s L} pe et Fe TE ke | y 4 CNET EN Paie SPP (& Ma) ANNALES DES SCIENCES NATURELLES. SACONDE SÉRIB TOME V. ‘ k-et at 0 jet “momies É£ , 490; TON LE À LISE ME BÂMATNON #00 CL At) th ne TN 4 TEE | HRSNSN | L2auiéso ddr SAM EE NON E À | | ess À 1 ! Fret Me sÉGLLOS KA LOL | D ponavrar-mene a KmoGuA ss AE : ere ET 2 Le LASER x. NS RE ÿ Non) D ds RAAMIDHONS LE IE ane ? Gi em | rex Ve ANNALES DES SCIENCES NATURELELES. PARTIE ZOOLOGIQUEX, Cocortctoroier Greece iecereremoIPeG CSG 0160018 0S mec D O0SIEIOeR RecuErCHES anatomiques et physiologiques sur lorgane de louie dans les Oiseaux, Par M; Brescuer, Docteur en médecine, Chirurgien ordinaire de l’Hôtel-Dieu, membre de l'Institut, etc. CHAPITRE PREMIER. PARTIE HISTORIQUE. $ 1. Un des plus anciens et des plus illustres membres de ceite académie, lequel fut anatomiste habile, médecin éclairé et grand architecte, Claude Perrault enfin, a dit : « L'histoire, de quelque « nature qu’elle soit, s'écrit en deux manières; en l’une, on « rapporte toutes les choses qui ont été recueillies en plusieurs « temps, et qui appartiennent au sujet qu’elle traite : en l'autre, «a on se renferme dans la narration des faits particuliers, dont « celui qui écrit a une connaissance certaine (1).» Nous avons suivi avec rigueur dans cet opuscule, ce que nous enseignent ces paroles. Dans la première partie de notre travail sont consi- gnés les principaux faits publiés jusqu’à nos jours par les ana- tomistes ; et dans la seconde partie, nous avons placé ce que (x) C, Perrault.—Mémoires pour servir à l'histoire paturelle des animaux, etc, Paris, 2674 in-f, BRESCHET. — Organe de l’ouie dans les Oiseaux) nos propres recherches nous ont faït connaître. Ainsi; on pourra voir avec facilité et promptitude ce qu'était la science, avant nous, sur ce point d'anatomie, et ce que nous avons ajouté. Nous dirons à cet égard que noîïre travail était achevé depuis long-temps, lorsque nous avons pu consulter plusieurs ouvrages publiés avant le commencement de nos dissections, ou à une époque correspondante à celle de nos propres inves- tigations; tels sont les Mémoires de MM.Tréviranus, Huschke, etc.; tel est surtout le travail,de M. Windischmann, bien postérieur au nôtre, et dont nous devons la connaissance à M. Muller, alors professeur de l’université de Bonn, lorsque nous lui communi- quâmes nos propres études. $ 2. Casserius(1), dont les recherches sur la structure de l’o- reille de l’homme et des animaux sont pleines de faits,et dont les figures sont dignes d’éloges, quoique publiées à une époque déjà bien loin de nous (1600), a successivement représenté le con- duit auditif, et la membrane du tympan de l'Oie, du Coq- d'Inde (2); la cavité du tympan avec le nerf et losselet qui la traversent. Il donne à cette derniere partie, le nom de Mar- teau (3) ; il décrit aussi le labyrinthe et, une ouverture commu- niquant avec la Cochlée. (4) Il représente séparément la columelle avec ses annexes, nomme marteau le centre de cette tige et étrier son extrémité interne ; mais d'après la figure de cette dernière partie, il est à croire qu'il a représenté le cartilage de la Cochlée, et non la platine ou base de la Columelle. (5) $5.Claude Perrault avait depuislong-temps observé que lastruc- ture de l’organe de l’ouïe des Oiseaux a quelque chose de parti- culier :« Les osselets sont réduits à un seul, et dans le labyrin- « the au lieu d’un conduit en spirale, il y a seulement un conduit « court en manière d’un petit sac. » (x) Julii Casserii Placentini de vocis auditüsque organis, etc. Ferrarie 1600. Pentæs« theseion, hoc est, de quinque sensibus. liber x. Venetiis 1609. (2) Tab. org. auditüs. — Tab. vrir. fig. 7 et vr. (3) Tab. 1x. fig, xrr et xurr. (4) — fig. x1x, foramen ad cochleam vergens. fig. xx. Extuberantia cochleæ, (5) Ossicula organi auditus diversorum animalium, (Anseris.) H, BRESCH£T. = Orsane.de l’ouie dans les Oiseaux. 7 Ce qu'il dit de l'oreille des Poissons n’a pas été cité par les auteurs modernes, cependant ses observations sont bien anté- rieures à celles de Geoffroy ; Camper, Monro, etc. « Dans les Poissons, nous n’avons point encore pu trouver ni de tambour, ni d'osselets, ni de conduits dans le labyrinthe, qui ait aucune analogie avec le Limacon: Z y en a méme beaucoup où il ne se trouve point d'ouverture au dehors qui soit visible. Tout ce qu'on y voit distinctement sont les conduits, principalement ceux du labyrinthe, qui se trouvent en quelques Poissons , au nombre de trois, comme aux Oiseaux; il y en a où il ne s’en trouve que deux. » (1) Il paraîtrait d'après ce passage, que C. Perrault avait con- naissance des communications de l'oreille des Poissons. àvec l'extérieur , communications indiquées dans la Raie, par Geof- {roy , décrites avec plus d’exactitude par Monro, et surtout par Weber, et niées, fort mal-à-propos, comme le remarque fort bien G. Cuvier (3), par Camper et Scarpa. Quant aux Poissons qui n’ont que deux canaux semi-circu- laires, nous n’en connaissons pas, et il est à présumer que C. Perrault s’est trompé sur ce point. Les Cyclostômes sont les seuls Poissons dont l'oreille soit dépourvue de canaux semi-cir- culaires. | Dans un autre ouvrage consacré à la description anatomique de beaucoup d'animaux, C. Perrault parle de la structure des ‘organes des sens chez un grand nombre d'Oiseaux, mais il ne dit rien de la disposition de l'appareil auditif. (3) $ 4. Comparetti (4) reconnaît l’existence d’un sac dans le la- byrinthe des Oiseaux, ainsi que la présence de corpuscules cré- tacés. Il avait étudié assez bien la Cochlée sous le rapport de sa forme, de sa longueur et de sa courbure, particulièrement dans (x) OEuvres diverses de physique, etc. De C. et P. Perrault, Du Bruit, troisième partie, » u,®. Largeur de l’enfourchure .......,..... ses... 8 4 » o. Anus , à 12 pieds de la queue. Nota. Toutes ces mesures sont rigoureuses : elles ont été prises avec soin sur l'animal même, Je doute que nous possédions jusqu’à présent une bonne figure de la Balénoptère à bec. Celle qui a été publiée dernièrement pour le zouveau Dictionnaire d'histoire naturelle n’était qu’une copie amplifiée de celle qu'on voit représentée en très petit dans les planches de l’ouvrage de Bloch sur les poissons. Or on sait ce qu’il faut penser en général des figures de cet ouvrage. L’amplification de ceile dont il s’agit en rendent plus évidentes les inexactitudes, qui étaient principalement remarquables dans la mollesse et la grandeur des bras. C’est ce qui m'a engagé à donner la figure nouvelle que je joins à ce mémoire. Elle est assurèment plus exacte, car elle a été faite en vue de l'animal même et d’après des mesures rigoureusement prises sur di- verses parties de son corps pour en reproduire fidèlement les dimensions, Fig. 2. La mächoire inférieure. a,a,a. Les maxillaires inférieurs recouverts par une levre. b, b. Membrane buccale. ce, c. La langue. — On remarque à sa surface supérieure deux corps papillaires très déve- loppés; d, d. — etsur le bout un espace ovale, déprimé, concave, où la membrane est lisse, tendue et dépourvue de papilles; e.-— Le bord supérieur &e la langue est frangé par de grosses papilles pareilles à celles qui se voient en 4. La langue est adhérente par toute sa face inférieure à la membrane buccale, elle ne peut exécuter sur elle-même que les mouvemens les plus bornés; mais l’extensibilité de la mem-— brane et l'extrême laxité du réseau lamineux subjacent me laissent croire qu’elle en pourrait faire de plus étendus, qu'il lui serait aisé de s'avancer jusqu'au bout de la michoire et de se diriger en divers sens vers ses bords. f. Tissu lamineux fort lâche, séreux, à grandes lames, à longues cellules, situé entre la peau et la membrane buccale. g. Réservoir aérifère. La rapidité avec laquelle le dépècement s’est effectué ne m’a paspermis de constater l’exis- tence de ce réservoir. (Voy. Hist. Nat. des poissors, par Bloch, tom. 1x, p. 153, édit. de RR. Cassel. et Dictionn. des Sc. nalur., tome 117, pag. 422 }). hk,h,h. La peau au dessous de la mâchoire. — On ÿ voit des plis ou sillons parallèles qui s'enfoncent jusque dans le tissu adipeux. Ils ne sont pas bornés au dessous de la mâchoire; ils s'étendent aussi sous la gorge et sous la poitrine, Ils sont placés assez régulièrement à deux pouces les uns des autxes ; leur profondeur est de six lignes et ils peuvent s'ouvrir d'autant. Ils sont probablement destinés à suppléer à ce qui manque d’extensibilité à la peau et au tissu adipeux, lorsque l'animal respire et surtout lorsqu'il remplit le réservoir aérifère g dont on assure qu'il est pourvu. La peau est noire sur tout le dessus du corps, mais elle prend une teinte grise et nacrée en dessous. Dans l’intérieur des plis elle redevient noire. Je n'ai pas trouvé de glandes salivaires à la mâchoire inférieure et je mai pas vu qu’il en existât dans aucune autre partie de la tête. F. RAVIN. — Sur les Fanons. 279 Fig. 3. La mâchoire supérieure. Surface palatine osseuse. a, a. Les os maxillaires réunis et formant au palais une double voute creusée par des sinus de différentes sortes. B,6. Sinus en forme de sillons. e,e,c. Sinus en forme d’anses. d,d. Os palatins. Fig. 4. Membrane palatine. a, a. Membrane palatine moyenne, lisse, tendue, divisée en deux parties par une ligne mé- diane longitudinale. b,b. Membrane palatine latérale ou membrare des fanons. On y voit une foule de petits sillons de grandeurs inégales, disposés sur plusieurs rangs et destinés à recevoir la base des fanons. De chaque bord de ces sillons s'élèvent des expansions charnues, vasculaires, qui pénètrent dans les fanons, entre leurs racines. Dans la figure ces membranes sont contractées. On les a indi- quées par de simples traits. (Voy. la fig. 9.) Fig. 5. Masse de fanons réunis entre eux. a,a. Les fanons du premier rang ou fanons extérieurs. b,c. Fanons du 2° et du 5° rangs, ou fanons internes. d,e. Crins isolés, simples. fg,h,i. Masse de substance blanche enveloppant les racines des fanons. f.g. Bord externe formant une bande blanche sur la base des fanons du premier rang. Cette bande s’appuie contre la lèvre. h,ë. Bord interne beaucoup moins élevé qui adhère à la tranche de la membrane palatine moyenne (fig. 4.) gi. Lame en forme de trapèze qui descend entre deux fanons. Fig. 6. Des fanons de divers rangs et des crins simples, Ils sont séparés les uns des autres et détachés de la substance blanche qui les enveloppait. a. Fanon du premier raug. b, c,d, Fanons des 2°, 3° et 4° rangs. e. Crin simple, isolé. f,g- Racines écartées du fanon externe. f';g. Racines des fanons internes, disposées de mème manière, Fig. 7. Fanons unis par la substance blanche. a,b. Fanons externes. — f, g. racines du fanon 4. — ,i, racines du fanon 4. — Ha racines dont l’une appartient au fanon a, et l’autre au fanon 4, et qui sont toutes deux recou- vertes par des replis de la substance blanche, — /, lame de substance blanche qui descend entre les deux fanons a et 4, et dont les replis embrassent leurs racines y et k, —c, d, e,e’. fanons internes et simples crins, disposés comme les fanons externes à l'égard des lames de la substance blanche et unis par elle de la même manière. Dans cette figure Les fanons sont beau- coup plus écartés et les fanons sont plus distans qu’il ne doivent l'être. © n l'a fait exprès pour qu'on en distingue mieux l’arrangement. Fig. 8. Lame de substance blanche isolée. Elle est divisée artificielleu.nt suivant les rangs des fanons auxquels elle correspond, d Lame, p,p, replis qui s’attachent aux racines des fanons à droite et à gauche. 278 VANBENEDEN. — Anatomie de ’Helix algira. Fig. 9. Morceau de membrane palatine, au dessous des fanons qui s'y doivent attacher. La partie latérale de cette membrane présente quelques-unes des expansions charnues et vasculaires qui s'insinuent dans les fanons. a, a. Portion de membrane palatine. b, b. Lames vasculaires relevées et étendues. c, e. Lames vasculaires contractées et rabattues sur la membrane, entre les sillons de laquelle elles forment des saillies de couleur rouge. d, d, d, Fanons dans la base desquels doivent pénétrer les lames vasculaires. Fig. 10, Cette figure a été faite pour suppléer à la fig. 5 dont la petitesse ne permet pas de voir assez clairement la disposition des lames de la substance blanche à la base des fauons. Les lames qui couvrent les fanons du premier rang sont foutes disposées régulièrement en une longue série extérieure, unique, dans laquelle elles diminuent graduellement de longueur et d'épaisseur vers chaque exbémité. — Les lames des fanons internes du 2° et du 3° rang sont disposées au contraire par séries courtes et multiples, dans lesquelles elles varient symétrique ment de longueur, à-peu-près comme des tuyaux d'orgue, Le nombre de ces tuyaux n’est pas égal pour chaque série. — Les lames du quatrième rang sont aussi disposées en petites séries ; mais elles se trouvent dans un sens inverse. Elles se présentent à l'œil comme de simples fentes, tant la lame blanche y est devenue mince. Elles sont placées entre les divers rangs de fanons internes pour combler les espaces qu'ils laissent entre eux. IL en est de même des trous qui correspondent aux racines des simples crins. Mémorme sur l'anatomie de l’Felix algira, Par le docteur VANBENEDEN, Professeur à l’université de Louvain. { Mémoire présenté à l'Académie de Bruxelles dans la séance du 8 août 1835. ) Dans ces dernières années , les Coquilles fluviales et terrestres ont été l’objet de recherches particulières et très assidues. Les géologues, sentant vivement le besoin de connaître les dépouilles de ces Mollusques, ont excité l’ardeur des malacologistes, et en quelques années on a vu les cabinets enrichis d’un nombre considérable de coquilles rapportées de tous les points du globe, et appartenant à presque tous les genres de Pulmonés; mais il. n’en est aucun qui ait vu le nombre d'espèces s’acc oître comme celui des Hélices, et qui ait nécessité plus de subdivisions. VANBENEDEN. — Anatomie de l’Helix algira. 279 Différens auteurs ont essayé de les grouper dans des sous- genres; mais n'ayant pris pour guide que la coquille sans s’ap- puyer sur l’animal qui la produit, leurs coupes sont plus ou moins artificielles, et on en ignore absolument la valeur. Différens zoologistes avaient senti, depuis long-temps, la nécessité de ne pas s’écarter de la méthode naturelle, et M. de Blainville avait même déjà signalé sur quels organes intérieurs la distinction des espèces pouvait se baser; mais jusqu'à présent on n'avait pas cherché à mettre ces principes en pratique, et le véritable moyen de parvenir, par la connaissance anatomique, à l'établissement rigoureux des genres, sous-genres et espèces était encore négligé. C’est en partie pour parvenir à ce but que j'ai commencé ces recherches, et que j'ai pris un Æelix d’une subdivision assez naturelle, pour m'assurer de la valeur de ce groupe et savoir jusqu'où s'étendent les variations dans les différens appareils. L’espece qui fait le sujet de ce mémoire habite le midi de la France et le rord de l'Afrique. Les individus qui ont servi à mes recherches m'ont été généreusement communiqués par M. le professeur Laurent, qui s'occupe depuis quelque temps à ob- server les mœurs de ces curieux animaux. Je donnerai d'abord l'anatomie absolue de l'animal, que je comparerai ensuite à | Aelix pomatia , lequel peut être considéré comme type du genre, et en même temps de la subdivision de ceux qui affectent la forme globuleuse. C’est de cette espèce que Cuvier a donné l'anatomie; nous verrons, par suite de la comparaison , les applications qu'on pourra faire des disposi- bons anatomiques. Ayant trouvé dans deux individus une sorte d’atrophie dans les organes de la génération, soit par suite de la captivité des anmwaux, de leur nourriture ou de l’époque de l’année, je join- drai une figure de ces organes tels qu'ils se sont présentés; ils pourront quelquefois aider à nous mettre sur la voie de la véri- table détermination de certains organes encore douteux, je veux dire du testicule et de l'ovaire, sur la nature desquels on est loin d’être daccord, Système nerveux, — Ge système est formé sur le même type 280 VANBENEDEN. — Anatomie de l'Helix algira. que celui des autres Gasteéropodes , mais il se fait remarquer par le grand nombre de nerfs qui partent du collier nerveux. On aperçoit d'abord deux ganglions sus-œæsophagiens qui re- présentent le cerveau et qui sont contenus dans un névrilème tres lâche; ces deux ganglions sont unis par une commissure. Il part de chacun de ces ganglions le nerf optique, le nerf du tentacule inférieur, dont le rameau principal se perd autour de la hanche, les nerfs qui se rendent aux petits muscles ex- trinsèques de la bouche, les nerfs qui se rendent à la peau qui recouvre la tête, un nerf du côté droit qui se rend à la verge, et les deux filets qui forment:le collier par une réunion avec les ganglions inférieurs. Inférieurement à l'œsophage, il y a quatre ganglions réunis en une seule masse, dont ceux du milieu fournissent les nerfs qui se rendent aux principaux viscères, et les autres filets in- nombrables quiet partent vont se perdre dans le pied, le man- teau et les muscles rétracteurs. Le-nerf.optique se laisse parfaitement disséquer jusqu'à sa terminaison. -Îl part du cerveau, entre dans le tentacule en for- mant plusieurs zigzags, comme le montre la figure, et se perd dans le globe de l'œil. On conçoit bien pourquoi le nerf doit se replier sur lui-même, le globe de l'œil étant à l'extrémité du tentacule, lorsque celui-ci s’'épanouit. Système musculaire. — Le pied qui est musculaire dans toute son étendue,-et dont les fibres s’entrecroisent en tout sens, s’effile considérablement pour pouvoir entrer dans l'ouverture étroite de la coquille. Il est entouré par le collier, qui serre le pied comme un sphincter, et dont le bord est musculeux et très épais; les fibres musculaires diminuent à mesure qu’il s'enfonce dans la coquille. Immédiatement au-dessus de la partie infé- rieure, on voit le muscle rétracteur du pied, dont les fibres s'entrelacent avec celles de cet organe, et qui va s'attacher pos- térieurement à la columelle de la coquilie; il sert à tirer le pied au dedans de la coquille. En dessus de celui-ci est un autre muscle columellaire; il s’unit antérieurement à la paroi mus- culeuse de la cavité buccale, et il s'attache à la columelle der« ricre le précédent; c’est le-muscle rétracteur de la bouche. - VANBENEDEN, — _Ænaiomie de l’Helix algira. 281 Au-dessus de celui-ci, qui forme comme un plancher sous l'œsophage, on trouve les muscles propres des tentacules, qui prennent leur attache sur sa surface; ils sont réunis postérieu- rement et forment le rétracteur commun des tentacules. Le muscle rétracteur de la verge va prendre son point d’at- tache sur les parois de la grande cavité viscérale; il est tres développé dans cette espèce. Tous ces muscles que nous venons d'énumérer après le pied sont des muscles rétracteurs, sauf un seul qui agit comme sphinc- ter. Il y a au tentacule oculaire deux petits muscles très distincts qui produisent le mouvement contraire des précédens. Ils s’at- tachent d’un côté à l'enveloppe de l'œil et de Pautre côté à la peau. Cuvier ne parle pas de ces muscles dans /’Helix pomatia. s ième digestif. — La bouche est armée comme dans toutes les espèces de ce groupe d'une pièce cornée assez solide, dont la moitié qui est très dure fait saillie en dehors, tandis que le reste est engagé dans l'épaisseur des muscles. Cette pièce ressemble beaucoup au bec des Céphalopodes avec lequel on ne peut s'empêcher de le comparer; elle est adhérente à la voûte de la bouche. Il se tronve inférieurement, sur la masse musculaire, un autre pièce cornée enclavée de même dans l’épaisseur des mus- cles et considérée généralement comme la langue. La pièce supérieure présente au milieu une saillie recourbée en avant qui lui donne cet aspect de bec d'oiseau, tandis que la piece inférieure est beaucoup moins solide et se trouve repliée vers son milieu sur elle-même. Elle est divisée en deux par- ties : l’une postérieure est adhérente aux muscles; l’autre moi- tié est entièrement libre et mobile et peut jouer dans la cavité de la bouche: c’est sans doute à cause de cela qu’elle a reçu le nom de langue. Sur toute la surface de cette lame on remarque des crochets très fins qui servent à retenir et à broyer les ali- mens par le point d'appui qu’elle offre à la dent supérieure. Ces crochets sont disposés d’une manière très régulière en formant des dessins qui semblent caractéristiques lorsqu'on les examine au microscope, Ce serait peut-être un moyen très avantageux à employer pour la détermination des espèces douteuses. 382 VANBENEDEN. — Ænalomie de l’Helix algira. La cavité buccale est très musculeuse, surtout à sa partie inférieure. Ses principaux filets nerveux sont fournis par le gan- glion sous-œsophagien. L'œsophage commence dans la voûte de cette cavité. Les glandes salivaires l’enveloppent presque immédiatement après sa sortie du collier nerveux, et il reste d’un volume égal jusqu’à ce qu'il se rende. dans le foie. [ei se montrel'estomac en forme de sac tres allongé et à p:rois aussi minces que dans le reste «lu tube digestif. L’intestin se contourne immédiatement après sa naissance, produit encore un léger renflement, vient barrer en avant l'extrémité du foie et va s'ouvrir à l'extérieur après avoir formé une anse dans l'intérieur de cette glande. Les glandes salivaires sont très volumineuses et entourent parfaitement l'œsophage. Elles forment un véritable anneau et donnent naissance aux conduits excréteurs qui se rendent par dessous le cercle nerveux, dans la cavité buccale à travers les parois supérieures. Le foie est très volumineux. Il est divisé en deux parties dont l’une forme avec l'ovaire le tortillon, tandis que l’autre entoure les intestins en forme de lobules. Les canaux biliaires répandent le produit de la sécrétion dans l'intestin immédiatement après son origine. Système circulatoire.— Le sang se porte par un grand nombre de subdivisions de ses vaisseaux à la veine pulmonaire,etc’est sur son trajet que se fait l'hématose. Le réseau vasculaire est très ré- gulièrement placé sur les parois supérieures du sac pulmonaire et la veine naît sur la ligne médiane de la réunion de tous ces VAISSEAUX. L’oreillette est petite et comprise dans le péricarde. Ile trouve un rétrécissement entre elle et le cœur. Le péricardeest uni aux parois du sac pulmonaire. Le cœur se meut librement dans son intérieur. L’aorte naît à l'extrémité opposée de la veine pulmo- naire, et elle se divise en différens rameaux qui vont se perdre dans le corps. L'organe de la viscosité, que M. de Blainville regarde comme un organe de dépuration, est situé dans les parois supéñeures du sac pulmonaire à côté du cœur et de la veine pulmonaire. Il VANBENEDEN. — Anatomie de l’Helix algira. 283 est allongé, arrondi aux deux extrémités. Sa texture dénote sa nature glandulaire. On l’aperçoit à l'extérieur à travers la peau qui recouvre le dos. Système générateur. -— Ta détermination de ces organes prin: cipaux étantencore un point en litige, puisque les uns regardent comme testicule ce que les autres considèrent comme ovaire, et vice versa, j'ai dû choisir entre ces deux déterminations, et j'ai pris celle de Cuvier et de Carus ;mais je n’ai point jusqu’à présent la conviction que telle est la détermination précise qu'on doit donner des uns ou des autres. Le testicule est situé à l'extrémité postérieure du second ovi- ducte ou de la matrice. Ilest assez volumineux, de couleur jaune et d'un aspect luisant. Il reçoit de l'ovaire logé dans le fuie le pre- mier oviducte ou bienles parois dece premier oviducte se con- fondent dans son propre tissu. Le canal déférent par l'intermède d'une glande très allongée et située tout le longdelamatrice, pa- rait venir aussi aboutir à cet organe. Cette glande, qui est surtout très développée dans les Limnées où elle forme une grande po- che, estrermarquable iei, de même que dans /'Helix promatia par sa grande étendue. La nature de cet organe de même que sa fonction sont encore inconnues. Le canal déférent est long, arrondi et d'une consistance assez grande. Il est diversement replié dans les parois étroites que lui laissent les organes environnans, et il va aboutir à l’extré- mité de la verge. À l'endroit où le canal déféreut se rend dans la verge, il y à un grand et fort muscle rétracteur, qui prend son point d'appui sur la portion membraneuse qui sépare le sac pul- monaire du sac viscéral, et qui retire cette organe après l'acte de la copulation. Vers le milieu de la verge on aperçoit un bourrelet dont les bords sont libres et flottars. L'ovaire est situé dans le foie comme dans le plus grand nom- bre de Mollusques, et cette disposition, qui se trouve jusque dans les Bivalves, est très favorable à cette détermination. L'ovaire dans cette espèce n’est point aussi nettement distincte que dans les autres Pulmonés, et il se trouve logé à l'extrémité des tours de spire. Le premier oviducte qui naît par plusieurs ra- mifications de cet organe et qui longe le côté interne des tours 284 VANBENEDEN. — _Ænatomie de l’Helix algira. de spire, ou le bord columellaire, se replie différentes fois sur lui-même en se séparant du foie, et après de nombreuses cir- convolutions, il se rend au testicule. J’ai trouvé des Zoosper- mes dans l'intérieur de ce canal qui est le même que celui où Prevost de Genève en a trouvé le premier dans les Limnées. (1) A l'extrémité antérieure du testicule naît comme nous venons de le voir le second oviducte ou la matrice. Elle est assez large et fortement festonnée comme unintestin. Cette matrice se rend dans une poche semblable à celle qui loge le cristallin dans l’Helix pometia et où aboutit également un canal qui provient de la bourse du Pourpre. Cette bourse du Pourpre envoie son conduit dans la bourse commune, à côté de la matrice, et Les parois de l'un et de l’autre semblent être continuées. La bourse qui est assez grande est attachée au second oviducte ou -ma- trice. J'ai trouvé dans l'intérieur de cette bourse des animal- cules en aussi grand nombre que dans le premier oviducte. (2} A l'endroit où s’insèrent dans l'Æelix pometia les vésicules multifides, dont la fonction n’est point encore connue, il y a tout autour de cette poche une glande qui a un aspect granulé et qui remplace probablement les vésicules des autres Hélices. L'absence de ces appendices et la simple réunion de la poche du Pourpre avec la matrice à l'extrémité de cette poche rend cette partie de l'appareil extrêmement simple, tandis qu'on a de la peine à le débrouiller dans les autres Hélices. Je me borne dans ce moment à l'énoncé des faits, me réser- vant de chercher la solution de plusieurs de ces problèmes phy- siologiques, dans un travail spécial sur les organes de la géné- ration de ces animaux. Atrophie de l’appareil de la génération. Dans la disposition anomale que nous avons indiquée en (1) De la génération chez les Limnées. (Mém. de la Soc. de physique et d'hist. nat. de Ge- nève, tom, 1v. 2. livr.p. 171.) (2) M. de Blainville ( Actinologie, p. 596) rapporte qu'il a trouvé des zoospermes dans l'organe que Cuvier appelle testicule et dans celui qu’il considère comme l'ovaire, , VANBENEDEN. — Anatomie de l’Helix algira. 285 commençant, et qui est représentée à la figure 5, l'appareil, est d’une petitesse telle que c'est à la faveur de la forme que la verge a conservée, et de ses rapports avec les autres organes, qu'on le reconnait pour ce qu'il est réellement. Le testicule est extrêmement petit. On ne trouve presque au- cune différence entre lui et le reste de l'appareil. La glande ( prostate ) qui est accolée contre la matrice ne laisse que quel- ques traces légères de son existence. Le canal déférent lappen- dice de la verge, et le muscle rétracteur sont réduits à une grande minceur. L'ovaire logé dans le foie est à peine visible, de même que son premier oviducte. Le second oviducte semble ne pas être diffé- rent du testicule, et ilse rend avec le canai de la bourse du Pourpre à la poche commune comme deux cordons sans aucune dilatation ou boursouflement, Comparaison de l'Helix pomatia avec l’Helix algira. Nous examinerons les mêmes appareils d’après l’ordre que nous avons suivi dans leur description. Le système nerveux offre d'abord cette différence dans le cerveau, que l’Æelix pomatia n’a en dessus de l'œsophage quan cordon nerveux, tandis que dans l’Æelix algira on aperçoit dis- tinctement sur la ligne médiane, deux ganglions qui sont unis entre eux par une commissure. Au lieu d’avoirun gros cordon de l'épaisseur du cerveau pour former le collier nerveux, il n’y a dans l’a/gira que deux filets d’une assez grande ténuité, qui lient Ja portion sus-œsophagienne à la sous-œsophagienne. Pour troi- sième différence on peut signaler le nombre prodigieux de nerfs qui sortent dans l’Æelix alzira du cerveau et des ganglions sous- œsophagiens, tandis qu'il est facile de compter le nombre de fi- lets beaucoup plus gros qui proviennent surtout de l'anneau nerveux de l’Æelix pomatia. Le canal digestif présente surtout une différence dans les pièces cornées qui arment la bouche. Dans l'Aelix pomatia la pièce supérieure offre sur tout son bord libre des dentelures qui se continuent en autant de cannelures sur sa surface anté- 286 VANBENEDEN. — _Ænatomie de l’Helix algira. rieure; la forme de cette pièce dans l’Helix algira rappelle au contraire celle des Céphalopodes. La partie moyenne est bombée sur le milieu et tranchant sur tout son bord libre. Cette disposition explique parfaitement pourquoi cette espèce sem- ble se distinguer par ses mœurs des autres espèces. L'œsophage est entouré dans l’Æelix algira des glandes sali- vaires constituant une masse unique, tandis que dans l’Helix po- matia, ces glandes enveloppent l'estomac même et se divisent en plusieurs ramifications disposées autour de cet organe. Dans l'Helix pomatia, à quelque distance de l'estomac, l'intestin offre un cœcum à l'endroit où les vaisseaux biliaires se rendent; dans l’Helix algira l'intestin est continu et il présente un second renflement allongé immédiatement après qu'il s'est atrophié sur lui-même. C'est dans les organes de la génération que nous allons voir les différences les plus marquées. L’appendice de la verge a de même que le canal de la bourse du Pourpre un volume beaucoup plus-considérable dans l’Helix poinatia; dans l’algira on ne voit qu'un très petit appendice à la verge , et le canal de la bourse du Pourpre est très court et attaché à la matrice. L'organe femelle n'offre que peu de différence jusqu’à l'en- droit où les diflérens conduits s’unissent dans la bourse com- mune. Dans l'A. pomatia nous voyons une bourse du dard, des deux côtés de d'extrémité de l'oviducte, un amas d’appendices abou- tissant à un canal commun, et la conduit de la bourse du Pour- pre qui aboutit à ce même oviducte avant les appendices dont nous venons de parler. Dans l’Aelix ‘algira, nous ne distinguons pas de bourse du dard , ou du moins la bourse ne contient point un corps cristal- din, et l'oviductes’'abonche au fond de cet organe, avec le con- duit de la vésicule du Pourpre. Il n°ÿ a:point de vésicule multifides, mais on voit àla place un corps glandulaire entourant entièrement cette bourse comme um anneau atitour du doigt. . VANBENEDEN, — Anatomie de l’Helix algira. 287 Nous résumerons nos différences ainsi qu'il suit : 1° 11 y a deux ganglions représentant le cerveau dans l'Helix . = . CC 5 2 algira et quatre ganglions inférieurement;1l n'y a qu'un anneau . . . . , Liere 2 nerveux sans ganglions distincts, si ce n’est le supérieur et l'in- férieur dans l’Aelix pomatia. 2° Le nombre véritable de filets nerveux sortant de l'anneau nerveux est beaucoup plus considérable et les filets plus tenus dans l’'Æelix algira que dans l Helix pomatia. 3° Les glandes salivaires entourent l'œsophage dans l’algira et l'estomac dans l’Æelix pomatia. 4° L’appendice de laverge est beaucoup plus long de même que le conduit de la vessie du Pourpre dans l’Helix pomatia. 5° Il n’y a point de dard dans l'algira, et la poche quile con-- tient sert de conduit dans l’algira, aux organes femelles. 6° Les vésicules multifides sont représentées par un co rfs ne 6 | | glandulaire sans aucun appendice dans l’Helix algira. 7° La bourse du Pourpre est libre et flottante au bout 4e son canal dans l'Helix pomatia et adhérent à l’oviducte dans Y Zelix algira. Avant de proposer une division sous-générique des Hélices, il sera certainement convenable d'anatomiser la plupart des es- pèces si on veut les grouper d’après l’ordre de lexrs affinités. Il me semble que les divisions pourront s'établir sur l'absence ou Ja présence des vésicules multifides, ainsi que sur leur nombre comme l’a proposé M. de Blainville, et que les caractères spéci- fiques pourront se trouver tant dans les pièces cornées qui _arment la bouche que dans les autres différences qu'offre cet appareil. Pour que ces caractères deviennent zoologique:s, on devra tou- jours tàcher de les traduire par quelques autre;s caractères dans la coquille. 288 VANBENEDEN. — Anatomie de l’Helix algira. EXPLICATION DE LA PLANCHE X. : ( Toutes les figures sont grossies, du double, ) Fig. 1. Représentant principalement le système nerveux et les tentacules, a. cavité buccale b. grand muscle rétracteur de la bouche c. œæsophage; dd. conduit salivaire; e. manteau; f. pe- tit muscle transverse qui tire la bouche sur le côté; g. tentacule supérieur; 2. tentacule infé- rieur ; &. & muscles rétracteurs communs des deux tentacules; /. muscles contracteurs des 1en- tacules supérieurs ; À. cerveau; Z. ganglions inférieurs; m. nerf optique; 2. nerf du tentacule in- férieur ; 0. nerf des organes de la digestion; p. plexus nerveux du pied; g. nerf des parties latérales et supérieures du manteau. & Fig. 2. Représentant surtout les muscles principaux. aa. le pied; à. une coupe du collier; c. muscle rétracteur du pied; 4. musele rétracteur de la bouche; c. la cavité de la bouche; J. le canal qui est furiné par les parties environnantes et qui conduit à la bouche lorsque l'animal est retiré; g. mâchoire ou dents supérieures; 4. œsophage; c. estomac; À. le tortillon. Fig. 5. Cette figure montre principalement le sac pulmoraire ou plutôt ses parois. a, parois supérieure du sac pulmonaire; 4. organe de la viscosité; c. péricarde; d. le cœur ; e. Poreillette; [. la veine pulmonaire ; g. Vaorte et ses divisions; 2. le foie; z. parois de la cavité viscérale. Fig. 4. Organes de la génération, entièrement étalés; aa, la verge; 2. canal déférent ; c. glande prostate ; d. muscle rétracteur de la verge ; e. vessie de la Pourpre avec son conduit; f. matrice ou second oviducte; g. testicule (Guv.) 2. oviducte. (Cuv.) £. uvaire (Cuv.) caché sous l'enveloppe; , le foie. Fig. 5. Les organes de la génération atrophiés; voyez l'explication des lettres sur la figure précédente, Fig. 6. Le canal digestif, a. La bouche; 2. æsophace; c. estomac; d. second renflement; e. in- testin; f. glande salivaire; g. conduit idem; 2. l'anus qui est ici rejeté à gauche, Fig. 7. Mâchoire ou bec supérieur vue de face, Fig. 8. idem vue de profil. Fig. 9. Lame cornée inférieure. G. P. DESHAYES. — Température des périodes tertiaires. 289 Osservartions sur l'estimation de la température des périodes tertiaires en Europe, fondée sur la considération des coquilles fossiles, Par M. G. P. DESHAYES. Lues à l'Académie des Sciences le 23 mai 1836. La conchyliologie, étudiée d’une manière rationnelle dans ses diverses parties, soit zoologiques, soit d'application à la géologie, peut devenir pour cette dernière science un moyen puissant de perfectionnement. Il est même permis aujourd'hui d'espérer de voir la conchyliologie aborder des questions qui intéressent la physique généraledu globe terrestre , et présenter les matériaux nécessaires pour les résoudre. Des observations très nombreuses, répétées sur plus de huit mille espèces de coquilles vivantes et fossiles, multipliées sur plus de soixante mille individus de toutes les régions, me font apercevoir des résultats importans sur l'estimation approxima- tive des températures de périodes géologiques, sur lesquelles l'homme ne peut apporter ses annales historiques, puisque alors il n'existait pas à la surface de la terre. Je crois que si les végétaux, comme l'a savamment établi M. Arago dans l'Annuaire du Bureau des Longitudes de 1834, peuvent donner pour les temps historiques des moyennes tem- pératures; si l'existence dans certains lieux de la vigne, des palmiers, etc., équivaut pour l’habile physicien à des observa.- tions thermométriques, je crois aussi que les animaux et sur tout ceux qui peuplent les eaux marines, peuvent, par leur présence, déterminer très approximativement la température moyenne du lieu qu'ils habitent. Tous les animaux marins ne sont pas propres à indiquer des températures avec la même précision ; il faut choisir ceux qui, jouissant de faibles mouvemens, ne peuvent se soustraire pério- diquement aux alternatives des saisons, et sont forcés de subir V, Zoor., — Mai, 19 290 G.P. DESHAYES. — Température des périodes tertiaires. toute leur influence dans les lieux qui les ont vus naïître. Le plus grand nombre des Mollusques et des Zoophytes remplissent ces conditions. Pour arriver à la connaissance des températures des temps antérieurs à l'existence de l’homme, il y a une marche logique à suivre. Il faut d’abord chercher un point de départ dans la nature actuelle, pour s’assurer si la vie des animaux dont il va être question est liée plus ou moins intimement à des condi- tions parmi lesquelles la température jouerait le plus grand rôle. C’est ce qui me détermine à exposer très rapidement quel- ques faits relatifs à la distribution des Mollusques , en allant du nord au midi; et, pour abréger, je parlerai seulement de ceux qui sont répandus depuis le cap Nord jusqu’au golfe de Guinée. Si l'on prend dans leur ensemble le petit nombre d'espèces qui vivent au nord, on peut les partager en deux sortes bien distinctes : les unes, propres aux mers froides, n’en dépassent pas les limites ; les autres, en moindre nombre, viennent vivre dans les mers tempérées d'Allemagne, de France et d'Angleterre avec les espèces de ces mers. En examinant les Mollusques de nos mers tempérées, dans lesquelles il existe un plus grand nombre d'espèces que dans les mers du Nord, il est facile de les séparer en trois séries. Dans la première sont comprises les espèces que je viens d’in- diquer, celles qui remontent dans les mers du Nord; les es- pèces de la seconde série se dirigent vers les mers méridiona- les ; celles de la troisième enfin sont propres aux mers tem- pérées. Descendons maintenant dans la région intertropicale, et nous y observerons des phénomènes semblables ; nous y rencontre- rons un plus grand nombre d'espèces que dans les deux régions précédentes, et si, parmi elles, quelques-unes se trouvent aussi dans la région tempérée, un grand nombre est propre aux mers équatoriales. | Voilà les faits généraux , ei l'on peut déjà en tirer cette con- séquence générale , que chaque ensemble d'espèces représente la moyenne température de chacune des régions. Mais il est certaines espèces plus localisées et d’autres plus généralement (e. P. pesnAYEs. — Température des périodes tertiaires. 291 répandues. Ainsi le Buccinum undatum, par exemple, se trouve depuis le cap Nord jusqu’au Sénégal, allant en se mo- difiant avec la température; aussi il est assez facile de distin- guer les variétés propres aux trois ou quatre termes principaux de température. Cette espèce n’est pas la seule ainsi répandue ; mais jusqu'à présent je n’en connais qu'un très petit nombre ayant; comme celle-ci, la propriété de vivre à des températures si diverses. D'autres espèces plus sensibles, à ce qu’il paraît, aux in- fluences des températures, sont beaucoup plus localisées, et ce sont celles-là qu’il est plus important de connaitre, Je vais en signaler quelques-unes : 1. Buccinum glaciale; 2. Cardium groendlandicum. Ces deux espèces ne dépassent pas le cercle polaire, et on les trouve en Norwège et au Groendland. | 3. Terebratula psittacea. Elle vit entre le 65 et le 95 degré. Pour moi, ces espèces et plusieurs autres représentent la température moyenne du nord de la Norwège. 1. Le Tellina baltica. à. Le Patella noachina. 3. Le Natica clausa. 4. Le Patella testudinalis, plusieurs espèces du genre Astarte et plusieurs autres espèces, me représentent la tempé- rature moyenne du nord de l'Angleterre, du midi de la Suède et du Danemark. Dans la Manche, sur les côtes de France et d'Angleterre, il existe aussi plusieurs espèces propres à notre température : 1. Psammobia vespertina. 2. Pecten irregularis, etc. Les côtes d'Espagne et de Portugal sont plus inconnues que celles de la Nouvelle-Hollande ou de l'Amérique méridionale. La Méditerranée renferme aussi un grand nombre d'espèces qui lui sont particulières; mais comme elles appartiennent à une mer intérieure, nous n’en parlerons pas actuellement, dans la 4 crainte de voir attribuer leur présence à ce cas particulier et exceptionnel. Les observations sont peu nombreuses sur les côtes d'Afrique depuis la Barbarie jusqu'au Sénégal ; mais pour cette région im- portante, nous avons l'excellent ouvrage d’Adanson, et les re- 19: 292 G. P. DESHAYES. — Température des périodes tertiaires. lations fréquentes du commerce avec le Sénégal et la Guinée ont depuis long-temps enrichi les collections des coquilles ma- rines de cette région. Parmi le grand nombre d'espèces connues dans la zone intertropicale, il y en a beaucoup qui lui sont particulières; la liste en est trop longue pour être rapportée ici. Ces espèces ,‘habituées à une haute température peu variable, ne se rencontrent vivantes sur aucun autre point de la surface du globe; elles expriment donc avec fidélité la température des mers dans lesquelles elles habitent. Ces faits demanderaient sans doute à être développés dans un travail spécial. Ils me font espérer que les zoologistes pour- ront par la suite répondre à une question comme celle-ci : Telle série d'espèces étant donnée, indiquer la température du lieu d'où elles proviennent. C’est ainsi que dans un avenir prochain, j'ose l’espérer, l'attention des zoologistes, dirigée vers un but nouveau, donnera à leur science les moyens de confirmer les expériences des physiciens et d’y suppléer quelquefois. Ces faits relatifs à la coïncidence de la température avec la présence de certaines espèces, mentionnés avec le plus de con- cision possible, devaient précéder ce que j'ai à dire sur la tem- pérature des époques géclogiques des terrains tertiaires. Je dois ajouter que, pour arriver sur cette question intéressante, il fal- lait comparer avec soin, avec une minutieuse patience, toutes les espèces vivantes connues avec toutes celles qui proviennent des divers terrains tertiaires de l'Europe. Voici les principaux résultats obtenus à l’aide de ce long travail : 1° Les terrains tertiaires de l'Europe ne contiennent aucune espèce identique des terrains secondaires sous-jacens ; 20 Les terrains tertiaires sont les seuls qui contiennent fos- siles des espèces encore vivantes; 3° Les espèces analogues sont d’autant plus nombreuses, que Je terrain est plus récent, et réciproquement. 4° Des proportions constantes (3 pour cent, 19 ponr cent , b2 pour cent) dans le nombre des espèces analogues, déter- minent l’age des terrains tertiaires; G. P. DESHAYES. — Temperalure des périodes tertiaires. 293 5° Les terrains tertiaires sont en superposition et non en pa- rallélisme comme on l'avait d’abord supposé. 6° Les terrains tertiaires, sous le rapport de leur zoologie, doivent être divisés en trois groupes ou étages. (1) Les derniers terrains tertiaires, les plus superficiels, ont été déposés lorsque la température de l'Europe était, à peu de chose près, semblable à celle que nous éprouvons; en voici les preu- ves : les terrains tertiaires de cet âge de la Norwège, de la Suède, du Danemark, de Saint-Hospice près Nice, d’une partie de la Sicile, contiennent à l’état fossile toutes les espèces identiques des mers correspondantes, et entre autres celles dont nous avons déja parlé, qui, plus localisées, représentent bien mieux pour nous la température. Ces fossiles offrent les mêmes séries de variétés que les espèces vivantes, ce qui annonce bien positive- ment la stabilité de la température ou de tres faibles modifica- tions depuis le moment de l’enfouissement des fossiles jusqu'à nos jours. Ces mêmes terrains du versant méditerranéen de la France, de l'Espagne et du Piémont, de l'Italie, de la Sicile , de la Morée et de la Barbarie (Alger), recelent une grande partie des es- pèces qui vivent dans la Méditerranée, mais en contiennent aussi dont les analogues ne subsistent plus ou sont distribués en petit nombre dans les régions chaudes de l'Océan atlantique et dans les mers de l'Inde. Pour se faire une juste idée de la période tertiaire sur le pourtour de la Méditerranée, il faut distinguer trois sortes d'espèces fossiles : 1° celles dont les analogues vivent encore dans la Méditerranée; 2° celles en petit nombre dont les analogues ne sont plus dans la Méditerranée, mais se retrouvent dans l'Océan Atlantique, la Mer-Rouge et la Mer des Indes 3° celles dont les analogues vivans n'existent plus. Ces observations m'ont fait penser que la Méditerranée avait éprouvé un faible abaissement de température depuis que la chaîne de l'Atlas d’un côté et celle de lApennin d'un autre, avaient pris leur relief actuel. Ces changemens daus l'élévation (x) Depuis le mois d'août 1851 que j'ai prouvé l'existence de ces groupes, en indiquant les lieux où où pouvait les observer, les géologues ont confirmé Jeur séparation. 294 G. P. DESHAYES. — J'emperature des périodes tertiaires. des terrains, et par suite dans la température, expliqueraient l'extinction des analogues vivans des espèces de la troisième sé- rie et la distribution particulière des espèces de la seconde série dans des mers plus chaudes que la Méditerranée. Ceci me fait re- garder comme très probable qu'avant les derniers mouvemens des bords de cette mer, elle. avait avec l'Océan Atlantique une large communication par le grand désert africain et avec l'O- céan indien une autre communication, soit par la Mer-Rouge, soit par les terres basses de l'Arabie qui séparent la Méditerra- née du golfe Persique. La seconde période tertiaire se compose d’un grand nombre de petits bassins répandus surtout vers le centre de l'Europe, La Superga près Turin, le bassin de la Gironde, les faluns de la Fouraine , le petit bassin d'Angers, le bassin de Vienne en Autriche, la Podolie, la Wolhynie et quelques autres lambeaux sur la frontière méridionale de la Russie d'Europe, dont quel- ques parcelles se montrent non loin de Moscou. Les terrains la- custres de Mayence et des bords du Rhin appartiennent proba- blement aussi à cette période. Pendant cette époque, la température a été bien différente de ce qu’elle est actuellement dans les lieux que nous venons de citer. En effet, les espèces propres au Sénégal et à la mer de Guinée, celles qui représentent le mieux la température de cette partie de la zone équatoriale, se retrouvent à l'état fossile dans les couches dépendantes de cette seconde période. Maintenant, si, tenant compte du nombre des espèces, de la grande quantité d'individus appartenant à chacune d'elles, de leur volume plus considérable, ce sera sur le bassin de la Gi- ronde que nous ferons passer la ligne de plus grande intensité de la chaleur, et nous dirons : Là a régné autrefois, pendant une longue suite de siècles, une température équatoriale. Il a fallu cette température pour que les espèces aujourd’hui fos- siles aient vécu jadis dans nos mers, car elles n’y vivent plus et ne pourraient y vivre actueliement ; eiles y vivaient, pourquoi ny vivraient-elles plus si la température était restée la même ? Il à faliu que cette température se continuät pendant une longue suite de siècles, pour que des générations entassées for- G.P. DESHAYES. — Température des périodes tertiaires. 295 massent de leurs débris un sol d’une vaste étendue et d’une as- sez grande épaisseur. Si, comme je le crois fermement, le bassin de la Gironde a été déposé sous une température équatoriale, il suffira de jeter un regard sur une carte pour se convaincre que l'influence de cette température s’est fait ressentir jusqu'en Pologne et au midi de la Russie d'Europe. Pour déterminer la température équatoriale de ma seconde période tertiaire, j'ai constaté l’analogie de près de deux cents espèces de la zone intertropicale avec des espèces fossiles ré- pandues surtout à Bordeaux et à Dax, et dans les autres bassins appartenant à cette seconde période. Un moyen aussi concluant manque malheureusement pour déterminer la température du premier étage des terrains ter- tiaires. Ce premier groupe, représenté particulièrement par le bassin de Paris, occupe aussi celui de Londres et celui de Va- lognes, presque toute la Belgique et la Hollande, plusieurs points des Alpes, Castel-Gomberco, le Val-de-Ronca, quelques petits bassins de la Hongrie et de la Moldavie, la partie infé- rieure du bassin de la Gironde (Blaye, etc.), enfin, mais avec quelques doutes, tous les terrains tertiaires inférieurs de l’A- mérique septentrionale. Sur plus de quatorze cents espèces reconnues dans les ter- rains parisiens , trente-huit seulement ont leurs analogues vi- vans. Il est vrai que la plupart de ces trente-huit espèces habi- tent dans toute la zone équatoriale; cependant parmi elles il -y en a quelques-unes qui se répandent non-seulement dans cette zone et remontent jusque dans nos mers tempérées, mais on en voit aussi quelques autres passer dans la mer du Nord. Il faut donc abandonner, pour estimer la température de la plus importante période tertiaire, le moyen que j'ai employé pour les deux précédentes. Je pourrai cependant suppléer par plusieurs moyens de moindre valeur à celui qui m'échappe ici. Dans les mers Glaciales , il n'existe qu’un très petit nombre d'espèces de Mollusques ; mais d’autres espèces s'ajoutent à celles- là à mesure que l'on s’avance vers les régions plus chaudes ; et lou voit ainsi s’accroître de huit ou dix qui subsistent vers le 206 G.P. DESNAYES. — Température des périodes tertiaires. 80° degré, jusqu’à près de neuf cents qui vivent dans la région tropicale du Sénégal et de la Guinée. Cet accroissement des es- pèces avec la température, indique assez toute l'influence qu’exerce sur la création des êtres vivans cet agent si puissant, la chaleur. Mais ces phénomènes ne se montrent pas seulement dans la partie du globe terrestre que j'ai choisie pour exemple, ils se reproduisent aussi de la mer de Béring aux iles de la Sonde ; de chaque côté de l'Amérique septentrionale, et, en sens in- verse, de chaque côté de l'Amérique méridionale. Un fait important vient donner un nouveau point d'appui à l'estimation de la température des deux dernières périodes ter- tiaires : c’est l'accord dans le nombre des espèces fossiles et des espèces vivantes. Ainsi, au nord, peu d’espèces vivantes, peu d'espèces fossiles; dans la région méditerranéenne, environ sept cents espèces fossiles, près de six cents vivantes. Il faut se rappeler que cette différence vient de ce que parmi les espèces fossiles, il y en a un certain nombre appartenant à des races per- dues. Enfin la température élevée de ma seconde période sera mise hors de contestation, lorsque, aux mille espèces fossiles de cette époque, seront opposées les neuf cents vivantes dans les mers intertropicales de l'Afrique. Puisque le nombre des espèces s'accroît avec la température, puisque sur un point détérminé de la région intertropicale on trouve neuf cents espèces, il me semhle que, par une induction naturelle,on peut attribuer à ma première période tertiaire une température au moins équatoriale, car on y reconnait, comme nous l'avons déjà dit, quatorze cents espèces sur lesquelles douze cents environ sont accumulées dans le bassin de Paris en particulier, c’est-à-dire sur une étendue de quarante lieues de diamètre dans un sens et de cinquante-cinq dans l’autre. Il n'existe plus dans aucune de nos mers un seul point rassem- blant autant d'espèces dans un espace aussi étroit. Si nous examinons actuellement ces espèces, nous les trouve- rons particulièrement grandes et nombreuses dans des familles et des genres dont les espèces se multiplient dans les régions les plus chaudes de laterre. Cent quarante espèces de Cérites, un grand nombre de Pleurotomes , de Fuseaux, de Mitres, de G. P. DESHAYES. — Température des périodes tertiaires. 297 Volutes, de Rochers, de Vénus, de Bucardes , d'Arches, etc., etc., fossiles aux environs de Paris; l'absence dans ce bassin des formes propres aux mers septentrionales, tous ces faits re- latifs au nombre et à la nature des espèces , se réunissent pour attester fortement que la grande période parisienne s’est écoulée sous une température équatoriale probablement plus élevée que celle de l'équateur actuel. En empruntant à d'autres parties de la paléontologie pari- sienne des documens comparables à ceux que fournit la con- chyliologie, je trouverai dans le grand nombre des Pachy- dermes, leur taille quelquefois gigantesque, une preuve de plus de la haute température du bassin de Paris. Où trouve-t-on au- jourd’hui des animaux analogues, si ce n’est dans les parties équatoriales de l’ancien et du nouveau continent, dans les îles de la Sonde et dans les îles Asiatiques. En ajoutant à ces con- sidérations celles que fournissent un petit nombre de végétaux fossiles, et particulièrement des Palmiers, on aura acquis le moyen de former un assez grand nombre d’inductions ten- dant toutes à prouver la haute température de la première pé- riode des terrains tertiaires. Je donnerais peut-être un degré de certitude de plus à à mes inductions , si je mettais en Héslud l'état ancien du bassin de Paris avec son état actuel; jy trouverais en effet, d'un côté, un grand nombre d'animaux dont les races sont anéanties, et d’un autre, le sol occupé par des races nou- velles, et les mers les plus voisines peuplées d'espèces dont les quatre-vingt-dix-neuf centièmes n’existaient pas dans les temps anciens ; je trouverais aussi dans cette comparaison les preuves des changemens profonds qui se sont opérés dans les condi- tions de l'existence des êtres vivans ; mais je n’insisterai pas sur ce sujet intéressant , il demanderait plus de développement que je ne puis lui en donner ici. De ce que je viens d'exposer, il me semble que l'on peut en tirer les conclusions suivantes : 1° £a premiére période tertiaire s’est écoulée sous une tem- pérature équatoriale et, selon toutes les probabilités, de plu- sieurs degrés plus chaude que celle actuelle de l'équateur ; 208 G. P, DESHAYES. — Température des périodes tertiaires. 2° Pendant la seconde période dont les couches occupent le centre de l'Europe, la température a été semblable à celle du Sénégal et de la Guinée; 3° La température de la troisième période, d’abord un peu plus élevée que la nôtre dans le bassin méditerranéen , est de- venue semblable à celle que nous éprouvons : dans le nord, les espèces du nord sont fossiles; dans le midi, celles du midi. Ainsi, depuis le commencement des terrains tertiaires, la température a été constamment en sabaissant. Passant dans nos climats de l’équatoriale à celle que nous avons maintenant, il est facile de mesurer la différence. Sans doute les physiciens, s'appuyant sur les belles théories de la chaleur, ont pu supposer à priori les changemens de tem- pérature dont je viens de parler ; il est curieux néanmoins de voir leurs prévisions confirmées par une science long-temps négligée et que personne n’avait encore pensé à diriger vers ce but tout nouveau. Cette question des températures pourrait être reprise pour les terrains secondaires ; mais les observations et les matériaux manquent : elle n’est pas la seule du domaine de la conchylio- logie ; plusieurs ont non moins d'importance; la biologie, par exemple, destinée à faire connaître les lois du développee nt de la vie à la surface de la terre dans l’espace et dans le temps, puisera dans la conchyliologie de nombreux matériaux. Mais la biologie est une science encore à faire : Lamarck l'a entrevue, qui en posera les bases ? HODGSON, = Chèvres et Moutons sauvages de l'Hymalaya. 299 Nore sur les Chèvres et les Moutons sauvages de l'Hymalaya, etc., , Par M. Hopesox, résidant à Nipal. (1) «Un des points les plus délicats de la classification des Mam- mifères, est l’établissement des caractères propres à séparer convenablement les genres Antilope, Chèvre et Mouton. La plupart des zoologistes de nos jours paraissent penser que la distinction du premier de ces groupes à l’aide de la structure solide de la base des cornes, signalée par M. Geoffroy Saint- Hilaire , est exacte ; mais quoique le nombre d’Antilopes que j'ai eu l’occasion d'examiner soit fort petit, j'ai néanmoins constaté que dans quatre espèces au moins (savoir : le Chirée, le Thar, le Goral et le Duvaucelliü) il existe dans l'axe osseux des cornes des sinus en communication avec les sinus frontaux , et si l’on m'objecte que trois de ces espèces semblent établir le passage vers les Chèvres, on ne peut arguer de la même manière rela- tivement à la quatrième espèce, qui appartient au groupe des Gazelles de M. Smith. « Il est par conséquent certain que l'existence de cornes so- lides n’est pas un’ caractère invariable du genre Antilope, ni même un caractère assez généralement constant pour pouvoir servir de base à une distinction générique. « Il paraïîtrait que chez les Antilopes, le noyau osseux des cornes présente une structure compacte et est creusé à sa base de cellules peu étendues et presque entièrement dépourvues de cloisons cellulaires ; tandis que dans le genre Chèvre et surtout dans le genre Mouton, les cornes sont poreuses, non com- pactes et creusés à leur base de grands sinus remplis de cel- lules. » Dans la suite de cette note, l’auteur ne s'occupe pas davan- tage des Antilopes, mais donne une description du Capra jha- (x) Extrait du Journal of the Asiatic society of Bengal, sept, 1835, imprimé à Calcutta. 300 ruscoNI. — Développement des œufs des Poissons. ral , qui habite à l'état sauvage dans le Nipal, et se rapproche beaucoup, par la disposition de ses cornes, de l’Egagre et du C. jemlaica. U s'occupe ensuite d’un mouton sauvage qui habite également le Nipal, et qu'il nomme l'Ovis Nahoor, mais qui n’est peut-être qu’une variété de l'O. musimon. Enfin il donne un tableau comparatif des caractères des Genres Chèvre et Mouton. LeTrre sur les changemens que les œufs des poissons éprou- vent avant qu'ils aient pris la forme d’en:bryon, adressée à M. Enxesr H. Weser, professeur d’anatomie ; Par M. Ruscowi. (1) E Dans ma premiere lettre je vous ai ébauché l’histoire du déve- loppement de la Perche ( Perca fluviatilis) ; je vous ai dit que dans les œufs de ce poisson je n’ai pas vu les métamorphoses que l’on observe dans ceux des Batraciens, et qui précèdent tou- jours la formation de l'embryon ; toutefois, à vous dire vrai, j'ai toujours eu quelque soupcon de n’avoir pas observé avec toutes les précautions qui sont nécessaires pour éviter l'erreur; et après vous avoir écrit je me suis fait le reproche de n'avoir fait usage, dans mes tentatives, d'aucun procédé chimique pour obli- ger la nature à se dévoiler; et quoique M. Baer, dans son mémoire sur le développement des poissons (2) publié tout récemment, ne dise rien à l’égard des métamorphoses de leurs œufs, et que son silence nous porte à présumer qu’elle n’ont pas lieu, J'ai néan- (1) Ce travail, dont l’auteur a eu la complaisance de nous adresser la traduction a été pu- blié avec une planche dans la Bibliotheca Italiana v. 79 et dans un des derniers cahiers des Ar- chives de Physiologie de Müller. Nous regrettons que les limites de notre atlas nous aient empèché de reproduire ici ces figures, mais le texte est assez clair pour ne pas les rendre indispensables, R. (2) Untersuchungen über die Entwickelungsgeschichte der Fische, etc., von D, K.E, von Baer, Leipzig, 1835. k D 7] RuSCONr. — Déveluppement des œufs des Poissons. 301 moins toujours été dansle doute, et, desireux d’éclaircir cepoint, je me suis décidé à faire de nouvelles observations; et à tenter la fécondation artificielle ; dans cette intention je me suis rendu à Côme au commencement de juillet, et J'ai pris un logement au bord du lac. Mon premier soin fut de demander aux pêcheurs quels sont les poissons qui déposent leur frai dans le mois de juillet. La Tanche et l'Ablette, me dirent-ils. Fort content de leur réponse, etlesayant intéressés à mes recherches par quelques générosités je les priai, quand il leur arriverait de prendre dans leurs filets des Tanches , de choisir celles qui laisseraient échapper très facilement les œufs ou la laite, de les conserver en état de vie, et de men donner avis le plus promptement possible. Les pé- cheurs, devenus obligeans, secondèrent parfaitement mes vues. Le premier avis me fut donné le 10 juillet, je fis la féconda- tion artificielle dans la barque des pêcheurs de la manière sui- vante : un pécheurfitsortir du podex d’une Tanche femelle, au moyen d’un légère pression faite à l'abdomen et près de l'anus, une certaine quantité d'œufs que je recueillis dans une écuelle dans laquelle j'avais préalablement versé deux verres d’eau qui avait été puisée dans le lac; ensuite un autre pêcheur, compri- mant le ventre à une tanche mâle, fit tomber sur ces œufs deux ou trois gouttes d'humeur séminale; cela fait, je remplis l'é- cuelle d’eau : les œufs à peine tombés dans l’écuelle allèrent de suite au fond de l’eau; ils étaient très transparens et présentaient une masse d’une couleur verdâtre tirant au jaune semblable à celle de l'huile d'olive; l'humeur séminale pareille à du lait, quant à la couleur, mais d’une densité beaucoup plus grande, produisit d'abord un petit nuage dans l'eau et alla au fond de l'écuelle, et ici notez bien que pour rendre les œufs plus visi- bles qu'ils étaient, je me suis servi d’une écuelle de faïence dont le vernis était d’un brun foncé. De retour chez moi, j'ai commencé à examiner les œufs avec attention; ils étaient parfaitement ronds, adhéraient au fond de l'écuelle’et leurs enveloppes se voyaient distinctement, à cause de l'eau qui s'était déjà insinuée entre les œufs et la membrane dont chacun d'eux est enveloppé; mais ce qui me frappa d’abord 302 nusconI. — Développement des œufs des Poissons. ce fut de trouver qu'ils différaient notablement de ceux de la Perche, en ce qu'ils n'avaient pas dans leur partie moyenne et superficielle la vésicule ombilicale, qui, ainsi que je vous l'ai déjà écrit, décroit peu-à-peu à mesure que le petit poisson se déve- loppe. et finit pars’insinuer entièrement dansle canal alimentaire. Quatre heures après la fécondation, j'ai commencé à voir çà et là des œufs qui avaient perdu d’un côté leur transparence et étaient d'un blanc mat; le nombre de ces œufs s’accrut gra- duellement et au bout de vingt-quatre heures, tous étaient de- venus opaques, de sorte que je dus en conclure qu'ils n'étaient pas venus à bien; j'ai donc renouvelé la fécondation artificielle et dans le doute qu’ils ne fussent pas venus à bien par la raison que, dans l’écuelle, ils étaient trop près les uns des autres, et presque aussi serrés que les petites pierres d'une mosaïque, je recueillis les œufs dans la seconde expérience, non pas dans une écuelle, mais dans un plat assez large que je convris préalable- ment avec du papier bleu, et j’eus en outre la précaution, en recueillant les œufs, de les disperser autant que possible sur la surface du plat : cinq heures après la fécondation, je vis de nou- veau cà et là des œufs qui d’un côté avaient perdu leur transpa- rence et je ne tardai pas à m’apercevoir que leur nombre aug- mentait graduellement, de manière que je commencçai à déses- pérer du succès; le lendemain, c'est-à-dire vingt-quatre heures après la fécondation, je trouvai que presque tous les œufs étaient blanc mat d'un côté, mais dans ceux qui avaient conservé toute leur transparence, je vis quelque chose qui me parut nouveau, ét dont je fus frappé, de sorte qu'ayant repris courage, je m'em- pressai de découper les petits morceaux de papier sur lequel adhéraientces derniers, et après les avoir placés dans des verres à montre remplis d'eau, je les détachai du papier avec la pointe d’une petite spatule et les distribuai de facon que dans chaque verre il y avait huit ou dix œufs : six ou sept heures après cette opération, je commençai à voir à l'aide du microscope le petit embryon qui faisait déjà quelque léger mouvement, et vingt- quatre heures après, savoir cinquante heures après la féconda- tion, j'eus le plaisir de voir les petits poissons se dégager de leur enveloppe, ruscoNI. — Développement des œufs des Poissons. 303 Très content de l'issue de cette expérience, je fis de nouveau la fécondation artificielle, dans le but simplement de m’assurer si les poissons éprouvent les métamorphoses que j'ai observées dans les Batraciens anoures et urodeles, et j'ai éclairci ce sujet de la manière qui suit : une demi-heure après avoir fait la fécondation artificielle, j'ai enlevé de la feuille de papier qui couvrait le plat, un petit morceau de papier auquel adhéraient huit ou dix œufs très transparens; ensuite, avec une petite pince, je l'ai placé dans un verre à montre rempli d’eau, et, sans me donner la peine de détacher les œufs, j'ai fait tomber dans l’eau du verre quatre ou cinq gouttes d’une mixture acidule composée d’une partie d'acide nitrique et de huit parties d'eau; ce petit nombre de gouttes suffirent pour détruire dans les œufs la vie organique qui était à peine commencée, de façon qu’en peu de minutes ils perdirent tout- à-fait leur transparence, non pas dans toute leur périphérie, mais dans la partie seulement qui correspond à l'hémisphère supérieure de l'œuf de la grenouille, qui était précisément le segment que j'avais besoin d'observer. Tous les quarts d'heure et pendant dix heures de suite j'ai renouvelé cette opération, et j'ai eu toujours soin de ne soumettre à l’action de l'acide ni- trique que les œufs qui étaient très transparens; par ce procédé chimique, j'ai vu les métamorphoses qu’ils éprouvent avant de se transformer en embryon, et j'ai pu les suivre depuis la fé- condation jusqu’à leur parfait développement, comme vous verrez tout-à-l'heure, d’après les détails dans lesquels je vais entrer. L'œufdela Tanche (Cyprinus tinca) est un globule parfaitement rond, d’un millimètre de diamètre, et transparent presque comme le cristal ; la membrane vitelline est assez forte, et la ma- tière qu’elle contient esttrèsfluide.L’œufou le vitellus,oulegerme, car pour moi, lorsque je parle des Batraciens et des poissons, ces trois mots sont synonymes, est renfermé dans une enveloppe particulière très mince et transparente, qui est en contact, tant que l’œuf se trouve dans l’oviductus, avec la membrane vitelline; mais dès que l'œuf à été déposé, elle s'en écarte peu-à-peu et jusqu’à un certain point à cause de limbibition de l’eau, c’est- 304 rusconi.— Développement des œufs des Poissons. à-dire à cause de l’eau qui s’insinue entre l’œuf et son enve- loppe ; cette dernière est enduite d’une matière visqueuse, laquelle, dans l'œuf de la Tanche, n’est pas visible, mais qui n’en existe pas moins, car les œufs adhèrent aux corps-sur les- quels ils sont déposés; la viscosité des enveloppes se, dissout par la suite dans l’eau, et par cette raison elle perd sa propriété agglutinante. L'œuf, observé au microscope, présente une quan- tité de petits grains de différentes grandeurs, entremélés avec de petits globules semblables à des gouttelettes d'huile; c’est à ces dernières qu'est due la couleur jaunâtre tirant au vert du vitellus dont je vous ai parlé plus haut. Peu après la fécondation, l'œuf perd sa sphéricité et prend la forme d’une poire : alors il apparait, sur une partie de sa périphérie, une sorte d'en- flure, qui rappelle à l'esprit celle qui est produite par les ven- touses; en outre, les petits grains de la matière vitelline, qui étaient épars, se trouvent réunis à la base de la partie enflée; une demi-heure après cette première métamorphose, 1l se ma- nifeste sur l’enflure, ou pour mieux dire sur la partie saillante du vitellus, deux sillons qui se coupent à angle droit. Un quart d'heure après, deux nouveaux sillons viennent se placer à côté des premiers, de facon que la partie saillante du vitellus, qut était divisée d’abord en quatre lobes, se trouve maintenant partagée en huit. Au bout d'un quart d'heure, chacun de ces huit lobes est divisé lui-même en quatre par six nouveaux sillons qui se coupent à angle droit, de manière que le nombre des lobes est quadruplé; une demi-heure apres apparaissent plusieurs autres sillons qui croisent les premiers, de sorte que les lobes sont devenus plus petits qu’ils n'étaient, et se sont tellement multipliés qu'il n’est guère possible de les suivre pour les compter : bientôt de nouveaux sillons continuent à apparaître, les lobes se rapetissent de plus en plus; enfin ils disparaissent entièrement, et la surface de la partie saillante du vitellus redevient lisse comme elle était avant la manifes- tation des premiers sillons C’est à cette époque que le vitellus commence à se transfor- mer en embryon; la portion de la membrane vitelline qui cou- yrait la partie proéminente du vitellus se transforme, des qu'elle ruscoNI. — Developpement des œufs des Poissons. 305 est devenue lisse, en la peau du poisson; cette transformation s'étend graduellement sur toute la surface du globule, et ne laisse à découvert qu’une très petite fente presque impercep- tible, qui est l'anus du futur animal, comme cela a lieu chez les Batraciens; mais avant que la peau se soit complètement orga- nisée, c'est-à-dire quand sa formation s'est étendue jusqu'aux trois quarts du globule, il se manifeste, sur la nouvelle peau, une tache triangulaire blanchätre semi-transparente et sans contours bien arrêtés, laquelle, du bord de la peau où elle est assez large, s'étend en avant et s'épanouit vers l’extrémité op- posée à celle où la membrane vitelline n’a pas encore éprouvé sa transformation ; cette tache semi-transparente est le premier rudiment de l'épine. L'organisation de la peau fait graduelle- ment des progrès, et pendant qu’elle s'étend sur toute la sur- face du globule, la tache semi-transparente se rétrécit peu-à-peu à son origine, gagne progressivement en longueur, ses con- tours se prononcent, et quand toute la membrane vitelline s'est transformée en peau et que l'anus est formé, la tache semi-transparente commence à devenir saillante sur la surface du globule; ‘embryon ensuite se dessine, s’allonge successive ment, se dilate à une de ses extrémités, et présente ainsi les pre- miers rudimens de la tête. Je crois inutile de continuer de vous rendre compte de ces détails; je vous dirai seulement que qua- rante heures environ après la fécondation, les petits embryons de la Tanche commencent à faire quelque léger mouvement, et après douze heures en sus, ils se dégagent ordinairement de leur enveloppe ; le sang, à cette époque, a déjà acquis sa cou- leur naturelle. A peine sorties de leur enveloppe, les petites Tanches pa raissent comme engourdies ; elles se tiennent toujours couchées sur un côté, et passent des heures entières dans cette position; si vous les touchez légèrement, elles sé mettent de suite à na- ger, Mais pour quelques instans seulement, et leur manière de nager ressemble en tout point à celle des Tétards observés à l'époque à laquelle ils sortent de leurs enveloppes ; ce n’est qu’a- pres l'apparition des premiers rudimens de la vessie natatoire et des nageoires pectorales qu’elles se placent sur leur ventre, V, 2001, = Mai, 20 306 rusconr. —Développement des œufs des Poissons. et nagent ensuite parfaitement dès que les nageoires pectorales, qui sont les premières à apparaître, se sont suffisamment dé- veloppées, et que la vessie natatoire, qu'on voit distinctement à travers la colonne vertébrale et les muscles de l’épine, se pré- sente sous la forme d’une petite bulle d’air ovoide. Vers le sep- tième jour, elles se vident, par la voie du rectum, d’une matière cendrée sous forme de petits flocons : tous les viscères abdo- minaux , à cette époque, sont assez développés et en état d’exer- cer leur fonction; aussi voit-on les petites Tanches, vers le hui- tième jour, aller au-devant de l'aliment. Elles ont un naturel très vorace, et refusent toute sorte de pâture qui n’estpas animale; les Ablettes (Cyprinus alburnus) , au contraire, ne se nourrissent, du moins quand elles sont très jeunes, que de substances végétales. J'ai alimenté les premières avec des puces d’eau (entomostracés) qu’elles saisissaient et avalaient avec beaucoup de difficulté, quoiqu’elles ne poursuivissent que celles qui étaient nouvelle- ment nées dans la cuvette où je les ai élevés, et j'ai nourri les secondes avec une matière végétale d’un très beau vert, que l’eau du lac puisée dans les heures les plus chaudes déposait pendant la nuit: ici je ne dois pas omettre de vous dire que la tempéra- ture de ma. chambre pendant le cours de mes observations a toujours varié entre + 18 et + 20R,et que lesAbleites, quoique plus petites que les Tanches, car les plus grosses ne dépassent pas la longueur de six pouces, déposent cependant des œufs qui sont plus gros que ceux des Tanches, de manière que pour voir le développement des cyprins, les premières sont préféra- bles aux secondes, et cela d'autant plus qu’elles abondent dans toutes les rivières et qu'on peut les avoir très facilement; je dois vous dire en outre qu'après la disparition ide tous les sillons, j'ai abandonné presque entièrement l'emploi de la mixture acidulé, dont je vous ai parlé plus haut; au lieu de faire usage de lacide nitrique, j'ai placé le verre à montre où étaient les œufs qui faisaient le sujet de mes observations, tantôt sur un drap noir, mais le plus souvent sur une lame d'argent bien polie, et je me suis servi d'un microscope à une seule lentille dont le fuyer était de quatorze millimètres; il m'eût été impossible de me servir d’une lentille plus forte pottr ruscONI. — Développement des œufs des Poissons. 307 voir des objets qui étaient dans l’eau, et avoir assez d'espace au- dessous du microscope pour manier un petit pinceau et tourner l'œuf en tous sens. C’est par ce moyen que j'ai pu voir la for- mation de l’épine et j'ai pu me convaincre que chez les poissons, les cyprins, du moins, l'épine n’est pas originairement divisée en deux moitiés séparées l'une de l'autre, comme cela a lieu chez les Batraciens anoures et urodèles, et chez plusieurs autres ani- maux : chez les poissons l’épine se forme d’une seule pièce. Cette observation, comme vous voyez, n’est rien moins que fa- vorable à la loi de M. Serres, et nous prouve que très souvent nous généralisons avec trop de précipitation. Mais reprenons le fil de mes remarques. Je pense qu’à présent vous serez pleinement convaincu, d’a- près ce que je vous ai exposé que, pour donner une histoire complète du développement des poissons il est de toute néces- sité de faire la fécondation artificielle et d'élever les poissons pendant un certain temps. M. Baer nous dit que, bien rarement ou presque jamais, il n’a réassi à faire développer dans sa cham- bre des œufs qui avaient été recueillis peu de temps après avoir été fécondés (1).Cela me porte à soupçonner que la peine qu'il s’est donnée de renouveler l'eau très souverit a été la cause de ses insuccés; pour vous prouver que mon soupçon n'est pas dénué de tout fondement, je vous communiquerai une obser- vation que j'ai faite et que je dois entièrement au hasard : Étant à Vesio, je fus me promener de fort bon matin et par un beau jour de juillet sur les rives du petit lac de la Villa-Tra= versi (2), et pendant que j'admirais ici des groupes d'arbres dont les branches se penchent sur les restes d’un château qui nous rappellent la sombre époque du féodalisme, là une forêt de pins dont l'obscurité contraste singuliérement avec les collines riantes couvertes de vignes et de fleurs, situées du côté oppo- { (1) Ueberhaupt gelang es mir schwer oder gar nicht den Laich in meiner stube zuv Ent« wickelung zubvingen, wenn er erst Kurz vorher befruchtet war, so sebr ich aucti Pemicht war ibm frisches Tlurwasser zu geben. (1) Maison de plaisance à quatre lieues de Milan, dont le jardin, qu'on dit avoir été fait et embelli par la nature, offre de tous côtés au peintre paysagiste des points de vue vraiment magnifiques. 20, 308 RusconI.— Développement des œufs des Poissons. sé; en un mot, pendant que j'étais ravi en extase par la beauté du site, un bruit soudain vint frapper mon oreille et me tirer de ma rêverie ; je crus d'abord qu’on frappait l’eau avec des bà- tons ou avec la partie plate d’un aviron : curieux de savoir ce que c'était, je promenai aussitôt mes yeux sur les bords du lac, et je ne tardai pas à aécouvrir le lieu d’où le bruit venait et la cause qui le produisait : bref, c’étaient des poissons qui dépo- saient leur frai. Desirant voir de près cette scène, je me rappro- chaï insensiblement du lieu où elle se passait, et, profitant des arbrisseaux et des rosiers dont les rives du lac sont ornées, je me cachai de manière que sans être vu j'ai pu observer ces pois- sons à mon aise et de très près. Ils frayaient à l'embouchure d'un ruisseau qui apporte au lac le tribu d’une eau fraiche et limpide, mais si peu abondante que les petits cailloux du lit qu'elle parcourt se trouvent presque à sec. 9» Vous savez sans doute que plusieurs espèces de poissons ont l'habitude de frayer à l'embouchure des rivières : les saumons, par exemple, sont de ce nombre ; mais ceux dont je vous parle étaient pas de cette famille, c'étaient des gujons communs (cyprinus gobio). Voici de quelle manière ils déposaient leur frai : ils s’approchaient de l'embouchure, puis nageant tout-à- coup avec vitesse et donnant à leur corps, par ce moyen, une forte impulsion, ils sortaient du lac et remontaient le ruisseau jusqu’à la distance de deux pieds et demi à-peu-près, non pas en sautant, mais en glissant en quelque sorte sur Île gravier; après ce premier élan, ils s'arrêtaient et remuaient légèrement leur tronc et leur queue; en un mot, ils frottaient leur abdo- men sur le gravier, car ils le posaient entièrement sur le lit du ruisseau, et, à l'exception de leur ventre et de la partie infé- rieure de leur tête, tout le reste de leur corps était à sec; ils res- taient dans cette position pendant sept ou huit secondes; puis, frappant de’ leur queue avec force le lit du ruisseau et faisant jaillir l’eau de tous côtés, ils se tournaient et regagnaient le lac pour recommencer les mêmes ébats. Un naturaliste a avancé que les poissons, en déposant leur frai, se tournent sur un côté de manitre que le ventre du mâle se trouve appliqué ou du moins très près et vis-à-vis de celui de RUSCONr. =" Développement des œufs des Poissons. 30og la femelle. Je ne conteste pas le fait; je vous déclare simplement que les poissons dont je vous parle n'ont jamais fait un pareil mouvement : les femelles et les mâles ne faisaient que se lancer sur le lit du ruisseau de la manière que je viens de vous dire; les premières répandaient les œufs , les secondes la laite. Ce qui m'a frappé, ce fut de voir que parmi les poissons qui frayaient, et dont les plus gros ne dépassaient pas la longueur d’un pied, il y en avait de fort petits; j'ignore si ces derniers déposaient des œufs et de la laite, mais certes ils se lancaïent sur le lit du ruisseau tout comme les autres. J'ai joui pendant un quart d'heure de cette scène, qui pour moi fut très amusante, quand tout-à-coup un gros canard mus- qué (anas moschata), sortant lestement du lac, saisit avec son bec un petit poisson qui sautait sur le lit du ruisseau pour re- gagner le lac, et s’en alla avec sa proie après avoir mis en fuite tous les autres. N'ayant donc plus de poissons à observer, je portai mon attention sur les œufs qu'ils avaient déposé : ils n’é- taient ni amoncelés comme ceux des grenouilles, ni en cordon où en chapelet comme ceux des crapauds, ni en ruban ou en dentelle très large comme ceux de la [perche de rivière, mais dispersés de manière qu’on eût dit que le lit du ruisseau était ensemencé d'œufs. Après avoir fait cette observation, j'ai été me pourvoir d’une écuelle fort grande, puis étant retourné à l'embouchure du ruis- seau, j'ai recueilli trois ou quatre cailloux auxquels adhéraient des œufs , une douzaine à-peu-près; j'ai placé les cailloux dans l’é- cuelle avec de l'eau puisée dans le lac, et de retour à la maison, j'aimis l’écuelle dans le coin d’une chambre etjen’y ai plusfaitat- tention ; huit ou dix jours après, ayant visité l’écuelle, j'y trou- vai quatre poissons fort bien développés et qui nageaient à mer- veille; ils étaient très petits, et n'étaient perceptibles qu’à cause de leurs yeux, qui, vus pardessus, sé présentaient comme deux points noirs assez larges ; tout le reste de leur corps était si trans- parent, qu'il eùt été difficile de les voir si je n’eusse pas eu la précaution de placer les cailloux dans une écuelle vernissée de brun : vous voyez donc que même sous ce rapport, j'ai eu plus de bonheur que M. Baer, car j'ai vu non-seulement les méta- 3ro rusconr. — Développement des œufs des Poissons. morphoses que subissent les œufs avant de prendre la forme d’embryon, mais j'ai pu sans la moindre difficulté et sans me donner la moindre peine, faire développer des œufs recueillis peu après avoir été fécondés. M. Baer nous dit { page 2) qu'il a été obligé par la suite de continuer ses observations sur le lieu même où les poissons avaient déposé leur frai, et en disant cela il veut donner à ceux qui voudront s'occuper de ce sujet un avis dont ils pourront faire leur profit; mais je pense que les naturalistes, doréna- vant, prendront le parti de faire la fécondation artificielle, qui est indispensable pour ceux du moins qui veulent voir les mé- tamorphoses des ovules, et en même temps constater un fait que j'ai annoncé autrefois et que je me plais à répéter ici, savoir, que le mode dont les Batraciens et les Poissons se développent est différent de celui des Oiseaux. Je sais que bien des anatomistes regardent le vitellus de l'œuf des oi- seaux , des amphibies et des poissons, comme l’analogue de la vessie ombilicale des mammifères. Certes, je serais bien de leur avis, s'ils se limitaient à parler simplement des Oiseaux, des Ophidiens , des Chéloniens et des Sauriens ; mais je ne puis nul- lement partager leur opinion quand ils soutiennent que cette analogie se trouve vraie même à l'égard des Batraciens et des Poissons, car les observations que j'ai faites m'ont prouvé le contraire ; chez les Oiseaux, par exemple, la membrane blasto- dermique qui renferme la matière du vitellus est un appendice des intestins, une poche intestinale qui rentre dans la cavité du bas-ventre , ainsi que cela a été fort bien vu et parfaitement démontré par M. Dutrochet et par d’autres; au contraire, chez les Batraciens et les Poissons (ceux du moins dont j'ai suivi le développement), la membrane propre du vitellus n’est pasune ‘poche intestinale, mais la peau du fatur animal ; elle est la pre- mière à s'organiser, et dès que sa transformation en peau s’est accomplie, vous voyez l'ovaire s’allonger dans un sens, s’aplatir dans un autre , en un mot vous reconnaissez que le globule se transforme et prend peu-à-peu la forme embryonnaire : ceci est un fait de la plus grande évidence, et notez bien que la diffé- RUSCONI. — Développement des œufs des Poissons. 311 rence que je viens de signaler en amène d’autres qui sont plus ou moins intéressantes. Les principes généraux, je le sais bien, sont fort commodes; mais la nature se joue assez souvent de nos lois générales : elle varie ses plans et arrive à son but par des voies diverses : voyez par exemple l’ovule de la perche de rivière, vous y trouverez la vésicule ombilicale(r) qui est déjà renfermée dans la mem- brane vitelline, la peau du futur animal; elle se rapetisse peu- à-peu à mesure que l’ovule se transforme en embryon, et au Vingt-neuvième jour aprés la fécondation, elle 4 passé en. tièrement dans le canal alimentaire dont elle est un appendice : voilà donc une différence, car le moile dont la Perche se déve loppe se rapproche à quelques égarüs de celui des Oiseaux et de celui des Batraciens. (2) Vous me demanderez peut-être s’il y a quelque différence à ’égard de la vésicule de Purkinje entre les œufs des Batraciens et ceux des Poissons; à cette question, je réponds que je n’ai jamais eu l’occasion de chercher cette vésicule dans les œufs de ces derniers ; je crois cependant qu’elle existe dans les œufs des Poissons tout comme dans ceux des Oiseaux et des Amphibies: dans les Batraciens, elle est située à la surface de l’ovule, immé- diatement au-dessous de la membrane vitelline ; elle a la forme d’une lentille très bombée, décroït peu-à-peu à mesure que l'o- vule s'approche de l'époque à laquelle il doit passer dans l’ovi- ducte, ét elle n'existe plus dès que l'œuf s’est insinué dans ce { 1 (x) Je désigne cette vésicule qu’on voit au milieu et immédiatement au-dessous de la mem- brane sphéroïde qui contient la matière de l'œuf, par le nom de vésicule ombilicale, sans pré- tendre toutefois que cette dénomination soit juste, (2) Ayant suivi de nouveau le développement de la Perche de rivière, j'ai vu que les œufs de ce poisson éprouvent , à quelques petites différences près , les métamorphoses qu’on observe dans les œufs des Batraciens ; le segment de l'œuf sur lequel les métamorphoses ont lieu devient peu-à-peu d'un blanc mat, tandis que dans les œufs des Cyprins, ce même segment, qui cor- respond à l'hémisphère brun de l'œuf de la grenouille, est toujours, pendant les métamor- phoses, très transparent, de manière que, pour voir les sillons et les lobes sur les œufs de la Perche, il n’est pas nécessaire avant tout de les rendre opaques au moyen de la mixture acidulée dont je vous ai parlé plus haut : les métamorphoses des œufs de la Perche se succèdent rapides ment; c’est sans doute par ce motif qu'elles me sont échappées la première fois que je me suis uccupé de ce sujet. T 31% DUYERNOY. — Sur de Foie. conduit . la matière dont elle est remplie n'est pas aqueuse, puisque sous l’action de l'acide nitrique elle se condense ni plus ni moins que la matière du vitellus. Je m'occupe à présent du développement successif de l’encé- phale des Poissons, et je reprendrai cesujet quand j'aurai donné à mes observations un peu plus d’étendue. A vous dire la vérité, j'ai quelque doute à l'égard des nouvelles déterminations que M.Serres a données aux MR dis parties dont l'encéphale des Poissons se compose, et par cette raison je voudrais bien que ce sujet fixàt votre attention : vos observations, faites avec le talent qu’on vous connaît, seraient fort intéressantes ; elles ap- porteraient de nouvelles lamieres, et dissiperaient nos incerti- tudes sur différens points qui selon moi sont encore un sujet en question. Nore additionnelle au mémoire de M. Duverwoy, sur quelques particularités du système sanguin abdominal et du canal ali- mentaire de plusieurs poissons cartilagineux ( Annales des Sc. nat, t. II, p. 274.) “ C'est dans les Essais de physique de Pinault, t. 1, p. 218, et pl xv (Paris, 1680), in-12, que M. le professeur Rapp avait vu la première description de la singulière valvule intestinale décrite dans ce mémoire. Ce même professeur m’écrit (le 2 dé- cembre 1835), qu'il avait observé cette même valvule à CETTE, dans le canal intestinal du Sgualus glaucus. Il est également nécessaire d’ajouter ici que, dans l'explication de la planche 1v du volume précédent, la figure 3 a été mal éti- quetée; elle appartient à la chèvre et non au chien; il y a aussi, dans le texte de ce mémoire, plusieurs fautes d'impression (sur- tout dans la note de la page 262), mais le lecteur pourra faci- lement les reconnaître, sans que nous les indiquions ici. A Académie des Sciences. 31à AwaLvse des travaux anatomiques , physiologiques et zoolo- giques présentés à l’Académie des Sciences pendant le mois de mai 1856. Séance du 2 mai 1836. Extrait d’une lettre de M. Marion ne Procé à M. DE BLAINVILLE, sur un jeune Orang-outang apporté vivant de Sumatra à Nantes, et faisant au- jourd’hui partie de la ménagerie du Muséum d'histoire naturelle de Pa- ris. (Communiqué par M. de Brarnvicce.) « Je me suis transporté hier chez le capitaine Van Iseghem, et ce n'est pas sans un vif intérêt que j'y ai contemplé, pendant plus d’une demi-heure, le jeune Orang-outang mâle qu'il a rapporté de Sumatra, et dont vous avez envie de faire l’acquisition pour le Jardin du Roi. « Je dis l’orang-outang, parce qu'il ne m'est pas permis de douter que ce n’en soit un. Du reste, vous en jugerez vous-même en dernier ressort, d’après quel- ques indications que je vais vous fournir. « Son front est très élevé et bombé dans la ligne médiane, de manière à si- muler assez bien le front de certains hommes; il est tout-à-fait dépourvu de longs poils, ainsi que le reste de la face, sauf les côtés des joues où de longs poils roux simulent très bien des favoris. « Son nez ne fait point de saillie; ses yeux ont une expression d'intelligence et de douceur remarquable ; les paupières sont garnies de longs cils; son mu- seau n’est nullement proéminent, mais ses lèvres sont très mobiles, et peuvent s'allonger de deux pouces environ. Les oreilles sont bien hordées, et restemble- raient à celles de l'homme si elles étaient pourvues du lobule qui caractérise ces dernières. « La face est d’une couleur ardoisée, dont l'intensité va en se dégradant du centre à la circonférence. « {1 n’a point de callosités aux fesses; il ne porte aucun vestige de queue, ct il a l'anus un peu proéminent. « Les pouces sont très petits comparativement aux autres doigts, dans les mains de devant comme dans celles de derrière. « Toutle corps, à l'exception de la face et des parties antérieures et latérales du cou, est couvert de longs poils roux ; et ceux de la tête se portant d’arrière en avant sur Je front, font exactement l'effet d’une perruque. « Les dents offrent l'apparence de celles de l'homme, si ce n’est que les ca- nines sont relativement plus allongces que chez celui-ci, et qu’elles se logent, lorsque la bouche se ferme, dans un espace vide, situé, pour la mâchoire iufe— rieure, derrière les canines, et, pour la mâchoire supérieure, en dedans, « Cet animal, dont l'âge peut être supposé de neuf mois environ, n'a encore 314 Académie des Sciences. que quatre molaires de chaque côté à la mâchoire inferieure, et deux ] choire superieure. « Sa taille est d'environ deux pieds six pouces, dans la station debout. «a Du sommet de la tête à l'anus, on trouve une longueur de dix-huit pouces. « La cuisse, la jambe et la main des extrémités abdominales ont chacune six pouces de longueur. « Dans les membres thoraciques, le bras a huit pouces, l’avant-bras sept pouces et demi, et la main six pouces. « J'ai été frappe de la lenteur des mouvemens de l'Orang-outang , laquelle contraste avec la turbulence des autres singes. J'ai été plus frappé encore de son air calme et réfléchi, de sa sociabilité apparente, et de je ne sais quoi d’hu- main répandu sur sa physionomie. « 11 est de la plus grande douceur, et recherche les caresses même des étrangers. « Vous pourrez juger du degre de son intelligence par les deux faits suivans, lesquels se sont passés sous mes yeux. « Son maître lui donnant à manger d’une certaine distance, il descendit de la chaise sur laquelle il était assis, la prit à deux mains, la poria auprès de celle de son maître, et se plaça de nouveau sur cette chaise, dans la position qu’il venait de quitter. « Voulant ouvrir une porte qui communiquait dans une autre pièce, il porta une chaise auprès de cette porte, monta dessus, et saisit le bouton de la serrure, en lui imprimant un mouvement de rotation semblable à celui qu’il avait vu faire pour l'ouvrir. « Cet animal est omnivore dans toute la force du terme, et très facile à nour- rir. Il est très propre, et paraît jouir d’une bonne santé. « M. Van Iseghem possède un fragment de la peau de la mère de ce jeune singe. Cette peau prouve que l'animal auquel elle appartenait avait au moins deux pieds de long de la nuque à l’anus. On a dit à M. Van Iseghem que cette mère avait cinq pieds de haut. » (1) Maladies des vers à soie. — Recherches sur la Muscardine ; par M. Ac. Bassr, de Lodi. La maladie qui a éte l’objet des recherches de M. Bassi a reçu en français le nom de Muscardine, à use de la ressemblance que présente le ver qu’elle à fait mourir avec une espèce de pastille allongée très connue en Provence. La muscardine attaque le ver à soie dans tous ses âges et tous ses états, Quoi- que plusieurs jours s’ecoulent entre son invasion et sa terminaison, qui est tou- jours fatale, elle ne se manifeste, pour ainsi dire, par aucun signe extérieur, et (x) C'est d’après ces renseignemens que le Muséum d'histoire naturelle de Paris s’est décidé à faire l'acquisition de ce curieux animal qui se voit aujourd’hui dans la ménagerie du Jardin du Roi. _Académie des Sciences. ‘315 sauf dans les épidémies les plus violentes, le ver qui en est atteint meurt en con- servant sa couleur naturelle, son volume et toutes les apparences de la sante. A peine, cependant, le corps est-il privé de mouvement, que de moelleux et de flasque qu'il etait, il devient consistant, et peu-à-peu il acquiert assez de du- reté pour être cassant. Souvent pendant que ce changement s'opère, il y a al- tération de la couleur, ordinairement en une teinte pourprée, quelquefois en un bleu foncé. Il ne paraît pas que ce soit la réduction à Pétat d’esclavage qui ait rendu le ver à soie sujet à la muscardine, puisqu'il n’est pas très rare de rencontrer des larves d’autres lépidoptères vivant en pleine liberté, qui en sont également at- teintes. D'ailleurs la maladie ne semble pas être du nombre. de celles qui peu- vent naître sous l'ivfluence du mauvais régime auquel les vers sont quelquefois soumis dans les magnaneries. M. Bassi a en vain essayé de la faire se dévelop- per chez ces animaux, en les plaçant dans les circonstances les plus défavorables; il n’est parvenu à la faire naître chez un individu sain, que par voie de conta- gion , c’est-à-dire par voie de communication directe ou indirecte avec un autre individu précédemment atteint du même mal. Avant de parler des circonstances suivant lesquelles a lieu cette propagation, il convient de faireremarquer que le ver, mort de la muscardine, se couvre ha- bituellement, au bout de peu de temps, d’une efflorescence semblable à de la neige. Cependant, si le cadavre est placé daus une atmosphère d’une extrême sécheresse, cet enduit farineux ne se montre pas ; ilne se montre pas non plus chez les individus qui succombent à ce qu’on appelle la muscardine bâtarde ou noircissure. Tant que cette efflorescence re s’est pas montrée, la propagation de la mala- die n’a pas lieu par le simple contact extérieur. Mais si l’on entame largement la peau d’un individu récemment mort de la muscardine ou près d'en mourir, et qu’ensuite, avec l'instrument mouillé par le liquide intérieur, on touche ou, ce qui est plus sûr, on pique la peau d’un individu sain, on lui communiquera la maladie. L’efflorescence blanche, en effet, comme l'a reconnu M. Bassi, n’est que la partie extérieure d’une multitude innombrable de petits champignons, lesquels, ayant la mort de l'animal, existaient déjà sous ses tégumens et s’y accroissaient à ses dépens, sans pouvoir d’ailleurs se faire jour au-dehors, en raison de la résistance que leur offrait Ja peau; ils ne peuvent percer l’enveloppe cutanée que lorsqu'elle est déjà ramollie par un commencement de putréfaction, Leur fructification suit de près leur apparition à l'extérieur, et les germes innombra- bles qui se répandent sur les corps voisins ou se dispersent dans l'atmosphère, vont au loin porter la maladie. Les germes, attachés à des sorps solides, peuvent conserver long-temps la faculté de se reproduire et de faire naître la muscardine chez les vers à soie sur le corps desquels ils seraient portés, M. Bassi pense qu’en les plaçant dans des 316 Académie des Sciences. circonstances convenables, ils conserveront près de trois ans leur activité con= tagieuse. D’une année à l’autre ils se conservent aisément, et l'introduction d'œufs pro- venant d’une magnanérie infectée dans une magnanerie qui n’était pas encore atteinte de la maladie, pourra l’ÿ faire apparaître ; non que le ver soit malade dans l'œuf même, mais parce qu'une fois éclos il pourra se coller à sa peau quel- ques-uns des germes qui étaient restés attachés à la surface extérieure de la co- que. M. Bassi, du reste, se croit fondé à conclure de ses expériences qu’on peut éloigner cette cause d'infection en soumettant les œufs suspects à certaines lo- tious qui, faites en temps convenable, ne nuisent point à l'embryon. Si l’on agite sur l’eau un ver mort de la muscardine, et déjà couvert de l’en- duit farineux, cet enduit se détache en partie, flotte à la surface, et peut y res- ter ainsi assez long-temps sans perdre son action nuisible, Si on plonge l’ani- mal avec assez de précaution pour que les germes ne se détachent point et res- tent submergés, ils se conservent sans altération pendant plusieurs jours, tandis que le ver pourrit promptement. Les expériences microscopiques faites plus récemment par M. Balsamo, pro- fesseur d'histoire natureile au lycée de Milan, ont confirme les idées de M. Bassi sur la nature de la muscardine. Cet observateur à reconnu que l'efflorescence blanche, qui se montre à la surface du ver mort depuis quelque temps, est duc en cffet au développement d’une multitude de plantes cryptogames : ces plantes Jui ont paru appartenir au genre Botrytis. L'espèce dont il s’agit ici, le 2. Bas- szana, offre suivant luiles caractères suivans : floccis densis, albis, erectis, ramosis ; ramis sporidiferis sporulis subovatis. De nombreuses observations l’ont conduit à reconnaître : « 1° Que cette muscidinée ne se voit jamais que sur des vers morts de la muscardine; qu’elle ne se rencontre jamais parmi les diverses espèces de moisis- sures qui se développent sur des vers desséchés artificiellement; qu’on peut la reproduire sur tel individu qu’on choisira, en lui communiquant les germes pris sur un ver affecté de muscardine ; ’ « 2° Que la peau du ver attaqué de la maladie est parfaitement saine, et que les éléèmens morbifiques gisent dans un pigmentum sous-cutané, qui peut aug- menter de volume , et envahir presque toutes les parties intérieures du ver et de la nymphe ; « 3° Que ce pigmentum offre un amas de petits grains semblables aux spo- res de la moisissure, lesquels, dans Ges circonstances favorables, s’allongent en filamens qui portent des germes capables de reproduire le véritable Botrytis Bassiana. » A cette occasion, M. Duméril communique une observation « qui, dit-il, a « quelque analogie avec ce fait, c’est que souvent, après les pluies d'automne, € on trouve attachées contre les mursun grand nombre de mouches mortes, éta- « lées, bien conservées et excessivement gonflées dans la région de l'abdomen, « dont le corps se trouve couvert d’une poussière blanche, très fine. Académie des Sciences. 317 « En examinant à la loupe cette poussière et la matière qui remplit le ventre, « il est facile de reconnaître que c’est une véritable moisissure développée con- « stamment de la même manière, et qui peut-être a été également la cause de la « mort de ces insectes, comme les Trysiphés font périr les plantes qu’elles atta- « quent. » Séance du 9 mai. Empreintes de pieds d’un quadrupède dans le grès bigarré de Hildbure- hausen, en Saxe ; communication par M. DE Branvize. « Dans le cours de l’année dernière, M. de Humboldt d’abord, et M. Link ensuite, ont entretenu l’Académie au sujet de plaques ou dalles de grès, des environs de Hildburghausen en Saxe, appartenant geclogiquement au grès bi- garré ou nouveau grès rouge, à la surface infcrieure desquelles on a remarqué un nombre considérable de figures en relicf assez régulières et régulièrement disposées, pour que plusieurs naturalistes allemands aient pa les regarder comme les résultats de pas d'animaux quadrupèdes de la famille des quadrumanes ou singes, suivant les uns, de celles de Didelphes pédimanes on Sarigues, suivant les autres, comme MM. Wiegmann et Humboldt, et même de Salamandres gigantes- ques, d’après MM. Munster et Link. L'administration du Muséum d'Histoire naturelle, dans le but d’éclaircir une question aussi interessante en paléontolo- gie et dont on a déjà tiré des conséquences si contradictoires à ce que l’on ad- met assez généralement aujourd’hui comme résultat de l’état actuel dr nos con- naissances sur l'histoire de la succession des êtres organisés à la surface de la terre, s'est empressée de faire l'acquisition d’un grand et beau morceau de ce grès à la surface duquel existent trois séries de ces prétendues impressions tra- duites en plate-bosse et liées entre elles par une réäiculation plus ou moins ser- rée. Au premier examen qu'il en a fait, M. de Blainville croit s’être assuré que ces figures en relief ne doivent en aucune manière être attribuées à des em- preintes qu'auraient laissées les pieds d’un animal quadrupède quelconque mar- chant sur un sol susceptible de les recevoir et de les garder assez long-temps pour qu’ensuite elles aient pu être remplies par une matière plus ou moins molle et capable de se solidifier. 11 pense au contraire que ce sont indubitablement des traces de végétaux analogues sans doute à ceux que l’on a déjà rencontrés plu= sieurs fois dans le grès rouge , et considérés comme des Prêles gigantesques , ou des Rhyzomes de quelqnes Acorus ou même des tiges sarmenteuses plus ou moins réticulées et anastomosées, ce qu'il ne lui appartient pas de décider, Quant aux raisons à l'appui le son opinion, que ce ne sont certainement pas des empreintes de pieds d'animaux quadrupèdes, M. de Blainville se propose de les soumettre au jugement de l'Académie, dans une de ses séances prochaines, aussitôt qu'il aura pu faire exécuter des dessins rigoureusement! exacts du bel échantillon ar- rivé dernièrement au Muséum, comparativement avec des figures d'empreintes des pattes d'un Singe, d’une Sarigue et d’une Solamandre, » 318 Académie des Sciences. Recherches sur la disposition des plumes chez les oiseaux, et sur les muscles destinés à mouvoir ces plumes, par M. Jacquemin. Dans une précédente lettre l'auteur avait considéré le mode d'implantation des plumes à la face supérieure du corps ; cette fois il s'occupe de la face in- férieure ; il décrit aussi les écailles cornes qui recouvrent les pieds, enfin il indique les différens muscles qui servent au mouvement des plumes. Ces mus- cles suivant lui sont au nombre de quinze, dont cinq occupent la face supérieure du corps, deux la face inférieure , cinq le bras, un la jambe, deux la région de l'oreille. Séance du 16 mai. Anatomie et physiologie de la Corneille ( Corvus corone), prise comme type de la classe des Oiseaux , etc., par E. Jacquemin. ( Second mémoire : Insertion des plumes qui recouvrent la peau de cet oiseau, et muscles qui servent à leur mouvement. ) Lettre sur la structure des poumons , par M. Bourcerx. L'Académie ayant reçu, dans une de ses précédentes séances, un travail sur la structure des poumons , M. Bourgery annonce qu'il s’est occupé de recher- ches sur le même sujet, et qu’il les aurait dejà soumises au jugement de l’Aca- démie si les dessins explicatifs qui accompagnent son mémoire eussent été ter- minés. En attendant, il croit devoir faire connaître les principaux résultats aux- quels il est arrive. Après avoir indiqué sommairement la disposition générale des artères et des veines pulmonaires, puis leurs rapports avec les canaux aériens, il entre dans quelques détails sux la terminaison de ces trois ordres de vaisseaux. « Le capillaire aérien n°## point une cellule ou vésicule , mais un canal. « Les canaux aériens capillaires, dont l'agglomération forme les lobules, sont incurvés ou légèrement sinueux, inclinés et entrelacés en divers sens. Ils se jet- tent tous les uns dans les autres, de façon à donner l’idée d’un labyrinthe, ce qui me les a fait nommer, dit l'auteur, canaux labyrinthiques. Vs naissent des plus petits canaux bronchiques. « Ces derniers sont d’abord rectilignes et ramifies sous forme alterne. Deve- nus capillaires à leurs derniers embranchemens , ils s'incurvent, reçoivent les canaux labyrinthiques qui s'ouvrent sur leurs parois, et ils se terminent en s’a- bouchant avec l'un d’eux qui continue leur direction. Ces canaux, dont le dia- mètre n'excède que de moitié celui des autres, s'en distinguent surtout par leur plus grande longueur et l'excès d'épaisseur de leurs parois. « Quant aux capillaires sanguins , une artériole, à son arrivée dans le lo- bule pulmonaire , représente une tige dont Les rameaux divergeus se distribuent en cône ou en arbre. Chacune des branches principales ayant atteint les cloisons, c’est-à-dire les espaces intercanaliculaires, enveloppe les canaux les plus Voi= sins par autant d’anneaux vasculaires formés par un seul vaisseau. La même dis- Academie des Sciences. 319 position se répète de proche en proche , tous les canaux se trouvant ainsi envi- ronnés de yaisseaux annulaires interposés entre leurs cloisons et qui s'abouchent les uns avec les autres dans les points tangens ou aux nœuds d’intersection ; en sorte que, sur une coupe entre deux rameaux nés de lartériole d’origine ou de deux artérioles voisines, la surface est formée par un canevas de ces anneaux vasculaires communiquant entre eux , ou mieux, se continuant partont sans in- terruption, et décroissant un peu en diamètre, des rameaux vers le centre moyen de jonction. « Les veinules naissent du canevas annulaire en sens inverse des artérioles; ainsi c’est ce canevas lui-même qui constitue le système capillaire sanguin pul- monaire. » Séance du 23 mai. Appréciation de la température moyenne des époques géologiques terrains tertiaires en Europe, au moyen de l’étude comparative des espèces vivantes et fossiles de coquilles, par M. Drsnayes. (Voyez ci-dessus page 289.) Observation sur deux espèces de fausses galles. M. Varror, de Dijon, adresse quelques observations sur une espèce de Ten- thrèdes qui attaque les branches de chèvre-feuille, les déforme et les rend cassantes. « On remarque, dital, sur les branches du Loniceru xylosteon Linn., des renflemens irréguliers qui les rendent fragiles dans ces endroits. Ces renflemens qui déforment les tiges, présentent du côté convexe le prolongement de l'écorce, et du côté concave une apparence de carie on gélivure : ils ne s'opposent point aux progrès de la végétation. « Cette altération est due à une larve de Tenthrède. « Aux mois d'avril et de mai, on peut voir sur les bourgeons du chèvre- feuille des bois, de fausses galles charnues, les unes ovoïdes , les autres glo- buleuses, quelquefois rougeâtres, d’autres fois vertes. Ces galles étaient très abondantes en 1835; elles sont rares cette année, probablement à cause de la rigueur et de la longueur de hiver, qui se seront opposés au développement de la Tenthrède. 6 « J'ouvris un certain nombre de Galles, et je trouvai constamment dans leur intérieur une larve à 22 pattes , analogue à celle du Tenthredo gullæ foliorum Salicis , Linn., bien décrite par Swammerdam, Collect. académ., part. étrang.s 1. v, p. 494, pl. 28, fig. 9. « La larve contenue dans les fausses galles du chèvre-feuille est hyaline, à tête couleur châtain ; elle laisse apercevoir distinctement ses six pattes écail- leuses; mais les pattes membraneuses, extrémement petites, paraissent sous forme de tubercules, Cette larve est longue de 8 millimètres. C’est alors que , comme celle des galles des feuilles de saule, elle perce la galle en y pratiquant 320 Academie des Sciences. L° une ouverture ronde par laquelle elle s’échappe pour aller subir ses métamor- phoses en terre. Quelquefois, mais raremeut , elle subit ses transformations dans la galle, et c’est à un de ces heureux hasards que j'ai dû de connaître d’une ma- nière certaine l'espèce de Tenthrède à laquelle sont dues les fausses-galles du chèvre-feuille des bois, ( Elle est entièrement noire : antenne à 9 articles, ge- noux blauchîtres. ) « La femelle, qui paraît à la fin de mars, pond un œuf dans le bourgeon; cet œuf ne tarde pas à éclore; la piqüre et la présence de la larve déterminent la tuméfaction du bourgeon par l’extravasion de la sève, et produisent un résultat pareil à celui observé sur une branche de Saule marseau , Salix caprœu Linv., par Palissot de Beauvois, dont on peut lire la note dans les acé, Paris. 1811, p.149, pl. 1v, fig. 1, 2. « Lorsque la larve est sortie, la galle acquiert une consistance plus ferme; elle finit par devenir ligneuse et par former comme une sorte de calus sur l'ar- buste. L'ouverture par laquelle la larve s’est échappée augmente de dimension, se déforme, et finit par disparaître en laissant une cavité sur la branche, dont la végétation se continue par l’écorce et le bois, car il n’y a plus de canal mé- dullaire , la fausse galle en a interrompu la continuitc. Plusieurs espèces d'Ichneumons, ainsi que l'a reconnu M. Vallot , attaquent et font périr la larve de la Tenthrède du chèvre-feuille avant qu'elle ait quitte la galle à l'abri de laquelle elle se développe. Une autre fausse galle qui se montre surle Sisymbrium sylvestre est due, suivant M. Vallot, à une espèce très petite de Cecidomyie. ANATOMIE. — S/ruciure des poumons. — M. Bazin, qui avait adressé, daus les séances du 21 mars et 18 avril, divers dessins et préparations ayant pour ob- jet de montrer le mode de terminaison des bronches, rappelle que ses observa- tions sur ce point d'anatomie conduisent à des résultats bica différens de ceux qui out cté récemment soumis à l’Académie ( Voir page 318 l'extrait d’une communication de M. Bourgery ). Suivant M. Bazin, les poumons d'aucun Mammifère n’offrent à l'extrémité des canaux aériens une disposition telle que celle qu'on a désignée sous le nom de canaux labyrinthiques, dans tous, au contraire, « les bronches, après s'être divisées, subdivisées ou ramifiées un plus ou moins grand nombre de fois, finissent par donner des ramuscules très courts qui se terminent en cul-de-sac. Ce sont les extrémités de ces ramifica— tions , et les renflemens qu’elles présentent quand elles sont distendues , que la plupart des anatomistes ont pris pour des cellules ou des vésicules. QUATREFAGES, =« Développement des Ænodontes. 321 Mémoire sur la vie intra-branchiale des petites Anodonies, Par M. ARMAND DE QUATREFAGES, Docteur en médecine et ès-sciénces, Présenté à l'Académie des Sciences le 11 mai 1835. (1) Mon intention, dans ce travail, n’est pas d'examiner le ques- tion anatomique et physiologique des organes génitaux de FA- nodonte ,-non plus que le développement de ses œufs dans l’o- vaire. Je laisserai de côté tout ce qui se rattache à ces deux points de la science si intéressans d’ailleurs, mais que je n'ai . pas encore suffisamment éclaircis, pour prendre les œufs à leur sortie de l'ovaire, et suivre leur évolution intrabranchiale jus- qu'au moment où les petites Anodontes abandonnent entière- ment leur mère pour vivre de leur vie propre. Le 20 septembre 1834, j'avais placé une Anodonte dans un vase en cristal, afin d'examiner le mécanisme à l'aide duquel l'eau est mise en contact avec les divers replis branchiaux. En- core pleine de vigueur, elle m’offrait ce mode de respiration qu’on pourrait appeler à grand courant (x). Bientôt je vis sortir de son orifice anal ces petites masses d'œufs décrites par M. de Blainville : elles étaient disséminées dans le liquide, en tres grande quantité. L'animal continuant à pondre avec beaucoup de rapidité, les œufs étaient entraînés par le courant qui en- trait dans la trachée : ils se trouvaient par là portés dans les (r) Voyez le rapport fait sur ce travail par M. de Blainville (Annales , tome 4, page 283). (2) Lorsque les Anodontes ne sont prises que depuis peu de temps, elles ont deux manières de respirer : tantôt le liquide passe avec beaucoup de rapidité dans les canaux concentriques formés par le manteau et les branchies, entrant par l'ouverture garnie de tentacules que forme l'extrémité du manteau (trachée }, et sortant par l'orifice anal avec assez de force pour agiter l'eau à cinq ou six pouces de distance ; d’autres fois, l'eau parcourt le même rajet, mais avec lenteur, et sans qu'il y ait de jet à la sortie. Quand l'animal est affaibli pour avoir été gardé loug-temps dans un vase, il ne respire plus que de cette seconde manière. V. ZLooz, — Juin, àt 322 QUATREFAGES. — Développement des Ænodontes. branchies externes, qui les premières reçoivent le liquide, et déposés dans leurs replis. Ce fait explique très bien la présence presque constante des œufs seulement dans les branchies ex- ternes (r). Ceux qui ont été trouvés ailleurs, soit dans les bran- chies internes, soit dans les replis du manteau, y avaient été probablement entrainés par le liquide, dévié de sa route nor- male, peut-être par la brusque fermeture des valves de la co- quille ou par toute autre cause. On voit encore qu'il doit se perdre un grand nombre d’œufs dans cette espèce de transport qu'ils sont obligés de subir, et que chaque Anodonte peut fort bien servir de mère à des œufs pondus par ses voisines. (2) L’Anodonte que j'avais sous les yeux continua à donner des œufs pendant vingt-quatre heures, laissant des intervalles de demi-heure ou trois quarts d’heure environ entre chaque ponte. L’ayant ouverte au bout de ce temps, je trouvai ses branchies externes remplis d'œufs assez régulièrement disposés en séries dans ses locules. Celles-ci étaient remplies d’une espèce d’albu- mine filante provenant en grande partie de la matière qui en- veloppait les œufs au moment de la ponte, et qui avait perdu un peu de sa densité en absorbant une cértaine quantité d’eau. Le ventre était flasque, et la peau en était comme ridée; ce qui s'explique facilement par l'état de vacuité subite des ovaires. Quelques expériences approximatives me montrèrent que les œufs pondus par une Anodonte de moyenne grandeur pou- vaient être au nombre de quatorze mille, plutôt plus que moins; les plus grandes en contenaient au moins vingt mille. J'en re- tueillis environ deux cents que je plaçai dans un verre à li- queur. Le lendemain, je ne fus pas peu surpris de les trouver rangés d'une manière régulière contre la paroi directement ex- (1) Sur plus de soixante Anodontes que j’ai ouvertes, je n'ai trouvé des œufs dans les bran- chies internes que deux ou trois fois, et en très petite quantité; dans le manteau, jamais. (2) Je n’ai pu reconnaître la marche indiquée par MM. Rathke et de Blainville comme étant celle suivie par les œufs à leur sortie de l'oviducte. 11 me semble difficile que les œufs ne soient pas entrainés par le courant que forme l'eau expirée, et emportés par l’orifice anal avant de pouvoir remonter le long du bord antérieur des brauchies internes, Au reste, M. de Blain- ville a lui-même très bien décrit leur sortie, QUATREFAGES. — Développement des Anodontes. 323 posée à la lumière. L’albumine qui les enveloppe au moment de leur sortie avait formé une espèce de membrane dans l’é-. paisseur de laquelle ils étaient contenus. Curieux de voir si cette espèce de tissu se réorganiserait, je le rompis ‘et le délayai dans le liquide; mais mes œufs restèrent au fond du verre, et, au bout de quelques jours ils étaient la proie de myriades d’infu- soires et surtout de vibrions. Premier jour, — Examinés aussitôt après leur sortie, ces œufs étaient sphériques, de un quart de millimètre de diamètre en viron, Au microscope , ils présentaient cette espèce de petit gà- teau circulaire formé de globules transparens renfermant eux- mêmes des globulins, et que quelques naturalistes de nos jours considèrent comme un véritable vitellus, mais qui, du moins dans les Limnées et les Planorbes ; m'a paru être le premier ru- diment du système nerveux (1). L’enveloppe membraneuse, _ parfaitement transparente, était assez résistante, et renfermait une liqueur où les réactifs montraient une grande quantité d’al- bumine. Deuxième et troisième jours.— Le nombre des globules auge mente par le développement successif des globulins, sans que le gâteau change de fornie. Ici comme dans les Limnées et les Planorbes, les nouveaux globules se portent du centre à la cir- conférence. Quatrième jour. — Xes globules ne sont plus distincts : le gâteau entier semble composé de globulins disséminés dans une masse pulpeuse. Vers sa circonférence se montre un segment légèrement opaque qui en occupe environ le tiers. Cinquième jour.— Le gâteau augmente rapidement et prend là forme d’un triangle sphérique. Le segment opaque aperçu la (1) Dans le mémoire que j'ai publié sur l’embryogénie des Limnées et des Planorbes, j'a- vais avancé que les œufs de ces Mollusques w’offraient dans le commencement aucune trace de germe, Depuis, j'ai reconnu que cette erreur , car c'en est une, tenait à ce que j'avais examiné des œufs placés à l'éxtrémité des masses ovigères, Ces œufs à germe imparfait ou même nul, ne se développé nt pâs. Dans més recherches sur les Anodontes , j'en ai trouvé de semblables au milieu de petits bien développés, ét qui au bout d’un mois étaient les mêmes que le jour de Ja ponte, 21, 324 quATREFAGES. — Développement des Anodontes. veille forme l’un des côtés en débordant un peu à droite et à gauche. Les locules des branchies sont fermées par une membrane extrèmement fine qui semble n'être que la surface un peu s0- lidifiée de l’albumine qu’elles renferment. Celle-ci paraît avoir augmenté en quantité, par suite probablement d’une sécrétion particulière des branchies. Sixième jour. — On distingue la coquille encore membra- neuse parfaitement transparente, enfermant le gâteau qu'on distingue à travers , et qui lui-même semble se laisser traverser plus facilement par la lumière. Le segment apercu les jours pré- cédens est aussi devenu plus transparent, et forme la charnière. La coquille conserve la forme triangulaire à côtés légèrement courbés; elle remplit presque entièrement l'œuf. Septième jour.— La coquille presse contre les parois de l'œuf qu'elle distend par ses trois angles. Son bord cardinal est en- tièrement rectiligne, tandis que les deux autres conservent leur courbure : elle est toujours membraneuse.On ne distingue plus le gâteau, mais vers le tiers supérieur des valves, on voit un espace à-peu-près elliptique, translucide, circonscrit par une ligne opaque, et que nous reconnaîtrons plus tard être l’em- preinte du muscle adducteur. On ne peut dire que celui-ci existe encore, aucun tissu n'étant déterminé : aussi je pense que la plus grande transparence de ce point est produite par l'adhé- rence des rudimens de l'animal avec la coquille dans l'endroit où plus tard s’attachera le muscle. Le fluide albumineux renfermé dans les locules des branchies commence à prendre une apparence pulpeuse. On y distingue une foule de points opaques irrégulièrement disséminés , ana- Jogues aux globulins. 8° jour. — La coquille, par son accroissement progres- sif, a déchiré la membrane qui l'emprisonnait, et dont les fragmens que l’on retrouve ne tardent pas à être résorbés. Ses bords antérieur et postérieur acquièrent un peu plus de cour- bure, tandis que le bord cardinal demeure à-peu-près recti- ligne. Les angles antérieur et postérieur s’'arrondissent : les valves s’incrustent par points de sels calcaires, et du centre à la QUATREFAGES. — Développement des Ænodontes. - 32h circonférence, laissant tout autour une lame translucide, assez ferme, élastique, et qui semble être un prolongement du liga- ment de la charnière. À l'angle inférieur, les deux portions an- térieure et postérieure de cette lame se réunissent, et se pro- longent dans l'intérieur de la coquille en un angle très aigu. En même temps, on aperçoit à ce même angle des espèces de mamelons allongés, translucides, et formant une sorte de houpe. C’est le premier rudiment des dents du crochet, comme le prolongement triangulaire dont nous avons parlé l’est du crochet lui-même. Ce sont ces mamelons plus ou moins déve- loppés qui ont été vus et dessinés par MM. Bojanus, Pfeffer et Prévost dans leurs planches, et que M. Jacobson regarde comme étant les indices des crochets. Nul doute que si ces observa- teurs n'ont pas aperçu cet organe, cela n’a tenu qu'à ce que les animaux qu'ils avaient sous les yeux n'étaient pas assez ayan- cés en âge. Le liquide albumineux dans lequel les œufs étaient plongés achève de s’ organiser en une matière pulpeuse, très peu con- sistante, et dans laquelle paraït un lacis inextricable de vais- seaux , les uns droits ou à peine onduleux, d’autres en spirale serrée, d’autres enfin enroulés et comme entortillés les uns au- tour des autres. On en voit quelques-uns sortir entre les valves des petites Anodontes; mais la coquille toujours fermée à cette époque de leur vie, empêche de voir le point où ils aboutissent. J'en ai compté tantôt deux, tantôt trois ou quatre; mais ce manque de fixité dans leur nombre doit être sans doute attri- bué à la facilité avec laquelle se déchirent et se rompent ces tissus à peine déformés. Les jours suivans, la petite Anodonte augmente à peine de volume ; mais les parties se consolident, la coquille brunit et achève de s’incruster ; ses bords seuls demeurent toujours liga- menteux. Les mamelons de son angle inférieur s’allongent, et on en voit d'autres poindre sur le prolongement intérieur de la lame. Le nombre des vaisseaux se multiplie. 12° jour, — Le crochet s’allonge de manière à égaler en lon- gueur le tiers de la hauteur de la coquille. En même temps sa base s’élargit, acquiert un peu plus de consistance, et bientôt 326 quaTRErFAGES. — Développement des Ænodontes. on voit sur sa ligne médiane des points incrustés de matière calcaire. Lés dents augmentent en nombre et commencent à paraître jusqu’à son extrémité. Le crochet et la bande ligamen- teuse prennent la teinte légèrement brunâtre du reste de la co- quille. On n'apercoit, au reste, aucune articulation entre cet organe et la valve à laquelle il est attaché. 13 et 14° jours. — Les crochets et la coquille acquièrent plus de solidité par une incrustation successive. Néanmoins, les pre- miers demeurent flexibles et comme cartilagineux, la matière calcaire n'y étant que disséminée par points, tandis que les valves se solidifient entièrement quoique conservantleur translu- cidité entre les points opaques formés par le premier dépôt des sels terreux. Les dents s'allongent, se consolident, et présen- tent tout-à-fait un aspect corné. Vers cette époque, les crochets qui étaient restés couchés dans l'intérieur de la coquille, se redressent sur elle à angle droit quand le petit animal ouvre ses valves, mouvement qu'il commence seulement alors à exécuter. Deux lames sémilunaires, transparentes , s’attachent à droite et à gauche du crochet, et se rendent au bord interne de la coquille. Ces lames demeurant tendues lors même que l'animal rapproche le crochet de ses valves, je les ai considérées dès ce moment comme des muscles destinés à fléchir cet organe, le mouvernent d'extension étant dû à lélasticité du ligament sur lequel il est implanté. Lorsque la petite Anodonte ouvre sa coquille, on voit le muscle adducteur placé au milieu et vers le tiers supérieur, ainsi que nous l'avons déjà dit. On en distingue très bien les fibres que l’on voit se contracter sous ses yeux. En avant et en arrière du muscle, on aperçoit les vaisseaux dont nous avons parlé pénétrer dans un amas de globules semblables à ceux qui constituent le germe. Autour de ces points d'insertion, on voit se former presque constamment de petits tourbillons analogues à ceux que fournissent certains infusoires. Je n’ai jamais dis- tingué de cirrhe. On ne reconnaît, du reste, d'autre trace d'or- ganisation qu’une cavité allongée placée à la partie inférieure du muscle, cavité que nous verrons être le premier rudiment du tube intestinal. quarreraces. — Développement des Anodontes. 327 Les vaisseaux que nous avons décrits , et qu'avec MM. Rathke et Jacobson nous considérons comme les organes de la nutri- tion de l'embryon, comme de véritables vaisseaux ombilicaux, traversent la matière pulpeuse dans laquelle sont plongées les petites Anodontes, et se rapprochent de manière à former dans les locules des branchies dé la mère de nouvelles cloisons le long desquelles sont appliqués les petits. Arrivés près des feuillets de la branchie, ils se divisent en deux ou trois branches dont cha- cune est presque aussi volumineuse que le tronc principal, et se terminent par un petit renflement piriforme, sans entrer en communication avec les vaisseaux de la mère. Ces renflemens jouissént à un haüt degré du pouvoir absorbant et exsorbant. En les isolant autant que possible, on voit les uns se couvrir de cirrhes et les autres donner naissance seulement à des tourbil- lons très rapides. Il semblerait, d’après cela, que les premiers seraient des organes d'exsorption, les seconds d'absorption. Quant aux vaisséaux qui sillonnent la matière pulpeuse dont hous avons parlé, ils se terminent à-peu-près de la même ma- nière dans le voisinage des feuilléts branchiaux. Ainsi on pour- rait être tenté de croire que, parmi les vaisseaux ombilicaux, les uns sont de véritables veines, les autres des artères venant puiser dans un placenta les matériaux nécessaires, et y rapporter ce qui devient inutile à la nutrition de la petite Anodonte. Je n’ai pu reconnaître la moindre trace d'irritabilité dans ces vaisseaux , quelques moyens que j'aie employés pour cela. Plu- sieurs fois j'ai cru les voir se contracter ou se dérouler, mais j'ai fini par m'apercevoir que ces mouvemens étaient produits par quelque Anodonte qui ouvrait et férmait sa coquille, mouve- ment qu’elles exécutent très souvent. Les jours suivans n’amènent pas de grands changemens; seu- lement la coquille et ses dépendances se foncent en couleur et acquièrent plus de solidité : les fibres musculaires deviennent plus distinctes : les globules sont distendus par les globulins ; mais l'accroissement marche toujours avec une extrême lenteur. 20-25° jours. — La bande translucide qui règne autour des valves , et que nous avons vue persister plus long-temps que ces 328 QUATREFAGES: — Développement des Anodontes. dernières dans son état primitif de cartilage, est entièrement incrustée, excepté sur le bord qui touche à la coquille. Là règne un sillon qui la sépare de cette dernière, sillon assez profond à l'angle inférieur et sur les côtés , et qui va en s'effacant vers le bord cardinal. Pour reconnaitre bien distinctement cette dis- position, il faut faire macérer les petites Anodontes. Alors on voit qu'un ligament interposé règne tout le long de ce sillon en bas et sur les côtés , et va aboutir supérieurement au bord car- dinal où ilse confond avec le ligament de la charnière, La cou- leur de la bande est la même que celle du reste de la coquille : le crochet semble n’en être qu'un prolongement, et l’attention la plus soutenue n’a pu me faire reconnaître d’articulation in- termédiaire. Le crochet est demeuré flexible, et la matière cal- caire n'y est déposée que par points. Sa longueur écale les deux tiers de la hauteur de la coquille; sa forme est celle d’un tri- angle isocèle à côtés légèrement concaves. A sa face externe se trouvent les dents en cylindres arrondis à leur extrémité, au nombre de quatorze à seize. Elles sont placées sur deux rangs alternes à la partie supérieure du crochet, et sur trois dans le point où il s’élargit assez pour cela. Quelques-unes sont irrégu- lièrement groupées à sa base : ce sont celles que nous avons vu paraître les premières sous la forme d’une petite houpe. Deux faisceaux musculaires, revêtus extérieurement d’une forte apo- névrose qui résiste long-temps à la macération, s’attachent de chaque côté du crochet : l’un plus large, depuis la base jusqu’au tiers supérieur, l’autre depuis ce point jusqu’à l'extrémité. Le premier se porte au bord interne, et le second à la face interne de la bande qui règne autour des valves. On voit que tout ce singulier appareil tient à cette dernière, et qu’en supposant que ce soit une partie caduque, il doit disparaitre avec elle. À cette époque, les globulins ont remplacé les globules au- tour du muscle adducteur. Ils se sont développés surtout dans le üers médian, et forment dans chaque valve une espèce de masse tout-à-fait transparente, dent les dimensions varient quel- quefois d’un moment à l’autre, et au milieu de laquelle on voit, outre le canal digestif déjà aperçu, une autre cavité allongée qui plus tard formera l'aorte. Au point où s’insèrent les cordons QUATREFAGES. — Développement des Ænodontes. 329 ombilicaux, on voit un petit renflement auquel ils paraissent aboutir. Nous avons vu que la petite Anodonte écarte souvent ses valves au point qu’elles se trouvent sur le même plan. On con- çoit que dans cette position le muscle adducteur éprouve une extension tres considérable, En outre, la contractilité de la fibre musculaire ne parait pas très forte à cette époque de la vie, tandis que le ligament de la charnière semble avoir acquis une élasticité très prononcée. Aussi voit-on souvent le petit animal faire de vains efforts pour refermer ses deux valves, qui la plu- part du temps demeurent au moins entr'ouvertes. Si elles se rapprochent assez pour que les crochets, en s’abaissant l’un vers l’autre, viennent à se rencontrer, on voit ceux-ci s’incurver davantage, et les dents s’engrener les unes dans les autres à la maniere des pignons de deux roues. C’est à l’aide de ce curieux mécanisme que la petite Anodonte parvient à fermer entière- ment sa coquille et à la maintenir dans cet état malgré l’action continuelle du ligament de la charnière. D'après la disposition des dents que nous avons vues être al- ternes, on conçoit que lorsque les deux crochets sont appliqués l'un contre l'autre, les mouvemens d’avant en arrière que pour- raient exécuter les valves en glissant l’une sur l’autre, sont ar- rétés aussi bien que ceux de haut en bas. La petite Anodonte trouve donc dans cette espèce de charnière supplémentaire un moyen de plus pour résister aux causes légères qui pourraient si facilement à cette époque disjoindre les deux valves de la co- quille. Enfin , le singulier appareil qui nous occupe peut servir de moyen de défense à notre petit bivalve. En effet, lorsqu'il a quitté le sein protecteur de sa mère, il est exposé aux attaques d'ennemis nombreux qui en détruisent des quantités innom- brables. Or, il se trouve protégé dans le point le plus faible, d'abord par son crochet aigu et armé de dents redoutables, puis par cette espèce de barrière musculo-tendineuse qui ferme une partie de l'orifice de la coquille lorsque les valves en sont écartées. À dater de ce moment, le développement de la petite Ano- 330 QUATREFAGES. — Développement des Anodontes. donte marche avec plus de lenteur encore qu'auparavant, par suite, je pense, des rigueurs de la saison. On remarque seule- ment qué les muscles adducteurs du crochet paraissent se ren- forcer peu-à-peu. Vers le 45° ou 50° jour, la coquille change de forme. Le côté postérieur paraît s’allonger en même temps que le bord cardi- nal s'accroît dans ce sens, tandis que le côté antérieur demeure stationnaire. En avant du muscle, entre l'aorte et l'intestin, on voit paraître une rangée de globules un peu plus opaques que le reste du corps, et qui plus tard deviendront le foie. La masse de l'animal a augmenté au point que lorsque les valves sont ouvertes, on dirait qu'il ne peut être contenu dans sa coquille sans éprouver une forte pression. Les petits mamelons où abou- tissént les cordons ombilicaux ont pris de l'accroissement et une forme bien déterminée. Ils sont composés de cinq ou six côtes séparées par des sillons longitudinaux. Au point d’inser- tion se trouve un petit enfoncement; de sorte qu’ils ressem- blent assez à la moitié supérieure d’une pomme calville. Au 60° jour environ, la coquille a pris plus d'épaisseur. Le sillon qui sépare la bande marginale du reste des valves s’est creusé plus profondément, surtout à l'angle inférieur, où celles- ci présentent des espèces de déchirures. 70° jour. — Le foie a atteint le muscle. Dans le reste du corps, on aperçoit quelques rudimens de vaisseaux se formant par lacunes et se dirigeant de bas en haut. 80° Jour. — Au milieu du foie, on aperçoit dans chaque valve une cavité irrégulièrement ovalaire, dirigée de haut en bas, placée derrière l'aorte, laquelle s’est allongée de manière à arriver Jusqu'à sa partie antérieure et supérieure : c’est l’esto- mac qui commence à paraître. Je n’ai pu reconnaître d’une ma- nière bien positive si c'était une véritable lacune résultant de l'écartement des globules, ou bien si c'était un de ces derniers dilaté et formant ainsi le premier rudiment de la grande poche digestive. 96-our.— Les dimensions dela cavitéstomacale ontaugmenté. L’aorte qui les contourne antérieurement se dilate à la partie supérieure pour former le cœur sous la forme d’une ampoule QUATREFAGES. — Développement des Ænodontes. 331 allongée et recourbée inférieurement, de manière à embrasser l'estomac. L’'intestin s’allonge, arrive jusqu’au foie en avant, se coude un peu en zigzag inférieurement et remonte après avoir contourné le muscle adducteur jusque vers le milieu du bord cardinal. 120° jour. — Les lacunes que nous avons remarquées dans la masse du corps de lanimal se sont organisées en vaisseaux ramifiés. F’intestin est en communication avec l'estomac; le cœur contourne ce dernier en arrivant au-delà de sa partie postérieure; on distingue à travers le muscle un autre vaisseau qui se forme le long du bord cardinal. Est-ce l'aorte descendante ou bien le rectum qui commence seulement älors à paraître? Enfin, vers le 125° jour environ, l'Anodonte se débarrasse tout-à-coup de tous ses petits. Je pense que l’accroisséement de ces derniers finit par distendre et déchirer la membrane si ténue qui ferme le reph de la branchie et qu’ils sont ensuite expulsés. Cette délivrance a lieu dans quatre ou cinq jours pour le plus grand nombre des mères, car le 21 janvier j'avais toutes mes Anodontes pleines de petits, et le 28 du même mois je n’en trou- vai pas une seule qui en contint sur une vingtaine que j'ouvris. Comme il m'en restait quelques-unes déposées depuis long- temps dans un baquet, j'espérai trouver au fond de celui-ci les petits expulsés par leur mère. J'en découvris, en effet, plasieurs dans la vase; ils étaient vivans et paraissaient plus forts que ceux que j'avais observés jusque-là. Le mouvement par lequel elles ouvraient leurs valves était plus lent et plus gradué; peu les avaient écartées, au point de les avoir sur le même plan, et elles n'offraient plus ces mouvemens saccadés qui faisaient naître l'idée d’un effort brusque et violent nécessaire pour les fermer. La coquille était toujours translucide, brunâtre; les fibres des muscles du crochet très distinctes. L’estomac communiquait avec le liquide ambiant par une ouverture ovalaire dont les bords étaient garnis de cirrhes. Je ne pus douter que ce ne fût réellement l'entrée du tube digestif, ayant vu plusieurs infu- soires pénétrer par là dans l'intérieur, entraînés, je pense, par l'aspiration exercée par l'animal. Le muscle adducteur des valves offrait un léger sillon longitudinal, comme s’il voulait se séparer 332 QuATRErAGES. — Développement des Anodontes. en deux faisceaux. Le foie occupait environ un tiers de la lon- gueur de la coquille; il était toujours formé de globules incolo- res et seulement un peu moins transparens que le reste. du corps; la forme de l'estomac était irrégulièrement quadrilatère. Le cœur ne présentait aucune contraction : on distinguait la grande artère mésentérique; au reste, ni elle ni le tronc prin- cipal n'offraient de ramifications sensibles. C’est en vain que j'ai cherché à reconnaitre quelques traces du système nerveux, probablement sa ténuité et sa transparence l'ont dérobé à mes recherches. Réflexions. Il est difficile, après avoir lu ce qui précède, de s'expliquer comment Leuwenhoeck a pu voir les petites moules des étangs (Anodontes, Unio }, en tout semblables à leur mère, tant dans ‘œuf que dans les branchies. En effet, les différences de forme et d'organisation sont certes assez grandes pour justifier ceux qui, comme MM. Rathke et Jacobson, ont considéré ces petits bivalves comme tout-à-fait étrangers à l'animal qui les nourris- sait. On serait encore plus volontiers porté à embrasser cette opinion par la circonstance de l'abandon qu'ils font du sein maternel avant d’avoir pris leur forme normale. Mais à part les raisons si bien développées par M. de Blainville, il me parait impossible de regarder ces petits animaux autrement que comme le produit de l’Anodonte, que l’on voit pondre sous ses yeux. Pour suivre le développement des petites Anodontes, j'ai dû me procurer un grand nombre de mères, et c'est dans leurs branchies que j'allais chercher chaque fois celles que je voulais soumettre à mes observations. J'ai pu de cette manière les suivre pas à pas; mais lorsque j'ai voulu en mettre à part dans des verres, elles étaient toujours mortes au bout de vingt-quatre heures, et ne tardaient pas à devenir la proie des Infusoires, et surtout comme l'ont remarqué Leuwenhoeck et d’autres obser- vateurs, des Vibrions et des Brachions. Ce résultat n’a, du reste, rien de plus étonnant que la mort d'un fœtus de mammifere qu’on extrairait du ventre de sa mère avant l'époque marquée pour la naissance. QUATREFAGES, =— Développement des Anodontes. 333 Je n'ai pas observé que, pour la sortie des petits, ilse formât de nouveaux canaux. La cause que j'ai indiquée me paraît plus que suffisante pour l'expliquer. Une fois la membrane qui ferme le replis de la branchie déchirée ils ont dû sortir, aidés proba- blement par une réaction de la part de celle-ci, et être entrai- nés par l’eau respirée en même temps que la masse placentaire qui les environnait. Le développement embryonnaire des Anodontes ressemble en tout dans les premiers temps à celui des Limnées et des Pla- norbes. Dans les Acéphales comme dans les Pulmonés nous voyons un germe primitif composé de globules qui se dévelop- pent du centre à la circonférence par l'accroissement des glo- bules plus petits renfermés dans les premiers (globulins). Il est à regretter que la coquille de nos bivalves, qui, bien que translu- cide ne permet pas de distinguer des organes aussi diaphanes , empêche de pousser plus loin les recherches comparatives. Néanmoins quelques faits quenous avons constatés chez les Pul- monés aquatiques se sont reproduits ici sous nos yeux. Telle est la formation de quelques canaux ou cavités par lacune, par écartement des globules, et non par le développement de ces derniers. Je n'ai pu le reconnaître bien évidemment que pour quelques troncs veineux. Le tube digestif et en particulier l’es- tomac m'ont laissé dans le doute à cet égard : néanmoins sa forme et l’analogie m'engageraient à penser qu'il doit en être de même. Il n’en est pas ainsi pour le cœur et l'aorte dont j'ai pu suivre les progrès pas à pas. Jajouterai que dans les Anodontes comme dans les Pulmonés le canal digestif s’est formé de plusieurs par- ties primitivement isolées, et que chez elles comme chez ces der- niers nous avons vu le système circulatoire et digestif montrer d'abord, non l'organe central (le cœur, l'estomac), mais bien des dépendances excentriques de ceux-ci (l'aorte, l'intestin). Chez les uns et chez les autres la forme des organes a précédé leur texture définitive. Le système nerveux qui, dans les Pulmonés aquatiques sem- ble être le point de départ de l’organisation s’est ici dérobé à nos recherches. N’existerait-il pas encore à cette époque; et ne viendrait-il compléter l'organisme de l’'Anodonte qu’à l’époque 334. QUATREFAGES. — Développement des Ænodontes. où celle-ci, par une véritable métamorphose acquerrait sa forme et son organisation définitives? C’est là une curieuse question qui ne peut être’résolue que par des recherches ultérieures. Une chose assez remarquable, c'est que le cœur ne nous ait pas présenté de pulsations même après que le petit animal a eu quitté la branchie où avait commencé son existence. Cette cir- constance m'a tenu quelque temps en suspens sur la nature de ce renflement piriforme placé à l'extrémité de l'artère. Néan- moins la position de celle-ci qu'il était impossible de méconnai- tre, et sa marche progressive vers le lieu où se trouve placé le cœur chez ces animaux, m'ont fait penser qu'il ne pouvait pas y avoir de doute. Enfin nous appellerons l’attention sur la disposition des or- ganes qui sont tous en double chez la petite Anodonte. Si les conjectures que j'ai formées sur la nature de chacun d’eux est juste, il s'ensuit qu’à cette époque de sa vie elle a deux cœurs, deux estomacs, deux bouches , etc. Ces organes sont-ils desti- nés à se rapprocher, à se confondre chacun avec son pareil ? Ce serait là pour l'observateur une bien belle démonstration de la loi de M. Serres. Au reste leur développement n’est pas régu- lièrement symétriqne, En général ceux de la valve gauche étaient plus avancés, excepté l’aorte qui a toujours marché avec la même vitesse dans l’une et dans l’autre. Je terminerai en regrettant de n'avoir pu étendre nos re- cherches aux jeunes Unios. Mais sur une vingtaine que j'ai ou- vertes, je n'en ai trouvé aucune qui contint soit des œufs, soit des petits, ce qui doit être attribué à la saison, puisqu'il paraît d'aprés les observations de M. de Blainville que la fin du prin- temps est l'époque de la ponte pour ce genre d’Acéphales. EXPLICATION DE LA PLANCHE XII. Fig, 1. OEuf d’Anodonte au moment de la ponte ; a, le germe composé de globules très dis- tincts qui contiennent des globulins, Fig. 2, Jd. quatrième. jour ; a, le germe composé de globulins; 2. segment opaque qui de- viendra la charnière. Fig. 3. Germe au cinquième jour, «. le germe devénu triangulaire ; 4, le segment débor- dant à droite et ägauche. QUATREFAGES. — Développement des _Ænodonies. 33b. Fig. 4. Sixième jour. &; la coquille encore membraneuse; 2. le germe ou rudiment du corps; c. la charnière, . Fig. 5. Septième jour. a. la coquille distendant les parois de l'œuf : elle est encore mem- braneuse ; 4. le corps visible encore à travers la valve; c. empreinte du muscle adducteur des valves. À Fig. 6, Huitième jour. La coquille au moment de l’éclosion. à. la coquille incrustée par points; &. bande translucide et encore ligamenteuse qui entoure les valves et à laqueïle tien- dra plus tard le crochet et ses dépendances; c. empreinte du muscle; d. premières dents du crochet. Fig. 7: Même jour. Vue de la charnière. a. a. la coquille proprement dite; #. 8. la bande; c. c. ligament cardinal. Fig. 8. Dixième jour. Rudimens du crochet. a, la coquille; 2. la bande; c. le crochet, Fig. 9. Quatorzième jour. Une valve vue de profil. &. La coquille; 8. la bande; c. le cro- chet garni de ses dents; d. muscles adducteurs du crochet. Fig. 10. Anodonte ouverte. a. a. la coquille; . . la bande; c. c. les crochets; d. d. les musclesadducteurs des crochets ; e. muscle adducteur des valves ; ff. cordons ombilicaux ; g. g« ligament cardinal; 4. +, premiers rudimens du tube digestif; ë, ë. corps de l’Anodonte com- posé de globules peu distincts. Fig. 11. Vingt-cinquième jour. Le crochet et ses dépendances. @. la coquille incrustée par points ; 8. &. les bandes toujours translucides quoique incrustées; c. le crochet; d. d. sil- Jon rempli par un ligament qui unit la bande à la valve correspondante ; e.e, premiers muscles adducteurs du crochet; f. f. seconds id, Fig. 12. Terminaison des vaisseaux ombilicaux; a. a. renflemens piriformes qui terminent les vaisseaux ombilicaux; 2. un de ces vaisseaux; c.c. c. c. vaisseaux placentaires; d. d. vais= seau branchial de la mère. Fig. 13. Le crochet dépouillé de ses museles ; &. la coquilie ; &. à. la bande ; c. c. extrémité du crochet; d. d. d. les dents. N. B. On voit que la matière calcaire disséminée par points dans le crochet est en plus grande quantité le long de son axe, et qu’elle cesse entièrement en arrivant à la bande à la- quelle tient tout cet appareil. Fig. 14. Anodonte fermant sa coquille. a. a. les valves; 4, à. la bande; c« c. les crochets; d. d, premiers muscles adducteurs des crochets; e. e. seconds id. ; f. f. cordons ombilieaux ; g. petit mamelon où se termine celui que l'on voit en entier; k. muscle adducteur des valves, i. corps de l’animal. Les globules ont disparu pour faire place aux globulins. Fig. 15. Mème jour, Anodonte entr'ouverte. a. a, les valves; 4. 6. les bandes; c. c. les cros chets. L'un d'eux a été enlevé; d.d, ligament cardinal; e.e. premiers muscles adducteurs du crochet; f. f. seconds id, ; g. g. cordons ombilicaux ; 2, 4, mammelons où ils se terminent; ë muscle adducteur des valves; 4. k, aorte ascendante ici ventrale; Z, Z, intestin: Fig. 16. Quarante-cinquième à cinquantième jour, Mêmes lettres que dans la figure 14. On voit que le corps est assez développé pour qu'il semble ne pas pouvoir être contenu dans Îa coquille, Fig. 17. Même jour. N. B. Pour ne pas trop embrouiller mes figures, j'ai supprimégles indications données pré- cédemment,. a, Le foie; Ÿ, l'aorte ascendante; c, Vintestin, 336 OWEN. — Sur les Entozoaires. Fig. 18. Quatresvingtième jour. & le foie; . l'estomac. Fig. 19. Quatre-vingt-quinzième jour. a. l'intestin commençant à devenir sinueux; 4. l'aorte; c. l'estomac ; d. le cœur; e. le foie ; f. f. f. lacunes laissées entre les globulins qui for- ment la masse du corps, qui plus tard s'organisent en vaisseaux veineux. Fig. 20. Anodonte trois jours après la sortie des branchies de la mère. a. a. l'intestin ; 8. b. l'aorte; c. c. l'estomac; d. d, la bouche; e. e. le cœur ; f. ff. f. vaisseaux veineux ; Le ge artère mésentérique ; k. L. vaisseaux que l'on distingue à travers le muscle et dont je n’ai pu préciser la nature, Fig. 21. Coupe de l'épaisseur de la coquille. On voit de quelle manière Ja matière calcaire a été primitivement disposée. REMARQUES sur les Entozoaires considérés en général et sur les modifications d'organisation qu’ils présentent en particulier : accompagnées de quelques considérations sur la place que leurs différens genres doivent occuper dans une classification naturelle. Par M. R. Owen. (1) Dans mes recherches sur le petit Entozoaire humain auquel j'ai donné le nom de 7richina, j'avais éprouvé une difficulté considérable, outre celle du sujet lui-même, par la croyance où j'étais que tous les parasites internes constituent un groupe naturel d'animaux. Il est vrai qu'il était facile de s'assurer que dans le 7richina il n’y avait ni trachées, ni branchies, ni au- cune autre espèce d'organe respiratoire, que les organes véri- tables de la circulation manquaient complètement , et qu'il n’y avait aucun vestige d'appareil nerveux dans cet animal vermi- forme: mais d'autres caractères négatifs, tels que ceux offerts par l’appareil digestif, et en particulier la disposition de ses or- ganes d'adhérence et de succion, le séparent de tous les Ento- zoaires connus jusque alors, d’une manière aussi tranchée que les autres caractères négatifs mentionnés plus baut, le séparent des vers d’un ordre supérieur. La plus grande partie de la définition que Cuvier donne des (x) Traduit de l'anglais (Trans, of the Zool, Soc. vol. r, part, 1v.) OWEN. == Sur les Entlozoaires. 337 Entozoaires se rapporte aux localités où ces animaux se trou- vent, aux moyens thérapeutiques qu’ils exigent et aux phénomè- nes de leur reproduction ; tandis que les véritables caractères à l’aide desquels il les sépare des autres groupes ne sont que négatifs. On n’aperçoit aux vers intestinaux ni trachées, ni branchies, ni aucun autre organe dela respiration, et ils doivent éprouver les influences de l’oxigène par l'intermédiaire des animaux qu'ils habitent. Ils n’offrent aucune trace d’une vraie circula- ton, et l’on n’y voit que des vestiges de nerfs assez obscurs, pour que plusieurs naturalistes en aient révoqué l'existence. Cuvier ajoute ensuite : « Lorsque ces caractères se trouvent réunis dans un animal, avec une forme semblable à celle de cette classe, nous ly rangeons, quoiqu'il habite dans l’inté- rieur d’une autre espèce. » (1) __ Sil avait appliqué avec rigueur cette définition, les Yïbrions de Müller auraient été rangés dans le règne animal parmi les Entozoaires ; et il serait difficile de déterminer quelle modifica- tion des formes extérieures suffirait pour exclure une espèee dépourvue d'organes de respiration et de circulation, d’une classe, qui, même dans le système de Cuvier, renferme des ani- maux de presque toutes les variétés de formes. Heureusement, cependant, la présence de cils vibratiles, qui servent plus ou moins à la respiration, fournirait un bon caractere pour sépa- rer des Entozoaires les infusoires les plus simples, mais tous ceux qui sont dépourvus de cils (2), et qui ne produisent pas de cou- rans quand on les place dans un liquide coloré, devaient être encore rangés à côté des vers intestinaux. Rudolphi,dans son Historia Entozoorum, crutavoir surmonté la difficulté d’assigner aux Entozoaires des caractères distinc- tifs, en niant qu'il existe dans ces animaux un appareil nerveux, circonstance qui les séparerait des Annélides ; mais dans un ou- vrage publié plus tard, son Synopsis Entozoorum (3), il recon- \) Aègne anim. nouv. ed. t, rt. p. 246. (2) Les Amblyura serpentulus Ehr., les Anguillula Aceti, Anguillula Glutinis. (3) P. 572. V, Z001. — Juin. 22 338 *OWEN. — Sur les Eniozoaires. naît qu'il s'était trompé, et en conséquence propose de séparer les Vematoidea d'avec les autres ordres d’'Entozoaires, pour les réunir aux Annélides où ils devraient former une fanille dis- üncte: et il laisse les autres Entozoaires, c’est-à-dire, les vers in- testinaux parenchymateux de Cuvier, parmi les Rayonnés ou Zoophytes, qu'il désigne avec justesse par l'expression regnum chaoticum. A l'égard des rapports des Nématoïdes avec les vers à sang rouge, fe présence manifeste d'organes respiratoires, celle pi vaisseaux dans lesquels circule du sang rouge, chez ces der- niérs animaux, et surtout l'absence de ganglions sur les fila- mens nerveux 4 sont les organes du sentiment et du mouve- ment chez les Nématoïdes suffisent pour établir entre eux une limite marquée dans toute classification naturelle. Comme les Nématoïdes ou versintestinaux cavitaires diffèrent autant des vers parenchymateux, par la présence dans les pre- miers, d'un système nerveux manifeste, qu’ils diffèrent des An- nélides par la forme de ce même appareil, j'ai été amené à les réunir à tous les Radiaires qui se distinguent des autres divisions du règne animal, par la présence d’un système nerveux offrant la forme de filamens simples, sans ganglions et sans anasto- moses. Par suite de ces considérations, et dans la vue d'établir une division plus naturelle de l'embranchement des Rayonnés que Ton n'a fait jusqu'à présent, je propose de séparer ces êtres en deux groupes fondés principalement sur les deux états que pré- sente leur système nerveux, c’est-à-dire, l’état moléculaire et l’é- tat filiforme. La nécessité d'une division analogue parait avoir été sentie par tous les naturalistes qui ont étudié les affinités naturelles de cel embranchement qui occupe la partie la plus inférieure de l'échelle animale ; car les Rayonnés de Cuvier renferment des animaux qui diffèrent beaucoup les uns des autres. non-seule- ment à l'égard de leur système nerveux, mais aussi en ce qui concerne plusieurs autres systèmes d'organes, de manière qu'il est impossible de dire d’avance par le moyen de la classification quelle serait la structure des appareils locomoteurs, excrétoi- owenx. — Sur les Entozoaires. 339 res, digestif, sensitif ou générateur, d'un animal en particulier pris dans telle ou telle division. Le savant entomologiste, M. W. S. Mac Leay, dans une es quisse des rapports naturels des animaux qui fait partie du se- cond volume de ses Horæ entomologicæ, a proposé de limiter la dénomination de Rayonnés aux Æchinodermes et aux Aca- lèphes de Cuvier, qui seuls, comme il le remarque avec justesse, présentent rigoureusement la forme radiée du corps, et de créer une division du règne animal qui, sous le nom d’Acrita, renfermerait les Infusoires, les Polypes et les Entozoaires pa- renchymateux : pendant que les vers intestinaux cavitaires se- raient rapportés aux animaux articulés, sans être confondus cependant avec les Annélides, comme l'avait voulu Rudolphi; mais pour être réunis avec les Epizoaires de Lamarck et consti- tuer une classe qui devrait être placée entre les Anoplura du docteur Mac Leay et les Chilognathes. La disposition filamenteuse simple du système nerveux dans ces animaux, qui s'oppose à la manière de voir de Rudolphi, s'oppose également à celle de Mac Leay. Ils ne peuvent pas être réunis aux Ænnélides ni rapprochés d'aucun de leurs groupes. Les Acrila de Mac Leay sont ainsi définis. « Animalia gelatinosa polymorpha, interaneis nullis, medullà. que indistinctà. « Os interdum indistinctum, sed nutritio absorptione externà vel internà semper sistit. Anus nullus. « Reproductio fissipara vel gemmipara, gemmis modo exter- nis modo internis , interdum acervatis. « Fleraque ex individuis semper cohærentibus animalia com- posita sistunt. » Cette définition ingénieuse et concise était conforme à état des connaissances anatomiques et zoologiques de l'époque, mais quatorze années de recherches postérieures couronnées par des découvertes dont les plus brillantes se rapportent à la structure et aux fonctions des classes inférieures du règne animal, la ren- dent aujourd'hui peu propre à donner une idée exacte de l'or- 224 340 OWEN. — Sur les Entozoaires. ganisation de ces animaux, qu'on avait ainsi réunis dans un groupe plus ou moins naturel. Les belles découvertes du professeur Ehrenberg sur les orga- nes digestifs des Monades démontrent non-seulement l’exis- tence d’une cavité digestive, interne, compliquée, dans les Ægas- tria de M. de Blainville, mais aussi la présence d’une ouverture anale manifeste dans beaucoup de genres de ces animaux très simples. Ainsi la nécessité d’une absorption extérieure pour ser- vir à la nutrition n’est nullement démontrée même dans les êtres les plus inférieurs. On doit regarder comme offrant les mêmes rapports avec le système digestif les pores fécaux des Spon- giaires. * Les organes de la reproduction dans ces animaux ont peu de rapports avec la perfection des espèces : le T'œænia ne se pro- page, ni par séparation spontanée, ni par bouture, mais par de véritables œufs, souvent formés et contenus dans des ovaires dis- tincts qui sont placés un à un dans chaque article : les œufs que contiennent ces réceptacles sont ordinairement d’autant plus développés, que l'anneau qui les contient, s'éloigne davantage de la tête, et quoique ces ovaires aient des orifices distincts au mi- lieu ou sur les bords des anneaux, cependant ces derniers se détachent en général lorsque les œufs contenus dans les ovaires s'approchent de la maturité et ressemblent en quelque sorte aux ovaires extérieurs des ZLernées et des Monocules. Chez le Trematodes et autre groupe de Vers parenchymateux , des glandes fécondantes ont été ajoutées à l'appareil femelle, etquel- ques physiologistes supposent avec Cuvier que la génération est eflectuée par Intromission réciproque. Enfin des sexes sépa- rés sont assignés aux Æchinorhynques dont l'organisation est la plus élevée parmi les Vers intestinaux parenchymateux. Ainsi les organes de la génération ne fournissent pas de ca- ractères applicables à tous les Acrita de Mac Leay; et nous avons vu également qu’on ne peut pas attribuer à tous un simple sac digestif sans ouverture anale: et'ici on peut observer en général, que c’est seulement à l'égard du système nerveux, qu'on peut assigner des caractères communs à toute une divi- sion primaire du règne auimal. Owen. — Sur les Eniozoaires. 341 Les divisions qui présentent des globules nerveux disséminés sont les Polygastriques, les Éponges, les Polypes et les Acalè- phes et de plus les Vers parenchÿ mateux de Cuvier ou Vers mol- lasses de Lamarck, dont je proposerai de former un groupe de la division des Acrita, sous le nom de Sterelmintha. (x) Mais de même que les Acrita, placés tout-à-fait au bas de l’é- chelle animale présentent des analogies avec les premiers états de développement des classes supérieures dans lesquelles les changemens d'organisation de l'embryon se succèdent avec la plus grande rapidité , nous trouvons que les différentes espèces dans chaque classe éprouvent successivement des modifications qui les rapprochent non pas des Acrita qui leur succèdent im- médiatement, mais de quelques-uns des animaux des classes supérieures du règne animal, dont le type des 4crita semble présenter les germes. À cause de cette tendance dans les Zcrita à monter dans l'échelle, 11 devient beaucoup plus difficile de poser des ca- ractères organiques qui les distinguent des êtres appartenant à des classes plus élevées. Même à l'égard du système nerveux dans les Polypes, nous sommes amenés pas à pas des Jydra aux Actinia, chez lesquels cé système, jusque-là globuleux commence à prendre un arrangement filamenteux autour de l’orifice oral; et de même, si nous parcourons les Sterelmintha depuis l'Hy- datide jusqu’à l’£chinorhynque , nous verrons dans ces derniers entozoaires, dont l’organisation est très developpée, des traces de filamens nerveux allongés; différentes espèces d’Acalèphes offrent également la forme agrégée du système nerveux. Mais même, en supposant que toutes ces exceptions à la règle gé- nérale soient bien fondées , que ces filamens soient de véritables filamens nerveux, les êtres dans lesquels l’état disséminé du système nerveux existe, sont sinombreux en proportion de ceux dans lesquels on voit l'état agrégé de ce même système, qu’on (1) Zrepecs, Solidus, &uave, mot appliqué par les anciens aux vers intestinaux qui étaient divisés en é&yuv0eg GTRYYYA AL où Antestinalia teretia, et en épaves mAurstur ou Zntestinaliæ lata, 342 OWEN. == S#r les Entozoaires. peut sans inconvénient regarder cet état comme le caractère principal des Acrita. (1) Jai déjà fait remarquer que l'absence d’une ouverture excré- mentitielle du canal digestif ne suffit pas comme caractère dis- tinctif des Acrita ; mais 1l ÿ à un état de l'appareil digestif qui est applicable à presque tous les individus de cette classé autant que l'est la disposition disséminée du système nerveux : dans ces animaux Pintestin n'est pas séparé de la peau par une cavité abdominale, au contraire quelle que soit la forme de la cavité intestinale elle consiste en une simple excavation du paren- chyme de animal. Le petit nombre de genres qui ne présen- tent pas ce caractère sont justement ceux dans lesquels Pexis- tence de filamens nerveux est la moins douteuse, comme par exemple les Zctinia et les Beroë. Il est heureux pour le natura- liste systématique qu'il y ait si peu d’exceptions à la règle géné- rale en ce qui regarde le système nerveux et digestif des Æcrita : car on peut affirmer que l'existence d’une disposition filamen- teuse de la substance nerveuse en même temps que la présence d’une cavité abdominale et des parois intestinales du canal ali- mentaire suffit pour caractériser les véritables Rayonnés d’avec lesquels les crita doivent être distingués. Par conséquent dans les Acrita, nous trouvons une cavité (x) Le professeur Ebrenberg a récemment attribué à la Wedusa aurita des organesvisuels dis- tincts qui se présentent sous la forme de petits points rouges sur la surface de huit masses de couleur brune rangées autour de la circonférence du disque ; ces masses consistent chacune dans un petit corps ovale ou cylindroïde, jaunâtre, avec un petit pédoncule délié. Ce pédoncule très peu allongé s'élève d’une vésicule dans l’intérieur de laquelle on voit un corps glanduleux , libre, de couleur jaune vu par la lumière transmise, et blanchâtre par la lumière réfléchie. C'est sur la surface dorsale du corps jaune qui surmonte le Pédoncule, qu’on apercoit le petit point rouge bien arrété que le professeur Ehrenberg prend pour un œil. 11 compare les yeux des Meduses à ceux des Rotifères et à ceux des Entomostracés. Le corps glanduleux placé à la base du pédoncule est regardé par lui comme un ganglion optique qui a des rapports avec deux filamens qui s’entrecroisent à-peu-près vers le milieu de leur trajet. Il pense que ces filamens appartiennent à un cercle nerveux qui, dans la plus grande partie de son trajet, longe la base de la rangée de tentacules , de manière à former pour ainsi dire la paroi antérieure du vaisseau circulaire ou appendice de la cavité digestive qui entoure le bord du disque. Ehrenberg décrit en outre un autre cercle nerveux, composé de quatre masses ganglioniformes disposées autour de la bouche, chacune de ces masses étant en rapport avec un groupe corre dant de tenta- cules, — (Mülleri Archiv’s 1834. p. 662 , et Annales des Sc. Nat. 2° série, t, 4, p. 290.) OWEN. — Sur les Enfozoaires. 343 digestive intérne, un des caractères les plus importans et les plus généraux du règne animal. Dans les Sterelmintha, comme dans le plus grand nombre des Acrita, il n’y a qu'une seule commu: nication entre la cavité digestive et l'extérieur du corps. Les genres Cœnurus paraissent seuls faire exception. Dans ce genre en effet, comme dans les Zoophytes composés, la nutrition s’ef- féctue par le moyen d’une bouche, maïs sans aucun anus. Le système vasculaire dans les Acrita, quand on peut en trou- ver des traces, répond à l’état du système digestif, et comme ce dérnier consiste en des canaux réticulés enfoncés dans le parenchyme du corps, sans présenter des paroës proprement dites; ces vaisseaux sont ordinairement superficiels, et on aper- coit dans leur intérieur une sorte de tourbillon des fluides nutritifs , analogue à celle qu'on peut observer dans certaines plantes; mais il n’y à pas une véritable circulation. On rencon- tre cétte disposition en descendant l’échelle jusqu'aux Polygas- triques, dans lesquels le professeur Ehrenberg a reconnu l’exis- tence de canaux superficiels, hyaloïdes, Dans les genres de Ste- relmintha qui manifestent des traces d'un système sanguin on aperçoit une sorte d'ondulation dans des canaux qui ressem- blent par leur forme, par leur position et par leur structure, à ceux qui se trouvent chez les Trematoda et surtout dans les Planariées et dans les Æchinorhynques ; plusieurs espèces de ce dernier genre présentent un réseau vasculaire cutané d’une grande richesse. (1) Parmi les Æcalèphes, le genre Méduse présente un système vasculaire tout aussi simple que celui des 4crita les plus infé- riéürs , comme on peut voir dans le réseau vasculaire margi- nal du disque du Ahëzostoma, et si on compare cette structure avec les vaisseaux bien plus développés dés Æchinodermes, on sera disposé à croire que les Zcalèphes doivent être rangées dans la division la plus simple des Rayonnés de Cuvier. S'il est vrai, comme on affirme, que les Méduses ne produisent pas des œufs, mais des gemmules garnies de cils et doués de locomotion , nous avons une raison de plus pour ranger les (1) Echirorhynchus vasculosus, Aud, sys R. 587. 344 OWEN. — Sur les Entozoaires. Acalèphes parmi les Zcrita où l'on remarque seulement le mode de reproduction analogue à celle des plantes, c’est-à-dire celle qui s'opère par des gemmules internes, ou externes, ou par séparation spontanée. Ce caractère ne s'applique pas cependant à tous les Acrita , car les Séerelmintha se propageant par des œufs, possèdent des organes de génération manifestes et séparés des organes diges- tifs. Ces organes sont ou cryptandres, c'est-à-dire productifs sans imprégnation, comme dans les Cystica et dans les Cestoï- des, on bien une glande fécondante est surajoutée aux ovaires, comme dans les Trematodes; ou enfin les sexes sont séparés comme dans les /cantocephales. Ainsi donc presque tous les modes de reproduction qu'on observe dans les classes supérieu- res du règne animal se montrent chez les Acrita. Ainsi, nous voyons que, dans ce sous-règne des Æcrites, tous les organes , à l'exception de ceux de la digestion et de la reproduction, sont plus ou moins confondus ensemble, et que le parenchyme de leur corps paraît remplir plu- sieurs fonctions. On voit aussi que quand un organe se dessine nettement il est répété souvent d’une manière pres- que indéfinie dans le même individu. Ainsi, dans les Polypes, les canaux de la nutrition s'ouvrent fréquemment à l'exté- rieur par mille bouches, et les Polygastriques doivent leur nom à une multiplication analogue de la cavité digestive. Dans les Sterelmintha lesystème générateur devient le sujet de cetterépé- tition: ainsi chaque articulation du Tænia est le siège d’un ovaire séparé, quoique toutes ces articulations doivent leur nourriture aux prolongemens des mêmes tubes digestifs simples. Encore dans les Æponges calcaires et siliceuses, qui les premières de tout le règne animaloffrent, pour ainsi dire esquisse d’un sque- lette interne, lequel en se développant semble les dépouiller u peu de traces de vie qu'elles possédaient antérieurement , on voit que l'organisation se borne à répéter continuellement dans toutes leurs parties ce squelette rudimentaire. Les puissances formatrices étant ainsi dirigées sur un petit n bre d'opérations simples, et non pas concentrées sur un seul système , il n’est nullement étonnant de trouver dans les OwEN. — Sur les Entozoaires. 345 Acrita une très grande diversité de formes extérieures; presque tous les types de l’organisation animale se trouvent comme ébauchés dans cette classe d’êtres. « La nature, dit Mac-Leay (1), bien loin d’agir sans ordre en commençant son ouvrage , nous a donné dans ces animaux imparfaits, l’esquisse, pour ainsi dire, des différentes formes qu’elle avait l'intention d'adopter plus tard pour tout le règne animal. » Ainsi dans la masse mu- queuse et presque inerte des Sferelmintha, on retrouve les traits principaux des Mollusques(2). Dans la masse charnue vi- vante qui environne l’axe terreux et creux des Polypes nageurs, on voit les vestiges d’un animal vertébré; dans l'enveloppe crus- tacée de la masse vivante des Polypi vaginati et dans leur struc- ture plus ou moins articulée, nous apercevons les premières indications du type des animaux articulés. Ayant été ainsi amenés par des considérations sur la place que les Trichina doivent occuper dans un arrangement natu- rel, à passer en revue la classification générale des Ænto- zoaires , et les affinités entre les autres classes de Rayonnés et à examiner si cette division du règne animal doit être conservée comme Cuvier l'avait établie, je viens maintenant jeter un coup- d'œil sur les Entozoaires qui n’appartiennent pas au groupe des Sterelmintha, et je les considérerai sous le point de vue de leurs rapports avec les Radiaires qui restent après qu’on en a détaché les Acrita. Je propose de diviser les vers cavitaires de Cuvier qui renfer- ment les Vematoidea de Rudolphi, les vers rigidules de Lamarck, etles genres Nemertes et Linguatula (Pentastoma Rud.), en deux sections, dont la première sous lenom de Cælelmintha (3),com- prendrait les Nematoidea et genres Linguatula et Sipunculus , tandis que l’autre serait formée par les vers rigidules et aurait le titre d’/pizoa. Les recherches récentes du docteur Nord- (x) Horæ Entomologieæ , vol. x. part. 11, p. 228: (2) Cependant les Mollusques se lient d’une manière plus intime avec les Polypes composés par l'intermédiaire des genres Botrylla, Eschare et Cellaire; tandis que les Tremadotes eon- duisent évidemment aux Annélides suceurs , tels que les Sangsues, etc. (3) Kocs, cavus ; oyave lumbricus. 346 OWEN. = Sur les Entozoaires. mann, démontrent que beaucoup d'animaux de cette dernière section présentent, dans leur condition primitive et libre, une organisation bien supérieure à celle qu'ils offrent après s'être fixés sur les animaux qu'ils infestent. Ges deux sous-divisions ont chacune un système ner- veux, quon peut appeler filamenteux , analogue à celui des Æchinodermes et des Rotifères du professeur Ehren- berg, car dans tous ces animaux de simples filamens ner- veux dépourvus de ganglions, et dont le nombre et la direc- tion varient suivant la forme de l'animal, partent d’un point placé auprès de la partie supérieure du canal alimentaire. Cette condition du système nerveux est accompagnée d'un dévelop- pement très apparent de l'appareil musculaire et surtout de la tunique musculaire du tube digestif, lequel flotte libre dans l'intérieur d’une cavité abdominale, et tous, à la seule excep- tion de la famille des Echinodermes, ont une ouverture anale manifeste. Il n’y a plus dans cette division aucun exemple de reproduction fissipare ni gemmipare.Dans les Echinodermes qui se rapprochent des Po/ypes à tuyaux par l'intermédiaire des En- crinites immobiles, pédiculés, le fluide nutritif circule dans des artères et dans des veines distinctes ; et dans les Zolothuries un véritable appareil respiratoire est sur-ajouté. Si on suit la série animale depuis les Echinodermes qui présentent l'aspect vermi- forme allongé et en même temps une sorte de ramollissement de la croûte qui les revêt à l'extérieur, on arrive par une transi- tion facile et naturelle en parcourant les Sipunculi aux Cælel- mintha ; et je crois que ces deux derniers groupes ont entre eux des rapports plus intimes que n’en ont les Sipunculi avec les Echinodermes , et je me fonde sur l'absence des organes de respiration êt des pieds tubulés dans le premier, sur des traces obscures d’un appareil vasculaire et sur l'aspect de leur système nerveux. Les Cælelmintha ainsi établis présentent les mêmes variétés dans les organes de la génération que les Sterelmintha. Nous trouvons l'appareil femelle sans les organes fécondans, ou le type cryptandre, dans les Siépunculi ; dans les Linguatula on voit s'ajouter des glandes mâles, mais sans fécondation réci- owEx. — Sur les Entozoaires. 347 proque, et enfin des sexes séparés se présentent dans les We- matoidea. Si nous distribuons les parasites internes du corps humain selon cet essai de classification naturelle des Entozoaires, on verra que ces animaux appartiennent au moins à trois classes distinctes du règne animal. ENTOZOA HOMINIS. Sub regnum ACRITA. Classis (INFUSORIA Cu.) 1. Cercaria seminis. (2) Cui locus seméen virile. Trichina spiralis. Musculi voluntari. » Classis SrERELMINT HA. 3. Echinococcus hominis. Hepar. 4. Cysticercus Cellulosæ. Musculi, cerebrum. 5. — visceralis. Viscera generatim. 6. Tœnia solium. Intestina tenuia. 7. Bothriocephalus latus. Intestina tenuia. 8. Polystoma venarum. Venæ. 9. — Pinguicola. Ovaria. 10. Distoma hepaticum. Vesica fellea. : Sab regnum NEMATONEURA. (5) Classis CzLezminra. 11. Ascaris vermicularis. Intestinum rectum. 12. — lumbricoides. Intestina tenuia. 13. Strongylus Gigas. en. 14. Spiroprera Hominis. Vesica urinaria. 15. T'ricocephalus dispar. Cœcum, intestina crassa. 16. Filaria bronchialis. Glandulæ bronchiales. 17. — Medinensis. Substantia cellalosa. 18. — Oculi. Oculus. ; (x) Comme la disposition de la cavité digestive n'a pas’ été observée dans ce genre et dans celui qui le suit immédiatement, on ne peut pas les ‘classer parmi Les Polygastriques d'Eh- renberg. (2) vue filum , et nevpon nervus ; expression ‘qui désigne l’état du système nerveux qui sépare les Cælelmintha et les Epizoa des animaux articulés et les rapproche des £chinodermes et des Aotifères, 548 FALCONER ET CAUTLEY. Descrrprion du Sivatherium giganteum, nouveau genre de Ru- minans fossiles de lu vallée de Markanda , dans la branche Sivälek des montagnes inférieures de l'Himalaya, Par MM. Hueux Farcower , MD. Directeur du Jardin botanique de Scharanpur, Et le capitaine Cavwrrey, Surveillant du Doab-Canal. (x) Le fossile dont nous publions ici la description est une nou- velle acquisition pour la Zoologie antédiluvienne, et ce fait seul suffirait pour y donner de l'intérêt; mais il mérite surtout de fixer l'attention à cause de ses grandes dimensions qui dé- passent celles du Rhinocéros, de la famille à laquelle il appar- tient, et du mode de conformation qu’il présente. Le Sivatherium est, en effet, un des animaux perdus les plus remarquables que lon ait encore rencontré dans les couches peu anciennes de la terre. Tous les genres de mammifères fossiles, découverts et fondés par Cuvier, appartenaient à l’ordre des Pachydermes, les espèces qui se rapportaient à d’autres groupes ayant toutes leur repré- sentant actuellement vivant sur la surface du globe. Parmi les Ruminans, on n’a encore rencontré aucune déviation remar- quable des types actuels, et les espèces fossiles sont extrême- ment voisines des espèces récentes. Cependant, d’après la position isolée des Girafes et des Chameaux, il était présumable que certains genres, actuellement perdus, avaient jadis formé le passage entre ces animaux, les autres Ruminans et les Pachy- dermes. Or, le Sivatherium est précisément dans ce cas, car il (x) Ce mémoire vient de paraître dansle Journal of the Asiatie Society of Bengal qui se pu- blie à Calcutta, et qui contient plusieurs articles très intéressans sur les fossiles découverts ré- cemment dans l'Himalaya ( janvier 1836). Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 349 établit une liaison entre les Ruminans et les Pachydermes, et offre en même temps des particularités individuelles si mar- quées, qu'il n’a pas d’analogue parmi les animaux connus ap- partenant à l’un ou à l’autre de ces ordres. Le fossile, d’après lequel nous avons établi le genre dont la description va nous occuper, est une tête dans un état de con- servation remarquable. Lorsqu'on la découvrit, elle était heu- reusement si enveloppée dans une masse de pierre, que toutes les parties les plus importantes étaient restées intactes, bien que, pendant long-temps, elle eût été exposée à l’action d’un courant d'eau; le quartier de roche où elle était logée aurait même pu échapper à l'attention, si dans un point le bord des dents n’avait fait saillie à sa surface. Après un travail long et difficile, on est parvenu à enlever la gangue terreuse, de maniere à mettre à nu cette énorme tête avec ses cornes, ses os nasaux élevés en voûte au-dessus du chanfrein, et toutes ses dents molaires; les seules mutilations consistent dans la fracture de l'extrémité des cornes, du sommet du crâne, là où le plan occipital se joint au plan des sourcils, et de l'extrémité du mu- seau. Enfin, les seules parties encore engagées dans ja pierre sont une portion de l'os occipital, les fosses zygomatiques des deux côtés, et la base du crâne dans le point occupé par le sphénoïde. La forme de cette tête est très singulière (1). Les traits les plus remarquables sont : 1° son volume, qui approche de celui de la tête de l'éléphant; 2° l’immense développement et la lon- gueur du crâne derrière les orbites; 3° les deux axes osseux des cornes qui naissent du sourcil entre les orbites et s’écartent lun de l'autre; 4° la forme et la direction des os nasaux qui s'élèvent beaucoup au-dessus du chanfrein et se prolongent en une voûte pointue au-dessus des narines externes; 5° la forme massive, la largeur et la brièveté de la face en avant des orbites; f° le grand angle sous lequel la surface triturante des molaires supérieures s’écarte de la direction de la base du crâne. Vue de profil, cette tête ne ressemble à celle d'aucun autre (1) Voy, pl. 12. 350 FALCONER ET CAUTLEY. animal, tant à çcause de la direction et de la forme. des cornes, que de l’élévation et de la courbure des os nasaux. Le nez ressemble un peu à celui du Rhinocéros, mais cette appa- rence est illusoire, et dépend seulement de ce que le museau est tronqué. Vue de face, ja tête parait avoir à-peu-près la forme d’un coin, sa plus grande largeur étant au vertex, et ses dimensions diminuant graduellement de là jusqu’au museau; des rétrécissemens brusques s’observent seulement en arrière des orbites et sous les molaires, Les arcades zygomatiques ne sont nullement saillantes et même presque cachées; le sourcil est large, plat et renflé latéralement, de manière à former deux convexités ; les orbites sont écartés et ont l'apparence d’avoir été projetées en avant à cause du grand prolongement de l'es frontal vers le haut. 11 n’y a ni crètes ni lignes saillantes; la sur- face du crâne est lisse, et présente des lignes courbes sans an- gles. Enfin, depuis le vertex jusqu’à la racine du nez, les os suivent un plan droit et offrent une légère élévation entre les cornes. $ 1. Des dents. — Les dents molaires sont au nombre de six de chaque côté à la mâchoire supérieure; la troisième de la série ou dernière molaire de première dentition a été remplacée par la dent permanente correspondante, et l’usure de celle-ci et de la dernière molaire est assez avancée, ce qui indique que l'animal avait déjà passé l’âge adulte. (PL 12. fig. 2.) Les dents sont, sous tous les rapports, celles d’un Ruminant n’offrant que de légères particularités individuelles. Les trois dernières mâchelières ou grosses molaires sont chacune composées de deux portions ou demi-cylindres renfer- mant chacun, lorsqu'ils sont usés, un double croissant d’émail dont la convexité est tournée en dedans. De même que chez les Ruminans, la dernière molaire ne présente pas d'autre compli- cation comme dans la molaire correspondante d’en bas. Ea sur- face triturante est inclinée du bord externe en dedans, et la forme générale est exactement celle des dents du Chameau ou du Bœuf, mais avec des dimensions plus considérables. Les crètes d’émail sont inégalement saillantes et les dépressions Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 35x situées entre ces lignes sont inégalement creusées. Enfin chaque demi-cylindre présente; dans la section horizontale, sur la sur- face externe, trois tubercules sailians ou arcades avec des sinus intermédiaires, et du côté externe une courbure simple. D’autres particularités distinguent ces dents de celles des Ruminans; ainsi, par suite du raccourcissement de la mâchoire, les dents sont beaucoup plus larges comparativement à leur longueur, la largeur de la troisième et quatrième molaires étant à leur longueur sous les rapports de 27%%,24 à 1,55 et 9f-,2 à 1,68. Leur forme est aussi moins prismatique; le corps de la dent présente, à sa base, un renflement en forme de collet, à partir duquel sa face interne s'incline en-dehors, de façon que la couronne se rétrécit un peu, Dans la troisième molaire, la largeur de la couronne n’est que de 1,93, tandis que le dia- mètre du collet est de 2,24. Les saillies et les creux de la surface externe des dents descendent aussi moins bas sur le corps et disparaissent sur le collet; il n’y a point de colonnes accessoires sur le sillon de jonction à la face interne; et les croissans d'é- mail présentent un caractère qui les distinguent des dents de tous les Ruminans connus, car la lame interne, au lieu d'offrir une courbure presque simple, décrit des zigzags à-peu-près de la même manière que chez l'Elosmatherium. Entre elles, ces grosses molaires ne diffèrent que par le degré de leur détrition; l'antépénultième est la plus usée, etles ‘a- mes en croissant moins courbes, plus rapprochées et moins distinctes. Les trois mâchelières antérieures ou molaires simples ont la forme ordinaire chez les Ruminans, savoir, celle d’un demi- cylindre simple avec une seule paire de lames en croissant. La première est très usée et mutilée; la seconde est plus entière, ayant fonctionnée pendant moins long-temps, et mioritre très bien les courbures flexueuses de la lame d'émail quai forme le croissant; la dernière présente la forme simple de la dent de seconde dentition qui remplace la dernière molaire de lait, et elle montre aussi la disposition onduleuse de l'émail. Quant à la position des dents dans la mâchoire, il est à noter que les quatre dernières molaires, savoir, les trois mo laires per- 352 FALCONER ET CAUTLEY. manentes et la dernière de lait sont placées sur une ligne droite, et que les deux séries sont paralleles entre elles; mais les deux premières molaires se dirigent tout-à-coup en dedans, et si ce changement dans leur alignement n'existait pas, les deux rangées de dents auraient représenté exactement les deux côtés d’un carré équilatéral, la longueur de chacune de ces rangées et la distance qui sépare les dents étant presque la même, savoir, o pouces 8 lignes et 9 pouces 9 lignes. Le plan suivant lequel la détrition s’est opérée sur la ran- gée entière de dents d’arrière en avant n’est pas horizontal, mais légèrement courbe et dirigé en haut, de manière à former, avec la base du crâne, un angle assez fort; aussi, lorsque la tête est posée sur les condyles et les dernières molaires, le plan qui traverse ces points est coupé à un angle d'environ 45° par la ligne correspondante au plan de détrition des molaires, et cette particularité’est un des traits caractéristiques de cette tête. Voici les dimensions des dents dont nous venons d’étudier la forme. Longueur. Largeur. Dernière molaire du côté droit. . . . . . . . . « .. — 2.35 (1) Peénultième, id. TUE SEA hs EF Be, Je 200 2.38 Antépénultième, M ina due red ou ee CES 2.20 Dernière molaire simplé. +: : - +... "ets. 1:09 2.24 Deuxième ONE EL SEE OR PS PO EETE 1.9 Première RIRE ER TU HMS LATE T7e 1.90 Du côté Du côté externe. interne, Hauteur de la dernière molaire. . . .,. . . . « + « . 99 5.5 _ EME ==. et. EI = [LS 5.5 — SECONTC MOMITO US eme ts vol ete alle tatre OUE 4.5 == premiére molaire. . .:. ... . . . + . 6.4 3.2 Longueur totale de la série des molaires. . . . . . . . 9 p.81. $ >. Des os de la téte et de la face. — Par suite de l’âge de l'animal auquel cette tête appartenait, tous ses os s'étaient soudés entre eux de manière à ne plus laisser de traces de leurs sutures, et à faire disparaitre complètement leurs limites respectives. L’os frontal est large, plat et légèrement concave dans sa (1) Toutes les mesures employées dans ce Mémoire sont des pouces anglais. Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 353, moitié supérieure; sur le vertex , il présente latéralement deux renflemens considérables et décrit une large courbure en des- cendant vers les os temporaux. Antérieurement, il se rétrécit derrière les orbites, et ensuite s’élargit de nouveau et envoie à los malaire une apophyse qui complète la paroi orbitaire ex- terne; sa. largeur, dans sa partie la plus haute, en arrière de l'orbite, est de 16 p., 2. Deux apophyses coniques courtes et épaisses naissent par une base très large, en partie entre les orbites et en partie derrière ces cavités; elles se rétrécissent rapidement, de manière à se terminer en pointe; mais dans le fossile dont nous donnons la description, elles ont été mutilées près de leur extrémité. La direction de leur axe est perpendi- culaire à leur ‘base, et elles divergent entre elles sous un angle très ouvert ; enfin leur surface ne présente point de rugosités et est lisse partout. Ces apophyses sont évidemment les axes osseux de deux cornes inter-orbitaires, et par leur position aussi ‘bien que par leurs dimensions, elles rendent cette tête très re- marquable. Les connexions du frontal avec les autres os ne sont nulle part distinctes. À son extrémité supérieure, le crâne est fracturé de manière à faire voir la structure intérieure des os; les tables interne et externe sont tres écartées l’une de l’autre, et l’inter- valle qu’elles laissent entre elles est occupé par de grandes cellules formées, comme chez l’Eléphant, par des expansions Îa- mellaires du diploé osseux; dans l’occipital, l'intervalle entre les deux tables excède 2 p.r 72. Sur le côté gauche du frontal, la table externe a été enlevée sur le renflement du vertex et laisse apercevoir des moules de cellules oblongues ou en forme d’a- mandes avec des parois lisses. L'os temporal est en majeure partie caché par la gangue pier- reuse qui n’a pas été enlevée dans la fosse temporale, et on ne distingue aucune trace de la suture écailleuse; les apophyses inférieures de cet os, situées dans le voisinage du trou auditif, ont été détruites ou sont restées cachées; l'apophyse zygoma- tique est longue et va rejoindre l'apophyse correspondante de Vos malaire, en suivant une direction à peine courbe; une ligne menée le long de sa surface, passerait antérieurement par les V. 7001, — Juin, 23 354 FALCONER FT CAUTLEY. tubérosités de l'os maxillaire et postérieurement sur le bord supérieur des condyles de l’occipital; du reste, cette arcade est forte et épaisse. La fosse temporale est très longue et peu profonde; elle ne s'élève aussi que peu sur les côtés de la tête, et est dépassée par les bords de l’os frontal. La forme et la po- sition de la surface articulaire de la mâchoire inférieure sont restées cachées par la gangue. Cette tête fossile n'offre rien qui puisse servir à la détermi- nation de la forme et des limites des pariétaux, le crâne étant très mutilé dans la région occupée par ces os; mais ils parais- sent avoir été semblables à ceux du Bœuf, et s'être étendus de- puis l'os occipital jusqu’au frontal à l'angle supérieur du crâne. La forme et les caractères de Foccipital sont bien marqués. Cet os occupe un grand espace, sa largeur étant proportionnée à celle du frontal, et sa hauteur considérable ; latéralement, il se prolonge en deux ailes, qui commencent au bord supérieur du grand trou occipital et se dirigent en haut et en dehors. Ces ailes sont lisses et excavées inférieurement et extérieurement, depuis le voisinage des condyles jusque vers la région mastoi- dienne du temporal; leur bord interne se continue avec une crête, qui part du bord du trou occipital, diverge presqu’à angle droit de son congénère et limite une grande fosse trian+ gulaire, dans laquelle elle descend brusquement. Dans la tête fossile, cette fosse est en majeure partie occupée par de la pierre; mais elle ne paraît pas être superficielle, et semble être une simple modification de la conformation qui se voit chez V'Éléphant. Il n’y à pas de trace de crêté nide protubérance oc- cipitale : latéralement, dans ses points de jonction avec le tem- poral, l'os est mutilé, et là aussi bien qu’à la fracture de son bord supérieur, on voit que son intérieur est rempli de grandes cellules, formées par des lames du diploé et renfermées entre les deux tables osseuses , qui sont très écartées; cette disposition est surtout très marquée dans la portion supérieure de l'os, où les cellules paraissent se joindre à celles du frontal. Les condÿles sont très grands et très bien conservés; le plus grand diamètre de chacune de ces éminences articulaires, est de 4.4 p., et la distance comprise entre leurs deux angles extérieurs, mesurés Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 355 à travers le grand trou occipital, est de 7.4 p., dimensions qui sont supérieures à celles de V'Éléphant. Quant à leur forme, elle est exactement la même que chez les Ruminans; en effet, leur surface externe se compose de deux surfaces convexes, qui se rencontrent et forment un angle arrondi; lune, dirigée dans le sens du grand axe, s’étend obliquement en arrière depuis le bord antérieur du grand trou; l’autre, se voit en avant et au dessus du bord postérieur , leur ligne de jonction étant dans la direction du diamètre transversal du grand trou. Cette dernière surface est la plus grande, son diamètre antéro-postérieur étant de 2.5 p., et son diamètre transversal de 2.6. Les grandes di- mensions du trou occipital et des condyles, ont dû entrainer un développement correspondant dans les vertèbres et avoir modifié la forme du cou et des membres antérieurs. L’os sphénoïde et toutes les parties de la base du crâne, de- puis le grand trou occipitai jusqu’au palais, manquaient ou étaient cachés. | La partie du sourcil où commencent les os du nez n’est pas distincte ; la suture de ces os avecle frontal, étant complètement effacée, on ne voit pas comment ils s'y joignent. Entre Îles cornes, on remarque une élévation dans les sourcils, qui, un peu plus en avant, s’abaissent de nouveau, et un peu au de- vant d’une ligne réunissant les angles antérieurs des orbites, se trouve une autre élévation du sourcil. Depuis ce point, qui peut être considéré comme la racine du nez, les os nasaux commencent à s'élever, en formant avec le plan des sourcils, un angle considérable ; ils sont larges, bien arqués à leur base, et décrivent en avancant une ligne convexe, de manière à se rétrécir rapidement et à se terminer par une pointe, recourbée en bas, qui surmonte les narines extérieures. Dans une portion considérable de leur longueur ,‘ils sont unis aux os maxillaires ; mais au devant du point où ils commencent à se rétrécir, leur bord est libre et séparé des maxillaires, par un sinus très large, de façon que, vue latéralement, leur forme a beaucoup de res- semblance avec celle de la mandibule supérieure d'un Faucon, écartée de la mandibuie inférieure. Malheureusement, les bords “antérieurs des maxillaires sont tellement mutilés, qu'on ne 23, 356 FALCONER ET CAUTLEŸ. peut déterminer la longueur exacte de la portion libre des os nasaux; mais on l’a mesurée dans une étendue de trois pouces. La même cause empêche de voir à quelle distance les os nasaux s’approchent des os incisives, qu'ils ne paraissent pas toucher ; et ce point aurait été important à observer, car de là dépend la conformation des parties molles du nez. La hauteur et la forme des os nasaux constituent le trait le plus remarquable de cette tête singulière; vus en dessus, ils paraissent passer rapidement d’une base très large à une pointe aiguë, et leur hauteur ver- ticale à leur base, dans le point convexe le plus élevé au dessus du sourcil, est de 3 p. 172. La forme des maxillaires est remarquable sous deux rapports ; 1° par leur brièveté, comparée à leur largeur et à leur profon- deur; et 2° par la direction oblique de la ligne des alvéoles, qui, à partir de la dernière molaire antérieure s'élève, comme si la mâchoire avait été refoulée en haut pour correspondre à l’élé- vation des os nasaux, où joint la base du crâne, en formant un angle. La brièveté de la mâchoire a déjà été signalée , en par- lant des dimensions des dents; nous avons vu que les molaires sont comprimées, et que leur largeur dépasse leur longueur dans une proportion peu ordinaire chez les Ruminans. Nous, avons mentionné aussi la largeur des maxillaires; l'intervalle entre le côté externe des alvéoles, est égale, avons-nous dit, à la longueur de la ligne occupée par les molaires. Les tubéro- sités jugales sont très grandes et saillantes; leur diamètre à leur base est de 2 pouces, et la largeur des joues vers leur milieu, de 12.2 p., tandis qu’au niveau des alvéoles elles n’ont que 9.8 p. Elles sont situées au dessus des troisième et quatrième molaires, et une crête peu distincte monte de là vers l'os molaire. Le trou sous-orbitaire est grand; son diamètre vertical étant de 1,2 p.; il est situé au dessus de la première molaire , comme dans le Bœuf et les Cerfs. Le bout de la mâchoire est cassé à environ 2,8 p. de la première molaire, au-devant du bord alvéolaire de laquelle est une dépression subite de 1,7 p. Le museau ne présente plus dans ce point, qu’une largeur de 5,8 p., et plus en avant à la fracture, seulement 4,1. La voûte palatine est convexe d’arrière en avant, et concave transversalement, TI Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 357 ne reste aucune trace du trou palatin, ni de la suture des os propres du palais. Les apophyses sphéno-palatines et toutes les parties situées entre ces éminences et le grand trou occipital, manquent ou sont restées cachées (1). La mutilation de la portion antérieure du museau, empêche aussi de voir comment les os in- cisifs étaient réunis aux maxillaires; mais il paraïîtrait qu'ils ne s’élevaient pas en avant jusqu’au point d'union de ces derniers os avec les os nasaux. La même cause a empêché de bien re- connaître le mode d'union des os nasaux et maxillaires, ainsi que la grandeur et la profondeur de l’échancrure du sinus nasal. L’os malaire ou jugal est épais, massif et un peu saillant. Son bord inférieur est terminé brusquement par un creux, qui des- cend sous les maxillaires ; le bord supérieur concourt puissam- ment à la formation de l'orbite. I’apophyse orbitaire s’unit à une éminence correspondante du frontal, pour compléter en arrière le cadre de l'orbite. L’apophyse zygomatique est forte, épaisse et un peu aplatie. Aucune portion de l’arcade zygomati- que n’est proéminente; l’intervalle entre les points les plus sail- lans de cette arcade n'étant pas, à beaucoup près, aussi larges que la partie postérieure du crâne, et un peu moindre que la largeur comprise entre les éminences malaires. Il est impossible de distinguer la grandeur ou la forme des os lacrymaux, à raison de l'absence complète de sutures. La sur- face de la région lacrymale se continue insensiblement avec celle des parties voisines. Il n’y a pas de trou à la partie anté- rieure et inférieure de l'orbite, pour le passage du conduit lacry- mal, ni de fosse au dessous, indiquant l’existence d’un sinus sous-orbitaire ou lacrymal. Il faut aussi ajouter un fait omis ci- dessus ; savoir : que le frontal ne présente aucune trace de trou sourcilier. Les orbites sont placées très en avant, par suite du grand développement du crâne supérieurement et de la brièveté des 05 de la face; ils sont situés aussi un peu plus bas que d’ordi- aire, leur centre étant à environ 3,6 p. au dessous du niveau du sourcil. En débarrassant ce fossile de sa gangue pierreuse; on (1) Excepté une portion de la régioy basilaire qui ressemble à celle des Ruminans. 358: FALCONER ET CAUTLEY: a altéré un peu la forme du bord de ces fosses; du côté gauche, où elle est le moins altérée , l'axe de l'orbite forme un petit angle avec le plan du sourcil. Le diamètre antéro-postérieur de ces cavités, est de 3,3 p., et leur diamètre vertical de 2,7. Il n’y a point d’éminences ni d'inégalités sur le bord orbitaire, comme chez les Ruminans; sa diregtion est très oblique; l'intervalle entre le bord supérieur ou frontal des deux orbites, est de 13,2 p., et celui entre leur bord inférieur de 16,2. Voici les dimensions de la tête du Sivatherium Gigzanteum : Pouces anglais. Mètres. Du bord antérieur du grand trou occipital à 'alvéole de la première! molaire: . .'. 5 , . "1. 5901885 0.478 Du bord antérieur à l'extrémité tronquée du museau. .:. .? 20. 6 0.526 Du bord antérieur au bord postérieur de la dernière molaire. 10. 3 0.262 De la pointe des os nasaux au bord fracturé supérieur du erège en Lené.dralle. D on ane Ma colin ie tonte i8io 0.456 De la pointe en suivant la courbure. . . . . . . . . , 19.0 0.482 De celle à l’endroit où la voûte du nez commence à s'élever au dessus du sourcil (en suivant la courbure). . . . + 7. 8. 0.198 De ce dernier point jusqu’à la fracture du nez. . . . . . 11. 2. 0.284 De l'extrémité des os nasaux au niveau de l'extrémité des canine re binomette sat Ti 0.216 De l’angle antérieur de l'orbite droit à la première molaire, 9. 9 0.251 De l'angle postérieur à la première molaire, . . . . . . . 12.2 0.307 Largeur du crâne au vertex (la mutilation du côté gauche COUPER), CONVITOR. Fos MS RL PET Ro 0.559 Largeur entre les orbites mesurées au bord supérieur. . .! 12. 2 0.309 — Id. inferieur - . .'.’ 16. 3 0.411 — en arrière des orbites dans le point où le frontal se DEN load in rfi das no: FOURS 0.370 6 — entrele en dts arcades zigomatiques. . . . . . 16. 4 0.417 — entre les éminences malaires. . . . . .« . . . .! 16.6 0.122 — dela base du crâne derrière les aph. mastoïdes. . . 19. 5 0.496 — entre les éminences jugales des os maxillaires . , + 12. 2 0.30g — dela mâchoire au devant de la première molaire . . 5. 8 0.149 à © dans le point mutilé. . . : . . . « 4.1 0.104 — entre les surfaces externes des cornes à leur base. .« 12. 5 0.312 — id. à leur extrémite _— id. fracturée. ,., 13. 6 0.347 Elévation verticale des cornes au-dessus des sourcils. .:. .. 4 2 0165 Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 359 Distance de la convexité des condyles occipitaux au milieu Es de l'os frontal entre les cornes. «+ e,+ + « + + 11. 9 0.302 — du corps du sphénoïde au même pointe AU En O0 0.232 — du milieu du palais entre les troisième et quatrième molaires à la racine des os nasaux, . . + + ele fe 5 0.192 — de la surface postérieure de la dernière molaire à Vex- trémité des os nasaux. . « . . . . . . + + + 19.0 0.33r — de la couronne de l’avant-dernière molaire à la racine ds osnamuts hum tn lu. sfr Job} 4D.14 0.262 — de la conyexité des os nasaux près leur extrémité à la voûte palatine au devant de la première molaire. 5.53 0.140 — du milieu de l'aile de l’occipital au renflement fron- unie ion ee Or Pete Ltd Er AA PRE So SEE A 5.98 0.228 — du bord inférieur de l'orbite à la couronne de la cin- quième molaire. 41, 4 4 pe. 44009 3 0.186 — de la couronne de la première molaire jusqu’au bord du palais situé au devant. . . ., - . . . .« 2. 6 0.666 — de langle antérieur de l’orbite à l'extrémité des cs RFA GAME ES SR Malta TO. 2 0.259 Diamètre antéro-postérieur de l'orbite ddl: R VAS QUA 3. 3 0.084 TRE ART Se US UNS as MATE D. "7 0.068 — antéro-postérieur du grand trou occipital. . . . 2. 3 0.058 ER ENSNETSAR ES à. fe SPP PANNES) ETES $. 6 0.066 — longitudinal des condyles. . . . . . . . .".".1 4.4 0.112 D ransvereal = Q tn À re ets ti Ps iL 2 à 0.060 Intervalle entre l'angle extérieur de ces condyles mesurés par dessus le trou occipital. . . . . . . . . . + «+ 7. & 0.118 Parmi les ossemens nombreux recueillis dans le voisinage de Yendroit où l’on a découvert cette tête, se trouve un fragment de la mâchoire inférieure d’un très grand Ruminant, que nous ne doutons pas avoir appartenu au Sivatherium, et qui provenait probablement du même individu. C’est la portion postérieure de la mâchoire droite, cassée au bord antérieur de la troisième molaire; lapophyse céoteide, le condyle et la portion corres- pondante de la branche, ainsi qu’une partie de l'angle de la mâchoire, manquent également. Il ne reste que les deux trous postérieurs de la dernière moiaire,dont la couronne est en partie mutilée, mais laisse apercevoir les croissans d’émail, et présente ainsi les caractères propres aux dents des Ruminans. Le contour de la mâchoire pris d’une section verticale, représente un el- 360 FALCONER ET CAUTLEY. lipse, et sa surface externe est plus convexe que l’interne. L’os s'amincit du côté interne, vers l’angle de la mâchoire, de ma- nière à former une dépression musculaire, grande et bien mar- quée, et un sillon tres bien défini remonte de cette dépres- sion sur la branche de la mâchoire, vers le trou maxillaire, gomme chez les Ruminans. La surface de la dent est couverte de petites rugosités et de stries, comme dans les molaires supé- rieures de la tête. Enfin, elle était formée de trois demi-cylin- dres, comme c’est ordinaire dans cette famille, et son usure considérable prouve que l'animal auquel elle appartenait , était, de même que celui dont provenait la tête , plus qu’adulte. La forme et les proportions de cette mâchoire se rapportent très exactement à celles de la partie correspondante du squelette du Buffle, comme on peut le voir dans le tableau suivant, où on la compare aussi avec le Chameau. Sivatheriumn, Buffle. Chameau. Hauteur de la mâchoire au niveau de la dernière mo- MRC RE RER Le ne to: 006 US95 pe M6 2.70 DRE Re Ji et te dons Us ul 1 & 1.05 1.40 Largeur de la dernière molaire. . .:. , . . . 1.35 0.64 0.76 Longueur des 2/3 postérieurs de cette dent. . . . 2:15 0.95 1.15 On ne connaît aucun Ruminant ni récent ni fossile ayant une mâchoire aussi grande, ses dimensions étant environ le double de celles de la mâchoire d’un Buffle dont la tête était lon- gue de 10, 2 p. (0,489m') et supérieures à celles des Rhinocéros, Nous n’hésitons par conséquent pas à rapporter ce fragment au Sivatherium giganteum. Nous ne savons rien de plus, touchant l’ostéologie de la tête de ce grand animal; mais d’après les faits que nous venons d’ex- poser, on peut facilement deviner quelle devait en être la dispo- sition générale. L'état de mutilation du museau et du vertex est très à regret- ter, car cela laisse dans le doute quelques points fort intéres- sans de la structure du Sivatherium ; savoir : 1° l'existence des dents canines et incisives à la mâchoire supérieure, et leur nom- bre s'il ÿ en a ; 2° le nombre et l'étendue des os qui concourent à former ja base des narines; et 3° l'existence ou l'absence de om am” Sur un nouveau $enre de Ruminant fossile. 361 deux cornes sur le vertex, outre les deux cornes interorbitaires. Quant au premier de ces points, nous ne pouvons nous guider par l’analogie pour arrêter notre opinion, car il existe des Rumi- nans pourvus de dents incisives et canines à la mâchoire supé- rieure et d’autres qui en sont privés ; il est aussi à noter que le Sivatherium diffère beaucoup de l’un et l’autre de ces groupes. Cependant deux faits nous portent à croire que cet animal fossile n’avait pas d’incisives : 1° chez tous les Ruminans ayant les mo- laires rangées en une série normale et continue, et portant des cornes sur le front, il n’y a pas d’incisives ; dans le chameau et lesesp èces voisines où il existe des incisives supérieures, les mo- laires antérieures sont séparées du reste de la série par un inter- valle et sont disposées autrement. Or, le Sivatherium avait des cornes et ses molaires étaient contiguës : par conséquent il est probable qu’il manquait d’incisives comme les autres Ruminans ‘ présentant les mêmes particularités de structure. L'étendue et les rapports des os incisifs sont des points in- téressans à cause des inductions qu’on peut en tirer relativement à la conformation des parties molles voisines. Chez la plupart des Ruminans à cornes les os incisifs se con- tinuent sous la forme d’une apophyse étroite le long du bord antérieur des os maxillaires et vont se joindre à la partie latérale des os nasaux , de facon que le cadre osseux des narines est formé par deux paires d'os, les incisifs et les nasaux. Dans le Chameau les apophyses montantes des os incisifs se terminent sur les maxillaires sans atteindre aux nasaux et par conséquent les bords de l'ouverture nasale sont formés par trois paires d'os : les incisifs, les maxillaires et les nasaux. Mais on ne voit jamais ni chez lés Ruminans à cornes, ni chez les Cha- meaux et autres Ruminans sans cornes, les os du nez s'élever au-dessus du niveau du front et faire ainsi une saillie notable, et leurs bords inférieurs ne sont jamais libres dans une étendue considérable vers le bout de ces os ; ce sont des lames osseuses à bords presque parallèles qui s'étendent entre les maxillaires et se joignent aux apophyses montantes des incisifs près de leur extrémité, ou bien ne s’articulent qu'avec les premiers et jamais 362 FALCORER ET CAUTLEY. ils ne se prolongent de facon à laisser entre leur bord et ces os une échancrure ou sinus considérable, Dans notre tête fossile, la forme et les rapports des os nasaux sont très différens ; au lieu de se porter en avant sur le même niveau que le front, ils s'élèvent en formantavec cette partie un angle arrondi d'environ 15°, saillie dont on n’a pas d'exemple chez les Ruminans et qui est même plus considérable que celle existante chez le Rhinocéros, le Tapir et le Paleotherium , les seuls mammifères herbivores dont la structure présente cette particularité. Au lieu d’être des lames étroites à bords parallèles, ces os sont larges et voütés à leur base, et se rétrécissent rapi- dement en une pointe recourbée en bas et recouvrant les na- rines. Dans une étendue considérable de leur longueur ils ne sont pas articulés aux os voisins, mais restent libres et éloignés des maxillaires, de manière à laisser entre leur bord et les maxil- laires un vide considérable. Malheureusement nous ne savons pas exactement l'étendue dans laquelle les os nasaux étaient ainsi libres, l’os maxillaire étant mutilé des deux côtés et ses connexions avec les incisifs détruits, mais comme les os nasaux avancent au-delà du bord fracturé de la mâchoire, et que leur bord est bien de forme symétrique et également arquée de cha- que côté de la tête, nous ne pouvons douter que ces os n'aient été libres dans une longueur considérable etne s’articulaient pas aux incisifs. Pour déterminer la disposition des parties molles voisines il faut chercher des analogies chez les Ruminans et les Pachy- dermes, La grande saillie formée par les os nasaux dans le Sivatherium n’a pas d'exemple chez les Ruminans, et la connexion de ces os avec les incisifs ou la disposition contraire ne correspond avec aucune particularité importante dans l’organisation de cette fa- mille, Dans Ja tribu Bovine on trouve le Bœuf et le Buffle ayant les os nasaux et incisifs réunis, tandis que dans le Yack(r) et l'Aurochs ils sont séparés. Dans le Chameau, ils sont égaie- (x) Cuvier : Ossemens fossiles , t, rv, p, x31. mate Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 363. ment séparés et chez cet animal la lèvre supérieure est plus MO- bile que chez aucun autre Ruminant. Dans l’ordre des Pachydermes on trouve les mêmes varia- tions, mais ces différences sont accompagnées de modifications correspondantes, très importantes dans la conformation des par- ties molles; c’est par conséquent dans ce groupe que nous de- vons chercher la solution de la question dont nous nous oc- cupons. Chez l'Éléphant et le Mastodonte, le Tapir, le Rhinocéros, et le Paloetherium trois paires d’os concourent à former les narines; savoir : les nasaux , les maxillaires et les incisifs (1); et chez ces animaux, la lèvre supérieure est très développée. En effet ele est préhensile chez le Rhinocéros ; ‘chez l’Eléphant et le Tapir , elle se prolonge en une trompe, et l'étendue qu’elle acquiert corres- pond à des différences proportionnelles dans la position et la forme des os nasaux. Dans le Rhinocéros , ces os sont longs et épais ; ils s'étendent jusqu'à l'extrémité du museau et ont beau- coup de force pour soutenir les cornes de l'animal; enfin la le- vre elle-même est large, épaisse et très mobile mais peu allon- gée. Dans l’Eléphant ils sont très courts; les os incisifs pren- nent un développement énorme pour l'insertion des défen- ses, et la trompe a une grande longueur. Dans le Tapir ils sont courts, libres, excepté à leur base et saillans au dessus des maxillaires; mode de conformation qui est accompagné de l'existence d’une trompe bien formée. Chez les autres Pachy- dermes deux paires d’os seulement (les incisifs et les nasaux) en- trent dans la composition du cadre nasal; les os incisifs s’élé- vent de manière à joindre les nasaux, et ceux-ci au lieu d’être courts, saillans et séparés des maxillaires par une grande échan- crure, sont longs; en s’avançant ils restent unis aux maxillaires et ils ressemblent plus ou moins exactement à ceux des Rumi- nans. Dans ce groupe, nous trouvons le cheval, dont la lèvre supérieure est douée de beaucoup de mobilité, et chez cet ani- mal la portion inférieure des os nasauxest en même temps hbre e (x) Cuvier : Ossemens fossiles, t, mx, p. 29: 364 FALCONER ËT CAUTLEY. dans une étendue considérable ; tandis que dans les autres gen- res, la lèvre ne ressemble en rien à un organe de préhension. Le Sivatherium présente le même mode de conformation que chez les Pachydermes à trompe, et c’est au Tapir qu’il ressemble le plus. Il en diffère surtout par la saillie plus considérable des os nasaux sur le chanfrein, par la grandeur de ces os et par les di- mensions moindres de la grande échancrure naso-maxillaire. Mais comme il y a similitude dans tous les points les plus im- portans entre ces deux animaux, nous ne pouvons douter que le Sivatherium n'ait été pourvu d’une trompe comme le Tapir. D'autres analogies, quoique moins directes viennent corro- borer cette opinion : 1° La grandeur du trou sous-orbitaire. Dans notre fossile, les dimensions exactes de cette ouverture n’ont pu être détermi- nées, parce que ses bords avaient été mutilés en détachant la gangue pierreuse, mais son diamètre vertical paraît être d’envi- ron 1,2 p. ou un peu moins. Or, un trou ayant de pareilles dimensions semble indiquer le passage d’un nerf volumineux et, partant, un grand développement de la lèvre. 2° La table externe des os du crâne est très éloignée de la ta- ble interne et en est séparée par des lames verticales du diploé qui forment de grandes cellules comme chez l'Éléphant; los occipital s'étend aussi latéralement pour former des ailes pour- vues d’une cavité considérable comme chez cet animal. Or, l’une et l’autre de ces particularités d'organisation sont des disposi- tions appropriées pour fournir à l'insertion des muscles une surface très large, et font supposer un cou épais, charnu et peu mobile, conformation qui àson tour tend à prouver la nécessité d’une trompe. 3° La grandeur considérable des condyles de loccipital qui sont plus volumineux que chez l'Éléphant, non-seulement pro- portionnellement aux dimensions de la tête, mais même d’une manière absolue. L’atlas et les autres vertèbres cervicaux ont dû être proportionnellement développés pour recevoir et sou- tenir ces condyles, et ont dû être entourés d’une masse muscu- laire considérable; circonstances qui l’une et l’autre doivent tendre à diminer beaucoup l'étendue des mouvemens de la tête Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 365 et du cou. Or, pour approprier l’animal à son régime herbivore, il a dû être pourvu d’un instinct spécial pour atteindre sa nour- riture, ou bien avoir des vertèbres cervicales allongées propor- tionnellement à leur diamètre, de manière à donner de la liberté aux mouvemens du cou. Dans ce dernier cas, le cou aurait été d’une grande longueur, et pour le soutenir, ainsi que la masse musculaire y appartenant, il aurait fallu un développement im- mense des apophyses épineuses des vertèbres dorsales et de tout le membre antérieur, d’où aurait résulté une conformation gé- nérale du corps des plus lourdes. Il est par conséquent plus pro- bable que les vertèbres étaient comprimées comme chez l'Élé- phant et le cou court et épais; circonstances que nous avons déjà cru être favorables à notre opinion relative à l'existence d’une trompe. 4° Enfin, la face est plus courte, plus large et plus massive que chez aucun Ruminant ; elle ressemble un peu à celle de l'Eléphant et convient pour l’attache d’une trompe. Passons maintenant à ce qui se rapporte aux cornes. On ne peut douter que les deux apophyses épaisses, courtes et coniques situées entre les orbites n'aient été l'axe osseux de cor- nes semblables à celles des Antilopes et des Bœufs. Elles sont lisses et se confondent par leur base avec le reste du front sans présenter aucune trace de bourrelet. Les étuis cor- nés dont elles étaient enveloppées ont dù être droits, épais et peu allongés. Aucun Ruminant bicorne ne porte des cornes placées ainsi directement entre et au dessus des orbites, mais toujours plus ou moins en arrière. Le seul Ruminant ayant des cornes ainsi placées est J’Antilope de l'Hindoustan ( Tetracerus, Antilope quadricornis où Chicara des auteurs), qui, sous ce rap- port, diffère seulement du Sivatherium par la position de ses cor- nes antérieures un peu plus avancées au devant des orbites. Cette ressemblance nous conduit naturellement à nous deman- der si le Sivatherium avait aussi sur le sommet de la tête deux autres cornes ? Le crâne de notre fossile est mutilé tout en tra- vers du vertex, de manière qu’on ne peut s'assurer directement du fait, mais les considérations suivantes en rendent la présomp- tion au mojns probable, 366 FALCONER ET CAUTLEY. 1° Ainsi que nous l’avons déjà dit, les cornes sont toujours placés plus ou moins en arriére des orbites chez les Ruminans bicornes; 2° Dans les espèces à quatre cornes connues, la paire de cornes normales est située sur le front et la paire supplémen- taire entre les orbites; 3° Dans la tribu bovine des Ruminans, l'os frontal est res- serré entre les orbites et au-dessus de ce rétrécissement, il s’é- largit de manière à former deux éminences qui sont situées aux angles latéraux du vertex, et qui se continuent avec l'axe osseux des cornes. Cette conformation n'existe pas chez les Ruminans sans cornes où qui ont des cornes rapprochées des sourcils; or chez le Sivatherium elle se voit Quoi qu’il en soit, l'existence des cornes inter-orbitaires est un fait fort remarquable dans la conformation de notre fossile ; et si elles étaient seules, on voit, d'apres leur position, que la structure de la tête serait peut-être encore plus singulière que si une seconde paire de ces appendices surmontait le vertex. Pour juger de la longueur de la portion du museau qui manque dans notre fossile, et pour déterminer la longueur totale de la tête, il faut aussi avoir recours à l’analogie. Chez la plnpart des Ruminans à molaires contiguës, l’inter- valle compris entre la première molaire et le bord antérieur des os incisifs est presque égal à l’espace occupé par les mo- laires; tantôt c'est un peu plus, mais ordinairement un peu moins. Chez les autres Ruminans, tels que le Chameau, où les molaires antérieures ne sont pas disposées comme les autres, et en sont éloignées pour se placer au milieu Îde l’espace vide compris entre les molaires et les incisives, ce rapport n'existe plus; la distance comprise entre la première molaire +t le bord antérieur des es incisifs était moindre que l’espace wt- cupé par les molaires. Chez le Sivatherium, les molaires sont en série continue; et si nous évaluons la longueur du museau d’après cette analogie, nous aurons prés de deux pouces pour l’espace entre la première molaire et l'extrémité des os incisifs; ce qui donnera 28,85 pour la longueur totale de la tête, depuis le bord du grand trou occipital jusqu'à d'ex- [l Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 367. trémité de la mâchoire supérieure. Cette évaluation pourra peut-être sembler un peu exagérée,; mais nous sommes per suadés qu’elle ne s'éloigne pas beaucoup de la vérité, car, pour un Ruminant , le museau serait encore court comparativement à la largeur de la face. Il nous reste encore à noùs occuper des crbites. La grandeur et la position des yeux établissent une différence remarquable entre les Pachydermes et les Ruminans; chez ces derniers, l'œil est grand et saïllant, chez les premiers, il est plus petit et plus enfoncé, et il résulte une différence notable dans l'expression de la figure. Chez le Sivathérium, l’orbite est beaucoup plus petit proportionnellement à l’ensemble de la tête que chez les Ruminans actuellement existans. Cette cavité est aussi placée plus en avant dans la face et plus bas sous le niveau du sourail; son bord n’est pas élevé et saillant comme chez les Ruminans, _€t sa direction est oblique, l'intervalle entre les bords orbitaires supérieurs étant de 12,2 p., et celui entre les bords inférieurs de 16,2 p. Le diamètre longitudinal dépasse le diamètre vertical dans le rapport d'environ 5 à 4, et-le grand axe est presque dans la ligne du sinus naso-maxilläire à la portion postérieure de l’arcade zygomatique. D'après cette conformation, notis pen- sons que l'œil devait être plus petit et moins proéminent que dans les Ruminans actuels, et que l'expression de la face devait être plus lourde et plus désagréable , mais moins cependant que chez les Pachydermes, le Cheval excepté. Il est aussi à présumer que l'axe visuel était dirigé en avant aussi bien que latéralement, et qu'il était interrompu en arrière. Nous terminerons ici les considérations que nous nous étions proposé de présenter touchant la tête de notre fossile. Quant aux autres parties du corps, nous ne possédons encore rien qui puisse être rapporté avec certitude au Sivatkerium (1). Parmi-un (1) Pendant que ce mémoire était sous presse à Caleutta, M. Cautley à été informé de la découverte de presque tous les os de l’un des membres d'un animal qui paraît être le même que celui nommé ici Sivatherium. Nous possédons une vertébre cervicale de Ruminant qui à dû appartenir à un animal aussi grand que le Sivatherium, mais que nous sommes porté à considérer , pour plusieurs rai- sous, provenir de quelque autre espece de Ruminänt gigantesque dont l'existence nous est à- peu-prés démontrée. M. le lieutenant Baker nous a donné aussi des preuves de l'existence de l'Élan et d'une espèce de Cliameau dans ces terrains, 68 FALCONER ET CAUTLEY. grand nombre d’ossemens de chevaux découverts dans le même voisinage que la tête dont nous venons de donner la description, il s’est trouvé trois morceaux très bien conservés de la portion inférieure des extrémités d'un grand Ruminant, qui apparte- naient à trois jambes d’un même animal, et qui, par leur volume, ne pouvaient être rapportés à aucun des Ruminans de notre collection, si ce n’est au Sratherium gigänteum ; nous nous abstenons cependant de les décrire ici, car ils nous semblent petits comparativement à notre tête fossile, et nous avons lieu de croire qu'il existe des débris d’autres grands Ruminans dans les mêmes terrains. La forme des vertèbres et surtout des os du carpe et du tarse, est un point d'un grand intérêt qui reste encore à constater; car nous pouvons nous attendre à trouver chez un animal aussi volumineux, le type ordinaire modifié. En raison de sa masse et de l’armature de sa tête, il èst probable que peu d'animaux pouvaient résister au Sivatherium, et nous devons nous attendre à trouver ses membres conformés d’une manière favorable à la solidité plutôt qu'à la célérité. Du reste, nous ne doutons pas que, dans la riche moisson de fossiles que nous espérons recueillir encore dans la vallée du Markenda, il ne se trouve quelques échan- tillons , propres à combler ies lacunes nombreuses qui existent encore dans nos connaissances sur l’ostéologie du Sivatherium. La structure des dents a fait naître une conjecture, touchant les habitudes de cet animal. Nous avons vu ci-dessus, que la lame centrale d’émail, décrit une courbe flexueuse, ressemblant un peu à ce qui se voit chez l'Élasmotherium, disposition qui est évidemment destinée à augmenter le pouvoir triturant de ces dents. On en peut conclure, que la nourriture du Sivatherium était moins herbacée que celle des Ruminans à cornes, actuelle- ment existans, et se composait de feuilles et de jeunes bran- ches; ou bien, que les alimens étaient, comme chez le Cheval, plus complètement mâchés, l'appareil digestif moins compliqué, le corps moins massif, et la nécessité de la régurgitation moins marquée que chez les Ruminans de nos jours. Les mesures suivantes, prises chez le Sivatherium, l'Éléphant et le Rhinocéros, donneront une idée exacte de la taille de notre | Sur un nouveau genre de Ruminant fossile. 36q fossile, et quoique peu nombreuses, elles sont caractéristiques. Rhinocéros Éléphant. Sivatherium, de l'Inde à une corne. Distance du trou occipital à la première molaire 23.10 18.85 24. 9 Plus grande largeur du crâne. .:.:. . . . , 26.00 22.00 12.05 14. de ia face entre les os ma- Riresser OBTIENT EST T16.15 16.62 9.20 Plus grande hauteur du crâne. . . . . .« . 17.80 11: 9 11.05 Grand diamètre du trou occipital. .:. . . . 2.55 2. 6 2. 6 Petit diamètre du trou occipital. . . . . . . 2. 4 2. 3 145 Moyenne de ces mesures .. . . . . . . . 45.06 12.38 10.22 Si l'opinion que nous nous sommes formée du Sivatherium est juste , cet animal devait être très remarquable, et devait remplir une lacune importante dans l’intervalle qui sépare les Ruminans des Pachydermes. D'après les dents et les cornes, il est évident que c'était un Ruminant, et d’un autre côté, l’ostéologie de la face, la disposition présumée de la lèvre supérieure, et la position ainsi que le volume de l'orbite, le rapprochent des Pachydermes. L'existence de quelque chose de semblable à une trompe, est une circonstance si anomale pour un Ruminant, qu’au premier abord, on pourrait douter de l’exactitude de la place assignée à notre fossile; mais sur un examen plus attentif, cette diffi- culté tombe. Dans l’ordre des Pachydermes, il y a des genres pourvus d’une trompe; d'autres qui en sont privés ; par conséquent, cet organe n’est pas essentiel au mode d'organisation de ce groupe de mammifères; mais son existence est déterminée par le volumede la tête ou les habitudes de ces êtres. Ainsi, chez l'Éléphant la nature a raccourci le cou, destiné à soutenir l'énorme tête, les longues défenses et le puissant appareil masticateur de l’animal, et a évité ainsi la perturbation qui serait résultée dans le reste du corps, par l'existence d’un long cou; mais lorsque le levier portant la tête a été diminué de longueur, d’autres moyens pour atteindre les alimens devenaient nécessaires à l’animal, et une trompe a été fixée au devant de sa bouche. Or, il nous suffirait de supposer un Ruminant, placé dans les mêmes conditions, V, ZOOL, mes Juin, 24 370 Académie des Sciences. pour qu'un organe semblable lui devienne également néces- saire. D’autres conditions organiques, ont même déterminé l'existence d’un état rudimentaire de cet organe chez le Cha- meau, où la lèvre supérieure est fendue et chaque moitié, mo- bile et extensible, constitue un excellent organe du toucher. Le fossile que nous venons d'étudier a été découvert entre la rivière Markenda et la vallée de Pinjor, dans la chaîne des montagnes du Sivalik ou Hymalaiens inférieurs, et sy trouve conjointement avec des os fossiles d'Éléphant, de Mastodonte j de Rhinocéros, d'Hippopotame, etc. Autant que nous pouvons en juger par nos recherches, cet änimal n'était pas commun ; car, comparé au Mastodonte et à l’'Hippopotame ( #1. Sivalensis nobis , espèce nouvelle, caractérisée par l'existence de six inci- sives à chaque mächoire ), il était même très rare. ' EXPIACATION DE LA FLANCHE 13. « A , . « . Fig. 1. Tête du Sivatherium ‘giganteum, vue dé face. Fig. 2. La même, vue en dessous, Fig. 3. La même, vue de profil. AnaALvsE des travaux anatomiques, physiologiques et z0olo- giques présentés à FAcadémie des Sciences pendant le mois de juin 1836. Séance du 6 juin 1836. Anazvse des travaux de Goethe en histoire naturelle et considérations sur le caractère de leur partie scientifique, par M, Grorrroy-Sainr-Hirarmr. Dans ce mémoire M. Geoffroy s'applique à faire connaître quelle est la part qui appartient à Goethe dans l'établissement de la théorie de l'unité organique. Séance du 13 juin. M. Geoffroy donue lecture de la seconde partie du mémoire sut Gôethe, com- mencé dans la séance préeédente. JE | Académie des Sciences. 375 Levrre sur les mœurs du. Rossignol ; par M: D: Nervaux. « Je crois devoir vous communiquer une particularité de la vie du Rossi= gnol, de laquelle j'ai été témoin durant la dernière inondation. « Une partie de mon jardin a été envahie. Un de ces oiseaux avait fait soti nid dans la haie inférieure où les caux montaient avec impétuosité. Inquiet de savoir si elles parviendraient jusqu’au niveau de ce nid , je l’observai plusieurs fois par jour : il se trouvait à six pas environ de ha ligne formée par les eaux. fl ÿ avait quatre œufs. Un matin je n’en vis plus que deux et m'aperçus que Peru était à qüelques lignes de la partie imférieure du nid qui était appuyé sur üm fagot d’épires placé pour boucheture.:.. Je pensai d'abord que les deux œufs qui manquaient avaient été submergés, mais peu d’instans plus tard, n’en ayant plas vu qu'un seul, j'observai avee attention, ct quel fut mon étonnement en voyant les deux oiseaux rasañt la terre ed volant avec rapidité en même témps qu'avec précaution et se dirigeant vers une des parties les plus élevées de mon clos; emportant avec eux lé dernier œuf qui restait dans leur ancien nid, et de les rétrouver tous les quätre dans nn nouveau à cent cinquante pas du premier, où depnis sont éclos cinq petits. j « Comment ces pauvres animaux ont-ils pu porter leurs œufs à une distance alssi grande ? est-ce avec le bec où avec les ongles? C’est ce que je n’ai pas eu le temps de voir, mais ce qu'il ÿ a de certain, Cest que les œufs ont élé portés d’un endroit à un autre. » Structure des poumons ; par M. Bazrx. M. Bazin annonce qu'il a étendu aux animaux carmassiers ses recherches sur la terminaison des canaux aériens. Les lobules qu’on disait exister dans les pou- mons de tous les mammifères ne se sont présentés à lui dans aucun de ces ani- maux qu'il a eu occasion d'observer, ct il a trouvé au contraire constamment, uue disposition semblable à celle qu’il a signalée pour l'espèce humaine. rs S ER RR RSR EN IE RSLAIAT [TN 7LAÉ Ÿ EN RR ONE NS EU AUD ATÈTRES S 1 ? A ee S \ ù Vk 4_ SE ee un \ \ ET } Ÿ > De mnt S _— : S . LS] 72) Wer, D an de Dnerah 2° dérih 2 PR er June . nat. 2 prie ff dll | | L au li | | { di Na im (1° je l l : ! L * ! ï ji | { 1 | ( }, Ne ( | | D il {to an (lle || Ÿs “| Lmpreintes de pieds d'ocreutr FH PIRE PRL}) D) SOS LIQ D S'OUYINYPIU A) 272 1% pParpet) SRHUDLIL LOPNUYITYRIULL) ‘1 LL] ki : RP SE NU OUR Sep uupr _ om. 5. PL > / 1 Zoo. DE Séries 07/2 Ann des Srrence. N & 1 2 vituit de hniter versie var Clarus («a g 2 Ornih Fi EUS rétutde 3) ga (4 U huchnites q ah “ lig.1. Or Ve SNA. D Ann. des drrene NO ET ES TS Ps is - ” ; AE A ne 4 F + ; Zool. T5. PL.B. D. Ciganteuxr ©. Tuberorus . LE de. De ©. Ttradactylur. e ©. Palmatur.. = =. Æmpreudes de. V272 d'otseaut.. Anatomie de l'helir alyira Ann. des Seienc: nat. 2° Jérte. Zool. Tom à: Pl 11 4 ONU te LR CNRS MARNE Balenoptére a Dec. 5 SŸ Ÿ Ÿ È Ÿ Ÿ | : À è S Ÿ # à g- » + x a> NOTE d'a Re x RES É De VA R) sn - er nl tee a AUS tt 7e: x : si GS : NE : > | al . . . - ” DT | né ) à UPS" LS CPAM 7" À co us D fs + ed MT VO) à LA  70 Û PA ( # . ; . - _ , : | . É . + : » . - LA à « » . ’ k : - ol Ce à no. L ; j Fr Les , Les - y d'= "s Lu et D À " ‘ls RON nr) À) DE - = , + er Le L 3 « CAR Pa ‘ a NULS = 1140 ? ” ; . = ; | « L à + RÉRAETN à # PRE Ve À AE A SAGE) 8 $ VAT LR N