\ AU LNH à (CRAN UNE 1 : AURONT HAN AE AD EMEENU AN NAN Us UE 19 AA (LUYINUR *U \ di QU YA Dont à fra jui 1 ï 7 ie ! Ho HAN rt HA M'A (À At Û ' LA an ht ip HARVARD UNIVERSITY la Library of the Museum of Comparative Zoology ANNALES SCIENCES NATURELLES SIXIÈME SÉRIE ZOOLOGIE MoTTEeRoZ. Direct. des Imprimeries réunies, A, rue Mignon, 2, Paris. CR ——— — ANNALES DES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L’'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE MM. H. er ALPH. MILNE EDWARDS TOME XIV PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE Boulevard Saint-Germain et rue de l’Époron En face de l’École de médecine ‘4882 RECHERCHES SUR L'HISTOLOGIE DES INSECTES ET SUR LES PHÉNOMÈNES HISTOLOGIQUES QUI ACCOMPAGNENT LE DÉVELOPPEMENT POST-EMBRYONNAIRE DE CES ANIMAUX Par M. H. VIALLANES. AVANT-PROPOS. a Talia sunt insectorum semina (vermes ab Aris- totele dicta) quæ initio imperfecte edita sibi victum quærunt indique nutriuntur et augentur, de eruca in aureliam, de imperfecto ovo in perfectum ovum et semen. » (Harvey, De Generatione animaliuwm.) Le sujet du mémoire que je publie aujourd’hui m'a été in- spiré par la lecture des travaux de M. Weismann sur le déve- loppement des Insectes. Ce naturaliste a montré que pour les Insectes chez lesquels la larve est le plus différente de l’imago, chez lesquels par con- séquent la métamorphose est la plus profonde, les tissus et les systèmes de la larve ne servent point à former directement les tissus et les systèmes correspondants de l’adulte. Mais qu’au moment où la larve devient immobile et se change en nymphe, la plupart de ses organes se détruisent et se transforment en une sorte de purée graisseuse dans laquelle se constituent ensuite les tissus de l’imago comme ils se constitueraient dans un œuf. C’est ce qu'avait pressenti Harvey. Mais l'étude de cessortes d'œufs qu’on appelle des nymphes ou des pupes présente plus d'intérêt que celle des œufs ordi- naires puisque on y voit s’accomplir, non seulement des phéno- mènes de genèse mais encore des phénomènes de destruction. Les phénomènes de destruction de tissus ont surtout attiré ANN. SC. NAT., ZOOL. AOUT 1882. XIV. À. — ART. N° {. 2 H. VIALLANES,. mon attention, et c’estsur ce point principalement que je crois pouvoir apporter de nouvelles lumières. La destruction physio- logique des tissus n’est point un phénomène qui s’observe communément chez les animaux, à ce titre son étude présente déjà beaucoup d'intérêt. Mais cet intérêt s’accroit encore quand les faits vous conduisent à reconnaitre de grandes ana- logies entre cette destruction physiologique des üssus de la larve et divers phénomènes dont l’étude est du ressort de la pathologie. On verra en effet par la suite de ce travail que la nature semble procéder toujours de même, qu'il s'agisse de détruire les tissus d’une larve pour obéir aux lois physiologiques du développement, ou bien que ce soient les tissus d’un Vertébré qui doivent disparaître sous l'influence d’un processus morbide; et qu’ainsi vient encore se confirmer cette pensée si juste de CL. Bernard: « [n’est pas nécessaire de créer des lois spéciales, les unes pour la pathologie, les autres pour la physiologie. » L’étude de la genèse des tissus de l’imago nous offre aussi beaucoup d'intérêt, les recherches d’histogénie n’ont guère été faites que chez les Vertébrés et j'ai pensé qu’en transportant ces investigations sur un autre terrain 11 me serait possible d’éli- miner bien des conditions accessoires qui sont variables, pour arriver à la connaissance des phénomènes essentiels toujours constants. La méthode à suivre dans ces recherches était toute tracée; je devais commencer par bien connaitre les tissus de la larve et ceux de l’imago à leur période d'état. Aussi ai-je tout d’abord “repris les observations faites avant moi sur ce point. Ce travail de vérification m'a conduit à redresser quelques erreurs et à trouver principalement sur l’histologie du système nerveux un certain nombre de faits nouveaux et intéressants. Ensuite j'ai étudié, en m’adressant à des nymphes, le mode de destruction des tissus de la larve et de formation des tissus de l’imago. C'est le même ordre que je suivrai dans l’exposé de mes recherches. Mais je dois dire tout d’abord que je suis loin d’avoir rempli ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 5 le programme complet que je m'étais tracé ; J'ai dû laisser com- plètement de côté le tube digestif et les organes génitaux. Le tableau que je publie un peu plus loin permettra d’embrasser d’un coup d'œil le plan général de mon travail et de bien saisir les limites dans lesquelles je me suis enfermé. Mais tout d’abord, qu’il me soit permis d'exprimer ma pro- fonde gratitude aux maîtres à qui je dois tant, à MM. Ef. et Alph. Milne Edwards, ils m'ont sans cesse soutenu et encou- ragé et m'ont donné de bien nombreuses preuves de leur bien- veillance. Je dois aussi de bien vifs remerciements à M. le pro- fesseur von Kælliker qui m’a prodigué tant de savants conseils quand j'étudiais sous sa direction à l’Université de Wurtz- bourg, ainsi qu’à môn excellent maître et ami M. le privat docent Philipp Stühr. PLAN DE CE MÉMOIRE. PREMIÈRE PARTIE. Étude des tissus de la larve et de l’imago à leur période d'état. CHAPITRE [#. — Les téguments de la larve. CHAPITRE II. — Système nerveux périphérique, $ 1. — Nerfs de la larve. $ 2. — Ganglions périphériques. CHAPITRE IT. — Terminaisons nerveuses sensitives. $ 4. — Chez la larve de Stratiomys. | $ 2. — Chez les larves de Musca et d'Eristalis. CHAPITRE IV. — Muscles striés involontaires. $ 1. — Histologie du vaisseau dorsal. $ 2. — Vaisseau dorsal chez les jeunes larves. $ 3. — Museles du tube digestif. Q $ 4. — Terminaisons nerveuses motrices dans les muscles involontaires. CHAPITRE V. — Musceles striés volontaires. $ 4. — Muscles de la larve. $ 2. — Muscles de l'aile chez l’imago. $ 3. — Muscles des pattes chez l’imago. CuapITRE VI. — Terminaisons nerveuses motrices dans les muscles striés volontaires. $ 1. — Chez la larve de Stratiomys. $S 2. — Chez la larve de Tipula. $ 3. — Chez l'Eristalis et chez le Dytique. n H. VEALLANES. DEUXIÈME PARTIE. ÉTUDE DES PHÉNOMÈNES DE L'HISTOLYSE OU DESTRUCIION DES TISSUS ET DES SYSTÈMES LARVAIRES. $ 1. — Historique général des travaux relatifs au développement post-embryon- naire des Insectes. $ 2. — Historique général des travaux relatifs aux phénomènes de l’histolyse. CHaptrRe 1. -- État du sang de la larve au moment de la métamorphose. CHAPITRE II. — [Hlisiolyse des muscles. CHAPITRE [II — Histolyse du corps adipeux. CHAPITRE IV. 1, — Histolyse des glandes salivaires. $ 2. — Histolyse des trachées. CHAPITRE V. — Des boules à noyaux (Kôrnchenkugeln) de M. Weismann et quelques autres formations de nature problématique. CHAPITRE VI. — Dessèchement et chute de l’hypoderme larvaire. TROISIÈME PARTIE. ÉTUDE DES PHÉNOMÈNES DE L'HISTOGÉNÈSE OU FORMATION DES TISSUS ET DES SYSTÈMES DE L’IMAGO. CHAPITRE [%. — Développement des téguments de la tête et du thorax. CHAPITRE Il. — Développement des téguments de l'abdomen. CHAPITRE HE. — Développement du système musculaire. $ 1. — Muscles de Paile. $ 2. — Muscles des pattes. $ 3. — Considérations générales sur la morphologie du tissu musculaire. CHAPITRE IV. — Développement de lappareil visuel. $ 1. — Appareil visuel chez une nymphe presque arrivée à son état de dévelop- pement complet. $ 2. — Développement du ganglion optique et de l'œil composé. Je dois ajouter que chaque chapitre est précédé d’un histo- rique particulier et terminé par des conclusions. N.B.Les conclusions que je considère comme nouvelles et comme m appartenant exclusivement sont écrites en caractères italiques. Pour l’étude de la structure des tissus à leur période d'état, je me suis adressé à un certain nombre d'espèces dont la plu- ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 5 part appartiennent à l’ordre des Diptères; ce sont les suivanies : Musca vomitoria, Stratiomys chameæleon, Tipula gigantea, Eris- talis tenax et Dytiscus marginalis. Dans mes recherches sur les phénomènes histologiques qui s’accomplissent durant la méta- morphose, j'ai pris principalement la Musca vomitoric pour sujet d'étude. PREMIÈRE PARTIE. CHAPITRE I. — LES TÉGUMENTS DE LA LARVE. Historique. — M. Leydig (4) (1855) observe que le tégument des Arthropodes est composé de deux couches, l’une externe et dure, l’autre interne et molle, dans cette couche molle il re- marque des noyaux et des fibres. Il considère la couche molle comme une couche de tissu conjonctif, la couche dure égale- ment comme une couche de tissu conjonctif, mais qui se serait chitinisé. Il observe des canaux poreux traversant la couche chitinisée. Parmi les Insectes M. Leydig ne parait avoir observé que des adultes. M. Leydig (1857) (2) reproduit les mêmes opinions qu’il avait émises dans le travail précédent. M. Hæckel (3) (1857) étudie les téguments de l’Écrevisse ; il remarque que les noyaux de la couche molle (Leydig) ap- partiennent à des cellules et que les fibres décrites par cet au- teur ne sont autres que les prolongements ramifiés de ces cel- Jules. La couche molle n’était done plus une couche conjonctive, mais bien une sorte d’épithélium qu’on désigne généralement aujourd’hui sous le nom d’hypoderme, on l'appelle aussi matrix ou couche chitinogène. M. Hæckel découvre en outre sous la couche molle une membrane anhiste qu’il désigne sous le nom de #embrane basale. De plus il considère la couche chiti- (1) Leydig, Zur feineren Anatomie der Arthropoden, (Archiv. für Anatomie und Physiologie, p. 316 et suiv., pl. XV-XVIHIL, 1855). (2) Leydig, Traité d’'histologie comparée, trad. franc., p. 119 et suiv. (3) Hæckel, Die Gewebe der Flüsskrebses. (Archiv. f. Anat. und Physiol., 1857). 6 : EH. VIALLANES. nisée de Leydig non pas comme une membrane conjonctive durcie ainsi que l’avait fait ce dernier auteur, mais bien comme une culicule homogène. M. Weismann (1) (1864) étudie la peau des larves des Mus- cides, et en décrit ainsi la structure : Sous une cuticule existe un hypoderme formé par une seule couche de cellules hexago- nales aplaties, et disposées en mosaïque. Il ne paraît point avoir observé de membrane basale. M. Graber (2) (1874) étudie la peau des Insectes adultes (Locusta, Decticus, Grillus). Sous la couche chitineuse, qu’à l'exemple de M. Hæckel et de M. Weismann 1l considère comme une cuticule, se trouve l’hypoderme (couche molle de Leydig). Cet hypoderme est constitué par des cellules plus ou moins étirées très variables de forme et disposées sans régu- larité. Sous l’hypoderme se trouve la membrane basale de M. Hæc- kel ; M. Graber la considère comme une formation cuticulaire interne de l’hypoderme. De plus entre la membrane basale et l’hypoderme, M. Graber observe qu’il existe souvent une couche de tissu conjonctif composé de fibres et de noyaux et qu'il considère comme une simple différenciation de l’hypo- derme. Ainsi, d’après M. Graber, la peau des Insectes se com- pose de quatre couches qui sont, en allant de l'extérieur vers l’intérieur : 4° la cuticule (couche chitineuse) ; 2 l’hypoderme (couche molle, matrice, couche chitinogène) ; 3° la membrane fibreuse ; 4° la membrane basale. Observations. — Je ne m’occuperaipour le moment que de la structure de la peau des larves quiest beaucoup plus simple. Téguments de la larve de Stratiomys chameæleon (3).—Quand on traite la peau d’une larve de Stratiomys par la potasse caus- (1) Weismann, Nachembryonale Entwickelung der Musciden.(Zeitschrift f. Wiss. Zoolog., 1864, t. XIV, p. 191). (2) Graber, Ueber ein Art fibrilloiden Bindegewebes des Insectenhaut und seine locale Bedeutung als Tracheensuspensorium. (Archiv. für Mikrosko- pische Anatomie, 1874, t. X, p. 124, pl. IX). (9) PI. TT, toutes les figures de la planche, ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 7 tique, les parties molles sont dissoutes, seule la cuticule chiti- neuse subsiste. Cette cuticule semble formée par des champs hexagonaux de couleur sombre, séparés les uns des autres par une ligne assez large et très claire. Chacun de ces champs pré- sente un point central plus obscur, d’où partent des lignes rayonnantes dont l’aspect varie selon qu’on éloigne ou qu’on rapproche l'objectif. Dans certaines régions ces champs hexa- gonaux sont plus foncés, dans d’autres plus clairs. Cest à ces différences de coloration qu'est dù l'aspect tigré de l’ani- mal. On observe de distance en distance des champs différents de leurs voisins par leur taille plus grande, leurs côtés plus nombreux, leur aspect complètement opaque. Nous verrons plus loin que ces champs correspondent chacun à l’insertion d’une fibre musculaire. On observe encore à la surface de la cuticule des poils de diverses grandeurs. Comme je le mon- trerai plus bas, à la plupart de ces poils sont annexées des ter- minalsons nerveuses tactiles, aussi est-ce en traitant des orga- nes du tact que je les étudierai. La cuticule de la larve de Stratiomys présente ceei de parti- culier qu’elle est imprégnée d’une quantité considérable de calcaire. On s’en assure facilement en traitant par l'acide acé- tique une cuticule au préalable dépouillée par la potasse des parties molles qui y adhèrent. Sous l'influence de lacide la cuticule fait effervescence comme le ferait dans les mêmes conditions une carapace d’Écrevisse. Quand le dégagement d'acide carbonique est terminé, on remarque que la pièce est devenue bien plus transparente ; son aspect général n’a pas changé, mais les champs hexagonaux sont devenus moins réfringents et on n’y observe plus ces lignes obscures semblant rayonner d’un point central et que je signalais tout à l’heure. La cuticule étant maintenant connue, étudions les autres parties de la peau. Pour cela, il faut avoir recours à la mé- thode suivante. On injecte dans la cavité générale de l’animal un mélange à volume égal d'acide osmique à 4/100 et d'alcool à 36 degrés; au bout de quelques instants on ouvre l'animal qui est complètement fixé. On enlève avec des ciseaux un lam- 8 HI. VEALLANES. beau de la peau, on le place dans l’eau distillée et en s’aidant de la pince et des aiguilles à dissection, on détache toutes les fibres musculaires qui s’y insèrent. La pièce est ensuite colorée au picrocarminate, puis traitée par Pacide acétique afin que, la euticule se décalcifiant, la préparation soit plus transparente. On le monte alors à la glycérine ou au baume, puis on l’observe par sa face interne. Sur une pièce ainsi préparée on se con— vaine facilement qu'il existe sous la cuticule une membrane formée par une seule assise de cellules, c’est l’hypoderme. Les cellules de l’hypoderme sont aplaties, régulièrement hexago- nales, leurs contours sont nets sans toutefois qu’on puisse affir- mer qu'elles présentent une membrane d’enveloppe. Chacune d’elles répond rigoureusement à un des champs hexagonaux de la cuticule et présente à son centre un gros noyau sphérique. J'ai signalé plus haut, en décrivant la cuticule, existence de champs polygonaux qui se distinguent de leurs voisins par leur grande taille et par leur opacité. À chacun de ces champs de grande lLaille répond rigoureusement une cellule hypoder- mique, qui diffère des autres cellules hypodermiques parce que son noyau est si volumineux qu’il la remplit presque entière- ment et parce qu'elle donne insertion à l’extrémité d’une fibre musculaire. La peau du Stratiome n’est pas seulement formée par une cuticule et un hypoderme, elle comprend une troisième cou- che que je n’aurais point découverte si je n'avais eu recours à la méthode suivante : On découpe avec des ciseaux un lambeau de la peau d’un animal traité par le mélange d’alcool et d'acide osmique indiqué plus haut; avec des épingles on le fixe au fond d’une cuvette à dissection en s’aidant d’une aiguille à cataracte, on détache sans peine l’hypoderme d’avec la cuti- cule, on enlève les fibres musculaires adhérentes à la peau ainsi isolée. Celle-ci est alors transportée sur une lame, sa face cuticulaire tournée en haut, on la fixe au verre par le tour de main dit de la demi-dessiccation, on la brosse légèrement avec un pinceau, puis on la colore à lhématoxy- line de Bœhmer et on l’observe dans la glycérine. Dans les ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. à. parties de la préparation qui ont été les plus frottées, les cellules hypodermiques ont été complètement enlevées et ont laissé à découvert une membrane anhiste très mince et très légèrement colorée; à la face inférieure de cette membrane rampent des nerfs et des trachées; nous avons évidemment affaire là à une membrane basale analogue à celle que M. Gra- ber a découverte à læ face interne de la peau des Insectes adultes. Dans les points de la préparation où l’action du pin- ceau s’est fait moins sentir, l’aspect est un peu différent, les cellules hypodermiques n’ont pas été complètement enlevées mais seulement érodées ; leur noyau a été chassé et la place que ce dernier occupait se montre comme une tache de forme arrondie tranchant en elair sur ce qui reste du protoplasma. Si Jinsiste sur ce fait qui n’a pas en soi grande importance, c’est qu’il m'a permis de me rendre compte de l’aspect tant soit peu anormal qu’offrent certaines préparations que j'aurai à décrire plus loin. Structure de la. peau chez les larves de Musea et d'Eristalis. — La cuticule de la larve de Musca est lisse dans presque toute son étendue; aux points de jonction des anneaux seulement, elle présente des élevures en forme d’épines aplaties et qui servent à la progression. De semblables épines existent chez l’Eristalis, mais elles sont bien plus nombreuses et se trouvent sur presque toute la surface du corps. La cuticule chez la Musca, comme chez l’Eristalis, parait complètement homogène et n'offre rien qui puisse rappeler les champs hexagonaux que nous observions chez le Stratiomys. La euticule est fort épaisse chez la Musca, ainsi qu’on le voit bien sur une coupe (1). Jamais je n’ai trouvé dans la cuticule des larves qui nous occupent rien qui ressemble aux canaux poreux décrits chez les Crustacés et les Insectes adultes. L'absence de canaux poreux, jointe à la grande épaisseur qu’acquiert la cuticule, nous explique qu’une larve de Musca bien gorgée de nourri- ture, et par conséquent peu propre à absorber par endosmose, (1) PL. I, fig. 12. 10 H. VEALLANES. puisse vivre pendant près de douze heures dans l’alcool absolu, ainsi que je l'ai observé bien des fois. Chez la Musca, comme chez l’Eristalis, Phypoderme est semblable à celui que pai décrit plus haut chez le Stratiomys; sur ce point je n’ai rien à ajouter à la description donnée par M. Weismann. Jamais chez aucune des larves que J'ai étudiées je n’ai trouvé une seule cellule de Phypoderme en état de division. C’est là un fait fort curieux, vu le développement rapide de ces animaux. Je ne suis d’ailleurs pas le premier à faire cette remarque. M. Auerbach (1), qui a étudié avec soin les glandes salivaires de quelques larves de Diptères, a observé que les cellules con- stitutives de ces glandes s’accroissent, mais ne se multiplient pas. Chez la Musca, comme chez l’Eristalis, une membrane basale est sous-jacente à l’hypoderme, cette membrane avait échappé à M. Weismann. Chez l’Eristalis j'ai observé de gros noyaux sphériques arrondis qui étaient accolés à cette mem- brane basale, ils étaient toujours rares et très irrégulièrement espacés, je ne puis me prononcer sur la signification de ces éléments. Chez la Musca et l’Eristalis, il existe, accolées à la face interne de la cuticule, des accumulations de cellules assez remarquables. Ces accumulations se présentent sous la forme de rubans effilés à leurs extrémités et formés d’une seule couche d'éléments. À leur partie moyenne, ces rubans présentent quatre à cinq cellules dans leur largeur, le nombre de celles-ci va en diminuant vers les extrémités du ruban qui se termine par une seule cellule. Les cellules (2) de la partie moyenne du ruban sont grandes, très aplaties; leur contour est anguleux et irrégulier, par un ou deux de leurs côtés elles s’accolent à leurs congénères ; de leurs côtés libres naissent de nombreux prolongements filiformes générale- ment rectilignes et simples. Parmi ces prolongements les uns vont se jeter dans des prolongements analogues des cel- lules voisines, les autres, après un trajet plus ou moins long, vont s'attacher à la membrane basale de la peau en formant, (4) Auerbach, Organologische Studien. Breslau, 1874. (2) PI: I, fig. 9: ARTICLE N° {4 HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 11 au point où 1ls se fixent, un épatement en forme de triangle isocèle; d’autres prolongements enfin vont s'unir à la gaine des nerfs voisins ou des trachées. Je désignerai sous le nom de cellules sous-hypodermiques les éléments que je viens de décrire ; leur forme, la disposition des prolongements qu’ils émettent pourraient faire penser tout d’abord qu’ils sont de nature nerveuse, mais une étude plus détaillée nous montrera qu'il faut rejeter absolument cette manière de voir. Pour étudier la structure des cellules sous-hypodermiques, il convient d'examiner une peau d’Eristalis ou de Musca dilacérée après avoir séjourné pendant plusieurs heures dans l'acide osmique au 1/100. Sur une pièce ainsi préparée, le protoplasma d'une cellule sous-hypodermique se montre comme fortement coloré en brun; en son milieu on observe un noyau arrondi, les prolongements ne sont que très faiblement colorés. L’ob- servation faite à l’aide d’un objectif puissant nous rend compte de cette différence de coloration, nous voyons en effet que les cellules qui nous occupent possèdent une membrane d’enveloppe, à double contour, peu colorée. C’est cette membrane qui semble s’étirer en certains points pour constituer les prolongements. Le protoplasma de la cel- lule ne pénètre pas dans ces prolongements et au niveau de leur point de naissance se montre avec un contour nette- ment limité. Quand on suit un ruban de cellules sous-hypoder- miques sur toute sa longueur, on voit que ces cellules se modi- fient vers les extrémités du ruban. En effet, à mesure qu’on s’éloigne de la partie moyenne du ruban, on voit les cellules émettre de moins en moins des prolongements, la cellule extrême n’en émet même plus qu’un, lequel va s’attacher à la membrane basale de la peau. Les faits que je viens de relater touchant la structure des cellules sous-hypodermiques et de leurs prolongements, dé- montrent amplement que ces cellules n’ont rien de nerveux, et, si j'insiste sur ce fait, c’est que tout à l’heure j'aurai à dé- crire des cellules ganglionnaires multipolaires occupant une situation analogue et avec lesquelles on pourrait peut-être les 419 H. VIALLANES. confondre si l’on se contentait d’un examen superficiel. Il était d'autant plus intéressant de rechercher la nature de ces cellules sous-hypodermiques, qu’on n’a décrit nulle part, chez les Insectes, d'éléments offrant leur aspect. On détermine facilement leur signification en suivant leur développement. Dans ce but, 1l convient de les étudier chez une larve prête à se mettre en pupe (1). On voit alors que les cellules sous-hypo- dermiques sont en voie de modification, ces modifications sont surtout accusées vers les extrémités du ruban. Les cel- lules hypodermiques les plus modifiées montrent leur pro- toplasma rempli de granules sphériques colorables par le carmin, quoique fortement chargés de graisse, ainsi que le prouve la tete noire qu’ils acquièrent en présence de lacide osmique. Îls sont si nombreux qu'ils soulèvent l'enveloppe de la cellule en lui donnant un aspect tomenteux et masquent presque le noyau. Dans les cellules sous-hypodermiques moins avancées, les granules se montrent plus petits et plus rares. Ces transformations que je viens d'indiquer brièvement ne s’observent pas seulement dans les cellules sous-hypoder- miques, elles caractérisent aussi les cellules du corps adipeux ainsi que Je le décrirai plus lom avec détail. C’est donc, je crois, des cellules du corps adipeux qu’il faut rapprocher les éléments que Je viens de décrire. CONCLUSIONS. à 4° La peau des larves que J'ai étudiées se compose d’une seule assise de grandes cellules aplaties, régulièrement dis- posées en mosaïque. C’est l’ypoderme, couche bien décrite par M. Weismann. 2° Au-dessus de l’hypoderme existe une couche dure, chiti- neuse, fortement imprégnée de calcaire chez le Stratiome, c’est la cuficule. Elle paraît homogène chez la Musca et l’Eristalis, elle offre, au contraire, chez le Stratiome des dessins élégants (1) PL EL, fig. 10. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 43 répondant exactement aux contours des cellules hypoder- miques. 3. Au-dessous de l’hypoderme et directement accolée à lui, existe une membrane mince anhiste qu'il faut, je crois, assi- miler à la membrane basale que M. Hæckel a observée chez l’'Écrevisse et M. Graber chez les insectes adultes. 4. Chez l'Eristalis et chez la Musca, au-dessous de la mem- brane basale et accolée à elle, on trouve des agglomérations de cellules bizarres que j'appelle cellules sous-hypodermiques. Elles sont caractérisées par les prolongements filiformes fort longs qu’elles émettent; ceux-ci se montrent comme formés par l’étirement de la membrane d’enveloppe de la cellule. Le protoplasma de la cellule ne pénètre pas dans ces prolongements. Les cellules sous-hypodermiques subissent, lorsque l’insecte va passer à l’état de pupe, des transformations tout à fait analogues à celles qui caractérisent les cellules du corps adipeux. CHAPITRE IT SYSTÈME NERVEUX PÉRIPHÉRIQUE: $ 1. — Nerfs de la larve. Historique. — Parmi les arthropodes, les histologistes n’ont ouère étudié la structure des nerfs que chez quelques insectes et chez quelques crustacés décapodes (1). Je ne m’occuperai pas dans cet historique des travaux entrepris sur l’histologie des conducteurs nerveux de ces derniers animaux, les natura- listes sont trop en désaccord les uns avec les autres pour que je puisse aller chercher dans leurs observations des points solides, me permettant d'établir des comparaisons entre le nerf des crustacés et celui des insectes. M. Leydig (1855) observe que chez les insectes comme chez (1) Voy. les travaux de Helmholtz, Hæckel, Leydig, Jung, Krieger. (2) Leydig, Zum feineren Bau der Arthropoden, Müllers Archiv, 1855. p. 399. ANN. SC. NAT., ZOOL., AOUT 1882. XIV. 2. -— ART, N° {. 14 HI. VÉALLANES. les arachnides un nerf se montre formé par une gaine transpa- rente (névrilemme) renfermant un contenu qui paraît constitué par de fines molécules disposées en files longitudinales. M. Margo (1) (18692) répète les observations de M. Leydig, mais il observe des faits qui avaient échappé à ce dernier, il re- marque que la gaine du nerf renferme dans son épaisseur de petits noyaux ovalaires ; il remarque en outre, en étudiant l’hy- drophile, qu'au point de division d’un nerf en deux branches on trouve souvent un gros noyau enfermé sous la gaine. I] conclut de la présence de ce noyau que le nerf avant de se bifurquer s’est renflé en une cellule ganglionnaire de laquelle partiraient les deux branches de division. M. Margo décrit le contenu du nerfcomme absolument homogène à l’état frais, mais devenant promptement granuleux sous l'influence des réactifs. M. Waldeyer (1863) (2) a étudié les nerfs d’un certain nom- bre d’invertébrés, 1l les a toujours trouvés constitués quant à leur contenu par des fibrilles très fines; 1l fait remarquer que celles-ci ont souvent un aspect grenu, qu'il attribue à ce qu'étant très délicates elles se plient en tous sens sous l’effet de la plus légère pression. Ces fibrilles se groupent pour con- situer un nerf; ce groupement se fait selon deux modes. — Dans le premier cas (Anodonte, Lombric), un seul faisceau de fibrilles constitue tout le nerf, il est enveloppé par une gaine contenant des noyaux. — Dans le second cas (Dysticus) le nerf est constitué par un certain nombre de paquets de fibrilles pourvus chacun d’une gaine propre et réunis ensemble par une gaine commune. M. Waldeyer assimile les nerfs du premier type à un cylindre-axe qui ne serait pas enveloppé de myéline, ceux du second type aux nerfs sympathiques des vertébrés. M. Leydig(3) (1864) observe les nerfs qui naissent d’un gan- (1) Margo, Ueber die Endigung der Nerven in der quergestreiften Muskel. substanz. Pesth, 1862, p. 11, pl. IL, fig. 6. (2) Waldeyer, Untersuchungen uber den Ursprung und den Verlauf des Axencylinders bei Wirbellosen und Wirbelthiere' (Zeitschrift für rationelle Medicin, 3° série, t. XX, p. 204, pl. VIIL, XI). (3) Leydig, Zum Bau des thierischen Corpers. Tubingen, 1864, t. E, p. 223 et suiv. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 45 glion dela chaîne thoracique de l’E£ristatis adulte, il remarque que ces nerfs se présentent sous différents aspects. Le nerf qui nait du milieu du ganglion est clair, non granuleux, il semble formé d'éléments tubulaires clairs et larges. Les autres branches nerveuses ont un aspect obscur et granuleux, elles ressemblent au nerf olfactif des vertébrés. L’enveloppe des nerfs est caractérisée par des noyaux situés à sa face interne; des noyaux semblables peuvent exister à la surface des nerfs dont l'enveloppe n’est pas visible, ce qui fait penser à M. Leydig que dans ce cas l’enveloppe existe encore, mais qu'elle est trop mince pour qu’on puisse la distinguer. M. Weismann (1) (1863) est, je crois, le premier observa- teur qui ait étudié avec som les nerfs d’une larve d’insecte, il décrit de la manière suivante les nerfs de la larve de la mou- che qu'il a observés après les avoir traités par l'alcool faible : « On reconnaît dans l’intérieur d’une gaine sans structure des » tubes pâäles, dont le contour très délicat se montre partout » formé d’une double ligne, ce qui fait penser que chacun de » ces tubes est composé d’une enveloppe très mince renfer- » mant un contenu. Entre ces tubes et la gaine reste un espace » clair, dans lequel se trouvent des noyaux ovales, ces noyaux » sont les uns petits, les autres très grands, ces derniers se » rencontrent particulièrement aux points de division des » nerfs. » M. Cadiat (2) (1878) et M. Ranvier (3) (1878) observent les nerfs de différents insectes adultes et confirment entièrement les faits observés par M. Waldeyer, chez ces mêmes animaux. En résumé, nous voyons que tous les auteurs sont d’accord pour admettre que les nerfs des insectes sont constitués par une gaine et par un contenu. Tousentre la gaine et le contenu ont observé des noyaux. M. Margo, après lui M. Weismann, ont remarqué qu'aux points de division des nerfs il existait gé- (t) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren. Leipzig, 1864, p. 120. (2) Cadiat, Note sur la structure des nerfs des invertébrés (Comptes rendus Acad. des sciences, t. LXXXVI, n° 22, p. 1420-1423). (3) Ranvier, Leçons sur l’histologie du système nerveux. Paris, t. I, p. 225, 16 MH. VEALLANES. néralement sous la gaine un noyau infiniment plus gros que les autres. Les observations de MM. Waldeyer, Leydig, Cadiat, Ran- vier, nous montrent que l’intérieur de la gaine peut être cloi- sonné par des gaines secondaires. Quant au contenu de la gaine ou conducteur proprement dit, les observateurs sont en désaccord complet. C’est une substance homogène et transparente pour Margo; pour M. Leydig, c’est une matière spéciale finement granuleuse; pour M. Weismann, ce sont des tubes ayant un diamètre notable ; enfin pour MM. Wal- deyer, Ranvier, Gadiat, ce sont des fibrilles extrêmement fines. En présence de telles divergences, il est d'autant plus diffi- eile de se faire une opinion que, sion lit les travaux publiés sur la structure du nerf des autres invertébrés, on voit que les au- teurs ne sont pas davantage d'accord sur la nature du conduc- teur nerveux. Ainsi tandis que MM. Helmoltz (1), Hæckel (2), Yung (3), Krieger (4), le considèrent comme étant formé par une substance demi-fluide homogène, MM. Walter (5), Buch- holz (6), Solbrig (7), Hermann (8), H. Schultze (9), etc., le regardent au contraire comme formé par un paquet de fibrilles. J’expose maintenant le résultat de mes propres cbserva- tions. (1) Helmholtz, De fabrica nervorum evertebrarum. Berolini diss., 1842. (2) Hæckel, Die Gewebe des Flusskrebses (Mullers Archiv, 1857). (3) Yung, Recherches sur la structure intime et les fonctions du système nerveux central chez les Crustacés. Archives Zool. exp., t. VII, 1878). (4) Krieger, Ueber das Centralnervensystem des Flusskrebses (Zeitsch. f. wiss. Zool, t.XXXIII, 1880). (5) Walter, Microscopische Siudien ueber das Centralnervensystem Wirbel- loses Thiere, 1863. (6) Buchholz, Bemerkungen über den histolog. Bau. d. Centralnerven- systems der susswasser Mollusken (Muller’s Archiv, 1863). (7) Solbrig, Ueber die feinere Structur der Nervenelemente bei den Gastero- poden. Preisschrift. München, 1870. à (8) Hermann, Das Centralnervensystem von Hirudo medicinalis. München, 1875. (9) ilans Schultze, Die fibrillare Structur der Nervenelemente bei Wirbel- losen (Arch. f. microsk. Anat., vol. XVI, 1877). ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 17 Observations. — On ouvre par sa face ventrale une larve de Musca ou d’Eristalis, on enlève avec une pince toute la chaîne ganglionnaire et on l’examine dans une goutte du sang même de J’animal. Les nerfs qui partent de la chaîne ganglionnaire sont détachés sur une assez grande longueur, ils se présentent comme des cordons pâles fréquemment ramifiés. Nous pouvons déjà sur une telle préparation nous rendre compte de la struc- ture générale du nerf. Le nerf (1) étudié près de sa sortie de la chaîne ganglion- naire et avant de s'être ramifié se montre comme un cordon un peu aplati. On reconnaît au premier coup d’œil qu'il est formé par une enveloppe et un contenu, l’enveloppe est peu réfringente, le contenu l’est bien davantage. Nous étudierons successivement chacune de ces parties. L’enveloppe se pré- sente comme une membrane assez épaisse à double contour, très transparente, homogène et présentant, plongés dans son intérieur, à peu près à égale distance des deux bords, de petits noyaux ovalaires assez régulièrement espacés. Sous l'influence de l’eau ou de l'acide acétique étendu, la gaine du nerf se gonfle et se creuse de grandes vacuoles. Pensant que chacun de ces noyaux pourrait bien appartenir à une cellule distincte, j'ai à bien des reprises imprégné les nerfs par le nitrate d'argent, mais jamais je n'ai obtenu à leur surface aucun dessin de con- tours cellulaires. Les noyaux de la gaine du nerf se colorent fortement par le carmin ou l’hématoxyline, tandis que la gaine elle-même reste toujours incolore. L’histologie du nerf des in- vertébrés est encore si mal connue, que j'ai longtemps hésité sur la signification morphologique de ses diverses parties et par conséquent sur le nom qu’il convenait de leur donner. Je désignerai avec M. Ranvier l'enveloppe du nerf sous la déno- mination de gaine de Henle. Examinons maintenant le contenu de la gaine de Henle.Ob- servé à un fort grossissement et dans le sang même de l’ani- mal, il se montre plus réfringent que la gaine et semble con- (1) PI. L, fig. 6. 18 H. VIALLANES,. stitué par une substance semi-fluide, granuleuse. Vient-on à presser légèrement la lamelle, on observe dans le contenu de la gain: des mouvements de fluctuation ; si on examine le bout coupé du nerf on voit s’en échapper un courant de très fines gra- nulations, mais quelque pression qu’on exerce, il est impossi- ble de faire sortir tout le contenu de la gaine. Si nous nous con- tentions de cette première observation, nous serions en droit de supposer que le contenu de la gaine est une substance demi- fluide renfermant de fines granulations. Mais si, au lieu d’exa- miner le nerf immédiatement après sa sortie du corps de lani- mal, on attend quelques instants, on voit que le contenu du nerf présente une striation longitudinale extrêmement fine. Le nerf traité par l'acide osmique, l’alcool, le bichromate de po- tasse ou l’acide chromique, montre la striation de son con- tenu d’une manière encore plus nette. Mais, quelque puis- sants que soient les objectifs que j'ai employés à leur étude, ces stries me snt toujours apparues comme des lignes simples; M. Weismann semble avoir été plus heureux que moi. Aujour- d’hui que les aspects striés que l’on observe, tant à la surface des cylindres-axes qu’à celle des cellules nerveuses, sont si vi- vement discutés, Je devais soumettre à la plus sévère critique les observations que je viens de relater. L'aspect strié, qui apparait seulement après la mort du nerf ou sous l'influence des réactifs, est-il dû à l’existence de fibrilles préformées, ou est-ce un produit de l’art? C’est ce que je vais essayer de discuter. Tout d’abord on pourrait supposer que l’aspect strié du con- tenu de la gaine de Henle est dù à ce que les granulations que nous y observions à l’état frais se sont groupées en files longitu- dinales sous l'influence des réactifs. C’est en effet à une cause analogue que M. Krieger attribue l’aspect strié qu’offrent les tubes nerveux des crustacés. Mais l'aspect particulier que présentent certaines préparations me fait considérer cette hypothèse comme peu probable. Un nerf étant imprégné au chlorure d’or après l’action de l'acide formique est examiné dans un mélange d’eau et d’acide formique; les stries se ARTICLE N° 1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 19 montrent avec une extrême netteté. Mais vient-on à presser la lamelle, le nerf quia perdu son élasticité s’écrasera facilement ; les stries, de rectilignes qu'elles étaient, paraîtront suivre un trajet flexueux tout en restant parallèles entre elles, si bien que le contenu du nerf présentera l'aspect d’un paquet de che- veux ondulés. On s’expliquerait mal celte image en supposant l’aspect strié dù à un groupement spécial de granulations dé- terminé par les réactifs. C’est ce qui doit nous porter à penser, avec M. Waldeyer, M. Ranvier, M. H. Schultze, que la stria- tion est due à l’existence de fibrilles qui en réalité n’étaient pas visibles sur le vivant, mais qui, sous l’influence des réac- tifs, sont devenues reconnaissables, leurs propriétés optiques s'étant modifiées. À l'exemple de M. Waldeyer et de M. Ran- vier, je désignerai le contenu du nerf, qui ressemble ainsi à un paquet de fibrilles, sous le nom de cylindre-axe; différents faits que j'ai observés et que je décrirai plus loin, montreront que cette dénomination est bien justifiée. Si maintenant nous examinons sur une certaine longueur un nerf coloré au picrocarminate, nous découvrons que de dis- tance en distance, mais à intervalles assez irréguliers, un gros noyau ovalaire se montre au-dessous de la gaine de Henle. Ces gros noyaux, ainsi qu'on peut facilement s’en assurer sur des vues de profil, sont bien situés entre la gaine de Henle et le eylindre-axe, ils sont ovalaires, et par leur situation aussi bien que parleur taille considérable, se distinguent au premier coup d'œil des novaux de la gaine. Si ces gros noyaux, comme je l’ai dit plus haut, sont espacés d’une façon tout à fait irrégulière sur le trajet d’un nerf, en revanche ils existent d’une façon pour ainsi dire constante aux points de division de celui-ci (1) (je n’entends parler pour le moment que des plus grosses branches) ; dans ce cas, ils sont situés dans l’angle de bifur- cation du cylindre-axe. Ces noyaux appartiennent au cylindre- axe et non à la gaine, comme je m'en suis assuré (2) en fai- sant agir de l’ammoniaque sur un nerf fixé au préalable par (4) PI. I, fig. 2et 4. @) PI L, fig. 1 20 H. VIALLANES, le liquide de Müller; dans ce cas, la gaine de Henle se soulève et se sépare du cylindre-axe auquel les noyaux en question restent adhérents. Je désignerai ces noyaux sous le nom de noyaux du cylindre-axe pour rappeler leur situation. Nous n’avons jusqu’à présent étudié le nerf qu’au voisinage de sa sortie des centres nerveux, voyons maintenant comment il se divise et comment sa structure se modifie à mesure qu'il approche de sa terminaison. Les plus gros nerfs se divisent généralement en deux bran- ches, dans les petits on voit fréquemment d’un même point naître quatre à cinq branches secondaires. Un nerf avant de se bifurquer présente un renflement. La gaine de Henle se conti- nue sur les branches de bifurcation, le cylindre-axe se divise également, et dans l’angle (1) compris entre les deux branches qu’il émet, reste un petit espace clair rempli d’une matière fine- ment granuleuse dans laquelle se trouve un noyau semblable par tous ces caractères à ceux que J'ai désignés plus haut sous le nom de noyaux du cylindre-axe. Au point de bifurcation d’un nerf on voit très fréquemment un paquet de fibrilles passer d’une branche secondaire à l’autre (2). Cette anastomose, et les deux branches de division du cylindre-axe du tronc principal, limitent un espace triangulaire dans lequel se trouvent la substance granuleuse et le noyau du cylindre-axe. À mesure qu'un nerf s'éloigne de son point d’origine, les noyaux de la gaine se rapprochent de la face interne de cette dernière qui a diminué d'épaisseur. Plus loin encore ils parais- sent situés sur cette face même : c’est dans cet état que se trou- vent les nerfs moteurs au moment où ils pénètrent dans les fibres musculaires de la larve de Tipula (3). Guand la gaine ne se montre plus, on retrouve encore à la surface du cylindre- axe les noyaux caractéristiques de la gaine (4) comme l’a re- marqué avant moi M. Leydig; et ce fait donne à penser que (1) PI. I, fig. 2 et 4. (2) PL I, fig. 2 et 4. (3) PI. VII, fig. 2. (4) PI. I, fig. 3. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 921 cette dernière n’a pas complètement disparu, mais qu’elle est trop mince pour qu’on puisse la voir. Chez la larve de Stra- homys (1), les nerfs qui arrivent aux fibres musculaires se mon- trent constitués de la sorte, c’est-à-dire qu’ils sont réduits à leur cylindre-axe, à la surface duquel on voit de nombreux noyaux ressemblant par tous leurs caractères à ceux de la gaine de Henle. Dans la larve de Musca et dans celle d’Eristalis les petits nerfs qui rampent sous la peau semblent réduits à un cylindre-axe complètement nu. Quant aux noyaux que j'ai désignés sous le nom de noyaux du cylindre-axe, ce n’est que dans les gros nerfs qu’on les trouve sur letrajet même du cylindre-axe. Sur les branches plus petites on les rencontre aux points de division seulement (2), ils se montrent là avec une grande constance, car on les trouve dans cette situation, même sur des rameaux nerveux qui ont perdu toute trace de la gaine. En résumé, chez les larves que j'ai étudiées (Musca, Erista- lis, Stratiomys, Tipula), le nerf, non loin de son point de sortie des centres nerveux, est constitué par une gaine et un contenu. Le contenu ne semble pas cloisonné par des gaines secondaires, comme M. Waldeyer l’a observé chez des insectes adultes. Le contenu du nerf paraîtgranuleux et à l’état frais,on y observedes mouvements moléculaires. Quand on presse un nerf coupé on en voit sortir defines granulations. Par suite de sa mort et sous l'influence des réactifs, le contenu du nerf montre des stria- tions longitudinales très fines. Ces striations paraissent dues à l'existence de fibrilles préformées et non à un groupement spé- cial de granules produit sous l'influence des réactifs, car elles persistent même quand, dans certaines conditions, on écrase le nerf. — On pourrait concilier ce fait avec l'existence des mou- vements moléculaires observés dans le contenu du nerf, en supposant que les fibrilles sont plongées dans une substance finement granuleuse demi-fluide. — Dans mes descriptions je désigne le contenu du nerf sous le nom de cylindre-axe. Au (1) PI. VE, fig. 1 et 2. (2) PI. [, fig. 4. 29 H. VIALLANES. cylindre-axe sont annexés des noyaux spéciaux qui lui adhè- rent intimement. On ne rencontre une gaine que chez les plus gros nerfs, cette enveloppe est formée par une substance homogène dans laquelle sont plongés de petits noyaux. En somme, en ce qui concerne la structure du nerf, je n’ajoute que peu de choses à ce qu’on savait avant moi. J’éta- blis seulement une distinction qui me semble importante entre les noyaux de la gaine et les noyaux du cylindre-axe qui jusqu’à présent avaient été confondus. $ 2. — Ganglions périphériques. Observations. — Chez plusieurs des larves que j'ai étudiées j'ai rencontré des ganglions sur le trajet des nerfs qui se ren- dent à la peau. | J'ai pu observer trois formes différentes de ces organes que je crois intéressant de décrire avec quelque détail: La première forme de ganglions nerveux et certainement la plus intéressante a été observée par moi dans la larve de Ti- pula (1). Silon examine par la face ventrale l'enveloppe dermo- musculaire de cet animal, séparée d’avec la cuticule, grâce à un séjour de quelquesinstants dans l’acidé formique à 1/4, on remarque que dans chaque anneau il existe de chaque côté de la ligne médiane, mais assez loin d’elle, un petit ganglion situé entre l’hypoderme et la couche musculaire. La position de ce petit centre nerveux étant reconnue, on peut facilement le cher- cher et l’isoler par dilacération sur des pièces fixées à l'acide os- mique, on le colore ensuite au picrocarminate. L’organe se présente avec une forme quadrilatère; par chacun de ses angles il reçoit un nerf, ces nerfs ne présentent rien de particulier, ils sont, comme tous les nerfs, d’un volume un peu notable, con- stitués par un cylindre-axe strié, euveloppé par une game de Henle, épaisse et présentant à sa face profonde les noyaux qui la caractérisent. La gaine des nerfs qui pénètrent dans le gan- glion se continue sur cet organe pour lui former une enve- (DNP IEEE ARTICLE N° d, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 93 loppe propre. Si maintenant nous portons notre attention sur le contenu du ganglion, nous y remarquons quatre cellules sensiblement sphériques : une d’elles se distingue de ses con- génères par sa taille considérable, les trois autres sont plus petites. Chacune de ces cellules se montre avec l’aspect d’une sphère de protoplasma renfermant à son centre un gros noyau arrondi et pourvu d’un nucléole. Si nous suivons chacun des nerfs qui pénètrent dans le ganglion, nous nous rendrons par- faitement compte des rapports qu’il affecte avec les éléments cellulaires. Le cylindre-axe de chacun des nerfs au moment où il entre dans le ganglion, se divise en un certain nombre de paquets de fibrilles ; parmi ceux-ci les uns vont simplement traverser le ganglion pour aller concourir à la formation du cylindre-axe des autres nerfs, les autres au contraire vont se mettre en rap- port intime avec les cellules. On s’en rend bien compte en examinant surtout la plus grande des quatre cellules du gan- glion, qui grâce à sa taille se prête bien à l'étude. Nous remar- quons qu'un paquet de fibrilles se dirige vers elle; un peu avant de l’atteindre, les fibrilles s’'écartent l’une de l’autre pour donner au paquet l’apparencé d'un cône creux qui par sa base viendrait s'appliquer sur la sphère que constitue le proto- plasma de la cellule. Les fibrilles, bien. distinctes les unes des autres, cheminent un instant àla surface du protoplasma, puis de nouveau se réunissent; mais au lieu de former un seul paquet, elles en forment deux qui vont en divérgeant. Pour cela ils sont obligés de se croiser et de chevaucher l’un sur l’autre en entremêlant leurs fibrilles; puis chacun d'eux va s’unir au cylindre-axe d’une des branches nerveuses qui arrivent au ganglion. Ces faits nous montrent très clairement que cette cellule que nous décrivons maintenant n'est autre chose qu'une cellule nerveuse tripolaire, présentant même des con- ditions très favorables pour l’étude de la disposition des fibril- les par rapport au protoplasma, disposition indiquée chez les vertébrés, pour la première fois, par M. Schultze, bien étu- diée par M. Ranvier dans les cellules nerveuses de la raie et dans celles de la sangsue. 24 H. VIALLANES. En examinant le protoplasma de nos cellules nerveuses nous remarquons qu'il présente des stries concentriques à son noyau, entre ces stries nous voyons de petits corps fusiformes disposés en lignes également concentriques. M. Leydig et M. H. Schultze ont observé dans les cellules ganglionnaires de plusieurs invertébrés, une striation du protoplasma tout à fait analogue à celle que je viens de décrire. Un doute pourtant me reste à cet égard, les petits corps disposés en séries concentriques sont-ils situés en dehors ou en dedans du protoplasma? C’est ce que je n’ai pu décider avec certitude. Les trois autres cellules qui entrent dans la constitution du ganglion dont l’étude nous occupe sont plus petites, elles ont exactement la même structure que la plus grande que je viens de décrire et qui, par ses dimensions, se prêtait mieux à l'étude. En résumé, chez la larve de Tipule nous trouvons dans cha- que anneau, loin de la chaîne ventrale, une paire de ganglions de taille assez grande, situés entre les muscles et l’hypoderme, chacun de ces ganglions reçoit quatre nerfs, son enveloppe n'est autre chose que la continuation de la gaine de Henle. A l’intérieur du ganglion, les cylindre-axes échangent mutuelle- ment des paquets de fibrilles et s'unissent à quatre cellules ganglionnaires qu'ils rencontrent sur leur passage. Il me reste un regret, c’est de n’avoir pu suivre les nerfs qui naissent de ces ganglions, plus curieux encore par leur dis- position régulière dans chaque anneau que par leur structure même. Une seconde forme de ganglions que j'ai observée cette fois chez la larve de Musca est très remarquable et je ne crois pas qu’on ait décrit d'organes analogues. Ces ganglions que je dé- signerai sous le nom de ganglions à côtes de melon, pour rap- peler leur forme si caractéristique, se trouvent également si- tués au-dessous de l’hypoderme, mais on ne les rencontre pas à des places déterminées comme cela avait lieu pour les gan- glions de la larve de Tipula. Souvent j'ai parcouru de grands ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 25 espaces sans en trouver, d’autres fois J'en ai vu deux peu éloi- gnés l’un de l’autre. Quand on examime par sa face externe une enveloppe dermo-musculaire de larve de Musca, on voit qu’au- dessous de l’hypoderme rampent un grand nombre de nerfs qui s’anastomosent très fréquemment entre eux, pour former un riche plexus dont les branches terminales se renflent en cellules nerveuses multipolaires qui s’anastomosent souvent entre elles et dont les prolongements paraissent se termi- ner par des extrémités libres. Parmi les plus gros nerfs qui constituent ce riche plexus on en rencontre qui paraissent renflés en un fuseau court. C’est ce renflement qui constitue le ganglion que nous allons étudier maintenant et que J'ai figuré. La préparation que je représente (1) a été obtenue en dilacé- rant une peau de larve de Musca, fixée par l'acide osmique et virée par le chlorure d’or, selon un procédé que j'indiquerai plus loin avec détail à propos des terminaisons nerveuses. On observe sur le trajet d’un nerf un gros renflement que celui-ci semble traverser comme un fil traverse un grain de chapelet. Cet aspect est dù à ce que le conducteur nerveux présente à sa surface, à un même niveau, cinq fortes sallies un peu allongées et disposées comme le seraient les côtes très saillantes d’un melon. À l’intérieur de chacune de ces saillies qui paraissent creuses, nous remarquons un petit corps fusiforme fortement coloré en violet, et présentant en son milieu une tache ronde complètement incolore. Une telle coloration, les rapports ana- tomiques de ces petits corps, nous prouvent bien que chacun d'eux est une cellule nerveuse ganglionnaire certainement bi- polaire, comme l'indique la forme en fuseau de son proto- plasma. Le nerf, à son entrée comme à sa sortie du ganglion, paraît complètement dépourvu de gaine et réduit à un cylindre- axe nu, le ganglion lui-même paraît aussi privé de toute enve- loppe. Le cylindre-axe, à son entrée comme à sa sortie du ganglion, montre bien nettement sa structure fibrillaire ; mais Je n'ai pu me rendre un compte exact des rapports qu'affectent (1) PI. Ï, fig. 8. 926 H. VIALLANES. les fibrilles avec les cellules nerveuses, peut-être à cause de la petitesse des objets. Le nerf avant son entrée dans le ganglion est bifurqué, il l'était également à sa sortie. Le ganglion décrit ci-dessus, et que je désigne sous le nom de ganglion à côtes de melon, appartient, comme je lai dit plus haut, à ce riche plexus sous-cutané d’où partent les nerfs sensitifs terminaux. J’ai observé chez la larve de lEristalis une troisième forme de ganglion qui se rapproche un peu de celle que je viens de décrire. En dilacérant la base de ces organes antenni- formes qui terminent en avant le corps de l'animal, on décou- vre un plexus sous-cutané extrêmement riche dont deux des plus gros nerfs vont se terminer à des organes sensoriels spéciaux, et dont les petits nerfs terminaux se rendent aux téguments du voisinage. Une des branches de ce plexus se montre avec constance renflé en un point de son trajet. En examinant ce renflement (1), on voit qu’il est dû à la présence de deux cellules nerveuses, fusiformes, très rapprochées l’une de l’autre et occupant l'axe du nerf. À considérer la forme de ces cellules, il n’est pas douteux qu’elles soient bipolaires. Le nerf qui enveloppe, pour ainsi dire, ces cellules ne présente pas d’enveloppe et parait réduit à son cylindre-axe. Je n’ai pas besoin de faire remarquer les ressemblances très grandes qui existent entre l’organe que je viens de décrire et celui que j'ai désigné plus haut sous le nom de ganglion à côtes de melon. CONCLUSIONS: 4e Chez les larves que j'ai étudiées, on rencontre, entre les téguments et les muscles, des ganglions nerveux périphériques qui n'appartiennent ni à la chaîne ventrale ni au système stomatogastrique. Je ne crois pas qu’on ait signalé jusqu'à présent rien d'analoque chez les insectes. CNE TE ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 927 2 Les ganglions périphériques de la larve de Tipula sont très remarquables par leur disposition régulière et leur symé- trie. On en trouve une paire dans chaque anneau. 3° Les ganglions périphériques qu'on rencontre dans la larve de Musca entre la peau et les muscles sont inégalement dis- séminés. Je les ai décrits sous le nom de ganglions à côtes de melon, pour rappeller leur aspect caractéristique. 4 On rencontre des ganglions périphériques analogues chez l'Eristalis, mais ils sont localisés dans le plexus nerveux d'où partent les nerfs qui se rendent aux organes sensoriels spéciaux de la région antérieure du corps. CHAPITRE III TERMINAISONS NERVEUSES SENSITIVES Historique. — M. Leydig (1) (1851), en étudiant par trans- paretice la larve de la Corethra, a reconnu que chez cet ani- al certains longs poils qui hérissent les téguments se trouvent én rapport chacun avec un conducteur nerveux, aussi les considère-t-il comme des organes des sens. Il remarqua que l’union de ce conducteur avec le poil se faisait de la manière suivante : le nerf arrivé à la base du poil se renfle en un corps fusiforme dont l’extrémité terminale est immédiatement sous- jacente à la base du poil. M. Leydig reconnut dans le corps fusifome un protoplasma et un ou déux noyaux. Il le consi- déra comme une cellule ganglionnaire. Des recherches subséquentes dues principalément à ce même anatomisté, nous apprirént que ces organes sensoriels, constitués par un poil chitineux et une formation gan- glionnaire sous-jacente, reliés par un conducteur aux cen- tres nerveux, étaient extrêmement répandus chez tous les arthropodes. Les naturalistes qui les étudièrent, s'appuyant sur des considérations théoriques tirées du lieu où ces appa- (1) Leydig, Anatomisches und histologisches uber die Larve dér Corethra plumicornis (Zeitsch. f. wiss Zool., t. LIL (1851), p. 441). 928 H. VIALLANES. reils se rencontrent, de la forme du poil qui les termine, et plus rarement sur des expériences physiologiques, les con- sidèrent tantôt comme des organes auditifs, d’autres fois comme des organes olfactifs, gustatifs ou tactiles. Je ne m'occuperai pas 1e1 des fonctions qui ont été attribuées à ces appareils, je ferai seulement connaitre ce que les travaux de nos devanciers nous ont appris sur leur structure. M. Leydig (1) (1860) décrit dans le balancier de quelques diptères (Musca, Eristalis) et au voisinage de la bouche de quelques insectes, des organes sensoriels construits sur le même plan que ceux qu'il avait découverts chez la Corethra. lei encore le nerf se renfle en une cellule ganglionnaire bipo- laire (bipolare Ganglien-Kugel), dont le prolongement se termine au contact des téguments ou à la base d’un poil chitineux. M. Hensen (2) (1863) reconnut que chez les Crustacés les nerfs sensoriels se terminent dans l’antenne d’une manière analogue, chacun d’eux se renfle en une cellule bipolaire dont le prolongement pénètre dans l’intérieur d’un poil creux qui le coiffe pour ainsi dire. M. Landois (3) (1868) reconnut dans l’antenne du Lucanus cervus un mode de terminaison tout à fait analogue des nerfs sensoriels. M. Jobert (4) (1872) reprit l'étude de ces mêmes organes sensoriels dans les pièces buccales d’un certain nombre d’in- sectes. Comme ses prédécesseurs, 1l reconnut que le nerf arrivé au voisinage du poil se renflait en un corps fusiforme dont l’extrémité terminale se continuait jusqu’à la base même (1) Leydig, Ueber Geruchs und Gehororgan der Krebse und Insecten (Archiv f. Anat. und Physiol., 1860, p. 304, pl. IX, fig. 20). (2) Hensen, Stüdien über das Gehorogan der Decapoden (Zeitsch. f. wiss. Zoolog., t. XIIL, 1863, p. 318, pl. XXII, fig. 36). (3) Landois, Das Gehorogan des Hirschkäfers (Lucanus cervus) (Archiv für mikrosk. Anat., vol. IV, 1868, p. 88, pl. VD. ; (4) Jobert, Études d'anatomie comparée sur les organes du toucher chez divers Mammifères, Oiseaux, Poissons et Insectes (Ann. des sc. nat., t. XVI, n° 5, et Bibliothèque de l'École des hautes études, t. NI, 1872, art. n°5, pl. X). ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 99 du poil. Mais diverses observations intéressantes qu'il fit le conduisirent à attribuer à ce corps fusiforme une signi- fication différente de celle qu’on lui avait donnée, et à le considérer non plus comme une simple cellule ganglion- naire bipolaire, mais comme un ganglion composé de plu- sieurs Cellules nerveuses. En effet, chez les animaux qu'il étudia, il rencontra dans le renflement fusiforme du nerf quatre ou cinq noyaux qu’il considéra comme appartenant à autant de cellules. M. Jobert observa, en outre, un fait fort intéressant : il remarqua que de la base du poil sensoriel par- tait un prolongement chitineux creux qui s’enfonçait dans le renflement fusiforme. M. Hauser (1) (1880) étudia au point de vue physiologique et anatomique les antennes d’un grand nombre d’insectes, il y découvrit des appareils nerveux terminaux qui ne sont pas en tous points faciles à comparer avec ceux précédem- ment décrits. Toutefois, 1l nous montre encore que le nerfse termine par une cellule dans le protoplasma duquel se montre un {rès gros novau. MM. Künckel et Gazaniaire (2) (1881) s’adressèrent, comme M. Jobert, à la trompe des insectes diptères. Comme MM. Leydig, Hensen, Landois et autres, 1ls virent le nerf se terminer en se renflant en une cellule bipolaire; ils ont reconnu que le prolongement terminal de celle-ci était coiffé par le poil chitineux sensoriel. MM. Künckel et Gazaniaire ; pensent être les premiers à considérer le renflement terminal du nerf comme une cellule nerveuse bipolaire; mais cette interprétation a été donnée dès 1860 par celui même qui a découvert ces organes (3), et toutes les observations qui ont (1) Hauser, Physiologische und histologische Untersuchungen über das Geruchsorgan der Insecten (Zeitsch. f. Wiss. Zool., t. XXXIV, 1880, p. 367- 403, pl. XVII, XIX). (2) Künckel et Gazantaire, Rapport du cylindre-axe et des cellules nerveuses périphériques avec les organes des sens chez les Insectes (Comptes rendus, t. XACII, n° 9, p. 471, 1881). (3) Leydig, Ueber Geruchs und Gehorogan der Krebse und Insecten (Archiv für Anat. und Phys., 1860, p. 304, pl. IX, fig. 2). ANN. SC. NAT., ZOOL., AOUT 1882. XIV. 3. — ART. N° {. 30 M. VIALLANES. élé faites depuis, à part peut-être celles de M. Jobert, sont venues en confirmer l'exactitude. Les naturalistes du travail desquels je rends compte, ont observé quelques faits plus nouveaux. [ls ont remarqué que la gaine du nerf se continuait sur la cellule nerveuse pour l’envelopper; ils ont reconnu que, dans beaucoup de cas, des noyaux plus ou moins nombreux, assez volumineux, s’accumulaient entre le protoplasma de la cellule nerveuse et la gaine. Cette observation rend compte des images observées par M. Jobert, et parait montrer qu'il ne faut point, comme l’avait fait ce naturaliste, considérer le renflement terminal du nerf comme formé par plusieurs cel- lules nerveuses, mais qu'il faut y voir, comme dans les autres cas, une cellule nerveuse entourée d'éléments protecteurs. Tel est le résumé des principaux travaux (1) publiés sur le mode de terminaison des nerfs sensoriels chez les Arthropodes. En somme, il est bien établi aujourd’hui qu'au voisinage d’un poil sensoriel le nerf se renfle en une cellule nerveuse bipolaire. Fu Comment le prolongement terminal de cette cellule en- tre-t-il en rapport avec le poil? À cet égard, la plupart des observateurs sont peu affirmatifs et nous disent simplement qu'ils ont suivi ce prolongement jusqu'à la base du poil; MM. Künckel et Gazamaire vont plus loin; ils nous disent que ce prolongement pénètre dans l’intérieur même du poil chitineux dont il est pour ainsi dire coiffé. Les recherches que j'ai faites et que J'exposerai plus loin me portent à croire qu'il n’en est pas tout à fait ainsi. Il reste de plus à résoudre une question importante à laquelle aucun de mes prédéces- seurs ne paraît avoir songé : comment est assurée la sensibilité dans les régions où la cuticule est parfaitement lisse, etoù l’on ne rencontre n1 poils ni saillies d'aucune sorte ? J’exposerai successivement les recherches que j'ai entre- (1) Je dois, en outre, citer les travaux suivants qui ont une moindre impor tance : Hyks, On a structure in the anten. of Insect. (Transact. Linn. Societ., London, XXII, 1852). — O. Grimm, Zur Anat. der Fühler der Insecten (Mém. Acad. de Saint-Petersbourg, 1869, p. 66). ARTICLE N° 1. | HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 31 prises : 1° sur le mode de terminaison des nerfs sensitifs chez la larve de Stratiomys; 2 sur le mode de terminaison des nerfs sensitifs chez les larves d’Eristalis et de Musca. Elles nous fournissent, je crois, la solution de ces deux questions qui se présentaient à notre esprit, comment la cellule nerveuse ter- minale se met-elle en rapport avec le poil sensoriel? Comment la sensibilité est-elle assurée dans les régions qui n’ont pas de poils? $ 1. — Terminaisons nerveuses sensitives chez la larve de Stratiomys. Je ne reviendrai pas sur la structure du tégument de la larve de Stratiomys; je lai fait connaître plus haut avec détail. Je rappellerai seulement qu'il se compose d’un hypo- derme formé d’une seule couche de cellules aplaties, limité en dedans par une membrane basale et en dehors par une cuticule hérissée de poils el ornée d’un dessin élégant qui cor- respond rigoureusement aux contours des cellules hypoder- miques Quand on examine par sa face interne un tégument de Séra- hiomys débarrassé des muscles qui s’y insèrent, on remarque qu’au-dessous de la membrane basale rampent des nerfs fort nombreux (pl. IT, fig. 4). Des branches nerveuses principales partent des branches secondaires; parmi celles-ci, les unes, après un trajet plus ou moins long, se renflent en une espèce de massue (pl. ILE, fig. # cf) située au voisinage du point d'implantation d’un poil et se terminent là; les autres se renflent au contraire en une cellule multipolaire (pl. II, fig. 3, em) dont les prolongements se bifurquent et paraissent se terminer par des extrémités libres. En résumé, dans les téguments nous trouvons deux sortes de branches nerveuses terminales : les unes se rendent à la base des poils, les autres n’affectent aucun rapport avec ces appendices. Les premières seules ont été étudiées avant mot, les secondes n’ont point été aperçues. J’étudierai successive- ment ces deux modes de terminaison. 39 H, VIALLANES. Terminaisons nerveuses en rapport avec les poils. — Ces organes se composent de deux parties principales : le poil sensoriel et l’appareil nerveux terminal ; nous les étudierons successivement. L'examen le plus superficiel permet de reconnaître que le tégument est hérissé de poils de diverses longueurs qui se montrent comme des élevures de la cuticule terminées en pointe. On s'assure facilement que ces poils sont de deux sortes. Les uns, sensiblement plus petits, naissent dans l’in- terstice des lignes polygonales qui ornent la cuticule, et qui répondent, comme nous le savons, aux contours des cel- lules hypodermiques ; les autres, au contraire, ont une large base d'implantation qui tient la place qu’occuperait un grand champ polygonal. Les seconds de ces poils se mettent seuls en rapport avec les éléments nerveux et méritent seuls le nom de poils sensoriels. Les poils, qu'ils soient sensoriels ou non, sont creux et composés par conséquent de deux parties : un canal central et une enveloppe chitineuse qui, au point d'implantation, se continue avec la cuticule générale. Du côté de la cavité du corps, le canal central est librement ouvert, si bien que si l’on pouvait promener une aiguille suffi- samment ténue au-dessous de la cuticule, elle pénétrerait dans la cavité du poil; nous devons donc considérer un orifice au canal central. Dans les poils sensoriels (1) cet orifice présente une dispo- sition particulière, 1l est Hmité par un épais bourrelet chiti- neux très saillant, c’est là la base du poil. Dans son ensemble, cette partie a la forme d’une demi-sphère; par son bord elle est enchâssée entre les champs polygonaux de la cuticule oénérale qui, comme nous le savons, correspondent chacun a une cellule hypodermique; de sa face plane s'élèvent les parois des poils; le sommet de sa face arrondie, qui fait saillie en dedans, présente un large enfoncement qui. n’est autre que l’orifice du canal central. L'étude de la partie (CMD ENTIER ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET. DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. Ja initiale du canal central nous révèle quelques détails inté- ressants dont nous comprendrons plus loin l’importance. Si nous pénétrons dans le canal central par son orifice assez large, comme nous l'avons dit, nous remarquons que sa partie initiale est évasée en cône, puis que son calibre se rétrécit brusquement pour se continuer sans plus changer sensible- ment de diamètre. La partie évasée que je désigne sous le nom de vestibule du canal est tout entière creusée dans la base; la partie rétrécie, à laquelle je donne le nom de canal propre- ment dit, commence au niveau du plan général de la cuticule. Nous remarquons de plus que le canal proprement dit n’est pas la simple continuation du vestibule, mais que son entrée est bordée, comme le serait celle d’un puits, par une margelle saillante dans la cavité du vestibule, et que j’appellerai la margelle du canal central. Toutes les parties que je viens de décrire jusqu’à présent sont chitineuses, on peut les étudier sur des pièces simplement bouillies dans la potasse. Si, au lieu d'opérer de la sorte, nous traitons un tégument par l'acide acétique, nous parvenons facilement à détacher l’hypoderme d’avec la cuticule. Cet hypoderme est ensuite placé sur un porte-objet et coloré par une solution aqueuse de vert de méthyle. Nous reconnaissons alors que de sa surface s'élèvent de longues baguettes protoplasmiques dont la forme est la même que celle des poils. Chacune d'elles est le contenu du canal central d’un poil chitineux; elles sont assez remarquables par ce fait que leur partie centrale est fortement colorée en vert, tandis que leur partie corti- cale ne l’est point du tout. Parmi ces baguettes protoplas- miques, il nous est assez facile de distinguer celles qui appartiennent à des poils ordinaires de celles qui appar- tiennent aux poils sensoriels. Les premières sont en conti- nuiié avec le protoplasma des cellules hypodermiques ordi- naires, et n’en sont qu'une simple élevure. Les secondes semblent, au contraire, sortir d’entre les cellules hypoder- miques non modifiées, écartées pour leur faire place; nous verrons plus loin à quoi est due cette apparence. 34 H. VIALLANES. Pour acquérir d’autres notions sur la structure du poil sensoriel, il faut étudier par leur face interne des téguments fixés par le mélange d'alcool et d’acide osmique, débarrassés des muscles qui sy insèrent, mais non de la cuticule; puis colorés par le carmin et traités par l'acide acétique afin de rendre la cuticule aussi transparente que possible. Sur de telles pièces, on remarque qu’au voisinage de chaque poil sensoriel arrive un nerf. Celui-ci se renfle en un corps fusi- forme renfermant, dans son intérieur, un noyau volumineux. Nous voyons l’extrémité terminale de ce corps s'engager dans le vestibule du canal central du poil. Je puis le dire dès main- tenant, le corps fusiforme est une cellule ganglionnaire bi- polaire. Au voisinage de la base du poil, accolé contre le corps fusiforme, ou bien occupant les situations les plus variables par rapport à celui-ci, nous trouvons constamment un gros noyau dont la présence n’a jamais été signalée. Je l'appelle le noyau de la cellule du poil. Nous verrons que son rôle est des plus importants. Les préparations faites comme je viens de ion ont l'avantage de nous montrer en même temps et dans leurs rap- ports les parties molles et les parties chitineuses; mais elles ont l'inconvénient, étant trop opaques, de nous cacher bien des détails; pour aller plus avant il nous faut renoncer à étudier en même temps l’hypoderme avec la cuticule. Nous aurons recours au procédé suivant : On fixe une larve de Sératiomys en injectant dans sa cavité générale un mélange à parties égales d'alcool à 36° et d'acide osmique au centième, on coupe un lambeau de la peau, on en détache les muscles, puis on sépare l’hypoderme d’avec la cuticule. L’hy- poderme ainsi préparé (1) est coloré à l’hématoxyline de Bæœhmer, puis monté au baume ou à la glycérine. (1) Comme agents fixateurs, j'ai employé aussi l’acide osmique en solution aqueuse ou en vapeurs, l’alcool absolu, l'acide picrique, les liqueurs de Müller et de Kleinenberg ; les images ont toujours été les mêmes, toutefois, je recom- mande plus particulièrement le mélange d’alcool et d’acide osmique. Les pièces préparées par ce procédé montrent les contours cellulaires bien plus nettement dessinés. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 39 Si nous examinons par sa face externe un hypoderme pré- paré de la sorte, nous reconnaissons que la cuticule à entrainé avec elle les baguettes protoplasmiques qui remplissent le canal central des poils, et que celles-ci ne sont plus représen- tées que par un court tronçon, une amorce restée adhérente à l’hypoderme. C’est un inconvénient que nous ne rencontrions pas dans les préparations traitées fraîches par l'acide acétique, où la baguette protoplasmique quittait tout entière le canal du poil; mais il suffit d’être prévenu. Étudions maintenant notre hypoderme par sa face interne ; nous reconnaissons les parties déjà signalées : le nerf qui au voisinage du poil se renfle en un corps fusiforme, et ce gros noyau extérieur au corps fusiforme que j'ai appelé noyau de. la cellule du poil. | Cellule du poil (1).— Quand nous examinons ce gros noyau extérieur au corps fusiforme, dont la présence est absolument constante, bien que sa situation puisse légèrement varier, nous remarquons qu’il est entouré par une aire de protoplasma par- faitement limitée; 1l appartient donc à une cellule complète, que j'appelle cellule du poil. Gelle-ci par la plus grande partie de son corps constitue une lame aplatie sous-jacente à l’hypo- derme ; mais une région de son protoplasma semble présenter une perforation quise manifeste comme un cercle très clair; autour de ce cercle, le protoplasma constitue un bourrelet saillant, assez large et régulièrement eirculaire. On remarque, en outre, que l’extrémité terminale du corps fusiforme va s’enfoncer dans le cercle clair que je comparais à une perfo- ration, et qu'ainsi le bourrelet circulaire lui forme comme un collier. Si nous nous rappelons maintenant la description que j'ai donnée plus haut des parties chitineuses du poil sensoriel, nous reconnaissons que le bourrelet protoplasmique circu- laire répond à la base d’un poil dont il est, pour ainsi dire, le moulage, et que le cercle clair qu’il circonscrit et dans lequel (4) PI. IE, principalement fig. 1, 2, 6. 36 H. VEALLANES. s'engage l’extrémité terminale du corps fusiforme répond au veslibule du canal central. Ainsi le poil chitineux repose par sa base sur le protoplasma d’une cellule spéciale, la cellule du poil. Celle-ci se reconnait au premier coup d'œil, à son gros noyau, à ses rapports Si spéciaux, et aussi à la coloration plus foncée que son protoplasma prend en pré- sence de l’hématoxyline. La cellule du poil est par la plus grande partie de son étendue sous-jacente aux cellules de l’'hypoderme; c’est seulement à sa face supérieure, par les bords du bourrelet protoplasmique qui double la base chiti- neuse du poil, qu’elie se soude avec les bords des cellules hypodermiques qui entourent celui-ci. Ainsi la cellule du poil concourt, en somme, comme les cellules’ de l’hypo- derme, à limiter la cavité du corps, comme elles, elle sé crète une cuticule chitineuse, laquelle présente seulement cette particularité de s'élever en un cône creux au lieu de rester à l’état de lame. La grande taille de la cellule du poil s'explique facilement par la grande quantité de chitine qu’il lui faut sécréter ; sa position en partie sous-jacente, par l’étroi- tesse de la base du poil, qui ne lui permet d’être superticielle que par une portion restreinte de son protoplasma. Il me paraît certain que la cellule du poil n’est autre chose qu’une cellule hypodermique, légèrement modifiée pour sécré- ter une cuticule de forme spéciale, le poil. Ge qui confirme bien l’exacutude de cette manière de voir, c’est l'étude des petits poils non sensoriels; ceux-c1 sont, en effet, constitués par une simple élevure de la cuticule, dans laquelle se con- tinue le protoplasma d’une cellule hypodermique non mo- difiée. Le protoplasma de la cellule du poil sensoriel ne revêt pas seulement la base du poil et le vestibule du canal central, mais il pénètre dans le canal même qu'il remplit, ainsi que nous le verrons plus loin. Revenons maintenant avec plus de détail sur la structure du corps fusiforme, dont j'ai seulement indiqué laspect général. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. ml Corps fusiforme (1). — I se montre avec la forme d’un fuseau plus ou moins allongé, se continuant par une de ses extrémités avec un nerf, par l’autre s'engageant dansle vestibule du canal central, lequei est tapissé, comme nous lavons vu, par le protoplasma de la cellule du poil. Le nerf a la structure que nous lui connaissons, il est formé par un cylindre-axe et une gaine de Henle. Celle-ci se continue sur le corps fusi- forme en conservant ses noyaux spéciaux, mais elle va s’amin- cissant beaucoup à mesure qu’elle approche de l’extré- mité terminale de ce dernier. Le corps fusiforme renferme dans son intérieur un seul gros noyau ovalaire, environné d’un protoplasma avec lequel se continue le cylindre- axe. La manière dont cette continuation s’effectue, ne peut être bien reconnue que sur des pièces fortement imprégnées d’os- mium. Sur de telles préparations (2) on reconnaît que, après que la gaine du nerf s’est évasée pour recouvrir le corps fusi- forme, le cylindre-axe conserve encore quelque temps son diamètre ordinaire, il chemine en présentant une ou deux sinuosités, puis atteint le protoplasma du corps fusiforme. Ensuite ses fibrilles se décomposent, se séparent les unes des autres pour embrasser le protoplasma et reproduire, en un mot, la figure que donne M. Ranvier (3) des cellules nerveuses bipolaires des ganglions spinaux de la raie. Sur une des pré- parations (4) que j'ai figurées, nous pouvons faire une remarque assez intéressante. Sur le trajet du nerf, les noyaux de la gaine sont situés à la face interne de celle-ci ; quand la gaine s’est élargie, c’est, au contraire, à la face externe qu’on les rencontre. Mais ce qui mérite davantage d'attirer l’attention, c’est que, sur le court trajet sinueux qu’il parcourt avant d’attemdre le protoplasma, le cylindre-axe montre, appliqué à sa surface, un noyau en tout semblable à ceux de la gaine, (1) PI. II, toutes les figures. (2) PI. IL, fig. 5. (3) Ranvier, Traité technique d'histologie, 1815-1878, p. 711, fig. 294. (4) PI. I, fig. 5. 38 IH. VIALLANES. et pourtant, en ce point, cette dernière est tout à fait éloignée de lui. La présence de ce noyau indiquerait-elle que la gaine s’est dédoublée en deux feuillets : l'un trop mince pour qu’on le voie et appliqué au cylindre-axe, l’autre, au contraire, gar- dant son épaisseur el formant enveloppe du corps fusiforme ? C’est une discussion dans laquelle je ne veux pas entrer; mais si j'ai insisté sur ce fait, c’est que plus loin nous rencontrerons quelque chose d’analogue en étudiant la colline de Doyère. Les faits que nous venons d'exposer touchant la structure du corps fusiforme, montrent avec la plus entière évidence que ce corps est bien une cellule ganglionnaire bipolaire recou- verte, comme cela s’observe si souvent, par la gaine de Henle élargie. Je n’ai point encore donné de détails sur le noyau du corps fusiforme, ou pour mieux dire sur le noyau de la cellule bi- polaire que ce corps représente. Il se montre généralement avec un aspect sphérique, il est de taille vraiment énorme, et paraît rempli par une quantité considérable de nucléoles d’as- sez grande taille. Il nous reste maintenant à déterminer le point le plus im- portant : Comment se termine l’extrémité du corps fusiforme que nous avons vue s'engager dans l’excavation conique de la base du poil, laquelle est tapissée, comme nous l'avons dit, par une portion du protoplasma de la cellule du poil? Pour résou- dre cette question, 1l faut s'adresser à des préparations d’hy- poderme (1) dépouillées de la cuticule et des museles, après fixation par l’alcool et l’acide osmique; elles doivent être examinées par leur face externe ou cuticulaire. J'ai déjà dit qu’en séparant la cuticule d’avec l’hypoderme, dans des pièces traitées par les liquides fixateurs, on entraînait avec la cuticule le protoplasma qui remplit le canal central du poil. C’est une condition dont il nous faudra tenir compte ici. Si donc nous examinons une préparation disposée comme (4) PI. III, fig. 2. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 39 je viens de l’indiquer et telle que celle que J'ai figurée, nous remarquons le corps fusiforme avec son aspect ordinaire; au même niveau, nous rencontrons la partie principale de la cel- lule du poil avec son gros noyau. Au-dessus d’eux s’étend l’hypoderme; sur le plan de cette membrane et en faisant partie, nous trouvons la portion de la cellule du poil qui double la base de cette formation. Gette portion de cellule se présente avec son aspect ordinaire; elle ressemble à un bourre- let circulaire, et représente la moulure de la base chitineuse du poil; elle est claire à son centre, et sur son bord bien net, viennent s'appuyer un certain nombre de cellules hypoder- miques, qui ainsi sont disposées comme en couronne autour de la base du poil. Portons maintenant notre attention sur le bourrelet proto- plasmique qui moule la base chitineuse du poil ; en nous rappe- lant que précédemment nous avons déjà conduit l’extrémité terminale du corps fusiforme jusqu’à la région claire qu’il pré- sente à son centre. En éloignant objectif, nous remarquons que l'extrémité du corps fusiforme semble traverser la partie centrale du bourrelet ens’en faisant, pour ainsi dire, un collier, il s'élève ensuite comme une tige courte au-dessus du niveau général de l’hypoderme. En examinant cette sorte de tige avec un objectif plus puissant, on observe qu’autour de sa base se montre le protoplasma qui moule l’excavation conique. On remarque de plus qu’elle est composée par un mélange de fibrilles et de protoplasma continu avec celui de la cellule du poil, et qu’enfin les fibrilles sont situées à la surface de la tige dont le centre parait entièrement protoplasmique. La sorte de tige que nous décrivons ne se termine point par une extrémité tronquée, mais par une sorte de couronne for- mée par des fibrilles un peu divergentes. En examinant cette extrémité, on croirait voir un pinceau dont les poils centraux auraient été enlevés. Comment maintenant convient-il d’inter- préter les images que je viens de décrire? On ne peut mettre en doute, je crois, que les fibrilles nerveuses de l'extrémité terminale du corps fusiforme ne pénètrent à l’intérieur même 40 H. VIALLANES,. du protoplasma de la cellule du poil qui remplit l’excavation conique. En considérant leur situation à la périphérie d’une tige protoplasmique, la manière dont elles divergent vers leur extrémité terminale, en comparant le diamètre et la forme de la couronne terminale qu’elles constituent avec le diamètre, et la forme des différentes parties de la face chitineuse du poil, on arrive à cette conclusion, qu’elles sont extérieures à la mar- gelle du canal central. Parmi les fibrilles, quelques-unes pé- nètrent-elles dans le protoplasma du canal central? c’est ce qu'il m'est impossible de décider. Il ne me reste plus maintenant qu’à donner quelques détails accessoires sur la structure des corps fusiformes, et à indiquer les variations qu’on peut observer chez un même animal d’un de ces organes à l’autre. Les corps fusiformes ne pendent pas librement dans la cavité du corps, ils sont toujours couchés sous les téguments et assez fortement accolés à l’hypoderme sous-jacent; c’est ce dont on s'assure en examinant des pièces dilacérées, et aussi en observant les préparations avant de les avoir recouvertes d’une lamelle. On observe très fréquem- ment (1) un certain nombre de petites cellules isolées les unes des autres, souvent disposées en bordure autour du corps fusi- forme, mais le touchant rarement. Ces cellules annexes ont un contour régulier; elles sont appliquées à la face profonde de la peau ; elles renferment un noyau, et sont reconnaissables au premier coup d’œil par l'intensité avec laquelle leur proto- plasma se colore soit par l’hématoxvline, soit par le carmin. Ces cellules manquent souvent autour des corps fusiformes, et, d'autre part, s’observent fréquemment dans des régions de la peau où 1l n’y a point de terminaisons nerveuses; Je ne serais pas éloigné de penser qu’elles sont comparables à ces cellules rameuses disposées en ruban, que je déerivais plus haut, à la face profonde de la peau des larves d’Eristalis et de Musca. Les dimensions des corps fusiformes varient beaucoup, elles sont généralement en rapport avec celles du poil sensoriel; (1) PL IE, fig. 1, 5, 6. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 41 leur forme est tantôt très raccourcie, tantôt, au contraire, très allongée; dans ce cas, le noyau est proportionnellement plus petit. Les variations les plus importantes à connaitre sont celles qui portent sur la cellule du poil, elles n’affectent jamais la partie de cet élément qui double la base du poil et pénètre dans son canal central, mais seulement celle qui est sous- jacente à l’hypoderme et qui renferme le noyau. Cette partie peut, en effet, être écartée complètement du corps fusiforme, ou, au contraire, complètement accolée à lui, ce cas constitue une très mauvaise condition pour l'étude. J'ajouterai, en terminant, que J'ai fréquemment rencontré des individus chez lesquels l'étude était rendue impossible par la grande quantité de spores opaques accumulées à la face pro- fonde de la peau ; ces spores m’ontparu appartenir à des cham- pignons parasites. Terminaisons nerveuses n'affectant aucun rapport avec les poils. — Ainsi que je l’ai dit plus haut, des nerfs qui rampent sous la peau de la larve de Srratiomys, se détachent deux sortes de branches, les unes se rendent aux poils sensoriels et se ter- minent, comme nous l’avons vu, en se renflant en une cellule ganglionnaire bipolaire, les autres paraissent se terminer librement sans affecter aucun rapport avec les poils. On ob- serve facilement ces derniers en étudiant par leur face in- terne des lambeaux d’hypoderme détachés de la cuticule, après avoir été fixés par le mélange d'acide osmique et d'alcool, puis colorés à l’hématoxyline. Sur de telles préparations, nous reconnaissons que ces branches nerveuses, après un trajet plus ou moins long, quelquefois tout à fait court, se renflent en une cellule multipolaire pourvue de trois ou quatre pro- longements. Le cylindre-axe de la branche nerveuse se confond avec le protoplasma de la cellule. La gaine de Henle, pourvue de ses noyaux caractéristiques, se continue sur elle. De cette cellule multipolaire partent deux, trois ou quatre prolongements terminaux sur lesquels se continue la gaine, et qui, après un trajet souvent assez long, se bifurquent en 49 H. VIALLANES. deux pointes très fines intimement accolées à l’hypoderme, mais sans qu'on puisse les suivre plus loin. Il me semble que nous avons affaire là à une terminaison nerveuse libre. J'ai étudié ces appareils terminaux par la méthode de l’or, mais celle-ci ne m'a donné rien de plus que l’hématoxyline. Elle a seulement l'avantage de permettre de trouver au pre- mier coup d’oœil les cellules multipolaires, car on colore ainsi leur protoplasma en violet intense, tandis que leur noyau reste clair ; c’est là, nous le verrons, ‘une réaction caractéristique. q $ 2. — Terminaisons nerveuses sensitives chez les larves d’Éristalis et de Musca. J'ai déjà décrit la peau de ces animaux, elle est constituée essentiellement comme celle du Sfratiomys, à cette différence près qu'ici la cuticule ne reflète plus le dessin des cellules hypodermiques, et qu'on ne rencontre plus ces vrais poils à canal central que je décrivais longuement tout à l’heure; on ne trouve plus, à la surface de la peau, que des sortes d’épines pleines qui ne sont que des épaississements de la cuticule; toutefois je ne veux pas poser ceci en règle absolue, car, ainsi qu’on le verra, il existe dans les téguments de la larve de la Mouche quelques représentants rares et dégra- dés de ces poils sensoriels si puissamment développés chez le Stratiomys. La technique que j'ai déerite plus haut pour l’étude des ter- minaisons nerveuses dans la peau du Stratiomys n’est pas com- mode à appliquer chez la Musca ou l’Eristalis. Car chez ces ani- maux il est difficile de détacher les muscles d'avec l’hypoderme sans déchirer celui-e1, aussi l’ai-je employée seulement comme méthode de contrôle. Chez les larves qui nous occupent main- tenant, il convient d’avoir recours à un procédé qui nous permette d'étudier lhypoderme et ses nerfs sans détacher les muscles. La manière d'opérer qui m'a le mieux réussi est la suivante : On injecte dans la cavité générale d’une larve une solution ARTICLE N° f. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 43 acl mique à DIèce € nce à brunir d'acide os e à +, quand la pièce commence à b 100? légèrement. on ouvre l’animal, on enlève ses viscères, on plonge la pièce pendant dix minutes dans l’acide formique au =; on la laisse ensuite macérer pendant vingt-quatre heures à l’obscu- rité, dans une solution de chlorure d’or à = (des solutions bien plus faibles peuvent être employées). La réduction de l'or s'achève ensuite à la lumière dans l’acide formique au £ On sépare alors facilement et par grands lambeaux l’enveloppe dermo-musculaire d'avec la cuticule; il arrive fréquemment que, dans cette opération, avec la cuticule on entraîne le noyau et une partie du protoplasma des cellules hypodermiques. C’est même là une circonstance utile à connaître et souvent favo- rable. La pièce est examinée dans la glycérine par sa face externe, les muscles sous-jacents sont transparents et ne gênent pas l’observation. Examinons d’abord la préparation empruntée à la larve de Musca que représente la figure (pl. IL, fig. 2). Dans cette pièce la cuticule enlevée a entraîné avec elle presque toute l’épais- seur des cellules hypodermiques et leur noyau, si bien qu'il n'existe plus au-dessus de la membrane basale qu’une mince couche de protoplasma, légèrement coloré en violet, et qui, à intervalles égaux, montre des taches blanches circulaires qui répondent à la place qu'occupait le noyau d’une cellule hypo- dermique. Ge qui démontre bien l'exactitude de cette manière d'interpréter cet aspect, c’est que si l’on examine par sa face interne la cuticule enlevée, on retrouve à sa surface les noyaux hypodermiques entrainés avec elle et dont la trace seule a subsisté sur la membrane basale. Au-dessous de la membrane basale, nous trouvons une quantité considérable de filets ner- veux sur la disposition desquels nous allons revenir ; au-des- sous de ces nerfs, nous rencontrons enfin la couche des fibres musculaires rendues très transparentes par l’acide formique et trop peu colorées par lor pour gêner en rien l’observa- tion. Examinons maintenant plus soigneusement les nerfs qui rampent au-dessous de la membrane basale. Grâce à [a colo- 4% H. VIALLANES. ration violette qu'ils ont prise, ils se distinguent au premier coup d'œil et tranchent admirablement sur les tissus voisins. Le contour de ces nerfs est parfaitement net, mais ils parais- sent tous réduits à leur cylindre-axe nu; quelques efforts que J'aie fait, je n'ai pu découvrir à leur surface, ni gaine, mi noyaux indiquant la présence d’une enveloppe. Si nous suivons un de ces nerfs, nous voyons qu'après avoir recu des anastomoses nombreuses des nerfs voisins, il se divise pour donner naissance à un certain nombre de branches secon- daires. La plupart de ces branches nerveuses vont, après un trajet plus ou moins long, se renfler pour former une cellule ganglionnaire multipolaire. Gelles-ci paraissent un peu apla- ües, elles présentent trois, quatre, souvent même six prolon- gements, Je n’en ai Jamais rencontré qui fussent bipolaires ou unipolaires. Ces cellules sont très faciles à distinguer, elles se montrent avec un contour bien net, leur protoplasma est très fortement coloré en violet foncé, et renferme à sa partie centrale un noyau à contour circulaire et nettement limité. Ce noyau est resté tou: à fait clair et tranche ainsi sur le protoplasma qui l’environn», c’est là, comme je l'ai dit plus haut, une réac- tion habituelle aux cellules nerveuses en présence de l’or em- ployé dans les conditions que J'ai définies. Les prolongements aiférents ou efférents de ces cellules ganglionnaires présentent un aspect nettement fibrillaire. Les prolongements efférents, c’est-à-dire ceux qui se dirigent vers leur point de terminaison, s’anastomosent fréquemment avec des prolongements issus de cellules voisines, ces anastomoses se font souvent pour ainsi dire à plein canal, si J'ose me servir de cette comparaison; souvent aussi des branches anastomotiques réunissent un ou deux filets nerveux secondaires. Voyons maintenant comment se comportent les prolonge- ments terminaux des cellules ganglionnaires. Après un cer- tain trajet, et souvent après s'être divisés une ou deux fois, ils paraissent se terminer par des extrémités effilées situées au-dessous de lamembrane basale. J’ai vu plusieurs fois naître de ces prolongements terminaux de très minces filets qui ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 45 allaient s’attacher par une extrémité bifurquée au sarcolemme des muscles sous-jacents. Sans rien vouloir affirmer sur la nature de ces filaments, je ne puis penser que ce sont des nerfs moteurs, ce sont peut-être des conducteurs nerveux chargés d'assurer la sensibilité musculaire (?). En examinant la figure (pl. IT, fig. 2) on se convainc facile- ment que les branches nerveuses qui se rendent aux cellules ganglionnaires s’anastomosent fréquemment avec les branches afférentes et efférentes de ces singuliers ganglions sous-cutanés que j'ai décrits plus haut sous le nom de ganglions à côtes de melon. En résumé, nous voyons que les nerfs sous-cutanés, après s’être fréquemment anastomosés, émettent des branches qui se renflent en cellules nerveuses multipolaires fréquemment anas- tomosées entre elles, et dont les prolongements semblent se termimer sous la membrane basale par des filaments ténus et effilés. Il arrive souvent chez la Musca que le plexus sous-cutané est encore plus riche en cellules ganglionnaires que celui que je viens de décrire. Souvent on voit (1) plusieurs des prolonge- ments d'une cellule multipolaire se renfler chacun en une cellule multipolaire plus petite d’où naissent enfin des prolon- gements terminaux. Chez l’Eristalis (2) les nerfs sous-cutanés se comportent comme chez la larve de Musca; toutefois ils sont moins abondants, et les cellules multipolaires en lesquelles ils se renflent s'anastomosent plus rarement entre elles. Dans les téguments de l’Æristalis, je n’ai jamais rencontré ces gan- olions à côtes de melon que j'ai décrits dans la larve de Mouche. Dans la préparation empruntée aux téguments de l’Eristalis, et que j'ai figurée, on ne voit aucune anastomose entre les cellules ganglionnaires voisines, et l’on se rend bien compte de la finesse des prolongements terminaux en les com- parant aux cellules hypodermiques au-dessous desquelles ils (1) PL L, fig. 2. (2) PI. IE, fig. 1. ANN. SC. NAT., ZOOL., AOUT, 1882. XIV. 4. — ART. N° 1. 46 H. VIALLANES. rampent. Dans cette même préparation, on remarque qu’une des branches, issue d’un tronc nerveux principal, paraît se terminer par une grosse extrémité en massue; Je ne sais à quoi attribuer cette apparence que j'ai figurée. Mais chez l’Erisralis et chez la Musca tous les nerfs sensitifs ne se terminent pas comme je viens de l'indiquer. On trouve chez ces animaux des formations cuticulaires qui rappellent les poils sensoriels, en rapport avec des organes nerveux analogues aux corps fusiformes que je déerivais plus haut pour le Stra- tiomys. Ces appareils sensoriels ne sont pas dispersés sur tout le corps comme chez ce dernier, ils sont localisés à certaines places déterminées, et semblent, par cela même, acquérir une importance et un degré de perfectionnement bien supérieurs. Les circonstances m'ont malheureusement empêché de faire de ces appareils une étude aussi détaillée que je l'aurais souhaité. Bien que mes recherches soient sur plus d’un point incomplètes, je ne crois pas toutefois qu’il soit sans intérêt de faire connaître les résultats auxquels je suis déjà parvenu. Quand on examine à la loupe l'extrémité antérieure d’une larve d’Éristalis, on remarque qu’il existe en avant de la bouche une petite saillie médiane, d’où naissent une paire de sortes de tentacules que je désignerai sous le nom d'organes antenniformes. Pour faire une étude plus détaillée de ces appareils, on détache d’un coup de ciseaux la saillie médiane qui supporte les organes antenniformes et l’on examine la pièce dans le sang même de l’animal. On remarque alors que chacun (1) des organes antenni- ormes est evêtu, comme le reste du corps, par une cuticule chitineuse. Pour étudier cette sorte de squelette extérieur, on pourrait avoir recours à l’emploi de la potasse caustique, mais comme ici les parties molles sont très transparentes, nous pourrons facilement nous passer de l’emploi de tout réactif. Chacun des organes antenniformes se montre avec l'aspect CHAT LT fig: ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 47 d’un cylindre presque aussi large que haut, se continuant par son extrémité postérieure avec la saillie médiane qui le porte, et terminé à son extrémité antérieurepar deux branches, l’une interne, l’autre externe. Comme il me parait assez probable que l'organe antenniforme répond à unappendice modifié, pout faciliter la description, je désignerai sous le nom d’article basilaire le cylindre qui porte les deux branches terminales, j'appellerai ces dernières, l’une article externe, l’autre article interne. L'article basilaire, dont j'ai rapidement indiqué la situation générale, se présente sous l’aspect d’un cylindre inséré très près de la ligne médiane ; il est revêtu extérieurement par une cuticule chitineuse épaissie vers le milieu de la hauteur, très mince au contraire vers les deux bases. De l'extrémité supé- rieure de l’article basilaire naissent les deux articles termi- naux, interne et externe. Eux aussi paraissent articulés, car leur cuticule est très mince et comme plissée à leur point d’in- sertion ; ailleurs elle est au contraire très épaisse. Par leur aspect général, les deux articles terminaux se ressemblent assez, tous deux ont l’aspect d’un cône tronqué, peu évasé, inséré par sa grande base à Particle basilaire, leur petite base se termine par un organe très spécial que j’appellerai bouton sensoriel. Les deux articles interne et externe diffèrent V’un de Pautre par la forme de leur bouton sensoriel. Je déerirai par conséquent successivement le bouton sensoriel interne et le bouton sensoriel externe. L'article interne se termine par un bouton sensoriel dont je vais tâcher de faire comprendre la forme. Ce bouton se com- pose d'un tronc de cône très surbaissé, se continuant par sa petite base avec l'extrémité de l’article interne et dont la grande base se termine par une sorte de dôme conique élevé, dont le sommet est fermé. Il va sans dire que le bouton sensoriel est creux, et que ce que je viens de décrire esi son enveloppe chitineuse qui se continue avec celle de Particle qu'il termine. La cuticule du bouton sensoriel est très mince, et, sur l’arête circulaire saillante qui sépare la surface du 48 I. VIALLANES. cône d'avec celle du dôme, elle présente des dessins spéciaux; de distance en distance elle est marquée de petits cercles à con- tour parfaitement net et dont le centre paraît obscur. Chacun de ces cercles m’a paru répondre à un amincissement ou à une perforation de la cuticule, mais la petitesse des objets m'em- pêche d’être affirmatif sur ce point. Le bouton sensoriel de l’article externe n’a pas une forme aussi caractéristique. L'article externe se termine à son extré- mité tronquée comme par une membrane mince, tendue et bombée, qui le ferme pour ainsi dire comme une baudruche ferme un bocal. Mais cette membrane n’est point umie, elle présente en dehors sept ou huit prolongements digitiformes creux qui ne paraissent être que des refoulements extérieurs; il va sans dire qu’ils sont reyêtus de chitine. Maintenant que nous connaissons dans toutes ses parties l'enveloppe chitineuse qui revêt les organes antenniformes, étudions les parties molles qu’elle renferme. Pour cette étude, je n'ai guère employé que des pièces fraiches, quelquefois seulement j'ai eu recours à l’acide acétique dilué ; aussi mes recherches renferment-elles beaucoup de lacunes, mais je ne ferai connaître que les faits dont je me suis assuré avec la plus entière certitude. La cuticule qui revêt les organes antenniformes est doublée par une couche de cellules hypodermiques ayant exactement les mêmes caractères que celles qu'on rencontre dans toute autre région du corps, mais le revêtement hypodermique ne parait pas exister à l’intérieur des boutons sensoriels, il s’ar- rête à leur niveau. Dans la cavité de l’article basilaire existent deux gros corps d'aspect sombre qui la remplissent presque tout entière et qui doivent probablement être assimilés à ces corps fusiformes dont nous avons déjà parlé; c’est sous ce nom queje les désignerai dès maintenant. Chacun de ces corps répond à un des articles terminaux, par conséquent l’un est externe, l’autre est interne. Chacun d'eux recoit par son extrémité proximale un gros nerf à striation longitudimale bien nette, et se continue par son ARTICLE N° 1, ! | HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 49 extrémité distale en un prolongement qui a, lui aussi, tous les caractères d’un conducteur nerveux, car il se présente avec l'aspect d’un cordon finement strié en long. Le corps fusiforme interne a la forme d’un cylindre terminé par un cône à chacune de ses extrémités, l’externe au con- traire a la forme d’un fuseau court et est de taille un peu plus considérable. Quand on traite les corps fusiformes par l’acide acétique dilué, on voit apparaître dans leur intérieur un grand nombre de noyaux sphériques. Si l’on cherche par la dissection et la dilacération l’origine du nerf que chacun d’eux reçoit par son extrémité proximale, on voit que ces conducteurs nerveux n’ont point une source unique, mais que tous deux provien- nent d’un riche plexus d’où partent d’autres rameaux termi- naux, mais bien plus petits, qui vont se jeter dans la peau de la région antérieure du corps. Sur une des branches de ce plexus, et non loin de l’origine des nerfs des corps fusiformes, on rencontre constamment un de ces ganglions à deux cellules dont j'ai indiqué plus haut la structure. Cherchons maintenant à nous rendre compte du mode de terminaison du prolongement distal qu'émet chacun des corps fusiformes. Ces prolongements cheminent chacun dans la ca- vité de l’article terminal correspondant, le prolongement du corps fusiforme interne est beaucoup plus grêle que celui de l’externe, tous deux sont très nettement fibrillaires. Le prolon- $ement du corps fusiforme interne parcourt l’article terminal correspondant dans toute sa longueur. Arrivé au bouton sen- soriel, il pénètre dans la cavité de celui-ci, ses fibrilles parais- sent alors s’écarter un peu l’une de l’autre, et on peut les suivre jusqu'au niveau de cette ligne marquée des petits cer- cles que j'indiquais tout à l’heure à la surface du bouton sen- soriel. Dans l’article terminal externe, le prolongement du corps fusiforme correspondant se comporte de même, ses fibrilles m'ont paru atteindre l’origine des appendices digitiformes, mais sans que je puisse dire si elles y pénètrent. 50 H. VIAELANES. Quelles que soient les lacunes qui restent à combler dans l'étude de ces appareils nerveux terminaux que je viens de dé- crire, je crois toutefois qu'il est possible de les comparer aux appareils nerveux que nous observions chez le Stratyomus. Dans les deux cas, nous voyons un nerf se renfler en un corps fusiforme, et aller ensuite se terminer au-dessous d’une région modifiée de la euticule. Les observations que J'ai faites chez d’autres animaux mon- treront bien que le bouton sensoriel est l’analogue d’un poil ; elles nous montreront aussi quelles modifications importantes peuvent offrir ces appareils nerveux terminaux. Quand on examine par sa face dorsale une larve de Mouche, on remarque qu’au voisinage de l'extrémité antérieure du corps existent deux saillies ayant la forme d’un mamelon, l’une est postérieure et interne, l’autre est antérieure et externe. Ces sail- lies, qui ont été décrites par M. Weismann (1), sont regardées par lui comme homologues, la première à une antenne, la seconde à un palpe maxillaire. Ce même anatomiste remarqua qu’à l’intérieur de chacun de ces mamelons existait un corps de forme sphérique en relation avec un nerf. Aussi les con- sidéra-t-1l comme des organes des sens. Ayant fait de ces organes une étude plus détaillée, je pourrai donner sur leur structure des détails qui auront quelque intérêt, surtout après ce que nous savons des organes antenniformes de l’Eristalis. Dans la larve de Mouche, le mamelon interne et postérieur (antenne) se présente comme une élevure conique, peu sail< lante de la cuticule, cette élevure présente à sa surface quel- ques plissements concentriques et se termine par un bouton conique, en forme de dôme, absolument semblable au bouton sensoriel qui termine l’article interne de l’organe antenniforme de l’Eristalis. Le mamelon antérieur et externe (2) (palpe maxiilaire) est un peu plus volumineux et très saillant. En l’examinant par sa face supérieure, on remarque qu'à son sommet il se termine (1) Weismann, loc. cit., p. 121 du tirage à part, pl. VII, fig. 1. (2) PI. IV, fig. 6. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 91 par une sorte de plateau circulaire de couleur claire, entouré par un cercle épais plus fortement coloré en brun, le plateau est marqué à sa surface de quatre ou einq petits cercles. Si nous cherchons sur une vue de profil à nous rendre mieux compte de la disposition de ces parties, nous voyons que le cercle de couleur foncée répond à la projection horizontale d’un court cylindre creux qui, par sa base, se continue avec la cuticule générale du mamelon, laquelle se relève un peu autour de lui, si bien qu’il paraît entouré d’une sorte de cir- convallation ; cette disposition le rend exsertile. Quant au pla- teau, 1l est disposé par rapport au cylindre creux comme une membrane bombée qui le fermerait en haut, les petits cercles dessinés à la surface de ce plateau ne sont autre chose que la projection horizontale de sortes d’évaginations digitiformes. La description que je viens de donner de la partie centrale du mamelon externe nous montre bien que nous avons affaire là à un organe rigoureusement analogue au bouton sensoriel externe de l’organe antenniforme de l’Eristalis. Le court cy- lindre creux, qui est terminé en haut par le bouton sensoriel, répond évidemment à l’article externe de l’organe antenni- forme de lEristalis. Si nous revenons à l’examen du mamelon externe de la larve de Mouche, nous remarquons qu’autour de ce court anneau chitineux, qui supporte le bouton sensoriel, la cuticule de la surface du mamelon est marquée d’épaississements concentri- ques élégants, réunis par des anastomoses et limitant ainsi des sortes de champs. Un de ces champs a une forme assez régu- lhièrement arrondie, et en son milieu on rencontre un cerele à bordure foncée. Je désignerai dès maintenant ce cercle sous le nom de bouton sensoriel accessoire : il est tout à fait distinct et séparé du bouton sensoriel principal, sa surface est marquée d’une petite tache circulaire analogue à celles qu’on rencontre à la surface du bouton principal. Si maintenant nous étudions par dilacération, ou même simplement par transparence, sur l’animal vivant, les organes que renferment ces mamelons, nous voyons que chacun d’eux 59 | M. VIALLANES. présente au-dessous de sa cuticule chitimeuse une couche hypodermique semblable à celle de l’enveloppe générale du corps, mais qui parait s'arrêter au niveau du bouton sensoriel. À l’intérieur de chaque mamelon, nous trouvons un organe fusiforme absolument comparable à celui que nous avons rencontré chez l’Eristalis. Mais ici cet organe est bien plus ramassé, presque sphérique, et d’une taille bien plus considé- rable, car on peut le distinguer même à l’œil nu. Par son extrémité proximale, il reçoit un gros nerf, de son extrémité distale part un gros prolongement nettement strié en long, qui après un très court trajet arrive Jusqu’au-dessous du bouton sensoriel, sans que j'aie pu le suivre plus loin. L’organe fusi- forme du mamelon interne est constitué essentiellement comme tous les organes fusiformes que nous avons déjà étudiés, c’est- à-dire qu’il reçoit un nerf et émet un seul prolongement; celui du mamelon externe, au contraire, est un peu différent. Au lieu d'émettre un seul prolongement, il en émet deux: lun. très gros, le prolongement principal, qui part du pôle de l’or- gane et qui se rend au bouton sensoriel principal ; l’autre, au contraire, beaucoup plus petit, et qui naît des parties latérales, c’est le prolongement accessoire. Ge dernier se dirige vers le bouton sensoriel accessoire et se place au-dessous de lui, pour se renfler en un corps fusiforme accessoire. En résumé, chez l’Eristalis comme chez la larve de Mouche, nous trouvons à l'extrémité antérieure du corps de chaque côté, deux gros organes fusiformes se terminant chacun au-dessous d’un organe spécial recouvert de chitine, le bouton sensoriel. Chaque bouton sensoriel a une forme caractéristique qu’on retrouve chez les deux animaux que nous avons étudiés. Cette forme paraît répondre à un rôle physiologique spécial, car elle ne se modifie pas, alors que les autres conditions mor- phologiques changent. (1) Doyère d’abord, puis ensuite Greef ont signalé chez les Tardigrades des organes qui me paraissent assez analogues (Doyère, Mémoire sur les Tardi- grades, in Ann. sc.nat., 2 série, 1840), Greef, Untersuchungen über den Bau und die Naturgeschichte der Bärthierschen, inArchiv f.mick. Anat., 1.11, 1866). ARTICLE N° f{. HISTOLOGIE ET. DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 53 Ces grands appareils sensoriels sont bien les homologues des corps fusiformes que nous déerivions plus haut chez le Straliomys ; ce qui le prouve, c’est qu’on rencontre répandus à la surface du corps de la larve de Musca des organes qui établissent le passage entre ces deux sortes d'appa- reils. Quand on examine une larve de Musca par sa face infé- rieure, On remarque qu’au voisinage de la bouche la cuticule est marquée de rides régulières qui convergent vers l’orifice buccal. De chaque côté on trouve, au milieu de ces rides, un petit espace circulaire (1), lisse, entouré d’une ou deux rides concentriques ; il est un peu soulevé et constitue une sorte de bouton. Ce bouton est marqué lui-même à sa surface de deux ou trois petits cercles analogues à ceux que nous obser- vions à la surface du bouton sensoriel interne du même animal. Cet organe représente dans son ensemble un bouton sensoriel, et ce qui le démontre, c’est que si l’on observe la peau de cette région par sa face interne, on trouve au-dessous de lui un organe fusiforme. Si maintenant nous examinons la surface des anneaux situés en arrière de la bouche, nous remarquons que chacun d’eux présente de chaque côté de la ligne médiane un bouton senso- riel (2) analogue à ceux que nous venons de décrire au voisi- nage de la bouche. Chacun d’eux est un peu surélevé en cône; de face il se montre comme un cercle à l’intérieur duquel sont tracés deux cercles concentriques plus petits. Au-dessous de chacun de ces organes, nous trouvons un corps fusiforme ana- logue à ceux précédemment décrits. CONCLUSIONS, Chez les larves que j'ai étudiées, les nerfs sensitifs se termi- nent de deux manières : À, les uns se mettent en rapport avec des appareils chitineux spéciaux, les poils sensoriels; (1) PL IV, fig. 5. (2) PL IV, fig. 7. 54 IH. VIALLANES. — B. les autres paraissent se terminer par des extrémités hbres. Le premier de ces deux modes de terminaison avait été seul reconnu et étudié. À. — Terminaison des poils dans les nerfs sensorels. 1° Arrivé au voisinage de la base d’un poil sensoriel, le cylindre-axe se renfle en une cellule ganglionnaire bipolaire sur laquelle se continue la gaine nerveuse. 2 Le poil sensoriel est constitué par une élevure conique creuse de la cuticule chitineuse générale ; 47 est sécrété par une grosse cellule hypodermique spéciale légèrement modifiée et que j'appelle la cellule du poil. Le protoplasma de cette cellule remplit complètement la cavité du poil et en tapisse la base. | 3° Le prolongement terminal de lu cellule nerveuse bipo- laire n'est pas, comme on le pensait, directement coiffé par le poil. Mais il pénètre dans le protoplasma de la cellule qui sécrète et rempli le poil pour se fusionner avec ce proto- plasma. En un mot, on peut dire que le conducteur nerveux sensitif se termine en se renflant en une cellule nerveuse bipolaire dont le prolongement terminal va se fusionner avec le proto- plasma d'une cellule hypodermique légèrement modifiée pour sécréler un poil. 4 Les appareils terminaux que je viens de décrire paraissent destinés à assurer la sensibilité spéciale, tact, odorat, etc. B. — Terminaisons des nerfs par des extrémités libres. 1° Chez les larves que j'ai étudiées, il existe au-dessous de l’hypoderme un plexus extrêmement riche, formé par de très nombreuses cellules nerveuses multipoluires anastomosées, et dont les prolongements paraissent se terminer par des extrémités libres et effilées au-dessous des cellules hypodermiques. À ma connaissance, on n'a décrit de plexus sous-hypodermiques ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 55 analogues que chez quelques Vers inférieurs (1) : les Gor- dius (2) et les Nématodes (3). | 2° Le plexus sous-cutané paraît destiné à assurer la sen- sibilité générale. CHAPITRE IV MUSCLES STRIÉS INVOLONTAIRES. $ 1. — Histologie du vaisseau dorsal des larves. Je ne m’occuperai pas longuement dans ce travail de l’ana- tomie de l’apparal central de la circulation des Insectes, je n'ai pas réuni pour cela un nombre de matériaux suffisam- ment coordonnés, je m'occuperai seulement de quelques-uns des points de l’histologie de cet organe, qui m'ont paru offrir le plus d'intérêt. Aussi ne ferai-je que signaler en passant les travaux de Carus, de Strauss-Dürckeim (4), de Verloren (5), une note de M. Dareste (6). Je n'analyserai que les travaux qui ont trait au point dont je m'occupe ici, c’est-à-dire à la struc- ture des éléments contractiles du vaisseau dorsal. À ce propos, je crois nécessaire de rappeler la nomenclature (1) Au moment de mettre sous presse, j'apprends que M. Hoeck (Hoeck; Nouvelles études sur les Pycnogonides,in Archives Zool. expér., 1881, t. IX, pl. 471) a découvert chez les Pycnogonides des plexus ganglionnaires sous- cutanés qui me paraissent assez analogues. Ce naturaliste a, de plus, remarqué que ces plexus étaient surtout développés chez les espèces aveugles; c’est aussi ce qui se passe chez nos Insectes. Ne voyons-nous pas ces plexus présenter un grand développement chez les larves de Musca et d’Eristatis qui manquent d’yeux, tandis qu'ils sont fort réduits chez le Stratiomys qui possède des or- ganes visuels bien développés. (2) Villot, Monographie des Dragonneaux (Archiv. Zool. expér., 1881, vol. III, 1874). (3) Bütschli, Beitrage zur Kenntniss des Nervensystems der Nematoden: (Archiv f. mickr. Anat., 1873). (4) Strauss-Durckeim, Considérations générales sur l'anatomie comparée des animaux articulés. Paris, 1828. (5) Verloren, Mémoire sur la circulation dans les Insectes. — Mémoires couronnes et mémoires des savants étrangers de l’Académie des sciences de Belgique, t. XIX, 1871. (6) Dareste, Note sur le développement du vaisseau dorsal chez les Insectes (Archiv. Zool. exp., t. WU, 1873, pp. 35-37). 96 H. VIALLANES. des diverses parties qui entrent dans la constitution de l’appa- reil central de la circulation des Insectes. Cet appareil est constitué par un long tube s'étendant d’une extrémité du corps à l’autre, et désigné dans son ensemble sous le nom de vaisseau dorsal. Cet organe, excepté à sa partie extérieure, est généra- lement enveloppé par une masse de tissus spéciaux, tantôt musculaires et conjonctifs, d’autres fois même purement cellu- laires. M. Graber désigne tout cet ensemble sous le nom de tissu péricardique. Je laisserai aujourd’hui ce tissu de côté, pour m'occuper exclusivement de lhistologie du vaisseau dorsal de quelques larves que j'ai étudiées. Historique. —Les auteurs suivants sesontoccupésde cesujet : M. Leydig (1) (1851) observe que chez la larve de Corethra, le vaisseau dorsal se montre comme un tube cristallin ouvert à ses deux extrémités, présentant sur sa longueur huit paires de fentes valvulaires latérales qui le divisent ainsi en chambres successives. Les parois des chambres antérieures présentent quelques noyaux espacés dans leur épaisseur; la chambre postérieure offre une disposition remarquable en ce qu’on rencontre dans son intérieur sept paires d'organes très parti- culiers qui paraissent jouer le rôle de valvules. Chacun de ceux-e1 se compose d’une masse renflée renfermant un noyau et attachée aux parois du vaisseau dorsal par un pédicule assez long. M. Leydig compare ces sortes de valvules à des for- mations tout à fait analogues qu'il avait découvertes précé- demment dans les vaisseaux contractiles de diverses Hirudi- nées (Pontobdella, Branchellion, Clepsine). M. Weismarn (1864) observe que les parois du vaisseau dorsal de la larve de Mouche sont constituées par deux mem- branes d’enveloppe très minces et anhistes, comprenant entre elles la substance contractile, laquelle renferme des noyaux. Il compare le vaisseau dorsal dans son ensemble à une fibre musculaire unique qui serait creuse et fort longue. M. Weismann (1866) étudie le vaisseau dorsal de la larve de (1) Leydig, Anatomisches und histologisches über die larve der Corethra plumicornis (Zeitch. f. Wiss. Zool., t. III, p. 445, taf. XVI, 1851), _ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 57 Corethra et nw’ajoute que peu de choses à ce qu'avait décrit M. Leydig. M. Bütschli (1) (1870) étudie le développement embryon- naire de l’Abeille et observe que le vaisseau dorsal dérive de deux cordons cellulaires latéraux qui se rapprochent et finale- ment se soudent sur la ligne médiane. M. Graber (2) (1873) étudie principalement les msectes adultes. Chez ces animaux, le vaisseau dorsal est formé de trois couches qui sont, en allant de dedans en dehors : l’entima, mince et anbiste; la muscularis, formée de fibres musculaires longitudinales et annulaires; enfin l’adventitia, de nature conjonctive. M. Dogiel (3) (1877), dans la partie anatomique de son travail, reprend les observations de M. Leydig et celles de M. Weismann, au point de vue de la structure du vaisseau proprement dit; 1l n’y ajoute que peu de choses, il remarque seulement que ce dernier présente une striation sur laquelle il ne donne point de détails et qui avait échappé à ses prédéces- seurs. M. Graber (4) (1879), en étudiant l’embryologie du Pyrrho- coris apterus, complète les observations de M. Bütschli sur le développement du vaisseau dorsal. Il observe que le cœur, à son premier état de développement, est représenté par deux rangs de cellules cubiques placés chacun d’un côté de la ligne mé- diane, et que chacune de ces cellules prend ensuite la forme d'un demi-anneau qui vient sur la ligne médiane se souder avec son congénère pour limiter ainsi la cavité du vaisseau. M. Jaworowski (5) (1879) étudie le vaisseau dorsal de la (1) Bütschli, Zur Entwikelungsgeschichte der Biene (Zeüsch. f. wiss Zooi., t. XX, 1870). (2) Graber, Ueber den propulsatorischen Apparat der Insecten (Archiv f. mickrosc. Anat., t. IX, 1873, p. 129 et suiv., pl. VII-X). (3) Dogiel, Anatomie und Physiologie des Herzes der larvée der Corethra plumicornis (Comptes rendus. Académie de Saint-Pétersbourg, t. XXIV, 36 pages, 2 planches, 1877). (4) Graber, Die Insecten. München, 1879, t. Il, p. 435. (5) Jaworowski, Ueber die Entwikélung des Rückengefasses und speciell der 58 IH. VIALLANES. larve de Chüronomus; il observe qu'il est formé par un long tube présentant des ouvertures latérales. Ge tube est constitué par une membrane mince renfermant de chaque côté dans son épaisseur une file de noyaux elliptiques, très réguliers. Il re- trouve ces valvules pédonculées observées par MM. Leydig, Weismann, Dogiel, et montre que chacune d'elles n’est autre chose qu’un de ces noyaux de la paroi du vaisseau dorsal qui a fait saillie dans la cavité. Il remarque, comme ses prédé- cesseurs, que la partie antérieure du vaisseau dorsal est con- tractile, et n’est point enveloppée par du tissu péricardique. M.Jaworowski observe dans la partie postérieure du vaisseau dorsal seulement un fin strié transversal selon des lignes annulaires. La partie antérieure lui paraït au contraire com- plètement homogène. Se basant principalement sur les re- cherches précédemment citées de M. Graber et sur la dispo- sition régulière des noyaux du vaisseau dorsal, il pense, sans le montrer directement, que chacun de ces noyaux appartient à une cellule en forme de demi-anneau aplati. Suivant lui, c’est par la réunion de ces demi-anneaux que le cœur serait constitué. Je résumerai rapidement les faits connus sur la structure du vaisseau dorsal des larves, faits sur lesquels il n'existe pas de controverse, en laissant de côté le vaisseau dorsal des adultes qui, d’après M. Graber, le seul auteur qui lait étudié bistologiquement, parait différer très profondément de celui de la larve et offrir un degré de complication bien plus grand. Nous savons que le vaisseau dorsal des larves d'insectes est constitué par un tube dans la paroi duquel sont plongés des noyaux régulièrement disposés sur deux files, l’une à droite, l’autre à gauche de la ligne médiane. L'étude de quelques embryons fait supposer, sans qu’on en ait de preuves directes, que chaque noyau répond à une seule cellule, et qu'amnsi le vaisseau est constitué par une série de tronçons cylindriques Musculatur bei Chironomus und cinigen anderen Insecten (Sitzb. der k. Akad. der Wissensch., vol. LXXX, 1879, 20 pages, 3 planches.) ARTICLE !K° 1. HISTOLOGIE ET.DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 99 creux, soudés bout à bout, forméseux-mêmes chacun par deux cellules soudées sur la ligne médiane. On ne sait presque rien sur ces cellules constitutives du vaisseau, on n'a jamais vu leurs lignes de soudures, on n’a que rarement entrevu une très vague striation de leur substance. J'arrive maintenant à mes observations personnelles, en confirmant tout d’abord la parfaite exactitude des observations faites avant moi sur les animaux vivants. Si nous examinons par transparence une jeune larve de Limnobia, Tipula, Ghironomus, Eristalis, ete., nous reconnais- sons que le vaisseau dorsal s'étend en ligne directe depuis l’ex- irémité postérieure du corps jusqu’au collier œsophagien, au dessous duquel il s’avance. Nous remarquons aussi que le vaisseau présente deux régions distinctes : la postérieure, qui est revêtue par du tissu péricardique ; l’antérieure, qui est nue et baigne librement dans le liquide cavitaire, c’est cette der- nière qui se prête le mieux à l’étude. Quand le vaisseau dorsal se trouve à l’état de repos com- plet (1), état qu'on détermine facilement par les vapeurs de chloroforme, sa parte antérieure se montre, ainsi que l’ont vu mes prédécesseurs, comme un tube cristallin parfaitement calibré et renfermant de chaque côté, dans l'épaisseur de sa paroi, une file de noyaux très régulièrement espacés. Ceux-ci sont disposés par paires, c’est-à-dire que chaque noyau de droite à un répondant à gauche, placé exactement à la même hauteur. Chaque noyau se montre comme un pelt corps réfringent, fusiforme, fortemerit allongé dans le sens antéro- postérieur. Si l'emploi du chloroforme n’a pas été trop pro- longé, les mouvements du cœur réapparaissent au bout d'un certain temps, et se montrent d'abord très lents, ce qui permet de les étudier facilement. La partie postérieure du cœur se contracte la première et chasse ainsi le sang en avant. Sous la pression que celui-ci détermine, la partie antérieure du cœur se gonfle passivement, puis subitement elle-se contracte, c’est (1) PL IV, fig. 8. 60 H. VIALLANES. la systole, pour revenir ensuite à l’état de repos et recom- mencer la même révolution. Au point de vue auquel nous nous plaçons, l’aspect qu'offre le cœur en systole mérite quelque attention. Au moment de la systole (1), la partie antérieure du vais- seau dorsal se raccourcit dans son ensemble en prenant pour point fixe les ganglions cérébroïdes auxquels elle adhère en avant, et en tirant sur la partie postérieure du vaisseau; de plus, sa forme change au lieu de se montrer comme un tube bien calibré, ainsi qu'elle l'était au repos; elle présente des renflements et des resserrements successifs, ou, si l’on veut, des nœuds et des ventres. Les noyaux se trouvent situés à la partie la plus saillante des ventres, les nœuds occupant l'intervalle qui sépare deux paires successives de noyaux. Ainsi, pendant la systole, le vaisseau dorsal paraît formé par une série de tron- çons renflés à leur partie moyenne et renfermant chacun une paire de noyaux. Au moment de la contraction, cesnoyaux pré- sentent un changement de forme assez remarquable. D’allongés qu'ils sont d'avant en arrière à l’état de repos, ils deviennent sphériques et même aplatis dans le sens antéro-postérieur. C'est là un mouvement que je crois purement passif, 1l nous démontre bien, dans tous les cas, que la partie antérieure du vaisseau se raccourcit. Je ne sais si les détails que je viens de donner peuvent inté- resser les physiologistes, mais ils viennent assurément fournir un appui assez solide à l'hypothèse de M. Jaworowski, qui veut que le vaisseau dorsal soit formé par des tronçons soudés bout à bout. Ne trouvant pas que l'examen des animaux vivants nous en apprenait suffisamment, je me suis en outre adressé aux méthodes histochimiques. Dans la cavité générale d’une grosse larve d’Eristalis, j'm- jecte une solution d’azotate d'argent à 1/500°, j'isole ensuite la partie antérieure du vaisseau, je fais opérer la réducton à la lumière, et je colore au carmin. Ainsi préparé, le vaisseau (GDS Te G ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. GI dorsal se montre avec l'aspect général qu’il nous offrait chez l'animal vivant à l’état de repos. Mais le fait important, c’est qu'il se montre maintenant partagé en tronçons successifs par de fines lignes annulaires, dessinées en noir par l'argent réduit. Chacune de ces lignes est parfaitement continue, un peu trem- blée, et comme tracée à la plume; elle occupe toujours la partie moyenne de l'intervalle compris entre deux paires de noyaux. Ceci est la preuve matérielle que le vaisseau dorsal est formé par des tronçons creux placés bout à bout, puisque nous savons que l’argent jouit de cette propriété de se réduire sur le ciment imtercellulaire. Mais quelques tentatives que j'aie faites, je n’ai pu découvrir de soudures médianes, indiquant que chaque tronçon est lui-même formé par deux cellules. Il ne faudrait pourtant pas pour cela conclure au mal fondé de l'hy- pothèse de M. Jaworowski; nous savons qu'avec la méthode de l’argent les résultats négatifs n'ont guère de valeur. Mais en tenant compte seulement des soudures annulaires, et des faits qui nous sont fournis par les embryologistes, nous arri- vons fatalement à cette conclusion que le vaisseau est formé par des tronçons creux placés bout à bout, formés eux-mêmes chacun par deux cellules en forme de demi-cylindres creux, soudées sur la ligne médiane, bien qu'on ne puisse par l'argent mettre cette dernière soudure en évidence. En somme, le vaisseau dorsal d’une larve ressemble assez à un capillaire de Vertébré ; comme lui, 1l est simplement formé par des cellules aplaties soudées sur leurs bords. Mais le vaisseau dorsal de l’inseete est contractile, le capil- laire du vertébré ne l’est pas. Les recherches que J'ai entre- prises, et que je vais faire connaître, nous montreront que cette contractilité est obtenue par un procédé fort simple, qui fait de chaque cellule du vaisseau dorsal un élément fort re- marquable, une vraie fibre musculaire, tout en la laissant parfaitement comparable à la cellule endothéliale des capil- laires. Les auteurs qui m'ont précédé étudiaient seulement des animaux vivants; aussi avaient-ils simplement reconnu de ANN. SC, NAT., ZOOL., AOUT 1882. XIV, D. — ART. N. 1. 62 HT. VIALLANES. vagues traces de striation dans la paroi du vaisseau. J’ai voulu reprendre avec plus de détails l'étude de cette striation à peine signalée. Je me suis d’abord adressé à des pièces fixées par divers agents et colorées à l’hématoxyline; mais comme je n’obtenais de la sorte que des images incertaines, j'ai eu re- cours à l'emploi combiné de l’acide osmique et du chlorure d’or, qui, dans d’autres circonstances, m'avait donné de si bons résultats (1). # Sinous observons la partie antérieure du vaisseau dorsal de la larve d’Eristalis préparée par cette méthode (2), nous re- marquons tout d’abord que l'or s’est le plus fortement réduit là où se réduit également le métal quand on emploie l'argent, et qu'ansi la soudure des tronçons constitutifs du vaisseau est indiquée par un trait d'or fin et très foncé. Les noyaux de la paroi, disposés, comme nous le savons, par paires dans chaque tronçon, sont fortement colorés en violet. Mais ce que cette méthode nous permet de découvrir, c’est l'existence de nom- breuses fibrilles musculaires dans l'épaisseur de la paroi. Ces fibrilles ont toutes une direction longitudinale; elles ne sont point serrées les unes contre les autres, mais largement et régulièrement espacées ; chacune d’elles à une grande longueur et semble passer sans se modifier d’un tronçon à l’autre. Ces fibrilles ont une largeur plus grande que celles des muscles ordinaires ; elles mesurent en moyenne 6 millièmes de milli- mètres, et montrent les stries caractéristiques qu’on observe dans toute fibrille musculaire; c’est-à-dire qu'entre deux disques minces et noirs, se voit un disque large et obscur, séparé lui-même des disques minces voisins par une bande claire. Nos fibrilles étant plongées dans l'épaisseur de la paroi du vaisseau, 1l est intéressant de rechercher comment elles se comportent par rapport aux lignes de soudure des tron- cons constitutifs de ce vaisseau et que l'or a mises en évi- dence, On remarque que la ligne de soudure de deux tronçons (1) J'ai fait précédemment connaître cette méthode à propos des terminai- sons nerveuses sensitives dans la peau de la larve de Musca. (2) PI. IV, fig. 10. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 63 successifs coupe toujours les fibrilles en passant par un de leurs disques minces dont elle renforce la couleur. Ainsi, bien qu'une même fibrille paraisse s'étendre sur la longueur de plusieurs tronçons constitutifs du vaisseau, en réalité elle est formée par un certain nombre de morceaux soudés bout à bout, compris chacun, rigoureusement dans un tronçon. De ce fait que les lignes de soudures cellulaires passent toujours par les disques minces, il résulte que dans une même cellule constitutive du vaisseau la fibrille commence et finit toujours par un disque mince. Geci montre avec la plus entière évi- dence que l'unité physiologique composante de la fibrille est l'espace compris entre deux disques minces. Cetespace, connu sous le nom de segment musculaire, est généralement consi- déré comme l'unité physiologique composante de la fibrille ; c’est bien la conclusion à laquelle j'arrive aussi, mais je suis, je crois, le premier à donner une démonstration évidente et matérielle de l’exactitude de cette théorie. Quand on examine les fibrilles musculaires du vaisseau dorsal sous certains aspects (1), elles offrent des images bi- zarres sur l'interprétation desquelles je fais toutes mes réserves; aussi je me contente de dire ce que J'ai vu. Le vaisseau dorsal étant examiné au-dessous d’une lamelle, se trouve comprimé et aplati, on conçoit alors qu’en poussant légèrement la lamelle avec une aiguille, on arrive à le faire rouler sur lui-même. Par ce mouvement, on amène successi- vement chacune des fibrilles à occuper le bord du vaisseau aplati et à se présenter, par conséquent, de profil. La fibrille observée dans cette position paraît constituée par une série de grains soudés bout à bout; on s’assure facilement que les faces de contact de ces grains répondent aux disques minces, c’est par elles, en effet, que passent toujours les lignes de soudure des tronçons constitutifs du cœur. Chacun de nos grains répond donc à un segment musculaire; mais au lieu de voir ce seg- ment traversé dans toute sa largeur par une large bande (4) PL AV, fig. 10, f 64 MH. VIALLANES. sombre, limitée en haut et en bas par une bande claire, nous voyons simplement à son centre un cercle sombre entouré de toute part par une substance claire. L'image que je viens de décrire semblerait donner un appui à la théorie de M. Krause, qui veut voir dans le segment musculaire une sorte de boîte fermée en haut et en bas par le disque mince et noir, renfer- mant dans son intérieur une substance claire, au sein de laquelle plongerait un cylindre coloré, couché transversale- ment; lequel, par conséquent, se montrerait tantôt comme une bande sombre, tantôt, au contraire, seulement comme un cercle. Je ne puis donner que peu de détails sur la région postérieure du vaisseau dorsal, je dirai seulement que les fibrilles y sont annulaires au lieu d’être longitudinales. CONCLUSIONS. En résumé, le vaisseau dorsal est histologiquement compa- rable à un capillaire de Vertébré. Comme lui, 1l est formé par des cellules plates soudées bord à bord. Mais au point de vue physiologique, 1l en diffère parce qu'il est contractile. Cette contractilité du vaisseau est obtenue par ce fait que des fibrilles musculaires se sont développées dans le protoplasma des cel- lules qui le forment. Ainsi la cellule constitutive du vaisseau dorsal joue le rôle d’une fibre musculaire el est morphologi- quement comparable à une cellule endothéliale de capillaire. L'élude des fibrilles développées au sein des cellules du vais- seau nous & appris que dans une même celluie une fibrulle commence el finit toujours par un disque mance. C’est un fait intéressant et qui montre bien que l’unité physiologique de la fibrille est l’espace compris entre deux disques minces. $ 2. — Le vaisseau dorsal chez les jeunes larves. J'ai indiqué précédemment lPétat de nos connaissances sur le mode de développement du vaisseau dorsal. M. Graber a observé chez l'embryon un stade où le cœur n’était repré- ARTICLE N° {. IMISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 65 senté que par une double file de cellules et ne fonctionnait pas encore. D’autres naturalistes, M. Leydig, M. Weismann, M. Dogiel, M. Jaworowski, ont observé des larves dans les- quelles le vaisseau dorsal était déjà hautement différencié et pourvu de valvules. J’ai pu observer un état qui vient relier les observations. de M. Graber avec celles des anatomistes que je viens de citer; j'ai en effet trouvé plusieurs larves dans lesquelles le vaisseau dorsal se montrait à l’état de simple tube ouvert à ses deux extrémités, et complètement dépourvu d’orifices laté- raux. Les larves qui ont servi à ces observations présen- taient en outre une disposition curieuse de l'appareil respira- toire, assurant au vaisseau dorsal le rèle de cœur artériel, et que je crois intéressant de faire connaître avec quelques détails. J’ai le regret de n’avoir pu déterminer avec assez de pré- cision la larve qui m'a servi à cette étude, elle me parait ap- partenir au genre Clenophora et vivait dans la vase, au bord des mares des environs de Paris. D'ailleurs la disposition que je vais décrire semble assez répandue chez les larves de Diptères, je l’ai rencontrée chez des espèces aquatiques, comme aussi chez des espèces fongicoles. Quoi qu’il en soit, dans la larve que j'ai étudiée le vaisseau dorsal s’étend comme un tube ouvert à ses deux extrémités, depuis le point de jonction du dernier avec l’avant-dernier an- neau jusques à la commissure sous-æsophagienne, au-dessous de laquelle il s'engage. Il se présente sur le vivant avec l’as- pect que nous lui décrivions tout à l'heure, c’est-à-dire comme un tube à paroi tout à fait homogène et transparente, de chaque côté renfermant dans son épaisseur une file de noyaux fusiformes, très régulièrement espacés; nulle part on n’observe aucune trace d’orifices ou de valvules. Mais à un état de déve- loppement plus avancé, on remarque que certains points pré- sentent des contractions plus fortes; c’est là que, plus tard, apparaîtront les orifices, du mode de formation desquels je ne m'occuperai pas dans ce travail. Je veux seulement faire 66 H. VIALLANES. remarquer leur absence à un moment donné de la vie, absence coineidant avec une disposition particulière de l'appareil res- piratoire. Afin de pouvoir la bien faire comprendre, il faut entrer dans quelques détails. L’anneau qui termine le corps de la larve est renflé à sa partie moyenne et séparé de l’anneau précédent par un rétré- “cissement assez marqué, il se termine en arrière par deux longs appendices chitineux rappelant par leur forme et leur situation les pinces de la Forficule, mais non mobiles et pré- sentant sur leur bord interne des soies longues et souples. Au-dessus du point de naissance de chacun de ces appendices, on trouve un stigmate. Ces deux points sont les seuls orifices par lesquels l'appareil respiratoire communique avec le dehors. De chacun de ces stigmates, part un gros tronc trachéen à direction longitudinale s'étendant jusqu’à la région anté- rieure de l’animal ; mais c'est surtout dans le dernier anneau que l'étude de ces tubes est intéressante. Un peu en avant de la partie moyenne du dernier anneau, ils sont reliés entre eux par une anastomose transversale, c’est à ce niveau que com- mence le vaisseau dorsal, le bord de son extrémité posté- rieure qui est ouverte, s'attache à droite et à gauche sur les troncs trachéens principaux, un peu en avant de l’anasto- mose. Entre le stigmate et la branche anastomotique, les troncs trachéens principaux émettent sur toute leur surface une mul- titude de petites trachées, qui se divisent peu et se terminen toutes par une extrémité tronquée dans la cavité du dernier anneau où elles flottent librement, elles sont en si grand nombre qu’elles le remplissent presque tout entier. Toutes ces trachées se dirigent en avant à l'exception des plus internes; celles-ci, en effet, se dirigent directement en dedans et s’entrelacent avec leurs congénères. Du tronc anastomotique partent aussi de nombreuses trachées dont plusieurs se rattachent à la sur- face de l’extrémité postérieure du vaisseau dorsal. Comme nous le voyons, le dernier anneau est une cavité pleine de sang dans laquelle flottent un nombre immense de petites trachées; le vaisseau dorsal, tube ouvert à son extrémité ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 67 postérieure, plonge jusqu'auprès du fond de cette cavité. Pour comprendre le but de ces dispositions, 1l suffit d'observer la circulation chez un animal vivant, rien n’est plus facile d’ailleurs car le sang est très riche en globules. Ces globules, qui sont amiboïdes et émettent sans cesse des longs pseudo- podes, sont très faciles à voir et à suivre dans leur marche. En avant des ganglions cérébroïdes, on voit sortir à chaque systole, de l'extrémité antérieure du vaisseau dorsal, un fort courant sanguin qui étant, pour ainsi dire, brisé par la résis- tance que lui offrent les parois de la tête, rebrousse chemin et retourne en arrière. Ainsi dans toute la cavité générale Le sang circule d'avant en arrière. Ce mouvement paraît être déter- miné non seulement par vis a retro, mais encore par un véri- table appel de l'extrémité postérieure du vaisseau. En effet, lorsque cette extrémité se contracte, le sang afflue jusqu’au fond du dernier anneau et passe entre les innombrables tra- chées qui s’y rencontrent. Quand survient alors un mouve- ment de diastole, le sang se précipite dans l’orifice béant du vaisseau, et avant d'y pénétrer traverse encore un véritable treillage trachéen, qui paraît protéger l’organe central de la circulation contre l'introduction de tout globule non vivifié. | Il semble ainsi que chez la larve dont l'étude nous occupe, le vaisseau dorsal soit un cœur complètement artériel, puisque aucun globule ne peut y entrer sans avoir passé entre les branches flottantes de l’arbre trachéen le plus riche qu’on puisse imaginer. Ainsi la fonction respiratoire semble s’être localisée dans le dernier anneau, et ce qui confirme encore cette manière de voir, c’est l'extrême pauvreté en trachées des autres régions du corps. Il est bien probable qu’au moment où les orifices se forment les choses changent un peu, et que le vaisseau dorsal reçoit par eux une certaine quantité de sang veineux. Les faits que je viens de relater peuvent se résumer en deux mots : Chez les animaux que j'ai étudiés, le vaisseau dorsal se trouve 68 H. VIALLANES. formé par un tube simple, ouvert à ses deux extrémités et ne présentant pas trace d’orifices sur ses parties latérales. Les trachées semblent disposées pour que le cœur ainsi constitué ne puisse recevoir que du sang artérialisé. $ 3. — Muscles du tube digestif. Historique. — Je n'ai trouvé que très peu de renseignements sur l’histologie des fibres musculaires du tube digestif des in- sectes, les seuls que j'ai pu découvrir sont les suivants : Ramdhor (4) (1811) signale dans le tube digestif des insectes l'existence de deux ordres de fibres musculaires, les unes sont transversales, les autres longitudinales. Il remarque de plus que dans beaucoup de cas ces fibres sont ramifiées. M. Leydig (2, 3) (1855-1866) ne donne presque aucun détail sur les fibres musculaires du tube digestif des Insectes, il constate seulement que partout on les trouve striées. Il a étudié à ce point de vue un grand nombre d° SSpÈLS et jamais ne les a rencontrées lisses. M. Weismann (4) (1864) observe que les fibres musculaires longitudinales des ventricules chylifiquesse montrent chacune comme une sorte de long fuseau mince présentant un noyau sur un point de son trajet. M. Ranvier (5) (1878) observe et figure la couche musculaire de l’œsophage de la Blatte. Cette couche, quand elle est isolée de la cuticule et de l’épithélium, se montre comme une lame anhiste au sein de laquelle se trouvent plongés de place en place de gros noyaux elliptiques aplatis; de plus, dans ce pro- (1) Ramdhor, Abhandlung uber die Verdauungs Werckzeuge der Insec- ten. 1 vol. in-4°, 30 planches. Halle, 1811. (2) Leydig, Zum feineren Bau der Arthropoden (Müller’s Archiv, 1855, . 299). ; (3) Leydig, Hislologie comparée. Traduction française. Paris, 1866, p. 386. (4) Weismann, Entwikelung der Dipteren. Tir. à part. Leipzig, p. 113, pl. IX, fig. 16. (5) RUNIÉE EU | sur l’histologie du système nerveux. Paris, t. [, p. 299. pl. VI fig. ARTICLE N° 1. était ns dt A t - NRA HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 69 toplasma sont noyées des fibrilles rectilignes, toutes écartées les unes des autres et à direction parfaitement parallèle. Je laisse de côté d’autres résultats obtenus par M. Ranvier et par M. Renaut, car 1ls sont intéressants seulement pour la connaissance de la structure intime de la fibrille, et c’est là une face de la question dont je ne me suis oceupé qu'accessoi- rement au cours de ce travail. Mes observations sur l’histologie des muscles du tube di- gestif ont été faites sur une espèce seulement, la larve de Tipula gigantea. Pour la description anatomique du tube digestif de cet animal, je renvoie au travail de M. Wevyen- bergh (1). Je rappellerai seulement qu’à l’œæsophage fait suite un ven- tricule chilifique de taille considérable, vers l'extrémité anté- rieure duquel s'ouvrent quatre diverticulums creux (appendices gastriques). J'ai étudié la musculature seulement du ventricule chylifique et ces appendices. Observations. — Le mieux pour acquérir une idée exacte de la disposition générale des couches musculaires est de pro- céder de la manière suivante: on injecte dans la cavité géné- rale de l’animal une solution d’acide osmique à 1 pour 100. Quand les tissus sont fixés, on ouvre la larve, on enlève le ven- tricule qu’on place dans l’eau distillée. On fend sa paroi, on l’étale et l’on brosse sa face interne avec un pinceau pour chasser l’épithélium, ce qui se fait très facilement; ensuite on colore la pièce par l’hématoxyline et on la monte au baume. Quand on examine par sa face externe une pièce ainsi pré- parée on remarque que la musculature du tube digestif se compose de deux couches de fibres. Les externes sont longi- tudinales, les internes annulaires. Ces deux couches peuvent assez facilement se séparer l’une de l’autre par dilacération. Chacune d’elles se présente alors comme une membrane trans- parente, très mince, d’aspect anhiste, dans l’épaisseur de laquelle seraient placées les fibres musculaires. Si nous (1) Weyenbergh, Beitrage zur Anatomie und Histologie der hemicephalen Dipteren Larven. Haarlem, 1872, p. 61, 3 planches. 70 H. VIALLANES,. examinons les fibres de la couche externe (1), nous voyons que chacune d'elles se présente sous la forme d’une longue baguette allant en s’effilant vers ses deux extrémités, et présen- tant très nettement l’aspect strié. Sur le trajet de chacune de ces fibres s’observe un gros noyau ovalaire. Celui-ci n’est pas immédiatement appliqué contre la substance contractile, mais plongé au sein d’une aire de protoplasma granuleux peu éten- due qui se moule sur elle, mais sans l’envelopper complète- ment. Si on examine la fibre musculaire de face, l’aire pro- toplasmique se montre sous l'aspect d’une surface lozangique nettement limitée et au centre de laquelle se trouve le noyau. Sion l’examine au contraire de profil, cette aire se montre sous l'aspect d’une sorte d’élevure conique. Chaque fibre musculaire se termine généralement en se bi- furquanten deux chefs, qui vont se confondre avec la substance contractile d’une fibre voisine. La substance contractile et l'aire protoplasmique qui lui est annexée paraissent plongées immédiatement dans l’épaisseur de cette membrane anhiste quirelie toutes les fibres musculaires longitudinales entre elles. Dans la couche musculaire interne (2) les fibres sont égale- ment plongées dans une membrane anhiste qui les relie l’une à l’autre, elles sont à direction transversale, et ne forment qu’un seul plan; elles s'unissent les unes aux autres par leurs extrémités de la manière que j'indiquerai plus loim. Ces fibres ne présentent qu'un seul noyau, elles sont rangées si régulie- rement côte à côte que les noyaux des fibres voisines se répon- dent exactement et sont placés tous sur une même ligne longi- tudinale. Chaque fibre se compose d’un ruban très court de substance contractile, au milieu duquel se trouve le noyau musculaire arrondi, chacune des extrémités de ce ruban se divise en trois ou quatre longues bandelettes étroites qui mar- chent quelque temps parallèlement, puis chacune d’elles se bifurque pour s’anastomoser avecles extrémités bifurquées de même d’une autre fibre. Toutes les fibres étant sensiblement (1) PL. IV, fig. 1. (2) PI. IV, fig. 4. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 71 de la même longueur et se trouvant très régulièrement arran- gées côte à côte, les extrémités des fibres voisines sont situées sur une même ligne longitudinale comme le sont leurs noyaux. Une question importante restait à éclaircir, ces fibres mus- culaires du ventricule chylifique ont-elles chacune une enve- loppe propre? À cet égard, je n’ai d'observations que sur les fibres longitudinales ; quand on observe un tube digestif après avoir été traité par l’acide acétique, puis coloré au vert de méthyle et dilacéré suffisamment pour isoler l’une ‘de l’autre les fibres musculaires longitudinales, on remarque que cha- cune de celles-ci (1) se montre comme composée d’une enve- loppe tubulaire, à parois assez épaisses et claires, se gonflant sous l'influence du réactif et renfermant dans son intérieur la substance striée, avec la petite aire protoplasmique. Cette enveloppe a-t-elle la valeur d’un sarcolemme ordi- naire, C'est-à-dire faut-il penser que chaque fibre musculaire _enveloppée d’une gaine particulière et distincte, est plongée au sein de la membrane anhiste qui sépare les fibres les unes des autres et dont il a été question plus haut; ou faut-il au contraire supposer que la membrane anhiste. se dédouble pour loger la fibre musculaire et lui servir ainsi d’enveloppe ? Pour que cette dernière hypothèse soit admissible, il faut sup- poser que, sous l'influence de l’acide acétique et de la dilacé- ration, la partie de membrane anhiste non dédoublée, séparant deux fibres voisines, s’est trouvée enlevée. La méthode de l’argent aurait seule pu donner la solution de ce problème, en faisant apparaître des lignes de soudure qui, comme dans le vaisseau dorsal, auraient marqué la limite de chaque élément. Malheureusement, cette méthode ne m'a donné dans ce cas particulier que des résultats négatifs, sans valeur par conséquent. Quoi qu’il en soit d’ailleurs à cet égard, les fibres muscu- laires du tube digestif montrent bien qu’elles ont chacune une forme précise et une autonomie, bien qu’on ne puisse déceler (4) PI. IV, fig. 2. 79 H. VIALLANES,. par les réactifs le point précis qui limite le domaine de deux fibres musculaires voisines. Le fait que les fibres musculaires ne possèdent qu’un noyau, le fait qu’elles se soudent entre elles sur un seul plan pour constituer une membrane, leur comparaison si facile à établir avec l'élément contractile du vaisseau dorsal, me por- tent à croire que chacune d'elles répond à une cellule aplatie, possédant un noyau, et dont le protoplasma s’est partiellement différencié en substance contractile. Si maintenant nous examinons, en ayant recours aux mêmes procédés, la couche musculaire des appendices gastriques qui s'ouvrent vers l'entrée du ventricule chylifique, nous remar- quons que l’élément contractile s’y montre disposé d’une ma- nière un peu différente. Dans cette région du tube digestif, je n’ai observé qu’une seule couche de fibres musculaires, celles- ei sont à direction longitudinale. Quand, après avoir fendu l’appendice gastrique, enlevé son épithélium au pinceau, on examine sa paroi (1), on remarque qu’elle se présente comme une membrane percée de nombreu- ses ouvertures ovales de dimensions variées, c’est une mem- brane fenêtrée, analogue comme aspect général à l’épiploon du lapin. À la surface de cette membrane se montrent des noyaux arrondis, chacun de ceux-c1 occupe la partie moyenne d’un long ruban de substance contractile striée transversalement à direction longitudinale. Je n’ai pu décider si ce ruban mus- culaire était placé à la surface ou dans l'épaisseur de la mem- brane anhiste. Aucun de ces rubans ne reste simple sur une longueur un peu notable; mais très près du noyau, en avant comme en arrière, 1l se divise en sept ou huit bandelettes étroites, qui se subdivisent fréquemment, s’anastomosent entre elles et avec les bandelettes issues des rubans mus- culaires voisins, tantôt en s’approchant l’une de l’autre, tantôt en s’envoyant de très minces brides de substance contraetile striée. (DPIMIX EME ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 73 Ces bandelettes s’infléchissent pour contourner les fenêtres dont elles semblent souvent limiter directement le contour. Ilest faule de comparer cette disposition avec ce que nous avons observé dans les autres parties du ventricule chyhfique. Ici encore chaque fibre musculaire paraît répondre à une cel- lule aplatie présentant un seul noyau, qui se serait soudée bord à bord avec ses voisines, et dont le protoplasma se serait partiel- lement transformé en bandelettes de substance contractile. Mais dans l’appendice gastrique, les fibres présentant une plus grande irrégularité de forme il est encore plus difficile que dans le ventricule de décider où est la limite précise du domaine de chaque fibre, et ici encore la méthode de l'argent ne m'a donné que des ui négatifs. En résumé, bien que je n’aie pu réussir à déceler les lignes de soudure des fibres musculaires du tube digestif, la comparai- son $i facile qu’on peut faire entre ces éléments et ceux qui entrent dans la composition du vaisseau dorsal, me ‘porte à croire qu'ici encore, chaque fibre musculaire est une seule cellule aplatie pourvue d’un seul noyau et dont le protoplasma s’est plus ou moins complètement différencié en substance contractle. $ 4. — Terminaisons nerveuses motrices dans les muscles du tube digestif. Îlistorique. — On sait depuis longtemps (1), grâce surtout aux travaux de M. Blanchard, que l'appareil digestif des In- sectes est innervé par les ganglions connus sous le nom de ganglions stomato-gastriques, par les ganglions sus-intestinaux ou du système sympathique; mais je ne connais pas de re- cherches sur le mode de distribution et de terminaison des nerfs issus de ces ganglions. La seule indication, bien sommaire d’ailleurs, que j'aie pu trouver nv'a été fournie par les travaux de M. Ranvier. M. Ranvier (2) (1880) s'exprime ainsi (p. 469) : (1) Milne Edwards, Anatomie ct physiologie comparées, t. XI, 1816, p 187 et suivantes. (2) Ranvier, Leçons d'anatomie générale. Paris, 1880. 74 H. VIALLANES. «Si, d'autre part, nous considérons les Arthropodes, sur- » tout les Insectes, nous verrons que la tunique musculaire de » leur tube digestif est formée par des fibres striées. Or, si l’on » examine les fibres nerveuses qui s’y rendent, on remarque » que ces fibres constituent également un plexus, un véritable » plexus fondamental, car il possède des cellules ganglion- » naires dans ses points nodaux et sur le parcours même » des fibres qui le composent. » Observations. — Ces quelques lignes sont les seuls rensei- onements, bien vagues d’ailleurs, que j'aie pu trouver sur ce sujet, aussi je crois qu'il n’est pas sans intérêt de rendre compte des observations que j'ai pu faire moi-même sur le mode de distribution des nerfs dans le tube digestif des Insectes. J’ai étudié à cet égard le ventricule chylifique de la larve de Tipula gigantea. Dans cet organe les éléments nerveux sont difficiles à déceler, et ce n’est guère qu'avec la méthode de l'or que je suis arrivé à les étudier avec quelques détails. On fixe le ventricule chylifique en le gonflant par l'acide osmique eton traite la pièce parle chlorure d’or, suivant cette méthode que j'ai déjà eu l’occasion de décrire avec détail. Avant d’exa- miner la préparation 1l est nécessaire de balayer l’épithélium au pinceau, ce qui se fait très facilement. Il convient d’exa- miner une pièce d’une grande surface, ce qu’on obtient en fen- dant longitudinalement le ventricule chylifique après l’avoir coupé à ses deux extrémités, on a de la sorte sous les yeux la tunique musculaire complète. On se rappelle que la musculature du ventricule chylifique se compose de deux couches de fibres, l’une externe formée de fibres longitudinales, l’autre interne formée de fibres annu- laires, ces détails se retrouvent au premier coup d’œil. Avec un peu d'attention on découvre bientôt des cellules nerveu- ses au milieu des fibres musculaires (1). Ges cellules sont disposées avec une très grande régularité. On ne les rencontre que sur quatre lignes longitudinales orientées comme des gé- (4) PI. VE, fig. 3. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 75 nératrices du cylindre que représente le ventricule chyhfique. Si nous étudions une de ces lignes, nous voyons que chacune d'elles présente des cellules ganglionnaires disposées sur une seule file longitudinale. Ces cellules sont très régulièrement espacées et reliées l’une à l’autre par un fin prolongement anastomotique; elles sont toutes multipolaires et à contours anguleux, leur grand diamètre est orienté dans le sens longi- tudinal. Par leurs contours latéraux elles émettent un certain nombre de prolongements qui se divisent rapidement un grand nombre de fois en devenant très fins, ces prolongements s’anas- tomosent fréquemment entre eux. Malheureusement, leur ténuité toujours croissante à mesure qu'ils se divisent, ne m'a pas permis de les suivre jusqu’à leur terminaison, mais il paraît bien probable qu’ils sont destinés à innerver Te fibres mus - culaires entre lesquelles ils serpentent. Les cellules ganglionnaires se montrent avec un protoplasma très fortement coloré en violet foncé, au centre duquel on observe un noyau arrondi, lui au contraire, très clair. Les pro- longements se présentent comme des filaments fins, d’une coloration très intense, ce qui les fait bien trancher sur les parties voisines. Je n’ai pu déceler de gaines adventives, nià la surface des cellules ganglionnaires, n1 à celle des prolonge- ments. Ce qui rend assez intéressante l’étude du plexus nerveux que je viens de décrire, c’est que les cellules ganglionnaires qui entrent dans sa composition ne sont point partout uniformé- ment réparties, mais se montrent localisées seulement sur un certain nombre de lignes longitudinales. Les faits que je viens d’énoncer confirment bien cette loi si générale émise pour la première fois par M. Ranvier (1) : « Les muscles organiques, qu’ils soient lisses ou strids, sont animés par des nerfs qui, immédiatement avant d'atteindre ces muscles, forment un plezus ganglionnaire. » (1) Ranvier, Leçons d’andtoimie générale. Paris, 1880, p. 463. 76 H. VIALLANES. CHAPITRE V MUSCLES STRIÉS VOLONTAIRES. Avant d'exposer les résultats de mes recherches, je crois nécessaire de rappeler en quelques mots l’état présent de la science sur la structure du muscle strié volontaire des Vertébrés. Car ayant sans cesse à le prendre comme terme de compa- raison, je crois utile de bien définir tout d’abord les mots dont je me serviral. Le tissu musculaire d’un Vertébré est composé de faisceaux primitifs, chacun d’eux est pourvu d’une enveloppe spéciale, le sarcolemme. Le contenu du sarcolemme est formé par la réunion d'un grand nombre de prismes à base polygonale, les colonnettes, séparés les uns des autres et du sarcolemme par un protoplasma granuleux, au sein duquel sont plongés des noyaux (noyaux musculaires). Chaque colonnette est elle- même formée par une réunion de parties plas petites, les fibrelles. Sur une coupe transversale, chaque colonnette se montre comme un champ polygonal (champ de Cohnheim). Ge dernier se résout en un certain nombre de petits cercles bril- lants, séparés les uns des autres par des petits espaces de sub- stance homogène. Chacun de ces cercles correspond à la coupe d’une fibrille. On sait que l’aspect strié du tissu musculaire est dù à ce que chaque fibrille est formée par une série de disques empilés les uns sur les autres et inégalement réfrin- gents; mais je ne veux entrer dans aucun détail à ce sujet, car ce n’est que d’une façon tout à fait accessoire que j'ai étudié la disposition de ces disques. Les fibres musculaires des Insectes constituent un objet d'étude vraiment classique dans les recherches sur la stria- tion musculaire et sur le mode de terminaison des nerfs mo- teurs. Mais si les histologistes ont beaucoup observé Îles muscles des Insectes à ces deux points de vue, ilsont beaucoup négligé les autres détails de leur organisation. Dans l'historique que je vais donner des recherches faites ANTICLE N° {, HISTOLOGIE ET. DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. ÿ 7] avant moi sur la structure des muscles des Insectes, je laisse- rai de côté les travaux qui n’ont trait qu'à l'étude des détails de la striation, car, sur ce point, je n’ai pas d'observations nouvelles à apporter. Je renverrai au chapitre suivaut pour l'historique détaillé des recherches relatives au mode de terminaison des nerfs moteurs. Historique. — Parmi ceux qui se sont occupés de l’étude des muscles striés des Insectes, je dois, en suivant l’ordre chronologique, citer tout d’abord Dujardin (1), Amici, et MM. Frey et Leuckart (2), mais c’est à M. Leydig que nous sommes redevables des premières notions précises sur ce sujet. M. Leydig (3) (1855) constate que chez tous les Arthropodes qu'il a étudiés, les muscles de la vie animale comme ceux de la vie organique sont striés. Il montre le peu de fondement de l'opinion de MM. Frey et Leuckart, qui pensaient que chez les Insectes de petite taille, les muscles étaient lisses. Il remarque que chez les Insectes les fibres musculaires des pattes se pré- sentent avec l’aspect d’un cylindre de matière contractile, revêtu extérieurement d’un sarcolemme, et traversé à sa par- tie centrale par un canal axial, renfermant une substance gra- nuleuse et des noyaux. Il remarque en outre que les muscles moteurs des ailes, ou muscles jaunes, se distinguent des autres par leur peu de solidité; et que de la sorte, sous le moindre etfort, ils se décomposent en leurs fibrilles constitutives. M. Weismann (4) (1862) publie un mémoire des plus im- portants sur l’histologie et le mode de développement du tissu musculaire dansles principaux groupes du règne animal. C’est sur ce sujet le seul travail d'ensemble que nous possédions. (1) Dujardin, Manuel de l'observateur au microscope, 1843. (2) Frey et Leuckart, Lehrbuch der Zootomie. (3) Leydig, Zum feineren Bau der Arihr DROUER (Müller’s Archiv, 1855, p. 376, pl. XV-XVII). (4) Weismann, Ueber die zwei Typen contractilen Gewebes une ibre Verthei- lung in die grossen Gruppen des Thierreichs, sowie über die histologische Bedeutung ihrer Formelemente (Zeitsch. f. ration. pain Bd XV, p. 60. Taf. IV-VIT, 1862). ANN. SC, NAT., Z00L., AOUT 1882. XIV, OP ARTAN 1 se 78 H. VIALLANES. M. Weismann reconnaît chez les Insectes trois types princi- paux de faisceaux primitifs : 4° les faisceaux primitifs de la larve; ils sont composés d’un sarcolemme renfermant une masse contractile, entre le sarcolemme et la masse contractile sont situés des noyaux, ainsi 1ls se rapprochent beaucoup des faisceaux primitifs des Vertébrés; les faisceaux primitifs mo- teurs des pattes; ils sont composés, comme l’indique M. Leydig, par un cylindre de substance contractile, revêtu d’un sarco- lemme, et traversé par un canal axial renfermant des noyaux; 9° les faisceaux primitifs des ailes, dépourvus de sarcolemme, et composés chacun par un simple paquet de fibrilles, séparées les unes des autres par une substance interfibrillaire demi- liquide. M. Weismann ne nous donne aucun renseignement sur la manière dont les fibrilles sont arrangées. M. Grunmach (1) (1872) ne publie qu’une seule observation qui me paraisse nouvelle; je la cite in extenso (2). « Sur des muscles thoraciques durcis dans l'alcool, je suis arrivé à obte- nir des coupes transversales en quelque sorte satisfaisantes (einigermassen befriedigende). Sur les coupes, se montrait une image rappelant les champs de Cohnheim, ces champs étaient triangulaires, quadrangulaires ou pentangulaires; ils étaient séparés les uns des autres par une substance brillante. Par la comparaison des coupes transversales et longitudinales, j'ai acquis la conviction que chacun des champs répondait à la coupe d’une fibrille, les lignes de séparation des champs répon- dant à la substance interfibrillaire. » Aussi, M. Grunmach pense-t-il que ce que l’on considère généralement comme la fibrille dans les muscles de l’aile répond en réalité à la colon- nette du faisceau primitif des Vertébrés. M. T. W. Engelmann (3) (1873) observe que la fibrille du muscle de l'aile peut, sous l’influence de la dissociation, se (1) Grunmach, Ueber die Structur der quergesteiften Muskelfasern bei den Insecten. Thèse de doctorat en médecine. Berlin, 1872, 46 pages. (2) Grunmach, loc. cit., p. 40. (3) T. W. Engelmann, Pflüger’s Archiv f. d. gesammt. Physiol., Bd 1, p. 33, Taf. II, 1873. ARTICLE N° 1. s HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 79 fendre èn deux; ce qui n’a pas lieu pour la fibrille du Vertébré, aussi pense-t-il que la fibrille de l’Insecte n’est point une for- mation homologue de celle du Vertébré. M. Schäfer (1) (1873) reconnait que les faisceaux des muscles des pattes de l’hydrophile sont constitués, comme d’ailleurs chez la plupart des Insectes, par un cylindre de substance contractile, enveloppé d’un sarcolemne et percé d’un canal axial où se trouvent les noyaux. Mais ayant observé la coupe transversale optique de ces faisceaux, il découvrit des images fort intéressantes. Quand, opérant dans la chambre humideet prenant pour véhicule le sang même de l'animal, on examine la coupe optique d’un faisceau, on remarque que la substance contractile se montre comme une masse parfaite- ment homogène, semée de points sphériques bien plus réfrin- gents. M. Schäfer considère chacun de ces points brillants comme représentant la coupe transversale optique d’une fibrille, De plus, M. Schäfer a remarqué que si l’on ajoute de l’eau à la préparation, on altère le tissu, et qu’alors l'aspect de la coupe optique est complètement modifié. On ne dis- tingue plus ces points brillants qui représentaient la coupe des fibrilles ; le canal central du faisceau s’élargit singulière- ment, et autour de lui rayonnent des sortes de fentes plusieurs fois divisées qui vont aboutir à la surface de la masse con- tractile. M. Schäfer fait remarquer que la coupe a alors un aspect qui rappelle celui qu'offre la section d’un faisceau de Vertébré où l’on voit les champs de Cohnheim. M. Ranvier (2) (1880), étudiant les muscles de l’aire de l’hydrophile, remarque, comme l'avait fait Weismann, qu’on peut les décomposer en faisceaux. « Le faisceau dans son entier, dit-il, n’est formé que par la juxtaposition de filaments très fins de substance musculaire, plongés dans une masse de granulations réfringentes comblant les interstices qu’ils lais- (1) Schäfer, On the minut structure of the leg muscles of the Wather Beetle (Philosophical transactions, 1873, p. 429, pl. XXIID). (2) Ranvier, Leçons d'anatomie générale sur le système musculaire. Paris, 1880, p. 95 et suiv. 80 H. VIALLANES. sent entre eux. Ces filaments ne sont, en outre, maintenus unis que par les trachées, qui les rassemblent comme des liens circulaires réunissant en un faisceau unique les fils juxtaposés d’un écheveau. » De plus, M. Ranvier remarque que ces fila- ments précités, que les histologistes nomment les fibrilles élémentaires des muscles moteurs des ailes, ne représentent point de véritables unités histologiques; en effet, chez l’'Hy- drophile et mieux encore chez le Xylocope, on parvient à les décomposer en filaments plus fins, souvent anastomosés et bifurqués qui, eux seuls, paraissent répondre aux fibrilles des Vertébrés. Aussi M. Ranvier pense-t-1l, comme l'avait fait avant lui M. Grunmach, que ce que les auteurs appellent la fibrille dans les museles de l'aile des Insectes est en réalité lhomo- logue de la colonnette musculaire des Vertébrés. Je suivrai la division adoptée par M. Weismann dans son mémoire précité et J’étudierai successivement : 1° les muscles de la larve; 2° les muscles de l’aile de l’imago; 8° les muscles des pattes de l’imago. $ 1. — Muscles volontaires de la larve. Historique. — L'histologie des muscles de la larve ne me parait avoir été que peu étudiée. Aussi aucun des auteurs dont j'ai lu les travaux, à part M. Weismann, ne signale la diffé- rence si grande et si facile à voir qui existe entre les muscles de l’imago et ceux de la larve. La plupart des histologistes qui ont pris le muscle larvaire pour objet d'étude ne se sont guère occupés que de la structure intime de la fibrille et ont laissé de côté le reste de l’organisation du tissu. M. Weismann (1) (1864) observa les faisceaux primitifs de la larve de la Mouche, il décrit leur structure de la manière suivante : € Le faisceau primitif est enveloppé d’un sarco- lemme à l’intérieur duquel existe une masse contractile striée, entre elle et le sarcolemme se trouve un protoplasma granu- leux dans lequel sont plongés de nombreux noyaux muscu- laires. » (3) Weismann, Entwikelung der Dipteren, p, 106, Taf. VILLE, fig. 41 D. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES, 81 Observations. — Je n’ai que peu de choses à ajouter aux observations de M. Weismann, j'ai toutefois pu, sur les coupes transversales de faisceaux primitifs, observer quelques détails qui lui avaient échappé. En examinant la coupe d’un faisceau primitif (1), on remarque que la masse contractile présente le dessin caractéristique des champs de Cohnheim, même avec beaucoup plus de netteté qu’on ne peut l’observer chez les Vertébrés : ceci nous indique bien que la substance contractile est constituée par une réunion des colonnettes. Les noyaux ne sont point tous situés, ainsi que le pensait Weismann, entre le sarcolemme et la masse contractile. Mais beaucoup sont situés au sein même de cette masse, entre les colonnettes qui s’écartent pour les loger, ainsi que cela a lieu chez la Grenouille. Ces faits nous montrent bien que le faisceau primitif de la larve de Mouche est constitué exactement comme le faisceau primitif du Vertébré et lui est en tous points comparable. M. Weismann indique simplement que chaque faisceau primitif s’insère à l’hypoderme par ses deux extrémités. Quand on examine un faisceau primitif conservant encore ses inser— tions, on voit qu'il s'attache à une cellule hypodermique tou- jours un peu plus grosse que ses voisines. Pour déterminer avec précision ce mode d'insertion, 1l convient de traiter une enveloppe dermo-musculaire par un séjour de vingt-quatre heures dans l’alcool au tiers. Par la dilacération, le faisceau primitif s’isole alors parfaitement de la cellule hypodermique et l’onremarque qu'ici comme chez le Vertébré, le sarcolemme enveloppe de toutes parts la substance contractile et qu’il ne cesse point aux points d'insertion. Chez la larve de Stratiomys la fibre musculaire est essen- tiellement constituée comme chez celle de la Musca; toutefois elle présente quelques particularités fort remarquables sur lesquelles je crois nécessaire de donner quelques détails. Les faisceaux primitifs chez le Srratiomys atteignent des dimensions vraiment colossales, la plupart s'étendant d’un (4) PI. V, fig. 18. 89 M. VIALLANES. anneau à l’autre mesurent # à 5 millimètres. À leur partie moyenne, ilsmesurent0"",4de diamètre et sont par conséquent parfaitement visibles à l’œil nu. Chaque faisceau primitif (1), entièrement revêtu par un sarcolemme est bi, tri, ou quadribifurqué à chaque extrémité. Chacune des branches de division du faisceau va s’insérer à une seule cellule hypodermique. J’ai mdiqué précédemment, en décrivant la peau du Sfratiomys, quelles modifications présentaient les cellules hypodermiques destinées aux inser- tions musculaires. La substance contractile présente des lignes sombres longitudinales qui indiquent bien que, comme chez les Vertébrés, elle est divisée en colonnettes. Les noyaux musculaires sont peu nombreux, mais ils attei- gnent une taille considérable et mesurent 0"",02, Leur contour circulaire parfaitement net semble dû à l’existence d’une membrane. Quand on examine un faisceau primitif traité par lacide acétique à 1 pour 100, puis coloré au vert de méthyle, on remarque que l’intérieur du noyau est rempli par un sue nucléaire parfaitement clair et transparent, au sein duquel sont plongés de nombreux nuecléoles tous à peu près de taille égale et qui sont les seules parties colorées du noyau. Si le faisceau primitif a été traité par un mélange à parties égales d'alcool à 36 degrés et d’acide osmique à 4 pour 100, les noyaux sont parfaitement visibles, et l’on remarque que cha- cun d'eux se montre entouré par une aire circulaire tranchant en clair eur les parties environnantes. Cette observation paraît indiquer que le protoplasma qui entoure immédiatement le noyau est un peu différent de celui au sein duquel plongent les colonnettes. Le diamètre des faisceaux primitifs varie notablement dans les diverses régions du corps. Dans les plus petits, les noyaux sont très régulièrement disposés sur une seule ligne longitu- dinale ; dans les plus gros ils sont disposés avec un peu moins d'ordre. La disposition des noyaux présente chez le Stratiomys 1) PI IV, fig. 11. ARTICLE N° 1. j 5 HISTOLOGIE ET.DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 83 une particularité très remarquable. Pour la bien faire com- prendre, je décrirai d’abord un faisceau primitif de petit diamètre et bifurqué à ces deux extrémités; c’est d’ailleurs là le cas le plus général. | Si nous examinons un tel faisceau vers Sa partie moyenne, nous remarquons au-dessous du sarcolemme et les noyaux qui se présentent avec les caractères que j'ai mdiqués plus haut; tous sont situés sur une seule ligne longitudinale, ils sont assez écartés les uns des autres, mais régulièrement espacés. Si nous suivons le faisceau sur sa longueur, nous voyons qu'avant de se terminer 1l se divise en deux chefs égaux qui forment entre eux un angle assez aigu. La ligne sur laquelle sont situés les noyaux musculaires constitue la bissectrice de cet angle. Souvent même le dernier noyau de la file situé entre le sarcolemme et la masse contractile occupe l’angle même de bifurcation. Si maintenant nous examinons l’espace compris entre les deux branches, nous.y voyons à peu près vers le milieu de la longueur des branches et à égale distance de l’une et de l’autre, un gros noyau (1). Ce dernier présente tous les carac- tères de forme, de taille, de coloration qu'offrent les noyaux musculaires, il est situé sur la même ligne qu'eux, mais il paraît placé en dehors du faisceau. En réalité il n’en est rien, et cette situation extrafasciculaire n’est qu’une apparence due à une disposition très curieuse du sarcolemme. Les deux branches de bifurcation sont réunies l’une à lPau- tre par une anastomose de leur sarcolemme, disposée comme Pest la barre qui réunit les deux jambages de la lettre A. Cette anastomose est creuse ; à sa partie moyenne elle est ren- flée en ampoule pour renfermer un noyau, lequel est environné d’une aire de protoplasma. Ainsi le noyau d'apparence extra- fasciculaire est en réalité plongé dans le protoplasma du faisceau. Cette anastomose renfermant un noyau n’est pas la seule (4) PE. IV, fig. 41. 84 IH. VIALLANES. qui unisse entre elles les deux branches de bifurcation; car en outre celles-ci sont généralement unies l’une à l’autre par un certain nombre de brides très fines et très pâles qui ne parais- sent être que des expansions du sarcolemme. Elles sont très difficiles à voir sur le tissu frais, mais quand on s'adresse à des pièces colorées par la fuchsine, elles se mon- trent avec la plus grande netteté. Ces brides paraissent parfai- tement homogènes ; sous l’influence de l'acide acétique, elles se gonflent et augmentent de volume, maïs jamais elles ne m'ont présenté d’apparences qui aient pu me faire penser qu'elles soient creuses. Ces brides ne sont point seulement développées entre les branches de bifurcation du faisceau pri- mitif, il en existe encore un grand nombre qui servent à réunir le sarcolemme d’un faisceau à celui de ses voisins. Quelque bizarres que soient ces dispositions qu'offre le tissu musculaire du Stratiomys, les faisceaux primitifs qui le composent n’en sont pas moins parfaitement comparables aux faisceaux primitifs d’un Vertébré. $ 2. — Muscles des ailes chez l’imago. Observations. — Avant d'étudier la structure des muscles du thorax, il convient de donner quelques indications sur leur disposition topographique. Je ne veux entrer dans aucun détail ni sur leurs insertions diverses, ni sur leurs fonctions, mais seulement indiquer leur disposition générale, quand on les observe sur des coupes transversales du thorax; cette connais- sance nous sera en effet absolument nécessaire lorsqu'il nous faudra étudier leur développement chez la pupe. Pour pratiquer des coupes totales à travers le thorax d’une Mouche adulte, il faut prendre l’animal au moment même où il sort de l'enveloppe pupale, car un peu plus tard les tégu- ments deviennent très durs, ébrèchent le rasoir et se brisent eux-mêmes. [Il est absolument nécessaire d’avoir recours à la méthode du collodion, car autrement toutes les parties renfer- ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET.DÉVELOPPEMENT: DES INSECTES. 89 mées dans le thorax se séparent les unes des autres et se dis- persent. | Si nous examinons une coupe transversale du thorax prati- quée vers sa partie moyenne, nous remarquons qu’elle se présente avec l’aspect suivant. Sur la ligne médiane, à la jonction du quart inférieur et des trois quarts supérieurs, nous rencontrons le tube digestif quien coupe, se montre comme un petit cercle. Immédiatement à côté de la ligne médiane, nous trouvons une masse musculaire volumineuse dont les fibres sont à direction longitudinale et par conséquent coupées transversalement. Cette masse musculaire est étroite dans le sens transversal, mais de haut en bas, elle occupe tout l’espace situé entre le tube digestif et les téguments dorsaux. Je la désignerai dès maintenant sous le nom de masse musculaire interne de l’aile; elle est composée de six faisceaux situés les uns au-dessus des autres sur une même ligne verticale et régulièrement espacés. Les faisceaux ont en coupe transversale un contour rectangulaire, les supérieurs ont leur grand côté perpendiculaire à la ligne médiane, les inférieurs sont de plus en plus inclinés vers cette ligne. Ils sont séparés les uns des autres par des espaces réguliers, chacun d’eux est complètement enveloppé par un grand nombre de trachées très fines qui lui forment comme une sorte d’enveloppe, et l’isolent de ses congénères, ainsi que de toutes les parties voisines. En dehors de la masse musculaire interne, en haut du thorax, nous trouvons diffé- rentes autres masses musculaires de l'aile à directions variées etsur la disposition topographique desquelles il est inutile que je donne des détails. | Si nous étudions la masse musculaire interne sur des coupes successives, nous voyons qu’un peu plus en arrière du point que nous venons d'étudier, elle n’est plus formée que de cinq faisceaux; plus en arrière encore de quatre, et enfin d’un seule- ment. Cela tient à ce que les faisceaux s’attachant tous aux (1) PL. XIV, fig. 1. 86 H. VIALLANES. téguments dorsaux prennent leur insertion, les supérieurs plus antérieurement que les inférieurs. Tous les muscles autres que ceux qui forment les masses musculaires de l’aïle sont constitués par un tissu musculaire différent et sont histologiquement des #uscles des pattes. Avant d'étudier la structure des muscles de Paile de la Mouche, je rapporterai les observations que J'ai faites sur ceux du Dytique; ceci me permettra d'établir plus facilement cer- taines homologies intéressantes. Quand, avant ouvert le thorax d’un Dytique, on enlève un fragment des muscles de l'aile, ce fragment se décompose immédiatement en un grand nombre de fibrilles mesurant 1 millimètre; cette décomposition en fibrilles se fait même sans qu'on soit obligé d’avoir recours aux aiguilles, L'aspect de ces fibrilles qui sont un objet d'étude classique est trop connu pour que je veuille le décrire, mais ce qui ne me paraît pas avoir été étudié avec soin, c’est la manière dont elles sont groupées. Désirant combler cette lacune j'ai eu recours au procédé suivant : Avec une aiguille, on fait un petit trou aux téguments du thorax d’un Dytique vivant. Par cet orifice on injecte un mé- lange à parties égales d’acide osmique à 4/100 et d'alcool à 36 degrés. Quelques instants après on ouvre largement le thorax de l’animal, on enlève une masse musculaire de l’aile en la décolant de ses insertions avec un sealpel. Grâce à l'agent fixateur employé et grâce aussi aux nombreuses trachées qui l’enlacent, on peut manier cette pièce sans crainte de la dila- cérer, on la colore en masse par le carmin, puis on l'inelut dans le collodion. On la débite ensuite en coupes transversales aussi minces que possible et dans un plan bien perpendieu- laire à la direction des fibres. En examinant une de ces coupes (1) à un grossissement modéré, on croirait avair sous les yeux une coupe pratiquée à à travers le muscle d'un Mam- mifère. (1) PI. V, fig. 10. ARTICLE N° 4. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 87 La masse musculaire semble, à première vue, constituée par des faisceaux primitifs (1), à noyaux extérieurs à la masse contractile, comme cela a lieu chez l'homme. Ces faisceaux sont les uns lâchement unis à leurs congénères, les autres se montrent complètement libres. Mais cette similitude entre le muscle du Mammifère et celui de l’Insecte n’est qu'appa- rente. Si l’on étudie avec un objectif à immersion assez puissant la coupe (2) d’un de ces faisceaux primitifs, on remarque qu’il _est constitué de la manière suivante : Il se présente avec un contour circulaire ou elliptique, mais on ne voit pas à sa sur- face trace de sarcolemme, il paraît par conséquent réduit à une masse contractile complètement privée d’enveloppe. Sur le pourtour de la coupe, s’observent toujours un certain nombre de noyaux ovalaires (2-6) qui sont à moitié engagés dans la -masse contractile et qui, par conséquent, par la moitié de leur surface font saillie au dehors. | Quant à la masse contractile elle-même, elle se présente avec un aspect extrêmement remarquable et élégant, on croi- rait voir un plan uni formé d’une substance parfaitement homogène et sur lequel seraient posées un grand nombre de demi-sphères cristaHines, toutes d’un même diamètre et régu- lièrement espacées. Chacune de ces demi-sphères mesure 0° ,0010 de diamètre. L'espace qui sépare deux sphères voi- sines est à peu près égal au diamètre de l’une d’elles. Malheu- reusement le hthographe n’a point copié fidèlement le dessin manuserit que j'avais fait avec le plus grand soin, en dessinant chaque sphère une à une à la chambre elaire (3). Dans la figure 9, planche V, il a donné aux sphères un trop grand dia- mètre, a diminué leur nombre et ne les a pas régulièrement espacées, comme elles le sont dans la nature. Les sphères n’ont un aspect de solide en relief que quand on emploie la lumière oblique. À la lumière directe chacune (1) PL V, fig. 10. (2) PL. V, fig. 9. (3) Sur mes préparations, les images que je viens de décrire sont si nettes, que j'ai pu en obtenir des photographies absolument démonstratives. 88 MH. VIALLANES. d'elles présente seulement sa projection, c’est-à-dire un cercle très régulier, se montrant plus réfringent que la sub- stance homogène qui l’entoure. Ainsi l’aspect d’un solide sphérique, comme on pouvait le supposer, n’est dù qu’à un jeu spécial de lumière à travers une substance fortement réfringente. Aucun doute ne peut, je crois, subsister sur l’interprétation de ces images, chaque cercle représente la coupe transversale d’une fibrille; en effet, le cercle mesure 0®%",0010 (1), ce qui est précisément le diamètre de la fibrille étudiée sur les pièces dilacérées. Les cercles sont séparés les uns des autres, commeje lai dit plus haut, par une substance unissante moinsréfringente qu'eux et parfaitement homogène. En étudiant la coupe avec le plus grand soin, jamais on n’y découvre la plus légère fis- sure (2); nulle part elle ne perd son homogénéité n1 sa conti- nuité. Les cercles ne sont jamais situés tout à fait sur le bord de la substance unissante, mais toujours entourés de toute part -par cette substance. Les bords de cette dernière sont parfaite- ment nets et réguliers et ne présentent jamais ni sinuosités, ni encoches, excepté pour loger les noyaux qui sont par une de leur moitié enfoncés dans la substance unissante, et qui par leur autre moitié paraissent en contact immédiat avec l'extérieur. Si nous cherchons maintenant à mettre en parallèles Les dis- positions que je viens de décrire avec ce que nous savons sur la structure du tissu musculaire des Vertébrés, nous voyons que ce que j'ai désigné sous le nom de faisceau n’est point comparable au faisceau du Vertébré tout entier; 1l n’est compa- rable qu’à une portion de cet organite, à la colonnette muscu- (1) Je puis donner ce chiffre avec une entière certitude. J'ai pris un grand nombre de mesures en dessinant à la chambre claire, à un grossissement de 900 diamètres, l’erreur ne peut, par conséquent, être que fort minime. (2) Ces fissures décomposant la coupe en champs polygonaux et qu’a décrits sans les figurer M. Grunmach, me paraissent dues à de simples brisures déterminées par le rasoir quand on n’emploie pas le collodion. Quand ces bri- sures se produisent, il devient impossible de voir les cercles réfringents qui représentent la coupe des fibrilles, et qui, ainsi que les noyaux, ont complète ment échappé à l’anatomiste allemand. ARTICLE N°1. HISTOLOGIE ET. DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 89 laire. Eneffet noussavons que la colonnette musculaire est une réunion de fibrilles unies les unes aux autres par une sub- stance homogène indivise; sur une coupe la colonnette montre les coupes des fibrilles, comme des cercles séparés les uns des autres par la substance unissante; le protoplasma et les noyaux sontextérieurs à lacolonnette, 1ls ne la pénètrent n1 ne la divi- sent. Cesont là tous les caractères des faisceauxde Paile, que je pourrais par conséquent aussi bien désigner sous le nom de colonnettes. Ainsi chez le Dytique les museles jaunes de l'aile me pa- raissent constitués par des faisceaux réduits à une seule colon- nette. Cette assimilation nécessite naturellement qu’on homo- logue la fibrille de l’Insecte à celle du Vertébré. Cette homo- logie me parait rigoureusement exacte, puisque sur une coupe les fibrilles des Insectes se présentent avec le même aspect et les mêmes rapports que celles des Vertébrés. Une seule objection me paraît pouvoir être faite à cette manière de voir. Chez le Vertébré, si loin qu’on pousse la dilacération, on n'arrive pas à diviser une fibrilleen deux, il semble que la fibrille cesse d’exister en tant qu’appareil auto- nome dès qu'on la divise; chez l’Insecte, au contraire, MM. Wagner, Engelman, Ranvier, Renaut, sont parvenus à dilacérer des fibrilles. Au point de vue physiologique et en con- sidérant la fibrille seulement comme un appareil de mouve- ment, cette distinction a sans doute la plus grandeimportance. Mais quand on cherche, comme Je le fais ici, simplement les homologies, on ne peut, je crois, se défendre d’assimiler ce cercle entouré de substance homogène qui représente la coupe dela fibrille de l’Insecte, au cercle qui représente la coupe dela fibrille du Vertébré; sauf à admettre que la fibrille qui chez les Vertébrés représente en même temps une unité morphologi- que et physiologique, se soit chez l’Insecte décomposée en plusieurs unités physiologiques, tout en restant dans son en- semble une unité morphologique. Les exemples de semblables substitutions sont trop fréquents pour que j'aie besoin d’insister davantage. / 90 H. VIALLANES. On peut résumer en deux mots le résultat des observations que je viens d'exposer. Les muscles jaunes de l’aile du Dy- tique sont composés par des faisceaux privés de sarcolemme et réduits à une seule colonnette. Il ne me reste plus que quelques détails à ajouter pour ter- miner la description des faisceaux musculaires de laile du - Dytique. Il est évident que cette substance homogène qui umit les fibrilles l’une à l’autre tout en les isolant, et qu’on met si facilement en évidence sur des coupes après avoir eu recours aux moyens fixateurs, n’a qu'une consistance semi-liquide chez l’animal vivant; ce qui explique que, durant la vie, leffort mécanique le plus minime suffise à isoler et à séparer les fibrilles les unes des autres. Mais après avoir eu recours à un agent fixateur énergique, alcool absolu ou acide osmique injecté dans la cavité géné- rale de l’animal vivant, il est facile de séparer les faisceaux les uns des autres, sans les décomposer en leurs fibrilles constitu- tives. Pour cela il est nécessaire de sectionner nettement avec un scalpel un muscle au voisinage de ses points d'insertion, l'isolement des faisceaux se fait ensuite facilement. Sur des pièces préparées de la sorte, on constate que les faisceaux ont tous une longueur égale à celle des muscles et qu’ainsi chacun d’eux s'étend d’un point d'insertion à l’autre. Après coloration par le carmin (1), il est facile d’étudier les noyaux qui sont situés à la surface du faisceau et dont j'ai plus haut indiqué l'aspect et la situation sur les coupes. Ces noyaux sont nombreux, assez régulièrement espacés et assez fortement allongés dans le sens longitudinal. Il paraît extrèmement probable que ces noyaux ne sont point à nu extérieurement, mais qu'ils sont environnés d’une aire de protoplasma enveloppant elle-même le faisceau; mais cette aire doit être très mince, car je n’ai pu la déceler. Quand on examine le faisceau isolé, on remarque qu’il ne présente pas la régularité de striation transversale qu'offri- (1) PI. V, fig, 8 ARTICLE N° 1; HISTOLÔGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. JM rait une colonnette de Vertébré, ni même un faisceau primitif, En employant un objectif à immersion on reconnaît facile- ment la cause de cette différence ; elle est due à ce que les stries de fibrilles voisines ne se répondent pas exactement. Cette discordance provient peul-être de ce que la matière unissant les fibrilles étant demi-liquide ou tout. au moins fort peu consistante chez l’animal vivant, les fibrilles auront été soumises, au moment de la fixation, à des tractions inégales. Nous verrons plus loin que dans les faisceaux musculaires des pattes, au contraire, où la substance unissante est bien plus solde, les stries de toutes les fibrilles se correspondent si bien, que dans son ensemble la colonnette semble consti- tuée par une pile de disques superposés. Je n’ai pot encore donné de détails sur les dispositions que présentent les faisceaux les uns par rapport aux autres; l'étude de cette disposition qui varie avec les régions d’une même masse musculaire, présente beaucoup d'intérêt et nous permettra de comprendre ce qui se passe chez la Mouche. En observant un musele sur une coupe transversale, nous remar- quons que dans sa partie inférieure (1), les faisceaux sont complètement isolés les uns des autres et séparés. Dans un autre point. de la coupe nous voyons des groupes de trois ou quatre faisceaux, qui se sont intimement accolés l’un à l’autre ; les points de contact sont marqués par une ligne de couleur sombre, dans laquelle sont plongés les noyaux des deux fais- ceaux voisins, mais on ne peut dire auquel des deux appar- tient en propre chacun de ces noyaux. Dans la partie supérieure de la coupe, chaque groupe se compose d’un grand nombre de faisceaux et présente une forme bien définie, Imaginons un tel groupe enveloppé par un sarcolemme, et nous aurons l’homologue complet d’un fais- ceau primitif de Vertébré; les lignes de contact renfermant les noyaux dans leur épaisseur représenteront les espaces qui, chez les Vertébrés, séparent l’une de l’autre les colonnettes. Cette observation nous prouve encore bien nettement que le () PL V, fig. 10. 99 H. VIALLANES. faisceau de l'aile de l’Insecte est l’homologue de la colonnette du Vertébré, puisqu'il faut que plusieurs faisceaux de l’aile se réunissent pour former un ensemble morphologiquement comparable au faisceau tout entier du Vertébré. Ayant décrit les muscles de l'aile du Dytique, j’étudierai maintenant ceux de la Mouche, qui présentent quelques parti- cularités fort intéressantes. Jai indiqué précédemment avec quelques détails leur disposition topographique, et l’on serap- pelle qu'ils constituent de chaque côté une grande masse interne aplatie latéralement, et marchant d’avant en arrière. À la partie moyenne du thorax, la masse interne se montre composée de six fibres (1) situées l’une au-dessous de l’autre. Chaque fibre est complètement entourée par une enveloppe de trachées fines et nombreuses qui l’isolent de toutes les par- ties voisines. Examinons maintenant une de ces fibres sous un faible grossissement et en coupe transversale (2). Afin que ma description soit facile à bien comprendre je rappellerai que je suppose l’animal dans sa situation ordinaire, le dos en haut, le ventre en bas. Sur une coupe transversale la fibre se montre avec un contour assez régulier et a dans son ensemble la forme d’un rectangle dont la grande base est transversale. Nous remarquons que la surface de la coupe se montre divisée en trois régions par une ligne zigzaguée sur son trajet, mais dont la forme générale rappelle celle de la lettre Y. La branche principale de l’Y naît de la partie moyenne du côté externe de la coupe et marche parallèlement aux côtés infé- rieur et supérieur, puis se divise en deux branches qui vont aboutir aux deux angles internes. L’existence de cette ligne nous permet de considérer trois régions dans la coupe, une supérieure, une inférieure et une interne. Chacune de ces régions est elle-même divisée en un certain nombre de tranches, par des lignes qui, partant des branches de lY, vont aboutir (1) Je crois utile de dire que j’emploie le mot fibre dans son sens le plus général et afin de ne rien préjuger sur les homologies. (2) PI. V, fig. 14. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 93 aux bords de la coupe. Ges lignes sont régulièrement espacées et dans chaque région parallèles entre elles. Celles des régions supérieure et inférieure sont verticales, celles de la région interne sont horizontales. Les lignes qui naissent ainsi de chaque côté des branches de l’Y, alternent entre elles, chacune d'elles naissant au sommet d’un de ces petits zigzags que les branches de l’Y décrivent dans leur trajet. De la sorte la coupe se trouve divisée en un certain nombre de polygones à cinq pans; on peut se représenter la forme de chacun d’eux, en ima- ginant un rectangle assez allongé, dont une des petites bases serait composée de deux côtés se coupant à angle aigu et qui, par conséquent, serait terminé par un coin. Dans tous les poly- sones, la petite base opposée au coin est extérieure; comme cette base est toujours un peu arrondie, le contour général de la fibre est festonné, chaque feston répondant à la petite base d’un des polygones. Par ses grandes bases, chaque polygone est en contact avec les parties correspondantes de ses deux voisins. Par chacun des côtés de son coin, chaque polygone est en contact avec les côtés correspondants de deux polygones d'une autre région. On comprend alors que la ligne zigzaguée à forme d’Y n’est autre chose que la ligne qui passe par les côtés des coins de tous Les polygones. On corrigera ce que cette description a de fatalement schématique en examinant la figure (1) qui en apprendra plus que tout ce que je pourrais dire. | Ce qu'il y a de plus important à retenir, c’est que chaque fibre se montre sur une coupe divisée en un certain nombre de polygones qui tous ont un côté à l'extérieur : c’est l’ensemble de ces côtés extérieurs qui constitue le contour général de la coupe. Si maintenant on emploie un objectif plus puissant (2), on remarque que ces lignes qui séparent ainsi la coupe en champs polygonaux, sont dues à ce qu’il existe un léger interstice entre les polygones. Dans cet interstice, nous trouvons d’assez nom- (1) PL. V, fig. 14. CPE ie dt. ANN. SC. NAT., ZOOL., AOUT 1882. XIN.. Te ARTINe de 94 LH. VIALLANES. breux noyaux. Chacun de ceux-ci étant aussi large que lin- terstice lui-même, on ne peut dire s’il appartient à l’un ou à l’autre des polygones que l’interstice sépare. En examinant le contour extérieur de la coupe, je n’ai jamais rencontré de noyaux appliqués sur les côtés extérieurs des polygones. Si maintenant, avec un objectif à immersion (1), nous exa- minons la surface de chaque polygone, nous remarquons que cette surface se montre comme semée de petits points bril- lants très régulièrement disposés et se détachant sur un fond homogène moins réfringent. Chacun de ces points répond à la coupe d’une fibrille, mais cette formation est ie1 bien plus petite que chez le Dytique, aussi ne puis-je donner sa mesure précise; Je puis seulement affirmer que son diamètre est inférieur à 0"®,001. La sub- stance qui unit et sépare les fibrilles constitutives de chaque polygone est parfaitement homogène et continue. Ainsi chaque polygone répond bien à la coupe d’une formation homologue à la colonnette du Vertébré. Nous voyons donc que chez la Mouche comme chez le Dytique, la même unité morphologique, la colonnette, entre dans la constitution du tissu musculaire. Mais dans le second cas, ces unités composantes restent isolées les unes des autres, si bien que chaque faisceau se trouve représenté par une seule colonnette; dans le premier, au contraire, plusieurs de ces unités se réunissent, se soudent pour former des faisceaux composés de plusieurs colonnettes, lesquels sont alors homo- logues aux faisceaux des Vertébrés, Chez la Mouche, cette disposition des colonnettes en groupe- ments définis, a déterminé, entre ces colonnettes, une adhé- rence assez grande. Si, après avoir fixé les muscles du thorax par une injection d'alcool absolu, nous isolons une fibre et qu'ensuite nous essayons de séparer les unes des autres les colonnettes qui la constituent, nous n’arrivons par la dila- cération qu'a la décomposer en ses fibrilles constitutives. GPIANE he Me ARTICLE N° f. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 95 N'ayant point réussi chez la Mouche à séparer les colonnettes les unes des autres pour examiner leur surface, 1l était néces- saire d’avox recours à des coupes longitudinales. Parmi celles-ci, les plus instructives sont celles qui sont pratiquées selon un plan horizontal (l’animal étant supposé dans sa posi- tion naturelle), car de la sorte on sectionne sous une même incidence toutes les colonnettes de la région supérieure ou inférieure d’une même fibre. . Sur une préparation obtenue dans ces conditions (1), chaque colonnette se présente comme une bande à bords parallèles et d'aspect finement fibrillaire, les bandes voisines sont séparées l’une de l’autre par un léger interstice linéaire : c’est l’interstice intercolumnaire. Dans cet interstice sont plongés les noyaux : ceux-ci sont allongés dans le sens longitudinal, ils sont régu- lièrement espacés, et comme chacun d’eux est aussi large et même souvent un peu plus large que l'interstice, chaque colonnette est séparée de sa voisine par une simple file de noyaux. J’ai indiqué plus haut que chaque fibre, ou pour mieux dire chaque faisceau était entouré par une quantité considérable de trachées qui lui constituent une véritable enveloppe. Mais il est à noter que jamais une de ces trachées, ni grosse ni petite, ne pénètre dans son intérieur, Jamais Je n’en ai rencontré dans les espaces intercolumnaires, et à plus forte raison jamais dans l’intérieur des colonnettes ; c’est d’ailleurs ce qui avait lieu chez le Dytique. Je suis, je crois, le premier à donner ces détails sur la structure des muscles de l’aile des Insectes, et cette étude nous montre que : 1° La fibrille de l'aile de l’Insecte est l’homoloque de la fibrille du muscle du Vertébré, bien que chez l’Insecte elle puisse se décomposer en unités plus petites, alors que chez le Vertébré elle est indivisible. 2 Chez l’Insecte comme chez le Vertébré, les fibrilles se pré- sentent en coupe comme des cercles; dans l’un et l'autre cas, d) PL V, fig. 16. 96 M. VIALLANES. elles sont réunies en paquets par une substance interfibrillaire homogène et continue. Ces réunions de fibrilles qu'on appelle des colonnettes, ne sont pénétrées, ni par le protoplasma, ni par les noyaux qui restent en dehors d'elles. 3° Chez le Dytique, ces colonnettes restent isolées et inde- pendantes les unes des autres; chez la Mouche, an contraire, plusieurs colonnettes s’accolent ensemble et modifient leur forme pour constituer des groupements définis . 4° On peut exprimer les rapports homologiques qui existent entre les muscles de l'aile de la Mouche, du Dytique et ceux du Vertébré en disant : Chez le Dytique, le faisceau primitif est dépourvu de sarco- lemme et sa masse contractile est réduite à une seule colonnette. Chez la Mouche, le faisceau primitif est dépourvu de sarco- lemme else masse contractile est formée de plusieurs colonnettes. Chez le Vertébré, le faisceau primitif est pourvu d’un sarco- lemme et sa masse contractile est formée de plusieurs colon- nettes. $ 3. — Muscles des pattes chez l’imago. Les muscles des pattes (1), et nous décrivonsen même temps tous les muscles autres que ceux de Paile, sont assez connus ; etje n'ai que très peu de choses à ajouter aux descriptions de M. Leydig, de M. Weismann et de M. Schäfer. Chaque faisceau musculaire des pattesse présente commeun cylindre desubstancecontractile,creusé d’un canal central étroit également cylindrique. Généralement la substance contractile est révêtue d’un sarcolemme immédiatement appliqué à sa surface et qui paraît lui adhérer intimement, surtout au ni- veau des disques minces, comme M. Frédéricq l’a remarqué. Lesarcolemme est toujours très mince, généralement difficile à déceler, souvent même il paraît faire défaut, car quelque (1) PE V, fig. 1, 2, 3, 9, 6. Les muscles appartenant à ce type se rencontrent non seulement chez les adultes, mais aussi dans certains organes des larves, dans la queue de celles d'Eristalis, par exemple, où ils ont été découverts par M. Batelli (Ann. and Magazin of Nat. history, 1878). ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 97 procédé qu'on emploie, on n'en peut découvrir de trace. La substance contracüle présente la striation transversale caractéristique avec une nelielté admirable, chaque strie tra- verse toute la largeur du faisceau et n’est nulle part inter- rompue ; ce qui est dù à ce que les disques des fibnilles juxta- posées se correspondent exactement. Si nous examinons le canal central, nous remarquons qu'il est rempli d’un protoplasma plus ou moins granuleux, dans lequel sont plongés les noyaux musculaires. Ceux-ci sont tantôt aussi larges que le calibre même du canal, ils sont alors disposés bout à bout sur une seule rangée (1). D’autres fois ils sont beaucoup plus petits, alors ils ne sont pas disposés avec cette régularité (2), et à un même niveau, on en peut trouver plusieurs. | Tantôt les noyaux musculaires sont nombreux et en contact les uns avec les autres, d’autres fois ils sont très espacés. Pour étudier les faisceaux en coupes transversales, il con- vient surtout de s'adresser à la masse musculaire qui s'étend dans le thorax directement d’arrière en avant et pénètre dans la tête. L'étude de ces coupes (3) nous apprend que la taille des faisceaux est très variable, que quelques-uns sont de dimensions extrêmement réduites. Tantôt les faisceaux d’un même muscle, sont assez écartés les uns des autres, alors leur section est sensiblement circulaire ; d’autres fois ils sont très serrés, alors ils se compriment les uns les autres et prennent par pression réciproque un contour hexagonal (4). Quand on examine une section transversale d’un faisceau avec un objectif puissant, on retrouve l’image décrite par M: Schäfer. La masse contractile se montre comme une substance homogène transparente, parfaitement continue et parsemée de points brillants très petits, disposés avec une grande régularité. Chacun de ces points répond à la coupe 98 H. VIALLANES. d’une fibrille ; mais quelque puissant que soit l'objectif au- quel on a recours, on ne voit jamais dans la substance con- tractile, ni fentes, ni lignes pouvant faire supposer qu’elle est cloisonnée par in protoplasma. Cette observationnousforce à déré lefaisceau des pattes comme représentant une seule colonnette, puisque nulle part sa substance contractile n’estinterrompue par du protoplasma. Il diffère done du faisceau de l’aile du Dytique, seulement parce qu'il possède un sarcolemme et parce que ses noyaux, au lieu d’être périphériques, sont centraux. CONCLUSIONS. 4° Les fibrilles qui entrent dans la composition du tissu musculaire des Insectes, sont les homoloques des fibrilles des Vertébrés, bien que dans quelques cas (muscles de l’aile) elles puissent se décomposer en parties plus petites (fibricules), alors que chez les Vertébrés, elles sont toujours indivisibles. 2 Chez l’Insecte comme chez le Vertébré, les fibrilles se réunissent loujours en colonnettes, c'est-à-dire qu’elles se sroupent en paquets distincts, où elles sont unies les unes aux autres par une substance homogène et continue, dans laquelle ne pénètrent jamais mi le protoplasma ni les noyaux. 3° Chez le Vertébré, un grand nombre de colonnettes sépa- rées les unes des autres par du protoplasma et des noyaux se réunissent sous uneenveloppe commune, le sarcolemme, pour constituer le faisceau primitif. Chez l’Insecte, le groupement des colonnettes ne sefait point toujours ainsi. On peut exprimer de la manière suivante, les différences et les ressemblances qui existent entre les diffé- rentes sortes de muscles des Insectes et le muscle des Vertébrés. a. Chez la larve le faisceau primitif est constitué exactement comme celui des Vertébrés. b. Dans les muscles de l'aile de la Mouche, le faisceau pri- milif est dépourvu de sarcolemme et composé seulement d’un petit nombre de colonnettes. ARTICLE N° f{. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 99 c. Dans les muscles de l'aile du Dytique le faisceau primitif est dépourvu de sarcolemme et réduit à une seule colonnette. d. Dans les muscles des pattes, le faisceau est pourvu d’un sarcolemme souvent à peine développé et réduit à une seule colonnette, CHAPITRE VI TERMINAISONS NERVEUSES MOTRICES DANS LES MUSCLES STRIÉS VOLONTAIRES. Valentin et Emmert, les premiers, s’occupèrent de l’étude du mode de terminaison des nerfs dans les muscles striés; ils crurent pouvoir affirmer que le nerf se terminait en embras- sant la fibre musculaire par une anse fermée. Cette manière de voir, s’accordant bien avec les pop physiologiques alors régnantes, fut naturellement admise, bien qu'elle ne reposât sur aucun fait solidement établi, mais elle ne devait point résister longtemps à l'observation rigoureuse des faits. Doyère (1) (1840), en étudiant le Wilnesium tardigradum, découvre que chez cet animal le nerf dépourvu d’enveloppe s’unit à la fibre musculaire, elle aussi dépourvue d’enveloppe, par un renflement conique finement granuleux qui semble comme coulé sur la fibre musculaire, et qu'ainsi la substance nerveuse et la substance contractile se trouvent en contact intime et immédiat. M. de Quatrefages (2) (1843) observe chez les Mollusques nus (Eolidina paradoxa) et chez les Rotateurs (Notommata et Hydatina) la même disposition que Doyère avait découverte chez les Tardigrades. M. Aôlliker (3) fait sur la larve de Chironomus une observa- tion qui vient donner un nouveau caractère de généralité à la (1) Doyère, Mémoire sur les Tardigrades (Ann. sc. nat., 2 série, p. 346, pl. XVIL fig. 1, 4, 1840). (2) De Quatrefages, Mémoire sur l’Eolidina “à (Ann. sc. nat., 2 série, . ns p. 299, pl. IL, fig. 12). (3) Kôlliker, Mikroskopische Anatomie, vol, I, p. 245. 100 . H. VIALLANES. découverte de Doyère; il voit un nerf se diviser en deux branches à la manière d’une fourche et s'appliquer à la surface de la fibre musculaire après s’être renflé à ses extré- mités. M. Leydig (1) (1851) observe que chez la larve de Corethra, le nerf va s’appliquer sur la fibre musculaire en se terminant : par un renflement conique granuleux et renfermant un noyau dans son intérieur. Meissner (2) (1854), Weld (5) (1855) étendent aux Néma- todes la découverte de Doyère. Malgré les travaux que je viens de citer, l’ancienne théorie de la terminaison en anse continuait à être généralement admise et enseignée dans la plupart des traités d'anatomie, quand une importante découverte due à M. Rouget vint la ren- verser à Jamais. M. Rouget (4) (1862), étudiant les Reptiles et les Vertébrés à sang chaud, observa que le nerf vient se fixer au sarcolemme par son extrémité, et qu'à ce miveau il existe sur le faisceau primitif une saillie conique constituée par une masse granu- leuse pourvue de noyaux et d’un aspect semblable à l’éminence que Doyère avait signalée. Pour M. Rouget, la gaine du nerf se continue avec le sarcolemme; la masse granuleuse qu’il nomme plaque terminale ne serait qu'un épanouissement en plaque du cylindre-axe appliqué à la surface de la substance contractile. Les noyaux qui se montrent dans cette plaque et à sa surface sont pour lui les analogues de ceux de la gaine du nerf. Du jour où la découverte de M. Rouget fut connue, des recherches sur le même sujet parurent en si grand nombre, (1) Leydig, Histologisches und Anatomisches ueber die Larve der Corethra plumicornis (Zeitsch. f. wiss. Zool., t. IL, 1851, p. 435, Taf. XVI). (2) Meissner, Beiträge zur Anatomie und Physiologie von Mermis albicans (Zeitschrift f. zoolog., vol. V, p. 234, 1854). (3) Weld, Ueber den Ner Hi der Nematodem(Wiener Sitzungsberichi, t. XVIII, p. 298, 1855). (4) Rouget, Note sur la terminaison des nerfs moteurs dans les muscles chez les Reptiles, les Oiseaux et les Mammifères (Comptes rendus Acad. des sc., t. IV, p. 548-551, 29 septembre 1862). ARTICLE N° f{. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 401 que le cadre de ce travail m'interdit de les analyser toutes ; aussi me contenterai-je de rendre compte de celles qui ont trait au mode de terminaison des nerfs dans les muscles des Insectes. M. Margo (1) (1862), observant les muscles du Dvtique, voit le nerf se mettre en rapport avec la fibre musculaire par l'in- termédiaire d’une éminence analogue au cône de Dovère. Dans cette éminence, formée d’une substance granuleuse, il re- marque un noyau. De cette substance granuleuse partiraient des files de noyaux unis entre eux par des prolongements et appliqués sur la substance contractile. Pour Margo, Féminence de Doyère serait une cellule nerveuse intramusculaire pour- vue de prolongements représentés par les files de noyaux dont il vient d’être parlé. M. Rouget (2) (1863) étudie les muscles de la Locusta viri- dissima et observe les faits suivants : « Les fibres nerveuses se terminent sur les faisceaux primitifs dans certains points où elles n’ont aucun rapport avec les noyaux situés à la surface ou à l'intérieur des faisceaux. La gaine nerveuse se soude au sarcolemme, et le contenu de substance nerveuse semble s’in- terrompre et cesser brusquement en s’accolant à la surface des fibrilles striées. » Pour M. Rouget, les noyaux anastomosés de Margo n’ont aucun rapport avec la substance nerveuse, ce sont simplement des noyaux musculaires: M. T. W. Engelmann (3) (1863) prend pour objet d'étude les muscles de l’armure génitale de deux espèces de Coléoptères (Trichodes alvearius et T. Apiarius). Les faisceaux musculaires \-imitfs sont cylindriques, pourvus d’un sarcolemme ; il eaiste des noyaux, les uns disposés en une file centrale, les autres rares et situés sans ordre sous le sarcolemme, l’émi- (1) Margo, Ueber die Endigung der Nerven in der quergestreiften Muskel- substanz. Pesth, 1862. (2) Rouget, Mémoire sur la terminaison des nerfs moteurs (Journal de la physiologie, t. V, p. 591). (3) Engelmann, Untersuchungen über den cons von Nerv und Muskelfaser (Jenaische Zeitschrift für Medic. und Naturwissen, vol. I, p. 922-324, Taf. VIT, 1863). 102 HI. VIALLANES. nence de Doyère est une masse granuleuse directement appli- quée sur la substance contractile, le cylindre-axe disparait en pénétrant au sommet de l’éminence. Dans lPéminence on observe deux sortes de noyaux. Les premiers sont à double contour et pourvus d’un nucléole. Engelmann les assimile aux noyaux musculaires; les seconds ont un contour simple et pas de nucléoles ; 1l les assimile aux noyaux de la gaine du nerf. M. Waldeyer (1) (1863) étudie également des faisceaux pri- mitifs à file centrale de noyaux (Dytiscus, Hydrophilus); ses observations diffèrent de celle d'Engelmann en ce qu'il ne remarque aucune formation nucléaire au sein de l’éminence de Doyère. M. Rouget (2) (1862) fait une communication importante que Je cite presque textuellement. Le cône terminal déerit par Doyère chez les Tardigrades, par M. de Quatrefages chez lEo- lidina, existe chez les Insectes (Chironomus, Corethra), mais n'est pas la vraie terminaison du nerf. Le cône est dû au soulè- vement du sarcolemme par la fibre nerveuse; celle-ci, dans le point correspondant au sommet du cône, se bifurque en deux filaments qui s'écartent pour gagner la surface du faisceau con- tractile au niveau de la base du cône. La substance demi-fluide granuleuse interposée au sarcolemme et à la masse contractile partout chez les Articulés, est accumulée en plus ou moins grande quantité dans le point où la gaine du faisceau soulevé forme la gaine du cône. Mais là comme dans toute l’étendue du faisceau musculaire, cette substance granuleuse est complètement étrangère aux éléments nerveux; 1l en est de même des noyaux qui se rencontrent au niveau du cône de Dovyère, comme dans toutes les autres régions du faisceau musculaire, les fibrilles résultant de la bifurca- tion de la fibre terminale au sommet du cône sont les seuls (1) Waldeyer, Untersuchungen uber d. Ursprung u. d. Verlauf d. Axen- cylinders bei Wirbellosen und Wirbelthiere sowie uber dessen Endverhalthen in d. quergestreiften Muskelfasérn (Zeüschrift für rationnelle Medicin, t. XX p. 193, 1863). (2) Rouget, Notes sur la terminaison des nerfs moteurs chez les Crustacés et les Insectes (Comptes rendus Acad. des sc., t. LX, p. 850, 1869). ARTICLE N° 1, HISTOLOGIE ET. DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 103 éléments nerveux; celles-ci traversent la substance gra- nuleuse, et après avoir atteint la surface du faisceau, tantôt s’yterminent presqueimmédiatement (Crustacés), tantôt avant de se terminer elles cheminent en sens opposé l’une à l’autre en s'appliquant à la surface des fibrilles contractiles dans l’é- tendue de trois stries transversales. Chez les Coléoptères prin- cipalement, leur extrémité est légèrement eflilée; elles ne présentent n1 plaques, ni noyaux, ni substance finement gra- nuleuse. M. Maddoæ (1) (1867) observe le cône de Doyère à la surface de la fibre musculaire d’une larve de Diptère (Tipula cristal- hina), mais 1l ne lui semble pas que la substance du cône soit en contact avec la substance contractile. M. Trinchese (2) (1867) prend pour objet d’étude le Luciola italica et l'Appis mellifica : les faisceaux primitifs qu’il observe sont des faisceaux à file centrale de noyaux; l’éminence de Doyère, toujours fort petite, se montre comme formée d’une substance granuleuse en contact direct avec la masse contrac- tile : elle renferme de rares noyaux et quelquefois même enes t dépourvue. M. Kühne (3) (1871) décrit de la façon suivante la termi- naison nerveuse motrice des Insectes qu’il à principalement observée chez l'Hydrophile. Chaquefibre musculaire reçoit un grand nombre de nerfs. Chaque nerf atteint une sorte de colline (l’éminence de Doyère) en entonnoir dont la pointe ré- pond toujours au point d'entrée du nerf, La gaine nerveuse s’unit au sarcolemme, le cylindre-axe pénètre dans l’éminence par le sommet, puis se divise en deux branches fortement di- vergentes qui peuvent se suivre un peu dans l’intérieur de l’é- (1) Maddox, On the apparent relation of the nerves to the muscular struc- tures in the aquatic larva of Tipula cristallina (Degecr) (Proceedings of the Royal Society of London, vol. XVI, p. 61, 1867). ) (2) Trinchese, Mémoire sur la terminaison périphérique des nerfs moteurs dans la série animale (Journal de l'anatomie et de la physiologie, p. 485, pl. XVII-XXI, 1867). (3) W. Kübne, Nero und Muskelfaser in Stricker’s Handbuch, t. 1, p. 145 fig. 34. 404 IN. VIALLANES. minence sans qu’il soit toutefois possible d’en apercevoir la fin. L’éminence est toujours située sur une ligne de substance gra- nuleuse mêlée de noyaux ,interposée à la substance contractile et au sarcolemme. M. Klein (1) (1873) répète les observations de Kühne sur le Dytique et l’'Hydrophile; les deux branches de bifureation du cylindre-axe, que Kühne n'avait pu suivre, lui paraissent se terminer chacune par une extrémité arrondie. M. Arndt (2) (1873) consacre un chapitre de son mémoire à l'étude du mode de terminaison des nerfs moteurs dans les muscles des Insectes. Pour lui, le cylindre-axe disparait après avoir atteint le cône de Doyère. Gelui-ei est formé par une masse protoplasmique granuleuse contenant des noyaux et qui serait en rapport intime avec d’autres noyaux, unisentre eux par une substance! protoplasmique analogue à celle du cône, et dis- posés en longues files plus ou moins parallèles, à la surface et au sein de la masse contractile. M. Ranvier (3) (1878) étudie la terminaison nerveuse mo- trice dans les muscles de la patte de l’Hydrophile et observe les faits suivants: « Lorsqu'elle arrive sur l’éminence termi- nale, la fibre nerveuse s’élargit, sa gaine se confond avec le sarcolemme, tandis que le cylindre-axe se décompose en ses fibrilles constitutives. Celles-ci s’écartent les unes des autres et se répandent à la surface d’un cône de matière granuleuse, parfois muni d’un noyau et qui se confond avec une couche protoplasmique extrèmement mince étendue sur toute la surface du faisceau musculaire; on peut suivre les fibrilles eylindraxiles jusqu’à la base du cône, mais il n’est pas possible de les distinguer au delà. La masse granuleuse de l’éminence ne saurait donc être considérée Li] (1) Klein, Handbook for the physiological laboratory, p. 84. (2) Arndt, Untersuchungen uber die Endigungen der Nerven in den quer- gestreiften Muskelfasern (Archiv für mikroskopische Anatomie, vol. IX, 1873, p- 480). (3) Ranvier, Leçons sur l'histologie du systeme nerveux, t. I, p. 275 et suivantes. AMRDICHE NE HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 105 comme un épanouissement du cylindre-axe. À la base de l’é- minence il existe le plus souvent, comme Kühne et Margo l’ont indiqué, des noyaux en assez grande abondance, mais leur nombre n’est pas constant, ils peuvent même manquer complètement. > M. Fœttinger (1) (1880) a fait, sur plusieurs espèces d'In- sectes, des recherches qui confirment en tout point l’exacti- tude des observations de M. Ranvier; mais il va plus loin que ce dermer et voit les fibrilles nc tati du cylindre-axe, qui se sont dissociées au sommet du cône de Doyère, aller abou- tir chacune à un disque intermédiaire et se terminer par con- séquent en se fusionnant complètement avee la substance con- tractile. Telest le résumé suceinet des travaux publiés jusqu’à ce jour sur le mode de terminaison des nerfs dans les museles striés des Insectes. En comparant les différents travaux dont je viens de donner l’analyse, il est facile d’embrasser d’un coup d'œil les progrès accomplis et de se rendre un compte exact des points qui restent encore douteux. Pour ce qui a trait à la disposition anatomique générale, nous remarquerons que tous les auteurs sont d'accord pour affirmer l'exactitude des faits suivants. Les fibres musculaires présentent à leur surface des saillies coniques (cône, colline, éminence de Doyère). Le nerfatteint le sommet de l’éminence, sa gaine se confond et se continue avec le sarcolemme, si bien que l’éminence présente une enveloppe en forme d’entonnoir, dont la base se continue avec le sarcolemme, le sommet avec la gaine du nerf. Quant au contenu de l’éminence, c’est pour tous les auteurs une masse granuleuse protoplasmique. Les anciens observateurs considéraient l'existence de noyaux au sein de cette masse comme un faitessentiel, mais les recherches de Waldever, Trinchese, Ranvier, Fœttinger, montrent que ces formations manquent souvent. Quant aux relations qui existent entre la masse granuleuse (1) Fœttinger, Sur les terminaisons des nerfs dans les muscles des Insectes (Archives de biologie, t. 1, p. 276, pl. 10, 1890). 106 M. VEALLANES. et la substance contractile, les auteurs sont, à l'exception de Maddox (1),tous d'accord pour admettre que la masse granu- leuse se trouve directement en contact avec la substance contractile et également en rapport direct avec la mince couche protoplasmique située entre la substance contractile et le sar- colemme; dans cette couche protoplasmique peuvent exister des noyaux, quelquefois disposés sous forme de trainées dont quelques-unes paraissent en rapport plus ou moins étroit avec la masse granuleuse qui remplit l’éminence de Doyère. Quant à ce qui concerne la destinée dernière du cylindre-axe, nos connaissances ont fait beaucoup de progrès depuis les travaux de Margo, Waldeyer, Engelmann, Arndt; ces auteurs n’avaient point suivi le cylindre-axe au delà du sommet de l’éminence de Doyère, ils considéraient la matière granuleuse qui remplit cette éminence comme la continuation anatomique el physio- logique du conducteur nerveux. Ainsi, pour eux, le cylindre- axe perdant toute sa structure fibrillaire en arrivant au sommet se résoudrait pour ainsi dire en cette masse granuleuse qui remplit l’éminence. Mais cette manière de voir ne devait point résister longtemps à l'emploi de méthodes d'investigation plus parfaites et mieux appropriées. M. Rouget, le premier, montra que le cylindre- axe se divise en deux branches dans l'intérieur de l’éminence de Doyère, et que ces deux branches vont ensuite s'appliquer à la surface même de la substance contractile. Ainsi, la masse granuleuse qui remplit l’éminence perdait l'importance que lui avaient attribuée les précédents observateurs. Kühne, puis Klein, virent, comme M. Rouget, le cylindre-axe se diviser en deux branches dans l’intérieur de l’éminence, mais ils ne purent suivre ces branches jusqu’à la substance contractile. MM. Ranvier et Fœttinger sont arrivés à des conclusions qui diffèrent de celles deleurs prédécesseurs : pour eux, le cylindre- axe se décompose en ses fibrilles constitutives dès son entrée au sommet de l’éminence; ces fibrilles se dirigent vers la base (1) Je montrerai plus loin que l'opinion de Maddox est basée sur une obser- vation fort exacte, quoique incomplète. ARTICLE N° 1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 107 du cône. Le premier de ces observateurs ne les suivit pas plus loin; le second vit chacune d'elles se jeter dans un disque intermédiaire. La divergence des auteurs sur le sort du cylindre-axe me parait tenir surtout à ce que les différents observateurs qui se sont occupés de la question, se sont adressés à des objets d'étude différents. Ainsi M. Ranvier et M. Fœættinger étudiaient des fibres musculaires d'insectes adultes, tandis qu’au contraire M. Rouget s'était adressé à des larves. Précédemment j'ai montré combien la fibre musculaire de la larve était différente de celle de l'adulte, c’est une autre espèce histologique. Tandis que la fibre musculaire de la larve répond dans son entier à un faisceau primitif de Vertébrés, la fibre musculaire de l’in- secte adulte ne répond qu’à une colonnette, et ainsi que le montreront mes propres recherches, cette différence de com- position imprime des modifications profondes à la constitution du cône de Doyère. Mes observations sur les terminaisons nerveuses motrices ont été faites sur les larves et sur les adultes, J'ai étudié à cet égard les larves de Sératiomys chamaæleon, Tipula gigantea, Eristalis, et l'Hydrophile à l’état adulte. | \ $ 1. — Terminaisons nerveuses motrices dans les muscles striés de la larve de Stratiomys chameæleon. J'ai décrit plus haut avec détail la structure des muscles de cet animal, je rappellerai simplement qu’ils sont constitués par des faisceaux primitifs en tous points comparables aux faisceaux primitifs des Vertébrés, c’est-à-dire pourvus d’un sarcolemme et formés par la réunion de colonnettes séparées les unes des autres par des cloisons de protoplasma. À la des- cription que j'ai donnée précédemment, j'ajouterai seulement quelques détails sur les trachées qui se distribuent aux fibres musculaires et qu’il est nécessaire de bien connaitre avant d'aborder l’étude des terminaisons nerveuses. A la surface du sarcolemme circulent de fines trachées, qui 108 I. VIALLANES. présentent la disposition suivante (pl. VF, fig. 2) : Un tronc trachéen aborde le sarcolemme, puis se divise Immédiatement en un certain nombre de trachéoles disposées en pinceau. Chacune de ces trachéoles est composée de son tube chitineux, revêtu extérieurement d’une mince couche protoplasmique; cette couche se continue sur le tronc trachéen, et au point d’où les trachéoles se détachent du tronc principal, elle pré- sente une épaisseur plus grande et renferme un gros noyau arrondi (pl. VE, fig. 2, / pourvu d’un nucléole et mesurant 0"",092. Les trachées sont situées à la surface ou dans Pépais- seur du sarcolemme, mais elles ne pénètrent point sous cette enveloppe, ainsi qu’on peut s’en assurer en traitant la pièce par l'acide acélique; dans ce cas, en effet, le sarcolemme se soulevant entraine avec lui tous les rameaux aérifères. Ces tra- chées ne partagent nullement la distribution des nerfs, comme on l’observera dans la larve du Tipula. La meilleure méthode pour se rendre compte du mode de distribution des nerfs dans la musculature, et de la manière dont ils se terminent dans les faisceaux primitifs, est celle qui consiste à virer par le chlorure d’or des pièces au préalable fixées par l’osmium. J’emprunte cette manière d'opérer à M. Ranvier, en la modifiant quelque peu. On mjecte dans la cavité générale de la larve une solution d'acide osmique à 1/1400, et l’on maintient la pression pendant quelques minutes. Les museles se trouvant alors fixés en extension, on fend l’en- veloppe dermo-musculaire de l’animal, on l’étale, on la lave à l’eau distillée, on la plonge pendant dix minutes dans l’acide formique au 1/4, puis on la laisse séjourner pendant douze heures à l’obscurité dans une solution de chlorure d’or à 1/5000. La réduction s’opère ensuite à la lumière dans lacide formique au 1/#. La musculature se détache alors facilement par grands lambeaux qu’on monte dans la glycérine, soit en- tiers, soit après les avoir dilacérés. Ces pièces, comme la plu- part de celles qui sont colorées par l'or, se conservent mal ; pendant quelques jours elles s’améliorent, plus tard elles prennent un aspect granuleux, et l'élection devient diffuse. ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 109 Pour que la méthode que je viens d'indiquer donne de bons résultats, il faut que le contact avec l’osmium ait été de courte durée et que la réduction s’opère à la lumière vive. Sur une pièce préparée comme Je viens de l'indiquer, il est facile d'observer à un faible grossissement le mode de distribu- tion des nerfs (pl. VE, fig. 2, ») qui circulent en grande abon- dânce à face interne de la musculature. Ces nerfs s’anasto- mosent très fréquemment entre eux et forment de la sorte un réseau assez irrégulier, dont les branches ultimes viennent se terminer dans les faisceaux primitifs; jamais sur le trajet des nerfs qui constituent ce réseau on ne rencontre de formations ganglionnaires, comme nous avons vu qu'il en existe dans les plexus nerveux dont les branches dernières vont se terminer dans les muscles striés involontaires du tube digestif. Les nerfs (pl. VE, fig. 2, n) qui se rendent aux faisceaux pri- mitifs de la larve de Siratiomys se montrent comme des fila- ments colorés en violet, présentant une striation longitudinale franchement accusée; leur contour extérieur est bien net, mais je n'ai pu parvenir à le voir double. A la surface des nerfs se montrent en assez grand nombre des noyaux aplatis de forme ovalaire fortement colorés en violet par l’or et présentant un ou plus souvent deux nucléoles dont la coloration est encore plus foncée. Ces noyaux mesurent en moyenne 0"",011 dans leur grand diamètre. Nous reconnaissons immédiatement que nous avons affaire à cette variété de conducteur nerveux si répandues chez les larves d'insectes et dans lesquelles la gaine du cylindre se trouve réduite à une telle minceur qu’on ne peut la distinguer par un double contour, tandis que ses noyaux sont demeurés avec tous leurs caractères. Dans le cas qui nous occupe, je dé- signerai donc les noyaux situés à la périphérie du cylindre sous le nom de noyaux de la gaine du nerf. Le nerf étant décrit et ses diverses parties désignées, voyons comment cet organe va se mettre en rapport avec l’élément contractile. En examinant un faisceau primitif fraîchement dilacéré, on ANN. SC. NAT., ZOOL., AOUT 1882. XIV. 8. — ART. N. 1. 110 H. VIALLANES. ne tarde pas à apercevoir sur les bords de petites élevures coniques mesurant en moyenne 0"",02 de hauteur. Ces éle- vures sont nombreuses, on peut en rencontrer environ quatre à cinq pour chaque faisceau primitif, chacune d’elles reçoit un filet nerveux à son sommet, nous avons donc affaire à une for- mation analogue au cône de Doyère et c’estsous ce nom que Je la désignerai. Si maintenant nous faisons arriver sous la lamelle une solution d’acide acétique (pl. VI, fig. 4) à 1 p.100, puis ensuite une solution aqueuse de vert de méthyle, nous ne tarderons pas à voir la préparation se modifier pro- fondément; mais ces modifications s’accomplissent assez len- tement pour qu'il soit facile de les suivre pas à pas. Sous l'influence de l'acide acétique, le sarcolemme aban- donne la masse contractile sur laquelle 1l était appliqué, le cône de Doyère se soulève aussi et exagère ses dimensions. On voit alors de la manière la plus nette que l’élevure qui consti- tue le cône de Doyère est due à ce que à ce niveau le sarco- lemme (pl. VE, fig. 1, s) est soulevé. On voit le contour exté- rieur du sarcolemme se continuer sans ligne de démarcation avec le contour extérieur du nerf qui a atteint le sommet du cône. Le nerf (pl. VI, fig. 4,7) pénètre dans l’intérieur du cône et immédiatement après son entrée se divise en deux branches. Ces deux branches étaient avant l’action de l’acide acétique appliquées contre la substance contractile, mais sous l'influence du réactif le sommet de la colline s’élevant, elles ont été comme tiraillées et décollées, si bien qu’elles ne sont plus attachées à la masse contractile que par leur partie qui est la plus éloignée du sommet du cône. De ces deux branches principales on voit naître un certain nombre de rameaux se- condaires, mais qu'il n’est pas possible de suivre bien loin. Cette observation nous montre déjà de la manière la plus nette que le nerf ayant pénétré sous le sarcolemme se divise immé- diatement en deux branches, qui elles-mêmes émettent des rameaux secondaires, et qu’ainsi il existe sous le sarcolemme une véritable arborisation nerveuse. Sous l'influence du vert de méthyle, les noyaux musculaires ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET. DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 111 et ceux de la gaine du nerf se montrent appliqués à la surface des branches de l’arborisation. Ni entre les branches de l’ar- borisation, ni dans l’intérieur du cône il n’existe aucun amas de noyaux ou de substance granuleuse ; Pélevure qui constitue le cône de Doyère est donc uniquement due à ce que le sarco- lemme est soulevé par les deux branches de bifurcation du cylindre-axe. La méthode de l'acide acétique et du vert de méthyle convient bien pour acquérir une notion précise de la structure du cône de Doyère, et pour se convaincre de l’exis- tence d’une arborisation nerveuse située entre le sarcolemme et la masse contractile. Maïs pour faire une étude complète de l’arborisation, il faut avoir recours à des pièces fixées par l’os- mium et colorées ensuite par l’or selon le procédé indiqué plus haut. Sur de telles pièces et en examinant les cônes de Doyère qui se présentent de profil et surtout ceux qui se montrent de face nous observons les faits suivants : Le cylindre axe après avoir pénétré au sommet du cône de Doyère se renfle (pl. VI, fig. 2, c et ce’) un peu, puis se divise immédiatement en deux branches principales. C’est à ce ren- flement seul (pl. VE, fig. 2, e et c'), qui soulève la sarcolëmme sous lequel il est situé, qu'est due l’élevure qui constitue le cône de Doyère; mais ce renflement n’a en lui rien de caracté- ristique, ni d’'importanñt, car il en existe un tout à fait sembla- ble au point de bifurcation d’un nerf quelconque. Les deux branches de bifurcation du cylindre-axe, c’est-à-dire les deux branches principales de l’arborisation ; sont orientées selon une même ligne droite, laquelle peut être dirigée parallèlement ou obliquement par rapport à l’axe de la fibre musculaire. Les deux branches principales de l’arborisation mesurent en moyenne 0"%,005 vers leur point d’origine; elles s'étendent en s’effilant uñ peu sur une longueur qui atteint souvent plus de 0"",t; mais les deux branches principales d’une même arbo- risation peuvent être assez inégales entre elles quant à leur dia- mètre et quant à l’étendue de leur trajet. Les deux branches principales se divisent dichotomiquement à leur extrémité, en deux branches de 1“ ordre; elles émettent 112 H. VIALLANES. également sur leur trajet un certain nombre de branches de 2° ordre, qui se séparent d’elles généralement à angle droit. Les branches de 2° ordre se divisent à leur tour un certain nombre de fois, dichotomiquement et d’une façon fort régu- lière, de manière à donner naissance à des branches de 3°, 4 etmême 5°ordre, dont le diamètre est de plus en plus petit. Il résulte de cette division dichotomique successive, une arbori- sation des plus élégantes, et occupant une aire assez étendue. Jamais je n'ai vu d’anastomoses entre les différentes branches d’une arborisation, et aucun fait ne me permet de penser qu'il en puisse exister. Toutes les branches d’une arborisation pa- raissent situées entre le sarcolemme et la substance contrac- üle. Il est à remarquer que les branches de l’arborisation se dé- tachent de la manière la plus nette sur le fond formé par la substance contractile striée, et qu’ainsi elles ne sont point en- tourées par une aire de substance granuleuse, ainsi que nous l’observerons chez le Tipula. | Des noyaux sont annexés à l’arborisation, mais il est de la plus haute importance de remarquer que tous ces noyaux ap- partiennent aux branches mêmes de l’arborisation et leur sont immédiatement appliqués, et que par conséquent il n’existe rien qui puisse êlre comparé à la matière granuleuse n1 aux noyaux fondamentaux (1) de l’arborisation terminale des Ver- tébrés allantoïdiens. Les noyaux annexés aux branches de l’arborisation de la larve du Stratiomys, et que je désignerai sous le nom de noyaux de l’arborisation, se présentent sous deux aspects, selon qu'ils appartiennent aux branches principales ou aux branches ter- minales. Les noyaux des branches principales sont appliqués à la surface du renflement (pl. TI, p. 52, chap. D que présente le cylindre-axe en pénétrant sous le sarcolemme, ainsi qu’à celle des deux branches principales de l’arborisation. Par aucun (1) Ranvier, Leçons sur l’histologie du système nerveux, t. II, p. 307. ARTICLE N° {. : HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 113 caractère, de taille, de structure, de rapports ou de réaction en présence des diverses matières colorantes, je n’ai pu trou- ver de différences entre ces noyaux et ceux qu’on observe à la surface du nerf avant qu'il atteigne le cône de Doyère, et qui sont les noyaux de la gaine. Il semble donc que le cylindre- axe, en pénétrant sous le sarcolemme conserve encore avec lui les noyaux de sa gaine. Les noyaux des branches terminales (pl. VE, fig. 52, d) se ren- contrent sur toutes les branches de l’arborisation issues des deux branches principales ; ils se distinguent de la manière la plustranchée des noyaux des branches principales ; ils ont un contour régulièrement ovalaire assez allongé; ils mesurent dans leur grand diamètre 0"",005, et ne présentent point de nucléole ; ils ont un aspect pâle et par le chlorure d’or se colo- rent bien plus faiblement que ceux des branches principales. Ils se montrent sur les branches de l’arborisation à partir du point où cessent d’exister les noyaux des branches principales. Ils sont disposés très régulièrement sur les branches de l’arbo- risation qui, grâce à leur présence, prennent l'aspect d’un chapelet, dont les grains oblongs seraient un peu écartés les uns des autres. Le fait que les noyaux des branches terminales commen- cent à se montrer à la surface du conducteur nerveux, quand cessent les noyaux des branches principales, semblant ainsi remplacer ces derniers, me porte à supposer que ces deux formes nucléaires n’ont point chacune une signification spé- ciale. La différence d'aspect des deux sortes de noyaux, leur différence de taille, est peut-être simplement due à ce qu'ils accompagnent des conducteurs nerveux de tailles différentes. Les branches terminales de l’arborisation ressemblent d’une manière frappante aux branches terminales de larborisation nerveuse du muscle de la Grenouille (1). Chez les Sératiomys, comme chez la Grenouille, le nerf semble se terminer par une extrémité effilée. {1) Ranvier, Leçons sur l’histologie du système nerveux, t. Ii, p. 343, pl. VII, fig. 9. 114 H. VIALLVNES. Qu'il me soit permis de faire remarquer que ces rameaux nerveux ultimes, avec leur pointe effilée, leurs noyaux spéciaux, qui leur donnent un aspect moniliforme si caractéristique, -essemblent d’une manière vraiment frappante à ces rameaux nerveux terminaux observés par Klein (1) et par Tschiriew (2) dans les tendons, les aponévroses, Le tissu conjonctif. Mais est-ce là le sort dernier du conducteur nerveux? C’est ce que l’imperfection de nos méthodes d'investigation ne nous permet point de juger. Il ne me reste plus qu’à résumer brièvement les faits dont l'existence nous a été démontrée par l’étude détaillée que je viens de faire du mode de terminaison des nerfs dans les muscles striés de la larve du Stratiomys. CONCLUSIONS. 4° Chaque faisceau primitif rigoureusement constitué sur le plan du faisceau primitif des Vertébrés présente à sa surface un certain nombre d’éminences (cônes de Doyère); au sommet de chaque cône arrive un nerf. 2° Les nerfs sont constitués chacun par un cylindre-axe, présentant à sa surface denombreux noyaux qui méritent le nom de noyaux de la gaine du nerf. Avant d'aborder les faisceaux primitifs, les nerfs s’anastomosent et forment un réseau. 3° Le cône de Doyère est formé par le sarcolemme soulevé, dont le contour se continue avec le contour extérieur du nerf. 4 Le cylindre-axe ayant pénétré dans le cône de Doyère, se divise en deux branches principales qui émettent des branches secondaires, lesquelles se divisent dichotomiquement un assez grand nombre de fois. Ainsi il'existe sous le sarcolemme une arborisation terminale analogue à celle décrite chez les Verté- brés. Rien d'analoque n'était jusqu'à présent soupçonné chez les Arthropodes. Seul M. Rouget avait vu le commencement des deux branches principales. (1) Klein, Handbook for the physiological laboratory. (2) Tschiriew, Sur les terminaisons nerveuses dans les muscles striés Archives de physiologie, 2° série, t. VI, p. 90, 1879). ARTICLE N° {. d HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 415 5 Les deux branches principales de l’arborisation sont pour- vues à leur surface de noyaux analoques à ceux qu'on trouve à la surface du cylindre-axe avant son entrée sous le sarcolemme, _et que je désigne sous le nom de noyaux de Parborisation. 6° L’arborisation est située tout entièresous le sarcolemme, et ses branches directement appliquées à la surface de la masse con- tractile. 7° Chez le Stratiomys comme chez la Grenouille il n'existe mn dans le cône de Doyère, ni entre les branches de l’arborisation, aucune accumulation de substance granuleuse ou de noyaux. $ 2. — Terminaisons nerveuses motrices dans les muscles de la larve de Tipula. La musculature assez puissante de la larve du Tipula est composée de deux couches de faisceaux musculaires primitifs : les uns sont longitudinaux, les autres transversaux. Ces faisceaux ont une largeur qui est en moyenne de 0"",1, leur longueur esten général égale à celle d’un anneau du corps. Ils présentent lamême structure queceuxde la larve deSfratiomys, à cétte différence près que leurs noyaux propres sont plus petits et plus nombreux que chez le Srratiomys. Ges noyaux mesurent 0%%,051. Quant au reste, la fibre musculaire du Ti- pula ressemble absolument à celle du Srafiomys, que nous avons décrite plus haut. Ainsi dans l’une et l’autre de ces es- pèces, la fibre musculaire est exactement bâtie sur le plan du faisceau primitif du Vertébré. Quant au nerf, sa structure est assez différente chezle Tipula et chez le Sératiomys : chez le Tipula, en effet, il se présente comme formé d'un cylindre-axe (pl. VIE, fig. 2, c) mesurant O"",01 vers le point où il aborde la fibre musculaire. Ce cylindre- axe est enveloppé par une gaine (pl. VI, fig. 2, g, n) de sub- stance homogène, dont l'épaisseur est égale à la moitié du dia- mètre du cylindre-axe. Rappelons-nous que si une enveloppe existe autour du cylindre-axe chez le Sératiomys, assurément elle doit être réduite à une épaisseur extrêmement faible. La substance homogène qui constitue la gaine du nerf chez le 416 H. VIALLANES. Tipula a des caractères qui la rapprochent de la substance fon- damentale du tissu conjonctif : comme elle, elle se gonfle sous l'influence de l’eau ou de l'acide acétique. La gaine est comme toujours pourvue de noyaux, les unssont situés dans son épais- seur même, les autres sont placés à sa face interne, par con- séquent paraissent appliqués directement sur le cylindre-axe. Les novaux de la game mesurent environ 0"",002. Pour étudier la distribution des nerfs dans la musculature, il faut avoir recours à des pièces fixées par l’osmium, puis virées par l’or suivant la méthode que j'ai indiquée plus haut. La figure (pl. VIT, fig. 1) nons donne une bonne idée de ce mode de distribution; nous y voyons deux nerfs qui, après s'être unis et avoir échangé des fibres, se séparent de nou- veau en deux branches, dont l’une se dirige à droite et l’autre à gauche. De ces branches secondaires se détachent de courts rameaux qui vont aboutir chacun à une fibre musculaire. La même figure nous permet encore de constater que chaque fibre musculaire reçoit un nerf vers le milieu de sa longueur, et qu’elle n’en reçoit qu’un seul : de la sorte, chaque fibre musculaire ne présente qu’un seul cône de Doyère. C’est déjà là un fait intéressant, les auteurs qui m'ont précédé ayant toujours observé un grand nombre de cônes pour chaque fibre musculaire chez les Arthropodes. Nous nous rappelons en outre que chez le Stratiomys les cônes de Dovère sont toujours nombreux pour une même fibre musculaire. Quant aux trachées, elles suivent la même distribution que es nerfs, à la gaine desquels elles sont soudées (pl. VIE, fig. 2 et 3). Chaque fibre musculaire reçoit ainsi une trachée en même temps que son nerf; celle-ci se divise ensuite et ses rameaux de division serpentent à la surface de la fibre mus- culaire (pl. VIT, fig. 3), comme si elles suivaient les branches de l’arborisation nerveuse terminale que nous décrirons tout à l'heure. Malheureusement j'ai négligé de rechercher si ces conduits aériens étaient situés comme chez le Sératiomys à la surface du sarcolemme, ou si au contraire ils étaient sous- acents à cette enveloppe. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 117 J'ai dit plus haut qu’il n’existait qu’un seul cône de Doyère pour chaque fibre musculaire; aussi ne serons-nous point étonnés de voir ce cône atteindre des dimensions considérables (pl. VII, fig. 2); il est haut de 0"",05 et mesure à sa base 0.03 dans son plus grand diamètre. Chaque cône se présente sous la forme d’un entonnoir aplati latérale- ment, très allongé dans le sens de l’axe de la fibre mus- culaire. Grâce à cette forme tant soit peu anormale, il est facile de se tromper à première vue sur la vraie consti- tution du cône. En effet, quand on l’examine de profil, ses deux faces latérales se trouvant presque en contact, il semble que le sarcolemme se continue sous le cône en formant comme une base à ce dernier : c’est dans cette erreur que j'étais tombé tout d’abord, erreur bien pardonnable quand on a sous les yeux une préparation telle que celle que représente la figure 2 de la planche VIT. Mais en observant des coupes transversales de fibre musculaire, on se convainc facilement que chez le Tipula comme chez les autres animaux, le cône doit être considéré comme un entonnoir, dont la circonférence de la grande ouverture se continuerait sans ligne de démarcation avec le sarcolemme, .et dont la circonférence de la petite ouverture se continuerait également sans ligne de démarca- tion avec la gaine du nerf. La paroi du cône chez le Sératiomys était une membrane mince en tout sémblable au sarcolemme ; ici les parois plus épaisses vers le sommet du cône que vers sa base présentent dans leur épaisseur et à leur face interne des noyaux en tout semblables à ceux de la gaine du nerf (pl. VIL, fig. 9), si bien que le cône doit être considéré comme un simple évasement conique de la gaine du nerf, qui va se confondre avec le sarcolemme. Nous savons que c’est là ce qui a lieu chez les Vertébrés allantoïdiens, où les parois du cône ne sont autre chose que la gaine de Henle coniquement évasée et conservant ses noyaux. M. Ranvier donne le nom de noyaux vaginaux À ces noyaux de la paroi du cône qu’il a observés chez le Lézard et la Cou- leuvre : ceux dont nous venons de signaler la présence dans la MS H, VIALLANES. paroi du cône chez le Tipula, nous semblant tout à fait analo- gues, nous les désignerons sous la même dénomination. Le cylindre-axe, qui mesure 0"",0105 de diamètre immé- diatement après avoir pénétré au sommet du cône de Doyère, se divise en deux branches égales (pl. VIT, fig. 2) qui divergent comme les branches d’une fourche en se dirigeant vers la surface de la substance contractile ; elles sont situées dans un: plan qui passe par l’axe de la fibre musculaire, elles occupent les deux angles dièdres du cône de Doyère qui a, comme nous l'avons dit, la forme d’un entonnoir aplati. Ges deux branches de division du cylindre-axe sont les deux branches principales d’une arborisation nerveuse terminale (pl. VIT, fig. 3) compa- rable à celle que l’on observe chez le Sératiomys; ayant atteint la surface de la masse contractile, ces deux branches se diri-. gent en sens opposé chacune vers une des extrémités de la fibre musculaire, extrémité qu’elles atteignent souvent. Mais elles vont en s’effilant, car sur leur trajet, elles émettent des branches secondaires souvent très volumineuses qui se déta- chent généralement à angle droit. Ces branches secondaires embrassent la fibre musculaire, comme les doigts de la main embrassent un cylindre. Elles émettent d’une façon assez régulière des rameaux de troisième, de quatrième et cin- quième ordre. Il en résulte ainsi une arborisation extrême- ment riche et étendue, qui enlace toute la fibre musculaire ; jamais je n’ai vu d’anastomose entre les branches de cette arborisation. Elle est très facile à voir et en détail même avec un faible grossissement sur des pièces préparées par l’os- mium et l’or, car les branches sont volumineuses; les prin- cipales mesurent 0"%,006, les secondaires 0"*,004; elles ont un contour net, se présentent (pl. VIL, fig. 1) avec un strié longitudinal qui leur donne l’aspect d’un paquet de cheveux ondulés. Les dernières branches de l’arborisation (pl. VIT, fig. 2) paraissent se terminer par des extrémités effilées qui générale- ment sont dirigées dans le sens de la longueur de la fibre. Quand on examine une fibre musculaire colorée par l’or, on distingue à sa surface les branches nombreuses de larborisa-. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET -DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 419 tion, mais pour peu qu'on abaisse l’objectif on aperçoit d’autres branches : tout d’abord j'avais pensé que cet aspect était dû à ce que l’arborisation aurait émis des branches pénétrant dans l'intérieur même de la masse contractile et qui y seraient distribuées. Mais depuis, ayant étudié des coupes transversales, toutes les branches nerveuses que j'ai rencontrées se sont montrées entre le sarcolemme et la masse contractile. Mon erreur était évidemment due à ce que la fibre musculaire comprimée par la lamelle laissait voir les branches de l’arbo- risation situées sur les deux faces. | On peut encore déceler la présence de l’arborisation par d’autres procédés que celui que je viens d'indiquer. On l’aper- çcoit assez nettement sur les fibres musculaires vivantes, ob- servées dans le sang même de l’animal. Quand on a fixé une fibre musculaire par un séjour de deux ou trois heures dans l'acide osmique à À pour 100, puis qu’on l’a colorée au picro- carminate, les branches principales de l’arborisation se mon- trent avec une netteté admirable (pl. VITL, fig. 1), les noyaux qui leur sont annexés sont parfaitement colorés; mais ce pro- cédé ne fait point apparaître les petites branches de l’arbo- risation. Pour expliquer cet échec, il faut admettre que pour que les petites branches soient rendues visibles par losmium seul, il faudrait prolonger l'influence de ce réactif pendant un temps si long, que la fibre musculaire tout entière serait devenue opaque. L'alcool au 1/3, qui donne des résultats si remar- quables dans l'étude de l’arborisation terminale chez les Ver- tébrés, ne m'a été que d’un faible secours, appliqué à l'étude des terminaisons nerveuses chez les Insectes. En revanche, j'ai retiré le plus grand profit de l’acide acétique et du vert de méthyle employés comme 1l a été dit plus haut pour le Stratiomys : sous l'influence de lacide acétique, le sarco- lemme se soulève (pl. VIE, fig 3 et 5), la masse contractile se rompt et se rétracte en divers points. Les branches de l’arbo- risation, au contraire, ne se rompant ni ne se rétractant, sont détachées de leurs adhérences, et dans l’espace compris entre 190 M. VIALLANES. deux tronçons du cylindre contractile, rompus et écartés, on voit l’arborisation flotter librement sous le sarcolemme (pl. VII, fig. 3, b). Cette expérience nous prouve de la manière la plus nette que l’arborisation existe bien réellement et qu’elle n’est point un produit de nos réactifs. Une matière granuleuse et des noyaux très abondants sont annexés aux branches de lParborisation. Si, en effet, on examine la figure 1 de la planche VIT qui représente une branche principale de l’arborisation d’une fibre musculaire traitée par l'acide osmique et colorée par le picrocarminate selon le procédé mdiqué plus haut, nous voyons que cette branche ne se détache pont comme chez le Srra- hiomys sur un fond formé par la substance contractile, mais bien sur un fond formé par une substance granuleuse, qui constitue comme une vague bordure sur les côtés du conduc- teur nerveux. Nous remarquerons aussi que deux sortes de noyaux sont annexés à cette branche. Les premiers (pl. VII, fig. 1, b), plus fortement colorés en rouge, sont directement appliqués et comme moulés sur la branche nerveuse; leur forme est lenticulaire, ils sont pourvus d’un nucléole, les plus petits d’entre eux sont arrondis et mesurent 0"*,008, les seconds (pl. VIIL, fig. 1, a), plus grands, sont généralement el- liptiques et peuvent atteindre 0"",03 dans leur grand diamè- tre; jamais ces noyaux ne sont appliqués sur les branches de l’arborisation; ils en sont toujours à une certaine distance et plongés dans la substance dont je viens de parler. J’appellerai les premiers de ces noyaux, noyaux de l’arborisation, pour rappeler les rapports intimes qu'ils affectent avec les con- ducteurs nerveux, et les autres, noyaux de la matière granu- leuse (1), car partout où nous les trouverons, ils se montreront plongés dans cette substance. On saisit bien la différence qui existe entre les deux sortes de noyaux, lorsque, opérant comme je l'ai indiqué plus haut, on traite un faisceau primitif par (1) Il est toujours facile de distinguer ces noyaux d’avec les noyaux Him laires : ces derniers, chez le Tipula comme chez le Stratiomys, sont caractéri- sés par le grand nombre de nucléoles qu’ils renferment. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET.DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 191 l'acide acétique et qu’on le colore ensuite par le vert de méthyle ; le sarcolemme se soulève, la masse contractile se rompt en plusieurs points et les branches de l’arborisation peuvent flotter librement. Les branches ainsi devenues libres n’entrai- nent avec elles que les noyaux de l’arborisation qui leur sont intimement accolés, et n’affectent plus aucun rapport ni avec la matière granuleuse, ni avec les noyaux de la matière granuleuse. Si maintenant on suit les branches de l’arborisation (pl. VITT, fig. 2), on observe qu'à mesure qu’on approche de la terminai- son du nerf, la matière granuleuse et les noyaux qui lui appar- tiennent deviennent de plus en plus rares, et qu'ils ont toujours complètement disparu quand on arrive aux branches de quatrième ordre. Quant aux noyaux de larborisation, ils paraissent accompagner les branches ultimes de l’arborisation. La matière granuleuse et les deux sortes de noyaux que je viens de décrire existent dans le cône de Doyère; pour bien se rendre compte de leur rapport, il convient d'observer le cône se présentant de profil (pl. VIF, fig. 2, et pl. VITE, fig. 4). Sur une préparation ainsi disposée, nous observons que le cône est rempli par la matière granuleuse pourvue de ses noyaux par- ticuliers, mais cette accumulation de matière granuleuse et de noyaux est sujetle à de nombreuses variations : ainsi il arrive fréquemment que la matière granuleuse et les noyaux qui l’accompagnent n’occupent que le sommet du cône (pl. VII, fig. 2, »), tandis que la base du cône en est dépourvue. C’est probablement l'observation d’un cas analogue qui a fait tomber Maddox dans l’erreur, et lui a fait dire que le nerf se termi- pait en se résolvant en une matière granuleuse, pourvue de noyaux, laquelle occupait seulement le sommet du cône et ne se mettait pas en contact avec la masse contractile. Cette ma- nière d'interpréter l’observation de Maddox me parait d'autant plus probable que l'animal qu’étudiait ce naturaliste (T ipula cristallinu) est très voisin du Tipula gigantea. Quant aux noyaux de l’arborisation, ils existent dans le cône avec les caractères que nous leur avons indiqués, appliqués aux 199 HI. VIALLANES. deux branches de bifurcation du cylindre-axe, mais ici, comme chez le Siraliomys, je n’ai pu distinguer par aucun caractère les noyaux de l’arborisation de ceux de la gaine du nerf. Ce qui doit nous porter à penser que chez la larve de Tipula au niveau du sommet du cône, la gaine du nerfse dédouble en deux feuillets, l’un épais qui en allant se souder au sarco- lemme concourt à former l'enveloppe du cône, l’autre beau- coup plus mince, reconnaissable seulement par ses noyaux et qui accompagne le cylindre-axé dans toutes ses branches de division. CONCLUSIONS. 4° La fibre musculaire de la larve de Tipula est bâtie sur le même plan que la fibre musculaire du Vertébré. | % Le nerf, au moment où il aborde la fibre musculaire, est composé d’un cylindre-axe revêtu d'une gaine épaisse; des noyaux semblasles entre eux (noyaux de la gaine du nerf) sont les uns situés dans l’épaisseur de cette gaine, les autres entre la gaine et le cylindre-axe. 3 Chaque fibre musculaire ne reçoit qu'un nerf et ne pré- sente par conséquent qu'un cône de Doyère. % La gaine du nerf se continue et se confond avec le sarco- lemme pour constituer la paroi du cône de Doyère; mais cette paroi présente plutôt les caractères de la gaine du nerf, que ceux du sarcolemme, car elle offre des noyaux dans son épaisseur ; il faut peut-être assimiler ces noyaux aux noyaux vaginaux dé- crits dans l’épaisseur des parois du cône chez les Vertébrés allantoïdiens (Lézard). ; 5° Le cylindre-axe, après avoir pénétré au sommet du cône, se divise en deux branches principales qui s'appliquent à la surface de la matière contractile, et atteignent chacune üne des extrémités de la fibre. De ces branches principales se de- tachent à angle droit des branches secondaires, qui enlacent toute la fibre et émettent elles-mêmes des branches de 8°, 4° et Sc ordre. Il en résulie ainsi une arborisation nerveuse terminale ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET ‘DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 193 des plus riches et des plus étendues, dont les rameaux derniers paraissent se terminer par des extrémités effilées. 6° Les branches de l'arborisation présentent sur tout leur par- cours des noyaux qui leur sont immédiatement appliqués et qui les accompagnent depuis leur origine jusqu’à leur terminaison. Je désigne ces noyaux sous le nom de noyaux de l’arborisation ; aucun caractère ne na permis de les distinquer des noyaux de la gaine du nerf. 7° Aux plus grosses branches de l'arborisation est annexée une matière granuleuse particulière qui remplit plus ou moins complètement le cône de Doyère. Cette matière granuleuse est pourvue de noyaux spéciaux qu’il convient peut-être d'assimiler aux noyaux fondamentaux annexés à l’arborisation terminale chez les Vertébrés allantoïdiens. $ 3. — Terminaisons nerveuses motrices dans les muscles des pattes du Dytique et dans ceux de la queue de la larve d’Eristalis. Les muscles des pattes chez tous les insectes adultes, ceux de la queue chez la larve d’Eristalis, sont bâtis sur un tout autre plan que les muscles des deux larves qui viennent de nous servir à l’étude des terminaisons nerveuses motrices. En effet, les faisceaux qui les composent ne sont plus entièrement com- parables aux faisceaux primitifs des Vertébrés, puisque, ainsi que nous l’avons montré dans le chapitre précédent, la masse contractile s’y trouve réduite à une seule colonnette. Si nous examinons ces faisceaux réduits chacun à une- seule colonnette, qu’ils appartiennent à un insecte adulte ou à une larve, nous reconnaissons que les nerfs moteurs n'y forment point d’arborisation, mais qu'ils s'y terminent exactement comme M. Ranvier l’a décrit. Nous voyons en effet que, quand le nerf a atteint le sommet du cône de Doyère, sa gaine se con- fond avec le sarcolemme, tandis que le eylindre-axe se décom- pose immédiatement en ses fibrilles constitutives, lesquelles se dirigent en divergeant vers la masse contractile. Dans leur trajet ces fibrilles paraissent plongées au sein d’une matière finement granuleuse entremêlée de noyaux. Mais j'ai été moins 124 MH. VIALLANES. heureux que M. Fœttinger, et c’est vainement que j'ai cherché à suivre ces fibrilles jusqu'aux disques, où, suivant ce natura- liste elles iraient chacune se jetter. Ainsi, dans les faisceaux réduits à une seule colonnette, qu'ils appartiennent à des larves ou à des adultes, les nerfs moteurs ne forment point d’arborisations terminales, mais se décom- posent en leurs fibrilles constitutives dès qu'ils ont franchi le sarcolemme. CONCLUSIONS. 1° On rencontre chez les Insectes deux modes de terminai- son des nerfs moteurs. Tantôt le nerf après avoir percé le sar- colemme émet des branches pour former une arborisation termi- nale analogue à l’arborisation terminale des Vertébrés et dont le premier j'ai reconnu l'existence ; d’autres fois, immédiate- ment après son entrée sous le sarcolemme 1l se décompose en ses fibrilles constitutives qui divergent comme les poils d'un pinceau. I 2 L'existence ou l’absence d’une arborisation terminale n’est point en rapport direct avec le degré que l’animal occupe dans l'échelle zoologique, elle dépend uniquement de la consti- tution du faisceau primitif. 3° Chez l’Insecte, les nerfs moteurs forment une arborisation terminale dans les faisceaux dont la masse contractile est com- posée comme chez les Vertébrés par un grand nombre de colon- nettes. 4 Chez l’Insecte, les nerfs moteurs ne forment point d’arbo- risation terminale, mais se décomposent immédiatement en leurs fibrilles constitutives, dans les faisceaux dont la masse contractile est réduite à une seule colonnette. 9° L'étude que Ÿ’'ai faite de l’arborisation terminale chez deux espèces (Stratiomys ef Tipula), nous montre que chez les insectes les branches de l’arborisation présentent, d’un type à l’autre, les snêmes différences qu'on peut observer chez les Vertébrés, aù même point de vue, entre la Grenouille et le Lézard. Chez le Tipula, en effet, une matière granuleuse abondante renfermant ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 1925 des noyaux spéciaux élait développée autour des branches de l'arborisation, chez le Stratiomys, au contraire, cette substance ainsi que les noyaux manquaient complètement. DEUXIÈME PARTIE ÉTUDES DES PHÉNOMÈNES DE L'HISTOLYSE, OU DESTRUCTION DES TISSUS ET DES SYSTÈMES LARVAIRES. $ 1. — Historique général des travaux relatifs au développement post-embryonnaire des Insectes. Lorsque la larve de la Mouche, l’asticot, a acquis toute sa taille, elle devient immobile, ses anneaux se rapprochent les uns des autres, elle prend la forme d’une sorte de tonnelet, puis sa cuticule devient dure et brunit, c’est alors une pupe ou #ymphe. Quelques semaines plus tard, l'enveloppe pupale se rompt, et laisse sortir une mouche parfaite, l’imago. Ces métamorphoses ont été observées depuis bien longtemps (1), elles se rencontrent chez beaucoup d’Insectes. Mais quels phé- nomènes s’accomplissent dans la pupe, par quel mécanisme la nature peut-elle transformer un asticot en mouche ou une chenille en papillon? Voilà le problème qui a préoccupé bien longtemps les naturalistes, pourtant 1l n’a été résolu qu’il y a quelques années, grâce aux recherches de M. Weismann. Je serais entrainé trop loin, si je voulais citer les travaux de tous ceux qui, comme Schwammerdam, Réaumur, Lyonnet, Hérold, se sont, avant M. Weismann, occupés de la question. Mais je ne saurais passer sous silence les travaux de Guillaume Harvey. L'illustre auteur du traité De generatione animalium, ne consacre que quelques lignes aux métamorphoses des Insectes. Je ne résiste pas au désir de les citer textuellement, car on croirait, en les lisant, que leur auteur a pressenti bien des découvertes modernes : « Alia (2) vero semen adhuc im- (1) Redi, Experimenta circa generutionem Insectorum. Leide, 1739. (2) Guilelmi Harvei opera omnia a collegio Medicorum Londinersi, edita MDCCLXVI. — De generatione animalium. Exercitatio II, p. 183. ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE, 1882. XIV. 9. — ART. N° {. 196 H. VIALLANES. perfectum et immaturatum recludunt, incrementum et per- fectionem, sive maturitatem, soris acquisiturum; ut plurima genera piscium, ranæ, item molilia, crustata, testacea et co- chleæ : quorum ova primum exposita sunt, veluti origmes duntaxat, inceptiones et vitellh; qui postea albumima sibi 1psis cireum circa induunt ; tandemque alimentum sibi attrahentes, concoquentes et apponentes, In perfectum semen atque ovum evadunt. Talia sunt insectorum semina (vermes ab Aristotele dicta) quæ inilio imperfecte edita sibi victum quærunt mde- que nutriuntur et augentur, de eruca in aurelam ; de ovo im- perfecto in perfectum ovum et semen. » Ainsi, pour Harvey, œuf des Insectes n'ayant pas en soi une réserve nutritive suffisante, embryon le quitte dans un état imparfait e, sans avoir pu attemdre son développement complet, c’est la larve. Cette dernière se met alors en quête de nourriture et, quand elle a suffisamment amassé de matériaux nutritifs, elle revient à l’état d'œuf. La pupe est cet œuf secondaire qui se développe en Insecte parfait. La suite de ce travail montrera que les faits viennent donner l'appui le plus solide à cette conception de Harvey. Mais c’est à M. Weismann (1) que revient l’honneur d’avoir été le premier à saisir le véritable mécanisme de la métamor- phose des Insectes. Sans doute, après le mémoire du savant professeur de Fribourg, des lacunes restaient à combler, des points douteux à éclaircir, mais, dans son ensemble, le phé- nomène était connu. M. Weismann n’a pas seulement fourni aux embryologistes la solution du problème qu’ils cherchaient depuis si longtemps, 1l a ouvert aux histologistes des voies toutes nouvelles, en montrant que dans la pupe s’accom- plissent des phénomènes de destruction et de genèse dont l'étude pouvait être du plus haut intérêt. Je crois nécessaire de résumer d’abord dans leurs grands traits les faits découverts par M. Weismann, sauf à entrer plus tard dans leur détail. (1) Weismann, Die nachembryonale Eniwikelung der Musciden (Zeitschr. f. wiss zooi., 1864, t. XIV). ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 197 Dans la cavité générale de la larve, on trouve un certain nombre de petits corps blancs, disposés par paires, ef que M. Weismann appelle des disques imaginaux (2maginal Schei- ben). En avant il en existe une paire, ce sont les disques de la tête ; plus en arrière, on en rencontre six paires, dont trois sont inférieures et trois supérieures, ce sont les disques du thorax. Au moment où la larve devient immobile et se met en pupe, la plupart de ses tissus sont détruits et disparaissent. Ce phé- nomène de destruction est désigné, par M. Weismann, sous le nom d’histolyse. Les cellules hypodermiques des quatre pre- miers anneaux, les trachées, les museles, le corps adipeux, les nerfs périphériques subissent l’histolyse; c’est-à-dire dégé- nèrent, meurent et sont dissous, sans qu'il reste, par consé- quent, d'eux aucun élément cellulaire. Toutes les cellules épi- théliales de l'intestin moyen se rassemblent en une seule masse cellulaire centrale. Les disques imaginaux prennent alors un grand accroisse- ment, s’élalent en membrane, se portent à la périphérie, se soudent entre eux sur leurs bords, vont remplacer les tégu- ments larvaires disparus dans les quatre premiers anneaux et constituer ainsi les téguments du thorax et de la tête de limago. La paire de disques de la tête constitue les téguments de la tête et des appendices qui en dépendent. Chacun des quatre demi-arceaux qui constituent chacun des zoonites du thorax de l'imago est formé, lui et l’appendice qui en peut dépendre, par un disque thoracique correspondant. Les téguments de l'abdomen de l’imago dérivent directe- ment des téguments des derniers anneaux larvaires dont les cellules hypodermiques se modifient sur place. Quand tous les téguments de l’imago sont constitués, ses trachées, ses muscles, ses nerfs périphériques se forment; mais sans qu’il y ait aucune filiation entre ces tissus nouveaux et les tissus larvaires correspondants depuis longtemps dispa- rus par dégénérescence et mort de leurs éléments cellulaires. 198 El. VEALLANES. Le système nerveux central ne disparaît pas, mais 1l se mo- difie profondément. L’intestin de l’imago se développe aux dépens de cette masse cellulaire en laquelle s’était transformé l'intestin larvaire. Pendant ce temps les glandes génitales déjà ébauchées chez la larve ont achevé leur développement. Après les mémoires de M. Weismann parurent sur le même sujet un certain nombre de travaux dus à MM. Lowne (1), Künckel d'Herculais (2), Ganin (3). Je n'aurai point à citer les recherches de M. Lowne, car sur tous les points dont je me suis occupé, il ne fait que confirmer les observations de M. Weismann. Les travaux de M. Künckel d'Herculais et ceux de M. Ganin confirment dans leur ensemble les découvertes de M. Weis- mann, mais Ces deux naturalistes sont, sur un certain nombre de points de détail, en désaccord avec l’observateur allemand. L’exposé détaillé et la discussion des observations de MM. Weismann, Künckel d’'Herculais et Ganin, trouveront leur place dans les différents chapitres où je m'occuperai des points qu'ils ont eux-mêmes étudiés avant moi. Je veux pourtant dire, dès maintenant, quel est le point le plus important sur lequel mes prédécesseurs sont divisés. Tandis que M. Weismann suppose queles éléments qui forment les muscles, nerfs et trachées de l’imago apparaissent par génération spontanée dans le liquide cavitaire de la nymphe, les disques ne servant qu’à former les téguments ; M. Künekel et M. Ganin pensent, au contraire, que les éléments qui ser- vent à former les muscles, neris et trachées de l’imago dérivent (1) Lowne, Anatomy and Physiology of the Blow-fly. London, 1870. (2) Künckel d'Herculais, Organisation et développement des Volucelles. Paris, 1815. (3) Materiaux pour servir à l’histoire du développement post-embryonnaire des Insectes (en russe). Société des médecins et des naturalistes russes de Warsovie, 1875. M. Ganin ne paraît avoir eu aucune connaissance des travaux de M. Kuünckel d'Herculais, il ne cite nulle part le nom de ce naturaliste, bien que les premières communications que celui-ci fit à l’Académie des sciences de Paris remontent à 1868 (J. Künckel, Recherches sur l’organisation et le déve- loppement des Dipières du genre Volucelle, in Compt. rend. Acad. des sc., t. LXVIII, 1868, p. 1231). ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 1929 des disques, et qu'ainsi ceux-ci servent à constituer encore autre chose que les téguments. Avant d'exposer le résultat de mes recherches personnelles sur le développement post-embryonnaire, je crois nécessaire d'indiquer les procédés techniques auxquels J'ai eu recours, afin de rendre facile à tous le contrôle de mes observations. Elles ont été faites sur le Musca vomitoria. Une seule méthode d'investigation m’a paru capable de permettre d'étudier les üssus de la nymphe avec certitude, c’est la méthode des coupes. Je procédais de la manière suivante : Des nymphes entières, de différents âges, étaient fixées par un séjour-de deux ou trois jours dans l’acide picrique concentré ou dans la liqueur de Kleinenberg (Pikrinschwefelsaure). De ce liquide fixateur, elles étaient transportées dans l’alcool faible, fort, puis absolu. Je les colorais ensuite en masse par le carmin ou par la solu- tion alcoolique d’hématoxyline de Kleinenberg. De nouveau, elles étaient déshydratées. Quand cette déshydratation était parfaite, je les plongeais dans l’éther pendant quelques heures, je les transportais ensuite dans le collodion normal (elles doivent y séjourner plusieurs jours afin d’être bien imbibées de ce liquide). De là, je les transportais dans le chloroforme; sous l’influence de ce réactif, le collodion se prend en une masse consistante comme de la cire, mais présentant une élas- ticité qui la rend incassable et ayant de plus l'avantage bien précieux d’être admirablement transparente et d’avoir exacte- ment l’indice de réfraction du verre. C’est, on le voit, une mo- dification légère de l’excellente méthode de M. Duval. Les coupes étaient alors pratiquées à travers l'animal entier, à l'aide du microtome du D' Long. Il faut avoir soin d'entretenir la pièce à couper et le rasoir bien imbibés d’essence de téré- benthine. Les pièces étaient ensuite montées dans le baume du Canada dissous dans le chloroforme. Les coupes que j'ob- tenais ainsi mesuraient, en moyenne, un cinquantième de millimètre, mais souvent j'en faisais de bien plus fines ; ainsi, pour létude des centres nerveux, j'ai débité un cerveau de 130 EX. VEALLANES. mouche en plus de cinquante coupes successives. Grâce à l'emploi du collodion, pas une cellule, pas un globule du sang ne peuvent être déplacés; et cette masse à inclusion est si transparente, si homogène, que même en employant les plus puissants objectifs à immersion, on ne peut parvenir à décou- vrir sa présence, alors même qu’on en est prévenu. Quand j'aurai eu recours à d’autres procédés, je l’indique- rai soigneusement. $ 2. — Historique général des travaux relatifs aux phénomènes de l’histolyse” M. Weismann avait montré que les téguments de la tête et du thorax de l’imago sont formés par les disques imaginaux; que les trachées, le corps adipeux, les nerfs, les cellules hypo- dermiques des premiers segments de la larve disparaissent; il avait aussi montré que les nerfs, les trachées, les muscles de l’imago sont des formations nouvelles apparaissant durant la vie nymphale. Ce sont là des faits que tout le monde admet aujourd’hui. Mais d’où proviennent les éléments de ces tissus nouveaux? Proviennent-ils des disques, ou dérivent-ils, au contraire, des éléments des tissus larvaires, par suite d’une transformation quelconque? Voilà Palternative dans laquelle s’est placé M. Weismann. À ce point de vue, il a d’abord étudié les disques; mais rien, dans l'étude de cesparties, ne lui ayant permis de supposer qu’ils pussent former d’autres tissus que les téguments, il pensa que les muscles, trachées et nerfs de l’imago devaient d’une manière quelconque tirer leur origine des tissus larvaires. Aussi s’attacha-t-1il à étudier le mode de destruction, l’histolyse, en un mot, des tissus de la larve, espérant ainsi arriver à trouver entre eux et les tissus nouveaux une filiation quelconque. Il n’y découvrir pas de filiation directe. Tous les éléments cellulaires des üssus de la larve sujets à l’histolyse, lui parurent entrer en dégénérescence, mourir el se dissoudre en une sorte de purée graisseuse remplissant le corps de la nymphe. Aussi fut-il contraint de supposer que les éléments formateurs des tissus ARTICLE N°1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 131 nouveaux apparaissaient dans la cavité générale de la nymphe par formation spontanée. Comme M. Weismann, M. Künckel et M. Ganin conclurent de leurs observations sur les phénomènes de l’histolyse, qu’au moment de la métamorphose tous les éléments cellulaires des tissus larvaires entraient en dégénérescence, mouraient, étaient dissous, sans qu'il puisse, par conséquent, exister aucune fillation entre eux et les tissus nouveaux. Touchant l’histolyse des tissus larvaires, J'ai répété toutes les observations des trois naturalistes que je viens de citer, et retrouvé toutes les images qu'ils avaient eues sous les yeux, mais un grand nombre de faits qui leur avaient échappé, et que j'ai pu découvrir, me forcent à arriver à des conclusions assez différentes des leurs. J’étudierai successivement, et dans autant de chapitres dis- tincts, les transformations que subissent les principaux tissus larvaires au moment de la métamorphose. L'étude de chaque tissu sera précédée de l’historique détaillé de ce qu'on savait avant moi sur ses transformations. CHAPITRE PREMIER. ÉTAT DU SANG DE LA LARVE AU MOMENT DE LA MÉTAMORPHOSE. N'ayant découvert rien de bien intéressant sur le sang de la larve, Je n'ai pas cru devoir lui consacrer un chapitre spécial dans la première partie de ce travail. Mais, comme le rôle que le sang joue dans le développement post-embryonnaire, présente le plus grand intérêt, ainsi que je le montrera plus loin, je donnerai quelques détails sur les modifications que présentent les globules sanguins au moment où l’animal devient immobile et se change en nymphe. Historique. — M. Weismann (1), 1864, décrit de la manière (1) Weismaun, Die nachembryonale Entwick. der Musciden. (Zeitsch. f. wiss. Zool., t. XIV, 1864, p. 213.) 132 H. VIALLANES. suivante le sang de la larve de la Mouche : « IT est incolore et contient des corpuscules sanguins, nombreux, mais inégale- ment répartis, ce sont des vésicules sphériques avec une mem- brane distincte. » Je puis sur plusieurs points compléter les observations de M. Weismann. Observations. — Quand avec une pipette effilée on pratique une saignée à une larve de mouche, on obtient un liquide opalin un peu laiteux qui se coagule très rapidement. En l’exa- minant quelques instants après sa sortie du corps de l’animal, il se présente avec l'aspect décrit par M. Weismann, c’est-à- dire qu’on y trouve des globules offrant une membrane dis- tincte et un contenu granuleux. Mais si, au contraire, on examine le sang immédiatement après qu'il a été extrait, et en ayant soin d'employer la chambre humide, 1l est facile de s'assurer que les globules sanguins sont amiboïdes et émettent des pseudopodes, comme le font les leucocytes des Vertébrés examinés à l’état vivant. Sous l'influence de la mort, les globules sanguins de la larve de mouche rétractent leurs pseudopodes, et leur contour, qui devient alors très net, peut faire croire qu'ils possèdent une membrane d'enveloppe. Dans le sang on n’observe pas seulement des globules, mais encore une grande quantité de granulations très fines, forte- ment réfringentes et qui paraissent graisseuses. Pour étudier avec plus de détail la structure des globules du sang, il con- vient de les fixer puis ensuite de les colorer. À cet égard, l’al- cool au tiers m’a donné de bons résultats, mais sous l'influence de ce réactif la plupart des globules rétractent leurs pseudo- podes. Comme réactif colorant, j’ai employé l’hématoxyline de Bœhmer (1). Quand on examine des préparations de sang ainsi obtenues, on remarque que la plupart des globules, ayant rétracté leurs pseudopodes se présentent avec l'aspect de cellules plus (1) PL. 10, fig. 8. ARTICLE N° d. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 155 ou moins arrondies dont le diamètre varie de 0,01 à 0,03. Elles présentent un contour parfaitement net ; mais on ne doit pas considérer cette apparence comme déterminée par lexis- tence d’une véritable membrane, car nous savons que ces éléments présentent à l’état frais des mouvements amiboïdes. Au centre de l’élément nous observons un gros noyau; mais cette partie présente des différences assez grandes d’un globule à l’autre. Toujours le noyau se montre avec un contour par- faitement net; sa taille présente des variations notables, tantôt il est assez petit, tantôt 1l remplit presque toute la cellule. Il n’est jamais colorable dans son entier, mais paraît renfermer un suc clair, homogène, au sem duquel sont suspendus des nucléoles, seuls capables de fixer la matière colorante. Dans beaucoup de globules tous les nucléoles sont petits et égaux entre eux; dans d’autres, au contraire, un des nucléoles atteint une taille bien supérieure à celle de ses congénères et occupe le centre de la cavité du noyau. Dans beaucoup de globules, le protoplasma paraît parfaite- ment homogène, mais dans quelques autres on rencontre au sein du protoplasma des formations particulières que j’appel- lerai vacuoles pour rappeler leur aspect bien plutôt que pour indiquer leur véritable signification, sur laquelle je ne suis pas suffisamment fixé. Dans chaque globule il n’y à généralement qu'une vacuole, pourtant dans un certain nombre de cas, j’en ai observé deux. Une vacuole se présente avec l'aspect d’une sphère très claire, parfaitement régulière, à limites nettes et plongée au sein du protoplasma. Cette sphère n’est point formée par une goutte- lette de graisse, elle n’a point l’aspect si réfringent de cette substance et l’acide osmique ne peut la colorer en noir. Quand on exagère un peu la durée du contact avec la matière colo- rante, le protoplasma finit par se colorer un peu, mais la va- cuole reste toujours claire et incolore. Quant à leur situation, les vacuoles sont placées entre la surface extérieure de la cel- lule et le noyau, jamais je ne les ai vues en contact immédiat avec l’une ou l’autre de ces parties. 134 Hi. VIALLANES. Jamais chez la larve, je n’ai pu découvrir une cellule du sang en voie de prolifération. Pour arriver à connaitre avec certitude ce que deviennent les globules du sang de la larve quand l’insecte devient nym- phe, il convient d'étudier une pupe du premier jour assez ré- cemment formée pour que les tissus de la larve, museles, corps adipeux, trachées, ne soient pas encore dissociés, ainsi on n’est pas exposé à confondre les globules du sang avec les pro- duits de cette dissociation qui, nous le verrons, y ressem- blent. Comme il est impossible, même en connaissant parfaitement l’âge d’une pupe, de déterminer exactement à quel stade de son développement elle est arrivée, la rapidité de l’évolution variant non seulement avec les conditions thermiques, mais probablement aussi avec les individus; il est de toute nécessité pour étudier les modifications que subissent les globules san- guins pendant la vie nymphale, et pour être assuré qu'on a bien affaire à ces éléments et pas à d’autres, d’avoir recours à des coupes d'ensemble attestant par elles-mêmes qu'aucun tissu ne s’est encore détruit et que par conséquent tous les élé- ments libres dans la cavité du corps ne sont autre chose que les globules sanguins de la larve. Ces coupes doivent être faites sur des pièces traitées par le collodion afin d'éviter tout déplacement et toute dissociation des tissus. Sur des pièces ainsi préparées (1), on remarque que dans toute la cavité du corps, dans toutes les lacunes interorganiques se pré- sentent de grandes quantités de globules sanguins. Ges élé- ments sont assez inégalement répartis et dans certaines places ils sont accumulés en plus grand nombre qu'ailleurs. Dans une pupe de cet âge, comme chez la larve, le sang renferme outre les globules une grande quantité de granulations d’aspect graisseux extrêmement fines. La plupart des globules se montrent avec le même aspect que nous leur avons décrit chez la larve. Mais parmi eux nous (PI 12/8410 etpl. 13, fig. 1. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 155 en trouvons un certain nombre présentant les indices d’une multiplication, quelques-uns en effet possèdent deux noyaux d’autres en montrent quatre (1). Les faits que j'ai indiqués plus haut, touchant la structure des globules sanguins de la larve, ce que Je viens de dire de leur état chez la nymphe, montrent avec l’évidence la plus absolue, que ces éléments sont identiques aux leucocytes du sang des Vertébrés. Les globules du sang de la larve sont, comme les leucocytes, des cellules embryonnaires typiques. En examinant le sang d’une nymphe, toujours dans les mêmes conditions que celles que je viens d'indiquer plus haut, on remarque qu'outre les globules non modifiés et ceux tou- jours rares possédant deux ou quatre noyaux, il existe encore d’autres éléments d’un aspect tout spécial. Ces dermers (2), qui ne sont jamais abondants, se montrent comme des sphères assez opaques de mêmes dimensions que les globules du sang, c’est-à-dire dont le diamètre oscille entre 0"",01 et 0"",03. Chacune de ses sphères parait composée par l'accumulation d’un très grand nombre de granulations extrêmement fines et bien que son contour soit très nettement limité, on ne peut découvrir de membrane d’enveloppe à sa surface. Quand on examine un de ces éléments, on est frappé de la grande ressem- blance qu’il offre avec le globule du pus le mieux caractérisé. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer la figure que je donne de cet élément trouvé dans le sang de la nymphe avec les dessins de globules du pus donnés par M. Virchow (3) ou par MM. Cornil et Ranvier (4). Aujourd’hui nous savons avec certitude que le globule du pus n’est autre chose qu’une cellule embryonnaire quelconque (leucocyte, ou autre) dégénérée. Nous ne pouvons mettre en doute que ces éléments semblables à des globules du pus que (1) PI. 10, fig. 9 d. @)PLM0, fig Ja, b, c. (3) Virchow, Pathologie cellulaire, trad. franc. Pitiss 1866, p. 151, fig. 66. (4) Cornil et Ranvier, Manuel d Hisiologie pathologique, 2° édit, t. I, p. 119, fig. 59. 136 H. VIALLANES. nous trouvons dans la cavité de la nymphe, ne soient des cellules du sang dégénérées. Comme je lai dit plus haut ces éléments ayant l’aspect de globules du pus sont toujours fort rares, il faut souvent examiner bien des coupes avant d’en rencontrer. Leur présence n’indique nullement que tous les autres glo- bules vont également dépérir, car on ne voit pas leur nombre augmenter avec l’âge. De plus, nous savons que dans le sang le plus normal des Vertébrés on trouve toujours un certain nombre de globules de pus, c’est-à-dire de leucocytes dégé- nérés et mourants. Chez les organites qui composent un tissu, comme chez les individus qui composent une colonie, les uns meurent quand les autres naïssent. CONCLUSIONS. Les cellules du sang de la larve sont analogues aux leuco- cytes des Vertébrés, ce sont des cellules embryonnaires typi- ques. On les retrouve sous cette forme chez la nymphe. CHAPITRE Il. HISTOLYSE DES MUSCLES DE LA LARVE. Historique. — M. Weismann (1), 1864, observe que chez le Musca et le Sarcophaga tous les muscles larvaires disparais- sent dès le début de la vie nymphale, il décrit ce phénomène de la manière suivante : « Les muscles perdent d’abord leur striation transversale, tandis que le sarcolemme se soulève par places, les noyaux restant encore intacts. Plus tard, les noyaux et le contenu contractile se transforment en une masse finement granuleuse qui est mise en liberté par suite de la rupture du sarcolemme. » M. Chun (2), 1875, nous donne quelques renseignements (1) Weismann, Die nachembryonale Entwikelung der Musciden (Zeitsch. f. wiss. Zool., t. XIV, p. 165). (2) Chun, Ueber den Bau, die Entwikelung und physiologische Bedeutung ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 15% sur l’histolyse des muscles du tube digestif de la chenille du Sphinx ligustri. Je les cite in extenso : « Les noyaux muscu- laires atteignent une dimension étonnante. Bientôt ils se divi- sent et offrent ainsi l'aspect d’une prolifération de noyaux. C’est un processus très analogue à celui que Leuckart a décrit dans la trichinose..…. Tandis que les noyaux des muscles commencent à se diviser, le sarcolemme se plisse, et souvent d’une manière si régulière, qu'il a un aspect spiralé comme les trachées. En même temps, la substance contractile devient graisseuse, les noyaux sont mis en liberté par suite de la dis- parition du sarcolemme. » Ce sont là les seules observations que M. Chun ait faites sur l’histolyse du tissu musculaire. - M. Ganin (1), 1875, décrit de la manière suivante l’histo- lyse des muscles de la larve : « Le nucléole des noyaux se mo- difie le premier, 1l grossit sensiblement, sa substance devient très brillante et remplit presque toute la cavité du noyau, qui présente la forme d’une bulle. Le long du faisceau musculaire, entre les groupes de fibrilles, apparaissent des fentes longitu- dinales, ces interstices augmentent en nombre et en grandeur ; et, grâce à elles, la substance contractile se partage en une quantité de particules allongées, affectant la forme d’un in- testin, courbées et tordues dans toutes les directions. Ces par- ticules allongées se divisent en fragments angulaires de moin- dres dimensions, et ceux-ci à leur tour se subdivisent encore en petites boules isolées de plus en plus minimes. Les nu- cléoles des noyaux du sarcolemme ne se distinguent presque en rien de beaucoup des particules arrondies provenant de la dissolution de la substance contractile du faisceau muscu- laire. Lorsque le faisceau musculaire a dégénéré en entier, les der Rectaldrusen bei den Insecten. Inaugur. dissert. — 31 pages, 3 planches. Franckfort, 1875. (1) Afin de rendre plus facile la comparaison. des résultats obtenus par M. Ganin avec ceux auxquels moi-même je suis arrivé, j'ai reproduit, aussi fidèlement que possible (pl. 11, fig. 3), la seule figure où le savant russe représente un faisceau musculaire en voie d’histolyse (pl. 3, fig. 21). 138 H. VIALLANES. produits caractéristiques de sa décomposition conservent pen- dant quelque temps le même emplacement qu'avait occupé le faisceau musculaire ; ils marquent pour ainsi dire la position occupée antérieurement par celui-ci. Dans la suite, les produits de la décomposition des muscles sont charriés passivement dans les diverses parties du corps de la nymphe. Au moment de la dissolution définitive du faisceau musculaire, ses noyaux en forme de bulle disparaissent, 1l est probable qu’ils se fondent avec les produits décomposés de la substance contractile. » Observations. — Tels sont les seuls renseignements que j'ai pu trouver sur lhistolyse du tissu musculaire, j'arrive maintenant à mes observations personnelles. Jai étudié le phénomène de l’histolyse des muscles à l’aide de coupes prati- quées après fixation par l’acide picrique et l’aleool, puis colo- ration au carmin et inclusion dans le collodion. Lhistolyse du tissu musculaire commence dès le premier jour de la vie nym- phale, elle est complètement terminée avant le sixième. Les derniers segments de la larve sont les plus favorables à cette étude, dans cette région les phénomènes de destruction mar- chantavec plus de lenteur sont plus faciles à observer dans leurs diverses phases. Avant de rechercher comment disparaissent les faisceaux primitifs de la larve, je crois nécessaire de rappeler briève- ment leur structure que j'ai décrite plus haut avec détail. Le faisceau primitif de la larve de la Mouche est rigoureusement construit sur le même plan que le faisceau primitif du Ver- tébré. Comme le faisceau du Vertébré, 1l est composé par un sarcolemme renfermant une masse contractile ; entre le sarco- lemme et la masse contractile se trouve Le protoplasma qui pénètre dans cette dernière et la cloisonne en colonnettes. Dans le protoplasma on rencontre des noyaux, les uns sont situés entre le sarcolemme et la masse contractile, les autres à l’intérieur de la masse contractile entre les colonnettes. Îl est nécessaire de donner quelques détails sur la structure. du noyau musculaire chez la larve, car c’est sur cette partie que porteront les premières modifications. Ghez la larve le ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 139 noyau musculaire (1) se présente avec Paspect d’un corps len- ticulaire. Bien que son contour soit net, on ne peut lui distin- guer de membrane d’enveloppe. Son contenu est colorable par le carmin dans toutes ses parties, pourtant on y distingue quelques nucléoles un peu plus fortement colorés. Stade T. — Si maintenant nous examinons des coupes pra- tiquées à travers l'abdomen d’une pupe récemment formée et n'ayant pas encore acquis sa teinte brune caractéristique, nous observons, en allant du dehors en dedans, d’abord la cuticule, au-dessous l’hypoderme encore intact, plus profondément la couche musculaire offrant des fibres coupées les unes trans- versalement, les autres longitudinalement ; plus profondément encore, nous trouvons une ou deux rangées de cellules du corps adipeux séparant la couche musculaire d’avec le paquet intestinal. Sur une telle préparation, en observant les coupes des faisceaux primitifs, nous remarquons qu’un certain nombre d’entre eux se sont modifiés. Le dessin des champs de Cohn- heim a presque entièrement disparu, la striation transversale commence à s’effacer ; les noyaux musculaires, aussi bien ceux qui sont situés sous le sarcolemme que ceux qui sont plongés au sein de la masse contractile, ont augmenté de volume, ils sont devenus sphériques de lenticulaires qu’ils étaient chez la larve (2) ; de plus, ils ont acquis la propriété de se colorer par le carmin en un rouge pourpre particulièrement vif et foncé qui attire immédiatement l'attention. Je dois dire qu’en outre leur constitution même paraît s'être modifiée ; maintenant ils paraissent très réfringents et complètement homogènes, car on ne peut trouver dans leur intérieur trace de nueléoles. Les faisceaux primitifs dans lesquels les noyaux présentent ces modifications, vont marcher rapidement vers la destruc- tion, et en observant des coupes pratiquées à travers des pupes de différents âges, il est facile de suivre toutes les phases du phènomène. Stade II. — Sur des coupes transversales du faisceau mus- (1) PL. 9, fig. 8. (2) PL. 9, fig. 9 a. 140 MH. VIALLANES,. culaire, nous remarquons qu'il m’existe plus trace du sarco- lemme, et que la masse contractile paraît être devenue com- plètement homogène. C’est vainement, en effet, qu'on y cherche le dessin si caractéristique des champs de Cohnheim. Chaque noyau musculaire, au lieu d’être immédiatement en contact avec la masse contractile, comme nous l’observions au stade précédent, se trouve maintenant revêtu par une étroite aire de protoplasma, limité lui-même extérieurement par une mince membrane (1). Ainsi, chaque noyau musculaire, fait maintenant partie d’une véritable cellule, que je dési- gnerai dorénavant sous le nom de cellule musculaire. Cet état a été observé par M. Ganin, qui à vu le noyau muscu- laire se présenter comme une sphère claire, à l’intérieur de laquelle se montrait un corps coloré. Mais, faute sans doute d’avoir observé le stade précédent, le naturaliste russe s’est, je crois, mépris sur la véritable signification de l’image qu'il a eue sous les yeux.Pour lui, cette sphère claire dans son entier est le noyau musculaire, le corps coloré qu’elle renferme n'étant qu'un nucléole hypertrophié. L'observation du mode de développement de cette sphère ne nous autorise point à admettre qu’il en est ainsi, mais nous montre, au con- traire, que la sphère claire dans son entier est une cellule, le corps coloré qu’elle renferme n'étant point un nucléole, mais bien le noyau musculaire lui-même. On remarque qu’autour de chaque cellule musculaire la substance contractile s’est un peu résorbée. De la sorte, chaque cellule musculaire se trouve située dans une loge. Les loges creusées autour des cellules musculares périphériques se montrent comme de simples encoches ouvertes à la surface du faisceau, les loges creusées autour des cellules musculaires intrafasciculaires sont closes de toutes parts. La résorption de la masse contractile marche plus vite que l’accroissement de la cellule musculaire, car cette dernière se trouve toujours au large dans la loge qui la renferme. Il semble qu’en se résorbant pour former les (H)NPI9 oO: ARTICLE N° 1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 141 loges, la substance contractile se soit transformée en une sub- stance très finement granuleuse, non réfringente, et non colo- rable par les teintures (carmin ou hématoxyline); nous voyons, en effet, une telle matière toujours interposée entre les parois des loges et la cellule musculaire que chacune de celles-ei ren- ferme. Mais il n’y a pas de zone de passage entre la substance finement granuleuse et la masse contractle; cette dernière, en effet, a toujours un bord parfaitement net et taillé à pic comme à l’emporte-pièce. Stade IT. — L'examen d’un état plus avancé nous montre que le protoplasma de la cellule musculaire est devenu plus abondant et que des formations nouvelles se sont montrées dans son intérieur. Mais comme dans un même faisceau toutes les cellules musculaires n’évoluent pas avec la même rapidité, il est facile d'observer les différentes phases par lesquelles chacune d’elles doit passer. Dans le protoplasma de la cellule musculaire (1) apparaissent tout d’abord sept ou huit très petits granules sphériques, fortement réfringents, d'aspect homogène, colorés en clair par le carmin, et se distinguant ainsi avec la plus grande netteté du noyau musculaire, tou- jours coloré en rouge pourpre foncé. Je désignerai dès main- tenant ces corps, que nous venons de voir apparaitre, sous le nom de granules roses, pour rappeler la teinte caractéristique qu'ils prennent sous l'influence du carmin. Ces granules gros— sissent peu à peu (2) et bientôt chacun d’eux a acquis la taille du noyau musculaire; ils remplissent alors toute la cellule musculaire qui a beaucoup augmenté de volume pour les con- tenir. Cette dernière présente alors l’aspect suivant (3) : on croirait voir une mûre revêtue d’une mince couche de proto- plasma, limité lui-même par une délicate membrane, et com- posée de huit à neuf grains sphériques, tous de tailles égales et un peu déformés par pression réciproque. L’un de ces grains est coloré par le carmin en rouge pourpre foncé, les autres ont (1) PL 9, fig. 9c. (2) PL. 9, fig. 9 d. (G)TIUIENCES Me Esc ER AN À ANN. SC NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1882. xIv. 10. — ART. N. 1. 149 H. VIALLANES. une teinte beaucoup plus claire : le premier est le noyau mus- culaire, les seconds sont ces corps que j'ai désignés sous le nom de granules roses. Un peu plus tard (1), le protoplasma et la membrane d’enveloppe ont entièrement disparu et les grains de la mûre, toujours accolés les uns aux autres, se montrent maintenant à nu. Pendant que la cellule musculaire s’accroît ainsi en produisant des granules dans son intérieur, la résorp- tion de la substance contractile continue toujours autour d'elle. Stade IV. — Un peu plus tard, les grains de la mûre, que représente maintenant chaque cellule musculaire, s’écartent et se séparent les uns des autres; alors n'étant plus pressés, ils reprennent leur forme parfaitement sphérique (2). La cellule musculaire à de la sorte perdu son autonomie; et dans la loge que nous avons vue se creuser autour d'elle aux dépens de la masse contractile, on ne trouve plus à sa place que huit à neuf sphères complètement isolées. L’une de ces sphères, toujours reconnaisable à sa couleur pourpre, est le noyau mus- culaire, les autres sont les granules roses. Il semble que tout le protoplasma de la cellule musculaire ait été employé à la production de ces corps; Car, ainsi que le noyau muscu- laire, ils se montrent maintenant complètement à nu. Si nous examinons maintenant la masse contractile, nous remar- quons que la résorption de cette dernière se continue comme elle avait commencé dans un stade précédent. Aussi le fais- ceau présente-t-1l l'aspect suivant : La masse contractile montre sur son bord les excavations que nous avons vues se creuser autour de chacune des cellules musculaires; chaque excavation renferme un noyau musculaire et les sept ou huit granules roses produits par la cellule musculaire; ces . formations sont plongées au sein de cette substance finement granuleuse, dont il a été parlé plus haut et qui semble résulter d’une transformation de la masse contractile. La substance finement granuleuse paraît tendre à s'échapper des excavations; (1) PL 9, fig. 9h. VO IECMTESCE, eciiesr ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 1443 car nous la voyons maintenant s’élendre au dehors, se répandre à la surface de toute la masse contractile (1), et former ainsi tout autour du faisceau une sorte de revêtement. Toutefois, la substance finement granuleuse ne parait pas avoir grande tendance à se mélanger au liquide cavitaire, car la bordure qu’elle forme autour du faisceau est toujours assez bien limitée en dehors. De plus, nous remarquons que les granules roses et les noyaux musculaires s’écartent davantage les uns des autres et s’échappent, comme la substance finement granu- leuse, des excavations où 1ls étaient enfermés, pour se répandre avec elle sur tout le pourtour de la masse contractile. Si, au lieu d'examiner le bord d’un faisceau, nous examinons sa par- tie centrale, nous remarquons que des phénomènes analogues se sont accomplis là; la résorption de la masse contractile a continué à se produire autour de chaque cellule intramuscu- laire, pour lui former une loge de plus en plus grande. Dans chacune de ces loges se trouvent sequestrés, au sein d’une ma- tière finement granuleuse, le noyau musculaire et les granules produits par la cellule musculaire. Stade V.— L'examen d’un état plus avancé (2) nous per- met de constater les faits suivants. La masse contractile se montre, comme au stade précédent, entourée de toute part par la matière finement granuleuse; celle-ci ne tend point à se mélanger au liquide cavitaire, et sa limite extérieure répond à peu près à la place qu'occupait le sarcolemme disparu depuis longtemps. Le contour de la substance contractile ne montre plus seulement ces quelques loges que nous avons vues se creuser autour de chacune des cellules mus- culaires, mais il présente maintenant des siauosités pro- fondes et irrégulièrement découpées. Aussi, le faisceau offre- t-il en coupe un aspect que je ne saurais mieux comparer qu’à (DAPIA9/ fe 5. (2) PL. 9, fig. 6 et 7, et pl. 11, fig. 1 et 2. Pour extcuter ces deux der- nières figures, je me suis adressé à celles de mes préparations où les granules étaient le moins serrés et par conséquent le plus faciles à étudier dans leurs détails. 144 M. VIALLANES. l’image que présente sur une carte géographique une terre à rivage sinueux et déchiqueté. Si nous examinons la partie centrale du faisceau, nous remarquons que ces loges, que nous avons vues se creuser au- tour de chaque cellule musculaire, se sont encore agrandies et que leurs contours sont devenus plus sinueux et plus irrégu- liers; de plus, nous observons qu’elles s’excavent surtout dans un seul sens, de dedans en dehors, comme si elles ten- daient à venir s'ouvrir à la surface du faisceau. Tandis qu’au stade précédent, en fait d'éléments figurés, nous trouvions, outre les noyaux musculaires, seulement un petit nombre des granules roses, maintenant nous rencontrons une très grande quantité de ces dernières formations, bien que le nombre des premiers ne semble pas avoir augmenté. Les noyaux musculaires, toujours reconnaissables à la colo- ration pourpre foncé qu'ils prennent sous l'influence du car- min, se présentent sous les aspects suivants : 1° Les uns (1) se montrent isolés et dépourvus de proto- plasma comme ils l’étaient au stade précédent (2); 2° Les uns sont entourés d’une aire de protoplasma, limité lui-même par une membrane d’enveloppe; chacun d’eux se montre ainsi comme le noyau d’une cellule complète tout à fait semblable à ce que nous étudions tout à l'heure, sous le nom de cellule musculaire (3); 3° Les uns,également pourvus de protoplasma,présentent à côté d'eux dans ce protoplasma même qui les entoure, un cer- tain nombre de très petits granules roses, sept ou huit envi- ron (3); 4 Les uns se montrent accolés chacun à un groupe de sept ou huit granules roses de même taille qu'eux et réunis poûr former une mûre (4). Le fait, qu'on peut observer les noyaux musculaires sous ces (1) PI. 9, fig. 9 a. (2) P1:,9, fig.291b. (3) Pl 9 fo 91e: “ANA 0 fo ONE 10, ARTICLE #° 4, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 145 différents aspects, alors que de nombreux granules roses ont déjà été produits, nous conduit à admettre que le noyau mus- culaire, après avoir perdu le protoplasma dontils’était entouré tout d'abord et qui a servi à produire les premiers granules roses, régénère un nouveau protoplasma où se forme une nouvelle portée de granules roses. Au stade que nous étudions, les granules roses qui sont, ainsi que je l'ai dit, très nombreux, se présentent, eux aussi, sous différents aspects qui sont les suivants : 4° Les uns (1) sont isolés et nus, ils se montrent, en un mot, sous l’aspect que nous leur décrivions lorsque, après s’être formés aux dépens du protoplasma de la cellule HHUSCUALTE, ils se séparent de leurs frères ; 2° Les uns (2), se Monte ant entourés d’une aire de proto- plasma limité extérieurement par une membrane, semblent être devenus chacun le noyau d’une cellule véritable ; 3° Les uns (3), également entourés de protoplasma, laissent voir à côté d'eux, dans ce même protoplasma, un certain nombre de granules roses plus petits ; 4 Les uns (4) sont réunis par groupes de sept ou huit de tailles égales, pour former des sortes de müres tantôt nues, tantôt revêtues d’une membrane d’enveloppe. L'observation des différents états sous lesquels se présentent les granules roses, jointe à la remarque déjà faite de l’accrois- sement rapide de leur nombre, nous contraint à admettre que ces corps sont capables de se multiplier et que leur multipli- cation s'opère de la manière suivante : Chaque granule s’en- toure d’une aire de protopläsma et devient ainsi le noyau d’une vraie cellule; dans le protoplasma de cette cellule appa- raissent de nouveaux granules qui grandissent puis se séparent, pour se multiplier à à leur tour par un procédé analogue à celui qui a servi à leur donner naissance. (1) PI. 9, fig. 9 à, n, n’. CPP ho9 (3) PL. 9, fig: 9 K, L. (4) PI. 9, fig. 9 m. L46 H. VIALLANES. Je dois ajouter qu'il paraît peu probable que les granules roses dérivent d'éléments extérieurs au faisceau; car celui-ci, bien qu'ayant depuis longtemps perdu son sarcolemme, garde toujours son contour net, la substance finement granuleuse aui l'entoure n’ayant point tendance à se laisser pénétrer par les éléments voisins, ni à se mêler au liquide cavitaire (1). On ne peut non plus penser que les granules puissent dériver d’une manière directe de la masse contractile ; aucun fait ne peut nous autoriser à faire une semblable supposition. Je suis porté à considérer comme des cellules, ces granules que je viens de décrire, ces corps à forme définie qui dérivent des cellules musculaires qui s’aceroissent et se multiplient. J'ai dit plus haut : qu'au stade, dont l'examen nous occupe maintenant, le contour de la masse contractile était sinueux et profondément découpé. Il est à remarquer que c’est dans es plus profondes de ces découpures que les granules sont Île plus accumulés; ceci nous donne à penser que c’est devant l’envahissement de ces éléments nouveaux que la substance contractile disparait comme si elle leur servait de nourri- ture. Stede VI. — Si nous examinons un état plus avancé, nous remarquons que la résorption de la masse contractile a conti- nué à s’opérer là surtout où les granules sont accumulés en plus grand nombre, et que toutes les loges intrafasciculaires s'ouvrent maintenant à la surface de la masse contractile érodée, en prenant l’aspect de golfes profonds et sinueux. Le contour déchiqueté de la substance contractile est toujours parfaitement net et tranché, la substance granuleuse dans laquelle plongent les granules est, elle aussi, parfaitement limitée à l'extérieur et ne manifeste aucune tendance à se mé- langer avec le fluide cavitaire. Dans son ensemble, le faisceau présente, à très peu de chose près, la même forme et les mêmes dimensions qu’il offrait chez la larve avant l’histolyse; ce qui nous montre que, dans leur ensemble, les granules présentent: (HP 9 000 DICO UME ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 147 un volume égal à la quantité de substance contractile qui à disparu devant leur envahissement et dont ils semblent s'être nourris. Si, au lieu d'examiner la coupe transversale du faisceau, nous observons la surface de celui-ci, nous remarquons qu’il offre un aspect des plus particuliers, grâce à ces excavations remplies de granules qui s'étendent irrégulièrement en serpen- tant dans toutes les directions. Stade VIT. — Si nous étudions en coupe transversale un état plus avancé encore, nous remarquons que la substance contractile à entièrement disparu, et qu’à sa place on ne trouve plus qu’un amas de granules encore en voie de multipli- cation, c’est-à-dire se présentant sous ces aspects variés que je décrivais au stade V. Au milieu de ces granules roses, nous trouvons un certain nombre de noyaux rouge pourpre : ce sont les noyaux musculaires, se présentant sous les divers aspects que je décrivais au stade V. Il est à remarquer que, malgré la destruction complète de la substance contractile, le faisceau primitif conserve encore sa taille et sa forme générale ; ainsi, la masse contractile parait avoir été remplacée, volume à volume, par les éléments libres devant l’envahissement desquels elle a disparu. Stade VIIT. — Afin de bien comprendre les phénomènes qui vont s’accomplir maintenant, il convient d'étudier, non plus un faisceau primitif seul, mais de porter son attention sur une coupe d'ensemble pratiquée à travers l’abdomen de la nymphe. Sur une telle préparation, nous reconnaissons, en allant de dehors en dedans, les parties suivantes : tout d’abord l’hypoderme larvaire, dont les grandes cellules si remarquables ne sont point encore altérées; immédiatement après vient la couche des muscles; plus en dedans encore, une épaisse assise de cellules adipeuses encore parfaitement recon- naissables et dont les dimensions se sont considérablement accrues, mais dont la membrane persiste encore. Cette couche (1) PL. 9, fig. 9. 148 HX. VRALELANES. de cellules sépare les muscles d'avec la masse intestinale qu’on voit au centre de la coupe. Maintenant que nous sommes bien orientés, portons notre attention sur la couche musculaire; nous trouvons là des fais- ceaux primitifs arrivés à différents états : les uns n’ont point encore perdu toute leur masse contractile ; d’autres sont arri- vés au dernier des stades que J’ai décrits précédemment, c’est- à-dire que leur masse contractile est entièrement remplacée par des granules. À côté de ces faisceaux, nous en trouvons d’autres, plus avancés encore, et en voie de perdre leur auto- nomie. La matière finement granuleuse, tout à l’heure encore assez nettement limitée, diffuse maintenant au dehors et se mélange au liquide cavitaire; les granules s’écartent les uns des autres, se répandent dans ce liquide et quittent ainsi la place qu’oceupait jadis le faisceau. Pour être devenus libres, les granules n’ont point changé de caractères, on les trouve toujours sous ces différents aspects que Je décrivais au stade V. Ainsi, à la suite de la disparition de chaque faisceau primi- tif, une grande quantité de granules est mise en liberté et entre en circulation dans le liquide cavitaire. Il en résulte que, quand on examine une coupe totale de l'abdomen à un stade plus avancé encore, on ne trouve plus à Ja place de la couche musculaire, qu'une grande quantité de granules se montrant sous tous les aspects que j'ai décrits et plongeant à même dans le liquide sanguin. Après leur mise en liberté, les granules entrent en cireula- tionet se répandant dans toute la cavité générale de la nymphe, ‘s'insinuent dans toutes les lacunes qui s’ouvrent devant eux; aussi les rencontrons-nous jusqu'aux extrémités des mem- bres nouvellement formés de l’imago. Ainsi que je le disais plus haut, bien que les granules aient des propriétés optiques assez bizarres, un mode de reproduc- tion bien spécial, je serais assez porté à considérer ces corps .comme des êtres vivants, comme des cellules, puisque tous ARTICLE N° f. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 149 dérivent d’une cellule, et surtout puisqu'ils sont capables de s'accroître et de se multipher (1). Immédiatement après leur mise en circulation, alors que la substance contractile a entièrement disparu, les granules se rencontrent aux différents états de développement que J'ai déjà décrits. 1° Les uns sont isolés et nus, c’est-à-dire ne présentent aucune trace de protoplasma ; 2° Les uns sont entourés chacun d’une aire de protoplasma, semblant ainsi être devenus chacun le noyau d’une cellule complète ; 3° Les autres sont dans le même état, mais de plus on trouve dans le protoplasma qui les entoure un certain nombre de granules plus petits ; die 4° D'autres enfin plus avancés sont réunis par groupes de huit ou dix pour former des mûres, tantôt nues, tantôt enve— loppées chacune par une membrane. J'aurai, dans la suite, souvent à parler de ces formations, que j'appellerai des granules müriformes. Quelques jours encore après la destruction complète de tous les muscles larvaires, on rencontre dans la cavité générale de la nymphe, des granules à tous les états de développement que je viens d’énumérer. Mais plus tard, chez des nymphes plus âgées, on remarque que les granules ont diminué de nom- bre et que de plus tous se montrent à l’état müriforme. Cette observation me paraît indiquer qu’à un moment donné, les granules cessent de se multiplier, puis qu’ils atteignent tous l’état müriforme pour ne plus le dépasser. Mais avant d'aller plus loin, je crois nécessaire de faire (1) Il est à remarquer que les granules roses ressemblent au plus haut degré aux éléments du vitellus blanc des oiseaux et des reptiles si soigneusement décrits par Clarck (Embryology of the turtle. Contributions to the natural history of the United States of N. America. vol. Il, part. III, 4857); par Lere- boullet (Recherches d’embryologie comparée sur le développement de la truite, du lézard et du limnée. Paris, 1863); par His (Untersuchungen über die erste Anlage der Wirbelthierleibes. Leipzig, 1868) et dont la nature cellulaire n'est point admise par tous les auteurs. 150 H. VIALLANES. remarquer que j'ai retrouvé toutes les images qu'avait obser- vées M. Ganin ; et, si les conclusions auxquelles j'arrive diffèrent si profondément des siennes, c’est que j'ai, touchant les trans- formations du faisceau primitif, observé un certain nombre d’autres images qu'il n'avait même pas aperçues; il suffit, pour s’en convaincre, de lire la description que M. Ganin donne de l’histolyse des muscles, et qu'au commencement de ce chapitre J’ai citée im extenso. Ainsi le naturaliste russe déerit une image parfaitement réelle, quand il nous dit : € qu'à son dernier état le faisceau primitif n’est plus représenté que par un amas de petites boules qui ne se distinguent en rien des nucléoles du sarcolemme (1). » Mais faute, sans doute, de les avoir étudiées avec des méthodes appropriées, M. Ganin n’a reconnu ni l’origine ni la nature de ces formations que j'ai décrites, puisqu'il les considère simplement comme le produit d’une « cassure spéciale » de la masse contractile. Aussi le savant russe arrive-t-il à cette conclusion, que le fais- ceau primilif disparaît par dégénérescence, c’est-à-dire meurt dans toutes ses parties et sans qu’un seul de ses éléments cellulaires survive à cette destruction. Recherchons maintenant quelle est la signification de ce phénomène de destruction du tissu musculaire de la larve, s’il est isolé dans la nature ou si nous rencontrons ailleurs des processus analogues. Si la destruction des tissus est un phénomène rare à l’état physiologique, il est fréquent à l’état pathologique et nous savons le déterminer expérimentalement. Quand on irrite un tissu cartilagineux, osseux, conjonc- tif, elc., celui-ci se détruit en obéissant à des lois générales parfaitement connues. Chaque cellule subissant une évolution régressive revient à l’état de cellule embryonnaire, et prolifère activement; devant l’envahissement de cet essaim de cellules nouvelles, la substance intercellulaire est résorbée, elle semble (1) J'ai montré plus haut que ce que M. Ganin croyait être un nucléole hypertrophié est en réalité un noyau musculaire. ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 151 leur servir de pâture. Quand elle a complètement disparu, le tissu n’est plus représenté que par un amas de cellules em- bryonnaires. En étudiant le mode de destruction des muscles de la larve, nous avons assisté aux différentes phases d’un processus assez analogue ; en effet, nous voyons chaque élément cellulaire (le noyau) du faisceau devenir une cellule vraie, puis celle-ci proliférer activement, la substance contractile se résorber devant l’envahissement de ces éléments jeunes, comme si elle était mangée par elles, et enfin disparaître en entier pour être remplacée par la masse des granules produits quise mul- tiplient sans cesse. On se demandera sans doute pourquoi J'ai été chercher mes termes de comparaison dans la pathologie du tissu osseux, car- tilagineux, etc., au lieu de m'adresser à celle du tissu museu- laire qui doit nous intéresser plus directement. C’est que la myosite franche, l’inflammation du faisceau primitif lui-même, est un processus rare, bien moins connu, et qu'il est difficile de déterminer expérimentalement. Mais si peu nombreuses et si peu détaillées que soient les observations que j'ai pu trouver à ce sujet, elles suffisent amplement à nous montrer que la nature procède de même, qu'il s'agisse de détruire le tissu musculaire d’une larve pour obéir aux lois physiologiques du déveioppement, ou bien que ce soit celui d’un animal quelconque qui doive disparaître sous l’influence d’une cause morbide, À la suite d’une irritation traumatique, dans les maladies infectieuses graves, typhus abdominal et exanthémique (Wal- deyer et Zencker), la fièvre récurrente et la fièvre puerpérale (Popoff), les noyaux musculaires prolifèrent et donnent nais- sance à des éléments arrondis pourvus d’un noyau, envahissant tout le contenu du sarcolemme. - C’est bien par un"procédé à peu près analogue que dispa- raissent, eux aussi, les muscles de la larve. M. Chun, d’ailleurs, que j'ai cité plus haut, l'avait remarqué avant moi, puisqu'il compare les phénomènes qui s’accom- 159 H. VIALLANES. plissent dans les museles de la chenille au moment de la méta- morphose aux lésions que la trichinose détermine dans Îles faisceaux musculaires des vertèbres (Ghun, Ueber den Bau, die Entwikelung und physiologische Bedeutung der Rectaldrüsen bei den Insecten. Inaug. dissert. 31 pages, 3 planches. Franck- fort, 1875). Si je me permets ces incursions sur le domaine de la méde- cine, c'est qu'aujourd'hui l’histologie normale et l’histologie pathologique ne font plus qu’une science et sont inséparables. Cette fusion s’est opérée grâce aux travaux de lillustre auteur de la « Pathologie cellulaire », M. Virchow, grâce aussi à M. Ranvier à qui revient l'honneur d’avoir montré que quand, sous linfluence des lois physiologiques du développement, le cartilage disparaît pour faire place à l’osce premier passe par les mêmes phases que s’il devait se détruire sous l'influence d’une irritation expérimentale ou d’origine morbide. En résumé, au moment où la larve devient nymphe, ses faisceaux primitifs paraissent se détruire par le même pro- cédé que se détruit un tissu irrité, soit expérimentalement, soit sous l'influence d’un agent morbifique, c’est-à-dire que ses éléments cellulaires retournent à l’état de cellules com- plètes, lesquelles prolifèrent, si bien que le tissu primitif est remplacé par un amas d'éléments nouveaux. En somme, nous avons affaire à un processus qui paraît assez analogue à celui de l’inflammation. Mais je dois me hâter de dire que, s'il y a grande analogie, il n’y a point identité. Dans l’inflammation, en effet, les éléments produits sont des cellules embryonnaires typiques; dans l’histolyse des muscles larvaires, ce sont des éléments qui, bien qu'ayant la propriété de se multiplier, présentent pourtant des caractères tout à fait spéciaux et qui les éloignent notablement des cellules em- bryonnaires typiques. On s’accorde généralement aujourd’hui à considérer deux grands groupes de tissus, qui d’ailleurs n’expriment que Îles termes les plus éloignés d’une série continue. Le premier de ces groupes comprend les tissus formés de cellules intime- ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 14 ment et immédiatement soudées les unes aux autres, les épi- théliums; le second comprend les tissus formés de cellules séparées les unes des autres par une matière fondamentale abondante, caractéristique par ses propriétés chimiques et physiques (os, cartilage, tissu conjonctf et ses dérivés). Les tissus du second groupe diffèrent en outre de ceux du premier par leur évolution et par les phénomènes dont ils sont le siège quand, sous l’influence d’uneirritation, leurs éléments revien- nent à l’état des cellules embryonnaires et prolifèrent. Quant au tissu musculaire, sa place n’est point encore fixée avec certitude; pour ceux qui, comme M. L. Frédéricq (4), consi- dèrent chaque faisceau primitif comme un organite pluricel- lulaire, chaque noyau représentant à lui seul un élément cel- lulaire, le sarcolemme et la substance contractile urie sub- stance fondamentale; le tissu musculaire appartient au deuxième groupe. Pour les nombreux histologistes qui, comme M. Külliker et M. Ranvier, pensent au contraire que chaque faisceau primitif représente une cellule, dont l'enveloppe serait devenue le sar- colemme, dont une partie du protoplasma serait devenue la substance contractile, et dont le noyau, primitivement unique, se serait fragmenté en autant de morceaux qu'il y a de noyaux dans chaque faisceau, pour ces histologistes dis-je, le tissu mus- culairedoitconstituer ungroupe à part.J’ajouterai qu’un certain nombre d’autres opinions ont encore cours dans la science. Ce désaccord vient de ce que les faits fournis par l’étude de l’histogenèse du tissu musculaire ne sont pas suffisamment concluants, et peut-être aussi de ce qu’on ne connait presque pas le processus de destruction de ce tissu. Si ce processus doit être pris en considération, Ge il s’agit de rechercher la nature d’un tissu et ses en il me paraît certain que le tissu musculaire doit être rapproché beaucoup des tissus conJonctifs. (1) L. Fredericq, Génération et structure du tissu musculaire. Bruxelles, 1875. { 154 I. VEALLANES,. Que l’on compare, en effet, la description et les figures que j'ai données de l’histolyse du tissu musculaire, avee les descrip- tions et les figures de lostéite (4) et de la chondrite (2) qui ont été publiées par les anatomo-pathologistes, et l’on verra que le noyau musculaire et les éléments qui en dérivent jouent, par rapport à la masse contractile, le même rôle que la cellule car-* tilagineuse ou osseuse et leurs dérivés jouent par rapport à la substance fondamentale de l'os ou du cartilage. Sans vouloir encore prendre parti, je ferai seulement re- marquer que cette observation vient appuyer l’opinion de M. L. Frédérieq. Afin de juger de la valeur des caractères qu’on peut tirer du mode de destruction du faisceau primitif, quand on veut éta- blir la signification morphologique de cet organite, il est néces- saire de rechercher s'il n'existe pas une relation quelconque entre les phases de sa destruction et celles de sa genèse. Les études de M. Weismann, sur le développement du faisceau primitif de la larve de ll Mouche, nous permettront de le faire. Cet observateur a vu (3) que, chez une larve, au sortir de l'œuf, un faisceau primitif était composé d’un sarcolemme renfermant une masse granuleuse, au sein de laquelle étaient plongés des éléments cellulaires en quantité considérable. En suivant le développement des jeunes faisceaux ainsi consti- tuës, 1l à remarqué que la substance granuleuse se transfor- malt peu à peu en substance contractile, et qu'à mesure que cette transformalion s’effectuait, les éléments cellulaires dimi- nuaient en nombre, et que finalement il n’en restait plus qu'un petit nombre, dont chacun constituait un noyau muscu- laire. En mettant en parallèle mes observations sur la destruction du faisceau et celles de M. Weismann sur sa genèse, on ne peut (1) Cornil et Ranvier, Manuel d'anatomie pathologique, 1881, p. sec et suiv., fig. 185 et 227, fig. 103. @) Id. ibid., p. 95 et suiv., fig. 43. (3) Weismaun, Die Entwikelung der Dipteren, p.106 du tirage à part. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 195 manquer de remarquer qu’il existe une certaine harmonie entre les deux phénomènes. Dans son état premier, le faisceau primitif est constitué par une matière granuleuse, où sont plongés de nombreux élé- ments cellulaires; dans son état dernier, au moment où il va bientôt perdre son autonomie, il est constitué d’une manière analogue. À mesure que le faisceau se développe, la matière oranuleuse fait place à la substance contractile, et ses élé- ments cellulaires diminuent en nombre. Par opposition, nous voyons qu’à mesure qu'il marche vers sa destruetion, la sub- stance contractile se transforme en matière granuleuse, et les éléments libres deviennent plus nombreux. On Île voit, 1l existe une harmonie certaine entre le processus de genèse et celui de destruction; il semble que le faisceau qui marche vers la destruction revienne sur ses pas, repasse par des états suc- cessifs qui rappellent ceux qu'il avait parcourus en se déve- loppant, et qu'il parcoure ainsi les divers stades d’une évolu- tion régressive. Je désignerai sous le nom d’histolyse par évolution régres- sive ce mode de destruction du faisceau primitif, dont je viens de décrire les divers stades. | J'ai dit plus haut que, dès les premiers jours de la vie nymphale, la plupart des faisceaux primitifs de la larve mon- traient leurs noyaux déjà transformés en cellules vraies. Mais à côté d’eux on en voit d’autres qui semblent tout à fait in- tacts. Comme je le montrerai plus loin, on peut déjà affirmer que les noyaux de ces retardataires ne proliféreront pas, et qu'amnsi ils ne disparaîtront pas selon le mode que j'ai décrit plus haut. Si en effet on examine la coupe d’une pupe du second jour, on remarque que, parmi les faisceaux muscu- laires, les uns sont déjà à un état assez avancé d'évolution régressive, tandis que d’autres offrent dans leur noyau des al- térations qui nous montrent bien que cet élément est déjà devenu impropre à la reproduction et va dégénérer. Tandis que le noyau musculaire se présentait chez la larve coinme un corps ovalaire, entièrement coloré er rouge, montrant dans 1956 H, VIALLANES. son intérieur seulement un petit nombre de nucléoles plus fon- cés; le noyau (1) du faisceau qui va dégénérer, se montre comme un corps ovoide limité par un double contour bien net etne renfermant, en fait de parties colorées, qu’un groupe central de nucléoles très petits etserrésles uns contre lesautres. Rien n’est plus facile que de suivre les modifications succes- sives de ce noyau, un même faisceau en présentant toujours plusieurs à différents états (2). Les nucléoles deviennent de plus en plus rares, ils s’écartent les uns des autres, puis enfin disparaissent complètement, si bien que le noyau se trouve réduit à sa seule membrane d’enveloppe et se présente ainsi comme une coque vide. Tandis que les modifications du noyau s’accomplissent, la substance sontractile, de son côté, subit de profondes altéra- tions (3). Le sarcolemme disparait de bonne heure, la masse contractile conserve longtemps encore sa striation longitu- dinale et transversale, comme si elle se dissolvait à sa surface, et cela d’une façon si régulière, que ses contours restent sim- ples et qu’elle garde jusques à la fin sa forme générale. Le produit de cette sorte de dissolution semble être une substance incolore, très finement granuleuse et demi-lquide. Pour s’as- surer que les choses s’accomplissent bien comme Je l’indique, il suffit d'examiner un faisceau primitif en voie de dégénéres- cence, et tel que ceux que j'ai figurés (4). On voit que le fais- ceau à conservé sa forme générale : à son centre se montre un. cylindre régulier de substance contractile; ce cylindre est en- veloppé par une couche de matière très finement granuleuse et nettement limitée en dehors; plongés dans cette dernière, se montrent les noyaux musculaires présentant tous les degrés d’altération que je viens de décrire. En étudiant des états plus avancés, on remarque qu'à mesure que le cylindre con- tractile se dissout, les noyaux disparaissent, la matière fine- (1) PI. 9, fig. 2 et fig. 8 a. CPI ON Ne oethe 1074, D, cd, ef. (8) PI:9; fig. 3/'et 4. (4) PL. 9, fig. 3 et 4. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 157 ment granuleuse qui lentoure perd ses limites et semble se mêler au liquide cavitaire. Je désignerai sous le nom d’his- tolyse par dégénérescence (1) ce mode de destruction du faisceau primitif, que Je viens de faire connaitre. Il'est à remarquer que, si les faisceaux primitifs qui subiront l’histolyse par dégénérescence du noyau sont les derniers à présenter des altérations, ce sont aussi les derniers à dispa- vaître tout à fait. Ainsi, chez une nymphe où tous les faisceaux qui ont subi l’histolyse par évolution régressive ont depuis longtemps perdu leur autonomie, on rencontre encore des faisceaux en dégénérescence. Mais comment admettre que deux faisceaux musculaires voisins et qui paraissent placés dans des conditions identiques aient des sorts si différents ; que dans l’un les éléments cellu- laires- prennent un surcroît d'activité et prolifèrent, tandis que dans l’autre ces mêmes éléments meurent et dégénèrent. Les hypothèses que je pourrais faire à ce sujet ne repose- raient sur aucune base solide. Je ferai seulement remarquer que les analogies que j'ai signalées entre le processus de l’hys- tolyse et celui de l’inflammation se poursuit jusqu’au bout. Nous savons, en effet, que quand on irrite un tissu, la plupart de ses éléments. sous l'influence de cette modification du mi- lieu intérieur, prennent un surcroît d'activité et prolifèrent, tandis qu’un certain nombre sont frappés de mort et dégénè- rent comme s'ils n'avaient pu s’accommoder de ces nouvelles conditions. CONCLUSIONS. 4° Les fibres musculaires de la larve disparaissent toutes dès le début de la vie nymphale (Weismann). X Cette destruction s'effectue suivant deux modes : l’un ca- ractérisé par la prolifération du noyau, c’est ce que j'appelle l’histolyse par une évolution régressive; l'autre, au contraire, (1) Les phénomènes que je viens de décrire n’ont été observés par aucun de mes prédécesseurs. ANN. SC. NAT., ZOOL,, NOVEMBRE 1882. XIV. 11. — ART. N° 1. 158 : H. VEALLANES. par la dégénérescence et la mort de ce même noyau, c’est ce que j'appelle l'histolyse par dégénérescence. 3° L’histolyse par évolution régressive est caractérisée par les phénomènes suivants : Les noyaux musculaires deviennent sphériques, chacun d'eux s'enveloppant d’une aire de protoplasma devient une cellule que j'appelle cellule musculaire. Celle-ci proliférant, donne naissance à un grand nombre d’autres élé- ments (granules roses) qui se multiplient activement. La masse contractile disparaît devant l’envahissement de ces nouveaux éléments, comme si elle leur servait de nourriture. Aussi quand la substance contractile a entièrement disparu, le faisceau n’est plus représenté que par un amas de granules qui ensuite s’écar- tent les uns des autres et se répandent dans la cavité générale. 4 L'aspect et le mode de multiplication de la cellule muscu- laire et des éléments quien naissent, sont très spéciaux ; ces dermers ressemblent beaucoup aux éléments du vitellus des oiseaux el des reptiles. »° L’histolyse du faisceau par dégénérescence s'effectue de la manière suivante : Les nucléoles colorables qui renferment le noyau deviennent de plus en plus rares, puis disparaissent, si bien que le noyau se trouve bientôt réduit à sa seule enveloppe qui se montre comme une coque vide. Pendant ce temps, la sub- stance contractile disparait peu à peu en se dissolvant d’une façon régulière de la périphérie au centre. 6° Le résultat dernier de l'histolyse du tissu musculaire est, en somme, de faire disparaître les muscles de la larve et de meltre en circulation dans la cavité générale une quantité con- sidérable d'éléments ressemblant aux éléments du vitellus des oiseaux et des reptiles. ARTICLE N° { HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 199 CHAPITRE II. HISTOLYSE DU CORPS ADIPEUX. Historique. — La structure générale du corps adipeux est trop connue que pour je donne l'historique de tous les travaux relatifs à ce tissu. Je rappellerai seulement qu’il est composé par de simples cellules au sein du protoplasma desquelles la graisse s’amasse en gouttelettes. Mais j'analyserai avec grand soin les travaux des anatomistes qui se sont occupés des modifications que ces éléments cellulaires subissent au cours du développement. | M. Weismann (1), 1864, s’exprime ainsi : « Au second jour de la vie nymphale les cellules du corps adipeux se renflent, leur contenu sombre et finement granuleux se concentre au- tour du noyau. Ensuite la membrane se rompt et le contenu se disperse tandis que le noyau disparaît. » M. Auerbach (2), 1874, étudie les modifications que subis- sent les cellules du corps adipeux depuis la sortie de l’œuf jusqu’à l’époque de la vie nymphale exclusivement. Il constate tout d’abord que durant la vie larvaire, les cellules du corps adipeux ne se multiplient pas, ainsi que d’ailleurs celles de beaucoup d’autres tissus, mais qu’elles s’accroissent seule- ment. Il remarque qu'à mesure que la larve se développe, des modifications s’accomplissent dans le noyau des cellules du corps adipeux. Ces modifications sont les suivantes : Quand la larve sort de l’œuf, les cellules du corps adipeux se montrent avec un protoplasma clair non chargé de gouttes graisseuses, leur noyau est arrondi, pourvu d’une membrane d’enveloppe et renferme un seul nucléole arrondi. Plus tard, on voit le nucléole en voie de division binaire, le noyau ren- ferme alors deux nucléoles. À un âge plus avancé, il en ren- (4) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren, tir. à part. Leipzig, 1864, p. 176-177. (2) Auerbach, Organologische Studien. Breslau, 1874, Heft IT p. 142 et suiv., pl. IT, fig. 1-7. 160 HE. VIALLANES,. ferme trois, puis quatre, puis cinq, enfin un grand nombre. Mais ces nucléoles sont alors de deux tailles, quatre ou cinq plus grands occupent le centre, les plus petits très nombreux sont accolés à la face interne de la membrane d’enveloppe du noyau. À partir de ce moment, à mesure que la larve s'accroît, les gros nucléoles diminuent de nombre par rapport aux petits, et quand l’accroissement est complet on ne trouve plus dans le noyau qu'un gros nucléole central et appliqués contre les parois, un grand nombre de petits. À ce moment tant de gouttelettes graisseuses se sont déposées dans le protoplasma que l’obser- vation est rendue très difficile. M. Auerbach n’a pas suivi plus avant le sort des cellules du corps adipeux, mais 1l suppose, sans s'appuyer d'ailleurs sur un seul fait d'observation directe, que ces nucléoles sont des cellules filles qui, plus tard, sortiraient du noyau qui leur au- rait pour ainsi dire servi de « chambre incubatrice ». (Bru- traum.) | M. Künckel d'Herculais (1), 1875, ne donne aucun rensei- anement sur les modifications histologiques que subissent les cellules du corps adipeux, il émet seulement, relativement à leur rôle, l’opinion suivante. Il pense que ces cellules meu- rent et dégénèrent et que les matériaux qu'elles avaient amas- sés durant la vie larvaire servent simplement d'aliments et qu’ainsi elles jouent seulement le rôle d’un vitellus nutri- tif (2) par rapport aux tissus nouveaux qui se forment. Malheureusement, 1l ne dit point quels sont les faits qu'il a observés appuyant cette manière de voir. I (3) remarque seu- lement que lorsque les muscles de l’imago sont déjà ébau- chés, on rencontre encore dans le corps de la nymphe les cellules du corps adipeux non altérées. M. Ganin (4), 1875, décrit longuement les transformations (1) Künckel d’Herculais, Recherches sur l’organisation et le développement des. Volucelles. Paris, 1875. (2) Künckel, loc. cit., p. 199. (3) Id, loc. cit., p. 198. (4) Ganin. Matériaux pour servir à l'histoire dù développement post-em- ARTICIE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 161 des cellules du corps adipeux durant le développement post- embryonnaire. Il a observé les faits suivants : Dèsledébut de la vie nymphale, les cellules du corps adipeux grossissant beau- coup deviennent sphériques de polygonales qu’elles étaient, elles cessent alors d’être adhérentes les unes aux autres. Le nucléole de leur noyau disparaît ensuite, mais même avant qu'il ait disparu, on voit apparaître dans la cavité du noyau des filaments qui s’anastomosent entre eux. Dans le proto- plasma des cellules du corps adipeux, se montrent « des glo- bules gras d’un jaune foncé ; en outre, des gouttes de graisse ordinaire et une grande quantité de globules luisants à mou- vements moléculaires. Plus tard, le protoplasma des cellules adipeuses se transforme en un liquide visqueux, beaucoup de céllules se désagrègent alors en particules séparées de moin- dres dimensions, composées de gouttes grasses, de boules d’un jaune foncé, de sphéroïdes foncés. Dans quelques-unes de ces parties séparées, on rencontre parfois le gros noyau réticulaire, non modifié, entouré de sa membrane, mais ne possédant pas de nucléole ». M. Ganin fait remarquer que toutes les cellules du corps adipeux ne disparaissent pas en même temps, et que même un certain nombre d’entre elles subsistent toujours et se retrou- vent chez l’imago. M. Ganin pense que les faits qu’il a observés prouvent que les cellules du corps adipeux qui disparaissent sont frappées de mort et dégénèrent, et qu’ainsi aucune partie vivante ne restant de ces éléments, leurs débris servent seule- ment de matériaux nutritifs aux tissus nouveaux qui se forment dans la nymphe. En résumé, pour tous les auteurs qui m'ont précédé, les cellules du corps adipeux dégénèrent et meurent durant la vie nymphale. Je laisse de côté cette curieuse opinion de M. Auer- bach sur le rôle des noyaux de ces cellules, il n’a fait, à cet égard, aucune observation directe et donne lui-même cette manière de voir comme une pure hypothèse. “bnyonnaire .des : Insectes (en russe). Varsovie, 1875, p. 34 et suiv., pl..I, fig. 18, et pl. 3, fig. 19 et 20. 162 HI. VEALLANES. Observations. — J'arrive maintenant à mes observations personnelles. Si chez une larve de Mouche, quelques jours avant son passage à l’état de pupe, on observe les cellules du corps adipeux après les avoir fixées par l'acide picrique et les avoir colorées au carmin, on remarque qu’elles sont constituées comme l'indique M. Auerbach. Chacune d'elles .se présente avec un contour assez régulièrement hexagonal, et est limitée par une membrane d’enveloppe mince, mais très facile à voir. Au centre du protoplasma rempli de granulations graisseuses très fines se montre un gros noyau, à contour cir- culaire. Ce noyau est nettement pourvu d’une enveloppe par- faitement distincte, 1l est rempli par un suc nucléaire incolore renfermant de nombreux nucléoles fortement colorés. La plupart de ces derniers sont petits et se montrent directement appliqués contre la paroi interne de la membrane d’enveloppe du noyau, quatre ou einq plus gros occupent au contraire le centre. Si, dans les mêmes conditions, on examine les cellules du corps adipeux à un état de développement plus avancé, quand la larve est devenue immobile, quoique n’ayant pas encore pris la teinte brune caractéristique de la pupe, on remarque que les cellules du corps adipeux ont beaucoup augmenté de volume, d’hexagonales qu’elles étaient, elles sont devenues sphériques, aussi se détachent-elles facilement les unes des autres. Les granulations graisseuses qu’elles renferment main- tenant sont devenues si abondantes, que si l’on n’avait soin de traiter les pièces par l’éther, l'observation serait impossible. Il faut avoir soin de n’employer ce réactif qu'après la colora- tion, laquelle doit être elle-même suivie d’une immersion dans l'alcool. On remarque que le noyau n’a pas changé d’aspect, seulement il a acquis une taille un peu plus considérable; de plus, les nucléoles qu’il renferme sont moins nombreux qu’à l’état précédent. Mais le point le plus important à noter, c’est que dans le protoplasma qui présente des striations rayonnantes autour du noyau comme autour d’un centre, on observe de très ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 163 nombreux granules sphériques colorables en rouge par le carmin. À partir de ce moment on ne peut plus étudier avec certitude les transformations du corps adipeux, sans avoir recours aux coupes totales faites après traitement par Le collodion selon le procédé indiqué plus haut. À un état plus avancé du développement on remarque que les granules sphériques plongés dans le protoplosma parais- sent avoir augmenté de taille et être devenus plus nombreux. La membrane d’enveloppe de la cellule adipeuse persiste toujours (1). Quant au noyau il à encore augmenté de taille, mais 1l n'offre plus un contour circulaire, il est maintenant irrégulièrement elliptique, de plus ses nucléoles se sont encore réduits en nombre. | Les cellules du corps adipeux, qui d’ailleurs n’ont cessé de s’accroitre, présentent à un stade plus avancé une taille vrai- ment colossale. Les granules sphériques renfermés dans le protoplasma ont aussi beaucoup grossi; ils sont tous parfaite- ment sphériques, ont un aspect réfringent et leur structure parait tout à fait homogène. Les nucléoles du noyau sont devenus encore moins nombreux, on n’en compte plus que huit à dix petits et trois ou quatre gros. Si déjà à cette époque on examine les granules contenus dans le protoplasma avec un objectif un peu fort (l'objectif n° 9, Hartnack, suffit amplement), on remarque que chacun d’eux se montre comme une petite sphère fortement colorée en rouge, mesurant 6 millièmes de millimètre et environnée par une étroite bordure claire nettement limitée extérieurement. Ainsi chacun des granules du protoplasma de la cellule adi- peuse paraît être devenu le noyau d’une vraie cellule complète. Il me paraît probable que M. Ganin avait ces éléments sous les yeux quand il indiquait dans le protoplasma des cellules du corps adipeux la présence « d’une quantité considérable de globules luisants à mouvements moléculaires ». (4) PI. 11, fig. 4. ï 164 LH. VIALLANES. Je n'ai point été assez heureux pour observer dans le noyau de la cellule adipeuse ces filaments réticulés qu'y décrit M. Ganin. Le suc nucléaire m'a toujours apparu parfaitement homogène. Jamais non plus je n’ai rencontré qu'un seul nu- cléole dans ce noyau, ainsi que la observé le naturaliste russe (1). Un peu plus tard la membrane d’enveloppe de la cellule du corps adipeux se rompt pour mettre en liberté tout cet essaim de granules renfermés dans son protoplasma. Les diverses phases de cette sortie sont faciles à observer déjà sur des pupes du second jour et grâce au collodion qui prévient tout déplacement des éléments. La membrane d’enveloppe de la cellule du corps adipeux ne paraît point disparaitre sur toute son étendue en même temps mais se rompre d’abord en un point. En effet on remarque des cellules dans lesquelles l’enve- loppe n'existe plus sur une certaine étendue; par l’orifice ainsi établi fait saillie un groupe de granules. À un stade plus avancé on neremarque plus trace de l'enveloppe de la cellule mère (2), cette dernière n’a pourtant point encore perdu son autonomie, car les granules, bien que s’étant un peu écartés les uns des autres, restent encore groupés, et leur ensemble constitue un amas sphérique au centre duquel se trouve le noyau de la cellule mère non encore détruit. Comme dans le stade précédent, nous ne trouvons plus trace du protoplasma de la mère, les granules sont séparés les uns des autres par des espaces clairs, ils semblent maintenant plongés à même dans le liquide cavitaire. Le noyau de la cellule mère (3) n’a pas changé de taille, il se présente seulement avec un aspect un peu différent de ce que nous observions au début de la vie nympbale, il est plus ou moins elliptique, se montre limité par une membrane mince circonscrivant un espace complètement (1) Cette divergence vient sans doute de ce que je ne me suis pas placé dans des conditions identiques. Je ne pouvais le faire, ne sachant à quels procédés a eu recours le savant russe, ‘ (2) PL. 10, fig. 10. (OMPIEMO ep ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 165 clair dans lequel se trouventseulement quelquesnucléoles. Les modifications du noyau se manifestent seulement par la réduc- tion en nombre des nucléoles qui enfin finissent par disparaître complètement, J'ai en effet trouvé des noyaux réduits à l’état de coque vide. La dispersion des granules s'effectue assez rapidement quand l'enveloppe de la cellule mère a disparu. Cette dis- persion n’a pas lieu régulièrement, mais généralement elle se produit plus rapidement dans une direction déterminée; aussi voit-on souvent l’essaim des granules comme étiré et dispersé dans un de ses points, tandis que dans le reste de son étendue 1l garde encore son autonomie. Après la disparition de l'enveloppe de la cellule mère comme un peu avant que ce phénomène se soit produit, les gra- nules (1) se montrent comme constitués chacun par une sphère réfrmgente fortement colorée par le.carmin et entourée par une aire étroite de substanceincolore, nettement limitée en dehors et qui paraît être de nature protoplasmique. Au mo- ment de leur mise en liberté, les granules, qui sont d’ailleurs fortréguliers quant à leur taille mesurent en moyenne 0,006. Il est à remarquer (2) qu'un certain nombre d’entre eux, au lieu de renfermer à leur centre une seule sphère colorée, en renferment deux ou quatre. Quelle interprétation convient-il de donner aux images que je viens de décrire? Deux hypothèses se présentent à l'esprit: ou bien les granules sont des organites, c’est-à-dire des élé- ments cellulaires fils de la cellule au sein delaquelle nous les. avons vus naître; oubien ce sont des formations analogues aux grains vitelhns, c’est-à-dire des corps inanimés simples, pro- duits élaborés par le travail nutritif de la cellule adipeuse. Les arguments qui militent en faveur de la première hypo- thèse sont les suivants : chaque granule ressemble étrangement à une cellule, sa forme est constante et régulière, il se com- pose de deux parties, l’une périphérique et incolore nettement (1) PL. 40, fig. 11. (2j PI. 10, fig. 41. 166 H. VIALLANES. limitée en dehors qui rappelle bien un protoplasma, l’autre centrale, sphérique, colorable par le carmin et qui ainsi res- semble bien à un noyau. De plus, on rencontre souvent des granules qui, au lieu de présenter un seul corps central en montrent deux ou quatre et semblent ainsi en voie de repro- duction. Enfin et surtout j'ajouterai qu’on ne peut guère découvrir de caractères physiques permettant de distinguer avec certitude les granules issus des cellules du corps adipeux d’avec les cellules embryonnaires qui constituent la première ébauche des muscles de l'aile de lPimago. Les faits qui peuvent nous faire pencher vers la seconde hypothèse sont tirés de l’observation du mode de formation des granules, nous ne sommes pas en effet habitués à voir un grand nombre de cellules filles se former d’une manière simul- tanée au sein du protoplasma d’une cellule mère sans que le novau de celle-ci paraisse y prendre aucune part. Mais en pré- sence des faits que j'ai observés pour les glandes salivaires et pour les trachées au moment de l’histolyse, cet argument perd une grande partie de sa valeur. Plus loin en effet nous verrons qu'au moment de l’histolyse, dans le protoplasma des cellules de ces organes, apparaissent des corps dont la nature cellulaire n’est point douteuse et sans que le noyau paraisse prendre aucune part à leur formation. Je dois faire remarquer qu’on observe une grande irrégula- rité dans l’évolution des cellules du corps adipeux. Celles de la région antérieure de la larve disparaissent les premières, et deux jours à peine après le début de la vie nymphale, on ne trouve plus à leur place que les granules qu’elles ont produits. Mais un certain nombre de cellules adipeuses des régions ab- dominale et thoracique subsistent plus longtemps; 1l semble qu’elles soient arrêtées dans leur développement, et qu’elles soient résorbées sans pouvoir accomplir le cycle complet de leur évolution. Au début de la vie nymphale, de même que les cellules adipeuses qui doivent disparaitre par le procédé que j'ai décrit précédemment avec détails, elles se remplissent de granules et augmentent de volume ; mais elles ne vont pas plus ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 167 loin, elles s’atrophient ensuite peu à peu, et sont résorbées sans être ouvertes. L USIONS. 4° La destruction des cellules du corps adipeux est due à ce que dans leur protoplasma se forment des granules qui gros- sissent et sont mis en liberté après la rupture de la membrane d’enveloppe. Les granules apparaissent d’une manière simul- tanée et sans que le noyau de la cellule adipeuse paraisse prendre aucune part à leur formation. 2° Les granules produits par les cellules adipeuses sont consti- tuës chacun par une sphère colorable par le carmin, ressemblant à un noyau, environnée d’une aire de substance non colorable, limitée en dehors par un contour net et ressemblant à un proto- plasma. I peut paraître assez probable que chaque granule est un orgamte, une cellule, fille de la cellule adipeuse au sein de laquelle elle est née. On ne peut, en effet, découvrir des carac- tères permettant de distinguer nettement les granules d’avec les cellules embryonnaires qui constituent les premières ébau- ches des muscles de laile de l’imago. CHAPITRE IV HISTOLYSE DES GLANDES SALIVAIRES ET DES TRACHÉES $ 1. — Histolyse des glandes salivaires. Historique. — Les auteurs qui m'ont précédé ne donnent aucun détail sur le mode de disparition des glandes salivaires de la larve, ils constatent simplement que quelques jours après que l’insecte est devenu immobile, ces organes ont disparu. La structure des glandes salivaires de la larve de la Mouche a été bien décrite par M. Weismann et par M. Auerbach. Aussi je me contenterai, pour l’intelligence des détails qui vont suivre, de rappeler ce que nous savons sur l'anatomie de ces organes. La larve de la Mouche possède une paire de glandes sali- 168 H. VIALLANES. vaires. Chacun de ces organes, qui atteint une taille consi- dérable, est constitué par un large tube fermé en arrière et se terminant en avant par un canal excréteur, court el étroit. Ainsi la glande se compose de deux parties distinctes : l’une sécrétante, l’autre chargée de conduire au dehors les produits de sécrétion. La partie sécrétante se montre comme un gros tube à large lumière, dont la paroi est constituée par une seule assise de grosses cellules aplaties, polygonales, soudées l’une à l’autre par leurs bords, pourvues d’une membrane distincte et montrant à leur centre un gros noyau arrondi. Ges cellules sont doublées intérieurement par une cuticule chiti- neuse très mince, qui à chaque mue de la larve se détache pour se renouveler. Le conduit sécréteur présente la même structure essentielle, mais les cellules qui forment sa paroi sont beaucoup plus petites, la cuticule chitineuse qu’elles sécrètent est beaucoup plus forte et montre des épaississements spiraux, ce qui. fait que ce conduit excréteur ressemble à s’y méprendre à une trachée. Ceci n’a d’ailleurs rien qui doive nous surprendre. Nous savons, surtout depuis les travaux de M. Bütschli (1) sur l’embryogénie de l’Abeille, que les trachées et les glandes salivaires sont des formations homologues. M. Auerbach (2) à étudié avec beaucoup de soin les modi- fications que subissent les cellules salivaires, depuis le moment où l’animal sort de l’œuf jusqu’au commencement de la vie nympbale. Il a observé que ces éléments allaient en grandis- sant à mesure que l’organe s’accroissait, sans pourtant jamais se multiplier; il a de plus observé que dans chaque cellule, le nucléole, d’abord unique, se multipliait et qu'ainsi au moment où la larve était sur Le point de se mettre en pupe, il existait dans chaque noyau un nombre considérable de nucléoles (3). (1) Bütschli, Zur Entwikelungsgesichte dez Biene (Zeitschr. für Wissens- chaft Zool.,t. XX, p. 519-564, Taf. XXIV-XXVII, 1872). (2) Auerbach, Organologische Studien, Heft I, p. 139 et suiv., pl. HTB, fig. 1-6. Breslau, 1874. (3) Mon mémoire était complètement terminé lorsque parut une note de M. Bal- ARTICLE N° 1, | HHISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 169 Mais, ainsi que je l'ai indiqué plus haut, les auteurs qui m'ont précédé ne donnent aucun renseignement sur les trans- formations histologiques que subissent. les glandes salivaires, -après que l’insecte est devenu immobile. L'étude de ces trans- formations qui présente, je crois, beaucoup d'intérêt, peut se faire très facilement sur des pupes du premier jour. Comme dans les glandes salivaires, la destruction ne s'effectue pas sur tous les points à la fois, mais elle commence en avant, pour s'étendre de proche en proche vers l'extrémité postérieure; on peut, par des coupes successives, pratiquées sur un même organe, se rendre compte de toutes les phases du phénomène. Observations. — Si nous examinons une coupe transversale pratiquée vers l’extrémité postérieure d’une glande salivaire -chezune pupe du premier jour (1), nous remarquons qu’elle se présente avec un aspect notablement différent de celui qu’elle offrait chez la larve. Les cellules constitutives de l’or- -gane ont beaucoup augmenté de volume; aussi se pressant les unes contre les: autres, font-elles assez fortement saillie en ‘biani « Sur la structure du noyau des cellules salivaires chez les larves de Chironomus » (Zoologischer Anzeiger, 1880, p. 662) et offrant le plus grand intérêt; cet observateur avait, en effet, reconnu que, dans les noyaux, les par- ties chromatiques, c’est-à-dire colorables par les teintures, ne sont point distri- buées au hasard ainsi qu’on le croyait, mais groupées de manière à former dans l’intérieur du noyau un cordon pelotonné des plus remarquables et de structure fort complexe. Un peu plus tard, M. le D' Henneguy, préparateur au ‘Collège de France, m’annonça qu’il avait rencontré une disposition analogue dans les cellules salivaires de la larve de la Mouche. Monattention étant attirée sur ce point, je fis de nouvelles observations et je reconnus qu’effectivement chez cet animal, les parties chromatiques du noyau (les nucléoles) étaient unies les unes aux autres pour former un cordon moniliforme. Mais ce cordon est in- finiment plus grêle et plus convoluté que chez le Chironome, ce qui explique bien qu’il doive échapper quand on n’est pas prévenu de son existence. Je dois dire que malgré l’intéressante découverte de M. Balbiani, les faits observés par M. Auerbach et par moi n’en restent pas moins exacts; seulement, n'étant pas prévenus, nous n'avons pas reconnu le lien qui unit les nucléoles les uns aux autres pour en former un cordon moniliforme. On conçoit qu'il serait du plus haut intérêt de rechercher ce que devient le cordon, au moment de la méta- morphose, mais cette étude présente de grandes difficultés techniques et je ne suis point encore arrivé à les surmonter. (1) PL 10, fig. 1. 170 IH. VIALLANES. dehors comme aussi dans l’intérieur du calibre de la glande, ce qui donne à l’ensemble de l’organe des contours irréguliers et bossués qu’il ne présentait pas chez la larve. Il estimpossible maintenant de trouver trace de cette cuticule chitineuse qui chez la larve tapissait la surface interne de l’épithélium glan- dulaire. Les cellules semblent avoir perdu leurs membranes ; leurs contours, en effet, ne sont plus aussi nets et réguliers, leur protoplasma a acquis une propriété qu’il ne possédait pas durant la période larvaire; 1l se colore en rouge pourpre des plus intenses sous l’influence du carmin. Les noyaux se sont accrus dans des proportions considérables, maintenant ils mesurent 0"",040 de diamètre. Les autres caractères des noyaux n’ont pas changé (1), chacun d’eux se montrant tou- jours comme une sphère limitée par un contour parfaitement net, indice de l’existence d'une membrane, et renfermant dans son intérieur une substance claire, non colorable; au sein de ce suc nucléaire sont plongés des nucléoles nombreux, quarante à cinquante, d'aspect anguleux et de très grande taille, fortement colorés par le carmin. Sur les coupes, il arrive fréquemment qu’on rencontre des cellules qui semblent privées de noyau, ou chez lesquelles cette partie ne paraît représentée que par un petit groupe de nu- cléoles, qu’on croirait situés au sein même du protoplasma; mais, en examinant deux coupes minces, successives, on s’as- sure que cet aspect n’est pas dû à ce que certaines cellules ont perdu leur noyau, mais à ce que le rasoir a passé au-dessous du noyau, ou que la coupe n’a intéressé qu’une faible partie de ce dernier. Les éuormes dimensions des noyaux font qu’il en est souvent ainsi. | Si maintenant nous examinons une coupe pratiquée dans une région un peu plus antérieure de la glande, nous obser- vons des modifications plus profondes et très importantes. Les cellules ayant encore augmenté de volume, se sont pressées les unes contre les autres, aussi ont-elles subi des (PI UI0 Mie ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 4171 déplacements et des déformations ; pour pouvoir se loger elles font plus ou moins saillie, les unes vers l’intérieur de la glande, les autres vers l’extérieur. Leur protoplasma a toujours la teinte rouge intense que nous indiquions tout à l’heure. Leur noyau n’a pas changé d'aspect, mais 1l s’est déplacé, il n’oc- cupe plus la partie centrale de la cellule, il est rejeté en dehors et se trouve maintenant presque en contact avec la surface extérieure du protoplasma. Dans une des cellules de la glande, on remarque que le pro- toplasma n’a pas dans toute son étendue la même intensité de coloration, sa partie extérieure offre la teinte rouge pourpre de toutes les autres cellules, mais vers l’intérieur de la glande sa Coloration est bien plus claire. Il n’existe pas d’ailleurs de limite tranchée entre ces deux régions, il y a seulement une rapide dégradation de teinte. Si nous examinons avec atten- tion celte région plus claire du protoplasma, nous voyons qu’elle diffère de la région plus foncée, non seulement par une coloration plus faible, mais surtout parce qu’au lieu d’être homogène elle renferme un certain nombre de noyaux. Ces noyaux, au nombre de quatre ou cinq, sont parfaitement carac- térisés, ils mesurent en moyenne 5 à 10 millièmes de milli- mètres; chacun d’eux se montre comme une sphère plus claire que le protoplasma ambiant, son contour est marqué par une ligne des plus nettes. Ces noyaux renferment dans leur inté- rieur, plongés au sein d’un suc nucléaire transparent, un cer- tain nombre de nucléoles, dont l’un central est beaucoup plus oros que ses congénères. Chacun de ces noyaux appartient bien à une cellule distincte; la suite du développement nous le montrera clairement. Quoi qu'il en soit d’ailleurs à cet égard, ce qui est bien certain c’est que nous venons de con- stater que des éléments nouveaux sont apparus à l’intérieur du protoplasma des cellules larvaires. Cette formation paraît s'être effectuée sans participation directe du noyau de la cellule mère; en effet ces éléments nouveaux apparaissent toujours dans la région de la cellule mère voisine de la cavité de la glande, tandis que le noyau est repoussé vers l'extérieur. La 179 H. VIALLANES. suite du développement nous montrera bien mieux encore qu'il n’est guère possible d'admettre que le noyau de la cellule mère prenne part à la formation des cellules filles. Étudions maintenant un stade plus avancé; la préparation de la glande salivaire se montre alors avec l’aspect que Jai fi- ouré (1). La coupe comme précédemment a la forme d’un anneau, cet anneau n’est plus formé dans son entier par ces srandes cellules glandulaires que nous connaissons; mais sur une portion comprenant un des tiers de sa circonférence, 1l est composé par de petits éléments en tout semblables à ceux qui au stade précédent ont apparu dans le protoplasma d'une des cellules glandulaires. Étudions d’abord cette région formée de tissu nouveau, et que je désignerai dès maintenant sous le nom de région des cellules embryonnaires; plus loin cette dénomination sera plemement justifiée. La région des cellules embryonnaires constitue, ainsi que je l’ai dit, un des tiers de la coupe de la glande; par ses deux extrémités, elle se continue immédiate- ment avec les cellules glandulaires qui constituent les deux autres tiers de Panneau que représente la coupe. Je désignerai l’ensemble de ces cellules glandulaires sous le nom de région des cellules glandulaires. Nous verrons plus loin avec détail comment s'effectue la continuité de la région des cellules glandulaires avec celle des cellules embryonnaires. La région des cellules embryonnaires constituant une por- tion de l'anneau que représente la coupe de la glande offre, par conséquent, un bord interne concave et un bord externe convexe. Le bord interne est très régulier, le bord externe l’est moins. Quant à sa structure, la région embryonnaire paraît constituée par un protoplasma faiblement coloré au, sein duquel sont plongés de nombreux noyaux, d’une dimension assez notable, 5 à 10 millièmes de millimètre, parfaitement caractérisés et absolument semblables à ces noyaux qu’au stade précédent nous avons vus apparaître au sein du proto- (#) PI. 10, fig. 2. . ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 173 plasma d’une des cellules glandulaires. Ces noyaux ont un contour net, 1ls renferment dans leur intérieur, au sein d’un suc cellulaire transparent, un nucléole principal plus gros, en- touré d’autres nueléoles plus petits et nombreux. L'existence de ces noyaux indique bien que la région que nous étudions maintenant est composée de nombreuses cellules que je crois devoir appeler cellules embryonnaires. Ce nom s'applique, on le sait, à des cellules nouvellement formées, ou conservant encore les caractères de cellules jeunes et capables de se mul- üiplier. Il ne m'a pas été possible de délimiter le domaine précis de chacune des cellules embryonnaires, ce qui arrive d'ailleurs bien souvent quand ces éléments sont fortement pressés les uns contre les autres et ne possèdent pas de membrane distincte. Étudions maintenant avec quelques détails l'aspect qu'offre la région des cellules glandulaires. Il semble que la région des cellules embryonnaires ait en se constituant développé à ses deux extrémités une forte pression sur les cellules glandu- laires, en effet ces dernières sont fortement déprimées et un peu déplacées. Elles ont probablement subi une pression latérale, car pour se loger elles ont dû faire saillie, les unes en dehors de la glande, les autres à l’intérieur; toutes ont main- tenant leur plus grand diamètre dirigé de dedans en dehors, au lieu d'être fortement aplaties dans le sens opposé ainsi qu’on l’observait chez la larve. On avait pu remarquer dans le stade précédent que le noyau des cellules glandulaires s'était déplacé, et occupait une position excentrique. Ce transport du noyau vers l’extérieur s’est encore accentué, et cela surtout pour les cellules les plus voisines de la région embryonnaire. Parmi ces dernières, chez les unes, le noyau est arrivé à se mettre en contact avec la surface du protoplasma; chez d’autres ce phénomène de transport s’est accentué davantage encore, et par une assez grande portion de sa surface le noyau fait hernie hors du protoplasma, de plus sur une partie plus ou moins étendue de cette surface saillante la membrane du noyau a disparu. De la sorte la cavité du noyau communique librement avec l’extérieur. Il semble que dans les noyaux ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1882. XIV. 12. — ART. N. f. 17% EH. VIALLANES. ainsi ouverts les nucléoles soient moins nombreux, peut-être quelques-uns d’entre eux ont-ils été mis en liberté ou résorbés. Pour se rendre un compte exact de l’origine de la région des cellules embryonnaires, il faut étudier comment cette région se continue avec la région des cellules glandulaires. Il suffit d'examiner la figure représentant le stade que je décris (1), pour comprendre que deux cellules larvaires seule- ment sont en contactavec la région des cellules embryonnaires. Si nous portons notre attention sur une de ces deux cellules, nous voyons que son protoplasma, coloré par le carmin en rouge foncé, se continue sans ligne de démarcation avec le protoplasma de l’aire embryonnaire coloré au contraire faible- ment en rose et au sein duquel sont plongés les noyaux de nouvelle formation dont J'ai parlé plus haut. En rapprochant cette observation de la description que j'ai lonnée du stade précédent, on voit sans peine que ces cellules cui par leur réunion forment la région embryonnaire ne sont autre chose que ces éléments que nous avons vus naître précé- demment au sein du protoplasma d’une des cellules glandu- laires. Le groupe de cellules embryonnaires d’abord très petit s’est développé en multipliant ses éléments, et maintenant il parait s’accroitre aux dépens des cellules glandulaires qui le confinent, soit que le protoplasma de ces cellules produise des cellules embryonnaires nouvelles, soit que les cellules em- bryonnaires déja formées se soient multipliées en envahis- sant le protoplasma des cellules glandulaires. Examinons la coupe d'une glande salivaire à un stade encore plus avancé (2). La région embryonnaire présente les inèmes caractères de structure que J'ai indiqués précédem- inent, mais elle s’est accrue dans des proportions considé- rables, maintenant elle est étendue à la face interne de la région des cellules glandulaires, si bien qu’à elle seule elle limite la lumière de la glande. La région des cellules glandu-. (1) PL. 10, fig. 2. } (2) PI 10, fig. 3. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 175 laires n’est plus représentée que par quelques éléments situés à la périphérie de l'anneau que forme le tissu embryonnaire ; parmi ces derniers, les uns présentent encore toutes leurs parties, les autres ne sont plus représentés chacun que par une sorte de protubérance faisant saillie à la surface externe de l'anneau de tissu embryonnaire. | Le tissu embryonnaire s’est non seulement étendu au point de constituer un anneau complet, il s’est encore accru en épaisseur, car la lumière de la glande se trouve maintenant très réduite. Le contour intérieur de l’anneau du tissu embryonnaire n’en est pas moins parfaitement régulier. Examinons maintenant ce qui reste des cellules glandu- laires qui, par suite de l’envahissement du tissu embryonnaire, se trouvent rejetées à la périphérie. Dans l’espace de la coupe, qui répond aux points qu’occupait déja au stade précédent le tissu embryonnaire, nous ne rencontrons pas trace de cellules glandulaires, mais le reste de la région embryonnaire est cir- conscrit extérieurement par des cellules glandulaires présen- tant divers degrés de transformation. Sur la coupe que j'ai figurée (1), on voit trois cellules glandulaires présentant encore leur noyau et reliées au tissu embryonnaire par la partie interne de leur protoplasma. Celle de ces cellules qui est la moins altérée présenteles caractères qu'offraient la plupart des cellules glandulaires au stade précédent; son noyau est forte- ment repoussé vers l’extérieur ; son protoplasma, toujours coloré en rouge intense, paraît entier, mais du côté interne il se continue sans ligne de démarcation nette avec le tissu embryonnaire adjacent. Une autre cellule glandulaire présente des modifications plus profondes, son noyau a atteint la surface extérieure de la cellule et s’est ouvert au dehors. À sa partie interne, le proto- plasma a diminué et est presque entièrement remplacé par le tissu embryonnaire qui semble envahir la cellule. Ce phéno- mène d’envahissement est encore plus accentué dans une trol- (1) PL. 10, fig. 3. 176 HI. VIALELANES. sième cellule glandulaire : 1e1 le tissu embryonnaire à envahi le protoplasma jusqu’à toucher presque la face interne du noyau. Dans les espaces qui existent entre les trois cellules dont je viens de parler, on trouve à la surface du tissu embryonnaire quatre protubérances, plus ou moins saillantes (1), qui par leur forme et leur disposition montrent nettement que cha- cune d’elles est le reste du protoplasma d’une cellule glandu- laire. Ces protubérances ont vers leur extrémité externe la coloration rouge pourpre si caractéristique du protoplasma des cellules glandulaires ; par leur base, elles se continuent sans ligne de démareation avec le tissu embryonnaire. On se pose naturellement une question très importante, que jai le regret de ne pouvoir résoudre, c’est celle de savoir com- ment disparaissent les noyaux des cellules glandulaires, que nous avons vus S’approcher de la surface et venir s'ouvrir à l'extérieur. Malheureusement les stades intermédiaires me manquent et je n'ai pu me former de conviction à cet égard. Toutefois, j'ai bien souvent remarqué que, quand le noyau de la cellule glandulaire s'était ouvert, les nucléoles faisaient saillie à l’extérieur et que ceux qui restaient à l’intérieur du noyau paraissaient avoir diminué de nombre ; peut-être sont-ils mis en liberté ou résorbés sur place quand le noyau s'ouvre. Si on examine la coupe d’une glande salivare à un stade encore plus avancé, on remarque que, comme précédemment, le tissu embryonnaire constitue un anneau coraplet. Mais il ne reste plus de cellules glandulaires possédant encore leur noyau. Les cellules glandulaires ne sont plus représentées chacune que par une protubérance protoplasmique plus ou moins surbaissée, s’élevant à la surface du tissu embryon- uare. À un état plus avancé encore, on ne trouve plus trace de ces protubérances; aussi, à ce moment, la glande salivaire est-cile constituée simplement par un tube creux dont les pa: ois fort épaisses sont formées par un nombre considérable de cellules embryonnaires serrées les unes contre les autres. (4) PI. 10, fig. 3 c g'. ARTICIE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 477 On peut maintenant distinguer assez nettement les contours de chacune de ces cellules. Si les parois de la glande sont beaucoup plus épaisses qu’elles ne l’étaient autrefois, en revanche son calibre intérieur est beaucoup réduit. $ 2. — Histolyse des trachées. Historique. — Avant de décrire les transformations que su- bissent les trachées de la larve, je crois utile de rappeler en deux mots quelle est leur structure, qui d’ailleurs est parfaite- ment connue aujourd’hui au point de vue histologique comme au point de vue morphologique. Ce sont des tubes dont la paroi est formée par une seule assise de cellules polygonales, apla- ties, très semblables à celles de l’hypoderme. Cette couche péritonéale sécrète en dedans une cuticule épaisse, présentant des épaississements spiraux, et, en dehors, une membrane amorphe qui doit être considérée comme une membrane basale. M. Weismann (1), (1864), observe que les trachées de la larve disparaissent au moment de la métamorphose; 1l décrit ce phénomène de la manière suivante : Dès le premier jour, la membrane péritonéale s’enfle, ses gros noyaux subsistent encore à certaines places, plongés au sein de la substance fondamentale en voie de dégénérescence graisseuse. Au com- mencement, le tube chitineux de la trachée contenait encore de l'air, plus tard, il se déchire et disparait. Pour bien comprendre la description de M. Weismann, il faut se rappeler qu’à l’époque où il écrivait, on considérait l'enveloppe péritonéale comme formée, non par des cellules distinctes les unes des autres, mais par des noyaux plongés au sein d’une substance protoplasmique indivise. Par conséquent, M. Weismann avait vu la couche cellulaire augmenter beau- coup d'épaisseur, les gros noyaux des cellules subsister, ce qui était entre ces noyaux lui avait paru en dégénérescence grais- seuse; plus tard, 1l avait constaté la disparition du tube chi- tineux. o Weismann, Die Entwikelung der Dipteren. Leipzig, 1864. Tirage à part, p. 165. 178 EE. VEALELANES, M. Künckel d’Herculais (LU), 1875, nous donne les rensei- gnements suivants sur les transformations histologiques que subissent les trachées au moment où la larve devient immo- bile : « Lorsqu'une larve de Syrphides (Volucella, Eristalis), » Muscides (Musca, Lucilia, Sarcophaga) est prête à se méta- » morphoser, la membrane péritrachéale (péritonéale) devient » le siège d’une activité des plus grandes, elle se couvre de » cellules, dont nous n’avons actuellement ni à chercher l’ori- » gine, ni à suivre le développement, ces cellules se groupent » sur certains points, pour constituer des agglomérations » pyriformes qui ont quelque analogie avec les histoblastes. » M. Ganin (1875) ne donne que peu de renseignements sur les transformations histologiques que subissent les trachées de la larve, 1l s'exprime ainsi : « Le protoplasma aussi bien que » les noyaux de la membrane péritonéale subissent une dégé- » nérescence graisseuse foncée. » En présence des indications si sommaires que nous don- nent les observateurs que je viens de citer, et surtout en pré- sence de leur contradiction, J'ai cru devoir étudier, après eux, les transformations histologiques que subissent les trachées de la larve. Observations. — Mes études ont été faites sur des pupes de un à deux jours, fixées par l’acide picrique et l'alcool, colorées au carmin, puis débitées en coupes, après avoir été traitées par la méthode du collodion afin d'empêcher toute dissociation des éléments. Quand on examine la coupe transversale d’une trachée chez une larve prête à se métamorphoser, on remarque les dispo- sitions suivantes. La lumière pleine d’air de la trachée est limitée par la couche chitineuse assez épaisse. Immédiatement en dehors de la couche chitineuse et appliquée à sa surface se montre la couche péritonéale. Les éléments qui constituent cette couche sont de grandes cellules aplaties, soudées les unes (1) Künckel d'Herculais, Recherches sur l'organisation et le développement des Volucelles. Paris, 1876. ARTICLE N° Î. ILHISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 179 aux autres par leurs bords pour constituer une seule assise. Elles présentent à leur centre un gros noyau qui vu de face à un contour arrondi, qui sur une coupe présente un contour ovalaire. Ce noyau est limité par une membrane propre à l’intérieur de laquelle, au milieu d’un suc nucléaire mco- lore, se trouvent de nombreux nucléoles fortement colorés. Comme les cellules dont nous parlons sont de très grande taille, il arrive rarement que dans une coupe transversale le rasoir rencontre plus de deux ou trois noyaux. Si maintenant nous examinons la coupe transversale d’une trachée, quelques heures seulement après que la larve est deve- nue immobile, nous remarquons que des modifications déjà profondes se sont accomplies. La couche péritonéale à beau- coup augmenté d'épaisseur, et cette augmentation est due à ce que dans chaque cellule le protoplasma est devenu beaucoup plus abondant; de plus, ce protoplasma a acquis la faculté de se colorer en rouge par le carmin; en outre il n’est plus possible maintenant de distinguer la limite qui sépare deux cellules voisines. Le noyau lui-même présente des modifica- tions, 1l a augmenté de volume; de plus, il s’est déplacé vers l'extérieur, si bien qu’au lieu d’occuper le centre de la cellule, il est maintenant en contact avec la surface extérieure du protoplasma. L’anneau que représente sur une coupe la membrane péri- tonéale, n’a pas seulement gagné en épaisseur par suite de accroissement du protoplasma, son diamètre aussi à aug- menté, si bien que maintenant la membrane péritonéale est séparée de la couche chitineuse par un espace circulaire vide. Dans cette séparation de la couche cellulaire d’avec la couche chitineuse, il s’est, en somme, passé un phénomène analogue à celui qui se produit à chaque mue de la larve. À chaque mue, en effet, comme l’a observé M. Weismann, la membrane péri- tonéale de la trachée, prenant de l'accroissement, abandonne la couche chitineuse qui ne peut la suivre, puis sécrète ensuite une nouvelle couche chitineuse. Quand une larve se met en pupe, un phénomène analogue s’accomplit, la membrane pé- 180 H. VIALLANES. ritontale s’accroissant, quitte la couche chitineuse, mais main- tenant cette membrane péritonéale a perdu la faculté de sécrèter une nouvelle cuticule. À un état plus avancé, la coupe d’une trachée se montre avec l’aspect que j'ai représenté (1). La membrane péritonéale a encore gagné en épaisseur, aussi l’espace vide qui la sépare de la couche chitineuse a-t-1l augmenté. Comme dans le stade précédent, il est impossible de distinguer la limite des cellules de la membrane péritonéale, ces éléments ne sont plus indiqués que par leurs noyaux. Dans la préparation que J'ai repré- sentée, le rasoir a rencontré deux de ses noyaux, ceux-ci ont beaucoup augmenté de volume, mais leurs autres caractères n’ont que peu changé, ils se montrent avec une membrane d’enveloppe très nette,ilssontremplis d’un succellulaire elair et homogène, à l’intérieur duquel se trouvent quinze à vingt nu- cléoles. Parmi ces derniers,les plus petits sontsituésau voismage de la membrane d’enveloppe, quatre ou cinq autres un peu plus gros sont groupés au centre du noyau. Si l’aspect des noyaux n’a que peu changé, en revanche, leur situation s’est modifiée. Au stade précédent, nous avions déjà remarqué qu'ils avaient quitté leur situation centrale pour venir se mettre en contact avec la surface extérieure du proto- plasma de leur cellule. Ce mouvement s’est encore accentué, et maintenant par plus de la moitié de sa surface, le noyau fait saillie à l'extérieur et baigne à même dans le fluide cavi- taire. En examinant le protoplasma des cellules trachéennes, nous remarquons qu'il ne présente plus l’aspect homogène qu'il offrait encore au stade précédent. Dans son intérieur, nous trouvons un grand nombre de formations nouvelles. Cha- cune de celles-ci se montre comme une sphère limitée par un contour net, renfermant une substance plus claire que le protoplasma ambiant, et montrant à son centre une petite tache colorée en rouge vif. (PE MO ho t5: ARTICLE N° 4. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 481 Chacune de ces formations représente-t-elle à elle seule une cellule, qui serait ainsi plongée dans le protoplasma de la cellule trachéenne, ou bien est-elle dans son ensemble le noyau d’une cellule nouvelle, dont le domaine ne serait point sépa- rable d’avec celui de ses voisines ? Quoi qu’il en soit sur cette question que je ne puis trancher, ce qui est bien certain c’est que des éléments cellulaires nou- veaux, des cellules filles en un mot, viennent d’apparaître au sein du protoplasma des cellules larvaires, dont le noyau ne parail avoir pris aucune part à cette formation. Si nous comparons les phénomènes de transformation des trachées avec ceux que j'ai décrits plus haut pour les glandes salivaires, nous voyons qu'il y a entre eux les plus grandes analogies. Dans l’un et l’autre cas le noyau de la cellule larvaire se montre au moment de la métamorphose pourvu de nombreux nucléoles ; quand l’insecte est devenu immobile le protoplasma acquiert la faculté de se colorer par le carmin et se gonfle beaucoup ; le noyau qui a aussi acquis une taille plus considérable se déplace vers l'extérieur au point de faire saillie hors du protoplasma par une étendue plus ou moins grande de sa surface, et à ce moment, à l’intérieur du protoplasma et sans que le noyau paraisse y prendre aucune part, se montrent de nombreuses cellules filles. Ces phénomènes quis’accomplissent, comme nous le voyons, exactement de la même manière dans les trachées que dans les glandes salivaires, montrent bien que ces organes ont entre eux non seulement une grande analogie de structure, mais qu’encore ils sont appelés à jouer dans le développement post-embryonnaire des rôles analogues. Si nous observons un stade plus avancé (1) de l’histolyse des trachées, nous voyons que cette analogie se poursuit jus- qu’au bout. La trachée examinée sur une coupe transversale présente maintenant la structure suivante : La membrane péritonéale se montre infiniment plus épaisse qu’elle ne l'était (1) PI. 10, fig. G. 189 H. VIALLANES. au stade précédent, ces éléments nouveaux que nous avions vus apparaître au sein du protoplasmade la cellule larvaire se sont beaucoup multipliés, ce sont maintenant des cellules bien distinctes, limitées par un contour net et présentant un petit noyau. Ces éléments jeunes sont sphériques et fortement tassés les uns contre les autres. Cet accroissement de la couche péritonéale est dû, soit à ce que de nouvelles cellules filles se sont formées, soit à ce que les cellules filles déjà for- mées au stade précédent se sont activement multipliées. Quoi qu’il en soit, les cellules qui sont nées dans le protoplasma des cellules larvaires et qui maintenant constituent à elles seules la membrane péritonéale de la trachée, doivent être, eu égard à leur récente formation, à leur forme sphérique, à leur état d'éléments encore non différenciés (1), désignées sous le nom de cellules embryonnaires. Il ne reste plus maintenant aucune trace des anciennes cellules trachéennes, leur noyau qui au stade précédent était déjà à moitié sorti du protoplasma ne se retrouve plus mainte- nant. S’est-1l rompu et ouvert au dehors comme celui des cellules des glandes salivaires, ainsi que par analogie cela peut paraitre probable? Les observations me manquent pour l’'affirmer. La disparition du noyau des cellules trachéennes, l’en- vahissement de leur protoplasma par de nombreux essaims d'éléments nouvellement formés, fait que la trachée se montre maintenant sur une coupe transversale comme un anneau très épais, entièrement formé de cellules embryonnaires pressées les unes contre les autres. Au centre de cet anneau et séparé de son bord intérieur par un grand espace vide annu- laire, se voit la coupe de la couche chitineuse depuis longtemps séparée de toutes les parties vivantes. L’analogie que je signalais plus haut entre les phénomènes qui s’accomplissent dans les trachées et ceux qui s’accomplis- & (4) Jentends par élément encore non différencié une cellule qui n’a point encore revêtu les caractères d’adaplation à une fonction spéciale. ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 183 sent dans les glandes salivaires, s’est maintenant plus accentuée que jamais. Si nous comparons en effet l’image qu'offre maintenant la trachée avec le dernier des stades que J'ai observé pour les glandes salivaires, nous voyons que ces deux organes se présentent l’un et l’autre sur une coupe comme un anneau épais entièrement formé de cellules embryonnaires. Cette ressemblance est telle, qu'on ne peut distinguer une tra- chée d’une glande salivaire, autrement que par leurs rapports de position et parce qu’au centre de la trachée se retrouve encore la couche chitineuse qui dès le début s’est séparée des parties vivantes; la couche chitineuse des glandes salivaires, beaucoup plus mince, avait disparu bien plus tôt. Ainsi les trachées et les glandes salivaires qui chez l’em- bryon étaient, comme l’a montré M. Bütschli, deux formations semblables, l’une et l’autre constituées par un tube à parois épaisses formées de cellules embryonnaires, se sont durant la vie larvaire différenciées l’une de l’autre pour s'adapter à des fonctions spéciales. Mais au moment où la vie nymphale com- mence, les trachées comme les glandes salivaires parcourent les divers stades d’une évolution régressive. À mesure que cette évolution s’accomplit, les trachées et la glande salivaire se ressemblent davantage, et quand cette évolution est ter- minée on ne peut plus les distinguer l’une de l’autre. Ce résultat est obtenu parce que en se transformant la trachée et la glande salivaire acquièrent les caractères d’une trachée et d’une glande embryonnaire. Pour s'assurer qu'il en est bien ainsi il n’est point nécessaire d’avoir des embryons pour termes de comparaison. Dans une même nymphe, à côté de trachées larvaires qui pour disparaître subissent l’évolution régressive, on trouve les trachées de l’adulte en voie de formation et parcourant les stades de l’évolution progressive. La trachée qui se forme se montre comme un tube dont les parois épaisses sont formées de cellules embryonnaires, la trachée comme la glande salivaire arrivées au terme de l’évo- lution régressive sont rigoureusement constituées de même. 154 HI. VEALLANES. On ne peut distinguer l'organe qui se forme de l’organe qui va disparaître que par des rapports de position et parce qu’à l'intérieur des trachées larvaires se retrouve encore les restes du tube chitineux depuis bien longtemps isolé de toutes les parties vivantes. Plus loin, à propos du développement des trachées de l’imago, j'aurai occasion d'indiquer les conditions, purement topographiques d’ailleurs, qui permettent d'établir celte distinction. L'évolution régressive n’est point achevée quand la trachée ou la glande sont arrivées à avoir leurs parois formées d’un amas de cellules embryonnaires. Si j'ai considéré ce stade comme le dernier de tous, c’est qu'à partir de cet état les tra- chées comme les glandes salivaires vont perdre leur auto- nomie. Les cellules embryonnaires qui les composent vont s’isoler les unes des autres et devenir libres. Les phases de ce phénomène sont faciles à saisir, car il ne se produit pas en même temps sur toute la longueur d’unetrachée, mais débute par divers points assez éloignés les uns des autres. J'ai dit plus haut que, dès que les cellules embryonnaires avaient apparu au sein des cellules larvaires, elles se multi- phaient activement; cette multiplication se fait souvent d’une manière régulière, alors la couche des cellules embryonnaires conserve une épaisseur égale sur toute la circonférence de la trachée ; d’autres fois cette prolifération se fait d’une manière plus active dans un point que dans un autre, alors la trachée présente une nodosité sur son trajet, cette nodosité n’est en somme due qu’à une accumulation plus grande de cellules embryonnaires en une place déterminée (1). Dans tous les cas, la multiplication des cellules embryonnaires détermine non seulement l’épaississement des parois de la trachée, mais encore l’élargissement de la lumière que limitent ces parois. Si bien qu’à mesure que l’évolution régressive fait des pro- grès, l’espace vide qui sépare la couche cellulaire d'avec le tube (1) Ces nodosités ont été observées par M. Künckel, dont j'ai relaté plus haut les observations touchant les métamorphoses des trachées. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 185 tineux devient plus considérable. Sous l’influence de la multi- plication et aussi de l’accroissement des éléments qui la composent la couche cellulaire finit par se rompre sur un de ses points. Sur une coupe transversale la trachée se montre alors avec l’aspect suivant : la couche des cellules embryon- naires qui au stade précédent formait un anneau complet représente maintenant un anneau interrompu sur un point; au centre de celui-ci, mais séparé de lui par un vide encore plus considérable, se montre la coupe du tube chitineux. À un état plus avancé (1), on remarque sur une coupe que l’anneau s’est encore ouvert davantage, aussi la masse des cellules embryonnaires se présente-t-elle maintenant sous forme d’un croissant dans la concavité duquel se montre encore le tube chitineux souvent déchiré et aplati. Les cellules embryonnaires n’ont pas changé d’aspect, elles sontseulement un peu plus grosses ; de plus, elles sont moins tassées les unes contre les autres, aussi leurs contours sont-ils plus faciles à distinguer. Elles ont une tendance manifeste à se séparer les unes des autres, aussi celles qui sont sur les bords de la coupe sont-elles déjà à moitié libres, n'étant plus liées à leurs congé- nères que par une surface restreinte : souvent même on trouve un ou plusieurs groupes de cellules émbryonnaires tout à fait séparés de la masse générale. Toutes ces cellules embryon- paires ressemblent absolument aux autres cellules embryon- naires (globules sanguins) répandues à cette époque dans le liquide cavitaire de la nymphe, et l’on ne peut les en distinguer que quand elles sont encore groupées au voisinage d’un tube chitineux, qui par sa présence atteste leur origine. Le tube chitineux quis’est rompu et déchiré ne tarde pas à disparaitre, souvent même sa disparition précède la dispersion des cellules embryonnaires. Le fait certainement le plus curieux de ceux que je viens d'indiquer, c’est le mode de genèse des cellules filles aux dépens du protoplasma de la cellule larvaire trachéenne ou (4) PI. 40, fig. 7. 186 H. VIALLANES. glandulaire. En effet, ces éléments semblent apparaitre d’une manière simultanée, puis se multiplier,et cela sans que le noyau de la cellule mère semble prendre une part quelconque à leur production. Non seulement le noyau de la cellule mère ne paraît y prendre aucune part, mais 1l est repoussé vers l’exté- rieur et semble dégénérer et mourir, alors que dans le proto- plasma qui l'entoure apparaissent les cellules filles. Je ne veux point m’arrêter à de longues considérations sur ce curieux processus de genèse d'éléments nouveaux auquel je ne connais rien d’analogue. Je ne puis qu’affirmer exactitude de la description des images que j'ai vues et la fidélité des dessins que j'en ai faits. Mais je dois ajouter que je ne serais pas très éloigné de croire que nous avons affaire là à un phénomène de genèse cellulaire analogue à ce que M. Ed. van Beneden a observé dans la cellule germigène des Dyciémydes et M. Balbiam, M. M. Duval, M. Sabatier dans le spermatoblaste de divers animaux. CONCLUSIONS. 1° Les éléments cellulaires des trachées et des glandes sali- vaires ne dépérissent pas et ne meurent pas au moment de la transformation, comme le pensaient M. Weismann et M. Ganin, ils prennent au contraire un surcroit d'activité et prolifèrent. 2 Cette prolifération des cellules trachéennes ou glandulaires s'effectue de la manière suivante : Dès le début de la vie nym- phale les cellules augmentent de volume, leur noyau qui s’est également accru est rejeté tout à fait à la périphérie. Dans des points du protoplasma éloignés du noyau apparaissent des cellules filles, qui augmentent en nombre et l’envahissent tout entier. Devant cet envahissement d'éléments nouveaux, le noyau de la cellule mère est tout à fait repoussé a l'extérieur où il s'ouvre et disparaît ensuite. La trachée comme la glande sali- vaire n’est plus alors constituée que par un tube à parois épaisses formées de nombreuses cellules embryonnaires typiques. ARTICLE N° f. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 187 3° Il est complètement impossible alors de distinguer la tra- chée de la glande, ces deux formations sont semblables entre elles comme elles l’étaient chez l'embryon. Aussi à cette époque ne peul-on pas distinguer une trachée sur le point de disparaître d’une trachée de l’imago en voie de formation, toutes deux étant exclusivement formées de cellules embryonnaires. Il semble donc qu'au moment de la transformation les trachées et les glandes salivaires de la larve subissent une évolution régressive. 4° Quand les trachées ou les glandes sont revenues à l’état de trachées ou de glandes embryonnaires, les cellules embryon- naires qui les constituent se séparent les unes des autres et se dispersent. Ainsi ces organes lurvaires disparaissent. 9° Le résultat dernier de l’histolyse des trachées et des glandes est de mettre en circulation dans la cavité générale de la nymphe un nombre très considérable de cellules embryon- naires. CHAPITRE V. DES BOULES A NOYAUX (Xürnchenkugeln) DE M. WEISMANN ET DE QUELQUES AUTRES FORMATIONS PROBLÉMATIQUES. M. Weismann, pensant s'être assuré que les disques imagi- naux ne pouvaient donner naissañce qu'aux téguments de l’imago, et croyant être certain que tous les tissus de la larve mourraïient et se dissolvaient pour ainsi dire en une sorte de purée graisseuse, ne pouvait songer à faire dériver les tissus de l’imago, ni des disques, ni des éléments cellulaires compo- sant les tissus de la larve. Aussi pensa-t-1l que les éléments formateurs des tissus de l’imago tiraient leur origine de for- mations spéciales qu'il découvrit dans le corps de la nymphe et auxquelles il donna le nom de boules à noyaux (Kôrnchen- kugeln) (1). Chacune d'elles se présentait comme une sphère (4) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren. Tirage à part. Leipzig, 1864, p. 171 et suiv. 188 MH. VIALLANES. de matière finement granuleuse, limitée extérieurement par une très fine enveloppe, et renfermant dans son intérieur un certain nombre de noyaux. Ces sphères étaient de deux tailles, les unes plus petites, les autres plus grandes. Les petites (1) mesuraient en moyenne 0"",0%4 et renfermaient seulement quelques noyaux, souvent ces noyaux paraissaient les remplir complètement; alors elles se montraient avec laspect de müres. Les plus grandes sphères (2), qui souvent atteignaient des dimensions considérables, renfermaient des noyaux imfini- ment plus nombreux que les petites. Comme chez la larve, M. Weismann n'avait trouvé rien d’analogue à ces boules à noyaux, comme de plus, il pensait que tous les éléments cel- lulaires larvaires étaient dégénérés et morts, il fut conduit à faire sur leur origine l'hypothèse suivante : Cette purée grais- seuse, non organisée, produit de la dissolution des tissus lar- vaires, se serait pour ainsi dire agglutinée en boules; les noyaux qu’on rencontre dans ces boules y seraient apparus ensuite comme par génération spontanée. M. Weismann pensait que les noyaux renfermés dans les boules étaient les agents formateurs des muscles, nerfs et tra- chées de l’imago. [Il appuyait cette manière de voir sur ce fait que ces noyaux étaient les seuls éléments cellulaires hbres qu’il ait rencontrés dans le corps de la nymphe, et, en outre, sur cette remarque qu'il fit que les tissus de l’imago, et particulièrement les muscles, étaient, au début de leur développement, com- posés par un amas de petits éléments cellulaires ayant exacte- ment la forme et la taille des noyaux renfermés dans les boules à noyaux. M. Chun (3), étudiant le développement du Sphinx ligustri, rencontra dans la cavité générale du corps de la nymphe des formations tout à fait analogues aux petites AXürnchenkugeln de M. Weismann. Elles se présentaient, en effet, comme des (1) Weismann, loc. cit., pl. XII], fig. 57 a. (2) Weismann, loc. cit., pl. XII, fig. 57 b, c, dete. (3) Chun, Ueber den Bau, die Entwikelung und die physiologische Bedeu- Lung der Rectaldrüsen bei den Insecten, 1875, p. 26 et 27, pl. UT, fig. 8. ARTICLE N° 4. HISTOLOGIE ET. DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 189 sphères pourvues extérieurement d’une fine membrane ren- fermant une matière finement granuleuse au milieu de laquelle élaient plongés des noyaux. Dans quelques-unes, les noyaux étant plus serrés les uns contre les autres, donnaient à la for- mation l'aspect d’une mûre à gros grains. C’étaient bien évidemment là les petites Xürnchenkugeln de M. Weismann. De plus, 1l rencontra chez la nymphe différents éléments qui, par leur aspect et leur organisation, constituaient des formes de passage entre les globules amiboïdes du sang de la larve et ces petites Xürnchenkugeln. Aussi pensa-t-1l que ces petites boules à noyaux de M. Weismann n'étaient autre chose que des globules du sang dont le protoplasma était devenu gra- nulo-graisseux et dont le noyau s'était multiplié. Mais M. Chun ne nous dit rien ni sur l’origine ni sur la constitution des srandes boules à noyaux. En résumé, pour le naturaliste des travaux duquel je rends compte, chaque petite boule à noyau était une véritable cellule à plusieurs noyaux dérivant direc- tement d’un globule de sang par simple transformation de celui-ci. M. Ganin retrouva dans le corps de la nymphe ces forma- tions si curieuses que M. Weismann avait appelées des Kôrn- chenkugeln, 1 les décrivit comme de petites mûres composées d’un certain nombre de grains sphériqués. Mais il leur attribua une nature et une origine bien différentes de celles que leur avait attribué l’auteur allemand. Il les avait vues apparaitre au sein de la substance contractile des faisceaux musculaires en voie de destruction, elles ne naissaient donc pas spontané- ment dans le corps de la nymphe. Il avait vu la substance contractile se fendre, se fragmenter, puis à un moment donné être entièrement remplacée par un amas de Kôrnchenkugeln. De cette dernière observation, il concluait que les granules constitutifs de ces Kürnchenkugeln n'avaient point du tout la signification de noyaux comme le pensait M. Weismann, mais que c’étaient simplement des fragments inanimés de substance contractile dont la forme si particulière était due à ce que cette substanceen se détruisant s'était brisée d’une manière spéciale. ANN. SC. NAT., ZOOL., OCTOBRE 1882. XIV. 13. — ART. N, 1. 190 IH. VIALELANES. Une remarque fort importante de M. Weismann et dont M. Ganin ne nous parle pas, le presque toute sa valeur à cette interprétation; M. Weismann a vu et figuré une mem- brane d’enveloppe autour des petites boules à noyaux. Comment concilier ce fait avec l’hypothèse du naturaliste russe ? Je dois faire remarquer que M. Ganin n'entend évidemment parler que de petites Kürnchenkugeln de M. Weismann, de celles qui ne renferment que sept à huit granules et mesurent O",04. Il ne nous dit point s’il a retrouvé dans le corps de la nymphe les grandes Kôrnchenkugeln de M. Weismann, celles qui atteignent une taille considérable et renferment des noyaux en très grande abondance. Comme M. Weismann et comme M. Ganim, j'ai rencontré, après la disparition des muscles, beaucoup de petites Kornchen- kugeln répandues dans le corps de la nymphe. Comme M. Ganin, je les ai vues apparaître tout d’abord dans les fais- ceaux primitifs, comme fui, j'ai vu la masse contractile être à un moment donné entièrement remplacée par un amas de ces formations. Mais beaucoup d’autres faits touchant l’histolyse du muscle, qui avaient échappé au savant russe et que j'ai observés avec soin, me forcent à arriver à des conclusions tout à fait différentes des siennes sur la nature et l’origine de ces petites Kürnchenkugeln. Je ne veux point répéter pour la seconde fois les détails que j'ai donné plus haut sur le mode de destruction du tissu mus- culaire de la larve, mais seulement rappeler en deux mots les principaux faits que J'ai fait connaître. Dans les faisceaux qui doivent disparaître par évolution régressive, au moment de la métamorphose, les noyaux musculaires deviennent de véritables cellules, ils donnent naissance à de nouveaux éléments (granules roses) qui, à leur tour, prolifèrent active- ment et revêtent des caractères qui les font ressembler d’une manière frappante aux éléments du vitellus des oiseaux et des reptiles. Devant leur envahissement, la matière contractile se résorbe comme si elle leur servait de nourriture ; plus tard, ARTICLE N°1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 191 ces éléments deviennent hbres et se dispersent dans la cavité du corps. Il suffit de se reporter aux descriptions et aux figures que M. Weismann et M. Ganin donnent des Kornchenkugeln pour se convaincre que les corps qu'ils désignent sous ce nom, ne sont autre chose que des granules roses arrivés à leur dernier état de développement, c’est-à-dire se présentant sous l'aspect müriforme. Aussi je repousse les hypothèses faites, el par M. Weismann et par M. Ganin, sur l’origine et la nature des petites boules à noyaux. Je considère ces corps comme des éléments dérivant des noyaux musculaires de la larve et pré- sentant des caractères qui Les font ressembler aux éléments du vitellus des oiseaux et des reptiles. On se rappelle que M. Weismann avait trouvé dans le corps de la nymphe deux sortes de Xürnchenkugeln, les unes petites et formées de noyaux peu nombreux, les autres très grandes et renfermant un nombre considérable de petits corps sphériques qu'il considérait comme des noyaux. Je crois avoir nettement montré quelle était la nature et la véritable origine des premières. Restent les secondes; j'ai très facile- ment retrouvé ces grandes Kornchenkugeln. Elles sont bien constituées comme l’a indiqué M. Weismann, elles se mon- tirent bien comme de grandes sphères limitées extérieurement par une membrane très mince et renfermant dans leur intérieur un nombre très considérable de granules ; on en rencontre dont la membrane est intacte, d'autres dont la membrane est rompue et qui laissent ainsi échapper leur contenu. Il suffit de se rappeler la description que j'ai donnée plus haut de l’histolyse du corps adipeux pour être convaincu que les grandes Kornchenkugeln de M. Weismann ne sont autre chose que des cellules du corps adipeux arrivées à leur der- nier état. Si M. Weismann avait suivi pas à pas les transformations des cellules du corps adipeux, il aurait certainement reconnu, comme Je l'ai fait, que chacune de ces Kornchenkugeln n’était qu'une cellule du corps adipeux arrivée à son dernier état. Il 492 EH. VEALLANES. aurait sans doute été mis sur la voie de la vérité, s’il avait ren- contré dans chaque Kornchenkugeln au milieu des granules produits, le grand noyau central qui n’est autre chose que le noyau même de la cellule adipeuse transformée. Je m'explique bien facilement que la présence de ce grand noyau ait échappé à l’anatomiste ailemand, il me paraît en‘ effet ne pas avoir dégraissé ses préparations avec l’éther, et je sais par expé- riénce que sans cette précaution il est presque impossible de découvrir ce grand noyau, alors même qu’on est prévenu de son existence par d’autres observations. Il me reste encore à dire quelques mots de certaines forma- tions d'aspect particulier que M. Ganin a rencontrées dans le corps de la nymphe, et dont l’origine et la nature ne me paraissent pas encore bien claires. Ge sont de petites sphères, « limitées par une mince membrane, remplies d’un liquide où sont plongées de très fines granulations et quelques grains luisants ». Il pense sans en avoir de preuves directes, que chacune de ces formations est le noyau mort et dégénéré des cellules du corps adipeux. Mais 1l me semble que ces petites sphères sont peut-être plutôt ces cellules embryonnaires mortes et dégénérées analogues à des globules du pus et que j'ai décrites à propos des transformations des éléments du sang Toutefois je n’oserais affirmer l'exactitude de cette assi- milation, je ne sais sije me suis exactement placé dans les mêmes conditions que M. Ganin. Je ne voudrais pas clore ce chapitre que je consacre aux discussions sur la nature et l’origine de certaines formations de nature problématique sans dire quelques mots d’un organe fort singulier découvert chez la larve de la mouche par M. Weismann (1) et désigné par lui sous le nom de cordon cellulaire guirlandiforme (Guirlandenformig Zellenstrang). Cet organe, dont la signification est restée problématique, se montre chez la larve, ainsi qu'il l’a vu et comme je l’ai vérifié (1) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren, tir. à part, p. 132, taf. VIT, fig. 10. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 193 après lur, sous forme d’une guirlande, attachée par ses deux extrémités aux deux glandes salivaires et par le reste de son étendue, flottant librement dans la cavité du corps. Get organe est constitué uniquement par un certain nombre de cellules un peu fusiformes, intimement accolées les unes aux autres. Ces cellules sont fort remarquables par la multiplicité de leurs noyaux, aucune d'elles n’en présente moins de deux, la plupart en possèdent quatre ou cinq. Chacun de ces noyaux se montre avec l'aspect d’une petite sphère entièrement colorable par le carmin, toutefois je n’oserais affirmer l’exac- titude absolue de ce dernier détail. Jai pensé que j'arriverais peut-être à découvrir la signification de ce curieux organe en étudiant les modifications que subissent ses éléments au moment de la métamorphose, ce que n'avait point fait M. Weismann. Cette étude ne m'a pas donné la solution du problème. Toutefois je vais dire le peu que j'ai vu; ces quelques renseignements pourront peut-être servir à un autre investigateur. Quand on étudie des coupes successives pratiquées à travers une pupe du premier jour on découvre bientôt le cordon guir- landiforme qui se trouve dans l’espace compris entre les deux glandes salivaires. Mais on reconnait que les cellules (1) qui le composent ont déjà subi de profondes modifications, elles ont beaucoup grossi, et d’un peu allongées qu’elles étaient sont devenues plus rondes. Leur protoplasma à maintenant acquis la propriété de se colorer fortement en rouge par le carmin. Mais le changement le plus notable qu'on remarque, c’est la réduction du nombre de leurs noyaux. Tandis que durant la vie larvaire elles possédaient toujours au moins deux noyaux et généralement quatre ou cinq, la plupart maintenant n'en présentent plus qu’un, et quelques-unes seulement en montrent deux. Non seulement les noyaux se sont réduits en nombre, mais encore ils se sont modifiés sous d’autres rap- ports, 1ls ont grossi beaucoup, quoique en restant parfaitement (1) PI. 9, fig. 11. 194 H. VEALLANES. sphériques. On leur distingue maintenant une membrane d’enveloppe parfaitement nette; ils paraissent remplis d’un suc nucléaire incolore dans lequel sont plongés de nombreux nucléoles fortement colorés. Je dois ajouter en outre que par ce fait que les cellules du cordon guirlandiforme ont grossi et se sont arrondies, elles ne se montrent plus accolées mais sont un peu écartées les unes des autres. CONCLUSIONS. 4° Ces formations problématiques découvertes par M. Weis- mann el appelées par lui boules à noyaux (Kôrnchenkugeln) ne doivent pas leur formation à ce qu'une purée graisseuse, provenant d’une dissolution des éléments morts et dégénérés de la larve, se serait ramassée en boulettes dans l’intérieur desquelles des noyaux seraient ensuite nés par génération spontanée. Elles ont une origine et une nature toute différente. M. Weismann a décrit et figuré deux sortes de Kürnchen- kugeln, les unes petites offrant quelques noyaux seulement, les autres très grandes en renfermant un nombre considérable, il avait confondu ces deux sortes de formations sous un même nom, mais il convient de les distinguer. 2 Les petites Kôrnchenkugeln apparaissent bien dans les faisceaux musculaires en voie de destruction, comme l’a vu M. Ganin. Mais elles ont une nature et une origine première toute différente de celle qu’il leur a attribuée. Ge ne sont point, comme il le pensait, des fragments inanimés de substance contractile dont la forme caractéristique serait due à ce que cette substance se serait craquelée et brisée d’une certaine manière. Mais cesont des éléments à divers états de prolifération, dérivant du noyau musculaire et ressemblant par divers carac- ières aux éléments du vitellus des oiseaux et des reptiles. (Voyez le chapitre où j’étudie l’histolyse du tissu musculaire.) 3° Les grandes « Kürnchenkugeln » sont des cellules du corps adipeux arrivées à leur dernier état, c’est-à-dire tout à fait ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 195 hypertrophiées et dont le protoplasma renferme une quantité considérable de granules spéciaux qui doivent peut-être étre considérés comme autant de cellules embryonnaires. (Voyez mon chapitre relatif à l’histolyse du corps adipeux.) CHAPITRE VI. DESSÈCHEMENT ET CHUTE DE L'HYPODERME LARVAIRE. Pour tous les auteurs qui m'ont précédé, les cellules hypo- dermiques des premiers segments de la larve disparaissent, sont totalement frappées de mort, et l’hypoderme de la tête et du thorax de l’adulte se forme aux dépens des disques imaginaux, landis que les cellules hypodermiques des derniers seoments de la larve se transforment au contraire sur place pour former les téguments de l’abdomen de l'adulte. Je dois dire tout de suite que sur ce dernier point Je suis en désaccord avec mes prédécesseurs; je crois devoir réserver à mon chapitre traitant de la formation de l’abdomen la discussion détaillée de leur opinion à cet égard. M. Weismann (186%) (1) décrit de la manière suivante la dis- parition des cellules hypodermiques des premiers segments de la larve. « Le contenu cellulaire se change c in dunkle Molekel», un liquide aqueux s’amasse entre la membrane et le contenu, la membrane se crève et le contenu sort et se disperse. » M. Auerbach (1874) (2) observe que dans les cellules de l’hypoderme comme dans celles de plusieurs autres tissus, le nombre des nucléoles augmente avec la croissance de la larve et qu’enfin ceux-c1 sont très nombreux quand l’animal est prêt à se mettre en pupe. M. Ganin (1875) (3) ne donne que peu de détails sur le mode de disparition des cellules hypodermiques des premiers (1) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren. Tir. à part, 1864, p. 165. (2) Auerbach, Organologische Studien. Breslau, 1874. (3) Ganin, Matériaux pour l'histoire du développement post-embryonnaire des Insectes. Varsovie, 1875. 196 H. VIALLANES. segments ; comme M. Weismann, il pense que le sort des cel- lules hypodermiques des derniers segments est tout différent. À propos du développement des téguments de Pabdomen j'au- rai à discuter cette manière de voir que je ne saurais partager entièrement. Je crois intéressant de donner quelques détails sur le mode de disparition des cellules hypodermiques de la larve. Mes recherches ont été faites sur des coupes pratiquées à travers des pupes de différents âges fixées par lacide pierique ou la liqueur de Kleimenberg, colorées au carmin et traitées par le collodion afin d'éviter toute dissociation des éléments. Sur des pièces ainsi préparées, quand on examine une coupe pratiquée à travers une pupe du premier Jour ayant déjà pris sa couleur brune, on remarque que l’enveloppe de la pupe est constituée par une couche chitineuse épaisse, brune, très cassante; ce n’est autre chose que la cuticule de la larve qui s’est durcie et a changé de couleur. Au-dessous de cette enve- loppe chitineuse externe et complètement séparée d'elle, se trouve une seconde enveloppe également chitineuse, mais bien plus mince. Enfin, plus profondément nous rencon- trons la couche des cellules hypodermiques encore par- faitement reconnaissable, mais cette couche cellulaire est complètement isolée de la seconde couche chitineuse et ne paraît revêtue par aucune cuticule immédiatement appliquée à sa surface. On peut s'assurer encore facilement de ce fait en ouvrant avec précaution et sous l’eau une pupe encore vivante. Cette observation montre bien qu'au moment où la larve est devenue immobile sa cuticule épaisse s’est séparée de l’hypo- derme pour former, en se dureissant, l'enveloppe pupale exté- rieure; qu'ensuite l’hypoderme a sécrété une seconde cuticule très mince, la seconde couche chitineuse, dont il s’est ensuite séparé pour perdre enfin la faculté de donner naissance à de nouveaux produits Cuticulaires. Il semble done que deux mues s’accomplissent après que la larve est devenue immobile, par la première, l'animal se débarrasse de sa cuticule larvaire épaisse qui devient l’enve- ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 197 loppe pupale, puis son hypodérme sécrète une seconde cuti- cule extrêmement mince, dont il s’isole ensuite pour rester à nu, protégé seulement à distance par les deux cuticules dont il s’est successivement débarrassé. L’hypoderme présente l'aspect général que nous lui connais- sons et qui a été décrit dans la première partie de ce travail, 1l commence toutefois à montrer déjà quelques modifications no- tables. Le protoplasma à acquis la faculté de se colorer en rouge pourpre intense par le carmin. Au sein de ce protoplasma foncé, le noyau se détache en clair, etse présente avec un contour ex- trêèmement net, qui montre bien que le noyau est circonserit par une membrane distincte. L'intérieur du noyau semble rempli par un suc clair et transparent, ne renfermant en fait de parties colorées, qu’un certain nombre de pelits nucléoles arrondis; quarante où cinquante environ qui sont principale- ment groupés à la face interne de la membrane d’enveloppe. À un stade plus avancé, le protoplasma a diminué encore, ce phénomène qui s’est effectué surtout du côté externe a déter- miné l'aspect que présente la figure (pl. 10, fig. 14). On y remar- que en effet que les noyaux sont, par leur face quiregarde vers l'extérieur, dénudés de protoplasma. La disparition du protoplasma a marché trèsrégulièrement, et ne parait pas s'être effectuée plus vite au voisinage du noyau que dans l’espace compris entre les noyaux de deux cellules voisines. Le fait de la multiplicité des nucléoles n’a rien qui doive nous étonner. M. Auerbach a en effet montré que dans les cel- lules de l’hypoderme le nucléole, d’abord unique lors de l’éelo- sion de la larve, allait en se multipliant activement jusqu’au début de la vie nymphale. | Si nous examinons l’hypoderme sur une pupe un peu plus âgée, nous remarquons qu'il n’est plus possible de distinguer de limite précise séparant deux cellules voisines; il semble ainsi que la membrane cellulaire ait disparu, de plus le proto- plasma a diminué de volume, tout en conservant des contours parfaitement nets. Le noyau n’a pas changé d'aspect, mais 198 H. VIALLANES. par le fait de la réduction du protoplasma, 1l occupe mainte- nant presque toute l’épaisseur de la cellule. Un peu plus tard (1), le protoplasma diminue encore, il ne se montre plus sur une coupe que comme une très mince bande unissant les uns aux autres les noyaux qui, eux, n’ont toujours que peu changé. Grâce à cette résorption du proto- plasma, les noyaux se trouvent mis à nu sur presque toute leur surface. Quelques légers changements commencent à s’observer dans leur intérieur ; les nucléoles qu'ils renfermaient ont nota- blement diminué en nombre et aussi en volume. Mais même avant cette époque, l’hypoderme larvaire doit être considéré comme un tissu mort et ne faisant plus partie du corps de l'animal ; en effet, 1l s’est rompu en beaucoup de points et se soulève en grandes écailles. Ces dernières modifi- cations que nous observons ne doivent donc être considérées que comme les effets du dessèchement. En se soulevant ainsi en écailles et en se desséchant, l’hypoderme larvaire forme à la surface du corps de la nymphe une sorte de poussière fari- neuse qu’on enlève facilement au pinceau. L’hypoderme lar- vaire n'étant constitué que par une seule couche de cellules, sa rupture et sa desquamation détermineraient évidemment l'ouverture du corps de la nymphe et la sortie de ses liquides s’il n'était remplacé par une autre enveloppe. L'hypoderme larvaire qui se dessèche et se desquame ainsi n’est pas immédiatement remplacé par l’hypoderme de limago ainsi qu'on pourrait le penser tout d’abord, mais par une enveloppe provisoire. Celle-ci ne me parait être autre chose que la membrane basale de l’hypoderme larvaire un peu épaissie. Les détails que je viens de donner sur le dessèchement et la chute de Phypoderme larvaire s'appliquent seulement aux quatre premiers segments du corps, répondant à la tête et au thorax de l’imago, mais non pas aux huit derniers quirépondent à l'abdomen. Les phénomènes d’histolyse qui s’accomplissent . GMPIMO MEME ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 199 dans ceux-ci sont si intimement liés à la genèse des Lissus nouveaux, qu'on ne peut les étudier isolément, aussi est-ce dans la troisième partie de ce mémoire que je les décrirai avec détail. CONCLUSIONS 1° Ainsi que l’ont montré M. Weismann et M. Ganin, au moment de la métamorphose, l’hypoderme larvaire des quatre premiers segments répondant à la tête et au thorax de l’imago se dessèche et tombe. J'ai seulement donné quelques détails nouveaux sur ce phénomène. 2° L’hypoderme larvaire n’est point immédiatement remplacé par l’hypoderme imaginal, mais par une cuticule mince, qui à elle seule assure pendant quelque temps la clôture de la cavité du corps et qui ne me paraît être autre chose que la membrane basale de l’hypoderme larvaire un peu épaisse. 3° L’histolyse des téguments larvaires des derniers anneaux répondant à l'abdomen de l’imago sera étudiée dans la troi- sième partie de ce mémoire. TROISIÈME PARTIE ÉTUDE DES PHÉNOMÈNES DE L'HISTOGENÈSE OU FORMATION DES TISSUS ET DES SYSTÈMES DE L'IMAGO CHAPITRE PREMIER. DÉVELOPPEMENT DES TÉGUMENTS DE LA TÊTE ET DU THORAX. Ainsi que je lai indiqué plus haut, M. Weismann décou- vrit dans le corps de la larve un certain nombre de petits corps blancs disposés par paires, et auxquels il donna le nom de disques imaginaux (Jimaginalscheiben) (1). reconnut qu'ils (1) Avant M. Weismann, les disques imaginaux avaient été vus et quelque- fois même assez bien décrits par divers auteurs, mais aucun de ceux-ci n’avait compris la véritable signification de ces parties. Parmi ces observateurs, je dois 200 HE. VIALLANES. étaient destinés à remplacer les téguments larvaires détruits dans les premiers segments, et à former ainsi les téguments de la tête et du thorax de limago. [| trouva sept paires de ces petits organes : la première était située en avant des ganglions cérébroïides, les six autres en arrière. Parmi ces dernières, trois étaient supérieures et trois inférieures. Il reconnut que les disques de la première paire servaient à former les téguments de la tête de l’imago, 1l les désigna sous le nom de disques de la tête; il reconnut que les disques des six autres paires servaient à former les téguments du thorax, aussi les désigna-t-1l sous le nom de disques du thorax. S'étant assuré que chacun de ces douze disques thoraciques ser- vait à former un des quatre demi-arceaux qui constituent chaque zoonite du thorax, et l’appendice qui peut en dépendre, M. Weismann donna à chaque paire de disques le nom de la région qu’elle devait former. On rencontre, par consé- quent, de chaque côté de la ligne médiane en allant d'avant en arrière : 1° les deux disques prothoraciques supérieur et inférieur ; ® les deux disques mésothoraciques supérieur et in- férieur ; 3° les deux disques métathoraciques supérieur et inférieur; M. Weismann, ayant remarqué que chaque disque céphalique, représenté d’abord par une seule masse, se montrait plus tard divisé en deux parties, destinées chacune à constituer une région distinete de la tête, désigna chacune de ces parties par le nom de l'organe principal qu'elle devait former ; 1l appela l’antérieure, disque de l’antenne; la pos- térieure, disque de l'œil. principalement citer : Swammerdam, Histoire générale des insectes. Utrecht, 1682. — Lyonnet, Traité anatomique de la Chenille qui ronge le saule. La Have, 1762. — Lachat et Audouin, Anatomie d'une larve apode trouvée dans le Bourdon des pierres (Journal de physique et de chimie, t. LXXXVII, 1819). — L. Dufour, Etudes anatomiques sur une Mouche, dans le but d'éclairer histoire des métamorphoses et de la prétendue circulation des Insectes (Acad. des sciences de Paris. Mém. des sav. étr., t. IX, 1845). — Scherber; Vergleichende Anatomie und Physiologie der OŒEstriden-larven (Sitzungsb. der Kais. Akad. der Wiss. Wien, t. XL, 1860). Pour plus de détails, je renvoie à M. Künckel (Organisation et développement des Volucelles), qui a donné une excellente analyse des travaux des naturalistes que je viens de citer. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9201 Tel est le résumé tout à fait succinet de ce que M. Weismann nous apprend sur la disposition générale des disques imagi- naux. Je ne m’y arrêterai pas longtemps, n'ayant que fort peu de choses à ajouter à ce qu’on savait avant moi sur cette dispo- sition générale des disques. Mais j analyserai avec détail ce que M. Weismann et ceux qui l'ont suivi ont observé touchant la structure interne de ces organes. M. Weismann observa que les disques affectent des rapports intimes, les uns avec les nerfs, les autres avec les trachées. Les ayant étudiés chez de jeunes larves, il vit, en effet, que chacun d’eux se présentait comme un renflement du névrilemme ou de la membrane péritrachéale, formé de pettes cellules embryon- naires ;1l remarqua, qu'avec le développement, ces renflements grandissaient et se présentaient alors comme de petits corps suspendus aux trachées ou aux nerfs ,« comme des fruits sont suspendus aux branches d’un arbre ». Il observa qu’arrivés à cet état les disques offrent à leur surface une mince mem- brane amorphe et que leur contenu, toujours formé de petites cellules, se montre divisé en deux régions : un noyau central et une partie périphérique. M. Xünckel d’Herculais (1), étudiant les larves de Volucelles, découvrit un certain nombre de disques qui avaient échappé à M. Weismann. En avant il en découvrit deux paires, il les considéra comme destinées, l’une à former la lèvre inférieure et l’autre le labre. Au voisinage de l'anus il en trouva deux nou- velles paires destinées à former, en se développant, les pièces de l'anneau géuital. De plus, 1l remarqua que chez la Volucelle le disque de l’antenne était tout à fait séparé de celui de l’œil ; tandis que M. Weismann considérait ces deux disques comme dépendant l’un de l’autre et dérivant d’une masse primitive- ment unique. M. Künckel ne nous donne pas plus de renseignements histologiques que M. Weismann sur la structure des disques. (1) Künckel d’Herculais, Organisation et développement des Volucelles, t. T. Paris, 1815. 209 I. VIALLANES,. Mais ayant remarqué que sur de jeunes larves de Volucelle les disques se montraient chacun comme une petite ampoule reliée à la peau par un pédicule, 1l pensa que ces organes se constituent par suite d’un refoulement de l’hypoderme lar- vaire. Généralisant les résultats qu’il avait obtenus chez les Volucelles, il pensa que les disques ne pouvaient point dériver de la membrane péritrachéenne ou de la gaine nerveuse, comme l’'avaitadmis M. Weismann pour la Mouche. Aussi M. Künckel crut-il nécessaire de créer un mot nouveau pour désigner les disques ; il les appelle des histoblastes. Mais comme je ne vois pas la nécessité d'introduire dans la science une expression nouvelle pour désigner une chose qui ne l’est pas, je m’en tien- drai au mot de disque imaginal,imitant en cela les natura- listes qui, après M. Künckel, ont eu à s'occuper de la question. M. Ganin (1) étudia la structure et l’origine des disques imaginaux avec beaucoup plus de soins et de détails qu’on ne l'avait fait jusqu'alors. Les recherches qu’il fit sur le mode de formation de ces organes chez la Mouche, confirment absolu- ment les recherches de M. Weismann, et ne paraissent pas favorables aux généralisations de M. Künckel. En effet, chez la larve de la Mouche, M. Ganin ne vit jamais naître les disques imaginaux de lhypoderme, mais toujours de la membrane péritonéale d’une trachée ou de la gaine d’un nerf. D’après le naturaliste russe, à son premier état un disque se présente comme un léger renflement de la mem- brane péritrachéenne ou de la gaine nerveuse ; ce ren- flement est constitué par une masse de protoplasma dans lequel sont plongés de nombreux noyaux. Ce renflement gran- dit et bientôt se creuse d'une cavité, qu'il appelle cavité pro- visoire, celle-ci, sur une coupe transversale, se montre comme une fente semi-lunaire à concavité tournée vers la trachée ou le nerf. Cette fente divise le disque en deux portions : l’une, externe, très mince, à laquelle M. Ganin donne le nom de (1) Ganin, Matériaux pour l'histoire du développement post-embryonnaire : des Insectes (en russe). Travaux de la Société des médecins et des naturalistes russes à Varsovie, 1876. 76 pages, 4 planches. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 203 feuillet provisoire; l'autre, bien plus considérable, embrassée par la concavité de la fente, et à laquelle il donne le nom d’ectoderme. Un peu plus tard les éléments du disque sont mieux différenciés. On remarque alors que le feuillet provi- soire est constitué par une seule couche de cellules, tandis que lPectoderme est composé par une grande accumulation de cellules. Bientôt, dans cet ectoderme, apparaît une différen- ciation et on remarque que ce {issu comprend deuxrégions, une interne et une externe, qui sur une coupe se présentent avec l'aspect suivant : La région externe de l’ectoderme à la forme d’un croissant qui, par sa convexilé, limite la cavité provisoire, et qui par ses deux cornes se continue avec le feuillet provisoire. La région interne est comprise dans la concavité du croissant que représente la région externe. M. Ganin réserve à la région externe le nom d'ectoderme, et 1l désigne l’interne sous celui de #mésoderme. Cette dernière se distingue de lex- terne par ce que les cellules qui la constituent, au lieu d’être serrées les unes contre les autres, sont plongées dans une ma- ère intercellulaire abondante. De ses recherches sur l’évolution des disques durant la vie nymphale, M. Ganin conclut que : le feuillet provisoire dispa- raît, que l’exoderme sert à former les téguments correspon- dants de la tête et du thorax, ainsi que les tendons et les tra- chées par suite d’une simple imvagination ; que le mésoderme sert à former tous les muscles qu'on peut trouver dans la tête et Le thorax de l’imago. J'arrive maintenant à l'exposé de mes recherches person- nelles. Mais je dois dire tout d’abord que j'ai négligé l'étude d’un certain nombre de points : je ne me suis pas occupé de l’origine première des disques, et n’ai point fait d'observations nouvelles sur leur disposition topographique. Mes recherches ont surtout porté : 1° sur la structure des disques chez la larve complètement développée et chez la jeune nymphe; ® sur l’origine de leur mésoderme; 3° sur leur évolution Structure des disques chez la larve et chez la jeunenymphe. — 204 If. VEALLANES. Si nous examinons sur une coupe longitudinale (1), c'est-à-dire parallèle à Paxe du futur membre, un disque prothoracique inférieur chez une larve de Mouche arrivée à toute sa crois- sance, mais encore aclive, nous remarquons qu'il se présente exactement sous l’aspect qu'a figuré M. Ganin. Nous y recon- naissons sans peine les parties décrites par le naturaliste russe, d’abord le feuillet provisoire mince et composé d’une seule assise de cellules, se continuant sans ligne de démarcation avec l’exoderme, composé, lui, au contraire, de plusieurs assises de petites cellules fusiformes ; eritre le feuillet provisoire et l’'exoderme nous trouvons une cavité qui, en coupe, se pré- sente sous la forme d'un croissant, c’est la cavité provisoire. Dans l’exoderme nous distinguons sans peine deux régions : l’une périphérique, se continuant avec le feuillet provisoire; l’autre centrale, plus épaisse, faisant sailhe dans la cavité provisoire et ayant l'aspect d’un bourgeon creux marqué de sillons annulaires. La première est destinée, comme M. Ganin l'a bien montré, à constituer les téguments thoraciques eir- cumvoisins du membre, la seconde ceux du membre même ; les sillons qu'on remarque à la surface de cette dernière imdi- quent déjà les futures articulations. La cavité de ce bourgeon exodermique creux, saillant dans la cavité provisoire, et qui représente le tégument du futur membre, est remplie par un tissu spécial parfaitement limité en dedans et que M. Ganin désigne sous le nom de mésoderme du disque. Ce tissu se présente bien avec les caractères que lui a assignés le natura- liste russe ; il est formé par une substance intercellulaire abon- dante dans laquelle sont plongées de petites cellules assez irré- gulières, souvent éloilées et toujours peu nombreuses. M. Ganin, ayant étudié de tels disques imaginaux chez de très Jeunes larves, a établi, d’une manière je crois certaine, que leur méso- derme se forme par suite d’une simple différenciation de l'exo- derme. Origine du mésoderme des disques imaginaux. — Les no- (1)-PI. 45, fig. 42. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 205 tions acquises par mon savant prédécesseur sur la struc- ture des disques dont nous venons de parler et sur l’origine de leur mésoderme, me paraissent parfaitement exactes, mais je crois qu’il a eu le tort de vouloir les généraliser trop rapide- ment à tous les autres disques. L'examen détaillé que je vais faire de quelques-uns de ces organes, nous en fournir la preuve. Si chez une nymphe du premier Jour, nous examinons le disque de l'aile (1), nous retrouvons facilement dans cet organe les parties qui nous sont déjà connues; le feuillet provisoire, la cavité provisoire, l’exoderme et le mésoderme. Ce dernier se présente avec les caractères histologiques que nous connaissons, mais nous remarquons que du côté de la cavité générale, son contour est vague et mal défini. De plus, nous observons qu’en dedans de ce mésoderme, assez loin de lui dans la cavité même du corps de lanimal, se montre un groupe de trois ou quatre trachées qui ne paraissent point appartenir au disque, puisqu'elles sont tout à fait isolées de lui. Ces trachées paraissent en voie d’histolyse, car leur membrane péritonéaie est représentée par un amas considérable de cellules embryonnaires qui les englobe toutes les trois. Get aspect provient, à n’en pas douter, de ce que ces trachées étant très voisines l’une de l’autre, leurs membranes péritonéales se sont soudées et confondues entre elles au moment de la prolifération de leurs éléments cellulaires. Si nous examinons le même disque de l'aile à un état un peu plus avancé (2), nous remarquons que le mésoderme s’est accru etqu'il s’est avancé vers l’intérieur, si bien qu’en dedans il se trouve maintenant en contact avec le petit groupe de trachées dont je viens de parler. Mais le point important à noter, c’est que les cellules embryonnaires constitutives de l'enveloppe péritrachéenne se montrent maintenant séparées lesunes des autres par une substance mtercellulaire assez abon- dante, si bien que le tissu qu’elles constituent se trouve en CAPI MO MERS? (2) PI. 15, fig. 1. ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1882. XIV. 14: — ART.:N° 9. 206 HE. VEALLANES. continuité absolue avec celui du mésoderme, sans qu’on puisse dire ni où commence l’un, ni où finit Pautre. Cette observation ne parait-elle pas démontrer que les cellules embryonnaires provenant de lhistolyse d’une tra- chée larvaire, peuvent concourir à former le mésoderme des disques imaginaux? D’autres faits sont plus probants encore. Si nous examinons une coupe transversale pratiquée à travers la région antérieure d’une jeune nymphe et passant par le disque (4) de l’antenne, nous observons les faits sui- vants : L'hypoderme larvaire n’a point encore disparu, mais ses cellules présentent déjà des traces évidentes d’altération qui nous montrent que bientôt elles vont se dessécher et tom- ber en écailles. Les plus grosses trachées larvaires sont encore reconnais- sables, mais leurs éléments ayant proliféré comme nous l'avons décrit plus haut, leur membrane péritonéale est repré- sentée par un cylindre ereux et irrégulier dont les parois très épaisses sont constituées par un amas de nombreuses cellules embryonnaires. Le centre de fa coupe est occupé par un grand nombre de cellules adipeuses à différents états de proliféra- tion, les plus extérieures sont les plus avancées, elles ont perdu leur membrane; les sranules qu’elles ont produits dans leur protoplasma commencent à s’écarter et se dispersent déjà dans le liquide cavitaire. Dans le large espace cireulaire qui sépare le corps adipeux des téguments, flottent librement un grand nombre d'éléments libres. Leur situation, l’état müriforme qu’un grand nombre d’entre eux présentent, l’étude que nous avons faite précédemment de lhistolyse des muscles, nous prouvent amplement que la plupart d'entre eux sont les pro- duits de la destruction des fibres musculaires de la larve. Au sein de cette accumulation d'éléments, entre le corps adipeux qui n’a pas encore disparu dans son entier et l’hypoderme lar- vaire, nous trouvons le disque de l’antenne. Il se montre (4) PI. 15, fig. 6. ARTICLE N° 4. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 207 coupé longitudinalement, c’est-à-dire selon l’axe du membre dont il est l’ébauche. Son feuillet et sa cavité provisoires comme aussi son exoderme, se présentent avec l'aspect général que nous con- naissons, mais nous remarquons que le mésoderme manque, et qu’ainsi la cavité du bourgeon creux que forme l’exoderme, ou, si l’on aime mieux, la cavité ébauchée du membre, est remplie par le fluide cavitaire de la nymphe, au lieu d’être remplie par un tissu mésodermique. Dans ce liquide qui rem- plit la cavité du membre, flottent ces granules d’aspects variés que nous savons provenir de l’histolyse des muscles et du corps adipeux de la larve ; nous y trouvons aussi beaucoup de cellules embryonnaires.Parleur situation, celles-ci représentent les éléments mésodermiques, mais rien ne vient nous dire qu’elles dérivent de l’exoderme; il paraît même beaucoup plus naturel de penser que, comme les autres cellules qui flottent dans la cavité générale, ce sont des globules de sang ou des cellules embryonnaires provenant de l’histolyse des trachées ou des glandes salivaires et qui se seraient introduites méca- niquement dans la cavité du disque, comme elles auraient pénétré dans n'importe quelle autre lacune. Dans ce cas particulier, nous avons même quelques motifs de croire qu’elles dérivent plus spécialement des cellules tra- chéennes de la larve. En effet, tout à l’entrée de la cavité du disque, nous trouvons une assez grosse trachée larvaire en voie d’histolyse, elle a parcouru les phases du processus que j'ai décrit plus haut; son tube chitineux persiste encore, sa membrane péritonéale est transformée en un cylindre épais dont les parois sont formées de nombreuses cellules embryon- naires. L’amas que celles-ci forment s'étend surtout en dehors, vers la cavité du futur membre, comme s’il voulait y péné- trer. Nous savons, par nos éludes antérieures, que ces cel- lules embryonnaires vont devenir libres et vont flotter dans le liquide cavitaire. Elles peuvent donc pénétrer dans la cavité du disque, mais nous ne pourrons les reconnaître une fois qu’elles auront quitté leur lieu de naissance ; les cellules 208 HI. VIALLANES. embryonnaires, en effet, ne sont point différenciées, elles se ressemblent toutes, quelle que soit leur origine ; c’est là même leur caractère. Il semble donc résulter de ces faits que le mésoderme des dis- ques imaginaux ne dérive pas nécessairement de l’exoderme de ceux-ci, mais que toute cellule embryonnaire est bonne à le former ; l’examen d’autres disques nous en fournira encore amplement la preuve. Le disque sur lequel j'ai fait les observations que je vais rapporter maintenant est un disque inférieur méso- ou méta- thoracique, je ne sais lequel des deux, cette détermination n'étant pas facile quand on observe des coupes denymphes tout à fait jeunes, et que la nature même des recherches interdit, comme nous allons le voir, l'emploi de toute autre méthode. Pour plus de commodité, j’appellerai le disque dont je vais parler mésothoracique, tout en faisant mes réserves sur l’exac- titude de cette dénomination. Sinousexaminons une série de coupes successives pratiquées à travers une pupe du premier jour, avant qu'elle ait acquis sa teinte brune caractéristique , nous reconnaissons que tous les tissus larvaires sujets à l’histolyse commencent déjà à présenter les premiers phénomènes qui caractérisent ce processus ; mais qu'aucun d'eux n’a encore perdu son autonomie ; el qu’ainsi, dans la cavité générale, 1l ne peut se trouver en circulation aucun élément autre que des globules sanguins de la larve. Ces globules fort abondants sont, nous le savons déjà, sim- plement des cellules embryonnaires, on les rencontre partout, dans toutes les lacunes que les organes laissent entre eux ; mais nous remarquons qu'ils sont assez irrégulièrement répar- is, plus serrés, plus entassés dans certains points que dans d’autres. Ceci n’a rien qui doive nous étonner, quand on suit les mouvements circulatoires chez une jeune larve suffisam- ment transparente pour permettre celte observation; on remarque qu'il en est de même et que les globules sanguins forment des accumulations dans les points où la circulation est le moins libre, là où 1l y a comme des remous. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 209 Dans la figure (1) j'ai représenté toutes les parties voisines du disque ; on y voit des faisceaux musculaires, des trachées, des cellules du corps adipeux présentant déjà les premiers sym- ptômes du phénomène de l’histolyse, et dans les lacunes que laissent entre eux tous ces organes, le liquide cavitaire où plongent de nombreux globules. Dans le disque, nous recon- naissons facilement le feuillet provisoire, la cavité provisoire et l’exoderme, mais nous remarquons qu'il n’y a point de mésoderme caractérisé ; si bien que la cavité de ce bourgeon creux que représente l’exoderme, ou, si l’on aime mieux, la cavité ébauchée du membre, communique librement et lar- gement avec la cavité générale de la nymphe; elle est, par conséquent, uniquement remplie par le sang. On remarque que les globules sanguins se montrent plus nombreux, plus serrés, dans la cavité de l’exoderme du disque que dans les lacunes voisines. Si ces globules sécrétaient entre eux une matière intercellulaire, ils constitueraient là un véritable mésoderme, et c’est en effet un tel phénomène qui paraît se produire. Si nous examinons en effet le même disque (2), mais à un état plus avancé de quelques heures, nous remarquons que les organes voisins n'ont que peu changé, leur histolyse est plus avancée, mais 1ls se montrent encore parfaitement reconnais- sables. Quant au disque lui-même, 1l a beaucoup grandi, s’est rapproché de l'extérieur, la cavité qui limite intérieurement son exoderme est devenue bien plus considérable. L’ébauche d’un tendon s’y est constituée par suite de la croissance et de l’invagination de Pexoderme, une grosse trachée s’est également montrée et paraît être aussi une formation exodermique. Mais le point le plus important à noter, c’est qu’il existe maintenant un véritable mésoderme. Ge tissu est surtout bien différencié en dehors, c’est-à-dire vers le fond de la cavité du membre. Mais à mesure qu’on s’avance en dedans, c’est-à-dire vers la (4) PL. 19, fig. 1. (2) PL. 48, fig. 1. 210 H. VIALLANES. cavité générale de la nymphe, les caractères du mésoderme se modifient et l’on passe sans ligne de démarcation du méso- derme bien caractérisé au liquide sanguin chargé de glo- bules. Tout parait donc se passer comme si la formation du méso- derme était due à ce que la matière intercellulaire liquide du sang aurait simplement changé de caractère et se serait so- lidifiée dans la cavité du disque. Dans le disque des yeux le mésoderme revêt des caractères très différents de ce que nous connaissons, je les étudierai plus loin, à propos du développement de l'appareil visuel. Développement des disques imaginaux. — M. Weismann a, le premier, montré que les disques imaginaux étaient des sortes de bourgeons destinés à s’accroître au moment de la métamorphose, à se substituer aux téguments larvaires dis- parus dans les quatre premiers anneaux du corps pour con- stituer les téguments de la tête et du thorax de l’imago. M. Ganin, qui fit des disques une étude plus approfondie, montra que ces organes se composaient des parties que nous avons étudiées plus haut : le feuillet provisoire, l’exoderme et le mésoderme. Il montra de plus qu'au moment de la méta- morphose le feuillet provisoire disparaissait, que l’exoderme servait à constituer l'hypoderme de l’imago et ses dépendances (trachées et tendons), enfin il assigna au mésoderme un rôle très important, mais que J aurai à discuter quand j'étudierai l’origine des muscles de l’imago. Je dois dire immédiatement que mes observations personnelles confirment absolument les conclusions de M. Ganin touchant le rôle du feuillet provisoire et de l’exoderme. Je veux seulement donner quelques détails sur la manière dont s’accomplit ce remplacement de l’hypo- derme larvaire par l’exoderme du disque ou hypoderme imaginal. Le disque qui se prête le mieux à cette étude est celui de l'antenne, aussi Je le prends pour type de ma description. Au début de la vie nymphale, quand les muscles des premiers segments ont complètement disparu, le disque de l’antenne se ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 211 présente avec l’aspectque j'ai décrit précédemment et figuré (1). Il est baigné de toutes parts par le liquide cavitaire où flottent un nombre considérable de cellules embryonnaires et de ces éléments variés mis en liberté par suite du phénomène de l’histolyse qui constituent ainsi une couche épaisse entre les celle les adipeuses qui n’ont point encore disparu et l’hypo- derme larvaire. Les cellules de ce dernier tissu présentent déjà les premiers symptômes de cette dégénérescence qui déter- minera leur dessèchement et leur chute (amoindrissement du protoplasma, disparition de la chromatine que renfermait leur noyau). Dans le disque nous retrouvons les parties que j'ai décrites précédemment, mais nous remarquons que l’on ne reconnaît plus d'éléments cellulaires dans le feuillet provi- soirée, qui paraît ainsi réduit à une simple membrane anhiste. À un état un peu plus avancé, on observe que le disque s’est déplacé dans son ensemble et qu'il s’est amsi approché de l’'hypoderme larvaire, si bien qu’il ne reste plus entre le tégument et le feuillet provisoire qu’un étroit espace rempli par le liquide cavitaire et les éléments libres qui y plongent. Un peu plus tard, le disque s’est encore avancé davantage vers l’extérieur, si bien que le feuillet provisoireest maintenant en contact avec la face profonde de l’hypoderme. En même temps l’exoderme s’est accru sur ses bords et a gagné sur le feuillet provisoire, aux dépens duquel il parait s’être étendu, si bien que la portion libre de celui-ci, comprise entre l’exo- derme du disque et l’hypoderme larvaire, se trouve maintenatnt très réduite. À un stade un peu plus avancé l’exoderme a continué à s’accroître par son bord, si bien que celui-ei paraît en contact avec l’hypoderme larvaire ; on ne peut plus alors distinguer de feuillet provisoire, et la cavité provisoire qui subsiste tou- Jours se trouve limitée en dehors par l’hypoderme larvaire, en dedans par l’exoderme du disque. Un peu plus tard l’hypo- derme, déjà presque complètement desséché, se rompt en un (1) PI. 15, fig. 6. 212 H. VIALLANES. point qui correspond au centre du disque, ainsi la cavité pro- visoire se trouve ouverte et communique largement avec l'extérieur. Après s'être rompu, l’hypoderme se soulève en orandes écailles qui sont détachées du corps de Panimal bien au delà des points qu’atteint le bord de l’exoderme. On conçoit aisément que la clôture du corps de l’animal cesserait t#être assurée s’il n'existait une enveloppe de transilion tutermédiaire à celle qui est en voie de disparition et à celle qui est en voie de formation. On se convainc facilement, en examinant les parties sous-jacentes aux écailles soulevées de l’hypoderme, que celui-ci en se détachant laisse au-dessous de lui une mince enveloppe qui le remplace provisoirement ; celle-e1 se montre comme une mince cuticule qui, en dedans, se trouve en con- tact immédiat avec le liquide cavitaire de la nymphe. Il me paraît assez probable que cette mince membrane, qui à elle seule constitue à un moment donné toute la elôture du corps, n’est autre chose que la membrane basale de l’hypoderme larvaire. Dès que la cavité provisoire étant ouverte, l’exoderme du disque se trouve par sa surface en contact avec l’extérieur, 1l représente l’hypoderme de l’imago et n’a plus qu’à s’accroître sur ses bords jusqu'à se souder avec ses congénères pour constituer le tégument définitif. L’exoderme s’accroit en demeurant extérieurement appliqué intimement à cette mince membrane où je crois reconnaitre la membrane basale de l’hypoderme larvaire, et de la sorte la clôture du corps se trouve constamment assurée. Développement de l'aile. — Le disque de l'aile présente dans son développement quelques particularités remarquables dont je n'ai pas encore parlé, et qui avaient échappé à mes prédé- cesseurs. Chez la Mouche adulte, l'aile se compose d’une mince membrane sèche et papyracée attachée au thorax par un pé- dicule étroit, et dans l’intérieur de laquelle ne pénètre qu’une seule trachéole très grêle et très courte. Mais dans la nymphe, au contraire, immédiatement après sa formation el sa sortie du ARTICLE N° 1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 213 corps, l’aile (1) se présente comme une expansion molle, épaisse, largement attachée au tronc. Elle est constituée par deux lames épaisses soudées sur leurs bords, celles-ci Himitent entre elles une large cavité qui, au niveau du point d'attache de l'aile, communique hbrement avec la cavité générale. Lastruc- ture de ces deux lames qui constituent la paroi de l'aile, est la même que celle de tous les autres téguments de l’imago ; en effet, chacune d'elles se compose, en allant de dehors en de- dans, d’une cuticule chitineuse, d’un hypoderme formé de très petites cellules fusiformes placées côte à côte, et d’une mem- brane basale. Quelque temps après la formation de Faile, on voit apparaitre dans la cavité de celle-ci un nombre extrême- ment considérable de trachées. Ces tubes aériens se présentent avec un aspect assez parliculier, ils sont fins, très égaux entre eux, parfaitement calibrés, très rarement divisés. Ils ont un trajet assez sinueux et marchent parallèlement les uns aux autres en s’accolant par paquets de sept ou huit. Je ne sais pas avec précision quel est le mode de terminaison de ces trachées, je crois pourtant qu’elle se fait par des anses ; ce qui est très certain, c’est qu'après avoir parcouru toute l’aile, les trachées entrent dans la cavité du thorax en se réunissant en un gros paquet. Plus tard, la cavité de l'aile s’oblitère par suite de la sou- dure de ses deux lames ; en même temps, les trachées semon- trent plus rares, puis elles disparaissent tout à fait, si bien que chez l’adulte on n’en trouve plus trace. Qu'on se place au point de vue physiologique ou morpholo- gique, le fait de l’existence, dans les ailes de la nymphe, d’un appare!l trachéen appelé à disparaitre chez l’imago, ne manque pas d'intérêt. Les morphologistes qui considèrent l'aile comme l’homologue d’une branchie trachéenne, trouve- ront dans ce fait un appui de plus en faveur de leur théorie. M. Künckel, qui combat cette théorie, considère que l'absence de trachées dans l’aile du Diptère adulte est l'argument le (1) PI. 15, fig. 2. 214 H. VIALLANES. plus puissant qu’on puisse lui opposer; mais, en présence des faits que je viens de faire connaître, cet argument perd la plus grande partie de sa valeur. CONCLUSIONS. 1° Les disques imaginaux sont constitués, comme l'indique M. Ganin, par trois assises cellulaires distinctes : le feuillet provisoire, l’exoderme et le mésoderme. La surface mterne du feuillet provisoire est séparée de la surface externe de l’exo- derme par une sorte de fente, la cavité provisoire. 2° M. Ganin pense que dans chaque disque, le mésoderme dérive toujours de l’exoderme; mais un certain nombre de faits nouveaux que J'ai pu observer me portent à penser que ce n'est pas là une règle générale, mais que dans quelques cas déterminés, le mésoderme des disques se forme aux dépens de cellules embryonnaires quelconques (globules du sang ou autres) répandues dans la cavité générale. 3° J'ai donné quelques détails nouveaux sur le mode sui- vant, lequel l’hypoderme imaginal qui représente l’exoderme des disques, se substitue dans le thorax et la tête à l’hypo- derme larvaire mort et rejeté. 4% L'étude que j'ai faite du développement du disque formateur de l'aile, montre que cet appendice renferme chez la nymphe des trachées extrêmement nombreuses, mais qui sont transitoires et appelées à disparaître à la in de la vie nymphale. CHAPITRE I. DÉVELOPPEMENT DES TÉGUMENTS DE L'ABDOMEN. M. Weismann (1) n’a que peu étudié le développement de l'abdomen de l’imago, à ce sujet il nous donne les seuls rensei- gnements que voici : « Les téguments de Pabdomen de l’imago doivent leur formation à une simple transformation de l’hypo- (1) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren, tir. à part. Leipzig, 1864, p. 190. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 215 derme de la larve, pour ainsi dire en une nouvelle séparation en anneaux et sur laquelle l’ancienne ne paraît en rien influer. » M. Ganin (1) nous fournit de nombreux renseignements sur le développement de l’abdomen de l’imago. Gomme je suis, à ce sujet, arrivé à des résultats différents de ceux qu'a obtenus ce naturaliste, je dois le citer in extenso : « Le commence- ment des processus de renouvellement dans les segments abdo- minaux peut être observé peu de temps après la formation de la pupe, c’est-à-dire vers la fin du second ou le commence- ment du troisième jour de la vie nymphale. La transformation des grosses cellules polygonales abdominales de l’hypoderme de la larve en petites cellules rondes embryonnaires, com- mence avant tout dans les parties latérales des segments et cela seulement sur quatre points, deux à gauche et deux à droite. La nouvelle formation est précédée par la séparation de la peau et des muscles abdominaux dela larve, plus tard, ces muscles se décomposent totalement, demême que les muscles des quatre segments antérieurs de la larve. Après que la sépa- ration des muscles abdominaux d’avec l’hypoderme a eu lieu, les contours des segments disparus sont indiqués seulement par les plis de l’hypoderme larvaire. Dans l’espace qui sépare deux plis voisins, se forment à droite et à gauche des ren- flements ovales dont l’axe longitudinal est couché en travers du LESC: » Ces renflements se forment par suite de la segmentation des vieilles cellules de l’hypoderme larvaire, ils se composent de petites cellules embryonnaires qui subissent un processus de multiplication incessante. La partie moyenne de chaque ren- flement, plus épaisse, se compose de beaucoup de couches de (1) Ganin, Matériaux pour l'histoire du \développement post-embryonnaire des Insectes (en russe). Varsovie, 1876, p. 32 et suiv. J'ai reproduit aussi exactement que possible (pl. 11, fig. 6), la seule figure que M. Ganin nous donne sur le développement des téguments de l’abdomen, elle est destinée à montrer la transformation des grandes cellules de l’hypoderme larvaire en pe- tites cellules embryonnaires. 216 H. VIALLANES. cellules rondes qui se pressent les unes contre les autres; à mesure qu’on approche de la périphérie, le renflement s’a- mineit et n’est plus qu'un amas de cellules de lhypoderme de la larve. De ces points, le renouvellement des cellules du vieil hypoderme se propage vers le haut, vers le bas et vers les côtés; des coupes transversales de l'abdomen de la pupe à di- verses phases de son développement, permettent de suivre tous les stades transitoires du processus de ce renouvellement : souvent on peut voir que lorsque les parties latérales des seg- ments sont déjà formées de tissus de nouvelle formation, les parties abdominale et dorsale sont encore occupées par les cellules du vieil hypoderme larvaire..…… Avant que le re- nouvellement de l’hypoderme ait lieu sur toute la surface abdominale de la nymphe, il se forme à la face interne des renflements latéraux abdominaux, le germe du second feuiilet germinatif ou mésoderme, par suite de la séparation et de la segmentation des couches internes des cellules de ces mêmes reuflements, plus tard les cellules du mésoderme deviennent fusiformes et s’isolent les unes des autres. » Aïnsi, pour M. Ganin, tandis que l’hypoderme larvaire des quatre premiers segments se desséchait et tombait en squames, l’hypoderme larvaire des huit derniers anneaux prenait au contraire, au moment de la métamorphose, un surcroît d’acti- vité ; ses grandes cellules entraient en prolifération et se trans- formaient toutes en pettes cellules embryonnaires; cette transformation commençait d’abord pour chaque anneau par quatre points symétriquement disposés, puis continuait à s’efflectuer, en rayonnant autour de chacun de ces centres, Jusqu'à ce que toutes les cellules hypodermiques larvaires aient été de la sorte transformées. Je dois ajouter que M. Ganin ne nous donne aucun rensel- gnement sur la manière dont s'effectue cette transformation des grandes cellules larvaires en petites cellules embryon- naires. J'ai repris les observations de M. Ganin touchant le mod de formation des téguments de l'abdomen de l’imago ; bien que ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9217 je sois arrivé à des conclusions assez différentes des siennes, je dois pourtant rendre justice à l’habileté de cet observateur. J'ai retrouvé toutes les images qu’il a décrites, et c’est seule- ment pour avoir observé certains stades quilui avaient échappé, que J'arrive à des résultats différents. Observations. — Pour arriver à connaître l’origine et le mode de formation des téguments de l'abdomen de l’imago, il est nécessaire d'observer des coupes totales, pratiquées chez des pupes, entre le premier et le troisième jour de la vie nymphale. Quand on examine une coupe totale pratiquée dans la région postérieure du corps chez une larve prête à se méta- morphoser, on rencontre les parties suivantes, en allant de dehors en dedans : Tout d'abord Ia peau, formée pär une épaisse cuticule chitmeuse, doublée en dedans par l'hypoderme lequel est constitué, comme nous le savons, par une seule assise de grandes cellules aplaties ; puis vient la couche mus- culaire, formée par des faisceaux coupés sous diverses inci- dences ; enfin nous trouvons le corps adipeux qui enveloppe le paquet intestinal et le sépare d’avec la couche musculaire. Je n’ai plus à donner aucun détail sur la structure de tous ces tissus, nous les connaissons déjà. Si nous examinons une coupe pratiquée dans les mêmes conditions, chez un animal un peu plus avancé dans son déve- loppement, c’est-à-dire chez une nymphe récemment formée et commençant seulement à brunir, nous reconnaissons que les modifications suivantes se sont accomplies : La cuticule larvaire, qui constitue l’enveloppe si solide de la pupe, a bruni et est devenue très dure. L’hypoderme s’est détaché d'avec elle et s’en montre maintenant séparé par un étroit espace; de plus, il asécrété une nouvelle cuticule, laquelle est fort mince. Soit par la dissection sous l'eau, soit par l'emploi de la méthode des coupes, on retrouve facilement cette enveloppe de nouvelle formation, dans l’espace libre qui sépare l’hypoderme d’avec la cuticule brune et épaisse qui constitue l'enveloppe exté- rieure de la pupe. Il semble donc que l'intervalle compris 918 H. VIALLANES. entre le moment où la larve devient immobile et le stade que nous décrivons corresponde en réalité à deux mues. Les cellules hypodermiques (1) sont devenues plus épaisses qu’elles ne l’étaient chez la larve, leurs contours se sont effacés, si bien qu’on ne peut limiter le domaine de deux cellules voi- sines. Le protoplasma est non seulement devenu plus abon- dant, mais encore il à acquis une propriété dont il ne jouissait pas durant la vie larvaire, il se laisse maintenant colorer par les tentures de carmin ou d’hématoxyline. Les noyaux, eux aussi, ont subi d'assez profonds changements, ils ont augmenté de volume, bien que leur membrane se montre toujours avec la plus grande netteté, leurs parties chromatiques sont deve- nues bien moins abondantes, car ils se montrent maintenant comme remplis par un sue incolore au sein duquel plongent seulement quelques rares nuceléoles colorés en rouge par le car- min. De plus, il faut ajouter que les noyaux hypodermiques se sont déplacés ; au lieu d'occuper la partie centrale des cel- lules, ainsi que cela avait lieu chez la larve, ils sont repoussés en dedans et appliqués contre la paroi interne de la cellule. Il est à remarquer que ces modifications de l’hypoderme sont surtout aecentuées, au voisinage de quatre épaississe- ments (2) disposés symétriquement dans chaque anneau et que nous désignerons dès maintenant sous le nom de disques ima- ginaux de l’abdomen. C’est qu'en effet, dans chaque anneau de l’abdomen, en quatre points, deux supérieurs et deux inférieurs, symétrique- ment disposés, l’hypoderme larvaire s’est épaissi. Chacun de ces épaississements ou disques, offre un contour ovalaire quand on l'examine de face. Sur une coupe on voit clairement qu'il est constitué par un tissu embryonnaire, c’est-à-dire par un amas de petites cellules sphériques, pourvues chacune d'un noyau et d’un nucléole et fortement tassées les unes contre les autres. (1) PL 11, fig. 5. @) PL. 11 fig 5: ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 219 Par ses bords amincis, le disque se continue sans ligne de démarcation avec l’hypoderme larvaire, au milieu duquel il est comme enchâssé. Il est très important de rechercher comment s'effectue la transition du tissu hypodermique au tissu embryonnaire du disque. À mesure qu’on s’avance vers les bords de celui-ci, on voit les cellules embryonnaires qui le constituent devenir de moins en moins serrées; enfin les plus externes de ces éléments sont assez distants les uns des autres, et plongent au sein même du protoplasma des cellules hypo- dermiques voisines. | Le stade que je viens de décrire a été bien vu par M. Ganin, mais, en se reportant au texte de ce naturaliste, on verra que sa description est incomplète sur bien des points. Si l’on compare la figure publiée par le naturaliste russe et que j'ai repro- duite (1) avec celle que je donne, on se convaincra que ce savant a tant soit peu schématisé les choses. Si le lecteur veut bien se reporter à ce que nous a appris l'étude du processus de lhistolyse des glandes salivaires et des trachées, 1l se convaincra que nous avons affaire 1c1 à un phé- nomène analogue. Au moment de la métamorphose, les tra- chées et les glandes salivaires se transforment en tissu embryonnaire, par ce fait que des cellules nouvelles appa- raissant au sein du protoplasma de leurs cellules consti- tutives, se multiplient et l’envahissent tout entier, sans que le noyau larvaire paraisse prendre aucune part à ces formations. De même, l’hypoderme larvaire, en quatre points pour chaque anneau de l’abdomen, se transforme en tissu embryon- naire, par ce fait que des cellules embryonnaires apparaissent dans le protoplasma des cellules hypodermiques, puis se multiplient et envahissent celui-ci. M. Ganin a bien vu comment apparaissent et se forment les disques imaginaux de l’abdomen, mais il s’est, je crois, mépris sur la manière dont se fait l'accroissement de ces parties. L'étude d’un stade plus avancé, et que mon savant nrédéces- (4) PI. 11, fig. 6. 990 H. VEALLANES. seur n'a point observé, montre bien que les conclusions aux- quelles il arrive ne sauraient être admises. À la fin du premier jour de la vie nymphale, une coupe prati- quée à travers l’abdomen se montre avec l'aspect que je vais décrire (1). Au centre, nous trouvons le tube intestinal, trans- formé par suite du phénomène de lhistolyse, en un simple cylindre de cellules; plus en dehors, nous rencontrons les cellules du corps adipeux, qui, pour la plupart, ont perdu leur autonomie, ayant déjà subi l’histolyse ; plus en dehors, enfin, vient la couche musculaire. À part quelques fibres retardataires qui subissent la dégénérescence, tous les faisceaux musculaires ont disparu, et à la place qu'ils occupaient se montre un amas d'éléments divers, flottant librement dans le liquide cavitaire. En dehors, l'hypoderme larvaire à disparu, et le corps de la nymphe n’est plus limité que par une très mince cuticule, au-dessous de laquelle les éléments libres dont je viens de parler sont plus accumulés et plus serrés qu'ailleurs. Nous retrouvons sur la coupe les disques imaginaux de l'abdomen, avec la même forme générale qu’ils offraient au stade précédent. Mais l’hypoderme larvaire ayant disparu dans toute l’étendue qui les sépare l’un de l'autre, ils sont mainte- nant complètement libres sur leurs bords. En dehors, les disques imaginaux ont sécrété une cuticule assez épaisse au niveau de leur centre, s’amineissant à la périphérie, et se con- tinuant sans ligne de démarcation avec la mince cuticule qui, entre les disques, limite à elle seule la cavité du corps de la nymphe. La structure histologique des disques ne s’est que peu modifiée, toutefois je dois dire que les cellules qui les consti- tuent ne sont pas sphériques comme elles l’étaient au stade précédent, mais elles se sont allongées de dedans en dehors, et maintenant sont fusiformes; mais 1l faut remarquer que cette modification n’est accentuée qu'au centre du disque; à La périphérie, les cellules ont toujours le caractère nettement embryonnaire. (1) PI. 14, fig. 5. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 991 Je disais plus haut que l’hypoderme larvaire avait entière- ment disparu ; en réalité il n’en est point tout à fait ainsi, car en suivant le contour de la coupe, dans les espaces qui séparent les disques les uns des autres, nous trouvons de temps en temps et à intervalles irréguliers, quelques rares cellules hypo- dermiques larvaires isolées subsistant encore, tandis que leurs congénères ont déjà disparu autour d'elles. Ces quelques cellules, qui sont les derniers vestiges de l’hypoderme larvaire, présentent des traces évidentes d’altération et de dégénéres- cence, elles ne tarderont pas elles-mêmes à disparaître tout à fait. Au stade suivant, en effet, nous ne trouvons plus rien de l’'hypoderme larvaire, et dans les espaces qui séparent l’un de l’autre les disques imaginaux d’un anneau, la mince euti- cule dont nous avons déjà parlé sert seule à limiter la cavité du corps. Les faits que je viens de faire connaître montrent bien que l’'hypoderme larvaire se détruit partout dans l’abdomen, excepté dans quatre points symétriquement disposés dans chaque anneau, où 1l se transforme en tissu embryonnaire pour constituer des disques imaginaux. Pour M. Ganin, au contraire, l’hypoderme larva ire tout entier se transformerait en tissu embryonnaire. À un stade plus avancé que celui que je viens de décrire, la partie centrale des disques s’est beaucoup épaissie et s’est dif- férenciée en deux couches; une externe, que M. Ganin désigne sous le nom d’exoderme, car elle représente l’hypoderme de l’imago, une interne, auquel il donne le nom de mésoderme, car c’est d'elle que dérivent les tissus plus profonds. Non seulement les disques se sont épaissis à leur centre, mais, en outre, ils se sont beaucoup étendus à la périphérie, si bien qu'ils se touchent presque les uns les autres. Plus tard, ils arrivent en contact el se soudent sur leurs bords; alors la cavité de la nymphe est définitivement fermée et l’hypoderme de l’imago est entièrement constitué. > ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 18892. XIV. 5, — ART. N° 1. 999 HH. VÉALLANES. CONCLUSIONS. 1° Au moment de la métamorphose, pour chaque anneau de l'abdomen, en quatre points, deux supérieurs et deux infé- rieurs, sSymétriquement disposés, l’hypoderme larvaire s’épaissit. 2% Ces épaisissements méritent. le nom de disques ima- gimaux. Leur formation est due à ce que dans les points qui leur correspondent les cellules hypodermiques larvaires pro- duisent de nombreuses cellules embryonnaires, ef sont le siège d'un phénomène analogue à celui que nous observions dans les cellules trachéennes et salivaires au moment de l’histolyse. 3 Quand les disques imaginaux sont formés, toutes les cel- lules hypodermiques larvaires qui sont situées en dehors de ces parties, el qui n’ont point pris part à leur formation, disparais- sent par dégénérescence et sont résorbées. 4° Après sa formation, le tissu des disques se sépare en deux couches : une externe, méritant le nom d’exoderme et qui servira à former l’hypoderme de l’imago; une interne, méritant le nom de mésoderme et qui servira à former les tissus plus profonds, c’est ce qu'a bien décrit M. Ganin. 5° Après que les cellules hypodermiques larvaires non trans- formées ont disparu entre les disques, ceux-ci s'accroissent par leur bord, arrivent en contact les uns avec les autres et se sou- dent pour limiter la cavité du corps et constituer l’hypoderme de l’imago. | 6° En résumé, tandis que pour M. Ganin, toutes les cellules hypodermiques larvaires se transforment en petites cellules embryonnaires pour former l’hypoderme de l’imago, pour moi, cette transformation n’a lieu qu’en quatre points pour chaque anneau, et les cellules hypodermiques comprises en dehors de ces poinis dégénèrent et sont résorbées. 7° Les observations que je viens de faire connaître nous montrent que les téguments de l'abdomen se constituent par le même mécanisme que ceux de la tête ou du thorax. La ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 293 seule différence de quelque importance est la suivante : dans la tête et dans le thorax, les disques se sont formés avant Ia métamorphose; dans l’abdomen, au contraire, ces parties se constituent au moment même de la métamorphose. Considérations générales sur le mode de formation des téqu- ments de l’ümago. — Bien que nos connaissances sur les méta- morphoses des Insectes soient encore très imparfaites, puisque les naturalistes n’ont encore étudié qu’un très petit nombre de types, 1l est pourtant de quelque intérêt de tenter un groupe- ment du peu que nous savons. Chez les insectes à métamorphose incomplète (Orthoptères), l'animal, au sortir de l’œuf, ressemble beaucoup à l'adulte; 1l se nourrit, s’accroit, et perd périodiquement sa cuticule; à chacune de ces mues, l’hypoderme, se modifiant quelque peu, arrive finalement à revêtir sa forme et son aspect définitifs. Chez les insectes à métamorphose complète (Diptères), Panimal, au sortir de l’œuf, ne ressemble nullement à ce qu’il doit devenir, c’est une larve qui se nourrit, s’accroit, perd périodiquement sa cuticule, mais sans que son hypoderme subisse aucun changement de forme ou de structure, puis subitement (au moment de la métamorphose), cet hypoderme larvaire est détruit et remplacé par un hypoderme nouveau, ayant la forme et la structure définitives. Ainsi, tandis que chez les insectes à métamorphose incomplète, l’hypoderme larvaire devient l’hypoderme imaginal, par suite d’une transformation lente et progressive; chez les insectes à métamorphose com- plète, l’hypoderme larvaire ne subit aucun changement au cours du développement et ne prend aucune part directe à la formation du tégument imaginal qui vient se substituer à lui. Cette substitution d’un hypoderme imaginal à un hypo- derme larvaire s'effectue par suite d’un mécanisme qui rappelle assez le phénomène du renouvellement des dents, qu’on observe chez les mammifères. Dans la mâchoire d’un mammifère, au-dessous de chaque dent de lait, existe un germe de remplacement qui, à un moment donné, s’accroil, détermine la chute dela dent de lait et forme une dent défini- 294 H. VIALLANES,. ve qui sy substitue. Chez l’insecte, dans chaque zoonite, au-dessous de lhypoderme larvaire, il existe quatre germes de remplacement (disques imaginaux) qui, à un moment donné, s’accroissent, déterminent la chute de lhypoderme larvaire et se substituent à lui en formant chacun une des pièces fondamentales du: tégument définitif, c’est-à-dire un demi-arceau, et les parties qui en peuvent dépendre. Toutefois, dans certaines régicns du corps où la concentration des z00- nites est plus grande, où, par conséquent, les pièces squelet- tiques fondamentales sont plus intimement soudées, on peut observer une réduction dans le nombre des disques et en trouver seulement une paire pour chaque zoonite; c’est ce qua s’observe dans la tête. Les faits observés par M. Weismann chez la Corethra, ceux qu'a découverts M. Künckel chez la Volucelle, doivent nous porter à croire que les disques dérivent primitivement de l’hypoderme larvaire, par suite d’un bourgeonnement interne de celui-ci; chez ces animaux, en effet, on remarque que les disques imaginaux sont toujours réunis à l’hypoderme par un pédicule plus ou moins allongé. Dans le mode de développement de l’hypoderme imaginal, les variations qui s’observent d’une espèce à l’autre, et, dans une même espèce, d’une région du corps à l’autre, paraissent tenir à de simples différences dans l’époque de formation des disques, ainsi : Dans l'abdomen de la mouche, les disques apparaissent tout à la fin de la vie nymphale; il en résulte que leur développe- ment suit immédiatement leur formation, aussi ne sont-ils jamais refoulés dans la profondeur du corps et restent-ils tou- jours superficiels. Dans le thorax de la Corethra (Weismann), et dans celui de la Volucelle (Künckel), les disques apparaissent au commen- cement de la vie nymphale, aussi sont-ils refoulés profondé- ment et ne restent-ils unis avec les téguments que par un pédoncule plus ou moins long. Dans le thorax de la mouche, les disques se forment bien ARTICLE N° f. ILISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 995 plus tôt, ils existent déjà chez l’embryon dans l'œuf; c’est peut-être à cette circonstance qu'il faut attribuer ce fait que, chez la larve, 1ls paraissent ne plus être des dépendances de la peau. Mais, je me hâte de le dire, ce point appelle de nouvelles recherches. Il n’est pas sans intérêt de faire remarquer que la méta- morphose des insectes ne constitue pas un procédé de déve- loppement spécial à ces animaux. Les belles recherches de M. 3. Barrois ont établi que chez les Nemertes qui passent par la forme Pilidium, on observe des phénomènes qui rappellent les métamorphoses complètes des insectes, puisqu'il se pro- duit chez ces vers une chute de l’exoderme larvaire et un remplacement de celui-ci par suite du développement de germes analogues aux disques imaginaux. Ce qui rend cette analogie encore plus frappante, c’est que M. J. Barrois (1) a montré que, d’une espèce de Némerte à l’autre, on rencon- trait les mêmes différences qu'entre un insecte à métamor- phose complète et un insecte à métamorphose incomplète. CHAPITRE II. DÉVELOPPEMENT DU SYSTÈME MUSCULAIRE. Historique. — Les observations sur le aéveloppement du faisceau musculaire strié n’ont jusqu’à présent été faites que sur quelques vertébrés et sur quelques espèces d’insectes de l’ordre des Diptères. Je ne ferai point ici historique des si nombreux travaux auxquels a donné lieu l'étude du développement du tissu mus- culaire des vertébrés, on trouvera cet historique exposé avec grands détails dans un mémoire important, dù à M. Léon Frédéricq (2), et dans les leçons de M. Ranvier (3). (1) JS. Barrois, Mémoire sur l’embryologie des Némertes (Ann. sc. nat., 6° série, &. VI, 1877.) (2) Léon Frédéricq, Génération et structure du tissu musculaire. Gand, 1875. (3) Ranvier, Leçons d'anatomie générale sur le système musculaire. Paris, 1880. 296 HI. VIALEANES. Je ferai seulement remarquer qu’en lisant les travaux des histologisies qui se sont occupés de cetle question, on est frappé de ceci, qu'ils sont presque tous d'accord sur les images observées, tandis que les conclusions auxquelles 1ls arrivent sont fort différentes. Ces divergences tiennent, à n’en pas douter, à ce que chez les animaux que ces observateurs étu- diaient, l’interprétation était difficile ou sujette à controverse. C'est ce qui m'a décidé à entreprendre l’étude de la genèse du üssu musculaire chez d’autres animaux que les vertébrés, espérant qu’ainsi les phénomènes de l’évolution seraient plus faciles à interpréter ; J'avais d’ailleurs été précédé dans cette voie par trois naturalistes : M. Weismann, M. Künckel d’'Her- culais et M. Ganin. Au sujet du développement des muscles de l’imago, il n’y a qu'un petit nombre de points sur lesquels tout le monde soit d'accord, c’est pour admettre que ces muscles n’existaient point chez la larve, qu’iis se développent chez la nymphe et qu'à leur premier état ils sont formés par des cellules em- bryonnaires. Mais les trois observateurs que je viens de citer sont en désaccord complet sur l’origine de ces cellules em- bryonnaires musculogènes, et sur la manière dont ces cel- lules se différencient ensuite et se transforment pour constituer le tissu musculaire. Afin de rendre les comparaisons plus faciles, je séparerai ces deux questions et je donnerai successi- vement l'historique de ce que les auteurs qui m'ont précédé nous apprennent : À° Sur les transformations que subissent les cellules embryonnaires pour former le tissu musculaire ; 2° Sur l'origine de ces cellules embryonnaires musculogènes. M. Weismann (1) 1864, a successivement étudié le déve- loppement des muscles de la larve et celui des muscles de l’adulte qui naissent durant la période nymphale. Développement des muscles de la larve (p. 192 et suiv.). — L'auteur a observé les faits suivants : Dans une larve qui sort de l’œuf, les faisceaux primitifs sont des tubes cylindriques (1) Weismann, Die Nachembryonale Entwikelung der Dipteren. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 997 fermés, limités par un sarcolemme sans structure, et remplis d'une substance fondamentale claire et visqueuse ; dans cette substance sont des éléments cellulaires (noyaux), agglomérés, mesurant 0,005 à 0,006 millimètres ; 1l n’y à pas encore trace de striation. Plus tard, cette striation se montre, elle paraît se produire par suite de la transformation de la substance fonda- mentale en substance contractle ; cette transformation a lieu dans l’axe de la fibre et non à sa périphérie. Sous le sarco- lemme, se voit alors une couche non modifiée, en dedans de laquelle est la masse contractile striée. Dans la fibre non encore complètement développée, dans cette couche non modifiée, se trouve une grande quantité d'éléments cellulaires. Plus tard, on n’en rencontre plus que quelques-uns qui grossissent beaucoup et deviennent les noyaux musculaires. Développement des fibres musculaires de l’imago. — M. Weis- mann (1) étudie successivement le développement des muscles de l’aile et celui des muscles des pattes ; ces deux espèces de muscles étant, ainsi qu'il le fait remarquer, très différentes l’une de l’autre. Pour le développement des muscles de l’aile, il a observé les faits suivants en étudiant les genres Musca, Sarcophaga, Stratiomys, Ghironomus, Pontia et Simulia. 4° Dans le liquide qui remplit le thorax d’une pupe, on trouve de très fins cordons pâles, présentant les mêmes inser- tions que les muscles de l’aile. Dans l’état de développement le moins avancé qui ait été observé, chacun de ces cordons était constitué par une grande quantité d'éléments cellulaires entassés, mesurant 0,006 et séparés les uns des autres par une faible quantité de matière fondamentale. Chacun de ces cordons avait une forme cylindrique et paraissait enveloppé par une mince enveloppe sans structure. 2° Au septième ou huitième jour de la vie nymphale, l’aspect des cordons a changé. Les éléments cellulaires sont disposés (1) Weismann, Ueber die zwei Typen contratilen Gewebes und ihre Verthei- lung in die grossen Grüppen des Thierreichs, $owie über die histologische Bedeutung ihrer Formelemente (Zeitsch. f. ration. Medicin, 1862, Bd XV, p. 60). 998 M. VIALLANES. en trainées longitudinales. Chacune de ces trainées est séparée de sa voisine par une bande longitudinale de matière fonda- mentale. Chaque trainée cellulaire est constituée par plusieurs rangs d'éléments. La substance fondamentale qui constitue les bandes longitudinales paraît différente de celle qui sépare l’un de l’autre les éléments cellulaires d’une même traïnée. A cette époque, le cordon se montre nettement enveloppé par une membrane amorphe. Un peu plus tard, les bandes de substance fondamentalé ont grandi, se sont élargies, elles ont, par conséquent, comprimé les bandes d'éléments cellulaires. Les bandes de substance fondamentale prennent plus tard un aspect fibrillaire ; ainsi, les fibrilles semblent s’être formées, comme par suite d’un clivage des bandes de substance fonda- mentale, c’est seulement plus tard qu’elles prennent un strié transversal. Si bien que chaque cordon est devenu une masse musculaire, chaque bande de substance fondamentale un des faisceaux qui entrent dans la composition de la masse musculaire. Je dois faire remarquer ici qu'afin de rendre les comparaisons plus faciles, je n’emploie pas les termes dont s’est servi M. Weismann, mais ceux que j'ai dû employer précé- demment en décrivant la structure des museles de Paile à leur période d'état. 3° À un état plus avancé, la mince enveloppe qui revêtait le cordon disparait. Les éléments cellulaires qui remplissaient les intervalles compris entre les faisceaux disparaissent et sont remplacés (sans que M. Weismann nous dise comment) par des cellules infiniment plus grandes, pourvues d’une membrane épaisse et mesurant 0"",018 à 0,095. Plus tard, apparaissent les trachées de ladulte qui paraissent se déve- lopper aux dépens de ces grandes cellules, mais le savant na- turaliste allemand ne nous donne pas de détails à ce sujet. Ces trachées de l’imago enveloppent complètement les faisceaux et les séparent les uns des autres. M. Weismann, s'appuyant sur ce fait que chaque cordon formateur d’une masse muscu- laire est, au début, enveloppé d'une membrane qui disparait dans la suite; pensant, d'autre part, que chaque faisceau est ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 299 uniquement composé par un paquet de fibrilles, non divisé en paquets plus petits, suppose que toute la masse musculaire produite par un seul cordon représente, dans son ensemble, un faisceau primitif de Vertébré, dont le sarcolemme aurait disparu et que des trachées seraient venues séparer en paquets de fibrilles. Mais les détails que j'ai donnés plus haut sur la structure des muscles de lPaile à leur période d'état, et qui avaient échappé à M. Weismann, nous montrent déjà que l’assimila- tion proposée par l’auteur allemand doit au moins subir des modifications. J'ai, en effet, montré que cette partie que M. Weismann considérait comme un simple paquet de fibrilles, et que j'ai appelée le faisceau, était en réalité divisée en colon- nettes, séparées les unes des autres par du protoplasma et des noyaux. C’est là encore un des motifs qui m'ont engagé à répéter, sur l’évolution du tissu musculaire, les observations de ceux qui m'ont précédé. M. Weismann (1) a observé les faits suivants touchant le développement des museles des pattes (pages 203 et suiv.). 1° Chez les Tipulides, chaque faisceau primitif des pattes se montre, à son premier état, comme un cordon cylindrique formé de nombreuses cellules, plus tard la substance inter- cellulaire qui sépare ces éléments se différencie à la surface en un sarcolemme. La substance contractile se forme ensuite au-dessous du sarcolemme par différenciation de la substance intercellulaire; ce revêtement de substance contractileé, en s’épaississant, repousse devant lui les éléments cellulaires qui deviennent la colonne axiale de noyaux qu’on rencontre dans chaque faisceau. Chez le Musca vomitoria, les choses se passent, à peu de chose près, de la même manière. ® Chez le Sarcophaga, M. Weismann a découvert une modification extrèmement intéressante du phénomène de la genèse des muscles des pattes. La transformation de la sub- stance fondamentale en substance contractile ne se fait pas (1) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren. Tir. à part. Leipzig, 1864. 930 Hi. VIALLANES. seulement de la périphérie au centre du faisceau, mais elle s'opère à la fois sur deux zones concentriques qui restent sépa- rées l’une de l’autre par une zône de substance fondamentale non transformée. Ainsi, au douzième jour de la vie nymphale, on observe que le faisceau est constitué, comme dans le cas précédent, par une mince couche de matière contractile enve- loppant une file unique d'éléments cellulaires. Mais, au sixième jour, on observe une autre enveloppe de substance contractile, concentrique à la première et séparée d’elle par une mince zone de substance fondamentale non modifiée. J’ajouterai que, d’après M. Weismann, les éléments cellu- laires qui entrent dans la constitution de l’'ébauche d’une fibre musculaire mesurent, dans tous les cas, 0,006. En résumé M. Weismann a, dans tous les cas, vu la fibre musculaire constituée d’abord par un amas d'éléments cellulaires séparés par de la substance fondamentale. La matière contractile fibril- laire s’est toujours montrée à lui comme formée par suite d’une simple transformation de cette substance fondamentale. M. Künchel d'Herculais (1) a fait les observations suivantes sur la genèse des muscles chez la Volucelle. 1° En ouvrant le thorax d’une pupe de trois jours, on trouve d’abord une mince membrane cuticulaire, c’est l'enveloppe de la nymphe. Au dessous on voit une couche de cellules hypo- dermiques, formant un réseau d’hexagones, c’est l’hypoderme larvaire, puis des cellules elliptiques imbriquées, enfin le tissu musèulaire de la larve en voie de destruction. Ces cellules eili- ptiques, longues de 0"",064 et larges de 0,006 à 0"",009, ont un noyau assez volumineux; à chaque pôle, en dehors du noyau, on aperçoit un petit globule qui réfracte vivement la lumière. 2 En opérant de même sur une pupe du troisième ou qua- trième jour, on trouve la même disposition, mais les cellules elliptiques paraissent s’être allongées et sont maintenant (1) J. Künckel d’Herculais, Organisation et développement des Volucelles. Paris, 1875, p. 196, 199. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 231 fusiformes (1), le tissu musculaire de la larve se montre encore au-dessous. 3° Plus tard, à la place des cellules fusiformes, on trouve des éléments très allongés et présentant des renflements de dis- tance en distance, ce qui leur donne l'apparence de chape- lets (2). À chacun de ces renflements correspond un noyau chaque chapelet semble formé par un cylindre de substance contractile, qui, de distance en distance, renferme des noyaux correspondant aux parties renflées. 4° Chez une pupe du cinquième jour on trouve les « fais- ceaux musculaires » déjà formés, mais ils sont dissimulés par une multitude d'éléments cellulaires (noyaux), très rappro- chés et disposés dans une substance fondamentale (blastème), en lignes longitudinales et transversales à peu près régulières. Ces éléments cellulaires, que M. Künckel compare à des «myo- plastes » sont arrondis et mesurent 0"",006. Au-dessous d'eux setrouvent des « faisceaux primitifs », mesurant 0"",038, enve- loppés chacun par une membrane (sarcolemme). Sous cette membrane on trouve des éléments cellulaires, placés en séries de distance en distance et mesurant 0%%,049. Quand on dila- cère ces faisceaux primitifs on les voit se décomposer en ces formations en chapelet, décrites tout à l'heure, et mesurant toujours 0**,006 au niveau de leurs renflements ; elles n’ont aucune trace de striation. 5° Quand on dilacère les muscles d’une pupe plus avancée encore, on les décompose en fibrilles striées mesurant 0"",004, et n’offrant pas trace d’enveloppe ni de noyaux dans leur inté- rieur. M. Künckel pense, sans en avoir d’ailleurs de preuve di- recte, que chacune de ces fibrilles n’est autre chose qu’une des formations en chapelet transformée et ayant perdu ses noyaux. Tels sont les seuls faits d'observation que j'ai pu relever dans le chapitre que M. Künckel consacre au développement du tissu musculaire ; il en tire les conclusions suivantes. (1) Künckel, loc. cit., t. VIIT, fig. 5. (2) Künckel, loc. cit., pl. IX, fig. 10. 959 HE. VIALLANES. « L'élément primitif du musele est une cellule qui, par son allongement, constitue une fibrille ; la fibre ou faisceau primi- tif est une formation secondaire, c’est une réunion sous une enveloppe commune, le sarcolemme d’un certain nombre de fibrilles déjà développées : le sarcolemme est donc une forme de tissu conjonctif, les mvoplastes sont les centres de formation du périmysum et ne jouent aucun rôle dans la genèse des muscles, le tissu qui renferme les myoplastes n’est encore qu'une forme du tissu conjonctif. Enfin, sans préjuger la nature intime de la substance fibrillaire, on voit que la fibrille possède une enveloppe qui est la paroi de la cellule d'origine. » « Tout me porte à croire, ajoute M. Künckel, qu'il en est de même chez les Vertébrés .» Quand on lit le travail de M. Künckel, on est frappé de ce que cet auteur ne tienne aucun compte des faits exposés par M. Weismann ; car, quelque effort qu’on fasse, on ne peut con- ciler les observations et les dessins de l’auteur allemand avec les théories de M. Künckel et ce dernier ne nous dit pas pourquoi il n’a pas reproduit les préparations de M. Weis- mann. Mais, en ne considérant qu’en soi l'ouvrage du naturaliste français, on n’est nullement convaincu de la solidité de ses conclusions. Et pour ne parler que du point le plus impor- tant, celui de la transformation en une fibrille de chacune des formations en chapelet, comment admettre qu’une fibrille, qui mesure à peine 0"",001, soit le dérivé direct d’une formation qui, dans ses points les plus larges, mesure 0"*,006 à 0,009. Il faudrait pour cela admettre que les muscles embryonnaires présentent un volume beaucoup plus grand que les muscles complètement développés. Or, Herold et M. Weismann ont vu que les muscles de l'aile, alors qu'ils avaient déjà la direc- tion et les points d'insertion qu'ils conserveront toujours, pré- sentaient un volume infiniment plus petit que celui qu'ils auront chez l'adulte. D'ailleurs M. Künckel n’a point observé d'état transitoire entre la formation en chapelet et la fibrille. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 255 Il ne nous dit point comment disparaissent les noyaux de cette formation en chapelet qu'il regarde comme une jeune fibrille. C’est pourtant là qu'est le nœud même de la question. Etjene suis pas le premier à remarquer cette grande lacune. M. Ran- vier (4) l’a fait avant moi quand il dit : « Pour soutenir la théorie, M. Künckel est forcé de supposer à priori que ce noyau à disparu par atrophie complète et totale. » ‘ Je signalerai encore une autre lacune dans le travail de M. Künckel: ce naturaliste ne nous dit point ce qui distingue le développement des museles de l’aile de celui des muscles des pattes. Il doit pourtant exister une différence, puisque. ces éléments diffèrent beaucoup les uns desautres chez l’adulte et puisque M. Weismann a vu dans leur développement des dissemblances très profondes. On comprend difficilement comment M. Künckel a pu con- clure si rapidement sur la nature des formations en chapelet s'il a eu sous les yeux les travaux des histologistes qui ont étudié avant lui ia genèse des muscles des Vertébrés. Les for- mations en chapelet,‘telles que les dessine M. Künckel, res- semblent à S'y méprendre, et comme taille et comme configu- ration générale, aux jeunes faisceaux primitifs des Vertébrés quereprésentent, par exemple, les planches de M. Kælliker (2) ou celles de M. Weismann(3) même. De plus j'ajouterai quesi lon compare la description que M. Weismann donne des jeunes faisceaux des pattes avec celle que M. Künckel donne des formations en chapelet, on est frappé de leur ressem- blance. Les jeunes faisceaux des pattes, comme les formations en chapelet, sont constitués par un mince cylindre creux de sub- stance contractile renfermant dans son intérieur des éléments (1) Ranvier, Leçons d'anatomie générale sur le système musculaire. Paris, 1880, p. 283. (2) Kæœlliker, Traité d’histologie. 2° édit. française, 1872, p. 231, fig. 125. (3) Ueber zwei Typen contractilen Gewebes. Zeitsch. [. rahionn. Medicin, 1862, Bd XV, fig. 4 et &. ARTICLE N° 1. 934 H. VEALEANES. ayant l’aspect de noyaux et, dans les deux cas, mesurant Oum, 006, et l’on se demande alors si M. Künckel n'aurait pas eu sous les yeux de jeunes faisceaux des pattes, alors qu'il croyait avoir affaire à de Jeunes fibrilles. M. Ganin (1), en ce qui concerne le développement des muscles de laile, nous donne beaucoup moins de détails que M. Weismann, mais ce qu'il a observé confirme tout à fait les travaux du naturaliste allemand. Quant aux muscles des pattes, il a vu un état de leur développement encore moins avancé que le premier stade qu'a observé M. Weismann; il décrit en effet les muscles des pattes à leur état le plus jeune comme composés par un amas de petites cellules fusiformes, pourvues d’un seul noyau et qui me paraissent tout à fait analogues à ces cellules que M. Künckel pense représenter le premier état d’une fibrille. M. Weismann pensant, avoir acquis la certitude que tous les tissus larvaires étaient frappés de mort et se dissolvaient; d'autre part, croyant s'être assuré que les disques imaginaux étaient seulement capables de former des téguments, se trou- vait fort embarrassé pour découvrir l’origine des muscles nou- veaux. Mais il rencontra dans le corps de la nymphe des forma- tions très curieuses et d’origne problématique, auxquelles :l donna lenom de boules à noyaux (Kôrnchen Kugeln), e’étaient de grosses sphères revêtues d’une membrane d’enveloppe et ren- fermant de nombreux éléments arrondis ayant l’aspect de noyaux et plongés dans une substance finement granuleuse (2). Ayant vu plusieurs de ces boules à noyaux rompre leur enve- loppe et laisser échapper leur contenu, ayant de plus remarqué que les éléments à aspect de noyaux qu’elles mettaient ainsi en hberté ressemblaient, par plusieurs caractères, aux cellules (1) Ganin, Matériaux pour l'Histoire du développement post-embryonnaire des Insectes. Varsovie, 1875 (en russe). (2) J'ai montré dans un chapitre précédent que les boules à noyaux de M. Weismann n'étaient autre chose que des cellules du corps adipeux très hy- pertrophiées, et ayant proliféré une quantité considérable de granules ressem- blant à des éléments cellulaires. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 939 qui constituent la première ébauche des muscles de l’imago, il supposa que ces éléments cellulaires sortis des boules à noyaux étaient les éléments formateurs des tissus nouveaux. M. Weismann, n'ayant reconnu aucune fillation entre les éléments larvaires et ces boules à noyaux, supposa, en faisant d’ailleurs toutes ses réserves, que ces formations probléma- tiques étaient dues à ce qu’une purée graisseuse non organisée, provenant de la fonte des tissus détruits, se serait ramassée en boulettes, dans l’intérieur desquelles des éléments cellu- laires seraient apparus par formation libre. M. Künckel recherche également l’origine des cellules musculogènes. Tout d'abord 1l critique par des arguments théoriques l’hypothèse que fit M. Weismann au sujet du mode de formation des boules à noyaux (1). « N'est-ce pas, dit-il, ressuseiter la théorie de la formation des cellules libres et remettre en faveur l'opinion de Schwann et Schleiden, uni- versellement abandonnée aujourd'hui. » Mais, sur ce point, M. Künckel me parait un peu déplacer la question. Que l'hypo- thèse que fit M. Weismann sur l’origine des boules à noyaux soit inadmissible aujourd'hui, cela n'empêche pas que ces boules à noyaux existent puisqu'elles ont été décrites et dessi- nées, cela ne prouve pas que les éléments qu’elles renferment et qu’elles mettent en liberté soient impropres àformer du tissu musculaire. M. Künckel pense que les cellules musculogènes dérivent des disques imaginaux, mais il ne nous dit pas comment, et ne me paraît, à l'appui de cette opinion, n’apporter aucun fait d'observation directe. Il signale pourtant un fait qui doit faire supposer que le tissu adipeux ne prend aucune part formatrice dans la constitution des muscles nouveaux (2). 11 a, en effet vu le corps adipeux conserver sa forme générale au septième ou huitième jour de la vie nymphale, alors que (1) Künckel, Organisation eb développement des Volucelles. Paris, 1875 pe lof: (2) Künckel, Loc. cit., p. 198. ARTICLE N° 1. 236 RH. VEALLANES. bien avant cette époque les muscles de limago étaient déjà ébauchés. M. Ganin, ayant cru, comme ses prédécesseurs, pouvoir ôtre certain que tous les tissus larvaires étaient frappés de mort etse dissolvaient, pensant d'autre part s'être assuré que les boules à noyaux de M. Weismann étaient des fragments inanimés de substance contractile devant leur forme caracté- ristique simplement à ce que celle-ci se serait, en se dissoi- vant, fracturée d’une certaine manière, n'avait plus l'embarras du choix pour rechercher l’origine des cellules musculogènes. Elles ne pouvaient évidemment provenir que des disques, puisque c’étaient là les seules parties de lPanimal dont les cellules aient échappé à la mort. Aussi M. Ganin est-il forcé de considérer toute cellule qu’il rencontre après l’histolvse dans la cavité générale de la nymphe comme dérivant des disques par émigration. Mais le savant russe ne s’en tint pas aux données que lui avait fournies l’étude de lhistolyse ; ül rechercha directement l’origine des cellules musculogènes. En étudiant l’évolution des disques chez la nymphe, il vit le mésoderme de ceux-ci se différencier sur certains points en trainées d’un aspect spécial. Dans ces trainées les cellules du mésoderme étaient plus pressées les unes contre les autres et affectaient une forme allongée en fuseau dans le sens de la longueur. En suivant le développement 1l vit que chacune de ces trainées se différenciait de plus en plus des parties voisines et devenait un musele de la patte. En ce qui concerne les muscles de l'aile, M. Ganin ne nous donne pas de preuves directes de leur origine. Au premier stade où 1] lui a été possible de les reconnaitre, ils occupaient déjà une situation assez éloignée de l’ectoderme (1). M. Ganin (1) J'ai reproduit aussi exactement que possible (pl. 11, fig. 7) la figure sur laquelle M. Ganin base son opinion touchant l’origine des muscles de Paile; mais elle ne me parait nullement convaincante; rien, en effet, ne nous prouve que ce tissu, situé à droite et composé de petites cellules fusiformes plongées au sein d’une substance fondamentale, soit l’ébacche d’un muscle de l'aile. De plus, quiconque a observé des coupes de l’hypoderme d’une nymphe ne pourra mé- HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9237 ne doute point qu'ils ne proviennent du mésoderme par une émigration des cellules de celui-ci; c’est aussi à des cellules émigrantes du mésoderme des disques que M. Ganin attribue l’origine des muscles du tube digestif. Les conclusions de M. Ganin seraient parfaitement admis- sibles s’il était bien démontré que tous les éléments larvaires meurent, se dissolvent sans laisser d'eux aucun élément cellu- laire. Mais, dans la deuxième partie de ce travail, j’ai montré que l’histolyse n’était point un phénomène aussi simple que le supposaient mes prédécesseurs. J'ai établi que les glandes salivaires disparaissaient en se transformant en cellules em- bryonnaires libres, typiques ; que les muscles et les cellules adipeuses disparaissaient en mettant en liberté des éléments (granules) ressemblant par bien des caractères à des cellules vivantes. | L'existence de ces phénomènes rend singulièrement plus difficile la recherche de l'origine des tissus de l’imago. Nous ne serons plus en droit, comme M. Ganin de considérer à priori toute cellule embryonnaire que nous rencontrerons dans la cavité de la nymphe comme ayant émigré du méso- derme des disques. Et de plus, si réellement des cellules peu- vent ainsi émigrer, à quels caraclères pourrons-nous les dis- tinguer, comment pourrons-nous les suivre au milieu des cellules embryonnaires d'origines si diverses et des élé- ments libres si variés qui remplissent le corps de la nymphe ? Dans cette étude du développement et de l’origine du tissu musculaire qui, on vient de le voir, présente tant de difficul- tés, il faut, je crois, procéder avec une extrême prudence, laisser de côté les méthodes qui paraissent le plus philoso- phiques pour prendre celles qui sontle plus sûres. Aussi j'étu- dierai le développement du tissu musculaire « à reculons » ou, si l’on aime mieux, j'emploierai la « méthode embryolo- connaître que la figure soit quelque peu schématisée, jamais en effet les cellules hypodermiques de la nymphe ou de l’imago ne sont disposées comme des moel- lons cubiques, ainsi que le représente le naturaliste russe. ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE, 1882. XIV. 16. — ART. N° 1. 258 H. VIALLANES. gique descendante », pour me servir de lexpression de M. Ranvier, de la sorte nous irons du connu à l'inconnu. Observations. — La coupe pratiquée transversalement dans le thorax d’une mouche adulte et passant au voisinage du point d'attache des ailes se présente avec un contour à peu près circulaire. En allant de bas en haut on rencontre, sur la ligne médiane, d’abord la chaine ganglionnaire, immédiatement au- dessus l’œsophage, qui ne présente là qu’un faible diamètre ; sur cette même ligne médiane, mais tout à fait en haut et immédiatement au-dessous des téguments, se trouve le vais- seau dorsal. Tout le reste de la cavité thoracique est rempli par des muscles séparés les uns des autres par d’étroites trachées. Je dois n’arrêter quelques instanis à décrire la dis- position topographique de ces muscles, car cette connaissance nous sera indispensable pour l'étude de leur développement. Immédiatement en dehors de la ligne médiane, nous trouvons une grande masse musculaire que J’appellerai masse muscu- laire interne de l'aile; ses fibres étant dirigées longitudinale- ment, elle se montre en coupe transversale (1). La masse interne se présente avec le contour général d’un rectangle allongé dont les grands côtés sont verticaux, dont le petit côté supérieur est situé immédiatement au-dessous des téguments dorsaux, et dontle petit côté inférieur arrive au niveau de l’æso- phage ; ainsi elle occupe presque toute la hauteur du thorax. En haut les deux masses internes sont presque en contact sur la ligne médiane, en bas elles s’écartent un peu, de la sorte elles limitent un triangle isocèle à sommet supérieur, dont la surface de l’œsophage constitue la petite base inférieure. Cet espace triangulaire est rempli par une matière gris jaunâtre réfringente qui, examinée à un fort grossissement, se montre comme composée parde fines granulationsgraisseuses, au milieu desquelles on rencontre un certain nombre de noyaux colora- (1) PI. 14, fig. 3. La figure à laquelle je renvoie ne correspond pas au stade que je décris en ce moment, elle représente un état bien moins avancé, pour- tant elle suffit à donrer une excellente idée de la disposition générale de la masse musculaire interne. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 939 bles par le carmin et qui souvent se montrent agglomérés plu- sieurs ensemble pour présenter ainsi l'aspect d’une petite mûre. Maintenant que nous connaissons les rapports généraux de la masse interne, examinons plus attentivement sa structure. Elle se montre composée par une seule rangée de six faisceaux disposés les uns au-dessus des autres sur une même ligne ver- ticale, par conséquent chacun d’eux occupe toute la largeur de la masse musculaire. Le contour de chaque faisceau est généralement celui d’un rectangle dont les grands côtés sont horizontaux et les petits verticaux. Les faisceaux qui consti- tuent la masse interne sont régulièrement espacés et séparés les uns des autres et de toutes les parties voisines par de fines trachées qui, sans jamais pénétrer dans leur intérieur, les enlacent de toutes parts. Les rapports de la masse mus- culaire interne, la disposition des parties qui là composent sont si caractéristiques que, sur une coupe, on la reconnaît au premier coup d'œil. La figure en donnera une bonne idée et permettra de corriger ce que ma description a de forcément schématique. Dans un chapitre précédent J'ai décrit avee détails la struc- ture des faisceaux qui composent les muscles de laile de la mouche, je n’y reviendrai pas longuement, je veux seulement en rappeler les traits principaux. Chaque faisceau est composé par un certain nombre de colonnettes ayant la forme d’un prisme rectangulaire, elles sont accolées les unes aux autres et disposées avec une régularité parfaite. Chacune d'elles est extérieure par une de ses faces, et par les autres en contact avec ses voisines. Dans les étroits espaces (espaces interco- lumnaires) qui séparent les unes des autres les colonnettes d’un même faisceau se rencontrent d'assez nombreux noyaux. Chaque colonnette est constituée par une substance parfaite- ment homogène et transparente, dans laquelle sont isolémeut plongées de nombreuses fibrilles régulièrement espacées ; la coupe de chaque fibrille se montre comme un point brilanr et rond. Comme la masse musculaire interne s’étend directement 240 HI. VIALLANES. d'avant en arrière, presque d’une extrémité à l’autre du tho- rax, elle est partout perpendiculairement sectionnée. Il est important de noter qu'à mesure qu’on avance vers l'arrière elle ne se montre plus composée que par cinq, par quatre, par trois, puis par un seul faisceau. Ces images s'expliquent tout naturellement quand on sait que les faisceaux de la masse interne s’insèrent aux téguments dorsaux, les inférieurs en arrière des supérieurs. Dans la région supérieure et latérale du thorax nous rencon- irons d’autres muscles de l'aile, je les désignerai dans leur ensemble sous le nom de muscles externes, pour ne pas les confondre avec la masse interné ; ils se montrent coupés dans toutes les directions et leur aspect change d’une coupe à l’autre, il n’est pas nécessaire que je cherche à décrire exacte- ment leur disposition. Les régions inférieure et latérale du thorax renferment des muscles qui appartiennent aux pattes et qui, comme nous le savons, ont une structure histologique très différente de celle des muscles des ailes. Plus loin j'aurai à les étudier. Sije me suis arrêté si longtemps à décrire la structure et la disposition topographique de la masse musculaire interne de l'aile, c’est que c’est d’elle dont Je me propose de suivre le développement. Nous verrons qu'elle dérive d’une ébauche spéciale qui, dès le début, est reconnaissable et indépendante des ébauches des autres muscles. Puisque nous nous sommes proposé d’avoir recours à la méthode embryologique descendante, examinons donc une pupe quelque temps avant que les tissus de l’imago aient acquis tous leurs caractères. Mais il faut, dès maintenant, que Je signale une lacune dans mes recherches, le stade que nous allons étudier est un peu trop éloigné de l’état adulte, et un état transitoire nous serait nécessaire pour saisir avec certitude le mode d'évolution des trachées qui enlacent les faisceaux musculaires. Mais, malgré mes efforts, je n’ai pu combler cet hiatus, c’est qu’en effet, le développement des nymphes à une durée si irrégulière, variant ARTICLE N 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 241 tellement avec les conditions du milieu extérieur, et aussi avec les conditions individuelles, que, quand même on a noté avec soin l’âge des pupes que l’on élève, 1l faut souvent en étudier des quantités considérables avant d’en rencontrer ‘une qui soit arrivée précisément à l’état de développement que l’on désire observer. C’est pourquoi je ne donnerai pas l’âge précis des nymphes que j'ai étudiées, de tels renseigne- ments ne pouvant servir de rien à ceux qui voudront répèter mes observations. Étudions donc la pupe le plus rapprochée que jai pu trou- ver de l’état définitif; elle en est malheureusement encore un peu éloignée, ainsi que je le disais. Stade VI. — Si nous examinons une section transversale du thorax (1) passant par le point d'insertion des ailes, nous remar- quons que le contour de la coupe est sensiblement circulaire ; l'aile, dont la cavité est presque complètement oblitérée, com- munique pourtant encore assez largement avec la cavité du Corps. Ce qui frappait le plus, quand nous examinions la coupe du thorax de ladulte, c’est que les muscles le remplissaient presque complètement; maintenant, au contraire, ils occupent un espace fort restreint, ce n’est point qu'ils n'aient pas tous apparu, mais c’est que, quoique déjà parfaitement constitués dans toutes leurs parties, ils sont bien loin d’avoir acquis leur taille définitive. À mi-hauteur de la ligne médiane, c’est-à-dire à peu près exactement au centre de la coupe, nous trouvons la sec- ton du tube digestif, qui se montre comme un petit cercle. Au-dessous de cet organe et à peu près à égale distance de lui et des téguments ventraux, nous rencontrons la coupe de la chaîne ganglionnaire en voie de transformation. Ainsi, ni le tube digestif, ni le système nerveux central, r’ont acquis leur si- tuation définitive, puisque à l’état adulte, comme nous l'avons vu précédemment, la chaîne ganglionnaire se trouve immédia- (1) PL 16, fig. 4. 249 H. VIALLANES, tement située contre les téguments ventraux et le tube digestif immédiatement au-dessus d'elle. À la hauteur du tube digestif, nous trouvons de chaque côté, dans les parties latérales de la coupe, la section transver- sale d’une grosse trachée. C'est le tronc longitudinal principal du système trachéen de la nymphe. Nous remarquons que la membrane péritonéale de cette trachée, s'étant élargie, s’est soulevée et s’est séparée d’avec le tube chitineux, elle est évi- demment en voie de transformation , les cellules disposées sur une seule couche qui la composent sont globuleuses et em- bryonnaires, de plus, on remarque qu’elle émet des prolonge- ments latéraux qui sont de nouvelles trachées en voie de formation. Dans la partie latérale et supérieure du thorax, nous ren- controns la masse musculaire interne de l'aile, elle se présente avec l’aspect et la forme qui la rendent si reconnaissable chez adulte, les faisceaux qui la composent ont leur disposition et leur structure définitive. Mais, quoique ayant rigoureusement les proportions qu’elle gardera toujours, la masse interne pré- sente à peine le quart de la taille qu'elle atteint lorsque le développement est complet, c’est, en un mot, une miniature de la masse interne de l'adulte. Cette différence de taille en- traine des différences dans les rapports qu’elle affecte avec les parties voisines. Au lieu d’être, comme chez ladulte, en con- tact avec sa congénère sur la ligne médiane, elle en est sé- parée par un grand espace et se trouve ainsi tout à fait laté- rale ; au lieu d’être située immédiatement au-dessous des tégu- ments dorsaux, elle en est assez éloignée ; au heu de descendre presque jusqu'aux téguments ventraux, elle descend à peine jusques au niveau d’une ligne horizontale qui passerait par le centre de la coupe. De plus, l'orientation générale de la masse interne n’est pas encore tout à fait celle qu’elle présente chez l’insecte adulte; en effet, son grand diamètre, au lieu d’être presque vertical, est incliné sur la ligne médiane de bas en haut. Dans les parties latérales et supérieures du thorax, en de- ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 943 hors de la masse interne et tout à fait isolés d’elle, nous rencon- trons les autres muscles de l'aile; 1ls sont, eux aussi, parfaite- ment formés dans toutes leurs parties quoique encore très petits. Dans les parties latérales et inférieures du thorax, nous rencontrons les muscles des pattes tous encore de très petite taille, quoique parfaitement conformés dans toutes leurs parties. La masse musculaire interne de l'aile, dont je viens de dé- crire l’état et dont je me suis proposé de suivre le développe- ment, se montre maintenant encore plus distincte et plus facile à reconnaître au premier coup d'œil, qu’elle ne Fest chez l'adulte; car les diverses masses musculaires voisines étant fort petites, quoique déjà parfaitement conformées, ne sont pas encore arrivées en contact les unes avec les autres. Les muscies, le système nerveux, le tube digestif, les deux gros trones trachéens latéraux et quelques petites trachées sur lesquelles je reviendrai, voilà les seuls organes que nous ren- contrions sur la coupe. Mais comme l’animal a toute sa taille, comme, d'autre part, les muscles sont à l’état de miniature, on comprend que les organes soient séparés les uns des autres et des parties voisines par des espaces considérables. Ces espaces sont remplis par une grande quantité de ces éléments d'aspect si bizarre, que nous avons étudiés dans la partie de ce travail consacrée aux phénomènes de l’histolyse et que nous savons provenir de la destruction des tissus lar- vaires. Ces éléments sont : 1° Des cellules du corps adipeux larvaire se présentant avec l'aspect général que je leur ai décrit, lorsque, presque arrivées au terme de leur évolution, elles sont sur le point de dispa- raitre en perdant leur autonomie. Chacune d’elles se montre, en effet, comme une sphère revêtue d’une mince enveloppe, remplie d’une matière finement granuleuse dans laquelle sont plongés de nombreux petits granules colorables par le carmin, et montrant dans sa partie centrale un grand noyau réduit à l’état d’une coque vide. Chez la jeune nymphe, nous rencontrions, ainsi que je l'ai décrit dans le chapitre 244 H. VIALLANES. consacré à l’étude de l’histolyse, des cellules du corps adipeux à tous les états de leur évolution, c’est-à-dire dont les unes étaient arrivées à un état analogue à celui que je viens d’in- diquer, dont les autres plus avancées avaient perdu leur mem- brane et laissaient ainsi échapper les petits granules produits dans leur protoplasma. Au contraire, chez la nymphe avancée que nous étudions maintenant, toutes les cellules adipeuses que nous rencontrons se présentent sous le même état; les unes comme les autres, toutes, sans exception, s'offrent sous l’aspect que j'ai décrit plus haut. Il semble donc que les cel- lules adipeuses que nous rencontrons maintenant chez la nymphe soient des retardataires dont le développement se trouve arrêté. Ces cellules adipeuses n’ont point seulement été arrêtées dans leur évolution, leur vitalité à encore sub: une attemte plus profonde. En effet, les granules qu’elles ont pro- duit dans leur protoplasma présentent des signes certams de décrépitude; au lieu de s’écarter les uns des autres pour faire éclater l'enveloppe de la cellule qui les renferme, amsi que cela a lieu chez les cellules adipeuses qui accomplissent leur évolution complète dans les premiers iours de la vie nym- phale, ils se montrent tassés les uns contre les autres. De plus, ils sont bien plus petits, bien moins réguliers que dans les premiers jours de la vie nymphale. Maintenant, c’est vaine- ment qu'on chercherait un seul de ces granules possédant une aire propre de protoplasma. Les cellules adipeuses ainsi arrê- tées au cours de leur développement et frappées de dégéné- rescence ont diminué de volume. Maintenant, en effet, toutes celles que nous rencontrons se montrent bien plus petites que toutes celles qu’on pouvait observer dans les premiers Jours de la vie nymphale. Ainsi, les cellules du corps adipeux qui n’ont pas pu achever leur évolution complète dans les premiers temps de la vie nymphale sont arrêtées au cours de leur évolution et frappées de dégénérescence. Cet état de dégénérescence est précurseur de la mort et de : la dissolution totale: en effet, dans le thorax de l’adulte nous n’avons pas rencontré une seule cellule adipeuse larvaire. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 945 Nous avons seulement trouvé, au-dessus du tube digestif et entre les masses musculaires internes, une accumulation de matière granulo-graisseuse, renfermant quelques petits noyaux colorables par le carmin. C’étaient là, sans doute, les derniers vestiges de ces cellules adipeuses retardataires et que la dégé- nérescence a frappées avant qu'elles aient pu parcourir le eycle complet de leur évolution. 2° En fait d'éléments libres, nous trouvons dans la cavité générale, outre les cellules adipeuses, un grand nombre de ces éléments que j'ai désignés sous le nom de granules roses et que nous savons être le produit de l’histolyse des fibres mus- culaires de la larve (1). Mais 1l est à remarquer que mainte- nant ils se montrent tous sous l’aspect de müres, c’est-à-dire qu'ils sont tous arrivés à cet état que nous avons considéré comme le terme de leur évolution. Cette observation mesemble démontrer avec évidence que tous les granules répandus dans le corps de la nymphe ont été arrêtés dans leur développement; mais que cet arrêt de développement ne s’est manifesté chez eux que lorsqu'ils étaient arrivés au terme de leur évolution, c’est-à-dire à l’état müriforme. Dans le thorax de l’insecte adulte que nous décrivions tout à l’heure, on ne rencontre plus ces granules müriformes que nous trouvons maintenant; ils sont donc destinés à dispa- raitre. On ne peut s'arrêter à- l’idée qu'ils puissent jouer un rôle quelconque dans la formation des tissus de limago, puisque ceux-ci sont déjà complètement constitués. Il me semble plus naturel de penser qu’ils disparaissent par dégé- nérescence et se dissolvent, servant ainsi simplement d’aliment aux muscles de l’imago, déjà formés dans toutes leurs parties, et qui n'ont plus qu'à grandir pour atteindre leur état défi- nitif. C’est évidemment un rôle analogue qu'il faut attribuer à ces cellules adipeuses que nous rencontrons en même temps dans le corps de la nymphe. Cette interprétation à d’ailleurs été (1) Voyez, dans la deuxième partie de ce mémoire, le chapitre consacré à l’histolyse du corps adipeux et du tissu musculaire. 246 H. VIALELANES. donnée avant moi par M. Ganin et par M. Künkel d'Hercu- lais, qui désigne le corps adipeux sous le nom de « vitellus post-embryonnaire ». Voyons maintenant avec plus de détails comment sont ré- partis ces granules müriformes et ces cellules adipeuses qui plongent au sein du liquide cavitaire. Les granules müûriformes sont dans tous les points du tho- rax mélangés avec les cellules adipeuses; mais 1l y a cer- taimes régions de la coupe où ils se montrent plus abondants et non mélangés avec ces dernières. Ainsi, sur toute la péri- phérie de la coupe, ils constituent une couche épaisse sous- Jacente aux téguments et pénètrent dans la cavité de l'aile, qui, vers sa base, n’est pas encore oblitérée ; 1ls sont encore accu- mulés en grand nombre autour du tube digestif. Les cellules adipeuses ne touchent pas immédiatement la masse muscu- lare interne, car celle-ci est enveloppée par une accumulation assez considérable de granules müriformes. Les cellules adi- peuses ne sont pas répandues partout, elles constituent une grande accumulation d’un seul tenant, qui, en haut, s'étend dans ce grand espace médian laissé libre entre les deux masses musculaires internes; en haut et sur les côtés, cette accumu- lation de cellules adipeuses remonte dans l’espace compris entre les téguments et la masse musculaire interne; en bas, elle remplit presque toute la cavité du thorax et entoure le tube digestif dont elle est séparée par un amas de cellules müriformes dont j'ai déjà parlé. Dans la pupe que nous étudions, je n’avais encore parlé, en fait de trachées, que de ce gros tronc latéral que nous rencon- trons transversalement coupé. Mais si nous examinons la ré- glon voisine du bord externe de la masse musculaire interne, nous voyons qu'il existe là des trachées en voie de développe- ment. Chacune d'elles se présente comme un tronc d’un diamètre considérable, montant directement le long du bord externe de la masse musculaire, et émettant en dedans, au niveau de chaque espace interfasciculaire, une branche quis’yinsinue. Comme dans presque toutes les coupes transver- ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 947 sales nous rencontrons un tronc trachéen analogue; nous sommes forcés d'admettre que d'avant en arrière il s’en trouve un grand nombre, tous parallèles entre eux et croisant perpen- diculairement la direction des fibres de la masse interne, à laquelle 1ls sont accolés en dehors. Comme ces troncs trachéens n'arrivent pas tous en même temps au même état de développement, il est facile sur une seule nymphe d’en observer à tous les stades, en étudiant différentes coupes transversales. À son état le moins avancé (1), chaque tronc tra- chéen se montre comme un tube court, terminé par une extré- mité assez obtuse, il se dirige de bas en haut, et longe le bord externe du faisceau le plus inférieur de la masse musculaire; grandissant ensuite, il atteint le niveau de l’espace interfasei- culaire inférieur, il émet alors en dedans une branche hori- zontale, qui pénètre dans cet espace, il continue à croître ver- ticalement, en longeant la masse interne, et, dès qu’il arrive au niveau d’un autre espace interfasciculaire, 1l émet une branche latérale qui s’y insinue. Ces troncstrachéens sont cons- ütués et se développent d’une manière tout à fait analogue à ce qu’on pourrait observer chez un embryon; toutefois, il faut que je relate avec quelques détails l’aspect qu’ils m'ont présenté. En effet, au sujet du développement des trachées interfascicu- lares, il existe entre M. Weismann et moi un désaccord, dont je ne saisis pas bien la cause et sur lequel je reviendrai plus loin. Les trachées (2) et les branches latérales qu’elles émettent se présentent comme des tubes assez larges, à parois fort épaisses, formées par un seul rang de cellules globuleuses un peu déformées par pression réciproque. [l ne me paraît pas qu’elles aient encore sécrété de tube chitineux. L’extré- mité de ces trachées, sans cesse en croissance, se montre très obtuse, et se présente sous l'aspect du bourgeon qui termine une branche d'arbre. Quand une coupe passe exactement par l’axe d’une trachée, on remarque que la cavité de celle-ci se termine en cul-de-sac dans l’intérieur du bourgeon. Les cel- (1) PL. 16, fig. 4, et pl. 14, fig. 4. (@ PI. 44, fig. 4. 948 H. VIALLANES. lules trachéennes qui constituent le bourgeon ont une forme différente de celles qui forment la paroi même du tronc, sans qu'il y ait pourtant entre elles aucune limite tranchée. En effet, les cellules trachéennes tout à fait extrêmes sont fusi- formes et très effilées dans le sens de la croissance ; celles qui viennent ensuite sont bien plus raccourcies et passent sans transition aux cellules presque globuleuses qui constituent la paroi du tronc trachéen. Les trachées qui pénètrent dans les espaces interfasciculaires sont aussi larges que ceux-ci et par conséquent elles les remplissent complètement. Les espaces interfasciculaires ne sont pas complètement libres et vides quand les trachées y pénètrent; on y rencontre, en effet, comme d’ailleurs dans toutes les cavités de lanymphe, ces granules müriformes qui se présentent toujours avec un aspect qui les rend si reconnaissables. Dans les espaces inter- fasciculaires où ils n’ont pénétré que tardivement, ainsi que nous le verrons plus loin, les granules müriformes ne sont jamais nombreux ni serrés les uns contre les autres. À me- sure que les trachées envahissent les espaces interfascicu- laires, elles repoussent devant elles les granules müriformes. Ceux-cine prennent évidemment aucune part active à l’accrois- sement des trachées; des éléments se présentant sous cet état ne pourraient évidemment jouer un rôle formateur direct. On se rappelle, comme je l’indiquais dans l'historique qui précède ce chapitre, que M. Weismann avait observé qu'au moment où les trachées commencent à apparaître dans Îles espaces interfasciculaires, ceux-ci se montrent remplis par de grandes cellules tout à fait caractérisées, pourvues d’une enveloppe épaisse, d’un protoplasma abondant et d’un seul oros noyau central. Au contraire, dans le cas que nous étu- dions, les espaces interfasciculaires ne renferment que quelques granules müriformes, qu’il est impossible de con- fondre avec ces grandes cellules qu'y a rencontrées M. Weis- mann. Cette différence considérable entre les faits que j'ai ob- servés et ceux que décrit le naturaliste allemand tient, sans doute, à ce que lun de nous s’est placé dans des conditions ARTICLERNOMEN HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 249 mal déterminées. Voici ce qui me fait supposer qu’il en est bien ainsi : ayant voulu faire quelques observations, malheu- reusement restées incomplètes, sur le développement des muscles de l'aile du Stratiome, j'ai retrouvé à plusieurs reprises entre les faisceaux, ces grandes cellules si caractéristiques que M. Weismann a observées au moment de l'apparition des tra- chées; mes préparations reproduisent avec la plus grande exactitude la figure publiée par l’auteur allemand (1). Mais, ainsi que je le disais plus haut, chez la mouche que j'ai étudiée avec beaucoup de soin et d’une manière suivie, 1] m'a été im- possible, quelques tentatives que j'aie faites, de retrouver rien d’analogue à ces grandes cellules interfasciculaires décrites par M. Weismann, et que j'ai pourtant retrouvées chez le Stra- tiome. Stade V (2).— Au voisinage de la masse interne, les trachées ne sont pasencore développées, les faisceaux se montrent plus rapprochés que précédemment, et un étroit espace les sépare seulement l’un de l’autre. Tout autour de la masse interne sont accumulés un grand nombre de granules müriformes, mais seulement quelques-uns de ceux-c1 ont pu pénétrer dans les espaces interfasciculaires, ces derniers étant encore trop étroits ou trop récemment formés. Je dois, en outre, faire remarquer qu'à cette époque dans son ensemble la masse mus- culaire est encore plus petite que précédemment, bien que toutes ses parties soient constituées comme elles le seront définitivement. De plus, la masse musculaire se montre, encore plus que dans l’état précédent, éloignée de la ligne médiane. Sa direction oblique de bas en haut et de dehors en dedans est encore plus accentuée. Stade IV.— 1 est regrettable que l’état que je vais décrire soit un peu trop éloigné de celui que j’ai décrit précédemment, malgré mes recherches je n’ai pu trouver de stade intermé- oo Au stade IV que nous étudions maintenant, la masse (1) Weismann, Die Nachemhyonale Entwikelung der Dipteren (Zeilsch. f. wiss. Zool., t. XIV, 1864, pl. 27, fig. 65). (2) PI. 14, fig. 3 950 H. VIALLANES. musculaire interne est parfaitement reconnaissable, bien que très petite dans son ensemble; elle est maintenant très écartée de la ligne médiane, par conséquent assez rapprochée des téguments dorsaux, de plus, son obliquité étant encore plus grande, elle a une direction presque horizontale. Elle est con- stituée (1) par un grand nombrede petites cellules que j'appelle dès maintenant cellules musculogènes, séparées les unes des autres par une substance intercellulaire assez abondante. Au- tour de l’ébauche de la masse musculaire, se montrent accu- mulés en grand nombre, ces granules produits par les cellules adipeuses et dont l’origine est presque toujours reconnaissable parce qu'ils sont encore groupés autour des restes du noyau de leur mère. Ces petits granules ressemblent à s’y méprendre, comme taille et comme aspect, aux cellules musculogènes, et souventon ne saurait dire n1 où commence ni où finit l’ébauche si les cellules constitutives de celle-ci n’étaient plongées dans cette matière intercellulaire dont j'ai parlé plus haut, et dont les limites sont très nettes. L’ébauche de la masse musculaire se présente en coupe transversale avec la forme d’une ellipse allongée, ai-je dit pré- cédemment, c’est bien là, en effet, sa forme générale; mais de plus où remarque que sur chacun de ses grands côtés, elle est creusée de cinq sillons peu profonds, séparés l’un de l’autre par une partie saillante. Chaque paire de sillons opposés con- stitue l’ébauche d’un espace interfasciculaire ; supposons, en effet, que les sillons aillent en s’approfondissant, jusqu’à ce que chacun d'eux soit allé rejoindre son vis-à-vis, la masse mus- culaire se trouvera divisée en six portions superposées répon- dant chacune à un faisceau. Si maintenant nous examinons plus en détail la structure intime del’ébauche de la massemusculaire, nous reconnaissons que sur le grand diamètre de l’ellip$e que représente sa coupe, se montrent six taches sensiblement circulaires, régulièrement espacées. C’est aux espaces qui séparent ces taches que répon- APIs he ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 951 dent les sillons qui sont l’ébauche des espaces interfascicu - laires. Chaque tache, je puis le dire dès maintenant, est l’ébauche d’un faisceau. Afin de se rendre un compte exact de sa structure, il convient de l’examiner sur des coupes aussi minces que possible, parfaitement horizontales, et avec un objectif puissant.Je äonne un dessin qui la représente ampli- fiée 1020 fois, mais un grossissement de 300 diamètres peut suffire. On reconnaît facilement que le tissu de l’ébauche de la masse musculaire est constitué par ces cellules que J'ai dési- gnées sous le nom de musculogènes, séparées les unes des autres par une matière intercellulaire homogène assez abondante. Le contour des cellules musculogènes est très net, bien qu’elles ne semblent pas être pourvues de membrane d’enveloppe, elles ont une forme sensiblement sphérique et mesurent en moyenne 0"%,006, leur protoplasma est dans son entier colorable en rouge clair et montre à son centre un très petit noyau plus foncé. Je dois dire que ce noyau est souvent fort difficile à voir, que quelquefois même je n’ai pu le mettre en évidence. Extérieure- ment aux taches, la matière intercellulaire se montre parfaite- ment homogène et très transparente. Chaque tache ou ébauche d’un faisceau paraît due à ce que la substance intercellulaire de la région correspondante a acquis une réfrmgence beaucoup plus grande et une texture spéciale. Si, en effet, on examine les bords d’une tache, on remarque que ceux-c1 sont flous, et que la substance de la tache se continue sans ligne de démar- cation avec la substance intercellulaire. En s'étendant de la sorte aux dépens de la substance intercellulaire, la tache en- globe les cellules musculogènes qu’elle rencontre. Ges éléments cellulaires englobés se disposent avec un ordre qui rappelle celui qu'offrent les noyaux intercolumnaires dans le faisceau complètement formé. Cette ordonnation me paraît due à ce que la substance intercellulaire, une fois transformée en cette substance réfringente de la tache, subit un accroissement inégal dans ses différents points. Si, avec un objectif puissant à immersion, nous examinons la substance intercellulaire trans- formée, nous reconnaissons qu’elle a acquis une texture spé- 959 IH. VIALEANES. ciale, et que sur les coupes transversales, elle se montre avec un aspect très finement poimtillé (1). La description que je viens de donner et surtout lexamen des figures convaincront, je crois, le lecteur de la légitimité des conclusions suivantes : 1° chaque tache est l’ébauche d’un faisceau; 2° la substance contractile se constitue par suite d’une simple différenciation de la substance intercellulaire qui sépare les cellules musculogènes; 4° les cellules musculogènes autour desquelles cette différenciation s'effectue deviennent les noyaux intercolumnaires. Ce qui vient confirmer pleinement l'exactitude de ces conelu- sions, C'est l'examen des coupes longitudinales. Une coupe longitudinale (2) de l’ébauche de la masse musculaire intéres- sant plusieurs ébauches de faisceaux, se montre composée de bandes alternativement claires et sombres. Chaque bande claire répond à l’ébauche d’un faisceau ; chaque bande sombre répond à l'intervalle qui sépare deux ébauches voisines. La structure de son tissu se montre avec le même aspect qu'on observe en coupe transversale. Chaque bande claire ou ébauche d’un faisceau se montre constituée par une substance réfrin- gente, striée très finement en long, et interrompue par des files longitudinales de cellules assez régulièrement espacées, qui répondent aux cellules musculogènes englobées que nous observions en coupe transversale. Il suffit de comparer l’image qu'offre une bande sombre avec celle que présente la coupe longitudinale du faisceau de lPadulte (3), pour se convaincre que les cellules musculogènes englobées répondent aux noyaux intercolumnaires, les espaces compris entre les files qu’elles constituent aux colonnettes, les stries longitudinales qu'of- frent ces espaces, aux fibrilles. Le stade que je viens de décrire, a été observé par M. Weis- (1) PI. 14, fig. 1. (2) PI. 14, fig. 2 et pl. 5, fig. 17. La première de ces coupes n’intéresse qu’un seul faisceau étant menée horizontalement, la seconde en intéresse plu- sieurs étant menée verticalement. (3) PI. 5, fig. 16. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 293 mann, c’est le plus jeune état qu’il ait pu rencontrer. La des- cription que donne l’auteur allemand de cette phase du déve- loppement de Ja masse musculaire est rigoureusement exacte, l’imperfection des moyens dont il disposait alors, l'avait seule empêché d’apercevoir quelques faits importants que j'ai pu découvrir. Les noyaux intercolumnaires fui avaient complè- tement échappé, cette lacune est d'autant plus facile à com- prendre qu’il ne connaissait point leur existence dans le muscle de l’adulte. M. Weismann avait remarqué que lorsqu'on traite par l'acide acétique lPébauche de la masse musculaire, elle se gonfle et qu'une membrane se détache de sa surface; aussi considérait-1l lébauche dans son entier comme l’homologue d’un faisceau primitf, cette membrane représentant un sarco- lemme appelé à disparaître dans la suite du développement. Je puis atlester l'exactitude du fait, mais je erois l’interprétation un peu hasardée, mes observations me portent à croire que cette membrane est plutôt un produit artificiel, déterminé par les liquides altérants qui modifient d’abord les couches les moins denses de la substance intercellulaire au milieu de la- quelle sont plongées les cellules musculogènes. En effet, quand on a recours aux liquides fixateurs énergiques : alcool absolu, acide picrique ou chromique, on ne trouve sur une coupe, même en employant des objectifs puissants, aucun indice de cette prétendue membrane. Stade II (1). — Aucun état aussi peu avancé ne me parait avoir été observé par les naturalistes qui m'ont précédé. L’ébauche de la masse musculaire interne est très petite et assez difficile à trouver. Sur une coupe transversale elle est toujours reconnaissable à ces taches disposées comme précédemment, et que nous savons représenter chacune l’ébauche d’un des six faisceaux. Mais la limite extérieure de l’ébauche de la masse n’a plus un contour extérieur nettement défini. On ne peut dire avec précision ni où elle commence ni où elle finit; ceci tient à ce que la substance intercellulaire au sem de laquelle (1) PI. 12, fig. 2 ANNe SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1882. XIV. 17. — ART. N° 1. 254 H. VEALLANES. sont plongées les cellules musculogènes qui la composent west un peu abondante qu'immédiatement à la périphérie des taches, et aussi à ce que les cellules musculogènes ressem- blent beaucoup aux éléments libres qui, de toute part, en- Al tourent l’'ébauche et sur l'étude desquels nous aurons à nous arrêter. De toute part l’ébauche est entourée par une grande accu- mulation d'éléments libres et plongeant dans le liquide cavi- taire; en dehors ce sont de gros granules, les uns simples, les autres à l’état müriforme ; nous reconnaissons sans peine dans ces formations les produits de l’histolyse du tissu musculaire arrivés à divers états de développement. Ces éléments étant très différents, comme taille et comme aspect des cellules museu- logènes, il est facile en dehors de limiter le contour de l’'ébauche. En dedans il n’en est plus de même, car là, les élé- ments qui confinent à l’ébauche, ressemblent à s'y méprendre aux cellules musculogènes. Ces corps, en effet, se montrent comme des sphères colo- rables par le carmin, mesurant 0"",006 et présentant une partie centrale plus foncée (noyau ?). Ce ne sont autre chose que les granules produits par l’histolyse des cellules adipeuses. Leur origine est d’ailleurs bien facile à reconnaitre, car ils sont encore groupés en essaim autour du noyau vide de leur mère, dont la membrane a disparu. En dedans, chacun de ces essaims garde bien sonautonomie; mais en dehors, c’est-à-dire du côté de l’ébauche, la dispersion des granules ayant marché plus vite, tous les essaims sont confondus. Mais Le point le plus im- portant à noter, c’est qu’il est impossible, dans de telles con- ditions, de distinguer les granules d'avec les cellules musculo- gènes. Aussi, si l’on pouvait admettre la nature cellulaire des granules, 1l faudrait reconnaître que tout se passe comme si ces éléments servaient à constituer l’ébauche de la masse mus- culaire interne. Stade IT. — L’ébauche de la masse musculaire interne se présente avec le même aspect qu’au stade précédent. Son examen est fort mtéressant parce qu’il nous apprend que les ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9255 six taches ne se constituent pas toutes en même temps, mais qu’elles apparaissent successivement. En effet, sur une coupe transversale, l’ébauche ne montre plus que trois taches. À un .état moins avancé encore, nous en trouverions seulement deux. Stade [ (4).— C’est l'état le moins avancé que J'ai pu décou- vrir. L’ébauche de la masse interne en coupe transversale mesure à peine 0", 02 dans son plus grand diamètre, aussi n'est-ce pas sans la chercher qu’on la découvre au milieu des éléments qui remplissent le thorax de la nymphe. Pour bien comprendre sa disposition et ses rapports, 1l est nécessaire de donner un certain nombre de détails sur les parties circonvoi- sines. Dans les nymphes qui m'ont servi pour l’étude de ce premier stade, les disques imaginaux venaient d'achever leur développement, etles téguments thorraciques de l’imagoétaient complètement constitués, l’hypoderme larvaire avait, par conséquent, depuis longtemps disparu. Au-dessous des tégu- ments, à la place qu’occupaient jadis les muscles de la larve, se montrent accumulés en grand nombre et flottant librement dans le liquide cavitaire les granules à différents états de déve- loppement, que nous savons provenir de l’histolyse des muscles larvaires. Tout le reste de la cavité du thorax est rempli par les cellules du corps adipeux, énormément hypertrophiées et en voie d’histolyse. L’histolyse des cellules adipeuses a marché plus vite pour celles de la périphérie que pour celles du centre, ces dernières possèdent encore leur enveloppeet leur protoplasma se montre rempli de granules. Les cellules adi- peuses périphériques, au contraire, ont perdu leur membrane, et les granules qu’elles ont produits dans leur protoplasma sont en voie de dissémination. Les essaims que ceux-ci con- stituent autour du noyau de leur mère commencent déjà à se mêler les uns avec les autres. Aussi, en beaucoup de points, voyons-nous de grandes accumulations de granules qui pro- viennent de la fusion de plusieurs essaims voisins, ainsi que l’attestent les noyaux des cellules mères qu’on retrouve encore (4) PL 16, fig. 2. 9256 EX. VEAËELANES. là. C'est au sein d’une de ces accumulations que se rencontre l’ébauche de la masse musculaire interne ; mais la pelitesse de celle-ci et la nécessité d'employer un fort objecuf, font qu’on ne la rencontre pas du premier coup ; il faut aller la chercher tout en haut du thorax et assez loin des téguments, au sein même du corps adipeux. Elle a l’aspect (1) d’une petite tache sensiblement circulaire, sombre et réfringente, bordée par une large auréole plus claire, non limitée extérieurement. L’auréole est constituée par des éléments mesurant 0"", 006, ressemblant à s’y méprendre aux granules du corps adipeux et plongés au sein d’une matière intercellulaire assez abon- dante et très transparente. À mesure qu'on s'éloigne du centre de l’'ébauche, on remarque que cette substance intercellulaire est moins caractérisée, et qu'enfin elle disparait sans qu’on puisse dire à quel point elle finit précisément. C’est ce qui me faisait dire que l’auréole n’est point limitée extérieurement. Quant à la tache que l’auréole entoure, elle n’est point non plus très nettement limitée en dehors, elle parait due unique- ment à ce que, dans cette région centrale, la matière intercel- lulaire est plus abondante et a acquis une réfringence et une texture spéciales. Sur une coupe transversale elle se montre en effet finement ponctuée et sur une coupe longitudinale elle parait striée en long. Au stade que nous étudions, la tache n'a encore englobé que quelques-uns des éléments cellulaires de l’auréole, elle est donc uniquement formée de matière inte cellulaire. Quand on examine sa périphérie, on se convainc sans peine qu’elle ne peut s'étendre qu'aux dépens de la ma- tière intercellulaire de l’auréole, par suite d’une transformation de c.tte matière. La comparaison de ce stade avec le précédent, nous montre, avec la plus entière évidence, que l’auréole dans son ensemble est l’'ébauche de ia masse musculaire interne de l'aile et que la tache est ébauche du premier faisceau qui apparait. Les éléments cellulaires qui entrent dans la composition de l’au- réole et de la tache sont évidemment des cellules musculo- (1) PI. 16, fig. 3. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 997 gènes, bien qu'ils ressemblent beaucoup aux granules pro- duits par les cellules adipeuses. La substance de la tache qui s'étend aux dépens de la substance imtercellulaire de Pau- réole par suite d’un changement de texture de celle-ct, est le premier indice de la masse contractile. Les cellules de l’au- réole que la tache englobe en s'étendant sont destinées à devenir les noyaux intercolumnaires. Pour permettre au lecteur de bien saisir le lien qui unit les diverses observations que je viens de relater il est nécessaire de les résumer en suivant maintenant leur ordre logique. Stade T. — Sur une coupe transversale du thorax d’une jeunenymphe, nous trouvons en haut, assez loin des téguments de l’imago déjà formés, l’ébauche de la masse musculaire interne de l’aile. L'étude de coupes successives nous apprend que cette ébauche fort petite s'étend d'avant en arrière comme un cordon cylindrique. Sur une coupe transversale, elle pré- sente deux régions distinctes: une centrale ou tache, et une périphérique ou auréole qui enveloppe cette première. Le üssu de lauréole est constitué par de petites cellules sphé- riques, mesurant 0"",006, séparées les unes des autres par une substance fondamentale peu abondante, homogène et transparente, ces cellules méritent le nom de cellules musculouènes. La tache que nous devons déjà considérer comme l’ébauche de l’un des six faisceaux qui constituent la masse musculaire estcomplètement développée. La substance qui constitue la tache est fortement réfringente et sa texture est fibrillaire. À la périphérie elle s'étend en englobant quel- ques-unes des cellules musculogènes de l’auréole et se con- tinue sans ligne de démarcation avec la substance interceliu- laire homogène de cette région. On doit déjà considérer la substance de la tache comme la substance contractile du fai- sceau, et les cellules musculogènes qu’elle a englobées comme de futurs noyaux intercolumnaires. À ce stade il est à remar- quer que dans les conditions où nous nous sommes placés, 1l n'existe aucun moyen physique de distinguer les cellules mus- culogènes d'avec les granules produits par l’histolyse des 958 H. VEALLANES. cellules adipeuses el que, par conséquent, on ne peut établir une limite entre le tissu de l’ébauche et les accumulations que constituent les granules qui entourent de toutes parts. Stade IT. —L’ébauche de la masse musculaire n’a pas changé de structure, mais elle présente maintenant trois taches au lieu d’une seule. Au stade suivant elle en montrera six. Ceci doit nous faire supposer que les taches se forment successi- vement. Toutefois, je suis le premier à reconnaitre que cette interprétation peut être sujette à de justes critiques. Stade III. — L’ébauche de la masse musculaire est complè- tement constituée. En coupe transversale, elle se montre comme une ellipse allongée sur le grand diamètre de laquelle se montrent les six taches, ébauches des six faisceaux. Son tissu est constitué comme au stade précédent par les cellules musculogènes plongées au sein d’une matière intercellulaire homogène et transparente. Les taches sont dues à ce que, aux points qui leur corres- pondent, la substance intercellulaire est devenue plus abon- dante et a acquis une texture fibrillaire et une réfringence plus grande. Stade IV.— Dans son ensemble, l’ébauche à un peu grandi. Son contour extérieur est devenu bien distinct de toutes Les par- ties voisines. Chacune des six taches s’est étendue en englo- bant un certain nombre des cellules musculogènes voisines. Ces cellules musculogènes englobées sont disposées avec grande régularité et exactement comme le sont, chez l’adulte, les noyaux intercolumnaires dont, dès maintenant, elles méri- tent le nom. En examinant le bord de l’ébauche de la masse musculaire, on remarque que celui-ci présente deséchancrures disposées par paires répondant aux intervalles qui séparent deux taches voisines. On doit considérer chaque paire d’échan- crures, comme l’ébauche d’un espace interfasciculaire. Stade V.—Toutes les cellules musculogènes qui n’ont point été englobées par les taches de substance contractile ont dis- paru. Il en résulte que l’ébauche de la masse musculaire est réduite à ses six taches ou ébauches des faisceaux, séparées ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 259 les unes des autres par des espaces vides (espaces interfascicu- laires). Les faisceaux ne méritent plus le nom d’ébauche, car ils ont, dès maintenant, leur structure définitive, seulement ils sont encore extrêmement petits. Ils n’ont donc plus qu’à s’ac- croître pour atteindre l’état parfait. Stade VI. — Les faisceaux se sont un peu accrus, ils se sont un peu écartés les uns des autres, si bien que les espaces interfasciculaires sont devenus plus larges. Dans ces espaces commencent à s’enfoncer des trachées qui se forment par bour- geonnement des gros troncs trachéens voisins. Pour atteindre leur état défimtif, les faisceaux n’ont plus qu’à s’accroitre; de plus, il faut que dans son ensemble la masse musculaire qu’ils constituent, se déplace et se rapproche de la ligne médiane. Ce mouvement commence d’ailleurs à s'effectuer dès les premiers stades. Les faits que je viens de faire connaître touchant le dévelop- pement des faisceaux de l’aile, sont suffisamment clairs et en- chaïinés pour que nous puissions sans peine en tirer des conclu- sions positives. Mais celles de mes observations qui ont trait à l’origmce première des cellules musculogènes deviennent plus difficiles à interpréter. Nous nous rappellerons que sur ce point deux hypothèses ont été faites. La première a été défendue par M. Weismann, la seconde par M. Künckel d'Herculais et par M. Ganin. M. Weismann, s'appuyant sur cette observation fort exacte que les granules mis en liberté par les cellules adipeuses larvaires au moment de l’histolyse ressemblent, par beaucoup de ca- ractères, aux cellules musculogènes, attribuait à ces deux formations une commune origine. Par conséquent, pour l’ana- tomiste allemand, les cellules musculogènes étaient des élé- ments produits par les cellules adipeuses larvaires (1). Pour M. Künckel d'Herculais, et pour M. Ganin, le corps adipeux larvaire joue seulement un rôle nourricier et ne prend (1) Je crois nécessaire de rappeler que M. Weismann désignait sous le nom de « grandes boules à noyaux » les cellules adipeuses remplies de granules et arrivées au terme de leur évolution. 260 Hi. VIALELANES. aucune part à la formation des muscles de Pimago, pour eux les cellules musculogènes dérivent des disques imaginaux. M. Künckel base son opinion sur le fait suivant. Il a vu chez la Volucelle, le corps adipeux conserver sa forme générale au septième ou huitième jour de la vie nymphale, alors que bien avant cette époque les muscles de l’imago étaient déjà ébau- chés. Mais c’est là une preuve indirecte et qui d’ailleurs ne saurait s'appliquer à la mouche. M. Ganin a montré directement que les muscles des pattes dérivaient des disques imaginaux ; mais, à mon sens, il n’a rien prouvé en ce qui concerne les muscles de l'aile. Il a donné, touchant l’origine première de ces organes, une figure (1) qui, quand bien même elle ne serait point schématisée, ne prouve- rait encore rien. Cette figure que j'ai reproduite (2) représente une couche de tissu analogue d'aspect au mésoderme des disques, assez éloignée d’un exoderme et reliée à lui par de minces filaments, mais rien ne vient nous prouver qu’elle ser vira à produire les muscles de l’aile. Mes observations personnelles sur la genèse des museles de laile, bien qu'étant plus complètes et plus détaillées que celles de mes prédécesseurs, sont pourtant lom de nous fournir la clef du problème. Pour quiconque ne serait pas prévenu, elles établiraient d’une manière presque indiscutable que les cellules musculogènes ne sont autres que ces éléments issus du corps adipeux et que je désigne sous le nom de gra- nules pour ne rien préjuger. Mais tout le premier, je reconnais que pour qu'une telle conclusion soit légitime, il faudrait d’«bord prouver que chaque granule est bien un organite vi- vant et si mes observations nous montrent que les granules ont l'apparence de cellules, elles n’établissent pas qu’ils en ont les propriétés. (4) Ganin, loc. cit., pl. 2, fig. 10. (CAPI MA MERS ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 261 CONCLUSIONS e 1° Après que les téguments imaginaux du thorax sont con- stitués, les muscles de l'aile apparaissent; jai suivi le dévelop- pement d’un groupe spécial de ceux-ci, et que je désigne sous le nom de masse musculuire interne de l'aile. 2% La masse musculaire interne qui, chez l'adulte, remplit presque tout le thorax, est composée de six faisceaux superpo- sés dont la direction est antéro-postérieure. Dans la première partie de ce mémoire, j'ai décrit leur structure avec détail. 3° La masse musculaire interne dérive tout entière d'une ébauche unique. | 4° Au début, l’ébauche de la masse musculaire se montre comme un très mince cordon étendu d’avant en arrière et si- tué dans la région latérale et supérieure du thorax. Son tissu est formé par de petites cellules mesurant Onmn,006 (cellules museulogènes), plongées au sein d’une substance fondamen- tale homogène et peu abondante. 9° Plus tard dans l’intérieur de l’ébauche de la masse mus- culaire, se différencient cinq lignes superposées, étendues d'avant en arrière et disposées, en un mot, comme le sont dé- finitivement les faisceaux. Chacune de ces lignes est, en effet, lébauche d’un faisceau. 6° Sur des coupes on s'assure que la formation de l’ébauche d’un faisceau est due à ce qu'aux points correspondants la substance fondamentale de lébauche de la masse musculaire est devenue plus abondante et à acquis une texture fibrillaire qui lui donne déjà l’apparence de la substance contractile. 1° Les ébauches des faisceaux s’accroissent par ce fait, qu'autour d'elles la substance fondamentale de l’ébauche de la masse musculaire continue à se transformer en substance contraclile. 8° A mesure qu'elle s'étend ainsi vers la périphérie, la sub- stance contractile englobe les cellules musculogènes qu'elle ren- contre. Celles-ci se disposent au sein de la,musse contractile 262 if. VEALLANES. avec une grande régularité, comme le sont chez l'adulte les noyaux intercolumnaires ; chacune d'elles devient, en effet, un de ces noyaux. 9° Plus tard, la substance fondamentale non transformée en substance contractile et Les cellules musculogènes qui n’ont point été englobées par les faisceaux, disparaissent complète- ment el sont résorbées, sans servir à la formation des trachées musculaires. La masse musculaire est alors constituée, comme elle doit l'être définitivement, par six faisceaux isolés les uns des autres. Ceux-ci ont dès maintenant la structure qu'ils au- ront toujours, seulement ils sont encore extrèmement petits, ils n’ont plus qu’à s’accroitre. 10° Les faits que je viens de faire connaître confirment plei- nement et complètent les observations de M. Weismann (1). Ils nous portent à croire que cette théorie généralement admise, qui veut que chaque faisceau musculaire représente une cellule unique, n’est pas applicable au cas qui nous occupe. [ls nous montrent, en effet, que chaque faisceau est un organite pluricellulaire, c’est-à-dire une partie formée par plusieurs cellules (noyaux musculaires) distinctes dès l’origine et plongées au sem d’une substance fondamentale, d’abord homogène, puis devenant fibrillaire et contractile par suite du développement. En un mot, il me semble qu’au point de vue histologique et morphologique, on peut comparer le tissu musculaire de l'aile de l’insecte à diverses formes de tissu con- Jonctüif, au tissu tendineux des Vertébrés, par exemple, les noyaux musculaires représentant les cellules tendineuses, la substance contractile représentant la substance fondamentale fibrillaire du tendon. Développement des muscles des pattes. Pour exposer le résultat de mes observations sur le déve- (1) Cette confirmation a d'autant plus de valeur que les résultats auxquels je suis parvenu ont été obtenus par des méthodes d'investigation tout à fait dif- férentes de celles auxquelles avait recours l’anatomiste allemand. Celui-ci ob- servait uniquement par dilacération et moi presque uniquement par coupes. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 963 loppement des muscles des pattes, je procèderai comme Je l'ai fait pour ceux de l'aile, je ferai connaître successivement un certain nombre d'états en commençant par les plus avancés. Mais je crois nécessaire, tout d’abord, de rappeler en deux mots la structure des muscles des pattes, complètement for- més ; pour plus de détails il suffira de se reporter à la première partie de ce mémoire. Les faisceaux musculaires des pattes se présentent sous forme de cylindres réguliers, leur taille n’est point constante, les plus gros mesurent, en largeur, 0"*,04, les plus petits atteignent à peine 0"*,009. Ils sont revêtus d’un sar- colemme toujours très mince et très adhérent, quelquefois même cette enveloppe paraît faire complètement défaut. Les faisceaux musculaires dont l'étude nous occupe sontformés par un cylindre de matière contractile creusé d’un canal axial rem- pli de protoplasma et dans lequel sont situés les noyaux muscu- laires. La masse contractile est formée par une substance homo- gène, dans laquelle sont plongées les fibrilles très régulière- ment disposées, celles-ci sont beaucoup plus petites que celles des muscles de l’aile, par conséquent elles sont bien lom d’at- teindre 0,001 de largeur. La masse contractile est continue, elle n’est nulle part interrompue par des cloisons protoplas- miques, aussi doit-elle être considérée comme représentant une seule colonnette musculaire. Le faisceau musculaire des pattes, chez l’insecte, est l’homologue d’un faisceau de Ver- tébré dont toute la masse contractile serait réduite à une seule colonnette. Les noyaux musculaires qu’on trouve dans Île canal central se présentent avec des aspects assez variables, la plupart du temps ils sont aussi larges que le canal lui-même et forment alors une seule file axiale. On rencontre quelquefois des faisceaux dans lesquels les noyaux sont beaucoup plus petits, ils sont alors très nombreux et entassés sans ordre dans le canal central. Stade IV (1). — Quand on examine les muscles des pattes chez une nymphe non encore complètement développée, on (1) PL. 5, fig. 7. 26% MH. VIALEANES. remarque qu'ils se présentent exactement avec lPaspect général que nous connaissons. Mais on remarque que la stria- tion transversale n’est point encore visible, que la masse con- tractile est moins épaisse, tandis que le canal central et ses noyaux se présentent avec les caractères qu'on observe chez linsecte parfait. Stade IT (4). — À un stade moins avancé l'épaisseur de la masse contractile est encore plus faible, par rapport à celle du canal central qu’elle enveloppe. Les noyaux musculaires qu’on rencontre dans l’intérieur de celui-ci sont rangés en une seule file axiale comme cela a lieu chez l'adulte. Stade IT (2).— La substance contractile est bien moins abon- dante, elle ne forme plus maintenant qu’un tube tout à fait mince, laissant pourtant reconnaitre un double contour et renfermant dans son intérieur la file axiale des noyaux muscu- laires. Ceux-e1 sont sensiblement sphériques :et mesurent 0,003, c’est à peu près la taille qu’ils conservent chez Padulte. Tantôt les noyaux sont en contact les uns avec les autres, d’autres fois 1ls sont assez espacés. À cet état les muscles des pattes ont déjà les insertions et la direction qu'ils conservent toujours, mais 1ls sont beaucoup plus petits que chez l'adulte. Cette petitesse est naturellement due à ce que la substance contractile des faisceaux qui les composent est loin d’avoir acquis son épaisseur définilive. Stade F.— Les muscles ont déjà leur direction et leurs mser- üons définitives, mais, sur une coupe longitudinale, 1ls se pré- sentent avec un aspect un peu différent de ce que nous connais- sons, 1ls paraissent formés par une substance imtercellulaire dans laquelle seraient plongés des noyaux disposés sans grande régularité. Mais, si on les étudie par dilacération après macé- ration dans l'alcool au tiers, on reconnait qu’en réalité chaque faisceau se présente avec un aspect un peu différent de celui qu'il offrait à l’état plus avancé décrit précédemment. Les (PINS Me eICr (@) PL 5, fig. 15. — PI. 18, fig. 3, m.— PI. 16, fig. 6 et 7. Ces trois dernières figures représentent des coupes transversales des muscles des pattes. ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 265 noyaux n'ont pas changé d’aspect ni de disposition, 1ls mesurent toujours0"®,003, mais la substance contractile n’est représentée que par une enveloppe très mince revêlant, comme un tube, la file des noyaux. Ce tube de substance contractile est étranglé dans l’intervalle des noyaux qui sont assez espacés les uns des autres. Ges étranglements successifs donnent à l’ensemble du faisceau un aspect momliforme. Ces jeunes faisceaux des pattes à aspect momliforme ont été bien vus et bien décrits par M. Künckel ; mais faute sans doute d’en avoir suivi le dévelop- pement, ce naturaliste les a considérés comme des éléments destinés à devenir chacun une fibrille musculaire. Pour cela il était obligé d'admettre à priori, ef sans aucune preuve directe, qu'à un moment donné ces éléments, en forme de chapelet, se réduisaient de volume, perdaient leurs noyaux et se chan- geaient chacun en une fibrille mesurant 0"",001. En ce qui concerne l’origine prenuère des éléments cellu- laires formateurs des muscles des pattes, mes observations confirment pleinement l’opinion émise par M. Künckel et les faits découverts par M. Ganin. Pour moi comme pour ces deux naturalistes les cellules formatrices des muscles des pattes dérivent des disques imaginaux. Voici sur quelles observations je base ma manière de voir. Quand, au début de la vie nymphale, on examine en coupe longitudinale le disque prothoracique inférieur, par exemple, on remarque que le mésoderme constitué, comme nous le sa- vons, par des cellules plongées au sein d’une matière inter- cellulaire abondante, remplit complètement la cavité du membre. Mais plus tard, lorsque le développement est un peu plus avancé, alors qu'un ou deux troncs trachéens ont apparu dans l’intérieur du membre, on remarque que le mésoderme n’a pas suivi le développement de l’exoderme, aussi s’est-1l en partie détaché de cette partie (1). De plus, des lacunes se sont creusées dans le mésoderme, si bien que celui-ci se (1) PL 16, fig. 5. — Cette figure, qui représente une coupe transversale d’un disque, fait bien comprendre ce phénomène. 266 EH. VIALLANES. trouve morcelé en longues trainées fort étroites par rapport à la cavité accrue du membre. À un état plus avancé, on reconnaît que chacune de ces trai- nées est l’ébauche d’un muscle des pattes (1); précédemmentles cellules mésodermiques qui la formaient étaient disposées sans régularité, maintenant elles sont ordonnées en files longitudi- nales. Si l’on dilacère une de ces ébauches des muscles des pattes, on reconnait que cette disposition en série de ses élé- ments est due à ce qu'elle est constituée maintenant par de jeunes faisceaux musculaires moniliformes analogues à ceux que nous avons décrits au stade I. Il y aurait plusieurs manières d'interpréter ces observations, aucune opinion précise ne peut donc nous être permise. Nous pouvons supposer, ou bien que chaque cellule mésodermique s’allonge et fragmente son noyau pour devenir un jeune fais- ceau, ou bien que chaque cellule mésodermique devient un noyau musculaire, la substance intercellulaire se transformant en substance contractile. Dans le premier cas, chaque faisceau serait le dérivé d’une cellule unique ayant fragmenté son noyau; dans le second, chaque faisceau serait un organite pluricellulaire dès lori- gine. J’inclinerais un peu vers cette seconde hypothèse. CONCLUSIONS. 1° Les muscles des pattes dérivent du mésoderme des dis- ques IMagInaux. | 2° Le tissu du mésoderme est formé par des éléments cellu- laires plongés au sein d’une substance fondamentale homo- gène. 3° Au moment de la métamorphose, le mésoderme se détache de l’exoderme des disques et se dispose sous forme de traïnées étroites. Chacune de ces trainées est l’ébauche d’un muscle ou d’une masse musculaire. 4 Plus tard, on remarque que les éléments cellulaires de (1) PI. 18, fig. 3. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 967 l’ébauche (cellules ou noyaux?) sont disposés en files longitu- dinales, s'étendant régulièrement d’une insertion à l’autre. Si alors on dilacère l’ébauche, on reconnait que cet aspect est dù à ce qu’elle est composée par des formations ayant les ca- ractères suivants : Chacune de ces formations se montre comme un long tube, à parois réfringentes, renflé de distance en dis- tance, ce qui lui donne l’apparence d’un chapelet. Dans chacun de ces renflements nous trouvons un noyau. Ces formations en chapelet ont été bien vues et bien décrites par M. Künckel; mais ce ne sont.point de jeunes fibrilles, ainsi que le suppose ce naturaliste, mais bien de jeunes faisceaux des pattes. 9° La suite du développement nous montre effectivement que la paroi de chacune de ces formations en chapelet s’épaissit, acquiert une texture fibrillaire et devient la masse contractile d’un faisceau. Nous observons aussi que la cavité axiale de la formation en chapelet persiste pour devenir le canal axial du faisceau et que chacun de ses noyaux devient un noyau muscu- laire. Nous nous rappelons que chez l’adulte les noyaux museu- laires sont effectivement situés dans le canal axial du faisceau. Considérations sur la morphologie du tissu musculaire. — Dans la première partie de ce travail, nous avons vu que chaque faisceau musculaire de la vie organique (faisceau du cœur) représentait une cellule unique, très légèrement mo- difiée pour remplir le rôle d’élément contractile. Dans cette même première partie consacrée à l'étude des tissus à leur période d'état, nous avons vu en outre qu'il était bien difficile d’homologuer un faisceau musculaire de la vie animale à une cellule unique. Les observations faites par M. Weismann d’abord, ensuite par M. Ganin et par moi, sur le développement des muscles du corps de la larve et sur ceux de l'aile de l’imago (1), nous montrent que les faisceaux qui composent ces organes ne sont point comparables chacun à une cellule unique, mais que ce (1) C’est à dessein que je ne parle pas des muscles des pattes puisqu'il sub- siste encore quelque obscurité sur leur mode de formation. 268 HE. VESALELANES. sont des organites pluricellulaires dès l’origine. Nous avons vu, en effet, que dans ces deux cas, chaque faisceau était primitivement formé par de nombreuses cellules (cellules musculogènes), plongées au sein d’une substance fondamen- tale homogène; de plus, nous avons observé que par suite du développement, la substance fondamentale acquérant une texture fibrillaire spéciale, devenait la masse contractile, tandis que chaque noyau musculaire était formé par une cellule museulogène. Ces faits nous prouvent que les faisceaux volontaires que nous avons étudiés, ne représentent point chacun une seule cellule, mais bien un organite pluricellu- lure, une partie histologiquement et morphologiquement comparable à un tendon de Vertébré, par exemple. [Il me paraît done légitime d'homologuer les noyaux musculaires avec Îles cellules tendineuses et la substance contractile du faisceau musculaire à la substance fondamentale fibrillaire du tendon. Il semble done, d’après ceci, que la série des tissus contrac- üles constitue une série parallèle à celle des tissus conjonctifs, puisque dans lun et l’autre de ces groupes, à mesure que le perfectionnement s'établit, les fonctions mécaniques se loca- Hisent de plus en plus en dehors des cellules, pour devenir l'apanage de la substance fondamentale, c’est-à-dire des ter- ritoires indivis qui s'étendent entre les cellules voisines ; tandis qu'aux cellules mêmes paraissent être réservées les fonctions de nutrition. L'étude des terminaisons nerveuses vient encore montrer le bien fondé des homologies que j'essaye d'établir entre le tissu tendineux et le tissu contractile strié volontaire. Dans un mé- moire récent, M. Golgi (1) a, en effet, montré que dans les ten- dons des Vertébrés, les nerfs formaient des arborisations ter- minales analogues à celles qu'on rencontre dans les faisceaux musculaires striés. (1) Golgi, Sui nervi dei tendini dell uomo e di altri vertebrali. Acad. des sciences de Turin, t. XXXII, 1880. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 269 CHAPITRE IV DÉVELOPPEMENT DE L'APPAREIL VISUEL. Historique des travaux relatifs à la structure et au développement de l'appareil visuel des Insectes. Ce qui rend difficile l’exposition des faits connus avant moi sur l'appareil de la vision, ce n’est pas seulement la complexité même du sujet, c’est aussi la variété des termes employés pour dénommer les différentes parties qui le constituent. Ce n’est pas que les auteurs qui m'ont précédé aient créé beaucoup de noms nouveaux, 1ls se sont, en général, servis de termes em- pruntés à l’anatomie des Vertébrés ; mais chacun les à pris dans une acception différente. Ainsi, pour ne parler que des auteurs que J'aurai le plus souvent à citer, M. Grenacher, M. Gaccio et M. Berger emploient le mot rétine chacun dans une acception spéciale. Gomme, d'autre part, aucun travail d'ensemble n’a été publié sur toutes les parties qui composent appareil de la vision chez les Arthropodes, on se trouve fort embarrassé lorsqu'il faut choisir les termes à employer dans l'historique des travaux d'autrui et dans l'exposé de ses pro- pres recherches. L'appareil de la vision chez les Arthropodes se compose de deux parties distinctes : la première est l'œil proprement dit (au sens restreint que M. Grenacher donne à ce mot), la seconde est l’appareil plus complexe de transmission et de perception. Ge dernier est constitué par des conducteurs ner- veux, par la région spéciale des ganglions cérébroïdes d’où naissent ceux-c1 et enfin par des relais ganglionnaires interpo- sés sur leur trajet. La première portion de l'appareil de la vision, c’est-à-dire l'œil composé proprement dit, est aujourd’hui parfaitement connue, quant à sa structure et quant à son développement, gràce principalement aux travaux de Claparède, de M. Weis- ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1882. XIV. 48. — ART. N. 1. 970 HI. VÉALLANES. mann et de M. Grenacher. En revanche, nous n’avons que des renseignements tout à fait insuffisants sur la structure des organes de transmission et de perception qui constituent la seconde portion de Pappareil visuel, de plus nous ne savons presque rien sur l’évolution histologique de ces parties. Afin d'introduire un peu d'ordre dans un sujet aussi com- plexe, je diviserai mon historique en trois parties. J’indiquerai ce que nous savons : 4° sur la structure de l’œil composé pro- prement dit; 2° sur celle des appareils de transmission et de percepüon; 3° sur le développement de l’œil composé et de l'appareil de transmission et de perception. Historique des travaux relatifs à la structure de l'œil composé. — C'est à M. Leydig (1), à Claparède (2) et à M. Weis- mann (3), que nous sommes redevables des premières notions précises sur l'œil composé des Arthropodes. Plus récemment, M. Grenacher (4) a publié un travail comparatif sur l’œil étudié dans tous les groupes principaux du type Arthropode, aussi emploierai-je la nomenclature proposée par ce natura- liste, elle diffère peu d’ailleurs de celle qui est employée par Claparède et par M. Weismann. Je dois dire immédiatement que dans mes descriptions, à l'exemple de ceux qui m'ont précédé, je ne considérerai pas l’œil comme placé dans sa position habituelle, mais J’appellerai antérieure la partie la plus superficielle, celle qui reçoit la première un rayon lumi- neux et postérieure, la plus profonde, celle qui est la plus rapprochée des centres nerveux. L’œil composé est formé par la réunion d’un certain nombre (1) Leydig, Traité d'histologie comparee. (2) Claparède, Zur Morphologie der zusammengesetzen Augen der Arthro- poden. (Zeitsch. f. wiss. Zool., 1860, p. 191, taf. XI-XIV). (3) Weismann, Die nachembryonale Entwikelung der Diptleren. (Zeits. f. wiss. Zool., Bd. XiV, 1864). Pour l'historique détaillé, voy. : J. Chatin, Les organes des sens dans la série animale. Paris, 1880. (4) Grenacher, Untersuchungen über das Arthropoden-Auge. Klinische Monatsblätter für Augenheilkunde. 15, Jahrg, 1877, 42 pages, 26 gravures, et Untersuchungen über das Sehorgan des Arthropoden. Gættinguen, 1879, in-4°, 485 pages, 11 planches. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 271 d’yeux élémentaires, la forme générale de chacun de ceux-ci représente grossièrement une colonne. L’œ1il composé est limité postérieurement par une membrane limitante sans structure, qui se continue sans ligne de démarcation avec la membrane basale qui double intérieurement lhypoderme général. Ceci suffirait déja à nous faire pressentir ce que l’embryologie montre clairement, à savoir : que l’œil composé n'est, dans son ensemble, qu'une région modifiée des tégu- ments généraux. Les yeux élémentaires reposent tous par leur extrémité postérieure sur la membrane limitante. Cha- cun d'eux comprend les parties suivantes, en allant d'avant en arrrière : L° la cornéule : c’est une formation chitineuse trans- parente, convexe en avant, présentant un contour hexagonal ; toutes les cornéules sont soudées les unes aux autres par leurs bords, et leur ensemble constitue la cornée à facettes, laquelle se continue sans ligne de démarcation avec la cutieule des téguments généraux voisins; 2° les cellules cristalliniennes ou de Semper : elles sont au nombre de quatre, groupées en croix et appliquées à la face postérieure de la cornéule qu’elles sécrètent; 8° le cône cristalloiïde (Krystal-Kegel) ( « cône » des auteurs français) : C’est un cône à sommet arrondi et tourné en arrière; il est formé par une substance résistante et très réfringente, 1l se compose de quatre segments se touchant sur la ligne axiale, chacun d’eux est sous-jacent à une des quatre cellules cristalliniennes et est sécrété par elle; 4° ia rétinule (Nervenstab de Claparède et de M. Weismann) (1) : elle a la forme d’une colonne dont la base antérieure est en contact avec le sommet du cône cristalloïde, dont l'extrémité postérieure s'appuie sur la membrane limitante. Elle est formée par la soudure de sept longues cellules en forme de baguettes, ce sont les cellules rétiniennes (Bildungzellen des Nervenstab de M. Weismann). Pour former (1) Nervenstab signifie littéralement « bâton nerveux », les auteurs français ont peut-être eu tort en traduisant ce mot par le diminutif bâtonnet, le mot Stäbchen qui seul signifie littéralement « bâtonnet » étant employé par les Allemands pour désigner les parties composantes du Nervenstab. 719) HE. VEALEANES. la rétinule, ces éléments se groupent de la manière suivante : six sont périphériques et enveloppent le septième qui est cen- tral. Chacune de ces cellules sécrète une longue formation cuticulaire, un bétonnet (Stäbchen de M. Weismann). La cellule centrale sécrète son bâtonnet dans sa partie axiale; les six cellules périphériques sécrètent leur bâtonnet le long de celle de leurs faces qui est en contact avec la cellule axiale. Les sept bâtonnets constituent par leur réunion un ensemble que M. Grenacher appelle le rhabdome (Axengebilde des Ner- venstabes de M. Weismann). I faut ajouter que chaque œil élé- mentaire est enveloppé par un certain nombre de cellules pigmentaires ou choroïdiennes qui lui constituent une gaine. Telle est la constitution des yeux élémentaires qui, par leur réunion,constituent œil composé. Les variations qu’on observe d’un Insecte à l’autre sont de peu d'importance, elles peuvent porter tout d’abord sur le cône cristalloïde. Ainsi chez les Dip- tères brachycères, les cellules cristalliniennes ne sécrètent pas de cône, à proprement parler, mais seulement un liquide coagu- lable qui les sépare de la rétinule ; chez les Tipulides ces mêmes cellules ne sécrètent plus rien qui rappelle un cône et ainsi, en arrière, elles sont en contact immédiat avec la rétinule. D’autres modifications peuvent se produire du côté de la rétinule, elles portent surtout sur le mode de groupement des sept cellules rétiniennes (Fipulides) et sur la situation qu’oc- cupe le noyau de ces ceilules par rapport au bâtonnet que chacuné d'elles sécrète. J'ajouterai que M. Grenacher désigne sous le nom de rétine l'ensemble des rétinules entrant dans la constitution de Poœil composé. C’est aussi dans cette acception que j'emploierai ce mot. Historique des travaux relatifs à l'appareil de transmission et de perception. — L'étude des organes de transmission et de perception est inséparable de celle des centres nerveux. Depuis qu'ont paru les remarquables études de Dujardin (1) (4) Dujardin, Sur le système nerveux des Insectes (Ann. sc. nat., 3° série, t. XIV). ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 975 sur la structure du cerveau des Insectes, de nombreuses recherches ont été entreprises sur ce sujet, elles ont montré que les centres nerveux des Arthropodes ne le cédaient point à ceux des Vertébrés au pointde vue de la complexité des parties. Les naturalistes qui, après Dujardin, se sont occupés de la structure intime du cerveau des Insectes sont MM. Leydig (1), Rabb-Ruckhardt (2), Ciaccio (3), Dietl (4), Flogel (5), Ber- ger (6), Newton (7), Michels (8), Packard (9). Mais tous, à l’exception de M. Ciaccio et de M. Berger, ont négligé l'étude du point qui nous intéresse, 1ls ont étudié seu- lement la partie centrale des ganglions cérébroïdes, laissant de côté les parties latérales qui sont les centres d’où naissent les conducteurs nerveux qui se rendent à l’œil composé. Aussi ne rendrai-je comple que des travaux publiés par les deux anatomistes que je viens de citer. Ni M. Ciaccio, ni M. Berger n'emploient le mot rétine dans l’acception généralement admise; de plus, chacun d’eux désigne sous ce nom des parties différentes ; aussi l’analyse que je vais donner de leurs recher- ches serait-elle complètement incompréhensible si je n’avais (1) Leydig, Zum Bau des thierrischen Corpers. Tubingen, 1864. (2) Rabb-Ruckhardt, Studien über Insectengehirne (Archiv. f. Anat. und Physiol., 1875, p.480, pl. 1). (3) Ciaccio, De l'œil des Diptères (Comptes rendus de l'Acad. des sciences de Bologne, 1875, p. 99). Traduit en franç. in Journal de Zoologie de Gervais, t-W876 (4) Dietl, Die Organisation des Arthropoden Gehirns (Zeits. f. wiss. Zool., t. XXVIL, p. 489, pl. XXXVI-XXXVIIT, 1876). (5) Flogel, Ueber den einheitlichen Bau des Gehirns in den verschiedenen Insecien Ordaungen (Zeitschr. f. wuss. Zool., t. XXX, supplément. Taf. XXIII- XXIV, 1878). (6) Berger, Untersuchungen über den Bau des Gehirns und der Retina in den Arthropoden (Arbeilen der Zool. Institut zu Wien, Il Heft, p. 1-48, 5 Taf., 1878). (7) Newton, On the Brain of the cokroach (Quarterly journal of the micro- scop. science, t. LXXV, 1879, p. 340, pl. XV-XVT). (8) Michels, Beschreibung des Nervensystems von Oryctes nasicornis in Larven, Puppen, und Kaferzustandes (Zeits. f. wiss.'Zool., t. XLIIE, p. 440. Taf. XXXIII-XXXVI, 1880). (9) Packard, The brain of the locust. —— Tractated from the second report of the Unitedstates entomological commission, 1880, p. 223-242, pl. IX-XV. 274 El. VEQLEANES. soin dunifier la terminologie. J’emploierai le mot rétine dans le sens que lui donne M. Grenacher, c’est-à-dire pour désigner l'ensemble des rétinules. M. Ciaccio (1875) décrit de la manière suivante les parties qui sont postérieures à la membrane limitante postérieure de la rétine (Grenacher) d’une Tipulide adulte qu'il a étudiée. Immédiatement en arrière de la membrane limitante de la rétine, se trouve une lame nerveuse'qui la double entièrement. Cette lame, limitée en arrière par une limitante fibreuse, est formée de deux couches, l’une antérieure, qu'il appelle couche des cellules nerveuses, l’autre postérieure, qu'il appelle la couche des fibres du nerf optique ou des fibres en palissades. La couche des cellules nerveuses est composée de cellules gauglionnaires ordinairement disposées par files; chacune de ces files, en raison de sa situation, paraît faire suite à un des faisceaux nerveux constitutifs de la couche suivante. Ces cel- lulies sont presque toutes d’égale grandeur et chacune d'elles présente un certain nombre de prolongements, l’un d'eux se continue probablement avec une fibre de lacouche postérieure, un autre atteint la partie postérieure de la rétinule, enfin les autres prolongements ne servent qu'à réunir les cellules d’une file à celles d’une autre file. La couche des fibres du nerf optique, immédiatement située en arrière de la couche des cellules nerveuses, est com- posée de petits faisceaux de fibres entourés d’une matière gra- nuleuse ; elle rappelle assez bien, en raison de la disposition particulière des faisceaux qui la composent, l’aspect d’une palissade. On remarque en outre dans cette couche, à peu de distance de celle des cellules nerveuses, de petits noyaux oblongs disposés sur une seule ligne : M. Ciaccio désigne cette ligne sous le nom de zone nucléaire de la couche des fibres. La couche des fibres, limitée en arrière par une membrane limitante, est en communication avec le cerveau par l’inter- médiaire d’un gros paquet de fibres nerveuses qui perforent cette membrane. M. Ciaccio désigne ce paquet de fibres sous le nom de nerf optique ; mais il ne nous donne pas de rensei- ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 975 snements sur son origine, il dit seulement qu'il la vu sortir d’une région du cerveau formée de nombreuses petites cellules ganglionnaires. M. Berger (1878) ne paraît avoir eu aucune connaissance du travail de M. Giaccio. Se plaçant au même point de vue 1l étudie plusieurs Insectes (Aeschna et Musca). Un certain nom- bre de dispositions décrites par M. Giaccio n’ont point été retrouvées par M. Berger, et inversement M. Berger signale certains faits dont le savant italien ne parle pas. Entre la couche des cellules nerveuses de M. Giaccio et la limi- tante de la rétine, il découvre une nouvelle couche et lui donne le nom de couche des faisceaux nerveux (Nervenbundel- schicht), elle est composée de fibres nerveuses s'étendant de la couche des cellules nerveuses à la limitante de la rétine. Plus en arrière, M. Berger retrouve la couche des cellules nerveuses (Giaecio), mais il lui donne un autre nom et l'appelle couche des noyaux (Kornerschicht). Il ne reconnait point cette disposi- tion en files régulières des éléments de cette couche, il ne con- sidère pas ces éléments comme des cellules multipolaires, mais les regarde comme de simples noyaux. Immédiatement en arrière, le naturaliste viennois retrouve la couche des fibres en palissades (Ciaccio), il l’appelle couche molécu- laire (Molecularschicht); en effet, 11 la considère comme formée simplement de substance finement granuleuse, il n’y voit point les fibres disposées en palissades régulières dont parle M. Ciaccio. En arrière de cette couche il découvre une assise de cellules ganglionnaires (Ganglienzellenschicht) dont ne parle pas lanatomiste italien ; en revanche, M. Berger ne signale rien d’analogue à la limitante que, dans cette même région, son : prédécesseur avait vue. Le naturaliste des travaux duquel je rends compte observa que cette couche de cellules ganglion- naires élait unie à cette région latérale du cerveau, qu’on appelle le ganglion optique, par un gros paquet de fibres ner- veuses répondant à ce que M. Giaccio appelait le nerf optique. Tandis que ce dernier considérait le ganglion optique comme simplement formé par un amas de petites cellules ganglion- 976 H. VIALLANES. naires, M. Berger le décrit et le figure comme constitué par une masse centrale de substance blanche, enveloppée par une écorce de cellules ganglionnaires, montrant en dedans des fibres rayonnantes et renfermant, plus en dehors, un noyau intérieur de substance grise. [remarque que les fibres optiques ne naissent pas directement de la surface de l'écorce grise, mais de la substance blanche centrale, par deux racines, dont lune est supérieure, l’autre inférieure au noyau de substance grise. Historique des travaux relatifs au développement de l'appa- reil de la vision. — Les larves de Muscides, comme celles de plusieurs autres Insectes, sont aveugles, les yeux se dévelop- pent durant la vie nymphale. M. Weismann (1) est le seul observateur qui ait étudié les transformations qui s’accom- plissent dans les ganglions cérébroïdes, tandis que l'organe de la vision se forme, le seul qui ait recherché par suite de quel procédé se constituent les appareils de transmission. Sur ces deux points si importants, l’anatomiste allemand ne nous donne que les renseignements qu'ont pu lui fournir des études macroscopiques, ils n’en présentent pas moins un intérêt capital. Le système nerveux central de la larve de la Mouche se compose d’une chaine ventrale fort courte et d’une paire de ganglions cérébroïdes. Le ganglion sous-æsophagien est si intimement soudé, d’une part aux ganglions cérébroïdes, d'autre part au reste de la chaîne, qu'on ne peut distinguer ses limites, Chaque ganglion cérébroïde se présente avec la forme d’un œuf à grand axe vertical; en bas, il se continue avec le ganglion sous-æsophagien, en haut il est uni à son congénère par une courte commissure. Le ganglion cérébroïde ne donne naissance qu'à un seul nerf qui sort de sa face externe, encore ce nerf ne se rend-1l à aucune partie larvaire, mais à un disque imaginal situé plus en avant et qui est le disque de l'œil com- posé correspondant. La forme du disque de l'œil peut être (1) Weismann, Die Entwikelung der Dipteren. Tir. à part, 1864, p. 190 et suiv. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 277 grossièrement comparée à celle du chapeau d’un champignon qui coifferait le ganglion cérébroïde. Le nerf dont nous venons de parler, et que M. Weismann appelle la « tige nerveuse », rattache le disque au ganglion comme le pied d’un champi- gnon rattache le chapeau au sol. M. Weismann attribuait au disque de l’œil exactement la même structure qu'aux autres disques imaginaux; on se rappelle qu’il considérait ceux-ci comme formés par un amas de cellules embryonnaires enfer- mées dans une enveloppe commune anhyste. Au moment de la métamorphose, des transformations s’ac- complissent dans le disque, dans le ganglion cérébroïde cor- respondant et dans la tige nerveuse qui unit ces deux parties. Transformation du disque. — Au moment de la métamor- phose, le disque grandit, s'étale, devient plus plat et va rem- placer l’hypoderme larvaire disparu à la place qu'occupera plus tard l’œil composé de lPimago ; en se soudant sur ses bords avec les disques voisins il concourt à limiter la cavité du corps de la Mouche. L’œil composé dans son ensemble doit donc être considéré simplement comme une région différenciée des téguments généraux. Mais pendant ce temps des modifications se sont accomplies dans le tissu même du disque. Les cellules les plus superficielles ont grossi et elles se sont rangées côte à côte avec une régularité qui rappelle l’arrangement symétrique que présentent chez l’imago les facettes de la cornée. Chacune de ces cellules mérite le nom de cellule optogène, chacune d'elles formera dans toutes ses parties un des yeux élémen- taires. En effet, la cellule optogène se segmente en deux parties, une antérieure et une postérieure, l’antérieure se divisant radialement en quatre donne naissance aux quatre cellules cristalliniennes qui en avant sécrètent la cornéule et en arrière le cône cristalloïde; la postérieure constitue la rétinule en se divisant radialement en sept cellules rétiniennes. Plus tard. apparaissent les cellules pigmentaires ou choroïdiennes qui revêtent l’œil élémentaire. | Transformation du ganglion cérébroide et de la tige nerveuse. — Pendant que ces changements s’accomplissent dans le 978 M. VEALLANES. disque, de profondes modifications se sont effectuées dans le ganglion cérébroïde et dans la tige nerveuse. Tout d’abord le ganglion cérébroïde grossit beaucoup, devient sphérique, puis se marque à sa surface d’un sillon annulaire, ce sillon s’appro- fondit et sépare le ganglion cérébroïde en deux parties, une latérale et une médiane. La première, beaucoup plus volumi- neuse quela seconde, est le ganglion optique proprement dit, c’est à elle que s’attache la tige nerveuse du disque des yeux. Le ganglion optique continue à grossir, à mesure que son volume augmente il se rapproche davantage du disque de Poil, aussi la tige nerveuse qui unit ces deux parties se rac- courcit-elle. Plus tard, on remarque que non seulement la tige a continué à se raccourcir, mais que de plus, elle s’est élargie, si bien qu’elle se montre comme un gros paquet de fibres lar- gement inséré sur le disque, d’une part, et sur le ganglion optique, d'autre part. À l’état suivant, observé par M. Weis- mann, de profondes modifications s'étaient accomplies. Le ganglion opiique a continué à s’accroitre, sa surface s’est beau- coup approchée de la face postérieure de loœil, comme une demi-sphère pleine qui viendrait se loger au-dessous d’une calotte hémisphérique. On ne trouve plus trace de la tige ner- veuse, la face postérieure de l'œil composé est complètement séparée de la surface du ganglion optique par un assez large espace rempli par quelques cellules flottantes et une grande quantité de matière graisseuse; M. Weismann donne à cet espace le nom de couche limite (Grenzschicht). Mais l’auteur allemand remarque que le ganglion optique est limité en avant par une assise spéciale qui le coiffe, comme une calotte hémi- sphérique coifferail une demi-sphère ; 1l reconnait que cette calotte présente dans son épaisseur des stries antéro-posté- rieures rayonnantes, il pense que sa formation est due à la transformation et à l’étalement de la tige nerveuse, c’est aussi sous ce nom qu'il la désigne. A cet ensemble formé par cette calotte, qu’il considère comme représentantet la tige nerveuse transformée et le ganglion optique proprement dit, M. Weis- mann donne le nom de bulbe optique. L'auteur allemand ARTICLE N° À. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 279 remarque que cette calotte,qu'il appelle la «tige transformée », est, par sa face inférieure, en contact immédiat et intime avec la surface antérieure du ganglion optique. Bien que n’ayant étudié le ganglion que par transparence et dans son entier, 1l nous donne pourtant quelques détails importants sur sa structure, il observe que ee ganglion est formé de plusieurs couches : une antérieure qui l’unit à la face postérieure de la « tige transfor- mée » et où 1l reconnait des cellules et des fibres. Le reste du ganglion lui paraît composé de substance blanche à fibres rayonnantes d’arrière en avant. Au milieu de cette substance blanche, il reconnait l'existence d’un noyau central, se présen- tant en coupe optique comme un eroissant à concavité posté- rieure, il le considère comme formé par des fibres à direction transversale. À la face postérieure de ce noyau, 1l reconnait l'existence de quelques cellules nerveuses. M. Weismann pense qu’en se transformant, la tige nerveuse s’est complète- ment séparée de l'œil, qui reste ainsi sans continuité aucune avec le système nerveux central, mais que plus tard cette con- tinuité se rétablit par ce fait que des cellules ganglionnaires se développent dans la couche limite (Grenzschicht) et viennent ainsi unir la prétendue « tige nerveuse transformée » avec l'œil composé. | Tels sont les seuls faits qui nous sont aujourd’hui connus touchant la structure et le développement de appareil visuel. Avant d'exposer le résultat de mes propres recherches, je dois faire remarquer que si l’on essaie de comparer la figure où M. Berger représente les parties situées en arrière de l’œil chez la Mouche et celle que M. Weismann donne des mêmes or- ganes, on reconnait au premier coup d'œil que toute homolo- gation est impossible tant les deux dessins se ressemblent peu. Je ne parle pas des éléments, puisque M. Weismann n’a pres- que pas étudié lhistologie de ces parties, mais en a seule- ment observé les plus grandes régions. Cette dissemblance me parait tenir à la différence des mé- thodes auxquelles ont eu recours ces auteurs. M. Weismann ne faisait point de coupes, il observait par transparence l’or- 280 HI. VIALLANES. gane dans son entier. M. Berger, au contraire, se contentait d'examiner des sections. Je dois dire immédiatement qu’au point de vue des régions, le premier de ces observateurs s’est beaucoup plus que le second approché de la vérité. Car si la méthode des coupes est indispensable pour l'étude de certains organes, elle ne peut donner de résultats concluants que quand les conditions dans lesquelles sont faites les sections sont dé- terminées avec la plus grande rigueur. Qu’il me soit permis de donner à cet égard quelques détails techniques, dont ceux qui répéteront mes observations auront vite compris toute l'importance. Quand on examine extérieurement la tête d’une Mouche, on reconnaît que la surface de la cornée à facettes est analogue à celle d’une portion de sphère qui couvrirait la face latérale de la tête. Si maintenant on procède à la dissection des centres nerveux, on remarque que lappareil visuel, c'est-à-dire le ganglion optique, l'œil composé et les parties interposées à ces deux régions, constituent un ensemble comparable à un cône, dont le sommet répondrait à l’étran- glement qui sépare le ganglion optique d’avec le ganglion cérébroïde proprement dit et dont la base sphérique répon- drait à la surface de la cornée. Un examen même superficiel nous montre que les axes des yeux élémentaires sont tous orientés à peu près selon des rayons qui partiraient du som- met du cône pour aboutir à la cornée. On remarque, en outre, que les fibres, les files de cellules, etc., qui constituent cet ensemble si complexe situé en arrière de l'œil, sont toutes orientées de même. On comprend alors que si l’on ne veut point avoir à interpréter des coupes obliques, chose toujours si difficile, il est de toute nécessité que la section comprenne un plan passant exactement par l’axe de ce cône que représente l’ensemble de l'appareil visuel. On conçoit alors que d’un même côté, chez un même animal, on ne pourra obtenir qu’une seule coupe facilement interprétable. Une section faite dans ces conditions passera nécessairement par un des méri- diens de la cornée, et coupera, selon leur axe, autant d’yeux élémentaires qu’il y en a sur ce méridien. Comme le contour ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 281 de la surface cornéenne n’est point circulaire, les méridiens ne sont point égaux, mais sur les plus petits on trouve au moins cent yeux élémentaires. Ge fait me fait penser que la section décrite et figurée par M. Berger (1) était faite dans de mauvaises conditions et ne passait pas par l’axe de l'appareil visuel. Malgré tout cela, les conditions dans lesquelles a été faite la coupe que figure M. Berger, ne m’apparaissent pas bien clairement, car je nai point retrouvé chez l’adulte d'images exactement semblables à celles qu'il a dessinées. $ 1. — Appareil visuel chez une nymphe presque arrivée à son développement complet. * Je dois dire tout d’abord que je ne puis apporter de rensei- gnements suffisamment précis sur la structure de l'appareil visuel chez la Mouche tout à fait adulte. Chez la Mouche adulte, en effet, l'étude est rendue très difficile par la pré- sence du pigment et d’un nombre considérable de trachées, et aussi par la difficulté très grande qu’on éprouve à orienter convenablement lPanimal, car dans les derniers jours de la vie nymphale, la tête s’aplatit et devient mobile sur Le thorax, par suite de l’amincissement du cou. Mais je décrirai d’abord, avec beaucoup de détails, la structure de l'appareil visuel chez des nymphes déjà fort avancées, chez lesquelles les yeux étaient constitués dans toutes leurs parties, mais avant l’appa- rition du pigment et des trachées. Parmi les très nombreuses coupes que j'ai faites sur des nymphes de cet âge, je prends pour type de ma description une des meilleures et des mieux orientées que j'aie pu obtenir, elle passe par un des plus grands diamètres de l’œil et dans son plan elle comprend laxe op- tique tout entier. Comme les images que mes préparations montrent diffèrent assez de ce qu'a figuré et décrit M. Berger, Jai photographié les plus importantes dans leur ensemble et dans leurs détails, afin d’en rendre la communication plus facile et d’être plus assuré moi-même de l’exactitude de mes - dessins. (1) Berger, loc. cit., pl. IL, fig. 21. 289 IH. VEALLANES. Étudions d’abord l’ensemble (1) d’une coupe comprenant en même temps le système nerveux et l'appareil visuel. Sur la ligne médiane et un peu en bas, nous reconnaissons tout d’abord le trou œsophagien qui immédiatement nous permet de nous orienter. Ce trou est entièrement entouré par une masse considérable de substance blanche, enveloppée elle- même tout entière par une couche plus ou moins épaisse de substance grise ou cellulaire. Le ganglion cérébroïde et le gan- olion sous-æsophagien sont complètement confondus et il nous est impossible de trouver entre ces deux parties une limite précise; toutefois, en bas et en dehors, nous trouvons une échancrure assez profonde à la surface de l'écorce grise, elle paraît être le dernier indice de la soudure du ganglion sous-æsophagien avec le ganglion cérébroïde. Bien que je n’aie aucune preuve absolument certaine qu’il en soit ainsi, J'admettrai cette interprétalion et afin de rendre la description plus facile j’appellerai ganglion cérébroïde toutes les par- ties des centres nerveux situées au-dessus de cette échan- crure. L | Le ganglion cérébroide se compose de deux parties bien distinctes : une partie centrale entourant immédiatement l’œsophage, et une partie latérale; la première est le cerveau proprement dit, la seconde le ganglion optique. Elles sont séparées l’une de l’autre par un sillon (2) annulaire très pro- fond, aussi est-ce seulement par un isthme étroit qu’elles sont réunies l’une à l’autre. Le ganglion optique, qui à lui seul pré- sente un volume plus considérable que le cerveau proprement dit et le ganglion sous-æsophagien réunis, est limité en de- hors par un contour convexe très régulièrement arrondi. Si maintenant, quittant les centres nerveux, nous examinons la périphérie de la coupe, nous y trouvons l’œil composé (3), exactement sectionné selon l’axe de tous les yeux élémentaires situés sur le méridien par lequel le rasoir a passé. Il se pré- CPS M0 (C)PEMS MEME ST (2) Pl 18/fe-tiete ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 283 sente en coupe avec un aspect extrêmement élégant; c’est un croissant très effilé, rappelant l’image de la lune à son premier quartier; sa convexité extérieure est formée par ia cornée à facettes, sa concavité interne par la membrane limitante de l’œil. La corne supérieure du croissant atteint presque la ligne médiane; la corne inférieure descend très bas, bien au- dessous du niveau du trou œsophagien, c’est qu’en effet, notre coupe passe par un des plus grands diamètres de l’œil, et nous savons que chez la Mouche les yeux font presque le tour de la tête. Nous remarquons que la membrane limitante de l'œil est assez éloignée de la surface externe du ganglion optique. Dans l’espace qui sépare ces deux régions, nous voyons un organe qui, en coupe, a la forme d’un croissant, il a exactement les mêmes courbures et la même orientation que le croissant que représente la coupe de lœil composé, seule- ment il est plus petit, aussi sa corne inférieure descend-elle moins bas et sa corne supérieure monte-t-elle moins haut. C’est à ce second croissant, séparé en dehors de la limitante de l’œil par un espace clair, séparé en dedans de la surface du ganglion optique également par un espace assez grand, que je donne le nom de lame ganglionnaire (À). Le nom de lame est bien mérité, car si lon examine des coupes pratiquées suivant divers méridiens, on s'assure que cet organe se présente toujours avec le même aspect et les mêmes rapports, ce qui prouve bien que c’est une lame de même courbure que l'œil composé interposée comme un écran entre celui-ci et le ganglion optique. A l’espace qui sé- pare la lame ganglionnaire de la limitante de Pœil composé, je donnerai le nom de couche des fibres postrétiniennes (9), je désignerai sous le nom de couche des fibres préqunglion- naires (3), l’espace qui sépare la lame ganglionnaire de la surface externe du ganglion optique. En résumé, les princi- pales régions de l’appareil visuel que nous avons à étudier sont, (1) PL. 48, fig. 4, Lg. CPE Te DIN S)BIEMIS, Ho 10/9: 284 HE. VIALLANES,. en allant de dehors en dedans : 1° l’œil composé; 2° la couche des fibres postrétiniennes; 3° la lame ganglionnaire; 4 la couche des fibres préganglionnaires ; 5° le ganglion optique. Œil composé (1). — Ainsi que je lai dit plus haut, quand l’œil composé est coupé selon un de ses méridiens, sa section se montre comme un croissant effilé, à courbure très élégante. Il est limité en avant par la cornée à facettes (2), en arrière par une membrane mince et homogène qu’on désigne sous le nom de hmitante postérieure (3) de l'œil composé. Chaque œil élémentaire se montre avec la forme générale d’une petite colonne, dont l’une des extrémités repose sur la membrane limitante, tandis que l’autre est immédiatement sous-jacente à la cornée. Les yeux élémentaires sont disposés avec une régularité admirable, mais tous n’ont pas la même orientation. Ceux qui occupent le centre sont normalement orientés par rapport à la courbure générale de l'œil, c’est-à-dire qu’ils sont parallèles à l'axe optique principal ; mais à mesure qu’on s’a- vance vers la périphérie, on remarque que les veux élémen- taires deviennent de plus en plus obliques et que leur axe fait avec l’axe principal un angle de plus en plus grand. L’orien- tation des yeux élémentaires et la courbure des deux faces de l’œil composé (cornée et limitante) sont combinées de telle manière que les yeux élémentaires ont sensiblement les. mêmes dimensions, qu’on les examine au centre ou à la péri- phérie. Dans une pupe arrivée à l’état que nous étudions, les yeux élémentaires sont complètement développés dans toutes leurs parties essentielles ; seules les parties accessoires, cellules pro- tectrices et pigmentaires, n’ont point acquis leurs caractères définitifs : cette circonstance facilite singulièrement l'étude. Je n’entrerai dans aucun détail sur la structure de l’œil élémen- taire, car, pour le moment, il ne nous présente rien qui ne soit parfaitement connu, 1l est arrivé à cet état de développement (DIPEMS he tet2: (2)IP AS ec: (3) PI. 18, fig. 2, lpo. ARTICLE N° 1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 289 que M. Weismann représente dans la figure 55, pl. XIII de son ouvrage. La cornéule, qui, comme chacun le sait, n’est qu'une des facettes de la cornée générale, a acquis son aspect défini- tif. En arrière de chaque cornéule, nous trouvons quatre cel- lules disposées en croix, ce sont les cellules cristallinien- nes (1); leurs noyaux sont bien visibles, mais les limites de leur protoplasma le sont beaucoup moins, il n’y a à cette époque rien qui représente encore cette sorte d'humeur aqueuse que sécrètent les cellules rétiniennes et qui paraît être lhomologue du cône cristalloïde des autres Insectes. En arrière des cellules cristalliniennes, nous trouvons Îa réti- nule, elle se présente avec l'aspect d’une massue délicate, dont la grosse extrémité est antérieure. Les contours ‘des six cellules rétiniennes périphériques sont très visibles, car elles sont séparées l’une de l’autre par une cannelure bien nette. Le noyau des cellules rétiniennes est situé très en avant et c'est la présence de ces six noyaux sur un même niveau qui déter- mine ce renflement qui donne à la rétinule une forme de mas- sue. Quant à la septième cellule rétinienne, celle qui est axiale, nous ne la voyons pas, seules les coupes transversales la mettent en évidence. À la surface de chaque rétinule, à peu près à égale distance du renflement et de l'extrémité postérieure, se montre un noyau allongé (2) et faisant un peu saillie. Il a été bien vu et bien figuré par M. Weismann, qui le considère comme appartenant à une cellule protectrice très mince, qui, dès cette époque, envelopperait la rétinule. Toutes les mêmes parties des yeux élémentaires sont situées sur des lignes courbes parallèles à la courbure générale de fx cornée. Aussi, si nous considérons l’œil composé dans son en. semble, nous pouvons y reconnaître un certain nombre de couches. En arrière de la cornée, nous trouvons une couche formée par l’ensemble des cellules cristallinienaes, immédia- tement après, celle formée par toutes les rétinules et à laquelle (DIM forcer. (2) PI. 18, fig. 2, znr. ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1882. XIV. 19. — ART. N° 1. 286 H. VEALLANES. on doit réserver le nom de rétine (1). Dans cette rétine propre- ment dite, on distingue au premier coup d'œil deux zones : une antérieure, marquée par la ligne courbe sur laquelle sont situés tous les noyaux des cellules rétiniennes; une posté- rieure (2), c’est la ligne qui passe par ce noyau protecteur que chaque rétinule présente à sa surface. Il me parait assez curieux de rapprocher cette description que je viens de donner de Poil d’une Mouche non encore com- plètement développée, de celle que M. Ciaccio a donnée de l'œil des Tipulides adultes. Nous remarquons une identité complète dans les deux descriptions, il me semble que l'œil des Tipulides représente un état embryonnaire de l'œil des Mus- eides. Chez la Mouche arrivée à l’état dont nous faisons en ce mo- ment l’étude, on remarque que les yeux élémentaires sont au niveau de leur partie la plus mince, largement séparés les uns des autres par un espace clair et qui paraît vide. Mais si nous employons un objectif assez fort, nous remarquons que l'intervalle qui sépare deux yeux élémentaires voisins est en réalité divisé par une très mince cloison longitudinale dans l'épaisseur ou à la surface de laquelle on distingue de petits noyaux. Ges noyaux représentent seuls les cellules choroïdiennes, qui plus tard grandiront, se chargeront de pigment et prendront une grande importance. Une coupe transversale passant au niveau des rétinules, nous montrera mieux la disposition de ces cloisons formées par les cellules choroïdiennes ; ces cloisons sont extrêmement régulières, elles limitent des loges hexagonales, semblables à des alvéoles d’a- beilles; un œil élémentaire s’élève du fond de chacune de ces loges. Je n’ai point encore donné de détails sur la structure de la membrane limitante (3) de l'œil; c’est sur sa face antérieure (1) PL AS, fig.2; ret. (2) PI. 18; fig. 2, znr. (3) PI. 18, fig. 2, po. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9287 que les rétinules reposent par leur extrémité postérieure. Elle se présente comme une membrane parfaitement nette et régu- lière, son contour est double, mais elle paraît homogène et sans structure. En observant avec un fort grossissement, on reconnaît qu'un certain nombre de noyaux analogues à ceux des cellules choroïdiennes sont appliqués à sa surface anté- rieure, 1l est probable que ce sont ces éléments cellulaires qui la tiennent sous leur dépendance. J'ai dit plus haut qu'au centre de lœil, les axes des yeux élémentaires étaient normaux, par rapport à la membrane limi- tante, et que, vers la périphérie, ils devenaient, au contraire, tout à fait obliques; cette obliquité va si loin, que les yeux tout à fait périphériques sont complètement couchés sur la-mem- brane limitante. À première vue, en examinant les cornes de ce croissant que représente la coupe de l’œil composé, on serait assez tenté de croire que la membrane limitante va rejoindre la cornée à la périphérie de l'œil. Mais en y regardant de plus près, on re- connaît que la cornée se continue sans ligne de démarcation avec la cuticule générale, tandis que la limitante se continue, au contraire, avec la membrane basale qui double intérieure- ment l’hypoderme. Celui-ci est très mince, pas même aussi épais que la couche des cellules cristalliniennes et c’est cette minceur qui peut faire croire que la limitante va se souder à la cornée, alors qu'elle ne fait que s’en approcher beaucoup, tout en en restant toujours séparée par une couche de cel- lules. Ceci, d’ailleurs, n’a rien qui doive nous étonner. L’em- bryologie et l'anatomie comparée prouvent, avec la plus entière évidence, que l’'æil composé n’est qu’une portion transformée des téguments, la cornée n'étant que la cuti- cule générale légèrement modifiée, la membrane limitante répondant à la membrane basale et tous les éléments cellu- lares compris entre ces deux couches, aux cellules hypoder- miques. | En résumé, en examinant l’ensemble de la coupe de l’œil 286 HI. VIALLANES. composé, on observe les couches suivantes en allant d'avant en arrière : jo La cornée à facettes ; 90 La couche des cellules cristalliniennes; 1° La zone des noyaux 3° La couche des cellules rétiniennes (ré- | rétiniens ; tine);, on y distingue deux zones....... | 2 La zone des noyaux protecteurs ; 1° La membrane limitante postérieure de lPœil. Couche des fibres post-rétiniennes (1). — La couche des fibres post-rétiniennes est l’espace compris entre la limitante postérieure de Poœil et la face antérieure de la lame ganglion naire, les éléments qu’elle renferme sont peu nombreux et très espacés les uns des autres. Parmi ces éléments, les uns sont étrangers à l’appareil visuel, les autres lui appartiennent en propre, ces derniers sont des conducteurs nerveux, des fibres réunissant les rétinules à la lame ganglionnaire. Quant aux éléments étrangers dont je parlais plus haut, ils sont faciles à reconnaitre, ce sont ces granules roses à l’état mü- riforme ou à un stade moins avancé de leur développement, qui à cette époque de la vie nymphale sont répandus dans tout le corps. Nous savons que ces éléments proviennent de l’histolyse des muscles, qu'ils flottent dans le liquide cavitaire et se répandent dans toutes les parties de lanimal où une lacune se montre entre les organes. Plus loin, en étu- diant l’évolution de l'appareil visuel, j'imdiquerai comment ces éléments sont allés se loger dans la couche des fibres post-réliniennes, mais ce que nous constatons maintenant, c'est qu'ils n’en peuvent plus sortir etque d’autres n’y peuvent pas entrer.C’est qu’en effet la couche des fibres post-rétiniennes est limitée de toutes parts, par ce fait que sur tout le bord de la lame ganglionnaire, la gaine de cet organe se réfléchit en avant et va s’unir à la membrane limitante de l’œil. On peut ainsi comparer la forme de la couche des fibres post-réti- miennes, à celle d’une boîte ronde dont le couvercle, plus grand (1) PE 48, fig. 2, fpr. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 289 que le fond et fortement courbé en avant, représenterait la limi- tante postérieure de l'œil, dont le fond bombé dans le mème sens représenterait la lame ganglionnaire. J’ai indiqué quels étaient les éléments étrangers au système nerveux qu’on ren-- contre dans la couche post-rétinienne, étudions avec plus de détail les éléments essentiels, les fibres nerveuses. Chacune de celles-ci m'a toujours apparu comme un très petit fil par- faitement cylindrique, homogène et assez réfrimgent. Ces fibres qui s'étendent d'avant en arrière, c’est-à-dire de la limitante de l’œil à la face antérieure de la lame ganglionnaire ont tou- Jours un trajet un peu flexueux. Dans les points où l’on ren- contre ces granules étrangers à lappareil visuel, cette flexuo- sité s’exagère, comme si les fibres étaient obligées de les con- tourner. Le trajet des fibres n'étant pas rectiligne, dans une même coupe mince on ne les a pas toutes dans leur enter, mais on en trouve toujours un grand nombre qui se montrent dans leur intégrité complète, ce sont celles-là surtout qui sont favorables à l’étude. En avant, chacune de ces fibres sort de la membrane limi- tante de l’œil, immédiatement en arrière d’une rétinule ; chaque rétinule, s'appuyant par son extrémité postérieure effilée sur la membrane limitante, paraît être une simple conti- nuation, un simple renflement de la fibre. Mais comment, en réalité, s’'établissent les rapports entre le conducteur ner- veux et les éléments de la rétinule? Voilà ce qui me parait très difficile à déterminer, étant donnée Pimperfection des méthodes dont nous disposons. Il ne peut plus être question aujourd’hui d’une continuation du nerf au centre de la rétinule sous forme d’un filament central (ou de Ritter). M. Grenacher a, en effet, montré que ce filament avait une signification tout à fait diffé- rente. Quoi qu'il en soit d’ailleurs à cet égard, ce qui est bien certain, c'est que l’extrémité postérieure effilée de chaque réli- nule se continue avec une fibre post-rétinienne. J’ajouterai qu'à la surface de chacune des fibres post-rétiniennes se montre un petit noyau oblong qui y est intimement appliqué. Quelque attentives qu’aient été mes recherches à cet égard, 290 H. VIALLANES. jamais je n'ai découvert rien qui puisse faire supposer qu’il existe aucune sorte d’anastomose entre les fibres post-réti- niennes voisines. | Chez les Tipulides adultes, M. Ciaccio n’a trouvé rien d’ana- logue à cette couche que je viens de décrire; au contraire, M. Berger l'avait vue avant moi chez les Muscides adultes, mais plusieurs points importants de sa structure lui avaient échappé. Lame ganglionnaire (1). — La lame ganglionnaire est située immédiatement en arrière de la couche des fibres post-réti- niennes. Au premier coup d’œil on reconnait qu’elle est divisée en trois couches parfaitement distinctes : une antérieure ou couche de cellules nerveuses, une moyenne formée par des fibres en palissade, et une postérieure formée par des fibres et des noyaux allongés que j'appelle couche des fibres nucléces. On remarque, en outre, que la lame ganglionnaire est limitée en avant et en arrière par une mince membrane, et présente ainsi une limitante antérieure et une postérieure; de plus, on reconnaît que dans l’épaisseur même de la lame ganglion- naire, la couche des fibres en palissade et la couche des fibres nucléées sont séparées l’une de l’autre par une membrane mince, c’est la limitante moyenne. À. Couche des cellules ganghonnaires (2). — La couche des cellules ganglionnaires est limitée en avant par une mince membrane limitante, la lhimitante antérieure de la lame gan- glionnaire, qui la sépare de la couche des fibres post-réti- niennes; elle est composée par la réunion d’un certain nombre de courts chapelets de cellules, disposés les uns à côté des autres avec la plus grande régularité. Ces chapelets sont rec- tilignes et orientés par rapport aux courbures de la lame ganglionnaire, comme les yeux élémentaires le sont par rap- port aux courbures de l’œil composé. On s'assure facilement que le nombre de ces chapelets est rigoureusement égal à celui des yeux élémentaires; Parrange- ment des premiers est rigoureusement le même que celui des (1) PL 18, fig. 1, lg. (2) PI. 18, fig. 2, cg. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9291 seconds. Si, en effet, on pratique une coupe tangentielle à la lame ganglionnaire, les chapelets sont coupés transversale- ment, et l’on est alors frappé de admirable régularité de leur disposition, qui reproduit exactement celle des parties con- stitutives de l’œil composé. Chaque chapelet est formé par quatre grains arrondis, forte- ment serrés les uns contre les autres. Du grain le plus antérieur sort un filament, comme sorürait le fil d’un chapelet, il perce la membrane limitante antérieure de la lame ganglionnaire et va gagner lextrémité postérieure d’une rétinule. En somme, le filament qui sort de chacun des chapelets est une fibre post- rétinienne. Quant aux grains constitutifs des chapelets, chacun d’eux se montre comme un noyau arrondi homogène, à contour par- faitement net et dans toutes ses parties coloré en rouge par le carmin. Nous verrons plus loin qu’un grandnombre de cellules nerveuses se présentent avec cet aspect, par suite de la très srande réduction de leur protoplasma. Aussi ne parait-1l pas douteux que chacun des grains des chapelets ait la signification d'une cellule ganglionnaire bipolaire ; seulement les prolon- gements qui réunissent les cellules les unes aux autres sont aussi courts que possible. Ce qui confirme plemement l’exac- titude de cette interprétation, c’est que de la cellule extrème de chaque chapelet part un conducteur nerveux. Les chape- lets voisins sont toujours très distinctement séparés les uns des autres par un espace clair et vide. Jamais je n'ai pu décou- vrir entre eux une anastomose d'aucune sorte. M. Gaccio a décrit chez les Tipulides adultes une couche de cellules ganglionnaires qui évidemment est l’homologue de celle dont je viens de donner la description, mais au lieu d’être séparée de la limitante postérieure de l'œil par une couche de fibres post-rétiniennes, elle était immédiatement située en arrière de cette limitante et il n'existait rien d’analogue aux fibres post-rétiniennes. Dans la couche ganglionnaire de M. Ciaccio, les éléments avaient bien aussi une disposition 299 H. VIALLANES. en séries régulières, mais c’étaient des cellules multipolaires, s’anastomosant d’une file à l’autre. M. Berger a trouvé chez la Mouche adulte la couche que je viens de décrire, il l'appelle la couche à noyaux; mais il n’a reconnu ni la disposition si remarquable des éléments cellu- laires qui la composent, niles rapports que ces éléments affec- tent avec les fibres post-rétiniennes. Pour lui, cette couche était uniquement composée par un amas de noyaux disposés sans ordre. B. Couche des fibres en palissade (1). — La couche des fibres en palissade est immédiatement située en arrière de la couche des cellules ganglionnaires, dont elle se distingue avec la netteté la plus grande, bien qu’elle n’en soit séparée par aucune membrane. Immédiatement en arrière de la couche des fibres en palissade vient la couche des fibres nucléées, ces deux dernières assises sont séparées l’une de l’autre par une membrane limitante. La couche des fibres en palissade à été découverte par M. Ciaccio chez les Tipulides, ce savant en a fort bien déerit la structure. M. Berger, qui, ainsi que Je l'ai dit, n'avait pas connaissance du travail de M. Ciaccio, a retrouvé cette même couche, mais il n’y à reconnu aucun détail de structure ; pour lui c'était une région simplement formée d’une substance très finement granuleuse, aussi l’appelait-il « couche molé- culaire ». Chacune des fibres constituantes de la couche des fibres en palissade s'appuie en arrière par une extrémité effilée sur la limitante moyenne et en avant se continue par son extrémité antérieure plus large avec la cellule postérieure d’un des cha- pelets constitutifs de la couche précédemment décrite. Les fibres voisines ne sont point en contact les unes avec les autres, mais sont largement séparées par un espace rempli d’une matière très finement granuleuse et moinsréfringente qu’elles. Chaque fibre s’élargissant d’arrière en avant, l’espace qui (1) PI. 48; fig-L2, cp. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 293 sépare deux fibres voisines est naturellement plus large en arrière qu'en avant. Au voisinage de son tiers supérieur, chaque fibre présente, appliqué à sa surface, un noyau ova- laire assez volumineux, mais je ne sais pas quelle en est la signification; c’est peut-être un élément protecteur. Chaque fibre se continuant en avant avec la cellule posté- rieure d'un des chapelets constitutifs de la couche précédente, les fibres sont en nombre égal à celui des chapelets. Il est à remarquer que chacune d'elles se continue exactement avec l’axe du chapelet correspondant. Comme le noyau annexé à chaque fibre est toujours situé à une même hauteur, tous les noyaux annexés sont situés sur une même ligne courbe parallèle à la courbure de la lame-gan- glionnaire. Cette disposition a été bien vue par M. Craccio qui donne à cette ligne ie nom de Zone nucléaire, dénomination que Je conserve (1). Si M. Berger n’a point reconnu l’existence de fibres dans la couche que je viens de décrire, et s’il a consi- déré cette région comme simplement formée par une substance moléculaire, en revanche il y a vu cette zone nucléaire, à laquelle il donne le nom de « couche secondaire des noyaux ». C. Couche des fibres nucléées (2).— La couche des fibres nu- cléées est située en arrière de la couche des fibres en palissade dont elle est séparée par la limitante moyenne. C’est la dernière couche de la lame ganglionnaire, aussi ai-je donné le nom de limitante postérieure à la membrane qui la revêten arrière. La couche des fibres nucléées est uniquement composée par des fibres qui présentent beaucoup d’analogie avec les fibres post- rétiniennes; chacune d'elles se présente comme un fil fin cylindrique, légèrement flexueux, à la surface duquel se irouve appliqué un gros noyau ovalaire. Il existe autant de fibres nucléées que de fibres en palissade; en effet, chaque fibre nucléée naît de l’extrémité postérieure d’une fibre en (1) PI. 18, fig. 2, zpn. (2) PI. 18, fig. 2, fn. 294 HI. VIALLANES. palissade, puis, continuant sa marche en arrière, va percer la limitante postérieure pour entrer dans la région suivante de l'appareil visuel. Ni M. Ciaccio, ni M. Berger ne me paraissent avoir rien vu d’analogue à la couche des fibres nucléées ; d’ailleurs, à partir de cette région mes observations diffèrent tellement de celles de M. Berger qu'il m'est impossible de les comparer à celles de ce naturaliste. Je dois me contenter de renvoyer au résumé que J'ai donné des faits observés par mes prédéces- seurs et à leurs propres travaux. D. Membranes limitantes de la lume ganglionnaire. — Jus” qu'ici j'ai seulement signalé en passant la présence des limi- tantes qui entrent dans la composition de la lame ganglion- naire, Je crois nécessaire d'y revenir et de donner quelques détails complémentaires sur leur structure et leur disposition. La limitante antérieure (1) s'étend à la face antérieure de la lame ganglionnaire, elle revêt par conséquent immédiate- ment en avant la couche des cellules ganglionnaires ; la limi- tante moyenne (2) sépare la couche des fibres en palissade de la couche des fibres nucléées; enfin la limitante postérieure (3) revêt cette dernière couche en arrière. La limitante antérieure est tout à fait mince, elle se présente pourtant avec un contour double et très régulier ; mais je n’ai pu découvrir de noyaux ni à sa surface ni dans son épaisseur. Les deux autres limi- tantes sont plus puissantes, et dans leur épaisseur sont plongés des noyaux aplatis, assez rapprochés les uns des autres. Les trois membranes sont perforées par des trous petits et nom- breux qui laissent passer les fibres nerveuses d’une couche à l’autre. Les limitantes divisent la lame ganglionnaire en étages, à la périphérie elles sont unies l’une à l’autre, comme les plan- chers d’une maison sont unis par les murs extérieurs. On remarque en effet que les côtés latéraux de la lame ganglion- naire sont revêtus par une mince gaine conjonctive sur laquelle (PASS Ta (2) Pl: 18,fig- 2, Im. (3) PI. 18, fig. 2, (pl. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 995 viennent s'appuyer toutes les limitantes. Cette gaine se conti- nue en avant, puis va rejoindre la limitante de l’œil en enve- loppant ainsi la couche des fibres post-rétiniennes; elle se continue de même en arrière et va rejoindre la limitante du ganglion optique pour former ainsi une enveloppe périphérique à la couche des fibres préganglionnaires. En résumé, la lame ganglionnaire comprend, en allant d'avant en arrière, les parties suivantes : 4o La limitante antérieure de la lame ganglionnaire ; 2° La couche des cellules ganglionnaires ; 3° La couche des fibres en palissade dans laquelle se rencontre la zone nucléaire ; 4° La limitante moyenne de la lame ganglionnaire ; 5° La couche des fibres nucléées ; 6° La limitante postérieure de la lame ganglionnaire. Couche des fibres préganglionnaires (1).— Gette couche est interposée entre la lame ganglionnaire et le ganglion optique, elle est par conséquent comprise entre la limitante postérieure de la lame et le névrilemme ou limitante du ganglion optique. Sa structure est des plus simples; elle se compose de fibres écartées les unes des autres, à trajet légèrement sinueux; celles-e1 se présentent tout à fait avec le même aspect que les fibres nucléées de la couche précédente, à cette différence près, qu'on ne découvre pas de noyaux à leur surface. Chacune d’elles n’est en réalité que la continuation d’une des fibres nucléées qui sortent de la lame ganglionnaire en perçant la imitante pos- térieure de cette lame. Les fibres préganglionnaires, pas plus que les fibres nucléées, ne présentent entre elles aucune trace d’anastomose. Les fibres préganglionnares pénètrent en ar- rière dans le ganglion optique en perçant l'enveloppe conjonc- tive ou névrilemme qui revêt cette partie des centres nerveux. Dans la pupe que J'ai figurée et prise pour type de ma des- cription (2), le névrilemme du ganglion n’a pas encore atteint tout son développement, il existe seulement en haut. Aussi (1) PI. 18, fig. 2, {pg. (2) PI. 18, fig. 2, nev. 296 M. VIALLANES. voyons-nous qu'en bas le ganglion optique n’est séparé par aucune membrane d'avec la couche des fibres préganglion- naires. Ganglhion optique. — Le ganglion optique a une structure plus complexe qu'aucune des autres régions de l'appareil visuel. Sur la coupe ilse montre avec la forme d’un quart de cercle dont le sommet serait arrondi et émoussé, il est orienté de la manière suivante par rapport à l'axe du corps de l'animal: son bord convexe est dirigé en dehors, son côté interne s’at- tache par un pédoncule étroit aux parües latérales du cerveau proprement dit. Mais si nous prenons pour point de repère l’axe optique, comme nous lavons fait dans la partie précédente de cette description, nous voyons que le bord convexe du ganglion regarde en avant, car 1l est concentrique à la courbure des autres parlies de l’œil; c’est par conséquent sur lui que vien- drait tomber l’axe prolongé de l’un quelconque des yeux élé- mentaires. Dans la description du ganglion optique, comme dans celle des autres parties de l'appareil visuel, je prendrai pour ligne d'orientation laxe général du système optique considéré comme antéro-postérieur. Le plus rapide examen permet de distinguer deux grandes” régions dans le ganglion optique : une intérieure formée de substance blanche et que j'appellerai le noyau central (À), et une périphérique que J'appellerai l’écorce du ganglion, celle-ei est formée au contraire par de nombreuses cellules ganglion- naires. | Laformeet orientation du noyau central reproduisent celles du ganglion optique, c’est-à-dire qu’en coupe ce noyau se présente comme un petit cadran, inscrit dans le grand ca- dran que représente la coupe du ganglion. Le noyau central offre par conséquent comme le ganglion un bord convexe antérieur et un sommet postérieur. QUE une 11 ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 297 En avant, la limite entre le noyau et l'écorce est parfaite- ment tranchée; en arrière et sur les côtés, elle est moins nette. On distingue deux régions bien tranchées dans l'écorce du ganglion : là première, à laquelle je donne lenom de couche des cellules en chapelets (1), est formée par la portion de l'écorce comprise entre l’axe du ganglion et l’axe du noyau central; la seconde est formée par tout le reste de l'écorce et répond par conséquent à toutes les parties qui revêtent les côtés du noyau central ; Je lui réserve particulièrement le nom d’écorce grise du ganglion optique. | Quant au noyau central, il est divisé en deux grandes régions par une ligne parallèle à son bord convexe. Je donne le nom de croissant du noyau central (2) à la région située en avant de cette ligne, et celui d'éventail à la région située en arrière. J’étudierai dans l'ordre suivant les grandes régions du gan- glion optique : a. Couche des cellules en chapelets ; b. Croissant du noyau central ; ce. Éventail du noyau central ; d. Écorce grise du ganglion optique. a. Couche des cellules en chapelets (3). — La couche des cellules en chapelets est formée par la portion de l'écorce grise qui enveloppe la convexité du croissant du noyau central. Sans parler de ses caractères histologiques qui sont des plus tranchés, il est facile, même à un faible grossissement, de trouver les limites précises qui séparent cette couche d’avec l'écorce grise proprement dite, ce sont deux échancrures pro- fondes, une supérieure et une imférieure. Nous remarquons en outre que la couche des cellules en chapelets est tout entière postérieure à la couche des fibres préganglionnaires et ainsi lui fait immédiatement suite; si maintenant nous examinons à un plus fort grossissement la couche des cellules en chapelets, nousremarquons que sa structure est très parti- (H)PIe 18; ho 2 cch: (2) PI. 18, fig: 2, cr. (3) PL. 18, fig. 2, cch. 298 MH. VEALLANES. culière. Elle est en effet constituée par la réunion d’un grand nombre de longs chapelets qui par lune de leurs extrémités s’attachent au bord convexe du croissant, qui par l’autre se continuent chacun avec une des fibres préganglionnaires. Chez un animal plus avancé en développement que celui que nous étudions maintenant, la couche des fibres préganglion- naires est complètement séparée de la couche des cellules en chapelets par une membrane percée de fins trous qui laisse passer les conducteurs nerveux. Cette membrane ne revêt pas seulement la couche des chapelets, mais encore toute la sur- face du ganglion optique et du cerveau,ce n’est, en un mot, autre chose que le névrilemme de la chaine ganglionnaire. Mais dans notre animal, le névrilemme des centres nerveux n’est point encore formé dans son entier et ce n’est qu'en haut que nous voyons cette mince membrane (1) séparer la couche des chapelets de celle des fibres préganglionnaires; en basil n'y en à pas encore trace. Les chapelets constitutifs de la couche dont nous faisons maintenant l'étude sont très distincts les uns des autres et se touchent rarement ; ceux qui sont le plus rapprochés de laxe optique général, ont un trajet tout à fait antéro-postérieur, mais Ceux qui sont périphériques s’inclinent un peu vers l’axe. Chaque chapelet se compose de quinze à vingt grains, ceux-ci sont serrés les uns contre les autres, ce qui leur donne souvent un aspect un peu cubique; 1ls ont un contour par- faitement net, le carmin les colore en rouge vif homogène dans toute leur masse. Il me parait certain que chaque grain de chapelet doit être considéré comme une cellule gan- glionnaire bipolaire. Nous rencontrerons dans d’autres parties du système nerveux, et on rencontre chez la plupart des Inver- tébrés, ainsi que M. Dietl (2) surtout l’a bien montré, des cellules ganglionnaires dans lesquelles le noyau est si gros par rapport au protoplasma, que celui-ci ne semble pas exister, CMPIMAO Me rev (2) Dietl, Untersuchungen über die Organisation des Gehirns wirbelloser Thiere (Silzungb. de K. Acad. der Wissensch. in Wien, Bd LXXXVII, 1878). ARTICLE N° f. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9299 et que souvent mème 1l est impossible de le mettre en évidence. Du gran antérieur de chaque chapelet sort un filament qui n’est autre chose qu’une des fibres préganglionnaires pré- cédemment décrites. Chaque fibre préganglionnaire naissant d’un chapelet, il existe autant de chapelets que de fibres. Il suffit de se reporter aux figures et aux descriptions que j'ai données plus haut des régions plus antérieures de Pappa- reil visuel, pour se convaincre qu’à chaque œil élémentaire correspond un chapelet. En arrière, il n'existe pas de membrane séparant le croissant du noyau central d'avec la couche que nous étudions; mais la limite entre ces deux régions est parfaitement tranchée et le grain postérieur de chaque chapelet paraît reposer sans inter- médiaire sur la surface du croissant. b. Croissant du noyau central (4). — Cette région a la forme d’un croissant à cornes mousses et arrondies. Par tout son bord convexe, le croissant est en rapport avec la couche des cellules en chapelet, son bord concave limite le bord anté- rieur convexe de léventail. Il ne renferme point de cellules, car aucun des points de sa masse n’est colorable par les réac- tifs qui teignent les noyaux. Il me parait être formé par ce tissu spécial si répandu dans les centres nerveux des Inver- tébrés que M. Leydig (2) a découvert et décrit sous le nom de Puncisubstanz (substance ponctuée). La nature de ce tissu n’est point encore établie avec une entière certitude ; toute- fois, les recherches récentes de M. Solbrig (3), de M. Dierl (4) et de M. Krieger (5) me paraissent montrer d’une manière assez certaine qu'il est formé par un feutrage de très fines (4) PI. 18,-fig. 2, cr. (2) Leydig, Traité d’'histologie comparée. Trad. franç., p. 63 et suiv. (3) Solbrig, Ueber die feinere Structur der Nervenelemente bei den Gastero- poden (Siützungsbericht d. Kôn.bairischen Acad. der Wissensch., 1872, H. 1, p. 1-8). (4) Dietl, Untersuchungen über die Organisation des Gehirns wirbelloser Thiere (Sitzungb. d. K. Acad. d. Wissench. in Wien., Bd LXXVIL, 1878). (2) Krieger, Ueber das Centralnervensystem des Flusskrebses (Zeitsch. f. wiss. Zool., vol. XXXIII, Heft 1v, 1880). 300 H. VIALLANES. fibrilles nerveuses anastomosées dans tous les sens les unes avec les autres, et servant à faire communiquer les cellules ganglionnaires entre elles, comme un réseau capillaire fait communiquer une veine avec une artère (si je puis me servir d’une telle comparaison). À un grossissement modéré, la substance du croissant paraît homogène, mais si on lexamine avec un objectif plus fort et surtout à la lumière oblique, on y reconnaît certains détails de structure assez intéressants. Elle est traversée par de nom- breuses fibrilles serrées, très fines, rayonnantes, à trajet recti- ligne et qui traversent le croissant dans toute sa largeur, c’est- à-dire en s'étendant du bord concave au bord convexe. En outre, dans la substance du croissant, nous découvrons des zones obscures alternant avec des zones claires plus larges. Chaque zone obscure se présente comme une ligne sombre assez épaisse s'étendant d’une extrémité du croissant à l’autre et concentrique aux courbures de celui-ci. Il existe trois de ces zones obscures, elles sont régulièrement Fr je ne con- nais See leur signification. . Éventail du noyau central (4).— Sur la coupe, l'éventail se on avec la forme d’un quart de cercle. On peut donc lui considérer un arc ou bord convexe, deux côtés et un sommet. L’arc est limité par la concavité du croissant, les côtés et le sommet par l'écorce grise du ganglion optique. Tandis que la ligne de séparation du croissant et de lPéventail est parfaite- ment tranchée, 1! n°v a pas de séparation précise entre l’éven- tail et l’écorce grise, car les cellules de celle-cr empiètent sur la substance de celui-là. La région que nous étudions est formée, comme le croissant, par de la substance ponctuée, mais elle renferme, en outre, des fibres d’une taille assez considérable, qui grâce à la régu- larité de leur arrangement lui donnent un aspect très élégant. Ces fibres espacées à intervalles égaux rayonnent du sommet vers le bord convexe, comme rayonnent les lames d’un éventail. (A)PPIEMS Mo n2 Me ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 901 Chacune d'elles ayant atteint la concavité du croissant s'enfonce dans la substance de celui-ci, et disparait sans qu'il soit pos- sible de la suivre plus loin. Chaque fibre se présente comme une baguette réfringente à contours nets, allant en s’élargis- sant du sommet vers le bord de l'éventail. Les fibres ont d'abord un trajet rectiligne, puis chacune d’elles décrit deux sinuosités très régulières. Cette zone antérieure de l'éventail, dans laquelle les fibres sont sinueuses, présente en outre quelques autres particularités. En effet, dans cette région on trouve des noyaux entre les fibres. Ceux-e1 diffèrent assez de ceux qu'on rencontre dans le reste du système nerveux. Chacun d'eux se présente sous l'aspect d’un petit corps arrondi ou ovalaire, revêtu d’une membrane et rempli d’un suc incolore, au sein duquel se montrent quelques nucléoles fortement colorés. d. Écorce grise du ganglion optique (1). — L’écorce grise constitue une large bordure entourant les côtés et le sommet de l'éventail; en avant, un sillon profond la sépare d’avec la couche des chapelets. En coupe, ce sillon est représenté par deux échancrures, l’une supérieure et l’autre inférieure, je les ai déjà signalées tout à l'heure. Elle est composée par un amas de ces petites cellules ganglionnaires si répandues chez les Arthropodes et caractérisées par une si grande réduction de leur protoplasma, qu’elles paraissent uniquement formées par un noyau. Aussi, sur une coupe d'épaisseur moyenne, l'écorce grise paraît-elle formée par des noyaux fortement pressés les uns contre les autres. Mais quand en observe des sections très minces, on remarque que ces noyaux sont séparés les uns des autres par des espaces clairs très étroits. J'ai indiqué plus haut que sur les côtés et au sommet de l'éventail la limite entre l’écorce grise et cette région n’était pas nettement tranchée; là, en effet, nous voyons que les cel- lules ganglionnaires sont moins serrées et que la substance ponctuée de l’éventail pénètre entre elles. Si l’on étudie l’écorce grise par dilacération (2) sur des (1) PL 18, fig. 2, eg. (2) PI. 18, fig. 6. ANN. SC. NAT., ZOGL., NOVEMBRE 1882. XIV. 20. — anT. N° 1, 302 EH. VEALLANES. pièces fraiches, après traitement par lacide acétique fable et coloration au vert de méthyle, on reconnait facilement que chacune de ces cellules est constituée par un noyau générale- ment sphérique, quelquefois bilobé, entouré d’un protoplasma extrêmement réduit, qui lui constitue seulement une mince enveloppe. J’ajouterai que toutes les cellules de écorce grise que j'ai observées se sont montrées unipolaires. Le prolonge- ment naissait du protoplasma comme un filament extrêmement fin, quelquefois il était bifurqué ou anastomosé avec les pro- longements des cellules voisines. CONCLUSIONS. J'énumère tout d’abord, sous forme de tableau, les diffé- rentes régions de l’appareil visuel. J'écris en lettres italiques les parties que j'ai été le premier à observer ou à décrire. Je fais suivre d’un point d'exclamation les expressions nouvelles que j'ai dù introduire dans la nomenclature. | Gornée à facettes. | Couche des cellules cristalli- niennes. Couche des rétinules ou rétine. Limitante postérieure de l'œil composé. Couche des fibres post-rétiniennes (!). Limitante antérieure de la lame ganglionnaire (!). Couche des cellules ganglion- naires. Couche des fibres en palissade, Limitante moyenne de la lame ganglionnaire (!). Couche des fibres nucléées (1). Limilante postérieure de la lame ganglionnaire (!). Couche des fibres préganglionnaires (1). ! Névrilemme. Couche des cellules en chape- lets (1). Ganglion optique... { Croissant du noyau central (!). Éventail du noyau central (!). Écorce grise du ganglion opti- que. | Œil composé... .... Appareil visuel Lame ganglionnaire (!). ARTICLE N° Î. IISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 903 1° Ainsi que l'indique ce tableau, l'appareil visuel se com- pose d’un grand nombre de parties. Ces parties, dont plusieurs n'étaient point connues avant moi, avaient été arbitrairement groupées en un certain nombre de régions, J'ai dù modifier cette classification. Pour établir le groupement nouveau que je crois seul naturel, je me suis appuyé sur les faits embryo- logiques qui seront exposés dans le chapitre suivant. Les régions principales qui entrent dans la constitution de lappa- reil visuel sont, ainsi que l’indique le tableau, les suivantes, en allant d'avant en arrière, c’est-à-dire en suivant le trajet d’un rayon lumineux qui viendrait tomber sur l’œil : 4° l’œil composé; 2° la couche des fibres postrétiniennes; 3° la lame ganglionnaire ; 4° la couche de fibres prégangtionnaires ; 5° le ganglion optique. 2 L’œil composé est aujourd'hui parfaitement connu, gràce aux travaux de ceux qui m'ont précédé. Je crois pourtant nécessaire de rappeler en deux mots Îles traits principaux de son organisation. L’œil composé est limité en avant par la cor- née à facettes qui se contmue avec la cuticule générale, en arrière par une membrane limitante (limitante postérieure de Pæ:l), qui se continue avec la membrane basale de l’hypo- derme. Les parties comprises entre ces deux membranes sont les yeux élémentaires et les cellules choroïdiennes. Chaque œil élémentaire est, par son extrémité äntérieure, sous-jacent à la cornée, par son extrémité postérieure, il s'appuie sur la limitante postérieure; d'avant en arrière, 1] présente Les parties suivantes : la cornéule, les cellules cristalliniennes et la ré- tinule. 3° Del’extrémité postérieure de chaque œil élémentaire sort une fibre nerveuse qui perce la limitante postérieure. Ces fibres, dont l’ensemble constitue une région que j'appelle la couche des fibres postrétiniennes, se dirigent en arrière sans jamais s'anastomoser. 4 Après un certain trajet, les fibres postrétiniennes pénètrent dans une région de l’appareil visuel que j'appelle la lame gan- alionnaire et qui s'étale comme un écran interposé entre 304 MH. VIALLANES, l’œil composé et le ganglion optique. Pour cela elles percent d'abord la membrane qui limite en avant la lame ganglionnaire, puis chacune d'elles traverse une file de 4 cellules ganglion- naires bipolaires. Les files voisines sont complètement inde- pendantes les unes des autres, leur ensemble est désigné sous le nom de couche des cellules ganglionnaires. Au sortir de la file de cellules nerveuses qu'il vient de traverser, le conduc- teur nerveux revêt un aspect tout particulier, 1] se montre comme une très grosse fibre réfringente à trajet rectili- gne et présentant à sa surface un noyau. L'ensemble de ces grosses fibres mérite le nom de couche des fibres en palissade. La couche des fibres en palissade est limitée en arrière par une membrane (limitante moyenne de la lame ganglionnaire). Les conducteurs nerveux percent cette membrane ef en même temps changent de caractère, àls reprenxent l'aspect qu'ils avaient dans la région postrétimenne, chacun d'eux se présente comme une fibre fine à trajet un peu contourne, montrant à sa surface un gros noyau. Après un certain trajet ils franchissent une nou- velle limitante (la limitante postérieure de la lame qanglion- naire) et quittent ainsi celle troisième région de Pappareil visuel. À cet espace compris entre la limitante moyenne et la limitante postérieure de la lame ganglionnaire, je donne le nom de couche des fibres nucléées. 5° À leur sortie de la lame ganglionnaire, les conducteurs nerveux, toujours distincts les uns des autres, se dirigent vers le ganglion optique qui se montre comme une sphère aplatie rattachée au cerveau proprement dit par un court et étroit pédoncule. Ils percent le névrilemme ou gaine conjonctive des centres nerveux. Les fibres qui réunissent ainsi la lame ganglionnaire au centre nerveux, méritent le nom de fibres préganglionnaires. 6° Après avoir percé le névrilemme, les conducteurs nerveux traversent chacun une file de 15 à 920 cellules ganglionnaires bi- polaires disposées comme les grains d'un chapelet. Je désigne sous le nom de couche des cellules en chapelets la région du ganglion optique qu'occupent ces files de cellules. Les chapelets voisins sont ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 305 complètement indépendants les uns des autres. Il suffit de se reporter à mes descriptions et à mes dessins pour se convaincre qu'à chaque œil élémentaire répond un chapelet et pour s'as- surer que l'influx nerveux qui arrive à Pextrémité postérieure de chaque chapelet est le produit de l'impression lumineuse reçue par le seul œil élémentaire correspondant. Nous avons, en effet, pu suivre un même conducteur nerveux depuis l'œil élémentaire d'où dl nait jusqu'au delà de la couche des chapelets, et durant ce long trajet nous ne lui avons jamais vu contracter d’anasto- moses avec ses voisins, ni jamais franchir en fait de relais gan- glionnaires que des cellules bipolaires développées sur sa route. Par leur extrémité postérieure, les chapelets naissent de la surface d'un gros noyau de substance blanche qui occupe le centre du ganglion optique. Ce noyau comprend deux parties distinctes que je désigne, la première sous le nom de croissant, la seconde sous celui d’éventail. Le croissant se montre en coupe avec la forme d’un croisant à convexilé antérieure. C’est de cette face convexe que naissent les chapelets. Le tissu du croissant paraît formé par ce feutrage de fines fibrilies nerveuses anastomosées que M. Leydig a décrit sous lenom de substance ponctuée. C’est donc seulement dans cette région que les conducteurs nerveux arrivés des yeux élé- mentaires jusque-là sans s’anastomoser, pourraient s’unir à leurs voisins. L’éventail à en coupe la forme d'un éventail dont le manche serait postérieur, el dont le bord courbe convexe viendrait s'emboiter dans la concavité du croissant. Le tissu de l'éventail est formé par de grosses fibres divergentes qui vont se jeter dans la concavité du croissant. Les parties latérales du croissant et de l’éventail sont revê- tues par une écorce de petites cellules ganglionnaires, qui se continue avec l’écorce grise du cerveau proprement dit. 306 H. VIALLANES, $ 2. — Développement de l'appareil visuel. Pour arriver à la connaissance du développement des parties si complexes qui entrent dans la constitution de l'œil composé, J'ai étudié des coupes pratiquées à travers des larves et des nymphes de différents âges. Afin de rendre plus facile à suivre l'exposé des faits que J’ai découverts, je ferai connaitre succes- sivement cinq stades du développement de lPappareil visuel, en w’occupant principalement des parties nerveuses situées en arrière de l’œil. Ensuite je consacrerai un paragraphe spécial à l'étude de l’évolution du disque imaginal formateur de loœil composé et de la tige nerveuse qui, chez la larve, le réunit au cerveau. Comme j'ai déjà eu l’occasion de le faire dans plusieurs parties de ce travail, je décrirai d’abord les états Les plus avan- cés, afin de procéder du connu à l’inconnu. Stade V.— La coupe (1) est faite à peu près dans les mêmes conditions que celle que j'ai prise pour type dans la description précédente, seulement elle passe un peu plus en arrière ; aussi remarquons-nous que læsophage n’est pas entièrement en- touré de substance nerveuse. À première vue, nous reconnais- sons le cerveau proprement dit et le ganglion optique, ils sont séparés l’un de l’autre par un sillon profond et étroit. L'oœ1l composé (2) occupe la situation et présente l'étendue qu'il gardera toujours, mais il est très loin d’avoir acquis son épaisseur définitive; en effet, les yeux qui le composent sont encore très peu développés. L’échelle à laquelle j'ai fait mon dessin est trop petite pour qu’on puisse s'en rendre compte, mais si l’on examine la pièce à un grossisse- ment plus fort, on remarque que chaque œil élémentaire est arrivé à peu près à l’état que M. Weismann à figuré (Taf. XIÏT, fig 955 E). Chaque œil élémentaire est encore court et piriforme et la distinction ne s’est point encore bien établie entre la rétinule et les cellules cristallmiennes, la cor- (4) PL 17, fig. 5. (2) Pl'A 7 fig 15 No: ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 907 néule a déjà sa forme bombée caractéristique. La limitante pos- térieure de l'œil composé est parfaitement développée ainsi que le montre mon dessin. Je ne m'arrêterai pas plus longtemps à décrire l’œil, le développement de cet organe est aujourd’hui bien connu. Le développement des autres parties de Pappa- reil visuel n'ayant presque pas été étudié, j'y insisterai plus longuement. J’étudierai successivement le ganglion optique, puis les parties nerveuses qui le réunissent à l’œil composé. Le ganglion optique est loin d’avoir atteint sa taille défini- tive, mais 1l a déjà sa forme générale et ses principaux carac- tères. Le croissant (1) du noyau central à acquis la forme et les rapports qu’il conservera définitivement ; il montre avec la plus grande netteté les fibrilles antéro-postérieures qui le traver- sent, il présente déjà l’indice des zones claires et obscures qui, chez l’adulte, lui donnent un aspect si particulier. L'éven- tail (2) du noyau central montre bien nettement ses fibres rayonnantes qui pourtant sont encore très fines. La zone anté- rieure de léventail est bien distincte, les noyaux qui la carac- térisent occupent leur situation définitive, mais, entre eux, les fibres de l'éventail me semblent encore rectilignes; on sait que par la suite, dans cette région, les fibres présentent sur leur trajet une où deux sinuosités. L’écorce grise du ganglion optique a déjà acquis la plupart des caractères définitifs que nous lui connaissons. La convexité du croissant est revêtue par la couche des cellules en chape- lets (3) déjà reconnaissable à ses rapports et à la disposition de ses éléments en files caractéristiques. En haut, la couche des chapelets se continue sans aucune ligne de démarcation avec l'écorce grise dont elle ne parait ainsi être qu’une différencia- tion locale. Nous savons que par la suite du développement un sillon profond sépare l'écorce grise de la couche des chape- lets et qu'il n’y à pas de transition entre ces deux régions si différentes au point de vue histologique. En bas, la ligne de CONTE MENCA CIM Ro MS Cr : (3) PI. 17, fig. 5, cch. 308 H. VIALLANES. démarcation entre la couche des chapelets et lécorce grise est bien plus facile à saisir. Mais on remarque que cette dernière se prolonge en un lobe (1) terminé par un bord tranchant, ou, si l’on veut,en une lame qui remonte et revêt ainsi une portion de la face antérieure de la couche des chapelets. Le contact entre ce lobe de l'écorce grise et la couche des chapelets n’est pas parfait, il reste entre eux une fente étroite dont l’ouverture extérieure se montre en coupe comme une échancrure. Je dé- signe dès maintenant cette fente sous le nom de fente de sortie de la lame ganglionnaire. La couche des chapelets est réunie à l’œil composé par un ensemble de parties où nous pouvons reconnaître la lame ganglionnaire, les fibres postrétiniennes (2) et les fibres pré- ganglionnaires. Mais 1l n°y a pas encore trace de limitantes sé- parant ces diverses couches ; de plus, celles-ci sont bien loin d’avoir acquis leur état définitif. La lame ganglionnaire se reconnaît facilement, mais elle est bien loin d'occuper sa situation définitive. Au lieu d’être située très près de l’œil, comme dans l’état précédemment décrit, elle en est très éloignée ; elle se montre en revanche très rapprochée du ganglion, presque en contact avec lui. De plus elle est très peu étendue, sa surface n’est pas le quart de ce qu’elle doit être. Dans la lame, nous retrouvons facilement la couche la plus antérieure, celle des cellules ganglion- naires (3), bien reconnaissable à la disposition en files des élé- ments qui la constituent. En arrière d’elle nous trouvons une couche claire striée. C’est l’'ébauche de la couche des fibres en palissade (4); nous y reconnaissons même cette zone nucléaire qui,chez l'adulte, lui donne un aspect si particulier. Mais cette zone (5) n’a point encore sa situation définitive ; au lieu d’être située au milieu de la couche, elle en occupe la limite (DPI Mes CPIREo AS DT. (3) PI. 17, fig. 5, cg. (4) PLATS. 5" D. (5) PI. 17, fig. 5, zn. ARTICLE N° {. j HISTOLOGIE ET: DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 309 postérieure. Ceci nous indique que les fibres en palissade n’ont point encore acquis leur longueur et qu’elles doivent s’ac- croître en arrière. Entre cette zone nucléaire et le ganglion optique se trouve une couche (1) d'aspect uniforme, uniquement formée par de fines fibrilles entremêlées de noyaux ; ces fibrilles se dirigent toutes en avant et vont se jeter à la face postérieure de l’ébauche de la couche en palissade. La plupart naissent direc- tement de la couche des chapelets, les autres sortent comme un paquet de cette fente que J'ai appelée fente de sortie de la lame ganglionnaire. Il est probable que ces dernières pro- viennent aussi de la couche des chapelets, car nous savons que la fente sépare la couche des chapelets d'avec le lobe de l'écorce grise. Ilme paraît bien évident que cette région formée de noyaux et de fibres étenduesentre la couche des chapelets et l’ébauche de la couche des fibres en palissade répond à la fois à la couche des fibres nucléées et à celle des fibres préganglionnaires, non encore différenciées l’une de l’autre et non encore cloisonnées par la limitante postérieure de la lame ganglionnaire. Si maintenant nous examinons l’espace compris entre la face antérieure de la lame ganglionnaire et la limitante posté- rieure de l'œil, nous y reconnaissons sans peine la partie corres- pondante à celle qui, dans l’état définitif, constitue ce que j'ai appelé la couche des fibres postrétiniennes (2). Cette partie est, en effet, déjà constituée, comme elle le sera chez l’adulte, par de très fines fibres qui, partant de la face antérieure de la lame ganglionnaire, vont se jeter chacune à l'extrémité posté- rieure d’un œil élémentaire. Mais à l’état que nous étudions maintenant, l’œil composé ayant acquis l'étendue qu’il conservera toujours, la lame gan- glionnaire étant, au contraire, encore très réduite et très éloi- gnée de la limitante postérieure de l'œil, les fibres postréti- (1) PI. 17, fig. 5, fpg (2) PI. 17, fig. 17, fpr. 310 MH. VEALEANES. niennes ont une étendue et un arrangement différents de ce que nous savons qu’elles sont dans la suite. Les fibres post- rétiniennes sont groupées en un gros faisceau qui par une de ses extrémités naît de la face antérieure de la lame ganglion- naire; ce faisceau se divise en avant, puis arrive au voisinage de l'œil, il s’élargit alors, s'étale et se dissocie, si bien que ses libres les plus extérieures vont gagner les yeux élémentaires les plus périphériques, ses fibres les plus intérieures se ren- dant aux yeux élémentaires voisins de l’axe. Ge gros faisceau dissocié qui représente la couche des fibres postrétiniennes est dépourvu de toute enveloppe, les fibres qui entrent dans sa composition ne sont point réunies les unes aux autres, mais libres et simplement groupées. Aussi ren- contre-t-on entre elles une certaine quantité de ces granules Spéciaux, si répandus dans le corps de la nymphe, que nous savons provenir de lhistolyse des tissus larvaires et qui pénètrent dans tous les vides qui se présentent devant eux. Nous nous rappelons que dans l’état plus avancé, étudié pré- cédemment, ces mêmes éléments se retrouvaient encore entre les fibres postrétiniennes. SI nous Comparons maintenant le cinquième état que nous venons de faire connaitre avec celui décrit plus haut il nous est facile de nous rendre compte des modifications qui s'accomplissent durant l'intervalle qui sépare ces deux stades. Les yeux élémentaires achevant leur développement qui est connu et sur lequel je ne m’arrêterai pas, prennent de lac- croissement, aussi la limitante postérieure de l'œil composé se rapproche-t-elle de la lame ganglionnaire. Le ganglion optique orandissant repousse devant lui la lame ganglionnaire qui par cette double action se trouve rapprochée de la limitante postérieure de l’œil et arrive ainsi à occuper sa situation défi- nitive, tandis que les fibres postrétiniennes subissent un rac- courcissement considérable. La lame ganglionnaire s’aceroit dans toute son étendue, la couche des cellulés ganglionnaires qu'elle présente en avant n’a que peu de modifications à subir. Les fibres en palissade s’accroissent en arrière, si bien que ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 911 la zone nucléaire, déjà constituée, vient occuper sa situation définitive au milieu de la couche que ces palissades forment. Les fibres nucléées ont encore à se différencier d’avec les fibres préganglionnaires. Quant au ganglion optique, les modifications qu'il a encore à subir sont moins profondes, la couche des chapelets n’a plus qu'à se différencier davantage d’avec l'écorce grise. Le lobe de l'écorce grise et avec lui la fente de sortie doivent disparaitre par suite d’un accroissement plus rapide de la couche des cha- pelets. Le croissant et l’éventail du noyau central sont consti- tués dans toutes leurs parties et n’ont que de très légères modifications à subir. Enfin, toutes les limitantes, à part la postérieure de l'œil, ont à se former. | Stade IV. — La coupe (1) que je prends pour type de ma description est pratiquée sur une pupe un peu plus Jeune que celle que nous avons examinée précédemment, elle a été exécutée dans les mêmes conditions. L'ensemble du système nerveux offre Paspect général que nous lui connaissons, mais le ganglion optique est moins net- tement séparé du cerveau proprement dit, 1l est moins sphé- rique, plus aplati de haut en bas, et dans toutes ses parties plus petit. Dans son intérieur nous reconnaissons, au premier coup d'œil, l’éventail et le croissant. Cette dernière partie présente dans son ensemble l’aspect qu'il conservera toujours, toute- fois les fibrilles antéro-postérieures qui la traversent ne peuvent être distinguées avec certitude qu’en employant un objectif puissant. L'éventail se montre aussi avec la plupart de ses caractères définitifs, toutefois nous remarquons que les noyaux qui caractérisent sa zone antérieure n’offrent point encore la disposition que nous leur connaissons à un état de dévelop- pement plus avancé; nous voyons en effet qu’ils sont plus for- tement serrés les uns contre les autres, placés seulement sur (1) PL. 17, fig. 4. 312 H. VIALLANES. deux rangs et immédiatement appliqués contre la concavité du croissant. L'écorce grise proprement dite se montre avec les carac- tères que nous lui connaissons, mais nous remarquons qu'il est impossible d'établir de distinction entre elle et la couche des chapelets. En effet, l’écorce qui revêt (1) la convexité du croissant et qui, par conséquent, occupe la place de la couche des chapelets dont elle est l’ébauche, ne peut par aucun caractère histologique se distinguer de lécorce grise propre- ment dite avec laquelle elle est en continuité. Cette partie que, dans l’état précédemment décrit, je dési- gnais sous le nom de lobe de l’écorce grise, à une importance beaucoup plus considérable. Ge lobe (2) se termine par une extrémité épaissie et mousse qui s'élève jusqu'au niveau supérieur de l’ébauche de la couche des chapelets. Cette der- nière région ne présentant aucun caractère histologique qui la différencie d'avec l’écorce grise, on ne peut établir de limite séparant ce qui deviendra couche des chapelets de ce qui res- tera écorce grise. Toutefois cette distinction est possible au niveau du lobe, grâce à la présence de la fente de sortie qui sépare en’avant la surface de l’ébauche d’avec la couche des chapelets. De ce fait que le lobe de lécorce grise monte beaucoup plus haut que dans l’état précédent, de ce fait aussi que la fente n’est guère plus profonde, il résulte que c’est la partie supérieure de l’ébauche de la couche des chapelets qui est limitée par cette fente, la partie inférieure restant encore con- fondue avec le lobe. Cette observation suffit à nous indiquer quels sont les phé- nomènes qui s’accomplissent dans l'intervalle qui sépare le quatrième d'avec le cinquième stade : la fente s’approfondit et s’avance de haut en bas, en décrivant une courbe paral- lèle à la convexité du croissant, découpant ainsi l'écorce qui (1) PI. 17, fig. 4, cch. CPLM EE ANT ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 313 revêt le croissant en deux portions, une antérieure, qui est le lobe, une postérieure, qui est l'ébauche de la couche des cha- pelets. Mais, à mesure que cette fente s’approfondit, l’extré- mité supérieure du lobe s’abaisse, si bien que la fente garde longtemps à peu près la même profondeur et qu’au fur et à mesure qu'elle s’avance de haut en bas, la surface de l’ébauche devient libre également de haut en bas. Ceci explique comment, à l’état plus avancé que nous avons étudié tout à l’heure, nous voyons la surface de la couche des chapelets entièrement libre dans presque toute son étendue, tandis que dans sa partie tout à fait inférieure elle était encore revêtue par le lobe. Je dois faire immédiatement remarquer que cette réduction du lobe de l’écorce grise qui finalement amène sa disparition, n’est point due à ce que les éléments cellulaires qui le consti- tuent sont détruits, mais seulement à ce que l’ébauche de la couche des chapelets prend un accroissement plus rapide que les parties voisines et refoule en bas le lobe qui rentre pour ainsi dire dans l'écorce grise, sans avoir perdu une seule de ses cellules. Si maintenant nous examinons les parties nerveuses inter- posées entre le ganglion optique et l’œil composé, nous remar- quons que bien qu'étant presque toutes reconnaissables, elles diffèrent pourtant sur plus d’un point important, de ce que nous observions à l’état précédent. Nous reconnaissons tout d’abord la lame ganglionnaire, mais nous remarquons que son plan, au lieu d’être parallèle au plan de lPœil composé et à celui de la convexité du croissant, se montre à peu près perpen- diculaire à eux. Ainsi, comme on peut le remarquer sur la figure, le plan de la lame ganglionnaire regarde en haut au lieu de regarder en avant. Non seulement la lame ganglion- naire n’a point son orientation définitive, mais encore elle n’a point sa position définitive ; en effet, elle recouvre la face supé- rieure du ganglion au lieu d’en recouvrir la face antérieure. Nous comprenons déjà quel mouvement doit effectuer la lame ganglionnaire pour prendre la position qu’elle conservera. 314 M. VAALEANES. Elle doit s’abaisser en avant de toutes pièces en décrivant un demi-cercle, pour venir ainsi prendre en même temps sa posi- tion et son orientation définitives. Cette orientation particulière que présente, au stade que nous étudions, la lame ganglionnaire, détermine des différences dans la manière d’être des fibres postrétimennes. Gelles-et, en effet, au lieu de se diriger immédiatement en avant, pour oaoner la face postérieure de l’æ1l composé, se dirigent d’abord en bas, puis prennent seulement ensuite une direction antéro- postérieure. On remarque, en outre, que ces fibres sont beau— coup plus serrées qu’au stade plus avancé et que c’est seule- ment au voisinage de l'œil composé qu'elles commencent à s’écarter l’une de Pautre, pour aller gagner chacune un des yeux élémentaires. Je n’ai encore décrit que la situation et l'orientation géné- rales de lalame ganglionnaire, mais si nous étudions sa manière d’être avec plus de détail, nous découvrons des faits très-inté- ressants. Tout d’abord nous remarquons que le plan de la lame n’est pas régulièrement convexe comme dans les états précédemment décrits. Sa coupe, au lieu de se présenter comme un arc de cercle, se montre avec la forme d’un M à jambages fortement écartés. Le sommet inférieur de PM se trouve placé immédiatement en face de lorifice de la fente située entre le lobe de l'écorce et l’ébauche de la couche des chapelets, il y pénètre même un peu. Aussi la partie mférieure des jambages médians de PM est-elle comprise entre les bords de la fente. Ge fait doit déjà nous faire soupçonner que la lame ganglionnaire n’est autre chose qu’une portion du gan- olion optique, d'abord comprise dans Pintérieur de celui-ci, et qui, ensuite, en serait sortie en émigrant par la fente; dans la suite nous verrons qu’il en est bien ainsi. En observant la lame, nous y reconnaissons facilement la couche des cellules ganglionnaires (1), mais nous remarquons que les éléments qui composent cette assise, bien que déjà CREME fig. L, cg. ARTICLE N° 1: HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 910 ordonnés en file, n’offrent point dans leur arrangement cette régularité qu’ils montraient dans les états plus avancés. Tou- tefois, la zone postérieure de ces cellules, c’est-à-dire celle qui confine à la couche suivante, est remarquable par la disposi- tion parfaitement régulière des éléments qui la composent. Immédiatement en arrière de cette zone nous trouvons une couche peu épaisse, claire et striée : c’est la couche des fibres en palissade. La zone nucléaire qu'on rencontre dans cette couche est parfaitement développée, mais, comme dans l’état précédent, elle n’a pas sa position définitive, elle est située immédiatement en arrière de la couche des palissades. La lame ganglionnaire est rattachée au ganglion par un paquet de fibres (1) disposées en éventail, elles naissent de l'intérieur de la fente qu’elles remplissent tout entière, puis divergent pour se porter à la face postérieure de la lame. Ce paquet représente dans son ensemble les fibres préganglion- naires et les fibres nucléées ; mais tandis que, dans l’état pré- cédent, ce paquet de fibres renfermait au milieu de ses con- ducteurs nerveux un grand nombre de petits noyaux dissémi- nés, nous n’en rencontrons maintenant qu'un petit nombre ; ils sont presque immédiatement appliqués contre la zone nu- cléaire des fibres en palissade. Parmi ces noyaux, ceux qui sont situés au voisinage du centre du paquet de fibres se montrent avec un aspect particulier qui les rend faciles à distinguer. ï1s sont volumineux, sphériques, ont une enveloppe nette et renferment, au milieu d’un sue clair, un certain nombre de nucléoles colorés. Ce paquet de conducteurs nerveux, qui est l’ébauche des fibres préganglionnaires, sort de la fente en la remplissant tout entière. Mais quelle est l’origine réelle de ces fibres? Naissent-elles du lobe ou de l’ébauche de la couche des cha- pelets? La comparaison de l’état que je décris maintenant avec celui plus avancé que j'ai décrit précédemment, nous prouve que ces fibres naissent, en réalité, de l’ébauche de la couche (1) PL. A7, fig. 4, fpg. 316 EH. VIALLANES. des chapelets. Nous savons, en effet, que lorsque la surface de celle-e1 est devenue complètement libre, par suite de Ja réduc- tion du lobe de l'écorce grise, cette origine des fibres prégan- glionnaires apparaît avec la plus entière évidence. Il est cer- tain qu'à l’état que nous étudions, toutes les fibres prégan- olionnaires ne sont point formées sur toute leur longueur, puisqu'il n’y a encore qu'une faible parte de la surface de la couche des chapelets qui soit constituée. Il est évident que les fibres croissent et s’allongent à mesure que la fente s’appro- fondit en contournant la surface de l’ébauche de la couche des chapelets. En résumé, ce que l’examen du quatrième étal nous apprend de plus important, c’est que la formation de la couche des chapelets n’est point due, comme on serait porté à le supposer à priori, à la différenciation de la couche la plus extérieure de l'écorce du ganglion, mais que l’ébauche de la couche des chapelets occupe d’abord une situation profonde et devient ensuite extérieure, par suite d’un mécanisme spécial (extension de la fente et abaissement du lobe). De plus, l'étude de la structure et des rapports de la lame ganglionnaire doit nous faire soupçonner qu’elle était primitivement comprise dans l'intérieur du centre nerveux; c’est ce que viendra, en effet, nous démontrer l’observation que je vais donner d’un état moins avancé encore. Stade IIT.— Au point de vue de l’histoire du développe- ment de l’appareil visuel, le troisième état est un des plus intéressants, car c’est lui qui établit vraiment le passage entre la larve et l’imago. Get état est transitoire, il dure peut-être à peine quelques heures, car parmi les très nombreuses pupes que j'ai étudiées, je ne l'ai rencontré qu’une seule fois. Mal- heureusement les coupes queje fis de la pupe qui le présentaient n’ont pointété exécutées dans des conditions bien déterminées. Aussi suis-je obligé de laisser sans description un certain nombre de parties du ganglion optique, faute de pouvoir les comparer avec certitude, n1 à ce que nous connaissons déjà, ni à ce que nous rencontrerons à des états moins avancés. Je me contente ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 917 seulement de donner de ces parties un dessin aussi exact que possible. Cette lacune dans mes observations est d'autant plus regrettable qu’elle s’opposera à ce que noussaisissions la valeur de certaines dispositions qu’on rencontre chez la larve. Dans la figure (1) qui représente le troisième état, nous remarquons que l’œil composé se montre encore très peu avancé dans son développement, il n’a en effet encore ni sa taille, ni sa forme, ni sa situation définitive. Ce n’est encore qu'un disque peu épais ; la cornée et la limitante postérieure sont constituées, mais chaque œil élémentaire est encore à cet état qu'a décrit M. Weismann, il est représenté par une seule cellule, la cellule optogène. Pourtant chacune de ces cellules est, par son extrémité postérieure, en rapport avec une de ces fibres que nous connaissons déjà et que j'ai désignées sous le nom de fibres postrétiniennes. Comme dans l’état plus avancé précédemment décrit, toutes ces fibres se réunissent en un seul paquet qui se dirige en arrière vers le ganglion optique. Ce paquet de fibres est cette partie qu'avait vue M. Weismann, mais sans en avoir reconnu la signification ni les rapports et qu'il appelle la « tige nerveuse » du disque imaginal de l'œil. Tandis que dans les états précédemment étudiés, nous voyions les fibres postrétiniennes se rendre dans une partie nerveuse (la lame ganglionnaire) interposée entre le ganglion et l’œil composé, nous les voyons maintenant se jeter immédiatement dans le ganglion. Cette différence n’est point due à ce que la lame ganglionnaire n'existe pas encore, mais bien à ce qu’elle se trouve incluse dans l’intérieur des centres nerveux. Si,en effet, nous examinons la structure du ganglion optique, nous reconnaissons qu'il est constitué de la manière suivante. Dans son ensemble, il se compose, commé dans les états précé- demment étudiés, d’un noyau central de substance blanche, sur laquelle je ne veux donner aucun détail, et d’une écorce cellulaire. Dans cette écorce se trouve intercalée comme un coin qu'on y aurait enfoncé, une partie spéciale qui, je dois le dire UB PLAT Ie 3: ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1852. XIV. 21. — ART. N° 1. 518 HI. VEALLANES. dès maintenant, n’est autre chose que l’ébauche de la lame ganglionnaire. Elle se présente sur une coupe avec un contour triangulaire. L'un de ses côtés est supérieur, l’autre imférieur, et j'appelle antérieur le troisième côté tourné vers l’œil com- posé. Par son côté antérieur, l’ébauche de la lame ganglion- naire concourt à former le contour général du ganglion; de plus, nous remarquons que c’est de toute l’étendue de ce côté que naissent les fibres postrétiniennes. Bien que l’ébauche de la lame ganglionnaire soit complètement intercalée dans l'écorce du ganglion, elle est pourtant très nettement distincte de la substance de celle-ci; en effet, suivant son côté inférieur, une fente étroite et ouverte à l’extérieur l’en sépare complète ment. Suivant le côté supérieur, la distinction est aussi parfai- tement nette, bien qu'il n’y ait plus là de fente à proprement parler. Le sommet de l’ébauche de la lame ganglionnaire, c’est-à-dire l’angle opposé au côté antérieur, se continue avec la substance blanche du noyau central du ganglion optique. On remarque que l’ébauche de la lame ganglionnaire est complètement divisée en deux régions, une antérieure et une postérieure, par une bande blanche assez épaisse, ayant la forme d’un V, dont l'ouverture serait dirigée vers le côté anté- rieur. Cette bande est marquée de stries antéro-postérieures, c’est l’ébauche de la couche des fibres en palissade, ainsi que le montrent bien l’étude de ses rapports et aussi les compa- raisons qu’on peut établir avec les états précédemment décrits. L'espace que la couche des fibres en palissade limite en avant, est rempli par un amas de cellules disposées en files et d’où naissent en avant les fibres postrétiniennes; nous reconnais- sons là l’ébauche de la couche des cellules ganglionnaires. Immédiatement en arrière, la couche des fibres en palissade est doublée par une couche de noyaux disposés sur plusieurs rangs et sans grande régularité. Ces élements sont destinés à devenir les novaux de la zone nucléaire et ceux des fibres nu- cléées. Immédiatement en arrière de cette couche, sur la bis- sectrice du triangle que représente la coupe de la lame gan- olionnaire, se trouve le groupe de ces quatre ou cinq noyaux ARTICLE N° 1. IHISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 919 sphériques, plus gros, dont nous remarquions encore la pré- sence au stade précédemment étudié. L’espace compris en arrière et en dehors de la couche de noyaux dont je viens de parler est entièrement occupé par des fibres qui convergent toutes vers le sommet, nous reconnaissons là l’ébauche des fibres préganglionnaires et nucléées. Le côté inférieur de la lame ganglionnaire est séparé de l'écorce grise par une fente étroite et profonde s’ouvrant à l’ex- térieur, le côté supérieur est séparé de l’écoree grise par un organe fort curieux et dont la signification est restée pour moi tout à fait problématique. Gette partie a la forme d’un U ou- vert en avant et intercalé entre l’ébauche de la lame ganglion- naire et l'écorce ; les jambages de VU sont épais et constitués per des cellules assez semblables à celles qui forment l'écorce grise. Nous retrouverons cet organe à des états de développement moins avancés, mais sa signification n’en est pas moins problé- matique pour moi. Ce que l'étude du troisième état et sa comparaison avec le quatrième nous enseigne de plus important, est ce fait que la lame ganglionnaire est primitivement comprise dans l’inté- rieur du ganglion optique, puis qu’elle s’en détache et émigre, laissant une fente (fente de sortie) à la place qu’elle occupait. Cette dermière partie joue un rôle important et que J'ai signalé plus haut dans la formation de la couche des chapelets. Stade IT. — L'état que je vais décrire se rencontre chez des nymphes tout à fait jeunes, c’est-à-dire quelques heures seule- ment après la formation de la pupe, alors que les téguments sont encore blancs et n’ont point encore pris leur teinte brune caractéristique. Les ganglions cérébroïdes se présentent avec l'aspect qu’on observe chez la larve et qu’a bien décrit Léon Dufour, et après lui, M. Weismann. Ils se montrent avec la forme d’un ovoide à grand axe vertical, en haut ils sont reliés l’un à l’autre par une étroite commissure sus-æsophagienne, en bas ils se con- fondent avec le ganglion sous-æsophagien, qui n’est point 320 H. VIALLANES. distinct des autres ganglions de la chaîne ventrale. La surface de chaque ganglion cérébroïde étant parfaitement lisse, les méthodes macroscopiques ne permettent pas d’y distinguer ces deux parties si nettement séparées chez l’imago, le cerveau proprement dit et le ganglion optique. L’œil composé à peine différencié est encore à l’état de dis- que imaginal, il est situé en avant du ganglion cérébroïde par rapport à l’axe du corps, tandis qu’aux états précédents il était externe par rapport à cet axe. Aussi un grand change- ment dans l’orientation des parties doit-il s’opérer durant l’in- tervalle qui sépare l’état que nous étudions de celui plus avancé précédemment décrit. Il serait, je crois, difficile de me faire bien comprendre si je continuais à employer la nomenclature dont je me suis servi plus haut; nous ne pouvons plus prendre pour point de repère l’axe général de l’appareil visuel, celui-ci n’est, en effet, point encore constitué. Je crois plus facile, dans la description qui va suivre, de rapporter à l’axe du corps, comme on le fait d’or- dinaire, la position des parties dont j'aurai à parler. Quand on examine simplement à la loupe le ganglion céré- broïde, on reconnait que, de sa partie antérieure et externe, naît une grosse branche ayant tout l’aspect d’un nerf ordinaire et qui se rend au disque de l’œil composé correspondant. C’est une partie que nous connaissons déjà, que M. Weismann appe- lait la tige nerveuse du disque de l’œil et que l’étude du déve- loppement nous a montrée être l’ébauche des fibres postréti- niennes. Ainsi que je l’ai dit plus haut, par l'examen extérieur du ganglion cérébroïde, il n'est point possible d’y distinguer le cerveau proprement dit d'avec le ganglion optique, mais il n’en est pas de même si l’on y pratique des coupes microsco- piques. | Les sections les plus instructives sont celles qui sont menées transversalement et qui passent un peu en avant de la commis- sure sous-œsophagienne. En réalité, les figures que je donne sont plus faciles à comparer dans leur ensemble à celles du quatrième qu'à celles du troisième état. Geci tient à ce que la ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 391 coupe obtenue pendant le troisième état a été faite dans des conditions différentes des autres et mal déterminées. La coupe (1) du ganglion cérébroïde que je décris tout d’abord, se présente avec un contour sensiblement triangu- laire; on peut lui considérer un côté supérieur, un interne et un externe; un angle interne, un supérieur et un inférieur. Le ganglion se divise en deux régions bien distinctes, une petite et une grande, la petite (2) occupe l’angle interne, je n’en ai point figuré les détails et jen esquisse seulement le contour; c’est le cerveau proprement dit, la grande région représente le ganglion optique. C’est de cette dernière seule dont nous avons à nous occuper. Le ganglion optique se compose de deux parties bien dis- tinctes, un noyau central de substance blanche (3) et une écorce grise (4). L’écorce est proportionnellement plus épaisse que dans les états plus avancés décrits précédemment. Nous remarquons qu’en dehors cette écorce est sur une cer- taine étendue (9) légèrement différenciée ; en effet, les cellules qui la composent sont là disposées en files externo-internes assez régulières. De la surface de cette région sortent les fibres postrétiniennes (6) qui, par leur réunion en un faisceau, constituent la tige nerveuse du disque des yeux. Cette région de l'écorce représente donc l’ébauche de la couche antérieure de la lame ganglionnaire. Immédiatement en arrière, elle se montre limitée par une bande claire assez étroite (7) dirigée de haut en bas, assez mal différenciée à ses deux extrémités, c’est l’ébauche de la couche des fibres en palissade. Immédiatement en dedans, celle-ci est elle-même limitée par une bande sombre (8) formée par de petits noyaux Gb fout. (ME AE NT Nr (3) PI. 17, fig. 1, nc. (4) PI. 17, fig. 1, eg. GPL AM fo deg: (OEM DT. (7) PI. 17, fig. 1, cp. (8) PIE fie. 1; zn: 399 HE. VEALLANES,. vers ses deux extrémités, elle se continue sans ligne de démarcation tranchée avec l'écorce grise, c’est l’ébauche de cette assise de noyaux qu’à l’état précédent nous trouvions en arrière des palissades. Cette assise de noyaux se trouve en dedans en contact immédiat avec la substance blanche du noyau central. Ge dernier paraît constitué d’une manière très simple : en effet, il est seulement formé par des fibres dirigées de, dedans en dehors; dans son ensemble, on pourrait assez facilement le comparer à l’éventail, mais nous ne voyons rien qui rappelle ce croissant si remarquable que nous trouvions aux états plus avancés. Les fibres postrétiniennes après leur sortie de l’ébauche de la lame ganglionnaire se réunissent, ainsi que Je Pai dit, en un faisceau (la tige nerveuse de M. Weismann) qui se dirige en haut, puis ensuite en avant pour gagner le disque des yeux, de la manière que je décrirai plus loim. Pour chercher à se rendre compte de la forme que présente réellement la lame ganglionnaire, 1l convient d’étudier cette partie sur un certain nombre de coupes. Si done nous exa- minons une section pratiquée un peu en arrière de celle que je viens de décrire (4), nous remarquons que l’ébauche de la lame ganglionnaire s’est dédoublée en deux parties séparées l’une de l’autre par une portion d’écorce grise non différen- ciée. Sur des coupes plus postérieures encore, les deux por- tons de lPébauche de la lame sont encore plus écartées l’une de l’autre. Ceci doit nous faire supposer que l’ébauche a la forme d’un V incrusté dans l'écorce grise et dont la branche médiane serait tournée en avant. La figure 2 de la planche 47 représente une coupe pratiquée dans cette région où l’ébauche de la lame ganglionnaire est dédoublée en deux parties. Chacune de celles-ci présente exté- rieurement la couche des cellules ganglionnaires donnant nais- sance aux fibres postrétiniennes, plus en dedans, l’ébauche de la couche des fibres en palissade. Cette dernière n’est point (MAS? ARTICLE N°1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 923 plane, mais elle est incurvée en dehors et embrasse, à la ma- nière d’un V, la couche des cellules ganglionnaires. En dedans du sommet du V se montre une petite région à contour trian- gulaire, formée par un amas de noyaux, ce sont là les représen- lants de ces noyaux que nous décrivions en arrière de la couche des fibres en palissade aux états plus avancés. J’ajouterai que le noyau central a un aspect assez différent de celui que nous lui connaissons, il se montre avec la forme d’un fer à cheval à concavité externe, 1l se met en con- tact par ses deux extrémités assez effilées avec les deux portions de l’ébauche de la lame ganglionnaire. | Je dois, de plus, faire remarquer qu’à côté de la portion inférieure de l’ébauche de la lame, entre elle et l'écorce grise voisine, nous retrouvons cet organe (1) en forme d’U, que jai signalé plus haut et dont j'ignore la signification. Stade T.— Si nous étudions maintenant le ganglion céré- broïde d’une larve ayant atteint sa taille, mais encore active, nous reconnaissons que sa structure est à peu de chose près la même que celle que nous venons de décrire chez la toute jeune nymphe. Tout d’abord nous remarquons que les centres nerveux sont enveloppés par un névrilemme, nous n’en trouvions, au con- traire, pas trace dans les états plus avancés ; ceci nous prouve, ainsi que M. Weismann l'avait d’ailleurs bien montré, que l'enveloppe conjonctive des centres nerveux de la larve dispa- rait au moment de la métamorphose pour se reconstituer en- suite lorsque les transformations sont achevées. La coupe du ganglion cérébroïde de la larve que Je figure (2) est dessinée à grande échelle, elle est pratiquée, un peu plus en arrière que la dernière que J'ai décrite, elle passe, en effet, par les commissures sus- et sous-æsophagiennes. On remarque que le ganglion optique, que j’aireprésenté seul, est nettement séparé du cerveau proprement dit. Chacune des deux portions de la lame ganglionnaire se présente avec las- (4) PI, 17, fig. 11. (2) PI. 16, fig. 8, 324 H. VIALLANES. pect que nous lui connaissons. Nous reconnaissons facilement l’'ébauche de la couche des cellules ganglionnaires, et celle de la couche des palissades avec sa forme de V. En dedans du sommet du V, nous trouvons une tache triangulaire d'aspect sombre qui paraît représenter ce groupe de noyaux que nous avons déjà signalé plus haut en arrière des palissades. En haut de la partie supérieure de l’ébauche de la lame et en bas de la partie inférieure de cette même ébauche, nous rencontrons un de ces organes problématiques en U. La formation de chacun de ces organes paraît être due à une différenciation de la couche des cellules ganglionnaires de l’'ébauche de lame. Le noyau central a comme précédemment, la forme d’un fer à cheval à concavité externe. Nous trouvons dans ce fer à cheval et dans les autres régions du ganglion optique, des par- ties très complexes. Je n'ose ni les nommer ni les décrire, n’en connaissant pas la signification, je me contente de les figurer avec autant de soin que possible. Développement du disque imaginal de l'œil composé. — Dans la description que je viens de donner des transformations de l'appareil visuel durant la vie nymphale, je me suis surtout occupé des parties nerveuses, laissant presque complètement de côté l'œil composé proprement dit. C’est qu’en effet, grâce aux travaux de Claparède, et surtout à ceux de M. Weismann et de M. Grenacher, on connaît bien aujourd’hui le mode de formation de chacun des yeux élémentaires; on sait que cha- cun d’eux dérive d’une seule cellule optogène, reconnaissable au début de la métamorphose, dans l’intérieur du disque de l'œil. Mais d’où dérive cette cellule optogène, quelle est la structure précise du disque, quels rapports affecte ce dernier avec la tige nerveuse? Voilà autant de lacunes que je me suis efforcé de combler. Quelques mots d'historique montreront bien quel est l’état présent de la question. M. Weismann, le premier, reconnut que l’œil composé tout entier dérivait d’une partie préformée chez la larve, le disque de l’œil. Il attribuait à cette partie la même structure qu’à ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 9925 tous les disques imaginaux, c’était pour lui un amas de cel- lules embryonnaires, revêtu d'une fine membrane d’enve- loppe. M. Weismann reconnut qu’au moment de la métamorphose, les cellules de la couche la plus superficielle se montraient plus grandes et disposées avec beaucoup de régularité, il suivit le développement de ces éléments et reconnut que chacun d’eux devenait un œil élémentaire, c'était en un mot une cel- lule optogène. M. Weismann remarqua que le disque de l'œil était uni au ganglion cérébroïde correspondant par un pédon- cule auquel il donna le nom de tige nerveuse, mais il ne rechercha point comment se fait cette union. Tels sont les seuls renseignements que M. Weismann nous donne sur la structure intime du disque de l'œil. J’ai indiqué plus haut quel rôle l’anatomiste allemand attribuait à la tige nerveuse, mais l'étude du développement nous a montré que le rôle de cette partie était tout différent et que les fibres qui la compo- sent étaient, en réalité, destinées à devenir les fibres postréti- niennes de l’imago et non point à disparaître. M. Ganin, ayant repris l’étude des disques imaginaux, recon- nut que ces parties avaient, en réalité, une structure plus complexe que ne le pensait M. Weismann, il montra en effet que chacun d’eux était composé de trois couches cellulaires différenciées, un feuillet provisoire, un exoderme et un méso- derme; ce sont là des faits que j'ai rapportés plus haut avec détails et sur lesquels je ne m'arrêterai pas une seconde fois. M. Gauin étendit ces résultats aux disques des yeux. Mais il ne signala aucun caractère différentiel entre ces organes et les disques formateurs des téguments généraux, il ne parle pas non plus de la manière dont ils s’unissent avec la tige ner- veuse. Pour étudier la structure du disque de l’œil, j'ai eu recours à des pièces fixées par l’mjection, dans le corps de l’animal, d’un mélange à parties égales d’une solution d’acide osmique au centième et d'alcool à 36 degrés, puis colorées, soit au car- min, soit à l’hématoxyline alcoolique de Kleinenberg. Quand on 3926 M. VEALLANES. pratique une coupe transversale à travers le disque de Pœil d’une larve d’Éristalis ayant atteint tout son développement, on remarque qu'il est bâti sur le même plan que les disques des membres; toutefois, il en diffère sur certains points assez importants. Il se présente (1) comme une grande ampoule creuse, dont la cavité communique librement avec la cavité générale du corps par une ouverture située à sa face interne. Je Comparerais volontiers la structure du disque de l’œil à celle d’une gastrula formée par mvagination, sa paroi, en effet, est formée par deux feuillets, séparés l’un de l’autre par un espace étroit et se continuant lun avec l’autre au niveau des bords de l'ouverture ; on dirait, en un mot, que le disque est formé par une sphère creuse dont un des hémisphères se serait enfoncé dans l’autre. Le feuillet extérieur est très mince, 1l est formé par une seule assise de cellules aplaties ; sur une coupe, il se montre comme une bande claire, dans l'épaisseur de laquelle sont plongés des noyaux régulièrement espacés et disposés sur un seul plan; nous reconnaissons là le feuillet provisoire du disque. Le feuillet intérieur est beaucoup plus épais, surtout à sa partie centrale opposée à l'ouverture, mais au voisinage de cet orifice 1l s’amincit et se continue sans ligne de démarcation avec le feuillet provisoire ; dans le feuillet intérieur, nous reconnaissons l’exoderme du disque. Dans sa partie centrale la plus épaisse et que j’appellerai dès mainte- nant la région optogénique, l’exoderme est doublé intérieure- ment par une couche d’un tissu spécial, que M. Ganin compare au mésoderme des autres disques et auquel il attribue une structure identique; plus loin, j'aurai à discuter cette assimila- tion. Comme cette couche double seulement la partie optogé- nique de lexoderme et qu’elle va en s’amincissant du centre à la périphérie, elle se présente en coupe sous la forme d’un croissant effilé, et, grâce à son peu d'importance, la cavité libre du disque reste très considérable. Si maintenant nous examinons l’exoderme dans sa portion (1) PI. 15, fig. 5. ARTICLE N° 4. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 997 non optogénique, nous voyons qu'il est constitué comme dans tous les disques : en dehors, il est limité par une mince cuti- eule chitineuse, en dedans par une délicate membrane anhiste, la membrane basale. Le tissu compris entre ces deux limitantes est constitué par plusieurs assises de très petites cellules fusiformes allongées, très serrées les unes contre les autres. Dans sa portion optogénique, l’exoderme du disque a une structure assez différente de celle qu’on rencontre dans la portion non optogénique, bien qu'il n’y ait pas de démarca- tion tranchée entre ces deux régions. Dans celte région opto- génique, 1l est limité en dehors par une assez épaisse cuticule chitineuse qui se continue avec la cuticule du reste de l’exo- derme, c’est l’ébauche de la cornée à facettes ; en dedans il est limité par la membrane basale qui se continue sans au- cune ligne de démarcation avec la membrane basale de la portion non optogénique. L’espace (1) compris entre la cuti- cule et la membrane basale, est rempli par un tissu composé de deux couches bien distinctes, une externe, plus épaisse, que je désignerai dès maintenant sous le nom de couche des cel- lules optogènes, une interne, que j'appellerai couche des cel- lules choroïdiennes. Les cellules optogènes ont la forme d’un cylindre très régulier, terminé par deux extrémités coniques, elles sont très régulièrement disposées en palissade et séparées l’une de l’autre par un étroit espace clair. Chaque cellule opto- gène est en contact, par son extrémité externe avec la face profonde de la cutieule, et par son extrémité postérieure s’en- fonce dans la couche des cellules choroïdiennes. C’est vaine- ment qu'en employant divers réactifs, j’ai essayé de déceler un noyau dans la cellule optogène; alors même que les parties voisines étaient colorées avec la plus belle élection par le car- min ou l’hématoxyline, elle se montrait dans son entier for- tement teinte et cela d’une manière tout à fait homogène; en un mot, la chromatine était répandue dans tout le proto- plasma, ainsi que nous l’observions dans certaines cellules (1) PI. 15, fig. 4. 328 H. VIALLANES. larvaires, lorsqu’au moment de lhistolyse elles s'apprêtent à proliférer. Si, au lieu d'étudier la couche des cellules opto- oènes sur des coupes parallèles à l’axe de ses éléments, nous l'étudions de face ou mieux sur des coupes transversales, nous remarquons que chaque cellule optogène se présente comme un losange (1). Ces losanges sont séparés les uns des autres par d’étroits espaces clairs, représentant les espaces qui sépa- rent les cellules voisines. Les cellules optogènes sont toutes disposées avec une régularité admirable, comme le seront plus tard les yeux élémentaires, à chacun desquels une d’elles doit donner naissance. Quant à la couche des cellules choroïdiennes dans laquelle les cellules optogènes enfoncent leur extrémité interne, elle se continue sans ligne de démarcation avec le tissu de la région non optogénique de l’exoderme et est constituée comme lui par de très petits éléments fusiformes, fortement pressés les uns contre les autres. Si, au lieu d'examiner le disque chez une larve, nous l’obser- vons chez une jeune nymphe, nous remarquons que les cel- lules optogènes ont beaucoup grossi, que leur forme est devenue plus ramassée et qu’ainsi elles ont presque complète- ment envahi la couche des cellules choroïdiennes qui a perdu toute importance; de plus, elles sesont comprimées mutuelle- ment, si bien que chacune d’elles a maintenant la forme d’un prisme hexagonal. C’est à M. Ganin qu’est due la découverte de cette couche que j'ai déjà signalée en dedans de la portion optogénique de l’exoderme et qu’il désigna sous le nom de mésoderme; comme signification et comme structure, il l’identifiait complètement au mésoderme des autres disques. En réalité, ce tissu a une valeur toute particulière et qui a complètement échappé au naturaliste russe. Mais pour bien la comprendre, 1l est néces- saire que je donne d’abord quelques détails sur cette « tige nerveuse » découverte par M. Weismann et qui relie le gan- CAPES fo TE ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 929 glion cérébroïde au disque correspondant de l’œil. J’ai montré précédemment que la tige nerveuse était constituée par de fines fibres nerveuses naissant de l’ébauche de la lame gan- glionnaire encore incluse dans les centres nerveux. J’ai de plus montré, par l’étude du développement, que cette partie n’avait pas la signification que croyait devoir lui attribuer le naturaliste allemand, mais qu’en réalité, ses fibres subissaient, durant la métamorphose, un simple raccourcissement et un écarte- ment, pour devenir chacune une des fibres postrétiniennes. Cette connaissance de l’union de chacune des fibres post- réliniennes ou de la « tige nerveuse » avec un œil élémentaire, nous à été fournie par l’étude de l'appareil visuel chez la nymphe. Mais comment se comporte la tige nerveuse chez la larve, alors que l’œil composé n’est encore qu’un disque ima- ginal ; c’est ce que nous allons rechercher. On arrive facilement à se rendre compte du mode d'union de la tige nerveuse avec le disque, en étudiant chez l’Eristalis des coupes horizontales intéressantà la fois le disque et le gan- glion cérébroïde. On se convainc facilement que la tige ner- veuse, après sa sortie du ganglion, pénètre dans la cavité du disque et s'étale pour doubler la partie optogénique et consti- tuer ainsi cette couche que M. Ganin appelle mésoderme. Sans doute, au premier abord, cette couche a bien, comme le décrit le savant russe, l'aspect d’un tissu formé de cellules disséminées au sein d’une matière intercellulaire abondante, mais en y regardant de plus près et surtout en étudiant les pièces imprégnées d’osmium, on remarque qu’elle est, en réa- lité, composée par de fines fibres entremêlées de quelques noyaux et qui ne sont que la continuation de celles de la tige nerveuse. Ces fibres qui, par leur ensemble, représentent le mésoderme du disque, vont se jeter dans la membrane basale de la portion optogénique de l’exoderme. Afin de se rendre compte du mode de terminaison de ces fibres, il convient de dilacérer des disques qu’on a préalablement colorés par le chlorure d’or réduit en présence de l’acide formique, selon le procédé que j'ai indiqué plus haut, à propos des terminai- 990 H. VEALLANES. sons motrices; on isole alors facilement les cellules opto- oènes, et l’on remarque que chacune d’elles se continue, par son extrémité interne, avec un mince filament assez long; il n’y a pas de doute que ce filament ne soit une de ces fibres dont l’ensemble représente le mésoderme. Ainsi, l’œil élémentaire, alors même qu'il n’est encore qu'une simple cellule, est déjà relié au centre nerveux par un conducteur. Une question reste encore à éclaircir : d’où proviennent les cellules optogènes et comment se constituent-elles. Jai pu la résoudre d’une manière que je crois tout à fait concluante. Quand on examine des larves non encore parvenues à toute leur taille et à des âges différents, on reconnait que la portion optogénique, d’abord assez réduite, va en se différenciant du centre à la périphérie. Aussi, en étudiant le disque de l'œil d’une larve non encore parvenue à sa taille, trouve-t-on à ja périphérie de la portion optogénique des cellules optogènes à tous les états de développement et d'autant plus avancées qu'on s’approche davantage du centre. | J'ai représenté une coupe (1) passant par le point de contact de la région optogénique avec la région non optogénique; il suffit d'examiner la figure pour connaître avec certitude lori- gine et le mode de formation des cellules optogènes. On re- marque, en effet, que la région non optogénique est constituée comme l’exoderme de tous les disques imaginaux, par de petites cellules fusiformes disposées sur plusieurs assises et formant une couche épaisse limitée en dehors par une mince cuticule chitineuse, et en dedans par une membrane basale. La formation des cellules optogènes est due à ce qu’un certain nombre des cellules exodermiques les plus extérieures grossis- sent et s’allongent. La couche choroïdienne est simplement formée par les cellules de l’exoderme qui ne se sont pas diffé- renciées de la sorte. Il est à remarquer qu’au fur et à mesure qu'une cellule exodermique grossit pour devenir une cellule (1) PI, 15, fig. 9. ARTICLE N° {. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 991 optogène, son noyau grossit en même temps. Mais bientôt il s’efface et cesse d’être visible, la cellule acquérant la propriété de se célorer, sous l'influence des teintures, d’une manière intense et uniforme dans toutes ses parties, ainsi que Je lai indiqué plus haut. De plus, à mesure que les cellules optogé- niques grossissent, elles repoussent en arrière les cellules exo- dermiques non différenciées qui les séparaient les unes des autres, si bien qu’elles finissent par se trouver seules à former la couche sous-jacente à la cuticule, qui, comme nous le savons, est l’ébauche de la cornée. On remarque, dans la préparation que j'ai figurée, que, bien que l’assise des cellules optogéniques soit encore loin d’avoir acquis son aspect définitif, pourtant la couche formée par l’épanouissement des fibres postrétiniennes et qui repré- sente le mésoderme du disque, a déjà revêtu tous ses carac- ‘ tères. Résumé des observations relatives au développement post- embryonnaire de l'appareil visuel. Afin que le lecteur puisse plus facilement se rendre un compte exact des progrès que J'ai fait faire à la question, je crois nécessaire de rappeler brièvement les travaux faits avant moi. Ce résumé historique, venant après l’exposé des faits, per- mettra de comparer d’une manière plus précise mes observa- tions avec celles de mes FI IEROUTS. M. Weismann arriva aux conclusions suivantes touchant le développement de l’appareil visuel : 4° Chez la larve, l'appareil visuel se compose de deux par- ties, le disque imaginal des yeux et la tige nerveuse. Le disque imaginal se montre comme une masse pleine formée de cel- lules dont les plus superficielles sont plus grosses (cellules optogènes) et qui est revêtue par une mince membrane anhiste. La tige est une sorte de pédoncule qui relie le disque imaginal aux parties latérales du ganglion cérébroïde. 2 Au moment de la métamorphose, le disque s'étale en 332 H. VIALLANES. membrane, vient remplacer les téguments larvaires disparus au point correspondant ; chaque cellule optogène devenant un œil élémentaire, le disque dans son ensemble forme ainsi Pœil composé (1). Le ganglion cérébroïde grossit, puis un sillon annulaire se creuse à sa surface; ce sillon le divise en deux portions, une externe d’où part la tige nerveuse et qui mérite le nom de ganglion optique, et une interne qui est le cerveau proprement dit. 9° Le ganglion optique grossit beaucoup, 1l acquiert une forme hémisphérique et s'approche ainsi de la face interne de l'œil composé, aussi la tige nerveuse se raccoureit-elle. 4° En observant l'appareil visuel à un état de développement plus avancé, M. Weismann remarqua qu’en arrière de l'œil et le séparant complètement des parties nerveuses plus internes s’'étendait une zone qui lui parut formée uniquement par ces éléments libres qui proviennent de l’histolyse des tissus lar- vaires ; 1l lui donna le nom de Grenzschicht. I avait évidem- ment sous les yeux ce que J'ai décrit sous le nom de couche des fibres postrétiniennes. L'auteur allemand observa de plus qu'entre cette Grenzschicht et la surface du ganglion optique s’étendait une sorte de lame de substance blanche et striée d'avant en arrière. En décrivant cette partie, il avait évidem- ment sous les yeux cette région de la lame ganglionnaire que M. Ciaccio, puis moi avons appelée couche des fibres en palis- sade, il la considérait comme « la tige nerveuse transformée ». 5° En observant ensuite un état plus avancé, 1l découvrit, entre cette prétendue « tige nerveuse transformée » et la Grenzschicht, une couche de cellules nerveuses. Cette partie se rapporte évidemment à notre couche des cellules ganglion- (1) C’est seulement sur le développement des cellules optogènes que M. Weis- mann nous donne des détails histologiques : sur les autres parties de l’appareil visuel cet auteur nous fournit simplement les renseignements macroscopiques qu'il a pu obtenir par la dissection et l'observation des organes en masse et non sectionnés. Cette lacune rend souvent fort difficile la détermination des parties dont il parle. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 999 naires de la lame. M. Weismann pensa que ces cellules ner- veuses se constituaient par suite d’une transformation des éléments libres répandus dans la Grenzschicht, et qu’elles avaient pour rôle de réunir l’œil composé à la prétendue « tige nerveuse transformée ». Ces deux parties auraient été selon lui jusque-là complètement isolées. M. Ganin, qui, après M. Weismann, s’occupa du dévelop- pement post-embryonnaire des Insectes, négligea la tige ner- veuse et les autres parties nerveuses qui prennent part à la formation de l'appareil visuel, 1l s’appliqua seulement à l’étude du disque imaginal de l'œil. Il montra que ce disque avait la même composition que les autres disques imaginaux et qu'il comprenait un feuillet provisoire, un exoderme et un méso- derme. Mais il ne reconnut dans ces deux dernières assises aucune disposition particulière. Les recherches plus étendues que celles de mes prédéces- seurs et que J'ai faites sur des nymphes et des larves de diffé- rents âges, m'ont permis d'augmenter nos connaissances sur la structure et le développement de l’appareil visuel des In- sectes. J'ai résumé précédemment le résultat de mes recherches sur la structure de l'appareil visuel arrivé à sa période d’état. Je réunis maintenant sous forme de conclusions les principaux résultats auxquels m’a conduit l’étude de son développe- ment. Comme toujours, j'écris en italique les faits que je con- sidère comme m’appartenant exclusivement. CONCLUSIONS. 1° Chez la larve, avant la métamorphose, l'appareil visuel est représenté par trois parties principales : À, le disque ima- ginal de l'œil; B, la tige nerveuse; C, le ganglion optique. À. Le disque imaginal de l’œil est bâti sur le plan de tous les autres disques, 1l présente, par conséquent, en allant de dedans en dehors : un feuillet provisoire, un exoderme et un mésoderme. Le feuillet provisoire se montre avec les mêmes ANN. SC. NAT., ZOOL., NOVEMBRE 1882. XIV. 22. — ART. N° {. 394 Hi. VEALELANES. caractères que dans les autres disques. L'exoderme du disque de l’œil, chez de Jeunes larves, se montre avec les caractères qu'il présente dans tous les disques, il est formé par de petites cellules fusiformes très serrées, disposées sur plusieurs rangs, il est limité en dehors par une mince cuticule, en dedans par une membrane basale. Quelque temps avant la métamor- phose, les cellules exodermiques les plus superficielles grossis- sent et S'allongent beaucoup en acquérant la propriété de se colorer d'une facon particulièrement intense sous l'influence des teintures ; dès ce moment elles méritent le nom de cellules op- togènes. Cette transformation s'accomplit du centre à la péri- phérie du disque. Les cellules occupant la partie la plus mterne de l’exoderme et qui ne sont point transformées en cellules optogènes méritent le nom de celluies choroïdiennes. Le mésoderme du disque de l'œil n'a point la structure du mésoderme des autres disques. Il n’est point formé par une sub- stance fondamentale homogène abondante cimentant des cellules, mais bien par de fines fibrilles nerveuses entremélées de noyaux el qui paraissent se terminer sur La membrane basale de l'exo- derme. Quand on dilacère l’exoderme, on reconnait qu'il n’en est point précisément ainsi, mais que chaque fibrille du mésoderme y pénètre et se continue avec l'extrémité d'une cellule optogène. B. La tige nerveuse est une sorte de pédoncule qui relie le disque de l’œil au ganglion optique. Elle est constituée par de fines fibrilles nerveuses entremêlées de noyaux. Celles-ci se continuent avec les fibrilles nerveuses du mésoderme. Ainsi, le mésoderme du disque n’est qu'un épanouissement de la tige ner- veuse. Ainsi, dès qu'elle est différenciée, chaque cellule opto- gène est reliée au centre nerveux par un conducteur. C. Le ganglion optique est constitué par la portion la plus externe du ganglion cérébroiïde; il est revêtu par l'enveloppe commune des centres nerveux ou névrilemme, Quand on étudie sa structure, on remarque qu'il comprend un noyau central de substance blanche revêtu par une écorce cellulaire épaisse ou écorce grise. Sur les parties latérales du ganglion optique et encastré comme un coin dans l'écorce grise, se montre un organe ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 33) fort complexe qui mérite le nom débauche de la lame ganglion- naire. Nous y reconnaissons déjà toutes les parties principales qui entrent dans la constitution de la lame ganglionnaire défi- mitivement constituée; en dehors, la couche des cellules qan- glionnaires, composée comme chez l'adulte de cellules bipo- laires formant par leur réunion de courts chapelets disposés côte à côte. Immédiatement plus en dedans, nous trouvons l'esquisse de la couche des fibres en palissade, puis une assise formée de fibres et de noyaux, cette dernière est l’ébauche de la couche des jibres nucléées. Les fibres de la tige nerveuse naissent de la parte la plus extérieure de l’ébauche de la lame, c’est-à-dire de la surface de la couche des cellules ganglionnaires comme le font chez l'adulte les fibres postrétiniennes. Ainsi, chez la larve, toutes les parties principales de l'appareil visuel sont ébauchees, elles sont de plus unies entre elles comme elles le seront chez l'adulte, puisque nous voyons chaque cellule oplogène unie à la lame ganglionnaire par un conducteur spécial, une fibrille de la tige nerveuse. 2° Au moment de la métamorphose, les phénomènes sui- vants s’accomplissent. Le feuillet provisoire du disque ima- ginal de l'œil disparait, son exoderme s'accroît, s'étale en membrane et vient occuper l’espace où doit se former l’œil composé, 1l se soude sur ses bords avec les disques voisins; sa cuticule devient la cornée à facettes, sa membrane basale la limitante postérieure de l'œil. Chaque cellule optogène se déve- loppant selon un procédé bien connu, surtout depuis les tra- vaux de M. Weismann et de M. Grenacher, devient un œil élé- mentaire. Le névrilemme du ganglion optique disparaît, ce dernier s’accroit alors, prend une forme sphérique, se sépare par un sillon annulaire du reste du ganglion cérébroïde ou cerveau proprement dit. En s’accroissant, le ganglion optique se rap- proche de la face postérieure de l'œil composé. La lame ganglionnaire, jusque-là comprise sous forme d’é- bauche au sein de l'écorce grise, sort de la place où elle était encastrée, émigre hors du ganglion optique, puis s'accroît et 390 IH. VEALEANIS. s’élend comme un écran entre celui-ci et l'œil composé. En même temps que la lame s'accroît, la structure définitive de ses deux premières couches nerveuses se réalise. Durant l'évolution de la lame et du disque de l'œil, les fibrilles de la tige nerveuse ne cessent point un instant d'unir ces deux parties. A mesure que le disque de l'œil et la lame s'accroissent en surface, les fibrilles de la tige nerveuse se dissocient et s'écar- tent les unes des autres pour suivre ce mouvement. À mesure que la lame se rapproche de l'œil composé, elles se raccourcissent. Chaque fibrille de la tige nerveuse devient ainsi une des fibres postrétiniennes. Cest ce nom qu'à l’état définitif nous arons donné aux conducteurs nerveux qui unissent chaque œil élémen- taire à une des files de cellules de la première couche de la lame ganghonnaire. En quittant l'écorce grise du qanghon oplique où elle était encastrée, la lame ganglionnaire entraîne avec elle un paquet de fibres, ce sont les fibres préganglionnaires, qui continuent ainsi à l’unir au centre nerveux. Ces fibres ne naissent point de cellules situées à la surface de l'écorce grise, mais bien de cel- lules situées dans l'épaisseur de celle-ci. À mesure que la lame s'étale, les fibres préganglionnaires qu'elle à entraîinces s’écar- tent les unes des autres et se dissocient pour suivre ce mouve- ment. En même temps, la partie profonde de l'écorce grise d'où naissent ces fibres préganglionnaires prend un développement plus rapide que les parties voisines, les repousse el vient occuper la surface du ganglion pour former la région que dans l’état définitif nous appelons couche des chapelets. En même temps, le croissant et l'éventail ébauchés depuis longtemps complètent leur développement. Plus tard, les limitantes de la lame et le névrilemme se reconstituent sans que je puisse dire par quel procédé. En terminant ce travail, qui pour être bien imparfait ne m'en à pas moins coûté de longues heures d'étude, qu’il me soit permis de réclamer lindulgence du lecteur pour les géné- ARTICLE N° {. ISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 497 ralisations que je me suis quelquefois permises. Il m’accordera les circonstances atténuantes, eu égard au peu d'espace que je leur ai consacré, et au soin que j'ai toujours pris de bien les séparer d'avec les faits. C’est à ces derniers seulement que j'attribue quelque valeur. EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE 1. Fig. 1. Un nerf de la larve d’Eristalis traité par lammoniaque après fixation par la liqueur de Mülier. Sous l’influence du réactif, le névrilemme s’est sou- levé et a quitté le cylindre-axe. g, gaine du nerf ou de Henle ; c, cylindre- axe; nc, noyau du cylindre-axe. Gross. 300 diam. Fig. 2. Nerf de la larve de Tipula gigantea. Acide osmique, carmin. Gross. 180 diam. ; Fig. 3. Petit nerf de la larve d’'Eristalis. Acide osmique, carmin. La gaine du nerf est tellement réduite qu’elle n’est plus apparente, mais on remarque à la surface du cylindre-axe les noyaux qui appartiennent à cette gaine. Gross. « 180 diam. Fig. 4. Branche nerveuse de la larve d’Eristalis à la surface de laquelle la ep fait défaut. Gross. 180 diam. lg. 5. Ganglion nerveux à deux cellules de la larve d’Eristalis. Acide os- mique et chlorure d’or. Gross. 190 diam. Fig. 6. Nerf de la larve de Musca. Acide osmique et carmin. Gross. 180 dun Fig. 7. Ganglion périphérique de la larve de Tipula. Acide osmique et carmin. g, gaine; c, cellules ganglionnaires. Gross. 350 diam. Fig. 8. Ganglion à côtes de melon de la larve de Musca. Acide osmique et chlo- rure d’or. Gross. 190 diam. Fig. 9. Hypoderme de la larve de Musca observé par sa face profonde. Acide osmique. », hypoderme; a, cellules sous-hypodermiques. Gross. 160 diam. Fig. 10. Un groupe de cellules sous-hypodermiques au moment de la méta- morphose. Gross. 160 diam. Fig. 11. Groupe de cellules ganglionnaires appartenant au plexus nerveux sous- cutané. Acide osmique, chlorure d’or; larve de Musca. Fig. 12. Coupe de la peau d’une larve de Musca. Acide picrique, alcool, car- min. €, cuticule ; k, hypoderme. Gross. 180 diam. PLANCHE 2. Fig. 1. Plexus nerveux sous- -hypodermique chez la larve d’Eristalis. Acide os- mique et chlorure d'or. L’hypoderme n'a point été détaché de la cuticule, il est observé par sa face profonde. , cellules hypodermiques; n, nerf, g, cel- lules ganglionnaires dont les prolongements paraissent se terminer par des extrémités libres. Gross. 380 diam. 3938 BH. VIALLANES. Fig. 2, Plexus nerveux sous-hypodermique chez la larve de Musca. Acide os- mique et chlorure d’or. La cuticule a été enlevée, elle à entraîné avec elle l’hypoderme. La membrane basale est restée adhérente aux tissus plus pro- fonds, elle est marquée de cercles clairs, indiquant la place qu’occupaient les noyaux des cellules hypodermiques. b, membrane basale; m», muscles; n, nerfs; g, cellules ganglionnaires multipolaires dont les prolongements pa- raissent se terminer par des extrémités libres; gm, ganglion à côtes de me- lon. Gross. 190 diam. PLANCHE 3. Terminaisons nerveuses dans la peau de la larve du Stratiomys chameæleon. Fig. 1. L’hypoderme, fixé par un mélange d’acide osmique et d’alcoo!l, puis coloré par l'hématoxyline, a été détaché de la cuticule et est observé par sa face profonde. k, cellules hypodermiques; ca, cellules annexées; cp, cellule du poil; nn, noyau de la cellule nerveuse terminale; cy, cylindre-axe ; ng, noyaux de la gaine du nerf. Gross. 3600 diam. Fig. 2. Même technique. L’hypoderme est observé par sa face superficielle. cp, cellule du poil; cy, eylindre-axe ; nn, noyau de la cellule nerveuse terminale; pp, prolongement terminal de la cellule nerveuse traversant l’anneau que forme autour de lui la cellule du poil. Gross. 360 diam. Fig. 3. Mème agent fixateur et même coloration. La cuticule n’est point séparée de l’hypoderme. p, poil; bp, base chitineuse du poil; nn, noyau de la cellule nerveuse terminale; cp, noyau de la cellule du poil dont le pos n’est pas visible. Gross. 360 diam. Fig. 4. Hypoderme observé à un faible grossissement par sa face interne. n, nerf; cm, cellule ganglionnaire multipolaire dont les prolongements paraissent se terminer par des extrémités libres aprèss’être bifurquées; cp, terminaison par une cellule bipolaire à la base d’un poil. (La pièce a été traitée par un mé- lange d’acide osmique et d'alcool, puis colorée à l’hématoxyline.) Fig. 5. L’hypoderme est observé par sa face profonde. ca, cellules annexées; Cy, cylindre-axe. On voit nettement que celui-ci se continue avec le proto- plasma de la cellule nerveuse terminale; nn, noyau de ia cellule nerveuse terminale; ep, noyau de la cellule du poil. Mème technique que pour la figure précédente. Gross. 360 diam. Fig. 6. Mèmes conditions que pour la figure précédente. nn, noyau de la cel- lule nerveuse terminale; cp, noyau de la cellule du poil dont le proteplasma se réduit presque uniquement à l’anneau dans lequel s'engage le prolonge- ment terminal de la cellule nerveuse. Gross. 360 diam. Fig. 7. Mèmes conditions que pour la figure précédente. cy, cylindre-axe; nn, noyau de la cellule nerveuse; cp, noyau de la cellule du poil. Gross. 360 diam. PLANCHE 4. Fig. 1. Muscles longitudinaux du tube digestif de la larve de Tipula gigantea, dilacérés après fixation par un mélange d'acide osmique et d'alcool, puis colo- ration par l’hématoxyline. n, noyau musculaire; p, protoplasma ; é, trachée. Gross. 360 diam. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 339 Fig. 2. Organe antenniforme de la larve d’'Eristalis observé sur l’animal vivant. e, bouton sensoriel externe; 4, bouton sensoriel interne. Fig. 3. Faisceau musculaire longitudinal du tube digestif de la larve de Tipula, isolé après traitement par l’acide acétique et coloration par le vert de mé- thyle, Gross. 360 diam. Fig. 4. Tunique musculaire interne, à fibres transversales, du tube digestif de la larve de Tipula. Acide osmique, hématoxyline. Gross. 180 diam. Fig. 5. Bouton sensoriel situé au voisinage de la bouche de la larve de Musca. Il est observé de face, après traitement par la potasse caustique. Gross. 360 diam. Fig. 6. Bouton sensoriel externe de la larve de Musca. Mêmes conditions d'observation que pour la figure précédente. Gross. 360 diam. Fig. 7. Bouton sensoriel situé latéralement sur les anneaux du corps de la larve de Musca. Mèmes conditions d'observation que pour la figure précé- dente. Gross. 520 diam. Fig. 8. Vaisseau dorsal au repos, observé par transparence chez une jeune larve de Tipula anesthésiée par le chloroforme. Fig. 9. Le même vaisseau dorsal à Pétat de contraction. Fig. 10. Portion de la région antérieure du vaisseau dorsal de la larve d’Eris- talis, fixé par l’acide osmique et coloré par l'or. n, noyaux des cellules du vaisseau; f, fibrilles musculaires développées dans le protoplasma des cel- lules du vaisseau; f’, fibrille observée de profil ; [//, ligne de soudure des cel- lules du vaisseau, on remarque qu’elle coupe toujours les fibrilles selon un disque mince. Gross. 260 diam. Fig. 11. Faisceau musculaire primitif de la larve de Siratiomys. Acide osmique et fuchsine. Gross. 95 diam. PLANCHE 9. Fig. 1. Coupe transversale d’un muscle des pattes chez une Mouche adulte. Gross. 180 diam. Fig. 2. Faisceau musculaire des pattes de la Mouche adulte, isolé. Gross. 360 diam. Fig. 3. Faisceau musculaire des pattes du Dytique isolé. Gross. 360 diam. Fig. 4. Coupe transversale d’un muscle des pattes chez une Mouche adulte. Gross. 360 diam. Fig. 5. Faisceau musculaire des pattes de la Mouche adulte isolé. Gross. 360 diam. Fig. 6. Coupe t'ansversale d’un muscle des pattes chez une Mouche adulte. Gross. 180 diam. ] Fig. 7. Coupe longitudinale d’un muscle des pattes chez une nymphe presque arrivée à son développement complet. Gross. 180 diam. Fig. 8. Un faisceau isolé des muscles de l’aile du Dytique. Gross. 180 diam. Fig. 9. Coupe transversale d’un faisceau des muscles de l’aile du Dytique. Gross. 600 diam. Fig. 10. Coupe transversale d’un muscle de l’aile du Dytique. Gross. 100 diam. 340 H. VIALLANES. Fig. 11. Coupe transversale d’un faisceau musculaire de l'aile chez la Mouche. On n’a représenté qu’une portion de la coupe. Fig. 12. Coupe transversale d’un faisceau musculaire de l’aile chez la Mouche. Une portion de la coupe est seule représentée. Gross. 360 diam. Fig. 13. Coupe longitudinale des muscles des pattes chez une jeune nymphe, Gross. 360 diam. Fig. 14. Coupe transversale d’un faisceau musculaire de l'aile chez la Mouche adulte. Gross. 180 diam. Fig. 15. Coupe longitudinale d’un musele des pattes chez une très jeune nymphe de Mouche. Gross. 420 diam. Fig. 16. Coupe longitudinale d’un faisceau musculaire de laile chez une Mouche adulte. Gross. 360 diam. Fig. 17. Coupe longitudinale de la masse musculaire interne en voie de déve- loppement chez une jeune nymphe de Mouche. 4, espaces interfasciculaires ; e, faisceau avec des files de noyaux remplissant les espaces intercolum- naires. l'ig. 18. Coupe transversale d’un faisceau musculaire chez la larve de la Mouche. Gross. 180 diam. PLANCHE 6. % Stratiomys chamaæleon. Fig. 1. Deux faisceaux primitifs de la larve de Stratiomys chameæleon traités par l’acide acétique à 1/100 et colorés au vert de méthyle. Sous l'influence de l'acide acétique, le sarcolemme s’est soulevé. «&, tractus unissant le sarco- lemme d'une fibre musculaire au sarcolemme de la fibre voisine; s, sarco- lemme; n, nerf pénétrant au sommet du cône de Doyère et se divisant en deux branches situées sous le sarcolemme et qui, sous l'influence du réactif, se sont détachées de la masse contractile à laquelle elles étaient appliquées. Gross. 180 diam. Fig. 2. Faisceau primitif de la larve de Sératiomys chamwæleon fixé par l'acide osmique à 1/100, traité par l’acide formique au 1/4, plongé pendant vingt-quatre heures à l’obscurité, dans le chlorure d’or au 1/10 000, la ré- duction s’opérant ensuite à la lumière dans le chlorure d’or à 1/4. nm, noyau musculaire ; {, noyau trachéen entouré de son aire protoplasmique; n, nerf; cet c’, renflement que présente le nerf après avoir pénétré au sommet du cône de Doyère; d, branche dernière de l’arborisation terminale. Gross. 180 diam. Fig. 3. Plexus nerveux de la tunique musculaire du tube digestif de la larve de Tipula gigantea. Mème technique que pour la figure précédente. Gross. 180 diam. Le PLANCHE 7. Tipula gigantea. Fig. 1. Fibres musculaires de la larve de Tipula gigantea, traitées comme la préparation que représente la figure 2 de la planche 6. Cette figure est des- tinée à montrer le mode de distribution des nerfs. Gross. 66 diam. ARTICLE N° 1. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 341 Fig. 2. Colline de Doyère, vue de profil. £, trachée; c, cylindre-axe; gn, gaine du nerf; s, sarcolemme; », substance granuleuse et noyaux de l’arborisation situés entre les deux branches de bifurcation du cylindre-axe. Même tech- nique que pour la figure précédente. Gross. 300 diam. Fig. 3. Vue d'ensemble d’une arborisation terminale. Même technique que pour la figure précédente, Gross, 180 diam, PLANCHE 8, Tipula gigantea. Fig. 1. Branche principale de l’arborisation nerveuse d’une fibre musculaire fixée par un séjour de douze heures dans l'acide osmique à 1/100 et colorée au picrocarminate. b, noyaux de l’arborisation ; 4, noyaux de la substance gra- nuleuse. Gross. 440 diam. Fig. 2. Fibre musculaire observée sur un point assez éloigné du cône de Doyère et montrant bien les détails de l’arborisation et les divers noyaux qui l’ac- compagnent. Même technique que pour la figure 2 de la planche 6. Gross. 360 diam. . Fig. 3. Fibre musculaire traitée par l’acide acétique à 1/100 et colorée au vert de méthyle. s, sarcolemme soulevé; b, une branche de l’arborisation laissée libre sous le sarcolemme par le retrait de la substance contractile. Fig. 4. Un cône de Doyère vu de profil et remarquable par l’abondance de la substance granuleuse et des noyaux de cette même substance qui le remplis- sent complètement. {, trachée; c, cylindre-axe ; n, noyaux de la substance granuleuse. Même technique que pour la figure 2 de la planche 6. Gross. 360 diam. Fig. 5. Fibre musculaire traitée par l’acide acétique à 1/100 et colorée au vert de méthyle. Le sarcolemme est soulevé, la substance contractile s’est rom- pue; sur une certaine longueur les branches de l’arborisation sont devenues lipres et flottent sous le sarcolemme. Un nerf n croise la fibre musculaire et y détermine un étranglement. | PLANCHE 9. Fig. 1. Tunique musculaire des appendices gastriques de la larve de -Tipula gigantea. Acide osmique, hématoxyline. Gross. 180 diam. Fig. 2. Faisceau primitif d’une larve de Musca commençant à dégénérer. Gross. 180 diam. Fig. 3. Faisceau primitif à un état de dégénérescence plus avancé. La substance contractile a commencé à se dissoudre à la périphérie en se transformant en une substance finement granuleuse dans laquelle se trouvent les noyaux musculaires arrivés à divers degrés de déchéance vitale. Gross. 180 diam. Fig. 4. Faisceau primitif en voie de dégénérescence. Gross. 70 diam. Fig. 5. Portion de la coupe transversale d’un faisceau primitif en voie dhisto- lyse par évolution régressive; la substance contractile dont le contour commence à s’éroder et à devenir anfractueux, s’est transformée à la péri- 342 H. VIALLANES. phérie en une matière finement granuleuse et dans laquelle se trouvent les noyaux musculaires à différents états de prolifération. Gross. 360 diam. Fig. 6 et 7. Coupe transversale d’un faisceau primitif à un stade plus avancé de l’histolyse par évolution régressive. La substance contractile a un contour tout à fait déchiqueté, elle est presque entièrement transformée en une sub- stance finement granuleuse renfermant un amas de granules produits par la prolifération des noyaux musculaires. Fig. 8. Noyaux musculaires de la larve avant la métamorphose. Fig. 9. a, noyau musculaire des faisceaux qui doivent subir l’histolyse par évolution régressive; b, noyau musculaire entouré de protoplasma et devenu ainsi le noyau d’une véritable cellule, la cellule musculaire; €, d, e, f, 4, divers états de dévelonpement de la cellule musculaire produisant des gra- nules roses; 4, mise en liberté des granules roses produits par la cellule musculaire ; 7, #, l, m, n, divers états de prolifération des granules roses. Gross. 380 diam. Fig. 10. Noyaux musculaires à divers états de dégénérescence. 4, 1* état, le noyau se présente avec l’aspect d'une coque renfermant à son centre un amas sphérique de granulations colorables par le carmin; b, €, d, e, états de dégé- nérescence plus avancés; les granulations colorées s’écartent et deviennent de plus en plus rares; f, dernier état de dégénérescence, toutes les granula- üons colorables ont disparu et le noyau est réduit à une coque vide. Fig. 11. Cellules du cordon guirlandiforme de M. Weismann, chez une jeune nymphe. Gross, 195 diam. PLANCHE 10. Fig. 1. Coupe transversale d’une glande salivaire quelques heures après que Ja larve s’est changée en nymphe. On remarque que ie protoplasma des cel- lules glandulaires a acquis la propriété de se colorer d’une maniére très intense et que leur noyau a beaucoup grossi. Fig. 2. Coupe transversale d’une glande salivaire à un état plus avancé de l’évolution régressive. s, globules du sang ; te, tissu embryonnaire s’étendant aux dépens des cellules glandulaires cg, dont le noyau est repoussé à la péri- phérie. Gross. 320 diam. Fig. 3. Coupe transversale d’une glande salivaire à un état de l’évolution régres- sive encore plus avancé. Le tissu embryonnaire te s’est encore étendu davan- tage aux dépens des cellules glandulaires. Quelques-unes de celles-ci sont encore reconnaissables, les autres ont totalement disparu ou ne sont plus représentées que par un simple moignon cg’. Gross. 320 diam. Fig. 4. Deux cellules glandulaires d’une jeune nymphe un peu avant que les cellules embryonnaires se soient formées dans leur protoplasma. Gross. 360 diam. Fig. 5. Coupe transversale d’une trachée larvaire commençant son évolution régressive chez une jeune nymphe; un tissu embryonnaire s’est développé aux dépens du protoplasma des cellules trachéennes dont le noyau est repoussé à la périphérie et présente des traces de dégénérescence. Gross. 320 diam. Fig. 6. Coupe transversale d’une trachée larvaire à un état plus avancé de ARTICLE N° Î. HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 343 l'évolution régressive ; l'enveloppe péritonéale est entièrement transformée en un tissu embryonnaire. Gross. 490 diam. Fig. 7. Coupe transversale d’une trachée larvaire à un état de l’évolution régressive plus avancé encore. Les cellules du tissu embryonnaire qui ont remplacé lenveloppe péritonéale commencent à se séparer et à se disperser. Gross. 490 diam. Fig. 8. Globules du sang chez une larve de Mouche avant la métamorphose. Acide picrique, hématoxyline. Gross. 490 diam. Fig. 9. Globules du sang chez une jeune nymphe. Quelques-uns, &, b, c, sont en dégénérescence graisseuse; les autres d en voie de prolifération. Gross. 490 dian:. Fig. 10. Cellule du corps adipeux larvaire en voie d’histolyse. Son noyau est en voie de dégénérescence, son enveloppe a disparu, dans son protoplasma se sont formés de nombreux granules. Gross. 420 diam. — N. B. Le litho- oraphe n’a pas copié tout à fait exactement mon dessin, il a figuré les gra- nules beaucoup trop gros. Fig. 11. Granules produits par les cellules du corps adipeux au moment de leur dispersion. Gross. 490 diam. Fig. 12. Noyau de la cellule du corps adipeux au moment de la dispersion des granules. Gross. 450 diam. Fig. 13. Coupe de l’hypoderme larvaire qnand il commence à se dessécher. Gross. 250 diam. Fig. 14. Coupe de l’hypoderme larvaire presque entièrement desséché et com- mençant à se desquamer, ses noyaux sont les uns réduits à une coque vide, les autres rompus et ouverts. Gross. 300 diam. PLANCHE 11. Fig. 1 et 2. Coupes transversales de faisceaux musculaires de la larve subis- sant l’histolyse par évolution régressive. La substance contractile érodée est entourée d’une matière finement granuleuse dans laquelle plongent les noyaux musculaires et les granules à divers états de développement. Gross. 380 diam. Fig. 5. Faisceau musculaire en voie d’hisiolysé, d’après M. Ganin (figure em- pruntée à cet auteur). À Fig. 4. Coupe d’une cellule du corps adipeux en voie d’histolyse et dont la membrane n’a pas encore disparu. Gross. 380 diam, Fig. 5. Coupe pratiquée à travers les téguments abdominaux d’une nymphe du deuxième jour. }, noyaux des cellules de l’hypoderme larvaire; d, disque imaginal se formant par suite d’une prolifération des cellules hypodermiques. Gross. 380 diam. Fig. 6. Formation d’un disque imaginal de l’abdomen, d’après M. Ganin (figure empruntée à cet auteur). Fig. 7. Figure empruntée à M. Ganin et sur laquelle cet auteur base son opi- nion sur l’origine des muscles de l’aile de l’imago. 344 M. VIALLANES. PLANCHE 192, Fig. 1. Portion d’une coupe transversale pratiquée à travers une nymphe du premier jour intéressant un disque imaginal, et avant qu'aucun tissu larvaire ait perdu son autonomie. hl, hypoderme larvaire; m, faisceaux musculaires de la larve coupés transversalement; m/, faisceaux musculaires de la larve coupés longitudinalement; £, trachées larvaires commençant à subir l’évolu- tion régressive; $, globules du sang qu’on rencontre dans toutes les lacunes ; cp, cavité provisoire du disque; fp, feuillet provisoire du disque; eæ, exo- derme du disque. Gross. 195 diam. Fig. 2. Portion d’une coupe transversale pratiquée à travers le thorax d'une nymphe du quatrième jour alors que les téguments de limago sont complète- ment constitués et que les téguments larvaires ont disparu; ki, hypoderme de l’imago; ca, cellules du corps adipeux ayant achevé leur évolution et dont les cellules filles commencent à se disperser; trois faisceaux » de la masse musculaire interne de l'aile sont déjà ébauchés ; gim, granules müriformes provenant de l’histolyse des muscles larvaires maintenant disparus. Gross. 980 diam. PLANCHE 13. Fig. 1. Portion d’une coupe transversale pratiquée à travers une nymphe du premier jour, intéressant un disque imaginal thoracique inférieur et avant qu'aucun tissu larvaire ait perdu son autonomie. m, faisceau musculaire de la larve coupé transversalement; #/, faisceau musculaire de la larve coupé longitudinalement; trl, trachée larvaire commençant à subir l’évolu- tion régressive; ca, cellule larvaire du corps adipeux ayant proliféré des granules dans son protoplasma, mais n'ayant pas encore perdu sa membrane ; s, globules du sang; gs, glande salivaire; eæ, exoderme du disque; fp, feuillet provisoire; cp, cavité provisoire ; mes, mésoderme du disque; f, ten- don de l’imago se formant aux dépens de l’exoderme du disque; fr, trachée de l’imago en voie de formation. Gross. 195 diam. Fig. 2. Portion d'une coupe transversale pratiquée à travers le thorax d’une nymphe alors que les téguments de l’imago sont complètement formés. a, hypoderme de l’imago; ca, cellules du corps adipeux en voie de proliféra- tion; gm, granules müriformes provenant de l’histolyse des muscles larvaires depuis longtemps disparus; mi, ébauche complètement formée de la masse musculaire interne de l’aile, elle est transversalement coupée et montre six taches qui sont les ébauches des six faisceaux qui composent la masse mus- culaire interne ; me, portion de la masse musculaire externe de l’aile coupée obliquement. PLANCHE 14. Fig. 1. Coupe transversale de l’ébauche de la masse musculaire interne de l’aile chez une jeune nymphe. e, granules müriformes flottants dans la cavité géné- rale; cm, cellules musculogènes plongées dans une substance intercellulaire homogène abondante; f, faisceau musculaire en voie de formation, la sub- ARTICLE N° 1, HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 349 stance intercellulaire acquiert du centre à la périphérie une texture fibrillaire et devient ainsi la masse contractile. Les cellules musculogènes englobées par la substance contractile se disposent avec régularité et deviennent les noyaux intercolumnaires #. Gross. 1020 diam. Fig. 2. Coupe longitudinale de lébauche de la masse musculaire interne arrivée à peu près au même stade que celui que représente la figure 1. f, substance contractile du faisceau ; n, noyaux intercolumnaires ; cm, cellules musculo- gènes. Gross. 540 diam. Fig, 3. Coupe transversale de la masse musculaire interne de l’aile entièrement constituée, mais encore fort pelite, les trachées ne sont point encore déve- loppées entre les faisceaux. f, faisceaux ; e, espaces interfasciculaires. Gross. 180 diam. Fig. 4. Développement des trachées de la masse musculaire interne de l'aile. t, tronc trachéen principal émettant des branches qui pénètrent dans les espaces interfasciculaires cf. Gross, 360 diam. Fig. 5. Développement des téguments imaginaux de l'abdomen. cl, dernière cuticule sécrétée par l’hypoderme larvaire maintenant desséchée et tombée; ci, cuticule imaginale; hi, un des quatre disques imaginaux de l’abdomen; e, granules à divers états de développement, provenant principalement de l’his- tolyse des muscles larvaires, ils sont plus petits et plus serrés au-dessous de la cuticule imaginale; m, faisceau primitif de la larve n’ayant point subi l’évolution régressive et disparaissant par dégénérescence. PLancHEe 15. Lettres communes à toutes les figures : fp, feuillet provisoire; e, ectoderme; m, niésoderme. Fig. 4. Disque imaginal mésothoracique supérieur ou disque de l’aile. #, tra- chée en voie d’histolyse. Gross. 90 diam. Fig. 2. Coupe longitudinale d’un disque mésothoracique inférieur chez une larve de mouche n'ayant pas encore acquis toute sa taille. Gross. 30 diam. Fig. 3. Aile nouvellement formée. m, muscle de laile en voie de développe- ment ; », hypoderme imaginal; {, trachées. Fig. 4. Coupe d’une portion du disque de l'œil chez une larve d’'Eristalis ayant atteint son développement complet. c, cuticule, ébauche de la cornée; co, cellules optogènes; cc, cellules choroïdiennes ; m, fibres de la tige nerveuse représentant le mésoderme et destinées à devenir les fibres postrétiniennes. Gross. 320 diam. Fig. 5. Coupe d'ensemble du disque de l’œil chez une larve d’Eristalis. Gross. 90 diam. Fig. 6. Coupe pratiquée à travers la région antérieure d’une nymphe du pre- mier jour, et montrant les rapports du disque de l’antenne avec les parties voisines. k, hypoderme larvaire; n, cellules embryonnaires et autres élé- ments libres dans la cavité générale de la nymphe; £#, trachée larvaire en voie d’'histolyse. Gross. 51 diam, Fig. 7. Coupe tangentielle pratiquée à travers la coùche des cellules optogènes d'un disque de l'œil arrivé au stade que représente la figure 4. Gross. 350 diam. 346 HE. VIALLANES. Fig. 8. Coupe d’un disque de l’aile un peu moins avancé que celui que repré. sente la figure 4. Gross. 51 diam. Fig. 9. Coupe d’une portion de l’exoderme du disque de l’œil d’une larve d'Eristalis, la préparation montre bien l’origine des cellules optogènes, o, cellules optogènes; €, cuticule représentant l’ébauche de la cornée; m, fibres de la tige nerveuse destinée à devenir les fibres postrétiniennes et représentant le mésoderme des autres disques. PLANCHE 16. Fig. 1. Portion d’une coupe transversale pratiquée près de l'extrémité antérieure d’une très jeune nymphe. k, hypoderme larvaire en voie de dégénérescence; m, coupe transversale de faisceaux musculaires n'ayant point subi Pévolution récressive et en voie de disparition par dégénérescence; #m', coupes longi- tudinales des mêmes. La cavité générale se trouve remplie par une quantité ‘ considérable de granules et de cellules embryonnaires à différents états de développement. Fig. 2. Portion d’une coupe transversale du thorax d’une jeune nymphe mon- trant l'origine de l’ébauche de la masse musculaire interne de l'aile. 4, hypo- derme de l’imago formé aux dépens du disque de l'aile; e, granules à diffé- rents états de développement, provenant principalement de l’évolution régressive des muscles larvaires ; ca, cellules adipeuses ayavt proliféré, leur noyau persiste encore, leur membrane d’enveloppe a disparu, les nombreux granules qu’elles ont produits dans leur protoplasma commencent à s’écarter et à se disperser; le premier faisceau f de la masse musculaire interne est apparu. Gross. 320 diam. Fig. 3. État un peu moins avancé de la formation du premier faisceau. f, sub- stance contractile ; e, granules provenant des cellules du corps adipeux de la larve; €, cellules musculogènes. Gross. 420 diam. Fig. 4. Coupe transversale du thorax d’une nymphe au moment de la formation des trachées. k, hypoderme de l’imago; td, tube digestif; t, trachée émet- tant des branches qui pénètrent dans les espaces interfasciculaires; f, faisceau de la masse musculaire interne ; #, granules müriformes ; ca, cellules adi- peuses n’ayant point achevé leur évolution régressive. Fig. 5. Coupe transversale d’un disque imagihal, après la disparition du feuillet provisoire. e, exoderme ; »#, mésoderme; £, trachées. Gross. 495 diam. Fig. 6 et 7. Muscles des pattes en voie de développement; jeunes faisceaux en coupe transversale. Gross. 360 diam. Fig. 8. Coupe transversale du ganglion optique de la larve d’Eristalis passant au niveau du point où l’ébauche de la lame ganglionnaire est dédoublée. cg ; couches des cellules ganglionnaires ; cp, couche des palissades ; #, organe en U. Gross. 195 diam. PLANCHE 17. Fig. 1. Coupé transversale du ganglion cérébroïde d’une jeune nymphe de Musca, le cerveau proprement dit c n’est figuré que par son contour, le gan- glion optique seul est ombré. fpr, fibres postrétiniennes réunies en un pa- ARTICLE N° Î: HISTOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DES INSECTES. 347 quet que M. Weismann appelait la tige nerveuse du disque des yeux; cg, ébauche de la couche des cellules ganglionnaires de la laine ganglionnaire encore comprise dans l’intérieur du ganglion optique; cp, ébauche de la couche des fibres en palissade; 3n, couche de noyaux postérieure à la couche des fibres en palissade; nc, noyau central de substance blanche ; eg, écorce grise du ganglion optique. Gross. 90 diam. Fig. 2. Coupe pratiquée dans les mêmes conditions que pour la figure précé- dente, mais un peu plus en arrière afin de montrer le dédoublement de la lame ganglionnaire, mêmes lettres. #, organe problématique en U. F g. 5. Coupe intéressant les centres nerveux et le disque de l’œil. Les condi- tions d'orientation n’ont pu être déterminées avec précision. €, cornée; 0p, couche des cellules optogènes dont chacune occupe la place de l’œil élémen- taire qu’elle doit former; fpr, fibres postrétiniennes se continuant chacune en avant avec l'extrémité postérieure d’une cellule optogène; cm, granules müriformes emprisonnés entre les fibres postrétiniennes; «, organe problé- matique en U; /, fente de sortie de la lame ganglionnaire ; celle-ci comprend en allant d'avant en arrière : cg, la couche des cellules ganglionnaires; cp, l’ébauche de la couche des fibres en palissade; zn, couche de noyäux pos- térieurs à cette dernière et représentant à la fois la zone nucléaire des palis- sades et les noyaux des fibres nucléées qui ne sont point encore différenciées en couche distincte; nc, noyau central du ganglion optique; eg, son écorce grise. Fig. 4. État plus avancé; la lame ganglionnaire est complètement sortie du ganglion optique dans l’intérieur duquel elle était comprise. fpr, fibres post- rétiniennes; cg, couche des cellulles ganglionnaires; cp, couches des fibres en palissade; Zn, zone nucléaire maintenant différenciée, mais occupant encore la face postérieure de la couche des palissades ; /pg, couche des fibres préganglionnaires non encore différenciée d’avec la couche des fibres nu- cléées et remplissant la fente de sortie; cch, couche des cellules en chapelet s’ébauchant aux dépens de l'écorce grise; {g, lobe de lécorce grise; cr, croissant du noyau central; ev, éventail. Fig. 5. État plus avancé encore. Mèmes lettres que pour la figure précédente, la couche des cellules en chapelet est presque complètement constituée, le lobe de Pécorce grise est très réduit maintenant. æs, trou œsophagien. Fig. 6. Cellules glanglionnaires de l’écorce grise du ganglion optique d’une larve d’Eristalis colorée par le chlorure d’or au 1/10 000 après fixation par les vapeurs d’acide osmique et traitement par l’acide formique au quart. PLancue 18. Fig. 1. Coupe transversale de la tête d’une nymphe de Musca avant le dévelop- pement du pigment et des trachées, l’œil composé, les centres nerveux et les parties intermédiaire ont seules été dessinées. 0, œil composé; fpr, couches des fibres postrétiniennes; {g, lame ganglionnaire; fpg, couche des fibres préganglionnaires ; cch, couche des fibres en chapelet; cr, croissant du noyau central; ev, éventail du noyau central; sa, sillon annulaire séparant le gan- glion optique du cerveau proprement dit; æs, trou œsophagien. 348 H. VIALLANES. — HISTOL. ET DÉVEL. DES INSECTES. Fig. 2. Portion inférieure de la préparation précédente grossie davantage (195 diam.). €, cornée; cer, couche des cellules cristalliniennes ; ret, couche des rélinules; zn1', zone nucléaire des rétinules ; po, membrane limitante posté” rieure de l'œil; fpr, fibres postrétiniennes; cm, granules müriformes empri- sonnés entre les fibres postrétiniennes; al, limitante antérieure de la lame ganglionnaire; cg, couche des cellules ganglionnaires ; cp, couche des fibres en palissade; znp, zone nucléaire des fibres en palissade; ml, limitante moyenne de la lame ganglionnaire ; fn, couche des fibres nucléées ; Jp, limi- tante postérieure de la lame ganglionnaire ; fpg, couches des fibrés prégan- glionnaires; nev, névrilemme en voie de formation constituant la limitante antérieure du ganglion optique; cch, couche des cellules en chapelets; cr, croissant du noyau central, zng, zone nucléée antérieure de l'éventail; ev, éventail; ecg, écorce grise du ganglion optique. Fig. 3. Coupe transversale de la patte d’une nymphe; gross. 180 diam. m, ébauche des muscles ; t, trachées. NOTES ANATOMIQUES SUR UNE LINGUATULE OBSERVÉE CHEZ L'ALLIGATOR LUCIUS. Par M. Joannes CHATIN. Le groupe des Linguatules ou Pentastomes, dontles affinités zoologiques ont été si longtemps méconnues, a fréquemment appelé l’attention des anatomistes. [ls lui ont consacré de nombreux travaux (1) qui, malgré leur valeur, n’ont pu que (1) Schrark, Linguatula oder Zungenwurm, eine neue Sert der Ein- geweidewürmer, 1796. Rhind, Lescription of a species of Worm found in the frontal sinus of a Scheep (Edinb. Journ. of nat. and geogr., t. [, 1830). Owen, On the anatomy of Linguatula tænioides (Trans. Zool. Soc., 1835). Diesing, Versuch einer Monographie der Gattung Pentastoma (Ann. Wien. - Mus., 1835). pn/ Mirañi, Beitrage zur Anatomie des Pent.tænioides (Nova Acta Acad. Leop. Car., 1835, et Ann des sc. nat., ® série, t. VI, Zoologie, 1836). Owen, Analomie der Linguatula tænioides (Isis, 1837). Wyman, Notice of two species of Linguatula (Boston Jour. nat. History t. V, 1845). P.-J. van Beneden, Recher ches sur l'or ganisation et le développement des Linguatules (Ann. des sc. nat., 3° série, t. XI, Zoologie, 1849). E. Blanchard, De random el des rapports naturels des Linguatules (Comptes rendus des séances de l’'Academie des sciences, t. XXX, 1850). Gros, Ueber Linguatula ferox (Fror. Tags. Zaol., 1850). Mayer, Ueber Pentastomum proboscideum (1d., 1851). Schubart, Ueber die Entwickelung des Pentastoma tænioides (Zeitschrift f. Zoologie, 1853). Küchenmeister, De la Linguatula ferox (Acad. de Belgique, 1855). L 1d., Sur les Linguatules vivant en parasiles dans le foie de l'Homme et de plusieurs Mammiferes (L'Institut, XXI, 1855). Bilharz, Ueber Pentastomum constricitum (Zeitschrift f. Zoologie, 1856). P.-J. van Beneden, Note sur quelques Pentastomes (Acad. de Belgique, 2e série, t. IL, 1857). Leuckart, Sur les métamorphoses du Pentastoma (L'Institut, 1857). Harley, On the Anatomy of a new species of Pentastoma found in the long and air-sac of an Egyptian Cobra (Proceedings Zool. Soc., 1857). Leuckart, Démonstration par voie expérimentale de l'identité spécifique du ANN. SC. NAT., ZOOL., DÉCEMBRE 1882. XIV. 23. — ART. N° 9 D J. CHATIX. partiellement élucider l’histoire de ces singuliers parasites ; d'autre part, on ne pouvait donner alors à l’histologie sa place légitime Aussi, avais-je pensé qu'il y aurait quelque intérêt à faire connaître la constitution de l’un des types les plus intéressants de la famille. J’espérais pouvoir en pour- suivre complètement l’examen, lorsque des circonstances imprévues, m'imposant d’autres recherches, m'ont obligé à limiter mes observations, sans me permettre de les étendre à l’ensemble des appareils organiques. Jai même dû en différer longtemps la publication puisqu'elles remontent aux premières semaines de l’année 1881 ; elles ont été poursuivies dans le laboratoire d'anatomie zoologique de l’École des Hautes Études, dirigé par MM. H. et A. Milne Edwards. En disséquant un Caïman à museau de Brochet (AUigator Lucius Cuv.) (1) de grande taille (2), je trouve le foie littéra- lement farci de Linguatules. Les autres organes n’offrent au- cune trace de ces parasites, mais ils sont tellement nombreux dans la masse hépatique qu'il est impossible d’y pratiquer la moindre incision sans qu'ils apparaissent aussitôt. ils sont libres et non enkystés, particularité remarquable si l’on se re- porte aux notions encore classiques et suivant lesquelles les Pentastomes devraient toujours être enkystés dans le foie, le péritoine, les muscles, et ne sauraient être rencontrés, à l’état libre, que dans les cavités ouvertes (fosses nasales, sinus, voies respiratoires, canal intestinal, etc.). Or ils se montrent ici complétement: libres ; c’est en vain que Je mulüplie les préparations pour rechercher si l’enkyste- ment ne se manifesterait pas, au moins à l’état d’ébauche, Pentastoma denticulatum ef du Pentastomum tænioides (Bull. Acad. Bel- gique, 1857). Jacquart, Mécanisme de lu rétraction des ongles des Félis et des crochets des. Linguatules trouvées dans les poumons des Serpents (Journal de l Anatomie et de la Physiologie, 1866). (1) Duméril et Bibron, Erpétologie générale, t. LL, p. 75. (2) Il mesurait 2°,60. ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. 3 dans telle ou telle partie de l'organe. Je n’en rencontre jamais le moindre indice, et e’est à peine si je puis parfois constater une légère induration des tissus. Encore cette modification ne se rencontre-t-elle que sur les points où les Linguatules sont agglomérées en nombre notable et, comme on va le voir, cette disposition est toujours exceptionnelle. En effet, les parasites, loin d’être rassemblés, plus ou moins inertes, en amas nombreux, ainsi qu'on l’observe fréquem- ment, se trouvent au contraire disséminés dans le foie qu'ils parcourent en tout sens. Ge n’est que de loin en loin que se montrent de petits pelotons formés par le rapprochement de sept ou huit Pentastomes, très rarement plus. Non seulement ces parasites sont parfaitement vivants (la mort de l'hôte remonte à trois jours), mais leur vitalité est ex- trême et se traduit par des déplacements incessants. Il est donc impossible de leur assigner une station particulière dans l’or- gane hépatique : ils occupent indifféremment toutes ses parties; cependant ils paraissent surtout abondants au voisinage des vaisseaux et pénètrent même dans ceux-ci, car j'en trouve plu- sieurs dans une des branches de l'artère hépatique. Leur progression, dont je décrirai plus tard le mécanisme, est très rapide : en pratiquant des coupes dans la masse hépa- tique, on voit presque immédiatement apparaître des Penta- stomes sur des points qui n’en offraient aucune trace. De même, quand on cherche à les saisir, ils s’enfoncent au moindre contact dans le tissu ambiant. Les plans fibreux semblent seuls leur opposer quelque résistance, et parfois même ce n’est qu'après de longs efforts qu’ils parviennent à franchir l'obstacle : je dépose des Linguatules sur un lambeau de foie, encore revêtu de sa capsule fibreuse; c’est seulement au bout d’une heure qu’elles peuvent le traverser, pour dispa- raître dans le tissu sous-jacent. Plongées dans l’alcool, ces Linguatules meurent rapidement après s'être pelotonnées en boule, l’extrémité caudale venant se placer dans le voisinage de la tête. Elles résistent long- temps à l’action de la glycérine, pouvant y vivre durant une 4 J. CHATEN. heure et demie ou deux heures : on les voit se raccourcir, puis s'étendre, déployer leurs crochets céphaliques pour les replier ensuite, elc.; d’énergiques contractions péristaltiques ani- ment le tube digestif et revêtent parfois le caractère d’oscilla- tions assez régulièrement rythmées. L'étude des Linguatules observées vivantes dans ce liquide permet donc de recueillir déjà quelques notions intéressantes sur la constitution générale et le mode de fonctionnement de certains organes ; par contre, l'emploi de la glycérine ne fournit le plus souvent, pour l’exa- men histologique des Linguatules, que des résultats défec- tueux; aussi, aurai-je soin de faire connaître successivement la technique particulière qu’il convient d'appliquer à l’étude des divers systèmes ou appareils. FORME GÉNÉRALE DU CORPS. CROCHETS CÉPHALIQUES. Le corps, d’un blanc grisätre, est long de 9 millimètres en moyenne; sa plus grande largeur est égale à 0"",9. Il compte environ quatre-vingts anneaux, sans qu'on puisse d'ailleurs observer, à cet égard, une constance absolue chez les divers individus. L’extrémité céphalique, légèrement déprimée, se termine antérieurement par un bourrelet excavé sur lequel s’ap- puie la première paire de crochets. Au-dessous de ceux-ci se trouve une fossette qui les sépare de la seconde paire de crochets; c’est au dela de cette région que l’annulation commence, les champs latéraux offrant dès lors les saillies et les dépressions qui se succèderont sur toute l'étendue du corps. À la description de cette partie antérieure du corps, se rattache naturellement l'étude des crochets de la Linguatule. Ainsi que je le rappelais précédemment, ces organes se trouvent disposés en deux paires: la première est tout à fait extérieure, la seconde peut être qualifiée de péristomienne, car elle se trouve placée sur une ligne passant par le milièu de l’orifice buccal. ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. D Considérés en eux-mêmes, les crochets offrent un intérêt tout spécial et dont on trouve le témoignage dans les minu- tieuses études que leur ont consacrées les zoologistes soucieux d’y trouver des caractères précis et constants pour la diagnose des espèces. Les travaux de Diesing méritent à cet égard une mention spéciale et, malgré leur date relativement éloignée, peuvent être encore utilement consultés. Il semble cependant que, sur quelques points, les conclu- sions de Diesing ne puissent être acceptées sans réserve, car si elles ne cessent de révéler une observation consciencieuse et sagace, elles paraissent porter parfois la trace d’une généralisa- tion trop rapide. Tel est le cas des « crochets géminés » aux- quels Diesing croit pouvoir accorder une fréquence et, par suite, une valeur qu'ils ne peuvent réclamer. Introduite hâtivement dans l’histoire morphologique des Linguatules, développée surtout plus que de raison, cette notion ne présente évidemment qu'une importance secondaire et ne saurait recevoir que des applications fort limitées. C’est ainsi que chez la Linguatule du Caïman, un examen superfi- ciel semble justifier pleinement les vues de Diesing, tandis qu’une étude plus minutieuse oblige à les repousser : quand on considère dans son ensemble, sans dilacération préalable, la région céphalique, on croit voir des crochets doubles ou même triples, mais cette interprétation disparait devant une observation attentive. Celle-ci montre, en effet, que les crochets, de forme d’ailleurs très spéciale, se composent d’une partie basilaire (tige ou manche), fort allongée, s’enfonçant profondément dans les tissus ambiants et donnant insertion aux muscles destinés à mettre en mouvement le crochet. À sa partie supérieure se voient trois pointes ou lames recourbées et de puissance inégale. L'une (fig. 2, 4) qui peut être regardée comme le centre de ce système, est forte et recourbée de haut en bas; sa base est large, son extrémité libre est également très développée. Au-dessus de la lame précédente, s’avance une pointe plus (9) J. CHATIEN. grêle (fig. 2,4) et faiblement incurvée; se dirigeant d’abord de bas en haut, elle s’abaisse légèrement vers sa partie terminale. Sa base, assez étroite, sa prolonge sur le bord interne du cro- chet par une côte à peine saillante. La troisième lame (fig. 3,c) se montre au-dessous de la lame principale. Fortement recourbée, terminée par une pointe acérée, elle se dirige de haut en bas et de dehors en dedans. C’est surtout pour l’exacte interprétation de ce dernier segment que l’observation de l’animal vivant est indispen- sable, sinon on se trouve conduit à formuler une appréciation complètement erronée et qu'il est presque impossible d'éviter quand on se borne à l’examen post mortem ou, condition plus fâcheuse encore, à l'observation d'individus conservés dans l'alcool. En raison de sa situation inférieure et de l’orientation que lui imprime le sens de son incurvation (de dedans en dehors), cette dernière lame se trouve facilement masquée par les téguments et les tissus voisins : elle semble alors complè- tement enfouie dans leur masse. Quelle idée fait-elle naître dans l’esprit de l'observateur, même lorsqu'il est familiarisé avec la constitution des organes analogues, tels que les cro- chets des Cestodes? Evidemment celle d’une simple « garde ». Mais si l’on examine l'animal vivant, on voit que cette assimilation ne peut aucunement se défendre: c’est bien réel- lement une troisième lame, et, s’il en fallait une preuve, on la trouverait dans le mode de fonctionnement du crochet. Lorsque celui-ci se met en mouvement, on constate nettement que la lame c se déploie au dehors comme les lames & et b et réclame ainsi une valeur égale à celle que l’on doit accorder à ses congénères. En résumé, on ne saurait décrire, chez la Linguatule du Caïman, des crochets supplémentaires, des crochets géminés ou des «paires doubles». Les crochets, parfaitement simples dans leur partie basilaire ou somatique, se terminent à leur extrémité libre par trois lames mobiles. Ils sont répartis en deux paires d’égale importance. ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. 7 Des muscles puissants mettent en mouvement les diverses parties du crochet ; il convient même de rappeler que des faisceaux très développés s’insèrent sur la lame c dont les rapports achèvent ainsi d'établir la véritable signification. À la surface du corps se voient diverses marques extérieures dont la description trouvera sa place naturelle dans l’histoire du système tégumentaire. Si la région céphalique de l'animal présente, par ses appendices, un intérêt spécial, on ne saurait accorder la même attention à la partie postérieure : légèrement atténuée et arrondie, elle mérite à peine d’être mentionnée. TÉGUMENTS. Épais et résistants, les téguments constituent, par leur union avec les couches contractiles sous-jacentes, un véritable tube dermo-musculaire comparable à celui qui s’observe chez divers types de l’embranchement des Vers. La description du système musculaire ne saurait trouver place dans ce chapitre, aussi dois-je en différer l’exposé pour insister particulièrement sur la texture du tégument général. La complexité même qui caractérise celui-ci oblige à établir une certaine méthode dans l’analyse de ses diverses parties parmi lesquelles il con- vient de distinguer : 4° La peau; 2° Les productions cutanées (aiguillons, canaux poreux, olandes, etc.). | Psau. — D'une épaisseur qui ne varie que très légèrement sur les différentes régions du corps, la peau se montre formée de deux couches essentielles, déjà bien distinguées chez le Pen- tastomum Diesingü, par M. van Beneden (1). Par leur ordre de superposition, par leurs rapports géné- raux comme par leurs caractères propres, ces deux zones (1) P.-J. van Beneden, Recherches sur l’organisation et le développement des Linguatules (Ann. des sc. nat., 3° série, Zool., t. XI, 1849, p. 318). 8 J. CHMATEN. sont assez exactement conformes aux notions fournies par l’étude de la généralité des Arthropodes. La couche extérieure répond, en effet, à la « cuticule », et la couche profonde à l’«hypoderme», sans qu'il soit nécessaire d'ouvrir, au sujet de ces définitions de mots, Îles stériles dis- cussions qui ont si longtemps divisé les histologistes. La zone cuticulaire recouvre la surface entière du corps et, par son épaisseur, comme par sa structure, représente la par- tie essentielle du système tégumentaire considéré au point de vue de la protection qu'il assure aux organes internes. Sa puissance et sa densité varient d’ailleurs suivant les régions: s’amincissant dans les intervalles des anneaux, elle y acquiert une mollesse et une souplesse qui permettent à ces segments une mobilité suffisante; s’'indurant, au contraire, sur le segment même, elle y présente ses caractères normaux, et c’est à ce niveau qu'il convient de l’étudier. On constate alors qu’elle est formée de lamelles faciles à distinguer et dont l’observation attentive fournit d’intéressants détails : considérées dans leur texture propre, ces lamelles se montrent d'autant plus résis- tantes qu’on les examine dans un point plus voisin de la sur- face extérieure du corps, ce qui oblige à reconnaitre dans la zone cuticulaire des régions de densité variable ; étudiées dans leur orientation, ces lamelles affectent des directions fort difiérentes et ne reproduisent aucunement cette stratification régulière si souvent figurée, dans divers animaux voisins, par de nombreux auteurs. En réalité, la cuticule possède ici une constitution nettement fasciculaire et ses faisceaux se réunis- sant en groupes plus ou moins volumineux, s’infléchissant dans des directions diverses, forment un ensemble dont la com- plexité se trouve encore accentuée par la présence des canaux poreux qui traversent cette couche pour gagner la région sous-jacente. Celle-ci représente l’chypoderme», et son étude suffit à montrer le danger des généralisations hâtives et des rapproche- ments prématurés. Fondant ses lois sur les résultats de quel- ques observationsisolées, n’hésitant pas à appliquer à Puniver- ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES,. 9 salité des êtres compris dans un des embranchements les plus vastes de la série animale, les notions fournies par l’examen de quelques types vulgaires, certaine École a depuis longtemps assimilé l’hypoderme des Arthropodes à une membrane épithé- liale : une assise de cellules eût figuré la zone hypodermique proprement dite, tandis que la face supérieure ou libre de ces éléments, subissant une différenciation spéciale, eût formé la succession de lamelles qui constitue la cuticule. Lorsqu'on se reporte àces planches et auxdeseriptions quiles accompagnent, on croit avoir sous les yeux quelque tracé schématique de l’épi- derme végétal accompagné de sa cuticule et l’on peut se demander si l’origine de cette conception théorique ne devrait être cherchée dans quelque lointain souvenir des modifications propres au tissu protecteur des végétaux. En ce qui concerne les Pentastomes, l'observation directe ne permet aucunement de l’adopter, tous les faits la contredisant formellement : dès qu'on examine cette zone sur des coupes pratiquées en différents sens et colorées par les divers réactifs, on constate que, loin d'offrir la structure cellulaire qu’on lui a si rapide- ment assignée, elle ne se montre formée que par une masse de protoplasma dans laquelle se trouvent épars de nombreux noyaux. [l faut une étude très minutieuse et d’incessantes modifications dans la technique adoptée, pour parvenir à découvrir les liens organiques qui unissent noyaux et proto- plasma : on reconnaît alors que celui-ci se groupe en amas de volume variable autour des noyaux qui deviennent ainsi le centre de petits départements cellulaires ; mais ces aires ne sont aucunement réparties sur une seule et même ligne horizontale, comme le veut la théorie à laquelle je viens de faire allusion; jamais on ne remarque autour des corps pro- toplasmiques la membrane d’enveloppe si complaisamment, si fréquemment figurée. En revanche, le protoplasma montre des formations secondaires dont on ne saurait omettre la mention, et qui se présentent généralement sous l’aspect de granula- tions pigmentaires faiblement colorées. Lorsque ces produc- tions existent, elles se groupent dans le voisinage du noyau et 10 J. CHATIX. nullement vers la périphérie de l'élément, de sorte qu’on ne saurait invoquer leur présence pour justifier la distinction d’une membrane limitante. PiquANTs.— On sait qu’à la surface du corps des Lingua- tules, se trouvent des appendices tégumentaires qui s s'élèvent sous l’aspect de piquants ou aiguillons plus ou moins acérés, plus ou moins résistants. Leur forme, leur mode de répartition offrent un intérêt d'autant plus considérable que les zoologistes ont depuis long- temps, et fort utilement, introduit ces notions dans la dia- gnose des diverses espèces. Chez le Pentastome du Caïman, ces formations se montrent régulièrement disposées sur le bord de chaque segment, repro- duisant assez exactement ce qui s’observe dans le Pentastonum denticulatum (1). Leurs dimensions sont très minimes ; aussi, ne pente les distinguer qu’à l’aide d’un assez fortgrossissement (LS - Verick). Ils se composent de deux parties : ° une région basilaire, large et renflée; 2 une région apicilaire, effilée, offrant l’as- pect d’une pointe acérée, souvent recourbée légèrement. Limités par une une dure, résistante, bol ces aiguillons offrent à leur centre une pulpe molle et finement granuleuse. CANAUX POREUX. GLANDES CUTANÉES, — Lorsque l’on exa- mine la surface tégumentaire sous un grossissement moyen (+), on y découvre des orifices qui semblent tout d’abord sim- ples, mais qui, observés avec une attention plus minutieuse, se montrent bordés d’un double contour qui leur donne un aspect aréolé. Ces ouvertures sont régulièrement disposées, chaque seg- ment du corps en portant une rangée, ils sont placés sur la (1) Gobbold, Parasites ; À treatise on the Entozoa of Man and Animals, including some account of the Ectozoa, p. 261, fig. 51, 1879. ARTICLE N° 2, ANATOMIE DES LINGUATULES. 11 même ligne et sensiblement équidistants. Plusieurs auteurs n'hésitent pas à les qualifier de « stigmates », leur attribuant la valeur de véritables orifices respiratoires (1). Je crois que c’est agir un peu rapidement et dépasser la limite des déduc- tions fonctionnelles permises par les affinités zoologiques. Rien, dans l’organisation générale des Linguatules, ne justifie une pareille interprétation, et si l’on substitue aux conceptions théoriques les résultats de l'observation directe, on ne tarde pas à reconnaitre à ces parties une sigmfication complètement différente. En effet, quand on pratique une coupe verticale dans la région cutanée, on constate que la zone externe du tégument se trouve traversée par des canalicules se continuant dans toute l'épaisseur de la peau et venant s'ouvrir aux orifices dont je mentionnais précédemment la situation et qui repré- sentent ainsi l'ouverture de véritables canaux cutanés. Quelle est la sigmification de ces canaux? En étudiant, sui- vant le procédé que je viens d'indiquer, la section des tégu- ments, on découvre, au-dessous de leur couche profonde, des formations dont la nature ne saurait soulever la moindre incer- titude; ce sont des organes glandulaires. Tantôt ils sont uni- cellulaires ; tantôt, au contraire, ils sont pluricellulaires. Dans le premier cas ils sont en forme de cul-de-sac allongé, mesurant 0,03 à 0,05 dans leur diamètre transversal ; le noyau est très apparent ; la masse protoplasmique, abondante et finement granuleuse, offre parfois de, petits globules faible- ment réfringents. Par son aspect de bouteille ou d’amphore, la glande rappelle assez souvent l'apparence des « cellules muqueuses » décrites chez les Sélaciens par Todaro (2). Lorsque la glande est pluricellulaire, elle peut être comparée (1) « The integument of the body is perforated with numerous respiratorv openings or stigmata. » (Cobhold, Parasites, p. 559.) — « Annuli lineares, unica serie stigmatum instructi. » (Leuckart, Bau und Entwickelungsges- chichte der Pentastomen, p. 155. (2) Todaro, Die Geschmachsorgane der Rochen (Centralblait für d. m, Wissensch., n° 15, 1872). 49 J. CHA'TIN. à une petite outre limitée par une mince membrane et présen- tant des cellules dont le diamètre moyen ne dépasse pas 0"",01. Leur noyau est petit et entouré d’abondants granules, géné- ralement pâles. Il est inutile d’insister sur la valeur qui s'attache à ces relations des canalicules poreux avec les glandes eutanées; seules, ces connexions permettent d'établir exactement leurs rapports réciproques et de déterminer avec une rigueur suffi- sante leur véritable signification. Les résultats quiles expriment sont parfaitement conformes aux enseignements classiques de l’anatomie comparée nous montrant, dans la généralité des Arthropodes, l’existence de semblables canaux disposés pour livrer passage aux produits sécrétés par des glandes analogues à celles qui viennent d’être décrites dans le Penta- stome du Caiman. APPAREIL DIGESTIF. Située à la face ventrale du corps, la bouche s’ouvre, non pas à l’extrémité antérieure de celui-ci, mais à quelque dis- tance en arrière de cette extrémité. Elle se montre sous l'aspect d’une fente antéro-postérieure, plus large en son milieu qu’à ses deux extrémités ; les quatre crochets l'entourent, mais elle ne se trouve pas exactement située à égale distance de la paire antérieure et de la paire postérieure. Son pôle antérieur (1) remonte légèrement entre les crochets antérieurs, tandis que son pôle postérieur descend très notablement en arrière de la base des crochets posté- rieurs. Le contour de l’orifice buccal se montre limité par un bord solide et légèrement saillant. Ce cadre est de nature chitineuse, présente une résistance assez considérable et donne insertion aux muscles péribuccaux. Destinés à assurer les mouvements de l’ouverture buccale, (1) Ce terme peut d'autant mieux s’appliquer ici que la forme de l’orifice buccal est sensiblement comparable à une ellipse. ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. 15 ces muscles sont groupés en deux masses principales, symé- triquement disposés sur les côtés de la ligne axile; leur direc- tion est oblique d’avant en arrière. À la bouche succède le tube digestif dans lequel on peut distinguer les trois régions suivantes : 4° L’intestin initial; 2° L’intestin moyen; 9° L'intestin terminal. Ces différentes parties sont lom d'offrir ici des limites aussi nettement tracées que chez beaucoup d’Arthropodes. Cepen- dant elles possèdent des caractères généralement assez spé- claux pour qu’on puisse les délimiter respectivement sans ren- contrer de difficultés réelles. L’intestin initial offre une gracilité qui permet de le recon- naître aisément; 1l se développe, sous l’aspect d’un étroit canal qui commence à la cavité buccale pour se terminer dans la région suivante du canal alimentaire. Son diamètre demeure sensiblement constant sur toute son étendue. Lorsqu'on accompagne ainsi l'intestin initial jusqu’à sa ter- minaison postérieure, on voit le tube digestif acquérir, à ce niveau, un calibre plus considérable. Cette tendance ne s’af- firme pas brusquement, elle s’esquisse d’abord par une ampli- fication progressive, et c’est peu à peu que l'élargissement s’accentue. Lorsqu'on observe l’animal à l’état vivant, condi- tion indispensable pour l’exacte interprétation de ces diverses particularités, on constate que cette région moyenne est géné- ralement distendue par un contenu de couleur jaunâtre. Si l’on observe attentivement la direction et le mode de propaga- tion des mouvements péristaltiques du tube digestif, on voit qu’ils résident principalement dans cette région moyenne. À sa suite vient l'intestin terminal, dont les dimensions sont plus réduites, qu'on les examine dans le sens longitudinal ou dans la direction transverse. On voit que, dans cette description, je me suis scrupuleuse- ment attaché à décrire les diverses parties du tube alimen- taire sous des noms qui rappellent simplement leur ordre de 14 3. CHATIN. succession, sans tenter de substituer à ces termes des déno- minations empruntées à l’anatomie des animaux supérieurs. Cette réserve s'explique et se justifie par la configuration même de ces diverses régions. Si l'intestin initial peut recevoir, sans exagération grave, le nom de canal œsophagien, on serait déja moins en droit de décrire comme un véritable estomac la partie moyenne; quant à l'intestin terminal, ce serait par une analogie encore plus lointaine qu’on tenterait de lui appliquer le nom de rectum. Il ne suffit pas de considérer ainsi le tube digestif au double point de vue de l’anatomie et de la morphologie; 1l faut égale- ment, sous peine de laisser une grave lacune dans son étude, l’examiner dans sa structure intime. Son histologie s’exprime d’ailleurs par des dispositions rela- tivement simples. D’une façon générale, on peut, en effet, distinguer dans ses parois les deux zones suivantes : 4° Membrane limitante ; 2° Couche épithéliale. Membrane limitante. —J'emploie à dessein ce terme dont l'explication doit être cherchée dans la nature même de la zone parlétale que je décris en ce moment. De texture essen- tiellement mixte, elle se montre composée tout à la fois de trabécules conjonctifs et de plans musculaires sans qu'il soit généralement possible de les délimiter nettement et d'établir entre les éléments de soutien et les éléments contractiles des frontières topographiques répondant à leur distinction his- tique. L’épaisseur de la membrane lhimitante se maintient assez constante sur toute l’étendue du canal digestif; cependant elle semble s’exagérer vers la partie terminale de l'intestin ini- tial et vers la portion antérieure de l’intestin moyen, c’est-à- dire dans la région intermédiaire entre ces deux parties du tube alimentaire. Couche épithéliale. — Sur la membrane limitante se voit un revêtement épithélial formé par des éléments faciles à distinguer sur des pièces fraiches. ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. 15 Observées dans ces conditions, les cellules de l’épithélium intestinal apparaissent avec les caractères suivants leur volume est relativement assez considérable, mais le corps protoplasmique n’en représente, à l’état de complet développement, qu’une faible partie; la presque totalité du protoplasma est, en effet, envahie par la formation de nom- breux granules pigmentaires, de couleur jaunâtre ou bru- nâtre. Parfois même l'abondance de ces productions secon- daires masque prématurément la présence du noyau; dans d’autres cas, au contraire, le noyau demeure longtemps distinct. | En raison des dimensions qu’elles présentent dans lPintes- tin moyen, comme en raison de la pigmentation qui les y caractérise, ces cellules peuvent surtout s’observer dans cette région ; mais, et je ne saurais trop insister sur cé point, la condition essentielle pour leur étude réside dans l'examen de pièces fraiches. Quant à instituer de pareilles recherches sur des individus conservés dans l'alcool ou dans tout autre liquide analogue, on ne saurait y songer, Car Ce tissu ne peut aucune- ment être distingué en de semblables conditions. C’est à peine si l’on découvre alors, comme témoins ultimes de son existence, de fines granulations brunâtres, éparses sur la paroi intestinale et dont l’aspect ne permettrait aucunement de soupçonner la nature et la valeur des éléments qui viennent d’être décrits et dont ils constituent les derniers vestiges. Peut-être quelques observateurs songeront-ils à assimiler cette zone épithéliale à une couche de tissu hépatique, mais un tel rapprochement ne me parait pas à l'abri de toute ceri- tique; j'estime même que, dans l’état actuel de nos con- naissances, on ne saurait le proposer sans l’accompagner de réserves formelles. Les réactions fournies par ces cellules indiquent, en réalité, des caractères histochimiques trop incerlains pour qu’on soit autorisé à leur accorder une valeur fonctionnelle exactement déterminée. L’histologie permet de les regarder, avec assez de vraisemblance, comme des élé- ments glandulaires ; chercher à accentuer davantage leur signi- 16 J. CHATIN. fication, serait sortir du domaine de l’observation pour péné- trer dans celui de l’hypothèse. SYSTÈME NERVEUX. Depuis l’époque où les beaux travaux de MM. Blanchard (1) et van Beneden (2) faisaient connaître le mode d'organisation propre au système nerveux des Linguatules, l’histoire de cet appareil n’a réalisé nul progrès sensible. Dès qu’on interroge les divers mémoires publiés dans ces dernières années, on est immédiatement frappé de l'incertitude, de l’insuffisance et de la concision des notions exposées. Diesing et Leuckart n’ont aucunement modifié l’état de la question. Jacquart, si merveilleusement servi cependant par les dimensions gigantesques des Pentastomes qu'il put étudier, se montre, dans ses descriptions, notablement inférieur à ses devanciers (3). Depuis lors, nul fait nouveau n’a été recueilli, et les auteurs classiques doivent se borner à des indications analogues à celles-ci : € Als Gentralorgan des Nervensystems fungirt ein unter dem Schlunde gelegenes Ganglion mit einem Schlundringe (4). » Tels sont, d’après un de ses repré- sentants les plus autorisés, les enseignements de la zoologie contemporaine; 1l serait difficile de rien imaginer de plus sommaire et de plus théorique. L'observation directe permet fort heureusement d’amplifier cet exposé, elle ne permet pas seulement d’y introduire des détails nouveaux, elle oblige, en outre, à modifier sur plusieurs points les descriptions antérieures, et fournit les éléments indispensables à l’exacte détermination des parties constitu- tives de l’appareil. S'il était nécessaire de justifier son intervention, on en trouverait facilement la preuve dans l’étude de la masse (i) Blanchard, op. cit. (2) P.-J. van Beneden, op. cit. (3) Jacquart, Journal de l’'Anatomie et de la Physiologie, 1866. (4) G. von Hayek, Handbuch der Zoologie, t. 1, p. 131, 1879. ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. BF œsophagienne. Tous les auteurs s'accordent à lui reconnaitre la valeur d’un véritable centre nerveux; mais, particularité singulière, ils ne semblent aucunement soucieux de légitimer par des témoignages anatomiques, cette assimilation fonction- nelle; les planches qui accompagnent leurs mémoires paraissent même souvent en contredire le texte, car on y cherche vainement la trace de quelque disposition propre à établir l’existence d’un centre ganglionnaire. Sous quel aspect, en effet, représentent-ils cet organe ? Sous l'apparence d’une masse fibroïde, formée de faisceaux rappro- chés ; à cet égard, nulle variation : toutes les planches sont identiques et, si lon doit excuser les recherches dont la date remonte à vingt-cinq ou trente ans, le même privilège ne sau- rait évidemment s'étendre aux travaux plus récents. Il est particulièrement regrettable de constater de sem- blables lacunes dans le mémoire de Jacquart : opérant sur des animaux de grande taille, publiant ses recherches à une époque (1866) où l’on connaissait exactement la signification des divers éléments nerveux, cet observateur n’eût pas dû négliger aussi complètement la partie histologique de son sujet. Quel est le critère anatomique d’un centre nerveux ? Cha- cun sait qu'il s'exprime par la présence d’organites particu- liers, les cellules nerveuses, qui peuvent revêtir des aspects variables, mais conservent toujours leur valeur propre. Or aucun des zoologistes qui ont retracé récemment l’histoire des Linguatules ne nous fouruit à cet égard la moindre indication ; ils se bornent constamment à décrire et à figurer la même masse « fibroïde », à contours ambigus, à structure indécise. J'aurai bientôt l’occasion d’insister sur quelques dispositions qui expliquent et excusent l’insuffisance de ces descriptions ; mais, auparavant, je dois faire connaître la méthode qui m’a permis d'étudier le système nerveux des Linguatules et d'ajouter peut-être quelques faits nouveaux à son histoire. Il suffit de se reporter aux dimensions offertes par les Pen- tastomes du Caïman pour pressentir que leur dissection ne ANN. SC. NAT., ZOOL., DÉCEMBRE 1882. NIV D LE NAN NENAN 18 JS. CHATIN. saurait être poursuivie que dans des limites fort étroites, en présence de difficultés bientôt insurmontables. C’est alors qu’il convient de faire intervenir les coupes successives, pratiquées à des niveaux aussi peu éloignés que possible. Je me hâte d'ajouter que je considère leur intervention comme un simple moyen d'étendre les recherches au delà des limites imposées par les conditions matérielles de l'observation ; on ne saurait y chercher les éléments d’une véritable technique, ainsi qu’on a tenté de le démontrer dans ces dernières années: en anatomie zoologique, la méthode des coupes successives doit être regardée comme purement auxilaire; dès que les circonstances le permettent, on doit lui substituer, sans hési- tation, la dissection qui seule permet d'interpréter exactement les rapports naturels des parties et d'appliquer à celles-ci leur véritable signification. Ces réserves faites sur la réelle valeur de la méthode des coupes, j'ajoute que les procédés auxquels j'ai dû recourir diffèrent peu de ceux que j'ai employés dans d’autres circon- stances et, en particulier, pour l’étude histologique des fais- ceaux nerveux des Mollusques. Aussi crois-je inutile de revenir sur ces détails pratiques; je me borne à rappeler qu'ils se résument dans limprégnation par le chlorure d’or après fixa- tion par l'acide osmique au centième et traitement par l'acide formique au quart. En examinant alors le centre nerveux et s’aidant de coupes pratiquées en différents sens, on recueille une première notion dont limportance ne tardera pas à s'affirmer lorsque le moment sera venu de comparer la réalité des faits avec les descriptions antérieures : loin d’être privée de toute protection spéciale, loin de se trouver en contact immédiat avec les muscles ambiants, ainsi qu’on l’admet généralement, la masse nerveuse se trouve revêtue d’une enveloppe spéciale, caracté- risée par la texture suivante. À l’état frais, cette membrane est légèrement jaunâtre ou glauque, mais cette teinte s’effaçant si l’on modifie l’obliquité de la lumière ne possède qu’une valeur secondaire ; quant ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. 19 au tissu même de la tunique, il se montre essentiellement formé d'éléments lamineux denses, mêlés de fibrilles ténues et brillantes, dans lesquelles on ne saurait méconnaitre une réelle analogie avec les fibres élastiques. Comme je le faisais remarquer précédemment, l'existence de cette enveloppe permet d’élucider une assez ancienne concep- tion, singulière au premier abord, et d’après laquelle le centre ganglionnaire des Pentastomes eût été représenté par une masse purement « fibreuse »; or ce qualificatif doit s'appliquer non au centre lui-même, mais à sa fumica propria, à cette sorte de membrane méningoide qui semble avoir marqué la limite ultime de la plupart des observations. On s’est, en effet, trop généralement borné à l’étude exté- rieure de l'organe dont on ne distinguait ainsi que la zone périphérique et protectrice ; c’est au-dessous de cette mem brane que se trouve la véritable masse nerveuse dont la nature, on va s’en convaincre aisément, s'affirme par des caractères parfaitement normaux. Dans une gangue interstitielle formée par l’intrication d'innombrables fibrilles ténues, se distinguent des éléments cellulaires nettement différenciés ; ce sont d’imcontestables cellules nerveuses, mesurant en moyenne 0"",0012 et présen- tant une constitution dont l'analyse ne laisse pas d'offrir quelque intérêt. | Pour les observer, il suffit de dilacérer lentement une par- celle du tissu dans une goutte d’eau salée à un centième ; l'emploi du chlorure d’or fournit des résultats plus précis et permet de constater que chacun de ces éléments se compose essentiellement d’un noyau volumineux, autour duquel on dis- tingue une mince zone protoplasmique. De ce corps cellulaire, ainsi réduit à des dimensions à peine appréciables, partent de fins prolongements qui présentent une réfringence sensible- ment comparable à celle qui caractérise la zone protoplasmique entourant le noyau. Ces prolongements, généralement au nombre de deux, sont d’une extrême gracilité et ne peuvent s’observer que sur les pièces fraiches, préparées par une 90 J. CHATEX. dissociation progressive ; sur les coupes on les distingue diffi- clement, et l’on serait parfois tenté de décrire des globules apolaires, si l'existence de pareils éléments n’était inconciliable avec tout Ce que nous savons aujourd’hui du mode de fonc- üonnement des cellules nerveuses. En groupant les diverses notions fournies par l’examen de ces éléments, on ne peut s'empêcher d’être frappé de La simi- litude que certains d’entre eux (1) offrent avec les « myélo- cytes » des animaux supérieurs. Représentent-1ls 1c1, comme on l’admet pour les Vertébrés, le type fondamental ou originel du globule nerveux? Cette question s’est souvent imposée à mon attention durant le cours de mes observations sur la Linguatule du Caïman ; mais j'estime que, dans l’état actuel de nos connaissances, 1l y aurait quelque imprudence à tenter de la résoudre, car c’est surtout en semblable matière qu’il importe de se tenir en garde contre toute généralisation hâtive, contre tout rapprochement prématuré (2). Tels sont les résultats fournis par l'étude histologique de ce centre nerveux; on peut apprécier facilement l'intérêt qu'ils présentent pour l’anatomie générale et, j'ajoute, pour P’anato- mie morphologique. Les descriptions antérieures s’accor- daient à nous représenter les Pentastomes comme des types aberrants ; nous devons, au contraire, les considérer désor- mais comme des formes parfaitement normales, n’offrant dans la structure de leur centre nerveux nulle disposition particu- lière ou exceptionnelle. Cette texture reproduit même fidèle- ment les dispositions communes à la généralité des Invertébrés (Arthropodes, Mollusques et Vers (3). (1) Fig. 8. (2) L’analogie avec les myélocytes semble d’ailleurs s’exprimer surtout par des caractères extérieurs; elle paraît moins absolue quand on interroge les manifestations générales de l’élément, lintensité de ses réactions, etc. Tandis que les myélocytes des Vertébrés résistent longtemps à l’altération cada- vérique, celle-ci efface rapidement toute trace d'organisation dans les petites cellules nerveuses de la Linguatule, etc. 2) En ce qui concerne ce dernier groupe, il est impossible de n'être pas ARTICLE N° 2: ANATOMIE DES LINGUATULES. 91 De ce centre principal partent de nombreux trones nerveux qui ne présentent, dans la Linguatule du Caïman, ni la régu- larité figurée par M. van Beneden, ni la diffusion que semblent exprimer les dessins de Jacquart. Sur les bords de la masse ganglionnaire (1), naissent des nerfs assez volumineux et que je propose de désigner sous le nom de nerfs latéraux (2); on peut les subdiviser, d’après leur direction, en nerfs latéraux antérieurs (3) et nerfs laté- raux postérieurs (4). Des nerfs latéraux antérieurs se détachent des filets qui envoient des rameaux aux crochets; certaines de leurs bran- ches terminales se perdent dans les téguments céphaliques. Les nerfs latéraux postérieurs fournissent principalement des filets musculo-cutanés destinés à la presque totalité du tube dermomusculaire. Vers le milieu du bord antérieur du. centre nerveux, naissent des rameaux (9) destinés à la région buccale. On serait tenté d'y voir un dernier témoin de la partie pharyngienne du système stomato-gastrique des Arthropodes supérieurs. Toute- fois, si l'anatomie paraît autoriser ce rapprochement, la phy- siologie commande de ne le formuler qu'avec d’expresses réserves, car il semble que la valeur fonctionnelle de ces divers filets soit assez variable : les uns se distribuent aux parois de la cavité buccale et sont probablement sensitifs ; d’autres, au contraire, se rendent uniquement aux muscles qui mettent en mouvement les lèvres de l'ouverture orale et semblent ainsi représenter des nerfs centrifuges. Dans la région opposée du ganglion, c’est-à-dire vers la parte médiane de son bord postérieur, se voit l’origine de frappé des dispositions communes au centre nerveux des Linguatules et à celui de divers Nématodes étudiés par M. Marion : même tunique protectrice, même masse interne et réellement nerveuse, etc. (1) Fig. 6. COSTA EEE TU TENe (2) Ont: (CON mp: (GAROU 29 J. CHATIN. deux troncs nerveux qui se subdivisent presque aussitôt en un certain nombre de filets qu’on peut désigner sous le nom de nerfs viscéraux (1), car après avoir cheminé sur la face supé- rieure de l’œsophage, ils ne tardent pas à se subdiviser sur l'intestin moyen, etc. Étudiés dans leur structure, ces nerfs se montrent com- posés de fibres ténues qui offrent une légère striation longitu- dimale ei sont simplement revêtues d’une mince gaine proto- plasmique à noyaux elliptiques. Gette gaine est-elle renforcée par la présence d'éléments conjonctfs ? Subit-elle, dans sa zone périphérique, une différenciation appréciable? Il me parait difficile de répondre, avec une précision suffisante, à ces questions. Tout ce que je puis ajouter à la description précédente, c’est que je n'ai Jamais observé de formations myéloides dans ces conducteurs nerveux. Si l’on se reporte aux notions recueillies antérieurement sur la conslitution générale du système nerveux dans les diverses espèces du genre et spécialement chez le Pentastomum Diesingii, on constate que ce même appareil se présente 1e1 avec une évidente simplification dans ses principales parties : manifestant une remarquable tendance à la coalescence, les nerfs des crochets se confondent, dans leur partie initiale, avec les nerfs latéraux dont ils semblent même ne plus figurer que de simples rameaux secondaires ; les nerfs buccaux, éga- lement réduits dans leur nombre, semblent ne plus devoir revendiquer qu’une faible autonomie. Enfin, le système sto- mato-gastrique, si minutieusement étudié chez le P. probos- cideum par M. E. Blanchard, si bien figuré dans le P. Diesingqii par M. van Beneden, témoigne ici d’une telle dégradation qu'on hésite à affirmer sa véritable parenté originelle. Les ganglions secondaires qu'il possède dans les types voisins semblent même faire complètement défaut, car les plus patientes investigations, variées par tous les moyens que peut offrir la technique actuelle, sont impuissantes à en faire (1) Fig. 6, n. v. ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. 23 découvrir la moindre trace. L’anatomie révèle ainsi d’impor- tantes modifications dans l’ensemble de l’appareil; mais il convient de ne pas s’en exagérer la valeur, et pour en appré- cier l’exacte signification, 1l suffit de grouper les faits révélés par l’examen histologique. On voit alors s'affirmer, de la ma- mère la plus éclatante, les liens communs à ces diverses espèces : seules, les dispositions extérieures varient; les ca- ractères essentiels demeurent constamment identiques. SENSIBILITÉ. — ORGANES DES SENS. La sensibilité générale est assez développée et semble plus délicate que dans la plupart des parasites soumis aux mêmes conditions biologiques; les Linguatules réagissent rapidement et vigoureusement contre les excitations mécaniques, chi- miques et électriques. Ces impressions générales et tactiles ren écrit les seuls actes sensitifs dont on puisse constater la manifestation avec quelque rigueur. Peut-on déterminer anatomiquement les organites chargés de les recueillir? L'observation ne fournit malheureusement ici que des résultats approximatifs ; il est possible que les filets ultimes des nerfs tégumentaires se ter- minent à la base des soies cutanées; diverses préparations m'ont paru établir la réalité de ces connexions ; toutefois, je ne les signale qu'avec réserve, l’ensemble des observations n'ayant pas offert sur ce point une constance absolue. - Quant aux excitations lumineuses, je me borne à mention- ner un fait assez singulier : on sait que dans de nombreux Helminthes et Acariens, ainsi que chez diverses larves d’In- sectes, on constate une véritable photophobie, la plus faible lumière suffisant à mettre en fuite ces animaux. Or le stimu- lant lumineux paraît agir ici tout différemment, et, loin de chercher à se soustraire à son influence, les Linguatules se di- rigent vers le faisceau lumineux : dès qu’on pratique une 12 24 J. CRAATIN. coupe dans la masse hépatique qu'habitent ces Pentastomes, on les voit immédiatement apparaître en grand nombre sur la face éclairée. LOCOMOTION. L’étude du mode de locomotion des Pentastomes ne pré- sente pas seulement un réel intérêt pour la physiologie com- parée, elle offre également quelque valeur pour la nosographie de ces êtres, car, seule, elle peut permettre de déterminer le mode de pénétration ou de progression dans les tissus, et d'apprécier ainsi, avec exactitude, leur action nocive. Aussi me suis-je attaché tout particulièrement à lobservation des actes fonctionnels qui concourent à l’assurer. La remarquable vitalité des Linguatules du Caïman, l’action de la glycérime qui, amenant une exagération imitiale des mouvements, ne tarde pas à les ralentir progressivement, m'ont permis de donner à ces expériences toute la durée et toute la précision nécessaires; j'ai pu les répéter à diverses reprises, et les reproduire devant la Société de biologie (4). L'observation d'animaux vivants est, en effet, absolument indispensable pour l'interprétation de ces phénomènes ; il convient, en outre, de faire précéder ces recherches expéri- mentales d’une minutieuse étude anatomique des crochets céphaliques. C’est sans doute pour avoir négligé de suivre une semblable méthode que certains naturalistes ont été conduits à formuler des conclusions absolument erronées sur le fonc- tionnement de ces crochets et, par suite, sur le mode de loco- motion et de pénétration des Pentastomes. Je crois inutile de revenir sur la constitution des crochets céphaliques : on sait que ces organes, au nombre de quatre, sont disposés en deux paires sur la région céphalique ou pé- (1) Joannes Chatin, Sur le mode de locomotion et de pénétration des Lin- gquatules (Comptes rendus des séances de la Société de biologie, 5 février 1881). — Id. Gazette médicale, 5 mars 1881. ABTICLE N° ?, ANATOMIE DES LINGUATULES. 95 ristomienne ; chacun d’eux se compose d'une tige basilaire portant trois pièces unciformes et mobiles. Lorsqu'on observe la succession des mouvements dont l’en- semble détermine le déplacement et la progression de la Lin- guatule dans les tissus qu’elle habite, on voit chacun des cro- chets glisser lentement de dedans en dehors, déployant d’abord la pièce grêle et supérieure qui s’avance presque horizontale- ment; la route se trouvant ainsi tracée, la pièce médiane entre en action pour l’élargir; enfin la troisième pièce intervient dans un double but : tandis qu’en se rabattant de haut en bas, elle écarte les tissus dissociés par le jeu des deux autres seg- ments, elle fixe par sa pointe la Linguatule dans sa position nouvelle. Les crochets ayant agi de la sorte, et presque toujours sui- vant une alternance dont les intervalles sont très rappro- chés, le corps commence à se déplacer. La région céphalique s’avance, soutenue par les segments inférieurs des crochets, puis la région postérieure du corps se rapproche, par une lente contraction, de ces points d'appui. La Linguatule ne chemine pas constamment à la surface du substratum, s’élève même légèrement et rappelle ainsi le mode de locomotion des Glossiphonies ou des Piscicoles, plutôt que celui des Sangsues médicinales (1). À Il convient donc de distinguer deux temps dans la progres- sion d’une Linguatule : le premier s’accomplit par un méca- nisme qui rappelle assez bien la marche souterraine de la Taupe, 1l se résume en un travail de fouissement ; le second, au contraire, peut être comparé à la progression de certaines Hirudimées, c’est un mouvement de reptation. La pénétration des Linguatules est d'autant plus rapide que les tissus leur opposent une plus farble résistance. Déposées à la surface du foie revêtu de sa tunique fibreuse, elles n’y dis- paraissent souvent qu'après une ou deux heures ; pour la mu- (1) C’est à tort que certains auteurs ont cru pouvoir assimiler la marche de la Linguatule à celle d’une Chenille arpenteuse s’élevant perpendiculairement, se recourbant, formant même un anneau complet, ete. 26 3. CHATIN. queuse intestinale, le temps est moindre; il diminue plus notablement encore pour le parenchyme hépatique dépouillé de ses enveloppes, et, dans ces conditions nouvelles, il n’est pas rare de voir la période de pénétration se réduire à vingt ou trente minutes. CONDITIONS BIOLOGIQUES. — HABITAT. — ACTION NOCIVE. Les auteurs s'accordent, d’une manière générale, à décrire les Linguatules comme libres et sexuées dans les cavités ou- vertes (sinus, fosses nasales, appareil respiratoire, etc.), et comme enkystées et agames dans les cavités closes ou dans les organes profonds et parenchymateux (péritoine, foie, muscles abdominaux, etc.). L’agamie et l’enkystement, l'indépendance et la sexualité représenteralent donc constamment les deux termes essentiels, équivalents et inséparables d’un même état du Pentastome. On sait que telle est également la doctrine admise pour un orand nombre d'Helminthes, chez lesquels les études récentes l’ont cependant trouvée quelquefois en défaut : non seulement il n’est pas rare de trouver chez des Nématodes enkystés une ébauche manifeste de l’appareil gémital (4), mais parfois le Ver enkysté se montre complètement sexué, et, dans certains cas, on a même trouvé des produits sexuels nettement définis. Tout récemment, M. Edmond Perrier faisait connaître une curieuse espèce de Nématode, le Dionyx Lacazi, parasite des Pentodriles : cet Helminthe montre, à l’état d’enkystement, un appareil sexuel complètement développé; dans les kystes qui renferment des femelles, se voient des corps analogues à des œufs (2). Or, de même qu'il existe des Helminthes enkystés et sexués, (1) Joannes Chatin, Études sur les Helminthes nouveaux (Ann. des sc nat.) 1874). — Id. Observations sur l'enkystement de la Trichine spirale (Ann. des” sc. nat., 1881). (2) Ed. Perrier, Organisation des Lombriciens terrestres (Archives de Zoo- logie expérimentale, t. XI, 1881, p. 243). : ARTICLE N° 2. ANATOMIE DES LINGUATULES. 1e) de même on peut observer des Linguatules encore agames et cependant complètement libres: tel est le cas des parasites du Caïman. Ils possèdent une indépendance absolue, nulle poche ne les entoure, et c’est avec la plus entière liberté, témoi- gnant même d’une excessive agilité, qu’ils parcourent en tout sens la masse hépatique. Ont-ils été rencontrés déjà dans cet organe? Les auteurs n’en font aucune mention; cependant Leuckart fournit une indication assez instructive. Après avoir décrit l’état sexué du Pentastomum oxycephalum et avoir rappelé que, sous cette forme,cette Linguatule a été observée dans les poumons et les bronches de divers Crocodiliens, il s'exprime ainsi au sujet de la forme agame : « Ex habitaculo nescio quo translatum in pulmonibus Alligatoris promiscue cum exemplaribus mino- ribus statum perfectum exhibentibus collegi. » Suivant Leuckart, le parasite agame ne se trouverait donc pas normalement dans le poumon; il ne devrait y parvenir que pour subir son évolution dernière et y acquérir des organes génitaux ; la preuve en est, pour Leuckart, duns ce fait qu'avec ces êtres agames, 1l trouve des individus sexués, mais n'ayant pas encore atteint leur complet développement, aussi a-t-1l soin d'indiquer que les parasites doivent, à l’état agame, oc- cuper dans le corps de lhôte une autre station. Celle-ci ne pourrait-elle être représentée par les viscères abdominaux et spécialement par le foie? La présence d’innom- brables larves dans l’organe hépatique semble particulière- ment favorable à cette localisation. Mes observations confirme- raient même d’une façon rigoureuse celles de Leuckart, si j'avais pu rencontrer dans le poumon la forme sexuée; toutes les recherches ont été, sous ce rapport, complètement infruc- tueuses, mais en y réfléchissant, cette circonstance semble moins dirimante qu'on ne serait tenté de l’imaginer tout d’abord. Peut-être indique-t-elle simplement que les Lingua- (1) Leuckart, Bau und Entwick. d. Pentastom., 1860, p. 156. 28 J. CHATIEN. tules, à l’état embryonnaire plutôt encore qu’à l’état larvaire, n'avaient pénétré que depuis peu de temps dans la masse hépatique où devait s’accomplir un stage durant lequel elles eussent complété leur développement et atteint l’époque de leur migration dans d’autres organes (poumon, etc.). L'hypothèse, fort acceptable si l'on se reporte aux notions acquises sur les conditions biologiques de ces êtres, se trouve confirmée par l'existence encore hbre de ces Linguatules agames et par l'absence si anormale, si exceptionnelle, de tout kyste protecteur. Elle fait même disparaitre une objection grave qui s’élèverait si l’on persistait à vouloir assigner constamment aux Linguatules un double habitat, et si l’on se refusait à admettre qu'elles pussent accomplir leur entière évolution chezle même hôte, conformément à la doctrine encore classique et suivant laquelle ces parasites se trouveraient nécessairement agames chez les Herbivores et sexués chez les Carnivores. De nombreux faits contraires à cette théorie .ont été d’ail- leurs déjà relevés : des Linguatules sexuées ont été trouvées dans le Cheval, tandis que, d'autre part, ona recueilh des Lin- guatules agames chez les Ghats, les Chiens et même chez les Lions.Les Grocodiliens, de leur côté, n’étant rien moins qu’her- bivores, ne semblent que médiocrement favorables à cette doctrine; étude de leurs parasites prouverait même une fois de plus, s’il en était besoin, les dangers de ces théories hâtive- ment édifiées et que l’on persiste à défendre contre Îles faits observés. N’est-1l pas plusrationnel d'admettre que l’hôte inter- médiaire peut faire défaut et que certains Pentastomes peuvent parcourir, dans le même organisme, le cyele entier de leur développement? Quant à l’action nocive des Linguatules, elle est trop mani- feste pour qu’on puisse la nier, et je ne saurais partager l’opti- misme de quelques zoologistes. Lorsqu'on a vu, comme j'ai pu le constater à plusieurs reprises, ces parasites sillonner en tout sens un organe de l’importance fonctionnelle du foie, lorsqu'on se reporte à la puissance et au jeu des crochets frayant leur route au milieu de la masse hépatique, il est impossible d’ad- ARTICLE N° 2 ANATOMIE DES LINGUATULES. 20 mettre que ces entozoaires « ne causent aucun trouble dans les fonctions de l'organe qui les recèle ». S'il était néces- saire de fournir la preuve de leur nocivité, on la trouverait dans l’examen de leur tube digestif dont le contenu présente tous les caractères des produits hépatiques. Il est vraisem- blable que des accidents graves doivent être déterminés par la présence de ces parasites, surtout lorsqu'ils sont aussi nom- breux, aussi indépendants, aussi puissamment armés que ceux dont j'ai pu étudier l’organisation. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES. Il semble que les longues vicissitudes taxonomiques subies par le groupe des Linguatules considéré dans son ensemble, se reflètent encore sur l’histoire zoologique de chacune de ses espèces. Seules, certaines familles d'Helminthes présentent une pareille confusion et opposent de semblables difficultés à l’exacte appréciation des types spécifiques. M. J. Bell a justement insisté, dans un travail récent, sur la nécessité de fixer rigoureusement la synonymie des divers Pentastomes: pour parvenir à déterminer deux individus trouvés dans un Boa constrictor, 1l a dù successivement re- prendre l’examen de toutes les espèces mentionnées chez les Ophidiens (1). Telle est, en effet, dans l’état actuel de la science, la seule méthode qui puisse offrir quelque rigueur; telle est aussi celle que j'ai dû suivre pour rapporter à sa véri- table origine la Linguatule du Caïman. En éliminant les espèces douteuses ou décrites sous divers noms, on peut réduire à vingt environ le nombre des espèces aujourd'hui connues; encore plusieurs de ces types ne pa- raissent-ils pas devoir résister à une sérieuse étude critique. La plupart d’entre eux, par leur organisation comme par leur habitat, s’éloignent d’ailleurs entièrement du parasite décrit (1) Jeffrey Bell, On the Pentastomum polyzonum of Harley, with a note on the synonymy of the allied species (Annals and Mag. of natural History, sep- tembre 1880). 30 J. CHATIN. — ANATOMIE DES LINGUATULES. ici et l’examen se trouve limité à deux types, le Pentastomum subtriquetrum de Diesing et le Pentastomum oxycephalum du même auteur. Si l’on se reporte à la diagnose respective de ces deux espèces, on constate que le Pentastome du Caïman se sépare nettement de la première pour se rapprocher étroitement du Pentastomum oxycephalum, sans paraître cependant s'identifier avec lui d’une manière absolue. Leur comparaison révèle, en effet, quelques dissemblances, mais seraient-elles suffisantes pour autoriser la création d’une espèce nouvelle ? Certains naturalistes n’hésiteraient probable- ment pas à l'admettre, obéissant à cette regrettable tendance qui détermine si fréquemment la constitution d'espèces nou- velles avec des types mcomplètement étudiés ; je crois d’autant moins devoir suivre leur exemple, que les différences résident principalement dans le nombre des anneaux et dans l’organi- sation des crochets. Or le premier de ces caractères varie sou- vent dans la même espèce, et,: si le second a été interprété différemment par Diesing, on ne doit peut-être l’attribuer qu’à un examen superficiel comme j'ai eu l’occasion de le montrer précédemment ; enfin ce n’est pas avec des formes larvaires ou incomplètement développées que l’on peut établir une espèce nouvelle. Je crois donc devoir rapporter au Pentastomum oxy- cephalum les Linguatules observées dans le foie du Caïman. EXPLICATION DES FIGURES. —- PI. 19 A. Fig. 1. Extrémité antérieure du corps : B, bouche; C, €, crochets de la pre- mière paire ; C’, C/, crochets de la seconde paire. x Fig. 2. Un crochet céphalique isolé : à@, b, c, les trois lames. Fig. 3. Fragment de la cuticule avec les soies (s) et les canaux poreux (c. p.). Fig. 4. Glande cutanée unicellulaire. Fig. 5. Glande cutanée pluricellulaire. Fig. 6. Centre ganglionnaire œsophagien : n. b., nerfs buccaux; n. L. a., nerfs latéraux antérieurs ; n. L. p., nerfs latéraux postérieurs ; n. 0., nerfs viscéraux. Fig. 7. Coupe verticale dans la masse ganglionnaire : f, enveloppe externe, de structure fibreuse; €, masse interne, essentiellement constituée par des cel- lules nerveuses. ? Fig. 8 et 9. Cellules nerveuses formant la masse centrale du ganglion. Fig. 10. Fibres nerveuses isolées. ARTICLE N° 2. NOTE SUR LA STRUCTURE DU NOYAU DANS LES CELLULES MARGINALES DES TUBES DE MALPIGHI CHEZ LES INSECTES ET LES MYRIAPODES. Par M. Joannes CHATIN. Les travaux récents (1) ont obligé les histologistes à modi- fier profondément la conception primitive du noyau, telle qu’elle avait été presque constamment admise depuis un demi- siècle. On a dû reconnaître que, loin de se résumer en quel- ques nucléoles, plus ou moins nombreux, plus ou moins volu- mineux, sa structure revêtait souvent une réelle complexité. En 1876, M. Balbian: signalait, dans les cellules épithé- liales de l’ovaire du Sfenobothrus pratorum, d'importantes dis- positions : au lieu de renfermer des nucléoles ordinaires, ce noyau présentait un grand nombre de petites granulations égales entre elles, que M. Balbiani comparait à un amas de bactéries remplissant la cavité du noyau. Par un groupement ultérieur, ces granulations, se réunissant les unes aux autres, formaient les filaments des figures nucléaires qui caractérisent les différents stades de la karvokinèse. Ceci suffisait déjà à montrer que les filaments nucléaires ne sauraient être consi- dérés comme homogènes puisqu'ils sont formés de granules sériés (2). Reprenant l’étude de certains phénomènes observés par Flemming, Pfitzner faisait connaître, dans les cellules de la (1) Voy. particulièrement les Mémoires de Hitzmann, Fromann, Butschli, Hertwig, etc. , (2) Balbiani, Sur les phénomènes de la division du noyau cellulaire (Comptes rendus des séances de l’Académie des sciences, t. LXXXIIT, 1876, p. 821). ANN. SC. NAT., ZOOL. XIV. 24%. — ART. N. 3. 2 J. CHATIN. Salamandre, des caractères analogues à ceux qui viennent d’être mentionnés (1). Enfin récemment M. Balbiani complétait ses recherches an- térieures par l’étude fort instructive des cellules salivaires des larves de Chironomus (2) tandis que Strasburger tentait de grou- per et de codifier, en quelque sorte, l’ensemble des notions actuellement acquises sur la structure du noyau (3). C’est à l'examen du même sujet qu'ont été consacrées les recherches dont je résume ici les principaux résultats. Les tubes de Malpighi fournissent, pour létude de la tex- ture intime du noyau, d'excellents types d'observation, ainsi qu'il était facile de le prévoir en se reportant aux anciens tra- vaux (Meckel, Leydig, etc.) qui ont rendu classiques les caractères généraux ce leurs cellules marginales. Il importe toutefois de spécifier les conditions nécessaires pour poursuivre, sur ces éléments, de semblables observa- tions : si l’on cherche à les réaliser sur des tubes en plem état de fonctionnement, on se heurte à de nombreuses et sérieuses difficultés, le noyau apparaissant alors simplement comme une masse rameuse dans laquelle on peut à peine dis- ünguer de fines ramifications dessinant un grossier réseau. On sait, en effet, que les cellules des tubes malpighiens possèdent une haute valeur physiclogique : dans leur intérieur se for- ment d'importants produits de différenciation ou d’élabora- tion dont le développement peut masquer, plus ou moins complètement, le noyau parvenu à sa période de maturité et modifié en lui-même. Au contraire, si l’on étudie les cellules marginales chez la (1) Pfitzner, Ueber den feineren Bau bei der Zelltheilung auftretenden fadenformigen Differenzirungen des Zellkerns (Morphol. Jahrbuch, 1881, p. 289). (2) Balbiani, Sur la structure des noyaux des cellules salivaires chez les larves de Chironomus (Zoologischer Anzeiger, n° 99 et n° 100, 1881). (3) Strasburger, Ueber den Theilungsvorgang der Zellkerne und des Ver- haltniss der Kerntheilung zur Zelltheilung, Bonn, 1882. ARTICLE N° 9. STRUCTURE DU NOYAU. 3 larve, ou si l’on réussit à les choisir convenablement chez l'adulte, on peut parvenir assez sûrement à y constater les traits essentiels de la structure nucléaire. Les larves de Diptères, de Lépidoptères, etc., constituent d'excellents sujets d'étude. Divers Insectes adultes (Carabus auratus, Melolontha vulgaris, Apis mellifica, Gryllotalpa, Locusta viridissima, etc.) s’y prêtent également et l’on peut en rapprocher plusieurs Myriapodes, appartenant surtout à la tribu des Chilognathes (lulides, etc.). Mais, chez ces divers types, on doit pratiquer une certaine sélection parmi les vaisseaux malpighiens qui ne sauraient être indifféremment étudiés avec une égale certitude : dans la Taupe-Grillon, on devra s'adresser aux « vaisseaux jaunes » de Leydig ; go ; dans le Hanneton, 1l convient d’examiner supiaut les « vaisseaux empennés », etc. La méthode la plus ne et elle suffit si l’on veut se bor- ner à acquérir des notions générales, consiste à observer les cellules dilacérées dans le liquide cavitaire : on incise, sur l'animal vivant, les parois abdominales, on attire sur une lame de verre les vaisseaux malpighiens avec l’anse intestinale voisine ; puis on dilacère doucement les vaisseaux, afin d'observer leurs cellules intactes. On recouvre ensuite, sans enlever les débris intestinaux, etc., qui peuvent flotter dans la préparation; leur interposition évite une compression trop forte et permet ainsi d'observer les cellules dans de bonnes conditions. — Quant aux réactifs colorants, 1ls sont surtout importants pour lexamen de certains détails secondaires ; j'aurai bientôt à en indiquer l’emploi. Il est rare que l’on découvre immédiatement, sur les pre- mières cellules examinées, tous les détails de la structure nucléaire. Le plus souvent on ne voit qu'un énorme noyau rameux, avec deux, trois, quatre ou même cinq nucléoles entre lesquels on parvient aqmenie à à découvrir déjà un fin réseau filiforme (1). (A) Fig. 1. ANN SC. NAT., ZOOL., DÉCEMBRE 1882. XIV. 25. — ART. N. 9, 4 J. CHATIN. Si l’on continue cette étude, on arrive à suivre les méandres du réseau et à constater qu'il est formé d’un véritable cordon pelotonné sur lui-même et n’apparaissant encore que comme une trainée granuleuse (1) (dans les glandes séricigènes de quelques Lépidoptères 11 m’a été impossible de poursuivre l'observation au delà de cette notion fort vague d’un ruban granuleux). Cette apparence tient sans doute à la sénilité ou à la mort de l’élément considéré, car en se plaçant dans de meilleures conditions, on voit le cordon se montrer non plus granuleux, mais échinulé (2) ou moniliforme (3). On tend alors rapide- ment vers la succession des formes si bien décrites dans d’autres éléments par M. Balbiani. Ce cordon n’est pas précisément enchâssé dans le corps du noyau ; 1} peut, par la compression, y subir de légers déplace- ments. On peut, en quelque sorte, l'amener à y flotter et l’on constate en même temps qu'il se trouve en continuité ou, tout au moins, en contiguité avec les nucléoles (4). Il est difficile d'observer le cordon sous un état plus parfait que celui qui vient d’être indiqué, c’est-à-dire sous l’apparence d’un cordon moniliforme semblant formé par le rapprochement de globules superposés. Cependant, en certains cas, il repro- duit plus exactement les caractères indiqués par M. Balbiani; il paraît alors formé par la succession de disques foncés sépa- rés par des espaces clairs (5) ; seulement il arrive parfois que ces disques s’inclinent les uns sur les autres, dessinant une sorte de spiricule (6) qui rappelle la disposition figurée par Baranetzkv dans les cellules mères du pollen chez le Trades- cantia; cette forme est-elle réelle, doit-elle au contraire être (1) Fig. (2) Fig. (3) Fig. 4. (4) Fig. 4 bis. (5) Fig. 6 et 7. (6) Fig. 8 et 9. ARTICLE N° 3. go to STRUCTURE DU NOYAU. ) rapportée à un accident de préparation? Je ne puis formuler à cet égard aucune conclusion précise et l’on ne saurait actuel- lement décider entre les deux hypothèses qui viennent d’être indiquées : s’il existe réellement une spiricule, le noyau des cellules malpighiennes se rapproche étroitement des figures nucléaires des végétaux ; s’il s’agit d’un accident de glissement, on obtient ainsi la preuve de l'existence d’une membrane limi- tante autour du cordon; mais, je le répète, les résultats sont encore trop peu concordants pour qu'on puisse se prononcer à cet égard. Je me borne à présenter l’hypothèse d’un glisse- ment comme la plus probable. On observe parfois des bourrelets analogues à ceux que M. Balbiani a signalés dans les cellules glandulaires du Chiro- nomus : difficiles à voir directement, 1ls ne se distinguent guère que par l'application des réactifs colorants. Le carmin suffit souvent à les faire distinguer, les teintant plus fortement que les autres parties du cordon. Les nucléoles se colorent vivement comme les bourrelets, et ceci me conduit à les considérer soit en eux-mêmes, soit dans leurs rapports avec le réseau intranucléaire. Examiné sous un fort grossissement, le nucléole se montre sous l'aspect d’une masse finement granuleuse dans laquelle des vacuoles claires et réfrmgentes apparaissent comme des points brillants (1). Ces vacuoles étant d'autant plus réduites que l’on examine un élément plus jeune, on doit peut-être les considérer comme n’apparaissant que secondairement, la structure originelle du nucléole semblant se traduire par l’as- pect acimoïde qu'a fait connaître M. Balbiani. — Quant aux rapports du nucléole et du cordon réticulare, 1ls semblent être fort intimes; le cordon plonge, en effet, dans la masse nucléolaire et, par la compression, on peut constater que sa partie terminale se dilate et se ramifie avant de disparaitre dans le nucléole (2). (1) Fig. 40. (2) Fig. 11. 6 J. CHATIN, Ces résultats confirment done pleinement les faits observés par M. Balbiani, ils sont toutefois plus limités et l’on peut l’attribuer à la nature même des éléments étudiés : non seule- ment les cellules qui bordent les tubes de Malpighi élaborent de nombreux produits, mais elles sont, en outre, soumises à une rapide transformation graisseuse. Cette adiposité masque promptement leurs caractères fondamentaux et ne permet que difficilement de les étudier dans leur intégralité. On vient de voir que, dans ces éléments comme dans diverses cellules intestinales, salivaires, etc., le noyau se montre formé d’une masse principale dans laquelle se trouve le réseau et les nucléoles, parties que l’on est ainsi tout d’abord tenté de con- sidérer comme des portions secondaires du noyau. Mais il est possible que l'hypothèse inverse soit, au contraire, plus voisine de la vérité, et que la masse somatique du noyau soit une simple dépendance de l'appareil réticulo-nucléolaire. Des recherches récentes ont, en effet, montré que dans certaines cellules privées de noyau, on découvre un système réticulaire fort analogue à celui qui vient d’être décrit dans le noyau des cellules nucléées. On pourrait donc admettre que le système réticulaire se formerait le premier, puis, qu’autour de lui se condenserait une zone protoplasmique représentant le corps du noyau. — Quant au nucléole (simple ou multiple), Je pense qu’au point de vue originel, il peut difficilement être séparé du réseau ; non seulement 1} lui est intimement uni, mais souvent le réseau ou cordon existe sans que l’on puisse distinguer un nucléole, et, lorsque celui-ci se constitue, il paraît dériver d’une différenciation semblable à celle dont émanent certaines parties du réseau, telles que les « bourre- lets » qui appartiennent indubitablement au cordon réticulé et possèdent cependant les caractères histochimiques des nucléoles. | On sait d’ailleurs que Klein (1), étudiant la structure du (1) Klein in Quarterly Journal of Microscopical science, 1878, p 375 et suiv. ARTICLE N° 3. STRUCTURE DU NOYAU. 7 noyau dans les cellules de l'estomac du Triton, a formellement contesté l’autonomie du nucléole, le considérant comme le ré- sultat d’un simple épaississement des fibrilles du réseau ou d’une « coalescence par contraction d’une partie du réseau ». Sur tous les noyaux qu'il a examinés, il n’a jamais pu voir la moindre trace d’un nucléole existant comme un organe à part et distinct du noyau. On ne saurait cependant, en certains cas, refuser une signification spéciale au nucléole ; mais il est possible qu'il ne représente qu’une partie secondaire du réseau. L'hypothèse ne saurait toutefois suffire à résoudre une si délicate question ; le sujet appelle de nouvelles observations et l’on doit souhaiter les voir se multiplier rapidement et s'étendre aux principaux types histiques étudiés dans les divers groupes animaux et végétaux, afin de donner à l’un des plus intéressants chapitres de l'anatomie générale son com- plément nécessaire. EXPLICATION DES FIGURES Fig. 1. Grullotalpa vulgaris. Cellule à réseau nucléaire filiforme : N, noyau ; r, réseau ; n, nucléoles. Fig. 2. Le réseau nucléaire apparaît granuleux (mêmes lettres). Fig. 3. Réseau nucléaire échinulé. Fig. 4. Réseau nucléaire moniliforme. Fig. 4 bis. Le même isolé : n, nucléoles. Fig. 5. Fragment de réseau moniliforme. Fig. 6 et 7. Carabus auratus. Portions de réseaux nucléaires se montrant for- més de disques empilés. Fig. 8 et 9. Papilio machaon. Portions de réseaux spiralés. Fig. 10. Julus terrestris. Nucléole isolé avec ses vacuoles v. Fig. 11. Apis mellifica. Rapports du nucléole et du réseau; celui-ci se ramifie en s’enfonçant dans le nucléole. Fig. 12. Fragment de réseau se terminant dans uu nucléole et portant à quel- que distance de celui-ci un bourrelet annulaire. PUBLICATIONS RÉCENTES ADRESSÉES À LA RÉDACTION DES ANNALES Hraité d'embryologie et d'organogénie comparées, par F. M. BALFOUR, traduit de l’anglais, par M. H. A. Rogin, docteur ès sciences naturelles, t. I. Cet ouvrage est si généralement connu et si estimé, qu'il serait superflu d'en signaler ici les mérites. La traduction que M. Robin vient d’en faire est une excellente acquisition pour la littérature scientifique française et sera par- ticullèrement utile à nos étudiants. Elle formera 2 volumes in-8° et elle con- tient de nombreuses figures propres à faciliter l'intelligence du texte. Eraité de zoologie, par G. GLAUS, traduit de l'allemand par M. G. Moquix- TANDON, seconde édition. La première édition de cet ouvrage n'était pas accompagnée de figures; celle que M. Moquin-Tandon publie aujourd’hui en contient un très grand nombre et sera par conséquent beaucoup plus utile aux étudiants. Les trois premicres livraisons ont paru. La trichine et la trichinose, par M. Joannès CHATIN, maître de conférences à la Faculté des sciences de Paris. Un volume in-8, avec planches, 1883. La quantité immense de viande de porc infestée de trichines, introduite en France par le commerce américain, et le danger que l’emploi alimentaire de cette denrée peut avoir, donnent un intérêt particulier aux observations et aux expériences physiologiques dont M. Chatin rend compte dans ce livre des- tiné d’ailleurs à présenter une histoire complète de ces parasites. L'auteur a été chargé par le gouvernement d’examiner au microscope toutes les viandes de ce genre emmagasinées au Havre, et il a profité de cette circonstance pour étudier très attentivement l’histoire naturelle et médicale des trichines. Il a constaté que ces vers peuvent se loger dans diverses parties de l'organisme où l’on n’en soupçonnait pas l'existence et qu'ils sont susceptibles de résister à l’action de la plupart des agents réputés propres à en opérer la destruction. Ainsi, ni la salaison, ni la dessiccation, ni la fumaison, ni la cuisson à basse température ne tue nécessairement ces parasites enkystés qui, après être restés pendant plusieurs mois dans un état de mort apparente, peuvent re- venir àla vie active, se multiplier et infester les animaux dans l'intestin des- quels on les introduit, Parmi les parties de cet ouvrage qui contiennent le plus de faits nouveaux, nous citerons les chapitres consacrés à l’anatomie et l’his- tologie des trichines, au développement de l’ovule et de l’embryon, à la forma- tion et aux dégénérescences du kyste, et à l’étude expérimentale de la trichi- nose. Catalogue général des Mollusques vivants de France, par M. A. Locarn. Un vol. gr. in-8°, 1882. = Ce catalogue méthodique et descriptif contient l'indication des Mollusques terrestres, des Mollusques d’eau douce et des Mollusques des eaux saumâtres. Il a été fait avec beaucoup de soin. ARTICLE N° 4. ; PUBLICATIONS RÉCENTES. 9 Nouvelles Archives du Muséum d'histoire naturelle, deuxième série, t. V, fascicule 1 (1882). Cette livraison contient deux articles de zoologie, savoir : 1° une note sur les Carnassiers du genre Bassaricyon, par M. Huer (avec 4 planches); 2° une revi- sion des Murex du Muséum, par M. PolRtER. Description des ossements fossiles des environs d'Anvers, par M. Van BENEDEN, 3° partie. Bruxelles, 1882. Ce beau travail, publié dans les Annales du Musée royal d'histoire natu- relle de Belgique, fait grand honneur à cet établissement et au zoologiste émi- nent qui en est l’auteur. La livraison que nous venons de recevoir se compose d’un volume de texte consacré à l’étude des Fossiles appartenant aux genres Megapteron, Balenopteron, Burtinopsis et Erpelocetus, et d’un atlas de 109 planches, format in-folio. Minute structure of the central nervous system of certain Reptiles and Batra- cians of America, by J. Mason. Un vol. in-4°. Newport, 1882. Dans une série très nombreuse de planches photographiques exécutées avec une perfection rare, l’auteur reproduit la structure microscopique des diverses parties de l’axe cérébro-spinal, mise en évidence au moyen de tranches minces préalablement durcies et colorées par les procédés employés d'ordinaire en his- tologie. Ses investigations portent sur dix-neuf espèces de Reptiles et Batraciens et fournissent des matériaux précieux pour l’étude comparative du mode de constitution de cette partie importante de l’organisme. Les figures qu'il donne occupent 113 planches grand in-4° et peuvent, avec avantage, être examinées à la loupe. Report om the ÆEehinoïdea dredsged by B. M. S. the Challenger during the years 1873-1877, by Alex. AGassiz. Un volume ïin-4° de 321 pages et 45 planches. La publication des riches coilections zoologiques formées par l’expédition an glaise du Challenger se poursuit très activement. L’étude des Echinoïdes a été confiée à M. Alex. Agassiz qui avait précédemment enrichi la science de tra- vaux très importants sur le groupe naturel auquel ces Radiaires appartiennent. I! traite d’abord diverses questions relatives à la classification et à la structure de ces animaux; puis 1] examine comparativement les caractères des espèces actuellemeut existantes et des espèces fossiles. La seconde partie de cette mo- nographie est consacrée à la description des espèces, et dans la dernière partie l’auteur s'occupe de leur distribution géographique et bathymétrique. Report on the Ophiuroïdea (Rapport sur les Ophiuroïdes provenant des dra- gages effectués par le Challenger, par M. Lyman. 1 vol. in-4° de 386 pages, accompagnées de 48 planches, 1882. Ce travail important constitue une monographie complète des Ophiuroïdes et des Astrophytidæ. L'auteur y fait connaître vingt genres nouveaux et soixante- sept espèces nouvelles. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME Recherches sur l’histologie des Insectes et sur les phénomènes histogéniques qui accompagnent le développement postem- bryonnaire de ces animaux, par M. VIALLANES.....,...... ARTICLE N° f. Notes anatomiques sur une Linguatule observée chez l’Alliga- tor lucius, par M. J. CHATIN....... 1600238000 0 HE CLEA CES ARTICLE N° 2 Note sur la structure du noyau dans les cellules marginales des tubes de Malpighi, chez les Insectes et les Myriapodes, par ME AGHATIN ER RUE ENS Speo ra don oeade Abitio à ro DD VB + ARTICLE N° 3. Eublhications/récentes es PER ERP R RE PRG REC EE CON ARTICLE NON TABLE DES ARTICLES PAR NOMS D'AUTEURS. ART. ART. CHATIN (Johannès). — Notes ana- VIALLANES. — Recherches sur tomiques sur une Linguatule l’histologie des Insectes et sur observéechezl’Alligatorlucius 2 les phénomènes histogéniques CHarTiN (J.).—Notesur lastructure qui accompagnent le dévelop- du noyau dans les cellules mar- pement postembryonnaire de ginales des tubes de Malpighi, ces animaux, ..... DO ODO GE MAI chez les Insectes et les Myria- POdeS ere tre CE HARR HALIWR O) TABLE DES PLANCHES CONTENUES DANS CE VOLUME. Planches 1-18. Histologie et développement des Insectes. — 19. À. Pantastomum oxycephalum ; B. Noyau des cellules margi- nales des tubes de Malpighi. FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES. MorTERoZ, Adm.-Direct. des Imprimeries réunies, À, rue Mignon, 2, Paris. Fig 6 Zool ZA PI an des Senat CSérie GREEN STE E TETE ER TE PETTNE Wicoleé lith Histologie et developpement. des Insectes | AViallanes del. Îlistologie et developpement ve Insectes . Jmp. Lemercier 4C 2% 7rde Seinelaris Zoot. LXIVPL2 Wicolet lith. CEE à. Hi nn des Sc nat CE Série ; ZoolTYW PLS Fig S ; À “eg 18 A Viallanes del. Wicolet litz. Hislologie et développement des Insectes Znplemercier À 4 S7rde Seine Pa PES. 74 Î Mécnes V2 : re ESS ne x = > ee - = ee See LE EE E Ke A LE = PRO Ex AR ONETRTNEE ARTE > e ë PRE s _ THE : ; Zool TI LIL Fiy# 3 Ÿ Re < AAA His tologie et développement Marre lee ( Ann des Sc nat. 6 Serre AN LI Nicolet With | à > : À 1€ veloppement des Insectes er enren CCD ” FA à DS Ÿ & . ÿ à È Ï f à MS © À S D 3. SN — ré L + AT Ann des Sc.nat.6° Serie. Zoo. 1 XIV, PL,0 Fig. 1. H.Viallanes del. Ep Becquet. Mercier th. Histologie et développement des Insectes EM Ra TON at ii Ann. des Scnat.6° Serie. Zoo it IVe PET Epeul Jmp Becquet. Mercier lith. Jhetologie er développement des Insectes co) = ë a F $ = = _—. ue a =) = @) (©) N (27) (el 4 ta D To re) = (@) _È a does Lo Su À Re RS) ° : + Q () + _-$ o Fe D Se e) oO A = Des À a ao D — - : =) : E bel < : 5 è ni LE k 9. Wrcolet lth À = DS à N rplenereter 4 CE Jaris lologee" cl developpement des 1nsectes. e Ji Ares del. D. des Se.nat C'Série Zool.T XIV PL10. - - Fig 12 Hiy. 1 Fig13 Fig. 1à HIrallanes del. 1 WVicolet lith. listologte’ el développement des Insectes 1mp Lemereier KC Paris Zool TIW FH 4 5 si x ‘a & LA Vrallares del.etlith. {mp Lemercier & C Paris. - hslologte el développement des Zrsectes 2h x Ann. des Sc.rrat.0 Série’ Zoot. TXIVPI22 à : : 8 ”, Pa28%s e 2e 2% n°98 6 LÉ 023% DR A & 809 ne 2) be ee ® a; ; TS OS TER LCR A Viallanes del. …. Wicolétlith. Histologie et développement des Insectes Îmrlemercier & CE Fais. Nicolet Ut. Zool TAIVIV TS. Hestologte” et developpement des Insectes np Lemercier AC Paris SX à À È ee | 26 600 À RERO $ EEE TT & ES PReRS de Ÿ = 66% 2008 > Vase à À DS Ÿ sé À è 2 F2 egse° à NS : À Ÿ Ÿ ù Ÿ S pe. 4 s , = * = ares" del. | Histolegie el developpement des Insectes LA Zool. TAIVPI 14. Micolet. Li} . Zo00 TITI ‘ 2 1 Tree Frq.3 “ TS - Ÿ NU, PrRaLr TC # a PSE à > DS, 2 Z C7 Arstologie et développertent des Insectes. BA a Pro Merrerrrer WC Farrs.. r A. Viallanes del. Wicoleklith. Ann des Se Wat. 6Serre Zool. LIL PI. (\ 12 ecee 12 490, 0e A Viallanes del, Nicolet Ulh. {éstologre” el developpement des Insectes lv Lerrerccer & arts. Zoo, VII21. T7 1 Viullanes del Nicolet lth /léstologie” et developpenrent des 1nsectes. rar Lemererer «CC Paris HR RSR = ee | ER E RE Aredes Se Nat, 6Serte. Zoo! L'H PI, 16 RE ER mn D re) x PTT ; ; f, MARÉES LE # yotttestiirras LA L 1 ART, El JPT ch cr C2 T1 19 ne 172 Don eu cch AVrallanes del. é Nicolet lith. {istologie et développernertt des Insectes Tr Ternercier & CC Paris, jf < Ann, des J'etence,rat, 0° S'erce.. Zoo, Tome 14 , PL,1q À. Penlastomun 2227 cephalunt B: Woyau des celules margiaales des aber de WMaprighe. np, Lemerecier et l< Lars. ABONNEMENT 1882. 52 ANNÉE, VI SÉRIE, r. XIV, n° 1 à 6. ANNALES SCIENCES NATURELLES POOLOGIE PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L’'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE MM. H. ET ALPH. MILNE ED WARDS TOME XIV, n° 1 à 6. (FIN DE L'ABONNEMENT 1882 ; TOMES XIV, XV.) PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE BE PARIS Boulevard Saint-Germain et rue de lPÉporon EN FACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 1882 | Paris, 25 FR. — DÉPARTEMENTS, 26 FR, Publié en janvier 1883. CONDITIONS DE LA PUBLICATION ANNALES DES SCIENCES NATURELLES SIXIÈME SÉRIE Zoologie, publiée sous la direction de MM. H. et Azur. Mine Enwanps. Il paraît chaque année 2 vol. gr. in-8°, avec les planches correspon- dant aux Mémoires. Chaque volume est publié en six cahiers paraissant mensuellement. Prix de l'abonnement annuel : DST: Botanique, publiée sous la direction de M. Pa. VAN TIEGHEM. Il paraît chaque année 2 vol. gr. in-8°, avec les planches correspon- dant aux Mémoires. Chaque volume est publié en six cahiers paraissant mensuellement. Prix de l'abonnement annuel : 25 fr, Prix des collections : PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (Æare.) DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. CinquiÈME SÉRIE (1864-1873). Chaque partie, 20 vol. 25 00 ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. HÉBERT, et pour la partie paléontologique, par M. AzPnonsE MILNE Epwanps. Il est publié chaque année, à partir de janviér 1870, 1 vol. gr. in-8°, avec les planches et figures dans le texte correspondant aux Mémoires. Le volume paraît en quatre fascicules trimestriels. Prix de l’abonnement annuel : : V5 fr. Nota. — Il est accepté des abonnements aux Annales des sciences naturelles et aux Annales des sciences géologiques, en tout cinq volumes annuellement, au prix de 60 francs au lieu de 65 francs. A LA MÈME LIBRAIRIE CHIMIE ANALYTIQUE Eug. PELIGOT Membre de l’Institut (Académie des sciences) et de la Société d'agriculture Professeur de chimie analytique à l'Institut national agronomique, etc. Méthodes générales d'analyse. — La terre arable. — Les eaux. — Les engrais. — Les cendres végétales. — Les céréales. — Les fourrages. — Les matières sucrées. — Les huiles. — Le lait. — Le beurre. — Le vin et les liqueurs fermentées. Un volume in-8° avec 43 figures dans le texte. Prix : 10 francs. DC D—— L'ART DES JARDINS TRAITÉ GÉNÉRAL DE LA COMPOSITION DES PARCS ET JARDINS ÉLO ARE ANDRÉ Architecte-Paysagiste Ancien chef de service des plantations suburbaines de la Ville de Paris 6 4 vol. très grand in-8° de 866 pages _ Avec 11 planches en chromolithographie et 520 figures dans le texte. Prix : 35 francs. _ Avec une reliure riche, tranche dorée, fers spéciaux : 42 francs. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER ) ARTICLE N° 1. Recherches sur l’histologie des Insectes et sur les phénomènes histogéniques qui accompagnent le développement post-embryonnaire de ces animaux, par M. VIALLANES. ARTICLE N° 2. Notes anatomiques sur une Linguatule observée chez lAlliga- tor lucius, par M. J. CHATIN. ARTICLE N° 3. Note sur la structure du noyau dans les cellules marginales des tubes de Malpighi, chez les Insectes et les Myriapodes, par M. J. CHATIN. ARTICLE N° 4. Publications récentes. Planches contenues dans ce cahier. Planches 1-18. Histologie et développement des Insectes. — 19. A. Pantasitomum oxyuphelum. B. Noyau des cellules margi- nales des tubes de Malpighi. MorTeRoz, Adm.-Direct. des Imprimerics réunies, A, rue Mignon, 2, Paris. RSS eme Bookbinding Co.. Inc. 300 Summer Street Bostan, Mass. 02210 Fun 481 AP Al LUC PR DATE BON LUC 8 LATE TYOUVN . n vip LA DE Di f; 4! TI [4 ha ts is ci HAL rue sus DUT nr ‘ds Û \ f Yo ( UNS ! d 2 : ià V i? n an nn " NH a TUN n 1 is nt { a # % TRARAN k A AL os H! MARNE # ss pe Vsal |} . “ut ï HRt à: . je OS jee ia nee 2 sa Au Mer D Nat teté Hi RENE f: ne ARR HE doute à fe NAN vit un sa Et je . “ ‘ d'a Ua . TE : GREC NRA AUTMAUES Lo ru Lai pes sh tot en ; ‘ À ÿ " a