerf spinal correspondant par des nerfs par- tant de la racine antérieure, enfin mis en communication avec le nerf spinal supérieur par deux rameaux communi- cants qui se réunissent rapidement ensemble. N’avons-nous pas trouvé toujours une disposition sem- blable à la partie supérieure du thorax? Le premier gan- glion intercostal n'est-il pas toujours uni au dernier nerf du plexus brachial par un filet nerveux servant de rameau communicant? Il est probable que dans les autres parties du thorax la disposition est analogue. Nous aurions donc ainsi une disposition se rapprochant beaucoup de celle que l’on rencontre chez les mammifères. Les coureurs que nous allons étudier bientôt présentent des phénomènes tout à fait contraires : nous allons rencon- trer ici des rapports curieux, et qui ne rappellent nullement ceux que présentent, chez les mammifères, les nerfs sympa- thiques el ceux du système cérébro-spinal. Nous avons laissé à cet oiseau la place qu'ils occupent dans la classification; mais nous faisons dès à présent remarquer qu'au point de vue du sympathique thoracique, les pigeons et les rapaces se rapprochent beaucoup plus des mammifères que les coureurs. RAPACES (fig. schématique 9). Chez le busard, le sympathique thoracique, s’il présente, quant à ses branches, les plus grandes analogies avec les autres oiseaux, offre des différences importantes dans ses rapports avec la moelle. Les trois ganglions sympathiques qui se trouvent au niveau du plexus brachial sont toujours unis intimement avec ces nerfs, et le quatrième ganglion thoracique est réuni au nerf brachial par un long rameau communicant. Cette description est, comme on le voit, identique à celle que nous avons faite pour les autres oiseaux. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 49 Mais les ganglions spinaux et sympathiques ne sont plus unis ensemble aussi intimement. Déjà cette différenciation commençail à se produire chez le pigeon; ici elle est com- plète, et l’on distingue nettement le ganglion sympathique au-dessus du nerf spinal. Cette indépendance est tellement tr Ron Ÿ ? | Ê pp A Ÿ è >= ÈS u FÈ 4 SS Ÿè tài N È À à SE P ei £ RE ! \ is) =. Fig. schématique 9. — i, 2,3, 4,5, 6, 7, côtes; 8, nerfs du membre supérieur; 12, ventricule succenturié; 13, foie; 16 cœur; &, :grand splanchnique; 6, union du grand et du petit splanchnique ; e, petit splanchnique ; d, plexus entourant l'artère du gésier; À, ganglions sympathique et spinal; ?, nerfs spinaux. marquée que, entre la cinquième el la sixième côte, il existe deux ganglions sympathiques, absolument indépen- dants du nerf spinal. Chacun d’eux est réuni au ganglion de la cinquième côte par deux connectifs. Il y a donc une grande indépendance entre les nerfs spinaux et le système sympathique, sauf au niveau de la moelle thoracique supé- rieure. couREURS (Casoar émeu) (PI. V). Une aponévrose très résistante entoure la colonne ver- tébrale, et c’est entre cette aponévrose et le périoste que se trouvent les connectifs du sympathique : ils sont accompagnés par une veine V volumineuse placée au-dessous, l'animal étant supposé couché sur le dos. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, À. — ART. N° À 50 R. MARAGE. Les ganglions sont situés très profondément au-dessous de la tête de chaque côte, dans le canal formé par les côtes et les apophyses récurrentes. Ils n'apparaissent pas tout d’abord, car l’aponévrose, dont nous avons déjà parlé, vient se fixer sur la côte et contribue à former un espace creux limité en haut par la côte, en bas par l’apophyse récurrente et la partie thoracique, en dedans par le trou de conjugai- son, formant une cavité conique large à sa base, très pro- fonde, et c'est dans cette cavité que se trouvent logés les nerfs. Les nerfs dont la couleur est rosée sont entourés d’un tissu conjonctif très résistant, et 1ls s’entre-croisent avec la veine V qui avait servi de satellite aux connectifs (PI. V,fig.1); celle-ci continue son chemin vers le trou de conjugaison situé plus haut; elle y envoie une branche volumineuse et va se jeter dans une veine située dans le canal vertébral au- dessous de la moelle. Une artère À s’entre-croise avec les branches de la veine, et il est fort difficile d'en distinguer les troncs nerveux. Pour arriver à faire l'étude du tronc spinal et de ses branches, nous avons dû scier la colonne vertébrale, per- pendiculairement à son axe, au niveau d'un trou de conju- gaison; il a été facile ensuite d'enlever le nerf avec ses branches, ses racines et une portion de la moelle. On pourrait se contenter d’énucléer simplement les plexus nerveux et sanguin avec de petits ciseaux courbes ; mais on n'aurait pas les origines et les rapports avec la moelle. Ce nerf naît de la moelle par deux racines, antérieure, R A et postérieure, R P ; aucune d'elles ne présente de ganglion, elles sont contenues toutes deux dans une même gaine fibreuse très résistante (fig. 2), et elles semblent ne former qu’une seule racine, la postérieure plus volumineuse que l’autre. Le tronc nerveux N fait un angle aigu avec ses racines, et il s’anastomose avec elles au point où arrivent les con- nectifs qui l’unissent aux deux nerfs spinaux voisins. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 51 Il existe à ce niveau un renflement excessivement léger constitué par la réunion du ganglion sympathique en avant et du ganglion de la racine postérieure en arrière. Vers la face supérieure le nerf envoie une branche qui contribue à former le grand nerf splanchnique N ; à la face inférieure le nerf se dirige vers la partie postérieure du thorax. Il semble donc encore y avoir ici au point de vue anatomique confusion entre le système spinal et le grand sympathique. Les nerfs sont très petits par rapport au volume de l'animal; une oïe ordinaire a des nerfs spinaux presque aussi gros que ceux du casoar adulte que nous avons pu nous procurer. COUPE PERPENDICULAIRE AUX RACINES. Nous voyons d’abord apparaître (PI. V, fig. 3)le ganglion sympathique GS et le nerf N qui contribue à former le nerf splanchnique ; les cellules sont d'abord peu nombreuses el massées d’un des côtés de la figure ; ensuite elles augmen- tent de nombre; nous voyons en C la commissure qui fail communiquer ensemble deux ganglions sympathiques; ces commissures naissent en partie des ganglions sympathiques. Bientôt les cellules du sympathique diminuent, et dans un plan plus rapproché de la colonne vertébrale apparaît le ganglion de la racine postérieure qui va nous présenter ici des phénomènes intéressants (G, fig. 4). Ce ganglion est situé plus haut que le ganglion sympa- thique; il émet des fibres nerveuses qui vont donner nais- sance au nerf N ; mais ce nerf n’est pas formé uniquement par les fibres sorties des cellules du ganglion postérieur et par les fibres de la racine antérieure ; il y a en effet des fibres qui traversent directement le ganglion sans s'arrêter dans les cellules; ces fibres vont se perdre dans le nerf cérébro- spinal. En effet, s'il en est ainsi, que devons-nous trouver en 52 R. MARAGE. faisant des coupes successives de la périphérie au centre? D'abord les fibres du nerf, puis les cellules en grand nom- bre qui ont reçu des fibres de la racine postérieure ; ensuite les cellules doivent diminuer et nous devons trouver des fibres dont l’axe est perpendiculaire à la coupe; ces fibres doivent augmenter de plus en plus en nombre et rester seules quand nous serons parvenus au niveau de la racine posté- rieure ; c’est toujours, en effet, ce que nous présentent les figures 5, 6, 7 ; les fibres augmentent de plus en plus; dans la figure 6 il n’y a plus que quelques cellules, et elles ont complètement disparu dans la figure 7. Mais toujours danstoutes les coupes nous trouvons en 1RP un faisceau de fibres massées ensemble; nous savons fort bien que toutes ne traversent pas directement et qu un grand nombre restent dans le ganglion; en effet, à la périphérie dans la figure 5 il y a beaucoup moins de fibres que dans les figures 6 ou 7. La racine antérieure R A, comme nous l’indiquait Pana- tomie descriptive, est accolée à la racine postérieure; elle ne présente rien de particulier si ce n’est celte union intime avec la racine postérieure. Cependant jamais dans les racines les fibres ne communiquent ensemble, el ce n’est qu'après le ganglion que les deux racines se confondent pour donner naissance au nerf. | En résumé, la racine postérieure présente la disposition suivante : comme chez tous les vertébrés on y remarque la présence d’un ganglion formé d’un grand nombre de cellules nerveuses ; mais au centre de ce ganglion 1il existe, quel que soit le point où l’on fait passer la coupe, des fibres ner- veuses, dont un certain nombre traverse directement, les autres se perdent dans les cellules. Pour étudier les commissures, nous avons fait des coupes perpendiculaires aux premières, c'est-à-dire parallèles aux racines, et nous avons constaté que, si la plus grande partie des fibres restaient dans les racines, 1l y en avait quelques- unes qui traversaient directement. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. D3 En effet, dans la figure 8 nous voyons en grande quantité les commissures C qui font communiquer les ganglions entre eux ; ces nerfs sont divisés en nerfs secondaires composés d’une cinquantaine de fibres élémentaires. On pourrait donc les regarder comme des nerfs différents, unis ensemble pour la commodité de la route, c’est un phénomène tout à fait analogue à celui que nous avons rencontré lorsque nous avons fait une coupe perpendiculaire aux deux racines. Les cellules du ganglion sympathique GS sont encore plus nom- breuses. Elles apparaissent en quantité beaucoup plus considérable dans la figure 9, mais un phénomène que nous devons faire remarquer est le suivant : les commissures qui en coupe étaient trèsnombreuses dans la figure 8 diminuent beaucoup ; les unes passent dans le nerf N qui contribue à former le nerf splanchnique, les autres pénètrent dans les racines. Donc les ganglions ne sont pas traversés complètement par les connectifs ; ces nerfs servent réellement à faire com- muniquer un ganglion avec les deux voisins antérieur et postérieur : parmi ces commissures les unes passent dans le nerf N du grand splanchnique, les autres dans la ra- cine antérieure ou dans la racine postérieure qui se rend à la moelle, comme on peut le voir dans la figure 10. La racine antérieure apparaît la première, elle envoie des nerfs au ganglion sympathique, ils représentent les rami communicantes (RO, fig. 10), la racine postérieure ne présente que quelques cellules ; ce n’est que plus loin que les cellules apparaissent en grand nombre; mais alors les commissures dont l'axe est perpendiculaire à la coupe ont presque complètement disparu ; ce qui prouve bien ce que nous disions tout à l'heure, c’est que les connectifs ne tra- versent pas tous le ganglion d’une extrémité à l’autre. Dans la figure 10 les cellules ont presque complètement disparu, on ne retrouve plus que des fibres; c’est une dispo- sition absolument analogue à celle que nous avons lrouvée chez le canard, le poulet et le pigeon. D4 R. MARAGE. Puis bientôt nous voyons apparaître les cellules du gan- olion de la racine postérieure et du ganglion sympa- thique. À En résumé, si le ganglion sympathique est développé surtout à droite du nerf pris pour axe, le ganglion de la racine postérieure se trouve surtout à droile, mais dans un plan différent : le premier plus éloigné, le second plus rap- proché de la colonne vertébrale. Il est facile de faire voir ici l’analogie qui existe avec les autres oiseaux. La disposition des ganglions est absolument semblable; la seule différence réside dans l'orientation des nerfs et des racines; mais si nous nous souvenons de la place qu’occupent les ganglions au-dessous de la tête de la côte et profondément dans une cavité ménagée entre deux vertèbres, nous comprendrons la raison de ce processus ; en effet les nerfs ont suivi la seule voie possible pour sortir de la cavité où ils se trouvaient; ils ont dû remonter le long de la colonne vertébrale en suivant un chemin parallèle à celui des racines. IV. — PORTION ABDOMINALE (PI. VI. 8 1%. — Historique. | C'est sans contredit la partie du sympathique qui a été la moins étudiée. En eflet, comme nous avons pu le remarquer jusqu'ici, les anatomisies se sont occupés surtout des nerfs encéphaliques et de leurs anastomoses avec le ganglion cer- vical supérieur. | Weber nous indique seulement que les nerfs de l'intestin sont fournis par les nerfs sympathiques et par d’autres filets, partis des ganglions sacrés, qui sont plus indépendants du nérf spinal que les ganglions thoraciques. Swan lui-même se contente de dire que les nerfs intesti- naux sont fournis par des plexus accompagnant l'artère mésentérique supérieure et inférieure ; ce dernier plexus LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 59 correspondant au plexus hypogastrique, que l’on rencontre chez les mammifères. Comme nous le voyons, les notions acquises jusqu'ici sont assez incomplètes et l’on serait tenté de supposer que la plus grande analogie existe entre les nerfs intestinaux des mam- milères et des oiseaux. Heureusement un iravail fort intéressant de Remak (1) va nous montrer que la question est loin d'être aussi simple qu'elle le paraît. Le travail de Remak se divise en trois parties, dans la première 1l étudie le système intestinal chez le poulet (pha- sinus gallus) ; il est le premier qui ait signalé la présence d'un tronc nerveux unique suivant tout le trajet de l'intestin. Cette disposition, si différente de celle que l’on rencontre chez les mammifères, le conduit à rechercher le mode de développement du sympathique intestinal ainsi que Ia na- iure des fibres dont il est formé. La fin'de son travail, et c’est une partie fort importante, est consacrée aux fibres à bords minces qui portent son nom, nous voulons parler des fibres de Remak. Plusieurs de ses contemporains avaient nié, la nature nerveuse de ces fibres, et son travail est consacré en partie à prouver que les fibres à bords minces sont bien de nature nerveuse. Nous ne le sui- vrons pas dans toutes ces discussions, el nous nous conten- terons de résumer ici la partie qui nous intéresse, c’est-à- dire la disposition anatomique du nerf intestinal. Du reste ce travail est imprimé tout au long dans notre thèse inaugu- rale de médecine. Ce nerf suit l'intestin depuis le rectum jusqu’au duodénum ; il arrive parfois qu’un second ganglion accompagne le pre- mier, mais d'après cet auteur il n'en existe jamais au niveau de l'intestin grêle. Ces nerfs sont formés surtout de fibres à bords foncés, mais cependant on y remarque la présence de quelques fibres (4) Ueber ein selstandiges durmnervensystem, Berlin, 1847. 56 R. MARAGE. à noyaux. On peut se demander comment :il se fait que ce nerf facile à trouver n'ait pas été signalé par Swan et les autres observateurs qui l'avaient précédé. La raison en est simple. Si nous nous reportons en arrière, nous nous rappellerons que les anatomisies avaient toujours soin de prendre des animaux d'une certaine taille : le cygne, l’oie, le héron, l’autruche, l'aigle, tels sont les oiseaux que l’on étudiait: or, comme nous allons le voir, chez les palmipèdes le système intestinal est peu développé; on n’y rencontre pas ces gan- glions volumineux que Remak a signalés; chez les rapaces el chez les coureurs nous n’avons pas irouvé de nerf intesti- nal proprement dit; ce sont plutôt des plexus, accompa- gnant les artères mésentériques, qui fournissent des nerfs à l'intestin grêle, ceux du gros Intestin partent de la portion abdominale du sympathique ; ils sont fournis par les gan- lions situés sur les deux troncs du sympathique, de chaque côté de la colonne vertébrale. Il faut donc, pour avoir une idée juste du nerf intestinal, l’étudier non pas seulement chez les gallinacés ou plutôt chez un gallinacé, comme l’a fait Remak, mais chez des ordres éloignés les uns des autres. C'est ce que nous avons fait et nous verrons que le nerf intestinal présente des différences considérables non seu-. lement dans les divers ordres, mais encore chez les oiseaux appartenant à une même famille. Nous ne voudrions pas affirmer que ces différences ont une grande importance, mais il était utile de les signaler, car la description de Re- mak ne s'applique guère qu'au poulet, le seul animal qu'il ait étudié. $ 2. — Étude anatomique. Nous diviserons ce travail en deux parties ; dans la pre- mière, nous étudierons les deux troncs du sympathique, qui continuent le nerf thoracique ; dans la seconde, nous.étu- dierons les nerfs intestinaux. | | « | | - LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 57 PORTION ABDOMINALE (Canard). Nous avons abandonné le tronc du sympathique au niveau de la dernière côte, et nous avons vu que les nerfs qui par- tent des deux derniers ganglions thoraciques contribuent à former le petit nerf splanchnique, que Swan nommait le se- cond grand nerf splanchnique. Ce nerf estencore constitué par des rameaux qui partent des trois premiers ganglions abdominaux; ces filets nerveux remontent et vont former un riche plexus autour de l'aorte et de la veine rénale. _ A ce niveau le tronc du sympathique est formé par un tronc nerveux unique, placé le long de la colonne vertébrale : quel- quefois il se forme un collier nerveux qui enserre une artère, une veine ou une apophyse osseuse ; mais ce fait est rare. Les ganglions sont beaucoup moins volumineux que ceux de la région thoracique, mais ils sont toujours au niveau des nerfs spinaux, avec lesquels 1ls ne sont pas intimement liés. En effet, dans la région abdominale le sympathique pré- sente chez tous les oiseaux un grand degré d'indépendance ; les ganglions sont réunis aux nerfs spinaux par un ou deux rameaux communicants, absolument comme chez les mam- mifères. Le tronc nerveux est logé au-dessous du rein, qui chez les oiseaux acquiert une grande longueur ; le parenchyme de cet organe se laisse traverser par les nerfs spinaux, aussi est-on obiigé de le détruire en partie pour arriver jusqu’au sympathique. | Les ganglions envoient un grand nombre de filets ner- veux qui vont former autour de l’aorte un riche plexus s’anastomosant avec les nerfs du côté opposé, c’est ainsi que Les deux troncs du sympathique sont toujours mis en com- munication l’un avec l’autre : ces nerfs envoient des filets au mésentère et vont s’anastomoser avec le nerf intestinal qui se trouve ainsi directement en communication avec les deux troncs du sympathique. 8 R. MARAGE. Les nerfs qui sont fournis à l'ovaire et aux capsules surré- nales partent toujours des ganglions abdominaux supérieurs ; cest le plus souvent le quatrième ganglion qui envoie un grand nombre de filets nerveux à la capsule surrénale, les trois premiers contribuant à la formation du petit nerf splanchnique. Mais chez les oiseaux il n'existe le plus sou- vent qu'un seul ovaire : l'ovaire gauche, aussi n’y aura-t-il plus de symétrie entre les sympathiques droit et gauche; du reste | nous retrouverons souvent cette disposition quand nous nous occuperons de l'origine du nerf intestinal. NERF INTESTINAL. Le nerf intestinal est relativement peu développé chezles palmipèdes ; dans la partie de l'intestin comprise entre. les cæcums et l’anus, il se présente sous la forme d’un tronc nerveux, situé entre la veine mésentériqueet l'intestin; mais irès près de ce dernier organe. Ce nerf part du eloaque, suit le grosintestin, puis vas’anastomoser avec les plexus ner- veux qui entourent l'artère mésentérique; dès son origine, il reçoit des troncs du sympathique un grand nombre de filets nerveux; il est donc en rapport à ses deux exirémités avec le sympathique abdominal et, par conséquent, il ne forme pas un système indépendant. Au niveau du rectum il n'existe pas de ARE volu- mineux, comme Remak en a trouvé chez le poulet. Le nerf est entouré d’une sorte de gaine formée par le mésentère, et au microscope il semble constitué uniquement par des fibres à bords minces. En résumé, si nous distinguons, comme l’a fait Remak, deux parties dans le nerf intestinal, nous voyons que la por- tion recto-colique est constituée par un tronc nerveux, unique, sans ganglions, situé très près de l'intestin et parallèle à cet organe, la partie iléo-jéjunale est au contraire représentée par un plexus très riche formé par le prolonge- ment du pelit nerf splanchnique. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. D9 Du reste cette deuxième portion présente chez les oiseaux des variétés nombreuses: cependant nous pouvons ramener cette disposition à deux types : ou bien les portions rectales et iléo-jéjunales sont complètement différentes, c'est ce qui se présente chez le canard, l’oie, le faisan, la pintade : ou bien le nerf intestinal est constitué par un filet nerveux unique, partant des deux derniers ganglions thoraciques qau- ches, suivant tout l'intestin, et venant au niveau du cloaque s'anastomoser avec les filets nerveux partis du tronc sym- pathique ; c’est ce que nous trouvons chez le poulet et le pi- geon. Chez les rapaces et les coureurs Le nerf intestinal est dif- férent. OIE. Le sympathique abdominal de l'oie est tout à fait sem- blable à celui du canard. Le tronc du sympathique va en s’amincissant de plus en plus jusqu'au coccyx; il présente des ganglions nombreux qui deviennent de plus en plus petits à mesure qu'ils se rapprochent du cloaque. Ils en- voient un grand nombre de filets nerveux dans le mésentère. Des trois derniers ganglions thoraciques naissent trois nerfs qui s’anastomosent ensemble, forment un plexus autour de l'artère mésentérique supérieure et c’est de ce plexus que vont naître les filets nerveux qui se rendront à l'intestin grêle. Auprès des cæcums, le tronc nerveux devient unique comme chez le canard, suit la veine mésentérique et vient s’anastomoser au niveau du cloaque avec les nerfs partis des troncs latéraux du sympathique. Il n'existe pas de gan- glions volumineux analogues à ceux que nous allons rencon- trer chez les gallinacés. GALLINACÉS. Chez les gallinacés, le tronc du sympathique présente toujours des dispositions absolument analogues, nous allons 60 R. MARAGE. décrire rapidement celui d’un faisan. Le premier ganglion abdominal envoie toujours aux capsules surrénales et à l'ovaire un grand nombre de filets nerveux : quelquefois les deuxième et troisième ganglions en émettent également. Ces nerfs partent tous du même point du ganglion, et ils se divisent immédiatement de manière à parvenir à l'organe en différents points, chacune des branches primitives se subdi- visant au plus en deux autres. Dans d’autres cas, les filets nerveux de l'ovaire partent du dernier ganglion thoracique et des premiers ganglions abdominaux, tandis que les nerfs de la capsule surrénale étaient fournis par le premier gan- ghion abdominal. Le tronc du sympathique reste toujours simple ; il s’amin- cit de plus en plus à mesure qu’il se rapproche des vertèbres sacrées, et souvent au niveau du cloaque il se divise en deux ou trois branches. Les ganglions fort nombreux se trouvent toujours au point d'union avec les nerfs spinaux, avec les- quels ils sont mis en communication par des 7ami commu- nicantes très courts. Les ganglions sont surtout volumineux au niveau du plexus lombaire. Des branches nombreuses partent des ganglions, forment un riche plexus autour de l'aorte, et se dirigent ensuite vers le mésentère pour s’anastomoser, au moyen de filets ner- veux très fins, avec le nerf intestinal. NERF INTESTINAL. Chez le poulet le nerf intestinal est très bien développé, il prend son origine dans un plexus nerveux qui accompagne le tronc céphalique et envoie des rameaux du ventricule suc- centurié au gésier et au pancréas; puis il se place entre l'artère mésentérique et l'intestin, accompagne l'artère dont il est très rapproché, et coupe à angle droit toutes les branches artérielles. Mais le nerf intestinal présente dans toute la portion jéjunale un grand nombre de petits gan- glions sphériques, facilement visibles à l'œil nu, et d'où LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 61 partent les nerfs qui se rendent à l'intestin. Au niveau de l'iléon, les ganglions n'existent plus. Dans la partie recto- colique, 1l existe trois ganglions volumineux, d’où partent des filets nerveux se rendant à l'intestin. D’autres filets très ténus partent du plexus qui entoure l’aorte abdominale. A ses deux extrémités le nerf intestinal est donc en commu- nication avec le reste du sympathique. Chez /a pintade la partie recto-colique présente de irès grandes analogies avec le nerf correspondant du pou- let. Un ganglion volumineux allongé est situé près du cloaque auquel il envoie des filets nombreux : le nerf intestinal s’é- carte alors du rectum, va se placer près de la veine, et pré- sente trois nouveaux ganglions, le supérieur étant plus volu- mineux que les autres. Ce dernier envoie à l'ovaire droit un filet nerveux; donc, à part quelques légères différences, la description que nous avons faite pour le poulet aurait pu s'appliquer à la pintade. Mais dans la partie iléo-jéjunale c’est un plexus nerveux très riche, qui accompagne la veine mésentérique ; les nerfs de ce plexus suivent les ramifications des vaisseaux qui se rendent à l'intestin. Le point d’origine est encore le petit nerf splanchnique. Ce nerf splanchnique forme au-dessous du gésier un riche plexus qui envoie des rameaux nombreux aux deux ovaires, car nous avons trouvé chez plusieurs oi- seaux les deux ovaires également développés. Cette disposition, tout à fait différente au niveau de l’intes- tin grêle et du gros intestin, se présente également chez le faisan; au niveau du jéjunum et de l’iléon les nerfs accom- pagnent les vaisseaux et en sont les satellites, mais ils ten- dent à former des plexus; au contraire, au niveau du gros inteslin nous voyons apparaitre ce tronc nerveux unique, présentant trois ou quatre ganglions très allongés, situés à des hauteurs variables, et envoyant des filets nerveux à l’o- vaire et à l'intestin. Chez le faisan nous avons trouvé plu- sieurs fois sur la veine qui accompagne le nerf recto-colique 62 R. MARAGE. un deuxième nerf inteslinal présentant un ganglion ana- logue à ceux que nous avons décrits. Ce nerf sert à établir la communication avec les filets ner- veux partis des deux troncs latéraux du sympathique, nous avons retrouvé d’une façon très précise cette disposition chez le pigeon. Le nerf intestinal du faisan est donc abso- lument dépendant du sympathique abdominal ; même dans certains cas, ce nerf part très nettement des deux derniers ganglions thoraciques gauches. Les deux filets nerveux se réunissent en un seul, accom- pagnent pendant quelque temps le tronc cœliaque, puis un peu au-dessus des côlons ils suivent le trajet de l'intestin en se dirigeant vers le rectum; mais toujours la portion termi- nale, celle qui présente des ganglions et est voisine du cloaque, toujours cette portion est plus volumineuse que la partie d’origine siluée au niveau du tronc cœliaque. À son origine le nerf intestinal que nous venons de décrire reçoit deux filets nerveux, l’un venu du pneumogastrique gauche, l’autre du grand nerf splanchnique. D'ailleurs il y a toujours des anastomoses entre le pneumogastrique et le nerf intesti- nal. Si les racines du nerf intestinal n'étaient pas si nom- breuses au niveau du tronc cœliaque on pourrait le regarder comme la continuation du nerf vague, ce qui n’aurait rien d'étonnant, puisque chez les reptiles et les poissons c’est le nerf vague qui tend à remplacer le sympathique. Sous ce rapport les oiseaux sont nettement intermédiaires entre les mammifères et les reptiles. En effet, chez ces derniers ani- maux, entre autres chez le monitor niloticus, le nerf intesti- nal existe également. PIGEON (fig. schématique 10). Chez le pigeon les ganglions des deux troncs du sympa- thique abdominal ont une teinte rosée, ils sont excessive- ment petits, et les commissures deviennent de plus en plus fines. Les rameaux communiquants sont marqués d’une fa- LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 63 çon très nette, mais 1ls sont peu nombreux; souvent le sym- pathique se termine dans un petit ganglion au niveau du cloaque. I = == = _—- lol / 1 ns LI] 7: / Fig. schématique 10.— 1, pancréas; ?, rectum ; 3, veine mésentérique ; à, c, origine du nerf intestinal ; d, nerf allant vers le pancréas; e, f, g, nerf intestinal. Le sympathique thoracique à sa partie supérieure est beaucoup plus gros que le sympathique abdominal; ce qui n'a rien d'étonnant puisque les origines les plus importantes du sympathique se trouvent dans la région thoracique. Le nerf intestinal a des dispositions variables ; 1l présente toujours nettement deux origines, l’une supérieure, l’autre inférieure. 64 R. MARAGE. Il naît en haut des deux derniers ganglions thoraciques gauches; le nerf ainsi formé se divise en trois branches. Une partie suit l’arlère mésentérique, l’autre se dirige vers le pancréas et le duodénum; le troisième nerf suit l'aorte abdominale jusqu’au coccyx ; avant d'y arriver il envoie vers le cloaque un filet nerveux qui va s’anastomoser avec le nerf intestinal à son point d’origine inférieure. Le nerf intestinal ne présente pas de ganglions apparents; c’est un simple filet nerveux qui suit le trajet de l’intestin depuis le cloaque jus- qu’au duodénum (fig. 10). RAPACES (cu'cus hutsonicus, buteo vulgaris). _ Le tronc du sympathique abdominal est toujours formé par un filet nerveux unique, ne présentant de ganglions qu’au niveau des nerfs spinaux avec lesquels il est mis en communicalion par des rameaux communicants bien déve- loppés. Cette indépendance du sympathique abdominal n'a rien ici qui doive nous étonner, puisqu'elle existait déjà au niveau du thorax. Les nerfs de l'intestin grêle proviennent du petit splanch- nique, ils accompagnent les artères. Au niveau du rectum on trouve un filet nerveux analogue à celui que nous avons décrit chez les autres oiseaux; mais il est très mince, très difficile à voir, situé tout près de l'artère qu'il accompagne, il ne présente pas de ganglions apparents. Il existe quel- quefois un deuxième filet nerveux très mince, partant du premier et se rendant à l'ovaire. Chez ces animaux le nerf intestinal est très peu développé: il n’y a pas à le comparer avec celui des gallinacés et même des palmipèdes. COUREURS. Nous avons vu que chez le casoar le sympathique thora- cique avait un volume très petit par rapport au volume de LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 65 l'animal. Il n’en est plus de même pour le sympathique ab- dominal. Les troncs du sympathique sont très volumineux au niveau du plexus lombaire : ce plexus est formé par la réunion de cinq ou six nerfs ayant chacun un demi-centi- mètre de diamètre environ, il se divise en un grand nombre de branches avant de pénétrer dans le canal vertébral; de ces filets partent les rameaux communicants. Ils sont gé- néralement au nombre de deux pour chaque nerf spinal. Le tronc du sympathique est contenu dans une gaine con- jonctive très résistante, et 1l est très adhérent à l’aponévrose anté-vertébrale; un grand nombre de nerfs se dirigent vers l'aorte abdominale. Ce qui est important ici c’est de noter le volume considé- rable que prend le sympathique au niveau des membres pos- térieurs, alors que les nerfs du plexus brachial étaient à peine aussi gros que ceux d'un canard. Il existe donc un rapport bien marqué entre le développement du sympathi- que et celui des membres antérieurs et postérieurs. CONCLUSIONS. Si nous Jetons maintenant un coup d'œil d'ensemble sur l'étude que nous venons de faire, il nous sera facile de voir les analogies et Les différences qui existent au point de vue du sympathique entre les mammifères, les oiseaux et les reptiles. Chez les oiseaux, nous pouvons prendre comme point de départ les ganglions qui s'unissent aux nerfs thoraciques; c'est en effet à ce niveau que le sympathique reçoit de la moelle le plus de fibres nerveuses. Lorsque le sympathique remonte vers la tête, le tronc ner- veux devient unique à partir du point où il s’anastomose avec les nerfs du plexus brachial; à ce niveau, il pénètre dans le canal vertébral et présente des ganglions aux points où il est en rapport avec les nerfs spinaux. Ce filet nerveux se jette ensuite dans le ganglion cervical supérieur, situé ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, D. — ART. N° 1. 66 R. MARAGE. dans l'angle formé par les nerfs de la neuvième et de la dixième paire, il est toujours uni intimement au glossopha- rvngien par du tissu conjonctif. Du ganglion sympathique partent plusieurs nerfs, dont deux plus volumineux se diri- gent l’un vers la tête, l’autre vers les carotides. Par conséquent, au-dessus du thorax, tronc nerveux uni- que, à ganglions nombreux, se terminant dans le ganglion cervical supérieur. | Au-dessous de la région thoracique, le sympathique est formé d’un seul filet nerveux, et il ne se bifurque que sl rencontre un obstacle : quelques rameaux communicanis le mettent en relation avec le système cérébro-spinal. Les branches du sympathique partent en général des gan- glions, et si nous ne tenons pas compte des nerfs secondaires qui vont former des plexus autour de l'aorte, nous aurons trois troncs nerveux principaux : d'abord le grand nerf splanchnique, suivant le tronc cœliaque et s’anastomosant toujours avec les deux nerfs vagues au niveau du gésier ; puis le petit splanchnique parlant des deux derniers gan- glions thoraciques et des trois premiers ganglions abdomi- naux ; enfin le nerf intestinal, qui s’anastomose à l'extrémité supérieure avec les deux splanchniques et les deux nerfs vagues, à l’extrémité inférieure avec les nerfs du sympathi- que abdominal. A ces nerfs il convient d’ajouter le système constitué par le glosso-pharyngien et le pneumogasirique : Ces deux nerfs partent en effet d’un ganglion qui présente de nombreuses cellules nerveuses. Le nerf vague forme pour ainsi dire un sympathique médian qui vient fournir des branches aux poumons, au cœur et au tube digestif. Rappelons, en effet, que le nerf intestinal s’anastomose avec le pneumogastrique. Ne rencontre-t-on pas d’ailleurs une disposition semblable chez les reptiles et Les vertébrés inférieurs ? Les oiseaux ser- viraient de classe intermédiaire entre les mammifères et les autres animaux. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 67 Chez l’homme, le tronc du sympathique présente une dis- position beaucoup plus régulière. Au milieu du thorax et de l'abdomen c’est une série de ganglions identiques réunis au système cérébro-spinal par les rami communicantes. Au niveau du cou, trois ganglions seulement, cervical supérieur, moyen et inférieur. C’est donc dans la région abdominale que le sympathique présente le plus de ressem- blance avec celui des oiseaux. Mais les branches qui en émanent offrent des dispositions tout à fait différentes ; chez l’homme, au niveau de l'intestin. ce sont des plexus nombreux avec des ganglions volumineux : au contraire, chez les oiseaux, s’il y a des plexus, ce n’est qu'au contact des vaisseaux, et le plus souvent, ce sont des troncs nerveux dont les ramifications sont analogues à celles du pneumogastrique. Chez les reptiles, le sympathique présente, d’après Swan, les plus grandes analogies avec celui des oiseaux : nous retrouvons, au milieu du thorax, cette connexion intime des ganglions sympathiquesavecles ganglions des nerfs spinaux : dans les régions cervicale et abdominale, les dispositions des nerfs sont tout à fait semblables. Le nerf mésentérique inférieur du Monitor Niloticus mon- tre, d’après Remak, quelques propriétés anatomiques d’un nerf intestinal. Weber, chez les serpents, a pu suivre le. rameaux intestinaux du nerf vague très loin sur le gros in- testin. Enfin Müller a découvert chez les Myxines un rameau intestinal impair formé par les deux nerfs vagues ; il longe le bord postérieur du conduit du gros Intestin jusqu’à l'anus. D'ailleurs, chez un grand nombre de vertébrés et d’inver- tébrés, les zoologistes ont décrit un système sympathique et un système stomato-gastrique, le premier étant le sympathi- que que l’on décrit chez les vertébrés supérieurs, le second l’analogue des deux nerfs pneumogastriques. Les oiseaux forment donc bien une classe intermédiaire entre les mam- mifères et les autres vertébrés. 68 R. MARAGE. EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE I Sympathique suivant la carotide. — suivant la veine jugulaire avec le pneumogastrique. — allant vers la tète en suivant la carotide externe. . Extrémité de l’artère près de la base du bec. . Ganglion cervical supérieur. . Sy mpathique dans le canal vertébral. . Ganglion commun aux deux nerfs de la 9° et de la 10€ paire. -- du glosso-pharyngien. Extrémité du nerf intestinal au niveau du cloaque. . Filets nerveux partant de l'aorte et allant à l'intestin. . Ovaire. . Trijumeau. . Grand nerf splanchnique. . Glosso-pharyngien. 10. Peumogastrique. 11: Rein. 13. Petit splanchnique. HN date et Fig. 1. — Nerfs encéphaliques du faisan; leurs rapports avec le sympa- thique. Fig. 2. — Nerfs encéphaliques du canard ; leurs rapports avec le sympa- thique. Fig. 3. — Glosso-pharyngien, vague, et ganglion cervical supérieur du ca- nard. Fig. 4. — Ganglion commun: aux nerfs de la 9° et de la 10° paire (canard). Fig. 4. — Une rangée de cellules dans ce ganglion; autour, des cellules du tissu conjonctif. Fig. 5. — Coupe passant par le milieu du ganglion cervical supérieur. Fig. 6. — Coupe montrant l’origine d’un nerf sympathique. Fig. 6’. — Deux cellules de ganglion sympathique. Fig. 7. — Ganglion du glosso-pharyngien. Fig. 7°, — Une des cellules de ce ganglion. Fig. 8. — Nerfs sympathiques du canard et branches du pneumogastrique. PLANCHE II Nerf du sympathique cervical et nerf spinal dans le canal vertébral (150 environ). Les mêmes lettres ont été employées pour toutes les figures. RA. Racine antérieure partant de la moelle M. RP. Racine postérieure partant de la moelle M. G. Ganglion de la racine postérieure. N. Nerf mixte formé par les racines antérieure et postérieure. N’. Nerf partant du ganglion postérieur. GS. Ganglion sympathique. LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. 69 C. Commissure. A. Artère vertébrale. Fig. 1. — Vue générale ; le ganglion sympathique GS et l'artère À sont situés du côté de la racine antérieure. Fig. 2,3,4,5.— Coupe perpendiculaire à la direction des racines suivantyy". Fig. 2. — Le ganglion sympathique avec le nerf spinal au-dessous ; des fibres conjonctives les reliant ensemble. Fig. 3. — Le ganglion sympathique presque disparu; on commence à voir le ganglion spinal G. Fig. 4. — La racine antérieure d’où part le nerf N/; au-dessous le ganglion spinal G. Fig. 5. — Les deux racines antérieure et postérieure. Fig. 6, 7, 8, 9, 10. — Coupe suivant XX’ parallèles aux racines. Fig. 6. — La commissure supérieure et l'artère A; le ganglion sympa- thique GS apparait. Fig. 7. — Le ganglion sympathique, l'artère et les deux racines avec le gan- glion spinal G. Fig. 8. — On voit les rapports entre le système sympathique et le système cérébro-spinal. Fig. 9. — Le nerf mixte est coupé environ en son milieu ; en N’ apparaît le nerf que l’on avait déjà vu en 3 et 4; le nerf mixte est formé en haut de fibres à bords foncés, en bas de fibres à bords minces parties du gan- glion spinal. Fig. 10. — La coupe porte plus loin que les ganglions; on aperçoit la com- missure C, l'artère A et le nerf N’. | Fig. 11. — Cellule unipolaire d’un ganglion sympathique. Fig. 12. — Cellule de la moelle épinière. PLANCHE III Nerf du plexus brachial du canard (150 environ). Les mêmes lettres ont été employées pour toutes les figures. RA. Racine antérieure partant de la moelle. RP. Racine postérieure partant de la moelle. G. Ganglion de la racine postérieure. N. Nerf mixte formé par les racines antérieure et postérieure. N’. Nerf partant de la racine antérieure. GS. Ganglion sympathique. C. Commissures. - Fig. 1. — Vue générale du nert. Fig. 2, 3, 4, 5,6. — Coupes perpendiculaires à l’axe du nerf brachial N. Fig. 2. — Coupe passant par le ganglion sympathique et montrant les ra- meaux communicants. Fig. 3. — Coupe montrant les commissures C unissant entre eux deux gan- glions sympathiques ; les rameaux communicants pénètrent dans ces filets nerveux ; à la partie supérieure apparaît le ganglion de la racine postérieure G. Fig. 4.— Coupe montrant la racine antérieure RA et la racine postérieure RP ; un nerf N' part de la racine antérieure en traversant le ganglion spinal. Fig. 5. — Les deux racines; les cellules se trouvent surtout à la périphérie au milieu des fibres qui traversent directement. 70 R. MARAGE. Fig. 6. — Coupe du nerf brachial avant le ganglion sympathique ; au milieu on aperçoit des fibres de Remak; à la périphérie, des fibres à bords foncés. Fig. 7,8, 9. — Coupes parallèles aux racines. Fig. 7. — Le nerf brachial N envoie à son extrémité des rameaux commu- nicants qui pénètrent dans le ganglion sympathique GS; partout ail- leurs le ganglion sympathique est simplement appliqué sur le nerf sans recevoir aucun filet nerveux. Le ganglion sympathique est formé de deux parties ; dans la portion inférieure, on voit des cellules multipolaires; dans la portion supérieure se trouvent les connectifs coupés perpendi- culairement à leur axe. Fig. 8. — Les deux racines antérieure RA et postérieure RP du nerf bra- chial ; le nerf N° naït de la racine antérieure en traversant le ganglion spinal, qui lui envoie cependant quelques rameaux. Fig. 9. — Le ganglion sympathique ne recoit pas de filets nerveux N; on voit la coupe des connectifs. Fig. 10. — Cellule multipolaire d’un ganglion sympathique (500 environ). Fig. 11. — Cellule d’un ganglion spinal (500 environ). PLANCHE IV. Nerf thoracique du canard ; coupes parallèles aux racines (grossiss. 150). Les mêmes lettres ont été employées pour toutes les figures. RA. Racine antérieure partant de la moelle. RP. Racine postérieure partant de la moelle. G. Ganglion de la racine postérieure. N. Nerf mixte formé par les racines antérieure et postérieure. GS. Ganglion sympathique. S. Nerf partant du ganglion sympathique. Fig. 1. — Vue générale des deux ganglions, de leurs nerfs et de leurs ra- cines. Fig. 2. — Coupe représentant la racine antérieure et la racine postérieure avec son ganglion. Fig. 3. — Les racines commencent à pénétrer dans le ganglion pour aller former le nerf N. Fig. 4. — Le ganglion sympathique GS est séparé nettement par le nerf parti de la racine antérieure ; il n’en reçoit pas un seul filet nerveux. Fig. 5. — Le nerf parti de la racine antérieure sépare nettement les deux ganglions G et GS; il envoie au ganglion sympathique des filets nerveux servant de rameaux communicants. Fig. 6. — Coupe passant vers le milieu des deux ganglions ; le nombre des cellules à beaucoup diminué; il n’y a plus de limite tranchée entre les deux ganglions G et GS. Fig. 7. — Analogue à la précédente ; le nerf S a disparu; le nombre des cellules augmente ; les fibres qui séparent les deux ganglions passent en partie dans le ganglion sympathique; on voit au milieu de la figure des fibres perpendiculaires aux premières et servant de rameaux communi- cants. Fig. 8. — Analogue à la précédente; les racines ont disparu ; le ganglion LE SYMPATHIQUE DES OISEAUX. F € sympathique est beaucoup plus volumineux que le ganglion de la racine postérieure. Fig. 9. — Le ganglion postérieur avec les fibres qui en partent pour former Imerc PLANCHE V Nerf thoracique du casoar émeu (gross. 150). RA. Racine antérieure partant de la moelle. RP. Racine postérieure partant de la moelle, G. Ganglion de la racine postérieure. N. Nerf mixte formé par les racines antérieure et postérieure. GS. Ganglion sympathique. S. Nerf partant du ganglion sympathique. GC. Connectifs faisant communiquer deux ganglions ensemble. RC. Rameaux communicants. M, moelle épinière. Fig. 1. — Aspect général du nerf appliqué sur les parties latérales de la co- lonne vertébrale ; il est accompagné d’une artère A et d’une veine V. Fig. 2. — Le même nerf sans l'artère et la veine, disposé de façon à faire voir les racines qui vont à la moelle épinière M. Fig. 3. — Coupe perpendiculaire aux racines ; on voit le ganglion sympa- thique GS, la commissure qui en part C; la figure a été coupée à droite; il n’y à donc que la moitié du nerf. Fig. #. — Coupe perpendiculaire aux racines, mais plus rapprochée de Ia colonne vertébrale; on voit à gauche le nerf N et à droite le ganglion de la racine postérieure G; il en part des filets nerveux qui se rendent dans le nerf; en RP des fibres sont perpendiculaires à la figure et se trouvent au milieu des cellules. Fig. 5. — Les deux racines antérieure RA et postérieure RP. Elles sont con- tenues dans la même gaine conjonctive très épaisse et très résistante. On voit au milieu du ganglion des fibres nerveuses qui traversent directe- ment sans s'arrêter dans les cellules ; à la périphérie sont massées les cellules. Fig. 6. — Racine postérieure, la coupe est plus rapprochée de la moelle ; il y à beaucoup plus de fibres nerveuses; le nombre des cellules diminue. Fig. 7. — Racine postérieure, il n’y a plus que des fibres nerveuses. Fig. 8, 9, 10. — Coupes parallèles aux racines, par conséquent perpendi- culaires aux précédentes. ; Fig. 8. — Les commissures C sont coupées perpendiculairement à leur axe; le ganglion sympathique est représenté partiellement en GS. Fig. 9. — Le nombre des fibres augmente; les commissures disparaissent de plus en plus; elles ne traversent donc pas directement le ganglion. Fig. 10. — Coupe passant par le milieu du ganglion; les fibres sont très nombreuses; c’est donc une disposition analogue à celle qui existe chez le canard ; les cellules sont massées à la périphérie et les fibres se trou- vent surtout au centre. PLANCHE VI Nerf intestinal. 1. Premier ganglion du nerf intestinal. 79 R. MARAGE. 2. Filets nerveux partant de l’aorte et faisant communiquer le nerf intesti- nal avec le grand sympathique. . Nerf allant à l'ovaire. . Artère mésentérique. . Petit nerf splanchnique. . Pneumogastrique. . Grand nerf splanchnique. . Pancréas. . Veine mésentérique. 40. Aorte. 41. Rein. 12. Nerf allant s’anastomoser avec la partie supérieure du nerf intestinal. Fig. 4. — Nerf intestinal du faisan. Fig. 2. — — de la pintade. Fig. 3. — — du coq. Fig. 4. — = du pigeon. @ ©? ©? OX HT LE SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES ET SES RAPPORTS AVEC L'APPAREIL CIRGULATOIRE Par M. E. L. BOUVIER. S Ir, — Historique. Ce modeste travail a pour but d'étudier les ganglions nerveux des Crustacés décapodes dans les rapports qu'ils présentent entre eux et avec l'appareil circulatoire. Les lois générales qui régissent ces phénomènes ont été magistrale- ment mises en évidence, il y a plus d’un demi-siècle, par H. Milne-Edwards ; il ne reste plus, par suite, qu’à justifier ces lois par de nouveaux exemples, montrer les modifica- tions sous lesquelles elles se présentent, et les appliquer à la recherche des affinités naturelles des différents types. Le résumé historique suivant, malgré sa brièveté, justifiera l'utilité de cette étude et mettra d’ailleurs au courant une bibliographie qui n’a pas été traitée, que je sache, depuis Milne-Edwards. Les premières recherches sur le système nerveux des crustacés remontent à 1672 et furent faites par Thomas Willis (1). Ce savant décrit le cerveau de l'Écrevisse, les deux connectifs qui en partent et qui constituent le collier œsophagien, enfin la chaîne ventrale formée par deux cor- (4) Willis, De anima brutorum quæ Hominis vitalis ac sensitiva est, exercilu- tiones duæ, Londres, 1672. 74 L. BOUVIER. dons alternativement disjoints et réunis; Willis compare cette chaîne ventrale à la moelle épinière des animaux ver- tébrés. Au siècle suivant, Swammerdam (1) étudie en détails le système nerveux du Pagure; figure et description sont d’une exactitude rigoureuse et n'ont pas été surpassées depuis ; on reviendra plus loin sur cette étude remarquable, et il nous suffira de faire observer ici que le cerveau, le col- lier œsophagien, la masse ganglionnaire thoracique et cing ganglions abdominaux forment les parties essentielles du sys- ième nerveux du Pagure. | En 1755, Rôsel (2) méconnaît complètement le système nerveux de l’Écrevisse ; il ne signale que la portion abdomi- nale de sa chaîne ventrale, et il la considère comme un vais- seau qui se distingue des autres en ce qu'il présente de petites nodosités. En 1790, Herbst (3) relève simplement la figure et la description de Rôsel, il réédite le système ner- veux du Pagure d’après Swammerdam, mais il décrit, pour la première fois, un système nerveux de crabe. Ce système nerveux se compose de deux cerveaux ; l’un d’eux, situé en avant, au-dessus de l’œsophage, correspond au cerveau normal; l’autre, situé sur la face ventrale, au-dessous de lœsophage, représente la masse ganglionnaire thoracique des crabes. L'auteur signale le collier œsophagien qui met en relation les deux centres, et il mentionne en outre, avec une exactitude assez grande, les principaux nerfs de l'or- ganisme. Il est fâcheux que Herbst ait accepté sans vérifi- cation les assertions erronées de Rôüsel, car son étude des crabes est suffisamment remarquable pour l’époque où elle a été faite. | Avec Cuvier (4), nous entrons dans le domaine des études (1) Swammerdam, Histoire naturelle des Insectes, traduite du Biblia naturæ. Coll. acad., partie étrangère, t. V, p. 122. (2) Rôsel, Der monathlich herausgegeben Insecten Belustigung, dritter Theïl, Nürnberg, 1755. (3) Herbst, Versuch ciner Naturgeschischte der Krabben und Krebse, Berlin und Stralsund, 1790. (4) Cuvier, Lecons d'anatomie comparée, t. IX. SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 15 exactes et précises, et nous pouvons signaler un essai de gé- néralisation : « Dans les décapodes à longue queue, la par- tie moyenne du système est un cordon noueux qui se pro- longe d’une extrémité à l’autre; dans ceux à courte queue, vulgairement nommés crabes, il y a au milieu de l'abdomen un anneau où un disque médullaire d’où les nerfs du corps partent comme des rayons. » L’illustre savant observe la commissure qui réunit en arrière de l’œsophage les deux branches du collier œsophagien, sur ces branches 1l indique deux petits ganglions sympathiques; enfin, 1l décrit très exactement, dans ses parties essentielles, le système nerveux de l’Écrevisse, du Homard, du Crabe enragé et du Crabe maja. Parlant du système nerveux du Pagure, Cuvier dit que ce crustacé « paraît avoir beaucoup moins de ganglions que l'Écrevisse ». Cuvier a beaucoup mieux étudié le système nerveux des Crustacés que leur appareil circulatoire, aussi ne fait-il au- cune mention des rapports très curieux qui existent entre ces deux sortes d'organes. Même lacune produite par les mêmes causes dans Suckow (1) : le système nerveux du Homard, seule espèce étudiée par l’auteur, est figuré avec beaucoup de soin, mais la commissure post-æsophagienne n'est pas représentée. En 1825, Lund (2) signale pour la première fois, dans la même espèce, les rapports du système nerveux avec l'appareil circulatoire; l'artère sternale, dit-il, traverse verticalement la chaîne nerveuse dans la région thoracique et, arrivée au-dessous de la chaîne nerveuse, se divise en deux branches médianes situées au-dessous de celle-ci. Ces conclusions seront justifiées et singulièrement précisées par Milne-Edwards. En 1828, Siraus-Durckheim (3) tente une généralisation (1) Suckow, Anatomisch-physiologische Untersuchungen der Insekten und Krustenthiere, 4% vol., 17 cahier, Heidelberg, 1818. (2) Lund, Zweifel an dem Daseyn eines Circulations-systems bey den Crustaceen, Isis, vol. XVI-XVII. (3) Straus-Durckheim, Considérations générales sur l'anatomie comparée des animaux articulés. 76 L. BOUVIER. des phénomènes relatifs au système nerveux dans tout le groupe des animaux articulés. Cette généralisation est d’une complexité au moins aussi grande que les phénomènes qu'elle veut expliquer; elle ne comprend pas moins de huit lois, mais nous ne relèverons ici que celles en qu 1 immédiat avec le sujet qui nous occupe. «1° Toutes les fois que le corps est composé de segments semblables, on trouve à la moelle épinière autant de paires de ganglions qu'il y a de sternums au corps, variant en vo- lume selon la masse des organes de la vie de relation que chaque segment contient, et suivant la plus ou moins grande activité de ces organes. » La Scolopendre peut servir de type à cette loi, de même que bon nombre de Crustacés édriophthalmes. « 2° Lorsque le tronc est composé de segments soit mo- biles, soit immobiles, soit même soudés, mais toujours dis- tincts dans leur région sternale, tandis que l'abdomen est formé de segments bien mobiles, les paires de ganglions se répètent dans chaque segment de l’une et l’autre partie, en suivant pour la grosseur la proportion des organes de la vie de relation renfermée dans chaque segment. » Ex. : l'Écrevisse. 3° Quand le tronc se trouve formé de segments, soit mobiles, soit immobiles, soit soudés, mais distincts dans. leur partie sternale, tandis que ceux de l'abdomen sont immobiles, dépourvus inférieurement de muscles moteurs, que ces segments soient d’ailleurs soudés ou non, les gan- glions se répètent dans les segments du tronc seulement, comme dans le cas précédent, mais l'abdomen n’en ren- ferme point et reçoit ses nerfs de la dernière paire de gan- glions du tronc, qui est alors plus grosse que les autres. La partie terminale du cordon de la moelle épinière se prolonge jusque vers l’extrémité de l’abdomen, où ils se distribuent. » Ces lois sont approchées plutôt qu'absolues; elles res- semblent bien plus à des résumés partiels qu'à des lois proprement dites et, malgré leur nombre et leur com- plexité, elles ne sont guère que la paraphrase des proposi- SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 71 tions, remarquablement concises, formulées par Cuvier. L'auteur, du reste, les a maintenues beaucoup plus tard (1), à une époque où Audouin et Milne-Edwards avaient depuis longtemps fait la synthèse des phénomènes qui président à la constitution du système nerveux chez les Crustacés. C'est à ces savants, en eflet, que l'on doit à peu près toutes les connaissances précises que nous possédons actuel- lement sur le système nerveux des animaux de cette classe. L'année même où Straus-Durckheim publiait son travail sur les Articulés, Audouin et Milne-Edwards (2) étudiaient le système nerveux dans un très grand nombre de Crustacés et montraient, avec une pleine évidence, que la forme ty- pique de ce système est une double chaîne ganglionnaire susceptible de se concentrer à la fois dans le sens trans- versal (abdomen de l’Ecrevisse et du Palémon) et dans le sens longitudinal (Crabes). Après la mort d’Audouin, Milne-Edwards étendit et résuma ses travaux, dans ses essais sur l’organisation des Crustacés appliquée à la classi- ficalion (3), puis dans son histoire naturelle des crustacés (4), enfin dans son grand traité (5) de physiologie et d'anatomie comparée. À peu près à la même époque, Ratkhe (6) publiait en Allemagne ses belles recherches sur le développement de l'Écrevisse et justifiait les découvertes des savants fran- çais en établissant que le système nerveux de notre crus- tacé d’eau douce, à l’état larvaire, se compose d’une double chaîne de ganglions bien distincts et groupés en autant de paires qu’il y a de membres. Milne-Edwards fait observer (4) Straus-Durckheim, Traité pratique et théorique d'anatomie comparative, Paris, 1842. (2) Audouin et Milne Edwards. Troisième mémoire sur l'anatomie et la physiologie des Crustacés; recherches anatomiques sur le système nerveux. Ann. sc. nat., t. XIV, 1828. (3) H. Milne-Edwards. Recherches sur l’organisation et la classification des Crustacés décapodes. Ann. sc. nat., t. XXV, 1832. (4) H. Milne-Edwards, Histoire naturelle des Crustacés, t. Ier, 1834. (5) H. Milne-Edwards, Leçons sur la physiologie et l'anatomie comparée de l’homme et des animaux, t. II, 1874. (6) Rathke, Untersuchungen über die Bildung und Entwickelung des Fluss= krebsen, 1829. 18 L. BOUVIEB. que les découvertes de Ratkhe établissent un parallélisme remarquable entre les modifications progressives du système nerveux dans l'individu et dans le groupe auquel appartient l'individu; il en conclut (1) « que le système nerveux des Crustacés se compose toujours de noyaux médullaires, dont le nombre normal est égal à celui des membres et que toutes les modifications qu'on y rencontre, soit à diverses époques de l’incubation, soit dans différentes espèces de la série, dépendent principalement des rapprochements plus ou moins complets de ces noyaux, agglomération qui s'opère des côtés vers la ligne médiane, en même temps que dans la direction longitudinale ; mais peuvent aussi tenir en partie à un arrêt de développement dans un certain nombre de ces noyaux». Du reste, Milne-Edwards n’a pas borné ses recherches à l’animal adulte, et ila devancé Ratkhe dans l’étude des formes plus jeunes, en étudiant le système nerveux du Phyllosome:; Je me hâte d'ajouter, 1l est vrai, qu'à l'époque où parut le mémoire du savant français, le Phyllosome était considéré comme un crustacé adulte et non comme [a forme larvaire de la Langouste. Les larves de Crustacés décapodes ont été d’abord étudiées, dans leur ensemble, par M. Gerbe (2), à une époque beaucoup plus rapprochée de la nôtre (vers 1874), et 1l résulte de cette étude que les larves zoé des crabes pré- sentent des ganglions abdominaux qui n'existent plus, au moins dans cette région, dans l'animal adulte. De nos jours, M. Claus (3) est revenu incidemment sur ce sujet en étu- diant l’appareil circulatoire des formes larvaires chez les Crustacés décapodes. Les figures nombreuses qui accom- pagnent le curieux mémoire du savant professeur de Vienne représentent, totalement ou en partie, la chaîne nerveuse abdominale des larves de Crangons, de Pagures, de Porcel- lanes, de divers Crabes, etc., et toutes mettent en évidence, (1) Milne-Edwards, Histoire naturelle des Crustacés, t. T*, p. 147. (2) Cité par Milne-Edwards, dans son Traité de physiologie et d'anatomie comparée, t. XI, 1874. (3) Claus, Zur Kenntniss der Kreislaufsorgane der Schizopoden und Decapo- den. Arbeiten aus dem zool. Instit. der Univ. Wien, t. V, 1884. SYSTÈME NERVEUX DES. CRUSTACÉS DÉCAPODES. 19 avec la plus grande netteté, la présence d’une chaîne gan- glionnaire scalariforme abdominale dans ces différentes for- mes larvaires, résultat qui s'accorde d’ailleurs parfaitement avec les conclusions de M. Gerbe, et qui démontre, d’une manière irréfutable, qu’on ne saurait nullement conclure du système nerveux de la larve à celui de l'animal adulte et réciproquement. Je pourrais clore 1c1 cette revue bibliographique, car tous x les travaux postérieurs à ceux de Milne-Edwards ne font que justifier les conclusions auxquelles ce savant est arrivé ; signalons toutefois pour mémoire les travaux de Swann (1), de Newport (2), de Hunter (3) sur le système nerveux du Homard; de Brandt et Ratzeburg (4), de M. Lemoine (5) et de M. Huxley (6) sur le système nerveux de l’Écrevisse : quelques mots de Fr. Müller (7) sur celui des Porcellanes ; enfin les traités de zoologie ou d'anatomie comparée de Richard Owen (8), de Siebold et Stannius (9), de Gegenbaur (10) et de Claus (11). Je reviendrai toutefois sur un certain nombre de ces tra- vaux pour montrer qu'il importe d’éclaircir quelques points encore en litige, dans l’organisation fondamentale du sys- ième nerveux. Milne-Edwards s'accorde avec Cuvier pour attribuer au Crabe enragé (Carcinus mœnas) une masse (4) Swann, Ilustrations of the comparative anatomy of the nervous system, 1835. (2) Newport, On the nervous system of the Sphinx ligustri. Philosoph. Tran- sactions, 1834. (3) Descriptive and iülustrated catalogue of the physiological series of comp. anat. contained in the Museum of the royal college of surgeons. (4) Brandt et Ratzeburg, Medizinische Zoologie, 1829. (5) Lemoine. Recherches pour servir à l’histoire du système nerveux, musculaire et glandulaire de l’Ecrevisse. Ann. sc. nat., 5° série, t. IX, 1868. (6) Huxley, L’Écrevisse, introduction à l'étude de la zoologie, édition an- glaise, 4877, édition française, 1880. (7) Fr. Müller, Die Verwandlung der Porcelanen, 1862. (8) Owen, Lectures on the comparative anat, and physiol. of the invertebrate animals, 2° édition, Londres, 1858. (9) Siebold et Stannius, Nouveau manuel d'anatomie comparée, trad. fran- caise, t. I, 1850. (10; Gegenbaur, Manuel d'anatomie comparée, trad. française, 1874. (411) Claus, Traité de zoologie, 2° édition, trad. francaise, 1883. 80 L. BOUVIER. ganglionnaire thoracique perforée se prolongeant en arrière dans un cordon impair destiné à l’abdomen: ce tronc ner- veux, dit l’auteur, « ne présente point de renflement gan- glionnaire comme dans les Décapodes macroures, et cette disposition est en rapport avec l’état presque rudimentaire de cette partie du corps ». C’est aussi l’opinion de Siebold et Stannius, de M. Richard Owen, de M. Claus; mais, dans le Traité de zoologie de ce dernier savant, on trouve la figure du système nerveux du Carcinus mænas, représentée d’après Milne-Edwards, et dans cette figure, la masse ganglionnaire thoracique se prolonge dans un cordon que le traducteur indique comme la « terminaison de la chaîne ventrale » (1). Je n’insisterais pas sur cette expression, au moins équivoque, si beaucoup d'élèves ne cherchaient encore aujourd’hui, dans les Crabes, un rudiment de la chaîne nerveuse abdomi- nale; ce rudiment n'existe pas et le Carcinus mœnas res- semble en cela à tous les autres Crabes parfaitement carac- térisés. Une autre question, beaucoup plus discutée, est celle du système nerveux des Pagures. Il n’est peut-être pas de sys- tème nerveux plus facile à préparer, et il n’en est pas sur lequel on soit moins fixé à l'heure actuelle. J'ai déjà dit que Swammerdam attribuait aux Pagures une chaîne nerveuse abdominale composée de cinq ganglions, et que Cuvier s’ex- primait à ce sujet d’une manière assez vague. D'après M. Richard Owen, au contraire, les Pagures n’auraient qu'un seul ganglion abdominal, et c’est aussi l'opinion de Siebold et Stannius, de Gegenbaur et de Claus. Il suffit de lire la plupart de ces auteurs pour se convaincre des notions peu exactes qu'on possède sur le système nerveux des Ano- moures de Milne-Edwards en général et des Pagures en particulier. « Chez les Anomoures, dit M. Gegenbaur (2), outre une réduction dans le nombre de ganglions thoraci- ques, toute la partie abdominale de la chaîne ganglionnaire, (1) Claus, Traité de zoologie, 2° édition, fig. 614. (2) Gegenbaur, loc. cit. SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. st en rapport avec l’atrophie qui frappe l'abdomen de ces Crustacés, est représentée par un ganglion unique. » KE Milne-Edwards (1) de son côté attribue aux Anomoures les deux caractères suivants : « 1° ganglions nerveux du thorax réunis en une masse allongée ou formant une double chaîne longitudinale; 2° en général, point de gan- glions nerveux distincts dans l'abdomen (exception : Pa- gures). » Cette revue bibliographique suffit pour montrer qu'il reste encore à faire sur la grosse anatomie du système ner- veux, et comme les questions discutées sont précisément relatives aux Anomoures, c’est-à-dire aux Crustacés qui, à tous égards, servent de transition entre les Brachyures et les Macroures, on ne jugera peut-être pas inutile une étude de ces formes de transition. Mes recherches se porteront sur d’autres formes de passage entre les différentes familles de ces groupes, sur les rapports plus précis du système nerveux avec l'appareil circulatoire et sur la valeur systé- matique des divers modes de condensation du système nerveux. Laissant de côté les recherches histologiques, ce travail se divisera par conséquent en deux chapitres. Dans le pre- mier, J'étudierai le système nerveux dans son ensemble, er suivant autant que possible la classification de Milne- Edwards ; dans le second, je résumerai brièvement le résul- tat de mes observations sur les rapports du système ner- veux avec l'appareil circulatoire. $ 2. — Système nerveux. J'étudierai successivement le système nerveux dans les Macroures, les Anomoures et les Brachyures. (1) Milne-Edwards, Recherches sur l’organisation et la classification des Crus- tacés. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 6. — ART. N° 2. 82 L. BOUVIER. À. — MACROURES. Famille des Salicoques (Carididés) (fig. 1). — La famille des Salicoques a été divisée par Milne -Edwards en quatre tribus, les Pénéens, les Palémoniens, les Alphéens et les Crangoniens. Les Pénéens se placent à la base de la famille et représentent en outre les Macroures les plus simples; les Crangoniens doivent être considérés, au contraire, comme les Salicoques les plus différenciés. Je n’ai pas étudié de représentants de la tribu des Alphéens. | Les Crustacés de la famille des Salicoques sont tous ca- ractérisés par un système nerveux extrémement condensé.dans le sens transversal et par une chaîne nerveuse abdominale com- posée de six paires de ganglions confondus deux à deux. Dans la région thoracique les connectifs ganglionnaires ne sont jamais séparés qu'au niveau du passage de l’artère sternale, et dans la région abdominale ils sont complètement confon- dus en un cordon cylindrique, renflé par intervalle et émet- tant fréquemment des nerfs en dehors des points noueux qui correspondent aux ganglions. En un mot, /a fusion trans- versale des centres ganglionnaires et des connectifs atteint son MmazIMmUm. Je n’ai pu malheureusement étudier les Sergestes, qui sont considérés comme les Salicoques les plus simples, mais j'ai eu l’occasion d'observer un certain nombre d’A {ya (sp. nov.?) grâce à l’obligeance d’un jeune savant portugais, M. Nobre, qui avait reçu du Maroc un certain nombre de ces animaux. Ce Crustacé est une grande crevette africaine, et il ne dif- fère des Palémons asiatiques étudiés par Milne-Edwards que par des caractères tout à fait secondaires ; les centres ner- veux thoraciques, notamment, forment une masse un peu plus étroite et en même temps plus allongée dans le sens longitudinal; les ganglions abdominaux proéminent très peu sur le cordon qui les porte et on ne peut guère sérieu- sement les étudier qu'au microscope. SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 83 Les Palémons de nos côtes, et notamment les Pal/æmon serratus, Fabr. et sguilla, Linn., ne diffèrent pas sensible- ment de l'espèce décrite et figurée par Milne-Edwards. Le Crangon vulgaris, Fabr. (fig. 1), vulgairement Crevette grise, manifeste déjà un plus haut degré de condensation dans le sens longitudinal. La chaîne nerveuse abdominale est presque semblable à celle des Palémons, mais la masse ganglionnaire thoracique est plus condensée et moins allon- gée. On y distingue très nettement à l'œil nu, et beaucoup plus facilement à la loupe ou au microscope, un certain nombre de segments placés à la suile et séparés les uns des autres par des lignes plus claires. Tous ces segments sont symétriquement divisés en deux parties par une ligne con- tinue qui correspond à l'axe du corps. Le premier segment (0) est formé par les ganglions sous-æsophagiens assez inti- mement confondus en une masse ovoïde allongée; les seg- ments suivants, au nombre de cinq, correspondent respec- tivement aux paires nerveuses des diverses paires de pattes ambulatoires, et la perforation (p) qui livre passage à l’ar- tère sternale se trouve normalement comprise entre les ganglions de la troisième et de la quatrième paires. Pour étu- dier la segmentation de la masse nerveuse thoracique dans un Macroure où cette masse est déjà singulièrement con- densée, il n’est guère de meilleur type que cette espèce. Famille des Palinuridés fig. 2). — Les Palinuridés se rap- prochent de la famille précédente par la fusion transversale complète des ganglions et des connectifs de la chaîne abdomi- nale; ils se rapprochent de la famille des Salicoques et se distinguent des Astaciens par /a fusion transversale plus grande de la masse nerveuse thoracique; caractère qui coïn- cide avec le phénomène des métamorphoses et des formes larvaires dans les deux familles. Chez les Palinuridés, comme chez les Salicoques, la masse nerveuse thoracique ne présente pas d’autre perforation que celle destinée au passage de l'artère sternale. Dans la Lan- gouste (Palinurus vulgaris, Latr.) les centres nerveux du 84 L. BOUVIER. thorax forment, d’après Milne-Edwards, une espèce de gros ganglion ovoïde, fortement allongé dans le sens de la lon- gueur, perforé en arrière, et ne présentant guère de centres un peu distincts que ceux réunis en avant au point d’arri- vée des deux connectifs du collier œsophagien. Il n’en est pas de même dans le Scyllarus arctus, Fabr. (fig. 2), dont plusieurs beaux individus m'ont été envoyés de Marseille par MM. Marion, professeur à la Faculté des sciences, et Vayssière, maître de conférences. Dans cette espèce, la chaîne est remarquablement allongée dans la région thora- cique et toutes les paires ganglionnaires qui la composent se distinguent avec une grande netteté. Je dois faire excep- lion, toutefois, pour les ganglions sous-æsophagiens ; ceux-ci sont réunis en un centre court (0), aussi large que long, dans lequel il m'a été impossible de discerner les divers éléments formatifs. Les cinq paires nerveuses qui envoient des nerfs aux pattes ambulatoires sont toutes éloignées et bien séparées les unes des autres ; on distingue parfaitement les deux ganglions de chaque paire, enfin les ganglions proéminent fortement en dehors de leurs connectifs, et ceux-ci sont parfaitement séparés dans presque toute leur longueur quoique réunis transversalement dans un mince névrilème transparent. À l'œil nu ou avec l’aide des gros- sissements, ces connectifs se séparent très bien et se distin- guent par une teinte plus opaque et par une structure fibreuse, sur le fond clair constitué par le névrilème. En réalité, ce système nerveux diffère beaucoup de celui des Langoustes et il se rapproche bien plus du système nerveux des Astaciens, quoiqu'il présente seulement la perfora- tion (p) destinée au passage de l'artère sternale. Famille des Astacidés (fig. 3). — Au point de vue de sys- tème nerveux, les Astacidés se rangent, naturellement, à la suite des Scyllares, et les Écrevisses comme les Homards ne diffèrent que très peu de ces derniers. Leur système nerveux présente une concentration remarquablement plus faible dans le sens transversal et la concentration dans le sens longitudinal SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 85 est égale ou plus faible. Partout les connectifs sont distincts dans la région thoracique, qu'ils soient ou non réunis par un névrilème dans les régions non traversées par l'artère sternale; partout aussi la séparation des connectifs com- mence à se manifester dans la chaîne abdominale et atteint son maximum de netteté à l'extrémité de la chaîne quoique, dans cette partie comme dans les autres, un névrilème réu- nisse toujours étroitement les deux connectifs. C'est dans les Écrevisses (Astacus fluviatilis, Rond.) et dans les Homards (Æomarus vulgaris, Bel.) que les centres nerveux et leurs connectifs présentent le degré le plus pro- noncé de condensation dans les deux sens.’ La chaîne gan- glionnaire, dans sa région thoracique, est assez allongée et ses ganglions sont bien séparés; mais elle ne présente de perforation qu'au niveau de l'artère sternale et la dernière paire, celle qui correspond à la cinquième paire de pattes ambulatoires, est singulièrement rapprochée de la précé- dente. Bien différent déjà est le système nerveux du Nephrops Norwegicus, Linn. (fig. 3) que j'ai pu étudier sur les splen- dides exemplaires recueillis pour moi à Arcachon par M. Durègne. Dans cette espèce les ganglions thoraciques s’éloignent dans le sens longitudinal et leurs connectifs se séparent dans le sens transversal. La distance qui sépare les deux dernières paires de ganglions thoraciques est au moins égale à celle que présentent entre eux les autres ganglions de la même région et, d’un autre côté, on observe quatre perforations dans cette chaine nerveuse. La première est comprise entre les première et deuxième paires thoraci- ques (m', m°), la deuxième entre les deux dernières paires (m*, m°), les autres entre les paires médianes; parmi ces deux dernières se trouve la perforation (p) occupée par l’ar- ière sternale. Cette séparation très nette des connectifs dans la région thoracique caractérise absolument les Né- phrops et les rapproche singulièrement des Thalassinidés du genre Axius. 86 L. BOUVIER. Famille des Galathéidés (fig. 4). — Avec les Galathéidés, nous entrons dans une nouvelle série qui diffère de la pré- cédente par une condensation nerveuse en général plus pro- noncée dans le sens longitudinal et beaucoup moins dans le sens transversal. Nous reviendrons plus loin sur la signification qu'il convient de donner à ce phénomène bizarre. J'ai étudié le système nerveux de la Galathea strigosa, Fabr., sur des individus qui me furent envoyés de Marseille avec les Scyllares; son caractère fondamental est la pré- sence d’une chaîne ganglionnaire abdominale composée de cinq paires de centres réunies longitudinalement par des connectifs toujours très distincts et complètement séparés. Les centres thoraciques pairs sont tous parfaitement nets. Le ganglion sous-æsophagien (o) m'a toujours montré cinq paires ner- veuses très apparentes ; la paire antérieure, destinée aux mandibules, ne se séparant pas toujours très nettement de la suivante. Les deux ganglions (#') qui desservent la pre- mière paire de pattes ambulatoires sont en contact immé- diat avec la masse sous-æœsophagienne ; ils sont énormes et en cela tout à fait en rapport avec les fortes pinces qu'ils doivent innerver. Ces deux ganglions se rattachent aux au- tres centres thoraciques par deux connectifs médiocrement longs, mais très distincts, quoique réunis par un mince né- vrilème. Les quatre dernières paires thoraciques sont en contact et constituent un groupe ovoïde perforé en son centre; les ganglions de ces diverses paires se font tous re- marquer par une grande netteté, les deux postérieurs com- prennent entre eux un petit massif de cellules (4°) qui envoie des nerfs au premier anneau abdominal. Le premier ganglion (4') de la chaîne abdominale étant venu se souder aux ganglions thoraciques postérieurs, il en résulte que cette chaîne est réduite aux cinq paires gan- glionnaires dont j'ai parlé plus haut. Les ganglions de chaque paire se distinguent toujours parfaitement, et ils sont en général situés à peu près au niveau des articulations qui réunissent les anneaux, le premier se trouvant compris SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 87 entre le deuxième et le troisième segment abdominal ; tou- tefois, l’avant-dernière paire (a) se trouve au milieu du cinquième anneau abdominal et la dernière (a?) (qui corres- pond à deux paires fusionnées) vers le milieu de l’avant- dernier anneau. Les ganglions de la deuxième paire (a) sont rattachés aux premiers centres {a') par deux très longs con- nectifs qui se séparent complètement dans toute la dernière moitié de leur trajet, aux ganglions de la troisième paire (ai) par deux connectifs plus courts mais néanmoins séparés. Les autres connectifs de la chaîne sont simplement en con- taci, en arrière ils m'ont toujours paru parfaitement séparés un peu avant le dernier ganglion. Famille des Thalassinidés (fig. 5). — Les Macroures de cette famille ont un abdomen allongé et replet qui renferme toujours une partie des organes glandulaires normalement renfermés dans la chambre thoracique. Ainsi les lobes du foie se prolongent en arrière jusque dans le premier anneau abdominal et les glandes génilales s'étendent, dans la ré- gion dorsale, sur toule la longueur de la queue jusqu'au telson ; c’est là du moins ce que j'ai pu observer sur les deux espèces qui ont servi à mes recherches, la Gebia deltusa, Leach. et l’Axrius stirynchus, Leach. Les Thalassinidés se cachent dans Le sable et cette particularité rend leur recher- che assez difficile; aussi n’ai-je pu disposer que d’un maté- riel peu riche, un Axius et deux Gebia recueillis à Saint- Waast par M. Malard. Le système nerveux de l’'Axius stirynchus (fig. 5) diffère très peu de celui du Néphrops, et son caractère essentiel est une séparation encore plus marquée des centres et des con- nectifs dans le sens transversal. Les divers groupes gan- glionnaires de la masse nerveuse sous-æsophagienne (0) se manifestent avec une assez grande nettelé el le dernier, celui qui correspond à la troisième paire de pattes-mä- choires, se trouve assez nettement séparé des autres. Entre ce groupe el la paire ganglionnaire des pattes ambulatoires antérieures, les connectifs sont déjà bien distincts, sans être *S L. BOUVIER. pourtant séparés complètement. Partout ailleurs, dans la région thoracique, les deux connectifs sont complètement distincts comme dans les Néphrops, et cette observation aura son importance pour expliquer certaines dispositions wrganiques présentées par les Pagures. La chaîne nerveuse abdominale se compose encore de six masses ganglionnaires, æais les connectifs qui réunissent ces masses sont bien net- tement dessinés quoique réunis dans un névrilème commun, et on les voit même se séparer complètement entre les deux derniers centres ganglionnaires de l’abdomen. Dans la Gebia deltusa nous rencontrons un système ner- yeux à peu près identique à celui de l’Axius, mais avec des eonnectifs absolument distincts sur presque toute la. lon- gaeur de l'abdomen ; la première paire de ganglions abdomi- maux se trouve déjà vers l'extrémité postérieure du thorax; £’est là une tendance à la concentration dans le sens lon- gitudinal, qui s’accentue singulièrement chez les Pagures. B. — ANOMOURES. Le groupe des Anomoures est formé par des espèces qui, à l'exception des Pagures, servent de transition entre les PDécapodes à longue queue ou Macroures et les Décapodes à ecurte queue ou Brachyures. À ce point de vue, l'étude des Anomoures est d’un grand intérêt et doit montrer comment s'effectue, pas à pas, le passage enire ces deux groupes extrêmes. Malheureusement tous les Crustacés anomoures ne se trouvent pas dans nos mers, et beaucoup de ceux qu'on y rencontre sont d’une rareté relativement grande. En fait, malgré toute la bonne volonté de MM. Durègne à Arcachon, Marion et Vayssière à Marseille, je n'ai pu me procurer que le Bernard l’Hermite et les deux Porcellanes de nos côtes. Par les résultats auxquels je suis arrivé, on jugera combien pourraient être fructueuses des recherches sur les autres Anomoures. | Famille des Paquridés (fig. 6 el 7). — On peut donner une SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 89 idée assez nette du système nerveux des Paguridés en disant que c’est un système nerveux de Thalassinidé, beaucoup plus concentré dans le sens longitudinal, beaucoup moins dans le sens transversal, au moins dans la région de l'abdomen. L’es- pèce que J'ai étudiée est le Paqurus Bernhardus, Linn., mais J'ai vérifié mes observations sur plusieurs espèces exotiques trouvées par hasard dans des coquilles de Gastéropodes. Le système nerveux du Bernard l'Hermite se compose essentiellement d’un cerveau très volumineux (c), d’une masse ganglionnaire thoracique médiocrement allongée et d’une longue chaîne ganglionnaire abdominale. N'ayant pas spécia- lement étudié la distribution des nerfs dans les animaux qui font l’objet de ces recherches, je ne dirai rien du cerveau, sinon qu'il se fait remarquer, non seulement par ses grandes dimensions, mais par son allongement transversal. Quant à la masse ganglionnaire thoracique, elle paraît constituer un ovoïde allongé, présentant des saillies nerveuses sur les côtés et une perforation simple pour le passage de l’artère sternale. C'est là, en effet, tout ce que l’on voit à l'œil nu, et même à un minutieux examen à la loupe. Pour comprendre et étudier complètement cette masse thoracique, il est absolument nécessaire de porter son examen sur des individus parfaite- mentinjectés. On s'aperçoit alors que cette masse est perforée, non seulement par l'artère sternale, mais par deux artérioles ascendantes issues de l’artère maxillo-pédieuse. La première de ces artérioles traverse la masse nerveuse entre (r) le pre- mier et le deuxième renflement, la seconde entre (r') le deuxième et le troisième, elles sont de dimensions assez fortes, et si on ne les aperçoit pas sur des animaux non injec- tés, cela tient à la facilité avec laquelle on peut les briser dans la dissection et à leur transparence qui est presque égale à celle du névrilème environnant. Cette observation une fois faite, on constate que le premier renflement est très réguliè- rement ovoide, que son extrémité antérieure correspond au ganglion sous-æsophagien (0), sa partie postérieure aux gan- glions (m') des premières pattes ambulatoires, enfin que le 90 L. BOUVIËR. nerf de la patte gauche est beaucoup plus développé que celui de la patte droite, résultat facile à prévoir quand on sait à quel point ces deux appendices sont asymétriques. Le renfle- ment suivant (”°?) appartient tout entier à la deuxième paire de pattes ambulatoires et le troisième {#°) aux pattes de la troisième paire. Quant au petit renflement ganglionnaire (7) qui termine en arrière la masse thoracique et se limite en avant par la perforation sternale (p), il a une structure com- plexe puisqu'il émet les nerfs des deux dernières paires d’appendices thoraciques et ceux qui se distribuent dans la région antérieure de l’abdomen. Le renflement ganglionnaire postérieur correspond par conséquent à trois paires de gan- glions; ces ganglions sont simplement déterminés par les nerfs qu'ils émettent; cela est très évident pour les deux der- nières paires thoraciques, très réduites comme les segments qu'elles innervent, mais les premiers nerfs abdominaux se confondent d’abord avec les connectifs de la chaîne abdomi- nale et ils s’en détachent peu à peu à mesure qu’on se dirige vers l'extrémité postérieure du corps. Du reste, cette fusion des nerfs avec leurs connectifs est un caractère essentiel de la chaîne abdominale des Pagures; on la rencontre ailleurs, un peu dans toutes les familles, mais jamais avec un pareil degré de développement; sur tout leur trajet, les connectifs abdominaux émettent des nerts nombreux et importants qui, naturellement, proviennent des ganglions situés dans leur voisinage. Un autre caractère de cette chaîne nerveuse est la séparation complète, absolue, des deux connectifs; cette disposition, qui commençait à prendre un grand développement dans les Gébies et les Axius, atteint ici son maximum d'intensité; les Galathées elles-mêmes, sous ce rapport, sont inférieures aux Pagures. De distance en distance les connectifs se réunissent dans les ganglions nerveux destinés à l’innervation de l’abdomen; ces ganglions sont au nômbre de cing comme chez les Gala- thées, et sont tous très faciles à mettre en évidence; le der- nier (a), un peu plus développé que les autres, se trouve SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 91 situé à la naissance des anneaux chitineux et résistants qui terminent l'abdomen. Si nous comparons ce système nerveux à celui des Thalas- sinidés, nous verrons sans peine combien les analogies sont profondes. Les perforations (r et’) correspondant aux deux ar- térioles sont remplacées, chez les Thalassinidés, par l’espace qui sépare les connectifs situés entre les ganglions des deux premières paires d’appendices thoraciques et entre ceux de la deuxième et de la troisième paire; enfin la première paire de ganglions abdominaux, déjà située dans le thorax chez les Gébies, est venue se confondre avec la masse thoracique comme chez les Galathéidés. Tous les systèmes nerveux que j'ai décrits jusqu'ici sont, autant que je sache, étudiés pour la première fois. Il n’en est pas de même de celui des Pagures et son histoire est assez instructive par elle-même pour que je me permette de la rappeler ici. C’est Swammerdam (1) qui a le premier étudié le système nerveux du Pagure et la figure qu'il en donne se- rait complètement irréprochable si la commissure post-æso- phagienne et les trois perforations de la masse ganglionnaire thoracique étaient représentées. Dans cette figure, d’ailleurs, les connectifs abdominaux sont incomplètement séparés, mais les nerfs internodaux sont nombreux et l’auteur a soin de faire observer que presque tous les nerfs qui partent des ganglions se distribuent aux muscles de l’abdomen, tandis que « ceux que produit le tronc de la moelle, dans les inter- valles des nœuds, vont aux viscères ». Aïnsi, Swammerdam a vu et figuré les cinq ganglions abdominaux du Pagure, mais cette observation commence à s’obscurcir avec Cuvier (2). « Le Bernard l’Hermite, dit ce dernier, paraît avoir beaucoup moins de ganglions que l'Écrevisse; on ne lui en voit que cinq », et l’on ne sait si ce nombre s'applique à la chaîne nerveuse fout entière ou seulement à sa partie abdomi- nale. Milne-Edwards ne paraît pas s'être occupé du système (1) Loc. cit. (2) Loc. cit. 92 L. BOUVIER. nerveux des Pagures; dans un travail (1) pourtant, il range le Bernard l’Hermite avec les Pagures dans un groupe carac- térisé par la présence de plusieurs ganglions abdominaux. Depuis cette époque (1832), les idées se troublent de plus en plus et deviennent tout à fait fausses. M. Richard Owen (2) paraît avoir étudié avec soin le système nerveux du Pagure; il décrit notamment la commissure post-œæsophagienne, les nerfs stomato-gastriques issus du collier œsophagien, la perforation sternale de la masse thoracique et les nerfs émis par cette dernière. Il fait remarquer ensuite que l'abdomen, étant gros et d’une sensibilité très grande, devrait être _ pourvu de ganglions importants et nombreux : « C’est pour- tant le contraire qui s'observe, ajoute-t-il ; six ganglions bien développés distribuent leurs nerfs aux fibres musculaires de la queue du Homard, mais il n’y a pas de chaîne ganglionnaire dans la queue sensible du Bernard. Un ganglion, en vérité, s’y observe (le dernier ganglion, situé au voisinage de l’anus), mais sa situation et son rôle semblent infirmer l'hypothèse d’une fonction sensitive spéciale » et 1l semble à peu près exclusivement destiné à l'innervation des muscles de l’extré- mité de la queue. Comme M. Richard Owen, Siébold et Stannius (3) ne signalent qu'un ganglion abdominal : « La portion abdominale postérieure de la moelle est formée par deux cordons qui partent du troisième ganglion abdominal (la masse ganglionnaire des pattes ambulatoires postérieures), et ne se réunissent qu'à une faible distance en avant de l’anus pour constituer un quatrième et dernier ganglion. » Cette opinion est aussi émise par les auteurs actuellement en usage; nous avons vu qu'elle était adoptée par M. Gegenbaur et nous la retrouvons formellement exprimée par M. Claus (4) sous la forme suivante : « Chez les Décapodes macroures il existe ordinairement six petits ganglions abdominaux qui sont tous (1) Milne-Edwards. Recherches sur l’organisation et la classification des crustacés décapodes, Ann. sc. nat., 1re série, t. XXV, 1832. (2) Loc. cit. | (3) Loc. cit. (4) Loc. eût. SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 93 confondus en une seule masse chez les Pagures. » La conclu- sion à tirer de cette étude, c’est que Swammerdam a eu raison contre les observateurs plus récents et que les idées fausses se perpétuent aussi bien, sinon mieux, que les idées les plus justes. Famille des Porcellanidés (fig. 8, 9, 10 et 11). — Avec les Porcellanes, nous sommes à la limite peu précise qui sépare les Macroures des Brachyures; si elles sont Brachyures par la forme générale de leur corps et par leur queue repliée sous le thorax, elles sont Macroures par leur nageoire en éventail et par la structure de leur système nerveux. Chez les Porcel- lanes, en effet, le système nerveux présente encore une chaîne abdominale à connectifs séparés et formée par cinq ganglions comme chez les Galathées. Du reste, des différences impor- tantes peuvent être relevées entre les deux espèces de nos côtes : Porcellana longicornis, Penn. et P. platycheles, Penn. Le système nerveux de la Porcellana longicornis (fig. 8 et 9) se compose essentiellement du cerveau (c), de la masse gan- glionnaire thoracique et d’une chaîne ganglionnaire étendue sur presque toute la longueur de l'abdomen. La masse gan- glionnaire thoracique ne présente pas d’autre perforation que celle (p) destinée au passage de l’artère slernale; elle est plus concentrée que celle des Galathées tout en présentant comme elle des paires ganglionnaires extrêmement distinctes à l’exception de celles qui constituent le ganglion sous- œsophagien (a). Ces paires ganglionnaires sont au nombre de cinq et correspondent exactement aux cinq paires de pattes ambulatoires; entre les deux ganglions de la dernière paire, on observe un petit renflement (a) formé par des cellules nerveuses et correspondant à la première paire de ganglions abdominaux; cette paire est venue s’adjoindre à la masse thoracique comme chez les Galathées et les Pagures. Par conséquent, la chaîne nerveuse abdominale se composera de cinq groupes ganglionnaires seulement; les quatre premiers groupes sont formés chacun par une paire de ganglions bien distincts, le dernier (a), situé à la naissance 0% L. BOUVIER. de l’avant-dernier anneau abdominal, est chargé au contraire de l’innervation des deux derniers anneaux de l'abdomen. Les centres nerveux de la chaîne sont réunis entre eux par deux connectifs parfaitement distincts malgré leurs faibles dimensions; on les aperçoit déjà bien à la loupe, mais comme la P. longicornis est un crustacé de très petite taille, le mieux est d'enlever tout le système nerveux avec précaution et de l’étudier au microscope dans la glycérine après l'avoir très légèrement coloré. ) On étudiera de même, par les deux procédés, le système nerveux de la Porcellana platycheles (Gg. 9 et 10), quoique cette espèce ait des dimensions un peu plus fortes que la pré- cédente. On n’observera pas de différences sensibles dans la masse thoracique, toujours formée par des paires ganglion- naires très distinctes; mais on en relèvera de très grandes dans la chaîne abdominale. Celle-ci, en effet, se réduit à une longueur extrêmement faible et se frouve tout entière logée dans le thorax; elle comprend toujours cinq groupes nerveux manifestement réunis par paires dans les quatre premiers groupes, le dernier (a) innervant, comme de cou- tume, les deux derniers anneaux de l'abdomen. Malgré sa longueur très réduite, la chaîne abdominale est pourvue de ganglions bien développés et ses connectifs sont au moins aussi nettement séparés que ceux de la 2. /ongicornas. En résumé, {a Porcellana longicornis a encore un système nerveux de Macroure et notamment un système nerveux de Galathée, tandis que la Porcellana platycheles est manifeste- ment Anomoure et pourvue d'un système nerveux probablement dentique avec celui des Homoles. Nous trouvons par consé- quent ici deux espèces d'un même genre caractérisées par des groupements nerveux très différents; l’une est macroure, l'autre est déjà brachyure ou peu s’en faut. Je crois que c'est pour la première fois qu'on signale chez les Crustacés des cbservalions de cette nature; en étudiant les Gastéropodes prosobranches, j'étais arrivé d’ailleurs à mettre en évidence des phénomènes tout à fait analogues; j'avais montré no- SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 95 tamment que, chez les Cérithidés, on trouve tous les passa- ges entre le système nerveux dialyneure et la zygoneurie la plus différenciée, que certaines Struthiolaires ont un sys- ième nerveux de Cérithe et sont comme elles dépourvues de pénis, tandis que d’autres ont un système nerveux et un pénis de Chénopus ou de Strombe. Tous ces exemples suffi- raient pour montrer la transformation lente et progressive des formes animales, en même temps que l'impossibilité presque absolue où l’on se trouve d'établir des limites pee cises entre les différents groupes. Le système nerveux des vrais Anomoures adultes n’a, pour ainsi dire, pas été étudié jusqu'ici. Milne-Edwards (1) leur attribue un système nerveux qui dans « sa portion ab- dominale présente à peine des traces de ganglions »; :l figure d’ailleurs le système nerveux de l'Homole, mais il représente sa chaîne abdominale par un simple cordon ner- veux, ce qui me porterait à croire que cette espèce se trouve encore plus rapprochée des Brachyures que la Porcellana platycheles. Fr. Müller (2) a incomplètement observé la masse thoracique ganglionnaire des Porcellanes, un peu mieux la chaîne abdominale : « Dans chacun des anneaux de l’abdomen, dit-il, se trouve un ganglion nerveux très net, qui se met en relalion avec les ganglions voisins par deux connectifs, » et les Porcellanes seraient pour lui des crabes demeurés siationnaires au stade mégalope, ce qui corres- pond parfaitement, d’ailleurs, à la signification systématique des caractères anatomiques. M. Claus s’est également occupé des Porcellanes, mais ses recherches se sont limi- tées aux larves et ne font pas connaître, par conséquent, la structure de l’animal adulle. C. — BRACHYURES. Les Brachyures ne présentent plus de chaîne ganglion- naire abdominale ; l'abdomen étant toujours très réduit, les (1) Milne-Edwards, Histoire naturelle des Crustacés. (2) Loc. cit. 06 L. BOUVIER. ganglions abdominaux ne doivent avoir eux-mêmes que des dimensions {rès faibles et ils se sont tous fusionnés en une seule masse, très peu développée, qui est venue se joindre à l'extrémité postérieure de la masse thoracique, de la même manière que le premier ganglion abdominal des Galathées, des Pagures et des Porcellanes. En raison même de sa grande condensation, le système nerveux des Brachyures ne présente qu'un intérêt très restreint et je me contenterai de signaler très brièvement quelques observations relevées sur un grand nombre d'espèces. Les crabes de la famille des Oxystomes se placent très manifestement à la suite des Anomoures. Leur masse gan- glionnaire thoracique, perforée par l'artère sternale, est formée de cinq paires ganglionnaires extrêmement nettes; en avant de la première paire se trouve le ganglion sous- œsophagien, tandis que le centre abdominal est compris en- tre les deux ganglions de la dernière paire. Tout cet en- semble forme une masse ovoïde, d'autant plus allongée qu'on se rapproche des formes les plus inférieures du groupe. Dans le Corystes dentatus, Latr. (fig. 12), l’ensemble des gan- _glions thoraciques ressemble étonnamment à la masse gan- glionnaire thoraciqne des Porcellanes. Elle est un peu plus renflée en arrière et moins allongée dans l’Afe/ecyclus cruentatus, Desm., enfin elle se réduit encore un peu plus dans le sens de la longueur dans le Calappa granulata Fabr. Les crabes rangés dans la famille des Catométopes présen- tent des caractères à peu près identiques; ils ne diffèrent des Oxystomes que par une concentralion un peu plus grande des ganglions dans le sens longitudinal. C’est là, du moins, ce que j'ai pu observer sur quelques Pinnotheres pisum, Latr., et sur de nombreux exemplaires de Grapsus varius, Latr. Au point de vue du système nerveux, les Cyclométopes constituent à lous égards une grande famille de transition dans laquelle on voit se confondre peu à peu les différents centres ganglionnaires groupés dans la masse thoracique, c'est aussi dans ce groupe qu'on voit disparaître la perfo- SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 97 ration sternale. La famille des Cyclométopes se divise en deux tribus, les Portuniens et les Cancériens. Or tous les Portuniens que j'ai étudiés (Portunus puber, Linn., P. cor- rugatus, Leach) se distinguent encore par une perforation sternale aussi nette que celle du Carcinus mænas, espèce très fréquemment étudiée jusqu'ici; dans la tribu des Can- cériens on observe la perforation dans le Tourteau (P/aty- carcinus pagurus, M.-E.), mais elle fait absolument défaut chez les Xanthes, qui appartiennent pourtant à un genre très voisin (Xantho rivulosus, M.-E.). Par conséquent, l'existence d'une masse thoracique imperforée n’est pas un caractère ex- clusif des Oxyrhinques, el l'on doit considérer avec Milne- Edwards les Xanthes et les formes voisines comme les Cyclo- métopes les plus rapprochés des Oxyrhinques. Au sujet du Carcinus mænas, je dois faire observer que le cordon abdo- minal impair, figuré par tous les auteurs, et considéré par- fois comme un prolongement ganglionnaire (voyez plus haut, p.11 et 12), est en réalité formé par un paquet de nerfs abdominaux assez distincts, même à leur origine. Celle dis- position vient d’être figurée par M. Vayssière (1) et mes ob- servations confirment complètement les siennes. Chez tous les Oxyrhinques étudiés jusqu'ici, la masse thoracique est imperforée; Milne-Edwards a représenté plusieurs fois cette disposition dans le Âaïa squinado et Carus dans le Pisa tetraodon (2); c'est ce que j'ai observé moi- même dans les espèces suivantes : Pisa Gibbisi, Leach, Stenorhynchus phalangium, Aud. et Znachus scorpio, Fabr. La distinction des centres ganglionnaires est Le plus souvent impossible chez les Oxyrhinques; pourtant on l’observe en- core assez bien dans les Pisa, et Carus l’a très nettement si- gnalée dans le Pisa letraodon. La figure donnée par ce der- nier auteur est inexacte en ce sens qu’elle indique un ganglion abdominal logé dans le thorax et réuni par deux longs connectifs aux ganglions thoraciques. \ 1) Vayssière, Atlas d'anatomie des Invertébrés, Paris, 1888. 2) Carus, Tabulæ anatomiam comparativam, pars VITE, Leipzig, 1848. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 1. — ART. N° 92. k 98 L. BOUVIER. $ 3. — Rapports du système nerveux avec l’appareil circulatoire (fig. 13). La plupart des rapports qui existent entre le système ner- veux et l'appareil circulatoire artériel sont connus depuis longtemps et ont été signalés par différents auteurs, notam- ment par Milne-Edwards. Ainsi, l’on sait que le tronc arté- riel, issu postérieurement du cœur, se divise en deux bran- ches : l’une qui se dirige en arrière dans la région dorsale et reçoit le nom d’artère abdominale supérieure (s); l’autre, l’ar- tère sternale (v), qui plonge verticalement vers le sternum, traverse la chaîne nerveuse entre les ganglions thoraciques de la troisième et de la quatrième paire et se divise en deux branches médianes, l’une antérieure connue sous le nom d’artère maxillo-pédieuse (f), l'autre postérieure sous le nom d’artère abdominale inférieure (1). Ces deux dernières artères sont naturellement situées au-dessous de la chaîne ganglion- naire nerveuse; l'artère abdominale supérieure, au contraire, est située au-dessus, et il en est de même des trois artères issues de l’extrémité antérieure du cœur, l'artère ophthalmi- que (/) médiane et impaire et les deux artères antennaires. Artères antennaires et ophthalmique. — Ces {rois artères envoient des rameaux plus ou moins nombreux et importants au cerveau, observation faite d’ailleurs en partie par Milne- Edwards, et signalée par Claus, dans ses recherches sur les larves de Crustacés. Une observation qui n'a pas été faite jusqu'ici, et qui mérite cependant qu'on en tienne compte, est relalive aux rapports qui existent entre les artères anten- naires et les deux branches latérales antérieures de l'artère maxillo-pédieuse. Quand elles ont irrigué les antennes et les yeux, les artères antennaires se portent en dedans, sous le rostre, à la rencontre l’une de l’autre, elles se confondent, et le tronc commun, fort grêle, qui résulte de cette fusion, se dirige en arrière, du côté de l’œsophage, compris dans ce trajet entre les connectifs du collier œsophagien. En arrière, gp tronc se ramifie sur les parois de l’œsophage et se confond SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 99 avec les artérioles œsophagiennes, qui proviennent de la bifurcation de l'artère maxillo-pédieuse. Ainsi se constitue un collier artériel plus ou moins en forme de réseau, collier qui met en relation le système vasculaire dorsal avec le système vasculaire ventral. Ces faits ont été observés sur l’Astacus fluviatilis; ils sont très difficiles à mettre en évi- dence, et je n'ai pu les étudier dans le groupe tout entier. Du reste, ils subissent des modifications qui seront développées dans un mémoire ultérieur actuellement terminé, et consacré tout entier à la circulation chez les Crustacés décapodes. Artère sternale. — On connait les relations constantes de l'artère sternale (v) avec la chaîne nerveuse dans sa région thoracique; on sait aussi que cette artère cesse de traverser la masse ganglionnaire thoracique chez les Brachyures du genre Xantho, crustacés très voisins des Tourleaux, qui pré- sentent encore les relations fondamentales de l'artère sternale. On aurait tort de croire que l'artère sternale lraverse seule la chaîne ventrale thoracique; nous avons vu que des arté- rioles ascendantes contractaient avec elle les mêmes rapports chez les Pagures (fig. 6 et 7); connaissant le degré de conden- sation de la masse thoracique chez ce dernier, on doit croire que ses deux perforations antérieures (r,7"), morpho- logiquement semblables à celle des Thalassinidés, sont restées intactes, grâce aux artérioles qui les traversent. Quand on étudiera sur des animaux inJectés les relations de l'appareil circulatoire avec le système nerveux, chez les Gébies et chez les Axius, je suis persuadé qu'on y retrouvera les deux grosses artérioles ascendantes des Pagures. Chez les Xanthes, des artérioles ascendantes traversent aussi la masse des ganglions thoraciques; mais elles n’offrent pas de rapports constants avec cette dernière, et c’est pour- quoi je me contente de les signaler ici. Artères abdominales. — À. Krohn (1) étudiant l'appareil (4) A. Krohn, Ueber das Gefässsystem des Flusskrebses ; Isis, vol. XX VII, 1834. « Die tiefe Schanzarterie zeigt sich mir nur als ein untergeordneter 100 L. BOUVIER. circulatoire de l'Écrevisse s'exprime, au sujet des artères abdominales, de la manière suivante : « L'artère abdominale inférieure n’est pour moi qu'une branche subordonnée d’anastomose entre les deux troncs principaux du bulbe car- diaque, puisqu'elle se met en relation immédiate avec l’ar- tère abdominale supérieure, bifurquée vers l'extrémité de la queue. » Cette observation est exacte, je l'ai précisée et étendue à tout le groupe des Décapodes, dans une note rela- tivement récente (1). En résumé, voici comment sont dispo- sées ces artères : le vaisseau abdominal supérieur {s), arrivé dans l’avant-dernier anneau de l'abdomen, se met en relation par deux branches plus ou moins puissantes avec l'artère abdominale inférieure (1); ces deux branches passant à droite et à gauche du tube digestif, celui-ci se trouve embrassé dans un collier vasculaire (6); chez la plupart des crabes, il y a même un plus grand nombre de colliers artériels péri-intes- tinaux; dans {ous les cas, et c’est la relation anatomique que je tiens à signaler ici, 27 y a toujours un collier artériel péri-intestinal situë en arrière du dernier ganglion de la chaîne nerveuse abdominale. J'ai étudié de très nombreux Crustacés décapodes, j'ai répété les dissections et les injections, cette règle est restée absolument générale; les Crevettes (Crangon vulgaris) et les Homards (Homarus vulgaris), qui sont les tvpes les moins commodes pour cette étude, les Pagures, dont l'appareil cir- culatoire est aberrant au moins dans la région abdominale, tous m'ont présenté les rapports signalés plus haut. Toutefois, chez les Pagures, l'artère dorsale abdominale se Jetle dans sa branche ventrale, en arrière du dernier ganglion nerveux, sans qu'il se forme de collier vasculaire péri-intestinal. De l'irrigation du système nerveux. — 1] suffit d'étudier le anatomischer Ast zwischen den beiden Hauptzweigen des Bulbus, da er mit der am Ende des Schwanzes bifurkirten obern Arterie desselben in unmit- telbare Verbindung trit. » (4) E.-L. Bouvier. Sur l'appareil circulatoire des Maïa, Grapsus, etc. Bull. soc. philom., 7° série, t. XII. SYSTÈME NERVEUX DÉS CRUSTACÉS DÉCAPODES, 101 système nerveux d’un Crustacé décapode sur un animal par- faitement injecté, pour se faire une idée de la richesse d’irri- gation de tout le système. Un réseau étroit le colore d’une manière intense, et les branches de ce réseau se ramifient en tous sens dans la malière nerveuse. On ne rencontre nulle part une irrigation plus riche, pas même dans les régions intestinales les plus abondamment pourvues de vaisseaux sanguins. Ce sont principalement les artères du système ventral, artère maxillo-pédieuse et artère abdominale infé- rieure, qui sont chargées de cette irrigation ; mais j'ai montré plus haut que les artères antérieures du système dorsal envoyaient aussi un nombre très considérable d’artérioles au cerveau. Ce sont des artérioles plus importantes que les autres et très constantes dans leurs rapports, qui lraversent en deux points la masse ganglionnaire thoracique du Ber- nard l’'Hermite. Claus a signalé tous ces réseaux vasculaires dans les larves (1). $ 4. — Conclusions. Ce n’est pas sans motif que j'ai suivi, aussi complètement que possible, la classification de Milne-Edwards. J'aurais pu choisir celle d’un autre carcinologiste éminent, Claus, mais j'ai dû l’abandonner quand j'ai voulu tenir compte des affi- nités naturelles entre les différentes familles. Ainsi, en dehors des Notopodes {la plupart des Anomoures), Claus (2) place, à la base du groupe des Crustacés brachyures, les Oxystomes, mais il en écarte les Corystidés, qu'il range parmi les Cyclo- métopes; on ne peut justifier ce déplacement qu’en s’ap- puyant sur la forme générale du corps, mais cette considéra- tion perd singulièrement de sa valeur, si l’on observe que, de tous les Brachyures, ce sont précisément les Corystes qui se rapprochent le plus des Anomoures par leur système nerveux. En tous cas, les Corystes ne sauraient se placer parmi les (1) Claus, Zur Kenntniss der Kreislaufsorgane der Schizopocen und Decapo- den. Arbeiten aus dem zool. Inst. d. Univ. Wien, t. V, 1884. (2) Claus, Traité de zoologie, trad. française, 2° édition. 102 L. BOUVICR. Cyclométopes, car leurs ganglions thoraciques sont parfaite- ment distincts, et la masse qu'ils forment est traversée par l'artère sternale. J'ai montré plus haut comment les Catométopes ou Grap- soïdés servaient d'intermédiaires naturels entre les Oxys- tomes et les Cyclométopes; Claus les place, au contraire, au sommet de la série des Brachyures; quant aux Oxyrhinques, il les intercale entre les Oxystomes et les Cyclométopes, lorsque tous leurs caractères exigent qu'on leur donne la place la plus élevée dans le sous-ordre des Décapodes. L'étude de l'appareil circulatoire justifie d’ailleurs complète- ment ces conclusions. À mon avis, le résullat principal de ce travail est de dé- gager une loi qui n’a jamais été mise en évidence jusqu'ici. J'ai étudié les Décapodes dans l’ordre ascendant de leur per- fectionnement progressif; toutefois, obligé de disposer les familles les unes à la suite des autres, je dois faire observer que, dans une classification naturelle, elles ne se placeraient pas toutes dans cet ordre; ainsi les Astacidés d’eau douce terminent probablement un rameau issu des Astacidés marins; ainsi, les Thalassinidés me paraissent être des Astacidés marins qui se sont abrités dans le sable, et ont fini par donner naissance aux Paguridés qui s’abritent dans des coquilles et forment le dernier terme d'un autre rameau; ainsi encore, les Porcellanidés, et peut-être d’autres Ano- moures, se rattachent directement aux Galathéidés, et ser- vent de point de départ aux Brachyures proprement dits. Or, si l’on étudie le système nerveux des Macroures et des Anomoures dans ces trois rameaux, qui comprennent à eux seuls à peu près tous les Décapodes, on est frappé par les faits suivant(s : chez les Salicoques, qui sont placés à la base du sous-ordre, le système nerveux présente son maximum de condensalion dans le sens transversal; chez les Astacidés, cette condensation à déjà beaucoup diminué, surtout dans les Néphrops; enfin, si l’on se dirige, soit du côté des Por- cellanes par les Galathéidés, soit du côté des Pagures par les SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 103 -Thalassinidés, on voit la dissociation transversale s’accentuer de plus en plus. Les Palinuridés forment un rameau à part et se rapprochent beaucoup des Salicoques; ils ont aussi un système nerveux très condensé dans le sens transversal, surtout chez la Langouste. La loi à tirer de ces faits, c’est que, chez les Décapodes, la concentration du système nerveux dans le sens transversal va en diminuant, à mesure qu’on se rapproche des Brachyures. Cette loi est absolument exacte si l’on considère la chaîne abdominale ; elle est seulement d’une exactitude relative si l’on étudie les ganglions thoraciques. Il est aisé de justifier celte légère divergence. À mesure que le système nerveux se dissocie transversalement, il éprouve une tendance à se condenser longitudinalement. Cette tendance est déjà mani- feste dans la région de l'abdomen, et l’on a vu le premier ganglion abdominal des Galathées, des Pagures et des Por- cellanes, venir se fusionner avec les ganglions thoraciques, elle est beaucoup plus marquée encore dans la région thora- cique. Là, en effet, les ganglions sont beaucoup plus gros, plus rapprochés, et les connectifs qui les relient sont par conséquent plus courts. À mesure que la concentration lon- gitudinale s’accentue dans cette région, on verra les con- neclifs se réduire de plus en plus et ils finiront par devenir si courts que le faible intervalle qui les sépare disparaîtra complètement. Toutefois, cette disparition des intervalles situés entre les connectifs peut persister longtemps encore en dépit de la concentration longitudinale manifeste des centres nerveux, et chez les Pagures, où elle est déjà portée très loin dans la région thoracique, presque tous les espaces interconnectivaux sont encore parfaitement persistants. On pourrait résumer tous ces faits en disant que /a condensation des centres et des connectifs nerveux dans le sens longitudi- nal est inverse de la condensation dans le sens transversal ; dans le sens longitudinal elle augmente à mesure qu'on'se rap- proche des Brachyures, tandis qu'elle diminue au contraire dans le sens transversal. On se convaincra de la vérité de 104 L. BOUVIER. celte loi en jetant un coup d'œil sur les figures 1, 2, 3, #, 5, 6, 7,8, 10 et 12 qui accompagnent ce mémoire; l’examen de’ ces figures montrera en outre que la condensation lon- gitudinale dans la région thoracique suit quelquefois une marche un peu irrégulière (fig. 1 et 2), tandis que la dis- sociation dans le sens transversal se manifeste parlout avec une régularité parfaite. | Si la condensation des centres et des conneclifs nerveux diminue chez les Décapodes, à mesure qu’on s'élève dans l’ordre, on ne saurait en dire autant des autres ordres de Crustacés. Dans chacun de ses ordres, en effet, on voit la condensation longitudinale généralement marcher de pair avec la condensation iransversale, et il en est ordinaire- ment de même chez les autres Articulés. Cette loi est parti- culière aux Décapodes et pourra peut-être servir à l’étude de leurs affinités ; si elle n'a pas été signalée jusqu'ici, c’est qu'on a précisément omis d'étudier les formes qui la ren- dent manifeste à tous les yeux, les Néphrops, les Galathées, les Thalassinidés et les Pagures. Un autre résultat non moins important est d’avoir mon- tré comment s’opère progressivement le passage de la forme macroure à la forme brachyure; ce passage s'effectue en trois temps : dans le premier, un ganglion abdominal vient se joindre à la masse thoracique ; dans le deuxième, la chaîne ganglionnaire se raccourcit notablement et se localise dans le thorax; dans le troisième, cette chaîne réduite entre en contact intime avec les centres de la région thoracique. Les Galathées et les Pagures sont au premier stade, les Porcellanes au second, les Crabes au troisième. Je devrais signaler, en outre, les relations très instruc- lives qui existent entre le système nerveux et l'appareil cir- culatoire, mais je me contente des notions que j'ai données à ce sujet, me proposant d'y revenir avec plus de détails dans un travail ultérieur ; quant aux autres résultats parti- culiers, ils ont été mis en relief dans Le corps de ce mémoire. Tous mes remerciments aux personnes qui m'ont aidé SYSTÈME NERVEUX DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. 105 dans la préparation de ce mémoire : à M. Edmond Perrier, professeur au Muséum d'histoire naturelle, dans le labora- toire duquel j'ai effectué toutes mes recherches; à M. A. Milne- Edwards, dont la bibliothèque a servi à mes recherches bibliographiques ; à MM. Marion et Vayssière, de la Faculté des sciences de Marseille; enfin à M. Durègne, directeur du laboratoire d'Arcachon, qui m'ont procuré la plupart des matériaux dont j'avais besoin. Paris, 30 décembre 1888. 106 L. BOUVIER, | EXPLICATION DE LA PLANCHE Lettres communes. — c, cerveau ; æ, connectif formant le collier œsopha- gien ; d, cCommissure post-æsophagienne; æ, origine du sympathique sur le collier œsophagien; o, ganglion sous-æœsophagien; m!, m?, m?, m*, mÿ, paires ganglionnaires correspondant aux 1re, 2°, 3e, 4e et 5° paires de pattes ambulatoires; p, perforation servant au passage de l’artère ster- nale; at, a?, a, a*, aÿ, paires ganglionnaires correspondant aux 1°, 2e, 3°, 4° et 5° anneaux abdominaux; 4, ganglion anal servant à l’innervation des deux derniers anneaux de l'abdomen. Fig. 1. — Crangon vulgaris. — Système nerveux complet. Fig. 2. — Scyllarus actus. — Id. Fig. 3. — Nephrops norwegicus. — Id. Fig. #. — Galathea strigosa. — Id. Fig. 5. — Aœius stirynchus. — Id. Fig. 6. — Pagurus Bernhardus. — Système nerveux complet. — r, orifice servant de passage à l’artériole antérieure; r', orifice servant de passage à l’artériole postérieure; n, masse ganglionnaire correspondant aux deux dernières paires thoraciques et à la première paire abdominale. Fig. 7. — Pagurus Bernhardus. — Masse ganglionnaire thoracique. Mêmes lettres que dans la figure précédente. Fig. 8. — Porcellana longicornis. — Système nerveux à l'exception des gan- glions cérébroïdes. Fig. 9. — Porcellana longicornis. — Animal figuré avec son système nerveux. Grossissement 2 14/2. Fig. 10. — Porcellana platycheles. — Système nerveux complet. Fig. 11. — Porcellana platycheles. — Animal figuré avec son système ner- veux. Grandeur naturelle. Fig. 12. — Corystes dentatus. — Masse ganglionnaire thoracique très forte- ment grossie. Fig. 13. — Schéma représentant les rapports de l'appareil circulatoire avec le système nerveux chez les Crustacés décapodes. — [, artère ophthal- mique ; k, cœur; s, artère abdominale supérieure; à, artère abdominale inférieure ; v, artère sternale; f, artère maxillo-pédieuse; {, collier artériel péri-intestinal. | OBS SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES ET EN PARTICULIER D'UN OLIGOCHÆTE LIMICOLE MARIN (Enchytræoides Marioni, nov. sp.). Par M. LOUIS ROULE. INTRODUCTION Les recherches d’embryogénie ont pris, durant ces der- nières années, une place prépondérante parmi les études des naturalistes ; et ce fait s'explique aisément, étant donné que les connaissances acquises sur le développement des êtres nous permettent de mieux comprendre les relations établies entre eux, et leurs rapports naturels. Mais il est encore difficile de s'élever à une synthèse générale de la science embryogénique, car les résultats obtenus sont souvent con- tradicloires ; dans des études d’une telle délicatesse et d'une aussi grande minutie, 1l est facile de se tromper, et l’on n'arrive souvent à la vérité qu'après de longs détours et de nombreuses erreurs. — Aussi ne faut-il pas trop s'étonner des discussions fréquentes qui s'élèvent entre les embryogé- nistes, et des divergences profondes qui les séparent; ces dissentiments s’effacent peu à peu, à mesure que de nouvelles recherches sont effectuées et délruisent un certain nombre d'erreurs. Et l’embryogénie avance maintenant à grands pas; 108 LOUIS ROULT. il a déjà été possible d’ébaucher quelques synthèses parti- culières, et d'édifier les principales parties de la science du développement. Ces synthèses pèchent toujours par quelques points, car les matériaux ne sont pas encore bien nombreux; à cause même de celle pénurie, elles sont souvent trop systé- matiques; mais elles renferment toujours des notions exactes, et permettent de croire que le temps n’est pas loin où l’em- bryogénie sera en pleine possession de sa méthode. Parmi les théories qui ont été publiées en ces derniers temps sur le développement des animaux, la plus importante, et aussi la plus célèbre, est due aux frères Hertwig (10). Leur théorie du cœlome a suscité beaucoup de travaux, soit pour la confirmer, soit pour la combattre; el, ainsi que le fait remarquer avec raison M. Ed. Van Beneden, elle préoccupe à un tel point les embryogénistes actuels, que toutes leurs études montrent les traces de cette préoccupation; en effet, ils s'efforcent souvent de montrer combien les résultats qu'ils ont obtenus concordent peu avec ceux qu'ils auraient dû avoir d’après la théorie des Hertwig, ou bien au contraire combien ces résultats lui sont conformes. — On sait quelle est la base de celte dernière. Tous les Métazoaires sont divisés en Entérocæliens et Pseudocæliens, suivant que leur mésoderme prend naissance par le procédé épithéhal ou par le procédé mésenchymateux, et suivant que leur cœlome dérive de l’archenteron primitif (enterocæle), ou ne montre avec ce dernier aucune connexion directe (sckizocæle). Certains Enté- rocæliens, les Vertébrés, par exemple, possèdent bien quel- ques tissus d’origine mésenchymateuse, mais la majeure partie de leur mésoderme est formée aux dépens d’un feuillet blastodermique dont les éléments sont disposés en couches épithéliales; chez tous les Pseudocæliens par contre, les feuillets blastodermiques primordiaux, l'ectoblaste et l'endo- blaste, produisent des cellules qui émigrent, pénètrent dans l’espace laissé entre eux, s'y disposent sans régularité, et donnent naissance ensuite aux {issus conjonclifs et muscu- laires du mésoderme. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 109 Les frères Hertwig, ayant démontré l'existence de ces deux procédés généliques chez tous les Métazoaires, ne s’en sont pas tenus à cette simple constatation, qui était cependant de la plus grande importance, et ont voulu aller plus loin encore. Ils ont dit que ces deux procédés diffèrent l'un de l'autre dès l’origine, qu'ils n'ont entre eux aucun point de contact, et qu’il est nécessaire, dans une classification natu- relle, de diviser les Métazoaires en Entérocæliens et Pseu- docæliens, suivant qu'ils présentent, au début de leur déve- loppement, l’un ou l’autre de ces modes. Ils ne se sont pas bornés à synthétiser, à grouper en un ensemble net, tous les faits histogénétiques connus; ils ont essayé d'appliquer cette synthèse à la classification des animaux. C'était alors trop s’avancer. _ Ilest bien certain que les études de morphologie ont toujours pour but la classification naturelle du règne animal, car elles tendent plus ou moins à mieux faire apprécier les rapports et les différences qui existent entre les divers groupes; mais ces rapports et ces différences résultent de l'ensemble de l’organisation, et non d'un point particulier tel que l’histogenèse. — Les travaux publiés depuis {881 par divers auteurs ont démontré la vérilé de la théorie du cœlome pour ce qui touche seulement aux modes de formation des tissus; ces derniers prennent toujours naissance soit par le procédé épithélial, soit par le procédé mésenchymateux. Certains des travaux récents ont même indiqué un fait dont les frères Hertwig n'avaient pas soupçonné l'existence : le remplacement, dans le cours de l’évolution embryonnaire, de l’un de ces procédés par l’autre. — Mais 1l paraît résulter aussi, d’un certain nombre de recherches, que ces deux modes histogénéliques ne paraissent avoir aucune impor- tance fondamentale; qu’ils existent parfois tous deux dans un même groupe nalurel, l’un se montrant dans une des divisions de ce groupe, et le second dans une autre ; enfin, que l’on ne doit pas se baser sur eux pour établir une classi- fication naturelle des Métazoaires. 110 LOUIS ROULE. Il était, du reste, déjà possible d’entrevoir ces conclusions au moment même où les frères Hertwig exposaient leur théorie, et cela en se basant sur l’insuccès des essais de classification qu'appuie un seul ordre de faits. Lorsqu'il s’agit d'apprécier les rapports naturels des groupes d'animaux entre eux, il faut tout faire entrer en ligne de compte, suivant l'importance de chaque chose : l'anatomie de l’adulte et le développement de l'embryon. Il est bien certain que l’em- bryogénie donne plus de renseignements sur les relations naturelles des groupes que lanatomie seule, puisqu'elle résume la phylogénie ancienne, mais encore convient-il d'examiner en elle et la genèse des tissus et la genèse des organes. Or, les divers modes de développement des organes, ainsi que les formes extérieures des larves, sont laissés de côté par les frères Hertwig, qui se bornent seulement à l'examen de la genèse des tissus, et se basent sur elle, à l'exclusion de tout autre ordre de faits, pour établir une synthèse em- bryogénique. Quoi qu'il en soit, les frères Hertwig, en ce qui touche à l'histogenèse et à l’origine des feuillets blastodermiques, ont eu le grand mérite de démontrer le plus souvent, et de faire pressentir dans les cas douteux, que le mésoblaste des Cœ- lomates dérive de l’endoblaste, alors que le système nerveux provient constamment de l’ectoblaste, et que ce mésoblaste se développe suivant les deux procédés fondamentaux indiqués plus haut. Mais il restait à revoir ces cas douteux, parmi lesquels se trouve au premier rang le développement des Annélides. Il suffit de lire les mémoires publiés sur ce sujet durant ces dernières années, etnotamment ceux de M. Salensky (25), qui est le naturaliste possédant le mieux celle question, pour voir à combien d'opinions contraires donne lieu la genèse du mésoblaste chez les Annélides. Ces opinions diffèrent du tout au tout, puisque certains auteurs font provenir ce feuillet de l’ectoblaste, alors que d’autres le font naître de l’endoblaste ; d’après plusieurs même, 1l dérive des deux à DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 111 la fois. — Aussi ai-je essayé d'observer les choses par moi- même, afin de me créer une opinion personnelle. Mais le désir d’élucider, chez plusieurs Annélides, l’origine du méso- blaste, n’est pas le seul qui m'’ait engagé à entreprendre cette étude. J’ai voulu voir par la même occasion si, comme les frères Hertwig tendent à l’admettre, les Annélides sont des Enterocæliens; et si, de plus, leur mésoderme se cons- tue d’après le procédé épithélial. — L'examen de la nature réelle de ce mésoderme présente encore une certaine impor- tance au point de vue de la Cœlom-Theorie, puisque les Hertwig mettent les Mollusques dans le groupe des Pseudo- cœliens. Or, on le sait, les larves des Mollusques ont une grande ressemblance avec celles des Annélides; etils’agissait de savoir si cette similitude générale s'accorde bien avec une dissemblance profonde dans les procédés formatifs du feuillet blastodermique moyen. J'ai commencé par étudier les embryons d’un Polychæte tubicole de la famille des Sabellides, la Dasychone lucul- lana D. Ch. Puis, au cours de mes premières observations, de nouvelles séries de recherches, dont l'idée m'a été suggérée par la lecture de mémoires récents, sont venues s'ajouter aux anciennes. M. Lang (14), en se basant sur l’organisation des Plathelminthes et des Hirudinées, a exposé une théorie disant que ces derniers animaux établissent une liaison entre les premiers el les Annélides ; les Plathelmintes seraient, pour lui, des Pseudocæliens dépourvus de tout entérocæle. L’en- térocæle commencerait à se montrer chez les Hirudinées, où il est représenté par les cæcums du tube digestif; et enfin, chez les Annélides, l’entérocæle se serait séparé de l'intestin pour constituer vraiment la cavité générale du corps. De plus, MM. Sedgwick (26) et Kleinenberg (12) ont émis des vues parliculièressurles rapports existant entre le système nerveux des Cœlentérés et celui des Annélides. Enfin, MM. Hat- schek (9), Fraipont (6), et R.-S. Bergh (3) ont également constaté nombre de faits intéressants sur les organes excré- teurs. 112 LOUIS ROULE. Dans ces condilions, une simple étude de la genèse des feuillets blastodermiques ne pouvait guère suffire à résoudre les questions posées, et il devenait nécessaire de suivre, autant que possible, l’évolution embryonnaire complète d'une Annélide depuis l’ovule jusqu’à l’état adulte, en exa- . minant le développement de tous les organes. Les larves de Dasychone, beaucoup trop sensibles à l'action des réactifs fixateurs, et se contractant trop facilement, ne m'ont pas donné de bons résultats, et j'ai dû chercher ailleurs. — Je me suis adressé alors à un petit Oligochæte limicole, très commun dans les rochers à fleur d’eau qui bornent au nord l'entrée du Vieux-Port de Marseille, et qui passe, à l'exemple des autres Oligochætes, enfermé dans un cocon protecteur, une bonne partie de son évolution embryonnaire. Mon attente n’a pas été déçue. Il m'a été permis, après de patientes et longues recherches, de suivre en entier le déve- loppement de cet Oligochæte, et de donner dans ce travail un ensemble complet de son embryogénie. J’aitâché de revoir plusieurs fois la plupart des faits exposés, afin d’être certain de chacun d'eux dans la mesure du possible; mais ces recherches, faites sur des embryons fort petits, que l’on ne distingue qu’à la loupe, sont très délicates, et peut-être me suis-je trompé parfois. — L'orientation des coupes m'a surtout présenté des difficultés, et la présence d’un vitellus nutritif assez abondant rendait souvent fragiles les embryons jeunes; mais, avec le temps, j'ai réussi à venir à bout des obstacles qui se sont présentés. L'Oligochæte limicole que j'ai étudié a été signalé à diverses reprises par M. A.-F. Marion, sans qu'aucun nom particulier lui fût donné. A l’instigation du savant Professeur, un jeune naturaliste suisse qui était venu travailler en 1884 à la Station de Marseille, et qui depuis est mort malheureusement dans une ascension de la Jungfrau, Wetstein, en avait commencé une monographie anatomique, qui, à ma connaissance, na jamais été publiée. — Plus tard, M. R. Saint-Loup (24), étant DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 113 également venu profiter des ressources de la stalion, a repris ces observations, et en a publié le résultat dans une note adressée à l’Académie des sciences. M. R. Saint-Loup place cet Oligochæte dans le genre Pachydrilus, et, créant pour lui une nouvelle espèce, lanomme Pachydrilus enchytræoides. En réalité, cet Oligochæte n’est pas toul à fait un Pachy- drile, et n'est pas davantage un Enchytrœus; ses caractères sont intermédiaires entre ceux de ces deux genres, et le nom choisi par M. Saint-Loup fait bien ressortir cette situalion mixte. Dans la famille des Enchytræïdes, les Pachydrilus ont un sang coloré et des testicules divisés en lobes d'aspect assez régulier, tandis que les Enchytrœus ont un sang inco- lore, et leurs testicules montrent un aspect variable et nulle- ment déterminé; or, les Oligochætes de Marseille ont unsang coloré comme celui des Pachydrilus, et un testicule irrégulier comme celui des Enchytrœus. De plus, leurs glandes septales ressemblent en tout à celles des Enchytrœus. Cet Oligochæte se rapproche donc plus de ce dernier genre que du premier, et, à la rigueur, on pourrait le mettre parmi les Enchytrœus, mais on ne doit pas le considérer comme un Pachydrile. — Les nombreuses espèces du genre Enchytrœus vivent pour la plupart dans l’eau douce; elles ont toutes un sang inco- lore, et présentent une uniformité remarquable de caractères; l'introduction parmi ellesde l’Oligochæte marseillais briserait donc celte uniformité. Aussi m'’a-t-il semblé qu'il valait mieux faire de cet Oligochæte le type d’un nouveau genre, satellite du genre Enchytrœus, et n'ayant, par rapport à ce dernier, que la valeur d'un sous-genre. Afin de conserver les droits de priorité de M. Saint-Loup, et de marquer ainsi, par le choix du nom, les caractères de ce nouveau genre, Je l’ai nommé Enchytræoides. Ses caractères ont déjà été exposés, et peuvent êlre résumés ainsi : Genre Excayrrœus. — Sous-genre Enchytræoides : carac- ières du genre, mais sang coloré en rouge-brun comme celui des Pachydrilus. — L'unique espèce connue est marine, et habite les eaux quelque peu saumâtres. J'ai nommé cette ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 8. — ART. N° 3. 114 ; LOUIS ROULE. espèce Enchytræoides Marion; cette dédicace revient en effet autant au savant naluralisie qui a signalé cette espèce, qu'au maitre qui m'a guidé dans mes premières études zoologiques. Les caractères spécifiques sont les suivants : Corps allongé, acuminé vers l'extrémité antérieure, en forme de cône tronqué vers l'extrémité postérieure; la troncature, qui indique la place où est situé l'anus, est très faible. Cin- quante anneaux environ à l'état adulte ; lobe céphalique petit. Sores courtes, faiblement recourbées en S, au nombre de six en moyenne par faisceau; le lobe céphalique, le lobe anal et les anneaux chtelliens en sont dépourvus. Longueur : 12 à 14 millimètres; largeur : un demi à 1 millimètre. Corps transparent, faiblement jaunätre. | Pas plus que M. Saint-Loup, je n’ai pu rapporter l'£. Marion à l'une des espèces marines de Pachydrilus décrites par Claparède, et cela, à cause de l'insuffisance des carac- tères donnés par ce dernier auteur. Plus récemment, M. Czerniawsky (4) a signalé plusieurs espèces de Pachy- driles comme vivant dans la mer Noire ; peut-être, étant donnée la ressemblance parfaite des conditions de l'habitat, une de ces dernières, et notamment le P. gracilis, Cz., cor- respond à mon Ænchytræoides; mais je ne puis l’affirmer encore, car les descriptions données par Czerniasky ne sont pas très complètes, et, pour juger sainement en pareille ma- lière, lorsqu'il s’agit d'animaux presque semblables par l’as- pect extérieur, 1l est nécessaire d’avoir entre les mains des exemplaires de chaque espèce pour se décider en toute sürelé. Ce mémoire n’a pas seulement pour but d'ajouter quel- ques résultats nouveaux à ceux qui sont déjà connus sur l’embryogénie des Annélides; 1l montre aussi comment se développent les embryons des Oligochætes limicoles, et c’est là un sujet de recherches qui n'avait pas encore élé élucidé d’une manière complète, en s’aidant de toutes les ressources offertes par la technique moderne. Les savantes études de DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 115 M.E. Perrier (20), et les monographies de M. Vejdovsky (27), renferment bien quelques indications sur le développement de ces animaux, mais ces indications sont très succinctes. Tandis que l’embryogénie des Oligochætes terricoles à été examinée par divers auteurs, et notamment par MM. Kowa- levsky (13) et Kleinenberg (12), celle des Oligochætes limi- coles élait presque inconnue; je n'ai, en effet, à signaler qu'un petit mémoire de M. Lemoine (16) comme traitant de ce sujet. M. Lemoine a étudié, d'une façon très brève, l’or- ganisation et le développement des Enchytrœus; les quel- ques détails peu circonstanciés qu'il donne sont souvent exacts, mais ne permettent pas de bien comprendre en en- lier la genèse des tissus et des organes, car l’auteur n'a fait ses recherches qu'en observant ses embryons par transpa- rence, et n'a jamais pratiqué de coupes. Le lravail de M. Lemoine, fort court, ne fournit donc que peu d’indica- tions, et l’auteur se borne de préférence à décrire l'aspect extérieur des êtres qui l’occupent ; j'aurai du reste l’occa- sion de revenir sur les diverses assertions qu'il a données. J'ai employé à la fois, dans mes recherches, le procédé des coupes et l’examen par transparence. Cette dernière méthode m'a donné quelques bons résullats dans certains cas particuliers, lorsqu'il s'est agi, par exemple, de voir l'aspect général offert par un organe durant le cours de son évolution ; elle m'a permis, entre autres choses, de bien suivre le développement des organes excréleurs. Mais le premier procédé, relatif aux coupes successives effectuées suivant des directions données, est celui dont je me suis servi de préférence, car il m'a offert les résultats les plus nombreux et les plus détaillés. La technique en est fort simple; les embryons, extraits de leur cocon protecteur, sont fixés par l'acide acétique cristallisable pur ou par ma liqueur acéto-corrosive. Dans ce cas parliculier, les deux réactifs agissent à peu près de la même manière, et la fixation est achevée en une ou deux 116 LOUIS ROULE. minutes. Je lave ensuite à l’eau distillée pour chasser l’ex- cès de réactif fixateur, et je durcis par la série ascendante des alcools jusqu’à l'alcool à 95°. Lorsque le durcissement est opéré, je fais trois séries parallèles d’embryons du même âge, l’une colorée avec la teinture alcoolique de cochenille (formule de Mayer), l’autre avec le carmin chlorhydrique (formule de Mayer), et la troisième avec l'hématoxyline alcoolique (formule de Delafield). Je ne suis arrivé à l’em- ploi de ces réactifs, de préférence aux autres, qu'après un grand nombre de tâtonnements préliminaires; ce sont eux qui m'ont donné les coupes les mieux colorées et les plus nettes ; le carmin chlorhydrique notamment m'a rendu de bien grands services dans l’étude de la segmentation, en se fixant de préférence sur les filaments nucléaires. — La colo- ration faite, j'inclus dans la paraffine, après un traitement préalable au toluène pour enlever l’alcool qui m’a servi à nettoyer les embryons de l’excès du réactif colorant, et je coupe avec le microtome de Dumaige pour obtenir les sec- tions successives ; ces sections sont collées, dans leur ordre, sur des lames de verre avec le mélange d’albumine et de gly- cérine de Mayer, et montées au baume de Canada. Le choix des directions de coupes m'a présenté de grandes difficultés lorsqu'il s'est agi de l'étude des embryons fort Jeunes. Ces embryons sont très petits, puisqu'ils mesurent à peine, suivant leur plus grand axe, un tiers ou un quart de millimètre. — La recherche des cocons m'a été aussi fort pénible. Les jeunes £nchytræoides sont mis en liberté lors- qu'ils possèdent environ quinze anneaux; mais les premiers stades, les plus importants, m’avaient d’abord échappé. Les jeunes, lorsqu'ils sont libres, vivent avec les adultes sur des brins d'algues, el, en mettant un certain nombre de ces algues dans des cristallisoirs remplis d'eau de mer fraîche, il m'était possible, après deux ou trois jours de repos, de trouver quelques jeunes, à différents âges, rampant sur les parois de verre; mais je suis resté longtemps sans trouver les cocons. Enfin, en examinant soigneusement les brins DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 147 d'algues avec une forte loupe, et déroulant leurs plis à me- sure avec la pointe d'une aiguille, il m'a été donné de voir, fixées sur certains d'entre eux, des petites masses arron- dies, ne mesurant pas tout à fait 1 millimètre de diamètre, et de couleur blanche : c'élaient les cocons de l'Enchy- træoides. Lorsque je les ai aperçus une première fois, il m'a été plus facile de les retrouver ensuile, et, avec le temps, il m'a été permis d'observer tous les stades embryonnaires depuis l’ovule fécondé. Une seconde difficulté, qui s'est offerte par la suite, a été le choix de ces cocons pour n'étudier et ne fixer ensemble que des embryons du même âge; cette recherche m'a été été rendue facile par ce fait que la plupart des embryons renfermés dans le même cocon sont, à peu de chose près, parvenus au même stade. Voici comment j opérais : j’enle- vais sur les brindilles d'algues un certain nombre de co- cons, et je les mettais avec un peu d'eau de mer dans un verre de montre. Lorsque la récolte élait achevée, je plaçais plusieurs de ces cocons en une seule rangée sur une lame de verre, et je les examinais au microscope avec un faible grossissement. Lorsque, par transparence à travers les parois de la coque, je m'étais rendu compte de l’âge des embryons d'un cocon donné, je metlais chacun d'eux à part avec un numéro d'ordre correspondant à l’âge, et j’agissais de même pour les autres. Cela achevé, J'ouvrais délicatement la coque, et, en ayant soin de ne pas léser les jeunes, je les disposais tous sur une lame de verre afin de voir au microscope ceux qui étaient parvenus exactement au stade que je désirais ; cette seconde opération devait être menée avec rapidité, pour que l’eau de mer environnante n'ait pas le temps de irop impressionner l'organisme des embryons, et je plon- geais ensuite ces derniers dans le réactif fixateur. Cette méthode était évidemment très longue et très fas- üidieuse, mais son emploi m'a rendu de grands services en me permettant de reconslituer la série complète des stades; et le but atteint m'a amplement dédommagé des 118 LOUIS ROULE. x al heures consacrées à choisir et à classer les embryons. Mais, malgré tous les soins apportés à mes recherches, il m'aurait été sans doute bien difficile de les mener à bonne fin, si les Ænchytræoides n’eussent été eux-mêmes aussi ai- sés à élever dans des cristallisoirs. Non seulement les adul- tes y vivaient fort bien — j'en ai conservé vivants pendant plus de trois mois, — mais ils s’accouplaient parfois, pon- daient, et, dans certains cas, les jeunes se développaient. Mes cristallisoirs renfermaient ainsi de véritables cultures, où j'étais sûr de pouvoir puiser en tout temps; les seules précautions que j'aie prises étaient de conserver mes ani- maux dans une demi-obscurité, et de renouveler l’eau une fois par mois environ. Grâce à celte facilité d'adaptation, les matériaux que j'ai recueillis pendant un séjour au labo- ratoire de Marseille, et ceux que j'ai obtenus en conservant des individus envoyés à diverses reprises du même labora- loire, m'ont suffi pour achever mes recherches. Quant à l’eau de mer fraîche, le laboratoire de Toulouse en est cons- tamment pourvu, qui lui vient de la station zoologique de Banyuls, grâce à l'obligeance de M. le professeur H. de Lacaze-Duthiers. Aussi ne saurais-je trop remercier l’émi- nent zoologiste, ainsi que M. le professeur A.-F. Marion, des ressources qu'ils m'ont procurées pour l'exécution de mon travail. | Ce mémoire est divisé en trois parties. La première renferme l'exposé complet des recherches, en suivant la série des stades, et sans y mêler aucune discussion relative aux résultats obtenus ; j'ai pensé que cette méthode était bonne, en allégeant l'exposition, et permettant au lecteur de parcourir sans fatigue l'étude du développement. Dans la seconde partie, j'ai alors comparé, organe par organe, les résultats définitifs à ceux déjà acquis à la science. Enfin, dans une troisième et dernière partie, J'examine jusqu’à quel point mes recherches s'accordent avec les théories des frères Hertwig, de Lang, de Kleinenberg, etc., sur les rela- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 119 tions des Annélides avec les autres groupes d'animaux. Ces trois parlies sont suivies d’un résumé qui facilite au lecteur la connaissance des points principaux du mémoire. — Les figures relatives à la segmentation de l’ovule sont insérées dans le texte, avec quelques schémas explicatifs de la struc- ture de l'embryon lors des stades les moins avancés; toutes les autres figures sont rassemblées dans les planches. PREMIÈRE PARTIE DESCRIPTION DES STADES EMBRYONNAIRES Cette première partie, consacrée à l'étude et à la descrip- tion des stades embryonnaires, est divisée en cinq paragra- phes. Le premier paragraphe traite de l’aspect présenté par les cocons qui contiennent les ovules fécondés ; le second, de la segmentation et de la formation des feuillets blasto- dermiques; le troisième, des stades compris entre le moment où les feuillets blastodermiaques ont apparu et celui où les Jeunes embryons sortent du cocon; le quatrième, des stades placés entre l'instant de la sortie et celui où les embryons possèdent trente-cinq segments ; enfin, dans le cinquième et dernier paragraphe est décrite l’évolution de l'embryon de- puis le stade à trente-cinq segments jusqu'à l'état adulte. Ce dernier paragraphe contient aussi les documents relatifs à la spermatogenèse et à l’ovogenèse; les glandes sexuelles n'apparaissent en effet d'une manière bien nette, et ne prennent leurs contours définitifs qu'après le stade où le corps de l'embryon présente trente-cinq segments. $ 1er. — Aspect des cocons et des ovules. Les œufs pondus par les Enchytræoides ne sont pas aban- donnés au hasard des circonstances. Lorsque la maturité sexuelle est arrivée, Le clitellum de ces Oligochætes, comme 120 LOUIS ROULE. celui de tous leurs congénères, renferme dans sa paroi ectodermique un grand nombre de cellules à mucus (leco- derme correspondant ici à l’kypoderme des auteurs). Au mo- ment de la fécondation, plusieurs individus se rapprochent les uns des autres et s’entrelacent ; les ovules expulsés sont alors fécondés. Tous les ovules produits par un même imdi- vidu sont ensuite enveloppés par le mucus que sécrète l'ec- toderme clitellien. Ce mucus se concrète autour d'eux, et leur forme une enveloppe protectrice que l'individu attache à un brin d’algue. Les ovules fécondés subissent dans ce cocon les premiers stades de leur développement; c’est, en effet, dans l’intérieur du cocon lui-même que s'effectue la segmentation, que les feuillets blastodermiques prennent naissance, que la plupart des organes s’ébauchent; et les jeunes embryons sortiront lorsque leur corps sera divisé en quatorze ou quinze anneaux. Ils vivent ensuite d’une vie libre, et complètent leur organisation en se nourrissant eux- mêmes, et rampant sur les algues à côté des adultes. Les Enchytræoides ne diffèrent donc pas des autres Oli- gochætes à ce point de vue : les ovules, après la féconda- tion, sont placés dans un cocon, où s'effectue la majeure parlie des stades embryonnaires. Les cocons des Enchy- træoides sont fort petits ; la figure 1 les représente avec une taille voisine de la grandeur naturelle; ils mesurent en moyenne un demi-millimèire de diamètre. Ils sont blancs ; cette couleur ne provient pas de la substance qui constitue la paroi du cocon, mais bien des ovules eux-mêmes. La paroi du cocon est en effet translucide, et laisse apercevoir les œufs par transparence; ceux-ci renferment un vitellus nutriif abondant, chargé de granulations réfringentes, qui renvoient la lumière directe sans l’absorber, de manière à produire une teinte blanche très nette. — Mais, malgré leur couleur, il est encore difficile de les trouver, à cause de leur petilesse excessive ; leur diamètre varie entre un demi-mil- limètre et { millimètre, se rapproche même le plus souvent de la première de ces deux dimensions, et il faut apporter DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 194 une grande attention à leur recherche pour les apercevoir; il est même nécessaire de se servir d'une loupe pour procé- der à cette exploration. De plus, les cocons sont très clair- semés ; les Ænchytræoides ne les placent pas côte à côle, mais les répartissent en petit nombre sur un assez grand es- pace; et cela est d'autant plus curieux, qu'au moment de la fécondation, un certain nombre d'individus, qui doivent certainement pondre en même temps ou à des intervalles rapprochés, sont entrelacés et serrés les uns contre les au- tres en un point restreint d'un brin d'algue. La petitesse des cocons et leur éloignement mutuel ren- dent la recherche des embryons très fastidieuse et fort lon- gue, et cette recherche a été une des plus grandes difficultés de mon travail, difficulté toute matérielle, il est vrai, mais qu'il était nécessaire de résoudre pour obtenir des résultats complets. Les cocons sont plus ou moins ovalaires. Leur face acco- lée aux corps étrangers, un peu moins arrondie que leur face libre, est souvent entièrement attachée à l’objet qui sert de support; il existe cependant, soit à une des exiré- mités du cocon, soit aux deux extrémités opposées, des prolon- gements assez courts, semblables à des pelits pédicules, et par lesquels se produit plus particulièrement l’adhérence. Chaque cocon renferme en moyenne six à huil ou neuf ovules. La paroi, formée par le mucus clitellien, en est assez mince, et ne montre pas partout la même épaisseur; la substance qui la constitue est élastique, anhiste, translu- cide, absorbe avec peu d'intensité les réactifs colorants, et ne contient pas d'éléments figurés. — Les ovules sont tassés les uns contre les autres; leur forme normale est arrondie ou légèrement ovalaire; mais ils deviennent assez souvent pres- que polyédriques par suite de leur compression réciproque. Les espaces étroits et peu importants par leur étendue, laissés entre eux, contiennent un liquide clair sans aucune utilité directe pour les embryons, du moins selon toute pro- babilité; il n'existe point ici entre les ovules, comme dans 192 LOUIS ROULE. les cocons d’autres Oligochætes et notamment dans ceux des Lombrics, des amas d’une substance albumineuse servant à la nutrition des embryons el absorbée par eux durant leur évolution. Comme la cavité des cocons ne s'accroît pas, car la paroi n’en est pas extensible, et comme déjà les ovules, au début de la segmentation, sont serrés les uns contre les autres, il en résulte que les embryons n’augmentent pas de taille tant qu'ils restent renfermés dans l’intérieur de leur coque protectrice. Leur volume ne change pas, et, depuis le stade ovulaire jusqu'au moment où ils possèdent quinze anneaux, reste constamment le même. Cependant, leurs dimensions varient; les embryons perdent l’aspect arrondi qu'ils pré- sentent dès l’abord, et prennent une forme allongée et cylin- drique; ils diminuent dans le sens transversal pour gagner dans le sens longitudinal. De plus, ils perdent aussi leur opacité primitive à la lumière transmise, et leur corps devient plus transparent à mesure qu'ils augmentent en âge; cette modification tient à la disparition des granules vitellins. Dans un cocon qui renferme des ovules non segmentés, tel que celui représenté par la figure 2, les ovules sont immo- biles, et leur paroi externe, parfaitement lisse, ne présente aucune saillie ni aucune bosselure. Lorsque la segmentation commence à se manifester, les ovules demeurent toujours immobiles, mais les blastomères dessinent des saillies plus ou moins prononcées et plus ou moins grosses, qui font per- dre à l’œuf son contour uni (figure 3). Les saillies produites par les blastomères deviennent de plus en plus nombreuses et de plus en plus petites à mesure que la segmentation con- tinue, car la taille des blastomères diminue à mesure que leur nombre augmente; et enfin, lorsque la segmentation est achevée, lorsque les feuillets blastodermiques ont pris nais- sance, le contour de l’embryon est redevenu uni, mais sa forme générale a changé. L’embryon est cylindrique, obtus aux deux extrémités, et environ deux fois plus long que large; il est toujours immobile, mais son corps se contracte parfois DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 123 avec assez d'intensité, l'onde de contraction partant d’une extrémité pour aller à l’autre. — Ensuite, au fur et à mesure que l’évolution progresse, l'embryon s’allonge et devient plus étroit; les traces des premiers segments apparaissent, les soies commencent à se montrer, et finalement l'embryon ne tarde pas à posséder le chiffre de quatorze ou quinze anneaux, stade auquel il sort de la coque pour vivre d’une vie libre. Mais, pendant que ces changements de forme interviennent, les embryons, qui étaient d’abord immobiles, se meuvent dans la cavité de leur cocon, et leur agilité est d'autant plus grande qu'ils sont parvenus à un stade plus avancé; lorsque les premiers segments apparaissent, les embryons ne se déplacent qu'avec une certaine lenteur; lorsque les quinze segments sont bien formés, les embryons parcourent avec rapidité (figure 4) l’intérieur du cocon, en longeant sa paroi, passant les uns au-dessus des autres, ets’entrelaçant souvent. A ce moment, la paroi se perce d’une ouverture, et les em- bryons, devenus libres, nagent dans l’eau qui les environne, ou rampent sur les brins d’Algues qui portaient leurs coques. La rupture de la paroi du cocon me parait être due aux embryons eux-mêmes. Tout en se déplaçant avec rapidité, ils rongent cette paroi, et finalement celle-ci cède dans une de ses régions les plus minces etles moins résistantes. L'ouver- ture est d’abord étroite; puis elle s'élargit grâce aux efforts des embryons pour passer, et les jeunes £nchytræoides ne tardent pas à quitter le lieu où ils ont accompli les premiers stades de leur développement. Les embryons d’un même cocon parcourent en même temps les stades de leur évolution, et l’on en remarque fort peu de retardataires. De plus, [a grande majorité des embryons renfermés dans un cocon donné parviennent au stade de l'expulsion, et bien peu sont arrêtés dans leur déve- loppement. Les différences que l’on constate d’un ovule à l’autre pour ce qui touche à la durée de l’évolution sont plus nombreuses lors des premiers stades; pourtant, on voit par- 124 LOUIS ROULE. fois, dans certains cocons, des embryons très agiles el possé- dant leurs quinze segments placés à côté d’autres embryons aux mouvements ralentis, et ne montrant encore que dix, onze ou douze anneaux. Mais ces différences ne tardent pas à s’effacer, el les jeunes sortent presque semblables les uns aux autres; du reste, ceux qui sont expulsés à un état moins avancé que le stade normal de sortie complètent, comme leurs congénères, leur organisation pendant qu'ils vivent en liberté. | Les embryons mettent environ une douzaine de jours à parcourir la série des processus évolutifs depuis le début de la segmentation jusqu'au moment de la sortie. Cependant, comme il est fort difficile, à cause du peu d'importance des changements extérieurs, d'apprécier jour par jour l’âge exact des jeunes encorerenfermés dans leur coque, je me suis servi, pour caractériser les stades, des diverses modifications qui se produisent dans la genèse des organes. — Les jeunes Enchy- trœoïdes mettent un temps assez long pour aller du stade à quinze anneaux jusqu'à l’état adulle; ce temps a une durée moyenne de deux mois environ. L'époque de la reproduction pour ces animaux est com- prise entre le mois de novembre et le mois de mai; certains individus pourtant sont précoces et d’autres retardataires ; la date ainsi fixée est une moyenne. La ponte cesse presque complètement durant les fortes chaleurs. Je n’ai point remar- qué qu'il y eût des formes de printemps et des formes d’au- tomne, ainsi que des dissemblances, suivant la saison, dans les procédés de reproduction. $ 2. — Segmentation et formation des feuillets blastodermiques. I. Aspect de l’ovule. — Un ovule fécondé d’'Enchytræoides présente l'aspect indiqué par la figure 1 {dans le texte); ïl est fort pelit, puisque son diamètre moven est environ de un cinquième à un sixième de millimètre, et, malgré cette petitesse, ilcontient en abondance des granulations vitellines. Ces granulations ne sont pas réparties inégalement, et l’on DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 1925 ne peut distinguer dans l’ovule aucune région où elles soient plus nombreuses, distincte ainsi d'une autre région où elles le soient moins; elles sont répandues partout d’une manière égale, et il est impossible d'établir dans l’ovule une distinelion entre du vitellus nutritif et du vitellus évolutif. Cette répartition égale des granulations vitellines entraîne avec elle une segmentation égale dès l’abord, ou presque égale ; l’'ovule se divise en effet en deux blastomères à peu près semblables, et ceux-ci se partagent derechef de Ia même manière. Plus tard, la fragmentalion du vitellus étant plus rapide en un des pôles de l’ovule, les blastomères placés à ce pôle sont plus petits et plus nombreux que les autres; mais malgré cette différenciation ullérieure en gros blastomères (macromères) et petits blastomères (micromères), les dissem- blances de taille sont assez minimes. — On ne voit point les granulations vitellines s’amasser de préférence dans les ma- cromères, car elles restent toujours réparties avec égalité. Une telle segmentation est intéressante à constater dans un ovule riche en granulations vitellines; généralement, les ovules holoblastiques ou à segmentation égale renferment une faible quantité de ces granulations. Ici, les matériaux nutritifs embryonnaires sont abondants; l'embryon produit ses principaux organes avant son expulsion du cocon; et lorsqu'il sort, il ressemble, sauf par la taille, par la réduc- lon du nombre des segments et par l'absence des glandes sexuelles, à un individu adulte. — Les granulations vitellines sont petites et très nombreuses dans l’ovule qui va se segmen- ter; elles sont blanches ou blanc jaunâtre clair à la lumière directe, et presque noires à la lumière transmise; elles absor- bent avec force les réactifs colorants. Le hyaloplasme vitellin qui les contient est coloré par les mêmes réactifs avec une moins grande intensilé. L'ovule est entouré par un chorion anhiste assez épais, renfermant en un point deux petits corps granuleux, qui correspondent sans doute aux globules polaires. Je dis « sans doute », car il m'a été impossible de suivre les phénomènes 126 LOUIS ROULE. de la maturation ovulaire et de la fécondation; la présence des granulalions vitellines est un obstacle que Je n'ai pu vaincre, malgré l'emploi des agents éclaircissants et des colo- rants nucléaires en usage dans la technique histologique. Mais il est infiniment probable que les deux corps granuleux signalés plus haut sont bien les globules polaires, car c’est là leur place, et 1l serait difficile de donner à ces éléments une autre signification. La membrane vitelline, fort mince, disparaît peu à peu avec le chorion au cours de l’évolution embryonnaire, et elle ne devient jamais la cuticule de l'embryon. Salensky (25) admet que cette persistance de la membrane vitelline comme cuticule est presque la règle chez les Polychætes; j'ai été à même de me convaincre que chez certains de ces derniers, et notamment chez Ia Dasychone lucullana, 1 n’en est pas ainsi, el J'ai retrouvé le même fait, c’est-à-dire la disparition de la membrane vitelline, chez les £nchytræoides. IL. Segmentation. — J'ai étudié la segmentation de deux manières : en observant par transparence les ovules en voie de scission, et en examinant des séries de coupes succes- sives. Ces deux méthodes se complètent l’une l’autre, et m'ont ainsi permis de me faire une idée nette de la manière suivant laquelle s'effectue la division de l’œuf et se forment les feuillets blastodermiques. C’est là une question des plus importantes, à laquelle il est nécessaire d'accorder une grande attention, à cause des divergences qui existent entre les au- teurs sur l’origine du mésoblaste. — Une autre cause, qui m'a également déterminé à étudier la segmentation d’une ma- nière complète, a été de vérifier, sur le plus grand nombre possible d’ovules, s’il existe des iniliales mésoblastiques, ou s’il n’en existe pas. Mes premières études, tout en me per- mettant de croire que le mésoblaste et l’endoblasie ont une commune origine et ne possèdent aucun rapport avec l’ecto- blaste, ne m'avaient montré aucune initiale; j'ai donc tâché d’élucider cette question, et de reconnaître si je ne m'étais DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 197 pas trompé. Mes recherches ultérieures m'ont conduit aux mêmes résultats que les premières. Le premier effet de la segmentation est de diviser la masse du vitellus en deux parties. Les deux blastomères ainsi for- més sontfréquemment inégaux; leur inégalité n’est cependant pas très grande, et il est facile de s’en convaincre en exami- nant la figure 2a (dans le texte): l’un des blastomères est à peine plus petit que l’autre, el cette figure répond à la moyenne des faits observés. J'ai cependant constaté certains cas où les deux blastomères primilifs étaient parfaitement égaux, et d’autres cas, moins nombreux, où les différences de taille étaient plus considérables que dans la figure indi- quée ci-dessus. Mais, en ne considérant que la majorité des ovules, on peut avancer que le premier plan de segmentation “hi S 1 MANS NS 7 ci ji \ AS & Fig. 1. — Ovule non segmenté. a pour effet de diviser le vitellus en deux biastomères pres- que égaux. Ce premier plan est parfois courbe, comme le montre la figure 2 a (dans le texte). L'ovule est donc scindé en deux blastomères, dont l’un est un peu plus pelit que l’autre; je désignerai, pour plus de simplicité dans la description, le petit blastomère par la lettre À, et le second par la lettre B. Il existe entire ces deux éléments primordiaux une certaine différence dans la rapidité de la division. Les résultats ultimes sont les mêmes; les cellules qui dérivent des deux blastomères sont sembla- bles les unes aux autres, et sont homologues, puisqu'elles donnent naissance de la même manière aux mêmes feuillets, 128 LOUIS ROULE. mais la division est plus hâtive chez l’un que chez l’autre. Le petit blastomère A se segmente plus rapidement que B, el cela dès le début de la scission ovulaire, — Aussitôt après que le premier plan partageant l’ovule en 2 masses vient d'apparaître, À se fragmente en 2 autres blastomères, tandis que B reste encore indivis pendant un certain temps. La figure 3 a {dans le texte) montre un ovule divisé en trois parles; le gros blastomère inférieur n’est autre que B resté indivis; les 2 blastomères supérieurs, à peu près égaux tous deux, proviennent de A. Il règne cependant, lors de ces premières phases, une certaine inégalité d'un ovule à l’autre, et souvent parmi les ovules d’un même cocon. A côté d'un œuf dans lequel A s’est scindé en deux parties, on en trouve d’autres chez lesquels le même blastomère s'est partagé en 3 parties presque égales. Parfois ces 3 segments n'apparaissent pas en même Fig. 3. — Stades à 3 (a) et 4 (b) blastomères. temps; À se divise d’abord en deux comme dans le cas précédent, puis la plus grosse de ces deux masses vitellines se fragmente à son tour en deux, de manière à produire ainsi 3 nouveaux blastomères. D’autres fois, les deux lignes de scission qui partagent À en 3 segments apparaissent en même temps, et échancrent de la même manière ce blasto- mère en partant de la périphérie de l’ovule : tel est l’ovule représenté par la figure 3 à (dans le texte). Mais, dans la majorité des cas, À se divise seulement en deux parties. Lorsque cette scission est achevée, les 2 nou- veaux blastomères ainsi formés arrondissent quelque peu DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 129 leurs angles, et en même temps B se partage en deux masses : tel est l’ovule dessiné dans la figure 4 a (dans Le texte). — Ce- pendant les inégalités mentionnées plus haut comme existant dans les ovules au stade 3 se manifestent aussi à ce stade 4; parfois, le gros blastomère B se scinde en trois parties au lieu de deux, de sorte que, suivant le cas, on trouve des ovules munis de 5 ou 6 blastomères au lieu de 4. On ren- contre 5 blastomères lorsque B s’est seulement divisé en Fig. 4. — Stades à 4 (a) et 5 (6) blastomères. 2 parties, comme dans les cas les plus fréquents, alors que À s’esl partagé en 3; et on voit 6 blastomères lorsque A et B se fragmentent {ous les 2 en 3 masses, au lieu de se partager seulement en 2 comme dans le processus normal. La figure 4 à (dans le texte) montre un ovule à 5 blastomères, parmi lesquels 3 proviennent de À, et 2 de B; la figure 5 (dans le texte) montre un ovule à 6 blastomères, parmi les- quels 3 proviennent de À, et 3 de B. Après le stade normal à 4 blastomères, auquel correspon- dent les cas d'inégalité signalés plus haut ets’appliquant aux ovules à 5 et 6 parties, la segmentation perd de sa régularité. On vient de voir que cette régularité n’est déjà pas très grande dès le début, puisque, si la plupart des ovules se divisent d'abord en 2, puis en 4, un certain nombre se divisent d’a- bord en 3 et arrivent ensuite au stade 4, ou bien passent par des stades 5 et 6. Ces différences dans la marche de la segmentation tiennent sans doute à l’abondance des granu- Jations vitellines ; la segmentation n’est en effet bien régulière ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. PoUDe JU HART. N° d 130 LOUIS ROULE. et partout semblable que dans les œufs alécithes ou presque alécithes, el son irrégularité est d’aulant plus grande que la quantité de vitellus nutrilif est plus considérable. Le stade qui succède d'ordinaire (toujours en étudiant la majorité des ovules) au stade 4, est un stade à 9 blastomères. Les deux élémenis qui dérivent de A se partagent, soit peu à peu (chacun en deux d’abord, ce qui fait 4; puis l’un des # encore en deux pour arriver au chiffre 5), soit en même temps (l'un des 2 blastomères se divisant en deux Fig. 5. — Stade à 6 blastomères. Fig. 6. — Stade à 9 blastomères. el l’autre en trois), en 5 blastomères de iaille à peu près égale. De même, les deux éléments issus de B se frag- mentent chacun en deux parties, de manière à produire 4 segments. L'ovule, à ce stade, est donc formé de 9 blas- tomères. — Si les choses se passaient régulièrement, il devrait y avoir 8 blastomères au lieu de 9; mais les segments qui naissent de À se scindant toujours plus vite que ceux provenant de B, l'égalité est fort rare. Presque toujours, à ce stade, À est en avance d'au moins un blastomère sur B, etje n'ai rencontré que fort peu d’ovules montrant 8 seg- ments; encore, dans ce cas, la division en 4 élait-elle presque achevée dans A, alors qu'elle commençait à peine dans B. A ce stade 9, il existe une grande différence entre les blas- tomères issus de À et ceux issus de B. Ces derniers sont plus gros que les autres, et leur taille est environ double. Mais, à part cette dissemblance, on ne peut dire que les gros segments renferment plus de granulations vitellines, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 131 toutes choses égales d’ailleurs, que les petits; autant qu'il est permis d’en juger d’après l'aspect, ces granulalions sont répandues dans l’ovule en même quantité, et on ne dislin- gue nullement entre des petits blastomères chargés de vitellus évolutif et des gros blastomères riches surtout en vitellus nutritif. La segmentation de B est quelque peu en retard sur celle de À; mais l'inégalité de taille des blastomères, qui en est la conséquence, ne tardera pas à disparaître. — À dater du stade 9, les irrégularités dans la marche de la scission vitelline deviennent plus grandes entre les ovules, et il est alors impossible de formuler une règle précise. Le nombre des blastomères change d’un ovule à l’autre, et l’on ne trouve point de stade précis et déterminé. Le seul fait qui persisle encore est le suivant : les blastomères À se fragmen- tent plus rapidement que les blastomères B, de sorte que (D) Fig. 7. — Stades anormaux à » (a) et 9 (b) blastomères. l’ovule paraît divisé en deux parties, l’une formée par des petits segments nombreux, l’autre constituée par des gros segments plus rares. — En général, à ces stades déjà avancés, À possède 4 ou 5 blastomères de plus que B. Mais, à parlir du moment où l’ovule est partagé en une vingtaine d'éléments, À se divise avec lenteur, tandis que B continue à se scinder Jusqu'à ce que ses diverses parties soient égales et semblables à celles de A; à cet instant, tous les blaslo- mères de l’ovule sont identiques, et donneront naissance de la même manière aux trois feuillels blastodermiques, sans 132 LOUIS ROULE. que l’on puisse constater entre eux aucune différence sous ce rapport. Les stades principaux qui suivent le plus souvent le stade 9 sont des stades à 13, 14 et 15 segments. Seulement ces sta- des sont atteints de diverses manières, suivant que B se divise plus ou moins rapidement. Les inégalités premières qui se moutrent d'un ovule à l’autre dans la segmentation de A et de B existent toujours; parfois B est de fort peu en arrière sur À; dans d’autres cas, il l’est bien davantage. — La figure 84 (dans le texte) montre un ovule à 13 blastomères; sur ce chiffre 4 seulement proviennent de B, et les 9 autres sont formés par A. Les blastomères B sont volumineux, et deux ou trois fois plus gros que les autres; ces derniers, issus de A, sont assez inégaux de taille. Les granulations vitellines sont réparties en même quantité dans les deux régions. La figure 8 à (dans le texte) monire un ovule à 14 blas- tomères, parmi lesquels 5 proviennent de B, et Les 9 autres de A. Ce stade suit immédiatement sans doute celui de la AE Fig. 8. — Stades à 13 (a) el 14 (b) blastomères. figure précédente; les éléments À ne se sont pas encore divisés de nouveau, tandis que l’un des éléments B est en vole de scission. À côlé de ces ovules, que l’on doit considérer comme nor- maux, puisqu'ils sont de beaucoup les plus nombreux, il en est d'autres dans lesquels B est très en retard sur A, et se divise à peine. Ainsi la figure 7 (dans le texte) montre deux ovules, dans lesquels B ne s’est pas segmenté, tandis que À DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 133 est parlagé en un grand nombre de cellules, quatre dans le premier, et huit dans le second. — Certains autres ovules, tel que celui représenté par la figure 9 {dans le texte), ont, dès le début de la segmentation, A beaucoup plus petit que B. Il en résulte que les blastomères issus de À forment une sorte de cumulus constitué par plusieurs éléments de taille réduite, el situé au-dessus des volumi- neux blastomères auxquels B a donné naissance. Fig. 9. — Stade anormal à 10 blastomères. Mais ces cas sont tout à fait exceptionnels, et en dehors de la règle habituelle. J'ai tenu cependant à les signaler, parce que, à mon sens, ils ne correspondent pas à des dé- vialions pathologiques. Ces ovules sont placés dans les co- cons à côté d’autres œufs qui suivent l’évolution habituelle, et les mêmes conditions influent sur eux; de plus, ces ovu- les aberrants continuent à se segmenter, ainsi que j'ai pu m en convaincre, et produisent des planulas semblables à celles formées par les ovules normaux. Il ne s’agit donc pas de monstruosités, mais bien d'inégalités excessives dans la marche de la segmentation. Ces inégalités existent déjà dans les processus habituels, mais elles sont peu prononcées, et ue deviennent considérables que dans ces cas très rares; elles liennent sans doute à l'abondance des granulations vi- tellines, car les œufs pauvres en vitellus nutritif s’écartent fort peu d'ordinaire du type normal. Il est bon d’insister sur ce fait que, dans aucun cas, on ne conslate une tendance des petits blastomères issus de A à envelopper les gros blastomères issus de B. Chacun des élé- 134 LOUIS ROULE. ments reste à la place où il prend naissance, et les petits ne gagnent nullement sur B pour l’entourer par épibolie. — En d’autres termes, étant donnés les deux blastomères primi- üifs de l’ovule segmenté, A et B, chacun d’eux se divise en éléments plus ou moins nombreux et d’une manière plus ou moins rapide; mais les éléments qui dérivent de À restent tous à la place qu'occupait À sans aller ailleurs, et il en est de même pour les éléments B. Les blastomères À occupent donc un des pôles de l’ovule, et sont juxtaposés aux blasto- mères B, qui occupent l’autre pôle, comme, dès le début de la segmentalion ovulaire, A était jJuxtaposé à B. A et B, en se divisant, produisent à la fois des blastomères périphériques et des blastomères centraux, car l’ovule seg- menté est le plus souvent dépourvu d'une cavité interne comparable à un blastocæle, Lorsque les ovules sont arrivés au stade à 13-15 blasto- mères, on voit les éléments B subir une évolution parlicu- lière. Ceux qui, parmi eux, sont placés sur ce que l'on pour- rait nommer la ligne équatoriale de l’œuf, c’est-à-dire sur le plan de jonction de À et de B, se divisent en plus petites cel- lules que les autres, et donneni naissance à des blastomères semblables par la taille el par tous leurs autres caractères aux blastomères A. — Ainsi l’ovule au stade 16, représenté par la figure 10 (dans le texte) sous deux aspects, en en- üer (10 a) et en coupe optique (10 4), montre encore une différence assez grande entre À et B; B est représenté par cinq gros segments dont l’un, sur la coupe optique, est en voie de division tangentielle, de manière à produire un élé- ment central assez petit et un élément périphérique volu- mineux. Il n’en est pas ainsi pour l’ovule représenté par la figure 11 (dans le texte), et vu aussi en entier (11 a) et sur une coupe optique (11 à); il n'existe plus que deux blastomères B assez volumineux, et ces blastomères sont justement les plus éloi- gnés de À. Les autres éléments B se sont divisés, soit radia- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 135 lement, soit tangentiellement, en cellules semblables de tous points à celles provenant de À, de telle sorte que la diffé- rence primordiale, différence portant sur la grosseur seule, Fig. 10. — Stade à 16 blastomères; a, relief; #, coupe optique. qui existait entre A et B, tend à s’amoindrir, et finalement, comme on le verra plus loin, à disparaître tout à fait. Les plans de scission ne sont pas tous dirigés dans Île même sens; les blastomères qui, au stade 13-15, se divi- saient presque toujours radialement, se segmentent, à dater (b) Fig. 11. — Stade à 19-20 blastomères; à, relief, b, coupe optique. de ce stade, radialement el tangentiellement. Les plans tan- gentiels de scission deviennent même plus nombreux que les autres, de sorte que chaque blastomère tend à se diviser en un élément central et un élément périphérique. Ce dernier se partage ensuite dans le sens radial pour produire deux éléments périphériques juxtaposés, après quoi chacun de ceux-ci se divise dans le sens tangenliel; les blastomères périphériques se segmentent donc tantôt radialement, tan- tôt tangentiellement, et cela avec une alternance assez ré- 136 LOUIS ROULE. gulière. Il n’en est pas de même pour les blastomères cen- traux, qui se divisent dans toutes les directions sans aucune orlentalion précise. | À mesure que la segmentation s'effectue, les éléments centraux se fassent les uns contre les autres de manière à ne laisser entre eux aucune cavité comparable à un blasto- cœle. Lorsqu'un blastomère achève de se diviser, les deux par- lies qui proviennent de lui ont d'abord des angles bien prononcés; ces extrémités angulaires tendent ensuite à s'ar- rondir, de sorte qu’il reste toujours de petits espaces vi- des entre les blastomères. Parfois ces espaces vides ont, en quelques points, une taille assez grande, et il serait alors permis de les considérer comme répondant à des cavités blas- tocæliennes. La question est ici difficile à trancher. — Si ces espaces n'existent vraiment que par suite de l’atténuation des angles, il est certain que leur formation est due à une cause toute mécanique, et il est impossible de les considérer comme homologues d’un blastocæle. Si d'autre part, dans ces ovules chargés d'éléments vitellins et à développement condensé, il se produit un écartement de blastomères, pour si peu prononcé qu'il soit, ce vide doit avoir la signifi- cation d’un blastocæle. Le blastocæle n’est ici, s’il existe, qu'une persistance très amoindrie de l’ample blastocæle des ovules d’Annélides à embryogénie dilatée, et qu’un souvenir atavique en voie de disparition. J’ai donc tâché de bien me rendre compte de sa présence ou de son absence, et voici les résultats aux- quels je suis arrivé : Dans la grande majorité des cas, les seuls vides que mon- ire l’ovule segmenté sont des espaces angulaires très étroits, laissés aux points de contact des extrémités arrondies de plusieurs blastomères. Dans certains cas pourtant, quelques ovules montrent un espace assez ample situé soit dans l’amas des blastomères centraux, soit entre quelques éléments cen- traux el les éléments périphériques; cet espace est plus grand que les vides angulaires, et provient sans aucun doute 2 DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 194 d’un écarlement de cellules; il est donc permis de le regar- der comme homologue de la cavité blastocælienne des blas- tulas d'Annélides à embryogénie dilatée. Seulement cel es- pace est très pelit relativement au blastocæle de ces blas- tulas, et 1l varie de grandeur d’un ovule à un autre; tout en différant toujours par sa taille des vides angulaires, 1l est parfois plus étroit, d’autres fois plus large, et cela dans des ovules parvenus au même stade. Ainsi on trouve tous les intermédiaires entre l'absence complète de blastocæle (et c'est là le cas Le plus fréquent) et la présence d'une pelite cavité blastocælienne.—Il est donc certain qu'ils’agitici d’un organe en voie de disparition, et dont la genèse tend à être omise dans l’évolution embryonnaire par suite de la conden- sation, de l’accélération du développement, que détermine la présence de nombreuses réserves nutrilives. Dans certains ovules, le blastocæle existe encore bien que fort réduit, et, dans la plupart des autres, il a tout à fait disparu. [lest important de remarquer que le blastocæle, lorsqu'il apparait, ne se montre jamais que dans des ovules à 15-20 blastomères, et s’atrophie toujours plus tard. Les ovules parvenus à un stade ultérieur sont constamment dé- pourvus de toute cavité, et les cellules centrales sont tassées les unes conire les autres sans laisser entre elles aucun vide. Le blastocæle ne prend donc naissance que dans des œufs encore jeunes, et sa cavité ne tarde pas à être remplie par les blastomères qui l'entourent. La durée en est donc fort courte. — Aussi un tel fait contribue-t-il à mieux accentuer dans l'esprit cette idée que le blastocæle est en voie de dis- parition dans les ovules d'£nchytræoides ; il tend encore à se montrer dans le cours du développement, et à se montrer au moment où il apparaît d'habitude dans les blastulas d’An- nélides à embryogénie dilatée; mais, ou bien il ne peut le faire, ou bien ilest hâtivement obstrué par les cellules voi- sines qui s'accumulent dans sa cavité. IL était utile d'indiquer ici qu'un blastocæle apparaît par- fois dans le cours de l’évolution des £nchytræoides, parce que, 138 LOUIS ROULE. au moment où la segmentation est achevée, des cavités se creusent dans l’amas des blastomères centraux, et il se pourrait que l’on accordât à ces vides la valeur d’un blas- tocæle. Ces cavités, qui prennent naissance bien après les stades décrits jusqu’à présent, deviennent l’une la cavilé in- testinale, et l’autre la cavité générale du corps. Si l’on pro- cède par comparaison, il est certain que ces espaces, n'ayant aucun rapport avec le blasiocæle chez les larves d’Anné- lides, ne peuvent être considérés comme un blastocæle chez les embryons d'Enchytræoides. Mais j'ai tenu à démontrer d’une manière indiscutable que ces cavilés, en s’en tenant aux seuls ovules de ces derniers animaux, n’ont rien de commun avec le blastocæle, puisqu'elles apparaissent lors- que le blastocæle a disparu. Lorsque l’ovule est arrivé au stade à 20-22 blastomères, et que le blastocæle, lorsqu'il existe, commence à s’amoin- drir, la division des segments continue à s'effectuer, et cela en accentuant davantage la tendance déjà manifestée au stade 15. Les éléments B, jusqu'ici plus gros que les au- tres, se partagent en cellules aussi petites que les éléments A, de sorte que les différences de taille, si net!les au début de la fragmentation ovulaire, s’effacent et disparaissent. En même temps, le nombre des éléments centraux devient de plus en plus grand, et plus considérable bientôt que celui des éléments périphériques. La figure 12 (dans le texte), montre, en relief (12 a) et en coupe optique (12 6), un ovule d'environ 35 à 40 blas- tomères. Les éléments qui dérivent de B, et qui sont placés à côté des segments provenant de À, ont la même taille que ces derniers et ne diffèrent d'eux sous aucun rapport; les uns n'ont pas plus d’opacité ni de transparence que les au- tres, et ils contiennent tous une égale quantilé de granula- tions vitellines. Seuls, quatre ou cinq éléments B, placés en un pôle de l’œuf diamétralement opposé à celui qu'occupent les blastomères A, sont encore volumineux et montrent un DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 139 reste de la dissemblance qui se manifeste au début entre À et B. — La coupe optique {12 à) présente d’une manière nelte les faits indiqués ci-dessus, et montre en même temps que les éléments centraux augmentent en nombre; ces élé- (b) Fig. 12. — Stade à 35-40 blastomères ; à, relief; b, coupe optique. ments ne laissent entre eux aucun autre espace libre que les étroits vides angulaires, et le blastocæle a complètement disparu. | Dans la figure 13 (dans le texte) est dessiné, en relief (13 a) el en coupe optique (13 6), un ovule à 60 blastomères envi- ron. Les segments qui dérivent de B sont presque tous égaux à ceux qui proviennent de À, sauf quelques-uns, toujours (b» Fig. 13. — Stade à 55-60 blastomères ; a, relief, b, coupe optique. placés en un pôle de l’œuf opposé à celui qu’occupe A; seu- lement, les différences de taille sont beaucoup moins pro- noncées que dans l’ovule précédent. — On voit, sur la coupe optique, que les éléments centraux sont devenus plus nom- breux. Ils se ressemblent tous, et n’ont entre eux aucun caractère distinctif; ils ressemblent aussi à ceux de la péri- 140 LOUIS ROULE. phérie, renferment la même quantité de granulations vitel- lines, et en diffèrent à peine par leur forme rendue polygo- nale à cause de la pression réciproque qu'ils exercent les uns sur les autres. Les étroits vides angulaires disparaissent même souvent à la suite de cette pression mutuelle. Parmi ces éléments centraux, les uns dérivent du blasto- mère primitif À, et les autres de B; mais quelle que soit leur origine, ils ont même aspect et aussi même valeur mor- phologique, puisqu'ils donnent tous naissance en commun aux mêmes organes. Les éléments issus de À ne produisent point de feuillets blastodermiques, ni de tissus différents de ceux qui viennent de B : leur évolution est identique. Fig. 14. — Stade à 70-80 blastomères ; a, relief; b, coupe optique. Lorsque le nombre des cellules centrales est devenu plus grand que celui des cellules périphériques, la segmentation commence à toucher à sa fin. Ainsi l’ovule représenté par la figure 14 (dans le texte) possède environ 70 à 80 blasto- mères. Lorsqu'on l’examine en entier (14 &), tous les blasto- mères qui le constituent paraissent semblables; à peine quelques-uns, toujours situés dans la région B, sont-ils un peu plus grands que les autres. Sur une coupe optique (14 6), on voit que les éléments centraux sont très nombreux, et tous serrés les uns contre les autres. Les blastomères péri- phériques sont disposés autour d'eux en une couche dont les cellules diffèrent quelque peu d’aspect; les unes sont en- core grandes et pénètrent par un angle dans la masse cen- lrale; les autres sont plus petites et presque cubiques. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 141 La dernière modification qui se produit ensuite dans l'ovule segmenté, et qui achève de donner aux feuillets blas- todermiques, alors conslilués, leur aspect définitif, est la régularisation de la couche périphérique. Les segments ovu- laires continuent à se diviser, et tout aussi bien les éléments centraux que ceux placés à l'extérieur; mais ces derniers, en se divisant, tendent à devenir semblables les uns aux au- tres par la taille et par la forme. Ils sont à peu près cubi- ques lorsque celle évolution est achevée, et constituent une couche à un seul rang de cellules, qui se laisse distinguer avec netteté de la masse des éléments internes. La figure 15 (dans Le texte) montre, en relief (15 a) et sur une coupe optique (15 6), l'aspect de l'embryon à ce moment. L'embrycn est une planula formée par une couche périphé- rique de cellules cubiques, et un volumineux amas central LE e Re Fig. 15. — Stade planula, a, relief; b, coupe optique. d'éléments polyédriques, tassés les uns contre les autres sans laisser un seul vide entre eux, et à peu près de même taille que les cellules externes. Tous les éléments de la planula sont semblables au point de vue de la quantité des granu- lations vitellines qu’ils renferment, et les cellules centrales ne sont pas plus opaques ni plus chargées de matériaux nu- tritifs que les cellules périphériques. À ce slade, la segmentation étant achevée, les feuillets blastodermiques ont pris naissance. La couche unique d'élé- ments placés à la périphérie produira l’ectoderme et les centres nerveux : elle correspond donc à l'ecfoblaste. De l'ensemble des éléments centraux dérivent tous les organes mésodermiques et endodermiques ; seulement, au stade pla- nula, il est impossible d'établir une distinction entre ce qui 142 LOUIS ROULE. apparent à l’'endoblaste et ce qui appartient au mésoblaste : toutes Les cellules se ressemblent. Cet amas central est donc un méso-endoblaste, d'où naîlront plus tard, par différencia- ton progressive, le mésoblasie et l’endoblaste. En effet, une cavité ne va pas tarder à se creuser dans ce groupe cellulaire interne, et deviendra la cavité intestinale; les cellules qui la limitent immédiatement produiront l’endo- derme et constituent ainsi l’endoblaste. Quant aux nom- breux éléments, disposés sur plusieurs rangées, qui sont placés entre l’ectoblaste et l’endoblaste, ils représentent le mésobluste, et, dans leur masse, se creuseront les cavités segmentaires. Il est utile de fixer dès à présent ce fail que le mésoblaste ne provient ni de l’ectoblasie ni de l’endoblaste; et il est facile de s’en rendre compte en examinant les figures 10, 11, 12, 13, 14, 15, insérées dans le texte, et les figures de la planche VII. Le mésoblaste ne dérive pas de l’endoblaste, puisque ces deux feuillets naissent tous deux aux dépens de l’amas central des blastomères, qui constitue ainsi un méso- endoblasie. Le mésoblaste ne provient pas davantage de l’ectoblaste, puisque ce dernier feuillet revêt son aspect dé- finitif en même temps que le méso-endoblaste, et à dater de cet instant, ne lui envoie aucune cellule. Le mésoblaste est formé par le méso-endoblaste seul, au même titre et en même temps que l’endoblaste. Pour éludier la genèse du mésoblaste aux dépens des au- tres feuillets blastodermiques, il faut attendre évidemment que ces derniers soient bien consiilués. Tant que la seg- menlation s'effectue, on ne peut établir aucune différence entre les éléments qui donnent naissance à l’ectoblaste et ceux qui produiront le méso-endoblaste; 1l n'existe dans l’ovule que des blastomères en voie de scission, qui se divi- sent dans tous les sens en segments périphériques et segments centraux. Il n° y a là qu’une simple division cellulaire, qu'un accroissement numérique des éléments qui constituent l’ovule. — Ensuite, lorsque la segmentation va s'arrêter, ces DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 143 éléments régularisent leur disposition et s'arrangent en cou- ches cellulaires nettes ou feuillets blastodermiques. Aussitôt après que les deux feuillets primordiaux, l’ectoblaste et le méso-endoblaste, se sont différenciés et peuvent être distin- gués l’un de l’autre grâce à leur aspect propre, aucun élé- ment du premier n’augmente la masse du second; tous les deux suivent séparément la même évolution particulière, et restent juxtaposés sans se mélanger. En supposant même que certaines cellules d’origine eclo- blastique viendraient s'ajouter à l’ensemble du mésoblaste, il faut bien reconnaître que ces cellules surajoutées sont bien peu nombreuses relativement aux autres; le mésoblaste pro- vient surtout du méso-endoblaste, et n’est point produit en totalité par. l'ectoblaste. Comme on le voit, il n'existe dans celte évolution em- bryonnaire aucune initiale mésoblastique, et c’est 1à un fait des plus intéressants, étant donnée la présence de ces ini- Uales dans la plupart des développements connus d’Annéli- des. J’ai examiné une grande quantité d’ovules afin d’être bien certain de leur absence, et j'ai toujours observé les Fig. 16. — Stade anormal à 90-100 blastomères. faits déjà décrits, sans remarquer jamais l'existence des deux initiales habituelles. Parfois il m'est arrivé de rencon- irer des ovules (fig. 16 dans le texte) chez lesquels deux cellules, placées côte à côte en un pôle de l’œuf, sont un peu plus grosses que les autres. Ces éléments ne correspondent pas à des initiales; ce sont des cellules dérivant de B, en 144 LOUIS ROULE. retard sur les autres, encore assez volumineuses, et ne don- nant point naissance au mésoblaste, puisque, à ce moment- là, le méso-endoblaste est presque entièrement ébauché. En somme, la segmentation aboutit à une planula cons- liluée par un ectoblaste et un méso-endoblaste. Cette planula, lorsqu'elle vient d'être formée, ne contient aucune cavité, el le petit blastocæle a disparu depuis longtemps. Je reviens encore sur celte parlicularité que, l'ovule pri- mitif se divisant en deux, la segmentation continue, sans que jamais les cellules du petit blastomère tendent à envelopper celles du gros. Il n’y a point ici de recouvrement épiboli- que, et tous les éléments de l’ovule se scindent, sans que l’on voie cette division se poursuivre plus rapidement dans un sens que dans un autre. Les choses se passent presque, sauf la petite inégalité première existant au point de vue de la taille entre les éléments A el B, comme dans un ovule alécithe se segmentant pour produire une morula. La marche de la segmentalion est la même; seulement, c'est une planula compacte qui prend naissance, et non une blas- tula; le blastocæle, lorsqu'il apparaît, est fort petit, et son importance est nulle ou à peu près. Lorsque les deux feuillets blastodermiques primordiaux ont apparu, l'embryon perd sa forme arrondie, ets’allonge quelque peu: c'est là un acheminement vers l’aspect cylin- drique qu'il ne va pas tarder à prendre. Mais ces modifica- tions s’effecluent sans qu'il y ait changement de volume; l'embryon perd de ses dimensions dans un sens pour gagner dans un autre. Les descriptions détaillées qui précèdent ont été faites d’après des ovules entiers, examinés en relief ou sur leur coupe optique; J'ai tâché de revoir les mêmes faits sur des coupes d'ovules segmentés, afin de me rendre un comple exact de la marche de la division cellulaire, et de bien véri- fier encore si le mode de formation des feuillets blastoder- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 145 miques décrit ci-dessus est exact. Je suis arrivé aux mêmes résullats. La figure 62 (planche VIT) montre une coupe passant par le centre d'un ovule parvenu à un stade équivalant presque à celui (19-20 blastomères) de la figure 11 (dans le texte). Presque toute la périphérie de la coupe est occupée par des petits blastomères; un seul élément volumineux est placé à l’un des pôles; le centre montre trois segments, l’un assez gros et les deux autres plus réduits. Ces derniers parais- sent provenir, l’un de la division du gros blastomère cen- tral, et l’autre de la division d’un blastomère périphérique. — On voit donc que les cellules centrales, qui formeront plus tard le méso-endoblaste, ont des origines différentes, et même si l’on accordait, à ce stade, la valeur d’un ectoblaste à l’ensemble des éléments périphériques, on ne devrait pas attribuer à cet ectoblaste seul la production des cellules mésoblastiques, puisqu’un certain nombre de ces dernières proviennent d’un gros blastomère central. Quant à celui-ci, il a été formé peu après le début de la segmentation, à un moment où chacun des segments occupe l'épaisseur entière de l’ovule, depuis la périphérie jusqu’au centre, et où l’on ne distingue encore avec cerlitude aucun feuillet blastoder- mique. Il serait possible d'admettre, il est vrai, que, le méso-endo- blaste se divisant plus tard en un endoblasle et un mésoblaste, les cellules qui constituent ce dernier proviennent exclusi- vement de la segmentation des blastomères périphériques de l’ovule représenté dans la figure 62, et celles de l’endoblaste de la division des blastomères centraux. Cette interpréta- tion est en désaccord avec les fails que j'ai observés. J'ai souvent examiné des ovules au stade 19-20, pour reconnaître s'il y a là vraiment une différence d’origine, et j'ai toujours vu que certains des gros éléments centraux donnent naissance à des cellules qui feront plus tard partie du mésoblaste, comme certains éléments périphériques pro- duisent des cellules dont plusieurs, après quelques partitions ANN. SC. NAT. ZOL., 1889. vil, 10. — ART. N° 3. 146 LOUIS ROULT. répélées, arriveront au niveau de l’endoblaste futur. En somme, il n'y a, dans cette segmentation, aucune tendance préélablie qui accorde au mésoblaste une origine différente de l’endoblaste ; {ous deux proviennent également de l’amas des cellules centrales qui s’est formé peu à peu, et sans aucune régularité, durant la division de l’ovule. De plus, l'aspect que présente cet amas central, constitué par des éléments tous semblables et ne différant les uns des aulres sous aucun rapport, montre encore leur communauté d'origine el leur identité de valeur morphologique. Au stade planula, il n'existe vraiment, dans les œufs d'En- chytræoides, que deux feuillets blastodermiques primordiaux, l’ectoblaste, placé à la périphérie et constitué par une seule couche de cellules, et le méso-endoblaste, représenté par un grand nombre d'éléments serrés les uns contre les autres. D’après un examen superficiel de coupes d’ovules sembla- bles à celle représentée par la figure 62, il semblerait que certains des segments périphériques se divisent de manière à envelopper le gros blastomère situé à l’un des pôles de l’œuf, et à produire une planula par épibolie. Cela n’est pas; on l’a déjà vu dans les descriptions d’ovules étudiés entiers, et on le voit de nouveau en examinant les stades ultérieurs à celui de la figure 62, ou même d’autres stades correspon- dants. Il ne se produit jamais de mouvement épibolique, et, après le stade de la figure 62, le gros blastomère se segmen- tera de manière à produire un élément périphérique et un élément central. Après un petit nombre de divisions sem- blables, l’ovule de la figure 62 prendra l'aspect de l'ovule dessiné dans la figure 63. La figure 62 montre encore que, au moins dans le début de la segmentation, la partition des blastomères ne s'effectue pas suivant une surface plane et perpendiculaire au grand axe de la cellule, mais plutôt suivant une surface courbe. Ce mode de scission est surtout bien net dans l’un des segments périphériques et dans le gros élément central. Ce dernier vient de se partager en une cellule encore fort grosse, et DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 147 une seconde cellule plus petite; le plan de division est quelque peu recourbé. La courbure est encore plus accen- tuée dans le plan de division de l’élément périphérique placé au-dessous du gros blastomère central; cet élément vient de se scinder en deux cellules dont la plus petite, presque arrondie, est comme taillée à l’emporte-pièce dans la seconde plus grande. — La figure 66 représente trois seg- ments d’un ovule parvenu au stade de la figure 63, et séparés quelque peu les uns des autres par l'effet de la préparation; les deux segments supérieurs proviennent de la division d'un unique blastomère, et le plan de division est encore recourbé. Dans la figure 63, qui représente une coupe médiane passant par le centre d’un ovule à trente blastomères environ, on constate déjà la présence d’une couche périphérique et d'un amas cellulaire central. Mais la segmentation est loim d'être achevée encore, et les considérations exposées plus haut, au sujet de l’origine du mésoblaste, doivent encore trouver ici leur application. — Parmi les cellules de la couche externe, les unes sont petites et ne se divisent plus sans doute, les autres sont grandes et présentent tous les carac- tères d'éléments en voie de scission. Parmi ces dernières, certaines montrent deux noyaux dans leur intérieur, et leur protoplasma déjà échancré entre ces deux noyaux; d’autres montrent, à leur (our, un noyau qui se divise en deux asters avec une ligne équatoriale intermédiaire. Ces grosses cellules externes, qui se segmentent surtout dans le sens tangentiel, donnent aussi naissance à des éléments qui augmentent la masse du méso-endoblaste futur. — Si donc l’on accorde, dès ce stade, la valeur d’ectoblaste à l’ensemble de ces cellules, on pourra prétendre, à l'exemple de Salensky, que le méso- endoblaste dérive, au moins en partie, de cet ectoblaste. Mais, encore une fois, je ne pense pas que l’on puisse considérer, dès maintenant, les cellules périphériques comme formant un ectoblaste. Dans toute segmentation, quelle qu'elle soit, on ne doit accorder à un ensemble de cellules la valeur de feuillet blastodermique, que lorsque la 148 LOUIS ROULE. fragmentalion du vitellus est achevée; jusqu'à ce que cet . achèvement ait eu lieu, l’ovule est simplement constitué par des blastomères qui se divisent. On suit, depuis le début de la segmentation, la marche de la division ovulaire, et l’on peut prédire que tels blastomères donnent naissance à tel feuillet blastodermique; mais il est prématuré d'accorder, dès le début, la signification qu'aura le feuillet aux blasto- mères qui le produisent. — Dans le cas particulier de l'En- chytræoides, les segments externes {fig. 62 et 63) forment à la fois l’ectoblaste et une partie du méso-endoblaste; mais ce serait trop s’avancer que de les considérer comme répon- dant déjà à un ectoblaste. Ces segments sont des éléments ovulaires en voie de division, et pas autre chose ; lorsque la division est achevée et lorsque la planula est constituée, les cellules qui proviennent de ces segments se disposent en feuillets blastodermiques ; mais, jusqu'à ce moment, les feuil- lets n’ont pas encore apparu avec leur aspect spécial et leur signification propre. On a vu plus haut qu’une petite cavité, homologue du blastocæle, se manifeste parfois dans certains ovules, aux stades des figures 62 et 63; la figure 64 montre un de ces blas- tocæles (B/). La cavité est assez étroite; je l’ai vue plus grande sur d’autres ovules; elle est comprise entre l’amas des blas- tomères centraux et un gros blastomère périphérique qui s'avance dans son intérieur; ce dernier, en proliférant, ne tardera pas sans doute à la remplir entièrement. — Lorsque les cellules qui limitent le blastocæle vers l'extérieur sont pe- tiles et arrondies, la cavité blastocælienne communique avec le dehors par les étroits interstices laissés entre ces cellules ; mais cette communication est accidentelle et n’a aucune im- portance embryogénique, étant donnée la cause qui la pro- duit. Il est probable qu’un fait du même ordre existe chez d’autres Oligochætes, puisque Kleinenberg (12) a vu, chez un Lombric, le blastocæle s'ouvrir au dehors. Sans doute ce fait élait aussi accidentel. Tout blastocæle a disparu dans les ovules parvenus au DÉVELOPPEMENT DES ‘ANNÉLIDES. 149 stade de la figure 65, et l’amas des éléments centraux com- mence à devenir volumineux. Les blastomères externes sont encore de taille mégale et en voie de segmentation tangen- tielle; ils contribuent donc à augmenter en même temps la masse de l’ectoblaste futur et celle du méso-endoblaste. Il en est de même pour l'embryon représenté en coupe longitudi- nale médiane dans la figure 67; la plupart des éléments pé- riphériques sont petits et ne se divisent plus que dans le sens radial; les segmentations tangentielles sont devenues rares. Un de ces éléments, très volumineux, est situé en un des pôles de l'embryon; mais il ne correspond pas à une imi- liale mésoblastique, puisque, à ce moment, le mésoblaste et l’endoblaste sont presque complètement ébauchés ; ilconcourt à augmenter, pour une faible part, la masse du méso-endo- blaste, et c’est là tout son rôle. _ Les figures 68 et 69 montrent une coupe longitudinale et une coupe transversale d’un embryon parvenu au stade pla- nula. L'ectoblaste forme alors un feuillet bien net, constitué par une seule couche de cellules qui ne se divisent plus que radialement; toute scission tangentielle a disparu, et l’ecto- blaste devient peu à peu l’ectoderme de l'adulte, en conser- vant toujours un aspect de couche cellulaire simple. Les élé- ments du méso-endoblaste sont serrés les uns contre les au- tres, et ne diffèrent entre eux par aucun caractère; ils sont tous triangulaires ou polyédriques. Aucune cavité n'est creusée, à ce stade, dans le mésc-endoblaste. Les cellules ectoblastiques, dans la figure 68, montrent encore quelques dissemblances de forme et de taille; ces dissemblances sont bien minimes, mais elles n’en existent pas moins. Elles ont presque entièrement disparu dans la figure 69 ; les éléments ecloblastiques sont disposés en une couche, dont la limite interne est bien régulière et nullement anguleuse. Les éléments sont rectangulaires dans la partie supérieure de la figure; ils sont Faute dans la partie inférieure. La figure 66 représente des PATRONS dissociés appar- 150 LOUIS ROULE. tenant à un ovule dont le stade est intermédiaire entre celui de la figure 62 et celui de la figure 63. Leur forme, avec ses contours arrondis, a déjà été décrite; leur proto- plasme est chargé de fines granulations vitellines très nom- breuses, et renferme un noyau qui absorbe fortement les réaclifs colorants. — Les figures 70 et 71 montrent des cel- lules du méso-endoblaste prises dans des ovules, aux stades des figures 65, 67, et 69. Les cellules sont serrées les unes contre les autres, mais comme leur contour est quelque peu arrondi, 1l reste entre elles des vides étroits; le protoplasme cellulaire pénètre dans ces vides, et forme ainsi des petites expansions presque dépourvues de granules vitellins. Ces expansions sont dues à la pression mutuelle des cellules, à une cause purement mécanique, et rappellent par là les crêtes d’empreinte des cellules tendineuses. — L'élément de la figure 71 montre un noyau à réseau chromatique dense et épais, laissant, entre les filaments qui le constituent, des petils espaces remplis par du suc nucléaire incolore. $ 3. — Stades compris entre la fin de la segmentation et la sortie des jeunes hors du cocon. Stade I. — Premières indications de la cavité intestinale et du cœælome. — Lorsque la segmentation est achevée, l’em- bryon présente donc deux feuillets blastodermiques, un ecto- blaste externe et un méso-endoblaste central; ce dernier ne contient, à ce stade, aucune cavité. Après que les deux feuil- lets de la planula sont devenus bien distincts l’un de l’autre, et offrent une ligne de séparation nette, une coupe longitu- dinale médiane, pratiquée au travers de cette planula, pré- sente l’aspect représenté par la figure 72. L’embryon est allongé, ovalaire, et commence à revêtir la forme cylin- drique qu'il aura plus tard; l’ectoblaste est formé de petites cellules toutes semblables, sauf en une région particulière, el à peu près cubiques. Quant au méso-endoblaste, 1l est consti- tué par des cellules polyédriques, à angles bien marqués el quelque peu arrondis; on ne peut encore établir aucune dif- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 151 férence entre les éléments qui produiront l’endoblaste et ceux qui feront partie du mésoblasle. Dès ce stade, en une région de l'embryon, les cellules de l’ectoblaste sont plus longues et plus étroites qu'ailleurs; la segmentation paraît s'y effectuer avec plus de rapidité, et il est facile de le reconnaître, car un assez grand nombre des cellules de cette région contiennent deux noyaux. C’est aux dépens de cette partie de l’ectoblaste que naïîtront les cen- tres nerveux cérébraux; cette partie correspond ainsi à la plaque céphalique des larves d’Annélides. — On sait que, chez ces dernières, cette plaque apparaît de très bonne heure; il en est de même ici, puisqu'on la voit se former dès le stade planula, dès que l’ectoblaste est à peine ébauché. Au début, la plaque céphalique est grande, et s'étend sur les parties latérales du corps de l'embryon; à mesure que l’évolution continue, ses dimensions deviennent plus restreintes, et elle se localise à l’une des extrémités du corps, qui deviendra la région céphalique. Cette plaque apparaît avant l’ébauche du cordon nerveux ventral ou plaque médullaire. Y faut bien reconnaître pour- tant que, malgré cette apparition anticipée, la plaque cépha- lique ne proliférera, pour donner naissance aux centres cérébraux, qu'au moment où la plaque médullaire aura été formée. Ces deux ébauches nerveuses, primitlivement sépa- rées et qui ne se réunissent que plus tard, suivent donc ensemble, et d'une manière correspondante, leur évolution propre. — Jusqu'à la venue du premier Indice de la plaque médullaire, la plaque céphalique reste constituée par des cellules allongées, et ne diffère que par là des autres régions de l’ectoblaste. Une coupe transversale du même embryon (fig. 73) montre, suivant un autre plan, les caractères exposés ci- dessus, et la distinction parfaite qui existe entre l’ecto- blaste et le méso-endoblaste. Toutes les cellules ectoblasti- ques ont la même taille ou à peu près, de sorte qu'une ligne nelle sépare ces deux feuillets. — Mais, en surplus, des 152 LOUIS ROULE. différences d'un autre ordre apparaissent déjà entre l’ecto- blaste et le méso-endoblaste. Les éléments ‘ectoblastiques (fig. 74) sont remplis par des granulations vitellines de petite taille, assez peu réfringentes et absorbant avec une grande intensité les réactifs colorants; par contre, les granulations vitellines des éléments du méso-endoblaste sont plus grosses, plus réfringentes, et se colorent avec moins de facilité. — Lorsque la segmentation s’effectuait encore, les granula- lions étaient semblables partout, et semblables à celles qui existent actuellement dans l’ectoblaste ; elles deviennent plus grosses dans le mésoendoblaste parce que, sans doute, elles se fusionnent les unes avec les autres, pour produire des amas assez volumineux. Cette fusion de granules vitellins continuera à s'effectuer, de sorte que, dans les stades ulté- rieurs, les cellules embryonnaires renfermeront un petit be de grandes granulations. | | Mais, à mesure que plusieurs de ces done s’assemblent, la substance qui les constitue est absorbée par le protoplasme pour réparer ses perles. En effet, l’ensemble des grosses granulations est inférieur comme volume, dans les stades qui suivent ceux des figures 72 et 73, à celui des petits -granules que chaque: cellule renferme vers la fin de la seg- mentation. On voit, à mesure que l'embryon devient plus âgé, ces granulalions occuper une place moindre, et ül est évident qu'elles sont absorbées par le protoplasma pour servir à sa nutrition. — Comme la présence d’une grande quanlité de ces corpuscules rend l'embryon opaque, on constate que cette opacité diminue dans un rapport cons{ant avec la réduction des granules vitellins. Lorsque l’ectobiaste se laisse aisément. distinguer du méso-endoblaste, l'ébauche de la cavité intestinale (wchenté- ron) apparail dans la partie centrale de ce dernier ; la figure 75 montre sur une coupe transversale de quelle manière s’ef- fectue celle apparition. Les cellules qui occupent le centre du méso-endoblaste s’écartent les unes des:autres, et laissent entre elles une cavité, élroite au début, qui s’élargit peu à DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 153 peu. Cette cavité, lorsqu'elle vient de se former, n'a pas une forme très régulière; sa paroi ést anguleuse, et diffère d’as- pect d'un embryon à l’autre. — Cette inégalilé est due à la façon suivant laquelle se creuse la cavité intestinale. Non seulement les cellules centrales du méso-endoblaste s’écartent ‘pour laisser entre elles un vide, mais encore les parties de ces cellules qui regardent l’espace vide subissent une sorte de résorption. Leur membrane disparaît, leur protoplasma est comme rongé, déchiquelé sur ses bords, et les granulations qu'il renferme sont mises en liberté; la cavité s'agrandit ‘donc, non pas seulement par un écart des cellules, mais aussi par la disparition partielle du protoplasma de ces cel- Jules. Du reste, si l’on suit, sur des coupes longitudinales, le début de ce développement (fig. 78), on voit que, parfois, plusieurs cavités se creusent ensemble par résorption du protoplasme dans certaines cellules placées côte à côte. Ces €Cavilés intracellulaires sont d’abord séparées les unes des autres ; puis, le protoplasma continuant à êlre résorbé, elles Se fusionnent et ne forment plus ensuite qu'un espace unique, la cavité intestinale. Cette dernière s'agrandit ensuite, surtout par l’écartement des cellules qui l’entourent, et gagne plus ‘dans le sens longitudinal que dans le sens transversal, car l'embryon s’'accroit surtout en longueur. — Ainsi, lorsque la cavité intestinale est à son début, elle apparaît parfois comme un espace unique produit à la fois par un écartement de cellules et par résorption de protoplasme, ef d’autres fois elle ést formée par la fusion de plusieurs petites cavités distinctes, creusées par résorplion du protoplasme dans l’intérieur même de quelques cellules du méso-endoblaste. On se rend compte de ces faits en éludiant des coupes longitudinales d'embryons parvenus à ce stade, comme celle ‘dessinée dans la figure 76; l'embryon représenté dans cette figure serail pourtant un peu plus avancé que celui, coupé transversalement, de la figure 75, car sa cavité intestinale a déjà prisune certaine extension. Au centre même de l'embryon 154 LOUIS ROULT. est placée la première portion qui ait apparu de cette cavité; elle est reconnaissable à son contour dentelé et déchi- queté. Partant de cette portion centrale, la cavité a pro- gressé vers la région antérieure du corps, en se maintenant toujours dans l’axe médian de l'embryon, et s’est avancée jusque sous l’ectoblaste ; cette dernière partie a un contour plus régulier, et a pris sans doute naissance par un simple écartement des cellules. Dans la région postérieure existe une seconde cavité, petite, étroite, qui est une deuxième ébauche de la cavité intestinale; celle-ci ne tardera pas àse confondre avec la première, pour ne former avec elle qu’un seul espace allant d'une extrémité à l’autre de l'embryon. Ilestintéressant de rencontrer plusieurs ébauches distinctes de la cavité intestinale, et de voir combien une embryogénie condensée présente de faits différents de ceux qu'offre un développement dilaté. Dans ce dernier cas, lorsque l'embryon arrive au stade gastrula, la cavité intestinale ou archentéron ne dérive que d’une seule ébauche; ici, plusieurs cavités distinctes se creusent d’abord et se fusionnent ensuite. Il y a, dans ce mode, une tendance préétablie, l’hérédilé, qui détermine la formation de la cavité intestinale ; mais le pro- cédé même de formation a perdu sa régularité primitive. Les deux coupes dessinées dans les figures 75 et76 montrent encore que les cellules placées immédiatement autour de l’archentéron ressemblent à leurs voisines; elles ne sont pas disposées en une couche définie, et leurs contours sont polyédriques, anguleux. Dans la figure 76, on voit aussi la plaque céphalique (Pce) formée de cellules ectoblastiques allongées, dont plusieurs renferment deux noyaux. Parfois (fig. 77) certaines cellules du méso-endoblaste perdent leur aspect polyédrique el s’arrondissent ; leur pro- toplasma se contracte et laisse entre lui et les cellules voi- sines un étroit espace vide. Ces éléments paraissent entrer en dégénérescence; leur intérieur est rempli de granula- tions très fines, plus petites que celles des autres éléments du méso-endoblaste; leur noyau est très volumineux; l’en- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. La semble est fortement coloré. Ces cellules sont parfois au nombre de trois ou de quatre sur une même coupe; elles sont donc en assez grande quantité dans l'embryon entier. Comme elles disparaissent plus tard de manière à ne laisser aucune trace, et comme elles ne donnent naissance à aucun organe, je suppose que ce sont là simplement des cellules en voie de dégénérescence. La figure 78 montre les cellules centrales du méso-en- doblasie au moment où, dans l'intérieur de certaines d’entre elles, apparaissent les espaces qui, en se fusionnant plus tard, produisent la cavité intestinale. Cette figure présente en haut deux espaces ainsi creusés ; l’un d'eux existe presque entier dans un seul élément; l’autre est placé au point de réunion de trois ou de quatre cellules, qui ont toutes une partie de leur protoplasme détruite sur une plus ou moins grande étendue. Le bas de la figure est occupé par l’archentéron déjà bien développé, et qui va se réunir aux deux espaces précédents par la résorption des minces tractus de proto- plasme qui les séparent encore; le contour de cette cavité n’est pas régulier, mais présente des saillies anguleuses et des dépressions qui indiquent bien de quelle façon il a pris naissance. Une indication du même genre est encore fournie par l'examen de la partie qui limite immédiatement la cavité; cette partie est dépourvue de paroi propre, et le protoplasme est pour ainsi dire mis à nu. De celte partie, et cela pour toutes les cellules, partent de fins tractus, difficilement colo- rables, très nombreux, qui s’entre-croisent dans l’intérieur de l’archentéron, et semblent parfois s’anastomoser. — J'ai essayé de reconnaitre la nature réelle de ces traelus, et je ne suis pas arrivé à un résultat certain. Il ne me paraît point qu ils correspondent à des filaments de protoplasme émis par les cellules et comparables à des pseudopodes; ils sont trop fins pour cela, ne se ramifient guère, et ont à peu près le même diamètre dans toute leur étendue; du reste, s'ils étaient formés par du protoplasme, ils devraient se colorer facilement 156 _ LOUIS ROULE. comme ce dernier, et cela n’est pas. Je crois plutôt que ces tractus sont des filaments muqueux, ou bien des cils vibra- tiles assez longs et englués dans un mucus coagulé par les réactifs. À un stade un peu plus avancé, en effet, la présence de cils vibratiles dans la cavité intestinale est manifeste, puisqu'on les voit battre; et il semble, en suivant la série des processus, que ces filaments se transforment en vrais cils, Il faudrait donc admettre que, dès le début de l’apparition de l’archentéron, les cellules qui le limitent possèdent des cils longs et grêles, qui ne peuvent Jouer aucun rôle, puisque la cavité est {rop étroite pour les laisser se mouvoir, mais qui battront plus tard lorsque la cavité sera plus ample. Lorsque l’archentéron commence à s'étendre dans l’in- térieur du corps de l'embryon, les cellules qui l'entourent immédiatement prennent un aspect différent de celui offert par les autres cellules du méso-endoblaste. Elles grossissent un peu, perdent leur contour polyédrique, et s’allongent dans unsens radial ; elles tendent à devenir presque rectangulaires ; ces modifications s'effectuent chez toutes en même temps et avec la même intensité. Il en résulte que la couche qui limite la cavité digestive se distingue bientôt du reste du méso-endoblaste, et en est séparée par une ligne assez régu- lière (fig. 80). À ce moment, le méso-endoblaste primitif est divisé en un endoblaste, constitué par la couche unique de cellules qui entourent la cavité digestive, et un mésoblaste représenté par plusieurs rangées d'éléments placés entre l’ectoblaste et l’endoblaste, et disposées comme celles d'un épithélium pavimenteux stratifié. Aussi pourrait-on, à la rigueur, considérer ce mésoblaste primitif comme un feuillet épithélial, bien qu’il soit formé par plusieurs couches cellu- laires au lieu d’une seule, contrairement aux vrais Entéro- cœliens des frères Hertwig. Les trois feuillets A ET des Cœlomates ont done fait leur apparition, et, bien que l'embryogénie soil condensée, bien qu’elle offre pui particularités importantes, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. tot cette apparition s’est effectuée dans le même ordre que pour un développement dilaté. En suivant en effet l’évolution d’une Trochosphère, qui est La larve {typique des Annélides, on voit, après le stade blastula, l’archentéron prendre nais- sance par invagination. Lorsque la gastrula s’est ainsi mani- festée, elle est constituée par un ecloblaste périphérique et un feuillet interne, nommé couramment endoblaste ou hypo- blaste, mais qui est en réalité un méso-endoblaste, puisque l’endoblaste vrai et les initiales mésoblasliques se forment à ses dépens. Ces deux feuillets sont séparés par un large blas- tocæle; et, lorsque le méso-endoblaste qui limite l'archentéron est entièrement organisé, la plupart de ses éléments cons- lituent l’endoblaste définitif en persistant aulour de l’archen- téron ; deux cellules seulement se séparent de lui pour péné- rer dans le blastocæle et y former le mésoblaste ; en somme, il y à eu division de ce méso-endoblaste en un mésoblaste et un endoblaste. Dans une larve Trochosphère typique, on voit d’abord l’ectoblaste et le méso-endoblaste se produire aux dépens du blastoderme, et ensuite le mésoblaste et l’endoblaste aux dépens du méso-endoblaste. La même suc- cession de faits se renouvelle dans le développement condensé des Enchytræoides, mais avec une altération de procédés qui découle de la grande abondance du vitellus nutritif. L'ovule segmenté ne forme pas un blastoderme entourant un vaste blastocæle, mais une planula dépourvue de toute cavité blastocælienne, et constituée par un amas compact de cellules; dans cette planula se délimitent 2x sifu un ectoblaste à la périphérie et un méso-endoblaste au centre, comme la blastula qui doit devenir une Trochosphère se modifie en une gastrula munie de son ectoblaste et de son méso-endoblaste. Ensuite, une cavité homologue de l’archentéron gastrulaire se creuse dans la masse du méso-endoblaste, et, corrélalivement à cette apparition, le méso-endoblaste se divise, par un simple clivage, en un endoblaste qui entoure la cavité digestive, et un mésoblaste compris entre l’ectoblaste et l’endoblaste. Ilyaseulementicicondensation desprocessusembryonnaires. 158 LOUIS ROULE. Lorsque les initiales mésoblastiques d'une Trochosphère se sont séparées du méso-endoblaste, elles pénètrent dans le blastocæle, et s'y segmentent par divisions répétées; cette segmentalion a pour effet de produire deux amas compactes de cellules, ou bandelettes mésoblasliques, qui remplissent tout ou partie du blastocæie, et s’intercalent entre l’ecto- blaste et l’endoblaste. Les régions de la Trochosphère où les bandeleltes ont pris leur enlier développement montrent donc un ectoblaste à la périphérie, un endoblaste au centre pour limiter l’archentéron, et, entre ces deux feuillets, un amas de cellules correspondant au mésoblaste. — Les faits sont les mêmes chez les £nchytræoides; seulement, par suite de l'accélération du développement, les iniliales n’apparais- sent pas, et, dès la fin de la segmentation ovulaire, les bande- lettesmésoblastiquess’organisent aux dépens des blastomères. La phase de formation des iniliales a été omise dans le déve- loppement, tout comme l’a été aussi la phase d'invagination embolique du blastoderme. — Aussitôt que la segmentalion est achevée, ou peu après cet achèvement, l'embryon d'En- chytræoides est parvenu au même stade qu'une larve Trocho- sphère dont les bandelelles mésoblastiques auraient pris déjà un grand accroissement. | D'une telle comparaison découle cette conséquencequel’es- pace occupé, chez les embryons très jeunes d'Enchytræoides, par les cellules mésoblastiques, correspond au blastocæle des larves Trochosphères; sil'on fait abstraction par la pensée de ces cellules, la cavité laissée ainsi entre l’ectoblaste et l’endoblaste forme un vaste blastocæle, homologue de celui des Trochosphères avant que les bandelettes mésoblastiques ne l’aient rempli. La seule distinction qu'il soit possible d'établir entre le mésoblaste des embryons d'£Enchytræoides et celui des Tro- chosphères munies de leurs bandelettes, porte sur la masse même de ce mésoblaste; mais ce n’est là qu'un fait secon- daire. Dans une larve Trochosphère, les bandelettes méso- blastiques se développent de préférence sur la face ventrale DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES, 159 et les parties latérales du corps; tandis que, chez lesembryons d'Enchytræoides, les cellules mésoblastiques sont aussi nom- breuses sur la face dorsale que sur la face ventrale ou les côlés. La condensation des processus fait que l’ensemble du feuillet moyen, dès son apparilion aux dépens du méso-endo- blaste, est aussi bien développé que chez une larve Tro- chosphère déjà âgée, alors que les bandelettes empiètent sur la région dorsale du corps. Enfin, une dernière ressemblance entre l’amas mésoblas- tique des embryons d'Enchytræoïdes et les bandelettes d’une Trochosphère porte sur l'apparition de cavités dans son intérieur, cavités qui deviendront le cœlome de l'adulte. En effet, lorsque le méso-endoblaste s’est partagé en endoblaste et mésoblasie, des cavités se creusent dans la masse de ce dernier. Seulement, dans les bandelettes des Trochosphères, plusieurs cavités apparaissent séparément les unes des autres, et deviendront les cavités segmentaires, les cellules qui les séparent formant elles-mêmes les dissépiments; des faits semblables se manifestent aussi dans des embryogénies condensées d'Annélides; mais 1l n’en est pas de même pour les Enchytræoides. Comme on le verra dans l’exposé suivant, une cavité unique va se creuser dès l’abord, et cette cavité ne se divisera que plus tard par des cloisons transversales pour donner naissance aux segments. Lorsque l'embryon est arrivé au stade décrit ci-dessus, c'est-à-dire lorsque l’archentéron est déjà bien net, ses con- tours ont changé d'aspect; l'embryon à perdu sa forme arrondie ou largement ovalaire, et il est devenu cylin- drique (fig. 5, pl. I). Les extrémités sont encore rondes, mais sa longueur est environ le double ou le triple de son diamèire transversal; c’est la première indication de l'accroissement dans le sens longitudinal, qu’il va continuer à montrer désormais. Le corps d’un embryon frais est opaque, aussi opaque que l’ovule lui-même, et l’on distingue avec peine les contours 160 LOUIS ROULE. des cellules ectoblastiques. Il n’en était pas de même au stade planula : dès la fin de la segmentation, on voyail encore avec assez de facilité, el surtout dans l’ectoblastie, les parois des éléments. Une telle difficulté provient de ce que les cellules: du feuillet externe tendent à se fusionner pour former un syncylium, dans lequel la place de chaque élément n’est connue que d’après la position de son noyau. Et cetle ten-. dance à la fusion existe encore, bien que plus restreinte, dans l’endoblaste; elle est presque nulle dans le mésoblaste, dont les éléments sont toujours distincts. L'apparition d'un ecltoblaste constitué par un syncytium protoplasmique commence dès maintenant, et ce caractère s’accentue davan- tage dans le cours de l’évolution, jusqu'à ce que le Lo approche de l’état adulte. Les figures 79 et 81 (planche VIIT) montrent, l’une sur une coupe longitudinale et l’autre sur une coupe transversale, le mode d'apparition du cœlome. Lorsque les cellules de l’endoblaste s'agrandissent et régularisent leur forme de manière à produire un feuillet nettement limité vers la péri- phérie, on constate une tendance de ce feuillet à se séparer de la partie profonde du mésoblaste en laissant un intervalle entre elle et lui. Ce vide, d’abord très étroit et semblable à une fente, se manifeste par places ; en beaucoup de points, la couche cellulaire la plus interne du mésoblaste reste accolée à l'endoblasie et se sépare ainsi des couches externes. — Le vide ainsi formé est d’abord très irrégulier ; il sépare en certains points l’endoblaste du mésoblaste, de sorte que le premier de ces feuillets est pour ainsi dire mis à nu par sa face externe, et, en d’autres points, 1l divise le mésoblaste en deux zones, une interne et l’autre externe, séparées entire elles par ce vide. La zone interne est formée d'habitude par une seule rangée de cellules, rarement par deux; elle correspond à la sp/anchnopleure. La zone externe est beau- coup plus épaisse, et constituée par plusieurs rangées de’ cellules, trois, quatre ou cinq; elle est située entre la fente qui vient de se creuser et l'ectoblaste, et correspond à la DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 161 somatopleure. L'espace vide lui-même donne naissance, en grandissant, aux cavités des segments, et n'est donc pas autre chose que le cælome. La figure 79 montre cette genèse sur une coupe longitu- dinale ; on y voit, vers la partieinférieure du dessin, lecælome apparaître dans le mésoblaste même, et se percer, vers la partie supérieure, entre l’endoblaste et le mésoblaste. Au point de vue de la situation de ces fentes, il existe donc entre les embryons des différences assez grandes; parfois le cælome se creuse en entier dans le mésoblaste ; ailleurs, il se perce par places entre le feuillet moyen et l'endoblaste. Mais quel que soit l'aspect au début, le cœlome finit bientôt par être constitué comme le montre la figure 81. Cette figure représente une coupe transversale d’un embryon un peu plus avancé que celui de la figure 80. La cavité cœlomique a finalement divisé le mésoblaste en deux couches : une interne, la splanchnopleure, formée par une seule rangée de cellules, et une externe plus épaisse, la somatopleure. Lorsque le cœlome sépare en partie le méso- blaste de l’endoblaste, et met ce dernier feuillet à nu par sa périphérie, quelques cellules se détachent de la région profonde du mésoblaste, deviennent libres dans la cavité cœlomique, puis vont s'appliquer contre l’endoblaste pour produire la splanchnopleure.— De cette manière, si cette der- nière zone n'entoure pas entièrement l’endoblaste dès l’ap- parition des premiers vides cœlomiques, elle ne tarde pas à se compléter par l’appoint que lui fournissent les éléments détachés de la couche profonde du mésoblaste. Et, quel que soit le procédé mis en œuvre, la rangée cellulaire mésoblas- tique la plus interne devient la splanchnopleure, les autres rangées, plus nombreuses, produisant la somatopleure. Ces éléments libres qui se détachent ainsi pour former en partie le mésoblaste viscéral ressemblent à ces éléments mésenchymateux des larves de Mollusques, qui se séparent des bandeleltes mésoblastiques par la dissociation de ces dernières, et donnent également naissance à la splanchno- ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, A1. — ART. N° 3. ; 162 LOUIS ROULE. pleure en s'appliquant contre l’endoblaste, où à la somato- pleure en s'appliquant contre l’ectoblaste. Dans les deux cas en effet, il existe dès le début desamas cellulaires compacts qui représentent le mésoblaste dérivé du mésendoblaste ; dansces amas apparaissent des fentes où tombent des cellules méso- blastiques dissociées et libres; ces vides s’accroissent, la plupart des éléments du feuillet moyen se séparent à mesure les uns des autres, et s'appliquent ensuite contre l’endoblaste et l’'ectoblaste en couches plus ou moins régulières. — Chezles embryons d'Enchytræoides, cette dissociation n’est pas aussi complète que chez les larves de Mollusques, mais on voit toujours des éléments mésoblastiques se dissocier, devenir libres, et constituer ensuite soit la splanchnopleure, soit, comme on le verra plus tard, les dissépiments, soit encore prendre part à la genèse des organes segmentaires, etc. Le cœlome apparaît de la même manière que le schizo- cœle des Mollusques; l’amas cellulaire mésoblastique étant compact dès l’abord, une fente se creuse dans son intérieur et Le divise en deux parties. — Il est important de mentionner cette ressemblance, car le cœlome des Znchytræoides corres- pond certainement à celui des Archiannélides et des Poly- chætes à développement dilaté, et pourtant il se forme par le même procédé qu'un schizocæle de Mollusque. La con- clusion immédiate est que ces procédés embryonnaires n’ont aucune signification importante; les seuls faits à mettre en lumière sont l’origine même des organes aux dépens des feuillets, et non les moyens employés par ces feuillets pour produire les organes et les tissus. Un autre phénomène intéressant est le suivant : dans la plupart des embryogénies condensées d’Annélides, les ca- vités segmentaires prennent séparément naissance dans le mésoblaste ; elles se percent chacune d’une manière indé- pendanie des voisines, de sorte que le mésoblaste est creusé de plusieurs cavités ne communiquant pas entre elles. Il n’en est pas de même ici. On observe bien, dès le début, que les ébauches du cœlome sont assez nombreuses, mais ces ébau- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 163 ches n’ont pas la régularité de disposition qu'elles affectent dans les cas signalés plus haut; elles ne tardent pas à se fu- sionner pour ne former qu’une seule et même cavité nulle- ment divisée par des cloisons transversales. — La présence d'un cœlome à cavité unique est, comme procédé formatif, une ressemblance de plus avec le schizocæle des Mollusques. Cette cavité s'agrandit beaucoup, et les ébauches des dissé- ai Cælome 1 EE TS 2 n omalopleu re Splanch nopleure Fig. 17. — Schéma d’un embryon au stade I. piments apparaissent assez lard. On voit, dans les figures 79 et 81, les premiers vides cœlomiques encore étroits et sé- _ parés les uns des autres ; les stades ultérieurs vont les mon- itrer se fusionnant. Stade IT. — Apparition du système nerveux. — Ainsi, en résumé, après que les embryons d'Enchytræoïdes sont par- venus au stade planula, les premiers organes qui apparais- sent sont l’archentéron et le cœlome. Ces deux cavités se creusent dans le méso-endoblaste; l’archentéron prend nais- sance d'abord, et la couche cellulaire qui l'entoure devient l’endoblaste ; le cœlome se manifeste ensuite sous l’aspect de vides irréguliers qui se percent dans le mésoblaste. Ces vides n'ont aucun rapport avec les cavités segmentaires fu- 164 LOUIS ROULE. tures ; ils tendent à se fusionner en un vaste cœlome unique. Les stades ultérieurs montrent la suite de l’évolution de ces deux cavités et le commencement de la genèse du système nerveux (pl. IX); ce système dérive de l’ectoblaste. La figure 83 représente une coupe transversale d’un em- bryon au stade qui suit immédiatement l'apparition des es- paces cœlomiques; elle montre déjà un accroissement im- portant de ces derniers. —A ce stade, l’ectoblaste consiste en une couche de cellules aplaties ; les noyaux sont plus nom- breux qu'autrefois, ce qui dénole une prolifération assez intense, mais les limites des cellules sont plus difficiles à discerner. On ne les reconnaît souvent qu'avec beaucoup de peine, et parfois même on ne les aperçoit pas du tout ; les portions latérales des membranes cellulaires ont disparu, et les particules protoplasmiques de tous les éléments ecto- blastiques se sont confondus en un syncytium. — Il n’en est pas de même pour les parois externe et interne; celle-ci (basale) est très nette, régulière, el sépare par une ligne bien accentuée l’ectoblaste du mésoblaste ; il est donc plus facile de distinguer ces deux feuillets que dans les stades précé- dents, et cette distinction est encore rendue plus nette par la différence d'intensité avec laquelle leurs éléments absor- bent les réaclifs colorants ; le mésoblaste est plus coloré que l’ectoblaste. Quant à la paroi externe des cellules de ce dernier feuillet, elle est encore fort mince, et ne doit s’épaissir que plus tard pour former une cuticule. En un point de cette coupe transversale, dans une région placée sur la ligne médiane ventrale, l’ectoblaste est épaissi ; cel épaississement est la première ébauche (plaque médul- laire) du cordon nerveux ventral. En examinant les coupes longitudinales du même stade, on voit que ce cordon se ma- nifeste presque en même lemps sur toute la longueur de l'embryon, depuis l'extrémité antérieure jusqu’à l'extrémité postérieure ; on voit aussi que son développement précède quelque peu celui des centres nerveux sus-œæsophagiens. La plaque céphalique est encore presque semblable à ce DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 165 qu’elle était lors des stades précédents, et n’a pas pris un accroissement bien considérable. — L’ébauche de la plaque céphalique est antérieure à celle du cordon ventral, puis- qu’elle existe seule alors que l’ectoblaste de la face ventrale de l'embryon ne montre aucune trace de prolifération; et cependant le cordon prend, au moins dès le début de son apparition, un accroissement plus rapide que le cerveau. Ce fait est en rapport avec ce que nous savons du déve- loppement des Trochosphères d’'Annélides; la plaque cé- phalique se montre chez elle de fort bonne heure, avant même que les bandelettes mésoblastiques soient ébauchées, et les plaques médullaires ne font leur apparition que plus tard. Or, chez l’'Enchytræoides, on voit, dès que la segmen- tation est achevée et la planula bien constiluée, la plaque céphalique déjà représentée par des cellules ectoblastiques allongées et renfermant plusieurs noyaux. Cette présence hâtive de la plaque céphalique répond certainement à l’ap- parition primilive de cette même plaque chez les larves Tro- chosphères, et dans les deux cas, les plaques médullaires ne se montrent que plus tard. La concordance dans la suc- cession des processus est parfaite, en tenant toujours compte, bien entendu, des altérations qu'une embryogénie conden- sée produit dans les procédés de genèse des organes. Un second fait important à remarquer, c’est que la plaque médullaire est unique et non double; de plus, cette simpli- cité sera conservée durant l’évolution entière. Ce fait paraît êlre en contradiction avec les développements connus du cordon nerveux ventral chez les Annélides. Les types primi- tifs, les Archiannélides, les Archichétopodes, montrent qu'il existe chez leurs larves deux cordons nerveux ventraux parallèles, placés très près l’un de l’autre et de chaque côté de la ligne médiane; les adultes mêmes conservent toujours cetie dualité primitive, que l’on retrouve chez un grand nombre de Polychætes. Ces deux cordons dériveraient, se- lon plusieurs auteurs, de deux plaques médullaires placées côte à côte sur la ligne médiane ventrale. — Pour les autres 166 LOUIS ROULE. Annélides, lorsque, à l'exemple de l’Enchytræoides, il n'existe chez l'adulte qu’un seul cordon nerveux, les ébauches de ce cordon, c'est-à-dire les plaques médullaires, d'abord aunom- bre de deux, se fusionneraient danslecours du développement. On voit, dans la figure 83, la plaque médullaire déjà assez avancée; l'aspect de cette plaque dénote bien qu'elle est unique, et qu'elle ne provient pas de la fusion sur la ligne médiane de deux ébauches d’abord séparées. Dans ce der- nier cas, en effet, à un stade aussi jeune, la plaque médul- laire devrait être plus élroite au milieu, sur la ligne mé- diane même, qui répondrait à la région de jonction, et plus épaisse sur les côlés, qui correspondraient au deux plaques primitives; or, c'est le contraire que j'ai toujours vu. La plaque unique est plus épaisse en son centre que dans n’im- porte quelle autre région; et ses côtés s’amincissent peu à peu en se confondant à mesure avec l’ectoblaste dont ils proviennent. Cette disposition première correspond, il me semble, à celle qui existe dès l’abord chez les larves des Archianné- lides ; il se produit sur la ligne médiane ventrale un épais- sissement unique de l'ectoblaste, bombé en son milieu et aminci sur les bords, dans l’intérieur duquel prennent nais- sance côte à côte les deux bandes de substance fibrillaire qui constituent en majeure partie les cordons nerveux de l’adulte.—Il est également permis de rattacher ce procédé à celui que Salensky (25) et Nussbaum (19) ont constaté chez les Hirudinées, et qui est surtout bien net chez les Pran- chiobdella. se forme, sur la ligne médio-ventrale, une sorte d’invagination de l’ectoblaste. de chaque côté de laquelle les éléments ectoblastiques prolifèrent pour produire les plaques médullaires; ces dernières sont donc au nombre de deux, mais elles sont très rapprochées l’une de l’autre, puis- qu'elles sont séparées par l’étroite cavité de l’invagination. L'ensemble apparaît comme chez les embryons d'Enchy- træoides, c'est-à-dire plus épais au centre et plus mince sur les côtés. | DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 167 Ensuite, chez les embryons d'Enchytræoides, comme chez ceux des autres Annélides, la dualité des plaques médul- laires se manifeste dans la suite de l’évolution, mais ces pla- ques restent toujours unies et ne se séparent jamais. Dès le début de son développement, le cordon ventral est plus épais en son milieu que sur les bords; mais, plus tard, ces derniers ne lardent pas à prendre la prépondérance, et à s’exhausser au-dessus du centre, car leur prolifération est plus active. Après un certain temps, le centre de la plaque médullaire est plus étroit que les côtés, et le cor- don nerveux paraît alors, si l’on se borne à l’étude de ce stade seul, constitué par la jonction, sur la ligne médiane, de deux bandelettes primitivement séparées. — IT est probable que les assertions émises par divers auteurs, et tendant à faire admettre qu'il se produit d’abord deux plaques médul- laires séparées, ont été données d’après l'étude de stades assez avancés et semblables à celui que je viens de décrire; il existe toujours, sans doute, dès l’abord, un seul centre de prolifération, dans lequel prennent naissance ensuite les deux cordons fibrillaires. | La figure 83 montre avec netteté que la plaque médul- laire provient entièrement de l’ectoblaste, et n’a aucun rap- port d’origine avec le mésoblaste sous-jacent. La paroi pro- fonde de cette plaque est très distincte, et se continue sur les côtés avec la paroi profonde de l’ectoblaste; d'autre part, la plaque se colore avec les réactifs de la même manière que l’ectoblaste, et sa teinte est bien différente de celle que prend le mésoblaste. Avec le carmin alcoolique, la plaque et l’ectoblaste sont rose clair, tandis que le mésoblaste de- vient rouge foncé; avec l’hématoxyline alcoolique, la plaque et l’ectoblaste sont violets, tandis que les éléments méso- blastiques deviennent d’un pourpre intense; en somme, la plaque médullaire et l’ectoblaste étaient toujours, avec les réactifs que j'ai employés, d’une teinte moins foncée que les cellules mésoblastiques. La coupe transversale dessinée dans la figure 83 montre 168 LOUIS ROULE. encore que, à ce stade, la cavité intestinale s’est agrandie (Cin) et a pris un aspect régulier. Les cellules endoblasti- ques qui l'entourent sont grandes, allongées, et limitées du côté de la périphérie par une ligne nette qui les sépare des éléments mésoblastiques. Cette ligne de séparation corres- pond ainsi à la paroi externe de l’endoblaste ; elle est régu- lière, sans aucun angle rentrant ni saillant qui fassent pé- nétrer quelques cellules de l’endoblaste entre plusieurs éléments du mésoblaste, ou réciproquement. Dès ce stade, la distinction est complète entre ces deux feuillets, et il n'existe plus aucune trace de leur origine commune aux dépens du mésoendoblaste. La paroi interne des cellules endoblastiques, qui limite la cavité intestinale, porte toujours les filaments allongés dont il a été fait mention plus haut. À ce moment, pas plus que dans les stades précédents, il m'a été impossible de recon- naître si ce sont là des cils vibratiles longs et flexibles, ou des filaments de mucus coagulés par les réactifs. La balance me paraît cependant pencher en faveur de l’opinion qui voudrait que ce soient des cils vibratiles. Si l’on compare le mésoblaste d’un embryon parvenu à ce stade à celui d’un embryon appartenant au stade précédent, on constate d’abord que le nombre de ses éléments a aug- menté en même temps que leur taille a diminué. Il y a done eu des divisions cellulaires répétées, qui ont eu pour effet d'accroître le chiffre des éléments mésoblastiques, mais sans augmenter d’une manière correspondante la masse to- tale du mésoblaste.— Ces éléments ont perdu leurs contours anguleux et polyédriques, et sont arrondis ou ovalaires. Cet aspect est tout aussi net chez ceux qui sont libres et isolés dans les vides cœlomiques que chez ceux qui restent juxta- posés. Au présent stade, quelques éléments, placés sous l'ectoblaste, ont encore un contour polyédrique, mais ils ne tarderont pas à le perdre.—Il résulte de ce changement que, même dans les régions où un certain nombre de cel- lules mésoblastiques sont placées les unes à côtés des aulres, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 169 il existe entre ces dernières des vides, pelits et étroits il est vrai, mais qui n’en sont pas moins appréciables. Cette mo- dification contribue à faire perdre au mésoblaste son aspect épithélial pour rendre plus nette sa disposition mésenchy- maleuse, sa constilution aux dépens d'éléments presque indépendants les uns des autres, et simplement juxtaposés. sans contracter entre eux les relations étroites qui existent entre les éléments d’une couche épithéliale vraie. Les vides cœlomiques sont plus nombreux qu’au stade précédent, et l’on peut fort bien se rendre compte de leur disposition irrégulière. Il n'apparaît pas, dans l’épaisseur du feuillet moyen, une cavité unique à parois régulières, mais. bien un certain nombre d'espaces vides qui se creusent entre. les cellules; plusieurs de ces espaces sont petits et étroits, d'autres sont plus grands, mais tous affectent le même as- pect général. Ils sont laissés entre des cellules qui s’écar- tent, sans qu’il y ait dans ce procédé évolutif la régularité que l’on constate dans la formation d'un cœlome par le mode épithélial; leurs parois présentent des angles ren- trants et saillants, et les éléments qui les constituent pa- raissent tendre à se séparer de leurs voisins pour devenir Libres dans la cavité qu'ils contribuent à limiter. Certains même sont tout à fait isolés des autres. — Ainsi, il est per- mis d'affirmer que le cœlome des embryons d’Enchytræoides. qui sont des Annélides chétopodes, apparaît de la même manière que le schizocæle des larves de Mollusques ; et Je. choisis ces dernières comme terme de comparaison, afin de pouvoir mieux préciser plus tard les relations qui existeni entre les Annélides et les Mollusques, et aussi parce que les frères Hertwig font des Mollusques un type d'animaux mésenchymateux. Au stade de la figure 83, les vides cœlomiques sont encore indépendants les uns des autres et ne communiquent pas entre eux. Ils ne tarderont pas à se fusionner, et à former par leur ensemble une vaste cavité générale, d'abord indi-- vise, qui enlourera le tube digestif entier. 170 LOUIS ROULE. Malgré leur irrégularité d'aspect et de situation, on cons- tate pourtant que ces vides, partout où ils sont placés, divi- sent le mésoblaste en deux couches, une somatopleure épaisse, et une splanchnopleure représentée d'ordinaire par une seule rangée de cellules. Au stade décrit en ce moment, cette dernière, qui parfois manquait en partie chez les em- bryons plus jeunes, est entière: ses cellules sont étroite- ment appliquées contre l’endoblaste par leur région pro- fonde. De place en place, des bandes plus ou moins épaisses, formées par des éléments mésoblastiques, relient la splanch- nopleure à la somatopleure et constituent ainsi les parois latérales des vides cœlomiques. Les figures 84, 85, 86 el 87 montrent les détails de la structure histologique des embryons parvenus au stade de la figure 83. Les éléments mésoblastiques qui deviennent libres sont représentés dans la figure 84; ils sont arrondis ou ovalaires ; leur contour est bien régulier, et on ne les voit nullement porter des expansions semblables à des pseu- dopodes. Leur taille est fort minime : leur diamètre mesure en moyenne 15 #. Leur membrane cellulaire est très mince, à peine appréciable; le protoplasma est en minime quan- lité, et relativement difficile à colorer ; le noyau, assez vo- lumineux, est représenté par un réseau de filaments très serrés. — La majeure partie de la cellule est remplie par un petit nombre de volumineuses granulations vitellines, beau- coup plus grosses que celles renfermées dans les mêmes éléments lors des stades précédents; il faut donc que les petites granulations primitives, d’abord répandues dans la cellule en grande quantité, se soient fusionnées les unes avec les autres pour produire les gros granules que l’on trouve seuls à ce stade. Ces granules sont très réfringents, et se colorent fortement par les réactifs, plus que le protoplasma et moins que le noyau, ce qui permet de ne pas confondre ce dernier avec eux ; leur substance paraît être homogène. Dans la figure 87 sont dessinés quelques éléments de l’ec- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 171 toblaste et de la somatopleure. Ces derniers rappellent par leur structure ceux de la figure 84; cette ressemblance n’a rien d'étonnant du reste, puisque tous font partie du méso- blaste, et ce feuillet n’a encore subi aucune différenciation. — Les cellules de l’ectoblaste sont à peu près rectangulaires, autant du moins qu'il est permis d’en juger d’après l’écar- tement des noyaux, car il est impossible souvent de distin- guer leurs parois latérales. Celles-ci ont disparu, laissant ainsi le protoplasma se confondre avec celui des cellules voisines, et produire un syncylium dans lequel les noyaux seuls indiquent la place des éléments cellulaires. Ce proto- plasme renferme des. granulalions vitellines, qui conservent l'aspect qu'elles avaient dans les blastomères de l’ovule segmenté; elles sont petites, assez nombreuses, et se colo- rent avec une certaine difficulté. Si les parois latérales des éléments ectoblastiques ont dis- paru, il n’en est pas de même pour les deux autres. La paroi externe commence à s'épaissir quelque peu, et forme un pla- teau assez mince qui, en augmentant d'importance dans les stades ultérieurs, deviendra la cuticule. De même, la paroi profonde constilue une basale aisée à reconnaître, qui li- mite nettement l’ectoblaste du côté du feuillet moyen. On vient de voir que, à ce stade, l’ectoblaste présente une structure plasmodiale par la disparition des parois laté- rales des cellules; cette structure existe aussi dans l’épaissis- sement médian ventral ou plaque médullaire, qui représente l’ébauche du cordon nerveux ventral. Cet épaississement est constitué par un très grand nombre de noyaux plongés au sein d’une masse protoplasmique dans laquelle il est impos- sible de reconnaîlre des parois de cellules. Ces noyaux sont en voie de segmentation. À vrai dire, la croissance de la plaque médullaire n’est pas une division cellulaire véritable, mais une multiplication de noyaux dans un syncytium pro- toplasmique. La plaque médullaire est limitée du côté de l'extérieur par un plateau semblable à celui de l’ectoblaste, et se con- 172 LOUIS ROULE. üinuant du reste avec lui. La même observation est appli- cable à la basale, qui sépare la plaque du mésoblaste. A un état encore aussi peu avancé du développement du cordon nerveux ventral, on retrouve encore une disposition de noyaux qui montre bien la genèse de ce cordon aux dépens de l’ectoblaste. Les noyaux externes, placés sous le plateau, sont situés à égale distance les uns Bd autres, el prolongent ainsi avec netteté la série des noyaux de l’ectoblaste vrai; les noyaux internes sont répartis par contre sans aucune ré- gularité. Le protoplasme plasmodial de la plaque PR ne renferme point de granulations vitellines, et diffère en cela du protoplasma de l’ectoblaste. Il contient seulement des granules très fins, el aussi quelques rares fibrilles, dont le nombre ne va pas tarder à augmenter. Quant aux noyaux. ils sont un peu plus grands que ceux de lectoblaste vrai, et leur réseau nucléaire est mieux visible; leur taille plus con- sidérable provientsans doute de ce que les filaments nucléaires. sont moins resserrés, et les parcelles de suc nucléaire en. quantité plus grande que dans les noyaux ectoblastiques. Les filaments chromaliques absorbent avec force les réactifs. colorants; aussi les noyaux onl- ils une teinte plus foncée que le pr oloplasme qui les contient. Ces noyaux sont en voie de prolifération active. En les examinant sur de bonnes coupes avec d'excellents objecüfs à immersion homogène, on remarque chez eux les divers processus de la karyokinèse. Certains ont leurs filaments rassemblés en peloton; d’autres ramassent leur substance chromatique en deux bandes équatoriales qui s’écartent l’une de l’autre, etc. On ne reconnaît cependant que l’ensemble des mouvements kinéliques, car la petitesse de ces noyaux (5 à 6 w en moyenne) empêche de bien voir les détails mêmes des procédés de la segmentation. Les principales modifications qui surviennent ensuite. chez l'embryon portent sur le cœlomie et le système nerveux. ind chics ati RS DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 173 Les figures 88 et 89 montrent une coupe longitudinale ver- ticale et une coupe transversale d’un embryon un peu plus âgé que celui de la figure 83; la coupe longitudinale n’est pas tout à fait médiane dans sa région supérieure, mais bien un peu oblique, à en juger d'après la longueur et l’aspect de cette région. Sur la figure 88, on voit, en raccourcissant par la pensée la région supérieure, que l'embryon est presque cylindrique. Son contour est régulier, sauf pourtant vers sa face anté- rieure, où quelques dépressions, encore peu accentuées, mais qui deviendront plus prononcées par la suite, représentent les premières indicalions des anneaux. La cavité intestinale est ample, unique, sans plus montrer aucun de ces petits espaces primitifs qui apparaissent séparément les uns des autres ; de même, le cœlome est grand et paraît ne constituer aussi qu'une seule cavité. L’ectoblaste diffère beaucoup d'aspect suivant qu’on l'exa- mine sur la face dorsale ou sur la face ventrale de l'embryon. Sur la face dorsale (à droite dans la figure 88), il est mince, aplati, et ne contient qu'une seule rangée de noyaux. Sur la face ventrale par contre (à gauche dans la même figure), il est relativement plus épais, et montre plusieurs rangées de noyaux. Cette différence d'aspect provient de ce que la coupe est verticale et médiane; l’ectoblaste épaissi de la face ventrale correspond à la plaque médullaire coupée longitudi- nalement.— La plaque médullaire, dont on reconnaît ainsi, et d’une manière indiscutable, l’origine ectoblastique, s’amincit peu à peu en avant et en arrière. Elle ne cesse en arrière que tout à fait vers l'extrémité postérieure de l'embryon; à ce niveau seul, les rangées multiples desnoyaux disparaissent pour faire place à la couche unique de l’ectoblaste normal. Au contraire, dans la région antérieure, la plaque cesse avant d'arriver à l'extrémité du corps; il existe, entre la terminai- son de la plaque et l'extrémité antérieure de l'embryon —où se trouve la plaque céphalique, — un espace assez étroit dans lequel l’ectoblaste conserve ses caractères habituels et ne 174 LOUIS ROULE. subit aucune prolifération de noyaux. Cet espace est le s40- modæum ; il est desliné à s’invaginer pour aller au-devant de la cavité intestinale, et former ainsi la bouche avec le pharynx. L'ectoblaste s’épaissit de nouveau dans la région anté- rieure (supérieure dans la figure 88) et terminale de l’em- bryon; cet épaississement n’est autre que la plaque céphali- que, qui existait déjà dans les stades antérieurs à celui-ci. Mais, dans ces stades, la plaque céphalique était représentée par des cellules un peu plus longues que les éléments ordi- naires de l’ectoblaste, et renfermant parfois deux noyaux, ce qui dénotait une tendance à la prolifération. Chez l'embryon de la figure 88, c’est-à-dire au moment où la plaque médul- laire, déjà bien ébauchée, prend sa forme et sa longueur définitive — car elle ne dépasse jamais en avant et en arrière les limites qu’elle possède déjà, —la prolifération de la plaque céphalique commence à devenir plus active. Les parois laté- rales de ses cellules ont disparu comme dans le reste de l’ectoblaste; les noyaux, devenus plus nombreux, sont dispo- sés sur deux ou troisrangées; enfin, son épaisseur est environ le double de celle de l’ectoblaste ordinaire, tout en étant moindre que celle de la plaque médullaire. J'ai donc revu, chez l'embryon d'Enchytræoides, ce fait déjà signalé chez d’autres Annélides, que les centres nerveux de l'adulte dérivent de deux ébauches primitivement sépa- rées, et ne se rejoignant que plus tard par des commissures; ces deux ébauches sont la plaque céphalique et la plaque médullaire. J'ajouterai que, contrairement à l'opinion de Kleinenberg (12), la plaque céphalique donne bien ici nais- sance aux centres cérébraux. Cette plaque des embryons d'Enchytræoides me semble correspondre, étant données sa situation, son apparition hâlive dès la fin de la segmentation et sa lenteur à proliférer lors des premiers stades du déve- loppement, à la plaque céphalique des larves Trochosphères. Il est du reste important de bien se rendre compte de la: succession des faits. Dès qu'apparaît le stade planula, la pla- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 175 que céphalique est ébauchée, et la plaque médullaire ne s’est pas encore manifestée; à mesure que l'embryon poursuit son évolution, la plaque céphalique reste telle quelle ou à peu près, etla plaque médullaire commence à semontrer.Cettedernière subit un développement rapide, et, lorsqu'elle est déjà bien constituée, la plaque céphalique entre en activité pour pro- duire le cerveau. —A mon sens, unetelle succession de phéno- mènes est du plus grand intérêt, car elle permet de se repré- sentier la manière dont les centres nerveux ont apparu chez les Annélides, et je reviendrai plus loin sur cette question. Qu'il me suffise d'ajouter que je n'ai point vu d'autre ébauche ner- veuse que celles déjà mentionnées, et que, malgré mes recherches, je n'ai pas trouvé d’anneau nerveux comparable à celui des larves de Po/ygordius et de Lopadorhynchus. La cavité intestinale ne montre encore ni bouche ni anus. Les cellules de l’endoblaste qui la limitent conservent les caractères exposés plus haut; elles sont cylindriques, et portent toujours sur leur paroi interne ces longs filaments flexueux dont je n’ai pu élucider la vraie nature. Dans le mésoblaste, la cavité cœlomique est devenue plus grande que lors des stades précédents. Tous les vides qui avaient pris naissance séparément se sont fusionnés en une seule cavité, encore assez étroite, qui entoure l'archentéron entier, sauf vers ses extrémités antérieure et postérieure; dans ces deux régions, en effet, les cellules mésoblastiques sont encore serrées les unes contre les autres. Partout ailleurs, le cœlome sépare la splanchnopleure de la somatopleure; les éléments de ces deux feuillets mésoblastiques se ressemblent par leurs caractères,et ne diffèrent que par leur quantité. La splanchnopleure ne possède qu'une seule rangée de cel- lules, parfois deux en certains points, directement appliquées contre l’endoblaste ; la somatopleure, par contre, est formée par trois ou quatre rangées cellulaires superposées. En géné- ral, le nombre de ces dernières est plus grand sur la face dorsale que sur la face ventrale, de sorte que la somatopleure est plus épaisse sur la première de ces faces que sur la se- 176 | LOUIS ROULE. conde, où est siluée la plaque médullaire.— Dans la région antérieure de l'embryon, entre la plaque céphalique, qui fait partie de l’ectoblaste, et l'extrémité de l'intestin, se {trouve une masse assez considérable d'éléments mésoblastiques; une autre masse, souvent plus considérable, est située dans la région postérieure. | La cavité cæœlomique est donc simple, puisque les vides primitifs se sont rassemblés. Il est bon d'indiquer de nouveau que ces vides apparaissent sans aucune régularité, etonne doil donc pas les assimiler à des ébauches de cavités segmentai- res. La cause de leur apparition est toute mécanique : le mésoblaste se divise en deux couches, la somatopleure et la splanchnopleure, et celle division commence en plusieurs endroits à la fois, sans aucun ordre préélabli. Plus tard, ces vides, d’abordséparés, se fusionnent pour constituerlecælome unique. Si ces vides étaient homologues de cavités segmen- taires, et plusieurs développements composés d'Annélides montrent ainsi une apparilion hâtive de métamères dans leur mésoblaste, ils se creuseraient à égale distance les uns des autres ou à peu près, el ne se confondraient pas ensuite, ainsi qu'on le voit dans les développements auxquels je fais allusion. Chez les embryons d’Enchytræoides, le cæœlome com- mence par avoir une cavité simple, sous forme d’ébauches distinctes destinées à se confondre, et se partage plus tard en segments successifs. Cette allération des procédés est encore, sans doute, une conséquence de la condensation des phénomènes embryogéniques. La cavité cœlomique renferme des éléments libres tenus en suspension dans un plasma liquide. Ces éléments, on le sait, sont des cellules mésoblastiques détachées du feuillet auquel elles appartenaient, et semblables en tout aux autres éléments du mésoblaste. Parfois deux ou trois d’entre eux, placés à la file les uns des autres sur une ligne transversale, établissent à travers la cavité du cœlome une sorte de pont qui joint la somatopleure à la splanchnopleure. Ces tractus unissants ne jouent encore aucun rôle; ils sont destinés sou- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 177 vent à se dissocier sans rien produire; mais des tractus sem- blables, qui prendront naissance lors des stades ultérieurs, évolueront pour devenir les dissépiments qui divisent le cœlome en plusieurs cavités, et qui séparent ces cavités l’une de l’autre. Ainsi, les éléments du mésoblaste se dissocient parfois, au moment de la formation du cœlome, pour constituer une partie de la splanchnopleure; et cette dissociation con- linue à s'effectuer par la suite, comme dans un mésoblaste mésenchymateux. Si le cœlome ne revêtait pas ensuite sa disposition segmentée, et si le tissu conjonctif était plus abon- dant, on aurait là, en tant que procédé, une véritable embryogénie de Mollusque. — La coupe transversale de la figure 89 montre, dans une autre direction, les mêmes détails que la figure 88. Sur les faces dorsale et latérale du corps, l’ectoblaste est aplati; il porte la plaque médullaire sur la ligne médiane de la face ventrale. Cette plaque est beaucoup plus épaisse que dans les coupes d’embryons plus jeunes (comme celle de la figure 83, par exemple); elle offre sept à huit rangées superposées de noyaux, plongés dans une masse commune de protoplasme dépourvue de toute paroi cellulaire. Les caractères histo- logiques sont les mêmes que ceux mentionnés plus haut; _ilimporte cependant de remarquer que la plaque médullaire a cessé d'être plus épaisse au centre et plus mince sur les côtés. Ces dernières arrivent à la même hauteur que le centre, et, de plus, celui-ci paraît être quelque peu déprimé. Ce caractère ira en s’accentuant dans les stades ultérieurs, à tel point que la plaque médullaire semblera formée de deux parties fusionnées sur la ligne médiane; c’est certaine- ment là un souvenir de la dualité des ébauches nerveuses, qui se manifeste durant le cours du développement. L’endoblaste n'offre rien de particulier qui ne soit visible aussi sur les coupes longitudinales. — Quant au mésoblaste, on se rend compte, en comparant la figure 89 à la figure 83, ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, A2. — ART. N° 3. 178 LOUIS ROULE. de l'extension prise par les vides cœlomiques: ces vides sont presque entièrement confondus en une seule cavilé. Les cellules mésoblastiques, à la suite de leurs bipartitions répé- tées, sont devenues plus petites et plus nombreuses; les trac- lus unissant la somatopleure à la splanchnopleure ont une importance beaucoup moindre, étant donnée l'extension prise par les vides cœlomiques. Enfin, on reconnaît, plus net- tement que sur les coupes longitudinales, le fait de l’épais- seur différente de la somalopleure, suivant qu’on l’examine sur la face dorsale ou sur la face ventrale de l'embryon. — Les embryons un peu plus avancés que ceux dont la structure vient d’être exposée sont importants à connaître en ce sens qu'ils montrent le commencement d’une prolifé- ration active de la plaque céphalique. —La figure 90 repré- sente une coupe longitudinale verticale et médiane d’un de ces embryons. L’ectoblaste offre à peu de choses près la même structure que chez les embryons précédents. Il en est de même pour la plaque médullaire, qui, si elle atteint en arrière l’extré- milé postérieure du corps, ne parvient pas en avant jusqu’à l'extrémité antérieure. — Ilest pourtant curieux de voir, dans la région antérieure de l'embryon et vers sa face dorsale (à gauche et en haut dans la figure 90), l’ectoblaste montrer deux étranglements à peine prononcés. Comme on le verra plus loin, ces étranglements correspondent (en ce sens qu'ils sont placés au même niveau) à deux petits amas {ransver- saux de cellules mésoblastiques qui relient la somatopleure à la splanchnopleure; 1ls sont les indications des premiers segments de l'embryon. Ces petits amas transversaux de cellules mésoblasliques, qu'il ne faut pas confondre avec les tractus irréguliers et obliques décrits plus haut et destinés à disparaîire, deviendront les dissépiments qui séparent l’une de l’autre les deux cavités segmentaires antérieures. L’ectoblaste est épaissi dans la région antérieure et termi: nale du corps; cel épaississement d’origine ectoblastique DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 179 correspond à la plaque céphalique, qui commence à prendre dès ce stade une grande extension. En comparant la figure 90 à la figure 88, on voit la plaque céphalique de cette dernière, bien que plus développée déjà qu'aux stades précédents et renfermant deux ou trois rangées de noyaux, être encore assez mince. Au contraire, dans la figure 90, cette plaque renferme huit à dix rangées de noyaux et proémine même quelque peu dans la cavité cœlomique. L'épaississement ec- loblastique qui constitue la plaque céphalique est limité à l'extrémité antérieure de l'embryon, et ne s'étend pas sur les côtés; 1l n’a, comme je l’ai déjà montré, aucune relation directe avec la plaque médullaire, si ce n’est une origine commune aux dépens du feuillet blastodermique externe. La cavité intestinale est plus simple que chez les embryons de la figure 88. Le tube digestif s'étend en arrière jusqu’à l'extrémité du corps, el, en avant, se recourbe quelque peu vers la face ventrale, dans la région qui sépare la plaque céphalique de la plaque médullaire, pour se rapprocher de l'ecloblasie. C'est dans cette région qu’une invaginalion eclo- blastique (stomodæœum) donnera naissance à la bouche et au pharynx. Quant aux cellules endoblastiques, elles n’offrent rien de parliculier. Dans leurs traits généraux, le mésoblaste et le cœlome ressemblent à ce qu'ils étaient lors des stades précédents; la cavité cælomique a seulement pris une plus grande exten- sion dans le sens transversal. Les éléments libres sont aussi plus nombreux. À ce stade, la cavilé du cœlome est tantôt entière, tantôt divisée déjà, dans la région antérieure du corps, par des pelites cloisons qui sont des ébauches de dissépiments. Dans tous les cas pourtant, celte cavilé dé- passe en avani le tube digestif, et parvient jusqu'au-dessous de la plaque céphalique; de cette manière, la cavité du lobe céphalique de l'adulte dérive du cœlome au même titre que les cavités des autres segments. La première n’a donc pas une origine différente de celle offerte par les secondes. Chez quelques embryons parvenus à cet état (et celui re- 180 LOUIS ROULE. présenté par la figure 90 en est un), deux ou trois des élé- ments qui circulent dans le cœlome, ou bien deux ou trois cellules appartenant soit à la somatopleure, soit à la splan- chnopleure, traversent la cavité cœlomique comme des ponts et unissent le feuillet pariétal du mésoblaste au feuillel viscéral. Ces petits amas cellulaires proviennent le plus souvent de la somatopleure, car la splanchnopleure est formée d'ordinaire par une seule couche de cellules appliquées contre l’endo- blaste. — Ces cloisons primitives apparaissent d'abord sur la face dorsale de l'embryon, et ne se montrent que plus tard dans la région ventrale : ce sont les ébauches des dissépi- ments. Grâce à leur présence, le cæœlome sera divisé en cavités que ces dissépiments sépareront les unes des autres. Comme on l’a déjà vu, une consiriction de l’ectoblaste correspond toujours à l’espace occupé par ces ébauches de cloisons; et, de même que les dissépiments se montrent d'abord sur la face dorsale de l'embryon, de même les constrictions de l’ectoblaste apparaissent en premier lieu dans la région dorsale. Cette genèse simultanée des dissépiments, ou tout au moins de leurs ébauches, et des constrictions externes qui leur correspondent, dénote bien une condensation des pro- cessus embryonnaires. C'est sans doute à une cause pareille qu'il faut également attribuer la simplicité primordiale du cælome, dont la cavité se cloisonne ensuite, au lieu de voir apparaître séparément les uns des autres tous les espaces segmentaires.—Il est bon de signaler cependant que, même chez les embryons d'Enchytræoïides, les premières cavités segmentaires se montrent rapidement; ce fait concorde avec l'apparition hâtive de ces mêmes cavités chez les autres Annélides. Il est important aussi d'indiquer que cette forma- ton de mélamères aux dépens d’un cœlome unique existe pour les douze ou treize segments antérieurs seuls, qui appa- raissent en premier lieu ; tous les autres segments se creusent séparément, au fur et à mesure de l'extension prise par le corps de l’embryon, dans l’amas de cellules méso- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES, 181 blastiques qui occupe la région postérieure de l'individu. Les premiers dissépiments qui prennent naissance sont situés vers l'extrémité antérieure de l'embryon; dans la fi- gure 90, l’unséparelefuturlobe céphalique dusegment buccal, et le second sépare ce dernier du troisième segment; le lobe céphalique, ayant même origine etmêmestructure fondamen- lale que les autres anneaux, doit porter le numéro wn dans la série des métamères.— Cette apparition précoce des dissé- piments antérieurs est en contradiction avec ce qui se passe chezles Trochosphères d'Annelés polymériques, dont les pre- miers segments se montrent dans la région postérieure de la larve. Cependant, chez certains Annelés à embryogénie con- densée, on voit un certain nombre d’anneaux se creuser en même temps dans le mésoblaste, et ce fait dénote que l’ordre d'apparition n’a pas une bien grande importance, puisqu'il est ainsi susceptible de varier. Le type primitif répond évi- demment à l’évolution des larves Trochosphères, el je ne m'explique encore mes observations sur les embryons d'En- chytræoïdes que par les altérations de processus qu'entraine avec lui un développementaccéléré, dépourvu de vie larvaire. — La figure 91 montre, à un fort grossissement, les détails histologiques de la plaque céphalique au début de son appa- rilion. La plaque est recouverte en dehors par un mince plateau qui se continue sur les côtés avec celui de l’ecto- blaste ordinaire, auquel il ressemble du reste sous tous les rapports. Au-dessous du plateau vient une première rangée régulière de noyaux, qui fait suite à la rangée unique des noyaux du feuillet externe; il est donc permis de considérer cette première parlie comme répondant à l'ectoblaste ty- pique. Le reste de la plaque céphalique est occupé par des noyaux fort nombreux, plongés au sein d’une masse prolo- plasmique où n'existe aucune trace de parois cellulaires; les faits sont donc les mêmes que pour la plaque médullaire. — Les noyaux présentent les diverses figures karyokiné- üques; ils sont plus petits et plus rapprochés les uns des aulres que ceux de la plaque médullaire. 182 LOUIS ROULE. La structure histologique des éléments de l’endoblaste et de la splanchnopleure est représentée par les figures 92 et 93. Les cellules de l’endoblaste rappellent celles du mésoblaste par la grosseur de leurs granulations vitellines; il n'existe entre elles, à ce point de vue, aucune différence, et les élé- ments de la splanchnopleure sont semblables à ceux de la. somatopleure dessinés dans la figure 87. Parfois cependant (figure 93), les granulations vitellines des cellules endoblas- 18 E cloblaste. É, omalopleure Fig. 18. — Schéma d’un embryon au stale II. tiques sont petites et nombreuses, et ressemblent à celles de l’ectoblaste; mais, même dans ce cas, elles absorbent les réactifs colorants avec plus d'intensité que leurs similaires du feuillet externe. Stade III. — Apparition des cinq premuers segments anté- rieurs (Planche X). — Un embryon d’Enchytreoides parvenu à un stade un peu plus avancé que celui précédemment dé- crit est surtout caractérisé par la présence, dans la région antérieure de son corps, de quatre ou cinq étranglements, plus prononcés sur la face dorsale que sur la face ventrale, et qui divisent celte région antérieure en anneaux; les étran- glements extérieurs correspondent en effet à des dissépi- ments mésoblastiques internes qui relient la somatopleure DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 183 à la splanchnopleure. On a déjà vu deux, ou même une seule de ces constrictions, se manifester au moment où la plaque céphalique commence à s’épaissir, mais elles étaient encore peu accentuées ; elles deviennent plus profondes ensuite, de nouveaux étranglements prennent naissance en arrière d'elles, et cela en procédant de l'extrémité antérieure du corps vers l'extrémité postérieure. L’embryon revêt alors l'aspect indiqué par la figure 6 (pl. L). Le corps de l'embryon d'Enchytræoides est alors environ cinq à six fois plus long que large, et un peu plus épais dans sa moitié antérieure que dans sa moitié postérieure. La première de ces régions porte les cinq ou six étranglements annulaires qui lui donnent un aspect segmenté. L'embryon est encore granuleux, mais il est plus transparent qu'aux stades précédents, et on voit le tube digestif trancher en clair dans l’intérieur du corps. Ce tube est allongé, cylin- drique, et percé de deux ouvertures qui le font communi- quer avec l’extérieur; la bouche et l’anus se creusent en effet à ce stade, la première sur la face ventrale en avant de la plaque médullaire, le second dans l'extrémité posté- rieure du corps. — La bouche et l’anus prennent naissance par deux dépressions ectoblastiques qui vont à la rencontre de l’endoblaste ; les cellules qui occupent le fond de la dépres- sion, et celles qui font partie de l’endoblaste dans la région de rencontre, se détruisent de manière à faire communiquer la cavilé intestinale avec les deux invaginations. La dépres- sion buccale ou stomodæum constitue le pharynx, et la dépression anale ou proctodæum forme un petit rectum court et assez étroit. L’embryon est encore immobile dans l’intérieur du cocon. Telles sont les particularités d'organisation offertes par l'étude directe des embryons entiers; les séries de coupes successives donnent des renseignements plus détaillés. — La figure 94 représente une coupe longitudinale, verticale et médiane, d’un embryon semblable à celui dessiné dans la 184 LOUIS ROULE. figure 6; cette coupe a été choisie de préférence à toute autre parce que la région antérieure étant un peu recour- bée, le rasoir a tranché obliquement cette région en passant à la fois par la bouche et par la commissure nerveuse qui entoure le pharynx; celte figure a donc l'avantage de syn- thétiser trois ou quatre coupes verticales et régulières. On retrouve ici les faits déjà signalés : la forme allongée du corps, moins accentuée cependant que sur un embryon vivant à cause de la contraction amenée par les réactifs, la présence de segments antérieurs, et l'extension prise dans le sens lransversal par la cavité cæœlomique. Dans la région postérieure, la coupe passe un peu en dehors de l'anus qui n’est pas représenté. | | — L'ectoblaste présente des caractères différents suivant la parle du corps où on l'examine. Vers l'extrémité postérieure, il ne diffère pas de ce qu'il élait aux stades précédents; 1l est très mince et renferme une seule rangée de noyaux pla- cés dans un protoplasme commun, car les parois latérales des cellules font toujours défaut, et ne se montrent à nou- veau que plus tard. Vers l’extrémité antérieure du corps et sur la face dorsale, il présente les consilrictions qui cor- respondent aux cloisons séparant les cavités segmentai- res; mais ces constrictions ne sont pas des dépressions cir- culaires de la couche ectoblastique. Au contraire, les dimen- sions différentes offertes par cette couche produisent seules l'aspect de bourrelets séparés par des sillons annulaires; l’ectoblaste est fort mince dans le fond des sillons; son épaisseur augmente à mesure que l’on remonte sur les bour- relels, et cette augmentation continue jusque sur le sommet des bourrelets où l'épaisseur est la plus grande.—Ilrésulte de cette disposition que la paroi extérieure de l’ectoblaste pré- sente une série d'enfoncements séparés par des élévations, tandis que la paroi interne est à peu près plane. Cetle struc- ture persiste jusque chez l'adulte, où les dépressions qui séparent les anneaux dépendent de l’ectoderme et n’intéres- sent en rien le mésoderme. DÉVELOPPÉMENT DES ANNÉLIDES. 185 Les premiers segments sont semblables les uns aux autres sous le rapport des dimensions, et sont parfaitement égaux. — La plaque médullaire présente la même extension qu'aux stades précédents ; elle parvient en arrière jusqu’à l’extré- mité postérieure du corps, et s'y amincit peu à peu en se confondant avec l’ectoblaste; elle s’amincit de même en avant, et se termine sur les bords de la bouche qui vient de se percer. Si la longueur de la plaque médullaire n’a pas varié, il n’en est pas de même pour son épaisseur, qui est plus considérable que chez les embryons moins âgés; on y volt huit à dix rangées de noyaux, et, de plus, il apparaît dans son intérieur une assez grande quantité de substance fibrillaire. — Aussi, sur les coupes, la plaque médullaire pré- sente deux zones : une zone externe eu rapport avec l’ecto- blaste, principalement formée de noyaux nombreux; et une zone interne, plus mince que la précédente, conslituée sur- tout par de la substance fibrillaire. Cette dernière se con- fond, sur la limite des deux zones, avec le protoplasma qui entoure les noyaux de la couche externe. Les deux zones sont superposées l’une à l’autre dans le sens de la longueur de la plaque médullaire; mais, tandis que la première occupe toute l’étendue de la plaque et se perd peu à peu dans l'ectoblaste, la substance fibrillaire s’amincit peu à peu en avant et en arrière, et n'arrive pas aux extrémilés de la plaque médullaire. La plaque céphalique a pris une extension considérable. Elle est toujours en rapport avec l’ectoblaste ; sa région pos- térieure forme un corps volumineux qui s’avance dans le cœlome, et s'étend au-dessus de l'extrémité antérieure du tube digestif. La partie de la plaque qui s'étend en arrière ne s'accole pas à l’ectoblaste ; l’ébauche des ganglions cé- rébraux ne lient au feuillet externe que dans les points où la prolifération a commencé en premier lieu, et les autres portions de l'ectoblaste voisines de ces points ne prennent jamais part à cette prolifération, bien que la plaque vienne, par le fait de son accroissement, se mettre en contact ou 186 LOUIS ROULE. presque en contact avec elles. Ainsi, dès que l’ébauche a pris naissance, elle grandit pour son propre compte, sans plus rien emprunter par la suite aux éléments ectoblastiques environnants. Un étroit espace, occupé par la cavité cœlomique renfer- mant des cellules libres, s'étend, sur la face dorsale de l’ani- mal, entre la partie postéro-supérieure de la plaque cépha- lique et la somatopleure de cette région, la partie posléro- inférieure se metlant en rapport avec l'extrémité antérieure du tube digestif. La portion de la plaque qui reste en rela- lion directe avec l’ectoblaste est surtout antérieure et ter- minale; elle s'étend fort peu sur les côtés et occupe l’espace placé en avant et en haut de la bouche (V. fig. 21, dans le texle). La région de l’ectoblaste où la plaque céphalique à pris naissance, et qui conserve ses rapports avec cette dernière, commence à revêtir l'aspect qu'elle gardera désormais. Le protoplasme forme encore un syncytium, et n'offre point de membranes cellulaires latérales ; mais les noyaux s’allongent et se superposent comme s'ils appartenaient à des cellules épithéliales cylindriques. Plus tard, les membranes cellu- laires ayant apparu, toute celte région, c’est-à-dire l’extré- mité antérieure du lobe céphalique, présente des cellules cylindriques étroites et fort longues. | La substance fibrillaire fait son apparition dans la plaque céphalique de la même manière que dans l’ébauche du cordon nerveux ventral; la position de cette substance diffère seule. Elle est située dans le centre de la plaque céphalique, et la zone à noyaux l'entoure complètement. La figure 94, qui représente une coupe oblique dans la région antérieure, passe par une commissure qui relie la plaque céphalique à l’extrémilé antérieure de la plaque médullaire. Cette commissure, ainsi qu’on le voit avec plus de netteté sur les coupes transversales, provient de la pla- que céphalique ; elle est double, c’est-à-dire formée par uné paire de cordons qui entourent la région antérieure du + DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 187 tube digestif et vont se souder à l’extrémité de la plaque médullaire. La substance fibrillaire ne pénètre pas dans les cordons commissuraux, ou y pénètre en faible quantité; les cordons émanent surlout de Ia zone à noyaux, et sont cons- titués comme elle par des noyaux très rapprochés, plongés dans un syncylium protoplasmique. Ainsi, les centres nerveux, dérivant de deux ébauches distinctes dès l'origine et séparées l’une de l’autre (plaque céphalique et plaque médullaire), sont reliés ensuite par une commissure qui entoure l’œsophage et devient l'anneau œsophagien de l'adulte. Celte commissure, qui dérive sur- tout de la plaque céphalique, c’est-à-dire de l’ébauche des centres nerveux sus-æsophagiens, et à la genèse de laquelle le cordon médullaire ne prend qu'une part restreinte, ap- paraît assez hâtivement, puisque cinq ou six anneaux à peine sont délimilés lorsqu'elle est déjà complète; mais elle ne prend naissance que lorsque la plaque céphalique et le cor- don médullaire ont déjà acquis une extension considérable. En tenant compte de la condensation des phénomènes du développement, il est aisé de conclure que, au point de vue phylogénétique, les deux centres nerveux sont restés isolés l’un de l’autre pendant longtemps, alors que chacun d’eux possédait une structure déjà bien complexe, et n’ont été re- liés qu'assez lard par une commissure directe pour faciliter l’unité des fonctions du système nerveux. — La cavité intestinale est, en ce moment, pourvue d'une bouche et d’un anus. La bouche, on le sait, esl produite par une invagination de l’ectoblaste qui apparaît en avant de l’extrémité antérieure du cordon médullaire, sur la face ventrale du corps. Lorsqu'elle vient de se former, son ori- fice est petit, presque arrondi, et son pourtour ne présente aucun caractère particulier. Les cellules de l’invagination ectoblastique sont un peu moins grandes que celles'de l’en- doblaste. On a vu plus haut la situation de l’anus, posté- rieur et terminal. La cavité de l'intestin, fort large, présente partout les 188 LOUIS ROULE. mêmes dimensions, sans dilatations ni étranglements, sauf au voisinage de la bouche et de l’anus. Les dépressions ecto- blastiques qui produisent ces deux orifices ont en effet un calibre un peu inférieur à celui de la cavité intestinale. — Les éléments de l’endoblaste ont presque revêlu leur aspecl définitif. Ils sont rectangulaires, environ deux fois plus hauts que larges, et certains d’entre eux portent des cils vibratiles, sans que j'aie bien pu reconnaître les rapporls de ces cils avec les filaments que ces mêmes cellules portaient lors des précédents stades. Les cils vibratiles commencent à appa- raître en ce moment; ils augmentent en nombre à mesure que l'embryon devient plus âgé, et recouvrent l’endoblaste d’un tapis serré. | — La cavité cælomique est ample et spacieuse ; elle s'étend en avant jusque entre la plaque céphalique et la paroi dor- sale du corps, et en arrière jusque près de l'extrémité posté- rieure. Elle renferme de nombreuses cellules libres. Son aspect diffère suivant qu’on l’examine dans la région dorsale ou dans la région ventrale du corps. Dans la première de ces régions (à gauche sur la figure 94), elle est découpée en six ou sept segments par de petits amas cellulaires qui la traversent en joignant la somatopleure à la splanchnopleure. — Le nombre de ces ébauches de cloisons a donc augmenté depuis le dernier stade; il n’en existait alors que deux, et on en trouve maintenant quatre ou cinq supplémentaires, si- tuées en arrière des deux premières. Ainsi, la genèse des dissépiments, et par suite la segmentation de la cavilé cœlo- mique, procède d'avant en arrière.— Dans la région ventrale (à droite sur la figure 94), la cavité cœlomique est libre et ne présenteaucune trace de cloisons; leséléments qu'elle contient sont isolés et circulent en liberté dans toute son étendue. Si donc la genèse des dissépiments procède d’avant en arrière dans le sens de la longueur de l'embryon, elle procède de haut en bas dans le sens de la largeur, puisque les ébauches en sont déjà bien nettes sur la face dorsale du corps, alors qu’elles ne sont pas encore représentées sur la face ventrale. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 189 La splanchnopleure ne consiste plus qu’en une seule cou- che de cellules entourant l’endoblaste. Alors qu'aux stades précédents on lui voyait par places une double rangée, les cellules supplémentaires ont dès maintenant disparu, soit qu’elles aient pris place parmi les autres formant une cou- che unique, soient qu'elles aient élé détachées pour devenir libres dans la cavité cœlomique. — À mesure que les éléments de la splanchnopleure se divisent et prolifèrent pour suivre l'accroissement du tube intestinal qu'ils environnent, leur aspect se régularise. [ls sont tous à peu près semblables comme taille, cubiques ou quelque peu rectangulaires, el constituent un épithélium pavimenteux simple bien régulier. Comme leur ensemble est intimement lié à l’endoblaste, il semble que la cavité intestinale soit limitée par un épithélium à deux rangs de cellules. Ceci est exact en apparence, mais la signification morphologique de chacune de ces rangées est bien différente; l’une constitue l’endoblaste à elle seule, et l’autre, la plus externe, faisait encore partie du méso- blaste lorsque l’endoblaste commençait à se différencier dans le sein de la masse mésoendoblastique. Elle s’est ensuite sé- parée du reste du mésoblaste lorsque les vides cœlomiques ont apparu, et elle représente la splanchnopleure. Les cellules de la splanchnopleure renferment un prolo- plasme qui se colore à peu près de la même manière et avec la même intensité que celui des éléments endoblasliques. Si la splanchnopleure n’est formée que par une seule cou- che de cellules, il n’en est pas de même pour la sonatopleure. Celle-ci consiste en quatre ou cinq rangées de cellules pla- cées au-dessous de l’ectoblaste, et n’offrant encore aucune différenciation spéciale. Le nombre des rangées, sur la face dorsale du corps, est bien tel que je viens de l’annoncer, mais non sur la face ventrale; cette dernière offre seulement deux ou trois couches cellulaires, et encore ces couches dis- paraissent-elles souvent auprès du cordon médullaire, qui est pour ainsi dire à nu dans la cavité cœlomique.— Ce fait est en rapport avec la structure de l’adulte; les fibres muscu- 190 LOUIS ROULE. laires de la paroi du corps, qui dérivent de la somatopleure, recouvrent à peine la base du cordon nerveux ventral, de telle sorte que celui-ci se trouve libre dans la cavité géné- rale du corps représentée par l’ensemble des cavités zooni- taires.— Les coupes d’embryons, pratiquées à ce stade et aux stades suivants, montrent dans la somatopleure moins d’élé- ments qu'il n’en existe en réalité ; cela tient à ce que cesélé- ments n'ont entre eux aucune cohésion (cette cohésion apparaît seulement lorsqu'ils sont transformés en fibres musculaires), et se délachent avec facilité par les divers traitements que la technique histologique force à pratiquer. On se rend compte, en examinant par transparence des embryons vivants, que le nombre des rangées cellullaires est bien tel que je l’ai indiqué. Les ébauches des dissépiments, qui lraversent la région dorsale de la cavité cœlomique, en joignant la somatopleure à la splanchnopleure, sont encore constituées par trois ou quatre cellules unies entre elles, et ne présentent aucune trace de tissu conjonclif ni de fibres musculaires. Quant à leur origine, elles dérivent en partie de cellules libres qui se soudent à quelques-unes de leurs voisines, et de la somato- pleure; dans certains cas, les éléments supplémentaires de la splanchnopleure y prennent également part. — En allant au fond des choses, ces diverses provenances sont identiques, et ilest inmulile de discuter à ce sujet, pour savoir si le plus grand nombre des cellules cloisonnaires provient ou non de la somatopleure. Les éléments libres sont des cellules de la somalopleure ou de la splanchnopleure détachées de leur feuillet; tantôt elles restent libres, tantôt elles viennent de nouveau se réunir à la couche pariétale du mésoblaste. Au présent stade, {ous les éléments mésoblastiques, qu'ils soient isolés ou agrégés, ont la même structure et la même valeur ; ils diffèrent les uns des autres seulement par les rapports de proximité qu'ils affectent; et, en somme, les cellules des dissépiments sont des éléments de provenances diverses. mais de même origine fondamentale. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 191 Les cellules libres sont plongées dans un plasma liquide qui remplit la cavité cæœlomique enlière. Ce plasma est cer- tainement produit par les éléments du mésoblaste, car il n'existe aucune ouverture faisant communiquer le cœlome avec la cavité du cocon qui renferme les embryons. C'est là un produit d'exsudation homologue, de par son origine, à la substance fondamentale des tissus conjonctifs; ii provient, en effet, du protoplasme des cellules, et est rejeté à la péri- phérie de la membrane cellulaire, sans plus avoir, avec cette membrane, d’autres rapports que ües rapporls de juxtapo- sition. La seule différence qu'il serail permis de trouver entre ce plasma et la substance conjonctive fondamentale est une différence de cohésion moléculaire; dans un cas, la sub- stance est solide; dans l’autre, elle est liquide ou visqueuse. Le plasma est hyalin, ne renferme aucune granulation, si ce n’est des corpuscules vitellins provenant de cellules en voie de dégénérescence, et charrie les éléments libres. Ces derniers sont arrondis ou ovalaires, el, pas plus à ce stade qu'aux stades précédents, n'envoient d'expansions pseudo- podiques.— Leur nombre est considérable, et il est facile de s'en rendre compte en examinant, par lransparence, des embryons vivants : leur volume lotal est plus grand que celui du plasma qui les contient. Cette particularité est une ressemblance de plus entre eux et les cellules de la somato- pleure. Ces dernières sont arrondies, en effet, el ne se tou- chent que par certains points de leur périphérie; entre elles exisle une cerlaine quantité, minime il est vrai, mais pour- tant appréciable, de plasma liquide. De telle sorte que, par une série de gradations ménagées, on passe des cellules serrées, placées immédiatement sous l’ectoblaste, aux cel- lules libres de la cavité cæœlomique. — La coupe représentée par la figure 94 est quelque peu oblique dans la région antérieure du corps, et passe par la commissure œsophagienne; celle de la figure 95, appartenant à un embryon plus jeune, est rigoureusement verticale et médiane. 192 LOUIS ROULE. La bouche n’est pas encore percée, mais une légère inva- gination ectoblastique (stomodœum) se montre déjà, et l'extrémité antérieure du tube digestif n’est séparée du fond de cette invagination que par un étroit espace. — La plaque médullaire n'offre rien de particulier; quant à la plaque céphalique, elle est moins développée que dans la figure 94 et s'étend moins en arrière: il est donc facile de reconnaître ses rapports avec l’ectoblaste. La substance fibrillaire com- mence à apparaître dans le centre de la plaque. — Afin de bien montrer l’organisation des embryons à ce stade important, j'ai dessiné trois coupes transversales (figu- res 96, 97, 98) pratiquées, les deux premières dans la région occupée par la plaque céphalique, et la troisième vers le mi- lieu du corps. — La coupe transversale de la figure 96, tout à fait antérieure et terminale, passe dans cette parlie du lobe céphalique où la plaque cérébrale est encore soudée à l’ecto- blaste dont elle provient. Aussi la coupe est-elle compacte et ne présente-t-elle aucune cavité. À la périphérie sont placés les éléments de l’ectoblaste, qui formeront les cellules ecto- dermiques de l'adulte; le protoplasme constilue toujours un syncytium ; mais, abstraction faite des parois cellulaires laté- rales qui n’ont pas encore apparu, l’ensemble de cette cou- che rappelle un épithélium cylindrique à longues cellules étroites. — La partie centrale de la coupe est occupée par. l'extrémité antérieure de la plaque céphalique, représentée par des noyaux plongés dans une masse protoplasmique commune. Ces noyaux, très rapprochés les uns des autres, ressemblent à ceux qui, placés à la périphérie, feront partie des éléments du futur ectoderme. Il n'existe aucune ligne de démarcation entre la zone centrale et la couche externe à noyaux; ces deux parties ne forment qu'un seul tout. — La coupe représentée par la figure 97 passe quelque peu en arrière de la bouche, dans la région où la plaque cépha- lique émet un double cordon commissural qui va la relier à l'extrémité antérieure du cordon médullaire. L’ectoblaste DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 193 est toujours représenté par une mince couche de proto- plasma renfermant une seule rangée de noyaux. Sur la face ventrale, et en relation directe avec l’ectoblasle, on voit l'extrémité antérieure du cordon médullaire, assez peu épais en celte partie du corps. Sa paroi supérieure est déprimée en son milieu, surélevée sur les côtés, de manière à paraître bifurquée. — La zone à noyaux offre un pelit nombre de rangées nucléaires; la zone supérieure, cons- lituée par la substance fibrillaire, est presque entourée par une ou deux couches de noyaux. Ces derniers prennent la prépondérance dans la région antérieure du cordon, et existent à peu près seuls; 1l en est de même pour la région postérieure. Sur l'un des côlés, le cordon envoie un petit prolongement en forme de mamelon court, constitué seule- ment par des noyaux, et qui va à la rencontre du cordon commissural émis par la plaque céphalique. Cette dernière est surtout remarquable à cause de sa forme ; sa face interne est bifurquée, c’est-à-dire déprimée en son centre et surélevée sur les côtés, comme celle du cordon médullaire. La conclusion qu’il est logique d’en tirer est donc la même dans les deux cas; bien que la plaque céphalique dérive d’une ébauche unique, on remarque en elle deux centres principaux de développement, où la proli- fération se fait sentir avec Le plus d'intensité. — Cette dispo- sition répond, sans doute, à une dualité déterminée par la symétrie bilatérale du corps. L’ébauche est unique, comme l’est, chez l’adulte, le ganglion sus-œæsophagien; mais da multiplication cellulaire s'effectue en deux régions placées côte à côte, distinctes l’une de l’autre sur une assez grande partie de leur étendue, et soudées sur la ligne médiane. La paroi supérieure de la plaque céphalique est seule soudée à l’ectoblaste; les parois latérales sont libres de toute adhérence avec ce feuillet, et ne montrent même pas avec lui des rapports de juxtaposition, puisque le cœlome pénètre entre les côtés de la plaque céphalique et l’ecto- blaste. — L'ébauche du cerveau est donc, à ce stade, une masse ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, À3. — ART. N° 3. 194 LOUIS ROULE. bilobée attachée à l'ectoblaste par sa région antérieure, el libre par tout le reste de sa surface. Elle émet, par l’extré- mité postérieure de chacun de ses deux lobes, une commis- sure qui se dirige vers l'extrémité antérieure du cordon médullaire. La partie centrale de la plaque céphalique est occupée par de la substance fibrillaire; cette dernière forme deux ilois, chacun d'eux étant situé dans l’un des lobes, etréunis sur la ligne médiane par une bande étroite de la même substance. La substance fibrillaire est entourée de tous les côtés par cinq ou six rangées de noyaux. Quant au cordon commis- sural, il est constitué en majeure partie par la zone à noyaux. La commissure dérive surtout de la plaque céphalique; elle est double, car chaque lobe de la plaque émet, par son extré- milé postérieure, une bande de tissu nerveux qui va se réunir à la région antérieure du cordon médullaire; ce double cordon entoure l’œsophage un peu en arrière du sto- modæum, el représente ainsi l’ébauche de l'anneau œsopha- gien de l'adulte. — Sur la figure 97, la commissure n’est des- sinée que d’un côté, parce que la coupe, légèrement oblique, : passe par un seul des deux cordons commissuraux; le cordon situé de l’autre côté existe sur les coupes antérieures à celle qui est figurée. La plaque médullaire envoie un petit mamelon à la ren- contre du tractus émis par la plaque céphalique. Il existe donc, en allant au fond des choses, deux paires d’ébauches distinctes pour la commissure œsophagienne; la première paire provient de la plaque céphalique, et l’autre de la plaque médullaire. Il faut cependant reconnaître que les ébauches de la première paire sont de beaucoup les plus longues et les plus importantes; la majeure parlie de l'anneau œsophagien est produite par elles, alors que la plaque médullaire ne prend à celte genèse qu’une action fort restreinte. | — La coupe transversale dessinée dans la figure 98 a été pratiquée vers le milieu du corps; aussi la plaque cépha- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 195 lique n'est-elle pas représentée, tandis que la plaque médul- laire y atteint son maximum d'extension. Cette dernière, très épaisse, proémine beaucoup dans la cavité cœlomique ; un faible espace seul la sépare de la splanchnopleure qui revêt l'intestin. — En comparant cette coupe à la similaire du stade précédent (fig. 89, pl. IX), on jugera du développement pris par l’ébauche du cordon nerveux ventral. Cette ébauche est devenue deux ou trois fois plus épaisse; le nombre des rangées de noyaux à considérablement augmenté, et enfin la substance fibrillaire a fait son appari- tion. Mais le cordon est toujours en rapport avec l’ectoblaste par un large espace, et cette base d'implantation ne s’est pas encore rétrécie, comme elle le fera dans les stades sui- vants. — La paroi interne de la plaque médullaire est dépri- mée en son milieu, de manière à paraître divisée en deux larges lobes renfermant chacun de la substance fibrillaire. L’ectoblaste est plus mince encore qu’au stade précédent, et la cavité cœlomique s’est beaucoup accrue. Les tractus cellulaires, qui reliaient la somatopleure à la splanchno- pleure, ont disparu, de telle sorte que la cavité cælomique est continue; elle entoure le tube digestif et n'est point sub- divisée, sur les coupes transversales, en espaces de forme irrégulière. L'aspect présenté par les deux feuillets méso- blastiques et par les cellules libres, tout aussi net sur les coupes longitudinales que sur les coupes transversales, ne mérite aucune autre description. Du reste, il suffit de com- parer la figure 98 à la figure 89, qui représente la coupe transversale d’un embryon un peu moins âgé, pour se rendre compte des modifications effectuées. Les centres nerveux ont pris plus d'importance; le cælome s’est accru; enfin, les éléments mésoblastiques sont plus nombreux et plus petits. — Si l'aspect général a changé, il en est aussi de même pour la structure histologique des cellules. On a déjà vu que, sur les coupes longitudinales, les éléments de l’ectoblaste n’ont pas tous la même hauteur; la figure 100 montre les détails de cette disposition. Partout où se produit un étranglement 196 LOUIS ROULE. extérieur qui correspond à une cloison, l’ectoblaste, fort mince, est représenté par une lame étroite de protoplasma dépourvue de noyau. Cette lame s’épaissit ensuite à partir de la région amincie, et forme un mamelon large et bombé, qui correspond à la paroi du segment; après quoi, le feuillet externe se déprime encore, jusqu à un nouvel étranglement placé de même au niveau d’une cloison, et où l'épaisseur du protoplasma est fort restreinte. — Il suit de là que la cause des dilatalions et des constrictions, qui dénotent au dehors la division segmentaire du cœlome, est la différence d’épais- seur que présente l’ectoblaste en ses diverses régions; la paroi interne de ce feuillet est plane et linéaire, alors que la paroi externe offre des alternances régulières de saillies et d’étranglements. | L’ectoblaste, dans ses régions amincies, ne renferme pas de noyaux; il en contient, par contre, disposés en une seule rangée, dans ses parlies bombées. Le protoplasme ne montre pas de parois cellulaires latérales; les granulations vitellines ont à peu près disparu dans son intérieur; celles qu'il contient sont petites, peu nombreuses, el difficiles à colorer. | — La figure 102 représente une portion de la plaque cépha- lique à un fort grossissement. Les noyaux, petits, offrent des figures karyokinétiques bien nettes, el sont disposés d’une façon irrégulière, tout en étant très rapprochés les uns des autres: seuls, ceux de la rangée périphérique, qui sont destinés à faire partie du futur ectoderme, offrent une certaine régularité de disposition, et sont plus allongés et plus serrés que les autres. Tous les noyaux, quels qu'ils soient, sont plongés dans une masse commune de proto- plasme.—Il ya encore, à ce stade, continuité parfaite entre la partie de l’ectoblaste qui deviendra l’ectoderme du lobe céphalique, et celle qui constituera le cerveau. Le proto- plasme commun renferme de petites granulalions très fines, et se laisse facilement colorer par les réactifs, mais DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 197 moins que les noyaux; c’est à ses dépens que prennent nais- sance ces îlots placés au centre de la masse céphalique, et que j'ai nommés îlots de substance fibrillaire. Je leur ai donné ce nom par anticipalion, car ils sont chargés de produire la substance fibrillaire placée dans le cerveau de l'adulte. Au stade que je décris ici, le protoplasme de ces îlots ne diffère en rien de celui qui est situé entre les noyaux; iloffre lesmêmes caractères. Mais, àmesure quel'évo- lution embryonnaire avance, des granulations nombreuses el 19 Cavité inléstinale Cælome ( Done Somafspleure À Splanchnopleure ie, 0 NES M ER if Ecléblaste L PT nee nn NN Anus Êr MS ST OCT TT TTL TI VTT TT TT ou! TRE COR 7 EE OCTO RTL D M WE Are CCC Ca) "a e . Ë . . ass ; À Æncoblas bé : 5 TU ME nedullaire à PE EE Cælome Commussure æsophagunne Fig. 19, — Schéma d’un embryon au stade IIL. assez grosses apparaissent dans sa masse, des fibrilles s’y montrent, et la structure propre à la substance fibrillaire des centres nerveux d'Annélides s’y manifeste avec toutes ses particularités. Il s’est ainsi produit, dans le syncytium pri- mordial, une différenciation ?n situ, qui aboutit à la forma- Uon de cordons fibrillaires accompagnés de granulations myéliques; tout comme, dans le synecytium de l’ectoblaste ordinaire, des cellules vont apparaître par la production de membranes latérales in situ. — Les faits sont semblables dans les deux cas; mais la complexité est plus grande pour ce qui touche les centres nerveux, car ce sont des éléments très différenciés, des groupes de fibrilles nerveuses, qui prennent 198 LOUIS ROULE. naissance. — Üne modification analogue existe aussi dans les zones à noyaux des ébauches des centres nerveux; les noyaux y sont d’abord répandus dans un plasmode continu, et, plus tard, des membranes cellulaires apparaissent autour de cts d’entre eux, de manière à délimiter des éléments nerveux complets. La structure présentée par la plaque céphalique corres- pond à celle du cordon médullaire, avec cette différence que la substance fibrillaire de ce dernier n’est pas située au centre de l’ébauche. Cette substance renferme, comme celle de la plaque céphalique du reste, quelques noyaux très espacés, identiques à ceux de la périphérie; ce fait contri- bue, pour sa part, à bien montrer l’origine de la substance fibrillaire. Cette substance dérive directement du proto- plasme placé entre les noyaux; ce protoplasme s’accumule en certaines régions où les noyaux pénètrent fort peu, el qui deviennent, chez l'adulte, les bandes ou les zones à fibrilles nerveuses. Les éléments de l’endoblaste et du mésoblaste contiennent encore des granulations vitellines, moins nombreuses qu'au stade précédent, mais toujours grosses et facilement colorables. Stade IV. — Apparition des douze-quinze premiers seq- ments, et formation des premières soies (planches I, Il, XI, XII). — A dater du moment où les cinq ou six premiers seg- ments antérieurs ont commencé à se montrer, l’évolution marche rapidement jusqu'à la mise en liberté de l'embryon. De nouveaux segments se forment en arrière de ceux qui existaient déjà, de sorte que le jeune Enchytræoïdes possède, lors de sa sortie, environ douze à quinze ou seize anneaux; le corps s’allonge et revêt presque l’aspect de celui de l'adulte ; les organes segmentaires apparaissent ; enfin, sauf les glandes sexuelles, tous les organes qui existent chez l’adulle, y compris les vaisseaux sanguins, sont au moins ébauchés, et quelques-uns possèdent même leur structure DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 199 définitive. De plus, les embryons, qui étaient immobiles ou presque immobiles jusque-là, se meuvent avec rapidité dans l'intérieur du cocon; ce dernier est dessiné dans la figure 4 (planche 1). Afin de bien comprendre les modifications qui se passent alors dans le corps de l'embryon, il faut l’étudier de deux ma- nières : par transparence, avec un compresseur, sur des in- dividus vivants; et par l’examen de séries de coupes prati- quées en divers sens. Le premier procédé a l'avantage de montrer l’ensemble de la structure, et de mieux faire con- naître les rapports des organes entre eux; on observe ainsi certains détails qu'il serait presque impossible de bien voir sur des coupes, ou que l’on ne verrait qu'avec une grande difficulté. Cette difficulté de tout observer sur les coupes provient de l'extrême petitesse des embryons, qui sont peu maniables, et des contractions amenées par l'emploi des réaclifs fixateurs : l'orientation des séries de coupes n'est ainsi rien moins qu'aisée à effectuer. — Aussi, en examinant d'abord la disposition générale et les rapports mutuels des organes sur des embryons vivants, et en étudiant ensuite leur structure histologique sur des coupes, il m'a été donné de me rendre compte des principales particularités du déve- loppement. Je suivrai, dans l'exposé, le plan que j'ai suivi dans mes recherches; je décrirai d’abord l’organisation des embryons vivants, puis leur structure histologique. — Au stade IIT, l'embryon possède une forme cylindrique; mais sa région antérieure est souvent un peu plus large que la postérieure ; de plus, la région antérieure montre seule des constrictions externes qui dénotent une division en anneaux. Il existe, au plus, cinq ou six anneaux dans la première moitié de l'embryon, la moitié postérieure étant lisse au dehors, et ne présentant dans son cœlome aucune ébauche de cloisons. — À mesure que l'embryon devient plus âgé et passe au stade IV, son corps s’allonge et présente le même diamètre sur loute son élendue, sauf vers les deux extré- 200 LOUIS ROULE. mités, qui sont un peu amincies. La division en segments parvient jusqu’à la région anale, où l’ectoblaste se resserre en regard de nouvelles cloisons; aux six premiers anneaux formés s’en ajoutent six ou sept autres placés plus en arrière, le dernier étant assezrapproché de l’anus.— Cependant, entre ce dernier anneau el l'extrémité postérieure du corps, existe un espace ne présentant aucune trace de segmentation; la cavité cæœlomique de cet espace est remplie d'éléments méso- blastiques en voie de prolifération, et chargés de subvenir à la genèse d’autres anneaux qui prendront ullérieurement naissance. | L'embryon entier présente ainsi, dans toute sa longueur, des séries de constriclions et de dilatalions; les dix ou douze premiers anneaux qui, à eux seuls, occupent tout le corps, sont égaux et semblables les uns aux autres. Les deux ou irois derniers anneaux, qui précèdent immédiatement la région non segmentée voisine de l'anus, sont plus pelits et moins bien marqués; ils effectuent une sorte de transition entre les anneaux constitués normalement et la région non segmentée. Le corps est plus transparent qu'au stade HIT; sans même se servir de compresseur, on dislingue au centre le lube digestif qui tranche en clair sur l’ensemble. Celle transpa- rence plus grande tient sans doute à ce fait que les granu- lations vitellines sont presque toutes absorbées ; l'embryon s’est nourri à leurs dépens, et, lorsqu'elles disparaissent, il est obligé de sortir du cocon pour chercher lui-même ses aliments. — L'embryon, parvenu au stade IV (fig. 7, pl. I), atteint un peu moins d'un millimètre de longueur; sa largeur est médiocre relativement à la longueur, puisqu'elle ne dépasse pas un dixième de millimètre. Les saillies limitées par les constriclions annulaires sont faiblement prononcées, tout en étantreconnaissables; elles portentenleur milieu, et dechaque côté de la ligne médiane, deux pelils groupes de soies, placés l’un sur la face dorsale et l’autre sur la face ventrale du DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 201 corps. Les soies sont au nombre de {rois ou quatre par groupes sur les anneaux antérieurs, qui ont été formés au stade I11: il n'en existe plus que deux sur les anneaux moyens, et plus qu'une seule fort pelite sur les anneaux postérieurs. Souvent même, le dernier ou les deux derniers segments en sont complètement dépourvus. Le tube digestif est aisément reconnaissable; il occupe l'axe central et longitudinal de l'embryon, et s'étend depuis la bouche jusqu'à l’anus. La bouche, on le sait, est percée sur la face ventrale du corps, en avant de l'extrémité anté- rieure du cordon médullaire; cette extrémité est, à son tour, placée un peu en arrière de la cloison qui, sur la face dorsale, sépare le lobe céphalique du segment buccal. Il en résulte que l’invaginalion ectoblastique qui donne naissance à la bouche est située au point de jonclion de ces deux anneaux, mais empiète plutôt sur le segment buccal que sur le segment céphalique. Aussi, chez l'adulte, la bouche sert-elle à pré- ciser la ligne de jonction de ces deux métamères. Le tube digestif est assez dilaté dans sa région antérieure ; il se rétrécit quelque peu en arrière, non loin de l’anus. Sa face dorsale montre, sur la ligne médiane, quelques tractus rougeâlres ne communiquant pas les uns avec les autres, bien que placés sur un même axe; ces tractus sont les ébauches du vaisseau sanguin dorsal. — Examinée sur les embryons vivants.la paroi dutube digestif n'offre àal’extérieur, qu'une couche de cellules arrondies, d’une couleur jaune bru- nâtre assez foncé ; ces cellules sont les éléments de la splan- chnopleure, encore petits et disposés avec régularité, mais commençant à posséder déjà la structure et la couleur de la couche chloragogène de l'adulte ; la splanchnopleure, en effet, produit la couche chloragogène seule, sans former de issu musculaire ni de tissu conjonctif. La paroi interne du tube digestif, qui limite la cavité intestinale, offre un tapis serré de cils vibraliles qui battent constamment; ces cils commencent à se montrer un peu en arrière de la bouche, et s'étendent jusqu’à l'ouverture anale. 202 LOUIS ROULE. — On ne peut rien distinguer de la structure histologique sur l’ectoblaste des embryons vivants. Tout au plusreconnail- on que la paroi du corps, représentée par l’ectoblaste et la somatopleure, présente trois couches : 1° l’épithélium ecto- blastique; 2° une mince zone hyaline, offrant parfois des stries longitudinales; 3° une troisième zone, formée par plusieurs rangées de cellules arrondies et semblables à celles qui sont libres dans la cavité du cœælome. Cette der- mière correspond à la couche interne de la somatopleure, dont les éléments n’ont encore subi aucune différenciation histologique; elle est plus épaisse que la zone moyenne, constituée par des éléments qui appartiennent aussi à la somatopleure, mais se transforment en fibres musculaires. La somatopleure n’est donc plus entièrement formée, comme au stade IIT, par des cellules semblables aux cellules mésoblastiques primitives ; certains de ses éléments se diffé- rencient et deviennent des fibres musculaires. — Cette mo- dification s'effectue de la périphérie vers le centre, de sorte qu'au stade IV, une ou deux rangées externes d'éléments sont musculaires, tandis que les autres conservent l'aspect primordial. La division de la somatopleure en deux couches distinctes provient donc de ce fait que la genèse des fibres musculaires s'effectue graduellement, et non enune seule fois. — Cette transformalion, en procédant de la périphérie vers le centre, gagne toutes Les rangées de la somatopleure, sauf la plus interne; celle-ci persiste toujours sans se modifier, ses éléments s’aplatissent, s’accolent à la zone musculaire sous-jacente, et elle devient l’endothélium péritonéal de la paroi du corps. — On à vu plus haut l'aspect offert par les cellules de la splanchnopleure; cet aspect n'offre rien d'imporlant, mais il est bon de signaler que les ébauches des vaisseaux sanguins apparaissent entre le feuillet mésoblaslique viscéral et l’en- doblaste; leur paroi, comme on le verra plus loin, est fournie par la splanchnopleure, et l'endoblaste n’y prend aucune part. Il est curieux d'observer aussi que le vaisseau dorsal, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 203. qui se montre le premier, n'offre pas une ébauche unique, mais au contraire deux ou plusieurs ébauches disjointes, ne se rejoignant que plus tard.—Il ne faut sans doute accorder aucune importance à ce phénomène; et la soudure entre les divers tronçons s'effectue peu après leur apparition. Le vaisseau dorsal se montre seul au début du stade IV; vers la fin de ce stade, les ébauches de ce vaisseau se sont réunies en un seul tronc, étendu sur le tube digestif entier, etle vaisseau ventralapparaîtàsontour. Lorsque les embryons viennent de sortir du cocon. c'est-à-dire au début du stade V, les deux vaisseaux sont à peu près complets; mais 1ls sont très étroits encore, et manquent d’anastomoses les joignant l’un à l’autre; ces anastomoses se montrent plus lard, à mesure que s'accroît le calibre des troncs vasculaires. — Dès la formation de leurs ébauches, les vaisseaux sanguins ont une couleur jaune clair, due au liquide qu'ils renferment ; celte teinte les fait aisément reconnaître. — Entre le tube digestif et la paroi du corps est placée la cavité du cœlome qui, à ce stade, est découpée en segments par des ébauches de cloisons, et parfois même par des dis- sépiments ayant atteint, sauf la taille, leur structure défini- live. On aperçoit par transparence les cloisons comme de minces traits soudés d’un côté aux téguments, et de l’autre au tube digestif; suivant les contractions du corps de l’animal, ces cloisons, repoussées par le liquide du cœlome, s'incurvent quelque peu en avant ou en arrière. Les dissépiments sont encore interrompus sur la face venirale de l'embryon. De plus, ils sont percés d'ouvertures par lesquelles les éléments libres du cœlome passent d’une cavité segmentaire dans l’autre, en suivant les mouvements du liquide qui les charrie. Ces mouvements sont dus aux contractions du corps, et n’ont pas d’autre cause, car la splanchnopleure et la couche interne de la somatopleure sont privées de cils vibratiles. — Outreles dissépiments, on aperçoit encore, dans la cavité 204 LOUIS ROULE. du cœlome, des corps qui tranchent en clair ou en foncé; ce sont les g/andes septales et les organes seygmentaires. — Les glandes septales apparaissent comme de pelites masses claires étendues, au niveau des constrictions annulaires de l'ectoblaste, entre le tube digestif et la paroi du corps. Ces glandes, développées ainsi au lieu et place des dissépiments, sont au nombre de trois paires : la première paire sépare le 5° segment du 6°, la seconde paire le 6° segment du 7°, et la troisième sépare le 7° segment du 8°.— Cette énumération est faite en comptant le lobe céphalique comme le premier anneau, et le segment buccal comme le second; j ai en effet montré plus haut que la première cloison apparue sépare l'extrémité antérieure de l'embryon d’un deuxième métamère placé en arrière, et cette extrémitéantérieure ainsi délimitée deviendra le lobe céphalique. La cloison qui sépare ce dernier de l’anneau buccal offre la même structure primor- diale et la même organisation définitive que les autres dissé- piments. — Les cinq anneaux placés en avant des glandes septales, et les trois anneaux qu’elles séparent les uns des autres, sont dépourvus d'organes segmentaires. Par contre, on aperçoit dans les trois anneaux qui suivent immédiatement le mélamère (8°) placé derrière la glande septale postérieure, c'est-à-dire dans les 9°, 10° et 11°, de petites masses allongées el de couleur foncée; ces masses sont au nombre d'une paire par anneau, l’une étant placée à droite et l'autre à gauche du tube digestif. — Ce sont là des ébauches d'organes segmentaires; elles ont en ce moment une structure fort simple,etconsistentenun corpsgranuleux où l'on ne reconnaît aucune paroi cellulaire bien nette, et dans laquelle le canal excréteur n'est pas encore creusé, ou bien ne possède qu'un trajet fort court. Ces ébauches, placées dans la cavité même des anneaux, sont en rapport par leur extrémité postérieure avec la face interne des téguments, et adhèrent par leur extrémité antérieure à la cloison qui sépare celte cavité de celle du segment précédent. Chaque anneau présentant DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 205 deux cloisons, l’une antérieure et l’autre postérieure, les organes segmentaires sont toujours suspendus à la paroi antérieure. | Le 8° anneau, placé en arrière des glandes septales, ne possède pas d'organes néphridiens ou segmentaires, alors que le 9°en est pourvu. Voici probablement l'explication de ce fait : Les organes segmentaires sont non seulement suspendus à la cloison antérieure de l’anneau auquel ils appartiennent, mais ils traversent cette cloison pour s'ouvrir par un pavillon vibratile dans la cavité du métamère précédent. Les organes néphridiens du 8° anneau devraient donc, s'ils existaient, traverser la dernière paire de glandes septales pour s'ouvrir dans la cavité du 7° segment, cavité limitée par deux glandes septales. La règle semblant être que les anneaux pourvus de pareilles glandes ne possèdent pas d'organes segmentaires, le 8° anneau, bien que sa cloison antérieure soit seule une glande septale, ne fait pas exception. Il est très important de noter que les 9°, 10° et 11° méta- mères sont pourvus, au stade [V, d'organes segmentaires bien développés; ces organes vont en effet S’atrophier et disparaître à mesure que se développent les glandes sexuelles, de sorte qu'ils n’existent plus chez l'adulte; sauf dans des cas assez rares où les néphridies du 9° anneau persistent, mais rabougries et n’exerçant plus aucune fonction. Le 12° anneau, et c’est encore là un fait d'une grande importance, ne renferme à ce stade aucune ébauche d'organes segmentares. Et même, lorsque l'embryon sera plus âgé, ilne montrera aucune ébauche de ce genre, du moins jusqu’à ce que le corps possède environ vingt ou vingt-deux anneaux. Alors, à la place de l’organe segmentaire absent, se développe le spermiducte. — Ainsi qu'on le verra plus tard, on doit consi- dérer le spermiducte comme un organe segmentaire servant seulement à l’expulsion des spermatozoïdes, et qui, chez les Oligochætes à fonctions plus différenciées et plus complexes que les types primitifs d’Annélides, se montre lorsque les 206 LOUIS ROULE. glandes sexuelles prennent naissance et lorsqu'ils doivent accomplir leur rôle. _— Les anneaux placés en arrière du 12° sont encore peu développés; un ou deux présentent seuls des cloisons recon- naissables ; les autres ne sont pas nettement limités. Aussi est-il nécessaire d'étudier avec attention la région postérieure de l'embryon, où les anneaux sont à peine ébauchés, et où les organes segmentaires commencent à apparaître, pour bien comprendre quelques faits intéressants de l’évolution des Enchytræoides. — La figure 12 (pl. Il) représente la région postérieure d'un embryon vue par transparence. À la périphérie sont placés les téguments ; on voit au centre le tube digestif entouré par la couche chloragogène et portant le vaisseau dorsal. L’a- nus s'ouvre au milieu de l'extrémité postérieure, et l’ecto- blaste s’y déprime pour former un rectum qui va se souder à l'intestin proprement dit. Ce rectum est court, étroit, et garni de cils vibratiles ; 1l correspond au proctodœum, et fait le pendant du stomodæum. La splanchnopleure ne présente aucun fait intéressant, sauf sa disposition dans la région voisine du rectum. Les cavités cœlomiques ne se sont pas encore montrées, et le mésoblaste y est constitué par une masse cellulaire pleine qui remplit tout l’espace laissé entre l’ectoblaste et l’endoblaste, comme chez la planula primitive; la splanchnopleure n’est done pas encore séparée de la somatopleure, et n’a pas revêtu ses caractères particuliers. — À mesure que l’on remonte depuis la région rectale jusque vers le 12° anneau, on voit les cavités cœlomiques se creuser dans l’amas mésoblastique, la soma- topleure et la splanchnopleure se séparer pour suivre chacune leur évolution spéciale, les dissépiments se manifester au travers du cœlome, et enfin les organes segmentaires appa- raître. Et le développement de ces diverses parties est d'autant plus avancé que l’on se rapproche davantage du 12° anneau. — Comme, dans cette série, on part d’une région où le méso- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 207 blaste est représenté par une masse de cellules embryon- naires semblables, on comprend qu'il est bon de suivre toutes les phases de celte évolution. Les éléments mésoblastiques de la région rectale offrent la même structure que ceux du mésoblaste de la planula, et dérivent du reste des cellules du feuillet moyen qui étaient placées tout à fait à l'extrémité postérieure de l'embryon. Ces éléments n’ont subi aucune différenciation, et se sont bornés à proliférer ; ils comblent l'espace en cul-de-sac placé autour de l'intestin. entre l’ectoblaste et le rectum. Si la partie postérieure de cet amas mésoblastique est pleine et ne renferme aucun espace vide, il n’en est pas de même pour sa partie antérieure ; cette dernière se creuse de cavités qui apparaissent les unes derrière les autres à mesure que l'embryon s’allonge. De cette manière, la cavité percée en dernier lieu, située par conséquent le plus en arrière, se trouve ensuite reportée en avant d'une nouvelle cavité qui s’est formée derrière elle; et la même évolution continue pour celle-ci. — Ces cavités apparaissent fort régulièrement et par paires, c’est-à-dire que, à la même hauteur et sur une ligne transversale, on voit se creuser deux cavilés égales de taille, conservant cette égalité dans le cours de leur évolution, et placées l’une à droite, l’autre à gauche du tube digestif. Ces cavités, qui se montrent ainsi par paires dans le méso- blaste compacte de la région postérieure du corps, sont les ébauches des cavités segmentaires situées en arrière du 12° et du 13° anneau. Ces ébauches sont indépendantes les unes des autres dès l’a- bord, dès leur apparition primitive; des cloisons transversales formées par des cellules mésoblastiques les séparent. Ces cloisons sont d’abord assez épaisses, et constituées par trois ou quatre rangées de cellules au moment où l’ébauche commence à se percer; à mesure que l’ébauche grandit et estreportéeen avant par l'allongement de la région postérieure du corps et la production de nouvelles cavités en arrière d’elle, les cloisons s’étirent et deviennent plus minces. —Une autre 208 LOUIS ROULE. cause de cette diminution d'épaisseur estla chute de quelques- unes des cellules cloisonnaires dans la cavité du segment ; ces cellules deviennent ainsi libres, isolées, et, jointes à d'autres éléments provenant de la somatopleure, jouent le même rôle que les éléments libres des douze anneaux anté- rieurs. — Finalement, lorsque les ébauches des cavités seg- mentaires commencent à être assez grandes, les cloisons sont réduites à deux couches de cellules superposées; ces cloisons primitives deviendront les dissépiments qui séparent les uns des autres les métamères définitifs. En résumé, il existe dans la région postérieure du corps un amas de cellules mésoblastiques en voie de prolifération constante, et qui persiste Jusqu'au moment où l'embryon atteint l’état adulte. Des cavités se creusent par paires dans cet amas, les unes derrière les autres, au fur et à mesure que cette région postérieure s’allonge ; ces cavités, indépendantes dès le début et ne communiquant pas entre elles, grandissent pour devenir les cavités segmentaires placées derrière les 12° et 13° anneaux, et, en croissant dans le sens transversal, entourent la partie du tube digestif placée de leur côté (de sorte que la paire entoure la portion de l'intestin située à son niveau). Les couches de cellules qui les séparent consti- tuent les ébauches des cloisons. On le voit, l'extension du corps de l’embryon dans le sens longitudinal, et la genèse de nouveaux anneaux, ne s’effectuent pas indifféremment et d'une manière égale dans tout l’orga- nisme, mais seulement dans l'extrémité postérieure. Aussitôt après que les segments ont été formés, ils ne font plus que s’accroître dans le sens transversal et acquérir leur structure définitive; les anneaux qui apparaissent ensuite sont placés derrière ces premiers segments, et prennent tous naissance dans la région postérieure du corps, qui seule, à l’exclusion des autres parties, subit une extension longitudinale. Les cavilés qui naissent ainsi dans le mésoblaste postérieur dérivent d'espaces vides creusés dans ce mésoblaste ; tout comme les douze segments antérieurs, y compris le lobe DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 209 céphalique, sont produits par le cloisonnement d’une cavité unique; cette cavité se perce d’abord, puis granditen demeu- rant simple, et se divise ensuite, par l'apparition de douze paires de dissépiments, en métamères placés les uns derrière les autres. Les dissépiments les plus antérieurs, qui séparent le lobe céphalique de l'anneau buccal et ce dernier du 3° anneau, prennent naissance les premiers, et le même ordre existe pour les autres : le développement des cloisons procède d'avant en arrière. — Il n’en est pas ainsi pour les anneaux postérieurs, c’est-à-dire pour ceux placés en arrière des douze ou treize premiers anneaux. Ceux-là ne proviennent pas du eloisonnement d’une cavité unique, mais ils se creusent par paires indépendamment les uns des autres ; chaque paire de cavités apparaît dans le mésoblaste devant celle qui la suil et va se former.— [l existe dans la région postérieure du corps quatre ou cinq paires de cavités à différents âges, et le développement est d'autant plus accentué que l'anneau est placé plus en avant. Il en résulte que les cavités les plus Jeunes sont toujours placées derrière les plus âgées, et que le développement procède d’arrière en avant, contrairement à ce qu'il en est pour les douze ou treize premiers métamères. Un tel contraste est fort curieux. Mais le procédé seul diffère, les phénomènes étant identiques quant à leur es- sence. Dans les deux cas, en effet, les cavilés des segments dérivent d'espaces qui apparaissent par une sorte de déla- mination, de clivage, dans le mésoblaste, et leur valeur morphologique est par suite semblable ; les manières dont elles prennent naissance sont seules différentes. — Dans un cas, les cavités communiquent toutes entre elles, et forment un espace unique qui finit par se cloisonner; dans le second cas, les cavités sont indépendantes dès l’abord, et conser- vent toujours celte disposition primitive. Et, fail qui ajoute encore à l'importance du contraste, les douze ou treize pre- miers anneaux font seuls partie du premier cas, tous les autres anneaux du corps appartenant au second. Celle différence provient sans doute de la condensation ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 44. — ART. N° 3. 210 LOUIS ROULE. des processus embryonnaires. Chez les Trochosphères d’An nélides, toutes les paires de cavités segmentaires sont indé- pendantes dès le début de leur apparition, et ne communi- quent pas entre elles; il en est de même dans certaines embryogénies condensées d’autres Annélides. La séparation primilive des cavités segmentaires est donc le processus normal, et si, chez les embryons d'£Enchytræoides, on ren- contre un procédé différent, il faut sans doute en faire re- monter la cause à l’altéralion qu'amène une grande abon- dance de vitellus nutritif. Il est bon pourtant d’insister encore sur ce fait que le procédé par cloisonnement d’une cavité unique est limité aux douze ou ireize premiers anneaux du corps, tous les autres prenant naissance par le mode habituel. La consé- quence est la suivante : comme les cavités des anneaux sont homologues les unes des autres, et comme elles apparaissent toujours dans le mésoblaste, il en résulle que la cavité uni- que des douze premiers anneaux, semblable chez la planula à un schizocæle, correspond, au point de vue morpholo- gique, à douze cavités segmentaires fusionnées. Or, comme ces dernières sont, chez les Annélides, et d'après les frères Hertwig, des entérocæles, le schizocæle primitif correspond à la somme de plusieurs espaces entérocæliens dont les parois sont désagrégées. — Les cavités postérieures, qui naissent dans le méso- blasle, divisent ce dernier en deux couches : l’une interne, la splanchnopleure, constituée par une seule couche de cel- luies qui se continue avec la splanchnopleure des douze pre- miers anneaux; l’autre externe, la somatopleure, formée par plusieurs rangées de cellules, et se continue de même avec la somatopleure des douze premiers anneaux. Lorsque les cavités commencent à se montrer, les éléments de la so- malopleure ne sont encore nullement différenciés ; mais, à mesure que la région postérieure de l'embryon s’allonge, et que les cavités déjà creusées sont reportées plus en avant, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 211 ils présentent les mêmes modifications que ceux des douze ou treize anneaux antérieurs. et effectuées dans le même ordre.— Les cellules les plus externes, placées au-dessous de l’ectoblaste, se transforment en fibres musculaires, et cette évolution continue, en procédant de la périphérie vers le centre, jusqu'à l’avant-dernière rangée interne ; lorsque celle-ci est devenue musculaire à son tour, la dernière ran- gée, qui limite immédiatement la cavité segmentaire, con- serve à peu près le même aspect, et devient l’endothélium péritonéal. Il résulte de ce développement une structure de la paroi du corps semblable à celle dessinée dans la figure 12. La couche musculaire, hyaline, située au-dessous de l’ecto- blaste, s’amincit peu à peu en arrière, et disparaît avant d'arriver aux environs de l’orifice anal, tandis que la couche de cellules non encore modifiées devient par contre, en sui- vant la même direction, de plus en plus large. —Malgré cette opposition, la somatopleure conserve loujours la même épaisseur. De même que dans la région antérieure du corps, les constrictions des téguments placées au niveau des cloi- sons, et qui trahissent au dehors la structure segmentaire du mésoblaste, sont produiles par l’ectoblaste seul, et la somatopleure n’y prend aucune part. Ces constrictions man- quent dans la région où les cavités cœlomiques commencent à apparaître, et deviennent de plus en plus profondes à me- sure que ces cavités s'accroissent et revêtent leur aspect définitif. Les dissépiments ‘complètent leur structure en même temps que les cavités qu'ils concourent à limiter. D'abord à peine distincts de la masse mésoblaslique postérieure, irès épais, et fort peu étendus en largeur, ils croissent en- suite dans le sens transversal, maïs aussi deviennent plus minces. Lorsqu'ils sont arrivés à ne plus posséder que deux rangées de cellules placées l’une sur l'autre, ils persistent sous celte forme, et un nouveau phénomène intervient. — Sur le plan de jonction des deux rangées cellulaires d’un 212 LOUIS ROULE. même dissépiment apparaît une étroite zone hyaline qui s’épaissit peu à peu, et sépare l’une de l’autre les deux ran- gées tout en leur restant accolée. La cloison montre done en allant d'avant en arrière : une première couche de cel- lules, la zone hyaline, et une troisième couche formée par un seul rang de cellules. Cette zone hyaline n’est autre que de la substance conjonctive fondamentale, exsudée par les eellules de la cloison, et produite par la base seule de ces éléments, et non par leur périphérie entière. ue on le verra plus loin, un dissépiment, chez l'adulte, présente une couche conjonctive épaisse, limitée sur ses deux faces par un épithélium pavimenteux simple qui se relie latéralement à la splanchnopleure et à l’endothélium péritonéal de la somatopleure; cet épithélium est aussi un endothélium péritonéal, ayant un aspect semblable à celui de la somatopleure et dérivant de même du mésoblaste. — Les deux couches d'endothélium des cloisons proviennent des deux rangées cellulaires primitives; celles-ci persistent avec leur structure première, et produisent ces couches endothéliales sans subir de modifications particulières. L’épaisse bande conjonctive dérive de la zone hyaline, qui a beaucoup augmenté de volume. Ainsi, une couche cellulaire qui présente, dès le début de son apparition, une disposition épithéliale et la conserve, produit de la substance conjonctive en assez grande quan- tité, car on ne peut assimiler la bande médiane à une basale grossie outre mesure. Les faits qui empêchent une pareille assimilation sont l’aspect même de la substance, ses carac- tères histologiques, et la présence dans son intérieur de quelques cellules isolées et de fibres musculaires. Ces der- niers éléments proviennent des cellules endothéliales ; celles-ci se divisent latéralement pour étaler leur ensemble en surface, mais parfois elles se partagent en sens contraire; les produits internes de la segmentation pénètrent dans la substance conjonctive, et tantôt y deviennent des fibres mus- culaires, tantôt persistent telles quelles et prennent le ca- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 213 raclère de cellules conjonctives. Mais ces dernières sont toujours en petit nombre; elles manquent encore lorsque la bande conjonclive est déjà bien épaisse, et l’on ne doit pas leur attribuer la genèse de la substance conjonctive entière. — Pour terminer l'exposé des observations qu’il est pos- sible de faire en examinant par transparence la région posté- rieure du corps de l’embryon, il faut étudier la genèse des organes segmentaires. — On a déjà vu plus haut l’aspect offert par ces organes dans les anneaux qui en possèdent parmi les métamères antérieurs, c’est-à-dire dans les 9°, 10° et 11° anneaux. Chaque organe est une masse granuleuse accolée au dissépiment antérieur de l’anneau qui le con- üent, et traverse ce dissépiment pour s'ouvrir par un pa- villon vibratile dans la cavité du mélamère précédent. — Les trois paires de ces organes sont placées, de part et d'autre du tube digestif, sur le prolongement d’un même axe; mais les néphridies situées du même côté ne sont nullement en rapport les unes avec les autres ; l'extrémité postérieure de chacune d'elles est séparée du pavillon vibratile de celle qui la suit par un espace très appréciable. L'aspect n’est plus le même dans les anneaux postérieurs. La figure 12 montre l'organe segmentaire du 14° anneau (le plus antérieur dans cette figure) comme une masse de teinte un peu claire, et à parois bosselées. L’organe seg- mentaire du 15° anneau, moins avancé dans son dévelop- pement, permet de comprendre que les bosselures du pré- cédent viennent de ce que l’organe est constitué par un petit nombre de grosses cellules juxtaposées. Quatre de ces cellules sont accolées à la paroi postérieure de la cloison, el une cinquième, chargée de produire le pavillon vibratile, est située sur la paroi antérieure de cette même cloison. — L'extrémilé postérieure de la néphridie du 14° anneau est séparée par un espace très étroit de cette cinquième cellule antérieure. — En remontant la série des stades évo- lutifs, c'est-à-dire en allant vers la région anale, pour avoir 214 LOUIS ROULE. des états plus jeunes, on remarque que l'intervalle placé entre les ébauches des organes segmentaires du même côté finit par disparaître, de sorte que ces ébauches sont juxta- posées en une file continue. Et l’on voit aussi que les ébau- ches les plus jeunes, ou plutôt les éléments les plus posté- rieurs parmi ceux qui devront donner naissance aux organes segmentaires, sont situés dans l’amas mésoblastique rectal: Les conclusions qu’il est permis de tirer d’une telle struc- ture sont les suivantes : | 1° Les ébauches des organes segmentaires ne dérivent ni des cloisons, ni de la somatopleure déjà différenciée, mais apparaissent dans l’amas mésoblastique postérieur à un niveau où les cavités segmentaires sont encore fort petites, c'est-à-dire à un niveau où la division du mésoblaste en splanchnopleure et somatopleure se manifeste à peine. Ces ébauches prennent donc directement naissance dans le mé- soblasie encore constitué par des éléments embryonnaires indifférents. — Il est juste pourtant de reconnaître que les rangées cellulaires parmi lesquelles se forment les jeunes néphridies appartiennent un peu plus haut à la somato- pleure ; 1l est donc permis de penser que ces organes font parte du feuillet pariétal du mésoblaste. 2° Les organes segmentaires placés du même côté sont soudés en une file continue, lorsqu'ils sont encore à l’état d’ébauches. C’est là une observation des plus importantes, en ce sens qu'elle montre un souvenir de l’état primitif re- présenté par la continuité du tube néphridien chez les larves d'Archiannélides. — Une pareille continuité des ébauches d'organes segmentaires a été retrouvée chez les embryons d’autres Annélides, et existe même parfois chez l'adulte. Seulement, à cause de la condensation des processus, elle se montre, chez les embryons d'Enchytræoides, à un stade où les conduits néphridiens ne sont pas encore creusés. Ces conduits ne se percent qu’au moment où les ébauches vien- nent de se séparer les unes des autres. 3° Les organes segmentaires, au début de leur évolution, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 215 sont constitués par un amas de cellules à parois distinctes. Ces cellules ne tardent pas à se fusionner les unes avec les au- tres, et leur protoplasme forme un syncytium dans lequel on ne reconnaît plus les parois des éléments constitulifs. Lorsque la fusion est complète, l’organe perd son aspect bosselé, un canal se creuse dans son intérieur, el s'étend peu à peu dans le protoplasme commun. La cellule antérieure, placée sur la face antérieure du dissépiment auquel adhère Ia né- phridie, grandit, et se perce d'un conduit qui s'ouvre d’un côté dans la cavité de l'anneau et se réunit de l’autre au canal de l'organe. — Ce dernier n’est pas un canal intercel- lulaire, dont la cavité est limitée par des cellules entières, mais un Canal intracellulaire, c’est-à-dire creusé dans le protoplasma même des cellules qui l'entourent. Cette struc- ture est bien évidente pour la cellule antérieure, qui se transforme en pavillon vibratile ; elle l’est tout autant dans le corps même de la néphridie, car le conduit apparaît sou- vent alors que les éléments primordiaux ne sont pas encore fusionnés, et l’on voit alors se percer les vides dans Le pro- toplasme. Les organes segmentaires commencent donc par être for- més de cellules à parois complètes et réunies en un petit groupe placé le plus souvent au point de jonction des cloi- sons et de la somatopleure ; la majeure partie de l'organe est reportée en arrière de la cloison, sauf une ou deux cel- lules situées à peu près au niveau du dissépiment lui-même ou de sa couche endothéliale antérieure. Il semble même parfois que l'élément chargé de donner naissance au pavillon se trouve dans l’endothélium antérieur, et y apparaît comme cellule un peu plus grosse que les autres. — Lorsque l’organe segmentaire a atteint son développement complet, il pré- sente un corps volumineux, plongé dans la cavité de l’an- neau; un co/ ou portion rétrécie, qui traverse la cloison antérieure de l’anneau, et un pavillon, ouvert par un large orifice dans la cavité de l’anneau précédent. Le corps dé- rive du gros amas cellulaire primitif; le col et le pavillon 216 LOUIS ROULE. proviennent de la cellule antérieure ou des deux cellules antérieures lorsqu'il en existe deux. — Au stade IV, les néphridies les plus évoluées sont encore bien petites. Leur corps est à peu près ovalaire, limité à la périphérie par un contour presque régulier ; le col est très court, le pavillon de taille minime, ainsi que son ouverture et le conduit qu'il renferme. Le corps ne contient souvent qu'un petit canal, premier indice du conduit néphridien qui va prendre son développement complet; parfois ce canal n'est pas encore réuni à celui du pavillon ; tous deux sont munis de cils vibratiles qui battent d’un mouvement très ra- pide.— La figure 12 de la planche II, les figures 9 et 10 de la planche [, permettent de suivre aisément l'évolution des organes segmentaires, telle qu’on l’observe en étudiant par transparence des embryons vivants. — On a vu plus haut que certains des anneaux formés par le cloisonnement de la cavité cœlomique primitive, c'est-à- dire les 9°, 10° et 11°, possèdent des organes segmentaires. Ces derniers ont la même origine que les néphridies des anneaux postérieurs. Les cloisons, ou plutôt les ébauches des cloisons qui partagent en métamères la cavité du cœlome, sont produites en partie par des cellules hbres, en partie par des prolongements de la somatopleure qui traversent le cœlome, et vont à la rencontre de la splanchnopleure. Les cel- lules chargées de donner naissance aux organes segmentaires appartiennent à ces prolongements dérivés de la somato- pleure, et sont placées au point de jonction de la cloison future avec le feuillet mésoblastique pariétal. — De cette ma- nière, il est bien inutile de chercher à préciser si les or- ganes segmenlaires proviennent de la somatopleure ou des cloisons, puisque les cloisons et les organes se forment en même temps aux dépens d’une ébauche commune qui appar- tient à la somatopleure. — Quant à l’évolution subie par ces néphridies antérieures, elle est de tous points semblable à celle que j'ai déjà indiquée; seulement, je n’ai pas vu que les ébauches soient soudées dès l’abord en un cordon con- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. FE Pod tinu ; mais cela est fort probable, et je reviendrai sur celte question dans la deuxième partie de ce mémoire. — Les figures 16, 17 et 18 de la planche II, représentent d’une manière schématique le développement des cloisons et des organes segmentaires. — Après avoir étudié par transparence le développement des embryons parvenus au stade IV, il est bon d'examiner au surplus des séries de coupes pratiquées en divers sens, afin d'acquérir des notions plus complètes sur l’organogénie, et de connaître l’histogénie. | La figure 104 (pl. XI) représente une coupe transversale pratiquée vers le milieu d’un anneau du corps. Les faits qui frappent d’abord portent sur la grande extension de la ca- vité générale et du cordon nerveux ventral. — La cavité géné- rale ne montre, sur les lignes médianes dorsale et ventrale, aucun mésentère verlical joignant la somatopleure à la splanchnopleure; ces mésentères manquent dans le cœlome schizocælien antérieur, et n'existent pas davantage dans les anneaux postérieurs, car les deux cavités de la même paire se réunissent complètement en haut et en bas, et font dis- paraître leurs parois de séparation. Parfois cependant, quel- ques tractus musculaires médians se rendent des téguments à l'intestin, et simulent ainsi des bandes mésentériques, mais ces tractus sont minces, peu nombreux et fort irrégu- liers. — Une telle disposition est remarquable, étant donnée la présence de vrais mésentères chez un grand nombre d'Annélides. L’ectoblaste est moins étroit que chez les embryons du stade précédent ; son épaisseur augmente, mais d’une ma- nière inégale, de sorte qu'il est assez élevé en certaines ré- gions et fort mince en d’autres. On commence à voir appa- raitre des parois cellulaires dans le protoplasme sympodial ; mais tous les éléments ainsi formés se ressemblent encore, et il n'existe parmi eux aucune différenciation dans un sens particulier. 218 LOUIS ROULE. Le cordon médullaire, fort volumineux, proémine beau- coup dans la cavité générale, et arrive presque à toucher l'intestin ; il est attaché à l’ectoblaste par une base encore large, et qui, sur les coupes transversales, paraît constituer une sorte de pédoncule.— Sa région supérieure est toujours plus ou moins déprimée en son centre. La substance fibril- laire, toujours disposée en une bandelette placée dans la région supérieure et interne du cordon, a augmenté de vo- lume. — En somme, le cordon n'a subi, depuis le stade HI, aucune évolution importante ; il est simplement devenu un peu plus épais. De même, l’endoblaste n’a pas beaucoup changé. Les cel- lules de ce feuillet, ayant déjà acquis leurs caractères défi- nitifs lors des stades IT et IT, montrent toujours le même aspect ; elles sont allongées, presque égales les unes aux autres en hauteur et en largeur, et sont munies de cils vi- bratiles. Elles sont toujours disposées en une seule rangée. Le mésoblaste est la partie la plus intéressante à étudier. Les cellules de la splanchnopleure forment une couche simple, étroitement liée à l’endoblaste ; elles sont petites, cubiques, et toutes égales de taille. En certains points, quel- ques éléments libres s’accolent à ce feuillet, mais d’une facon transitoire, el sans donner naissance à aucun organe ni à aucun {issu. — La somatopleure est toujours conslituée par plusieurs rangées cellulaires, mais j'ai déjà précisé qu'il est difficile d'avoir toutes ces rangées représentées sur les coupes, car les cellules se détachent lors des manipulations. Pour bien se rendre compte de la structure générale de la somatopleure, il faut l’observer sur des embryons vivants, et j'ai exposé plus haut les résultais de cet examen. Les coupes montrent seulement les détails histologiques déli- cals, comme, par exemple, la transformation des éléments en fibres musculaires. | — La figure 107 montre, à un grossissement plus élevé que la figure 104, les détails de la structure de l’ectoblaste et de la somatopleure chez un embryon à douze ou quatorze an- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 219 neaux.-—L'ectoblaste présente quelques parois cellulaires qui viennent d'apparaître dans le syncylium protoplasmique ; ces parois découpent ainsi le protoplasme en éléments allon- gés, rectangulaires, munis d’un plateau et d’une basale. Le plateau est assez épais ; il offre un double contour, et cons- tituera, en continuant à s'épaissir tout en se chitinisant, la cuticule de l'adulte. La basale est plus mince, tout en se manifestant sur la coupe comme un trait bien net qui sépare l’ectoblaste du mésoblaste somalique. — Les granulations vi- tellines ont presque toutes disparu, ainsi du reste que dans les autres parties de l'organisme. Il faut sans doute attri- buer la transparenee du corps à celte disparilion ; cepen- dant, il existe encore plusieurs de ces granules dans les élé- ments du mésoblaste. La somatopleure présente à examiner deux couches : une couche externe, adjacente à l’ectoblaste, qui correspond à la zone hvyaline des téguments vus par transparence; et une couche interne, limitant le cœlome. Sur la coupe dessinée dans la figure 107, la couche externe est formée seulement par deux rangées de cellules. — Les cellules de la rangée pla- cée immédiatement sous l’ectoblaste sont allongées, losangi- ques, et contiennent un petit noyau ; 1l n'existe presque point de granulations vitellines dans leur protoplasme, et ce der- nier ressemble comme aspect à la substance contractile des fibres musculaires. Il est fort difficile de bien apercevoir cette couche externe ; les noyaux seuls sont toujours visi- bles; mais sur la plupart des coupes, et principalement sur les coupes longitudinales, on ne peut reconnaîlre leurs rap- ports exacts; il est nécessaire d'étudier de bonnes coupes transversales fortement colorées, et colorées surtout à l’hé- maloxyline, pour discerner la couche sous-ectoblastique. — Îl est indiscutable que, au stade actuel, cette dernière ap- partient à la somatopleure, aux cellules de laquelle elle est étroitement liée, et n’a aucun rapport d'origine avec l’ecto- blaste; et il est bon de préciser ce fait, car cette rangée externe donne naissance à la mince couche musculaire cir- 2920 LOUIS ROULE. culaire de l'adulte. Celle-ci ne dérive donc pas de l’ecto- blaste, mais provient du mésoblaste au même titre que lés fibres musculaires longitudinales. — Lors du stade IV, les cellules de cette couche commencent à se transformer en fibres musculaires; elles s’allongent en effet, et leur proto- Li se modifie en substance contraclile. Sur le fragment de coupe transversale dessiné dans la figure 107, la deuxième rangée externe de la somatopleure présente des rapports assez confus. On y voit des cellules qui perdent leurs contours arrondis, et paraissent se souder intimement les unes aux autres, à mesure qu’elles s’aplatis- sent dans le sens transversal; il existe encore quelques gra- nulations vitellines dans leur protoplasme.Les bonnes coupes longitudinales et quelques dissociations heureuses permet- tent de reconnaître que ces éléments croissent dans le sens de la longueur de l'embryon, tout en augmentant de beau- coup leur volume initial, et se transforment en fibres muscu- laires. — Il est malaisé de suivre cette évolution sur des coupes transversales, qui montrent seulement les rapports de cette rangée avec ses voisines. La zone interne de la somatopleure renferme trois ou quatre couches de cellules ayant gardé leur aspect primitif. Ces cellules, arrondies ou ovalaires, se touchent seulement par quelques points de leur surface, et laissent entre elles des vides assez grands; elles contiennent un noyau facile à colorer, et un petit nombre de granulations vitellines, qui ne se teintent plus aussi facilement qu’autrefois, et sem- blent être en voie de disparition. — Le réticulum chromatique des noyaux est rassemblé en un seul nucléole volumineux, placé au centre même du noyau; le suc nucléaire occupe l’espace compris entre ce nucléole et la mince paroi nucléaire. Aux stades précédents, le réticulum était par contre assez net, et ne s'était pas condensé en une masse unique. Cette différence d'aspect est due sans doule à des différences d’é- volution. Chez les embryons plus jeunes, les cellules méso- blastiques se bornaient à se segmenter, et les réseaux chro- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. Pr 4 maliques, toujours en mouvement, élaient par suite très visibles. Actuellement, les cellules ont presque atteint sans doute leur nombre définitif, ne se divisent plus, et leur noyau est entré dans une période de repos. Aussi, les fila- ments chromaliques se sont-ils rassemblés en un nucléole. La seule évolution que suivent désormais les éléments du mésoblaste consiste à s’accroîlre tout en produisant des tissus divers, et notamment du lissu musculaire. Il n'existe encore qu’une seule rangée de fibres musculai- res longitudinales. À mesure que l'embryon deviendra plus âgé, les couches cellulaires non encore modifiées se trans- forment à leur tour en fibres, et ce développement continue, en procédant de la périphérie vers le centre, jusqu’à ce qu'il ait atteint l’avant-dernière rangée de la somatopleure. On sait en effet que la dernière rangée, la plus interne, persiste telle quelle, et devient l’endothélium péritonéal. — À la somatopleure sont annexées les ébauches des or- ganes segmentaires. Suivant le plan par lequel a passé la coupe dans l’intérieur de l’anneau, les sections de ces organes sont ou bien libres dans le cœlome, ou bien accolées à la somato- pleure, ou bien accolées à l’ectoblaste après avoir traversé le feuillet somatique. Les sections sont libres lorsque le rasoir passe immédiatement en arrière de la cloison antérieure de l'anneau; elles se rapprochent de plus en plus de la soma- iopleure à mesure que les coupes sont pratiquées plus en arrière. Finalement, la région postérieure de l'organe tra- verse la somatopleure et se met en relation avec la face pro- fonde de l’ectoblaste ; en ce point apparaîtra Le pore extérieur de la néphridie. | La figure 106 représente, à un assez fort grossissement, la structure d'une ébauche néphridienne au stade IV, lorsque les cellules constitutives sont fusionnées. L’ébauche consiste en une masse de protoplasma dans laquelle on ne distingue aucune des anciennes parois, et limitée à la périphérie par une ligne fort nette, à contour simple. Le protoplasme, fine- ment granuleux, contient quelques noyaux reconnaissables 299 LOUIS ROULE. à leur teinte plus foncée, et qui appartiennent sans aucun doute aux cellules primordiales de l’ébauche. Ces cellules se sont confondues les unes avec les autres, leurs parois cellulaires ont disparu, et leur protoplasme ne forme qu'un seul ensemble; mais les noyaux persistent, indiquant ainsi la valeur pluricellulaire de l'organe. — Des canaux, dont on ne voit sur les coupes que les lumières sectionnées, sont creusés dans l'épaisseur même du protoplasme; ce dernier limile immédiatement leur cavité, mais 1l n'est pas encore revêtu de cils vibratiles, sans doute parce que les conduits viennent à peine de faire leur apparition. Le liquide qui eir- cule dans les canaux néphridiens est donc mis directement en contact avec le protoplasme de l'organe. — La cavité cœlomique renferme toujours, sur les coupes, des éléments libres en plus ou moins grand nombre. Ces der- niers ne sont pas, comme on pourrait le croire, détachés de la somatopleure par les manipulations histologiques; ils exis- tent normalement, puisqu'on les voit, et en plus grande quantité que sur des coupes, chez des embryons vivants examinés en entier. Ils conservent encore l’aspect qu'ils avaient déjà aux stades précédents, et ressemblent aux cellu- les non modifiées de la somatopleure. Ils sont arrondis ou ovalaires, et renferment un noyau dont le réticulum chroma- tique est condensé en un nucléole; leur protoplasme contient quelques rares granulations vitellines difficilement colo- rables. | En examinant la somatopleure sur la figure 104, on voit que sa paroi interne offre un contour très irrégulier ; parfois ce feuillet est réduit à une ou deux couches de cellules, alors qu'ailleurs il présente cinq ou six rangées d'éléments. Cet aspect n’est pas normal, ainsi qu'il est facile de s’en con- vaincre par l'examen d’embryons vivants; la somatopleure offre. partout la même épaisseur, égale à la plus grande épaisseur représentée dans la figure 104. — Si les autres ré- gions sont plus minces, la cause en est due aux manipulations qui désagrègent les cellules et les font tomber. La figure 104 DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 293 est un dessin fidèle d’une coupe transversale à laquelle rien n’est ajouté; pour obtenir le vérilable aspect, il faudrait transporter les détails histologiques de celte figure sur les figures 9 de la planche I et 12 de la planche IT, dessinées d'après des embryons vus par transparence. — Les coupes longitudinales ne donnent pas d’autresrensei- gnements que ceux déjà fournis par les transversales ; seules, les coupes longitudinales pratiquées dans la région antérieure du corps, comme celle de la figure 105, permettent d’ac- quérir quelques notions complémentaires. La coupe de la figure 105, longitudinale, verticale et médiane, passe par la bouche et l’axe de la cavité digestive. L'’ectoblaste présente les mêmes caractères que sur les coupes transversales, et la même disposition qu'au stade précédent. Il importe cependant de remarquer que les cons- trictions extérieures, qui correspondent aux cloisons, sont tout aussi bien marquées sur la face venirale du corps que sur la face dorsale, et entourent par suite l'embryon entier. Ces constrictions sont toujours dues à des différences de hauteur de la couche ectoblastique. La partie de l’ectoblaste qui occupe tout à fait l'extrémité antérieure du corps, et limite le lobe céphalique presque entier, est relativement très épaisse ; elle renferme plusieurs rangées superposées de noyaux, et conserve ainsi la structure qu’elle avait dès les stades précédents, alors qu’elle donnait naissance à l’ébauche des centres nerveux sus-æsophagiens. Seulement, au stade actuel, cette ébauche s’est séparée de l'ectoblaste dont elle provient, el s’est reportée un peu en arrière, au-dessus de la face dorsale du pharynx, où elle forme une petite masse ovalaire. — L’ectoblaste antérieur ne perd pas son aspect primitif, et le conserve jusqu’à l’état adulte; des membranes cellulaires apparaissent autour de chaque noyau, et il se constitue ainsi, vers l'extrémité anté- rieure du lobe céphalique, un épithélium cylindrique stratifié quis’étend sur la face ventrale jusqu’au pourtour de la bouche. 95 » 4 LOUIS ROULE. Le ganglion sus-æsophagien, car il est permis de lui don- ner ce nom à cause de son isolement actuel, s’est donc séparé de l’ectoblaste, alors que le cordon ventral lui reste toujours uni, et ne perdra jamais, durant toute la vie de l'animal, ses connexions primilives. Ce ganglion, silué au-dessus du pharynx, s'étend depuis l'extrémité postérieure du segment céphalique jusque dans l’intérieur du troisième segment, en traversant l'anneau buccalentier.—Ilest limité par une mince paroi, et renferme une plus grande quantité de substance fibrillaire qu’au stade précédent; celte dernière occupe tou- jours la partie centrale du ganglion, mais elle s’est étendue vers la face inférieure, de manière à être en regard de la bande qui, constituée par la même substance, occupe la région supérieure du cordon médullaire. La bouche est limitée par deux lèvres épaisses; l’antérieure n’est autre qu'un prolongement du lobe céphalique, et la postérieure une expansion de l’anneau buccal; cette dernière, un peu plus mince que l’antérieure, est séparée du segment buccal par une constriction souvent peu marquée.— A la bou- che fait suite une région pharyngienne, qui dérive sans aucun doute de l’ectoblaste et correspond au stomodæœum ; les cel- lules de cette région sont petites et à peu près cubiques. L'ectoblaste s'arrête probablement à l'extrémité postérieure du pharynx; je dis « probablement » parce qu’il est fort difficile de discerner par la suite, dès que l’invagination sto- modæale s'ouvre dans l'intestin, ce qui dérive des cellules ectoblastiques de ce qui provient des éléments endoblasti- ques. La région postpharyngienne, qui constitue un gésier, ou proventricule, semble être formée par cette portion de l'intestin qui se met en rapport avec le stomodæum, mais sans que je puisse l’affirmer avec certitude. Les cellules supérieu- res de cette région sont longues et disposées en un épithé- lium cylindrique à deux ou trois rangées; les cellules infé- rieures sont plus courtes. Aucun de ces éléments ne porte de cils vibratiles, contrairement à ce qu’il en est pour le reste de l’endoblaste. — Quant au tube digestif proprement dit, ses si DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 223 éléments offrent partout l'aspect déjà décrit dans l'examen des coupes transversales. — Il est assez fréquent de ne point trouver, sur les coupes longitudinales, les sections des dissépiments ; les éléments qui constituent les cloisons ne sont pas encore bien différen- ciés à ce stade, et se désagrègent avec facilité. Il m'a été donné pourtant de rencontrer quelques points où les cloisons étaient entières, et Je les ai dessinés dans les figures 112 et 113 ; la figure 112 représente un état moins avancé que la figure 113.— On revoit sur ces coupes les faits observés ail- leurs sur des embryons étudiés par transparence. Les dissé- piments sont constitués au début par deux assises cellulaires superposées, qui s'étendent, à travers le cœlome, de la soma- topleure à la splanchnopleure; les cellules de ces assises rappellent tout à fait, par leur structure histologique, les éléments non encore différenciés du mésoblaste; elles sont arrondies ou ovalaires, et renferment un petit noyau avec quelques granulations vitellines. Les deux assises régularisent ensuite leur forme, et entre elles, dans toute leur région de soudure, apparaît une mince bande hyaline qui est le com- mencement de la substance conjonctive cloisonnaire. Les éléments libres dans la cavité générale ne subissent encore aucune évolution histologique particulière, sauf dans les quatre ou cinq premiers anneaux de la région antérieure du corps. — Lorsquele ganglion sus-æsophagien se détache de ’ectoblaste dont il dérive, il est isolé dans le cœlome, et n'est plus en rapport avec aucun organe, sauf avec le cordon ner veux ventral par la commissure œsophagienne. Quelques-uns des éléments libres de la cavité générale se transforment alors en fibres musculaires, qui s’altachent d’un côlé à la paroi du corps en se réunissant aux fibres de la somatopleure, et de l’autre au ganglion cérébral ou au gésier. J'ai cherché pendant longtemps à savoir si ces fibres musculaires, qui traversent le cæœlome en irradiant des organes internes vers la paroi du corps, dérivent de la somatopleure, ou proviennent des éléments libres, ou sont formés par les deux à la fois. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. vi, A5. — ART. N° 3. 2926 LOUIS ROULE. Autant qu'il est permis de se faire une opinion dans des ques- tions aussi difficiles à résoudre, car il faut suivre pas à pas toutes les petites modifications qui surviennent dans le corps des embryons, et 1l est aisé de se tromper, il me semble que la plupart de ces fibres sont produites par les éléments libres; la somatopleure en fournit bien quelques-unes, et cela surtout dans le lobe céphalique et l'anneau buccal, mais ces dernières sont peu nombreuses par rapport aux autres. — Les fibres qui naissent de la somatopleure traversent dans tous les sens, sans aucune régularité, la cavité du lobe cé- phalique, et servent à donner les pelits mouvements contrac- iles de cette région. Les fibres qui dérivent des éléments libres s’attachent au cerveau et au proventricule, puis se dirigent de ces organes vers les téguments en traversant la cavité générale, et traversant même parfois les cloisons qui séparent les uns des autres les anneaux antérieurs. Ces fibres sont de beaucoup plus nombreuses dans la région dorsale du corps que dans la région ventrale; celle-ci en est presque privée; elles se dirigent de préférence de bas en haut et d'avant en arrière.— Le rôle de ces fibres musculaires est de déterminer les mouvements du gésier et du ganglion sus- œsophagien. | — Les coupes longitudinales verticales donnent fort peu de renseignements sur la genèse des glandes septales ; il n’en est pas de même pour les coupes longitudinales horizontales, qui permettent aussi d'étudier avec facilité la genèse des cloisons. Les dissépiments et les glandes septales étant en effet bien développés sur les faces latérales du corps, les coupes verti- cales montrent ces organes et les divisent sans que les sections tiennent à autre chose qu'à la face dorsale et à la face ventrale des tégumenis ; leur résistance dans cette direction n’est pas irès grande, et les éléments cellulaires sont entraînés par le rasoir. Il n’en est pas de même pour les coupes horizon- tales; les cloisons, et surtout les glandes, sont solidement insérées sur les téguments et la paroi de l'intestin; aussi DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 221 sont-elles conservées en gardant leurs rapports normaux, J'ai essayé de bien voir la genèse des glandes septales, et, malgré mes recherches, J'avoue ne pas être encore arrivé à des résultats bien précis sur ce sujet. L'état le plus jeune qu'il m’ait été donné de voir est représenté dans la figure 108 ; les trois paires de glandes sont déjà bien épaisses, et il semble que rien ne serait plus facile de trouver un stade moins évolué en étudiant des embryons un peu plus Jeunes; c'est ce que j'ai fait, et ces embryons moins âgés ne m'ont jamais montré de glandes septales, ni de cloisons mises en leur lieu et place. 11 faut donc penser que ces glandes prennent hâtivement une structure déjà assez complexe, pour qu’un des états les plus simples de leur développement soit celui indiqué par la figure 108. Chaque glande est alors une masse ovalaire assez étroite, se terminant en pointe vers ses deux extrémités, d’un côté sur l’ectoblaste en traversant la somatopleure, et de l’autre sur l’'endoblaste en traversant la splanchnopleure. Je ne leur ai point trouvé de structure cellulaire bien nette, malgré l’em- ploi de réactifs divers; ces organes sont constitués par une masse unique de protoplasme, rappelant assez celui des né- phridies et contenant de même plusieurs noyaux; il est donc cerlain, étant donnée cette multiplicité de noyaux, qu’une seule glande répond à l'union de plusieurs cellules confondues les unes avec les autres, et réunies en un syncytium proto- plasmique, comme il en est pour les organes segmentaires. Une dernière ressemblance avec ces derniers consiste dans la présence de canaux intracellulaires, mais auxquels je n’ai jamais vu de cils vibratiles. Aïnsi constituées dès l’état le plus jeune qu'il m'ait été donné de voir, ces glandes grossissent en conservant la même structure; elles ne font guère que croître et acquérir leur forme el leurs dimensions définitives, sans subir aucune autre modification histologique. Cependant, s’il ne m'a pas été donné de reconnaître l'ex- trème début du développement des glandes septales, il est 228 LOUIS ROULE. possible de se le représenter. Il est à remarquer que ces organes apparaissent dans la cavité unique du cœlome anté- rieur, puisqu'ils appartiennent aux 6°, 7° et 8° segments, et qu'ils sont mis au lieu et place des cloisons ordinaires, dont ils possèdent la disposition générale et les rapports. — Abstrac- tion faite de leur structure particulière, les glandes septales sont en effet des cloisons très épaisses qui séparent les uns des autres quelques anneaux de la région antérieure du corps, alors que ce rôle est rempli ailleurs par des cloisons ordinaires. Or, à un stade un peu plus jeune qu’à celui étudié en ce moment, les cloisons sont constituées par des éléments mésoblastiques libres et par des cellules de la somatopleure ; et la région occupée plus tard par les glandes septales ne montre aussi pas autre chose que ces éléments et ces cellu- les. Il est donc très probable que les cloisons et les glandes septales ont une origine commune, et dérivent également du mésoblaste, et même de parties identiques du mésoblaste. Telle est la conclusion qui me paraît découler de mes re- cherches. Il me faut cependant signaler un fait que j'ai revu à diverses reprises : il semble, en certains cas (figure 118, planche XIT, que la paroi endoblastique se déprime quelque peu en regard de linsertion sur elle de la glande septale ; mais cet aspect ne suffil pas pour admettre une origine endo- blastique de ces glandes. Cette disposition se manifeste lors- que ces organes ont acquis une structure déjà complexe; la dépression est peu profonde; et bien qu’il semble n’y avoir point de séparation entre le protoplasma des cellules intesti- nales et celui de la glande, l’absence de stades plus jeunes montrant de tels rapports avec plus de nelteté me semble une raison suffisante pour écarter cette hypothèse.—Il parait, en somme, que les glandes septales sont d’origine mésoblas- tique, ‘et non d’origine endoblastique. | Reste à déterminer la valeur morphologique de ces organes. Les glandes septales sont mises, dans trois segments, à la place des cloisons ordinaires, et dérivent sans doute des mêmes éléments que ces dernières; mais leur évolution ulté- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 229 rieure est bien différente de ceile subie par les cloisons. Les glandes septales s'organisent hâlivement; leur protoplasme se fusionne en un syncylium, se creuse de canaux, et ne pro- duit jamais de substance conjonctive; de telle sorte que, si les glandes seplales apparaissent comme des cloisons, elles se développent ensuite comme des organes segmentaires. J'ai cherché à voir, soit à ce stade, soit aux stades plus avancés et jusqu’à l’état adulte, si les canaux de ces glandes débouchent quelque part, dans la cavilé digestive ou au dehors; car il faut remarquer que les extrémités de ces or- ganes traversent les feuillets mésoblastiques pour se mettre directement en rapport avec l’ectoblaste et l’endoblaste. Je D'ai jamais observé de pores externes ou inlernes, pas plus du reste que de communications entre les divers conduits creusés dans la glande. — Mais, bien que ne les ayant pas aperçus, je ne puis affirmer que ces pores n'existent pas; je suis en effet resté fort longtemps avant de trouver les orifices externes des organes segmentaires, qui sont très petits et presque cachés par les cellules ectodermiques environnantes, tellement leur ouverture est étroite; et il n'y aurait rien d'étonnant que le résultat négatif de mes recherches sur les glandes septales soit inexact. Pourtant, en procédant par analogie avec l'étude d’autres types d'Enchytræoïdiens, il me semble que la pré- sence d’orifices aux glandes septales n’a pas encore élé dé- montrée d’une manière satisfaisante. Si les glandes septales offrent une grande ressemblance, comme structure, avec les organes segmentaires, elles en différent par leur forme et par l'absence probable de pores. Les néphridies possèdent deux orifices, l’un qui débouche au dehors et l’autre dans le cœlome ; si la présence d’un orifice ectodermique ou endodermique est discutable pour ce qui tent aux glandes septales, il est certain toutefois que leurs canaux ne s'ouvrent pas dans la cavité générale du corps. Au point de vue morphologique, les glandes septales me semblentêtre des cloisons qui revêtent la structure desorganes segmentaires, s’épaississent en acquérant cette structure, 230 LOUIS ROULE. mais conservent toujours les rapports des cloisons et leur forme générale. À l'appui de cette opinion, je n’ai qu'à citer les faits déjà exposés sur la genèse des cloisons et des néphri- dies dans les anneaux antérieurs. — Mettant à part les cellules libres, qui donnent surtout naissance à la partie des cloisons voisine du tube digestif, la somatopleure envoie dans le cælome une expansion qui, en grandissant, va à la rencontre de la splanchnopleure. Cette expansion, lorsqu'elle apparaît, est constituée par un petit amas de cellules ; parmi ces dernières, les unes produisent la cloison proprement dite, les autres l’or- gane segmentaire attaché à cette cloison. Dans l’état normal, les ébauches de la cloison et de l'organe segmentaire sont donc confondues au moment de leur apparition; plus tard seu- lement, elles se séparent l’une de l’autre, et évoluent en prenant chacune sa forme et sa structure spéciales. — Il n’en est pas ainsi pour les glandes septales; les deux ébauches restent toujours confondues. Il en résulte que ces glandes offrent une organisation tenant à la fois des cloisons et des néphridies ; comme lescloisons, elles s'étendent verticalement de la paroi du corps à la paroi digestive en séparant l’une de l’autre les cavités des deux anneaux; comme les organes segmentaires, leur protoplasme est fusionné en un syncy- tium creusé de canaux. Les glandes septales ont donc- des caractères ambigus; les caractères qui les rapprochent des cloisons les éloignent des organes segmentaires, et réci- proquement. | Un autre fait, qui vient à l’appui de cette opinion, consiste en l’absence d'organes segmentaires vrais dans les anneaux pourvus de glandes”septales; cette absence serait expliquée par la fusion permanente de l’ébauche néphridienne avec l’ébauche cloisonnaire. — Une telle raison serait péremptoire si les cinq anneaux antérieurs à la première paire de glandes septales étaient pourvus d'organes segmentaires; or, ils n’en possèdent jamais, et leurs cloisons sont pourtant des cloisons ordinaires. Il en résulte que si la valeur morphologique des glandes paraît bien être telle que je viens de l'indiquer, les DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 371 faits sur lesquels il est permis de s'appuyer, tout en étant d'une grande importance, n’apportent pas avec euxdes preuves irréfutables. — L'étude des coupes d’embryons parvenus au stade IV montre encore le développement des sotes et des vaisseaux sanguins. On à déjà vu plus haut l’ordre d'apparition des bouquets de soies; les figures 109, 110 et 111 complètent ces notions en montrant comment chacune d'elles prend naissance. Au point où une soie doit se former, l’ectoblaste se déprime quelque peu; cette dépression, fort étroite, s’allonge; l’ecto- blaste qui la tapisse est encore constitué par un protoplasme continu, dans lequel on trouve bien des noyaux disposés avec régularité, mais où l’on ne rencontre aucune trace de parois latérales. Dès que la dépression apparaît, une substance homogène, anhyste, réfringente, se dépose dans sa cavité et la remplit entièrement; l’amas de cette substance est une jeune soie. Cette substance offre des caractères optiques semblables à ceux de la cuticule qui recouvre la périphérie de l’ectoblaste; cette cuticule s’atténue quelque peu vers les bords de la dépression, et semble être remplacée par la soie elle-même. Aussi, cette dernière est-elle en somme un dépôt de substance cuticulaire accumulé dans un espace cylindrique et étroit, et se moulant dans cet espace pour prendre sa forme. — L'identité des caractères optiques n’est pas la seule relation établie entre la soie et la cuticule; toutes deux sont produites par le protoplasme de l’ectoblaste, et toutes deux sont rejetées à la périphérie de ce protoplasme. Les différences portent sur la forme de l’espace où la matière hyaline est déversée, et sur la continuité de cette exsudation. Tandis quelacuticules’accroît aveclenteur, lasoie augmente rapidement d'épaisseur et de longueur. Elle aug- mente d'épaisseur à mesure que la dépression séligère am- plifie son diamètre; maïs cet accroissement ne dépasse pas une certaine limite qui est vite atteinte, et égale la largeur 232 LOUIS ROULE. + de la soie. Elle augmente de longueur parce que la substance qui la constilue est sans cesse produite par le protoplasme de la dépression; les nouvelles portions de celte substance sont ainsi ajoutées à la base des anciennes, et les élèvent peu à peu; il en résulte que ces dernières parties sont reportées à mesure au-dessus de la surface de l’ectoblaste. — Une telle extension continue jusqu'à ce que la soie atteigne sa longueur définitive; l’exsudation s’arrête alors, et la soie, toujours enfoncée par sa base dans la dépression qui lui a donné naissance, se maintient dans ses dimensions et sa forme sans plus s'accroître désormais. Lorsque la soie commence à se développer, l'invagination sétigère offre l'aspect d’une dépression tubulaire étroite, dont la paroi est partout de même épaisseur ; cette épaisseur étant égale à celle de l’ectoblaste environnant, on ne distingue aucune région où la paroi soit plus mince qu'ailleurs. Il n’en est plus de même aux stades suivants. La dépression sétigère s’allonge en déprimant la somato- pleure, et se divise en deux régions : une profonde et ter- minale, qui embrasse la base de la soie, et l’autre externe, tubulaire, qui entoure à la manière d’un fourreau la partie adhérente de cet appendice. La paroi de cette dernière région est très amincie, souvent à peine visible; les noyaux seuls lui donnent de place en place une plus grande épaisseur. — Il n'en est pas de même pour la région profonde, dont la paroi épaisse conslitue une sorte de bulbe enchâssant la base de la soie. Ce bulbe renferme plusieurs noyaux, correspond ainsi à plusieurs cellules, et, sans doute, produit seul la substance ‘exsudée; sa masse est en effet plus grande que celle de la région tubulaire, et sa situation concorde bien avec la prin- cipale direction d’accroissement de l’appendice formé. La soie croît surtout en longueur; il faut donc pour cela que la substance nouvellement produite soit déversée à sa base pour Ja soulever peu à peu; et, étant donnéela position du proto- plasme bulbaire, cette exsudation ne peut provenir que de lui. À mesure que les soies se développent, les cellules de la DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 238 somatopleure situées autour des dépressions ectoblastiques se {transforment en fibres musculaires destinées à faire mouvoir ces appendices. Au début de ce développement, les cellules mésoblastiques sont encore arrondies, ou ovalaires, et n'ont subi aucune modification. Pendant que la soie augmente en longueur et en épaisseur, quelques-unes de ces cellules s’allongent, et s’étirent en un fuseau fortement renflé vers son milieu, attaché d’un côté à la face interne de l’ecto- blaste et de l’autre à la paroi sétigère; la portion renflée renferme le noyau, et cette épaisseur plus grande est due à la présence de ce noyau. Plusieurs autres cellules de la somalopleure subissent aussi une évolution semblable, pen- dant que les premières continuent à s’allonger et à suivre l'extension prise par le fourreau qui entoure la soie. Lorsque ces éléments divers atteignent leur état définitif, la soie est implantée sur une grande partie de sa longueur dans une gaine épaissie vers son extrémité profonde, cette gaine étant la persistance de la dépression ectoblastique pri- mitive. De la paroi de la gaine, et surtout de sa base renflée ou bulbe, partent de nombreuses fibres musculaires, qui vont en irradiant se rattacher à la couche musculaire longitudi- nale placée au-dessous de l’ectoblaste, et permettent à la soie de se mouvoir dans tous les sens. — En somme, dans cet organe assez complexe, la soie elle-même avec son fourreau et son bulbe dérivent de l’ectoblaste, tandis que les fibres musculaires chargées de déterminer ses mouvements pro- viennent du mésoblaste. Les cellules de la somatopleure qui se transforment en fibres musculaires, el se disposent autour des soies (fig. 115), augmentent beaucoup de volume, mais suivant une seule direclion. L'élément primitif est une cellule arrondie (4), limilée par une mince membrane d’enveloppe, et renfermant un protoplasme finement granuleux, les gros grains de vitellus nutritif ayant presque disparu; l'élément contient en outre un noyau dont le réseau chromatique est condensé en un nucléole. Le protoplasme de cette cellule produit de la 234 LOUIS ROULE. substance contractile, qui se dépose en dedans de la mem- brane d’enveloppe, et à la périphérie même du protoplasme, de manière à être en contact direct avec lui; mais ce dépôt ne s'effectue qu'en deux points diamétralement opposés, en deux pôles (4). La substance contractile se laisse aisément reconnaître à son aspect homogène, et à sa teinte un peu moins foncée que celle du protoplasme non modifié. — Étant donnée la situation de cette substance, il est permis de consi- dérer l'élément entier comme une cellule qui augmente sa masse, mais dont les parties nouvellement formées diffèrent par leur structure de celles qui existaient déjà. La jeune fibre musculaire montre donc, à ce stade, une volumineuse partie centrale constituée par un protoplasme finement granuleux contenant le noyau, et deux petits amas terminaux de substance contractile. La jeune fibre, ayant ainsi une forme allongée, possède deux axes médians : l’un, longitudinal, qui passe par les deux amas terminaux; et l’autre transversal, perpendiculaire au premier. L'axe transversal ne croîtra plus désormais, ou du moins ne croîtra que fort peu; mais il n’en est pas de même pour l’axe longitudinal. De nouvelles quantités de substance con- tractile prennent naissance, et s'ajoutent aux deux amas polaires, sans se déposer ailleurs. La fibre augmente de di- mensions dans le sens de sa longueur, et cet accroissement est dû à la substance contractile, le protoplasme granuleux con- servant toujours le même volume. — La cellule mésoblastique primitive prend donc l'aspect d'un fuseau renflé en son milieu, la partie renflée correspondant à la région granuleuse el au noyau, les deux extrémités aux amas de substance contractile. Mais ces derniers, tout en croissant suivant l’axe longitudinal, augmentent quelque peu leurs dimensions transversales, et cela surtout au voisinage de la partie renflée; ils acquièrent bientôt un diamètre égal à celui de cette dernière; puis, lorsque ce stade est atteint, l'accroissement continue encore, de manière à leur faire entourer le protoplasme granuleux. — La fibre possède alors sa structure définitive ; elle est presque DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 239 entièrement constituée par de la substance contractile, qui montre, vers le milieu de l'élément et plongé dans sa masse, un ilot de protoplasme granuleux contenant le noyau primitif de la cellule; ce noyau est désormais celui de la fibre muscu- laire. La substance contractile commence à présenter des stries longitudinales, attestant sa division en fibrilles. Les fibres de la paroi du corps subissent une évolution semblable de tous points à celle que je viens de décrire; la forme et la taille diffèrent seules. Les fibres des bouquets de soies sont relativement courtes, et élargies à leurs deux extré- milés pour s'attacher à la gaine de la soie et à l’ectoblaste; celles de Ia paroi du corps sont plus longues, el terminées en pointe à leurs deux extrémités. La figure 114 représente les divers stades de ce développement. Sans insister outre mesure sur la genèse des fibres muscu- laires, Je tiens à signaler sa ressemblance parfaite avec ce qui se passe chez les Mollusques. Il n'existe ici aucun élément épithélio-musculaire primordial, mais on voit seu- lement des cellules se transformer en fibres musculaires sans montrer de partie épithéliale libre, et la substance con- iractile entourer de tous côtés le protoplasma granuleux de la cellule primitive. — On a déjà vu plus haut de quelle manière apparaissent les ébauches des vaisseaux sanguins; chaque vaisseau est produit par l'union d’un petit nombre d’ébauches séparées dès l’abord les unes des autres, et qui se soudent ensuite; d'autre part, le vaisseau dorsal se montre un peu avant le vaisseau ventral. — Les ébauches distinctes sont toutes placées sur un même axe. Ce fait précise bien le peu d'importance de cette sépa- ration primordiale, qui résulte sans doute de la condensation des processus embryonnaires, les ébauches se formant en même temps sur toute l'étendue de l’espace que doit occu- per le vaisseau. L'état le plus jeune qu’il m'ait été donné de voir, quant à la genèse des vaisseaux sanguins, est le suivant : 236 LOUIS ROULE. Un espace étroit apparaît, sur la ligne médiane du tube digestif (et, suivant le cas, soit à la face dorsale, soit à la face ventrale, puisqu'il existe deux vaisseaux), entre l’endoblaste et la splanchnopleure. Ces deux feuillets, intimement accolés Jun à l’autre partout ailleurs, se séparent de manière à laisser entre eux une petite fente; cet espace est rempli bâtivement par un plasma, d'abord hyalin, coloré ensuite en . jaune clair, puis en rouge brun, mais qui ne renferme jamais de granulations. — À ce stade, l’ébauche du vaisseau, car <'est bien le vaisseau sanguin qui apparaît ainsi, est un vide dépourvu de parois propres, et placé entre l’endoblaste et la splanchnopleure. Ce vide est même plutôt limité par les cellules de la splanchnopleure, qui se sont écartées pour lui donner naïssance, que par celles de l’endoblaste; ce dernier feuillet conserve la régularité de sa paroi périphérique, et sa basale établit entre son protoplasme et l’espace vasculaire une limite fort nette. Aussitôt après que l’ébauche du vaisseau sanguin s’est ainsi manifestée, une paroi propre va s'organiser autour de lui, et cette paroi lui est exclusivement fournie par la splanch- nopleure ; l’endoblaste n’y prend aucune part. L'espace vasculaire primitif est compris entre l’endoblaste, qui le limite à sa base, et le feuillet mésoblastique viscéral, qui s’est soulevé pour le limiter en haut et sur les côtés; ce feuillet l'empêche ainsi de communiquer avec le cœlome, et, depuis le moment de son apparition jusqu'à son état définitif, l'espace vasculaire n’a aucune relation directe avec la cavité générale du corps. Les cellules de la splanchnopleure se segmentent transversalement, de manière à produire un certain nombre de petits éléments, dont le protoplasme perd les grains vitellins qu’il renfermait encore; ce fait les distingue de leurs voisins faisant toujours partie de la splanchnopleure non mo- difiée. — Ces pelites cellules sont destinées à former la paroi vasculaire. Pour cela, elles entourent peu à peu la lumière de l’espace sanguin (fig. 116), et non seulement en haut et sur les côlés, mais aussi en bas, au-dessus de l’endoblaste. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 232 De son côté, l’espace vasculaire, d’abord petit et {triangulaire sur une coupe transversale, devient grand et arrondi. Fina- lement, il est entouré par les cellules dérivées de la splan- chnopleure, et entouré de tous ies côtés, puisque ces cellules se sont même appliquées contre l’endoblaste. Ce dernier ne prend donc aucune part à la genèse de la paroi du vaisseau, et il ne limite l’espace sanguin qu'au moment où ce dernier est encore dépourvu de parois propres. L'ébauche du tronc vasculaire, à ce stade et sur une coupe transversale (fig. 116, pl. XIT), se montre donc comme une petite cavité arrondie, entourée par des cellules assez épaisses et disposées sur une seule rangée, trois ou quatre de ces cellules suffisant pour la circonscrire (sur une coupe trans- versale). Le vaisseau lui-même est comme creusé dans l’épais- seur de la splanchnopleure ; sa face supérieure, limitée par la paroi propre, est en contact direct avec le plasma de la cavité cœlomique, mais la splanchnopleure tend à croître au-dessus d'elle de manière à l’envelopper. L'évolution ultérieure porte sur l'augmentation de calibre du vaisseau, et sur la jonction des tronçons séparés; le plasma contenu dans la cavité vasculaire devient de plus en plus foncé, passe du jaune clair au rouge brun, mais reste tou- jours homogène, et ne renferme ni globules ni granulations. La paroi vasculaire suit forcément l'extension de la cavité, mais le nombre des cellules qui la constituent n'’augmente guère ; il paraît même rester invariable. Aussi, pour suivre cette extension, les cellules de la paroi, d’abord arrondies, s’aplatissent peu à peu, et deviennent d’une minceur exces- sive; la figure 117 montre un état déjà avancé de celte évo- lution. Leur contenu présente aussi quelques modifications ; le protoplasme devient presque homogène, car les fines granulations qu'il possédait disparaissent; les noyaux perdent de leur grosseur et de leur affinité pour les colorants, ils semblent même s’'atrophier et disparaître aussi. La parot vasculaire subit une véritable kératinisation, et, plus tard, lorsque son développement est achevé, elle est seulement 238 LOUIS ROULE. représentée par un trait fort mince, à double contour, ne montrant presque pas de noyaux. A mesure que ces changements s'effectuent, la A pleure s’étendau-dessus du vaisseau, de telle sorte que celui-ci est encore placé, comme au moment de sa formation, entre l'endoblaste et le feuillet viscéral du mésoblaste. Mais il pos- sède une paroi propre, tandis qu'alors ilen était dépourvu. — Le plasma sanguin est produit sans doute par une exsudation des éléments de la splanchnopleure et de la paroi vasculaire. — Trois faits sont à remarquer dans l’histoire de la genèse des vaisseaux sanguins : tout d’abord, les vaisseaux sont dépourvus de paroi propre au moment de leur apparition; ensuite, une paroi propre se développe autour de leur ca- vilé, et cette paroi dérive de la splanchnopleure, du méso- blaste; enfin, les cavités vasculaires n’ont aucun rapport direct, à quelque moment que ce soit, avec la cavité géné- rale du corps.— Ces trois faits, rapprochés de la situation des vaisseaux dans l’organisme (entre l’endoblaste et la splan- chnopleure), permettent de comprendre leur nature réelle _et leur valeur morphologique. Si l’on se reporte à une larve d’Annélide, ne possédant encore que son ectoblaste et son endoblaste séparés par un vaste blastocæle, et si l’on suit Le développement des feuillets mésoblastiques dans la cavité blastocælienne, on voit ces feuillets remplir peu à peu le blastocæle et loccuper presque entièrement. Les deux feuillets mésoblastiques, la somatopleure et la splanchnopleure, limitent une cavité, le cœlome, qui se substitue au blastocæle et ne communique pas directement avec lui. Pour envahir l’espace blastocælien, les feuillets mésoblastiques progressent en longueur et en bauteur; en longueur, ils s'étendent depuis l'extrémité postérieure du corps jusque dans le lobe céphalique; en hauteur, 1ls partent des côtés du corps de la larve, et tendent à entourer l’archentéron en haut et en bas. Les feuillets mésoblastiques dérivent de deux ébauches, l’une placée à droite, et l’autre placée à gauche de l’archen- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 239 téron; lorsque ces ébauches croissent en hauteur, chacune d'elles tend à entourer la face de la paroi archentérique qui lui est adjacente ; et, à mesure que cette croissance s'effectue, le blastocæle diminue et disparaît sur les côtés pour ne plus persister que sur la face ventrale et sur la face dorsale du corps. — Lorsque les ébauches ont toutes deux entouré leur moilié correspondante de l’archentéron, c’est-à-dire au moment où leur croissance en hauteur est achevée, deux cas peuvent se présenter : ou bien ces ébauches s’adossent com- plètement sur les lignes médianes dorsale et ventrale, et le _blastocæle disparaît en ces régions comme il a déjà disparu sur les côtés; ou bien l’adossement est incomplet, et on trouve sur ces lignes médianes quelques restes de la cavité blastocælienne primitive. Comme l'accroissement en hauteur s'effectue sur toute la longueur de la larve, ces persistances blastocæliennes ont l'aspect d'espaces allongés et étroits, étendus depuis l'extrémité postérieure du corps jusqu’à l’ex- trémité antérieure. —Ces faits se trouvent non seulement chez les Annélides, mais:il est permis de se les représenter comme existant (schématiquement au moins) chez tous les Cœlo- mates munis d'un appareil sanguin distinct de la cavité gé- nérale. Lorsque le second cas se manifeste, c’est-à-dire lorsque l’adossement est incomplet, les espaces blastocæliens sont donc situés sur les lignes médianes dorsale et ventrale, dans l'épaisseur des mésentères qui résultent de l’accolement. Ils sont placés, ou entre les deux ébauches mésoblastiques, ou entre ces deux ébauches et l’ectoblaste, ou entre ces deux ébauches et l’endoblaste; mais, quels que soient leurs rapports, ils ne communiquent jamais, élant donnée leur origine, avec la cavité du cælome. Ces espaces blastocæliens occupent donc la situation des vaisseaux sanguins de l'adulte, lorsqu'il existe un appareil sanguin distinct de la cavité gé- nérale ; d'où celte hypothèse, due à Bütschli, que les espaces sanguins, séparés du cœlome et n'ayant aucun rapport avec lui, dérivent du blastocæle. 240 LOUIS ROULE. . Chez les larves d’Archiannélides et aussi, d’après les ob- servalions de Salensky (25) et de Nussbaum (19), chez les embryons de certaines Annélides, on voit d’une manière in- discutable que le vaisseau dorsal et le vaisseau ventral pro- viennent du blastocæle; ils sont compris entre la splanch- nopleure et l’endoderme, et correspondent aux espaces blastocæliens placés entre l’endoblaste et les deux bandes mé- soblastiques adossées pour former les mésentères verticaux. — Cette situation est la même que chez les Enchytræoïdes : seulement, ces derniers manquent de mésentères, et, de plus, leur embryogénie condensée et l'absence de blasto- cœle ne permettent pas de suivre la marche des processus, contrairement à ce qu'il en est pour les Archiannélides. Il est cependant certain, puisque les Enchytræoïdes sont des Oligochætes et par conséquent des Annélides, puisque les vaisseaux sanguins ont en outre la même situation dans l’or- ganisme et les mêmes rapports, que les vaisseaux des Enchy- træoïides ont la même valeur et la même signification mor- phologique que ceux des Archiannélides. Mais cette homologie, qui résulte d’une comparaison établie entre deux groupes d'animaux dont l’un dérive de l’autre, est démon- trable d’une autre manière, et résulte de l'examen même des faits, sans se préoccuper des relations de groupes. Lorsque commence le développement des planulas d'£n- chytræoides, le blastocæle à disparu s’il a existé, mais il est virtuellement représenté par l’espace qu'occupe l’ensemble des cellules mésoblastiques. Si l’on suppose que cet ensem- ble soit réduit à des initiales de taille minime, comme cela est dans une évolution larvaire, il reste entre l’endoblasie et l’ectoblaste une ample cavité qui répond au blastocæle. Par suite de la condensation des processus, le mésoblaste se trouve constitué dès le début par des bandelettes déjà volu- mineuses et complexes.— On conçoit cependant que, si la splanchnopleure et l’endoblaste s’écartent l’un de l’autre pour laisser entre eux un espace vide, cel espace, dépourvu de toute communication avec le cæœlome, correspondra à une DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 241 cavité d’origine blastocælienne, puisqu'il occupera la place virtuelle du blastocæle. Et, bien que le blastocæle n'existe pas réellement chez l'embryon d'Enchytræoïides, tout espace qui se creusera entre les feuillets mésoblastiques d’un côté, et l’ectoblaste ou l’endoblaste de l’autre, aura, par le seul fait de sa situation, la valeur d’une cavité blastocælienne. C'est ce qui arrive en effet. Lorsque les vaisseaux sanguins commencent à apparaître chez les £nchytræoïdes, ils sont représentés par des espaces dépourvus de parois propres, et compris entre l’endoblaste et la splanchnopleure; abstraction faite de leur apparition tardive, ils rappellent ces portions du blastocæle qui constituent le système sanguin, et on doit leur accorder la même signification morphologique. Plus tard, une paroi propre leur est fournie par la splanchno- pleure, par le mésoblaste, et celte paroi est donc homologue de celle, appartenant aux mésentères, qui limite les vais- seaux à origine blastocælienne directe. Et jamais, à aucun stade du développement, les cavités sanguines ne commu- niquent avec les cavités cœlomiques des anneaux. — Les Enchytræoides ont donc un système lymphatique ou plasmatique, représenté par l’ensemble des cavités segmen - taires, et un système sanguin ou hématique représenté par les deux vaisseaux accolés au tube digestif. Ces deux systè- mes ne sont Jamais en relations directes par leurs cavités; le premier est d’origine cœlomique, et le second d’origine blastocælienne. — Ayant ainsi achevé de parfaire les ébauches de presque tous leurs organes, sauf des glandes sexuelles, les embryons se meuvent avec rapidité dans l’intérieur du cocon où ils sont renfermés, et tâchent d'en sortir. Leur corps présente douze ou treize anneaux bien développés, et trois ou quatre segments postérieurs encore à peine indiqués. Les premiers anneaux commencent à être munis de soies; le tube digestif possède une bouche et un anus; les deux plaques nerveuses sont réunies par une commissure, et les centres cérébraux ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VI, 16. — ART. N° 3. 249 LOUIS ROULE. se sont séparés de l’ectoblaste, tandis que le cordon médul- laire lui reste uni. Les glandes septales, les organes segmen- taires, sont déjà visibles, et l’embryon présente done une structure assez complexe. Les premières rangées cellulaires de la somatopleure sont différenciées en fibres musculaires, ce qui permet à l’animal de se mouvoir avec facilité. Tous les embryons d’un même cocon se déplacent rapide- ment, et usent peu à peu, en une région déterminée, la paroi qui les renferme; celle-ci cède, se rompt, et les embryons devenus libres sont expulsés au dehors. 20 Cerveau Soma topleur 4 Fe" seplale Organes segmerlaures è 4 cu ; Anneaux 5 — _—_— : 2 pe en ecrs “posterwurs EX DM ii LED ! 7 LIT Zen D 1 D en, es Dr DEEE Ce De, Fe SSI 3060.. Ë KT Cf :} = Je | on ‘ut 7 ie Ÿ Anus | À Fcloblaste Splanchnopleure ? DisspimenE Fidoblasté, Cordon nerveux Fig. 20. — Schema d’un embryon au stade IV. Ils nagent quelque peu dans l’eau qui les entoure, mais rampent de préférence sur les brins d’Algues voisins ; ils se nourrissent eux-mêmes, ayant tout ce qui leur est nécessaire pour accomplir les fonctions digestives. Leur taille est en- core bien minime, puisqu'ils ont à peine un millimètre ou un millimètre et demi de longueur sur un ou deux dixièmes de millimètre de largeur. Comme ces embryons ne sont pas arrivés à leur entier développement, puisque les glandes sexuelles et le vais- seau ventral manquent encore, et puisque le nombre dé- finitif d’anneaux n'est pas atteint, il serait permis de leur donner le nom de /arves. Mais ce nom est réservé d’habi- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 243 tude à des stades moins évolués, dont la forme diffère assez de celle de l'adulte; et ce n’est pas ici le cas. — Aussi, dans la suite de cet exposé, continuerai-je à employer les termes de « Jeunes » et « d’'embryons », sous le bénéfice des réserves que je viens d'énoncer. $S 4. — Stades depuis la sortie du cocon jusqu'à la présence de 35-36 segments. Ce paragraphe est consacré à l'étude des stades embryon- naires qui s’écoulent depuis la sortie des jeunes hors de leur cocon, jusqu'au moment où le corps possède environ 35 à 36 segments; lorsque l'embryon est parvenu à ce dernier état, 1l offre à peu de chose près la structure de l’adulte, et n'en diffère que par sa taille plus petite, son nombre d’an- neaux encore réduit, et la présence de glandes sexuelles peu développées. — Depuis l'instant de la sortie jusqu’à la genèse du 36° segment, les principaux changements portent sur l'apparition du spermiducte dans le 12° segment, dépourvu jusque-là de tout organe segmentaire faisant communiquer la cavité générale avec l'extérieur. En même temps, les glandes sexuelles commencent à se montrer, mais sans que les anneaux où elles prennent naissance deviennent plus larges que les autres pour former un clitellum; la muscu- lature de la paroi du corps achève son évolution ; le système sanguin se complète, et la structure définitive s’ébauche ainsi peu à peu. Les nouveaux segments prennent naissance, par le pro- cédé déjà décrit, dans l’amas cellulaire mésoblastique situé autour du rectum ; l’ordre d'apparition ne varie pas, et pro- cède toujours d’arrière en avant. Il n'y a donc plus lieu d’insister sur ce sujet ; il est aisé de se représenter l’embryon allongeant son corps, et acquérant de nouveaux anneaux, pendant que les autres organes se modifient d’après les pro- cessus que je vais décrire. Il est possible de diviser en trois stades principaux l’en- semble de cette évolution. Le premier stade comprend les 244 LOUIS ROULE. embryons munis de 15-18 anneaux; le deuxième stade les embryons à 20-22 anneaux; enfin le troisième stade renferme les embryons pourvus de 28-30 segments. Bien entendu, les états intermédiaires à ces stades seront décrits lorsqu'ils offriront des faits intéressants; mais d’une manière générale, une élude approfondie de chacun de ces trois types suffit pour donner une idée nelte de l’évolution accomplie. — J'ignore le temps que meltent les embryons pour passer à l’état adulte depuis le moment de leur expulsion. J’ai bien essayé d'isoler dans des cristallisoirs quelques embryons parvenus à un stade déterminé, afin d'apprécier la durée de leur développement; mais ces embryons, n'étant pas soumis _à des conditions normales, ne tardaient pas à périr. Cette mortalité dans mes cultures m'a forcé, pour étudier les sta- des que je vais décrire, à rechercher sur des Algues fraîche- ment extraites de la mer des embryons à divers âges, afin de les examiner; et ce procédé seul m'a permis de complé- ter mes recherches. Les adultes subissent sans peine pen- dant quelques mois la vie de cristallisoir, et pondent leurs œuis; de même, les embryons renfermés dans les cocons ne paraissent nullement atteints par ce mode de vie; mais il n’en est pas ainsi pour les jeunes mis en liberté. —Pourtantil me semble, mais sans que je puisserien affirmer, car ce sont là des présomptions basées sur quelques faits n'ayant entre eux aucun rapport, que les jeunes £nchytræoïdes mettent environ un mois et demi ou deux mois pour arriver à leur taille définitive et posséder leur structure complète. : — Stade V.— Einbryons à 15-18 anneaux (planche XIL). — C'est l’état le plus jeune après la sortie du cocon; les em- bryons, encore très petits, puisqu'ils atteignent à peine 2 millimètres de longueur, sont minces, filiformes, et cela à un point tel qu'on les confond souvent, à l’œil nu, avec les petits Nématodes qui vivent à côté d’eux sur les Algues. — Sauf par le nombre des anneaux, leur aspect extérieur rap- pelle celui des adultes, avec cette différence que leur taille DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 249 est très minime. Ce stade est surtout caractérisé par l'appa- rition du vaisseau sanguin ventral, et la différenciation pres- que complète de la somatopleure en fibres musculaires. La figure 119 représente une coupe transversale d'un em- bryon muni de 16 anneaux, et qui venait sans doute d’être expulsé hors de son cocon. Il avait pris déjà, relativement aux embryons encore renfermés, une assez grande exten- sion dans le sens transversal, ce que l’on reconnait à ses cavités cœlomiques plus larges et moins obstruées par les éléments libres. —L'ectoblaste continue à s’épaissir, et sa cuticule, qui correspond à un plateau chitinisé, devient de plus en plus nette. Le cordon nerveux ventral proémine for- tement dans la cavité générale; sa face supérieure présente encore, mais d’une manière {rès atténuée, la trace de l’am- ple sillon qui la divisait en deux lobes longitudinaux; sa base d'insertion sur l’ectoblaste est toujours fort large. Les cellules de l’endoblaste, munies de leurs cils vibra- tiles, n’offrent rien d'important; elles sont entourées par la splanchnopleure, dont les éléments ont une forme cubique, et dont le protoplasma ne présente aucune structure parti- culière. — Le vaisseau dorsal existe seul, le vaisseau ventral ne s'étant pas encore montré; la paroi vasculaire, recouverte en dessus par la splanchnopleure, offre la structure indiquée par la figure 117, tout en étant un peu plus mince. — Presque toutes les rangées cellulaires externes de la somatopleure sont transformées en fibres musculaires; la rangée la plus interne, qui limite immédiatement la cavité cœlomique et deviendra l’endothélium péritonéal, conserve seule l'aspect primitif, les cellules qui la constituent sont cubiques, el ser- rées les unes contre les autres. — En certains points existent des amas d'éléments mésoblastiques non encore différen- clés, qui semblent être, ou des agglomérations fortuites de cellules libres, ou des proliférations locales de la région in- terne de la somatopleure. Dans tous les cas, ces amas ne donnent naissance à aucun organe particulier, et n’ont guère 246 LOUIS ROULE. d'importance génétique; 1ls produisent un réseau conjonc- tivo-musculaire fort lâche qui traverse dans tous les sens les cavités segmentaires. — Chez des embryons plus âgés, pourvus de 18 segments, la forme du corps n’a pas changé, et la taille n’a guère aug- menté; mais les organes internes deviennent plus nets et mieux visibles. En examinant les embryons par transparence (fig. 8, pl. I), on distingue fort bien le tube digestif, les glandes septales, les dissépiments, les organes segmentaires, et les vaisseaux sanguins. — Le vaisseau ventral a fait son ap- parition, mais 1l est encore constitué par de petits tronçons non soudés et éloignés les uns des autres; le vaisseau dor- sal par contre, qui s’est du reste montré bien avant le vais- seau ventral puisqu'on le voit déjà sur des embryons non sortis du cocon, est continu sur un assez grand espace.e t n'est interrompu avec une grande solution de continuité que dans la région des glandes septales. Autour de la région an- térieure du tube digestif, les anses anastomoliques, qui re- lient les deux troncs sanguins, sont à peine ébauchées. Il est important de voir que les anses anastomotiques ne se forment pas indépendamment des vaisseaux médians ; elles proviennent au contraire de ces derniers, et apparais- sent comme des bourgeons qui s’allongent peu à peu, ceux du tronc dorsal allant vers ceux du tronc ventral, et réci- proquement, jusqu’à ce qu'ils se rejoignent et se soudent. Les vaisseaux médians seuls ont une origine indépendante, et sont primordiaux par rapport à leurs anastomoses. Ces dernières ne viennent qu'après coup, afin de faire communi- quer ensemble les deux cavités vasculaires médianes, et ne sont pas autre chose que des diverticules de ces cavités; elles n’ont ainsi aucun rapport direct avec le blastocæle. — Une coupe transversale, pratiquée dansle corps d’un em- bryon à 18 segments (fig. 120), montre d’assez grandes dif- férences avec la coupe similaire d’un embryon à 15 anneaux. L’ectoblaste n’a changé ni de structure ni d'aspect; mais les DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 247 métamères s'étant quelque peu accrus dans le sens trans- versal sans que le cordon médullaire subisse un accroisse- ment correspondant, ce dernier paraît plus petit, par rap- port aux autres organes, que dans les stades précédents. La forme s’est aussi modifiée; le sillon supérieur n'existe pres- que plus, et la face qui le portait tend à s’arrondir; le cordon nerveux ventral prend donc son aspect définitif, et sa base d'insertion sur l’ectoblaste se réduit d’une manière corréla- live. La zone à noyaux et la zone à substance fibrillaire con- servent toujours leurs situations réciproques; la première, inférieure, pénètre dans le pédoncule qui joint le cordon nerveux à l’ectoblaste; la seconde, supérieure, n’envoie aucun prolongement vers le centre du cordon médul- laire. Les cellules de l’endoblaste et celles de lasplanchnopleure, mais surtout celles-ci, se sont quelque peu modifiées. — Les premières, toujours munies de leurs cils vibratiles et dispo- sées sur une seule rangée, sont plus longues et plus étroites. — Les secondes ont perdu leur forme cubique et sont devenues cylindriques; leur base est intimement liée à l’endoblaste, mais leur extrémité périphérique est arrondie; de plus, elles étaient autrefois toutes égales et rassemblées en une couche bien régulière, et actuellement elles offrent des différences de longueur assez grandes. Leur protoplasme n’a pourtant pas encore changé de structure. Les deux vaisseaux sanguins sont compris entre la splanch- nopleure et l’endoblaste; tous deux possèdent une région médiane épaisse, qui répond à la portion du vaisseau for- mée en premier lieu, et deux parties latérales plus minces, qui s’insinuent pour ainsi dire entre l’endoblaste et le feuil- let mésoblastique viscéral. Le vaisseau dorsal étant en avance par son développement sur le vaisseau ventral, cet aspect est chez lui plus prononcé. Aïnsi, les deux espaces vas- culaires, toujours limités par leurs parois propres, non seu- lement s'étendent en longueur sur le tube digestif entier, mais encore s’étalent dans le sens transversal, et cette ex- 248 LOUIS ROULE. {ension, qui commence à ce stade, deviendra de plus en Dane accentuée jusqu'à l’âge adulte. * La somatopleure est constituée en entier par des fibres musculaires, sauf sa rangée cellulaire interne. Les cellules de celte dernière se segmentent fort peu, et sont obligées pourtant de suivre l'accroissement en surface de la paroi du corps, qui dérive lui-même de l'accroissement transversal du corps entier; aussi ont-elles perdu la forme cubique qu'elles offraient au début du stade V, et sont-elles devenues aplaties. — La couche de fibres musculaires est plus épaisse sur la face dorsale du corps et sur les côtés que sur la face ventrale ; elle est interrompue, sur la ligne médiane ventrale, par le pédoncule qui relie le cordon nerveux à l’ectoblaste. La couche musculaire, alors fort mince, se replie sur la base du pédonceule, et remonte, en s’amincissant toujours, jusque vers la partie inférieure du cordon nerveux; elle cesse alors, et ne s'étend pas sur la face supérieure. Les organes segmentaires sont plus gros que chez les embryons à quinze segments; plusieurs canaux se sont creu- sés dans leur protoplasme, mais sans que ce dernier perde son caractère plasmodial qu'il conserve jusqu’à l’état adulte. La cavité cœlomique est très ample dans chaque anneau, et ne présente point de mésentères dorsal ni ventral; les éléments libres qu'elle contient rappellent toujours les élé- ments mésoblastiques primordiaux, et n'ont encore subi aucune différenciation. En résumé, les modifications intervenues dans la struc- ture de l'embryon durant ce stade portent simplement sur l'apparition de trois ou quatre anneaux dans la région pos- térieure du corps, sur la formation du vaisseau ventral et celle des premières ébauches des anses vasculaires anasto- motiques ; de plus, le cordon nerveux et la somatopleure commencent déjà à présenter leur structure définitive. Stade VI. nqt-deux anneaux. — Pendant ce stade, qui précède immédiatement celui où les DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 249 glandes sexuelles et le spermiducte vont faire leur appari- tion, les embryons grandissent avec rapidité, ou, en d’au- tres termes, le rapport entre leur accroissement en dimen- sions et l'accroissement en nombre d’anneaux est plus petit qu'aux stades précédents. Alors que, dans les stades IV et V, six ou sept segmen{s avaient pris naissance sans que le corps augmentât beaucoup en longueur et en largeur, il suffit, au stade actuel et aux stades suivants, pour que l'embryon double ses dimensions premières, du temps nécessaire à la genèse de deux ou trois mélamères. Ainsi l'embryon de vingt- deux segments environ, dessiné dans la figure 11 (pl. I), mesure 4 millimètres de longueur sur du ou 4/10 de milli- mètre de largeur. La forme du corps est toujours la même. Les bouquets de soies, ou rames, des anneaux antérieurs sont complets, et possèdent chacun cinq à six soies placées côte à côte; le nombre de ces appendices diminue à mesure que l’on recule vers les anneaux postérieurs. Les rames ne portent plus que deux ou trois soies chacune, et sont en outre {rès proches les unes des autres, sur les anneaux postérieurs et termi- naux. Ce fait n'est pas étonnant, puisque les nouveaux mé- tamères prennent naissance dans la région postérieure du corps, et sont encore {rès petits au moment où leurs soies apparaissent par le procédé connu. Le vaisseau dorsal et le vaisseau ventral sont à peu près continus ; ce dernier s’est bifurqué en avant, sur la face in- férieure du pharynx, mais le vaisseau dorsal n’envoie encore aux deux branches de cette bifurcation que deux anses anas- tomotiques, de telle sorte que ce tronc lui-même paraît aussi bifurqué. — Les autres organes, étudiés sur des embryons vus par transparence, ne montrent rien d'important qui ne soil déjà connu. Le douzième segment est toujours privé d’or- ganes segmentaires ; sa cavité contient seulement de nom- breuses cellules libres, tandis que les anneaux placés en ar- rière de lui possèdent tous des néphridies. 250 LOUIS ROULE. — Une coupe transversale pratiquée vers le milieu d’un anneau (fig. 121, pl. XII) offre une structure déjà bien com- plexe. La cavité cœlomique est fort grande, de sorle que l'ectoblaste et la somatopleure forment à sa périphérie une bande relativement étroite; la paroi du corps, constituée par l'union de ces deux feuillets, possède ainsi ses caractères définitifs. Les cellules de l’ectoblaste, presque distinctes les unes des autres, sont élevées et portent une cuticule bien apparente; leur aspect commence à varier suivant les régions. Sur la face ventrale du corps, les éléments ectoblastiques sont assez courts, semblables les uns aux autres, et présentent la dis- position d’un épithélium pavimenteux simple ordinaire. Par contre, sur la face dorsale et sur les côtés, mais principale- ment dans la région médiane du corps, qui correspond aux onzième, douzième, treizième anneaux, et par suite au fu- tur clitellum, une structure particulière commence à se dessiner.— Certaines des cellules de l’ectoblaste grossissent plus que les autres, et deviennent ovalaires, leur grand axe élant perpendiculaire à la surface des téguments ; leur pro- toplasme granuleux absorbe avec intensité les réactifs colo- rants appartenant à la série des couleurs d’aniline, et prend une teinte presque aussi foncée que celle des noyaux voi- sins ; par contre, avec le carmin, la cochenille, l’hématoxy- line, sa teinte reste beaucoup plus pâle. Ces éléments s’or- ganisent x situ dans le syncytium protoplasmique qui existait aux stades précédents ; ils continueront à croître à mesure que le clitellum prendra naissance et s’amplifiera, et devien- dront les cellules à mucus si nombreuses dans la paroi cli- tellienne. À côté de ces éléments, les autres cellules conser- vent leurs caractères primitifs. Dans les parties du corps où existent les rames de soies, l'ectoblaste est percé de pores, qui correspondent à l’ouver- ture des dépressions séligères, et par lesquels passent les soies pour faire saillie au dehors ou pour se rétracter. Sur les coupes, les soies paraissent plongées dans une masse DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 291 protoplasmique granuleuse, semée de noyaux, et en rap- port direct avec l’ectoblaste ; cette masse n’est évidemment pas autre chose que l'ensemble des dépressions qui ont donné naissance aux soies. — Mais je n’ai pas pu discerner avec certitude si cet aspect est réel, c’est-à-dire si, dans une même rame, toutes les dépressions d’abord séparées se sont soudées les unes aux autres en un seul corps, ou bien s’il est dû aux contractions déterminées par les réactifs. De toutes manières, c'est là un fait peu important, car chaque rame se comporte comme si elle formait une masse unique, et présente une partie centrale portant les soies, et une partie périphérique constituée par des fibres musculaires chargées de produire les mouvements. —On a déjà vu plus haut l'ori- gine et le mode de développement de ces fibres. Le cordon nerveux ventral offre désormais le même as- pect que chez l’adulte; sa face supérieure ne montre plus aucune trace de la dépression médiane. Une coupe transver- sale de ce cordon est tout à fait arrondie, sauf vers la base, où existe le petit pédicule, devenu très étroit et comme res- serré par la somatopleure qui le relie à l’ectoblaste. La di- vision en deux zones, une inférieure munie de noyaux et une supérieure contenant surtout de la substance fibrillaire, est toujours très nette; il semble pourtant que la seconde de ces zones augmente d'importance aux dépens de la pre- mière. Celle-ci renferme relativement moins de noyaux qu'aux stades précédents, et est devenue plus petite. Les deux feuillets embryonnaires internes, l’endoblaste et la splanchnopleure, occupent dans la cavité cœlomique un espace plus considérable que chez les embryons moins âgés, et cette augmentation est surtout due à la splanchno- pleure. Les cellules endoblastiques sont en effet un peu plus élevées dans la figure 121 que dans les figures 119 et 120, qui représentent des coupes d’embryons plus jeunes, mais cet accroissement en hauteur est loin d’être aussi accentué que celui des éléments de la splanchnopleure. Les cellules de l’endoblaste ne contiennent plus aucun bo Da LOUIS ROULE. grain de vitellus nutritif, et montrent seulement, à côté de leur noyau, de nombreuses et très fines granulations qui commencent à se colorer en jaune verdâtre, fait dénotant la présence chez ces cellules de ferments digestifs, et leur donnant par suile un rôle important dans les fonctions de nutrition. Elles présentent toujours de nombreux et longs cils vibratiles. . Les éléments de la splanchnopleure, qui commencçaient déjà à s’accroîlre en hauteur lors du stade V, sont actuelle- ment très allongés, et plus larges vers leur extrémité péri- phérique que vers leur base adhérente à l’endoblaste; ce qui leur donne une forme de massue. — La seule évolution subie chez les Ænchytræoides, comme chez tous les Oligochætes du reste, par le feuillet viscéral du mésoblaste, est la produc- lion de la couche chloragogène, représentée par une seule rangée de cellules; cette couche correspond ainsi à l’endo- thélium péritonéal placé autour de l'intestin des autres An- nélides. Ici, les éléments se sont accrus outre mesure en prenant un aspect particulier; et cet aspect ne se montre qu'assez tard dans l’évolution embryonnaire, puisqu'on ne l'avait pas encore rencontré jusqu ici, sauf au stade V, où 1l commençait à se manifester. La splanchnopleure ne se mo- difie donc en couche chloragogène que lorsque l'embryon possède déjà une vingtaine de segments; jusque là, ses cel- lules restent indifférentes. Non seulement les cellules de la splanchnopleure chan- gent de forme, mais leur protoplasma change aussi de struc- ture. Des granulations assez grosses, colorées en jaune brun, apparaissent dans son intérieur ; de la présence de ces gra- nulations vient du reste le nom de la couche. Les noyaux, au lieu de rester basilaires, sont refoulés dans la portion ex- terne de la cellule, qui est en même temps la portion la plus élargie. La somatopleure a revêtu son aspect définitif, et, réunie à l’ectoblaste, elle constitue la paroi du corps. Elle est tou- jours interrompue sur la ligne médiane ventrale pour laisser DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 253 passer le pédoncule qui relie le cordon nerveux à l’ecto- blaste, et se relève quelque peu sur les côtés de ce pédon- cule. — Le feuillet mésoblastique pariétal est formé de deux couches : une externe fort mince, placée sous l’ectoblaste, et représentée par une seule rangée de fibres musculaires annulaires, souvent à peine visibles chez ces embryons; et une interne, plus épaisse, constituée par plusieurs rangées, quatre à huit suivant les parties du corps, de fibres muscu- laires longitudinales. Celles-ci sont disposées avec la même régularité que chez les Archiannélides, et, si l’on se bornait à les examiner à ce stade ou aux stades suivants, on n’hési- terait pas à leur accorder une origine épithéliale. Or, tel n’est pas le cas ; on sait que la somatopleure n’est autre que le feuillet externe du mésoblaste primitif, séparé de la splanchnopleure par une cavité d’abord semblable à un schizocæle de Mollusque, au moins dans les premiers an- neaux du corps. On sait aussi que certains éléments de La somatopleure se séparent de leur feuillet pour devenir libres dans la cavité cœlomique, à la manière d'éléments mésen- chymateux. On sait de plus que les autres cellules de la so- matopleure, loin d'êlre serrées les unes contre les autres comme dans une couche épithéliale vraie, sont arrondies ou ovalaires, et simplement accolées par quelques points de leur contour. On sait enfin que ces éléments se transforment tout entiers en fibres musculaires, en produisant et déposant de la substance contractile à leur périphérie, et sans jamais présenter l’aspecl d'éléments épithélio-musculaires. — Et ce- pendant celte évolution, qui débute par un caractère mésen- chymateux indiscutable, aboutit à une disposition régulière de fibres musculaires, une disposition presque pinnée, comme si une couche épithéliale primitive s'était pliée et repliée sur elle-même à mesure que ses éléments se trans- formaient en fibres musculaires. Les fibres longitudinales de la somatopleure sont, en effet, placées les unes à côté des autres en séries régulières, dont l'aspect rappelle en tout celui de la musculature des Ar- 254 LOUIS ROULE. chiannélides, pour continuer à comparer entre eux des ani- maux appartenant à un même groupe naturel de Cœlo- males. — La couche de fibres longitudinales est limitée en dedans par l'endothélium péritonéal, qui dérive, on l’a vu, de la rangée cellulaire la plus interne de la somatopleure. Cet endothélium est formé, dans presque tout le corps, par des cellules larges, aplaties, fort minces, dont on ne dis- tingue guère que le noyau sur les coupes, car il est plus épais que le reste de la cellule. Il n’en est pas tout à fait ainsi dans la future région clitellienne ; les cellules de l’en- dothélium péritonéal sont encore cubiques ou peu s’en faut, et conservent l'aspect qu’elles présentaient lors des stades IV et V, afin sans doute de suffire, en s’élargissant, à l’exten- sion que va prendre bientôt cetle partie du corps. — Une telle disposition est une nouvelle preuve de l'existence, dans les embryogénies condensées, d'une tendance préétablie, qui fait que les éléments embryonnaires présentent souvent, lorsqu'ils sont encore à un état indifférent, une structure en rapport avec les organes et Les tissus qu'ils doivent former. Dans ce cas particulier, les glandes sexuelles n’ont pas en- core fait leur apparition; et cependant l’ectoblaste du futur clitellum présente déjà de jeunes cellules à mucus, l’endo- thélium péritonéal est assez épais et en voie de prolifération, alors que rien de semblable ne s'effectue dans Les autres par- ties du corps. + # Les organes Segmentaires ont beaucoup grossi, du moins ceux des neuvième, dixième, onzième, treizième, quatorzième .… dix-huitième segments. Examinés sur des embryons vus par transparence, ils remplissent une assez grande partie de l’espace cœlomique qui sépare linteslin des téguments; chaque anneau en possède deux, placés de part et d'autre de la ligne médiane. Le corps des néphridies est alors une masse épaisse, tronquée en avant, et quelque peu amincie en arrière; les conduits internes, munis de leurs cils vibratiles qui battent constamment, sont réunis en un seul canal flexueux qui tranche en clair sur le fond sombre de l’or- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 259 gane. Ce canal traverse le col, et va déboucher, par un ori- fice élargi en pavillon, dans la cavité du segment précé- dent; le pavillon a l'aspect d’une cuiller, et est également muni de longs cils vibratiles animés de mouvements rapides. Ces organes sont limilés par une paroi très mince. Leur protoplasme ne renferme aucune trace de membranes cellu- laires, et répond ainsi à un syncytium, puisqu'il contient plusieurs noyaux; ces derniers, assez distants les uns des autres, sont grands, et absorbent avec force les réaclifs colorants. Le protoplasme, rempli de fines granulations, est traversé par les canaux néphridiens qui apparaissent, sur les coupes, comme des espaces vides creusés à même, et dépourvus de membrane limitante ; le protoplasme, muni de ses cils vibratiles, est directement baigné par le liquide qui circule.— Les canaux néphridiens prennent naissance par une sorte de raréfaction de la substance protoplasmique, suivie de sa disparition; dans la partie de l'organe où un conduit va se percer, les granulations disparaissent d’abord, puis la substance devient de plus en plus claire, et finit par être entièrement résorbée, en laissant à sa place un vide qui devient le conduit néphridien. Lorsque le vide est creusé, le protoplasme qui l'entoure produit des cils vibratiles, et la structure définitive est ainsi complétée. Je n'ai pu voir, à ce stade, de pores externes aux paires antérieures d'organes segmentaires, qui sont les plus évo- luées, et cela, n1 sur les coupes, ni sur les embryons étu- diés par transparence. Peut-être existent-ils, et je ne lies ai pas trouvés, car, même chez l'adulte, ils sont très petits et fort difficiles à discerner ; mais les documents me font défaut pour l’affirmer. Les deux vaisseaux ont conservé la disposition qu'ils avaient déjà aux stades précédents, mais ils l'ont accentuée davantage ; ils s’étalent en largeur, et embrassent à eux deux plus des deux tiers de la périphérie de l’endoblaste. — Quant aux éléments libres dans les cavilés segmentaires, le seul fait à signaler est l'apparition, dans le protoplasme de plu- 256 LOUIS ROULE. sieurs d’entre eux, de volumineuses granulations semblables à celles des cellules de la splanchnopleure, mais moins co- lorées où tout à fait incolores. Le protoplasme de ces élé- ments suit donc une évolution presque analogue à celle subie par la couche chloragogène. Stade VIE. — £mbryons de vingt-deux à trente anneaux. — Les jeunes Enchytræoïdes s'accroissent beaucoup durant ce stade ; ils mesurent, à son début, environ 4 à 5 millimètres, et atteignent vers la fin 8 millimètres ; leur largeur, toujours proportionnelle à la longueur, égale environ le dixième de cette dernière. Le stade VIT est principalement caractérisé par l’apparition des glandes sexuelles et du spermiducte. Ces organes ne se montrent qu’assez tard dans l’évolution; malgré mes recherches, je n’ai point vu leurs ébauches chez des embryons plus jeunes, et il me paraît probable qu’elles n'existent pas: elles prennent naissance seulement lorsque le corps du jeune possède environ vingt-deux anneaux. La paroi du corps, représentée par l’ectoblaste et la so- matopleure, a déjà revêtu son aspect définitif au stade pré- cédent, et n’a pas changé de structure ; elle ne subira plus désormais aucune modification, sauf dans la région clitel- lienne.— La partie de l’ectoblaste placée toul à fait à l’extré- mité antérieure du lobe céphalique est formée de cellules cylindriques allongées, disposées sur plusieurs rangées. Les sillons circulaires, qui correspondent aux dissépiments In- ternes et produisent l'aspect annelé des téguments, sont toujours produits par une diminulion locale d'épaisseur de l’ectoblaste, diminution qui n’atteint jamais la couche de fibres musculaires sous-jacente. Le ganglion sus-æsophagien est une masse volumineuse, située au-dessus du pharynx dans la région antérieure du corps; il s'étend depuis le lobe céphalique jusqu’au troisième anneau, et remplit une grande partie de la région dorsale de ces segments. Sa forme est celle d'un ovoïde, plus étroit en avant qu'en arrière, et échancré sur la ligne médiane DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 257 dans sa portion postérieure. Cette échancrure, qui manque “en avant, divise le cerveau en deux lobes égaux ; elle répond à la persistance du sillon primitif, qui existait lorsque le ganglion sus-æsophagien était encore à l’état d’ébauche. La présence de celte échancrure indique donc une dualité: de composition, dualité qui a disparu par la soudure sur la ligne médiane des deux moitiés primordiales, mais a laissé une trace -de son ancienne existence. — Le centre cérébral nerveux est limité par une mince membrane d'enveloppe, qui était autre- fois en continuité avec la basale de l’ectoblaste, lorsque le cerveau prenait naissance, et à laquelle on doit, par suite, accorder la même valeur. Des fibres musculaires, dont on a vu plus haut l’origine, s'insèrent sur cette membrane, et vont se souder d'autre part à la paroï du corps, dans le lobe céphalique et les premiers anneaux ; ces fibres tiennent le cerveau suspendu dans les cavités segmentaires où il est “placé, et servent aussi à le faire mouvoir. — Le cordon ner- veux ventral n'offre aucune modification. L'intestin et la splanchnopleure, celle-ci transformée en couche chloragogène, ne présentent aucun fait intéressant. — Les dissépimenis se sont étendus jusque sur la face ventrale du corps, alors qu’au début on les voyait sur la face dor- sale seule. Ils ont laspect de lames minces, verticales, revêtues sur leurs deux faces par l’endothélium péritonéal dont on a vu plus haut l’origine, et présentent en leur axe médian une mince couche conjonctive. Au stade VIL les cloisons ne sont pas ailées plus loin dans leur évolution, même celles de la région antérieure du corps, qui concou- rent à limiter les premiers anneaux. Leur endothélium péri- tonéal se continue sur les côtés avec la couche chlorago- gène qui revêt l’endoblaste, et avec l’endothélium périto- néal qui tapisse la paroi interne de la somatopleure. Les glandes septales, qui tiennent la place des dissépiments situés entre les cinquième et sixième, sixième et septième, septième et huitième anneaux, sont plus grosses et plus épaisses qu'aux stades précédents, mais montrent toujours ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 147. — ART, N° 3. 238 LOUIS ROULE. les mêmes rapports; la paire postérieure, située entre les septième et huitième segments, prend un plus grand accrois- sement que les autres, et envoie au-dessus de la face dorsale du tube digestif et en avant deux expansions cylindriques. La structure de ces glandes n’a pas changé ; leur protoplasme sympodial, renfermant plusieurs noyaux, est creusé de ca- naux nullement limilés par une paroi propre, et semblables ainsi aux conduits des organes segmentaires; mais, conirai- rement aux observations de plusieurs auteurs, je n’ai jamais vu ces canaux présenter un tapis de cils vibratiles. —Dureste, l’'homologie entre les conduits néphridiens et les espaces vides des glandes septales est déjà assez grande, étant don- née leur ressemblance d'origine et de structure, pour que la présence ou l'absence de cils vibratiles soit un fait important à mentionner. — La paroi des glandes septales ne m'a jamais montré de revêtement péritonéal; cette paroi est fort mince, à contour simple, et semblable à celle des organes segmen- taires. Les embryons arrivés au stade VII montrent sur chaque côté du corps, en arrière de la première paire de glandes septales, une petite dépression ectoblastique, tubulaire, dont le fond serait un peu plus large que l’orifice externe (fig. 15, pl. Il). Ces deux invaginations sont les ébauches des organes nommés par les auteurs réceptacles séminaux, et dont je n'ai pu connaître le véritable rôle. Les deux vaisseaux sanguins sont continus d’une extrémité du tube digestif à l’autre, et leurs divers tronçons sont sou- dés. En arrière, autour du rectum, des anses anastomotiques circulaires, ayant la forme d’un anneau, joignent le vaisseau ventral au vaisseau dorsal. En avant, le premier de ces troncs vasculaires se bifurque, et ses deux branches se por- tent quelque peu sur les côtés du tube digestif; le vaisseau dorsal envoie à chacune de ces branches deux anses anasto- motiques repliées sur elles-mêmes, afin d'offrir une plus grande longueur totale tout en ne parcourant qu'un espace restreint. La première paire de ces anses est tout à fait ter- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 259 minale; on l’a vue apparaître au stade précédent, mais elle n’était pas ployée et ne décrivait pas plusieurs ondulalions. La seconde paire est située à peu de distance en arrière de la première. | — Le fait le plus important à éludier chezles embryons par- venus au stade VIT est la genèse des glandes sexuelles et de la paire de spermiductes ; il est ici nécessaire de bien préci- ser les processus, afin de résoudre avec certitude la ques- tion si controversée de l’homologie des organes segmen- taires et des conduits sexuels. L’embryon d'Enchytræoïdes, au stade précédent, alors que son corps porte vingl à vingt-deux anneaux, possède des organes segmentaires dans tous les anneaux placés en arrière du huitième, sauf dans le douzième ; ces organes sont bien développés dans le onzième et Le treizième, mais point dans le douzième. Les néphridies présentent toutes, sauf bien en- tendu celles en voie de formation dans la région postérieure de l'animal, un corps creusé de canaux vibraiiles commu- niquant les uns avec les autres, et communiquant aussi avec le pavillon ouvert dans la cavité de l’anneau antérieur — antérieur à celui qui renferme le corps même de l'organe segmentaire —. Le premier phénomène qui se produit, au début du stade VIT, lorsque l'embryon possède environ vingt-deux an- neaux, est la disparition de la paire de néphridies située dans le onzième segment. Ces organes perdent d’abord leur pavillon, qui diminue peu à peu de grosseur, et se résout en granulations devant libres dans le plasma de la cavité du dixième métamère; le corps, renfermé dans l’intérieur même du onzième anneau, subit la même évolution régres- sive. Réduit à une masse granuleuse accolée au dissépiment antérieur du onzième anneau, les canaux qui le parcourent s'obstruent peu à peu, sa masse diminue de grosseur, son proloplasme se résout en grains qui deviennent libres, et finalement l'organe disparaît sans laisser aucun vestige. — 260 LOUIS ROULE. À ce moment, le onzième et le douzième anneaux sont donc . dépourvus d'organes segmentaires, le douzième, parte que jamais il n’en est apparu dans son intérieur, et le onzième parce que ceux qui existaient autrefois ont été résorbés. Les glandes sexuelles et le spermiducte vont alors pe nais- sance en même lemps. Les glandes mâles se forment dans le onzième métamère, les glandes femelles et les spermiductes dans le douzième. Ce dernier fait est des plus importants, puisqu'on voit le conduit vecteur des spermatozoïdes apparaître dans un anneau dé- pourvu jusqu'alors de néphridies. — Les ébauches des glandes sexuelles et des spermiductes sont toujours paires; le onzième segment renferme deux ébauches testiculaires placées! de part et d'autre du tube digestif, et le douzième contient à son tour deux ébauches ovariennes et deux ébauches de ca- naux vecteurs mâles. Un autre fait, commun à tous ces or- ganes, est leur insertion sur le dissépiment antérieur du métamère auquel ils appartiennent. La figure 20 (pl. TT) montre, à un faible grossissement, l'aspect offert par la région sexuelle d'un embryon à vingt- quaire segments, après la disparition des néphridies du onzième anneau, et au moment de la naissance des ébauches sexuelles. Le dixième et Le treizième métamères renferment des organes segmeniaires bien développés et complets; le onzième métamère contient, en n’examinant qu’une des moitiés du corps, une petite masse hyaline qui est l’'ébauche du testicule ; et, dans le douzième métamère, on observe côte à côte deux petits groupes cellulaires transparents, dont l’un est l’ébauche du spermiducte, et l’autre l’ébauche de l'ovaire. | Les détails de cette genèse sont plus nets dans la figure 19 (pl. Il). L’ébauche testiculaire est un petit corps, formé par trois ou quatre cellules, accolé au dissépiment antérieur du onzième anneau. Les parties de ces cellules qui sont en con- tact les unes avec les autres ont fusionné leur protoplasme en un syncylium; mais les parties périphériques sont encore DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 261 distinctes, et apparaissent comme des bosselures plus ou moins prononcées; l'aspect rappelle donc quelque peu celui des organes segmentaires jeunes. — Étant donnée la situation de l'ébauche testiculaire, il est indiscutable que cette dernière dérive de l’'endothélium péritonéal qui revêt la face posté- rieure du dissépiment ; une ou deux cellules de cet endothé- lium prolifèrent, et le résultat de cette prolifération produit le testicule. Dans tous les cas, la jeune glande sexuelle mâle n’a aucun rapport direct avec la néphridie résorbée du onzième anneau ; celle-ci s’est réduite en fines granulations, et n’a donné naissance à aucune partie du testicule. La glande mâle dérive de l’endothélium péritonéal seul. Les mêmes considérations sont applicables aux organes du douzième anneau ; les ébauches de l'ovaire et du spermiducte sont également représentées par des petits amas cellulaires, mis en relation directe avec l’endothélium péritonéal qui revêt la face postérieure du dissépiment antérieur de ce mé- tamère.— Le jeune spermiducte est en tout semblable à une très jeune néphridie, et, de plus, 1l occupe exactement la place qu'aurait l'organe segmentaire s’il s'était développé dans le douzième anneau. Il est constitué par trois ou quatre cellules à contenu clair et réfringent, dont les portions mises en contact sont fusionnées en un syncytium, et dont les par- ties périphériques forment des bosselures. La cellule anté- rieure traverse le dissépiment et pénètre, en écartant les éléments endothéliaux, jusque dans la cavité du onzième segment ; elle se comporte ainsi comme la cellule antérieure des jeunes néphridies. — L’ébauche du spermiducte est située presque au point de jonction du dissépiment avec la soma- topleure, comme une ébauche d’organe segmentaire. Il est donc certain que le conduit vecteur mâle n’est autre que l'organe segmentaire du douzième anneau, qui apparaît un peu après les autres, à cause sans doute de ses fonctions particulières, et prend une forme spéciale, en rapport avec le rôle qu'il est appelé à jouer. J'ai dit plus haut que je n'avais pu voir avec netteté s’il 262 LOUIS ROULE. exislait, dans les anneaux dérivant de l’unique cœlome anté- rieur et pourvus de néphridies (neuvième, dixième, onzième, treizième), un cordon cellulaire continu, semblable à celui des anneaux postérieurs, et destiné à se fragmenter pour produire les organes segmentaires. L’altération des processus embryonnaires est telle, chez les Enchytræoïdes, qu'il n’y au- rait rien d'étonnant à ce que les cellules de ce cordon continu ne se laissent distinguer par aucun caractère apparent des cellules voisines, si ce cordon existe en réalité. — Les organes segmentaires m'ont paru provenir des éléments de la cloison voisins de la somatopleure, et la touchant presque; c’est le seul fait précis qu’il me soit permis d'affirmer. Et il suffit pour ma démonstration, puisque l’ébauche du spermiducte dérive des mêmes cellules, et est située à la même place, que celle des néphridies. — La question de la continuité primor- diale est ici secondaire. Je pense toutefois que cette conti- nuité existe, à un stade où les éléments de la somatopleure sont encore tous semblables, et où nos moyens techniques actuels ne permettent pas d’apercevoir des différences. Si la continuité est plus nette dans les anneaux postérieurs, ce fait est dû à la transparence et à la taille plus grande des cellules du cordon népbridien; elles tranchent ainsi sur l’ensemble des éléments mésoblastiques. L’ovaire est constitué par deux ou trois cellules distinctes, placées à côlé du jeune spermiducte, et qui proviennent de l’endothélium péritonéal. L'origine et la situation sont donc les mêmes pour la glande sexuelle mâle et la glande femelle. — À un état un peu plus avancé (fig. 25, pl. IT), le testicule est devenu plus volumineux, ainsi que le spermiducte et l'ovaire. Ce dernier offre une masse ovoïde, constituée par huit ou dix cellules accolées, mais bien distinctes les unes des autres, qui renferment toutes un noyau fort gros, el sont dans un élat évident de prolifération. — L'aspect est bien différent pour le testicule ; les éléments qui entrent dans sa composition se fusionnent les uns avec les autres en un syncy- tium, et leur protoplasma devient grossièrement granuleux. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 263: Ces granulations n’en sont pas en réalité; elles correspondent à des particules nucléaires très petites, qui proviennent de la division des noyaux primitifs, et appartiennent à de jeunes spermoblastes. — Quant au spermiducte, sa masse s’est allon- gée, tout en conservant sa forme bosselée ; la cellule anté- rieure, qui traverse la cloison pour faire saillie dans la cavité du onzième anneau, a augmenté de dimensions, et s’est di- visée en deux ou trois parties. — Les deux anneaux sexuels renferment dans leur cavité, à côté des ébauches qui viennent d’être décrites, de nombreux éléments libres qui, par leur accumulation, empêchent parfois de bien suivre les pro- cessus du développement. — Les figures 21 et 24 montrent un étatencore plus avancé; ces deux figures ont été dessinées sur un jeune individu possédant une trentaine d’anneaux; elles permettent de bien connaître l'aspect présenté par les ébauches sexuelles à la fin dustade VIT. — La première modification qui frappe dès l’abord est l’atrophie de la paire de néphridies située dans le treizième segment, qui fait suite à celui renfermant le spermiducte et l'ovaire. La résorption n'est pas encore complète, mais elle est en voie de s’effectuer; le pavillon vibratile, qui s’ouvrait dans la cavité du douzième anneau, a disparu; le corps n’est plus constitué que par une masse granuleuse, encore creusée de canaux où battent les cils vibratiles, et suspendue par son extrémité antérieure dans l’intérieur du treizième métamère. L'ébauche testiculaire a beaucoup accru ses dimensions; en s'étendant, elle touche presque le dissépiment postérieur de l’anneau qui la renferme. Elle s’est divisée par une fente longitudinale en deux parties, en deux lobes juxtaposés; de plus, un troisième lobe, encore bien petit, commence à prendre naissance dans sa région antérieure. Le testicule augmente donc beaucoup de volume, et cela avec rapidité; il tend à remplir la cavité du onzième segment, et bientôt cet espace ne lui suffisant plus, il pénétrera dans la cavité du dixième. — La paroi externe des lobes testiculaires est à 264 . LOUIS ROULE. peu près plane ; ellene présente donc plus les bosselures pri- mitives. Quant au contenu, ilest toujours représenté par un syncytium protoplasmique renfermant de nombreux noyaux. très petits en voie de division; la grande quantité de ces noyaux donne à l’ensemble son aspecl granuleux. La paroi mince qui limite les lobes testiculaires est du: même ordre que celle des organes segmeniaires ; elle pro-, vient de la réunion en une couche continte des portions, externes de membranes appartenant aux cellules de l’ébau-. che; ces cellules se sont fusionnées par leur partie interne, et les membranes ont disparu dans ces régions, mais il n’en a pas été de même pour la périphérie, où les membranes ont été conservées en se soudant les unes aux autres, et for- mant ainsi aulour de l’ébauche une paroi unique et continue. - Le spermiducte commence à revêtir son aspect définitif, c’est-à-dire à se montrer semblable à un canal, ouvert d’une part dans la cavité du onzième anneau pour y recueillir les. spermatozoïdes, et débouchant d’autre part à l'extérieur, sur les côtés du douzième, pour rejeter au dehors les élé-, ments fécondateurs; on le voit, les rapports des spermiduc- tes avec les cavités et les parois des métamères auxquels ils appartiennent sont semblables à ceux qu'affecteraient les né- phridies du douzième segment. — Le conduit vecteur mâle, offre donc à considérer : un pavillon ouvert dans la cavité du, onzième anneau; un corps situé dans l’intérieur du douzième anneau; et un orifice externe placé sur les côtés de ce der- nier anneau. On sait qu'il existe deux spermiductes, l’un placé à droite et l’autre à gauche du tube digestif, apparte- nant tous deux au douzième segment; l’évolution de l’un ne diffère en rien de celle de l’autre. Le pavillon est volumineux, relativement au pavillon d'une néphridie ordinaire ; il a une forme hémisphérique, et ne montre aucun cil vibratile ; ces derniers ne feront leur appa- rition que plus tard. Il est déprimé en son centre par une vaste et profonde cavité, qui communiquera avec le large conduit dont le corps est percé, mais ce conduit n'a pas DÉVELOPPEMENT DES :ANNÉLIDES. 265 encore pris naissance. Le pavillon dérive de la cellule anté- rieure de l’ébauche, qui traversait la cloison pour s'ouvrir dans le onzième anneau; cette unique cellule a donc gran- dement proliféré. A ce stade, la paroi du pavillon montre une certaine quantité de petites bosselures, correspondant cha- cune à un élément cellulaire. | Le corps du spermiducte, chez un embryon muni d’une trentaine d’anneaux, est cylindrique, et quelque peu ployé sur lui-même dans la cavité du douzième segment; cet aspect est dû à l’extension considérable prise par le spermiducte, qui le force à se replier un grand nombre de fois. Son dia- mètre transversal n'est pas égal partout, et se montre au contraire fort variable. L'aspect bosselé, encore bien net dans la figure 23, a disparu; les cellules se sont fusionnées les unes avec les autres, et la paroi est parfaitement lisse. — Cette paroi est de même nature et de même origine que celle des organes segmentaires vrais. L'intérieur du corps du spermiducte est occupé par un protoplasma hyalin, quel- que peu granuleux, ne renfermant encore aucun canal. Le conduit vecteur mâle s’est mis en rapportavec la paroi du corps par son extrémité postérieure, et traverse la soma- topleure, sans contracter de relations avec elle, pour se mettre en contact avec l'ectoblaste. Cette région de jonction deviendra le ‘pénis, et portera l’orifice extérieur du spermi- ducte ; comme il existe deux spermiductes, il se forme deux pénisplacés surles côtés mêmes du douzième ségment.— Afin de suffire à la genèse de l’appendice copulateur, qui est assez volumineux, et à son propre accroissement, la base (extré- muté postérieure) du spermiducte est plus grosse que le reste de l'organe; les cellules qui la constituent ne sont pas fusion- nées, conservent à l’ensemble un aspect bosselé, et sont dans un état évident de prolifération active. L'ébauche ovarienne, placée entre le spermiducte du même côté et le tube digestif, est représentée à cette époque par un corps hyalin, allongé, ovalaire, soudé par son extrémité antérieure à la paroi péritonéale qui lui a donné naissance, 266 LOUIS ROULE. et s'étendant en arrière jusqu’à toucher presque le dissépi- ment postérieur du douzième anneau; sa largeur est plus grande en arrière qu’en avant. Le jeune ovaire est formé de cellules distinctes, nullemeni fusionnées, mais accolées d’une manière assez étroite pour queleur pression réciproque leur donne un contour polyédrique. Ces cellules sont des ovo- blastes en voie de segmentation; les plus grosses d’entre elles sont situées dans la région postérieure de l'ovaire, et les plus petites dans la région antérieure. — Ce fait montre que l'accroissement de la masse ovarienne et la production de nouveaux ovoblasles s'effectuent au niveau de la cloison an- térieure, dans cette partie même où quelques cellules de l’endothélium péritonéal ont évolué pour donner naissance à l'ébauche de la glande femelle. Les cellules antérieures renferment un noyau volumineux, et se multiplient avec activité ; le noyau des grosses cellules postérieures est plus petit; de plus, quelques corps nucléaires apparaissent en outre dans le protoplasme de ces derniers éléments, mais leur étude sera faite avec celle de l’ovogenèse (voir stade IX). — En résumé, lors du stade VII, pendant que le nombre des anneaux passe de vingt-deux à trente, les glandes sexuelles et le spermiducte font leur apparition. Le testicule se développe dans le onzième segment, et l'ovaire dans le douzième, ce dernier étant dépourvu de néphridies, et les organes similaires du onzième mélamère ayant disparu par résorption avant la genèse de la glande mâle; les deux ébauches sexuelles prennent naissance aux dépens de l’en- dothélium péritonéal des cloisons. Quant aux spermiductes, ils se forment au lieu et place des organes segmentaires du douzième anneau, et leur correspondent selon toute évi- dence. $ 5. — Du stade à trente-deux et trente-six anneaux jusqu’à la mort de l'individu. Ce paragraphe est consacré à l'étude de ce-qu'il est per- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 267 mis d'appeler l’état adulte des Enchytræoïdes ; l’état adulte proprement dit répond pourtant à un stade passager durant lequel les glandes sexuelles complètent leur structure pour effectuer la fécondation. Avant ce moment, les individus continuent à croître el à se développer; la fécondation étant opérée, leurs organes subissent une sorte de dégénérescence qui continue jusqu’à la mort. — Il sera donc nécessaire de diviser en trois stades l’examen des faits décrits dans ce paragraphe. Le premier stade (VIII) renferme l'exposé des modifications survenues dans la structure lorsque le jeune possède en moyenne trente-six anneaux. Le second stade (IX) est consacré à l'étude de la maturité sexuelle, de l’ovoge- nèse, de la spermatogenèse et de la fécondation; c’est là le véritable état adulte, pendant lequel les individus possèdent de quarante-cinq à cinquante métamères. Enfin, le dernier stade (X) contient les quelques renseignements qu'il m’a été donné de rassembler sur la dégénérescence finale. Stade VIIL. — /ndividus ayant trente-deux à quarante an- neaux (pl. IIT et XIII). — À ce stade, lesjeunes Enchytræoides mesurent environ 1 centimètre de longueur ; ils sont donc bien près d’avoir acquis leurs dimensions définitives, et ne diffèrent de l’adulle que par l’état de leurs glandes sexuelles ; ces dernières n’ont pas encore atteint leur développement complet, et la région qui les renferme ne s’est pas élargie en un clitellum. Mais, ces organes mis à part, toutes les autres parties de l’économie ont revêtu leur dernier aspect; les tissus ne sont plus constitués par des éléments embryon- naires, c'est-à-dire par des éléments en voie de prolifération complète ; ces derniers ne se divisent plus, et tous les appa- reils persistent tels qu’ils sont, à peu de chose près. Aussi est-1l permis d'employer dès maintenant les termes qui pré- cisent cette inertie au point de vue de la prolifération, et montrent que les processus embryogéniques sont parvenus à leur complet achèvement; le mot ectoderme sera donc mis à la place de ectoblaste, comme ceux de mésoderme 268. | LOUIS ROULE. et d’endoderme à la place de mésoblaste et endoblaste: L’ectoderme et ses appendices ne diffèrent par aucun ca- ractère de l’ectoderme et des soïes des embryons un peu plus jeunes ; tout au plus la cuticule s’est-elle quelque peu: épaissie. Les centres nerveux, ayant acquis leur forme défi- nitive dès les stades précédents, ne présentent aucune modi- fication. Seul, le cordon ventral, dans la région postérieure du corps, où naissent les nouveaux segments, présente des processus évolutifs semblables à ceux déjà décrits; cette ré- gion est encore en voie de développement. | Pourtant, si l’ectoderme n'offre aucune trace de change- ment dans toute l'étendue du corps, il n’en est pas ainsi pour. les anneaux munis de glandes sexuelles. L’ectoderme y est plus épais qu'ailleurs ; mais cette augmentation en hauteur n'est visible que sur des coupes, et ne peut guère être ap- préciée à l'œil nu; ces anneaux ne sont pas encore dilatés en un clhitellum. — A mesure que les cellules ectodermiques s’accroissent en hauteur, certaines d’entre elles, chargées de sécréter le mucus qui constituera la coque protégeant les œufs, bien reconnaissables à leur forme ovoïde et à leur con- tenu granuleux, et qui s'étaient déjà montrées aux stades précédents, continuent à prendre naissance. Le tube digestif et l’'endoderme ne présentent aucun fait intéressant. La somatopleure, limitée sur sa face interne par l’endo- thélium péritonéal, est toujours formée par une rangée ex- terne de fibres annulaires et plusieurs rangées internes de fibres musculaires longitudinales. Ja rangée externe est plus aisée à reconnaître que précédemment, car ses fibres ont grossi, et absorbent avec plus d'intensité les réactifs colo- rants. La couche interne, constituée par les fibres longitu- dinales disposées sur six à huit rangées en moyenne, ren- ferme un certain nombre de noyaux, dont chacun appartient à une fibre, et se colore un peu plus que la substance con tractile. — Les fibressont étroitementunies les unesaux autres par un ciment assez abondant, visible sur les coupes, et DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 269 semblable à un substratum de couleur pâle sur lequel les sec- tions des cellulesmusculaires tranchent en foncé. Ce eiment se continue avec la substance conjonclive des cloisons dans les régions d'insertion de ces dernières sur la somato- pleure, et ce fait dénote ainsi sa véritable nature. Les fibres longitudinales sont tou'ours disposées avec régularité ; elles suivent toutes la même orientation, sauf au niveau des cloi- sons, où certaines abandonnent leur direction première pour pénétrer dans l’intérieur même du dissépiment. | Les cloisons sont devenues épaisses et cela surtout dans la région antérieure du cerps. Leurs deux faces sont revêtues par l’endothélium péritonéal; ce dernier se relie d’un côté à l’endothélium de la somatopleure et de l’autre à la couche chloragogène. Les deux couches endothéliales, constituées par des cellules aplaties, sont séparées l’une de l’autre par une zone assez épaisse de tissu conjonctif, dont on connaît l'origine. Ce tissu, produit au début par les cellules mêmes de l’endothélium, renferme quelques éléments figurés, dont plusieurs se sont transformés en fibres musculaires. Ces dernières sont nombreuses surtout vers l'insertion du dissé- piment sur la somatopleure, et pénètrent dans cette der- nière en s'intercalant à ses propres fibres. Les cellules de la splanchnopleure ou de la couche chlo- ragogène, pour lui donner son nom définitif, sont toujours disposées en une seule couche. Elles n'ont pas augmenté en nombre, mais elles se sont accrues en largeur afin de suivre l'extension croissante prise par le tube digestif ; elles deviennent ainsi ovalaires, avec une région inférieure étirée en un pédicule qui s'attache à la basale de l’endoderme. En certains points même, et notamment dans la région cli- tellienne, les cellules sont presque cubiques. — Mais, quelle que soit leur forme, leur structure intime est semblable partout. Leur protoplasme a subi une dégénérescence qui l'a fait se résoudre en un lacis très serré de petits tractus, limitant des aréoles fort étroites; ces aréoles contiennent les granulations colorées qui donnent sa teinte à la couche 270 LOUIS ROULE. chloragogène. Traitée par divers réactifs, cette couche.se colore à peine, tandis que l’endoderme prend une teinte franche et nette; aussi apparaît-elle comme une bande pâle, souvent à peine perceptible, placée autour de ce dernier. Les deux vaisseaux sanquins ont pris de l’extension. Chez les embryons plus jeunes, ils s’étalaient déjà en largeur, et s'insinuaient entre l’endoderme et la splanchnopleure, tout en conservant leur partie médiane assez dilatée et presque arrondie. Cet aspect a persisté et s’est accentué même. Les deux vaisseaux offrent à considérer une partie médiane qui est le tronc véritable, et deux régions latérales placées de part et d’autre de la ligne médiane. Ces deux dernières ne sont à vrai dire qu'une réunion d’espaces laissés entre la splanchnopleure et l’endoderme, et remplis par le plasma sanguin. Le diamètre du tronc vasculaire, et ces faits s'appliquent tout aussi bien au vaisseau dorsal qu’au vaisseau ventral, est de beaucoup plus large que la splanchnopleure n’est épaisse ; aussi ce tronc soulève-t-il cette dernière, sur les lignes médianes ventrale et dorsale du tube digestif, pour faire saillie dans Les cavités des segments. La splanchno- pleure recouvre la paroi vasculaire, mais ses éléments y sont plus petits qu'ailleurs ; ils deviennent de plus en plus réduits à mesure qu ils sont plus près de la partie saillante du vais- seau, et manquent même sur le sommet de cette partie sail- lante. Il semble, dans un assez grand nombre de cas, que la splanchnopleure forme une couche d'endothélium autour de la paroi vasculaire. Quant à cetle paroi propre, qui, on le sait, dérive origi- nairement de la splanchnopleure, elle est constituée par un petit nombre de cellules plates fort minces, dont le proto- plasme s’est kératinisé, et dont le noyau est très réduit. II est souvent difficile de la discerner de la basale du feuillet mésoblastique viscéral ou de celle de l’endoderme ; mais, par contre, elle est bien nette dans les points munis de DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 271 noyaux, car la présence de ces derniers donne à la cellule une épaisseur plus grande. Les espaces remplis de plasma sanguin entourent parfois l’'endoderme entier, et séparent ce dernier de la couche chlo- ragogène. Ils proviennent sans aucun doute des parties laté- rales que j'ai vues se former aux stades précédents; mais, au stade actuel, il est malaisé de voir leurs connexions avec le tronc vasculaire, car la paroi de ce dernier est parfois fermée de leur côté. Lorsqu'ils prenaient naissance, ils pos- sédaient une paroi propre, fort mince il est vrai, mais en- core visible, et ils en paraissent dépourvus maintenant. Il est probable que cette paroi, par suite de l'extension crois- sante de ces espaces, est devenue tellement fine qu'il est impossible de l’apercevoir, ou plutôt de la distinguer des basales de la splanchnopleure et de l’endoderme ; peut-être aussi a-t-elle été résorbée. Quant à l'absence de connexions directes entre ces espaces latéraux et les troncs vasculaires, elles n'existent pas partout, et j'ai vu souvent ces cavités se joindre les unes aux autres. Un plasma sanguin, de tous points semblable à celui des troncs médians, remplit les espaces latéraux; seulement, on ne peut apercevoir ces derniers sur les individus vivants, car la couche chloragogène, qui les recouvre, est loin d’êtretrans- parente. Les troncs, par contre, sont visibles en entier, car les cellules de la splanchnopleure manquent parfois au- dessus d'eux, et sont fort minces lorsqu'elles existent. Les espaces latéraux sont d'aspect fort irrégulier sur les coupes, et montrent une série de dilatations de {aille va- riable, séparées les unes des autres par des constrictions, et disposées sans aucun ordre. Ces espaces échancrent les élé- ments de la couche chloragogène et de l’endoderme, de manière que les parois de ces éléments sont arrondies au lieu d’être planes, et tantôt concaves, tantôt convexes. Parfois toutes les cavités sanguines d’une région déterminée communiquent largement les unes avec les autres ; ailleurs, elles sont séparées par de minces tractus que les cellules de 272 LOUIS ROULE. l’'endoderme envoient à celles de la splanchnopleure. Mais, même dans ce dernier cas, les communications ne sont pas interrompues, car les tractus sont très étroits, semblables à de fines poutrelles qui suspendent l’endoderme au feuillet mésoblastique viscéral, et autour desquelles le plasma san- guin passe avec facilité d'un espace dans l’autre. | Il n’est pas très aisé de connaître à quoi correspond une pareille structure, et quelles doivent être les fonctions de ces cavités irrégulières remplies de sang. — Il faut remarquerque les parois de ces cavités sont fort minces ; et, par suile, Le plasma sanguin qu'elles contiennent est presque en contact avec le protoplasma des cellules de l’épithélium intestinal; ces dernières sont en effet plus échancrées que celles dela splanchnopleure, et paraissent avoir seules avec le sang des relations imporlantes. Probablement, les produits de la di- gestion, une fois absorbés par l’endoderme, pénètrent par osmose dans les espaces latéraux, de sorte que le sang de ces derniers se charge de matériaux nutrilifs. — Pareille chose doit aussi se manifester pour les troncs médians, mais avec moins d’intensilé, car la portion de ces vaisseaux mise en rapport avec la paroi inteslinale est assez étroite. Ces troncs sont chargés de recevoir les matériaux nutritifs ab- sorbés par le sang des espaces latéraux, et cela soit d’une manière directe, soit nar osmose à travers la mince mem- brane qui les sépare en certains points. — Les espaces laté- raux, autant qu'il est permis de se baser sur.la structure pour croire à la fonction, auraient donc pour rôle de puiser les produits de la nutrition dans les cellules intesti- nales, el les troncs vasculaires de rassembler ces produits dans leur intérieur pour les distribuer au tube digestif entier. | Ces matériaux de nutrition doivent être absorbés par tout l'organisme, et non par la paroi intestinale seule. [Il est donc permis de croire que ces matériaux vont par osmose, à travers la paroi vasculaire et la splanchnopleure, dans, le plasma lymphatique qui remplit les cavités segmentaires. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 273 Ce plasma imbibe les organes de l’économie, et leur trans- met les substances assimilables. Si les choses se passent ainsi, on ne comprend guère pour quelie raison il existe des troncs médians ; les espaces laté- raux devraient suffire pour celte fonction. Mais il faut se souvenir que ces {roncs onl une origine primordiale par rapport aux espaces, puisqu'ils dérivent directement du blas- tocæle, et produisent ensuile ces espaces ; il leur faut donc apparaître dans le cours de l’évolution embryonnaire, même s'ils s’atrophiaient par la suite. — Etils sont, sans doute, con- servés dans l’organisme parce que toutes les régions du tube digestif ne servent pas à l’assimilation des aliments; la région antérieure, par exemple, avec son pharynx, n’est pas destinée à cette fonction. Les troncs médians ont alors pour rôle de transporter le sang chargé de matériaux nutri- tifs dans la paroi intestinale entière, afin que le plasma lym- phatique de tous les segments puisse recevoir en même temps et en égale quantité la partie de ces matériaux qui lui revient. — Les néphridies et les éléments libres du cœlome ont ac- quis leur forme définitive ; comme ils ne changent plus dé- sormais de structure ni d'aspect, ils seront étudiés avec plus de profit chez les individus adultes, c’est-à-dire parvenus au stade IX. — Le fait Le plus important, durant le stade actuel (stade VIIT), est l'achèvement presque complet des glandes sexuelles et du spermiducte. La paire d'organes segmentaires située dans le treizième anneau (fig. 25, pl. HT), qui fait suite à l'anneau renfermant le spermiducte et l'ovaire, est presque entièrement résor- bée; si la résorption n’est pas complète encore, ces organes ne sont plus représentés que par deux petites masses granu- leuses, incapables de remplir aucun rôle et ayant perdu toute importance.— La même dégénérescence atteint aussi la paire néphridienne du dixième anneau, et les processus de la résorplion se déroulent dans le même ordre ; cet anneau précède immédiatement celui qui renferme les ébauches tes- ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 18. — ART. N° 3. 274 LOUIS ROULE. ticulaires. Le pavillon vibratile, ouvert dans la cavité du neuvième métamère, disparaît le premier ; le corps de l’or- gane est ensuite une masse accolée à la cloison antérieure du dixième anneau, qui perd peu à peu de son volume ini- tal, et finit par disparaître. La résorption des organes segmentaires dans la région sexuelle est le corollaire obligé du développement des glandes reproductrices. Les organes du onzième anneau commencent les premiers à s’effacer, pour laisser la place aux ébauches testiculaires; celles-ci remplissent d’abord la cavité de cet anneau, puis, comme on le verra sous peu, s’avancent dans l’intérieur du dixième; les néphridies de ce dernier entrent alors en dégénérescence pour laisser libre la place qu’elles occupaient, et permettre aux testicules dese développer à l’aise. — De même, lorsque le spermiducte et l'ovaire ont occupé la cavité du douzième métamère, 1ls pé- nètrent dans le treizième, et les néphridies de ce dernier dis- paraissent encore pour laisser leur place vide. — Les mêmes phénomènes de résorption vont continuer dans les segments antérieur au dixième et postérieur au treizième, jusqu à ce que les glandes sexuelles aient acquis leur masse défimitive. Tout est subordonné au développement des produits repro- ducteurs, et les organes dont l’économie peut se passer dis- paraissent pour faire place à ceux de la génération. Les ébauches testiculaires se sont divisées chacune en trois lobes qui s'étendent dans la cavité du onzième anneau, depuis le dissépiment antérieur jusqu’au postérieur. Pour- lant, la première de ces cloisons s’atrophie en partie afin de livrer passage à deux ou trois lobes encore peu dévelop- pés, que le testicule envoie dans le dixième métamère. — Les testicules sont limités par une paroi fort mince, dont on connaît l’origine, et renferment un contenu granuleux, les granulations répondant aux noyaux des spermoblastes et même des spermatocytes. A ce stade, en eflet, un assez grand nombre de spermoblastes ont évolué en spermato- gemmes, qui se montrent, sur les coupes, comme des es- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 275 paces clairs limilés par deux ou trois rangées de pelils noyaux ; l’espace clair est le cytophore, el les noyaux péri- phériques appartiennent aux spermatocyles. Les organes, spermiducles et ovaires, renfermés dans la cavité du douzième anneau, méritent un examen approfondi. Chaque spermiducte est un tube allongé, enroulé un grand nombre de fois sur lui-même, traversant en avant la cloison pour s'épanouir en un large pavillon dans le onzième seg- ment, et semettanten rapport par son extrémité postérieure avec une région épaisse de l’ectoblaste; cette région est l’'ébauche du pénis. Le tube lui-même n'offre pas un diamètre égal sur toute sa longueur ; sa parlie antérieure, qui aboutit au pavillon, est environ deux ou trois fois plus large que l'autre. Le pavillon n'a guère changé d'aspect depuis le stade précédent, 1l présente toujours une forme hémisphérique, et les petites bosselures de ses parois sont bien marquées; il renferme en son centre une cavité profonde, qui commu- nique avec le canal dont le corps du spermiducte est percé; il est encore dépourvu de cils vibratiles. — Le pavillon est beaucoup plus large que le corps du spermiducte ; aussi, au moment où 1l traverse la cloison pour se joindre à ce der- nier, est-il obligé de rétrécir beaucoup son diamètre et de s'étrangler en un col semblable à celui des organes segmen- taires. Cette différence disparaîtra par la suite ; la région antérieure du corps deviendra aussi large que le pavillon, et le dissépiment s'atrophiera. Ce dernier commence du reste à se résorber; il est traversé en certains points par le sper- miducte replié sur lui-même, et, chez l'animal adulte, on n'en trouve plus aucun vestige. La partie antérieure du conduit mâle, qui s’abouche avec le pavillon, est environ deux ou trois fois plus courte que l’autre ; elle est repliée sur elle-même, et s’amincit peu à peu en arrière. Elle renferme un canal, dont le diamètre est égal à celui du conduit qui parcourt la région postérieure amincie; la différence de taille entre les deux parties du 276 LOUIS ROULE. spermiducte est due à la différence de hauteur des cellules de -leurs parois. Dans la portion élargie, les cellules sont allon- gées et cylindriques, disposées sur une seule rangée; par contre, dans la partie rétrécie, les cellules sont petites et fort minces. — Cette dernière région est pliée sur elle-même un grand nombre de fois, et {traverse la partie antérieure de l'ovaire à diverses reprises. Les cellules de sa paroi sont mu- nies de cils vibratiles, alors que celles de la première région en sont encore dépourvues; ces cils sont très rapprochés les uns des autres, et battent avec rapidité; le canal dans lequel ils se meuvent va se mettre en rapport avec l’ébauche du pénis, située sur les côtés du douzième anneau. Ainsi, le corps du spermiducte renferme un seul canal, qui le parcourt en entier, sans se replier sur lur-même comme ce- lui des organes segmentaires. Ce fait est intéressant. En effet, le spermiducte correspond à l'organe segmentaire du dou- zième anneau ; il est donc homologue des autres néphridies du corps, et pourtant sa forme définitive est assez différente. Au lieu de renfermer un canal ondulé, son canal est droit, et c’est le spermiducte entier qui décrit lui-mêmedes sinuo- sités; de plus, le conduit des néphridies est intracellulaire, tandis que celui du spermiducte est intercellulaire, c’est- à-dire limité par des cellules complètes, au moins dans sa région antérieure élargie. Cependant, l’ébauche d'un spermiducte ressemble tout à fait à celle d'un organe segmentaire: même origine aux dépens des mêmes cellules, et même évolution première. Les éléments de ces ébauches fusionnent leur protoplasme en un syncylium, et jusque-là aucune différence ne se ma- nifeste. Plus tard seulement, le corps du spermiducte s’al- longe beaucoup, et les choses se passent comme si le corps d’une néphridie ordinaire s'était étiré de manière à ce que son canal perde ses flexuosités et devienne droit. — La dif- férence de forme n'est done pas très considérable, et se {rouve suffisamment expliquée par la différence des fonctions, les canaux vecteurs mâles élant obligés de conduire au DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 277 dehors un grand nombre de spermatozoïdes, alors que des liquides seuls passent par les conduits des néphridies ordi- naires. — La même cause a sans doule amené aussi la diffé- rence de structure histologique; le syncytium s’est défait et s’est divisé en cellules distinctes. Les parois cellulaires sont bien nettes dans la région antérieure élargie; elles parais- sent manquer pourtant dans la région rétrécie. Cette différence de structure n’est pas suffisante pour détruire l’homologie établie entre le spermiducte et les or- ganes segmentaires. Cette homologie est basée sur l'identité d’origine et d'évolution ; et les dissemblances amenées plus tard par la diversité des fonctions ne masquent point cette similitude primordiale. L'extrémité postérieure des spermiductes se met en rap- port avec deux épaississements ectoblastiques placés sur les côtés du douzième anneau; ces épaississements, qui sont les ébauches des pénis, offrent une structure assez complexe. Vu de dehors, chacun d'eux a la forme d’un ma- melon bas, déprimé, enroulé sur lui-même, et muni en son centre d’une ouverture en forme d’étoile à trois branches; les coupes permettent de mieux se rendre compte des faits. Le mamelon est en réalilé une dépression des téguments, qui va se réunir au spermiducte, mais dont les parois sont fort épaisses, et surélèvent l’ensemble au-dessus de la sur- _ face du corps. — Les figures 128 et 129 (planche XII rendent compte du développement de l'organe copula- teur. Cet organe débute par être une simple dépression, non de l'ectoderme seul, mais de la paroi du corps entière. Sa cavité est fort étroite; les cellules qui la limitent sont longues et cylindriques dans sa partie postérieure; tandis que celles de la parlie antérieure (supérieure dans la figure 128) sont plus pelites que dans l’ectoderme voisin. La somatopleure revêt le fond de la dépression, mais elle y est plus mince que vers les autres régions de l'anneau. L'ébauche du pénis ne s'est pas encore mise en relation avec le spermiducte. 278 | LOUIS ROULE. ‘Il n’en est pas ainsi lors du stade représenté par la figure 129 ; la coupe dessinée passe un peu en arrière de l'ouverture externe du pénis, et traverse la partie épaissie. La soudure avec le spermiducte s’est effectuée, de sorte que la cavité du onzième segment communique librement avec l'extérieur; il est donc permis aux spermatozoïdes de passer au dehors. — La paroi del’organe copulateur a prisune épais- seur plus grande, mais elle n’a pas changé de caractères histologiques. Les cellules sont toujours étroites, longues et cylindriques ; elles forment une seule rangée régulière, mais, étant donnée la disposition de quelques noyaux placés au-dessous des autres, il semble que plusieurs régions ren- ferment deux couches cellulaires ; l’épithélium, d'abord sim- ple, se modifie ainsi en épithélium stratifié. La cavité du pénis, toujours petite et anguleuse, est limitée par une cuticule épaisse et réfringente, plus épaisse et plus réfringente que celle recouvrant l’ectoderme. La somato- pleure se réfléchit sur le fond de l’organe copulaieur, et l'entoure de ses fibres musculaires ; les longitudinales seules sont représentées ; les annulaires semblent avoir disparu. L’ectoderme ne modifie pas ses caractères dans les environs de l'orifice pénial; à ce stade du reste, 1l commence à devenir plus épais et à revêtir l'aspect qu'il aura lorsque le clitellum sera bien formé. L’ovaire est devenu une masse volumineuse qui, à côté du spermiducte, remplit toute la cavité du douzième segment ; les deux ébauches ovariennes occupent, en effet, non seu- lement les parties latérales de cette cavité comprises entre le tube digestif et les côtés du corps, mais s'avancent de plus au-dessus et au-dessous du tube intestinal. Leur déve- loppement suit toujours la même marche ; les ovoblastes les plus petits sont les plus antérieurs, et se montrent encore accolés au dissépiment qui leur à donné naissance. Les ovo- blastes postérieurs sont Les plus volumineux, et commencent même à produire des ovules parfaits. Les deux masses ovariennes n’ont plus à cette époque au- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 279 cune forme définie; elles sont lrop grandes pour la cavité du douzième anneau, et tendent à franchir sa cloison posté- rieure pour pénétrer dans le treizième ; les néphridies de ce dernier sont du reste atrophiées pour laisser la place libre aux glandes sexuelles, et ne pas gêner leur extension. La cloison est rompue en son milieu, comme si elle s’était op- posée à ce passage et si elle avait dû céder ; ses deux tron- çons, insérés l’un sur la paroi intestinale et l’autre sur la somatopleure, vont s’atrophier peu à peu à partir de ce moment, et disparaîtront en entier.— La même atrophieetla même disparition atteignent aussi le dissépiment antérieur du douzième anneau. Il en résulte alors que les spermi- ductes et les ovaires deviennent libres dans une vaste cavité produite par la réunion des onzième, douzième et treizième métamères. Celte cavité, à laquelle s'ajoute plus tard celle du dixième segment, renferme les testicules, et correspond à la région clitellienne. Le clitellum embrasse ainsi, non seulement les onzième et douzième anneaux qui renferment les premières ébauches des glandes sexuelles, mais encore le segment qui les pré- cède et celui qui les suit. De plus, les cloisons qui les sépa- raient les uns des autres ayant disparu, leurs cavités se rassemblent en un vaste espace qui contient les organes de la reproduction ; en avant sont placés les testicules, puis viennent les spermiductes enroulés sur eux-mêmes, et enfin les ovaires dans la région postérieure. Cette disposition sera conservée chez l’adulte; seulement, les glandes et les conduits vecteurs auront acquis un volume plus considérable; ils augmenteront même quelque peu le diamètre de la partie du corps qu’ils occupent. Cette der- nière, Vue sur un individu entier, paraîtra donc un peu plus dilatée que le reste du corps, et cetle augmentation en largeur sera agrandie encore par l'accroissement en épais- seur de l’ectoderme. La région sexuelle va donc prendre, et commence du reste à revêlir, les caractères qui lui ont valu le nom spécial de chtellum. 260 LOUIS BOULE. — Avec le stade VIIT finissent les périodes embryonnaires véritables des Enchytræoides. Jusqu'à la fin de ce stade, des appareils ont pris naissance ou bien ont complété leur or- ganisation ; mais, à dater de ce moment, aucun fait de déve- loppement ne se manifeste plus, et la structure générale est arrivée à son achèvement complet. — Il reste done à connaître l'adulte, afin de le comparer aux jeunes et aux embryons, et de comprendre la nature réelle des processus; puis il faudra étudier les spermatozoïdes, les ovules, la féconda- tion, afin de revenir au point de départ, l’ovule fécondé en voie de segmentation, et d'achever le cycle des phénomènes évolutifs. Stade IX. — Adulte; 45-50 anneaux (PI. V, XIV, XV). — Les £nchytræoides adultes mesurent environ 10 à 12 milli- mèires de longueur ; certains individus atteignent même un centimètre et demi; la largeur est toujours égale au dixième environ de la longueur. Le corps est aminci vers ses deux extrémités; le clitellum, que l'on distingue aisé- ment à sa couleur blanchâtre, marque à peu de chose près la fin du tiers antérieur de l'animal. L’excédent d'épaisseur du clitellum sur le reste du corps n’est pas bien grand, mais il est cependant fort appréciable. La couleur blanchâtre est due aux glandes sexuelles, et surtout aux ovules, dont les granulations vitellines renvoient les rayons lumineux directs. — Le corps porte environ une cinquantaine d’anneaux; c'est là le nombre maximum qu'il m'’ait été donné de constater. Ce chiffre est pourtant un chiffre moyen, car J'ai trouvé, rarement il est vrai, des individus ayant cinquante-cinq anneaux et parfois davantage. Ces faits montrent quil existe suivant les individus adulles des variations assez grandes dans le nombre définitif des segments; la moyenne est de cinquante, mais parfois on en voit davantage et d’au- tres fois il en existe moins. — Il est assez important de men- tionner ces variations, car plusieurs espèces d'Oligochætes et d’autres Annélides ont été établies par divers auteurs d’a- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 281 près un nombre fixe d’anneaux, alors que les autres carac- lères concordent avec ceux des espèces voisines ; il est pro- bable en effet que la quantité des segments, lorsque ces derniers sont abondants, est sujette à varier d’un individu à l’autre chez la plupart des Annélides. Les métamères sont séparés les uns des autres par des constrictions annulaires extérieures qui correspondent à des diminutions d'épaisseur de l’ectoderme. Ces constrictions ne sont pas loujours exactement placées au niveau des dis- sépiments ; elles leur sont parfois un peu antérieures où un peu postérieures, mais la distance qui les sépare n’est jamais bien grande. — Lessillonsannulairesmanquent danslarégion clitellienne ; l’ectoderme y possède partout la même épais- seur, et il est impossible par suite de distinguer les segments les uns des autres. Lors des stades moins avancés, l’ecto- derme du clitellum offrait pourtant le même aspect que celui des autres parties du corps, mais la différence de hauteur des cellules a disparu, à mesure que les glandes sexuelles se: développaient, et que les cloisons correspondant aux constrictions extérieures s’atrophiaient. Le lobe céphalique est petit, conique, à peine séparé par une légère constriction du segment buccal; il ne porte ni ocelles, ni otocystes, ni organes des sens d'aucune sorte. Le segment buccal, qui lui fait suite, est un peu plus large; la bouche est percée sur la partie antérieure de sa face ven- irale. Les anneaux qui suivent, jusqu’au dixième, augmen- tent de diamètre à mesure qu’il sont placés plus en arrière ; le troisième métlamère est ainsi quelque peu plus large que le second, et ainsi de suite. Le clitellum commence à la hauteur du dixième anneau ; il s'étend, avec ses parois épaisses, jusqu'au niveau du quatorzième segment, la partie antérieure de ce dernier appartenant encore au clitellum, et sa portion postérieure prenant peu à peu l’aspect d’un an- neau ordinaire. La longueur de la région clitellienne est un peu plus grande que la somme des longueurs particulières aux quatre mélamères qui la constituent (10°, 11°, 12°, 13°); 282 LOUIS ROULE. cela tient à ce fait que ces métamères ont accru leurs di- mensions dans le sens longitudinal et dans le sens transversal. Les segments qui font suite au clitellum n'offre aucune par- ticularité intéressante, et sont tous semblables les uns aux autres. Examinée par transparence, la paroi du corps présente trois couches : une première externe, granuleuse, qui di- minue d'épaisseur dans les sillons annulaires, et augmente de hauteur vers le milieu même des segments; une seconde hyaline, de dimensions égales dans toute son étendue, depuis la région antérieure du corps jusqu’à la région postérieure; enfin, une troisième couche mince, formée de cellules plates, en contact direct avec le liquide lymphatique qui remplit la cavité des segments. Cette dernière n’est autre que l'endothélium péritonéal; la couche moyenne répond à la somatopleure musculaire ; et l’externe granuleuse à l’ecto- derme (hypoderme des auteurs). — L'ectoderme est constitué, comme au stade précédent, par des cellules rectangulaires placées côte à côte en une seule rangée, sauf vers l'extrémité antérieure du lobe céphalique, où les cellules sont longues, étroites, et disposées en deux ou trois zones. Sur des individus vivants, cette extrémité m'a paru présenter des petits bâtonnets rigides et hyalins, sem- blables aux baguettes des éléments à cnidocils; mais je ne les ai point retrouvés sur les coupes, et je n'ai pas vu, ainsi, leurs rapports exacts; bien qu'il y ait toute probabilité en faveur de leur existence réelle, je ne puis assurer toutefois si Le lobe céphalique est muni ou non de cellules à cnidocils exerçant des fonctions tactiles. — L'ectoderme clitellien pré- sente aussi des caractères particuliers. [Il est plus épais que dans les autres régions du corps, sauf dans le lobe cépha- lique, mais n'offre cependant qu’une seule couche de cel- lules. Parmi ces dernières, les cellules à mucus prédominent, el de beaucoup; les éléments d’épithélium ordinaire sont plus rares. Les cellules à mucus ont une forme allongée, ovalaire, quelque peu déprimée sur les côtés par leur pres- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 283 sion réciproque, lorsqu'elles sont juxtaposées. Leur con- tenu paraît être granuleux; mais un examen plus appro- fondi et à un grossissement élevé permet de reconnaître que cet aspect répond à une structure vacuolaire. Le pro- toplasma forme des tractus anastomosés, limitant des vacuoles remplies de mucus; et cette structure s'étend à la cellule entière, sans que l’on distingue des régions spéciales, où le protoplasme et le mucus s'accumulent en plus grande quan- tité. Ces éléments se colorent fortement avec les couleurs d'aniline et l’hématoxyline, car le mucus absorbe alors le réactif; par contre, les teintures à base de carmin ne colorent que le protoplasme, et laissent le mucus dénué de toute teinte ; aussi, dans ce dernier cas, les cellules à mucus tranchent-elles en clair sur l’ensemble de l’ectoderme, alors que, dans le premier cas, elles tranchent en foncé. Leur noyau, très petit, est rejelé vers la périphérie, au-dessous de la membrane. | L'ectodermeentier estrecouverl parunecuticulemince, qui dérive du plateau de l’ectoblaste, et se montre, en effet, sur les coupes, comme un plateau épaissi et chitinisé. Si l’ectoblaste des embryons était constitué par un syncylium protoplasmique nullement différencié, on voit, chez l'adulte, l’ectoderme être représenté par une couche cellulaire à éléments distincts les uns des autres, et offrant parfois des caractères particuliers suivant les régions du Corps. — Les bouquets de soies ou rames sontau nombre de deux paires sur tous les anneaux, sauf sur le lobe céphalique, le lobe anal et les segments clitelliens ; ces derniers possédaient pourtant des soies, lors des précédents stades; ces organes ont donc disparu, à mesure que les métamères du clitellum se modifiaient pour servir à de nouvelles fonctions. Les deux rames du même côté sont situées très près l’une de l’autre, sur les côtés du segment, et fort loin de la ligne médiane; l’une est dorsale et l’autre ventrale. Étant donnée leur proxi- mité, chaque paire rappelle de très près un parapode biramé 284 ._ LOUIS ROULE. de Polychæte, qui aurait été dépouillé de ses cirrhes, et dont le mamelon central se serait déprimé de manière à se confondre avec les téguments; les deux rames persisteraient seules, et les appendices des Ænchytræoïides rappelleraient ainsi des parapodes atrophiés de Polychætes. L'aspect de chaque rame n’a pas changé. Une rame est un ensemble de dépressions des téguments renfermant un certain nombre de soies et entourées par plusieurs faisceaux de fibres musculaires rayonnantes; ces dernières sont char- gées, par le jeu de leur contraction et de leur extension, ou bien de faire saillir les soies et de les rétracter à l’intérieur, ou bien de les mouvoir dans toutes les directions. Ces fibres, comme l'indique la figure 46, sont insérées sur les dépres- sions ectodermiques qui contiennent les soies. Chaquerame présente, chezl’adulte, cinq, six, ouseptsoies; cependant les segments voisins du lobe céphalique et du lobe anal n’en montrent que trois ou quatre. Les soies sont fortes et courtes; leur longueur est d'environ 1 dixième de millimètre. Elles sont faiblement recourbées vers leur base adhérente, qui est large et solide; elles sont recourbées de même vers leur extrémité libre, mais dans la direction op- posée; cette dernière courbure n'esl pas assez prononcée pour que l’on puisse considérer ces soies comme ayant la forme de crochets. L’extrémité libre est mince et aiguë — Les centres nerveux sont représentés par un cerveau ou ganglion céphalique, et un cordon ventral, réunis par un collier œsophagien. — Le cerveau, entièrement distinct de l’ectoderme, présente la forme et les rapports qu'il avait déjà au stade VIII. Quelque peu aminci en avant, plus large et échancré en arrière, il est situé au-dessus du pharynx, entre ce dernier et la face dorsale du corps, dans la cavité du lobe céphalique, du lobe buccal et du troisième segment. Lorsque les fibres musculaires qui s’insèrent sur sa région postérieure sont très contractées et le ramènent fortement en arrière, le cerveau s’avance dans la cavité du quatrième, et parfois même dans celle du cinquième segment. — La com- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 285 missure œsophagienne embrasse le pharynx, en avant du gésier. — Le cordon nerveux est situé sur la ligne médiane venirale ; il ne présente, sur son trajet, aucun épaississement ganglionnaire bien net, et offre, à peu de chose près, le même diamètre dans toute son élendue. Il montre pourtant quelques varicosilés peu accentuées, et situées presque à égale distance les unes des autres, mais sans que leur nombre soit en rapport avec celui des anneaux. On ne doit pas accorder à ces dilatations locales la valeur de gan- glions segmentaires, d’abord parce que leur nombre est moindre que celui des segments, ensuite parce que leur structure ne diffère pas de celle des autres parties du cordon. Le cordon nerveux entier est constitué par des fibres el des cellules, et on ne remarque nulle part une agglomération locale de ces dernières, ayant par cela même le caractère de ganglion. Le cerveau porte, sur la face dorsale de sa région posté- rieure et de chaque côté de la Higne médiane, un petit corps granuleux et arrondi. Ce corps pourrail être pris de prime abord pour un otocyste ; mais il n’est pas situé dans les tégu- ments, puisqu'il est placé dans la substance même du cer- veau, et sa paroi, fort mince, ne m'a présenté aucune struc- ture cellulaire. Peut-être ce petil organe, ayant à peine un cinquantième de millimèlre de diamètre, doit-il être considéré comme un représentant rabougri d'un organe des sens, soit auditif, soit visuel, dont la base seule, en rapport avec les centres nerveux, aurait été conservée par atavisme, Ce serait donc là un fait du même ordre que la présence de la glande pinéale dans l’encéphale des Vertébrés supé- rieurs, où elle ne sert à rien, et où elle représente seulement un souvenir de l'œil épiphysaire de certains Vertébrés infé- rieurs. Le ganglion céphalique est entouré par une membrane mince, une capsule, qui dérive, comme on l’a vu, de la ba- sale de l’ectoblaste, et correspond à la membrane signalée par M. Wignal (28) comme entourant les centres nerveux 286 LOUIS ROULE, du Lombric. Sur cette capsule sont insérées des fibres mus- culaires dirigées dans tous les sens. Les fibres antérieures vont s'attacher à l'extrémité libre du lobe céphalique, les moyennes à la paroi de l’anneau buccal et du troisième segment, les postérieures, rassemblées en deux cordons. principaux, aux parois des quatrième, cinquième et parfois sixième anneaux. — Ces fibres s’insèrent, soit sur la somato- pleure, soit sur la basale de l’ectoderme; elles sont chargées de faire mouvoir le cerveau et de le déplacer, soit en avant, soit en arrière, soit latéralement. Elles sont disposées sans aucun ordre et suivent toutes les directions; elles partent d’un centre commun, qui est le cerveau, et vont, en irra- diant, s'attacher à la face interne des téguments. Elles déri- vent des cellules mésoblastiques antérieures, placées autour de la plaque céphalique en voie de prolifération. Ces cellules sont d’abord semblables à celles de la somato- pleure, et disposées de même en un amas compacte; et pour- tant, elles subissent une évolution franchement mésen- chymateuse, alors que les autres restent rassemblées en cou- ches unies et ne se dissocient pas. La différence d'évolution provient sans doute de la différence des fonctions à accom- plir, et non d’une dissemblance primitive. Les fibres museu- laires du cerveau rayonnent dans tous les sens, afin de mou- voir cet organe dans toutes les directions; et, par contre, les fibres de la somatopleure sont arrangées en une couche continue, afin de produire les mouvements de flexion du Corps. | Sur les coupes, le cerveau montre toujours les deux zones à noyaux el à substance fibrillaire qui le formaient déjà à des stades moins évolués. La zone à noyaux occupe la péri- phérie du ganglion céphalique, mais ne s'étend pas trop sur la face inférieure, où existe presque seule la substance fibril- laire ; les noyaux, disposés sur deux ou trois couches, sont plus nombreux dans la région postérieure du centre cérébral que dans l’antérieure. On voit, à un fort gros- sissement, autour d’un assez grand nombre de ces noyaux, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES,. 287 le protoplasme environnant renfermer, sur un certain espace, des granulations un peu plus grosses qu'ailleurs; et cet espace, de forme arrondie ou ovalaire, être limité par une fine membrane. Ces espaces, qui contiennent un proto- plasma granuleux et possèdent un noyau à leur centre, sont des cellules nerveuses; et, comme cette structure ne se mon- trait pas encore aux stades précédents, puisque les noyaux étaient libres dans la substance cérébrale, 11 faut que ces cellules se soient différenciées sur place, 2n situ. Une mem- brane cellulaire à pris naissance autour du noyau et à une certaine distance de lui; puis, la parlie de protoplasme ainsi isolée et comprise entre le noyau et la membrane, a revêtu des caractères spéciaux, qui se traduisent par une augmentation de taille des granulations. Je n'ai vu ces cellules nerveuses que sur les coupes ; j'ai tenté maintes fois de faire des dissociations du cerveau, mais je n'ai pu y parvenir, étant donnée la petitesse de cel organe. — M. Wignal (28), et tout récemment encore M. B. Friedländer (7), ont aperçu des cellules distinctes dans les centres nerveux du Lombric, et ont suivi les trajets de leurs fibres. Les cellules cérébrales ne sont pas juxtaposées, et laissent entre elles des espaces remplis par de la substance fibril- laire. Les fibrilles, peu nombreuses, m'ont semblé parcourir le cerveau dans tous les sens indistinctement, et former un feutrage irrégulier, orienté de préférence suivant l’axe des bandelettes commissurales péri-æsophagiennes. Le cordon ventral est toujours en rapport avec l’ectoderme par un pelit pédoncule que la somatopleure entoure d’une mince gaine musculaire ; il existe cependant des régions où les séries de coupes montrent l’ectoderme et le cordon séparés l’un de l’autre, mais ces régions ne sont pas très étendues. Il est entouré par une mince capsule, semblable à celle du ganglion céphalique, et qui se continue latéralement avec la basale de l'ectoderme. — Les zones à noyaux et à substance fibrillaire ont conservé leurs situations respec- 288 LOUIS ROULE. lives; la première, basilaire, se continue dans le pédoncule ; la seconde occupe la partie supérieure du cordon. De même que, dans le cerveau, plusieurs cellules ont pris naissance autour de quelques noyaux. Le tube digestif ne présente, sur son trajet, aucune de iinction en régions diverses, et différant soit de struc- ture, soit d'aspect ; il offre seulement une dilatation, le gésier ou proventricule, dans son extrémité antérieure voisine de la bouche, et s'étend ensuite, de cette dilatation jusqu'à l’anus, sans montrer aucune division en organes distincts. Les cloisons, qui s’attachent sur lui, le resserrent quelque peu au niveau de leurs insertions ; ces constrictions, étant donnée la cause qui les produit, sont placées à égale distance les unes des autres, de sorte que le tube digestif est annelé tout comme les téguments. | La bouche est percée sur la face ventrale du corps, au point de jonction du lobe céphalique avec le segment buccal, et est creusée dans la région antérieure de ce dernier. Elle a la forme d’une fente transversale limitée par deux lèvres mobiles, l’une petite et antérieure, qui appartient au lobe céphalique, l’autre postérieure et plus épaisse, qui est formée par un repli volumineux du segment buccal. L’anus est terminal et postérieur. — Les parties du tube digestif qui avoisinent ces deux ouvertures sont à peu près incolores, notamment celles qui constituent le rectum et sont proches de l'anus; les autres parties de l'intestin, étant recouvertes par la couche chloragogène, possèdent une couleur jaune verdâtre très franche. La bouche est dépourvue de cils vibra- iles, tandis que l’anus en possède. La région du tube digestif qui fait suite à la bouche, ou région pharyngienne, dérive du stomodæum ; elle s'étend de l'ouverture buccale jusque vers le milieu du troisième segment, et supporte le ganglion cérébral. Le pharynx est petit, cylindrique; les cellules de sa paroi sont cubiques, disposées sur une seule rangée, et recouvertes, du côté de-la cavité qu’elles limitent, par une cuticule assez épaisse, qui DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 289 se continue avec celle de l’ectoderme et présente les mêmes caractères. — Le gésier fait suite au pharynx ; je n'ai pu voir avec netleté si cel organe est produit par le stomodæum, ou s'il provient de la région antérieure de l’archentéron. Il est globuleux, presque arrondi, et s'étend du milieu du troi- sième anneau jusque vers l'extrémité postérieure du qua- trième. De nombreuses fibres musculaires s’insèrent sur lui, et, allant s'attacher aux tégumenis par leur autre extré- mité, le font mouvoir dans tous les sens, mais surtout d'avant en arrière; les plus nombreuses de ces fibres s’in- sèrent sur sa région postérieure. La paroi du proventricule offre une structure différente suivant que l’on examine sa face dorsale ou sa face ventrale. Les cellules de cette dernière sont peu élevées, rectangu- laires, et établissent, comme aspect général, une transition entre les éléments de la paroi pharyngienne et ceux de la paroi intestinale. Par contre, les cellules dorsales sont lon- gues et étroites; elles sont situées sur une seule couche, ou peu s’en faut, et forment ainsi une zone d’épithélium cylin- drique simple ; mais, grâce à leur hauteur, elles contribuent à donner à la paroi du proventricule sa grande épaisseur. La euticule pharyngienne s'étend aussi sur l’épithélium du gésier, ce qui tendrait à accorder à ce dernier une origine ectoblastique ou stomodæale, mais elle ne s’étend que sur sa région antérieure. Les cellules de cet organe, comme celles du pharynx, sont dépourvues de cils vibratiles, et ne sont pas recouvertes extérieurement par la couche chloragogène : nou- veaux faits tendant à montrer que le proventricule dérive de la même ébauche que le pharynx. L’intestin fait suite au gésier, et offre, sur toute son étendue, une même structure; 1l est revêtu en dehors par la couche chloragogène, et, grâce à l'insertion des cloisons sur sa paroi, il présente une série continue et régulière d'étran- glements et de dilatations, les premières correspondant aux insertions dissépimentaires, et les secondes aux cavités des anneaux. Ses cellules forment une couche simple d’épithé- ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VU, 19. — ART. N° 3. 290 LOUIS ROULE. lium cylindrique, couverte de cils vibratiles ; je n’ai point vu de cellules à mucus, pas plus d’ailleurs que dans la paroi du ‘ proventricule ni dans celle du pharynx. — Le rectum, qui est fort court, n’esl pas recouvert par la couche chloragogène ; à part celte différence, ses éléments présentent la même structure que ceux de l'intestin proprement dit. — La splanchnopleure, on l'a déjà vu, donne simplement naissance à la couche chloragogène, cette dernière étant représentée par une seule rangéede cellules, qui correspond, au point de vue morphogénique, au feuillet viscéral entier du mésoblaste, et, au point de vue morphologique, à l’endo- thélium péritonéal du tube digestif. Cette couche, examinée sur des individus entiers et vivants, possède une teinte brun jaunâtre caractéristique, et paraît composée de cellules ren- fermant des granulations colorées; les extrémités périphéri- ques de ces cellules sont arrondies, et simulent autant de petites bosselures. Sur Les coupes, on reconnaît que les élé- ments de la couche chloragogène varient beaucoup de forme suivant les régions, et cela sans aucune régularité ni aucun ordre : ils sont ou cubiques, ou rectangulaires, ou très allon- gés, et on rencontre parfois ces trois dispositions sur la même coupe. — Quoi qu'il en soit, leur structure histologique ne varie pas. Leur protoplasme est vacuolaire; les vacuoles sont très petites, et renferment les granulations qui donnent à la couche sa couleur spéciale; le noyau, très réduit, est relégué tantôt vers la périphérie, tantôt vers la base de la cellule ; la membrane, fort mince, ne présente aucuncaractère particulier. La base de ces éléments est étirée en un pédicule qui s'attache, soit à l'endoderme, soit d'ordinaire à la paroi externe des espaces sanguins latéraux placés entre la couche chloragogène et l'endoderme. | Il est assez difficile d'établir la nature des fonciions de cette couche. Il est certain qu’elle ne joue aucun rôle dans la digestion; elle est séparée en effet de l’endoderme par les espaces sanguins latéraux. D'autre part, il est curieux de remarquer que, chez l'adulte, les éléments libres de la cavité DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 291 générale sont de tous points semblables à ceux de la couche chloragogène, et cela à un tel degré que divers auteurs ont considéré les premiers de ces éléments comme des cellules détachées de la zone qui entoure l'intestin. On sait que tel n’est pas le cas, puisque les éléments du cœælome dérivent de cellules mésoblastiques libres. Ils ont la même origine que ceux de la splanchnopleure, car tous deux proviennent du mésoblaste en premier lieu, mais ils ne tirent nullement leur origine de la splanchnopleure déjà transformée en couche chloragogène. Tous deux suivent côte à côte et en même temps leur évolution particulière, qui aboutit à une structure identique, dénotant sans doute une similitude de fonctions. Les granulations de la couche chloragogène sont réfrin- gentes, et n’absorbent les réactifs colorants qu'avec une faible intensité ; ces deux faits, rapprochés de la structure vacuo- laire du protoplasma, permettent de considérer ces cellules comme des éléments chargés de produits de désassimilation. Les organes segmentaires serviraient à rejeter au dehors certains de ces produits à l’état liquide, pendant que d’autres s’accumuleraient dans la couche chloragogène et les cellules hbres. — Il est à remarquer que cette hypothèse serait en rapport avec d’autres fonctions probables de ces éléments. Étant donnée sa situation, la couche chloragogène doit se laisser traverser par les substances nutritives qui passent par osmose des espaces sanguins latéraux et de l’endoderme au plasma lymphatique de la cavité générale. Il n’est donc pas étonnant que cette couche se charge de produits de désassi- milation. — La somatopleure, sur des individus vivants, constitue une bande hyaline et homogène assez large, de même épaisseur sur toute son étendue, placée au-dessous de l’ectoderme, et limitée en dedans par l’endothélium péritonéal. Elle com- prend enréalité deux zones : une externe de fibres circulai- res, et une Interne de fibres longitudinales. Ces deux zones entourent le corpsentier, et sont seulement interrompuessur la ligne médiane ventrale par le pédoncule du cordon nerveux. 292 LOUIS ROULE. _Les fibres circulaires sont disposées sur une seule rangée; -la couche longitudinale, par contre, en présente cinq ousix. Cette dernière est un peu plus épaisse sur la face dorsale et sur les côlés du corps que sur la face ventrale; ses deux extrémités inférieures se relèvent en s’amincissant contre le pédoncule du cordon nerveux, et lui forment une gaine musculaire. Les fibres era sont. disposées, avec. régularité, en petits groupes radiaux séparés les uns des au- tres par du tissu conjonctif. Ce dernier n’existait, qu’en faible quantité lors des stades embryonnaires, et s’est développé depuis, bien que sa masse soit toujours fort minime. Sa subs- tance fondamentale, homogène, renferme quelques éléments figurés qui se colorent avec intensité, et que l’on voit, sur les coupes, placés. entre les fibres Hs ne et seOUIARE dans les espaces laissés entre elles. L'aspect régulier de la musculature ne diffère pas de celur offert par une musculature d’origine épithéliale réelle, comme: celle des Archiannélides et des Chœtognathes; la disposition: pinnée y est presque aussi nette, el l’ensemble est également limité en dedans par une couche endothéliale. Les fibres musculaires sont lisses, très longues, amineies aux deux extrémités, et aplaties transversalement; elles ont, comme chez beaucoup d’Annélides, la forme de lames, de sabre. Leur noyau, entouré par une mince zone de proto- plasma granuleux, est situé vers le milieu de la fibre, qui est aussi la partie la plus large; toutes les autres portions, de l'élément sont constituées par de la substance contractile divisée en fibrilles longitudinales. — Au début de leur dévelop- pement, les fibres musculaires ont une paroi très distincte, qui dérive de la membrane entourant la cellule mésoblasti- que primitive; chez les fibres parvenues à leurs dimensions définitives, cette paroi est tellement amincie qu'on ne l'aper- coil plus, et qu’on ne peut la distinguer du trait foncé linu- tant, au microscope, tous les objets réfringents. L’endothélium péritonéal de la paroi du corps, onde par la couche interne de la somatopleure, est représenté par DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 293 ‘une seule rangée de cellules plates, dont on ne voit guère que les noyaux sur les coupes, et qui se continue avec l’endothé- lium placé sur les deux faces des cloisons. Chez l'adulte, l'endothélium de la région clitellienne ne diffère pas de celui des autres parties du corps. Les cavilés des segments sont iraversées à tous les ni- veaux par des fibres musculaires, soit isolées, soit assemblées en faisceaux; ces dernières existent surlout dans le clitellum. Les fibres se détachent de la musculature périphérique, de la somatopleure, pour aller soit vers les dissépiments, soit vers le tube digestif, soit vers une autre partie des téguments et s’insérer sur eux. Quelquefois même (figure 151, plan- che XV), les faisceaux simulent, sur certaines coupes, un mé- sentère ventral étendu de la somatopleure à la paroi diges- tive, et rejetant de côté le cordon nerveux. Ces fibres sont disposées sans aucun ordre, et leur ensemble forme dans la cavité générale entière, dissépiments mis à part, un réseau fort irrégulier ; elles offrent une disposition mésenchyma- teuse indiscutable. Elles dérivent, soit des éléments libres, soit de la somatopleure, et prennent naissance de bonne heure, tout au début de la transformation de la somatopleure en couches musculaires; elles proviennent surtout de ces amas cellulaires épais que le feuillet pariétal du mésoblaste porte sur sa paroi interne. Leur origine est donc semblable à celle des fibres de la musculature périphérique; la dispo- sition ullérieure seule diffère. — Les dissépiments existent entre ious les anneaux, sauf dans la région clitellienne, où ils ont disparu à mesure que les organes sexuels se développaient. Les cloisons qui sépa- rent le lobe céphalique du segment buccal, et ce dernier du troisième anneau, sont divisées en plusieurs lanières nulle- ment situées dans un même plan vertical; elles étaient pourtant représentées, lors des stades précédents, par des lames entières. — Toutes les cloisons sont constituées par une bande médiane de tissu conjonctif, renfermant souvent des fibres musculaires, el limitée sur ses deux faces par un endo- 294 LOUIS ROULE, thélium à petites cellules plates. Il est inutile de revenir sur l'origine de ces divers éléments, qui à dé été expliquée dans les pages précédentes. En examinant les cloisons de face, et non sur leur tranche, on voit qu’elles ne sont pas des membranes pleines, mais au contraire des réseaux percés de nombreuses ouvertures de tailles diverses; les éléments libres du cœlome passent par ces ouvertures pour aller de la cavité d’un anneau dans celle d’un anneau voisin, et circulent ainsi dans l’organisme en- tier. Ces mouvements ne sont pas le fait des cellules libres elles-mêmes, mais sont déterminés par les contractions du corps, qui chassent le liquide de la cavité générale d’une région dans une autre; ce liquide entraîne avec lui les élé- ments qu'il tient en suspension, et ces derniers passent par les ouvertures des cloisons. Outre ces orifices, qu'il serait permis d’ appelerirréguliers, en ce sens qu'ils ne se correspondent pas d'une cloison à l’autre, il en existe d’autres qui ne manquent jamais et se ressemblent dans le corps entier. Ceux-ci sont au nombre de trois par dissépiment : l'un, central et volumineux, livre pas- sage au tube digestif; les deux autres. plus petits et latéraux. situés de part et d'autre de la ligne médiane, sont traversés par les cols des organes segmentaires. Les parois de ces orifi- ces sont soudées aux parois des organes qu’elles renferment, de manière à ne laisser aucun interstice. J’ai tâché de savoir si les ouvertures irrégulières appar ais- sent de bonne heure, ou bien si elles ne prennent naissance qu'assez tard, lorsque la cloison est déjà achevée; dans ce dernier cas, la cloison serait d’abord une lame pleine, qui se percerait de pores par la suite, tout comme l’épiploon des Vertébrés supérieurs. La concordance serait ici frappante, puisque les dissépiments sont suspendus, comme l’épiploon, dans la cavité générale du corps; et il était intéressant de résoudre celle question, afin de savoir si les éléments cœlo- matiques libres des Enchytræoïdes jouent le rôle de phagocy- tes,'ou bien s'ils sontindifférents sous ce rapport. — Enexami- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 295 nant des cloisons à divers stades de développement, j'ai vu que, dès leur apparition, elles sont constituées par des trai- nées cellulaires anastomosées en réseau, ce dernier offrant dans son ensemble l'aspect d’une lame verticale qui traverse le cælome pour aller de la paroi du corps sur l'intestin. Dès leur extrême jeunesse, les dissépiments sont donc des mem- branes percées d'ouvertures, et cette structure persiste jusqu’à l’âge adulte ; la seule modification qui se produise est l’appa- rilion du tissu conjonctif au centre des travées qui limitent les ouvertures, et l’émigration de quelques cellules endothé- liales dans ce tissu pour s’y transformer en fibres musculaires. Presque toutes les travées sont situées dans un même plan, et font partie de la cloison proprement dite; mais d’autres, en plus petit nombre, vont, en suivant une direction oblique, du dissépiment à la somatopleure ou au tube digestif, et constituent alors ces faisceaux de fibres musculaires dont j ai déjà mentionné l'existence. Il en résulte que, si les eloi- sons offrent en apparence une disposition régulière, elles appartiennent en réalité à un vaste réseau irrégulier de tissu conjonctivo-musculaire qui traverse la cavité générale, et rappelle par sa disposition le mésenchyme des Mollusques, avec cette différence que les espaces remplis par un plasma liquide sont plus grands et présentent une forme mieux définie. Ce ne sont donc pas les éléments libres du cœlome qui ron- gent les cloisons à la manière de phagocytes pour y percer des ouvertures, puisque ces ouvertures existent dès l’abord. Ces éléments ont du reste des contours immuables, et n’é- mettent jamais d’expansions pseudopodiques. — Les dissépiments situés entre les cinquième et sixième, sixième et septième, septième et huitième anneaux, sont remplacés, on le sait, par les glandes septales ; ces dernières affectent avec la paroi du corps et celle du tube digestif les mêmes relations que les cloisons elles-mêmes, et semblent être des dissépiments grandis outre mesure. Chacune d'elles s’insère sur la paroi du corps par un mince {ractus, puis s'é- 296 LOUIS ROULE. paissit dans l’espace qui sépare les téguments de l'intestin; et s’amincit encore quelque peu en venant s'attacher à ce dernier; la partie de la glande située sur la face dorsale du lube digestif envoie à la glande de la même paire et placée de l'autre côté une expansion qui les réunit l’une à l’autre. Les glandes septales renferment des canaux internes ne com- muniquant pas avec le cœlome, et s'étendent peu sur la face ventrale, au-dessous de l'intestin; de sorte que, dans cette région, les cavités des trois anneaux précités communiquent librement entre elles. Les glandes dela dernière paire, plus volumineuses que les autres, se replient au-dessus du tube digestif, et s’allongent en avant jusqu'à toucher celles de laseconde paire. Leur inser- Uon sur les téguments (et ce fait s'applique à toutes les glan- des septales) diffère de celle des cloisons ordinaires. La trame conjonctivo-musculaire de ces dernières s'unit directement à la somatopleure, sans que celle-ci soit interrompue au point d'attache; il n’en est pas de même pour les glandes septales. La musculature de la paroi du corps est interrompue sur toute la région d'insertion, de manière que l'extrémité péri- phérique des glandes soit en contact direct avec l’ectoderme, et se mette en rapport avec sa basale. C’est encore là un fait qui rapproche les glandes septales des organes segmen- taires. — J'ai souvent essayé de voir, soit sur des individus éxaminés par transparence, soit sur des séries de coupes, si des orifices creusés à travers l’ectoderme font communiquer les canaux des glandes septales avec l'extérieur, et je n'ai pas plus été heureux dans cette recherche que lors des pré- cédents stades ; je n’ai point remarqué qu'il existât des pores externes, el j'ajoute aussi que je n'ai point vu d’orifices per- mettant à ces canaux de s'ouvrir dans la cavité digestive. La structure histologique des glandes septales rappelle de très près celle des organes segmentaires. Leur surface est limitée par une membrane mince qu'aucun endothélium ne recouvre. Leur masse est creusée de nombreux canalicules anastomosés, dépourvus de cils vibratiles. La seule différence DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 297 importante, qu'il soit possible de signaler entre elles et les néphridies, porte sur la présence chez les premières de cel- lules à contours nets et distincts. Alors que, au début de leur développement, les cellules qui doivent donner nais- sance aux glandes septales et aux néphridies se fusionnent en un syncytium, cette structure n’est conservée par la suite que dans les organes segmentaires, et disparaît dans les glandes septales. Les cellules de ces dernières sont petites et polyédriques ; elles renferment chacune un protoplasma finement granuleux et un noyau très apparent; les membra- nes sont très minces; les canaux limités sont intercellulaires, et non intracellulaires comme ils l’étaient lors des stades moins avancés. En comparant encore cette structure à celle des néphridies, l’évolution rappelle ici ce qui se passe dans le spermiducte, dont le canal, d’abord intracellulaire, devient ensuiteintercellulaire. Un autre fait, important à signaler au sujet des glandes septales, consiste dans l’amincissement de l’ectoderme vers leur insertion périphérique. Cet aspect, rapproché de l'in- terruption de la musculature, pourrait être considéré comme une preuve en faveur de l'existence d’un orifice externe; mais 1l ne faut pas oublier que les glandes septales rempla- cent les dissépiments, et que l’ectoderme est également amine au niveau de l'insertion de ces dernières sur la paroi du corps. — Le nombre des organes segmentaires de l'adulte ne cor- respond pas tout à fait à celui de leurs ébauches, mais il lui est quelque peu inférieur. Chez l'embryon, tous les anneaux placés en avant des glandes septales, ou compris entre ces glandes, sont dépourvus de néphridies; par contre, les neu- vième, dixième et onzième segments possèdent leur paire normale. Les néphridies du douzième anneau sont remplacées par les spermiductes. Et, après le douzième anneau, tous les métamères, sans exceplion, sont munis de leurs organes excréteurs. Or, chez l'adulte, non seulement tous les anneaux anté- 298 LOUIS ROULE. rieurs du corps, depuis le premier jusqu'au huitième, sont privés d'organes segmentaires, mais encore il en est aïnsi pour le dixième, le onzième et le treizième, parfois même pour le neuvième et le quatorzième. L’atrophie de ces organes, qui existaient pourtant chez les jeunes, est la con- séquence de l'extension prise par les glandes sexuelles: les néphridies ont disparu pour laisser la place libre. — Chez certains individus, cette âtrophie atteint les neuvième et quatorzième métamères. De telles variations précisent bien le caractère de cette dégénérescence; puisqu'elle est susceptible de changer d'intensité suivant les individus, il est certain que son importance est toute secondaire, et est liée à l'extension prise par les organes de la reproduction. Lorsque ces derniers atteignent un volume considérable, de manière à pénétrer dans les cavités des neuvième et qua- torzième anneaux, les néphridies de ces derniers dispa- raissen{ ; lorsque, par contre, leur masse, assez minime, ne remplit que trois ou quatre segments, les néphridies des neu- vième et quatorzième anneaux, soit des deux à la fois, soit d’un seul et non de l’autre, persistent. Et elles persistent, ou bien avec leurs caractères normaux et leur structure complète, ou bien en présentant des signes de dégénéres- cence. | En somme, et en supposant que l’atrophie atteigne son maximum chez tous les individus, les organes segmentaires de l’adulte ne sont bien développés qu’à partir du quinzième métamère, et existent ensuite, au nombre d’une paire, dans chacun des anneaux suivants. Les néphridies sont toujours suspendues à la cloison anté- rieure du segmentauquel elles appartiennent; ellestraversent cette cloison pour s’avancer dans la cavilé du segment pré- cédent, el cette disposition correspond à la division del’organe entier en corps, col, et pavillon vibratile. Le corps est celte masse volumineuse placée dans la cavité même de l’anneau; le col traverse le dissépiment; et Le pavillon vibratile s'ouvre dans l’intérieur de l'anneau précédent. DÉVELOPPEMENT DES: ANNÉLIDES. 299 Le pavillon vibratile, en forme de cuiller, est court, ovalaire, et porte un large orifice taillé en biseau ; les minces parois de l’orifice sont garnies de cils vibratiles qui battent avec rapidité. Cette ouverlure communique avec un, canal creusé dans le col; ce dernier, qui est la partie la plus étroite de l'organe, joint le pavillon au corps; il est même permis de considérer le pavillon vibratile comme un épanouis- sement de la région antérieure du col. Le corps est volumineux, presque ovalaire ; il à souvent la forme d'un prisme rectangulaire à coins arrondis et déprimés; ses parois sont parfois plissées, surtout dans leur région antérieure. Le col s'attache au corps un peu en dehors de l’axe médian de ce dernier; ce fait donne à l’ensemble de l'organe un aspecl dissymétrique. L'intérieur du corps renferme un canal flexueux, ondulé, assez étroit, vibralile, _de même calibre dans toute son étendue, et qui tranche en clair sur le fond sombre de la néphridie; ce canal unique résulte de la jonction des divers petits conduits qui se sont creusés, à des stades plus Jeunes, dans le syncytium proto- plasmique. Les ondulations qu'il décrit lui donnent une longueur bien plus grande que celle de l'organe lui-même ; elles se dirigent irrégulièrement de manière à parcourir le corps dans tous les sens, mais elies sont d'habitude orientées de droite à gauche, et décrivent ainsi une spirale qui part de l'extrémité antérieure du corps pour se diriger vers l'extrémité postérieure où est silué le pore externe. Les organes segmentaires de la plupart des Enchytræoï- diens ont un corps divisé en deux parties : l’une antérieure, volumineuse, qui s’abouche avec le pavillon vibratile, et correspond au corps entier de l'organe des Enchytræoides ; et l’autre postérieure grêle, hyaline, plusou moinslongue suivant les types, creusée d’un canal unique, qui part de la portion volumineuse et va s'ouvrir au dehors. Celle dernière manque chez les Enchytræoides, ou bien n’est que fort peu développée ; le corps pousse, en un point voisin de son extrémité posté- rieure, un petit mamelon, également. creusé d’un canal 300 ‘LOUIS ROULE. unique, qui traverse la musculature et l’ectoderme ‘pour déboucher à l'extérieur. Ce pelit mamelon est évidemment l’homologue, bien amoindri, de la deuxième partie dont'il vient d’être fait mention. ae pore externe est petit, présque imperceptible, et dépourvu de cils vibratiles; il mesure environ 8 à 10 w de diamètre. Il est placé sur les côtés du corps, vers la face ventrale, et non loin des faisceaux de soies. Les néphridies sont limitées par une paroi mince, sem- blable à celle des glandes septales, et dont on connaît l’ori- gine. Leur protoplasme, finement granuleux, dans lequel je n'ai jamais distingué aucune trace de parois cellulaires, renferme un grand nombre de petils noyaux. Les canaux sont dépourvus de parois propres, et directement limités par le protoplasma. Ce dernier porte de nombreux cils vibratiles dont les battements rapides font mouvoir le AS qui parcourt le conduit. Les coupes qui passent par l’orifice externe d'un organe segmentaire, semblables par conséquent à celle dessinée dans la figure 151 (pl. XV), montrent que la musculature est interrompue dans le point de contact de l’organe avec les téguments, et que le mamelon signalé plus haut se met en rapport avec l’ectoderme. Le canal unique dont le mamelon est percé traverse alors la couche ectodermique, et vient s'ouvrir à l'extérieur, sans que l’ectoderme montre une augmentation ou une diminution d'épaisseur dans la région qui porte le pore. Ses cellules ne constituent pas elles-mêmes la paroi du canal excréteur; mais le protoplasme du mame- lon se prolonge, tout en s'amincissant, jusqu’à l’orifice externe, et forme au canal une paroi propre; cette dernière se réunit, sur le pourtour de. l'orifice, à la partie périphé- rique des cellules ectodermiques environnantes. Je n'ai point vu, malgré mes recherches, la genèse de l'orifice externe; mais, étant donnée la similitude d'aspect de la paroi propre du canal et du protoplasme de la néphridie, je conclus que celte paroi du mamelon est produite par l'organe segmentaire, et dérive par suite du mésoblaste. Si DÉVELOPPEMENT: DES ANNÉLIDES. 301 lectobläste prend une part quelconque à la formation du canal excréteur, il ne donne certainement naissance qu’au pourtour même de l'orifice, et l'ébauche d'origine ectoblastique ne pénètre pas profondément. — Peut-être cependant, la part qui revient à l’ectoblaste est-elle plus grande dans les organes segmentaires munis d'un long conduit excréteur, tels que ceux des autres Enchytræoïdiens, des Naïdiens, etc. Mais, dans tous les cas, le corps proprement dit de la néphridie est tout entier d’origine mésoblastique; l'ectoblaste produit seulementcette partie ducanal excréteur qui avoisine l’orifice externe. — Les vaisseaux sanguins, aunombre de deux, situés entre l’'endoderme et la couche chloragogène, sont placés, l’un sur la ligne médiane dorsale, et l’autre sur la ligne médiane ventrale du tube digestif. Ils s'étendent depuis la bouche jusqu’à l'anus; leur trajet, à peu près direct, présente fort peu de flexuosités, et encore ces dernières, lorsqu'elles existent, sont-elles peu accentuées. Leur calibre est le même sur toute leur longueur, en ne tenant compte bien entendu que de la partie médiane du vaisseau, et non des espaces latéraux qui embrassent le tube digestif entier; seul, le vaisseau dorsal se: dilate ME d peu dans la césion cli- tellienne. Le vaisseau dorsal est unique dans toute son étendue: il ne présente aucune trace de bifurcalion. Il n’en est pas de même pour le vaisseau ventral; celui-ci, en remontant de l’anus vers l'extrémité antérieure du corps, esl bien unique sur la majeure parlie de son trajet, mais, au niveau du sep- tième segment environ, 1l se bifurque. Les deux branches suivent la direction prise par la portion simple du vaisseau : celle-ci était placée sur la ligne médiane ventrale du tube digestif; les deux branches se portent sur les côtés de l'intestin, mais en se tenant plutôt sur la face ventrale, et remontent ainsi, tout en décrivant de nombreuses sinuo- sités, jusqu'aux environs de la bouche. Là, tout autour du pharynx, et un peu en avant du proventricule, les deux 302 _ LOUES ROULE. branches décrivent, au même niveau, un coude brusque pour passer sur la face supérieure de la paroi pharyngienne, etse joindre à l'extrémité antérieure du vaisseau dorsal. La cavité de ce dernier communique donc avec celles des deux branches du vaisseau ventral. Une communication analogue existe aussi dans la région postérieure du corps; un tronc circulaire, entourant le rectum, unit l’une à autre les extré- mités de ces deux vaisseaux. Ces anastomoses terminales ne sont pas les seules; quatre paires de rameaux anaslomotiques joignent en surplus le vaisseau dorsal aux deux branches du vaisseau ventral; trois paires de ces rameaux sont situées en avant des premières glandes seplales:; la quatrième paire est placée entre les premières glandes septales et les secondes. Ces rameaux MÉNPnsS donc tous à la région antérieure du corps, et il n’en existe point, si ce n’est le {ronc cireulair e reclal, dans la région postérieure. On connaît l’origine de ces branches anadlodiotialesl ce sont des bourgeons produits par les vaisseaux médians, qui vont à la rencontre les uns des autres pour se souder. Ils sont d'abord droits au moment de leur apparition; puis, leur longueur augmente, devient plus grande que la distance directe qui sépare les deux extrémités, et ils sont forcés de décrire des sinuosités. Ces ondulations sont très amples ss l'adulte. Les vaisseaux et leurs anastomoses contiennent un plasma rouge, ne renfermant aucun élément figuré; ce plasma absorbe avec une grande intensité les réactifs colorants, et surtout ceux préparés avec des couleurs d’aniline ou de l’ hématoxyline. Les parois vasculaires, devenues fort minces, sont toujours recouvertes par la couche chloragogène, et recouvrent elles- mêmes la basale de l’endoderme. Cet amincissement est le résultat de l’extension considérable prise par les cavités vasculaires, sans que les cellules de leurs parois prolifèrent et se multiplient d’une manière concordante; au contraire, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 303 ces cellules se kératinisent de bonne heure, et ne peuvent que s’étaler en s’amincissant, pour suivre l’augmentation de calibre. De part et d’autre de la partie médiane du vaisseau, qui possède un diamètre relativement considérable, sont placés les espaces sanguins latéraux. Ces espaces séparent l’endo- derme de la splanchnopleure sur presque toute l’étendue du tube digestif, et communiquent avec la partie médiane, soit directement, soit par osmose à travers une mince paroi de séparation. Ils ne présentent aucun caractère différent de ceux déjà exposés lors de l'étude du stade VITE; on a vu quelle est leur origine, et quelle est la nature probable de leurs fonctions. — Les éléments libres dansle plasma lymphatique quiremplit les cavités segmentaires sont nombreux; leur taille est encore assez grande, puisque leur diamètre moyen varie entre 30 et 40 vw. Leurs aspects sont dissemblables ; les uns sont sphé- riques, les autres ovalaires d’auires encore allongés et pointus, soit aux deux extrémités, soit à une seule; mais, si là forme varie d’un élément à l’autre, leur structure histolo- gique ne change pas. Leur protoplasme est creusé de petites vacuoles renfermant des granulations réfringentes, iden- tiques à celles que contiennent les cellules de la couche chloragogène ; leur membrane enveloppante est très mince; enfin, les réactifs ordinaires ne laissent pas apercevoir de noyau. Cependant, employant le vert de méthyle acétifié et osmiqué, les granulations restent incolores ou presque inco- lores, tandis que deux, trois ou quatre — suivant les élé- ments — grains, un peu plus larges que les granulations, prennent une teinte très foncée. Il est probable que ces grains répondent à des particules de substance nucléaire chromatique ; lenoyau primitif s’est fragmenté, et ses débris se sont répandus dans l’intérieur de la cellule. Ces éléments sont donc en voie de dégénérescence. J'ai déjà insisté sur la ressemblance frappante qui existe entre ces éléments.et ceux de la couche chloragogène; j'ai 304 LOUIS ROULE. déjà parlé de leur origine et de leur rôle probable, et, j'ai moniré qu'ils ne rongént pas la substance des cloisons, à la manière de phagocytes, pour y percer des ouvertures. —Ilne me reste done plus, pour achever l'étude des individusarrivés à l’âge adulte, qu'à décrire l'aspect et la structure des glandes sexuelles. 5) 86 — Les o’qjanes r'epr oducteurs forment, chez l'adulte, une masse volumineuse quiremplit,danslarégion chtdlionné tout l’espace compris entre le tube digestif et la paroï du corps. La région clitellienne comprend environ quatre anneaux, les dixième, onzième, douzième et treizième ; parmi ces anneaux, 1l est RU possible de distinguer encore la cons- triction extérieure qui sépare le dizième du onzième ; mais ül n'en est pas de même pour les autres, car les sillons ont disparu, et l’ectoderme présente partout la même épaisseur. Les dissépiments et les organes segmentaires ont disparu, de manière à ne gêner en rien l’extensionprise pes les glandes sexuelles. En allant d'avant en arrière, on voit d’abord les testicules, qui représentent la parlie antérieure de la masse sexuelle ; les testicules sont constitués par l'assemblage d’un grand nombre de vésicules hyalines disposées sans ordre et placées les unes à côté des autres. En arrière de cet ensemble de vésicules, et pénétrant parfois dans son intérieur, sont placés les deux spermiductes; ces conduits sont divisés en deux parties, l’une épaisse et de couleur sombre, s’avançant fréquemment au-dessus du tube digestif, l’autre étroite et de teinte claire, roulée en un peloton situé derrière la première partie et allant déboucher à l'extérieur sur un mamelon pénial. Les ovaires viennent ensuite; on voit d'abord les jeunes ovoblastes, semblables presque par leur aspect aux vésicules testiculaires, et, dans l'extrémité postérieure de la région clitellienne, un amas d'ovules à divers états de déve- loppement; certains de ces ovules, étant parvenus à matu- rité, se font remarquer par leur vitellus granuléux, et leur HE très foncée à la lumière transmise. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 305 — On sait que,lors du stade précédent, les deux ébauches testiculaires primitives se divisaient, tout en augmentant de volume, en lobes dont quelques-uns pénétraient dans la cavilé du dixième anneau; cette évolution a continué, mais en accentuant davantage son caractère primordial. Les lobes qui ont apparu les premiers ont donné naissance, toujours en accroissant leur masse, à des lobes secondaires plus petits; et ce sont ces derniers qui, chez l'adulte, ressemblent à des petites vésicules hyalines. Tout au début de leur déve- loppement, les glandes sexuelles mâles étaient régulières et symétriques ; elles changent d'aspect par la suite, car les lobes secondaires se forment sans aucun ordre sur les lobes primitifs. — Aussi, les £esticules de l'adulte sont-ils constitués par un amas de nombreuses petites vésicules groupées sans régularité, et insérées par une région antérieure amincie sur la paroi du lobe principal; ces vésicules ne sont donc pas libres et indépendantes les unes des autres. Une telle évolution se réduit à une sorte de bourgeonnement diffus des ébauches testiculaires. Les vésicules hyalines diffèrent de taille, les postérieures sont en général plus grosses que les antérieures. Elles diffèrent aussi de structure, les postérieures contiennent des paquets de spermatozoïdes déjà bien formés, et qui vont devenir libres, tandis que les antérieures ne renferment encore que des noyaux en voie de division. Le développe- ment procède donc d’avant en arrière; lorsque les vésicules postérieures seront arrivées à leur phase de malurité, et lorsque leurs spermatozoïdes se seront détachés d'elles, elles disparaîtront, et laisseront la place aux antérieures qui, pendant ce temps, ont grossi et produit des spermato- zôides. — Des tractus conjonctifs et des fibres musculaires sont placés, mais en pelit nombre, parmi les vésicules; ces traclus et ces fibres appartiennent, soit aux dissépiments atrophiés, soit au réseau conjonctivo-musculaire de la cavité générale. Les vésicules testiculaires antérieures, examinées par ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 20. — ART. N° 3. 306 ŒOUIS ROULE. transparence, montrent une paroi constituée par une mince membrane hyaline, et un contenu finement granuleux par- semé de nombreux noyaux serrés les uns contre les autres. Leur paroi n'est pas régulièrement ovale, mais est par contre quelque peu bosselée ; preuve que le développement n'est pas égal partout, et marche avec plus de rapidité en certains points. Le contenu granuleux est un symplasme, ne montrant aucune trace de parois cellulaires. Les noyaux sont des noyaux de spermatoblastes, et le protoplasme sym- podial qui les environne correspond à la coalescence du protoplasme de tous les spermatoblasies appartenant à la vésicule. Ces noyaux sont en voie de fragmentation, et, malgré ‘leur petitesse, on distingue en eux des figures ka- ryokinétiques assez netles; ils augmentent en nombre à mesure qu'ils deviennent plus petits, et finalement, se groupent en amas arrondis qui sont des spermatogemmes. — Le fait particulier et intéressant consiste dans la fusion des cellules-mères des spermatozoïdes; ces cellules ne sont pas indépendantes les unes des autres, mais assem- blées au contraire en un syncytium. Cette particularité mise à pari, la genèse des spermatozoïdes suit une marche nor- male, ainsi qu’on le verra par la suite. À mesure que les vésicules grossissent, les noyaux se multiplient dans leur intérieur et augmentent en nombre; ces nouveaux noyaux se rassemblent en groupes. Ainsi, dans une vésicule encore fort jeune, un noyau déterminé se divise en deux autres noyaux, qui se partagent à leur tour, elc.; ces particules de substance nucléaire ne s'é- cartent pas trop les unes des autres, et restent séparées par des espaces très petits. L'intérieur de la vésicule renferme ainsi une certaine quantité de ces groupes nucléaires. — Le protoplasme qui entoure les noyaux, et fait parle intégrante du groupe, conserve ses caractères primitifs el absorbe avec facilité les réactifs colorants; il n’en est pas tout à fait de même pour le protoplasma périphérique. c'est-à-dire situé entre les groupes. Celui-ci se colore avec DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 307 moins d'intensité, et semble présenter des caractères de dégénérescence. Effectivement, il est en voie de disparilion, et dès ce stade, il est possible de séparer avec la pointe d'une aiguille des groupes nucléaires entiers du reste de la vésicule. — Ces groupes sont des spermatogemmes. Les vésicules testiculaires postérieures sont toutes parve- nues à maturité. Leur contenu consiste en un grand nombre de spermatozoïdes rassemblés en paquets, plusieurs de ces paquels étant groupés aulour d’un espace central, clair et hyalin. — Les coupes montrent celte structure avec netteté. Lorsque les noyaux du spermatogemme se multiplient, ils restent pendant quelque temps unis en un amas compact: puis ils tendent tous à s'éloigner de la partie centrale de cet amas pour se disposer en une ou plusieurs rangées périphériques entourant cette partie centrale. En cet état, le groupe est un spermatogemme mûr, conslilué par un volumineux cytophore, correspondant à l’espace central, et par des spermatocytes disposés autour de ce cytophore. — Les spermatocytes offrent un noyau épais, entouré par une mince zone de protoplasma ; ce dernier s’effile en un long filament qui devient la queue du spermatozoïde. Les vési- cules mûres sont ainsi formées par un agrégat de cytophores supportant de nombreux spermatozoïdes. Les spermatogemmes sont très abondants dans une même vésicule ; aussi sont-ils serrés les uns contre les autres, et le protoplasme qui les sépare est en minime quantité. Lorsque le cytophore commence à se délimiter, ce proto- plasme périphérique à presque entièrement disparu, de sorte que les spermatogemmes sont libres et se soutiennent mutuellement dans l’intérieur de la vésicule. Au moment où les spermatozoïdes sont bien développés et munis de leur queue, la paroi de la vésicule se détruit, et les corpus- cules fécondateurs deviennent libres dans la cavité générale ; ils adhèrent encore aux cytophores, mais ces derniers dis- paraissent aussi, et les spermatozoïdes sont pris par le sper- miducte qui les conduit au dehors. 308 LOUIS ROULE. — Lors du précédent stade, le spermiducte offrait l’aspect d'un long canal divisé en deux parties : l’une antérieure courle et épaisse, terminée en avant par un pavillon ouvert dans la cavité du onzième anneau; et une postérieure, lon- gue et étroite, qui aboutit au pénis. Cet aspect persiste jusqu'à l’âge adulte; seulement les deux parties ont accru leurs dimensions, et sont devenues encore plus différentes de forme. Le dissépiment qui sépare le onzième anneau du douzième, et soutenait le pavillon du spermiducte, a disparu; aussi ce dernier est-il libre dans-la cavité générale. | La région antérieure épaissie du spermiducte a augmenté de diamètre et de longueur; elle est actuellement trop vaste pour l’espace restreint qu’elle occupait au stade pré- cédent, et a été obligée de se replier sur elle-même. Chez l'adulte, cette région ressemble à un tube très large, replié plusieurs fois sur lui-même, et courbé de telle sorte que le pavillon, au lieu de regarder l'extrémité antérieure du corps et d'être en contact avec les vésicules testiculaires, est tourné vers les ovaires. Cet aspect varie beaucoup suivant les individus; parfois même le pavillon est tourné en avant; mais, dans la grande majorité des cas, il regarde en arrière. — Cette région antérieure ne contient pas dans l’espace laissé entre le tube digestif et la paroi du corps; aussi avance- t-elle fréquemment au-dessus de l'intestin. Comme les deux spermiductes de chaque individu sont placés au même niveau, les portions qui passent au-dessus de l'intestin s’a- dossent fréquemment l’une à l’autre. Le pavillon qui termine l’extrémité libre du spermiducte n'est pas plus large que cette extrémité; ses parois sont lobées de manière à simuler deux lèvres dont l’une est plus élevée que l’autre; son orifice présente souvent l’aspect d’une fente garnie de longs cils vibratiles rigides, qui battent avec lenteur de la périphérie vers l'orifice, et sont sans doute chargés de recueillir les spermatozoïdes pour les faire pénétrer dans le spermiducte. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 309 Si la région antérieure du conduit vecteur mâle est aussi large, cette augmentation de diamètre tient surtout à la grande épaisseur de la paroi; le canal lui-même n’a pas un calibre bien considérable. La paroi est constituée par un épithélium cylindrique simple, dont les cellules sont très longues et très étroites; la membrane cellulaire, quoique fort mince, est bien netle; le protoplasme est chargé de très fines granulations; enfin, le noyau est relégué vers la base de la cellule. L’épithélium porte sur sa face interne un plateau assez épais, que traversent des cils vibratiles fort courts. | La région postérieure du spermiducte est beaucoup plus longue que l’antérieure, mais elle est aussi quatre ou cinq fois plus étroite. À cette différence de taille s'ajoute une différence de teinte : la région antérieure est blanchäire à la lumière directe et sombre à la lumière transmise, tout comme les ovules mürs, tandis que la région postérieure est claire et transparente. Cette dernière est repliée en un peloton irrégulier, situé entre la partie épaissie et l’amas d'ovoblastes qui termine en arrière l’ensemble des glandes sexuelles. Le canal spermiductaire grêle présente deux extrémités. L'une, périphérique, traverse la somatopleure et l’ecto- derme sur les côtés du douzième anneau pour pénétrer dans le mamelon pénial; elle traverse ce mamelon de bout en bout, el débouche à l'extérieur sur le sommet de son extrémité libre; cet orifice sert à l'expulsion des sperma- tozoïdes. L'autre, profonde, s'attache à la région épaisse du spermiducte; celle-ci s’amincit d’une façon assez brus- _ que, et se confond ensuite avec le canal grêle. On ne constate, sur le trajet entier du canal grêle, aucune variation de largeur. Sa paroi, mince, est formée de cellules plates dont on ne reconnaît la position que grâce à leurs noyaux, car leur protoplasma est confondu en un syncytium; la structure spéciale aux organes segmentaires a donc élé conservée dans la région postérieure du spermiducte, alors 310 LOUIS ROULE. qu'elle à disparu dans la région antérieure. La situation des noyaux montre que les cellules fusionnées auxquelles ils appartiennent sont disposées en un épithélium pavimen- teux simple, dont la paroi interne, limitant le canal central, porle de nombreux cils vibratiles, plus longs que ceux de la région antérieure, et battant avec rapidité. | Les deux pénis sont situés sur les parois latérales du douzième anneau; ils consistent en deux mamelons élevés, présentant une région basilaire épaisse avec une partie supérieure grêle, et traversés en leur centre par le canal du spermiducte; ce dernier débouche au dehors au sommet de la partie supérieure du pénis. L'organe copulateur, lors- qu'il prend naissance, est représenté d’abord par une dépres- sion de l’ectoblaste, dont le fond se met en rapport avec la terminaison du canal déférent; les cellules disparaissent au point de contact, el les deux cavités communiquent entre elles de manière à ce que le spermiducte s'ouvre au dehors. Ensuite, les cellules ectoblastiques qui limitent la dépres- sion prolifèrent, se multiplient, et produisent ainsi un ma- melon qui n’est autre que le pénis. De plus, le pourtour de l'orifice s’épaissit plus que les autres régions pémiales, el pénètre, en s'allongeant, dans l’intérieur même de la dépres- sion; puis, lorsque le moment de la maturité sexuelle approche, il se renverse au dehors en s’évaginant, et cons- titue ainsi le pelit tube grêle qui surmonte la base du pénis. Le canal qui traverse l'organe copulateur, en continuant le conduit spermiductaire et amenant les spermatozoïdes au dehors, est revêtu par une cuticule épaisse et très réfrin- gente ; il est dépourvu de cils vibratiles. Ces deux faits, et notamment le premier, n’ont rien qui doive étonner, puisque le canal est d'origine ectoblastique ; la présence d'une cuticule semblable à celle qui recouvre l'ectoderme n'est donc pas surprenante. — Le pénis étant inséré sur la paroï du corps en pleine région clitellienne, les parties de l’eclo- derme avoisinantes présenteraient donc, semble-t-il, la structure habituelle des téguments clitelliens. En réalité, il DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 311 n’en est pas ainsi. Au-dessus du pénis, eten allant versla face dorsale, l’ectoderme renferme bien de nombreuses cellules à mucus, offrant l'aspect de celles que l’on rencontre partout ailleurs dans le clitellum; mais, au-dessous du pénis et du côté de la face ventrale, l’ectoderme, représenté par de petites cellules d’épithélium ordinaire, ne montre aucun élément à mucus. Le fond de la dépression péniale primitive, qu'une demi- évagination porte presqu'au niveau de la surface des tégu- ments, alors que le reste du pénis est surélevé en un mame- lon, porte des muscles rétracteurs capables, en se contrac- tant, de faire disparaître la saillie présentée par l'organe copulateur, et de ramener la dépression à son état primor- dial. Outre ces muscles, il existe encore, sur le fond même de la dépression, des fibres antagonistes, qui appartiennent au système de la musculature longitudinale de la paroi du corps, et qui, en se contractant, font au contraire saillir le pénis à l'extérieur. La paroi même de l’appendice copulateur est en majeure partie constituée par des cellules épithéliales. La région supérieure de la paroi est plus mince que l’autre; ses cel- lules sont petites et à peu près rectangulaires. Les cellules de la région inférieure forment par contre un épithélium cylindrique stratifié très épais; elles sont longues et étroites, et le plus souvent portent leurs noyaux à leur base. — Les glandes ovariennes, chez l'adulte, offrent le même aspect irrégulier que les testicules ; on ne reconnaît en elles aucune trace des deux ébauches symétriques qui apparaissent en premier lieu dans le douzième segment, et l'ensemble des corps reproducteurs femelles semble ne constituer qu'une seule masse entourant le tube digestif. Cette masse est divisée en deux régions bien distinctes l’une de l’autre. La première présente un grand nombre de petites vésicules claires et transparentes, semblables en cela aux lobes testiculaires, mais un peu plus grosses et renfermant moins de granulations, La seconde, placée après la pre- 312 LOUIS ROULE. mière, et qui termine l’amas des glandes sexuelles, est constituée par des ovules volumineux, en assez petit nombre, dix en moyenne, et à divers élats de développement. Parmi ces ovules, les uns sont clairs et laissent aisément distinguer leurs noyaux; les autres contiennent un vitellus granuleux irès opaque, empêchant d’apercevoir la vésicule germinative. Ces derniers sont parvenus à maturité, et pénètrent parfois, après s'être dégagés de toute adhérence, jusque dans des anneaux situés en arrière de la région clitellienne. Les ovules de cette seconde partie appartenaient autrefois à la première ; les vésicules hyalines de celle-ci sont en effet des ovoblastes rassemblés en petits groupes, qui ne par- viennent pas à maturité, et disparaissent sans avoir donné naissance à des ovules; les autres continuent par contre leur évolution sans encombre jusqu’à la fin de leur développement. Les vésicules antérieures, arrondies ou ovalaires, sont terminées en avant par un petit pédoncule qui les rattache à leurs voisines; elles ne sont donc pas libres et isolées. L'examen de ces vésicules sur des individus vivants el sur des coupes montre qu’elles renferment un protoplasme fine- ment granuleux contenant plusieurs noyaux; ce protoplasme correspond donc encore à un syncytium, et c’est là une res- semblance frappante avec les vésicules testiculaires. Parmi ces noyaux, un seul, dans chaque ovoblaste, persistera pour devenir la vésicule germinative; tous les autres disparaîtront et seront résorbés. Lorsque l'ovaire, lors du stade VIIT, commençait à être bien développé, et s’avançait même déjà dans l’intérieur du treizième anneau, il était possible d'y reconnaître deux ré- gions : une antérieure, formée de petits ovoblastes en voie de multiplication et ne contenant qu'un seul noyau; et une postérieure, constituée par des ovoblastes plus volumineux, ne se divisant point, et renfermant plusieurs noyaux. Ces deux régions passent l’une à l’autre, par une transition lente, vers le milieu de l'ovaire. — Cette division existe encore chez l'adulte, mais elle est plus accentuée, car la transition a DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 313 disparu par une cause bien simple. Les ovoblastes postérieurs, déjà volumineux lors du stade VIII, et pourvus de plusieurs noyaux, sont les seuls qui se soient transformés en ovules; les autres ont été arrêtés dans leur développement, et res- tent comme témoins d’une production d’ovoblastes supé- rieure à l’utilisation définitive. Les petites vésicules de la région antérieure sont donc des ovoblastes qui n’ont pas accompli leur évolution ultérieure, et qui ne l’accompliront jamais. En effet, lorsque les ovules mürs sont rejetés à l'extérieur, les vésicules ovariennes antérieures, les spermiductes, les testicules, sont rejetés avec eux. Tous les corps reproducteurs qui, en ce moment, sont en bon état, servent à la fécondation; mais les autres meurent forcément sans jouer aucun rôle. — On n’a pas oublié qu'une dépression ectoblastique a pris naissance, d'assez bonne heure, en arrière de l'insertion sur les téguments de la première paire de glandes septales ; 11 existe deux de ces dépressions en réalité, l’une située à droite, et l’autre à gauche de la ligne médiane. Ces enfon- cements, dont l’orifice externe est ainsi placé au niveau de la constriction annulaire qui sépare le cinquième segment du sixième, ont d’abord l’aspect de poches simples qui com- muniquent avec l'extérieur. Plus tard, les cellules qui limi- tent le fond de la poche s’allongent beaucoup, et donnent à cette région une épaisseur assez grande. Ensuite inter- vient un nouveau phénomène, semblable à celui que j'ai déjà signalé pour le pénis, et produisant le même résultat. Le pourtour même de l’orifice externe s’allonge en un tube qui pénètre dans la cavité de la dépression. Celle-e1 a donc l’aspect d’une poche renfermant un tube, l’une des extrémités (externe) de ce dernier se continuant avec la paroi de la poche, et l’autre (interne), étant libre dans la cavité de la dépression ; cette deuxième extrémité est gar- nie de cils vibratiles. — Lorsque l'organe a atteint son déve- loppement complet, les choses sont telles que je viens de les indiquer ; mais, si l’on exerce une pression même assez 314 LOUIS ROULE. faible sur la région antérieure du corps d’un individu vivant, on voit Le tube s’évaginer et faire saillie au dehors. Il appa- raît alors comme un appendice cylindrique, terminé vers sa partie libre par un large pavillon vibratile, et dont le canal conduit dans la cavité de la poche, alors parfaitement libre et ne contenant rien. Celle cavité, terminée en cul-de-sac, ne communique ni avec le cœlome ni avec aucun des orga- nes qui y sont renfermés; sesrapports avec la première paire de glandes septales sont de simplesrapports de juxtaposition. Ces organes en forme de dépressions sont bien connus des naturalistes qui ont étudié les Enchytræoïdiens, et on leur a donné le nom de réceptacles séminaux. J'avoue n'avoir jamais vu de spermatozoïdes dans leur intérieur; je ne comprends pas, du reste, pour quelle raison les sperma- tozoïdes, une fois expulsés, pénétreraient dans ces poches étroites, puisque la fécondation s'opère, autant que J'en ai pujuger, au moment même de l'expulsion. — J'ai examiné beaucoup d'individus adultes, et j'ai toujours observé que le iube était enfoncé dans la dépression, et ne faisait point saillie à l'extérieur; à tel point qu'il est permis de se de- mander si ce dernier aspect ne serait pas anormal, et si le tube se dévagine jamais dans les circonstances habituelles. Spermatogenèse. — Le mode de développement des sper- malozoïdes ne diffère pas du procédé normal, tel qu'il est permis de l’établir d’après les recherches faites dans ces derniers temps sur les principaux groupes de Métazoaires. Une cellule mère primitive, ou spermoblaste, se segmente de manière à produire un amas müriforme de cellules filles, le spermatogemme ; les éléments de ce dernier se divisent en deux parties, dont l’une centrale, constituée par une seule cellule volumineuse, supporte toutes les autres cel- lules devenues périphériques. Un spermatogemme se diffé- rencie donc en un cylophore central qu'entourent de nom- breux spermatocytes ; ces derniers se transforment ensuite chacun en un spermatozoïde. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 315 On à vu plus haut que les vésicules testiculaires jeunes correspondent à des amas de spermatoblastes fusion- nés, et dont les noyaux seuls sont distincts. Cet aspect sympodial ne peut guère être bien étudié que sur des coupes, car les vésicules sont trop épaisses pour laisser apercevoir par transparence les détails minutieux de leur structure histologique, et cela sur des matériaux frais comme sur des matériaux fixés et colorés. — J’aitâäché de reconnaître si cette fusion existe bien en réalité, et 11 m'a semblé qu'il en était toujours ainsi; pourtant, je n’oserai l’affirmer, car les ovoblastes qui, sur des coupes, semblent également conslitués par un symplasme, montrent, lorsqu'on les exa- mine en entier, un cumulus représenté par des cellules dis- tinctes. Il serait donc possible que le même fait se repro- duisit pour leslesticules. — Quantauxautres organes, tels que l’ectoblaste, les centres nerveux, les organes segmentaires, qui, à certaines époques de leur évolution, possèdent aussi une structure symplasmique, je crois que cette structure existe bien en réalité, car je l’ai toujours retrouvée, quels que soient les procédés techniques employés. Les spermoblastes sont d'abord fort petits, et, en les supposant distinels, mesurent à peu près 4 à 5 w de dia- mètre. [ls grossissent ensuile et se segmentent à mesure. Le noyau primitif se divise régulièrement en deux parties qui se séparent l’une de l'autre, celles-ci se divisent de même, et ainsi de suite; mais celte scission complète n'existe pas pour le protoplasma. La ligne de scission pro- toplasmique, qui passe par le plan équatorial du noyau en voie de division, commence en effet à apparaître vers la région qu'il est permis de considérer comme la périphérie du spermoblaste, et s'’avance ensuite vers le centre, mais elle ne l’atteint pas. La porlion centrale de protoplasma, qui est placée entre les deux noyaux venant de se séparer, reste toujours indivise ; et cet aspect, visible dès le stade IT, persiste au stade IV et aux stades suivants, sans changer jamais. Il en résulte que les cellules filles dérivant du sper- 316 LOUIS ROULE. moblaste primitif sont à peu près distinctes les unes des autres vers leur périphérie, et sont confondues PR leurs régions profondes. En cet instant, l’amas de cellules filles est un spn TS gemme qui, par le fait même de son évolution, est divisé en deux parties : une centrale, représentée par le proto- plasma non segmenté; et une périphérique, constituée par les régions distinctes. Ces dernières deviendront les sperma- tocystes, tandis que la partie centrale formera le cytophore. — Aussitôt après que la distinction en cytophore et spermato- cytes est faite, le premier grossit sans jamais se diviser, tandis que les spermatocytes se partagent pour donner naissance à d’autres éléments semblables à eux. Aussi, les spermatocytes, qui s'étaient dès l’abord disposés sur une seule rangée, finissent-ils par être fort nombreux, irès petits, et groupés en deux ou trois couches concentri- ques. Le spermatogemme ne mesurait, au début de son déve- loppement, que 6 à 8 y de diamètre; il mesure, lorsqu'il est mür, 20 à 30 w ; cet accroissement est surtout le fait du cytophore. Ce dernier élément grossit beaucoup en effet. mais sans changer de structure ; son protoplasma est gra- nuleux, les granulations étant d'autant plus volumineuses que le cytophore est lui-même plus âgé, et contient un noyau difficile à voir. Je ne connais pas l’origine de ce noyau ; il est probable pourtant qu'il dérive de quelques fila- ments nucléaires séparés du noyau primitif appartenant au spermoblaste. Le corps nucléaire du cylophore contient fort peu de substance chromatique; aussi ne se colore-t-il qu'avec une grande difficulté, et même paraît-il avoir dis- paru lorsque le spermatogemme est parvenu à son complet développement. — Lecytophore est d’abord dépourvu demem- brane, et cette absence résulte de son origine même; une membrane fine se dépose ensuite à sa périphérie, et sépare son protoplasma de celui des spermatocytes. Ces derniers évoluent donc à part, et le cytophore n’est pour eux qu’un DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 317 simple support, qui présente, du reste, des signes Indiscu- tables de dégénérescence. Les spermatocytes, vers la fin de leur évolution, sont fort petits ; ils mesurent à peine 1 ou 2 y de diamètre. Ils étaient d’abord plus volumineux et c’est à leur segmentation répétée et à leur augmentation en nombre qu'il faut attribuer leur diminution de grosseur. Ils sont constitués par un proto- plasma peu abondant, limité par une très mince paroi à peine visible, et entourant un noyau épais dont les filaments présentent les dispositions karyokinétiques connues. Lors- qu'ils sont mürs, tous les filaments chromatiques se ramas- sent en un seul corps homogène qui est le noyau définitif. Ce dernier est très volumineux, car il est entouré par une enveloppe protoplasmique très mince et à peine appréciable. La figure 35 (planche IV), rend compte de la manière dont les spermatocytes ainsi constitués deviennent des spermatozoïdes. Chaque spermalocyte, d’abord arrondi, prend un aspectovalaire ; puis, en continuant à s’allonger, un aspect fusiforme. La région proximale du fuseau s'implante sur la membrane du cytophore, tandis que la région distale s’allonge toujours. Mais cet allongement est alors effectué par le protoplasme seul, qui s’effile en une longue queue très ténue, dans laquelle ne pénètre paslenoyau.— Le sper- matocyte est ainsi modifié en un spermatozoïde dont le corps est divisé en deux régions : une antérieure, ou tête, large- ment ovalaire et presque cylindrique, qui contient le noyau, ce dernier étant entouré par une zone protoplasmique très étroite et à peine appréciable ; et une postérieure, consti- . tuée par le protoplasma seul, qui présente l'aspect d’une queue très mince, et terminée en pointe. Le spermatozoïde, dérivant ainsi du spermatocyte, est donc une cellule véritable, mais de forme particulière, réduite presque à son noyau seul, et à peu près dépourvue de protoplasma. Le noyau est du reste la seule partie essen- elle du spermatozoïde, puisqu'il est chargé d'aller se fusionner avec le pronucleus femelle pour effectuer la fécon- 318 LOUIS ROULE. dation, tandis que le protoplasme ne joue aucun rôle dans cet acte. Les spermatozoïdes des Enchytræoïdes sont fort ptites 14e têle mesure environ 2 à 3 v de longueur sur 1/3 ou 1/4 de v. de diamètre ; leur queue possède à peu près 20 à 30 w de longueur ; elle est fort mince, et, par suite, très difficile à bien apercevoir. Certains spermatozoïdes portent sur leur tête un petitprolongement filiforme qui provient de l’étirement du protoplasma placé autour du novau; cet étirement s’effec- tue lorsque les spermatozoïdes se séparent du cytophore. Leur développement élant achevé, les spermatozoïdes se détachent par groupes du cytophore auquels ils adhèrent, et deviennent libres. Le cytophore se détruit peu à peu, et les spermatozoïdes sont alors capables de féconder les ovules mis à leur portée. — Étant donnée l'extrême petitesse de ces corps fécondaleurs, je n’ai pu voir avec nettelé s’il existe un corps problématique. Ovogenèse (Planche VT).— L’ovogenèse présente certains faits intéressants sur lesquels il est bon d’insister. — Ona vu plus haut que l’amas ovarien est divisé en deux parties, l’une antérieure composée d’ovoblastes arrêtés dans leur développement, et l’autre postérieure, représentée par des ovules presque mûrs ou parvenus à maturité complète. Je n'étudierai ici que le développement de ces derniers, car les ovoblastes de la région antérieure, étant arrêtés dans leur évolution, se présentent d’une manière permanente avec des formes que les ovules nous offrent d’une façon temporaire; il n’est donc nécessaire d'étudier que les ovules parvenus à maturité. J'ai examiné ces derniers, soil par transparence, soil sur des coupes d’ovaires. Les résultats oblenus par ces deux procédés se complètent les uns les autres; aussi les expo- serai-je tous, en commençant par l'étude des ovules entiers pris surdes individus vivants. Un ovoblaste fort jeune est une cellule d'environ 6 à 8 u. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 319 de diamètre ; ceLovoblaste, entouré par plusieurs autres élé- ments semblables à lui et qui évoluent de la même manière, provient, on le sait, des cellules d’endothélium péritonéal qui recouvrent la face postérieure de la cloison séparant le onzième anneau du douzième. À mesure que les ovoblastes deviennent plus âgés, 1ls sont refoulés en arrière, dans la cavité du douzième segment, par de nouveaux ovoblastes plus jeunes qui prennent naissance. — Un ovoblaste de 6 à 8 contient un noyau volumineux ; son protoplasme forme une zone étroite, limitée en dehors par une fine membrane. Il grossit ensuite jusqu’à atteindre une taille d'environ 16 à 20, et durant cet accroissement, le protoplasme augmente plus de volume que le noyau; il en sera toujours ainsi par la suite, de sorte que le protoplasme ovulaire finit par acquérir une masse considérable. Lorsque l’ovoblaste est parvenu au diamètre de 29 & en- viron, il se partage en deux cellules d’inégale grosseur; la cellule tournée vers le dissépiment est en général une fois et demie ou deux fois plus grosse que l’autre. La plus grande cellule deviendra l’ovule définitif; son protoplasme ne se segmentera plus, mais non son noyau, qui continuera à se diviser. Par contre, le noyau et le protoplasme de la petite cellule se partageront tous deux en éléments assez nom- breux, disposés en un cumulus sur l’un des pôles du véri- table ovule. L'évolution est au fond semblable dans Les deux cas, puisque le noyau se segmente toujours ; mais le prolo- plasme de la grande cellule (ovule) reste indivis, tandis que celui de la petite (cumulus) se scimde de la même manière que son noyau. Peu après le stade où l’ovoblaste s’est partagé en deux, la petite cellule se segmente de nouveau en deux autres portions. L’ovoblaste est ainsi constitué par trois éléments, dont l’un, volumineux, répond à la grosse cellule primitive, tandis que les deux autres proviennent de la segmentation de la pelite cellule. Ces deux éléments continuent à se diviser, sans quitter jamais la place qu'ils occupaient pour 320 LOUIS ROULE. envelopper l’ovule, et produisent ainsi le cumulus dont il a été question plus haut. Ce cumulus, sur une coupe optique, paraît être constitué par un assemblage de sept à huit cellules disposées sur deux rangées, serrées les unes contre les autres de manière à présenter une forme polyédrique, et renfermant chacune un noyau bien net ; les membranes cellulaires sont aussi fort distinctes, bien que très minces. . Pendant que le cumulus prenait naissance, de nouveaux noyaux apparaissent dans la grosse cellule par la segmen- tation de son noyau primitif; celui-ci se divise d’abord en deux, l’un de ceux-ci encore en deux, ces derniers en quatre et ainsi de suite. La première bipartilion a pour effet de scinder le noyau primitif en deux portions inégales; la plus grande de ces portions restera désormais indivise, et de- viendra la vésicule germinative, tandis que la plus petite suffit seule à la production des autres noyaux. Aussi, ces derniers sont-ils plus petits que le nucléus destiné à devenir la vésicule germinative. Les noyaux secondaires sont nom- breux, puis qu'une coupe optique, passant à peu près par le milieu de l’ovoblaste, en montre souvent cinq à six. Il est permis d’appeler cette grosse cellule plurinucléée l’ovule définitif, puisque effectivement elle deviendra l’ovule. Son protoplasme, limité par une mince membrane, est très clair, finement granuleux, et les noyaux qu’elle contient sem- blent être formés par une substance homogène encore plus claire et plus transparente que le protoplasme. Lorsque cette évolution est achevée, l’ovoblaste mesure environ un dixième de millimètre de diamètre. Il est cons- titué par deux parties : l’ovule vrai et le cumulus; ces deux parlies sont séparées par un trait mince qui répond à l'ac- collement de la membrane ovulaire et des membranes appartenantaux cellules profondes du cumulus. — La première phase de l’évolution est alors achevée, et la seconde phase, caractérisée par la disparition du cumulus et son absorption par l’ovule, va commencer, sans que l’ensemble augmente beaucoup de dimensions; souventmême, la taille ne varie plus. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 321 Les cellules du cumulus, qui étaient d’abord distinctes, le deviennent de moins en moins ; leurs membranes ten- dent à disparaître. Il en est de même pour les membranes qui séparent le protoplasme de l’ovule du protoplasme ren- fermé dans les cellules profondes du cumulus. Ces dernières s’atrophient en premier lieu, de sorte que les deux proto- plasmes communiquent l’un avec l’autre; les cellules péri- phériques subissent ensuite le même sort, et finalement l’en- semble constitue une masse unique qui est l’ovule définitif. Comme cette disparition va de l’ovule vers la périphérie du cumulus, et s'effectue peu à peu, il esi certain que l’on a affaire à une absorption du protoplasma du cumulus par le vitellus ovulaire. À mesure que cette absorption s’effec-. tue, le vitellus se charge de granulations réfringentes. On voit d’abord les membranes disparaître; et il se produit ensuite une véritable incorporation de la substance du cumulus à celle de l’ovule; ce dernier augmente donc sa masse en ajoutant à son propre protoplasme celui du cumulus. | Pendant que cette absorption se produit par le vitellus granuleux, tous les noyaux, sauf la vésicule germinative, subissent une sorte de pulvérisation, de segmentation pous- sée à l'extrême. Ils se partagent en noyaux de plus en plus petits, qui se répandent dans l'ovule entier, et, finalement, sont à peine deux outrois fois plus gros que les granulations. vitellines. Arrivés à cet extrême degré de petitesse, ils dis- paraissent sans laisser aucune trace, et l'ovule définitif ne possède plus qu’un seul et unique noyau très volumineux qui provient, comme on l'a vu, de la première bipartition. effectuée dans la grosse cellule de l’ovoblaste primordial. L’ovule est alors entièrement constitué. Il présenté une mince membrane vitelline périphérique, un vitellus rempli de granulalions, el un volumineux noyau. Parvenu à..cet état, il augmente de taille, et les granulations qu'il contient croissent aussi en nombre ; leur quantité devient considé- rable. Aussi l’ovule, d'abord clair et transparent, paraît-il, ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VIE, 21:-—=" ART. N° 3. 3292 | LOUIS ROULE. de plus en plus foncé à la lumière transmise, et blanchâtre à la lumière directe. — C’est en grande partie aux ovules, et un peu à la partie épaissie du spermiducte, que la région clitellienne doit sa couleur caractéristique. Un ovule parvenu à maturité mesure environ un cinquième de millimètre de diamètre. L'exposé qui précède a élé fait d’après des cbéeévatiété sur des ovaires frais; ces observations sonl, dans leur ensemble, plus ch iOtes que celles éfcetdEs sur des coupes, mais ces dernières ont l'avantage de montrer le mode de segmentation des noyaux. Le noyau de l’ovoblaste primordial est constitué par un réseau chromatique serré et divisé en trois parties : une centrale, très grosse, qui est le nucléole; un réticulum pé- riphérique; et une paroi nucléaire assez épaisse. Les espaces laissés entre ces trois parties sont remplis par un suc incolore. — Ce noyau se segmente en deux par les pro- cédés ordinaires, mais de manière que l’un des noyaux filles, celui de la grosse cellule, soit plus volumineux que l’autre. Ce dernier se partage alors en nucléi {(cumulus) presque tous égaux les uns aux autres, tandis que le premier persiste tel quel pour produire la vésicule germinative et les nombreux petits noyaux de l’ovule. En suivant les stades de ce développement, on voit, dans un même ovoblaste, les diverses phases de la division kiné kinétique. Cetle division présente cependant quelques caractères particuliers; ainsi, le dyaster n’est pas très net. Au moment où la scission d’un noyau s'effectue, le gros nucléole central s’allonge, etse fend suivant son grand axe, sans que le réticulum périphérique perde sa disposition irrégulière. Les deux moitiés du nucléole s’écartent l’une de l’autre pour devenir chacune le nucléole d’un noyau-fille, pendant que la paroi nucléaire se resserre au niveau de la ligne équatoriale, et pénètre dans cette ligne pour achever la division totale du noyau. Le réticulum chromatique ne se groupe pas, durant cette évolution, autour de deux pôles DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 323 distincts pour former un dyaster; le centre d’attraclion de la substance chromatique paraît être plutôt le nucléole en voie de bipartition. Cette altération des phénomènes kiné- tiques, qui est comme une simplification des processus ordinaires, est due sans doute à la rapidité de la division, car ces nombreux noyaux prennent naissance dans un temps assez court. Lorsque les noyaux secondaires, autres que la vésicule germinative, vont se résorber, le réticulum chromatique disparaît d’abord; le noyau ne présente plus que le nucléole central, le suc et la paroi. Le nucléole s’atrophie ensuite peu à peu; et les noyaux secondaires apparaissent comme de petits espaces clairs répandus dans le vitellus. Puis la paroi nucléaire s’amincit et se résorbe à son tour; le suc nucléaire est alors directement en contact avec le vitellus, et finalement disparaît aussi. Il ne reste alors aucune trace de ces nombreux noyaux, et leur sub- stance chromatique a été incorporée au protoplasma ovu- laire. Les nucléoles ne sont point ici des formations distinctes du réticulum nucléaire, mais répondent au contraire à des accumulations locales de substance chromatique. Un phénomène particulier consiste dans ce fait que les coupes d'ovoblastes ne montrent aucune paroi cellulaire, alors qu’on voit le cumulus des ovoblastes frais constitué par des cellules distinctes les unes des autres. Il est possible d'expliquer ce phénomène en se rappelant que les mem- branes cellulaires du cumulus sont fort minces et d’une durée temporaire ; très probablement elles correspondent à une partie périphérique du protoplasme qui serait devenue un peu plus dense que le reste de ce protoplasma. Elles sont loin d'être aussi nettes que la membrane vitelline définitive qui se montre plus tard autour de l’ovule. Il n’y a donc rien d'étonnant à ce que cette partie périphérique du protoplasme se colore de même que la cellule entière, et ne soit pas dis- tincte sur les coupes. 324 LOUIS ROULE. Pour bien se rendre compte de la valeur morphologique des formations qui dérivent de l’ovoblaste, il faut rappeler deux faits principaux. D'abord, l’ovoblaste primitif se divise en deux cellules; et ensuite, l’une de ces dernières produit le cumulus el l'autre devient l’ovule définitif. Il se produit donc ici, aux dépens de l’ovoblaste primitif, une masse de cellules, dont l’une, grossissant peu à peu et se distinguant ainsi des autres, deviendra l’ovule. — Un tel mode de déve- loppement a déjà été signalé chez plusieurs Vers annelés ; seulement, dans ce dernier cas, les cellules de l’amas ger- minatif sont d'abord toutes semblables, et l’ovule vrai ne se distingue parmi elles qu’assez tard. Il n’en est pas de même chez les Enchytræoïdes; dès la première partition de l’ovo- blaste, la cellule qui doit devenir l’ovule se montre avec ses. caractères propres, tandis que l’autre continue seule à proliférer pour produire sous forme de cumulus le reste de l'amas germinatif. Un phénomène particulier consiste dans l'absorption de ce cumulus par le vitellus ovulaire. Je n’ai pas connaissance de faits semblables chez les Annélides, et l’on n’en trouve guère de semblables que chez les Arthropodes et les Verlé- brés; aussi convient-1l, je pense, de donner la même signi- fication à ce phénomène. Le but cherché est d'augmenter la masse du vitellus par l’incorporation de cellules voisines. dérivant du même ovoblasie que l’ovule ou d’ovoblastes voisins. Il est probable qu’une interprétation analogue doit êlre donnée à la segmentation du noyau de l’ovule pour produire les noyaux secondaires. Ceux-ci tendent à se porter à la périphérie du vitellus pour y simuler un follicule, dont les éléments seraient confondus entre eux et avec le proto- plasme de l’œuf ; les noyaux seuls sont distincts et séparés. Il y aurait là une condensation du développement ovulaire. Le follicule est destiné, comme le cumulus, à être absorbé par la masse vitelline ; aussi ses éléments ne se séparent pas les uns des autres ni de l’ovule lui-même; ses noyaux seuls DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 220 font leur apparition; et, au moment où le follicule prend naissance, il se présente avec les caractères qu'il doit avoir au moment de son incorporation avec le vitellus. Tout se passe comme si l’ovoblaste donnait naissance à un amas de cellules germinalives, parmi lesquelles se différen- cient un ovule, un follicule entourant cet ovule, et un cumulus de même valeur que le follicule, mais placé en un des pôles de l’œuf. Ensuite le follicule et le cumulus sont absorbés par le vitellus, de sorte que toute cette évolulion aboutit à ce résullat : de donner naissance à un ovule ren- fermant en lui tous les éléments dérivés de l’ovoblaste pri- mordial. Cette série de phénomènes, au lieu d’être succes- sive et lente, est condensée et rapide; le cumulus et l’ovule apparaissent tous deux ensemble, dès le début, et le folli- cule ne se sépare pas du reste du vitellus ; sa présence est seulement indiquée par la disposition de ses noyaux. Cette assimilation des phénomènes que j'ai indiqués à la production d’un follicule et d’un cumulus est encore hypo- thétique, bien que très probable. Il faudrait, pour qu’elle fût certaine, connaître mieux “u’on ne la connaît jusqu'à pré- sent la genèse des ovules chez les Annélides. Pourtant, les Géphyriens armés, qui ont de grandes affinités avec les Annélides, et notamment les Bonellies, possèdent autour de leur ovule un follicule épais qui dérive de l’ovoblaste pri- milif, tout comme chez les Enchytræoïides; mais cet annexe se différencie peu à peu, et n’est pas absorbé par l’ovule. Il reste encore un fait que je ne me suis pas expliqué : la multiplication excessive des noyaux folliculaires dans le vitellus. Peut-être est-ce là un procédé d'absorption de la substance chromatique par le protoplasma vitellin. Il est probable qu’il en est ainsi; les noyaux destinés à être incor- porés se fragmentent d’abord en petites parcelles, qui sont absorbées par la suite; mais l’absence de documents com- paratifs m'empêche de prononcer. Fécondation. — Lorsque les organes sexuels sont mûrs, 326 LOUIS ROULE. Ÿ les individus qui les portent se réunissent en petits groupes sur les Algues qu'ils habitent, et la fécondation s’effectue à ce moment. Les spermiductes contiennent des spermato- zoïdes, mais la plupart de ces derniers sont renfermés avec les ovules dans la cavité clitellienne, et, si l’on examine avec soin la paroi du clitellum, on n’aperçoit aucune ouver- ture par laquelle les corps reproducteurs puissent sorür. Il suffit pourtant d’une très légère pression exercée sur l’indi- vidu pour que cette paroi cède en un point, situé presque toujours vers la région postérieure du clitellum; alors, par une détente brusque, tous les organes sexuels, ovules, sper- miductes, testicules, sont rejetés par cette fente, et la cavité clitellienne reste vide. | | J’ai cherché plusieurs fois à saisir des individus sur le fait, en voie de se féconder, afin de reconnaître si cette rupture existe normalement, et si c’est bien là le procédé d'émission des produits sexuels. Je ne suis jamais arrivé à le constater directement. J’ai toujours trouvé des individus de deux sortes : soit avec une région clitellienne très élar- gie, qu'une légère pression suffit pour entr'ouvrir, soit avec une cavité clilellienne vide, privée de tous les organes qu’elle contenait. Parfois, dans ce dernier cas, il m’a semblé voir des traces de la fente qui se serait percée; mais, comme la paroi devenue flasque se replie sur elle-même, il est si facile de confondre des plis étroits et profonds avec une ouver- ture véritable, que je ne puis me prononcer en toute sûreté. Pourtant, en rapprochant tous les faits constatés, 1l est permis de penser que les produits sexuels sont rejetés au dehors par la rupture de la paroi clitellienne. Les seules voies normales par lesquelles ces produits pourraient sortir sont les spermiductes; or, ces conduits sont trop petits pour laisser passer les ovules, et, du reste, au moment de la rupture, ils sont expulsés avec les ovules eux-mêmes. Il faut donc, de toute nécessité, qu’il y ait rupture, et forma- tion d’un orifice assez large pour que toutes les glandes sexuelles soit rejetées à l'extérieur. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 327 Probablement, les choses se passent de la manière sui- vante. Un certain nombre d'individus se rassemblent et se serrent les uns contre les autres; chacun d’eux entoure la région antérieure de son corps d'une couche épaisse de mucus sécrétée par l’ectoderme clitellien. Par l'effet de leur pression mutuelle, la paroi du clitellum se rompt. Mais, auparavant, les spermatozoïdes renfermés dans les spermiductes arrivent sans doute au dehors, et devien- nent libres; peut-être à ce moment se produit-il une copu- lation entre tous les individus d’un même groupe, grâce au pénis et au réceptacle séminal. Quoi qu’il en soit, ces indi- vidus sont environnés par une assez grande quantité de spermatozoïdes. Lorsque la paroi clitellienne cède, les ovules sont rejelés les premiers, et sont suivis par les sperma- tozoïides encore renfermés dans la cavité du clitellum. La fécondation se produit alors; les ovules fécondés restent entourés par le mucus clitellien, qui se concrète ensuite, el devient la coque. La fécondation accomplie, les autres organes expulsés se détruisent peu à peu sans jouer aucun rôle. Les quelques faits qu’il m’a été donné de constater per- mettent de croire que les choses se passent ainsi, du moins dans l’ensemble, mais je ne puis l’affirmer. Les impuretés diverses qui recouvrent toujours les individus empêchent de bien voir commentla fécondation s'effectue ; el, si l’on essaye de débarrasser l’animal de ses impurelés, la paroi clilel- lienne se brise, et les observations ne peuvent être con- Uüinuées. Stade X. Dégénérescence finale etmort. — Lorsque les œufs ont été fécondés et déposés dans leur coque protectrice, les tissus se cicatrisent dans la région clitellienne. Il se produit même une sorte de reconstitution des organes autrefois alrophiés; ainsi, quelques dissépiments se reforment à nouveau. Mais ce travail de reconstitution ne va plus loin, et l’ensemble de l'organisme paraît subir des phénomènes 328 LOUIS ROULE. de dégénérescence. Les tissus deviennent opaques et granu- leux ; les quelques lobules testiculaires et ovariens qui n’ont pas été rejetés se remplissent de concrétions brunâtres, et plusieurs néphridies s’atrophient. Ensuite les individus que je conservais ralentissaient leurs mouvements, devenaient moins agiles, et ne tardaient pas à mourir. L’acte de la fécondation marquerait donc, pour les Ænchytræoïides comme pour d’autres Annélides, la fin de la vie. | J'ignore si les choses se passent ainsi dans la nature, car les individus conservés dans des petits aquariums sont soumis à des condilions d'existence défavorables, et l’on ne doit pas conclure de ce cas particulier à la généralité du phénomène. J'ai vu aussi des individus, pris dans la mer depuis peu, présenter les faits de dégénérescence signalés ci-dessus ; mais je n’ai pu connaître si ces individus, ayant persisté dans leur mode de vie normal, n'auraient pas eu de nouvelles glandes sexuelles pour satisfaire à une seconde fécondation. Dans mes cristallisoirs, ces individus mouraient comme les autres, et vivaient moins longtemps que les adultes n'ayant pas encore eu leur clitellum rompu pour expulser leurs organes sexuels. Malgré l'absence de notions précises, il m’a paru intéres- sant de signaler cette dégénérescence finale, qui amène la mort de l'individu après que la conservation de l’espèce a été assurée. DEUXIÈME PARTIE DESCRIPTION ET DISCUSSION DU DÉVELOPPEMENT DES ORGANES. Dans la deuxième partie de ce mémoire sont décrits les phénomènes principaux du développement des organes, chacun de ces derniers élant examiné en particulier. Cette DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 329 synthèse permettra de mieux faire apprécier la valeur des résultats obtenus, en les comparant à ceux déjà donnés par l'étude des autres Vers annelés (1). — Lorsque la segmentation est achevée, l'embryon atteint un stade planula pendant lequel deux feuillets primordiaux sont seuls distincts, l’ectoblaste et le mésoendoblaste. En- suite une cavité se creuse dans la masse de ce dernier: celte cavité correspond à l’archentéron des larves Trochos- phères, et la couche de cellules qui l’entoure devient l’endo- blaste. Le mésoendoblaste s’est donc divisé en un endoblaste et un mésoblaste, de sorte que, à ce stade, l'embryon pré- sente les trois feuillets blastodermiques des Cæœlomates. Chacun d’eux suivra, dès ce moment, son évolution parti- culière, et donnera naissance à des organes qui ne se con- fondent pas avec ceux provenant des feuillets voisins, tout en conservant avec eux des rapports de juxtaposition et d’adhérence. — Ces feuillets doivent donc être étudiés à part, et forment le sujet de paragraphes distincts, dont l’un renferme l'étude des organes qui dérivent de l’ectoblaste, l’autre celle des organes qui dérivent de l’endoblaste, et le dernier celle des organes qui proviennent du mésoblaste; de plus, un premier paragraphe contient l'examen spécial des feuillets blastodermiques. $ 1. — Feuillets blastodermiques. Dh! I. — Deux faits principaux sont à remarquer dans la genèse des feuillets blastodermiques chez les Enchytræoïdes : 1° L'absence d’initiales mésoblastiques. 2° L'existence d’un feuillet primordial ou mésoendoblaste, (1) Je regrette de ne pouvoir examiner ici l’importante monographie de M. Hugo Eisig sur les Capitellides du golfe de Naples (Fauna und Flora, XVIe monog.), car elle a paru trop tard pour que je lui consacre une étude attentive. Au cours de ses observations sur l'anatomie, l’histologie et la systématique de ces Annélides, M. Eisig discute certains problèmes de morphologie générale; j'aurai l’occasion de revenir sur ce sujet, dans un prochain mémoire consacré à une Capitellide vivant dans les ports de Cette. 330 LOUIS ROULE. qui apparaît en même temps que l’ectoblaste, et aux dépens duquel se forment le mésoblasie et l’endoblaste. Ces deux derniers feuillets sont donc postérieurs à l’ectoblaste, et ne prennent pas naissance en même temps que lui. — L'ovule fécondé se divise en deux blastomères presque égaux ; ceux-ci se segmentent à leur tour et produisent une. planula dépourvue de blastocæle; cette cavité se manifeste pourtant dans quelques cas, mais ne tarde pas à disparaîlre. La couche cellulaire périphérique de la planula devient l’ec- toblaste, et l’amas des cellules centrales constitue le mésoen- doblaste. — Une cavité médiane se creuse ensuite dans ce dernier feuillet; la couche cellulaire qui entoure immédiate- ment la cavité est l’endoblaste, et la cavité elle-même corres- pond à l’archentéron. Les éléments compris entre l’ecto- blaste et l’endoblaste appartiennent au mésoblaste. — A ce stade, les trois feuillets de l'embryon possèdent leurs carac- ières propres, et évoluent pour donner naissance à tous les organes. Ce mode de développement des feuillets diffère de tous les procédés décrits par les auteurs comme existant chez les Annélides, au début de leur évolution embryonnaire. Mais ces différences ne résistent pas à un examen crilique appro- fondi; et même, en étudiant avec soin les observations faites jusqu'ici par divers naturalistes, et notamment par M. Salensky (25), il est permis de croire que ce mode est assez fréquent. Dans les cas où l’on n’a pas constaté la présence d’ini- tiales mésoblastiques — et Salensky surtout a signalé ces cas, — le mésoblaste proviendrait ordinairement de l’ectoblaste. Il en serait ainsi, par exemple, chez les Pr/eolaria. Un examen attentif des figures données par M. Salensky et des descriptions qui les accompagnent montre que, chez cette Annélide, la segmentation de l’ovule fécondé aboutit à une planula semblable à celle des Enchytræoïdes, c’est-à-dire munie de deux feuillets, un ectoblaste périphérique et un DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 391 amas central de gros blastomères. Salensky n’a pas suivi d’une manière précise l’évolution ultérieure de cette masse centrale; il dit avoir vu naître les bandelettes mésoblastiques sur ses côtés, el dans une situation telle que ces bandelettes paraissent dériver de l’ectoblaste. En réalité, aucun fait, ni dans le texte, ni dans les figures, n'autorise à conclure ainsi. En se bornant aux seules assertions de l’auteur, il existe tout autant de raisons pour faire provenir les ébauches méso- blastiques de l'amas central que de l’ectoblaste, car Salensky a observé seulement un stade déjà assez avancé, et n'a pas vu avec netteté la suite de l’évolution. Pour que la vérité de son opinion füt démontrée, il faudrait que l’amas central devienne tout entier l’endoblaste, et que les ébauches latérales produisissent à elles seules le mésoblaste; or, cela ne ressort pas du tout des descriptions. | La question reste donc en suspens. — Mais en rappro- chant ces faits de ceux que j'ai observés moi-même, il est peut-être permis de penser que les planulas de Prleolaria ont une structure semblable à celle des Enchytræoïdes, et pré- sentent de même un ectoblaste périphérique, et un amas cellulaire interne ayant la valeur d’un méso-endoblaste. D’autres observations faites par M. Salensky sur le déve- loppement de l’Aricia fœtida Clap., et celui de la T'erebella Meckelli D. Ch. (Polymnia nebulosa x. Mrz.) concordent, en tant que phénomènes principaux, avec les miennes. — Chez l'Aricia, par exemple, l'œuf, vers le milieu des stades de la segmentation, renferme un petit blactocæle qui dispa- raît par la suite. La planula complète présente un ectoblaste distinct d’une masse cellulaire centrale; et cette dernière semble donner naissance à l’endoblasie et au mésoblaste par un procédé semblable à celui des embryons d'Enchytræoïdes. — Une légère dépression de la paroi des planulas d’Aricia est comparée, par l’auteur, à un blastopore et à une petite cavité archentérique; cette opinion n'est pas soutenable. En lisant la suite du mémoire, on voit que la cavité intestinale, le véritable archenteron, se creuse dans la masse centrale, 332 LOUIS ROULE. et n’a par suite aucun rapport avec cette dépression exté- rieure ; de plus, le stomodœum n’a pas encore fait son appa- rition à un stade aussi peu avancé. Il faut voir là un phéno- mène comparable à celui que j'ai observé souvent chez les Enchytræoïides. Les embryons, en devenant cylindriques, de sphériques qu'ils étaient, ne modifient pas leurs contours avec régularité; ils se courbent, se plissent parfois, et la paroi de leur corps présente souvent des dépressions qui n’ont aucune valeur génétique, et résultent d’une inégalité d'extension. La cause, toute mécanique, en est donc dénuée d'importance {Voir fig. 67, planche VIT). Si M. Salensky a interprété d’une manière inexacte les faits qu'il a observés, cela tient à ce qu’il a étudié des stades séparés par de trop longs intervalles, et n’a pas essayé de voir nettement l’origine du mésoblaste. Ainsi, il dit d’abord, dans l'examen de la segmentation des Nereis cultrifera Gr., qu'il n’a pas reconnu le mode de formation du mésoblaste, mais que l'aspect offert par ses cellules tend à faire croire qu'il provient de l’endoblaste; et, plus loin, il revient en partie sur ce qu'il à avancé pour écrire que l’origine ecto- blastique du mésoblaste lui paraît probable. Ce ne sont point là des assertions précises; et si Salensky avait vu avec plus de netteté comment le mésoblaste apparaît et de quelle manière il évolue, il n'émettrait pas des doutes semblables, Il me paraît plutôt que les observations faites par cet auteur conduisent aux mêmes résultats que les miennes. Lorsque les initiales mésoblastiques manquent chez les em- bryons d’Annélides, le mésoblaste ne provient pas de l’ecto- blaste ; mais, il existe dans la planula un feuillet formé en même temps que ce dernier, et aux dépens duquel prennent naissance l’endoblaste au centre et le mésobläste à Ia péri- phérie; ce feuillet est le méso-endoblaste. — Et la chose me semble d'autant plus certaine que j'ai également constaté la même évolution chez une Annélide polychæte, la Dasychone lucullana D. C., dont l'œuf fécondé se transforme en une planula , qui présente un ectoblaste externe el un mé- DÉVELOPPEMENT, DES ,ANNÉLIDES. 3933 sendoblaste central produisant les deux autres feuillets. — L'absence d’initiales mésoblastiques n’est donc pas un fait particulier à l'Enchytræoïdes ; il est au contraire assez répandu chez les Chétopodes, et on le retrouve aussi chez d'autres Annélides, les Hirudinées par exemple. D'après Nussbaum (19), chez la Clepsine complanata Sav., la planula présente un ectoblaste périphérique et quatre grosses cel- lules centrales. Ces dernières représentent pour moi le méso- endoblaste; l’une d’entre elles produit en effet le mésoblaste et la cellule initiale des glandes sexuelles, et les trois autres donnent naissance à l’endoblaste. — Le méso-endoblaste de la Clepsine est constitué par quatre gros blastomères, alors que, chez la plupart des Chétopodes, les éléments de ce feuillet sont plus nombreux et plus petits. Cette différence tient sans doute à ce que l’ovule des Hirudinées renferme une très grande quantité de vitellus nutritif; celui-ci est accumulé dans certaines régions, et les autres parties de l'œuf, plus riches en vitellus évolutif, se segmentent avec rapidité pour produire hâlivement l’ectoblaste; par contre, les blastomères chargés de deutocélithe se divisent avec len- teur en gros éléments. — L'évolution est plus condensée chez les Clepsines que chez les Enchytræoïdes ; mais il n’en est pas toujours ainsi. Les embryons de franchiobdella, et ces dernières ont avec les vraies Hirudinées des rapports étroits, débutent, d’après Salensky (25), par un stade pla- nula, dont les éléments sont groupés de la même manière que chez lesembryons d'Enchytræoïdes. Is montrent un blas- tocæle, qui se creuse de bonne heure pour disparaître rapi- dement, el un méso-endoblaste dontles cellules périphériques produisent le mésoblaste alors que les cellules centrales donnent naissance à l’endoblaste. L'absence des initiales mésoblastiques est donc un fait très répandu, et paraît être la règle, chez les Annélides, . dans tous les cas d'embryogénie condensée. La cellule qui, chez les Clepsines, donne naissance au mésoblaste et à l'initiale sexuelle, ne peut être assimilée tout à fait à une 334 LOUIS ROULE. cellule mère d’initiales, car ces dernières sont toujours dis- üinctes l’une de l’autre chez les larves Trochosphères, et ne dérivent pas d’un élément primordial unique. Cette cellule: des embryons de Clepsine est égale à la somme des deux initiales ; les choses se passent comme si ces initiales, après leur apparition (distincte pour chacune d'elles), s'étaient fusionnées en une seule masse qui se divise ensuite pour produire les bandelettes mésoblastiques. Cette différence de procédé résulte sans doute de la condensation du développe- ment, condensation poussée ici à l'extrême. Chez les larves Trochosphères, l’endoblaste s’invagine chez Ja blastula; puis deux cellules de ce feuillet, placées l’une à droite et l’autre à gauche de la ligne médiane, n’ayant entre elles aucun rapport direct, se distinguent de leurs voisines par leur évolution ultérieure; elles quittent l’endoblaste, pénètrent dans le blastocæle, et se segmentent pour donner naissance aux bandelettes mésoblastiques. — Les processus sont plus condensés chez les embryons d'Enchytræoïdes et ceux d'autres Annélides ;iln’existe pas d’initiales, et, lorsque le mésoblaste apparaît, il est constitué dès l’abord par un amas de cellules comparable à l’ensemble des bandelettes pluri- cellulaires de la Trochosphère. — Enfin, chez les Clepsines, la condensation des processus est plus grande encore; les blastomères chargés de produire le mésoblaste et l’endo- blaste sont peu nombreux et fort gros. Aussi, lorsque le mé- so-endoblaste se manifeste, est-il déjà possible de reconnaître en lui les éléments dont proviendra le feuillet moyen et ceux dont proviendra le feuillet interne. Le premier dérive d’un seul blastomère très volumineux qui correspond à l’en- semble des deux initiales de la Trochosphère, et le second de trois autres blastomères. Si la planula montre un seul blastomère mésoblastique, la cause en est due à la grande ‘quantité de vitellus nutritif amassée dans l'œuf, qui ralentit la segmentation ; sans cela, elle renfermerait, comme celle de l'Enchytræoïdes, des éléments mésoblastiques plus nom- breux et aussi plus petits. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 339 — Il est probable que les ovules riches en deutolécithe, et chez lesquels on a signalé la présence d’initiales du méso- blaste, sont semblables à ceux {de la C/epsine. Une petite quantité de blastomères, ou même un blastomère unique, donnent seul naissance au feuillet moyen, et on les a consi- dérés comme des initiales. — Ce sont des initiales, en effet, puisqu'elles produisent le mésoblaste, mais elles ne corres- pondent pas aux vraies initiales des larves Trochosphères, qui apparaissent indépendamment l’une de l’autre. Et les différences profondes existant sur ce sujet entre les descrip- tions données par les auteurs, tendent bien à montrer qu'il en est ainsi. M. Gütte (8)a vu des initiales mésoblastiques dans les œufs segmentés de Mereis Dumerilii Aud. et Edw., alors que Sa- lensky (25) n’a rien observé de semblable chez la Nereis cul- tifera Gr., dont le mésoblaste lui paraît dériver de l'ecto- blaste. Et, pour mieux accentuer encore la divergence entre ces deux auteurs, Gôtte a remarqué que les initiales prove- naient de l’endoblaste. Cet exemple d’assertions dissembla- bles est choisi parmi les Polychætes ; mais il en est de même pour les Oligochætes. Ainsi M. Hatschek (9) décrit des initiales mésoblastiques chez les Criodrilus, M. Kowalevsky {13) chez l'Euaxes, et M. Klemenberg (12) chez le Lumbricus trapezoïdes, alors que le Lumbricus agricola Hoffm., d’après Kowalevsky, en serait dépourvu. Deux espèces d’un même genre différeraient donc l’une de l’autre au point de vue de l’origine du mésoblaste, les œufs segmentés de l’une ayant des initiales et ceux de la seconde en étant privés. Dans l’état actuel de la science, 1l est probable que l’origine du mésoblaste est unique pour toutes les Annélides, et sans doute aussi pour tous les Cœlomates; mais les Annélides ‘sont ici les seuls animaux à considérer. Que le mésoblaste provienne de l’endoblaste ou d’un mésendoblaste, il ne doit avoir, dans ces deux cas, aucune relation avec l’ectoblaste, æt réciproquement. Or, chez les larves Trochosphères, qui passent par un développement dilaté et montrent ainsi sans 336 LOUIS ROULE. altération les processus primordiaux, le mésoblaste dérive de deux initiales qui appartiennent à l’endoblaste pri- milif; le feuillet moyen n'a donc point de relations avec l'ectoblaste , et doit être considéré comme indépendant de ce dernier. — Ce premier fait étant acquis, ilest certain que l'origine du mésoblaste, dans les développements condensés, doit être semblable à celle constatée chez les Trochosphères, abstraction faite des modifications introduites dans les pro- cessus par la présence d'une grande quantité de vitellus nutritif. Le mésoblaste doit. provenir d’un feuillet homologue à l’endoblaste des larves ; seulement, comme les jeunes embryons sont constitués par un grand nombre de cellules presque semblables, il est fort difficile de distinguer les uns des autres les feuillets blastodermiques. Et il est nécessaire, pour obtenir des résultats précis, de suivre avec attention la segmentation de l’ovule et les premiers phénomènes évolutifs, jusqu’à ce que les trois couches blastodermiques se présen- tent avec leurs caractères propres. C'est en suivant cette méthode queje me suis rendu compte de la genèse des feuillets chez les Ænchytræoïdes et les Dasychone. C'est en comparant les observations faites par divers auteurs aux miennes que J'ai étendu à la plupart des développements condensés d’Annélides l'interprétation donnée plus haut. Quant aux assertions contradictoires de Kowalevsky et Kleinenberg, de Gôtte et Salensky, je ne puis me les expliquer que par l'insuffisance des procédés techni- ques usités au moment où ces embryogénisles effectuaient leurs travaux. Il faut en effet, pour bien voir la genèse des feuillets dans une embryogénie condensée, suivre attentive- ment sur des coupes la segmentation de l’ovule et la formation des premiers organes ; des études par transparence, ou des examens de coupes pratiquées au travers d’embryons pris à des stades séparés par de trop grands intervalles, ne don- nent aucun résultat précis. Ft il est probable que de nou- velles recherches comparatives, semblables à celles que j'ai essayé de faire sur deux types, abouliraient à des conclu- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 331 sions fort différentes de celles émises par les auteurs précités. — En résumé, dans les développements condensés d’Anné- lides, et autant qu’il est permis de le croire, deux feuillets seuls apparaissent tout d’abord dans la planule, l’ectoblaste et le méso-endoblaste; ensuite, le méso-endoblaste se divise en un mésoblaste périphérique et un endoblaste central. Il n’existe donc point d’initiales mésoblastiques comparables à celles des larves Trochosphères. IT. — Cette absence d’initiales est facile à expliquer ; il suffit pour cela de suivre l’évolution des larves Trochosphères. Les initiales de ces dernières quittent l’endoblaste auquel elles appartiennent, pénètrent dans le blastocæle laissé entre le feuillet externe et le feuillet interne, et se segmentent pour donner naissance chacune à un amas compact de cellules. Ces amas sont au nombre de deux puisqu'il existe deux initiales, et ils tendent à remplir le blastocæle pour occuper en entier l’espace compris entre l’ectoblaste et l’endoblaste .Une coupe transversale pratiquée dans une larve parvenue à ce stade montre : un ectoblaste périphérique constitué par une seule couche de cellules; deux amas cel- lulaires plus ou moins étendus et plus ou moins épais pro- venant de la prolifération de ces initiales ; un endoblaste central, représenté comme l’ectoblaste par une seule couche de cellules, et entourant l’archentéron.— Or,une coupe trans- versale d’un embryon d'Enchytrævides, faite au moment où l'archentéron commence à se creuser dans le mésendo- blaste, présente les mêmes éléments disposés dans le même ordre. À la périphérie, un ectoblasle constitué par une seule couche de cellules; au centre, un endoblaste à une seule rangée de cellules limitant l’archentéron ; entre les deux, le mésoblaste, formé par un grand nombre de cellules serrées les unes contre les autres. La ressemblance est frappante, et le mésoblaste des jeunes Enchytræoides occupe la situation des bandelettes mésoblas- ANN. SC. NAT. ZOOL.. 1889. VII, 22. — ART. N° 3. 338 LOUIS ROULE. tique de la Trochosphère. L’homologie est indiscutable, et les différences portent seulement sur le procédé génétique. — Les Trochosphères sont des larves, et, à ce titre, subis- sent un développement dilaté ; leurs feuillets prennent nais- sance lentement, par une série de transformations suc- cessives et distinctes, aux dépens du blastoderme de la blastula ; leurs organes agissent de même vis-à-vis des feuillets blastodermiques. — Il n’en est pas ainsi pour les embryogénies condensées et accélérées comme celle de l'Enchytræoïdes; les feuillets apparaissent tousen même temps, avec une structure complexe que ceux des larves ne possè- dent qu'après un grand nombre de modifications; et il en est de même pour les organes. Ainsi, tandis que chez la plupart des Trochosphères, l'œuf segmenté aboutit à une blas- tula, dont le blastoderme entoure un vaste blastocæle et produit ensuite l’ectoblaste avec l’endoblaste ; l'œuf segmenté des Enchytræoïides, dépourvu de toutblastocæle, aboutit à une planula montrant dès le début les deux feuillets primordiaux distincts l’un de l’autre. Des faits semblables se reproduisent pour le mésoblaste. Deux cellules primitives, ou initiales, se différencient dans l’'endoblaste des Trochosphère, et, après leur apparition, se segmentent pour produire les bandelettes mésoblastiques. Au contraire, dans l’évolution condensée des Ænchytræoïdes, le mésoblaste se sépare de l’endoblaste primitif ou méso-endo- blaste sous forme de bandeleltes, et non sous forme d’ini- tiales. — Cette altération des procédés mis en œuvre résulte encore de l'accélération du développement; de même que les stades blastula et gastrula sont omis dans la série des processus embryonnaires, de même la phase à initiales est également omise; l’œuf segmenté aboutit à une planula à deux feuillets etnon à une blastula munie de son blastoderme, et le mésoblaste se sépare du mésoendoblaste sous forme de bandelettes et non sous celle d’initiales. Lorsque la quantité de vitellus nutritif contenue dans l'œuf est très considérable, comme chez les Clepsine, le mésoblaste, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 339 au moment où il apparait dans le mésoendoblastie, est repré- senté par un petit nombre de grosses cellules, ou même par un seul blastomère qui, à lui seul, est homologue à la somme des deux iniliales de la Trochosphère ou des bandelettes de l’'Enchytreoides. | HT. — L'absence d’initiales ne constitue done pas une grande différence entre la genèse du mésoblaste chez les Trochosphèreslibres et cette même genèse chezles embryons à développement condensé ; la seule dissemblance réside dans le procédé mis en œuvre. En revanche, une différence réelle paraît se manifester entre ces deux types d'évolution embryonnaire dans l’origine du feuillet moyen: chez les Trochosphères, les deux initiales dérivent de l’endoblaste ; alors que, chez les £nchytræoïdes, les bandeleltes se séparent, par une sorte de délamination, d’un feuillet primordial ou méso-endoblaste qui produit à la fois et en même temps le mésoblaste avec l’endoblaste. Dans le premier cas, l’endo- blaste existe seul dès l’abord, et donne naissance aux iniliales; dans le second, l’endoblaste ne se développe pas en premier lieu, et provient d’un mésoendoblaste préformé. — Cette différence, si grande au premier abord, n’en est pas une en réalité, et J'ai déjà insisté sur ce fait dans un petit mémoire récent (23); 1l suffit, pour s’en rendre compte, _de suivre le développement d’une Trochosphère, puis de le comparer à celui d’un embryon d'Enchytræoïdes. Une Trochosphère, en schématisant' et simplifiant quelque peu les processus, provient d’une blastula ; une partie du blastoderme de cette dernière s’invagine dans le blastocæle, et devient ainsi l’endoblaste qui entoure l’archentéron. A ce stade gastrulaire, la larve présente un ectoblaste et un en- doblaste produits tous deux en même temps lors de l’invagi- nation. Ensuite, deux cellules de l’endoblaste se séparent de lui, et, en profilérant, donnent naissance au mésoblaste : il résulte de ce fait que l’endoblaste de la gastrula n’est pas un feuillet simple, puisqu'il renferme à la fois des éléments qui 340 LOUIS ROULE. constituent l’endoderme el d’autres qui produisent le méso- blaste; cet endoblaste primordial est un méso-endoblaste, comme celui des embryons d'£nchytræoïdes. — Et la même série de phénomènes se reproduit dans les deux cas. Le méso-endoblaste se montre d’abord chez la Trochosphère, puis quelques cellules se séparent de lui pour engendrer le mésoblaste ; les autres éléments, placés au centre, consti- tuant l’endoblaste définitif. De même, le méso-endoblaste apparaît en premier lieu chez les embryons d’£nchytræoïdes ; puis, plusieurs cellules périphériques se séparent de lui pour produire le mésoblaste, tandis que les éléments cen- traux font partie de l’endoblaste. Le procédé de genèse diffère seul, et j'ai déjà insisté sur ce fait dans les pages précédentes. La Trochosphère présente une série de modifications successives, distinctes les unes des autres dans le temps, qui permettent de bien vorr les processus embryonnaires. Par contre, chez les jeunes Enchytræoïdes, les feuillets, au moment où ils se forment aux dépens des blastomères de la planula, ont déjà une structure complexe et sont représentés par un grand nombre de cellules. — Cette différence résulte de la condensation du développement, et n'a pas d’autre cause. Si l’on suppose qu'une gastrula, allant devenir Trochosphère, remplisse son blastocæle avec des cellules provenant des initiales, on aura un embryon d'Enchytræoides au moment de l'apparition de l’archentéron, et de la séparation du mésoblaste d'avec l’en- doblaste. Les études récentes d’embryogénie montrent que, selon toute probabilité, le mésoblaste des Cœlomates provient tou- jours de i’endoblaste. — En schématisant les développe- ments larvaires des Cœlomates actuels et les ramenant au stade gastrula, on ne doit pas appeler endoblaste le feuillet quilimitel’archentérongastrulaire, mais bien méso-endoblaste, ou mésendoblaste, puisqu'il est chargé de produire à la fois l’endoblasteet le mésoblaste ; celui-ci dérivant toujours d’ébau- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 341 ches paires, de manière à déterminer dans le corps une sy- métrie bilatérale. Et c’est là une opposition primordiale entre les Cœlomates et les Cœlentérés, puisque le mésoderme de ces derniers est formé à la fois par l’ectoblasteet l'endoblaste, et n’est jamais produit par des ébauches paires d’origine endoblastique. L’endoblaste des gastrulas de Cœlentérés est un feuillet simple, tandis que celui des gastrulas de Cœlomates actuels est un feuillet double, un méso-endoblaste. Dans le développement larvaire des Cœlomates, l’évolution ontogénétique reproduit l’évolution phylogénétique, et le méso-endoblaste se montre dès l’abord avec un aspect sem- _blable à celui offert par l’endoblaste des gastrulas de Cœlen- térés; la division en deux parties, l’une interne, l’autre externe ou mésoblastique, n’intervenant que plus tard. — Au contraire, chez les mêmes Cœlomates, dans les dévelop- pements condensés, l’évolution ontogénétique est réduite à son minimum d’étendue. Le méso-endoblaste n'apparaît plus avec l'aspect primordial de l’endoblaste des Cœlentérés ; lorsqu'il prend naissance, il est constitué par un grand nombre de cellules parmi lesquelles on distingue souvent celles qui feront partie de l’endoblaste de celles qui appar- tiendront au mésoblaste. La nature spéciale de ce feuillet primordial est donc encore plus nette dans les planulas que dans les gastrulas. En résumé, et pour continuer à opposer les uns aux autres les Cœlentérés et les Cœlomates, les embryons de ces deux groupes de Métazoaires présentent toujours deux feuillets primitifs, l’un externe et l’autre interne. Le feuillet externe, ou ectoblaste, donne naissance, dans les deux cas, aux léguments et aux centres nerveux; par contre, le feuillet interne subit deux évolutions différentes. Chezles Cœlentérés, il persiste avec son caractère primitif, el produit d’une ma- nière confuse, de concert avec l’ectoblaste, le mésoderme de ces animaux. Il se divise en deux parties chez les Cœlomates : l'une qui formera l’endoderme, et doit par suite être consi- dérée comme un endoblaste définitif: et l’autre dont pro- 349 LOUIS ROULE. viendra le mésoblaste. — Le feuillet interne des Cœlomates est donc un méso-endoblaste, tandis que celui des Cœlentérés est un endoblasie simple. | | IV. — J'ai parlé, dans la discussion qui précède, des larves Trochosphères d'Annélides comme si leur structure était unique et semblable dans tous les cas. J’avais surtout en vue les Trochosphères qui viennent d’une blastula, et non celles qui présentent un commencement d’embryogénie con- densée; et les premièresoffrent, chez toutes les Annélides qui en possèdent, une organisation identique. — En outre, la présence ou l'absence d’une larve Trochosphère dans le déve- loppement est de peu d'importance, puisque la même famille renferme des types à évolution larvaire et d’autres à évolu- ton planulaire. Ainsi, l’Aydroides (Eupomatus) uncinata Phil., passe, d'après Hatschek (9), par un stade planula; 1l en est de même, d’après von Drasche (5), pour le Pomatoceros triqueter D. Ch.; et cependant, chez une Sabellide, la Da- sychone lucullana D. Ch., le développement, ainsi que je lai observé, rappelle tout à fait celui des Enchytræoïdes. — Les Trochosphères présentent au début de leur embrvogénie, chez beaucoup d’Annélides, des caractères identiques au point de vue de la genèse des feuillets, et ne diffèrent entre elles que par la forme du corps ou l’arrangement de leurs cou- ronnes vibratiles. Aussi, me suis-je cru autorisé àrapprocher d’une larve Trochosphère typique, et sans rapporter cette larve à aucun groupe précis d'Annélides, le développement des Enchytræoides, puisque je n'avais à étudier que l'ori- gine des feuillets blastodermiques et leurs processus évo- lutifs. Pourtant, il est un fait sur lequel il est bon d'insister, et qui distingue une Trochosphère d’un embryon d’Oligochæte. Les Trochosphères, et cela est surtout bien net pour celles qui ont un corps globuleux et relativement fort gros, comme les larves de Polygordius par exemple, possèdent, à côté de leur mésoblaste dérivé des initiales, plusieurs fibres muscu- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 343 laires qui ne proviennent pas de ces dernières. Elles offrent aussi un réseau nerveux qui paraît n'avoir aucun rapport direct avec les centres nerveux de l'adulte, bien que tous deux aient une origine ectoblastique commune, et que Klei- nenberg (12) ait vu, chez les larves de Lopadorynchus, des relations se manifester entre les seconds et le premier. Ces ébauches musculaires et nerveuses sont spéciales aux larves et manquent aux embryons d'Enchytræoides. J'ai essayé de les retrouver, mais j'ai toujours vu des cellules embryon- naires non différenciées dans l’ectoblaste et le mésoblaste, jusqu’au moment où les deux centres nerveux définitifs font leur apparition. Or, au stade correspondant chez les larves, ces ébauches musculaires et nerveuses ont presque disparu. Les développements condensés ne montrent donc aucune trace de ces tissus hâlivement différenciés, et présentent seulement, dès leur début, les tissus et les organes qui exis- tent chez l'adulte. Cette absence me paraît devoir s’opposer à ce que l’on accepte en entier les opinions de M. Kleinenberg. Ce natura- liste pense que les centres nerveux des Annélides correspon- dent à des modifications poussées dans un certain sens, avec symétrie bilatérale, du réseau nerveux à symétrie radiaire de la Trochosphère, et qu’il a retrouvé chez les larves de Lopa- dorhynchus. Pour moi, j'ai toujours observé que les centres nerveux dérivaient de l’ectoblaste, à un stade où ce feuillet est constitué par de simples cellules épithéliales, n’ayant pro- duit, au préalable, aucun autre élément nerveux ni aucun élément épithélio-nerveux. Les choses se passent comme si le réseau de la larve ne faisait jamais son apparition; et, par suite, les centres, au moment de leur naissance, ne peuvent avoir de rapports avec un réseauabsent.— Les Enchytræoïdes ont, il est vrai, un développement condensé; mais si les rela- tions entre le système nerveux de la larve et celui de l'adulte étaient aussi étroits que le dit Kleinenberg, il est probable que l’ectoblaste des embryons dérivant d'une pla- nula montrerait quelques traces de cet appareil nerveux lar- 344 LOUIS ROULE. vaire, tout au moins dans les régions qui avoisinent les ébauches des centres. | Étant donnée l'absence de cet appareil dans les développe- ments condensés, il est permis de croire que ce réseau est spécial à la larve, et n’a d’autres rapports avec les centres que ceux résultant de leur origine commune, puisque tous deux sont produits par l’ectoblaste. Les larves vivent en liberté dans la mer, se nourrissent et se déplacent pendant un certain temps, avant que les ganglions nerveux de l'adulte et les fibres musculaires du mésoblaste aient fait leur apparition. Aussi, aux dépens des feuillets blastodermi- ques primordiaux (les seuls lissus qu’elles possèdent en ce moment), un système nerveux et un système musculaire prennent-ils naissance ; mais ces systèmes ne sont nécessaires qu'aux larves et n'existent que chez elles. Ils n’ont aucune relation avec les centres nerveux et les couches musculaires qui apparaissent plus tard et se développent suivant une symétrie bilatérale. Cependant, le cerveau et le cordon médullaire ont encore quelques rapports avec le réseau nerveux de la larve; tous deux sont formés par l’ectoblaste, et peut-être quelques par- ties du second sont-elles conservées dans le premier. — Mais la différence est complète pour les fibres musculaires. Celles de la larve sont produites de bonne heure par l’ectoblaste et l’endoblaste; quelques cellules de ces feuillets tombent dans le blastocæle, à la manière de phagocytes, et prennent l’as- pect de fibres musculaires. Elles n’ont donc aucune relation d’origine avec les fibres de la musculature de l'adulte, qui proviennent toutes du mésoblaste; à un stade où les pre- mières sont bien développées et capables de se contracter, le mésoblaste n’est pas représenté, ou bien est constitué soit par les initiales, soit par les bandelettes dont les éléments ont encore l'aspect de cellules embryonnaires. Ces fibres sont donc spéciales à la larve, et forment par leur réunion un méso- derme hâtif, larvaire, comparable par l’origine au méso- derme des Cœlentérés. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 345 Une larve Trochosphère présente donc, dans son évolution, deux groupes de tissus intercalés entre le feuillet interne et le feuillet externe : un premier groupe, produit par ces deux feuillets, et assimilable au mésoderme des Cœlentérés; et un second groupe, qui prend une extension considérable par la suite, et dérive simplement des initiales mésoblastiques, sans que les deux autres feuillets contribuent en rien à sa forma- tion directe. — Ce mésoderme phagocytaire primitif, que l’on pourrait nommer mésoderme blastocælien ou mésoderme primaire, n'est pas spécial aux larves d’Annélides; on le re- trouve chez les larves de presque tous les autres Cœlomates; mais ce n'est pas ici le lieu d'exposer ces considérations d'embryogénie générale. — Il importe, pourtant, de ne pas le confondre avec le mésoderme de l'adulte, qui dérive du mésoblaste, lequel provient lui-même du méso-endoblaste, et de ne pas les décrire tous deux, comme on l’a fait parfois, sous lenom commun de « formations mésodermiques ». V. — J'ai tâché de retrouver, chez les embryons d'En- chytræoïdes, des initiales sexuelles semblables à celles que M. Nussbaum (19) a vues chez les embryons des C/epsines, mais je n y suis pas parvenu. Il est impossible de distinguer, d'après mes recherches, et même à des stades déjà avancés, les élémenis qui doivent produire les glandes sexuelles de ceux qui doivent produire d’autres organes. Les ébauches de ces glandes apparaissent lorsque les premiers anneaux sont déjà bien formés, et elles prennent naissance aux dépens de l’endothélium péritonéal de certaines cloisons ; mais je n'ai point remarqué que ces cellules endothéliales aient revêtu un aspect parliculier lors des stades antérieurs à celui de la genèse des ébauches sexuelles. Sans prétendre aller à l’encontre des assertions de Nussbaum, ïl était utile d'indiquer l'absence d’initiales sexuelles chez les embryons d'Enchytræoïdes, puisque la pré- sence précoce de semblables initiales a été signalée chez d’au- tres animaux. Il importe aussi de remarquer que les larves 346 LOUIS ROULE. de Polygordius, dont le développement paraît s'effectuer suivant un type primitif, sont également privées d’initiales sexuelles. | VI. — J'ai comparé jusqu'ici, sous le rapport de la seg- mentalion de l’œuf et de la genèse des feuillets blastodermi- ques, les £nchytræoides à toutes les autres Annélides, et prin- cipalement aux Polychætes. Il existe, en effet, de si grandes ressemblances d'organisation entre les Oligochætes et les Polychætes que de pareilles comparaisons étaient permises ; et les documents relatifs aux premiers processus embrvon- naires des Oligochætes sont tellement contradictoires qu'il est impossible de s'appuyer sur eux pour discuter avec certi- tude. — J'ai suffisamment relaté plus haut les différences établies entre trois des principaux auteurs qui se sont occupés du développement des Annélides, Kowalevsky, Kleï- nenberg et Hatschek, pour n'avoir plus à y revenir. Il me suffira d'indiquer 1ci que chaque œuf d’'Enchytræcides donne naissance à un seul individu, et ne se divise pas en deux par- ties comme les œufs du Lumbricus trapezoïdes; et que l’évo- Jution condensée des mêmes Æ£nchytræoides est bien diffé- rente de celle avec stade gastrulaire décrite par Kowalevsky (13) comme existant chez les Lumbricus agricola Hoffm. M. Kleinenberg (12) avance que le blastocæle des œufs segmentés du Lumbricus trapezoïdes communique avec l’exté- rieur par un pore; 1l s’agit peut-être d'un fait semblable à celui que j'ai vu parfois chez les embryons d'Enchytræoides pourvus d’un blastocæle. Cette cavité est limitée, sur une cer- taine partie de son étendue, par une seule couche de cel- lules à peu près sphériques; ces dernières, à cause de leur forme, se touchent par une région restreinte, et laissent entre elles des espaces vides, souvent assez grands, qui font en effet communiquer le blastocæle avec l'extérieur. — Cette communication est dénuée de toute importance morpholo- gique, puisqu'elle dépend de la forme arrondie des blasto- mères ; si ces derniers étaient cubiques ou rectangulaires, et DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 347 serrés les uns contre les autres; comme dans une blastula, pareille communication n'’existerait pas. Peul-êlre le fait signalé par M. Kleinenberg est-il comparable à celui que jai consfaté. $ 2. — Organes produits par l’ectoblaste. L’ectoblaste des embryons d’'£nchyrræoides possède, dès le Stade planula, ses caractères propres. Il est représenté par une seule couche de cellules cubiques, petites, qui se fusion- nent plus tard en un syncytium; ces cellules sont pourtant rectangulaires et allongées en une région, qui sera la future plaque céphalique, et par suite, la future ébauche des cen- tres nerveux sus-æsophagiens. Les organes, en accordant à ce mot son sens le plus étendu, produits par l’ectoblaste, sont au nombre de trois : 1° L’ectoderme; 2° Les soies ; 3° Les centres nerveux. L'ectoderme est la persistance de l’ectoblaste chez l'adulte. Lorsque l’ectoblaste a produit les deux autres organes, il conserve son aspect général, et se borne à augmenter le nombre de ses cellules, pour suivre l’accroissement du corps en surface. L’ectoderme porte les soies, et conserve avec l’un des centres nerveux, le cordon médullaire, les rela- tions étroites déjà établies entre ce dernier et l’ectoblaste primitif. VII. Ectoderme. — L'ectoderme dérive directement de l'ectoblaste. Ce dernier est représenté d'ordinaire par une seule couche de cellules, et montre toujours cet aspect, sauf dans les régions où il prolifère pour donner naïssance aux soles et aux centres nerveux; il conserve cette structure jusqu à l’élat adulte, et modifie quelque peu certains de ses éléments pour devenir l’ectoderme. Quelques-uns de ces der- niers gardent, en effet, le caractère épithélial, tandis que plu- sieurs autres, accumulés de préférence dans la région cli- 348 LOUIS ROULE. tellienne, revêtent la forme de cellules à mucus. Celles-ei sont semblables à celles déjà signalées comme existant dans l’ectoderme des autres Oligochætes et des Chétopodes ; leurs fonciions sont également identiques. J'ai nommé ectoderme la couche épithéliale qui entoure le corps, et non .ypoderme à l'exemple de la plupart des au- teurs, parce que le premier terme me paraît plutôt répondre à la réalité des choses. Cette couche provient, en effet, de l’ectoblaste, et se trouve ainsi homologue de l’ectoderme ou épiderme des autres Métazoaires; 1l n’y a donc pas lieu d’em- ployer un nom spécial pour la désigner. En outre, l'emploi du mot zypoderme est dû à une erreur d'observation, car il tend à indiquer que cette zone épithéliale est placée sous un derme; ce qui n’est pas le cas. Ainsi, ce terme a contre lui sa signification, qui est erronée, et de plus, il fait double emploi; 1l vaut donc mieux ne pas s’en servir, et débarrasser d'autant la nomenclature technologique, déjà bien en- combrée. | L'ectoderme est recouvert par une cuticule assez mince, mais dure et résistante, produite par les cellules ectoblasti- ques; elle apparaît d’abord comme un plateau qui s’épaissit peu à peu. — Salensky (25), et Hatschek (9) dans quelques cas, avancent que la cuticule, chez les Annélides observées par eux, provient de la membrane vitelline de l’ovule; cette membrane persiste autour de l’ectoblaste de l'embryon, et se transforme ainsi en une couche cuticulaire. — À prigri, cette origine est bien extraordinaire, car on ne l’a encore constatée sûrement chez aucun autre groupe de Métazoaires. Pour moi, je n’ai point remarqué de faits semblables chez les embryons d'Enchytræoïdes; la membrane vitelline dispa- raît peu à peu pendant la segmentation, et n’existe plus au moment où l’archentéron se creuse dans le méso-endoblaste. — Cette disparition de la membrane vitelline est encore plus nette chez les Dasychone lucullana D. Ch., qui appartiennent à la famille des Serpulides, et sont par suite très voisines des types étudiés par MM. Salensky et Hatschek. Le vitellus se DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 349 segmente et, en même temps, subit un retrait, de sorte que l'espace occupé par la jeune larve est plus petit que l’espace primitivement occupé par le vitellus; la larve se meut alors dans la cavité de l'ovule, cavité limitée par la membrane vitel- line; puis cette dernière se rompt, et la larve est mise en liberté. La membrane vitelline, fort mince, adhère intime- ment au vitellus, lorsque l’œuf n’est pas encore segmenté; elle se sépare ensuite de lui et disparaît; elle ne se trans- forme donc pas en une cuticule périphérique. De même que pour les embryons d'Enchytræoïdes, cette dernière, chez Les Dasychone, est produite par l’ectoblaste. VIII. Soies. — Les faisceaux de soies ou rames sont au nombre de deux paires par segment, et ils n'existent ni sur le lobe céphalique, ni sur le lobe anal, ni sur les anneaux clitelliens de l’adulte; chaque rame porte cinq ou six soies: les deux faisceaux placés du même côté sont très proches l'un de l’autre, et simulent les deux rames d’un parapode atrophié de Polychæte. — Tel est l’aspect des bouquets de soies chez les Enchytræoides adultes; chez les embryons, les soies d’une même rame n'apparaissent pas en même temps, et sont produites les unes après les autres. Chacune d'elles prend naissance indépendamment de ses voisines; une dé- pression ectoblastique tubulaire se creuse, et les cellules qui tapissent cette dépression produisent la substance de la soie. Cette substance rappelle tout à fait celle de la cuticule ; elle se moule dans l’invagination, en prend la forme, et de- vient cylindrique. Puis, la dépression sétigère s’allonge, ses parois s’amincissent, le fond seul reste épais et continue à sécréter la soie; de sorte que celle-ci croît plus en longueur qu'en épaisseur. — Les soies seules dérivent de l’ectoblaste ; les fibres musculaires qui servent à les faire mouvoir pro- viennent du mésoblaste somatique. Sans revenir ici sur les longues discussions auxquelles a donné lieu la genèse des soies, je dois dire que récemment, MM. Salensky et Hatschek, aux travaux desquels il faut 320 LOUIS ROULE. ; toujours revenir lorsqu'on étudie le développement des Annélides, ont avancé que l’origine mésoblastique des soies est certaine. Il suffit de relire le passage précédent pour voir combien leur opinion diffère de la mienne. — Mais, comme les assertions de naturalistes aussi distingués que les auteurs précités méritent toujours une grande créance, il est bon d’a- Jouter à l’appui de mes observations celles de MM. E. Perrier (20) et Rietsch (22), pour ne citer que cerlains des tra- vaux les plus importants publiés dans ces dernières années. M. E. Perrier a vu que les soies des Oligochætes terricoles sont produites par l’ectoblaste ; il en est de même pour celles du Sternaspis scutata Otto, d’après M. Rietsch. | Je ne puis cependant, à l'exemple de ce dernier, accorder une importance majeure, au point de vue de la genèse des soies, à une grosse cellule située au fond de la dépression sétigère. Je n'ai point remarqué de cellules semblables. — Les éléments qui constituent la paroi de la dépression sont d’abord tous égaux, à en juger d’après les distances qui séparent leurs noyaux, et il est probable que tous contri- buent dans la même mesure à produire la petite ébauche de la soie; plus tard, la soie augmente en longueur de préfé- rence, et les trois ou quatre cellules du fond de la dépression contribuent seules à cet accroissement. Ces cellules, plus longues que les autres, mais confondues comme elles en un syncytium, correspondent sans doule au gros élément basi- laire des Sternaspis ; seulement, elles ne forment pas la soie à elles seules, bien qu’elles prennent la plus grande part à cette genèse. L'opinion déjà ancienne de Leydig (17) paraît donc être exacte; les soies sont produites par l’ectoblaste, et n'ont aucun rapport avec le feuillet moyen. Mais, encore une fois, je ne pense pas, à l'exemple de Rietsch, très affirmatif à ce sujet, que chaque soie dérive d’une seule cellule; j'ai toujours vu, chez les £nchytræoides, les cellules de la dépression concourir toutes à la genèse de ces appen- dices ; el, par suite, comme les soies croissent de préférence DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 391 en longueur, cette genèse se localise surlout dans la région basilaire de la dépression. La substance de la soie est de même nature que celle de la cuticule. Les soies correspondent probablement à des parties spéciales dela couche cuticulaire qui entoure le corps entier; ces appendices prennent naissance dans des dépres- sions ectoblastiques, revêtent ainsi une forme cylindrique, et sont susceptibles d’un accroissement considérable s’opérant surtout par leur base, ce qui leur permet de faire saillie hors des téguments. IX. Centres nerveux. — Les centres nerveux de l’adulte sont représentés par le cerveau et le cordon médullaire Cerveau Plaque cephaliz cie 21 Somalopleure 2 Z 1 P. NZ" B ? k Cordon m ST TE Cælorne Û . . ÉRCES set » f Ma vole CA se CA eT , : Short sde Cavrté nbctinale* Ft. 21: Fig At, A?, A3, schémas de la genèse du cerveau; B!, B2, B%, schémas de la | genèse du cordon médullaire. ventral ou moelle ventrale. Le cerveau est privé de toule adhérence avec l’ectoderme ; il est libre dans les cavités des segments qui le contiennent, el peut se déplacer, grâce au jeu de muscles particuliers. Il n’en est pas ainsi pour le cor- don médullaire; celui-ci est en rapport sur toute sa longueur 3h2 LOUIS ROULE. avec l’ectoderme, et lui est uni par sa base. — Le cerveau el la moelle renferment de la substance fibrillaire et des cellules nerveuses; ces dernières ne forment point dans le cordon médullaire des amas localisés ayant la valeur de ganglions. Les centres nerveux sont produits par l’ectoblaste ; leurs ébauches sont d’abord simples, mais elles montrent ensuite deux centres principaux de prolifération, surtout bien nets dans la moelle, et qui dénotent l'existence d'une dualité, atténuée ensuite par la condensation des processus. L'é- bauche du cerveau, ou plaque céphalique, est séparée de l'ébauche du cordon ventral, ou plaque médullaire. Les deux centres sont réunis l’un à l’autre assez tard, au moyen de deux commissures qui proviennent du cerveau en majeure partie, et entourent l’æœsophage avant de se réunir à l’extré- mité antérieure de la moelle ventrale. L'origine ectoblastique des centres nerveux est déjà connue, non seulement chez les Annélides, mais encore chez tous les Métazoaires ; dans le cas particulier des Oligochætes, elle a été décrite par MM. Kowalevsky (13) et Klemen- berg (12); il n’y a donc pas lieu d'entamer une discussion à ce sujet. — Certains points de détail méritent pourtant un examen approfondi. M. Salensky (25) a vu, chez l’Aricia fœtida Clap., la plaaue céphalique se mettre en rapport avec le mésoblaste, et il assimile cette union aux rapports existant, chez les larves de Polygordius, entre la plaque céphalique et les cellules du mésoderme blastocælien. — Les phénomènes me paraissent être semblables chez l’Aricia et l’'Enchytræoïdes; la plaque céphalique, qui dérive de l’ectoblaste, touche forcément au mésoblaste sous-jacent, et le repousse devant elle. Mais ce mésoblaste est homologue de celui qui, chez le Polygordus, provient des initiales; 1l n'est done pas comparable au mésoderme blastocælien de la larve. En conséquence, si la plaque céphalique se met en rapport avec le mésoblaste, ces relations n’ont rien de commun avec celles établies entre la DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 393 plaque céphalique de la larve et son mésoderme blastocælien. — Du reste, la plaque céphalique est simplement Juxtaposée au mésoblaste, chez les embryons d'Enchytræoïdes, et je n'ai jamais vu de traînées cellulaires unir Ja première au second. _Gütte (8) et Salensky (25) se trompent, d’après Kleinen- berg (12), lorsqu'ils comparent les ébauches du cerveau, dans les embryons à développement condensé qu’ils ont étudiés, à la plaque céphalique ou plaque syncipitale des larves. Je crois à mon tour que Kleinenberg est dans l’er- reur lorsqu'il s'élève contre une pareille interprétation. — La plaque céphalique des larves est un épaississement local de l’ectoblaste, relié par des tractus au réseau nerveux an- nulaire des couronnes vibratiles et aux fibres musculaires du mésoderme blastocælien. Cette plaque apparaît donc de très bonne heure. — Lorsque la larve se transforme peu à peu pour revêtir l’aspect et la structure de l’adulte, le réseau annulaire s’atrophie, et les tractus qui le joignent à la plaque disparaissent de même. Mais la plaque ne s’atrophie pas; la région de l’'ectoblaste où elle est située continue à grandir et à proliférer pour donner naissance au cerveau de l'adulte. La plaque céphalique est toujours une, bien qu’elle change de rapports. Chez la larve, elle est en relations avec le réseau nerveux annulaire; chez l’adulte, elle s’unit au cordon mé- dullaire; mais ces changements ne suffisent pas pour avancer que la plaque céphalique de la larve soit distincte de l'ébau- che du cerveau. Cette dernière correspond à une plaque céphalique agrandie de manière à suivre l'accroissement du corps, et perdant à mesure ses connexions premières pour en acquérir de nouvelles. Il suffit de suivre l’évolution du cerveau chez les embryons d'Enchytræoïides pour se convaincre que l’ébauche de cet organe est bien homologue à la plaque céphalique des larves. Cette ébauche se montre de très bonne heure, dès le stade planula ; et cette apparition hâtive est déjà une ressemblance avec la plaque céphalique larvaire. Si elle ne contracte ensuite aucun rapport avec les autres parties du corps de ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 23. — ART. N° 3. 354 LOUIS ROULE. l'embryon, il faut en chercher la cause dans l'absence du réseau nerveux annulaire et du mésoderme blastocælien ; les seuls organes de la larve qui se mettent en relations avec la plaque céphalique étant absents, il est certain que cetle dernière doit rester isolée jusqu’au moment où des com- missures la Joindront au cordon médullaire. M. Klemenberg dit, en outre, que les prolongements laté- raux émis par l’ébauche cérébrale ne sont pas, chez les larves de Lopadorhynchus, des commissures œsophagiennes, mais bien des nerfs longitudinaux qui existent chez les em- bryons seuls, et disparaissent avant l’état adulte; les com- missures seraient formées plus tard, indépendamment du cerveau et du cordon médullaire. Je n’ai point observé des faits semblables ni vu des nerfs longitudinaux ; les prolon- gements latéraux sont bien les commissures œsophagiennes ; et ces commissures proviennent du cerveau, du moins en majeure partie, l’autre parlie étant fournie par le cordon. — Mes observations diffèrent donc de celles de Kleinenberg, et concordent avec celles des autres embryogénistes qui ont étudié le même sujet. Lorsque le cerveau se détache de l’ectoderme et devient libre dans les cavités des premiers segments, les cellules mésoblastiques environnantes se transforment en fibres mus- culaires, dont les unes s’insèrent sur le cerveau lui-même et les autres s’attachent à la paroi du pharynx; toutes dirigent en outre leur extrémité périphérique vers les téguments. Cette évolution rappelle tout à fait celle décrite par M. Frai- pont (6) comme existant chez les larves de Polygordius ; les cellules du mésoblaste qui avoisinent le cerveau se modifient aussi en fibres musculaires qui s’insèrent sur le cerveau et le pharynx. — Le cordon médullaire des larves de Polygordius est représenté d’abord, d’après les recherches de Hatschek (9) et surtout d’après celles de Fraipont (6), par un épaississe- ment ectoblastique plurinucléé situé sur la ligne médio- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 39) ventrale de la larve. Bientôt après, la substance fibrillaire fait son apparition, et se dispose en deux bandes placées sur les bords de l’épaississement primitif; ces deux bandes sont des centres de prolifération, qui grossissent seuls. Aussi, au moment de leur naissance, les bandes sont reliées l’une à l’autre par la région médiane de l’épaississement, tandis que, plus tard, elles sont séparées et distinctes, puisque seules elles se sont accrues; la région médiane n’a plus alors qu’une importance secondaire. — En somme, le cordon médullaire commence par être unique; puis, ses bords grandissent plus vite que son milieu, et il se divise, suivant une ligne longitudinale, en deux parties, l’une placée à droite et l'autre à gauche de la ligne médiane. Ces deux parties, nommées par Salensky plaques médullaires, restent distinctes l’une de l’autre, lorsque leur évolution est achevée, chez beaucoup d’Annélides, et sont confondues chez d’autres, sur la ligne médiane, soit en totalité, soit en parlie. Il est à remarquer que le cordon médullaire est simple lorsqu'il est constitué par un amas de noyaux, et devient double au moment où apparaît la substance fibrillaire ; cette dernière se dispose, en effet, sous formes de deux bandes distinctes jointes l’une à l'autre par la région nucléée moyenne. Durant toute la vie, cette dernière reste en contact avec l’ectoderme, Le protoplasma qui entoure les noyaux se continuant avec celui des cellules ectodermiques de la zone de contact. — Le cordon est représenté d’abord par un épaississement de l’ectoblaste renfermant des noyaux, qui proviennent de la division des noyaux de lectoblaste. Cet épaississement est d’abord bombé ; puis ses bords s’accrois- sent plus vite que son milieu; et, finalement, le cordon mé- dullaire est constitué par deux bandes largement unies sur la ligne médiane. L’accroissement plus rapide des bords est dû à l’apparition de la substance fibrillaire ; seulement, celte substance s’étend ensuite sur la ligne médiane pour former une zone continue ; une telle jonction des deux bandes fibrillaires n'existe pas chez les Po/ygordius, ou y est à peine prononcée. 3506 LOUIS ROULE. Les Enchytrwoides montrent donc une simplicité aussi grande que les Archiannélides et les Archichétopodes au point de vue des relations établies entre le cordon médul- laire et l’ectoderme, mais il faut reconnaître aussi que ces relations sont beaucoup plus étroites chez ces derniers que chez les premiers. — Les deux bandes médullaires des Ar- chiannélides et des Archichétopodes sont plongées pour ainsi dire dans l’ectoderme, et ne s'élèvent pas ou presque pas au-dessus de lui pour faire saillie dans la cavité générale. C’est le contraire pour les ÆEnchytræoïdes; le cordon ne touche l’ectoderme que par une mince zone étroite, sem- blable à un pédoncule, et le reste de l'organe constitue un corps distinct, à contours nets, nullement confondu avec d’autres parties de l’économie. — Bien que les relations pri- mitives soient ici conservées, la disposition dénote une supé- riorité évidente. M. Salensky (25) a, le premier, attiré l'attention sur l'existence, chez toutes les larves d’Annélides, d’une dépres- sion longitudinale et ventrale de l’ectoblaste, placée sous le cordon médullaire; cette dépression, garnie de cils vibra- iles, a été nommée par cet auteur gouttière médullaire. On la voit chez la larve seule, et elle disparaît chez l’adulte, sauf une exception : les Protodrilus en effet, qui font partie du oroupe des Archiannélides, conservent cette gouttière pen- dant toute leur vie. — Je puis confirmer les assertions de Salensky pour ce qui touche aux larves d’Annélides, et j'ai moi-même revu souvent cette goutlière, notamment chez la Dasychone lucullana D. C. Mais, si cette dépression existe chez les larves, elle manque chez les embryons d’Enchy- træoïides, et paraît manquer aussi dans tous les développe- ments dépourvus de stades larvares libres. L’ectoblaste esl arrondi au-dessous du cordon médullaire, et ne montre aucune trace de dépression. Ainsi, eærésumé, le cordon médullaire des £nchytræoïdes dérivg d'un épaississement ectoblastique, d’abord simple, pu bipartite, et ressemble en conséquence, comme pro- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. J0Ù cessus évolultifs, à celui des Archiannélides et des Archiché- topodes. Des faits analogues ont été constatés par M. Kleï- nenberg (12) chez le Lopadorhynchus, par M. Salensky (25) chez la Terebella Meckelu D. Ch. el d’autres types d’Anné- lides, par M. Nussbaum (19) chez la Clepsine, ete. Ce mode de développement, qui découle de celui observé chez les Poly- gordèus, paraît donc exister chez toutes les Annélides. — Pourtant, M. Kowalevsky (13) avance que, chez les Lum- bricus, le cordon est formé par l'union sur la ligne médiane de deux plaques médullaires d’abord séparées et distinctes l’une de l’autre. Il est probable que le savant embryogéniste a observé un stade déjà bien évolué ; à moins que les deux bandes de substance fibrillaire ne sé montrent de bonne heure chez les Lumbricus, alors que l’épaississement ecto- blastique médian est à peine ébauché. Dans ce dernier cas, les deux bandes paraissent former des cordons séparés; mais cet aspect serait dû à une apparition hâtive de la substance fibrillaire. — II semble plus certain qu'il en est chez toutes les Annélides comme chez les Polygordius. L'ébauche première étant simple, l'accroissement ultérieur s'effectue d’après Le type bilatéral, suivant en cela la symé- trie donnée à l’organisme par le mésoblaste. — Les ébauches des deux centres nerveux sont d’abord séparées, et naissent d’une manière indépendante; elles se réunissent plus tard au moyen de commissures qui entourent l’æœsophage. Cette séparation primordiale est déjà bien connue, et l’on a vu qu’elle existait chez tous les groupes d'Annélides. — S'il en est ainsi, il est impossible d'accepter l'opinion de M. Sedgwick (26) sur l’origine du système ner- veux des Annélides. Ce naturaliste admet que le système nerveux des Annélides dérive de celui des Cœlentérés, et notamment de celui des Actinies. Ce dernier forme sous l'ectoderme un plexus développé surtout aux environs de la bouche, autour de laquelle il se dispose en un anneau diffus. Pour produire l’organisme d’un Cœlomate bilatéral tel 38 LOUIS ROULE. qu'une Annélide, le corps croît dans le sens transversal, et la bouche, circulaire, s’allonge en une fente; puis, les deux extrémités de cette fente s’élargissent, et les bords de sa partie médiane se soudent l’un à l’autre. L'ouverture buc- cale primitive se serait donc divisée en deux ouvertures, dont l'une deviendrait la bouche et l’autre l’anus. — L’anneau nerveux se transforme de même; il s’allonge pour suivre l’étirement de la fente buccale ; sa partie anale disparaît ; sa partie buccale persiste pour produire les centres sus-æso- phagiens ; et sa partie médiane, placée au niveau de la région de soudure, produirait à son tour le cordon médullaire. Les deux porüons de l’anneau primitif, placées chacune dans un des deux bords de la région de soudure, correspondent, dans cette hypothèse, aux deux plaques médullaires de la larve des Annélides ; ces deux portions sont en effet sépa- rées, puis se réunissent l’une à l’autre à mesure que les bords se soudent. Cette hypothèse n'est pas soutenable, et cela pour deux raisons. Si vraiment les plaques céphalique et médullaires proviennent d’un anneau oral primitif, elles ne devraient pas naître séparément, mais dériver d’une ébauche commune correspondant à cet anneau primordial continu; or, ce n’est pas le cas. — Ensuite, si le cordon médullaire provient de la soudure des deux bandes latérales placées dans les bords qui se réunissent, ces deux bandes devraient naître d’une manière indépendante; or, on observe tout le contraire, puisque l’ébauche du cordon est un épaississement unique et médian de l’ectoblaste. Ces deux faits empêchent d'ac- cepter la théorie de Sedgwick. Les Trochosphères des Annélides possèdent un réseau ner- veux circulaire placé sous l’ectoblaste ; ce réseau a bien été étudié par Hatschek (9) et Fraipont (6), sur les larves de Polygordius, et par Kleinenberg (12) sur les larves de Lopa- dorhynchus. Ce réseau nerveux est donc primordial, puisqu'il apparaît avant la grande plaque céphalique et le cordon mé- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 39 dullaire; mais je ne pense pas qu’il possède toute l'impor- tance que Kleinenberg voudrait lui accorder. — Ce savant admet, en effet, que le réseau nerveux de la larve est l’unique point de départ des centres nerveux de l’adulle; bien que son existence soit transitoire, il relie entre eux le cordon médullaire et la plaque céphalique, au moment où ils pren- nent naissance. Si vraiment l'importance morphogénétique du réseau nerveux larvaire était aussi grande que l’admet Kleinenberg, il est très probable que ce réseau manifesterail sa présence chez tous les embryons d'Annélides ; lorsque les deux centres nerveux commencent à se former, on devrait trouver entre eux quelques vestiges du réseau pour les relier l’un à l’autre. Or, je n'ai jamais remarqué de vestiges semblables ; les deux ébauches sont d'abord distincles, et ne se rejoignent que plus tard, par le moyen des commissures. Les larves d’Annélides. étant des êlres libres dans l’eau qui les entoure, possèdent des appareils de relalion; ces appareils sont fort simples, mais ils n’en existent pas moins, et à côté d'eux, pour les innerver, on trouve un système ner- veux à symétrie radiaire. À mesure que la larve augmente en âge, et que l’aspect de son corps se modifie pour s’al- longer suivant une symétrie bilatérale, le système nerveux de la larve disparaît pour faire place à un nouvel appareil nerveux disposé aussi suivant une symétrie bilatérale; et c'est alors que prend naissance le cordon médullaire. En même temps, la plaque céphalique primitive s'accroît pour devenir un centre d'innervation d'une taille proportionnée à celle du corps. — Ces modifications se produisent pendant que le réseau annulaire s’atrophie, de telle sorte que les pla- ques céphalique et médullaire sont séparées dès le début de leur apparition. Peut-être quelques iractus, appartenant au réseau et n'ayant pas encore disparu, établissent-1ils des rela- lions entre les deux ébauches nerveuses, mais ces relations ne lardent pas à s’effacer. — Et, si l’on suit la marche du développement de ce système nerveux, on voit d'abord se former un appareil propre à la larve, et disposé suivant la 300 LOUIS ROULE. symétrie de son corps; puis, lorsque la symétrie de la larve change, certaines parties du réseau larvaire persistent pour produire la plaque céphalique, les autres parties s’atrophient, et le cordon médullaire apparaît sur la face ventrale de la région inférieure de la larve. Cette région inférieure est, en effet, la seule qui s’allonge et s’accroisse pour constituer le corps de l'adulte; le cordon médullaire est un centre ner- veux propre à cette région, et n’apparait qu'au moment où celte région prend naissance. Celte série de processus est bien nette cher les ue de Polygordius, qui, autant qu'il est permis d’en juger d’après l’état actuel de la science, représentent un état primitif de l’évolution des Annélides. La même série existe aussi, bien que restreinte par la condensation du développement, chez les embryons d’Enchytræoïdes. La plaque céphalique se montre dès le stade planula, mais elle est très petite el ne s’accroil guère; ce stade correspond à celui d’une larve Tro- chosphère. Plus tard, la plaque médullaire fait son appari- ton; la plaque céphalique grandit alors et prolifère. La plaque médullaire est donc postérieure, dans la série des stades, à la plaque céphalique, et cette dernière ne grossit qu'au moment où la plaque médullaire prend naissance. — Une telle succession de phénomènes concorde avec l’état actuel de nos connaissances sur le développement de la Tro- chosphère des Polygordius. M. Kleinenberg (12) dit avoir vu le cordon médullaire de la larve des Lopadorhynchus se mettre en rapport, au moment où 1l apparaît, avec le réseau nerveux annulaire, de manière à ce que ce réseau élablisse une anastomose entre le cordon et la plaque céphalique. — Mais il suffit de iire le mémoire écrit par Kleinenberg et d'examiner ses dessins, pour se convaincre que le développement des Lopadorhynchus est plus condensé que celui des Polygordius. 1] ne l’est pas assez pour empêcher lapparition du réseau nerveux annulaire, à l'exemple de ce qui se passe chez les Ænchytræoïides; maisil l’est suffisamment pour que ce réseau soit représenté surtout DÉVELOPPEMENT: DES ANNÉLIDES. 361 par une bande compacle, et non par un ensemble de fins lractus anastomosés ; pour que la région inférieure du corps soit, dès le début, fort grosse et placée sous la tête de la Tro- chosphère, en empiétant même quelque peu sur sa parlie antérieure ; et pour que le cordon médullaire fasse une appa- rition hâtive dans cette région inférieure. La bande nerveuse annulaire, lors de cette apparition, ne s’est pas encore atro- phiée complètement, el, comme cette bande est produite par l’ectoblaste ainsi que le cordon, des connexions transitoires s’'élablissent entre eux. Mais il faut attribuer l'existence de ces connexions à la condensation des processus embryon- naires, et rechercher, chez les larves des Archiannélides, les caractères primordiaux du développement. M. Fraipont (6) a constaté la présence, chez les Po/ygor- dius, d'un plexus nerveux intermusculaire, qu'il rapproche de celui des Chœtognathes et des Actinies. — Le plexus des Actinies prend naissance entre les fibres musculaires même, d’après les recherches des frères Hertwig; et ces derniers, ayant remarqué que le plexus des Chæœtognathes ressemble à celui des Actinies, en ont conclu que son origine est sem- blable. Fraipont agit de même, avec quelques restrictions il est vrai, en se basant sur la structure du plexus chez l’adulte. — Or, pour en arriver à de pareilles conclusions, il est né- cessaire d'étudier le développement lui-même, et de voir si vraiment ce plexus ne dérive pas de l’ectoblaste ; car, s’il n’en est pas ainsi, si le plexus est produit par le mésoblaste, cette notion va à l’encontre de toutes nos connaissances actuelles sur la genèse du système nerveux. Chez tous les Cœlomates examinés jusqu'ici à ce point de vue, les nerfs qui se ren- dent aux muscles dérivent des centres nerveux. — La ques- tion reste donc entière; j'ai bien essayé de la résoudre sur les embryons d'Enchytræoïdes, mais je n'y suis pas parvenu ; je n'ai point vu de branches provenir des centres nerveux, ni des cellules mésoblastiques former un plexus situé entre les fibres de la musculature. 362 LOUIS ROULE. $ 3. — Organes produits par l’endoblaste. : X. — L'’endoblaste est représenté par la couche de cel- lules qui entoure la cavité archentérique, au moment où cette dernière vient de se creuser dans le mésoendoblaste:; les cellules de cette couche s’allongent, se serrent les unes contre les autres, et diffèrent ainsi, comme forme, de celles placées plus en dehors. L’endoblaste se différencie donc rapidement. — L'archentéron s'accroît ensuite, et l’endoblaste suit cet accroissement ; il finit par se mettre en rapport avec l’ectoblaste en deux régions du corps de l’embryon, la région postérieure terminale et la région ventrale de l’extré- mité antérieure ; deux dépressions ectoblastiques vont alors à la rencontre du feuillet interne, el constituent le stomo- dæum et le proctodæum. Ces deux dépressions s’abouchent avec l’archentéron; ce dernier devient l'intestin, la dépression antérieure le pharynx, et la postérieure le rectum. Le rectum et le pharynx sont donc produits par l’ecto- blaste et non par l’endoblaste, comme M. Lemoine (16) semble le croire. Je ne puis pourtant assurer avec certitude que le proventricule dérive de l’endoblaste ; il me paraît bien qu'il en est ainsi, mais l’absence de cils vibratiles sur sa paroi, et la présence d’une cuticule semblable à celle du pharynx, permettent aussi de croire qu'il correspond à l'extrémité postérieure du stomodæum. Le développement de l’archentéron par l'apparition d’un vide dans le mésoendoblaste semble être un fait commun dans les embryogénies condensées d’Annélides; Salensky (25) l’a signalé plusieurs fois, et Kowalevsky (13) a remarqué une genèse semblable chez l’£uaxes. La couche endodermique, qui dérive directement de l’en- doblaste, reste simple durant toute la vie de l'individu. $S 4. — Organes produits par le mésoblaste. Lorsque l’endoblaste s’est différencié dans le méso-endo- blaste, le mésoblaste reste constitué par quatre ou cinq ran- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 303 gées de blastomères compris entre l'ectoblaste et le feuillet endoblastique. Ces rangées sont en nombre égal, ou presque égal, dans toutes les régions de l’embryon, et ne sont nulle- ment rassemblées en deux bandelettes latérales. Deux fentes, l’une placée à droite et l’autre à gauche de l’archentéron, apparaissent dans le mésoblaste, et la position latérale de ces fentes est le seul indice de l’arrangement en bandeleltes des éléments mésoblastiques. — Ces fentes sont les ébauches du cœælome; elles divisent le feuillet moyen en deux couches : l'une interne, accolée à l’endoblaste, la sp/anchnopleure, représentée par une seule rangée de cellules ; l’autre externe, accolée à l’ectoblaste, la somatopleure, constituée par plu- sieurs rangées de cellules. Les ébauches cœlomiques prennent donc naissance par le même procédé que le schizocæle des Mollusques; elles s'étendent autour de l’archentéron, pour se réunir sur les lignes médianes dorsale et ventrale, mais ne pénètrent pas très loin dans la région postérieure du corps, où reste une partie du mésoblaste non divisée en somatopleure et splanchnopleure. Lorsque la fusion est accomplie, le cœlome est une cavité simple et unique. Cette cavité grandit ; des cellules se détachent de la soma- topleure, tombent dans son intérieur, et y restent à l’élat libre, comme des éléments mésenchymateux. D’autres cel- lules, rassemblées en petits groupes, s'étendent dela soma- topleure à la splanchnopleure pour diviser le cœlome en segments distincts; la cavité cœlomique, d’abord simple, est ainsi cloisonnée en douze ou treize anneaux séparés. Ces anneaux sont tous antérieurs. Les postérieurs prennent nais- sance, indépendamment les uns des autres, dans le méso- blaste postérieur où le cœlome n'a pas pénétré; chacun de ces anneaux dérive de la fusion, sur les lignes médianes dor- sale et ventrale, d’une paire de cavités d’abord séparées. Le mode de genèse des douze ou treïze métamères antérieurs diffère donc de celui des mélamères postérieurs. Les organes produits par le mésoblaste sont : 1° La somatopleure; 304 LOUIS ROULE. 2° La splanchnopleure ; | 3" Les cavités segmentaires; leurs cloisons et leurs élé- ments libres : | 4° Les vaisseaux sanguins ; o° Les organes segmentaires ou néphridies ; 6° Les glandes septales ; 1° Les organes sexuels. XI. Somatopleure. — La somatopleure est représentée dès l’abord par quatre ou cinq couches de blastomères arrondis, et laissant entre eux des vides très appréciables, de manière à ressembler aux éléments de la somatopleure des embryons âgés de Mollusques. Ces blastomères se segmentent pour augmenter leur nombre et suivre l’accroissement du corps; leur couche la plus interne conserve durant toute la vie ses caractères primordiaux, et devient l’endothélium péritonéal de la paroi du corps. Les cellules des autres rangées se transforment en fibres musculaires ; pour cela, chaque cel- lule produit de la substance contractile et enveloppe avec elle son protoplasme initial, qui contient le noyau, et reste au milieu de la fibre ; l'élément musculaire ainsi produit ressemble done par sa structure et son mode de développe- ment aux fibres musculaires des Mollusques. Leur aspect diffère seul, car les fibres des Annélides, serrées les unes contre les autres sans interposition de substance conjonc- tive, prennent une forme lamelleuse. — La rangée la plus externe des blastomères de la somatopleure devient une couche de fibres circulaires, placée même au-dessous de l’ectoblaste ; les autres rangées donnent naissance à des fibres longitudinales. Quelques cellules non employées dans cette genèse produisent en minime quantité de la substance conjonclive, qui reste placée entre les fibres, et leur sert de ciment. ° Ce mode de développement de la musculature ressemble, autant qu’il est permis d’en juger d’après les descriptions de MM. Salensky (25) et Nussbaum (19), à celui de la muscu- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 30 lature des Annélides à embryogénie condensée. — II im- porte de signaler que la rangée externe des blastomères produit des fibres musculaires circulaires et sous-jacentes à l’ectoderme; ces dernières ne dérivent donc pas de l’ec- toblaste, mais proviennent du mésoblaste au même titre que les fibres longitudinales. Cette couche circulaire manque aux Archiannélides, et paraît ne jamais faire défaut chez les Archichétopodes et les Chétopodes; son origine exacte n'avait pas encore été démontrée d’une manière précise, à tel point que M. Fraipont (6) incline presque à la considérer comme ectoblastique. Cela n'est pas, du moins pour les Enchytræoïides, et 11 est probable qu'il en est ainsi chez les autres Chétopodes ; car il serait extraordinaire de voir, dans un même groupe d'animaux, des organes homologues et semblablement placés dériver de feuillets blastodermiques différents. XIL. Splanchnopleure. — La splanchnopleure est d’abord constituée par une seule rangée de cellules accolée à l’en- doblaste; ces cellules restent indifférentes pendant un certain temps, puis elles grandissent, donnent à leur proto- plasma un aspect vacuolaire, et se remplissent de granula- tions colorées en jaune verdâtre. Elles ne prolifèrent pas durant cette évolution, et ne forment jamais qu’une seule couche nommée, chez l'adulte, couche chloragogène, qui cor- respond ainsi à la splanchnopleure entière, et représente l’endothélium péritonéal de la parot intestinale ; elles ne se modifient jamais en fibres musculaires. Quelques auteurs désignent parfois, à cause de leur cou- leur, les éléments de la couche chloragogène sous le nom de cellules hépatiques. Ce terme estimpropre à tous les points de vue: au point de vue morphologique, puisque ces élé- ments dérivent du mésoblaste et sont placés en dehors de l’endoderme ; au point de vue physiologique, parce qu'ils ne sécrètent point de produits servant à la digestion des aliments. Ils sont en effet séparés de la cavité intestinale par toute 306 LOUIS ROULE. l'épaisseur de l’endoderme et des espaces sanguins latéraux. XIII. Cavités segmentaires ; leurs cloisons et leurs éléments libres. — Les cavités des segments sont toutes homologues, puisqu'elles sont creusées dans la masse des éléments méso- blastiques ; mais elles diffèrent comme procédé de formation. Les douze ou treize anneaux antérieurs dérivent directement, on le sait, du cœlome primitif par le cloisonnement de ce dernier ; ils communiquent donc les uns avec les autres dès l’abord, et ne sont séparés qu’ensuite par des dissépiments. Les cavités segmentaires postérieures, par contre, sont dis- tinctes dès leur apparition, et chacune d’elles est formée par ja fusion d’une paire de fentes creusées au même niveau. — Le cœlome céphalique n’est qu’une partie du cœlome primordial, et ne se distingue nullement par son origine des segments qui lui font suite. Il en est de même chez le Polygordius et le Lopadorhynchus. M. Salensky admet pourtant que, chez la Terebella Meckelii D. Ch., le cœlome céphalique apparaît indépendamment du cœlome somati- que. Mes observations ne conduisent pas aux mêmes résul- tats; et, malgré les assertions de Salensky, je suis persuadé que la cavité de la tête n’est pas autre chose que la partie antérieure du cœlome entier. | Les cloisons, bien qu'ayant toutes la même valeur et étant homologues les unes des autres, diffèrent aussi comme procédés formatifs. Celles placées entre les douze ou treize segments antérieurs, qui divisent ainsi en cavités secon- daires le cæœlome primordial, sont principalement produites par la somatopleure; les autres correspondent aux bandes cellulaires laissées entre les espaces segmentaires posté- rieurs. Ces derniers prennent naissance à part les uns des autres; le premier d’entre eux est séparé du suivant par une couche de cellules mésoblastiques, celui-ci du troisième par une couche semblable, et ainsi de suite; les cloisons déri- vent de ces couches. — Par contre, dans la région antérieure DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 367 du corps, la somatopleure envoie à travers le cœlome quel- ques traînées cellulaires qui vont rejoindre la splanchopleure, et auxquelles s'ajoutent plusieurs éléments libres; les cloi- sons sont ainsi formées aux dépens de ces traînées, et divi- sent en anneaux la cavité cœlomique. Les dissépiments sont d’abord constitués par deux cou- ches de cellules; ces dernières produisent de la substance conjonctive el la rejettent vers leur surface d'union. Cette substance s’épaissit de plus en plus, et quelques cellules émigrent dans son intérieur pour s’y transformeren éléments conjonctifs ou en fibres musculaires. Finalement, chaque cloison présente une bande conjonctivo-musculaire médiane, revêtue sur ses deux faces par un endothélium péritonéal qui dérive des deux zones cellulaires primordiales, et se continue latéralement avec celui de la paroi du corps et la couche chloragogène. Les cloisons ne sont pas des membranes Hé He mais des réseaux à larges mailles, permettant aux éléments libres de passer d’une cavité segmentaire dans une autre. Quelques iractus musculaires partent des dissépiments, et traversent les cavités des anneaux pour aller s'insérer sur la paroi du corps ou sur celle de l'intestin. L'ensemble de ces tractus et des cloisons constitue, dans la cavité générale, un réseau con- jonctivo-musculaire dont les parties les plus grandes et les . plus régulières constituent les dissépiments ; ce réseau rap- pelle, sauf par la taille plus grande des espaces laissés entre les travées, celui qui traverse la cavité ‘générale des animaux mésenchymateux. Les éléments libres proviennent de blastomères déta- chés surtout de la somatopleure. Il sont plongés dans un plasma liquide et incolore, et restent pendant un certain temps sans modifier leur structure; puis ils grossissent, subissent des modifications semblables à celles offertes par les cellules de la couche chloragogène, et leur protoplasme devient vacuolaire. — Étant donnée leur origine, ces éléments 368 LOUIS ROULE. libres ne sont point des cellules de la couche chloragogène détachées de leurs voisines après avoir revêtu leur structure définitive. Les éléments libres et ceux de la couche chlora- gogène proviennent du mésoblaste, et, dès qu'ils se sont séparés de ce dernier, subissent leur évolution côte à côte sans Jamais se confondre. XIV. Vaisseaux sanguins. — Le vaisseau ventral prend naissance un certain temps après le vaisseau dorsal, et tous deux apparaissent sous forme de tronçons qui se soudent les uns aux autres. Chaque ébauche de ces tronçons consiste en un espace vide, percé par la séparation, en unpoint donné, sur les lignes médianes dorsale et ventrale de l'intestin, de l’endoblaste et de la splanchnopleure ; ces vides correspon- dent, étant donnée leur situation, à des espaces blastocæliens. Ensuite, des cellules de la splanchnopleure se mettent en rapport avec les cavités vasculaires, prolifèrent, et leur for- ment une paroi propre. — Les vaisseaux possèdent donc une paroi particulière, qui leur est fournie par le feuillet viscéral du mésoblaste. Leur cavité grandit et se remplit d’un plasma coloré en rouge brun, dépourvu de globules; leur paroi augmente de même en surface, tout en s’amin- cissant et subissant une sorte de kératinisation. Lorsque les vaisseaux sont parvenus à leur entier déve- loppement, ils sont divisés en trois parties : une médiane et cylindrique, ou vaisseau proprement dit, et deux latérales étroites, ou espaces sanguins latéraux, qui s'étendent entre l'endoderme et la couche chloragogène pour allerse réunir aux espaces semblables du tronc vasculaire opposé. L’endoderme est donc entouré par une couche sanguine presque continue. Enrésumé, les vaisseaux sonttoujours distincts du cæœlome, ne communiquent jamais avec lui, et leurs parois sont pro- duites par la splanchnopleure ; M. Salensky (25) a observé les mêmes faits chez d’autres Chétopodes, et M. Nussbaum (19) les arevus chez la Clepsine. Il est donc permis de croire qu'il en est ainsi chez toutes les Annélides. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 3069 M. Michælsen (18) décrit, dans un mémoire récent, les espaces sanguins latéraux comme analogues à un système chylifère, et dit même avoir vu ces espaces envoyer des rameaux dans le protoplasma des cellules endodermiques. Je n’ai point remarqué de semblables ramifications intra- cellullaires ; parfois, les cellules de l’endoderme ont bien une base arrondie et concave, et les espaces sanguins occupent ces anfractuosités en paraissant tendre à séparer les cellules les unes des autres ; mais ces espaces ne pénètrent point dans le protoplasma, et en sont toujours séparés par la membrane même des éléments endodermiques. En re- vanche, je suis d'accord avec Michælsen au sujet du rôle de ces espaces ; je crois en effet que le sang renfermé dans ces portions latérales absorbe, à travers les cellules endoder- miques, les parties assimilables des matériaux nutritifs; et ils jouent ainsi Le rôle de chylifères. Chacun des deux vaisseaux dérive d’une ébauche mé- diane. Pourtant, M. Kowalevsky (13) pour les Lumbricus, et M. Vejdovsky (27) pour les Criodrilus, admettent que le vaisseau dorsal est produit par la coalescence de deux troncs latéraux. Il n’en est pas ainsi pour les Enchytræoides ; le vaisseau dorsal provient d’une ébauche simple, et nulle- ment double. XV. Organes segmentaires. — Les huit anneaux antérieurs du corps sont toujours dépourvus, chez les Enchytræoïdes, d'organes segmentaires. Les néphridies des neuvième, dixième et onzième segments apparaissent bien chez l’em- bryon; mais elles disparaissent ensuile, à mesure que les glandes sexuelles se développent. La paire d'organes — car chaque anneau possède deux organes segmentaires — du douzième segment est transformée en une paire de spermi- ductes. Quant aux néphridies des métamères suivants, elles existent toujours chez l’adulte, sauf celles du treizième et parfois du quatorzième segments, qui disparaissent pour faire place aux glandes sexuelles. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 24. — ART. N° 3. 3170 LOUIS ROULE. Ces organes sont, chez l'adulte, divisés en trois parties : un corps ovalaire, volumineux, terminé en avant par une région effilée ou col; ce dernier traverse le dissépiment an- térieur de l’anneau qui renferme le corps, et s'ouvre dans la cavité de l'anneau précédent par un large pavillon vibra- ile. L'extrémité postérieure du corps s’effile en un petit canal fort court, qui débouche au dehors par un pore très étroit. — Le protoplasme de la néphridie contient plusieurs noyaux, el correspond ainsi à un syncytium cellulaire; il est traversé par un canal vibraüile, flexueux, replié plusieurs fois sur lui-même, allant du pavillon au pore externe sans aucune solution de continuité. Ce canal, dépourvu de paroi propre, est directement limité par le protoplasma, qui porte des cils vibratiles; sa situation esl donc semblable à celle d’un conduit intracellulaire, c’est-à-dire creusé à nu dans une masse protoplasmique. Les organes segmentaires des autres Enchytræoïdens rap- pellent, d’après les descriptions données par Vejdovsky (27), ceux des Enchytræoides; seulement, le canal grêle, qui dé- bouche au dehors, est d'habitude plus allongé chez les premiers, et parlois même plus long que le corps de la né- phridie. — M. Michælsen (18) dit avoir vu, chez certains Enchytræoidiens, les parois des cellules qui constituent par leur réunion l'organe segmentaire; il m’a toujours paru que ces éléments sont fusionnés en un symplasme, et sont dépourvus par conséquent de membranes limitantes. Mi- chælsen a observé en outre que le canal néphridien circule à nu dans le protoplasme en traversant les membranes cellulaires ; ce canal est donc intracellulaire dans tous les cas. — Une telle disposition des conduits néphridiens existe chez la plupart des Oligochætes, puisqu'on l’a remarquée déjà chez les Lumbricus et les Criodrilus ; on l’a retrouvée aussi chez les Chétopodes, les Hirudinées, les Archianné- lides, chez la Trochosphère même; elle paraît donc se montrer toujours dans le rein céphalique et ses dérivés, les organes segmentaires,. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. SA Les néphridies des anneaux placées en arrière du douzième segment sont d'abord représentés, au début de leur dévelop- pement, par deux rangées de grosses cellules placées, dans le mésoblaste, l’une à droite de l’archentéron, l’autre à gauche, et situées dans une région qui correspond à la face interne de la somatopleure. Ces cellules sont un peu plus grandes et plus réfringentes que les éléments mésoblastiques ordi- naires. — Chacune de ces rangées se divise ensuite en petits groupes de trois à quatre cellules, chaque groupe étant en rapport avec l’ébauche d’un anneau ; plus tard, une ou deux des cellules sont portées, par la prolifération du mésoblaste environnant, dans une des bandes qui séparent Les segments les uns des autres et deviendront les cloisons, tandis que les autres cellules du même groupe sont suspendues dans la cavité même de l’anneau. Celte dernière prend d’abord naissance entre le petit amas cellulaire et lasplanchnopleure, puis achève de se creuser tout autour de l’amas et parvient à l'isoler. Chacun de ces groupes est une ébauche de néphridie; les cellules qui la constituent prolifèrent, et se fusionnent les unes avec les autres en un symplasme; les deux antérieures produisent le col et le pavillon, pendant que les autres augmentent en nombre pour constituer le corps. Le canal se creuse ensuile par places ; ses divers tronçons se réunis- sent peu à peu les uns aux autres, et forment un conduit continu. — Ainsi, les ébauches des organes segmentaires sont d'abord rassemblées en un cordon placé sur la face interne de la somatopleure; puis ce cordon se divise, ses fragments sont refoulés par la prolifération des tissus envi- ronnants dans les dissépiments et les cavités des anneaux, et modifient leur aspect pour devenir des organes segmen- taires. — Quelques observations éparses, dues à Vejdov- sky (27) et à Lemoine (16), semblent montrer qu'il en est ainsi chez les autres Oligochætes limicoles. Ce mode de développement n'existe que pour les néphri- dies appartenant aux anneaux placés en arrière des douzième 342 LOUIS ROULE. el treizième métamères ; il n’en est pas tout à fait ainsi pour celles des neuvième, dixième et onzième anneaux, bien que leur origine première soit semblable. Je n’ai pu voir si ces néphridies sont réunies d’abord en un cordon continu, et si ce cordon est soudé à celui des autres organes segmentaires ; le stade le plus jeune qu'il m'’ait été donné de reconnaître m'a montré des ébauches distinctes, constituées chacune par trois ou quatre cellules, et placées sur la face interne de la somatopleure, dans un petit bourrelet qui se forme aux dépens de ce feuillet. Le bourrelet s'étend au travers du cœlome pour aller rejoindre la splanchnopleure, et devient une cloison; il entraîne avec lui, dans son évolution, l’ébau- che de la néphridie, qui se trouve ainsi suspendue au dissé- piment, après avoir pris naissance à côté de lui dans la somatopleure. Tous les organes segmenlaires ont donc une origine com- mune, puisqu'ils dérivent de la somatopleure; ils sont attachés aux cloisons parce que ces dernières les ont em- portés dans leur extension au travers du cœlome; et ils passent par les mêmes processus de développement, puisqu'ils sont constitués au début par un petit nombre de cellules, qui se fusionnent ensuite et se confondent. Ils dérivent en entier du mésoblaste, sauf une petite région voisine du pore externe, qui paraît provenir de l’ectoblaste. Les embryogénistes se sont souvent demandé si les or- ganes segmentaires sont produits par les dissépiments ou par la somatopleure ; Kowalevsky tient à la première opinion, et Hatschek admet que la seconde seule est exacte, pour ne citer que deux des plus marquants parmi les auteurs qui ont traité du développement des Annélides. Mes observations viennent corroborer celles de Hatschek. — Les néphridies évoluent aux dépens de la somatopleure; seulement elles sont de suite entraînées, à l’état d'ébauches fort simples, par les cloisons, et paraissent ainsi dépendre de ces dernières. Kowalevsky, comme Eisig, comme d’autres naturalistes, n'ont vu sans doute que des stades postérieurs à celui de la DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. ES NN genèse dans le mésoblaste somatique, et, remarquant que les ébauches à peine développées sont suspendues aux cloi- sons, ils en ont conclu que les premières dérivent des se- condes. En réalité, toutes les deux proviennent de la soma- topleure, et, sous l’état le plus simple, leurs éléments sont groupés ensemble. — M. Lehman (15) a également observé que les organes segmentaires d'un Oligochæte terricole, VA obophora rubicunda, dérivent de la somatopleure. La continuité primordiale, la soudure en un seul cordon, des ébauches néphridiennes, est intéressante à rapprocher de celles que Hatschek(9) a signalées comme existant chez les larves de Polygordius. Le rein céphalique de la Trochosphère des Archiannélides s’allonge en un long canal, qui se divise ensuite en fragments, dont chacun correspond à un anneau ; ces canaux traversent d'un côté les cloisons pour s'ouvrir dans le cœlome, et de l’autre vont déboucher à l'extérieur ; ils se transforment ainsi en organes segmentaires. — La soudure de ces tronçons en un seul conduit n'existe que chez les larves fort jeunes, et il en est de même pour les Enchytræoides. Lorsque le cordon cellulaire commence à manifester sa présence, les éléments du mésoblaste n'ont encore subi aucune différenciation, et les embryons sont bien peu âgés. La marche du développement dans le temps est ainsi semblable dans les deux cas. La seule différence porte sur la présence d’un canal dans le rein céphalique des larves de Polygordius, alors que ce canal manque dans le cordon des embryons d'Enchytræoïdes, et apparaît plus tard, après la division en fragments. — Cette différence résulte sans doute de la dissemblance profonde établie entre les deux modes évolutifs. Le rein céphalique des larvesestun appareilexcréteur, quiaccomplitles fonctions aux- quelles il est destiné ; aussi renferme-t-il un canal débou- chant au dehors. Il n’en est pas de même pour les embryons d'Enchytræoïides renfermés dans leur cocon; au moment où leur cordon cellulaire apparaît, ils se nourrissent aux dé- pens de leurs granulations vitellines, et les produits de désas- 374 LOUIS ROULE. similation sont peu abondants. Aussi le cordon se divise-t-il avant que le canal ne se soit creusé dans son intérieur. A cette “cause toute physiologique il faut ajouter aussi celle qui dé- coule de la condensation des processus embryonnaires. M. Lehman (15) représente, dans une coupe d’un jeune embryon d’A//obophora rubicunda, un rein céphalique cilié, très large, et presque aussi long que l'embryon lui-même. Ces dimensions exagérées sont vraiment extraordinaires, et je n’ai rien vu de semblable chez les embryons d'Enchy- træoides. Les observations de M. Wilson (29) me semblent plus exactes; ce dernier auteur a remarqué, chez des em- bryons de Lumbricus, un cordon qui unit entre eux les organes segmenlaires, mais à un stade où ces organes sont déjà parvenus à leur développement presque complet. — La continuité première des appareils excréteurs est donc dé- montrée; mais il faut croire qu’elle se manifeste à des instants différents suivant les types ; et, bien plus, un cer- tain nombre de mémoires publiés dans ces dernières années tendent à montrer que, dans certains cas, les organes seg- mentaires de l’adulte lui-même sont reliés entre eux par un conduit. Veydovsky (27) a déjà signalé des relations sembla- bles chez les Anachæta; Meyer et Cunningham les ont vues chez un Polychæle, la Lanice conchilega ; enfin, tout récem- ment, Beddard (2) a dit que ce fait est la règle chez les Oligochætes du groupe des Perichæta. Pour moi, J'ai tou- jours observé que les néphridies sont isolées les unes des autres chez l’adulte, et ne sont réunies en un cordon con- tinu qu’à un âge fort peu avancé, avant même qu'ils aient acquis leur structure définitive; et mes observations con- cordent avec celles de Hatschek (9) sur les Archiannélides et de R.-S. Bergh (3) sur les Hirudinées. La présence d’un canal qui relie, chez divers jee d'An- nélides, les organes segmentaires de l'adulte est, sans doute, une persistance de la continuité primitive qui doit exister chez tous les embryons. Parfois, la division est complète, et les néphridies sont distinctes les unes des autres; dans d’au- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 319 tres cas, la division est incomplète, et quelques éléments persistent entre les néphridies pour les relier entre elles. Mais, d’un côté comme d’un autre, les organes segmentaires dérivent toujours d’une ébauche primitivement continue et située dans la somatopleure. Ce sont là, à ce qu’il semble, les conclusions qui ressortent des travaux récents. XVI. Glandes septales. — Les glandes septales sont des cloisons étendues, sur la face dorsale du corps, entre les cin- quième et sixième, sixième et septième, septième et hui- tième anneaux; elles offrent les mêmes rapports que les dissépiments ordinaires avec la paroi du corps et celle du tube digestif, mais sont plus grosses, très épaisses, et pré- sentent la même structure que les organes segmentaires. Elles sont creusées d’un canal qui ne m'a montré aucune ouverture interne ni externe; elles ne communiquent donc ni avec l'extérieur ni avec un organe quelconque du corps, et je n'ai pu connaître leurs fonctions. Elles ont la même ori- gine que les cloisons, sont produites en majeure partie par la somaliopleure, mais ne portent point de néphridies. — En somme, il est permis de résumer leurs caractères en disant qu'elles tiennent à la fois des dissépiments et des organes segmentaires, autant par leur mode de développement que par leur structure définitive. Je n'ai pas l'intention de rouvrir le débat au sujet de la nature des glandes septales ; je vais me borner à donner mon opinion, etje ne l’émets qu'avec beaucoup de réticences, car, à mon sens, les observations de mes devanciers ajoutées aux miennes ne suffisent pas pour donner une appréciation exacle. Il serait nécessaire de reprendre l'étude complète de l’évolution de ces glandes, avant de se prononcer en connais sance de cause. — Les deux faits suivants sont pourtant à remarquer : l'absence d'organes segmentaires dans les anneaux antérieurs et dans ceux placés entre les glandes septales; et l’aspect de ces glandes, qui paraissent rassembler en elles la structure des cloisons et celle des néphridies. I] 376 | LOUIS ROULE. semble que les ébauches de ces deux derniers appareils, au lieu de devenir distinctes l’une de l’autre pour produire un organe segmentaire suspendu à un dissépiment, restent confondues et ne se séparent pas; il en résulte un corps mixte, dépourvu d’orifices comme les dissépiments et offrant les mêmes relations, mais gros et percé d'un canal comme les organes segmentaires. Les glandes seplales ne seraient donc pas des glandes et n'exerceraient point de fonctions particulières; elles corres- pondraient à des cloisons dans l’intérieur desquelles s'est développée l’ébauche d’une néphridie, sans que cette ébauche parvienne à se séparer de la cloison pour revêtir son aspect propre. En effet, les dissépiments et les organes segmentaires des douze anneaux antérieurs dérivent de la somatopleure, et les ébauches des seconds sont transportées dans la cavité générale en se suspendant à celles des premiers; si l’on suppose que toutes deux continuent à proliférer en laissant toujours leurs éléments confondus, on obtiendra des glandes septales avec leur structure et leur disposition. Il est à remarquer, si cette opinion est exacte, un autre fait qui vient la corroborer : les premiers anneaux sont séparés les uns des autres par des cloisons simples; les cin- quième, sixième et septième anneaux présentent des glandes septales, c'est-à-dire des cloisons munies d'organes segmen- taires pris dans la substance même de la cloison; enfin, tous les autres anneaux, placés plus en arrière, sont munis de cloisons auxquelles sont appendues des néphridies dis- tinctes et bien formées. Les glandes septales établiraient donc une transition entre les cloisons simples et les cloisons pourvues d'organes segmentaires vrais. — Je dois ajouter, en terminant, que MM. Vejdovsky (27) et Lemoine (16) ont également remarqué une ressemblance de structure entre les jeunes glandes septales et les organes segmentaires. XVII. Organes sexuels. — Il n'existe point d’initiales sexuelles prenant naissance aux dépens des premiers blas- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. Shi: tomères de l'œuf segmenté ; les testicules et les ovaires sont produits par l’endothélium péritonéal des dissépiments, et correspondent à de simples amas de spermoblastes et d’ovo- blastes, sans inlercalation de tissu d'aucune autre sorte. Les testicules proviennent de l’endothélium qui revêt, sur sa face postérieure, le dissépiment antérieur du onzième anneau, et les ovaires d’un endothélium semblable dépendant du dis- sépiment antérieur du douzième anneau. Chacun de ces segments renferme une paire de glandes sexuelles; il existe donc deux testicules et deux ovaires, placés de part et d'autre de la ligne médiane dans la cavité qui les contient. Les deux testicules, en grandissant, remplissent toute la cavité du onzième anneau, puis pénètrent dans l’intérieur des dixième et neuvième mélamères, dont les organes seg- mentaires s’atrophient. Chaque testicule est constitué par une masse lobée divisée en petites vésicules contenant un grand nombre de spermoblasies. Ces derniers produisent des spermatogemmes, dont les éléments deviennent tous des spermatocytes qui se transforment en spermatozoïdes, sauf un seul volumineux et central représentant le cytophore. Les deux ovaires accroissent aussi leur masse, et pénètrent jusque dans la cavité du treizième anneau, dont les organes segmentaires disparaissent. Chaque ovaire est constitué par un amas d’ovoblastes qui se divisent tous en deux cellules, dont l’une deviendra le véritable ovule, et l’autre un cumulus proligère se divisant de nouveau à diverses reprises. Le noyau de l’ovule se partage en un certain nombre de novaux secondaires, dont l’un, volumineux, persiste comme vésicule germinalive, et dont les autres se iransportent à la péri- phérie pour représenter, sans doute, un follicule qui ne parvient pas à se séparer de l’ovule. Ensuite, les noyaux folliculaires disparaissent, le vitellus accroît sa masse en absorbant les cellules du cumulus, et l'œuf arrive à matu- rité. Un petit nombre d’ovules, parmi la grande quantité d’ovoblastes, subissent seuls leur développement complet. La spermatogenèse ressemble à celle des C/irellio, telle 318 LOUIS ROULE. qu'elle à été décrite par M. Jensen (11). Quant à l’évolution si particulière des ovoblastes, je n’ai point connaissance qu'elle ait déjà été signalée ; plusieurs figures cependant, rencontrées çà et Ià dans les mémoires de Lemoine (16) et de Vejdovsky (27), tendraient à montrer qu'il en serait ainsi chez d’autres Oligochætes. | Les conduits sexuels des Ænchytræoïdes sont représentés par deux spermiductes placés dans le douzième anneau, à 22 Paroi dy corps Dissepiment Paroi urtestinale (1) !Pore externe Pis. 02 (1), Schéma d’une né phridie; (2), Schéma d’un spermiducte. côté el en dehors des ovaires. Chaque spermiducte dérive d’un petit amas cellulaire suspendu au dissépiment antérieur de l’anneau, non loin de la somatopleure, et semblable à une jeune ébauche d'organe segmentaire. Cette ressemblance conlinue à se montrer dans la suite de l’évolution, sans s’altérer jamais; les cellules de l’amas se fusionnent en un symplasme, et le tout s’allonge en traversant la cloison pour s'ouvrir dans la cavité du onzième métamère par un large pavillon vibratile. L'extrémité opposée à ce pavillon, ou corps du spermiducte, pénètre dans la paroi latérale du douzième anneau et débouche au dehors; une petite dépres- sion de l’ectoblaste se met en rapport avec lui, et les cellules de cette dépression prolifèrent pour constituer un pénis. — DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 3179 Le corps grandit beaucoup et se divise en deux régions, comme celui des néphridies : l’une épaisse, et l’autre grêle qui aboutit à l’orifice extérieur; ces deux régions, très longues et repliées sur elles-mêmes, renferment un canal vibratile droit et non flexueux. Les organes segmentaires ne diffèrent donc des conduits vecteurs mâles que par leur forme générale. Les spermiductes ne sont pas autre chose que les organes segmentaires du douzième anneau, modifiés en vue d’une fonction spéciale, le rejet des spermatozoïdes au dehors. Lorsque les néphridies prennent naissance dans les méta- mères qui précèdent et suivent le douzième anneau, celui-ci ne montre encore aucun de ces appareils; et, plus tard, les spermiductes apparaissent aux points mêmes où les organes segmentaires auraient dû se montrer. — L'origine est donc semblable : les jeunes spermiductes sont représentés par plusieurs cellules suspendues aux cloisons, et placées non loin de la somaltopleure comme si elles en provenaient. L'évolution est encore semblable : ces cellules prolifèrent et se fusionnent en un symplasme, dans lequel on ne reconnaît plus les parois des éléments primordiaux. Enfin, la structure définitive concorde également : les spermiductes font com- muniquer la cavité du onzième anneau avec le dehors, et cela en traversant le douzième anneau. L’homologie est donc indiscutable. On peut se demander pour quelle raison les spermiductes apparaissent bien après les autres organes segmentaires, el non pas en même temps. La réponse est aisée à donner. Les spermatozoïdes des Oligochæles ne prennent pas naissance dans tous les anneaux, comme chez un certain nombre d’An- nélides, mais seulement dans le onzième métamère; les néphridies du douzième segment, qui seules font communi- quer la cavité du onzième avec l’exlérieur, sont donc les seules à recevoir ces spermatozoïdes. — Ainsi, chez ces êtres à structure relativement complexe, la tendance à la spécialisalion fonctionnelle permet que ces conduits sexuels 380 LOUIS ROULE. jouent le rôle de canaux vecteurs pour les produits de la généralion, et point d'autre. Les spermiductes ne ressemblent en rien, au point de vue physiologique, aux autres organes segmentaires; ils servent seulement à mener les sperma- tozoïdes au dehors. Partant, ils prennent naissance chez les jeunes, au moment où les testicules se montrent ainsi que les ovaires, et pas avant; leurs ébauches existaient déjà, sem- blables à celles des néphridies ordinaires, mais elles atten- daient, pour évoluer, que les glandes sexuelles fissent leur apparilion. M. Vejdovsky (27), ayant remarqué que les organes seg- mentaires de la région clitellienne s’atrophient pendant le développement des appareils reproducteurs, en conclut que les spermiductes ne sont pas homologues des néphridies. Or, on à vu le contraire. Vejdovsky n’a sans doute pas observé que l’anneau ou les anneaux desquels dépendent les conduits vecteurs ne possèdent point d'organes segmentaires Jusqu'au moment où ces conduits apparaissent, et a confondu cet anneau avec ceux qui le précèdent et le suivent, dont les néphridies s’atrophient en réalité, après s'être montrées et avoir même fonctionné. Les conduits sexuels des Oligochætes limicoles sont donc vraiment, selon toute probabilité, des organes segmentaires modifiés en vue d’un rôle spécial. Quant à comparer ces conduits avec ceux des Oligochætes terricoles, la chose est bien difficile, car les anneaux sexuels de ces derniers ren- ferment à la fois des organes segmentaires vrais et des con- duits sexuels. Plusieurs naturalistes ont disculé sur ce sujet, et il me suffira de citer les noms de E. Perrier, Claparède, Ray-Lankester, pour faire comprendre limportance du débat ; plus récemment, Vejdowsky et Lehmann sont revenus sur cette question, mais leurs observations sont encore peu nombreuses et peu probantes. Balfour, et un certain nombre de zoologistes l’ont suivi en cette malière, admet à la fois que les conduits sexuels des Oligochætes limicoles correspondent bien à des organes DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 301 segmentaires, et que ceux des Oligochætes terricoles pro- viennent d'une bipartition des conduits des premiers, une portion persistant sous forme de néphridie, et l’autre pro- duisant les canaux sexuels. Balfour se base pour cela sur une structure particulière à un type primitif de Chétopode; les organes segmentaires du Saccocirrus papillocercus Bob. femelle seraient bifurqués, et effectueraient ainsi une tran- sition vers la division définitive, si l’on suppose que les deux branches se séparent l’une de l’autre en s’adaptant à des fonctions différentes. — J’ai eu l’occasion d'examiner des Saccocirrus femelles, etje me suis convaincu que leurs organes segmentaires sont simples et non bifurqués; la deuxième branche supposée esl une dépression des téguments, qui ne communique pas du tout avec la cavité générale ni avec l'organe segmentaire véritable, mais est simplement accolée à ce dernier; leur étroite juxlaposition a fait croire à une communicalion réelle. — Tout récemment, Beddard (2) vient de signaler que les néphridies des Perichæta sont ramifiées et possèdent plusieurs pores externes. Mais je ne pense pas pourtant qu’il soit possible de trouver dans cet ordre de faits une explication plausible. Il ne faut pas oublier en effet que les conduits sexuels des Oligochætes lerricoles ne ressemblent point à des organes segmentaires; ils n'offrent pas de pavillon ouvert librement dans la cavité générale pour y prendre les corps reproduc- leurs qui y sont parvenues au préalable; mais s'appuient directement sur la glande sexuelle et communiquent presque avec elle seule. — Dans ce cas, il paraît plus certain de trouver une explication en comparant cette structure à celle observée par Nussbaum (19) chez une Hirudinée, la C/epsine complanata Sav., dont les conduits sexuels rappellent ceux des Olgochætes terricoles par leur disposition générale. Ces canaux dérivent d’ébauches néphridiennes, qui se mettent en rapport avec les glandes de la génération, les enveloppent de tous côlés, et s’allongent en conduits venant déboucher au dehors. — Peut-être, chez les Oligochætes terricoles, les 382 LOUIS ROULE. jeunes organes segmentaires de la région clitellienne se divisent-ils en deux parties, l’une qui accomplit l’évolution habituelle et devient une néphridie, l’autre qui s’accole aux glandes sexuelles, les entoure, et s’étire ensuite pour former les conduits vecteurs de ces glandes. La division ne s’effec- tuerait que dans les ébauches néphridiennes encore très jeunes, et c'est en cela que mon explication diffère de celle présentée par Balfour; mais toules ces hypothèses, basées sur quelques faits à peine, demandent confirmation. TROISIÈME PARTIE CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR L'ORGANISATION DES ANNÉLIDES. La troisième partie de ce mémoire est consacrée à l'exposé des conclusions qu'il est possible de tirer des résultats obtenus, acquis à la science actuelle, par les études consa- crées au développement des Annélides. Ces résultats per- mettent en effet de comprendre la nature réelle du méso- blaste de ces êtres, et par extension celle du mésoblaste des Cæœlomates; ils permettent aussi de voir si les Annélides sont vraiment des Entérocæliens, et si la division des Méta- zoaires en Enterocæliens et Pseudocæliens est naturelle; ils autorisent enfin à discuter les opinions de MM. Lang, Kleinenberg, Fraipont et Hatschek, sur les relations réelles des Annélides. | Cette troisième partie est divisée en quaire paragraphes. Le premier traite de la valeur morphologique du méso-endo- blaste des Annélides ; le second du développement du méso- blaste et de la cavité générale qu'il limite, en examinant si les faits acquis concordent avec la théorie des frères Hert- wig. Le iroisième paragraphe est consacré à la discussion des opinions de Lang et de Kleinenberg sur les affinités DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 383 naturelles des Annélides; enfin, le quatrième paragraphe expose les appréciations qu’il est permis de formuler sur les relations exactes des Annélides avec les autres groupes de Cœlomates. $ 1. — Valeur morphologique du méso-endoblaste. 1. — La discussion relative à la nature du méso-endoblaste a été esquissée déjà dans la seconde partie de ce mémoire; mais il est utile d'y revenir une nouvelle fois, afin de bien préciser encore les faits observés et leurs conséquences. Le mésoblaste des Enchytræoïides n'apparaît pas, on le sait, comme un feuillet indépendant; il est au contraire confondu avec l’endoblaste en une masse commune que j'ai nommée Mn6so-endoblaste. Ainsi, lorsque l’ovule achève sa segmentation, les deux feuillets blastodermiques primor- diaux sont l’ectoblaste et le méso-endoblaste; plus tard, lorsque l’archentéron apparaît, le méso-endoblaste se divise en un endoblaste interne limitant la cavité archentérique, et un mésoblaste périphérique qui, plus tard encore, se par- tage à son tour en somatopleure et splanchnopleure. Cette fusion primitive de l’endoblaste et du mésoblaste n'existe pas chez les Enchytræoïdes seuls et les embryons d’Annélides à développement condensé ; on la retrouve aussi chez les larves. — Les recherches de Hatschek (9) autorisent _à penser que, chez ces dernières, les bandelettes mésoblas- tiques dérivent chacune d’une cellule imitiale faisant au début partie de l’endoblaste. Lorsque ces initiales ne sont : pas encore séparées du feuillet interne, ce dernier contient en lui-même l’endoblaste définitif et le mésoblaste futur; il n'est donc pas seulement un endoblaste, mais un méso-endo- blaste, puisqu'il en renferme en germe les deux feuillets blastodermiques profonds. — La présence d’un méso-endo- blaste au commencement de l’évolution est donc tout aussi nette chez les larves que chez les embryons riches en vitellus nutritif, l'aspect seul de ce feuillet diffère dans les deux cas, mais la valeur morphologique est la même, et la date de 384 LOUIS ROULE. son apparition également, puisqu'il prend toujours naissance à l'instant où licbtobaite se différencie. = Sans revenir ici sur des considérations déjà me. dans la seconde partie, 1l importe de remarquer que la notion du méso-endoblaste est applicable à tous les Cœlomates. Les études de plusieurs embryogénistes, et notamment celles des frères Hertwig, ont montré en effet que le mésoblaste de ces êtres dérive de l’endoblaste; et les observations contra- dictoires existant encore dans la science actuelle disparais- sent de plus en plus devant de nouvelles recherches. Tout porte à le croire, l'opinion des frères Hertwig est exacte, et le mésoblaste provient toujours de l'endoblaste. Dans ce cas, le feuillet primordial interne, qui apparaît chez l’em- bryon en même temps que l’ectoblaste, n’est pas seulement un mésoblaste, mais un méso-endoblaste semblable à celui des Annélides, et contenant en lui-même le és ODIHSIS futur avec l’endoblaste définitif. Une pareille valeur accordée à l'endoblaste des Cælomates est très importante au point de vue des différences existant entre ces derniers et les Cœlentérés. L’endoblaste des em- bryons de Cœlentérés ne donne jamais naissance à un mésoblaste disposé suivant une symétrie bilatérale et sem- blable à celui des Cœlomates ; on ne voit chez eux rien de _ semblable à l’amas mésoblastique des embryons d'Enchy- trœoïides. — Dans de pareilles comparaisons, les larves sont presque les seules importantes à connaître, car elles subissent un développement dilaté et montrent une série distincte de processus successifs. Or, l’endoblaste des larves de Cœ- lentérés devient en entier l’endoblaste définitif, et ne forme à ses dépens ni diverticules entérocæliens ni initiales méso- blastiques en nombre déterminé. Tout se borne pour lui à la production, de concert avec l’ectoblaste, d'une substance conjonctive fondamentale, qui s’insiaue entre les deux feuillets primitifs, et à l’émigration irrégulière dans cette substance de cellules ectoblastiques et endoblastiques qui deviendront les éléments figurés du mésoderme de ces êlres. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 385 L'endoblaste des larves de Cœlentérés est donc un feuillet simple, tandis que celui des larves de Cœlomates est un feuillet double. Il est certain que cette différence n’a pas été préétablie ; les larves des plus anciens Cœlomates de- vaient être semblables aux larves de Cœlentérés, et leur endoblaste était aussi un feuillet simple : seulement, cet endoblasie a évolué d’une façon particulière ; il a donné naissance, suivant un mode déterminé, à certains éléments, qui ont constitué par la suite un nouveau feuillet blasto- dermique. Cette évolution ancienne a laissé des traces dans le développement des Cœlomates actuels, car l’endoblaste de leurs larves ressemble beaucoup dès le début à celui des embryons de Cœlentérés ; mais elles disparaissent ensuite; tous les Cœlomates actuels, dont le développement est connu, possèdent un mésoblaste; et cette structure les sépare des Cœlentérés dépourvus de tout mésoblaste vrai. $ 2. — Développement du mésoblaste et du cœlome. IL. — Dans une pareille discussion, qui touche aux ques- tion les plus intéressantes de l’'embryogénie, et me porte à examiner les parties principales de la théorie des frères Hertwig (10), il convient avant tout de préciser les faits qu'il est permis de regarder comme exacts, si l’on en juge d’après le nombre des naturalistes qui les ont constatés. Le mésoblaste dérive le plus souvent, chez les larves des Annélides, de deux cellules initiales, qui font primitivement partie du méso-endoblaste, se séparent ensuite de lui, el parviennent dans le blastocæle; arrivées dans cette cavité, elles se segmentent un grand nombre de fois, et produisent les bandelettes mésoblastiques. Ces dernières sont d’abord constituées par un [amas compact de cellules ; plus tard se creusent dans leur intérieur une série de cavités qui, en grandissant et entourant le tube intestinal, engendrent le cœlome. — Le cœlome ne dérive donc pas d’ébauches enté- rocœæliennes, c'est-à-dire de dépressions archentériques capables de grandir et de s’isoler pour devenir closes et ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 25. — ART. N° 3, 386 LOUIS ROULE. ne plus jamais communiquer avec la cavité intestinale. Le méso-endoblaste est représenté dès l’abord, chez les embryons à développement accéléré et condensé, par une masse compacte de cellules, au milieu de laquelle se creuse l’archentéron. Lorsque cette évolution est achevée, l’endo- blaste se sépare du mésoblaste, et des cavités, qui appa- raissent dans ce dernier, deviennent en grandissant les cavités segmentaires, dont l'ensemble représente le cæœlome. Ces vides mésoblastiques ne communiquent point avec l’archentéron lorsqu'ils apparaissent, et ne communiqueront jamais avec lui; ils en sont toujours séparés par l’endoblaste et la splanchnopleure. — Ainsi, de même que chez les larves, le cœlome n'affecte jamais de rapports directs avec l’ar- chentéron, et ne dérive pas d’ébauches entérocæliennes. Ce procédé formatif diffère beaucoup de celui constaté chez les Chætognathes, les Brachiopodes, les Échinodermes, et les Chordés. Les embryons de ces quatre groupes de Cœlomates montrent une ou plusieurs paires de dépres- sions latérales des parois archentériques; ces dépressions croissent en pénétrant dans le blastocæle, et s’isolent de l'archentéron, en conservant une cavité centrale qui était d’abord un diverticule de l’archentéron lui-même.—Cemode est bien différent de celui observé chez les larves d’Anné- lides; les deux cellules initiales ne rappellent en rien les diverticules des vrais Entérocæliens. Ceux-ci sont limités par une couche cellulaire épithéliale et renferment une cavité, tandis que celles-là sont de simples cellules et ne contiennent aucun espace vide dans leur intérieur. Malgré ces dissemblances, les frères Hertwig ont placé les Aunélides parmi les Entérocæliens, en se basant pour ce faire sur une particularité constatée maintes fois dans les développements condensés. Ils admettent que les cellules initiales correspondent à des diverticules entérocæliens dont la cavité aurait disparu et dont ies éléments seraient encore confondus; la cavité ne prendrait naissance qu’au moment oùlesinitiales sesont séparées du méso-endoblaste, et ontpro- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 387 duit par leur prolifération un amas dont les cellules sont assimilables à celles des diverticules entérocæliens. — Cette Opinion est sans doute exacte ; on voit, en effet, les jeunes embryons d'Enchytræoïdes être dépourvus d’archentéron à un moment où les larves libres des Annélides en possèdent un; l'absence provisoire d’une cavité, lors des premiers stades de l’évolution, est un fait assez commun, et rien n’em- pêche qu'on la constate aussi dans la genèse du mésoblaste. Il en résulte que le cœlome des Entérocæliens, dans l’es- prit même des frères Hertwig, a une double origine. Dans un cas, il provient vraiment de diverticules archentériques, et c'est là le procédé typique; dans un second cas, chez les larves d’Annélides par exemple, il est produit par des ini- tiales qui ont en puissance la valeur de diverticules entéro- cœliens. Et, dans les développements condensés de ces mêmes Annélides, les initiales disparaissent parfois, ne font jamais leur apparition, le mésoblaste étant représenté dès l’abord par des bandelettes, des masses cellulaires, déjà fort épaisses. — A l’appui de leur opinion, les frères Hert- wig produisent un certain nombre d'arguments, qui tous, avec plus ou moins d'importance, viennent la corroborer. C'est là un point faible dans la théorie exposée par les auteurs précilés, car, si un cœlome ayant la valeur d'un entérocæle peut ne pas dériver de diverticules archentéri- ques, 1ls’ensuit qu'il n'existe, entre les Entérocæliens pourvus de ce cælome et certains Pseudocæliens, de différences que dans l’évolution ultérieure du mésoblaste. — Ces différences sont admises par les frères Hertwig, mais, pour moi, elles n'existent pas enréalité. J'ai, en effet, l'intention de démon- trer que l’ensemble des cavités segmentaires des Annélides correspond à la cavité générale des Mollusques, c'est-à-dire à l’ensemble des lacunes conjonctives de ces animaux. Or, les Mollusques, d’après les frères Hertwig, sont des Pseudo- cœliens. — Je veux montrer de plus que les parois de la cavité générale, c’est-à-dire les tissus mésodermiques, ont la même origine et la même signification chez les Mollus- tot | LOUIS ROULE. ques et les Annélides, les différences portant seulementsur la forme des organes constitués par elles. — I]me fautdonc. dans cette discussion, examiner deux choses : 1° le dévelop- pement et la structure de la cavité générale chez les Annelés et les Mollusques ; 2° le développement du mésoblaste et la structure du mésoderme chez ces mêmes animaux. III — On connaît déjà le développement du cœlome chez les larves d’Annélides, car les larves sont ici les seules imporlantes à considérer, puisque seules elles montrent iso- lément et successivement la série des processus embryon- naires. — Les recherches de plusieurs naturalistes, et celles de Haischek entre autres, ont montré que le méso-endo- blaste des larves de Mollusques se divise de bonne heure en un endoblaste définitif et deux initiales mésoblastiques sem- blables à celles des Annélides. Les initiales évoluent aussi de la même manière ; elles parviennent dans le blastocæle, et y prolifèrent. Certains autres embryogénistes, et Kowa- levsky même, admettent bien que l’ectoblaste joue aussi un certain rôle dans la genèse du mésoblaste ; mais ces faits ne sont pas très prouvés, et, dans la majorité des cas, les initiales prennent la plus grande part à ce dévelop- pement. Le mésoblaste des Mollusques provient done, chez les larves, de deux initiales homologues de celles des larves d'Annélides, et qui produisent de même dans le blas= tocœle des amas cellulaires, parmi lesquels se creusent des cavités formant le cæœlome par leur réunion. La concordance est parfaite dans les deux cas, et il ne faut pas admettre les appréciations des frères Hertwig, qui disent ceci en substance : « Le mésoderme des Mollus- ques est formé par des cellules laissées dans le blastocæle entre l’ectoblaste et l’endoblaste; ces cellules existent aussi chez les larves d'Annélides, mais elles ne produisent pas le mésoderme définitif, ce dernier étant engendré par les deux initiales. » Les frères Hertwig ont confondu ici deux choses différentes: le mésoderme primaire ou blastocælien, qui DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 389 : apparaît chez les larves d'Annelés et de Mollusques pour servir à leur vie de relation, et le mésoblaste véritable qui dérive des initiales. Ces dernières existent tout aussi bien chez les Mollusques que chez les Annelés, et produisent le vrai mésoderme définitif, le mésoderme primaire disparais- sant à mesure que la larve se rapproche de l’état adulte. — Les frères Hertwig ont admis à tort que le mésoderme blas- tocælien persiste chezles embryons de Mollusque pour donner naissance au mésoderme définitif, puisque ce dernier dérive des initiales comme celui des Annelés. | — Ainsi, la cavité générale des Mollusques se creuse, comme celle des Annélides, au milieu d’amas cellulaires dérivant des initiales; ces deux cavités sont donc homolo- gues, et ne diffèrent même pas l’une de l’autre comme pro- * cédé de formation. Les seules différences qu'il soit possible de signaler entre elles portent sur leur aspect ultérieur chez l'adulte. La cavité générale ou cœlome des Annelés polymériques est divisée régulièrement en chambres, les cavités segmentaires, par des cloisons transversales: éten- dues entre la paroi du corps et celle de l'intestin ; tandis que celle des Mollusques est découpée en lacunes conjonctives de forme non déterminée et de tailles dissemblables. Ces différences ne sont pourtant pas tellement grandes qu'il n'existe entre les deux formes des transitions assez nom- breuses. Chez les Enchytræoïdes par exemple, les cloisons trans- versales ne sont pas des membranes pleines, mais bien des feutrages de tractus conjonctivo-musculaires situés dans un même plan; elles sont ainsi percées d'ouvertures qui per- mettent aux cavités segmentaires de communiquer entre elles De plus, ces cloisons portent de nouveaux tractus qui se dirigent obliquement à travers les segments pour aller se rattacher soit à la paroi du corps, soit à l'intestin. Le cœlome des Enchytræoïdes est donc découpé en cavités de forme déterminée divisées elles-mêmes en cavités plus petites d’as- 390 LOUIS ROULE, pect irrégulier ; ces dernières communiquent largement les nes avec les autres, car les tractus obliques qui les séparent sont fort étroits. — En supposant que les feutrages des cloisons ne soient pas placés dans un même plan, et que les tractus obliques soient plus épais, le cœlome des Æn- chytræoïides ressemblerait à celui d'un Mollusque à cavité générale fort simple, à celui d’un Dentale par exemple. — Et cette supposition est facile à admettre, puisque la nature actuelle en fournit un exemple, pris parmi les Annelés polymériques eux-mêmes. Les Sfernaspis appartiennent évi- demment à ce dernier groupe, la disposition de leurs soies et celle de leur musculature le prouvent avec évidence ; pourtant, les cloisons segmentaires n’existent pas chez eux, et on voit à leur place des tractus reliant l’intestin à la paroi du corps, et découpant le cœlome en vastes sinus. Ces trac- tus sont moins épais que ceux situés dans la cavité générale de la plupart des Mollusques, mais ils rappellent ceux des Mollusques primitifs tels que les Solénoconques. — Il est donc impossible d'admettre que les différences d'aspect du cœlome soient entre les Mollusques et les Annélides des différences importantes et fondamentales, puisque, dans plusieurs cas, la cavité générale des Annélides présente la même structure que celle des Mollusques. Il est même permis d'aller plus loin dans cette voie et de croire que le remplissage du cœlome par des tractus con- jonctifs n’a point de valeur considérable au pointde vue des relations naturelles des êtres. Ainsi, parmi les Turbellariés rhabdocæles, les Eurhabdocæles ont une cavité générale presque libre, alors que les Acœæles et les Alloiocæles ont leur même cavité à peu près remplie par du parenchyme. — Les distinctions établies par les frères Hertwig entre les En- térocæliens et les Pseudocæliens tendraient à faire admettre que le cœlome des premiers est libre le plus souvent, tandis que celui des seconds est obstrué par du tissu conjonctif. Or on constate parfois l'inverse. La cavité générale de certains Pseudocæliens, tels que les Dentales, est à peine découpée en DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 391 grands sinus par quelques tractus mésentériques ; tandis qu'on voit le cœlome, d’origine entérocælienne, des Bra- chiopodes et des Entéropneustes, pour ne citer que ceux-là, se remplir peu à peu de tractus conjonctifs et se diviser en lacunes communiquant entre elles. M. Ed. Van Beneden a même constaté que le cæœlome entérocælien des Tuniciers se détruit; et les cellules des entérocæles, en se séparant les unes des autres et se groupant ensuite avec irrégularité, finissent par former une cavité générale semblable à celle des vrais Pseudocæliens. En résumé, la présence ou l'absence de tractus conjonc- tifs dans la cavité générale ne doivent pas être considérées comme des caractères précis et constants, susceptibles de servir de base à l'appréciation des rapports naturels établis entre les groupes de Cœlomates. — Un troisième ordre de faits reste à examiner dans l'étude du cœlome. — Chez les larves des Annélides primi- tifs, des Polygordius par exemple, les cavités cœlomiques apparaissent rapidement dans l'intérieur de bandelettes mésoblastiques constituées encore par un petit nombre de cellules, et grandissent avec hâte, de sorte que leurs parois, formées par ces bandelettes mêmes, présentent au plus une ou deux couches de cellules. Cette croissance hâtive et cette simplicité de la paroi entraînent une certaine ressemblance de ces cavités cœlomiques avec les entérocæles vrais ; cette ressemblance ne découle pas, bien entendu, d’une com- munauté d’origine, puisque les entérocæles proviennent de diverticules archentériques, et les cavités cœlomiques des Annélides se creusent dans les bandelettes mésoblastiques sans Jamais avoir aucune connexion directe avec l’archen- léron, mais elle existe pourtant dans l'aspect général, à cause de la structure fort simple de la paroi. Une pareille ressemblance ne setrouve pas chez les larves de Mollusques; les bandeleltes mésoblastiques sont déjà constituées par un assez grand nombre de cellules lorsque 392 LOUIS ROULE. les premières cavités cœlomiques commencent à se mani- fester dans leur intérieur, et ces cavités apparaissent comme des fentes étroites, limitées par des parois mésoblastiques épaisses. [1 y a donc une grande différence d'aspect entre les premières ébauches du cœlome des Moiïlusques et les ébauches correspondantes des Archiannélides ; cette diffé- rence est caractérisée par le mot schizocæle ou pseudocæle appliqué au cœlome des Mollusques, contrairement au mot enterocæle appliqué au cœlome des Entérocæliens. Le mot schizocæle est du reste un terme déjà ancien repris par les frères Hertwig pour désigner la cavité générale de leurs Pseu- docæliens. — Or, les dissemblances profondes, admises par les auteurs de la cœlome-théorie entre ces deux modes de genèse, ne sont pas aussi importantes qu'ils le croient, et ne sauraient servir à distinguer l’un de l’autre les grands groupes créés par eux dans les Mélazoaires, puisqu'on les retrouve tous deux chez les Annélides. Le cœlome dés Enchytræoïdes prend en effet naissance comme celui des Mollusques, et lui ressemble tout à fait; il est un vrai schizocæle, el pourtant les Enchytræoïdes sont des Annélides tout comme les Polygordius. Le cœlome des Oligochætes se creuse, au milieu du mé- soblaste, comme une fente limitée sur sa face externe par plusieurs couches de cellules, et nullement semblable à une vésicule limitée par une paroi simple. Le cœlome, dès l’abord, est un schizocæle comparable à celui des larves de Mollusques, quicontinueàgrandiret à s'étendre dansle méso- blaste en conservant loujours l’aspect de fente. Plus tard seu- lement son évolution diffère; des cloisons segmentaires dis- posées avec régularité prennent naissance dans sa cavité ; mais, on l’a déjà vu, la présence de ces cloisons n’est chezles Annélides ni un caractère persistant ni un caractère impor- tant. — Cette genèse schizocælienne de la cavité générale n’est pas particulière aux £nchytræoïdes. I suffit de lire les descriptions données par Salensky, le principal des auteurs ayant étudié l'embryogénie condensée des Annélides, pour DÉVELOPPEMENT DES: ANNÉLIDES. | 393 se convaincre que ce procédé existe dans tous les ovules riches en vitellus nutrilif et dont le développement est accéléré ; les cavités métamériques rappellent à leur début, des fentes schizocæliennes, des lacunes conjonctives de Mol- lusques, en voie de formation. Ce procédé génétique est, chez les Annélides, une modi- fication du procédé par vésicules à parois simples et sem- blables à des entérocæles. Le premier dérive du second par la condensation des stades embryonnaires, car le mésoblaste est représenté par un nombre plus considérable d'éléments. — Si donc l’on admet l’opinion des frères Hertwig, et si l’on accorde aux grandes vésicules mésoblastiques des larves d'Archiannélides la valeur d’entérocæles, on est forcé de conclure que les différences ne sont pas bien grandes entre le schizocæle et l’entérocæle, puisque le même groupe naturel d'animaux les possède tous les deux. La genèse schizocælienne est une simple altération de la genèse entéro- cœlienne, qui survient à la suite de la anndonse ban des phases du développement. Il serait facile de trouver, parmi les Cœlomates, d’autres exemples venant corroborer cette assertion, et cela chez les Echinodermes et les Vertébrés par exemple; ‘dans certains cas, l’entérocæle de ces derniers apparaît tout à fait comme un vrai schizocæle. — On ne doit donc pas considérer le cœlome schizocælien comme distinct du cœlome entérocæ- lien, mais plutôt comme une modification de ce dernier. Le schizocæle n’est pas un état, une manière d’être, de la cavité générale, opposable à l’entérocæle, mais un mode de déve- loppement de cette cavité. Et, pour résumer cette longue discussion, il est impos- sible, sans doute, de se baser sur les caractères offerts par le cœlome, soit dans sa structure, soit dans son évolution, pour distinguer entre eux les embranchements des Cœlomates; puisque ces caractères sont susceptibles de varier dans un même groupe et de se remplacer, sous l'influence de condi- tions telles que la forme générale de l’organisme et la plus 394 LOUIS ROULE. ou moins grande quanlité de vitellus nutritif renferméedans l'œuf. | IV. — Les mêmes conclusions découlent aussi de l’examen du mésoblaste, c’est-à-dire des couches cellulaires qui en- tourent le cœlome naissant et constituent le mésoderme par leur prolifération. Le mésoblaste des Archiannélides est vraiment épithélial, ainsi qu’il appert des observations de Hatschek (9) et de Frai- pont (6). Les cavités cœlomiques sont d’abord limitées par une ou deux couches cellulaires semblables à des rangées d’épithélium, et dont les éléments ne se séparent point les uns des autres; ces éléments augmentent en nombre, et se transforment presque tous en fibres musculaires, le tissu conjonctif jouant ici un rôle peu important. Autant qu'il est permis de l’admettre pourtant, d’après les recherches de ces deux auteurs, chacun des éléments du mésoblaste se trans- forme entièrement en une fibre musculaire, sans montrer aucune parlie conservant sa nature épithéliale; mais, dans l’ensemble, la genèse de la musculature rappelle d’assez près celle de la musculature des Chætognathes, considérée par les frères Hertwig comme le type d’une musculature épithéliale. Il n’en est pas de même chez les embryons d'Enchytræiïdes. — Le mésoblaste viscéral doit être ici laissé de côté, puisqu'il ne produit ni tissu musculaire ni tissu conjonctif, et la somatopleure seule est intéressante à examiner. Cette dernière est constituée par des éléments arrondis ou ova- laires, laissant entre eux des vides appréciables, et disposés sur plusieurs couches; quelques-uns même se délachent de leurs voisins pour tomber dans la cavité cœlomique. Cer- tains d’entre eux produisent de la substance conjonctive fondamentale, qui constitue la trame des cloisons et celle des tractus traversant les cavités segmentaires, et deviennent ainsi des cellules conjonctives. La plupart des autres se trans- forment en fibres musculaires ; pour cela, leur protoplasme donne naissance à de la substance contractile, et la dépose DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES, 395 autour de lui de manière à s’en envelopper; la partie ini- tiale de l'élément est ainsi placée au centre de la substance surajoutée, et le tout ne forme qu'un seul corps, une seule fibre-cellule. Certains des éléments mésoblastiques devenus libres dans la cavité générale se transforment aussi en fibres musculaires, notamment dans les trois premiers anneaux; c'est ainsi que prennent naissance les fibres insérées, sur le cerveau et la région antérieure du tube digestif. En énumérant les diverses particularités de l’évolution de la musculature chez les Enchytræoïdes, on énumère tous les caractères signalés par les frères Hertwig comme propres à un développement mésenchymateux. Les Mollusques repré- sentent, pour ces auteurs, le type des Pseudocæliens, et c’est pour cela que j'insiste à leur sujet; or, les divers faits déjà cités, la dissociation locale de quelques éléments mésoblasti- ques, la production d'une certaine quantité de substance conjonctive, la transtormation complète d’une cellule en fibre musculaire par le dépôt de substance contractile au- tour d'elle, se retrouvent chez les Mollusques, et sont propres aux mésodermes mésenchymateux et non aux mésodermes épithéliaux. De telle sorte que, dans le seul groupe des Anné- hides, le feuillet moyen des Pol/ygordius se développe par le procédé épithélial, et celui des Enchytræoïides par le procédé mésenchymateux. Il faut en conclure que ces deux modes n'ont pas une valeur aussi grande que le voudraient les frères Hertwig, puisque, dans certains cas, le second remplace le premier. Et ces cas spéciaux résultent sans doute, soit, comme on vient de le voir, du développement lui-même, suivant qu'il est dilaté ou condensé, soit de la forme générale de l’orga- nisme. La paroi du corps des Mollusques est relativement plus épaisse que celle des Annélides, leur cavité générale se remplit de tractus conjonctifs; aussi la musculature n’est- elle pas disposée en une couche mince et régulière placée sous l’ectoderme, mais bien en une trame plus ou moins serrée, en un feutrage de fibres allant dans toutes les direc- 396 LOUIS ROULE. tions où il est nécessaire de déterminer un mouvement. V. — Il résulte de tous les faits exposés que les Annélides ne sont pas des vrais Entérocæliens, car leur cœlome ne provient pas de diverticules archentériques, et leur méso- derme montre, suivant les types, soit une origine épithéliale, soit une origine mésenchymateuse. Les frères Hertwig signa- lent pourtant, à l’appui de leur opinion, certains arguments qu'il convient de discuter : TI 1° Le fait que le cœlome des Annélides est une cavité spa- cieuse, ne communiquant pas avec le système vasculaire san- guin lorsqu'il en existe un, n’est pas un caractère constant chez les Entérocæliens; puisque le cælome des Brachiopodes, par exemple, en se remplissant de tissu conjonctif, se divise en lacunes, et forme même un appareil circulatoire lympha- tique, comme celui de certains Pseudocæliens, les Mollus- ques par exemple. 2° La présence de mésentères soutenant l'intestin dans la cavité générale, ainsi que cela existe chez les Entérocæliens, n’est pas constante chez les Annélides, car les Enchytræoïdes n’en montrent point chez la larve, et les adultes en sont presque dépourvus. Îl en est du reste ainsi chez plusieurs autres Annélides. | 3° La musculature des Annélides ne provient pas toujours de l’endothélium péritonéal; la couche interne de la soma- topleure se transforme seule, chez les Enchytræoïdes, en endothélium péritonéal; les éléments des autres couches deviennent des fibres musculaires. Or, ces dernières ne déri- vent nullement de la couche interne, puisque toutes deux sont produites par le mésoblaste, en même temps et à un égal degré. | 4° Le fait que les organes excréteurs des Annélides deviennent souvent les conduits vecteurs des glandes sexuelles, n’est pas suffisant pour placer ces animaux parmi les Enté- rocæliens, car certains Pseudocæliens, tels que les Mollus- ques de la classe des Solénoconques et d’une partie de la DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES, 397 classe des Lamellibranches, rejettent au dehors leurs corps reproducteurs par la voie des organes de l’excrétion. Les considérations invoquées par les frères Hertwig pour soutenir que les Annélides appartiennent au groupe de leurs Entérocæliens ne résistent donc pas à un examen attentif, du moins dans l’état actuel de la science, alors que de nou- velles connaissances plus précises sont venues s'ajouter à celles existant déjà au moment où ces auteurs ont publié Jeur théorie. VI. — Deux conséquences principales découlent de cette longue discussion : La première est que, en se plaçant au point de vue des frères Hertwig, et considérant leur théorie comme exacte, les Annélides ne sont pas des Entérocæliens; leur mésoblaste dérive de deux cellules initiales, et non de diverticules archentériques, et leur cœlome apparaît parfois comme un schizocæle. La seconde conséquence a une portée plus grande, car elle tend à faire admettre que la division des Métazoaires en Entérocæliens et Pseudocæliens est factice et systématique. En laissant de côté toute discussion relative aux différences existant entre les Cœlentérés et les Cœlomates, on voit que, chez certains de ces derniers, les Annélides entre autres, le mésoderme prend naissance tantôt par le procédé épithélial, et tantôt par le procédé mésenchymateux. Si donc les pro- cédés généliques du mésoblaste sont susceptibles de varier dans un groupe naturel d'animaux, il devient impossible de se servir des différences existant entre eux pour diviser tous les Cœlomates en Entérocæliens et Pseudocæliens, suivant qu'ils présentent l’un ou l’autre de ces deux modes. La réalité est que le même groupe peut contenir à la fois des animaux à mésoderme épithélial et des animaux à mésoderme mésen- chymateux ; et il faut s'adresser à d’autres caractères pour distinguer entre eux les embranchements des Métazoaires. La véritable obiection, et l’objection capitale qu'il convient 398 LOUIS ROULE, c de dresser contre la théorie exposée par les frères Herlwig, porte sur la méthode même de travail de ces naturalistes. Grâce à leur puissant esprit d'analyse, ils ont suivi, chez tous les animaux, le développement des tissus, et surtout celui du tissu musculaire, et 1ls ont accordé à ce développement une importance trop considérable. Ils ont vu en lui le principe même des procédés formatifs, et n’ont accordé aucune atten- tion au développement des organes, ni à l’aspect des larves, ni à l'anatomie de l'adulte ; bien plus, lorsque les documents relatifs à l’histogenèse leur ont manqué, ils ont suppléé à cette absence en tâchant de connaître cette histogenèse d’après la structure histologique des tissus entierement évolués. Et, quand ils ont tenté de grouper leurs recherches pour les ras- sembler sous une forme synthétique, l’histogenèse seule les a préoccupés, et ils ont laissé de côté tout le reste. Ils en sont venus alors à considérer la genèse épithéliale du mésoderme ou sa genèse mésenchymateuse comme les deux faits pri- mordiaux de l’embryogénie des Métazoaires, les seuls qui aient la plus grande importance, que l’on retrouve à l’origine des feuillets, et ils ont divisé les Métazoaires en deux types principaux suivant qu'ils présentent l’un ou l’autre de ces modes évolutifs. Le mérite des frères Hertwig sera d’avoir montré que ces deux modes se retrouvent toujours; mais, lorsqu'il s’agit d’ap- précier les rapports des animaux, il faut non seulement s'adresser à l’histogenèse, mais encore faire entrer en ligne de compte tous les autres documents fournis par l’embryo- génie et par l’anatomie. C'est en réunissant tous ces maté- riaux que l’on parviendra à des résultats précis et certains, el non en insistant de préférence sur quelques particularités étudiées, à l'exclusion des autres, dans la série animale entière. VII. — Les partisans de la théorie des frères Hertwig pen: seront peut-être que les conclusions précédentes dépassent les faits apportés, et que j'ai seulement montré deux choses : en DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 399 premier lieu, le cœlome des Annélides n’est pas un entéro- cœle véritable, puisqu'il ne dérive pas de diverticules archen- tériques ; en second lieu, il ne faut accorder aucune valeur fondamentale à la genèse épithéliale ou mésenchymateuse du mésoderme. Mais ils maintiendront toujours qu'il existe une grande différence entre un entérocæle et un schizocæle, car le premier possède, dès l’abord, des connexions directes avec l'archentéron, tandis que le second en est dépourvu pendant la durée entière de son existence. La discussion se localiserait ainsi sur la nature du cœlome, et ne porterait plus à la fois sur la nature de cette cavité et sur celle des paroïs qui la limi- tent, c’est-à-dire du mésoderme. | Il est pourtant possible de citer un certain nombre de faits tendant à prouver que le schizocæle est une modifica- tion, une altération, de l’entérocæle, et ne constitue pas un état réel et primordial du cœlome. Ces faits viennent à l'appui des conclusions exposées dans les pages qui précè- dent : Sous l'influence d'une condensation du développement embryonnaire, il arrive parfois, dans un même groupe na- turel, qu’un cœlome, d’origine entérocælienne chez les types primitifs passant par des stades larvaires, se montre comme un schizocæle. Il en est ainsi chez les Vertébrés par exemple ; le cælome de l’'Amphioxus est bien un entérocæle, et pour- tant, chez la plupart des Craniotes, dont l’œuf contient une grande quantité de vitellus nutritif, la cavité générale prend naissance sans jamais offrir de rapports directs avec l’ar- chentéron. D'autre part, il est aujourd’hui impossible de se refuser à admettre les relations étroites qui lient les Bryozoaires aux Brachiopodes; certains de ces derniers, les Lingules par exemple, passent, durant leur développement, par un stade qui rappelle tout à fait un Bryozoaire par l’aspect; de plus, dans la nature actuelle, le genre Rhabdopleura effectue une transition évidente entre ces deux classes. Et cependant, le cœælome d’un Brachiopode dérive de diverticules archentéri- 400 LOUIS ROULE. ques, alors que celui d’un Bryozoaire ne LORS jamais avec la cavité gastrique primitive. Les entérocæles vrais étant toujours limités, d’ après les frères Hertwig, par une paroi épithéliale, conservent à l’état adulte une partie de cette paroi sous forme d’endothélium péritonéal, alors que les schizocæles en sont constamment privés. Or, parmi les lacunes qui constituent le schizocæle des Mollusques céphalophores, certaines, placées autour des principaux viscères de l’organisme, deviennent fort grandes, se séparent des autres pour ne plus jamais communiquer avec elles, et forment une sorte de cavité générale sem- blable par l'aspect et par les rapports à un entérocæle, et : tapissée de même par un endothélium. Il suffit d'imprégner par le nitrate d’argent la paroi externe des viscères, ou de couper cetle paroi après fixation par le sublimé acétique, pour apercevoir cet endothélium. La distinction établie par les frères Hertwig n'existe donc pas en réalité. Une autre différence employée par ces auteurs pour sé- parer, à l’état adulte, les entérocæles des schizocæles, porte sur leur aspect même; la cavité des premiers, libre, con- tient un plasma liquide charriant ou non des globules, tandis que la cavité des seconds est d'ordinaire obstruée par des tractus conjonctüifs. Cette différence n'existe pas toujours. La majeure partie de l’entérocæle des Brachiopodes est divisée en petites lacunes par des tractus conjonctifs, et ces lacunes s'organisent même en un système circulatoire; tandis que le schizocæle des Mollusques inférieurs, tels que les Dentales, est divisé en un petit nombre de grands sinus par de minces tractus auxquels on pourrait accorder lei nom de mésentères. Sans aller plus loin dans cette discussion, et laissant de côté, pour y couper court, l'examen des cas de mésenchyme secondaire signalés par M. Ed. Van Beneden, les exceptions sont, on le voit, fort nombreuses. Les différences entre l’'En- térocæle et le, Schizocæle n’ont pas Le caractère d’uniformité que les frères Hertwig voudraient leur attribuer, et sont au DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 401 contraire susceptibles de variations. — Il semble plutôt, d’après l’ensemble des faits connus aujourd'hui, que l’en- térocæle soit l’aspect primitif du cœlome, le schizocæle étant un état secondaire qui dérive de la genèse entérocælienne. Cette altération du mode initial se produit de deux manières : 1° par la présence d'initiales mésoblastiques tenant la place des diverticules archentériques ; 2° par la condensation du développement, qui amène le cœlome à se creuser directe- ment dans le mésoblaste sans jamais montrer de connexions directes avec l’archentéron. En somme, toutes les considérations précédentes abou- tissent au même but : à démontrer que les deux procédés de développement du cœlome et des tissus mésodermiques n’ont pas une valeur telle, qu’il soit nécessaire de diviser les Cæœlomates en deux groupes distincts suivant qu'ils présen- tent l’un ou l’autre de ces modes; et, par suite, que la clas- sification des Métazoaires en Entérocæliens et Pseudocæliens est appuyée sur des faits trop restreints et trop variables pour être naturelle. $ 3. — Théories de MM. Lang et Kleinenberg. VIT. — M. Lang (14), acceptant les opinions des frères Hertwig, admet que les Annélides proviennent des Hirudi- nées, ces dernières dérivant elles-mêmes des Plathelminthes, et voici par quel procédé : Les Plathelminthes sont des Pseudocæliens, et, à ce titre, sont dépourvus d’entérocæle; leur mésoderme est mésen- chymateux. Or, chez certains Plathelminthes, les Turbellariés dendrocæles par exemple, le tube digestif envoie latérale- ment des diverticules ramifiés; les ramifications n'existent pourtant pas toujours, car, chez la Gunda segmentata entre au- tres, les diverticules sont tous simples, égaux entre eux, et semblables à des dilatations cæcales régulières du tube diges- tif. Elles rappellent tout à fait les diverticules archentériques d’un entérocæle en voie de formation, et aussi les cæcums intestinaux des Hirudinées. — D'où conclusions : les Gunda ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 26. — ART. N° 3. 402 | LOUIS ROULE. sont intermédiaires entre les Plathelminthes et les Hiru- dinées ; la cavité générale de ces dernières est un schizocæle comme l’ensemble des lacunes conjonctives des Plathel- minthes. Les Hirudinées elles-mêmes sont également inter- médiaires entre les Gunda, et par extension entre les Tur- bellariés dendrocæles, et les Annélides, en ce sens que les cæcums intestinaux se séparent peu à peu du tube digestif pour produire le cæœlome entérocælien existant seul chez les Annélides, d’après Lang et Hertwig. | Une semblable assimilation, basée sur l’étude d’un seul organe, mérite d’être discutée, bien qu’elle paraisse extraor- dinaire, car elle a été acceptée par divers auteurs. Et c’est là du reste un défaut commun à plusieurs naturalistes de l’école allemande, fidèles à la méthode des frères Hertwig ; 1ls étudient souvent la structure histologique seule d’un animal, suivant les changements de forme d’un ou de deux organes, et le terrain leur manque ensuite pour conclure d’une façon précise et vrale. M. Nussbaum (19) s’est déjà élevé contre les assimilations établies par M. Lang, et je m'élève contre elles à mon tour. Si le cœlome des Hirudinées est un schizocæle et celui des Annélides un entérocæle, tous deux devraient, dans l'esprit de la théorie des frères Hertwig, se former de manières différentes. Or, la cavité générale des C/epsines étudiées par Nussbaum prend naissance par le même procédé que celle des embryons d’Annélides à développement condensé ; toutes deux apparaissent dans le mésoderme comme des sériesrégu- lières de fentes, qui grandissent peu à peu autour du tube digestif et deviennent les cavités segmentaires. Le cœlome des Hirudinées est homologue de celui des Chétopodes ; leur seule différence porte sur la présence chez le premier d’un certain nombre de tractus conjonctifs épais qui le divisent en sinus, et encore ces tractus manquent-ils parfois. Les Hirudinées, ayant un cœlome divisé en segments, n’effectuent aucune transition entre les Plathelminthes et les Chétopodes; elles sont de vraies Annélides dépourvues de DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 403 soies comme les Polygordius; leurs cæcums intestinaux correspondent à des dilatations de la cavité digestive n'ayant point de rapports avec les entérocæles. Ces derniers man- quent, on l’a vu, chez les Annélides actuelles, et l’organisation des Cœlomates primitifs était loin de présenter la complexité de celle des Hirudinées lorsque les entérocæles offraient l'aspect de simples diverlicules gastriques. — On retrouve aujourd’hui ces diverticules, comme souvenir ancestral, chez certaines larves de Cœlomates encore fort peu évoluées ; et ces derniers étaient représentés à la surface du globe par de simples gastrulas au moment où leurs entérocæles dépen- daient encore de l’archentéron primordial. IX. — M. Kieinenberg (12), reprenant sous une forme nouvelle el avec des faits nouveaux une théorie due en prin- cipe à Balfour et à son élève Sedgwick, expose que les Annélides dérivent, par une sorte de métamorphose, de Cœlentérés tels que les Méduses. Le savant professeur de Messine a surtout étudié les larves d’un Polychæte pélagique appartenant au genre Lopadorhynchus. Ces larves rappellent assez celles des Po/ygordius comme aspect extérieur, mais . leur développement est un peu plus condensé; elles présen- tent une région supérieure volumineuse portant vers sa base un petit appendice cylindrique ; ce dernier deviendra le corps de l'Annélide, tandis que la partie supérieure se délache et ne persiste pas dans l'organisme définitif. Il semble que l’on assiste ainsi à la production de l’Annélide par cette région volumineuse ; après quoi le corps ayant pris naïssance, il se détache et devient libre. Cette scission est fort brusque, car elle dure à peine quelques minutes. M. Kleinenberg en conclut que l’Annélide s’ébauche en deux fois. L'œuf fécondé produit un premier organisme à symétrie radiaire, qui est la nourrice du second; celui-ci se développe aux dépens du premier, puis, lorsqu'il possède à peu de chose près sa structure définitive, se sépare de lui pour vivre d’une vie propre. L’Annélide ne provient pas di- 404 LOUIS ROULE. rectement de l'œuf fécondé, mais de cet organisme à symé- trie radiaire. Celui-ci rappelle, d'après M. Kleinenberg, une Méduse, car son système nerveux et ses fibres musculaires sont disposés de la même manière que chez les Méduses. Cette opinion me semble exagérée pour deux raisons : d'abord, parce que beaucoup de détails importants de la structure s'opposent à une pareille assimilation; ensuite, parce que la disposition particulière du système nerveux chez les larves de Lopadorhynchus n'existe pas chez les em- bryons d’autres Annélides. Ce système constituerait en effet un anneau placé autour du corps, sous l’ectoblaste dont il provient, et semblable à celui de l’ombrelle des Méduses:; le système musculaire serait aussi bâti sur un plan analogue. — Mais l’on ne doit pas se baser sur la disposition propre à ces deux systèmes seuls pour établir une comparaison entre deux types d'animaux. M. Kleinenberg, dans son mémoire, n’accorde aucune importance à la cavité générale ; et pourtant des cavités segmentaires se creusent dans le mésoblaste des larves de Lopadorhynchus, alors que rien de semblable se montre jamais chez les Méduses. Si le sys- tème excréteur des mêmes larves n’est pas très net, il n’en est pas ainsi pour les autres embryons d’Annélides, qui possèdent un rein céphalique bien développé, dont on n’a jamais signalé l'existence chez les Méduses. M. Kleinenberg a démontré un seul fait : le système nerveux des larves d'Annélides est disposé suivant une symé- trie radiaire, alors que celui de l'adulte offre par contre une symétrie bilatérale, et c'est tout; mais vouloir, en par- tant de ce simple fait, établir que les larves des Annélides sont des Méduses, c’est aller trop loin. Le savant professeur va même jusqu’à dire ceci : si l’on trouvait dans la nature actuelle des organismes semblables à ces larves, on devrait les placer parmi les Méduses. Or, de pareils organismes existent en réalité; certains Rotifères pélagiques des mers chaudes ressemblent à des larves d’Annélides, et se repro- duisent à cet état; pourtant Semper, qui les a décrits le DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 405 premier, les a placés parmi les Rotifères et non ail- leurs. En lisant soigneusement le mémoire de Kleinenberg, et comparant ses descriptions à celles données par Hatschek et par Fraipont sur le développement des Archiannélides, on voit que les larves de Lopadorhynchus passent sans doute par des phases un peu plus condensées que les larves des Polygordius. Les premières produisent rapidement le corps de l’adulte, et leur blastocæle est beaucoup plus étroit; partant, les tissus placés dans ce blastocæle sont comprimés entre l’ectoblaste et l’endoblaste, et affectent une disposition annulaire que les larves de Polygordius ne montrent pas aussi nettement. Chez celles-ci, les quelques fibres muscu- laires forment un réseau irrégulier à travers la cavité du blastocæle, et les filets nerveux sont anastomosés en un plexus sous-ectodermique. La différence principale porte sur la rapidité de la méta- morphose. Le corps des larves de Polygordius est relative- ment très volumineux par rapport à l’ébauche du tronc de l'adulte ; ce dernier seul grandit et accroît ses dimensions, tandis que le premier, restant stationnaire, perd toute im- portance. La couronne vibratile, qui soutenait le tout à la surface de la mer, s'atrophie peu à peu durant ces modifica- tions, et parfois même ses cellules se détachent et tombent. — En somme, le corps de la larve se divise en deux parties : une supérieure volumineuse, et une inférieure réduite; celte dernière seule s'accroît, tandis que la première paraît s’amoindrir, puisqu'elle ne se développe pas, et se détruit même en partie. Cette série de phénomènes se manifeste chez les larves des Polygordius avec une certaine lenteur ; on suit avec facilité cette transformation, qui se ramène à un défaut d'équilibre dans l’accroissement ultérieur, la partie inférieure grandis- sant beaucoup plus que l’autre de manière à conslituer seule le corps de l'adulte. Au moment où la première a déjà pris de l'importance, la couronne vibratile de la région supérieure 406 | LOUIS ROULE. ne peut plus soutenir la larve; celle-ci tombe au fond de l’eau, où elle continuera à vivre désormais. : La transformation est beaucoup plus rapide chez les larves des Lopadorhynchus ; la partie qui deviendra le corps de l'adulte à déjà acquis une certaine taille lorsque la région supérieure est encore assez grande, et celle-ci se détache brusquement, entièrement, de la première pour se détruire ensuite. Cette rapidité me paraît tenir à la vie pélagique des Lopadorhynchus, et à une certaine condensation du dévelop- pement. Comme l'animal adulle nage à la surface des mers, la région supérieure de la larve conserve ses dimensions premières jusqu’au moment où les parapodes de la partie inférieure sont assez développés pour la remplacer dans son rôle de sustentation; lorsque ce moment est arrivé, la région supérieure ne cesse pas seulement de s'accroître, mais se détache brusquement, au lieu de se dissocier cellule à cellule comme chez les Archiannélides. — Et la condensa- tion du léveloppement doit également avoir ici son in- fluence, en ce sens que les cellules tombent toutes à la fois au lieu de se détacher une à une. Quelle que soit la valeur de cette explication, on ne doit pas, à ce qu'il me semble, regarder les Annélides comme revêtant deux formes distinctes dans le cours de leur évolu- tion embryonnaire, et comme présentant une alternance de générations. Le seul fait cerlain est le défaut d'équilibre dans l'accroissement ultérieur des deux parties du corps de la larve, la partie inférieure augmentant seule de dimensions et constituant le corps de l’adulte; à ce défaut d’'équihbre s'ajoute aussi la tendance de la région supérieure à perdre la plupart de ses éléments par la disparition lente ou subite de sa couronne vibratile. — On constate souvent, dans les divers groupes du règne animal, des différences analogues dans l’accroissement des parties, sans que l’on accorde à ces différences une valeur semblable à celle admise par Kleinen- berg pour les larves d’Annélides. — De toutes manières, 1l serait intéressant de comparer cette disposition à celle des DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 407 larves de Siponcles, autour desquelles Hatschek a vu un véri- table amnios. J'ai déjà exposé plus haut les raisons qui s'opposent à considérer les larves d’Annélides comme des organismes médusoïdes, et j'ai signalé aussi, dans la seconde partie de ce mémoire, les considérations qui s'opposent également à rapprocher les Annélides des Cœlentérés d'après la disposi- tion de leur système nerveux. — Les Cœlentérés se distin- guent des Annélides, comme des autres Cœlomates du reste, par l'absence complète de cavité générale ; cette absence est primordiale, elle existe dès les stades embryonnaires qui suivent immédiatement le stade gastrula. Tous les tissus qui limitent la cavité générale des Cœlomates et constituent leur mésoderme n'existent pas chez lesCœlentérés; ces tissus sont évidemment semblables à ceux du mésoderme des Cœlen- térés par la structure histologique, mais ils ne leur sont pas homologues parce qu'ils ne proviennent pas des mêmes feuillets blastodermiques. Les tissus mésodermiques des Cæœlomates sont produits par le mésoblaste, qui manque chez les Cœlentérés, et ce mésoblaste apparaît de fort bonne heure chez les embryons, car il se forme aussitôt après que le stade gastrula est ébauché. — C’est donc à ce stade que les Cœlentérés se sont séparés des Cœlomates, et il est inu- tile de chercher parmi les premiers des transitions vers les seconds; ces transitions n'existent pas. Les deux grands groupes de Mélazoaires ont évolué chacun de leur côté depuis leur séparation première, et ont donné naissance à un nombre infini d'organismes divers, mais sans se con- fondre désormais. $ 4. — Situation réelle des Annélides dans la classification. X. — Les opinions les plus acceptables sur la situation réelle des Annélides parmi les animaux découlent de celles émises par Hatschek (9) et par Fraipont (6). Le premier de ces auteurs, se basant sur la similitude d’aspect des larves d’An- nélides et de Mollusques, rapproche ces deux groupes l’un 408 LOUIS ROULE. de l’autre, et admet que tous deux, accompagnés de leurs satellites, dérivent d’une forme ancestrale commune, le Tro- chozoon, semblable à une larve Trochosphère. Les Trocho- zoon, Offrant ainsi la même structure que les larves d’Anné- lides, possédaient comme celles-ci des organes excréteurs consiruits sur le type des reins céphaliques: or, d’après Frai- pont, les organes excréteurs des Plathelminthes rappellent, comme disposition fondamentale, ceux des larves de Vers annelés. | Il est très probable, si ces faits sont exacts (et tout porte à le croire), que les formes primordiales des Annélides aient été voisines des formes primordiales de Plathelminthes; ces deux grands embranchements de Cæœlomates auraient eu ainsi un point de départ commun. Cette opinion, émise en premier lieu par Fraipont, et que mes propres recherches me portent à accepter, diffère beaucoup de celle adoptée par Lang. Pour ce dernier auteur, en effet, les Annélides déri- vent de Plathelminthes à organisation déjà bien complexe, semblables à ceux qui vivent dans la nature actuelle. En réalité, les Vers annelés et les Vers plats se rapprochent par leurs larves; ces dernières seules offrent des points de com- paraison, et montrent que peut-être il a existé autrefois un groupe de Cœlomates à structure fort simple, semblables aux larves Trochosphères, et d’où sont sortis à la fois les Pla- thelminthes et les Annélides, sans que ces derniers aient jamais montré ensuite de nouveaux points de contact. Quoi qu'il en soit, et en laissant de côté l'examen de pareilles relations, il est certain, on l’a vu plus haut, que la barrière élevée par les frères Hertwig entre les Annelés et les Mollusques, les premiers étant des Entérocæliens et les seconds des Pseudocæliens, n’existe pas en réalité. Les larves de Mollusques sont des Trochosphères comme les larves des Annélides, et leur mésoblaste prend naissance de la même manière, c’est-à-dire au moyen d'initiales; en ras- semblant donc en un seul groupe tous les animaux qui pré- sentent, dans leur développement dilaté, la forme de larves DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. . 409 L dite Trochosphère, munie de sa paire de reins céphaliques et de sa couronne vibratile orale, les Mollusques ne doivent pas être séparés des Vers annelés. — Ces derniers renferment deux séries; la première conlient les Annelés véritables, dont les bandeletles mésoblastiques se creusent de cavités segmentaires distinctes; et la seconde contient les types dont les bandelettes, semblables en cela à celles des Mollus- ques, ne se creusent que d’une seule cavité ou d’un lacis irrégulier de lacunes conjonctives. En désignant sous le nom de Trochozoaires le groupe entier des Cœlomates munis de larves Trochosphères, ce groupe doit être divisé en 77o- chozoares polymériques et Trochozoaires monomériques; les premiers sont ceux dont le mésoderme renferme plusieurs cavités segmentaires, et dont le corps est par suite divisé en anneaux ; les seconds, ou monomériques, sont ainsi appelés parce que leur cœlome, qu'il soit divisé plus tard en lacunes ou qu'il ne le soit pas, ne présente jamais de divisions méta- mériques régulières. Deux séries se présentent actuellement chez les Trocho- zoares polymériques : ou bien les cavités segmentaires de la larve persistent chez l'adulte; ou bien ces cavités se mon- trent chez la larve seule, et l’adulte n’en possède pas, leurs cloisons se délruisant de telle sorte que le cœlome définitif ressemble à celui des Trochozoaires monomériques. Dans la première série, les Trochozoaires seront dits « à segments persistants », et, dans la seconde « à segments détruits ». Les Polymériques rentrant dans ce dernier cas sont les S/ernas- pidiens et les Géphyriens armés; la structure annelée du corps de l’adulte étant encore moins nette chez ceux-ci que chez ceux-là. Les Polymériques appartenant au premier groupe sont les Archiannélides, les Hirudinées, les Archiché- topodes et les Euchétopodes, qui se divisent eux-mêmes en Oligochætes et Polychetes. Les Trochozoaires monomériques renferment un certain nombre de classes, dont il est encore difficile d'apprécier les relations; tout au plus est-il permis d'y reconnaître trois 410 LOUIS ROULE. séries. — La première contient Iles Géphyriens inermes seuls, dontles larves sont parfois entourées d’un amnios, et qui crois- sent surtout par leur région aborale. — A la seconde série appartiennent les Bryozoaires, les Brachiopodes, et sans doute aussi les Phoronis, encore si peu connus. — Enfin, les Aoëi- fères, les Amplineuriens, el les Mollusques, rentrent dans la troisième série. La couronne orale des larves de Mollusques est d'habitude divisée en deux lobes; une semblable division manque chez les larves d'Amphineuriens, mais ces derniers se rapprochent pourtant des Mollusques par un grand nombre de détails d'organisation ; quant aux Rotifères, 1l est presque permis de les considérer comme des larves de Mollusques. — Les trois classes de la seconde série présen- tent aussi quelques caractères communs; chez les larves des Phoronis et des Bryozoaires, une région du corps s'accroît plus que les autres, et cette région, préorale d’or- dinaire, constitue presque à elle seule l'organisme de l'adulte. Il n’en est pas tout à fait ainsi chez les Brachio- podes, du moins chez ceux dont le développement est connu, mais cependant la région autérieure de leur larve devient également fort grande et forme le corps, tandis que la parte inférieure ne produit que le pédoncule servant à la fixation. — Cet essai sur la classification des Cœlomates à larves Trochosphères, ou Trochozoaires, est ici bien à sa place. J'avais en effet pour but, lorsque j'ai commencé mes recher- ches, de vérifier si la théorie des frères Hertwig était exacte pour ce qui touche aux Annélides, et si les affinités étroites signalées par Hatschek comme existant entre les larves d’Annelés et de Mollusques devaient céder le pas aux diffé- rences admises par les frères Iertwig. Il résulte de mes observations que la division des Métazoaires en Entérocæliens et Pseudocæliens est systématique ; et rien ne s'oppose plus à rapprocher les Annélides des Mollusques, puisqueleurslarves se ressemblent par l’origine et l’évolution de leurs feuillets, par leur forme extérieure, et par leur structure générale. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 411 TROCHOZOAIRES. CT ET TT POLYMÉRIQUES. MONOMÉRIQUES. CC RS Re + Segments Segments ne 28 3° persistants. détruits. Série. Série. Série. (Polymerii Polymerii Poe ee rs tee intacti). destructi). È À ë ë È A — D. 0 Re Achètes. Chétopodes. : Se FT E À MOLLUSQUES. Hirudi- Euchéto- nées. : podes. E È É Archiché- ? Géphyriens : pie Det topodes. ? armés. : i podes. : neuTiens. Sternaspi- | Géphyriens : Br 0- diens.— inermes. : zoaires. Archianné- Phoronis. ADR ne à Rotifères. ——TROCHOZOON. Ce tableau résume, d'une manière graphique, les rapports probables existant, d’après l’état actuel de nos connais- sances, entre les diverses classes des Trochozoaires. RÉSUMÉ GÉNÉRAL PREMIÈRE BE, PARTIE $ 17, — Aspect des cocons et des ovules (page 119). Les œufs sont enfermés, au nombre de six, sept, huit ou neuf, dans de petits cocons accrochés à des brins d’Algues ; les embryons subissent, dans ces cocons, les premières phases de leur développement, et en sortent lorsqu'ils possèdent en moyenne quatorze à quinze anneaux. 412 LOUIS ROULE. $ 2. — Segmentation et formation des feuillets blastodermiques : (page 124). | La segmentation de l’ovule est totale et quelque peu inégale : les deux premiers blastomères formés diffèrent de taille, mais renferment une même quantité de granula- tions vitellines ; il n’y a point de séparation entre le vitellus nutritif et le vitellus évolutif. La segmentation continue sans qu'il se produise Jamais de recouvrement épibolique du gros blastomère par les éléments du petit. — Dès le début de la division, le gros blastomère est en retard sur l’autre, de sorte qu'un pôle de l’ovule est occupé par des éléments de petite taille en assez grande quantité, et l’autre par des élé- ments moins nombreux et plus gros. Ces différences s’atté- nuent à mesure que la segmentation s’avance, et finalement disparaissent. D'ordinaire, l’ovule ne contient aucune cavité comparable à un bols parfois pourtant, ce dernier existe, mais petit, réduit, et il ne tarde pas à disparaître de manière à manquer lorsque la segmentation est achevée. Au début de la division ovulaire, les blastomères attei- gnent tous le centre de l'œuf. Bientôt des scissions tangen- lielles les partagent de nouveau en éléments périphériques et éléments centraux; ces derniers continuent à se segmenter en pelites cellules qui restent {oujours internes ; les premiers, par de nouvelles scissions tangentielles, se divisent encore en cellules périphériques et cellules placées autour des élé- ments centraux. Lorsque toute partition tangentielle a cessé, l'embryon est arrivé à un stade planula; 1l présente à l'extérieur un ectoblaste formé par une seule couche de cellules, et à l’intérieur un amas de nombreuses cellules aux dépens desquelles se constituent l'endoblaste au centre et le mésoblaste à la périphérie; cetamas cellulaire est donc un Meso-endoblaste, dépourvu à ce moment de toute cavilé et entièrement plein. Les deux blastomères primordiaux donnent chu) nais- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 49 sance à une partie de l’ectoblaste et à une partie du méso- endoblaste, sans que l’un ou l’autre tende à produire plus spécialement les éléments de l’ectoblaste ou ceux du méso- endoblaste (figures 1 à 16 dans le texte ; figures 62-69 de la planche VIT). à à. — Stades compris entre la fin de la segmentation et la sortie des jeunes hors du cocon (page 150). Stade I (page 150). — Lorsque la segmentation est achevée, l'embryon est constitué par deux feuillets blastodermiques. un ectoblaste périphérique, et un volumineux méso-endo- blaste interne. Ce dernier se creuse en son centre d’une cavité, l’archentéron, qui deviendra la cavité intestinale de l’adulte ; les cellules méso-endoblastiques qui limitent immé- diatement l'archentéron prennent un aspect uniforme et se disposent en une seule couche continue, l'endoblasie. Les cinq ou six rangées de cellules comprises entre l’ectoblaste et l’endoblaste représentent le mésoblaste. Deux fentes apparaissent dans le mésoblaste, l’une d’un côté de la ligne médiane, et l’autre du côté opposé; elles se réunissent en haut et en bas, entourent l’archentéron, et divisent le mésoblaste en deux feuillets, l'un interne et l'autre externe. Ces deux fentes se manifestent par le pro- cédé schizocælien; elles constituent le cælome par leur réunion. —- Le feuillet mésoblastique externe, composé par un assez grand nombre de rangées cellulaires, est la soma- topleure ; le feuillet interne, n'offrant souvent qu’une seule rangée cellulaire, est la splanchnopleure ; quelques cellules se détachent des feuillets mésoblastiques, correspondent ainsi à des éléments mésenchymateux, et tombent dans la cavité cœlomique où elles deviennent libres (figure 5 de la pl. I, fig. 72-82 de la pl. VIII). Stade IT (page 163). — L’embryon perd ensuite sa forme ovalaire, s’allonge et devient cylindrique; l’archentéron s'agrandit, ainsi que le cæœlome, mais ce dernier reste encore 414 LOUIS ROULE. traversé par des bandes cellulaires disposées irrégulière- ment. — L’ectoblaste de la région antérieure du corps constitue en s'épaississant la plaque céphalique, ébauche des ganglions nerveux sus-æsophagiens. Un épaississement analogue prend encore naissance aux dépens de l’ectoblaste sur la ligne médiane ventrale : c’est la p/ague médulluire, ébauche du cordon nerveux ventral. Ces deux ébauches ne communiquent pas entre elles et sont distinctes; au début de leur développement, elles sont simples, mais il se forme en elles deux centres principaux de prolifération, ce qui leur donne plus tard un aspect double. — Un proctodæum et un stomodæum se mettent en rapport avec Maui < (figu- res 83-93 de la pl. IX). Stade ITT (page 182). — L'embryon continue à s’allonger tout en devenant plus étroit ; quatre ou cinq anneaux appa- raissent dans la région antérieure de son corps. Pour cela, la somatopleure et quelques éléments libres produisent des cloisons transversales qui s'étendent à travers le cœlome pour rejoindre la splanchnopleure. La première de ces cloisons sépare le lobe céphalique du segment buccal ; le lobe céphali- que a donc la valeur d’un anneau et correspond au premier segment du corps; sa cavité est la partie antérieure du cœlome entier. L’ectoblaste se déprime en regard des cloi- sons, de sorte qu'une annulation extérieure correspond à la segmentation interne du mésoblaste et du cœlome. — La plaque céphalique envoie à la rencontre de la plaque médul- laire une double commissure entourant le stomodæum, et qui deviendra l'anneau œsophagien; les deux ébauches ner- veuses, d’abord séparées, sont ainsi réunies. — Le stomo- dœum produit le pharynx, el le proctodœum le rectum (fig. 6 de la pl. I; fig. 94-103 de la pl. X). Stade IV (page 198). — De nouveaux anneaux prennent naissance en arrière des premiers et par le même procédé; la genèse se dirige donc d'avant en arrière, et le cœlome est DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 415 ainsi divisé en douze ou treize segments auxquels correspon- dent toujours des annulations ectoblasliques. En arrière du dernier anneau existe une masse mésoblastique volumineuse dans laquelle se creusent, par paires et de part et d’autre du tube digestif, des cavité closes ; ces dernières, en grandissant, deviendront chacune des segments placés en arrière de ceux qui proviennent de la division du cœlome primordial; mais leur valeur morphologique est semblable. La genèse de ces segments postérieurs procède d’arrière en avant. Les sotes se forment aux dépens de l’ectoblaste, et les muscles qui les meuvent aux dépens de la somatopleure. — La plaque céphalique, toujours reliée au cordon mé- dullaire par l’anneau œsophagien, se sépare de l’ectoblaste, et devient libre sous forme de ganglion cérébral placé au- dessus du pharynx; le cordon médullaire reste toujours uni à l’ectoblaste. — Les cellules externes et sous-ectoblas- tiques de la somatopleure commencent à se différencier en _ fibres musculaires lisses, par la production de substance contractile à leur périphérie, et deviennent ainsi des fibres- cellules semblables à celles des Mollusques ; la rangée la plus externe de ces éléments fournit les fibres circulaires, les autres produisent les f‘bres longitudinales ; la rangée la plus interne ne se modifie pas et devient l’endothélium péritonéal. — La splanchnopleure ne subit encore aucun changement. Les organes segmentaires ou néphridies apparaissent, de chaque côté du corps, sous forme d’un cordon continu qui se différencie dans la région profonde de la somatopleure ; ce cordon se fragmente en groupes de quatre ou cinq cellules, qui se mettent en rapport avec les cloisons. Les cellules de chaque groupe se fusionnent en un synplasme dans lequel se creusent des canaux vibratiles.— Les premier, deuxième, troisième, quatrième, cinquième anneaux ne possèdent point d'organes segmentaires; les sixième, septième, huitième, offrent des cloisons très épaisses, dont la structure ressemble à celle des néphridies, et qui sont les ébauches des glandes septales ; les neuvième, dixième, onzième, sont pourvus d’or- 416 LOUIS ROULE. ganes segmentaires ; le douzième, dans lequel apparaîtront les spermiductes, n’en montre aucune trace; enfin, tous les autres anneaux possèdent des ébauches d’organes segmen- taires (figures 7 de la pl. I, 12 de la pl. IT, 104-115 de la pl. XI, 116-118 de la pl. XII). $ 4. — Stades compris entre la sortie des cocons et l'apparition du 35°-36° segment (page 243). Slade V (page 244). — Les embryons sortent du cocon à la fin du stade IV; après leur expulsion, leur corps continue à s’allonger, et quatre ou cinq anneaux apparaissent les uns après les autres dans sa région postérieure. — Les fibres musculaires longitudinales de la somatopleure affectent une disposition régulière, presque pinnée, fait qui s'accorde peu avec leur mode de développement, semblable à celui des fibres des Mollusques. Ce stade est principalement caractérisé par la naïssance des deux vaisseaux sanguins ; ces vaisseaux se montrent d’abord par tronçons, qui se rejoignent et se soudent; le vaisseau dorsal avait déjà fait son apparition au stade pré- cédent. Au début de leur développement, chaque tronçon esl représenté par un espace vide, dépourvu de parois propres, placé entre la splanchnopleure et l’endoblaste ; étant donnée cette situation, on doit le considérer comme homologue d'un espace blastocælien, qui ne communique pas et ne communiquera jamais avec le cœlome. Plus tard, la splanchnopleure fournit au vaisseau une paroi complète. Lorsque les deux vaisseaux sont continus sur tout leur trajet, des anses anastomiques, produites par les troncs vasculaires eux-mêmes et n’ayant pas d’origine indépendante, les réu- nissent l’un à l’autre (figures 8-10 de la pl. I; 16 de la pl. Il; 116, 117, 119 de la pl. XII). Stade VI (page 248). -— Durant ce stade, Les jeunes En- chytræoïdes arrivent à posséder environ vingt-deux anneaux. La paroi du corps, constituée par l’ectoblaste et la somato- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 417 pleure, revêt sa structure définitive, ainsi que le système nerveux. — Les organes segmentaires montrent aussi l’as- pect qu'ils ont chez l'adulte ; leurs canaux vibratiles, creusés à nu dans le protoplasme, se réunissent en un seul conduit flexueux. Chaque néphridie présente à considérer : un corps volumineux, traversé par le canal qui débouche au dehors ; et un co! étroit franchissant la cloison postérieure de l'anneau précédent par un pavillon vibratile. — Les cellules de la splanchnopleure, toujours disposées en une seule rangée, s’allongent beaucoup, se remplissent de granula- tions jaune verdâtre, et constituent la couche chloragogène qui revêl le tube digestif (figures 11 de la pl. II, 120-126 de la pl. XI). Stade VIT (page 256). — Ce stade, pendant lequel le nombre des anneaux atleint le chiffre 30, est caractérisé par l'apparition des glandes sexuelles et des deux spermi- ductes. Tout d’abord, la paire d'organes segmentaires du onzième anneau se résorbe et disparaît. Ensuite, les ébauches du éesticule et de l'ovaire prennent naissance, les premières dans le onzième anneau et les secondes dans le douzième, chacune d’elles étant au nombre d’une paire par métamère ; elles dérivent toutes de l’endothélium péritonéal de la cloison qui limite en avant l’anneau auquel elles appartiennent. — Les ébauches testiculaires grandissent rapidement, se divi- sent en lobes, et les cellules qui les constituent se fusionnent en un symplasme parsemé d’une quantité de pelits noyaux. Les deux ébauches ovariennes restent indivises, et leurs cellules, bien qu'étroitement serrées, ne se fusionnent pas. Les deux spermiductes apparaissent dans le douzième anneau, au lieu et place des organes segmentaires qui ne s’y sont pas développés; leur origine et leur évolution rappel- lent de tous points celles des vraies néphridies, de sorte que l'homologie des spermiductes avec ces dernières est indiscu- table. Ces canaux vecteurs s'ouvrent par un large pavillon dans la cavité du onzième anneau ; leur corps se met en rap- ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889. VII, 27. — ART. N° 3. 418 LOUIS ROULE. port avec l’ectoblaste de la paroi du douzième anneau pour produire le pénis, s’allonge en se repliant sur lui-même, et ne contient encore aucun canal (fig. 13-15 et 19 de la planche IT; 20, 21, 23, 24 de la planche II). $S 5. — Stades compris entre l'apparition du trente-deuxiéme- trente-sixième anneau et la mort de l'individu (page 266). Stade VIII. — Les jeunes Enchytrævides possèdent déjà une assez grande taille ; ils ont environ 1 centimètre de lon- gueur, et leur corps montre trente-six à quarante segments; la région clitellienne n'est pas encore distincte. — Les glandes sexuelles continuent à s'accroître, et leur dévelop- pement caractérise surtout ce stade. Les testicules remplis- sent la cavité du onzième anneau, et pénètrent même dans celle du dixième, dont les organes segmentaires s’atrophient. Les spermiductes acquièrent une plus grande longueur, et se percent d’un canal central. Les ovaires occupent la cavité du douzième anneau et une partie de celle du treizième; les organes segmentaires de ce dernier s’atrophient. Les autres parties du corps ont acquis leur structure défi- nitive (fig. 22 de la planche III; 25-36 de la planche IV: 127-131 de la planche XIII). Stade IX (page 280).—Ce stade pourrait être appelé le stade adulte, car ilest caractérisé par la présence de glandes sexuelles parvenues à maturité. Le corps mesure environ 12 à 15 millimètres de longueur, et compte cinquante anneaux en moyenne. La région clitellienne, qui correspond à l’ensemble des dixième, onzième, douzième et treizième segments, est un peu plus large que le reste du corps; cet excès de largeur est surtout dû à l’ectoderme, qui s’épaissit et renferme de nombreuses cellules à mucus; la cause en revient aussi aux glandes sexuelles, dont la masse, devenue très considérable, distend les parois clitelliennes. He. cloisons de la région cli- tellienne disparaissent en partie. Les testicules sont divisés en un grand nombre de petites DÉVELOPPEMENT. DES: ANNÉLIDES. 419 vésicules disposées sans ordre. Les spermiductes sont grands, fort longs, et présentent deux parties : une anté- rieure lrès large, portant le pavillon vibratile ouvert dans la cavité clitellienne ; et l’autre postérieure, étroite et allongée, qui mène à l’orifice extérieur. Ce dernier est percé sur un petit mamelon remplissant peut-être les fonclions d’un pénis; ce mamelon est une dépression ectodermique dont les parois sont surélevées au-dessus des téguments. Les ovaires sont constitués par l'assemblage d'un grand nombre d’ovoblastes à divers états de développement ; les ovoblastes postérieurs sont les seuls à accomplir leur évolution entière, et à devenir des ovules parfaits. Les vésicules testiculaires renferment un grand nombre de spermoblastes ; chaque spermoblaste se segmente un cer- {ain nombre de fois, pour produire un spermatogemme cons- titué par l'assemblage d’une grosse cellule centrale ou cytophore, et de spermatocytes périphériques. Chacun de ces derniers devient un spermatozoïde, dont le noyau forme à lui seul la tête presque entière; ce noyau est entouré par une mince zone protoplasmique, qui s’effile en une queue longue el grêle. — Les ovoblastes se partagent en deux cellules, dont l’une deviendra l’ovule, et l’autre produira, en un pôle de cet ovule, un cumulus cellulaire. Le noyau de l’ovule se divise un certain nombre de fois, mais non le vitellus ; cette segmentation incomplète correspond sans doute à la genèse d'un follicule périphérique, représenté seulement par ses noyaux ; ces derniers disparaissent ensuite et sont peu à peu résorbés, comme si l’ovule avait absorbé le follicule pour augmenter sa masse; après quoi, le cumulus cellulaire est également absorbé par le vitellus. Certains spermatozoïdes parviennent sans doute au dehors par le moyen des spermiductes, mais la plupart d’entre eux sont rejetés avec les ovules par la rupture de la paroi du corps dans la région postérieure du clitellum; les ovules sont alors fécondés, et le mucus abondant sécrété par l’ec- toderme clitellien leur forme une enveloppe protectrice 420 LOUIS ROULE. (fig. 29-37 de la planche IV; 38-48 de la planche V; 49- _61 de la planche VI; 132-151 des planches XIV et XV). Stade X (page 327). — Lorsque l’adulte a rejeté ses organes sexuels, y compris les spermiductes, ses tissus subissent une sorte de dégénérescence finale, se remplissent de granula- tions, deviennent opaques, et l'individu meurt ensuite. L'acte de la reproduction paraît êlre ainsi le terme de la vie des individus. | DEUXIÈME PARTIE. $ 1. — Feuillets blastodermiques (page 329). [ (page 329). — L'absence d’initiales mésoblastiques ne paraît pas être particulière aux embryons d'Enchytræoides ; elle semble, au contraire, être la règle dans tous les déve- loppements condensés d’Annélides, c’est-à-dire dans les dé- veloppements dépourvus de phases larvaires et débutant par un stade planula. Les initiales ne font jamais leur appa- rition, et le mésoblaste se détache de l’ensemble du mésoen- doblaste sous forme d’une masse pluricellulaire. — Des faits analogues s'observent aussi chez d’autres groupes d’ani- maux ; il suffit, par exemple, de comparer le développement des Vertébrés Craniotes à celui des Acraniens, pour trouver des phénomènes semblables ; les entérocæles de l’'Amphioxus manquent à la plupart des autres Vertébrés, qui ont une embryogénie condensée, et le mésoblaste se sépare par un simple clivage d'un feuillet primordial correspondant au méso-endoblaste des Annélides. IL (page 337). — Lorsque le méso-endoblaste des En- chytræoïdes se partage en un endoblaste central et un méso- blaste périphérique, ce dernier est homologue des bande- lettes mésoblastiques de la larve Trochosphère. Celles-ci sont, en effet, constituées par un amas de cellules placées entre l’ectoblaste et l’endoblaste, et il en est de même pour DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 491 le mésoblaste des embryons d'Enchytreoides. Seulement, à cause de la condensation des processus évolutifs, le méso- blaste de ces derniers possède déjà, au moment de son appa- rition, une structure complexe, que celui des larves montre _ seulement après un certain temps et une série de transfor- mations distinctes. IT (page 339). — L'endoblaste des larves Trochosphères est homologue du méso-endoblaste des embryons d’'£n- chytræoïdes, el correspond lui-même à un méso-endoblaste. Ce feuillet produit, en effet, l’endoblaste définitif, qui doit devenir l’endoderme, et les deux initiales mésoblastiques. La seule différence existant entre les larves et les embryons pla- nulaires est une différence dans le mode d'apparition. Le méso-endoblaste de ces derniers est constitué, dès l’abord, par une masse de cellules, qui répond à l’ensemble du méso- blaste et de l’endoblaste des larves Trochosphères lorsque les initiales mésoblastiques se sont segmentées pour engen- drer les bandelettes. Cette différence de procédé est une conséquence de la condensation du développement. Une telle nature de l’endoblaste primordial n’est pas spé- ciale aux Annélides, mais se retrouve chez tous les Cœlo- mates. L'endoblaste primordial de ces derniers est, en réalité, un méso-endoblaste, contrairement à celui des Cœlentérés, qui est un endoblaste simple. IV (page 342). — Les embryons d'Enchytræoïdes sont dépourvus de tout mésoderme blastocælien semblable à celui des larves Trochosphères. Ils ne possèdent ni fibres muscu- laires, ni éléments nerveux différenciés hâlivement. On sait qu'il n'en est pas ainsi chez les larves; mais, étant donnée l'absence complète du mésoderme primaire chez les em- bryons à développement condensé, il faut en conclure que les éléments du mésoblaste vrai n’ont aucun rapport avec lui; ce mésoderme blastocælien est propre à la larve, et il sert à en assurer les relations avec les milieux extérieurs. 4922 LOUIS ROULE. V (page 345). — Nussbaum a décrit, chez les embryons de -Clepsines, une cellule initiale, distincte presque dès Le début de la segmentation, et chargée de produire les glandes sexuelles. Cette initiale manque chez les Enchytræcïides, et manque aussi chez les autres Annélides. Il est à remar- quer que le Polygordus, le prototype des Annélides achètes et chétopodes, et qui passe par une évolution dilatée avec stades larvaires libres, est également dépourvu d’initiales sexuelles. | VI (page 346). — Le développement des embryons d'£En- chytræoïdes est très différent de celui des autres Oligochætes, tel qu'il a été décrit par les auteurs; mais il faut remarquer que la plupart des recherches de ces derniers ont été effec- tuées à une époque où les procédés techniques étaient insuf- fisants, et ne permettaient pas de résoudre des questions aussi délicates que celles de la genèse des feuillets blastoder- miques. C’est là, sans doute, qu'il convient de chercher la cause des divergences profondes existant entre les auteurs. $ 2. — Organes produits par l’ectoblaste (page 347). VIL. Ectoderme (page 347). —L'’ectoderme dérive de l’ec- toblaste; il correspond à l’ypoderme des auleurs, mais ce dernier terme ne devrait plus être employé, à cause de sa signification inexacte. La cuticule est produite par l’ecto- blaste, et ne provient nullement de la membrane vitelline. VITE. Soies (page 349). — Chacune des soies qui constituent les rames par leur réunion prend naissance dans une dépres- sion tubulaire de l’ectoblaste, dont les cellules exsudent toutes, dès l’abord, la substance de la soie; cette substance, semblable à celle de la cuticule, remplit ainsi la dépression, et revêt la forme d’un cylindre plein, terminé en pointe vers son extrémité libre. Puis la dépression s’allonge, les quelques cellules du fond deviennent plus grandes que les autres, et DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 493 produisent seules la substance de la soie ; aussi cette der- nière croît-elle en longeur, et arrive à dépasser le niveau des téguments, pour faire saillie au dehors. IX. Système nerveux (page 351). — Les deux ébauches des centres nerveux, la plaque céphalique et la plaque médullaire, sont produites par l’ectoblaste, et sont d’abord séparées l’une de l’autre ; elles se réunissent ensuite, grâce à des commis- sures qui entourent l’œsophage. — La plaque céphalique des embryons à développement condensé correspond évidem- ment à celle des larves, et les deux prolongements latéraux émis par elle sont bien les commissures péri-œsophagiennes, et non des nerfs longitudinaux particuliers à l'embryon; cette plaque se sépare ensuite de l’ectoblaste pour devenir libre. — Il n’en est pas de même pour la plaque médullaire, qui reste toujours unie à ce feuillet. Cette plaque est d’abord formée par un épaississement simple et médian de la couche ectoblastique, et se divise en deux parties au moment de l'apparition de la substance fibrillaire qui se dispose en deux bandes juxtaposées. Il n'existe chez l'embryon ni anneau nerveux, ni tractus, reliant entre elles les deux plaques; ces dernières sont certainement distinctes l’une de l’autre lors de leur appari- ion. Il est donc bien difficile de ne pas opposer ces faits aux hypothèses de Sedgwick et de Kleinenberg ; le premier admet- tant que le système nerveux des Bilatéraux, celui des Anné- lides compris, dérive du système nerveux des Actinies; et lé second voulant que l’anneau nerveux des larves soit le point de départ de tous les centres nerveux de l'adulte. — La plaque céphalique est en effet une partie grossie du plexus larvaire; mais le cordon médullaire prend naissance dans une région qui n'existe pas chez la larve lorsque le plexus est bien développé, et qui devient le corps de l'adulte. Ce cordon n’a donc aucun rapport direct avec le réseau ner- veux larvaire. — Je n'ai point vu la genèse d’un plexus ner- veux intermusculaire, mais aucune observation directe 42% | LOUIS ROULE, n'autorise encore à admettre que le plexus intermusculaire des Archiannélides soit d’origine mésoblastique. $ 3. — Organes produits par l’endoblaste (page 362). X. Endoderme (page 362). — L'archentéron se creuse dans le méso-endoblaste, et il semble qu’il en est ainsi chez toutes les Annélides à développement condensé: il ne communique donc pas avec le dehors au moment de son apparition, et il n'existe aucune ouverture correspondant au blastopore des larves Trochosphères qui débutent par un stade gastrulaire. La couche cellulaire qui entoure immédiatement l’archen- téron constitue l’endoblaste, et devient l’endoderme. Un stomodæum et un proctodæum produisent d'assez bonne heure le pharynx et le rectum. $ 4. — Organes produits par le mésoblaste (page 364). XI. Somatopleure (page 364). — Le mésoderme somatique est représenté chez l'adulte par trois couches de tissus, savoir, en allant de dehors en dedans : une couche de fibres musculaires circulaires, une couche épaisse de fibres muscu- laires longitudinales, et une couche d'endothélium péri- tonéal. Ces trois zones dérivent à un égal degré, et en même temps, de la somatopleure; et l'endothélium péri- tonéal ne prend aucune part à la genèse des fibres muscu- laires ; ces dernières se différencient ?n sifu aux dépens des éléments de la somatopleure, par le même procédé que les fibres des Mollusques. La couche externe circulaire provient bien du mésoblaste somatique, et non de l’ectoblaste. XII. Splanchnopleure (page 365). — La splanchnopleure n’est jamais représentée que par une seule rangée de cellu- les, qui se transforme tout entière en couche chloragogène, sans subir aucune autre modification. XIII. Cœlome (page 366). — Le liquide renfermé dans le cœælome charrie des éléments libres, semblables à des élé- DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 425 ments mésenchymateux, et dérivant du mésoblaste; leur structure est analogue à celle des éléments de la couche chloragogène. Les cloisons, qui traversent à intervalles ré- guliers la cavité générale et lui donnent l’aspect segmenté, dérivent de la somatopleure ; elles sont fenêtrées, c’est-à-dire percées d'ouvertures béantes, et font partie d’un réseau conjonctivo-musculaire très lâche qui traverse l’ensemble du cœlome. XIV. Vaisseaux sanguins (page 368). — Chacun de ces vaisseaux dérive d'une ébauche unique et médiane, ayant la valeur d’un espace blastocælien, et nullement double; le liquide sanguin ne contient aucun globule. Lorsque les vaisseaux sont parvenus à leur achèvement complet, ils se divisent en un tronc cylindrique médian et deux espaces latéraux; ceux-c1 pénètrent quelque peu entre les cellules endodermiques, mais je ne les ai point vus s’introduire dans le protoplasma même de ces cellules. XV. Organes seymentaires (page 369).— Ces organes pro- viennent de la somatopleure, et ceux du même côté sont d’abord soudés en un cordon cellulaire continu, qui se fragmente ensuite, chaque partie pénétrant dans une cloison en voie d'extension. Cette continuité primordiale rappelle celle des deux reins céphaliques des larves Trochosphères ; seulement, ces derniers sont traversés par un canal avant leur division ultérieure en néphridies, fait qui n’existe pas chez les embryons à développement condensé. Divers auteurs ont signalé récemment la persistance de cette con- tinuité chez l'adulte. XVI. Glandes septales (page 375). — Les glandes septales tiennent à la fois, par leur structure, des cloisons et des organes segmentaires ; elles correspondent probablement à des cloisons dans l’intérieur desquelles une ébauche d'organe segmentaire s’est développée sans parvenir à s’en séparer. 496 LOUIS ROULE. XVII. Organes sexuels (page 376). — La spermatogenèse ressemble à celle des autres Oligochætes, et il en est peut-être de même pour l’ovogenèse. Les spermiductes ne sont pas autre chose que les organes segmentaires du douzième an- neau, modifiés en vue de conduire les spermatozoïdes au dehors, et apparaissant au moment où les testicules commencent à se former. Les conduits sexuels des Oligo- chætes limicoles sont donc vraiment des organes segmen- taires. — Quant à ceux des Oligochætes terricoles, leur valeur morphologique est encore douteuse ; mais tout porte à croire qu'ils proviennent de néphridies modifiées dès leur naissance. TROISIÈME PARTIE. $ 1. — Valeur morphologique du méso-endoblaste (page 383). [ (page 383). — La notion du méso-endoblaste des Anné- lides doit être étendue à tous les Cœlomates: chez ces ani- maux, l’endoblaste primordial, qui dérive directement du blastoderme, est un feuillet double, un méso-endoblaste, puis- qu'il produit à la fois le mésoblaste vrai et l’endoblaste défi- nitif. [Il n’en est pas ainsi chez les Cœlentérés, dont le mé- soderme provient irrégulièrement de l’ectoblaste et de l’endoblaste, sans que l’on voie jamais chez eux ces forma- tions distinctes qui naissent dumésoendoblaste des Cœlomates et deviennent le mésoderme de ces êtres. Cette notion est surtout très nette en ramenant d’une manière schématique Lous les faits de l’évolution embryonnaire à la phase gastrula ; et les particularités propres aux développements condensés découlent de l’évolution gastrulaire primordiale. $ 2. — Développement du mésoblaste et du cœlome (page 385). IT (page 385). — Le cœlome des Annélides n’est pas un entérocæle vrai, car il ne dérive point de diverticules archen- tériques ; il prend toujours naissance, sans affecter jamais de relations directes avec l’archentéron, au milieu de l’amas DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 427 de cellules qui provient de la segmentation des initiales mésoblastiques. [IL (page 388). — Le cœlome des Mollusques est homo- logue de celui des Annélides, car il se creuse aussi dans l’amas de cellules qui provient de la segmentalion des initiales mésoblastiques. La seule différence porte sur l’as- pect régulièrement annelé du cœlome des Annélides, mais celte annulalion n’exisle pas toujours, chez les Sternaspidiens par exemple, dont la cavité générale ressemble à celle de Mollusques à struclure fort simple. Et non seulement l’ori- gine concorde dans les deux cas, mais parfois chez cer- taines Annélides telles que les Enchytræoides, l’ébauche du cœlome est un schizocæle semblable à l’ébauche du cœlome des Mollusques. IV (page 394). — Les parois qui limitent le cœlome des Annélides, c’est-à-dire le mésoderme, subissent la même évolution que les parois correspondantes des Mollusques. Les fibres musculaires des Archiannélides se développent bien suivant le procédé épithélial, mais celles des Enchytræoïdes prennent naissance par le mode mésenchymateux typique. Les conclusions à tirer de ces faits sont de deux sortes : d’abord, il n'existe aucune différence histogénétique entre les tissus mésodermiques de certaines Annélides et ceux des Mollusques; ensuite, les deux procédés histogénétiques primordiaux des frères Hertwig, le mode épithélial et le mode mésenchymateux, n’ont pas une grande valeur, puis- qu’on les rencontre dans le même groupe des Annélides. V (page 396). — La plupart des considérations invoquées par les frères Hertwig pour placer les Annélides parmi les Entérocæliens, tirées de l’absence de tractus conjonctifs traversant la cavilé générale, de la présence de mésentères, de l’origine de la musculature, et de la transformation des organes excréteurs en conduits sexuels, cèdent devant les résultats nouvellement acquis. 428 LOUIS ROULE. VI (page 397). — En effet, ces résultats montrent que les Annélides ne sont pas des Entérocæliens, et que la division des Métazoaires en Entérocæliens et Pseudocæliens est factice et systématique. Cette classification est principalement basée sur les processus évolutifs du tissu musculaire dans la série animale et sur le mode de développement du cœlome; or, puisque ces deux séries de phénomènes sont susceptibles de se remplacer dans un même groupe, comme chez les Anné- lides par exemple, il est impossible de s'appuyer sur elles pour établir une classification naturelle des Métazoaires. VII (page 398). — Des différences considérables ont été établies par les frères Hertwig entre un entérocæle et un schizocæle ou pseudocæle; or, il semble, contrairement à l'avis de ces auteurs, que l’entérocæle soit l’état primitif du cœlome, le schizocæle étant un état secondaire qui dérive de la genèse entérocælienne par la présence d’initiales, ou par la condensation du développement. $ 3. — Théories de MM. Lang et Kleinenberg (page 401). VIII (page 401). — Les Hirudinées ayant une vraie cavité générale homologue de celle des Chétopodes et distincte des cæcums intestinaux, on ne doit pas accepter l'opinion de Lang qui voudrait faire des Hirudinées un groupe intermé- diaire entre les Plathelminthes et les Chétopodes ; d’après cel auteur, les cæcums intestinaux des Hirudinées, semblables à ceux de Plathelminthes tels que la Gunda segmentata, se- raient des entérocæles en voie de formation, des ébauches de cavités segmentaires de Chétopodes. La cavité générale des Hirudinées ressemble sous tous les rapports à celle des Chétopodes; elle est de même divisée en mélamères; et le cœlome de ces deux types d'Annélides ne montre Jamais de rapports directs avec la cavité gastrique. Par contre, le cœælome des Plathelminthes n'est pas divisé en métamères, et cette particularité crée entre eux et les Annélides une diffé- rence considérable. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 429 IX (page 403). — Les Annélides n’ont également aucun rapport avec les Cœlentérés, et ne montrent dans leur déve- loppement aucune alternance de généralion. Les faits obser- vés par M. Kleinenberg sur les larves de Lopadorhynchus résultent sans doute d’une condensalion assez grande des processus évolutifs, et l'alternance de générations se réduit à un défaut d'équilibre dans l’accroissement ullérieur des deux parties du corps de la larve. $S4.— Situation réelle des annélides dans la classification (page 407). X (page 407). — Les Mollusques se rapprochent des Annélides par tous leurs caractères embryonnaires; aussi, est-il permis de rassembler ces deux groupes, accompagnés de leurs satellites, en un seul embranchement de Cœlomates nommé « embranchement des Trochozoaires ». Cet embran- chement est surtout caractérisé par l’aspect de ses larves, qui revêtent toutes d’une facon plus ou moins nette le type de la Trochosphère ou Trochozon ; il se rattache sans doute aux Plathelminthes par ces larves mêmes, mais par elles seules et non par des formes adultes comme le voudrait Lang. Suivant que le cœlome se divise en métamères ou ne se divise pas, les Trochozoaires sont dits polymériques ou monomériques, chacune de ces deux séries renfermant un certain nombre de classes diverses. D = LISTE DES AUTEURS CITÉS DANS LE TEXTE . Bazrour. — Traité d'embryogénie. . Bepparn. — On the occurence of numerous nephridia in the same seg- ment of certain Earthworms. — Phil. Trans., janvier 1888; Quart. J. of Mic. sc., février 1888. . BERGH (R.-S.). — Metamorphose von Aulastoma gulo. — Arb. a. d. Würz- burg, 1885. — Exkretions organe der Würmer. — Kosmos, 1885. . CZERNIAWSkY. — Materialia ad zoographiam ponticam comparatam, fasc. III; Vermes. — Bull. Soc. Imp. Nat. de Moscou, 1880. . DrRascHE (von). — Beit. zur Entwick. der Polychæten, Wienn, 1884-85. . FRAIPONT. — Polygordius, XIV® Monog. de Fauna und Flora des golfes von Neapel, Berlin, 1887. — Recherches sur le système nerveux central des Archiannélides. — Arch. de Biol.. 1884. . FRIEDLANDER (B.). — Beit. z. kentn. des Centralnervensystems von Lum- bricus. — Zeitsch. f. Wiss. Zool., XLVIT, 1, 1888. GoTTe. — Entwick. der Würmer, Leipzig, 1882. Harscaek. —Studien über Entwick. der Anneliden.— Ab. aus d. Wienn, 4878. — Entw. der Trochophora von Eupomatus uncinatus. — Arb. aus d... Wienn, 1885. . HerTwiG (R. et O.). — Die Cœlom-Theorie. — Jen. Zeitsch., 1881. . JENSEN. — Recherches sur la spermatogenèse. — Arch. de Biol., 1883. . KLEINENBERG. — The development of the Lumbricus trapezoides. — Quart. J. of. Mic. Sc., 1879. — Die Entstehung des Annelides aus der Larve von Lopadorhynchus. — Zeilsch. f. Wiss. Zool., 1886. . Kowazevsky. — Embryol. Stud. an Würmer und Arthropoden. — Mém. Acad., Saint-Pétersbourg, 7° série, 1871. . LANG. — Die Polycladen. — Fauna und Flora des golfes von Neapel, 188#. —- Ueber Gunda segmentata. — Mitth. aus... Neapel, 1881. . LEnmanx. — Geschlechtsprodukte bei den Obligochæten. — Jen. Zeitsch., 1887. . Lemoine. — Rech. sur le dével. et l’organis. de l'Enchytrœus albidus. — Assoc. franc. pour l’avanc. des sciences, 1883. . Leynic. — Ueber Phreoryctes menkeanus. — Arch. f. Mik. Anat., 1885. , MicHœLsEN. — Beit. z. Kentn. der deutschen Enchytræiden-Fauna. — Arch. f. Mik. Anat., 1888. . Nusspaux. — Recherches sur l’organogénie des Hirudinées. — Arch. slaves de biol., 1886. . PERRIER (E.). — Etudes sur l’organisation des Lombriciens et des Oligo- chætes en général. — Nouvelles Arch. du Muséum, 1872; Arch. Zool. Exp., 1873-74-81. . QuATREFAGES (de). — Histoire naturelle des Annelés marins et d’eau. douce. — Suites à Buffon, Paris, 1865. 22. 23. 24. 29. 26. 27. 28. 29. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 431 RigrscH. —- Étude sur le Sfernaspis scutata. — Ann. sc. nat., Zool., 1882. Roue (Louis). — Etudes sur le développement de la Dasychone lucullana. — Revue des sc. nat. de Montpellier, 1886 ; Comptes rendus de l’Ac. des sciences, 1887. — Études sur l’organisation et le développement de l'Enchytræoïides Marioni; Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1888 et 1889. — Observations sur la genèse et l’évolution des feuillets blastodermiques chez les Annélides. — Revue biol. du nord de la France, 1888. SanT-Loup (R.). — Sur l’organisation du Pachydrilus enchytræoïdes. — Comptes rendus de l’Académie des sciences, 1885. SALENSKkY. — Études sur le développement des Annélides. — Arch. de biol., 1882, 1883 et 1885. SEDGWICK (A.). — On the origine of Metameric segmentation. — Quart. J. of Mic. sc., et Stud. f. the Morphol. Labor. of Cambridge, 1884. Vesovsky. — Beit, z. Morph. der Oligochæten; Enchytræïden. — Prague, 1879. — System der Oligochæten. — Prague, 1885. ViGnaL (W.). —Rech. histol. sur les centres nerveux de quelques inver- tébrés. — Arch. Zool. Exp., 1883. Wizson. — The germ bands of Lumbricus. — Journal of Morphology, 1887. EXPLICATION DES FIGURES FIGURES DANS LE TEXTE 1, page 127, — Ovule entier, non encore segmenté, 100/1. 2, —- 127. — Stades à 2 blastomères, 150/1. 3, — 128. — — à3 et 4 blastomères, 150/1. k, — 129 — — à 4 et 5 blastomères, 150/1. 5, — 130. — — à 6 blastomères, 150/1. 6, — 130. — — à 9 blastomères, 150/1. 7, — 131. — — anormaux à 5 et 9 blastomères, 150/1. 8, — 132. — — à 13-15 blastomères, 150/1. 9, — 133. — — à 10 blastomères, 150/1. 10, — 1435. — — à 16 blastomères, 150/1. 11, — 135. — — à 19-20 blastomères, 150/1. 12, — 139. — — à 35-40 blastomères, 150/1. 13, — 139. — — à 55-60 blastomères, 150/1. 14, — 140. — — à 70-80 blastomères, 150/1. 15, — 141. — — planula, 120/1. 16, — 143. — — anormal à 90-100 blastomères, 180/1. 47, — 163. — Schéma d’un embryon au stade I, 350/1. de Re : nie ut ss pe Il, 350/1, 432 | LOUIS ROULE. Fig. 19, page 197. — — Schéma d’un embryon au stade III, 350/4. — 20, — 242 — — — — — IV, 400/1. — 21, — 351. — — — du développement des centres nerveux. — 22, — 978. — — — comparatifs d’un organe segmentaire (1) et du spermiducte (2). FIGURES HORS TEXTE (1) PLANCHE VIII (PI, I du Mémoire.) Fig. 4. — Filaments d’Algues portant des cocons. Fig. 2. — Cocon renfermant He œufs non encore segmentés, 40/1. Fig. 3. — — a = en voie de segmentation, 40/1. Fig. 4 — — — des embryons prêts à sortir, 40/1. Fig. 5. — Embryon entier, au stade I, 100/1. Fig. 6. — — — ILE, 100/1. — In, intestin; An, anus. Fig. 7. — _. à 15 anneaux environ (stade IV), 100/1.— S$, cons- trictions annulaires extérieures; In, intestin; An, anus; Os, organes seg- mentaires ; Sp, glandes septales; Vd, vaisseau dorsal. Fig. 8 — Embryon à 20-22 anneaux environ (stade V), 100/1. — Mêmes lettres que pour la figure 7; Pe, paroi du corps. Fig. 9. — Portion du corps d’un embryon déjà avancé, parvenu à la fin du stade V, et montrant les ébauches des organes segmentaires encore consti- tuées par des cellules distinctes, 250/1. — Ec, ectoblaste; MI, muscles longitudinaux ; Mp, cellules de la somatopleure non encore Foi ; Cl, cloison; Cg, éléments libres; Os, organe segmentaire; In, intestin re- couvert par la couche chloragogène. Fig. 10. — Portion du corps du même embryon, prise plus en avant, et montrant des jeunes organes segmentaires à cellules fusionnées, 250/1. — Mêmes lettres que pour la figure 9; Pv, pavillon vibratile. PLANCHE IX (PL. II du mémoire.) Fig. 411. — Embryon entier au stade VI, 40/1. — Ec, ectoblaste; S, sillons annulaires extérieurs; Bo, bouche vue par transparence; In, intestin; An, anus ; Os, organes segmentaires; Vd, vaisseau dorsal. Fig. 12. — Extrémité postérieure d’un embryon au stade IV, montrant l'amas mésoblastique postérieur et la continuité des ébauches néphri- diennes. — Ec, ectoblaste; MI, fibres musculaires longitudinales de la somatopleure ; Mp, éléments de la somatopleure non modifiés; An, Anus; ‘Anc, anastomoses postérieures circulaires des vaisseaux sanguins; Cl, cloi- sons; Os, organes segmentaires; Cos, cordon continu des ébauches d’or- ganes segmentaires; Cg, éléments libres. Fig. 13. — Extrémité antérieure d’un embryon au stade VII, 100/1.— Cr, gan- glion sus-æsophagien; In, intestin; Sp, glande septale; Cl, cloison; Vd, vais- (1) Les planches I-VI représentent le développement d’après l’étude par trans= parence, et montrent principalement l’organogénie; les planches VII-XV repré- sentent le développement d’après des coupes, et montrent de préférence l'histo- génie. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 453 seau dorsal; Anc, anses anastomotiques antérieures des vaisseaux san- guins; RS, receptaculum seminis. Fig. 14. — Extrémité antérieure d’un embryon un peu plus âgé que celui de la figure 13, 250/1. — Mèmes lettres que pour la figure 13; Ec, ecto- blaste ; M, fibres musculaires longitudinales ; Mp, dléhients de la somato- pleure non encore différenciés; Cg, éléments libres. Fig. 15. — Portion grossie de la figure 13, 350/1. — Mèmes lettres que dans les figures 13 et 4 Fig. 46. — Coupe longitudinale horizontaie et schématique de la région pos- __térieure du corps br embryon à 14-16 anneaux (stade V); comparer à la figure 12. — Mêmes lettres que pour la figure 12; En, endoblaste; Mo, splanchnopleure ; Mp, somatopleure. — Ce schéma montre la formation des deux feuillets mésoblastiques, des organes segmentaires et n° cloi- sons, aux dépens de l’amas mésoblastique postérieur. Fig. 17. — Schémas montrant l'extrême jeunesse des organes segmentaires. — À, cellules encore distinctes; B, cellules fusionnées en un syncytium. — Cl, cloison; Os, organe segmentaire. Fig. 18. — Schémas montrant l'évolution ultérieure des organes segmen- taires. — A, apparition du conduit néphridien; B, premières flexuosités de ce rte C, structure définitive. — Cl, cloison : Pv, pavillon vibra- tile ; Os, corps de l’organe; C, conduit; P, son pore externe. Fig. 19. — Portion du corps d’un embryon peu après la sortie du cocon, au début du stade VII, montrant les ébauches des glandes sexuelles et du spermiducte, 350/1. — ÆEc, ectoderme; Ml, fibres musculaires longitudi- nales; Mp, endothélium péritonéal; In, intestin revêtu par la couche chloragogène; Os, organe segmentaire, et Pv, son pavillon vibratile; Cg, éléments libres; Te, ébauche du testicule dans le 11° anneau ; Ov, ébauche de l’ovaire, et Cf, ébauche du spermiducte, dans le 12° anneau. PLANCHE X (PI. III du Mémoire.) Fig. 20. — Région sexuelle d’un embryon pris vers le milieu du stade VII, 100/1. — Mêmes lettres que pour la figure 19; Vd, vaisseau sanguin dor- sal; CI, cloisons. Fig. 21. — Région sexuelle d’un embryon parvenu vers la fin du même stade, et montrant des ébauches d’organes sexuels assez complexes déjà, 100/1. — Mêmes lettres que dans les figures 19 et 20; Osr, organes segmentaires en voie d'atrophie; Pe, ébauche du pénis; Pot, pavillon du spermiducte. Fig. 22. — Région sexuelle d’un embryon au stade VIII, montrant des ébauches sexuelles commencant presque à revêtir leurs caractères défini- tifs, 80/1. — Mêmes lettres que dans les figures 19, 20 et 21. — Les trois figures 20, 21 et 22, indiquent la nature des changements qui s'effectuent d'une manière successive dans la région sexuelle. Fig. 23. — Détails, à un fort grossissement, de la figure 20. Le 12° segment est représenté en entier, les 11° et 13° le sont en partie, 300/1. — Mêmes lettres que dans les figures précédentes 19-22. Comparer plus spécialement cette figure à la figure 19 (planche Il) qui représente un stade plus jeune. Fig. 24. — Détails grossis de la figure 21. Mèmes observations que pour la figure 23, 300/1. — Mêmes lettres que dans les figures 19-23. Comparer plus spécialement aux figures 19 et 23. ANN. SC. NAT. ZOOL., 1889, VII, 28. — ART. N° 3. 434 x LOUIS ROULE. PLANCHE XI (PI. IV du Mémoire.) Fig. 25. — Détails grossis de la figure 22; mêmes observations que pour les figures 23 et 24, 300/1. — Mèmes lettres que dans les figures 19-24. — Les quatre figures 19, 23, 24 et 25, montrent d’une manière détaillée les chan- gements qui se produisent dans le 12° segment, et complètent ainsi les figures 20, 21 et 22, de la planche III. Fig. 26. — Pavillon vibratile du spermiducte, représenté en entier, 300/1. Fig. 27. — Portion grêle du spermiducte; le fragment est vu par transpa- rence. 400/1. Fig. 28. — Jeune pénis vu de face, et montrant son orifice triquètre, 300/1. Fig. 29. — Lobules testiculaires examinés sur l’animal vivant, 200/1. Fig. 30. — Portion grossie de la figure précédente, 300/1. — L'intérieur du testicule est rempli par des spermatogemmes et des faisceaux de sperma- tozoïdes, Sp. Fig. 31. — Début de l'évolution des spermoblastes; a, jeune spermato- gemme ; b, spermatogemme plus évoluée, 600/1. Fig. 32. — Mêmes spermatogemmes que ans la figure 31. mais vus en coupe optique, 600/1. — c et d correspondent à a et b de la figure 33; Spt, cytophore; Spc, spermatocytes. Flg. 33. — Fin de l’évolution des spermatogemmes. — b représente un état plus avancé que a, mais encore peu évoluée; en c, les spermatozoïdes commencent à se développer aux dépens des spermatocytes; en dete, les spermatozoïdes sont entièrement développés, 600/1. — Sp, spermato- zoïdes; Spt, cytophore. Fig. 34. — Détails de la figure 32 6, montrant l'aspect du réseau chromatique nucléaire dans la phase pelotonnée (a), et la phase de division (b), 950/1. Fig. 35. — Détails de l’évolution d’un spermatocyte ou spermatozoïde, 800/1. Spt, cytophore. | Fig. 36. — Spermatozoïdes, 950/1. Fig. 37. — Organe segmentaire entièrement développé, mais un peu plus anormal en ce sens que le conduit néphridien, au lieu de se diriger sui- vant une spirale dans le corps, est replié en un peloton irrégulier, 250/1. — Pv, pavillon vibratile; Cos, conduit néphridien; Po, pore externe percé ici presque sur le corps de l'organe. D'habitude, ce pore est porté sur un petit mamelon. PLANCHE XII (adulte) (PI. V du Mémoire.) Fig. 38. — Enchytræoïdes adultes, un peu plus grands que nature. Fig. 39. — Région antérieure d’un individu adulte, vue par la face dorsale, 40/1. — Le, lohe céphalique; Pe, paroi du corps; S, soïes; In, intestin; Vd, vaisseau sanguin dorsal; Ans, anses anastomotiques joignant le vais- seau dorsal au ventral; Sp, glandes septales; Rs, réceptale de la semence; Te, testicules; Clv, spermiductes ; Pe, pénis; Ovj, ovules jeunes; Ov, ovules mûrs; Cl, cloisons. — La partie inférieure de la figure, à partir des let- tres Te, correspond au clitellum. Fig. 40. — La même région vue de profil, 25/1. — Mêmes lettres que dans la figure 39; Bo, bouche; Lb, lobe buccal; Ph, pharynx; Vv, vaisseau sanguin ventral. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 435 Fig. #1. — Région moyenne du corps d'un individu adulte, 50/1. — Mêmes lettres que dans la figure 39; Os, organes segmentaires. Fig. 42. — Région postérieure du corps d’un individu adulte, vue par la face dorsale, 50/1. — Mêmes lettres que dans les figures 39 et 41; An, anus. En avant de l'anus est placée l’anse sanguine circulaire et postérieure. Fig. 43. — Détails de la structure d’un anneau, choisi dans la région moyenne du corps et examiné par transparence; la moitié gauche de l'anneau est seule dessinée, 250/1. — Ec, ectoderme; M{, musculature longitudinale; En, endothélium péritonéal du mésoderme somatique; In, intestin recou- vert par la couche chloragogène; Cl, cloisons segmentaires; Cg, éléments lymphatiques libres; Os, organe segmentaire muni de son pavillon vibra- tile Pr. Fig. 44, — Réceptacle de la semence dévaginé, 250/1. Fig. 45. — Pénis dévaginé, 100/1. Fig. 46. — Aspect offert par une rame de soies, 200/1. — $,soies; Ec, ecto- derme : MI, muscles destinées à mouvoir les soies. Fig. 47. — Soies entières, 250/1. Fig. 48. — Éléments lymphatiques libres traités par le vert de méthyle pour montrer leurs particules nucléaires, 400/1. PLANCHE XIIT (ovogenèse) (PL. VI du Mémoire.) Fig. 49, — Amas de spermoblastes, 100/1. — Ovj, ovoblastes; Ov, ovules jeunes; Ov?, ovules mûrs. Fig. 50. — Débuts de l’évolution des spermoblastes, 300/1. — Fo, cumulus; Ovu, vitellus; Nu, noyaux secondaires ou du follicule; Vo, vésicule ger- minative. Cette figure renferme plusieurs ovoblastes à divers états de développement, et montre tous les états de la genèse du cumulus placé en un pôle de l'œuf, et de la division nucléaire de l'ovule en une seule vésicule germinative et plusieurs noyaux secondaires. Fig. 51. — Ovoblaste avec son cumulus entièrement formé, et ses petits noyaux secondaires placés dans le vitellus à côté de la vésicule germina- tive, 300/1. Fig. 52. — Ovoblaste dont le cumulus commence à être absorbé par le vitellus ovulaire, 300/1. Fig. 53. — Ovoblaste dont le cumulus est presque entièrement absorbé par le vitellus ovulaire, 300/1. Fig. 54. — Ovule ayant achevé son évolution, mais encore petit, et n'ayant plus qu’à grandir pour parvenir à maturité, 250/1. Les figures 55-61 représentent l’ovogenèse sur des coupes, tandis que les figures 49-54 montrent cette méme ovogenése vue par transparence sur des maté- riauæ frais. Fig. 55. — Jeunes ovoblastes commencant à diviser leur noyau primordial en un certain nombre de noyaux secondaires, 350/1. Fig. 56. — Ovoblaste plus âgé, 350/1. — Nu!t, noyaux secondaires en voie de division. Fig. 57. — Ovoblaste encore plus âgé, 350/1. — Nu‘, noyaux secondaires encore capables de division; Nu?, noyaux secondaires en voie d'atrophie. Fig. 58. — Ovoblaste plus âgé que celui de la figure 57, 350/1.— Le nombre des noyaux en voie d'atrophie augmente. Fig. 59. — Ovoblaste commençant à se transformer en ovule, et montrant 436 | LOUIS ROULE. dans le vitellus un grand nombre de noyaux en voie d’atrophie, 300/1. Fig. 60. — Portion d'ovule mür, montrant le vitellus dépourvu de noyaux secondaires et renfermant la vésicule germinative. Fig. 61. — Phases de la division des noyaux secondaires, 50/1. — La paroi nucléaire est de même nature que les filaments chromatiques, et ceux-c conservent en partie leur aspect pelotonné durant la karyokinèse. PLANCHE XIV (PI. VII du Mémoire.) Fig. 62. — Coupe d’un ovule segmenté, au stade 19-20 blastomères, et cor- -respondant à la figure 11 du texte, 250/1. Fig. 63. — Coupe d’un ovule segmenté, au stade 30 blastomères, 250/1. Fig. 64. — Coupe d’un ovule semblable à celui de la figure 63, mais mon- trant un petit blastocæle B{, 250/1. Fig. 65. — Coupe d’un ovule à 50 blastomères environ, 250/1. Fig. 66. — Aspect et structure des blastomères, 300/1. Fig. 67. — Embryon commençant à revêtir le stade planula, et quelque peu courbé de manière à montrer une face déprimée et concave, et à ressem- bler ainsi à certains embryons d’Annélides décrits par plusieurs auteurs comme passant par un stade gastrula; cet aspect est trompeur, car la dépression concave ne répond nullement à un archenteron, 250/1. Fig. 68. — Embryon parvenu au stade planula, et vu sur une coupe longi- tudinale, 250/1. — Ec, ectoblaste ; Men, mésendoblaste. Fig. 69. — Coupe transversale de l'embryon représenté dans la figure 68, 250/1. Fig. 70 et 71. — Aspects divers présentés par les blastomères des ovules représentés dans les figures 67-69, 300/1. PLANCHE XV (stade I) (PL VIII du Mémoire.) Fig. 72. — Coupe longitudinale et médiane d’une planula déjà assez évoluée, 250/1. — Ec, ectoblaste; Pce, plaque céphalique; Men, mésendoblaste. Fig. 73. — Coupe transversale de l'embryon dessiné dans la figure 72, 250/1. — Mêmes lettres que dans la figure précédente. Fig. 74. — Détails de la structure histologique des éléments des feuillets, 350/1. — Mêmes lettres que dans la figure 72. Fig. 75. — Coupe transversale d’un embryon au début du stade I, 250/1. — Ec, ectoblaste; Men, mésendoblaste; Cin, archenteron en voie d'apparition. Fig. 76. — Coupe longitudinale et médiane du même embryon, 250/1. — Mèmes lettres que dans la figure précédente. Fig. 77. — Aspect de certains éléments du mésendoblaste, 350/1. Fig. 78. — Détails de la manière suivant laquelle apparaissent les ébauches archentériques. — In, ébauches archentériques. Fig. 79. — Coupe longitudinale et médiane d’un embryon vers la fin du stade I, 200/1. — Ec, ectoblaste; Pce, plaque céphalique; Me, mésoblaste ; Cgn, ébauches de la cavité cælomique; En, endoblaste; Cin, archenteron. Fig. 80. — Coupe transversale d’un embryon intermédiaire entre celui de la figure 76 et celui de la figure 79, 200/1. — Cette figure montre la divi- sion du mésendoblaste Dent en un Endoblaste En entourant l’ar- chenteron Cin, et un mésoblaste Me. DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 437 Fig. 81. — Coupe transversale d'un embryon semblable à celui de la figure 79, 200/1.— Mèmes lettres que pour la figure 79. — Ces deux figures montrent l'apparition des cavités cœlomiques dans le mésoblaste. Fig. 82. — Détails de la structure histologique des éléments des feuillets blastodermiques chez les embryons parvenus à la fin du stade I, 350/1. — Ec, ectoblaste; En, endoblaste; Mep, somatopleure ; Mev, splanchnopleure ; Cgn, ébauches des cavités cælomiques. PLANCHE XVI (stade Il) (PI. IX du Mémoire.) Fig. 83. — Coupe transversale d'un embryon au début du stade II, 250/1. — Ec, ectoblaste ; Cne, plaque médullaire; En, endoblaste; Cin, archenteron; Mep, somatopleure; Mev, splanchnopleure ; Cgn, ébauches du cæœlome; Cg, éléments mésoblastiques libres. Fig. 84. — Détails de la structure histologique des éléments mésoblastiques, 500/1. — Pr, protoplasma; Nu, noyau; Cn, granulations vitellines. Fig. 85. — Aspect des noyaux en voie de segmentation de la plaque médul- laire, 800/1. Fig. 86. — Détails de la structure histologique de la plaque médullaire, 600/1. — Cu, cuticule; Cec, noyaux de l’ectoblaste; Cne, noyaux de la _ plaque. Fig. 87. — Détails de la structure histologique de l’ectoblaste Ec et de la somatopleure Mep, 500/1. — Cu, cuticule. Fig. 88. — Coupe longitudinale verticale et médiane de l'embryon représenté dans la figure 83, 250/1. — Mêmes lettres que dans la figure 83. Fig. 89. — Coupe transversale d’un embryon vers la fin du stade II, 250/1. — Mêmes lettres que dans la figure 83. Fig. 90. — Coupe longitudinale verticale et médiane de l'embryon précé- dent, 250/1. — Mèmes lettres que dans la figure 83; Cr, plaque cépha- lique. Fig. 91. — Détails de la structure histologique de la plaque céphalique, 600/1. — Comparer à la figure 86. Fig. 92. — Détails de la structure histologique de l’endoblaste En et de la splanchnopleure Mev, 500/1. Fig. 93. — Aspect de certaines cellules endoblastiques, 500/1.— Nu, noyaux; On, granulations vitellines. PLANCHE XVII (stade Ill) (PI. X du Mémoire.) Fig. 94. — Coupe longitudinale verticale et médiane d'un embryon parvenu vers le milieu du stade IIT, 300/1. — Ec, ectoblaste; Cr, plaque céphalique; Cne, plaque médullaire; Pc, îlots qui deviendront plus tard des amas de substance fibrillaire ; Bo, bouche; En, endoblaste ; Cin, archenteron devenu la cavité intestinale; Mev, splanchnopleure; Mep, somatopleure; Con, cœlome commencant à se cloisonner; C{y, ébauches des cloisons; C9, élé- - ments mésoblastiques libres. Cette figure est un tant soit peu oblique dans la région antérieure. Fig. 95. — Partie antérieure de la coupe longitudinale verticale et médiane d'un embryon un peu plus jeune que celui ‘de la figure 94; la bouche n'est 438 LOUIS ROULE. . pas encore percée, 300/1. — Mêmes lettres que dans la figure 94; Ph, ex- trémité antérieure de la cavité intestinale. Fig. 96. — Coupe transversale dans l'extrémité antérieure de l'embryon dessiné dans la figure 94, 300/1. — Mèmeés lettres que dans la figure 94. Fig. 97. — Coupe transversale dans une région placée peu en arrière de la précédente, et passant par la commissure nerveuse œsophagienne Co, 300/1. — Mèmes lettres que dans la figure 94. Fig. 98. — Coupe transversale pratiquée vers le milieu du corps 2. même embryon, 300/1. — Mêmes lettres que dans la figure 94. Fig. 99. — Détails de la structure histologique de l’endoblaste En et de la splanchnopleure Mev, 550/1. — Nu, noyau; Cn, granulations vitellines. Fig. 100. — Détails de la structure histologique de l’ectoblaste et de la _somatopleure dans la région antérieure et dorsale (à gauche dans la fig. 94) de l'embryon représenté dans la figure 94, 550/1. — Mêmes lettres que dans les figures 94 et 99. Fig. 101. — Mêmes détails que dans la figure 100, mais représentés d’après une coupe transversale, 550/1. | | Fig. 102. — Détails de la structure histologique de la Pre céphalique, 6007/1. Fig. 103. — Détails de la structure histologique de la plaque médullaire, 600/1. — Comparer ces deux figures aux figures 86 et 91 de la planche précédente, qui représentent les mêmes organes avec la même légende explicative; Pc indique les îlots protoplasmiques qui se transforment en zones de substance fibrillaire. PLANCHE XVIII (stade IV) (PI. XI du Mémoire.) Fig. 104. — Coupe transversale de la région moyenne du corps d’un embryon au stade IV. — Ec, ectoblaste; Cne, cordon médullaire; En, endoblaste; Mev, splanchnopleure; M{, fibres musculaires de la somatopleure; Mep, cellules embryonnaires de la somatopleure; Cgn, cœlome; Cg, éléments cœlomiques libres; Os, organe segmentaire; Cos, conduit néphridien. Fig. 105. — Partie antérieure d’une coupe longitudinale verticale et médiane du même embryon, 250/1. — Mêmes lettres que dans la figure précédente; Lce, lobe céphalique ; Lb, lobe buccal; Cu, cuticule; Bo, bouche; Cr, cer- veau; Phi, pharynx; Ph, gésier; Is, dépressions annulaires ectoblastiques; Sp, substance fibrillaire; Phd, paroi dorsale du gésier. Fig. 106. — Détails de la structure histologique de l’ébauche néphridienne représentée dans la figure 104, 650/1. — Cos, conduit néphridien: Nu, noyaux cellulaires; Cu, granulations vitellines; Cg, élément cæœlomique libre. Fig. 107. — Détails de la structure histologique des téguments d'un embryon au stade IV, sur une coupe transversale, 600/1. — Cu, cuticule; Ec, ecto- blaste; Ml, fibres musculaires circulaires; Mep, éléments embryonnaires de la somatopleure. Fig. 1408. — Partie d’une coupe longitudinale et horizontale du même em- bryon, 300/1. — Mêmes lettres que dans les figures précédentes; Cin, ca- vité intestinale; Sp, glandes septales. Fig. 109, 110, 4111. — Détails du développement des soies, 600/1. — S, soie; Ec, ectoblaste : Sb, bulbe sétigère ; MI, fibres mince. crc Cg, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 439 éléments embryonnaires de la somatopleure ; Cgm, éléments en voie de se. transformer en fibres musculaires. * Fig. 112, 113. — Détails du développement des cloisons, 300/1. — La figure 112 montre l’état le plus jeune. Ec, ectoblaste; En, endoblaste; Mev, splanchnopleure; Cgn, cæœlome segmenté; Cg, éléments cœlomiques libres; Mlj, fibres musculaires de la somatopleure ; Cli, éléments embryon- naires des cloisons ; C{, substance conjonctive des cloisons recouverte sur ses deux faces par ces éléments. Fig. 114. — Développement des fibres musculaires de la somatopleure, montrant, à des stades successifs (a, b, c, d, e), l’enveloppement du proto- plasme initial par la substance contractile, 650 /1. Fig. 415. — Développement des fibres musculaires des soies, montrant, avec la même série (a, b, c, d), les mêmes détails que la figure précédente, 650 7/1. PLANCHE XIX (PI. XII du Mémoire.) Fig. 116 et 117. — Détails chez des embryons aux stades IV et V de la genèse du vaisseau sanguin dorsal, 600/1. — La figure 116 représente l’état le plus jeune; En, endoblaste ; Mev, splanchnopleure; Vv, cavité du vaisseau ; Pv, paroi vasculaire fournie par la splanchnopleure; Nu, noyau; Cn, gra- nulations vitellines. Fig. 118. — Coupe longitudinale et horizontale, chez un embryon parvenu à la fin du stade IV, d’une rame séligère et des glandes septales, 30u/1. — Cette coupe est destinée à montrer les dépressions existant parfois sur la paroi endoblastique vis-à-vis des insertions sur elle des glandes septales. Ec, ectoblaste; S, soie; MI, muscles de la somatopleure; Sp, glandes sep- tales ; En, endoblaste. Fig. 119. — Coupe transversale d’un embryon à 15-16 anneaux, au début du stade V, 300/1. — Ec, ectoblaste; Cne, cordon médullaire ou cordon ner- veux ventral; Mi, fibres musculaires de la somatopleure; Mep, cellules embryonnaires de la somatopleure, internes et chargées de former l’en- dothélium péritonéal; Cgn, cœlome; Cg, éléments cœlomiques libres; Os, organe segmentaire; Mev, splanchnopleure; En, endoblaste, surmonté en son axe médian par un espace vide qui est l’ébauche du vaisseau dorsal. Fig. 120. — Coupe transversale pratiquée vers le milieu du corps d’un em- bryon à 18 segments, 250/1. — Comparer à la figure précédente. Les deux espaces teintés qui recouvrent l’endoblaste en haut et en bas, tout en empiétant un peu sur les côtés, sont les ébauches des vaisseaux san- guins. — Mêmes lettres que dans la figure 119; Cos, conduit néphridien. Fig. 421. — Coupe transversale d’un embryon à 20-22 anneaux, 250/1. — Comparer aux deux figures précédentes; les organes segmentaires Os et la splanchnopleure ou couche chloragogène Mev commencent à revêtir leur aspect définitif. — Mêmes lettres que dans les figures 119 et 120; En, endothélium péritonéal; Nos, noyaux des organes segmentaires; Vd, vais- seau sanguin dorsal; Vvd, espaces sanguins latéraux dépendant du vais- seau dorsal; Vv, vaisseau ventral. Fig. 122. — Coupe longitudinale de la paroi du corps de l'embryon précé- dent, 550/1. — Ec, ectoblaste; Cu, cuticule; Is, dépressions annulaires ec- toblastiques ; Ml, fibres musculaires longitudinales ; En, endothélium péri- tonéal. 440 LOUIS ROULE. Fig. 123. — Détails de la structure histologique d'une ébauche néphridienne prise chez un embryon à 20-22 segments, 550/1. — Cos, canal néphridien sectionné; Nos, espaces où de nouvelles parties du canal vont se creuser par disparition de substance; Pro, protoplasme granuleux; Nu, noyaux. Fig. 124. — Portion d’une coupe transversale d'un embryon à 20-22 seg- - ments, prise dans la région ventrale, 550/1. — Ec, ectoblaste; Cu, cuti- cule ; Cne, cordon nerveux ventral; MI, fibres musculaires de Ja somato- pleure; En, endothélium péritonéal ; S soies; Sb, bulbe sétigère; Ms, amas des fibres musculaires servant à mouvoir les soies. Fig. 125. — Détails de la structure histologique des éléments de la couche chloragogène, pris chez le même embryon, 550/1. Fig. 126. — Détails de la structure histologique de l’endoblaste, pris chez le même embryon, 550/1. PLANCHE XX (PI. XIII du Mémoire.) Fig. 127. — Coupe longitudinale horizontale d’un embryon au stade VIIE, du même âge que ceux des figures 22 (pl. III) et 25 (pl. IV), 350/1.— Cette coupe représente la moitié gauche de la région sexuelle, et montre en entier la cavité du 12° anneau. Ec, ectoblaste revêtu de sa cuticule épaisse; Cm, jeunes cellules à mucus; Mt, couche de fibres musculaires circulaires; MI, fibres musculaires longitudinales; En (à gauche) endothélium péri- tonéal; En (à droite), endoblaste; Vud, espaces latéraux du vaisseau ven- tral échancrant les cellules de l’endoblaste; Mev, couche chloragogène; Cl, cloisons; Ov, amas d’ovoblastes; Te, vésicules testiculaires presque müres et renfermant des spermatogemmes; Tej, vésicules testiculaires jeunes et contenant des spermoblastes; Cfv, section de la partie élargie du spermiducte ; Ctg, sections de la partie grêle du spermiducte. Fig. 128 et 129. ——- Développement du pénis, 400/1. — La figure 128 repré- sente l’état le plus jeune. — Ec, ectoblaste; Cu, cuticule; MI, fibres mus- culaires longitudinales ; Ov, amas d’ovoblastes ; Ov, ovoblastes jeunes et leurs noyaux Nu; Ope, orifice pénial externe; Cpe, canal pénial; Epe, paroi ventrale du pénis; Ctg, sections de la partie grêle du spermiducte; Cg, élé- ments cœlomiques libres. Fig. 130. — Coupe transversale pratiquée vers la région moyenne du corps d’un embryon parvenu au stade VIII, 250/1. — Mèmes lettres que dans la figure 127; Cu, cuticule; Mt, fibres musculaires circulaires; Vd, vaisseau sanguin dorsal; Vo, vaisseau ventral; Vvd, espaces sanguins latéraux. Fig. 1431. — Détails, chez le même embryon, de la coupe transversale de l'intestin et des organes qui l'entourent, 400/1. — Mêmes lettres que dans les figures 127 et 130; Pvd, paroi propre du vaisseau dorsal; Puv, paroi propre du vaisseau ventral; Cin, cavité intestinale. PLANCHE XXI (adulte) (PI. XIV du Mémoire.) Fig. 1432. — Région postérieure du cerveau de l'adulte, Cr, pour montrer les organes des sens atrophiés (?), et les muscles postérieurs Mer, 70/1. Fig. 133. — Coupe longitudinale verticale et médiane dans la région anté- rieure du corps d’un individu adulte, 60/1. — Le, lobe céphalique: Lb, DÉVELOPPEMENT DES ANNÉLIDES. 441 lobe buccal; Bo, bouche; 1s, dépressions annulaires ectoblastiques; Ec, ectoderme; M/, musculature de la paroi du corps; Cr, cerveau; Cne, cordon nerveux ventral; Mev, couche chloragogène; En, endoderme; Cin, cavité intestinale; Ph, gésier; Sp, glandes septales; Cgn, cœlome; Te, lobes tes- ticulaires ; Ctv, portion large du spermiducte; Ov, lobes ovariens. — La région inférieure de la figure, placée au-dessous du trait qui joindrait Is à Ctw, correspond au clitellum. Fig. 134. — Détails de la partie supérieure de la coupe précédente, 180/1. Mèmes lettres que dans la figure 133; M, fibres musculaires mésenchy- mateuses du lobe céphalique et du lobe buccal; Mer, muscles postérieurs du cerveau; Phj, pharynx; Of, organes des sens atrophiés (?) placés dans la substance cérébrale. Fig. 135. — Coupe transversale pratiquée dans la région antérieure du corps de l'adulte, et passant par les glandes septales, 250/1. — Mèmes lettres que dans les figures 133 et 134; Mu, cellules à mucus; Ml, fibres mus- culaires circulaires; M, fibres musculaires mésenchymateuses; Vd, vais- seau sanguin dorsal; Sp, glandes septales. Fig. 136. — Détails de la structure histologique de la périphérie du cerveau 500/1. — Cu, membrane propre dérivant de la basale de l’ectoblaste; CI, cellules nerveuses avec leurs noyaux Nu; Sp, substance fibrillaire. Fig. 137. — Détails de la structure histologique, et sur une coupe transver- sale, du cordon nerveux ventral, 500/1. — Ec, ectoderme; Cu, cuticule; Mt, fibres musculaires annulaires ; MI, fibres musculaires longitudinales; Ecn, pédoncule joignant le cordon nerveux à l’ectoderme ; Nn, noyaux des cellules nerveuses; Pt, substance fibrillaire. Fig. 138. — Fibres musculaires de la somatopleure dissociées, 500/1. Fig. 139. — Coupe transversale de la région grêle du spermiducte, 500/1. — Ci, cils vibratiles; Nu, noyaux de la paroi. PLANCHE XXII (adulte) (PI. XV du Mémoire.) Fig. 140 et 141. — Coupes transversales dans la région clitellienne ; la fig. 140 représente la moitié gauche d’une coupe pratiquée dans la partie anté- rieure de cette région, et la figure 141 la moitié droite d’une coupe pra- tiquée dans la partie postérieure de cette mème région, 250/1. — Ces deux coupes ont été colorées par des réactifs différents, de sorte que les cel- lules à mucus de l’une tranchent en foncé, et les autres en clair. — Ec, ectoderme; Cu, cuticule; Cmu, cellules à mucus; Mt, fibres musculaires circulaires ; Ml, fibres musculaires longitudinales; M, fibres musculaires mésenchymateuses; Cne, cordon nerveux ventral; En (au milieu), endo- derme; En (à gauche), endothélium péritonéal; Vd, vaisseau dorsal; Vo, vaisseau ventral; Vod, espaces sanguins latéraux ; Cgn, cavité cœlomique; Te, lobes testiculaires mürs; Tej, lobes testiculaires jeunes; Cfn, sections de la partie large du spermiducte; Ctg, sections de la partie grêle du sper- miducte ; Ovj, ovoblastes; S, faisceaux de spermatozoïdes. Fig. 142. — Coupe du pénis, 250/1.— Ec, ectoderme; Cmu, cellules à mucus; Mt, fibres musculaires circulaires ; MI, fibres musculaires longitudinales ; M, muscles du pénis; Epe, parois du pénis; Epc, canal pénien; Ope, ori- fice pénien externe. Fig. 143,144, 145,146. — Évolution des spermoblastes en spermatogemmes, 442 LOUIS ROULE. et des spermatocytes en spermatozoïdes, examinée sur des coupes, 600/1. — Spt, cytophore. — Comparer aux figures 31-35 de la planche IV. Fig. 147. — Éléments de la couche chloragogène, 500/1. | Fig. 148. — Éléments de la paroi de la portion large du spermiducte, 500/1. Fig. 149. — Spermatozoïdes fixés par le sublimé acétique, et colorés à l’hé- matoxyline, 600/1. Fig. 150. — Détails de la coupe d’une vésicule testiculaire jeune, montrant le passage des régions à spermoblastes aux régions à spermatogemmes, 500/1. — Tej, région à spermoblastes; Spf, région à spermoblastes divisés en spermatogemmes. Fig. 151. — Portion d'une coupe transversale pratiquée dans la région moyenne du corps de l'adulte, 250/4. — Mêmes lettres que dans les figures 140 et 141; Os, organes segmentaires; Cos, conduit néphridien; 050, orifice externe de la néphridie. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME Fr ARTICLE N° 4. — Anatomie descriptive du sympathique chez les Oi- seaux, par R. MARAGE............... RESAET ENTER 1 ARTICLE N° 2. — Le système nerveux des Crustacés décapodes et ses rapports avec l'appareil circulatoire, par M. E.-L. DOUTER. «LE EUR un SUD PIE OISE AUS ARTICLE N° 3. — Études sur le développement des Annélides et en particulier d’un Oligochæte imicole marin (Enchy- trœoïdes Marioni nov. sp.), par M. Louis Roue... 107 TABLE DES MATIÈRES PAR NOMS D'AUTEURS Pages. Pages. Bouvier. — Le système ner- : RouLe. — Etudes sur le déve- … veux des Crustacés déca- loppement des Annélides podes et ses rapports avec et en particulier d’un Oli- : l'appareil circulatoire.... 73 gochæte limicole marin MARAGE. — Anatomie, descrip- (Enchytræoïides Marioni, tive du sympathique chez NDOV::SP:)ire 86 04 20 Dés SON les! Oipeaux sis 6 bn n8 ets | TABLE DES PLANCHES CONTENUES DANS CE VOLUME PLANCHE I à VI. — Système sympathique des Oiseaux. PLancHe VII. — Système nerveux des Crustacés. PLance VII à XXII. — Développement des Annélides, Ann.des Sciences nat. 7° Série. Zool. Tome VIT PL.I. C Richard de. G Masson Editeur Nicolet it. >. 1 À Ganglion cervical superieur et Ses rapports ( Faisan ) EL : (Canard) FE Sympathique du Canard. Tmp. Edouard Pry. Paris. Ann. des Sciences nat. Z° Serie. AE. - 0 Zool. Tome VAT PL.11 C Richard del G. Masson Editeur | Nicolet lit .Verf cervical du Canard Imp Edouard Bry. Paris. / À RAT Ann. des Sciences nal.7° Série. Zool. Tome VII PL. GS C' Richard del. G. Masson Editeur: Nicolet Ut. Nerf du pleœus brachial du Canard Imp. Edouard Bry, Paris. Ann des Sciences nat. 7 ° Serie. Zoot Tome VIT. PL.ITV. C Richard del. G Masson, Editeur. Micolet ll Nerf Thoracigque du Canard £ np. Edouard Bry, Paris. Ann des Sciences nat. 7° Serie. Zool. Tome VIT PL. V C. Richard del. G. Masson Editeur. Wicolet., Uth. Nerf Thoracique du Casoar. Imp. Edouard Bry, Faris. Ann. RUES nat 7 Série. - Zoo, Tbme VII PL. VI Millot del CG Mascon Editer | Nicolet lith. F1, Nerf intestinal du Faisan | F3, Nerf intestinal du Cog. FE dela Pintades | FÆ& 2 Ad du Pigeon 1np. Edouard Bry, Paris \ Zoo. Tome 7, PL 7. TITTHN + DOS £ É , RS RE Ne 1 nn À Fes HER R à 54 NE £ NS A 4 N : 4 pm): 7 — =—=2 . 44 p / il ? / ‘ / \ ÿ K ( / \\ \ (RS _Ann.des Setenc. nat. 7 < J'erte. d 7 y 1 PE pre ee \ RL A [24 æ ’ J' ysleme nerveur des Crus tlaces Imp,Lemererer et L te Paris. ÆE,Z. Bouvier del, Ann des Sciences nat. T° Serie Zoo Tome VIL PL VII | (PL L du Mémoire.) Lous Roule del. _Leuba Lith | mp Edouard Bry Parts Embryoloare des Innelides Me ir Ann. des Sciences nat. 7° Sérce. Zool. Tome VI] PL IX ( PT. IL du Mernoire.) 6] a 6 ENT CR RG 6 0) SD Pr TE , À en A AREA SR “2 Louis Roule del _ Leuba lit. /mp. Edouard Bry Paris FE mbryoloyie des _Annelides Ve 13 » L-? dE ARTE mo Fe C1 à 0 af € ) mou s » [es AIT du M Zool. Tome VI1 PIX ET J'Le. s e S e ces nal. 7. ent 2 Ann des S AIT TUE , TA 1 Imp. Edouard Bry Paris. * lides. 72e yoloqie des A1 mbr 7 Æ | £ Louis Roule del _ Leuba tith VII PIXT. ? Zool. Tonru 1) smoire d. (74 M. r (PL.IV Imp Edouard Bry Paris. . Louis Roule del _ Leuba lith lides » ? VA mbryologqe des Anne Zool. 7ome VIZ PL X1J. TLE. Je Ann des Sciences nat 7 (PL V du Mémorre.) 7 Paris [7474 rl Br » ? Imp Ed Louis Roule del. _ Leuba lit? Annelides. es _ 4 ele € A mbryog Zool. Tome VA PI XI _ Ann. des Sciences nat. T° Série (PL VI du Mémoire.) SAS er LA s & PAU üe ur Lorus Roule del._Leuba lit}. Imp Fo Bry Paris Énbryogénie des Annelides Zool. Tome VI] PI NIV Ann. des Sciences nat T° Série. (PLVI du Mémoire.) Jmp. E, douar B ry Paris Louis Roule del. _-Leuba lit. 7 mbryogente des Anneélides Ann des Sciences nat. 7° Série. Zool Tome VIT PL XV _ (PLVIII du Mémoire) SHOT Jr le | Fe. 20 / le] @ PET ‘ GE: Aer Es gre { = se HER ES | @ — | «e L*] Ge F ÿ 8 / / / 4 Se. (le CRE CA L ë / ÉD @ * 3 Ly LS C . | FE ee | ù DNS \ à ? D œ Rai ele Sr AQQUQu ES AMV RER er EE Se 1e 7 & Ua) SL PER, < È LES R4 « EE che tie ; SC He Louis Roule del_ Leuba lith {mp Édouard Bry Paris FE mbryogente des Annelides Zool, Tome VIL PI XVI (PL IX du Mémoire) nces na. T° Série. Cle, le ? Le | o ( | e O 2 - < 2 Louis Roule del_Leuba th Ann. des $ a Jon Se on RTC EU © ou e @) CHR NETEONE S OO À tie FOSSES S Geo <É P (° Imp Edouard Bry Paris a (æY Embryologie des Annélides Ann. des Sciences nat 7° Série. Zoo Tome VIT PI XVI | (PL X du Mérnotre ) 4 UT 4 4, & :* OZ ù 9 Le RAC M ® 6° ,98, æe mi Co] æ, Fe 8 (J (1 iq. 101 FA > Mev Cin FE Can ouis Roule del._ Leuba lith. mp E douard Bry Faris Embryologie des Annelides » D Sciences nat T°$ Zool Tome VIE PI XVII (PLXT du Mémoire. eF”l£. 2 a, #2 PLEINE LL "DM { DOAOMAOUO SON TON Al! LS Le 10 Q] ke AS Li rs Ce } ] \ Se S | |R Ÿ QU . | \ DOM Ve ses TE [a eee 1 x tee | CAL] et sl - Se ak 1eUBBMe ec = | | ! \\ | : OCR QD nl 21 A HAT get AU AAA @) © af] a, LL) ie 2 TS Er —s TT | | ! ! 16 | Î 1 \ rec 000 DO RS BE A D) 2000002 00085860 Minas À ul Era + — Se 2 OCR LE iéichlhlete Fu APE es ” (es \o =D 2 = Fes 3 de 5 SO Ce NX g Des ce esdos y. / : > JFG = 3 DUT CONS € D TT Tr à , ) 7 à > C = : 2 ALES LE RAS NN vA à \) À KW = D N N ; | \\\ [4B] )) Do ane Ua Set CHE RAF A . LL iii 1 Le D) AS ” . 4 PE OU A ©" "7 © Set sea : ER °- — ut tint fl [æ) mm D Le) SD, , _SYS C/ e< OC O0 te A + EF EE SP 60e en S À a = D D led Leila Lil np. Edouard Bry Paris des Annélides. qe Lo E mbryo naë. T° Série. | Zoo, Tome VII PI XIX (PL XI du Mémoire.) Cin IV À l Ec CORNE st Nu set 88 ATOOnNNnnn Ent 77 APS a° Gi - / 1 4} CN «e à A NC : #) 2 °\ 8z À + o [1 PMU ŒIL A CT) PAUL 26 $ Fig.120 ŒUITTFr “ \/d € > TOUL LPS A >, "s Le D, = > CRE 6e Pr s 9 CYAZ TEL Tr] RE TP aetse PR tt Louis Roule del_Leuba lith. | Imp. Edouard Bry Paris Embryologte des Annélides. Zool Tome VIT PL XX Le. Ser e 24 Ann. des Sciences ral. (PLAIT du Mémoire.) Mc va ti (ee : EmEEre au | KL ne en En 2e 46 st AOL) 8 (=) > = 72 É té i #$ Fi a CN) om À x j re Assis OOCEITEEES nn gs HATAUN( a AA UE 1 141 ea” TPS € A s?_ a. < RO K EE ir. QE V4 077 7h nn | CY » / æ, æ | | COLE 2 | | «24 -.e a 6 | TU Paris. Ip. Edouard BP, A mbryoloqte des Annéelides. Lous Roule del_ Leuba th | #2 L Ann. des Sciences nal.T°S Zoo. Tome VI PL XXI = 4 CFE ( PLXIV du Mémoire.) UE Pa} 7 Ï | fl | PE DR = Lun JE |, ee ie] || Kama le ES | Fe (2 Ce. 24 || = æ 4 [l | es) TION =. # EC [PLIS PO _— CS ÈS £ : ë EX \ UT a on VE é s \ NE LATE : } LED Te & : or ) É OP (0 os smmeme LOTS $ dj th Imp. Edouard B T4 Parts. Louis Roule del _ Leuba Lith. des Annélides. yologte EL'mbr Ann. des Sciences nat. 7° Serie | Zoo. Tome VII PEER À CPLXT ou Memoire.) La Fe - + à _ = a ee CEA 2% CT EE lig.143 Fig. 144 : ER 0 : ddee 068 Ba ®i40 œ * CELL 77 vo% (] th Te RTE RUE Ê Le : CS Ca d'e $ LT RENE F4 DATE T La TRS ES 28 LT UNE EE À Le F CET 8e % Louis Roule del _ Leuba lith © Amp Edouard Bry Paris Embryologie des Annélides. , ï d À cé n f) LE R n N vf AU ! à | 198 1 à, 4 ne Fr, û te 1 ; L PL 4 è Nr EN CRU Ù | d PTE & Lire i È | ” 0e é ’ + ñ f * ' u ' r tea e À NE fi | 4 É À + > re Le (] 1 # - , 1 if IT DT " LFu (A Û 4 à L #4 LR nu ; U Nr : à \ FT L f Ba \ AE + # Û 4 RUE TS x Supp Avril 1889. lément au N° 1-2 des ANNALES DES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE. G. MASSON, Enorreur LIBRAIRE DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain, à Paris ARS NP PR PEER" EEE SEE KT VCL DES | Me BULLETIN DES NOUVEAUTÉS ET RÉCENTES PUBLICATIONS La Science pratique, suite des Recettes ét Procédés utiles, par Gasion TISSANDIER, rédacteur en chef du journal La Nature. 1 volume in-12 avec figures dans Île OR AE te Ne 2 0 ea Pi reite VA MEE 2 Ce petis livre est le complément des recettes et procédés utiles dont la 5° édition à été récemment publiée. Comme lui, il est né dans la Boite aux lettres du journal La Nature, inépuisable mine de renseignements, venus parfois de tous les pays du monde; comme lui, il contient de uombreux docu- ments, que l’auteur a compulsés, groupés et méthodiquement réunis. {1 y a ajouté la description de petits appareils domes- tiques, de systèmes bien conçus, que l'ingénieur, le chimiste où l’amateur ont intérêt à connaître et dont ils auront occasion de se servir avec profit. Nous espérons que la Science pratique pourra rendre des sérvices aux travailleurs et répondre à la devise qui avait inspiré déjà notre premier travail: Etre utile. Comment on fait parler les sourds-muets, par L. Go- GUILLOT, professeur à l’Institulion nationale des sourds- muets de Paris, précédé d’une préface de M. le D” Ladreit de la Charrière, médecin en chef de l'Institution nationale des sourds-muets et de la-clinique otologique. NOR AIMANT AIO NME UrES. 5 7, er pee en OUT Il y a un intérêt évident pour tout médecin de grand centre r" ronéoiwnnr efliracnment leg narents ourds-muete Traité d'ostéologie comparée, par G. Poucner, professeur d'anatomie comparée au Muséum, et H. BEAUREGARD, aide-naturaliste dela chaire. 1 volume in-8°, avec 3341f- FOR UE POSE GMA An EE Le LEE AR detre Il existait dégrands ouvrages sur l’ostéologie, mais il n'avait pas encore été fait.de traité eléme ; les auteurs ont entre- pris cette tâche et ont publié un ouvrage clair, facileà consulter et richement illu Stré. Traité de chimie minérale et organique, par MM. Wrezw, professeur à la Faculté des sciences de Lille, et HAnrior, professeur agrégé à la Faculté de médecine de Paris. Tome IV, fascicule 2, fin de la Chimie organique et de : l'ouvrage. 1 vol. in-8° avec figures, dans.le texte . 5 fr. : Prix de l’ouyrage complet ». 1,14 RO LNEA NES, Le Traité de chimie de MM. Willm et Hanriat a pris pour cadre général le programme de la licence ès sciences physiques. Les auteurs se sont cependant attachés à montrer tout le parti que l’on pouvait tirer de la science pure au point de vue de ses applications; aussi les principes sur lesquels reposent nos. grandes industries ont-ils été suffisamment développés, non: dans le but de faire un traité industriel, mais de facon à donner au lecteur une idée générale de tout ce qui se raltache à la chimie, L'ouvrage est complété par deux tables générales des matières || destinées à faciliter les recherches au lecteur. , PT dut taste y en einer à à Supplément au N° 1-2 des ANNALES DES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE. Avril 1889. G. MASSON, Énorreur LIBRAIRE DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain, à Paris No 72, dé se servir avec profit. ; Nous espérons que la Science pratique pourra rendre des sérvices aux travailleurs et répondre à la devise qui avait inspiré déjà notre premier travail: Éfreutile. Comment on fait parler les sourds-muets, par L. Go- GuiLLor, professeur à l’Inslilution nationale des sourds- muets de Paris, précédé d'une préface de M. le D” Ladreit dela Charrière, médecin en chef de lInstitution nationale des sourds-muets et de lasclinique otologique. Awol, in-80 avec 76 figures... +... . .:4. «+ 8 1r. Hy dun intérèt évident pour tout médecin, de) grand centre äpouvoir renseigner. eflicacement les parents de sourds-mucts “Pédipogique de ces iifortunes @ Wine pouvait avec plus d'auto” rité que M. Goguillot, rapporteër «des programmes d'enseigne- ment l'Inslilutiop nationale des sourds-muets de Paris, faire l'éxposé. de la méthode qui y est pratiquée et qui Consiste, commeon le sait, à faire parler les sourds-muets ct à leur ensci- gner à comprendre Ja parole au mouyement des lèvres. Les philologues, les grammañiens, les psychologuës, trouve: rout dans cet ouvrage de curieuses observations prises toutes sure vif eu qui pourront les aider dans leurs travaux, La savantes prelace qui fe) précède contient sur les origines et letraitement de la surdité de précieux renseignements. Formulaire pratique de l'Électricien, par M. E. Hos- PITALIER, ingénieur des Arts et Manufactures, professeur à l'Ecole municipale de physique et de chimie indus- trielles. Septième année, 1889. 1 vol. in-8° cart « 5 fr. Cette septième edition comyonte deschangements assez impor- tants..Nous sighalérons d'abord les tableaux relatifs aux réci- proques, carrés, cubes, racines carrées, etc., des nombres entiers. Ce tableau a été étendu jusqu à 1000. Le magnétisme et le calcul des dynamos sont mis au couranl des travaux les plus vécents. Enlin, une longue liste fail connaitre les prix moyens destappareils et produits ordinairement émployés, tn électricité, nermettant de dresser rapidement un deris approximatif ou ayant-projet des installations électriques. Comptabilité financière, Changes, Assurances, Bourse, etc.,et Comptabilité maritime par M. Joseph Barné, expert pres la cour et les tribunaux, pro- fesseur à l'École supérieure de commerce. Nouvelle édition entièrément refondue. { vol. in-8°. +: . #1r. CARIOUNE ON OI ae PR UE nr 6) fre Ce livre convient aux élèves des écoles commercialés en méme temps qu'aux cumptables eL aux employés des grandes atlministrations et des SERIES finaucières. 11 donne de précieux renscignements sur les monnaies françaises et étran- gères, sur l'usage des codes, les arbitrages, la spéculation, les ordres de banque, les assurances, les sociétés el le commerce marilime. BULLETIN DES NOUVEAUTÉS ET RÉCENTES PUBLICATIONS lsunles meilleures. méthodes ‘employer pour le traitement, Traité d'ostéologie comparée, par G. Poucuer, professeur d'anatomie comparée au Muséum, et H. BEAUREGARD, aide-naturaliste dela chaire. 1 volume in-8°,.avec 3910f GUEST AE AT ER ETAT PES NN RNA ETS IL existait dégrands ouvrages sur l’ostéologie, mais il n'avait pas encure été fait.de traité eléementaire; les auteurs ont'entre- pris cette tâche et ont publié un ouvrage clair, facile consulter et richement illustré, Traité de chimie minérale et organique, par MM: Wrerr, professeur à la Faculté des sciences de bille, et HaNiror, professeur agrégé à la Faculté de médecine de Panis. Tome IV, fascicule 2, fin de la Chimie organique et de l'ouvrage. { vol. in-8° avec figures, dans le texte . 5 fr. Prix de l’ouyrage complet . : . : . PÉRRRRE LE 20 Le Traité de chimie de MM. Willm ct Hanriut a pris pour cadre général le prosramme de là licence ès sciences pliysiques: Les auteurs se sont cependant attachés à montrertout le parti que lon pouvait tirer de la! science pure aupoiut de wie de ses applications; aussi les principes Sur lesquels reposent nos grandes industries ont-ils été suffisamment, dévelonpés, "nou: dans Je but de faire un traité industriel, mais dé façon à donner au lecteur une idée géncrale de tout ce qui se raitache à la chimie. L'ouvrage estcomplété par deux tables générales des matières destinées à faciliter les recherches au lecteur. Les Comp#urs d'énergie électrique, par E. Hosrrrat kr, ingénieur des Arts et Manufactures, professeur à l'École de physique et de chimie industrielles de lafille de Paris. 4DrOChURERIDE BE NN PAR Etre Dans cette brochure, M. Hospitalier fait connaître sommuire- ment les appareils réalisés pondant les dernières années pour clféctuer la mesure industrielle de lénergie-électrique, quelle que soit la forme du courant; puis il expose l'état acturl de la question, ainsi queles principales Solutions proposées expe- rimentées où employées en pratique, afin d'être utile aux cliercheurs en leur montrant les résullats acquis, les chemins déjà frayés et ceux, sur lesquels il serait inutile de s'engager. Théorie élémentaire de l'électricité et du magnétisme, exposée spécialement au point de vue de la production, de l'utilisation et de la distribution industrielles de l'électricité, par F: Van RYSSELBERGHE, chargé du cours des applications de, l'électricité aux Ecoles spéciales de l’Université. de Gand; avec la collaboration de MM. E. LaGRANGE, capitaine du génie, docteur ès, sciences physiques et mathématiques, professeur à l'Ecole militaire de Bruxelles, er G. Royers, ingénieur en chef. 1 vol. in-8° avec figures . . . . . . . 9 fr. Les Ballons et leur emploi à la guerre, par G. Esri- TALLIER, Capitaine du génie, commandant la 4°*compa= gnie d’aérosliers. { vol. in=18 de la Petite Bibliothèque aéronuulique, avec pl. et fig. dansle texte . = A fr. 50 Ce volume èst le premier d'une Petite Bibliothèque aero- nautique, que nous felicitons l'éditeur d'avoir fon iéerelle serau trés utile aux praliciens el à lous ceux qui s'intéressent aux applivations de la navigation aëénenne. L'autcur décrit Jes usages des ballons au point de vuc militaire ct après avoir. resumé les faits historiques, il! donnesun aperçu, d'ensemble, de l'organisation actuelle due à Vélablissemeut de Chalais-t Meudon, aborde la question des ballons dirigeables après celle des ballons captifs, et montre l'importance dela navi- ration aérienne dans l'avenir. Concis, biun exposé, (le petit! fre de M. Espitallier mérite d’étre lu attentivement. nn «x £. "(G: Tissaxnien.). RE nat mem Ent aveterranlet er enet céer ei renll iris l ment à l'institution nationale des sourus-muels qe Falis, ENT méthode qui y est pratiquée et qui consiste, x exposé de la ô t. à faire parler les sourds-muets et à leur ensci- comme on le sai | gner à comprendre la parole au mouvement des lèvres. ————__———# ee | ront hilologues, les grammairiens, les psychologues trouve- ans cet ouvrage de curieuses observations prises toutes sur.le vif el qui pourront les aider dans leurs travaux, La savante prélace qui Île précède contient sur les origines et letraitement de la surdité de précieux renseignements. Les Formulaire pratique de l'Électricien, par M. E. Hos- PITALIER, ingénieur des Arts et Manufactures, professeur ‘à l'Ecole municipale de physique et de chimie indus- trielles. Septième année, 1889. 1 vol. in-8° cart + 5 1 Cette septième edition comporte des chargements assez impor- tants. Nous signalero ' tab re au ; proques, carrés, cubes, racines Carrees, etc., des nombres entièrs. Ce tableau a été étendu jusquà 1000. Le magnétisme et le calcul des. dynamos sont mis au courant des travaux les longue liste fait connaitre les prix plus récents. Enfin, une da cn roduits ordinairement émployés en moyens des appareils et électricité, permettant de < ment u approximatif ou avant-projel des installations électriques. s Comptabilité financière, Changes, ; Bourse, etc.,et Comptabilité maritime par M. Joseph BarRÉ, expert pres la cour el les tribunaux, pro- fesseur à l'Ecole supérieure de commerce. Nouvelle édition entièrément refondue. VOIS EN OP Aer Cartonué Ole” MN EP ENREMREnR E" 5 fr. Ce livre convient aux élèves des écoles commerciales on même temps qu'aux cumptables el aux employés des grandes alministrations et des compagnies financières. Il donne de précieux re gères, Sur l'usage des codes Assurances, , les arbitrages, la spéculation, les ordres de banque, les assuxances, les sociétés et le commerce marilime. ns d’abord les tableaux relatifs aux réci- dresser rapidement un devis nscignements sur les monnaies françaises et étran-. UC PEY DAC VE LU LL UVLLLLIIIL ALIM LLALVIALNO LL LCL TARIL LL À CELL 1e 4 brôchurerinese. tente HAUTS RE RS ne ei Dans cette brochure, M. Hospitalier fail connaître sommuire- ment les appareils réalisés pendant les dernières ‘années pour effectuer la mesure industrielle de l'énergie “électrique, quelle que soit la forme du courant; puis il expose l'état acturl'de la question, ainsi que les. principales solutions proposées, expé- rimentées où employées en pratique, afin d’être utile aux. chercheurs en leur montrant les résultats acquis, les chemins déjà frayés et ceux. sur lesquels il serait inutile de s’engager. Théorie élémentaire de l’électricité et du magnétisme, exposée spécialement au point de vue de la production, | de l’utihsation et de la distribution industrielles de l'électriciié, par F. Van RYSSELBERGHE, chargé du cours des applications de l'électricité aux Evoles spéciales “de PÜniversité de Gand; avec la collaboration de | MM. E. LAGRANGE, capitaine du génie, docteur ès sciences physiques et mathématiques, professeur à l'Ecole militaire de Bruxelles, et G. RoyeRs, ingénieur en chef. 1 vol, in-8° avec figures... . .:, ... 0'fr + Les Ballons et leur emploi à la guerre, par G. Espi- | TALLIER, capitaine du génie, commandant la 4° compa- gnie d’aérostiers. 1 vol. in-18 de la Petite Bibliothèque aéronuutique, avec pl. et fig. dansle texte. + 1 fr. 50 Ce volume est le premier d'une Petite Bibliothèque aéro- nautique, que nous felicitons l'editeur d'avoir fonée; elle sera !| très utile aux praliciens el à (ous ceux qui s’iitéressent aux applications de la navigation aérienne. L'autcur décrit les usases des ballons au point de vuc militaire ct après avoir, resumé les faits historiques, il donne un aperçu dénsemble | de l'organisatinn actuelle due à établissement de Chalais- | Meudon, aborde la question des ballons dirigeables après celle des ballons captifs, et montre l'importance de la navi- vation aérienne dans lavenir. Concis, bien exposé, le petit livre de M. Espitallier mérite d'être lu attentivement. | | (G. TISSANDIER.) || Lt 1 Hi, ture; assimilation-pal |l'Phtisie 1 Choix de lectures littéraires, avec noles et nolices, par MM. Eugène Bauer et E. de SAINT-ETIENNE, professeurs à l'Ecole Alsacienne, à l'usage des classés élémentaires des lycées, du cours supérieur des écoles primaires et des institutions de j pan filles. { vol. in-12, cartonné toile . À fr. 50 Les auteurs se sont efTorcés, Fr" ins ce ET de rassembler des lectures intéressantes, simples et familières, qui fussent en mème tomps des modèles pour les élèves, E Îles sont grou- pées de façon à former des travaux vivants ét pittores ues, parlant à l'esprit et à l'imagination des écoliers. Faire un livre fus, l'élève prendra plaisir à se rappeler quand il sera sorti (} a Fate lui inspirer le goût de la lecture, telle à été leur biuon. Plantæ Davidianæ, ex Sinarum imperio, par MA) Expat A. Fnascugr, allaché à l'herbrer du Muséum. Première partie : Plantes de Mongolie (du nord et du centre de la Chine). 1 vol. avec 27 planches . 50 fr. Deuxième parie: Plantes du Thibet oriental (grapness de Moupine). 4 vol. in-4°, avec 17 planches . . 50 fr. Rec hes comparatives sur l'origine des membres endOgènes dans les plantes vasculaires, par Pau, VAN Eu: membre de l'Institut, professeur au Muséum, et H. Dourior, préparateur au Muséum. 4 volume in-8, avec #0 planches comprenant 586 figures . . 30 fr. Anvales des sciences géologiques, publiées sous la di- rection de M. Hésenr, membre de l'Institut, professeur de géologie à la Sorbonne, pour la partie géologique, ctde M. Alph. MizxE Enwanps, membre de Jnstitut, professeur-administrateur eu Muséum d'histoire natu= relle, pour la partie paléontologique. Tomo XX. — PRE géologique de la montagne de Lure (suite), par M. Kician. — Notions statigraphiques et aléontoloxiques a pliquéos à l'étude du gisement des plantes ossiles d'Aix on Provence, par le marquis G. de SaponTa. — Déliotrobus sternbergi; nouveau genre de conifères tertiaires, par A:-FeManiox. — Des phosphates de chaux, de leurs prin- SPUL gisements Far 0 ec né 9 on en agri= pis ù ES Contribution à l'étude Cor ur ré épartement EL te par Heuri Lasxe. Ce volume contient 7 planches et une carle en couleur, Prix du volume : Paris, 15 fr. — Départements, 16 fr, — Union postale, 47 fr. La Carpe. Nouveaux procédés d'élevage et d'aménage= ment des étangs par le systèmede Dubiseh, par M. le Dr A. Le Play, agriculieur à Ligoure (Haute-Vienne), membre de Ja Sociélé nationale d'agricullure. 4 vol, RARES CRT RENTE de of ER EC APE 2cfr. Congrès pour l'étude de la tuberculose, 1° Session, 1888: Président : M . le professeur Guauvéau (de l'Ins- titut). Comptes ue et mémoires publiés sous la direction de M. le Dr L. H. Perir, secrétaire général. Premier fascicule, 4 vol. in-8° avec figures. Pour les pérsonnes non membres du Congrès , . . . . ‘#8 fr. Le deuxième fascicule, qui terminera l’ouvrage, pa- raitra au mois d'avril et sera mis en vente au prix de 7 francs. Lunettes et pince-nez. Étude médicale et pratique, par Georges.J. Bec, Docteur en médecine des ‘facultés de Me Gizz (Montréal) et de Paris. 4 volume carlonné, pré- cédé d'une introduction de E. Java, membre de l'Aca- démie de médecine, directeur du laboratoire d'ophtal- mologie de la Sorbonne . à fr. 1Cepotit volume mérite d'être lu et médité par les oculistes ot los opticions: mieux encore que los malades, auxquels il est destiné,.les hommes compétents sauront apprécier Ja précision Let l'originalité de cet vpuscule, qui se recommande tout au moius par son-utilité pratique. , par MM. A. GouGuENuEIN, médecin de as riboisière et ile Ja clinique laryngologique de - cot hôpital, et P, Tissien, interne des Nôpilaux. 1 vol. s'a avec. ne dans le texte et 5 planches, dont OMR ADN RENE 8 fr. — is aps Su dar PAUL DUPONT à ru da Bou FAT un = = Notions d'Agriculture et d'Horticulture, à l'usage du cours moÿen et da cours supérieur des écoles primaires, par E. PAmanr, professeur d'agriculture et de sciences patrelles à J' École normale de Douai, officier d'acadé- mie. 4 vol. in-16, aveé 179 lg. dan$ le texte. . 1 fr. 25 Ce livre, rédigé conformément au programme adopté par le conseil départemental de l'ensei ignement du Nord, résume rapi- dement les points sur lesquels los eléves n'auront, pour s’éclairer, qu'à regarder ce qui so pratique Lous les jours autour d'eux et insiste spécialemeut sur les notions qui font généralement défaut. Nos futurs cultivaieurs puiseront dedans, non pas ce que tout le monde sait déjà, mais ce qu'ils doivent safoir pour réussir dans la profession qui les atteud. Expéditions scientifiques du « Travailleur » et du « Talisman », pendaat les années 1880 à 1883. Ouyrage publié sous les auspices du Micisière de l'instruction publie, sous la direction de M. Alpb. Milne Etlwärds, membre de l'institut, président de la Commission des dragages sous-marins, Le premier volume vient de pas il contient les Poissons, par L. VAILLANT, professeur-administrateur au Muséum d'histoire naturelle, membre de la Commission des dragages sous-marins. {Un volume ‘in-4°, avec 28/planches:.r. 7.71. : Jo 0 Er. L'ouvrage formera au moins quatre PRE in-8° accom- pagués de nombreuses planches noires ou en couleur ‘et de gravures dans le texte ; 1l reste à paraitre : Crustacés, Mollusques, Bryozoaires, Annélides, Echinodermes, Corailhaires, Éponges, Prolozoaires, Cours complet de viticulture, par G. Foex, directeur et professeur de viticulture à l école nâtionale d'agr icullure de Montpellier. Nouvelle édition. 1 vol. in 8° avec 50 figures et 4 carles en éhromo . : . . . . . . 16 fr. Cette seconde édition à été mise aucourant des résultats nou- veaux obtenus récemment en, viticulture. Nous signalerons : la cousacréeil'Ampélogr 2hie;quia.ét augmentée des tra- vaux récents de J.-E. PLaxcnoù, sur les à ampélidees, et les descri tions d'un certain mombrede cépages qui out récemment évaillé l'attention des viticulteurs. Leschapitres relatifs au mildew etaux diverses maladies cryptoganiques ont été l’objet de nombreuses additions, et les meilleurs appareils destinés aux traitements autcryptogamiques y ont éte décrits. Alimentation des-animaux domestiques, traduit d'après la 5° édition allemande, par A. UamsEeaux. Nouvelle édition revue et augmentée. { vol. in-18, 3 fr. 50 nn | Éd. sur la valeur du ‘traitement de la tuberculose pulmonaire, par les inhalations d'acide fluoxhydrique, par D° GarGin. 4 volume in-8, . . . . . : 2 fr. Séméiologie de l'aire de Traube, parle D° C. AnmGaras, professeur agrégé à là faculté, médecin des hôpitaux de Bordeaux. 1 volume in-8°, avec [7 figures et 3 hélio- gravOTCS Hans Ib IX re # tr, De l’étiologie de ‘la phtisie pulmonaire et laryngée, ei de leur Lrailement à toutes les périodes de la maladie, pe le D' H. pe LisEnmanx (de Strasbourg), officier de a Légion d'honneur, ancien médecin de {*° classe de l'armée, -ex-médecin traitant de l'hôpital militaire du Gros-Caillou. 4 vol.:in-8°. . . . . %: 3 fr. Études pratiques sur la vaccine, par le Docteur Pau LALAGADE, chwurgien en chef des hôpitaux, directeur de la pure pour le département du Tarn. 4 volume in-8°. is de physiologie humaine, à lu des étu- par AL Léon FrepenicQ ets. Nr rofesseurs à An cor de Liège. Nouvelle édition, entièrement revue, ayec 124 figures dans'le texte. . . . . M2fr. Ce AE re 4 ARR Sato BE LE. TOR SA à = é re at 0 0 md ds LS CT ea seau EE À € ( nn d TN 9088 01354 0810