ANNALES SCIENCES NATURELLES. T K» I M À: Il I sikh:. ZOOLOGIE. Paris» — lUPimir.niR i»f. noi Rr.oor kt mautinkt, ru» J.iiob .IJ 7i-D. ANNALES SCIENCES DES NATURELLES COMPRENANT I.A ZOOLOGIE, LA BOTANIQUE, l’an vtomie et la physiologie comparées des deux règnes , ET l’histoire DES CORPS ORGANISES FOSSILES; RÉDIGÉES TOUR LA ZOOLOGIE PAR NI. NI II. AK EDAVARDS, ET POUR LA BOTANIQUE PAR NI NI. AU. liROVGMAItl ET J. I)I(AIS\E «troisième Série. ZOOLOGIE. TOME CINQUIÈME. PARIS. VICTOR MASSON, LIBRAIRE DES SOCIÉTÉS SAVANTES PRÈS LE MINISTÈRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE, PLACE DE I.’ÉCOI.E-DE-Mt'DECINE, 1. 18i|G ' * - ■ ■ j} • I >lï I l'j ; 1 ■ '.Il 1 t ■ ANNALES UES SCIENCES NATURELLES. PARTIE ZOOLOGIQUE. UKSCBIPTION UES GALLES DU VERBASCUM ET DU SCROPHVLARIA , El i)ES INSECTES QUI LES HABITENT, POl'R SERVIR A l’histoire du parasitisme; Far M. LÉON DUFOUR. Lue a I Académie des Sciences, le 2i novembre I8I0. C’est un fait très singulier, mais un fait très positif, que la plu- part des larves d’insectes sont décimées par d'autres larves parasites, comme si , dans le but des harmonies de la nature, une loi de destruction devait contrebalancer une loi de produc- tion. Le parasitisme, considéré de haut, semble donc un correctif pour équilibrer les races ou les espèces. L’histoire des galles et de leurs hôtes , tant légitimes qu’usurpateurs , est appelée à former un des épisodes les plus curieux , les plus piquants de la science entomologique. Des investigations dirigées avec intelligence vers cette étude mettront en relief des faits si extraordinaires, que des esprits peu sérieux ou superficiels pourraient les prendre pour le 6 LÉON m FOUR. — SL 11 LES I.XSECTES des galles roman de la science. Voici un spécimen de ces curieuses super- positions d’existences, de ces inévitables dépendances. Une fleur est piquée par un frêle Moucheron pressé d’v déposer un œuf. Cette action , si simple , devient l’occasion d’une pertur- bation nutritive dans la corolle et les étamines de cette fleur ; ces organes prennent un développement exubérant, anormal; ils s’hypertrophient , se déforment, et il en résulte une (/aile d’une configuration déterminée et constante. Cette galle , à peine de la grosseur d’une petite aveline, devient le berceau de quatre Insectes génériquement différents , sans mettre en ligne clc compte les usurpations éventuelles de domicile par de très petits nomades. Essayons de dérouler les manœuvres mystérieuses de ce quadruple habitat. Le fondateur de cette intumescence morbide, de cette fleur hy- pertrophiée , est un Diptère de la famille des Tipulaires , un Ceci- domyia. Sa larve , malgré son incarcération dans le creux d’un sphéroïde fermé de toutes parts , n’est pas pour cela à l’abri des incursions, des attaques de trois cruels ennemis, pour lesquels sa propriété et sa vie deviennent des conditions d’existence ; ce sont trois Insectes de l’ordre des Hyménoptères , mais de trois genres différents : un Misocampus, un Jiulophus , un Stomoctea. Le Misocampe, guidé par un merveilleux instinct, obéissant à une mission irrévocable , sent , devine qu’une larve , condamnée à devenir le réceptacle vivant de sa progéniture , est à une distance suffisante de la surface de la galle , pour que la longueur de sa fine tarière abdominale ou de son oviscapte lui permette d’in- sérer dans le corps de cette larve un œuf solitaire. Et remarquez, je vous prie, que l’ovaire du Misocampe, que, malgré sa petitesse, j’ai pu disséquer , a environ une quinzaine de gaines ovigères multiloculaires pouvant fournir è une ponte successive d’une cin- quantaine d’œufs, destinés, par conséquent, à cinquante victimes. Il faut donc que cette habile et industrieuse mère aille pondre un œut isolément dans chaque galle. Ce n’est pas tout encore ; admirez ce concours de difficultés vaincues : le Misocampe doit avoir acquis la certitude, c’est presque une prescience, qu’aucun autre individu de son espèce ne l’a précédé dans cette inocula- DU VERBASCUM El Dli SCKOPUltUIUA. 7 tion d’un œuf : car il est écrit là-haut que le parasite du Ver de la Cécidomyie doit être seul aux prises avec sa victime. Je vous le demande, où résident dans ce myrmidon d’insecte cette per- fection de l’odorat, cette subtilité de l’ouïe, qui, dans ce cas, pourraient influencer ses déterminations ? Aurait-il ce don de seconde vue dont les illuminés du magnétisme nous parlent par- fois? ou bien n’est-ce encore qu’un simple instinct, comme on dit?... Mais rentrons dans le positif. De l’œuf implanté parle Misocampe doit éclore un Ver , l’ennemi personnel du légitime possesseur de la galle , condamné à devenir son inévitable proie. L’Eulophe , qui ne doit pas avoir , comme lo Misocampe , des enfants carnassiers et assassins , mais qui n’en est pas moins re- doutable pour la Cécidomyie , est instruit , par une faculté innée , que le domicile de la Tipulaire renferme des provisions de bouche, dont il a pressenti et la qualité et la quantité. Il sait que la tur- gescence des étamines est au degré convenable pour alimenter le premier âge de sa postérité ; il a mission d’envahir , d’usurper cet asile, et d’y introduire , non pas un seul œuf, comme le Miso- campe , mais une douzaine d'œufs, d’où naîtra une tribu de Vers avides qui vont réaliser le sic vos non vobis de Virgile. Quant au Stomoctée, dont la taille surpasse celle de l’Eulophe, et qui pullule moins que lui , je l’ai obtenu des mêmes galles sans être encore lïxé ni sur ses métamorphoses , ni sur son parasitisme du Misocampe ou de l’Eulophe. J’avais retardé d’un an la publi- cation de ce Mémoire, espérant que , en 1845, je pourrais éclairer cette question ; mais la constitution météorologique de l’année désastreuse qui tire à sa fin a été telle, que là où les étés précé- dents, j’aurais eu à mon service des milliers de nos galles, je n’en ai pas découvert une seule. L’entomologie a eu, en 1845, ses déceptions , comme l’agriculture ses calamités. Le fondateur de la galle se trouve donc dans l’atïreuse alterna- tive ou d’être dévoré vivant par son parasite direct le Misocampe , ou de mourir d’inanition par son parasite indirect l’Eulophe Mais rassurez-vous, le type de l’espèce de la Cécidomyie ne dis- paraîtra pas de ce monde ; les harmonies de la nature auxquelles le faible Diptère prête son atome d'influence ne sont pas à même s LÉO* Dl'FOLR. SLK LUS 1NSKCTES DUS (.ALLES de se troubler. Le créateur , qui veut que tout ce qui a vie la con- serve , a donné à cet Insecte une prodigieuse fécondité , et la majeure partie de ses larves, au milieu des dangers qui l’envi- ronnent , subissent leurs complètes métamorphoses. Si j’ai souvent trouvé le cadavre du Ver de la Cécidomyie gisant au milieu de la prospérité des larves de l’Eulophe , j’ai vu aussi dans d’autres circonstances la Nymphe de celte Tipu- laire parfaitement viable, lorsque les Chrysalides de l’Hvmé- noptère n’étaient qu’au nombre de. cinq ou six. Dans le premier cas, ou le Misocampe avait tué la larve de la Cécidomyie , ou celle-ci était morte de faim par la voracité des larves de l’Eu- lophe. Dans le second cas , n’est-il pas probable que la prévoyance maternelle de PEulophe, pour proportionner le nombre de ses petits à la quantité présumée de nourriture, n’aura placé dans la galle que la moitié de sa couvée ordinaire ? 11 peut se faire aussi que la larve de la Cécidomyie , ayant déjà pris un certain dévelop- pement lorsque l’Eulophe a colloqué dans la galle ses douze œufs, une partie des Vers issus de ces derniers aura péri d’inanition ; ou bien encore la tribu des Eulophes aura pu être partiellement victime du parasitisme du Stomoctée. Le sujet de ce Mémoire , quoique ne traitant que de fort petites choses, est pourtant assez vaste pour comporter plusieurs divi- sions. Je consacrerai donc un premier chapitre aux galles, et un second aux habitants de ces galles. (HAPITBE 1. U ALLES. Une galle est une production complexe , puisqu’elle résulte du concours simultané, de l’action combinée d’un végétal et d’un Insecte. Je ne puis donc pas isoler dans cette étude ces deux élé- ments; je ne puis pas séparer la cause de l’effet. Tout en circon- scrivant mon sujet dans les limites de l’entomologie , je serai irré- sistiblement entraîné à quelques considérations de physiologie végétale qui découlent de ces aberrations des lois normales ; mais j’y mettrai une grande réserve. Dl VEIUSASCUI Kl 1)1 SKR^PHLLAHIA. !) Le Verbascum pulverulenlum et le Scrophularia canina crois- sent abondamment l’un et l’autre sur les chaussées graveleuses de l’Adour, près Saint-Sever , el fleurissent en mai et juin. C’est à cette époque que ces plantes sont plus ou moins chargées de galles ; mais cetles-ci se rencontrent en quantité beaucoup plus considé- rable dans les rameaux du thyrse pyramidal du / erbascum que dans ceux plus rares , plus divergents , de la Serophulaire. On est surpris tout d’abord que la même espèce d'insecte éta- blisse indifféremment sa progéniture dans deux plantes qui appar- tiennent à deux familles différentes, et dont la structure extérieure est si dissemblable. Ainsi le / erbascum , de la famille des Sola- nées, a ses larges feuilles, ses tiges , son intlorescence , couvertes d’un duvet abondant, floconneux, et n’est point aromatique; tandis que la Serophulaire, de la famille des Personnées , est glabre dans toutes ses parties, et odorante. Cependant, en y por- tant quelque attention , nous retrouverons encore dans cette ché- tive Cécidomyie un certain instinct botanique analogue à celui dont le célèbre De Candolle a consigné plusieurs exemples dans sa Thèse inaugurale , publiée en 1804, sur les propriétés médi- cales des plantes (p. 18). Ici le cas est encore plus remar- quable ; car ce n’est pas dans les espèces d’un même genre que notre Tipulaire doit fixer son choix : elle passe du genre d’une famille dans le genre d’une autre famille. Mais cet Insecte fait preuve d’un tact, je dirais presque d’un discernement, qui ne viole pas autant qu’on pourrait le croire d’abord la série natu- relle des genres: car, d’une part, les deux familles sont contiguës dans le cadre de la classification , et , d’autre part , le genre Ver- bascum termine les Solanées, tandis que la Serophulaire est peu éloignée du commencement des Personnées ; peut-être même pour- rait-elle revendiquer, par sa corolle mal bilabiée (qui se rapproche par là de celle légèrement irrégulière du Verbascum) et surtout par sa capsule , un poste à la tète de cette dernière famille (L). Quant à l’indication fournie par le choix de notre Cécidomyie , je suis loin de la regarder comme indifférente : elle est à mes yeux (I Aujourd’hui les Botanistes placent cçs deux genres dans la même famille , colle des Scroplmlarmées, H SL K I.KS INSECTES DES GAI. LES J 0 ii:oa ni Foi'B. — un témoignage de l'analogie de composition intime, de l’identité des sucs que le même Insecte retire, pour sa nourriture, des organes correspondants ou similaires de ces deux plantes. Je vais m’expliquer : Ces galles, irrégulièrement arrondies ou ovalaires, varient pour leur grandeur , et ont de 8 à l'i millimètres de diamètre ; elles sont plus grandes dans le / 'erbascum que dans la Scrophu- laire , ce qui tient à la différence de densité ou d’extensibilité des textures respectives. Dans la première de ces plantes , elles ont une couleur d’un vert pâle ou jaunâtre, avec un fin duvet coton- neux , qu’une loupe attentive constate aussi dans la corolle nor- male ; dans la seconde, elles sont glabres, verdâtres, avec une teinte violacée; dans les unes comme dans les autres , elles sont exclusivement formées aux dépens de la corolle et des étamines : l’ovaire , le calice et le pédoncule n’y participent en rien. C’est lorsque la fleur est encore en bouton que la Cécidomyie perce celui-ci avec son oviscapte, et loge dans son intérieur un seul œuf. Est-ce la présence seule de ce dernier qui détermine le développement anormal et monstrueux de la ileur? ou bien l’In- secte en pondant l’œuf y instille-t-il quelque humeur âcre qui pourrait être sécrétée par l’appareil compliqué situé sur le trajet de l’oviducte, et dont une partie porte le nom de glande sébi- fique? La question me semble d’une solution difficile; toutefois ce n’est pas à la larve qui sort de cet œuf qu’il faut attribuer l’hy- pertrophie ; celle-ci doit nécessairement précéder sa naissance, car sans cela elle serait condamnée à mourir de faim , puisque c’est le suc du tissu turgescent qui peut seul faire la nourriture de la larve. Quoi qu’il en puisse être, la corolle, par l’effet d’une irritation nutritive, devient exubérante; ses lobes s’infléchissent, se recro- quevillent en dedans, et, loin de prendre dans le J erbascum leur belle couleur jaune, deviennent d’un gris verdâtre, et acquièrent une consistance subcoriacée. Mais admirez comme , dans les plus petites choses , la nature a tout calculé avec soin ; cette condition d’uiio consistance coriacée rend évidemment ce tissu impropre à la nourriture d’une larve délicate et tendre , et est devenue une DU VERMSCUM ET DU SCROl’lIUr. ARIA. 11 nécessité pour protéger la cavité de la galle , le berceau de la larve, sinon contre les attaques de tous ses ennemis, du moins contre les injures du temps. Ainsi la corolle, qui, pour la fleur , est le rideau nuptial des organes reproducteurs , devient ici la tente tutélaire de l’existence de la larve. Les filaments des éta- mines, considérablement grossis par l’hypertrophie, ont éprouvé dans leur texture intime d’étonnantes modifications physiolo- giques ; ils sont devenus tendres , succulents , et la loupe y distingue des papilles granuleuses qui rappellent la glaciale ( Mesembryanthemum crystallimm !.. ) , et où se trouvent entre- mêlés , dans le 1 erbascutn , des poils , les uns atrophiés , ara- néeux ; les autres épaissis , terminés par un capitule glanduleux, cristallin. Ces filaments succulents sont essentiellement destinés à la nourriture de la larve ou des larves , comme l’observation directe me l’a démontré. Les anthères tantôt suivent l’impulsion du développement morbide , et leurs valves , plus ou moins défor- mées , renferment un pollen mal élaboré ; tantôt s’étiolent et avortent. Le pistil échappe à la turgescence des organes mâles , mais il subit souvent le sort de l’infécondité ; il n’est pas rare, sur- tout dans la Scrophulaire, qu’il se courbe irrégulièrement en hameçon. Je ne saurais passer sous silence une observation qui , sans être étrangère à mon sujet , se rattache plus particulièrement à la pathologie végétale. Il arrive parfois que , par des influences météorologiques ou par une autre cause peu appréciable , la larve meurt peu après sa sortie de l’œuf. Alors les parties en voie d’hy- pertrophie tendent à se guérir ; l’excitation fondamentale , qui se serait continuée par l’action de sucer, s’atténue, s’efface ; les tissus turgescents, de nouveau soumis à l’action normale des lois phy- siologiques, se serrent, se condensent; la sève perd son exubé- rance morbide, reprend son cours naturel ; enfin , quoique tardi- vement , les étamines rentrent dans leurs fonctions génératrices en meme temps que les lobes de la corolle se déploient, et s’é- talent dans le Ferbascum en ravivant leur couleur jaune. Dans d’autres circonstances où la mort do la larve survient aussi , les efforts de la nature se trouvant impuissants pour remédier â la 12 LÉO* DUFOUR. — SI 11 UiS INSECTES DES li ALLES turgescence pathologique , il se déclare une véritable atrophie ; les étamines se dessèchent, et la galle inhabitée languit et meurt. y ota. Réaumur, dans la préface du tome Y de ses Mémoires, mentionne simplement les fleurs monstrueuses du Bouillon blanc ( Ferbascum) que lui avait envoyées Bernard de Jussieu , et qu’il croyait habitées par le Ver d’une Tipule (ce que mes observations ont justifié) ; mais il ne décrit nulle part ni la galle ni le Ver. M. le docteur Vallot de Dijon , fort habile observateur, a donné le signalement succinct et de cette galle et de laCécidomyie qui la produit, et d’un des Parasites cjui l’habitent. ( Actes de l’Acad. de Dijon, 1827, pag. i)2.) CHAPITRE II. HAfilTANTS DES GALLES ET LELRS MÉTAMORPHOSES. Article 1". — Métamorphoses de la Cécidonn ic. 1° Larve (PI. 2, fig. 5-8). Larva apoda, pseudocepliala , ovato-oblonga, lutea, ylabra ; palpis (?) laleralibus bi-articulalis. Long. 3“"". II ab. in gallis / erbasci et Scrophulariæ. Pour bien saisir la composition et la structure de cette petite larve , il convient de l’étudier immergée vivante dans l’eau , et sous le microscope. Les individus qui ont servi à ma description et à mes dessins étaient adultes , et à même d’entrer en travail de nymphe. Le corps se compose , comme celui de beaucoup de larves de Diptères , de douze segments , le pseudocéphale non compris. Celui-ci , fort rétractile et difficile à bien constater , semble formé de deux pièces invaginées, dont la postérieure, étroite et rudimen- taire, reçoit l’antérieure, qui est subtriangulaire et munie de chaque côté, avant son extrémité, d’un palpe (ou si L’on veut d’une antenne) bi-articulé. In trait linéaire médian, brunâtre, DI VHRMSCCM ET DI SCROPHII. U1IA. 13 s’observe à la région dorsale de cette pièce ; je n’ai pas aperçu les crocs ou mandibules. Le premier des segments thoraciques est largement et légèrement échancré en avant; le segment anal est fort petit , comme rudimentaire , et tronqué. Cette larve a , comme ses congénères , neuf paires de stigmates placés sur les côtés des segments dorsaux. La première paire se voit au segment qui représente le prothorax ; les deux segments suivants n’en ont pas; les huit autres paires occupent les huit segments qui suivent ceux du thorax. 2° Nïmphe (PI. 2, fig. 9-14). Aympha nuda , obvoluta , oblonga, [usco-brunnea , subeoriacea ; antice attenuata, acute biftda, poslice obtusa ; Ihoracis linea dor- sali impressa carinataque; segmentis abdominis punctato aspe- rulis. Long. 5"“". IJab. in gallis Verbasci et Scrophulariœ. La seconde morphose de notre Cécidomyie , ou celle qui suc- cède à la larve , est une véritable .Xymphe ou Chrysalide, et non une Pvpe. Elle est d’un châtain vif. Vue en dessus , sa partie antérieure ressemble à une hure aiguë terminée en une pointe finement bifide , et sa base oftre de chaque côté une saillie arrondie qui n’est pas un œil , ainsi qu’on pourrait le croire à la simple inspec- tion du dessin. Le microscope met en éxidence près de cette saillie un poil roide , une sorte do spinule. Les véritables yeux se voient en dessous; ils sont grands, ovales, noirâtres, et, entre eux , il y a deux dents aiguës , dirigées en avant , et comme cro- chues. L’étui des antennes borde le contour externe des yeux. Premier segment du thorax grand, convexe, lisse, luisant, glabre , avec une ligne médiane dorsale , canaliculée et caré- née; le second, rudimentaire; le troisième, ou métathorax, en carré transversal , et plus grand que le précédent. Abdomen à sept segments parallèles à peu près égaux ; l’avant- dernier un peu plus large , et le dernier fort petit. Région dorsale de tous ces segments garnie d’aspérités ou de petites spinules l/l l.ÉONi DUFOfR. — SUR LES INSECTES DES GALLES serrées, disposées en séries transversales assez régulières: une bande inerme sépare , les uns des autres , les cinq premiers seg- ments. Région inférieure, offrant le relief des ailes rabattues et des pattes emmaillotées ; celles-ci contiguës sur un même plan atteignant le bord de l'antépénultième segment. Croyez-vous que cette hure, ces épines, ces aspérités soient tout simplement des traits distinctifs de l’espèce, une vaine confi- guration? Détrompez-vous; il en est bien autrement. Si la frêle Cécidomyie eût été destinée à naître dans la cavité sans issue de sa galle , la fragilité de ses longues pattes , la faiblesse de toutes ses parties , la structure de sa bouche , ne lui auraient pas permis de pratiquer une brèche à la voûte de sa demeure pour s’envoler, et son berceau fût infailliblement devenu son tombeau. Mais le créateur de la Cécidomyie devait être conséquent au principe de la perpétuité de l’espèce : les organismes les plus inaperçus sont empreints de son incessante sollicitude. Pour bien comprendre celle-ci , il faut se livrer à l’étude consciencieuse des moindres détails de structure extérieure , pour en pénétrer le but fonc- tionnel. La hure bifide de notre Nymphe est en même temps un coin et une tarière destinés à perforer l’enveloppe coriacéede la galle. Lors de l’éclosion du Diptère, vous trouvez en effet la Nymphe engagée jusqu’à l’abdomen dans un trou de son cachot où elle se tient, pour ainsi dire, à la fenêtre. Et comment cette Nymphe revêtue d’une coque inerte , dépourvue de tout organe de loco- motion , puisque ses membres ne sont qu’un relief immobile , a- t-ellc pu opérer cette perforation ? C’est ici un instinct providen- tiel , un mystère dont la révélation défie le témoignage de nos sens et presque de notre intelligence. Toutefois il est probable que la Larve , avant sa définitive métamorphose en Nymphe, a reçu mission de s’approcher, par son bout antérieur, du point prédestiné à être perforé. La Nymphe , par des mouvements suc- cessifs, insaisissables mais réels, met en exercice et la pointe bifide de sa hure et les deux crochets inférieurs placés entre les yeux. Rappelons-nous que j’ai signalé au thorax une ligne médiane ea- naliculée et carénée. Cette ligne n’est qu’une symphyse destinée 111 VERBASCUM ET 1)1 SCROI’III I.ARIA. 15 à se dessouder et à s’entr’ouvrir par les mouvements expulsifs du Diptère inclus, lorsque l’heure de sa naissance, de son évasion est sonnée. 11 fallait donc , pour le succès de cette manœuvre , que le thorax , dans toute l’étendue de la ligne qui le pourfend , se plaçât hors de la galle , en plein air, et c’est là ce qui a lieu. La surface lisse, polie et presque glissante de cette partie du corps favorise on ne peut mieux son exsertion par le trou pratiqué au moyen de la vrille ou tarière cunéiforme dont j’ai parlé ; tandis que les aspérités spinuleuses de l'alxlomen tendent, et à limiter l’exsertion et à fixer la Nymphe à l’ouverture, afin de fournir un point d’appui aux mouvements expansifs de l’Insecte, qui se dégage de ses langes pour prendre son essor et voler à ses amours. T" Insecte ailé (PI. '2. lig. 12-15). Cecidomijia Verbasci Vallot (I. r.). Cécidomyie du Verbascum. Migra, antennis Ih-articulis ; oculis in utroquesexu coadunatis ; Ihorace einereo-plumbeo; collo, thoracis lateribus, alarumque basi rubescentibus ; abdomine pubescente squamoso , lateribus pedisbusque lividis; alis diaphanis. Long. 5""". Jiab. in sterilibus. (Saint-Sever). Tête arrondie, mais non hémisphérique, ainsi qu’on le dit des Cécidomyies en général , sensiblement déprimée , envahie par les yeux, qui, dans les deux sexes, sont, non pas contigus en arrière , mais soudés , continus , de manière que leur ensemble représente un grand fer à cheval dont les branches ne sont sépa- rées que par un espace étroit et pâle qui constitue la face. Sa région inférieure, d’un blanc soyeux, débordée par quelques poils. Nulle trace d’ocelles. Antennes moins longues que le corps, de quatorze articles dans les deux sexes ; le premier conoïde . le deuxième court , urcéolé , les trois derniers ovales-arrondis dans la femelle . avec le dernier rudimentaire enchatonné ; ces trois articles , dans le mâle , de la longueur de ceux qui les précèdent. Palpes pâles, de deux articles seulement ; le premier, gros, ]() LÉO\ l»l FOI K. St P. I.ES INSECTES DES CAI. I. ES conoïde ; l’autre, long, cylindroïde, à peine arqué, hérissé. Cette composition des palpes, insolite dans la famille des Tipulaires, m’a fait multiplier mes explorations microscopiques ; et cepen- dant je n’ai pu constater dans ces organes que deux articles. ï en aurait-il deux autres qui m’auraient échappé? Dans l’Insecte vivant, un cou bien marqué, rougeâtre , conoïde. Corselet ovalaire , glabre ou presque glabre . gris-plombé , avec deux lignes enfoncées presque parallèles. Écusson demi- circulaire, convexe. Balanciers grands, conoïdes, blanchâtres. Abdomen à duvet gris-blanchâtre, caduc ; tantôt uniformément lavé de rougeâtre, tantôt de cette dernière couleur sur les lianes seulement , ce qui dépend de la naissance plus ou moins récente. Oviscapte pouvant s’allonger par le désemboîtement des tuyaux qui le constituent, et mettant alors en évidence une tarière pili— forme qui permet à la Cécidomyie d’insérer profondément les œufs dans les boutons des fleurs. Armure copulatrice du mâle se présentant sous la forme d’un corps arrondi , corné, d’un gris brun, qui n’est qu’un forceps, dont chaque branche se termine par une pointe aigue. Pattes paraissant glabres, même à une loupe simple, mais évidemment velues au microscope. Ailes subdiaphanes , velues , avec leur bord postérieur frangé. Ces poils et ces franges tombent au moindre frottement, et on croirait souvenl qu’ils n’ont pas existé. C’est en mai et en juin que les Cécidomvies piquent les bou- tons; mais j’ai souvent constaté une seconde product ion de galles, au mois d’aoùt, sur des rejets fleuris du Verbascum. \ lîTici.E 11. — Métamorphoses du Misocmnpm. I" I.ahve (PI. 2. tig. 16-19). iMrva apoda , cephala, pilosa , ovato-oblonga, supra convexa , subtus plana; capite minuta rotundalo , subtus bipapillato ; seg- menta cor poris ultirno subemarginalo. Long. 3 -li““". JJab. parasitica in Lorca Cecidonujuv I erbasci. On la reconnaît à l’instant aux poils assez longs qui hérissent IH VKKIUSCIM HT 1)1 SCItOI’IIl I.MIH. 17 sa région dorsale. Tète ayant en dessous, de chaque côté de son bord antérieur, une papille qui flanquerait un très petit suçoir proéminent. En dehors de cette papille est une pièce antenni- forme , qui m’a semblé terminée par une courte soie; enfin il y a deux mandibules brunes, cornées, simples, qui ont l’air d’être collées sur le tégument. Dernier segment abdominal , petit , ou tronqué , ou échancré. Je me suis assuré que les angles de cette échancrure servent de pseudopodes pour que la larve se fixe sur celle de la Céc.idomvie. J'ai bien souvent constaté , par la pellucidité des téguments , le passage de l’humeur jaune de cette dernière Larve dans les en- trailles de celle du Misocampe. C’est au moment où la J.arve de la Cécidomyie va subir sa métamorphose en nymphe qu’elle suc- combe aux attaques de son parasite. D'innombrables ouvertures des galles m’ont appris qu'une teinte noire de leurs parois internes annonçait positivement la présence de la Larve du Misocampe, soit suçant le Ver de la Cé- cidomyie , soit reléguée dans quelque coin de la galle. Ce signe ne me trompait jamais. 2° Nvmpiie (PI. 2, fig. 20, 21). ,\ ymplia nuda, obvoluta, oblonga, glaberrina , nid J a , rufesicens ; abdominis oviscapto dorso incumbenle. Long, h il ah. in gai la T'erbasci. La tarière ou oviscapte est réfléchie sur le dos de l’abdomen , comme celle du I^eucospis , et ce n’est qu’à la naissance de fin- secte ailé qu’elle se détache du dos pour demeurer au bout de l’abdomen comme une queue. I.cs pattes postérieures se prolon- gent jusqu’à l’extrémité du ventre. 3" ÎMSECTF. AILÉ- Misoca m p us n i g ricorn is . Misocampe nigricorne. Diplolepis nigricornis Fabr. Ent. Syst II. p. 185. Oblojujus , viriilis , nitidus (inlerduin cœrulescens) abdonune sub- 3e série. Zodl. T. V. (Janvier 1840.) 3 - 18 Ï.ÉOX DL'FOFR. — SUR LES INSECTES DES GALLES triquetro ; antennarum nigrarum articulo primo subtus, palpis, pedibusque flavis; oviscapto nigro, abdominis longiludine. Long. Mas minor, antennis brevioribus subcrassioribusque , scapo bre- viore nigro. Hab. in incultis. La couleur jaune du dessous du scape de l’antenne , dans la femelle , a échappé à Fabricius , et est sujette à s'effacer par la dessiccation. L’article terminal est olivâtre et deux fois plus long que celui qui le précède. Hanches jaunes aussi. Cuisses posté- rieures vertes au milieu , parfois seulement noires à leur base , ainsi que le dit Fabricius. Ailes diaphanes, avec la nervure cos- tale et la callosité pâles. Celle-ci atténuée vers son insertion. Ab- domen plus lisse , plus luisant que le corselet. Lame intermédiaire de Poviscapte roussâtre. Le Misocampe nigricorne ne s’obtient pas seulement des galles du Verbascum et de la Scrophulaire , mais aussi de la galle de YEryngium fondée par un Lasioptera , dont je donnerai plus tard l’histoire, et de la galle fongueuse pomi forme du chêne produite par le Diplolepis quercus terminait s. Ces divers habitats prouvent que notre Misocampe attaque des Larves d’ordres différents. Je l’ai aussi recueilli abondamment en fauchant sur les plantes aqua- tiques. Observations sur le genre Misocaiiipus. C’est, en histoire naturelle , un principe d’équité et une ques- tion d’ordre que de respecter les dénominations techniques de nos devanciers. Dès 1818 Latreille avait fondé le genre M isocampus sur un démembrement des Cynipsàe Geoffroy (1). Plus de vingt ans après , sans égard pour la priorité , on a donné le nom de Callimome à ce même groupe d’Hyménoptères. Les caractères essentiels des Misocampus se réduisent , suivant moi , à ceux-ci : Antennes filiformes ou à peine en massue , coudées , de onze (I) Nouv. Dtcl ri'Ihst. «ni., 2' édit article Misocampe. 1)1 MiltlHSClilI ET 1)1 SCROPHELAiUA. l'J articles, dont le troisième très petit, rudimentaire, les suivants serrés entre eux, peu distincts, le terminal plus grand que ceux qui le précèdent. Ocelles presque en ligne droite sur la tranche occipitale. Ailes velues , sans nervures discoïdales. Oviscapte plus long que l’abdomen. Abdomen comprimé , avec une saillie ventrale. \ nricr.E lit. — Métamorphoses de VEuloplms. I” Larve (PI. 2, fig. 22-21). J.arva a poilu, eephala , oblonga , postice allen nalu , ylabra , ope microscopii yranulala - colliculosa ; capite piinulo , honiispliœ- rico : prothorace majore, vltimo segmenta angusliwe , rétrac- tile. Long. 2'"ra. If ab. in gallis Verbasci et Scrophulariœ. Les plus fortes lentilles amplifiantes ne m’ont fait découvrir aucune trace ni d’antennes ni d’organes manducateurs ; je n’ai pu constater au -dessous de la tète qu’un point enfoncé contractile , oui semble faire l’otlice de suçoir. La même lentille , qui met en évidence la texture granuleuse , chagrinée , des segments du corps, fait voir la tète unie et lisse. Le segment terminal ou caudal est cylindroïde, lisse, susceptible de s’allonger ou de se raccourcir au gré de l’animal , et j’ai souvent vu la Larve s’en servir comme d’un pseudopode, pour s’accrocher et exécuter quelques mouvements brusques , en même temps que ses tégu- ments chagrinés favorisent sa progression ou plutôt sa rep- tation. Les Larves de l’Eulophe sont au nombre de sept ou huit, de dix à douze dans une même galle. Nous avons vu que la Larve soli- taire du Misocampe est le parasite direct , l’assassin du Ver de la Cécidomyie. Le troupeau de celles de l’Eulophe non seulement usurpe le domicile de cette dernière , mais consomme sa nourri- ture et l’oblige souvent à mourir de faim. .T’ai bien distinctement vu ce troupeau brouter les granules succulents des étamines hy- 20 LÉO\ Dl'FOCR. — - SUR lilïS INSECTES IMÎS GALLES pértrophiées. Ce fait du régime herbivore de cette Larve , fait que j’ai constaté vingt fois , est nouveau pour la science , et con- tredit la dénomination de Pupivores affectée à la famille où elle est comprise. 2° Nymphe (PI. 2, fig. 23). .\ymphanuda, obvolula , oblonga, subincurva, glaberrima, ni- tida , pallicle rufescens. Long. 1 1/2. 2n,m. Il ah. ingallis J'erbasci. Ces Nymphes sont à nu dans la galle, et un peu variables pour leur longueur, suivant les sexes. Entre les segments dorsaux et ventraux de l’abdomen se voit un trait latéral brun , comme cal- leux. L’abdomen est en cône effilé, sans oviscapte apparent ; yeux bruns; deux des tarses atteignant le bout de l’abdomen. 3° Insecte aii,é (PI. 2, fig. 27-30). Eulophus Verbasci Vallot (l. c. I 827, p. 92). Euloplie du l'erbasciim. — Dut1., Mcm. de l’Arad. des Se . vol. VII p. 239, 1841. Luteo-rufescens , subglaber, hinc Inde macullulalus ; antennis ai- gris; alis hyalinis , costa nigra; abdomine conico acuminato, nigro, nitido, basi plus minusve pallido. Long. 1 1/2, 2 1/2"”“. Nascitur e gallis J erbasci et Scrop/udariæ. Ce petit insecte , quoique fort eom’mun , est peu connu et n’a- vait pas été figuré. Tête un peu plus large que le corselet , subverticale , pressée contre celui-ci , roussâtre , à occiput noir. Antennes coudées , at- teignant le milieu du corselet ; celles de la femelle , de sept arti- cles simplement pubescents, dont le troisième fort petit, rudi- mentaire (1), les trois suivants arrondis, moniliformes ; le ter- (I) Cel article , qui existe aussi dans le tlisocampus , est une sorte de ru/tile destinée a favoriser les mouvements du fouet de l'antenne sur le scupe. 11 ne sau- rai; être bien mis en évidence que par la macération. DI VERBASCUM El DI SCROJ'IILL AllIA. •21 minai en bouton ovale , oblong , plus grand que les précédents , dont il est bien distinct; celles du mâle , de huit ou neuf articles, tous allongés et longuement ciliés au dos, le terminal plus long , mais non plus gros, offrant vers son tiers postérieur l’indice d’une division. l’alpes à dernier article grêle, terminé par deux soies roides. Mandibules assez fortes, bidentées; yeux el ocelles d’un brun rougeâtre ; ceux-ci sur une ligne droite noircie. Corselet ayant , le plus souvent , un gros point mésothoracique, des taches sur les flancs , et le métathorax noirs. Écusson pâle , convexe , arrondi , avec une impression linéaire de chaque côté. Abdomen sessile et contigu au corselet, pâle à sa base, avec une bande au segment. Oviscapte logé, comme dans les Chalcis, dans une rainure sous-ventrale et ne dépassant pas le bout de l’abdomen. Observations critiques sur le genre 'Eulophus. Il est des auteurs qui, bravant d’avance toute critique et usurpant une sorte d’omnipotence , trouvent tout simple de faire table rase des antécédents sur la matière qu’ils traitent. Ils ne se font aucun scrupule de baptiser, au nom de leur autorité arbi- traire et avec une technologie plus ou moins rude et énigma- tique , tout ce qui passe sous leurs yeux. En procédant ainsi , non seulement ils se dispensent de recherches difftcul tueuses : mais, sans respect pour les droits acquis, ils éludent toute érudition, toute synonymie ; ils altèrent sans pitié jusqu’au texte du petit nombre de citations qu’ils font. J’appelle cela un délit scientifique, un dangereux exemple. Ces réflexions me sont suggérées par la Monographia Chalciditum de Francis Walker (1839). Je ne vois dans cette Monographie que le genre Eulophus dont les antennes aient neuf articles, et ce nombre serait le même dans les deux sexes. L’auteur anglais , avec la prétention d'a- dopter le genre Eulophus, fondé par Geoffroy, donne neuf articles à ses antennes, tandis que Geoffroy dit textuellement quelles sont composées de sept pièces (1), et il n’avait connu que le mâle. De (I) Ihst. lu s., II, j). 313, pl. 13, |ig. 3, 22 LÉON DIFOLR. — SUR LES INSECTES DES GALLES Géer, postérieurement à Geoffroy , a aussi décrit et figuré exac- tement (1) le même Eulophus , et , plus heureux que son prédé- cesseur, il a fait connaître la femelle. Or, de Géer dit positive- ment. que les antennes du mâle sont divisées en sept articulât ions , et celles de la femelle en six. Latreille , dans son immortel Gé- néra , n’avait, pas , je le présume , des observations qui lui fus- sent propres sur YEulophus de Geoffroy , et appréciant à leur juste valeur les assertions des deux auteurs précités, il assigna aux Eulophus des antennes de six ou sept articles. Ainsi le caractère principal du genre Eulophus , fondé sur le nombre des articles des antennes , exclurait formellement , d'a- près le signalement de M. Walker, l’espèce qui a servi de type à Geoffroy, à de Géer et h Latreille. L’entomologiste britannique, en inscrivant en première ligne cette espèce et en citant cette triple synonymie, aurait donc commis une erreur grave, je dirais presque une inconséquence. Venons maintenant à l’espèce. M. Boyer de Fous-Colombe , dans sa Monographia Chalcïdilum Gallo-provinciœ , etc. (2), cite comme provenue e calycibus inflatis Ferbasci nigri , et sous le nom de Cynips Quercus ramuli? une espèce qui semble avoir de très grands rapports avec notre petit Eulophus. Mais peut-on supposer, malgré l’analogie de l’habitat , que cet excellent obser- vateur ait compris dans le genre Cynips de Latreille, adopté par lui, un Chalcidite dont les antennes n’ont que sept ou huit arti- cles, mais bien distincts, tandis que les véritables Cynips de La- treille , de Geoffroy et d’Olivier en ont dix ou onze serrés et peu distincts? Comment l’entomologiste cl’Aix rapporterait-il à son espèce, même avec le signe du doute, le Cynips Quercus ramuli de Eabricius, lorsque le genre Cynips de celui-ci correspond , ainsi que tout le monde sait, au Diplolepis de Geoffroy et Latreille, dont les antennes, filiformes et plus longues que le corselet, ne sont pas coudées comme celles du Cynips Latr.?La synonymie d’Olivier (Encycl. méth.), citée par M. Boyer, ne saurait convenir non plus à notre Eulophe ; car Olivier donne au Cynips Quercus (1) Mcm., t. Il, p. 899, pl. 31, fig. 14-17. (2) Ann. des Si'. nat.. 1" série, t. XXVI, p. 296. Dl VEllBASCÜM El 1U SCnOrill'LADlA. •23 ramuli des antennes aussi longues que l’abdomen , ce qui prouve encore que c’est un Diplolepis Geoffr. Article IV. — Stomoctca pnllipes, Nob. Viridi-aurea , anlennarum nigrarum articula primo, tibiarum apice larsisque pallidis ; abdomine brevi subtriquetro nigro-vio- laceo, nitido ; alis diaphanis ; callo longe pedicellato, apice orbi- culatim dilatato. Long. 2"”". Sic fernina. E gallis Scrophvlariœ. Observation. Le défaut de documents relatifs aux métamorphoses de ce petit Chalcidite m’oblige, à regret , à laisser ici une lacune que je remplirai peut-être un jour. En attendant , voici le signalement de ce genre nouveau : Antennes coudées , de la longueur de la moitié du corps , in- sérées au centre de la face, de neuf articles; premier, grêle, allongé; deuxième, court, conoïde, courbé ; troisième, fort petit, rudimentaire ; les suivants forman t une masse cylindroïde pubes- cente ; le terminal à peine plus grand , subacuminé. Tète assez grosse, à face large, unie, non déprimée. Mandibules saillantes, presque en promuscide, pectinées ou a quatre dents profondes , très acérées (d’où leur dénomination générique). Ab- domen court , sessile. Oviscr)pte non saillant. Ailes sans nervures discoïdales. Callosité grêle, allongée, terminée par une dilata- tion orbiculaire. Aucun des signalements des quatre-vingt-huit espèces décrites dans les Eulophus de M. Walker ne peut convenir à la nôtre. EXPLICATION DES FIGCKES ( presque toutes fort grossies) PLANCHE 2. Fig. I . Brandie du Vcrbascum pulvérulent um avec des galles; de grandeur nat. Fig. 2. Étamine avec son filament velu, dans l'état normal, mais grossie. Fig. a. Étamine hypertrophiée et grossie , avec une larve de Cécidomvie sur le filament. '2!l LÊOX DUFOUR. — Slilt LES INSECTES JJI VERIUSCTM , ETC. Fig. 4. Branche de Scrophularia cuniiia avec des galles ; de grandeur naturelle. Fig. 5. Larve de Cecidomyia Verbasci, fort grossie. Fig. 6. Mesure de sa longueur naturelle. Fig. 7. Portion antérieure détachée, de cette larve. a, tête ou pseudocéphale ; b, b, palpes? ou antennes?; c,r, les deux stig- mates prothoraciques. Fig. 8. Cette larve vue de profil, pour faire voir les neuf stigmates. Fig. 9. Nymphe de cette larve très grossie, vue par le dos. Fig. 10. La même, par sa région ventrale. Fig. I I . Portion antérieure vue de profil , et un peu en dessous , pour mettre en évidence les deux dents aiguës d'entre les yeux. Fig. '12. Cecidomyia Verbasri fort grossie. Fig. 13. Mesure de sa longueur naturelle. Fig. 1 4. Tête du mêle, vue par dessus , pour faire voir les palpes et I antenne de ce sexe. Fig. 13. Antenne de la femelle. Fig. 16. Larve de Misocumpits nigricornis fort grossie. Fig. 17. Tète détachée, vue en dessous, pour faire voir les papilles, les pièces antenniformes, les mandibules. Fig. 1 8. Mesure de la longueur naturelle de cette larve. Fig. 19. Bout postérieur de cette larve, pour mettre en évidence l'échancrure du dernier segment. Fig. 20. Nymphe de cette larve, vue de côté, fort grossie. Fig. 21 . Mesure de sa longueur naturelle. Fig. 22. Larve d'Ealuplius Verbasci , fort grossie. Fig. 23. Mesure de sa longueur naturelle. Fig. 24. Portion antérieure détachée, pour mettre en évidence la texture cha- grinée des segments du corps et la tête lisse. Fig. 25. Nymphe ÜEulophus Verbasci, vue de profil, et fort grossie. Fig. 26. Mesure de sa longueur naturelle. Fig. 27. Eulophus Verbasci femelle. Fig. 28. Mesure de sa longueur naturelle. Fig. 29. Antenne de la femelle. Fig. 30. Antenne du mâle. MEMOIRE 25 sir l’appareil de la respiration dans les oiseaux; Far M. NATALIS GUILLOT ( Présenté a l' Academie des Sciences, le i février 1816- I II IPI I RE I. CONSI mil! ATI O. N SRI! ÉMU 1 NA I R ES. 1/ appareil de la respiration des oiseaux, étudié successivement par Borelli (1), Harvey (2), Perrault (,’>), Hunter 4), Camper (5), M. Girardi (0), Malacarne (7), Cuvier, Jacquemin, et par d’au- tres savants, a déjà été l’objet de recherches intéressantes. Malgré l’autorité des écrits de plusieurs de ces anatomistes, il est cepen- dant permis de croire que cet ensemble d’organes n’est pas assez connu, que les dispositions particulières de ce curieux assem- blage d’instruments ne sont point exactement appréciées. On a bien pu comprendre d’une manière très générale le jeu de ces parties; mais, à cause de l’interprétation équivoque des faits les plus saillants, on a dù accepter certaines erreurs comme des vérités incontestables. D’autre part, les descriptions répétées des formes les plus apparentes peuvent faire penser que nos connaissances sont complètes, tandis que, restreintes, au contraire, elles laissent encore à désirer de nouvelles études. (4) Burelii, De mulu aniinaiium (2) Harvey, De (jeneralione . . :i) Perrault, Mëm. pour servir u Vhixloire inilurellc des mihmmx. (!) Hunter, \nimal œcononttj. (.->) Camper (Œuvres), De lu sirncLure des os dons les Oiseaux U ») M. Girardi, Osserv analom inlornolu respirulioncdegli uccelli. il] Malacarno . Conférant di ossvrvaiioni inlorno atjli ortjuni délia nespirazipnc dey U vçvolli 26 1MATAI.1S GUILLOT. — SI R L’APPAREIL S’il convient d’abord d’étudier avec précision un assez grand nombre de détails anatomiques, parmi lesquels il en est qui sont assez mal décrits pour qu’on puisse les regarder comme ignorés, il est également nécessaire d’élucider plusieurs opinions physio- logiques déduites d’observations superficielles. Telle est précisé- ment la tâche que je me suis imposée. Je n’ai certes pas la préten- tion de l’avoir complètement remplie, car le nombre des espèces animales que j’ai disséquées a été restreint ; mais s’il ne m’a pas été permis de beaucoup voir, j’ai cherché du moins à bien con- naître ce que j’ai pu regarder. J’ai répété mes observations à plusieurs reprises, quelques unes sur des Oiseaux que les anatomistes ont rarement l’occasion d’é- tudier, mais le plus souvent sur des animaux communs, dans lesquels il sera facile de rechercher les détails indiqués, et de dé- couvrir de nouvelles particularités dans le nombre infini de celles que j’ignore. On a généralement désigné , dans l’appareil respiratoire des Oiseaux , deux groupes d’organes distincts par la structure et la situation propres à chacun d’eux. Le premier groupe renferme les poumons , dans lesquels se divisent et se subdivisent les rami- fications de la trachée. Le second est constitué par un ensemble de cellules dans lesquelles pénètre l’air, au moyen de certaines ouvertures permanentes des bronches. Ces dispositions générales, communes à tous les Oiseaux, ont conduit, depuis fort longtemps, les anatomistes à croire que ces singuliers orifices des bronches faisaient passer l’air inspiré, non pas seulement dans des cellules capables de le renfermer, mais dans la plèvre, mais dans l’intérieur de la cavité péritonéale, et de plus encore dans toutes les parties du corps. Cette manière de voir, fondée sur une assertion de Harvey (1), (l) G. Harvey, De gcneratione. Ilibl. anal. Mangeli. Genève, 1685, p. 603. — - a Quinetiam (quod a nemine hactenus observatum memini) earum bronchia (avium) sive asperæ arteriæ fines in abdomen perforantur, aerenique inspiratum intra cavitates illarum membranarum recondunt. Quemadmodum pisces et ser- pentes intra amplas vesicas in abdomine positas eundem atlrahunt et reservant, eoquc facilius natare existimantur : et ut ratifc ac bufones, cum æstate vehemen- DE I.A RESPIRATION DANS LÊS OISEAI \. •27 qui ne considérait pas les poumons des Oiseaux comme les organes de la respiration, dut encore paraître plus exacte après les cu- rieuses recherches de Hunter, de M. Girardi, de Camper, sur les communications des organes respirateurs des Oiseaux avec l’in- térieur des os des membres et du tronc. Les citations suivantes pourront faire penser que tous les savants l’admettent aujour- d’hui. Cloquet (IJ s'exprime en ces termes : « La respiration domine toutes les autres fonctions des Oiseaux , imprime son énergie à toute leur constitution : la grande extension des poumons , l’ab- sence d’un diaphragme , l’existence de cellules sacciformes, d’ap- pendices membraneux , de réservoirs supplémentaires à ces vis- cères, et de conduits propres à distribuer l’air dans toute l'habitude du corps, dans l’intérieur même des os, dans le tissu cellulaire, sous la peau , dans les plumes mêmes , conduits si bien vus et dé- crits par P. Camper, par Ilunter, par Malacarne, par Michèle Girardi, par Méry, par M. Cuvier, et une foule d’autres anato- mistes, peuvent faire dire d’eux, à juste titre, qu’ils sont embrasés et comme consumés du feu de la vie. » Selon Jacquemin (2), « le fluide respiratoire, après avoir rem- pli les mailles nombreuses du poumon , sort de ces organes par des trous, dont le nombre et la disposition sont variables. A me- sure que le jeune Oiseau exerce son corps, l’air se fait jour entre les organes respiratoires , digestifs et génitaux qui remplissent la cavité pêctoro -ventrale. Les membranes séreuses qu'il ren- contre sur son passage sont percées de trous dans des points dé- terminés. De là résultent huit poches ou sacs, situées de telle ma- nière qu’elles entourent les organes les plus volumineux de la cavité interne du corps, lesquelles poches, communiquant les tius respirant, aeris plus solito in vesiculas numerosissimas absorbent (unde earum tam ingens tumor) quo eundem postea in coaxatione liberaliter expirent : ita in pennatis pulmones polius transitus et via ad respirationem videntur quam hujus adnequatum organum. » (1) H. Cloque!, Dicl. des Sc. nul., 1837, t. XLV, p. 238, art. Respiration. (2) Jacquemin, Sur la pneumatiçilc des Oiseaux (/Icud. des Cur. de la Nature, t XIX, p 286. 1836) '2 S VHAI.1S GlILLOT. — SLR I.’ALT.UIKIL unes avec les autres , permettent à l’air d’accomplir une sorte de circulation lente dans tout l’intérieur du corps. Lorsque l’air est arrivé dans ces poches, l’Oiseau approche de l'époque où il com- mence à voler. La pression atmosphérique , pendant cette loco- motion, devient plus énergique; l’air, dans l’intérieur du corps, prend un nouvel essor, et lorsque nous avons examiné le corps d’un jeune Oiseau, quelques semaines après qu'il eut commencé à voler, nous avons vu que l 'air s était avancé dans le tissu cellu- laire placé entre les muscles, qu il avait percé les os, et qu’il était entré dans leur intérieur. Par l’intermédiaire des sacs aériens, sous-scapulaires et sous-fémoraux, l’air pénètre aussi dans les cellules sous-cutanées, s’introduit dans le tuyau des plumes , si ce n’est par ces cellules , du moins par le trou qui est à la base des barbules. De toutes ces cavités, l’air revient aux poumons pour être expulsé au dehors par la trachée-artère. » « La bronche de chaque poumon, dit Cuvier (1), et ses dix ou onze rameaux, aboutissent à la surface des poumons, d’où l’air passe dans de grandes cellules qui communiquent les unes dans les autres, le conduisent dans toutes les parties du corps de l’Oiseau, et forment une sorte de poumon accessoire très étendu et très compliqué. » Les observateurs qui décrivent les réceptacles membraneux où l’on voit les orifices des bronches, diffèrent sur des particularités importantes, telles que la situation et le nombre des cellules indi- quées par les uns et par les autres. Jacquemin (2) en décrit huit, sous les noms de poches pneumatiques sous-claviculaires, sous- scapulaires, pectorales, sternales, sous-costales, sous-fémorales, abdominales et sacrées. Deux de ces poches, l’une pectorale, l’autre sternale, seraient impaires. G. Cuvier (3) indique quatre cellules aériennes étendues d’a- vant en arrière sur les régions latérales du tronc, puis quatre autres cavités de même nature et de même usage, situées les unes après les autres sur la ligne médiane, et renfermant avec l’air, (t) G. Cuvier, .incu. comp., 2’ édit., 1 840, t, VU, p. 123. (2) Jacquemin, /. c., p. 288 etsuiv, (3) U. Cuvier, i r., vu!. VU. p. tîa et suiv, DIÎ LA RESPIRATION DW'S LPS OISEUX. 29 d’abord le cœur (cellule du cœur), puis le foie (cellule du foie), ensuite les estomacs (cellule des estomacs) , puis enfin les intes- tins (cellule des intestins). M. Richard Owen, dans un excellent travail sur l’anatomie des Oiseaux (1), reproduit , avec peu de variations, les divisions ac- ceptées par Cuvier, et plus anciennement encore par Perrault. Cet anatomiste décrit, dans les régions antérieures du corps de l'Oiseau , des cellules aériennes interclaviculaires , des cellules thoraciques antérieures, thoraciques latérales, subdivisées en axillaires, sous-scapulaires et cardiaque postérieure, des cellules hépatiques. Dans la région postérieure, il indique des cellules abdominales droites et gauches , des cellules pyloriques et duo- dénales, et des cellules fémorales placées dans le voisinage de l’articulation du fémur avec le bassin. Mais si ces observations relatives au nombre et à la situation des cellules aériennes ne sont point exactement concordantes , elles ne diffèrent plus sur d’autres points, et elles conduisent les observateurs à conclure à la pénétration de l’air dans l’intérieur de la plèvre , et même de la cavité péritonéale des Oiseaux , et à la confusion de ces membranes séreuses avec l’enveloppe des cel- lules aériennes. On pense, en effet, que non seulement les lobes du foie sont enveloppés par les replis d’une ou de deux de ces cellules (2), mais encore que toute la masse intestinale est elle-même renfer- mée dans l’intérieur de ces cavités ajoutées à l’organe principal de la respiration : inexactitudes bien grandes, qu’il importe tout d’abord de rappeler, parce qu’elles ont été émises et acceptées comme reproduisant un détail caractéristique propre à la classe des Oiseaux. Quelques citations, empruntées à des ouvrages importants, vont montrer que les savants les plus habiles n’ont pas encore pensé que ces assertions dussent être inacceptables. fl) R. Owen, Cyclopeilia of anatomy London. 1839, art. Aves, p. 342. 2' col. (2) G. Cuvier, /. c , t. VII. 2' éd., p. 1 2fi. — R. Owen. /. r., t I, p. 3*3 Jacquemin, /. c., p. 28G 1. 20 3» WTAI.IS GlILLOT. — SUR l’aPPAREH. G. Cuvier (I) dit que la cellule des intestins se prolonge sur le canal digestif, l’ovaire, l’oviducte, etc., pour former les mé- sentères , et qu’elle est en partie comparable au péritoine des Mammifères. M. R. Owen (2) décrit l’intestin renfermé dans les poches aériennes de l’abdomen des Oiseaux; il représente cette opinion par une figure. M. Duvernoy (3) désigne le péritoine et la membrane des poches abdominales comme une seule et même chose, et je reproduis le texte des additions à l’ouvrage éminem- ment classique de G. Cuvier, de manière à ne laisser aucun doute sur l’existence des opinions acceptées aujourd’hui. « Le péritoine et la plèvre paraissent confondus, ainsi que les cavités thoraciques et abdominales (dans les Oiseaux et les Reptiles), et ne forment qu’une seule membrane. La disposition de cette membrane com- mune a quelque chose de particulier dans les Oiseaux. Elle y forme de grandes cellules, dont une partie sont vides, et les autres remplies par des viscères; ces cellules communiquent avec les poumons, et se remplissent ou se vident d’air dans l’inspiration et l’expiration... Ce péritoine communique d’une part avec les bronches, recevant par ces canaux l’air des poumons, commu- niquant d’autre part avec les cavités des os dans lesquelles cet air pénètre. » Des assertions aussi affirmatiyes ne sauraient être admises plus longtemps sans un contrôle sérieux ; quelle que puisse être l’au- torité des anatomistes qui les ont émises, elles doivent être jugées ; des détails nombreux, faciles à apprécier, s’élèvent contre elles, et tendent à les faire regarder comme entièrement dépour- vues de fondement. Si l’observation anatomique ne fournit, aucun appui capable de les maintenir, l’expérimentation sur les animaux vivants force également de comprendre l’organisation des Oiseaux d’une tout autre manière. Avant d’avoir commencé les études que je reproduis, je n’au- (1) G. Cuvier, l.c, p. 328. (2) R. Owen, I. c., p. 342, 2' col. (3) G. Cuvier, Anal, comp., additions de M. Duvernoy, t. IV, 2e part , p. CSO, 1. 13, et 651, 1. 28. DIi LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 31 rais certainement pas pu croire que plusieurs des parties d’un aussi important sujet , surtout celles qui sont relatives aux réser- voirs de l’abdomen, eussent été aussi complètement négligées. Les descriptions des cellules abdominales de quelques auteurs sem- blent être si bien tracées d’après la nature , les affirmations sont si précises, qu’il m’a fallu le témoignage de dissections et d’expé- rimentations multipliées pour appeler de nouveau l’attention sur des parties que l’on croit bien connaître, et dont l'organisation est cependant encore cachée par une trop grande obscurité. J’ai dû m’attacher non seulement à connaître les objets sur lesquels l’attention a déjà clé fixée, tels que les poumons, les bronches et les cellules aériennes des Oiseaux; mais il m’a paru de plus nécessaire d’étudier le rapport des réservoirs aériens avec les nerfs, avec les vaisseaux lymphatiques et sanguins, et même avec l’appareil musculaire; non pour dire tout ce que ces rap- ports ont de curieux et tout ce qu’ils fournissent d’aperçus nou- veaux , mais pour indiquer seulement une voie d’études intéres- santes dans laquelle les anatomistes pourront, en contrôlant ces recherches, découvrir encore plus de détails que je n’en ai pu voir. Les Oiseaux que j’ai choisis pour mes études ont été pris à différents âges dans les deux sexes. Les Gallinacés, quelques Oi- seaux de proie, tels que le Faucon, la Buse, l’Emouchet, des Passereaux, Serins, Tarins, Pigeons, etc., des Palmipèdes, Canards, Mauves, Sarcelles, ont été les principaux sujets de mes dissections. L’insufflation est le seul procédé convenable pour préparer avantageusement l’examen des organes accessoires de la respi- ration des Oiseaux; elle pourrait peut-être même servir à aider une dessiccation complète , et par conséquent à une conservation plus longue des parties ; mais cette conservation entraîne trop de soins et de chances fâcheuses. Les membranes distendues s’af- faissent ou se déchirent facilement, dès qu’elles perdent leur humidité; il vaut donc mieux étudier immédiatement et dessiner les objets aussi rapidement que possible. On peut, avant l’insufflation , qui doit être pratiquée surtout 32 WT1MS GIILLOT. SI R I.’ W'I’ARIilf. par la trachée, ouvrir d’abord la cavité péritonéale.; on peut aussi conserver les parois de l’abdomen. 11 n’importe pas de laisser la peau de l’animal; l’absence de ce tégument ne change en rien les résultats que l’on se propose d’obtenir. Les vaisseaux artériels et veineux de quelques Oiseaux doivent avoir été remplis par une matière colorante avant l’insufflation des réservoirs aériens; les études deviennent alors plus intéressantes encore. Quoi qu’il en puisse être , l’insufflation devra être lente et modé- rée; si le péritoine est ouvert, on soulèvera lentement les intestins avec le manche mouillé d’un scalpel , afin de bien les séparer des vessies aériennes qui apparaîtront rapidement. 11 faudra se garder de souffler trop fort et trop longtemps, car on détruirait bien vite ce que l’on doit chercher à mettre en évidence. Lorsque l’on voudra connaître les particularités relatives à la disposition des vaisseaux lymphatiques étendus à la surface des réservoirs aériens, il ne faudra pas chercher à les voir sur des animaux qui auront jeûné depuis quelque temps; on devra tout au contraire choisir des Oiseaux que l’on aura nourris abondam- ment , et attendre alors que les aliments aient été entièrement ramollis dans le jabot. On devra même examiner cet organe à l’aide d’une pression convenable avant de faire périr l’animal , afin d’avoir autant que possible la certitude du passage de la plus grande partie des matières alimentaires dans le gésier et dans l’intestin. Lorsque la tuméfaction du jabot produite par les matières alimentaires aura presque disparu , on pourra inciser le ventre, et l’on trouvera tous les vaisseaux chylifères gonflés par les liquides; on distinguera très nettement alors les plexus nombreux qu’ils forment à la surface du mésentère, et les vaisseaux lympha- tiques tout autour des réservoirs aériens ; on suivra tous les dé- tails sur lesquels je me propose d’appeler l’attention. J’ai tenté maintes fois de faire pénétrer des injections mercurielles dans l’in- térieur de ces conduits délicats , mais sans pouvoir réussir dans mes tentatives ; je préfère donc les rendre apparents en nourris- sant convenablement un animal, quoique cependant ce moyen même ne produise pas toujours des résultats satisfaisants. Tant de circonstances indépendantes de la volonté de l’observateur sont DF. LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 33 capables de troubler la digestion des oiseaux, qu’on n’obtient pas toujours à volonté la manifestation des phénomènes intéressants qui seront décrits; mais , en ceci comme en tant d’autres recher- ches , la patience vaincra les difficultés. CHAPITRE II. DE L’APPAREIL PULMONAIRE. Les poumons, dans lesquels pénètre l’air introduit par la trachée , sont les premiers organes que je me propose d’exa- miner : ils sont doubles, comme on le sait, placés de chaque côté de la colonne vertébrale , depuis la seconde vertèbre dorsale jus- qu’à la dernière côte ; ils ne sont pas libres comme dans les autres animaux vertébrés ; ils sont, au contraire , fixés aux parois supé- rieures de la poitrine par des adhérences légères des plèvres, que toutefois on peut faire disparaître par une insufflation convenable. Éloignés des parois inférieures de la poitrine par un large espace occupé par les cellules du réservoir thoracique , ils offrent une surface unie de ce côté , tandis que la surface supérieure ou dor- sale, moulée sur les inégalités du thorax , présente une série suc- cessive de sillons correspondant aux élévations des côtes. Entre les deux poumons sont placés d’avant en arrière le cœur et le foie , et au-dessus de ces organes , dans l’intervalle qui les sépare de la colonne vertébrale , se prolonge le ventricule succen- turié depuis la fin du jabot jusqu’au gésier. Un examen superficiel pourrait faire penser que les poumons ne sont recouverts d’aucune membrane séreuse ; qu’en un mot , il n’existerait point de plèvres chez les Oiseaux. On l’a dit plu- sieurs fois, et quelques uns le pensent encore. Lorsqu’on ouvre en effet le thorax , les cavités des cellules que l’on rencontre sem- blent recouvrir immédiatement les organes de la respiration , et ne laissent pas supposer d’abord qu’il y ait autre chose au-dessous de la membrane que l’on aperçoit. Rien donc ne semble plus acceptable au premier aperçu que l’assertion qui nie la plèvre pulmonaire, ou que l’opinion affirmant 3* série Zool. T. Y (Janvier 1816.) 3 3 34 N AT A MS GITLLOT. — SUR I.’ APPAREIL que cette membrane est perforée chez les Oiseaux (1) ; cependant ces deux manières de voir sont erronées. La plèvre des Oiseaux existe tout autour de chacun des pou- mons: elle est séparée des parois des cellules aériennes en bas par l’aponévrose très mince dans laquelle se terminent les lan- guettes musculaires du diaphragme: en arrière, elle s’adosse exactement , soit aux côtes , soit , dans quelques animaux , à la membrane des petites cellules aériennes placées dans le voisinage de chaque ganglion du nerf intercostal. Pour voir ces plèvres et en apprécier la disposition, on doit, après avoir ouvert les réservoirs aériens thoraciques, inciser la membrane qui revêt l’intérieur des cellules aériennes , inciser éga- lement la couche musculaire que je nomme diaphragme, depuis longtemps déjà désignée sous le même nom (2). On aperçoit alors la plèvre; on peut en ouvrir la cavité, y introduire l’extrémité d’un tube, et, par le souffle, en séparer aussitôt les deux feuillets appliqués auparavant l’un contre l’autre. L’un de ces feuillets recouvre toute la surface de chaque organe , l’autre s'étend à l’opposé sur toutes les parties voisines , c’est-à-dire sur les cellules aériennes, sur les os, jttr le muscle diaphragme ou sur l’aponévrose qui en dérive. Dans les endroits où les bronches communiquent avec les cellules aériennes, la plèvre n’est point percée, comme on l’a dit , mais elle recouvre exactement les contours des orifices des bronches , si bien qu’on peut insuffler la cavité des plèvres et la distendre sans pouvoir .faire pénétrer l’air ou toute autre substance dans les cellules aériennes. C’est entre la cavité de ces plèvres et la membrane du réservoir aérien thoracique que s’étend de chaque côté du corps une couche musculaire et aponévrotique , désignée par Aristote sous le nom de diaphragme, et décrite successivement par J. Hunter (3), (1) Jacquemin, l. c., p. 286, lig. 6. (2) Aristote, Hist. animalmni, lib. vi, chap. 2. (3) Hunter, Animal œconomxj , p. 90 (London, 1792), trad. par Richelot. Paris, 1841, t. IV, p. 231 . — « On dit que les Oiseaux n ont pas de diaphragme. Celte opinion doit avoir pour point de départ ou un défaut d'observation . ou une idée DE LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 35 M. Girardi (1), Perrault (2), Cuvier (3) , Meckel (4), et par R. Owen ( 5 ). Les insertions de ce muscle très plat et très mince , semblables à de petites languettes, peuvent être observées succes- sivement , et en nombre variable suivant les espèces , sur la face interne des seconde , troisième , quatrième et cinquième côtes. De là ce muscle s’étend à la surface inférieure de chaque poumon, dont il recouvre en bas les parties les plus voisines des côtes ; il en est séparé par la plèvre d’un côté , et de l’autre il est recouvert par la membrane du réservoir aérien. Il vient se terminer dans une aponévrose très mince qui recouvre la face inférieure de trop étroite qu'on s'est faite de ce que l'on doit entendre par diaphragme : car il y a une membrane assez forte , mais mince et transparente , qui recouvre la sur- face inférieure des poumons et y adhère , et qui donne insertion a plusieurs mus- cles minces qui naissent de la surface interne des côtes. La fonction de cette mem- brane parait être de diminuer la concavité du poumon du côté de l'abdomen, au moment de l'inspiration , et de concourir par là à la dilatation des cellules aérien- nes; par conséquent on doit la considérer comme répondant à un des principaux usages propres à un diaphragme. (1) Michèle Girardi, Saggio di osservalioni anatomic/ie (Jfem. délia Societa Un - liana , t. II, p. 739. Yerona , 1784). — Cet anatomiste décrit le diaphragme autrement que.!. Hunter: il se trompe évidemment ; mais il reconnaît, néanmoins l’existence d'un diaphragme chez les Oiseaux. (2) Perrault [Mém. pour servir à l'histoire des animaux, p 1 43. Paris, 167 0 décrit fort bien et sans aucune obscurité le diaphragme des oiseaux, et en indique les usages. (3) Cuvier, /. c., t. VII, p. 264. (4) J. -F Meckel, Anat. comp., trad. par liiester. t. VI, p. 21. Paris, 1829-33. (o) K. Owen, Cijclopedia of analomy, art. Ayes, t. I. p. 293, col. I. — u The diaphragm arises by üeshy digitations from tlie sternal ribs; in the ostrich these digitations are five in number of etlher side : the earneous fasci- culi do not, however, extend so far upon the central aponeurosis as even to be united to one another, and consequently tliis muscle bas frequentlv been denied to birds From the lungs heing confined to the back part of the thorax, the dia- phragmatic aponeurosis attached to their inferior surface is not extended as a transverse septum betvveen the chest and abdomen . but ailows the heart to en- croach upon the inter espace of the lobes of the liver, as in reptiles. The contrac- tion of the muscle tends directly to dilate the lungs , but is less perfect as an in- spiratory action from the aponeurosis or central tendon being perforated by large cribriform apertures for the passage of the air into the abdominal air cells. » 36 MTALIS Cl'ILI.OT. — SLR l’aPPAPEII. chaque poumon , et qu’il n’est bientôt plus possible de séparer soit de la plèvre , soit de la membrane propre des réservoirs aériens ; c’est par le centre de cette aponévrose que passent le ventricule succenturié, l’aorte et la veine cave. L’aponévrose légère qui termine ce large muscle , ou bien les languettes mus- culaires apparentes dans quelques Oiseaux, rencontre néces- sairement plusieurs des ouvertures par lesquelles l’air sort des poumons pour entrer dans les cellules aériennes, surtout dans celles qui constituent les parties latérales du réservoir aérien tho- racique. Les fibres de cette aponévrose s’écartent au niveau même de ces orifices, et les enceignent d’un double repli très manifeste , surtout lorsque les ouvertures des bronches sont considérables. La disposition de ces fibres est telle qu’elles représentent, autour de l’orifice le plus large de la surface antérieure des poumons, comme une sorte d’appareil valvulaire , dans lequel on pourrait soupçonner des fibres musculaires chez quelques Oiseaux , tels que le Paon , la Cresserelle, la Pintade et même le Coq. Si donc la superficie des poumons des Oiseaux est bien diffé- rente de ce que l’on remarque dans les Mammifères , on ne doit point aller aussi loin que plusieurs observateurs, qui dénient aux premiers de ces animaux toute apparence de plèvre ; on ne doit pas davantage accepter les assertions de ceux qui osent affirmer que le diaphragme des Oiseaux n’a jamais été décrit. L’intérieur des poumons des Oiseaux est surtout constitué par un assemblage de canaux aériens , de vaisseaux sanguins , et par un tissu élastique particulier (t). L' 'étude des canaux aériens a déjà prouvé que les canaux car- tilagineux de la trachée-artère disparaissent rapidement aussitôt que les conduits bronchiques ont pénétré dans les poumons (2). Ces conduits, très souvent dilatés dans le voisinage de leur origine , comme oh peut surtout le remarquer dans la Pintade , dans le Paon, dans le Dindon, etc., se divisent ordinairement ( I ) G . Cuvier cl Duvernov, l.c., t. VII, p. 120. — Lereboullet, Anal, des org. de Li respiration. Strasbourg. — II. Owen, /. c.t p. 341, 2e col. ^2' Mcckel. Anal, comp ., trad. par Schuster, t. X, 1838, p. 345. DE LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 3" en quatre , cinq ou six , et même en un plus grand nombre de bronches principales (1). Ils divergent en s’éloignant les uns des autres jusqu’à ce qu’ils soient parvenus dans la profondeur ou bien à la surface des poumons ; là ils s’ouvrent par un nombre variable de trous dans les réservoirs aériens (2). Ces ouvertures ont été figurées par plusieurs anatomistes. Dans le trajet qu’elles suivent , ces bronches croisent générale- ment la direction des artères et des veines pulmonaires , disposi- tion qui paraît être constante dans toute l’épaisseur des organes depuis les conduits les plus volumineux de l’air jusqu’aux plus petits. Les tuyaux bronchiques les plus considérables se rendent aux réservoirs aériens ; d’autres bronches secondaires en naissent sous un angle à peu près droit; elles fournissent d’autres con- duits nés de la même manière , jusqu’à ce qu’ enfin les plus petits de ces canaux aériens se terminent par des anastomoses communes apparentes à l’extérieur des organes comme des sortes de cannelures. Ce n’est donc pas , à proprement parler, dans des cellules pulmonaires que se terminent les bronches des Oiseaux ; les poumons de ces animaux résultent, comme un l’a très bien fait remarquer (3), de l’assemblage des conduits anastomosés formés par les divisions successives des bronches. Tout autour de ces conduits aériens, soit des plus gros, soit des plus petits , s’étendent les vaisseaux sanguins et le réseau très curieux formé par le tissu élastique. Pour étudier les détails de ces parties, il faut d’abord avoir coloré les vaisseaux artériels et veineux des poumons à l’aide d’une injection très fine , puis examiner les tissus frais ou desséchés avec le microscope. On peut cependant tout aussi bien , après avoir plongé l’animal dans une solution de chlorure de zinc, lancer ce liquide par la trachée dans les bronches, puis laisser les tissus se dessécher. Le sang qui reste dans les tissus se noircit alors , (t) G. Cuvier, I. c., 1. Vit, p. 125, indique dix ou onze ramifications princi- pales des bronches. (2) R Ovvcn, I. c , p. 311. — Meckel, t. c.. p. 345. (3) G. Cuvier, 2' édit., add. de Duvernov, t VU, p, 116. 38 NATALIS «U1LLOT. SÜU l’API'ARIÎII, permet d’examiner les plus petits vaisseaux avec le secours du microscope , et les fait très facilement distinguer du tissu élas- tique. En coupant des tranches du poumon, frais ou desséché, ou en étudiant la surface de l’organe avec des grossissements variables, de manière avoir, de toutes les manières possibles, la superficie des canaux aériens les plus larges ou les plus étroits , on remarque toujours que les parois de ces conduits sont soutenues par un ré- seau constitué par un tissu non injectable, souvent distinct par une grande blancheur. Les mailles de ce réseau enceignent les bronches , depuis les plus grosses jusqu’aux plus petites, et c’est au-dessous d’elles qu’apparaissent les vaisseaux sanguins. Comme on injecte toujours les veines par les artères, et vice versâ , il n’est plus possible de distinguer autour des conduits aé- riens ce qui appartient aux artères pulmonaires ou ce qui est le commencement des veines; on ne voit plus qu’un amas de vais- seaux anastomosés les uns avec les autres dans tous les sens. Ces dispositions, déjà fort bien appréciées par Retzius (i), par MM. Lereboulet (‘2) et Duvernoy (3), offriraient encore une autre sorte d’intérêt, si on les comparait à ce que l’on voit à la super- ficie des deux poumons vésiculcux de certains Reptiles. Une analogie déjà signalée rapproche la structure de ces or- ganes dans des animaux si différents. Une petite portion d’un pou- mon de Lézard injectée [Lacer ta teguixin ) , comparée , sous le microscope, à un fragment de poumon d’Oiseau, présente à peu près les mêmes caractères. Mêmes dispositions des vaisseaux san- guins autour d’espèces d’enfoncements infundibuliformes , der- nière apparence de tuyaux bronchiques; même apparence du tissu élastique, étendu sous la forme d’un réseau très distinct. Rapports curieux qui retracent encore, dans les profondeurs les (1) Retzius, Froliep a Notisen, 1832. (2) Lereboulet, Anat. comp. de l'app. resp. dans les onfm. vert. Strasbourg, 1838. ‘ (3) G, Cuvier, I, c., vol. VU. DE LA KKSPIUATION DANS LES OISEAUX. 39 plus cachées de l’organisation, les ressemblances si fréquemment signalées des deux classes d’animaux. Une partie seule de l’air respiré par les Oiseaux pénètre jusque dans toutes les parties du poumon ; l’autre suit les divisions bron- chiques les plus amples, et vient pénétrer dans les réservoirs aé- riens du ventre et de la poitrine. Les orifices par lesquels l’air peut sortir sont multiples, et ont déjà fait l’objet de plusieurs remarques. Aucun d’eux n’est situé à la partie supérieure ou costale des poumons ; tous apparaissent, soit à l’endroit où les bronches s’enfoncent dans les tissus , soit à la face inférieure du diaphragme , soit à l’extrémité des organes la plus rapprochée de la cavité abdominale. Les plus antérieurs de ces orifices sont voisins des bronches les plus voisines du larynx inférieur (1): les uns sont inférieurs et conduisent l'air dans la portion du réservoir thoracique placée autour du larynx ; les autres sont supérieurs et laissent pénétrer l’air dans la partie du réservoir située au-dessus du larynx. Deux autres orifices des bronches sont apparents à la face in- férieure ou diaphragmatique du poumon; ils ont été, ainsi que les précédents, décrits ou figurés (2). Ceux-là principalement offrent autour de la circonférence qui les entoure deux espèces de lèvres membraneuses , formées par les fibres de l’aponévrose diaphragmatique. Les uns appartiennent à la plus antérieure des deux cavités aériennes, placée au-dedans et au-dessusde l’arc des côtes (cellule hépatique, 1L Owen) ; ils sont au nombre de deux, quelquefois de trois. Le premier offre un diamètre considérable ; souvent un autre orifice plus petit , et couvert par un repli membraneux , se trouve placé plus en dedans que l’ouverture principale, dont le niveau est à peu près le même que celui de la seconde côte. Cette ouverture des bronches est limitée, en avant, par la cour- bure de l’artère pulmonaire, en arrière, par la veine qui rapporte au cœur le sang du poumon. (1) II. Owen, l. c., p. 311. — Id., Anatomie de l' Aptéryx. (2) H. Owen, I. c., p. 341. — Jlilne Edwards, Elémente de zoologie, t. II, p. 23. — 1341. 40 VtTAMS «IILLOT. — SUR l’APPAREII. En dehors de l’ouverture ou des ouvertures que je viens d’in- diquer, on en voit d’autres à peu près sur le même niveau , mais plus éloignées de l’axe du cœur ; elles sont également bridées par un repli de l’aponévrose diaphragmatique. Une autre ouverture transmet aussi l’air à la cavité aérienne placée sous les côtes, en arrière de la précédente (cellules abdo- minales, R. Ovven); elle est située à peu près au niveau de la troisième côte, et souvent encore double ; elle est, comme le der- nier des orifices de la cavité précédente , fort éloignée de l’axe du corps. On la découvre à l’endroit même où une cloison membra- neuse sépare les deux cavités aériennes l’une de l'autre. Le dernier des orifices des bronches est celui qui permet à l’air de s’introduire dans les réservoirs aériens de l’abdomen. 11 a déjà été décrit par Harvey, limiter, etc., et représenté, de même que les orifices précédents (1). Il est situé au-dessus du niveau de l’avant-dernière côte , dans un point plus ou moins éloigné de la colonne vertébrale, suivant les espèces, immédiatement au-dessus de l’extrémité supérieure des reins. Il est très facile de le voir en ouvrant la cavité abdominale , lorsqu’on a déchiré l’enveloppe délicate du réservoir aérien. On voit qu’il est bordé par un ou deux replis membraneux, entre les- quels on aperçoit le tissu pulmonaire recouvert par la plèvre, ainsi que l’orifice simple et souvent double par lequel l’air peut entrer dans les réservoirs de l’abdomen. Un habile anatomiste , l’un des plus compétents sur l’anatomie des Oiseaux, M. Richard Ovven ("2), a figuré, déplus, quelques autres petites ouvertures situées au sommet de chaque poumon : elles m’ont paru exister même dans les animaux domestiques; mais ce sont principalement les ouvertures les plus larges qui ont fixé l’attention des observateurs (3). Chacun de ces orifices constitue l’ouverture des réservoirs aé- riens des Oiseaux, organes considérés par Meckel (4) comme étant (1) R. Ovven, I. c., p. 341. (2) R. Ovven, Anatomie Je V Aptéryx. (3) Milne Edwards, 1. c. (i) Meckel, Anal, camp., trait, de Schuster, l X, p. 317 Paris, 1838. DE IA RESPIRATION D VAS I.ES OISEAUX. 41 analogues aux trachées des Insectes, regardées également comme étant formées par la plèvre, par le péritoine, même par le tissu cellulaire du corps, ce qui a pu faire dire à Carus que tous les viscères de l’Oiseau étaient renfermés dans le poumon lui-même. La disposition de celles de ces parties accessoires qui existent dans la poitrine a été généralement indiquée; mais celles qui sont renfermées dans le ventre sont moins connues : aucune ligure n’en a donné jusqu’ici une représentation intelligible. Je pense donc qu’après avoir fait connaître les premières, il sera utile de faire apprécier en détail les particularités de l’organisation que possèdent les secondes. C'UAPITRK III. DES RÉSERVOIRS AÉRIENS DES OISEAl \. Les réservoirs aériens des Oiseaux sont composés par de larges espaces limités par des membranes transparentes. Ils sont situés dans la région thoracique, ainsi que dans la cavité de l’abdomen, sur la ligne médiane, ou sur les parties latérales du corps. Ils re- çoivent l’air qui a traversé les poumons par les orifices précédem- ment indiqués; cet air ne peut suivre d’autre voie, pour sortir de ces réceptables, que celles par lesquelles il a été introduit. Ces réservoirs sont naturellement divisés en deux groupes dis- tincts par la situation des ouvertures des bronches, par la région dans laquelle chacun est placé , et même par la configuration générale. Le premier groupe comprend les réservoirs aériens thoraci- ques (1), le second renferme les réservoirs aériens abdominaux (2). Dans la région thoracique , les réservoirs sont disposés de ma- nière à occuper non seulement la région antérieure et médiane du tronc de l’animal , mais encore les deux côtés de la colonne ver- tébrale, soit en dedans, -oit en dehors du thorax; ils s’étendent même dans le creux de l’aisselle, ainsi que le long de l’omo- plate. (t) Pi. 3. PI. î. il J . x/2, r/3 a t i/o. (2) PI. 3; PI. i. 61, 62. VV1AI.1N (.1 II. 1.0 r. SIUl l’.UTAIIEIL Ù2 Dans la région du ventre, les réservoirs se prolongent entre les reins et la colonne vertébrale d’une part, de l’autre, au-des- sous des organes sécréteurs de l’urine , formant alors deux énor- mes vessies aériennes communes à tous les Oiseaux. Ces réservoirs aériens du ventre et de la poitrine peuvent être en général regardés comme indépendants l’un de l’autre, quoique certains pertuis, ouverts à la région moyenne de la colonne verté- brale , puissent permettre à l’air de sortir des premiers pour pénétrer lentement dans les seconds , par le moyen des canaux aériens des vertèbres. § I. Réservoirs aériens thoraciques. La disposition générale des réservoirs aériens du thorax n’est pas facile à exprimer : peut-être serait-il possible de l’indiquer en disant qu’ils résultent de l’agglomération de cavités séparées par des cloisons membraneuses transparentes, généralement com- plètes. Ces cavités sont mises en évidence après l’ablation du sternum et des côtes ; mais alors on a détruit les parois destinées à les pro- téger. Si l’on veut conserver les os et entreprendre l’examen d’une autre manière, il faut disséquer les téguments du cou, éloigner le jabot de l’animal , enlever le tissu cellulaire qui en- toure la trachée à l’endroit oii ce conduit pénètre dans la poitrine. La partie antérieure du réservoir thoracique est mise alors ii dé- couvert. Pour apercevoir les régions latérales, il est seulement néces- saire de séparer le muscle pectoral de ses attaches et de ses inser- tions : les cavités aériennes s’élèveront alors comme des saillies quelquefois énormes, dès qu’elles seront insufflées par la trachée. La dessiccation régulière de la poitrine, privée des muscles qui la recouvrent , servira à faire reconnaître la forme générale des parties des réservoirs aériens placées sous les côtes; une incision des parois de l’abdomen , soit avant , soit après la dessiccation , montrera les prolongements abdominaux qui appartiennent à ces parties sous-costales. Ces préparations seront les plus faciles ; mais pour comprendre DE l.V HESl’lllATION DANS LUS OISEAUX. 43 la manière dont le réservoir thoracique s’étend le long du rachis, dans quelques animaux, on devra extraire les poumons de la poitrine. Elles ne sont pas certainement les seules que l’on entreprendra : les coupes multipliées du thorax , les dissections attentives des animaux frais ou desséchés, devront être prati- quées par l’anatomiste ; car, sans le secours de ces études , on ne reconnaîtrait pas toujours, au premier aperçu, l’existence des détails qui vont être indiqués. Les réservoirs aériens du thorax se présentent d’abord comme un ensemble de parties renfermées dans l’intérieur de la poitrine. Cependant elles en dépassent les limites dans plusieurs endroits : quelques unes des cavités qui les composent s’étendent , en effet, non seulement en dehors jusqu’à l’omoplate , mais encore dans l’intérieur même de la cavité abdominale, au-dessus des muscles de la paroi antérieure du ventre. Les réservoirs du thorax sont limités, en avant, par les tégu- ments du cou ; en haut, par la colonne vertébrale ; de ce côté, ils s’étendent jusqu’à la base de la poitrine; au-dessus de la convexité des côtes , ils font une saillie plus ou moins volumineuse , suivant les espèces, au travers de l’espace limité , à droite et à gauche , par les os coracoïdiens, la colonne vertébrale , la première côte et l’omoplate. Le cœur, le ventricule succenturié , le foie , séparent plus nettement encore que partout ailleurs les portions droites des réservoirs aériens d’avec les portions gauches, et ne sont point renfermés dans les cavités aériennes, comme l’ont cru Jacque- min (1) , G. Cuvier (2) et plusieurs autres. Lorsqu’ils sont ouverts par l’ablation des côtes ou du sternum, ils paraissent constitués par un ensemble de cellules plus ou moins larges, formées par des membranes repliées autour des troncs vas- culaires et des nerfs, tendues pour former des cloisons, et dirigées en plusieurs sens. De ces espaces celluleux, les uns sont latéraux, soit en dehors , soit en dedans du thorax ; les autres , situés sur la ligne médiane, s’étendent en avant de la base du cœur. (1) Jacqucmin, I. c., p. 286. (2) (L Cuvier, I. c., t. VII, p. 126. !lli MIALIS «11LLOT. — SUR L’APPAREIL Ces parties, diversement disposées, ont reçu , jusqu’à présent, de nombreuses dénominations. Loin de conserver une nomenclature incertaine , souvent con- tradictoire, et de multiplier, à mon tour, des termes qui ne pour- raient aider en aucune manière l’intelligence des anatomistes, je m’efforcerai seulement de chercher à faire comprendre les dispo- sitions principales de cette organisation compliquée , me conten- tant de rappeler les noms par lequels les organes que je décris ont été désignés avec plus ou moins de précision. Je distingue dans les réservoirs aériens du thorax quatre ordres de cavités : la première peut être considérée comme impaire ; les trois autres sont paires ; elles ne sont pas toutes symétriques. A. Première cavité des réservoirs aériens thoraciques , ou réservoir infra-la- ryngien (poche pneumatique sous-claviculaire , J acqoemin ; cellule thoracique antérieure, Owen). Cette cavité est composée de deux parties inégalement dévelop- pées dans les diverses espèces d’animaux : l’une est placée sur la ligne médiane du corps (poche sous-claviculaire, Jacquemin; cellule thoracique antérieure, R. Owen) (l); l’autre est située de chaque côté du thorax en dehors des os coracoïdiens et des côtes, le long du bord antérieur de l’omoplate et de l’extrémité supérieure de l’humérus (poche sous-scapulaire, Jacquemin ; cellules axillaires, 1\. Owen (2). Ces deux parties d'un réservoir commun paraissent être tota- lement séparées , lorsque l’on ne considère que la situation et les reliefs extérieurs de chacune d’elles; mais un examen plus appro- fondi démontre qu’elles communiquent largement ensemble , et qu’elles ne forment que deux dépendances distinctes d’un même groupe. La première cavité du réservoir infra-laryngien est placée au sommet de la poitrine en avant de la base du cœur, sous l’extré- mité antérieure du sternum , dans l’espace limité de chaque côté (1) PI. 3; PI i, «I. (2) PI. 3; PI. I, «2. DE LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. /j5 par les veines jugulaires et les os coracoïdiens , et en avant par les téguments du cou (1). Elle ne repose pas sur la colonne vertébrale ; elle en est séparée par le conduit œsophagien du ventricule succenturié , par les artères carotides , et par un autre réceptacle d’air que l’on doit insuffler pour en bien connaître la situation. La cavité infra- laryngienne est impaire; aucune cloison mé- diane ne la sépare en deux parties. J.a forme qu’elle présente, lorsque les membranes qui la limi- tent n’ont point été incisées, est difficile à définir ; cependant , à l’extérieur ainsi qu'à l’intérieur, on peut décrire une face supé- rieure , une face inférieure, une face postérieure , une autre anté- rieure et deux latérales. La face supérieure est bornée par une cloison membraneuse , qui sépare la cavité infra-laryngienne d’avec un réservoir d’air placé au-dessous de la colonne vertébrale ; elle est en rapport en dehors avec l’œsophage du ventricule succenturié, sur les côtés avec les veines jugulaires et les artères carotides; toute l’extré- mité inférieure de la trachée , le larynx inférieur et ses muscles sont placés au contact de cette face supérieure. Ces organes s’é- tendent au-dessous d’elle, sur elle, lorsque l’animal est couché sur le dos. La face inférieure s’étend entre les deux os coracoïdiens; elle est représentée en avant par une membrane tendue entre ces deux os et le sternum , en arrière par l’extrémité antérieure du ster- num et les deux articulations sterno-coracoïdiennes. La face postérieure ne peut être vue que lorsque le réservoir infra-laryngien est ouvert ; on y remarque la base du cœur , l’aorte et les gros vaisseaux qui en émanent, l'artère pulmonaire, à l’origine de ces vaisseaux, le péricarde; plus en dehors se trouve une cloison qui sépare le réservoir infra-laryngien des cavités aériennes situées sur les côtés de la poitrine en dedans des côtes. La face antérieure s’élève en avant du sternum, entre les deux (I) PL 3; PI. i, al. /[(> VV1AI.1H (.LU. 1.01. — SUR L’APPAREIL os coracoïdiens et les muscles coracoïdiens internes, sous la forme de trois renflements généralement distincts, mais de volume très variable dans les diverses espèces. Deux de ces prolongements sont latéraux ou coracoïdiens ; le troisième est médian , on le distingue entre les deux autres dans le Paon , le Coq, etc. La face latérale de ce réservoir infra-laryngien est encore plus difficile à apprécier que les précédentes ; elle s’étend dans l’inter- valle compris sur les squelettes entre les os coracoïdiens, la pre- mière côte , le bord antérieur de l’omoplate , et les apophyses transverses des vertèbres cervicales : non que je veuille dire que le plan de cette face s’étend entre toutes ces parties osseuses ; je désire seulement faire comprendre que c’est de ce côté, rempli de muscles, de nerfs et de vaisseaux, que peut être placée la face externe du réservoir infra-laryngien. C’est par cette face que, à l’aide de communications qui seront tout-à-l’heure décrites , le réservoir infra-laryngien se prolonge au-dehors de la poitrine en arrière du membre antérieur. Mais examinons d’abord l’intérieur de la cavité qui nous occupe. Il est tapissé par une membrane dense, destinée à l’isoler de tous côtés ; elle se replie sur toutes les parties voisines du réservoir, et enveloppe tous les organes renfermés dans la cavité infra- laryngienne. L’intérieur du réservoir infra-laryngien offre encore , à con- sidérer la trachée-artère , le larynx inférieur placé sur la ligne médiane , ainsi que les muscles qui les meuvent. Cette première partie du réservoir infra-laryngien communique avec une autre cavité aérienne placée de chaque côté du thorax des Oiseaux , en dehors des os coracoïdiens , en arrière de l’articula- tion de l’épaule, et le long du bord inférieur de l’omoplate. Cette cavité extérieure, rattachée intimement au réservoir infra- laryngien, a été jusqu'ici isolément étudiée par la majorité des observateurs ; on s’est probablement fondé pour cette considération sur la situation des parties que l’on a désignées sous les noms de poches ou cellules axillaires (Jacquemin , Cuvier, R. Owen) ; mais comme ces organes ne reçoivent l’air des poumons que par le moyen du réservoir infra-laryngien , comme ils communiquent DE r./V RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 47 avec lui par une large ouverture , il me semble que , s’ils méri- tent une étude distincte , ils ne doivent point être entièrement sé- parés de la cavité dans laquelle ils puisent l’air qui les distend. B. Prolongements axillaires ou sous-scapulaires du réservoir infra-laryngien (poche sous-scapulaire, Jacqi kmin: poche sous-axillaire, Owen). Le réservoir infra-laryngien s’étend au-delà des limites laté- rales de la poitrine par une ouverture placée entre le muscle coracc-brachial et le muscle troisième pectoral , dans le voisinage des vaisseaux et des nerfs qui se rendent au membre antérieur et au thorax. Cette ouverture , bordée par un repli membraneux , offre des diamètres très variables chez les divers Oiseaux : il m’a paru que , dans le Coq, elle était assez large pour laisser facile- ment pénétrer une grosse plume au travers d’elle. C’est par ce trou que l’air vient remplir la portion sous-scapulaire ou axillaire du réservoir infra-laryngien (1). De forme généralement globuleuse , cette partie accessoire du réservoir infra-laryngien se présente à l’extérieur sous l'ap- parence d’une série plus ou moins nombreuse de renflements arrondis transparents , séparés les uns des autres par plusieurs sillons , dans lesquels se replient les membranes celluleuses pla- cées à l’intérieur. La superficie de ces renflements est limitée par une membrane très délicate attachée à toutes les parties osseuses, formant sur le squelette l’orifice antéro-latéral de la poitrine. Cette membrane adhère , en arrière , à la première côte ; en haut, à l’aponévrose qui naît des apophyses transverses; en avant, et en dedans , elle se confond avec celle qui revêt le second réservoir de la poitrine ; en avant, et en dehors , elle s’attache à tout le bord externe de l’os coracoïdien; plus en avant, elle adhère à l’humérus , au-devant de la membrane de l’articulation ; puis elle s’insère en dehors du trou, qui permet à l’air de pénétrer dans l’intérieur de l’os du bras : de là cette membrane quitte l’hu- mérus , et se porte sur le bord interne de l’omoplate jusqu’à la partie moyenne de cet os, où elle se termine le plus généralement. Les renflements que limite cette expansion membraneuse sont (i) fl. 3: Pl. 4, «2. \\T\ IIS GtlI.I.OT. SI II I. \PPAREU. 18 multiples , mais on peut les diviser en trois parties presque tou- jours distinctes. L’une s’étend jusqu’au niveau de l’attache humérale du muscle pectoral, et elle est le plus souvent proportionnelle au volume du muscle qui la recouvre. Je l’ai toujours observée dans tous les Oiseaux que j’ai étudiés; si elle est faible , le développement du muscle pectoral est peu considérable (1) : le Coq et le Faucon offrent à cet égard un curieux sujet de comparaison. Un autre renflement est situé en arrière du précédent ; il four- nit un point d’attache solide aux fibres musculaires d’une portion du muscle pectoral , distincte surtout dans les Gallinacés, et prin- cipalement dans le Coq. Dans d’autres espèces, telles que le Faucon , la Buse , la Cresserelle , ce renflement acquiert de telles dimensions qu’il peut parvenir sous le muscle pectoral jusqu’à la base de la poitrine. Le renflement postérieur est placé au-dessus et en arrière des précédents ; il s’étend généralement au-dessous du muscle sca- pulaire ou sus-épineux , dont les fibres s’épanouissent en partie dans une aponévrose assez dense , fortifiant la poche aérienne d’une manière notable. Dans le Paon , ce renflement donne nais- sance à une série de cellules accessoires, étendues, comme un chapelet, les unes après les autres jusque par dessus l’épaule, qu’elles contournent ; elles viennent s’ouvrir par un orifice large dans la vaste dilatation située à la base du cou de cet oiseau , la- ( I) Je signale à cette occasion la différence de coloration qui caractérise les muscles des Oiseaux dont le vol est actif ou puissant, et les muscles des Oiseaux qui ne volent que très peu : le Faucon , la Buse , les Moineaux , les Pigeons , ont les muscles pectoraux extrêmement colorés, d'une nuance d'un rouge très foncé, due à la quantité de sang qui les pénètre; les Coqs et les Poules présentent au contraire des muscles d'une pâleur qu'on peut apprécier facilement. Ce défaut de coloration cesse aux membres postérieurs dans les Gallinacés : les muscles des cuisses, qui exercent incessamment leur action, sont très rouges, et n’ont aucune ressemblance de couleur avec les muscles du membre antérieur. Cette différence, qui n'est plus observable dans les animaux bons voiliers, correspond à des varia- tions manifestes dans la densité des organes musculaires : ceux qui sont pâles sont mous et fiasques; ceux qui sont très colorés par le sang sont au contraire fermes ou même durs. DE I. V ItESI'in \TTü\ D\.NS i.F.S OISEALX. /(<) quelle dilatation appartient à la partie principale du réceptacle, dont je décris actuellement les cavités accessoires. Lorsqu’on incise ces dilatations membraneuses, et que l’on en examine l’intérieur, elles apparaissent comme un ensemble de plusieurs cellules séparées par des cloisons incomplètes, dans l’épaisseur desquelles se prolongent les nerfs et les vaisseaux san- guins du membre antérieur et de la surface de la poitrine. Ces conduits sont partout revêtus d’une membrane extérieure , tout aussi bien que dans les autres cavités aériennes. C’est dans l’intérieur de l’une des cellules placées en dehors de la poitrine, auprès de l’humérus, au-dessous de l’articulation huméro-scapulaire , près de la membrane qui revêt les surfaces articulaires, isolées comme partout ailleurs du contact de l’air, qu’apparaît l’orifice plus ou moins large par le moyen duquel l’air peut entrer dans l’humérus : disposition curieuse, signalée depuis longtemps par limiter, Camper, etc. (1), dont les usages ont suggéré tant d’expériences intéressantes qui mériteraient encore aujourd’hui d’être remises en évidence. L’ensemble formé par les deux vastes cavités aériennes que je viens de décrire ne possède qu’un moyen de communication pro- pre à laisser sortir l’air des poumons. Ces orifices décrits, quoique mal figurés, par plusieurs anato- mistes, sont distincts en arrière de chacune des divisions de la trachée , à l'endroit même où chaque bronche pénètre dans les poumons. Au premier coup d’œil, on ne voit qu’une ouverture de chaque côté, bordée, à droite et à gauche, par un repli mem- braneux fixé par un ligament étendu sur la ligne médiane du corps, et attaché à la base du larynx inférieur; mais, avec plus d’attention, on découvre sous ces lèvres membraneuses plusieurs pertuis placés précisément au sommet des poumons, à l’endroit même où la bronche s’y introduit. C’est par cette ouverture seule que l’air s’introduit au travers du réservoir infra-laryngien jusque dans les cavités aériennes sous-maxillaires, les distend tantôt plus, tantôt moins, suivant les (I) Hanter. I. r 3' série. Zoor. T V. (Janvier 18-45.) < 50 AATALIS GUILLOT. — SUR l’appareh. espèces, et va pénétrer non seulement jusque dans l’os du bras, mais encore dans le sternum, par plusieurs trous placés à la partie antérieure de cet os (1). Il me reste encore à indiquer quelques unes des modifications subies par cette double cavité du réservoir aérien thoracique dans plusieurs des Oiseaux soumis à mon examen. Je regrette toute- fois que cet objet intéressant d’étude ait été forcément restreint à un petit nombre d’animaux (2). La première partie, ou le réservoir infra-laryngien proprement dit, existe dans tous les Oiseaux ; mais les dimensions en parais- sent surtout considérables dans le Coq, le Dindon, le Paon, dans le Rossignol , dans le Tarin : elles décroissent chez le Faucon , elles décroissent également dans le Francolin, dans la Perdrix. Dans les premiers de ces animaux, l’extérieur du réservoir pro- duit plusieurs renflements très considérables, en général au nom- bre de trois, en dedans des deux os coracoïdiens, renflements qui peuvent s’étendre même jusqu’au niveau des os claviculaires. On les remarque dans le Dindon, dans les Rossignols, dans les Alouettes. Ils m’ont toujours paru considérables chez les mâles, et faibles sur les femelles. Le Tarin et le Serin offrent desexem- (1) Les usages des communications de l'appareil respiratoire avec l’intérieur des os ont été l'objet d'études multipliées, dont on peut trouver les détails dans l'ouvrage de Hunier (*) et dans Camper (**). Elles ont été étudiées dans toutes les classes d'Oiseaux ou à peu près. Hunter a gonflé les cellules aériennes en soufllant par les os; il a injesté ces os en poussant des liquides dans la trachée. Les expé- riences de Hunter et ses travaux devraient être présents à la mémoire de toutes les personnes qui s'occupent de l'anatomie et de la physiologie des organes res- piratoires des Oiseaux. (2) Les variations de l'étendue des cavités osseuses de l'humérus et des os de l'avant-bras, destinées a renfermer l'air, aux différents âges et dans les diverses espèces, ont été étudiées avec détail par Hunter, Camper, et plus récemment par Jacquemin (/. c., p. 314). Ces anatomistes s'occupent tous des variations dues à l'absence ou à la présence de l'air dans les ns des membres antérieurs et pos- térieurs des Oiseaux. (*) Hunter, Animal leconomu, p. 80 passim. (**) Camper, Olïucrcs complètes, t. lit, p. ilil Paris, an xi. DE LA RESHBATTON DANS LES OISEAUX. 51 pies de ces particularités. Me pourra-t-on étendre ultérieurement ces recherches, et apprécier mieux que je n’ai pu le faire , tous les décroissements et les accroissements alternatifs du réservoir laryngien , dans les diverses espèces, et chercher à reconnaître si ces organes s’augmentent aux époques de l’année où les animaux mâles chantent avec le plus de force? Ne peut-on déjà en déduire quelques opinions sur le mécanisme de la production de la voix chez les Oiseaux . et sur les causes de l’énergie plus grande du chant des mâles, opinions qui tendraient à confirmer une manière de voir de limiter (1), reproduite par M. Girardi (2) et par Jac- quemin, au sujet des fonctions des réservoirs aériens? Ces anatomistes pensent que les cellules aériennes servent à renfermer l’air destiné à produire et à renforcer le chant des Oi- seaux; mais ils attribuent cette fonction à toutes les cellules aé- riennes, tandis qu’elle ne me paraît dépendre que de l'influence du réservoir laryngien. L’ensemble offre une disposition du réservoir infra-laryngien fort curieuse à étudier dans le l’aon ; elle a été indiquée déjà par Jacquemin (o). Ce réservoir est composé, comme dans les autres Oiseaux , des deux parties que je viens de décrire d’une manière générale ; mais il offre une extension si considérable des proion - gements membraneux du cou et de l’aisselle, que je ne saurais les passer sous silence. Les prolongements du cou s’étendent , à droite et à gauche , comme deux énormes vessies placées de chaque côté du jabot, éten- dues même jusqu’au-devant des muscles pectoraux. Celle qui est à droite est moins volumineuse que l’autre ; elle est cependant fort ample ; mais, probablement en raison de la présence du jabot, elle n’acquiert jamais le volume de celle qui est à gauche de cet organe. Celle-ci atteint la grosseur d’une orange , et lorsqu’elle est insufflée, elle forme une tuméfaction énorme au sommet de la poi- trine. (1) Hunier, Animal œconomy. (2) M. Girardi, I. c. (3) Jacriuemin, /. c ô2 V4TAI.IS «XIILOT. — Sir. l.’APPARr.ir La portion axillaire du réservoir infra -laryngien s’étend, de son côté, en arrière du bras, et vient former tout autour de l’é- paule une série de cavités membraneuses remplies d’air, sous- cutanées, qui s’abouchent largement en arrière du dos, au-dessus de l’extrémité antérieure de l’omoplate, avec l’énorme dilatation antérieure. Je ne connais aucun Oiseau chez lequel les deux portions du réservoir infra-laryngien offrent une disposition aussi irrégulière, jointe à de pareilles dimensions. C. Seconde cavité des réservoirs aériens du thorax ou réservoir supra-laryngien (poche pneumatique pectorale Jacquemix). Ce réceptacle d’air est pair et symétrique. Chacune de ses par- ties, droites et gauches, sont indépendantes l’une de l’autre. Il présente un arrangement simple dans plusieurs Oiseaux , mais compliqué dans d’autres espèces, à cause du nombre de certaines cavités secondaires. C’est par le moyen de ces cavités accessoires que l’air peut entrer dans le corps des vertèbres , de manière à être introduit jusque dans la cavité du tympan, et même, comme on l’a démontré, jusque dans la mâchoire inférieure (1). Pour en bien faire comprendre la disposition , je le divise en deux parties : l’une principale, dont l’existence m’a paru être générale; l’autre, accessoire, qui me semble plus ou moins déve- loppée, suivant les espèces. Ce développement est souvent peu considérable. 1° La première est placée au-dessus du réservoir infra-laryn- gien , et le recouvre; lorsque l’animal est placé dans la situation naturelle, on la voit au-devant de la colonne vertébrale, au sommet de la poitrine, à la base du cou (2). C’est entre ce réservoir supra-laryngien et le réservoir infra- laryngien que l’œsophage du ventricule succenturié s’introduit dans l’intérieur du thorax. Celte cavité est double, symétrique , et ses deux portions droite (I) Hunier, /. r. — Canipor, /. r. (2; PI. 3 . PI. 4. a ). Dli I.A KESiUHATIOK DA AS LES OISEAUX. 53 et. gauche sont séparées l’une de l’autre, sur la ligne médiane du corps, par l’œsophage et par une cloison verticale médiane. Chacune d’elles est bornée par une membrane commençant en avant et au-dessus des deux grosses bronches, s’étendant au-dev ant et au-dessus du sommet de chaque poumon, formant un prolon- gement replié verticalement en haut, pour s’attacher à la partie moyenne du corps des vertèbres du cou, d’oii résulte la cloison médiane. Cette membrane recouvre aussi l’œsophage, et va s’at- tacher au bord interne des os coracoïdiens, et au bord antérieur et interne de l'omoplate , le long de la colonne vertébrale ; elle pé- nètre dans plusieurs ouvertures qui servent à conduire l’air dans d’autre cavités aériennes des vertèbres cervicales, de là jusque dans les os du crâne et de la face , dans la cavité du tympan , et même dans le pharynx , par le moyen du conduit guttural de l’oreille ; de sorte que les liquides injectés dans cette cavité des ré- servoirs thoraciques peuvent s’écouler facilement par le pharynx, lorsqu’on place en bas la tète de l’animal. A la rigueur, on pour- rait dire, en considérant cette disposition, que les Oiseaux peu- vent expirer et inspirer l’air par le conduit guttural de l'oreille. La membrane qui limite le réservoir supra-laryngien enceint une cavité limitée en haut par la colonne vertébrale et les muscles qui la recouvrent , bornée sur son côté interne par l’œsophage et la cloison qui isole la cavité droite de la cavité gauche. En bas , elle est séparée du réceptacle infra-laryngiën décrit en premier lieu par une autre cloison membraneuse, entre les feuillets de laquelle se prolongent les deux artères carotides et les veines jugu- laires. L’œsophage correspond également à la région inférieure , et sépare aussi plus ou moins la cavité aérienne droite d’avec celle qui est placée du côté gauche du corps. En dehors , cette cavité est en rapport avec les sommets de chaque poumon, séparée de ces organes par les deux feuillets des plèvres, que l’on peut démontrer par l’insufllation ; de plus . elle est contiguë aux nerfs du plexus brachial, isolés du contact de l’air par la membrane qui les recouvre. Il serait fort difficile d’assigner une figure à ce réceptacle d’air ; otf peut tout au plus indiquer la forme des parties étendues de vitaïjs Gi ii.i.or. sir, l’appareil 54 chaque côté, le long du cou. Elles représentent deux prolonge- ments; celui de droite disparaît souvent, celui du côté gauche est toujours le plus long; il fait une saillie remarquable sur le cou de quelques Oiseaux. C’est à l’endroit où les bronches entrent dans les poumons que l’on aperçoit les orifices capables de laisser passer l’air dans le réservoir supra-laryngien ; ils sont voisins de ceux que j’ai décrits précédemment , mais placés au-dessus d’eux. Dans le Paon , un seul large orifice de la bronche sert de moyen de communication ; mais il n’en est pas ainsi dans d’autres espèces : ces ouvertures y sont multipliées. L’étude de cette cavité aérienne est intéressante, non pas seu- lement parce qu’on l’a confondue avec le réservoir précédemment décrit , mais de plus encore parce qu’elle sert principalement à conduire l’air dans l’intérieur des os, des vertèbres et de la tête. 2° La portion accessoire du réservoir supra-laryngien résulte de la présence d’un nombre plus ou moins considérable de cel- lules placées entre chacune des côtes, au-dessous des apophyses transverses des vertèbres. On ne la distingue pas dans toutes les espèces ; cependant on en trouve encore des traces au niveau de l’avant-dernière côte dans le Coq (1). Dans le Paon , au contraire , ces cavités acces- soires m’ont, semblé très nettement, prononcées. Je vais essayer de faire comprendre la disposition qu’elles offrent chez le Paon. Vers la paroi supérieure des prolongements cervicaux du se- cond réceptacle aérien de la poitrine , on découvre aisément quatre ou cinq trous placés au-dessous des apophyses transverses des quatre ou cinq dernières vertèbres cervicales. Ces trous , bordés par un repli membraneux, conduisent dans l’intérieur même du corps des vertèbres, et permettent à l’air de se pro- pager en haut jusque dans les os du crâne ; ils en facilitent égale- ment l’introduction au travers de toute la colonne vertébrale : tous conduisent à des cavités résultant de la présence d’un canal cel- luleux placé au-devant des apophyses transverses des vertèbres dorsales. (i) pi. t. o3’. DE LA RESPIRATION DANS LES OISE VL \. 55 On constate très facilement le passage de l’air et le trajet qu’il peut suivre dans ce canal , soit en injectant des liquides ou du mercure , soit en insufflant l’animal et en le laissant sécher : c’est alors surtout que l’on peut distinguer les détails suivants. Les trous qui conduisent l’air dans les vertèbres cervicales servent à le transmettre de vertèbre en vertèbre jusque dans toute la longueur du rachis. Le cinquième, ou le plus inférieur de ces orifices , car le nombre doit être variable , pénètre à la fois dans le corps de la première vertèbre dorsale et dans un petit canal placé au-devant de la première cote sur l’articulation costo-ver- tébrale : de là, il s’ouvre dans une petite cellule placée sous cette articulation, laquelle offre une pelitc ouverture communiquant avec le corps de la seconde vertèbre dorsale. Depuis cet endroit , sous toutes les côtes , au-devant des apophyses transverses des vertèbres dorsales , on remarque un espace plus ou moins grand, mais toujours plein d’air, et pourvu d’un orifice qui doit per- mettre à cet air de sortir du corps de la vertèbre ou d’y rentrer. Au-dessus de la septième côte , ces cellules aériennes s’agran- dissent ordinairement plus encore que dans les régions supé- rieures de la poitrine ; mais c’est, surtout au-dessus de l'avant- dernière côte qu’elles offrent une dilatation plus appréciable. On verra bientôt comment, par ces passages ménagés au tra- vers des os de la colonne vertébrale , l’air peut être introduit jusque dans l’intérieur des réservoirs abdominaux , et comment par cette voie étroite et indirecte il peut être reporté dans les réser- voirs aériens de la poitrine. D. Troisièmes cavités aériennes du réservoir thoracique ou réceptacles sous-costaux ( poclie pneumatique sous-costale, cellules hépatiques, It Owen — Jacqi-ewii.) La disposition de ces cavités aériennes sous-costales n’est plus dillicile à connaître. Klles sont au nombre de deux de chaque côté du corps, placées l’une en avant de l’autre; les deux premières sont symétriques : les deux autres ne le sont point absolument, quoiqu’elles se res- semblent beaucoup. Klles sont indépendantes, c’est-à-dire qu’elles 56 WIAl.IS GlILLOl. SUK -U’.Vl’I'AUlill. sont limitées par des enveloppes qui les séparent complètement les unes des autres. On distingue l’ensemble complet de chacun de ces réceptacles sur des animaux récemment tués ou desséchés ; ils se présentent alors avec les rapports suivants : Le premier ou le plus antérieur est limité, en avant, par la pre- mière côte et par l’artère pulmonaire; en liait! , par le poumon ; en bas , par les côtes ; en dedans , par le foie ; en arrière, par la cloison qui le sépare du réceptacle suivant. Toutes les laces de la cavité aérienne sont tapissées par une membrane qui n’est pas la plèvre, et qui est séparée d’elle en haut par l’épaisseur des languettes diaphragmatiques et par l’aponévrose très mince qui en dérive. C’est entre cette aponévrose et le poumon que se trouve la cavité de la plèvre si facile à insuffler (1). Trois orifices plus ou moins larges , bordés par une double lèvre membraneuse, sont apparents au fond de ce réceptacle aérien. Ces orifices des bronches , dont l’un surtout a été décrit et figuré par de nombreux observateurs, sont situés à peu près au niveau de la seconde côte dans le voisinage de la veine pulmo- naire (2). Le second réceptacle sous-costal du réservoir aérien thora- cique est étendu en arrière du précédent , une cloison membra- neuse l’en sépare. 11 lui est analogue sous plusieurs rapports; sous d’autres , il en diffère : car il est plus considérable , et se prolonge même dans l’intérieur de l’abdomen au-delà de la limite de la dernière côte. La partie gauche de ce réservoir descend bien plus loin dans le ventre que celle qui est située à droite ; elle peut même se prolonger jusqu’à la limite inférieure de la cavité abdominale. Ce détail, qui dérange l’arrangement symétrique du réservoir aérien thoracique, m’a paru constant dans tous les ani- maux (3). Si les rapports de cette seconde portion des réceptacles sous- costaux varient à droite et à gauche , ils diffèrent encore dans la poitrine et dans le ventre. (1) PI. 3; PI i. ai. — (3) l’I i c.d.f — (3) PI 3; PI t, o3. l)li LV lll-.Sl’lIl.WIOX UXXS LKS UlSn.UA. 57 Dans la poitrine, la limite supérieure est la surface pulmo- naire séparée de la membrane aérienne par la plèvre. Une cloi- son membraneuse , étendue des poumons à la première côte , forme la limite antérieure; les côtes la bornent en dessous; en dedans, le foie adhère à la surface extérieure de la membrane qui est en contact avec l’air. Dans l’abdomen , celte portion du réservoir aérien thoracique se prolonge à droite sous l’apparence d’un renflement cylindrique, en rapport avec les parties que renferme le ventre (1). A gauche, un prolongement analogue existe, mais il est plus long que le précédent ; la forme en est modifiée par la présence du gésier, auquel il adhère, et sur lequel il s’étend en partie; la limite inférieure de ce prolongement parvient souvent jusqu’à l’extrémité postérieure de l’abdomen. L'intérieur de cette cavité aérienne est de toutes parts tapissé par une membrane transparente, sur laquelle on remarque, du côté du poumon , une ou deux ouvertures , suivant les espèces. Elles sont situées au niveau de la troisième côte , plus en dehors de l’axe du corps que l’orifice de la cavité précédente (2). Ces descriptions rappellent des particularités , sinon parfaite- ment connues, du moins indiquées en majeure partie par la plu- part des observateurs. Celles qui vont suivre concernent des détails encore inaperçus, si je ne me trompe; car je ne trouve aucune figure, aucune espèce de description capable d’en faire soupçonner l’existence. S II. Des réservoirs aériens de l’abdomen des Oiseaux. On a décrit , je l’ai dit plus haut , des cellules abdominales recevant l’air des cellules de la poitrine et leur faisant suite; on a non seulement multiplié le nombre de ces cellules , mais encore on a voulu qu’elles ne fissent avec le péritoine et la plèvre qu’une seule et même chose. Quant à la Véritable disposition des réser- voirs abdominaux , elle n’a point, encore été signalée ; je n’ai en- core trouvé dans les auteurs anciens ou modernes aucune indica- tl) VI. 3, «3. - £) PI. i, !/. 58 XATW.IS (IIILI.OT. — SUR L’APPAREIL lion capable de faire soupçonner l’existence ou l’arrangement de ces parties. Les descriptions suivantes donneront, je l’espère, une tout autre idée de ces réservoirs abdominaux, et fourniront peut-être aux physiologistes l 'occasion de plusieurs recherches intéressantes. Ils ne sauraient être aperçus après la mort de l’animal sans avoir été préalablement remplis d’air ; les membranes qui les limitent sont si faibles que , lorsqu’elles sont abandonnées à elles-mêmes, elles disparaissent derrière les reins d’une part, de l’autre entre les circonvolutions intestinales. Il est donc nécessaire ou d’exa- miner un Oiseau vivant , ou mieux d’insulller un cadavre par la trachée , pour bien voir ce que je décris. Ces réservoirs sont au nombre de deux de chaque côté du corps. L’un est situé entre le rein et les apophyses transverses des vertèbres sacrées ; on le découvre en soulevant la masse de l'or- gane de la sécrétion urinaire: c’est le moins étendu des réservoirs abdominaux (1). L’autre , dont les dimensions sont extrêmement considérables , s’étend au-devant du rein , séparé du précédent par toute l’épais- seur de cet organe (2). J’appelle le premier réservoir supérieur de l’abdomen ; je désignerai le second sous le nom de réservoir inférieur : l’un et l’autre existaient dans tous ies Oiseaux qu’il m’a été possible d’exa- miner. A. Le réservoir supérieur ou supra-rénal de l’abdomen pourrait être considéré comme faisant suite au réservoir supra-laryngien , destiné à faire pénétrer l’air dans les os des vertèbres et dans les os des membres ; mais sa situation , et de plus la présence de l’ou- verture très large par laquelle il communique avec les vastes vessies aériennes, constituant le réservoir inférieur ou infra-rénal de l’abdomen, autorisent à le décrire séparément (3). 11 s’étend depuis la dernière côte jusqu’il la limite inférieure de chaque rein. De forme irrégulière , à peu près indiquée par les contours du rein , il est en rapport , en haut, avec les apophyses (I) PI. 4, 62, — (2) l’I. 3; I»l. 4, 61. — (3) IM. 4, 6f. DE LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 59 transverses des vertèbres lombaires, avec les surfaces osseuses de la cavité intérieure du bassin ; en dedans , il est borné par les parties latérales du corps des vertèbres ; en avant, , sur toute l’é- tendue qu’il parcourt, il est appuyé sur la face supérieure du rein. line membrane très line enveloppe de toutes parts cette cavité aérienne , dont les dimensions sont généralement proportionnelles à celles du bassin. Lorsqu’on l’insuffle , on écarte le rein de la paroi supérieure de l’abdomen. Ce réservoir n’est pas placé dans le péritoine ; il est en dehors des surfaces que tapisse cette membrane. Dans l’intérieur de la cavité dans laquelle pénètre l’air au-des- sus du rein s’étend une délicate membrane qui recouvre toutes les éminences et toutes les anfractuosités des organes ; elle entoure les nerfs du plexus lombo-abdominal , les apophyses transverses des vertèbres lombaires, et s’introduit jusque dans l’intérieur du corps des vertèbres lombaires. Ce réservoir supérieur de l’abdomen communique d’une part avec les os de la colonne vertébrale ; de l’autre , il se prolonge au travers du trou obturateur jusqu’à la région supérieure de la cuisse , où il donne naissance à une poche aérienne accessoire , placée entre la tête du fémur et l’os des iles, dans le voisinage de l’articulation coxo-fémorale. C’est dans l’intérieur de cette cellule que l’on distingue un trou par lequel l’air peut pénétrer dans l’os de la cuisse (1). L’air qui sort du réservoir supérieur du ventre arrive à celte cellule, soit en suivant les nerfs, qui , du plexus lombo-abdomi- nal, se rendent au membre inférieur, soit en suivant l’artère iliaque. Si l’air qui parvient à ce réservoir supérieur du ventre peut y être transmis par le moyen des conduits intérieurs du corps des (1 ) Je rappelle encore ici les nombreuses observations de limiter et de Camper sur l'absence de l'air dans les os du'membre inférieur des Oiseaux domestiques ou coureurs , et sur la présence de ce gaz ainsi que l'absence de graisse dans le fémur des Oiseaux bons voiliers. Ces remarques ont été plus récemment étudiées avee détail par Jacquemin (I. c.). 60 VVI'AI.IS «IILLOT. — suit l.’.Vl’l’ VI1EII. vertèbres , avec lesquels communique le réservoir thoracique , il y pénètre , et plus facilement encore , par un large orifice qui forme une très remarquable communication entre les réservoirs supérieurs et inférieurs du ventre. Cet orifice, situé à peu près au niveau de l’apophyse transverse de la première vertèbre lombaire , est bordé par de larges replis membraneux, derrière lesquels apparaissent les ouvertures des conduits aériens du rachis. La description des réservoirs inférieurs du ventre fera mieux comprendre la disposition de cette ouver- ture (1). 13. Réservoirs abdominaux inférieurs. On ne pourrait apercevoir ces organes avant de les avoir in- sufflés; ils flottent alors dans 1‘ intérieur de la cavité péritonéale , appliqués sur le péritoine, semblables à des lambeaux irréguliers de fausses membranes. Dans cet état , il est très facile de les in- ciser ou de les déchirer, et, par conséquent, on risque fort de ne pouvoir en comprendre la disposition. Quelquefois une certaine quantité d’air les remplit encore après la mort de l’animal, et produit, par une inégale répartition, l’appa- rence de plusieurs cellules isolées là où une investigation plus at- tentive ne démontre qu'un réservoir unique. Préparés par une insufflation convenable , qu’on ne doit point exagérer de peur de briser des enveloppes fragiles , ces réservoirs offrent l’apparence de deux énormes vessies symétriquement dé- veloppées à droite et à gauche de la colonne vertébrale (!2). Elles occupent alors non seulement toute l’étendue de la ca- vité abdominale, mais elles en dépassent les limites, leur circon- férence parvient au niveau même de la partie moyenne de la cuisse. Le volume qu’elles offrent est partout considérable ; les dia- mètres de ces vessies peuvent être supérieurs à un décimètre dans les Oiseaux tels que le Coq , le Faucon , la Cresserellc , etc. 11 est de plus de trois centimètres dans les petits Oiseaux, comme les Serins, les Tarins, les Fauvettes, etc., etc. (i) ri 4,oi' — (2) fi. :t. ri. i. m DE I.\ RESPIRATION DANS I.ES OISEAUX. fil La transparence et la régularité des contours de ces organes sont admirables, et cette diaphanéité est telle, que je ne saurais comparer ces vessies à autre chose qu’à d’énormes bulles de savon; elles en ont toute la fragilité. La figure qui les distingue est régulièrement globuleuse après l'insufflation ; dès qu’elles se vident, elles s’affaissent et disparais- sent aussitôt. Les rapports tangentiels de ces vessies aériennes distendues sont les suivants : en bas, elles touchent de tous côtés aux parois de l’abdomen, au gésier, aux bords inférieurs du foie, aux pro- longements latéraux du réservoir aérien thoracique. En dedans, du côté de la ligne médiane, elles sont séparées par toute la masse du canal digestif et par l’épaisseur du mésen- tère. Entre chacune d’elles et ce mésentère longitudinal, on voit les testicules, les conduits déférents chez le mâle , et du côté gau- che, chez la femelle, on remarque l’oviducte. En haut , elles s’étendent au-dessous de la masse de chaque rein qui les sépare du réservoir abdominal supérieur; la surface inférieure du rein constitue donc la limite qui borne supérieure- ment l’intérieur de chacune de ces vessies aériennes. La membrane qui constitue ces vastes vessies doit être formée de deux feuillets : l’un est le feuillet propre, qui parcourt toute I étendue de la cavité aérienne , sur les reins, sur l’artère iliaque, sur les veines rénales, et qui va se continuer sur tous les contours intérieurs; l’autre est extérieur : c’est le péritoine appliqué sur la membrane précédente, et la doublant tout autour des vessies aé- riennes. Mais il n’est pas possible de séparer ces deux feuillets l’un de l’autre; on ne peut en constater l’existence qu'à l’endroit où le péritoine quitte la surface du réservoir aérien , pour aller couvrir toutes les autres parties placées dans l’intérieur de l’ab- domen. Quoique recouvertes par la membrane péritonéale, ces vessies aériennes n’ont aucune espèce de communication avec la cavité du péritoine : on peut insuffler cette cavité, la distendre par un liquide , sans remplir, en aucune manière , les organes destinés à renfermer l’air. 11 est même possible d’enlever en totalité le canal VATAMS ei’lUOT. G2 — sir l’appareil digestif, et de conserver le réservoir aérien dans toute son inté- grité. Il en serait autrement si, comme on l’affirme, l'air était contenu dans l’intérieur de la cavité tapissée par la membrane séreuse. Le point de départ de la membrane qui sert à former ces vessies aériennes se découvre dans la profondeur de la région antérieure du ventre, au-dessus et en dehors de la face supérieure du foie. Là, cette membrane circonscrit un orifice par lequel l’air sort des poumons (1); elle s'attache ensuite en haut, d’une part en dehors, tout autour du bord mousse du petit bassin, de l’autre à tout le bord externe du canal déférent ou à la base du repli péri- tonéal de l’oviducte. Elle tapisse la surface antérieure du rein ; elle s’accole également à la membrane du second réservoir sus- costal, et la double : c’est au moment où disparaissent ces con- tacts, soit sur le rein, soit sur l’os des iles, soit sur le réservoir thoracique , que la membrane des vessies aériennes commence à être recouverte par le péritoine. C’est aussi à partir de ces points d’adhérence qu’elle s’élève, lorsqu'elle est insufflée, pour s’étendre jusqu’ au-dehors de la cavité de l’abdomen. L'examen de l’intérieur des vessies aériennes démontre , dans la région antérieure de l’abdomen, l’existence de deux orifices de communication qui rattachent ces réservoirs, d'une part aux bron- ches , de l’autre aux réservoirs abdominaux supérieurs ou supra- rénaux (2). L’orifice par lequel l’air sort des bronches se découvre à la base de la poitrine, au-dessus du niveau de la dernière côte, dans un endroit plus ou moins rapproché de la colonne vertébrale, suivant les espèces. Il est bordé par un repli membraneux au travers duquel on voit un prolongement du poumon, à la surface duquel on distingue un ou plusieurs pertuis donnant passage à l’air. Au-dessous de cet orifice , on en voit un autre dont le niveau est à peu près celui de la première apophyse transverse des ver- tèbres lombaires. Celui-là fait communiquer les deux réservoirs fl) PI. 4, /i. — PI. 4, Ml'. I)F, FA RESPIRATION DANS FF,S OISEAUX. 63 aériens du ventre. Il est, de même que le précédent, entouré par un seul ou par plusieurs replis membraneux, dans l’épaisseur desquels se répandent quelques ramifications nerveuses nées des ganglions du nerf intercostal. A partir de ces orifices, la surface interne des vessies aériennes s’étend sur la veine cave, sur la veine rénale, sur l’artère iliaque, sur une partie de la circonférence de chaque rein , limitée par la veine rénale. Les organes dont je signale l’existence n’ont aucune sorle de rapport avec les prétendues cellules indiquées sous le nom de cellules vides et de cellules pleines, de cellules du cloaque et de l’intestin, etc. Rien de ce qui a été décrit ne ressemble à l’état naturel des choses. Le regard pénètre si facilement au-delà des enveloppes de ces réservoirs, que l’on peut voir aisément qu’ils ne résultent en au- cune manière d’un amas de cellules. Ce sont de larges vessies aériennes, dont les enveloppes sont excessivement minces, et rien de plus. La considération de ces organes montre donc quelles erreurs ont été commises par ceux qui ont attribué à l’air introduit dans le ventre des Oiseaux des routes et un séjour que la nature ne lui a point assignés. L’énorme capacité des réservoirs aériens abdominaux complète l'ensemble des organes accessoires du poumon des Oiseaux. On a dû comprendre, par ce que j’ai dit précédemment du passage de l’air dans les conduits aériens des vertèbres, par le moyen du réservoir supra-laryngien, que ce réservoir peut servir à conduire l’air jusque dans l’intérieur du ventre, et que, d’autre part, à l’aide des mêmes conduits vertébraux, l’air peut trouver une issue qui l’aide à sortir du ventre par les trous situés entre les apophyses transverses des os du sacrum ou des lombes. Ces orifices reçoivent d’abord l’air qui provient du réservoir supra-rénal ; mais ils le reçoivent également des vessies aériennes du ventre, puisque les deux réservoirs abdominaux s’abouchent l’un dans l’autre à l’endroit même où commence chacun d’eux. Si les descriptions précédentes des réservoirs thoraciques et VVI U.IS M IM AT. SI R I APPAREIL 64 abdominaux peuvent faire comprendre l’étendue des surfaces en contact avec l’air, et même faire soupçonner, jusqu’à un certain point, le degré d’utilité de ces organes, d’autres détails sont ce- pendant encore utiles à connaître, afin que le degré d’utilité de ces parties puisse être un jour convenablement apprécié. CHAPITRE IV. RAPPORT DES RÉSERVOIRS AÉRIENS DES OISEAUX AVEC I.ES MUSCLES ET I.ES APONÉVROSES. On a déjà cherché à signaler les rapports des cavités aériennes et des organes musculaires. G. Cuvier (1) admit avec raison que les parois musculaires de l’abdomen devaient resserrer les cellules abdominales qu’il dé- crivait. li ajouta même que les parois de plusieurs de ces cellules sont évidemment musculeuses et capables de se contracter. !l est possible qu’il en soit ainsi chez l’Autruche, animal indiqué par Cuvier comme l’objet de ses investigations; mais il est toutefois très permis de n’accepter cette assertion qu’avec une grande réserve. Les deux vessies aériennes des Oiseaux ne m’ont jamais offert la moindre apparence d’une fibre musculaire ; j’ai vainement cher- ché cette disposition. Elles sont élastiques ; cette propriété est fort évidente, car elles reviennent sur elles-mêmes lorsque l’air s’en échappe. Tout en tenant compte des resserrements des vessies dus à l’é- lasticité dont elles jouissent, on peut croire qu'elles doivent être principalement soumises à l’influence des mouvements de con- traction des divers muscles de l’abdomen. Cette action doit sur- tout servir à expulser l'air qu’elles renferment , et à le refouler dans chaque poumon. On comprendra sans peine, en examinant la poitrine d’un Oi- seau , que les muscles qui servent à agrandir le thorax pendant l’inspiration doivent également aider l’air à sortir des bronches, (I) G. Cuvier, I. r., t IV. an siv. p 365 I. 20. DF. I.\ RESPIRATION DANS I.FS OTSFAIX. (35 à distendre les cellules aériennes ; mais il est plus difficile de se rendre compte des forces capables de le chasser entièrement de ces mêmes cavités, de le faire passer des unes dans les autres, jusque dans les tuyaux bronchiques. Dans la poitrine, de même que dans l’abdomen, aucun organe musculaire n’agit encore sur le réservoir aérien, en s’attachant directement sur l’enveloppe qui le limite. Ce n’est que dans un point particulier du corps des Oiseaux que l’action des organes musculaires sur le réservoir aérien paraît être directe ; les muscles non seulement y protègent et soutiennent les cellules aériennes par un contact immédiat, mais quelques uns d’entre eux encore s’attachent aux parois du réservoir aérien, soit directement, soit par le moyen de bandelettes aponévrotiques. Ils sont tellement disposés, qu’ils pourraient être considérés comme des organes tenseurs des enveloppes de ces parties. C’est seulement à la surface de la poche axillaire que ces dis- positions des organes musculaires peuvent être étudiées. Je vais essayer de les faire comprendre en indiquant successi- vement les muscles qui me semblent, en partie du moins, insérés directement sur l’enveloppe propre des cellules aériennes du creux de l’aisselle. Ces muscles sont : 1" Un muscle peaucier, irrégulièrement quadrilatère, aplati , très faible dans les animaux jeunes , très appréciable dans la vieillesse, inséré à la surface adhérente du tégument externe d’une part , de l’autre attaché solidement à l’aponévrose qui adhère à la poche axillaire. Cette aponévrose est le résultat de plusieurs ex- pansions fibreuses nées des muscles pectoraux , scapulaires, et de deux portions du muscle grand dorsal. La partie antérieure des fibres de ce muscle peaucier se confond avec les fibres du muscle pectoral. ■2“ Le muscle grand pectoral. Sur les Gallinacés , ce muscle peut être facilement divisé en deux parties : l’une principale ser- vant à abaisser l’humérus , étendue depuis le sternum et la clavi- cule jusqu’à la crête humérale ; l’autre accessoire placée en dehors de la précédente, séparée d’elle par une longue expansion fibreuse. 3e série. Zool. T. V. (Février 1 8 46.) i 5 66 NATALIS CàUILiLOT. — SL' R L’APPAREIL Cette portion accessoire s’attache k la surface externe des côtes ; elle se dirige en avant, s’unit à la partie la plus reculée du réservoir axillaire , qu’elle recouvre , et sur lequel ses fibres s’im- plantent, dès que cette portion musculaire distincte s’est unie par une aponévrose commune au muscle scapulaire et au muscle peaucier. Après s’être implantées sur toute l’étendue du réservoir axil- laire , ces fibres du muscle pectoral accessoire donnent, naissance k une double expansion aponévrotique née d’une base commune : l’une de ces expansions se porte k la membrane de l’aile , s’y divise en plusieurs prolongements et sert k la tendre ; l’autre suit la direction du bras, et va s’attacher k l’extrémité interne et infé- rieure de l’humérus. On ne saurait douter, en disséquant ce muscle, qu’il ne s’at- tache k la membrane du réservoir aérien , et qu’il n’ait une action directe sur elle. 3° Le double faisceau musculaire désigné sous le nom de rhomboïde (Meckel) , et que Cuvier désigne comme étant l’ana- logue du grand dorsal de l’Homme. La partie la plus antérieure de ces faisceaux musculaires , in- sérée d’abord aux apophyses épineuses des premières vertèbres dorsales, marche vers le bras sous la forme d’une languette très mince, et vient s’attacher k la ligne âpre de l’humérus. Avant son insertion , elle se confond , par plusieurs prolongements , avec l’aponévrose qui provient du pectoral accessoire. La tension de ces parties membraneuses peut concourir k maintenir l’air dans l’intérieur de la poche aérienne. Le second faisceau, que l’on a considéré comme une portion du muscle grand dorsal, naît en arrière du précédent, marche comme lui vers l’épaule , et se transforme rapidement en une même apo- névrose qui vient se perdre k la surface du réservoir axillaire. On peut considérer encore ce faisceau musculaire comme un agent énergique de dilatation. 4“ Le muscle , désigné sous le nom de sus-épineux , que je nomme muscle scapulaire , né de la surface supérieure de l’omo- plate. se dirige vers l’épaule en embrassant une partie du ré- DE LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 67. servoir aérien qui pénètre même au milieu des fibres muscu- laires qui l’enceignent. L’une des portions de ce muscle est supé- rieure ; ses fibres adhèrent à la membrane du réservoir aérien , concourent à former l’aponévrose commune qui la recouvre et en fortifie les parois , pénètre ensuite dans l’intérieur de la cavité aérienne, et, recouverte par une membrane très fine, va s’atta- cher à la tubérosité interne de l’humérus. 5° Quelques fibres musculaires distinctes se rendent encore, dans les Oiseaux de proie , à l’extrémité inférieure du réservoir axillaire ; on les distingue très bien sous la forme d’un petit fais- ceau irrégulièrement quadrilatéral dans le Faucon, la Buse et l’Émouchet. Il est encore nécessaire d’ajouter à la nomenclature de tous ces muscles l’indication d’un petit faisceau musculaire singulièrement disposé ; il naît de la quatrième et de la cinquième côte , monte obliquement en arrière , et perfore le muscle que j’appelle scapu- laire (sus-épineux, teckel); puis, s’élevant toujours vers la région antérieure sous la forme d’un cylindre très grêle , il par- vient à la peau entre l’épaule et le cou, et se fixe à ce tégument. Cet organe ne semble-t-il pas être destiné à fortifier encore l’ac- tion de toutes les parties musculaires étalées à la surface du réser- voir aérien ? Tous les détails dans lesquels je viens d’entrer peuvent-ils faire penser que ces muscles n’ont aucune influence sur le développe- ment de la capacité des réservoirs aériens de l’aisselle? Je ne saurais adopter cette manière de voir ; il me semble, au contraire, qu’ils sont disposés de manière à en accroître les dimensions, et à favoriser l’entrée de l’air dans ces régions éloignées du centre du corps , et largement comprimées toutes les fois que la portion interne du muscle grand pectoral exécute un mouvement violent. 68 XATAMS GUILI.OT. SUP, I.’APPAREir. CHAPITRIi V. DU RAPPORT des vaisseaux sanguins AVEC i.es réservoirs AÉRIENS DES OISEAUX. Si l’on considère l’ensemble de l’appareil respiratoire des Oiseaux sur un animal dont les vaisseaux sanguins ont été péné- trés par une injection très fine, il est facile de voir que le nombre des vaisseaux des réservoirs aériens ne saurait être comparé à l’énorme proportion d’artères et de veines divisées à l’infini dans chacun des poumons. Ces organes conservent toujours le carac- tère important de vascularité qui leur est propre dans toutes les espèces, quelle que soit l’étendue des réservoirs avec lesquels les bronches communiquent. Au premier aperçu, sur un animal non injecté, les membranes des réservoirs aériens semblent généralement privées de vais- seaux ; il faut alors quelque attention pour en découvrir les traces, car ils s’effacent rapidement après la mort. Il n’en est pas de même lorsque des injections convenables ont pénétré jusqu’aux ramifi- cations les plus délicates des vaisseaux sanguins du corps. Ces veines et ces artères, inaperçues dans le premier cas, apparaissent alors, remplies par les matières colorantes, et peuvent être l’objet de quelques observations. Aucun de ces vaisseaux des réservoirs aériens ne provient de l’artère pulmonaire ; aucun d’eux ne paraît verser le sang dans les veines pulmonaires : ils sont donc entièrement distincts des conduits ordinaires de la circulation des poumons. Les artères naissent des troncs du système aortique les plus rapprochés de la surface membraneuse sur laquelle elles se répandent. Les veines sc jettent en général dans les branches veineuses les plus voisines. Les artères qui se rendent aux membranes des renflements du réservoir infra-laryngien se répandent à la surface de ces poches, le long des cloisons des cellules ; on les aperçoit très bien après avoir disséqué la peau du cou et après avoir enlevé le jabot. Elles ne sont pas assez nombreuses pour indiquer une grande UE LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 69 vascularité de ces poches, mais on en distingue parfaitement l’existence ; elles naissent des deux branches de la carotide , que Barkow a désignées sous le nom de rameaux cutanés du cou. Toutes les veinules qui correspondent à ces branches vont se terminer dans chacune des veines jugulaires. .le ne saurais passer sous silence quelques particularités rela- tives aux petits organes décrits de chaque côté du cou par Meckd etM. Magendie (1), auprès de la partie du réservoir aérien supra- laryngien qui se prolonge le long du cou , en avant et sur les côtés de la colonne vertébrale. Ces petits organes forment quel- ques masses du volume d’un pois, irrégulièrement arrondies; le nombre en est variable. 11 en existe trois ou cinq de chaque côté ; ils sont rougeâtres dans l’état ordinaire ; lorsque les veines sont injectées , ils ressemblent au contraire à un amas de petites vei- nules ayant la couleur de la matière lancée dans les veines; lors- qu’on les examine avec le microscope, on peut reconnaître qu’ils sont presque entièrement composés d’un lacis très multiplié de veinules, dont les rameaux principaux vont se jeter dans les veines jugulaires. J’ignore absolument quels peuvent être les usages de ces petits ganglions veineux ; mais j’ai voulu les rappeler à l’at- tention des observateurs, parce qu’on les a comparés au thymus , et qu’ils font réellement partie du système veineux du réservoir aérien. Toutes les cellules membraneuses latérales du thorax , inté- rieures ou extérieures , reçoivent des artérioles qui se répandent à la superficie des enveloppes de ces réservoirs. Ces artérioles proviennent des artères humérales et pectorales pour les réservoirs sous-axillaires ; d’autres rameaux naissent de chacune des artères thoraciques intérieures , de l’artère pectorale ou thoracique extérieure, de chacune des artères intercostales, et même des rameaux de l’artère cœliaque répandus sur le gé- sier. Toutes ces artères forment des plexus très évidents sur les surfaces du réservoir aérien voisines des parois de la poitrine, et (I) Meckêl, Anal, cump., irait, par Riesler, t. I, p. 252. 1 828. — Magendie, Ment, sur plusieurs organes particuliers qui existent dans les Oiseaux (l dans les Ilcplilcs[llull. delà Soc. philomatique, 1519), 7V4TILIS GlILLOT. sur l’appareil 70 donnent naissance à un nombre très considérable de petites vei- nules. Ces vaisseaux veineux , sortant d’un plexus commun , se dirigent, sous l’apparence d’une foule de petites branches, vers chacun des bords externes des lobes du foie, et pénètrent dans l’in- térieur de cet organe. Ce sont de petites veines qui , sur une très médiocre échelle, ont tout-à-fait le caractère de petites veines portes, puisque le sang qui les traverse ne parvient au cœur qu’a- près avoir traversé l’organe de la sécrétion biliaire. Les ramifications artérielles et veineuses répandues à la sur- face des vessies aériennes abdominales sont bien moins nom- breuses ; on en constate l’existence , cependant on les injecte diffi- cilement. Jamais elles ne forment à la superficie de ces vastes réservoirs des plexus aussi distincts que les plexus des réservoirs thora- ciques. Les artères viennent de quelques petits rameaux produits par l’artère iliaque ou fémorale voisine de la courbure postérieure des vessies aériennes ; elles se propagent , sous l’apparence de ramifications très grêles , tout autour de la circonférence de ces organes. Les veines suivent le même trajet , et marchent de plus en plus parallèlement aux artères à mesure qu’elles s’éloignent de leur origine; elles se terminent à la veine iliaque ou crurale. Telles sont les dispositions les plus générales de ces vaisseaux veineux et artériels. Si elles indiquent un rapport constant entre les réservoirs aériens et l’appareil de la circulation ; si elles peuvent faire préjuger quelques uns des usages de ces réservoirs, elles autorisent en même temps à penser que ces fonctions sont loin d’être actives ; car , dans tous les endroits du corps des ani- maux où une fonction active est opérée , le nombre des voies de la circulation est manifestement multiplié. Si donc ces réservoirs aériens peuvent être considérés comme des appareils d'hématose, cette opinion ne saurait être acceptée qu’en admettant que la fonction ne peut avoir ni une activité ni une importance bien grandes. DE LA RESIMKVriON DANS LES OISEAl \. 71 CHAPITRi; VI. DI RAPPORT DES RÉSERVOIRS AÉRIENS AVEC I.ES VAISSEAUX LYMPHATIQUES. L’étude des vaisseaux lymphatiques répandus à la superficie des réservoirs aériens est extrêmement intéressante; mais elle est loin d’être facile. Lorsque les animaux ont jeûné longtemps, on ne voit point ces conduits ; il est donc indispensable de nourrir les Oiseaux avant de les sacrifier. Lorsqu’on a insulïlé les réservoirs aériens des Oiseaux que l’on a tués pendant la digestion , on trouve la majeure partie des sur- faces couverte de vaisseaux lymphatiques, dont on reconnaît la présence non seulement autour des diverses cavités du réservoir thoracique, mais encore sur les réservoirs aériens du ventre. Ils existent à la superficie des réservoirs thoraciques sous-cos- taux, entre lesquels passe le ventricule succenturié. On les distingue également sur les deux prolongements abdo- minaux de ces mêmes réservoirs thoraciques. Le nombre en est très appréciable sur les deux énormes vessies aériennes du ventre; mais si on distend ces derniers organes avec trop de force , on fait disparaître les vaisseaux lymphatiques, parce qu’ils se vident alors. Ces vaisseaux forment partout une série très appréciable d’a- nastomoses, desquelles résulte un lacis étendu à la surface des membranes placées au contact de l’air. Je ne connais nulle part, dans les autres animaux , même chez l’Homme , une disposition des conduits lymphatiques capable de rappeler celle que j’indique. Elle est ici tellement caractérisée, et le nombre des anastomoses est si multiplié, que je concevrais parfaitement bien que l’on pût regarder ces vaisseaux comme les agents d’une respiration particulière. Dans les réservoirs, l’air aurait donc , sur les liquides contenus dans les parties que je dé- signe, une action analogue à celle qu’il exerce sur le sang de l’ar- tère pulmonaire. Quoi qu’il en soit, il ne me paraît pas possible que ces détails puissent être insignifiants. 72 \AT\MS «l'ILLOT. — SUIS 1,’APl'ARlilL Il est certain que les vaisseaux observés ne sont point des con- duits sanguins ; ces derniers se remplissent très bien par des in- jections fines, que les animaux aient mangé ou qu’ils aient été affamés. Les autres nesc découvrent, au contraire, que pendant la digestion , et les injections lancées dans les artères ou les veines n’y pénètrent qu’ après avoir été poussées au-delà de leurs der- nières limites. On ne peut les injecter avec le mercure: j’ai essayé maintes fois de le faire , sans obtenir aucun résultat , parce que je les ai constamment rompus. Ce n’est donc , je le répète , que pendant la digestion seule qu’on peut les apercevoir, les liquides venant alors affluer de toutes parts à la superficie du réservoir aérien. Je ne doute pas que, dans les régions les plus antérieures des réservoirs aériens, loin du canal digestif, ces liquides ne soient entièrement analogues à la lymphe ; mais il ne paraît pas en être ainsi dans le voisinage du ventricule succenturié, du gésier, et dans l’intérieur de l’abdomen. Là, ce sont véritablement des con- duits qui ont la plus grande analogie avec les vaisseaux chyli- fères. Le liquide charrié par ces vaisseaux est trouble, opalin, et ab- solument le même que celui cpii parcourt les conduits lactés du mésentère. La comparaison est certes bien facile, puisque, sur le même animal , le mésentère et les réservoirs aériens sont égale- ment tapissés par des ramifications et des anastomoses formées par des vaisseaux de même apparence. J’ai dû chercher à savoir comment cette circulation du chyle pouvait être opérée; il m’a paru qu’il fallait prendre en consi- dération la disposition des principaux vaisseaux destinés à porter ce liquide jusque dans les veines. Je n’insisterai point sur ce sujet, à l’occasion duquel j’entreprends en ce moment de nouvelles études: mais je signale seulement les remarques suivantes k l’at- tention des anatomistes. L’appareil de la circulation de la lymphe et du chyle se com- pose, dans l’abdomen des Oiseaux, de vaisseaux principaux et de conduits secondaires. Les vaisseaux principaux sont au nombre de trois. Les deux DE LA IIESI’IUATION DANS LES OISEAL'A. 73 premiers sont pairs; il en existe un à droite et un à gauche, de chaque côté de la colonne vertébrale. Us sont étendus symétri- quement sur toute la longueur des reins, au dedans du canal défé- rent chez le mâle, et de l’oviducte chez la femelle. Ces vaisseaux sont ceux qui ont été décrits par Lauth et par l’ohmann. Us re- çoivent les vaisseaux lymphatiques du membre inférieur. L’autre canal est le canal principal des vaisseaux chylifères; il est étendu tout le long du mésentère, et reçoit deux canaux égale- ment volumineux qui proviennent, en bas, des cæcums, en haut, de la courbure du duodénum. II a été également indiqué par l’olnnann et par Lauth. Ces deux ordres de vaisseaux aboutissent à un endroit placé au-devant de la veine cave , dans les régions supérieures de l’ab- domen, entre les deux testicules, entre les deux ouvertures qui font communiquer les vessies aériennes du ventre avec les pou- mons. Là, ils se confondent les uns avec les autres, non seule- ment en formant des plexus multipliés autour de la veine cave , mais encore en produisant une ou deux dilatations , difficiles à apercevoir dans la plupart des Oiseaux, mais dont l’on parvient cependant à constater l’existence en multipliant les recherches. 11 faut cependant reconnaître que ces dissections sont fort diffi- ciles, et que l’erreur est à craindre. U est possible qu’à cet endroit les vaisseaux chylifères aient des communications avec la veine , mais je ne saurais l’affirmer : ce que je puis dire, c’est que , lorsqu’on injecte avec du mercure dans ces gros troncs de lymphatiques , on pénètre souvent dans la veine cave. C’est dans les deux troncs latéraux des vaisseaux lymphati- ques du ventre que se terminent les rameaux secondaires étendus à la surface interne des membranes des réservoirs abdominaux. On peut facilement vérifier l’existence de cette particularité sur des animaux qui ont pris des aliments. Les vaisseaux lymphatiques, de la présence desquels résultent les plexus multipliés à la superficie des prolongements abdomi- naux du réservoir thoracique, se réunissent en troncs de plus en plus volumineux , à mesure qu’ils sc rapprochent du ventricule 74 VVI'AI.IS (.IIIJWI. — sun l'apparkil succenturié. Ils passent au-dessus de lui, et ils viennent, si je ne me trompe, aboutir au confluent des deux troncs désignés, dans le voisinage de la veine porte; ils m’ont paru s’anastomoser avec les vaisseaux lymphatiques du réservoir infra-rénal de l’abdo- men. Ces vastes vessies touchent, en ellét, de fort près les pro- longements abdominaux du réservoir thoracique , puisque , dans la région antérieure du ventre , ces cavités ne sont séparées que par une cloison commune. On expliquerait difficilement la présence du chyle autour des réservoirs aériens, si l’on perdait de vue le rapport de contiguïté qui rapproche le ventricule succenturié et le gésier des réservoirs latéraux de la poitrine et même des réservoirs abdominaux. Ces deux parties du canal alimentaire n’ont point de mésentère : les vaisseaux chylifères qui en dérivent sont donc nécessairement obli- gés de suivre les parois des parties les plus voisines, formées par les membranes des réservoirs aériens. C’est par l’action très énergique du ventricule succenturié que paraissent être produits les liquides destinés à parcourir les vais- seaux lymphatiques répandus sur le pourtour des prolongements abdominaux du réservoir thoracique; on n’en saurait douter en examinant des animaux tués pendant la digestion. Ces vaisseaux se dessinent sur toute la surface des cavités aériennes en formant un lacis de vaisseaux rarement volumineux, le plus souvent extrê- mement fins , et anastomosés les uns avec les autres ; on les reconnaît à la couche blanche qu’ils possèdent ; elle est tout-à-lait analogue à la couleur des vaisseaux chylifères répandus à la su- perficie du mésentère. J’aurais voulu en extraire le liquide pour l’analyser et en reconnaître la nature, mais il m’a été impossible de le faire. La maladie, si fréquente chez les Oiseaux . à laquelle on donne vulgairement le nom d'avctlvre, doit tenir probablement à des alté- rations particulières des liquides charriés par ces vaisseaux. Dans cette affection, tous les réservoirs aériens, et surtout les réservoirs qui reçoivent les vaisseaux chylifères du ventricule succenturié, sont couverts d’une couenne jaunâtre, souvent épaisse de plusieurs millimètres, Celte maladie ne permet plus que l'air soit en contact DE |,\ RESPIRATION DANS I.ES OISEAUX. 75 avec les membranes délicates au milieu desquelles il doit péné- trer, et force l’animal à respirer, comme les autres vertébrés , à l’aide des poumons seuls. Plusieurs remarques intéressantes résultent encore de l’examen du rapport de chacun des réservoirs aériens avec les ramifications du système nerveux. Elles exigent le secours de dissections multi- pliées, et elles conduisent à faire penser que ce ne sont pas seule- ment les nerfs de la huitième paire et les nerfs du grand sympa- thique qui se répandent dans les membranes destinées au contact de l’air, mais encore que des nerfs de la vie animale viennent se prolonger jusqu’aux membranes des cavités aériennes. L’appa- reil respiratoire des Oiseaux aurait donc avec le centre nerveux un rapport que l’on ne saurait apprécier dans les autres classes de Vertébrés. On peut très facilement suivre les rameaux du plexus cervical qui, dans le Paon, dans le Dindon, même dans le Coq, se répandent à la superficie des réservoirs infra et supra-laryngien : on peut disséquer des ramifications analogues qui proviennent plus loin du plexus axillaire, et qui s’étendent à la surface des cavités aériennes situées au dehors de la poitrine , au-dessous de l’omo- plate. Dans la région la plus antérieure de l’abdomen, auprès des orifices communs des deux réservoirs abdominaux, quelques ra- meaux des nerfs vertébraux parcourent également les replis mem- braneux qui bordent ces ouvertures. Des filets plus ou moins nombreux du nerf pneumo-gastrique s’écartent à droite et à gauche de chacun des troncs principaux de ce nerf, et se divisent dans les parois de chacun des réservoirs thoraciques. On les perd rapidement de vue; mais enfin on peut en constater l’existence. C’est principalement en arrière des deux poumons, auprès des articulations costo-vertébrales et des apophyses transverses des vertèbres dorsales et lombaires, que le rapport des réservoirs aériens avec le système nerveux est le plus curieux à étudier, mais seulement dans quelques Oiseaux. Dans le Paon surtout, on remarque à cet endroit du corps les ganglions du nerf grand sympathique, placés les uns après les autres entre chaque espace 76 NATALIS Gl II. 1.01. SUR L'APPAREIL intercostal. Ils sont très apparents , et la dissection n’en est pas difficile. Chacun de ces ganglions repose sur une petite cavité aérienne environnée par les filets nerveux émanés du ganglion. L’ensemble de toutes ces cavités aériennes réunies constitue la seconde partie du réservoir supra-laryngien destiné à transmettre l’air aux vertèbres dorsales et au membre antérieur. Dans l’animal que je signale, les plexus formés sur les mem- branes de ces cavités aériennes sont très appréciables dans toute la longueur de la poitrine ; mais on les remarque surtout dans le voisinage de la première et de la dernière côte. Dans tous les Oiseaux, on peut constater, sur une échelle plus ou moins étendue , l’existence de ces plexus nerveux : tantôt ils sont très appréciables dans le voisinage de l’articulation de chaque côte, comme dans le Paon ; d’a*utres fois, on ne les distingue que vers le sommet et à la base de la poitrine , ainsi que cela se voit sur le Coq. Mais que d’études nécessaires avant que toutes ces variations puissent être convenablement appréciées ! La considération de l’ensemble et des détails offerts par les réservoirs aériens des Oiseaux ne doit pas être seulement res- treinte aux descriptions anatomiques du genre de celles qui pré- cèdent; un autre sujet d’ctude également intéressant doit être entrepris et continué sur une échelle étendue. Lorsque ces obser- vations auront été complètes, il sera possible de se faire une idée exacte du rôle que doit jouer cet étrange appareil : jusque là , les affirmations ne devront être émises qu’avec réserve , et les tra- vaux même les plus exacts n’auront pour résultat que de pré- parer les anatomistes à d’autres investigations. Curieux de connaître les changements subis par les réservoirs aériens dans les différentes périodes de la vie, j’ai dû entreprendre quelques recherches sur la famille des Gallinacés , où l’àge est facile à déterminer d’une manière approximative. Les autres ani- maux, excepté toutefois les Pigeons, ne pouvaient me fournir que de grandes incertitudes. Les résultats suivants m’ont paru très prononcés lorsque l’on compare un jeune Coq à un vieux Coq, moins précis peut-être, DE LA RESPIRATION DANS LES OISEAUX. 77 mais cependant très acceptables, lorsque l'on met en regard deux Poules, dont l’une est adulte, et l'autre très âgée. La capacité des réservoirs aériens, indiquée par l'insufflation de la trachée et par le degré de distension des enveloppes mem- braneuses, paraît sensiblement modifiée aux deux âges extrêmes, mais non pas de la même manière , dans le réservoir thoracique et dans le réservoir abdominal. Les deux vessies aériennes du ventre m’ont semblé plus vastes dans les Coqs les plus âgés que dans les jeunes Coqs nés depuis moins d’un an; j’oserais même assurer que ces organes n’ont pas acquis , dans le courant de cette première année, tout le dévelop- pement auquel ils peuvent atteindre par la suite. Mais en est-il de même dans les autres espèces? Je n’ai point assez sacrifié d’a- nimaux pour avoir le droit d’exprimer une opinion aflirmative à cet égard. Les réservoirs infra et supra-laryngiens semblent plus déve- loppés dans les Coqs de deux années que dans les animaux très jeunes ; ils m’ont paru moins étendus sur quelques animaux dont j’ignorais l’âge , parce qu’ils avaient été achetés sur les marchés, mais chez lesquels la dureté , la coloration des os, l’os- sification des cartilages, la couleur de la peau , des muscles et la résistance des aponévroses semblaient annoncer que la nais- sance datait de plusieurs années. Mais, je le répète encore, ce sont plutôt des aperçus que je soumets à l’expérience que des assertions que j’émets. Des remarques plus précises peuvent résulter de la comparai- son du Coq et de la Poule ; il me semble qu’elles autorisent à ad- mettre l’influence du sexe sur le développement des réservoirs aériens. Les deux vessies abdominales de la Poule sont, en général, moins étendues que celles du Coq ; l’insufflation semble bien le démontrer. Il en est de même du réservoir aérien thoracique, dont on peut juger les dimensions dans les deux sexes, en com- parant les prolongements qui s’étendent jusque dans l'abdomen, les deux parties latérales sus-costales du réservoir aérien thora- cique, ainsi que les poches axillaires de ce même réservoir. Tout 78 NATAI.18 GLILLOT. SLIP. L’APPAREIL est plus restreint dans la Poule que dans le Coq. Les particula- rités relatives aux expansions aponévrotiques et aux muscles de la poche axillaire apparaissent également tracées sur un plan moins étendu. Des différences analogues se présentent dans les Pigeons mâles et femelles, chez les Serins et les Tarins des deux sexes : le déve- loppement du réservoir infra-laryngien , c’est-à-dire de la portion la plus externe du réservoir thoracique, offre, dans les mâles, un volume plus considérable que celui que l’on remarque dans le sexe femelle. De grandes difficultés s’opposent à la précision de ces remar- ques; mais des obstacles plus nombreux encore empêchent de déterminer toutes les variations de ces réservoirs aériens dans les familles nombreuses d’Oiseaux. Le plus grand développement des réservoirs thoraciques m’a paru propre aux animaux qui se soutiennent longtemps au milieu de l’air. Je confirme par cette assertion ce qu’ont déjà dit les observateurs. Le Faucon, la Buse, la Cresserelle, les Mouettes peuvent être, à cet égard, facilement comparés à nos animaux de basse-cour. Mais il ne m'a pas paru en être de même pour les deux vessies aériennes de l’abdomen. Quoique volumineuses et très étendues chez le Faucon , la Buse, la Cresserelle , etc., elles n’y acquièrent point encore le volume énorme des mêmes organes dans le Coq et dans le Dindon. A cet égard , il me semble qu’on ne doit point généraliser ce qui est relatif au réservoir aérien de la poitrine. Tel est l’ensemble des études anatomiques auxquelles je me suis livré; peut-être paraîtront-elles déjà capables de modifier quelques unes des assertions connues : cependant il me reste encore un autre examen à entreprendre , sans lequel je ne ferais qu’ imparfaitement comprendre les erreurs physiologiques que je désire voir effacer de la science. La généralité des physiologistes et des anatomistes qui ont étu- dié les Oiseaux pense : 1" que l’air des poumons pénètre dans une cavité thoraco-abdominale commune séparée par des cellules for- mant plusieurs divisions; que, dans cette cavité, le péritoine et les DE I,A H INSPIRATION DANS LES OISEAI 79 cellules aériennes ne constituent qu'un seul et même espace au milieu duquel l’air circule librement; 2“ que l'air sort des réser- voirs aériens, se répand dans le tissu cellulaire, et parvient jusque dans toutes les parties du corps de l’animal (1), Pour m’éclairer sur ces assertions autrement que par des dis- sections, j’ai dû entreprendre et répéter à plusieurs reprises les expériences suivantes. .l'ai d’abord injecté des liquides , tels que l’eau, l’essence de térébenthine, le suif fondu, par la trachée-artère, dans les réser- voirs aériens, et je n’ai jamais vu que ces substances aient pu dé- passer la limite des membranes que j’ai décrites. J’ai disséqué des animaux ainsi injectés: j’ai enlevé la peau, ainsi que les muscles des membres ou du tronc, et, tant que les réservoirs aériens ont été intacts, jamais les liquides ne se sont écoulés au dehors, comme cela aurait dû se faire s’il y avait eu quelque moyen de communication entre les réservoirs aériens et les autres parties du corps. 11 était cependant possible qu’il y eût encore quelque disposi- tion cachée par la mort de l’animal, en vertu de laquelle les choses auraient pu se présenter d’une tout autre manière pen- dant la vie. Pour éclairer davantage encore ce sujet, M. Milne Edwards me donna le conseil d’expérimenter sur des animaux vivants, et je dois à cette heureuse idée d’avoir pu démontrer d’une manière péremptoire les erreurs dans lesquelles on est tombé jusqu’ici. C’est donc un devoir pour moi de ne point m'at- tribuer le mérite des expériences suivantes. Il est facile de placer des Oiseaux sous l'eau et de maintenir la têteau-dehors du liquide. Je suppose que l’on a préalablement coupé les plumes aussi près que possible de leur insertion. Si le tissu cellulaire contient de l’air pendant la vie. il est cer- tain que cet air doit s’échapper sous l'apparence de bulles plus ou moins nombreuses, dès que la peau est coupée. Or, l’expérience démontre le contraire : on peut inciser les téguments d’un Oiseau, les enlever même en grande partie, sé- t)ti Cuvier I c — Jacquemin. I c 80 AIATALIS Gt'IIXOT. — Sl'Ii I.’APPARCTr. parer les muscles les uns des autres, les couper dans tous les sens, sans qu’une seule bulle d’air s’échappe. J’ai répété de semblables tentatives dans le voisinage du tronc , aussi bien que dans la con- tinuité des membres, même à la base du tuyau des plumes. Les résultats ont toujours été les mêmes : je n’ai pu constater nulle part la présence de l’air. Pour savoir si les réservoirs aériens communiquent avec le pé- ritoine, j’ai dû ouvrir la cavité tapissée par cette membrane : en apparence, rien n’est plus facile ; en réalité, une telle tentative ofl're de grandes difficultés, parce que les vessies aériennes, tendues par la respiration de l’animal , viennent appuyer sur les parois du ventre. Or, la ténuité des membranes est telle, que le moindre contact des instruments les déchire: cependant, avec un peu d’a- dresse et quelque patience, on parvient toujours à un bon résultat. Lorsque la cavité péritonéale a été ouverte et que les muscles abdominaux ont été rejetés à droite et à gauche du corps , aucune bulle d’air ne s’est encore échappée; mais les vessies aériennes, n’éprouvant plus aucun obstacle de la part des muscles abdomi- naux , se distendent à chaque mouvement du thorax, et se gonflent au milieu de l’eau qui les supporte de toutes parts, mais sans jamais acquérir le volume auquel elles peuvent parvenir lorsqu’on les insuffle artificiellement. On a donc alors sous les yeux la preuve la plus évidente de l’absence de toute communication entre les voies aériennes et le péritoine. Dès que l’on perfore les vessies aériennes, elles se vident, l’air s’échappe, et elles disparaissent : à chaque mouvement inspiratoire ou expiratoire de l’animal , de nombreuses bulles d’air sortent avec force et traversent la masse du liquide. Un phénomène particulier indirectement rattaché au sujet qui m’occupe se manifeste pendant que l’on pratique les expériences ! précédentes. On en suit d’instant en instant les progrès, et au premier aperçu , il pourrait faire croire à la présence de l’air au milieu des liquides issus des vaisseaux sanguins, coupés sur l’a- nimal vivant. Le sang qui s’échappe se divise en deux parties; l’une colore T)K I.A nF.Sl’IIUTIOK DANS T.F.S OISKAUX. 81 l'eau en s’y dissolvant : c’est le cruor ; l’autre est rapidement pré- cipitée : c’est la fibrine. Cette dernière substance se coagule en niasses irrégulières , tremblantes , qui ne renferment aucune apparence de bulles aéri- formes au moment où elle se dépose. Mais , à mesure que la coagulation s’accroît , on voit des globules aériens , remarqua- bles par une transparence très grande , naître et se multiplier dans l’épaisseur de ces amas fibrineux. Ils s’accumulent près les uns des autres, et finissent enfin par être si nombreux , qu’on pourrait croire, avant d’avoir suivi les phases de ce phénomène , qu’il est l’indice de la présence de l’air dans le tissu cellulaire. Mais cette production d’un gaz , dont j'ignore la nature , ne semble autre chose que le résultat de la séparation de l’air dissous dans le sang; elle n’infirme en aucune manière l'opinion que j'a- dopte, de laquelle il résulte que l’air ne traverse jamais, pendant la vie , le tissu cellulaire des Oiseaux, et qu’il ne saurait dépasser la limite des réservoirs aériens. Sur des Oiseaux vivants placés sous l’eau, on ne rencontre d’air que dans le tuyau des plumes; l’incision de ces organes le dé- montre; mais il n’y est introduit que par l’extérieur du corps, et non par l’intérieur. On arrive à le croire, en disséquant attentivement sous l’eau le tissu cellulaire de la base des plumes ; on peut même isoler ces or- ganes des tissus auxquels ils adhèrent, sans qu’il sorte une bulle d’air. D’autres expériences conduisent aux mêmes résultats. Oue l’on prenne l’aile d’un Oiseau, qu’on isole l’humérus, scié en travers à son tiers supérieur; qu’on attache cet os, à l'aide d’un conduit de caoutchouc, à un tube long d’un mètre, et plus long encore; lorsque cet ajutage est fixé solidement, que l'on rem- plisse le tube de mercure ; on verra que , malgré l’énorme pres- sion , les tuyaux des plumes resteront vides, et que pas une par- celle du métal ne les aura pénétrés. Ce résultat exclut donc formellement l’idée d’une communica- tion des plumes avec les réservoirs aériens , par le moyen des os. L’air que l’on rencontre dans les plumes n’y apparaît point a toutes les époques du développement ; lorsque la plume est jeune, 3'[série T V. (Févri*r 'Sifi.,1 i ® 8‘2 , XATAI.IS MULOT. — SUR r.’APPARIÎII. il n’y en a point encore dans le tuyau de cet organe : on ne dis- tingue alors qu’une substance grasse qui s’élève à la surface de l’eau. Ce n’est que dans les plumes déjà desséchées, où la matière spongieuse et grasse a disparu , que l’on peut observer l’air entre les membranes placées les unes après les autres dans toute la longueur du cylindre corné de l’organe. On a déjà dit que cet air pénétrait aussi par un trou placé à la partie intérieure de la plume, dans le voisinage de l’endroit où naissent les barbules. Cette as- sertion appartient à Jacquemin (1). Dès que les anatomistes ont eu connaissance des dispositions singulières de l’appareil respiratoire des Oiseaux, ils ont été na- turellement conduits aussitôt à en rechercher les effets : aussi trouve-t-on dans la science maintes opinions plus ou moins pro- bables sur l’utilité possible des réservoirs aériens. L’une des opi- nions admet qu’ils servent à la respiration en conduisant l’air, et par conséquent l’oxygène, sur des surfaces dont les dimensions sont plus considérables que celles des surfaces pulmonaires. D’autres ont vu dans ces réservoirs des organes destinés à aider mécaniquement la respiration, en faisant, à chaque inspi- ration, revenir l’air du ventre jusque dans les poumons, et en permettant à un air nouveau de retourner dans l’abdomen pen- dant chaque expiration. Car on sait que l’air qui entre dans l’ab- domen des Oiseaux, pour remplir les réservoirs aériens, y pénètre pendant l’expiration , en sort pendant l’inspiration , tandis que des mouvements contraires et opposés s’exécutent au même in- stant dans le réservoir thoracique (2). (1) Jacquemin, l. r. p. Jsti — Par l'intermédiaire des sacs aériens sous- scapulaires et sous-fémorau\ , Pair pénètre aussi dans les cellules sous-cutanées, et s'introduit dans le tuyau des plumes, si ce n'est par ces cellules , du moin9 par le trou qui est. à la base des barbules. (2) R. Owen, I. c., p. 344 — » During the act of inspiration... the air then rushes into the lungs and into the thoracic réceptacles; while those of the abdomen become flaccid : when the sternum is raised on approximated towards spine, part of the air is expelled from the lungs and thoracic cells by the trachea, and part driven into the abdominal receptaeles , winch are tlius alternately en- larged and diminished with those of the thorax » DF. r.A RESPIRATION DANS I.ES OISEAUX. 83 D’autres observateurs, et Borelli le plus ancien de tous (1), ont cru que ces réservoirs étaient destinés à rendre le corps de l’oiseau plus léger , soit par la différente densité de l’air introduit dans l’intérieur du corps et des os , soit par la dessiccation des liquides médullaires contenus dans le squelette. 11 est vrai que les travaux de Hunter, de Jacquemin et de plusieurs autres anato- mistes , ont prouvé que nulle part la capacité des canaux des membres et des vertèbres osseux n’était aussi étendue que dans les Oiseaux dont le vol est rapide, et que nulle part cet air ne peut être plus raréfié par la chaleur animale , et par conséquent plus léger que dans l’intérieur de ces animaux. On a cru de même que les réservoirs aériens étaient capables de donner aux muscles et aux aponévroses un soutien énergique , propre à aider les mouvements et à favoriser la facilité du vol (2). Hunter et plus tard Jacquemin ont supposé qu’ils aident beau- coup la force et la durée du chant des Oiseaux. Beaucoup de preuves viennent à l’appui de cette manière de voir. Jacquemin (3) leur attribue plusieurs usages : « L’oxydation du sang , l’augmentation de la surface du corps, afin que des muscles vigoureux , tels que le vol en exige, trouvent des points d’attache assez étendus ; la diminution de la pesanteur spécifique par la dilatation de l’air, et le dessèchement des liquides de la moelle dans les cavités osseuses; et dans l’élasticité que ces réservoirs pneumatiques donnent au corps pour seconder concurremment avec l’élasticité de l’air le vol des Oiseaux. » Il est difficile, en présence de tant d’opinions contraires, d’en (1) J. -A. Borelli, De motu animalium in Bibl. anut. Mangeli, t. II, 1685, p. 895. — ci Augetur actio alarum ob diminutionem resistentiæ , quia corpora avium minus ponderosa sunt in specie quant corpora hontinum et quadrupedum , scilicet pondus illarum ad horum pondus minorent proportionem habet quant moles ad ntolem Hoc palet quia ossa avium fistulosa valde excavata et subtilia sunt ad instar radicum pennarum ; scapulæ, costæ et brachia parum carnosa sunt, pectus et abdomen amplas cavilates aereplenas habent, pennæ tamen et palmæ levissimæ sunt ; unde duplici nomine augetur potentia alarunt ob virtutis motivæ ntusculo- rum incremenlum, et ob diminutionem ponderis resislentis. » (2) II. Owen, l. c., p. 34i. (3) Jacquemin, I. c., p. .333. %ll XATAMS «.(11,1.01. — SUR I.’APPAWTir. admettre encore une de plus, analogue ou nouvelle. 11 vaut mieux peut-être se taire longtemps encore sur des fondions que nous ignorons , et ne pas se hâter de produire des idées antérieures à toute espèce d’expérimentation. Que d’études restent encore à entreprendre sur la densité, sur les variations de la température et sur la composition chimique de l’air contenu dans les réser- voirs aériens ! Que de conditions, que d’influences variées dont l’action doit être étudiée , et qui malheureusement restent encore en dehors des limites de nos connaissances ! Si d’autres devaient entreprendre ces recherches délicates , ils ne pourraient arriver à des résultats précis qu’ après avoir compris nettement l’arrangement général, et les détails de l’instrument soumis à leur examen. C’est dans cette intention de préparer des études physiologiques, de les rendre précises et plus intéressantes, que j’ai tenté de faire mieux connaître quelques parties trop vaguement indiquées , et dont plusieurs même peuvent être re- gardées comme inconnues. BÉSUMÉ ET CONCLUSIONS. Les détails anatomiques et physiologiques exposés dans les pages précédentes peuvent être indiqués par les propositions sui- vantes : 1° L’air qui pénètre parla trachée-artère dans les poumons des Oiseaux se rend par des orifices particuliers des bronches, non dans une cavité thoraco-abdominale commune formée par la plèvre et le péritoine , et de là dans toutes les parties du corps , mais dans des réservoirs distincts. 2° Les premiers de ces réservoirs sont, en majeure partie , si- tués dans le thorax, les seconds sont renfermés dans l’abdomen. 3° Les réservoirs aériens thoraciques sont au nombre de quatre ; l’un peut être considéré comme impair, les trois autres sont pairs et généralement symétriques. k° Je nomme le premier réservoir thoracique, réservoir infra- laryngien; il conduit l’air du larynx dans le sternum et dans l’hu- mérus. 11 est composé de trois cavités : l’une est placée en avant LIE LA llliSl'lll.UlON DANS LES OISEAUX. 85 du cœur, sur la ligne médiane; les deux autres s’étendent et se prolongent sur les parties latérales de la poitrine à l’extérieur. 5° Je désigne le second réservoir du thorax sous le nom de ré- servoir supra-laryngien ; il conduit l’air dans l’intérieur des ver- tèbres cervicales jusque dans les os de la lace , du crâne, dans la caisse du tympan , et même dans le pharynx, par le conduit gut- tural de l’oreille. 11 peut être, de chaque côté, composé de deux parties, dont la dernière est souvent peu développée. La première est située au-dessus du larynx inférieur, la seconde peut s’étendre au-dessous des apophyses transverses des vertèbres dorsales. G” Les troisième , quatrième réservoirs thoraciques sont placés des deux côtés de la poitrine , entre le cœur, le foie et les côtes ; le dernier d’entre eux se prolonge dans l’abdomen. 7° Les réservoirs aériens de l’abdomen sont au nombre de deux de chaque côté. 8° L’un , réservoir supra-rénal , est placé au-dessus du rein , entre cet organe et la colonne vertébrale ; il conduit l’air dans les vertèbres lombaires, dans les os du bassin , et dans un prolonge- ment ampullaire placé près de la partie supérieure et interne de l’os de la cuisse. 9' L’autre , réservoir infra-rénal , est représenté , de chaque côté du ventre , par une énorme vessie aérienne transparente et fort mince. 10“ Ces réservoirs thoraciques et abdominaux sont développés au-dehors de la plèvre et du péritoine, membranes existantes sans aucune perforation chez les Oiseaux , de même que chez les Mammifères. 1 1’ Des artères, des veines, des vaisseaux lymphatiques et chy - lifères, des nerfs, se répandent à la surface des réservoirs aériens. 12* L’air ne peut sortir de ces cavités aériennes pour se ré- pandre dans la plèvre , dans le péritoine ou dans le tissu cellu- laire du corps de l’Oiseau ; il parvient seulement dans l'intérieur des os, mais il n’en dépasse jamais les limites. 86 NATALIS UlULOÏ. — APPAREIL RESPIRATOIRE DES OISEAUX. EXPLICATION DES FIGURES PLANCHE 3. ( Cette figure est destinée à représenter l'ensemble des réservoirs aériens des Oiseaux, insufflés et placés dans la situation naturelle qu’ils occupent.) al, a2. n3, ni, a5, réservoirs aériens thoraciques. (, 1 , 62, réservoirs aériens abdominaux. al , réservoir infra-laryngien ; partie médiane. ai, réservoir infra-laryngien ; partie accessoire ou axillaire. a3, réservoir supra-laryngien. ai, réservoir sus-costal antérieur. aS, réservoir sus-costal postérieur. 11 se prolonge des deux côtés dans 1 in- térieur de l’abdomen; celui du côté gauche s'étend sur le gésier, et descend plus en arrière que le précédent. 61, réservoir abdominal inférieur ou infra-rénal. Il est formé par d'énormes vessies: l'une d'elles est complètement insufflée ; elle est située à gauche 62, réservoir abdominal supérieur ou supra-rénal. PLANCHE k. (Cette figure est destinée à représenter les réservoirs aériens du thorax et de l'ab- domen , ouverts, ainsi que la disposition du réservoir supra-rénal.) al , réservoir infra-laryngien ouvert , et dont la cavité renferme le larynx ; il est incisé en i pour laisser voir l'intérieur du réservoir supra-larvngien. a2, prolongements axillaires du réservoir infra-laryngien. k, ouverture de communication entre les deux parties du réservoir infra- Jaryngien , c'est-à-dire entre la portion médiane et la portion axillaire ou sous-scapulaire. a3, réservoir supra laryngien, dont on n'aperçoit que l'extrémité supérieure. Cette cavité est ouverte en i par une section de la paroi qui la sépare du réservoir infra-laryngien. «3', cellule aérienne placée à la base de la poitrine, et recevant l'air du réser- voir supra-laryngien par le moyen des conduits aériens des vertèbres. «4, réservoir sous-costal antérieur ouvert. La face supérieure de ce réservoir est séparée du poumon par le diaphragme, et les deux feuillets de la plèvre placés au-dessus de ce muscle. c,d,f, ouvertures bordées de quelques replis membraneux qui permettent à l'air de sortir des bronches, no, réservoir sous-costal postérieur. g, ouverture par laquelle l'air entre dans cette cavité. «AT ET P. GEICYAIS. — SUR UES CERFS UE l’AMÉR. MÉRID. 87 61 , limites supérieures du réservoir infra-rénal ouvert dans toute son étendus. h, ouverture par laquelle il reçoit l'air des poumons. 61', ouverture par laquelle il communique avec le réservoir supra-rénal placé au-dessus du rein. j), veines i’iaques et rénales situées à la face supérieure du réservoir infra- rénal. 62 , réservoir supra-rénal étendu depuis la base de la poitrine jusqu'à l'extré- mité du bassin. 62', prolongement fémoral de ce réservoir. q, artère iliaque qui est séparée du réservoir supra-rénal par l'épaisseur du rein. /, aorte. n, n, artères pulmonaires. m,m, veines sous-clavières. o, o, veines pulmonaires. REMARQUES sir ue CAPE l PUDU et h'EQUUS BISfLCUS de Mouina; Par MM. GAY et PAUL G ER VAIS (I Les auteurs qui ont écrit sur la mammalogie depuis Molina ont fréquemment critiqué les renseignements qu’il nous a laissés sur les Mammifères du Chili, et malheureusement on doit avouer que, dans bien des cas , les documents publiés par ce naturaliste sont si incomplets, et même d’une inexactitude si évidente, qu’ils justifient la défiance générale avec laquelle ils ont été accueillis, et la sévérité des critiques qu’ils ont fait naître. Mais ce peu de confiance des naturalistes dans les écrits de Molina a fait oublier trop souvent ce qu’ils renferment de bon et de positif. Dans plu- sieurs circonstances, on a donné comme nouvelles des espèces qui ne diffèrent point des siennes; et, parmi ces espèces, il en est qu’on aurait aisément reconnues , si l’on avait pu tenir quelque compte de ses descriptions. L’étude que nous venons de faire des Mammifères du Chili, étude dont nous publierons prochainement (1) Ce travail est destiné à la partie mammalogique de 1 Histoire du Chili, que M. Gay publie en langue espagnole. SL U LUS ESPECES L)li CEKl'S 88 U4f ET F. «EKVAIS. les résultats, nous a montré plusieurs fois la justesse de cette remarque, et l’animal dont nous parlerons d’abord dans cette note est un des plus remarquables parmi ceux auxquels elle est applicable. Cervus pudu. — Molina a fait connaître sous le nom de Pudu un petit Ruminant du Chili, appelé Venado par les Espagnols, c’est-à-dire Chevreuil; mais, comme il le rapporte au genre des Chèvres, sous le nom d eCaprapudu, la plupart des naturalistes qui ont voulu le classer ont dù éprouver de véritables difficultés. C’est pour cette raison, sans doute, que beaucoup d’entre eux l’ont complètement passé sous silence, tandis que d’autres en ont fait successivement une Chèvre, à l’exemple de Molina, un Mouton, ou même une Antilope. Nous nous proposons de démontrer que le Pudu est, au con- traire, une espèce du genre Cerf fort rapprochée des Cervus rufus et nemorivagus , et qu’il a été décrit, depuis Molina, comme un animal d'espcce nouvelle, erreur qu’il était peut-être bien difficile d’éviter, à cause du petit nombre de documents qu’on avait pu recueillir lorsqu’on en fit la publication. Yoici ce que Molina rapporte au sujet de son Pudu : a C’est une espèce de Chèvre sauvage de la grandeur d’un Che- vreau de six mois, de poil brun; le mâle seul a des cornes, qui sont très petites. Les Espagnols le nomment Venado ou Chevreuil ; mais c’est à tort, car il ne lui ressemble point du tout; il a, au contraire, le caractère de la Chèvre, à l’exception de la barbe , qui lui manque entièrement. Le Pudu a, en outre, des cornes rondes, lisses et tournées en dehors. Les animaux de cette espèce descendent des Andes au commencement de l’hiver, en troupes très nombreuses, pour paître dans les plaines des provinces aus- trales. Les Chiliens les prennent alors en quantité, tant pour les manger que pour les élever chez eux , ce qui réussit très bien ; car les Pudu sont naturellement fort doux, et ils se font prompte- ment à l’état de domesticité. » Nous avons pu étudier les caractères de ces Venado du Chili sur deux exemplaires, et il est incontestable que ces animaux ap- 81» DIS I.’.UIlÎRlQUJi MÉRIDIONALE. partiennent à la famille des Cerfs. Malheureusement, ces deux exemplaires ne sont pas encore adultes. Voici la description que nous en avons faite : Couleur générale rousse, finement tiquetée, sur la plus grande partie du corps, de roux plus ou moins vif. Le front et le sinciput ne sont pas tiquetés ; les poils de cette partie, un peu plus longs que ceux d’alentour, sont en manière de petite houppe , à peu près comme-dans les Antilopes nommées Grimms. Sur les oreilles, le menton, les canons et les quatre pattes, les poils sont d’un roux cannelle ; ils n’y sont pas tiquetés. Le devant du cou, la poi- trine et le ventre, ainsi que la face interne des bras et des cuisses, sont d’un roux plus grisâtre. La région nasale , la base du cou , en dessus et l’origine de la queue passent au roux noir. Les poils ne sont pas très forts ni bien longs; mais ils sont cassants, de longueur médiocre , et n’affectent point la disposition spirale propre à ceux de beaucoup d’animaux du genre Cerf. A la région dorsale, ils sont cendrés vers leur base, c’est-à-dire dans la por- tion cachée, qui occupe plus de la moitié de leur longueur; le reste est marqué d’un large anneau noir luisant, et d’une annelure de couleur roux-cannelle assez vif, placée près de la pointe. (Quel- ques uns n’ont point de roux. Ces animaux sont peu élevés sur jambes ; leurs proportions sont assez trapues; leur tète est forte et raccourcie, mais leurs jambes sont assez faibles. Voici leurs dimensions : Longueur du corps et delà tète 0,73 — des oreilles 0,07 Hauteur au garrot 0,3i Le seul crâne que nous ayons vu est celui du mâle. Ainsi que nous l’avons déjà dit , cet exemplaire n’a point encore les carac- tères de l’adulte. Comparé à celui d’un Cervus simplicicornis [Cerv. rufusel nemorivagus, F. Cuv.) de môme âge, le crâne du Pudu montre diverses particularités qui ont évidemment une va- leur spécifique. Il est moins allongé, plus élevé dans sa partie frontale, et pourvu d’un enfoncement considérable subcirculaire pour le larmier, tandis que le Cervus simplicicornis n’a point d’en- 90 «AT ET P. SERVAIS. — SUR LES ESPÈCES DE CERFS foncement distinct pour cet organe. Contrairement encore à ce qui a lieu dans ce dernier, l’os incisif ne se joint qu’au maxil- laire, sans remonter jusqu’au nasal. Comme dans les Gouazou-bira (Cerv. nemorivagus) , il y a ici de petites canines à la mâchoire supérieure. 11 n’y a encore qu’un faible indice des bois. Le petit Ruminant du Chili , que les habitants de ce pays nom- ment Venado, est donc une espèce fort voisine du Cervus simpli- cornis ( C . rufus et nemorivagus) , mais néanmoins distincte. Ce n’est pas une Chèvre, comme le pensait Molina, et nous devons changer son nom en celui de Cervus pudu. Ainsi s’explique le caractère qu’il présente de manquer de barbe , et les cornes très petites, rondes et lisses, qui surmontent son front, d’après l’au- teur chilien. Voyons quels renseignements publiés par des naturalistes ré- cents peuvent lui être appliqués. M. Pœppig (1), qui a donné de très bons documents sur le Chili, parle d’un petit Cerf de ce pays qui nous paraît être le prétendu Capra pudu. Voici ce qu’il en dit : « Chevreuil non signalé par Molina. 11 habite les parties les plus élevées du Chili. Cet animal, qui doit s’y trouver en grand nombre, n’a guère que deux pieds de hauteur, et égale un chien de moyenne taille. Comme je n’en ai vu qu’une femelle apprivoisée, je ne puis rien dire de décisif sur l’espèce : cependant il se pourrait qu’elle lut déjà mentionnée parmi celles qu’a décrites Azara. » Il nous semble inutile d’insister sur la similitude presque com- plète de cette note de M. Pœppig avec ce que Molina rapporte au sujet du Venado. Il paraîtra plus évident encore que c’est la même espèce que feu M. Bennett a décrite sous le nom de Cervus humilis, et dont il n'a vu, comme M. Pœppig, qu’une femelle domestique. Celle-ci a vécu à la ménagerie de la Société zoologique de Londres , qui l’avait reçue du Chili. M. Bennett en établissait ainsi provisoire- ment la diagnose : . fl) Froriep's Notisen , 1829 . — BulUlin unir, de Férussac, t. XIX, p. 95 (1829). 91 PE l’amérique méridionale. Cervus parvus, obesus, breviceps; facie lata, brevi, obtusa; fissura infra-orbitali mediocri ; cauda subnulla ; corpore toto rufo, antice nigrescenti ; postice, fronte, pedibusque inferioribus satu- ratioribus; infra-dilution; altituda ad humeros vix 1 1/2 ped. ; longitudo caudæ unciam superans. A cette caractéristique, facilement applicable aux individus que nous avons observés, Bennett ajoutait, d’après le capitaine king, qu’une peau de la même espèce avait été rapportée par ce navi- gateur en Angleterre, et que le jeune âge de l’espèce est tacheté de jaunâtre , et présente une bande de même couleur de chaque côté du dos. D’après M. king, ces petits Cerfs sont abondants à la Conception, et on les rencontre dans des régions aussi australes que l’archipel de Chiloë. Ils vivent par petites bandes. Ainsi le Venado ou Pudu est un Cerf, et non une Chèvre ; ce Cerf se rapproche du Cervus simplicicornis, mais il n’est pas de la même espèce; M. Pœppig en a parlé depuis IWolina ; feu Bennett l’a décrit d’une manière plus reconnaissable ; mais la science ne possède point encore tous les renseignements nécessaires à son égard; la dénomination de Cervus humilis conviendrait bien à cette espèce: cependant les règles suivies dans la nomenclature zoologique veulent qu’on l’appelle Cervus pudu, le nom spéci- fique donné par Molina devant être préféré à tout autre, comme plus ancien. M. Pœppig avait bien jugé des affinités de cette espèce en la rapprochant des petits Cerfs de d’Azara. Ses caractères extérieurs et anatomiques montrent néanmoins qu’elle ne doit être confondue ni avec le Gouazou-bira ni avec le Gouazou-pita. Cervus cuilensis. — Une autre espèce de Ruminant du Chili, bien distincte de la précédente, de taille plus forte, et vivant dans les régions les plus élevées, appartient aussi au genre Cerf, et l’un de nous en a déjà fait paraître une figure dans son ouvrage sur le Chili, sous le nom de Cervus cuilensis. D’après les ren- seignements qu’il a pu se procurer, ce Cerf, dont l’espèce est également distincte de toutes celles qui vivent dans les autres par- 92 «Aï ET P. «EKÏAIS. SL U I.ES ESPÈCES DE CEIU'S ties de l’Amérique méridionale, serait le Gemul (Equus bisulcus) de Molina. Comme l 'Equus bisulcus est un des animaux décrits par ce naturaliste qui ont le plus embarrassé les savants , c’est par ses caractères zoologiques que nous devons commencer. Le Guamul des Chiliens, ou Cervus chilensis, dont nous n’a- vons vu qu’un seul individu, actuellement déposé dans les gale- ries du Muséum de Paris , est une espèce très rapprochée , par sa taille , par son crâne , et même par son pelage , du Cervus antisensis découvert dans les Andes boliviennes et dénommé par M. Alcide d’Orbigny. Nous ne pouvons dire, néanmoins, jusqu’à quel point il s’en rapprochait par la forme des bois : l’exemplaire dont nous venons de parler était encore trop jeune. Son pelage est brun fauve , et rappelle , de même que celui du Cervus antisensis , le Chevreuil d’Europe en habit d’hiver. Ses poils sont également longs et cassants ; ils sont de même flexueux ou ondulés en spirale dans leur partie cachée. Tout le corps est tiqueté de fauve plus ou moins doré. Chaque poil est brun en- fumé dans sa plus grande longueur, et montre, près de sa pointe, un anneau plus vif de la même couleur, et ensuite l’anneau jaune- paille ou jaune doré qui occupe une longueur de 2 lignes environ, et qui est suivi d’une petite portion noire placée tout- à-fait à la pointe du poil , mais dans une étendue qui excède un peu celle de la portion jaune. La tête , la face externe des oreilles , le cou , en dessus et en dessous, le dessous de la gorge, le dos, les lianes, la poitrine, la région fessière, les membres (en un mot, presque tout le corps) , sont garnis de poils ainsi colorés, c’est-à-dire tiquetés. La queue est brune en dessus et blanchâtre en dessous, et à la pointe , ainsi que la région anale , qui est entourée de poils plus longs et se redressant probablement comme ceux du Che- vreuil, sous l'action du peaucier. Il y a du blanc, lavé d’un peu de fauve, aux régions inguinale et mammaire, ainsi qu’à la face interne des cuisses et de l’avant-bras. La portion moustachière de la lèvre supérieure et la face interne des oreilles ont des poils également blanchâtres ; mais la partie de la lèvre la plus voisine du mufllé est noirâtre, ce qui n’a pas lieu dans le Cervus anli- DF. I.’ AMÉRIQUE MÉRIDIONALE. 93 semis. Le menton est fauve-blanchâtre. Il y a du brun sur le bord de la conque auditive, et une ligne de la même couleur borde les sabots. La poitrine et le ventre sont plus bruns que le reste du corps; les canons sont de couleur fuligineuse. Les poils, longs partout, le sont davantage à la région fessière et aux lianes. Longueur de la tête et du corps 1 ,20 — de l'oreille 0,17 — de la queue 0,10 Hauteur au garrot 0,70 Le Cervus chilensis est trapu. Le crâne de l'individu que nous décrivons n’a encore , à la place où devaient s'élever les bois , c’est-à-dire au-dessus et un peu en arrière des orbites, qu’une faible saillie. Quatre paires de molaires seulement sont sorties hors des alvéoles : trois de lait , et la quatrième d’adulte. La mâ- choire supérieure a de petites canines. Le crâne est de la gros- seur de celui du Gouazou-ti ( Cervus campestris ) ; mais il en dif- fère par plus d’aplatissement au chanfrein , par sa région inter- oculaire plus carrée , par plus de saillie du bord externe de la région supra-oculaire du frontal. L’enfoncement du larmier est aussi plus considérable sur ce crâne , au contraire du foramen naso-maxillaire, qui est un peu moins grand. Les dents incisives du Cervus chilensis ont la même proportion que celles du Cervus anlisensis, mais elles sont un peu plus petites. L’espace inter- orbitaire est plus large que dans ce dernier. L’os incisif remonte jusqu’aux os du nez et se joint à eux dans une longueur de 0'", 020 ; chaque os nasal est un peu échancré à son bord antérieur; la su- ture maxillo-palatine est transverse ; le crâne a 0‘", 21 de longueur totale. Voici donc une deuxième espèce de Cerf à ajouter à la liste de celles qui vivent dans l’Amérique méridionale. Il est probable que le nombre en sera encore augmenté, et les collections possèdent déjà quelques pièces qui pourraient mettre les naturalistes sur la voie de ces découvertes. Ainsi G. Cuvier fait connaître , comme se rapportant au Cervus virginianus , des bois envoyés de Cayenne par M. Poiteau ; mais il est évident qu’ils sont d’une aulre espèce. SI T. LES ORGANES Ç)/i j. ni'um — Ces bois sont petits, épineux, à un seul andouiller, etc. Nous signalerons cette espèce à l’attention des zoologistes, sous le nom de Cervus spinosus. Une autre , qu’on pourrait appeler Cervus Goudotii, vit dans les régions élevées de la Nouvelle-Grenade. M. Justin Goudot, qui nous l’a indiquée, en a rapporté un bois aujourd’hui déposé au Muséum de Paris. Ce bois est de forme lyrée, de moitié moins grand que celui d’un Axis, et pourvu d’un seul andouiller basilaire postérieur. Ces deux espèces, celles que nous venons de décrire et le Cervus antisensis de M. d’Orbigny, portent à cinq le nombre de celles qu’on a découvertes depuis assez peu de temps dans l’Amérique méridionale, et dont il n’est point encore question dans la plupart des ouvrages usuels de mammalogie. MÉMOIRE SUR LES DIFFÉRENCES TYPIQUES, INCONNUES JUSQU'A PRÉSENT, DES ORGANES DE LA VOIX DES PASSEREAUX; Par M. J. MULLER (I). Jusqu’à ce jour, on s’en est toujours rapporté aux recherches de Cuvier sur le larynx des oiseaux chanteurs. D’après ce travail , l’appareil multi-musculaire servant au chant est composé de cinq muscles qui soulèvent les demi-cer- ceaux les plus mobiles des bronches, le second et le troisième, par leur périphérie antérieure et postérieure , et modifient leur posi- tion , ainsi que celle du ligament vocal , par rapport au courant d’air. Cuvier trouva généralement ces muscles chez les Moineaux, les Pinsons, les Mésanges, les Merles, les Grives, les Embérises, les Alouettes, les Corbeaux, les Corneilles, les Casse-Noix et les Pies, et il déclare qu’ils sont communs à tous les Passereaux, à l’exception des Cypselus, Caprimulgus et Coracias, qui n’ont (I ) Extrait du Rapport mensuel de l'Académie des Sciences de Berlin , séance du 26 juin 185-ü. Traduit de l'allemand par Vf H. Lebert. DE I.A VOIX DES PASSEREAUX. 95 qu’un muscle simple de chaque côté du larynx inférieur, comme beaucoup d’Oiseaux, que l’on n’a jamais comptés parmi les Passe- reaux, mais qui appartiennent aux ordres des A ccipitres, Scansores et Palmipèdes. Savart confirma ces observations sur tous les points essentiels ; il décrivit six muscles , trois paires antérieures et trois postérieures chez les Corbeaux, les Laniers et les Étourneaux, cinq (dont deux antérieures) chez les Grives et les Alouettes. Nitzsch a signalé, dans l’ouvrage de Naumann sur les Oiseaux, la présence de l’appareil multi-musculaire servant au chant dans tous les genres d’Oiseaux chanteurs européens qu’il a pu examiner. Il voulut, dans ses divers Mémoires ornithologiques, séparer les Oiseaux privés de cet appareil, des Oiseaux chanteurs ou Pas- sereaux. Il chercha avec ardeur pour les Oiseaux chanteurs d’autres caractères ostéologiques , splanchnologiques et angiolo- giques ; il en est résulté des particularités et des différences orni- thologiques fort intéressantes ; mais aucun de ces caractères n’a de valeur absolue, et pour chacun d’eux il y a de notables exceptions. Beaucoup d’Oiseaux , auxquels l’appareil multi-musculaire man- que , ont pourtant l’apophyse épisternale fourchue [yabelforlsalz) à la partie antérieure du sternum et l’échancrure simple de cet os, comme les A mpelis, Gymnocephalus , Rupicola, Pipra, Opetior- rhynchus, T hamnophilus , Tyrannus, Elœnia, etc. Toutes ces dif- férences ostéologiques des Passereaux deviennent insignifiantes, aussi bien que celles des Gallinacés ; de même qu’il y a chez ces derniers des genres avec une et avec deux échancrures ( Cryp - taras, Hemipodivs) , de même on rencontre parmi les Passereaux desOiseaux à une et à deux échancrures ( Pteroplochus , Colins ); et tandis que quelquefois cette échancrure se réduit à un trou [A mpe- lis) , le sternum devient dans quelques cas tout-à-fait solide ( Tro - chilus, Cypselus). Nitsch désignait comme étrangers au type des Passereaux les genres Trochilus, Cypselus, qui, avec YHémi- proene, forment pour lui la famille des Macrochires ; les genres Vpupa, Buceros, Epimachus , Alcedo , qu’il réunit avec la famille des IÀpoglossœ ; et les genres Caprimulgus, Ayctornis, Podaryus, Coracias, Merops, Calbula, Cuculus , Phœnicophœus, Coceyyius, Ceidropus, Crotophaya , Scythrops, /.eptosomatus , Indirator, J. Ml I. LP.lt. SUR LES ORGANES 90 Trogon , qui forment la famille des Cuculinœ. Viennent ensuite les Psittacinœ , et enfin les Amphibolœ : Musophaga, Clusio . Opisthocomus. Nitsch exposa sa classification d’une manière plus étendue dans son système de Ptérulographie , dans lequel il prit en considération la distribution des plumes ( Federfluren ) , ce qui du reste n’est pas une donnée très fertile. Dans son travail , la tribu des Picariœ renferme les Macrochires , Capromulginœ , Todhlce , Cuculinœ, Picinœ, Psittacinœ, Lipoglossœ, Amphiboles. Le mérite des travaux de Nitsch devait donner un grand poids à ses vues systématiques : aussi ces dernières ont-elles été appré- ciées et adoptées par des zoologistes distingués d’Allemagne. Prenant pour définitives et bien constatées les différences entre les Oiseaux chanteurs et les Picariœ , plusieurs ornithologistes s’efforcaient de constater, surtout pour cette tribu, des différences extérieures. Dernièrement , M. Sundevall a trouvé une différence dans l’arrangement des pennes-tectrices des ailes, et il en a fait une application qui conservera sa ' valeur pour caractériser les genres et les familles, sans qu’on en puisse faire un caractère universel. Mais la distinction entre les Oiseaux chanteurs et les Picariœ, d’après une différence interne constante, supposée par Nitsch, est tout-à-fait insuffisante, d’après mes recherches ana- tomiques sur les organes de la voix, recherches faites sur un grand nombre de genres. L’organe de la voix des Passereaux n’offre nullement une structure aussi concordante. Les différences typiques les plus importantes sont restées inconnues jusqu’à pré- sent. Le larynx avec un seul muscle, tel qu’il doit être chez les Picariœ particulièrement, se retrouve chez de nombreux genres américains classés parmi les Oiseaux chanteurs. Il existe , en outre , d’autres configurations plus complexes du larynx avec un ou plus d’un muscle , basées sur de tout autres principes, et dif- férant complètement du larynx typique , regardé comme propre aux Oiseaux chanteurs. La musculature la plus compliquée, quant au nombre des muscles, est, il est vrai, l’appareil des muscles canta- teurs. Mais il existe une forme de l’organe vocal bien plus muscu- laire, qui est mise en jeu pour produire les tons les plus sonores, ceux qui sont aussi susceptibles de modulation ; cette forme DF. LA VOIX DES PASSEREAUX. 97 qui se rencontre chez les C hasmarliynchits , n’a pas le moindre rapport avec la construction de l’appareil ordinaire du chant. La plupart des Ampelines de Swainson ou de Nitsch, connue les Cephalopterus, n’ont (d’après la description de Tschudi) qu’un seul muscle mince, conforme au type des Picariœ de Nitsch, et, par conséquent, ne seraient pas des Oiseaux chanteurs; ils sont aussi organisés comme le Gymnocephalus (G. calvus ), Ampelis ou Cotinga [A. pompadora) , R upicola [II. cayana);\e Gymnocephalus ressemble aussi au Cephalopterus par la dilatation de sa trachée. Tous ces Oiseaux n’ont au larynx qu’un seul muscle très mince, qui se montre comme le prolongement des muscles latéraux de la trachée. Ceux-ci devraient être, d’après les principes de Nitsch , classés parmi les Picariæ , comme déjà l’avaient été, par la même raison, les genres Coracias, l papa, Caprimulgus, Cypselus , Merops, Alcedo, Prionitis, Todus et Buceros. La famille des Ampelines S\v. et Nitsch., composée d’éléments assez hétérogènes, contient aussi des Oiseaux qui possèdent un appareil musculaire servant au chant , ce sont les Bombycilla ; en outre, on y rencontre le plus fort développement musculaire du larynx qu’on puisse trouver parmi tous les Oiseaux, mais con- struit d’après un modèle différent de l’appareil du chant : je veux parler de l’appareil propre aux Chasmarhynchus. Mais une élimination des Oiseaux étrangers devient déjà tout- à-fait impossible dans une autre tribu. Dans la famille des Laniades, parmi \esLanius Cu v. , il y a des Oiseaux à appareil musculaire ser- vant au chant, ce sont les Lanius européens et africains, et les Bari- las australiens; les types de l’Amérique du Midi , Thamnophilus, Vieill., n’ont point de larynx multi-musculaire, et n’ont qu’un seul muscle. D'après cela, la sous- division de la famille les Tliamno- phili S\v. n’est point fondée; car les Malaconotus S\v. concordent tout— à-fait avec les J.anius pour l’appareil du chant ; et ce genre Malaconotus est, en général, peu admissible, comme bien d’autres genres, qui ne sont pas établis d’après des recherches anatomi- ques. On retrouve, par contre, le muscle simple et le larynx par- ticulier des Tlnimnnphilus dans les Myiothères, que l'on a classés ailleurs. 3" série Znm T V ( Février 1846.' r* 7 J. IHCLLER. Sl’R I.ES ORGANES 98 Les Opêtiorhynchus n’ont point l'appareil du chant ; ils ont, de chaque côté, deux muscles, et leur larynx particulier se rapproche surtout de celui des Thamnophilus et des Myiothera. Le genre Muscicapa Cuv. offre des différences encore plus grandes que les Lanius Cuv. Les Muscicapa, dans le sens le plus strict, parmi les Oiseaux de l'Europe et de l’Afrique , les Musci- peta africains Sw. et le Platyssora Jard. , Selb. , ont seuls l’appa- reil multi-musculaire des Oiseaux chanteurs européens. Les Mus- cicapides américains n’ont qu’un seul muscle, parfois épais comme dans les Tyrannus, Elœnia, Platyrhyncus , et parfois très mince, comme dans les Myiobius, Myonectes, Pyrocephalus. Les Piprides n’ont point d’appareil multi-musculaire; ils n’ont qu’un seul muscle servant au chant, tantôt épais, tantôt mince. Plus de la moitié des Passereaux américains examinés n’ont point l’appareil musculaire particulier du chant qui, en Amérique, se retrouve dans les familles ou genres Fringilla, Tanagra, Sylvia, llirundo, Cassicus, Tardas, Dolichonyx, Sturnella , Nec- tarinia, et leurs sous-genres. D’un autre côté, l’appareil musculaire du larynx devient plus compliqué dans plusieurs des Picariæ de Nitsch , ou des Cor- cyges Sundevall , dans les Colins, encore plus dans les Trochilus et Psitlacus , même les Alccdo , dans lesquels Nitsch n’a pas trouvé trace d’un muscle; ils se rapprochent des Tyrannus par leur muscle cantateur large, mais simple. Ce muscle unique, qui, dans quelques Passereaux de Nitsch, s’est déjà notablement aminci, disparaît tout-à-fait dans quelques Picariæ, dans les Prionites, les Trogon, Rhamphastos, Corythaix. Description de formes nouvelles du larynx. Organes de la voix du Chasmarynchus. — La forme extérieure, représentée dans une planche du prince Max de Yied , fait déjà voir que le larynx inférieur du C ' kasmarhynchus nudicoUis est très charnu; mais elle laisse douter si cet appareil est. celui du chant ou non. On sait que ces oiseaux se distinguent par leur voix sonore, que f)E LA VOIX DES PASSEREAUX. •99 . le prince Max compare au son clair d’une cloche; les sons sont isolés, soutenus, quelquefois assez rapprochés, comme lorsqu’un forgeron frappe à coups réitérés sur son enclume. D’après M. Rich. Schomburgk , qui observa surtout le Chaitnarhynehus caruncu- latus , ces tons sont aussi modulés. J’ai examiné l’organe de la voix des deux genres. Au dehors , il paraît sous la forme d’un manteau uni et charnu, qui couvre toutes les parties du larynx, depuis la ligne médiane antérieure jusqu’à la postérieure, se jette même encore, inférieurement, entre les bronches et sur le tambour (Buegel), et se renforce sur le tambour, dont la moitié est encore couverte de chair à sa partie antérieure. De cette ma- nière, la masse charnue qui recouvre le larynx forme avec celui-ci deux sphères unies dans leur milieu. Toutes les fibres antérieures, latérales et postérieures ont le même trajet de haut en bas, et on ne peut pas les séparer en plusieurs muscles distincts. Il est très singulier, et même sans exemple, que la plus grande partie de cette chair musculaire ne soit pas destinée au mouvement des demi- cerceaux des bronches, mais s’insère entre le bord inférieur du larynx et le premier demi-cerceau, sur la membrane muqueuse; les fibres musculaires descendent en arc, et leurs extrémités sont implantées verticalement sur la membrane muqueuse. Ainsi se forme un labium musculeux à la paroi externe des organes vo- caux , à l’entrée de chaque bronche. Ce labium a deux faces, une descendante plus grande, et une inférieure plus petite, qui se tourne vers le premier demi -cerceau. Sur l’arête qui forme ce point de jonction des faces du labium se trouve une expansion élastique, le ligament vocal externe. La masse musculaire du labium forme la partie épaisse et pro- fonde de la masse charnue. La partie superficielle des fibres mus- culaires forme tous les faisceaux charnus qui se rendent au labium, et sert à mouvoir le premier et le second demi-cerceau des bronches. Le premier demi-cerceau en est complètement en- veloppé, ainsi que la partie antérieure et postérieure du second. Il n’v a point de séparation entre les couches superficielle et pro- fonde du muscle, qui est tout-à-fait uni. Près des lignes médianes antérieures et postérieures, les fibres musculaires provenant du J. MILI.KK. — sur. LUS OUGAiSES 100 larynx se contournent vers l’interstice , entre les deux bronches, et en arrière, vers une extrémité cartilagineuse du larynx, au moyen de laquelle la membrane tympaniforme peut être tendue, et se tournent enfin vers cette membrane elle-même. Dans le Chasmarhynchus carunculatus , une longue bande mus- culaire se dirigeant d’arrière vers la membrane tympaniforme, fournit quelques faisceaux élastiques qui s’étalent dans cette mem- brane même. La partie antérieure du tambour (Buegel) est recou- verte d’un muscle transversal particulier, qui tend cette mem- brane. Le Ch. carunculatus n’a point un ligament vocal interne, qui existe dans le Chasmarhynchus nudicollis, où il est même très fort et très épais; il est situé latéralement à côté clu tambour? fixé en arrière à l’extrémité cartilagineuse qui , du larynx , va au bout du premier cerceau, et antérieurement à un muscle qui embrasse le ligament, comme lorsqu’on saisit et attire une corde à pleine main. Cette couche musculaire, située sur le tambour, provient en partie de la face antérieure du larynx, et en partie elle con- tinue à prendre origine dans le tambour, de manière que les fibres vont obliquement du dedans au dehors. Le larynx du Ch. nudicollis est encore plus musculeux que celui du Ch. carunculatus. Chez l’un et l’autre, le nerf de ces masses charnues, branche des pneumogastriques, est très fort. Le muscle sternotrachéal prend son origine antérieurement, et, comme dans beaucoup d’autres Passereaux, il n’a point de con- nexion avec les muscles latéraux de la trachée. Organes clu chant du Tliamnophilus , Myiothera, Opetiorhyn- chus. — Ces trois genres offrent, une structure des organes de la voix, dont aucun exemple n’est connu jusqu’à présent parmi les Oiseaux. Les demi -cerceaux des bronches ne vibrent pas sous l’action de muscles; la partie vibrante se trouve dans la trachée elle-même. Les anneaux ordinaires et larges de la trachée cessent brusquement avant la division , puis vient une portion de la tra- chée finement membraneuse, aussi longue que large, aplatie d’a- vant en arrière, se terminant avec un anneau de la trachée, à la- quelle se joignent les bronches. La partie membraneuse de la trachée renferme cinq, six on sept anneaux très délicats, appa- UE l.\ \UI\ UES l’ASSEKKAlX. 101 l aissant comme des lignes, fixés sur les côtés, là où ils sont inter- rompus, par un ligament longitudinal; ce sont ces demi-cerceaux qui vibrent dans la trachée, avec une membrane intermédiaire qui les unit. La paroi membraneuse de la trachée, dans le C. tham- nophilm et dans le Myiolhera, est raccourcie, de chaque côté, par un muscle qui va de l’extrémité solide au dernier anneau de la trachée, au-dessus de la division. Les Thamnophilm se dis- tinguent encore en ce que le muscle sterno-trachealis a deux chefs, dont l’un naît à la surface solide de la trachée, au-dessus de la partie membraneuse , et l’autre provient de cette partie elle- même, près du ligament qui contient les anneaux vibrants, au- dessus de la division de la trachée en bronches. Ont été examinés : Thamnophilm nævius ( Lanius nœvim L. , Gm.), Thamnopliilus guttatm Spix [Lanius meleager Licht, Doubl., Ver. , /i91 ) , Tham- nophilm cri status Pr. , M. J’ai examiné, du genre Myiolhera , le M. margaritacea Mus. Berol. (près du Thamnophilm gularis Spix). Ces deux genres, de Swainson et Gray, sont mal placés; ils se rapprochent beaucoup, tant par leurs caractères internes qu’externes, et doivent se trouver dans une famille de T hamnophilini ou de Myiotherini , quoique suffisamment figurés comme genres par les jambes (Làufe), qui, dans le Thamnophilm , portent de grandes plaques en arrière. Les Fnrnarii, dont les types sont le F urnarius Vieill. . Opetio- rhynchus Temm. , Figulus Spix , ont aussi à la trachée m e partie inférieure plate et membraneuse, munie d’anneaux vibrants très fins. La structure diffère sur plusieurs points importants, et offre des rapports particuliers. La partie membraneuse, comme le liga- ment latéral, n’est plus raccourcie par un seul muscle, mais par deux, se fixant à un os vocal particulier, et non pas au dernier an- neau de la trachée. Cet os vocal, très singulier, long, pyramidal, fait une saillie libre dans sa cavité; sa base est fixée sur le der- nier anneau trachéal et le premier demi-cerceau bronchique, et à côté de la partie membraneuse de la trachée ; il s’étend libre- ment dans la cavité jusqu’au-dessus de la trachée membraneuse, sans cependant y adhérer. Les muscles qui raccourcissent la partie vibrante de la trachée se fixent aux bords antérieur et pos- J. MULLER. SUR LES ORGANES 102 térieur de l’os vocal, près de sa base. Il est encore à remarquer que le muscle sterno-trachéal ne provient pas de la trachée, mais de l’extrémité pointue de ce même os. Il n’a donc pas de connexion avec le long muscle latéral de la trachée. Ont été examinés : Fur- narius rufus Yieill. [Turdus badins Licht. , Donb. , Verz. , hhl), Furnarius brachyurus Mus. Berol. , Cillurus nigrofumosus Caban. Voyez Tschudi, Wiegm. Arch. f. Naturh, 1844 (Upucerlhia ni- grofumosa d'Orb.). Organe de la voix du Trochilus. — L’organe de la voix, situé au cou, est le même dans les sous-genres des Trochilus, savoir, Campylopterus, Phaetornis, Lampornis, Otorhynchus, Onysmia. Il a deux muscles. Le premier demi-cerceau des bronches est très petit, comme avorté, enclavé entre le second grand demi-cerceau et le larynx inférieur ; les extrémités du second demi-cerceau sont fixées au larynx lui-même; l’extrémité postérieure est très grande et triangulaire ; deux de ses faces servent à recevoir la masse musculaire provenant antérieurement du larynx, qui va oblique- ment en dehors, et enfin se tourne en arrière et en bas. Un se- cond muscle provient de cette extrémité du second demi-cerceau, et se dirige dans le sens opposé, en avant et en bas, se fixant aux deux anneaux suivants, ainsi qu’au troisième, qui est déjà un an- neau complet. La petite membrane tympaniforme renferme un cartilage rond. Organe de la voix du Colins. — Il a un muscle cantateui* épais , et offre cela de particulier que le premier anneau bronchique forme un bouclier osseux , triangulaire, s’étendant sur le second et le troisième. C’est à ce bouclier ([lie s’insère le muscle, qui donne aussi de petits fascicules à la partie antérieure du second ef du troisième demi- cerceau ; le ligament vocal est situé au bord supérieur du premier demi-cerceau osseux. Ont été exa- minés : ('olitts capensis et guiritea , Less. Organe de la voix des Piprides, — La structure du larynx diffère dans les diverses espèces de Pipra. Aucun ne possède l’appareil multi-musculaire servant au chant. Le Pipra pareola a un muscle particulier épais et large; dans les Pipra à courte queue . P. auricapilla , Licht., et P. leucocilla, ce muscle n’est pas plus DE LA VOIX DES l'ASSEUEADX. 103 épais que le muscle latéral de la trachée, et, chez le dernier, il n’en est même que la continuation. Le premier et le second anneau des bronches du leucocilla sont des anneaux entiers ; le troisième est très grand , osseux, et presque entier. C’est à lui qu’est fixé le ligament vocal , et il reçoit le muscle , qui se divise en une partie antérieure et une posté- rieure. Depuis le troisième , tous les anneaux ne sont que des demi-cerceaux ; dans le P. aurinapilla , les deux premiers an- neaux sont aussi entiers; le troisième est une plaque osseuse, large , sur laquelle se fixe le muscle du chant. Les bronches du P. pareola sont encore différentes. Aucun des Piprides n’a de cartilage aryténoïde dans la membrane tympaniforme , comme elle existe généralement dans les Muscicapides américaines. Organe de la voix de s Muscicapides du Nouveau Monde. — 11 s’y trouve plusieurs formes différentes , qui n’ont de commun que l’absence de l’appareil musculaire propre au chant. Il n’y a qu’un seul muscle, parfois très épais et très long, mais si petit chez quelques uns qu’il ne paraît être qu’un prolongement du muscle latéral de la trachée. Elles ont toutes un cartilage aryté- noïde dans la membrane tympaniforme , et, chez la plupart, les premiers anneaux des bronches sont complets , de façon qu’ils constituent pour ainsi dire une continuation de la trachée. Une de ces formes qui se rencontrent parmi les Muscicapides améri- caines a été observée par Audubon. Dans son Ornitliological Ilio- yraphg des Muscicapides de l’Amérique du Nord, cet auteur dit que les Muscicapides américaines n’ont qu’un seul muscle fort , servant au chant: c’est cette forme que j’ai observée dans les Tyrannus , lilænia et Platyrhynchus. Le muscle forme une masse épaisse , mais toutes les fibres sont parallèles ; la partie posté- rieure du larynx et des anneaux bronchiques ne sont pas recou- verts par la masse musculaire. Chez le Tyrannus sulpliuralus , Cuv. ( Saurophagus sulphu- ratus, S\v.), les cinq premiers anneaux bronchiques ne sont presque pas mobiles ; les trois premiers sont des anneaux com- plets ; les demi-cerceaux commencent après le troisième ; le muscle s’insère au quatrième et à la partie postérieure du cinquième J. Ml I.I.BOU. — SI U I.KS OUÜAXKS 104 anneau. C’est avec le sixième que commencent les demi- cerceaux mobiles : entre celui-ci et le suivant se trouve la membrane tym- paniforme; il n’y a point de ligaments vocaux particuliers. Le Tyrannus ferox n’a qu’un seul anneau bronchique complet; le muscle s’insère au suivant. Le cartilage aryténoïdien est très grand ; il est formé d’un grand et d’un petit cartilage réunis par de petits ligaments. L 'Elœnia brcvirostris (voy. Tschudi, Wiegm. Arch., 18îi4) et \' Elœnia pagana, Sund. (Muscicapa pagana, Licht. ; Plalyrhyn- clnis pagamts ) offrent une conformation semblable ; la dernière n’a point d’anneau bronchique complet. Un Platyrhynchus du Pérou avait de deux à trois anneaux bronchiques complets. 11 y a une autre forme de Muscicapides qui, pour l’organe de la voix, diffère tout-à-fait des Tyrannus, Elœnia et Platyrhynchus : c’est un nouveau genre distinct et facile à reconnaître ; car les trois ou quatre premières pennes rémiges ( Schwungfeclern ) sont plus petites que les suivantes. Dans le genre Coloplerus, Cab. , et les deux espèces décrites par Cabanis dans le Voyage de Rich. Schomburgk , la partie inférieure de la trachée est aplatie laté- ralement sur les douze derniers anneaux, qui sont fendus posté- rieurement; une lisière osseuse en connexion avec le tambour s’insère dans cette fente longitudinale. Les quatre premiers demi- cerceaux sont très larges; au quatrième s’insère un muscle, qui prend une direction oblique de haut en bas et en arrière , et qui devient pointu à sa partie inférieure. Il y a , en outre, un muscle impair, considérable, fort singulier, qui raccourcit antérieure- ment la partie inférieure de la trachée, et va jusqu’au tambour. Le genre Pyrocephalus , Gould. ( Muscicapa coronata , Cuv.) se distingue en ce que les muscles latéraux de la trachée se tour- nent en avant dans leur partie inférieure , en confluant en une pointe musculeuse qui se termine au dernier anneau de la tra- chée. Les muscles qui meuvent les anneaux bronchiques sont réduits à leur minimum ; un vestige musculaire va du dernier anneau de la trachée à la circonférence antérieure du second cerceau bronchique. Dans les genres Myiobus, Gray, et Mionectes, Cabanis, le 1ÏK I.V VOIX 1)158 l’ASSlilli: U S 05 muscle latéral de la trachée reste simple jusqu'aux bronches, et il n’y a pas d’autres muscles servant au chant. Ont été examinés : 1 lyobius crythrurus , Mus. Berol., et Mionectes leucocephalvs , Cabanis (Museicapa leucocephala , Tenu».; Todus lencocephalus . Gm.). Les Fluvicolines américaines aussi,ne sont que des Passereaux à muscle vocal simple, à peu près comme on le trouve dans le Tyrannus et YElœnia; les muscles latéraux de la trachée se ter- minent antérieurement. Ont été examinés : Fluvicola bicolor (.1/ us- cicapa bicolor, L. Gm. ; 1 /. albiventris, Spix) et Y. Honda rvfa oui genus Centrophanes , Caban., qui appartient aussi à cette famille. Les autres Oiseaux à muscles vocaux simples ont été men- tionnés plus haut; il faut y ranger encore le Steatornis. Le Croto- pbaga lui ressemble, en ce que la voix ne se forme point à la division de la trachée, mais plus bas dans les bronches; le (’roto- phaga major a huit anneaux complets des bronches ; le muscle s’in- sère au dixième. Les conséquences systématiques de ces recherches anatomiques sont faciles à déduire; il suffit, pour le moment, d’insister sur les points de vue généraux. Il résulte incontestablement de ce qui a été dit qu’on ne peut pas séparer les Oiseaux chanteurs des autres Passereaux. 11 n’v a qu’une seule grande tribu des Inccssores ou Passereaux, qui doit même aussi embrasser les Syndactyli et les Scansores. Le larynx des Perroquets est bien plus haut placé, quant à l’organisation, que l’organe de la voix de beaucoup d’Oi- seaux appelés chanteurs. Cette tribu des Jneessores contiendra des Oiseaux à appareil musculaire vocalisateur compliqué, et des Oiseaux qui n’ont plus du tout de muscles pour le chant. La transition de l’un à l’autre se fait d’une manière insensible. Dans VUpupa, le muscle latéral de la trachée s’insère au premier demi-cerceau peu mobile des bronches; de celte disposition il n’y a plus qu’un passage presque imperceptible à celle où il n’atteint plus du tout les bronches, comme dans les Prionitis, Trogon, Hamphastos, Corythaix. Pourtant ces Oiseaux ne sont pas privés des conditions générales pour la formation de la voix, étant munis de plis membraneux vibrants entre les demi-cerceaux mobiles. J. MULLER. — SLR LES ORGANES 106 Quelques uns ont encore d’autres éléments; c’est ainsi que le Prionitis a un cartilage aryténoïdien de la membrane tympani- forme très grand fixé au larynx inférieur. Quelques tribus se distinguent par une conformation du larynx semblable, concordante dans tous les genres, tels sont les Syndac- tyli ; dans d’autres , il y a diverses formes de larynx , de simples et de plus compliquées : c’est ainsi que , parmi les Scansores, se font remarquer les Psittacus. 11 faut sans doute placer différem- ment les Ampelis , liupicola, Cephalopterus , Gymmcephalus , et les rapprocher des Coracias, Upupa, Alceda, Buceros, Prionitis et Merops; le liupicola est même un Syndactylus. Mais nous ne pou- vons pas non plus étendre tellement loin la domination delà con- figuration du larynx , que tous les Oiseaux à larynx semblables dussent être rapportés à une seule et môme division, renfermant ^ par exemple tous les Oiseaux munis de l'appareil musculaire ser- vant au chant; il faudrait mettre alors dans la même division les Lanins rapaces avec les Fringilla granivores. Les Thamnophilus et Myiothera se rapprochent davantage des Lanius par leur genre de vie que des Fringilla, lors même qu’ils diffèrent des deux par leur larynx ; ils sont sans doute le typé d’une famille propre , donL les autres membres restent à chercher. Le genre C inclus, muni de l’appareil musculaire pour le chant, rapporté par Swainson aux Uyiotheriæ, ne doit pas y être classé; eu général, les familles d’Oiseaux établis par Swainson et par O ray ne doivent être regar- dées que comme des dispositions provisoires qui ne sont pas tou- jours très heureuses. Les vraies familles et sous-familles des Passe- reaux restent encore à déterminer d’après l’anatomie. Parmi les Muscicapides, si semblables par leur exlérieur, il faut séparer les formes de l’ancien et du nouveau monde , tout-à-fait différentes par le larynx ; on pourrait appeler les premières M uscicapides , les autres Tyrannides ; mais ce ne seraient pas les Muscicapinœ et les Tyranninœ de Swainson et de Gray , classification fautive. Swainson a séparé les Tyrannus et oiseaux semblables des Mnsci- capides américaines , et, par contre , les Muscicapides africaines avec les américaines ont été mises ensemble dans ses Muscica- pinœ, ce qui est tout-à-fait contre les affinités intérieures aujour- DU LA V0!\ DUS DASSUKUAUX. 107 d’hui bien démontrées. Tous les genres examinés des Muscicapides européennes et africaines ont l’appareil musculaire compliqué l>our le chant. Ont été examinés : Muscicapa atricapilla, L. ; Muscicapa g r isola , L. (Europe); Muscicapa atronilens , Mus. lierai. (Afrique, Mozambique) ; Muscipeta parailisi, S\v. ; Pla- tystera succincta, Mus. Bcrol. (Afrique). Tous les genres de Muscicapides américaines n’avaient pas d’appareil musculaire pour le chant. Ont été examinés les genres T yrannus , Cuv. ; et encore de plus près: Saurophagus , Sw. ; Tyrannula , Sw. ; Pla- tyrhynchus , Sw. ; Pyroceplialus , Gould; Myionecles , Cabanis; Myiobius, Gray ; Coloplerus, Cabanis. Ce genre Culicivora, Sw. , muni d’un seul appareil musculaire pour le chant (a été examiné le Sylvia ( culicivora ) bivittala. Mus. Berol.), ferait une excep- tion si ce genre appartenait aux Muscicapinæ, où Gray les place. Swainson , s’appuyant sur ce caractère , paraît avoir rangé avec raison les Culicivora parmi les Sylvianœ. L7 lirundo et le Cypsehis ont pour le larynx à peu près les mêmes rapports que ceux qui existent entre les Muscicapides de l’ancien et du nouveau monde. On ne peut pas les réunir en une seule famille ; mais ils ne sont pas tellement éloignés l’un de l’autre qu’on ne puisse les classer dans des ordres différents. Il existe un rapport tout-à-fait analogue entre les Xectarima elle Trochilus , ainsi qu’entre les Fringilles et les Colins. C’appareil musculaire pour le chant proprement dit, et la forme avec un seul muscle plus ou moins épais, sont les formes de la- rynx les plus répandues. La première de ces deux formes prédo- mine en Europe et en Afrique; la seconde compte, dans l’ancien monde, les genres Alcedo, Colins, Coracias, Eurystomus, Capri- mulgus , Cypselus, Upupa, Merops, Buceros, Picus, Yunx, Cu- culus,Centropus,Malcoha, Pogonias. Les formes de l'appareil mus- culaire pour le chant ont été examinées sur les oiseaux d’Afrique qui suivent: Malaconolus Sw., Dryoscopus Boie, Dicrurus Vieill. , l.umprotornis Temm., Icos T., Putrocossyplius Boie, Cralero- pus Sw. , Campephaga Vieill., Cracula Cuv., Muscipeta Sw. , Platystera Jard. , Zosterops Horfs. , Vig , Te.vtorV. , Ploceus Cuv. , A madina Sw. , Crithagra Sw., Estielda Sw. , Macronyx Sw. , 108 J. HliLLCR. — SUl LUS OllüAMiS DE LA VOIX, ETC. Euplectes Svv., Cimyris Cuv. , Philedon Cuv. Dans le nouveau monde, les formes simples prédominent sur les compliquées : aussi les cris, bien plus que les chants, retentissent dans les forêts de l’Amérique. Des formes particulières et peu répandues du larynx sont celles des Psittacines, des Thamnophilus , des Opethiorliynchus, des Tro- chilus, des Chasmarhynclius, qui aussi, pour la plupart, se rap- portent au nouveau monde. Les Psittacus , Alcedo, Hirundo, Cypselus, Caprimulgus, Picus, Cuculus, Fringilla, Sylvia, T ar- dus, Neclarinia, montrent, dans l’ancien et dans le nouveau monde, des caractères concordants pour chaque genre. Les matériaux employés sont des Oiseaux conservés dans l’es- prit de vin. Ce sont plusieurs centaines de Passereaux apparte- nant à cent genres et sous-genres différents. Les Passereaux aus- traliens y manquent encore pour la plupart. Les formes améri- caines proviennent des voyages de MM. de Olfers, Sello, Deppe, Rich. Schomburgk de Winterfeld; les africaines, des voyages de MM. Krebs et Peters; beaucoup ont été acquises par achats, et depuis longtemps on a collecté, dans ce but, les animaux entiers et non disséqués, conservés dans de l’alcool , étant bien plus inté- ressants pour la science que des préparations anatomiques de parties isolées. Nous désirons vivement qu’on soit généralement convaincu que la peau seule, sans conservation d’exemplaires cor- respondants dans de l’alcool, n’offrent que peu d’instruction, et que ces derniers ont une plus grande valeur que la première seule. La détermination des espèces devait être exacte pour le but de ce travail, tant par rapporté l’espèce qu’au sous-genre et à la synonymie. L’auteur ne pouvait pas, pour cela, se fier à ses pro- pres études et connaissances ornithologiques ; c’est pour cela que les exemplaires conservés dans de l’alcool ont été comparés avec les Oiseaux secs du Musée zoologique^et déterminés par un orni- thologiste de profession, M. Cabanis, aide-naturaliste du Musée zoologique; c’est lui aussi qui fournira la description des Oiseaux nouveaux du voyage de Rich. Schomburgk. ESSAI 109 n’iNE MONOGRAPHIE Dl' T IC ItG IP F S EDWAIWSII; Par M. ALEX. DE NORDMANN, l’iiiffsscni ù Odessa (IJ. PREMIERE PARTIE. ZOOLOGIE ET ANATOMIE. La mer Noire est extrêmement pauvre en animaux inférieurs. On ne trouve dans les environs d’Odessa que deux espèces très petites de Nudibranches, que je range dans le genre Tergipes, en me fondant sur la figure que M. de Blainville a donnée de ce genre dans sa Malacologie (1*1. 40, fig. 0). TERGIPES. Character generis : Corpus oblongum , elongatum , pallio discreto nullo , in caudam pro- cessu lanceolato attenuatum. Tenlacula 2 filiformia, elongata, aille duos oculos in verlice posila. Caput discrétion , processu frontali filifornii vel triangulari utrinque in- structum. Dorsum appendicibus lurgidis , clavatis , per paria seriebus duabus longitudinalibus dispositis; ano inter prinium et secundum par sito. Aperturæ sexuales in latere dextro anteriore. (I ) Remarques du traducteur. — Le Mémoire de M. Nordmann a paru trop étendu pour pouvoir être traduit m extenso. J'ai donc cru devoir me borner à une analyse détaillée , en conservant cependant, partout où cela était possible , l'expression de l'auteur, et en ne retranchant que des digressions qui quelquefois m'ont paru étrangères au sujet, et qui, dansd autres cas, reposent sur des faits et des opinions modifiés dans ces derniers temps. Les recherches de M. Nordmann ont été commencées en 1 840, achevées en I 843 ; elles ont été soumises à l'Académie de Saint-Pétersbourg en février 18 44. Il résulte de là que les recherches si mul- tipliées qui ont été faites dans cesderniers temps, sur l'ordre des Nudibranches, étaient entièrement inconnues à M. Nordmann, cl je ne doute pas que ce célèbre observateur n'eût modifié en bien des points ses opinions s'il avait pu tenir compte des lumières qui ont jailli des discussions soulevées à propos de l'anatomie de ces Mollusques. Voc.t, I 1 0 UE KORDMANIV. SUR LE TERGIPES EDWARDSII. 1. TERGIPES Edwadrsii , N. T. corpore albido , processible frontalibus etongalis, filiformibus, ap- peudicibus ilorsalibus clavatis, simplicibus 8. Long. 2 lin. 2. TERGIPES ADSPERSUS, N. T. corpore albido supra maculis cærulescenlibus adsperso : processible frontalibus brevioribus triangularibus; appendicibus dorsalibus cla- vatis 10, quorum 3, anteriora paria ad basin furcata. Long. 1 2/3 lin. Le Tergipes Edwardsii a un corps allongé, conique, pointu en arrière. Les deux véritables tentacules, placés dans la nuque, au-devant des yeux, sont, dans l’état d’expansion, à peine un peti plus courts que le corps, non compris l’appendice caudal; ces tentacules sont filiformes , ronds , un peu plus épais à la base , et arrondis aux extrémités. La tète est assez distincte , arrondie en avant , et pourvue de deux prolongements filiformes assez courts qui sont placés sur le front , et avec lesquels l’animal tâtonne en rampant. La peau est si serrée autour du corps qu’on ne peut pas parler d’un manteau. Quatre, rarement cinq paires d’appen- dices simples en forme de massue sont placées le long du corps ; ces appendices, que l’on a regardés généralement comme des branchies, sont épais , étranglés un peu au-dessous de leur extré- mité , et peuvent s’allonger et se rétracter comme les tentacules. L’extrémité postérieure du corps a un petit appendice transparent en forme de lancette, qui est pourvu de bords faiblement crispés. Le pied est un peu plus large que le corps ; la couleur de l’animal est d’un blanc bleuâtre, le pied est jaunâtre surtout le long dé scs bords ; les extrémités des appendices dorsaux sont d'un blanc de neige. Le Tergipes adspersus a des processus frontaux beaucoup plus courts, d’une forme triangulaire, et placés latéralement; le dos porte quatre ou cinq paires d’appendices en forme de massue, dont les trois premières sont fendues longitudinalement, et par conséquent doubles. Le corps est aussi d’un blanc laiteux , mais peu transparent; il est marqué, surtout sur le dos, aux environs des capsules auditives, de nombreuses lâches irrégu- B»E \«K»Nm. — sur. II! TKRGII’KS l'DWAHDSlL M l Hères et bleuâtres : les yeux sont d’un bleu sombre, comme dans l’espèce précédente. La vie du Tergipes Edwardsii dure au moins deux ans ; on le trouve surtout sur les plantes marines couvertes de divers Zoophytes, tels que les Corynes, les Campanulaires, les Bower- bankies, etc. En observant journellement ces animaux, j’ai été étonné de- voir qu’ils étaient soumis à un renouvellement temporaire *de l’épiderme de tout le corps. Les cils vibratilesde la surface du corps ne suivent pas la dé- pouille transparente et sans structure de l’ancien épiderme , ce qui paraît être en contradiction avec la régénération et la des- quamation continuelle de l’épithélium vibratile des vertébrés. Je. croyais d’abord m’ètrc trompé; mais, après avoir vu plusieurs fois ce renouvellement de la peau s’opérer sous le microscope , je ne puis plus avoir de doute sur l’exactitude de mon observa- tion. Les cils de la peau nouvelle ne commencent à vibrer que lorsque le nouvel épiderme entre en contact avec l’eau; la des- quamation se répète toutes les deux ou trois semaines, sans qu’il y ait une périodicité fixe. Les résultats suivants se rapportent uniquement au Tergipes Edwardsii, dont j’ai disséqué plus de deux cents individus; l’autre espèce, dont je n’ai pu trouver en tout que six indi- vidus, montre absolument les mêmes traits d’organisation et de développement. La peau. La peau ou le manteau peut être considérée comme composée de quatre couches différentes. La couche la plus externe, l’épi- derme, ne se voit qu’à la desquamation. C’est une membrane extrêmement mince, transparente, sans structure, qui est si bien appliquée contre la seconde couche, qu’on ne l’observe pas dans les circonstances ordinaires. Elle doit être perforée par les fais- ceaux des cils vibratiles, puisque ces derniers ne se détachent point lors de la desquamation. La seconde couche, plus épaisse, est formée par un tissu mou, 112 DF, NORDM4XX. — SU K LE TEItGIl’ES EDVVA11DSII. gélatineux, composé d’une quantité innombrable de cellules irré- gulières, arrondies ou polygonales, qui constituent un réseau fin que l’on voit surtout très bien sur les appendices dorsaux , lorsque ces derniers sont à l’état d’expansion. On remarque dans les mailles de ces réseaux des cellules de grandeurs difi’érentes, avec des noyaux et des masses grenues; on y trouve aussi les cellules vibratiles avec leurs noyaux. Les cils très fins et très courts de ces cellules forment des faisceaux qui se trouvent sur toutes les parties du corps, et qui sont probablement disposés par séries plus ou moins irrégulières. La troisième couche tégumentaire forme une couche plus épaisse de faisceaux et de fibres musculaires très apparents, dont la direc- tion est différente, d’après les différents endroits du corps. Dans la partie postérieure du corps, ces fibres se dirigent obliquement de haut en bas, et paraissent se croiser transversalement avec d’autres fibres plus profondes. Sur les appendices dorsaux, au contraire, et surtout sur les tentacules, ces fibres forment des an- neaux transverses qui , en s’éloignant ou en se rapprochant, peu- vent allonger ou contracter ces organes. Le pied est entièrement musculaire. On trouve, au-dessous de celte couche musculaire, une ou plu- sieurs strates de cellules transparentes ou de corps concrétion- naires de forme diverse , sur lesquels je reviendrai plus tard. Ces corps sont surtout répandus sur toute la face interne du pied , où ils présentent les dimensions les plus considérables et des con- tours angulaires qui les font ressembler à des cristaux. Ils se dis- tinguent des ganglions nerveux du voisinage seulement par leurs contours anguleux et par leur non-continuité. Ces corps sont plus petits et plus ovalaires dans les tentacules, plus grands et anguleux sous la peau des appendices dorsaux. Ils remplissent l’espace entre la peau et les viscères , et contiennent encore assez souvent d’autres granules plus petits. On les voit glisser en avant et en arrière, lors des mouvements de l’animal. DE \ORI>VIA\X. — SIR LF. TERG1PES EDWARDSII. 113 Système digestif. La bouche forme une lente verticale placée sous l’extrémité antérieure et inférieure (le la tête, entre les deux tentacules fron- taux. La masse buccale (l’I. 1, fig. 1, ü) a la forme d’une poire rétrécie en arrière, arrondie à la base, large au milieu, voûtée sur les côtés, plus mince et arrondie de nouveau en avant. L’ouverture buccale est couverte en haut par une masse épaisse, molle, échancrée au milieu de son bord antérieur; je considère cette masse comme la lèvre supérieure. Son bord est recourbé de haut en bas, de manière à pendre un peu par-dessus l’ouverture buccale. La lèvre supérieure est revêtue, à l’intérieur de la cavité buccale, d’une petite plaque faible, cartilagineuse, trian- gulaire, qui est la mâchoire supérieure. Cette mâchoire supérieure est presque libre et se distingue seulement au dedans par deux saillies cornées d'une couleur jaunâtre* Les deux mâchoires latérales sont fortes, musculeuses et dis- posées en ogive allongée. Elles sont larges en arrière, plus minces en avant; leurs extrémités antérieures sont cornées et finement dentelées. Cette substance cornée des pièces terminales se con- tinue dans la masse musculaire des mâchoires, en suivant leur contour interne et externe , sous forme de filet mince. Le filet in- terne forme deux arcs concaves distants de la langue, qui se rap- prochent ensuite, et se perdent après dans la masse musculaire, en se tournant vers la périphérie. Les filets externes ne peuvent être suivis que jusque vers le milieu du plus grand diamètre trans- versal de la masse buccale. Ces parties sont couvertes d’en bas pap deux coussins très mus- culaires, très épais, que l’on peut regarder comme la lèvre infé- rieure. Elles forment la plus grande partie de la masse buccale compacte, sont arrondies à leur extrémité antérieure, et se meu- vent très souvent pendant que l’animal mange. Leurs contours antérieurs se perdent, vers le milieu, dans le coussin musculaire. 3' sérié. Zool. T. V. ( Février tSlti. 4 8 •H »K VOKIinAW. — SU H LU TËltGU’ISS LDWABDSII. La langue. Cet organe (lig. 1, D) , situé dans la cavité buccale , peut être comparé à une bandelette ou à une plaque allongée, étroite et mince. La langue se confond, par sa base élargie, avec la masse mus- culaire de la cavité buccale postérieure, se replie d’abord de bas en haut, et à son extrémité, d’avant en arrière et en bas, de manière à, former, comme dans la Paludine, un S couché. Sa largeur dimi- nue d’arrière vers la pointe. Je ne l’ai trouvée revêtue d’aucune enveloppe qui empêcherait d’ailleurs l’action des dents dont elle est garnie. Un anneau cartilagineux , qui est attaché à la substance musculaire de la cavité buccale, sert de point d’appui à la base de la langue, sur la surface de laquelle se trouve une série de plaques semi-circulaires, au nombre de dix-huit à vingt-deux. La structure de ces plaques est partout la même; elles diminuent seulement de grandeur vers la pointe de la langue. Chacune de ces plaques porte plusieurs dents rapprochées, triangulaires et acérées au sommet. La dent du milieu est toujours la plus grande, tandis que celles de côté diminuent progressivement. Ces plaques se régénèrent sans doute, progressivement, d’arrière en avant ; car les plaques antérieures sont souvent très distinctement usées, tandis que les plaques postérieures , par leur consistance molle et leurs contours peu avancés, témoignent d’un développement moins avancé. Toute la langue est d’ailleurs transparente; les plaques et les dentelures se composent d’une substance dure et cassante. L’animal emploie sa langue pour gratter, l’un après l’autre, les Polypiers qu’il mange. Souvent alors on voit la langue sortir de la cavité buccale ; car ce sont surtout la pointe de la langue ainsi que les lèvres supérieure et inférieure qui sont employées dans l’acte de la mastication. Le système musculaire de la langue, qui est très mobile, est composé d’abord de deux muscles divergents qui s’attachent au milieu de cet organe, et qui sont les rétracteurs de la langue. D’autres muscles venant de directions opposées s’insèrent sur les plaques linguales postérieures et servent d’antagonistes aux pre - miers. Le pharynx a une forme ovalaire et des parois épaisses ; nu ixuKimtitv. — s (j u le tergipks kdwardsii. -115 il est suivi d’un œsophage court qui monte dans l’estomac , et qui est garni de cils vibratiles dont le courant va, non pas de dehors en dedans, comme on pourrait le soupçonner, mais de dedans en dehors. La cavité digestive. L’estomac (iig. 1, G) est situé immédiatement sous la peau dor- sale, entre les ganglions nerveux et la première paire d’appendices dorsaux ; il est entouré en partie par les circonvolutions du foie. 11 est assez spacieux , voûté en haut , et d’une forme irrégulièrement ovalaire. Ses parois sont tellement minces , que l’on distingue le mouvement des aliments avalés, même sans le concours du com- presseur. Le tissu de l’estomac est très particulier; il a l’air d’être composé d’une multitude innombrable de petites pointes dis- posées à des intervalles réguliers. Ces pointes sont tellement petites, que l’on ne peut déterminer si ce sont réellement des saillies ou des enfoncements ; l’épithélium interne de l’estomac est en outre garni de cils longs et mous, dont le mouvement ondulatoire communique aux aliments une rotation continuelle, et qui continue même après la dissection et le déchirement des pa- rois stomacales. L’intestin (fig. l,J),qui fait suite à l’estomac, est aussi spacieux, mais très mince de parois. Il s’étend en serpentant, sans diminuer beaucoup en largeur, au-dessous de la peau dorsale, jusque vers l’appendice caudal foliacé , oii il devient plus mince et tortueux. Les aliments retournent par le même chemin ; l’intestin forme deux diverticules assez larges des deux côtés de l’estomac, et finit par un retour qui conduit vers l’anus, situé un peu à droite de la ligne médiane, entre la première et la seconde paire d’appen- dices dorsaux. Les appendices dorsaux contiennent des cæcums distinctement limités par une membrane en forme de sac (fig. 1 , K). On voit, dans l’intérieur de ces cæcums, des ombrelles de Campanulaires, des Infusoires, des tentacules ciliés de Membranipores , des vésicules d’air, que l’animal avale quelquefois, et que l’on voit émigrer souvent d’un cæcum dans l’autre, jusqu’à ce qu’ils soient enfin ex- 116 DE ItOR»M*K\. — SliK Mi TEUG1PKS JiüWARDSIl. pulsés par la bouche. L’intestin est donc ramifié, et le nombre des cæcums dépend du nombre des appendices dorsaux. Tout le canal intestinal, aussi bien que les cæcums, exercent des contractions péristaltiques, par lesquelles les aliments sont poussés d’avant en arrière , et vice versâ , jusqu’à ce que le reste en soit expulsé par l’anus. On ne trouve, dans tout le trajet du canal intestinal jusque vers le rectum, aucune trace de cils vibratiles ; le rectum (fig. 1 , M) seul en est pourvu, et ses cils produisent l’aspect d’un courant ondulatoire qui marche de dehors en dedans. L’anus (fig. 1, 2V), situé immédiatement derrière le cœur, présente une petite saillie en forme de mamelon, par laquelle sont expulsés les excréments , sous forme de masses allongées et fusiformes. L’intestin s’élargit un peu avant le commencement du rectum, et présente ici un étranglement en formant les diverticules mentionnés (fig. 1 , L) des deux côtés de l’estomac. Le foie (t ) est très grand (fig. 1.0), tortueux et membraneux. Cet organe est situé, pour sa plus grande masse, au dessous de l’esto- mac, à gauche, dans la partie antérieure du corps, entre les ovaires et les orifices génitaux, plus rapprochée du pied que de la peau dorsale. 11 forme un paquet de lobes et d’anses , dont l’une court parallèlement au pied et se replie subitement en avant de la partie supérieure de la glande qui est en communication avec le vais- seau déférent. Trois autres lobes embrassent l’origine du rectum et se plient en travers, tandis que la plus grande masse du foie s’étend au-dessous de l’estomac en contournant le testicule. Le foie débouche par un canal étroit dans la partie postérieure de l’es- tomac, à gauche, immédiatement avant le commencement de l’in- testin. A l’origine de ce canal se trouve un sac ovale, enfoncé dans la substance du foie, et d’un jaune intense, que l’on doit envi- sager comme la vésicule biliaire (fig. 1, P). Cette vessie biliaire est pourvue d’un canal excréteur étroit qui se dirige en arrière, j Il La détermination de cet organe nous paraît assez contestable, et nous croyons que l'examen des autres Nudibranches prouve jusqu'à l'évidence que les organes glandulaires décrits ici sous le nom de foie, par M. Nordmann , font réellement partie des organes génitaux. (Note tlu traducteur .) DE %OKD>I\W. — SlIH LE TERG1PES EDWARDS». 117 vers la face dorsale, mais dont je n’ai pu suivre tout le trajet ; elle se trouve déjà dans les larves du Tergipes, et se remarque dans les adultes à l’extérieur. C’est sur le côté gauche, vis-à-vis de l’orifice génital , qu’il faut la chercher. J’ai trouvé deux glandes, probablement salivaires (fig. 1 ,F), qui sont situées des deux côtés, sur la face dorsale de l’estomac, et qui sont composées d’une substance très molle, celluleuse, formant plusieurs lobes allongés, étroits, à contour très peu accusé. Ces glandes s’ouvrent dans le fond de la cavité buccale ; on les aper- çoit surtout en arrêtant les mouvements de la masse buccale qu’elles suivent continuellement. Je dois mentionner encore un organe glandaire très particulier (fig. 1 , ()) situé entre l’estomac, le foie et le rectum. Cet organe, qui a la forme d’une bandelette allongée, se rétrécit petit à petit : il est composé d’une quantité de corps sphériques et jaunâtres pourvus de longs cils vibratiles, qui sont disposés en séries sur quatre , trois ou deux rangs successivement. Les cils continuent à vibrer encore plusieurs heures après l’extraction de ce corps, que je crois pouvoir envisager comme une glande urinaire, quoique je n’aie pas trouvé de canal excréteur. Système circulatoire. • Le cœur (fig. 1. T) est situé, dans notre animal, exactement dans la ligne médiane du corps, immédiatement au-dessous de la peau du dos, derrière l’estomac , entre la première et la seconde paire d’appendices dorsaux : il n’est pas percé par le rectum. Je n’ai pu savoir au juste s’il est enfermé ou non dans un péricarde par- ticulier. Quand on examine le cœur d’en haut , il est de forme triangulaire et composé de deux parties, d’un ventricule et d’une oreillette, qui, pendant la dilatation, sont fortement bombés, et montrent une différence sensible dans leur structure. J,e ventri- cule (fig. 1 , 7’1) situé en avant est extrêmement tendre et transpa- rent comme du verre ; il est cordiforme , et séparé par un fort étranglement de l’oreillette (T12) qui est plus petite , arrondie dans une certaine position, et composée d’un tissu beaucoup plus fort et beaucoup plus consistant. SUR LE TE RG 1RES EDWARDSII. 118 DE \OIt DMA \\. — J’ai vu sur des individus adultes que la partie la plus grande du cœur , ou le ventricule , montre un étranglement très appa- rent, à l’endroit où elle est contiguë à la plus petite, de sorte qu’elle paraît composée de deux segments de sphère. Le cœur est retenu dans sa position par des ligaments particuliers , cpii se fixent d’un côté sur le point de réunion des deux moitiés du cœur , et de l’autre côté dans les environs de l’intestin , de telle manière que tout le cœur est séparé en deux moitiés par ces ligaments transverses, qui indiquent déjà à eux seuls la séparation en oreillette et en ventricule. Le cœur est attaché en haut à la face interne de la peau du dos, où l’on n’aperçoit point de ligament , tandis qu’il s’en trouve dans l’axe longitudinal, sur les extré- mités antérieure et postérieure du cœur, qui, en courant parallèlement à l’aorte, se fixent à la peau dorsale. Les parois des deux moitiés du cœur sont de nature musculaire , et pourvues en outre de muscles à part qui fonctionnent lors des contractions. On trouve, sur les parois extérieures du ventricule, quatre ou six faisceaux musculaires, disposés de telle façon que deux de ces faisceaux se croisent en avant, et que de la partie supérieure du faisceau interne descendent quatre fibres plus minces qui vont se fixer sur le point d’insertion de l’oreillette ; celle-ci a un faisceau musculaire principal qui descend au-dessous de la ligne médiane depuis le point d’insertion , et qui envoie latéralement deux fibres qui partent de son milieu. On remarque en outre des fibres plus fines , dont plusieurs se croisent , et qui sont disposées dans une direction transver- sale et oblique. Tous ces muscles sont situés à la face externe du cœur, et n’ont point de stries transversales, comme c’est aussi le cas chez les Polypes. Une valvule très mobile en forme de langue se trouve sur l’em- bouchure de l’aorte, à l’extrémité antérieure du ventricule; elle ferme cette ouverture à chaque contraction , et la rouvre à la dila- tation. On compte soixante-dix à quatre-vingts pulsations du cœur à la minute , lesquelles se font de la manière suivante : le ventri- cule en se dilatant est poussé en avant, tandis que l’oreillette se DE ItORDMAIVN. — SDK LE TERGIPES EDWARDSII. 119 contracte sur la moitié de son volume; il recule pendant que l’oreillette se dilate, et s’avance sur un espace beaucoup moindre, il y a donc alternance entre les mouvements des deux moitiés du cœur , dont les muscles se contractent et se relâchent suc- cessivement. J’ai cherché en vain des valvules entre l’oreillette et le ventricule. Meckel croit qu’il ne peut y avoir de doute sur la nature de la circulation chez les Mollusques. L’aorte, dit- il, conduit le sang vers tous les organes , à l’exception des organes respira- toires ; le sang retourne vers ces derniers par la veine cave , qui est identique avec l’artère pulmonaire. Les organes respi- ratoires rendent le sang immédiatement à l’oreillette par un tronc très court. On pourrait croire qu’une structure semblable existe dans les Tergipes, quoiqu’il ne soit point facile de suivre le trajet des vaisseaux ; mais nous verrons de suite que le système veineux éprouve une modification importante. On ne peut suivre qu’à une très courte distance les deux vais- seaux élargis en entonnoir (Ts) qui entrent dans la portion posté- rieure du cœur ou dans l’oreillette, bien qu’ils aient un diamètre assez considérable ; mais le contenu opaque de l’intestin et des appendices dorsaux empêche tout examen , et l’on ne peut songer à une dissection par le scalpel. Les parois de ces vaisseaux , les seuls dont on peut prétendre avec certitude qu’ils appartiennent au système veineux , sont extrêmement minces , et tout-à-fait dénuées des fibres longitudi- nales et transversales, que doivent avoir, d’après M. Delle Chiaje, les veines respiratoires des Aplysies, avant qu’elles se soient réunies en un seul tronc. Je n’ai jamais vu que ces deux troncs veineux dans le Tergipes, tandis que, dans le Thétys, leur nombre égale celui des feuillets branchiaux, et que l’on n’attribue que deux veines récurrentes au Tritonia Hombergi. M. de Quatrefages a trouvé des entonnoirs semblables sur le cœur de l’Éolidine, mais il les compare aux oreillettes. L’aorte, dont la longueur dépend chez les Mollusques de la position du cœur , est très courte, puisque le cœur du Tergipes a une posi- 120 DE XOKDMAXX. — SUR LE TERGIPES EDWARDSII. tion très avancée ; elle s’étend le long du dos, et se sépare en deux branches peu de temps après sa sortie du cœur , au-dessus du diverticule droit de l’estomac. Ces deux branches se subdi- visent de nouveau en deux rameaux, dont deux se dirigent en avant, tandis cpie les deux autres se dirigent en arrière, ha paroi interne de l’aorte est couverte de cils vibratiles , mais qui ne pé- nètrent pas jusque dans le cœur. Les i leu r troncs veineux courts que nous venons île mentionner , le cœur et les artères qui partent du cœur , sont les seules parties du système circulatoire qui possèdent îles parois propres. Cette assertion paraîtra peut-être singulière; mais elle est vraie. Tous les intestins sont entourés par le sang ou le chyle, sans que ce liquide soit contenu dans des vaisseaux propres. On n’a qu’à regarder l’espace compris entre l’estomac , la masse buccale et le pied , en fixant des corpuscules sanguins isolés, pour se convaincre de la vérité de ce que j’avance. On verra alors distinctement les corpus- cules sanguins changer de trajet à chaque ondée de sang , et cela tout-à-fait indépendamment des contractions de l’intestin, d’où il résulte que les corpuscules ne suivent pas une voie limitée. On croit quelquefois voir des vaisseaux dans des parties qui offrent moins d’espace libre pour le mouvement du sang, par exemple dans les tentacules et dans les appendices dorsaux ; mais on ne tarde pas à se convaincre par une observation plus attentive que ce ne sont que des lacunes ou des canaux sans parois, situés entre les différents organes, et dans lesquels se meut la masse du sang. I,e nombre de ces canaux sans parois est au moins de trois, sinon davantage; ils existent dans les grands tentacules , entre les fibres nerveuses et le tissu cellulaire ; et de plus, entre les parois des cæcums, le tissu cellulaire et la peau des appendices dorsaux. Le liquide sanguin avec les corpuscules qui y sont suspendus est reçu dans un réservoir continu , le long du pied , entre les cir- convolutions du foie , les parties sexuelles et les concrétions cris- tallines du pied ; toute la masse sanguine se meut avec rapidité dans ce réservoir, comme cela est aussi le cas dans les Bryozoaires, les Isopodes, les Daphnies et les Crustacés inférieurs parasitiques. Le sang lui-même est composé , comme dans d’autres Inver- DE XOHDMW. — SUR I.F. TERGIPES KDWARDSII. 121 tébrés, de deux parties : d’un liquide transparent, blanchâtre, et de corpuscules sanguins. Ces derniers, qui se trouvent en quantité , sont à peu près tous de la même grandeur , plutôt petits que grands, d’une forme entièrement sphérique , et d’une couleur jaune claire. On peut donc dire qu’ils ont une forme constante et uniforme. Les concrétions floconneuses qui se trouvent dans le sang des Polypes et des Crustacés parasites manquent ici. Le mouvement des corpuscules est très rapide , surtout de ceux qui sont poussés des sinus de la cavité générale , situés à la base des tentacules, dans les canaux des tentacules mêmes. Ces corpus- cules sanguins avancent, avec la rapidité de l’éclair jusque dans les extrémités terminales des tentacules, et reviennent par le même chemin ou par une autre direction sans qu’on puisse voir un courant régulier. Un corpuscule sanguin retourne souvent à moitié chemin pour être poussé , dans le prochain moment , en un autre endroit. La direction dominante du courant sanguin le long du pied est cependant en général d’avant en arrière. Le mouvement du liquide sanguin,' qui n’est pas enfermé dans des parois propres, n’est en aucune façon dù à des cils vibratiles : il est tout aussi certain que ceux-ci manquent sur tous les intestins qui nagent dans le sang, qu’il est facile de prouver leur existence sur les parois des vaisseaux qui sortent du cœur. Il me paraît donc parfaitement vraisemblable , comme je l’ai d’ailleurs déjà dit dans un autre endroit , que la circulation peut se faire indépen- damment de tout moyen mécanique. Je fais la remarque expresse , pour prévenir toute interpréta- tion erronée, que je suis arrivé aux résultats que je viens d’exposer, sans me servir du compresseur. La moindre pression qui écarte les intestins arrête immédiatement le mouvement du sang. Pour en revenir au mouvement vibratile , que nous trouvons si généralement répandu dans les vaisseaux et les conduits excré- teurs des animaux inférieurs , tels que les Entozoaires , les Aca- lèphes , les Actinies , etc. , il est fort remarquable que la direction du mouvement ciliaire est justement opposée à celle que l’on sup- pose naturellement, de sorte quelle devrait plutôt s’opposer à l’ex- crétion ou à l’ingestion des liquides et des substances d’une autre 122 DE NORDMANN. — SUR UE TERGIPES EDWARDSII. nature. Pourquoi les extrémités des cils vibratiles de l’œsopliage se courbent-elles, non pas de dehors en dedans, mais dans la direction inverse? Et pourquoi les cils du rectum, du vaisseau déférent et de l’aorte, vibrent-ils, non pas de dedans en dehors, mais de dehors en dedans? Des prétendues branchies. On a pris jusqu’ici les appendices si variés des Nudibranches, qui se trouvent disposés symétriquement sur le dos ou sur les côtés du corps, pour des organes respiratoires ; cette manière de voir est fortement ébranlée depuis que j’ai vu que l’espace intérieur de ces appendices dorsaux contient un cæcum de la cavité diges- tive, et qu’il enferme en même temps une organe d’excrétion. On trouve ordinairement quatre, rarement cinq paires de ces branchies sur le Tergipes Edwardsii; elles sont placées sur deux séries parallèles , un peu latéralement , de manière que la ligne moyenne du dos reste libre; les séries sont quelquefois un peu obliques , de sorte qu’elles ne se répondent pas entièrement. L’animal les porte dirigées verticalement lorsqu’il rampe, ou bien si c’est un animal adulte, où elles ont une longueur considérable , elles pendent un peu sur le côté du corps. La première paire est toujours la plus longue ; les autres deviennent de plus en plus courtes. Ces appendices sont beaucoup plus petits sur les jeunes animaux; souvent ils sont seulement indiqués sous forme de mamelon ou de bouton ; leur nombre est aussi moins considé- rable; ils manquent entièrement sur les larves, qui sont encore enfermées dans la coquille nautiloïde. La cinquième paire, qui se trouve seulement sur des animaux très âgés, est toujours la plus petite , et placée près de l’appendice caudal. Nous lisons dans quelques manuels, comme chez Cuvier et Oken , que les Tergipes ont deux tentacules et deux séries de branchies en forme de mas- sue, pourvues d’une ventouse à l’extrémité, au moyen desquelles l’animal peut se fixer et ramper sur le dos. Tout est faux dans cette description , sauf le nombre des branchies : car il n’y a pas une trace de ventouse sur les appendices. Ces animaux rampent DE !VOn»MAI\;V. SUR I.E TERGIPES BDWARDSII. 123 comme tous les autres Gastéropodes , toujours sur le pied , et ne peuvent jamais se servir des branchies comme organe de fixat ion. L’animal peut mouvoir ces parties épaisses et massives, qui sont susceptibles d’une turgescence plus ou moins grande, et peuvent s’allonger et se raccourcir. Leur mobilité est due en partie aux mouvements péristaltiques des cæcums. L’animal avale souvent de l’air lorsqu’il rampe à la surface de l’eau le pied en haut; cet air est poussé souvent jusque dans les cæcums, et fait distendre alors les appendices dorsaux. Ces branchies sont cou- vertes , comme , du reste , toute la surface du corps , de fais- ceaux de cils courts qui vibrent sans interruption. Je n’ai jamais remarqué sur notre animal que ces branchies fussent susceptibles de tomber, comme on l’a observé sur d’autres genres voisins ; au contraire, une lésion de ces parties entraînait toujours à sa suite la mort de l’animal dans quelques jours. La force reproduc- trice des parties perdues du corps paraît manquer, en général , au genre Tergipes. La structure intime de ces parties offre les détails suivants, que l’on observe surtout bien lorsque les appendices dorsaux sont en tergescence et comme insufflés , ce qui leur donne une grande transparence. Une branche épaisse du canal intestinal se continue dans la cavité de chaque appendice dorsal, et se termine en s’é- largissant en forme de massue, un peu avant l’extrémité de l’ap- pendice, oùse trouve une cloison transversale. Cette cloison, com- posée d’une substance celluleuse et séreuse, sépare l’extrémité branchiale du cæcum en s’attachant par des ligaments ou des fibres musculaires à la paroi interne des branchies. Dans l’espace ainsi séparé du cæcum est situé un organe tout-à-fait particulier, blanc, ovalaire et glanduleux, une vessie dont l’enveloppe est très épaisse, et qui possède une consistance considérable (fig. 1 , /i). La limite sur laquelle cet organe rencontre l’extrémité du cæcum s’aperçoit souvent du dehors par un étranglement plus ou moins considérable de l’appendice dorsal. Le contenu de la vessie est toujours opaque sur des individus adultes; il est composé d’une quantité de petits corpuscules transparents, inégaux, et de forme ovalaire, ressemblant assez ù. ceux qui se trouvent en grande quan- 124 DE XORDMANN. — SUR LF, TERGIPES EDWARDSIF. tité dans la cavité générale de certains Entozoaires, tels que les Diplostomes, les Holostomes, les Tétrarhynques, etc. Cette vessie ou glande est susceptible de contractions et de db latations qui , très souvent , se font en même temps que les mou- vements péristaltiques du cæcum, quoiqu’il n’y ait pas de commu- nication visible. On voit distinctement , en employant une compression légère, que celte glande est séparée du cæcum par la cloison que nous avons mentionnée; la glande manque entièrement sur de jeunes individus, ou bien elle est si petite, que le cæcum s’avance jusque dans l'extrémité de l’espace intérieur de la branchie. Le contenu de la glande, une sorte de mucus, est expulsé, de temps en temps, par une petite ouverture située à l’extrémité de chaque branchie. Cette expulsion se fait toujours convulsivement, et les muscles de la cloison, en se contractant, contribuent à cet acte. Deux ou quatre séries de corpuscules en rosaires s’étendent depuis la cloison de la glande, en bas, entre les parois internes de chaque branchie. Ces organes sont composés de cellules ova- laires ou quadrangulaines , non contiguës , cristalloïdes , telles qu’on les trouve partout sous la peau, et surtout en grande quan- tité sur la masse musculaire du pied. On cherchera en vain des troncs vasculaires. Pourra-t-on , dorénavant , envisager ces appendices dorsaux comme de véritables branchies? je ne le crois pas. On pourrait, à la rigueur, considérer les lacunes qui se trouvent entre la peau et les corps cristalloïdes comme des cavités respiratoires; mais ces cavités n’auraient, aucune organisation particulière qui les distin- guât des autres cavités qui se trouvent entre les intestins et la peau, et dans lesquelles le sang circule aussi librement. Je n’ai pas pu trouver non plus des ouvertures particulières, telles qu’elles se trouvent dans les pieds de beaucoup de Mollusques, et qui conduisent à des canaux par lesquels l’eau pénètre entre la peau et les intestins. Système nerveux. L’étude du système nerveux est sans doute plus difticile dans un animal qui, comme noti-e Tergipes, est trop petit pour être DK NOKDMAVV — S LU Lli TKHGIPKS liOH AHUSI1. l'25 disséqué convenablement, et dont le corps, d’un autre côté, est trop opaque, pour que le microscope puisse donner une idée com- plète de la structure et de la disposition des organes intérieurs. Ce que je donne ici est donc le fruit d’études qui ont exigé beau- coup de temps , et dans lesquelles je n’ai pas pu m’aider du compresseur. De jeunes individus, devenus transparents par une abstinence d’aliments prolongée pendant quelque temps, m’ont principalement servi pour l’étude de ce système. On ne verra ja- mais, par exemple, les trajets des nerfs dans les tentacules longs, quand ceux-ci sont le moins du monde contractés; ils sont alors rendus opaques par les plis, tandis qu’au moment de la plus grande extension, leur structure celluleuse interne, les canaux vasculaires et les branches nerveuses dichotomisées se présentent de la ma- nière la plus complète. La substance sans structure qui forme les parois des vaisseaux, là où il y en a, ressemble partout à celle des libres musculaires et nerveuses; mais la lumière réfléchie, blan- châtre, le reflet nacré et les contours légers donnent un aspect si particulier au système nerveux , que je crois ne m’être jamais trompé sur la nature des fibres nerveuses. Le système nerveux central est composé de quatre paires de grands ganglions, qui sont, dans une paire, presque confondus ensemble, tandis que les autres sont réunies par de courtes com- missures. Le système nerv eux central forme , de cette manière , un anneau qui embrasse de tous côtés l’œsophage. .Te crois qu’on peut partager le système central, avec .VL de Siebold, en trois portions : deux paires de ganglions appartien- nent à la portion supérieure, une autre paire à la portion latérale, et la quatrième paire enfin à la portion inférieure. Je ferai remar- quer, en outre, que l’organe auditif est en communication avec la portion supérieure, dont la paire antérieure (fig. 1, W), qui repose immédiatement sur l’œsophage, est un peu plus grande que les au- tres ganglions. Chacun de cesganglions a une forme complètement ovalaire et une couleur blanchâtre légèrement teintée en jaune. Ces ganglions sont considérablement distants l’un de l’autre. Une autre paire (fig. 1 , X ) est accolée , en arrière , à cette première, de telle manière que les deux paires paraissent confondues au point de 126 DE — SUR LE TERGIPÜS EDWARDSII. réunion ; au moins ne remarque-t-on pas distinctement une com- missure. Ces deux ganglions postérieurs sont presque aussi grands que les antérieurs , un peu rétrécis à la base , où ils sont contigus à ces derniers, arrondis du côté opposé et tournés en dedans, de sorte qu’ils se touchent presque sur la ligne médiane. La paire latérale de ganglions (fig. 1, Y) s’accole à la paire précédente , en descendant obliquement en bas et en arrière. Chacun de ces ganglions latéraux est considérablement allongé, rétréci en avant , un peu courbé et boursouflé en arrière en forme de cornue. La moitié antérieure peut être considérée comme une commissure. Ces ganglions, en entourant l’œsophage et la partie postérieure de la masse buccale , s’écartent considérablement en arrière, et leur distance est encore augmentée par les mouvements des mâchoires , qui les poussent souvent d’avant en arrière. Au moyen de cette paire de ganglions la partie supérieure du système nerveux central se trouve liée à la partie inférieure des ganglions, et cela de telle manière que les commissures sont peu marquées. Chacun des ganglions inférieurs (fig. 1, Z) a une forme allongée, rétrécie au milieu et renflée aux deux extrémités , de manière à ressembler à une semelle; il peut doue être considéré comme formé par la réunion de deux ganglions confondus ensemble. La paire supérieure et antérieure des ganglions est celle qui envoie le plus de nerfs. De son bord antérieur naît , de chaque côté, un fil nerveux très court qui, immédiatement après son ori- gine , forme un ganglion considérable , et envoie des branches dans les deux appendices tentaculaires du front , ainsi que dans les tentacules longs. A. La première paire de nerfs (fig. 1 , 1), qui se distribue dans les tentacules longs , a un diamètre considérable, et se divise im- médiatement après son entrée dans le tentacule en trois bran- ches égales , qui sont d’abord assez distantes, mais se rapprochent plus tard, et se divisent de nouveau, à peu près au milieu de la lon- gueur du tentacule, en trois ou quatre branches, que l’on peut suivre presque jusqu’à l’extrémité du tentacule. Pour bien voir ces nerfs, il faut que les tentacules soient étendus volontaire- ment par l’animal. de \ok».ha\^. — sun le tekgii'es edwaudsii. 127 B. La seconde paire de nerfs (fig. I, 2) prend son origine dans les ganglions que je viens de mentionner, et, en décrivant un arc d’abord en dehors, puis en dedans, ils se perdent dans la masse des tentacules frontaux. C. Les troisième (fig. 1 , 3) et quatrième (4) paires de nerfs nais- sent immédiatement du ganglion oculifère, près de la base de l’intumescence d’où partent les nerfs tentaculaires. Ces nerfs, dont la paire intérieure montre un petit ganglion allongé non loin de son origine, se ramifient dans la masse musculaire des mâ- choires et de la langue. D. La cinquième paire (fig. 1, 5) forme un filet très fin, étroit, qui prend son origine dans le grand ganglion oculifère, et finit dans la lèvre supérieure. E. La même paire de ganglions envoie encore, depuis son bord externe, un filet, la sixième paire (fig. 1,6), qui, en embrassant d’abord la masse buccale, se rapproche du pied, et se continue en arrière. J’ai pu suivre ce filet, du côté droit, jusque derrière l’ou- verture génitale, où il se ramifie; mais je suis incertain si le filet du côté gauche qui se cache dans le repli du foie lui correspond exactement. F. La septième paire de nerfs enfin (fig. 1, 7) naît du bord pos- térieur de la même paire de ganglions, immédiatement derrière les organes auditifs; il court droit en arrière pour se cacher dans les environs du cœur et du rectum, après avoir longé l’estomac. La seconde paire de ganglions, qui est contiguë au ganglion oculifère, envoie de chaque côté un filet nerveux qui forme un arc autour de la base de la masse buccale, et qui se voit très bien, lorsqu’on observe les parties buccales d’en bas. Je n’ai pas pu suivre les trajets ultérieurs de ces filets, pas plus que celui des filets qui naissent de la partie inférieure du système nerveux cen- tral , et dont une paire se répartit dans le pied , et un autre filet impair dans le testicule et les ovaires. On trouve un peu en dessous et en arrière de l’ouverture buc- cale, entre les corps cristalloïdes et la partie antérieure du pied, quatre corps arrondis, que j’envisage comme des ganglions. Un filet très mince les met en communication avec la paire de SLU LU TElUill’IÏS EDWARDS1I. 128 DE \ORDMAW — ganglions oculifères du système nerveux central. De ces ganglions se détachent trois filets courts qui, en longeant la ligne médiane, sc confondent en un seul tilet, au-dessous de la vessie biliaire. On peut suivre ce filet, le long du pied jusque vers l’extrémité du canal in- testinal ; il donne, sur tout ce trajet , des branches à la glande du vaisseau déférent, aux replis du foie et aux ovaires. On ne peut douter que ces ganglions et ces nerfs n’appartiennent au système nerveux intestinal. L'organe île la vue. On voit, immédiatement au-dessous de la base des tentacules longs, deux petits points noirs qui ne sont autre chose que les yeux (lig. 1, a). Ces organes, plutôt petits que grands, ne sont pas con- formés aussi simplement que l’on pourrait le croire, puisqu’on leur trouve toutes les parties principales : enveloppe externe cho- roïde, pigment, pupilles, cristallins, et substance nerveuse. Les yeux , vus d’en haut , sont ronds dans le T ergipes Edwardsü, ovalaires et pointus en arrière chez l’autre espèce. Cependant leurs contours subissent quelquefois des variations assez sensi- bles. C’est ainsi que l’œil du Tergipes Edivardsii montre quel- quefois une forme irrégulière, lorsqu’on le voit de côté. 11 pré- sente alors un bourrelet arrondi muni de quelques petits prolon- gements, qui se rétrécit considérablement vers la base, et qui est coupé carrément en arrière. L’enveloppe qui, à ce. qu’il parait, est en communication im- médiate avec l’épiderme, est une membrane mince, vitrée, qui ne montre aucune trace de pigment. Elle est suivie d’une seconde membrane isolée qui est aussi mince, mais plus molle, et qui est couverte d’un amas de pigment d’une couleur très intense. Ce pigment est noir là oii il se trouve en masse considérable ; il paraît d’une belle teinte violette foncée, lorsqu’on le rend plus trans- parent par la compression. Cette seconde membrane pigmen- taire est la choroïde; en procédant avec précaution, on réussit assez bien à isoler le pigment de la membrane incolore. Il y a en avant , au milieu du bulbe, un endroit plus clair, allongé dans la direction longitudinale, qui, sous la pression. DE XOKIMIA.W. — suit LE lEKGU'ES EDWAKÜSJI. 129 prend une forme ronde. C'est la pupille, derrière laquelle est situé le cristallin sphérique. Je n'ai pas vu distinctement le corps vitré. Le nerf optique manque, à moins qu’on ne le cherche dans la base rétrécie du bulbe oculifère, qui est appliqué immédiate- ment à la paire supérieure des ganglions qui composent le sys- tème nerveux central. On ne trouve pas de muscles propres à l’œil, l’épiderme musculaire et le mouvement de l’animal per- mettant aux yeux de prendre des positions très dix erses. Conservés dans un bocal , ces animaux recherchent le côté de la lumière ; et quand je changeais la position du bocal , ils rampaient de nou- veau vers la lumière , pour\ u toutefois qu’ils trouvassent quel que chose à manger. Toutes les autres expériences sur la sensation de la lumière ne m’ont donné aucun résultat, et c’est plutôt le tact résidant dans les tentacules qui paraît guider les mouvements. Les yeux se développent de très bonne heure dans les em- bryons; ils sont déjà très apparents lorsque les intestins ne for- ment encore qu’une agglomération chaotique. Maisle pigment n’est pas alors bleu, il est, au contraire, d’un rose clair, et les contours sont très indistincts, ce qui fait un contraste très frappant avec les grandes capsules auditives, qui sont très nettement limitées I. 'organe auditif. •le connaissais déjà cet organe, et je iavais reconnu pour tel avant que l’excellenl Mémoire de M. vie Siebold eut paru. Maintenant, les observations se sont si souvent multipliées, que l’on peut affirmer que tous les Mollusques sont pourvus d’un organe auditif. Ces organes (fig. 1,6) sont situés immédiatement derrière les yeux, sur la partie postérieure des deux ganglions antérieurs. Ils se font reconnaître de suite par leurs contours très accusés et par leur volume encore plus considérable que celui des yeux. Les nerfs spécifiques de l’ouïe manquent ; les vésiculessont logées dans de petites excavations des ganglions. Ces capsules ont une forme allongée dans les adultes, arrondie dans les embryons; elles sont bombées en haut comme en bas, et formées d’une enveloppe mince et vitrée qui résiste considéra- V série. Zool T. V. (Mars 1816.) i !• SUU LE TlilUiU’liS EDVVAHDSII. 130 DE XORDMAXX. — blement à la pression. Ces capsules forment ainsi deux vésicules dont la cavité interne est sans doute partiellement remplie par un liquide clair et aqueux. Un petit otolitlie arrondi nage dans cette capsule sur le liquide. L’otolithe n’est visible dans les embryons que peu de temps avant l’éclosion ; dans son milieu se trouve une petite tache claire. L’otolithe ne touche pas les parois de la capsule auditive; il se maintient dans une oscillation conti- nuelle, causée par des vibrations. Je crois pouvoir confirmer, par l’observation directe, l’opinion énoncée parM. de Siebold, savoir, que les parois vibrent réellemeut, ce qui a été confirmé aussi depuis. Je croyais autrefois pouvoir expliquer les mouvements vibratoires des otolithes , en supposant que les capsules ne sont pas entièrement remplies de liquide, et que les otolithes nagent à la surface de ce liquide, continuellement influencée par les vibrations des parois capsulaires. Organes sexuels. Je trouve la disposition suivante dans les organes génitaux du Tergipes. L’orifice génital commun ^fig. 1 , f) est situé , comme je l’ai déjà mentionné, sur le côté droit du corps, entre le tentacule long et la première paire des appendices dorsaux. Cet orifice forme une verrue sensiblement saillante, conique et tronquée à son sommet, dont le bord supérieur est un peu allongé, de manière à pouvoir fermer presque complètement l’orifice comme une val- vule. La cavité génitale commune est assez spacieuse, arrondie, tapissée d’une membrane musculeuse , et perforée au fond par trois ouvertures, celles des canaux excrétoires des organes mâles et femelles , et celle d’une grande vésicule particulière que j’appelle la vessie muqueuse. Des organes sexuels mâles. Le testicule (fig. 1, c , qui est proportionnellement assez grand, se fait déjà remarquer, à la simple inspection avec la loupe, par sa couleur verdâtre ; il est situé à peu près au milieu du corps , un peu plus rapproché de la tète , en arrière du foie , et entouré en partie par les lobes de cet organe. UK VIlilDIAW. — Sl li LK TlilllSII'IiS KDW USDS1I. J 31 Il touche en haut au canal intestinal, en arrière aux organes sexuels femelles. On peut comparer sa forme à celle d’un boudin courbe fortement rempli ; son extrémité postérieure est arrondie, recourbée en bas; son extrémité antérieure diminue petit à petit en volume, et se termine en pointe; les parois sont formées par une membrane très épaisse et lisse , et par une seconde enveloppe assez mince. Deux canaux sont en communication avec le testicule ; celui qui est le plus court débouche, en venant du foie et en décrivant un arc, au-dessous de la partie recourbée du testicule, dans le milieu de cet organe. Cë canal court est ordinairement si bien caché sous la masse du testicule qu’il échappe à la vue; mais on le remarque chaque fois que l’on réussit à isoler complètement le testicule. J’ai vu la première preuve de l’existence de ce canal dans un mouvement vibratile assez fort qui se trouvait à cet endroit ; car , excepté l’estomac et le rein, tous les autres organes prennent un épithélium vibratile en approchant de leur orifice à la surface externe. L’intestin , par exemple , vibre seulement dans la partie rectale ; le canal déférent, seulement là où il quitte le testi- cule, et à son extrémité qui débouche dans la vessie ; la glande muqueuse , seulement à son embouchure ; le foie, dans le canal biliaire; l’oviducte, à la sortie de l’ovaire, et près de l’orifice génital ; le cœur, au passage dans les vaisseaux. Je n’ai pas pu m’assurer ni de la marche ni du mode de termi- naison du canal court dont je viens de parler ; peut-être est-il en communication directe avec les organes femelles ; mais je crois plutôt qu’il se termine en cæcum. On pourrait le regarder dans ce cas comme un épididyme. Un long canal serpentant entre les replis du foie , un véritable canal déférent (fig. \ ,rf , est en communication avec l’extrémité pointue du testicule. D’abord plus large, puis se rétrécissant con- sidérablement , ce canal s’étend vers la cavité sexuelle générale pour déboucher dans la verge très courte, qui quelquefois est un peu saillante. Ce petit organe est du reste entièrement différent de celui que Cuvier et les autres naturalistes ont désigné comme tel dans la majorité des Mollusques. SI II LE lEKGJl'ES mm VIIDS1I. DE MIItUHIW. Cette verge a une tonne conique courte et un petit orifice qui est formé par une membrane très dure d’une texture cartilagi- neuse. Comme on ne peut voir à la fois que ces deux parois opposées, le pénis a l’air de se terminer par deux courtes pointes ; j’ai déjà fait remarquer que l’on trouve un mouvement vibratile en cet endroit. Ce col de la verge et du conduit éjaculateur est en rapport avec une grande glande ovale , qui est souvent élargie en forme de massue vers son extrémité en apparence fermée, tandis qu’elle se rétrécit en avant. Cette vésicule (fig. 1 , e) contient dans son intérieur une quantité de petites vésicules rondes, une masse mucilagineuse remplie de granules ; elle s’étend le long du pied , dont elle se rapproche plus que tous les autres viscères. Son épithélium interne vibre vers l’orifice; son extrémité posté- rieure arrondie reçoit un canal court un peu tlexueux , qui paraît venir de la région des corps cristalloïdes du pied. Quatre à six fibres très fines prennent encore leur insertion sur la paroi externe postérieure, et paraissent pouvoir fonctionner pour l’expulsion du contenu. Les parois de cette vésicule sont d’une nature muscu- leuse; elles se contractent et se dilatent sous le compresseur tout-à-fait indépendamment des mouvements des autres organes. Cette vésicule , si on ne veut pas la comparer à la prostate , est , dans tous les cas, une glande muqueuse de laquelle provient la mucosité par laquelle l’animal se colle à des objets divers comme par un fil. Le pénis n’est pour ainsi dire qu’un prolongement du cette vésicule ; je n’ai pourtant jamais remarqué qu’il contînt des zoospermes (1). Le testicule de l’animal adulte est rempli de zoospermes tel- lement serrés qu’ils peuvent à peine se mouvoir. Leur forme se rapproche de celle que montrent les petits zoospermes de la Paludine, mais leurs mouvements paraissent plus vivaces. L’une de leurs extrémités ‘est allongée en forme do cheveu ; l’autre est plus épaisse et en forme de vis , quoique se terminant éga- (t ) Nous croyons, au contraire, que toute la vessie contractile n'est autre cliose que le pénis, qui, clans les autres Nudibranches, jouit aussi de mouvements tout- a -fait indépendants. * (iXote du traducteur.) DE NOBD9MNK. — SLR LE TERGIPES EDWARDSII. 133 lement en pointe. Les zoospermes sont très longs par rapport à l’animal ; ils mesurent île 10 à 16 centièmes de ligne ; le tour de la vis embrasse un tiers de leur longueur. Ils sont situés pêle- mêle dans le testicule et forment, en sortant, des faisceaux sem- blables à des boucles. 1 Is serpentent très vite en tournoyant sur leur extrémité renflée; ils ne se roidissent pas de suite dans l’eau de la mer, mais continuent à se mouvoir, tandis que l’eau douce produit le phénomène connu de la formation des anses. On trouve aussi dans le testicule de petits corpuscules et de petites vésicules qui sont en rapport avec la formation des zoospermes. Je passe outre sur cet objet, me réservant de démontrer plus tard que les zoo- spermes se forment aussi spontanément dans les organes sexuels femelles. L’organe désigné comme testicule est un organe pure- ment mâle ; je n'y ai jamais vu de corps vésiculaires qui eussent la moindre ressemblance avec des œufs en voie de développement. Nous décrirons bientôt l’analogue de l’organe hermaphrodite des autres Gastéropodes. Organes sexuels femelles. Les organes femelles occupent la plus grande partie de la cavité générale; car les ovaires, ainsi que les autres parties, s’étendent depuis le foie jusque vers l’appendice caudal du corps. Cet appa- reil si compliqué est composé, 1° des ovaires; 2° des canaux excréteurs des ovaires ; 3° des réceptacles particuliers, dans les- quels les œufs primitifs sont fécondés, et que j’appelle avec M. de Siebold les poches spermatiques ou fécondatrices ; 4° des canaux excréteurs de ces poches ; 5° d’un autre réceptacle qui correspond en quelque sorte à la matrice. Les ovaires (fig. 1, m sont des boyaux ovales ou arrondis, dont le nombre est très variable, d’après la taille et l’âge de l’animal, et d’après le nombre de poches spermatiques. Chacune de ces der- nières poches, dont j’ai compté de dix-huit à vingt-quatre dans les animaux adultes, est en communication avec trois à six ovaires, dont les canaux excréteurs très courts , mais capables d’une très grande extension, s’ouvrent, surtout dans la partie antérieure de la poche spermatique. Chacune de ces poches ressemble ainsi à Sl lt I.E TlillUIPES Em\ ARDSII. 1:ï(| »F. KORD9MNN. une grappe de raisin. La formation des œufs a lieu partout dans la cavité des ovaires, qui sont remplis par des amas de granules élémentaires plus ou moins petits, par des quantités d’œufs plus ou moins formés, arrondis et nettement circonscrits, qui sont tous pourvus de taches et de vésicules germinatives. On distingue entre autres des vésicules germinatives plus grandes et entourées déjà de masses vitellaires, opaques. Les œufs qui sent mûrs pour la fécondation passent, par les canaux excréteurs des ovaires, dans les poches séminales, pour se rendre de là dans l’oviducte, dont l’extrémité postérieure peut être regardée comme l’analogue de l’utérus. Les poches séminales (fig. l,.v) quoiqu'en relation intime avec les organes femelles, méritent une attention toute particulière , en ce qu’on y trouve un développement indépendant de zoospermes. Le nombre de ces poches, arrondies et un peu aplaties des deux côtés, varie, chez les différents individus, entre quatre et huit ; elles remplissent l’espace compris entre le testicule proprement dit et la partie postérieure de l’intestin, en se plaçant les unes à la suite des autres. Les parois assez épaisses de ces organes sont glandu- leuses. Leurs bords inférieurs sont bordés de jaune, quelquefois même, dans des individus plus âgés, d’un orangé assez vif. Les éléments que l'on trouve dans ces organes, et qui, à mon avis, sont tous liés au développement de zoospernies, sont les suivants. A. On trouve d’abord de petits granules opaques qui présen- tent un mouvement moléculaire, et. qui remplissent l’espace que laissent entre eux les autres éléments, en formant probablement la matière dont ces derniers se constituent ; B. De petites vésicules arrondies et qui sont surtout appli- quées contre les parois des poches séminales. Quelques unes de ces vésicules sont parfaitement transparentes ; d’autres sont rem- plies d’un contenu granuleux ; les plus grandes ont souvent un noyau distinct ; C. Des cellules plus grandes, allongées, sans noyaux, mais remplies de granules très petits, disposés en séries parallèles, ce qui donne aux cellules un aspect finement strié, qui est caracté- ristique de la formation des zoospermes ; DE iVORDMAiW. Sl’R I.E T EI\E IPES EDWARDSIT. 135 D. D’autres éléments encore plus longs, fusiformes, plus ou moins tortueux et sans enveloppe distincte, mais ayant un con- tenu semblable; ce sont des faisceaux de fibres spermatiques; E. Des zoospermes développés, ayant des têtes renflées et quel- ques tours en spirale. Les faisceaux les plus grands se laissent diviser, à l’aide du compresseur, en plusieurs faisceaux plus petits et rayonnants, dans lesquels les extrémités renflées des zoospermes se trouvent toujours du même côté. Ces têtes des zoospermes étaient entourées immédiatement de petites vésicules ovalaires et transparentes qui paraissaient en communication avec les têtes, tandis que les extrémités minces et pointues des zoospermes étaient collées ensemble par une masse glutineuse et granulée ; F. Enfin, des zoospermes libres parfaitement développés , sans vésicules. Ce sont les seuls qui présentent des indices de vie, tels qu’on les connaît chez les zoospermes. En les comparant avec ceux qu’on extrait du testicule, on trouve toujours une petite diffé- rence , qui consiste en ce que les zoospermes des vésicules sé- minales ont une forme plus allongée, la tête moins grosse, et un nombre de tours de spire moins considérable. Il y aurait donc chez le Tergipes deux formes de zoospermes un peu différentes. Tout cela prouve sans doute que les zoospermes se développent dans l’intérieur des organes femelles (1). Il est plus difficile de savoir si la matière première de ces corps, surtout les cellules désignées sous ia lettre H, proviennent seulement du testicule par éjaculation. Je suis porté à croire que (t ) Il me semble évident, d'après ces observations de M. Nordmann lui-même, que les organes nommés par lui poches spermatiques , et dans lesquels se déve- loppent les zoospermes, sont réellement les testicules multiples, tandis que l’or- gane appelé par lui testicule ne parait être qu'un diverticule du canal déférent, une espèce de vésicule séminale. Si le caractère du testicule, dans toute la série animale. est de servir d'organe pour la production des zoospermes, je ne sais pourquoi M Nordmann refuse ce nom a de- organes dans lesquels il trouve tous les degrés de ce développement, d'autant plus qu'd n'y a jamais découvert des éléments appartenant aux organes femelles. (.Voir du traducteur.) 13(3 dk xonmiwv — si r, i.i: tergipes edwardsii. ces vésicules ou cellules peuvent aussi être produites par les parois glanduleuses des poches séminales. Je n’ai jamais trouvé, dans ces poches, des éléments qu’on aurait pu prendre pour des œufs en voie de formation , comme je n’ai pas trouvé non plus de zoospermes en contact avec des vésicules germinatives. Les zoo- spermes ne pénètrent jamais dans les ovaires, oii il aurait été facile de les reconnaître à leur longueur considérable et à leur aspect particulier ; ils restent, au contraire, dans les poches sémi- nales, où ils sont réunis en faisceaux. La structure que nous venons de décrire prouve que le Ter • gipes, ainsi que d’autres animaux d'une conformation semblable, peut produire des oeufs fécondés sans copulation préalable. Pour avoir une certitude absolue sur ce fait , j’ai fait des expé- riences directes en nourrissant isolément, pendant des mois entiers, des individus que j’avais pris lorsqu’ils étaient encore d’une petitesse extrême. Presque tous ont pondu des œufs qui se sont développés. Les poches séminales du Tergipes débouchent par des canaux très courts et assez larges dans un grand boyau médian, l’utérus, qui diminue petit à petit en volume , et se termine dans le sac générateur commun, en formant un vagin allongé et un peu llexueux. DEIXIÈIIE PARTIE. EMlilîYOGÉNlF.. L’œuf dans l’ox aire. On ne peut distinguer les organes sexuels aussi longtemps que les jeunes Tergipes sont encore enfermés dans leur coquille nautiloïde ; mais aussitôt qu’ils se sont séparés de la coquille, et qu’ils ont atteint une longueur de 1/4 à 1/3 de ligne, on trouve déjà indiqués le testicule . ainsi que le contour de l’utérus. Les œufs se développent même beaucoup plus tôt que le contenu testiculaire ; mais ce qui frappe surtout , c’est le manque de tur- gescence de l’enveloppe extérieure de l’utérus et des parties con- tiguës. La configuration des ovaires, quoique en général arrondie, I»K \OIIIMItW. — sur. LE TEROIPES EDWARDS». 137 montre pourtant des coins et des entailles qui so présentent sous forme de sillons assez réguliers , formant tantôt des carrés , tantôt des polygones ou des figures croisées. Les œufs en voie de for- mation , et qui sont trop peu élastiques pour pouvoir distendre les parois des ovaires , sont entassés les uns sur les autres , com- primés extérieurement, et présentent ainsi des formes polyé- driques. En soumettant ces œufs à une pression graduée , on les voit affecter la forme de pentagones ou d’hexagones, dont chacun con- tient dans son intérieur une vésicule arrondie et un noyau plus transparent. L’enveloppe polygonale est la membrane vitellaire ; la vésicule transparente est la vésicule germinative ayant la tache de Wagner. On y découvre en outre des éléments clairs et transparents com- posés seulement de deux contours concentriques, savoir, de la vési- cule germinative et de son noyau ; puis des corps transparents , arrondis , très nettement circonscrits , que je regarde comme des taches germinatives , et enfin une quantité de granules molécu- laires qui forment la grande masse, de l’ovaire. S’il est vrai que les corps transparents , arrondis , à contours très accusés , que je viens de mentionner, sont réellement des taches germinatives isolées, il s’ensuivrait que cette tache serait le premier élément de l’œuf qui se forme, l ue pareille tache germinative paraît toute homogène ; elle ne contient pas , pendant cette première période , de ces granulations que l’on pourrait envisager comme des nu- cléoles. La tache germinative se retrouve dans les œufs les plus petits des individus les plus jeunes ; elle est toujours parfaitement arrondie, et l’on peut distinguer sur la tache, dès qu’elle est entourée par la vésicule germinative et par le vitellu.s, une enve- loppe très mince et un contenu. L’enveloppe ne présente aucune structure appréciable ; dans l’origine, ses contours sont plus accusés que plus tard. J’ai plu- sieurs fois réussi à faire sortir la vésicule germinative et la tache germinative par une fente de la membrane vitellaire ; ces deux élé- ments s’allongeaient pour trouver un chemin entre la substance vitellaire , et redevenaient sphériques plus tard après leur sortie , 138 DE NOKDMANN. — SUR LE TERGIPES EDWARDSII. ce qui prouve que ce sont des vésicules , dont l’enveloppe jouit d’une élasticité considérable. La tache germinative augmente en volume: son contenu est tout-à-fait sans structure aussi longtemps que dure cet accroisse- ment. La tache atteint le terme de sa croissance beaucoup plus tôt que la vésicule germinative, de manière qu’il n’est pas rare de rencontrer des taches de grandeur égale dans des vésicules ger- minatives très inégales. Chaque vésicule germinative ne contient qu’une seule tache, située ordinairement au centre , mais qui plus tard se rapproche un peu de la périphérie. Je ne crois pas que la tache soit toujours accolée à la paroi interne de la vésicule germinative, car elle change facilement de place lorsqu’on fait glisser avec précaution les lames du compresseur. Les granulations manquent aussi long- temps que la vésicule germinative est encore isolée; mais il se forme un précipité granulé du moment que le vitellus vient s’a- jouter et que l’ovule approche de sa maturité. Je crois donc pouvoir établir avec une pleine certitude que la vésicule germinative existe avant le vitellus , puisqu’on trouve dans les ovaires du Tergipes des vésicules avec leur tache germi- native, et sans la moindre trace de substance vitellaire. La vésicule germinative a une forme sphérique et entoure la tache germinative, d’abord assez étroitement, puis elle s’étend et s’accroît pendant longtemps, même après que la tache germi- native est parvenue à son volume définitif. Elle ne paraît atteindre le terme de sa croissance que lorsqu’une partie du vitellus s’est déjà déposée autour d’elle. La vésicule germinative est donc relativement d’autant plus grande que le vitellus est plus petit. L’enveloppe de la vésicule ne montre d’abord aucune structure, ainsi que son contenu liquide et albumineux ; mais ce dernier de- vient bientôt granuleux et forme de petits globules qui se collent à la paroi interne de la vésicule, et ressemblent un peu à des glo- bules graisseux. Nous distinguons dans le vitellus deux substances : la couche I»E XORDM.VVÎV. — sim LE TEllGIlUiS EDWABDSII. 1 39 primitive, assez mince, et une couche secondaire qui s’y ajoute plus tard. La couche primitive se présente sous la forme d’un disque, au milieu duquel sont enfermées la vésicule et la tache germinative. Celte couche est composée d’un liquide transparent, et parsemée de molécules très petites; elle est entourée manifestement d’une fine membrane cellulaire, d’une espèce de membrane vitellaire. Les corpuscules moléculaires sont d’abord de simples granules qui n’ont pas la forme de vésicules ou de cellules. La membrane vitellaire augmente tout aussi bien autour de la vésicule germi- native que celle-ci s’élargit autour de sa tache centrale. Parmi les œufs en voie de développement, on en trouve dans lesquels la vésicule germinative occupe plus de la moitié de l’œuf tout entier. Le caractère le plus saillant de l’œuf non mur est sa transparence et l’existence d’une membrane vitellaire distincte, tandis que celui de l’œuf mûr réside dans l’opacité , dans la com- position cellulaire de la masse vitellaire et dans la disparition de la membrane vitellaire. La masse vitellaire primitive est entourée, lorsqu’elle a atteint à peu près la moitié du volume de l’œuf tout entier, par les gra- nules brillants, plus accusés et plus grands, de la masse vitellaire secondaire, ou, en d’autres mots, une couche plus épaisse de substance vitellaire se dépose autour de la membrane vitellaire. Le vitellus primitif éprouve, bientôt après le dépôt de la sub- stance vitellaire secondaire, un changement, en ce sens que les molécules qui se trouvent en dedans de la membrane vitellaire s’accumulent pour former d’abord des granules, et plus tard des vésicules, dans lesquelles on aperçoit des noyaux plus petits. La membrane vitellaire disparaît dès que la transformation de la sub- stance vitellaire primitive est assez avancée pour qu’il devienne difficile de trouver une différence entre les deux substances vitel- laires, qui se pénètrent maintenant et se confondent mutuelle- ment. On peut encore quelquefois réussir à séparer les deux couches par une pression habilement ménagée, et faire voir la membrane vitellaire , ainsi que la différence des couches qu’elle sépare. 1/jO nu xorimiaxv — Slip, i.i: tergipes edwardsii. L’œuf mûr. L’œuf, parvenu à sa maturité, passe de l’ovaire, par le canal excréteur rpii se distend considérablement à cette occasion , dans la poche séminale remplie de zoospermes, où il est fécondé, et de là dans la matrice. L’utérus, rempli quelquefois de trente à qua- rante œufs à la fois, est très distendu dans ce cas; les œufs sont accumulés depuis l’orifice sexuel jusque vers l’appendice caudal, et il arrive assez fréquemment que les parois élastiques de l’utérus poussent des diverticules qui s’étendent jusque dans les cavités des appendices branchiaux, de manière que des œufs isolés sont quelquefois poussés à côté des cæcums intestinaux, jusque vers les extrémités des appendices. Le plus grand nombre d’œufs se trouve toujours plus rapproché du dos que du pied. L’œuf mûr a une forme parfaitement sphérique; son vitellus est enfermé dans une enveloppe mince, transparente et sans struc- ture, le chorion. Cette enveloppe entoure étroitement le vitellus, dont la masse, d’abord blanchâtre, a pris une teinte rose assez claire, teinte qui se voit à travers les téguments extérieurs du corps. Le diamètre d’un pareil ouifest de 0,06 de ligne. Le cho- rion résiste d’abord un peu à la compression et se fend ensuite, après une dilatation peu considérable. Le contenu de l’œuf est composé d’un liquide albumineux et transparent , dans lequel sont dispersés divers autres éléments qui sont au nombre de trois, savoir, des sphères assez grandes, transparentes, luisantes et très nettement circonscrites, qui sont manifestement des cellules, et dont l’intérieur est rempli par d’au- tres éléments globulaires peu distincts et par des granules. Ces sphères brillantes forment la grande partie du contenu vitellaire ; elles mesurent presque 0,006 de ligne. Elles deviennent surtout visibles par la compression, et leur éclat, par la lumière trans- mise, est tel, que leur aspect fatigue même l’œil exercé. A cela s’ajoutent des granules plus petits, moins nettement circonscrits, qui s’accolent ensemble, et qui sont entourés d’une masse gra- nuleuse très One, dont les molécules, ainsi que les contours des DE \OKHMAXV — sut LE II IIGII’ES EDWAKDSII. 1ÙI petites sphères, sont doués d’un mouvement très animé lorsqu’on écrase les œufs. La vésicule germinative, avec son noyau, ne montre pas de modification importante ; on remarque pourtant qu’elle appro- che davantage de la périphérie, et qu’elle est remplie de nom- breux granules opaques.. On remarque aussi quelquefois dans la substance vitellaire des globules plus grands et nettement accusés, qui sont probablement des gouttelettes d’huile. Le con- tenu vitellaire n’est pas sensible à l’eau de mer; le mouve- ment moléculaire devient seulement d’abord plus vif, pour se ralentir après, et s’arrêter définitivement après quelque temps. I.a ponte des œufs. La copulation, si toutefois elle a toujours lieu, non plus que la ponte de notre animal , n’est liée à une certaine saison ; car on trouve une quantité de capsules d’œufs depuis le printemps jus- qu’à l’époque où la mer gèle, et j’ai eu même des œufs qui furent pris en décembre, par une température de h degrés, dans la mer. La capsule dans laquelle les œufs du Tergipes sont enfermés est arrondie ou réniforme; elle constitue une vésicule d’une transpa- rence vitrée, qui est composée de deux enveloppes, une externe et une interne. Cette dernière entoure légèrement les œufs, et laisse apercevoir un espace considérable entre elle et l’enveloppe externe. La capsule a une ligne de diamètre; elle est fixée, par une tige courte et en forme d’entonnoir, à la face inférieure d’une feuille d’Algue ou à un Polypier quelconque, tels que des Cam- panulaires, des Corynes ou des Bow erbankies. L’espace externe, comme l’espace interne de la capsule , est rempli par un liquide gélatineux, dans lequel les petits, qui portent encore des coquilles, tourbillonnent pendant quelque temps après leur sortie de l’œuf. On remarque à la face de la vésicule, située vis-à-vis de la lige, un cercle dans lequel se montre une fente, vers la fin du dévelop- pement des petits. Celte fente donne aux petits une issue dans l’eau. Le nombre des œufs contenus dans les capsules varie beaucoup d’après la grandeur et l’àge de l’animal , et chacun d’eux répète 1 /p2 ni: vonn'i i\v — sois i.e ïeugipes edwardsij. plusieurs fois la ponte, sans que chaque ponte soit précédée né- cessairement d’un accouplement. J’ai retiré de douze individus, que j’isolais pendant dix jours, après les avoir conservés ensemble, le nombre suivant d’œufs. Du N" 1 La première fois. . . 9 La seconde fois. 6 » » 2 18 9.4 3 18 7 8 » 4 8 ...... 4 0 » » 5. ........18 13 » » 6 16 3 7 . 7 8 8 3 9 1 10 .52 H 64 12 80 30 26 1* Ce dernier animal était extraordinairement grand ; il vécut pendant plus de trois mois, changea plusieurs fois de peau, et se nourrissait, en dernier lieu seulement, d’infusoires, après avoir dévoré tous les faisceaux de Campanulaires qui étaient à sa portée. Il pondit plus tard encore des œufs que je ne comptais plus. Les œufs forment un amas irrégulier, mais qui n’est jamais serré au point qu’ils puissent se comprimer mutuellement, de ma- nière à prendre une forme polyédrique. Je n’ai pas vu non plus de coques vides sans vitellus , telles que M. Sars en mentionne dansiez N udibranches examinés par Iqi. Mes animaux pondaient de nuit , et quelquefois plusieurs capsules à la fois. Je n’ai pas vu une véritable immission du pénis, quoique j’eusse observé plusieurs couples en contact immédiat. Développement de l’embryon Les points suivants me paraissent surtout importants dans les modifications que subissent le vitellus et l’embryon. 1“ L’œuf devient oval; le chorion s’étend d’un cinquième de son axe lon- gitudinal. Un liquide transparent et albumineux se sépare en même temps du vitellus. 3“ Le vitellus perd sa forme sphé- DE XORDM.IW — SLK LE TEltGIl’ES EDM \UDS1I. 143 rique; sa masse devient moins compacte; ses contours se ri- dent. 4° La vésicule germinative et la tache de \\ agner dispa- raissent. 5° Les couches supérieures du vitellus perdent leur cou- leur rougeâtre; l’œuf devient blanc. 6" Des cellules vitellaires se séparent, dans la majorité des cas, du reste de la masse vitel- laire, et déterminent des formations parasitiques. 7“ Le vitellus est séparé en deux sphères par un sillon. 8" Le fractionnement se continue dans une progression régulière. 9“ Le vitellus a la forme d’une mûre. 10° Une vésicule- d’air (?) se sépare du vitellus. 11° La surface du vitellus devient grenue. 12° Pre- mière formation de l’embryon : le vitellus prend une forme al- longée qui passe bientôt à celle d’un triangle mal défini. 13° Ap- parition distincte du système animal, du système cutané; con- figuration de l’embryon. 14” La partie antérieure de l’embryon, les organes moteurs futurs sont indiqués par un étranglement. 15° Le bord antérieur, élargi, montre des rides qui se trans- forment bientôt en deux saillies arrondies latérales. 16° Les sail- lies se transforment en lambeaux, et entre eux parait un troisième prolongement, le pied. 17° Commencement de. la formation du manteau et de la coquille. 18° Des cils poussent sur les lambeaux. 19° Premier mouvement oscillatoire de l’embryon. 20° Le pied, accolé à la coquille, reçoit des cils vibratiles, 21" Les lambeaux (voiles) prennent la forme d’un disque; mouvement rotatoire de l’embryon. 22° Les cellules qui ont contribué à la formation du manteau se dissolvent et disparaissent. 23" La coquille s’est accrue considérablement. 24° Des rangées de cellules isolées indiquent le muscle suspenseur. 25° Formation des viscères, dont on ne peut distinguer d'abord que l’intestin isolé ; capsules audi- I i v es. 26° Le foie et d’autres corps glanduleux deviennent distincts, ainsi que l’anus, les ganglions. 27° Les cellules formant le muscle suspenseur disparaissent. 28° Dépôt pigmentaire des yeux. 29° Les parasites si curieux paraissent entre le chorion et l’embryon en- core enfermé dans sa coquille. 30° L’embryon, définitivement formé, ou la larve, ouvre et referme sa coquille, moyennant un opercule. 31° Plus grande dilatation du chorion. 32° La larve 144 DE Mlltlin\N\. — SL K LE HilU.ll'LS EDWAKDSII. crève le chorion. 33° Séjour des larves dans la capsule commune des œufs. 34° Les petits quittent la capsule. Le temps nécessaire au développement complet des œufs du Tergipes est très différent, d’après les saisons, et j’ai observé qu’il faut, en général , de seize à vingt jours pour l’accomplisse- ment de toutes les phases. Le changement trop souvent répété de l’eau de mer, dans la saison froide, retarde de beaucoup le développement. La première modification que l’on aperçoit consiste dans la di- latation de l’enveloppe externe , qui prend une forme ovale. Il se trouve même des œufs qui sont plus larges à l'une des extré- mités, et pointus à l’autre. Le vitellus, encore complètement glo- bulaire, d’une teinte rose parla lumière réfléchie, et nettement circonscrit, occupe à peu près les deux tiers dé l’espace du cho- rion. 11 est impossible de prouver l’existence d’une membrane vitellaire; le vitellus, par la compression, s’étend d’une manière uniforme, et coule hors du chorion déchiré, sans laisser de traces d’une enveloppe particulière. Pendant que le chorion augmente de volume, il se fait entre lui et le vitellus un espace assez considérable, qui se remplit d’un liquide albumineux et transparent. On sait que beaucoup d’œufs de Mollusques se tuméfient lorsqu’on les met dans l’eau; mais je crois que, dans le cas qui nous occupe , le liquide ne pé- nètre pas seulement par imbibition , mais qu’il provient aussi de la masse vitellaire elle même, entre les granules de laquelle il était contenu. Le vitellus s’agrandit peu de temps (six à dix heures) après la ponte; il perd en même temps sa forme sphérique et montre des contours ridés, qui proviennent de l’accumulation des cellules et des granules , entre lesquels il y a des espaces plus transpa- rents. Cette liquéfaction pénètre toute la masse vitellaire, et dé- truit aussi la vésicule germinative et la tache de Wagner, parties qui se montrent toujours dans les œufs contenus dans la matrice, en sorte que leur disparition n’est pas une conséquence immédiate de la fécondation. Je ne puis dire avec certitude si c’est la tache in: !V«KD1U\\. — SUR LE TERGIPES EDWARDSII. 1 h 5 ou la vésicule germinative qui disparaît la première ; leur place est occupée maintenant par des granules et des cellules grandes et petites. La teinte rosâtre du vitellus disparaît en même temps; l’œuf devient blanc. Avant le commencement du fractionnement se montre un phé- nomène tout-à-fait particulier, qui n’est qu’en rapport indirect avec le développement de l’embryon. De petites particules , quelquefois au nombre de deux à huit , commencent à se séparer du vitellus au moment où celui-ci se ride. Ces agglomérations sont d’abord collées à la surface du vitellus; mais bientôt elles se séparent complètement pour nager dans le liquide albumineux. Ces agglomérations ne sont pas différentes des éléments vitel- laires; elles contiennent toujours quelques cellules plus grandes, arrondies et transparentes, dans lesquelles se trouvent emboîtées d’autres cellules plus petites et pourvues de noyaux. J’ai pour- suivi attentivement les phases diverses de ces agglomérations, et j’ai vu qu’elles se transformaient en des animaux parasites d’une forme particulière. Ce fait me paraît de la plus haute importance ; il peut donner lieu à une quantité de questions et d’hypothèses. 11 s’agit d’abord de savoir si mes observations sont réellement fondées, et si je n’ai pas été trompé en prétendant que ces agglo- mérations proviennent réellement du vitellus , puis si les mem- branes et les enveloppes des œufs étaient réellement intactes , et si , «11 général , il y avait possibilité de suivre le développement de ces animaux parasites. On peut faire la réponse suivante à ces objections. Une quantité de parasites se trouve dans les par- ties internes des Mollusques; l’observation ne pouvait reposer sur une erreur, puisque , sur la grande quantité d’œufs qui se sont développés sous mes yeux, èi des saisons différentes, il n’y en avait que fort peu sur lesquels je n’eusse pas observé ce phéno- mène. Ni l’embryon ni les parasites ne se développaient lorsque les enveloppes du vitellus avaient une lésion quelconque qui laissait libre accès à l’eau. Toute la masse se décomposait alors par pourriture. Des germes de parasites peuvent se trouver tout aussi bien dans les ovaires que dans d’autres organes; ces germes peu- 3* série. Zoul. T. V. ( Mars -1846.) -j 10 146 DE NORDMANN. — SUR IÆ TERGII'ES EDWARDSII. vent être englobés par les enveloppes des œufs qui se forment. J’ai, d’ailleurs, déjà communiqué d’autres observations analogues qui constatent des faits semblables. Mais les rapports si intimes de ces agglomérations avec le reste du vitellus, leur développe- ment dans l’intérieur du chorion , sont toujours quelque chose de surprenant ; car, s’il y avait une membrane vitellaire particulière, les germes des parasites devraient être enfermés par cette mem- brane. D’autres naturalistes confirmeront sans doute mes obser- vations, pourvu que d’autres Mollusques présentent des cas ana- logues. La transformation des agglomérations séparées pour for- mer des animaux isolés n’est pas difficile à suivre , malgré la petitesse de ces dernières; mais, comme elle ne se fait qu’ après la fin du développement embryonnaire du Tergipes, je ne revien- drai sur cet objet que plus tard. Le premier sillon du fractionnement paraît, en général, qua- torze à seize heures après la ponte. D’abord à peine marqué , il devient de plus en plus profond, et finit par séparer le vitellus en deux sphères plus ou moins grandes, qui paraissent à peine acco- lées l’une à l’autre. Ce premier sillon a une direction très variable ; quelquefois il ne passe pas même dans le centre de l’œuf, de sorte qu’il se forme deux sphères d’une grandeur fort inégale. Je m’attendais à voir distinctement la membrane vitellaire pen- dant le fractionnement, ce qui n’est pas arrivé; comme cette membrane ne prend point part à la formation des sillons, elle aui'ait dû apparaître en formant des ponts à travers. Le premier sillon est bientôt coupé par un autre, qui partage alors le vitellus en quatre parties égales. Celles-ci se fendent en huit sphères, et ainsi de suite... Mais, quoiqu’il y ait une tendance à un sillonnement progressif et régulier, je dois pourtant faire observer que le vitellus est souvent très irrégulièrement frac- tionné avant qu’il prenne la forme d’une mûre. Les sphères vitellaires s’aplatissent mutuellement sur les points de contact; elles sont complètement séparées ; mais lorsqu’elles se désagrè- gent les unes des autres, l’embryon ne se développe pas; les sphères pourrissent , et des Monades se forment dans l’intérieur MU XOKMMAW. — SUtt l.li TliKüll’liS EDWAJRDSU. 147 du chorion intact, comme je l’ai déjà démontré, du reste , sur des œul's pourris de Lernées (1). Les taches circulaires et transparentes qui se trouvent dans l’intérieur des sphères de fractionnement manquent entièrement dans notre mollusque. Le volume du vitellus augmente fort peu pendant le fractionne- ment ; les sphères qui résultent de ce fractionnement ont toutes la même grandeur lorsque l’œuf est à l’état de mûre ; les sphères se subdivisent alors de nouveau jusqu’à ce que la surface de l’œuf ait cet aspect finement granulé qu’on lui connaît. Je dois avouer que je n’ai pu trouver de membranes propres autour des sphères, ([ue dans les dernières périodes du fractionnement. Néanmoins je ne veux pas nier leur présence dès le commencement. Je trouve que les sphères contiennent alors deux cellules em- boîtées les unes dans les autres , rarement davantage. Un phénomène particulier, sur lequel je voudrais appeler l’at- tention des observateurs futurs, se présente lorsque le vitellus a pris la forme d’une mûre. Une petite vésicule ronde est excrétée pendant ce temps par le vitellus. Cette vésicule, qui d’abord est attachée à la surface de l’une des sphères de fractionnement, dis- paraît plus tard sans laisser de traces. Ce n’est pas une goutte- lette d’huile, à en juger par ses contours opaques et son pouvoir de réfraction , mais plutôt une vésicule remplie d’un liquide lim- pide, ou peut-être même une vésicule d’air (?). Je regrette maintenant de n’avoir pas déterminé la nature de cette vési- cule, ce qui n’aurait pas été difficile. Elle est sans doute dans un rapport intime avec le fractionne- ment, puisqu’elle s’observe dans tous les œufs, et, à ce qu’il pa- raît, en un point déterminé. Je ne suis, d’ailleurs, pas le seul qui ait observe cette vésicule ; MM. Dumortier etPouchet l’ont vue sur les œufs des Lymnécs, etM. Van Beneden sur ceux des Aplysies. Cette vésicule ne peut pas être identique avec la tache germina- (I) ifikrographische Beilrœgc, II. — Les Infusoires qui se trouvent dans les œufs pourris des Tergipessont très petits, pointus en avant et surtout en arrière, et rappellent les formes de certaines espèces d'Euglènes. Ils nagent assez rapide- ment par des mouvements ondulatoires de la queue. 148 DE XOKDMAW. — Sl'll Lli TEKGIPJKS EDWAIIÜSII. tive, puisqu’il y a un intervalle d’au moins quatre jours entre son apparition et la disparition de la tache germinative. Le développement de l’embryon commence du moment où la surface du vitellus a reçu l’aspect granulé. Nous savons déjà, par le développement d’animaux de certaines classes de vertébrés, que le vitellus tout entier se transforme en embryon ; mais les Mol- lusques ne me paraissent pas, en général, très propres à fournir des notions sur les premiers germes de l’embryon. Je n’ose pas décider, faute d’observations directes, si les cel- lules des tissus deviennent libres par la destruction des cellules- mères et par la formation de générations nouvelles dans l’inté- rieur de ces dernières , ni si les cellules des tissus doivent leur origine aux cellules primaires détruites et redevenues informes. Ce qui est sûr, c’est que l’emboîtement des cellules m’est devenu parfaitement clair pendant le fractionnement, et que les cel- lules des tissus sont des éléments que l’on ne trouve pas dans les cellules primitives de fractionnement. J’ai cherché en vain à rattacher le développement à une cellule dite embryonnaire, d’a- près M. Kœlliker ; je n’ai pas pu non plus voir avec précision une enveloppe primitive , comme la veut M. Reichert. La couche superficielle du vitellus n’a pas une couleur différente , et je puis seulement rapporter qu’il existe un point plus clair, comme pre- mier indice des parties animales de l’embryon. Faute de pouvoir suivre les métamorphoses internes des cellules vitellaires, nous devons nous rattacher surtout à celle des contours que montre le vitellus , et dont le but est d’abord le développe- ment d’organes qui impriment un mouvement particulier à l’em- bryon. Avant que ces organes se montrent manifestement, il se forme une petite saillie sur le vitellus, dont la forme sphérique est de- venue plus allongée. Cette saillie est séparée en deux mamelons arrondis par un sillon d’abord peu marqué , mais qui devient de plus en plus large et profond. Les mamelons eux -mêmes sont également réunis par une espèce de pont saillant. Au-dessous dé ce mamelon se forme un peu plus tard un autre sillon, et au-dessus de ce sillon une troisième saillie arrondie, à la- DK XORDH.WV — SUR LE TERGIPES EDWARDSII. l/j9 quelle correspond, du côté opposé, la face ventrale de l’embryon, qui, vue de côté, se présente comme concave ou courbée en dedans. On remarque maintenant aussi sur les deux mamelons mentionnés des cils vibratiles très courts, qui impriment un mouvement trem- blotant à l’embryon. Ces cils sont d’abord si petits , qu’ils sont impuissants pour mouvoir l’embryon en entier. Leur présence est trahie par les petites particules nageant dans l’albumine, avec lesquelles ils viennent en contact. Le reste de la surface embryon- naire ne montre pas de cils vibratiles ; mais toute la masse est douée de très bonne heure de contractions et d’expansions très faibles. La troisième saillie, que nous avons mentionnée (le pied), s’ac- croît avant que les cils des mamelons aient atteint leur lon- gueur définitive. Les mamelons s’agrandissent, les cils s’allon- gent, les mouvements deviennent plus marqués. Ce sont d’abord des mouvements de va-et-vient, qui se changent bientôt en un tournoiement autour de l’axe. Quoique ces mouvements parais- sent tout-à-fait mécaniques, il y a pourtant des moments de repos oii les cils et l’embryon s’arrêtent. On remarque souvent, avant que les deux mamelons s’écartent, que le bord situé entre eux paraît comme frangé. Le bord de l’embryon est aussi, en avant comme en arrière, beaucoup plus transparent que le centre. Les deux mamelons ou les organes moteurs particuliers des- sinent la partie céphalique , l’extrémité opposée est la partie pos- térieure. L’embryon a, à cette époque, une forme à peu près qua- drangulaire, un peu plus large en avant, et arrondie en arrière. Cette forme de l’embryon se convertit bientôt en un triangle mal défini. A mesure que le bord postérieur transparent, en devenant plus distinct, trahit les rudiments d’une coquille en voie de formation, il se forme une espèce d’opposition entre le corps de l’embryon et le manteau qui l’enveloppe. Le centre opa- que se présente, vu de côté, à peu près sous la forme d’une croix. La partie antérieure , avec les cils vibratiles , est posée sur une base large comme une saillie très considérable, qui est coupée carrément en avant. Un bourrelet du manteau , qui est situé sur la paroi interne de la coquille, embrasse la bosse du dos. Le pied, '150 DU XOKDMAXX. Si; II le tergites edwardsii. en forme de saillie arrondie , se trouve vis-à-vis de cette bosse. La partie postérieure de l’embryon est ainsi enveloppée comme dans un sac double , le manteau et la coquille , tandis que la partie antérieure du corps n’a point d’enveloppe. Nous avons donc maintenant à distinguer trois parties diffé- rentes dans le corps de l’embryon : la coquille mince, transpa- rente et gélatineuse, le manteau moins transparent et formé de plusieurs couches de cellules élémentaires qui lui donnent un aspect vésiculeux , et enfin le vitellus opaque, composé aussi de cellules et comprenant l’agrégation des organes internes. Ce n’est donc pas la coquille qui empêche l’observateur de voir les parties internes, comme le croit M. Sars, mais plutôt le manteau. Les cellules qui composent ce dernier ne sont pas globulaires , mais plutôt allongées ou ovales, transparentes, sans noyau dis- tinct, et toutes à peu près d’égale grandeur. Elles sont disséminées, sans ordre apparent, dans un cyto- blastème grenu ; elles se confondent plus tard , de manière à rendre le manteau plus transparent. Je n’ai pas pu voir de cellules dans la coquille en voie de formation ; celle-ci se développe de bas en haut, et, tandis qu’en arrière elle devient de plus en plus apparente, son embouchure supérieure est tellement adhérente au manteau, qu’on ne peut pas lui assigner une limite distincte. Les cils vibratiles font toujours saillie sur les contours supérieurs de la coquille; le chorion s’est distendu en même temps, de manière à donner plus d’espace au mouvement de l’embryon. Les deux mamelons de la partie céphalique se transforment bientôt en deux lambeaux arrondis pourvus de longscils vibratiles. rendant les moments de repos, ces lambeaux sont appliqués l’un contre l’autre, et les cils étendus en ligne droite. Tous ces mouve- ments dépendent manifestement de la volonté de l’embryon. La coquille s’est agrandie pendant ce temps ; les cellules qui compo- saient le manteau ont disparu ; le pied a reçu une forme de langue, et on voit sur sa surface, qui est tournée contre les lambeaux, des cils vibratiles assez courts. Le manteau, devenu transparent, per- met d’apercevoir des séries isolées de cellules destinées à la for- DE NOBDIUm — SUR LE TERCIPES EDWARDSII. 1 51 mation du muscle suspenseur. On distingue maintenant l’estomac arrondi en forme de sac, composé entièrement de cellules ovales, qui paraissent être en communication avec les lambeaux vibrants, par un corps plus grand, opaque et cellulaire. On voit à côté de l’estomac une autre partie arrondie et grenue , le foie, et il existe une trace du canal intestinal, sans qu’il soit possible d’en suivre le trajet. On remarque de très bonne heure, et avant que l’opercule de la coquille , collée sur le pied , commence à s’ouvrir et à se fermer, avant même que les autres organes internes soient devenus apparents, on remarque, dis-je, à la base des lambeaux vibrants, que je nommerai dorénavant vibracules ou voiles, deux corps arrondis et nettement circonscrits, qui sont les capsules auditives. Les parois de ces capsules, qui ont déjà une certaine consistance, résistent , sans perdre leur forme , à une forte pression du com- presseur qui fait diftluer toutes les autres parties molles ; et lors- que, par un hasard quelconque, les embryons se décomposent, ces capsules cartilagineuses résistent à la dissolution générale, et se retrouvent sans changement parmi les parties décomposées. J’ai vu, quelques jours plus tard, les yeux de mes embryons à côté et au-dessus des vésicules auditives. Ils auraient peut-être échappé à mon observation , si un pigment à teinte rose ne les avait trahis. Ils sont beaucoup plus petits et moins nettement accusés que les capsules auditives, et leur pigment se confond avec la masse du corps environnant. Je n’ai pu voir aucune sub- stance capable de réfracter la lumière. Ces yeux , sans contours arrêtés, ressemblent beaucoup aux parties correspondantes dans les Infusoires et d’autres animaux inférieurs (1). (1 ) Me trouvant en 1 823 , avec M. Milne Edwards , sur les côtes de la Nor- mandie, j'ai vu et dessiné deux espèces d' Ascidies composées, qui se distinguent par des yeux rouges magnifiques. On n'a pas encore démontré l'existence d'veux chez des Polypaires, a l'exception du genre Syncoryne ; mais je peux communiquer dés à présent les détails suivants surl'organe auditif. J'ai déjà publié que l'animal complètement formé d'une Campanulaire se détache souvent et nage librement, après la transformation de quelques unes de ces parties, sous forme d une petite Méduse : dix-huit a vingt tentacules articulés sont pendus à la périphérie du corps, si r. l.li TERGIPIÎS EDWAUDSII. 152 DE NORDMAMV. — Des cellules rangées obliquement depuis le fond de la coquille jusque vers le pied sont restées seules de toutes celles qui ont formé les intestins et le manteau; ces cellules, accumuléesd’ abord sans ordre , s’appliquent bientôt l’une à la suite de l’autre par leur plus grand diamètre. Les cloisons transversales disparais- sent , et il se forme un simple faisceau musculaire allongé , dont la transformation s’opère de haut en bas , c’est-à-dire du pied , vers la paroi interne de la coquille, oii le faisceau montre encore quelques groupes cellulaires isolés qui se confondent bientôt avec lui. On pourrait croire que ce faisceau musculaire s’attache immé- diatement à la paroi interne de la coquille, parce qu'un lambeau du manteau s’applique ici étroitement à la paroi interne de la coquille. Le manteau se sépare plus tard de la coquille en entou- rant les intestins , ce qui produit un espace vide entre l’insertion inférieure du muscle et la coquille : ce muscle est le seul organe par lequel le manteau soit en rapport avec les intestins. Le jeune animal , maintenant complètement formé , ouvre l’opercule de sa coquille , avance le voile vibrant , et s’agite longtemps dans sa prison jusqu’à ce que le chorion se déchire. Nous essaierons maintenant de décrire notre animal aussi complè- tement que possible. La coquille, plus longue que large, est nautiloïde ; elle n’a qu’un seul tour de spire. Un opercule très mince s’applique sur l’ouverture assez grande de la coquille , de manière à pouvoir pénétrer quelque peu dans l’intérieur de la coquille lorsque le pied s’y retire. Les bords Supérieurs de la coquille sont lisses et à peine bombés sur les côtés. La coquille est un peu aplatie latéralement, ce qui fait qu’elle se couche sur le côté dans les moments de repos. L’animal nage dans l’eau, les voiles étendues et dirigées en qui a la forme d'une cloche. L'ouverture buccale, en forme de rosette, se trouve au milieu du disque, sur une saillie carrée dont quatre faisceaux musculaires rayon- nent vers les bords de la cloche. Les tentacules sont liés ensemble par une mem- brane extrêmement mince, comme dans les Plumatelles. On remarque, à la base des tentacules, des corps ronds nettement accusés, qui sont formés, comme les capsules auditives des jeunes Tergipes, et qui contiennent au centre un otolithe rond et vibrant. On a donc raison de prendre ces organes pour des organes auditifs. DE NORDIHANK. — SUR F,F. TFRC.IPES EDWARDSII. 153 avant; il sc meut assez rapidement en décrivant des cercles plus ou moins grands. Dans les bocaux on les trouve souvent en quan- tité tout près de la surface. Une vésicule d’air pénètre assez sou- vent dans la coquille lorsque l’animal se rapproche trop de la sur- face ; alors il ne peut plus plonger, et continue à tourner à la surface. Dans les vases, les animaux se tiennent surtout du côté de la lumière. A la voûte interne de la coquille est adaptée une membrane mince , le manteau , qui est épaissi sur le bord , de manière à former une espèce de bourrelet. Ce manteau est composé d’une seule enveloppe mince et sans structure apparente, de manière qu’on ne remarque aucune trace ni de l’épiderme vibrant, ni de la couche cutanée sous-jacente de l’animal adulte. Le manteau ne s’applique pas pourtant immédiatement à la paroi interne de la coquille; il en est souvent distant, et, dans ce cas, le muscle s’attache au coin le plus profond du manteau. L’animal n’est donc attaché à la coquille que par le bourrelet du manteau et par le pied adhérent k l’opercule ; cette circonstance explique déjà la facilité avec laquelle il se débarrasse de la coquille. Les voiles qui se trouvent à la partie antérieure de l’animal ont une forme arrondie ou plutôt ovale qui rappelle celle d’une oreille humaine ; leurs bords sont épaissis en bourrelet, mais elles ne sont pas fermées en dedans, en sorte qu’elles donnent lieu aune excavation, pourvue de larges ailes latérales ressemblant à un 8, et au milieu de laquelle se trouve l’ouverture buccale allongée et entourée de saillies mamelonnaires. Ouoique cette ouverture ne soit pas petite, je n’ai pourtant réussi à la voir que lorsque, par un hasard particulier, ses bords étaient écartés par le compresseur. Les cils , qui sont fixés en série simple sur les bords des voiles, ont une longueur considérable ; ils sont épaissis à leur base et pointus à leur extrémité. Leurs mouvements sont très rapides ; ils consistent dans une flexion de leur extrémité . qui se courbe en crochet pour se redresser immédiatement après. Le mouve- ment devient indécis lorsque l’animal est épuisé ; il est indépen- dant à la fois et de l’intégrité des organes sur lesquels se trou- vent les cils, et du système nerveux. Je l’ai vu se conti- I5ll DE INORDMAIVN. — SUR LE TERGIPIÏS EDWARDSII. nuer pendant des journées entières sur des particules séparées des voiles ; mais malgré cela, il y a pourtant des moments où l’ani- mal fait cesser le mouvement pour le recommencer. J’ai observé des phénomènes contradictoires semblables chez beaucoup de Bryozoaires. On peut rendre évidentes les parties cellulaires sur lesquelles sont fixés les cils, quoique l’objet soit très déli- cat. Chaque cellule ne porte qu’un seul cil, tandis que les cils courts de l’épiderme de l’animal adulte sont réunis en faisceau. Les cils continuent leur jeu en fléchissant leur longue pointe , même lorsque l’animal est retiré dans sa coquille. Les cils, con- sidérablement plus courts , qui sont placés sur le pied , vibrent du dehors en dedans , et tous les petits objets qui se trouvent dans les environs sont saisis par le tourbillon et amenés vers l’ouver- ture buccale. Le pied forme à la base de l’opercule , là où il est contigu aux voiles, une petite pointe que l’on voit seulement en plaçant l’em- bryon de profil. Les yeux, placés immédiatement derrière les voiles sur la nuque, sont d’un rouge clair, et se trouvent au-devant des grandes capsules auditives, dont chacune enferme un otolithe arrondi et vibrant. Je n’ai pas pu découvrir de cils sur la face interne des capsules auditives ; mais il est facile de se tromper sur la position réciproque de ces organes , lorsque l’animal est retiré dans sa coquille; ils sont en tout cas plus écartés latéralement que ce n’est le cas dans l’animal adulte. If œsophage, assez mince, est situé dans la ligne médiane du corps ; il n’existe pas trace de la langue si compliquée de l’animal adulte. L’estomac a la forme d’un sac; son extrémité postérieure , qui est un peu rétrécie, est courbée latéralement et en haut; ses I parois sont plus épaisses que dans l’animal adulte ; sa face interne est garnie de cils vibratiles qui impriment un mouvement tourbil- lonnant aux aliments avalés. L’intestin, étroit, naît de l’extrémité recourbée de l’estomac, se tourne en haut, et conduit vers l’anus, qui est situé près de la capsule auditive droite. La partie supé- rieure de l’estomac est en rapport avec le foie, qui est grand, arrondi , jaunâtre , et composé déjà maintenant de deux lam- DE NORDMANN. — SÛR LE TERGII'ES EDWARDSII. 155 beaux , dont le plus grand est situé du côté gauche. On remarque dans les environs du foie deux autres corps glandulaires , qui , peut-être , sont les premières traces des organes sexuels. Je n’ai pu trouver le cœur, pas plus que MM. Sars et Loven; peut-être est-il caché dans la niasse compacte du corps, située entre l'es- tomac et les voiles. 11 n’y a pas trace de tentacules. Le muscle d’attache se montre très différent dans sa configu- ration, ainsi que dans le nombre de fils qui le composent, suivant les différents individus. J’ai reconnu quatre ou cinq fils, qui tantôt sont très serrés, se confondent même, et tantôt se divisent en deux faisceaux dans la partie antérieure, c’est-à-dire vers le coin du pied. Une autre fois, j’ai vu deux faisceaux distants , dont le plus mince s’attachait à la base des voiles. Lorsque ces dernières sont rétractées, toutes les fibres du muscle paraissent comme tordues ensemble. J’ai vu jusqu’ici presque toujours deux ou trois autres corps tortueux et filiformes, composés de plusieurs nœuds gan- glionnaires qui paraissaient naître du milieu du faisceau muscu- laire, et qui couraient vers la face dorsale des voiles. J’ai des doutes sur la signification de ces parties, qui ne paraissent pas appartenir au système nerveux , parce qu’elles sont isolées des autres viscè- res : ce sont peut-être des fibres musculaires en voie de forma- tion. On trouve aussi quelques fils musculaires déliés par lesquels les coins de l’estomac s’attachent à la paroi inférieure du man- teau. Les petits , après avoir déchiré le chorion , se meuvent sans repos dans la capsule commune, dont le contenu albumineux leur sert de première nourriture. Je ne saurais dire exactement com- bien de temps ils restent dans cette capsule. Je les y ai vus demeu- rer jusqu’à dix-huit jours, après quoi je les ai enfin délivrés au moyen d’une petite incision. En comparant la jeune larve avec l’animal adulte , nous trou- vons les différences suivantes. Elle a d’abord une coquille qui lui donne un aspect nautiloïde ; au lieu de tentacules , elle possède des voiles en forme d’oreilles, qui la rendent capable d’un mouvement rapide, et qui disparaissent plus tard sans laisser de t races. Destinée à se nourrir de petits animaux mous nageant dans l’eau , notre SUR r.E TERGIPES EDWARDSTI, 156 DE XORDJUm. — larve est dépourvue des organes buccaux si compliqués de l’animal adulte. L’intestin diffère en ce que l’estomac est situé beaucoup plus en arrière. Les branchies et les cæcums manquent. La pré- sence d’un opercule nécessite celle d’un muscle d’attache parti- culier. Les yeux, les oreilles, le foie du côté gauche, et l’anus à droite, sont comme dans l’animal adulte. Des parasites qui se développent dans le choriou. Nous avons eu occasion plus haut d’observer que des particules (cellules granuleuses) se séparent quelquefois du vitellus avant que le fractionnement commence. On ne remarque d’abord aucune modification dans ces corpus- cules, si ce n’est qu’ils augmentent un peu de volume lorsque les intestins apparaissent. Les membranes cellulaires se con- fondent et forment des corps vésiculaires, au milieu desquels on observe un espace plus clair. Bientôt apparaît, à, la surface de cette vésicule, une petite saillie, de laquelle poussent des fils assez fins, qui se courbent et embrassent la périphérie de la vésicule. Ces fils s’allongent de plus en plus, deviennent saillants par leurs extrémités, et atteignent à la fin sept à neuf fois le diamètre de la vésicule. En s’étendant en éventail et en se courbant vers le même côté, ces fils représentent à peu près l’image d’une queue d’oiseau. Chaque fil commence à trembloter; la vessie se met en mouvement et tourne bientôt rapidement en cercle autour de son axe, comme une roue. Peu à peu les fils s’écartent entièrement et se séparent en deux faisceaux opposés; et cet être bizarre se promène maintenant, comme une araignée, lentement, sur ses longs pieds écartés , tournoie autour de son axe , ou bien se jette vivement d’un côté ou de l’autre. On trouve ordinairement quatre à huit de ces parasites dans chaque œuf de Tergipes. Ils augmentent en nombre par scission, vers la fin du développement embryonnaire. Le corps vésiculaire se fend , dans le sens de son axe longitudinal , en deux parties qui poussent à leur partie inférieure des fils nouveaux, formant, par la suite , deux faisceaux en éventail. On voit ainsi souvent deux vésicules encore accolées avec quatre faisceaux de fils. Chaque DE IXOltmiAW — SUIi LE TERGIPES EDWAltDSll. 157 faisceau est composé de six à huit lils , qui , d’ailleurs , sont des organes très caduques, et se détachent souvent en laissantle corps vésiculaire sans mouvement. Si par hasard un de ces parasites est entraîné dans le tourbillon des voiles et vers l’ouverture buc- cale, la larve se retire dans sa coquille, et le parasite se sauve , en laissant souvent quelques unes de ses jambes en arrière. Outre quelques vésicules plus claires dans l’intérieur, j’ai vu quelquefois une partie pointue à la surface de ces parasites, dont le corps vésiculaire n’a que 0,009 de ligne. Je nommerai cet animal, dont les mouvements ont quelque chose de commun avec ceux des Cercaires, Cosmella hydrachnoides , faisant allusion en même temps à la ressemblance de ces mouvements avec ceux de quelques Hydrachnes (1). Développement ultérieur des jeunes Tergipes. Je ne sais pas combien de temps la jeune larve reste dans sa coquille ; tous mes animaux sont morts en trois ou quatre se- maines, malgré tous les soins que je leur donnais. 11 ne me res- tait donc qu’un seul moyen pour connaître les phases transitoires ; celui de rechercher dans la mer les petits animalcules nageant librement ou rampant sur des Polypiers. La rareté de ces ani- maux m’a fait perdre beaucoup de temps; mais j’avais l’avantage (1)11 n'est pas rare de voir se désagréger certaines parties dans les embryons des animaux inférieurs, qui n'en continuent pas moins de se développer. Les par- ties désagrégées elles-mêmes jouissent pendant quelque temps d'une vie en quel- que sorte indépendante. J'ai observé, sur des embryons d'Actéons, que. les cils des voiles (pour me servir des expressions de M. Nordmann) se détachaient sou- vent lorsque l'animal commençait à souffrir; les cils détachés présentaient abso- lument les mêmes formes, les mêmes mouvements que les prétendus parasites de M. Nordmann. La seule différence qui existe entre mes observations et les siennes, c'est que dans les Actéons les cils ne se détachent qu'accidentellement après leur développement accompli , tandis que dans les Tergipes ce seraient des éléments détachés depuis le commencement du développement embryonnaire qui se déve- lopperaient pour former des cellules vibraliles complètes. Ce fait est certainement une belle confirmation de la doctrine qui veut que les éléments cellulaires des embryons jouissent d'une certaine indépendance de développement; mais il ne me parait pas prouver davantage, et je ne crois pas que M. Nordmann soit dans le vrai en prétendant que ces cellules vibraliles détachées sont des animaux parasites formés aux dépens de la substance vitellaire. (Note du traducteur .) 158 DE NOBDMANN. — SUK LIS TEllGU'JJS BDWA11DSII. que, dans la mer si pauvre des environs d’Odessa, il ne se trouve que cinq petits Mollusques qui auraient pu être confondus dans leur jeune âge, savoir : les deux Tergipes, une Rissoa, une Pha- sianelle et une Littorine. Toutes ces espèces s’étant développées chez moi , je reconnaissais sans peine la Rissoa à ses voiles rela- tivement très grandes, la Littorine à son pied large, et la Pha- sianelle à une coquille autrement formée et à des dimensions diffé- rentes. J’ai réussi enfin à me procurer un certain nombre d’individus qui m’ont montré les six formes détaillées ci-après, formes qui nous donneront, j’espère, la clef du cercle de développement. Seconde forme. L’animal est encore enfermé dans sa coquille ; le manteau s’est détaché de cette dernière et entoure étroitement la masse des viscères. Le pied, attaché à l’opercule, s’est tellement agrandi , qu’il forme une saillie considérable sur le bord de l’oper- cule, par dessus lequel il se retrouve en bas. Les voiles ont grandi, les yeux sont devenus violets. La tête porte deux tentacules coni- ques et courts, qui sont pourvus d’un épithélium vibratile. L’animal nageait avec une vitesse étonnante; mais dès qu’il venait en contact avec l’air, il se contractait et empêchait tout examen ulté- rieur. Grandeur, 0,11 de ligne. Trouvé une seule fois. Troisième forme. La coquille est détachée ; la configuration générale est celle de l’animal adulte ; le corps est court et conique, pointu en arrière, mais sans appendice caudal. Les tentacules sont allongés et pointus; les voiles ciliées existent encore; l'es- tomac s’est placé en avant, et on voit un intestin court en arrière. Grandeur, 0,14 de ligne. Quatrième forme. En général , comme le n° 3. L’animal nage et rampe. 11 s’est formé deux appendices dorsaux derrière les capsules auditives; l’intestin a donc maintenant deux cæcums. Pulsations du cœur manifestes. Une langue compliquée, formée de quelques plaques dentaires dans la cavité buccale. Le corps s’est allongé ; le testicule, d’un vert blanchâtre, avec un contenu vési- culeux, est très apparent. Grandeur, 0,13 de ligne. Ginquième forme. Les voiles ont disparu et sont remplacées par deux tentacules frontaux arrondis et recouverts de cils vibra- tilcs. Les appendices dorsaux se sont allongés. J’ai trouvé plusieurs DE KORDMANN, — SUR LE TERGIPES EDWARDSI1, 159 individus de cette forme, et j’ai souvent eu l’occasion d’observer un changement de peau , absolument comme dans j’animai adulte. Les animaux paraissaient souffrants pendant ce temps ; ils ne pre- naient pas de nourriture, et l’épiderme les entourait comme une gaine transparente. De ces changements de peaux résulte La sixième forme. Celle-ci s’accorde tout— à— fait avec l’animal adulte. La première paire d’appendices dorsaux s’est allongée, et on remarque la seconde paire sous forme d’une petite verrue; l’in- testin a donc deux diverticules longs et deux autres plus courts. Septième et dernière forme. Celle-ci se trouvait souvent sur des Campanulaires ; et, comme elle est très transparente, elle m’a montré beaucoup de détails sur sa structure. Il ne manque que la dernière paire d’appendices dorsaux ; les deux antérieurs mon- trent un petit sillon vers leur extrémité , au travers de laquelle on voit le corps glandulaire. Les zoospermes manquent encore dans le testicule. Il y a des œufs de différentes dimensions dans les ovaires. Toutes ces transformations ont lieu pendant que les animaux sont encore très petits , car la dernière forme ne mesu- rait pas plus de 0,1(3 à 0,19 de ligne de long. EXPLICATION DES FIGURES rLANCUE t. Fig. I . Lo Tergipes Edwarthtii vu du dos, et considérablement grossi. On a tenu le dessin beaucoup plus transparent que l'animal ne l’est réellement A, les grands tentacules. H, les processus frontaux. C, C,C , les trois premières paires d'appendices dorsaux. D, la masse buccale, avec la mâchoire et la langue. E, le pharynx ; l'œsophage, qui fait une courbe vers le haut, est recouvert par l'estomac. F, les glandes salivaires. G, l'estomac pourvu , sur sa paroi interne, de cils vibratiles qui impriment un mouvement rotatoire aux aliments. Il, le pylore. I, 1, le tronc moyen de l’intestin , rétréci d'espace en espace par des fibres musculaires contractées. 160 UK XOIUIMAIW. SI R LE 1 ERGiPES EDWARDSII. Ii, K, les cæcums intestinaux, pénétrant dans les appendices dorsaux. L,L, les deux diverticules de l’intestin. il, le rectum mince, naissant du diverticule gauche. N, l'anus. O, le foie, de couleur jaunâtre. P, la vessie biliaire. Q , la glande urinaire (?), composée de globules. T, le cœur. V, le ventricule. — T-, l’oreillette. — T3, les deux veines en entonnoirs, qui reçoivent le sang circulant librement dans le corps. Kr, première paire de ganglions du système nerveux central. X seconde paire. V, troisième paire. /, quatrième paire. I — 7, les troncs nerveux, numérotés d'apres leur succession », les yeux. b, les capsules auditives. c, le testicule, de couleur verdâtre. d, le vaisseau déférent. e, la glande muqueuse, dans laquelle s ouvre le vaisseau déférent. f, l’orifice génital commun. ij, l'utérus rempli d’œufs rougeâtres. h, l'oviducle. i, i, les œufs l, 1, les poches séminales. m, m, les ovaires. n, n, les glandes muqueuses situées à l’extrémité des appendices dorsaux. Fig "2. Un embryon près d'éclore, vu du côté du ventre, ayant les voiles déve- loppées. On voit les parasites enfermés avec lui dans la coque. Fig. 3. Deuxième forme de la larve encore enfermée dans sa coquille, vue du dos : les tentacules se sont développés. Fig. I. Troisième forme : la larve a quitté la coquille. Fig. o. Quatrième forme : la première paire d’appendices dorsaux a paru. Fig. 6. Cinquième forme : l’animal, après avoir remplacé les voiles par les appen- dices frontaux, rampe ; il change de peau. Fig. 7. Sixième forme, à deux paires d’appendices dorsaux. Fig. 8. Septième forme : il ne manque plus que la dernière paire d'appendices. Fig. 9-11. Le parasite, Cosmclla hydrachnoides , en différents états de dévelop- pement : Fig. 9. Le corps, arrondi, commence ; pousser des cils. — Fig. 10. Les cils commencent a s’étaler en éventail. — ■ Fig I I . L ■ même, avec un appendice en pointe et des cils plus allongés. — Fig. 12. Le même en voie de fissuration. 11)1 NOTICE PRÉLIMINAIRE SUR I.F DÉVELOPPE .U K N T DES CHÉLONI E N S ; Par M H. RATHKE Depuis neuf ans je travaille à réunir des matériaux pour une histoire du développement des Chéloniens , et je songe à publier bientôt le résultat de mes recherches. .l’ai pu examiner l’embryon dans un nombre assez considérable d’œufs frais d'Emys europœa, depuis sa première apparition jusqu’à la période dans laquelle on aurait vu bientôt apparaître les doigts des pieds. Pour la con- naissance des périodes suivantes du développement, j’avais à ma disposition deux embryons presque mûrs de Clielonia et Testudo, et dix Chéloniens très jeunes d’espèces différentes ( Cheloniu Mydas , Sphargis coriacea , Trionyx gangeticus , Tr. oceüatm, Emys europœa, Em. mauritanien , Cinosternum scorpioides, Gin. pensylvanicum, Plalemys Spiæii, Penlony.e...). I.e développement des embryons reste quelque temps toul-à- fait en accord avec le type général du développement des animaux vertébrés plus parfaits. C’est surtout la position respective des lames ventrales et dorsales et de la moelle épinière qui ne dif- fère en rien , ni au commencement ni plus tard , de celle qu’on observe chez les animaux vertébrés supérieurs. La remarque de M. de Baër, « que, chez les embryons jeunes d 'Emys europœa, les « lames ventrales sont attachées aux lames dorsales , au point où » celles-ci sont réunies en haut pour fermer le sillon dorsal , et que » le dos même se trouve ainsi assez enfoncé , » est une erreur d’ailleurs très pardonnable, parce que l’embryon est attaché très fortement au jaune , assez tenace chez cette espèce. On ne peut non plus constater la présomption de mon savant ami , « que , » chez les Chéloniens, les extrémités ne se détachent point de la » surface supérieure (ou externe) des lames ventrales et dorsales, » comme chez les autres vertébrés, mais de leur surface inférieure » (ou interne). » ( Dans bei den Schildkrœten , die Grundlage 3" série. Zool. T. V. (Mars ISifi.) - 11 162 IMTDiKE. — SUR T, R DÉVELOPPEMENT fur die Extremilaeten sicli niclit von der oberen ( oder aeusseren ), Flaeche der Bauch und Rückenplatten ablœst une in anderen Wirbellhieren , sondera von der unteren (■ inneren ) Flaeche). J’ai trouvé , au contraire , chez des embryons plus jeunes d 'Emys eu- ropéen j les extrémités situées extérieurement, dans les mêmes endroits du corps, et de la même manière que chez les embryons des Mammifères , des Oiseaux et des Sauriens. Les embryons F Emys européen s dont les extrémités se trouvent déjà tellement développées, que les doigts auraient dû bientôt se montrer, mais dont les côtes ne sont pas encore apparues, ressem- blent excessivement aux embryons très jeunes des Sauriens et des Mammifères. Alors surtout leur corps n'est ni aplati de dessus en dessous , ni trop élargi pour sa longueur, et sa partie dorsale se continue insensiblement (sans arête, sans bord prolongé, comme chez les Chéloniens adultes) avec le cou, avec les parties latérales et avec la queue. Partant de l’examen de ces jeunes embryons et des observations faites chez d’autres Chéloniens qui n’étaient pas encore entièrement développés, je chercherai à résumer provi- soirement en substance comment se fait en général le développe- ment du corps chez les Chéloniens. Après un développement un peu avancé des extrémités chez les embryons, les surfaces dorsale et ventrale du corps s’aplatissent peu à peu , plus ou moins , selon les espèces différentes de Ché- loniens , et deux apophyses latérales commencent à pousser de toutes les douze ou treize vertèbres du corps. La plupart de ces apophyses, se développant comme les huit paires intermédiaires des côtes, acquièrent en peu de temps une longueur très considé- rable. Comme elles se courbent peu en général, leurs extrémités sont tournées plus en dehors qu’en dessous. Ainsi , par l’élon- gation très rapide et très considérable de ces côtes , les parois du corps, contenant leurs extrémités tournées en dehors, sont poussées bien en avant de chaque côté, et le tronc devient très large entre les pieds antérieurs et postérieurs, situés à son commencement et à sa fin. Un fait aussi singulier que caractéristique pour les Chéloniens, DES CHELONIENS. 163 c’est que de leurs eûtes, remarquables par leur croissance en longueur, les deux dernières, c’est-à-dire en général la huitième et la neuvième paire, se dressentdirectement en arrière, tandis que la deuxième paire (mais non chez tous les Chéloniens) se tourne assez en avant. Ensuite le chorion fait un pli de chaque côté , à l’endroit où se trouvent situées dans les parois du corps les extrér mités des côtes très prolongées (deuxième ou huitième paire). Ce pli, en s’étendant, dépasse en avant le pied antérieur pour arriver au cou , en arrière le pied postérieur pour arriver à la queue ; enfin il rencontre, sur le cou et sur la racine de la queue, le pli semblable du côté opposé , et tous les deux s’unissent pour for- mer un seul pli circulaire , qui sépare alors le dos des côtés du corps. Chez quelques Chéloniens , surtout les marins, ce pli s’é- largit médiocrement pendant le développement ; chez d’autres , principalement chez les Trionyx, il devient extrêmement large, surtout la partie située au-dessus de la queue. Beaucoup plus tard, c’est-à-dire après l'éclosion des embryons, les côtes, déjà aupara- vant remarquables par leur longueur, mais, jusqu’à cette époque , toutes ou presque toutes d’une forme cylindrique, deviennent aussi beaucoup plus larges. Cette croissance en largeur com- mence de l’endroit où le cou se réunit avec le corps, et s’avance de là plus ou moins vers les extrémités ; elle devient si considérable, que les corps de toutes les côtes, à cause de l’absence complète de muscles intercostaux, arrivent de chaque côté à un état de contact et d’attouchement, ou tout-à-fait parfait, c’est-à-dire dans toute leur longueur, comme dans les genres Ernys, Terapene, Testudo., Trionyx, ou presque parfait, c’est-à-dire dans la plus grande par- tie de leur longueur, comme chez les Chelonia. Alors les nerfs inter- costaux et quelques vaisseaux situés d’abord entre les côtes, passent en dessous d’elles. En revanche, la première et la dernière côte deviennent beaucoup moins longues que les autres, et restent pour toujours très étroites et très minces. Aussi leurs relations avec les côtes voisines diffèrent assez de celles des côles intermédiaires; car, comme celles-ci croissent fortement en largeur, la deuxième dépasse la première, et la pénultième dépasse tellemem la dernière 1G/| RATHKE. — SUR I.E DÉVELOPPEMENT quelle la couvre d’une manière plus ou moins complète. I n peu après que les huit paires de côtes intermédiaires ont, commencé à s’élargir, une branche pousse de chaque côte, près de la colonne vertébrale, en dessus. Cette branche toujours croissante dépasse les rares et minces muscles dorsaux , les deux muscles sacro- spinaux (situés sur le col des côtes, dans toute la longueur du corps), s’unit avec l’apophyse épineuse de la vertèbre de la même côte , et devient tout-à-fait aussi large que le corps même de sa côte. Les apophyses épineuses naissent déjà avant l’éclosion sur laseconde vertèbre jusqu’à la hi.vtième. Elles restent assez courtes; mais, contrairement aux lois générales du développement des ani- maux vertébrés , elles croissent tellement en largeur, après leur ossification , qu’elles forment enfin une série de plaques horizon- tales d’une grandeur moyenne. Je ne puis pas adopter comme exacte l’opinion suivant laquelle ces plaques se formeraient dans le tissu cellulaire sous-cutané, indépendamment de la colonne vertébrale , dans le chorion lui- même ou en dessous ; quelles s’uniraient plus tard avec les ver- tèbres, et que la largeur remarquable des huit paires de côtes intermédiaires serait aussi le résultat d’un contact, et après, d’une réunion avec des plaques osseuses, formées en dessus de ces côtes. Au contraire , ces présomptions se trouvent réfutées par mes observations. Après l’élargissement successif des corps des huit paires de côtes intermédiaires, de leur rameau ou branche supérieure, exclusive- ment propre aux Chéloniens, et des apophyses épineuses des mêmes vertèbres, il se forme enfin , du contact et de l’attouchement des bords correspondants de toutes ces parties, une table osseuse composée de pièces assez nombreuses , qui s’étend en carapace , en dessus , et couvre les viscères. Pour agrandir et compléter cette carapace , déjà bien considérable, nous voyons se joindre à elle d’autres plaques osseuses. Elles se forment sur le dos, tout-à- fait indépendantes de la colonne vertébrale et des côtes, dans une couche très épaisse et bien solide du tissu cellulaire sous-cutané , etdoivent être prises pour le squelette interne (squelette cutané) des DSS CHÉLOMEINS. 165 animaux (1). Leur nombre est différent, selon les espèces diffé- rentes de Chéloniens. Dans le genre Trionyx, on trouve seulement une plaque; elle est située sur le cou, immédiatement avant les vertèbres dorsales. 11 y a encore quelques plaques dans le bord postérieur de la carapace chez quelques espèces de Trionyx ; mais elles restent cartilagineuses. Outre cette plaque nucale , toujours très grande, plusieurs petites plaques sous-cutanées se dévelop- pent encore chez la plupart des Chéloniens. Parmi celles-ci , un petit nombre seulement naissent en dessus des dernières vertè- bres dorsales et des vertèbres sacrées , tout le reste se développe dans les parties postérieures et latérales du pli cutané circulaire (limbus), dont la portion antérieure se trouve en grande partie remplie par la moitié antérieure de la plaque nucale, qui entre progressivement dans cette portion du pli circulaire. Après l’aplatissement du côté ventral , il se fait aussi , entre les téguments et les muscles, dans la couche d’un tissu cellulaire épais et solide qui joint ces parties différentes , un développement de quelques pièces cartilagineuses, dont le plastron se doit for- mer. Je n’ai pu déterminer le moment où leur formation commence. Le développement peu considérable du plastron chez les embryons plus âgés, et chez les individus à peine éclos, fait deviner qu'il ne se forme guère avant le milieu de la vie embryonnaire, et en tout cas relativement plus tard que le sternum des Oiseaux et des Mammifères. Les pièces cartilagineuses mêmes, apparaissant comme fondement du plastron , sont d’abord , pour la plupart , des bandes simples très étroites et très minces, formant deux paires, situées, l’une en avant, l’autre en arrière de l’ouverture ombilicale. Entre ces deux paires , existe encore au moment de l’éclosion un espace très considérable. En outre , il se forme gé- néralement, ou au moins chez la plupart des Chéloniens (excepté les Sphargis?), entre les extrémités antérieures des deux pièces antérieures paires , une petite plaque cartilagineuse impaire ou cinquième. Plus tard se développent , dans ces différents carti- lages , des pièces osseuses plus nombreuses , ordinairement ou I Os dénominations sont empruntées à la nomenclature de M. Carus. K. RV1UKC. 166 SDK LE DÉVELOPPEMENT peut-être toujours au nombre de neuf. Leur grandeur respective est très variable, selon les différentes espèces de Chéloniens; car, ou elles croissent tellement les unes au-devant des autres qu’elles se rencontrent par leurs bords correspondants, dans toute leur longueur, de manière à constituer un plastron tout uni , ou bien leur croissance reste plus bornée, et alors elles forment un plastron ouvert au milieu, ou seulement un anneau étroit, comme c’est pro- bablement le cas pour les Sphargis. D'ailleurs le développement du plastron diffère encore en ce que sa circonférence et surtout sa longueur deviennent relativement beaucoup plus grandes chez quelques espèces de Chéloniens. 11 dépasse alors le cou et la queue en dessous pour former un prolongement revêtu par le chorion seul , tandis que ce prolongement manque chez d’autres espèces. Cette différence dépend probablement de ce qu’il existait déjà ou non au côté ventral du corps , en dessous et en avant des pieds anté- rieurs, et en dessous et en arrière des pieds postérieurs, un pli transversal du chorion, dans lequel le plastron croissant pouvait entrer. Ainsi il est vraisemblable que les espèces qui montrent le prolongement qui vient d’être décrit, sont celles chez lesquelles existait déjà un pli semblable. Ce fait devient surtout bien pro- bable par l’examen des Chéloniens du genre Trionyx, chez lesquels on trouve en effet ce pli : mais il n’est guère rempli par les parties du plastron, peu développées dans ce genre. Tout-à-fait spécifique, et très remarquable pour les Chéloniens, est plus tard la relation de leur os du tronc avec le tissu cellulaire sous-cutané très solide, formant une couche un peu épaisse, et ordi- nairement pris pour cartilagineux. Toutes les pièces osseuses con- tiguës à cette couche, savoir, les apophyses épineuses des vertè- bres, de la deuxième jusqu’à la huitième, les huit paires de côtes intermédiaires, les plaques supplémentaires de la carapace, et sou- vent aussi toutes les pièces du plastron, après avoir perdu sur leur surface extérieure le périoste par résorption , viennent en contact avec le tissu cellulaire sous-cutané. C’est ce qui arrive après l’é- closion de l’embryon et principalement sur les côtes, de manière, que le périoste disparaît peu à peu, de l’extrémité supérieure (plus DES CI1KL0MENS. 1 07 près des vertèbres), vers l’extrémité inférieure. Chez les Chélo- niens marins, elle ne disparaît pas tout-à-fait sur l’extrémité inférieure, mais seulement jusqu’à la partie des côtes qui ne s’élargit jamais d’une manière considérable. Dès que la sub- stance osseuse de cette partie vient en contact immédiat avec le tissu cellulaire sous-cutané , on voit apparaître vers ce tissu des cellules médullaires nombreuses , qui , au moins dans le com- mencement, doivent être ouvertes en dehors. Peu à peu leur nombre s’accroît considérablement, et les os que je viens de nom- mer deviennent ainsi en même temps plus forts et très poreux , quoiqu’il y ait, selon les espèces, une différence assez marquée dans leur porosité. Les cellules ne sont pas remplies principale- ment par la graisse , comme cela a lieu chez les animaux verté- brés plus parfaits et même, chez les Chéloniens, dans les os plus éloignés du chorion ; elles sont remplies, mais par le tissu cellu- laire sous-cutané. Ce tissu entre peu à peu par les ouvertures des cellules comme par un rayonnement de petites racines nom- breuses, et s’y amasse toujours en proportion de leur crois- sance. Cependant la couche de ce tissu située entre les os et le chorion diminue toujours, non seulement relativement , mais aussi en partie d’une manière absolue, en sorte qu’il semble man- quer tout-à-fait sur la carapace et le plastron chez quelques Ché- loniens, notamment dans 1 ’Emys europæa. Prend-on, comme à l’ordinaire, le plastron des Chéloniens pour une partie du squelette nerveux et pour l’analogue du sternum des autres animaux vertébrés; on doit aussi admettre que les os com- posant l’épaule et le bassin sont situés d’une manière tout-à-fait contraire à la disposition générale de ces parties (quand elles exis- tent) chez les autres animaux vertébrés. Ils seraient situés de telle sorte qu'ils resteraient tout-à-fait inexplicables, selon notre con- naissance actuelle du développement des animaux. Mais on peut, je crois, en se fondantsurquelquesfaits, démontrer avec évidence que le plastron n’est rien autre chose qu’une partie du squelette cutané, et qu’il n’a rien de commun, au point de vue anatomique, avec le sternum des autres animaux. Cette supposition' une fois 168 i:\iiike. — sus le dévuloiteviem admise connue vraie, on peut ramener la situation des os de l’é- paule et du bassin des Chéloniens adultes aux relations qu’on trouve chez d’autres animaux. Alors il n’y a plus rien d’extraordinaire dans la disposition de ces parties, mais seulement quelque chose de spécifique produit par le développement curieux des parties dor- sales du corps. Quant à la position des omoplates, elles sont situées en avant des côtes chez des embryons plus âgés et chez de jeunes Chéloniens, et il est plus que probable qu’elles occupaient déjà cette position avant que le développement des côtes fit des progrès sensibles, et qu’elles n’étaient point seulement poussées en avant par les côtes, par suite de la rapide croissance du corps en largeur. Effectivement, la première paire de côtes, près et un peu en avant de laquelle elles sont situées chez des embryons plus âgés et des individus jeunes, n’est guère remarquable ni par sa longueur très grande, ni par sa largeur; on la trouve au contraire extrêmement courte et mince, si bien qu’un déplacement des omo- plates devient impossible. En outre , nous voyons chez quelques Poissons, quelques Sauriens ( Titigna sincoides ) et même chez un Mammifère ( Ornithorhynchus ) , les omoplates occuper une posi- tion semblable, en avant des côtes. Chez le Didelphis virgi- niana, toute l’omoplate, ou du moins la partie inférieure avec, l’ar- ticulation scapulaire, est située en avant des côtes, et il devient ainsi probable qu’ aussi chez ces animaux , au moins dans une période antérieure de leur développement, toute l’omoplate, avant qu’elle prenne sa position oblique et sa largeur considérable , est située en avant des côtes. Chez d’autres Mammifères , les omoplates (quoique jamais elles ne soient aussi avancées que chez les Ché- loniens et les Ornithorhynques) se rencontrent dans le premier temps de leur développement beaucoup plus en avant que dans les périodes postérieures. Chez le Cochon, nommément, l’omoplate, un peu après la formation du pied antérieur, couvre les deux côtes antérieures du côté correspondant. Quand il devient impos- sible de la voir comme partie séparée, elle ne dépasse point au commencement la première côte, tandis qu’elle s’étend de la pre- mière jusqu’à la septième chez les Cochons adultes. DES CIIELOMEVS. 169 Enfin la direction des omoplates chez les Chéloniens ne diffère pas beaucoup de celle qu’on observe chez les Ornithorhynques et plusieurs Sauriens, chez lesquels elles se trouvent aussi dans une direction perpendiculaire. Leur situation en dessous des parties osseuses du dos chez les Chéloniens adultes est produite plus tard par l’effet du développement successif, car, même chez des embryons plus âgés, elles touchent immédiatement , par leurs extrémités supérieures, la couche du tissu cellulaire sous-cutané. La métamorphose que je viens de décrire est l’effet de l’élar- gissement considérable de la seconde paire de côtes , débordant en voûte les parties voisines du squelette , la première paire de côtes et les omoplates. La position et l’articulation du bassin des Chéloniens ne diffère absolument en rien du type normal que présentent les animaux vertébrés pour les relations de position des os pelviens ; car les os coxaux des Chéloniens sont joints à l’os sacrum comme chez les Mammifères et chez les Sauriens en général. Ainsi ils n’offrent rien de particulier, sinon qu’ils sont couverts par d’autres parties osseuses. Cette couverture , que nous trouvons sur tout le bassin des Chéloniens, résulte pour une petite partie d’un élargissement de la paire pénultième des côtes, et en plus grande partie du développement du squelette cutané, car presque toute la partie pos- térieure de la carapace , formant chez la plupart des Chéloniens un toit au-dessus et après le bassin, est composée de pièces osseuses, développées près du chorion et indépendamment de la colonne vertébrale et des côtes. Ouant à ce qu’on trouve les fémurs des quatre pieds des Ché- loniens recouverts en dessus, et chez quelques espèces aussi plus ou moins en dessous, c’est en général la conséquence des plis laté- raux plus ou moins longs du chorion, dans lesquels se sont déve- loppées des pièces osseuses particulières appartenant au squelette cutané. D’ailleurs la cause en est aussi que des huit paires de côtes intermédiaires très prolongées et dirigées en dehors, les deux dernières sont en outre tournées fortement en arrière, et chez plusieurs Chéloniens, mais non chez tous, les deux an té- 170 RATHKE. — DÉVELOPPEMENT DES CHÉLOMENS. Heures en avant; celles-là débordent l’articulation coxale, celles- ci l’articulation scapulaire. L’exposé de ces faits me semble bien démontrer l’erreur de la remarque si souvent répétée, que chez les Chéloniens les os composant l’épaule et le bassin sont ramenés en dedans du corps. La disposition du péritoine chez les Chéloniens le prouve même d’une manière assez positive, car il n’enveloppe des deux côtés aucune des parties osseuses de l’épaule ni du bassin avec leurs muscles ; il les revêt seulement d’un seul côté, à savoir, celui qui est tourné vers les intestins. En arrière, il entre, comme chez les Mammifères, assez loin dans la cavité du bassin supérieur, revêt en partie sa surface interne et les muscles qui y sont fixés, et passe de là sur les viscères placés dans ce bassin. Ensuite il longe en dessous la partie dorsale du corps jusqu’aux omoplates (situées, comme je l’ai dit, très en avant) en enveloppant la surface infé- rieure des reins, les parties génitales internes, la surface infé- rieure et le bord externe des poumons, presque avec toute leur surface supérieure adhérente aux côtes , et la partie des côtes débordant latéralement les poumons et les organes urinaires. Après avoir passé des poumons, qui atteignent en avant les omo- plates , sur les omoplates et la surface postérieure de quelques uns de leurs muscles , il les longe en descendant et se tourne en arrière pour envelopper en partie la surface supérieure du péri- carde et surtout , de chaque côté et en arrière du péricarde, la surface supérieure des deux paires de clavicules avec leurs mus- cles. De là il passe enfin sur les muscles abdominaux. Un pli très grand du péritoine , partant du côté dorsal et du côté anté- rieur du corps, enveloppe l’intestin, en lui formant un mésentère très large , puis l’estomac, le foie, la rate et le pancréas. 171 OBSERVATIONS «CR LE DEVELOPPEMENT DE» SPERMATOZOÏDES DES RAIES ET DES TORPILLES. Far M. DE MARTINO (de Naples) (1). J’ai eu ces jours-ci l’occasion de faire des observations sur le développement des Spermatozoïdes dans le testicule des Raies et des Torpilles ; elles ne me semblent pas sans intérêt, et je m’em- presse de vous les communiquer. Par ces recherches je crois pou- voir éclaircir quelques faits relatifs à la structure intime du tes- ticule de ces Poissons , et au développement de leurs infusoires. M. Rathke avait observé que le testicule de quelques Poissons, surtout celui des cartilagineux , présente une substance composée d’un grand nombre de vésicules parfaitement closes , lesquelles ne peuvent verser le sperme dans la cavité abdominale que par leur rupture, car le testicule manque de canal déférent. M. Muller découvrait ensuite dans les Raies la communication immédiate entre le testicule et l’épididymc, et remarquait que les vésicules de l’organe génital mâle de ces Poissons ont le volume d’une tète d’é- pingle et sont remplies d’une matière dense et consistante. M. Delle Chiaje confirmait ces observations, et poussait ses recherches jus- qu’à suivre les ramifications délicates des vaisseaux spermatiques sur la substance du testicule. Or, quoique les connaissances anatomiques sur la structure du testicule des Raies et des Torpilles ne laissent rien à désirer, cependant, afin que l’exposé des résultats sur le développement des Spermatozoïdes soit plus précis, nous croyons devoir ad- mettre que : 1° Le testicule des Raies est formé de deux parties: de l’organe proprement sécréteur du sperme, et d’une espèce de réservoir en forme de sac, situé sur son bord interne. Ce réservoir manque au testicule des Torpilles ; fl) Extrait (tune leltro adressée par l’auteur à M. Milne Edwards. 172 DK DARTIXO. — SIR LES SPERMATOZOÏDES 2° La tunique albuginée qui enveloppe le testicule partage, au moyen de prolongements internes, la substance de cet organe en plusieurs lobules irréguliers et de grandeur différente; 3° Si l’on prend avec une pince une parcelle très petite de la substance d’un de ces lobules et qu’on la fasse tremper dans une goutte d’eau , sur une petite lame de verre , on observera très aisément que la substance du testicule est composée d’un nombre immense de petites vésicules sphériques et closes, qui sont tenues unies par une espèce de stroma ou de tissu cellulaire gélatineux , qui absorbe l’eau ; ti° Les vésicules n’ont pas toujours la même grandeur, car elles sont très petites hors la saison des amours, et lorsque la matière spermatique qu’elles renferment n’est pas encore mûre : au contraire, dans l’époque de la maturité du sperme, on les trouve dévoloppées jusqu’au double de leur grandeur ; nous avons vu les plus petites de 1/8 de ligne et les plus grandes de 1/3; 5” Les vésicules du testicule des Torpilles sont presque de moitié plus petites que celles des Raies; 6° Les vésicules sont toujours formées par une membrane pariétale très mince , close de toute part , et sont remplies de la matière spermatique. La vésicule aussi bien que son contenu sont, jusqu’à un certain point, transparents; 7° Le réservoir du testicule des Raies ne contient pas de vési- cules semblables , mais seulement une substance dense et lai- teuse , comme une espèce de crème. La substance spermatique, depuissa sécrétion jusqu’à l’éclosion des Spermatozoïdes, nous a présenté une série de phénomènes très curieux et importants, et presque en tout analogue? à ceux qui avaient été découverts par M. Wagner. Sous ce point de vue, on peut suivre le développement des vésicules depuis l’époque de leur immaturité jusqu’à celle où I elles sont devenues parfaitement mûres, et en conséquence près I d’éclater et de donner issue à la semence fourmillante de Sper- matozoïdes. Les degrés de la maturité sont les suivants : /. Les vésicules qui ne sont pas mûres et qui sont en consé- DES HAIES ET DES TORPILLES. 4 73 quence très petites, renferment une substance presque transpa- rente et à peine granuleuse. B. Ces granulations, fort déliées, se développent peu à peu, grandissent et se disposent ordinairement en séries , qui pren- nent l’apparence de ramifications. En même temps les vésicules augmentent de volume. C. Les granulations spermatiques, en se développant tou- jours, se montrent comme des cellules remplies de granules très fins et un peu transparents. I). Enfin ces granules mêmes croissent et restent enfermés dans la granulation-mère. Or, c’est dans ces granules que la génération des Spermato- zoïdes a lieu. En effet, dans chaque granule, comme il nous a sem- blé le voir en répétant plusieurs fois les observations , ne s’en- gendre jamais plus d’un seul Spermatozoïde. Nous n’avons pas encore suivi la génération de l’animalcule : seulement, nous avons vu que, lorsque le Spermatozoïde est arrivé au terme de son développement , il est enroulé au-dedans de son ovule. Deux fois nous avons vu ces ovules spermatozoïques se mouvoir en roulant très rapidement pendant que nous l’observions au microscope. Ils renfermaient le Spermatozoïde déjà développé, aux oscillations duquel était dû le mouvement rotatoire de l’ovule. La substance du réservoir du testicule des Raies, observée sous le microscope, consiste en un grand nombre de granulations- mères , très semblables à celles qui sont contenues dans les vési- cules-mères et renfermant les mêmes granules générateurs des Spermatozoïdes. Ces granulations du réservoir lui parviennent de la rupture des vésicules spermatiques mûres des testicules. II est certain que les Spermatozoïdes éclosent de plusieurs granules dans le testicule même , avant que les vésicules se rompent. Alors les Spermatozoïdes de tous les granules d’une granulation-mère res- tent unis par la tête, et représentent des faisceaux de filaments avec les queues libres et oscillantes, ainsi que M. Wagner les a parfaitement décrites et dessinées dans le Certhia familiaris. L’épididyme est un canalicule blanc, plus ou moins dilaté et I7/| DE MARTINO. — SPERMATOZOÏDES DES RAIES, ETC. gonflé de sperme, qui sort du sommet du testicule chez les Raies, et presque de son milieu chez les Torpilles. Il fait dès son origine d’innombrables circonvolutions sur lui-même , dont toute la masse est renfermée dans une gaine fibreuse et très résis- tante. 11 se dilate à mesure qu’il descend ; enfin le canal défé- rent est le même canal de l’épididyme beaucoup dilaté, surtout chez les Torpilles, et moins tortueux. Chez celles-ci principalement on voit très bien que la membrane du canal spermatophore résulte de deux couches , l’une musculaire fibreuse extérieure et l’autre muqueuse interne, qui, dans l’extension plus grande du canal fibreux , se plisse en formant des espèces de valvules conniventes, qu’on voit encore par transparence. De tous les points de l’épididyme ou du canal déférent des Raies et des Torpilles, si l'on tire une pelite goutte de sperme (lorsque les vésicules des testicules sont déjà parvenues à leurs maturité) , elle fourmille de Spermatozoïdes libres et oscillants, Le Spermatozoïde des Raies et des Torpilles, comme celui des Squales décrit par M. Muller, a un corps spiral , qui, à l’extrémité antérieure, est formé d’un petit renflement ou tète, et, à l’extré- mité postérieure , d’une queue très déliée. J. es mouvements de ce petit animalcule, très vifs et rapides, sont vermiculaires dans le corps et oscillatoires dans la queue. La vie des Spermatozoïdes des Raies et des Torpilles est fort tenace; car de l’épididyme de ces Poissons, morts deux jours auparavant, nous avons retiré des gouttes de sperme dont les Spermatozoïdes étaient presque fous vivants. 175 NOTE Slüi UE MÉCANISME DES SÉCRÉTIONS; Par M. A LEREEOU11ET, D. M., Professeur à la Faculté des sciences de Strasbourg. ( Lue à la Société de médecine de Strasbourg , le 5 mars 1846.) L’influence du microscope sur nos connaissances anatomiques et physiologiques est un fait aujourd’hui reconnu ; et si ce pré- cieux moyen d’investigation trouve encore des incrédules ou même quelques détracteurs , ce ne peut être que par ignorance ou par cette singulière erreur de raisonnement qui nous fait oublier, pour un résultat douteux, des services nombreux et réels. Bornons- nous à rappeler que ce n’est que depuis les perfectionnements ap- portés au microscope que l’anatomie générale, ce point de départ de toute bonne physiologie , repose sur des bases certaines ; c’est cet instrument qui a détruit une foule d’erreurs grossières qui nous donnaient les idées les plus fausses sur la manière dont s’ac- complissent certaines fonctions : l’existence des pores organiques, les prétendus parenchymes des viscères, la triple terminaison des artères en capillaires nutritifs, en capillaires sécréteurs et en capillaires exhalants ou absorbants , etc. Parmi les fonctions sur lesquelles nous n’avons des connaissances un peu positives que depuis que le microscope est venu à notre aide , nous devons ranger les sécrétions. Le temps est encore bien rapproché de nous où l’on admettait une continuation directe entre les vaisseaux sanguins et les canaux des glandes , et où l’on disait que le sang , arrivé dans les ramuscules les plus fins des artères , se changeait en produits sécrétés. Lisez , pour vous en convaincre, l’article Sécrétion du Dictionnaire de médecine, article publié en 1844, et signé par un physiologiste bien connu de l’an- cienne école. Vous y trouverez répété à satiété, qu’il y a « con- „ tinuité entre le système vasculaire sanguin qui apporte les ma- %. I I HI ItOI MET. — SL T. r.E MÉCANISME 176 » tériaux de la sécrétion et le système vasculaire sécréteur qui « fabrique et exporte l’humeur sécrétée. « Vous y trouverez ces assertions singulières : « qu’on ne peut rien connaître de la struc- » ture intime des organes exhalants ; » que « la texture des follicules » sécréteurs est aussi peu connue que celle de tout autre organe ; » que « c’est entre les deux systèmes vasculaires qui constituent » l’organe sécréteur à leur point d’abouchement que se fait vrai- » ment la sécrétion ; » et comme on n’est jamais parvenu jusqu’à ce point d’abouchement , on se tire d’affaire en désignant par le mot de parenchyme ou système capillaire de l’organe sécréteur le lieu où se fait la sécrétion (1) Aujourd’hui la composition et la structure intime des glandes sont assez bien connues pour ce qu’elles ont d’essentiel. On sait que tout organe sécréteur est formé par des capsules simples ou multiples , ou par des tubes de longueur variable , et qui peuvent aussi se trouver isolés ou réunis en masse plus ou moins compacte ; les formes des glandes sont extrêmement variées , leur composi- tion est au contraire remarquable par son uniformité. Les vais- seaux sanguins , chargés d’apporter les matériaux de la sécrétion, sont disposés autour de ces éléments sécréteurs , de manière à les accompagner dans toutes leurs divisions ; ils forment des réseaux à mailles plus ou moins lâches, suivant l’arrangement des capsules ou des tubes sécréteurs. Ces vaisseaux n’ont que des rapports de contiguïté avec ces derniers; il est bien certain, et clairement démontré , qu’il n’existe aucune continuité entre les vaisseaux et les tubes. Les tubes sécréteurs sont toujours terminés en cul-de- sac à leur extrémité ; on ne doit plus faire d’exception pour le rein ni pour le testicule. 11 ne reste donc plus qu’à étudier la structure propre de ces tubes sécréteurs; dès lors il sera possible d’asseoir sur ces données anatomiques une théorie, sinon rigoureuse, du moins assez vrai- semblable de la sécrétion. (1 ) L'article dont il est ici question n’est que ta reproduction littérale des deux articles Sécréteur et Secrétion de l'ancien Dictionnaire de médecine en 21 vo- lumes. par le même auteur Cet article aurait du être entièrement refondu. DES SÉCRÉTIONS. 177 llurkinjo(l). Meule (2), Valentin (3), Muller (4), en Allemagne; Mandl (5), en France; Goodsir (6) et Bowmann (7), en Angle- terre, ont étudié avec soin , sous ce rapport, la structure des glandes, et ont été conduits à envisager la sécrétion sous des points de vue qui différent plus ou moins des idées généralement reçues. Ilenle, dans son remarquable travail sur l'épithélium, dit que les canaux glanduleux sont revêtus d’une couche de cellules épi- théliales; ces cellules renferment un noyau très développé , rela- tivement à la cellule elle-même ; les contours de celle-ci se voient difficilement; ce n’est que lorsque plusieurs cellules sont rappro- chées les unes des autres qu’on distingue les intervalles plus pâles qui les séparent. Ces cellules se produisent en abondance , se pressent au dehors, et forment , dans plusieurs glandes, une par- tie du produit sécrété. La membrane qui les soutient est homo- gène. L’auteur fait remarquer l’analogie qui existe entre certains produits provenant des sécrétions (les corpuscules du mucus, par exemple) et les cellules épithéliales elles-mêmes. Dans son grand ouvrage d’anatomie générale , AL Ilenle entre dans beaucoup plus de détails sur la structure des glandes, et particulièrement des canalicules sécréteurs. Il signale le contenu de ces organes comme des noyaux de cellules nucléées ou des granules élémentaires. 11 croit que ces derniers se réunissent deux à deux, trois à trois, s’entourent d’une cellule et finissent par représenter d’assez gros corpuscules muqueux qu’on peut faire sortir des glandes par la pression , et qui , pendant la digestion , enveloppent le contenu de l’estomac d’une couche épaisse et comme membraneuse. Mais Ilenle ne s’explique pas sur les usages présumés de ces cellules , et il paraît ne faire jouer aucun rôle à (1) Bericht liber die Versammlung der Naturforscher in Prag. 1837. (2) Millier’ 8 Archiv , p. 4 03. — 1838. (3) Hondwœrterbuch der Phys., t. I — Absonderung Ceirebe. (4) Physiologie , trad. française. (5) Anatomie générale et Anatomie microscopique. (6) Transacl. of Edinb. Soc., XV, 295. (7) Philos. Trans., 1842, 1re partie. — Ann. des Se nul 2' série t XIX. p 108. 3* série Zoo ». TV. (Mars 1840 ) 4 12 178 A. LEREBOULLET. — SUR LE MÉCANISME la membrane propre du tube sécréteur ; loin de là, cette mem- brane manquerait même dans plusieurs glandes (le foie et les glandes des follicules pileux), en sorte que les organes sécréteurs seraient ici simplement formés de cellules réunies en amas ar- rondis et lobuleux ou disposées en séries linéaires. Quant à la théorie de la sécrétion, M. Henle admet que les matières sécrétées se produisent dans le sang, et que les glandes les reçoivent toutes formées de ce dernier; il considère ainsi les glandes comme des espèces de liltres, sans nier, toutefois, que les cellules endogènes ne puissent aussi prendre part à la sé- crétion. Valentin décrit les extrémités des canalicules sécréteurs comme renfermant des cellules complètes , des noyaux globuleux , et une masse plus claire interposée. Les cellules ont souvent un contenu qui est peut-être en rapport avec le produit sécrété. Déjà l’urkinje, avant Valentin , avait émis la même opinion sur le rôle des cellules; il comparait ces dernières aux parties élé- mentaires des végétaux , où chaque petite cellule a sa vie propre et se fabrique un contenu spécial (1). Cette opinion sur le rôle spécial que jouent dans les sécré- tions les cellules épithéliales des glandes, a été aussi exprimée par Bowmann , dans son beau travail sur la structure des reins (2), et surtout par Goodsir. Ce dernier a cherché à démontrer par l’étude des organes sécréteurs d’un grand nombre d’ani- maux que les matières caractéristiques des produits des sécré- tions se trouvent dans les cellules qui revêtent les canaux glan- duleux. M. Mandl, entin , comme les auteurs que je viens de citer , re- garde les glandes comme composées de canalicules sécréteurs , renfermant une masse de cellules d’autant plus compacte et ad- hérente aux parois des canalicules, que l’on s’approche du bout fermé en cul-de-sac ; il appelle cette masse cellulaire le paren- chyme de la glande, à l’imitation de Purkinje , qui lui donnait le nom d’enchyme. Ce parenchyme occupe toute l’épaisseur du ca- (4) Physiologie de Millier, t. 1, p. .337. (2) Lnc. rit., p. | 3 à DES SÉCRÉTIONS. 179 nalicule; il est composé de cellules à divers degrés de dévelop- pement; les plus imparfaites occupent la circonférence de ce cy- lindre intérieur , tandis que l’axe du canalicule est occupé par les cellules les plus parfaites. Ce cylindre de cellules est entouré im- médiatement par la tunique propre glandulaire , et celle-ci peut être revêtue d’un épithélium ou en être privée. \1. Mandl, comme on le voit, regarde les cellules de ce qu’il appelle le parenchyme , comme indépendantes des cellules de I épithélium : «Ce dernier, dit-il, manque tout-à-fait dans les vésicules les plus petites des glandes agglomérées. Les corpus- cules primitifs et les cellules les moins développées du paren- chyme sont adhérentes à la tunique propre glandulaire à l’aide de la matière organisatrice ou du blastème ; mais à mesure que ces cellules se développent et se rapprochent de l’axe du cana- licule , elles se détachent du blastème et deviennent libres. « Ainsi, tous les micrographes s’accordent sur l’existence des cellules ou des noyaux de cellules qui tapissent les parois internes îles canalicules sécréteurs, et remplissent plus ou moins leurs cavités ; mais ils diffèrent d’opinion sur la valeur morphologique de ces cellules et sur leurs fonctions présumables. Ouelques recherches que j’ai faites sur la structure intime des glandes et l’étude comparative des travaux particuliers publiés dans ces derniers temps, m’ont conduit à une théorie de la sécré- tion qui diffère sous plusieurs rapports de celles dont je viens de présenter l’analyse. Pour acquérir une notion exacte sur la disposition anatomique des organes sécréteurs , il faut procéder avec une grande précau- tion, et observer non seulement des pièces conservées dans l’alcool, muisaussi des glandes fraîches, séparéesde l’animal peu d’instants après la mort. Si l’on écarte les uns des autres, à l’aide de fines aiguilles et sous le microscope, les petits lobules dont la réunion constitue une glande en grappe , et qu’on examine ensuite par transpa- rence un de ses petits grains ainsi préparés , on voit très nette- ment que ce petit grain se compose décapsulés entassées les unes sur les autres, et groupées autour d’un ou de plusieurs conduits 180 I.EREBOELLET. — SIR LE MÉCANISME excréteurs. Sous un grossissement médioere, ces sortes de petits sacs paraissent granulés ; mais à l’aide d’un grossissement de 250 à .‘{00 diamètres, on distingue, au milieu des granulations, de petites vésicules sphériques, transparentes, renfermant elles- mêmes un contenu granuleux pâle. Que l’on déchire ensuite quel- ques unes de ces capsules glandulaires, on verra leur contenu s’écouler sous la forme de vésicules et de granules élémentaires ; et si l’on agite la pièce sous l’eau , on débarrassera entièrement les capsules de leur contenu , et les parois de ces capsules resteront étalées sur la lame de verre. Ces parois offrent , mais d’une ma- nière plus distincte , le même aspect que présentait la capsule avant qu’elle fût ouverte. Elles sont, en effet, tapissées d'une couche de vésicules granuleuses de différente grandeur , qui adhèrent à la membrane propre de la capsule , et entre lesquelles sont déposés des corpuscules élémentaires. Les vésicules adhé- rentes ont le même diamètre et le même aspect que celles qui étaient libresdans l’intérieur de la capsule; on peut donc admettre que ces dernières se sont détachées des parois du petit sac glan- dulaire. Ces vésicules ne sont pas encore des cellules complètes ; je n’ai jamais pu distinguer d’intervalle entre leur enveloppe et les granulations qu’elles renferment; d’un autre côté, elles sont sphé- riques et ne contiennent pas de noyau ; ou peut donc les regarder elles-mêmes comme de véritables noyaux de cellules envoie de formation. J’ai reconnu la disposition dont je viens de parler dans les glandes salivaires, le pancréas, les glandes rectales et les folli- cules inguinaux du lapin. La même structure s'observe dans les glandes utriculaires et dans celles qui sont formées de tubes. Si l’on étudie, par exemple, les utricules dont l’agglomération constitue la muqueuse gastrique de la caillette du veau , on voit que ces espèces de petits boyaux, terminés en cul-de-sac, sont aussi composés d’une membrane propre, tapissée de vésicules granuleuses semblables à des noyaux de cellules. Les vésicules qui remplissent le fond du cul-de-sac sont toujours simples : ce sont des noyaux proprement dits; mais à. mesure qu'on approche de l’orifice de l’ntricule, on voit que ces UES siiciiihioîss. 1 81 noyaux sont entourés d’une cellule distincte: ce sont des forma- tions plus avancées. Cette observation , que j’ai répétée plusieurs fois, confirme ce qu’ont dit Valentin et d’autres micrographes. à savoir, que les cellules sont d’autant plus développées qu’on ap- proche davantage de l’orifice de l’organe sécréteur. Les glandes tubuleuses ne font pas exception à cette composi- tion élémentaire. Les tubes urinaires-, du moins ceux de la sub- stance corticale, offrent le même aspect que les capsules terminales des glandes conglomérées , tandis que les tubes droits de la substance mamelonnée sont revêtus intérieurement d’un épithé- lium en pavé , composé de cellules dont le noyau occupe à peu près la moitié du diamètre de la cellule entière. Quant aux tubes séminifères, les corpuscules sphériques et granuleux qui adhèrent à leurs parois sont identiquement les mêmes que ceux qui rem- plissent la cavité de ces tubes. Ainsi, en résumé, des formations nucléaires obstruent la lumière des organes sécréteurs et se trouvent surtout accumulées vers les extrémités en cul-de-sac de ces organes ; des formations en tout semblables tapissent les parois internes de ces mêmes organes et adhèrent à ces parois : tels sont les faits que chacun peut vérifier ; cherchons maintenant à nous en rendre compte. ht d’abord , ces vésicules granulées qui affectent une forme et une disposition si constantes appartiennent, sans aucun doute, aux formations épithéliales ; notre opinion diffère totalement, sous ce rapport , de celle de M. Mandl. Mais elles n’appartiennent en- core ni à l’épithélium en pavé ni à l’épithélium cylindrique; elles ne constituent pas encore de véritables cellules ; ce sont , comme on l’a dit et comme nous l’avons vu, ce sont de jeunes cellules dans lesquelles le noyau est tellement développé et la cellule si rudimentaire , que les deux enveloppes se confondent , et qu’on ne peut les distinguer l’une de l’autre. On peut les comparer à ces jeunes cellules globuleuses qui végètent à la surface du derme , et dont la réunion constitue la membrane granulée qui recouvre la tunique fibreuse de la peau. Cependant il existe des différences entre ces deux ordres d’organes : les jeunes cellules de la peau sont disposées sur plusieurs plans superposés ; les nouvelles cel- 182 IFItlIEOI 1,111. SLit LE MECANISME Iules formées à la surface du derme repoussent vers le dehors les cellules anciennes; celles-ci s’aplatissent; en même temps, l’en- veloppe du noyau, ou la cellule proprement dite, s’agrandit, tandis que le noyau reste stationnaire ou même diminue de dimen- sion ; en sorte qu’on trouve entre les cellules vésiculeuses qui re- couvrent immédiatement le derme et les cellules squameuses qui forment la surface extérieure de la peau, tous les degrés intermé- diaires de développement. Dans les glandes, au contraire, du moins dans leurs extrémi- tés terminales , les jeunes cellules sont disposées sur un seul plan et tapissent intérieurement la tunique propre de la glande, tunique qu’on peut très bien regarder comme l’analogue du derme. D’abord très petites , elles grossissent peu à peu et se détachent de la paroi de la tunique propre, quand elles ont atteint une certaine dimen- sion, mais le plus souvent avant que la cellule soit distincte du noyau. Cette végétation est tellement active à l’extrémité des tubes sécréteurs, que l’on trouve toujours, comme nous l’avons dit, la lumière de ces tubes obstruée par les noyaux vésiculeux qui les remplissent. A mesure que l’on s’approche de l’orifice excréteur du tube , les couches de cellules adhérentes à la membrane propre de ce dernier deviennent plus épaisses, et les cellules les plus superficielles prennent peu <à peu le caractère de celles qui tapis- sent la cavité destinée à recevoir le produit sécrété. Il y a donc , comme on le voit , un passage insensible des formes élémentaires que présentent les cellules des extrémités en cul-de-sac des glandes, aux formes achevées des cellules complètes qui constituent l’épi- thélium des tubes excréteurs ; et cette gradation dans le dévelop- pement des cellules n’est pas une vue théorique , c’est un fait d’observation que nous avons vérifié sur plusieurs glandes, et dont parlent, du reste, la plupart des micrographes. Nous sommes donc en droit de regarder les vésicules granuleuses en question comme des formations épithéliales rudimentaires, et chargées d’accomplir, sous cette forme, des fonctions spéciales. Examinons maintenant quelle peut être la nature de ces fonc- tions. L’épithélium ordinaire est un organe de protection, d’absorp- DKS SKCKKT10XS. 183 tion ou d’exhalation , suivant les surfaces qu’il recouvre et suivant la forme et l’étendue des cellules qui le composent. On comprend, en elfet, qu’une lamelle d’une épaisseur inappréciable ne peut que laisser transsuder les liquides, tandis qu’une cellule cylin- drique ou une vésicule globuleuse, recevant un liquide dans sa cavité, peut faire éprouver à ce liquide des modifications quel- conques; en un mot, l’élaborer ou même en changer la nature. La sécrétion proprement dite, c’est-à-dire la métamorphose des éléments constitutifs du sang, pourra donc très bien s’opérer dans des organes vésiculeux comme ceux qui remplissent les tubes sécréteurs. Or, nous avons vu une différence capitale dans le mode de développement des cellules des tubes sécréteurs : les unes, celles du fond, se détachent sous la forme d’organes vési- culeux ; les autres , celles qui avoisinent l’orifice du tube excréteur, végètent à la manière des cellules de l’épiderme; ces dernières semblent acquérir de plus en plus les caractères d’organes pro- tecteurs ou d’organes d’exhalation ou d’absorption , tandis que les premières, par leur forme globuleuse, et surtout par leur repro- duction abondante et continue , semblent plutôt réunir les condi- tions nécessaires à l’élaboration des principes du sang. Nous pensons donc que les vésicules granuleuses qui tapissent les parois des tubes sécréteurs et qui se trouvent surtout accumu- lées vers l’extrémité en cul-de-sac de ces tubes, remplissent une autre fonction que les cellules qui revêtent intérieurement le reste du tube , et qui se modifient peu à peu pour prendre les caractères de l’épithélium de la surface libre de la muqueuse ou de la peau ; et nous ne croyons pas trop nous hasarder en regardant ces vési- cules comme les organes chargés d’élaborer la substance parti- culière à chaque sécrétion (salivine, biline, urée, etc.), tandis que les cellules épithéliales proprement dites laisseraient passer l’eau , les sels et les autres substances dissoutes dans la partie liquide du sang, et qu’on retrouve en plus ou moins grande pro- portion dans tous les liquides sécrétés. On sait , en effet , que l’eau entre pour une immense proportion dans les produits des sécré- tions : or. la surface des tubes sécréteurs est infiniment plus grande que celle qui résulterait de la somme de toutes les extré- I. UillEIIOlLLKT. SL U I.E MECANISME 184 mités terminales de ces tubes. De plus, la séparation du sang de ses éléments liquides n’entraîne aucune action particulière de la cellule : c’est un simple effet d’endosmose, et cet effet s’opérerait au moyen des cellules rangées en séries continues le long des pa- rois internes du tube sécréteur. Les vésicules, au contraire, se chargeraient soit d’extraire du sang les principes immédiats des sécrétions qui s’y trouvent déjà , soit de faire subir aux éléments du sang les transformations nécessaires à la production de ces principes. Elles verseraient leur contenu dans la cavité du cana- licule, et par conséquent au milieu du liquide que renferme ce dernier, soit par déhiscence , soit par dissolution de leurs parois. Ces vésicules formeraient donc la partie essentielle de chaque glande, sa partie en quelque sorte spécifique. Sans doute ce n’est là qu’une hypothèse, mais celle hypothèse n’est pas dénuée de fondement, et la science possède déjà plusieurs faits qui viennent militer en sa faveur : ainsi Goodsir a trouvé dans la poche à encre des seiches des cellules pigmentaires dont le contenu est en rapport avec la .sépia elle-même; le foie de plu- sieurs mollusques se composait de vésicules dont le contenu brun était en rapport avec la bile ; dans le rein d’un colimaçon ( hélix adspersa) , le même anatomiste a rencontré des cellules remplies de granules d’acide urique ; le manteau de l’aplysic , où se sépare un liquide pourpré , contient des cellules dans lesquelles se trouve un liquide de la même couleur. karslen (1) a fait des observations analogues sur le foie des crustacés et des mollusques. Henri Meckel , neveu du célèbre ana- tomiste de ce nom, vient de publier dans les Archives de Muller (1846, cah. 1, p. 1) un excellent travail , dans lequel il s’attache à représenter les cellules épithéliales des glandes comme les en- droits où s’opèrent les actions chimiques ; il s’est assuré que , dans l’écrevisse , le travail de formation de la bile est réparti entre deux sortes de vésicules, ayant chacune leur attribution particulière : les unes fabriquent de la bilinc, tandis que les autres ne renfer- ment que de la graisse. Enlin ne savons- nous pas que les cor- puscules solides que nous désignons sous h' nom de globules du : I' ;Vot’ «et. ji/ij/s met I. XXI, lr' parti'' , p J 9 5 DES SECRETIONS. 185 mucus ont la même tonne , la même composition et le même diamètre < pie les noyaux des cellules des glandes qui les sécrètent, et ne pouvons -nous pas, d’après cela, les regarder comme des noyaux qui ne sont pas encore arrivés à leur développement cel- lulaire? 11 nous reste encore à examiner le rôle que peut jouer la mem- brane propre du tube sécréteur. Tous les anatomistes sont à peu près d’accord pour envisager cette tunique comme un simple support, comme une sorte de squelette destiné à donner au tube sa forme et sa consistance, et à diriger au dehors les fluides sécrétés. Nous ne saurions nous ranger de cet avis, et nous ne craignons pas de dire que cette manière de voir nous semble peu physio- logique, à peu près comme si l’on voulait regarder le derme comme lecaput mortuum de la peau. Si nous étudions la structure de l'ovaire , non pas dans les ver- tébrés supérieurs, mais dans les reptiles et les poissons, nous voyons que cette glande se compose d’une enveloppe membra- neuse excessivement mince dans quelques groupes; c’est cette membrane fibro -grenue qui sécrète les ovules; on les voit se dé- velopper peu à peu , faire saillie à la surface interne du sac mem- braneux. et tomber ensuite dans sa cavité quand ils sont arrivés à leur complète évolution. Or, ce tpie nous pouvons voir dans la sécrétion des ovules se passe sans doute dans les autres sécrétions. Pour nous , la tunique propre des tubes sécréteurs est la membrane proligère de ces tubes; généralement regardée comme sans structure, elle a cependant été reconnue comme fibreuse par (juelques anatomistes; c’est à sa surface que végètent sans inter- ruption les vésicules sécrétoires , comme c’est à la surface des sacs ovariens que végètent les ovules. La structure particu- lière des glandes des animaux articulés nous semble une preuve en faveur de cette théorie. Dans ces glandes, en effet, les vési- cules ne sont pas à découvert dans la cavité du tube sécréteur ; elles sont elles-mêmes recouvertes par une membrane très fine, continue , en sorte que le développement des vésicules se fait entre cette membrane et la tunique propre , absolument comme dans les ovaires dont nous venons de parler. 186 A. EEKEItOI EL ET. — SUE Lli MÉCANISME DES SÉCRÉTIONS. On nous objectera sans doute que la tunique propre des or- ganes sécréteurs n’est pas indispensable à ces organes , puisqu’elle manque dans le foie des vertébrés. A cela nous répondrons que cette absence de la membrane propre des glandules sécrétoires du foie est loin d’être prouvée. Valentin est porté à admettre cette membrane, et krause l’admet positivement, et affirme qu’il est parvenu à la démontrer (1). D’ailleurs, il suffit de se rappeler combien sont difficiles les recherches sur la structure intime du foie, pour concevoir comment une membrane aussi délicate que la tunique propre des glandes a pu échapper aux recherches des meilleurs micrographes. Nous résumerons ainsi qu’il suit nos idées sur la sécrétion , en- visagée d’une manière générale : 1° Les glandes ont pour éléments sécréteurs des sacs ou des tubes, composés, en allant de dehors en dedans, d’un réseau vasculaire sanguin , d’une membrane propre et d’une couche de cellules. 2° La cavité des sacs ou des tubes est remplie de cellules libres, semblables à celles qui en tapissent les parois. 3° Les cellules qui tapissent les extrémités en cul-de-sac des organes sécréteurs ne se composent encore que du noyau ; celui-ci est sphérique , creux et rempli de granulations. h" Les cellules qui recouvrent les tubes dans leur continuité prennent de plus en plus le caractère de cellules achevées, à me- sure qu’on approche de l'orifice du tube; le noyau est alors par- faitement distinct de la cellule, et celle-ci finit par prendre la forme de lamelle (épithélium en pavé) ou celle de cylindre (épi- thélium cylindrique), se confondant ainsi peu à peu avec l’épithé- lium de la surface libre , à laquelle aboutit là glande. 3° Les jeunes cellules ou vésicules granuleuses (noyaux de cel- lules) qui remplissent les canalicules proviennent des parois de l’extrémité en cul-de-sac de ces canalicules : il se fait dans ces culs-de-sac une végétation abondante qui a pour effet de pro- duire sans cesse de nouvelles vésicules qui finissent par obstruer la lumière du tube. (I) Ueberden feinern /limiter Lebcr (Muller s Archic, I8ià, p. oJi). C. VltKTINS. SUR LA TEMPÉRATURE DES OURSINS. 187 (>' Ces vésicules paraissent être les organes sécréteurs propre- ment dits; elles élaborent les principes du sang, et les versent au dehors, soit en crevant, soit par une dissolution de leur en- veloppe; il est très probable que les produits qu’elles fournissent constituent les principes immédiats particuliers à chaque sécrétion. 7" L’eau, les sels et les autres substances que l’eau tient en dissolution proviendraient, dans cette hypothèse , des cellules qui tapissent les canalicules ; on s’expliquerait ainsi l’abondante quan- tité d’eau que renferment, en général, les liquides sécrétés. S" La membrane propre des canicules ou des petits sacs sécré- teurs est une membrane proligère analogue à celle qui constitue l’ovaire des vertébrés inférieurs et de la plupart des invertébrés. Nous soumettons les réflexions qui précèdent à l’appréciation de nos collègues de la Société de médecine. Sans doute elles au- raient besoin de reposer sur des faits plus nombreux encore ; mais telles qu’elles sont , elles peuvent déjà laisser entrevoir les pro- grès que le microscope a fait faire à la question importante de la sécrétion , et les résultats futurs que la science est en droit d’en espérer. SUR LA TEMPÉRATURE des , Spalanÿiis purpureus , O. -F. Muller, Trigla hirtmdo, L. , et Gadus œglefinus, L. , des mers du Nord; Par M CH. MARTINS. Le 20 juin 1839, la corvette la Recherche était en calme sur le Doger-Bank, dans la mer du Nord, par 53° 48' de latitude boréale, et 1° 2' de longitude orientale. La drague ramena un nombre prodigieux d’Oursins ( Spatangus purpureus, M.). Je m’empressai de prendre leur température dès qu’ils furent hissés sur le pont du navire. J’employai pour cela un excellent thermo- mètre à mercure construit par M. Walferdin. 11 porte 170 divi- sions ayant 0"’,5 d’écartement; son parcours total est de — 7" à -f- 33" centigrades. Le point de glace fondante correspond à la trentième division, et la valeur moyenne de chacune d’elles est 188 C. MüRTIKS. — SUR LA TEMl’KRATCRE de 0°,221 centigrade. On peut par conséquent apprécier facile- ment avec la loupe 0\0/i de degré. En outre, l’instrument est très sensible et prend rapidement la température de l’animal dans lequel il est plongé. J’enfonçais profondément le thermomètre dans la bouche des Oursins, et le laissais jusqu’à ce que le mer- cure restât stationnaire. Voici les résultats que j’ai obtenus sur quarante-huit d’entre eux : Température de 68 Oursins (Spatangux purpureus, M.). 1. Dr p lés. 10,12^ 25. De p rés. 12,32\ 2. 9,46 26. 11,9? j 3. 9,90 Moy. 10°, 16. 27. 13,09 ( 4. 10,34 28. 12,10 i 5. 10,78 29. 12,10 1 6. 10,34, 30. 12,98 ' 7. 10, 46 31. 12,54 8. 1 0,-45 32. 13,42 I 9. 40,46 Moy. I0°,60. 33. 13,421 10. 1 1,33 34. 13,71 i 11. 10,78 35. 12,76 ’ 12. 10,12 36. 1 3,20 / 13. 10,46 37. 15,29 14. 10,78 38. 14,37 . 15. 1 1,00 Moy ! 1 °, 0 2 . 39. 14,74 1 16. 1 1,44 40. 1 3,42 ( 17. 1 1,00 41. 15,40 18. 11,4 4 12. 13,64' 19. 10,78 43. 14,41 20. 1 1,44 1 44. 13,64 21. 1 1,66 Muv. Il", 37. 45. 13,96 22. 1 1.04 1 ' 46. 15,18 j 23. 1 1,62 47. 14,96 24. 1 1,66 48. 15,40 Moy. 12°, 4 2. Moy. 13°, 18 Moy. 14°,48. Mov, I 4°,39 l n simple coup d’œil jeté sur ces chiffres fait voir que la tem- pérature de ces animaux a été constamment en croissant. La loi devient évidente si l’on prend, comme je l’ai fait, les moyennes de DES OURSINS DES MERS Dl NORD. 189 six en six, parce que toutes les anomalies individuelles et celles qui tiennent à des circonstances fortuites se trouvent ainsi élimi- nées. Cet échauffeinent graduel s’explique très bien , si l’on a égard à la température des milieux dans lesquels ces animaux ont été successivement placés. Je voulus faire une sonde thermomé- trique pour connaître la température du fond ; mais le vent se leva et la corvette reprit sa marche. Heureusement , des expériences sous-marines faites l’année précédente, avec M. Bravais, à la même époque et sur le même banc, me permettent d’estimer cette température avec une exactitude suffisante : ces expériences nous avaient appris que les températures du fond, par A3 et 58 mè- tres , étaient de 5°, 95 et A°,80, la température de la surface étant 10°, 6 et 10°, 7. Les deux premiers nombres avaient été obtenus au moyen de plusieurs thermomètres à minima de M. Walferdin (1), garantis de la pression par un tube de cristal ; les deux derniers à l’aide de thermomètre plongeur (2). Or, le 20 juin 1839, la température de la mer à sa surface était de 12°, 23. Les Oursins reposaient sur un fond de vase à 38 mètres de profondeur. La température du fond devait donc être de 8°, G environ. La chaleur moyenne des six pre- miers Oursins que j’ai expérimentés était de 10°, IG, et supérieure par conséquent de 1°,55 à celle de la couche d’eau dans laquelle ils étaient plongés. Si l’on réfléchit maintenant qu’avant d’arriver sur le pont les Spatangues ont traversé des couches de liquide de plus en plus chaudes, et que la température de l’air était de 16°,1 à l'ombre, on m’accordera qu'ils ont dû s’échauffer dans le trajet qu’ils ont fait du fond de la mer sur le pont du navire. On sera d’au- tant plus porté à me faire cette concession, que la rapidité avec laquelle ces animaux se mettent en équilibre de température avec les milieux ambiants ressort de la manière la plus évidente du ta- bleau précédent. En effet, les expériences ont duré une demi-heure en tout, et ce temps a suffi pour que la température moyenne des Oursins s’élevât de 10", 16 à 14°, 59, c’est-à-dire de A°,A3 ; chan- (1) Voyez Pouillet, Truité fie physique, 3' édit., t II, p. B03, (2) Voyage en Scandinavie de la Commission dn Xurd (Météorologie), 1 I. p 1 3 190 C. MAKTIINS. — - Sim LA TEMPÉRATURE DES OURSINS, gement très notable, si l’on considère que l’air est un milieu moins dense que l’eau, et que sa température n’était supérieure à celle de la mer à sa surface que de 3°, 87 seulement. Toutes ces considé- rations me permettent, je crois, de conclure que non seulement ces Échinodermes ont une chaleur fort peu différente de celle de l’eau dans laquelle ils sont plongés, mais encore qu’ils prennent très rapidement la température des milieux qui les entourent. Une heure avant que les Oursins fussent pêchés, un Grondin gris (Trigla hirundo, L.) avait mordu à la ligne qui était à la traîne derrière le navire. A cet instant, la température de la mer à la surface était de 12 VI. Le même thermomètre qui m’a servi pour ces Oursins, enfoncé tout entier dans l’anus du poisson, marqua invariablement 12 ',75, température supérieure de 0°,P>5 seulement à celle de l’eau dans laquelle il se mouvait. Le 20 juillet 1838. j’eus une occasion encore plus favorable de vérifier combien la température des poissons diffère peu de celle de la mer. La corvette était encalmée sur les côtes du Spitzberg par le travers de Bellsound , et par latitude 77’ 21' N., et longitude 9° 15' E. Je venais de faire une sonde pour déter- miner la température sous-marine, et j’avais trouvé 1°,8 par 100 mètres de profondeur, et 5°,0 à la surface; la température de l’air était de 4\ 9. I ne Morue (Gadus œglefiuus, L.), de 0“‘,67 de long, sur 0"',37 de circonférence derrière les branchies et pesant 3 kilogrammes , fut prise avec une ligne de fond qui avait 47 mètres de longueur. A cette profondeur, la température de l’eau devait être nécessairement de 3°, 50; celle de la Morue (le ther- momètre étant plongé dans l’anus jusqu’à l’affleurement de la co- lonne mercurielle) ne dépassait pas 3°, 15. Elles ne différaient donc l’une de l’autre que de 0°,35. Cette observation me paraît assez curieuse en ce qu’elle montre que ces animaux peuvent avoir une température très basse sans perdre en rien de leur vivacité ; car cette Morue se débattait avec la plus grande violence. Dans ses branchies, la température était plus élevée que dans le ventre; le thermomètre y oscillait entre 3°, 39 et 4", 48. Mais ces nombres sont moins dignes de confiance que le premier, parce que l’afflux saccadé du sang veineux , l’engorgement du réseau capillaire des I.F.RFRT ET KOltl Y. TESTICULES DES PATELLES. 19 L branchies, suite de leur adhérence (1), et le mouvement inter- mittent des opercules , faisaient varier la température à chaque instant. En résumé, on peut, je crois, conclure de ces expériences que les Oursins et les Poissons des mers du Nord ont une température peu différente de celle du liquide dans laquelle ils sont plongés , et qu’elle change assez rapidement quand l’animal traverse des couches de température différente, ce qui justifie au plus haut degré la dénomination d’animaux à température variable, qui doit remplacer celle moins exacte d’animaux à sang froid. NOTE Sim LES TESTICULES ET LES SPERMATOZOÏDES DES PATELLES, Far MM. LEBERT et ROBIN. (Présentée ii l’Académie des Sciences le 1" décembre I 84 5.) Les Patelles, comme on le sait, ont été considérées pendant longtemps comme étant des animaux hermaphrodites, ou plutôt comme pouvant se reproduire sans le concours d’orgaues mâles, et .AJ. de Blainville, se fon- dant sur cette considération, a désigné sous le nom de Gastéropodes uui- sexués la division dont ces Mollusques font partie. AI. Milne Edwards con- stata il y a quelques années l’existence de Patelles mâles aussi bien que d’individus femelles (2) ; mais jusqu’ici on n’a donné aucune description anatomique de ces animaux, et nous avons profité de notre séjour sur les côtes de la Manche, au printemps dernier, pour remplir cette petite lacune. Le testicule des Patelles est situé sur le côté gauche du corps, entre la masse du foie et des intestins en dedans, l’enveloppe du corps en dehors. Il se détache facilement de cette dernière, difficilement de la première; il se recourbe un peu derrière la masse viscérale, à la partie postérieure du corps, et se présente sous forme d une masse aplatie latéralement, épaisse de 2 â 3 millimètres , longue de 2 centimètres et demi. Terminé en arrière par une extrémité ovale, il montre une légère échancrure à son extrémité postérieure, qui se termine près de la masse pharyngienne. Son bord inférieur s’interpose entre la masse des viscères et la langue , qu’il sépare ainsi des organes précédents. Le bord supérieur se trouve vers le milieu de la face latérale du corps. La couleur du testicule est d’un jaune pâle légèrement rosé; il est con- (1) Voy. les expériences sur le mécanisme de la respiration des Poissons par M. plonrens, dans ses Mémoires d'anatomie et de physiologie comparée, p. 8 2 (2) Voyez Ann. des Sc. nnt., 2e série, t. XIII. 1<)‘2 i.ebkht f.t nomv — ■ testicules df.s r vtelles. stitué par des tubes d’im cinquième de millimètre de diamètre, repliés un grand nombre de fois sur eux- mêmes. Les interstices des replis sont pleins d’une substance granuleuse, de couleur plus foncée que celle des tubes. A la coupe de cet organe, il s’en écoule en assez grande quantité un liquide légèrement visqueux, blanchâtre, lactescent, d’un aspect particu- lier, très analogue a celui du sperme des animaux supérieurs. Ce liquide, examiné au microscope, se montre formé de spermatozoïdes très nom- breux qui sont formés de deux parties : l’une, plus large et plus courte, d’un aspect foncé, a en moyenne 5 millièmes de millimètre de long, et 2 millièmes de large: l’autre partie, beaucoup moins visible, très pfde, constitue une sorte de queue, en forme de 111 très mince, ayant à peine un millième de millimètre de largeur, et 7 ou 8 de longueur. Cette queue Tonne, avec le corps, tantôt une ligne droite, tantôt un angle obtus. Les mouvements des spermatozoïdes sont assez vifs lorsque le sperme est frais; ils consistent en inclinaisons de la queue sur les côtés. L 'ovaire des Patelles est aussi situé sur le côté gauche du corps; mais il s’avance beaucoup plus que le testicule sous les viscères, et ne remonte pas si liant sur les côtés du corps ; sa face inférieure est en rapport avec la partie musculaire du pied. Il nés’ engage pas, comme le testicule, entre les viscères et la langue, et repousse celle-ci au côté droit du corps. Il a à peu près la même forme que le testicule chez les individus où il ne prend pas un volume plus considérable; mais, ainsi que le dit Cuvier, sa forme varie suivant (pie les ovules sont plus ou moins développés. Les ovules, étudiés à la période de développement où nous les avons trouvés, ont un cinquième de millimètre de diamètre. Le vitcllus est d’un blanc jaunâtre, formé de granules graisseux. On aperçoit dans le vitcllus la vésicule germinative, qui n’est jamais située exactement ni au centre ni à la surface duvitellus; elle est finement gra- nuleuse , mais plus claire et plus transparente que le vitcllus. Au contact de l’eau, une membrane très fine, sans structure apparente, se sépare du vitcllus, puis elle se rompt ; alors les granules vitellins s’échappent, entraî- nant avec eux la vésicule germinative, qu’il est facile d’en séparer. Cette vésicule germinative est ronde, formée d’une membrane transparente, sans structure : elle est remplie d’un liquide incolore contenant des granules très fins, toujours agglomérés en plus grand nombre dans un point que dans les autres : il n’y a pas encore de tache germinative proprement dite. Il nous a été impossible de trouver un canal excréteur, tant pour le testicule que pour l’ovaire. A l’époque où nous disséquions ces animaux (fin d’avril) , près de la moitié d’entre eux manquaient d’ovaire et de testicule; il n’y avait aucun organe à la place qu’ils occupent habituelle- ment. Quant aux autres, nous trouvions trois individus munis de testi- cules sur huit ou dix munis d’ovaires. DE LA COMPOSITION ET DE LA STRUCTURE DES ENVELOPPES DES TUNICIERS; Far MM. LOWIG et A. KÔLLIK.ER. Plus la science fait de progrès dans la connaissance desani* maux sans vertèbres et des plantes inférieures , plus aussi il paraît difficile de trouver, entre les formes les plus simples des deux règnes, des marques distinctives essentielles et générales, puisque presque tous les caractères qui ont été présentés pour leurs formes et leurs fonctions, ou pour leur composition , ont dû céder à une critique sévère, comme n’étant pas universels, et par conséquent comme inadmissibles. Un des meilleurs caractères distinctifs qui ont été proposés dans les temps modernes était que les membranes cellulaires des plantes étaient d'une composition exempte d’azote (gélatine, cellulose), tandis que celles des animaux consistaient dans une substance azotée (protéine , colle), ou autrement , que la cellulose, qui fait la base de toutes les plantes, manque abso- lument dans le règne animal. Mais ce caractère même paraît de- voir disparaître après un examen rigoureux, puisque Schmidt (1) a prétendu, l’année dernière, avoir trouvé dans l’enveloppe du Phallusia inamillaris une substance ternaire et identique à la cellulose (2). Certainement, il semble permis de douter d’un tel rapport; car il paraît impossible d’admettre que l’enveloppe du Phalusia , qui , à elle seule, forme plus des trois quarts du tout, soit composée de cellules avec une membrane sans azote, ce qui serait une exception d’une loi reconnue jusqu’ici universelle, d’autant plus frappante que la substance en question contient même une grande quantité de vaisseaux sanguins. Cependant les renseignements fournis par Schmidt ne sont (1j Z ur vergleichenden Physiologie der wirbellosen Thitir. Braunschweig, 1845 (2) Schmidt fait aussi mention du Frustalia satina comme d’un animal con- tenant de la cellulose; mais le Frustalia doit sans doute, comme tous les Diato- macées , être compté parmi les plantes : c'est aussi l'opinion presque unanime des botanistes modernes. 3' série 7.ool T V. (Avril 1 8 46.) t 13 194 I.ŒM'IG ET KffilXIKEK. — STRUCTURE ET COMPOSITION ])as de simples conjectures; ils se fondent sur des recherches chimiques qui paraissent avoir été faites avec beaucoup de soin , et ils ne peuvent donc être jugés que parle moyen des expériences. Quant à nous , nous l’avouons franchement , nous n’avons pu nous défendre de certains doutes; mais, nous gardant de tout juge- ment préventif, nous avons résolu d’examiner la question soulevée, avec tout le soin que réclame l’importance du sujet, afin de rendre un service à la science , sinon par la découverte de faits nouveaux, du moins par la confirmation des expériences de Schmidt. Les résultats de nos recherches sont les suivants : I. Recherches chimiques. 1 . Dans tous les animaux de l’ordre des Tuniciers qui étaient à notre disposition , savoir : Phalhma intestinaiis. — monachus. — gelatinosa. — mamillaris. — sulcata. Cia vellina lepadifurmis . Cynthia papillata. — canopus. — pomaria une partie très considérable du corps consiste en une substance absolument insoluble dans les acides et les alcalis. Elle con- stitue, dans les Ascidies simples, l’enveloppe extérieure cartila- gineuse (Clavellina , PhaUwtia ) ou coriace ( Cynthia ) du corps ; dans les Ascidies composées, la base plus ou moins gélatineuse qui renferme les groupes d’individus; dans les Salpa , tout le tube extérieur, qui renferme les muscles, les intestins, les vais- seaux , etc. 11 y a bien , dans les parties mentionnées , des parties solubles, dont nous parlerons plus tard ; mais les parties insolubles sont si prépondérantes que , même après en avoir séparé les parties so- | lubies , les enveloppes de ces animaux conservent leur forme in- Diazona violacea . Botryllus polycyclus. — violaeeus. Didemnum candidum . Apli di u m y ibbulosu m . Pyrosoma yiganteum. Salpa maxima. — bicaudata ; DLS ENVELOPPES DES TIMCIERS. 195 (acte. Après avoir traité les Salpes, les Pyrosomes, les Ascidies entières, pendant quatre, cinq et six jours à la chaleur, avec une solution de soude des plus concentrées, nous les avons retrouvées sans aucun changement quant à la forme , si bien que tous les bords aigus, les protubérances, les pointes, etc., étaient aussi parfaitement conservés que dans un individu intact; mais quant à la couleur, la consistance et la diaphanéité, il s’opère des changements notables : ainsi les téguments de tous les animaux nommés, excepté l’enveloppe du Cynthia, deviennent de plus en plus transparents, jusqu’à ce qu’ils atteignent la transparence du verre, quand ils sont traités successivement avec de l’acide muria- tique et une solution de soude; de petits morceaux carrés de l’en- veloppe du Phallusia, par exemple, ressemblent, pendant cette manipulation , à peu près aux dés d’albumine qu’on expose à une digestion artificielle , et deviennent d’abord transparents aux bords, puis perdent peu à peu complètement leur opacité, avec la seule différence qu’ils ne s’altèrent point du tout quant à leur forme , mais qu’ils conservent au contraire leurs arêtes les plus aiguës. Quant à la couleur, les nuances violettes et jaunes dispa- raissent chez les Diazona, Botryllus , Phallusia, etc., et chez les Cynthia, la couleur jaune fait place à un blanc de craie; chez tous , la consistance se modifie un peu ; cependant cette modifica- tion n’est bien sensible que chez les Cynthia, dont l’enveloppe, roide et solide, devient tendre et flexible. 2. La partie insoluble de l’enveloppe desTuniciers mentionnés, celle qui reste après une manipulation opérée avec de l’acide mu- riatique et une solution de soude, consiste dans une substance ab- solument exempte d’azote , ce dont nous nous sommes persuadés en chauffant avec un mélange de chaux et de natron (potasse) certaines quantités de cette partie insoluble lirée du Phallusia et du Cynthia, et en calcinant avec de l’hydrate de soude ces mêmes parties tirées des Phallusia , Cynthia , Salpa , Pijrosoma , Botryllus et Diazona. Nous avertissons ici que, pour exécuter ces examens avec succès , il est absolument nécessaire d’extraire avec de la soude , aussi complètement que possible, les parties que l’on veut examiner ; si l’on néglige cette précaution , il restera des 19G LOEWIG F.T hdl.IlKIK. STRUCTURE ET COMPOSITION parties chargées d’azote, qui induiront dans plus d’une erreur. Faute de matériaux , nous avons dû nous contenter de deux ana- lyses élémentaires pour le Cynthia et le Phallusia; les résultats en ont été les suivants : u. 0»' ,391 de la substance sèche et exempte d'azote, tirée de l'enveloppe du Phallusia mamillaris , ont donné , sur 1 00 parties : Carbone i3,40 Hydrogène 5,68 Oxygène 51,32. h OR1 ,130 de la substance sèche et exempte d'azote, tirée de l'enveloppe du Cynthia papillota, ont rendu, sur 100 parties : Carbone 43,20 Hydrogène 6,16 Oxygène 50,64 Ces chiffres correspondent, non seulement à ceux de Schmidt, cjui , dans 100 parties de l’enveloppe de Phallusia, privée aupa- ravant de toute matière inorganique, a obtenu : Carbone. ... 45,38 Hydrogène 6,47; mais aussi aux valeurs trouvées pour la cellulose des plantes. Ainsi donc, puisque la cellulose est aussi presque insoluble dans une solution de soude , nous n’hésitons pas à prétendre que dans les Phallusia et Cynthia, et probablement aussi dans tout l’ordre des Tuniciers, une partie considérable du corps animal est formée par la cellulose. Après être parvenus au point de pouvoir confirmer l’observa- tion de Schmidt, et l'étendre sur tout un ordre d’animaux , ce ne fut pas sans un vif intérêt que nous procédâmes à l’examen d’autres animaux pour trouver, si cela était possible, de nouvelles preuves de l’existence intéressante de la cellulose dans le règne animal , mais nous nous vîmes trompés dans nos espérances , car ce fut en vain que nous cherchâmes, même dans les parties ligneuses , cartilagineuses, gélatineuses, des polypes, méduses, mollus- | DUS ENVELOPPES DUS TUMCIERS. 197 ques, etc., une substance insoluble dans une solution de soude, et qui, chauffée avec de l’hydrate de soude, ne développât aucun azote. Un seul animal fait exception, c’est le Doliolum mediler- raneum Otto, animal énigmatique pour les naturalistes, que la plupart mettent au nombre des Béroïdes, et quelques uns au nombre des Salpes, Quoique ne pouvant donner sur l’organisation de cet animal des détails plus précis que nos prédécesseurs, nous croyons cependant devoir l’envisager , d’après sa composition chimique, comme ressemblant plutôt aux Salpes; du moins il présente, dans une solution de soude des plus concentrées, abso- lument les mêmes caractères que les Tuniciers, et même, après plusieurs jours, il paraît aussi intact quant à sa structure que quant à sa forme. Le manque de matériaux nous empêche malheureusement d’examiner si l’enveloppe de cet animal est exempte d’azote ; c’est pourquoi nous ne nous exprimons pas sur la place qu’il doit oc- cuper dans la série des animaux d’une manière aussi positive que nous serions peut-être en droit de le faire. Quant aux autres animaux dans lesquels nous avons cherché inutilement de la cel- lulose , nous indiquerons brièvement leurs noms et les caractères qu’ils présentent dans une solution de soude , afin de faciliter la voie aux observateurs qui dorénavant entreprendront un examen analogue. Ce sont : EPONGES. Alcy onium domuncula .... 1 se dissout très vite dans une solution t de soude. POLYPES. Axe du Gorgonia verrucosa. , \ — — vrminea . — Antipathes scoparia. — Pennatula grisea. : t ( se dissolvent facilement — — phosphorea . \ Polypier de Y Alcyonidium palmatum — du Pennaria Covolini. I 198 jLŒWICi ET KŒLLIHLU. — MÉDUSES. lihisQStoma Âldrovandi (tout l'animal). Pelagia noctiluca. . (id.) Beroë Forskhalii. . . (id.) Diphyes ?... (id.J Cartilage du l'plelh f limbosa . H ADI AIRES. Peau et axe de Y Astheracanthion violaceus Peau de Y Holothuria tubulosa. VERS. Ascaris lombricoides Meckelia annula ta ..... MOLLUSQUES. Çarmaria Mediterranea (tout l’animal). Pterotrachea coronata. . (id ) . Doris argo (id.) . Cymbulia Peronii ( la coquille). ANIMAUX ARTICULÉS. Sipunculus verrucosus Sabclla unispira (animal et enveloppe). \ephthys Hombergi flermione hystrix. . . . $colopei\dra morsilans POISSONS. Amphioxus lanceolalus STRUCTURE ET COMPOSITION se dissolvent facilement. \ résiste longtemps, mais se dissout enfin; chauffé avec de l’hydrate de soude, il s'en dégage de l’ammo- niaque. se dissolvent facilement, apres avoir été fortement manipulés avec de l'acide. se dissolvent facilement. se dissolvent facilement résiste longtemps. \ se dissolvent facilement , et ne sont ( donc pas composés en partie de (chitine, comme les autres Arti- culés. | La peau ne se dissout pas ; elle est . azotée, et par conséquent composée ' probablement de chitine. se dissout facilement. II. Recherches microscopiques. L'existence de la cellulose dans les Tuniciers une fois prouvée, il nous restait à rechercher les éléments des parties qu’elle con- stitue. Pour cela, nous avons examiné avec le microscope les enve- loppes des animaux mentionnés, avant et après leur manipulation DUS U.WUI.01TUS DLS TU.MC1UKS. 199 avec de l'acide muriatique et de la soude ; et par la comparaison des éléments qui se trouvaient dans l’un et l’autre cas, nous avons été à même de pouvoir décider quelles parties étaient com- posées d’une substance azotée, et quelles autres d’une substance exempte de ce corps. Voici les résultats que nous avons obtenus par cette opération. 1. Autant que nous avons pu le distinguer aux échantillons conservés dans l’esprit de vin , l’enveloppe cartilagineuse du Pliallusia mamillaris est composée de trois couches de différentes épaisseurs. La couche intérieure (1), simplement formée de cel- lules d’épitélium, polygonales, pourvues de nucléus, et mesurant 0,005'", couvre toute la superficie intérieure de l’enveloppe car- tilagineuse, et se joint aux deux ouvertures de cette enveloppe, et là, où celle-ci reçoit ses vaisseaux, à un autre épitélium, couvrant le sac membraneux qui contient les viscères. La seconde cou- che (2), considérablement plus épaisse, est composée d’une sub - stance homogène contenant des cristaux et des nucléus. Ces pre- miers ne se trouvent pas partout, et manquent peut-être absolu- ment dans les animaux frais; là où ils se présentent, ils sont déjà visibles à l’œil nu, et ressemblent à des stries blanches; vus au moyen d’une lentille grossissant moyennement, ce sont des cris- taux réunis en forme d’étoile, ou des concrétions terminées irré- gulièrement et de formes différentes. Les nucléus se trouvent par- tout en assez grand nombre , et sous des formes différentes ; ceux situés le plus à l’intérieur sont ronds, de 0,0015'" — 0,002"', avec un ou deux granules opaques, ressemblant à des grains adi- peux ; les nucléus extérieurs sont plus grands, ronds ou pourvus de prolongements plus ou moins longs, contenant une substance claire ou grenue, et ordinairement quelques granules opaques. Enfin la troisième couche (3) forme la masse principale de l’enveloppe du Pliallusia mamillaris. Celle-ci est le siège de ces artères si nombreuses et si fortes (4) qui viennent immédiatement du cœur, le traversent dans tous les sens , se ramifiant à peu près en forme de pinceau, pénètrent presque jusqu’à la super- fs) Fig. 1 , — n. O) Fig. C — 200 EŒ1V1G ET KŒLLIKER. STRUCTURE ET COMPOSITION ficie extérieure, et alors paraissent passer dans d'autres vaisseaux qui les accompagnent dans leur cours. Les éléments qui forment cette couche sont des cellules grandes et élégantes, puis une sub- stance claire, homogène, qui est la continuation immédiate de la substance principale de la couche intermédiaire; outre cela, on trouve à certaines places des cristaux , des nucléus et des cellules pigmentées. Les grandes cellules (i), que déjà R. Wagner a vues, et, comme il n’en avait pas fait d’analyse, a déclaré être des cel- lules cartilagineuses, sont d’une nature toute particulière, et ne res- semblent à aucune autre cellule animale connue jusqu’ici, excepté peut-être à celles de la corde dorsale de quelques animaux. Ce qu’il y a de plus remarquable dans ces cellules, c’est leur grandeur, qui varie de 0,008"'-0,05"', et dont la moyenne est de 0,02"'- 0,03"'. Elles se distinguent moins par leur forme, qui peut être sphérique , pyriforme, elliptique même, que par leur contenu dia- phane et absolument sans granules ni nucléus et par leurs mem- branes cellulaires délicates, unies et partout d’une égale épaisseur. La disposition de ces cellules est telle que les plus petitesse trou- vent dans la substance fondamentale , homogène et commune aux couches moyennes et extérieures, tout-à-fait dispersées, sans limite précise; puis suivent des cellules toujours plus grandes et plus rapprochées les unes des autres, jusqu’à ce qu’elles nous pré- sentent l’image d’un tissu cellulaire régulier avec fort peu de sub- stance intermédiaire. Cette couche reste ainsi jusqu’à la partie ex- térieure de l’enveloppe, excepté seulement que les cellules se rappe- tissent de nouveau peu à peu et qu’il paraît de même un peu plus de substance intermédiaire à la partie la plus extérieure. Les cris- taux et les cellules pigmentées dont nous avons déjà fait men- tion ne se trouvent que dans les parties extérieures de cette troi- sième couche ; les premiers (2), de forme aciculaire, mesurant au plus 0,0015"' en longueur, remplissent en masses compactes l’in- tervalle intercellulaire de la superficie; les dernières (3) . jaunes et remplies de granules assez gros, entourent particulièrement les dernières ramifications des vaisseaux. Les nucléi enfin (4) sont (I) Fig- La; fig- 2, b; fig. 3, b. (3) Fig. 4,6; fig- 2. t- (?) Fig. 4, d, fig 2, d. (4) Fig. 2, 3, c,c, d,d. DES ENVELOPPES DES TISMC1KRS, 201 de même nature que les gros nucléi de la couche intermédiaire , et se trouvent partout en assez grande quantité entre les grandes cellules. En conséquence de la manipulation chimique, la composition de l’enveloppe du Phallusia mamillaris se modifie de la manière suivante (1) : a), au moyen de l’acide muriatique, les cristaux de la seconde couche et de la couche extérieure se dissolvent en peu de temps ; b), au moyen de la solution de soude disparaissent les cellules d’épithélium, les nucléi, les cellules pigmentées et les vais- seaux. Ne se dissolvent pas et ne souffrent aucune modification . la substance fondamentale homogène des couches intermédiaires et extérieures (2) et les grandes cellules (3). Quant au temps après lequel on peut remarquer ces résultats, nous ferons observer qu’il varie beaucoup suivant les circon- stances, par exemple suivant que la solution de soude est con- centrée ou faible , appliquée chaude ou froide , sur un morceau épais ou mince de la substance à étudier. Sur un segment conve- nable pour une observation microscopique , les parties nommées disparaissent déjà après une coction de 10-15"', dans une solution de soude médiocrement concentrée, tandis que, pour atteindre le même résultat avec des enveloppes entières ou des morceaux d’en- veloppe assez considérables, il faut une manipulation d’un, deux et plusieurs jours, avec une solution concentrée à la chaleur. Nous concluons des résultats communiqués que. dans le Phallusia ma- millaris seulement, la substance fondamentale et les grandes cellules sont formées de cellulose : que les autres parties , au con- traire, nucléi, cellules d’épithélium , cellules pigmentées, vais- seaux, sont composés d’une substance fortement azotée, à laquelle probablement est aussi mêlée une légère quantité de graisse. 2. Le Phallusia monachus (II) ressemble sous plusieurs rap- ports au Phallusia mamillaris. L’épithélium intérieur de l’enve- loppe manque, il est vrai, dans les échantillons conservés dans l’esprit de vin, mais nous y trouvons une couche intérieure ho- (t) Fig 4. (2) F, g 4, n (3) Fig. 4, h. \i) Fig 3, 6, 7. 202 I. (i:\VII. ET hlin.lklli. — STRUCTURE ET COMPOSITION mogène , avec des îiucléi , et une couche semblable extérieure , beaucoup plus épaisse, avec de grandes cellules , des vaisseaux, des cellules pigmentées, des cristaux et des nucléi , comme dans le Phallusia mamillaris. Quoi qu’il en soit, les éléments montrent souvent des caractères distinctifs qui méritent d’être mentionnés spécialement. Les grandes cellules (1) ne mesurent que 0,01"'- 0,02"', et ne se trouvent serrées les unes contre les autres qu’à la superficie extérieure ; partout ailleurs elles sont séparées les unes des autres par une substance intermédiaire abondante (2) , et possèdent des membranes extrêmement délicates, de sorte qu’il n’est pas toujours facile de les reconnaître , surtout là où elles sont très éparses. Les nucléi (3) de la substance homogène sont rares, et, presque sans exception , allongés en forme de fu- seau , ou même ramifiés. A la superficie extérieure de l’enve- loppe, ils sont mêlés d’un très grand nombre de petites cellules pigmentées jaunes, de granules pigmentés, et aussi de cristaux aciculaires et de concrétions cristallines très petites (4), qui, dans ce cas aussi , sont prépondérants là où les vaisseaux se ter- minent en plus grand nombre. Nous avons trouvé dans un échantillon du même Phallusia une anomalie assez intéressante de cette composition normale. Sur cet échantillon on ne pouvait reconnaître distinctement des cellules qu’à la superficie extérieure et aux parties voisines; niais à l’intérieur nous n’en pûmes d’abord apercevoir aucune , malgré tous nos soins. Cependant , en examinant les objets avec une extrême attention, il se présentait çà et là, dans la masse homogène et pâle qui constitue la partie intérieure de l’enveloppe , des places ou lacunes plus ou moins régulières , claires , qui ne se dessinaient presque jamais tout alentour , mais ordinairement seulement d’un côté ou d’un autre, par un contour semi-lunaire, extrêmement délicat, et qu’on ne pouvait distin- guer qu’avec beaucoup de peine. A quelques endroits nous avons distingué ces lacunes avec plus de netteté (5), surtout là où (1) Fig. 5, 6, b. (4) Fig. 6, d. (2) Fig. 5, 6, a. (a) Fig. 7, h. (31 Fig. 5, 6, c. DES ENVELOPPES DES TUNICIEUS, 203 de petits granules jaunâtres étaient déposés à leur circonférence, ce qui se rencontrait quelquefois. Or, ces lacunes ne sont autre chose que des restes de cellules , semblables à celle de la couche extérieure, des cellules dont la membrane s’est plus ou moins dissoute, ou s’est perdue par une fusion plus ou moins complète dans la substance intermédiaire homogène ; cela ressort évidem- ment de ce que, à mesure qu’on s’éloigne du centre de l’enve- loppe de ce Phallusia, en s’approchant de l’extérieur, les rudi- ments de cellules deviennent plus nets , et font enfin place à des cellules distinctes. Traitée avec de l’acide muriatique et de la soude , l’enveloppe du Phallusia monachus donne les mêmes résultats que celle du Phallusia mamillaris, c’est-à-dire que les nucléi, les cellules pigmentées, les cristaux et les vaisseaux disparaissent, mais la substance fondamentale claire et les grandes cellules diaphanes restent sans se dissoudre et intactes. 3. La mince enveloppe du Phallusia sulcata est pourvue au côté intérieur d’un épithélium formé par une couche simple de petites cellules, contenant des nucléi. Tout le reste est composé : a) , d’une substance homogène (1) avec quelques nucléi (2) à peu près ronds, des cristaux aciculair.es (3) situés dans les parties extérieures , et des vaisseaux ; b) , de cellules rondes et elliptiques (4) , sans nucléus, munies de parois délicates, et mesurant en diamètre de 0,01"'-0,15'". L’observation chimique, qui ne consistait que dans une simple coction de fins segments avec de la soude et de l’acide muriatique, donna pour résultat l’insolubilité de la substance fondamentale et des grandes cellules incolores, h. Enfin nous avons encore étudié le Phallusia gelalinosa, que nous avons trouvé d’une formation toute particulière. Dans un premier échantillon (5), la substance tendre, gélatineuse, de l’en- veloppe ne possédait dans toute son épaisseur aucune trace de cellules, mais sa masse principale était composée de la même (4) Fig. 10, ii. (3) Fig. 8 (1) Fig. 10, a. (2) Fig. 10, o. (3) Fig. 10, d. 204 Ili:\VI(. ET KUI.I.IHDIl. — STRUCTURE ET COMPOSITION substance homogène que nous avons décrite en parlant des au- tres Phallusia. Dans un autre individu, nous avons découvert quelques restes de cellules extrêmement rares et peu distinctes. De plus, nous avons trouvé dans la substance homogène des deux échantillons , comme dans les autres espèces , des vais- seaux, des nucléi (1), pour la plupart ronds et de 0,002"'; dans l’échantillon sans cellules, il y avait aussi dans les parties extérieures une très grande quantité de cristaux aciculaires (2) et de granules jaunes, ressemblant souvent à des nucléi avec de grands nucléoles colorés. Lors de la manipulation de petites par- ticules avec de l’acide muriatique et de la soude , la substance homogène resta insoluble et parfaitement intacte , et tout le reste disparut. 5. La composition de l’enveloppe du Clavellina lepadifor- inis (3) correspond , sous plus d’un rapport , à celle des es- pèces mentionnées de Phallusia, en remarquant cependant que, dans le même individu, certaines parties ressemblent plutôt à. une espèce , et d’autres parties à une autre espèce , et que l’en- veloppe manque absolument de vaisseaux sanguins. La tige de la Clavelline (4), qui contient notamment un prolongement des parties molles du corps, offre, aussi bien que les excroissances qu’on y trouve, une composition que des segments transversaux faits dans toutes leurs parties , présentent comme un tissu élé- gant de cellules rondes ou allongées, sans nucléus, mesurant 0,ül'"-0,0J 4"' en diamètre, presque sans substance intermé- diaire , et placés très près les uns des autres. Quand , en suivant la tige, on approche de l’extrémité supérieure, on est surpris de voir, seulement alors, les cellules se séparer de plus en plus , disparaître même peu à peu, comme cela arrive chez quelques espèces de Phallusia, et faire place à une substance intermé- diaire homogène , et pourvue d’une quantité de nucléi. Enfin , l’on trouve dans la plus grande portion du devant de l’enveloppe une structure assez particulière. A l’extérieur (5), on aperçoit (1) Fig. 8, 9, b. (2) Fig. 8, c. (S) Fig. It, 12, 13. (4) Fig 12. (5) Fig. Il, DES ENVELOPPES DES TLNICIERS. 205 une couche serrée, mais peu épaisse, de cellules infiniment dé- licates , et souvent difficiles à reconnaître , et entre les cellules qui mesurent jusqu’à 0,02"', et s’étendent jusqu’à la superficie, des cristaux de carbonate de chaux (1) et des nucléi épars (2) mesurant jusqu’à 0,002"', avec de gros granules adipeux ronds. Puis, se dirigeant de l’extérieur à l’intérieur, vient une lame encore plus mince (3), composée d’une substance homogène transparente , incolore , avec des granules infiniment petits , pâles. En troisième lieu, on remarque une couche de grains ronds (à), ou des vésicules , dont nous n’avons pu reconnaître la nature d’une manière très certaine dans les échantillons conservés dans l’esprit de vin. Ces grains sont sphériques, à superficie lisse ou granulée, mesurent 0,0005"', 0,004"', et même 0,005'"; les plus gros déposés au milieu , les plus petits à l’extérieur : ils pa- raissent opaques , et ressemblent à des granules d’amidon ou à des granules adipeux. Par une solution d’iode , ils sont devenus jaunâtres , sans présenter aucune trace de bleu ; c’est pourquoi, sans vouloir toutefois nous prononcer là-dessus , nous serions portés à les prendre pour des grains adipeux. Après ces grains vient une lame épaisse (5) d’une substance homogène, diaphane, avec quelques petits nucléi sphériques assez rares , et qui contient d’autant plus de légers granules incolores qu’on approche davantage de l’intérienr; enfin, tout à l’intérieur se trouve une substance complètement diaphane (6), partout égale et peu épaisse, avec des nucléi sphériques granulés, et plus grands que 0,003'". Après avoir traité l’enveloppe du Clavellina avec de la soude et de l’acide muriatique, les cristaux, les nucléi et les grains adipeux en disparaissent aussi; au contraire, les grandes cellules et la substance homogène , avec ses granulations dispersées , restent parfaitement intactes, ce qui prouve l’identité de la com- position chimique du Phallusia et du Clavellina. (4) Fig. Il, — r,. (o) Fig. 1 1 , -2. (6) Fig. 4 1,— i (4) Fig. 43, d. (2) Fig. 4 3, c. (3) Fig. il,- 4- STRUCTURE ET COMl’OSITIOX 20G LŒUlCi ET KŒLL1KER. 6. Le Salpa maxima (1) ne contient, dans toute son enveloppe gélatineuse, aucune trace de cellules semblables à celles du Phallusia et du Clavellina . Elle est plutôt composée dans toute son épaisseur d’une substance homogène, claire, diaphane (2). A l’intérieur, on ne trouve pas d’éléments particuliers déposés dans cette substance , mais bien dans les couches intermédiaires et extérieures. Dans les premières, on trouve une quantité de très petits granules; dans les autres, de petits nucléi ronds (3), des cellules à noyaux (Z|) et des concrétions cristallines de forme sphé- rique ou étoilée. Ces dernières sont très régulières (5) et formées de 3-7 rayons droits, partant d’un centre ou quelquefois d’une concrétion sphérique ; ils sont composés d’une série , simple ou multiple, de granules plus ou moins gros , dont le nombre, en s’approchant de l’extérieur, augmente ou diminue , mais qui de- viennent toujours plus petits. La nature de ces concrétions est difficile à préciser. Elles ne se dissolvent pas dans l’acide muria- tique, et ne sont donc pas composées de carbonate ou de phos- phate de chaux ; leur manipulation avec du muriate de baryte a aussi prouvé qu’elles ne contenaient aucun sulfate de chaux. Ce sont probablement des concrétions d’acide silicique. Quant aux autres éléments, les grains et les nucléi se dissolvent par une onction dans une solution de soude; mais la masse homogène, qui donne à l’enveloppe sa forme . reste sans changement. 7. Le Salpa bicauclata , Q. et G. (G) (qu’on trouve assez facile- ment à Naples et à Messine) ressemble essentiellement , quant à la nature de sa composition, au Salpa maxima. puisque la masse fondamentale de l’enveloppe gélatineuse est composée d’une sub- stance homogène ; il en diffère cependant par les éléments con- tenus dans cette substance, et par une simple couche de cellules d’épithélium (7) qui la recouvre à l’intérieur. Quant aux premiers, on trouve dans la couche intérieure de la substance homogène, des (1) Fig. 34. (2) Fig. 34. ». (3) Fig. 34, 6. (4) Fig 3 4, c (3) Fig. 32. (6) Fig. 25. (7) Fig. 25, a DES ENVELOPPES DES TUMClERS. 207 vésicules granulées (1 ) de 0,0Ü3'"-0,004'" de diamètre, qui tantôt ont l’aspect de noyaux, tantôt celui de cellules; puis, dans la partie du milieu, çà et là des nucléi ronds ou fusiformes (2), et enfin, dans la couche extérieure, de petits cristaux, des nucléi ronds et des concrétions particulières , semblables à celles du Salpamaxima. Pour ces dernières, elles sont, les unes petites (3), élégamment ramifiées et disposées horizontalement ; les autres (h), plus grandes , ramifiées en forme de pinceaux , et paraissant à l’œil nu comme des touffes blanches; ces dernières commencent à la surface, descendent de là verticalement à l’intérieur, et for- ment enfin une touffe de fins rayons ramifiés. Grossies 350 fois, ces deux espèces de concrétions paraissent composées de gra- nules opaques de grandeur différente. La composition chimique de l’enveloppe de ce Salpa est abso- lument la même que celle de l’autre espèce, c’est-à-dire qu’a- près la manipulation avec de la soude et de l’acide muriatique , il ne reste que la substance fondamentale homogène et les con- crétions ramifiées. 8. Dans le Pyrosoma giganteum , l’enveloppe commune des individus est aussi formée d’une substance homogène et sans structure, qui résiste tout-à-fait à l’influence de la soude. Son in- térieur possède çà et là des nucléi ronds et quelques cellules ramifiées semblables à celles du tissu cellulaire lâche des embryons des Mammifères , par exemple à celle de la gélatine de Whar- ton. Ces deux éléments disparaissent tout-à-fait par la manipula- tion avec de la soude, tandis que la substance homogène reste intacte. 9. Le Diazonaviolcicea , Sav. (5), qu’on trouve aussi à Naples, quoique assez rarement, possède, dans la masse gélatineuse de l’enveloppe commune à tous les individus, une substance dia- phane et sans structure, totalement dépourvue de cellules (6). On trouve , dispersés dans cette substance , de nombreux prolon- (1) Fig. 25, c. (2) Fig. 25, il (3) Fig. 30, 31. (4) Fig. 25, f. (5) Fig. 47. (6) Fig 47, a. '208 LŒWI« ET UaXI.lKF.R. — STRUCTURE ET COMPOSITIOX gements de l’enveloppe charnue des individus (1), qui se rami- fient et finissent ou simplement en cul-de-sac (2), ou par un gonflement ( germe) (3). Savigny fait déjà mention de ces rami- fications ( Mém. sur les animaux sans vert. , sec. part. , fasc. , p. 36) ; mais c’est à tort qu’il les déclare être des vaisseaux. De plus, on trouve dans les couches extérieures, des vésicules avec des granules violets, des grains adipeux, des cristaux aciculaires et des concrétions de carbonate de chaux (4) , et surtout , vers l’intérieur, une grande quantité de petites vésicules rondes (5) (noyaux). Par suite de la manipulation avec l’acide muriatique et la soude, les cristaux, nucléi et cellules pigmentées se dissol- vent; mais la substance homogène reste sans changement. Ce- pendant il faut observer que , même après avoir été très longtemps sous l’influence de l’alcali, et quoique les cellules pigmentées aient disparu , les parties extérieures conservent à quelques places une teinte d’un violet pâle , qui provient et de particules colo- rantes non dissoutes et d’une substance colorante amorphe , dont toute la masse est pénétrée. tO. La structure du Didemnum candidum (6) est, au premier coup d’œil, toute particulière et absolument différente de celle des Tuniciers dont nous avons parlé jusqu’ici. La substance blanche qui contient les individus semble ne montrer que de pe- tits corps blancs étoilés (7), de 0,006"'-0,015"', semblables à ceux du Leploclinum stellatum que M. Milne Edwards a décrits (8) dans son ouvrage classique sur les Ascidies composées, excepté seulement que ceux-là sont plus ronds, pourvus de pointes plus courtes et plus nombreuses; mais si l’on place cette substance sous l’influence de l’acide muriatique, alors on a tout un autre aspect. La couleur blanche disparaît en peu de temps, tandis qu’il se dégage une grande quantité de bulles gazeuses; et lors de l’observation microscopique, on trouve dans la membrane jau- (4) Fig. 47. d. (2) Fig. 47, e (3) Fig. 47, f. (4) Fig. 47, c. fSl Fig 47, b. (6) Fig. 27. (7) Fig. 26, a. (8) Obsen:. sur les Ascidies rninp, des tdles de la Manche, pl. 8, fig. 2. DES ENVELOPPES DES TL'XICIEES. 200 nàtre, transparente, qui reste, une substance fondamentale homo- gène, parsemée de cellules (1) rondes et allongées, de 0,005"'- 0,013"' de diamètre, et de quelques petits amas granuleux. En observant ces cellules* nous crûmes d’abord avoir devant nous l’analogue des grandes cellules des Phallusia et Clavellina; car, comme celles-ci* elles étaient sans nucléus, à peine marquées par un contour pâle, délicat, et pourvues d’un contenu parfaite- ment liquide; mais une analyse plus attentive nous apprit qu’il en était tout autrement ; car dans une coction avec de la soude dans un verre réactif, leur dissolution fut complète, tandis que la sub- stance homogène ne se changea nullement; et, en observant attentivement l’influence de l’acide muriatique, nous fîmes lare- marque que chacun des corpuscules étoilés, qui n’étaient donc pas de simples concrétions, perdit peu à peu tous ses rayons, devint une cellule remplie de chaux (2), et prit enfin la forme d’une cellule incolore, vide, absolument semblable îi celles que nous avons décrites. Nous n’avons pu découvrir comment se for- ment ces cellules curieuses remplies de chaux au dedans, et gar- nies à l’extérieur de rayons calcaires ; mais d’après ce que nous avons vu chez d’autres Tunieiers, il serait permis de dire qu’il y a premièrement de grandes cellules pleines d’un liquide qui se remplissent peu à peu de chaux, jusqu’à ce qu’enfin la membrane cellulaire même soit incrustée, et que la chaux se soit déposée à l’extérieur de cette membrane, 11. L 'Aplidium gibbulosum présente dans son enveloppe une substance homogène avec quelques nucléi dispersés et une grande quantité de cellules rondes, à membranes très délicates, et me- surant de 0,005'" à 0,013'", et même jusqu’à 0,02"'. Celles de l’in- térieur (3) ne contiennent qu’un liquide; mais plus on avance vers l’extérieur, plus aussi elles contiennent de concrétions calcaires ; et, enfin, ce sont des cellules parfaitement incrustées, quoique sans appendices (1). Dans une manipulation avec de la soude et de l’acide muriatique, la substance homogène seule résiste, le reste se dissout. Nous ne pouvons nous empêcher ici d’appeler l’at- (4) Fig. 27 r. (3) Fig. 33, b. (î) Fig. 26, b. (4) Fig 33, a. 3* série Zom T V (Avril ISICj.j 14 210 LŒWIU ET Kffil.l.hlKIl. — STRUCTURE ET COMPOSITION tention du lecteur sur une forme remarquable de cellules incrus- tées , que l’un de nous observa , il y a déjà quelques années , dans la substance du Botryllus violaceus (1), et qui ressemblent, sous quelques rapports, aux cellules incrustées du Didemnum. Ces cellules sont . les unes parfaitement rondes (2), avec un diamètre de 0,009'", et, comme celles de l’Aplidium, remplies de concré- tions calcaires; d’autres (3), plutôt piriformes ou fusiformes , pos- sèdent un ou deux prolongements pointus, incolores, longs de O.OOG"'-O,009"', et de substance organique ; d’autres, enfin (h\ qui paraissent rondes ou tétraédriques , présentent même trois ou quatre de ces prolongements , qui souvent ont la même longueur et une disposition tout-à-fait régulière, mais souvent aussi dp grandeur différente et sans symétrie. Ces cellules à prolongements sont probablement analogues aux cellules rondes du Didem- num , contenant de la chaux à l’intérieur et des dépôts calcaires à l’extérieur, et pourraient de même être comparées à beaucoup de cellules végétales (les granules du pollen, spores, etc.) qui possèdent des dépôts à leur extérieur. Si de tels prolongements s’incrustaient, ce que nous n’avons pu observer, alors il se for- merait des corpuscules étoilés, semblables à ceux du Didemnum. 12. Le Botryllus polycyclus (5) commence, par sa structure toute particulière, une série nouvelle. Dans les parties extérieures de la masse commune , qui renferment les groupes d’individus, on trouve la structure ordinaire des Ascidies-Composées, c’est- à-dire une substance claire et homogène, avec quelques nucléi et cristaux ; mais dans les parties intérieures on rencontre, à côte* desnoyaux , des fibres, qui , comme nous osons l’affirmer, ne sont pas le produit d’une préparation fautive, mais existent naturelle- ment et se présentent aussi dans des particules préparées avec le plus grand soin. Ces fibres sont de deux espèces : les unes (6), qui sont les plus nombreuses, sont longues, extrêmement pâles et délicates, trop fines pour pouvoir être mesurées, ut se croisent (0 Fig 28. (2) Fig. 28, a. (3) Fig M.r.fc (4) Fig. 28, c.d. (5) Fig. 29, 46. (6) Fig 29, «. DES EWEI.OPI'KS DES TlMCIEItS. *211 dans tous les sens en formant d'élégantes sinuosités ; les autres ; 1 . moins nombreuses, sont courtes (0,01"'-0,03"'), plus larges, opa- ques et courbées de différentes manières ; en un mot, elles res- semblent à certains noyaux transformés en fibres ( Kernfasern ). 11 nous est impossible de donner aucun renseignement sur le dé- veloppement de ces fibres ; mais ce qui nous paraît être d’une importance majeure, c’est qu’ainsi que la substance homogène des parties extérieures et intérieures, elles résistent à la manipu- lation par l’acide muriatiqueet la soude , et que, par conséquent, puisque leur nature organique est incontestable , elles sont com- posées d’une substance sans azote. Nous ferons encore mention de points ronds,- visibles à l’œil nu, qui apparaissent dispersés dans les particules intérieures et extérieures de la masse commune de ce Botrylle. Les uns (2) sont blancs, plutôt situés à l’intérieur et paraissent sous le microscope comme des amas de granules ou d’aiguillettes ; ils sont insolubles dans une solution de soude et d’acide muriatique , et probablement formés par la même sub- stance qui constitue les concrétions de l’enveloppe des Salpa, c’est-à-dire d’acide silicique. Les autres (3) sont violets ou rou- geâtres , et se trouvent particulièrement dans les couches exté- rieures, près des groupes d’individus; cependant, quelquefois aussi, dans les parties intérieures de la masse commune. Une observation microscopique montre que ce sont des vésicules piri- formes, rondes ou allongées qui contiennent une substance colo- rante rougeâtre, probablement contenue dans des cellules et qui s'appliquent aux extrémités de canaux longs (4), délicats et ra- mifiés dans plusieurs sens. Quand on poursuit ces canaux , on trouve que ce ne sont pas des vaisseaux, mais bien plutôt des pro- longements de l’enveloppe charnue des individus, et que les vési- cules ne sont autre chose que des germes. Les canaux ramifiés , avec leurs gonflements , ne sont autre chose que les parties décou- vertes par Savigny (/. c. , pag. 56) dans tous les Botrvlles, et qu'il a pris à tort pour des « rameaux vasculaires » ( à d’autres endroits il les nomme « tubes marginaux»). M. Milne Edwards les a (1) Fig. 29, fc. (3) Fig, 46, e. (2) Fig 46, c (4) Fig 46, d. 212 in.W II. ET KUIIlKIlt, — STRUCTURE ET COMPOSITION' reconnus pour ce qu’ils sont (/. c. , pag. 42 , pi. 7, fig. 1, lb, 1<\ et 5n ). M. Edwards fit aussi à propos de ces prolongements l’ob- servation intéressante que le sang qui , notamment d’après sa dé- couverte et celle d’Audouin , coule en partie libre dans la cavité du corps des Ascidies , pénètre aussi dans ces prolongements et les parcourt dans toute leur longueur par un courant ascendant et descendant. Notre observation ne saurait donc apprendre rien de nouveau, sinon que le nombre de ces prolongements est très grand et qu’ils sont extrêmement ramifiés. Nous rappelle- rons encore que D. Chiaje, dans la deuxième édition de ses Mé- moires (tom. I, pag. 34, tabl. 83, fig. 13 et 15) , en traitant des Polyclinum, dessine et décrit des « vaisseaux » qui probable- ment ne sont autre chose que des développements de l’enveloppe , comme ceux que nous avons décrits à propos des Diazones et des Botrylles, 13. L’enveloppe coriace des différentes espèces de Cynthia , parmi lesquelles nous choisirons d’abord le Cynthia papillata (1), comme ayant été le mieux étudié, nous présente une composition encore plus remarquable que celle des Botrylles. Dans cette espèce, les fibres qui s’y trouvent aussi constituent la plus grande partie de l’enveloppe, et sont à quelques endroits si développées , qu’elles peuvent supporter la comparaison avec les plus belles fibrilles de tissu fibreux qu’on trouve chez les animaux vértébrés. Voici la description de la structure de l’enveloppe telle qu’elle se présente là où celle-ci ne possède pas une épaisseur très considé- rable (2). La lame simple, qui se trouve tout-à-fait à l’intérieur, forme un épithélium à cellules polygonales, qui a ceci de remar- quable, savoir, qu’il est joint à l’enveloppe proprement dite de l’ani- mal par des fibres musculaires dispersées qui se croisent. Suit une ('■paisse couche de fibres, parsemées de cellules et de tiucléi. Les fibres mêmes (3) sont incolores, ondulées, ressemblant aux fibrilles de tissu fibreux des animaux vertébrés, mais plus étroites ; elles (1) Fig. 14, 16, 23. (2) Voyez la figure 16, qui représente la structure analogue de l'enveloppe du Cynthia pomaria (3) Fig. 17 : fig. 23. a. DliS EMIiLOlTKS DES TUNJCJERS. '21 3 mesurent 0, 0002"'-0,000/i"', ne sont jamais ramifiées ni réunies en faisceaux. Quant à leur direction , elles sont en partie paral- lèles au grand axe de l’animal, ce qui est surtout le cas dans les lames intérieures, et en partie différemment entrelacées , de sorte que les unes soient disposées en longueur, les autres en largeur ( fibres circulaires et fibres longitudinales) ; dans les deux cas leur disposition est telle que l’enveloppe peut très facilement être fen- due en lamelles, quelquefois très délicates. Ces fibres n’admettent entre elles aucune substance intermédiaire, du moins nous n’en avons aperçu aucune trace, mais elles reçoivent dans des lacunes plus ou moins grandes formées par leur divergence, une quantité de grains et de vésicules de formes diverses. On distingue : a) de tout petits granules moléculaires incolores qui se trouvent à de certaines places en si grand nombre, qu’ils rendent les fibres diffi- ciles à distinguer et donnent à des couches un peu plus épaisses un aspect finement granulé; b) des cristaux qu’on ne trouve que dans les couches extérieures; c), des nucléi (1) de la grandeur de 0001"'-0003"', souvent avec de gros grains de la nature des grains adipeux; cl), des cellules de formes différentes. Les unes (2) con- tiennent des nucléi et des granules bruns, pigmentés, et sont rondes avec un diamètre de 0,005"'t0,01 ", ou allongées avec un diamètre de 0,006"'-0,008"'; les autres (3) sont de couleur pâle, et ressemblent d’une manière frappante, par les doubles nucléi et par les cellules incluses qu’on trouve en quantité variable (2-7) dans quelques unes d’elles , aux cellules qui forment les carti- lages des animaux supérieurs. Cette ressemblance est rendue plus frappante encore par la forme ronde ou allongée de ces cel- lules, par la disposition particulière des cellules incluses et par la réunion de quelques unes de ces cellules-mères, généralement rondes et moins grandes, en groupes de deux ou quatre. Elle n’est cependant qu’extérieure et ne repose que sur le fait qu’il se trouve ici une augmentation de cellules par formation intérieure comme dans les cartilages; car une observation plus exacte montre que ces cellules deviennent, par plusieurs transitions, identiques avec (I) Fig. 21,6. .'a' Fig. 23, r. fs) fig. 6, fig 21, a. STUUCTLiili ET COMPOSITION ‘214 i.n: u ii. et hd ii iiti i:. — les cellulespigmentées, plus simples, décrites plus haut, et ne sont autre chose que des formes plus développées de celles-là, mais chez lesquelles le pigment a disparu peu à peu à cause des for- mations intérieures. La troisième couche (1) est formée d’un épi- derme jaunâtre , corné, dont la structure, que nous n’avons pu déterminer dans les individus conservés dans l’esprit de vin, est probablement celluleuse. Les aiguillons qui recouvrent la sur- face extérieure du Cynthia papillata sont formés par cette couche et par la couche fibreuse, de telle sorte qu’à certains endroits il s’élève de la surface plane de la couche fibreuse extérieure un faisceau de fibres qui se couvre d’une couche de l’épiderme corné, laquelle fait encore saillir de petits aiguillons. Là ou l’en- veloppe du Cynthia atteint une épaisseur de 1/2-1 1/2"' et plus, sa composition change souvent d’une manière remarquable. Dans ce cas, l’épithélium (2j est suivi à l’extérieur d’une masse claire (3), homogène , sans structure , d’épaisseur moyenne , par- semée de cellules pigmentées et de nucléi , puis vient un élégant l issu fibreux (4) qui , composé d’un grand nombre de minces cou- ches de fibres circulaires (5) sans cellules ni nucléi, et de fibres rayonnantes (6) réunissant ces couches , passe tout à l’extérieur à un tissu fibreux irrégulier (7) qui se couvre d’un épiderme corné (8). Partout où se trouve une telle stratification des fibres, l’enveloppe du Cynthia ne peut être fendue en lamelles, parce que les fibres rayonnantes joignent très solidement les minces couches de fibres circulaires ; dans ce cas il n’y a d’autre moyen de déter- miner la structure de l’enveloppe que d’en dessécher une partie, de s’en procurer avec un rasoir de fins segments transversaux ou longitudinaux et de les étudier après les avoir ramollis. Une solution d’acide muriatique et de soude rend l’enveloppe du Cynthia toute blanche. En effet, les cellules pigmentées, l’é- piderme coloré, les cellules-mères, les cristaux, l’épithélium, les nucléi et les grains se dissolvent, de sorte qu’il ne reste que les (0 Fig. 14. (2) Fig. 14, — i. (3) Fig. U, — .. (4) Fig. 14, — a- (5) Fig. 18, b. (6) Fig 1 8, a. (7) Fig. 14, — 4. (S) Fig 14, — ÿ, a LH-.S liMKI.OlUMiS DUS TL'.MCIEKS. 215 libre» et la substance homogène (1) qui se trouve en quelques endroits. Ce sont donc ces deux éléments qui sont composés de cellulose. 14. La structure de l’enveloppe épaisse du Cynthia canopus est semblable à celle que nous venons de dépeindre. On trouve à l’in- térieur un épithélium, puis une couche épaisse de fibres longitu- dinales et circulaires, stratifiées assez indistinctement, dans les- quelles sont parsemés à l’extérieur des cristaux et des corps ronds assez grands, d’après toute apparence composés d’amas de cel- lules; enfin une couche mince d’un épiderme plus solide, blan- châtre, qui forme de petites papilles coniques ordinairement avec des appendices de la couche fibreuse. La couche épaisse, fibreuse seulement, résiste à l’influence de la soude et de l’acide muria- tique ; tout le reste se dissout sans aucun résidu. 15. Le Cynthia pomaria (2), enfin, le dernier des Tuniciers que nous avons analysés, offre comme partie prédominante de son enveloppe une couche de fibres (3) semblables à celles que nous venons de décrire , et dirigées la plupart longitudinalement , et , entre les fibres des cristaux, des cellules pigmentées (4), rondes, de 0,004"'-0,006'", et de plus, çà et là, des cellules particu- lières (5), allongées, remplies de granules jaunes, mesurant 0,008"' et plus. A l’intérieur, et collé à la couche fibreuse , on trouve un simple épithélium (6) à cellules polygonales de 0,006 "- 0m,008"', lequel est aussi joint à la partie charnue de l’enveloppe par des fibres musculaires; à l’extérieur, la couche fibreuse est couverte par une couche jaunâtre , solide, dont nous n’avons pu déterminer la structure. Nous devons encore faire mention de cer- taines cellules (7) qui se trouvent en assez grand nombre dans les parties intérieures de la couche fibreuse , et dont nous ne con- naissons d’analogue ni dans les Tuniciers, ni dans d’autres ani- maux , ni même dans les plantes. Ces cellules sont primitivement semblables à des cellules pigmentées, rondes , mais possèdent une (1) Fig. 1 6. (5) Fig. 22. (2) Fig. \ 5. (6) Fig. 15, u. (3) Fig. 15. r (7) Fig. 24. (4) Fig. 15, b. 216 1XEWI6 ET KŒLL1KEK, — STKKCTLKK ET COMPOSITION membrane plus épaisse et sans nucléus apparent (1). Plus tard , comme la comparaison d’un grand nombre de ces cellules se trou- vant dans des états différents le prouve , elles croissent en conser- vant leur forme jusqu’à la grandeur de 0,01"', et leur membrane devient en même temps plus épaisse ; si bien que, la cavité (2) des cellules n’augmentant que fort peu , les membranes atteignent l’épaisseur de 0,004"'. Enfin, la grandeur de ces cellules augmente jusqu’à 0,02"', et l’épaisseur de leur membrane jusqu’à 0,006"'; et pendant que ce développement s’opère, on aperçoit de fines raies dans la membrane cellulaire épaissie (3), et, à la fin, on trouve la membrane transformée en fibres (4), de sorte qu’on a sous les yeux des cellules moyennement agrandies dans leur cavité et contenant encore du pigment , ou aussi des granules pâles , et qui ont pour enveloppe un élégant peloton de fibres également rondes , fines , mais opaques , qu’on peut isoler par la compression (5). Nous ne savons nullement si ces fibres forment des anneaux ou des spi- rales ; mais puisque nous ne leur' avons jamais vu d’extrémités libres, nous serions portés à croire quelles sont circulaires ou quelles forment de grandes spirales. Quant à la manière dont cette curieuse transformation des cellules pigmentées s’opère, nous remarquerons que l’augmentation en épaisseur de la membrane cellulaire pourrait avoir lieu par accroissement ou par un dévelop- pement semblable à celui qui se trouve dans beaucoup de cellules végétales dont la membrane se compose de plusieurs couches , ou par le dépôt d’une substance qui s’appliquerait extérieurement. Nous ne pouvons dire d’une manière décisive laquelle de ces sup- positions est la bonne ; mais comme on ne trouve aucun vestige d’une substance déposée soit extérieurement , soit intérieurement, et comme la cavité cellulaire ne diminue pas pendant que l’enve- loppe devient plus épaisse, les deux dernières suppositions nous paraissent moins admissibles que la première , qui cependant ne saurait être établie pour la vraie à cause de cette circonstance seulement. Quoi qu’il en soit, ce qu’il y a de sur, c’est qu’à la fin les (1) Fig. 24, a. (2) Fig 23, h. (.3) Fig. 23, r. (4) Fig. 23, rf. v's) Fig- ”, <- DES EiNVELori'ES DES TUMCIERS. 217 cellules en question possèdent une enveloppe épaisse absolument homogène qui se divise en fibres. Il serait difficile de dire au juste comment ces fibres se forment ; mais l’analogie avec d’autres déve- loppements semblables permet d’admettre que les membranes cel- lulaires se solidifient partiellement, de telle sorte qu’à la fin elles se séparent en de fines fibres. La manipulation de l’enveloppe du Cynthia pomaria par de l’acide muriatique et par la soude est im- puissante contre les fibres de la couche intermédiaire et les enve- loppes cellulaires fibreuses ; tout le reste disparaît. Après cette description de la structure et de la composition chi- mique des Tuniciers adultes, il serait utile de jeter aussi un coup d’œil sur les caractères des embryons de ces animaux, et d’appren- dre, si cela est possible, quelque chose sur l’état primitif des enve- loppes contenant la cellulose. Depuis que MM. Milne Edwards et Audouin nous ont fait connaître, en 1828 (1), les curieux embryons des Ascidies composées ressemblant aux Cercaria, les observations des premiers développements des Tuniciers deviennent de plus en plus nombreuses. Sars, Dalyelle et Van Beneden (2) nous ont livré des notes précieuses ; mais M. Milne Edw ards surtout a traité le développement des Ascidies Composées dans son nouvel ouvrage si distingué, d’une manière qui ne laisse plus rien à désirer, surtout pour ce qui concerne la forme extérieure du corps et des organes. Quant à la structure microscopique , l’un de nous a fait , du moins pour les tout premiers développements, quelques observa- tions dont on peut tirer plusieurs conclusions d’une certaine im- portance; les caractères chimiques des premières époques seule- ment sont tout-à-fait dans le vague , et nous les recommandons à l’analyse des observateurs. Nous extrayons de l’analyse indiquée ce qui peut avoir de l’intérêt pour l’objet dont nous nous occupons ici spécialement. Dans toutes les Ascidies Composées étudiées par l’un de nous, savoir : Botryllus violaceus, aureus , Aplidium yibbulusum et Iniauroucium Nordmanni, Edw. , on remarque, dans les pre- mières époques du développement, une division du vitellus sein- ( I ) A un . dsx Sc. nul. , I " série, t. XV p 10 (2) ttull de l'ÀcoU. royalede BruxeUe». ‘218 LKHI« El KtELLIHER. — STRUCTURE ET COMPOSITION blable à celle qu’on trouve dans l’œuf des grenouilles , fait au- quel déjà M. Milne Edwards fait évidemment allusion , quand il dit (1) : « On remarque d’abord que les granules dont la masse vitelline est composée se pelotonnent , pour ainsi dire , et donnent à la surface de cette masse une apparence bosselée et framboi- sée,»ce queVan Beneden aussi vient de constater pour les Ascidies simples. Cette division (2) a lieu comme dans les vers intestinaux, c’est-à-dire que les simples nucléi contenus dans les globules qui , comme partout, ne sont que des agrégations de granules (3), se doublent toujours avant que les globules se divisent en deux. Sitôt que la division est parvenue à un certain degré, la forme sphérique de l’amas de globules devient allongée, et prend de plus en plus la forme d’un embryon dont la queue fait un demi- contour à l’entour du corps (A). Avant toute autre partie, on dis- tingue la queue , qui se forme évidemment , non pas comme prolongement de l’embryon , mais par la séparation d’une certaine partie des globules de la superficie, ce qui ressort surtout du fait que l’analyse la plus minutieuse ne présente jamais la queue au- trement que formée dans toute sa longueur. On pourrait objecter ;i cette supposition que , lorsque la queue se présente pour la pre- mière fois, elle est composée de cellules différemment grandes, et que, par conséquent, elle doit avoir subi quelques modifica- tions; mais nous ferons observer que, dans les dernières époques de la division, les globules ne sont pas tous également gros comme auparavant , mais d'une grandeur très variable. En même temps que la forme extérieure des embryons , et de très bonne heure , apparaissent chez X Amauroucium et VAplidium , les deux points oculaires (5) remarqués déjà par M. Edwards, même dans d’autres espèces; tandis qu’au cou traire de tels embryons ne montrent encore aucune trace d’une enveloppe ou de nodules à la partie antérieure : seulement, plus tard , il se forme tout à l’entour de l’embryon un limbe transparent incolore (6), qui, dans Y Amauroucium et VAplidium, se développe de plus en plus, et représente, surtout à (1) L. c., p. 26. (2) Fig. 35, 36, U. (3) il ! (*) Fig. 37. (5) Fig. 42, 45, c.c. (6) Fig. 38, d; fig. 12, 45, a, a. DUS ENVELOPPES DES TUNICIEKS. 219 l’extrémité épaisse du corps, une lame très forte, mais reste sans structure pendant tout le temps que les embryons sont contenus dans les enveloppes de l’œuf. En même temps que les enveloppes se forment, les embryons eux-mêmes commencent aussi à subir une suite de changements. Premièrement on voit apparaître, vers la partie antérieure, trois appendices de forme particulière (1) ; puis la substance jaunâtre dans l’intérieur du corps se sépare en deux lames, dont l’une, externe (2), reste diaphane; l’autre, interne (3), devient opaque, et se divise, chez les Botrylles , en huit corpuscules coniques (4) qui entourent un mamelon (5) assez grand, rond et pourvu d’un orifice; enfin, il s’opère aussi un grand nombre de modifications dans la structure. La description suivante des embryons à terme des espèces mentionnées donnera une idée plus exacte de toutes les modifications qu’ils subissent pendant leur développement. Les embryons à terme du Botryllus aureus (6) sont formés d’un corps sphérique large de 0,28"' et long de 0,38"', qui possède un orifice entouré de trois lobules à la partie antérieure (7), et, à la partie postérieure, une queue mince et finissant en pointe , longue de 0,72'". Ces embryons présentent extérieurement une couche mince de la substance diaphane (8), sans structure, dont nous avons déjà parlé , qui forme presque à elle seule les lobes ou ap- pendices lancéolés de la tête (9), et qui finit à l’extrémité opposée en une pointe assez longue qui outrepasse les parties intérieures de la queue. A l’intérieur de cette enveloppe, on trouve, dans la partie antérieure du corps, un second tégument délicat (1 0) formé de cellules rondes ou transformées en fibres , lequel n’entre pas dans la composition des lobes de la tête, mais enveloppe comme un fourreau la saillie mamelonnée dont nous avons parlé plus haut, de même que les huit corpuscules sphériques qui entourent cette saillie et s’adapte d’un côté au bord du mamelon et de l’autre à (1) Fig. 39, i. h; fig. 42, 15, c,c. (6) Fig. 39. (2) Fig. 42, 45. b. (7) Fig. 39, k. (3) Fig. 42, 45, d. (8) Fig. 39. d. (4) Fig. 38 39, f (9) Fig. 39, h. (5) Fig 38, 39, c (10) Fig. 39, ) 220 LŒW1C* ET hŒI.IIhl». STRUCTUllE ET COMPOSITION l’origine de la partie interne de la queue. Les formations in- ternes dont la substance constitue la partie la plus considérable des embryons, ne sont évidemment autre chose qu’un groupe d’indi- vidus, comme l’a déjà indiqué Sars, qui a découvert ces curieux embryons du Botryllus ; les huit corpuscules sphériques (1) , dont les bases se confondent et qui sont pourvus comme d’une tige commune , sont tout autant d’individus , et la saillie mame- lonnée (2) qui est au milieu d’eux représente le tube excréteur commun. Quant aux caractères plus subtils de ces parties, il faut remarquer que le tube excréteur possède à son extrémité pointue trois lobules (3) qui saillent dans la base des lobes de l’enveloppe extérieure, et que de son extrémité inferieure trois fils (nerfs?) (4) s’élèvent verticalement qui se bifurquent chacun en deux filaments, dont l’un va aboutir à l’orifice du tube , le second aux lobules, les dépasse après avoir atteint leur sommet, et, s’étendant en cinq ou six rameaux, atteint presque le bord des lobes de l’enveloppe extérieure. Quant aux huit embryons, on ne leur aperçoit encore aucun orifice, ni d’autres organes internes que des canaux (intestin) indistinctement pelotonnés; les éléments microscopiques, au con- traire, sont tout-à-fait distincts, savoir : des cellules de gran- deur différente pourvues de nucléus et remplies de grains d’un rouge pâle et des fibres en voie de formation ; les premières consti- tuent la masse principale du tube excréteur. La partie interne (5) de la queue, enfin, qui paraît être la continuation immédiate de la substance des embryons, possède une cavité intérieure (6) et des parois, dont les éléments celluleux composent deux lames. La lame intérieure est composée de cellules (7) de 0,012"' de dia- mètre, quadrangulaires ou rectangulaires, à angles arrondis, pourvues de nucléi distincts et de grains fins et jaunâtres ; elles sont disposées avec une grande régularité les unes à côté des au- tres en séries transversales, de sorte que la cavité de la queue se trouve toujours entourée de dix à douze cellules. La lame externe (1) Fig. 39, / (2) Fig. 39, e (3) Fig. 39, i. (i) Fig- 39, » (5) Fig. 39, c: fig. 40 (6) Fig. 40, il. (7) Fig 40, c. DES ENVELOPPES DES TL'MCIEltS. 221 est formée par une couche continue , simple et composée de petites cellules (1) mesurant 0,003"'-0,Ü0/i"', chez lesquelles on ne dis- tingue aucune disposition régulière. Nous remarquons en passant que la queue, quoique composée seulement des cellules indiquées et de l’enveloppe homogène, accomplit des mouvements très vifs, ce qui est une nouvelle preuve qu’il existe des parties contractiles formées de simples cellules. Les embryons à terme de YAplidium (2) et de YAmauruucium Nordmanni (3) ressemblent d’une manière si frappante aux larves a vi:v — rapport sur i.e mémoire précédent. Kig 46. Segment de l'enveloppe du Bolryllus pnlycyclut, grossi ! 00 fois. а, masse fondamentale fibreuse (voyez fig. 29). б, noyaux. c, concrétions anorganiques. d, ramifications de l'enveloppe de ces individus. e, germes situés à l'extrémité de ces ramifications. Fig. 47. Segment delà masse fondamentale du Diasona violacea, grossi 30 fois a, substance homogène. b, noyaux. • r, cellules ou concrétions. d, ramifications de l’enveloppe des individus. e, terminaisons de ces ramifications , non développées f, terminaisons développées en germes. g, granulations d'une couleur bleuâtre, contenues dans les ramifications. RAPPORT SUR LE MÉMOIRE PRÉCÉDENT. Par M FAYIN L’Académie nous a chargés , MM. Dumas, Milne Edwards, Boussingault et moi, d'examiner une Note de MM Lœwig et Kœlliker , qui annoncent avoir constaté la présence de la cellulose dans une classe tout entière d'animaux sans vertèbres , les Tuniciers. La cellulose , comme on le sait , pure ou injectée de substances organiques ou minérales, forme les parois des cellules, des divers tubes et des vaisseaux propres de toutes les plantes ; elle renferme , dans ces cavités , des matières organiques ternaires et azotées, sans que celles-ci fassent partie de sa composition intime ; elle enveloppe ou recèle dans l'épaisseur de ses parois divers principes immé- diats , des sels et des oxydes ; en un mot, cette substance à composition ternaire, souple, plus ou moins tenace et résistante suivant les degrés de sa cohésion, constitue la trame de tout l'édifice végétal. Tantôt assez faiblement agrégée pour être attaquée durant la digestion des ani- maux supérieurs, et remplir, sans doute alors , le même rôle que l'amidon , la dextrine, l’inuline, isomériques avec elle, ou que les sucres ses congénères; tan- tôt assez résistante pour être retrouvée intacte dans les'déjections des herbivores. Parmi plusieurs lichens, et dans le parenchyme de certaines feuilles, la cellu- lose se montre avec une agrégation si faible , qu'elle affecte quelquefois les pro- priétés de l'amidon , et peut , comme ce principe immédiat , se teindre en violet lorsqu'elle est hydratée et mise en présence de l'iode ! PAÏEN. — RAPPORT SIR LE MÉMOIRE PRÉCÉDENT. 239 On peut même toujours, lorsque la cellulose est pure et douée d'une forte cohésion , la désagréger au point de lui donner cette propriété caractéristique de l'amidon, devenue ainsi la propriété distinctive de la cellulose elle-même. Nous avons cru devoir rappeler au souvenir de l'Académie ces données , dont nous avons fait usage, afin de vérifier le fait important qui lui était annoncé Déjà, l'an dernier, 11. Schmidt avait signalé la présence d’une substance ter- naire voisine de la cellulose chez la Phallusia mamitlaris et la Frustulia satina ; le travail de MM. Lœwig et Kœlliker fut entrepris dans la vue de décider s’il existe réellement dans le règne animal une substance ternaire identique avec la cellulose. Les auteurs ont retrouvé chez tous les animaux de la classe des Tuniciers, qu'ils ont pu se procurer , une substance insoluble dans les solutions de potasse caustique , blanche , souple , dépourvue d'azote lorsqu'elle est complètement épurée. Ils l'ont reconnue parmi les Phallusia mamitlaris, intestinales et monachus ; les Cynthia papillota, Clavellina lepadiformis, Diazona violacea, Botryllus polycyclus, Pyrosoma giganteum, Salpa maxima. Cette substance forme , chez les Ascidies simples et agrégées , la couche exté- rieure d'apparence cartilagineuse; chez les Ascidies composées , la masse molle dans les cavités de laquelle les groupes d'individus sont logés, et chez les Salpa, toute l'enveloppe résistante dans laquelle sont contenus les muscles , les viscères, les nerfs; en sorte que tous ces organes se dissolvent dans la potasse, tandis que l'enveloppe résiste . MM. Lœwig et Kœlliker, ayant d’ailleurs soumis à l'analyse élémentaire l'en- veloppe de la Phallusia mamillaris et celle de la Cynthia papillota , ont trouvé , pour le carbone , l'hydrogène et l'oxygène , des nombres qui s’accordent avec la composition élémentaire de la cellulose. En conséquence, ils n’hésitent pas à sou- tenir que cette substance est identique avec la cellulose des plantes. Vos commissaires ont pu de leur côté entreprendre quelques essais sur des Phallusia intestinalis , que l'un deux, M. Milne Edwards, avait rapportés des côtes de la Bretagne. En faisant réagir successivement la solution de potasse caustique, l'eau aigui- sée d'acide chlorhydrique, puis leau pure, ils sont parvenus à dissoudre et extraire des enveloppes , sans déchirer celles-ci , tous les organes quelles renfer- maient. Alors ces enveloppes étaient blanches , translucides , un peu nacrées, et très souples Agglomérées mécaniquement, divisées à la lime, puis analysées , elles don- nent 3 pour 100 d'azote, c'est-à-dire le tiers seulement de la proportion conte- nue dans la chitine , enveloppe des Insectes et des Crustacés , et moins du -ixierne des quantités que recèle la peau privée de graisse des animaux supé- rieurs 2ftÜ PAÏEN. — RAPPORT SUR LE MÉMOIRE PRÉCÉDENT-. Celte faible dose d azote eût été réduite encore si la minime quantité de sub- stance mise à notre disposition eût permis de pousser plus loin l'épuration en divi- sant beaucoup les enveloppes examinées ; mais dès lors la composition de celles-ci était évidemment distincte de celle des différentes membranes animales , comme des téguments propres aux Insectes et aux Crustacés : enfin, les résultats des analyses élémentaires faites par les auteurs de la Note ne semblaient pouvoir convenir à aucun autre principe immédiat qu'à la cellulose. Cependant , plusieurs réactions décisives à cet égard n'ayant pas été mention- nées dans la communication , nous avons cru devoir les essayer ; trois petites enveloppes que nous avions réservées à cet effet pouvant suffire, l’une d'elles préalablement desséchée , fut plongée dans l'acide azotique concentré , et elle résista comme l'aurait fait la cellulose fortement agrégée ; la chitine, placée dans le même réactif, fut bientôt attaquée et dissoute. La substance essayée pouvait donc être comparée à de la cellulose très résistante, mais alors elle devait reproduire aussi les mêmes phénomènes , si on la faisait passer graduellement par des états d une agrégation moindre. Tels furent effec- tivement les résultats des expériences suivantes , à la fois simples et démonstra- tives : une des enveloppes . bien hydratée , fut plongée et foulée avec un tube dans une solution aqueuse d iode légèrement alcoolisée; elle prit une teinte jau- nâtre très faible ; étendue alors sur la paroi d'un verre , on la toucha sur plu- sieurs points avec de l'acide sulfurique monohydraté ; bientôt la désagrégation fut manifeste , et dès ce moment apparut le phénomène de la coloration violette in- tense appartenant , d'une façon exclusive jusqu'ici, aux particules de l'amidon ou de la cellulose désagrégée, teinte par l’iode. Dans de semblables circonstances , un tégument de sauterelle prit une colo- ration jaune-orangé qui persista seule sous l'influence dissolvante de l'acide sul- : furique concentré. En examinant, sous le microscope, la réaction de l'acide sulfurique sur un lam- beau d’enveloppe iodée de Phatlusia . on voyait succéder à la coloration violette ! une dissolution plus avancée détruisant l’effet de teinture , et laissant apercevoir de nombreux corpuscules de matière azotée colorée en jaune , et qui étaient restés , interposés entre les fibres du tissu Cet état de désagrégation de la cellulose correspondant aux groupes des parti- | cules amylacées aune notable stabilité. Telle est aussi l'une des propriétés de la | cellulose des Tuniciers Afin que l'Académie puisse en juger , nous avons Thon- ■ neur de lui présenter une des enveloppes mises en cet état où la coloration spé- I 1 c.iale s'est prononcée depuis plus de trente jours , et qui se peut prolonger encore i D un autre côté, nous avons pu reconnaître que les mêmes tuniques, traitées i humides par l'acide sulfurique , se désagrègent et se dissolvent en un liquide mucilagineux , diaphane , incolore, d’apparence semblable à la dextrine. Le travail de vos commissaires en était à ce point lorsque leur confrère , M Valenciennes , eut l’obligeance de mettre a leur disposition une quantité de P*¥EV — RAPPORT SÜR LE MÉMOIRE PRÉCÉDENT. 2(| I Tuniciers égale a peu près à celle employée déjà , ce qui leur permit de répéter et de compléter les analyses. Le tableau suivant présente les résultats obtenus dans les deux séries de re- cherches. DÉTERMINATION DE L’AZOTE. POIDS POI DS INDICATION DES SUBSTANCES. substances .lu g..z TUBE. l’aiote CES DUES pour ioo. millig. mm 'Enveloppes des Tuniciers lavées à 1 eau. 277 10,75 75,5 16 4.49 12,66 Ici. épurées par la potasse à O 02 et rucide chlorhydrique à U,OI . 127 5,50 75,6 16 5.19 " Id. Id. ld. 2e série. 555 11 00 75.5 16 5.80 » Id. Id. deux fois pur la pot. à 0.02 et 0,2b. et l’ac. chlurhyd. àtl,Ul 50b n * • * DÉTERMINATION DU CARBONE ET DE L’HYDROGÈNE. Substance employée. 58! milligr. Carbone . . . 44,5 Acide cm bonique . 622 Composition . Hydrogène . 6.4 Eau 220 Oxygène . . . 49.1 1UO.O On voit qu'à l'état normal les enveloppes analysées contenaient des matières azotées interposées dans les fibres de cellulose, etformant les vingt-sept centièmes du poids total , en supposant leur composition semblable à la moyenne environ des substances animales organisées ; une partie de ces matières paraissent résister a la solution faible de potasse caustique , et se dissoudre dans la solution concen- trée. Le procédé d'épuration complète de la cellulose des Tuniciers est donc , en définitive , le même que celui au moyen duquel on extrait la cellulose pure du bois et des autres tissus végétaux ; dans ce dernier cas , on élimine à la fois les substances azotées , les matières grasses et les principes ligneux. On pourrait représenter ainsi la composition immédiate des enveloppes des Tuniciers : Cellulose 00,34 Substances azotées 27,00 Matières inorganiques. . . 12,66 •100,00 On peut encore remarquer que les proportions des matières azotées interposées, ainsi que des substances minérales (phosphates, silice, etc ), sont au moins deux 3* série Zooi. T V (Avril 1846 ) 4 IG 2/|2 PAÏEN. — RAPPORT SUR LE MÉMOIRE PRÉCÉDENT, fois plus considérables que celles observées dans les épidermes des plantes : par- faitement épurées , ces enveloppes ne renferment plus d'azote. Enfin, notre analyse élémentaire s'est rapprochée plus encore de la composi- tion théorique de la cellulose que l’analyse de MM. Lœwig et Kœlliker. La cellulose , depuis qu'on a démontré sa présence dans les diverses espèces végétales dont elle relie et consolide toute la structure , a fourni l'un des princi- paux caractères distinctifs de ce règne : si l'on admet, cependant, qu'aucune règle de ce genre n'est absolue dans la nature, que toute distinction s'efface au- près des limites de nos classifications , on pourra conserver cette distinction elle- même en présence d'une exception semblable. Effectivement , les faits introduits dans la science sous le patronage de l'Aca- rlémie ont fait disparaître une ligne de démarcation autrefois admise entre la composition élémentaire des végétaux et celle des animaux ; d’un autre côté, on a rendu plus précises les distinctions entre les deux règnes en indiquant certaines relations entre la composition des substances organiques et le rôle qu elles parais- sent accomplir. La découverte soumise au jugement de l'Académie et vérifiée par ses commis- saires offre, avec les faits précédents, des analogies remarquables. Ainsi, dans les plantes, les cellules les plus jeunes soit à l’extrémité des spon- gioles radicellaires , soit au centre des bourgeons aériens, ces cellules, douées d une grande énergie vitale , présentent à l'analyse . comme à l'observation sous le microscope , une enveloppe très mince de cellulose renfermant en abondance , dans sa cavité, des corps qui ressemblent, par leur composition élémentaire, aux animaux eux-mêmes; et ce sont précisément ces corps, inaperçus autrefois , que l'on est porté à considérer aujourd'hui comme doués des principales fondions accomplies par les êtres vivants. Ne semble-t-il pas que la science vienne de trouver maintenant une confirma- tion des vues nouvelles , en rencontrant dans la série des êtres toute une classe d'animaux qui seraient comparables à dejeunes cellules végétales par l'enveloppe de cellulose qui les entoure ? Après un examen aussi approfondi qu'il lui était possible de le faire, votre commission est, à l'unanimité, d avis que l’existence de la cellulose chez les Tumciersa été mise hors de doute par MM. Lœwig et Kœlliker. C'est un fait capi- tal dans la science, et dont profiteront les études ultérieures relatives à la physio- logie comparée des deux règnes. Vos commissaires ont , en conséquence , l'honneur de vous proposer d'accorder à la communication de MM Lœwig et. Kœlliker une place dans le Recueil ries Suçants étrangers . RECHERCHES SCR CES POI.VPES! m Par M. DANA (IJ. Dans un ouvrage intitulé Structure et classification des Zoophxj- tes, M. Dana a présenté une histoire générale de la classe des Polypes proprement dits et une distribution nouvelle de ces ani- maux. L’auteur, déjà connu par des Mémoires intéressants sur les Caliges , les Apus, etc., a été attaché comme naturaliste à l’expédition scientifique faite par la marine nationale des États- Unis pendant les années 1838 à 1842, dans les régions polaires australes , et il paraît avoir rassemblé ainsi d’immenses matériaux dont la publication ne tardera pas à avoir lieu. Le volume qui vient de paraître est destiné à servir d’introduction au travail des- criptif que M. Dana se propose de donner prochainement sur les Polypes; l’auteur y traite de la structure de ces animaux, en général, mais il s’étend principalement sur les Actinoïdiens, dont il a eu l’occasion d’étudier un grand nombre d’espèces nouvelles. Enfin il propose pour ces Radiaires une classification particulière qui , à plusieurs égards , nous semble préférable à celles précé- demment proposées. Ce travail étant fort peu connu en Europe , nous croyons utile d’en extraire, pour les lecteurs des Annales, le tableau dans lequel M. Dana expose sa méthode. COXSPECTLS DISTRIBETIOMS 7.00PIIÏT0RHW (2) ZOOPHTTA. Animaux radiata sæpius basi afiixa, superné tentaculis co- ronata cum ore centrali edentato , et intus , tubo cibario uniforo: androgyna; ovipara et gemmipara: nervis inconspicuis (?) : cir- culatione excorde laxissima : sensùs organis specialibus nullis. (1) Structure and classification of Zoophytes, byJ.-D. Dana. Philadelphia, I 846 in-4. (2) Nous ferons remarquer ici que M. Dana ne donne pas au mot Zoophyte son acception ordinaire, et ne l'applique qu’aux Polypes proprement dits DAVt. CLASSIFICATION L'ES POLYPES. 2/|/| Ordo I. — ACTINOIDEA. Yentriculo stomachum includente lamellis radiatis generativis septato ; ovulis ore ejectis. Subordo I. — ACTINARIA. Tentacuüs 6, 12, aut pluribus, sæpissimè non papillosis et apice perforatis : sæpe coralligena; corallis calcareis (rarissime corneis) cellis radiatis. ■Tribus i. — ASTRÆACEA. Multitentaculata, tentacuüs subseriatis aut sparsis; sæpe gem- mipara, gemmatione superiore, polypis supernè lateraliter pro- iatantibus: sæpe coralligena, corallis calcareis, cellis multira- diatis, lamellis ultra cellas productis, itaque superficie corallorum aggregatorum lamello-striatâ. Familia 1 . — Actinidæ. Animalia non coralligena, sæpius aflixa. Généra : Actinia, Anlhea, Adamsia , Edwardsia, Ilyantlius , C.apnea , Artinecta, Epicystis, Actinodendrum , I.ucernaria , Metridium, Actine- ria, Ileterodaclyla , Epicladia. Familia 2. — Astr.eidæ. Calcareo- coralligena ; tentacuüs margine disci dispositis, discis inter- dum seriatim tantunnnodo confluentibus : corallorum cellis excavatis , stellis circumscriptis , interdum lobalis aut lineatis; lamellis corallorum aggregatorum in niedio septo sæpius interruptis. Généra : Euphyllia , Ctenophyllia , Mussa , Manicina , Caulastræa , Tri- dacophyllia, Astræa, Meandrina, Monticularia, Phyllastræa, Merulina , F.chinopora. Familia 3. — Fusgide. Coralligena-, discis non circumscriptis, tentacuüs sparsis, brevibus et sæpe obsoletis : simpücissima et aggregalo-geinmata ; aggregatis, discis, undique confluentibus, interstitiis nullis : corallis superficie lamello-striatis et sæpius stellatis , cellis veris nullis; lamellis, aggregatis, ex uno ad alium centrum productis. Généra: Fungia, Cyclolites, Herpetoülbus , Halomitra, Polyphylüa , Zoopilus, Pavonia, Agaricia, Psammocora. utvt. CLASSIFICATION UES POLYPES. 245 Tribus II. — CARYOPHYLLACEA. Multitentaculata; sæpissimè gemmipara, gemmatione infe- riore, gemmis lateralibus, raro (sicut in quibusdam Cyathophyl- lidis ) sursum crescentibus , polypis supernè non prolatantibus : sæpa coralligena , corallis calcareis, cellis rnultiradiatis, super- ficie interstitiali non lamello-striatâ. Familia 1 . — Cïathopbvllidæ. Coralligena ; polyporum singulorum corallo interné ad medium sæpius transversè obliquève septato et celluloso. Généra : Cyathophyllum , Calophyllum, Amplexus, Caninia, Araclmo- phyllum, Acervularia, Cystiophyllum, Clisiophyllum, Michelinia, Colum- naria, Sarcinula. Familia 2. — Carvopbyllidæ. Coralligena ; tentaculis confertis , elongatis ; oribus longé exsertis : corallo interné non transversè septato , cellis rnultiradiatis ( radiis duo- decim superantibus), caliculis margine tenuibus ; interstitiis nunquam laïuello-striatis. (Lamellis fere integris.) Généra : Ecmesus , Cyathina , Stephanophyllia , Turbinalia , Desmo- phyllum, Culicia, Caryophyllia, Uendrophyllia, Oculina, Anlhophvllum , Stylina , Aslroitis. Familia 3. — Gemmiporid.e. Coralligena; tentaculis brevibus, marginalibus, 2-3 seriatis, disco lato , paulo convexo; corallis porosis, caliculis margine crassis , lamellis fere æqualibus, non exsertis. Généra: Gemmipora, Astræopora (?) Familia 4. — Zoantbide. Non coralligena, extussubcoriacea; tentaculis brevibus, marginalibus, 2-3 seriatis, disco sæpe convexo, margine radiatè striato et interdum valde reflexo. Généra : Isaura, Zoanlha, Polythoa. Tribus ni. — JlADREPORACEA. Tentaculis uniseriatis , duodecini ( raro pluribus) , interdum obsoletis; gemmipara, gemmatione laterali : coralligena, corallis calcareis, cellis parvulis, radiis 6-12 aut obsoletis; superficie interstitiali non lamello-striatà. UAM. CLASSIFICATION DES POLYPES. 2/iG Familia 1 . — Madbeporidæ. Polypis 12-tentaculatis, basi medio non coralligenis; itaque cellis pro- fundissimis , ad medium corallum usque productis. Généra : Madrepora , Manopora. Familia 2. — Favositidæ Polypis 12-tentaculatis , basi seriatirn coralligenis, itaque cellis fundo calcareis, et medio corallo transversè septatis , raro solidis. Généra : Alveopora ( Alveoporinœ ) ; Sideropora, Seriatopora , Pocillo- pora , Stenopora, Coustellaria, Favosites, Catenipora ( Favositinœ ) ; He- opora, Heliolites, Millepora ( Helioporinœ ). Familia 3. — Poritidæ. Polypis tentaculis interdum duodecim superantibus, totà basi omnino porosè coralligenis; corallis undique æqualiter porosis, cellis paulo pro- fundis aut superficialibus et medio corallo vi.\ dispiciendis , radiis fere obsoletis. Généra : Porites , Goniopora. Tribus IV. — AnTIPATHACEA. Animalia 6-tentaculata , secretiones corneas basi elaborantia. Familia 1 . — Antipathidæ. Animalia caruosa , axein corneum spinulosum tegentia. SunoRDO II. — ALCYONARIA. Animalia 8-tentaculata , tentaculis papillosis, papillis apice perforatis : sæpa coralligena , corallis calcareis aut corneis , raro siliceis , cellis nunquam radiatis. Familia 1 . — Pennatulidæ. Nunquam aCBxa, aut libéra, aut basi defossa. Généra : Renilla, Pennatula, Veretillum, Funiculina, Virgularia (Peu- natulinee) ; Pavonaria, Umbellularia ( Pavomrinœ ). Famtlia 2. — Alctonidæ. Carnosa, penitus sæpe calcareo-spiculigera. Généra : Rhizoxenia , Anthelia, Xenia ( Xeninæ ) ; Ammothea , Sympo- dium, Nephthya, Alcvonium (A/ei/oninte) ; Spoggodia (Spoggorlinœ) . I)IM. CLASSIFICATION DLS POLTPIiS. 247 Familia 3. — Cornularidæ. Corallis tubulatis, corneis. Genus : Cornularia. Familia 4. — Tcbipuridæ Corallis tubulatis, calcareis. Généra: Aulopora, Telesto, Tubipora, Syringopora. Familia 5. — Gorgonidæ Secretiones epidermicas basi elaborantia , et sæpissimè alias quoque calcareas internas. Généra : Corallium ( Coralliinœ ) ; Hyalonema , Briareum , Gorgonia , Prinmoa, Bebryce (Gorgoninœ) ; Isis , Mopsea, Melitæa ( Isinæ ) Ordo II. — HYDROIDEA. Ventriculo tubuliformi, simplicissimo ; ovulis e lateribus ex- ternè enascentibus. Familia 1. — Hvdrid.e. Ovulis singulis ; gemmis lateralibus, et pullis niaturis deciduis : corallis nullis. Genus : Hydra. Familia 2. — Sertdlarid.s. Ovulis in vesiculo inclusis, gemmis lateralibus persistenlibus ; corallis corneis, caliculis sessilibus. Généra : Antennularia, Plumularia , Sertularia , Thuiaria , Thoa , Pa- sytbea. Familia 3. — Campasülaridæ. Ovulis in vesiculo inclusis, gemmis lateralibus persistenlibus; corallis corneis, caliculis pedicellatis. Généra : Laomedea, Campanularia. Familia 4. — Tcbclaridæ Gemmulisnudis caduceis, juxta tentaculos enascentibus; auitnalia sæpe coralligena, corallis corneis, tubulatis. Généra : Pennaria, Tubularia, Syncoryna, Corydendrium, Eudendrium, Coryna, Hydractinia. OBSERVATIONS SLR DIVERSES ESPÈCES DE MAMMIFÈRES FOSSILES DU MIDI DE LA FRANCE; Par M PAUL G ER VAIS § I. Remarques sur la classification des Mammifères vivants et fossiles, L’étude des Mammifères fossiles paraît appelée à fournir des données précieuses à la classification, et déjà les magnifiques tra- vaux de G. Cuvier, de M. de Blainville et de M. Piichard Owen sur les espèces éteintes de cette classe d’animaux ont eu la plus heureuse influence en appelant l’attention des zoologistes sur des particularités qu’on avait jusqu’ alors ignorées ou négligées. 11 sem- ble évident que , dans l’état actuel de la science , la classification doit se servir non seulement des caractères qu’on observe sur les espèces vivantes, mais qu’elle doitrecourirencore aux particularités que présentent les espèces perdues. Elle doit aussi s’inspirer des faits les plus importants de la distribution géographique et paléon- tologique de ces animaux. Puisque les Mammifères présentent à l’observation des faits analogues à ceux qu’on a remarqués récemment dans les diffé- rentes classes des Reptiles, des Poissons, des Céphalopodes et des Échinodermes, il est indispensable de fonder la clas- sification du groupe entier sur la connaissance de toutes ses frac- tions. Les lois de l'apparition des Mammifères aux divers âges de la création , les particularités qu’ils ont présentées suivant les différentes époques pendant lesquelles ils ont vécu , doivent donc éclairer la méthode aussi bien que les caractères des espèces actuelles envisagées à l’état adulte ou dans la série de leurs développements. Tous les naturalistes ont remarqué que, plus nous nous rappro- chons de la méthode naturelle , plus nous voyons concourir à sa démonstration les particularités fournies par l’étude dudévelop- P. «SERVAIS. — CLASSIFICATION DES MAMMIFÈRES. 2/|9 peinent, par l’organisation envisagée à l’àge adulte , par le mode d’existence et même par la répartition géographique et paléonto- logique des espèces. Il semble alors que nous soyons sur la trace du principe commun de toutes ces particularités. Les beaux tra- vaux de M. Agassiz et de quelques autres zoologistes ne laissent plus de doute à cet égard. La voie nouvelle qu’ils ont ouverte a rendu de trop grands services à la zoologie pour qu’on ne la suive pas toutes les fois qu’on le peut. Le besoin le plus pressant de la mammalogie actuelle, le désir le plus vif des mammalogistes, ce n’est plus la distinction des dif- férents ordres de la classe des Mammifères, car les travaux des naturalistes modernes en ont parfaitement établi la caractéris- tique; c’est la répartition de ces ordres eux-mêmes dans les diffé- rentes séries principales que l’on entrevoit déjà parmi les Mammi- fères, et dont chacune comprend des familles supérieures en orga- nisation , qui en sont pour ainsi dire les Primatès , des familles d’une élévation moyenne et d’autres qui sont inférieures même à celles-ci ou qui sont des termes pour ainsi dire dégradés , qu’on les compare aux premières espèces de la série dont ils font partie ou à celles qui commencent la série suivante. La classification des Mammifères en séries multiples, mais su- bordonnées les unes aux autres comme le sont les ordres ou les familles naturelles comprises dans chacune d’elles , n’est point un fait particulier à cette classe d’animaux. C’est l’application d’un principe que l’on peut considérer comme général en zoologie , et dont l’emploi doit conduire aux meilleurs résultats pour la connais- sance de tous les groupes du règne animal. Ajoutons que beau- coup de zoologistes en reconnaissent aujourd’hui la valeur et que la science lui doit déjà de précieuses découvertes. Les zoologistes les plus célèbres se sont occupés de la classifi- cation méthodique des Mammifères, et bien que les résultats aux- quels ils sont arrivés diffèrent sous quelques rapports , on peut aisément reconnaître que leurs travaux ont successivement per- fectionné cette branche importante de la zoologie. Ce n’est donc pas sans une grande réserve que nous nous permettrons de pro- poser quelques modifications aux classificationsqu’ils ont adoptées. P. SERVAIS. — CLASSIFICATION DES MAMMIFÈRES. Il nous semble que dans l’état actuel de nos connaissances en mannnalogie on peut admettre quatre séries primordiales ou sous- classes de Mammifères dans chacune desquelles les familles prin- cipales ou les ordres doivent être disposés sur deux lignes distinctes suivant que leurs espèces sont organisées pour vivre à terre ou dans les eaux de la mer. Nous nommerons 6’éo//iénen.v les Mammi- fères de la terre ou des eaux douces et T halassothériens ceux des eaux salées, qui sont les Lamantins, les Phoques et les Cétacés (1). Les quatre sous-classes sont celles des Primates, des Ongulés, des Carnassiers , tels que les comprenait G. Cuvier dans la pre- mière édition du Règne animal, et des Homodontes, qui répondent à peu près aux mal-dentés de M. de Blainville, Chaque sous-classe peut comprendre des Géothériens et des Thalassothériens. Cependant les Primatès n’ont point encore fourni d’animaux qui appartiennent à cette dernière catégorie , car on ne peut encore admettre l’opinion récemment émise que les Phoques sont des Quadrumanes aquatiques. Il est digne de remarque qu’en tête de chaque sous-classe nous avons des animaux terrestres que l’on a souvent rapprochés ou comparés entre eux , à cause de la supériorité évidente de leur organisme , principalement sous le rapport du cerveau et de l’in - telligence (Quadrumanes, Phoques, Éléphant, Cétacés) , tandis que les familles qui terminent ces sous-classes (Chéiroptères, Insectivores, Rongeurs, Marsupiaux, Édentés et Monotrèmes) ont été relégués par beaucoup d’auteurs à la fin de toute la classe sous les noms d ' Ineducabilia , Diclelphida et Monotremata. Et ce- pendant les affinités des Chéiroptères, des Insectivores et même des Rongeurs avec les Primatès ne sont pas contestables ; celles des Didelphes avec les Carnivores paraissent également indubi- (I) L tnia boliviensis, qui est un Dauphin d'eau douce découvert dans l'Amé- rique méridionale par M. Alcide d'Orbigny, et l’Enhtjdra marina, qui est une Loutre essentiellement marine de la côte nord-ouest d'Amérique, sont les prin- cipales exceptions que l'on puisse signaler à celte grande règle de la répartition géographique des Mammifères. Nous croyons néanmoins que les dénominations de Géothériens et Thalassothériens peuvent être employées utilement en géogra- phie zoologique et en paléontologie comme aussi en zoologie méthodique. P. SERVAIS. — CLASSIFICATION DES MAMMIFÈRES. 251 tables, et il semble qu’il en soit de même des Monotrèmes par rapport aux Édentés. Voici le tableau de cette classification : 1° Primata. 2° Fera. U AMM ALI A. . . . 3° Unguia la . 4° Homodonta. a) Geotheria. ^)Thalassotheria. Quadrumana. , ^ Chiroptera . . . ) Insectivora . . . \ Rodentia. . . . ) Carnivora . . . 1 Marsupialia . . . Phocœa . / Proboscidia. . . . Sirenia ) Pachydermata . i Pecora ( . Cetacea. 1 Tardigrada . . I Brûla 1 Monolremata. . au total, quinze ordres , sans comprendre l’Homme. Voici les noms vulgaires de chacun d’eux ; 1. Primâtes : Quadrumanes, Chéiroptères, Insectivores, Rongeurs (1) ; 2. Carnassiers (2) : Phoques ou Amphibies, Carnivores, Marsupiaux ou Didelphes. 3. Ongulés: Prohoscidiens , Siréniens, Pachydermes, Ru- minants; l\. Homodontes: Cétacés, Tardigrades, Édentés, Monotrèmes. Cette classification des Mammifères, d’après le principe de la dégradation multisériale des animaux et la considération de leur séjour, s’éloigne h quelques égards de celles qu’on a établies d’après le cerveau, les organes générateurs, le placenta et les membres (1) M. Milne Edwards, daDS son Mémoire sur la classification des animaux (Ann. Sc. nul., 3' série), a mis hors de doute les rapports des Rongeurs avec les premiers Mammifères. (2) Une autre dénomination serait préférable, car beaucoup de Didelphes ne pcu- ><>ni être appelés des animaux carnassiers 252 P. GERVA1S. — CLASSIFICATION DES MAMMIFÈRES, envisagés séparément; mais elle tient compte des caractères four- nis par ces différents systèmesd’organes dans la subordination des familles de chaque sous-classe. Seulement elle leur refuse la qua- lité de caractères dominateurs qu’on leur a successivement attri- buée et retirée. La classification d’après le système dentaire s’en éloignerait moins si les auteurs qui l’ont préférée, F. Cuvier entre autres, avaient suivi plus rigoureusement les indications fournies par les organes dont ils se sont servis. Je ne puis que répéter ici ce que j’ai écrit ailleurs: « 11 y a dans toutes les variations du système dentaire, danscette foule de dispositions au premierabord si disparates , un ordre réel dont les zoologistes commencent à se rendre compte, et dont on entrevoit le plus souvent la raison dans quelque particularité des mœurs des animaux ou dans le rang qu’ils occupent dans la série des êtres créés. » Les Mammifères Thalassothériens (1) sont peu nombreux si on les compare à ceux qui sont organisés pour vivre à terre ou dans les eaux douces; mais tout le monde sait que nos connaissances à leur égard sont bien moins avancées que celles relatives aux espèces terrestres. Les animaux marins de l’époque actuelle sont d’une observation dillicile, et la science ne possède encore qu’un petit nombre de documents certains sur ceux des mers australes. Les Mammifères des mers tertiaires ne sont encore décrits que fort incomplètement, et on ne connaît point encore ceux qui ont vécu au commencement de cette époque. Qui donc oserait dire que l’on n’en recueillera pas, même en Europe, qui nous ont échappé jusqu’ici? Comment croire que les dépôts également marins qui composent une partie du sol des autres continents ne fourniront pas des formes encore inconnues? Le Zeuglodon ou Basilosaure découvert dans l’Amérique septentrionale est bien une preuve du contraire, et il semble nous offrir un terme encore mal connu , mais fort curieux, de la chaîne aujourd’hui interrompue (l) MM. Duvernoy et de Selys-Longehamps font aussi des Mammifères marins un groupe à part. Le premier les intercale entre les Édentés et les Marsupiaux (Mém. Soc. d'hist. nul. de Strasbourg ); le second les relègue à la lin de toute la classe, ce qui se rapproche davantage de notre manière de voir mais néanmoins en accordant plus à la nature aquatique que nous ne le faisons P. SERVAIS. — MAMMIFÈRES FOSSII.ES DE MIDI. '2.V) des Mammifères marins, chaîne qui doit avoir été considérable si l’on en juge par l’importance que les mers ont eue aux diverses époques de la création animale. En terminant cette introduction déjà bien longue, pour arriver à la description de quelques Mammifères fossiles du midi de la France, je ferai la remarque suivante : Dans les savantes dissertations qui ont été imprimées au sujet des animaux de Stonesfield , supposés Didelphes, on ne s’est pas assez préoccupé, ce me semble, d’une opinion de M. de Blainville sur les affinités zoologiques de ces curieux fossiles de l’époque oolitique. « Si l’on croyait, dit M. de Blainville, devoir les consi- dérer comme de la classe des Mammifères, leur système dentaire molaire les rapprocherait des Phoques plus que d’aucun autre groupe. » En effet, si l’on étudie ces fossiles d’après les belles figures qu’en a publiées M. Richard Owen , on est frappé de l’analogie de leurs dents molaires , toutes de l’ordre des avant- molaires, à double racine et à couronne denticulée avec celles des Phoques. La mandibule elle-même a dans son apophyse coro- noïde une certaine ressemblance avec celle de ces animaux. Les Amphithérium , c’est-à-dire les Mammifères de l’oolite que (1. Cuvier a le premier considérés comme des Didelphes, formeraient - ils donc un groupe nouveau qui serait inférieur aux Phoques, comme les Didelphes le sont eux- mêmes aux Carnivores? C’est un rapprochement que je livre à la critique des naturalistes qui possèdent les mâchoires de Stonesfield , ou qui pourront étudier de nouveaux ossements appartenant à ces curieux animaux. § II. Kpoques auxquelles appartiennent les Mammifères fossiles dans le midi de la France. La détermination de l’âge des terrains marins repose essen- tiellement sur la connaissance des coquilles fossiles. Les ossements des Mammifères, dont les débris sont mêlés à ceux des Mollusques marins, lui fournissent aussi de bons documents ; mais c’est surtout pour la connaissance des dépôts lacustres qu’il importe de recou- ^5/t V. SERVAIS. — MAMMIFÈRES FOSSILES DU MIDI, rir à l’étude des Mammifères fossiles. Les Mammifères marins ou Thalassothériens caractérisent donc les terrains qui se sont formés sous la seule influence des eaux de la mer ; les restes des Géo- thériens se rencontrent seuls dans les dépôts qui se sont faits plus ou moins loin des mers, sous les eaux douces; et, dans d’autres cas, le mélange des Géothériens avec les Thalassothériens dé- montre que les cours d’eau tluviatiles amenaient du sol exondé les restes des animaux terrestres pour les ensevelir pêle-mêle sous les eaux de la mer, avec les cadavres des espèces marines, dans des lieux plus ou moins circonscrits. Ces trois conditions, qui se rencontrent également aujourd’hui sur divers points du globe, ont aussi existé à des époques anté- rieures dans le midi de la France. Certaines couches ne contien- nent que des débris marins, certaines autres n’ont que des débris terrestres , et il en est dont les fossiles sont un mélange d’ani- maux marins avec des espèces terrestres ou tluviatiles. A cette dernière sorte de dépôts appartiennent les sables de Montpellier, dont les Mammifères, déjàétudiés par MM. Marcel de Serres et de Christol, l’ont été de nouveau tout récemment par nous et le premier de ces naturalistes. Nous donnerons plus bas la notice que nous avons publiée sur ce sujet. Dans le calcaire-moellon de Saint-Jean de Védas , tout près de Montpellier, on n’a encore trouvé que des animaux marins. Nous décrirons une dent que nous avons obtenue de cette localité , et que nous rapportons au Squalodon de M. Grateloup, singulier genre de Dauphins fossiles qu’on n’avait point encore observé en Languedoc. A Vendargues, autre localité du département de l’Hérault, les sédiments aussi ont enfoui des débris de Mammifères marins. La Faculté des Sciences possède une belle coupe de la tête d’un Dauphin enveloppée dans ce calcaire. Cette tête indique une espèce voisine du Delphinus delphis , mais néan- moins différente. Auprès de Pézénas on trouve des argiles dans lesquelles il y a aussi des débris de Dauphins. Nous en avons quelques vertèbres à la Faculté des Sciences de Montpellier pro- venant de la collection de feu M. Reboul. Enfin nous devons citer un atlas et une vertèbre caudale d’un Cétacé assez grand , que P. GEKVAIS. — MAMMIFÈRES FOSSILES 1)1 MIDI. 255 possède M. Eugène Raspail, à Avignon, et qu’il a recueillis dans un terrain bien plus récent du département de Vaucluse. A Issel (département de l'Aude), dans la molasse d’Auchc, de Sansans, de Semorre, etc. (département du Gers), dans les dépôts d’Apt, de Cucuron, etc. (département de Vaucluse) , dans les cavernes du Gard et de l’Hérault, les Mammifères sont tous des Mammifères Géothériens. Nous avons donc dans le midi de la France comme dans l’ouest et ailleurs des formations mastozoïques de trois sortes : marines , terrestres et mixtes. Les époques auxquelles ces formations appar- tiennent sont aussi fort différentes : Le dépôt d’Issel est principalement caractérisé par la présence de Lophiodons et paraît du même âge que ceux d’Argenton (dé- partement de l’Indre) et de Buschweiller (département du Rhin). G’est un des plus anciens dépôts d’ossements de Mammifères. Les fossiles trouvés à Gargas, près d’Apt ( Vaucluse), dont nous décrirons une nouvelle espèce appartenant au genre Pte- rodon , sont d’une époque analogue à celles des Gypses de Paris. 11 y a d’ailleurs dans le même département quelques formations gypseuses, et M. Rénaux, architecte de la ville d’Avignon, y a recueilli des débris de Palæothérium. Le dépôt terrestre d’Apt se rattache aussi par ses fossiles à ceux de la Grave, près Bordeaux, et de l’île de Wight. Les terrains tertiaires moyens sont représentés en grand dans le départementdu Gerset dans quelques localités voisines. Les nom- breux ossements découverts par M. Lartet, dans ces localités, ont rendu célèbres les gisements qu’a si bien explorés cet habile naturaliste. Cucuron, qui nous a fourni une espèce d’Hyène encore inconnue jusqu’ici, et qui est la localité principale des Hipparions, paraît appartenir à l’époque tertiaire supérieure , c’est-à-dire au Plio- cène, ainsi que les sables de Montpellier, mais on n’y a encore découvert que des espèces terrestres, tandis qu’à Montpellier ce sont des animaux marins mêlés à des genres terrestres. Les plus importants parmi ces derniers sont sans contredit un Rhinocéros et un Mastodonte différents de ceux du Gers. •25(5 P. «EKVAIS. — M fVMMIPÈUKS FOSSII.ES DU MIDI. Au-dessus encore , dans les environs de Montpellier, viennent les terres qui renferment des restes d’IIippopotames; mais c'est surtout auprès de Pézénas qu’on observe les plus riches en fossiles, et M. de Christol leur a consacré un de ses mémoires. Les fossiles de Pézénas se rapprochent davantage de ceux des cavernes. On y trouve l’Éléphant, l’Hippopotame, divers Ruminants, parmi lesquels nous signalerons l’Élan , mais on n’y a pas encore con- staté d’une manière positive VHyœna spelœa ni le Rhinocéros ti- chorinus, qui sont deux des Mammifères caractéristiques du dilu- vium et de la plupart des cavernes. Ces deux espèces , au con- traire , ont laissé des débris dans les cavernes du midi comme dans celles du nord , et tout récemment nous avons vu chez M. Émilien Dumas, à Sommières, des restes de l’une et de l’autre recueillis par lui dans la caverne de Pondres (Gard). Toutefois les cavernes du Languedoc devront donner lieu à une distinction fort importante et qu’on n’avait point encore faite. La plupart , en se remplissant, ont enfoui des animaux de même espèce que ceux des cavernes de kirkdale, de Liège, de Gay- lenreuth (en Angleterre, en Belgique et en Allemagne) , et des dépôts diluviens d’Abbeville , de Paris , etc., ainsi que des prin- cipales cavernes de France, celles d’Échenoz et de I’ouvent (dé- partement de la Ilaute-Saône), de Brengus ( département du Lot) , etc. ; mais celles de Lunel-Viel ne sont pas complètement dans le même cas. Contrairement à ce qu’on a reconnu pour la caverne de Torquay, dans le Kent (Angleterre), qui est d’un âge antérieur au dépôt diluvien , celles de Lunel-Viel renferment au contraire des animaux ayant une analogie remarquable avec ceux qui vivent encore en Afrique , en Barbarie et même en Europe. Ce qu’il y a de plus remarquable à Lunel-Viel, ce sont une Hyène, (Uyœna prisca) , une Genette , un Lion et un Rhinocéros, qu’il nous paraît bien difficile de distinguer spécifiquement de l’Hyène rayée, de la Genette (europæo-barbaresque), du Lion et du Rhi- nocéros africanus. Lunel-Viel paraît manquer du Felisspelœa, du Rhinocéros lichorhinus et de quelques autres fossiles des dépôts diluviens. Malheureusement parmi les débris d’Éléphanl en très petit nombre qu’on y a rencontrés, on n’a signalé aucun morceau P. IlERUIOi. — MAMMIFÈRES FOSSILES DE VAUCLUSE. 25" de dent qui puisse décider de l’espèce (africaine ou plus semblable à. celle d’Asie) K laquelle appartenait l’Éléphant enseveli dans ces cavernes. Ces dépôts d’âges fort divers ne sont pas les seuls que nous pourrions signaler, mais nous manquons encore de documents re- lativement à ceux dont il nous resterait à parler. On peut voir néanmoins qu’ils appartiennent aux différentes époques éocène , miocène et pliocène que l’on a distinguées dans la période tertiaire, et que les terrains diluviens et l’époque actuelle que l’on sépare souvent des formations tertiaires, quoiqu’ils n’en diffèrent pas plus que ceux-ci ne diffèrent entre eux, y sont aussi représentés par les fossiles caractéristiques du diluvium du nord et du centre de, l’Europe, et de plus par des animaux que leur analogie avec ceux de l’Afrique rend extrêmement curieux. Rappelons aussi que plusieurs brèches osseuses ont été observées sur la côte du Languedoc et particulièrement à Cette. § Ht. Sur une nouvelle espère de Ptérodon du terrain tertiaire inferieur. Pendant le courant de l’année dernière, VI. Marcel de Serres m’avait communiqué un morceau fossile de mâchoire supérieure encore pourvu de deux molaires , qui fait partie de son intéres- sante collection. Ce morceau, qu’il jugeait être de Palæothérium, et qui appartient en effet à ce genre , avait attiré mon attention, parce qu’il était pour moi un premier indice de l’existence, dans le midi de la France , de terrains tertiaires de lage des plâtres de Paris. Ce curieux fossile avait été recueilli dans le département de Vaucluse; je l’emportai à Paris pour en déterminer l’espèce d’une manière précise; et comme M. de Blainville s’occupait alors de la révision des Palæothérium , d’après les pièces mêmes observées par G. Cuvier, et d’après celles qu’il a lui -même réunies, je le lui laissai en communication avec d’autres ossements du Midi. .l’ai su à mon retour de Paris , en passant à Lyon , que beau- coup d’autres débris du genre Palæothérium avaient été rencon- 3' série . Zool T V. (Mai 1 846 ), 4 7 ‘258 P. GERVAIS. — MAMMIFÈRES FOSSILES DE VAUCLUSE, très dans une localité du département de Vaucluse voisine d’Apt. à Gargas , et qu’avec eux on trouvait d’autres Mammifères dont les genres sont également analogues aux genres des Mammi- fères enfouis dans les plâtrièresde Paris. M. Jourdan, professeur à la Faculté des Sciences de Lyon, et directeur du Musée d’his- toire naturelle de cette ville , au palais Saint-Pierre , me fit voir une belle collection de ces fossiles d’Apt qu’il avait réunie , et il me fit remarquer parmi eux plusieurs espèces de Palæothé- rium , divers Anoplothérium , d’autres Mammifères , qui parais- sent être un Cochon et un Chæropotame, et des Reptiles chélo- niens et crocodiliens. M. Jourdan avait considéré ces fossiles comme de l’époque éocène , ce qui concorde parfaitement avec notre manière de voir Depuis lors , nous avons pu voir au musée d’ Avign on une suite également fort intéressai! te des fossiles du dépôt éocène d’Apt recueillie par M. Requien , et parmi eux une espèce qui manque à la collection formée par M. Jourdan. Comme ce dernier naturaliste doit publier très prochainement le résultat de ses recherches, nous nous abstiendrons de parler des fossiles du musée d’Avignon qui sont analogues aux siens et même de ceux que nous possédons actuellement à Montpellier, mais nous don- nerons quelques détails sur l’espèce que M. Requien possède seul jusqu’à présent. Celle-ci est un Carnassier que nous croyons du même genre que le Pleroclon parisiemè. Mammifère fort sin- gulier qui avait été indiqué d’abord par Cuvier comme une espèce de Dasyure. Ce genre Ptérodon est aussi un fossile des plâtres de Montmartre , et sa découverte à Apt vient confirmer notre opinion et celle de M. Jourdan sur l’âge du dépôt dont il provient. Ce point n’est pas le seul dans le Midi où l’on trouve des fos- siles de la même époque. Le terrain d' Apt paraît être une sorte de lignite : un dépôt semblable existe à Digne ( Gard ) , et renferme aussi des débris de Palæotbérium ; nous en avons vu quelques os dans l’intéressante collection de M. Émilien Dumas, à Sommières ; et d’après ce que nous a dit ce savant géologue , M. d’Hombres Firmas a recueilli des débris analogues auprès d’Alais. Ajoutons que si le dépôt d’Apt paraît contemporain de celui P. CRR VAIS. — MAMMIFÈRES FOSSILES D2 VAUCLUSE. 250 desgypses de Paris, ses espèces et telles de cette localité ne sont pas toutes identiques, mais plutôt congénères. Elles ont aussi une grande analogie avec celles du terrain éocène de Bordeaux douta parlé G. Cuvier, et avec celles de l’ile de Wight, que M. Owen vient de décrire dans son ouvrage sur les Mammifères et les Oiseaux fossiles de l’Angleterre. Nous donnerons à l’espèce de Pterodcm d’Apt le nom de Pterodox Reqi iem. Deux fragments recueillis par M. Requien nous paraissent appartenir à cette espèce. L’un est un morceau de maxillaire supérieur qui porte encore une dent molaire à peu près entière . et les racines de deux autres dans leurs alvéoles ; le second est une dent carnassière d’une forme toute spéciale , et que nous croyons être la dernière molaire supérieure droite du même animal. La dent implantée dans le morceau de maxillaire supérieur a sa principale pointe cassée , et en avant et en arrière de celle-ci une autre pointe surbaissée, l’antérieure étant la plus forte. Elle a aussi un talon interne placé sous sa grande pointe. Elle ne ressem- ble à aucune dent des Hyènes, desFelis ni desCanis, maison pour- rait, jusqu’à un certain point , la comparer à la carnassière supé- rieure des Ours et des Ratons, bien qu’il soit assez facile de l’en distinguer par lacomparaison.il est impossible de ne pas la trouver fort semblable à la dent moyenne de la figure du Ptérodon, publiée par M. de Blainville dans son Osléograpltie des Subursus , pl. 1 2. Cependant , on peut juger par les racines restées en place que les deux dents antérieures à celle-là devaient avoir le talon interne plus saillant que dans le Pterodon parisien se. La dent en place ou celle décrite ci-dessus a 0,015 dans son diamètre antéro-posté- rieur, et 0,012 de diamètre transversal au talon. Le morceau dans lequel cette dent est implantée est un fragment de maxil- laire supérieur gauche. La longueur de l’espace occupé par la dent et par les deux alvéoles de la dent qui la précèdent , est de 0,030. La place occupée par la racine de la dent la plus anté- rieure mesure 0,006 transversalement , et l’autre ou la plus forte des deux 0,011 . L’autre dent dont nous pouvons parler est isolée , cassée au 260 F. «ERVAIS. — MAMMIFÈRES FOSSILES l>F. VAUCLUSE. collet, mais à couronne entière. C’est une carnassière qu'on ne peut confondre , ainsi que nous l’avons dit , avec celle d’aucun Carnivore. Elle se distingue de la carnassière des Hyènes et des Felis en ce quelle manque du talon antéro-interne qui caractérise celle- ci , et du denticule surbaissé qu’elle porte en avant. Une pointe tranchante , étroite , à sommet aigu , répond au denticule prin- cipal de la carnassière supérieure des Felis et des Hyènes ; et le denticule postérieur , ou plutôt l’aile de la carnassière des mêmes animaux , qui n’est séparée de la pointe antérieure que par une faible échancrure, est presque deux fois aussi longue qu’elle, cou- pée obliquement suivant une ligne qui va de la partie posté- rieure de son collet au sommet de la pointe antérieure. Cette dent ne ressemble pas non plus à la carnassière des Canis ; mais elle rappelle davantage la dent postérieure de la figure du Ptérodon , publiée dans l’ouvrage de M. de Blainville. Toutefois ce n’est pas cette dent elle-même , car sa forme diffère à quelques égards, et nous la croyons une molaire carnassière qui manquerait dans le fragment observé par Cuvier et M. de Blainville. Ceci donnerait aux Ptérodons plusieurs dents carnassières, comme Fr. Cuvier l’a admis pour les genres Thylacyne et Sarcophile de la famille des Didelphes dasyuriens , et comme on le voit à la mâchoire infé- rieure de l’Hycenodon. Le Ptérodon d’Apt , cet éocène animal que nous donnons cependant comme un Carnivore , et non comme un Didelphe . jusqu’à ce qu’il soit mieux connu , aurait donc une véritable analogie sous le rapport de son système dentaire avec certains Didelphes carnassiers. La face antérieure de ht dent qui nous occupe est plane et verticale. Voici les dimensions de cette dent : Diamètre antéro-postérieur , 0,022 : diamètre transverse en avant . près le collet , 0,010 : hauteur verticale à la même face, 0,016 ; plus grande hauteur à la face externe , 0,018 ; hauteur à la séparation du grand denticule antérieur et de l’aile , 0,016 ; longueur antéro-postérieure de l’aile, 0,016; hauteur à son extrémité postérieure , 0,003. P. SERVAIS. — MAMMIFÈRES FOSSII.ES UE VAUCI.USE. 261 § iv. Sur une espèce non décriie d’Hyène fossile du terrain supérieur de Cucuron. MM. de Christol et Matheron (1) ont signalé à Cucuron, petite localité du département de Vaucluse , un gisement remarquable de Mammifères fossiles, dont la principale espèce est une sorte de Cheval tridactyle ; le premier de ces naturalistes a fait de cette espèce remarquable de la famille des Chevaux un genre particulier sous le nom à' H ippar ion ; il donne la détermination suivante des autres fossiles enfouis avec rilipparion : un Mouton, un Bœuf, un Cerf de la taille de l’Élaphe et une Hyène. En passant dernièrement à Avignon , j’ai cherché à voir des débris de ces différents animaux , et je me suis naturellement adressé, pour y parvenir, à41. Requien,qui est vraiment, par son obligeance et son savoir, la providence des naturalistes et des ar- tistes qui visitent le département de Vaucluse. M. Requien, qui a fondé et qui dirige le musée d’Avignon , m’a communiqué les fossiles de Cucuron qu’il avait déposés dans ce bel établissement. J’en dois aussi quelques uns à M. Eugène Raspail, auteur d’une monographie très bien faite des montagnes de Gigondas et de la description du singulier Reptile des terrains néocorniens qu’il a découvert et nommé N eustosaurns Gigondarum. Je ne parlerai point ici des débris d’IIipparion que j’ai vus à Avignon ou que je dois à la générosité de MM. Requien et Ras- pail ; car M. Jourdan , professeur à Lyon , m’a aussi montré un très beau pied du même animal, et il se propose d’en publier pro- chainement la description. Le Mouton signalé à Cucuron l’a été d’après des cornes qui doivent avoir 0,10 environ de longueur, et d’après des dents et quelques os. Nous ne saurions préciser encore ses caractères. Le Cerf etje Bœuf nous sont encore inconnus en nature ; mais nous avons observé le Sanglier d’après un morceau de maxillaire supérieur portant encore la dernière molaire du côté droit. Cette I innales des Sciences et de I Industrie du midi de Ui Fiance, l lit (1R32; 262 P. «EKt'AI». — MAMMIFÈRES FOSSILES LUS VAUCLUSE, dent est plus grosse que sa correspondante dans les Sangliers des sables marins de Montpellier et des cavernes de Lunel-Viel. Voici ses dimensions : diamètre antéro-postérieur, U, 045 ; dia- mètre transverse à la colline antérieure, 0,030 ; à laseconde col- line, 0,025; à la dernière ou talon, 0,015. Le morceau le plus intéressant parmi ceux que nous a prêtés M. Requien appartient à Y Hyène, et il nous permettra de démon- trer que l’espèce de ce genre qui est enfouie avec les Ilipparions de Cucuron n’est ni Y Ilyœna spelcea des cavernes, ni l’Hyène si semblable à l’Hyène rayée ( Ilyœna vulgaris) qu’on trouve dans les cavernes de Lunel-Viel ( Hérault) et dans quelques terrains supérieurs de l’Auvergne. C’est une espèce tout-à-fait distincte de celles qu’on a décrites jusqu’ici, soit à l’état fossile, soit à l’état vivant; nous la nommerons IIyæna uiimmrionum. La pièce fossile sur laquelle nous nous fondons est un fragment de mâchoire supérieure droite ayant encore quatre molaires. Au premier aspect on reconnaît ce morceau pour appartenir au genre Hyène, quoique la dernière dent, qui est d’ailleurs, comme chez les Hyènes, une tuberculeuse transverse, soit plus forte que sa cor- respondante dans les Hyènes rayée et brune ( Ilyœna vulgaris et fusca ) , et beaucoup moins rentrée à la partie postéro-interne de la carnassière que dans cette espèce et dans ses analogues fossiles (Ilyœna prisca de Lunel-Viel et //. arvernensis de la montagne de Perrier). La grosseur de la première des quatre molaires restantes et sa forme montrent bien qu’elle n’était pas l’analogue de la première fausse-molaire des Felis , et qu’il exis- tait en avant d’elle une autre molaire comme dans les Hyènes. La molaire carnassière a aussi la forme de celle des Hyènes, et fait bien voir que le fragment dont nous parlons n’appartient pas non plus à un Canis. C’était une Hyène ayant sans doute, comme les Hyènes, cinq molaires supérieures, ou bien ayant au moins les cinq dents de ces dernières, avec cette différence que la posté- j rieure était sur la même ligne que les autres au 'lieu d 'être en dedans de lagrande aile de la carnassière. Les autres dents restées à notre morceau fossile répondent aux deuxième, troisième et qua- trième molaires des Hyènes et sont presque entièrement sem- P. «SERVAIS. — MAMMIFÈRES FOSSILES DE l.’ilÉRAULT. 263 blables à celles de ces carnivores , mais leur talon postérieur est plus fort et subtranchant. L’aile postérieure de la dent carnas- sière est un peu plus grande et subbilobée : un bourrelet règne sur la partie interne de son collet depuis le talon antéro-interne usqu’auprès de l’extrémité postérieure de l’aile; ce bourrelet est plus senti que dans l’Hyène rayée. Mais ce qui distingue surtout notre nouvelle espèce fossile de l’Hyène rayée, et à plus forte raison de l’Hyène tachetée, ainsi que des correspondantes fossiles de l’une et de l’autre, c’est la forme et la grandeur de la molaire tuberculeuse , qui est d’un volume bien plus considérable que celle de l’Hyène rayée, plus grande même que celle-ci dans la dentition de lait. Elle n’a cependant qu’un seul lobe au lieu de deux comme dans les Canis; sa coupe est prismatique triangulaire, avec un rudiment de bourrelet anté- rieur et postérieur au collet de la partie interne ; la partie élevée du lobe interne étant subtranchante, celle de l’externe au con- traire mousse.Voici les dimensions de la carnassière et de la tuberculeuse : Longueur de la carnassière, 0,026; largeurau talon antérieur, 0,015. Longueur de la tuberculeuse, 0,009 ; largeur, 0,015. Un crâne d'Hyène rayée provenant de Barbarie nous a donné, pour la même dent tuberculeuse les dimensions 0,006 et 0,015. § v. Sur une dent de Squalodon Grateloupfi recueillie à Saint-Jean de Védas . près Montpellier. Le calcaire de Saint-Jean de Védas, tout près de Montpellier, appartient aux couches nommées calcaire moellon par M. Marcel deSerres, et l’on en tire depuis fort longtemps la plupart des pier- res de taille employées à la construction. C’est un dépôt marin à couches inclinées, fort riche en débris de coquilles ou de polypiers, pt dans lequel on observe aussi un grand nombre de dents de Squales, des dents de Daurades et d’autres débris d’animaux '264 P. CibUVAl**. — MAMMIFÈRES FOSSILES UE l’hÉRAULT. marins. Nous avions vu dans la collection de M. Marcel de Serres un fragment de côte de Métaxythérium provenant d'un terrain qui dépend de celui-ci. Après une course que nous avions faite à Saint Jean de Yédas, M. Paul Lichtenstein et moi , des ouvriers nous apportèrent avec des dents de Squales d’espèces diverses une dent crénelée qui me parut appartenir à l’animal singulier que 4L Grateloup a découvert à Léognan, près Bordeaux, et qu’il a décrit sous le nom de Squalodon. Voici la description de cette dent : Elle est comprimée, plus longue que haute, à surface rugueuse et comme chagrinée sur la calotte d’émail qui enveloppe sa cou- ronne. Elle est denticulée sur une partie de son bord tranchant, et le serait sans doute sur tout le contour de ce bord sans l’usure assez avancée à laquelle elle a été soumise, principalement au som- met et sur un des côtés du contour. La longueur de la grande partie usée est de 0,0 19. On voit par les plis qui la bordent qu’elle a dû résulter de la confluence de plusieurs tubercules ou denti- cules usés jusqu’à sa base. A sa partie inférieure est encore une petite île d’ivoire entourée d’émail qui est un autre decesdenticules. Le bord opposé en présente trois semblables . mais plus considé- rables et dont les deux supérieures sont déjà joints par un isthme de manière à représenter le chiffre 8. Une des faces de la dent est plus convexe que l’autre et montre une série oblique de six très petits tubercules inéquidistants usés de manière à simuler de très petites îles. Le plus rapproché de l'angle de la dent est sous la pre- mière des petites îles que nous avons indiquées. Hauteur de la partie coronale de cette dent, 0,010 ou 0,01 1 , du collet au sommet usé. Longueur d’avant en arrière, 0,025; celles de l’individu observé par M. Grateloup sont plus entières. La racine de la nôtre est cassée ; on voit par ce qu’il en reste et par la forme du trou du bulbe qui est unique, mais à double canal très fin, qu’elle était subdidyme. L’animal auquel nous attribuons cette dent, et que nous nom- merons Sqijai.ouon Grateloupii, ad’abordété considérécommeun P. «.l it» IIS. — MAMMIFÈRES FOSSILES DE l’hÉRAL LT. 265 Keptile saurien , mais c’est bien un Mammifère , et, comme le fait remarquer M. Van Beneden d’après l’inspection de la tête même découverte par M. Grateloup, il appartient à la famille des Dau- phins. M. Laurillard (1) a proposé de remplacer son nom de Squa- lodon par celui de Crenidelphinus , et plus récemment M Pedroni a employé celui de Delphinoides. Sans contredit, le Squalodon diffère beaucoup, par la forme de ses dents, des Dauphins actuels, et le seul Plataniste du Gange peut lui être comparé sous ce rapport. En effet , les dents postérieures de celui-ci prennent avec l’âge une apparence palmée que nous avons surtout vue d’une manière évidente sur des mâchoires con- servées au Collège des chirurgiens, à Londres. Dans son Ostéographie (genre Phoca, pag. 51), M. de Blain- ville a émis, d’après une indication dont nous lui avions fourni l’idée, que le Squalodon pourrait bien être l’animal dont Scilla a figuré des dents et que M. Agassiz a proposé de rapporter à la famille des Phoques. M. de Blainville lui-même nomme cet ani- mal Phoca melitensis antigua. La présence du Squalodon du Lan- guedoc nous semble donner plus de probabilité à ce rapproche- ment, si l’on remarque combien les dents figurées par Scilla et par M. Grateloup paraissent se ressembler, et si l’on se rappelle que le fossile de Scilla provenait de l’ile de Malte, île qui paraît avoir un dépôt de Mammifères fossiles du même âge que ceux de Montpellier et de Bordeaux. Avec la dent de Squalodon de Saint-Jean de Védas étaient deux fragments de côtes ayant la structure de celles des Dauphins. (1) Dict univ d’Hint nal de d'Orbigny, art Dauphin, t IV, p 636 2()6 P. GERV4K ET MARCEL DE SERRES. § VI. Sur les Mammifères dont on a trouvé les restes fossiles dans la caverne de Lunel-Viel et dans les sables de Montpellier (1), Far MM. PAUL CERVAIS et MARCEL DE SERRES. Le midi de la France, et en particulier le département de l'Hé- rault , sont souvent cités dans les ouvrages de paléontologie pour leurs nombreux ossements fossiles. On trouve, en effet, dans plu- sieurs points de ce département des débris osseux enfouis dans les formations tertiaires supérieures, et ces débris appartiennent aux diverses classes des animaux vertébrés. Ceux des Mammifères y sont les plus fréquents , et comme ils peuvent fournir à la géo- logie des données plus importantes, il nous a paru préférable de commencer par eux la série des mémoires que nous avons entre- prise sur les fossiles du midi de la France. Nous ferons connaître .ultérieurement les espèces perdues qui rentrent dans les autres classes du même embranchement. G. Cuvier avait déjà indiqué ou même figuré dans ses recher- ches plusieurs de ces débris de Mammifères. Il les rapporte aux genres Hippopotame, Rhinocéros, Palœothérium et Lophiodon. Mais ces ossements et les espèces qu’ils ont fait reconnaître étaient en bien petit nombre si on les compare à ceux que l’un de nous a signalés depuis , soit dans la formation tertiaire, soit dans les ca- vernes à ossements du Languedoc et du Roussillon. 1° Mammifères des cavernes. — Les cavernes dont nous vou- lons parler sont celles de Bize , de Mialet, d’Argon, de Fauzan et surtout de Lunel-Viel. Les ossements qu’on a recueillis à Bize , à Mialet , etc. , sont ceux des espèces caractéristiques de la faune diluvienne; ils res- semblent à ceux des cavernes du Centre et du Nord. Mais dans la dernière de ces localités, c’est-à-dire à Lunel-Viel , certaines des espèces enfouies sont bien différentes. On y remarque un mélange (1 ) Un extrait de ce travail a paru dans les Comptes-rendus de l'Académie des Sciences, I. XXII, p 295 (16 février 1 8 46). MAMMIFÈRES FOSSILES UE L’HÉRAULT. 267 d’animaux actuellement éteints avec d’autres qui sont fort sem- blables , sinon identiques , à ceux qui vivent encore en Europe ou en Afrique. Ainsi le Blaireau , le Putois, la Genette, la Loutre, le Castor, etc., y représentent la faune europæo - barbaresque , tandis que plusieurs Felis ( le Lion au lieu du Felis spelœa), la Panthère, une Hyène, qu’il semble bien difficile de distinguer de l’Hyène rayée, et un Rhinocéros très peu différent du Rhino- céros africanus (1), établissent, entre les animaux aujourd’hui fossiles à Lunel-Viel et ceux qui habitent la Barbarie et d’autres parties de l’Afrique , une analogie qui nous paraît toui-à-fait digne d’attention. Les fossiles recueillis à Lunel-Viel sont pour la plupart conservés à la Faculté des sciences de Montpellier dans les collections de géologie, et ils en forment la principale richesse. 2“ Mammifères dessables marins. — Les Mammifères conser- vés à l’état fossile dans les sables fluvio- marins du département de l’Hérault ne sont pas moins intéressants. Ils ont déjà fait le sujet de plusieurs notices publiées par l’un de nous , et ils ont aussi fourni à M. Jules de Christol, professeur à la Faculté des Sciences de Dijon , divers mémoires importants (2). Ils nous ont encore offert quelques sujets nouveaux d'observation. La petite faune mammalogique que leur étude permettra de reconstruire , diffère, sous plusieurs rapports importants, de celle de Lunel-Viel, qui appartient d’ailleurs à une époque bien plus récente. On y voit un mélange d’espèces marines qui fréquentaient sans (I ) Celte espèce avait été considérée, à cause de la taille des ossements qu'on en a recueillis, comme étant la même que le Rhinocéros minutus de G. Cuvier, dont les seules parties connues proviennent de Moissac (Lot-et-Garonne); mais elle en différé . ainsi que des autres Rhinocéros fossiles de France (RI i. tichorinus, magarhinus et incisions). Le fragment de mâchoire supérieure figuré dans les Recherches sur les ossements humaliles de Lunel-Viel ( pl. 12 , fig I ) appartient a un individu assez jeune; il ne diffère que fort peu de la même partie dans le Rh. africanus, ainsi que l’un de nous s'en est récemment assuré par la comparaison de ce fragment avec un crâne d'Afrique appartenant au Muséum de Paris. Nous devons ajouter que M . de Blainville , a qui dons avons communiqué ce fossile pour son grand travail sur les Rhinocéros (Ostéographie , fascicule 20, I 846), ne croit pas devoir le distinguer du Rli leptorliinus ou megarhinus de nos sables marins (2) Innales des Sciences naturelles , 2r série. P. UtUVIK ET MARCEL UE SERRES. 268 doute la petite baie dans laquelle les sables se sont accumulés , et d’espèces terrestres dont les cours d’eau y déposaient les débris en même temps que le sable qui les recouvre. Avec ces espèces de Mammifères sont des ossements d’Oiseaux , de Chéloniens , de Crocodiles et de Poissons marins. 11 y a aussi des coquilles ter- restres et marines, et parmi ces dernières, qui sont les plus répan- dues , des Huîtres, quelquefois disposées en bancs qui ont une assez grande étendue. a) Les espèces terrestres de Mammifères , dont on a reconnu la présence au milieu des sables dont il est ici question, appartiennent aux genres suivants : Ours, Ursus. — Une espèce indéterminée. Le genre en a été constaté d'une manière certaine d’après une arrière-molaire tuberculeuse , dé- couverte dans les sables sur lesquels est bâtie la citadelle de Montpel- lier (1). Fklis. — Une espèce à peu près grande comme le Serval. Nous en avons un fragment de mâchoire encore garni de ses trois molaires. Mastodonte , Mastodon. — L’espèce que nous nommerons Mastodon brevirostre (2) nous paraît différer de celle du Gers, de l’Orléanais , de la Hesse , etc. ; ses molaires étaient plus larges ; sa mâchoire inférieure avait une symphyse courte, et non prolongée en gouttière allongée et armée de défenses : caractères que fl M. Kaup et de Blainville ont reconnus à la mâchoire inférieure du Mastodon angustidens ou longirostre. I.es inci- sives supérieures étaient néanmoins en forme de défenses , et garnies d une bande étroite d’émail, comme chez le Mastodon angustidens. Les os de ce Mastodonte de l’Hérault sont assez fréquents ; on les a pris quel- quefois pour ceux de l’Éléphant, auxquels ils paraissent ressembler plus que ceux du Mastodonte miocène. (1) Le genre Hyène a été supposé plutôt que démontré ; l'un de nous lui a provisoirement attribué , dans une publication antérieure , des canines et des pe- lotes d'album grœcum. On ne saurait encore en indiquer l'espèce. (2) L un de nous (Jl. Gervais) vient de constater dans la riche collection de M. Bravard qu'il y aussi en Auvergne un Mastodonte d'espèce particulière , ainsi que l'ont pensé les paléontologistes de ce pays. Un squelette presque entier, que M Bravard vient de découvrir aux environs dlssoire, ne permet plus le doute a, cet égard. Le Mastodonte d’Auvergne se rapproche , par la forme de ses mo- laires et quelques autres particularités, que M. Bravard fera sans doute con- naître prochainement , du Mastodon tapi roules de MM Lartet et de Blainville, du Mast. giganleum et même, jusqu'à un certain point, du Dinothérium . MAMMIFÈRES FOSSILES I)E I. HÉRAULT. 1269 Rhinocéros. — Espèce intermédiaire aux Rhinocéros tichorhinus ci incisivus de Cuvier, mais distincte néanmoins de l’un et de l’autre , comme M. de Christol l'a démontré. Ce Rhinocéros, qui est également différent de celui de Lunel-Viel, a d’abord été nommé l Viinocéros de Montpellier (Marcel de Serres, Journal de physique ) ; Cuvier l’a considéré R tort comme le Rh. tichorhinus, d’après le dessin qui lui fut envoyé d’un crâne encore conservé à l’évêché de Montpellier; M. de Christol l’a dé- crit sous le nom de Ithinoceros megarhinus. Il est possible, ainsi qu’on en a déjà fait la remarque , qu’il ne diffère pas de celui d’Italie, dont Cuvier a parlé sous le nom de Rh. leptorhinus , et dont M. Owen vient de re- trouver des traces assez nombreuses en Angleterre , dans un terrain qui est aussi de l’époque pliocène. Le Rhinocéros de Montpellier avait à la mâchoire inférieure deux incisives à peu près semblables pour la forme à celles qu’on voit entre les dents cauiniformes des Rhinocéros de l’Inde, delà Sonde et incisivus. Ces deux dents sont en place dans une des man- dibules appartenant à la Faculté. Une autre mandibule en montre les al- véoles et entre elles deux alvéoles plus petites. La symphyse mandibu- laire de ce Rhinocéros a une forme très caractéristique. Tapir , Tapiras. — Des fragments de mâchoire inférieure et des mo- laires établissent une grande analogie entre l’espèce de ce Tapir et celle d’Auvergne ; mais la taille du nôtre est un peu moindre. Cheval , Equus. — On en trouve des dents et des os dans les assises supérieures des sables fluvio-marins. Sanglier , Sus. — Parait différer un peu du Sus prisais de Lunel-Viel ; il a été reconnu sur l’inspection de dents molaires. A ces sept genres, il faut en ajouter plusieurs de l’ordre des Rumi- nants fRuiuinants à bois et à étuis cornés), mais dont il nous est encore impossible de définir les espèces d’une manière suffisante. Une molaire de Castor a été recueillie dans le sol même sur lequel est bâtie la Faculté des Sciences, dans une marne à coquilles terrestres à une faible distance de la terre végétale (1), mais cependant au-dessous de quelques lits de sables. Nous manquons encore de pièces pour démontrer d’une manière cer- taine la présence dans les sa' les fluvio-marins des genres Éléphant , Hipoarion , Anthracotherium , I.ophiodon , J'alœolherium , Hippopotame , et de quelques autres qu’on y a signalés 2) et nous ne serions pas éton- nés que plusieurs d’entre eux n’y existassent réellement pas. ( I j Tout récemment on a trouvé sous lePalais-de-Justice, dans un terrain qui est la continuation de celui-ci, une mandibule inférieure gauche de Castor, quelques fragments de Rhinocéros et de Bœuf, ainsi que des coquilles terrestreset Ou viables. (ï, M de Christol (Ann. Sc. et Industr du midi de ta France t II, p 15 : — '210 P. GERVAIS ET MARCEL DE SERRES. b) Passons maintenant à l’énumération des espèces marines , dont on trouve les débris dans les sables marins mêlés à ceux des animaux terrestres dont il vient d’être question. Elles appartien- nent à quatre genres différents : Balœna , Physeter, Delphinus et Metaxytherium. Une moitié de mâchoire inférieure , déterrée depuis fort longtemps , démontre la présence d'une espèce de Baleine ou de Rorqual dans les eaux au fond desquelles les sables se sont déposés. Plusieurs dents y signalent un Cachalot ( Physeter ) d’une taille moins grande que le Ca- chalot actuel. I.e genre Dauphin (Delphinus) y est indiqué par quelques vertèbres. Quant au quatrième, le genre Metaxytherium de M. de Christol, les débris qu'il a fournis sont nombreux. I.es rapports des Metaxylheriums avec le Dugong, déjà établis par les recherches de ce naturaliste et de M. de Blainville, sont pleinement confirmées par nos observations. Nous nous contenterons d’indiquer entre ces deux genres d’animaux deux nou- veaux traits de ressemblance qui viennent s'ajouter à ceux que l’on a précédemment observés : t" bes os incisifs , que nous possédons entiers, avaient la même forme que ceux du Dugong et la même direction. Ils logeaient également une paire de fortes dents comparables à des dé- t 832) cite on canon de son Hipparion dans les sables marins supérieurs de Mont- pellier: il mentionne aussi (ibid., p. 17) le petit Hippopotame de Cuvier. Le Palœotherium de l’Hérault, signalé par Faujas Saint-Fond et G. Cuvier, est de Saint-Geniez , où il a été recueilli en 1780 : c'est un fragment de mâchoire inférieure. Cuvier le rapporte au Palœotherium aureliense (t. lit, p. 256, pl 63. fig. 17). L'indication des Lophiodon a aussi été donnée par Cuvier (t. Il, p. 217), mais d'après quelques dents du faubourg Boutonnet , à Montpellier. L'auteur ne les avait plus sous les yeux lorsqu'il en parla; il les avait vues en I 809, chez G. -A Deluc. L’ Anlhracotherium ne nous parait pas mieux démontré. Quant à V Hippopotame (Cuvier, t. I, p. 311, pl. 1, fig 2), il n'est pas dou- teux comme genre. On peut même dire , avec Cuvier, que c'est l'espèce ordinaire d'Europe; mais il n'est pas certain qu'il soit des environs de Montpellier Cuvier le suppose des bords de la Mosson simplement par induction On pourrait aussi , en s'appuyant sur les raisons qu’il allègue, croire que ce fragment vient de Pézé- nas. Et en effet, nous avons des restes d' Hippopotame qui ont été recueillis auprès de cette ville Cuvier cite néanmoins Antoine de Jussieu comme ayant eu des dé- bris d'Hippopotame trouvés sur les bords de la Mosson OWEX. Slîlï LE DICVXODON. 271 f dises. Ces dents, que nous ne connaissons encore qne par leurs alvéoles, (levaient être semblables â celles du fossile des bords du Pô, décrit par MM. Bruno et de Blainville sous le nom de Cheirotherium ou I fanatus Brochii. 2" Lasympbysedelamàcboireinférieure présentait aussi la même forme que dans le Dugong. A sa face antéro-supérieure était également un long aplatissement sur lequel reposait , par sa face inférieure et pos- térieure , la partie descendante des os incisifs. Sur cette surface aplatie de la symphyse menlonnière , on aperçoit encore les traces de cinq paires d’alvéoles rudimentaires , qui rappellent très bien celles que recouvre la plaque cornée du Dugong. Le Metaxytherium de Montpellier ressemble beaucoup par sa taille et par la forme de ses dents molaires h ceux de Blaye et d’Etrichy, près d’Étampes ( les Manatus dubius et Guettardi , Blainv.). Nous avons entrepris sur les fossiles d’espèces terrestres et aquatiques que l’on trouve dans les sables fluvio-marins de l’Hé- rault un ouvrage descriptif. Dans cet ouvrage les principales piè- ces sur lesquelles repose la distinction de nos espèces seront fi- gurées avec soin. 11 sera conçu d’après le même plan que celui qu’a publié l’un de nous sur les fossiles de Lunel-Viel avec la col- laboration de MM. le professeur Dubreuil et le docteur Jeanjean. Cet ouvrage ne tardera pas à paraître. Quatre planches, qui doi- vent en faire partie , sont déjà lithographiées et ont été déposées sur le bureau de l’Académie des Sciences de Paris (1) , en même, temps que le mémoire que nous imprimons aujourd’hui. Description de quelques crânes fossiles trouvés par M. Bain dans une couche DE GRÈS A L EXTRÉMITÉ SUD-EST DE L’AFRIQUE, ET CONSTITUANT UN NOUVEAU GENRE de Reptiles (le Dictnodos). dass l’ordre des Sauriens, par M. Owen ( Trans . de la Soc. tjéol de Londres, V série, t. II. 2- partie. — Extrait). Les Reptiles dont ces crânes démontrent l'existence ne sont point encore connus par l’ensemble de leur squelette d'une manière qui permette de fixer dé- finitivement leurs rapports zoologiques; mais les crânes ont été étudiés par M. Owen avec la sagacité et le soin qui caractérisent tous les travaux de cel éminent paléontologiste, et leur examen fournit des données précieuses sur les affinités et les formes probables de ces animaux. Ils ne présentent complètement les caractères d’aucun des ordres dans les- quels on divise aujourd hui les Reptiles, et ils semblent devoir former un groupe nouveau. Toutefois, si on les compare à chacun de ces ordres, on trouvera des (I) Séance du 16 février 1846 nni:\. SL H LE I>ICVNODO\. 272 différences d une importance inégale, qui semblent démontrer une analogie plus grande avec les Sauriens qu'avec les autres. Leurs os maxillaires supérieurs grands et immobiles , et leurs arcades zygo- matiques complètes et fortes qui s'étendent jusqu’à Los tympanique, empêchent de les rapprocher des Ophidienset des Batraciens. Leurs rapports avec les autres ordres sont moins éloignés, ils se rapprochent des Croc.odiliens par la forme des parties occipitales du crâne, et en particulier par la large surface continue que forment les pariétaux et les occipitaux au-dessus du condyle et du trou occipital. Leur tête courte et arrondie leur donne quelques rapports de forme avec les Chéloniens , dont ils se rapprochaient peut-être aussi par la forme dés parties an- térieures du museau . qui étaient probablement revêtues de corne. Mais , à côté de c.ps analogies, ces Reptiles fossiles diffèrent de tous les Crocodiliens et Chélo- niens connus par des caractères d une haute importance, et en particulier par l'ouverture nasale, qui pst double, par la réunion des os intermaxillaires en un seul , et par le peu de largeur des parties antérieures de la boite crânienne. Leurs rapports paraissent plus réels avec la division si nombreuse et si variée des Lacertiens. Ce n’est, en effet, que chez ces derniers que I on trouve aujour- d’hui la réunion des intermaxillaires , les narines distantes l'une de l’autre, la boite crânienne comprimée en avant, etc. La forme du condyle et quelques autres caractères de détail confirment d'ailleurs cette analogie . que M. Ovven résume en disant que ces crânes sont formés sur un type lacertien avec quelques modifica - lions chéloniennes et crocodiliennes, et plusieurs caractères spéciaux. Mais ce qui distingue le plus complètement ces Reptiles de tous ceux que I on connaît , c’est la présence de deux grandes dents a la partie postérieure de la mâchoire supérieure , tandis que le reste de la bouche en est dépourvu. Ces dents sont en forme de défenses, semblables à de grandes canines de Mammifères, longues, arquées et pointues ; elles rappellent un peu celles du Musc , du Morse et du Machairodus. Un tiers de leur longueur environ est enchâssé dans l’alvéole, et elles présentent à leur base une cavité pulpeuse conique. L’examen microscopique de ces dents montre qu elles n ont aucune analogie avec celles des Reptiles inférieurs , et. en particulier, avec celles des Labyrintlio- dontes. Elles ressemblent, au contraire, à celles des Crocodiliens, et ont même les tubes de la denline encore plus serrés, ce qui les rapproche des canines des Car- nassiers. La forme de ces dents, leur direction et leur pointe aigue peuvent faire penser qu’elles ont servi à l'animal d'armes offensives et défensives, et qu’elles n’ont pas été employées à creuser la terre ou à arracher des végétaux. De tous les Reptiles connus , celui auquel on peut peut-être le mieux comparer ces crânes est le Rhynchosaurus du nouveau grès rouge, qui a des mâchoires sans dents, dont l’extrémité était probablement revêtue de corne, et qui présente avec eux des rapports nombreux dans la disposition des os de la tête. Mais l'ab- sence des deux canines et la séparation des intermaxillaires sont des caractères importants qui rendent cette analogie peu intime. M. Owen a donné à ces fossiles africains le nom de Dicvnodon , qui est formé de <3iç , deux, et de xuviôou; , mot appliqué par Hippocrate aux dents canines. On en connaît déjà quatre espèces. Le savant paléontologiste anglais annonce la pro- chaine publication d’un Mémoire sur quelques os du corps; les vertèbres sont sub- biconcaves, comme dans la plupart des Reptiles fossiles; ce caractère, qui rappelle la classe des Poissons , peut faire présumer que les Dicynodons étaient aquatiques. ( sibl. nniv. Cm. s.ippl , m> s. ir> »i„r> isus RECHERCH ES 273 ANATOMIQl' ES ET ZOOLOGISTES St T, LE SYSTÈME NERVEUX DES ANIMAUX SANS VERTÈBRES: Par M. ÉMILE BLANCHARD IU; SYSTÈME NERVEUX I>ES INSECTES. MEMOIRE SUR LES COLÉOPTÈRES. CHAPITRE I. Considérations générales. Dans certains groupes du règne animal, particulièrement chpz les animaux les plus inférieurs, on ne tarde pas à reconnaître combien il est nécessaire d’étudier leur organisation pour ne pas se méprendre sur leurs affinités naturelles. Dans d’autres groupes, au contraire , les formes générales du type étant plus caractéristiques, toutes les modifications de l’en- veloppe extérieure pouvant être saisies et formulées de manière à caractériser chaque type, l’étude de l’organisation considérée entre des types voisins ne semble pas, au premier abord , devoir être d’une utilité aussi immédiate. C’est ainsi que la classe des Insectes , objet de tant de travaux . de tant de classifications , a pu être disposée de mille manières sans que jusqu’ici les caractères fournis par l’organisation intérieure soient venus jeter quelque lumière sur ces diverses méthodes. Les Insectes en général fournissent, dans leur système appen- diculaire , des caractères propres à faire reconnaître et à délimi- ter les genres et les familles d’une manière plus ou moins na- turelle. Jusqu’à présent , les modifications offertes par les pièces de la bouche , par les pattes et les antennes , ont été seules prises en considération pour faire apprécier les affinités existant à un plus 3* série. Zool T V. (Mai < 846 J 9 <8 'llh e. m.vvniAiti» — sur i.ü système nerveux ou moins haut degré entre les êtres composant cette grande classe du règne animal. Pour les divisions principales, comme les ordres, depuis long- temps on a tenu compte dans leurs caractères et des métamorphoses et des formes de l’animal dans son premier âge. Pour les divisions secondaires, comme les tribus et les familles, on s’est parfois occupé de l’aspect général des larves, jamais de leurs caractères, encore bien moins de leur structure anatomique. Néanmoins , si les formes extérieures dans la classe des Insectes permettent de grouper ces animaux d’une manière assez naturelle, si ces formes suffisent pour limiter nettement quelques groupes et faire apprécier, jusqu’à un certain point , leurs affinités diverses, il n’en est pas moins très vrai que bien des difficultés ne peuvent être résolues avec le secours seul des caractères extérieurs. La comparaison du système appendiculaire chez les Insectes a été poussée assez loin de nos jours : aussi , nous savons mainte- nant qu’il ne sortira plus de cette étude aucun fait bien important. Il faut donc se jeter dans une voie nouvelle pour espérer de nouveaux résultats. Pour perfectionner cette branche de la zoolo- gie , il est nécessaire de chercher des caractères dans l’organisa- tion ; il est nécessaire aussi que les observations anatomiques portent à la fois sur les Insectes parfaits et sur leurs larves. Consi- dérée de cette manière, l’embryogénie des Insectes conduira sans nul doute à la découverte de faits vraiment dignes d’attention. Ce que l’on avait négligé de faire jusqu’à présent, j'ai essayé de l’entreprendre ; et aujourd’hui , après d’assez nombreuses recherches, je suis demeuré convaincu qu’à l’avenir on n’arri- verait pas à modifier avec avantage un point important de la classification entomologique , sans s’appuyer sur des caractères anatomiques. Les recherches sur l’organisation des Insectes sont , à la vérité, déjà assez nombreuses. Après les travaux de Swammerdamm . de Treviranus, de Ramdorh, de M. Serres, de M. Marcel de Serres , etc. , M. Léon Dufour a enrichi la science de ses observa- tions sur l’anatomie des Insectes. Mais ce savant n’en a jamais fait une application bien directe DUS INSECTES.- 275 à la zoologie. C’est au point (Je vue fie l'anatomie comparée plus spécialement que ses recherches ont été dirigées. Quelquefois seulement il a signalé diverses particularités ana- tomiques comme venant à l’appui de certains rapprochements , ou comme venant, au contraire, montrer combien diverses familles sont composées d’éléments hétérogènes ; sans cependant en tirer aucune conclusion plus générale. 11 faut d’ailleurs remarquer que les travaux de M. Léon Dufour, » comme ceux de ses prédécesseurs, ont porté spécialement sur l’appareil alimentaire et sur les organes de la génération. Le sys- tème nerveux n’a presque point été l’objet des études de cet ana- tomiste : aussi . jusqu’à présent , cet appareil n’avait-il été repré- senté que pour un bien petit nombre de types de la classe des Insectes. Swammerdam, Cuvier, M. Serres l’ont fait connaître chez YOryctes rmsicornis et sa larve. M. Straus, chez les Melo- lontha vulgaris. M. Léon Dufour, chez la Cetonia aurata, le Lu- ranus parallelipipedus et le Pyrochroa coccinea. MM. Newport et. Léon Dufour l’ont représenté inexactement dans les Carabes. Au- douin a étudié le système nerveux de laCantharide(6\ vesica/oria ), MM. Brandt et Ratzeburg outre ce dernier, celui du Mylabris ciclto- rii et du M eloe proscarabeus. On doit encore à M. Newport la des- cription et la figure du système nerveux chez le Lucanus cervuse t le Timarcha tenebricosa, à M. Joly, chez le Colaspis atra et à M. Bur- meister chez la Calandra Sonimeri et la larve du Calosoma syco- phanla. C’était là tout ce qui était connu plus ou moins parfaite- ment dans un ordre aussi considérable que celui des Coléoptères. On sait combien plusieurs zoologistes attachent d’importance à la disposition du système nerveux. Quelques uns y voient la partie fondamentale de l’animal. Les recherches anatomiques que j’ai entreprises sur les Insectes et sur les Mollusques m’ont démontré en grande partie la justesse de cette opinion. Cependant on ne peut regarder les caractères tirés de la disposition du système nerveux comme dominateurs et entraînant à leur suite une série d’autres caractères. On doit seulement les considérer comme ayant une prédominance incontestable sur ceux qui sont fournis par les autres parties de l’organisme. 276 E. BEANCU,1RD. — SUR LE SYSTÈME NERVEUX Dans la classe des Insectes , les grandes divisions ne paraissent pas pouvoir reposer sur des modifications de cet appareil. Entre chacun des ordres , le système nerveux semble moins modifié qu’il ne l’est entre les diverses familles d’un même ordre. Les nerfs se distribuent toujours aux organes dans les mêmes rapports. Les grandes différences dans la disposition du système nerveux consistent donc particulièrement dans le rapprochement ou dans l’écartement des centres médullaires. Or, dans la plupart des ordres de la classe des Insectes , on observe des séries de modifications qui sont à peu près de la même nature. Il semble que chaque disposition analogue du système nerveux se retrouve sous des formes extérieures assez différentes, cor- respondant les unes aux autres entre les divers types. Quelques exemples feront mieux comprendre ce fait : ainsi, parmi les Co- léoptères , les uns nous offriront une chaîne ganglionnaire dont lescentres nerveux seront tous écartés; les autres nous présente- ront certains ganglions rapprochés ou même confondus sur un point. Chez d’autres encore , ils seront tous agglomérés dans la cavité thoracique. Ces divers degrés de centralisation que nous voyons dans les Coléoptères, nous les retrouverons dans les Hy- ménoptères, les Hémiptères, etc. Dans plusieurs ordres , nous trouverons toute la gradation , depuis la forme la plus centralisée jusqu’à celle qui l’est le moins chez les Insectes. Chez d’autres , au contraire , nous verrons con- stamment dominer une même forme ou seulement quelques unes d’entre elles. La conclusion générale de mes recherches sur l'organisation , et particulièrement sur le système nerveux . sera donc le tableau exprimant toutes ces analogies parfois masquées sous des aspects différents, et exprimant aussi toutes les affinités entre tous les types de la classe des Insectes. Avant d’arriver à ce but , l’anatomie doit être poussée assez loin dans chacun des ordres pour servir de base à sa classification in- térieure. Il est donc nécessaire de porter d’abord son attention sur tous les types des tribus , des familles et des groupes d’un DES INSECTES. 277 ordre, pour passer ensuite aux divisions d’un autre. J’ai choisi pour le premier sujet de ces recherches les Coléoptères , qui , à raison de leur nombre , de la grande variété de leurs formes et de la difficulté de reconnaître dans l'état actuel leurs diverses affinités, réclamaient de plus nombreuses observations. Dans l’ordre des Coléoptères, plus peut-être que dans aucun autre ordre de la classe des Insectes, on remarque certaines formes bien tranchées, ayant un nombre de représentants extrêmement considérable ; mais on observe en même temps une foule d’autres formes dont les représentants sont peu nombreux comparative- ment, et n’offrent pas cet ensemble de caractères tranchés qu’on trouve pour les premiers. Ceux-là se rapprochent souvent des autres à plusieurs égards ; ils paraissent en être en quelque sorte les satellites (1). D’autres fois, ce sont des intermédiaires, des liens qui unissent certains groupes. Ils indiquent alors des affinités. Jusqu’à présent , à l’aide des caractères fournis par les appen- dices, il a été totalement impossible d’apprécier les valeurs rela- tives et les rapports des differents caractères entre eux. Ensuite , l’enchaînement successif des groupes , auquel on est forcé de s’as* treindre dans l’énumération des ordres , des tribus et des familles, a conduit à négliger certaines affinités bien évidentes qui n’ont pas toujours échappé. Chaque type ne devrait ressembler qu’à celui qui le précède et à celui qui le suit pour que cette série soit naturelle. Mais en re- connaissant , comme le font la plupart des zoologistes , qu’dn type peut présenter avec d’autres des points d’analogie beaucoup plus nombreux , un tableau seul est capable de les représenter. Aussi je suivrai en cela la méthode adoptée par M. Milne Edwards pour résumer la classification des animaux vertébrés (2). Les animaux vertébrés étant peu nombreux comparativement aux invertébrés, si l’on place les types de chaque classe ou de ( I ) Cette expression, souvent employée par M. Milne Edwards dans ses cours au Muséum d'histoire naturelle et il la Faculté des Sciences, paraît plus que toute autre donner une idée juste des rapports de divers petits groupes avec des divi- sions d'un ordre plus élevé. (2) Annales des Scienres naturelles. V série, t. I. p 98 (I8ii). 278 E. BUM'IMR». — SUIS LIS SYSTÈME INERVEUX chaque ordre sur deux , trois ou quatre séries parallèles , dont les termes se correspondent d’une manière plus ou moins satisfai- sante, on réussit à indiquer au moins les rapports les plus ma- nifestes. Les animaux invertébrés ayant des formes plus variées et sur- tout incomparablement plus nombreuses dans chaque grande division, ces sortes de classifications n’amènent aucun résultat vraiment digne d’attention. Chez les Insectes, par exemple, on voit presque constamment une forme principale se lier à la fois , de la manière la plus évidente, avec quatre, six ou dix autres for- mes , s’en rapprochant à divers degrés. On voit mieux peut-être que dans la plupart des autres classes du règne animal des formes tenant de près à une famille et s’écartant en quelque sorte de toutes les autres. Un entomologiste anglais, M. Mac-Leay, en désignant certains groupes par l’épithète d'aberrants , a voulu indiquer la nature de ces types qui paraissent pour ainsi dire sortir du cadre formé par les autres. Malheureusement cette dénomination n’a pas toute la justesse possible. Elle semble devoir s’appliquer à quelque chose d’anomal , à des particularités tout-à-fait en dehors de celles qui nous sont offertes par l'ensemble des représentants d’une classe ou d’un ordre. Or cette idée ne serait pas exacte, il ne faut en- tendre ici par le mot de groupes aberrants que des divisions s’éloi- gnant de la plupart des autres divisions par un ou plusieurs de leurs èaractères , sans toutefois présenter aucune particularité qui pourrait les séparer de la classe ou de l’ordre auquel elles appar- tiennent. En zoologie, on est bien loin encore d’être arrivé pour chaque classe à reconnaître la valeur relative des caractères fournis par les divers organes. Presque toujours , ceux qui sont en apparence les plus saillants dans tel ou tel groupe, viennent à disparaître plus ou moins chez certaines espèces. Ainsi les divisions les plus natu- relles perdent leurs limites tranchées. Ainsi l’on est amené à crain- dre ordinairement d’attacher trop d’importance à ces caractères qui tendent si facilement à s’effacer. Cependant ce n’est parfois qu’une apparence trompeuse ; le ca- DES INSECTES. 279 ractère extérieur a disparu , mais toutes les particularités fonda- mentales d’organisation ont persisté. J’aurai lieu dans le cours de pe travail d’en citer plus d'un exemple. L’étude de la structure organique aux différentes périodes de la vie des êtres, comparée aux formes extérieures, paraît devoir seule conduire à des résultats satisfaisants. Tous les types étant parfaitement connus ; la comparaison la plus rigoureuse pouvant être établie entre chacun de leurs organes , alors seulement il de- viendra facile d’en déduire l’expression des affinités que nous offrent tous les êtres entre eux. Alors seulement les rapports qui unissent tous les types pourront être nettement appréciés. A ce point de vue nous obtiendrons du système nerveux des ré- sultats considérables. On l’avait étudié dans un si petit nombre d’insectes, qu’il était totalement impossible d’avoir une idée même un peu générale des modifications que présente cet appareil dans un même ordre entre les diverses tribus, entre les diverses fa- milles qui le composent. On ignorait complètement si ces modi- fications correspondaient avec des groupes naturels. Au point de vue purement anatomique et physiologique, le sys- tème nerveux des Insectes était déjà assez bien connu par suite des travaux de M. Newport. Les recherches antérieures d’Hérold et de M. Serres avaient déjà montré la manière dont se modifient les groupements des centres nerveux dans certains Coléoptères et Lépidoptères. M. Newport a agrandi sur ce point le cercle de nos connaissances par de nouvelles observations sur plusieurs autres Insectes du même ordre. Néanmoins il restait encore divers points à éclaircir. La nécessité de connaître d’une manière approfondie, dans chaque groupe du règne animal, l’organisation des espèces con- sidérées comme types des grandes divisions est bien reconnue. Il n’est donc plus besoin de s’attacher à montrer l’utilité d’une des- cription anatomique faite avec détails. En effet , c’est seulement lorsque la position de chaque organe aussi bien que tous ses caractères de forme et de structure sont bien décrits chez le type, qu’il devient facile d’apprécier à leur justp valeur les différences et les ressemblances qu’offrent avec 280 E. BI.AMUAKII. — SUK LE SYSTÈME NERVEUX lui les êtres s’en rapprochant ou s’en éloignant à certains égards. C'est pour cette raison que je crois devoir donner une descrip- tion détaillée du système nerveux des Coléoptères en prenant pour exemple un Insecte très vulgaire, le Hanneton. Ayant d’abord observé sur ce type diverses particularités qui n’ont pas été si- gnalées par M, Straus-Durckheim , il m’a semblé utile de m’ar- rêter à ce Coléoptère. J’ai cherché à étudier le système nerveux du Hanneton dans tous ses détails; mais comme- un type n’est bien connu que si ou l’a comparé avec d’autres types , j’ai examiné les analogies exis- tant entre le système nerveux du Hanneton et celui de bien d’au- tres Insectes. Afin d’établir une comparaison plus rigoureuse, j’ai choisi dans le même ordre un Insecte qui, sous le rapport de cet appa- reil , s’éloigne extrêmement du Hanneton. J'ai choisi le Carabe doré. Insecte des plus répandus dans notre pays, ayant une taille assez considérable , sur lequel, par conséquent , on pourra vérifier ines observations, aussi facilement qu’on peut le faire sur le Hanneton. Le système nerveux étanl bien connu dans ces deux types éloi- gnés, on verra de suife sur quels points on doit surtout porter son attention pour l’appréciation des caractères zoologiques. Il y a environ dix à douze ans que M. Nevvport a publié ses Recherches sur le système nerveux des Insectes (1). Cet anato- miste s’est occupé de la structure intime des ganglions et des fi- lets nerveux. Comme cette structure ne diffère pas sensiblement d’un type à l’autre, je n’aurai rien de bien important à ajouter ici sur ce point. Mais M. Nevvport s’est occupé également de la disposition du système nerveux dans plusieurs Coléoptères et surtout dans des Lépidoptères considérés aux divers états de leur vie. Ces recher- ches si bien exécutées ont montré non seulement des particularités dignes d’intérêt dans chacun des types étudiés , mais aussi des faits généraux propres à la classe entière des Insectes. M) Philosophienl Transite tinm, 1832, part. 2, 1 834. pari. 2. 1836. part. 2 DES INSECTES. 281 Cependant, malgré ces travaux considérables, je n'aurai peut- être pas seulement à signaler la disposition particulière du sys- tème nerveux dans le type Hanneton et dans le type Carabe. J’au- rai en outre à mentionner, touchant ce qui est général à tous les Insectes, certains détails qui ne me paraissent pas tout-à-faitsans importance et qu’on n’a pas signalés jusqu’à présent ou qui l’ont été trop incomplètement. Pour les nerfs de l’abdomen , pour ceux venant se rendre aux organes de la génération , pour la disposition des nerfs propres aux différentes parties de la bouche , mes observations pourront ajouter quelque chose à celles de mes devanciers. Mais c’est plus particulièrement pour la partie susintestinale du système nerveux que l’on compare au grand sympathique des animaux vertébrés, que mes observations me paraissent devoir offrir un intérêt plus réel. J’ai étendu ensuite mes recherches autant que possible à tous les types dans l’ordre des Coléoptères. 11 était nécessaire pour l’anatomie comparée que le nombre et le mode de groupement des ganglions fussent connus dans chaque famille, quel que dût être le résultat auquel conduiraient ces observations. Elles ne tardèrent pas à me convaincre que la zoologie, que la connaissance des rapports naturels unissant entre eux les êtres d’une même classe , que l’appréciation des limites à poser à cha- que groupe avait considérablement à s’éclairer par la considé- ration du système nerveux. Je vis bientôt que chaque forme dans la disposition de l’appareil nerveux correspondait à un groupe naturel. Je reconnus en même temps que cette disposition ne variait pas entre des types voisins, même quand la forme générale du corps différait beaucoup. Au premier abord , on pouvait être porté à présumer qu’un insecte court et élargi aurait un système nerveux dont les gan- glions seraient très rapprochés les uns des autres ou même réunis ; en un mot , un système nerveux très centralisé. On pou- vait croire aussi que cet appareil dans un Insecte long serait également allongé ; que ses ganglions seraient très écartés les uns des autres. 282 E. BLANCHARD. — SUR I.E SYSTÈME NERVEUX Or, c’est ce qui n’est point. 11 n’y a aucune coïncidence appa- rente entre la forme extérieure et la disposition du système ner- veux. Chez tel Insecte allongé il est très centralisé sur un point de l’économie. Chez tel autre Insecte court ou même orbiculaire, les ganglions demeurent nombreux et espacés. Depuis la forme la plus centralisée jusqu’à celle qui l’est le moins , on trouvera une série d'intermédiaires. C’est le cas pour les Coléoptères. Les travaux d’IIérold , de M. Newport , etc. , ont déjà appris que la forme la plus simple du système nerveux se trouvait chez la larve , et que cet appareil se centralisait de plus en plus quand l’Insecte passait par l’état de nymphe et devenait adulte. Le système nerveux ne parvenant pas au même degré de cen- tralisation chez tous les Insectes, il demeure constant que tous n’atteignent pas le même degré de perfection. On observe donc à l’égard de cette classe d’animaux ce qui a été observé il y a près de vingt ans à l'égard de la classe des Crustacés par MM. Au- douin et Milne Edwards fl). Aussi l’examen anatomique des larves comparées aux Insectes parfaits est-il d’un haut intérêt; car on découvre alors telle forme dans un animal adulte correspondant ici à telle forme dans une larve, là dans une nymphe. On tirera encore d’autres avantages de cette étude compa- rative. Tous les animaux ayant une tendance plus grande à l’ana- logie à l’état embryonnaire qu’à l’état adulte, quand des différences observées chez les Insectes parfaits entre des groupes ou des fa- milles ne seront pas encore saisissables chez les larves , leurs ca- ractères généraux s’étendront souvent alors à des tribus entières. Par conséquent les affinités qui semblent s’effacer chez les In- sectes parfaits, paraîtront souvent bien évidentes chez leurs larves. Ayant remarqué l’importance que le système nerveux pouvait avoir dans la classification , j’ai dû rechercher si le degré de cen- tralisation plus ou moins complet ne coïnciderait pas avec d’autres particularités d’organisation. (I) Recherches anatomiques sur le système nerveux des C ntslacés ( Annales des Sciences naturelles. Ir*' série, I XIV, p 77 — 1828) DES INSECTES. 2S3 Jusqu’ici le résultat a été négatif, je n’ai observé aucune coïn- cidence à cet égard. Ce sont les ganglions abdominaux qui pré- sentent le plus de différences d’une famille à l’autre. Depuis long- tempsles zoologistes, contrairement àl’opinion émise parM.Straus- Durckheim, ont reconnu que la soudure plus ou moins complète des anneaux de l’abdomen n’était nullement en rapport avec le nombre des ganglions. Mais d’autre part on ne découvre pas de correspondance plus manifeste. On peut considérer les types offrant le système nerveux le plus centralisé comme les plus parfaits. C’est au reste un prin- cipe admis et qui est indiqué chez les Insectes par les changements que subit cet appareil pendant leur accroissement. On doit re- garder les types chez lesquels les ganglions sont les plus sépa- rés, comme étant parvenus à un degré de perfection moins com- plet ; comme étant en quelque sorte devenus adultes plus tôt que les autres. Entre ces deux extrêmes se trouvent dès lors tous les intermédiaires. 11 est à regretter que l’observation des œufs soit si difficile à cause de leur petitesse et surtout de l’opacité de leur enveloppe. Les jeunes larves qui éclosent n’étant pas toutes par- venues au même degré de développement, il y aurait sans doute plus d’un fait intéressant à observer sur les développements de l’animal pendant son état d’œuf. Parmi les larves , toutes n’offrant pas un degré de développe- ment comparable, les unes sont beaucoup moins éloignées que les autres de la forme de l’Insecte parfait. Celles dont l’état embryon- naire est moins avancé à la sortie de l’œuf, subissent par consé- quent des changements plus considérables pendant leur état de nymphe, car les organes ne se modifient pas sensiblement durant la vie des larves : ils s’accroissent seulement. C’est en scrutant à la fois l’organisation des Insectes aux di- verses phases de leur vie qu’on arrivera sans nul doute à pou- voir les grouper d’une manière satisfaisante, en indiquant nette- ment leurs diverses relations. Mes efforts ont tendu vers ce but , en me livrant à ces recherches sur le système nerveux des Insectes. Je crois, dès aujourd’hui, être à même d’en tirer un parti avantageux pour caractériser les groupes naturels. Malheu- 284 E. BLANCHARD. SUR LE SYSTÈME .NERVEUX reusement il devait rester, et il restera un certain nombre de la- cunes. Plusieurs familles n’ont pas de représentants dans notre pays, et l’on se procure toujours difficilement les espèces exotiques dans l’alcool. Souvent, d’ailleurs, il est impossible de tirer parti des animaux conservés de cette manière quand leur séjour dans la liqueur a été trop prolongé. Pour les espèces indigènes des divers genres, les unes sont d’une exiguïté telle que leur dissection est loin d’être toujours possible ; les autres sont assez rares pour qu’on se les procure seulement par hasard. Les larves surtout échappent facilement, et comme on ne con- naît pas les métamorphoses de tous les Coléoptères, on est encore fréquemment arrêté de ce côté. C’est seulement à l’aide du temps qu'on parviendra à combler les lacunes que je viens d’indiquer. Mais une fois la voie ouverte , de nouveaux matériaux viennent facilement s’ajouter à un ensemble déjà considérable. En résumé , les divisions en tribus et en familles ne peuvent être considérées comme bien établies et bien connues dans leurs rapports entre elles qu’autant qu’elles reposent principalement sur des caractères organiques. Le système nerveux offrant plus que toute autre partie de l’or- ganisme des modifications coïncidant avec des divisions assez im- portantes , cet appareil doit jouer un grand rôle dans l’apprécia- tion des affinités naturelles. Les divisions très secondaires trouveront plus facilement alors des caractères dans la forme du canal alimentaire , des organes de la génération et du système appendiculaire. CHAPITRE II. De la description anatomique du système nerveux des Coléoptères. — Le Hanneton commun ( Melolontha vulgaris. Lin.) et le Carabe doré [Cor a - bus auratus. Lin.) considérés comme types dans cet ordre. Le système nerveux des Insectes, on le sait, est composé d’une série de ganglions unis par des cordons de communication. On compte d’abord deux ganglions cérébroïdes , souvent désignés par les anatomistes sous la dénomination de cerveau. A ces centres DES INSECTES. 285 nerveux toujours situés dans la tète au-dessus de l'œsophage , vient s’anastomoser le système nerveux splanchnique dont les gan- glions et les nerfs se distribuent plus particulièrement aux sys- tèmes de la vie organique. Les deux ganglions cérébroïdes , au moyen de deux cordons , formant un collier autour de l’oesophage , sont en connexion di- recte avec deux autres centres médullaires constituant toujours une seule masse située également dans la tète , au-dessous de la partie antérieure du tube digestif. A cette première paire de centres nerveux sous-intestinaux , succède une double chaîne de ganglions plus ou moins rapprochés, plus ou moins centralisés sur un point de l’économie, suivant les familles et les genres. Ces faits généraux sont trop connus et sont énoncés trop clai- rement dans nombre d'ouvrages sur l’anatomie comparée ou seu- lement sur l'anatomie spéciale des Insectes, pour qu’il soit utile de les développer ici Je me contenterai donc de décrire isolément chaque partie du système nerveux des Insectes coléoptères, en faisant surtout con- naître avec détails la disposition qu’affecte cet appareil dans les deux types éloignés que j’ai choisis : le Hanneton commun et le Carabe doré. § I Les ganglions cérébroïdes et les nerfs auxquels ils donnent naissance. Les ganglions cérébroïdes, généralement désignés par les ana- tomistes sous la dénomination de cerveau, reposent toujours directement sur l’œsophage, et constituent une seule masse bilo— bée. Chez le Hanneton commun , les ganglions cérébroïdes ont en dessus la forme de deux corps parfaitement sphériques qui seraient accolés l’un à l’autre (l) ; c’est ce que n’indique ni la figure ni la description données par M. Straus. Chez beaucoup d’autres insectes, tels que les Carabes, les Dytiques, les Hydrophiles, les deux ganglions sont plus confondus ensemble. Néanmoins on distingue toujours nettement les deux lobes (2). (1) Règne animal, nouvelle édition, pl. 3, a (2) M., pl. 3 bis, fig. t— t. 286 E. iiuvinmi. — sur i.k système nerveux La grosseur de ces centres nerveux, par rapport à la dimen- sion de la tète , varie beaucoup suivant les groupes. Dans le Hanneton , les ganglions cérébroïdes occupent près de la moitié de la largeur de la tête. Dans les Ateuchus, qui appartiennent à la même tribu , ces masses sont déjà proportionnellement moins volumineuses ; dans les Carabes et les Dytiques , elles le sont moins encore; dans les Hydrophiles, elles n’occupent guère plus du quart de la largeur de la tète. On remarque en général que le cerveau devient d’autant plus étroit que la tête de l’insecte est plus allongée, ou que les muscles des mandibules occupent un plus grand espace. On observe déjà cette diminution dans les Carabes; elle devient plus manifeste encore dans certains Cérambyciens, et surtout chez les Lucanes (t). I.a première paire de nerfs partant des ganglions cérébroïdes se rend aux antennes; ces nerfs antennaires, dont le volume est toujours assez considérable , ont leur origine à la face antérieure et inférieure des centres médullaires cérébroïdes. Ils se dirigent obliquement en passant sur le muscle adducteur des mandi- bules (2). Comme l’a remarqué M. Straus , ces nerfs se divisent en deux branches chez le Hanneton, et j’ai observé qu’il en était de même chez la plupart des Coléoptères. Le Carabe doré m’a présenté cette même division dans les nerfs des antennes et à leur base ; j’ai re- connu dans cet insecte l’existence d’un petit renflement ganglion- naire , analogue à celui qui a été observé dans le Hanneton (3). Il est plus ou moins volumineux ; mais on le retrouve néanmoins dans tous les Coléoptères. Les nerfs de la seconde paire sont les nerfs optiques. En géné- ral , ils ont une grosseur très considérable ; souvent même ils semblent n’être que la continuation des ganglions cérébroïdes. C’est le cas pour le Hanneton (h) , mais non pas pour tous les Insectes , comme le dit M. Straus. En effet , dans les Ateuchus, (<) PI 8, fig. I — t. (■ l Règne animal, nouvelle édition, pl. 4, fig. t — 6 (3) ld., pl. 3 bis, fig. t — la. (4) ld., pl. 4, fig. 1— c. DES INSECTES. 287 dans les Carabes (1) , etc., ils sont déjà un peu moins gros pro- portionnellement ; dans les Dytiques (2), ils le sont un peu moins encore. Chez les Hydrophiles, par exemple (Hydrophilus piceus Lin.) , où les ganglions cérébroïdes sont déjà très petits par rap- port à la grande taille de l’Insecte, les nerfs optiques sont grêles, presque aussi grêles que les nerfs des antennes (3). Il n’y a donc rien de tout-à-fait général à cet égard. Une paire de nerfs d’un volume assez considérable , que M. Newport regarde comme la troisième paire, prend naissance à la face inférieure du cerveau , et descend de chaque côté de l’œsophage. Ces nerfs sont les connectifs unissant les centres nerveux cérébroïdes avec les ganglions sous-œsophagiens, et for- mant ainsi un véritable collier. En outre , à la partie antérieure et inférieure , les ganglions cérébroïdes donnent naissance à deux nerfs, l’un allant s’anastomoser avec le ganglion frontal (4), l’autre distribuant ses filets à la lèvre supérieure (3). M. Straus n’a point aperçu ces nerfs ; ceux du labre ont du reste échappé à la plupart des anatomistes. M. Burmeister (6) est le seul disant avoir vu des nerfs partant de la face inférieure du cerveau, et pénétrant dans la lèvre supé- rieure. Souvent les cordons du ganglion frontal et les nerfs du labre paraissent avoir deux insertions distinctes au cerveau ; c’est le cas aussi pour la plupart des Coléoptères à l’état parfait, mais il n’en est pas de même chez leurs larves. Il naît un seul tronc nerveux se divisant en deux branches. C’est ce que j’ai représenté dans la larve du Hanneton (7). Quant au rôle physiologique que remplissent les centres ner- veux, cérébroïdes des Insectes, on ne saurait le comparer entière- ment à celui que remplit le cerveau des animaux vertébrés. Chez (t) Règne animal, nouvelle édition, pl 3 bis, fig. I — t b. (2j Pl. 10, fig. 1 — 1 6. (3) PI 11, fig. 1—16. (4) Règne animal, nouvelle édition, pl. 4, fig. 1 e. 3e. 4e, etc (5) Id , fig. 1 d, 3d, etc. (6) Hundbuch der Entomologie, t. I, p 309 (1832). (7) Règne animal, pl. 4, fig. 3, e,d ’288 E. Ull\(ll 1BII. — SL il LE SYSTÈME NERVEUX les Insectes, des facultés appartenant à ces ganglions cérébroïdes paraissent se retrouver jusqu’à un certain point dans les ganglions sous-intestinaux. Si , par exemple , on enlève la tète d’un Hanne- ton, d’une Abeille ou d'un Insecte quelconque, en ayant soin au moyen d’un peu de cire d’empêcher le liquide sanguin de s’écouler, l’animal peut non seulement vivre encore assez longtemps , mais même demeurer susceptible de mouvements réfléchis. Si l’on vient à lui frotter l’abdomen, on le voit aussitôt y porter la patte et gratter l’endroit qui a été touché. Certaines facultés propres seulement au cerveau chez les animaux vertébrés, ne sont pas localisées au même degré chez les Insectes. Néanmoins les ganglions céré- broïdes ont évidemment une. prédominance bien marquée sur les ganglions sous-intestinaux. Us fournissent les nerfs optiques et les nerfs des antennes qui paraissent être le siège d’un sens, pro- bablement celui de l’ouïe , par conséquent aux organes des sens qui mettent le mieux l’animal en relation avec le monde exté- rieur. Considérons en outre que ces masses médullaires cérébroï- des constituent le centre principal de l’appareil nerveux; car la chaîne ganglionnaire sous-intestinale vient s’y insérer de même que le système nerveux splanchnique. § II. Le système nerveux des appareils de la vie organique Cette partie du système nerveux des animaux articulés a été l’objet d'observations intéressantes et toutes spéciales de la part de divers anatomistes. D’abord découverte chez les Insectes par Svvammerdam (1), qui appliqua au nerf principal le nom de ré- current, ce système nerveux sus-intestinal a été décrit avec plus de détails dans la chenille du Cossus par Lyonnet. (2). Depuis, MM. Serres (3) et Muller (ft) , qui le comparent au grand sympa- thique des animaux vertébrés, l’ont étudié dans divers Insectes. (1) Biblia nalurœ , t. I, p. 316 et 317, et pl. 28, fig. 2 et 3 g. (2) Lyonnet, Traité anatomique de la Chenille du Saule (1762). (3< Latreille, Règne animal de Cuvier, t. IV, p. 23 (1829). (4) Ueber ein eigenthümliches dem nervus sympathicus analoges nerveusystem der Engeweide bei den Insecten ; in Nova Acta phys. med. Nat. Curios.., t. XIV, p. 71 , pl. vu (1 828). DUS INSF.CTFS. 289 M. Brandt (1) l’a décrit et représenté dans un plus grand nombre. Il l’a même examiné comparativement dans les Mollusques ainsi que dans les Crustacés , oit MM. Audouin et Milne Edwards l’a- vaient signalé pour la première fois (2). M. Newport a aussi apporté quelques observations sur ce sujet. A l’égard du Hanneton , M. Straus en a fait une étude moins approfondie. Il a considéré une portion de ce système nerveux comme des ganglions collatéraux ou accessoires du cerveau. Quant à l’autre portion , qu’il appelle système nerveux des organes vitaux, il en a seulement aperçu les deux ganglions antérieurs. Leurs connexions avec les centres nerveux cérébroïdes lui ont même totalement échappé (3). Dans un ouvrage postérieur (4), le même anatomiste paraît toutefois avoir en partie reconnu ce qu’il y a d’incomplet à cet égard dans son travail sur le Hanneton. Il dit s’être aperçu dans le Bradypore que les ganglions, considérés par lui, d’abord, comme des dépendances du cerveau , font partie du sympathique. C’est ce que MM. Brandt et Newport avaient fait remarquer long- temps auparavant. On pourra s’étonner que le système nerveux sus - œsophagien des Insectes soit demeuré bien peu connu . sous un certain point de vue , après les recherches que je viens de signaler. Cependant un fait important a échappé, les anatomistes ayant reconnu tous que les ganglions impairs ont pour fonction de distribuer leurs nerfs au canal alimentaire, lis paraissent s’être beaucoup moins occupés du mode de distribution des nerfs pro- venant des autres ganglions. (•1) Mémoires de l'Académie imp. des Sciences de Saint-Pétersbourg , et Annales des Sciences naturelles , 2e série, t. V, p. 81 , pl. 4 et 5 (1836], (2) Mémoire sur le système nerveux des Crustacés ( Annales des Sciences natu- relles, \rt série, t. XIV, p. 77). (3) Je n'ai pu apercevoir de ce système nerveux que deux ganglions impairs placés sur l'œsophage, auquel ils distribuent leurs nerfs. Il serait cependant pos- sible qu’il en existât d'autres, dans le tronc et dans l'abdomen, qui m'aient échappé (Straus-Durckheim, Considérations générales sur i anatomie comparée des animaux articulés, p. 406). (4) Traité d'anatomiepralique, t. II, p 351 (1842). 3r série Zool- T V. (Mai 1 846 ) 3 19 290 E. BI,l\(niRD. — SUR LE SYSTÈME NERVEUX Toutefois la dénomination de nerfs stomatogastriques donnée par M. Brandt, celle de nerfs pharyngiens donnée par M. Bur- meister, nous montrent que cet ensemble de ganglions et de nerfs a été regardé comme étant affecté plus spécialement au canal alimentaire. Or l’usage de ces ganglions antérieurs latéraux , comme les appelle M. iNewport , m’avait semblé au premier abord une chose essentielle à rechercher. Par des dissections faites avec un grand soin , je parvins à m’assurer parfaitement, d’abord dans le Hanneton, puis dans le Carabe et le Dytique, puis dans des Charançons et des Cérambyx, puis enfin dans beaucoup d’autres Coléoptères, qu’une paire de ces petits ganglions donnait ses principaux nerfs au vaisseau dorsal , tandis que ceux de l’autre paire distribuaient les leurs aux trachées. Ainsi s’explique l’existence de ces petits ganglions toujours placés de la même manière les uns par rapport aux autres. Ainsi l’on voit que chaque appareil de la vie organique reçoit des nerfs de ganglions particuliers. Cette division du travail physiologique ne paraît pas même avoir été soupçonnée. Cependant, une fois le fait connu , on le comprend si bien , il semble si évident , il est en même temps si facile à constater , qu’on est surpris en voyant comment on a négligé de rechercher si l’appareil de la circula- tion et l’appareil de la respiration n’avaient point leurs ganglions et leurs nerfs particuliers comme l’appareil alimentaire. Dans l’ordre des Coléoptères, j’ai trouvé constamment ces cen- tres médullaires disposés d’une manière identique chez les groupes les plus différents. Dans plusieurs autres ordres de la classe des Insectes, on a observé au contraire certaines différences. Je me bornerai ici à décrire cette portion du système nerveux dans les Coléoptères, me réservant de signaler les modifications qu’on y rencontre dans les autres ordres lorsque j’aurai examiné compa- rativement. tous les types de ces divers autres ordres. Il ne serait pas impossible qu’on y découvrît certains caractères correspon- dant avec les grandes divisions de la classe des Insectes. Chez tous ces animaux, on peut distinguer dans le système ner- veux sympathique ou de la vie organique trois portions parfaite- DES INSECTES. 291 ment distinctes : 1° les ganglions et les nerfs intestinaux ; 2* les ganglions et les nerfs du vaisseau dorsal : 3° les ganglions et les nerfs trachéens. Dans les Coléoptères , on compte trois ganglions intestinaux : c’est le système nerveux impair situé sur la ligne médiane du tube digestif. On peut considérer chacun de ces ganglions comme étant formé par la réunion de deux parties, ainsi qu’on l’admet pour la chaîne ganglionnaire sous-intestinale. Dans l’embryon très jeune ces parties sont peut-être réellement distinctes , mais la dif- ficulté est bien grande pour s’en assurer. Au reste , les ganglions intestinaux paraissent même exister par paire dans d’autres ordres, chez plusieurs Orthoptères, par exemple. Tous les anatomistes ont nommé avec Lyonrtët le premier de ces petits centres médullaires ganglion frontal. Sa position donne l’explication de ce nom. Le ganglion frontal (1) est toujours placé en avant du cerveau. Il offre de chaque côté un cordon nerveux , se recourbant et ve- nant s’insérer à la partie inférieure de chacun des ganglions céré- broïdes. A leur point d’insertion , on remarque ordinairement un petit renflement. Ces deux cordons de communication , obser- vés depuis longtemps par tant d’anatomistes, ont complètement échappé à M. Straus chez le Hanneton. Dans cet Insecte , ils sont assez longs et décrivent un arc très prolongé , car le ganglion frontal est plus rapproché du cerveau que dans beaucoup d’autres Coléoptères, comme ceux particuliè- rement dont la tète est allongée , le Carabe , par exemple. (> ganglion est en forme de triangle renversé plus ou moins élargi. Antérieurement il émet un petit filet nerveux , qui se divise en plusieurs branches sur les muscles du pharynx. Dans le Hanneton il est très petit et un peu difficile à voir: au contraire chez le Ca- rabe , il est assez facile à mettre en évidence. Les cordons de communication entre le ganglion frontal et le cerveau offrent encore sur leur trajet une branche très faible dont les divisions se perdent dans les muscles du pharynx. F.u (l ) Règne animal, pl . 4, fip le. 3e. fig. 4e; pl. 3 bis. fig. 1 — te, 2 — le.ptr 292 F. BLANCHARD. — SLR I.E SYSTÈME NERVEUX arrière le ganglion frontal émet un seul nerf, se dirigeant en droite ligne sur l’œsophage en passant sous les ganglions céré- broïdes. C’est le récurrent de Swammerdam et de Lyonnet ; c’est le vagus pour M. New port , qui le compare au nerf vague des animaux vertébrés. Ce nerf récurrent en arrière du cerveau se renfle en un très petit ganglion allongé (1) en connexion au moyen de deux petits filets, avec les centres médullaires du vais- seau dorsal. Au-delà le nerf récurrent se prolonge jusqu’à l’ex- trémité du jabot , où l’on observe un troisième ganglion intesti- nal (2). Le plus ordinairement le nerf récurrent est simple : il en est ainsi dans le Carabe (3). Chez le Hanneton, il est au contraire double (A). Sa longueur, il est inutile de le dire, est toujours celle de l’œsophage et du jabot réunis. Le ganglion du jabot (5) , que M. Straus n’est point parvenu à découvrir dans le Hanneton , est un peu triangulaire chez cet insecte ; mais le plus souvent il estde forme un peu ovalaire , comme dans le Carabe. Il émet deux ou trois branches, qui s’étendent sur le gésier et le ventricule chyli- fique, en se subdivisant en (ilets extrêmement déliés. On parvient quelquefois à les suivre jusque sur l’intestin , mais là on en perd la trace. Le nerf récurrent offre de nombreuses branches sur son trajet ; ces filets nerveux , cpii sont extrêmement fins, se ramifient tout autour de l’œsophage et du jabot. Ils sont surtout très dis- tincts chez les Dytiques. Les ganglions du vaisseau dorsal (6) sont situés de chaque côté de l’œsophage et à sa partie supérieure, appliqués contre le vais- seau dorsal. Ils adhèrent directement au cerveau : une commissure plus ou moins longue les unit l’un à l'autre. Dans le Hanneton, ces renflements médullaires sont beaucoup plus gros que dans la plupart des autres Coléoptères ; ils fournissent chacun un filet se rendant au vaisseau dorsal, où j’ai pu le suivre jusqu’au-delà du (4) Règne animal, pl. 4, fig. 1. (2) ld pl 4, fig. I b, fig i(i. pl 3 (iis, fig I — \ g (3) ld.. pl 3 bis, fig. 1 — 1 h. (i) ld., pl. 4, fig. 1 g. (5) ld., pl. 4, fig. I r. (6) ld , pl 4 fig. 1 h. DES INSECTES. 393 thorax (1). Ces deux ganglions émettent encore un ou deux petits filets latéraux, dont l’un suit le nerf optique, et donne une branche s’anastomosant avec une division du nerf mandibulaire. Ces cen- tres nerveux de l’appareil circulatoire doivent acquérir un déve- loppement plus considérable avec une circulation plus parfaite ; c’est peut-être la raison pour laquelle on leur trouve une plus grande dimension chez les Myriapodes que chez les Insectes. Les ganglions trachéens (2) sont unis aux ganglions angéiens par un cordon assez court se courbant autour de l’œsophage. Ces deux petits centres médullaires se trouvent ainsi très rapprochés par leur partie inférieure, où l’on observe entre eux une commis- sure extrêmement grêle. Ils fournissent plusieurs filets nerveux d’une finesse extrême, que j’ai réussi à suivre assez loin sur les troncs trachéens qui pénètrent dans la tête. Dès lors je n’ai pu douter de l’usage particulier de ces centres nerveux, car j’ai suivi leurs filets sur les trachées non seulement dans le Hanneton, mais dans le Carabe, dans divers Charançons, dans plusieurs Longi- cornes , etc. Chez les Dytiques , on les aperçoit aussi assez facile- ment : d’ailleurs ces ganglions reposent directement sur leurs troncs trachéens. § III. La chaîne ganglionnaire sous-inteslinale. Celte partie considérable du système nerveux des Insectes, que les anatomistes ont souvent comparée à la moelle épinière des animaux vertébrés, peut être distinguée en trois portions : celle de la tcte, celle du thorax , celle de l’abdomen. Je ne m’arrêterai nullement à cette comparaison , qui a été faite entre le système nerveux des invertébrés et celui des vertébrés, bien n’indique réellement cette analogie. Il n’y a aucun avantage à l’admettre, car elle ne saurait être démontrée d’une manière bien péremp- toire. On sait que M. Serres (3) compare au contraire les centres ner- veux sous-intestinaux des Insectes aux ganglions intervertébraux 'I Règne animal, pl t, fig I . i (2) Id , pl. 4, fig I k, fig. 3 /(, pl. 3 bis, fig. 2 — I 6, fig 3 — I b, elc. f3) Anatomie itu cerveau , I I , p 234, 253. cl i II p 45 et, sim (1823) *29Û E. BI;l\(lltltP. — Sun LE SYSTÈME NE11VEUX Je l’homme et des animaux supérieurs. Ce savant dès lors con- sidère les Insectes comme étant dépourvus d'une moelle épi- nière. § IV’. Le ganglion sous-œsophagien. Je désignerai ainsi le centre nerveux , qu’un naturaliste alle- mand , M. Burmeister, a comparé au cervelet , sans que je puisse m’expliquer comment il a trouvé une semblable analogie. Cette masse médullaire est toujours située à la partie postérieure de la tète, exactement au-dessous de l’œsophage 1). Ses deux angles antérieurs offrent deux sortes de bras , se redressant contre les parties latérales de l’œsophage (2) : ce sont les connectifs qui l’u- nissent aux ganglions cérébroïdes. lin arrière elle se prolonge un peu , de manière à former les cuisses , qui se continuent avec les connectifs du ganglion prothoracique. Le centre médullaire sous- œsophagien est en général assez allongé. Son volume n’égale pas celui de la moitié du cerveau , surtout chez le Hanneton , où ce dernier est très volumineux. C’est du ganglion sous-œsophagien que toutes les pièces de la bouche , en en exceptant toutefois la lèvre supérieure , reçoivent leurs nerfs. La plupart des anatomistes ont vu seulement les nerfs des man- dibules et des mâchoires , bien plus rarement ceux de la lèvre inférieure (3). Ces derniers , en effet, ont échappé à M. Straus ; ce qui a pu faire croire que chez le Hanneton la lèvre inférieure ne recevait que des filets nerveux provenant des branches des nerfs maxil- laires (h). (1) Règne animal, pl i, fig 2a. fig. 3—1. fig. I — 1 : pl 3, fig 1-3. (2) ld., pl. i, fig. 2 b. (3) La lèvre, la langue et les palpes labiaux doivent nécessairement recevoir un tronc nerveux, lequel formerait proprement la troisième paire ; mais je n'ai pu le découvrir, vu I extrême petitesse des parties. — Straus-Durckheim , Considé- rations générales sur l'anatomie comparée des animaux articulés , auxquelles on a puni l'anatomie du Melolontha vulgaris (Hanneton). ( I) Der nerve der Unterlippe ( nervus lahii). . Wo dieser nerve feblt (Z. B bei Melolontha da vertrelen .Emo der unterkiefer nerven seine nielle, und dies ist DES INSECTES. 295 A l’égard de la position de ceux-ci par rapport aux nerfs man- dibulaires, il ne l’a pas indiquée avec exactitude, et cette erreur a fait penser à M. Burmeister qu’il existait une différence, quant à l’insertion des nerfs buccaux, entre le Hanneton et la larve du Calosome. J’ai observé au contraire que cette différence n’existait pas. Les nerfs les plus internes du ganglion sous-œsophagien sont les nerfs labiaux(l . Ils prennent naissance à la partie médiane et un peu inférieure de ce centre nerveux. Ils sont extrêmement grêles, se dirigent directement jusqu’à la base de la lèvre infé- rieure, où l’on observe leur division en plusieurs branches. L’une des principales divisions pénètre dans chacun des palpes. Les nerfs maxillaires (2) ont leur origine un peu au-dessus et légèrement en dehors des nerfs labiaux ; leur grosseur est plus con- sidérable; leur direction aussi est un peu oblique. Sur leur trajet ils fournissent une branche qui se rend aux muscles adducteurs des mâchoires. A la base de ces appendices, ils se subdivisent eq plusieurs branches dont deux principales, l’une se rendant au corps même de la mâchoire, l’autre à son palpe. Les nerfs mandibulaires (3) constituent la paire externe , ils ont leur origine en dehors des nerfs maxillaires et un peu au-dessus. Ils se dirigent obliquement, ce qui, du reste, est indiqué par la position des mandibules relativement à celle du ganglion sous- œsophagien. Ces nerfs , à la base des mandibules , se divisent en plusieurs branches, dont trois plus fortes que les autres. Les nerfs mandibulaires offrent encore sur leur trajet une branche qui se contourne en arrière et se divise en nombreux filaments dans les muscles adducteurs des mandibules (Zi). Cette branche , de même grade da besonders der fait, \vo die zûnge klein, harl und kuorpelig ist — Bur- meister. Handbuch der Entomologie , t. I , p. 298 (1832). Ainsi, dans la chenille du Cossus Hgniperda. les nerfs des mandibules ne sont, suivant Lvonnet. que des rameaux des nerfs labiaux. Quand ceux-ci manquent , comme dans le Melolontha vulgaris, ils sont remplacés par une branche des. maxillaires. — Lacordaire, Introduction à l'Entomologie, I II, p. 196 (1838) (1) Règne animal, pl. 4, fig. 2 g. (2) Id , pl. 4, fig 2 b. 13) Id., pl. 4. fig. 2 c (41 Id , pl. 7, fig 2 d. "296 E. BLANCHARD. SUR LE SYSTÈME NERVEUX que les nerfs mandibulaires tout entiers, ont un volume assez con- sidérable chez le Hanneton ; ils l’ont également dans le Carabe , dont les pièces de la bouche sont très robustes. Ils ont un déve- loppement beaucoup plus grand dans les Lucanes (1 ), où les man- dibules deviennent énormes. Mais ils perdent considérablement de leur volume dans les Insectes, où ces appendices sont plus faibles. Dans tous les Coléoptères soumis à mes dissections, aussi bien que dans leurs larves, j’ai trouvé constamment l’origine de ces trois paires de nerfs buccaux entre les bras du ganglion sous-œsopha- gien. Leur insertion , par rapport les uns aux autres, m’a paru parfaitement constante. La position relative des diverses pièces de la bouche ne semble pas permettre qu’il en soit autrement. Cepen- dant, dans les descriptions anatomiques de ces parties telles qu’on les a données jusqu’ici, on trouve toute incertitude à cet égard. Sur les parties latérales du même centre médullaire on observe encore un fdet très délié se rendant aussi aux muscles rétracteurs des mandibules (2) : c’est la quatrième paire. Plus en arrière on découvre une cinquième paire; ce sont des filets nerveux (3) qui se rendent aux muscles rétracteurs de la tète. Dans les Insectes oii la tète est peu mobile , comme chez le Hanneton , par exemple, ces filets ne sont pas fort gros. Dans ceux au contraire où la tête est très mobile, où ses muscles rétracteurs sont très puissants , comme dans le Carabe, ces nerfs sont plus forts ; ils se divisent d’abord en deux branches dont l’extrémité est elle-même subdi- visée en plusieurs autres dans le prothorax. § V Los ganglions el les nerfs thoraciques et abominaux. Dans le thorax de tous les Insectes , il existe fondamentalement trois centres médullaires. Je les nommerai d’après chacune des portions du thorax à laquelle ils appartiennent : ganglions prothoracique , mésothoracique et métathoracique. Le premier (h) , uni par deux connectifs au ganglion sous- (1) PI 8, fig- 1—2 ij. (2) Replie animal, pl 1, f.g. ï r (3) Id., pl. i, fig. 2 h (4) Id . pl :t, fig. I :t. pl i bis, fig. 1—3, fig 2 — 3, fig 3—3, etc DES INSECTES. 297 œsophagien, demeure chez les Coléoptères constamment distinct des deux autres. Il est situé dans le prothorax, un peu plus près de l’extrémité postérieure que du bord antérieur. Les formes qu’il affecte sont assez variables suivant les groupes. Dans le Hanneton commun , il a l’aspect d’un cône renversé. Chez le Carabe , il est à peu près arrondi, en offrant néanmoins quelques angles à l’origine des nerfs. En général , le centre médullaire prothoracique varie de forme suivant le point d’origine des nerfs. Toujours il paraît plus dilaté à leurs insertions. On peut compter trois paires de nerfs pro- thoraciques. Ordinairement elles ont chacune leur origine distincte 'dans le ganglion , mais souvent aussi elles naissent d’un seul tronc commun ou quelquefois de deux, pour se séparer ensuite. La pre- mière distribue ses branches plus particulièrement aux muscles rétracteurs de la tète, la seconde aux muscles latéraux et supérieurs du prothorax, et la troisième aux pattes antérieures de l’Insecte. Chez le Hanneton , ces trois paires naissent d’un tronc commun, qui se sépare immédiatement en deux autres. Le premier est formé par la réunion des nerfs de la première et de la seconde paire (1), et leur séparation n’a lieu que vers le tiers de leur lon- gueur. Le nerf antérieur se dirige vers le bord latéral antérieur du prothorax , mais sur son trajet il présente trois branches qui se divisent en plusieurs ramifications dans les muscles rétracteurs de la tête. Inférieurement il donne une branche se divisant aus- sitôt en deux filets dans les muscles latéraux du prothorax. Le second nerf (2) chez le Hanneton semble n’être qu’une branche du premier; elle se rend au muscle extenseur de la hanche, en offrant néanmoins quelques petites ramifications qui se perdent dans les muscles latéraux du corselet. Le nerf des pattes (3) est toujours le plus puissant ; il pénètre dans la hanche, traverse le trochanter et la cuisse, oii il fournit une branche très forte qui s’étend jusqu’à l’extrémité de la jambe (4). Le nerf principal seul pénètre dans le tarse jusqu’à la (t) Règne animal, pl 3, fig I — 3 a, b. (a) Id , pl. 3, fig. 1—3 b (3) H., pl 3, lig I — 3 r t) H , pl 3, fig I —3 r 298 E. BEVXCUARO. — SUR I.E SYSTÈME NERVEUX base de leurs crochets. Dans la première partie de son trajet , le nerf crural donne naissance à deux branches : l’une, plus forte (1 ), se divise en deux rameaux : l’un se rend aux muscles fléchisseurs de la hanche et le second aux muscles rétracteurs du corselet. La seconde branche , très petite comparativement, pénètre aussi dans les muscles de la hanche. A l’égard du mode d’insertion des nerfs du prothorax, à l’égard aussi de la grosseur et de l’étendue de leurs branches, on observe des différences très considérables entre les divers types de l’ordre des Coléoptères. Sous ce rapport le Carabe s’éloigne notablement du Han- neton. Chacune des trois paires de nerfs prothoraciques a son origine parfaitement distincte, et de plus elle se divise en plusieurs branches, presque dès son origine. Ainsi le nerf antérieur (2) naît de l’angle supérieur du ganglion et se sépare aussitôt en deux branches. La plus forte donne encore naissance à un rameau dont les filets se distribuent aux muscles latéraux du corselet, tandis que la branche elle-même se bifurque entre les muscles rétrac- teurs de la tête. La seconde branche se divise en plusieurs ra- meaux dans les muscles du corselet, de même que les nerfs de la seconde paire (3). Ceux de la troisième (4) , dont l’origine est à l’angle inférieur du ganglion, se recourbent un peu comme dans tous les Insectes, pénètrent dans la hanche et ensuite dans toute la longueur des pattes, comme chez le Hanneton et comme dans tous les Coléop- tères que j’ai examinés; ils fournissent avant l’extrémité de la cuisse une branche qui aboutit seulement au bout de la jambe à la terminaison du muscle. Dès son origine le nerf crural émet une très forte branche dont les principales divisions se perdent dans les muscles extenseurs de la hanche; il en est de même d’une seconde branche beaucoup plus faible. Il fournit aussi inférieu- rement un très petit filet aux muscles rétracteurs du corselet. (1) Règne animal, pl. 3, fig. I — 3 d (2) Id., pl. 3 bis, fig. 1— 3 a. (3) Id., pl. 3 bis, fig. 1 — 3 6. (4) ld.t pl 3 bis, fig. I — 3 c. DES INSECTES. 299 Ou trouve donc, quant à l’insertion des nerfs prothoraciques entre les Coléoptères , des différences considérables selon les grou- pes auxquels ils appartiennent. Souvent les nerfs de la première et de la seconde paire sont soudés dans une partie de leur lon- gueur, et le second, dans beaucoup de cas, étant plus faible que le premier, semble n’en être qu’une branche. Il en est ainsi dans beaucoup de types, chez les Blaps, chez les Nécrophores (1) , par exemple, où les nerfs antérieurs sont très gros et leurs bran- ches propres aux muscles rétracteurs de tête fort nombreuses. Chez les Hydrophiles, cette tendance est plus marquée encore (2). Dans les Lucanes (3), les trois paires de nerfs sont bien distinctes; cependant elles naissent d’un tronc commun se divisant après un court trajet en trois nerfs, presque d’égale grosseur. Souvent un filet très grêle prenant naissance sur le trajet des connectifs qui unissent le centre médullaire sous-œsophagien avec le prothoracique , vient s’anastomoser avec le nerf antérieur. On aperçoit facilement cette disposition chez les Cérambyciens (4). Dans les Hydrophiles (5) , ce cordon de renforcement naît de la base du ganglion sous-œsophagien et vient s’anastomoser avec le centremédullaire prothoracique, près de l’origine de sa première paire de nerfs. Dans la plupart des Coléoptères on ne distingue pas cependant ce nerf. Nous verrons plus loin la nature de cette différence. Les ganglions mésothoracique et métathoracique sont complè- tement séparés l’un de l’autre dans la très grande majorité des Coléoptères. Chez les larves, ils le sont toujours. Néanmoins chez certains types on les trouve complètement réunis ; il y a une sou- dure, une fusion complète entre ces deux centres* nerveux. Ordi- nairement alors, c’est à peine si une légère dépression l’indique. C’est le cas pour le Hanneton (6) ; malgré cela, les nerfs se (1) PI. 10. fig. 3, et PI. 9, fig. I a.b c. (i) PI tt, fig. 1. (3) PI. 8, fig. 1—3 a.b,c (b) Règne animal, pl. 3 bit, fig 2 — 3a'. ;s) pi. ii, fig. i. /fi l Régné animal, pl 3, fig. 1—4 et 5 300 E. BLANCHARD. — SUR UE SYSTÈME NERVEUX trouvent toujours insérés dans les mêmes rapports, et il n’y a là aucune modification fondamentale. Les centres médullaires méso- thoracique et métathoracique , de même que le prothoracique , fournissent trois paires de nerfs. Les antérieurs sont les nerfs des ailes, les postérieurs sont ceux des pattes, et les intermédiaires sont ceux des muscles latéraux et supérieurs du thorax. Parfois le nerf intermédiaire naît d’un tronc commun avec celui des pattes, mais ce n’est pas ordinaire pour la plupart des Coléoptères. Dans le Hanneton, avons-nous dit, les centres nerveux du méso et du métathorax constituent une seule masse. Cette masse est d’un tiers plus longue que large et arrondie en avant comme en arrière. Une dépression transversale et une sorte de petite fos- sette médiane indique la réunion des deux ganglions (1). Mais il n’existe point là de perforation , et cette masse médullaire n’est point arrondie, comme M. Straus l’a décrite et représentée. Il ne pouvait y avoir aucune incertitude à cet égard sur aucun des nombreux individus de cette espèce que j’ai examinés. Le plus fréquemment chez les Coléoptères les connectifs entre les ganglions prothoracique et mésothoracique sont fort longs ; au contraire, dans le Hanneton, ils sont très courts. Les nerfs alaires, ceux qui se rendent directement aux élytres, s’insèrent aux angles antérieurs du ganglion mésothoracique , et se dirigent un peu obliquement jusqu’à la base des élytres. Avant d’atteindre l’apophyse de l’élytre , ils se divisent en trois bran- ches, chacune d’elles se rendant aux trois nervures principales des ailes en se subdivisant en plusieurs rameaux (2). Sur son trajet, le nerf alaire antérieur donne quelques petits lilets aux muscles rétracteurs du corselet. Le nerf intermédiaire naît du même tronc que le nerf des pattes ; il est assez grêle, et se sépare en trois branches se divisant elles- mêmes dans les muscles latéraux et supérieurs du thorax. Le nerf crural mésothoracique pénètre comme celui du prothorax dans la hanche, et nous offre aussi deux petits lilets pour ses mus- cles extenseurs. Les nerfs métathoraciques offrenl peu de dilTé- (1) Règne (mimai, nouvelle édition pi :t fig. I i (2) Ici . |.l. .1, fig. 1 — 1. DIÎS INSF.CTF.S. 301 rcnces avec ceux du mésothorax. Les nerfs alaires présentent avant leur extrémité la même division en trois branches (1). llsdonnent postérieurement une branche très forte dont les ramifications se perdent dans les muscles supérieurs du thorax , et surtout dans ceux des ailes. Le nerf moyen est soudé également à son origine avec le nerf cru- ral (2). Il se divise en deux branches principales ; les ramifications de l’une se distribuent particulièrement aux muscles alaires, celles de l’autre aux muscles de la hanche. Près de son origine le nerf moyen donne une branche considérable passant sous le nerf crural et venant se ramifier sur les muscles de l’insertion des pattes. Le nerf crural (3) descend directement jusqu’à l’apophyse de lahanche, où il se recourbe ensuite pour pénétrer dans son intérieur. Plu- sieurs branches du nerf crural se subdivisent sur les muscles de la hanche. Dans le Carabe , les ganglions mésothoraciques et métathora- ciques sont assez éloignés l'un de l'autre. Leurs trois paires de nerfs ont leur origine séparée l’une de l’autre. Au reste dans leur mode de division les différences ne sont pas grandes avec ce qu’on observe dans le Hanneton. La branche du nerf alaire antérieur qui se ramifie dans les muscles rétracteurs du corselet est ici seu- lement plus forte proportionnellement. Le nerf moyen est aussi plus gros, et presque dès sa base il se sépare en deux branches principales. Le nerf alaire métathoracique devient très grêle dans le Ca- rabe (11). L’absence des ailes en est la cause. Il reste alors tel qu’on le trouve dans les larves, où il se perd également entre les muscles latéraux du thorax. Le mode d’insertion des nerfs , mais bien plus encore leurs di- visions sous le rapport de leur volume et même de leur nombre, varient très notablement entre les divers types de l’ordre des Coléoptères. Mais ce sont là desmodificationsau fond assez légères qui ne détruisent en aucune manière le principe fondamental. f I ) Règne animal, nouvelle édition, pl. 3 — S b’ (2) Id . pl 3—5 (3) l réduits de trois qu’ils sont , comme dans la plupart des Coléo- » ptères, des Orthoptères, des Névroptères, à deux, comme dans >■ le plus grand nombre des Hémiptères, et à un, comme dans les x Diptères et dans quelques Hémiptères (2). » Il faut répéter, au contraire, à l’égard des Insectes ce qui a été dit à l’égard des Crustacés par MM. Audouin et Milne Edwards : « En dernier résultat , le système nerveux nous présente partout > une uniformité de composition remarquable, et toutes lesdiffé- » rences importantes que nous avons rencontrées en parcourant la • série de ces animaux ne sont évidemment que des modifications (1) Entwickelunasgesehichte der Schmetterlinge (1815). (2) Leçons d'anatomie comparée, par G. Cuvier, 2’’ édition, t. III, p. 367. DES INSECTES. 303 » dépendantes d’un degré plus ou moins grand du rapprochement » et de centralisation des noyaux médullaires. » ( 1) Ce sont surtout les premiers et les derniers de l’abdomên qui ten- dent à se confondre. Le premier et le second très fréquemment viennent se réunir et former une seule masse avec le ganglion métathoracique. C’est ce qui a conduit M. New port à regarder le premier ganglion , après le métathoracique, comme appartenant aussi au thorax. Dans certains cas, le premier anneau abdominal de la larve vient à se souder également avec les anneaux du thorax. Le ganglion réuni au centre médullaire du métathorax donne ses nerfs à cette portion devenue thoracique. D’après cela doit-on adopter la distinction faite par M. Newport? Je ne le pense pas, car souvent ce sont deux anneaux de l’abdomen qui sont devenus tho- raciques ; ne pourrait-on pas trouver d’exemples d’une fusion plus grande encore? Alors la distinction entre les centres nerveux du thorax et ceux de l’abdomen n’existerait pas réellement. Il me semble préférable et en même temps plus rationnel de considérer tous les ganglions en arrière de ceux dont les principaux nerfs se distribuent aux organes de la locomotion comme des centres mé- dullaires abdominaux. Dans les descriptions anatomiques on y gagnera plus de clarté ; car certainement , si la limite entre le tho- rax et l’abdomen n’est pas bien définie d’après la considération de l'enveloppe extérieure, elle ne l’est pas davantage d’après le système nerveux Les soudures entre les divers segments en sont la preuve. C’est ce qui me porte du reste à attacher peu d’impor- tance à cette distinction des centres médullaires, en thoraciques et en abdominaux. Les derniers ganglions abdominaux chez les Coléoptères ont une tendance très grande à se réunir. Le dernier est toujours constitué par la fusion de plusieurs autres en plus ou moins grande quantité suivant les groupes. Quelquefois tous les centres médullaires de l’abdomen sont en- tièrement confondus et ne forment alors qu’une seule masse , tou- jours dans ce cas refoulée dans le thorax , immédiatement contre ( 1 ) Troisième Mémoire sur innalomie et lu physiologie des Crustacés — Recher- ches anatomiques sur le système nerveux [lunules des Sciences nut., t. XIV, p. 98 — I 828) 3t)/l E. — SUIS LE SYSTÈME NERVEUX le ganglion métathoracique. 11 en est ainsi pour le Hanneton. Ou ne distingue même dans cette masse aucune division (1). Deux nerfs chez cet Insecte prennent naissance à la partie pos- térieure du centre nerveux métathoracique et viennent se ramifier à la base de l’abdomen ; c’est évidemment le résultat de la fusion de deux ganglions abdominaux avec le centre médullaire du mé- tathorax. Ces deux ganglions s’étant séparés des autres qui se sont seulement réunis entre eux , ceci est indiqué par l’embryo- génie. On peut s’en assurer en suivant les modifications qu’é- prouve l’animal par les progrès de l’âge. Le premier de ces nerfs inséré à l’extrémité postérieure du gan- glion métathoracique descend en passant sur l’entothorax et donne d’abord une branche se divisant en plusieurs rameaux qui se por- tent sur les muscles d’insertion des pattes et sur les rétracteurs de l’abdomen. Ce nerf se recourbe ensuite en fournissant deux autres branches dont l’une se rend aux muscles de l’entothorax , et les autres à ceux de la base de l’abdomen. Le second nerf suit la même direction que le précédent et se divise en deux grandes branches sur un premier anneau rudi- mentaire. Tous les autres sont échelonnés sur les parties latérales de la masse constituée par la réunion de tous les ganglions abdomi- naux. Nous en comptons six paires qui forment un faisceau pas- sant dans la gouttière que forme l’entothorax. La plus externe se rend au premier anneau de l’abdomen et ainsi de suite, au second, au troisième, jusqu’au dernier. Tous ces nerfs, parvenus dans leur anneau respectif, se divisent en deux grandes branches pres- que égales (2) ; l’une suit le point de jonction du segment abdomi- nal avec le suivant en produisant des filets qui se distribuent plus particulièrement aux muscles moteurs des anneaux de l’abdomen. L’autre branche, au contraire, se dirige vers les parties latérales et donne ses filets surtout aux muscles des stigmates. Le qua- trième de ces nerfs fournit une branche aux testicules chez les mâles, aux ovaires chez les femelles. (1) Règne animal, nouvelle édition, pl. T, fig I — fi. (2) /(/.. pl. 3 — 6 u,b,c,d,e,f,g,h T)IîS INSECTES. 305 La masse médullaire abdominale chez le Hanneton se prolonge postérieurement en deux cuisses d’où naît une paire de nerfs beau- coup plus gros que les autres nerfs de l’abdomen. M. Straus dit que leurs diverses branches lui ont paru aboutir aux organes de la génération. On n’a pas décrit davantage dans d’autres Insectes la manière dont ces nerfs se divisent et distribuent leurs rameaux. Cependant chez tous les Coléoptères leur mode de distribution est très analogue. Dans le Hanneton ces grands cordons nerveux descendent d’a- bord en ligne directe ; mais dans les mâles ils se contournent sur la verge, pénètrent dans ses muscles où ils se divisent en branches nombreuses, les unes remontant, les autres descendant (1). Chez les femelles, ces nerfs ne se contournent pas , ils aboutissent direc- tement à l’oviducte. Sur leur trajet ils fournissent d’abord deux branches qui se rendent aux testicules ou aux ovaires , puis une autre aux conduits déférents, et enfin une dernière beaucoup plus grande remonte sur le rectum, où l’on distingue plusieurs ramifi- cations. Dans le Carabe , les ganglions abdominaux forment une longue chaîne (2). Ils sont au nombre de sept plus ou moins es- pacés les un- des autres ; le premier de ces centres nerveux est assez gros et appliqué contre le ganglion métathoracique ; les cinq suivants sont plus petits et presque d’égale grosseur entre eux; le dernier seul est notablement plus volumineux et séparé du précé- dent par des connectifs très courts. Chacun de ces centres médul- laires abdominaux produit des nerfs ayant leur origine distincte, mais se distribuant comme les deux branches de chaque nerf de l’abdomen du Hanneton. Les nerfs du dernier ganglion, qu’on pourrait appeler les nerfs sacrés, sans cependant vouloir les com- parer anatomiquement à ceux qii’on nomme ainsi chez les verté- brés, se contournent également autour de la verge chez le Carabe en se ramifiant dans ses muscles; ils fournissent aussi des bran- ches aux testicules et une plus considérable au rectum (3). (1) Itiyne animal, nouvelle édition, pl. 3, fig. I — 6 o. (2) ld., pl. 4, fig. I. (3) ld., pl. 4, fig. 1, 3' série. Zooi,. T. V. (Mai 1846.) t 20 E. BI.IN4 H lItD. SI It UC SYSTEM IC NEItVKl \ 300 s vi. Du système nerveux des larves, comparé a celui des Insectes parfaits On sait comment llérold, M. Serres, M. Newport ensuite, ont suivi de jour en jour les modifications que présente le sys- tème nerveux des Lépidoptères, en passant de l’état de chenille à celui de chrysalide ; de l’état de chrysalide à celui d’insecte par- fait. Ils ont vu les connectifs se raccourcir de plus en plus et cer- tains ganglions se confondre entièrement. Dans la plupart des Coléoptères on remarque la centralisation du système nerveux, s’effectuant de la même manière. Pour ceux- là, je n’ai donc pas besoin de m’y arrêter. Mais les Scarabéiens , les Curculioniens , peut-être quelques autres encore, présentent dans l’accroissement de leur système nerveux certaines particu- larités que je dois noter comparativement. La règle générale reste cependant la même. Dans les larves appartenant aux deux grandes tribus que je viens de citer, on ob- serve une disposition assez particulière de leur système nerveux. Pour leur grande taille , il est très réduit et occupe seulement la partie antérieure du corps. Le ganglion sous-œsophagien, les trois ganglions thoraciques, les ganglions abdominaux , au nombre de huit ou neuf, sont très distincts les uns des autres ; mais leurs connectifs sont si courts que ces centres médullaires sont tous appliqués les uns à la suite des autres et paraissent ne former qu’une masse allongée et étranglée d’espace en espace (1 ). La règle générale reste cependant la même, disons-nous. La centralisation deviendra également- plus onsidé- rable quand l’animal passera par l’état de nymphe et deviendra adulte. En effet, les ganglions mésothoracique et métathoracique, séparés dans la larve, seront entièrement confondus chez l’Insecte parfait. Les ganglions abdominaux, distincts dans la larve, pré- senteront une fusion complète dans l’Insecte adulte. Ce rappro- chement, cette fusion des centres médullaires entre eux est ana- logue ici à. celle observée par llérold et par M. Newport, chez les Lépidoptères et certains Coléoptères. ' i Hétjni' animal, pl. 4, tiir . -1, ('t pl 14, lig I I»KS IVSKCTKS. 307 Seulement, tandis qu'on remarque dans ces derniers un rac- courcissement des connectifs, on observe pour les Scarabéiens, les Curculioniens, etc., un allongement sur certains points. Entre le ganglion sous-œsophagien et le ganglion prothoracique; entre le ganglion prothoracique et le mésothoracique , il existe chez le Hanneton et le Charançon des connectifs assez longs (1) ; chez leurs larves, au contraire, on ne les distingue point (2). Je tenais à rappeler ce fait que si les centres nerveux tendent toujours à la centralisation sur certains points quand l’Insecte abandonne la forme de larve , les connectifs ne se raccourcissent pas toujours, mais s’allongent aussi quelquefois. C’est ce qui a été bien démontré par M. Serres. Ce savant a indiqué l’écartement des centres nerveux par les progrès de l’âge chez le Scarabée nasicorne et surtout chez la larve d’un Di- ptère du genre Asile (3). Il est. encore un autre changement du système nerveux dans un même individu aux diverses périodes de sa vie auquel on ne s’est pas arrêté : c’est celui qui a lieu à i’égard des ganglions céré- broïdes. On a vu leur augmentation de volume; mais on n’a pas observé que leur partie antérieure tendait toujours à se recourber en dessous quand l’animal avançait en âge. Il est assez facile ce- pendant de suivre ce refoulement ; car il est indiqué par l’insertion des nerfs du labre et du ganglion frontal. Si l’on examine la larve du Hanneton, on trouvera ces deux nerfs naissant d’un tronc com- mun, dont l’origine est à l’extrémité antérieure de chacun des gan- glions cérébroïdes(A). Ceux-ci sont alors un peupointusen avant. Si l’on examine la nymphe du Hanneton ou du Scarabée nasicorne, on trouvera les ganglions cérébroïdes plus arrondis antérieu- rement, le tronc commun des deux nerfs plus court et ayant déjà son insertion en dessous. Enfin si l’on examine le Hanneton adulte, ces deux nerfs paraîtront alors avoir deux origines distinctes pres- (t j Règne animal, pl. 3, fig. 1 — 2 à 3 et 3 à 4 ; pl. 3 bis. fig. 2 — 2 a 3 et 3 a » (2) ld., pl. 4, fig. 3. et pl. t4, fig. 1 {3) Anatomie comparée du cerveau dans les quatre classes des animaux verté- brés. t II, p. 39 (1826). (4/ Règne animal, pl. 4. fig 3 e,d 308 E. BLANCHARD. — SUR LE SYSTÈME NERVEUX que au milieu de la partie inférieure des ganglions cérébroïdes(l). On suit aussi ce refoulement progressif non seulement chez le Hanneton , mais dans tous les autres Coléoptères. § VII. De la structure des nerfs et des ganglions. M. Newport est le premier qui se soit occupé sérieusement de la structure des nerfs et des ganglions chez les Insectes. Il nous a fait voir qu’il existait dans chaque nerf deux colonnes de fibres comme on 1 observe dans les racines des nerfs spinaux chez les animaux vertébrés. If une supérieure, qu’il regarde comme dévolue aux organes du 'mouvement ; l’autre inférieure, se confondant entièrement avec les ganglions, et qu’il considère comme dévolue à la sen- sibilité. Outre ces deux ordres de fibres, le même anatomiste a reconnu l’existence de nerfs particuliers déjà entrevus et nommés par Lyonnet brides épinières. Il les désigne sous le nom de nerfs transversaux d’après la direction de leurs branches principales , ou surajoutés, parce qu’ils fourniraient des branches à des muscles qui en reçoivent déjà de la chaîne ganglionnaire (2). Ces nerfs se distribueraient plus particulièrement aux trachées et aux muscles des mouvements involontaires comme ceux qui sont mis en jeu par le fait de la respiration. A chaque segment du corps on observerait un plexus de ces nerfs transversaux , correspondant avec celui du segment suivant au moyen de deux libres qui passent diagonalement sur le ganglion, se rapprochent ensuite et descendent le long des connectifs (3). Ces nerfs transversaux s’anastomosant plus ou moins, ou même se réunissant complètement avec les nerfs de la chaîne ganglion- (1) Règne animal, pl. 4. fig. 1 . (2) 1 hâve c.alled these nerves transverse from the direction of tbeir principal branches ; superailded , from their being nerves given lo muscles , in addition to nerves from the moto-sensitive or spinal cords, and respiratory from their distri- bution being chiefly lo muscles which appear lo be most concerned in respiration. — Newport, On the respiration of Insects (in Pliilosophical Transactions, part u — 1 83b). (."!) Voy. toc cil., pl. xxxvn. UES INSECTES, 30'J naire, M. Newport leur attribue une fonction analogue à celle du système nerveux sus-intestinal. Quelque ingénieuse que soit la distinction faite par M. Newport en ce qui concerne les fonctions attribuées aux diverses libres des nerfs des Insectes, sans vouloir en aucune manière la rejeter, je ne crois pas non plus devoir l’admettre comme positive, car elle n’est appuyée sur aucune preuve physiologique. Chez les larves, particulièrement dans certaines Chenilles, qui ont été le sujet des observations de M. Newport, les nerfs trans- versaux sont souvent très distincts, car chez plusieurs Lépi- doptères ils ont une coloration particulière, et les ganglions eux- mêmes sont souvent bruns ou rougeâtres. On les observe aussi assez facilement dans plusieurs larves de Coléoptères ; je les ai vus nettement, surtout dans les larves de Dytiques. Chez les insectes parfaits ils se confondent souvent avec la substance des ganglions, et alors on les distingue difficilement. Toutefois, ceux dont les ganglions sont espacés, comme les Carabes, les Staphylins, sont les plus favorables pour les observer. Toujours est-il que dans la plupart des nerfs , ils s’associent entièrement aux autres fibres. Du reste , il paraît évident que dans plusieurs circonstances au moins on a décrit et représenté des filets trachéens comme des portions de ce système surajouté. Les fibres nerveuses , regardées par M. Newport comme mo- trices, et qui passent sur les ganglions, restent au contraire pres- que toujours faciles à apercevoir chez les Insectes parfaits. On les rend surtout bien visibles en les plongeant pendant quelque temps dans l’alcool , ou mieux encore dans l’essence de térében- thine. Dans plusieurs larves, les trois cordes qui concourent à former les nerfs alaires sont très apparentes ; mais chez les Coléoptères à l’état parfait , on distingue difficilement les fibres transverses, et le filet nerveux qui naît du connectif n’est pas isolé chez tous, comme dans les Hydrophiles, lesCérambyx, etc. Dans le Hanneton, par exemple, le rapprochement est tel qu’on aperçoit assez difficilement à la base des nerfs alaires les trois ordres de fibres; on isole cependant le filet des connectifs en détruisant le névrilème, au moyen d’acide nitrique étendu d’eau. 310 F.. BLtMUARD. SUK LE SiSTÈME .\EKVKl.X En examinant les ganglions des Insectes sous le microscope , on aperçoit au centre deux nodules assez faciles à voir, surtout dans les ganglions abdominaux. M. Newport regarde cette partie centrale comme l’analogue de la matière grise dans les animaux vertébrés. § VIII De l'emploi des modifications du système nerveux en zoologie. La description anatomique du système nerveux des Coléoptères montre suffisamment sur quels points on doit particulièrement porter son attention pour les caractères zoologiques. Les groupe- ments des ganglions, de l’abdomen et du thorax doivent surtout nous arrêter. On tiendra compte encore d’autres modifications , sans cependant y attacher une valeur aussi grande. Ce sera d’a- bord le mode d’insertion des principaux nerfs, puis la forme par- ticulière des ganglions. Les subdivisions des nerfs , la grosseur et le nombre plus ou moins grand de leurs branches dans les organes où elles se rendent, ne semblent pas mériter au même degré d’être prises en considération , pour l’application de l’ana- tomie à cette partie de la zoologie. Le travail nécessaire pour reconnaître la disposition du système nerveux dans un Insecte de manière à pouvoir apprécier ses affinités naturelles , demeure donc , par cela même , moins considérable. CHAPITRE III. L><; la disposition du système nerveux dans les tribus, familles et groupes de l’ordre des Coléoptères. Je dois faire connaître maintenant la disposition particulière qu’affecte le système nerveux dans chaque tribu et dans chaque famille de l’ordre des Coléoptères. N’est-il pas utile auparavant d’examiner d’une manière comparative la valeur des caractères tirés des autres parties de l’organisme? Il sera plus facile alors d’apprécier l’importance du système nerveux. Les métamorphoses complètes ou incomplètes et la structure générale des ailes , sont les bases sur lesquelles repose la division de la classe des Insectes en plusieurs ordres. Les pattes fournis- Dl;s IXSliCTES. 31 1 sent des caractères propres à des tribus ou à des familles , par le nombre d’articles que présentent leurs tarses. Dans certains or- dres, ce caractère est nul. Tous les Hyménoptères, tous les Lépi- doptères , tous les Diptères , ont leurs tarses composés de cinq articles ; mais ce nombre de divisions descendant souvent à quatre, à trois, à deux, même à une seule , dans diverses familles, comme parmi les Coléoptères, les Orthoptères , les Hémiptères, etc., on s'en est servi avec avantage pour former des groupes plus ou moins considérables. Autrefois , à l’égard des Coléoptères , les entomologistes met- taient ce caractère en première ligne. Depuis, les rapprochements forcés qui en devenaient la cause n’ayant échappé à personne , on a cessé d’y attacher plus d’importance qu’on n’en attache aux modifications offertes par les antennes et par les parties de la bouche. Les antennes sont souvent des indices assez sûrs pour recon- naître des familles et même des tribus. Pour quelques unes d’entre elles, ce caractère suffit pour les faire reconnaître avec toute cer- titude ; mais néanmoins, il est bien loin de s’étendre à tous les groupes. Les plus petites modifications de ces appendices , dans un grand nombre de cas , servent avec avantage pour appuyer de petites divisions, comme les genres, par exemple. Les parties de la bouche paraissent avoir une valeur tout-à- fait comparable à celle des antennes ; tantôt donnant des carac- tères propres à des ordres entiers; tantôt seulement à des tribus : beaucoup plus ordinairement à des groupes plus limités encore. Les ailes fournissent des caractères précieux pour la séparation des ordres; mais elles présentent aussi des modifications nom- breuses dans la disposition de leurs nervures , correspondant à des divisions secondaires plus ou moins naturelles. Pour les Hyménoptères, pour les Diptères, un peu pour les Lépidoptères et les Névroptères , on a fait usage des caractères fournis par les nervures des ailes. Pour les autres ordres, comme les Coléoptères, les Hémiptères et même les Orthoptères, on le> a totalement négliges. On aura donc encore des faits de détails intéressants à tirer de cette étude. 312 E. BLWCIIARD. — SUR LE SYSTÈME NERVEUX Les appendices cornés et extérieurs dépendant des organes de la génération semblent aussi devoir présenter des caractères sur lesquels les entomologistes auront à porter leur attention. Jus- qu’ici , cependant , on les a négligés constamment. De ce qui précède il résulte que les modifications offertes, soit par les antennes, soit par les pièces de la bouche , soit par le tarses, ne peuvent suffire à caractériser tous les groupes. Il en résulte aussi que les modifications offertes par les antennes, les pièces de la bouche et les tarses, sont bien loin de se cor- respondre. Les ordres, les tribus, les familles, les groupes, les genres mêmes, ne peuvent donc souvent être caractérisés que par une réunion de caractères. Si les modifications d’un appendice suffi- sent pour la distinction d’un groupe, elles deviennent insuffisantes pour la plupart de ceux qui l’entourent. Dès lors il faut recourir à la fois à quatre, cinq, six ou dix caractères. Encore on ne par- vient pas toujours à caractériser avec précision tous les types appartenant à une même grande division. Toutefois , les plus grandes difficultés 11e se présentent pas là. Quand il s’agit de rapprocher les tribus et les familles , de ma- nière à placer près les uns des autres les êtres qui se ressemblent le plus , on s’aperçoit alors que les légères modifications de forme dans le système appendiculaire ne permettent pas de faire recon- naître de nombreuses affinités. Souvent, comme j’aurai lieu de le faire remarquer par la suite , il est tel genre paraissant , d’après la seule inspection des caractères extérieurs, pouvoir être placé indifféremment dans une famille ou dans une autre. Il est tel groupe ou telle famille qu’on ne sait parfois à quelle tribu rattacher. Aussi maintenant il s’agit de savoir dans quelle mesure les organes intérieurs viendront éclairer ce qui est resté douteux. Il s’agit encore de voir si les premiers états ne fourniront pas de précieuses données à cet égard ; si l’étude comparative des caractères intérieurs et extérieurs fournis par les larves ne con- duira pas à l’appréciation exacte des affinités relatives des In- sectes entre eux. DES INSECTES. 313 Jusqu’à présent , ces questions avaient trop peu fixé l’attention des zoologistes pour pouvoir être résolues sans le secours de re- cherches nombreuses. Je vais indiquer sommairement les faits connus touchant l’or- ganisation des Insectes , de manière à faire voir clairement mon point de départ. Les observations anatomiques sur les Insectes, je l’ai dit, sont déjà assez multipliées. Ramdorh , M. Marcel de Serres, et surtout M. Léon Dufour, ont fait connaître l’appareil alimentaire et l'ap- pareil reproducteur de l’un et l’autre sexe , dans la plupart des types importants de la classe des Insectes. L’ordre des Coléoptères , en particulier, a été sous ce rapport l’objet de nombreuses investigations. Les recherches des anatomistes que je viens de citer, jointes à mes propres observations sur un grand nombre de types dont ils ne se sont pas occupés , m’ont démontré que la connaissance des rapports naturels aurait peu à gagner , d’après la considération du tube alimentaire. En effet , nous voyons varier non seulement sa longueur totale, mais aussi les proportions de l’œsophage avec le jabot , du jabot avec le ventricule chylifique, du jabot et du ventricule chy lifique avec l’intestin , et ainsi de suite. Nous observons cela non seule- ment entre les types constituant de petits groupes ou des genres , mais même assez souvent entre des espèces d’un même genre. Les expansions qu’on remarque parfois dans une grande partie du tube digestif de certains Insectes ne se retrouvent plus chez les types voisins , au moins dans la plupart des cas. Cependant les différences dans le nombre des vaisseaux biliaires correspondent assez fréquemment à des groupes naturels, comme M. Léon Dufour l’a bien fait observer. Il est nécessaire de tenir compte de cette différence dans le nombre des vaisseaux biliaires. 11 est même nécessaire de tenir compte des caractères fournis par tout l’appareil alimentaire. Dans certains cas . on pourra le faire avec avantage pour des groupes très limités, surtout si l’on ne s’en tient -pas à la considé- ration de l’insecte parfait. SDK LU SYSTEME NERVEUX 31/| E. UI.WtUtKI). Mais bien certainement , comme base de classification , la con- figuration du canal intestinal n’a qu’une importance bien secon- daire. Après l’appareil alimentaire, l’appareil de la reproduction est celui dont on s’est le plus occupé. Ce que nous avons dit du tube digestif, nous pouvons le répéter pour les organes de la génération. Les organes mâles aussi bien que les organes femelles n’offrent aucune constance de formes dans les groupes les plus naturels. Nos connaissances touchant l’appareil respiratoire sont moins avancées que celles concernant les organes dont j’ai déjà parlé. Mes recherches m’ont démontré que les modifications offertes par les organes de la respiration étant peu nombreuses ne pourraient pas être extrêmement utiles à la classification. Un exemple suffira pour le montrer : tous les Coléoptères sont pourvus de trachées tubuleuses très semblables dans tous les types. Il faut en excepter seulement deux tribus : les Scarabéiens et les Lucaniens , qui tous sont pourvus de trachées vésiculeuses. Ceci prouve au reste que l’on doit tenir compte des différences que présente l’appareil res- piratoire. Ailleurs, dans les Hyménoptères et dans quelques autres ordres , on voit certaines modifications correspondant à certains groupes naturels. Mais néanmoins, avec la considération des tra- chées seulement , on obtiendrait fort peu de résultats. M. Newport pense que les trachées vésiculeuses, contenant plus d’air que les trachées tubuleuses , sont nécessaires aux Scara- béiens. Leur corps étant très volumineux , ils auraient besoin de plus d’air que les autres pour s’envoler. Au premier abord, celle opinion paraît fondée ; mais si l’on observe d’autres Coléoptères dont le corps est également très lourd, on ne comprend pas com- ment ce qui est nécessaire pour les Scarabéiens ne l’est pas éga- lement pour ceux-là. Il faut nécessairement en conclure que ce n’est pas là la raison , ou au moins que ce n’est pas la seule. Les larves des Scarabéiens n’ont que des trachées tubuleuses , comme les autres Coléoptères. Elles deviennent vésiculeuses quand l’animal devient adulte. Remarquons que ces trachées vésiculeuses appartiennent aux UES INSECTES. 315 Coléoptères dont l’organisation nous paraît la plus parfaite , d’après le degré de centralisation de leur système nerveux. Les Hyménoptères ont la plupart, comme les Coléoptères, des trachées tubuleuses ; plusieurs d'entre eux cependant en ont de vésiculeuses. Or ce sont surtout les Abeilles et les autres Apiens dont les trachées forment dans l’abdomen ces grandes poches aéri- fères. Ce sont donc les Hyménoptères les plus parfaits qui seuls en sont pourvus. Ceci ne conduit-il pas à montrer que les trachées vésiculeuses sont, chez les Insectes, un indice de perfection? On remarquera sans doute que les Lucaniens , dont le système nerveux est moins parfait que celui des Scarabéiens, ont des tra- chées semblables. Mais les Lucaniens constituent une petite tribu , sous beaucoup de rapports, bien voisine , et en quelque sorte satellite de celle des Scarabéiens. Ne peut-on pas admettre, comme on l’observé sou- vent dans divers groupes du règne animal , qu'ici un appareil est resté moins parfait , tandis qu’un autre a cependant acquis sa plus grande perfection? Examinons donc à présent , dans chaque tribu et dans chaque famille, les données qui nous sont offertes par le système nerveux en ce qui concerne la méthode naturelle. I r* Tribu. — Les Scarabéiens (Scarabœii). ( Lamellicornes , Lalr. ) Peu de tribus dans l’ordre des Coléoptères sont à la fois aussi naturelles et aussi nombreuses que celle des Scarabéiens. Les formes extérieures de tous ses représentants sont très variées , mais on leur trouve des caractères communs assez tranchés pour ne pas les méconnaître. Extérieurement, leurs antennes courtes, non coudées, et terminées par une massue perfoliée, permettent de les distinguer de tous les autres Coléoptères. Rien à la vérité n’indique que ce caractère ait une valeur bien considérable. On sait même qu’il disparaît jusqu’à un certain point dans un genre de cette tribu, dans le genre l.elhrus ; mais des pai ticulai ités 31(3 E. BLAMIMRO. — SUR LE SYSTÈME NERVEUX organiques propres à l’ensemble des Scarabéiens donnent à cette tribu une base plus solide. Nous admettons la division des Scarabéiens en huit familles, elles-mêmes subdivisées en plusieurs groupes (1). Ce sont les Cétoniides, les Glaphyrides, les Mélolonthides , les Scarabéides, les Géolrupides, les Euchirides, les Coprides et les Passalides. On distingue facilement entre elles ces diverses fa- milles à l'aide des modifications fournies surtout par les pièces de la bouche , et quelquefois par le nombre d’articles aux antennes. 11 est même plus facile de trouver des caractères pour les séparer les unes des autres que d’en rencontrer qui soient généraux à toutes, c’est-à-dire à la tribu entière des Scarabéiens. Après celui qui nous est offert par les antennes , on en cherche vainement un autre propre à la fois à tous , mais exclusivement à tous les Sca- rabéiens. Néanmoins nous observons dans ces Coléoptères des trachées dont la forme leur est particulière seulement avec celles des Lucaniens. J’exposerai plus loin les motifs qui m’ont fait sépa- rer ces derniers des Scarabéiens. Ceux-ci ont tous des trachées vésiculeuses, telles que M. Straus les a représentées chez le Han- neton. Je n’ai observé à cet égard aucune différence essentielle entre les Cétoines , les Hannetons , les Scarabées , les Géo- trupes, etc. Dans la disposition du système nerveux , j’ai rencontré une similitude non moins frappante; tel j’ai décrit cet appareil dans le Hanneton , tel je l’ai observé dans les Cétoines ( Cetonia aurata Lin.) et dans les Trichius ( Gnorimus nobiliset Trichius fasciatus Fab.), principaux représentants de la tribu des Cétoniides. Les Glaphyrides m’ont présenté une disposition tout-à-fait analogue. J’ai examiné leur système nerveux dans un type du groupe des Amphicomites (Psilodema melis) et dans un insecte du Chili appar- tenant au groupe des Pachycnémites, le Cratoscelis vulpina Erichs. Les Mélolonthides étudiés non seulement dans le Hanneton, mais encore dans divers autres représentants (\es Rhizotrogus ers tiens (I) Voyez pour les divisions des tribus en familles, groupes et genres, mon Histoire des Insectes (Paris, F Didot, ISIS, 2 vol.), où se trouvent énoncés leurs principaux caractères, tirés du système appendiculaire. DES INSECTES. 317 et citer Fabr. , l 'Anisoplia horlicola Lin., les Hoplia farinosa Fabr., et Decantera pulverulenla, Fabr.), de même que les Sca- rabéides (Scarabœus hercules et Orycles nasicornis Lin.), les Géo- trnpides ( Geotrupes stercorarius et vernalis Lin. et les Coprides (Copris lunaris Lin. , Ateuchus sacor J. in. ), sont également sem- blables sous ce rapport. Chez quelques uns de ces derniers , les Ateuchus principalement , j’ai observé une légère tendance vers une autre forme. Les ganglions thoraciques et abdominaux n’of- frent aucune modification vraiment appréciable; mais les gan- glions cérébroïdes sont un peu plus petits que dans les autres Scarabéiens proportionnellement au développement de la tète, et les nerfs optiques n’ont pas la même grosseur. C’est là une modi- fication bien légère toutefois ; mais rapprochée de ce qu’on voit dans une famille voisine, on reconnaît véritablement une tendance. La famille très peu nombreuse des Euchirides n’ayant pas de représentants dans notre pays , je n’ai pu l’étudier ; mais elle paraît si voisine des Scarabéides et des Géotrupides , que vrai- semblablement les espèces de cette famille ne feront pas exception avec les autres représentants de leur tribu. Je suis donc conduit à regarder les Cétoniides, Glaphyrides, Mélolontbides , Scarabéides , Géotrupides et Coprides , comme constituant un ensemble parfaitement homogène. Le degré de cen- tralisation de leur système nerveux doit aussi les faire considérer comme les Coléoptères dont l’organisation est la plus élevée. Les Aphodius dans la famille des Coprides (A. fimetarius et rufipes Fabr.), ainsi que les Géotrupides, tout en offrant les ca- ractères des autres Scarabéiens , nous présentent néanmoins une centralisation un peu moins prononcée. Les ganglions méso et métathoraciques sont réunis comme chez les autres représentants de la tribu ; seulement, leur réunion. est indiquée par une dépres- sion plus profonde que chez les Hannetons , les Cétoines et les Scarabées. La masse médullaire abdominale est aussi un tant soit peu plus oblongue ; mais ce sont là des différences à peine sen- sibles. Jusqu’ici je n’ai encore rien dit d’une huitième famille, dans la tribu des Scarabéiens, les Passalides, qui constituent un tvne 318 E. BUM'MM. — SUli i.li SYSTEME \KHVliljX un peu aberrant. Pour les Passâtes, je n'ai pu étudier que des individus ayant fait un long séjour dans l’alcool ( Passalus inter- rvptus Fabr. et distinctus Chev.). J'ai trouvé leur système ner- veux très analogue à celui des autres Scarabéiens; cependant j’ai remarqué la séparation du ganglion mésothoracique d’avec le métathoracique , et les ganglions abdominaux m’ont offert une masse plus allongée que celle des autres Insectes de la même tribu. Cette légère modification nous montre la famille des Pas- salides comme s’éloignant un peu du type principal de la tribu des Scarabéiens. Elle constitue un lien entre cette tribu et celle des Histériens. Au moins, d’après la considération des Insectes par- faits, elle indique en même temps, de la manière la plus évidente, des affinités beaucoup plus grandes entre les Passalides et les au- tres Scarabéiens qu’entre les Passalides et les Lucaniens. Cepen- dant tous les entomologistes qui avaient séparé ces derniers de la grande tribu des Scarabéiens leur avaient rattaché les Passalides, en considérant particulièrement la forme des derniers articles des antennes. On le voit ici , l’anatomie vient éclairer manifestement un point dont la solution ne pouvait être trouvée d’après l'inspec- tion seule des caractères extérieurs. Dans la tribu des Scarabéiens nous trouvons le genre Chiron , dont nous avons formé un groupe particulier sous la dénomination de Chironites. Ce groupe, qui a seulement quelques représentants propres à l’Afrique et aux Indes orientales, est considéré par cer- tains entomologistes comme appartenant à la famille des Géotru- pides , par d’autres à la famille des Passalides , par d’autres enfin à la tribu des Lucaniens. Les caractères zoologiques ne permettent pas de résoudre la question. Le secours de l’anatomie , la considération du système nerveux, ne pourrait probablement laisser aucun doute sur ses rapports. Ce serait peut-être un lien entre le groupe des Aphodiites et la famille des Passalides. Si les formes extérieures des Scarabéiens à leur état parfait sont extrêmement variées . elles le sont fort peu pendant leur état de larve. Nous devons à M. Dehaan un mémoire intéressant sur m:s iN’SUCTJiS. 319 les métamorphoses de ces Coléoptères (1) , où l’un peut facile- ment s’en convaincre. En effet , si l’on observe des différences très considérables entre les parties de la bouche d’un Mélolon- thide , d’un Scarabéide, d’un Cétoniide à leur état adulte , on en trouve seulement de très légères entre ces mêmes types à leur état de larve. Le canal intestinal des larves paraît néanmoins être encore assez variable , même entre les genres les plus voisins ; les observations sur ce sujet ne sont pas assez nombreuses pour qu’on sache si ces petites modifications du tube digestif seront des caractères pour des groupes très limités. Les larves des Sca- rabéiens rappellent considérablement la forme des Chenilles : leur tête arrondie et cornée, l’absence d’ocelles, leurs antennes de quatre articles insérées à la base des mandibules , leurs mâchoires dentelées et munies de palpes de trois ou quatre articles , et leurs pattes assez développées, les font reconnaître aisément (2). Leur système nerveux affecte une disposition qui n’appartient bien exactement à aucune autre tribu dans l’ordre des Coléoptères. Tel j’ai décrit cet appareil dans le Hanneton , tel je l’ai retrouvé dans la Cétoine et dans l’Oryctes. M. Léon Dufour a déjà décrit le système nerveux de la Cétoine dorée (3). On avait déjà une re- présentation grossière de celui de la larve de VOryctes nasicornis, dans l’ouvrage de Swammerdam (/i). J’ai comparé attentive- ment cette disposition dans ces deux derniers types avec celle qu’on observe dans le Hanneton , j’y ai reconnu une similitude complète. Ceci nous fournit une preuve bien évidente de l’homo- généité de la tribu des Scarabéiens. Chez les larves d’Aphodius (5) (famille des Coprides , groupe des Aphodiites), le système nerveux est très analogue à celui des Cétoines, des Hannetons et des Scarabées : néanmoins il est pro- (I) De Haan. Mémoires sur les métamorphoses (les Coléoptères. — 1er Mémoire : Les Lamellicornes ( Nouvelles Annales du Muséum, t IV, p. 125. — 1835). (3) Voyez pour leurs caractères (outre le Mémoire de M de Haan) Erichson, Archiv filr Naturgeschiclite, vol. VI 1 1 , p. 363 |1842). (3) Annales des Sciences naturelles, 2' série. I. XVIII p. 162. pl 4 (1 842). (4) Hibliu naturœ, pl 28. (K) J'ai étudié particulièrement la larve de \ Iphadius rufipes Eabr 320 E. BLANCHARD. — SLR LE SYSTÈME NERVEUX portionnellement un peu plus allongé. Ceci indique , à n’en pas douter, que ce groupe établit le passage entre les Scarabéiens proprement dits et cette petite famille des Passalides, qui nous semble s’en éloigner un peu, à quelques égards , et former ainsi un lien avec la tribu des Histériens. Les premiers états des Passales nous présentent des particula- rités fort curieuses. C’est tout récemment que nous avons pu les étudier , grâce à M. Sallé , entomologiste instruit et très zélé , qui a rapporté de la Nouvelle-Orléans plusieurs individus de la larve du Passalus distinclus. Cette larve ressemble d’une manière géné- rale à celles des autres Scarabéiens ; cependant elle est plus cylin- drique et moins recourbée ; ses mâchoires et ses mandibules sont plus fortement dentelées. Ce n’est pas toutefois ce qu’elle nous offre de plus singulier : elle se fait surtout remarquer par ses pattes, dont il n’existe que deux paires bien développées : celles du métathorax se montrant seulement sous l’apparence de deux très petits tubercules. On se rappellera qu’en 1838, M. West- wood (1) a décrit , comme appartenant au Bupreskis attenuata, une larve, n’ayant aussi que quatre pattes bien développées. Dans une note publiée en 1843 , j’ai signalé cette détermination comme inexacte , sans être toutefois à même d’indiquer la véritable. Aujourd’hui , il me paraît certain que cette prétendue larve du Buprestis attenuata appartient bien réellement au genre Passale. Nous ne pouvons douter en aucune manière de l’exactitude de l’observation faite par M. Sallé , cet entomologiste ayant élevé plusieurs fois ces insectes, et, de plus, nous ayant aussi rap- porté la nymphe qui suffirait , à mon avis , pour lever toute incer- titude. Le système nerveux de la larve du Passalus clistinctus nous a présenté une disposition des plus intéressantes à constater. On l’a vu, cet appareil, chez les Passales à l’état adulte, res- semble presque complètement à celui de tous les Scarabéiens : à leur état de larve, il ressemble, au contraire, extrêmement à celui des larves de Lucaniens. Après les trois centres nerveux thoraciques, notablement espacés, on trouve une chaîne abdo- (I) Introduction io the modem classification of Insects, t. I, p 221. DKS INSECTES. A-2i minale s’étendant jusqu’aux trois quarts de la longueur du corps. On compte huit ganglions abdominaux tous écartés les uns des autres, et dont le dernier est plus volumineux que les précédents : c’est une disposition semblable à celle observée pour la première fois par M. Léon Dufour chez la larve du Lucanus parallelipipedus. Ainsi, les Passalides constituent bien évidemment un type de transition entre les Scarabéiens et les Lucaniens. La considéra- tion des Insectes parfaits nous les montre comme très voisins des premiers; la considération des larves comme très voisins des seconds. Pendant leur état de nymphe, les Passalides éprouvent par conséquent des changements beaucoup plus considérables. A l’aide du système nerveux , nous saisissons donc non seule- ment les caractères les plus importants de la tribu des Scara- béiens , mais encore les plus légères dégradations du type. La considération de l’appareil alimentaire et des organes de la géné- ration ne fournissent aucun résultat à beaucoup près aussi géné- ral ; car ils présentent des différences extrêmement grandes entre les représentants des groupes d’une valeur très secondaire. Peut- être quand les faits observés seront plus nombreux, en tirera-t-on des caractères propres à limiter les petites divisions, et venant à l'appui de ceux qui sont offerts par les parties de la bouche. 2" Tribu — Les Licaniess (Liiainii). Dans ses premiers ouvrages, Latreil le avait séparé complète- ment ces Insectes des Scarabéiens. Plus tard il les plaça dans la même tribu, et cet exemple fut suivi pendant longtemps par la plupart des entomologistes. Danscesdernières années, cependant, plusieurs d’entre eux, prenant en considération la longueur des an- tennes et dans la plupart leur forme coudée, les en séparèrent de nouveau. D’abord je regardai cette séparation comme inutile , et je ne l’adoptai pas dans mon H istoire des Insectes. Maintenant , au contraire, elle me paraît devoir être adoptée. M. Léon Dufour, dans un mémoire sur les métamorphoses de la Cétoine et du Dor- cus, s’est prononcé aussi pour cette opinion (1). (1 J Léon Dufour, Histoire comparative des métamorphoses et de /’ anatomie des V série. Zool. T. V. (Juin 18 46.) t 21 322 E. BUMUtR». — SUIS l.li SYSTÈME- .NERVEUX Les Lucaniens sont pourvus de trachées vésiculeuses entière- ment analogues à celles des Scarabéiens. Mais la disposition de leur système nerveux est extrêmement différente. Chez les larves, où cet appareil a été observé par M. Léon Dufour, on remarque des différences non moins grandes que chez les Insectes par- faits. .l’ai étudié plus spécialement les Lucanes cerf volant ( Lvcanus cervus , Lin.), L. parallelipipedus, Lin. (Dorcus parallelipipedus de plusieurs entomologistes modernes), et I ePlatycerus earaboides. VI. Newport a aussi donné une figure (1) du premier. Chez le Lu- cane (2), les ganglions cérébroïdes sont petits comparativement au développement de la tête. Ils s’amincissent de manière à se confondre graduellement avec les nerfs optiques ('3). Ceux-ci ont une longueur très considérable qui augmente ou diminue avec la dimension de la têle. Le ganglion sous-œsophagien est plus petit et plus éloigné du cerveau que dans la plupart des autres Coléop- tères ; sa forme est aussi plus ovoïde (/i). Les ganglions thoraciques diffèrent considérablement de ceux des Scarabéiens. Le prothoracique, au lieu d’être presque en forme de cône renversé, est au contraire chez les Lucanes plus élargi au milieu et graduellement aminci aux deux extrémités (5). 11 en naît un seul tronc nerveux, se divisant bientôt en trois nerfs. Le pre- mier, dirigé en avant, présente deux branches latérales se sub- divisant bientôt en plusieurs filaments. Le second nerf s’étend di- rectement vers la partie latérale et médiane du prothorax, et le troisième, le nerf crural, redescend en formant un angle obtus avec le tronc nerveux commun. Les centres médullaires mésotho- racique et métathoracique sont séparés et même déjà assez éloi- gnés l’un de l’autre. Le premier (6) est gros et presque arrondi. ( elonia aurata rt Dorcus parallelipipedus (.Un. des Sc nat , 2 série, t. XVIII, p. 162, pl. Vet o. — 1842). (1) Cyclopedia of Anatomy nnd Phijsinlogij, art. Insecte, t II, p. 954 et 959 (1889). (2) PI. 8, fig. t. (3) PI. 8. fig. t — l h. (4) PI. 8, fig. 1—2. (3) PI- 8, fig. I. (6) PI. 8, fig I —4. m:s insectes. 323 Les branches principales des nerfs de la troisième paire sonl très fortes. Le ganglion métathoracique (1) est beaucoup plus petit et plus allongé. Les ganglions abdominaux, très petits comparativement à ceux du thorax et surtout à la grande dimension de l’Insecte, sont très écartés les uns des autres. On en compte six dont la forme est ovalaire (2). Le dernier seul est un peu plus gros , et outre les nerfs des or- ganes de la génération, il fournit des filets aux deux derniers an- neaux de l’abdomen. Les autres ganglions produisent une seule paire de nerfs qui se divisent en deux branches principales dans chaque anneau abdominal. Entre les Lucanus cervus et paraUelipipedus, je n’ai constaté aucune différence. J’ai pu examiner aussi le système nerveux d’un type de la tribu des. Lucaniens propre à la Nouvelle-Hollande, le Lam- prime bronzé ( Lamprima œnea Lat.) sur des individus bien con- servés. J’ai reconnu chez cet Insecte une organisation tout à-fait semblable à celle des Lucanes; mais je regrette de ne pas avoir pu étudier un type plus éloigné , appartenant à la même tribu, le genre Sinodendron. A l’égard de cet Insecte , par exemple , M. Westwood a signalé une affinité avec les Bostrichiens. L’observation anatomique nous apprendrait si les rapports un peu éloignés existant entre les Lu- caniens et les Bostrichiens ne sont pas réellement mieux établis par l’organisation des Sinodendrons que par celle des Lucanes. L’analogie entre ces derniers et les Cérambyciens , comme les Trictenotomides et les Prionides, a déjà été aperçue; c’est une analogie très réelle, mais elle n’est bien intime ni d’après la con- sidération du système nerveux ni d’après celle des caractères extérieurs. Les larves des Lucanes présentent extérieurement la ressein- . (i) PI. 8, fig. t— 5. (2) PI. 8. fig. 1—6, 7. 8, 9, 10. 11. ;V2/| e. BL.mii4K». — sim i.k système nerveux blance la plus grande avec celles des Scarabéiens. Comme ces der- niers, elles ont le corps contourné et les pattes assez dévelop- pées (i . M. Dehaan a remarqué cependant qu’elles en différaient en ce qu’elles ont l’anus longitudinal , tandis qu’il est transversal chez les Scarabéiens. Il faut noter en outre que l’extrémité de leur corps est généralement moins épaissie. M. Léon Dufour (2), rpii a étudié anatomiquement la larve du Lucane parallélipipède ( Lucanus parallelipipedus Lin.), nous a montré que cette larve offrait une disposition de son système nerveux très différente de celle de la Cétoine, du Hanneton ou du Scarabée. En effet, les ganglions thoraciques et abdominaux, loin d’être ra- massés comme chez ces derniers, forment au contraire une longue chaîne qui s’étend dans presque toute la longueur du corps. On compte huit ganglions abdominaux Le premier est très rapproché du centre nerveux métathoracique , et les deux derniers sont con- tigus l’un à l’autre. Tous les intermédiaires ont entre eux des connectifs à peu près d’égale longueur, c’est-à-dire de la longueur d’un des anneaux du corps. Il existe donc, comme on le voit, des différences très importantes dans l’organisation des Scarabéiens et des Lucaniens. Si ces types se lient l’un à l’autre par certains points tels que la constitution générale des larves , la présence des trachées vésiculeuses dans tout le corps chez les Insectes parfaits, ils s’éloignent notablement sous le rapport du système nerveux et des caractères fournis par le système appendiculaire. 3e Tribu. — Les Historiens ( Histerii ). Cette tribu se rapproche à beaucoup d’égards de celle des Sca- rabéiens; elle a comparativement peu de représentants : mais telle que je la considère aujourd’hui , elle offre un ensemble assez ho- mogène. Dans mon Histoire des Insectes, j’avais placé dans une même tribu avec les Misters et les Nitidules, les Silphes et les Nécrophores. D’après la considération des caractères extérieurs Jlj Voyez Rœsel, Inseckt Belustig, t. Il, pi. 4. — Ratzeburg die Forst. Insect., 1, I, pi- 3, fig- 19- (2) Ilisl. cnmpar. des métam. et de l'anal, des Cetonia aurata et Dorcus paral- leiipipedus (Ann. des Sc. nat., 2e série, t. XVIII, p. I 6'2 , pl . 5 A, fig. 17 — 1842). DES INSECTES. 325 seuls, on paraissait conduit à ce rapprochement. L’examen ana- tomique n’a pas lardé à me convaincre que les Silphes et les Né- crophores ne devaient pas prendre place parmi les llistériens. Au- jourd’hui cette tribu me paraît donc devoir être composée seule- ment des trois familles suivantes, les Histérides, les Nitidulides et les Scaphidides. Dans la disposition du système nerveux, j’ai trouvé la plus grande analogie entre ces divers types. J’ai étudié parmi les premiers trois des espèces les plus communes dans notre pays ( Hister quad rimacula tus Lin., cadaverinus et saprinus speculifer l’ayk. ). Chez ces Insectes, le système nerveux offre un degré de centralisation déjà très avancé, mais moins pro- noncé toutefois que chez les Scarabéiens. Les trois centres médullaires thoraciques sont très gros compa- rativement à la dimension du corps (1). Ils sont séparés par des connectifs très courts; et la distance entre le prothoracique et le mésothoracique n’est pas notablement plus grande qu’entre le mésothoracique et le métathoracique. Les ganglions abdominaux constituent une seule niasse (2) un peu allongée et pyriforme d’où naissent tous les nerfs, et à sa base on remarque deux sillons transversaux indiquant des ganglions dont la fusion avec les autres n’est pas complète. Les Nitidules, dont j’ai examiné plusieurs espèces, et surtout la Nitidula amea, m’ont présenté une disposition dans leur système nerveux très semblable à celle des Histers (3). Le centre médullaire prothoracique est seulement plus écarté des autres centres médul- laires du thorax. Ce fait étant connu, on remarque facilement qu’il existe une ressemblance très grande dans la forme des antennes et des parties de la bouche (4) chez ces deux types que les ento- mologistes éloignent plus ou moins l’un de l’autre. La troisième famille de la tribu des llistériens est très voisine ries précédentes; cependant elle offre quelques particularités. Dans; (1) PI. 8, lig. <2-8. i, s. (2) PI 8, fig. 2—6. (3) PI. 8, lig. 3. f i Voyez Ih nouvelle édition du Régne animal de Cuvier, pli 33 el 36. 32G E. BLINGIARU. — SU U LE SYSTÈME M.RVEIX les Scaphidiums (Scaphidium quadrimaculatum Fabr,)i 1), lesgan- glions mésothoracique et inétathoracique sont rapprochés comme chez les Histérides et les Nitidulides, mais le ganglion prothora- cique en est plus éloigné. La principale différence consiste, au reste, dans la forme de la masse médullaire abdominale. Elle est aussi un peu pvriforme , mais ici elle se termine par une sorte de pointe d’où naissent les deux nerfs nacrés qui chez ce type demeurent soudés dans une partie de leur longueur. La forme de la masse médullaire abdominale des Scaphidies semble conduire à celle qu’on observe dans les Gyrinides. Je n’ai pas encore eu l’occasion d’étudier anatomiquement les larves des Histériens. D’après leur forme extérieure, les larves des Nitidules et des llisters paraissent se rapprocher de celles des Silphes. Les larves de Scaphidium , dont je dois la connaissance à Al. Chevrolat, sont remarquables par leurs antennes déjà fort lon- gues. Elles ont beaucoup l'aspect des larves des Alycétophages et des Dermestes ; malheureusement je n’ai pu les obtenir vivantes, de manière à m’assurer si les caractères anatomiques ne vien- draient pas réellement indiquer là un lien entre les Histériens et les Dermestiens. 4' Tribu. Les Silpuieks (SüplUi'). Cette tribu a été rapprochée des Nitidules par la plupart des entomologistes. AL Erichson la regarde au contraire comme plus voisine des Staphyliniens. L’organisation vient à l’appui de ce der- nier rapprochement. Deux types principaux appartiennent à cette tribu ; ce sont les Nécrophores et les Silphes. Chez les premiers (2) ( Xecrophorus vespillo Lin. , mortuorum Fab.}, les nerfs prothoraciques antérieurs se divisent en trois branches principales assez fortes. Les nerfs intermédiaires nais- sent du même tronc que ceux de la première paire (3). (1) PL 8, fig. 4 (2) l’I. 9, (îp. I (S) PI. 9, lîp. I —4, S DES INSECTES. 327 Les centres nerveux méso et métathoracique sont très distincts l’un de l’autre, mais tout-à-fait contigus (1). Le filet nerveux des connectifs qui s’unit au nerf alaire antérieur est long et facile à voir. Les ganglions abdominaux forment une chaîne allongée. On ne compte distinctement sept (2). Le premier est accolé au centre mé- dullaire du métathorax. Les quatre suivants, de forme ovalaire, sont séparés les uns des autres par de longs connectifs. Enfin les deux derniers, séparés par un léger étranglement, constituent une seule masse ovoïde. Chacun de ces ganglions émet une seule paire de nerfs qui se séparent, comme chez lesScarabéiens, en deux bran- ches principales. Le système nerveux des Silphes (3) diffère peu de celui des Nécrophores; cependant les centres médullaires du mé- sothorax et du métathorax sont un peu plus écartés (i). Le pre- mier ganglion abdominal , accolé au métathoracique chez les Né- crophores, est ici presque entièrement confondu avec lui (5). Les suivants, au contraire, sont dans les mêmes rapports. Dans la larve des Silphes ( Silplia obscurci Lin. ) (6) , les gan- glions cérébroïdes forment une masse presque carrée , d’où nais- sent antérieurement les nerfs optiques et les nerfs des anten- nes (7). Les centres nerveux thoraciques sont tous les trois très espacés (8). J, es ganglions abdominaux, au nombre de deux, sont presque arrondis, très petits et tous à peu près d’égale grosseur (9). Le premier est séparé du ganglion métathoracique par deux connectifs très courts. Les six suivants sont espacés à peu près également. Le dernier seul, déjà formé par la réunion de plusieurs, comme l’indique le nombre des filets qu'il produit, est assez rapproché du précédent. Le système nerveux des larves des Silphes, comparé à celui des (1) I’I 9, ag. 2 [Silplm obscurci) (2) PI. 9, lig. 3 u, b. (3) PI. 9, fig. 1—6, 7, S, 9, 10, Il et 12. (i) PI. 9, fig. 2 l, ■>. (5) PI. 9, fig. 2-6. (6) PI 9, fig. 3. (7) PI. 9, fig. 3—1 n.fc. (8) PI. 9. fig. 3—3, i, o. (9) PI. 9, fig. 3 — 6, 7, 8, 9, 10., 1 1,. 12 et 13. 328 F.. ISI.AM HAItl». sut LE SYSTEME \Kli\EI \ Insectes parfaits, nous montre certaines différences bien apprécia- bles. Le premier ganglion abdominal, très distinct chez la larve, s’est confondu dans l’Insecte adulte avec le centre nerveux du métathorax. En outre les trois derniers ganglions de la larve se sont réunis chez l’Insecte parfait , de manière à ne plus constituer qu’une seule masse. D’après la considération de leur système nerveux, les Silphiens se rapprochent notablement des Staphyliniens et des Carabiens, en même temps qu’on observe aussi certains rapports entre eux et les Dermestiens. Leur chaîne ganglionnaire abdominale , sans présenter une disposition tout-à-fait analogue, ne s’en éloigne pas considérableme n t,. Ce rapprochement entre les Silphiens et les Staphyliniens esv encore démontré par les caractères extérieurs , par les antennes moniliformes, les mandibules robustes, etc. Mais les larves indiquent mieux encore ce rapport. Elles ont des pattes et des appendices buccaux bien développés comme ceux des Carabes; leur corps est également aplati. La considération du système nerveux nous conduit encore à re- connaître un rapport plus évident; comme chez les Carabes et les larves de Staphyliniens, les larves de Silphes ont des ganglions abdominaux très petits et disposés d’une manière très analogue les uns par rapport aux autres. Les affinités des Silphiens avec les Staphyliniens et les Cara- biens semblent bien manifestes quand on examine les Silphes. Avec les Dermestiens elles ne paraissent pas moins évidentes quand on examine surtout les Nécrophores. L’organisation interne indique nettement ces rapports. Les ca- ractères des larves les montrent également. La forme des mâ- choires et des articles des antennes chez les Insectes parfaits les confirme encore (I). (1 ) Voyez à cet égard les détails que nous avons donnés dans la nouvelle édi- tion du Règne animal de Cuvier. Pour la comparaison des Silphes avec les Stapln- liniens, les pl. 35, tig. 5", 6. 6,6, et pl 27, fig. 1», 3'; pl. 28, fig. 1", 9'\ etc. Pour la comparaison des Nécrophores avec les Dermestiens, les pl 35, lig 3", 4". pl. 36. lig. », 10", Il etc DUS INSECTES. 329 M. 1 „éon Dufour a reconnu aussi une analogie frappante , dit- il , entre les Silphes , les Carabes et les Staphylins , sous le rap- port de la structure du ventricule chylifique (1). Ce sont donc des affinités dont on peut reconnaître l’évidence d’après la considération de la plupart des organes. 5' Tribu. — Les Staphtlimens ( Slaphylinit). ( Brachélytres Latr ) Les Insectes composant cette tribu sont bien reconnaissables à leurs élytres, beaucoup plus courtes que le corps. Ils ont été regar- dés par certains entomologistes comme établissant un passage entre les Coléoptères et les Orthoptères, dont les élytres sont éga- lement courtes, c’est-à-dire les Forficules. C'est, en effet, un trait d’analogie ; cependant , dans leur organisation , rien n’indique une affinité bien intime entre ces deux types. Le système nerveux desStaphvliniens forme une longue chaîne. Je prends pour premier exemple les Staphylinus olens et maxil- losus Lin. (2 . Les centres médullaires thoraciques sont presque également espacés (3) : les deux premiers sont un peu en forme de losange ; celui du métathorax, au contraire, est presque ovalaire. La chaîne ganglionnaire abdominale , tout en se rapprochant beaucoup de ce qu’on observe dans les Carabiens, présente néan- moins des caractères particuliers. Dans les Staphylinites on dis- tingue nettement sept ganglions , comme chez les Carabes (h) : mais ils sont groupés autrement. Le premier, séparé du centre nerveux métathoracique par des connectifs très courts, n’est pas séparé davantage du second ganglion ; le troisième est au con- traire éloigné, ainsi que les quatrième et cinquième. Enfin ce der- nier, avec les sixième et septième , forme une seule masse dans laquelle les trois ganglions demeurent très distincts. Tous les Staphyliniens que j’ai examinés (Staphylinus olens I) Leon Dufour, Itecherches anatomiques sur les Carabiques et plusieurs mitres Insectes Coléoptères (Ann. (les Sc mit., ("série, 1 826 ; tirage à part, p. 34). (2) PL 0, fig. i. (3) PI B, lig i— 3. 4, 3. (4) PI. », fig 1 — fi 7, 8,9. 10 I I , I i. 330 E. BLANCHARD. — SUR LE SYSTÈME NERVEUX Lin., maxillosus Lin., erythropterus Fab. , nebulosus I'ab., les Philonthes, P. polilus Fab. , œneus Crav. et splendens Fab.) m’ont présenté une disposition très semblable. Toutefois je dois ajouter que, dans les Philonthes, les trois derniers noyaux médul- laires de l’abdomen sont plus intimement unis que dans les Sla- phylins proprement dits. Il en est de même des Xantholins (Xan- tlwlinus linearis Oliv. Dans les Quedius (Ç. fulgidus Fabr. ) et les Pédères ( Pœderus riparius l'ab.), le premier ganglion abdominal se rapproche ou se confond même avec le centre nerveux du métathorax ; les autres restent disposés exactement, comme chez les Staphylins. La disposition du système nerveux , tout en indiquant une étroite analogie entre les Silphiens et les Staphyliniens, en indique une non moins réelle entre ces derniers et les Carabiens : celle-ci est même plus manifeste. A l’égard du canal intestinal , M. Léon Dufour a signalé de grands rapports entre les Staphyliniens et les Carabiens. La forme de leurs antennes et de leurs pattes vient aussi à l’appui de ce rapprochement. Parmi les Staphyliniens , les plus petites espèces ( Omalides), notamment les Micropeplus, paraissent se lier avec les Nitidulides. Jusqu’à présent je n’ai pas pu en réunir suffisamment pour m'as- surer si ceux-ci présentaient dans leur système nerveux une dis- position qui indiquerait un passage entre ces Insectes et ceux de la tribu des Histériens. Les larves des Staphyliniens nous offrent un exemple bien manifeste de ces Coléoptères dont l’état embryonnaire , à leur sortie de l’œuf, est déjà très avancé. Ces larves, en effet, comme celles des Carabiens , sont remarquables non seulement par le développement de leurs appendices et par leur allure, qui les fait ressembler déjà aux Insectes parfaits, mais aussi par le dévelop- pement du système nerveux , considéré d’une manière compara- tive ; car celui de la larve (1) (St. olens Lin.) diffère seulement do celui de l’insecte adulte par l’écartement des trois derniers gan- (i) pi. 9. tip. DES INSECTES. 331 glions abdominaux (1) et par le volume moins considérable des centres médullaires thoraciques. On reconnaît bien les affinités des Staphyliniens avec les Ca- rabiens (2) par leurs larves. Elles ont des mandibules et des mâ- choires très grandes , comme celles des Carabes ; elles ont aussi des pattes propres à la course , et un tubercule anal pédiforme. Leur tête et leurs anneaux thoraciques sont d’apparence cornée , tandis que leur abdomen est mou : ce dernier caractère les dis- tingue au premier abord des larves des Carabes ; elles sont aussi moins aplaties et en général plus amincies vers l’extrémité posté- rieure. 6' Tribu. — Les Psélapuiens ( Pselapliii ) Je ne mentionne ici cette tribu que pour mémoire. Nous lui rattachons deux familles : celle des Psélaphides et celle des Scyd- ménides. Les premiers sont considérés par la plupart des entomo- logistes , et probablement avec raison , comme très voisins des Staphyliniens. Ces Coléoptères sont d'une extrême exiguïté, et je n’ai pas pu jusqu’à présent en étudier un assez grand nombre pour bien connaître la disposition de leur système nerveux. Je n’ai pas été plus heureux à l’égard des Scydménides , qui peut-être s’éloignent beaucoup des Psélaphides. Leurs caractères extérieurs paraissent devoir les en faire rapprocher ; mais déjà nous avons eu l’occasion de voir combien on pouvait être ainsi induit en erreur. Je n’ose donc encore rien préjuger à l’égard des affinités de ces Coléoptères. M. Stephens pense (3) que les Scyd- ménides établissent un lien entre les Psélaphides et les Anthicides de la tribu des Cantharidiens. Les premiers états de ces petits Insectes étant inconnus , c’est encore une raison pour se tenir sur la réserve touchant l’appré- ciation de leurs affinités. (1) PI 9, fig. 3 — 10, 11, 12. (2) Voyez le Magasin de zoologie (1835). — Heer, Observai, entum — Jiatze- burg, Die Forst Insecl, 1. 1, pl. 1 (1837! — La nouvelle édition du /ligne ani- mal de Cuvier (Insectes), pl 15, etc. (3) Marna ! of Itritish Coh'optera, p 342 (1837) 332 K. BI.IMIMKU suit 1.1. SYSTEME NEHVEUX 7'1 Tribu. — Les Dcruestiens (Dcrmcslii) . J’ai considéré cette tribu comme pouvant former quatre fa- milles : les Mycétophagides, les Dermestides, les Byrrhides et les Agathidiides. Il existe parmi nos Dermcstiens des types dont la taille est tellement exiguë, que les observations anatomiques sont loin d’être toujours faciles. Mes recherches n’ont encore porté que sur les Mycétophagides, les Dermestides et les Byrrhides. A la première de ces deux fa- milles , je rattache maintenant le genre Byturus. A l’exemple de la plupart des entomologistes, j’avais placé , dans mon Histoire îles Insectes, ce genre parmi les Nitidulides : l’examen anatomique m’a montré d’une manière évidente que sa place était parmi les Dermestiens. En effet, les Byturus diffèrent bien peu des Mycétophagides; leurs ganglions abdominaux sont seulement un peu plus gros : leur disposition est à fort peu de chose près la» même. Les Bytu- rus me paraissent donc devoir former un simple groupe dans la famille des Mycétophagides. L’organisation nous ayant conduit à reconnaître , de la manière la plus évidente , ce point d’affinité , on reconnaît sans peine que les Byturus et les Mycétophages dif- fèrent fort peu , également sous le rapport de la forme de leurs antennes et des pièces de leur bouche (I). Dans les Byturus (B. tomenlosus Payk.), les centres médul- laires thoraciques sont fort gros (2) ; le dernier est ovalaire et mé- diocrement éloigné du précédent. On distingue postérieurement la trace d’un ganglion abdominal qui s’est, réuni à lui. En outre , on compte six ganglions formant une chaîne ne dépassant pas beaucoup la base de l’abdomen (3). Ils sont séparés les uns des autres par des connectifs très courts ; les deux derniers sont même réunis, et forment une masse allongée : tous les autres ont une (I ) Règne animal de Cuvier nouvelle édition Insectes), pl 36, lis <>", et pl 62, fig. 12, I l I I (2) ri. 12, fig 1—3, i, (3) 1*1 12, fig 1—6. 7, 8, 91, 10, Il DES INSECTES. 533 forme ovalaire. On voit d’après cette description combien les By- turus diffèrent des Nitidules par leur organisation. Les Mycétophages s’en éloignent au contraire fort peu (M. qua- drimaculatus Fab.) ; les premiers ganglions abdominaux (1) sont seulement un peu plus espacés et un peu plus petits, le quatrième est plus rapproché du cinquième (2), et le dernier est le résultat d’une réunion un peu plus intime entre les deux ganglions pos- térieurs encore distincts chez les Byturus (3). On n'observe pas entre ces deux types de différences plus importantes à signaler. Dans les Dermestides ( Uermestes lardarius et vulpinus Lin), le ganglion abdominal , qui , chez les précédents , est presque com- plètement confondu avec le centre nerveux du métathorax, est ici beaucoup plus gros et plus distinct (4). Les larves de ces Der- mestes offrent une chaîne ganglionnaire abdominale composée de huit centres nerveux espacés à peu près également. Par les pro- grès de l’âge, le premier se rapproche du ganglion métathora- cique, le septième et le huitième se confondent (5) et se rappro- chent du sixième. Il existe alors une ressemblance très notable entre le système nerveux de ces Insectes et celui des Néc rophores. Chez les Byrrhides ( Byrrhus pilula Lin.), l’appareil de la sensi- bilité ne diffère notablement de celui des Uermestes qu’en ce que le premier ganglion abdominal est à peu près totalement confondu avec le métathoracique. Les Insectes de cette tribu , par les caractères de leur organi- sation aussi bien que par ceux des larves, offrent un ensemble homogène. Les larves des Mycétophages, comme celles des Der- mestes, sont hérissées de poils roides, leurs antennes sont assez allongées, leurs mandibules et leurs mâchoires petites. Quant aux Byturus, je n’ai pas eu l’occasion de les étudier pen- dant leurs premiers états. Il serait intéressant de les observer, pour apprécier mieux encore que nous ne pouvons le faire main- tenant tous les rapports de ce type avec les Dermestides et les Mycétophagides. (1) PI. 12, fig. 2—9. 10 (4) PI. 12, fig. 1 — 10, 1 1 (2) PI. 12, fig 3—6 (5) PI. 12, fig 2—12. (3) PI 12, fig. 2 '.Yàk K. HlWdltltl). — SI'. B I.E SYSTEM K Mil! VEUX Les Dermestiens ont des affinités très diverses ; comme on l’a déjà vu , ils se rapprochent à beaucoup d’égards des Silphiens par les Nécrophores. Leurs rapports avec les Érotyliens sont des plus étroits. Ils paraissent en même temps offrir une certaine ana- logie avec les Cucujiens. Leurs affinités avec les Bostrichiens sont aussi évidentes d’après leur organisation que d’après leurs carac- tères fournis par les antennes et les parties de la bouche. Elles ne le sont pas moins avec les Clériens. Tant que les parties les plus essentielles de l’organisation sont demeurées inconnues, il était complètement impossible d’appré- cier ces divers rapports, qui , aujourd’hui , ressortent jusqu’à la dernière évidence , car aucun caractère important ne vient les combattre. 8' Tribu. — Les Cucujiens ICucujiiy N’ayant pu examiner anatomiquement quelques uns des repré- sentants de cette tribu , ses affinités ne me paraissent pas pouvoir être bien reconnues. L’aspect extérieur semble devoir faire rap- procher les Gucujides des Dermestiens par le groupe des Sylva- nites. D’après la ligure de la larve du Cucujus spartii donné par M. Westwood (I), on pourrait croire ce rapprochement fondé. Les l’assandrides , que nous avons considérées comme formant une seconde famille dans la tribu des Cucujiens , se lient aussi aux Cérambyciens. Ces Coléoptères étant étrangers à notre pays, je n’ai pu étudier leur organisation. Leurs métamorphoses sont demeurées inconnues jusqu’à présent : aussi toute incertitude règne-t-elle à l’égard de leurs affinités naturelles. 9f Tribu. — Les Erotyliens iEvolylii). ( ('la vipalpes Latr. ) Il serait nécessaire de connaître dans cette tribu l’organisation de tous les types principaux , pour reconnaître tous ses liens de parenté. On arriverait même alors certainement à modifier ses limites. Les Erotyliens, en effet, sont loin de former un ensemble (I) /In [nlroduct. o' lhe modem classif. oflnsecls, I I p 166, fig. 12-19. nus ivsneriis. 335 homogène. On peut déjà s’en convaincre ; mes observations sur le système nerveux de quelques uns d’entre eux le prouveront. Mais ce sont encore des données trop peu nombreuses pour arri- ver à des résultats complets. Nous rattachons trois familles à cette tribu : les Érotylides, les Endomychides et les lpsides. Dans la première , on compte un nombre d’espèces considé- rable : seulement, la plupart étant exotiques, les formes les plus ty- piques, les formes les plus particulières appartenant à ces espèces exotiques, il est impossible aujourd’hui d’arriver à une solution. J’ai étudié le genre Triplax ( T . russica Fab.) ; là j’ai observé une disposition du système nerveux très analogue à celle des Der- mestiens (1). S’il en est de même pour tous les autres Érotylides, il n’y aura aucune raison pour les en séparer. Dans les Triplax , on observe une chaîne ganglionnaire abdo- minale "uigée. Un premier ganglion est accolé au centre mé- dullaire nîétathoracique (2), en en demeurant très distinct, comme chez les Dermestes. On compte ensuite encore , comme chez ces derniers, quatre ganglions espacés presque également, et enfin une masse médullaire terminale dans laquelle on en distingue deux (3). Le système nerveux des Tritomes ( Tritoma bipustulata) m’a offert quelques différences avec celui des Triplax , les quatre der- niers ganglions abdominaux étant plus rapprochés les uns des autres. Les larves des Triplax, extérieurement, ressemblent beaucoup à celles des Dermestiens. Elles ont, comme ces dernières, des pattes assez courtes , une enveloppe hérissée de poils assez roides , et elle-même d’une consistance assez solide. Ces larves, déjà décrites par MM. Léon Dufour (4) et Westwood (5), m’ont présenté un (1) PI. 1 2, fig 4. (2) PI. 12, fig. 4—6. (3) PI. 44, fig. 4—11, 12 (4) Annules i le la Société Entomoloijique de France, t. XI, p. 1 91 . pl. 7 (1842). (j) \\ estwood , An fntrod. lo lhe modem classif of Insecte, t. I. p. 393. et fig 49 — G 330 lî. BLANCHARD. — SI: U l.li SYSTEME NERVEUX système nerveux très analogue à celui des larves de Dermestes. Les ganglions abdominaux , au nombre de huit , sont presque aussi gros que ceux du thorax. Les connectifs qui les séparent les uns des autres sont aussi assez courts. Ainsi , d’après la considération des Triplax , tant à l’état de larve qu’à celui d’insecte parfait, on serait conduit à les réunir à la tribu des Derinestiens. Les caractères intérieurs sont d’accord en cela avec les caractères extérieurs. Mais les Érotyles proprement dits sont-ils conformés sur un plan bien analogue à celui des Triplax ? L’observation directe peut seule nous l’apprendre , et actuellement elle nous manque. D’après la description de la larve de l’ Erotylus (Ægythus) su- rinamensis Fab. donnée par M. Lacordaire , nous ne pouvons pas savoir jusqu’à quel point elle ressemble beaucoup à celles des Triplax. Pour les Endomychides, j’ai étudié le système nerveux d’un des principaux représentants de cette tribu, l’Endomychus rouge ( Endomychm coccineus Fab. ). Dans ce Coléoptère (1), les trois ganglions thoraciques sont à peu près également espacés et de la même grosseur. Les ganglion^ abdominaux sont beaucoup plus rapprochés les uns des autres que chez les Triplax. On en distingue seulement quatre (2). Le premier accolé au centre médullaire métathoracique ; le troisième et le quatrième réunis formant une masse médullaire allongée et un peu pyriforme. Le deuxième ganglion est juste situé à égale dis- tance entre le premier et le troisième. Les connectifs sont courts et réunis l’un à l’autre. Par la disposition du système nerveux les Endomychus se rap- prochent considérablement des Coccinclliens. Leurs larves ont été observées en Angleterre , mais les descrip- tions et les figures qu’on en a données sont insuffisantes pour les faire bien connaître (3). (1) PI. 12, fig. 5. (2) PI. 12, fig. 5-6, 7, 8, 9. (3) Voyez Curtis , British Entomology , et Westwood , An Int. ta thv modem class. of Ins., t. I, p. 394, fig. 49 — I I l)liS INSECTES. La famille des Ipsides est composée d’une série de genres qui certainement par la suite ne resteront pas ensemble. Les Colydies, tant à leur état de larve qu’à leur état d’insecte parfait, paraissent se lier étroitement avec certains Éroty liens comme les ïriplax et avec les Dermestiens. Quant aux Ipsides, ils ont beaucoup l’aspect des Nitidules. Je n’ai pas encore eu l’occasion d’étudier le système nerveux dans ces types intéressants : aussi leurs affinités me sem ■ blent encore impossibles à apprécier. J’ai observé anatomiquement un seul genre réuni à la famille des Ipsides par plusieurs entomologistes. Il devra certainement en être séparé. Les Trogossites ( Trogossila maurilanica Lin.) ont un système nerveux remarquable (1). Leur chaîne ganglionnaire est fort longue. Les centres nerveux thoraciques sont également espacés ; le prothoracique est le plus gros, et ses trois paires de nerfs nais- sent d’un tronc commun. Les ganglions abdominaux sont au nombre de huit (’2). Le pre- mier est réuni au métathoracique par deux connectifs très courts. 11 distribue ses filets nerveux dans les muscles du thorax. Les deuxième , troisième et quatrième ganglions sont séparés les uns des autres par des connectifs assez longs. Au contraire les qua- trième, cinquième, sixième, septième et huitième n’ont entre eux que des connectifs extrêmement courts. Ces ganglions sont de forme ovalaire, le dernier seul est plus élargi. Ils produisent une seule paire de nerfs qui se divisent en deux grandes branches. Si la forme extérieure des Trogossites, si leur corps long et aplati, leurs mandibules très robustes , leur abdomen fort court par rapport à la longueur du thorax leur donnent un aspect tout particulier , il en est de même de leur système nerveux. Cet appa- reil , chez les Trogossites , diffère beaucoup de celui de tous les autres Coléoptères soumis à mes investigations. Néanmoins on est conduit à le comparer au système nerveux des Carabes plutôt qu’à tout autre. Il présente un ganglion abdominal de plus que (Q PI. 13, fig. 1. (2) PI. 13. fig. 1 — 6. 7, 8. 9, 10, 11. 12, 13 3r série. Zool T. V (Juin 1816.) a SllB I.li SV ST K MK .NERVEUX 338 E. HI.IX(HIRI). — chez ces derniers, mais il y a une analogie très notable dans la disposition des centres nerveux. Les Trogossites constituent réellement un de ces types aber- rants, comme les appelle M. Mac-Leay. Certainement il existe une relation entre lui et les Carabiens. Aussi peut-être sera-t-on con- duit par la suite à regarder les Trogossites comme un intermé- diaire entre les ïps et les Carabiens par les Siagones, et entre ceux-ci et lesCucujes, et peut-être les Ténébrionides. D’après ce qui précède on voit combien la tribu des Érotyliens serait hétérogène. La constance dans la disposition du système nerveux qu’on remarque en général dans toutes les tribus natu- relles, alors même que les formes extérieures sont différentes, en est la meilleure preuve. Si dès à présent je ne change pas ses limites ou si je ne répartis point ses divers groupes dans plusieurs autres tribus, c’est qu’il n’est pas possible actuellement d’avoir des idées bien arrêtées à l’égard des affinités de tous les types qui les composent ; car les observations anatomiques nous manquent sur beaucoup de points. Je sais parfaitement que les Trogossites ne pourront rester dans une même tribu avec les Érotylides et les Endomychides. Cepen- dant je ne les en éloignerai pas maintenant ; car oit les p'acerait- no d’une manière convenable? devront-ils former une tribu par- ticulière à eux seuls? devront-ils constituer une tribu , réunis avec les lpsides, ou bien encore devront-ils être placés parmi les Cucujiens? L’observation nous manque pour résoudre ces ques- tions, il faut nécessairement l’attendre. C’est déjà un point essentiel de connaître l’intérêt qui s’atta- chera à leur solution et de savoir sur quels points on devra diriger son attention. 10* Tribu. — Les Cocci.nelliens [Coccinellii). Les Coccinelles proprement dites sont les principaux représen- tants de cette petite tribu. J'ai étudié le système nerveux de plu- sieurs espèces. Elles m’ont paru toutes très semblables au type du genre, au type de toute la tribu , à la Coccinelle à sept points ( Coccinella septempunctata Lin.). DUS INSECTES. 339 Les centres médullaires du thorax sont à peu près d'égale gros- seur (1); le prothoracique est notablement plus éloigné du méso- thoracique que celui-ci ne l’est du métathoracique. Les ganglions abdominaux forment une chaîne qui n’atteint pas même la moitié de la longueur de l’abdomen ("2). On en compte d’abord un assez gros accolé au centre nerveux du métathorax, puis un second séparé du premier par des connectifs assez longs; puis un troi- sième ayant entre lui et le second à peu près la même distance qu’entre le second et le premier : seulement, ce troisième ganglion forme qne seule masse médullaire avec les suivants, qui semblent être au nombre de trois. De légères dépressions transversales indiquent aussi quatre ganglions dans cette masse médullaire. On reconnaîtra ici une analogie avec le système nerveux des Endomychus. Mais on observera en même temps certaines dilfé- rences qui permettent de séparer les Coccinellienset les Endomy- chides, comme, par exemple, la brièveté de la chaîne abdominale chez ces derniers. Les caractères fournis par les appendices condui- sent aussi à ce résultat, mais sans autre indice il serait peu certain. lin fait que je m’explique maintenant est l’analogie très positive existant entre les Coccinelliens et les Sphæridides. Sous le rap- port de leur système nerveux il y a une ressemblance très réelle. Au premier abord j’en fus surpris; mais en examinant ensuite la forme du corps, celle des antennes, même des pièces de la bou- che, j'ai reconnu que l’analogie entre ces deux types n’existait pas seulement dans la disposition de leur système nerveux (3). Un indice était toutefois nécessaire pour la reconnaître. L’observation anatomique ne peut plus laisser de doute. Les Coccinelliens se rapprochent, se lient aussi à certains égards aux Chrysoméliens; la disposition de leur système nerveux les rapproche de certaines Chrysomèles , surtout du genre Lina. Entre les larves, la ressemblance est plus grande encore (4). Le système fi) 1*1. il, fig 2. (2) PI 13, fig. 2—6, 7, 8, 9, 10. (3) Vovez les pl. 38 et 74 bis de la nouvelle édition du Règne animal de Cuvier. (i) M. Ratzeburg a donné une très bonne figure de la larve de la C 'nrcinclla septempunclala (Die For st-fnscctm . I I pl I . fig. 1 -») SL K LH SYSTEME NERVEUX 340 F,. KLXNlHXRn. nerveux des larves des Coccinelles diffère à peine de celui des lar- ves de Chrysomèles. Il" Tribu — Les HYDRoruiutss ( Hydrophilii ). (Palpicornes Lair.) Cette tribu paraît assez naturelle, tout en renfermant des types qui s’éloignent du type principal à quelques égards; les familles qui la composent sont au nombre de cinq : les Sphæridiides , les Hydrophilides, les Hélophorides, les Parnides et les Hété- rocérides. J’ai plus particulièrement étudié les deux premières. Les Sphæridiides ( Sphæridium scarabœnides ) ont leur système nerveux un peu plus centralisé que celui des Hydrophilides. A ce point de vue, il est plus semblable à celui des Coccinelliens. Chez les Sphæridies, les centres nerveux du mésothorax et du méta- thorax sont très rapprochés l’un de l’autre, mais non pas accolés l'un à l’autre (1). Les ganglions abdominaux forment une chaîne assez courte (2 : le premier est extrêmement petit et accolé au centre médullaire métalhoracique ; le second en est éloigné, et les suivants, qui sont séparés du second par des connectifs assez courts , forment une seule masse. On y distingue nettement trois ganglions. La chaîne ganglionnaire abdominale n’atteint que la base de l’abdomen. J’ai examiné le système nerveux dans plusieurs Hydrophiles ( H ydrophilus piceus Lin. , llydrous coraboidcs Lin. ). j’y ai trouvé une ressemblance complète. Dans le grand Hydrophile, où je l’ai représenté avec détails, on remarque que les ganglions céré- broïdes sont très petits comparativement à la grosseur de la tête de l’Insecte (3). Les nerfs optiques, comme j’ai eu l’occasion de le dire précé- demment , sont ici extrêmement grêles comparativement à ceux qu’on observe ailleurs (4). Le centre médullaire prothoracique émet des nerfs antérieurs très gros et divisés en branches fort (1) PI. 13, fig. 3— i, S. (2) ri. 13, lig. 3— s 7. 8.9. 10 (3) PI. 11, fig 1 — 1 (1) PI. I I, lig 1 — 1 b DES INSECTES. 341 nombreuses (1). Les intermédiaires naissent du même tronc et sont aussi très grêles. Les connectifs qui unissent les centres ner- veux du prothorax avec ceux du mésothorax sont extrêmement longs. Les connectifs qui unissent ce dernier avec le ganglion du métathorax sont au contraire fort courts (2). Chez les Hydrophiles, la chaîne ganglionnaire abdominale est allongée (3). On compte cinq ganglions espacés presque également; le dernier, beaucoup plus gros que les autres, ne présente pas cependant de divisions apparentes. Le premier est accolé au centre médullaire métatho- racique. De chacun des ganglions de l’abdomen il naît une seule paire de nerfs qui se divisent d’abord en deux branches princi- pales, se subdivisant elles-mêmes en plusieurs autres branches encore très fortes. Le dernier centre médullaire donne seul trois paires de nerfs. Cuvier a donné une description succincte du système nerveux de ('Hydrophile dans ses leçons sur l’anatomie comparée (4). Si l’on compare maintenant le système nerveux des Sphæridies avec celui des Hydrophiles , on reconnaîtra que la principale dif- férence consiste dans l’écartement des trois derniers centres mé- dullaires. Chez les Sphæridies , ils sont contigus. Chez les Hydro- philes, ils sont aussi espacés que les deux premiers. 11 existe par conséquent une différence, non pas très considérable, mais néan- moins assez importante entre les Sphæridiides et les Hydrophili— des. Leurs caractères extérieurs ne pouvaient en donner qu’une idée imparfaite. Peut-être eût-on été conduit d’après cela seul à les regarder comme plus semblables qu’ils ne le sont en effet. Les Hydrophiles ont un tube alimentaire très long , formant de nombreuses circonvolutions. Ceci paraîtrait au premier abord in- diquer un rapprochement entre ces Insectes et les Scarabéiens; mais l’analogie consiste seulement dans la longueur, nullement dans la forme de chacune de ses parties. Ces Coléoptères ont aussi à la base de leur abdomen , comme les Dyticiens, un com- mencement de trachées vésiculeuses. lîien donc ne nous semble devoir venir à l’appui du rapproche-, (1)PI ) 1 . fig. I — 3a,6,c. (3) PI. 11, (!g. 1— 6, 7, 8, 9, H) f 2 ' l’I . H, fig. I — i a 5. (I) Tome II, page 339 (an vin). 342 E. BI./IIVCH.IRU. 8l)K LE SYSTÈME MîltVEUX ment des Scarabéiens et des Hydrophiliens. I.atreille plaçait ces deux tribus près l’une de l’autre; il y était conduit uniquement par la forme desanlennes, car les parties de la bouche n’indiquent pas une ressemblance bien grande entre ces deux tribus. L’organisation intérieure montre bien mieux qu’elles sont assez éloignées l'une de l’autre. La considération des larves conduit au même résultat. Comme plusieurs entomologistes l’ont pensé dans ces derniers temps, les Hydrophiliens se rapprochent, des Dyti- ciens, tout en oITranl de grandes différences avec eux.. Leur sys- tème nerveux en est une preuve; car malgré ses caractères par- ticuliers dans chacune de ces deux tribus , il présente aussi plu- sieurs points d’analogie. Par la considération de cet appareil on reconnaît un rapport réel entre les Hydrophiliens et les Silphiens. Par les Sphæridiides, comme je l’ai déjà dit , le type se modifie pour former un lien entre les Ilydrophilides et les Coccinelliens. Les larves d’ Hydrophiles ressemblent beaucoup à celles des Dyticiens par la forme générale de leur corps et surtout par la longueur de leurs pattes, le déve- loppement de leurs mandibules et de leurs mâchoires (1). Elles leur ressemblent aussi par leur système nerveux. Chez les larves d’ Hydrophiles (//. piceus Lin.), on compte sept ganglions abdo- minaux, dont le premier rapproché du centre nerveux métatho- racique. Il en est de mèmedansles larves de Dytiques: seulement, chez celles-ci, ils sont très rapprochés les uns des autres, et ne forment qu’une chaîne très courte. Chez les premières, au con- traire, ils sont fort espacés, et constituent ainsi une chaîne s’éten- dant presque jusqu’à l’extrémité du corps. Les rapports de ces deux tribus sont donc pleinement démontrés par l’organisation et par l’embryogénie : cependant ces rapports ne sont pas in- times. Je n’ai pu encore étudier suffisamment les Hélophorides, Parni- des , Hétérocérides , pour avoir des idées bien arrêtées à l’égard de leurs affinités. Les premiers cependant me paraissent très voi- sins des Hydrophilides. Les Parnides et les Hétérocérides , con- (l) Voyez la nouvelle édition du /ti'yne animal de Cuvier (Insectes), pl 15, lig. 2 et i . I>KS INSECTES. 343 sidérés par quelques entomologistes comme un lien vers lesGyri- nides à cause de la forme de leurs antennes, me semblent au con- traire former plutôt un lien entre les Hydrophiliens proprement dits et les Dermestiens. 12e Tribu — Les Dyticiens (Dyticii). ( llydrocanlhares l.atr.) Cette tribu comprend deux familles : les Dvticides et les Gyri- nides. J'ai disséqué plusieurs types de la première Dyticus rnargi- nalis Lin. , A cilius sulcatus , Colymbetes fuscus, etc.); ils m’ont paru tous conformés sur un plan général très analogue. Dans les Dytiques ( Dyticus marginalis Lin.), les ganglions cérébroïdes sont de médiocre grosseur, et les nerfs optiques sont moins volu- mineux que dans la plupart des autres types (1). Peu de Coléop- tères sont aussi favorables à l’observation du système nerveux de la vie organique que les Dytiques; leur nerf récurrent est assez gros , et l’on aperçoit même aisément ses branches latérales. Le ganglion gastrique se distingue facilement , de même que ses branches, qui se partagent sur le gésier et le ventricule chylifique. Les centres médullaires du thorax sont à peu près d’égale gros- seur (2) ; les trois paires de nerfs prothoraciques ont leurs ori- gines distinctes (3) ; les antérieurs se divisent en plusieurs bran- ches très fortes. Les centres nerveux du mésothorax et du méta- thoraxsont peu éloignés l’un de l’autre. Les ganglions abdominaux constituent une chaîne assez courte, qui n’atteint même pas la base de l’abdomen. On en compte six (4) : le premier accolé au centre médullaire métathoracique , le se- cond assez éloigné du premier , et les trois suivants séparés les uns des autres par des connectifs fort courts ; le cinquième et le sixième sont même intimement unis , et ne forment qu’une seule masse ovoïde. Les Dyticides ont un système nerveux qui se rap- proche beaucoup de celui des Carabiens , mais avec une centra- lisation plus grande. (1) PI. io, fig i — I . i (2) PI io, fig i— :» i. (3) PI. 10, fig. 1—3 a,b,c. (S) PI 10, fig 1—6. 7, 8, 9, 10, H 344 K. BUM'URD. — SLR I.E SYSTÈME NERVEUX Le système nerveux des larves de Dytiques (1 : a aussi une dis- position particulière; les ganglions cérébroïdes sont presque sépa- rée, et ressemblent à deux petites masses ovalaires accolées (2). Les nerfs optiques consistent d’abord en une sorte de gros tuber- cule qui se divise bientôt en un nombre de branches égal au nombre des yeux de la larve (3). Les ganglions du thorax sont séparés du ganglion sous-œsophagien par deux connectifs extrêmement longs. Les centres médullaires thoraciques sont presque d’égal vo- lume (4) ; les connectifs qui séparent le premier du second et le second du troisième , sont de même longueur et écartés l’un de l’autre. Ils produisent par deux racines le filet nerveux qui vient s’anastomoser avec les nerfs alaires. On compte chez les larves de Dytiques sept ganglions abdomi- naux très rapprochés les uns des autres (5) : le premier, le plus gros de tous, est séparé du centre nerveux métathoracique par deux connectifs très courts; le second en est un peu plus éloigné, mais tous les suivants sont fort peu séparés. La chaîne ganglionnaire ainsi ramassée se termine dans le troisième anneau abdominal ; les nerfs de chacun des ganglions descendent parallèlement jusqu’à leur anneau respectif, où ils se divisent et se subdivisent. Le premier centre nerveux abdominal fournit deux paires de nerfs se rendant aussi à deux anneaux, qui deviendront partie thoracique dans l’insecte parfait. Les caractères fournis par les mâchoires et leurs palpes n’ont jamais pu laisser de doute sur les affinités très grandes des Dvti- ciens avec les Carabiens. La considération du système nerveux chez les insectes parfaits et les larves prouve manifestement cette analogie. On reconnaît dans les Dytiques une tendance vers une plus grande centrali- sation que dans les Carabes : c’est en quelque sorte la même forme plus perfectionnée. Les larves des Dyticiens ressemblent considérablement à celles des Carabiens et des Staphyliniens : le canal intestinal des üyti- (4) PI. 10, fig. 2—3, 4, 5. (3) PI I 0, fig. 2—6, T, 8.9,10, Il et 12 (1) PI 10, lig 2. (2) PI. 10, fig 2—1 (3) PI 10, fig 2— I, 8 DUS INSECTES. 345 ques se rapproche aussi de celui des Carabes (I). Les affinités entre ces divers groupes ressortent jusqu’à la dernière évi- dence. Les Gyrinides, qu’on désigne vulgairement sous le nom de Tour- niquets , s’éloignent beaucoup du type principal des Dyticiens. Le système nerveux des Gyrins (*2) (G. natator et urinator Fab.) représenterait celui des Dytiques , parvenu à un degré de centra- lisation plus élevé. Les centres médullaires du mésothorax et du métathorax (3), chez ces Coléoptères, sont contigus. Tous les gan- glions abdominaux forment une seule masse allongée et accolée au ganglion métathoraciquc (4). On y distingue même difficile- ment les indices de la soudure des ganglions. Chez les Gyrins , les nerfs optiques se continuent en ligne droite avec les ganglions cérébroïdes (5), ce qui donne un aspect particulier à cette portion du système nerveux. Je n’ai pas encore eu l’occasion d’étudier les larves des Gyrins. Elles méritent d’être examinées , car elles conduiront à recon- naître si ces Coléoptères diffèrent beaucoup des Dytiques dans leur premier âge , ou si les insectes parfaits n’offrent qu’un degré de développement plus avancé. Par la configuration de leurs gan- glions abdominaux , les Gyrinides paraissent former un lien entre les Dyticides et les Scaphidides, et les llistériens en général. 13' Tribu. — Les Carabiens (Carabii ; (('arabiques Latr. ) Cette tribu, l’une des plus naturelles de tout l’ordre des Co- léoptères, est en même temps l’une des plus nombreuses. Tous ses représentants ont dans la forme des parties de leur bouche, de leurs antennes et de leurs pattes, des caractères géné- raux qui ne permettent pas de les confondre avec des groupes voisins. Nous divisons cette tribu en deux familles : lesCarabides et les (1) Voyez Léon Dufour, Recherches anatomiques sur les Coléoptères, p 22 (2) PL 8, fig. S. (4) PI. 8, fig. 5— 6. (3) PI 8, (ig 5—4,5. (3) PI. 8, fig. 5 — I , H. 3/lG E. BI.WtHAKII. — SUR I.E SYSTÈME NERVEUX Cicindélides. Pour les premiers , mes observations ont porté sur un assez grand nombre de genres. J’ai décrit le système nerveux du Carabe doré (1) au chap. 1 1 ; je n’y reviendrai pas ici. Je me contenterai d’indiquer les diffé- rences que j’ai observées entre ce type et les autres représentants de sa tribu. Dans le Carabe, on le sait , les sept ganglions abdo- minaux sont tous séparés les uns des autres. J’ai reconnu cette disposition , non seulement chez le Carabus auratus, mais aussi dans les ( '. monilis et purpurascens, et dans les Calosomes ( Calosoma inquisitor Lin.). Chez les Nébries (JS. brevicollis Fab.), le premier ganglion abdominal s'unit davantage avec le centre médullaire du métathorax. Dans les Elaphres (Ela- phrus uliginosus et riparius Fab.), il se confond presque entiè- rement avec le centre nerveux métathoracique , et les six autres ganglions abdominaux restent espacés dans les mêmes rapports que chez les Carabes. Les Elaphres ressemblent à cet égard aux Cicindèles. 11 y a donc bien évidemment une affinité très étroite entre ces deux types, et non pas seulement une analogie dans l’as- pect général, comme l’ont cru la plupart des entomologistes. Chez tous les Féronites qüe j’ai examinés ( Zabrus gibbus, Splw- drus planus, Pristonychus terricola, Calathus cisteloides. Platynus ( A nchomenus ) prasinus et ( Agonum ) marginatus, Feronia nigra, melanaria, etc.), de même que chez les Chlænies ( Chlænius ves- titus I’ab.), le premier ganglion abdominal est complètement rapproché du centre médullaire du métathorax, dont il demeure toutefois très distinct ; le deuxième et le troisième ganglion de l'abdomen sont espacés comme dans les Carabes, mais le qua- trième en est un peu plus écarté. Celui-ci et les trois derniers sont séparés les uns des autres par des connectifs si courts, qu’ils semblent au premier abord former une simple masse allongée ; mais avec un peu d’attention on distingue encore très nettement les quatre ganglions. Dans les Bembidionites ( Bembidionustulatum Lin., B. undu- latum Sturm. et B. ( Loplia ) quadrimaculatum Fab.), il y a une disposition tout-à-fait semblable, montrant d’une manière certaine (t) Règne animal , nouvelle édition, |>l 3 bis, fiix I DES INSECTES. 347 que ces Carabiens sont surtout voisins des Féronites et plus parti- culièrement des Platynes (sous-genres Anchomenus et Agonum), dont ils ont la forme générale et les habitudes. J’ai pu observer le système nerveux dans le genre Antliia (A. decimmaculata ), du groupe des Graphiptérites, sur un individu conservé dans l’alcool, et y reconnaître exactement le même grou- pement des ganglions abdominaux que dans les Féronites. Chez les Brachinites ( Il rue h in us crepitans et une espèce des Philippines, B. Catoirei Dej.) et les Harpalites (fl ar palus rufi- cornis, œneus et bipunctatus ), on trouve une petite différence avec les précédents en ce que le troisième ganglion abdominal est rap- proché du quatrième , comme celui-ci l’est par rapport aux sui- vants. Dans la famille des Cicindélides ( Cicindela campestris Lin. ), le premier centre nerveux de l’abdomen se confond avec le gan- glion du métathorax ; tous les centres nerveux sont au contraire un peu plus espacés et un peu plus petits proportionnellement que dans les Carabes. Le système nerveux des Carabiens offre ainsi une grande uni- formité dans sa disposition générale, tout en présentant de petites différences , dues simplement à la longueur ou à la brièveté des connectifs. On peut encore se servir avec avantage de ces légères modifications pour caractériser les groupes secondaires et appré- cier les affinités qu’ils présentent entre eux ; mais , pour en tirer tout le parti possible dans une tribu dont les collections renferment plus de quatre mille espèces, on le comprend sans peine, il faudra multiplier les observations beaucoup plus encore que je n’ai été à même de le faire. Plusieurs larves de Carabiens ont été décrites dans ces der- niers temps (1). M. Burmeister a décrit et en partie représenté le système ner- veux de la larve du Calosoma sycophanla (2). Il lui a trouvé huit ganglions abdominaux espacés. Il y a là une ressemblance très (1) Voyez Heer, Observa tiones entomol. — Ratzeburg, De Forsl-Insecl, I I — Wcstwood, Inlroducl. to the modem Classif of Insecte, t. I, p 67 (1840) ('2' Traits, of the Enl. Soc. of fond I I, et Handb. der Entom. Allas. 3/|8 E. BI.AXC1IARD. — SIR LE SYSTÈME NERVEUX grande avec la disposition que j’ai signalée dans la larve des Silphes. Les Carabiens offrent entre eux encore un trait d’ homogé- néité dans le tube alimentaire , en ce que leur ventricule chy- liiïque est presque constamment garni de papilles : seulement , comme il arrive en général pour la plupart des caractères fournis par le canal intestinal , celui-ci est loin d’être exclusif. Les affinités des Carabiens sont surtout très grandes avec les Dyticiens ; elles le sont presque autant avec les Silphiens et les Staphyliniens. Cette tribu se lie encore à celle des Piméliens : mais ici les ressemblances sont moins manifestes. Ces analogies sont bien démontrées par la disposition des centres nerveux : elles ne le sont pas moins par les caractères embryogéniques. U* Tribu — Les Pimelieks ( Pimctii ). (Mélasomes Latr. ) Ceux-ci constituent une tribu très considérable qui me semble très naturelle, telle que je la circonscris aujourd’hui. Dans mon Histoire des Insectes , à l’exemple de la plupart des entomologistes, j’avais considéré les Hélopiens comme formant une tribu distincte de celle des Piméliens, tout en remarquant que les caractères ex- térieurs rendaient difficile cette séparation. Aujourd’hui, d’après leur organisation , je me trouve conduit à réunir aux Piméliens la famille des Hélopiides et à en séparer les Cistélides , qui peu- vent en être éloignées aussi d’après la considération de leurs caractères extérieurs. A la tribu des Piméliens, je rattache quatre familles : les Pi- méliides, les Blapsides, les Ténébrionides et les Hélopiides. Dans la disposition de leur système nerveux, j’ai observé la plus grande analogie entre tous les principaux représentants de cette tribu. J’ai observé cet appareil dans les Pimélies ( Pimelia bipunctata Fab. et barbara Sol.), les Praocis (P. Spinolœ Sol. du Chili), les Blaps ( B. mortisatja Lin. ), les Pédines , les Opatres ( Opatrum subutosum Lin.), les Hélops (Ilelops caraboüles et lanipes Lin.). La chaîne ganglionnaire diffère à peine de l’un à l’autre de ces divers types. bus insectes. 3/pJ Dans les Blaps (1) ( B. mortisaga Lin.), les ganglions céré- broïdes sont assez petits, et les deux lobes sont peu marqués. Les nerfs optiques, dans la plus grande partie de leur longueur, sont divisés en nombreux filets aboutissant à chaque facette, comme on l’observe dans les larves (2). (l’est là un fait vraiment curieux de trouver chez un insecte parfait des nerfs optiques analogues à ceux des larves. Cette por- tion n’a pas acquis ici toute sa perfection : on s’explique cet arrêt de développement. Les Blaps vivant constamment dans l’obscu- rité, leurs yeux demeurent dans un état rudimentaire comparable en quelque sorte à ceux des larves. Chez ces Insectes , les centres médullaires du thorax sont très espacés (3). Les nerfs prothoraciques naissent de deux troncs (4). La chaîne ganglionnaire abdominale est assez allongée (5), et se termine vers le milieu de la longueur de l’abdomen. On observe d’abord un premier ganglion accolé au centre nerveux du méta thorax ; puis quatre autres à peu près également espacés, et enfin trois derniers réunis en une seule masse : les deux derniers sur- tout sont peu distincts l’un de l’autre (6). Les ganglions de l’abdo- men , dont la forme est un peu ovalaire , ont chacun deux paires de nerfs ayant leur origine séparément. Chez les Pimélies (Pi- vnelia bipunctata et barbara) et les Praocis ( /'. Spinolœ), c’est exactement la même disposition. Chez les Crypticus (C. glaber Fabr.), les derniers ganglions abdominaux se rapprochent davantage, et alors la ressemblance devient extrême avec le système nerveux des Carabiens. Dans les Ténébrions ( T. molitor Lin. ) et les Opatres, le sys- tème nerveux est aussi très semblable à celui des Blaps ; mais on distingue plus nettement les trois derniers ganglions abdomi- naux, et en outre tous les précédents sont séparés les uns desau- tres par des connectifs plus longs (7). (1) PI. 10, fig 3. (2) PI. 18, fig. 3—1 b. (3) PI. 10, fig. 3—3, 4. 5 (4; PI 10, fig. 3—3 u.b,c (5) PI 10, fig. 3—6, 7, 8, 9, 10 11 et 12. (6) PI. 10, fig 3—12 (7) PI. 10. fig 4—6, 7, 8, 9. Kl. H . 1 2 al 13 350 K. IIUKCIURU. — SUR i.u SYSTÈME NERVEUX il en est de même chez les Hélops. Dans ceux-ci, le premier ganglion abdominal se confond un peu plus avec le centre médul- laire du métathorax. Ainsi , entre les Piméliides, Blapsideset Hélopiides , il n’existe aucune différence importante dans la disposition du système ner- veux. Ceci nous montre que la tribu des Piméliens est vraiment homogène. 11 faut dire cependant que deux types assez anomaux, à en juger par leurs formes extérieures , les Cossyphus et les Phrenapates, n’ont pu être examinés anatomiquement. Malgré les différences que les Piméliens et les Carabiens offrent dans la forme de leurs mâchoires et dans le nombre d’articles de leurs tarses, on est conduit à regarder ces deux tribus comme très voisines l’une de l’autre. La forme de leurs antennes et de leurs pattes* indique déjà ce rapport ; c’est cela seul qui , dans mon Histoire des Insectes , m’avait conduit à ce rapprochement. Alors je doutais encore qu’il soit vraiment naturel. Aujourd’hui les caractères tirés de l’organisation ne peuvent me laisser aucun doute. Les larves des Ténébrionides et des Hélopiides sont bien con- * nues. Tout le monde a vu le Ver de farine, cette larve allongée, cylindrique, ayant une enveloppe luisante d’apparence cornée. Toutes les larves de Piméliens , à quelques légères différences près, ressemblent au Ver de farine, à la larve du Tenebrio mo - litor. J’ai observé en Sicile les larves des Pimélies ; leur corps est un peu plus aplati , mais elles présentent les mêmes caractères généraux. Dans la larve du Ténébrion , les centres nerveux forment une chaîne qui s’étend dans presque toute la longueur du corps (1). On compte trois ganglions thoraciques et huit abdominaux, ayant tous à peu près la même grosseur. Ils sont aussi espacés presque également. A l’extrémité du huitième ganglion abdominal , on observe un petit prolongement, qui n’est autre chose certaine- ment qu’un centre médullaire déjà réuni au précédent (2). Par leurs larves et même par leur organisation , les Piméliens (1) Pt. 10, fig. 5. (2) PI. 10. fig 5—13, H nus INSECTES. 351 ont certaines at'linités avec les Klatériens ; ils en ont aussi, d’autre part, avec les Diapériens et les Cantharidiens. 15° Tribu. — Les Diapériens ( Diaperii ). Les principaux représentants de cette tribu, à en juger par leurs formes extérieures, semblent se rapprocher considérable- ment îles Hélopiides. Leurs antennes perfoliées fournissent le seul caractère zoologique qui permette de les en séparer ; mais par la considération de leur organisation aux diverses phases de la vie de l’animal , même par les formes extérieures des larves , on ne tarde pas à reconnaître que les Diapères constituent un type assez éloigné de celui des Hélops. Chez les Diapères (D. boleli Lin.) (1), le centre médullaire du prothorax est éloigné de ceux du mésothorax et du métathorax , qui sont au contraire fort rapprochés l’un de l’autre (2). La chaîne abdominale n’atteint guère que le milieu de l’abdomen. On dis- tingue à peine un premier ganglion confondu avec le métathora- cique ; ensuite on en observe un second (3), qui en est séparé par des connectifs très courts , puis un troisième et un quatrième au contraire très espacés : le quatrième forme une seule masse avec le suivant ; il en demeure même médiocrement distinct A). Les larves de Diapères (5), molles, allongées, s’élargissant postérieurement , ont un cerveau remarquable. Les deux gan- glions cérébroïdes sont avancés en pointe , et séparés l’un de l’autre dans la plus grande partie de leur étendue (6). Le gan- glion sous-œsophagien est ovoïde ; les trois centres nerveux tho- raciques sont à peu près de même grosseur et également espacés. Les ganglions abdominaux, au nombre de huit, très semblables les uns aux autres , sont fort petits , comparativement à ceux du thorax (7). Ainsi les Diapériens diffèrent beaucoup des Hélo- (1) PI. M, fig. 3. (3) PI. Il, fig. 3—6 (2) PI. I l, lig. 3—3, 4. S. (4) PI. 11, fig. 3-8 et 9. (3) Représentées par M. Léon Dufour, Annales ries Sciences mit., 1' série , t. XX, p. 290, pl. 12 (1843). (6) Pl. 11, fig 4—1. (7) Pl II, fig 4 — 6, 7, 8, 9, 10 II 12, 13. 352 iî. bu\CüaHd. — suu i.e système nerveux jiiitles , non pas seulement à leur état parfait , mais aussi à leur état de larve. Comme l’indique le développement des centres mé- dullaires du thorax , ces larves de Diapères sont à un état em- bryonnaire beaucoup plus avancé que celles des Ténébrions. La disposition du système nerveux les rapproche notablement des Érotyliens. A ce point de vue , ils nous offrent encore une certaine analogie avec les Chrysoméliens. On aperçoit surtout ce rapport en examinant la nymphe des Diapères , car alors on compte , comme chez les Chrysomèles , trois ganglions abdomi- naux isolés , et un quatrième formé par la réunion de plusieurs autres (1). Les recherches de M. Léon Dufour sur les métamorphoses de 1 ’Eledona agaricicola (2) montrent que les Bolitophages sont très voisins des Diapères. Dans mon Histoire des Insectes , j’ai placé , d’après quelques ressemblances extérieures , les Trachyscélides et les Phalériides dans la tribu des Diapériens. Comme je n’ai pu étudier l’organi- sation de ces types , et comme leurs métamorphoses me sont inconnues, je ne saurais me prononcer pour leur réunion ou pour leur séparation. Toutefois je suis porté à croire que les Phalé- ries doivent différer beaucoup des Diapères. 16" Tribu. — Les Cantharidif.ns ( Canlharidii ). A cette tribu nous rattachons plusieurs familles : ce sont les Cistélides y les Pyrochroïdes, les Lagriides , les Mordellides, les Mélandryides, les OEdémérides, les Iloriides et les Canthari- dides. Cette réunion est loin de former un ensemble homogène, et nul doute que ses limites ne doivent changer. Mais dans l’état actuel il reste à observer l’organisation dans trop de types pour pouvoir prendre un parti. Le système nerveux chez les Cistèles (('. sulpliurea Lin.) offre une disposition particulière (3). Les trois centres médullaires tho- raciques sont très espacés. Les ganglions abdominaux sont au (1) PI 11 , fig. 5—6, 7, 8, 9. 10, 1 1. (2) Ann. des Sc. mil.. 2' série, t XX. p 28i, pl. 12 (1843). (3) Pl 13, fig. 7, uns i \m < 1 1 >. 353 nombre de cinc] en apparence ; le premier est séparé du centre nerveux du métathorax par des connectifs très longs; les trois suivants sont presque également espacés : mais le quatrième est réuni de manière à former une seule masse avec le cinquième. Celui-ci est très grand et terminé carrément. Les deux paires de nerfs de chaque ganglion naissent séparément. Dans la famille des Lagriides , j’ai examiné les espèces les plus répandues dans notre pays. Dans la Lagria hirla Lin. (1), le centre médullaire prothoracique est très éloigné du mésothoracique ; celui-ci l’est médiocrement du métathoracique. La chaîne gan- glionnaire abdominale s’étend jusqu’aux deux tiers environ de la longueur de l’abdomen ; on compte sept ganglions très petits (2) : le premier accolé au centre nerveux du métathorax, les quatre sui- vants écartés les uns des autres , mais le sixième beaucoup plus rapproché du précédent, et le septième presque réuni au sixième. Je n’ai pas trouvé dans d’autres Coléoptères de système nerveux très analogue à celui des Lagries; cependant il s’éloigne à peine de celui des Ténébrionides , et se rapproche un peu de celui des Clairons. Ne connaissant pas suffisamment les caractères des larves de Lagriides, et n’ayant pas étudié leur organisation intérieure, je n’ose encore me prononcer d’une manière définitive relativement aux affinités de la famille des Lagriides. Cependant, d’après la considération du système nerveux des Insectes parfaits, on devrait la placer dans la tribu des Piméliens, à la suite de la famille des Hélopiides. Mais, avant de démembrer cette tribu des Canthari- diens, il me semble préférable d’attendre que les divers types qui la composent actuellement soient mieux connus, puisque nous avons déjà la certitude que plusieurs d’entre eux devront en être séparés. Les Pyrochroïdes , que je n’ai pas eu l’occasion d’étudier, me paraissent , d’après les figures et les descriptions données par M. Léon Dufour, se rapprocher extrêmement des Cistèles (3). (t) PI. 14, fig. 6 (2) PI. 14, lig. 6 — 6, 7, 8, 9, 10, lt, 12. (3) Ann. îles Sc. nul., 2” série, t. XIII, p 321 , pl. 3 el 6 (1840 i' série Zoul T V. (Juin 1846.) 5 23 35A U. BLANCHARD. — SIR l.E SYSTEM il .NERVEUX Les Anthicides ne semblent pas s’éloigner considérablement des Cistélides. Dans leur système nerveux il existe cependant des dif- férences assez importantes. Là chaîne ganglionnaire abdominale est beaucoup plus courte, et le premier ganglion se trouve accolé au centre médullaire du métathorax. Si on le regarde comme cor- respondant à celui qui en est si éloigné chez les Cistèles, on trouvera les autres centres nerveux disposés dans ies mêmes rapports (1). J’ai examiné diverses espèces d’OEdémérides [OEdemera pocla- arica , lurida , etc.) ; plusieurs auteurs ont regardé cette petite fa- mille comme appartenant peut-être à la tribu des Cérambvciens. L'organisation des Insectes parfaits vient témoigner de cette analogie. On compte chez les OEdémères (OE. lurida Fab.), comme chez les Cérambycides, cinq ganglions abdominaux, dont le premier un peu éloigné du centre médullaire métathoracique , et le dernier plus gros que les autres et pyriforme “2). C’est la séparation du premier ganglion abdominal et du centre nerveux du métathorax qui constitue la principale différence entre les OEdémères et les Cérambycides. D’après l’aspect extérieur, leurs larves me paraissent conduire au même rapprochement ; cependant elles sont caractérisées par la présence de petites pattes et par leur- corps plus renflé. Les Cantharidides forment une petite famille bien délimitée. Leur système nerveux a déjà été étudié par Audouin dans la Cantharide des boutiques (3) ( Cantharis vesicatoria ) et par MM. Brandt et Ratzeburg (ù) dans les Cantharides, les Mylabres et les Méloés. Tous ces Coléoptères ont une chaîne abdominale composée de quatre ganglions à peu près également espacés; le dernier est plus gros que les précédents, et ne présente pas de divisions distinctes. Sous ce rapport les Cantharides ont une cer- taine analogie avec les Chrysoméliens. Déjà les antennes et les parties de la bouche m’avaient paru indiquer ce rapport. (IJ PI 13, fig 15 (2) PI, 14, fig. 5. (:ij .In». d/‘s Sr. nul . I Tt série, t IX, pi. 4 *2 (1826). 4) Mnlizinvsclic Xuolmjie, lid. Il, s. 103, n I 13, lu b xvii et xix nus insectes. 555 La même disposition existe chez les Cantharides (('. vesicatoria Lin.), les Méloés [M. proscarabeus Un., scabrosus et autumnalis Fabr.), les M y la lires (M . cichorii Lin.). MM. Brandt et Ratzeburg, qui ont obtenu les jeunes larves de ces Insectes, ont observé leur système nerveux sous le compres- seur; et d’après la figure qu’ils en ont donnée, on reconnaît une très grande ressemblance avec celui des larves rie Chrysomèles. Néanmoins il existe des différences assez considérables entre ces types. Chez les Cantharidides, les ganglions thoraciques sont beau- coup plus espacés que dans les Chrysoméliens, et plus petits com- parativement aux ganglions abdominaux. Les types sur lesquels j’ai surtout porté mon attention doivent appartenir certainement à des tribus différentes. Les descriptions anatomiques elles figures que j’en ai données ne laisseront aucun doute sur ce point. Mais comme il me reste k étudier d’autres types qu’on rattache encore à la tribu des Cantharidiens, et à ob- server les larves plus qu'on ne l'a fait jusqu’à présent . les limites ne sauraient être, quant à présent, posées avec certitude. 17" Tribu. — Les Lamptriess ( hnnpi/iii Les Lampyriens n’ont pas un très grand nombre de repré- sentants, mais ils forment un ensemble assez homogène. J'en retrancherai cependant les Malachiites, que j’avais placés d’abord près des Téléphores. Aujourd hui je suis conduit à les replacer près des Dasytes. comme le faisait Latreille. Tous les Lampyriens que j’ai étudiés ( Telephorus fuscus Lin. et melanurus Fabr. , Lampyris nocliluca Lin. , Seirtes hemisphœricus Fab. , Cebrio xanthomerus Fab.) m’ont paru conformés sur un plan général très analogue. Le système nerveux des Téléphores (T. melanurus Fab.) (1), comme celui des Lampyres, est extrêmement allongé. Le centre nerveux du prothorax est très écarté de celui du mésothorax, mais ce dernier l’est très médiocrement de celui du métathorax. (1) t’I 14, fig. 4 356 E. BLANCHARD. Sl'll I.K SYSTÈME MÎRVEUX Tous les trois sont à peu près d’égale grosseur. Les ganglions abdominaux sont fort petits comparativement (1 ) ; le premier est peu éloigné du centre médullaire métathoracique ; les suivants sont presque également espacés les uns des autres, le dernier seul est un peu plus rapproché du précédent; du reste, il n’est guère plus gros et ne donne de nerfs qu’à deux anneaux. Les nerfs de chacun des autres ganglions abdominaux naissent d’un seul tronc. Les Lampyres’ proprement dits, les Téléphores et les genres qui en sont voisins forment dans la tribu des Lampyriens une pre- mière famille, celle des Lampyrides. Une seconde, celle des Cé- brionides , renferme les Cébrions et plusieurs petits genres dont l’aspect est très différent. Les Cébrions (C. xanthomcrus Fab.) sont, sous le rapport de leur système nerveux, très semblables aux Téléphores. J’ai pu observer aussi un genre singulier de la même fa- mille, le genre Scirtes. La forme arrondie du corps, les cuisses très renflées, semblent au premier abord contraster tellement avec les formes extérieures des autres Lampyriens , que j’avais supposé que le groupe des Scirtites devait s’en éloigner par l’or- ganisation intérieure. Il n’en est rien cependant; les Scirtes (S. hemisphœricus Fab.) offrent dans leur système nerveux une dispo- sition analogue à celle qu’on observe chez les Lampyres et les Té- léphores (Ü) : seulement, les connectifs entre les divers ganglions sont moins longs proportionnellement. Ildevaiten être ainsi, l’In- secte étant très court; mais les rapports restent les mêmes. On compte également chez ces petits Coléoptères sept ganglions abdo- minaux isolés les uns des autres (3). Ceci est un des meilleurs exemples qu’on puisse citer pour mon- trer que la forme extérieure ne traduit pas toujours les particula- rités d’organisation : car chez les Cyphons (('. pallùlus Fab.) il y a une petite différence, les deux derniers ganglions de l’abdomen ne formant plus qu’une seule masse. l.es Lampyriens se rapprochent un peu des Piméliens, mais (1) PI. H. fig. 4—6. 7, 8. 9, 10, 11, 42. (2) PI, 13. fifr. 5. (3) PI 13. fis o— fi, 7, 8, 9. 10, H 12 nr.s insectes. 357 leurs aflinités ne sont bien évidentes qu’avec les Clériens et les Élatériens. 18° Tribu. — Les Élatériens ( Eluterii'y •l’avais considéré, à l’exemple de presque tous les entomolo- gistes, les Ëlatérides et les Buprestides comme devant appar- tenir à la même tribu. M. Milne Edwards, qui avait observé dans ces deux types des différences très grandes dans les nervures des ailes , était conduit par cela même à les éloigner. Les larves d’ailleurs confirmaient cette séparation. Cependant, sans reconnaître un rapport bien manifeste dans les formes exté- rieures des Buprestides et des Ëlatérides , je pensais encore que ces familles ne pouvaient être éloignées l’une de l’autre. Aujour- d’hui que j’ai étudié l’organisation dans plusieurs représentants de ces deux familles, je suis convaincu qu’elles ont fort peu de rapports entre elles. J’ai observé le système nerveux dans plusieurs Ëlatérides {A thons liirtus, Diacanthustatus,Chalcolepicliusstriatus, Pyroplio- rusnoctilucus, etc.). Il est au moins aussi allongé que celui des Lam- pyrides(l). Le ganglion prothoracique est très écarté du mésotho- racique , et celui-ci est encore notablement éloigné du métatho- racique. Les connectifs qui unissent ces deux derniers sont très écartés , parce que la pointe sternale propre aux Ëlatérides s’élève entre eux. On compte chez les Ëlaters huit petits ganglions abdomi- naux (2), le premier accolé au centre médullaire du métathorax, les suivants très espacés les uns des autres , excepté toutefois les deux derniers , qui sont tout-à-fait rapprochés et peu éloignés du précédent. Nous plaçons encore dans la tribu des Élatériens la famille des Kucnémides. Je n’ai pas pu me procurer encore de ces Insectes vivants pour les étudier. Par leur forme extérieure, on sait que les larves d’Klatérides (I) PI. 14, Ii{î 3. fi) Pt I i fif;. :t— fi, 7, 8. 9, Ht, tl t i SU; l.lî SYSTEME NERVEUX ,158 E. BI.AM'IIIKD. ressemblent considérablement à celles des Ténébrionides et des Hélopiides. Leur organisation interne indique une analogie aussi grande. Au reste, d’après la disposition du système nerveux, il est facile de s’apercevoir que les Êlatérides se rapprochent sensi- blement des Piméliens. Chez ces derniers, cependant, la chaîne abdominale est beaucoup plus ramassée, et les derniers ganglions particulièrement sont beaucoup plus rapprochés. Les Elatérides sont surtout voisins des Lampyriens ; avec ceux-ci la différence est légère, elle consiste principalement dans le nombre de huit ganglions abdominaux distincts au lieu de sept. 19'" Tribu. — Les Clébiens ( Clerii ). Cette tribu nous semble devoir se composer des trois familles suivantes : les Clérides, les Mélyrides et les Lymexylonides. Chez les premiers, Trichodes alvearius e t apiarius, Clerus for- micarius et mutillarius Fab. , le système nerveux est très al- longé (1). Les centres médullaires du prothorax et ceux du méta- tliorax sont espacés. Celui du prothorax l’est une fois plus. Avec le centre nerveux métathoracique s’est confondu au moins un gan- glion abdominal dont on trouve à peine l'indice. En outre on compte cinq ganglions, les quatre premiers petits et très espacés les uns des autres. Le dernier, au contraire, assez gros, est très rapproché du précédent (2). Les Clerus et les Trichodes m’ont offert complètement la même disposition. Dans les Mélyrides, auxquels je rattache maintenant le groupe des Malachiites, on observe peu de différence. Les Malachius ( M . œneus et bipustulatus Fab.) et les Dasytes (Z). plumbeus Oliv.) m’ont présenté une analogie complète. Le système nerveux de ces types ne m’a paru différer de celui des Clérides qu’en ce que le dernier ganglion abdominal est un peu moins rapproché des précédents. Les larves des Trichodes ressemblent extérieurement à celles des Téléphores ; mais leur organisation m’est inconnue. (i) PI U, fig. 2. (-) PI I i fig 2 6, 7 «, 9. tü, 11,12. DES 1 INSECTES. 350 Il existe pour la famille des Lymexylonides nue lacune dans mes recherches sur le système nerveux. 20r Tribu. — Les Bostrichiens ( Bostrichii ) Le représentant principal de celte petite tribu est celui que j’ai étudié : le Bostriche capucin ( Boslrichus capucinus ) ; son système nerveux (1) ressemble un peu à celui des Uermestiens et des Clé- riens, mais il est plus allongé. Les centres médullaires du méso- et du métathorax sont très peu séparés; la chaîne ganglionnaire abdominale s’étend presque jusqu’à l’extrémité du corps (2). On compte six ganglions , le premier accolé au centre nerveux du mé- tathorax. puis un deuxième , un troisième et un quatrième sépa- rés par des connectifs extrêmement longs ; puis un cinquième beaucoup moins éloigné, et enfin un sixième plus gros, qui lui est contigu. Comparé à celui des Dermestes, le système nerveux des Bos- trichiens en diffère par le nombre des ganglions, au nombre de six au lieu de sept, et cependant la chaîne est plus longue. Chez les Mycétophagus , la chaîne abdominale est plus ramassée encore; par conséquent les différences sont encore très sensibles. Les larves des Bostrichiens observées par M. Ratzeburg, etc., sont molles et munies de très petites pattes comme celles des Pti- nides. Il y a une grande ressemblance entre ces types, et les caractères tirés de l’organisation nous ont conduit à transporter les Ptinides, de la tribu des Clériens, dans celle des Bostrichiens. Les Ptinides forment une petite famille très voisine de celle des Bostrichides. Récemment encore je croyais devoir les laisser dans la tribu des Clériens; mais connaissant davantage aujourd’hui leur organisation intérieure, comparant entre elles les larves des Bostrichus, des Anobium et des l’tinus, comparant même l’en- semble des caractères extérieurs , il est impossible de ne pas ad- mettre que ces types appartiennent à une même tribu et diffèrent très notablement des Clériens. Les Anobium (A. tessellatum Fab. ) et les Ptinus (P. fut Fab. ressemblent beaucoup aux Bos- (t) PI. 12, lig fi (2) pi. 12. lig. 6— fi, 7, 8, 9, I 1, 11. 300 K. BUMIItKII. SL H I.E SYSTÈME iNEUVELX t richus sous le rapport de leur système nerveux. On distingue* également six ganglions abdominaux , dont les deux derniers in- timement unis ; mais ils forment cependant une chaîne qui ne s’é- tend guère au-delà du milieu de l’abdomen , tous les centres ner- veux étant séparés les uns des autres par des connectifs beaucoup plus courts. Les larves des Ptinus et des Anobiums sont épaisses, un peu contournées, et munies de petites pattes comme celles des Bostrichus. Depuis longtemps je n’ai pu me procurer de ces larves vivantes, de manière à pouvoir étudier leur système nerveux. Par leurs premiers états , les Bostrichiens avoisinent beaucoup les Curculioniens et les Scolytiens; mais d’après la considération de leur système nerveux ils sont à ceux-ci ce que les Lucaniens sont aux Scarabéiens. Ce sont des ressemblances et des diffé- rences à peu près de la même nature. L'appareil nerveux indique aussi un lien très étroit entre les Bostrichiens et les Dermestiens. Les premiers forment véritablement un groupe de transition entre plusieurs types. -I'' Tribu — • Lus Cubcumon>eks ( Curculicmii) ( Khynrophores L.iir ) Ces Insectes constituent une des tribus les plus nombreuses et en même temps une des plus naturelles de tout l’ordre des Coléo- ptères. Les Curculioniens sont remarquables en général par leur tète prolongée en forme de museau , par les pièces de leur bouche rudimentaires et par leurs antennes coudées et terminées en bou- ton. Quelques uns d’entre eux , dont on forme une petite famille particulière, les Bruchides, ne présentent plus ces caractères du type; les antennes sont droites, les parties de la bouche d’une forme différente, et la tète à peine prolongée. Dans ces derniers temps plusieurs entomologistes ont pensé devoir les séparer des autres Curculioniens et les rapprocher des Chrysoméliens. Ce fait suffira pour montrer combien on peut être facilement induit en erreur par ces caractères extérieurs, qui s’effacent dans certaines espèces. En effet , les Bruchides, par leur organisation, UES INSECTES. 3G1 ressemblent tuul-à-l'ait aux autres Curculioniens , et s’éloignent considérablement des Chrysoméliens. Les caractères des larves sont d’accord en cela avec ceux qui nous sont fournis par la disposition du système nerveux. 11 faut bien convenir que l’aspect extérieur des Bruchus semble militer en faveur de leur rapprochement de la tribu des Chrysoméliens; mais, on n’en saurait douter aujourd'hui, c’est là une apparence tout-à-fait trompeuse. Le système nerveux des Charansons nous présente une dis- position particulière qui indique un rapport très grand entre ces Insectes et les Scarabéiens et les Histériens. Dans un des Charansons les plus communsde notre pays, dans l’Otiorhynque de la Livèche ( Otiorhynchus ligustici Lin.), les ganglions cérébroïdes forment une masse presque arrondie, et les nerfs optiques remontent de chaque Côté vers les yeux (1). l.es trois centres médullaires du thorax sont très rapprochés et de forme un peu élargie ; les deuxième et troisième sont même contigus (“2). Tous les ganglions abdominaux forment une seule masse allongée, un peu pyriforme, à la base de laquelle on remar- que un ou deux petits sillons transversaux. Cette masse médul- laire (.'i) est accolée au centre nerveux du métathorax, elle produit tous les nerfs de i abdomen. Les deux nerfs des organes de la génération sont réunis dans une partie de leur longueur. J'ai observé les Liparus (L. germanus Fab.), les Cléonis (C. sulcirostris Fab.), les Pissodes (P. pini Fab.), les Cryptorhyn- chus [C. lapathi Fab.), les Calandres (6'. palmarum Lin.), ils ne m’ont olïert aucune modification appréciable. Les Attelabides, qui diffèrent beaucoup des précédents par la conformation des parties de leur bouche et des antennes, sont du reste conformés sur le même plan. Le système nerveux est tout-à-fait semblable à celui des autres Curculionides. J’ai constaté ce fait chez les Apoderus coryli , Rhynchiles bacchus Fab., etc. Comme je l’ai déjà dit, il en est de même pour les Bruchus (R. pisi Lin.) et les Anthribus ( U . rufipes Fab.). ( I ) Bègue animal nouvelle édition pl 3 bis fig 3 — 1 b (2) ld , pl. 3 bis. fig. 3 — 3, t 5 3) / sim LE SYSTEME NERVEUX 370 moins certaines particularités de faible importance viennent à l’appui de la division de cette grande tribu en plusieurs petites familles. Dans les Donaciides, j’ai vu le système nerveux de plusieurs Donacies ( I). lemnæ, nymphœ Fab.) et de plusieurs Criocères ( Crioceris merdigera el asparagi Fab.). Entre ces deux types, j’ai trouvé une similitude à peu près complète. Dans les Criocères (C. merdigera ), les centres médullaires méso- et métathoracique sont peu éloignés l’un de l’autre ; mais le centre nerveux prothora- cique l’est beaucoup plus (1). Les ganglions cérébroïdes sont très gros, et forment deux hémisphères bien marqués (2). La chaîne ganglionnaire abdominale s’étend un peu au-delà de la moitié de la longueur de l'abdomen (3). On distingue d’abord l’indice d’un premier ganglion réuni au centre médullaire du méta- thorax , puis on en compte quatre : le premier très éloigné < lu ganglion métathoracique ; les autres assez espacés les uns des autres , excepté le dernier, qui est un peu plus rapproché du pré- cédent. 11 est en forme de clochette , et quatre fois plus gros que les autres. Les nerfs abdominaux naissent d’un seul tronc se di- visant en deux branches principales dans chaque anneau. La seule différence qui me paraisse importante à signaler entre les Donacies et les Criocères , c’est que chez les premiers les con- nectifs du premier ganglion abdominal sont séparés , tandis qu’ils sont réunis dans les Criocères ; ensuite, bien que dans les Dona- cies les centres médullaires soient espacés dans les mêmes rap- ports, les connectifs sont plus longs : la chaîne abdominale s’é- tend ainsi jusqu’aux trois quarts de la longueur de l’abdomen ( l\ }. Dans les Clythrides, j’ai examiné plusieurs espèces de Crvp- tocéphales (C. sericeus , bipunctatus Fab., etc). Cette famille offre les caractères généraux de la tribu des Chrysoméliens ; mais s’il y a une analogie entre cette tribu et celle des Curculioniens , elle se manifeste surtout dans la famille des Clythrides. Chez les Cryptocéphales ( C . sericeus), le centre nerveux sous- (1) PI 15. fis. 2—3. 1, 5. (3) PI. 15. fig. 2—6, 7. 8, 9 (2) PI 15. fig. 2—1 (4) PI. 15. fig I DUS INSECTES. 371 œsophagien est plus rapproché qu’à l'ordinaire des ganglions thoraciques (I) : ceux-ci sont aussi peu écartés entre eux (2). Dans la chaîne ganglionnaire abdominale, on compte, comme dans la plupart des autres Chrysoméliens , quatre ganglions bien distincts : seulement, le premier est rapproché de celui du méta- thorax , et le troisième et le quatrième sont presque contigus (3). En1 un mot , les connectifs sont plus courts que chez les autres représentants de la tribu ; c’est un acheminement , c’est une ten- dance vers cette fusion des ganglions abdominaux qu’on observe dans les Curculioniens ; mais il y a encore une différence très considérable, et l’on n’en saurait douter : la considération du sys- tème nerveux ne permet pas de séparer les Clythrides des autres Chrysoméliens. Dans les Chrvsomélides, j’ai observé les Kumolpes [E. ritis ) et un grand nombre de Chrysomèles ( Chrysomela fucata, gra- minis, sanguinea, cerealis, Gaslrcedes raphani, Timarcha tene- bricosa, coriaria Fab. , etc.). M. Newport ( h ) a déjà fait connaître le système nerveux du Timarcha tenebricosa , et M. Joly (5) celui du Cnlaspis alra. Dans lesEumolpes ( E . vitis Fab.), les quatre ganglions abdo- minaux (6) sont très séparés les uns des autres ; le premier est peu éloigné du centre médullaire du métathorax. A l’extrémité de ce dernier on reconnaît l’indice d’un ganglion abdominal , mais moins distinctement encore que dans les Donaciides. D’après la description du système nerveux du Colaspis donnée parM. Joly, il paraît y avoir une ressemblance complète avec ce que j’ai observé chez les Eumolpes. Dans les Chrysomèles (C. graminis, cerealis, sanguinea, fu- cata , etc. ) proprement dites et les T imareha , il existe encore quatre ganglions abdominaux très distincts (7) : seulement, ils (t) PI. 15, fig. 4—2. (2) Pt. 15, fig. 4—3, 4, 5. (3) PI. 15, fig. 4—6. 7, 8, 9. (4) Cyclopedia of analom. and physiol., art. Insects. (5) Joly, Ann des Sc. nat , 3e série, t II, p. 5 (184 4). (6) PI. 15, fig. 5— 6, 7, 8. 9. . (7) Pt 15, fig. 6—6, 7, 8, 9. E. IM W IIIMI) SUIl l,K SV STIiMli MillVEUX 372 sont séparés par des connectifs plus courts , et le premier est ac- colé au centre nerveux du métathorax, de manière que la chaîne abdominale devient d'une extrême brièveté. Dans le genre Lina (/,. populi Lin.), on observe une disposi- tion des ganglions abdominaux (1), qui indique un passage bien manifeste des Chrysoméliens aux Coccinelliens. On distingue un premier ganglion presque entièrement confondu avec le métatho- racique (2) , puis un second isolé (3) , puis les autres réunis en une seule masse séparée du second ganglion par des connectifs très longs, et dans laquelle on distingue encore quatre noyaux (4). Chez les Cassidides (6’. equestris, viridis et murrœa Fab.), les centres médullaires abdominaux sont disposés comme chez les Chrysomèles proprement dites : seulement, les connectifs qui les séparent les uns des autres sont proportionnellement plus longs, en sorte que la chaîne abdominale atteint le milieu de la longueur île l’abdomen (5). Dans les Galérucides, le type des Chrysoméliens tend à se mo- difier un peu; on ne distingue plus (Luperus alni , Galcruea cal- mar iensis, Allica oleracea , etc. ) que trois ganglions isolés, le premier s’étant presque entièrement confondu avec le centre ner- veux du métathorax. Les larves des Chrysoméliens sont conformées en général sur un plan très analogue ; dans les larves de Chrysomèles ( Ch. fucata , Lina populi), j’ai observé comme M. Joly dans la larve du Colaspis atra, et M. Newport. dans celle du Timarcha tene- bricosa, huit ganglions abdominaux gros comparativement à ceux du thorax , séparés les uns des autres par des connectifs assez courts, et formant une chaîne qui s’étend presque jusqu’à l’extrémité du corps (6). La même disposition m’a été offerte par les larves de Criocères (6’. merdigera ) et de Cassides ( C . murrœa). Les petites différences que nous avons constatées chez les Insectes parfaits ne se manifestent pas encore dans les premiers états. Par la forme de leur corps , les larves de Clythrides ressemblent un (t) PI. 15, fig. 8. (2) PI. 14, fig 8—6 (3) PI. 15, fig. 8—7. (4) PI. 15, fig. 8-8, 9, 10, 11 (5) PI 15, fig. 3—6, 7, S, 9. (6) PI 15. fig. 7. J tut. //es Sc/ences ntt/. 3 * serre . Zool. Tonie i. />aye 3/3 DES INSECTES. ;ra peu à celles des Scarabéiens. J’ai étudié les larves du Clyllira quadripunctala Fab., dont je dois la connaissance à M. Vaudoucr, de Nantes; elle offre comme les autres Chrysoméliens huit gan- glions abdominaux espacés dans les mêmes rapports. L’étude du système nerveux des Chrysoméliens nous montre donc cette tribu comme formant un ensemble très homogène, mais établissant d’un côté un passage aux Cérambyciens par les Dona- ciides , et d’autre part une tendance vers les Curculioniens par les Clythrides. Mais ici ce n’est seulement qu’une tendance , tan- dis qu’entre les Cérambyciens et les Donaciides , la limite n’est véritablement pas tranchée. HÉSÜM K. A chaque tribu , à chaque modification importante dans l’orga- nisation, je me suis attaché à indiquer les relations des divers types ; souvent les affinités d’une famille ou d’une tribu avec les autres se sont trouvées très nombreuses. Après les avoir passées en revue, beaucoup de rapports échapperaient bien facilement, ou ne seraient qu’imparfaitement saisis , si l’on ne s’efforcait de les résumer. Dans le tableau ci-contre, j’ai cherché à représenter le degré d’affinité, le degré de parenté en quelque sorte des types principaux de l’ordre des Coléoptères, c’est-à-dire des tribus qui composent cette grande division de la classe des Insectes. Le système nerveux nous a paru fournir des caractères d’une importance considérable, car nous les avons vus persister dans les groupes naturels, quand tous les autres caractères se sont déjà modifiés. Dans ces derniers temps , M. Agassiz, en étudiant l’or- ganisation des boissons , est arrivé à reconnaître que le système nerveux , et particulièrement le cerveau , caractérisait presque toujours très nettement les familles naturelles. Cet accord entre les résultats obtenus presque en même temps sur des groupes d’animaux si différents par deux observateurs qui ne se sont rien communiqué, est une preuve déjà bien notable que les faits sont palpables aux yeux de ceux qui veulent les étudier. Ils tendent aussi à montrer que, dans tout le règne animal, on trouve en 37 h E. BI.IKCUARU. — SL 1S LE SVSTÈMI! NERVEUX général une subordination de caractères très analogue ; et , en zoologie, il est important avant tout de s’occuper, dans les re- cherches, de la valeur des caractères. Or , c’est précisément parce que les caractères tirés du système nerveux ont une grande valeur qu’ils nous indiquent si sûrement des affinités difficiles ou même impossibles à saisir par la considé- ration des autres organes. Ce sont ces caractères et ceux tirés des larves qui nous permettent seuls de saisir les rapports de certains groupes entre eux. Comme l’indique notre tableau, il existe des groupes très im- portants, autour desquels se placent des groupes secondaires ou tertiaires. Nous avons la tribu des Scarabiens parfaitement caractérisée par la disposition du système nerveux , à laquelle appartient bien manifestement la famille des Passalides, mais qui , toutefois , sort un peu du cadre si naturel formé par les autres familles de cette tribu. Nous avons auprès les Ilistériens , dont les rapports avec la tribu précédente nous ont été indiqués si positivement par la disposition du système nerveux. Le même appareil nous a montré en quelle mesure les Lucaniens s’éloignaient des Scarabéiens, avec lesquels ils ont encore de véritables affinités, et comment ils se rapprochaient des Bostrichiens en présentant en même temps une tendance vers la forme de certains Cérambyciens. Les Carabiens, qui constituent un des types principaux parmi les Coléoptères, nous ont offert aussi des caractères importants dans leur système nerveux , et , par la comparaison méthodique de cet appareil , il est devenu facile de constater que les Staphy- liniens et les Dyticiensen étaient extrêmement voisins, ainsi que les Silphiens ; et pour ces derniers , tout le monde reconnaîtra que leurs affinités ne pouvaient être nettement saisies à l’aide des caractèi es extérieurs. S’il est probable et même presque certain que les Psélaphiens avoisinent beaucoup les Staphyliniens , il n’en demeure pas moins évident que le degré de ressemblance existant entre ces deux types ne pourra être apprécié à sa juste valeur que par la con- sidération du système nerveux des Insectes parfaits et des larves. DES INSECTES. 375 L’observation de cet appareil nous a montré que les llydro- philiens constituaient un type assez particulier ; mais elle nous a appris aussi que ce type s’éloignait beaucoup de celui des Scara- béiens, dont on l’avait cru voisin à cause de la forme des antennes. Elle nous a appris que ee type, en se rapprochant des Dyticiens, en différait plus qu’on n’était porté à le croire , d’après la forme générale du corps ; elle nous a conduit encore à reconnaître que ce type, se modifiant un peu, passait vers la forme des Coccinel- liens. Nous avons constaté que deux ou trois tribus principales, les Dermestiens avec les Éroty liens et les Cantharidiens, n’étaient pas homogènes, et que certains types devraient en être séparés ; mais, pour ces derniers , nous avons établi que leur place, par rapport aux autres groupes, ne saurait être reconnue qu'au’ moment où leur système nerveux aurait été étudié. Il est devenu positif que les l’iméliens avoisinaient manifeste- ment les Carabiens , ce qui était douteux par la considération seule des caractères extérieurs; par la disposition de leur système nerveux , il a été facile de voir que les Diapériens en différaient notablement , et présentaient une tendance vers la forme des Chrysoméliens. Ces derniers nous ont présenté des caractères, dans l’appareil de la sensibilité, qui prouvent qu’ils n’ont que des rapports éloi- gnés avec les Curculioniens , dont on pouvait les croire plus voi- sins. A l’aide de ces caractères , nous avons suivi les plus légères modifications du type des Chrysoméliens , de manière à pouvoir reconnaître positivement par que! genre il avoisinait surtout les Coccinelliens, et par quel autre il se confondait presque avec celui des Cérambyciens. Les mêmes considérations anatomiques nous ont montré com- bien ces derniers étaient voisins des Buprestiens , bien que ceux- ci présentent dans leur système nerveux un caractère qui per- mettrait seul de les distinguer de tous les Coléoptères. La disposition du système nerveux montre jusqu’à quel point les Buprestiens s’éloignent des Élatériens , dont les entomologistes les croyaient si voisins, et combien, au contraire, les Elatériens se lient intimement aux Lainpyriens et aux Cléricns, en sorte que ces 370 U. ICI, W('ll 1 IC ■>. SU B LE SYSTEME XEKVEIA trois tribus rapprochées se montrent comme constituant un ensemble homogène, ayant d’une part un certain rapport avec les Cantharidiens, et d’autre part avec les Bostrichiens. Les caractères tirés du système nerveux nous ont montré que les Ptinides devaient être séparés des Clériens , auxquels les rattachaient tous les entomologistes, pour être placés parmi les Bostrichiens, ce qui s’accorde parfaitement avec les caractères fournis par les larves , et même par la plupart des caractères tirés du système appendiculaire des Insectes parfaits. Les mêmes observations nous ont amené à reconnaître les Bostrichiens comme se liant un peu aux Dermestiens , et différant notablement des Scolytiens, avec lesquels ils conservent certains rapports dans l’ensemble de leur organisation. Le système nerveux nous a montré d’une manière incon- testable que les Curculioniens et les Scolytiens constituent un des types principaux de l’ordre des Coléoptères , présentant des afii- nités manifestes avec les Scarabéiens , ce qui est encore confirmé par la forme contournée du corps des larves , et mieux encore par leur organisation intérieure. Toutes ces affinités reconnues par la considération du système nerveux ne se trouvent en aucune manière infirmées par la consh- dération de l’ensemble des autres caractères ; bien loin de là, car elles sont presque toujours confirmées par les caractères des larves. Quand les modifications les plus positives touchant les affinités naturelles ont été saisies d’après la disposition des centres ner- veux , on en vient le plus ordinairement à apercevoir ces mêmes rapports indiqués par certaines formes dans le système appendi- culaire. Ainsi, en m’efforçant de montrer que les caractères tirés du système nerveux ont une prédominance marquée sur les carac- tères fournis par les autres parties de l’organisme, je ne veux être nullement exclusif. Je crois que tout doit être étudié avec le même soin dans chaque groupe du règne animal ; mais il importe aussi de savoir saisir F importance des caractères en accordant naturellement plus de valeur à ceux qui offrent le plus de con- stance. Bien que les caractères les plus importants dans chaque division du règne animal tendent à disparaître chez certains de leurs représentants, comme Fa bien établi M. Miine Edwards; DES INSECTES. 377 bien que le système nerveux ne fasse pas complètement excep- tion à cette règle , tout nous prouve aujourd'hui de plus en plus que les caractères qu’il fournit ont plus d’importance en zoologie que ceux tirés des autres parties de l’organisme. EXPLICATION DES FIGEItES PLANCHE 8. Fig I . Lucanus cervus Lin 1, ganglions cérébroïdes. — a, nerfs antennaires ; b, nerfs optiques ; <■ gan- glion frontal ; d, nerfs de la lèvre supérieure: g, nerfs mandibulaires; h, nerfs maxillaires : e, ganglions angéiens : f, ganglions trachéens. 2, ganglion sous-œsophagien. — 3, ganglions prothoraciques. — a, b, c, les trois paires de nerfs. — 4, ganglion mésothoracique. — a, nerfs alaires. — b, nerfs médians. — c, nerfs des pattes. — 5, ganglion métathorarique. — 6, 7, 8, 9, 10, II, ganglions abdominaux. Fig. 2 Hister cadaveïiinos Payk 1, ganglions cérébroïdes. — a , nerfs antennaires. — b, nerfs optiques. — 2, ganglion sous-œsophagien. — 3, 4, 5, les trois ganglions thoraciques. — a, nerfs alaires. — b, nerfs médians. — c, nerfs des pattes — 6, ganglions abdominaux. ( Dans les figures suivantes , les mêmes chiffres et les mêmes lettres indiquent les mêmes parties. Les ganglions abdominaux sont toujours indiqués par le numéro 6 et les suivants.) Fig. 3. Nitidula ænea Lin. Fig. 4. ScAPHIDIl'M QUADRIMACULATUM Fabr. Fig. 5. Gïrinus natator Fabr PLANCHE 9. Fig. I . Necrophorus vespillo Lin. Fig 2. Silpha ORscuRA Fabr. Fig 3. Sa larve. Fig. 4. Stapuv LiNL's vaxillosus Lin. Fig. 5. Larve du Staphylinus ulens Lin PLANCHE 10. Fig. I. Dyticus harginalis Lin. I, ganglions cérébroïdes. — c, ganglion frontal. — d, un petit ganglion pharyngien. — e, nerfs de la lèvre supérieure. — b, ganglions angéiens. — 17, ganglions trachéens. — h, nerfs récurrents. (Les autres lettres comme dans les figures précédentes.) Fig. 2. Larve du Dylicus murginalis. I ganglions cérébroïdes. — n nerfs antennaires — b, nerfs optiques. — 378 E. BLANCHARD. — SYSTEM K NERVEUX DES INSECTES. c, ganglion frontal.— d, nerfs de la lèvre supérieure. — e, nerfs mandibulaires, — f, nerfs maxillaires. Fig. 3 Blaps mortisaga Lin Fabr. 1 2, dernier centre nerveux abdominal , dans cette masse médullaire on dis- tingue deux ganglions accolés. Il eût été peut-être préférable de mettre 12 et 1 3. Fig. 4. Tenebrio molitor Lin. Fig. 5. Sa larve. PLANCHE 11. Fig. 1. Hydrophilus piceus Lin Fig. 2. Helops lanipes Fabr Fig. 3. Diaperis boleti Lin. Fig. 4. Sa larve. Fig. 5. Sa nymphe. Fig. 6. Agriluj viridis Fabr. PLANCHE 12. Fig. 1 . Byturds tomentosus Fabr. Fig. 2. Mycetophagus quadrimaculatus Fabr. Fig. 3. Dermkstes lakdarius Linn. Fig. 4. Triplax russica Fabr. Fig. 5. Endomycuus coccineus Fabr. Fig 6. Bostricuus capucinus Fabr. PLANCHE 13. Fig. 1 Trogossita mauritanica Lin. Fig. 2 Coccinella septempunctata Lin Fig. 3. Spiiæridium scarabæoldes Fabr. Fig. 4. Malachius bipustulatus Fabr. Fig. 5. Scirtes hemisphæricus Fabr. Fig. 6. Ceratoderus monoceros Fabr. Fig. 7. Cistela sulphurea Lin. Fabr. F'ig 8. Scolytus pygm.eus Fabr. PLANCHE 14. Fig. I Larve de la Calandra palmarum Lin. I, ganglions cérébroïdes — a. nerfs antennaires. — 6, nerfs de la lèvre supérieure. — c, ganglion frontal. — d, ganglion œsophagien. — f . ganglions angéiens. — g, ganglions trachéens. — h, nerfs mandibulaires. — i, nerfs maxillaires. — k, nerfs labiaux. Fig. 2. Trichodes apiarius Fabr 1, ganglions cérébroïdes. — ■ ziervez/æ Ji'/te'snoru! â/i// / eùnm sc . /;. > /■ n ,m /. euriui St/x/ème /u’rvw/.r (/es / o/eo/i/è/ex ,1 /'ivnoru/ t/n/t S/.r/esm' /!,■/•// m.r i/e.r Coleon/èrar Syj-fcme nnroeuj' t/e.r 0>/e'o/> tires A' Jtdnwnet onp r\ l«| iX -•o o o