PIN E PA tit 04 DEN NAN NP SR ) MES A0 HelNNC EEE RARES AUOT Re Un rc A a L æ DS fee rs en Pt A ie ANNALES SCIENCES NATURELLES SEPTIÈME SÉRIE BOTANIQUE CORBEIL. — IMPRIMERIE CRÉTÉ. ANNALES DES SUIENCES NATURELLES SEPTIÈME SÉRIE BOTANIQUE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE ET LA CLASSIFICATION DES VÉGÉTAUX VIVANTS ET FOSSILES PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DÉ M. PH. VAN TIEGHEM TOME TREIZIÈME G. MASSON, EDITEUR LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE Boulevard Saint-Germain cé rue de l’'Epcron EN FACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 1891 NOUVELLES RECHERCHES SUR L'ORIGINE DES GRAINS D'AMIDON ET DES GRAINS CHLOROPHYLLIENS Par E. BELZUNG. Dans un précédent travail (1) sur le mode de développe- ment des grains d’amidon et des corps chlorophylliens, j'ai élé amené à formuler des conclusions notablement diffé- rentes, en quelque sorte même opposées à celles qui consti- tuent l'opinion généralement courante, et tout naturellement elles devaient se traduire par une vive opposition de la part de ceux qu'elles touchaient plus particulièrement. On trou- vera notamment, non Join de ma thèse, dans ces An- nales (2), un article d’après lequel tous mes résultats, sans exception, sont enlachés d'erreur et d'incapacité. Quelles qu'aient pu ètre mes illusions à ce moment, je n'avais pourtant pas la prétention de considérer mes idées sur ce sujet comme des vérilés absolues, d'autant plus qu'il n'y est question, pour ainsi dire, que de choses d'observa- lion, et on sait que ces dernières revêtent loujours un carac- tère plus ou moins individuel, surtout quand elles portent sur des objets délicats. (4) Er. Belzung, Recherches sur l’amidon et les grains de chlorophylle (Annales des sc. nat., 7° série, t. V, 1887). (2) A. F. W. Schimper, Sur l’amidon cet les leucites (Annales des sc. nat., 7° série, t. VI, 1887). 6 E. BELZUNRG&. En présence d’affirmations contradictoires aussi catégo- riques que celles de l’arlicle que je viens de rappeler, je m'é- {ais promis de reprendre mes recherches aussilôt, soit pour les corriger et en reconnaitre l’inexactitude, soit pour mieux en affirmer le bien fondé; mais, contrairement à mon désir, je n'ai pu faire de nouvelles observations que pendant Pélé dernier. Ce sont les résultats auxquels je suis arrivé à ce mo- ment que je vais maintenant exposer, après avoir toutefois présenté quelques objections à la doctrine actuelle. Objections à la doctrine actuelle. — On sait qu'au- jourd'hui la plupart des botanistes admettent, avec M. Schim- per, M. A. Meyer, et d’autres auteurs encore, que les grains d'amidon naissent toujours dans des corpuscules albumi- noïdes spéciaux, différenciés au sein du protoplasme des cellules, en un mot dans des leucites, et de plus qu'ils re- présentent des produits de lactivité même de ces leucites, 1. On s’attendrait à voir une affirmation aussi catégorique basée sur dés observations nombreuses, et surtout com- plètes, prenant le grain d’amidon au moment même de son apparilion dans des embryons très jeunes, sinon dans l'œuf, et le suivant à travers ses métamorphoses jusqu'à sa com- plète disparition. Il n’en est pas ainsi : la chose n'a élé tentée, en effel, que pour un très pelit nombre de plantes, ou je me trompe fort. Sans doute, des observations nombreuses ont été faites sur des organes adultes ou sur des pousses en voie de déve- loppement, et [à effectivement on rencontre des formations qui peuvent être rapportées à des leucites si l’on n’en fait une étude plus entière, et qui contiennent des grains d’ami- don; mais, Comme on va le voir, il n’est nullement permis d'en conclure qu'on se trouve réellement en présence de leucites, et encore moins que lamidon qui s’y dépose est élaboré par eux. La nalure des formations attribuées à des leucites, le mode de développement des grains d’amidon, et les rapports ORIGINE DES GRAINS D'AMIDON. À entre leucites et grains d’amidon ne peuvent être mis en lu- mière que par l'étude de l'embryon très jeune, si tant est qu'il y ait une origine dans la plante actuelle. 2. Une seconde objection est relative à la manière dont les observations ont élé traduites, et elle doit prévenir, ce me semble, contre la manière actuelle de voir des auteurs. Une observation anatomique ne peut être qualifiée de complète que si la description qui en est donnée est accompa- gnée d’une figure qui soit l'expression exacle et entière de l'image observée. Or, que l’on jette les yeux sur les dessins originaux touchant à la question de la naissance de l’ami- don, telle qu'on la conçoit depuis une dizaine d'années, et l'on verra que pas un seul, pour ainsi dire, ne représente enlièrement le contenu protoplasmique des cellules étudiées, aux diverses phases du développement. On y voit des vési- cules, figurées par un simple trait et renfermant un ou plusieurs granules amylacés, mais pas trace du protoplasme avoisinant; et encore ces figures sont-elles le plus souvent relatives à des organes adultes ou dérivés d'adultes. Mais ces limites des prétendus leucites appartiennent- elles à des corpuscules différenciés dans la cellule dès l'o- rigine, ou bien sont-elles simplement les limites de cavités protoplasmiques, ultérieurement remplies? C’est ce qu'il est impossible de dire. Ce sont cependant des observations de ce genre qui ont permis de dire que l'amidon nait invaria- blement dans des leucites. Je n’enlève rien ici de leur valeur intrinsèque aux obser- vations auxquelles je fais allusion; je dis seulement qu'elles sont incomplètement exprimées, qu’elles ne nous disent rien sur l'origine vraie des leucites et de l’amidon, et que les conclusions qu’on en tire ne sont pas acceptables. 3. J’ajouterai ici une remarque sur le traitement des ob- jets soumis à l'analyse. Je ne saurais accepter, comme un dogme, le procédé d’un grand nombre d'auleurs, qui con- siste à trailer préalablement par l'alcool absolu (ou par d'autres réactifs fixateurs) les matériaux à observer quand il 8 EE, BELZUNG. s’agit de formations aussi altérables que le protoplasme et le suc cellulaire. Que l'alcool fixe le protoplasme, cela n’est pas discutable, encore qu'il soit permis de faire quelques réserves; ce qui est non moins exact, c’est qu'il précipite divers principes contenus en dissolution dans le suc des cellules. Il suffit de laisser de jeunes graines ou de jeunes em- bryons, par exemple des Légumineuses, pendant vingt- quatre heures dans ce réactif, pour trouver au fond du réei- pient un précipité abondant, granuleux, rappelant à s'y mé- prendre les granulations protoplasmiques, et il n’est pas admissible que, pendant la fixation par l'alcool, une partie tout au moins de ce précipité ne se produise dans l’inté- rieur même des cellules et ne vienne par suite souiller la structure si délicate du protoplasme qu'il s’agit d'étudier. Ce qu'il importe de connaître, c’est non la s(ructure d’une cellule soumise à tel ou tel réaclif qui manifestement l'al- tère, mais sa structure naturelle. Aussi ai-je étudié de préférence, mais non exclusivement, des matériaux frais. Les coupes, faites à sec el immédiate- ment colorées, ont été plongées, soit dans le suc filtré de la plante, soit dans la glycérine étendue d’eau, puis aussitôt observées. J'ai toujours obtenu ainsi des figures analoques (pl. L fig. 2,4), mais beaucoup plus nettes qu'avec des ma- lériaux traités au préalable par l'alcool et dans lesquels le protoplasme esl plus où moins contracté. Même des coupes fraiches et non colorées, observées im- médiatement dans le suc de la plante, montrent parfois la structure protoplasmique avec la dernière netteté; il faut pour cela examiner de préférence des cellules intactes. La concordance des résultats obtenus par ces diverses méthodes m'autorise à ajouter foi aux observations faites sur les matériaux frais. On ne m'objectera pas, je pense, que la structure vue dans ces conditions est une structure trans- formée : d’abord à cause de la concordance dont je viens de parler; ensuite parce que l’observation peut être directe, ORIGINE DES GRAINS D'AMIDON. 9 pour ainsi dire instantanée, et enfin parce que les figures ainsi obtenues, colorées ou non, se maintiennent intacles pendant un et même plusieurs jours dans le suc de la plante ou dans la glycérine étendue d’eau. Il serait donc futile d’ar- guer que je me sois trouvé en présence de structures allé- rées. Les tissus ont été principalement colorés avec le vert d'iode, qui se fixe fortement sur le proloplasme et contraste bien avec la teinte bleue plus ou moins foncée que prennent les grains d'amidon en présence des réaclifs iodés ordi- naires. Les observations ont été faites avec un microscope de Zeiss, qui m'a donné les grossissements indispensables à cette étude. Exposé des recherches. — Ces premières recherches ont porté uniquement sur quelques Légumineuses, notamment sur les genres Haricot (Phaseolus), Pois {Pisum), Fève (Faba) et Lupin (Lupinus). J'ai envisagé la structure protoplasnique, successivement et à de nombreuses reprises : en premier lieu dans l'embryon très jeune; en second lieu dans Fembryon arrivé à maturité; en troisième lieu vers la fin de la germi- nalion, et de même dans les phases intermédiaires. Dans toutes ces plantes, les phénomènes interprétés dans ce travail se déroulent avec une remarquable uniformité. 1° Embryon très jeune. — Examinons par exemple un embryon de Haricot (Phaseolus multiflorus, vulgaris), où de Fève (Faba vulgaris) de 1 ou 2 millimètres de longueur. Chaque cellule de parenchyme (fig. 1, pl. 1) offre une mem- brane mince, un noyau très gros, fortement coloré par les réaclfs, et un protoplasme différencié en un réseau lrès net, d'aspect général spumeux, dont les mailles sont occupées par un sue abondant. Ce réseau peut êlre vu directement. Les mailles du réseau proloplasmique sont lanlôt nette- ment polyédriques, tantôt plus ou moins arrondies, auquel cas elles simulent un amas d'innombrables vacuoles ou vési- cules. Les unes sont {rès grandes, de la taille du noyau; les plus nombreuses sont beaucoup plus pelites. Leur paroi est 10 EE, BELZUNG. mince el granuleuse, et n'offre jamais de membrane propre. Les granulalions, ordinairement disposées en une seule file, paraissent unies par une substance hvyaline ; on peut les distinguer non seulement sur la coupe optique, mais sur le fond même des vacuoles (fig. 5, 0). Il arrive parfois, surtout dans les cellules les plus jeunes, que le réseau protoplasmique se présente avec des mailles extraordinairement élroiles; mais il est rare qu’on nv observe pas aussi çà et là des vacuoles plus grandes. C'est le cas par exemple pour le Lupin élégant (Lupinus eleqans) (Hg. 3). La même siruclure réliculée se rencontre dans toutes les espèces éludiées, sans exception, aussi bien dans Pal- bumen transiloire (Lupin élégant) que dans l'embryon. Ainsi, à l’âge très précoce où nous envisageons la struc- ture cellulaire, le protoplasme consiste uniquement en un réseau granuleux, emprisonnant dans ses mailles un suc abondant, et il ne renferme ni leucites, ni grains d’amidon. Dans l’élude nécessairement incomplète que j'avais faite du Pois dans mon premier travail, ce que j'avais pris pour des leuciles dans l'embryon de cette plante m'apparait manifes- tement aujourd’hui comme l’ensemble du réseau protoplas- mique, et même il est là d’une remarquable netteté (fig. 4). Voyons maintenant où se déposent les premiers grains d'amidon, soit dans l’axe de l'embryon, soit dans les cotylé- dons, car les phénomènes sont identiques dans toute l’éten- due de la jeune plantule. Pour cela, prenons un embryon de Haricot (Phaseolus vulgaris) ou de Pois (Pisum salivum) de 3 à 4 millimètres, ou un embryon de Fève (Faba vulgaris) de 5 à 6 millimètres. Les grains d'amidon, loujours simples, allongés en baguette dans la Fève (fig. 2), plutôt arrondis dans le Haricot et le Pois (fig. 6 et 4), se déposent purement et simplement dans les mailles du réseau protoplasmique, de préférence dans les plus grandes; mais on en trouve aussi dans les mailles très peliles. Aucune autre formation n'apparaît dans ORIGINE DES GRAINS D'AMIDON. 11 la cellule, et notamment il n'y a pas trace de leucites, Lorsque le dépôt de l'amidon est ainsi commencé en un certain nombre de points, d'ailleurs variable selon les cel- lules, la nouvelle substance amylacée continue à se déposer sur les grains déjà formés, en sorte que forcément un nom- bre considérable de mailles restent uniquement occupées par le suc cellulaire, condition d’ailleurs indispensable au développement ultérieur de la cellule. Dans les mailles du réseau de la Fève, on voit distincte- ment les baguettes amylacées droites ou courbes se déposer quelque part contre la paroi (fig. 6, à droite), puis grandir rapidement pour occuper bientôt les mailles entières, Dans ce dernier cas, la paroi de la maille recouvre exactement le grain d’amidon. Tous les stades peuvent d’ailleurs être observés dans une même cellule, d'autant mieux que les grains d'amidon, colorés en bleu, se détachent nettement du réseau protoplasmique qui à été coloré en vert, Si l’on venait à examiner seulement celte structure, sans connaître la phase première, on pourrait être amené à con- sidérer comme des leucites les interstices protoplasmiques dans lesquels se trouvent logés les grains d’amidon, et encore une observation altentive montrerait-elle bientôt que la structure est identique dans le protoplasme tout entier. A plus forte raison, si l'on se contente de figurer chaque vacuole par un cercle, sans représenter le protoplasme avoi- sinant, l'erreur devient-elle presque inévitable. Les embryons dont il vient d’être question sont d’un vert plus ou moins foncé, selon les espèces; mais ils ne contien- nent que rarement, à cet âge, des grains de chlorophylle dis- nets (Lupinus variabilis) : le pigment vert est ordinairement diffus et fixé sur le réseau protoplasmique. Le développement se continue (fig. 7, 8) comme il vient d'être indiqué jusqu’à l'approche de la maturité de la graine, sans qu'aucun changement survienne dans la struclure in- tracellulaire, du moins en ce qui concerne les formations vi- sées dans ce travail : il n'est pas question 1ci du développe - 12 E. BELZUNG. ment des grains d’aleurone, qui fera l’objet d’un article spécial. En résumé /e proloplasme des embryons en voie de for- malon se présente sous la forme d'un réseau à mailles mul- tiples, qui à aucun moment ne renferme de formation com- parable à celle définie par le mot leucite ; les grains d'amidon naissent dans les parties libres de la cellule, c'est-à-dire dans les mailles du réseau proloplasmique, exactement comme des cristaux où toute autre formation. 2° Embryon mûr. — Au fur et à mesure que la graine approche de l’état de maturité, les liquides qui jusqu'alors avaient afflué abondamment dans l'embryon se raréfient; le suc cellulaire se concentre par l'effet de la transpiration, en sorte que bientôt les nombreux principes qu'il contenait en dissolution tendent à se concréler et à remplir plus ou moins complètement les mailles restées libres du réseau protoplasmique, et surtout les grains d’aleurone qui affec- tent à ce moment une structure vacuolaire. Des mailles libres peuvent encore êlre observées dans des embryons presque mürs, par exemple dans la Fève, mais beaucoup moins net- tement que dans les phases antérieures, car le contenu cel- lulaire devient de plus en plus dense, à cause du développe- ment irès rapide de nombreux grains d’aleurone. a. — Les mailles qui étaient primilivement occupées par les grains d’amidon sont maintenant complètement envahies par celte formation. En sorte que si l’on examine par exemple la tigelle d'un embryon de Haricot à peu pres arrivé à ma- {urité, on trouve dans chaque cellule de parenchyme (fig. 9), à part le noyau, des grains d’amidon fort nombreux, devenus polyédriques par pression réciproque, et intercep- tant une simple rangée de granulations protoplasmiques, c'est-à-dire la paroi des mailles dans lesquelles se sont ori- ginellement déposés des grains amylacés. On remarque en oulre de fines granulalions aleuriques, et, là où le contenu s’est échappé en parlie des cellules, des vacuoles plus ou moins contraclées du réseau, que les grains d'amidon empèê- chaient de distinguer. ORIGINE DES GRAINS D'AMIDON. 13 b.— I] peut arriver aussi que l’amidon déposé dans l’em- bryon durant la première phase du dévelcppement se résorbe partiellement {ligelle du Haricot), ou totalement, pendant la maturation de la graine. Ce dernier cas est réalisé par le Lupin blanc (L. albus) et le Lupin variable (L. mutabilis) : les graines müres de ces plantes ne contiennent pas trace d’amidon. Dans de pareilles graines, on peut assister, par l'étude de matériaux de plus en plus âgés, à la reconstitution progres- sive des vacuoles, par suite de la résorption lente des grains d’amidon. Le même phénomène peut être observé dans l’al- bumen transitoire du Lupin élégant (L. elegans), et surtout dans le Cytise, où les mailles du réseau protoplasmique, d’a- bord polyédriques, reparaissent, un peu irrégulières, parce que le contenu cellulaire est alors en voie de résorplion. Maintenant, dans quel état se trouvent les vacuoles libres du protoplasme, lorsque la graine est complèlement arrivée à maturilé? C'est ce qu'il me paraît impossible d'établir direc- tement avec certitude, d’abord parce que le contenu cellulaire est devenu extrêmement dense et ensuite parce que les grains d’aleurone adultes affectent ici à peu près les mêmes formes que les vacuoles, ainsi que je lindiquerai ailleurs. Mais on peut, sans grande erreur, juger de l'état des mailles libres, sans doute plus ou moins contractées, de [a graine müre par l'examen de la structure aux premiers jours de la germina- lion, avant toule formation d’amidon transitoire. 3 Embryon en voie de germination. — Étudions mainle- nant les modifications qui surviennent dans la structure in- time de l'embryon pendant la germination. a. — Considérons d’abord le Lupin blanc, qui est un cas simple, parce que, comme on vient de le voir, celle graine ne renferme pas trace d’amidon à sa complèle maturité (fig. 10). Dès le premier où le second jour de la germination, et avant que l’amidon transitoire ne commence à se déposer, les principes qui s’élaient |concrélés dans les vacuoles (aleu- 14 | É. BELZUNG. riques ou autres), lors de la maturation de la graine, se dissolvent dans l’eau absorbée; les grains d’aleurone sont at- laqués, et alors, particulièrement dans la tige el la racine de Pembryon, la structure vacuolaire ne tarde pas à repa- railre. Seulement les vacuoles, au lieu d’être simples comme dans les premières phases du développement, sont pour la plupart cloisonnées, c’est-à-dire subdivisées chacune en mailles plus fines par un réseau secondaire; mais elles ne re- présentent pas plus des leucites que dans la phase antérieure. De pareilles vacuoles cloisonnées peuvent même se rencon- trer, mais {rès rarement, dans l’embryon en voie de forma- Lion (fig. 5 et 7, 4”). Les grains d’amidon transitoire de germination, qui ne ardent pas à se constituer (fig. 10, c), se déposent néces- sairement dans les mailles de chaque vacuole cloisonnée, c'est-à-dire qu'au lieu de se présenter sous la forme de grains simples comme dans la première phase du développe- ment, ils constituent maintenant de petils groupes de deux à quinze granules, en un mot des grains d'amidon composés ; mais 1] n’y a au fond aucune différence entre les deux forma- tions: dans le premier cas, on a affaire à des vacuoles simples recevant chacune un seul grain d’amidon; dans le second cas, les mêmes vacuoles se trouvent subdivisées en vacuoles plus petites, chacune de ces dernières offrant un granule amylacé distinct, mais naturellement très petit. La présence de grains d’amidon {oujours simples dans le premier äge de l'embryon, de grains {oujours composés pendant la germina'ion (à de rares exceptions près), impli- que la subdivision des vacuoles primaires en vacuoles se- condaires, indépendamment de ce que l'observation directe apprend que cette subdivision existe. Ne sont composés dans la première phase du développement que les grains déposés dans des vacuoles cloisonnées, et ne sont simples pendant la germination que ceux qui se déposent dans des vacuoles restées uniloculaires : l’un el l’autre eas ne se pré- sentent que rarement. ORIGINE DES GRAINS D'AMIDON. 15 Les granules d’amidon de germination, une fois apparus, remplissent bien vite les mailles du réseau secondaire qu’ils occupent et deviennent souvent polyédriques par pression réciproque. Quelques jours après, le grain d’amidon com- posé est définitivement constitué. On peut encore distinguer à ce moment les granulations albuminoïdes interposées, mais fréquemment aussi on n'en trouve presque plus trace. Le protoplasme des cellules de la tigelle, qui s’est com- plètement débarrassé des granules aleuriques qu'il contenait, montre de nouveau à ce moment le réseau des vacuoles aquifères, c’est-à-dire celles dans lesquelles aucun grain d’amidon ne s’est déposé et qui ne contiennent par consé- quent que le suc cellulaire. Plus tard, quand par exemple la tige hypocotylée du Lupin atteint 8 ou 10 centimètres de longueur, et que sa teinte devient blanchâtre (fig. 11), on se trouve de nouveau en présence d’un vaste réseau de vacuoles, limitées par des parois granuleuses très délicates et toutes complètement dé- pourvuües d'amidon. On verra plus loin quelle est la destinée normale de l’amidon {ransitoire ainsi disparu. b. — Voyons maintenant les différences que présente à considérer une graine qui, à la malurité, renferme une abondante réserve d’amidon, par exemple le Haricot d'Es- pagne (Ph. mulhiflorus). Tandis que pendant la germination les grains simples d’amidon de réserve sont digérés (fig. 12, c”), des grains composés d’amidon transitoire se constituent, comme dans le Lupin, dans les mailles restées libres pendant la matura- üon.de la graine, et ici encore, à côté des gros grains de réserve (c’), diversement corrodés et autour desquels il n’y a absolument aucune espèce d’enveloppe propre, à côté des réseaux secondaires (c) emprisonnant Îles grains d'amidon de germinalion, on voit de nombreuses mailles libres de toute formation figurée (4) et dans lesquelles s’accumule uniquement le sue de la cellule avec les principes qu'il tient en dissolulion. 16 | E. BELZUNG. On comprend maintenant pourquoi deux sortes de grains d’amidon, en apparence si différents, se trouvent réunis dans ces embryons au moment de la germination. On voit qu'il n’y a dans leur mode de formation aucune différence essen- lielle, mais seulement une différence de degré, savoir, que les gros grains d’amidon simples, dits de réserve, naissent dans les vacuoles uniloculaires du premier âge, tandis que les grains plus petits el groupés (qui sont du reste de ré- serve au même lilre que les précédents) naissent pendant la germination dans des vacuoles analogues, mais ultérieu- rement eloisonnées. Destinée des grains d’amidon de germination : for- mation des corps chlorophylliens. — Éludions enfin les transformations qu'éprouvent les grains composés d’amidon de germination, dans les premières semaines du dévelop- pement de la plantule à la lumiere. Dans les cotylédons du Lupin blanc, par exemple, qui verdissent très rapidement, et aussi dans la tigelle, on voit les grains d’amidon composés, ainsi que je l'ai décrit anté- rieurement, se résorber peu à peu; puis apparaît, dans la mesure même de leur disparition, une substance verte, im- prégnée de chlorophylle, si bien que lorsque le verdissement de la plantule atteint son maximum d'intensité, la plupart des grains d’amidon composés ont fait place à autant de grains de chlorophylle (fig. 11, d). On assiste de la sorte à là transformation des grains d'ami- don en corps chlorophylliens, les uns pleins, les autres plus ou moins vacuolaires (fig. 13, d'). Lorsqu'ils sont complètement développés, les corps chlorophylliens présentent à considérer deux parties (fig. 13, d): d’une part, des granulations d’un vert foncé, provenant de la métamorphose des granules amylacés, d'autre part une substance interstitielle d’un vert beaucoup plus clair, peut-être même incolore, représentant le réseau secondaire de la vacuole primitive. Ces deux parties sont aussi (très nelles dans le péricarpe du Haricot, où les grains verts sont de grande taille; j'ai figuré ces derniers ORIGINE DES GRAINS .D'AMIDON. 17 dans mon précédent travail, mais à un grossissement moindre et par conséquent avec moins de détail. Il arrive parfois que les grains de chlorophylle se montrent complètement isolés dans leur vacuole et séparés du protoplasme voisin par un espace circulaire simplement occupé par le sue. Les grains d’amidon de réserve, qui sont simples, peuvent, comme les grains d’amidon (ransitoire, se {transformer en grains de chlorophylle; ce fait a été cité déjà par plusieurs auteurs, notamment pour la Lentille; on peut l’observer aussi dans le Haricot. Mais les plus gros grains d’amidon ne subissent celte métamorphose que partiellement, en sorte qu'il reste toujours un noyau plus ou moins considérable d'amidon, simplement enveloppé d'une zone chlorophyllienne d'épaisseur variable; même un grand nombre d’entre eux ne sont le siège d'aucun verdissement, sans doute parce qu'ils obéissent à l’action digestive, qui est alors plus puissante que l'action verdissante. Dans toute l'étendue de la plantule, les grains de chloro- phylle se constituent comme il vient d’être indiqué. Que maintenant la chlorophylle vienne à disparaître dans le tissu considéré, comme par exemple cela a lieu dans l'écorce de la tige hypocolylée au bout de quelques semaines, el les vacuoles se reconstituent, rappelant la structure du premier âge. En résumé, les grains de chlorophylle représentent des for- malions actuelles, remplissant plus ou moins complètement certaines mailles du réseau protoplasmique. Leur structure est réniculée. Is ont pour élément générateur figuré des grains d'amidon simples ou composés, et pour éléments dissous tout au moins les principes azolés du suc cellulaire qui sont indispensables à l'élaboration de la chlorophylle. Conclusions. — Des recherches qui viennent d’être exposées découlent les conclusions suivantes : 1° Dans les jeunes embryons, le protoplasme des cellules se compose uniquement d'un réseau granuleux, dont les ANN. SC. NAT. BOT. XI, 2. 18 | E. BELZUNG. mailles sont occupées par le suc cellulaire; dans ce réseau se trouve englobé le noyau. 2° Les grains d’amidon se déposent dans un plus ou moins grand nombre de mailles de ce réseau et les envahissent progressivement ; ils sont simples. 3° A la maturité de l'embryon, par l'effet de la dessicca- tion, les mailles non amylifères sont contractées et renfer- ment, mais en beaucoup moins grande quantité que Îles grains d’aleurone, les principes qui précédemment étaient en dissolution dans le suc cellulaire. Le plus grand nombre d’entre elles, jusqu'alors simples, se cloisonnent en d’autres plus petites, et constituent ainsi chacune un réseau granu- leux secondaire. 4° Au moment de la germination, l’amidon transitoire se dépose dans les mailles de ces réseaux secondaires, qui sont du reste les seules parties accessibles de la cellule, et comme les granules amylacés se trouvent ainsi en plus ou moins grand nombre les uns à côté des autres, il en résulte des grains d’amidon composés. 5° Les grains d'amidon de germination (et même l’ami- don de réserve) se métamorphosent en grains de chloro- phylle, avec le concours des principes azotés du suc cellu- laire. Chaque grain de chlorophylle présente à considérer un réseau plus ou moins serré, dans les mailles duquel se trouve la substance imprégnée de pigment vert. 6° La formalion désignée par le mot /eucite n'existe à aucun âge et dans aucun membre des plantules étudiées dans ce travail. Conséquence. — Ces résultats me semblent être’ en con- tradiction avec l’idée aujourd'hui en faveur sur le rôle des grains de chlorophylle. Si en effet l’amidon, comme cela résulle de mes recherches, est un principe nécessaire à la constitution même de la chlorophylle, il me paraît difficile d'admettre que ce même pigment vert ait précisément pour rôle d'élaborer, par l'assimilation du carbone, les granules ORIGINE DES GRAINS D'AMIDON. 19 amylacés qui se déposent dans les grains de chlorophylle des feuilles adultes. L'apparition de ces granules dans les mailles des corps chlorophylliens me semble plutôt devoir être envisagée, non comme une manifestation plus ou moins directe de l’action assimilatrice de la chlorophylle, mais seulement comme une conséquence de la présence de principes plastiques abondants dans les cellules considérées, et indépendamment de toute action propre du pigment vert. En d’autres termes, même si les grains de chlorophylle n’exercçaient aucune aclion dans le phénomène général de l'assimilation, au sein des feuilles, des grains d’amidon se déposeraient néanmoins dans leur intérieur, exactement comme l’amidon transitoire de constitution (1"* phase) ou de germination (2° phase) se dé- pose toujours dans des formations analogues, quoique souvent incolores, et par le seul fait, du reste indispensable, de l’éla- boration ou de la mise en œuvre de principes plastiques. La production de l’amidon transiloire dans les graines en voie de germination doit être rattachée, selon moi, au même processus que la production des amides, c’est-à-dire que tous ces corps, dissous ou figurés, résultent des transfor- malions qu'éprouvent les réserves durant la germination, de même que leur destinée commune est de contribuer directement à l'édification de la structure adulte. C’est aussi par un phénomène du même ordre que se constitue journellement l’amidon transitoire dans les feuilles adultes de la plante. On voit que l’idée principale à laquelle m'avait conduit mon précédent travail, savoir, l’amidon envisagé comme source et non comme produit de la chlorophylle, ne se trouve nullement modifiée par mes nouvelles recherches. Il m'est donc moins que jamais permis d'accepter la doctrine courante sur cette question. Ce travail a été fait au laboratoire de Botanique (Orga- nographie et Physiologie) du Muséum d'histoire naturelle. 20 E. BELZUNG. Note ajoutée pendant l'impression. — Pendant l'impression de ce travail deux mémoires ont paru, concernant l’un les grains d’amidon, l’autre les grains de chlorophylle. Le premier (1) est une réfutation de la doctrine de M. Schimper; j'ai montré ailleurs (2) qu'il a pour base des données tout à fait insuffisantes, notamment en ce qui concerne l'origine première des grains d’amidon dans la plante. Le second mémoire (3) ne s’écarte guère de la doctrine courante, et l'intérêt qu'il pouvait offrir par le détail se trouve singulièrement diminué par l'absence de figures. Le bulletin bibliographique de la Société botanique de France en publiera prochainement une analyse sommaire, ce qui me dispense d’en parler ici. (4) Oscar Eberdt, Beiträge zur Enstehungsgeschichte der Stärke (Jahrb. f. wiss. Botanik, Band 22, Heft 3). (2) E. Belzung, Sur le développement de l'amidon (Journal de Botanique, Aer janvier 1891, Paris). : (3) Hans Bredow, Beiträge zur Kenntniss der Chromatophoren (Jahrb. f. wiss. Botanik, Band 22, Heft 3). EXPLICATION DES FIGURES DE LA PLANCHE LI. INDICATIONS GÉNÉRALES : &, parois granuleuses du réseau protoplasmique; b, mailles de ce réseau; €, mailles plus ou moins complètement occupées par les grains d’amidon; €’, grains d’amidon partiellement transformés en corps chlorophylliens; d, corps chlorophylliens complets. Grossisse- ment de toutes les figures : 2300. Fig. 1. — Cellule d’un très jeune embryon de Phaseolus vulgaris; b, mailles du réseau 4. Fig. 2. — Noyau entouré du protoplasme réticulé avoisinant (Faba vulgaris) ; e, grains d’amidon naissant dans les vacuoles. Fig. 3. — Cellule d’un embryon de Lupinus elegans d'un demi-millimètre de longueur. b', grandes mailles ; b, mailles très petites du réseau. Il n’y à pas encore d’amidon. Fig. 4. — Dépôt des premiers granules amylacés c dans un embryon de Pisum sativum de quatre millimètres. Le réseau est très net. (Matériaux frais ou fixés par l'alcool.) Fig. 5. — Trois grandes vacuoles arrondies d’une cellule de Pisum sativum, prises dans un embryon de quatre millimètres. En b, on voit le fond réti- culé de trois vacuoles; en &”, une vacuole partiellement subdivisée, avec plusieurs grains d'’amidon; en ce, deux autres vacuoles, simples, avec grains d’amidon plus développés. (Matériaux frais ou traités préalablement par l'alcool.) Fig. 6. — Grains d’amidon ovales dans la figure de gauche (Ph. vulgaris), en baguettes dans les trois figures de droite (Faba vulgaris), nés dans de larges vacuoles simples. Fig. 7. — Cellule d'un cotylédon de Pisum sativum, à une phase un peu plus avancée que dans la figure 4. b", vacuole partiellement cloisonnée, et offrant exceptionnellement plusieurs granules amylacés. Fig. 8. — Fragment d’une cellule d’un cotylédon de Phaseolus vulgaris, tiré d'un embryon de six à huit millimètres. ce, vacuoles amylifères; b, va- cuoles aquifères; n, noyau et nucléole. Fig. 9. — Petit fragment du contenu d’une cellule de Phaseolus vulgaris, pris dans la tigelle d’un embryon de huit à dix millimètres; le réseau protoplasmique est complètement rempli par les grains d’amidon. Fig. 10. — Moitié d’une cellule de la tige de Lupinus albus, après quatre jours de germination. b, vacuoles aquifères; €, grains d'amidon composés, logés dans les réseaux secondaires. Fig. 11. — La même cellule après une dizaine de jours de germination. b, réseau des vacuoles; d, grain de chlorophylle non encore détruit; d’, 29 E. BELZUNG. vacuole renfermant encore des traces du grain de chlorophylle qui l’occu- pait. Fig. 12. — Moitié d’une cellule du cotylédon de Phaseolus multiflorus, après dix jours de germination de la graine. b, vacuoles aquifères; c, grains d’amidon composés; c’, les mêmes partiellement transformés en grains de chlorophylle; d, grains de chlorophylle n'ayant plus trace de leur amidon générateur; €”, grains d’amidon de réserve en voie de digestion, diversement corrodés; f, grains d’aleurone fragmentés et non encore digérés. Fig. 13. — Moitié d’une cellule cotylédonaire de Lupinus albus, après dix jours de germination. b, c’, d, comme dans la figure 12; d', grains de chlorophylle devenus plus où moins vacuolaires, et faisant suite à d, grains pleins et nettement réticulés; f, granules provenant de la fragmen- tation des grains d’aleurone, et non encore résorbés. SUR LA STRUCTURE ET LES AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES Par Ph. VAN TIRGIENX. HISTORIQUE. A.-L. de Jussieu plaçait les Wemecylon el les Mouriria à côté des Fuchsia dans sa famille des Onagres, nos OEnothé- racées (1). A.-P. de Candolle (2), et d’après lui Lindley (3), Endli- cher (4), Gardner (5) ont réuni ces deux genres, sous le nom de Mémécylées (de Candolle, Endlicher), de Mémécylacées (Lindley) ou de Mouririacées (Gardner), en une famille à part, intermédiaire à celle des Mélastomacées, dont elle diffère par les feuilles uninerves, et à celle des Myrtacées, dont elle s'éloigne par le manque de poches sécrétrices. A. Richard (6) et M. Grisebach (7) ont introduit ces deux (1) A.-L. de Jussieu, Genera plantarum, p. 320, 1789. (2) A.-P. de Candolle, Prodromus, UE, p. 5, 4828 et Revue de la famille des Mélastomacées (Coll. de mém., 1, Paris, 1828). (3) Lindley, À nat. System of Botany, 2° éd., p. 40, 1836. (4) Endlicher, Genera plantarum, p. 1222, 1840. (5) Gardner, Journal of Botany, IL, 1840. (6) A. Richard, Plantes vasculaires de Cuba, p. 570, 1845 et Éléments de bo- tunique, 11° éd., p. 557. (1) Grisebach, Flora brit. West-Ind. Isl., p. 243, 1864. 2% PIE. VAN TIEGHEM. genres dans la famille des Myrtacées, en en formant une tribu spéciale sous le nom de Mouririées (Richard) ou de Mémécy- lées (Grisebach). M. Naudin, au contraire, à l'exemple de Dupetit-Thouars et de Robert Brown, les a incorporés à la famille des Méla- stomacées, opinion adoptée par tous les auteurs qui ont suivi, à l'exception de M. Grisebach ; en outre, il les a séparés l’un de l’autre pour en faire deux tribus distinctes. Dans sa Des- criplion monographique des Mélastomacées (1), il divise, en effet, celte grande famille en cinq tribus principales, savoir : les Mélastomées, comprenant la très grande majorité des genres; les Astroniées, avec le seul genre A s{ronia (y com- pris Naudinia) ; les Kibessiées, renfermant les quatre genres Kibessia, Macroplacis, Rectomitra e{ Pternandra (Ewychia); les Mémécylées, avec les trois genres Spathandra, Memecy- lon et Liÿndenia ; enfin les Mouririées, avec les deux genres Guildingia et Mouriria. Cette dernière tribu lui paraît appartenir à peine aux Mélastomacées (2). Plus tard, MM. Bentham et Hooker, adoptant une distri- bution nouvelle des genres des Mélastomacées proposée par Triana (3), ont réuni les Kibessiées aux Astroniées, les Mou- ririées aux Mémécylées etréduit ainsi à trois le nombre des tribus principales ou sous-familles, savoir : les Mélastomées, les Aslroniées avec les quatre genres Astronia, Kibessia, Plernandra (j compris Macroplacis et Rectomitra) et Ple- thiandra, el les Mémécylées avec les deux genres Memecylon (y compris Spathandra el Lijndenia) et Mouriria (y compris Guildingia) (4). Dans la publication définitive de son travail, Triana inchinaïit à séparer de nouveau ces deux derniers gen- res en deux tribus distinctes, les Mouririées qui, suivant lui el contrairement à l'opinion de M. Naudin, touchent de plus (4) Naudin, Melastomaucearum monographicæ descriptionis tentamen (Ann. des se. nut., 3° série, XVIII, 1852). (2) « Vix in Melastomaceis includitur, nulli tamen ordini aptius quam huic congruit » (loc. cit., p. 283). (3) Triana, Bull. du Congrès internat. d'Amsterdam, 1865. (4) Bentham et Hooker, Genera plantarum, 1, p. 725, 1867. STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 25 près aux Mélastomacées, et les Mémécylées qui se rappro- chent davantage des Myrtacées (1). Il maintenait aussi comme genre distinct les Æectomitra entre les Aibessia el les Pternandra dans les Astroniées. Plus tard encore, M. Baillon a divisé à son tour les Mé- lastomacées en trois tribus ou séries : les Mélastomées, les Astroniées, comprises comme ci-dessus, el les Blakéées. Dans cette dernière, il réunit aux Memecylon el aux Mouriria non seulement les Blakea et Topobea formant la sous-tribu des Blakéées de MM. Bentham et Hooker (Pyxidanthées de Triana), mais encore les Bellucia, Loreya et Heteroneuron. appartenant à leur sous-tribu des Miconiées, c'est-à-dire toute une série de genres que lous les auteurs précédents avaient placés dans les Mélastomées. IT y adjoint même, en les intercalant entre les Memecylon et les Mouriria, les Axinandra, que MM. Bentham et Hooker avaient classés, comme genre anomal, parmi les Lythracées (2). Enfin tout récemment M. Cogniaux, revenant à la manière de voir de Triana, a divisé les Mélastomacées du Brésil en deux tribus principales où sous-familles : les Mélastomées, où il réintègre les Blakea, Topobea, Bellucia, Loreya, ete., et les Mémécylées, avec le seul genre Mouriria, les Meme- cylon n'étant pas représentés au Brésil, non ie que les di- vers genres des Astroniées (3). On voit par là combien les affinités des deux genres We- mecylon et Mouriria, soit entre eux, soit avec les Mélastoma- cées proprement dites, soit avec les Myrtacées, ont été di- versement comprises par les botanistes descripteurs. J'ai pensé que l'anatomie pourrait meltre un peu de lumière dans cette obscurité. Pendant longtemps les anatomistes qui ont étudié la tige des Mélastomacées, MM. Crüger (1850), Sanio (1865), Vôch- (4) Triana, Les Mélastomacées (Transactions of the Linn. Society, XXVII, p.3etp. #4, 1873). (2) Baillon, Histoire des plantes, VII, p. 31, 1880. (3) Cogniaux, Flora brasiliensis, fasc. LXXXIX, 1883 et fasc. CIIE, p. 503, 1888. 26 PI. VAN TIEGHEM. ting (1875), Petersen (1882), Weiss (1883), Hérail (1885), ont porté leur attention exclusive sur les genres de la grande tribu des Mélastomées. Ils y ont rencontré toujours des tubes criblés périmédullaires , presque toujours des faisceaux li- béroligneux médullaires, quelquefois en outre des faisceaux libéroligneux corticaux. Pour la première fois, en 1885, M. Solereder, dans un travail d'ensemble sur la valeur systématique de la structure du bois chez les Dicotylédones, a compris les Astroniées et les Mémécylées dans le cadre de ses recherches (1). Il a vu que les Astronia ont des faisceaux libéroligneux dans la moelle et que le bois des Æibessia, Memecylon et Mouriria renferme des îlots de liber; maisila mal compris la forma- tion de ces îlots. Il n'a d'ailleurs tiré de ses observations aucune conclusion relative à la classification de ces plantes. Deux ans plus tard, M. Lignier, à qui l’on doit le travail anatomique le plus récent et le plus étendu sur la tige et la feuille des Mélastomacées, a étudié à son tour le genre Memecylon, sans avoir eu connaissance, semble-t-il, de l’ou- vrage de M. Solereder, qu’il ne cite pas (2). Il v a observé aussi les îlots deliber inclus dans le bois secondaire et en a indiqué exactement le mode de formation; de plus, il a si- gnalé l'existence de sclérites dans le parenchyme dela feuille. Toutefois, sans doute faute d’avoir étudié les Mouriria et les Astroniées, il ne paraît pas avoir attaché à ces caractè- res toute l'importance qui, suivant nous, leur est due. Il omet, eneffet, deles rappeler en résumant les conclusions de son travail el formule celles-ci comme si les Memecylon n’existaient pas (/oc. cit, p. 321 et p. 355). Il était nécessaire, on le voit, de reprendre l’élude anato- mique des Mémécylées, des Astroniées et même des Méla- stomées, notamment dans les deux sous-tribus les plus voi- (1) Solereder, Ueber den systematischen Werth der Holzstructur bei den Dico- tyledonen, p. 34 et p. 129, Munich, 1885. (2) Lignier, Recherches sur l'anatonie comparée des Calycanthées, des Mélu- stomucées et des Myrtacées (Arch. bot. du Nord de la France, IV, 1887). STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 97 sines, celles des Blakéées et des Miconiées, afin de fixer avec plus de précision les affinilés des genres et de les grouper en tribus d'une manière plus conforme à leurs affinités. Il MEMECYLON. Considérons, en premier lieu, le genre Memecylon et fai- sons d’abord l'étude anatomique de la tige, de la feuille et de la racine du Memecylon ramiflorum, seule espèce dont j'aie pu me procurer un échantillon vivant (1). Nous y rattache- rons ensuite aisément la structure de la tige et de la feuille des autres espèces, dont l’'Herbier du Muséum m'a fourni les matériaux. Tige. — Sous l’épiderme fortement cutinisé et dépourvu de poils, l'écorce de la jeune tige comprend une dizaine d'assises de cellules dont la plupart contiennent des chloro- leucites et des grains d’amidon, tandis que d’autres renfer- ment des mâcles sphériques d’oxalate de chaux. Elle est en- tièrement dépourvue de faisceaux libéreligneux. Les cellules de l’assise corticale la plus interne, c’est-à-dire de l’endo- derme, épaississent el lignifient de bonne heure leur mem- brane, sur la face interne ainsi que sur les faces latérales et transverses, de manière à prendre sur la section transver- sale la forme d’un U (PL. IF, fig 1,e); avant cetépaississement, les faces latérales et transverses ne se montrent pas pour- vues de plissements bien marqués. Çà et là, une cellule de l’avant-dernière assise s’épaissit et se lignifie de la même manière, doublant ainsi localement la cuirasse protectrice formée par l’endoderme autour du cylindre central (fig. 1). Celui-ci commence par qualre à six assises de petiles cel- lules aplalies tangentiellement, qui constituent le périceyele (1) M. Th. Dyer, directeur des Jardins royaux de Kew, a bien voulu me faire adresser un rameau feuillé de celte plante, mais il m'a été impossible, malgré mes instances réitérées, d’en obtenir une racine. Heureusement, j'ai trouvé dans la Collection des Bois du Muséum une racine âgée de cette même espèce, qui m'a permis de compléter mon travail, 28 PI. VAN TIEGHEM. (fig. 1, p); cà et là quelqu'une de ces cellules contient un cristal prismalique d’oxalate de chaux; çà et là aussi quelqu’une s’al- longe en fibre en épaississant et lignifiant sa membrane. L'assise la plus externe du péricycle accroît de bonne heure radialement ses cellules et les cloisonne tangentiellement, pour former un périderme. Le liège ainsi constitué a toutes ses cellules semblables; il en épaissit et lignifie la mem- brane progressivement de dehors en dedans, de la même manière que l’endoderme, c’est-à-dire exclusivement sur les faces interne, latérales et transverses, en forme d'U (fig. 1, /); mais les cellules subéreuses ainsi sclérifiées se distinguent toujours de celles de l’endoaerme par leur dimension plus petite et par leur superposition radiale. Sous le péricyele, le liber forme un anneau continu très mince, composé de pelits îlots de tubes criblés très étroits, séparés par du parenchyme dont les cellules contiennent ca et là des prismes d’oxalate de chaux. Séparé du liber par: l’assise génératrice, le bois forme aussi un anneau continu, composé de séries rayonnantes où les vaisseaux primaires, les plus internes, sont séparés par du parenchyme qui plus tard lignifie ses membranes, tandis que les secondaires, situés plus en dehors, sont séparés par des fibres très étroites, fortement épaissies et lignifiées. Les faisceaux libéroligneux étant fusionnés en un anneau libéroligneux continu, la struc- ture du cylindre central est gamodesme. Au pourtour de la moelle sont disposés en cercle des îlots de tubes criblés, plus volumineux que ceux du liber; les cellules de parenchyme qui les séparent contiennent aussi des cristaux prismaliques (fig. 2, c). Nés par recloisonne- ment longitudinal de certaines cellules médullaires périphé- riques, ces faisceaux criblés, dont il peut y avoir çà et là deux superposés sur le même rayon, constituent par leur ensemble une zone criblée périmédullaire. Entre eux et les vaisseaux les plus internes de l'anneau ligneux, se trouve au moins un rang de cellules parenchymateuses, où l’on voit se faire des cloisons tangentielles, qui se succèdent en direction STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 29 centrifuge ; les éléments secondaires ainsi formés épaissis- sent de dedans en dehors les faisceaux criblés (1). Au bord interne de ceux-ci, certaines cellules de la moelle, isolées ou rapprochées par petils groupes, s’allongent en fibres en épaississant et lignifiant leurs membranes. L'ensemble de ces fibres forme, en dedans de la zone criblée périmédullaire, une zone scléreuse (fig. 2, s), qui répond à la zone scléreuse constituée en dehors du liber par l’endoderme et par le liège (p): Par endroits, les cellules interposées entre les faisceaux criblés s’épaississent et se lignifient de la même manière, rejoignant la zone scléreuse à l'anneau ligneux, de manière que les faisceaux criblés semblent au premier abord inclus dans le bois primaire. Enfin toute la région centrale de la moelle (fig. 2,m) est composée de larges cellules à parois min- ces, dont la plupart contiennent des grains d'amidon, d’au- tres des mâcles sphériques, d’autres encore, mais moins nombreuses, de longs cristaux prismaliques. Plus tard, cette région épaissit et lignifie aussi ses membranes, surtout vers le centre. Elle est et demeure entièrement dépourvue de fais- ceaux libéroligneux. Telle est la structure de la tige jeune. Mais bientôt, et, semble-t-il, dès avant la fin de la première année de végé- tation, il s’y introduit un caractere nouveau. En de certaines places de sa périphérie, dont le nombre varie de seize à vingt, l’assise génératrice cesse de produire du bois secon- daire sur son bord interne, et, par contre, produit plus de li- ber secondaire sur son bord externe, tandis que dansles places (1) C'est à dessein, et parce que je le crois impropre, que j'évite de donner à ces faisceaux criblés le nom de Liber, en les appelant liber interne, liber périmédullaire, comme ont fait tous les auteurs qui jusqu'à présent les ont étudiés. Liber et bois désignent, en effet, deux régions anatomiques, ca- ractérisées respectivement par les tubes criblés et par les vaisseaux. Mais il peut yavoir des tubes criblés en dehors du liber, comme on le voit notam- ment dans le cas actuel, et des vaisseaux en dehors du bois, comme par exemple le gros vaisseau qui occupe l'axe de la moelle dans la racine du Blé et d’autres Graminées. A ces tubes criblés extra-libériens,à ces vaisseaux extra-ligneux,on donnera simplement une épithète pour indiquer la région qui les renferme; ce seront, comme ici, des tubes criblés périmédullaires, ou, comme dans le Blé, des vaisseaux médullaires. 30 PI. VAN MERGHMEM. intermédiaires, sensiblement de même largeur que les premiè- res, elle continue son jeu normal. Il en résulte bientôl dans le bois secondaire autant de cannelures de plus en plus sail- lantes, séparées par des sillons de plus en plus profonds où se trouve logé le liber correspondant (fig. 4). Dès que, dans leur progression vers l'extérieur, les ares générateurs des can- nelures (4) sont parvenus à dépasser le bord externe des fais- ceaux de liber compris dans les sillons, ils s'unissent tous ensemble par le moyen de l’assise interne du péricyele, qui devient à ces endroits génératrice et se cloisonne tangentiel- lement pour les fusionner (fig. 5). Désormais, et pendant quel- que temps, l’assise génératrice ainsi reconstituée fonctionne normalement sur tout son pourtour, c’est-à-dire produit du bois sur tout son bord interne (fig. 6). Les faisceaux du liber logés dans les sillons primitifs se trouvent ainsi totalement inclus dans le bois (fig. 3), où ils forment, sur la section trans- versale, un cercle d’ilots de forme circulaire ou ovale (fig. 2). Cà et là deux sillons sont assez rapprochés pour que l'arc générateur de l’étroite cannelure qui les sépare cesse à son tour après un peu de temps de produire du bois en dedans; il en résulte que les deux îlots se fusionnent en une bande tangentielle, bilobée sur son bord interne. Plus tard, l’assise génératrice cesse de nouveau de pro- duire du bois en un certain nombre de places, ordinairement alternes avec les précédentes, de sorte que le liber primaire et secondaire qui avait échappé à la première inclusion se trouve compris dans la seconde, et forme dans le bois secon- daire un second cercle d’ilots en dehors du premier. Et ainsi de suite, indéfiniment. A un moment donné, il ne subsiste donc, en dehors de l’assise génératrice, que le liber secon- daire le plus récemment formé ; tout le reste se trouve inclus dans le bois, à des profondeurs diverses, d'autant plus grandes qu'il est plus ancien. Il est possible qu'il se fasse à chaque période végélalive une inclusion nouvelle de liber, de sorte que chaque couche annuelle de bois secondaire contienne un cercle d'ilots libériens. Mais les couches annuelles du STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 31 bois secondaire n'étant pas nettement distinctes dans cette plante, la chose ne peut être décidée avec certitude. La ré- gion la plus âgée de la branche que j'ai pu éludier vivante avait trois cercles d'ilots de liber inclus, et un quatrième en voie de formation (fig. 2). Le bois secondaire de première année y était assez nettement limité en dehors et le premier cercle d’ilots était voisin de la limite. À ce niveau, la tige était sur le point de perdre son écorce et allait se trouver revêtue par la couche scléreuse (p) formée, comme il a été dit plus haut, par son endoderme et son liège. Dans une bran- che plus grosse, empruntée à un échantillon de l'Herbier du Muséum, le bois, qui mesurait 4,5 millimètres de diamètre, renfermait déjà dix à douze zones plus ou moins régulières d'ilots libériens. Après avoir cessé de produire du bois sur sa face interne, l'arc générateur correspondant à chaque sillon continue, avons-nous dit, à fonctionner en formant du liber sur sa face externe (fig. 4). Cette formation centripète de liber paraît même se prolonger encore un peu après l'inclusion complète du faisceau libérien dans le bois (fig. 5 et 6), si l’on en juge notamment par l’écrasement des tubes criblés externes de l'ilot. Chaque faisceau de liber inclus (fig. 3 et fig. 6) se montre donc constitué par des tubes criblés très étroits, séparés par duparenchyme dont cerlaines cellules, surtout dans la région externe du faisceau, renferment des prismes d’oxalate de chaux. Çà et là, tardivement, dans les îlots du cercle interne quand il y en a trois, on voit une ou quelques cellules du parenchyme libérien épaissir et lignifier leurs membranes. La remarquable anomalie que nous venons de décrire ressemble, dans ses traits essentiels, à celle de la tige des Strychnos, signalée d’abord par F. Müller (1), étudiée plus tard par A. de Bary, qui s'est mépris sur son origine (2), et dont M. Hérail a fourni récemment la véritable explica- (1) F. Müller, Bot. Zeitung, 1866. (2) A. de Bary, Vergleichende Anatomie, p. 594, 1877. 32 PET. VAN MIEGHENM. tion (1). Elle est seulement plus précoce ici et plus fré- quemment répélée. Comme il a été dit plus haut, M. Solereder a le premier, en 1885, observé celte anomalie chez les Memecylon, dont il a étudié sous ce rapport quatorze espèces, savoir : les 42. acu- minalum, amplericaule, anqulatum, cæruleum, cordatum, C'u- mingianum, edule, grande, Heyneanum, intermedium, lævi- gatum, oligomerum, polyanthemos, sphærocarpum. Mais, ainsi que l'avait fait A. de Bary pour les Strychnos, il en a mé- connu la véritable signification (2). Il admet, en effet, que si l’assise génératrice cesse en de certaines places de former du bois vers l'intérieur, c'est pour y produire du liber de dedans en dehors ; plus tard, elle cesse de produire du liber sur son bord interne pour y former de nouveau du bois, de sorte que ce liber centrifuge se trouve ainsi intercalé dans le bois. Nous avons vu que le liber est, au contraire, produit tout d’abord vers l'extérieur par l’assise génératrice ; il est centripète, suivant la règle; c’est plus tard seulement qu'il se trouve incorporé au bois. La structure de la tige du Memecylon clausiflorum Naud. (M. Cumingianum Presl), l'une des espèces déjà éludiées par M. Solereder, a été décrite en 1887 par M. Lignier telle à peu près que nous venons de l’esquisser (3). Le mode d'in- clusion du liber dans le bois, notamment, a été correc- tement indiqué, en conformité avec les observations anté- rieures de M. Hérail sur les Sfrychnos, observations que M. Lignier ne cite pas. Entre nos résultais et les siens, il v a pourtant quelques différences, qui intéressent les unes l’ana- tomie générale, les autres l'anatomie comparée. Ainsi, les assises de petites cellules qui séparent l’endo- derme des tubes criblés les plus externes sont rattachées par M. Lignier au liber ; elles sont pour lui le «liber externe » (4) Hérail, Recherches sur l'anatomie comparée de lu tige des Dicotylédones (Ann. des sc. nat., 7° série, I, p. 256, 1885). (2) Solereder, loc. cit., p.33 et p. 131, 1885. (3) Lignier, loc. cit., p. 217, 1887. STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 33 (loc. cit., p. 219). Pour nous, elles constituent, par définition même, le péricycle. Le liège est donc d'origine libérienne pour M. Lignier, tandis qu'il est d’origine péricyclique pour nous. De même, les cellules qui séparent latéralement les faisceaux criblés périmédullaires, et les fibres qui en revêtent le bord interne, sont rattachées par lui au « liber interne », qui forme dès lors une « bande continue » (/oc. cit., p. 218). Pour nous, ces cellules et ces fibres appartiennent à la moelle, où les faisceaux criblés eux-mêmes se sont formés et différenciés. Enfin, pour M. Lignier, les cellules médul- laires qui renferment des prismes d’oxalate de chaux, parce que ces prismes sont semblables à ceux du liber externe ou interne, «sont assurément des traces du tissu libéroli- gneux médullaire de la tige des Mélastomacées » (p. 221). C'est sans doute cette manière de voir qui permet à l’auteur, lorsqu'il formule plus loin ses conclusions généraies au sujet de la tige des Mélastomacées, de dire à deux reprises (p. 222 el p. 351), sans faire abstraction des Memecylon, que cette tige renferme {oujours dans sa moelle des faisceaux libéro- ligneux concentriques. Pour nous, Îles cellules à cristaux prismaliques sont simplement des cellules médullaires comme les autres et la moelle des Memecylon est absolument dépourvue de faisceaux libéroligneux. On verra d’ailleurs plus loin que, contrairement à ce qui est établi, il en est de même chez bon nombre de Mélastomées. M. Lignier signale en quelques mots la même structure dans la tige du Memecylon Hookeri (p. 222). Je lai retrouvée avec les mêmes caractères essentiels dans toutes les espèces dont j'ai pu étudier un fragment de tige dans l’Herbier du Muséum. Ce sont, outre la plupart des espèces observées par MM. Solereder et Lignier, les A7. Spa- thandra, fasciculare, Vogeli, trinerve, melastomoides, oligo- neuron, sylvaticum, phyllanthifolium, linclorium, panicula- tum, uloplerum, cuneatum, (Gardner, parnifolium, re- volutum, leucanthum, angustifolium. rostralum, fuscescens, lutescens, ligustrinum, dolichophyllum, varians, ellipticum, ANN. SC. NAT. BOT. XIII, 3. 34 ; PH. VAN TIEGHENM. costalum, Arnothanum, rhinophyllum, laurinun, oleæ folium, sculellatum, myricoides, strumosum, dumosum, heteropleu- ron, depressum, ferreum, excelsum, garcinioides, pauciflo- rum, capuellatum, Griffithianum, Thomson, orbiculare, pra- sinum, lilacinum, Preslianum, myrsinoides, elæagni, australe, viliense. | Avec le M. ramiflorum et les quinze espèces étudiées par MM. Solereder et Lignier, c’est un total de soixante-quinze espèces où l’anomalie a été constatée. On doit donc admettre qu'elle se retrouve dans toutes les espèces du genre, qu’elle constitue pour lui un caractère anatomique constant. Les différences d’une espèce à l’autre sont tout à fait se- condaires. C’est, par exemple, la formation de fibres ligni- fiées, éparses ou rapprochées en petits groupes dans le pé- ricycle et le parenchyme libérien (M. revolutum, melasto- moides, oligoneuron, oleæfolium, sphærocarpum, etc.), ou une sclérose plus précoce et plus étendue de la moelle (M. syloaticum, amplexicaule, revolutum, dumosum, etc.). C’estencore un écartement plus ou moins grand des faisceaux de liber inclus dans le bois secondaire. Le premier cercle n’en renferme que huit à dix, par exemple, dans les Â7. wlo- plerum, fuscescens, tinclorium, ligustrinum, trinerve, fasci- culare, elc., où ils sont aussi plus espacés dans les cercles successifs, tandis qu'il en comple une vingtaine dans les M. rostratum, amplexicaule, elc., comme dans le A7. ramiflo- rum, une trentaine dans les AZ. revolutum, cordatum, Thom- sont, elc., où ils sont aussi plus rapprochés dans les cer- cles successifs. Aïlleurs, les îlots confluent latéralement en bandes plus ou moins larges (7. rostratum, Gardneri, ellip- ticum, etc.). Ces bandes peuvent atteindre parfois jusqu’à un tiers de la circonférence de la tige, c’est-à-dire que l’assise génératrice a cessé tout à coup de produire du bois sur un tiers de sa circonférence à la fois (M. strumosum). Aïlleurs encore les cellules de parenchyme de ce liber inclus épais- sissent et lignifient leurs membranes, en formant des fibres isolées ou par petits paquets (A7. leucanthum, cuneatum, ete.). STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 3 Une tige de 2 millimètres de diamètre compte ordinaire- ment déjà six cercles de faisceaux libériens inclus (A7. sylvati- cum, etc.), une tige de 3 millimètres en a huit(M. parvifolium, etc.), une tige de 5 millimètres en a douze (M. revolutum, etc.), une tige de 6 millimètres en a quatorze (M. ellipti- cum, etc.), une tige de 7 millimètres, la plus grosse que j'aie pu observer en herbier, en a seize (M. heteropleuron, etc.). C’est, comme on voit, un accroissement moyen de deux cercles d’ilots libériens par millimètre de diamètre ou de quatre zones d’ilots par millimètre de rayon. Dans la Collection des Bois du Muséum, j'ai pu étudier une tige de 7. sphærocarpum, provenant de la Réunion, qui mesure 5 centimètres de diamètre. Le bois n’y offre pas de couches annuelles distineles et contient environ cent cercles plus ou moins réguliers d’îlots libériens, ce qui fait encore une moyenne de quatre rangs d’ilots par millimètre de rayon. Si chaque inclusion libérienne correspond à une année de végétation, cette tige à environ cent ans. À ce compte, la croissance en épaisseur de la tige des Memecy- lon est très lente, puisque la couche annuelle de bois n’y mesure pas plus d’un quart de millimètre. En résumé, la tige des Memecylon, pourvue d’un endo- derme scléreux en U et d'un liège scléreux péricyclique, dé- pourvue de faisceaux libéroligneux corticaux ou médullaires, jouit de la propriété remarquable d'inclure progressivement son liber dans son bois. feuille. — Le péliole du Memecylon ramiflorum à un épi- derme dépourvu de poils, dont la cuticule épaisse lignifie sa couche externe. Le parenchyme, où bon nombre de cellules contiennent des mâcles sphériques, renferme un large fais- ceau médian et deux petits faisceaux latéraux. Le faisceau médian, formé en bas d’un arc mince de liber, en haut d’un arc épais de bois, est entouré d’un péridesme (1) contre lequel la dernière assise du parenchyme, c’est-à-dire (4) Voir Ph. van Tieghem, Péricycle et péridesme (Journal de botanique, IV, 16 décembre 1890). 36 PH. VAN TARGHEM. l’endoderme, n'offre pas de plissements caractérisés. Sur la face inférieure, contre le liber, ce péridesme est tout entier colienchymateux et compte environ six épaisseurs de cellu- les. Sur la face supérieure, il n’est collenchymateux que dans sa zone externe; sa zone interne renferme des fascicules cri- blés plus épais que ceux du liber, disposés en un arc qui rejoint sur les bords l'arc libérien inférieur. Ces fascicules criblés péridesmiques correspondent aux fascicules criblés périmédullaires de la tige, qu'ils continuent dans la feuille. Entre eux et au-dessus d'eux, le péridesme contient des fi- bres, qui plus tard se lignifient et rejoignent le scléren- chyme ligneux, de manière à les inclure en apparence dans le bois. Entre le liber et Le bois, le faisceau médian possède un arc générateur, qui, après avoir fonctionné normalement pendant quelque temps, cesse de produire des fibres ligneuses en certaines places, où le bois se creuse d'autant de sillons, remplis par le fiber. C’est certainement Le début de l'anomalie offerte par la tige; mais ici l’assise génératrice fonctionne irop peu de temps pour arriver, comme dans la tige, à se re- fermer en dehors du liber des sillons et à l’inclure dans le bois. Chacun des deux petits faisceaux latéraux, également en- veloppé par un péridesme collenchymateux, égalementpourvu de fascicules criblés dans l’are supérieur de ce péridesme, est aussi bilatéral au début. Mais ici l’assise génératrice se rejoint en haut entre le bois et le tissu criblé péridesmique, de manière à produire du liber et du bois secondaires tout autour ; ilen résulte qu'après un cerlain temps le faisceau paraît concentrique à bois interne. Sur le flanc externe de chacun de ces deux faisceaux laté- raux, on voit dans le parenchyme un paquet de cellules très longues, à paroi extrèmement épaisse, ne laissant au centre qu'un vide très étroit, non lignifiées cependant et très flexi- bles. Les plus externes de ces éléments se séparent en rayon- nant vers l'extérieur et serpentent dans le parenchyme jus- qu à venir, çà etlà, mettre leurs extrémités en contact avec STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 31 l'épiderme. C’est le début du système de sclérites que nous allons rencontrer dans le limbe de Ja feuille. Le faisceau unique qui constitue la nervure médiane du limbe ne diffère du faisceau médian du pétiole que par sa dimension moindre ef par la minceur des parois du péri- desme, qui demeure parenchymateux. C’est seulement dans son arc supérieur, au-dessus de ses fascicules criblés, que celui-ci offre çà et là quelques fibres peu lignifiées. L'épiderme supérieur du limbe a ses cellules très fortement épaissies et cutinisées en dehors, dépourvues à la fois de poils et de stomates. L’épidermeé inférieur, çà et là dédoublé par une cloison langentielle, porte de nombreux stomates, dont les cellules de bordure sont situées dans son plan. Le parenchyme est hétérogène, palissadique dans la zone supé- rieure, où il est muni d’une assise sous-épidermique aqui- fère le long de la nervure médiane, formé dans la zone in- férieure de cellules arrondies à petits méals, dont certaines contiennent des mäcles sphériques d’oxalate de chaux. Dans ses deux zones, le parenchyme est traversé en {ous sens, mais surtout transversaleiment, par de très longues cel- lules à parois très épaisses, mais très faiblement lignifiées et très flexibles, à cavité très étroite et vide, mortes par con- séquent, et constituant une forme remarquable de scléren- chyme (fig. 7). À partir de la région médiane, qui est leur siège primitif, et où elles s'étendent tout d'abord, elles s’allongent vers le haut et vers le bas à travers le parenchyme, jusqu'à ve- nir toucher l’épiderme,puis se coudent à angle droitet rampent longuement sous l’épiderme, où elles se croisent en tout sens en formant un réseau. Le nombre de ces bouts rampants est plus grand et leur enchevêtrement plus serré sous l’épiderme supérieur, où ils forment par endroits une couche continue, que sous l’épiderme inférieur, où ils évitent les stomates. Leur rôle est évidemment d'assurer au parenchyme la pro- tection qui lui est nécessaire et de donner au limbe tout en- tier la solidité dont il à besoin. Ces éléments de soutien sont de même ordre que les cel- 38 PH. VAN TIEGHEM. lules scléreuses de la feuille des Ternstræmiacées, des Nym- phéacées, des Hamamélidées parmi les Saxifragacées, des Monstérées parmi les Aroïdées, des Olea, Fagræa, Rhizo- phora, ete, et le nom de sclérites ou de scléréides, qu'on leur donne chez ces diverses plantes, leur convient aussi. Par leur grande longueur, leur reptation sous l’épiderme, leur ab- sence de ramification, leur très faible lignificalion, c’est à celles des Olea, ou à celles des Dicoryphe parmi les Hamamé- lidées, qu’elles ressemblent le plus. Le grand nombre de ces sclérites, qui parcourent en tous sens le parenchyme avant de venir ramper sous les deux épi- dermes, et qui sont particulièrement abondantes et serrées sur les bords de la feuille, donne aux sections du limbe de cette plante un aspect très singulier et fort intéressant. C’est à peu près de la même manière que M. Lignier a décrit la structure du péliole, muni de cinq faisceaux au lieu de trois, et du limbe, également pourvu de sclérites allon- gées, non rameuses, arrivant au contact des deux épidermes, chez le Memecylon clausiflorum Naud. (M. Cumingianum Presl) (/oc. cit., p. 317 et p. 322). Nos divergences de vue sont ici du même ordre que pour la tige. Ainsi, la zone de collenchyme qui entoure les faisceaux du pétiole est ralta- chée par M. Lignier au liber ; c’est pour lui «le liber primaire externe et interne » (p.318). Pour nous, c’est, par définition même, le péridesme, et les faisceaux criblés qui sont situés contre le bord supérieur du bois sont des faisceaux criblés péridesmiques. Toutes les espèces de Memecylon, au nombre de soixante- dix, dont j'ai pu étudier Ja feuille dans l'Herbier du Muséum, ont aussi, dans le limbe, des sclérites plus ou moins nom- breuses et plus ou moins développées. Mais celles-ci sont de formes diverses et, sous ce rapport, on peut les rattacher à quatre types. Le type le plus fréquent est la forme longue, étroite et non ramifiée, rampant longuement sous les deux épidermes, que nous venons de décrire. Elle est offerte d’abord par les STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 39 M. ramiflorum et Cumingianum, comme on vient de le voir. Elle se rencontre aussi, sans lignification, dansles 97. e/æaçni, sylvaticum, cordatum, myrtiforme, grandifolium, ulopterum, floribundum, ellipticum , strumosum, oleæfolium, anqustifo- lium, capitellatum, etc., et avec une plus ou moins forte li- gnification de la membrane, dans les 27. finctorium, angula- tum, prunifolium, sphærocarpum, amplexicaule, Preslianum, rhinophyllum, umbellatum, liqustrinum, rhamnoideum, my- ricoides, excelsum, ferreum, Hockeri, ovoideum, edule, ovatunn, orbiculare, cæruleum, etc. Assez souvent, la région médiane, qui est aussi la plus âgée, est fortement lignifiée, tandis que les extrémités sous-épidermiques, qui sont plus jeunes, ne le sont pas du tout (M7. tinctorium, amplexicaule, Presha- num, etc.). D'autres espèces ont ‘encore la même forme de sclérites, mais celles-ci, au lieu de se diriger surtout trans- versalement, courent d’abord un certain temps dans le plan médian de la feuille, en ondulant en divers sens dans le paren- chyme, avant de se rendre par une douce obliquité sous les deux épidermes ; les extrémités rampantes sont alors moins longues et moins enchevêtrées que dans le premier cas. Il en est ainsi notamment dans les A7. paruifolium, revolukhun, rostratum, depressum, costatum, laurinum, dumosum, qarci- nioides, heteropleuron, dolichophyllum, myrsinoides, pauciflo- rum, australe, prasinum, pañiculatum, tenuicaule, Griffi- thianum, Thomsoni, etc. Elles cheminent quelquefois par pa- quets dans le plan médian et ces paquets se mettent çà et là en contact avec les fibres qui entourent les nervures (47. par- vifolium, australe, prasinum, Thomsoni, elc.). Les sclérites ont une forme toute différente lorsque la cel- lule primitive, située dans le plan moyen de lafeuille, se ra- mifie tout autour, soit en dichotomie répétée plus ou moins régulière (fig. 8, «, b), soit en forme d'étoile irrégulière, sans que ses branches courtes, dont plusieurs se dirigent pourtant vers le haut ou vers le bas, atteignent les deux épidermes. Quelquefois la cellule s’élargit beaucoup en forme de sac el se prolonge seulement tout autour, ou surtout vers le haut et 40 | PIN. VAN TIEGHEM. vers le bas, en une série de doigts de gant inégaux (fig. 9, «, b). Ces sclérites médianes, courtes el rameuses, dichotomes, étoi- léesoudigilées, loujours fortement lignifiées, se rencontrent dansles M. (rardneri, phyllanthifolium, lutescens, varians, Ar- nottianum, oligoneuron, melastomoides, trinerve, fasciculare, Vogel, Spathandra, ete. Elles sont aussi moins rapprochées, moins nombreuses que celles de la premiere sorte. Au point de vue de la proteclion et du soutien du parenchyme, c’est là évidemment une forme beaucoup moins parfaite que la pré- cédente. Aussi n'est-il pas étonnant de l’observer dans les espèces qui, par leurs feuilles trinerves, se rapprochent plus que les autres des Mélastomées(A1. Spathandra, Vogelü, f'asciculare, trinerve, melastomoides, oligonewr'on). Elles sont aussi plus rares dans ces espèces, et il faut parfois explorer une cerlaine étendue du limbe pour en rencontrer (M. Spa- thandra, etc.). La troisième et la quatrième formes sont intermédiaires entre les deux précédentes. Dans la troisième, les sclérites sont d'ordinaire, comme dans le premier cas, allongées surtout transversalement de manière à atteindre les deux épidermes; mais là elles s’aplatissent, se bifurquent et ne rampent que peu de temps suivant deux directions opposées, en forme de T (fig. 10) ; en outre, elles sont plus larges et se ramifient çà et là en formant de courtes branches dans leur trajet à travers le parenchyme. Il en est ainsi dans les M. cuneatum, leucanthum, macrophyllum, etc. Quelquefois ces sclérites à la fois allongées et rameuses se maintiennent dans la zone moyenne du parenchyme, où elles serpentent par petils groupes sans se rendre aux épidermes (. fusces- cens, etc.). s Enfin dans la quatrième forme, les sclérites, plus larges et à membrane moins épaissie, s'étendent transversalement d’un épiderme à l’autre en se renflant seulement à leur extrémité, sous forme de colonne, sans ramper sous les épi- dermes (M. scutellatum, Heyneanum, ete.). Elles poussent çà el là un petit ramuscule latéral en forme de dent ou d’épine. STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES, 4 Comme on le voit par les soixante-dix espèces qui vien- nent d'être citées, la présence de sclériles dans le limbe de la feuille, avec des formes et des développements divers, doit être regardée comme générale chez les Memecylon et doit entrer par conséquent dans la caractéristique anatomi- que de ce genre. Racine. — Comme il a été dit plus haut, j'ai eu le regret de ne pouvoir étudier vivante la racine du Memecylon rami- florum. J'ai dù me contenter de faire des coupes dans un fragment de racine âgée de cette espèce provenant de la Collection des Bois du Muséum, où cet échantillon a été envoyé de Pondichéry par Perrottet en 1854. Ce fragment, long de 25 centimètres, mesure 2 centimètres de diamètre. Sur la coupe transversale, le bois, qui n'offre pas de couches concentriques distinctes, renferme des ilots de liber inclus, tout pareils à ceux de la tige, disposés en un grand nombre de zones plus ou moins régulières. Ces îlots contiennent des cristaux prismaliques, plus gros que ceux de la tige et terminés par les pointements de l’octaèdre. Ils sont un peu plus espacés que dans la tige. Pourtant, du centre à la périphérie, on en compte environ quarante, ce qui fait quatre par millimètre. A raison d’une zone de liber inclus par an, celte racine compterait quarante années de vé- gétalion. L’anomalie de la tige des Memecyion se retrouve donc dans leur racine. Il en est de même, d’ailleurs, chezles S#rychnos, comme j'ai pu m'en assurer récemment par l'étude d’une racine assez âgée de S/. Nuxr-vomica. Conclusions. — De l'étude anatomique qu’on vient de faire de la tige, de la feuille et de la racine des Memecylon, il faut conclure que toutes les espèces de ce genre ont en commun deux caractères principaux, savoir : l'inclusion progressive du liber dans le bois de la lige et de la racine, et la présence de sclérites dans le limbe de la feuille. D'après la forme différente des sclériles, les nombreuses espèces de ce genre peuvent êlre groupées en quatre sections: 42 | PH. VAN TIRGINEM. 1° Sclérites filiformes, non rameuses, rampant longuement sous l’épiderme (A7. ramiflorum, ete.). 2° Sclérites filiformes, rameuses, rampant brièvement sous l'épiderme (M. cunea- tum, elc.). 3° Sclérites en colonnes, dressées d’un épiderme à l’autre (AT. scutellatum, elc.). 4° Sclérites médianes, digi- tées ou étoilées (7. Spathandra, etc.). Il est intéressant de remarquer que ces quatre mêmes types de sclérites foliaires se retrouvent chez les Hamamé- lidées, mais dans des genres différents, qu'ils peuvent servir à caractériser. En effet, M. Reinsch y a rencontré récem- ment : des sclérites filiformes non rameuses chez les Dico- ryphe, des sclérites filiformes ramifiées chez les Distylium, Loropelalum el Sycopsis, des sclériles en colonnes transver- sales chezles £ustigma el Hamamelis, enfin des sclérites mé- dianes, dichotomes ou étoilées, dans les /?hodoleia et Buck- landia (À). Applications. — Ces résultats sont susceptibles de rece- voir aussitèl diverses applications. Je me bornerai à en indiquer quelques-unes. On cultive depuis longtemps dans les serres du Muséum, sous le nom de Memecylon ramiflorum, une plante dont la tige est dépourvue de liber inclus dans le bois, dont le péri- derme est sous-épidermique et dont la feuille manque de sclériles. Celte plante n’est donc pas un AMemecylon. Ses autres caractères analomiques l’exeluent même de la fa- mille des Mélastomacées. À en juger par les poches oléi- fères qu’elle renferme dans l'écorce de la tige et dans le parenchyme du limbe foliaire, c'est une Myrtacée, proba- blement un £ugenia. J'ai trouvé, dans l'Herbier du Muséum, un échantillon éti- quelé « Memecylon. Voyage de M. Boivin, 1847-1852, côle orientale d'Afrique, Zanzibar ». La tige de cette plante n’a pas de liber inclus dans le bois; sa feuille n’a pas de selérites, mais renferme des poches oléifères. Ce n'est donc ni un (4) Reinsch, Ueber die anatomischen Verhällnisse der Hamamelidlaceen (Bota- nische Jahrbücher für Systematik, XI, p. 358, 1889). STRUCTURE ET AFFINITÉS DES ÿMÉMÉCYLIES, 43 Memecylon, ni même une Mélastomacée, mais bien une Myrtacée. Une autre plante, provenant du même voyage el récoltée à Nossi-Bé, est étiquelée Memecylon avec doute. Ici, la tige a des îlots de liber inclus dans le bois et la feuille contient dans sa zone moyenne des sclérites larges et digitées. C’est donc bien un Memecylon, cette fois, et un Âe- mecylon de la section Spathandra, telle qu’on l’a définie plus haut. L'Herbier du Muséum renferme encore un échantillon éliqueté «Rev. Baron, n° 2874, Madagascar, centre ». M. Co- guiaux l’a étudié el l'a rapporté, avec doute il est vrai, au genre Memecylon. La lige de cette plante à un bois secon- . daire normal, sans liber inclus, et le périderme y est sous- épidermique. Ce n’est donc pas un Meinecylon. De plus cette tige est entièrement dépourvue de ce lissu criblé périmé- dullaire, dont l'existence est générale chez les Mélasto- macées et les Myrtacées. Ce n'est donc ni une Mélasto- macée, ni une Myrtacée. D'autre part, l'écorce de la tige et le parenchyme de la feuille, qui est très lacuneux, ren- ferment un grand nombre de sclérites étoilées, à branches pointues, très différentes de celles que contient la feuille des Memecylon, même chez les espèces où elles sont rameuses et digitées; d’ailleurs les Memecylon n'ont pas de sclérites dans l'écorce de la tige. Par ces sclérites, c’est, parmi les Dialypétales à ovaire infère, aux Hamamélidées et surtout aux Ahodoleia et Bucklandia, comme il vient d’être dit, que la plante ressemble le plus. Elle s’en rapproche aussi par ses feuilles non opposées. Par là, elle diffère des Rhizophorées, qui ont aussi des sclériles, mais d’une forme différente. Enfin, comme la forme des sclérites des Memecylon varie avec les espèces, on pourra se servir de ce caractère pour décider, dans les cas douteux, si l’on a affaire à deux plantes de même espèce ou d'espèces distinctes. Et cela non seule- ment si elles appartiennent à des sections différentes, mais encore si elles se rattachent à une même section. Ainsi, par exemple, M. Naudin se demande à propos du A1. sphæ- 4 À. PH, VAN TIEGPEIM. rocarpum : « Nonne cadem species ac M. tinctorium ? » (Loc. cit., p. 281). Triana répond par l’affirmative et identifie le M. tinctorium avec le M. sphærocarpum. W me semble ce- pendant que la forme et la disposition des sclérites dans ces deux plantes sont assez différentes pour autoriser leur distinction spécifique. HI MOURIRIA. Étudions maintenant la tige et la feuille des Mouriria. dont j'ai pu observer de nombreuses espèces dans l'Herbier du Muséum. Tige. — Considérons, par exemple, une tige jeune de M. emarginata ou de M. spathulata. Sous l’épiderme, fortement cutinisé et muni çà et là de poils courts, simples et continus, l'écorce compte six à huit assises de cellules, dont la plus interne, qui est l’'endoderme, épaissit et lignifie sa membrane sur la face interne, ainsi que sur les faces lalérales et {ransverses, de manière à pré- senter sur la section transversale la forme d’un croissant ou d'un U. Les cellules corticales renferment çà et là les unes des mâcles sphériques, les autres des prismes d’oxalate de chaux. Le péricyele a sept ou huit assises de ceilules, dont la plus externe devient de bonne heure génératrice du périderme ; le liège, dont les cellules sont plus petites que celles de l’en- doderme, épaissit et lignifie ses membranes surtout sur la face interne. Çà et là une cellule du péricycle renferme un cristal prismatique; çà et là aussi on y trouve une fibre lignifiée. Le liber forme un mince anneau continu, où les paquets de tubes criblés très étroits sont séparés par des cellules de parenchyme qui contiennent aussi çà et là un cristal pris- matique. Le bois forme également un anneau continu, où les vaisseaux sont séparés par du parenchyme plus tard lignifié AS STRUCTURE ET: AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 45 dans la zone interne primaire, par du sclérenchyme à fibres très étroites dont la paroi est très épaissie el lignifiée dans la zone externe secondaire. La périphérie de la moelle, qui est de forme carrée, est occupée par des faisceaux criblés plus épais que ceux du liber, rapprochés en une zone presque continue; les cellules qui les séparent contiennent çà et là un cristal prismatique. Le reste de la moelle est formé d’un parenchyme à cellules arrondies, dont les membranes s'épais- sissent plus tard et se lignifient. Comme l'écorce, la moelle est entièrement dépourvue de faisceaux libéroligneux. Après avoir fonctionné normalement pendant un certain temps, l’assise génératrice cesse, en de certaines places, de produire du bois en dedans, et, par contre, y forme plus de liber en dehors. Plus tard, elle se referme en dehors du liber aux dépens de l’assise interne du péricycle. Il en ré- sulte, en ces places, l'inclusion dans le bois secondaire d'autant de faisceaux libériens disposés en cercle, Par la suite, la même cause agissant, il se fait, en des places allernes avec les précédentes, une nouvelle inclusion de liber dans le bois, et la chose se répète de la sorle indéfini- ment. Une branche mesurant quatre nullimèlres de dia- mètre renferme ainsi dans son bois secondaire huit cercles plus ou moins réguliers de faisceaux libériens inelus. Ces faisceaux contiennent, surtout dans leur région externe, des prismes d’oxalate de chaux dans leur parenchyme. M. Solereder a signalé le premier l'existence d'ilots de liber dans le bois du Mouriria quianensis. Mais, ici comme pour les Memecylon, il en a décrit inexaclement le mode de formation. Les autres espèces étudiées, savoir les À. Sagotiana, cras- sifolia, Gardneri, parvifolia, Pusa, pauciflora, anqustifolia, vernicosa, princeps, Apiranga, quianensis, Valenzuelana, aculflora, cauliflora, lanceolata, brevipes, abnornns, elliptica, arborea, Sideroxylon, ainsi que trois autres espèces non encore nommées, ne difièrent des deux précédentes que par des caractères tout à fait secondaires, comme une sclérose 46 PH. VAN TIRGIEM. partielle plus grande du péricycle (M. Gardneri, Pusa, elliplica, arborea, elc.), ou une sclérose moindre de la moelle, qui ne se lignifie qu'en partie (M. Gardneri, vernicosa, Api- ranga, Pusa, elliplica, Sagotiana, arborea, etc.), ou même ne se lignifie pas du tout (A7. pauciflora, quianensis, parvi- folia, cauliflora, brevipes, ete.), comme un écartement plus ou moins grand des faisceaux libériens inclus dans le bois secondaire, faisceaux qui peuvent descendre à huit ou dix dans le premier cercle (M. anqustifolia, parvifolhia, etc.) ou s'élever à une vingtaine (M. vernicosa, Sagoliana, quia- nensis, ele.). Constatée sans exception chez tous les espèces étudiées, au nombre de vingt-cinq, l'inclusion du liber dans le bois doit êlre regardée comme constante dans le genre Mouriria, au même litre que dans les Memecylon. J'ai pu éludier dans la Collection des Bois du Muséum une grosse tige de Mouriria Siderorylon ou Bois de fer de la Guyane. Cette tige, à moelle un peu excentrique, mesure du côté le plus développé onze centimètres de rayon. Le bois, très dur, est formé de couches concentriques très nettes el {rès minces, au nombre d'environ 460, renfermant chacune un cercle d’ilots de liber inclus. Ces innombrables faisceaux libériens tranchent sur la couleur brune du bois, comme autant de mouchetures claires, petites et arrondies sur la section transversale, où plusieurs sont souvent superposées sur le même rayon, allongées en filets sur la section longitu- dinale. De même que chez les Memecylon, il s’y forme donc en moyenne quatre zones d'ilots libériens par millimètre de rayon; mais ici ces zones d’ilots libériens sont comprises dans tout autant de couches ligneuses distinctes, ayant cha- cune en moyenne un quart de millimètre d'épaisseur. Lors- que les couches annuelles du bois ne sont pas distinctes, on est donc bien fondé à estimer l’âge de la tige par le nombre des zones d'ilots libériens inclus dans le bois, comme il a été dit plus haut pour les Memecylon (p. 30). En résumé, la lige des Mouriria possède les mêmes carac- STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 47 tères anatomiques que la lige des Aemecylon, savoir : un endoderme scléreux en U, un liège péricyelique sclérifié surtout en dedans, des faisceaux de liber inelus dans le bois secondaire, une zone de tubes eriblés périmédullaires, enfin une écorce et une moelle exemptes de faisceaux libéroli- gneux. Par la structure de sa tige, un Mouriria ne saurait donc être distingué d'un Memecylon. Feuille. — Le court pétiole de la feuille du A7. spathulata, par exemple, a sous l’épiderme un parenchyme à parois minces pourvu de mâcles d’oxalate de chaux, entourant un seul faisceau libéroligneux. Contre le faisceau, l’'endoderme n'offre ni plissements, ni épaississement de sa membrane. Le faisceau s’est reployé vers le haut, d’abord en goultière, puis en tube, de manière à séparer en définitive son péri- desme en deux régions : une zone externe à parois minces tout autour du liber et une plage interne à cellules plus larges, contenant des fascicules criblés contre le bois, et simulant une moelle. De chaque côté du faisceau, le paren- chyme est traversé par quelques sclérites, pareilles à celles que nous allons rencontrer dans le limbe. Le limbe offre dans son épiderme une disposition femar- quable. Plan et sans stomates sur la face supérieure, l’épi- derme est, sur la face inférieure, reployé çà et là dans le parenchyme, en forme de bouteille, de manière à constituer autant de petites cryptes, revêlues par une épaisse cuticule. Entre les cryptes, sur les parties planes, il est entièrement dépourvu de stomates. Ceux-ci sont localisés en petit nombre dans chaque crypte, dont ils occupent les parois latérales et le fond (fig. 11). Sur la face inférieure du limbe vue à plat, les orifices des cryptes sont plus ou moins larges, parfois assez étroits pour n'être entourés que de quatre cellules et simuler äes stomates; ils sont toujours bordés d’un épais bourrelet de cutine. Ces cryptes stomatifères ressemblent à celles des Nerium, à cette différence près qu’elles sont dé- pourvues de poils. Pourtant, chez le M. elliptica (fig. 14) et parfois aussi chez le M. Pusa, les cellules épidermiques de 48 PIE. VAN MIEGMEM. la cryple qui séparent les stomales se prolongent dans la cavité en forme de papilles ou de poils Counie, ce qui complète la ressemblance. Ces cryptes stomalifères se retrouvent dans la plupart des espèces examinées, tantôt arrondies ou ovoïdes (fig. 14) (47. angustifolia, cauliflora, Pusa, vernicosa, arborea, myrtifolia, ellipüica, crassifolia, Sideroxylon, quianensis, deux espèces encore innommées, etc.), tantôt larges et aplaties parallèle- ment à la surface (fig. 12) (M. lanceolata, Valenzuelana, Apiranga, eugeniæfolia, emarginala, excoriata, abnor- mis, elc.), tantôt, au contraire, élroites et allongées perpen- diculairement à la surface (fig. 13) (M. Gardneri, etc.). L'os- liole en est quelquefois très petit, stomatoïde (M. cauliflora, quianensis, eic.). Dans le M. Sagotiana (fig. 15), elles sont, au contraire, largement ouvertes et peu profondes, en forme de cuvelte. C'est une transition vers les espèces, en petit nombre, qui ont l'épiderme inférieur entièrement plan, avec des stomates distribués uniformément et très rappro- chés dans cet épiderme plan. Sur les vingt-huit espèces étudiées, six seulement se sont ainsi montrées entièrement dépourvues de cryptes stomalifères, ce sont: les f. brevipes, pauciflora, princeps, parvifolia, acutiflora et une espèce encore innommée. Au point de vue de la disposition des stomates, les diverses espèces du genre Mowriria peuvent donc être réparties en deux seclions : les Cryplopores, à stomates cachés dans des cryptes (M. anqusthifolia, etc.) etles Phanéropores, à stomates apparents (A7. brevipes, etc.). En outre, l’épiderme offre parfois, sur les deux faces du limbe, un caractère particulier. Le côté interne de la mem- brane de ses cellules, qui sont grandes, s’épaissit beaucoup, souvent jusqu'à occuper la moitié ou les deux-tiers de la hauteur de la cellule (fig. 16); cet épaississement, marqué de couches concentriques très-nelles, n'est ni cutinisé, ni lignifié. Ensemble, tous ces disques internes épaissis for- ment, entrele parenchyme etl’épiderme, une lame d’un blane STRUCTURE ET AFFINITÉS DES. MÉMÉCYLÉES,. 49 brillant, comme collenchymateuse, qui protège les parties sous-jacentes. Ce phénomène s'observe nolamment dans les M. elliptica, arborea, Gardneri, Sideroxylon, ete. Lorsque l'épiderme prend une cloison tangentielle et dédouble ses cellules dans toute son étendue, comme sur la face supé- rieure dans les A. elliptica, Gardneri, elc., c’est l’assise interne qui offre seule ce singulier épaississement. Quel- quefois l’épiderme est formé de deux sortes de cellules, les unes petites, à membranes minces, les autres grandes, à membrane épaissie sur la face interne; les petites cellules sont alors groupées en îlots au milieu des grandes (47. parvi- folia, pauciflora, ete.). Enfin ces cellules épaissies manquent complètement chez d’autres espèces (M. Sagotiana, euge- niæfolia, spathulata, acutiflora, Apirançga, brevipes, etc.); le parenchyme y est protégé, soit par une cuticule épaisse (47. brevipes, elc.), soit par une assise sous-épidermique de grandefscellules aquifères (AZ. acutiflora, spathulata, etc.) soit par une couche de sclérites rampantes, comme 1} va être dit. Le parenchyme du limbe, qui est du type hétérogène, à zone inférieure creusée seulement de petits méats, ren- ferme toujours, en effet, des sclérites, comme chezles Meme- cylon, et celles-ci offrent aussi, suivant les espèces, des formes diverses qui peuvent se rattacher à trois lypes. Parfois elles sont très longues, non ramifiées, el traver- sent le parenchyme dans toute son épaisseur, transversale- ment ou obliquement, pour aller ramper longuement sous les deux épidermes, mais surtout sous l’épiderme supérieur, où elles s’entre-croisent en un réseau plus ou moins serré (fig. 7) (M. crassifolia, eugeniæfolia, Apiranga, etc.) Ailleurs elles sont encore fortement allongées el ram- pent encore, quoique moins longuement, sous les deux épidermes ; mais en même temps elles se ramifient sur leur parcours en poussant des branches plus courtes et plus grèles (fig. 10) (A. Gardneri, arborea, abnormis, Pusa, etc.) Si l’épiderme est double, ou doublé d'une assise sous-épi- dermique aquifère, cest sous la seconde assise que rampent ANN. SC. NAT. BOT. XIIT, 4, 0 PH. VAN ŒIEGHEM. les bouts des sclérites (fig. 10) (M. Gardneri, Pusa, elc.). Ailleurs enfin et, semble-t-il, le plus souvent, elles de- meurent comprises dans la zone moyenne du parenchyme, s'y élargissént et s’y ramifient tout aulour en forme de buisson dichotone, d'éloile ou de palme plus ou moins irrégulière (fig. 8 et 9); certaines de leurs branches attei- gnent quelquefois les deux épidermes, mais sans y ramper (M1. princeps, Sagotiana, Sideroxylon, parvifolia, myrtifolia, vernicosa, anqustifolia, quianensis, pauciflora, Valenzuelana, acutiflora, cauliflora, lanceolata, spathulata, brevipes, ellip- tica, emarginata, excoriata, elc.). Ces deux formes extrêmes et les formes intermédiaires ont élé rencontrées aussi, on l’a vu, chez les Memecylon. Quand les sclérites sont très longues, filiformes, elles sont tantôt faiblement ou pas du tout lignifiées (M. Pusa, etc.) tantôt lignifiées dans leur région moyenne el non dans leurs extrémités rampantes (M. Apiranga, etc.), tantôt lignifiées dans toute leur longueur (W. Gardneri, eugeniæfolia, etc.). Quand elles sont courtes, étoilées ou palmées, elles sont toujours fortement lignifiées. Il est à remarquer que c’est dans les espèces à sclérites médianes et digitées, que l’épi- derme épaissit la face interne de ses cellules, comme il a été dit plus haut (7. elliptica, Sideroxylon, parvifolia, pauci- flora, angustifolia, ete.). Cet épaississement est sans objet quand les sclérites filiformes, en rampant sous l’épiderme, protègent suffisamment le parenchyme sous-jacent. En résumé, la feuille des Mouriria est caractérisée à la fois par ses sclériles, qui se rencontrent dans toutes les espèces, et par ses cryptes stomalifères, que l’on observe chez la plupart d’entre elles. Conclusions. — Par la structure de la tige, notamment par l’endoderme épaissi en U, le liège péricyclique seléreux, le liber inclus dans le bois secondaire, la moelle et l'écorce dépourvues de faisceaux lhibéroligneux, les Mouriria se montrent intimement unis aux Memecylon. Hs s'en rappro- chent encore par les sclérites du parenchyme foliaire. Ils ne STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 51 s'en écartent et ne s'en distinguent que par les eryptes stomatifères de la feuille. Lorsque celles-ci font défaut, c'est-à-dire dans Les Mouwriria phanéropores, toute distinc- tion anatomique s’efface entre les deux genres. ILest intéressant de remarquer que chez le M. parvifolia, qui est précisément dans ce cas, l'ovaire est, d’après Ben- tham, uniloculaire avec ovules verticillés autour d’un pla- centa central, comme chez les Memecylon (1). Cette espèce établit donc le passage entre les deux genres, aussi bien au point de vue de l’appareil reproducteur qu’à celui de l'appa- reil végétatif. Si elle n'était américaine, ce serait un Meme- cylon. De cette grande ressemblance de structure, on doit déjà conclure, contrairement à l'opinion de M. Naudin et aussi à celle de Triana, que ces deux genres appartiennent à une seule et même tribu. [ls se substituent l’un à l’autre, les Mouriria jouant dans la flore américaine le rôle dévolu aux Memecylon dans les flores asiatique, africaine et austra- lienne. IV PTERNANDRA, KIBESSIA, RECTOMITRA. Considérons maintenant les trois genres Péernandra, Kibessia et Rectomitra, maintenus distincts par Triana, qui les place à côté des Astronia dans sa tribu des Astroniées, tandis que M. Naudin en faisait une tribu à part, sous le nom de Kibessiées. Étudionsen d’abord la tige, puis la feuille. Tige. — La tige des Xibessia (K. simplex, azurea, fuligi- nosa, Cupularis, subalata, acuminata, cordata) a, sous l’épi- derme, une écorce composée d’une dizaine d’assises de cel- lules, dont quelques-unes renferment des mâcles sphériques, d’autres des prismes d’oxalate de chaux. Les cellules de l’assise corticale la plus interne, c’est-à-dire de l'endoderme, (4) Bentham et Hooker, Genera, I, p. 772, 1867. 52 PH. VAN ÆTIEGHEM. épaississent de bonne heure et lignifient leur membrane, sur la face interne, ainsi que sur les faces latérales et transverses, : en forme d’U. Plus tard, les cellules de l’avant-dernière assise et même de plusieurs des assises corticales internes se comportent de la même manière. L’écorce est entière- ment dépourvue de faisceaux libéroligneux. Le péricycle comprend d'ordinaire cinq ou six assises de cellules aplaties tangentiellement. Les cellules de l’assise externe, étroites et longues, épaississent et lignifient leur paroi en formant des fibres. Celles de la seconde assise s’accroissent radialement et se cloisonnent tangentiellement pour former un périderme, dont le liège est composé alter- nalivement de cellules à section carrée et de cellules à section très aplatie; les premières épaississent et lignifient leurs membranes sur la face interne, ainsi que sur la moitié interne des faces latérales et transverses; les secondes gar- dent d'ordinaire leurs parois minces, mais peuvent aussi eà el là les épaissir et les lignifier. L’assise fibreuse externe du péricycle est assez souvent interrompue, et dans les in- terruptions, le liège touche directement l’endoderme. En dedans du périderme, le péricycle renferme des fibres, isolées ou réunies par petits groupes; on y observe aussi çà et là une mâcle sphérique d’oxalate de chaux. Le liber forme un anneau continu, très mince, composé de petits paquets de tubes criblés très élroits, alternant avec des cellules de parenchyme. Le bois forme également un anneau continu, où les vaisseaux sont séparés par des fibres très étroites et très épaissies. En un mot, la structure est gamodesmique. De très bonne heure, c’est-à-dire à une très pelite distance de son bord interne, le bois renferme des îlots de liber inclus, qui se succèdent ensuite de dedans en dehors à des inler- valles très rapprochés. Ces îlots sont Loujours lrès peu pro- fonds; ils sont tantôl très étroits el alors très petits, tantôt et le plus souvent élalés tangentiellement en bandes plus ou moins larges et de forme assez irrégulière. STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 53 L'inclusion de ces faisceaux de liber dans le bois secon- daire s'opère ici comme chez les Memecylon et les Mouriria. En de certaines places, l’assise génératrice cesse de former des éléments ligneux, d’où autant de sillons à la surface du bois; mais bientôt les arcs intermédiaires, demeurés actifs, se re- joignent en dehors du liber de chaque sillon à travers l’assise interne du périeycle et l’assise génératrice ainsi reconstituée forme de nouveau des éléments ligneux sur toute sa périphé- rie; le liber des sillons se trouve de la sorte recouvert et in- clus dans le bois. {1 y a seulement cette différence qu'ici la production du liber n’est pas augmentée dans les places où le bois cesse de se produire ; les phases alternatives de rup- ture et de fermeture de l’assise génératrice sont donc plus courtes et se succèdent plus rapidement; il en résulte que les faisceaux de liber inclus sont plus minces et plus rappro- chés, Une tige de 3 millimètres de diamètre, par exemple, offre déjà dans son bois douze zones d’ilots libériens inclus, tandis qu’une tige de Memecylon d’égale épaisseur n’en a guère que huit. Les îlots de liber renferment aussi des prismes d’oxalate de chaux dans leur parenchyme. Le long du bord interne du bois ainsi constitué, la moelle renferme des îlots de tubes criblés, séparés par du paren- chyme. Dans les intervalles de ces îlots et dans sa région centrale, qui est absolument dépourvue de faisceaux libéro- ligneux, la moelle garde d’abord minces les parois de ses cellules, qui renferment çà et là des màcles sphériques et des cristaux prismatiques d’oxalate de chaux; mais, plus ou moins tard suivant les espèces, elle les épaissit et les lignifie, de sorte qu'au premier abord les faisceaux criblés périmédullaires paraissent être, comme les îlots libériens plus externes, inclus dans le bois. Cette structure anomale du bois des Abessia a été si- gnalée par M. Solereder en 1885 chez le Æ. simplex. Mais, au point de vue de l’origine des îlots de liber inclus, ce botaniste a fait ici la même erreur que chez les Memecylon et les Mouriria. 54 PH, VAN TIEGHEM. La lige des Æectomitra (R. cordata, tuberculata, galeata) et celle des Prernandra (P. cyanea, latifolia, capitellata) offrent les mêmes caractères que celle des Aibessia : même écorce dépourvue de faisceaux libéroligneux, avec un endoderme épaissi en U ; même péricyele, fibreux dans son assise externe et çà et là aussi dans sa profondeur; même liège péricyclique formé alternativement de cellules carrées épaissies et li- gnifiées sur la face interne et de cellules plates non épaissies; même bois secondaire parsemé d'ilots de liber inclus, très nombreux, très minces et très rapprochés; même moelle, enfin, ayant à sa périphérie une zone de fascicules criblés et pour le reste entièrement dépourvue de faisceaux libéroli- gneux. Une tige de Ætectomitra cordata, par exemple, mesu- rant 6 millimètres de diamètre offre de 26 à 30 zones con- centriques plus ou moins régulières de faisceaux libériens inclus dans son bois secondaire. La moelle demeure parfois tout entière parenchymateuse (Rectomitra cordata) ou n'épaissit que certaines cellules isolées (Pternandra capitellata) ; ailleurs elle épaissit et li- gnifie ses membranes d’abord tout autour des îlots criblés périphériques, plus tard aussi, mais moins fortement, dans la région centrale (P. cyanea, latifolia). Les fibres du pé- ricycle sont tantôt éparses (/iectomitra cordata), tantôt rap- prochées latéralement en une couche presque continue (Plernandra latifolia, cyanea). Ce sont là des différences tout à fait secondaires. Feuille. — Le pétiole des Aibessia (K. cordata) a trois faisceaux libéroligneux, rapprochés en arc dans une écorce où l’on voit çà et là une cellule à membrane épaisse et lignifiée, et une cellule à mâcle d’oxalate de chaux. Chaque faisceau est entouré d’un péridesme à parois minces conte- nant des fibres isolées et qui renferme dans son arc supé- rieur des faisceaux criblés, prolongements des faisceaux criblés périmédullaires de la tige. Dans le limbe, le faisceau de la nervure médiane a son péridesme épaissi et lignifié sur tout son pourtour. En bas, R? STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. D) ce péridesme est séparé de l'arc ligneux par l’arc du liber; en haut, il renferme, contre le bord supérieur du bois, plusieurs îlots criblés. L’épiderme, muni de stomates sur sa face inférieure seulement, recouvre un parenchyme hété- rogène entièrement dépourvu de sclérites. Chez les Aectomitra et les Pternandra, la feuille offre la même structure dans son pétiole et dans son limbe. Conclusions. — L’entière conformité de structure de la tige et de la feuille dans ces trois genres vient à l'appui de l'opinion des botanistes descripteurs, qui, en se fondant exclusivement sur les caractères extérieurs, notamment sur la placentation dorsale, les ont étroitement rapprochés, comme M. Naudin et Triana, et même les ont réduits soit à deux, comme MM. Bentham et Hooker, soit à un seul, comme M. Baillon. MM. Bentham et Hooker ont, en effet, adjoint les Aectomitra aux Kibessia, en même temps qu'ils ont reconnu la grande ressemblance des AXïbessia eux-mêmes avec les Plternandra. « Genus ægrè a Pternandra distinquen- dum », disent-ils des Xibessia ((renera, 1, p. 772). M. Baillon a été plus loin et a incorporé les Aïbessia aux Pfernandra, dont ils ne sont pour lui qu'une section. Quoiqu'il en soit, les Plernandra, Kibessia et Rectomütra ressemblent, par la structure de la tige, aux Memecylon et aux Mouriria, presque autant que ceux-ci se ressemblent entre eux. L’assise fibreuse externe du péricycle, la structure alternante du liège, le rapprochement plus grand des îlots de liber inclus dans le bois, ne sont après tout que des différences accessoires. Ils en diffèrent, au contraire, profondément par la struc- ture de la feuille, à la fois dépourvue de sclérites et de cryptes stomalifères. La propriété qu'ils partagent d'inclure progressivement leur liber dans leur bois secondaire établit entre ces deux catégories de genres, savoir : les Pternandra, Kibessia et Rectomitra d'une part, les Memecylon et les Mouriria d’au- 56 PEE. VAN MEIRGAEM. tre part, un lien très intime, que nous aurons à traduire plus tard dans la classification (1). V ASTRONIA. Étudions maintenant la tige et la feuille des Asrronia, genre érigé à l’état de tribu distincte par M. Naudin, réuni au contraire aux Pternandra et aux ÆKibessia dans une même tribu par tous les auteurs qui ont suivi, notamment Triana, MM. Bentham et Hooker, M. Baillon, M. Cogniaux. Tige. — La lige de l'Asfronia macrophylla a sous l’épi- derme une écorce épaisse, comptant une {rentaine d'assises de cellules à parois minces, un peu collenchymateuses, qui renferment çà et là soit une mâcle, soit un prisme d’oxalate de chaux ; la zone interne à quelques fibres isolées. L’endo- derme est formé de cellules rectangulaires, aplaties tangen- tiellement, à parois minces, munies sur leurs faces latérales et transverses de plissements lignifiés. C’est dans la seconde assise corticale que plus tard se développe le périderme, dont le liège épaissit et lignifie ses membranes en dedans et sur les côtés, en forme d'U. L’écorce est dépourvue de faisceaux libéroligneux. Le cylindre central commence par un péricyele de quatre à six rangs de cellules à parois minces, aplaties tangentiel- lement, dont quelques-unes contiennent un cristal prisma- tique. Le liber forme un mince anneau continu, composé de petits fascicules criblés, séparés par des cellules de paren- chyme renfermant çà et là un prisme d’oxalate de chaux. Le bois forme aussi un anneau continu, de structure nor- (1) J'ai beaucoup regretté de n'avoir pu obtenir de la Direction de l’'Her- bier de Kew un petit fragment de tige et de feuille du Plethiandra Motleyi. Il eût élé très intéressant de savoir si le bois secondaire de la tige y ren- ferme du liber inclus, si la moelle y est dépourvue de faisceaux libéro- Jigneux, si la feuille y possède ou non des sclérites et des cryptes, afin de décider si ce genre doit ou non prendre place dans la mème tribu que les trois précédents. STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 57 male à tout âge, c'est-à-dire sans aucune trace de liber inclus. La moelle, très large, garde ses parois minces dans toute son étendue et renferme dans bon nombre de ses cellules un long cristal prismatique. À sa périphérie, elle développe une zone de fascicules criblés, et dans sa région centrale, elle contient un grand nombre de faisceaux libéro- ligneux à liber périphérique et bois central. Même structure dans les As/ronia papetaria, spectabilis, pileolata, glabra, fraterna, à quelques différences secon- daires près. L’A. papetaria, par exemple, est remarquable par le nombre et la grandeur des prismes d’oxalate de chaux que renferment le péricycle, le liber, la zone criblée péri- médullaire et la moelle. Les A. pileolata, glabra, fraterna ont des cellules scléreuses dans la zone corticale interne. Les À. pileolata el glabra ont aussi des fibres dans le péri- cycle et le liber. Enfin dans l’A. pileolata, la moelle, étroite el en partie scléreuse, contient un moindre nombre de faisceaux hbéroligneux, six à huit seulement. Partout, c’est la seconde assise de l'écorce qui est génératrice du périderme. La présence de faisceaux libéroligneux médullaires a été brièvement signalée par M. Solereder chez l’Astronia glabra Wocxact:p. 131). Feuille. — 1] y a peu de chose à dire sur la feuille de ces plantes. Elle est toujours dépourvue à la fois de selérites et de cryptes stomatifères. Le parenchyme hélérogène y renferme beaucoup de longs prismes d’oxalate de chaux. On y voit parfois, entre l’épiderme supérieur et la couche palissadique, une (A. macrophylla, glabra) où deux (A. spectabilis) assises de cellules aquifères aplaties. Conclusions. — Par son périderme cortical, par son endo- derme à parois minces et plissées, par son bois secondaire sans liber inclus, enfin par les faisceaux libéroligneux de sa moelle, la tige des As/ronia diffère profondément aussi bien de celle des Péernandra, Kibessia el Rectomitra, que de celle des Memecylon et Mouriria. Ces différences sont telles qu'il sera impossible désormais de maintenir les Astronia 58 PI. VAN TIEGHENM. à côté des Plernandra et des Kibessia dans la même tribu, comme il à été fait jusqu'ici. Cette réunion dans une même tribu ne reposait d’ailleurs que sur une certaine ressemblance dans la placentalion, qui, des deux parts, est basilaire à ovules nombreux. Mais cette ressemblance est plus apparente que réelle. Dans les As- tronia, en effet, le placenta occupe le bas de l'angle interne de la loge, c’est-à-dire de la face ventrale du carpelle; dans les Pternandra, ele. il occupe le bas du dos de la loge, c’est- à-dire de la face dorsale du carpelle. Il est marginal ou ventral dans le premier cas, comme chez les Mélastomées, médian ou dorsal dans le second. C’est là une différence profonde, cachée sous une trompeuse similitude. Elle est telle que, bien comprise, elle eûl suffi déjà à elle seule à maintenir séparés ces deux groupes et même à réunir les Astronia aux Mélastomées. La voici maintenant singulière- ment accrue par les différences de structure que nous venons de constater dans la tige. Quant à la feuille des As/ronia, par l'absence de selériles et de cryptes stomatifères, elle s'éloigne de celle des Heme- cylon et des Mouriria, pour se rapprocher de celle des Pter- nandra et des Aïbessia; mais par là aussi elle ressemble tout autant à celle des autres Mélastomacées. . Pour fixer les affinités des As/ronia, nous sommes done conduits à étudier maintenant la structure de la tige et de la feuille des plantes de la tribu des Mélastomées. VI MÉLASTOMÉES. D'une façon générale, la structure de la tige des Mélasto- mées paraîl suffisamment connue, puisqu'elle a été étudiée par M. Vüchting dans neuf genres (Sonerila, Bertolonia, Me- dinilla, Miconia, Amphiblemma, Centradenia, Tibouchina, Arthrostemma, Heeria), par M. Solereder dans six autres gen- res (Osbechia, Hhynchanthera, Meriania, Oxyspora, Ossæa, STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES, 59 Blakea), enfin par M. Lignier dans cinq autres genres encore (Melastoma, Phyllagathis, Tococa, Monochætum, Nepsera), ce qui porte à vingt le nombre des genres observés jusqu'ici. On sait nolamment que l'écorce renferme quelquefois des faisceaux libéroligneux (Tibouchina, Centradenia, Heeria, Melastoma, Monochætum, Nepsera, Arthrostemma), que l'en- doderme y est souvent à parois minces, parfois munies sur les faces latérales de plissements bien marqués, que le liège v est tantôt épidermique (Centradenia, Amphi- blemma, etc.) ou sous-épidermique (Medinilla, Miconia, Nep- sera, ete.), tantôt péricyclique (Tibouchina, Monochætum, Heeria, etc.), que le bois y est toujours normal, que la moelle enfin renferme toujours à sa périphérie des faisceaux criblés et toujours aussi, à une seule exception près (Sonerila), des faisceaux libéroligneux dans sa région centrale. Pourtant, au point de vue des affinités de structure des divers genres que nous avons étudiés plus haut, notamment des Àstronia, 1 m'a paru nécessaire d'analyser encore avec soin la lige des genres réputés les plus voisins des Asé#ronia, c'est-à-dire de ceux qui constituent les deux sous-tribus des Blakéées et des Miconiées. Cette étude m'ayant conduit à quelques résullats nouveaux, j'ai élé amené à l’étendre, de proche en proche, à toutes les autres subdivisions de la grande tribu des Mélastomées. Des 127 genres qu'elle ren- ferme dans la Révision de Triana, j'en ai observé finale- ment 119; huit seulement m'ont fait défaut: ils manquent dans l’Herbier du Museum. Ce sont les Lithobium, Opistho- centra, Dicellandra, Dalenia, Carionia, Pleiochilon, Catoco- ryne, Monolena; les sept premiers se réduisent d’ailleurs chacun à une espèce, le dernier seul en a quatre. On pourra donc attacher un certain degré de généralité aux observations qui vont suivre et que je vais résumer en suivant l'ordre des onze sous-tribus adoptées par Triana. À en juger par l’/ndex generum Phanerogamarum de M. Durand (p.130, 1888), c'est aussi la classification de Triana qui sert de base à la monographie que M. Cogniaux prépare en ce moment. 60 PI. VAN ÆIEGIMEM. 1. Blakéées. — La tige des Plakea (B. trinervia, rosea, laurifolia, repens, Pyxidanthus, pulverulenta, anisophylla) a un liège sous-épidermique, à cellules faiblement et tardive- ment épaissies et lignifiées sur la face interne, une écorce contenant des cellules à mâcles cristallines et des cellules scléreuses lignifiées, souvent unies en une zone scléreuse dans la région moyenne, un endoderme à petites cellules rectangulaires aplaties, portant des plissements lignifiés sur leurs faces latérales et transverses, un péricycle renfermant cà et là quelques fibres isolées, un mince anneau de liber avec cellules à mâcles et parfois avec fibres (2. lauri- folia, elc.), un anneau de bois normal, une zone criblée péri- médullaire et enfin une moelle en partie scléreuse contenant de nombreux faisceaux libéroligneux, dont les vaisseaux sont parfois enveloppés d’un are de sclérenchyme à fibres très étroites (B. trinervia, rosea, Pyxidanthus). La tige des Topobea (T. stephanochæta, parasitica, glaber- rima, longipes, calycularis) à aussi un liège sous-épidermi- que à cellules épaissies et lignifiées sur les faces interne et latérales, une écorce à mâcles sphériques et parfois à cellules scléreuses (7. glaberrima, etc.), un endoderme à cellules plates munies de plissements lignifiés, un péricyele avec fibres éparses, un liber mince à mâcles sphériques, un bois normal dont les fibres sont parfois peu épaissies et lignifiées (T. stephanochæta), une zone criblée périmédullaire, enfin une moelle qui renferme, outre des cellules à mâcles et des fibres disséminées, de nombreux faisceaux libéroligneux quelquefois dépourvus de sclérenchyme (T°. calycularis). La feuille des Blakea el des Topobea est dépourvue à la fois de sclérites et de cryples stomalifères. Le parenchyme hétérogène y renferme des mâcles sphériques d’oxalate de chaux, dont les plus grosses sont contenues dans Passise sous-épidermique dela face supérieure, différenciée en assise aquifère dans le premier genre. On voit que ces deux genres, formant ensemble la sous- tribu des Blakéées de Bentham et Hooker (Pyxidanthées de STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 61 M. Naudin et de Triana), ont dans leur tige une structure toute différente de celle des Wemecylon, Mouriria, Pter- nandra et Xibessia, mais, par contre, toute semblable à celle des Aséronia. Ni M. Vôchüing, ni M. Lignier n'ont étudié les Blakéées. M. Solereder a signalé brièvement la présence de faisceaux libéroligneux médullaires chez un Plakea (B. ovalis). 2. Micomées. — La tige des Loreya (L. acutifolia, ovata, Spruceana, plicata) a un liège sous-épidermique, une écorce, tantôt sans fibres et pourvue de cristaux pris- matiques (L. ovata), tantôt fibreuse dans sa zone interne (L. acutifolia, Spruceana), un endoderme à petites cel- lules aplaties dont les parois minces sont munies de plis- sements lignifiés, un péricycle et un anneau de liber tantôt sans fibres et avec prismes (L. ovata), lantôt avec fibres isolées (L. plicata) ou groupées en séries radiales (L. Spruceana), un bois normal, une zone eriblée périmédul- laire contenant tantôt des prismes (L. ovata), tantôt des fibres (L. acuminata), enfin une moelle entièrement exempte de faisceaux libéroligneux, mais renfermant des cristaux prismaliques, parfois très gros (L. plicata). Dans les Henriettea (H. Patrisiana, maroniensis, Marti), la tige a un liège sous-épidermique, à cellules épaissies et lignifiées sur la face interne, une écorce sans fibres renfer- mant des cristaux prismatiques, un endoderme à cellules aplaties et plissées, un péricycle et un liber sans fibres et avec prismes, un bois normal, une zone criblée périmédul- laire avec prismes, enfin une large moelle entièrement dé- pourvue de faisceaux libéroligneux et dont quelques cellules ont des cristaux prismatiques. La tige des Henriettella (H. trachyphylla, parviflora, lateri- flora) a la même structure, avec les mêmes longs prismes dans l'écorce, Le péricycele, le Liber, la zone criblée périmé- dullaire et la moelle, qui est aussi absolument dépourvue de faisceaux libéroligneux. Seulement, le péricyele se sclérifie parfois dans sa zone externe el contient aussi quelques fibres 62 PH. VAN TIEGHEM. isolées (A. trachyhylla, lateriflora), tandis qu'ailleurs il garde ses parois minces (7. parviflora). Dans les Myriaspora (M. egensis, decipiens), c’est encore la même structure. Au-dessous du liège sous-épidermique, l'écorce a des cristaux prismatiques et des cellules scléreuses, isolées (A1. egensis) ou unies en une couche continue dans sa région moyenne (7. decipiens). Le péricycle, le liber, la zone criblée périmédullaire sont dépourvus de fibres et ren- ferment des prismes d’oxalate de chaux ; la moelle ne con- tient pas de faisceaux libéroligneux. À propos des cristaux prismatiques, si abondants dans ces quatre genres, comme dans les As/ronia, comme aussi dans les Pellucia, il est nécessaire de remarquer combien est inexacte la conclusion générale formulée par M. Lignier dans les termes suivants : «Dans le parenchyme cortical et dans le parenchyme médullaire, l’oxalate de chaux se dé- pose toujours sous forme de grosses mâcles sphériques. Dans le liber, il forme soit des mâcles sphériques, chez les Méla- stomées, soit des prismes allongés, chez les Memecylon » (loc. cit., p. 224, voir aussi p. 353). Plus récemment, M. Li- gnier a reproduit cette assertion sous une autre forme, en disant que les Lécythidacées se distinguent des Mélastoma- cées parce que les cristaux d’oxalate de chaux peuvent y être prismatiques (1). En résumé, les quatre genres Loreya, Henrieltea, Henriet- tella et Myriaspora sont dépourvus de ces faisceaux libéro- ligneux médullaires qui se rencontrent, comme on va voir, chez toutes les autres Miconiées (2). Mais si, sous ce rapport, comme aussi par leurs cristaux prismatiques, ces genres se rapprochent des Memecylon, Mouriria, Pternandra et Kibes- (4) Lignier, Recherches sur les organes végétatifs des Lécythidacées (Bull. scient. de lu France et de la Belgique, p. 381, 1890). (2) J'ai eu le regret de ne pouvoir étudier sous ce rapport l'Heteroneu- ron nigricans, plante remarquable notamment par ses feuilles uninerves, que MM. Bentham et Hooker regardent comme un genre bien distinct « genus valde singulare » (Genera, 1, p. 768, 1867), tandis que Triana, M. Baillon et M. Cogniaux s'accordent à la rattacher aux Loreya, sous le nom de L. nigricans. STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 63 sia, ils s'en écartent beaucoup par leur endoderme plissé, leur liège sous-épidermique et surtout par leur bois normal, dépourvu de liber inclus. Toutes les autres Miconiées ont, au contraire, essentielle- ment la même structure de tige que les As/ronia, Blakea et Topobea. L'endoderme, notamment, y esl formé de cellules plates à parois minces, pourvues de plissements lignifiés sur leurs faces latérales et lransverses. Le bois y est normal, sans liber inclus. La moelle, outre sa zone criblée périphé- rique, offre des faisceaux libéroligneux, qui peuvent se ré- duire à quatre (Tetrazyqia elæagnoides), à trois (Myrmidone macrosperma, Calophysa testiculata, Sagræu scalpta, Ossæa angustifolia), à deux (Octopleura diversifolia) ou à un seul (Clidemia hirta, Ossæa leptopus, Maieta Pœppiqu). Il en est ainsi dans les Ossæa (0. leptopus, bracteata, lima, scabrosa, angustifolia) (1), Octopleura (O. micrantha, diversi- folia), Bellucia (B. circumscissa, grossularioides), Myrmidone (M. macrosperma), Microphysca (M. quadrialata), Maieta (M. guianensis, Pœppiqu), Mecranium (M. hæmanthum), Calophysa (C’. testiculata.pilosa), Sagræa (S. plumosa, obliqua, quadelou- pensis, scalpta), Clidemia (C. hirta, blepharodes), Anæctocalycæ (A. bracteosa), Heterotrichum (H. macrodon, patens), Tococa (T. formicana, spadiciflora), Miconia (M. calvescens, desman- tha, metallica), Conostegia (C. speciosa, clidemioides), Ptero- cladon (P. Sprucei), Charianthus (Ch. coccineus, glaberrimus), Tetrazygia (T. villosa, elæagnoides, albicans), Pachyanthus (P. oleæfolius, cubensis), Calycogonium (C'.rhamnoideum, stel- latum, heterophyllum), Oxymeris (O0. Psychotria, quinque- dentata, brasiliensis, asperiuscula), Leandra (L. scabra), Pla- tycentrum (P. clidemioides). Cette liste comprend toutes les Miconiées de Triana, à l'exception des Pleiochiton et Cato- coryne, deux genres monotypes que je n'ai pas pu étudier. Les différences entre les genres, ou d’une espèce à l’autre dans le même genre, sont tout à fait secondaires. La plus (1) L'Ossæa microphylla Tr. (Sagræa microphylla Naud.) a, par exception sa moelle entièrement dépourvue de faisceaux libéroligneux. 64 PIE. VAN MERGHIEN. importante est dans l’origine du périderme, qui est le plus souvent sous-épidermique (Üssæa, Microphysca, Mecranium, Clidemia, Heterotrichum, Miconia, Conosteqia, Charianthus, Tetrazyqia, Pachyanthus, Calycogonium, Oxymeris, Platy- centrum, Charianthus, ete.), rarement péricyclique (Sagræa, Octopleura, Calophysa). Dans les Calophysa, l'endoderme épaissit et lignifie de bonne heure ses membranes sur la face interne, ainsi que sur les faces latérales et iransverses, en forme d'U; c'est au-dessous de lui que se forme plus tard un liège à cellules pareillement épaissies en U : d’où une certaine ressemblance avec les Memecylon et les Mouriria. L’écorce épaissit el lignifie parfois certaines de ses cellules, soit dans la zone interne, jusque contre l’endoderme, qui garde ses parois minces (Ossæa microphylla, O. bracteata, Pachyanthus oleæfolius, Tetrazygia villosa, etc.), soit dans la zone moyenne, laissant entre l'anneau scléreux ainsi formé et l'endoderme une ou plusieurs assises à parois minces (Mecranuun hæmanthum, Conosteqia speciosa, ete.). Ces cel- lules scléreuses ne s’épaississent quelquefois que vers l’inté- rieur et sur les côtés, en forme d’U (Oc{opleura micrantha, Conostegia speciosa, C. clidemioides). Le péricycle aussi est quelquefois partiellement scléreux (Orymeris asperiuscula, Calycogonium stellatum, Telrazyqia villosa, etc.) ; cet épais- sissement peut se faire en forme d'U (Octopleura micrantha). Les cristaux sont parfois des prismes {Bellucia, ete.), le plus souvent des mâcles sphériques. La feuille des Miconiées, comme celle des Blakéées el, disons-le pour n'avoir plus à v revenir, comme celle de toutes les autres Mélastomées, est toujours dépourvue à la fois de sclérites et de cryptes stomatifères. Dans les Loreya, Hen- rieltea, Henriettella, Myriaspora, mais aussi dans les Bellu- cia, le parenchyme hétérogène renferme un grand nombre de longs prismes d'oxalate de chaux, pareils à ceux que con- tient la lige de ces mêmes plantes, comme on l’a vu plus haut. M. Vôchling a le premier observé les nombreux faisceaux libéroligneux de la moelle des Wiconia (M. chrysoneura, ma- STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 65 gnifica). M. Solereder les a signalés brièvement dans un Ossæa (O. acuminata). M. Lignier les a étudiés à nouveau dans les Miconia (M. Pavoniana, metallica) et les a retrouvés dans le Tococa (T. latifolia) et V Heterotrichum (HT. macrodon). Aucun de ces auteurs n’a remarqué leur absence dans les Loreya, Henriettea, ete. En résumé, on voit que les Miconiées offrent deux types de structure différents, suivant que la tige est normale (Lo- reya, etc.) ou qu’elle a des faisceaux libéroligneux surnu- méraires dans sa moelle (Wiconia, etc.). Ces dernières seu- lement, qui sont aussi la grande majorité, ressemblent aux Blakéées et aux Astronia. 3. Dissochétées. — Dans la tige des Dissochétées, l'écorce, dépourvue de faisceaux libéroligneux, est limitée par un endoderme à cellules plates, munies de plissements lignifiés sur les faces latérales. Elle renferme quelquefois des paquets de cellules scléreuses (Pogonanthera pulverulenta, Pachy- centria tuberculata, constricta, elc.), le plus souvent une zone continue de sclérenchyme, séparée de l’endoderme par deux ou trois rangs de cellules à parois minces {Dissochæta superba, Omphalopus fallax, Marumia nemorosa, mus- cosa, ete.). Elle ne compte parfois que cinq assises, dont la seconde est scléreuse (Anplectrum pallens, rostratum, cya- nocarpum, elc.). Elle est rarement dépourvue de scléren- chyme (Creochiton pudibundum). Le liège y est le plus souvent sous-épidermique (Medinilla farinosa, Pachycentria tubercu- lata, etc.), parfois péricyelique (Sakersia africana). Le péricycle a d'ordinaire ses parois minces; pourtant, chez le Creochiton, où l'écorce n’a pas de sclérenchyme, les cellules du péricycle, à l'exception de l’assise externe qui demeure mince, épaississent et lignifient leurs membranes -en dedans el latéralement, en forme d'U. La moelle renferme toujours des faisceaux libéroligneux, d'ordinaire en grand nombre (A nplectrum, Marumia, Creo- chiton, Dissochæta, Omphalopus, Sakersia, elc.), se réduisant quelquefois à trois (Medinilla farinosa, elc.). Entre ces fais- ANN. SC. NAT. BOT. XII, D 66 PH. VAN TIEGHEM. ceaux, la moelle est parfois scléreuse (Pogonanthera, Pachy- centria, elc.). Réserve faile des Carionia et Dicellandra, deux genres monotypes que je n'ai pas pu observer, toutes les Dissoché- tées ont donc la tige munie de faisceaux libéroligneux mé- dullaires et dépourvue de faisceaux corticaux; elles res- semblent par là aux As#ronia, aux Blakéées et à la plupart des Miconiées. Dans cetle sous-tribu, on n'avait éludié jusqu'ici que le seul genre Medinilla. M. Vüchting a observé les M. farinosa, magnifica et Sieboldiana, M. Solereder le M. rubicunda et M. Lignier les M. farinosa, magnifica, speciosa et Curtisü. 4. Bertoloniées. — Dans la tige des Bertoloniées, l'écorce, ordinairement épaisse, est dépourvue de faisceaux libéro- ligneux et limitée en dedans par un endoderme à cellules aplaties et plissées, quelquefois très grandes (Macrocentrum cristatum). Elle est le plus souvent dépourvue d'éléments scléreux, quelquefois collenchymaleuse dans sa zone ex- terne (Diplarpea paleacea). Le périderme est épidermique (Diplarpea), ou sous-épidermique (Salpinga, Bertolonia). La moelle renferme des faisceaux libéroligneux ordinairement en petit nombre, se réduisant parfois à deux (Salpinga lon- gifolia, Diolena auriculata) où à un seul, axile (Trio/ena scor- pioides, Bertolonia pubescens), rarement nombreux (Diplar- pea). Ils sont quelquefois très petits et exclusivement libériens {Macrocentrum). Réserve faite du genre Monolena, que je n'ai pas pu étu- dier, toutes les Bertoloniées, par l'absence de faisceaux corticaux et la présence de faisceaux médullaires, ressem- blent donc aux Dissochétées, à la plupart des Miconiées, aux Blakéées et aux Astroma. Dans cette sous-tribu, le genre Bertolonia seul à été ob- servé jusqu'ici, d'abord par M. Vüchling (PB. marmorata), puis par M. Lignier (B. miranda, marmorata). 5. Sonérilées. — On sait déjà, par les recherches de MM. Vôchting (S. margaritacea), Solereder (S. elegans) et STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 67 Lignier (S. picta), que la tige des Sonerila ne renferme de faisceaux libéroligneux ni dans son écorce, ni dans sa moelle. C'était jusqu’à présent le seul exemple connu d’une structure caulinaire normale chez les Mélastomées. J'ai retrouvé cette même structure normale, non seule- ment dans plusieurs autres Sonerila (S. tomentellu, para- doxa, begoniwfolia, solanoides, robusta), mais encore dans les Gravesia (G. angustifolia, primuloides, Humblotü, bertolo- nioides, pedunculala, reliculata (1), où la moelle renferme souvent deux groupes de cellules scléreuses, et dans les Sar- copyramis (S. lanceolata), où l’endoderme est formé de grandes cellules plissées. On sait aussi, par le travail de M. Vüchting, que la tige des Amphiblemma (A. cymosum), et par celui de M. Lignier, que celle des PAyllagathis {P. rotundifolia), a dans la moelle des faisceaux libéroligneux qui peuvent manquer dans les branches grêles. J'ai vérifié ce caractère dans ces deux gen- res, et en outre, Je l’ai retrouvé dans les Calvoa (C. sinuata). Le liège y est épidermique (Amphiblemma) ou sous-épider- mique (Calvoa). Les Sonérilées offrent donc, comme les Miconiées, deux types de structure, suivant que la tige, toujours dépourvue de faisceaux corticaux, à ou n’a pas de faisceaux libéro- ligneux médullaires. Les six genres de celle sous-tribu se répartissent également entre ces deux manières d’être ; c’est donc essentiellement un groupe de transition. 6. Orysporées. — La sous-tribu des Oxysporées renferme onze genres, dont neuf ont la tige dépourvue de faisceaux corticaux et munie de faisceaux médullaires. Ce sont les Kendrickia (K. Walkerü), Rousseauxia (R. chrysophylla), Veprecella (V. schzocarpa), Ochthocharis (O. javanica, bor- nensis), Allomorplia (A. exiqua), Blastus (B. parvifolius), Driessenia (D. axantha), Bredia (B. Oldhanu), Oxyspora (0. (1) Pourtant, le Gravesia guttata Tri. a dans sa moelle quatre faisceaux libéroligneux. Mais cette plante est-elle bien un Gravesia? Ne doit-elle pas plutôt être rattachée au genre Bertolonia, comme le pensait Hooker? 68 PI. VAN MIEGHEM. paniculata). Deux seulement, le premier et le dernier de la série, l’Anerincleistus (A. hirsutus), qui touche aux Soné- rilées, et le Barthea (B. chinensis), qui confine aux Méria- niées, sont entièrement dépourvus de faisceaux surnumé- raires, corticaux ou médullaires, el offrent la même structure normale que la moitié des Sonérilées, plusieurs Miconiées, etc. L'écorce de ces plantes est limitée par un endoderme à cellules ordinairement aplalies et plissées (Blastus, Bredia, Oxryspora, Driessenia, etc.), quelquefois très étroites (Bar- thea), parfois épaissies soil également tout autour (A//omor- phia), soit en dedans et latéralement en forme d'U (Anerin- cleistus). Elle est quelquefois scléreuse dans sa zone moyenne (Oxyspora), où dans sa zone interne, dont les cellules s’épaississent en U de dedans en dehors (Blastus, Barthea). Le périderme y est ordinairement sous-épidermique (Blas- tus, Oxyspora, Bredia, Kendrickia, etc.), quelquefois péri- cyclique (Anerincleistus, Ochthocharis). Les faisceaux libéroligneux médullaires sont tantôt plus ou moins nombreux (Oxyspora, Rousseauria, Blastus), tan- lôl réduits à cinq (Veprecella) ou à un seul axile (Bredia, Driessenia). Ni M. Vüchting, ni M. Lignier n’ont étudié de plantes ap- partenant à cette subdivision. M. Solereder a signalé briève- ment l'existence de faisceaux médullaires dans un Oxyspora (O0. vagans). 7. Mérianiées. — Réserve faite du genre monotype Opis- (hocentra, que je n’ai pas pu étudier, toutes les Mérianiées, sauf l’Acanthella, ont leur tige dépourvue de faisceaux cor- ticaux et munie de faisceaux médullaires plus ou moins nombreux. Il en est ainsi dans les Calyptrella (C. tristis, Galeottü), Centronia (C. excelsa, brachycera), Graffenrieda (G. Morit- ziana, conostegioides), Arinæa (A. affinis, scutigera, lepi- dota), A delobotrys (A. scandens), Meriania (M. grandidens, speciosa, splendens), Huberia {H. ovalifolia, laurina), Behuria STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 69 (B. insignis). Dans l’Adelobotrys scandens, les faiseaux libéro- ligneux médullaires, au nombre de six à huit, sont remar- quables par l'épaisseur de la gaine fibreuse qui leur est annexée et qui est surtout développée du côté externe, dis- position qui est sans doute en rapport avec la végétation grimpante de cette plante. | L'écorce est souvent scléreuse dans sa zone moyenne (À delobotrys) ou dans sa zone interne, mais de manière à laisser entre le sclérenchyme et l’endoderme une ou plu- sieurs assises de cellules à parois minces (Meriania, Centro- nia, Axinæa, Graffenrieda, etc.) : la sclérose a lieu parfois en forme d'U (Graffenrieda); quelquefois c’est l’assise sus- endodermique qui est scléreuse (Behuria), ou bien les cel- lules scléreuses sont éparses (Huberia). Partout, l’endoderme a ses cellules aplaties, à parois minces et plissées latérale- ment. Le péricycle est souvent scléreux, à l'exception de son assise externe (Meriania, Centronia, Calyptrella,ete.). C'estordinai- rement l’assise péricyclique externe qui est génératrice du périderme (Meriania, Centronia, Calyptrella, ete.): le liège est tantôt tout entier à parois minces (Meriania, etc.), tantôt formé alternativement de cellules plates qui s’épaississent et de cellules carrées qui demeurent minces {Centronia, ele.) ; le phelloderme a quelquefois ses cellules épaissies et ligni- fiées en forme d'U (Meriania). Le périderme peut être aussi sous-épidermique (A delobotrys). La moelle est quelquefois en partie scléreuse (Centronia, Huberia, Behuria, etc.); ses faisceaux libéroligneux peuvent se réduire à cinq (Meriania speciosa). L’A canthella (A Sprucei) diffère de toutes les Mérianiées par sa fige quadrangulaire, dont l'écorce est munie d’un faisceau libéroligneux à chaque angle. La moelle a autour du centre quatre à six petits faisceaux surnuméraires, à liber prédominant ou même exclusivement libériens. La présence des faisceaux corlicaux rapproche ce genre des sous-tribus suivantes, notamment des Rhexiées et des Tibouchinées, 70 PI. VAN TIEGHEM. Ni M. Vôchting, ni M. Lignier n’ont étudié de plantes appartenant à cette subdivision. M. Solereder a signalé l'existence de faisceaux médullaires dans les Meriania (M. purpurea, leucantha). 8. Biheriées. — La sous-tribu des Rhexiées ne renferme que les trois genres Pachyloma, Monochætum et Rhexia. M. Lignier a étudié la tige des Monochætum (M. Bonplandii, umbellatum, calcareum) (loc. cit., p. 168). Il a constaté l'existence dans l'écorce de quatre petits faisceaux libéro- ligneux correspondant aux angles de la tige et dans la moelle d’un ou de plusieurs petits faisceaux libéroligneux, parfois réduits au liber. J'ai vérifié cette structure dans le M. umbellatum et dans le M. meridense, où il n’y à au centre de la moelle qu’un seul faisceau, exclusivement libérien. Je l'ai retrouvée avec les mêmes caractères dans les Æhexia (R. virginica, mariana). Ici, les faisceaux libéroligneux corticaux sont plus nombreux; il y en a non seulement dans les quatre ailes de la tige, mais encore dans les intervalles (A. virgi- nica). Les faisceaux médullaires, en petit nombre, parfois même réduits à un seul, axile, ne renferment pas de vais- seaux, sont exclusivement libériens. Iln'en est pas de même chez les Pachyloma (P. hube- rioides). L’écorce n’y contient pas de faisceaux libéroligneux ; elle a seulement çà et là quelques cellules scléreuses. La moelle, au contraire, a des faisceaux libéroligneux à bois bien développé. Les Rhexiées nous offrent donc deux types de structure, suivant que la tige a ou n’a pas de faisceaux libéroligneux corticaux. 9. Osbeckiées. — Chez tous les Osbeckiées, à l'exception des Dinophora et Nerophila, la Uige a la même structure que chez les /?hexia et Monochætum, c'est-à-dire possède à la fois des faisceaux libéroligneux corticaux el des faisceaux libé- roligneux médullaires. Ilen est ainsi dans les Dionycha (D. Bojerü), Dichætan- thera (D. latifolia, rosea, asperrima, madagascariensis), Me- STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. F1 lastoma (M. malabathricum, normale, repens), Dissotis (D. debilis), Tristemma (T. hirsutum), Otanthera (O. crinita, cyanoides), Guyonia (G. tenella), Antherotoma (A. Naudinii), Osbeckia (O chinensis, nepalensis). Chacune des côtes de la tige quadrangulaire renferme d'ordinaire un seul faisceau cortical (Dionycha, Otanthera, Melastoma, Guyonia, Anthe- rotoma, Osbeckia chinensis, ete.), quelquefois plusieurs, trois par exemple (Osbeckia nepalensis, Dichætanthera latifo- lia, etc.). Les faisceaux médullaires, à liber prédominant, parfois même exclusivement libériens, sont tantôt nom- breux (Dionycha Bojerü, Tristemma hirsutum, Dichætan- thera asperrima, rosea, latifolia, Osbeckia nepalensis, etc.), tantôt réduits à quatre (Dichætanthera madagascariensis, Otänthera crinita) et même à deux ou à un seul (Dissotis debilis). Dans le Dinophora (D. spenneroides), la tige est encore quadrangulaire, mais les angles de l'écorce sont entière- ment dépourvus de faisceaux. La moelle a trois faisceaux exclusivement libériens, disposés sur un même diamètre. Dans le Nerophila (N. gentianoides), plante annuelle ma- récageuse, il en est de même. L’écorce, creusée d’un cercle de lacunes aérifères, offre bien encore quatre angles, mais qui paraissent entièrement dépourvus de faisceaux, tandis que la moelle renferme vers lecentre un ou deux faisceaux, réduits au liber. Il se peut qu'ici la suppression des faisceaux corticaux soit simplement le résultat de l'adaptation à la vie aquatique. Dans toutes ces plantes, l'écorce est ordinairement très mince entre les angles, parfois réduite à trois assises (Di- nophora). Elle est limitée par un endoderme dont les cel- lules, le plus souvent aplaties, quelquefois hautes (Anthero- toma, Otanthera), sont ordinairement à parois minces et plissées, quelquefois épaissies en U (Dichætanthera). Le liège y est péricyclique, parfois homogène (Dissotis), le plus souvent formé alternativement de cellules plates et de cellules carrées. Les premières s’épaississent quelquefois 12 PIX. VAN TIEGHEM. uniformément, tandis que les secondes ou restent minces, ou s’épaississent en dedans et sur les côtés, en U (Dichætan- thera asperrima). Les Osbeckiées offrent donc deux types de structure, sui- vant que la lige renferme des faisceaux surnuméraires dans l'écorce et la moelle, ou dans la moelle seulement. M. Solereder a signalé les faisceaux médullaires de la tige d'un Osbeckia (O. nepalensis), mais sans parler de ses fais- ceaux corticaux. Par contre, M. Lignier a observé les fais- ceaux corlicaux d’un Melastoma (M. malabathricum), mais sans rien dire de ses faisceaux médullaires. 10. Tibouchinées (Pléromées). — A part les deux genres Marcetia et Fritzschia, toutes les Tibouchinées offrent la structure que nous venons de voir prédominer chez les Os- beckiées, c’est-à-dire ont dans leur tige à la fois des fais- ceaux corticaux et des faisceaux médullaires. Il en est ainsi dans les Actotis (A. acutifola), Chætolepis (Ch. microphylla, alpina, satureioides, cubensis, Lindeniana), Brachyotum (B. Benthamianum), Tibouchina (T. heteromalla, Candollei), Pterogastra (P. divaricata, cupheoïdes) (1), Pterolepis (P. ver- sicolor), Macairea (MT. stylosa, adenostemon), Comolia (C. Ser- tularia, ovalifolia, stenodon, Martiana, viscidula), Nepsera (N. aquatica), Microlepis (M. oleæfolia), À ppendicularia (A. thymaifolia), Ernestia (E. tenella), Purpurella (P. albiflora), Arthrostemma (A. herbaceun, ladanoides, glomeratum, lutes- cens, Martianum), Heeria (H. undulata), Desmoscelis (D. wil- losa), Acisanthera (À. quadrata, hedyotidea, recurva, punc- talissima). Les faisceaux corlicaux, souvent très petits, rarement assez gros (Wicrolepis, Desmoscelis), correspondent aux quatre an- gles de la tige ;il ven a quelquefois plusieurs à chaque angle (Tibouchina heteromalla, Artlrostemma glomeratum, herba- ceum, elc.). L’endoderme, ordinairement formé de cellules aplatiesetplisséeslatéralement, épaissit quelquefois uniformé- (1) M. Cogniaux a fait récemment du Pterogastra cupheoides le type d’un genre nouveau Schwackæa (Voir Durand : Indeæ generum, p. 132,1888). STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 15 ment ses membranes (7houchina). Les faisceaux médullaires, parfois exclusivement libériens (Purpurella, Pterolepis, Co- molia Martiana, etc.), sont nombreux (Tibouchina, Heeria, Macairea, Purpurella, Microlepis), ou se réduisent à trois ou quatre (Comolia Martiana, Desmoscelis, Pteroyastra, Arthro- stemma lutescens, ete.), ou même à un seul, axile (CAætolepis sa- tureioides, Arthrostemma Martianum, Nepsera aguatica, etc). Les Marcetia(M. taxifolia, canescens, tetrasticha, latifolia. tenuifolia) ont aussi dans l'écorce des faisceaux libéro- ligneux, souvent {très pelits; mais la moelle, quelquefois en partie scléreuse (M. taxifolia), x est entièrement dépouvue de faisceaux. Dans les Æritzschia (F. erecta, anisostemon, cæspilosa, in- tegrifolia), l'écorce, très mince, réduite parfois à trois assises (F. anisostemon), offre bien encore quatre angles, mais sans aucun faisceau libéroligneux. La moelle y est aussi com- plètement dépourvue de faisceaux. Les plantes de ce genre ont, comme on sait, un port tout particulier, éricoïde. C’est peut-être à ce mode de végétation qu'il faut attribuer la dis- parition des faisceaux surnuméraires dans les angles de Pécorce. Partout le périderme est péricyclique et exfolie l'écorce avec les faisceaux qu'elle renferme. Le liège cst formé al- ternativement de cellules plates et carrées, tantôt toutes à parois minces (Comolia, Heeria, Tibouchina. Pterolepis), tantôt à celiules carrées épaissies vers l’intérieur, les cellules plates demeurant minces ou s’épaississant tout autour (War- celia). M. Vôchting a observé les faisceaux corticaux et les fais- ceaux médullaires chez les Trhouchina (T. macrantha, petio- laris, Fontanesii, heteromalla), Arthrostemma |A. campanu- lare) et Heeria (H. rosea, subtriplinervia). M. Lignier les a étudiés à son tour dans les Tzbouchina(T. macrantha, hete- romalla), Nepsera {N. aquatica), Arthrostemma (A. Galeot- fianum) et Heeria (H. macrostachya, rosea). 11. Microliciées. — A part les trois genres Centradenia, 74 2 PH. VAN TIEGNHEM.. Bucquetia et Eriocnema, et réserve faite du Lithobium que je n’ai pas pu étudier, toutes les Microliciées ont leur tige munie de faisceaux corticaux, mais dépourvue de faisceaux libéroligneux médullaires. Par là, elles diffèrent nettement de la plupart des Tibouchinées et ressemblent aux Marceha. l'en est ainsi dans les Poferanthera (P. parviflora, cras- sipes), Tulasnea(T. foliosa), Siphanthera (S. paludosa, micro- licioides), Rhynchanthera (R. p'atensis, secundiflora, parvi- flora, novemnervia, Weddellii) (1), Lavoisiera (L. grandiflora, pulchella, microphylla, alba, pulcherrima, nervulosa, firmula, caryophyllea), Trembleya (T. pityoides), Microhicia (M. cor- data, variolosa, vestita, hirsutissima), Stenodon (S. suberosus, gracilis), Chætostoma (Ch. castrata), Cambessedesia (C. lale- venosa, espora), Pyramia (P. salviæfolia, striatella, puyro- phylla), Svitramia (S. pulchra), Castratella (C. pulosel- loides). Il y à ordinairement un faisceau libéroligneux cortical dans chacune des quatre côtes de la tige ; en dehors de lui, on voit parfois un faisceau de sclérenchyme sous-épider- mique (Microlicia, Chietostoma, etc.), ou bien il est entouré soit de quelques fibres (Lavoisiera), soit d'une épaisse gaine fibreuse {S/enodon, etc.). Ces faisceaux corlicaux sont tantôt assez gros (Stenodon, Svitramia, etc.), tantôt très petits (Trembleya, Tulasneu, elc.), au point de pouvoir passer inaperçus (Pyramia). L'endoderme est d'ordinaire à cellules plates, munies sur les faces latérales de plissements ligni- fiés (2). Le périderme est péricyclique et exfolie l'écorce avec (4) Toutefois le R. Gardneri a un petit faisceau libéroligneux au centre de sa moelle et, d’après M. Solereder, le R. limosa en a deux ou trois (loc. cit., p. 130). (2) En définitive, on voit que l’endoderme, toujours très net dans la tige des Mélastomacées, y est habituellement formé de cellules plates, à parois minces et munies latéralement de plissements lignifiés. Ceci est en contra- diction formelle avec la conclusion de M. Lignier, d'après laquelle l'endo- derme (gaine protectrice) de la tige de ces plantes ne serait que rarement pourvu de plissements, c'est-à-dire de ce qu'il nomme improprement des « cadres d’épaississement. » (Loc. cit., p. 223.) STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 75 ses faisceaux. Le liège est d'ordinaire formé alternalive- ment de cellules plates et de cellules carrées (Microlicia, Lavoisier…a, etc.). Dansles Centradenia (C. floribunda, rosea), outre les qua- tre faisceaux corticaux des côtes, la tige a dans sa moelle un faisceau libéroligneux axile, qui peut être très mince et même manquer complètement dans les rameaux grêles (C. loribunda) ; il est parfois réduit au liber. Dans les Buc- quetia (B. glutinosa), 1 en est de même, et le faisceau mé- dullaire axile est aussi exclusivement libérien. Ces deux genres se rattachent donc par leur structure non aux Micro- liciées, mais aux Tibouchinées. Dans les Eriocnema (E. acaulis, fulva), la moelle a aussi deux ou trois faisceaux libéroligneux, mais l'écorce est entièrement dépourvue de faisceaux. Par là, ce genre se ral- tache à l’une des premières sous-tribus étudiées plus haut. Les Microliciées n'avaient été étudiées jusqu'ici, par MM. Vôchting et Lignier, que dans les Centradenia, qui sont précisément un genre aberrantet d’affinités douteuses. Aussi le véritable caractère anatomique de cette sous-tribu était-il resté inconnu. On ignorait même qu'il existät des Méla- stomées à faisceaux corlicaux et sans faisceaux médullaires. Conclusions. — En résumé, il résulte de cette longue étude que la structure de la tige des Mélastomées se laisse rattacher à quatre types, suivant qu’il y a des faisceaux libéro- ligneux surnuméraires à la fois dans l'écorce et dans la moelle, dans l'écorce seulement, dans la moelle seulement, ou nulle part. De là aussitôt une subdivision anatomique de celte grande tribu en quatre sous-tribus. Pour éviter toute confusion avec les subdivisions établies par Triana d’après les carac- tères externes et dénommées par lui, comme on l’a vu plus haut, d’après le genre principal (Microliciées, Tibouchi- nées, etc.), nous nommerons nos sous-tribus, d’après leur caractère anatomique : la première Dermomyélodesmes, à faisceaux surnuméraires à la fois dans l'écorce et la moelle ; 76 PH. VAN MIEGHEM. la seconde Dermodesmes, à faisceaux surnuméraires dans l'écorce seulement; la troisième Myélodesmes, à faisceaux surnuméraires dans la moelle seulement; la quatrième Adesmes, sans faisceaux surnuméraires (1). Cherchons maintenant à établir la correspondance de ces quatre subdivisions anatomiques avec les onze sous-tribus de Triana, qui sont adoptées aussi et disposées de la même manière par M. Cogniaux dans sa Monographie en prépara- üon, comme il à été dit plus haut (p. 59). A cel effet, il convient d’abord de rappeler les caractères et la disposition de ces onze sous-tribus, ce qui fait l’objet du tableau suivant : : ; :.. (Bractées décus- | indéhiscent. FANS ARReRCeS. SÉCS MR ELL SE Blakéées. Graines droites. Nouveau monde Re Miconiées. = Etamines avec appendices. Ancien monde.... Dissochétées. D Graines droites. Üyme scor- {Nouveaumonde. Bertoloniées. = OO A TS Te JOIE | Ancien monde.. Sonérilées. capsu- postér. | courbes... re Fe Fe lairei}\ ruass{Graines 1458 j Ancien monde.. Oxysporées. | ines |U ARS Os | on Le l'aroites {Nouveau monde. Mérianiées. é à { Ancien monde.. Osbeckiées. nr antér. | courbes. { Nouveaumonde. Tibouchinées. Graines” droites 7.000 None Microliciées. On voit que les caractères ulilisés dans cette classification sont, d’abord la nature du fruit, puis l'existence et la dispo- sition des appendices staminaux, ensuite la forme des graines et enfin la distribution géographique. Pourtant, il y à bien des exceplions et des transitions. Ainsi les Me/astoma el Otanthera, malgré leur fruit indéhiscent, sont classés non dans les Dissochétées, mais dans les Osbeckiées, parce qu'ils ont la graine courbe. Les Æriocnema sont placés dans les Microliciées, bien que les étamines y soient dépourvues d’ap- pendices ; mais on admet qu'ils font transition vers les Ber- toloniées. D’autres intermédiaires sont signalés çà et là, et, d’une façon générale, l’auteur reconnaît que « beaucoup de Mélastomacées ne se prêtent qu'avec d’extrèmes difficultés (1) De Jecur, faisceau; depux, écorce, et uuexcs, moelle. STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. TL à une division satisfaisante, parce qu'aucun caractère isolé ne peut définir nettement chaque tribu » (/oc., cit, p. 5). Après des essais plus ou moins infructueux, il s’est arrêté, dit-il, à une combinaison des caractères les plus saillants. Ceci posé, nos Dermomyélodesmes comprennent : 1°toutes les Tibouchinées (Pléromées), moins les Marcetia et Fritz- schia ; 2° toutes les Osbeckiées, moins les Dinophora et Nero- phila ; 3° toutes les Rhexiées, moins les Pachyloma. y faut ioindre les Centradenia et Bucquetia des Microliciées, ainsi que l’Acanthella des Mérianiées. Nos Dermodesmes comprennent toutes les Microliciées, moins les Centradenia, Bucquetia et Eriocnema. WHY faut join- dre le Marcetia des Tibouchinées. Nos Myélodesmes comprennent : 1° toutes les Mérianiées, moins l’Acanthella; 2 toutes les Oxysporées, moins les Barthea et Anerincleistus ; 3° Toutes les Sonérilées. moins les Sonerila, Sarcopyramis et Gravesia ; 4° loutes les Bertolo- niées; 5° toutes les Dissochélées ; 6° toutes les Miconiées, moins les Loreya, Henriettea, Henriettella et Myriaspora ; 7° enfin toutes les Blakéées. Il y faut joindre encore l’Eriocnema des Microliciées, les Dinophora et Nerophila des Osbeckiées, le Pachyloma des Rhexiées, ainsi que les À stro- nia, qui ont aussi, comme on l’a vu page 57, des faisceaux libéroligneux dans la moelle seulement. C’est de beaucoup la subdivision la plus nombreuse. Nos Adesmes, enfin, comprennent non pas une sous-tribu déterminée, mais seulement des genres appartenant à plu- sieurs des sous-tribus précédentes, savoir : le Fritzschia des Tibouchinées, les Barthea el Anerincleistus des Oxysporées, les Sonerila, Sarcopyramis et Gravesia des Sonérilées, enfin les Loreya, Henriettea, Henriettella el _Myriaspora des Mi- coniées. En ce qui concerne les Dermomyélodesmes, les Dermo- desmes et les Myélodesmes, on voit déjà que l'accord entre les deux classificalions est aussi salisfaisant qu'il est possi- ble dans une tribu aussi homogène, où le groupement des 78 PH. VAN TIEGHEM. genres d'après les caractères extérieurs est, de l’aveu même du monographe, irès difficile et toujours quelque peu arbi- traire. Mais l'accord devient plus complet et plus évident si, dans la classificalion de Triana, l’on modifie la subordi- nation des caractères et par conséquent l’ordre des sous- tribus, en mettant en première ligne la forme des graines, en seconde la disposilion des appendices staminaux, en troi- sième seulement la nature du fruit. Ce qui donne le tableau suivant : , sonne (Tibouchinées. { courbes. \ ANÉFIEUTS® | Osbeckiées . .. ; DERMOMYÉLODESMES. Appendices staminaux | postérieurs. ARhexices..... antérieurs.. Microliciées.. DERMODESMES. ; | | Mérianiées. ..\ droites. | Oxysporées….. Graines \Appendices staminaux A Pr postérieurs ns ; ou nüls Bertoloniées.. ; MYÉLODESMES. { Dissochétées.. Miconiées.... Blakéées...….. D'où l’on voit clairement que les Dermomyélodesmes comprennent les Mélastomées à graine courbe, les Dermo- desmes les Mélastomées à graines droites el à élamines mu- nies d’appendices antérieurs, les Myélodesmes les Mélas- tomées à graines droites et à étamines munies d’appendices postérieurs ou sans appendices. La forme de la graine se montre donc, contrairement à l'opinion de Triana, un carac- tère plus important que la nature du fruit et que la disposi- tion des appendices staminaux, puisqu'elle est plus intime- ment liée à la structure de la tige. Et, pour la même raison, la disposition des appendices staminaux est elle-même plus importante que la nature du fruit. La correspondance générale des deux classifications étant de la sorte établie, si l'on en vient au détail, l'anatomie exige le déplacement de quelques genres; mais ces genres à déplacer sont précisément de ceux que Triana a signalés comme étant des formes de transition, de classement dou- eux, et qu'il a placés aux limites de ses subdivisions, ou STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES, 79 encore de ceux au sujet desquels les botanistes descripteurs qui ont suivi ne sont pas d'accord avec lui. Les Æriocnema, par exemple, doivent quitter les Microliciées pour aller se ranger parmi les Myélodesmes, dans les Berloloniées ; or Triana regardait déjà ce genre comme une transition des Microliciées aux Bertoloniées et M. Baillon les a placés tout à côté des Bertolonia, qui ont le même port (oc. cit., p. 10). Les Centradenia doivent sortir des Microliciées pour entrer dans les Dermomyélodesmes, chez les Tibouchinées; or ce genre, placé vers la limite de la sous-tribu par Triana, n’est classé qu'avec doute à côté des Microlicia par M. Baillon (loc. cit., p. 42). Inversement les Marcetia, el sans doute aussi les Fritzschia, si l'on admet que les faisceaux corlti- caux n’y ont avorté aux angles de la tige que par suite de la végétation éricoïde, doivent quitter les Tibouchinées pour se ranger dans les Microliciées. Les Pachyloma doivent quitter les Rhexiées, pour s’ad- joindre aux Mérianiées; mais pour Triana ce genre est à la limite des Rhexiées du côté des Mérianiées et M. Baillon le place, avec doute, il est vrai, dans les Mérianiées, à côté des Behuria. Inversement, l’Acanthella doit sortir des Méria - niées pour entrer non dans les Rhexiées, puisque ses appen- dices staminaux, peu développés, il est vrai, sont anté- rieurs, mais dans les Tibouchinées; or, ce genre, d’ailleurs très singulier, s'éloigne précisément des Mérianiées par cette disposition antérieure de ses courts appendices, et ses véritables affinités n’ont pas encore été fixées avec certitude. Le Nerophila devrait aussi, à la rigueur, quitter les Osbec- kiées, pour entrer dans les Microliciées; mais si l’on réflé- chit que, dans cette plante annuelle et marécageuse, c’est sans doute la végétation éphémère et aquatique qui amène la disparition des faisceaux corticaux, en même temps que la spongiosité de l'écorce, on la maintiendra, du moins pro- visoirement, à sa place primitive. Il serait facile d'ajouter d’autres exemples; ceux-ci suffi- 80 PH. VAN MIEGEFHEM. sent à montrer que les modificalions de détail, les retou- ches locales, imposées par l'anatomie à la classification de Triana, loin d’être en contradiction avec les données de la morphologie externe, ne font que les préciser et les compléter. Ajoutons seulement que les As/ronia, qui font maintenant partie des Mélastomées myélodesmes, puisqu'ils ont les graines droites, les étamines appendiculées, le fruit indé- hiscent et qu'ils sont de l’ancien monde, s’y rangent dans les Dissochétées, ou, si l’on préfère, à cause de leur placenta- tion basilaire, tout à côté des Dissochétées, dans une tribu spéciale, sous le nom d’Aséromiées. Notre subdivison des Adesmes n’a pas la même homogé- néité, ce qui se comprend, puisqu'elle n’est caractérisée que par une propriété négative, par un simple retour à la struc- ture normale. Ce retour peut s’opérer par des causes diffé- rentes dans les diverses sous-tribus, et il faut distinguer. Si la disparition des faisceaux surnuméraires corticaux est amenée par un mode spécial de végétation, aquatique comme dans le Nerophila, où éricoïde comme dans les Fritzschia, la cause en étant physiologique, on pourra n’en pas tenir comple dans la classificalion et laisser ces genres à la place que leur assignent leurs autres caractères. Mais si le retour à la structure normale n’est pas le résul- tat d’une adaptation, il prend de l'importance au point de vue des affinités et il devient nécessaire de l’exprimer dans le classement. A cet effet, d’une part, nous réunirons les Sonerila, Sarcopyramis, Gravesia, Barthea el Anerincleistus en un petit groupe distinct, sous le nom de Sonérilées, en ran- geant les autres Sonérilées de Triana (Phyllagathis, Calvoa, Amplaiblemma) dans les Bertoloniées, comme la chose a déjà été faile par Bentham et Hooker. D'autre part, nous sépa- rerons les Loreya, Henriettea, Henriettella et Myriaspora des autres Miconiées, pour en faire un petit groupe spécial, sous le nom de Loreyées. Ainsi définies, les Sonérilées et les Loreyées, composant la sous-tribu des Adesmes, prendront STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 81 rang à la fin de la série des Mélastomées, du côté des Mémécylées. En résumé, la tribu des Mélastomées se trouve de la sorte divisée en quatre sous-tribus anatomiques, renfermant treize groupes de genres, définis par les caractères extérieurs et la distribution géographique. Pour terminer, remarquons encore que l'anatomie n'au- torise pas la séparation des B/akea, Topobea, Bellucia, Lo- reya, elc., d'avec les Mélastomées, avec réunion aux Meme- cylon et aux Mowriria dans une même tribu, adoptée par M. Baillon (loc. cit., p. 24). Les trois premiers genres ap- partiennent, en effet, aux Myélodesmes, le quatrième aux Adesmes. M. Cogniaux a été bien inspiré en revenant sous ce rapport à la classification de TFriana. L’anatomie ne permet pas non plus d’incorporer les Loreya aux Bellucia, comme l’a fait M. Baillon (/oc. cif., p. 27). Ces deux genres sont bien distincts, puisqu'ils se rattachent à deux seclions anatomiques différentes de la tribu des Mé- lastomées. M. Cogniaux à agi sagement en les séparant de nouveau . On voit aussi combien M. Baillon se trompe lors- qu'il affirme que les Bellucia sont « des plantes très voisines des Mouriria » (loc. cit., p. 27). VII AXINANDRA. Connaissant bien la structure des Mélastomées, noussommes en mesure maintenant d'étudier, au point de vue anatomi- que, la lige et la feuille des Axinandra,ratlachés par MM. Ben- tham et Hooker aux Lythracées, comme genre anomal, et in- corporés plus récemment par M. Baillon aux Mélastomacées. La tige des Axinandra(A. coriacea, zeylanica, alata, Bec- cariana), sous un épiderme fortement cutinisé, a une écorce de six à dix assises de cellules, contenant çà et là des mâcles ANN. SC. NAT. BOT. x, Ô 82 PH. VAN TIEGHEM. sphériques ; la plus interne, qui est l’endoderme, est formée de larges cellules aplaties, faiblement plissées sur les faces latérales. Dans les A. zeylanica et Beccariana, dont la tige est quadrangulaire à faces bombées, l'écorce renferme, à cha- que angle, un très petit faisceau libéroligneux entouré d’une gaine scléreuse. Dans l'A. alata, dont la tige à quatre côtes saillantes en forme d'ailes, l'écorce contient dans chaque côte deux faisceaux libéroligneux plus gros, munis d'une gaine scléreuse plus épaisse. Le périeycle commence par un rang de fibres très étroites, appliquées contre l’endoderme ; ce rang de fibres est souvent interrompu, parfois sur de grands espaces (A. Beccariana). Au-dessous de lui, est une assise de cellules à parois minces, puis de nouveau une couche de fibres. C’est dans l’assise à parois minces, seconde assise du péricycle, que se développe le périderme ; son liège est composé allernalivement de cel- lules carrées, qui s'épaississent seulement sur la face interne, et de cellules plates qui s’épaississent uniformémeut tout autour. Le liber forme un anneau continu, dans les cellules duquel on voit çà et là un cristal prismatique. Le bois forme aussi un anneau continu, de structure normale. La moelle produit à sa périphérie une zone de faisceaux criblés; les cloisonnements centrifuges de l’assise médullaire externe élant assez actifs, de nouveaux tubes criblés s'ajoutent aux anciens, qui s'écrasent à mesure. Entre les faisceaux criblés, la moelle renferme des cristaux prismaliques el, en dedans de cette zone criblée, elle contient des paquets de fibres. Enfin, sa région centrale, qui plus tard se sclérifie fortement, est entièrement dépourvue de faisceaux libéroligneux. La feuille a un parenchyvme hétérogène, à mâcles sphéri- ques, dépourvu à la fois de sclérites et de cryptes stomati- fères. En résumé, la structure des Arinandra permet de les in- corporer aux Mélastomacées et, sur ce point, confirme l'opinion de M. Baillon. De plus, elle fixe, non seulement la tribu, mais encore la sous-tribu, où ce genre doit prendre STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 83 place. Le bois y élant normal, c’est parmi les Mélastomées. L'écorce ayant des faisceaux libéroligneux et la moelle en étant dépourvue, c’est dans les Dermodesmes, c’est-à-dire, comme on l’a vu, dans les Microliciées, ou près d’elles. Comme ce sont des plantes de Ceylan et de Bornéo, nous ne les In- corporerons pas aux Microliciées, qui sont toutes américai- nes ; nous en ferons à côté un petit groupe à part, sous le nom d'Axrinandrées. Ici cesse l'accord entre nos observations et celles de M. Baïllon. Ce botaniste, en effet, classe les Axinandra dans sa tribu des Blakéées, entre les Memecylon et les Mou- riria. M. Cogniaux les range aussi entre les Memecylon et les Mouriria dans sa tribu des Mémécylées (nos Mouririées et celles de Triana). Celte place est out à fait incompatible, on l’a vu, avec la structure de la tige et de la feuille de ces plantes. VIII CONCLUSIONS GÉNÉRALES. — CLASSIFICATION ANATOMIQUE DES MÉLASTOMACÉES. De cette longue série d’éludes, au cours de laquelle la presque totalité des genres de la famille, 126 sur 135, repré- sentés par plus de 375 espèces, ont été soumis, tout au moins dans la tige, à l'observation microscopique, découlent quelques conclusions générales, très simples et très nettes. Il nous reste à les formuler et à les traduire dans un tableau d'ensemble, qui résumera la Classification anatomique de la famille des Mélastomacées. La tige des Mélastomacées a son écorce limitée par un endoderme très net, le plus souvent formé de cellules aplaties, à parois minces, munies sur les faces latérales de plissements lignifiés. Le liber, peu développé, et le bois y forment l’un et l’autre un anneau continu ; en un mot, la structure v esl gamodesme. La moelle produit à sa périphérie des faisceaux 84 PIX. VAN TIEGNHEM. criblés, improprement nommés liber interne. C'est à peu près tout ce qu’on en peut dire de général. Dès qu'on en vient au détail, des différences surgissent, qui sont de divers ordres, et quiservent précisément à caractériser les tribus et les sous- tribus. Les cinq genres Memecylon, Mouriria, Pternandra, Kibes- sia et Reclomitra ont, aussi bien dans la racine que dans la tige, la propriété d'inclure progressivement leur liber dans leur bois secondaire. Ensemble, ils doivent constituer dans la familleune tribu principale et une seule, celle des MÉMÉCYLÉES. Les autres genres, 121 sur 126 étudiés, conservent au con- traire à leur liber sa place ordinaire el à leur bois secondaire sa structure normale. Tous ensemble, ils doivent former une autre tribu principale et une seule, celle des MÉLASTOMÉES. Dans la première tribu, les cinq genres qui la composent, réserve faite du Plethiandra, seront groupés, d'après la struc- ture de la feuille, en deux sous-tribus : les Mouririées, qui ont des sclérites, et les Plernandrées, qui n’en ont pas. En outre, les Mourirites ont, comme on sait, des ovules peu nombreux sur un placente marginal, tandis que les Pter- nandrées ont des ovules nombreux sur un placente médian. Chez les Mouririées, les Mouriria se distinguent d'ordinaire, par leurs cryples stomatifères, des Memecylon qui en sont dépourvus. De plus, l'ovaire des premiers est le plus souvent pluriloculaire, tandis que celui des seconds est loujours uni- loculaire. | Dans la seconde tribu, les centyvingt-neuf genres qui la constituent seront répartis en quatre sous-tribus : les Ades- mes, les Myélodesmes. les Dermodesmes et les Dermomyélo- “esmes, comme il a élé dit plus haut. Ce sont les Adesmes qui se rapprochent le plus des Mémécylées, lesquelles sont aussi dépourvues de tous faisceaux surnuméraires. Ce sont les Dermomyélodesmes, au contraire, qui s'en écartent le plus, puisqu'ils ont deux sortes de faisceaux surnuméraires. Le tableau suivant résume ces deux premiers degrés de la classification : SIRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 85 dans l'écorce etla moelle. I. DERMOMYÉLO - DESMES. Bois secondaire normal, MÉ- rte EEE S s Pe . DERMODESMES.. LASTOMÉES. Faisceaux libé-/dans l'écorce seule IT. DERMODESMES roligneux surnuméraires| ; D DRE je la moelle seule.... IT. MYÉLODESMES. ÉNUIIE PATL terre IV. ADESMES. 4 lee : sclérites.......,.. V.Pr ÉES. Bois secondaire à liber in 4ns clérites DÉCOPREE clus. HEMÉCYLEES. Feuilles... la SCIÉTITES re VIT. MOURIRIÉES. MÉLASTOMACÉES. Voiei maintenant, pour chacune de ces six. sous-tribus, la liste des genres qu’ellesrenferment, groupés, dans les quatre premières, en quatorze séries, d'après les caractères exté- rieurs et la distribution géographique, les deux dernières restant indivises : “DAUDAhT "DUUDANAS : CDR RAR TE oo note Pine nier D Orpi HOUR 2 E **SHATIITOHOI ** "apPUOUI nesANO Sinoati ppoDysnD | SOON ‘4 P N () amigo “que xneurueys S991puoddy ‘soyro1p soute) *SANSAGONUAG ‘II “UNJBYIOUO À . res ‘f ‘‘':‘apuouwu A °+:***sinon9s0d | ne) SATIXAHYU ‘€ puOouI NETANON 19) | \ | °py2hUOLT \ *"DALIYIUDILUYIUT | "OW0)SD)2T "S2J0SSU(T ru °° *SHANI4ISO ‘Z ‘°°° "OPUOUL U9IOUY tisttieitrerese XNBUIUE]S so91puoddy DI0JUDIO ‘saqin09 SUILI) "SHNSHGOIHANONUA( ‘I “Druofinr) *DjUY OUI NT °01499Q$0) , DIOUIUDOY | *SU00Y “UNjORYIDAT *“DUYINOQUE *D1800049)4 “14910994 *DALDIDI “DYOW0!) *D49S ON *s109)04191J "Dumnpuaddy | | "DUSOUUT te: SINONSJUE PH. VAN TIEGHEM. ‘*SHANIHIAOAIT ‘F ‘°°° "SPUOUI NESANON *Dp24ndund "DUUIJSOUYIAY *DU9II *s1d9103æy9 *$1199S0WSA(T "DAIYJUDSU Y *, DUU9PDAUI!) *, DUyanbong 86 37 2 MEMECYLEES. AFFINITÉS DES STRUCTURE ET Dyp249dfp09 "DUUOLU91) ‘npouurflour "DEUCY *SÂ10909pPV *"DAUDALO TU "(i) Dqussoyisido *DILIQNE *Duny9f *,Duo]ly904 "DUIJOULT, | "DUAJOUT | (à) vuajouor “padam)d{ “pEuid)ns "UN AJUIIOLIDT *DAU0)07408 “DuuaquyhuUY ‘20009 “sy206mnliyd *, DAOYdOUT | Un ; | , DUOUIOUT | *, DAPUDWITY *, DUISTIUA *, DU094DIU "DAIYJUD4910 “HOUSPINT "Datoyrunydhs "DAOYIUDYOULUYU "DAIISTOANT ‘Dho]quouT "DIITJOLN "U0POU2)S ‘DWO0}S072Y0) ‘MS2pASSAQUO!) ***SAIINVIVAN ‘L * SAJINOTOLUT ‘9 *"SHAUANVNIXV °C ‘(ems) **SAMOITOUIIN ‘# *:*°{9pUOW:NC9ANON |-" ‘°°° uoN | ) *OIIBINsd 9. °°" "een *S[NU no Sina193s0d Xneuru -8}S sootpuoddy ‘saJ1o1p SaUTU) SANSAGOTAAN II ntm rt nee: te: SDIOIdI09S SUIÂN | °°°" ""epUuOU U9IoUY nc di ue “lues soorpuoddy ‘sojtoap soeurs ‘(onns) SINSHGONUAG ‘IT *’**""9pUOU NE2ANON *(4) auÂ41090709 °D9090 "DLUOOLU "MÉRZNAUAIT, "SNYAUNLANY) *D1691S0u01) *th092032œ@UY *U0PD12049)d “snyjuvhyo0q “umru0609/01) (à) uornyoog ÉUTELTTIE T0) "DAPUDIT “unaju29h10)d "DOS F *DLy}uvUu060 | DINUIPAIU (à) rruorun) *sndoypyduo *U07242094/) “unAjIa UT °D)®Y90SS1(T “DUUUNADTT (à) Drua0 “DISAIYDS (4) DapuDyan j VAN MKIEGEIENI. 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VAN TIEGHEM. Ensemble, ces deux tableaux résument la classification analomique des 135 genres de la famille des Mélastomacées, groupés en seize séries, six sous-tribus et deux tribus. Il n’y a de doute que pour la place de neuf de ces genres, mar- qués (?), non encore étudiés au point de vue anatomique. Les genres qui ont dû être déplacés, au nombre de dix-neuf, sont suivis d’un astérisque (*). Les Mémécylées comprenant désormais les Pternandrées, qui ont lanervation caractéristique et les ovules nombreux des Mélastomées, il ne peut plus être question de les séparer des Mélastomées pour en faire une famille distincte, comme l'avaient pensé A. P. de Candolle, Lindley, Endlicher, Gardner, etc. Elles ne sont bien qu’une tribu de la famille des Mélastomacées. Des cinq tribus distinguées autrefois par M. Naudin chez les Mélastomacées et regardées par lui bien à tort comme équivalentes, savoir les Mélastomées, les Astroniées, les Ki- bessiées, les Mémécylées et les Mouririées, il eut suffi de réunir ensemble les deux premières, et ensemble les trois dernières, pour obtenir aussitôt la subdivision binaire qui est conforme aux affinités de structure des genres. C’est, en effet, seulement entre les Astroniées et les Kibessiées que la différence est profonde ; partout ailleurs, elle est très faible. En réunissant, au contraire, la seconde tribu de M. Nau- din à la troisième et la quatrième à la cinquième, Triana et d’aprèslui d’abord Bentham et Hooker, puis tout récem- ment M. Cogniaux, ont précisément méconnu cette différence profonde et ont formé un groupement ternaire où les affini- tés se trouventrompues. Elles le sont encore bien davantage dans la classification également ternaire adoptée par M. Baiïllon, carnonseulement les À s/ronia et les Pternandra y sont toujours rapprochés dans une même lribu, mais encore des genres appartenant cer- tainement aux Mélastomées, et mêmeà trois subdivisions dif- férentes des Mélastomées, comme les Azrinandra qui sont dermodesmes, les Blakea qui sont myélodesmes et les Lo- STRUCTURE ET AFFINITÉS DES MÉMÉCYLÉES. 91 reya qui sont adesmes, y sont pour la première fois réunis aux Memecylon et aux Mouriria dans une autre tribu. Des six subdivisions anatomiques que nous venons de tracer dans la famille des Mélastomacées, il n’y en a que deux, les Dermomyélodesmes el les Myélodesmes, où la tige ait des faisceaux libéroligneux dans la moelle ; dans les quatre autres, elle en est dépourvue. On voit done combien est inexacte la conclusion générale que M. Lignier formule en ces termes : «Dans la tige, le système libéroligneux foliaire principal est toujours compliqué par la présence de fais- ceaux médullaires (/oc. cit., p. 351). EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE IT. Fig. 1. — Portion d'une section transversale de la tige du Memecylon rami- florum, montrant l'endoderme e, épaissi en U, et le périderme péricycli- que avec son liège /, épaissi en U et lignifié, et son phelloderme réduit à une assise ph; p, péricycle avec cristaux prismatiques. Fig. 2. — Moitié d'une coupe transversale d’une tige plus âgée de la même plante. p, périderme scléreux; /, liber et péricycle; b, bois avec trois zones de faisceaux du liber inclus, et une quatrième en voie d'inclusion; c, zone criblée périmédullaire; s, zone scléreuse interne; m, moelle. Fig. 3. — Un ilot de liber inclus, en coupe transversale, fortement grossi, montrant les tubes criblés, le parenchyme et les cristaux prismatiques. Fig. 4. — Début de l'inclusion, L'assise génératrice normale g monte de chaque côté le long du faisceau de liber situé dans le sillon. Au fond du sillon, l'arc générateur, qui a cessé de former du bois, produit encore des éléments libériens. Fig. 5. — État plus avancé. L'assise génératrice g, parvenue en dehors du faisceau libérien, se referme à travers l’assise interne du péricyele; le faisceau est désormais séparé du péricycle. Fig. 6. — Etat définitif. L'assise génératrice ainsi complétée a formé du bois tout autour sur son bord interne, ce qui achève l'inclusion du faisceau libérien et l'amène à l’état définitif fig. 3. Fig. 7. — Portion d'une coupe transversale d’une feuille de Memecylon ra- miflorum, montrant les sclérites filiformes traversant le parenchyme à partir de la zone movenne et rampant sous les deux épidermes, mais en plus grand nombre sur la face supérieure. 92 PH, VAN TIEGREM. Fig. 8. — Sclérites isolées a, b, en forme de sac digité, de la feuille du Me- mecylon phyllanthifolium, où elles occupent la zone moyenne du paren- chyme. Fig. 9. — Sclérites isolées a, b, ramifiées en dichotomie irrégulière, de la feuille du Mouriria princeps, où elles occupent la zone moyenne du paren- chyme. Fig. 10. — Portion d’une section transversale de la feuille du Vouriria Gardneri, montrant une sclérite transversale, ramifiée en T sous les deux épidermes et formant sur son trajet quelques courtes branches. Fig. 11. — Section transversale d’une feuille du Mouriria angustifolia, pas- sant par une crypte stomatifère ovoide à paroi cutinisée; s, stomates. Fig. 12. — Crypte stomatifère aplatie de la feuille du Mouriria eugeniæfolia ; s, Stomates. Fig. 13. — Crypte stomatifère allongée en tube de la feuille du Mouriria Gardneri; s, stomates. Fig. 14. — Crypte stomatifère ovoide à poils simples de la feuille du Mou- riria elliptica; s, stomates. Fig. 15. — Crypte stomatifère largement ouverte, en cuvette, de la feuille du Mouriria Sagotiana; s, stomates. Fig. 16. — Épiderme à membrane fortement épaissie vers l'intérieur, et pourvue de stries concentriques, mais non lignifiée, de la feuille du Mou- riria angustifolia. RECHERCHES SUR LA CROISSANCE TERMINALE DE LA TIGE ET DE LA FEUILLE CHEZ LES GRAMINÉES Par M. H. DOULKIOX. Le mode de croissance terminale de la fige par deux cellules inilialesn’a pas, à ma connaissance, élé signaléaïlleurs que dans mon dernier mémoire (1). J'ai reconnu, en continuant mes recherches, qu'il est plus fréquent que îe ne l'avais cru tout d'abord : je citais notamment les Graminées comme ayant trois initiales, alors qu'en réalité elles n’en ont que deux ; beaucoup d’autres Mo- nocotylédones sont dans le même cas. L'objet de cette Note est de décrire aussi exactement que possible la croissance terminale à l’aide de deux initiales dans les Graminées et d’en citer quelques exemples. Nous examinerons tout d’abord un cas particulier, celui du Phragmites, qui me permettra d'expliquer et de corriger mon erreur. Phragmites communis. — La figure 1 (PI. HIT) représente aussi exactement que possible la section longitudinale du (4) H. Douliot, Recherches sur la croissance terminale de la tige chez les Phanérogames (Ann. des sc. nat., 7° série, XI, 1890). 94 À H. BOULIOT. sommet d'une lige de Phragmites communis, grossie environ deux cents fois. La coupe à élé menée parallèlement au plan de symétrie des feuilles; elle contient l'axe de la tige. Il n’est pas nécessaire, pour qu'une semblable coupe soit bonne, qu'elle soit extrêmement mince; les parois des cellules n'ayant qu'une très faible épaisseur sont transparentes même après leur coloration, mais cependant sont bien visibles quand on les voit par la franche ; or, d’une part les cellules superficieiles n’'empêchent pas de voir les cellules profondes et d'autre part les cloisons de la seclion médiane sont à peu près normales au plan de la section ; pour ces deux raisons, quand on met au point les divers niveaux d’une coupe épaisse, c’est celui qui contient l’axe qu’on voit avec la plus grande nelteté. On peut même dire que, généralement, quand on a mis au point le contour apparent de la tige, on voit le contour apparent du cylindre central avec une précision telle qu’on ne peut pas douler de la présence d’une section médiane. C'est dans ces conditions que je me suis toujours placé, préférant aux seclions très minces les seclions ayant envi- ron un vingtième de millimètre d'épaisseur, mais transpa- rentes. Une seule section bonne n'est pas suffisante pour décider du nombre et de la forme des cellules initiales d’une tige; c’est ce que prouvent les figures 1,2 et 3 de la pl. HIT. La figure 2 est une figure théorique calquée sur la figure 1 à peu de chose près; la cellule terminale sous-épidermi- que (?), qui a sept côtés dans la figure 1 ,n’en a plus que quatre dans la figure 2; cette modification légère dans le dessin donne lieu à une certaine interprétation du mode de crois- sance ; l'aspect de la figure 2 est celui de toutes les coupes de tiges croissant par lrois initiales. | Une modification tout aussi légère dans la forme de la cellule (à) permet de la transformer en un triangle, comme dans la figure 3. Elle possède alors l'aspect de la cellule terminale d'une Cryplogame vasculaire (abstraction faite de l'épiderme) ; la cellule terminale sous-épidermique du PArag- RECHERCHES SUR LA CROISSANCE TERMINALE. 95 miles apparaît alors comme une initiale commune à l'écorce et au cylindre central. Nous nous trouvons, par l'examen de la figure 1, en pré- sence de deux hypothèses résumées par les figures 2 et 3. Pour résoudre le problème, il faut faire un certain nombre de coupes axiles différentes et étudier les variations de forme et de dimensions de la cellule initiale sous-épider- mique. Dans les tiges qui possèdent trois initiales, celle du milieu, qui nous occupe, à une dimension constante dans le sens longitudinal, égalant tout au plus en longueur ses deux voisines de droite et de gauche. Au contraire, dans le cas de deux initiales, la seconde, qui est commune au cylindre central et à l'écorce, après avoir subi un cloisonnement latéral, se trouve beaucoup plus petite que le segment qu'elle vient de fournir; elle s'accroît alors, el, comme les segments latéraux se cloisonnent langentiellement, elle paraît bientôt beaucoup plus grande que les cellules avoisinantes. Il ne reste aucun doute dans l'esprit quand on voit se former dans une cellule pyramidale complèle ou tronquée une mince cloison qui détache un segment parallèle à une face latérale. Faute d’avoir vu nettement cette formation, la cellule terminale sous-épidermique ayant une dimension moyenne dans la coupe que J'ai figurée, j'ai cru que l'écorce avait une initiale propre comme dans la figure 2 (figure théorique fausse). Celte interprétation erronée de la crois- sance du Phragmites doit être remplacée par l’interpréla- tion que la figure 3 résume. Dans celte figure, où Les contours de la figure 1 sont représentés avec une très légère modifi- calion, chaque segment latéral détaché de la cellule 5, alternativement à gauche et à droite, est représenté avec une cloison tangentielle, limite de l'écorce et du cylindre central; on voit que celle limite est {rès voisine du sommet. L'examen d’autres sommets de Phragmites conduit à la même conclusion. Dans la figure 4, par exemple, la cellule terminale cu- 96 H. DOULIOT. néiforme sous-épidermique est assez apparente; elle vient de subir un cloisonnement parallèle à sa face latérale de droite ; ce segment est encore indivis, tandis que le segment précédemment formé du côté gauche à déjà une cloison tan- gentielle, séparant l'écorce du cylindre central. La cellule terminale de l’épiderme de la tige n’a jamais rien de commun avec la cellule sous-jacente, car elle ne prend que des cloisons radiales el jamais de cloison tangentielle au voisinage du sommet. Il n'en est pas de même dans la for- mation des feuilles, où l’épiderme joue un rôle capital. À quelque distance du sommet, on peut donc distin- guer dans une tige de Phragmites communis trois régions, auxquelles nous avons conservé les noms d’épiderme, d’écorce et de cylindre central. Il est intéressant de savoir maintenant quel rapport il y a entre cet épiderme primitif et l’épiderme définitif de la plante ; de même, il y a lieu de savoir ce que deviennent plus tard en se cloisonnant les cellules de cette écorce el quelles différenciations elles subissent ; quant au cylindre central du sommet, il suffit de dire qu'il fournira en se diffé- renciant le cvlindre central de la tige. Suivons donc l’épi- derme progressivement à partir du sommet, nous le verrons bientôt s’accroitre radialement et contribuer avec l'écorce à former une saillie à la surface de la tige, cette saillie est la première ébauche d’une feuille. Dans la feuille des Graminées, il faut distinguer deux par- ties essentielles, la gaine et le limbe. Au moment de l'appa- rition de la dernière feuille, c’est-à-dire au nœud le plus jeune, on voit autour de la tige un bourrelet annulaire ; ce bourrelet est la première apparition de la gaine ; l'écorce et l’épiderme prennent une part égale à sa formation. Mais la croissance ultérieure de ce bourrelet s'opère uniquement par son bord libre, et seules Les cellules épidermiques s’allon- gent verticalement et se cloïsonnent horizontalement, puis tangentiellement, pour former le parenchyme et l’épiderme de la gaine. Le limbe se forme aux dépens des cellules du RECHERCHES SUR LA CROISSANCE TERMINALE. 97 bord libre de la gaine, mais il croit par une seule cellule terminale. Cette cellule terminale se cloisonne fangentiellement, puis perpendiculairement à la surface de l’épiderme; elle con- tribue par se$ segments latéraux à la formation de l’épiderme de la feuille et par ses segments profonds à l'accroissement du parenchyme et des faisceaux qui s'y différencient ullé- rieurement. La cellule corticale qui s’est cloisonnée en même temps que la précédente pour former la saillie foliaire grandit radialement, en même lemps que la feuille se déve- loppe, et fournit la portion des faisceaux foliaires {traversant l'écorce de la tige. Il faut donc considérer dans lépiderme primitif deux sortes de cellules : les unes génératrices de l’épiderme de la tige et les autres génératrices de feuilles, et dans l'écorce deux sortes de cellules : des cellules nodales, qui contribuent à former Le faisceau foliaire dans sa portion corticale et des cellules internodales qui servent à former l'écorce même de la tige. Ces dernières correspondent aux cellules épider- miques siluées entre les feuilles. La croissance intercalaire commence à une faible distance du sommet; mais dans cette faible distance on peut compter un très grand nombre de feuilles ne laissant aucun entre- nœud appréciable à l'œil nu. On sait que dans la majorité des Dicotylédones l'accroissement intercalaire, qui établit une distance entre l’épiderme inférieur d'une feuille et l’épiderme supérieur de la feuille sous-jacente, se manifeste par l’élongation et le cloisonnement des cellules interno- dales. L’inverse a lieu dans les plantes qui nous occupent actuellemement. L’épiderme inférieur d’une feuiile ne cesse jamais d’être accolé à l’épiderme supérieur de la feuille précédente pour deux raisons: la première c’est que les feuilles engainent très étroitement la tige, la seconde c'est que la-eroissance intercalaire porte sur la région d'insertion de la feuille, c’est-à-dire sur les cellules nodales. Aux cellules internodales de l'écorce correspondent les planchers vascu- ANN. SC. NAT. BOT. XL 98 H. DBOULIOT. laires du cylindre central, que l’on considère généralement comme correspondant aux nœuds de la tige, tandis que ces planchers ne sont que le développement des portions inter- nodales de la tige jeune. Les espaces creux, les lacunes de la moelle, que l’on con- sidère généralement comme appartenant aux entre-nœuds, correspondent à la base d'insertion des feuilles, accrue par un développement intercalaire parfois très considérable. L'état adulte se trouve ici en contradiction avec le dévelop- pement des organes. Les nodosités de la tige, c’est-à-dire les portions renflées d’où semblent partir les feuilles, corres- pondent précisément aux cellules internodales du sommet en voie de croissance; et les porlions de tige intercalées entre ces nodosités, creuses intérieurement, sont le déve- loppement des cellules nodales. Ceci n’est visible que sur une tige aérienne, où la croissance intercalaire est rapide, landis que dans les liges souterraines, dépourvues de crois- sance intercalaire, il n’y a pas lieu de distinguer l’état adulte des régions nodales et des régions internodales, la tige n'ayant pas d'entre-nœuds apparents. Le même fait peut s'exprimer en d’autres termes, de la manière suivante : dans les tiges aériennes des Graminées, la feuille, qui, à l'état adulte, en- gaine la lige sur la longueur de plusieurs entrenœuds, est, en outre, concrescente avec la tige sur toute la longueur de l’entre-nœud apparent situé au-dessous de son insertion apparente. Ce fait éclaire une observation faite par M. Ph. van Tieghem en 1869 (1). M. van Tieghem a constaté que dans bon nom- bre de Graminées (Lolium, Bromus, Agrostis, Alopecurus, Phalaris, Oryza, Avena, Zea, Sorghum, Panicum, Coix, Eleu- sine, etc., etc.), il y a une sorte de dissociation du cotylédon, dont les deux parties, écusson et piléole, sont écartées l’une de l’autre de plusieurs centimètres ; cette dissociation est produite par un accroissement intercalaire portant sur une (4) Ph. van Ticghem, Observations anatomiques sur le cotylédon des Grami- nées (Ann. des se. nat., 5° série, XV, 1872). RECHERCHES SUR LA CROISSANCE TERMINALE. 99 région de la lige dont le faisceau du cotylédon s’est déjà dégagé, mais où sont encore inclus les faisceaux stipulaires. Cette région est une région nodale ; c’est le premier nœud de la tige. | Il existe néanmoins une assez grande différence entre le mode d'insertion de la première feuille et celui des feuilles suivantes. En effet, d'après M. van Tieghem, chez d’autres Graminées (Stipa, Triticum, Secale, Hordeum, etc.), la piléole s’insère sur la tigelle immédiatement au-dessus de l’'écusson ; il n'existe pas dans ces plantes d’accroissement intercalaire du premier nœud. Dans le Lolium, le Bromus, le Festuca, le Briza, le Poa, l'A grostis, l'Alopecurus, le Phalaris, VAnthoxanthum, TO- ryza, le Lagurus, V Holcus, ete. ,un fort accroissement interea- laire sépare l’écusson de la piléole, mais en laissant intactes les connexions anatomiques de la partie supérieure avec la partie inférieure; tandis que dans le Zea, le Coir, le Pani- cum, le Sorghum et l'Eleusine, ces connexions anatomiques s’effacent et la croissance intercalaire est encore plus consi- dérable. Tels sont les phénomènes qu’on observe au premier nœud ; mais, pour les feuilles suivantes, la zone de croissance inter- calaire est au nœud même et n'intéresse que la base d’in- sertion de la feuille. A lopecurus nigricans. — La cellule terminale sous-épider- mique, génératrice de l'écorce et du cylindre central, n’a pas toujours une section triangulaire; après avoir subi un accroissement longitudinal, elle se cloisonne perpendiculai- rement à l’axe de la tige et détache d'elle un segment infé- rieur qui contribue pour une faible part à l'accroissement du cylindre central; dans ce cas, l'aspect de la cellule subter- minale est celui d’un tronc de pyramide, dont l'angle très aigu la fait ressembler à un prisme; cet aspect m'a été fourni par l’Alopecurus nigricans, et, comme la cloison . horizontale qui vient de se former est très nette, on pourrait croire le cylindre central parfaitement distinct de l'écorce 100 El. DOULKOE. jusqu'à son sommel. Le développement de la feuille de l’A- lopecurus est identique à celui du Phragmites, Vécorce et l’'épiderme prennent part à la formation de la portion de feuille concrescente avec la tige, et la feuille croît par une cellule terminale unique. Triticum satioum. — Le Triticum satioum (fig. 7, PI. HD) possède sous l’épiderme une cellule génératrice de lécorce et du cylindre central identique à celle du Phragmites et se cloisonnant de même. À gauche de la figure, on peut voir la section longitudinale d’une feuille. Cette section, parallèle à l'axe de la tige, ne passant pas exactement par le plan de symélrie de la feuille, ne contient pas la cellule génératrice terminale, mais seulement un segment de cette cellule dans lequel apparaissent des cloisons normales et tangentielles. Sorghum saccharatum.— Dansle Sorghum (fig.8, PI. Il), la cellule subterminale a le même aspect que celle du Phrag- nules où celle du frificum. Toutefois, on peut voir que la première cloison formée dans le segment latéral n’est pas toujours la limite du cylindre central; il se forme, en effet, deux cloisons tangentielles successives et c’est ici la seconde formée, la plus externe, qui limite l'écorce du cylindre central. … Glyceria spectabilis. — Dans cette plante (fig. 9, PL HD) la cellule subterminale a pour section un polygone à 7 côlés comme celle de la figure 1. Cette cellule va bientôt se cloi- sonner parallèlement à ses faces latérales, pour fournir des segments qui engendreront l'écorce et le cylindre central. La figure 9 représente un bourgeon axillaire : son axe forme à peu près un angle de 45° avec la portion supérieure de l'axe de la tige, On peut remarquer également que ce bour- geon a même forme extérieure que le bourge on de Phrag- miles (lig. 4); son méristème est en dôme surbaissé, tandis que les mérislèmes terminaux ayant une élongation plus rapide sont plus pointus dans leur ensemble. Ce bourgeon de Glyceria possède déjà deux feuilles, qui croissent chacune par une cellule terminale. RECHERCHES SUR LA CROISSANCE TERMINALE. 101 Oryza sativa. — La figure 10 représente un méristème d'Oryza dont la cellule subterminale vient de subir un cloi- sonnement tangenliel, détachant vers le bas une cellule qui appartient désormais au cylindre central; ce cloisonnement tangentiel succède à la formation des segments latéraux, dans lesquels apparaît une cloison tangentielle marquant sur les flancs la limite entre le cylindre central et l'écorce. A gau- che de la figure, à l’aisselle de la première feuille, on peut voir la première ébauche d’un bourgeon latéral, dont l’épi- derme a une origine épidermique, tandis que son écorce et son Cylindre central tirent leur origine commune d’une cel- lule corticale de la tige. Avena sativa. — L'Avena sativa a un développement ana- logue : même forme dans son méristème lerminal que l'A /o- pecurus où le Phragmiles, même développement pour ses feuilles (fig. 11) que ces deux plantes. Le Panicum plicatum m'a fourni les mêmes résultats ; le Zea Mays, le Baldingera arundinacea également. Au résumé, la lige des Graminées croît par deux cellules, dont une terminale engendre l’épiderme et les feuilles, l’au- tre, sublerminale, engendre l'écorce et le cylindre central. De plus, les entre-nœuds apparents de la tige adulte corres- pondent aux nœuds vrais de la tige Jeune, encore dépourvue de croissance intercalaire. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE IT. Fig. 1. — Phragmites communis. — Sommet de la tige en voie de croissance. ep, épiderme; à, initiale commune à l'écorce et au cylindre central. Fig. 2. — Figure théorique. — Cette figure, faite d’après le sommet de la tige du Phragmites communis, est destinée à montrer comment on peut être conduit à voir trois initiales distinctes dans cette plante si l'on ne conserve 102 H. DOULIOT. pas à la cellule (i) sa véritable forme. La cellule (i) semble être, ici, uni- quement l’initiale de l'écorce. Fig. 3. —- Figure théorique. — Cette figure, faite d’après le sommet de la tige du Phrégmites communis, est destinée à mettre en évidence la cellule ini- tiale commune à l'écorce et au cylindre central et les segments latéraux qui s’en détachent. La première cloison tangentielle formée dans chaque segment est la limite interne de l'écorce. Fig. 4. — Phragmites communis. — Sommet d’un bourgeon axillaire. La sec- tion de la cellule terminale sous-épidermique a nettement la forme d'un coin ; le segment qu’elle vient de détacher à droite est encore indivis; celui de gauche a une cloison tangentielle, limite interne de l'écorce. Fig. 5. — Phragmites communis. — Formation des feuilles. Cette figure est le dessin du flanc droit d’une coupe axile de Phragmites dont la figure 1 représente le sommet. Fig. 6. — Phragmites communis. — Coupe parallèle au plan médian des feuilles, ne passant pas par la nervure médiane, pour montrer que l’épi- derme des feuilles et leur parenchyme ont une origine commune. Ce fait était moins visible dans la figure 5. Fig. 7. — Triticum sativum. — Coupe médiane de la tige et de la dernière feuille. À gauche, la feuille dérivant tout entière de l’épiderme primitif et croissant par une seule cellule; à droite, le sommet de la tige avec son . épiderme et sa cellule pyramidale sous-épidermique. Fig. 8. — Sorghum saccharatum. — Méristème terminal avec deux initiales. Fig. 9. — Glyceria spectabilis. — Méristème terminal d’un bourgeon crois- sant par deux cellules : l'une, terminale, empruntée à l’épiderme primitif; l’autre, subterminale, empruntée à l'écorce primitive. Fig. 10. — Oryza sativa. — Méristème terminal de la tige. L'initiale commune à l'écorce et au cylindre central vient de prendre une cloison tangen- tielle. | Fig. 11. — Avena sativa. — Développement des feuilles. SUR LES FEUILLN DE OUBLOURS MONOUOTYEHDOYE AQUATIQUES Par M. CAMILLE SAUVAGEAU. Avant d'exposer les résultats de l'étude que j'ai entreprise, je dois remercier M. van Tieghem et lui exprimer ma re- connaissance pour la bienveillante hospitalité et les facilités de travail qu’il m'a accordées dans son laboratoire. Lorsque j'ai commencé mes observations, j'avais l'intention d'étudier au point de vue anatomique, en une sorte de mono- graphie, les Monocotylédones aquatiques privées d’albumen réunies par Ad. Brongniart dans la classe des Fluviales (1). Mais je me limite dans ce mémoire à l'étude d’un seul or- gane, la feuille, d’un seul groupe, les Potamogétonacées d’Ascherson. Je m'occuperai prochainement des autres or- ganes végétatifs, sur lesquels j'ai déjà recueilli un certain nombre d'observations. Plus {ard viendra la description ana- tomique des autres groupes. L'étude de ces plantes ne doit pas être envisagée seule- ment au point de vue de l'extension de nos connaissances en Analomie générale; on peut lui demander aussi de contri- buer à nous éclairer sur certaines questions dont l'intérêt n'est pas moins grand. Telles sont, par exemple : (1) Ad. Brongniart, dans son Énumération des plantes cultivées au Muséum d'Histoire naturelle de Paris suivant l'ordre établi dans l'école de Botanique en 1843, a divisé les Monocotylédones apérispermées en deux classes, les Or- chioidées et les Fluviales. Celles-ci comprenaient les familles suivantes : 62 Hydrocharidées; 63 Butomées; 64 Alismacées ; 65 Naïadées et 66 Lem- nacées. 10% | CAMILLE SAUVAGEAU. 1° La mesure dans laquelle les caractères anatomiques peuvent aider à la classification ; 2° La possibilité de faire, sur de simples fragments, une déterminalion spécifique, souvent fort difficile, ainsi qu’en témoigne une synonymie compliquée: résultat qui permettrait de compléter nos renseignements sur leur distribution géo- graphique, particulièrement intéressante pour les plantes marines ; 3° Le degré d’influence exercé par le milieu sur la structure. Avant d'entrer dans le détail de l’étude anatomique, je donnerai rapidement l’élal actuel de ces différentes questions et l'indication des résultats auxquels J'ai été conduit. CHAPITRE PREMIER PRÉLIMINAIRES $ 4. — Classification. Ventenat (4) a le premier nommé Æ/uviales « parce qu’elles vivent dans les lieux aquatiques » des « Monocotylédones à élamines hypogynes » et à « périsperme nul ». Cette famille comprenait les quatre genres Pofamogeton Tourn., Ruppia L., Zannichellia Mich. et Zostera L. ; c'élaient les Monocotv- lédones les plus inférieures. { les avait distraits du dernier ordre des Acotylédones de A.-L. de Jussieu, les Naïades (2), ordre qui comprenait en outre des genres variés, vivant dans l'eau, tels que les Chara, Lemna, Hippuris, Ceratophyllum, Callitriche, Najas, etc. Le groupe de Ventenat, caractérisé principalement par l'absence d'albumen, est resté indépendant. ITs’est accru d’un (1) E.-P. Ventenat, Tableau du règne végétal selon la méthode de Jussieu, t. IT, an VII, p. 80. (2) A.-L. de Jussieu, Genera Plantarum secundum ordines naturales disposita, 1789, Ordo VI, Naiades, p. 18. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES, 105 certain nombre de genres, par suite des progrès réalisés dans la connaissance des plantes, mais les modifications qu'il a su- bies de la part des auteurs ont surtout porté sur la division des Fluviales en groupes de moindre importance. Je citerai seu- lement quelques-unes des classifications les plus connues. Dans son Genera plantarum, Endlicher (1) conserve le nom de Fluviales pour sa classe XX, placée entre les classes XIX Scitamineæ et XXI Spadicifloreæ. Classis XX, — FZUVIALES, Ordo LXXI. — Najadcæ.. 1655. Caulinia Willd. 1656. Najas Willd. 1657. Cymodocea Kôn. 1658. Thalassia Soland. 1659. Zostera Linn. 1659/1. Phyllospadix Hook. 1660. Posidonia Kün. 1661. Ruppia Linn. 1662, Zannichellia Michel. 1662j1. Halodule End. 1663. Althenia Petit. 4664. Potamogeton Linn. 1664/1, Cycnogeton Endl. 1664/2. Ouvirandra Thouar. Il place à la suite les Najadeæ fossiles, puis les Lemnaceæ. Peu de temps après, Kunth (2) a placé les fluviales entre les Pandaneæ et les Juncaginaceæ el les a distribuées en des groupes moins importants : FLUVIALES. I. Najadec. Najas Linn., Brown., Endl. ll, Zosterecæ. Zostera Linn. ex parte, Brown., Endl. Cymodocea Kænig., Endl. (1) S. Endlicher, Genera plantarum secundum ordines naturales disposila, 1836-1840, p. 229. J'ai intercalé ici les genres décrits par Endlicher dans son Supplementum 1, p. 1368. (2) C.-S. Kunth, Enumeralio plantarum omnium hucusque cognitarum secun- dum familias natuwrales disposita, t. TE, 1841, p. 111 et suiv. 106 CAMILLE SAUVAGEAU. IL. Posidoniecæ. Thalassia Soland , Kæœnig., Endl. Posidonia Kœnig., Endl. IV. Ruppicæ. Ruppia Linn., Juss., Endl. V. Zannichellicæ. Zannichellia Michel., Linn., Juss., End. Althenia F. Petit., Reichenb., Endl. VI. Potamogetonec. Potamogeton Linn., Juss., Brown., Endl. La classification suivie par Grenier et Godron (1), bien qu'elle comprenne uniquement des genres français, est inté- ressante à reproduire ici; c’esten effet celle d’Adr. de Jussieu, que J. Gay avait transmise aux auteurs de la Flore de France. Les sous-groupes de Kunth moins nombreux, y sont élevés au rang de famille; par suite, lindividualité du groupe des Fluviales à disparu. Famille CXXXIIT. — Juncaginées. Triglochin L. Scheuchzeria L. Famille CXXXIV. — Potamées. Potumogetlon L. ZLanichellia L. Althenia Petit, Famille CXXXV. — Najadées. Caulinia Willd. Najas Willd. Famille CXXX VI. — Zosteracées. Posidonia Kænig. Ruppia L. Zostera L. n nee Cœæn1o Cymodocea Kœnig. Enfin Bentham et Hooker (2), après avoir séparé le Tha- lassia qu'Endlicher et Kunth metlaient dans les Ælumales et qui estune Hydrocharidée, leur ont ajouté les Juncaginées. (1) Grenier et Godron, Flore de France, t. HI, 1856, p. 309 à 328. (2) Bentham et Hooker, Genera plantarum, t. HT, 1883, p. 1009. FEUILLES DES MONOCOTYIÉDONES AQUATIQUES. 107 Leur ordre des Naiadaceæ est compris entre les A /ismaceæ et les £riocauleæ. Ordo CXCOV. — warapACEÆ. Series À. — Tribus I. — «Juncaginecæ. Triglochin L. Scheuchzeria L. Tetroncium Willd. 4. Lilaea Humb. et Bonpl. CO 109 = Tribus IL — Aponogetonecæ. 5. Aponogeton Thumb. Tribus II, — Potamec. 6. Potamogeton L. 7. Ruppia L. Tribus IV. — Posidonieæ. 8. Posidonia Kün. 9. Amphibolis Agardh. Tribus V. — Zannichelliecæ. 10, Zannichellia L. 11. Althenia Petit. 12. Lepilæna J. Drummond. SeriesiB. — Tribus VI. — Zosterecæ. 13. Zostera L. 14. Phyllospartix Hook. Tribus VIL — Naiadec. 15. Naias L. Tribus VIII. — Cymodoceæ. 16. Cymodocea Kün. Dans ces vingt dernières années, M. Ascherson a beaucoup éludié les Phanérogames aquatiques et particulièrement celles qui vivent dans la mer. Il a donné récemment, dans les Familles naturelles de MM. Engler et Prantl (1), la des- cription de la famille des Pofamogetonaceæ qu'il à créée. Dans le même recueil, les Najadaceæ, les Aponogetonaceæ, les Juncaginaceæ, qui leur étaient réunies par Bentham et Hooker, sont considérées comme autant de familles indé- pendantes et d'importance systématique égale. (4) Engler et Prantl, Die natürlichen Pflanzenfamilien. P. Ascherson, Pota- mogetonaceæ, 26° livraison, p. 194 à 21%. 108 CAMILLE SAUVAGEAU. Je transeris ici, d'après M. Ascherson, la division de la famille des Potamogelonacezæ (1). A. Inflorescence en épi. Fleurs sans périanthe. «. Épi aplati, enfermé lors de la floraison dans la gaine de la dernière feuille. Style court. Stig- mates 2, longs, rubanés (Plantes marines sub- mergées; pollen filamenteux) (Zostera, Phyl- , lospadix) DL ME AD PR SE EE Re PO An RS I, ZOSTERTEÆ. b. Épi arrondi, non renfermé lors de la floraison dans la gaine de la dernière feuille. #, Épi composé. Épillets à l'aisselle de feuilles s'élevant au-dessus d'eux. Stigmate sessile à prolongements sétacés (Plantes marines submergées; pollen filamenteux) (Posi- VUONIA) Res ne lac ons me Cette etes IF. PosiponIEx. B, Epi simple, complètement libre lors de la floraison. Fleurs hermaphrodites. Stigmate sessile ou presque sessile, court, à petites papilles (Plantes d’eau douce ou saumâtre; épi émergeant au-dessus de l’eau; pollen en boule ou courbé) (Potamogeton, Ruppia). Il. POTAMOGETONEX. B. Fleurs unisexuées, isolées ou en cyme. a. Périanthe nul. Style beaucoup plus court que les 1-2 stigmates allongés rubanés (Plantes marines submergées: pollen filamenteux) (Cymodocea, Halodule)............. tente IV. CYmMonoCEx. b. Périanthe présent tout au moins sur les fleurs femelles. Style Le plus souvent plusieurs fois plus long que le stigmate en bouclier, en en- fonnoir ou cylindrique (Plantes submergées d’eau douce ou saumâtre, pollen en boule) (Zanmchelhia ATEN IA) ENTER ETES RE V. ZANNICHELLIEX. 1 J'ai suivi dans ce {ravail la classification de M. Ascherson el j'ai étudié la feuille des plantes comprises dans ses Pota- mogetonaceæ. Si l'on sépare des Fluviales d’'Endlicher et de Kunth : 1°les Najas dont on a fait depuis une famille spé- ciale el 2° les genres qui, mieux connus (T'halassia, etc.), en ont été Justement séparés, on voit que la famille des Pota- (1) Eichler (Blüthendiagramune, 1° partie, Leipzig, 1875, p. 80) admet la famille des Najadaceæ, avec les deux sous-familles : I, Najadeæ, qui ren- ferme le seul genre Najus et Il, Potamogetoneæ, dans laquelle il cite les gen- res : Cymodocea, Halodule, Zostera, Zannichellia, Althenia, Ruppia, Potamoge- ton et Posidonia. Cette sous-famille des Potamogeloneæ d'Eichler corres- pond donc bien aux Potamogetonaceæ de M. Ascherson, FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 109 mogétonacées, telle qu’elle est comprise par M. Ascherson, correspond bien aux Fluviales de ces auteurs. En somme, les plantes qui sont réunies iei dans une même famille ont deux caractères communs principaux : l’un, la vie dans l’eau, estun caractère d'adaptation; l’autre, l'absence d'albumen, est considéré dans les classificalions comme ayant une grande importance. Toutes ont aussi les carpelles libres et l'embryon macropode. Mais, cependant, il faut avouer que d’autres caractères non moins importants les séparent. Or, on peutsupposer que les Phanérogames actuel- lement aquatiques se sont adaptées peu à peu à ce mode d'existence, sans dériver toutes d’une souche commune. Dans ce cas, leurs affinités véritables devraient être cher- chées, non pas entre elles, mais avec des plantes terrestres. Déjà M. de Lanessan (1), après avoir fait remarquer que la présence ou l'absence de l’albumen n'est plus regardée au- jourd'hui comme un caractère aussi exclusif qu'autrefois, et que l’on observe à ce sujet, dans certaines familles, les plus grandes variations, a conclu de l'étude de l’inflorescence et des organes reproducteurs, que les Zostera sont les repré- sentants aquatiques, marins, de la famille des Graminées. D'après M. Engler (2) qui, à vrai dire, parait n’en avoir fail qu'une étude peu approfondie, l’inflorescence du Zostera marina le rapprocherait au contraire des Aroïdées, Et enfin pour M. Delpino (3), le Posidonia représenterait une Grami- née marine (/oc. cit., p. 170) et le Zostera une Aroïdée (loc. Hp L TEL). Lorsque l'anatomie des différents organes de ces plantes sera faite, et que l’on connaîtra avec certitude les caractères histologiques des familles des Monocotylées les plus voisines, (1)3.-L. de Lanessan, Organogénie de la fleur el du fruit des ZosTERA MARINA L. et Z. NANA Roth. — Rapports des Zosrera avec les (rraminées (Assoc. franc. pour l’avanc. d. sc., session de Nantes, 1875, p. 690 à 707,2 pl.). (2) A. Engler, Notiz über die Befruchtung von Zoslera marina und dus Wachsthum derselben (Bot. Zeit., 1879, p. 654 el 655). (3) Federico Delpino, Ulleriori osservaziont e consideruziont sulla dicogamia nel regno vegetale, 2% partie (Attè della sociela italiana di Scienze naturali, vol. XII, Milan, 1870, p. 167 à 205). 110 CAMILLE SAUVAGEAU. peut-être pourra-t-on présenter leur groupement d’une façon différente. Mais une étude de la feuille est un sujet trop res- treint pour que J'aie essayé, dans ce travail, d'appliquer la connaissance de sa structure au groupement des genres en familles. Aussi ai-je seulement voulu indiquer, dans le para- graphe précédent, la manière dont les botanistes descripteurs avaient compris le groupement des genres, el aussi les services que l'anatomie pourra rendre à la classification des plantes aquatiques quand elle sera connue d’une façon plus complète. $ 2. — Détermination spécifique. On sait la difficullé que les botanistes éprouvent dans la détermination des espèces des plantes aquatiques; telle es- pèce, reconnue bonne par quelques-uns, n’est plus justifiée pour d’autres. Il en résulte une synonymie embrouillée qui en complique singulièrement l'étude. Cette incertitude pro- vient soit des variations de forme que subissent certaines de ces plantes suivant l’état de l’eau dans laquelle elles végètent et c’est le cas de certains Potamogeton, soit de leur absence dans nos régions et de nos connaissances imparfaites à leur égard et c’est le cas de beaucoup de plantes marines. En effet, sur une trentaine de Phanérogames vivant nor- malement submergées dans l’eau de la mer (1), et adaptées à l'existence dans ce milieu, quatre seulement, Zostera ma- rina L., Zoslera nana Roth., Cymodocea æquorea Kün., et Posidonia Caulini Kôn., se rencontrent sur nos côtes, les autres sont répandues surtout dans les régions plus chaudes. Les caractères tirés de la fleur et du fruit sont employés pour la détermination des genres et des espèces. Mais si quelques espèces, comme les Zostera de nos côtes, fleuris- (1) M. Ascherson en compte 27 dont 9 Hydrocharidées, dans son mémoire intitulé : Die geographische Verbreitung der Seegräser (Anleitung zu Wissensch. Beobacht. auf Reisen von D' Neumayer, Berlin, 1888, p.191 à 212). Ce travail est une 2 édition, mise au courant, d’un premier mémoire portant le même titre et paru en 1875 dans le même recueil. C’est naturellement à cette 2€ édition que se rapporteront les citations que j'aurai l’occasion de faire dans la suite. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 111 sent et fruclifient abondamment, d’autres, comme le Posi- donia Caulini, ne fleurissent pas tous les ans, et il en est plu- sieurs dont les organes de reproduction sont encore très mal connus. Aussi, bien que certaines espèces soient abondantes en Australie, lit-on par exemple dans le Æ/ora australien- sis (1): « Des quatre espèces australiennes de Cymodoceu, une seule est particulière à l'Australie ; les autres, si leur nalure à élé reconnue exactement, sont répandues dans tout l’ancien monde, mais aucun des spécimens australiens que j'ai vus ne montre de frucifications, et, chez quelques- unes des espèces décrites, les fleurs femelles en tout cas sont entièrement inconnues ; 1l existe donc beaucoup d’in- certitude dans les caractères génériques et spécifiques indi- qués, comme aussi dans l’identificalion des espèces. » On retrouve la même incertilude chez les autres auteurs, et les échantillons récoltés par les botanistes ou les voya- geurs, et conservés dans les herbiers, sont presque toujours uniquement des fragments de tige pourvus de feuilles, dont la détermination est d'autant plus difficile que des descrip- lions faites sur des exemplaires incomplets ont rendu la sy- nonymie fort compliquée. C’est ainsi que le Cymodocea an- tarctica (Labill.) Endl., pour lequel Agard® avait créé en 1822 le genre À mplhibolis, et qu’il considérait avec réserves comme une Algue, a successivement reçu les noms suivants (2) : Ruppia antarctica Labill. Caulinia antarctica R. Br. Amphibolis bicornis Agardh. Amphibolis zosteræfoliu Agardh. Kernera antarctica Schult. Posidonia antarctica Spr. Cymodocea antaretica Endi. Phucagrostis antarctica Rupr. Thalassia antarctica F. Müll. Amphibolis antarctica Sonder et Aschs. (1) G. Bentham assisté de F. von Mueller, Flora australiensis, vol. VIT, Londres, 1878, p. 177. (2) P. Ascherson, Vorarbeiten zu einer Uebersich{ der phanerogamen Meer- gewächse, p. 164 (Linnæa, nouvelle série, t. 1, Berlin, 1867-68, p. 152 à 208). 142 CAMILLE SAUVAGEAU. Une plante voisine de la précédente, le Cymodocea ciliata (Fürsk.) Ehrenb., est presque aussi riche en synonymes, el on l’a appelée (1) : Lostera ciliata Forsk Thalassia ciliata Kôün. Caulinia serrulata R. Br. Posidonia serrulata Spr. Kernera serrulata Schult. Phucagrostis ciliata Ehrb. et Hempr. Thalassia indica W. et Arn. On le voit, les plantes marines sont ballottées non seule- ment d’une espèce dans une autre, mais d’un genre dans un autre. Si nos espèces indigènes ont subi moins de change- ments génériques, elles ont par contre reçu des noms spé- cifiques assez nombreux pour déceler une grande confusion de la part des auteurs. Ainsi le Zostera nana Roth., si fré- quent sur nos côtes, a élé successivement appelé (2) : Phucagrostis minor Theophrasti Cavol. Zostera nana Roth. Z. emarginala Ehrb. et Hempr. . uninervis Reichb. . Noltei Hornem. . minor Nolte. . pumila Le Gall. . angustifolia Loser. NRNRN NN C’est à M. Ascherson que l’on doit de pouvoir se retrouver dans ce dédale inextricable de synonymes. Par lidentifica- Lion ou la séparation des espèces et des genres, par les dia- gnoses et la discussion des espèces, il a beaucoup facilité la détermination des Phanérogames marines. Ce savant a pu arriver à ce résultat non seulement par un travail et une érudition considérables, mais aussi grâce aux nombreux matériaux qu'il a eus à sa disposilion, el qui lui ont permis de faire des études et des comparaisons dans des conditions exceptionnelles (3). Malgré lout, si la synonymie est sim- (1) P. Ascherson, Vorarbeiten, etc., loc. cit., p. 162. [l (2) Idem., p. 167. (3) M. Ascherson a fait sur ce sujet un grand nombre de communications PE EE Se TT FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 113 plifiée, le grand nombre des synonymes reste le témoin de la difficullé que les botanistes éprouvent à déterminer les Pha- nérogames marines sur des échantillons isolés. Aussi, comme j'ai déjà observé des différences remarquables et caractéris- tiques dans la racine des plantes des trois genres qui pous- sent sur nos côtes (1), j'ai pensé qu'il serait intéressant de continuer cette étude comparative par l'anatomie de la feuille. Les feuilles des plantes marines sont en effet les parties que l'on rencontre le plus fréquemment dans les herbiers, car la récolte sur place d'exemplaires complets est souvent impossible, et les voyageurs rapportent de préférence de simples feuilles qu'ils ont recueillies flottantes à la surface de l’eau ou rejetées sur le rivage. Si l'anatomie de la feuille pouvait donner des caractères spécifiques, si une seule feuille pouvait permettre la détermination précise de l'espèce à laquelle elle appartient, nous pourrions par le fait même étendre nos connaissances sur la distribution géographique de ces plantes. On verra dans ce travail que l'anatomie, par les différences qu’elle indique, pourra rendre de réels ser- vices. Toutefois, pour la plupart des espèces de Potamoge- ton, elle ne fournira que des caractères de faible valeur ou même nuls. La répartition géographique des Phanérogames marines présente en effet des particularités remarquables, dont M. Ascherson a fait ressortir tout l'intérêt. Ainsi, tandis que certaines espèces, comme le Cymodocea isoetifolia, Y Halo- dule uninervis, etc..., se retrouvent sur les côtes des îles si- tuées entre l'Afrique orientale et la Nouvelle-Calédonie, c'est-à-dire sur un espace de plus de 120° de longitude, d’au- tres espèces ont un domaine d'extension beaucoup plus res- éparses principalement dans Linnæu, dans les Verhandlungen des botanischen Vereins der Provinz Brandenburg, et dansles Sitzungs-Berichte der Gesellschaft naturforschender Freunde zu Berlin. (1) G. Sauvageau, Contribution à l'étude du système mécanique dans la racine des plantes aquatiques. Les Zostera, Cymodocea et Posidonia (Journ. de bot, 16 mai 1889). ANN. SC. NAT. BOT. XHI, 8 114 CAMHLLE SAUVAGEAU. treint, par exemple nos espèces méditerranéennes : Cymo- docea æquorea, Posidonia Caulini, les espèces australiennes : C. antarctica, Zostera Capricorni, Z. tasmanica, Posidonia australis, ete... Il est remarquable aussi que souvent les espèces qui se ressemblent le plus entre elles ne sont pas celles que l’on trouve réunies dans une même région; au contraire, lorsqu'un genre renferme deux espèces, celles-ci possèdent chacune leur domaine d'extension {sauf les Phyl- lospadix). Ce dernier fait pourrait être expliqué par des per- turbalions géologiques ayant entraîné des changements dans l'étendue, la continuité, les conditions climatériques, etc. des espaces occupés autrefois par ces plantes. L’élude ana- tomique de la feuille, en facilitant les déterminations, prêtera son aide à la Géographie botanique; des échantillons con- servés dans les herbiers et provenant de régions lointaines, mais en (rop mauvais élat de conservation pour être identi- fiés par les caractères extérieurs, pourront recevoir un nom, el nous fixeront plus complètement sur la répartition des espèces. Un travail sur ce sujet à déjà été entrepris en 1870 par M. Magnus sur la demande de M. Ascherson, pour l'aider à l'identification et à la spécification de certaines plantes ma- rines sur lesquelles il avait des doutes (1). Les espèces qu'il a étudiées sont : Thalassia Hemprichu, T.testudinum, Enhalus acoroides, Cymodocea nodosa (C. æquorea), C. rotundata, C. serrulata, C. isoetifolia, C. ciliata, €. antarctica, Zostera marina, Z. nana et Posidonia oceanica {P. Caulini). Pour quelques-unes de ces espèces, l’auteur est arrivé à recon- naître des différences fort intéressantes, mais ses résultats ne peuvent êlre qu'incomplets, car c’est seulement en cinq pages in-8 qu'il a éludié l'anatomie de la tige et de la feuille des douze espèces précédentes. Tout en reconnaissant les (1) P. Ascherson, Ueber die Phanerogamen des rothen Meeres, besonders Schi- zotheca Hemprichii Ehr., Phucagrostis rotundata Ehrb. und Phucagrostis ciliata (Sitz. Ber. der Gesellsch. naturf. Freunde zu Berlin im Jahre 1870, p. 83- 85). — P. Magnus, Ueber die Anuatornie der Meeresphanerogamen (Idem, p. 85-90). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 115 services que celte élude fui a rendus pour l'identification de quelques espèces, M. Ascherson en a cependant con- clu (1) que les caractères anatomiques de la tige et de la feuille sont inattendus, et ne peuvent être employés comme base d’une classification des Phanérogames marines. En effet, l'analomie des Cymodocea (Potamées) de la section PAyca- grostis ressemblerait beaucoup plus à celle des Thalassia (Hydrocharitacées) qu'à celle des autres sections A rphibolis et Phycoschænus du même genre Cymodocea. Une étude attentive et détaillée m'a au contraire montré que si les Tha- lassia avaient certains points communs avec les Cymodoceu, ceux-ci formaient cependant, au point de vue anatomique, un tout plus homogène que ne le croyait M. Ascherson (2). D'ailleurs, comme Je l'ai dit précédemment, je ne m'ap- pliquerai pas à rechercher ici dans quelle mesure l’anatomie pourrait « servir de base » ou seulement aider à la classifi- cation. Je ne me permettrai des comparaisons sur ce sujet qu'après une étude détaillée et approfondie des diffé- rents organes végétatifs; des conclusions aussi générales, fondées sur une étude aussi limitée que celle de la feuille, me paraîtraient prémalurées. Je me réserve donc de revenir sur ce sujet dans un travail ultérieur. Pour le moment, je me borne à chercher, dans la structure de la feuille, les moyens de mettre en relief les différences qui séparent les espèces plutôt que les caractères communs qui les rappro- chent. Le] $ 3. — Influence du milieu. Depuis quelques années, on à attaché beaucoup d'impor- tance à l'étude des rapports entre les végétaux ef le milieu ambiant, et l’on a souvent été conduit à accorder au milieu une influence prépondérante sur l'existence ou la disparition (4) P. Ascherson, in Extrait des Actes du cong. intern. des botanistes, ete. tenu à Amsterdam en 1877, p. 139-143. (2) C. Sauvageau, Observations sur la structure des feuilles des plantes aquu- tiques, Zostera, Cymodocea ef Posidonia (Journ. de bot., 1890) et Sur la feuille des Hydrocharidées marines (Idem, 1890). 116 CAMILLE SAUVAGEAU. de certains tissus. Je passerai rapidement en revue les prin- cipaux lravaux fails sur ce sujet, en me plaçant unique- ment au point de vue qui nous occupe ici. En 1882, M. Schwendener a éludié, dans un important mémoire, les gaines protectrices des végétaux et leurs ren- forcements (1). Bien qu’il s’y soit spécialement occupé des racines et des tiges, ses conclusions peuvent cependant, par leur généralité, s'appliquer aussi aux feuilles. Les gaines sont des assises subérifiées entourant le cylindre central (endoderme) ou l'organe tout entier. Leurs cellules peuvent s’épaissir en fibres au point d'obturer presque complètement leur lumière, et les cellules des assises voisines peuvent les renforcer en subissant la même modification. D’après l’au- teur, ces gaines ont leur raison d’être dans leurs fonctions; il les étudie successivement comme organes imperméables, organes de résistance à la pression, organes de protection, organes de soutien, et il consacre un chapitre parliculier à l'influence que le elimat et la station exercent sur l'intensité de leur développement. Cette influence n’est pas douteuse dans certains cas. Les Fougères et les Monocotylédones de nos pays, comme les Asplenium Ruta-muraria, Polypodium vulgare, Ceterach officinarum, À grostis vulgaris, Poa com- pressa, Slipa pennata, elc., qui vivent sur les murs, dans les fentes des rochers, etc., où elles sont exposées à de longues périodes de sécheresse, sont pourvues de gaines à éléments très épaissis. Au contraire, les plantes des lieux humides, comme les Asplenium Filix-fœæmina, Osmunda regalis, Alis- macées, Bulomées, etc., possèdent des gaines très délicates. La différence est encore plus frappante entre les Aroïdées épiphytes grimpantes (Monstera, Tornelia, ele.), qui ont à supporter une chaleur plus forte et une longue période de sécheresse, et les Aroïdées des marais et des rivages (Acorus, Caladium, elc.), lesquelles ne possèdent aucun épaississement£. (1) Schwendener, Die Schutzscheiden und ihre Verstärkungen (Physikal. Ab- hand. der Koniglich. Akad. der Wissench. zu Berlin, 1882, 75 pages, 5 pl.). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 117 L'auteur en conclut, naturellement, que les gaines à cellules épaissies et devenues imperméables sont des orga- nes de protection contre la sécheresse. Mais si une opposition aussi frappante s'observe entre des plantes vivant dans des conditions extrêmes d'existence, elle est loin d’être toujours aussi nettement marquée, et, comme le dit M. Schwendener, certains faits, qui peuvent êlre considérés comme des aber- ralions, ne pourront être expliqués d'une manière salisfai- sante que lorsque l’on connaîtra mieux les conditions biolo- giques dans lesquelles végètent les plantes qui les présentent. Des plantes habitant les lieux humides, mais exposées normalement ou accidentellement et pendant peu de temps à la sécheresse, pourront posséder un appareil de protection contre la perte d’eau et les brusques variations de tempéra- ture, comparable à celui des espèces adaptées à une séche- resse constante. Quoi qu'il en soit, si les plantes des endroits chauds et secs sont loujours pourvues de gaines protectrices à cellules épaissies et lignifiées, les plantes aquatiques se laissent grouper en deux catégories. Les unes, dont les gaines ne sont nullement épaissies, rentrent par conséquent dans le cadre tracé par M. Schwendener, les autres, contrairement à ce que pourrait faire prévoir leur station bien connue, puisqu'on les rencontre toujours dans des endroits humides ou marécageux, possèdent des gaines fort bien développées, et leur structure est absolument inexplicable. Aïnsi les racines de Plechnum spicant, Poa pralensis, Alopecurus fulous, ris spuria, Narthecium ossifraqum, etc., sont mieux protégées conlre la sécheresse, dont elles n’ont nullement à souffrir, que certaines espèces des mêmes genres habitant des rochers arides. La comparaison entre les espèces an- nuelles el les espèces vivaces ne donne aucun éclaircissement sur ce sujel. M. Schwendener déduit donc de ses observations que des plantes exposées normalement à une sécheresse con- stante ou lemporaire possèdent des gaines protectrices bien 118 | CAMILLE SAUVAGEAU. développées, à éléments fortement épaissis, tandis que l'habitat dans un sol constamment humide détermine la minceur des parois cellulaires ; celte loi n’élant applicable que si l’on a en vue les {termes extrêmes el non les nombreuses formes de passage sur lesquelles nos connaissances sont encore incomplèles. Très peu de temps après M. Schwendener, M. Costantin a étudié l’action du milieu, à un tout autre point de vue. dans une série de mémoires sur la racine, la lige, la feuille. Tantôt il compare sur deux exemplaires d'une même espèce, s'élant accrus dans deux milieux différents, des régions morphologiquement comparables, c’est la méthode de «F’ana- tomie expérimentale ». Tantôt, il compare les différentes parties d’un même organe développées dans des milieux différents quoique appartenant à un même exemplaire, c’est la méthode de « l'anatomie comparative ». L'une et l’autre méthode s'accordent dans les résultats qu’elles four- nissen. L'auteur à {rouvé, quant au tissu de soutien des feuilles, qu'il se réduit dans les feuilles aquatiques, ceci étant « vrai aussi bien pour les éléments sclérifiés que pour le collen- chyme. Tanltôl, comme dans les pétioles de Marsilia, ce sont les gaines fibreuses entourant les faisceaux qui dispa- raissent; lantôt, comme dans le Scirpus lacustris, ce sont des paquets de fibres qui existent sous l’épiderme des feuilles aériennes, el qui manquent dans les feuilles suhmergées. Dans les nervures médianes des feuilles aériennes de V'Asma Plantago, le péricycle du faisceau médian est forlement sclérifié, tandis que la même région de la feuille aqualique est formée de cellules à parois minces à peine colorables par la fuchsine » (4). Enfin, dans un {ravail d'ensemble sur Fanatomie comparée (1) S. Costantin, Études sur les feuilles des plantes aquatiques, p. 60-61 (Ann. se. nat. bot., 7e s. t. ILE, 4886. Tirage à part de 51 p. et 5 pl.). Voir aussi J. Costantin, Recherches sur la structure de la tige des plantes aquatiques (Idem, 6° s., Lt. XIX, 1884, 44 p., 4 pl.). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 119 des Phanérogames aquatiques, M. Schenck (1) est arrivé à des conclusions semblables. I s’est surtout proposé d'établir, d'après ses propres observations et d’après celles de ses devanciers, la série des modifications et des dégradations analomiques qui conduisent des Plantes aquatiques les plus différenciées aux Monocolylédones submergées dont la struc- ture est la plus dégradée. Ila montré, dans la feuille de cer- tains Po/amogeton, la persistance de quelques fibres autour des faisceaux libéro-ligneux, et il a cherché à expliquer la différence de structure observée entre les feuilles des plantes submergées et des plantes terrestres. Cependant, Je ne crois pas que nos connaissances solent encore as- sez complètes pour nous permettre de comprendre cer- lains faits, tels que l'existence de la chlorophylle dans les cellules de l’épiderme, la nature spéciale du parenchyme foliaire, qui n’est niun parenchyme en palissade, ni un paren- chyme spongieux, ele. Un fait incontestable qui se dégage des études entreprises jusqu'ici sur les plantes aqualiques, c’est leur dégradation par rapport aux plantes lerrestres. Comme l’a montré M. Schwendener, les plantes aqualiques, où même simple- ment celles qui recherchent l'humidité, sont particulière- ment mal parlagées sous le rapport des éléments mécani- ques, qui jouent, chez les autres plantes, Le rôle d'organes de protection ou de soutien. Mais d’autre part j'ai cilé d'après cel auteur des espèces présentant sous ce rapport une struc- ture tout à fait inatlendue, que leurs conditions d'existence ne juslifient en aucune manière. En effet, si l’intluence du milieu est incontestable, je ne la crois pas absolue. Les études d’ « anatomie expérimentale » qui nous mon- trent la dégradation que subissent le bois, le collenchyme, le sclérenchyme des plantes terrestres quand leurs organes (1) H. Schenck, Vergleichende Anatonue «ler submersen Gewächse (Bibliotheca botanica, Cassel, 1886, 47 p. 10 pl.). Voir aussi H. Schenck, Die Biologie der Wassergewächse, Bonn, 1886, 162 p., 2 pl. Je cite uniquement ici les tra- vaux d'ensemble ; on trouvera dans les mémoires de M. Costantin et de M. Schenck une bibliographie plus détaillée. 120 CAMEILEE SAUVAGEAU. se développent dans l’eau sont fort intéressantes, mais il est peut-être imprudent d'en généraliser les résultats. Les plan- les mises en expérience ne végètent pas dans leur milieu normal, et la réduction où la disparition de certains tissus peut être interprétée comme provenant de ce que ces Lissus sont les premiers à souffrir de ce changement. Si l’on vou- lait obliger des plantes terrestres à accomplir sous l’eau tout le cycle de leur végétation, elles périraient certainement au bout de peu de temps, et il serait injuste d’en conclure que la vie dans l’eau est impossible pour des Phanérogames. Les résultats de F « anatomie comparative » sont plus sûrs, mais ne sont nullement applicables à toutes les plantes vivant dans l’eau. Si des plantes comme le B/echnum spicant, le Poa pratensis, elc., bien que vivant dans les endroits hu- mides ont, d’après M. Schwendener, un système mécanique aussi bien développé que si elles vivaient dans des régions sèches, pourquoi certaines plantes aqualiques en seraient- elles dépourvues? Les Phanérogames qui vivent actuellement dans l’eau ont dù s'adapter peu à peu à l'existence dans ce milieu; l’état anatomique dans lequel nous les trouvons maintenant dépend assurément non seulement du temps de- puis lequel ladaptalion a commencé, mais aussi de leur structure originelle et de leur résistance spécifique à l’adap- ation, autrement dit des caractères qui leur ont été légués par hérédité. Assurément, celles qui auront conservé des éléments de soutien devenus inutiles seront le pelit nombre, mais elles seront d'autant plus intéressantes à mentionner. Ainsi, tandis que les feuilles de la plupart des espèces de Potamogeton toujours submergées sont privées de scléren- chyme, en dehors des quelques fibres qui accompagnent les nervures, celles d'autres espèces, vivant dans les mêmes con- ditions, en sont abondamment pourvues; les P. acutifolius, P. compressus, P. Robbinsi, par exemple, possèdent des faisceaux fibreux lignifiés très nombreux, qui courent sous un épiderme bien caractérisé comme épiderme de plante submergée. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 121 Les deux espèces du genre Alhenia, À. filiformis, el A. Barrandonii, vivent côte à côte dans quelques étangs des environs de Montpellier. Les feuilles de la première ne pos- sèdent jamais d'éléments épaissis; celles de la seconde, au contraire, ont non seulement leur unique nervure entourée d’un endoderme puissant, mais l’épiderme a ses parois plus épaisses, le limbe est parcouru par deux gros cordons fibreux plus ou moins lignifiés, el la gaine en montre plusieurs semblables. Ces faits sont complètement inexplicables si lon admet l’action prédominante et quasi exclusive du milieu. J'ai d’ailleurs montré des faits identiques au sujet des ra- emes (1) : non seulement l’endoderme de la racine des Pota- mogeton natans, P. polygonifolius, P. plantagineus, etc.. s'épaissit et se lignifie, mais la sclérose gagne aussi les cel- lules qui entourent les tubes criblés et les cellules de la moelle. Au contraire dans celle du P. densus qui croît à côté, Pendoderme n’est jamais épaissi, mais seulement subérifié sur les parois radiales et fangentielle externe, qui restent toujours plus minces que les parois des différentes assises corticales. On observe donc chez des espèces voisines, vivant dans le même milieu, et dont toules les conditions extérieures d’exis- lence sont les mêmes, des différences dans le degré d'adap- talion. L'élat anatomique actuel des plantes submergées n'est donc pas uniquement fonction de l'influence du milieu ambiant; il dépend aussi d’un autre facteur, lhérédité. C’est seulement par la voie historique que l’on pourrait apprécier quelle part revient dans leur structure à l’action ambiante et quelle part revient à la résistance spécifique, autrement dit quels sont les caractères acquis et quels sont les caractères conservés. Pour pouvoir faire des comparaisons uliles, il est donc nécessaire d'étudier un grand nombre d'espèces. Peut- être pourra-l-on un jour mettre à profit la connaissance dé- laillée des éléments des végétaux aquatiques, pour com- (1) CG. Sauvageau, Contribution à l'étude du système mécanique dans la racine des plantes aquatiques. Les Potarogeton (Journ. de bot.. 16 fév. 1889). 12% CAMILELE SAUVAGEHAA]. prendre dans quelles condilions leur adaptation s’est faite et quelle marche elle a suivie, et aussi pour nous éclairer sur leur phylogénie. Enfin, les conditions dans lesquelles vivent les plantes submergées dans la mer ne sont pas les mêmes pour toutes. Un autre facteur entre alors en ligne de compte, car lors- qu'elles croissent dans l'Océan à une profondeur qui ne dé- passe pas quelques mètres, elles sont plus ou moins à décou- vert à marée basse. Toul le monde à pu voir, dans les anses el les esluaires sableux ou vaseux, des prairies de Zos{era nana el Z. marina, par exemple, rester à découvert pendant plusieurs heures, exposées aux rayons du soieil. Alors, par- fois, les feuilles résistent; d’autres fois, elles se dessèchent complètement et meurent, el l'on rencontre à marée basse des Liges ayant ainsi perdu toutes leurs feuilles. El est vrai que l’humidité du sol joue un grand rôle dans leur conserva- tion et que, sur un fond sableux, les feuilles se dessécheront plus rapidement que sur un fond vaseux. On peut donc se demander si ces plantes sont pourvues d'un système protec- teur qui n'exislerait pas chez d'autres espèces toujours submergtes, le Cymodocea æquorea par exemple ; si de même les plantes marines tropicales ne possèdent pas un système mécanique particulier, destiné à prévenir une évaporalion trop rapide pendant les heures de marée basse; si enfin le Posiulonia Caulini, qui vit complètement et toujours sub- mergé dans la Méditerranée, et dont le système mécanique lignifié de la racine est assez développé, possède aussi dans ses feuilles du tissu scléreux, car s’il existe, son rôle doit être absolument différent. D'après M. Jadin (in itt.), les plantes marines de liîle Maurice affleurent à marée basse; aux époques de pleine lune et de nouvelle lune, les marées sont plus fortes et ces plantes restent, à chaque marée, complètement à découvert pendant plusieurs heures. Le Cymodocea ciliala vit à l'ile Maurice sur les rochers coralliens, et recherche de préférence les brisants, les endroits où la vague est la plus forte et FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 125 fouelte les récifs avec le plus de vigueur. Les feuilles de cette espèce, qui ont non seulement à résister à l'évaporalion mais au choc des vagues, possèdent-elles un système protecteur qui ferait défaut aux Cymodocea isoetifoliu et Halodule uninervis qui, d'après M. Jadin, habitent de préférence des stations paisibles? Leurs nervures sont en effet pourvues d’une gaine nettement protectrice, et les parois de leurs cellules, parti- culièrement celles des cellules épidermiques, sont plus fortes que celles des espèces qui vivent dans l'eau tranquille; mais il est cependant imposible d'en tirer une conclusion si l’on se rappelle, par exemple, le cas de F'A//henia Barrandoni et de l'A. fliformis qui a été cilé précédemment. Je me suis donc appliqué, dans le cours de cette élude, à chercher des caractères anatomiques assez constants pour caraclériser les différentes espèces. On verra en effet, dans les chapitres suivants, que les plantes marines présentent des particularités spécifiques suffisantes pour que l'étude anatomique d’une feuille suffise pour en donner une exacte détermination. Il en résulte qu’en présence de la grande rareté des fleurs, la connaissance de Ia structure d’une feuille peut maintenant être considérée comme le moyen le plus facile et le plus rapide de savoir à quel genre et à quelle espèce appartient une plante marine. J'ai fait ressorlir précédemment les avantages de ce résultat pour les études de Géographie botanique. Les caractères tirés de la tige, que j'aurai prochainement l’occasion de publier, viendront s'ajouter à ceux fournis par la feuille. Au con- traire, les caractères des Po/amogeton sont moins tranchés et souvent insuffisants pour une détermination spécitique. De plus, les caraclères anatomiques des plantes marines sont souvent tirés de la présence et de la nature du système mécanique, soit sous forme de cordons fibreux cellulosi- ques ou lignifiés, soit sous forme de gaines endodermiques plus ou moins importantes aulour des nervures: ils montrent done en mème lemps que l'existence des fibres el des élé- 124 CAMEHLLE SAUVAGEAU. ments lignifiés n’est nullement incompatible avec la vie dans l’eau. J'ai décrit avec détails l'anatomie de la feuille de nos espèces indigènes, afin qu’elle serve de point de comparaison avec les autres espèces des mêmes genres. Non seulement J'ai toujours vérifié avec le plus grand soin les déterminations des espèces que je n'avais pu recueillir moi-même, mais J'ai toujours étudié Le plus grand nombre d'échantillons qu'il m'a été possible. Par exemple, pour les Zostera et Ruppia français, j'ai comparé des exemplaires que j'avais recueillis à Hendaye, à Arcachon el au Croiïsic, avec d’autres provenant des environs de Montpellier ; afin de bien me rendre compte de Pautonomie d’une espèce australienne récemment décrite, le Zostera Capricorni, j'ai comparé des exemplaires prove- nant de six localités différentes. Naturellement je n'ai pas pu faire une élude aussi étendue pour toutes les espèces qui sont citées ici. Un certain nombre d'espèces ont été étudiées grâce aux riches collections du Muséum d'Histoire naturelle, et soil sur des exemplaires dont la détermination avait été véri- fiée en avril 1870 par M. Ascherson, soit sur d’autres que je leur avais comparés. J'ai toujours trouvé auprès des bota- nistes attachés à l'herbier du Muséum la plus grande bien- veillance et le plus grand désir de m'être ulile. J'ai cultivé cerlaines espèces dans le bassin dépendant du laboratoire de M. van Tieghem et aussi à l'École supérieure de phar- macie de Paris avec la gracieuse aulorisation de M. le pro- fesseur Guignard. Enfin, j'ai eu recours à l’obligeance de nombreux corres- pondants, et j'ai reçu des échantillons de M. Flahault de Montpellier, du laboratoire de Banyuls par l'intermédiaire de M. de Lacaze-Duthiers, du laboratoire d'Arcachon par son directeur M. Durègne, de M. Foucaud de Rochefort-sur- Mer, de M. le baron KF. von Mueller de Melbourne, de M. Urban et de M. Ascherson de Berlin, de M. Kjellman d'Upsal, de M. Farlow de Cambridge (Mass.), du Rév. Thomas FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 125 Morong de Ashland (Mass.), de M. Holm de Washington, de M. Jadin, envoyé en mission officielle à l’île Maurice. J'adresse mes remerciements et l'expression de ma gratitude à tous ceux qui ont bien voulu favoriser mes recherches. En recherchant des caractères anatomiques spécifiques, j'ai eu l’occasion d'observer quelques fails intéressants et d’un caractère général. Ainsi, en étudiant des feuilles très jeunes, j'ai reconnu de quelle manière se différencie le paren- chyme foliaire pour produire les différents types de struc- ture; en même temps j'ai reconnu que le mode d’origine des diaphragmes transversaux perforés, qui segmentent les canaux aérifères perpendiculairement à leur longueur, était constant. L'étude des Pofamogelon m'a permis de constater que le bois des nervures avait une double origine dans les feuilles pétiolées, qu'il se formait en deux temps bien distincts et avec des caractères histologiques différents. Enfin, après avoir observé la présence de stomates sur un certain nombre de feuilles normalement submergées, j'ai été amené à prouver par lexpérience que, si ces organes ne sont pas utiles à la plante, ils ne lui sont pas nuisibles. Jus- qu'ici, chez les plantes que j'ai étudiées, on n'avait pas con- staté lexistence d'une communication entre la nervure médiane et le milieu extérieur; cependant chez un assez grand nombre d'espèces, la nervure médiane vient réelle- ment s'ouvrir au sommet de la feuille, et ce fait m'a conduit à prouver que des échanges de liquide se produisent norma- lement, par l'intermédiaire de la feuille, entre la plante et le milieu ambiant. J’ai consacré un chapitre spécial à l'étude de chaque groupe ; ce procédé aura l'avantage de faciliter les recher- ches et les comparaisons des botanistes qui désireraient con- trôler les délerminalions spécifiques à l’aide des caractères anatomiques. Bien que l’étude de la feuille cotylédonaire puisse donner des résultats intéressants, je n’en parlerai pas, car les germi- UT RORRE CAMILLE SAUVAGEAU. nations que j'ai obtenues sont encore trop peu nombreuses. Plusieurs Potamogeton possèdent des organes hibernants, mais, bien que la feuille prenne parfois une part très impor- lante dans leur composition, c’est à dessein que je n’en ai pas parlé ; leur étude fera prochainement l’objet d’une note spé- ciale, dont j'ai déjà réuni les principaux matériaux. CHAPITRE H ZOSTÉRÉES. Les fleurs des Zostera sont hermaphrodites tandis que celles des Phyllospadix sont dioïques; celles-ci possèdent sur les faces latérales de l’épi de grandes bractées, qui d’après M. Ascherson correspondent aux rétinacles des Zostera. EL — Zostera L. Ce genre comprend les cinq espèces suivantes : 1. Z. marina L. 2. Z. Capricorni Aschs. 3. Z. nana Roth. k. Z. Muelleri Drm. 5. Z. tasmanica G. v. Martens, 1. Zostera marina L. Le Z. marina (1) est très répandu dans les mers de la zone tempérée septentrionale. Sur nos côtes de l'Ouest, il est très (4) J. Grônland, Beiträge zur Kennitniss der Zostera marina L. (Bot. Zeit., 18514, p. 185-192, pl. IV). — W. Hofmeister, Zur Entwickelungsgeschichte der Zostera (Bot. Zeit., 1852, p. 121, pl. HT). — P. Magnus, Ueber die Anatomie des Meeresphanerogamen, p. 88 (Sitzungs-Berichte der Gesellsch. naturforsch. Freunde zu Berlin im Jahre 1870, p. 85 à 90). — P. Duchartre, Quelques ob- servalions sur les caractères anatomiques des Zostera et Cymodocea, à propos d'une plante trouvée près de Montpellier (Bull. Soc. bot. Fr., t. XIX, 1872, p. 289-302). — J. Duval-Jouve, Particularités des Zostera marina L. et nana Roth. (Extr. de la Rev. des se. nat., 1873, 15 p., 1 pl.); ce mémoire est repro- duit textuellement dans Bull. soc. bot. Fr., t. XX, 1873, p. 81-89, mais sans planche. — P. Falkenberg, Vergleichende Untersuchungen über den Bau der FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. AT abondant. et l’on emploie ses feuilles sous le nom de »arech «pour emballage, pour engrais et même pour la confection d'objets de literie » (Duval-Jouve, loc. cit., p. 5); le nom de Matratzenseegras que lui donne parfois M. Ascherson indique aussi ce dernier usage. Ses feuilles, dont la largeur varie de 3 à 8 mm., atteignent une grande longueur, et beaucoup d’entre elles ont une gaine d'environ 20 cm. de long et un limbe de plus de 60 em., dont l'épaisseur va en diminuant graduelle- ment de la base au sommet. J'ai mesuré des feuilles dont la gaine avaitjusqu'à 35 em. elle limbe 1,20. Celles qui naissent sur l’axe principal sont larges et longues, tandis que les pre- mières feuilles des rameaux latéraux sont toujours plusétroites et plus courtes; plus lard, elles acquièrent les dimensions des précédentes. Les nervures, parallèles et indivises, sont en nombre constant sur la longueur d’une feuille, mais variable suivant les exemplaires étudiés ; ainsi, sur un même rameau, j'ai trouvé des feuilles ayant 5 nervures, d’autres 7 et d’au- tres 9. Ces nervures sont réunies l’une à l’autre transversale- ment par des branches d'anastomose, supportées par des diaphragmes transversaux, très facilement visibles par (rans- parence. À l'extrémité, elles se terminent par une anaslo- mose en are, « les deux plus internes s’unissant à la médiane, un peu en arrière du sommet, les autres à leur voisine plus interne, à des niveaux d'autant plus bas qu'elles-mêmes sont plus près du bord. Une particularité caractéristique, c'est que la nervure médiane se prolonge au-delà de ces anastomoses, jusqu'au sommet proprement dit de la feuille » (Duchartre, loc. cif., p. 294). En réalité elle vient s'y ouvrir en s’évasant légèrement tout à fait à son extrémité. Le sommet d'une feuille très jeune, encore renfermée dans la gaine qui l'entoure, est nettement el régulièrement obtus, les Vegetationsorgane der Monocotyledonen, Stuttgart, 1836 (Z. marina, p. 23-26 et pl.-Il, fig. 7, 8, 9). — F.-W.-C. Areschoug, Jemfôçantde undersükningar ôfver Bladets Anatomi, Lund, 1878 (Z. marina, p. 200-202, pl. IV, fig. 4). — À. Engler, Notiz über die Befruchtung von Zostera marina und das Wachsthaum derselben (Bot. Zeil., 1879, p. 654-655). — H. Schenck, Vergleichende Anu- tomie der submersen Gewächse, Cassel, 1886 (p. 2?, pl. IV, fig. 21). 128 CAMILLE SAUVAGEAU. bords el la pointe étant formés de cellules plus étroites que celles du milieu de la largeur du limbe; mais bientôt ces cellules extérieures meurent, perdent leur protoplasme et tombent en partie; il en résulte une véritable désquamation au sommet et sur les bords qui en sont voisins; très souvent même, il se produit une légère concavité au sommet, au- dessus de la nervure médiane évasée (fig. 1). Des courbes d'anastomose, qui réunissent les extrémités des nervures, s'élèvent des branches plus fines, NC qui se jettent de nouveau dans le A | g\ prolongement de la nervure: mé- 16 bass X\ diane, ou se dirigent directement | \ \ vers le bord de la feuille. Ce mode / | | | \ de terminaison de la nervure mé- br] | | diane entraîne sa communication he | À | avec le milieu extérieur. Dans le l | :/ | | cours de ce travail, nous retrouve- | {1 PF { Rl rons des dispositions analogues | | | | | dans d’autres genres. | ail | | | | | Une coupe transversale faite à la base d'un limbe adulte prouve Fig. li 57 éostere martine. quel Jimbe: à sa plus grande Sommet d'une feuille adulte a Les épaisseur au milieu de la largeur et s'atténue graduellement Jjus- qu'aux bords. L’épiderme forme une couche continue de cellules petites, à parois latérales et internes minces, et à paroi externe épaissie recouverte d'une mince eulicule, qui sont remplies de chlorophylle. Il n’est pas, comme on le dit souvent, la seule assise qui renferme de la chlorophylle, car toutes les cellules du parenchyme foliaire possèdent des grains verts disséminés dans une mince couche de proto- plasme pariétal; il en est d’ailleurs de même pour toutes les plantes que nous aurons à étudier dans la suite. Les faisceaux libéro-ligneux, d'autant plus rapprochés l’un de l’autre qu'ils sont plus éloignés du faisceau médian, sont supportés chacun par une cloison peu massive, formée il ï | | Lib À | (gross. 5). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 129 latéralement par une assise de grosses cellules, le séparant de la lacune voisine, sur la face supérieure par 3 ou 4 rangées de cellules situées entre le bois et l’épiderme et sur la face inférieure par des cellules plus nombreuses avec de petites lacunes entre le liber et l’épiderme. Le faisceau marginal, très voisin du bord, est plongé DE) H dans un tissu un peu plus ET . dense. 5 SOUS x Entre les faisceaux, le HO parenchyme est creusé de très grandes lacunes ou canaux aérifères courant suivant la longueur du limbe, parallèlement aux nervures, parfois se bifur- quant ou se fusionnant sans que leur disposition ou leur forme change sur une coupe transversale (fig. 2). Ces canaux, qui en coupe transversale vont d’une couche sous-épider- mique à l’autre, sont sé- parés entre eux par des murs d’une seule épais- seur de cellules superpo- sées. Le nombre des cel- lules conslituantes de ces sortes de piliers ou murs varie nalurellement suivant l'épaisseur de la feuille et par conséquent suivant le point considéré; chacune d'elles a une section à peu près rectangulaire, dont les deux côtés latéraux libres sont légèrement bombés ; celle qui est située à chaque ANN. SC. NAT. BOT. XI, 9 i ELA EN Fig. ?. — Zoslera marina. — Coupe transversale faite à la base du limbe, entre la nervure médiane et une nervure latérale. La partie libérienne est indiquée par des hachures (gross. 80) 130 CAMILLE SAUVAGEAU. extrémité de ces piliers est plus large que les précédentes, pentagonale ou hexagonale, et, sur deux de ses faces obliques s'applique une série de cellules de bordure, formant la voûte, dont le nombre varie avec la largeur du canal considéré. Parfois ces cellules de bordure arrivent au contact direct de l'épiderme, mais le plus souvent elles en sont séparées par 1 ou 2 assises sous-épidermiques. C’est d’ailleurs un fait constant chez les diverses espèces de Zostera que l’épiderme ne forme jamais directement la paroi des canaux aérifères. Des faisceaux de fibres seléreuses (1) de 1 à 12 cellules. épaissies, cellulosiques, correspondant à ce qu’on a appelé fibres libériennes et fibres extra-libériennes sont abondamment répandues au-dessous de l’épiderme; plus fréquents au voi- sinage des points où les murs de séparalion des canaux aboutissent, ils ne sont cependant pas rares entre eux (fig. 2). Ils existent aussi, sur les bords du limbe, en massifs plus compacts, el autour des faisceaux libéro-ligneux, en cordons isolés et de nombre variable (fig. 3). On isole facilement ces cordons fibreux en déchirant le limbe ; les fibres se séparent aussi l’une de l’autre; elles sont complètement cellulosiques, très longues, sans ponctualions, et leurs extrémités se ler- minent en pointe. Les faisceaux libéro-igneux, au nombre de 5,7 ou 9, ont toujours leur portion ligneuse plus rapprochée de Pépiderme que leur portion libérienne. Le faisceau médian est plus puissant que les faisceaux laléraux dont la taille va en dimi- nuant jusqu'au faisceau marginal. Sur aucun d'eux on ne remarque ni gaine endodermique ni péricycle (fig. 3); les fibres qui entourent partiellement les faisceaux sont insuffi- santes pour caraclériser ces assises. Les deux parties cons- tiltuantes d'un faisceau sont faciles à distinguer. Le bois est {1) Je donne à ces fibres le nom de fibres scléreuses, bien que chez les Zostera leur épaississement soit toujours de nature cellulosique, parce que nous trouverons tous les états intermédiaires entre elles et les fibres ligni- fiées d’autres espèces aquatiques. On pourrait les considérer comme des fibres scléreuses non lignifiées, car leur novau à disparu, comme dans les a u véritables Gbres de sclérenchyme. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 131 représenté par une lacune, d'autant plus large que le faisceau est plus puissant, entourée et circonscrite par une couronne d'assez grosses cellules, allongées suivant le rayon, dispo- sées en une assise unique, et dont la face qui borde la lacune lig. 3. — Zostera marina. — Coupe transversale d’un faisceau libéro-ligneux médian ; {, tubes criblés ; les épaississements intercellulaires sont indiqués par un pointillé (gross. 220). est épaissie sans que l’on y remarque {race de vaisseaux, quel que soit le point de la feuille adulte que l’on examine. Mais si l’on étudie par transparence une feuille de 1 cm. de long, on voit dans la moitié inférieure, c'est-à-dire la plus jeune, un vaisseau spiro-réliculé très net dans la ner- vure médiane, constilué par un ensemble d'éléments vas- 132 CAMILLE SAUVAGEAU. culaires courts, placés bout à bout, et terminés en bec de flûte ; parfois, mais rarement, on en lrouve deux à la fois. Vers le milieu de la feuilie, les ornements lignifiés deviennent moins nels, plus grêles, et enfin dans la seconde moitié on n’en aperçoit plus aucune trace. L'existence de ces vaisseaux est donc très éphémère ; à peine formés ils disparaissent. Le liber forme une masse de cellules plus étroites, assez rapprochée, mais séparée de la partie ligneuse; on recon- nait facilement les tubes criblés à leur section plus large, paraissant vides , probablement parce que leur contenu est très aqueux, et les cellules-compagnes contiguës, à leur contenu protoplas- mique plus dense que celui des cel- lules du parenchyme Fig. 4. — Zoslera marina. — Partie libérienne du libérien. Dans les faisceau de la fig. 3 ; {, tubes criblés ; les épaissis- ( sements intercellulaires sont indiqués par un poin- travaux qui ont eu tillé (gross. 460). l'étude du liber pour objet principal, on donne comme étant l’un des caractères du parenchyme libé- rien l'absence complète de lacunes ou même de méats entre les cellules constituantes (1), à l’exceplion toutefois de quel- ques plantes sans chlorophylle. Mais ce caractère ne s'appli- que pas au liber de la feuille du Zostera, car on rencontre presque toujours, au point d'union des cellules, de très petits méats triangulaires, comme on peut le voir sur la figure 4 qui représente, à un plus fort grossissement, la partie libé- rienne de la figure 3. Presque toujours aussi, de préférence (1) H. Lecomte, Contribution à l'étude du liber des Angiospermes (Ann. se. nat. Bot., 7° s.,t. X, 1889, p. 212). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 133 du côté le plus éloigné du bois, el de très bonne heure, cer tains de ces petits méals triangulaires s'agrandissent en pre- nant une forme plus ou moins irrégulière. On en trouve dont les dimensions en coupe transversale, atteignent celles des cellules avoisinantes: ce sont de véritables lacunes, à bords convexes, le plus souvent remplies par une matière de dégé- nérescence de la paroi, qui se colore fortement en rose par le carmin aluné. Ces épaississements intercellulaires, libériens, ne peuvent pas non plus être assimilés aux épaississements intershihels que M. Beauvisage a décrits dans le parenchyme libérien de l’/onidium : car ceux-ci sont le résultat d’une « hypertrophie irrégulière des membranes » sans qu'il y ait Jamais de « délamination des membranes » (1). On trouve ces lacunes libériennes avec leur remplissage dans le liber de la feuille et dela tige des Zostera, des Cymodocea, des Posi- donia, des Potamogeton, etc., el elles paraissent être, ainsi que les petits méals triangulaires du même tissu, caraclé- ristiques de la plupart des plantes aquatiques. Celle matière interstitielle, étant le produit de la dégénérescence de la lamelle moyenne qui se continue à la surface des méals, serait due, d’après les travaux de M. Mangin (2), à des com- posés pectiques. Si, à l’aide du papier d'amiante, on fait pas- ser sous le couvre-objet de la fuchsine sulfurique (3) (à 4 ou 5 parties d'acide pur pour 1 d’eau), la cellulose est dissoute et le tissu libérien reste indiqué par les lamelles moyennes el les remplissages des méats, qui possèdent la même nature. Les canaux aérilères du parenchyme sont cloisonnés trans- versalement par des diaphragmes perforés, d’une seule épaisseur de cellules {fig. 5) (4). Comme Duval-Jouve l’a in- (1) Dr Beauvisage, L'Inuline dans les Tonidium (Extr. bull. soc. bot. de Lyon, 1889, p. 9). (2) L. Mangin, Sur Lx substance intercelluluire (C. R. de l’Acad. des se., 410 fév. 1890). (3) C. Sauvageau, Sur un cas de protoplasme intercellulaire (Journ. de bot., 16 nov. 1888). (4) Quelques-unes des figures ont été prises sur Le Z. nana à cause des plus faibles dimensions de cette espèce. 134 CAMILLE SAUVAGEAU. diqué pour le Zostera, en même temps que pour la plupart des plantes aquatiques (1), ils sont vasculifères el servent de soutien aux délicales nervures d’anastomose transversale entre les nervures longitudinales. N'étant pas toujours sur un même plan, d'une nervure à l’autre, les nervures trans- versales d'union les suivent en faisant des ondulations. Les cellules qui constituent ces diaphragmes, vues de face sur une coupe transversale, sont petites et laissent entre elles d'étroits méats presque toujours triangulaires qui constituent les per- forations. Les diaphragmes sont d'autant plus rappro- chés l’un de l'autre, suivant la longueur de la feuille, que l’on con- sidère une partie plus jeune. On peut d'ail- leurs étudier leur origine par transparence sur des feuilles très jeunes lraitées par l'eau de Javelle, puis colorées; on voit alors qu'à la base le parenchyme est composé de cellules rectangulaires en coupe optique, aplaties, disposées réguliè- rement en files longitudinales et en rangées transversales entre les nervures, et se touchant sur toutes les faces. Bien- tôt (fig. 6, A) les petits côtés latéraux de ces cellules s’arron- dissent de manière à produire de très pelils méals rectangu- laires ; en même temps, chacune d'elles produit deux cloisons très rapprochées de cette paroi arrondie et de telle sorte qu'entre deux méals superposés se trouvent deux petites cellules filles, séparées entre elles par la cloison qui, au début, séparait leurs deux cellules mères. Les méals sont l’origine des lacunes, les petites cellules filles l’origine des Fig. 5. — Zostera nana.— Portion de diaphragme vu de face (gros. 220. (1) Duval-Jouve, Diaphragmes vasculifères des Monocotylédones aquatiques (Mém. de l'Acad. des sc. et let. de Montpellier, t. VII, 1873, p. 157-176, pl. VIT). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 135 diaphragmes et les cellules mères produiront les files de cel- lules séparant les lacunes entre elles. Désormais, les cellules mères, vues par transparence, ne se cloisonneront plus que parallèlement à leur côté le plus large, autrement dit perpen- diculairement à la longueur du limbe, de manière à suivre la transformation des méats en lacunes el leur accroissement suivant la longueur. Par suite, les cellules contiguës aux diaphragmes, qui au début étaient au contact l’une de l’autre, LE) [ El, “ (LZ Fig. 6. — Zostera nana, — Diaphragmes transversaux vus en coupe optique; A, B, C, D, états successifs (gross. 220). sont séparées par un nombre de cellules d'autant plus con- sidérable que la parlie examinée est plus âgée. En même temps, les deux petites cellules filles, origine du diaphragme, se cloisonnent pour suivre l'accroissement en largeur de la feuille et par conséquent des lacunes (fig. 6,B, C, Det fig. 9). J'ai constaté que les phénomènes se passent de la même facon chez les autres Zostera, les Potamogeton, les Ruppia, les Cymodocea,les Halodule, les Zannichellin(et aussi les Thalas- 136 CAMEILEE SAUVAGEAU. sia, V'Enhalus), on peut donc leur accorder un caractère de généralité, et je n'y reviendrai pas dans la suite de ce travail. On peul aussi étudier le développement du parenchyme et des diaphragmes sur des coupes transversales faites à la base Fig.7.— Zostera marina. — Coupe transversale faite à la base d'un limbe très jeune; le dessin n'arrive pas jusqu'à Ja nervure mé- diane (gross. 220). d'un limbe très jeune. La section mon- ire un épiderme continu au-dessous duquel, entre les faisceaux de procam- bium, on voit une rangée de grosses cellulesen contact qui, dans le voismage dufaisceau médian, ontdéjà commencé à se cloisonner (fig. 7); leur nombre est celui des futurs murs de sépara- tion des canaux interfasciculaires. Leur cloisonnement commence par la formation d’une paroi médiane dirigée suivant la largeur du limbe, qui est bientôt suivie de la formation d’une autre cloison parallèle se formant très près de chaque côté. Les deux cellules minces, ainsi isolées, sont l’origine des murs et c’est elles que nons avons vues précédemment par transparence en séries régulières à la base des feuilles jeunes ; elles continueront à se cloisonuner dans le même sens, d’au- tant plus longtemps que la partie con- sidérée dela feuille sera plus épaisse. Les deux cellules plus grosses, isolées vers lextérieur, seront l'origine de tout le tissu compris entre l’épiderme et les canaux. Les cellules ainsi formées, en s’arrondissant sur leurs bords, produisent par cloisonnement, dans la direc- lion perpendiculaire à la précédente, les toutes petites cellules filles, origine du diaphragme, que nous avons déjà observées par transparence. On ne les à pas représentées dans la figure 7, afin de ne pas compliquer le dessin. Si au FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 1 début, l’une des cellules mères n’a pas produit de cellule fille, il en résulte un vide, le diaphragme n'est pas entier, n'est pas en contact avec tout le pourtour du canal aérifère. Le limbe, diminuant graduellement d'épaisseur jusqu’au sommet, les canaux aérifères, tout en conservant leur nom- bre, diminuent aussi de volume. Bientôt, les murs de sépa- ralion n’ont plus qu'une seule cellule, qui disparail finale- ment, et les deux couches sous-épidermiques arrivent directement en contact; le limbe est alors légèrement bombhé au niveau desnervures. Vers le sommet, l’épiderme est rongé sur les bords, par suite de la desquamation qui s'y produit à l'élat jeune; on remarque aussi un faisceau fibreux mar- ginal plus puissant qu'à la base du limbe; cependant la plu- part des faisceaux fibreux disparaissent, mais ceux qui avoi- sinent la nervure médiane persistent. Cette nervure médiane que nous avons vue se prolonger jusqu'au sommet (fig. 1) présente de remarquables particu- larités anatomiques. Ainsi, tandis que sur la section prati- quée à la base du limbe, la lacune vasculaire est arrondie et entourée de larges cellules (fig. 3), on constate que, vers le sommet, ces cellules de bordure diminuent beaucoup de vo- lume, et que la lacune vasculaire s’aplatit dans le sens de la largeur du limbe, comme pour conserver son volume pri- milif. Plus près du sommet, à 1/2 em. ou ! em. du bord li- bre, on retrouve sur son contour de petites saillies (fig. 8 A) qui sont les restes de parois de cellules vasculaires, en partie résorbées ; le liber conserve une section arrondie. Enfin, dans la partie terminale élargie de la nervure mé- diane, la portion vasculaire est très aplatie (fig. 8 B); la lacune vasculaire est encore très reconnaissable à son contour plus épais, mais elle est complètement rem- plie par des cellules, disposées à peu près sur trois cou- ches, dont les parois cellulosiques extrêmement minces, très faciles à déchirer, sont très légèrement épaissies aux points oùelles se rencontrent entre elles. Ces cellules, qui représen- 138 CAMILLE SAUVAGEAH]. tent le bois, n’ont aucun ornement lignifié comme en pos- sèdent les vaisseaux; on dirait qu’elles jouent là un rôle secondaire, celui d'empêcher la paroi supérieure du système (à parois épidermiques plus minces que sur la face infé- rieure), d’obturer l’ouverture du faisceau en s’affaissant. En coupe longitudinale, ce sont des cellules étroites, allongées, à paroi transversale oblique souvent visible. La partie libé- Fig. 8. — Zostera marine. — À, nervure médiane à quelques m.m. du sommet; B, nervure médiane dans la partie élargie du sommet (gross. 220). rienne est composée de deux, trois, quatre masses de cellules étroites, rapprochées l’une de l’autre. La gaine de la feuille, fermée jusqu'à son sommet, possède à la base une section étroite el arrondie comme la tige qu'elle entoure ; plus haut elle est élargie et très aplatie. Sa structure est la même que celle du limbe, sauf la présence d'un plus grand nombre de cordons fibreux. La partie re- couvrante est formée à la base, entre les deux épidermes, de deux assises parenchymateuses produisant de nombreuse fibres ; au sommet, par où elle commence toujours à se dé- chirer et à se désorganiser, elle est plus mince, et réduite à ses deux épidermes complèlement en contact. La ligule, en coupe longitudinale (fig. 9), est composée FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 139 de deux épidermes entre lesquels s'introduisent à la base quelques cellules de nature parenchymateuse. La feuille pos- sède à ce niveau deux, trois, qualre diaphragmes (rans- versaux, beaucoup plus rapprochés l’un de l’autre qu'ils ne le sont dans toute autre partie, et dont un au moins est vas- culifère; aucune ramification vasculaire ne pénètre dans la ligule. La chute du limbe se fail un peu au-dessus de la li- gule : celle-ci reste altachée à la gaine qui persiste encore quelque temps sur la tige. Cette déhis- cence est facilitée par les cellules du limbe situées immé- diatement au-des- sus du point d’atta- che de la ligule, qui gélifient légèrement leurs parois. La feuille du Z. marina est donc ca- Fig. 9. _ Zosiera marina. = Coupe longitudinale Éotérisce: de par sa RE M pl le diaphragme inférieur est gaine complètement fermée ; 2° par ses cinq, sept, neuf nervures ; 3° par le pro- longement de la nervure médiane jusqu’au sommet ; 4° par l'absence d’endoderme et de péricyele autour des faisceaux libéro-ligneux ; 5° par ses canaux aérifères, disposés sur une seule rangée, jamais directement limités par l'épiderme ; 6° par ses fibres de sclérenchyme, non lignifiées, sous-épi- dermiques ou entourant les faisceaux libéro-ligneux, et enfin 7° par l'absence de cellules sécrétices. La première feuille d’un rameau de Z. marina, ou pré- feuille, Loujours différente des feuilles ordinaires, est ados- sée à la tige. Elle est facile à voir sur la tige dressée, là où 140 | CAMILLE SAUVAGEAU. naissent les inflorescences car les entre-nœuds y sont longs, et chaque branche ne porte que deux feuilles, une préfeuille et une feuille spathe. On la retrouve aussi à la base de cha- que branche de la tige végétalive, mais elle peut plus facile- ment passer inaperçue, et d’ailleurs dure peu de temps. C’est une gaine à bords soudés, plus étroite et un peu plus épaisse à sa base qu’à son sommet, mais toujours plus déli- cale que la gaine des feuilles ordinaires. Sa longeur varie avec les exemplaires et l'endroit considéré. La face adossée à l'axe, un peu plus longue que la face opposée, se Lermine au-dessus de la nervure médiane, en une pointe arrondie, que j'ai toujours trouvée plus aiguë dans les préfeuilles des rameaux végétalifs que dans celles des ra- meaux florifères. Celte face renferme quelques assises de cel- lules entre les deux épidermes, et des cordons fibreux surtout abondants au-dessous de l’épiderme dorsal, mais ce paren- chyme ne forme pas de canaux aérifères comme dans les feuilles normales; il est plus épais sur les bords que dans la région médiane, sans cependant y former une véritable ca- rène. Toutefois la nervure médiane persiste avec une lacune vasculaire et un groupe libérien bien déterminé ; de chaque côté d’elle sont deux, trois faisceaux libéro-ligneux, très rapprochés l’un de l’autre dans la masse parenchymateuse du bord épaissi; après son anastomose avec les nervures la- lérales elle se prolonge un peu vers le bord libre, sans S'y ouvrir, Car il n’y à jamais d'ouverture apicale. D'ailleurs, comme nous le verrons dans la suite de ce travail, c’est un fait général, que la préfeuille est toujours dépourvue d’ouver- lure apicale, même lorsque la feuille parfaite en possède une. La deuxième feuille de chaque rameau florifère estune feuille spathe. Elle possède une gaine entourant l’épi, une ligule et un limbe, et l'anatomie de ces parties est identique à celles des feuilles ordinaires. Cependant, la gaine, au lieu d’être close, a toujours ses lèvres libres. Au début les lèvres se recouvrent; mais plus tard, lors de la maturité des organes reproducteurs, elles sont écartées l’une de l’autre. Dans les spathes succes- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 141 sives d’une inflorescence générale, c’est alternativement le bord droit el le bord gauche qui recouvre l'autre. Irmisch a décrit le premier (4) à la base des feuilles d'un cerlain nombre de Monocotylédones, de petites languettes, formées de très bonne heure, très minces et longues de quelques millimètres, qu'il a appelées squamules intravagi- nales et dont il est difficile de préciser la signification. D'a- près Irmisch et Duval-Jouve, il y en aurait deux dans le Z. marina; M. Bornet(2)et M. Ascherson en ont compté qua- tre à chaque nœud, deux de chaque côté. Leur nombre n’est d’ailleurs pas très constant; sur les exemplaires provenant du Croisic et d'Arcachon, j'en ai le plus souvent compté qua- tre de chaque côté, en face les nervures latérales de la feuille; elles se retrouvent aussi à la base des préfeuilles. Par des coupes transversales dans les nœuds foliaires, on se rend compte de leur nombre et de leur origine. Elles ne sont pas produites par la feuille à l’aisselle de laquelle on les trouve, mais par la tige. En effet avant que la feuille soit complète- ment séparée de la tige, on voit à droite et à gauche de pelits segments, qui sont les sections des squamules, se sé- parer du pourtour de la tige, et laisser de légères cannelures à leur place; elles se forment d'autant plus tôt qu'elles sont plus éloignées de la nervure médiane. J'éludierai les Æéfinacles un peu plus loin, à propos du Z. nana. 2. Zostera Capricorni Aschs. Cette espèce est de date toute récente (3), elle a été créée (4) Th. Irmisch, Ueber einige Arten aus der natürlichen Pflanzenfamilie der Po- tameen (Abhandl. des Naturw. Vereines für die Provinz Sachsen und Thuingen, vol. If, 1858) et Th. Irmisch, Ucber das Vorkommen von schuppen- oder haar- formigen Gebilden innerhalb der Blattscheiden bei monocotylischen Gewächsen (Bot. Zeil., 18 juin 1858, p. 177-179). (2) Ed. Bornet, Recherches sur le Phucagrostis major Cavol., p. 23 (Ann. se. nat. bot., 5° s., t. 1, 1864). (3) P. Ascherson, Beitrag zur Kenntniss der Seegräser des Indischen und Stillen Oceans auf Briefen des D' F. Naumann (Verhandl. des bol. Vereins der Prov. Brandenburg, Berlin, 1876, p. 52-63) et in Silz. Ber. Naturf. Freunde, Berlin, 15 Févr. 1876. 142 CAMILLE SAUVAGEAU. en 1876 par M. Ascherson pour une plante de la Nouvelle- Zélande et des côtes orientales de l'Australie; si j'en juge d'après les exemplaires que M. le baron F. von Mueller m'a envovés, elle doit y êlre très abondante; j'ai comparé ces exemplaires à des fragments que M. Ascherson m'avait adressés, afin de bien m'assurer de l'identité de celte espèce. Les feuilles sont longues, leur largeur est de 3-% mm. ; par l'aspect extérieur elles se rapprochent beaucoup de celles du Z. marina, mais leur gaine esl ouverle. Le limbe est arrondi au sommet, mais, fait qui n'a pas été signalé jusqu'ici, l'épiderme de ce sommet se prolonge en nom- breuses peliles dents semblables à celles du Cymodocea æquorea. La présence de ces dents sépare le Z. Capricorni de tous les autres Zostera, et le rapproche par l'aspect exté- rieur des Cymodocea. Les feuilles jeunes présentent, au mi- lieu du bord terminal, une saillie plus forte, semblable à celle des Z. marina el Z. nana, qui disparaît bientôt el est remplacée par une ouverture apicale où la nervure médiane aboutit; au contraire les dents latérales du sommet persis- tent sur la feuille adulte. En coupe transversale, c'est aussi au Z. marina que cette espèce ressemble le plus. I y à cinq nervures libéro- ligneuses, dont la disposition n’est pas très constante, car la nervure marginale peut être accolée au bord ou en être sépa- rée par un ou deux canaux aérifères ; parfois la nervure laté- rale, au lieu d’être à peu près à égale distance entre ses deux voisines, est très rapprochée de la nervure marginale, et enfin quelques feuilles, plus rares l'est vrai, n'ont que trois nervures. La structure des faisceaux libéro-ligneux, de même d’ailleurs que dans les autres espèces de Zostera est celle représentée dans la figure 3. Les canaux aérifères sont hauts et larges comme dans le Z. marina, mais la couche de cellules sous-épidermiques est loujours une assise uni- que ; les cordons fibreux, à part ceux qui accompagnent les nervures où qui sont sur le bord, sont situés seulement à l'extrémité des murs. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 143 La gaine à une structure semblable avec le même nombre de nervures, et la ligule relativement longue, a près de 1 mm. de hauteur. La préfeuille a trois nervures ; les deux laté- rales se réunissent très près du sommet et parallèlement au bord libre, à la nervure médiane qui se prolonge un peu au-dessus sans jamais s'ouvrir à l'extérieur. La préfeuille ne présente aucune dent ni aucune desquamation. Les caractères qui viennent d’être indiqués suffiront donc pour distinguer facilement le Z. Capricorni du Z. marina et des autres espèces du genre. Les inflorescences du Z. Capricorni sont longues et à entre- nœuds lâches. Celles que j'ai étudiées étaient isolées de la lige rampanle et m'avaient été communiquées par M. F. von Mueller sous le nom de Z. Muelleri ; léchancrure terminale, large et profonde, du limbe des feuilles spathes leur donne en effet une ressemblance {rès réelle avec les feuilles du Z. Muelleri et la confusion est facile. Cependant l'étude comparée de Fanatomie de la feuille et de la tige de ces deux espèces m'a permis de changer leur détermination et de les regarder comme appartenant au Z. Capricorni. Le limbe des feuilles spathes est long et étroit, et j'y ai toujours rencontré seulement trois nervures; les deux ner- vures latérales s'unissent à la nervure médiane et celle-ci se prolonge très nettement jusqu’au fond d’une échancrure terminale large et profonde. Tandis que dans les autres espèces de Zoster…a et aussi dans les feuilles végélalives du Z. Cagricorn, Véchancrure du sommet de la feuille se pro- duit graduellement, et par la chute des cellules du bord terminal, elle existe dès le début dans les feuilles de l’inflo- rescence du Z. Capricorni. Cependant sur les feuilles très jeunes, longues de quelques millimètres, une dent s'élève du fond de l’échancrure, el c’est la destruction de cette dent qui assure la communication de la nervure médiane avec l'extérieur. Le bord terminal du limbe porte des dents semblables à celles de la feuille végétative, également réparties sur le 124 CAMILLE SAUVAGEAU. bord externe el sur les côtés de l’échancrure ; on les retrouve sur les feuilles adultes. La structure du limbe est exactement celle qui a été dé- crile précédemment pour les feuilles végétatives, avec cette différence qu’elle possède seulement trois nervures. La gaine des mêmes feuilles en possède cinq. La préfeuille est une gaine ouverte, dont le bord terminal ne présente ni dents ni échancrure ; de même que chez les autres espèces du genre elle possède une nervure médiane. 3. Zostera nana Roth. Le Z. nana, lrès répanau sur nos côtes de l'Atlantique et de la Méditerranée, est la plus grêle des espèces du genre ; c'est aussi celle qui possède la plus grande répartilion. Ses feuilles, rubanées, parfois très courtes, atteignent fré- quemment 50 cm. de longueur; leur largeur varie, sur des échantillons récoltés au même endroit, entre { mm. à peineel près de 2 mm. Elle possèdent seulement trois nervures ; la médiane se poursuit jusqu’au sommet, en s'évasant légèrement, après que les deux autres nervures se sont unies à elles par une courbure en arc. Le limbe, arrondi au sommel, y est creusé au milieu d’une légère échancrure correspondant à la nervure médiane, et laissant de chaque côté deux petits lobes, symétriques ou non. Au microscope, on reconnaîl facilement sur des feuilles adul- tes, surlout après les avoir trailées par l’eau de Javelle, puis colorées, que leur sommet a dù subir une desquama- lion semblable à celie du Z. marina, mais plus forte, et qui en s’accentant au point où la nervure médiane aboutit, y a découpé une échanerure (fig. 10). D'ailleurs, sur une feuille de quelques centimètres de longueur, encore renfermée dans la gaine de la feuille qui l'enveloppe, le sommet est com- plètement arrondi; la nervure médiane écrasée, est recou- verte par un épiderme à cellules plus grèles que les autres, moins vivantes, et destinées à tomber dès que la feuille sor- tira de la gaine recouvrante. Enfin sur une feuille {rès jeune, FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 145 de 2 mm. de long, le sommet, loin d’être échancré ou même arrondi, est obtus. Toute la partie obtuse tombera donc et permettra la communication de la nervure médiane avec l'extérieur. Tandis que sur une coupe transversale de la base du limbe du Z. marina et du Z. Capricorni, la plus grande épaisseur élait au milieu, et allait en diminuant jusqu'aux bords, la sec- üon du Z. nana est d'épaisseur plus uniforme, et presque toujours légèrement déprimée sur les deux faces, au niveau de la nervure médiane. La structure générale est aussi la même, mais il n'y à jamais que lrois faisceaux libéro-ligneux ; on trouve entre eux, de chaque côté, trois ca- oe ses naux aérifères dans les FÉES HE . Pass + feuilles les plus étroites, HER ° . GE PES RRS EST = È DE cinq ou six dans les plus PÉRFFFRRRRRRSSSESE larges. La couche sous- Fig. 10. — Zostera nana. — Sommet d'une épidermique est toujours feuille adulte ; la nervure médiane et les deux néant ae h aux points où aboutissent forme de la feuille très jeune (gross. 80). les murs de séparation qu’elle se dédouble pour donner une ou quelques fibres. Les cordons fibreux ne se montrent donc pas entre les murs, sauf au niveau dela nervure médiane et sur les bords de la feuille ; on en retrouve aussi autour des faisceaux libéro-ligneux. La gaine est ouverte suivant toute sa longueur, et ses lèvres sont beaucoup plus embrassantes à la base qu’au sommet, où elles se prolongent un peu au-dessus de la ligule en deux petites oreilles indépendantes du limbe. La ligule est identique à celle des espèces précédentes. La feuille du Z. nana se distingue donc de celle du Z. ma- rina : 1° par son limbe plus étroit pourvu de trois nervures ; 2 par sa gaine ouverte sur toute sa longueur; 3° par l'é- ANN. SC. NAT. BOT. xI, 40 146 | CAMILLE SAUVAGEAU. chancrure du sommet du limbe ; 4° par la couche sous-épi- dermique toujours réduite à une assise unique. La préfeuille est une gaine ouverte, dont les lèvres très en- veloppantes s'élèvent un peu au-dessus de la partie médiane. Les deux nervures latérales se réunissent à la nervure mé- diane en suivant le bord terminal; celle-ci se prolonge peu ou point au-dessus de cette anastomose, sans aboutir au bord libre, lequel d’ailleurs ne subit aucune desquamation. La structure est celle de la gaine d’une feuille ordinaire, avec les canaux aérifères en moins. La gaine de la feuille spathe est très légèrement ventrue un peu au-dessous de son milieu; elle à cinq faisceaux libéro-ligneux mais les deux faisceaux marginaux se réunis- sent à leurs voisins avant d'arriver à la ligule. L’anatomie du limbe est la même que celle des feuilles ordinaires. Comme M. Bornet l’a indiqué (/oc. cit. p. 23) il existe une seule paire de squamules intravaginales ; elles sont plus larges que celles du Z. marina et naissent par le même pro- cessus. Rétinacles. — M. Ascherson a divisé le genre Zostera en deux sections (1). La première (sect. A/ega), qui comprend uniquement le Z. marina, est caractérisée par l’absence complète de bractées sur l’épi floral (Bracteæ in spadicis margine nullæ). La deuxième (sect. Zosterella), avec le Z. nana pour type, se distingue par la présence de ces petites bractées florales que Cavolini avait observées et figurées en 1792 (2) et qu'il avait nommées réfinacles (Spadix margine bracteis (retinaculis Caulini) uncinatim supra flores recurva- tis præditus). Plus tard, M. Ascherson, parmi de nombreux exemplaires de Z. marina provenant de Kiel, en a trouvé (4) P. Ascherson, Plantarum phanerogamarum marinarum [taliæ conspectus (Nuovo giornale botanico italiano, vol. IT, Florence, 1870, p. 183), Voir aussi P. Ascherson, Vorarbeiten zu einer Uebersicht, etc. (Linnæa, loc. cit., p. 165 et 166). (2) Cavolini, Phucagrostidum Theophrasti anthesis, 1792, pl. IL, fig. 3. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 147 quelques-uns munis de rétinacles (1), et récemment il a con- sidéré les rétinacles comme « manquant ordinairement » dans cette espèce (2). L'inflorescence des Zostera, est en effet un épi aplati uni- latéral (3), enveloppé dans une feuille en forme de spathe, portant sur sa face florifère deux rangées de fleurs. Chaque fleur est composée de deux étamines et d’un pistil d’un seul carpelle, situé en face et de l’autre côté de la crête médiane qui parcourt l’épi suivant sa longueur. Les fleurs étant al- ternes, on constate, sur chaque moitié droite el gauche de la face florifère, une succession d’'étamines et de pistils qui appartiennent à des fleurs différentes. Les bords de l’épi se renflent un peu, et se replient de manière à recouvrir par- liellement les fleurs. Or, sur une inflorescence adulte de Z. nana, au-dessous de ce repli marginal, et vis-à-vis la ligne de séparation des deux élamines appartenant à une même fleur, est une petite languette qui se replie sur ces étamines; c'est une bractée ou rélinacle. Sur un épi, les rétinacles sont naturellement alternes comme les fleurs elles-mêmes. M. de Lanessan, qui a étudié le développement de la fleur du Z. nana, a vu la bractée naître sous forme d'un mamelon situé en dedans et à quelque distance du bourrelet marginal encore peu prononcé. « Ce mamelon s’aplatit bientôt laté- ralement de facon à ce que son grand axe devienne à peu près parallèle à celui de l’épi. Il s’allonge ensuite assez rapi- dement et prend la forme d’une languette membraneuse qui, parvenue à son développement complet, offre une longueur de 5-6 mm. et une largeur de 2-3 mm. Elle représente alors une véritable bractée... » (loc. cit., p. 693). C’est seulement plus tard que les deux mamelons staminaux, puis enfinlemamelon carpellaire quiappartientälamême fleur, font leur apparition. (1) P. Ascherson, Beitrag zur Kenntniss, ete. (loc. cit., p. 60). (2) « Retinacula in der Regel fehlend. » P. Ascherson in Engler et Prantl. loc. cit, p. 203. (3) J.-L. de Lanessan, Organogénie de la fleur et du fruit des Zostera ma- rina L. et Z. nana Roth. — Rapports des Zostera avec les Graminées (Assoc. fr. p. l'avanc. des sc., Nantes, 1875, p. 690-707, 2 pl.). 148 CAMILLE SAUVAGKHAU]. Si sur un épi adulte de Z. nana, on enlève avec pré- caulion les élamines et les ovules, on voit une ligne, un peu plus sombre que le fond de l’épi, descendre de la nervure médiane, en faisant un angle aigu avec elle, et aboutir à un rétinacle. Elle représente un faisceau con- ducteur très rudimentaire. Sur une coupe transversale, un rétinacle de Z. nana, se compose en effet d’un épiderme entourant un parenchyme à grandes cellules au milieu du- quel sont 3-4-5 cellules très élroites qui représentent un faisceau. Un rétinacle n’est donc pas une simple émergence mais une vérilable bractée (fig. 11). Duval-Jouve (Particularités elc., loc. cit., p. 11) a vu sur des échantillons de Z. PSpavsesenss SITES \ marina « une grande LR \ HO" ON CU à bractée, large et longue JF }f F57 de 5 à 7 mm. s'élever Te" de la saillie marginale Fig. 11. — Zostera nana. — Seclion transversale d'un carpelle, else cou- faite à la base d’un rétinacle (gross. 220). cher en travers sur l'ap- pareilreproducteur. Ces bractées n'ont ces dimensions qu'aux trois ou quatre fleurs inférieures, et ensuite elles diminuent successivement de grandeur, de manière qu'aux fleurs supérieures, elles ne sont plus représentées que par de faibles ondulations ». Il en conclut que la division en deux sections de M. Ascherson doit être rejelée. Il a donné à ce sujel un dessin (/oc. ct, fig. 7) qui représente bien en effet les rétinacles comme des expansions du.bord marginal renflé de l’épi. M. de Lanessan, après avoir étudié avec beaucoup de soin l'inflorescence du Z. nana, l'a comparée à celle du Z. marina, mais probablement plutôt d’après les dessins de Duval- Jouve que d’après des observations personnelles. Il en con- clut que les bractées du Z. nana ne doivent être ni assimi- lées ni confondues avec des ondulations du bord libre de l'épi, qui, parfois faibles, peuvent se transformer en de vérita- bles dents plus ou saillantes, prolongées en avant des fleurs. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 149 Pour cetauleur, la division du genre Zostera en deux sous- genres, établie par M. Ascherson, est donc parfaitement justifiée (/oc. cif., p. 692, 693, 696). Malheureusement le dessin de Duval-Jouve est tout à fait inexact et à induit M. de Lanessan en erreur. En effet, le bord marginal sail- lant de l’épi est bien légèrement onduleux, mais ce ne sont nullement des exagérations de ces ondulations qui produ - sent les languettes qui recouvrent les fleurs, mais de vérita- bles bractées, en tout comparables à celles du Z. nana. À la base de l’épi du Z. marina, dans l'angle aigu formé parles deux bords marginaux qui se rejoignent, est une fleur parfois incomplète, el qui manque toujours de bractée; mais sur tous les échantillons provenant du Croisic et d’Arca- chon que j'ai examinés, j'ai vu les deux fleurs suivantes pourvues chacune d’une large bractée rabattue sur les deux étamines; cette bractée attachée à lépi comme chez le Z. nana, un peu en dehors des étamines, est tout à fait in- dépendante de la saillie marginale. Les fleurs qui sont au- dessus, et qui sont plus jeunes, en sont loujours dépourvues. La structure de ces deux bractées est la même que celle des bractées du Z. nana, mais le petit faisceau de cellules étroi- tes qui les parcourt est un peu moins net. En résumé, tandis que chez le Z. nana, chaque fleur, ou presque toujours chaque fleur est pourvue d'un rélinacle, chez le Z. marina, deux fleurs seulement d’un épi en possè- dent. Ces rétinacles sont indépendants de la saillie margi- nale de l’épi; leur origine, leur position et leur structure les font considérer comme de vérilable bractées. Leur présence chez ces deux espèces, de même d’ailleurs que chez les au- tres, contredit la division du genre Zoster…a en deux sections. M. Ascherson (1) considère aussi comme caractéristique de la section 1, que la gaine de la feuille spathe est de même lar- geur que celle des feuilles ordinaires, tandis qu'elle est plus large chez les espèces de la section Il; mais cette différence, ‘(1) P. Ascherson in Engler et Prantl, loc. cit., p- 203. 150 CAMILLE SAUVAGEAU. Irès frappante pour le Z. fasmanica, est beaucoup moins sensible chez le Z. nana. On pourrait aussi ajouter que la gaine du Z. marina est fermée, tandis que celle des autres espèces est ouverte; mais d'autre part, on pourrait aussi bien se fonder pour établir des sections, sur les dents du sommet de la feuille du Z. Capricorni qui font défaut chez les autres espèces. Nous crovons donc préférable de rejeter la division des Zostera en sections. La présence de rélinacles où bractées chez toutes les espèces, doit faire considérer la fleur des Zostera comme une fleur hermaphrodite, munie d’une bractée. 4. Zostera Muelleri Irmisch. Cette espèce à été créée pour un Zostera australien qui dif- fère du Z. nana par ses feuilles un peu plus larges et par une échancrure plus large et plus évidente au sommet ; elle rem- placeraitle Z. nana dans l'hémisphère sud ; mais cette espèce, adoptée par M. Ascherson et plusieurs autres botanistes, n'est pas reconnue par les auteurs du Flora Australiensis, qui voient l'échancrure du sommet présenter toutes les formes de passage entre le Z. nana etle Z. Muelleri, etils considèrent ce dernier comme une variété australienne du Z. nana (1). La structure des feuilles, larges de 2 mm., est très semblable à celle du Z. nana. I y a trois nervures; la nervure médiane est séparée, de chaque côté, de la nervure latérale par sept ou huit canaux aérifères. Les faisceaux fibreux sont presque toujours au contact de l’épiderme, tandis qu'ils le sont rare- ment dans le Z. nana; ils sont aussi plus gros el à fibres plus fortement épaissies surtout sur les bords du limbe. Mais il serait certainement difficile de donner ces différences comme des caractères spécifiques, et je ne crois pas qu'une feuille puisse suffire pour une déterminalion certaine de ces deux espèces. Cependant, l'espèce est bien aulonome, et nous verrons plus tard des différences saillantes dans l'anatomie (1) Bentham et F. von Mueller, Flora Australiensis, vol. VIT, 1878, p. 176. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES, 151 de la tige permettre de distinguer le Z. nana du Z. Muelleri. Le sommet des très jeunes feuilles du Z. Muelleri est en- tier ; les parties latérales portent une ou deux dents semblables à celles du Z. Capricorni, mais une desquamation ne tarde pas à se produire, entraine ces quelques dents latérales et creuse une large échancrure médiane. Comme chez le Z. nana, on trouve à l’aisselle de chaque feuille deux squa- mules intravaginales. 5. Zostera tasmanica G. v. Martens. Le Z. tasmanica, cantonné en Australie, est remarquable par la ramification de sa lige florale et par la forme élargie et ventrue de la gaine qui entoure l’épi. Je n'ai eu à ma dis- position que des inflorescences, mais, comme nous avons constaté pour le Z. marina el le Z. nana l'identité de struc- ture entre la feuille spathe et la feuille ordinaire, nous pour- _rons conclure ici, de l'étude de l’une à la connaissance de autre, la largeur de la gaine de la spathe étant mise à part. Le limbe de la fewille spathe, long de plusieurs centimè- tres, est large de 3-4 millimètres ; son sommet est arrondi, le bord terminal n’est pas le siège d’une desquamation aussi importante que celle du Z. marina et du Z. nana, car c’est seulement au point où aboutit la nervure médiane que la chute de quelques cellules a produit une très légère échan- crure. Les nervures sont au nombre de (rois; la médiane est plus forle, et les deux marginales sont si près du bord de la feuille, qu'il n’y a pas de canal intercellulaire entre elles et le bord ; l’espace entre les nervures est d'autant plus large, et com- prend de chaque côté une douzaine de canaux aérifères étroits, de section presque arrondie, qui donnent à la coupe transversale un aspect très caractéristique. La couche de parenchyme sous-épidermique est simple, et les cordons fibreux sont situés à l'extrémité des murs. La gaine a cinq nervures, dont la plus extérieure de chaque 152 CAMILLE SAUVAGEAU. côté se recourbe au-dessous de la ligule pour s'unir à sa voisine. La structure est celle du limbe, mais les cordons fibreux sont plus abondants; dans les lèvres ils occupent presque tout l’espace entre les deux épidermes. La préfeuille a la forme d’une gaine ouverte: elle n’est pas renflée en son milieu comme la gaine de la feuille spathe ; elle possède cinq faisceaux libéro-ligneux, et ses cordons fibreux sont moins nombreux que dans la spathe. Ces caractères anatomiques, qui s'appliquent probable- ment aussi aux feuilles végétatives, distinguent le Z. tasma- nica des espèces précédentes. La feuille des Zostera sera donc caractérisée vis-à-vis de celle des autres genres; 1° par l'existence et la nature de l'ouverture apicale du limbe, absente sur la préfeuille; 2° par la constitution des faisceaux libéro-ligneux indiquée par la figure 3, accompagnés de quelques cordons fibreux non lignifiés: 3° par la disposition sur une seule rangée des canaux aérifères, séparés l’un de l’autre par des murs allant directement d'une couche sous-épidermique à l'autre et 4° par l'absence de cellules sécrétrices. Les Zostera ne possèdent donc, pour les préserver d’une évaporation trop active, qu'un épiderme compact à petites cellules, à paroi externe épaissie et recouverte d’une mince cuticule. Les fibres cellulosiques sous-épidermiques, ou voisines des faisceaux libéro-ligneux, ne peuvent pas être considérées comme protectrices, mais plutôt comme donnant de la résistance aux feuilles, en leur conservant cette flexi- bilité et cette souplesse qui leur permettent de suivre les mouvements de l’eau ambiante sans se déchirer. Mais les cellules du parenchyme, beaucoup plus volumineuses que celles de l’épiderme, dont le protoplasme ne forme qu’un mince revêtement pariétal avec quelques grains de chloro- phylle, jouent évidemment le rôle de tissu aquifère, de tissu réservoir d'eau, donnant aux feuilles vivantes leur turges- #x RE : ee FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 153 cence; c'est celle eau qui s'évapore pendant que la plante reste exposée à l'air ; si la quantité d’eau évaporée dépasse une certaine mesure, la feuille se fane, se dessèche et meurt. On peut d’ailleurs facilement constater que l’eau entre pour une forte proporlion dans le poids de la feuille, en laissant des feuilles vivantes se dessécher à l'air. Il — Phyllospadix W.-J. Hooker. Ce genre est de toutes les Phanérogames marines celui dont l'aire de distribution est la moins étendue; 1l appartient en propre à l'Amérique du Nord. M. Sereno Walson y recon- naît seulement deux espèces (1), distinctes l’une de l’autre par les caractères de la fleur femelle. De plus les feuilles de l’une, P. Torreyi Watson, auraient moins d'une ligne de largeur, et seraient faiblement 1-nerviées; celles de la seconde, P. Scouleri Hook., auraient deux lignes de largeur et seraient 3-nerviées. 6. Phyllospadix Torreyi Watson. x J'ai étudié un bel exemplaire grâce à l’obligeance de M. Farlow de Cambridge; bien qu'il ne fûl pas déterminé spécifiquement, et qu'il ne portât pas de fleurs, je l'ai rap- porté au P. Torreyi à cause de la largeur des feuilles et de leur nervation. Les feuilles, larges de 1 mm. à 1 mm. 1/2, portées sur des entre-nœuds très courts, atteignent une très grande longueur ; J'en ai mesuré qui, sans être entières, avaient une gaine de 30 cm. de long, et un limbe de plus de 1 mètre; la gaine, plus large que le limbe, se termine au niveau de la ligule par deux oreilies non adhérentes au limbe ; celui-ci conserve sa largeur presque jusqu'au sommet. A l'extrémité d’une feuille jeune, toutes les cellules épider- (4) Sereno Watson, Geological Survey of California. Botany, vol. IE, Cam- bridge, Mass., 1880, p. 192 et S. Watson, Descriptions of some New Spe- eies of North American Plants (Proceed, of the Americ. Acad., New Series, vol. VI, Boston, 1879, p. 303). 154 CAMILLE SAUVAGEAU. miques sont petites, semblables, très régulièrement dispo- sées en file, mais sur chaque bord, les cellules de la rangée marginale se prolongent vers l'extérieur (fig. 12). Ces pro- longements sont au contact l’un de l’autre, sauf à leur extré- mité arrondie, et forment une sorte de lame très mince, qui s'étend sur plusieurs centimètres de longueur. Par suite, sur une coupe transversale, on voit de chaque côtéune cellule épidermique qui se prolonge en poil plus ou moins recourbé ; la succession de ces poils forme la lame qui se continue sur le sommet arrondi de la feuille, mais s'arrête au milieu pour y laisser une pelite dépression, du fond de laquelle s'élève une dent médiane. Plus tard, cette petite dent se désorga- nise, et la nervure médiane s'ouvre au sommet dans une échancrure. Par {rans- parence, on reconnait {rois nervures, dont les deux marginales se réunissent à la mé- diane par une anastomose transversale un peu au-dessus du sommet. Le limbe adulte n’est pas rubané au même titre que celui des Zostera, Posi- Re donia, etcsiCar une coupe transversale, spadix Torreyi, — faite à la base du limbe, possède une face Bord d'une feuille ventrale aplatie et une face dorsale très jeune, vu de dessus (gross. 220). bombée. Un peu plus haut, elle a la forme d'une ellipse peu aplatie, et si l’on repré- sentait par 1 l'épaisseur à ce niveau, la largeur serait d’en- viron 1,5. C'est seulement dans la parlie supérieure que sa largeur est beaucoup plus importante que son épaisseur. À la base et sur une grande partie de la longueur du limbe, on trouve sur les coupes transversales un épiderme à cellules très étroiles et allongées, puis une zone sous-épi- dermique qui en suit le contour, et composée de plusieurs assises de cellules sans méats. Cette couche renferme de très nombreux faisceaux de fibres, à éléments très épaissis, plus ou moins lignifiés, ressemblant à ceux que nous obser- verons chez les Posidonia, el abondants surtout au contact FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 155 de l’épiderme; ceux de ces faisceaux qui sont sous-épider- miques persistent jusqu’au sommet du limbe, tandis que les autres disparaissent graduellement. Tout l'intérieur des coupes transversales est composé d’un parenchyme à grandes lacunes disposées sur plusieurs rangées, et séparées l’une de l’autre par des murs d’une seule épaisseur de cellules, sans aucune fibre. Au milieu, mais un peu plus près de la face ventrale, esi le faisceau libéro-ligneux médian; le faisceau marginal de chaque côté est à la limite de la zone sous-épi- dermique dense et de la zone centrale lacuneuse. Ces trois nervures sont semblables entre elles; chacune d'elle est composée d'une partie ligneuse formée d’une lacune vascu- laire, et d’une partie libérienne à pelits éléments séparés de la première par une, deux ou trois couches de fibres très épaissies el non lignifiées; c’est là un point commun avec l’Halodule, et qui distingue ces deux genres de ceux que nous étudions ici. Comme dans le Zos/era, l'endoderme pa- raît faire défaut; la nervure est parfois entourée par des faisceaux fibreux semblables à ceux de la zone externe, moins développés que ceux de la gaine. Bien que d’après M. Watson, lesfeuilles du P. Torreyisoient 1-nerviées, j'ai cependant rapporté à cette espèce les exem- plaires que je décris ici. Les botanistes descripteurs comptent en effet le nombre des nervures en observant la feuille par transparence, or les nervures marginales de notre espèce, étant très près du bord et noyées dans un tissu compact, et la feuille étant plus ou moins cylindrique sur la plus grande partie de sa longueur, un examen superficiel doit montrer uniquement la nervure médiane et la feuille paraît 1-nerviée. Vers le sommet, là où le limbe est devenu aplati, on re- trouve une zone sous-épidermique qui entoure complèlement les deux nervures marginales et possède de nombreux cor- dons fibreux au contact de l’épiderme. Entre deux nervures, existent seulement un ou deux canaux aérifères. On re- trouve encore des fibres entre le bois et le liber dans cha- cune des trois nervures. 156 CAMILLE SAHUVAGEAU. La gaine présente la même structure générale que le himbe, mais elle possède cinq nervures, dont trois se conti- nuent directement dans le limbe, et deux marginales plus étroites qui se terminent au sommet de la gaine. En coupe iransversale, l’épiderme a ses cellules moins étroites et moins allongées que dans le limbe. A la base, on voit dans la région médiane, sous l’épiderme dorsal, une couche de 8-10 assises cellu- laires sans méals, ren- fermant de nombreux cordons fibreux, et sous l’épiderme ven- tral, une couche de 2-3 assises, avec de gros cordons fibreux sou- vent très bien lignifiés | (fig. 13). Entre ces deux couches, est une région centrale, à grandes lacunes, cor- respondant à celle du limbe ; Ia nervure mé- diane, très proche de Fig-18.— Phyllospadix Torreyi.— Coupe transver- ld face ventrale à ls sale de la nervure médiane, vers la base de la < ep gaine ; a, lacune vasculaire (gross. 220). mêmeconsttution que dans le limbe, mais elle est entourée de gros faisceaux fibreux bien lignifiés. Les deux couches sous-épidermiques se rejoignent latéralement, pour donner sur les côtés une masse cellulaire compacte, diminuant graduellement d'épaisseur jusqu'aux bords des lèvres où les deux épidermes sont en contact. Les deux ner- vures latérales sont, comme dans le limbe, dans la zone compacte, tout près de la zone moyenne lacuneuse, et 'pos- sèdent aussi sur leur pourtour d'épais cordons fibreux ligni- fiés ; les deux nervures marginales plus faibles, entourées de fibres, sont situées dans les lèvres. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 157 A un niveau plus élevé, les deux couches sous-épidermiques ventrale et dorsale tendent à prendre une égale importance; la nervure médiane s'éloigne de la face ventrale et prend place vers le milieu du parenchyme lacuneux, comme dans le limbe. La ligule est plus épaisse à sa base que chez les autres Phanérogames marines; elle possède 6-8 assises de cellules semblables entre elles, dont le nombre diminue d’ailleurs assez rapidement vers le bord libre de la ligule. Les fais- ceaux libéro-ligneux n’y envoient point de ramification. J'ai observé la même structure sur un exemplaire de l’'herbier du Muséum et un exemplaire de l'herbier de Berlin. 7. Phyllospadiæ Scouleri Hook (1). J’ai reçu de M. Holm, de Washington, des exemplaires P. Scouleri, recueillis par M. Macoun à l’île de Vancouver ; pour m'assurer de l'exactitude de leur détermination, je les ai comparés, grâce à l’obligeance de M. Urban et de M. As- cherson, à des fragments de limbe pris sur des échantillons rapportés de Ross (au nord de San Francisco) par Wosnes- sensky, et qui correspondent à ceux représentés par Ruprecht (loc. cit.). Les feuilles, dontla largeur peut dépasser 3 mm., sont aplaties à la manière des feuilles rubanées ; si l’épais- seur au niveau de la nervure médiane, et mesurée sur une coupe transversale, est représentée par 1, la largeur l’est par 6-8. La forme de la section est donc nettement diffé- rente de celle du P. Torreyr. On trouve encore trois nervures sur les coupes transversa- les, mais les deux nervures latérales sont plus éloignées du bord que dans l'espèce précédente, et comme l'épaisseur est moindre sur les bords, on doit reconnaitre facilement (4) W.-J. Hooker, Flora boreali-americanu, vol. IT, Londres, 1840, p. 171 et pl. CLXXXVI. — Ruprecht, Neue Order unvollständig bekannte Pflanzen aus dem nôrdlichen Theile des Stillen Oceans (communiqué en 1852, Mém. de lAcad. imp. des sc. de Saint-Pétersbourg, 6° série, Sc. nat., t. VIX, Bot., 4855, p. 57-82, 8 pl.). 158 CAMILLE SAUVAGEAU. par transparence sur les feuilles fraîches les {rois nervures, ce qui vérilie la mention 3-nerviée de M. Watson. La structure des nervures est la même que dans le P. Torreyi; et des cellules épaissies, à parois cellulosiques existent aussi entre le liber et le bois; l’'endoderme n’est pas distinct. On trouve aussi une couche épidermique avec d’as- sez gros cordons fibreux, mais les canaux aérifères sont disposés plus régulièrement sur 2-3 rangées vers la base du limbe, une seule rangée vers le sommet; quelques cordons fibreux s’observent fréquemment autour des nervures. La structure du P. Scouleri correspond donc à celle d’un P. Tor- reyi dont le limbe serait rubané. Les bords du sommet du limbe, sur une longueur de plu- sieurs centimètres présentent une lame latérale semblable à celle du P. Torreyi, et due aux cellules épidermiques allon- gées etépaissies ; le bord terminal se termine en une pointe obtuse où aboutit la nervure médiane comme dans le Z. ma- rina, et qui se détruit sur la feuille adulte. La gaine possède aussi une structure comparable; les cor- dons fibreux sont plus régulièrement disposés que dans le P. Torreyi en une couche sous-épidermique ; ceux des lè- vres de la gaine sont plus puissants. Comme la préfeuille des Zostera, celle du P. Scouleri pos- sède une nervure médiane et deux nervures latérales, dont la structure est la même que celle du limbe; les cordons fibreux sont assez nombreux sous l'épiderme dorsal. Les rétinacles,quej'ai étudiéssur une inflorescence femelle, étaient très développés et mesuraient environ 3 mm. de large sur plus de { em. de long ; ilexiste un rétinacle sur lecôtéexté- rieur de chaque fleur. La structure entre les deux épidermes est uniquement parenchymateuse et montre une nervure médiane grêle, libéro-ligneuse. Ces rétinacles montrent donc mieux encore que chez les Zostera leur caractère de bractées. La structure de la feuille des Phyllospadir se rapproche de celle de la feuille des Zostera, par la non différenciation FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 159 de l’endoderme autour des nervures, par l’absence de cellu- les sécrétrices, et par l'existence d’une ouverture apicale. Elle s’en éloigne par la nature et la disposition des cordons fibreux et des canaux aérifères, et par la présence de cellules épaissies, cellulosiques, entre le liber et le bois des nervures. CHAPITRE HI POSIDONIÉES ASCHS. L'unique genre Posidonia renferme les deux espèces : 1. P, Caulini Kün. 2. P. australis J.-D. Hooker. La première est méditerranéenne, la seconde austra- lienne. 8. Posidonia Caulini Kôn. {{). Le P. Caulini, que Linné appelait Zostera oceanica, d’où son nom souvent employé de P. oceanica (L.) Del., appartient presque exclusivement à la Méditerranée. Il est souvent re- jeté en si grande abondance sur les côtes françaises que, grâce aux fibres qu'il renferme, on à esssayé de l’exploiter pour la fabricalion du papier; ces mêmes fibres, en retar- dant sa décomposition, l'empêchent d’êlre employé comme engrais. On l’a observé sur un certain nombre de points des côtes orientales de la Méditerranée (2) ; il passe le détroit de Gibraltar, remonte vers le nord sur les côtes de Portugal et d'Espagne et s’avance jusqu’à Biarritz (3). J'en ai recueilli des fragments de feuilles, rejetés sur le rivage, à Hendaye, à l'embouchure de la Bidassoa. Il vit à une plus grande pro- (4) Grenier, Recherches sur le Posidonia Caulini Kôn. (Bull. Soc. bot. Fr., t. VII, 1860, p. 362). — P. Duchartre, Éléments de botanique, 3° édit., 1885, p. 465, fig. 164. (2) P. Ascherson in Boissier, Flora Orientalis, vol. V, p. 26. (3) P. Ascherson, Die geographische Verbreitung etc., loc. cit., p. 205. 160 CAMILLE SAUVAGEAE. fondeur que les autres Phanérogames marines, qui peut atteindre 30 à 50 mètres (1). Les feuilles sont d’un vert foncé; le limbe, nettement sé- paré de la partie engainante par une ligule courbée en are, atteint 7-10 mm. de largeur et 1-5 dem. de longueur; il est mince, très flexible, de consistance parcheminée , arrondi au sommet, sans dents et parcouru en règle générale par treize nervures (parfois 15- 17), réunies l’une à l’autre par de nombreuses bran- ches transversales d’anas- lomose; à 1/2 ou 1/4 de millimètre de l'extrémité du limbe, elles se cour- bent en arc et se réunis- sent à un niveau d'autant plus bas qu’elles sont plus extérieures ; la nervure médiane se prolonge plus haut mais sans arriver jus- qu'au bord (fig. 14). Les Fig. 14. — Posidonia Caulini. — Sommet feuilles montrent de nom- d'une feuille adulte (gross. 5). breuses Laches brunes, irrégulièrement éparses , mais souvent plus abondantes au niveau des petites nervures ansversales d’anastomose, et qui sont dues à des cellules sécrétrices. La partie aplatie de la gaine est ferme, résistante et se fend très facilement suivant la longueur; ses lèvres, plus minces, sont plus larges à la base qu’au sommet. Son aspect extérieur, son mode d'apparition, sa structure et aussi son analogie avec la gaine des autres plantes marines, ne per- mettent pas de mettre en doute sa nature, bien que Grenier (4) Lorenz, Physik. Verhält. und Vertheil. der Organismen im Quarnero Golfe, Vienne, 1863, p. 249. Cité par Ascherson in Die geographische Ver- breitung, etc., p. 192. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 161 dise en parlant des feuilles de cette plante (/oc. cf, p. 424) : « Leur base (pétiole), qui devient brune et parcheminée en vieillissant, porte à droite et à gauche deux lames triangu- laires-allongées (slipules), qui, en se repliant en dessus, forment une gaine fendue dans toute sa longueur. Cette sorte de pétiole, ete. ». La feuille ne reste pas très longtemps complète; le limbe se détache au niveau de la ligule, et la gaine pourvue de sa ligule continue à protéger la base des feuilles plus jeunes. On trouve ainsi une ou plusieurs gaines entières, mais sans limbe, entourant étroitement chaque bouquet de feuilles; plus tard, ces gaines se déchirent, par ordre d'ancienneté, en lanières ou filaments qui persistent très longtemps sur le rhizome et le recouvrent. Cependant ces filaments se détachent et sont rejetés sur le rivage; si quel- ques-uns d’entre eux rencontrent un fragment de rhizome également rejeté sur le sable, ils y adhèrent, forment un petit feutrage qui, en roulant, s'accroît en entraînant d’autres fila- ments semblables, et produisent à la longue des boules pou- vant atteindre la grosseur d’une orange ou même d’une noix de coco. On appelle ces boules, qui parfois se trouvent par milliers sur certaines plages de la Méditerranée, du nom de pelotes de mer ou d’Ægagropiles de mer, par analogie avec les agrégats de poils pelotonnés rencontrés dans l’estomac des chèvres sauvages et d’autres animaux qui les avalent en se léchant (1). Les entre-nœuds élant très courts, et les gaines épaisses et résistantes, chaque faisceau de feuilles est très compact à à sa base; des feuilles dont le limbe flottant atteint quelques décimètres de longueur et présente son aspect et sa consis- tance définitives, sont au contraire, dans la partie cachée, minces, molles, sans résistance et leur gaine est petite ; d’au- tres, plus internes, tout en avant un limbe semblable au précédent, n’ont plus du tout de gaine et sont rétrécies à leur base; c’est cet étranglement qui avait fait croire à Grenier (1) Weddell, Sur les Ægagropiles de mer (Extrait des « Actes du Congrès international de botanistes, etc... » tenu à Amsterdam en 1877, p. 58-62. ANN. SG. NAT. BOT. xI1, 11 162 CAMILLE SAUVAGEAU. que la feuille élait pétiolée. Mais celte disposition, compara- ble à celle des autres Phanérogames marines à feuilles ru- banées et peut-être plus accentuée ici à cause de la largeur du limbe. ne présente au contraire rien d’anormal et s’ex- plique très facilement : ce limbe naît le premier et s'accroît par sa base; la partie la plus jeune étant la plus inférieure est la plus étroite; c’est seulement lorsque celle-ci a achevé à peu près complètement de se cloisonner et de s’accroître, que la gaine commence à se développer, et, d’abord peu résistante, elle augmente de consistance au fur et à mesure qu'elle devient plus extérieure, par suite de la désorganisa- tion des gaines plus anciennes. Sur une coupe transversale faite à la base d’un limbe a- dulte, on reconnaît que l'agencement des cellules a produit une structure beaucoup plus dense que dans le Zostera (fig. 15 B). L’épiderme, semblable sur les deux faces, forme une couche continue d’étroites cellules, à parois radiales et interne assez fortes, mais dont la paroi externe, en grande partie cellulosique, cutinisée extérieurement, est beancoup plus épaisse. Les cellules du parenchyme, d’abord plus ou moins irrégulières et très légèrement collenchymateuses, s'arrondissent et se disposent plus régulièrement vers l’inté- rieur de la feuille, de manière à laisser entre elles de nom- breux canaux aérifères ; chacun d’eux est limité par 4-8 cel- lules, disposées en rayons par rapport à lui. Dans la figure 15 el dans quelques-unes des suivantes on à représenté les parois de bordure des canaux plus épaissies, afin de rendre plus sensible à l'œil la disposition du parenchyme, bien que ces parois restent aussi minces que les autres. Les cellules n'étant jamais disposées en massifs serrés, sauf sous l’épiderme, il en résulte une facilité de circulation de l’air tout aussi grande que dans les Zostera, Cymodocea, ele,, mais réalisée par un procédé différent. Il n'existe pas de diaphragmes perforés semblables à ceux qui ont été étudiés précédemment, mais de temps en temps les cellules se rapprochent l’une de l’au- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 163 tre (fig. 16), se réunissent à d’autres cellules beaucoup plus courtes et plus étroites, pour former une sorte de plancher vasculifère, dans un plan tantôt parfaitement perpendicu- laire aux deux surfaces épidermiques, tantôt légèrement oblique comme dans la figure 16. De nombreuses cellules de 2-3-% assises parenchymateuses sous-épidermiques sont sécrélrices, à contenu brun plus ou moins orangé, souvent homogène, parfois granuleux et les este RE 000000000000000000020099000000000000000 ë 2200099 OS RS s@::2 2e, 72222299? RP SOA JS Séns Der a ae ë x: APE De: EEK 310000 Fig. 15. — Posidonia Caulini. — Coupe transversale du limbe; 4, à un centimèé- tre du sommet; B, à la base du limbe (gross. 145). remplissant plus ou moins complètement, ou réduit à des globules arrondis, appliqués contre la paroi interne. Elles sont moins nombreuses dans le parenchyme médian, sauf au niveau des nervures transversales d’anastomose, où elles sont au contraire très abondantes. Enfin, on les retrouve aussi dans la partie libérienne des faisceaux libéro-ligneux. 164 CAMILLE SAUVAGEAU. Réunies parfois en groupes de 2-3-4 contiguës, elles ne se distinguent pas autrement de leurs voisines ; sur les coupes longitudinales on les retrouve aussi, souvent plusieurs à la file l’une de l’autre, mais sans communication entre elles ni avec les cellules normales, comme le montre le gonflement de leurs parois par l’acide sulfurique. Traité par le perchlo- rure de fer, ce contenu prend une teinte noire, parfois plus ou moins verdâtre, indiquant la présence d’un composé tan- al ee, Jin ei | CAS Fig. 16. — Posidonia Caulini. — Coupe longitudinale faite à la base du limbe, montrant un plancher transversal (gross. 145). pnifère ; il n’est soluble ni dans l’eau ni dans l'alcool ou l’éther, et le tannin doit, par conséquent, s’y trouver à l’état de com- binaison. Il fixe plusieurs couleurs d’aniline, comme le vert d'iode, la safranine, etc. ; il jaunit par l’eau de Javelle, puis se dissout. Ces cellules sécrétrices ont des parois convexes, plus minces que celles de leurs voisines. Elles existent chez les Posidonia, Ruppia, Cymodocea, Halodule (1). (4) J'ai déjà noté la présence de ces cellules sécrétrices dans la racine du P. Caulini et du C. æquorea (Journ. de bot., 16 mai 1889), et j'avais cru le FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 163 La plupart des cellules de la couche sous-épidermique sont séparées entre elles et aussi de l’épiderme par des fibres blanches, nacrées, rarement isolées, plus souvent réunies en massifs serrés de 2 à 15 cellules (fig. 15). La lamelle moyenne de ces fibres est plus ou moins lignifiée, tandis que les cou- ches d’épaississement sont le plus souvent com- plètement cellulosiques ; leur lumière est extrè- mement réduite. Ces cordons fibreux restent dans le voisinage de l’é- piderme, sauf au niveau des nervures, où princi- palement sur la face li- bérienne, ils pénètrent dans la masse du paren- chyme (fig. 17); tout à fait sur les bords de la feuille, ils deviennent plus nombreux et plus internes. Ils donnent à la feuille une grande résistance el une grande Fig. 17. — Posidonia Caulini. — Coupe trans- flexibilité, celle résis- versale du faisceau libéro-ligneux médian, : prise à la base du limbe; £, 4, tubes criblés ; lance étant considérable- un épaississement intercellulaire est indiqué ment augmentée sur les par un pointillé (gross. 220). bords. Les treize (parfois 15-17) faisceaux libéro-ligneux ont leur liber plus près de la surface que le bois. Le faisceau médian est beaucoup plus important que les autres qui sont à peu près d’égale grosseur entre eux. Chaque faisceau est entouré d’une gaine endodermique de cellules polygonales, parfois dédou- perchlorure de fer sans action sur leur contenu, mais j'ai constaté depuis que ce réactif, mieux préparé, lui donne la mème coloration qu'à celui des feuilles. 166 CAMILLE SALVAGEAU. blées, à parois légèrement épaissies et presque toujours lignifiées. Sur des feuilles qui avaient été blessées et rongées sur les bords, j'ai observé que la gaine du faisceau le plus proche de la blessure était beaucoup plus fortement épaissie et lignifiée que celle des faisceaux plus éloignés, comme si elle avait eu besoin d’une plus grande protection. La section de la nervure médiane est ovale(fig. 17); les par- tieslibérienne et ligneuse, nettement distinctes l’une del’autre, sont entourées par uneassise de cellules correspondant au péri- cycle. Le faisceau ligneux comprend, au-dessous du péricycle, une couche de celluleslimitant, en partie entreelles et en partie avec le péricycle, une lacune renfermant de petits anneaux ou des fragments de spire lignifiés, qui sont des débris de vais- sceaux; on les retrouve d’ailleurs sur les coupes longitudi- nales, parfois intacts, parfois partiellement détruits. Le fais- ceau libérien, arrondi, possède plusieurs tubes criblés, des cellules compagnes à contenu protoplasmique dense, et des épaississements interstitiels semblables à ceux de la figure 4. Les nervures latérales sont plus petites, de section arron- die et à éléments moins nets; leur gaine est encore légère- ment épaissie el lignifiée. La lacune vasculaire est mal caractérisée, bien qu'on retrouve des vaisseaux sur les coupes longitudinales et aussi sur les coupes transversales faites dans une région jeune. Le limbe, tout en conservant la même largeur et le même nombre de faisceaux sur toute son étendue, diminue graduel- lement d'épaisseur, et à 1 centimètre du sommet il est réduit à 2-3 épaisseurs de cellules entre les deux épidermes (fig. 15 A); ceux-ci se rejoignent sur les bords sous un angle très aigu et arrivent en contact sur une longueur de plusieurs cellules. Comme dans les Zostera, les cellules épidermiques marginales tombent, mais la desquamation n’est pas assez profonde pour entamer la nervure médiane. Les cellules sé- crélrices, également réparties dans les 2-3 assises qui con- slituent tout le parenchyme, sont relativement plus abon- dantes qu'à la base du limbe. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 167 Sur des coupes transversales faites à la base de l’une des feuilles internes, dont la gaine n’est pas encore développée, les cellules du parenchyme, régulièrement disposées sur plusieurs rangées, laissent entre elles des méats quadrangu- laires. Bientôt apparaissent des cloisons allant d’un méat à un autre, puis les méals s’agrandissent en même temps que les cellules el, étant bordés par un plus grand nombre de cellules, ils deviennent étoilés. Les fibres se forment aux dé- pens de l’assise sous-épidermique, el le cloisonnement qui leur donne naissance a lieu peu de temps après le précédent, mais les futures fibres restent à l’état de paquets de cellules étroites, à parois minces, aussi longtemps que la base du limbe reste molle et recouverte par les gaines des autres feuilles. Le parenchyme de la gaine est de même nature, et son épaisseur diminue dans les lèvres jusqu'au contact des deux Fig. 18. — Posidonia Caulini. — Coupe transversale faite au sommet d’une gaine äagée (gross. 145). épidermes. Les gaines âgées, sans limbe, qui persistent assez longtemps intactes autour des feuilles plus jeunes avant de se désorganiser, ont au sommel leurs deux épidermes ligni- fiés mais minces; l’épiderme dorsal se continue sans varia- tions sur les lèvres; l’épiderme ventral, parfois moins lignifié que le précédent, se continue sur les lèvres par des cellules plus aplaties et à angles arrondis. Au-dessous de 168 CAMILLE SAUVAGEAU, chaque épiderme et à son contact (fig. 18) est une couche à peu près continue mais irrégulière de cellules scléreuses, bien lignifiées et épaissies. La couche scléreuse dorsale se continue dans les lèvres de la gaine jusqu’au point où les deux épidermes arrivent au contact; la couche ventrale, au contraire, moins puissante el moins fortement lignifiée ne se prolonge pas dans les lèvres. Le parenchyme ne présente aucune autre cellule sclérifiée ni épaissie. Tout à fait à la base de la même gaine âgée, la disposi- lion du système mécanique est différente (fig. 19); l'épiderme dorsal lignifié conserve les mêmes caractères, mais la cou- Fig. 19. — Posidonia Caulini. — Coupe transversale faite à la base d’une gaine âgée ; côté dorsal (gross. 145). che sclérifiée est remplacée par une rangée de puissants massifs seléreux, fortement lignifiés. qui arrivent au contact de l’épiderme ou en sont séparés par 1-2-3 rangs de cellules. On peul en compter une cinquantaine dans la partie plate de la gaine ; les plus gros possèdent souvent plus de cent de ces cellules fortement lignifiées et à lumière très étroite ; parfois de plus petits faisceaux semblables existent entre eux. On retrouve les cellules sécrétrices soit entre ces massifs fibreux, soit entre eux et l’épiderme. Dans la parlie recou- vrante de la gaine, ils deviennent plus petits, plus près l’un de l’autre el se transforment peu à peu en une couche con- tinue, sous-épidermique, sclérifiée, identique à celle du FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 169 sommet de la gaine. Sur la même coupe, les cellules de l’é- piderme ventral sont au contraire le plus souvent restées à parois minces, molles et cellulosiques; la couche sous-épi- dermique est dans le même état et présente seulement de petits îlots de 1-2-3 cellules peu épaissies, dont quelques-unes sont lignifiées, et qui sont à intervalles d'autant plus larges qu'ils sont plus rapprochés des lèvres. Si donc la lignifica- lion envahissait cette couche ventrale, sa structure resterait différente de celle de la face dorsale. Cette structure se continue sur une hauteur d'environ un centimètre; elle est remplacée au-dessous par celle que nous avons signalée au sommet de la gaine. Si cette disposi- lion du système mécanique facilite singulièrement la déchi- rure des gaines âgées en lanières, on peut se demander quelle est sa raison d'être dans les feuilles d’une plante qui reste toujours plongée à quelques mètres sous l’eau et par consé- quent n'a point à se protéger contre la sécheresse à laquelle sont exposées les Plantes marines qui, comme les Zostera, sont découvertes à marée basse, d'autant plus que la paroi externe des cellules épidermiques est aussi plus épaisse que chez les Zostera. D'ailleurs, la précédente description ne s'applique entiè- rement qu'aux gaines tout à fait extérieures d’un bouquet de feuilles, et la différencialion définitive du système méca- nique se fait, d'une manière complète, assez tardivement. Ainsi, la gaine de la feuille la plus âgée, parmi celles qui sont pourvues de leur limbe, possède au sommet la structure indiquée plus haut, avec des éléments définitive- ment différenciés; très souvent, au contraire, la base n’a encore que peu ou point d'éléments épaissis, et les futurs cordons scléreux y sont à l’état de massifs de cellules à parois . très minces, cellulosiques, et à contenu protoplasmique, bien que le limbe et la gaine aient acquis leurs dimensions exlé- rieures définitives. C’est seulement plus tard que les fibres se caractérisent comme éléments mécaniques. Si donc l’épais- sissement et la lignification des éléments de la gaine du 170 CAMILLE SAUVAGZAU). P. Caulini jouent un rèle protecteur, c’est non pas au profit de la feuille à laquelle cette gaine appartient, mais bien des feuilles plus jeunes qu’elle recouvre. Les nervures de la gaine ont les mêmes caractères que celle du limbe ; on en trouve parfois deux de plus, mais qui alors s'unissent à leurs voisines un peu au-dessous de la ligule. La ligule, peu élevée, courbée en arc à concavilé tournée vers le limbe, est comme celle des Zostera formée de deux lames épidermiques se rencontrant au sommet, etrecouvrant à la base une couche de cellules. À son niveau, la partie moyenne du parenchyme foliaire est segmentée par 3-4-5 dia- phragmes transversaux, très rapprochés l’un de l'autre ; sur les bords, les cellules du parenchyme sont plus petites, plus denses, el paraîtraient plutôt donner de la solidité au limbe que faire supposer sa chute. Mais tandis que l’épiderme du limbe est à parois cellulosiques, celui de la gaine est lignifié, et parfois les cellules de Ta ligule Le sont aussi; les fibres du limbe et les fibres lignifiées de la gaine s'arrêtent brusque- ment au niveau de la ligule en s’écartant très légèrement du bord épidermique. Cette différence de structure de l’épi- derme, et cet arrêt des fibres constitue à ce niveau un plan de moindre résistance qui entraîne la chute du limbe, tandis que la ligule reste attachée à la gaine. Les mêmes coupes longitudinales montrent dans chaque nervure 1-2-3 vais- seaux spiro-réliculés, qui ne pénètrent jamais dans la ligule. Les squamules intravaginales sont faciles à observer, ce sont de petites langueltes lancéolées, renfermant quelques cellules sécrétrices. M. Bornet (1) en a compté de 16 à 20 à chaque entre-nœud. En résumé, la feuille du Posidonia Caulini est caractérisée : 1° par un limbe dépourvu de dents, une gaine épaisse, à lèvres beaucoup plus larges dans le bas que dans le haul, et une ligule courbée en arc ; 2° par 13-17 nervures; 3° par (1) Bornet, Recherches sur le Phucagrostis major (loc. cit., p. 23). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 171 une gaine endodermique bien développée autour de chaque nervure; 4° par des canaux aérifères très nombreux, dis- posés sans ordre, de section étoilée, et non sectionnés par de vrais diaphragmes ; 5° par les fibres du limbe, nombreuses, presque complètement cellulosiques, sous-épidermiques, s’a- vançant un peu dans le parenchyme au niveau des nervures; par les fibres seléreuses, lignifiées, en revêtements sous-épi- dermiques au sommet des gaines âgées el en puissants fais- ceaux isolés à la base, produisant des lanières ou des fila- ments par suite de la désorganisation du parenchÿme ; 6° par la présence d’abondantes cellules sécrétrices. 9. Posidonia australis J.-D. Hooker. Cette espèce est cantonnée sur les côtes d'Australie et de Tasmanie. Ses feuilles sont très semblables à celles du P. Caulini dans leur forme et leur nervation, mais elles sont plus larges (10-12 mm.) et plus longues. Une coupe transversale faite à la base du limbe montre une structure comparable à celle de lespèce précédente ; mais les canaux aérifères sont beaucoup plus larges, bordés par un plus grand nombre de cellules, et cloisonnés par de vrais diaphragmes. Dans la région médiane, ils sont le plus souvent sur quatre rangées, mais leur nombre diminue sur les bords et ils se réduisent à deux rangéesexactementalternes. De temps en temps, au point où les murs de séparation se rencontrent, est situé un pelit cordon fibreux lignifié qui n'existe jamais dans le P. Caulini. Ces cordons lignifiés sont plus nombreux et plus constants au point de rencontre des murs de la rangée externe avec la zone sous-épidermique compacte ; ils ne sont jamais au contact direct des canaux aérifères, mais en sont toujours séparés par des cellules du parenchyme. À un niveau plus élevé, le parenchyme lacuneux est réduit à deux rangées de larges canaux aérifères, réguliè- rement alternes, sans cordons fibreux lignifiés. Enfin, à une faible distance du sommet du limbe (fig. 20), la couche sous- 112 CAMILLE SAUVAGEAU. épidermique avec ses nombreuses fibres cellulosiques est uni - que, el le parenchyme lacuneux est réduit à une seul assise ondulée de cellules. EEE va Fig. 20. — Posidonia australis. — Coupe transversale du limbe faite à 1 em. du sommet ; &, canaux aérifères (gross. 145). La gaine est plus épaisse que la base du limbe, et les différences avec le P. Caulini s'accentuent dans la disposition du parenchyme et des cordons fibreux. Les canaux aéri- FRERE EE ES LT 2°" & ET Des: = = =D. = Re. € KrrÉe A tone LR te. LÀ ne 200 SES TS CHR se CO A LÀ W [7 A A Je ET JE ÿ È PER RO TE A+ EParss CCE DOTE Fig. 21. — Posidonia australis. — Coupe transversale faite à la base d'une gaine âgée ; le faisceau libéro-ligneux est indiqué par des hachures (gross. 80). fères et les cordons fibreux lignifiés situés au point de ren- contre des murs sont plus nombreux. Chacun des murs aboutissant à la couche sous-épidermique est opposé à un FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 173 cordon lignifié plus important (fig. 21). La rangée dorsale de ces cordons lignifiés, nombreux, se prolonge dans les lèvres, tandis que la rangée ventrale n’y pénètre pas. A la base de la gaine, on ne retrouve aucune trace des fibres cellulosiques sous-épidermiques du limbe, les cordons lignifiés existent seuls, mais au sommet elles apparaissent un peu au-dessous de la ligule, et existent simultanément avec les cordons lignifiés. La feuille du P. australis se distinguera donc toujours facilement de celle du P. Caulini, par la forme de ses ca- naux aérifères pourvus de diaphragmes et par l'existence des faisceaux fibreux lignifiés dans le parenchyme. L'inflorescence du P. australis se compose de plusieurs épis portés au sommet d’un long pédoncule; ses feuilles, qu'elles soient complètes avec un limbe court, ou qu'elles soient réduites à une gaine, sont plus minces que les feuilles normales, mais possèdent la même disposition des éléments anatomiques. CHAPITRE IV POTAMOGÉTONÉES ASCHS. Les Potamogeton ont des fleurs en nombre variable, à 4 étamines et 4 carpelles qui restent sessiles après la fécon- dation. Les ÆRuppia n'ont que 2 fleurs, situées sur les 2 côtés opposés de l’épi; chacune possède 2 étamines ef 4 carpelles ou davantage, et le pédoncule du fruit s’allonge après la fécondation. IV. — Potamogeton Tourn. (1). Le mode de ramification de la tige décrit par [rmisch pour quelques espèces, est commun à toutes les espèces étu- (1) G.-S. Kunth, Enumeralio plantarum, etc. (loc. cit., t. IIT, 1842). — D, Guil, Dan. Jos. Koch, Sinopsis Floræ germanicæ et helveticæ, 2° édit., 2 partie, Leipzig, 1844 (ordre CXVII, Potameæ, Juss., p. 774-781). — Ad. Chatin, Re- 174 CAMILLE SAUVAGEAU. diées ici. Les axes sont de deux sortes : les uns rampants por- tent des racines et des feuilles écailleuses, les autres dressés portent des feuilles parfaites. Une tige rampante est un sym- pode formé par la réunion bout à bout des deux premiers entre-nœuds des « généralions » successives; les entre- nœuds suivants conslituent la tige dressée. Les feuilles sont alternes distiques (sauf P. densus). Les trois premiers nœuds d’une « génération » portent toujours des feuilles écailleuses, courtes, entourant plus ou moins l’axe. Les autres entre- nœuds, qui appartiennent à la tige dressée, portent des feuilles normales; cependant les feuilles inférieures de la tige dressée sont souvent incomplètement différenciées, sur- tout lorsque la plante végète dans les eaux profondes. Cha- que feuille normale possède une ligule (P. densus excepté). Lorsqu'un Potamogeton doit fleurir, la tige florale se conti- nue au-dessus d'un entre-nœud tellement court que l’on dit souvent que les feuilles sont opposées à la base de la tige florale ; parfois cependant, comme je l'ai observé par exem- ple sur des P. rufescens vivant dans un courant rapide, cet entre-nœud est bien développé. À l’aisselle de chacune de ces deux feuilles, une branche feuillée continue la plante. Une branche peut pousser à l’aisselle de chaque feuille nor- male ; sa première feuille, écailleuse, engainante, sans limbe, est une préfeuille ; souvent, au-dessus d’elle, sont siluées ré- gulièrement une où deux, parfois trois feuilles, également cherches d'anatomie végétale ; famille des Najades (C.R. Acad. des Se., t. XXXIX. 1854, p. 1044). — Th. Irmisch, Ueber cinige Arten aus der näturlichen Pflan- zenfamilie der Potameen (extr. des Abhandl. des Naturwiss. Vereines für die Prov. Sachsen und Thüringen in Halle, 2° vol., Berlin, 1858, 56 p. 3 pl.). — E. Cosson, Note sur la stipule et la préfeuille dans le genre Potamogeton, et quelques considérations sur ces organes dans les autres monocotylées (Bull. soc. Bot., Fr.,t. VIX, 1860, p. 745-720). — Dutailly, Sur la nature réelle des stipules des Rumex et des Potamogeton (Assoc. fr. pour l'avance. des sc., Le Havre, 1877, p. 581). — F.-W.-C. Areschoug, Jemfôrande undersükningar ôfver Bladets anatomi, Lund, 1878, p. 156, pl. IV, fig. 3. -— H. Schenck, Die Biologie der Wassergewächse, Bonn, 1886. — H. Schenck, Vergleichende Anatomie, etc. (loc. cit.). — G. Colomb, Recherches sur les stipules (Ann. sc. nat. Bot., T°s., t. VI, 1887, 76 p.). — C. Sauvageau, Sur une particularité de structure des plantes aquatiques (C. R. de l'Acad. des Sc., 1890). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 175 écailleuses mais mieux développées (P. perfoliatus, P. lu- cens, elc.). Le genre Potamogeton renfermant une cinquantaine d’es- pèces, je n’en étudierai iei qu'un certain nombre prises dans chaque section. En décrivant la feuille de ces différentes espèces, j'insisterai sur la présence et la nature de l’ouver- lure apicale dont j'ai mentionné précédemment l'existence chez les Zostera et les Phyllospadix, et qui se retrouve chez tous les Potamogeton. Section des Enantiophylli Koch ou Oppositifolii Kuntn. La plante complètement submergée a toutes ses feuilles semblables et opposées et privées de ligule. Cette section renferme une seule espèce, le P. densus L. 10. Potamogeton densus L. Le limbe, embrassant à la base, est régulièrement trian- gulaire dans la seconde moitié. [Il possède sept nervures, dont trois plus importantes proviennent directement de la tige, les autres plus extérieures en sont des ramifications comme on le voit à la base de la feuille par transparence. La nervure médiane se continue jusqu'au sommet, et deux nervures latérales les rejoignent à 1-2 mm. au-dessous. L’épiderme des deux faces ventrale et dorsale est identique, mais ses cellules sont plus larges vers le sommet; sur le bord, un certain nombre de ses cellules se prolongent en une pointe aiguë tournée vers le sommet de la feuille; ces dents uni- cellulaires sont lignifiées. À l'extrémité du limbe, le contour est creusé d’une concavité régulière, généralement peu pro- fonde et sans dents. Un cordon fibreux marginal suit chaque bord jusqu'au sommet du limbe. Si l’on examine sous le microscope la face supérieure d'une feuille, soit fraîche, soit mieux après l'avoir traitée par l’eau de Javelle puis colorée, on voit très bien par trans- parence les vaisseaux des nervures; ceux de la nervure mé- diane semblent se prolonger jusqu’au sommet, bien que le 176 CAMELLE SAUVAGEAU. bord légèrement concave paraisse presque toujours intact. Muis, si onl'examine par sa face dorsale, on apercoit à l’ex- trémité une échancrure plus ou moins proforée, due à la chute de quelques cellules épidermiques, et qui permet aux vaisseaux de s'ouvrir à l'extérieur ; c’est l'ouverture apicale. Les parois de l’échancrure en contact avec l'extérieur pren- nent souvent une teinte brune. Sur les feuilles très jeunes, cette échancrure n'existe pas. Nous verrons tout à l'heure ses relations avec la nervure médiane. Une coupe transversale pratiquée à la base d’un limbe adulte montre que la nervure médiane est entourée par un parenchyme à canaux aérifères sous-épidermiques plus ou moins régulièrement disposés. Ce tissu lacuneux est d'autant Fig. 22. — Potamogeton densus. — Section transversale faite vers le milieu de la longueur du limbe; bord du limbe (gross. 220). plus important latéralement que la coupe est faite plus près de la base ; on le retrouve autour des nervures latérales, mais beaucoup moins développé. Le reste du tissu de la feuille est très mince et réduit à une assise unique de cellules entre les deux épidermes, se transformant sur les bords, après cloisonnement, en le cordon fibreux signalé, précédemment (fig. 22). Dans certaines feuilles, cette assise fait même dé- faut et les deux épidermes sont en contact sauf au niveau des nervures secondaires et du cordon fibreux marginal. L'origine de la structure du parenchyme, irrégulièrement lacuneux autour de la nervure médiane, est facile à saisir sur des coupes faites dans des feuilles de quelques millimètres de longueur. On y voit, entre les deux épidermes, une assise unique de parenchyme dont le premier cloisonnement, au lieu de se faire parallèlement au plan de l’épiderme, est obli- que. Au point où ces cloisons obliques rencontrent l’épi- derme, se forme un méat qui, par suite du cloisonnement FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 1 ultérieur, devient un canal aérifère sous-épidermique. Le cloisonnement qui produit le cordon marginal est tardif. Vers la base du limbe, la nervure médiane {fig. 23 A) se compose d'une partie libérienne et d’une lacune vasculaire étroite, arrondie, renfermant des fragments lignifiés de vais- seaux ; l'endoderme n’est pas distinct; 1-4 cordons fibreux Fig. 23. — Potamogeton densus. — Coupe transversale de la nervure médiane. À, base du limbe. B, près du sommet et C au sommet du limbe (gross. 220). lignifiés de une ou quelques cellules chacun, et dont le nom- bre et la disposition varient suivant les échantillons consi- dérés, lui sont adossés. La lacune vasculaire est due à l’ac- croissement entraînant l’écartement des cellules qui entourent les vaisseaux. Les nervures latérales sont plus étroites, mais leur structure est la même. ANN. SC. NAT. BOT. xt, 12 178 CAMILLE SAUVAGEAU. Celte structure de la nervure médiane persiste sur pres- que toute la longueur du limbe, mais très près du sommet, au-dessus du point où l’anastomose avec les deux nervures la- lérales a eu lieu, les coupes transversales donnent une figure différente (fig. 23 B). La lacune vasculaire n’est plus arron- die, mais aplalie en croissant, et renferme des anneaux ligni- fiés indiquant des vaisseaux assez nombreux; la partie libé- rienne persiste. Et enfin, tout à fait au sommet (fig. 23 C), le liber à disparu, le faisceau n’est plus qu’une grande lacune à peu près circulaire, mais irrégulière à cause de la forme arrondie des cellules qui constituent sa paroi. On y trouve les vaisseaux qui devront déboucher à l’extérieur par lou- verture apicale, et qui sont indiqués par des anneaux ligni- fiés, soit isolés dans la lacune, soit adossés à la paroi. Si l'on compare ces faits à ceux que j'ai signalés chez les Zostera, on trouvera entre eux une grande analogie. Une coupe longitudinale, passant par l’extrémité de la ner- vure (fig. 24), montre la position de l'ouverture apicale sur la face dor- sale ; aussi est-elle difficile à aperce- voir quand on examine la feuille par dessus. Les vaisseaux de la nervure y apparaissent nettement ; à leur ex- trémilé, ils se dissocient el sont ré- duits à des anneaux ou des fragments de spire sans lien entre eux. La figure 24 montre en même lemps un stomate rencontré par le rasoir sur la face venirale. Pet tm L'existence de cette ouverture api- sus. — Coupe longitudinale du sommet d'une feuille, Cale est constante chez le P. densus ; passant par lanervure mé nous la relrouverons chez les autres diane. On voit l'ouverture apicalesurlafaceinférieure espèces soit avec les mêmes caractè- et.un stomate sur face: roc. sjit. avec desicaractères-diffé- supérieure (gross. 220). rents. Ilexiste toujours deux sguamules intravaginales à la base de FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 179 chaque feuille, situées une de chaque côté et à peu de dis- tance de la nervure médiane. Le nombre de ces singuliers organes est variable suivant les différentes espèces de Pota- mogeton, mais leur élude, qui à été faite par Irmisch pour quelques espèces, ne nouséclaire guère sur leur raison d’être el est en somme peu intéressante. Je n°v insisterai pas davan- lage et les passerai sous silence pour les espèces suivantes de Potamogeton. La préfeuille est le plus souvent {rès mince, réduite aux deux épidermes, avec 1-4 cordons fibreux très élroits, de longueur inégale, et qui ne vont pas jusqu'au sommet de la feuille. Celle qui est à la base des branches qui naissent près de l’inflorescence, et quiest bifurquée, a la même structure. . Les feuilles de la tige rampante sont écailleuses, leurs bords se recouvrent à la base ; le sommet arrondi est légère- ment échancré en son milieu, sans qu'il s’y produise aucune desquamaltion ; c’est d’ailleurs un fait général chez tous les Potamogelon que les feuilles parfaites seules perdent au som- met quelques cellules épidermiques donnant lieu à l'ouver- ture apicale. L'exemple du P. densus prouve bien que la nature écailleuse des feuilles du rhizome dépend unique- ment de leur situation sur l’axe et non de ce qu’elles sont souvent cachées dans le sol. Celle espèce, en effet, se ramifie très facilement et l’on trouve constamment des rbizomes se développant librement au milieu de Peau, à côté des tiges feuillées, or, leurs feuilles écailleuses restent les mêmes que si elles s'étaient développées dans le sol, mais au lieu d’être blanches elles sont vertes. Tantôt ces feuilles écailleuses sont minces, réduites aux deux épidermes, sauf dans la région médiane où ils sont séparés par une couche de parenchyme, et possèdent plusieurs cordons fibreux lignifiés, étroits, dont quelques-uns peuvent avoir quelques cellules libériennes sur leur face ventrale. Tantôt elles sont plus épaisses, leur structure est lacuneuse avec plusieurs couches de parenchyme, un peu comme à la base du limbe d'une feuille parfaite; leurs cordons fibreux sont 180 CAMILLE SAUVAGEAU. plus nombreux, et 3-4-5 d'entre eux possèdent même sur leur face ventrale un faisceau libérien bien développé. PI Section des Chloephylli Koch ou Graminifolii Kunth. Les espèces de cette section ont toutes leurs feuilles submergées, semblables, sessiles, graminiformes et li- néaires. A1. Potamogeton acutifolius Link. La feuille, rétrécie à la base, conserve ensuile une largeur constante jusqu'au sommel, où elle se termine brusquement en une pointe aiguë (fig. 25 À). Il existe cinq nervures dont les deux marginales plus grêles, adossées intérieurement à un cordon fibreux plus gros qu’elles, sont plus difficiles à voir. La nervure médiane, après son anastomose avec les nervures latérales, se continue jusqu’au sommet. Des cordons fibreux lignifiés courent sous l'épiderme dans le même sens que les ner- vures; ils s'anastomosent entre eux ou s’interrompent de temps en temps (1); leur nombre est variable. Le limbe est souvent pie. 080 porimostton acuéolte recourbé sur les bords, comme — Sommet d'une feuille adulte. A l'indique la figure 26 B, et le er AE te cordon fibreux marginal produit sont indiqués par un pointillé. un gonflement sur le bord du limbe. Surune feuilletrès jeune, encore cachée par la ligule de la feuille qui l'entoure, le som- mel aigu du limbe eslintact, et formé par quelques cellules à parois minces ; la nervure médiane se termine très près au- dessous, ainsi que le cordon marginal de chaque côté. Mais sur une feuille adulte ou même encore en voie de croissance, (1) Leur présence à été signalée par M. Schenck in Vergleichende Ana- tomie, elc. (loc. cit., p. 25). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 181 les cellules de l'extrémité de la pointe sont tombées (fig. 25 B); celle-ci reste ferme grâce aux fibres marginales, el les vaisseaux de la nervure médiane, viennent s'ouvrir à l'extérieur. Parfois, ces vaisseaux sont même protégés à droite et à gauche par une étroite bande fibreuse, lignifiée, qui doit contribuer à maintenir béante l'ouverture apicale. A la base du limbe, le parenchyme est très lacuneux ; immé- diatement autour de la nervure médiane. les canaux aérifères sont parfois irrégulièrement disposés, mais jusqu'à la ner- vure latérale de chaque côté, le parenchyme (fig. 26 B) ne forme que des murs de séparalion entre les canaux aérifères, allant directement d’un épiderme à l’autre, car il n'existe pas de couche sous-épidermique. Aux deux extrémités de chacun de ces murs est, en coupe transversale, un cordon fibreux à éléments bien lignifiés, mais qui manque parfois, ce qui produit l’irrégularité que l’on constate dans la distri- bution de ces cordons (fig. 25 A). Plus haut, cette partie lacu- neuse, très importante à la base, se resserre de plus en plus au voisinage de la nervure médiane. Au contraire, à droite et à gauche, le parenchyme réduit à une assise unique, renfer- mant des cordons fibreux relativement volumineux, augmente en même temps d'importance. On à choisi pour faire la fi- gure 26 B un exemplaire où celte assise esl peu large, mais les cordons fibreux sont généralement plus nombreux. Les nervures, accompagnées aussi de cordons fibreux sont, de même que dans les espèces des deux sections suivantes de Potamogelon, construites sur le même {ype que celles du P. densus (fig. 23 A). Par des coupes dans une feuille de 2-3 mm. de lon- gueur, on se rend compte de l’origine de la structure du pa- renchyme (fig. 26 A). Au début, la feuille se compose d’une seule couche de parenchyme entre les deux épidermes; la nervure médiane apparaît la première, puis les nervures latérales formées chacune aux dépens d’une seule cellule de parenchyme. Ensuite, chacune des cellules de cette couche produit latéralement des cloisonnements qui donneront naïs- 182 CAMILLE SAUVAGEAU. sance aux diaphragmes transversaux, les cellules les plus rapprochées de la nervure médiane commencant les pre- mières. Deux seulement de ces diaphragmes sont repré- sentés sur la figure 26 A. Chaque cellule de parenchyme se sépare de ses deux voisines, suivant {oule leur surface de con- tact, et produit entre deux diaphragmes superposés un méatf, origine d'un canal aérifère, et s'étendant par conséquent d’un Fig. 26. — Polamogeton acutifolius. — À, coupe transversale vers la base d’une feuille jeune; la nervure médiane possède trois vaisseaux (gross. 220). B, coupe transversale vers la base d'une feuille adulte; le dessin s’arrète à la nervure médiane (gross. 145). épiderme à l’autre. Ces cellules ne se cloisonneront plus ensuite que parallèlement à l’épiderme, pour former les murs de séparation des canaux aérifères, et de leur côté, les cellules de l’épiderme continueront à se cloisonner pour suivre l’accroissement en largeur de ces canaux. On com- prend donc pourquoi la disposition du parenchyme, sem- blable au début, est finalement différente de celle du Zostera et de celle du P. densus. Chez le Zostera, les diaphragmes, el par suite les méats entre les cellules mères des murs, ne se forment qu'après un premier cloisonnement, parallèle à l’épiderme, des cellules du parenchyme; d’autres cloisons se produisent parallèlement à la première, et entraînent l’agran- dissement du méat; mais comme celui-ci ne s’avance pas FEUILLES DES MONGCOTYLÉDONES .AQUATIQUES. 183 jusqu’à l'épiderme, une couche sous-épidermique se retrouve constamment sur la feuille adulle. D'autre part, chez le P. densus, le premier cloisonnement est oblique, et il en résulte la produclion de méats, puis de canaux sous-épider- -miques, moins régulièrement disposés. La /igule, bien développée, libre par rapport à la feuille, et insérée à son aisselle, est très engainante à sa base. et aplalie comme la tige qu'elle recouvre. Elle est réduite aux deux épidermes, sauf suivant deux carènes latérales, où le pa- renchyme s’est développé et entoure deux faisceaux conduc- teurs de chaque côté et tout près l’un de l’autre; il n’existe done pas de nervure médiane. Par des coupes transversales dans un nœud, on constate qu'un faisceau de la ligule est une dérivation du faisceau latéral du limbe. Entre les deux épider- mes, et sur toute la largeur de la ligule, sont des cordons fi- breux volumineux à éléments épaissis, bien lignifiés, et nom- breux, car ils ne sont distants l’un de l’autre que de l'épaisseur de 2-3-4 cellules épidermiques ; tous, sauf ceux des carènes, sont produits par l’épiderme ventral: pour cela une cellule épidermique se cloisonne parallèlement à sa surface, et la cellule ainsi séparée vers l'intérieur produit des fibres. La préfeuille est très semblable à la ligule. 12. Potamogeton compressus L. Les feuilles du P. compressus L. ont la même forme que celles du P. acuñifolius, mais elles sont plus longues et un peu plus larges. Il existe aussi cinq nervures libéro-ligneuses, mais les deux plus externes sont indépendantes el éloignées du cordon fibreux marginal. La nervure médiane se prolonge jusqu'au sommet, où elle s'ouvre dans une ouverture apicale semblable à la précédénte. Parfois l’une des nervures latérales, au lieu de s'unir à la nervure médiane par un arc d’anas- tomose convexe, se recourbe en sens inverse, la rejoint plus haul, plus près du sommet, et l'accompagne jusqu'à son extrémité en lui restant accolée. Le système scléreux est encore plus important que dans le P. acutifolius, par le nom- 184 CAMILLE SAUVAGEAU. bre et la grosseur des cordons fibreux lignifiés, car, outre ceux qui accompagnent les cinq nervures, ilen existe de nom- breux, indépendants, sous-épidermiques, et qui leur sont parallèles ; on en suit qui, sur plusieurs centimètres, ne présentent ni interruplion ni union avec leurs voisins. Comme dans l'espèce précédente, les deux cordons fibreux marginaux se prolongent très souvent dans l'extrémité aiguë, où ils prolègent la nervure médiane. J'ai insisté sur la présence, dans le limbe de ces deux espèces submergées, de cordons fibreux, épaissis, et bien lignifiés. Elle contredit en effet assez vivement les conclusions d’après lesquelles les éléments de soutien diminueraïent ou disparaîtraient chez les plantes aquatiques, d'autant plus qu'on ne peut pas invoquer, pour expliquer cette formation, le besoin pour la plante de résister à un courant énergique de l’eau ambiante, car ces espèces vivent fréquemment dans des fossés où des étangs d’eau non courante. 13. Potamogeton obtusifolius Mertens et Koch. Bien que le P. obtusifolèus ressemble beaucoup au ?. acu- tfolius par son aspect extérieur el par sa structure, le système mécanique disparail presque entièrement de ses feuilles. On n’y trouve plus que le cordon marginal toujours bien développé, des cordons fibreux accolés aux nervures et quelques autres, faibles, aux extrémités des murs de sépara- tion des canaux qui entourent la nervure médiane. Par suite, l'examen des feuilles au microscope, ou même à la loupe, suffit pour distinguer ces deux espèces voisines. La pointe du sommet du limbe est plus courte et arrondie, et il y a trois nervures au lieu de cinq. Sur une feuille très jeune, on voit facilement les quelques vaisseaux de la nervure médiane se terminer dans cette pointe immédiatemant au contact de l’épiderme. Sur une feuille adulte, les cellules de l’épiderme de cet endroit tombent el produisent une ouverture apicale très nette. Assez fréquemment, l’une des nervures latérales FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 185 vient elle-même se terminer dans l'ouverture apicale, contre la nervure médiane. 14. Potamogeton pusillus L.—15. P. hichoides Chamis. et Schlecht. — 16. P. pauciflorus Pursh. Ces trois espèces, plus grêles et plus délicates que les pré- cédentes, sont très semblables l’une à l’autre et peuvent être réunies dans une même description anatomique. Leurs feuilles, étroites, possèdent trois nervures accompagnées cha- cune de quelques fibres plus ou moins lignifiées. De même que dans les espèces précédentes, un cordon fibreux marginal, lignifié, reste isolé tout le long de chaque bord et se termine dans la pointe du sommet du limbe. Ici encore les feuilles très jeunes ont leur extrémilé inlacte, mais plus tard une ouverture apicale terminale, souvent protégée par les extré- milés des cordons fibreux marginaux, prend naissance par la chute de quelques cellules, au point où aboulissent les 1-2-3 vaisseaux de la nervure médiane. En faisant varier la mise au point dans l'examen d’une feuille rendue transpa- rente puis colorée, on reconnait très facilement, dans la ner- vure médiane, les vaisseaux à épaississements réticulés très délicats qui aboutissent à l'ouverture extérieure; si l’on suit les vaisseaux vers le bas, on ne retrouve plus d’ornements continus, mais seulement des anneaux isolés ou des fragments de spirale, sauf aux points où ils reçoivent les nervures transversales, qui elles-mêmes sont munies d'ornements réti- cuiés. La communication des nervures entre elles, ou celle de la nervure médiane avec l'extérieur, semble donc assurée par celte disposition. Tout à fait à sa base el sur une très courte hauteur, le limbe est souvent très rétréci, et sa section transverse est réduite à un demi-cercle, dont le bord convexe est en des- sous. De la couche de parenchyme qui entoure la nervure médiane partent des murs rayonnants, souvent réguliè- rement disposés, qui vont aboutir à l’épiderme ; un cor- don fibreux existe au point où quelques-uns de ces murs 386 CAMILLE SAUVAGEAU]. rencontrent l’épiderme; leur nombre est donc variable. Si la coupe transversale n’est pas pratiquée immédiatement à la base de la feuille, elle se compose de la partie médiane encore en demi-cercle et, en plus, de deux bandes minces, la- térales, réduites aux deux épidermes el à une unique assise de parenchyme, dans laquelle la nervure latérale à pénétré. Cette partie plate, à part le cordon fibreux marginal et les éléments lignifiés qui parfois accompagnent la nervure laté- rale, ne renferme aucun élément fibreux. La ligule, hbre à l’aisselle de la feuille, est réduite aux deux épidermes entre lesquels sont intercalés de nombreux cordons fibreux lignifiés, dont quelques-uns possèdent sur leur face ventrale des éléments étroits, semblables aux élé- ments libériens. Section des Coleophylli Koch ou Vaginiferi Kunth. Toutes les feuilles sont submergées, graminiformes, linéaires, sessiles, semblables entre elles ; la ligule est soudée à la base engainante de la feuille, mais libre au-dessus. 17. Potamogeton Robbinsii Oakes. Le P. Robbinsu est une espèce américaine dont la feuille, large de 4-5 mm. au-dessus de la gaine, se termine en pointe . et porte sur ses bords des dents monocellulaires, aiguës, épidermiques, tournées vers le haut. Un cordon fibreux marginal, relativement puissant, court au-dessous de ces dents, sans interruption, depuis la base de la feuille jusque tout près de l'extrémité. Outre les fibres qui accompa- gnent les nervures, on voit aussi de nombreux cordonsfibreux isolés, pareils à ceux des P. acutifolius et P. compressus. I yacinq nervures ; les deux latérales, après avoir recu Îles deux marginales, se réunissent sous un angle aigu à la ner- vure médiane qui se prolonge jusqu'au sommet. Sur la feuille très jeune, le sommet est intact; sur la feuille adulte, quel- ques cellules situées entre les deux dents du sommel sont tom- bées, et ont laissé un étroit orifice protégé par ces dents, et FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 187 auquel aboutit la nervure médiane, dont on voit bien les vaisseaux par transparence. Pas plus que précédemment, la présence d'aussi nombreux cordons fibreux dans le limbe ne peut être expliquée par le besoin de résistance de la plante à la force d’un courant d’eau rapide, car cette espèce croît dans les marécages (1). La base du limbe, en coupe transversale, est composée d’une partie médiane étroite, épaisse et lacuneuse, et laté- ralement d’une bande plus large, très mince el sans lacune. De la couche parenchymateuse qui entoure la nervure mé- diane partent des murs de séparation entre les canaux; mais ceux-ei ne sont pas, comme dans les espèces précédentes, limités extérieurement par l'épiderme, mais par une assise sous-épidermique constante. Des cordons fibreux lignifiés, isolés ou réunis, entourent la nervure, el souvent, mais non constamment, un cordon fibreux lignifié sous-épidermique est situé à l'extrémité d’un mur. A la base du limbe, le passage est insensible de la région médiane aux parlies minces latérales, mais plus haut, leur démarcation est brusque. Cette partie latérale est formée par une assise unique de parenchyme intercalée entre les deux épidermes ; elle renferme les nervures latérales et de nom- breux cordons fibreux, formés aux dépens, non pas du pa- renchyme, mais de l’épiderme dorsal. La parlie engainante possède de nombreux cordons fibreux dans toute son étendue. La ligule est formée uniquement par les deux épidermes, entre lesquels sont de nombreux cor- dons fibreux lignifiés ; elle n'a pas de nervure médiane, mais deux nervures latérales symétriques, et l’on reconnait, par des coupes transversales à ce niveau, que ces deux nervures ligulaires sont des dérivations des deux nervures latérales de la gaine. Il se produit donc ici, au sommet de la gaine, la même chose qu'à la base de la feuille du 2. acutifolius et d’autres espèces. (4) Asa Gray, Manual of the Botany of the Northern United States, 5° édit., 4867, p. #90. 188 CAMILLE SAUVAGEAU. 18. Potumogeton pectinatus L. —— 19. Potamogeton marinus L. Ces deux espèces sont très semblables l’une à l’autre. Les trois nervures sont accompagnées de cordons fibreux dont l'importance varie avec les exemplaires ; le limbe ne pré- sente pas d’autres fibres. La nervure médiane se prolonge jusqu'au sommet qui, sur les feuilles très jeunes, est pointu et entier, mais, et par suite de l'absence de dents et de cor- dons fibreux marginaux, la chute de cellules sur toute la largeur produit une sorte de troncature ; les vaisseaux spiro- réliculés qui y aboutissent étant très délicats, il est moins facile de les voir que dans les espèces précédentes. Les deux nervures marginales sont très près du bord. Dans les exemplaires à feuilles étroiles, on trouve de chaque côté un seul canal aérifère, grand, entre la bande parenchymateuse qui soutient la nervure médiane, et la nervure marginale ; dans ceux à feuilles larges, on trouve tous les intermédiaires entre la disposition précédente et celle de deux rangées de 2-4 canaux aérifères de chaque côté. Mais quel que soit leur nombre, ces canaux sont toujours limités extérieurement par une couche sous-épidermique.M. Schenck a déjà signalé cette particularité chez le P. pectinatus (1), mais celte structure se retrouve dans les {rois espèces de Coleophylli et est spéciale à cette section. Dans les autres espèces de Potamogeton, on peut rencontrer, sur les coupes transversales, certains canaux aérifères pareillement limités par une couche sous-épidermique, mais ce n’est Jamais qu'un accident limité à quelques-uns ou qui, tout au moins, ne se retrouve pas dans des coupes successives, ou des coupes pratiquées à différentes hauteurs. La partie engainante est 3-nerviée dans les feuilles étroites, 5-nerviée dans les feuilles larges ; la gaine sclé- rifiée qui entoure les nervures varie d'importance, mais est toujours mieux développée que dans le limbe. Comme dans (1) H. Schenck, Vergleichende Anatomie, etc. (loc. cit., p. 16}. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 189 le limbe, les cordons fibreux font défaut dans le paren- chyme, mais les lèvres en possèdent chacune 3-4 bien lignifiés. Sur la face ventrale, la couche épidermique fait dé- faut, ou présente elle-même avec l’épiderme des méats plus ou moins grands. La ligule, plate ou légèrement concave dans la région contre laquelle s'appuie le limbe, possède de chaque côté, au point où elle se recourbe pour former les lèvres, une nervure latérale adossée à un cordon fibreux, qui est une dérivation de la nervure latérale de la gaine se rendant dans le limbe. Entre ces deux nervures, sont de nombreux cor- dons fibreux intercalés entre les deux épidermes; ils ne proviennent pas de la gaine, puisqu'ils y manquent, mais prennent naissance à la base même de la ligule. Ceux des lèvres de la ligule ne sont pas non plus simplement le pro- longement de ceux des lèvres de la gaine, car ils y sont plus nombreux que dans celle région. Ainsi, tandis que les cor- dons fibreux font totalement défaut dans le limbe, ils sont nombreux dans la ligule. La préfeuille, petite et cachée dans la gaine de la feuille mère du bourgeon, est réduite aux deux épidermes et à des cordons fibreux lignifiés, qui courent sur toute sa longueur. Les feuilles écailleuses du rhizome ont 1-2-3 assises de cellules entre les deux épidermes, avec de nombreux cordons fibreux lignifiés; souvent on trouve aussi 1-2 faisceaux conducteurs, également entourés d'éléments fibreux lignifiés. Section des Homophylli Koch ou Conformifolii Kunth. Toutes les feuilles sont submergées, de même forme, ovales, oblongues ou lancéolées ; les feuilles supérieures sont par- fois émergées mais non nageantes. 20. Potamogeton crispus L. Les feuilles du P. crispus sont assez variables comme aspect extérieur; sur certains exemplaires elles sont unies et régu- lièrement plates, sur d’autres elles sont fortement ondulées 190 CAMILLE SAUVAGEAU. crispées. Suivant leur largeur elles sont 3- ou 5-nerviées, el la nervure médiane se prolonge jusqu'au sommet. Le bord de la feuille porte de peliles saillies terminées chacune par une dent pointue, conique, plus grande que les autres cellules épidermiques. Un cordon fibreux grêle, peu appa- rent, suit le bord dans ses ondulations et disparaît avant d'arriver au sommet. A l'endroit où aboutit la nervure mé- diane, est une petile échancrure, souvent peu nette, due à la chute de quelques cellules. Tantôt cette ouverture apicale estimmédiatement protégée par une dent de chaque côté, lantôtau con- traire les dents en sont trop éloignées pour jouer vis-à-vis d’elle un rôle pro- Fig. 21. — Polamogelon crispus. — Sommet de la lecteur ; la figure feuille (gross. 80). 27 montre un état moyen. Les vais- seaux y sont parfois difficilement visibles; l'ouverture est cependant conslante, el ses parois prennent souvent une teinte brunâtre probablement due au contact de l’eau. La structure du limbe ressemble à celle du P. densus, je n'y insiste pas. La ligule, très délicate, se détruit de bonne heure ; elle ne s’insère pas exactement dans l’aisselle de la feuille, et reste adhérente, dans sa région médiane, sur une certaine hauteur. De même que dans les espèces examinées précédemment, la feuille recoit trois faisceaux libéro-ligneux de la tige, l'un médian pour la nervure médiane, les deux autres donnent, à peine arrivés dans la feuille, une branche latérale qui devient une nervure de la ligule. Tandis que les cordons fibreux isolés font défaut dans le limbe, ils sont nombreux entre les deux épidermes de la ligule. Les feuilles écailleuses du rhizome présentent la plus grande anälogie avec la ligule. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 191 Dans les espèces de Potamogeton étudiées jusqu'ici, l'ou- verture apicale était tout à fait terminale, et accusée exté- rieurement par une échancrure du sommet de la feuille ; elle est plus difficile à retrouver dans les trois espèces sui- vantes, dont les nervures plus nombreuses, arquées, con- vergent vers le sommet. 21. Potamogeton perfoliatus L. La feuille, amplexicaule à sa base, porte sur son bord des dents monocellulaires assez nombreuses mais peu saillantes qui, de même que le cordon fibreux marginal, s'arrêtent au sommet, là où le bord devient légèrement concave. Les ner- vures latérales les plus extérieures, après avoir reçu les autres, s'unissent à la nervure médiane; en ce point, les vais- seaux spiralés et réticulés sont plus nombreux qu'ailleurs. Sur la face inférieure, la feuille laisse voir dans le point où la nervure médiane paraissait se terminer, un peu au-dessous du bord, une ouverture à contour irrégulier, et d’ailleurs assez difficile à constater. Mais les coupes longitudinales du sommet passant par la nervure médiane, montrent cette ouverture, qui est due à la désorganisation de quelques cellules épidermiques, mais laisse Toujours intact le bord terminal de la feuille. Après son anastomose avec les autres nervures, la nervure médiane ne se continue pas dans la même direction, comme chez les espèces précédentes, mais elle se recourbe directement vers la face inférieure jusqu'à l'épiderme. Les cellules épidermiques contre lesquelles elle aboutit se détruisent de 1rès bonne heure, donnent lieu à une ouverlure apicale et assurent ainsi la communication entre la nervure médiane et l'extérieur. Ces fails se consta- tent d’ailleurs plus facilement chez le P. lucens. Vers sa base, le limbe est lrès lacuneux et parcouru par de nombreuses nervures ayant la structure ordinaire ; à part le cordon marginal, aucune fibre n’est isolée dans le parenchyme. Plus haut, les nervures seules sont entourées de parenchyme lacuneux, et deux nervures voisines sont 192 CAMILLE SAUVAGEAU. séparées par une assise unique de cellules entre les deux épidermes. La ligule longue, mince, très engainante, est réduite à ses deux épidermes ; sur cerlains exemplaires el en quelques points une couche de parenchyme est intercalée entre eux. Les cordons fibreux lignifiés sont très nombreux et lui don- nent de la résistance ; les uns sont isolés, les autres accom- pagnent un paquet de cellules très étroites et semblables à des éléments libériens. On les reconnaît d'ailleurs en exami- nant directement la ligule à un faible grossissement, car les cordons exclusivement fibreux se terminent librement avant d'arriver au sommet, tandis que les aulres s’anastomosent entre eux. Cetle réunion se fait en deux groupes, l’un droit et l’autre gauche, par rapport à la ligne que suivrait une ner- vure médiane si elle existait. La préfeuille est semblable à la ligule, mais les éléments conducteurs sont moins bien représentés. Au-dessus, on trouve deux feuilles alternes, semblables à la préfeuille, et c'est seulement le quatrième nœud qui possède une feuille parfaite munie d’une ligule. Les feuilles écailleuses du rhizome ont entre les deux épi- dermes 2-3-4 assises laissant de nombreux méats entre leurs cellules. La paroi externe de l’épiderme dorsal est plus épaisse que celle de l’épiderme qui regarde la tige. Les nervures sont nombreuses, formées de cellules libériennes adossées à un cordon fibreux lignifié. 22. Potamogeton lucens L. Toutes les feuilles sont plus ou moins brièvement pé- liolées, avec un limbe ordinairement large nettement arrondi au sommel où bien terminé par un mucron. Deux des nervures latérales les plus extérieures, après avoir reçu leurs voisines, se joignent près du sommet de la feuille à la nervure médiane (fig. 28). Celle-ci, riche en vaisseaux spiro- réticulés, se renfle légèrement et se prolonge un peu au delà de son anastomose sans arriver jamais jusqu’au bord FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 193 qui reste entier; elle se recourbe vers la face inférieure et s’y ouvre dans une ouverture due à la chute de quelques cellules épidermiques. Dans les feuilles mucronées la nervure médiane se prolonge dans la pointe, soit seule, soil accom- pagnée par 2-4 nervures latérales, suivant la longueur et l'importance du mucron par rapport au limbe, et s'ouvre sur la face inférieure, près de l'extrémité. La section du pétiole est plate ou légèrement concave en dessus, très convexe en dessous ; on trouve à la base cinq ner- vures disposées sur un are à grand rayon; la médiane est plus grosse que les autres, et chacune est entourée par un cercle continu ou interrompu de 1-2 rangées de cellules sclérifiées. Je re- viendrai plus loin, à propos du P. na- ans, sur la compo- Fig. 28. — Polamogelon lucens. — Sommet de la silion des éléments feuille (gross. 5). libéro-ligneux. Les canaux aérifères sont nombreux, et sur deux rangées autour de l'arc suivant lequel les nervures sünt disposées ; les murs de séparation, qui se dirigent vers l'extérieur, mul- liplient parfois leurs cellules à leur contact avec l’épiderme, mais ici, comme chez les autres Potamogelon à feuilles pé- tiolées, l'existence de cette couche sous-épidermique n’est qu'un accident. Certains pélioles n’ont aucun cordon fibreux ou conduc- teur en dehors des nervures; d’autres, au contraire, en pos- sèdent au point de rencontre des murs entre eux ou avec l’'épiderme, et leur nombre est variable suivant le point con- sidéré du pétiole; ils sont uniquement fibreux et cellulo- siques ou lignifiés, ou bien fibreux et libériens, ou encore fibreux et libéro-ligneux. ANN. SC. NAT. BOT. XII, 15 194 CAMELEE SAUVAGEAU. Le limbe commence graduellement par l'élargissement du pétiole qui devient comme ailé; la nervure médiane se conserve fortement saillante sur la plus grande longueur du limbe et, pendant quelque temps, elle n’est que le prolonge- ment anatomique du pétiole. Le parenchyme est plus lacu- neux que celui des feuilles étudiées précédemment : il laisse entre les nervures secondaires de nombreux canaux aéri- fères, sous-épidermiques, séparés l’un de l’autre par des murs d'une hauteur de 1-2-3 cellules ; sur un limbe jeune au contraire il est réduit à une assise continue entre les deux épidermes. La ligule est très longue, embrassante, membraneuse, transparente et de couleur verte; elle est libre du limbe de- puis sa base. Le pétiole y a laissé une impression aplatie ou légèrement concave; deux carènes latérales, fortement sail- lantes à la base, s’amincissent plus haut et disparaissent avant d'arriver au sommet. Les cellules de l’épiderme dorsal sont plus étroites, et à paroi externe plus épaisse, que celles de l’épiderme ventral et même que celles de la feuille. Un faisceau libéro-ligneux, protégé par 1-2-3 ares de fibres bien lignifiées, court dans chaque carène. Le parenchyme est réduit à 1-2 assises de cellules, et à de nombreux cordons fibreux lignifiés; 15 à 18 d’entre eux sont accompagnés sur leur face ventrale de cellules libériennes {rès étroites; ces derniers se réunissent de chaque côté aux deux grosses ner- vures latérales qui restent indépendantes l’une de l’autre. La préfeuille est courte, mince, réduite aux deux épidermes avec quelques cordons fibreux. J'ai observé sur plusieurs exemplaires une curieuse transformation : la deuxième feuille au-dessus de la préfeuille, par conséquent la troisième du bourgeon, habituellement incomplète et semblable à la préfeuille, ressemblait à s’y méprendre à une feuille de P. peclinatus dont le limbe serait resté court. La gaine présentait une nervure médiane entourée d’un cerele sclé- reux, deux nervures latérales réduites à quelques cellules libériennes adossées à un cordon fibreux, et des cordons FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 195 fibreux isolés entre les nervures. Les trois nervures vont dans le limbe, mais les deux latérales envoient une dérivation dans la ligule; la ligule comprend, entre les deux épidermes, les deux nervures et les cordons fibreux qui viennent directe- ment de la gaine. Les faits se passent donc exactement comme dans les Potamogeton de la section Co/eophylh; mais la nervure médiane du limbe se prolonge vers le som- met, et s'ouvre sur la face inférieure, comme dans les feuilles parfaites. La structure des feuilles écailleuses du rhizome ressemble à celle du P. perfoliatus. 23. Potamogeton plantagineus Ducros. Les feuilles submergées correspondent comme forme el comme structure à celles du P. /ucens:; elles sont cependant plus longuement péliolées. Les feuilles supérieures, assez nombreuses, parfois rap- prochées en roselte terminale, sont plus ou moins émergées. C’est à cause de la présence de ces dernières que Koch avait placé cette espèce sous le nom de P.: Hornemanni Mever, dans la section des ÆHeterophylli, entre le P. rufescens Schrad. et le P. gramineus L. (1). Mais ces feuilles supé- rieures présentent la même structure, dans le pétiole et dans le limbe, que les feuilles submergées; le parenchyme en pa- lissade est complètement absent, et la face supérieure ne présente que de rares stomales. Il me semble donc que c'est avec raison que d’autres auteurs, comme Grenier et Godron (2), Cosson et Germain de Saint-Pierre (3), placent le P. plantagineus près du P. lucens parmi les Homophylli. Section des Hetcrophylli Koch ou Diversifolii Kunth. Toutes les espèces de cette section ont leurs feuilles supé- (4) Koch, Sinopsis, etc. (loc. cit., p. 777). (2) ( Grenier et Godron, Flore de France, t. LU, 1856, p. 315. (3) Cosson et Germain de Saint-Pierre, Flore des environs de Paris, 4861, p. 707. 196 CAMILLE SAUVAGEAU. rieures péliolées, nageantes, à limbe coriace, ovale-oblong ou lanceolé avec nervures arquées convergentes au sommet, et parenchyme en palissade; les feuilles nageantes ont aussi une ouverlure apicale. L'ouverture apicale, dans les espèces précédemment citées, était terminale (CA/oephyll, Coleophylli) où presque termi- nale et sur la face inférieure (Homophylli pro parte); ces deux disposilions se retrouvent sur les feuilles submergées des Heterophylli sui- vant qu’elles sont gra- miniformes ou plus ou moins oblongues à nervures arquées. Avant d'étudier sé- parément les diffé- rentes espèces de cette section, j'indiquerai la structure particu- lière des faisceaux li- béro-ligneux et du parenchyme des feuil- Fig. 29. — Polamogeton natans.— Section trans- versale d’une nervure médiane prise à la base les nageantes. d’un pétiole de 6 cm. de long, mais dont le Sur une coupe limbe n’est pas encore complètement déroulé. t, l, tubes criblés (gross. 220). transversale dans un péliole jeune de P. nalans, chaque nervure, de section arrondie, se compose d'une lacune vasculaire à contour ovale ou arrondi, limitée par des cellules disposées radialement, et qui renferme de pelits anneaux étroils, lignifiés (fig. 29). Ces anneaux, qui représentent autant de vaisseaux, sont au début très rap- prochés l’un de l’autre et renfermés dans la lacune alors beaucoup plus étroite. Les cellules qui l'entourent, en s’ac- croissant, distendent les contours du méat qui s’élargit à la manière d’un canal aérifère; les vaisseaux qui y sont ren- fermés, ne pouvant naturellement suivre cel accroissement, se séparent les uns des autres, et on les retrouve isolés dans FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 197 la lacune et disposés d’une façon quelconque. Ils ne sont pas les restes de vaisseaux autrefois plus nombreux et en partie résorbés, mais des vaisseaux isolés dans un tube plus large que celui qui les entourait au début. À celte période Jeune du développement, les cellules qui entourent la lacune vasculaire ne sont pas différenciées, et sont remplies d’un protoplasme dense; les tubes libériens ont un contenu moins dense que les cellules voisines, et se laissent facilement reconnaitre. On remarquera que la figure 29 ressemble à la figure 3 qui re- présente une nervure de Zos/era. En coupe longitudinale, les vaisseaux sont étroits, à paroi cellulosique très mince, à épaississements annelés, bien lignifiés et relativement très distants l’un de l’autre. Aucune des cellules qui entourent la lacune n’est différenciée. Cet état transitoire correspond à f'élat qui est définitif chez le P. densus et autres (fig. 23, A). Plus tard, à une époque nettement tranchée de la précédente, les cellules inférieures de bordure de la lacune vasculaire, et aussi quelques-unes à gauche et à droite de celles- ci, disposées sur une bande transversale entre la région li- gneuse et la région libérienne, se transforment (fig. 30). Elles grossissent rapidement, quel- ques unes font saillie dans la lacune vasculaire, leur proto- Fig. 30. — Potamogelon natans. — plasme disparait, leur mem- Section transversale au sommet du brane s’épaissit et se lignifie ; RE ent 20 EVE s a 18 Lo] TER elles deviennent des vaisseaux parfaitement caractérisés. Cependant, dans la nervure mé- diane, plus grosse, la lacune vasculaire reste toujours faci- lement visible ; dans les nervures latérales, où cette la- cune vasculaire est parfois très petite, ces nouveaux vaisseaux font fortement saillie, l'obturent plus ou moins complète- ment, et c'est seulement par une observation plus attentive que l’on reconnaît son existence, el aussi que l’on est en 198$ CAMBLILE SAUVAGEAE;. face non d’un élat primitif mais d’un état secondaire. En coupe longitudinale, ce bois de seconde formation se com- pose d'éléments larges, à ornements spiro-réliculés, très serrés ; l'aspect est donc tout différent de celui des premiers vaisseaux annelés. Enfin, dans une partie adulte, ces vaisseaux larges ont à leur Lour complètement ou en grande partie disparu ; la lacune que leur dispa- rition occasionne s'a- joute à la première qui prend la forme irrégu- lière représentée dans la figure 31. Cette la- cune à donc une ori- gine double: 1° elle s'est produite par l’a- grandissement des cel- lules qui l’entourent, à la manière d’un ca- Fig. 31. — Polamogelon natans. — Section trans- nal intercellulaire; ses versale d’une nervure médiane prise à la base. SRE . diraillés à du pétiole d’une feuille nageante adulte. #, 6, VERSER ITailies pal tubes criblés (gross. 220). l'agrandissement en largeur et en longueur de ce lissu jeune, sont comme dilacérés, ils se déchirent, leurs anneaux s'isolent ; 2° elle s’est augmentée à un état de développement du pétiole plus avancé, par la résorp- lion des vaisseaux formés en second lieu. Il ÿ a donc bien un premier bois primaire el un second bois primaire (1). Cette formation du bois en deux temps successifs, dans les faisceaux libéro-ligneux de la feuille, pourrait être com- parée à ce qui se passe dans les faisceaux de la tige de beau- coup de Monocotylédones, où le premier bois formé est souvent remplacé par une lacune. Mais je ne crois pas qu'on (1) On pourrait appliquer à ces deux sortes de bois primaire les déno- minations de protoæylème et de métaxylème qui ont été employées par les auteurs dans des circonstances comparables. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 199 y trouve un exemple de double origine aussi bon et aussi frappant que celui que je viens de décrire. Le P. natans pourrait être pris comme type de cetle production; dans les espèces qui ont été étudiées jusqu'ici, le faisceau libéro- ligneux produirait seulement du premier bois primaire, à éléments élroits, mais à ornements de diverses sortes (fig. 23, A). Les P.lucens et P.plantagineus, qui sont les deux seules espèces à feuilles pétiolées des seclions précédentes, ont la même origine de la lacune que celle du P. natans. Le limbe des feuilles nageantles des Æeterophylli, présente aussi une disposition du parenchyme dont la description est applicable à loutes les espèces. Au-dessous de l’épiderme supérieur, est un pa- renchyme en palis- sade (fig. 32), mais moins différencié que dans la plupart des feuilles des plantes aériennes ; ses cel- lules sont en coupe D) dela ee pevpess men gues que larges, ra- 115). rement deux fois plus longues; le contact entre les parois latérales est incomplet et laisse des méats. Les stomates sont nombreux, el corres- pondent à des chambres sous-stomaliques plus ou moins ré- gulièrement taillées dans ce parenchyme. Le tissu palissa- dique occupe à peu près la moilié supérieure de l'épaisseur de la feuille nageante ; la moitié inférieure est non pas un parenchyme spongieux, comme celui des feuilles des plantes aériennes, mais un parenchyme très lacuneux; des murs d’une seule épaisseur de cellules réunissent le parenchyme en pa- lissade à l’épiderme inférieur, de manière à limiter de vastes chambres aérifères; l'existence d’une couchesous-épidermi- que inférieure n’est qu’accidentelle. Cette structure du pa- renchyme est la mème pour toutes les feuilles nageantes de 200 CAMILLE SAUVAGEAU. Potamogeion : lorsque la feuille est épaisse, comme dans les P. natans, P. polygonifolius, P. gramineus, etc., les cel- lules sont grandes ; lorsque la feuille est petite et plus mince, comme dans les P. Vaseyi, P. spirillus, P. Claytoni, ele.,les deux couches conservent la même importance respective, le nombre de leurs éléments, en coupe transversale, est à peu près le même, mais ils sont de plus petites dimensions. 24. Potamogeton Vaseyi Robbins. Celte espèce a de nombreuses feuilles sabmergées et seu- lement un bouquet terminal peu fourni de très petites feuilles nageantes, arrondies, ovales. Quand la plante est dépourvue de ses feuilles nageantes, elle ressemble à s'y méprendre aux P. pusillus et P. trichoides. D'ailleurs, la ressemblance n'est pas seulement extérieure : le nombre et la structure des nervures des feuilles submergées, la nature de l’ouver- ture apicale, et la structure du parenchyme concordent aussi avec celles de ces deux espèces. Les feuilles nageantes sont petites et délicates. Le pétiole possède trois faisceaux libéro-ligneux protégés par un arc de sclérenchyme plus ou moins développé; à la base du pé- tiole d’une feuille adulte, le bois primaire seuls’est développé dans la lacune vasculaire étroite ; au contraire les deux sortes de bois primaire existent au sommet du pétiole. Les ner- vures arquées convergent au sommet ; malheureusement toutes les feuilles nageantes que j'ai étudiées étaient brisées tout à fait au sommet, et je n'ai pas pu voir comment la nervure médiane s’y terminait ; cependant, par analogie avec les autres feuilles nageantes, il est permis d’affirmer qu'elle s'ouvre à l'extérieur. 25. Potamogeton sptrillus Tuck. Celle espèce est encore plus grêle et plus délicate que la précédente. Le plus grand nombre de ses feuilles, très min- ces, de moins de { mm. delargeur sont submergées, et quel- ques-unes seulement pelites, ovales, coriaces, sont nageantes. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 201 Les feuilles submergées possèdent trois nervures non ac- eompagnées de fibres ; un cordon fibreux marginal de quel- ques cellules épaissies, peu ou point lignifiées, existe de chaque côté. Après que la nervure médiane a reçu les deux latérales, elle se continue jusqu'à l'extrémité, où ses 1-2 vaisseaux spiro-réliculés s'ouvrent dans une ouverture api cale très étroite, due à la chute de deux ou trois cellules. Le pétiole est parcouru par cinq nervures grêles, proté- gées par quelques cellules scléreuses ; à son sommet, la lacune vasculaire, irrégulière sur les côtés, a dû renfermer les deux sortes de bois primaire. La nervure médiane, au lieu de se recourber vers la face inférieure, un peu au-dessous de l'extrémité, vient y aboutir, comme dans les feuilles submergées. 26. Potamogeton Claytoni Tuck. Les feuilles submergées, nombreuses, larges d'environ 3-5 mm. et longues de 5-10 mm., sont terminées en pointe. Elles ont cinq nervures accompagnées d'éléments fibreux, et deux cordons marginaux lignifiés, qui cessent brusquement avant d'arriver au sommet. L’extrémité des feuilles jeunes montre par transparence 4-6 vaisseaux qui arrivent à une distance de 1-2 cellules de l'épiderme; celles-ci tombent plus lard, et laissent une troncalure analogue à celles des P. pectinatus et P. marinus. Les canaux aérifères sont relativement larges et nom- breux; les murs de séparation se rendent directement d’un épiderme à l’autre, ou se joignent à un mur transversal; dans ce dernier cas, les canaux des deux rangées alternent entre eux. Vers le milieu de la longueur du limbe, l'épaisseur diminue, et les murs sont plus courts; cetle région, vue de dessus, montre une sorte de réliculation (1) qui est due uniquement aux murs de séparation des canaux et aux dia- phragmes, et non à un mode spécial de ramification des nervures. (1) Asa Gray, Manual of the Botany, etc. (loc. cit. p. 485). 202 CAMILLE SAUVAGEAU. La ligule, bien développée et libre à l’aisselle des feuilles, possède deux assises de parenchyme entre les deux épi- dermes avec quelques faisceaux libériens adossés à des cor- dons fibreux. Ici, comme dans plusieurs des espèces précé- demment étudiées, bien que le parenchyme du limbe soit dépourvu de cordons fibreux lignifiés isolés, la ligule en renferme un cerlain nombre. Les cinq nervures du péliole sont entourées d’une gaine scléreuse; leur lacune vasculaire renferme les deux sortes de bois, tandis que les feuilles sabmergées ne développent que du bois primaire. La nervure médiane des feuilles nageantes se recourbe près du sommel vers la face inférieure et s’y ouvre. 27, Polamogelon gramineus L. — 28. Potamogeton nitens Web. Tandis que les feuilles submergées du P. gramineus, lan- céolées, de dimensions assez variables suivant les individus el suivant leur place sur la tige, sont sessiles mais atténuées à la base en une sorte de court pétiole ailé, celles du P. nitens sont demi-embrassantes à la base. Ces deux espèces ne présentent dans leur structure que des différences insi- gnifiantes ou nulles. Les nervures des feuilles submergées sont au nombre de 5-7; la médiane se prolonge parfois assez longuement au delà de son anastomose avec ses voisines, puis se recourbe vers la face inférieure pour s’y ouvrir; le bord terminal est entier, l'ouverture apicale facilement visible, et des coupes longitudinales montrent les nombreux vaisseaux spiro-réti- culés qui y aboutissent. Elles ont la struelure qui a été figurée pour le P. densus ; la nervure médiane, sur une partie de son trajet, est entourée d’un parenchyme lacuneux, tandis qu'entre les nervures il est réduit à une couche unique sans méats. À part le cordon fibreux marginal, il n'existe aucun cordon fibreux isolé. La ligule des feuilles submergées, plus courte et plus dé- licate que celle des feuilles nageantes, possède deux nervures FEUILLES DES MONOCOTYLEDONES AQUATIQUES. 205 libéro-ligneuses latérales, accompagnées par un cordon fi- breux assez puissant. Les cordons fibreux lignifiés sont assez nombreux, el quelques-uns sont adossés à un faisceau Hibé- rien. Tous les éléments de la ligule des feuilles pétiolées sont plus développés. La préfeuille a la même structure que la ligule, mais est dépourvue des deux nervures latérales. De même que dans les P. perfoliatus, P. lucens, elc..…., on trouve 1-2 feuilles semblables au-dessous des feuilles ligulées parfaites. Les feuilles écailleuses du rhizome sontun peu plus épaisses, et possèdent 2-3 assises cellulaires entre les deux épidermes ; on y trouve de nombreux petits faisceaux, les uns hbéro- ligneux, les autres libériens, protégés par des fibres, et des cordons fibreux isolés, plus où moins épaissis et lignifiés. Les feuilles flottantes sont longuement pétiolées ; chacune des cinq nervures est entourée d’une gaine scléreuse plus ou moins forte, mais toujours lignifiée et la lacune vasculaire possède du bois de deux sortes. Les canaux aérifères sont nombreux, et l’on trouve, soit au point où les murs de sépa- ration se rencontrent entre eux, soit où 1ils aboutissent à l'épiderme, des cordons fibreux ou fibro-conducleurs, comme il à été dit au sujet du P. lucens. Les nervures arquées du limbe se rencontrent au sommet; la nervure médiane se recourbe au delà, et, richement pourvue de vaisseaux, aboutit à l'ouverture apicale de la face inférieure, disposée comme sur les feuilles submergées. J'ai observé sur de nombreux exemplaires que la plante peut fleurir sans développer de feuilles nageantes, mais les feuilles opposées de la base de laxe floral sont pétiolées, leur limbe est ovale-allongé ; les nervures du pétiole ont une lacune vasculaire à double origine, comme celle des feuilles flottantes, mais le limbe ne développe pas de parenchyme en palissade, el, de même que dans le limbe des feuilles submergées, le parenchyme est réduit, entre les nervures, à une assise unique intercalée entre les deux épidermes. 204 CAMILLE SAUVAGEAU. 29. Potamogeton rufescens Schrad. Les feuilles submergées sont sessiles et seulement atté- nuées à la base, même lorsqu'elles poussent dans un courant rapide; leur sommet est entier, la nervure médiane se pro- longe à peine au delà de son anastomose avec ses voisines, pour s'ouvrir sur la face inférieure, dans une ouverture assez large, irrégulière, facilement visible. La nervure médiane qui y aboutit, et les nervures latérales ont en ce point abon- damment multiplié leurs vaisseaux. La coupe transversale de la base, en forme de croissant allongé, montre 5-9 nervures, entourées d’arcs scléreux; les unes ont les deux sortes de bois primaire, les autres le pre- mier bois primaire seulement; il est fréquent de trouver un étroit cordon fibreux, au point où chaque mur rencontre l'épiderme. La ligule, mince, n’est pas carénée; elle est réduite à ses deux épidermes, entre lesquels sont de nombreux cordons fibreux lignifiés, dont quelques-uns sont adossés à des fais- ceaux libériens. Celle des feuilles pétiolées est beaucoup plus longue et plus forte, bicarénée, avec un faisceau libéro-ligneux dans chaque carène. La feuille nageante ne présente rien de particulier. 30. Potamogeton natans L. — 31. Potamogeton polygonifolius Pourr. Les feuilles submergées des espèces précédentes d’AÆHete- rophylli, pouvaient être comparées, comme forme et comme structure, à celles d’autres espèces complètementsubmergées. Celles du P. natans réalisent un {ype à part, elles sont cy- lindriques, ou cylindriques aplaties, arrondies au sommet ou terminées en pointe aiguë. Les plus supérieures d’entre elles s’élargissent au sommet, soit en un limbe peu apparent, soit en un limbe bien développé. Bien que ces feuilles sabmergées soient plus nombreuses lorsque la plante croît dans une eau profonde, l'influence de la profondeur de l’eau ne s'exerce qu'imparfaitement sur elles, car il n’est pas rare d'en ren- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 205 contrer qui se dressent au-dessus de la surface du liquide, sans posséder la moindre {race de limbe à leur sommet. Une tige dressée, qui s'élève directement du rhizome, porte tou- jours, en nombre variable, ces feuilles cylindriques avant les feuilles nageantes péliolées; d'autre part, Irmisch {1) a re- marqué qu'à l'automne, après la floraison, au-dessus des feuilles parfaites séparées l’une de l'autre par de courts entre-nœuds, ces feuilles sans limbe se développent en assez grand nombre, bien que le sommet de la plante soit alors au niveau de l’eau. J'ai moi-même observé ce phénomène du- rant deux automnes successifs, sur des plantes croissant dans des bassins à niveau constant. Si la profondeur de l’eau in- flue sur leur production, elle n’est donc certainement pas la seule cause entrant en jeu. Ces feuilles submergées du P. nalans méritent le nom de phyllodes, non seulement à cause de leur forme et de la fré- quence avec laquelle elles se terminent par une ébauche de limbe, mais aussi à cause de leur structure, tout à fait com- parable à celle du pétiole des feuilles nageantes. Un phyllode a comme un pétiole 5-7-9 nervures ; chacune d'elles, protégée par une gaine scléreuse souvent moins importante que dans le pétiole, possède nettement du bois de deux origines (fig. 31). Autour des canaux aérifères sont des faisceaux présentant les mêmes variations que chez le P. lucens. La nervure mé- diane prolongée aboutit dans une ouverture apicale sur la face inférieure, mais, à cause de l’épaisseur du phyllode, il est bon, pour s’en rendre compte, de pratiquer des coupes longitudinales. La ligule est très développée, ses deux carènes latérales sont peu saillantes ; l’épiderme dorsal est plus épais que l’'épiderme ventral, et le parenchyme à 2-5 assises de cellules. Deux faisceaux libéro-ligneux protégés par des arcs scléreux cor- respondent aux carènes; entre eux, et dans les lèvres de la ligule, sont une vingtaine de faisceaux libériens protégés (4) Th. Irmisch, Ueber cinige Arten, etc. (loc. cit, p. 7). 206 CAMILLE SAUVAGEAU. extérieurement par un cordon fibreux épais, el des cordons fibreux lignifiés indépendants, encore plus nombreux. De même que dans les espèces précédentes, les deux nervures des carènes sont une dérivation des deux branches latérales qui viennent du cylindre central de la tige pour se rendre aux feuilles. Les cordons fibreux ou libéro-fibreux des lèvres de la ligule proviennent des nombreux faisceaux qui parcourent l’écoree de la tige. Les phyllodes ne sont pas les premières feuilles de la tige dressée; au-dessous se trouvent une ou plusieurs feuilles semblables à une ligule, et dont la structure est la riême, mais qui au lieu d’avoir deux nervures symétriques n’en ont plus qu'une seule, qui joue le rôle de nervure médiane, et vient du cylindre central de la Lige, tandis que les cordons fibreux ou libéro-fibreux sont des dérivations des faisceaux corlicaux. Les faits se passent done, comme le disait Cosson, de la même manière que si la feuille empêchait le dévelop- pement de la nervure médiane de la ligule. Les feuilles écailleuses du rhizome ressemblent aux ligu- les, mais sont courtes, sans faisceaux libéro-ligneux, et les éléments fibreux sont moins lignifiés. Les nervures du limbe du P. natans ont la structure indi- quée pour le péliole. Au sommet, la nervure médiane s’ou- vre sur la face inférieure, un peu au-dessous de l’extrémité du limbe. Or, dans les feuilles nageantes de celte espèce et des précédentes, les stomates existent non seulement à la face supérieure, mais aussi, beaucoup moins nombreux il est vrai, sur la face inférieure. J'ai cherché à savoir si un où plusieurs de ces derniers ne seraient pas l’origine de l'ouverture apicale; d’après l'étude de feuilles très jeunes, je crois pouvoir affirmer que, comme dans les feuilles des espèces submergées, celle ouverture se fait par la destruc- tion de quelques cellules épidermiques, et toujours indépen- damment des stomates. Je n'ai pas étudié les feuilles sub- mergées du P. polygonifolius, mais la structure de ses feuilles flottantes est identique à celle du P. ratans. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 907 Si l'étude des Pofamogeton ne nous à pas indiqué de caractères permellant la déterminalion certaine d'une es- pèce, d'apres l'examen anatomique d’une feuille, elle nous a cependant fourni cerlains renseignements intéressants. Tels sont les suivants : 4° [y a similitude de structure entre les feuilles des P. acutifolius et P. compressus, entre les feuilles des P. pu- sillus, P. trichoides, P. pauciflorus et les feuilles submer- gées du P. Vaseyr, entre les feuilles des P. pectinatus el P. marinus, des P. lucens et P. plantagineus, des P. grami- neus et P. nitens, entre les feuilles nageantes des P. natans et P. polygomfolius : 2° Le caractère indiqué par M. Schenck pour le P. pecti- nalus, d'avoir ses canaux aérifères limités exlérieurement par une couche sous-épidermique, est commun aux {rois Coleophylli. Les canaux aérifères des autres espèces sont protégés seulement par l’épiderme : si une couche sous- épidermique est assez fréquente, en particulier dans cer- tains pétioles, elle ne présente cependant pas un caractère de généralité ; 3° Un cordon fibreux marginal plus ou moins développé, se trouve chez toutes les espèces ; 4° Un système mécanique remarquable, indépendant des nervures, s'observe chez les P. ARobhinsi, P. compressus, P. acutifolius, el son existence ne paraît pas explicable par son ulilité ; 5° Des arcs scléreux se retrouvent presque constamment autour des nervures. Chez nos grandes espèces, P. natans. P. polygonifolius, P. plantagineus, ele., 1s forment même un étui circulaire de 2-3 épaisseurs de cellules fortement épaissies et bien lignifiées ; 6° Les préfeuilles et les feuilles écailleuses du rhizome peu- vent être considérées comme des ligules, dont les feuilles proprement dites ne se seraient pas développées. Lorsque la feuille ne possède aucun cordon fibreux isolé dans son paren- chyme, à part le cordon marginal, la ligule ou la préfeuille 208 CAMILLE SAUVAGEAU. peuvent au contraire avoir un système mécanique impor- tant. Tandis que la préfeuille des Zostera et Cymodocea pos- sède une nervure médiane, celle des Pofamogeton en est toujours dépourvue. 7° Le bois des nervures des feuilles non pétiolées se forme en un seul temps, tandis que celui des feuilles pétiolées na- geantes (P. nalans, P. gramineus, elc.), ou pétiolées et sub- mergées (P. lucens, P. plantagineus) ont deux sortes de bois primaire, différentes comme origine, comme structure et comme mode de disparition; 8° L'existence d'une ouverture apicale, où aboutit la ner- vure médiane, est constante, aussi bien chez les feuilles sub- mergées que chez les feuilles nageantes : terminale si la feuille est graminiforme, presque terminale, et sur la face inférieure, si les nervures sont arquées convergentes (sauf P. spirillus). 9° Enfin, certaines espèces présentent, sur leurs feuilles submergées, des stomates dont il n’a pas élé fait mention ici, et qui seront étudiés dans le chapitre vir. PF, — Ruppia L. Le genre Æwppia vit dans les marais et les fossés d’eau saumâtre du bord de la mer; on le retrouve aussi au milieu des terres, dans les eaux voisines des salines, dans la Meur- the, par exemple. Les feuilles de la tige rampante, aussi bien que de la tige dressée, possèdent une gaine et un Himbe; elles sont alternes- distiques, à gaine entourant la fige. Au point où la tige se termine par une inflorescence, on trouve deux feuilles oppo- sées, comme chez les Pofamogeton, el dont les gaines, pro- tectrices de la jeune inflorescence, sont très ventrues en forme de spathe; la ramification continue au-dessus par une branche naissant à l’aisselle de chacune d’elles. La forme du limbe, l'existence de la gaine, font ressembler extérieu- rement les /uppia aux P. pectinatus et P. marinus plus qu'à tout autre Polamogelon. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 209 Les auteurs ne sont pas d'accord sur le nombre des espè- ces du genre; Bentham et Hooker disent à ce sujet « species 1 vel plures » (1); Grenier et Godron ont admis trois espè- ces : À. maritima L., R. rostellata Koch, À. brachypus Gay. 32. Ruppia marilimua L. Cette espèce est très souvent appelée #?. spiralis Dumor- tier; après l'anthèse, les pédoncules des carpelles s’allon- gent beaucoup et s’enroulent en spirale serrée à Lours très nombreux. Le Z?. roste/lata Koch à des pédoncules plus courts, non roulés en spirale et des fruits ovoides sub-semi- lunaires. J. Gay dit à ce sujet (2) : « J'ai trouvé dans le fruit tous les passages qui conduisent de la forme ovoïde et régu- lière à la forme longuement rostrée et lrès oblique qu'on a cru jusqu'ici caractéristique du À. rostellata. » J'ai recueilli moi-même très souvent les deux espèces, j'ai observé les mêmes variations dans la forme du fruit, et aussi dans la longueur du pédoncule, et enfin, je n'at lrouvé aucune dif- férence entre ces deux espèces dans la structure de la feuille. Le limbe a moins de 1 millimètre de largeur; à son som- met, la plupart des cellules terminales se prolongent en dents arrondies composées de 1-2-3 cellules. Des dents semblables, mais plus espacées, se retrouvent sur les bords latéraux du limbe et font légèrement saillie. On voit facilement la ner- vure médiane se terminer en cœcum assez loin du bord terminal, qui ne subit aucune desquamation. Certaines cellules de l’épiderme sont transformées en cellules sécrétrices; elles sont plus abondantes sur les bords et au sommet, où quelques-unes des cellules des dents lermi- nales sont même (transformées. Leur contenu, homogène ou granuleux, présente les réaclions précédemment signalées à propos du. Posidonia. La structure est très rudimentaire. Une coupe transver- (1) Bentham el Hooker, Genera plantarum, t. HI, p. 1015. (2) Grenier et Godron, Flore de France, t. WE, p. 324, ANN. SC. NAT. BOT. XIII, 14. 210 CAMILLE SAUVAGEAU. sale de la base du limbe montre 1-2 couches de grosses cellules au-dessous de l’épiderme (fig. 33); au milieu et sur les bords, le parenchyme sous-épidermique se multiplie pour former trois massifs, un médian et deux marginaux soute- nant les trois nervures. Ils forment ainsi deux canaux aéri- fères relativement larges. Comme on le voit, cette disposition ressemble à celle des P. pectinatus et P. marinus. Fig. 33. — Ruppia marilima. — Section Fig. 34. — Ruypia marilima. — Sec- transversale de la base du limbe. Les tion transversale de la nervure nervures sont indiquées par des hachu- médiane de la feuille représentée res (gross. 80). sur la figure 33 (gross. 360). La nervure médiane est entourée d'un endoderme bien apparent, à parois plus épaisses que celles du faisceau libéro- ligneux et du parenchyme, mais non subérifiées (fig. 3%). Le péricycle est assez net, la lacune vasculaire est sous-péri- cyclique, et l’on trouve quelques tubes criblés mélés à des cellules du parenchyme, dont parfois quelques-unes sont sécrétrices. Il est rare de trouver des débris de vaisseaux, aussi bien sur les coupes transversales que longitudinales. Les deux nervures marginales sont très rudimentaires et composées de quelques cellules très étroites non différen- ciées en éléments spéciaux. À un niveau plus élevé, la feuille diminue d’épaisséur, surtout aux dépens des canaux aérifères; puis les faisceaux marginaux disparaissent sans qu'on les voie se réunir à la nervure médiane, et le parenchyme sous-épidermique est réduit à une seule assise, sauf au-dessus et au-dessous de la nervure médiane. Que la gaine appartienne à une feuille quelconque ou à FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 211 une des deux feuilles situées au-dessous de l’inflorescence, sa structure est identique à celle du limbe; les lèvres sont for- mées par les deux épidermes au contact, sans aucun élément fibreux. La ligule fait défaut, ou plutôt elle est réduite à un simple bourrelet, à peine saillant, dont on constate lexis- tence sur des coupes longitudinales. A la base de chaque rameau est une préfeuille, très mince, échancrée en son milieu, réduite sur toute son étendue aux deux épidermes, dont un grand nombre de cellules sont sécrétrices. 33. Ruppia brachypus J. Gay. Cette espèce a été créée par J. Gay pour un ÆRuppia des bords de la Méditerranée, qu'il disüinguait par la forme de l’étamine et la structure du péricarpe. Il n’en à pas publié la diagnose, mais on la trouve dans la Flore de France (Uocreit., p. 324). La feuille est plus étroite que dans l'espèce précédente ; ses deux canaux aérifères sont limités par une assise de grosses cellules sous-épidermiques qui, parfois seulement, se dédouble sur les bords, mais il n’y à jamais qu’une seule nervure, qui est en tout semblable à celle du 22. maritima. Les faisceaux latéraux manquent également dans la gaine. Si la structure de la feuille du /?. maritina est la mème que celle du À. rostellata, elle diffère au contraire de celle du R. brachypus. Les lrois espèces de la Flore de France pour- raient donc se réduire à deux. Bien que l'aspect extérieur des BRuppia pourrait les faire confondre, sur des exemplaires in- complets, avec des P. pectinalus où P. marinus, on les en distinguera cependant par des caractères qui les éloignent en même temps de tous les Potamogeton, tels que la présence de feuilles parfaites sur la tige rampante, de dents nom- breuses au sommet du limbe, de cellules sécrétrices, d’un endoderme, la structure du faisceau libéro-ligneux et lah- sence d'ouverture apicale. 240 CAMILLE SAUVAGEAU. CHAPITRE V CYMODOCÉES ASCHS. Les deux genres Cymodocea et Halodule se distinguent l’un de l’autre par de légères différences dans la structure de leurs fleurs dioïques. VI. — Cymodocea Kônic. Le genre C'ymodocea comprend 6 espèces, que M. Ascher- son à groupées en 3 sous genres (1). 10 $. G. Phycagrostis Willd. 4. C. nodosa (Ucriàa) Aschs. (C. æquorea Künig). 2. C. rotundata (Ehrb. et Hempr.) Aschs. et Schweinf. 3. C. serrulata (R. Br.) Aschs. et Magnus. 20 8, G. Amphibolis Agardh. 4. C. ciliala (Forsk.) Ehrenb. 5. C. antarctica (Labill.) End. 30 S. G. Phycoschænus Aschs, 6. C. manalorum Aschs. 7. C. isoetifolia Aschs. 34. Cymodocea æquorea Kôn. (2). Le €. æquorea Kôn., ou Phucagrostis major Cavol, est une plante méditerranéenne; 1l passe cependant le détroit de Gibrallar et arrive, au Nord jusqu’à Cadix, au Sud jusqu'aux Canaries (3) et en Sénégambie; les autres espèces sont ré- pandues dans les mers plus chaudes. Ses feuilles, dont les dimensions sont intermédiaires entre celles de nos deux (1) P. Ascherson, Die geographische Verbreilung ete., loc. cit., p. 197. (2) Ed. Bornet, Recherches sur le Phucagrostis major Cavol. (Ann. sc. nat., bot., 5° s., €. 1, 1864, p. 5-52, 11 pl.). — P. Duchartre, Quelques observations sur Les caractères anatomiques des Zostera et Gymodocea, à propos d'une plante trouvée près de Montpellier (Bull. soc. bot. Fr., t. XIX, 1872, p. 289-302). — H, Schenck, Vergleichende Anatomie etc., loc. cit., p. 23). (3) Les deux espèces des îles Canaries, C. Webbiana Adr. de Jussieu et C. Preauxiana Webb., ont été identifiées par M. Ascherson avec le C. æquorea (Linnæu, loc. cit., p. 163 et p. 184). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 213 espèces de Zostera, l'ont fait parfois considérer, quand il n'était ni fleuri ni fructifié, comme une espèce de ce genre. M. Ascherson, en le rapportant au Zostera nodosa Ucria, en fait le C. nodosa (Ucria) Aschs. Les exemplaires que j'ai étudiés provenaient de deux loca- lités méditerranéennes, Banyuls et Antibes; ils m'ont pré- senté de légères différences suivant leur origine. Les feuilles sont ligulées et longuement engainantes; le fimbe rubané, membraneux, long souvent de 20-30 em., à une largeur qui atteint ou dépasse 3 mm. J'ai toujours trouvé les exem- plaires d'Antibes plus étroits (environ 2 mm.); d'ailleurs dans les dessins en grandeur naturelle que M. Bornet en a donnés, la largeur du limbe n’atteint pas 3 mm. Il est dentelé sur les bords voisins de l’extrémilé arrondie; son épaisseur va en diminuant de sa base à son sommet. Le limbe est parcouru par neuf nervures (les exemplaires d'Antibes n’ont que sept nervures), que des branches trans- versales, soutenues par des diaphragmes, réunissent de temps en temps. Les deux nervures marginales de chaque côté, très rapprochées l’une de l’autre, paraissent, vues à la loupe, confondues en une seule; elles se soudent l’une à l’autre à quelques centimètres de l'extrémité de la feuille; les sept autres nervures se réunissent très près du sommet, en se recourbant en arc (fig. 35, A), comme dans les Zos{era el Posidonia ; la nervure médiane se prolonge un peu au-dessus, mais sans s’évaser ni jamais s'ouvrir à l'extérieur. Un cor- don fibreux plus ou moins lignifié, qui à première vue semble une nervure, court presque parallèlement au bord, en res- tant indivis ; il se recourbe au sommet de la feuille et s’ar- rête avant d’avoir rejoint le prolongement de la nervure médiane (fig. 35, A). La variation dans le nombre des nervures (9 ou 7) a une certaine importance si on le considère comme un caractère spécilique. En effet, M. Duchartre dit (/oc. cit., p. 299) : « On « décrit habituellement la feuille du Cymodocea comme ayant « 7 nervures; c'est ce que dit notamment M. Bornet(/oc. cf. 214 CAMILLE SAUVAGEAU. «p. 9); mais on néglige alors de compter un faisceau fibro- «vasculaire, c’est-à-dire une nervure peu apparente, qui « longe chacun des deux bords, et qui porte le nombre réel « des nervures à neuf. » Or, les échantillons étudiés par M. Duchartre avaient élé récoltés par M. Balansa près de Smyrne (/oc. cit, p. 297); M. Bornet a recueilli les siens à Antibes; la divergence entre ces deux auteurs lient donc simplement à ce que la variété d'Antibes a sept faisceaux, et celle de Smyrne neuf comme celle de Banvuls. î LP W] ff | | il DER: sr KT) Fig. 35. — Cymodocea æquorea. — À, sommet d'une feuille adulte (gross. 8). B, feuille jeune, dents de la partie arrondie du sommet (gross, 220). C, Idem, dents des bords, près du sommet. La feuille adulte présente sur ses bords, près du sommet, des dentelures de forme caractéristique, bien apparentes, qui en réalité ne sont que des restes, des débris de celles beaucoup plus nombreuses et plus développées à l’état jeune. En effet, au sommet d’une jeune feuille (fig. 35, B) encore renfermée dans la gaine de celle qui l'enveloppe, un très grand nombre des cellules épidermiques du bord se pro- longent nettement en doigt de gant vers l'extérieur, el, sur FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 245 les bords latéraux, ce ne sont plus des cellules isolées qui font saillie, mais de véritables massifs de cellules, terminés au sommet soit par une seule cellule proéminente, soit par une extrémité digitée (fig. 35, C). Plus tard, lorsque la jeune feuille sortira de la gaine enveloppante, ces cellules se dé- lacheront, le bord terminal deviendra assez régulièrement arrondi, et, sur les bords latéraux, il ne restera que la base tronquée des dentelures. M. Magnus (1) a signalé chez le C. æquorea, el quelques espèces du même genre, la présence de cellules épider- miques, dont le contenu est différent de celui de leurs voi- sines. Ce sont des cellules sécrétrices, lannifères, compa- rables à celles qui ont été étudiées précédemment chez les Posidonia et Ruppia. On les observe très facilement sous le microscope en étudiant l'extrémité d’une feuille, où elles forment des laches brunes, sombres, arrondies ou ovales; j'ai cependant rencontré des feuilles où ces cellules parais- saient remplies d’un liquide aqueux, et contrastaient par leur absence de coloralion avec les autres cellules épider- miques vertes. Elles sont distribuées en majeure partie, dans les exemplaires de Banyuls, tout à fait sur le bord de la feuille, principalement en dehors de la nervure fibreuse marginale, et sont particulièrement abondantes au sommet, mais presque loujours isolées l’une de l’autre; dans ceux d'Antibes, elles sont disséminées sans ordre et abondamment sur toute la surface. L'épiderme, semblable sur les deux faces, est composé de cellules petites, polygonales et disposées en files plus ou moins régulières; en faisant varier la mise au point, on aperçoit très facilement la couche sous-épidermique, dont les éléments, à parois beaucoup plus minces, correspondent comme surface à une vingtaine de cellules épidermiques. (1) P. Magnus, Ueber die Anatomie der Meeresphanerogamen (Sitz. der Gesells. naturf. Freunde zu Berlin, 1870, p. 85-90) et Ueber Schlauchgefässe im Stamme von Cymodocea nodosa,isoetifolia und manatorum und Schlauchzellen in der Blati-Epidermis dieser und andere Cymodocea arten (Idem, 1872, p. 30 et 31). 216 CAMILLE SAUVAGEAU. Les cellules sécrétrices ont des parois convexes, plus minces que celles de leurs voisines; elles s'élargissent en pénétrant dans la profondeur de la feuille et leur base se montre par transparence plus large que leur face superficielle. La description anatomique de la feuille, donnée par M. Bornet, puis par M. Duchartre, et que ce dernier auteur a figurée (1), ne correspond pas complètement à sa struc- ture générale, qui varie en effet, suivant le point considéré : le nombre des lacunes et des faisceaux fibreux n’a pas la constance ni la valeur qu’on lui a accordée. Une coupe transversale, faite à la base du limbe d’une feuille adulte, à la forme d’une lame de largeur constante, mais arrondie aux extrémités. Sur tout le pourtour de la section, l'épiderme est formé de cellules étroites, à parois latérales minces, à paroi externe plus épaisse et à contenu très dense et chlorophyilien. Au-dessous est une assise paren- chymateuse continue, à cellules très grandes, très réguliè- rement disposées, sans méats, et qui de temps en temps est complètement ou partiellement interrompue par des cor- dons fibreux. Le parenchyme qu'elle limite produit trois ran- gées de canaux aérifères (fig. 36), assez régulièrement dis- posés, et que l’on retrouve presque toujours si la coupe est faite à la base du limbe; elles peuvent parfois cependant se réduire à deux. Sur les bords, le tissu est plus massif et les lacunés moins nombreuses. La largeur des canaux des deux rangées extérieures, situées directement sous l’assise sous- épidermique, correspond à celle de 2-3 cellules de cette couche; ils sont séparés entre eux par des murs à une seule épaisseur de cellules, mais longs de 2-3 cellules. Au-dessus et au-dessous de chaque nervure, l’un de ces murs sépare deux canaux semblables à leurs voisins. Les canaux aérifères de la rangée médiane sont identiques aux précédents, ils sont au nombre de 2-3-4 entre deux nervures voisines. Par conséquent, chaque nervure (fig. 36 et 38) est entourée de (1) P. Duchartre, Éléments de botanique, 3° édit., p. 69, fig. 30. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. DA 7 six lacunes, deux de la rangée supérieure, deux de la rangée inférieure et de chaque côté une de la rangée médiane; elles correspondent à six murs rayonnants, partant de la nervure. ti TELE Fig, 36. — Cymodocea æquorea. — Coupe transversale faite à la base du limbe d'une feuille adulte; la plus grosse nervure est la nervure médiane (gross. 145). On se rend compte de l’origine des canaux aérifères et du parenchyme qu'ils parcourent par l'étude du développe- ment de la feuille (fig. 37). La base du limbe d’une feuille très jeune, est composée d’un épiderme à pa- rois très minces, et de deux cou- ches de grosses cellules arrivant au contact l’une kig. 37. — Cymodocea æquorea. — Coupe transversale de l’autre. sans faite à la base du limbe d'une feuille très jeune; le cloi- He sonnement des cellules, qui produiront le parenchyme, méals, lEPreéseN- à déjà commencé à se produire (gross.220). tant tout le pa- renchyme, mais séparées de distance en distance par un massif de cellules procambiales, qui sera l’origine d’un fais- ceau libéro-igneux. Il a ainsi entre deux faisceaux voisins, 2-3-4 paires de ces cellules sous-épidermiques qui représen- teront plus tard les murs longitudinaux de séparation entre 218 CAMILLE SAUVAGEAU. les lacunes. Bientôt 1-2-3 cloisons, parallèles à la surface de la feuille el {rès rapprochées l'une de l’autre, prennent naissance vers le milieu de chacune d'elles. Les minces cel- lules filles ainsi formées, dans chacune des deux couches de cellules mères, sont donc à peu près dans le prolongement l’une de l’autre et parallèles à la surface de la feuille. Mais bientôt leurs bords latéraux, en s’arrondissant, les séparent de leurs voisines de droite et de gauche par un très petit méal, origine d’une lacune; en même temps les cellules, repoussées vers l’épiderme, se cloisonnent longitudinale- ment, afin de suivre la transformation du méat en lacune. Les deux rangées extérieures de lacunes doivent leur origine à ces méals; la rangée médiane a une origine sem- blable due à la formation de cloisons tangentielles, d'un côté ou des deux côtés de la cloison qui, dès le début, séparait au milieu de la feuille les deux rangées de cellules mères. Les diaphragmes ont la même structure et la même origine que celle indiquée pour le Zostera. Les fibres se forment après les faisceaux libéro-ligneux, mais lorsque les lacunes sont encore très élroites, par un cloisonnement plus ou moins oblique dans une cellule sous- épidermique, de manière à séparer au contact de l’épiderme une cellule qui, en s’accroissant, se cloisonne dans divers sens, el produit des cellules très étroites, origine des fibres. Si chacune de ces petites cellules devient une fibre, le cor- don fibreux sera au contact direct de lépiderme ; si la trans- formation n'est pas totale, il pourra rester 1-2 cellules sous- épidermiques parenchymaleuses qui le sépareront de l’épi- derme, mais l'origine des cordons fibreux est toujours la même. Ces cordons fibreux, composés de 2-12 cellules à lumière très faible, Lanlôt restés cellulosiques, d’autres fois parfaite- ment lignifiés, sont assez fréquemment situés à l'extrémité du mur cellulaire partant de chaque nervure vers Pexté- rieur, et la pelile nervure marginale n’en ayant souvent que d'un seul côté, cela fait 16 faisceaux fibreux. Mais c'est seu- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 219 lement là l’une des dispositions les plus fréquentes, et que représentent les figures 36 et 38. Parfois, l'une des nervures possède un cordon fibreux vers l’une des faces de la feuille, et deux sur l’autre face, au point de rencontre des deux murs latéraux de la nervure avec la couche sous-épidermi- que. Les coupes faites par M. Bornet lui avaient montré cette disposilion comme constante, puisqu'il dit (/oc. cit., p. 44): « Au-dessous de l’épiderme... se trouvent des fais- ceaux de fibres libériennes; il y en a trois autour de cha- que nervure. » M. Duchartre la conteste en disant (/oc. cit., p. 300) : « Il y aurait là un défaut de symétrie que je n'ai jamais observé. » Le premier auteur avait complé 23 cor- dons fibreux, le second 18. En réalité, ce nombre est varia- ble, et en observant une feuille directement sous le micros- cope, on voit fréquemment les cordons fibreux se bifurquer en deux branches qui restent parallèles et très rapprochés, puis se réunissent de nouveau; alors, suivant que la coupe transversale passera dans l’une ou l’autre région, elle mon- trera soit un, soit deux cordons fibreux sur la même face d’une nervure. Sur un limbe de 22 cm. de long, j'ai compté à la base 13 cordons fibreux, au milieu du limbe 31, aux deux tiers 25, et à À cm. de l'extrémité 16. À la base d’une autre feuille, j'en ai trouvé 35. La feuille du C. æquorea possède donc des cordons sous-épidermiques de fibres sclé- reuses, cellulosiques ou plus ou moins lignifiées, en nombre variable, souvent situées en face des murs interlacunaires, et jamais dans l’intérieur du parenchyme. Tout à fait au bord de la feuille, au-dessous de la cou- che sous-épidermique, est un massif fibreux plus important que les précédents, et plus ou moins lignifié. Après avoir suivi le bord de la feuille, il vient se terminer à son sommet, au-dessus de la ligne onduleuse d'anastomose terminale des nervures. Parfois, il ne prend naissance que quelques milli- mètres au-dessus de la ligule, mais on le retrouve ensuite sur toute la longueur du limbe, sans qu'il se ramifie ou se soude aux autres cordons fibreux. 290 CAMILLE SAUVAGEAU, Les cellules sécrétrices sont le plus souvent épidermi- ques, étroites vers l’extérieur, et renflées dans la partie pro- fonde qui pénètre entre deux cellules sous-jacentes ; sur les exemplaires d'Antibes, on en trouve jusqu'à 25-30 sur une même coupe, réparties dans l’épiderme, la couche sous-épi- dermique el le parenchyme. On compte 7 ou 9 faisceaux libéro-ligneux; le faisceau mé- dian (fig. 38), plus gros que les autres, est à peu près égal DM mn Ann A En Je su CS Fig. 38. — Cymodocea æquorea. — Coupe transversale faite à la base du limbe, montrant le faisceau libéro-ligneux médian; #, {, tubes criblés; l'épaississement intercellulaire tibérien est indiqué par un pointillé (gross. 220). en section transversale, à la moitié de celui du Z. marina ; les trois faisceaux latéraux, également espacés de chaque côté, sont plus petits, et le faisceau marginal, quand il existe, est moins important que les autres et très rapproché de son voisin. Ils se distinguent de ceux du Zostera el au contraire se rapprochent de ceux du Posidonia, par la différenciation de la gaine endodermique plus ou moins lignifiée suivant les exemplaires étudiées, mais {oujours peu épaissie; parfois, FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 221 la lamelle moyenne de ses cellules se colore seule par les réactifs de la substance ligneuse, et l’épaississement reste cellulosique. Le péricycle du faisceau médian entoure sur la plus grande partie de son pourtour une lacune vasculaire (fig. 36 et 38), dont les vaisseaux se retrouvent sur les coupes longitudinales, sous forme de vaisseaux réticulés, à épais- sissement lâche, délicat, peu lignifié. La masse libérienne se compose de deux tubes criblés, jamais situés au contact de l’endoderme, et de cellules très étroites et plus nom- breuses, parmi lesquelles il serait difficile de distinguer les cellules-compagnes des cellules parenchymateuses. Les au- tres faisceaux libéro-ligneux ont un seul tube criblé; ce fait conocrde avec leur taille moindre, mais il est surtout remar- quable que la lacune vasculaire, située au-dessous du péri- cycle dans le faisceau médian, est ici à la place même d’une de ses cellules, celle qui est la plus proche de la sur- face supérieure de la feuille. Cette différence entre le fais- ceau médiau etles faisceaux latéraux se retrouve sur toute la longueur du limbe, et non seulement chez le C. æquorea, mais chez toutes les espèces de Cymodocea. Telle est la structure générale de la feuille étudiée à la base du limbe, mais la feuille diminuant graduellement d'épaisseur de sa base à son sommet, le nombre et la dis- position des canaux aérifères varient suivant la longueur. Les deux canaux appartenant à chacune des deux rangées externes, situés au-dessus et au-dessous des nervures, se ré- trécissent de plus en plus, et se réduisent peu à peu à de simples méats et enfin, à 1! centimètre du sommet, ils ont complètement disparu. Les canaux interfasciculaires, au con- traire, sont destinés à se fusionner entre eux suivant l’épais- seur de la feuille, mais non suivant sa largeur. Vers le mi- lieu du limbe, la rangée supérieure persiste sans changement, mais la rangée médiane s’est fusionnée avec la rangée infé- rieure, en canaux plus grands que ceux de la rangée supé- rieure, et leur restant opposés, de sorte que, si à la base du limbe on avait entre deux nervures voisines trois rangées de AAA CAMILLE SAUVAGEAU. € 2-3-4 lacunes. À un niveau plus élevé, les lacunes de la rangée supérieure se rétrécissent el se soudent finalement avec celles qui sont au-dessous. J'ai toujours vu la fusion commencer ainsi du côté libérien, et finir du côté ligneux. La structure devient alors celle décrite par MM. Bornet et Duchartre (Bornet, loc. cit., p. 44) : « Les lacunes comprises entre les faces de la feuille et les nervures sont beaucoup plus petites que celles qui se trouvent entre deux nervures voisines ; celles-ci forment de grandes chambres aériennes occupant toute l'épaisseur de la feuille. » Chacune de ces grandes lacunes correspond done à la fusion de trois des la- cunes superposées à la base de la feuille. Les murs qui les séparent diminuent de hauteur en s'avançant vers l’extré- mité de la feuille, et à 1 centimètre du sommet, chaque mur est réduit sur une coupe transversale, à une seule cellule, qui finalement disparaît, et les lacunes sont alors réduites à de simples méats entre les deux couches sous-épidermiques. Les coupes faites très près du sommet ne montrent de desquamation de l’épiderme que si elles passent par l’une des dents de la feuille ; les faisceaux libéro-ligneux, petits, ont la structure indiquée plus haut, et une coupe longitudinale pas- sant par le prolongement de la nervure médiane y montre deux vaisseaux réticulés se terminant en cul-de-sac à une dis- tance de quelques cellules du bord libre. Les feuilles du €’. æquorea sont longuement engainantes. Or, on sait (Bornet, loc. cf., p. 13 à 19) que les entre-nœuds de la tige sont de deux sortes : les uns, longs de plusieurs centimètres, se développent dans les premiers temps de la reprise de la végélation; les autres, longs à peine d’un milli- mètre, prennent naissance à la fin de la même période de végélation. Les feuilles qui se sont développées à la base des premiers se détachent au ras de la tige, sans laisser de tra- ces ; les autres, au contraire, perdent d’abord leur limbe, se détachant au niveau de la ligule, en laissant la gaine conti- nuer pendant quelque temps à jouer son rôle protecteur des 2-3-% lacunes, iln°y en à plus que deux rangées inégales de 2-3 FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 293 feuilles plus jeunes; elle ne tarde cependant pas à se désor- ganiser à son lour. La gaine presque entièrement blanche ou un peu teintée de vert au sommet, est fendue dans toute sa longueur, et ses lèvres, qui au début se recouvrent com- plètement, ne se croisent plus ensuite qu'à la partie infé- rieure, par suite du développement des feuilles plus jeunes; ces dernières sont d'ailleurs plus larges à la base qu’au som- met, où elles se terminent par un petit prolongement qui s'élève au-dessus du niveau de la ligule, mais sans contrac- ler d’adhérence avec le limbe. La structure de la gaine est la même que celle de la base du limbe. L’épiderme de la face ventrale a ses cellules plus aplalies, plus larges el à membrane externe moins épaisse ; les cellules sécrétrices sont souvent plus abondantes sur les lèvres que dans la partie plate de la gaine. A la base, le fais- ceau marginal, plus ou moins engagé dans la lèvre, s’en éloi- gne vers le sommet pour entrer dans le limbe. Les cordons fibreux sous-épidermiques, si répandus dans le limbe, sont parfois absents ou en nombre très réduit, et présentent d’ail- leurs les plus grandes variations suivant les exemplaires examinés, mais le cordon fibreux marginal est toujours absent. La ligule, transversale et rectiligne, est semblable à celles des Zostera (fig. 9). M. Bornet (loc. cil., p. 22) « a reconnu qu'elle prend naissance par le cloisonnement de {rois ran- gées horizontales des cellules de l’épiderme, qui se gonflent et se divisent par des cloisons verticales. Des six nouvelles rangées de cellules, les trois extérieures deviennent Le siège d’une multiplication rapide, en se coupant par des cloisons obliques ou horizontales. Les cellules supérieures et infé- rieures donnent naissance à l’épiderme de la ligule; les in- termédiaires en fournissent le parenchyme. » A ce niveau, les diaphragmes sont plus rapprochés qu’en toute autre par- ie de la feuille, et on en compte 3-4 superposés à une très faible distance, dont un est vasculifère. Aucun faisceau vas- culaire ni fibreux ne pénètre dans la ligule. 19 294 CAMILLE SAUVAGEAL. La feuille du C. æquorea est donc caractérisée : 1° par une gaine ouverte et un limbe dentelé sur les bords voisins du sommet; 2° par la présence de 7 ou 9 nervures; 3° par une gaire endodermique autour de chaque nervure, un péri- cycle continu dans la nervure médiane, et interrompu dans les nervures latérales par la lacune vasculaire ; 4° par les canaux aérifères disposés sur (rois rangées à la base du limbe, et sur une seule vers le sommet; 5° par la présence d’un cordon fibreux marginal puissant, plus ou moins ligni- fié, et de cordons sous-épidermiques, n’exislant jamais dans le parenchyme interne; 6° par la présence de cellules sécré- trices; el 7° par l’absence d'ouverture apicale. Le C. æquorea vit dans la Médilerranée à une faible pro- fondeur, mais reste toujours submergé; la structure de son parenchyme est cependant la même que chez les Zostera, qui ont à lutter contre l’évaporation, et sa gaine endodermique, absente chez les Zos{era, est disposée pour jouer un rôle pro- tecteur. Lorsque cette plante, après avoir traversé Le détroit de Gibraltar, se trouve dans l'Océan, elle doit aussi subir l'influence des variations du niveau de l’eau produites par les marées, et c’est alors que le parenchyme doit jouer le rôle de tissu aquifère. A la base de chaque bourgeon latéral, est une préfeuille réduite à une gaine arrondie au sommet, et à bords libres et recouvrants ; sa forme et sa position ont été très bien indi- quées par M. Bornet (loc. ct., pl. [ et IV). Elle possède {rois nervures ; un peu au-dessous du sommet, les deux ner- vures latérales se jéunissent à la nervure médiane qui se prolonge souvent un peu au delà, mais sans arriver au bord terminal qui d’ailleurs ne subit aucune desquamation. Les cellules sécrétrices, vues de dessus, sont élroites et leur lon- gueur est égale à celle de plusieurs cellules épidermiques. Une coupe transversale à la base de la préfeuille Ia mon- tre composée des deux épidermes entourant 1-2-3 assises de cellules plus grandes et sans canaux aérifères. De même que chez les Zostera la nervure médiane n’a pas disparu; son FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 295 endoderme est au contact immédiat de l’épiderme ventral ; sa lacune vasculaire est sous-péricyclique, tandis que celle des deux nervures latérales est sous-endodermique. On trouve aussi quelques cordons fibreux. Les fleurs mâles et les fleurs femelles sont dépourvues d’enveloppe spéciale: elles sont contenues dans la gaine d’une feuille semblable aux feuilles ordinaires comme forme et comme structure. Les squamules intravaginales ont été décrites avec beau- coup de soin par M. Bornet (/oc. «t., p. 22 et pl. V); il v en a toujours au moins dix disposés en deux groupes de cinq, parfois 12 ou 14; elles persistent longtemps sur la tige et la couleur brune qu’elles prennent en vieillissant facilite leur observation. 35. Cymodocea rotuncata (Ehrb. et Hempr.) Aschs. et Schweinf. Le C. rotundata se rencontre dans le mer Rouge et l’océan Indien ; ses fruits ont été décrits, mais ses fleurs sont en- core inconnues. C’est l'espèce qui ressemble le plus au C. æquorea, mais ses feuilles s’en distinguent par plusieurs caractères extérieurs : ainsi la gaine, au lieu d’avoir la même largeur sur toute sa longueur, est étroite à la base où ses lèvres se recouvrent pour enlourer la tige, tandis qu’au sommet la partie plate de la gaine atteint 5 mm. de largeur. Le limbe est rétréci au-dessus de la ligule, sur une hauteur d'environ 1 cm., puis reprend une largeur de 5 mm. qu'il conserve jusqu'à son sommet arrondi. Les dents sont beau- coup moins développées sur les feuilles jeunes que sur celles du C. æquorea; sur le bord lerminal arrondi, quelques cellules seulement font saillie, et sur les bords latéraux voi- sins du sommet sont de petiles dents triangulaires, peu saillantes, non bifurquées. Les nervures, au nombre de 10-13, ont la même disposi- tion que celles du €. æquorea, et montrent de même les vais- seaux réliculés par transparence. Un faisceau fibreux mar- ginal suit exactement le même trajet que dans l'espèce ANN. SC. NAT. BOT. xXIU, 15 226 CAMILLE SAUVAGEAU. précédente. L'épiderme, vu de dessus, est formé de cellules assez régulièrement disposées en files; ses cellules sécré- trices sont très nombreuses, à bords convexes et à paroi externe plus mince; tantôt, elles ont les mêmes dimensions que leurs voisines, tantôt, elles sont beaucoup plus longues (fig. 39), et l’on en trouve parfois deux à la suite l’une de l’autre, séparées par une paroi trans- versale (rès mince. Quand elles sont longues, elles ne proviennent pas de la fusion de plusieurs autres cellules, mais leur longueur dépend du mo- ment auquel elles se sont caractéri- sées comme cellules sécrétrices, et des cloisonnements qu'ont pu subir leurs voisines pendant l'allongement du limbe; elles se renflent moins dans la profondeur de la feuille que Fig. 39. — Cymodocea rotun- celles du C. æqjuore«. M cr Sur une coupe transversale faite à essus; les cellules nor- males sont en pointillé; les Ja base du limbe, les différences avec RE ne os l'espèce précédente sont dues à la 220). disposition du parenchyme. Partout, même au niveau des nervures, il n'existe qu'une seule couche de parenchyme sous-épi- dermique, et les nervures ont leur endoderme recouvert d'une assise parenchymateuse, interrompue parfois de ma- nière à laisser, en certains points, l'endoderme en contact direct avec les canaux aérifères; cette assise est composée au minimum de six grosses cellules, dont chacune est le point d'appui d'un mur cellulaire de 4-6 cellules (fig. 40) séparant quatre canaux aérifères ; le mur médian de chaque côté est per- pendiculaire à l’épiderme, et les deux autres sont obliques. Parfois, de la nervure médiane, partent 7-8 murs de sépa- tion entre 5-6 canaux aérifères. Certaines de leurs cellules sont sécréirices. Entre les nervures, les canaux occupent toute l’épaisseur du limbe, il y en a ainsi 2-3 entre deux ner- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 221 vures voisines. Sur les bords arrondis de la coupe, le paren- chyme est plus dense, de sorte que 1-2 nervures de chaque côté sont plongées dans un tissu massif, mais toujours peu important. Les cordons fibreux, parfaitement lignifiés , sont relativevement peu nombreux; on en trouve généralement un à l'ex- trémité du mur qui se dirige perpendiculaire- ment d'une nervure à l'épiderme ; mais pas plus que dans le €. æquo- rea, il n'y a de règle précise, car on en trouve parfois aux extrémités des autres murs de sé- paration, sans symétrie aucune. La présence du cordon marginal est constante. La disposition du pa- renchyme du C. rofun- data, considérée au-des- sus de la ligule, ressem- ble donc à celle affectée e de la nervure latérale sont indiquées par des ymodocea rolunduta. — Coupe transversale faite à la base du limbe; la partie libérienne a nervure médiane et la partie libéro-ligneus hachures (gross. 145), par le parenchyme du 5 C. æquorea dans la se- S£ conde moitié du limbe, sb à alors que les trois ran- gées de canaux aérifères se sont fusionnées en une seule. Mais le limbe, diminuant graduellement d'épaisseur jus- qu'au sommel, les murs de séparation deviennent nalurelle- ment de plus en plus courts, et tandis que les canaux inter- fasciculaires persistent, ceux qui accompagnent les nervures 228 CAMILLE SAUVAGEAU. disparaissent; la figure de la section est alors si semblable à celle d’une section faite vers le haut du limbe du C. æquo- rea, que je ne crois pas possible de les discerner avec cerlilude, abstraction faite du nombre des nervures; mais des coupes pratiquées comparativement à la base du limbe permettent d'éviter loute confusion entre les deux espèces. La ligule ni la gaine ne présentent rien de particulier, si ce n'est que les lèvres de la gaine, très minces, sont ré- duites, sur la plus grande partie de leur largeur, aux deux épidermes, entre lesquels sont de petits cordons fibreux lignifiés. Tandis que dans le C. æquorea, la gaine âgée se détache tout d’une pièce, dans le C. rofundata, après la chute du limbe qui se fait aussi au niveau de la ligule, elle se détache en lambeaux irréguliers par la décomposition du parenchyme. 36. Cymodocea serrulata (R. Br.) Aschs. et Magnus. Le C. serrulata, qui appartient à la mer Rouge, l'océan Indien et l’océan Pacifique, et dont les fleurs mâies et les fruits sont encore in- connus, a ses feuilles plus courtes et plus larges que celles de l'espèce précé- dente ; leur gaine, très étroite à la base, s’élargit jusqu’à la ligule, pour at- teindre environ 8 mm. de largeur, et se prolonge latéralement au-dessus Fig. 41. — Cymodocea serrulata. — Deux doses £a pole oreilles dents du sommet du limbe; la lettre cin- d'environ 3 mm. de hau- dique les cellules sécrétrices (gross. 145). {eur. Le limbe a la même largeur. Les dents du sommet du limbe, qui se retrouvent sur les feuilles adultes, ont une forme absolument caractéristique ; elles sont nom- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 299 breuses, très longues, et en forme de triangles {très aigus; elles manquent sur un court espace correspondant à la ter- minaison de la nervure médiane, mais de chaque côté, on en trouve 20-30 sur la partie arrondie (fig. 41). Ces dents deviennent plus espacées sur les bords latéraux, en même temps que plus courtes, puis disparaissent plus bas. L'épi- derme, abondamment sécréteur (fig. 41), a ses cellules un peu plus larges que dans les deux espèces précédentes. On compte 15-17 nervures, se comportant comme celles des espèces précédentes, el latéralement, on remarque aussi un cordon fibreux, mais qui s’arrêle avant d'atteindre la partie arrondie de l'extrémité du limbe. | Abstraction faite du nombre des nervures, la structure de la base du limbe est exactement comparable à celle du C. rolundala, prise à quelques centimètres au-dessus de la ligule ; autrement dit, la feuille est plus mince, et les canaux aérifères plus étroits. Cette structure correspond donc aussi à celle du C. æquorea, mais dans un point plus voisin de l'extrémité que pour le C. rotundala ; cependant, les coupes faites dans les trois espèces au-dessus de la ligule les carac- térisent. Le cordon fibreux marginal, puissant, unique des deux espèces précédentes, est remplacé par 2-3 cordons plus faibles, qui, vus de dessus par transparence, paraissent un cor- don unique. La ligule ne présente rien de particulier, mais il est re- marquable qu'à la base de la gaine, le parenchyme renferme trois couches de lacunes, comme dans le €. æquorea, landis qu'au sommet de la gaine, on n’en trouve plus qu'un seul comme à la base du limbe. Les trois espèces du sous-genre PhAycagrostis, présentent donc de grandes analogies dans la structure de leurs feuilles. Or, les études de M. Ascherson sur la distribution géogra- phique des Phanérogames marines (1), lui ont permis de (1) P. Ascherson, Die geographische Verbreitung etc., p. 211. 230 CAMILLE SAUVAGEAL. conclure que la répartition actuelle des espèces ne pouvait s'expliquer que par des immigrations d’un bassin dans un autre, à une époque géologique antérieure, pendant laquelle une configuration différente des mers permettait ces immi- grations devenues aujourd'hui impossibles. Cet auteur croit mème que la cause de la différenciation spécifique de cer- laines espèces, réside dans la cessation de la continuité pri- milive des bassins qu'elles habitaient. Parmi les exemples qu'il cite à l’appui de celte assertion, est celui que des quatre espèces de la Méditerranée {C. æquorea, Z. marina, Z. nana, P. Caulini), aucune ne se retrouve parmi les neuf espèces de la mer Rouge (Ænhalus acoroides, Thalassia Hemprichu, C. rotundata, C. serrulata, C. ciliata, C. isoetifolia, Halo- dule uninervis, Halophila stipulacea, H. ovalis), et qu'à part les Cymodocea de la seclion Phycagrostis, elles sont même com- plètement différentes comme genres. Pour ce savant auteur, la présence du C. rotundata dans la mer Rouge indiquerait done que l'espèce voisine C. æquorea de la Méditerranée ne serait autre que la première, immigrée de la mer Rouge à l'époque relativement récente où la Méditerranée était en- core ouverte vers le Sud-Est, et où l’isthme de Suez n’était pas formé. Quoi qu'il en soit, les résultats anatomiques exposés plus haut, et qui seront complétés plus tard par l'étude de fa tige, montrent une très grande homogénéité dans le sous-genre PAycagrostis, el plus d’affinités entre les espèces qui le composent qu'avec les espèces des deux autres sous-genres. 37. Cymodocea ciliata (Forsk.) Ehrenb. L'axe principal des PAycagrostis est rampant, et les fais- ceaux de feuilles sont portés par des parties dressées relati- vement courles. Au contraire, les deux espèces du sous-genre Amphibolis ont des tiges dressées, beaucoup plus allongées et abondamment ramifiées ; les feuilles des portions infé- rieures tombent d'assez bonne heure, mais celles des som- mets forment des bouquets compacts. Ces axes dressés sont FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 231 toujours à entre-nœæuds plus épais et plus courts chez le C. ciliata que chez le C. antarctica. J'ai pu observer, sur quelques exemplaires de C. ciliata, Ta disposition de la tige rampante. C'est un sympode dont chaque article est formé de quatre entre-nœuds; chaque entre-nœud a un demi à un centimètre de longueur; le quatrième, plus court, se redresse et devient la base de la tige dressée; un bourgeon se développe à sa base et continue la lige rampante. Les feuilles de la tige rampante sont des écailles. Le C. ciliata, de mème que le C. serrulata, a encore ses fleurs mâles el ses fruits in- connus ; on le rencontre dans les mêmes régions que ce der- nier, auquel, dit M. Ascherson, » ilest si semblable en appa- rence, qu'antérieurement, Je ne l'en ai pas même distingué ; en dehors des parties dressées, dures, allongées de la tige, il s’en distingne parles cicatrices foliaires, qui forment (comme chez le plus grand nombre | f des Phanérogames marines), f* { A | ; des anneaux fermés, tandis que Fig. 42. — Cymodocea ciliata. — Sommet chez le C. serrulata, ils sont d'une feuille adulte (gross. 5). ouverts plus ou moins large- ment sur un côté (1). » La confusion est cependant difficile sur les exemplaires pourvus de leur tige; d’ailleurs, les feuilles du C. ciliata, conservées en herbier, sont toujours plus sombres, plus coriaces que celles du C. serrulata, et pos- sèdent au sommet du limbe des dents fermes et écailleuses, très légèrement bordées de blanc. La largeur de la feuille est assez variable : je l’ai vue sur différents exemplaires varier, à la base du limbe, de 9 mm. (1) P. Ascherson, Die geographische Verbreitung etc., p. 199. 232 CAMILLE SAUVAGEAU. à 15 mm. La gaine, longue de 2 em. et demi à 3 cm. est très étroite à la base, où elle entoure la tige, et va en s’élar- gissant jusqu'au niveau de la ligule, et ses lèvres, dimi- nuant de largeur, se terminent en pointe arrondie. Les lèvres de la gaine possèdent de délicates nervures, légère- ment saillantes et facilement visibles à l'œil nu ; on en compte 3-4 à la base, mais elles ne remontent pas dans le limbe, et l’on voit la nervure marginale recevoir les autres, au fur el à mesure que la lèvre devient plus étroite, pour s’infléchir ensuite et remonter dans le limbe. La ligule, sée un peu obliquement par rap- port aux bords du limbe, est beaucoup plus développée que | chez les Phycagrostis el atteint J près de 3 mm. de hauteur. not souvent dispo- Pr) IS x x; NS Li = LL (4 1e, ES X x AR =)\ NO XX Era EN Fig. 43. — Cymodocea ciliala. — Dent du Fig. 44. — Cymodocea ciliata. — sommet de la feuille (6 de la fig. 42) Dent du bord latéral de la (gross. 145). feuille, près du sommet (a de la figure 42) (gross. 145). Le limbe possède à son sommet un grand nombre de dents (fig. 42), dont la forme et la structure sont très carac- téristiques. M. Maguus (/oc. cit., p. 89) les a appelées « dents nageoires » (Flossenzähne). Celles du sommet arrondi sont à peu près de même largeur dans toute leur hauteur et par- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 233 Fa fois dentées ou bifurquées sur leur bord externe (fig. 43); les dents latérales moins puissantes (fig. 44) sont plus lon- guement appliquées contre le limbe et atténuées à leur extré- mité inférieure, de manière à se confondre insensiblement avec lui. Elles sont dues à l'allongement en doigt de gant, vers l'extérieur, de quelques cellules épidermiques de bor- dure; ces prolongements, souvent irréguliers dans leur forme, sont unis entre eux par leurs parois communes, qui se sont élargies surtout au sommet des dents, el qui don- nent lieu sur les feuilles sèches à une légère bordure blan- che; l’épaississement de la membrane peut aussi diviser ces prolongements cellulaires en plusieurs segments (fig. 45) en- core plus irréguliers, et dans lesquels il est souvent difficile de retrouver les cellules primitives. Les cellules de l’épiderme, vues de dessus, ont leurs parois assez épaisses sur leur pourlour; un assez grand nombre sont sécrélrices de même que d’autres cellules profondes de parenchyme; après que leur contenu x été dissous, on ne les distingue plus des autres cellules épidermiques, comme on pouvait le faire chez les PhAycagrostis, ce qui indique qu’elles ont conservé leur forme normale. J'ai vu le nombre des nervures, compté sur des coupes transversales de diffé- rentes feuilles, varier de 17 à 25. Elles sont parallèles, se réunissent au sommet par des arcs d’anastomose comme dans les espèces précédentes, mais la nervure médiane ne se prolonge pas au-dessus. Les nervures transversales d'anastomose sont souvent très obliques (fig. 42). Une coupe transversale, à la base du limbe, montre un parenchyme relativement dense et constamment dépourvu de ces cordons fibreux que nous avons rencontrés chez les trois espèces de Phycagrostis. Le parenchyme entoure chaque nervure, sans laisser aucune lacune vers l’épiderme; les 4-6 nervures les plus voisines du bord, de chaque côté, sont plongées dans un (issu massif. Mais les nervures les plus proches de la nervure médiane laissent entre elles 3-6 ca- naux aérifères étroits (fig. 45) pourvus de diaphragmes trans- 234 CAMILLE SAUVAGEAU. versaux et séparés entre eux par des murs courts. Il est fré- quent que l’une des couches sous-épidermiques soit formée de deux assises de cellules. À un niveau plus élevé, la région [1 EH E j ne \—- 7 l = \ + LE Re + É A Sd { = ‘fl 4 Ve l se] sversale faite à la base du limbe; la partie libérienne de la gueuse de la nervure latérale sont indiquées par des hachurcs a CNE / ee | SÉCE Fig. 45. — Cymodocea ciliata. — Coupe tran NE À _. Ë Fig. 46. — Cymodocea ciliula. — Coupe transversale faite à la base d’une lèvre de la gaine; Ja partie libéro-ligneuse des nervures est indiquée par des hachures (gro nervure médiane et la partie libéro-li (gross. 145). médiane se rétrécit, et enfin disparait vers le sommet. La nervure médiane et les nervures latérales ont la structure indiquée pour le C. æquorea; chacune est entourée d’une gaine endodermique, à éléments épaissis, bien lignifiés FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 235 (fig. 45) et, sur certaines préparations, presque toutes les nervures sont entourées d’une gaine double ou triple de cel- lules épaissies et lignifiées. Dans la gaine foliaire, l’épiderme, comme cela à déjà été indiqué chez les espèces précédentes, a ses cellules plus aplaties sur la face ventrale que sur la face dorsale (fig. 46). Les faisceaux libéro-ligneux des lèvres, situés près de l’épiderme ventral, ont une gaine endodermique épaissie et lignifiée, comme ceux du limbe, mais qui en outre, sur la face qui regarde l'extérieur, se prolonge et va en s'élar- gissant par l’adjonction de nouveaux éléments semblables. Le plus souvent, ce massif fibreux arrive au contact de l’épi- derme, et parfois, comme dans le dessin de la figure 46, les fibres lignifiées sont si nombreuses qu’elles forment une sail- lie qui rend les nervures visibles extérieurement sous forme de stries. Suivant les échantillons examinés, ces paquets fibreux accompagnent aussi un nombre variable de nervures de la partie plate de la base de la gaine, mais sans arriver jusqu'à la nervure médiane. Plus rarement, le paquet fibreux qui accompagne une nervure n'est pas au contact direct de l’endoderme, mais en est séparé par 1, 2, 3 épaisseurs de cellules à parois minces. Au sommet de la gaine, les lèvres sont moins larges qu'à la base, et leurs nervures ont dimi- nué de nombre; les nervures de fa partie plate y sont assez souvent accompagnées d’un cordon fibreux, mais moins im- portant qu’à la base de la gaine. La ligule ne présente rien de particulier. Les étuis scléreux qui entourent les nervures du limbe et de la gaine, et l'épaisseur de l’épiderme sur sa face externe, ont pour effet de diminuer l’évaporation au moment de la marée basse; en consolidant la charpente de la feuille, ces moyens de protection augmentent aussi sa résistance au choc des vagues auquel elles sont exposées (v. p. 122). Mais l'existence de puissants cordons fibreux dans la gaine et leur absence dans le limbe, montrent que l’apparilion de ces or- ganes n’est pas dictée uniquement par les besoins de la plante. 236 CAMILLE SAUVAGEAU. D'ailleurs, bien que le C. ciliata, comme on l’a dit précé- demment, croisse habituellement à l'ile Maurice sur les récifs exposés à une forte lame, j'ai cependant recu de M. Jadin d’autres exemplaires de celte même espèce pous- sant en dedans des récifs, dans le fond de la baie, sur un fond de sable, et complètement à l'abri de la lame. Or, l'anatomie de la feuille de ces exemplaires correspond com- plètement à la description donnée plus haut. Les écailles, portées par la tige rampante, sont insérées circulairement comme les feuilles de la tige dressée. Les coupes transversales montrent l’épiderme de la face dorsale lignifié et plus fortement épaissi que celui de la face ven- trale; entre les deux épidermes sont situées quelques assises de parenchyme. Il existe une nervure unique et médiane très étroite entourée d'un endoderme à parois épaissies el lignifiées. Le parenchyme renferme, à peu près à égale distance des deux épidermes, une douzaine de cor- dons fibreux lignifiés, d'autant plus gros qu'ils sont plus près de la ligne médiane. 38. Cymodocea anturctiea (Labill.) Endl. Agardh, qui hésitait sur la position de cette plante dans le règne végétal, avait créé pour elle le genre Amphibolis, avec les deux espèces A. zosteraefolia et A. hicornis ; elle a été reconnue pour un Cymodocea grâce à la découverte de ses fleurs mâles par Gaudichaud (1). Les fleurs sont d’ailleurs extrêmement rares. Le C. antarctica n’est connu que des côtes de l'Australie et de la Tasmanie, où il produit des liges dressées à la ma- nière du €. ciliata, mais elles sont moins robustes, et leurs entre-nœuds sont plus allongés; ces tiges, qui peuvent attein- dre 50 em. à 1 m. de hauteur, sont dépouillées de leurs feuilles sur leurs entre-nœuds inférieurs, mais les conservent au sommet où elles forment un bouquet compact. (1) Gaudichaud a figuré la fleur mâle et la feuille in Freycinet, Voyage botanique de l'Uranie en 1826, pl. XL, fig. 2, et p. 161: D°AÆ FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 2981 Les feuilles sont courtes, le limbe a environ 4 em. de long et près de 1 cm. de large, et son sommet, au lieu d’être arrondi comme dans les espèces précédentes, est découpé en forme de croissant (fig. 47) (d’où son nom d'A. bicornis donné par Agardh), mais la première feuille d’un rameau a son sommet arrondi, la se- conde est légèrement échan- À crée, et, sur les feuilles sui- 1 cm.; ses lèvres, qui se re- couvrent à la base, diminuent ensuite rapidement de largeur, el se lerminent en une pointe aiguë dépassant d'environ 5 mm. le niveau de l'insertion de la ligule, et qui fait corps avec celle-ci sur le bord ex- lerne. : L'épiderme a loutes ses cel. PE fr, r Cned mel — lules semblables. Lesnervures, 5). au nombre d’une vingtaine, se distinguent de celles de toutes les espèces précédentes en ce que, tout en conservant une direction générale parallèle aux bords du limbe, elles se bifurquent ou se soudent d’une façon irrégulière (fig. 47), et les nervures transversales d’anaslomose, au lieu d’être perpendiculaires aux nervures longitudinales, sont souvent fortement obliques et peuvent même leur resler quelque temps parallèles. Éludié en coupe transversale à la base du limbe, le paren- chyme a la mème disposition générale que dans le C. c/iata. Les canaux aérifères, étroits et séparés par des murs courts ayant une hauteur de 1-2 cellules, n'existent qu'entre quel- vantes, l'échancrure augmente 71 | | ainsi, rapidement d’ailleurs, | | À| jusqu'à la forme {ypique. La | | | f | |] gaine, de forme conique, est | | | | al très courte, elle a moins de s HR | [IN Il HET 238 CAMILLE SAUVAGEAU. = ques nervures voisines de chaque côté de la nervure mé- diane, tandis que les parties latérales sont massives. D’ail- leurs, les nervures sont relativement très rapprochées les unes des autres, et laissent peu d'espace pour les canaux aérifères, puisqu'on en compte de 20 à 25 sur des coupes n'ayant pas { centimètre de largeur. Les canaux ne possè- dent plus de diaphragmes transversaux, semblables à ceux des espèces précédentes, mais les nervures d’anastomose sont supportées par des planchers, reconnaissables en coupe longitudinale, formés par des cellules du parenchyme plus petites, et plus rapprochées l’une de l’autre, comme dans le P. Caulini (fig. 16). Comme on pouvait s’y attendre d’après l'examen de la 48. — Cymodocea antarctica. — Bord d'une coupe transversale faite à la base du limbe pour montrer le massif de fibres lignifiées qui entoure le faisceau feuille vue de dessus, les faisceaux libéro-ligneux sont de taille inégale, et irrégulièrement écartés lun de l’autre; ils ont la structure caractéristique du genre, mais le faisceau marginal de chaque côté possède assez fréquemment sa lacune vasculaire sous-péricyclique, comme dans la nervure médiane. Chacun d’eux est entouré d’une forle gaine endo- dermique lignifiée, souvent double ou triple, tout au moins en cerlains points de son pourtour; mais le faisceau mar- ginal (fig. 48) est plongé dans un épais massif de cellules fibreuses, fortement épaissies et lignifiées, souvent séparé FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 239 par une seule assise de cellules; parfois deux faisceaux sont englobés dans cette gaine scléreuse. Vers le sommet du limbe, le parenchyme se réduit à deux assises de cellules sous-épidermiques, alternes, sans méats ; la nervure marginale, qui a perdu une partie de son épaisse gaine protectrice, reste cependant plus fortement protégée que les autres nervures. La gaine a la mème structure que le limbe; en dehors de la nervure marginale fortement protégée, qui est le prolon- gement de celle du limbe, se trouvent deux petites nervures, propres aux lèvres de la gaine, et qui se terminent dans leur prolongement supra-ligulaire sans entrer dans le ligule pro- prement dite, comme on peut le voir par une coupe trans- versale passant dans la ligule et les oreilles de la gaine. La ligule est longue comme celle du C. ciliata. L'Amphibolis sosteræfolia a élé créé par Agardh pour des plantes de quelques centimètres de hauteur, portant à la base de leur tige une petite coupe d’un blanc jaunâtre, de consistance osseuse, divisée longitudinalement sur presque toute la hauteur en quatre segments à peu près égaux; chacun de ces segments est fui-même divisé par de nombreuses en- tailles moins profondes, à la manière d’un peigne, d’où le nom de « Kammblatt » que M. Ascherson donne à cet or- gane. Comme M. Tepper l’a élabli (1), cet A. zosteræfolia, est une bouture naturelle du €. antarctica. À l'automne, vers le sommet de la tige, sur des entre-nœuds courts, se produit un organe de couleur verte, en forme de coupe. divisé en quatre segments, mais dont les premiers stades du développement n'ont pas été observés. Au printemps, le tissu (1) O. Tepper, Some observations on the Propagation of Cymodocea antarc- tica (Endl.) (Royal Society of South Australia, T déc. 1880). — O. Tepper, Observations on the Propagation of Cymodocea antarctica (Idem, ? août 1881). Je ne connais ces deux mémoires que par une analyse assez longue et une critique détaillée qu'en à donnée M. Ascherson, Beobachtungen von O. Tepper über die vegetative Vermehrung der australischen Scegras Art Cymodocea an- tarctica (Labill.) Endl. (Sitzungsb. des Bot. Ver. der Provinz Brandenbourg aus dem Jahre 1882, p. 28 à 33). 240 CAMELLE SAUVAGEAU. se désorganise et met à nu les dents du peigne, une dés- articulation se produit, et il en résulte qu’une petite plante de quelques centimètres de hauteur, portant à sa base un peigne, devient libre. Le peigne, dont les dents sont dures et pointues, lui sert d’ancre, la bouture flotte, el s'accroche par son peigne, se fixe el se développe en une plante nor- male. J'ai eu à ma disposition deux de ces boutures, et j'ai cherché à connaître la nature de ces peignes, mais je les ai trouvés uniquement formés, sur toute leur étendue, de cel- lules de sclérenchyme, fortement épaissies et lignifiées. Des éléments cellulaires, restés adhérents sur les face inférieure el supérieure, témoignaient de la desquamalion subie par cet organe. Connaissant la structure du limbe des feuilles nor- males et le sclérenchyme qui se développe autour des ner- vures, on aurait pu croire que le tissu dur et scléreux des peignes provenait d’une union de ces faisceaux entre eux à l’aide d'éléments épaissis. [n’en est rien, les nervures n’en- trent nullement dans leur composition, et leur sclérenchyme est indépendant de celui des nervures. : 39. Cymodocea manatorum Aschs. Les deux espèces du sous-genre Phycoschenus se distin- guent des autres Cymodocea, et d’une manière générale de toutes les Phanéroganes marines, par leurs feuilles à limbe arrondi, cylindrique, comme un jonc; la gaine est arrondie, à lèvres recouvrantes tout au moins à la partie inférieure, et la ligule est semblable à celle des espèces précédentes. La chute du limbe se fait tout d’une pièce au niveau de la ligule, qui reste adhérente à la gaine. Le €. manatorum à élé rencontré sur la côte américaine de l'Atlantique et sur les côtes des îles des Indes occiden- tales. Une coupe transversale, faite à la base du limbe, donne une figure bien différente de celle que nous avons rencon- lrée jusqu'ici. On y distingue {rois régions concentriques (fig. 49). La région centrale est constituée par une nervure axile, de structure identique à celle de la nervure médiane, FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 241 d'une espèce quelconque de Cymodocea, entourée par un endoderme hexagonal à éléments subérifiés, mais non épais- sis. Sur l’endoderme s'appliquent six grosses cellules paren- chymateuses, dont la section égale où dépasse celle du fais- ceau tout entier. La région moyenne ou lacuneuse comprend six canaux aérifères, très larges, séparés par six murs rayon- nants de chacun 5-7 cellules en file et qui unissent la région centrale à la région pé- riphérique. Tantôt, cha- cun dessix mursde sépa- ration va directement aboutir à la région pé- riphérique ; d’autres fois, un ou plusieurs d’entre eux se bifur- quent avant d'y arriver, de manière à délimiter entre les deux branches un nouveau canal aéri- fèc M blro tea C Fig. 49. — Cymodocea manalorum. — Coupe ere plus elroiL. es transversale du limbe; a, «, cellules sécré- Canaux, grands ou pe- trices; les faisceaux libéro-ligneux sont indi- tits. sont cloisonnés par qués par des hachures (gr. 80). 1 . des diaphragmes trans- versaux perforés. Quant à la zone externe, elle comprend au-dessous de l’épiderme 2-3 couches de grosses cellules de parenchyme, sans méats, et renferme deux faisceaux libéro- ligneux plus petits que le faisceau central, se développant plus tardivement, et situés à peu près sur un même diamè- tre avec lui. Chacun d'eux, recouvert d’un endoderme, est disposé obliquement, de telle sorte que les trois plans médians passant par les trois nervures se rencontreraient en un point qui serait situé en avant de la partie ligneuse de la nervure médiane. L’épiderme est formé de cellules très étroites, _dont un grand nombre, opposées à une paroi de séparation de deux cellules sous-jacentes, sont sécrétrices et ont pris de grandes dimensions en écarlant leurs voisines et en s’in- ANN. SC. NAT. BOT, x, 16 249 CAMILLE SAUVAGEAU. troduisant entre les deux cellules sous-jacentes. D'ailleurs, les cellules sécrétrices sont aussi répandues dans le paren- chyme, et jusque dans le parenchyme des nervures. Toutes les cellules du parenchyme sont très courtes en coupe lon- gitudinale. Des coupes transversales, faites à différentes hauteurs dans le limbe, montrent toujours trois faisceaux libéro- ligneux, et la même disposition générale du parenchyme, dont les variations proviennent de la bifureation plus ou moins tardive des murs de séparation des canaux. On ne trouve jamais de cordons fibreux. La gaine ne possède pas, comme dans les autres Cymo- docea, une partie plate et deux lèvres, mais plutôt une partie médiane plus épaisse et deux parties latérales. On y trouve cinq nervures, dont la médiane est plus volumineuse ; seules, les trois nervures du milieu pénètrent dans le limbe, les deux autres se terminent dans les courtes oreilles de la gaine qui dépassent la ligule. Dans la région médiane, plus épaisse, le parenchyme forme 2-3 couches de canaux aérifères, assez analogues à celles du €. æquorea, qui latéralement se rédui- sent à deux, puis à une seule, et enfin disparaissent dans les bords amincis; les cellules épidermiques sécrétrices de ces bords sont encore plus volumineuses que celles du limbe. Les lèvres de la gaine se prolongent au-dessus de la base du limbe en petites oreilles dont le bord externe se continue sur la face ventrale de la feuille et forme la ligule. 40. Cymodocea isoetifolia Aschs. Cette espèce se rencontre fréquemment dans la mer Rouge, l’océan Indien et l'océan Pacifique; la forme et la structure de ses feuilles se rapprochent beaucoup de celles de la précédente. La disposition du parenchyme et des élé- ments sécréleurs est la même, mais le nombre des nervures est plus grand. À la base de la gaine, on voit un faisceau médian, gros, el 3, 4, 5 latéraux de chaque côté, tous très rapprochés de la face ventrale de la gaine: à son sommet, FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 243 on trouve, entre le faisceau médian et l'épiderme dorsal, 9-4 faisceaux provenant de branches latérales ou du dépla- cement de quelques-uns des précédents. Au-dessus de la ligule, le limbe est légèrement aplati du côté interne; à ce niveau, une section transversale montre un faisceau médian, prolongement de celui de la gaine, et dans la zone externe 7-10 faisceaux plus petits disposés en uuarc ouvert du côté de la partie plate (fig. 50, A). Un centimètre au- dessus, la section est arrondie, les faisceaux périphé- riques se sont mul- tipliés, el on en Fig. 50. — Cymodocea isoetifolia. — Coupe transver- trouve 10-15 plus sale du limbe pour montrer la disposition des fais- ou moins irréguliè- ceaux libéro-ligneux. A, immédiatement au-dessus ; de la ligule; B, 1 centimètre au-dessus de A (gross. rementdisposéssur 25). tout le pourtour (fig. 50, B), Cette disposition est d’ailleurs assez variable, car, sur la feuille qui a servi à faire les dessins de lafigure 50, on trouvait vers le milieu de la hauteur du limbe 9 faisceaux périphériques, très régulièrement disposés en anneau. Le limbe, cylindrique sur presque toute sa hauteur, s’apla- Ut vers le sommet, et sa seclion transversale prend la forme d’un croissant; en même temps le nombre des nervures diminue, il n’y en a plus que cinq, enfin au sommet le limbe est plat, mince, et ne renferme plus que trois nervures. L'orientation des faisceaux libéro-ligneux mérite d’être signalée. Le faisceau axial, ou nervure médiane, reste sim- ple et plusgros que les faisceaux périphériques. Il est entouré par un endoderme à parois minces, maïs très net, souvent subérifié ; la lacune vasculaire, tournée vers la face ventrale, est sous-péricyclique comme chez les autres espèces de 244 CAMILLE SAUVAGEAU. Cymodocea et le faisceau libérien est bien caractérisé. Cha- cun des faisceaux périphériques est entouré par un endo- derme, et comprend une parlie libérienne et une lacune vasculaire sous-endodermique ; tous sont orientés de ma- nière que la partie ligneuse soit tournée vers la nervure médiane. C’est seulement au sommet, où le limbe est aplati et où les faisceaux lhibéro-ligneux ont diminué de nombre, qu'ils sont orientés normalement, comme dans les feuilles à limbe rubané. Bien que les coupes transversales montrent la partie ligneuse à l’état de simple lacune, on trouve sur les coupes longitudinales, dans la nervure médiane et dans les nervures périphériques, des vaisseaux lâchement réticulés, légèrement lignifiés. Les cordons fibreux font défaut. Les feuilles adultes du C. isoetifolia sont presque toujours déchirées à leur sommet, mais on peut observer sur des feuilles jeunes, encore renfermées dans la gaine de celle qui les enveloppe, que le sommet est orné de dents longues, plates, semblables à celles du C. serrulata (fig. 51), mais par- fois ramifiées. La ligule ressemble à celle du C. manatorum. Malgré leur ressemblance extérieure, les deux espèces de Phycoschwnus seront donc toujours facilement distinguées l'une de l’autre par le nombre différent de leurs nervures. Les caractères suivants distinguent les Cymodocea des au- tres genres : 1° la présence de dents au sommet du limbe; 2° Je nombre et la structure des nervures; 3° la présence constante d'une gaine endodermique; 4° la disposition du parenchyme ; 5° l'existence constante de cellules sécrétrices; 6° l’absence d'ouverture apicale. Les C. ciliata et C. antarc- tica ont leurs faisceaux libéro-ligneux protégés d’une façon spéciale contre l’évaporation et, d’une manière générale, toutes les espèces du genre possèdent un parenchyme à grosses cellules, qui doit jouer, quand les circonstances s’y prêtent, le rôle de tissu aquifère. Quant aux différentes espèces, on pourra les distinguer FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 245 entre elles, si l’on fait des coupes à différents niveaux, sur des feuilles complètes; j'ai réuni dans le tableau synoptique suivant leurs caractères distinctifs les plus apparents. Dents souvent bi ou tri- furquées, caduques ; 1-9 nervures ; 3 ran- uées de canaux aéri- | fères à la base du Hmbe:.ss spa: C. æquoreu. Dents très petites; gaine conique; 10-13 nervures ; { rangée de canaux aériféres ; ca- naux accompagnant les nervures, à sec- tion/larce....1.... C. rotundata. Dents longues, trian- gulaires; gaine coni- que; 15-17 nervures; canaux aérifères à | section plusfaible que Feuilles àlimbe | dans l'espèce précé- rubané....... DiTente ss ssssteens ,.. C. serrulata. !Dents écailleuses ; | gaine conique à fais- ceaux fibreux; 17-25 { Cordons fibreux | - dans le limbe. | S. g. Phycagrostis. DETVUTES ares C. ciliata. Sommet échancré en croissant; gaine co- Piside croissant; gaine Co nique, courte,se pro- longeant en oreilles triangulaires; une vingtaine denervures à anastomoses obli- ques; nervure mar- ginale plongée dans un épais massif de cellules lignifiées... C. antarctica. ‘5 nervures dans la cordons fibreux dans le limbe. S. gs. Amphibolis. Feuilles à limbe | Pas de gaine; 3 nervures cylindrique cordons fibreux. / dans le limbe...... C. manatorum. its g. Phycoschænus. | Nombre plus grand et variable de nervures. €. isoetifolia. VII. — Halodule ENpr. Le genre Æalodule (1), pour lequel du Petit-Thouars avait créé le genre Diplanthera, comprend seulement 2 espèces. (1) Aubert du Petit-Thouars, Mélanges de Botanique et de Voyages, Paris, Lo FSSs SD CAMILLE SAUVAGEAU. 41. Halodule uninervis (Forskal) Aschs. Cette espèce, plus connue sous le nom d’77. australis Miq., est très répandue dans la mer Rouge, l’océan Indien, l’océan Pacifique. Le port de la plante est assez semblable à celui d'un C. æquorea où mieux d’un C. rotundata, mais elle est de plus petite taille. Elle leur ressemble par les entre-nœuds de la tige rampante assez espacés, les feuilles étroites, le limbe qui se détache tout d'une pièce au niveau de la ligule, la gaine longue à bords libres et recou- vrants, à peu près de même largeur sur toute sa longueur, et qui se termine de chaque côté par une courte oreille. Comme chez les Phycagrostis, les courtes pousses verticales sont entourées à leur base par “ele quelques gaines qui ont perdu leur limbe, Rs AN ue et que Steinheil prenait pour des écailles. dule uninervis; B, À l'œil nu ou mieux à la loupe, on voit le He Wright. — Jimbe se terminer au sommet par {rois Sommet de la } feuille (gross. 5 dents : deux marginales plus longues, dans le prolongement des bords du limbe, laissant entre elles une échancrure, du milieu de laquelle s’élève la dent médiane plus courte(fig. 51, A). Au microscope, les deux premières sont entières et nettement limitées, la troisième est émoussée au sommet, déchirée, ses cellules sont minces, transparentes, plus ou moins vides de protoplasme. Mais sur une feuille jeune, encore enfermée dans la gaine de la feuille qui l’enveloppe, cette dent est au contraire au moins aussi haute que les deux autres, et se termine en un sommet obus, entier; avant qu’elle devienne libre, les cellules du sommet de la dent médiane se désorganisent et tombent, tandis que la base persiste ; il ne se produit pas d’autre des- B A: 1811. Genera nova Madagascariensia, p. 3. L'auteur donne seulement une description de quelques lignes sans figures. — Ad. Steinheil, Observations sur la spécification des Zannichellia ef sur le genre Diplanthera de Dupeiit- Thouars (Ann. sc. nat. bot., 2 s. t. IX, 1838, p. 99). L'auteur donne dans la planche IV six dessins se rapportant au Halodule uninervis. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 247 quamation à droite ou à gauche de cette dent médiane. Outre la nervure médiane, la feuille possède deux nervures marginales qui paraissent se terminer chacune dans la dent marginale correspondante sans s’anastomoser avec la ner- vure médiane. L’épiderme du limbe, vu de dessus, se montre formé de cellules plus allongées que chez les Cymodocea; un certain nombre d’entre elles, à parois plus minces et légère- ment convexes, sont remplies d’une malière brune tannifère, ce sont des cellules sécrétrices. Par son aspectextérieur etses cellules sécrétrices, V7. uwni- nervis a donc beaucoup de ressemblance avec les C. æquo- rea et C. rotundata; par la faible largeur de son limbe et ses trois nervures, il se rapprocheextérieurement du Z. nana, mais l'examen anatomique d’un simple fragment de feuille permetlra toujours de le distinguer de ces espèces. M. Ascherson (1) dit à propos de l'A. uninervis (H. austra- lis) : « Des observations plus étendues apprendront si une remarquable différence, observée sur les exemplaires que j'ai eus jusqu'ici sous les yeux, est constante, c’est-à-dire si la plante mâle de cette espèce est beaucoup plus délicate et plus grêle que la femelle, tandis que c’est l’inverse chez VA. Wrightu. » Je ne puis nüllement confirmer cette obser- vation, tout au moins quant à la première espèce. En effet, les exemplaires tirés de l’Herbier du Museum, que j'ai étu- diés au point de vue anatomique, avaient des origines diffé- rentes. Or les uns, qui provenaient du voyage de Schweinfurth dans l'Afrique centrale, en 1868, et du voyage de Botla en Arabie, étaient tous stériles et relativement robustes, la largeur de leurs feuilles adultes atteignait ou dépassait 2 mm. Les autres avaient été recueillis par M. Balansa en Nouvelle-Calédonie, et tous les exemplaires, stériles, mà- les ou femelles, étaient beaucoup plus grêles dans leur tige et dans leurs feuilles; celles-ci avaient au moins 1 mm. de largeur, el présentaient, comme celles des exemplaires (1) P. Ascherson, Die geographische Verbreitung, elc., p. 201. 248 CAMILLE SAUVAGEAU. précédents, trois délicates nervures; mais le nombre des canaux aérifères séparant deux nervures y était réduit à un ou deux. De même, tous les exemplaires que j'ai reçus de l’île Maurice, de M. Jadin, étaient stériles et apparte- naient à la variété grêle. Il me paraît donc plus exact de dire que la largeur des feuilles dans les formes grêles est égale ou inférieure à { mm. et que dans les formes plus vigoureuses elle atteint ou dépasse 2 mm. M. Ascher- son paraît d’ailleurs avoir renoncé à la précédente supposi- tion, car il admet pour l'A. uninervis (Flora orientalis, { N, p. 24) une forme grêle rappelant le Æuppia et une forme plus robuste se rapprochant du Zostera nana par la taille. Une coupe transversale de la base du limbe montre un épiderme à petites cellules, à paroi externe épaissie, qui ren- Fig. 52. — Halodule uninervis. — Coupe transversale de la base du limbe; a, a, cellules sécrétrices (gross. 220). ferme la totalité des cellules sécrétrices. Celles-ci sont ren- flées et pénètrentun peu dans le tissu sous jacent, en écartant deux cellules sous-épidermiques (fig. 52). La couche sous- épidermique est composée d’une assise de cellules, parfois de deux, dont les éléments sont alors séparés par des méats. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 9249 De chaque côté de la nervure médiane, dans la variété à feuilles larges, sont quatre à six canaux intercellulaires occupant toute l’épaisseur du parenchyme, et seulement un ou deux dans la variété à feuilles étroiles. Ces canaux sont cloisonnés par des diaphragmes perforés. Le parenchyme ne possède jamais le moindre cordon fibreux. La nervure médiane, plus grosse que les deux marginales, a une section presque parfaitement ronde, tandis que chez les Cymodocea, Zostera, Posidonia, etc., elle est plus ou moins allongée; deux ou trois assises de cellules parenchymateuses laissent entre elles des méats, la séparant des deux épider- mes. L'endoderme (fig. 53; a ses parois épaissies et lignifiées sur tout leur pourtour; le péri- cycle est bien caractérisé. Le bois est représenté par une la cune sous-péricyclique mon- tran parfois des vestiges d’or- Fig. 53. — Halodule uninervis. — nements lignifiés. Le Jiber k Coupe transversale de la nervure formé de quelques cellules seu- ne à la base du limbe (gross. lement, est séparé du bois par quelques cellules étroites, épaissies en fibres non ligni- fiées et disposées en une couche continue ou discontinue. Ces cellules épaissies, situées à l’intérieur même du faisceau, dont la présence est constante, et qui apparaissent de bonne heure dans le développement du faisceau sont très caracté- ristiques ; de toutes les Phanérogames marines, les Halodule et Phyllospadix (p.156) seuls possèdent des fibres semblables. Chacune des deux nervures marginales (fig. 54) est sépa- rée de l’épiderme du bord par deux ou trois rangées de cel- lules, dont les parois sont épaissies en collenchyme. Elles sont formées de quelques cellules seulement, et l’on reconnait encore la lacune vasculaire, très petite, mais l’endoderme n'est plus distinet. 250 CAMILLE SAUVAGEAU. Vers son sommet, le limbe diminuebeaucoup d'épaisseur, etle parenchyme est bientôt réduit à deux assises sous-épi- dermiques (fig. 54 B) de grosses cellules exactement op- posées, arrivant au contact l’une de l’autre, et laissant entre elles des méats quadrangulaires ; la symétrie n’est dérangée que par les cellules sécrétrices qui pénètrent entre elles. La nervure médiane s’est aplatie, el sa section est devenue ovale saivant la largeur du limbe:; l'endoderme et le péricyele sont Fig. 54. — Halodule uninervis. — Coupe transversale dn limbe. A, près de la base; B, près du sommet; a, a, cellules sécrétrices (gross. 145). restés bien caractérisés, et la lacune vasculaire s'est aplatie de manière à conserver à peu près la même surface de sec- tion; les cellules fibreuses non lignifiées se retrouvent encore entre la région ligneuse et la région libérienne. L’endoderme est séparé de l’épiderme par l’assise sous-épidermique qui, à ce niveau, rétrécit beaucoup ses cellules. La gaine possède, sur toute sa longueur, la même structure que la base du limbe ; les lèvres, surtout vers le sommet de la gaine, sont uniquement formées par les deux épidermes ; les cellules de l’épiderme dorsal sont beaucoup plus volumi- neuses et fréquemment sécrétrices. La ligule est courte et fait une saillie de quelques cellules seulement. La préfeuille est une gaine fendue sur toute la longueur, et arrondie au sommet ; elle est très mince et très délicate, FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 251 réduite à ses deux épidermes, sans aucun faisceau libéro-li- gneux ni cordon fibreux. | 42. Halodule Wrightii Aschs. On rencontre cette espèce uniquement dans la mer des Antilles. Les feuilles, assez longues, n’ont guère que 1 mm. de largeur; au sommet, elles possèdent deux dents mar- ginales (fig. 51 B), et une petite échancrure plus ou moins profonde se trouve à la place de la dent médiane de l'espèce précédente; c’est là qu'aboutit la nervure médiane, en communication avec l'extérieur. Au début, une petite Fig. 55. — Halodule Wrightii. — Coupe transversale de la base du limbe (gross. 220). dent arrondie existait en ce point, et c’est sa chute qui a amené la production de cette ouverture apicale. Les deux nervures marginales viennent se terminer insensiblement dans les dents marginales mais, pas plus que dans l'espèce précédente, je ne les ai vues s’anastomoser avec la nervure médiane. La structure, étudiée à la base du limbe, ne présente que de légères différences avec l'A. uninervis; les nervures sont identiques ; les méats qui, dans ce dernier, existaient entre les cellules des deux assises séparant l’endoderme de lé- 252 CAMILLE SAUVAGEAU. piderme, sont transformés ici en lacunes séparées par des murs (fig. 55) et; comme Îe limbe n’est pas plus épais dans cette espèce que dans la précédente, les cellules y sont moins grandes. Entre les nervures, on trouve un ou deux grands canaux aérifères comme dans l’{7. wninervis de la Nouvelle- Calédonie, mais en plus, sur la face ventrale, il y a une rangée sous-épidermique de canaux aérifères beaucoup plus pelits et plus nombreux. A un niveau plus élevé, les canaux aérifères, qui entourent la nervure médiane, se transfor- ment en méats, les étroits canaux de la face ventrale dispa- raissent, et la structure devient exactement celle de l'A. uni- nervis. De même, tout à fait au sommet, le parenchyme est réduit aux deux assises sous-épidermiques en contact et à éléments opposés. La gaine possède la même structure que le limbe. On dislinguera donc les deux espèces, soit par l’observa- tion du sommet du limbe, soit par une coupe transversale pratiquée à la base, au-dessus de la ligule. Le genre Halodule est donc caractérisé : 1° par les deux dents marginales du sommet de la feuille ; 2° par la section transversale arrondie de la nervure médiane, entourée d’un endoderme épaissi, et par les deux nervures marginales moins neltes ; 3° par la lacune vasculaire sous-péricyclique dans la nervure médiane, et par les fibres épaissies, non lignifiées, situées entre le liber et le bois; 4° par la disposi- tion des éléments des deux assises du parenchyme au som- met du limbe; 5° par les cellules sécrétrices exclusivement épidermiques; 6° par l’ouverture apicale. CHAPITRE VI ZANNICHELLIÉES ASCH. La fleur mâle n’a pas la même structure chez les deux gen- res Zannichellia Mich. et Althenia Petit; chez le Zannichel- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 253 la, elle est réduite à une étamine portée par un filet plus ou moins long, et est nue; chez l’A/fhenia, elle se compose d'une étamine également unique mais porlée sur un long pédicelle qui se termine par un périanthe formé par trois petites écailles. VIIL. — Zannichellia Micu. (1). La détermination spécifique des Zannichellia à l'aide des caractères que l’on trouve dans les flores est fort difficile, et la valeur que les auteurs leur accordent est très variable. Aussi, le nombre des espèces est lui-même variable suivant les auteurs. Bentham et Hooker (2) ne se prononcent pas sur ce sujet et disent «species { vel plures ». Dans un tra- vail récent sur les Zannichellia qu'il a observés dans le département de la Gironde, Clavaud (3) considère le Z. pa- lustris L. comme devant être divisé en quatre espèces : . Z. cyclostigma Clavaud. . Z. lingulata Clavaud. . Z. pedicellata (Fries) Boreau. . Z. repens (Bænngh) Boreau. EE © Dre, qui correspondent à des caractères et à des habitats déter- minés. J'emploie ici les noms spécifiques adoptés par ce botaniste. De même que chez les Potamogeton, l'axe rampant des Zannichellia est un sympode. Mais ici, la première feuille qui naîl sur l'axe rampant, ou préfeuille, est réduite à une gaine à bords soudés, et par suite entourant complètement l'axe ; la deuxième feuille et les feuilles suivantes ont toutes un limbe inséré directement au nœud, et qui correspond à la préfeuille précédente. Le limbe, légèrement rétréci à sa base, se termine en pointe. (4) Th. Irmisch, Ueber einige Arten etc., loc. cit., p. 36. — H. Schenck, Vergleichende Anatomie, etc. (loc. cit., p. 16). (2) Benfham et Hooker, Genera plantarum, t. IE, p. 1016. (3) Clavaud, Sur les Zannichellia du département de la Gironde (Actes de la soc. linn. de Bordeaux, 1888, p. LXVIT). 254 CAMILLE SAUVAGEAU. 43. Zannichellia repens (Bænngh.) Boreau. — 44, Zannichellia pedicella (Fries) Boreau. Une coupe transversale, pratiquée à la base du limbe, montre un épiderme à cellules étroites, au-dessous duquel est une assise continue de grosses cellules de parenchyme entourant de chaque côté un large canal aérifère (fig. 56). Au milieu, autour de l'unique nervure, sont de grosses cellules semblables aux précédentes et formant un massif qui réunit les deux épidermes. La nervure se compose d’une lacune vasculaire très étroite entourée de cellules, dont les parois sont légèrement bombées dans l’intérieur de la lacune, et d’un groupe de celluleslibériennestrès étroites. Son pourtour est formé par une as- sise de cellules, à pa- rois rectilignes, qu’il faut peut-être consi- dérer comme un péri- cycle à cause de la Fig. 56. — Zannichellia repens. — Coupe trans- forme de ses cellules, versale de la base du limbe (gross. 115). el aussi parce que 1-2 d'entre elles contri- buent à limiter la lacune vasculaire. L'absence complète d'éléments subérifiés empêche de déterminer l’endoderme. Plus haut, la structure est la même, mais la feuille est plus aplatie. La nervure se termine un peu avant d'arriver au sommet, où il ne se produit aucune desquamation. La ligule, de même que dans l'espèce suivante, est libre, et ses bords sont soudés ; elle est réduite aux deux épidermes, aussi est elle très délicate et se déchire-t-elle très facile- ment. Chacune des feuilles possède 2 squamules intravagi- nales. ‘ Les deux espèces sont identiques comme forme et comme structure. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 255 45. Zannichellia lingulata Clavaud. La feuille est un peu plus large que celle des deux espèces précédentes, elle atteint 1 mm., elle est aussi plus aplatie; l’assise sous épidermique, au lieu d’être unique sur tout le pourtour des deux canaux aérifères, se multiplie sur le bord de la feuille, de manière à produire une épaisseur de plu- sieurs grosses Cellules au milieu desquelles est un cordon de petites cellules, représentant une ébauche de nervure marginale. Siun Zannichellia était confondu avec le Æuppia, le Pota- mogeton pectinatus, le P. pusillus, sa structure permettrait toujours de le distinguer. IX. — Althenia PErir. Le genre A//henia a élé créé en 1829 par Petit pour une plante de petite taille, à feuilles capillaires, vivant complète- ment submergée dans l'étang saumâtre de Valcarès (Gard) (1), où ses rhizomes sont plongés dans la vase. Il en fit l'A. fliformis. Delile, prétendant avoir la priorité de la découverte, la décrivit successivement sous les deux noms de Bellevaha australis et de Zannichellia vaginalis (2). Cette petite plante ne fit l’objet d'aucune recherche spéciale jus- qu'en 1864, époque à laquelle M. Prillieux l’étudia au point de vue morphologique et anatomique (3). Les échantillons qui ont servi à son travail provenaient de la succession de J. Gay, et avaient été recueillis dans les environs de Mont- pellier, par M. Grônland. Je note ce détail. En 1872, Duval-Jouve trouva dans une mare des Onglous, entre Cette et Agde, un À /{henia de plus grande taille que le (4) F. Petit, Alfheniæ novi plantarum gencris descriptio (Ann. des se. d’ob- servation, t. 1, 1829, p. 451 à 456, pl. XIT). (2) Dans une simple page d'impression que Delile adressa à divers bota- nistes, et dont l’herbier du Muséum possède un exemplaire. (3) Ed. Prillieux, Recherches sur la végétation et la structure de l'Althenia fiiformis Petit (Ann. des sc. nat. Bot., 5° série, t. II, 1864, p. 169 à 190, pl. XV et XVI). 256 CAMELLE SAUVAGEAU. précédent et qu'il nomma À. Barrandoni (1). Tandis que la première espèce élait pelite, rampante, celle-ci avait des rameaux dressés atteignant jusqu'à 50 cm. ; des caractères morphologiques, cités par l’auteur, justifiaient la création de cette seconde espèce; Duval-Jouve donna le dessin d’une coupe de feuille d'A. Parrandoni, d’ailleurs absolument semblable à celui donné par M. Prillieux de l'A. filiformis. La flore de Montpellier de Loret et Barrandon cile une seule espèce d'Alfhenia: À. Barrandonü (2). Mais pendant l'impression de ce livre, Duval-Jouve trouvait en juin 1875, dans une mare saumâtre des Onglous, les deux espèces d’'Althenia vivant côte à côte (3). Cependant, parmi les Addenda de la Flore, on lit la note suivante probablement due à Loret (/oc. ct., p. 790): « Si l'Alfhenia du lac de Val- carès, localité authentique de l'espèce de Petit, n’offrait pas des caractères plus distinctifs que les deux plantes signalées aux Onglous, nous ne pourrions admettre qu'une seule espèce d’A/rhenia, VA. filiformis Petit, dont l'A: Barrandonii deviendrait alors pour nous une variété. » Aussi, dans la 2° édition faite par Loret seul, l’A. Barrandonü devient un simple synonyme (4). L’A. filiformis existe aussi dans la Charente-Inférieure, et les auteurs de la Flore de l'Ouest de la France donnent les deux noms spécifiques comme syno- nymes (5). Les floristes n’admettent done plus l’existence de l'A. Barrandoni, bien qu'aucun d'eux n'ait discuté les caractères morphologiques distinctifs indiqués par Duval-Jouve. Or, je considère les deux espèces d’Alfhenia comme parfaitement légitimes; l’étude anatomique de la feuille le prouve victo- (1) Duval-Jouve, Sur une nouvelle espèce d'Althenia (Alth. Barrandonii, J. Duv. J.) (Bull. soc. bot. Fr., t. XIX, 1872, p. Lxxxvi à LxxxiIx et pl. V}. (2) Loret et Barrandon, Flore de Montpellier, t. 11, 1876, p. 673. (3) Duval-Jouve, Note sur l’Althenia filiformis rencontré avec l'A. Barran- donii (Bull. soc. bot. Fr.,t. XXII, 1875, p. 233). (4) Loret et Barrandon, Flore de Montpellier, 2° édit. par Loret, 1886, p. 504. (5) Lloyd, Flore de l'Ouest de la France, 4° édit. par J. Foucaud, 1886, p. 329. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. DO. rieusement malgré l'identité des dessins de M. Prillieux et de Duval-Jouve. En effet celui-ci donne, comme je l'ai dit, le dessin d’une coupe de l'A. Barrandonü, mais, malgré le désir qu'on lui connaît de trouver dans l'anatomie des caractères taxinomiques, il ne cherche à en tirer aucune différence spécifique ; il s’est probablement fié à l'exactitude du dessin que M. Prillieux avait donné d’une coupe de la feuille de l'A. filiformis, et s’est cru dispensé de faire cette observation à nouveau; il a dû en conclure que la structure de ces deux espèces est identique. Mais si le dessin que M. Prillieux à donné (/oc. cit, pl. XV, fig. 1) d’un exemplaire entier d'A. fliformis est exact, celui de la coupe transversale de la feuille (/oc. cr, pl. XVE, fig. 6, 7. 8) se rapporte au contraire à l'A. Barrandoni. W est facile de comprendre pourquoi. Grôünland avait dû recueillir les échantillons étudiés par M. Prillieux dans une mare, semblable à celle de Duval-Jouve, oùles deux espèces étaient mélangées. Le rhizome de l'A. #/iformis élant loujours mieux conservé que celui de l'A. PBarrandonü, c'est cette première espèce que M. Prillieux a représentée dans la vue d'ensemble, mais la deuxième ayant les feuilles plus grosses, plus résistantes, cet auteur a dû les choisir pour y faire ses coupes. J'ai étudié l'A. f/iformis sur des exemplaires de la Cha- rente-Inférieure (Angoulins) que M. Foucaud avait bien voulu m'envoyer, et sur des exemplaires de Montpellier, du Portugal, et de la province d'Oran, conservés dans l’herbier du Museum. J'ai étudié l'A. Parrandontü sur des exemplaires donnés autrefois par Duval-Jouve à l’her- bier du Museum. Pour excuser la confusion que les floristes ont faite entre les deux espèces, je dirai, que de tous les exemplaires que possède le Museum, désignés comme A. filiformis et venant des environs de Montpellier, un seul exemplaire, chétif, donné par Delile, appartient à cette espèce, tous les autres sont de l'A. Barrandonii. D'ailleurs, Duval-Jouve avait déjà remarqué dans les collections du ANN. SC. NAT. BOT. XI, 11 258 CAMILLE SAUVAGEAU. Museum et dans l'herbier Cosson que les échantillons prove- nant de Montpellier et nommés A. fi/iformis appartenaient à l'A. Barrandonu (1). 46. Althenia filiformis Petit. Les feuilles sont composées d’une gaine et d’un limbe. La gaine est membraneuse, embrassante, plus large à sa base qu'à son sommet, et fendue sur toute sa longueur. Le limbe est étroit, capillaire, terminé en pointe, et son point d’inser- tion est variable; dans les feuilles inférieures de la tige dressée, il s'insère directement au sommet de la gaine, mais dans les feuilles plus élevées, il s’insère sur la ligne dorsale de la gaine, soit près de son sommet, soil près de sa base. Par suile, « si, comme l'a proposé Petit, on nomme ligule la portion de la gaine au delà du point d'insertion du limbe, on dira que dans les feuilles inférieures de la partie dressée de la tige, la gaine est très grande et la ligule très petite : dans les feuilles supérieures, au contraire, la ligule est très grande et la gaine très petite ; dans les feuilles florales, le limbe lui- même devient très petit et finit par ne pas atteindre même la longueur de la ligule. » (Prillieux, loc. cit., p. 184.) Si l’on étudie un limbe par transparence, on voit la ner- vure médiane se terminer un peu au-dessous du sommet, où ii ne se produit d’ailleurs aucune desquamalion ; sur une coupe transversale, faite à la base du limbe, l’épiderme est formé de cellules relativement grandes. Le parenchyme est constitué par de grosses cellules, toutes semblables, laissant entre elles des canaux aérifères, irrégulièrement disposés, qui arrivent au contact de l’épiderme (fig. 57). L'unique nervure est entourée d’un endoderme très net, dont toutes les parois ou seulement les parois radiales sont subérifiées, mais jamais épaissies. La lacune vasculaire, très nette, en est séparée par une assise de cellules. La gaine montre exactement la même disposition que le (1) Duval-Jouve, Sur une nouvelle espèce, etc. (lc. cit., en note, p. Lxxxvn). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 259. limbe; ses lèvres sont formées uniquement par les deux épidermes en contact, et dont les éléments deviennent de plus en plus étroits vers les bords. La nervure se continue directement dans le limbe sans envoyer de branche dans la portion ligulaire. Il est remarquable qu'il n'existe aucune fibre, ni dans le limbe ni dans la gaine. À l’aisselle de chaque feuille, on trouve deux squamules intravaginales, une de chaque côté, semblables à de minces filaments. M. Prillieux dit queles feuilles écailleuses qui naissent sur la lige tra- CRRIe sont « des feuilles Fig. 57. — Althenia filiformis. — Coupe trans- incomplètes, dont la versale de la base du limbe (gross. 200). portion vaginale seule s'est développée » (p.170); «elles sont membraneuses et par- courues par de fines nervures qui s'étendent parallèlement el sans s’anastomoser de la base au sommet » (p. 171). En réalité, ces feuilles sont réduites aux deux épidermes, sans aucune cellule interposée, et par conséquent sans nervure d'aucune sorte. Si l'A. filiformis, malgré les caractères tirés de la dépen- dance du limbe et de la ligule, était confondu avec un Zan- nichellia, on pourrait immédiatement l'en distinguer anato- miquement par l'existence de l'endoderme et par la disposi- tion des canaux aérifères. Quant à l'A. Parrandonü, nous allons voir que ses caractères sont bien particuliers. 47. Althenia Barrandonii J. Duv. J. Les feuilles de cette espèce sont plus fortes, plus raides que celles de VA. f/iformis ; elles présentent les mêmes rapports entre la gaine et le limbe. En étudiant le limbe par transparence sur une feuille préalablement colorée aux réactifs, on voit aussi une nervure médiane qui s'arrête un peu au-dessous du sommet de la feuille, sans que ce sommet 260 CAMILLE SAUVAGIAU]. subisse aucune desquamation, mais il existe en plus deux nervures latérales sous-épidermiques, mieux marquées que la médiane, et qui, comme nous le verrons, sont dues à des cordons fibreux. La section de la base du limbe est ovale comme celle de l'A. filiformis et à peu près de la même dimension, mais l’épiderme a toutes ses parois plus épaisses ; le parenchyme Fig. 5$. — Althenia Barrandonii. — Section transversale de la feuille ; A, à la base du limbe; B, à la base de la gaine (gross. 200). a les mêmes caractères, la nervure médiane la même struc- ture, mais l’'endoderme est épaissi et lignifié, son épaississe- ment varie suivant les exemplaires étudiés, mais il est cepen- dant toujours très réel (fig. 58 A). À droite et à gauche de la coupe, est un massif relativement puissant de fibres toujours fortement épaissies et le plus souvent lignifiées, que l’on ne retrouve jamais dans l'A. f/iformis. La structure de la gaine est encore plus caractéristique ; l’endoderme y est souvent plus épaissi (fig. 58 B). Quelques- unes des cellules de l’épiderme ventral, voisines de la ner- vure médiane, sont elles-mêmes épaissies et lignifiées. Les lèvres de la gaine sont réduites aux deux épidermes, mais il est remarquable que chaque lèvre, en dehors du massif fibreux FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 261 du limbe qui se continue dans la gaine, possède #4, 5, 6 cor- dons isolés l’un de l’autre et parallèles entre eux. Chacun d'eux est dû à quelques fibres fortement épaissies, intercalées entre les deux épidermes, et les cellules de l’épiderme ventral qui leur sont contiguës sont elles-mêmes transformées. Parfois ces cordons fibreux sont cellulosiques et d’autres fois parfaitement lignifiés. Les cordons fibreux se continuent dans la ligule qu'ils renforcent, mais la nervure n’y pénètre pas. La description précédente permet donc de rétablir l'A. Barrandonti. Par suite, le genre A/{henia comprendra deux espèces : l’une A. #A/formis, répandue dans la Loire-Infé- rieure, la Charente-Inférieure, les environs de Montpellier, la Camargue, Messine, la province d'Oran, le Portugal : l’autre, A. Barrandonii, cantonnée dans quelques étangs des environs de Montpellier. Nous pouvons en tirer en outre une conséquence impor- tante, qui vientappu yer les faits déjà signalés précédemment pour d’autres plantes. En effel, d’après des renseignements que je tiens de M. Barrandon et de M. Flahault, ces deux espèces se trouvent dans les environs de Montpellier, tantôt séparées, tantôt réunies, mais toujours complèlement sub- mergées. Toutes les fois qu'on veut les recueillir, il faut entrer assez profondément dans l’eau, mais le soleil étant très chaud dans ces parages, le niveau de l’eau baisse en été, et dès qu'une portion quelconque de ces plantes se trouve émergée, elle se dessèche et meurt. Enfin souvent, au mois d'août, les mares d’eau saumâtre qui renferment ces plantes restent à sec. Par suite des condilions communes d'existence de ces deux espèces, il n’est donc pas possible d'admettre que les parois épidermiques épaissies, que les cordons fibreux et les épaississements, si abondants chez l’une, y jouent un rôle protecteur important, puisqu'ils sont totalement absents chez l’autre. L'action du milieu, qui s'exerce de la même facon sur les deux espèces, n’entraîne 262 CAMILLE SAUVAGEAU. pas la similitude de structure. Ceci montre donc bien qu’en outre des conditions de milieu qui peuvent agir sur la structure des végétaux, cette structure dépend aussi beau- coup de propriétés et de conditions spécifiques, que nous pourrons peut-êlre un Jour exactement apprécier par la voie historique, mais dont la valeur exacte nous échappe actuel- lement. X. — Lepilæna J. DRruMMoN». Le genre Lepilæna (Heratheca Sonder) est exclusivement australien, il vit dans l’eau saumâtre des marais salants et des lagunes en compagnie des Æuppia ; la plante est très raraifiée, et son portest celui des Zannichellia et des À /{henin. Quelques auteurs, entre autres M. Ascherson (1)le rapportent au genre A/fhenia dont il se rapproche certainement par le petit périanthe trilobé situé au sommet du pédicelle staminal, par les trois fleurs femelles munies chacune d’une bractée, et par la ressemblance du fruit, mais d’autre part il s’en éloigne par ses fleurs dioïques et par l'existence de trois anthères à deux loges soudées l’une à l’autre par leur partie dorsale, portées sur un pédicelle commun. Bentham (2) qui admet l'indépendance de ce genre y reconnait {rois espèces : L. australis J. Drummond. ‘ L. cylindrocarpa Benth. L. Preissii F. Muell. Pour M. F.von Mueller (3) ces deux dernières espèces n’en forment qu'une, le L. Preissü. J'ai recule L. Preissü de M. von Mueller, et c’est la seule espèce que j'ai étudiée. (4) Ascherson in Engler et Prantl., loc. cit., p. 213. (2) Bentham, Flora Australiensis, t. VIE, p. 179-180. (3) EF. von Mueller, Fragmenta, etc., vol. VII, p. 217-218 et Second systematic Census, etc., p. 20#. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 263 48. Lepilæna Preissii J. Drumm. Les feuilles à l’aisselle desquelles peut naître un rameau végétalif possèdent une gaine entourant étroitement la tige. Le limbe s’insère au sommet de la gaine, en laissant au milieu une courte ligule et sur les côlés deux oreilles plus longues, attenant à cette ligule, et qui sont le prolongement des lèvres de la gaine. Les feuilles qui entourent une inflorescence ont une gaine plus large, plus ventrue, un peu comme dans le Æwppia. Le limbe y naît encore au sommet de la gaine. Mais, dans les feuilles qui entourent immédiatement les fleurs, el surtout les fleurs mâles, le point d'insertion du limbe descend sur la face dorsale, comme dans l’A/fhenia ; la gaine proprement dite diminue donc d'importance tandis que la ligule aug- mente de hauteur. Sur un limbe étudié par transparence, on voit l'unique nervure avec ses 2-3 vaisseaux spiro-réliculés s’élargir un peu au sommet, à la manière du Zos{era, mais sans s’y ouvrir, bien que le bord terminal subisse une très légère desqua- malion au point correspondant à l'extrémité de la nervure. Plusieurs cordons fibreux, parallèles à la nervure, arrivent jusqu'au sommet du limbe. Les coupes transversales, à la base du limbe, montrent qu'il existe entre les deux genres A//henia et Lepilæna non seulement des ressemblances extérieures mais aussi des res- semblances anatomiques. Le faisceau libéro-ligneux unique, composé d’une lacune vasculaire sous-péricyclique et d’une partie libérienne, est entouré par un endoderme très net dont les parois, tout au moins les parois radiales, sont subé- rifiées (fig. 59). Le parenchyme est lacuneux et irrégulier, et les canaux aérifères peuvent être limités par l’épiderme ou en être séparés par une assise sous-épidermique. Le développement du système fibreux est tout particu- lièrement remarquable. En plus du cordon fibreux marginal, il en existe d’assez nombreux, sous-épidermiques, disposés 264 CAMILLE SAUVAGEAU. sans symétrie et qui peuvent concourir à former le contour des canaux aérifères ; ces cordons font défaut au-dessus et au-dessous de la nervure. Ces fibres sont très épaissies, à lumière très réduite, et peu où point lignifiées. La partie dorsale de la gaine correspond complètement au limbe ; l’endoderme non épaissi y a ses parois encore plus nettement subérifiées que dans le limbe, et les cordons fibreux, semblablement disposés, sont plus forts. La ressem- blance la plus frappante avec l'A. Barrandonii se rencontre Fig. 59. — Lepilæna Preissii. — Section transversale vers la base du limbe (gross. 220). dans les lèvres, réduites aux deux épidermes, par la présence de cordons fibreux, assez volumineux, faisant saillie, formés aux dépens de l’épiderme ventral, mais qui ne l'ont pas envahi. Cette analogie de structure entre ces deux espèces, qui vivent dans les localités si éloignées l’une de l’autre, méritait d'être signalée. Il est bon aussi de faire ressortir qu'ici encore, l'influence du milieu est loin de s'exercer d’une facon prépondérante ; le L. Preissii vit mélangé au Ruppia, ces plantes ne sont pas sans ressemblances extérieures comme taille et comme forme, et cependant, la feuille de l’une est complètement dépourvue de tout élément fibreux, tandis que celle de l’autre en possède abondamment. QÙ FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 26 CHAPITRE VII LES STOMATES. Ad. Brongniart (1) qui avait observé, d’une part, la pré- sence constante de la chlorophylle dans les cellules de la couche superficielle des feuilles du Potfamogeton lucens et, d'autre part, la séparation par la macération d'une cuticule ne présentant pas d'ouvertures ou stomaltes, en avait conclu que les feuilles des plantes aquatiques ne possédaient ni épi- derme ni stomates, et que l’épiderme élait représenté par la cuticule. Depuis cetle époque, de nombreux auteurs (2) ont montré que la couche externe chlorophyllienne des feuilles submergées est un véritable épiderme ; ils ont en même temps recherché quelles modifications la vie dans l’eau fait subir aux organes des végétaux. Mais leurs résultats ne se sont pas loujours mutuellement confirmés. La question a été reprise récemment dans son ensemble par M. Costantin, qui a montré, entre autres résultats, et par un grand nombre d'observations, l'influence immédiate du milieu aquatique sur la présence des stomates : les feuil- les des plantes plus ou moins amphibies comme AHippuris vulgaris, Stratioles aloides, elc., possèdent des stomates quand elles se développent à l'air, et en sont privées quand elles sont submergées. En faisant varier le milieu, M. Cos- tantin est parvenu à provoquer sur de jeunes feuilles, soit la présence, soit l’absence de stomates. Aussi admet-il que le milieu exerce son action sur la structure des plantes aqua- tiques, à l'exclusion de l’hérédité. L'hérédité au contraire, d’après M. Mer (3), jouerait un (1) Ad. Brongniart, Nouvelles recherches sur la structure de l'Épiderme des Végétauæ (Ann. se. nat. bot., 2 s., t. 1, 1834, p. 65 à 71, 1 pl.). (2) V. la bibliographie in Costantin, Études sur les feuilles des plantes aqua- tiques (Ann. se. nat. bot., 7° s.,t. TI, 1886, p. 94 à 160, 5 pl.). (3) E. Mer, Plusieurs notes in Bull. soc. bot. Fr., années 1876, 1878, 1880, 1881, 1882, 1883, 1885. 266 CAMILLE SAUVAGEHAU. rôle important dans la structure des plantes aquatiques. Il cite à l’appui de cette idée un certain nombre de faits, que d’ailleurs M. Costantin a montré pouvoir être interprétés dans un sens différent. L’un de ces faits reste cependant inexpliqué par la seule influence du milieu: c'est la pré- sence de stomales sur des feuilles du Pofamogeton rufescens du lac de Longemer qui, par suite de la profondeur de l’eau, resteront toujours submergées. Un fait du même genre à été cité par M. Askenasy (1). Il a observé que les cotylédons des exemplaires submergés du ÆRanunculus aquatilis, bien qu'ils possèdent un épiderme à chlorophylle et une struc- ture semblable à celles des feuilles qui se développent dans l'eau, possèdent toujours quelques slomates sur la face supérieure (/0c. cit. p. 6). De même, à l'extrémité des pointes des feuilles submergées très découpées de la même espèce, M. Askenasy à observé des stomates un peu moins grands que ceux des feuilles aériennes; ils doivent être recher- chés sur les feuilles jeunes, car leur existence est éphé- mère, le tissu qui les porte ne lardant pas à se détruire (loc. cit. p. 29). Enfin, le même auteur a constaté un fait semblable sur les feuilles d'Hottonia palustris. Pour lui, « la présence de tels stomales sur les cotylédons, ainsi que leur apparition en des endroits où ils ne sont d'aucune utilité pour la plante, et aussi le fait de leur existence éphé- mère, est l’un des cas les plus remarquables de la formation d'organes rudimentaires dans le règne végétal (loc. cif., p30) Enfin, M. Borodin (2) a signalé l'existence de stomates à la face inférieure des feuilles des Callitriche autumnalis et C. verna ; nous reviendrons plus loin sur celte dernière ob- servation. On admet que les feuilles des autres espèces nor- malement submergées sont dépourvues de stomates. (4) E. Askenasy, Ueber den Einftuss des Wachsthumsmediums auf die Gestalt der Pflanzen (Bot. Leit., 1870, tirage à part, 30 p., 2 pl). (2) J. Borodin, Ueber den Bau der Blattspitze einiger Wasserpflanzen (Bot. Zeit., 1870, n° 52, p. 841 à 850, 1 pl.) FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 267 D'après M. Schenck (1), les stomates ne sont d'aucune utilité sur les feuilles sabmergées ; lorsqu'ils existent, ils doi- vent être considérés comme des organes ataviques, au même titre que l’épiderme sans chlorophylle des feuilles de quel- ques espèces submergées. Il y aurait, dans l'existence de ces plantes, lutte entre les deux facteurs opposés, adaptation, et hérédité ; le premier prendrait le plus souvent le dessus. mais l'influence du second se ferait sentir chez queiques plantes. Il me semble en effet que ces stomates pourraient être com- parés aux organes rudimentaires des zoologistes, qui sont pour ainsi dire les débris, les témoins d'organes autrefois plus développés et auxquels un rôle spécial était dévolu. Jai d’ailleurs observé quelques espèces toujours submergées qui possèdent des stomates sur leurs feuilles, et qui, à la suite de celles citées précédemment, viennent grossir la liste des espèces chez lesquelles lPhérédité triompherait parfois de l'adaptation. La Zannichellia repens est la première plante qui ait attiré mon attention sur ce sujet. Ses feuilles, larges d'environ 1/2 mm. au milieu du limbe, diminuent graduellement de largeur jusqu’au sommet où, finalement, elles se rétrécissent pour se terminer par une pointe formée de 1-2-3 rangées de cellules (fig. 60). Lorsque les feuilles se sont développées dans une eau très limpide, elles peuvent être observées directement sous le microscope. On voit alors, tout près du sommet, des stomates formés chacun de deux cellules stomatiques, en forme de rein, laissant entre elles un ostiole large et arrondi. L'ensemble des deux cellules stomatiques est plus large qu'une cellule de l’épiderme; les cellules avoisinantes ne sont pas modifiées. Ces stomates existent en cet endroit sur les deux faces de la feuille ; généralement on peut en compter deux à cinq sur une même face, mais j'en ai parfois trouvé Jusqu'à onze sur la même face. Il n’en existe pas sur tout le (1) H. Schenck, Vergleichende Anatomie, etc. (loc. cit, p. 7). Voir aussi H. Schenck, Die Biologie der, ete. (loc. cit.). 268 CAMILLE SAUVAGEAU. reste de la feuille. Observés sur des feuilles fraîches, leur ostiole est arrondi, toujours ouvert, et la chambre sous- stomatique est remplie par une bulle d'air. Presque toujours aussi, dans celte plante et dans celles que j'aurai à citer dans la suite, les deux cellules stoma- tiques renferment de très fins granules amylacés qui bleuissent par l’iode. Mais lrès souvent, et surtout à leur extrémité, les feuilles sont plus ou moins recouvertes par des diatomées ou de petites algues vertes qui mas- quent en partie les stomates, et ren- dent leur observalion difficile. Pour éviter cet inconvénient, on peut opérer de la manière suivante : Les feuilles, après avoir séjourné dans l'alcool, sont plongées dans l’eau of de Javelle étendue jusqu'à ce qu’elles LA ACT deviennent complètement transparen- Fig. 60. — Zannichellia re-_ les. En les lavant ensuite dans l’eau, pre a Ponnet dure eur cuticule se soulève et se sépare euille submergée (gross. 200). par place; pour s’en débarrasser, la feuille étant mise dans un verre de montre avec de l’eau, d’une main on la maintient douce- ment à l’aide d’un pinceau fin, et de l’autre main, avec un pinceau semblable, on enlève la cuticule. La feuille est alors parfaitement entière si l’on à opéré avec précaution ; on peut ensuite la colorer pour faciliter l'observation. Ce procédé opératoire, très simple, m'a toujours donné de bons résultats pour toutes les espèces que j'ai étudiées. J'ai recueilli les exemplaires de Z. repens que J'ai étudiés, dans quatre stations différentes : dans un élang des environs de Bordeaux, dans un étang du parc de Fontainebleau, dans un bassin de l’École de Botanique du Museum et dans le bas- sin du laboratoire de M. Van Tieghem. Tous étaient parfai- tement submergés, et présentaient des stomates avec les ea- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 269 ractères que j'ai indiqués. Cependant, 1l est bon d'ajouter que, parmi un bouquet de feuilles pourvues de stomates, on en trouve parfois une ou deux qui en manquent, sans qu'il me paraisse possible d'en indiquer la cause. Cette espèce peut vivre dans une épaisseur d’eau faible: en élé, lorsque la ramificalion a été abondante, ses feuilles sont superficielles et pour ainsi dire aériennes. J'ai observé des feuilles de cette sorte, recueillies dans un bassin du Museum; le nombre moyen des stomates qu’elles possédaient était alors un peu plus élevé, on en trouvait 5-8 sur une même face, massés près du sommet du limbe. Le reste de la feuille continuait à en être complètement dépourvu. J'ai recueilli le Zannichellia pedicellata dans la Gironde; il élait complètement submergé, cependant ses feuilles ne m'ont pas donné de résultats concordants ; sur une même branche, certaines feuilles étaient totalement dépourvues de stomates, et d’autres en possédaient une vingtaine sur chaque face, réunis au sommet et très rapprochés l’un de l’autre. Le Zannichellia lingulata, que j'avais récolté au Croisie, submergé dans des mares légèrement saumâtres, ne m'a présenté de stomates sur aucune de ses feuilles. Le Potamogeton lucens possède aussi fréquemment des stomates. J’en ai étudié deux variétés; dans l’une, les feuil- les étaient terminées par un mucron, dans l’autre, elles étaient arrondies au sommet. Les dimensions des feuilles sont elles-mêmes très variables. Les exemplaires de P. lucens cultivés dans les bassins de l'École de Pharmacie de Paris appartiennent à la variété non mucronée ; leurs feuilles sont très larges, et la plupart d'entre elles, par suile de la profondeur des bassins, ne peuvent arriver à la surface de l’eau. En décembre 1889, j'ai recueilli des feuilles profondément submergées au- dessous d’une couche de glace de plusieurs centimètres d'épaisseur ; toutes présentaient des stomates sur les deux faces, répartis près du sommet de la feuille, et de préfé- 270 CAMIELE SAUVAGEAU. rence au voisinage des nervures ; cependant aucune d’entre elles n'était destinée, par sa position, à atteindre la surface. Au mois de juin suivant, j'ai éludié un grand nombre de feuilles profondément submergées prises dans les mêmes bassins. Les slomates y élaient beaucoup plus nombreux qu'en hiver; j'en ai compté sur la face supérieure d’une feuille, près du sommet, sur un espace de 2 1/2 ctm.q., plus de 300; cependant toutes les feuilles n’en possédaient pas en aussi grand nombre. En septembre et en no- vembre 1890, il en élait de même. J'ai cité précédemment p. 194 le cas de feuilles imparfaites du P. lucens se lransformant en feuilles engainantes et ligu- lées ; jeles avais observées sur ces mêmes exemplaires de l'École de Pharmacie à feuilles parfaites pourvues de stomates ; or, leur limbe étroit et court, qui assu- rément n'était nullement destiné à arri- ver à la surface de l’eau, possédait ce- | pendant au sommet 1-2 stomates sur Fig. GI. — Potamogeton chaque face. A AA Comme chez le Zannichellia, chacun limbe (gross. 115). de ces stomates (fig. 61), sur les feuilles examinées à l’état frais, est ouvert, et se trouve au-dessus d’une chambre sous-stomatique. On les trouvait très bien caractérisés dans les feuilles très jeunes, encore enroulées dans la ligule qui les enveloppe. J'ai également observé, à différentes époques, les feuilles des exemplaires cullivés dans un bassin peu profond, à l'École de Botanique du Muséum. Elles sont de dimensions beaucoup plus faibles que les précédentes et possèdent beau- coup moins de stomates. Certaines en ont quelques-uns, et l’on en trouve aussi qui en manquent. C'était probablement sur des échantillons semblables, pauvres en stomates, que Brongniart avait fait ses observations. En novembre 1889, j'avais placé dans l’eau, dans un vase profond en verre, un de ces bourgeons hibernaux de P. /u- see FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 271 cens, composés de quelques entre-nœuds renflés, gorgés d'amidon, et deslinés à conserver la plante pendant lhiver. Il provenait de l'École de Botanique du Muséum. Cette bou- ture a germé et s'est accrue très lentement. Au mois de mai suivant, les feuilles plus inférieures et par conséquent les plus âgées possédaient des slomates sur les deux faces; celles qui étaient nées sur des entre-nœuds plus jeunes, en possédaient beaucoup moins. Enfin, sur des feuilles jeunes, examinées en juillet et en novembre, les stomates étaient peu nombreux, surtout sur la face inférieure. Au printemps de 1890, j'ai recu de très beaux exem- plaires de P. lucens du Jardin botanique de Bordeaux. Les feuilles, très larges, élaient terminées par un léger mucron; les feuilles inférieures, les premières formées, beaucoup plus étroites, se terminaient en une pointe de seclion arrondie, atteignant parfois 2 cm. de long; dans les feuilles sui- vantes, le limbe s’élargissait, en même temps que la pointe terminale se raccourcissait rapidement, pour atteindre bien- tôt les dimensions des feuilles normales. J'ai examiné un grand nombre de ces feuilles. Les feuilles parfaites, larges, plus voisines de la surface de l’eau, possédaient très peu de stomates, seulement 1, 2, 3 et même quelques-unes n’ont paru en être complètement dépourvues. Au contraire, celles de la base en possédaient davantage, répandues aussi sur le long mucron terminal, comme en témoignaient les coupes transversales. J'ai aussi retrouvé des stomales, assez régulièrement ré- partis sur les feuilles mucronées de la même espèce, re- cueillie dans les mares voisines de l’élang de Saint-Quentin. J'ai tenu à citer ces faits avec délails, pour montrer combien le phénomène de la présence de stomates sur des feuilles normalement submergées est variable, et qu'il n’est pas possible de l'expliquer en disant que les feuilles qui les portent sont celles qui seraient destinées à arriver à la sur- face, dans le cas d’un abaissement du niveau de l’eau; c’est parfois en effel l'inverse qui se produit. 979 CAMILLE SAUVAGEAU. M. Mer a cité le cas du P. rufescens, qui possède des sto- mates, bien que profondément submergé dans le lac de Longemer. Les exemplaires que j'ai étudiés croissaient dans des conditions toutes différentes : à Lamothe, près d'Arcachon, dans une pelite rivière à cours rapide, la Leyre. Dans l'endroit où je l'ai recueilli, il fleurit sans jamais for- mer de feuilles nageantes; toute la plante est couchée dans le sens du courant de l’eau, et constamment agilée près de sa surface; les entre-nœuds sont allongés, les feuilles, toutes semblables entre elles, sont étroites et longues, et j'en ai mesuré qui avaient 20 em. de iongueur (1). Ces feuilles sont arrondies à leur sommet, et leurs nervures sont riches en vaisseaux. J'ai toujours trouvé un assez grand nombre de stomales disséminés sur toute la face supérieure; on les retrouve sur les plus jeunes feuilles. La face inférieure n'en possède que rarement. Parmi des feuilles de P. perfoliatus, que j'ai recueillies au mois de mai dans un bassin de l'École de Botanique du Muséum, les unes paraissaient dépourvues de stomates, les autres m'en ont montré quelques-uns dispersés sur toute la surface. Au contraire, des feuilles récoltées dans le même bassin en juillet suivant, sur des tiges submergées, en élaient assez abondamment pourvues. La forme et surtout la dimension des feuilles du P. den- sus L. sont assez variables (2). Elles m'ont présenté les (1) Sur des points peu éloignés de là, mais abrités, la plante forme quelques feuilles nageantes. (2) On distingue souvent (Cosson et Germain de Saint-Pierre, Flore des environs de Paris, 2° édit., p. 710) deux variétés de cette espèce : var. « densus (P. densus L.) à feuilles rapprochées, presque imbriquées, ovales ou oblongues, ordinairement recourbées en dehors, et var. $ serratus (P. serra- tus L.) ou var. laxifolius de Grenier et Godron, à feuilles espacées, oblongues ou lancéolées. Ce sont plutôt deux formes que deux variétés, et un même exemplaire peut les revêtir tour à tour. Ainsi, un exemplaire à feuilles larges, oblongues et espacées (serratus) que j'avais planté au mois de novembre dans un bassin, et dont j'ai suivi le développement, s'y est accru pendant tout l'hiver et le commencement du printemps, en conser- vant la forme serratus. Puis, par suite de la ramification abondante de la plante, des branches se développèrent près de la surface pour donner des FEUILLES DES MONOCOTYLEDONES AQUATIQUES. 273 variations les plus extraordinaires dans la présence et le nombre des stomates, et1l serait beaucoup trop long de rap- peler toutes les observations que j'ai faites sur les feuilles de cette espèce. Tantôt, chaque feuille d'une tige profondé- ment submergée m'a présenté 20 à 40 slomates sur sa face supérieure, et les feuilles des tiges voisines qui arrivaient à la surface de l’eau n’en possédaient pas en plus grand nom- bre. Tantôt, dans un bassin voisin, les feuilles profondément submergées étaient toules ou presque toutes dépourvues de stomates, landis que celles qui arrivaient à la surface en possédaient en grand nombre. Cependant, on peut dire que très fréquemment les feuilles submergées du P?. densus possèdent des stomates (fig. 24), soit seulement sur leur face supérieure, soit sur les deux faces. Leur ostiole arrondi est de dimensions relativement grandes par rapport aux cellules stomaliques. Ils sont tou- jours réunis vers le sommet de-la feuille. Chez cette espèce, comme chez les précédentes, l'éclairement n’exerce aucune action sur la présence des slomales. Parmi un grand nombre de feuilles de P. pectinalus, que j'avais recueillies dans différentes localités, une seule feuille m'amontré quelques stomales situés au sommet. Sur quinze préparalions de feuille de P. marinus, faites pour l’observa- tion de l'ouverture apicale, trois seulement possédaient tout près du sommet 1, 2 stomales. J'ai aussi cherché des stomates sur les feuilles des autres espèces citées dans les chapitres précédents, mais aucune ne m'en à présenté. J'ai indiqué, d’une manière peul-êltre un inflorescences. Toutes ces branches superficielles correspondaient à la variété densus, tandis que des tiges dressées, restées plus ou moins profon- dément submergées, et produites à la mème époque par les tiges rampant .sur le fond du bassin, étaient à l’état serratus. D'ailleurs, on voit aussi des tiges dressées submergées, fleurir à l’état serralus, et aussi des branches à l’état densus se développer profondément. Enfin, au mois de mai, deux exem- ‘plaires à l’état serratus que j'avais plantés dans un autre bassin, pour faire d’autres expériences, après être restés quelque temps stationnaires, ont dé- veloppé des feuilles assez espacées, mais plus étroites et plus longues que les précédentes, ANN. SC. NAT. BOT. XII, 18 274 CAMILLE SAUVAGEAU. peu longue, les circonstances dans lesquelles j'ai rencontré des stomates, pour bien montrer que leur présence chez les plantes normalement submergées est indépendante des con- ditions d'existence. D'ailleurs, ils sont loin d’apparaître dans la généralité des espèces submergées, mais lorsqu'ils exis- tent, ils doivent être considérés comme des organes atavi- ques ayant résisté à la vie dans l’eau. Les stomates facilitent les échanges gazeux chez les plantes aériennes, et jouent un rôle important dans le phé- nomène de la transpiration. Or, d’une part, la transpiration, en temps qu'émission d’eau à l’état de vapeur, ne peut pas exister chez les plantes submergées, par le fait même qu’elles vivent dans l’eau, et d'autre part, les feuilles des plantes submergées sont plus perméables au passage des gaz que celles des plantes aériennes (1). On comprend donc que l'adaptation à la vie dans l’eau entraine la disparition des stomates, puisqu'ils sont devenus des organes inutiles. Mais d’après M. Schenck (/oc. cit., p. 6), les stomates seraient non seulement superflus pour ces plantes, mais encore dé- savantageux, car ils favoriseraient l'invasion de l’eau dans les espaces aérifères internes nécessaires aux échanges gazeux. S'ils sont inutiles, je ne les crois cependant pas nuisibles. En effet, les plantes citées précédemment ne paraissaient nul- lement souffrir de leurs stomates. D'ailleurs, on voit assez souvent, dans les eaux profondes, des P. natans et d'autres espèces, qui ont développé des feuilles identiques aux feuilles nageantes, mais restées submergées par suile de la profon- deur de l’eau et de la longueur insuffisante de leur pétiole. Ces feuilles ont des stomates, et cependant la plante qui les porte n’en paraît pas incommodée. En outre, comme je Pai mentionné précédemment, on trouve presque toujours, au- dessous d'un stomate d’une feuille submergée, une bulle d'air qui remplit la chambre sous-stomatique et qui, pour (4) L. Mangin, Recherches sur la pénétration ou la sortie des gaz dans les plantes (Ann. de la sc. agronom. fr. el étrang., Nancy, 1888). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES, 275 une pression donnée, doit empêcher l'entrée de l'eau. De plus, les méats ou les lacunes du parenchyme des feuilles aériennes sont remplacés, chez les plantes aquati- ques, par des canaux aérifères plus où moins larges, cloi- sonnés par des diaphragmes perforés, et dont le volume total peut êlre supérieur à celui de la masse cellulaire. Ces canaux renferment de l'air dont la composition et la pres- sion dépendent des gaz dissous dans l’eau ambiante et de la tempéralure de celle-ci, de leur coefficient de diffusion, et de l'intensité des échanges respiratoires de la plante. Lorsque les échanges gazeux entre la plante submergée et l’eau qui l'entoure sont faibles, ils ont lieu par diffusion à travers l’épiderme. Mais si la pression dans les canaux aéri- fères augmente, par suite par exemple d’une décomposilion plus intense de l'acide carbonique par la chlorophylle, sous l'influence de la lumière solaire, les gaz s’échappent direc- tement dans l’eau sous forme de bulles. L'observation de ces bulles est très facile; elles sortent de la plante, comme plusieurs auteurs l'ont montré, par des ouvertures (1) qui ont élé pratiquées soit accidentellement, soit par des animaux; les feuilles sont même parfois partiellement rongées. Des ouvertures se produisent aussi normalement, car la ligule, qui se trouve à l’aisselle des feuilles de Potamogelon, dure presque toujours moins longlemps que la feuille elle-même ; elle ne tarde pas à se désorganiser, puis à disparaître, mais une blessure doit exister au même endroit. Puisque la plante peut prospérer malgré ces ouvertures, les stomates ne doivent pas lui être défavorables, et elle les utilisera au dégagement des bulles gazeuses. Si cependant la pression de l'air contenu dans les canaux aérifères venait à diminuer, Îles ouvertures de ces slomates pourraient iouer un rôle inverse; la masse gazeuse, en diminuant de (4) Cloez et Gratiolet (Ann. phys. et chimie, 1849, XXXIH). — Van Tieghem, Recherches sur la respiration des plantes submergées (Bull. soc. bot. Fr. t. XII, 1866, p. 411). — Devaux, Du mécanisme des échanges gazeux chez les plantes aquatiques (Ann. se. nat. bot., 1889). 276 CAMELELE SAUVAGIAU). volume, permeltrail l'entrée de l’eau. En tout cas, si cette pénétration de l’eau se faisait, elle aurail lieu de préférence par les ouvertures accidentelles, car elles sont plus larges que les stomales. On peut donc se demander : 1° si la présence de l’eau dans les canaux aérifères constitue un réel danger pour la plante, et 2° par où sa pénétration peut se produire. Pour m'en rendre compte, j'ai employé un tube large, fermé à une extrémité, dans lequel on enfonce, à frottement très dur et assez profondément, un bouchon en caoutchouc percé de deux trous (fig. 62). Dans l’un, on introduit un tube étroit de verre, en relation avec une trompe, et dans l’autre la base de la branche sur laquelle on veut ex- périmenter. On complète la ferme- Lure par un {tampon de ouate imbibée de gélatine, et l’on recouvre la sur- face du bouchon d’une couche de gé- latine. Lorsque celle-ci est sèche, on verse dessus un peu de mercure, el l'on place le tout dans un vase pro- Fig. 62 fond, rempli d’eau. Cette disposition a pour objet d'éviter toute pénétra- lion d’eau dans le tube large ; il est nécessaire d'employer de la gélatine assez concentrée, se solidifiant rapide- ment, afin d'empêcher la plante de commencer à se faner pendant la préparation de l'expérience. Puis l’on fait le vide pendant un instant; si l’on brise alors la tige au- dessus du mercure, les canaux aérifères s'injectent d’eau. L'injection est complète sur plusieurs entre-nœuds de la base de la branche ; plus haut, elle n’a lieu que par index. On re- connait très facilement par transparence les parties injectées el celles qui ne le sont pas. Des Potamogelon perfoliatus, P. lucens, P. densus ainsi traités continuent parfaitement bien à vivre. Placés au soleil, ils dégagent des bulles gazeuses en certains points, mais non par la section de leur lige, où FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 277 les canaux sont remplis d’eau. Souvent, les feuilles de la base jaunissent et dépérissent, mais la tige s’accroit en longueur, aussi rapidement qu’elle peut le faire dans un vase et dans un laboratoire. À l’aisselle de plusieurs feuilles, même de celles qui correspondent aux points injectés, des bourgeons se développent en branche dressée et en sympode. J'ai con- servé ces plantes pendant trois mois dans de parfaites con- ditions d'existence. Mais quelle action l’eau ainsi injectée exerce-t-elle sur la paroi des canaux? On sait que la lamelle moyenne de sépa- ration entre les cellules se prolonge sur la paroi des canaux aérifères sous forme d’un revêtement très mince. Cette paroi souvent plus épaisse aux points où les cellules se tou- chent, peut former des bourrelets ou des protubérances dans la lumière des canaux (1). Or, une seclion trans- versale dans une tige de Pofamogeton montre dans l'écorce de nombreux canaux aérifères, d'autant plus étroits qu'ils sont plus rapprochés de l'endoderme. Sur une lige nor- male, toutes les parois cellulaires corticales se colorent en rose par l’action successive du vert d’iode et du carmin aluné ; le revêtement des canaux n’est donc pas indiqué par ce réactif. Mais, sur une tige conservée injectée pendant quelque temps, les cloisons entre les cellules prennent en- core la coloration rose par le vert d’iode et le carmin aluné, elles sont restées cellulosiques, tandis que les parois de la plupart des canaux aérifères, el aussi les diaphragmes per- forés transversaux, se colorent en vert, comme s'ils étaient subérifiés. Si, avant de colorer les coupes, on les traite par l'eau de Javelle, les parois des canaux se gonflent, forment des bourrelets saillants aux angles, el se divisent en deux couches : l’une, plus ou moins épaisse, au contact de la membrane cellulaire, se colore en rose, l’autre, interne, (4) H. Schenck, Ueber die Auskleidung der Intercellulargänge (Ber. der deut. Bot. Gesell., 1885, p. 217). — C. van Wisselingh, Sur les revétements des es- puces intercellulaires (Arch. néerl. des Sc. exactes el natur., t. XXI, 1886, p. 19). — CG. Sauvageau, Journ. de Botan., 16 nov. 1888 et 16 mai 1889. == L. Mangin, Sur la substance intercelluluire (C. R. de l’Ac.des Sc.,'10 fév. 1890), 278 CAMILLE SAUVAGEAU. prend la teinte verte. On peut en conclure : que le revèêle- ment des canaux à pris une plus grande épaisseur, que sa surface interne s’est déjà complètement transformée et su- bérifiée, et que sa surface externe, c’est-à-dire celle qui est au contact de la paroi cellulaire et qui se gonfle par l’eau de Javelle, n’a pas encore subi cette transformation. Cette modi- fication du revêlement des canaux aérifères doil correspon- dre à une protection des cellules du parenchyme contre l’eau injectée. Souvent, quelques-uns des canaux, et particulière- ment les plus internes, restent sans modification, parce que l'eau n’a pas pénétré à leur intérieur. Avant cette expérience, j'avais assez fréquemment cons- taté sur des coupes de racine, de tige, de feuille de diverses plantes aqualiques, que la paroi de certains canaux atrifères se colorait par le vert d'iode, tandis que celle des autres canaux se colorait par le carmin aluné, sans comprendre quelle pouvait être la cause de cette modification locale de la membrane. Je considère donc maintenant ce fait comme dû à la pénétration de l’eau dans les canaux, par une cause quelconque, et comme un moyen de protection employé par la plante. D'ailleurs, on peut facilement constater sur des feuilles que les canaux aérifères qui se colorent ainsi en vert sont en relation avec une blessure extérieure. Si l'eau extérieure pénètre dans quelques canaux aéri- fères, sa présence n'aura donc pas une action nuisible sur la plante. On peut maintenant se demander par où se fera nor- malement l'injection des canaux, à la suite d’une diminution de la pression interne. En prolongeant, dans l'expérience précédente, l’action de la trompe sur les plantes, l'injection des canaux a lieu, par le seul fait que la pression de l'air dans leur intérieur a beaucoup diminué, et la différence de réfringence de l'air et de l’eau suffit pour s'en rendre compte extérieurement. Il est bon, dans ce cas, de faire l'expérience dans de l’eau récemment bouillie, afin d'éviter la trop grande quantité de gaz dissous dans l’eau. On doit choisir une branche aussi intacte que possible, sans ouver- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 279 lure apparente. Pendant l'expérience, on voit l’eau sortir par la base de la branche, d'abord en bouillonnant, à cause des gaz qui s’échappent en même lemps, puis goutte à goutte et très lentement, lorsque les canaux aérifères de la lige sont injectés. C'est avec le P. perfohiatus que celle expé- rience a le mieux réussi ; en une heure, une branche d'une douzaine de centimètres de hauteur, très saine el intacte, m'a donné un centimètre cube de liquide. Si l’on fait l’ex- périence dans de l'eau tenant en dissolution une faible quantité de prussiate jaune de potasse, 1/5000 par exemple, l’eau recueillie bleuit par le sulfate ferroso-ferrique ; c'est donc bien l’eau extérieure qui a traversé le corps de la plante. Si, avant l'expérience, on examine au microscope les feuilles des plantes sur lesquelles on doit expérimenter, ou celles d’autres individus pris dans les mêmes conditions, on constate l'existence d’un réseau aérifère sous-épidermique, à mailles étroites, qui se détache, par sa teinte sombre, et se continue dans les chambres sous-stomatiques. Après l’ex- périence, tandis que l'eau remplit les canaux aérifères de la tige, les choses ont peu ou point changé dans les feuilles; si une injection s’y est produite, elle est localisée. L'eau exté- rieure à donc pénétré dans le corps de la plante, plutôt par les ouvertures accidentelles que par les stomates, et proba- blement par celles qui se trouvent à l’aisselle des feuilles. D'ailleurs jamais, dans la nature, la plante n'aura à subir de diminution de pression semblable à celle réalisée par l’ex- périence ; l'injection ne pourra done être que très localisée, et devra toujours se faire par des ouvertures autres que les stomates. En résumé : les plantes qui vivent normalement submer- gées sont généralement dépourvues de stomates. La dispa- rition des stomates par adaptation à la vie dans l’eau a lieu, non parce que ces organes seraient nuisibles à la plante, mais seulement parce qu'ils sont inutiles. Enfin, certaines 280 CARRE SAUVAGEAU. espèces de plantes submergées (Zannichellia repens, Potamo- geton lucens, P. perfoliatus, P. rufescens, P. densus) possè - dent des stomates ; le nombre de ces organes esf très variable pour une même espèce, et ils peuvent même manquer. Leur présence doil s'interpréler comme un exemple d’alavisme, etils doivent êlre comparés aux organes rudimentaires que l'on rencontre chez les animaux. Lorsqu'une diminution de pression se produit dans l’inté- rieur des canaux aérifères, il peut en résulter une pénétra- lion de l’eau dans leur cavité; cette injeclion se produira par les ouvertures autres que les stomales. Lorsqu'un index de liquide à pénétré dans un canal aéri- fère, le canal protège les cellules environnantes contre le contact de l’eau par une subérification de sa paroi. CHAPITRE VIT LES ÉCHANGES LIQUIDES. On s’est souvent demandé quelle est Putilité du courant d’eau de transpiration (1) qui, chez les plantes terrestres, circule constamment des racines jusqu'aux feuilles pour être déversé dans l'atmosphère, mais on est encore réduit à des suppositions pour l'expliquer. On peut dire cependant, qu'en plus de son rôle de pourvoir à l’évaporalion, l’eau absorbée dans le sol entraîne avec elle des substances utiles que la plante retient au passage. Quelle que soit l’impor- lance de cette dernière fonction, et malgré l’état d'infériorité des vaisseaux des plantes aquatiques, il doil se produire chez elles un courant d’eau semblable, aboutissant à une expulsion de l’eau inulile, expulsion qui nalurellement ne (4) J'emploie ici le mot transpiration dans le sens de transpiration propre- ment dite, chlorovaporisalion et chlorosudation, sans distinguer ces diffé- rents phénomènes (voir Ph. van Tieghem, Transpiration el chlorovaporisu- tion. Bull. soc, bot. Fr., p. 88, 1886), FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 281 pourra se faire sous forme d’une émission de vapeur, mais plutôt par diffusion. En effel, si l’une des conséquences de la circulation de l’eau dans la plante, est d'y amener des substances nutri- lives, elle doit êlre relativement importante chez les plantes submergées, car l'eau dans laquelle elles vivent est souvent moins riche en matières salines que celle qui circule dans le sol. De plus, les racines de certaines plantes aquatiques sont relativement bien développées; les Pofamogeton par exemple développent à chaque nœud de leur Lige rampante un anneau de nombreuses et longues racines couvertes de poils absorbants; certaines espèces, comme le P. densus, sont même remarquables par la facilité avec laquelle elles se ramifient et développent de nombreuses racines aux nœuds de leur tige rampante. Be même, les entre-nœuds de la tige rampante du Zostera marina sont peu distants l'un de l’autre, el portent, au-dessous de chaque nœud, deux paquets d’une douzaine de racines chacun, qui peuvent atteindre une grande longueur. J’ai observé d’ailleurs, chez le Nayjas major, le Zostera marina, el chez un certain nombre d'es- pèces de Potamogeton (1), que les poils absorbants vivent plus longtemps que les autres cellules de l’assise pilifère, et qu'ils doivent continuer à jouer leur rôle après la chute de ces dernières. En outre, un certain nombre de plantes aquatiques, quel- ques Potamogelon par exemple, développent normalement des feuilles de deux sortes : les unes, submergées, qui appa- raissent les premières el sont le plus souvent étroites et minces, les autres, pétiolées, nageantes, coriaces, couvertes de stomates. Tantôl, comme dans je P. natans, le P. polygo- nifolius, elc., les feuilles nageantes sont de beaucoup les plus importantes comme nombre et comme surface déve- loppée; lantôt, au contraire, les feuilles nageantes, qui (1) G. Sauvageau, Sur la racine du Najas (Journ. de Bot., 1°* janv. 1889) e Contribution à l'étude du système mécanique dans la racine des nes me tiques (Id., 16 mai 1889). - 282 CAMILLE SAUVAGEAU. accompagnent la fige florale, sont moins importantes que les feuilles submergées. Ainsi, lune des plus élégantes espèces américaines de Potamogeton, le P. Claytoni, possède de nombreuses feuilles submergées, rapprochées l’une de l'autre, longues de plusieurs centimètres et larges de 35 mm. et seulement quelques petites feuilles pétiolées, na- geantes, oblongues, couvertes de stomates. Or, j'ai compté les stomates en cinq points de la face supérieure d’une feuille nageante, et j'ai trouvé les nombres 216, 244, 268, 272, 276 par mm.q., c’est-à-dire une moyenne de 255 sto- mates par mm.q. sur la face supérieure. Une rosette de feuilles nageantes doit donc dégager dans l'air une quantité relativement grande de vapeur d’eau. De même, certaines espèces comme le P. gramineus peuvent être privées nor- malement de feuilles nageantes, ou au contraire, en déve- lopper quelques-unes de surface assez large; j'ai compté sur celles-ci en différents points 157, 162, 163,168, 180 stomates par mm.q., c'est-à-dire une moyenne de 166 par mm.q. Bien que le nombre de stomates soit moindre que chez le P. Claytoni, leur nombre total, el par conséquent la quan- lité de vapeur d’eau dégagée est cependant plus considérable à cause de la plus nd surface de ces feuilles. Mais la sur- face totale développée par les feuilles nageantes est toujours plus faible que celle des feuilles submergées. Il serait facile de citer d’autres exemples du même genre. Or, labsorplion, le transport et le dégagement de celte eau, nécessités par le développement des feuilles nageantes, n’ont pas pu se produire tout d’un coup, ni seulement à partir du moment tardif de l'apparition des feuilles na- geantes; ces phénomènes devaient aussi avoir lieu pendant la période où la plante possédait uniquement des feuilles submergées. Enfin, il doit en être de même chez les nom- breuses espèces de plantes normalement el {toujours submer- gées, car leurs nombreuses racines leur servent nalurelle- ment, non seulement à la fixation dans le sol, mais à l'absorption de l’eau. Il y a donc lieu de rechercher si cer- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 283 laines dispositions ne faciliteraient pas la sortie de l’eau absorbée par les racines. Je ne connais aucun travail ayant eu cette constatation pour objet. Cependant, en 1870, M. Borodin (loc. cit.) a décrit et figuré des stomates de durée éphémère sur les feuilles sub- mergées des Callitriche, qui pourraient bien servir à l'émis- sion d’eau à l'extérieur. Je rappelle les faits en quelques mots. Une jeune feuille de Calitriche autumnalis, faisant encore partie d’un bourgeon non épanoui, possède au sommet, et sur la face inférieure, deux groupes de deux ou trois sto- mates largement ouverts. Au-dessous de chaque groupe est une chambre sous-stomatique remplie d'eau et tapissée au fond par des cellules plus petites que celles du parenchyme foliaire. Souvent, la nervure médiane se bifurque à son sommet, et envoie une branche vasculaire à chacun de ces deux groupes de stomates. Lorsque la feuille devient adulte, ces stomates dépérissent et disparaissent, et il reste à la place de chaque groupe une cavité qui est l’ancienne chambre sous-stoma- tique. Chez le C. verna, il y a encore deux organes sembla- bles, mais chacun d’eux possède un seul stomate largement ouvert et beaucoup plus gros que ceux de la face supé- rieure de la feuille. Ces organes se transforment comme les précédents. À cause du parenchyme à pelites cellules qui tapisse le fond de la cavité sous-stomalique, M. Borodin, qui d’ailleurs attachait peu d'importance à ces bizarres formations, les a considérées, avec doule, comme des organes de sécrétion (loc. cit., p. 848). I les compare aussi aux stomates aquifères de certaines plantes lerrestres sans en tirer de conclusion. M. Schenck (loc. cit., p. 7) ne croil pas non plus pouvoir se prononcer sur ces organes ; il dit cependant qu'il ne faut pas les considérer sans examen comme des organes ataviques et inutiles. C'est après avoir eu connaissance des observations de M. Borodin que M. Askenasy (/oc. ci.) (1) a cherché et (1) Findique le travail de M. Askenasy comme postérieur à celui de 284 CAMILLE SAUVAGEAU. trouvé des stomates éphémères à l'extrémité des découpures des feuilles du ÆARanunculus aqualilis; leur existence est très courte, car le Lissu qui les porte se détruit de bonne heure (v. précédemment, p.266) ; il en résulte donc normale- ment une troncature, mais M. Askenasy ne dit pas si des vaisseaux y aboulissent comme dans les Callitriche. Ces échancrures des feuilles des Callitriche me paraissent être des organes permettant à l’eau absorbée par les racines, et qui n’est pas rejetée par diffusion, de sortir directement de la plante. Des comparaisons avec d’autres espèces aqua- tiques viennent appuyer cette hypothèse. J'ai en effet indiqué, dans les chapitres précédents, l'exis- tence d’une ouverture apicale correspondant à l'extrémité de la nervure médiane chez les différentes espèces de Zostera Phyllospadir, Halodule et Potamogeton. La disposition de cette ouverture, telle que je l'ai décrile, indique qu'il doit se produire à ce niveau des échanges liquides entre le système conducteur de la plante et le liquide ambiant, D'ailleurs, elle existe aussi sur les feuilles nageantes des Potamogeton, or, ces plantes croissent souvent en si grande abondance que, comme le montrent surtout les grandes espèces, P,. nalans, P. polygonifolius, ete., les feuilles nageantes se recouvrent l’une l’autre, se dressent plus ou moins et ne sont qu'imparfaitement en contact avec la sur- face de l’eau; elles deviennent alors en partie aériennes, et par suite, leur ouverture apicale doit fonctionner comme les stomates aquifères de beaucoup de plantes terrestres (1). Bien que cette ouverture apicale se forme indépendam- ment des stomates, elle peut être comparée à l'organe décrit M. Borodin, bien qu'il ait paru auparavant dans le Bof. Zeit. de 1870. Cela tient à ce que le travail de M. Borodin cité ici est une réimpression, mais plus étendue, d’une note écrite en russe en 4869 et analysée en 1869 dans le Bot. Zeit. —— Voir aussi P. Magnus, Eïnige Bemerkungen zu dem Aufsalze des Uerrn J. Borodin « Ueber den Buu der Blatispilze einiger Wasserpflan- zen » (Bot. Zeit., 1871, p. 479 à 484). (1) G. Sauvageau, Sur une particularité de structure des plantes aquatiques (C, R. de l'Acad, des Sc., 11 août 1890). FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 285 par M. Borodin sur les Calhitriche. Quoi qu'il en soit, son existence constante chez un grand nombre d'espèces, la date très précoce de sa formation, le développement souvent plus grand des vaisseaux qui y aboutissent, tout fait présumer qu'il s’agit là d'un organe dont le rôle doit êlre important dans la vie de la plante. Elle doit permettre l’écoulement de l’eau absorbée par les racines, soit simultanément avec le passage de l’eau par diffusion à travers l’épiderme, soil isolément et dans des conditions spéciales. Il serait égale- ment possible que l’eau extérieure, qui peut certainement être absorbée par les feuilles, le fût aussi par l’ouverture apicale. Il est cependant juste de remarquer que dans les eaux calcaires, la couche de carbonate de chaux qui se dépose à la face inférieure des feuilles, comme conséquence des échanges gazeux, pourrait, dans certains cas, obturer l'ouverture et nuire à son fonctionnement. D'ailleurs, si cette ouverture est sans utilité pour la plante, elle aurait dû dis- paraître avec le temps, comme les stomates ordinaires l'ont fait chez le plus grand nombre des espèces submergées. Toutefois, si elle joue un rèle, ce rôle n’est pas indispen- sable, puisqu'elle n'existe pas chez les Zannichellia, Ruppia, Cymodocea, elc., ou tout au moins il peut s'exercer par un autre procédé. Il est d’ailleurs difficile de se rendre compte des échanges de liquide qui ont lieu entre la plante et l’eau dans laquelle elle vit On considère souvent les plantes aquatiques comme absorbant seulement la quantité d'eau nécessaire à leur croissance, sans que cependant, à ma connaissance, au- cune expérience ait démontré qu'il existe des échanges li- quides dans l’un ou l’autre sens entre leurs feuilles et Le milieu ambiant. J'ai disposé un appareil qui m'a permis de constater que les plantes aquatiques absorbent et dégagent de l’eau, par un phénomène comparable à celui de la transpiration. Un tube de verre, large el court, est soudé à un tube étroit et long, de 2 mm. de diamètre, courbé deux fois à angle droit 2806 CAMALEE SAUVAGEAU. (Hig. 63). On enfonce à frottement dur, dans le {ube large, un bouchon de caoutchouc percé d'un trou. On remplit l'appa- reil d'eau bien aérée jusqu’à un certain point de la branche horizontale et sans laisser de bulle dans la branche large. Pendant que lon maintient la colonne d’eau suspendue, on introduit dans le bouchon une ou plusieurs tiges de Poramo- gelon Vigoureuses, bien intactes, et sans racines sur les bour- seons adventifs ; après avoir bien séchéle bouchon, on obture avec un tampon de gélatine, on recouvre de gélatine puis de mercure, et on place l’ap- pareil dans un vase rempli d’eau aérée. On conserve le vase à la lumière diffuse dans une étuve à température constante et peu élevée, el l'on marque le niveau de l’eau dans le tube étroit; ce point de repère permettra de con- staler dans quel sens se fait l'absorption de l'eau par la plante ; le tube est bouché par un lampon d'ouate pour empêcher l’évaporalion. À côlé, est placé un appareil témoin, dans lequel la tige de la plante esl remplacée par une baguette de verre; il doit rester sans va- rialions pendant loute la durée de l’expérience; ses change- ments de niveau correspondraient à des variations de tem- péralure, et permettraient de faire des corrections. Le mercure, pendant le temps de l’expérience, n’exerce pas d'action nuisible sur la plante. Il est nécessaire d’intro- duire dans le tube de l’eau bien aérée, car, dans le cas con- traire, de l’eau s’éléverait dans les canaux aérifères, et ferait croire à une absorption normale de liquide. Il est nécessaire aussi d'expérimenter à la lumière diffuse et à une tempéra- ture sensiblement constante, car, dans les conditions in- verses, des bulles de gaz se dégageraient par la section de la tige, se réuniraient sous le bouchon en caoutchouc et par SN mn SPAONE OS Cr FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 287 suite feraient varier le niveau de l’eau dans le tube hori- zontal. J'ai indiqué sur le tableau (fig. 64) la courbe d'absorption de l’eau de neuf de ces plantes, dans une expérience qui a duré cinq jours, du 8 juin au 12 juin, pendant lesquels la température a varié de 19° à 21°. Le point de repère a été à Jun 23 LE) IDE 1 5 TT © © TT, TT —— © we ER RE M EN RE EE EEE ER: ee LEE | TT EM LES FFE FT Fig. 64. — 1 et ?, Potamogeton pusillus; 3 et 4, P. crispus; 5, 6 et 7, P. densus; 8 et 9, P. perfolialus. marqué le 7 juin à 9 heures du soir, après un séjour de deux heures des appareils dans l’éluve, pour leur permettre de se mettre en équilibre avec elle. Le niveau n’a pas varié jus- qu'à 11 heures et demi; il à ensuite toujours varié dans le même sens pendant la durée de l'expérience. Le 10 juin, on 288 CAMILLE SAUVAGEAU. a remplacé l'eau de chaque vase à l’aide d’un siphon par de l’eau à la température de l’étuve. Les différences entre le point de repère et le niveau de Peau dans le tube ont été observées à des intervalles irréguliers mais assez rapprochés. Des observations faites à minuit du 8 juin au 9 juin, et le 10 juin à 1 heure du matin, m'ont permis de conclure que, dans les conditions où je m'étais placé, le phénomène se produisait dans le même sens le jour et la nuit. Sur le tableau (fig. 64) les ordonnées sont distantes de 3 mm. l’espace d’une heure correspondant à 1 mm. Les ab- cisses sont distantes de 5 mm., chaque millimètre de varia- üon de niveau dans le tube étant représenté par 1 mm. sur le tableau. On voit que tous les exemplaires ont une courbe de même sens. Un ?. densus a absorbé une plus grande quantité d’eau que les autres exemplaires. Si les plantes précédentes avaient été pourvues de leurs racines, leur absorption d’eau aurait été sûrement plus con- sidérable. La quantité d’eau absorbée est d’ailleurs moindre que chez des plantes à feuilles aériennes, puisqu'ici le courant d’eau qui circule dans le corps de la plante n’a pas, entre autres fonclions, à réparer la perte subie par l’évaporalion. De plus, comme on le verra plus loin, ce n’est pas seulement par les racines que les plantes absorbent l’eau dont elles ont besoin, mais aussi par les feuilles; ce dernier courant étant naturellement l'inverse du précédent, l'absorption observée dans l’expérience est plus faible que lPabsorption réelle. Mais celte faible quantité d'eau absorbée pendant l’expé- rience est cependant plus grande que la croissance ne le nécessite. En somme, lorsque la plante est à la lumière diffuse et soumise à une température constante, il se produit un phé- nomène de circulation d’eau comparable, comme résultat, à la transpiration proprement dite. Mais on sait que chez les plantes vertes terrestres la transpiration proprement dite ne représente qu'une faible portion du dégagement d’eau pro- duit par la plante ; la chlorovaporisalion qui à heu sous Fin- FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 289 fluence de la lumière dégage une quantité d’eau plus considé- rable. Il doit en être de même pour les plantes aquatiques, le phénomène se produisant, soit par diffusion sur toute la surface de la feuille, soit par l’ouverture apicale, et étant alors comparable à celui que M. van Tieghem a appelé chlo- rosudation. Or, sur l'appareil précédent exposé à la lumière solaire, il se produit des variations de niveau plus considé- rables dans les deux sens, mais il est difficile d'apprécier la part qui revient au dégagement des gaz par la base de la tige et à l'absorption de l'eau par la plante. Pour le moment, je dois donc laisser la question sans solution. J'ai aussi cherché dans les expériences précédentes, faites à la lumière diffuse el à la lumière directe, à mettre en évi- dence l'absorption de l’eau par les feuilles. Pour cela, l’ap- pareil était rempli d’eau pure et bien aérée, et le vase exté- rieur renfermail une dissolulion de prussiate jaune de potasse au titre de 1/5000 et 1/10000. S'il y avait eu ab- sorption de l'extérieur vers l’intérieur, l’eau du tube aurait donné la réaction du bleu de Prusse par un sel ferroso- ferrique, mais cette expérience ne m'a fourni aucun résultat. Cependant, l'eau absorbée par les feuilles peut, dans une certaine limite, suffire à la plante. On sait, en effet, que cer- taines espèces submergées, comme l’A/drorandia, le Cerato- phyllum, V'Utricularia, n'ont jamais de racines, et par consé- quent doivent absorber, par leurs feuilles, l’eau et les ma- tières nutritives dont elles ont besoin. J'ai donc cherché à me rendre compte si des plantes aquatiques, qui normale- ment sont pourvues de racines, peuvent vivre et prospérer sans qu’il leur soit possible d’absorber d’eau à l’aide de ces organes ni par la section de leur tige. Pour cela, j'ai choisi des branches vigoureuses et sans racines de P. densus, P. crispus, P. perfoliatus et P. lucens, et j'ai fermé la section de leur tige, soit avec de la gomme laque dissoute dans l’alcool, soit avec du beurre de cacao. Maintenues ensuite dans l’eau et exposées à la lumière, elles ont continué à vivre, et au bout d’une dizaine de jours, un ANN. SC. NAT. BOT. x, 19 290 CAMILLE SAUVAGEAU. certain nombre de bourgeons avaient commencé à se déve- lopper en sympode, et par suite avaient produit des racines. Cependant, avant l'apparition de celles-ci, ces plantes ont dû absorber de l'eau par leurs feuilles, car il est peu probable qu'elles aient vécu sur leurs réserves. De même, en mainte- nant submergées des branches vigoureuses et privées de racines des mêmes espèces, de telle sorte que la section de leur Lige soit constamment hors de l’eau, le résultat est le même, et montre que les feuilles peuvent suppléer les ra- cines. Enfin, on sait que si des branches de Pofamogeton sont retirées de l’eau, les feuilles, qui sont le siège d’une évapo- ration rapide, ne tardent pas à se faner. Des feuilles longues et étroites, comme celles du P. pectinalus, se recroquevillent rapidement, mais si la branche n’esl pas restée trop long- temps à l'air, et si on la plonge de nouveau dans l’eau, les feuilles se déroulent, reprennent leur forme première, et la plante continue à vivre comme auparavant. J'ai réalisé l'expé- rience avec les P. perfoliatus, P. lucens, P.ctcrispus; P. densus et P. pectinatus. Les branches, choisies comme précédemment, élaient étendues sur du papier buvard et à la lumière diffuse. Au bout de peu de temps, les feuilles avaient perdu leur turgescence et leurs bords étaient fanés. A ce moment, je les plongeais dans un vase rempli d’eau, de ma- nière à les maintenir submergées, mais en laissant l’extré- milé inférieure de la tige constamment hors de l’eau. Les feuilles ne tardaient pas à reprendre leur turgescence. Dans une expérience que j'ai faite à ce sujet dans de grands vases de verre, dont l’eau était fréquemment renouvelée, les P. densus et P. crispus ont développé des racines au bout de quelques Jours; deux jeunes branches de P. perfoliatus ont végété très lentement, au bout d’un mois elles étaient mortes, sans avoir développé de racines, mais après s’être allongées, l'une de deux entre-nœuds, l’autre de trois. Enfin, deux exemplaires de P. lucens, après être restés une quinzaine de jours stalionnaires, ont poussé assez vigoureusement des FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 291 branches et de nouveaux entre-nœuds, et après deux mois d'expérience, ces plantes accrues étaient encore en parfait état, sans avoir développé une seule racine. Lorsque des plantes aqualiques submergées, normale- ment pourvues de racines, en sont accidentellement privées, elles peuvent donc absorber par leurs feuilles de l’eau en quantité suffisante pour leur permettre de vivre et d'attendre la production de nouvelles racines adventives. Enfin, l’observalion sous le microscope permet de se ren- dre compte de la manière et de la rapidité avec laquelle peut se faire l'absorption d’eau. Les feuilles sabmergées de Potamogeton sont recouvertes d'une mince cuticule cireuse, qui les empêche d’être mouillées par l’eau dans laquelle elles sont plongées; on en constate facilement l'effet dans cer- taines espèces comme le P. crispus, etc. Mais ce revêtement n'empêche pas l'entrée de l’eau par la surface de la feuille, et les phénomènes de plasmolyse montrent, au contraire, que les échanges doivent se faire très facilement. J'en ai fait l’ex- périence avec les P. crispus, P. pusillus, P. densus, Zanni- chellia repens. On choisit une feuille bien entière et un peu longue; on la place sur une lame de verre et l’on recouvre d’une lamelle, de sorte que le sommet de la feuille, où se trouve l'ouverture apicale, el sa base, où se trouve la section de rupture, restent en dehors de la lamelle. On observe alors que toutes les cellules de l’épiderme sont pourvues d'un protoplasme abondant, renfermant des grains de chloro- phylle. Si l’on fait arriver sous la lamelle quelques gouttes d’une dissolution de nitrate de potasse à 10 p. 100, on voit le protoplasme se séparer immédiatement de la paroi cellu- laire ; il s'en éloigne ensuite de plus en plus, et se rassemble bientôt au milieu de la cellule en une masse compacte, que les grains de chlorophylle qu’elle renferme rendent plus faci- lement visible. Celle même feuille, essuyée rapidement avec un papier buvard, est portée de nouveau sous le mi- croscope. On fait pénétrer quelques gouttes d’eau pure sous la lamelle; aussitôt que l’eau arrive au contact de la feuille, 2992 CAMILLE SAUVAGEAU. la plasmolyse commence, le protoplasme se gonfle et on le voit peu à peu reprendre ses dimensions primitives el tapisser les cellules. La cuticule cireuse, qui revêt les feuilles des plantes aqua- tiques submergées, n’est donc nullement un obstacle à la plasmolyse; l'entrée et la sortie de l’eau se font même avec une grande rapidité, et l’on peut en conclure que, dans les conditions normales de végétation, tout en se faisant avec plus de lenteur, le passage de l’eau à travers la membrane épidermique doit réellement avoir lieu. En résumé : 1° il se produit chez les plantes aquatiques submergées un courant d’eau semblable au courant d’eau de transpiration des plantes terrestres. La sortie de l’eau peut se faire soit par diffusion à travers l’épiderme, soil par l’ou- verture apicale jouant le rôle de stomate aquifère. 2° En même temps, les feuilles absorbent l’eau du milieu ambiant. Cette absorption est suffisante pour permettre à des plantes privées de leurs racines de vivre et de se développer. Les phénomènes de plasmolyse montrent que le passage de l'eau à travers la membrane épidermique peut se faire rapi- dement. IL est probable que, chez les exemplaires pourvus de ra- cines, l'entrée de l’eau dans la plante se fait de préférence par les poils absorbants. Normalement, ou peut être seule- ment lorsque la plante est dépourvue de racines, ou dans cerlaines conditions qui resleraient à déterminer, et dans lesquelles l'activité des échanges serait plus considérable, de l'eau pénètre dans la plante par toute la surface de la feuille, ainsi que par l’ouverture apicale qui jouerait le rôle de pore aquifère. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 293 CHAPITRE IX CONCLUSIONS. L'étude de la feuille de 48 espèces, appartenant à la fa- mille des Potamogetonacées de M. Ascherson, nous conduit aux conclusions suivantes : 1° Les caractères anatomiques sont suffisants pour per- mettre, d’après l'examen d’une feuille, la détermination spé- cifique des espèces marines (18 espèces appartenant aux genres Zostera, Phyllospadix, Posidonia, Cymodocea, Halo- dule). Is sont incomplètement applicables aux Potamogeton, en ce sens qu'ils donnent des indications générales, mais non des caractères spécifiques certains. Ils permettent de distin- guer les A/fhenia filiformis et A. Barrandonü, récemment confondus par les Florisies. Les caractères anatomiques concordants des Æwppia maritima el A. rostellata confir- ment les doutes des auteurs sur la distinction de ces deux espèces. 2° Les caractères spécifiques, fournis par l’anatomie, pré- sentent des points communs pour toutes les plantes apparte- nant à un même genre. Par contre, les caractères génériques de même ordre ne confirment pas le groupement des genres réalisé d’après les caractères tirés de la fleur. 3° L'étude anatomique de ces plantes m'a permis en même temps de reconnaître un certain nombre de faits intéres- sants. Tels sont les suivants : a. Les diaphragmes, d’une seule épaisseur de cellules, qui cloisonnent transversalement les canaux aérifères ont une structure et une origine constantes. b. Contrairement à ce que l’on dit souvent, l’épiderme n'est pas chez les plantes marines la seule assise chloro- phyllienne; la chlorophylle se trouve aussi dans les cellules du parenchyme, mais le plus souvent en quantité moindre que dans l’épiderme. 294 CAMILLE SAUVAGEAU. ce. Chez un certain nombre de genres (Posidonia, Ruppia, Cymodocea, Halodule) il existe, dans l’épiderme et dans le parenchyme, des cellules à contenu presque toujours brun orangé, qui est tannifère. Lorsque deux de ces cellules sont contiguës, il n'existe pas de communication entre elles. d. Les nervures des feuilles pétiolées des Pofamogeton possèdent deux sortes de bois primaire, qui sont différentes comme origine, comine structure et comme mode de dispa- rilion. 4° On sait que l’action du milieu aquatique, dans lequel vivent ces plantes, retentit sur le bois, toujours peu déve- loppé, sur l’épiderme abondamment chlorophyllien, sur le parenchyme creusé de larges lacunes ou canaux aérifères et jamais palissadique chez les feuilles submergées. Mais, con- trairement à l'opinion acceptée, j'ai montré que le système mécanique, envisagé soit comme gaine protectrice des ner— vures, soil comme éléments fibreux, cellulosiques ou lignifiés, répartis dans le parenchyme, subit incomplètement l’action du milieu. Tantôt il disparaît en totalité, tantôt, au contraire, il prend un développement très important. Si, dans certains cas, son existence peut êlre expliquée comme étant liée à des circonstances extérieures, telles que la résistance à l'éva- poration ou au choc des vagues; dans d’autres cas, elle est inexplicable, par exemple lorsque deux espèces voisines, et vivant l’une près de l’autre, sont inégalement partagées sous ce rapport. Des observations, faites par différents auteurs, ont montré que les stomates disparaissent par suite de la vie dans l’eau. Aucune des espèces marines que j'ai étudiées n’en présente, et le plus grand nombre des espèces d’eau douce en est éga- lement dépourvu. Cependant, j'en ai retrouvé chez quelques espèces, d'une manière constante ou presque constante, mais leur présence, témoin d’une adaptalion incomplète, n'est nullement corrélative de celle du système mécanique, car ils existent chez des espèces très dégradées sous ce rap- port. FEUILLES DES MONOCOTYLÉDONES AQUATIQUES. 295 L'adaptation, malgré l'identité du milieu ambiant, ne s'exerce donc pas toujours également, ni dans le même sens, pour des plantes voisines dans la classification. J’ai déjà signalé un fait semblable en étudiant les feuilles des Hydro- charidées marines : tandis que, d’une part, les Enhalus ont des feuilles rubanées, très souples, capables de suivre toutes les ondulations de l’eau, et un épiderme à parois rectilignes el dépourvu de poils, ces feuilles possèdent aussi des vais- seaux et un système fibreux bien développé; d'autre part, les Halophila ont des feuilles très minces, un système conduc- teur extrêmement dégradé et un parenchyme tolalement dépourvu de fibres, mais leurs feuilles sont pétiolées, les cellules de l’épiderme ont, chez certaines espèces, des parois ondulées et même quelques cellules se prolongent en poils. Autrement dit : les plantes submergées présentent une résistance spécifique à l'adaptation; non seulement elles pos- sèdent des caractères dus à l'adaptation, mais elles ont aussi conservé des caractères alaviques. 5° Si les stomales ne sont pas utiles aux plantes aquatiques, ils ne sont pas nuisibles comme on l’a dit. En effet, j'ai montré par l'expérience que, si une diminution de pression se produit dans les canaux aérifères, l'eau pénètre dans leur intérieur, non pas par les stomates, mais par des bles- sures accidentelles ou normales. D'autre part, comme je lai constaté, lorsqu'un index liquide se trouve dans un canal aérifère, la paroi de celui-ci se protège contre son contact, en modifiant sa constitution. 6° Les feuilles d’un certain nombre de genres (Zostera, Phyllospadix, Halodule, Potamogelon) possèdent au som- met une ouverture apicale, où aboutit la nervure médiane, et dont l'existence n'avait jamais élé signalée. Elle se montre toujours de très bonne heure, et est due à la chute de quelques cellules épidermiques. Tantôt, cette sorte de des- quamalion à lieu tout à fait au sommet du limbe (Zostera, Phyllospadix, Halodule, certains Potamogeton), et la ner- vure médiane, après son anastomose avec les nervures voi- 296 CAMILLE SAUVAGEAU. sines, se prolonge en ligne droite pour y aboutir. Tantôt (cer- tains Potamogeton) le sommet du limbe reste intact, et la nervure médiane se recourbe vers la face inférieure pour s'y ouvrir; dans cette dernière portion de son parcours, la nervure médiane est relativement riche en vaisseaux. Lors- que la plante possède des stomates sur la face inférieure, ces stomates ne sont pas l’origine de l'ouverture apicale. En mettant la plante en communication avec le milieu am- biant, cette ouverture apicale doit favoriser les échanges de liquide entre la plante et le milieu. Son existence constante chez les genres précédemment cités, et son développement précoce, permettent de supposer que son rôle est important. Cependant, elle n’est pas indispensable, puisqu'elle manque chez des plantes vivant dans des conditions identiques (Cymo- docea, Posidonia, elc.). Jusqu'ici, on n'avait pas constaté l'existence d'échanges liquides entre les plantes aquatiques et le milieu ambiant ; or, j'ai montré, d’une part, qu'elles sont parcourues par un courant d’eau, comparable au courant d'eau de transpiration des plantes terrestres, et d'autre part que, privées de leurs racines, elles continuent à vivre et prospèrent en absorbant de l’eau par leurs feuilles. Les phénomènes de plasmolyse prouvent d’ailleurs que, chez ces plantes, l'absorption de l'eau peut se faire par loute la surface de la feuille. RECHERCHES SUR LES NŒUDS ET LES ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE DES DICOTYLEDONES Par M. A. PRUNET INTRODUCTION. Au point de vue de la morphologie externe, les diverses parties d’une tige ou d’un rameau ne sont pas absolument identiques; depuis longtemps déjà, les botanistes ont dis- tingué, dans la tige, les nœuds ou parties portant les feuilles, les bourgeons, les rameaux feuillés ou floraux, des entre- nœuds ou régions intercalées entre les nœuds. J'ai voulu savoir si à cette différencialion externe corres- pondait une différenciation interne. Mes recherches ont porté principalement sur le groupe des Dicotylédones. Le présent travail est donc une contribution à l’étude comparée des nœuds et des entre-nœuds de la tige des Dicotylédones. Ce sujet n'ayant pas été éludié dans son ensemble, je crois pouvoir me dispenser de faire un examen historique complet. Je signalerai, dans le courant de ce mémoire, les faits particuliers relalifs à mes recherches que j'ai trouvés dans les auteurs. 298 A. PRUNET. LIL — PARTIE DESCRIPTIVE I. Tiges ou rameaux de l’année. 1” NŒUDS DES TIGES AÉRIENNES NE PORTANT QUE DES FEUILLES. Les nœuds étudiés ont été pris dans la partie moyenne ou supérieure des rameaux, parmi les plus jeunes nœuds portant des feuilles adultes ; ce sont les entre-nœuds immé- diatement inférieurs qui ont été examinés comparativement; ces entre-nœuds avaient toujours terminé leur croissance en longueur. Une description détaillée de toutes les espèces que j'ai étudiées n'aurait sans doute pas élé inutile, mais elle aurait eu l'inconvénient d’allonger démesurément ce travail et d'amener des redites nécessairement faslidieuses. J'ai cru pouvoir me contenter de décrire en détail un petit nombre d'exemples, choisis de façon à présenter les divers faits que je me propose de mettre en évidence. Je donne ensuite la liste des plantes sur lesquelles ont porté mes recherches. VITIS VINIFERA. Dans cette plante, le renflement nodal est à peu près symétrique par rapport à l'insertion de la feuille. Je rappellerai d'abord, en la complétant, la structure de l'entre-nœud, déjà étudiée par M. d’Arbaumont (1), et je décrirai ensuite en détail celle du nœud. A. Structure de l’entre-nœud. — 1° Écorce. — L'épiderme ne présente rien de particulier. Le parenchyme cortical est formé à l'extérieur, de cellules de dimensions moyennes contenant de la chlorophylle, à l'intérieur, de grandes (1) D'Arbaumont, La tige des Ampélidées (Ann. des se. nat. Botan., 6° série, t. XI, 1881, p. 186-253). NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 299 cellules à peu près incolores; les unes et les autres sont allongées dans le sens de l’axe de la tige. Entre ces deux régions du parenchyme cortical, on observe des faisceaux irréguliers de collenchyme à éléments longs formant un cercle discontinu; ces faisceaux peuvent dans certains cas empiéler sur la couche externe du parenchyme cortical et atteindre ainsi l’épiderme. L’endoderme ne se distingue pas des cellules voisines de l'écorce. 2° Cylindre central. — Le péricycle est formé de fibres lignifiées réunies en paquets en forme de croissant à la partie externe des faisceaux libéro-ligneux. L’anneau libéro- ligneux est composé de nombreux faisceaux en forme de coin séparés par de larges rayons médullaires. Parmi ces faisceaux, il en est cinq qui se rendent à la feuille supérieure, ce sont les faisceaux ou traces foliaires: pour simplifier, j'appellerai les autres /aisceaux caulinaires. Chaque faisceau foliaire ou caulinaire présente vers la moelle quelques irachées entourées d’un parenchyme délicat non lignifié ; en dehors, se trouve la masse principale du faisceau, formée de larges vaisseaux ponctués ou rayés accompagnés de quel- ques cellules ligneuses et de nombreuses fibres à parois modérément épaissies. Vient ensuite un liber volumineux. Bien que les faisceaux foliaires aient la même structure générale que les faisceaux caulinaires, ils se reconnaissent cependant au premier coup d'œil, sur une coupe transver- sale, à leur largeur plus considérable, au nombre plus grand et au calibre moindre de leurs vaisseaux. Cette différenciation est déjà sensible d’ailleurs à la base de l'entre-nœud. Quelques mots sur le parenchyme de la partie interne des faisceaux. Les cellules qui forment ce tissu sont allongées dans le sens longitudinal, leurs parois transversales étant horizontales ou un peu obliques ; elles paraissent très actives, contiennent de l’amidon et même de la chlorophylle; elles ne lignifient leurs parois que vers l’époque de la chute des feuilles. Comme ce tissu est très répandu et que je l'ai rencontré dans toutes les plantes étudiées dans ce travail, 300 A. PRUNEX. je crois pouvoir, dès à présent, afin de faciliter les descrip- tions, le désigner sous le nom de parenchyme intra-ligneux. La moelle est formée de cellules à parois minces, ponctuées, ne se lignifiant que vers l’époque de la chute des feuilles. B. Structure du nœud. — J'éludierai d’abord les modifi- cations éprouvées dans les nœuds par les faisceaux foliaires et j'examinerai ensuite les changements de structure des. tissus propres de la tige. 1. Foisceaux foliaires. — Si, procédant par coupes suc- cessives, on examine des régions de plus en plus voisines du nœud, on voit les faisceaux foliaires se modifier, lente- ment d’abord, puis rapidement dès qu'on est parvenu à la base du renflement nodal. Tout d’abord, il y a simplement accentualion des particularités signalées plus haut, c’est- à-dire que les dimensions tangentielles de ces faisceaux continuent à s’accroîlre et que leurs vaisseaux deviennent plus nombreux et plus petits. Mais, à partir de la base du nœud, on voit apparaître une différenciation plus profonde : les éléments de soutien des faisceaux (fibres, cellules li- gneuses) disparaissent graduellement de dedans en dehors en même temps que des vaisseaux annelés et spiralés de faible calibre remplacent peu à peu les grands vaisseaux ponctués ou rayés. Au moment où ces faisceaux vont quitter l'anneau libéro-ligneux de l'axe pour se porter vers la feuille, ils sont formés de nombreux vaisseaux annelés ou spiralés disposés en files radiales régulières et d’un paren- chyme mou, absolument analogue quant à la forme de ses. éléments et à leur contenu au parenchyme intra-ligneux dont j'ai parlé plus haut; ce tissu paraît d’ailleurs provenir de l'extension graduelle de dedans en dehors du paren- chyme intra-ligneux. La forme des traces foliaires s’est auss} modifiée : elles se sont étalées dans le sens tangentiel et un peu raccourcies dans le sens radial, de façon à prendre l’'as- pect d’un éventail. Les faisceaux foliaires conservent cette forme et cette structure en traversant l'écorce. Les fibres péricycliques qui NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 301 coiffent en dehors leur partie libérienne perdent dans ce trajet leur lignification. Dans le pétiole, les faisceaux présentent comme un retour à leur structure première. Une coupe transversale dans la parlie moyenne de cet organe montre en effet que le diamè- tre des vaisseaux s’est accru notablement et que certains d’entre eux sont ponctuéës ou rayés, et que d’autre part les éléments de soutien, fibres et parenchyme ligneux, ont reparu à ia partie externe des faisceaux. Voir les figures 1, 293#pl-1V: IL Tissus propres de la tige. — Pour faciliter les descrip- lions, je distinguerai dans le nœud trois régions, une infé- rieure, une moyenne et l’autre supérieure : la première correspondant à peu près au point où les faisceaux foliaires complètement différenciés commencent à quitter l’anneau libéro-ligneux, la deuxième au milieu de l'insertion foliaire, la troisième occupant au-dessus du pétiole une position symétrique de la première. J'examinerai successivement les divers tissus de la lige. 1° Écorce. — Dans la région inférieure du nœud, l'anneau cortical est beaucoup plus épais que dans l’entre-nœud, moins par mulliplication que par dilatation de ses éléments dans le sens {ransversal. L'hypoderme collenchymateux forme maintenant un cercle à peu près continu entre le parenchyme externe à cellules de dimensions moyennes et le parenchyme interne à grandes cellules. Les divers éléments de l'écorce réduisent un peu leurs dimensions longitudi- nales. Dans Ja région moyenne du nœud, l'écorce s’épaissit en- core, mais surtout par mulliplication de ses éléments dont les dimensions lransversales changent peu tandis que leurs dimensions longitudinales continuent à se réduire. L’épais- sissement de l'écorce est surtout marqué au voisinage des faisceaux foliaires émergents. Pour se rendre à la base du péliole, les faisceaux foliaires extrêmes traversent la couche externe du parenchyme corlical considérablement accrue. 302 A. PRUNET. Dans cette portion de leur trajet, ils sont protégés vers l’in- térieur et vers l'extérieur par une bande de collenchyme provenant du dédoublement de l'hypoderme. Entre le fais- ceau et chaque bande hypodermique, se trouve un parenchyme à parois minces, à cellules actives contenant de l’amidon et de la chlorophylle. Au voisinage immédiat de la base du pétiole, tous les éléments parenchymateux de l'écorce dimi- nuent de calibre et renforcent leurs parois. Là aussi, le collenchyme éprouve quelques modifications : ses éléments se dilatent transversalement et se raccourcissent longitudi- nalement de facon à devenir presque isodiamétriques; leurs parois s’épaississent en même temps d’une façon sensible. Cet accroissement de densité des tissus corticaux a évidem- ment pour résultat de donner à la feuille une base d'insertion solide. Dans la région supérieure du nœud, ce qui frappe au pre- mier coup d'œil, c’est le développement du collenchyme qui s’est peu à peu substitué à la couche externe du parenchyme cortical et atteint maintenant l’épiderme. L’anneau cortical, encore accru, ne comprend plus que deux couches : à l’inté- rieur, le parenchyme à grandes cellules dont les éléments ont continué à augmenter leurs dimensions transversales et à réduire leurs dimensions longiludinales sans se multiplier sensiblement; en dehors, un épais manteau de collenchyme à éléments minimes vers le centre, plus volumineux vers la périphérie. Quelle que soit la région du nœud que l’on considère, on voit que la dilatation des éléments parenchymateux de l'é- corce porte surtout sur leurs dimensions transversales; il s'ensuit que ces éléments, fortement allongés dans le sens de l'axe à l’entre-nœud, deviennent au nœud à peu près isodia- métriques ou même plus allongés dans le sens transversal que dans le sens longitudinal. Ces caractères sont surtout marqués dans les parties du nœud qui confinent à la feuille. 2° Cylindre central. — Les paquets de fibres péricycliques placés au dos des faisceaux libéro-ligneux éprouvent peu de NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 303 modifications dans les régions inférieure et moyenne du nœud; cependant on peut constater que le calibre de leurs éléments est devenu plus considérable. Dans la région supé- rieure du nœud, elles ne sont plus que faiblement lignifiées ou même perdent toute lignification. Dans la région inférieure du nœud, l'épaisseur de l'anneau libéro-ligneux est un peu plus grande que dans l’entre-nœud. Les faisceaux caulinaires sont encore peu modifiés, cepen- dant on peut observer une légère réduction dans le calibre des vaisseaux dont le nombre est d'ailleurs augmenté; cetle multiplication des vaisseaux porte surtout sur les trachées du centre; elle est corrélalive d’un accroissement du paren- chyme intra-ligneux. Les rayons médullaires ont notablement épaissi; ils comprennent ici 5-7 files de cellules au lieu de 3-4 comme à l'entre-nœud; les dimensions de ces cellules se sont d'ailleurs accrues surtout dans le sens radial. Dans la région moyenne du nœud, l'épaisseur de l'anneau libéro-ligneux s'accroît encore, le calibre des vaisseaux con- linue à se réduire, les vaisseaux annelés el spiralés conti- nuent à se mulliplier et le parenchyme intra-ligneux s'étend de plus en plus vers la périphérie ; les rayons médullaires s’élargissent encore, mais uniquement par dilatation tangen- üelle de leurs éléments dont les parois sont amincies. C’est dans la région supérieure du nœud que les faisceaux éprouvent leur maximum de différenciation. Leurs dimen- sions radiales se réduisent Jusqu'à devenir sensiblement moindres que dans l’entre-nœud. Les vaisseaux, de calibre réduit, sont en majeure partie annelés et spiralés, les fibres ligneuses et le parenchyme ligneux sont remplacés par du parenchyme mou qui paraît résulter de l'extension progres- sive du parenchyme intra-ligneux vers la périphérie. Les rayons médullaires s’élargissent encore par simple dilatation de leurs éléments. Le diamètre de la moelle s'accroît déjà notablement dans la partie inférieure du nœud, mais cel accroissement est dû uniquement à la multiplicalion de ses éléments, dont les di- 304 A. PRUNET. mensions transversales sont réduites; une coupe longi- tudinale montre d’ailleurs que les dimensions axiales des cellules médullaires ont encore diminué; leurs parois en outre se sont épaissies et lignifiées, mais elles sont plus richement ponctuées. Dans la région moyenne du nœud, toutes ces modifications sont encore accentuées, les cellules médullaires réduisent en particulier d’une facon extrê- mement marquée leurs dimensions {ransversales (fig. 4% et 5, pl. IV). Dans la région supérieure du nœud, la moelle acquiert son maximum de diamètre, mais sa structure se modifie; elle redevient en effet cellulosique comme dans l’entre-nœud; ses éléments accroissent très sensiblement leurs dimensions transversales el aussi un peu leurs dimen- sions longitudinales. En résumé, dans le nœud: l'écorce s’épaissit et le diamètre de la moelle augmente; les cellules corticales et les cellules médullaires réduisent fortement leurs dimensions longitu- dinales, mais tandis que les dimensions transversales des cellules corticales s’accroissent notablement dans les trois parties dunœud, celles des cellules médullaires diminuent un peu dans les régions inférieure et moyenne du nœud; le collenchyme prend dans l'écorce une importance beaucoup plus grande ; les vaisseaux réduisent leur calibre et les vais- seaux à fond mince se multiplient; les éléments de soutien du bois sont d’abord moins abondants puis disparaissent; les rayons médullaires s'élargissent à la fois par multiplication et par dilatation de leurs éléments. Si nous étudions comparativement dans le nœud et dans l’entre-nœud le contenu des éléments cellulaires, nous ver- rons d’abord que la substitution du parenchyme intra- ligneux aux éléments scléreux du bois augmente considéra- blement dans le nœud le nombre des cellules actives, nous pourrons constater aussi que l’amidon y est plus abondant que dans l’entre-nœud, surtout au voisinage des faisceaux foliaires émergents, et enfin que le nombre des cellules à raphides y est plus considérable. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 30 Je ferai remarquer en terminant que c’est à la partie su- périeure du nœud que les divers tissus de la tige, sauf la moelle, sont différenciés au maximum. PHYSALIS PERUVIANA. Comme dans la Vigne, le renflement nodal est à peu près symétrique par rapport à la feuille. A. Structure de l'entre-nœud. — 1° Écorce. — L'écorce, peu épaisse, présente : un épiderme formé de cellules assez grandes, puis 2, 3 assises de cellules collenchymateuses à parois relalivement minces et contenant de la chlorophylle et enfin 1-2 assises de cellules claires à parois minces; vient ensuite un endoderme dont les éléments riches en amidon diffèrent peu des cellules corticales voisines. Tous les élé- ments cellulaires de l'écorce sont nettement allongés dans le sens de l’axe de la tige. 2 Cylindre central. — Le péricycle est composé de fibres à parois lignifiées, isolées ou réunies par petits groupes, for- mant un cercle discontinu aulour du cylindre central. Dans. le Physalis, comme dans les autres Solanées, outre le liber externe, on trouve un liber interne développé à la périphérie de la moelle. Le bois présente 6 faisceaux, 3 très volumineux el 3 très pelits alternant régulièrement avec les précédents. Chacun d'eux présente vers le centre quelques vaisseaux an- nelés ou spiralés accompagnés de ce parenchyme mou que j'ai déjà décrit dans la Vigne sous le nom de parenchyme intra- ligneux. En dehors, se trouve la masse principale du fais- ceau, formée d'assez larges vaisseaux annelés et spiralés accompagnés surtout de fibres ligneuses à parois modéré- ment épaissies. Les faisceaux sont reliés par des bandes épaisses de fibres ligneuses. On ne distingue pas dans le bois de rayons médullaires. La moelle est formée de grandes cellules à parois minces, non lignifiées, à peu près isodiamétriques. À la périphérie de la moelle, au voisinage du liber interne, on trouve quel- ques fibres éparses à parois lignifiées. ANN. SC. NAT. BOT. xI, 20 306 A. PRUNET. B. Structure du nœud. — 1. Faisceaux foliaires. — Les faisceaux qui se rendent à la feuille sont dans cette plante au nombre de 3. Le médian n'est pas autre chose que l’un des trois pelits faisceaux décrits plus haut, les deux laté- raux se détachent de la partie interne des deux grands fais- ceaux voisins. Le faisceau foliaire médian est plus petit que les latéraux. À mesure qu'ils se rapprochent de la base du pétiole, les 3 faisceaux foliaires éprouvent les modifications que J'ai déjà signalées dans les faisceaux foliaires de la Vigne, c'est-à-dire que leurs vaisseaux se multiplient et diminuent de calibre, que les vaisseaux annelés et spiralés remplacent peu à peu les vaisseaux ponclués et rayés el que les éléments de soutien disparaissent progressivement. À 2 où 3 milli- mètres de la base du pétiole, avant mème d’avoir quitté le cylindre central, ces faisceaux sont composés de vaisseaux annelés et spiralés disposés en files radiales régutières, simulant les rayons d’un éventail et d’un parenchyme mou analogue au parenchyme intra-ligneux. Des coupes succes- sives assez rapprochées permettent de constater que ce parenchyme, d’abord localisé, comme nous l’avons vu, au voisinage des trachées, s'étend graduellement vers l’exté- rieur à mesure que disparaissent les fibres ligneuses. Les vaisseaux foliaires les plus grands ne sont plus à la partie externe des faisceaux comme dans l’entre-nœud, mais non loin de leur bord interne. Les faisceaux foliaires conservent la structure que je viens de décrire en traversant l'écorce. Dans le pétiole, ils présentent comme un retour à leur struc- ture première, le calibre des vaisseaux augmente sensible- ment et parmi eux il en est de rayés ou de ponctués; en outre des fibres ligneuses apparaissent à la partie externe des faisceaux. IL. Tissus propres de la tige. — 1° Écorce. — L'écorce présente dans les diverses régions du nœud la même struc- ture générale que dans l’entre-nœud, mais elle s’épaissit notablement surlout au voisinage de la base du pétiole. Cet épaississement est dû uniquement à la dilatation de ses élé- NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 307 ments dans les parties du nœud opposées à la feuille, à la fois à la dilatation et à la multiplication de ses éléments dans le voisinage de la feuille. L’accroissement des cellules corti- cales porte surtout sur leurs dimensions transversales. La différencialion de l'écorce est maximum au niveau de l’in- sertion foliaire. 2 Cylindre central. — Les fibres péricycliques dispa- raissent dans les diverses régions du nœud. Le bois des faisceaux se modifie profondément ; les fibres ligneuses en effet sont remplacées presque totalement par du parenchyme mou; les vaisseaux diminuent de calibre sans devenir beaucoup plus nombreux; la proportion des petits vaisseaux annelés et spiralés devient plus considé- rable qu’à l’entre-nœud. Les modifications du bois ont leur maximum vers la partie moyenne du nœud. Le diamètre de la moelle augmente au nœud, le maximum s’observant au niveau de l'insertion foliaire. Au-dessus et au- dessous de la feuille, cet accroissement est dû surtout à la dilatation des cellules médullaires, au niveau de la feuille, surtout à leur multiplication. Une coupe longitudinale montre que les dimensions longitudinales des cellules médul- laires se sont notablement réduites, surtout au niveau de la feuille ; là aussi les parois de ces cellules sont un peu épais- sies, mais elles sont plus richement ponctuées. En résumé, dans le Physalis, les divers tissus de la tige éprouvent les modifications suivantes : les vaisseaux se mul- tiplient et diminuent de calibre et la proportion des vaisseaux annelés et spiralés devient plus considérable; les éléments de soutien lignifiés, soit du péricycle, soit du bois, disparaissent ou diminuent; les tissus parenchymateux augmentent de vo- lume soit par multiplication, soit par dilatalion transversale de leurs éléments dont les dimensions longitudinales d’autre part se réduisent sensiblement; la substitution du paren- chyme mou aux fibres ligneuses augmente le nombre des éléments actifs; les cristaux d’oxalate de chaux sont plus abondants que dans l’entre-nœud. 308 A. PRUNET. Tandis que dans la Vigne le maximum de différenciation des tissus nodaux se trouve au-dessus de la feuille, on l’ob- serve dans le Physals au niveau de l'insertion foliaire. PERIPLOCA GRÆCA. On sait que dans cette plante les feuilles sont opposées. Le renflement nodal n’est plus symétrique par rapport à la feuille ; il est plus accusé au-dessous de l'insertion foliaire qu'au-dessus. À. Structure de l'entre-nœud. — 1° Écorce. — L'épiderme ne présente rien de particulier. Le parenchyme cortical est tout entier formé de cellules assez petites, un peu collenchy- maleuses; ces cellules sont sensiblement allongées suivant l’axe de la tige. 2° Cylindre central. — Le péricycle est formé de paquets de longues fibres non lignifiées formant un cercle discontinu autour de l’anneau libéro-ligneux. On trouve dans cette plante, comme dans la plupart des autres Asclépiadées, un liber interne et un liber externe. Le bois des faisceaux renferme deux sortes de vaisseaux, les uns petits, surtout annelés et spiralés, formant vers le centre des files radiales très régulières plus ou moins étroitement accolées, les autres très grands, surtout ponctués, épars dans la partie moyenne et dans la partie externe des faisceaux. Les premiers sont accompagnés de quelques cellules de paren- chyme ligneux, les seconds surtout de fibres ligneuses d’assez grand calibre el à parois modérémentépaissies. Chaque feuille reçoit un seul faisceau. Les faisceaux foliaires se recon- naissent à la taille un peu plus grande et au nombre plus considérable des petits vaisseaux du centre; tandis qu’on ne trouve que 3-4 vaisseaux par file dans les faisceaux eauli- naires, on en comple 5-6 par file dans les faisceaux foliaires. De plus les faisceaux foliaires présentent vers leur partie interne un peu de parenchyme intra-ligneux. La moelle est formée de cellules assez petites allongées suivant l'axe de la tige. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 309 B. Structure du nœud. — TX. Faisceaux foliaires. — Les faisceaux foliaires présentent les modifications habituelles ; les vaisseaux se mulliplient et réduisent leur calibre, de pelits vaisseaux annelés et spiralés remplacent les grands vaisseaux ponctués; les éléments de soutien disparaissent. Au moment où les faisceaux quittent le cylindre central pour se rendre dans l'écorce, ils se sont dilatés dans le sens tan- gentiel et réduits dans le sens radial; ils sont formés de très nombreux vaisseaux annelés et spiralés disposés en files radiales régulières el entre les vaisseaux s’intercale du pa- renchyme intra-ligneux. Dans le pétiole, les vaisseaux aug- mentent de calibre et leur nombre diminue considérable- ment Voir plNTsfig: 47,48, 49 IL. Tissus propres de la tige. —1° Écorce. —Le parenchyme cortical s’épaissit à la fois par multiplication et par dilata- tion transversale de ses éléments qui deviennent isodiamé- triques. Cet épaississement est surtout marqué au niveau des inserlions foliaires et, dans les diverses parties du nœud, au voisinage des feuilles. Au contact immédiat de la base du pétiole, les cellules corticales réduisent leur calibre et épais- sissent leurs parois. Les cellules cristalligènes sont plus nombreuses que dans l’entre-nœud. 2° Cylindre central. — Le péricycle ne présente pas de modifications bien sensibles. Les grands vaisseaux ponctués du bois réduisent un peu leur calibre; les petits vaisseaux de la partie interne des faisceaux deviennent plus nombreux; on en compte 5-7 par file au lieu de 3-4; de plus ces vaisseaux sont maintenant accompagnés de parenchyme intra-ligneux. Les fibres per- sistent dans la partie moyenne et dans la partie externe du bois, mais leur calibre augmente et leurs parois diminuent d'épaisseur. Les rayons médullaires s’élargissent surtout par dilatation de leurs éléments dont les parois sont plus minces et plus richement ponctuées. Ces faits sont particulièrement marqués au voisinage des faisceaux foliaires émergents. La moelle se dilate, mais principalement par multiplication 310 A. PRUNET. de ses éléments. Les cellules cristalligènes y sont beaucoup plus nombreuses qu’à l’entre-nœud, surtout au voisinage des faisceaux foliaires émergents. Les dimensions longitudinales des cellules médullaires se réduisent, en particulier au ni- veau des inserlions foliaires. On le voit, les modifications présentées au nœud par les faisceaux foliaires sont les mêmes que dans les plantes étu- diées jusqu'ici; celles que présentent les tissus propres de la tige sont de même nature que dans le Physalis, mais elles sont en quelque sorte atténuées par la persistance de la plus grande partie des éléments de soutien du bois. La différenciation anatomique du nœud dans le Periploca présente son maximum au niveau de l’inserlion foliaire, elle est déjà très sensible au-dessous de la feuille, mais elle cesse rapidement au-dessus de la base du pétiole. ACONITUM INTERMEDIUM. Le renflement nodal est sensiblement limité à la partie inférieure et à la parlie moyenne du nœud. M. Marié (1), qui a étudié l'anatomie des Renonculacées, n'a pas décrit la tige aérienne de cette plante. A. Structure de l'entre-nœud. — 1° Écorce. — Au-dessus d’un épiderme à petites cellules, on trouve un parenchyme cortical formé de 2-3 couches de cellules allongées suivant l'axe de la tige. Vient ensuite l’endoderme dont les éléments peuvent se lignifier çà et là irrégulièrement. 2° Cylindre central. — Le péricycle comprend d’abord des paquets de fibres à paroïs très épaisses, fortement lignifiées, coiffant le liber des faisceaux, ensuite un anneau continu de sclérenchyme à éléments courts empâtant les paquets de fibres placés au dos des faisceaux. Comme dans tous les Aconits (2), les faisceaux sont de taille dissemblable et construits sur deux types différents. (1) P. Marié, Stucture des Renonculacées (Ann. des sc. nat. botan., 6° sér., t. XX, 1885, p. 35-180). (2) P. Marié, loc. cit., p. 130-149. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 311 Le premier type s’observe dans les faisceaux foliaires, les- quels sont au nombre de trois. Le bois de ces faisceaux est constitué en majeure parlie par des vaisseaux annelés et spiralés de faible calibre disséminés dans du parenchyme intra-ligneux. Au voisinage du liber seulement, on trouve quelques vaisseaux rayés ou ponctués, accompagnés d’un pelitnombre de cellules de parenchyme ligneux. Le deuxième type s’observe dans les faisceaux caulinaires. Ces faisceaux présentent vers la moelle quelques trachées accompagnées d’un peu de parenchyme intra-ligneux ; en dehors se trouve la masse principale du faisceau, formée de vaisseaux ponc- tués ou rayés d’assez grande taille réunis par du parenchyme Hgneux. Les rayons médullaires, très larges, sont formés en ma- jeure partie de parenchyme mou; les cellules les plus voi- sines du péricycle sont les seules qui se lignifient. La moelle est formée de parenchyme mou à éléments iso- diamétriques ou faiblement allongés dans le sens trans- versal. B. Structure du nœud. — 1. Faisceaux foliaires. — Les fais- ceaux foliaires présentent dans leur structure les mêmes mo- difications que dans les plantes précédentes. Cependant, ici, ces faisceaux conservent à peu près leurs dimensions tangen- Uelles et s’allongent un peu dans le sens radial; de plus les vaisseaux au lieu de se disposer en files radiales conservent leur répartition irrégulière de l’entre-nœud. Les arcs sclé- reux péricycliques qui protègent en dehors le liber des fais- ceaux persistent, mais en se modifiant; leurs éléments en effet augmentent de calibre, amincissent leurs parois et se raccourcissent considérablement; ce ne sont plus des fibres, mais des cellules de sclérenchyme court à parois richement ponctuées. Dans le pétiole, les vaisseaux diminuent de nombre et augmentent de calibre; en outre, un peu de pa- renchyme ligneux apparaît à la partie externe du bois. IL. Tissus propres de la tige. — 1° Écorce. — Les cellules épidermiques s’accroissent; les cellules du parenchyme cor- 3192 A. PRUNET. tical se multiplient en particulier, au voisinage du pétiole; là, d’ailleurs, leurs dimensions transversales s’accroissent nota- blement, de sorte qu’elles deviennent à peu près isodiamétri- ques. Au voisinage immédiat de la base du pétiole, surtout vers son angle interne, les cellules corticales réduisent leur calibre et épaississent fortement leurs parois de façon à for- mer une sorte de collenchyme à éléments courts. 2° Cylindre central. — Les divers éléments du péricycle augmentent de calibre et amincissent leurs parois. Dans le bois, les grands vaisseaux rayés et ponctués sont moins nom- breux et les vaisseaux annelés et spiralés se multiplient; le parenchyme intra-ligneux est plus abondant. Les rayons médullaires sont peu modifiés ; cependant on peut remar- quer que leurs éléments sont plus allongés dans le sens ra- dial. La moelle devient plus volumineuse surtout par dilata- tion de ses éléments. Si l’on étudie comparativement le contenu cellulaire dans le nœud et dans l’entre-nœud, on peut remarquer que l’ami- don est plus abondant dans le nœud, surtout au voisinage des faisceaux foliaires. La chlorophylle, un peu plus abon- dante dans le parenchyme intra-ligneux, diminue au con- raire dans les cellules de l'écorce les plus voisines de la feuille. Dans le Clematis tubulosa, les modifications des faisceaux foliairessont analogues à celles que j'ai décrites dans l’Aconit, mais ces faisceaux s’allongent beaucoup plus dans le sens radial (voir pl. V, fig. 8, 9, 10). ARISTOLOCHIA CLEMATITIS. La différenciation des faisceaux libéro-ligneux soit fo- liaires, soit caulinaires, est analogue à celle que j'ai signalée dans l’Aconit, et il en est de même pour la moelle. Les mo- difications présentées par l'écorce et par le péricycle sont beaucoup plus importantes. Dans l’entre-nœud, l'écorce est formée essentiellement de parenchyme mou accompagné dans les parties qui corres- NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 315 pondent aux côtes de la tige par des faisceaux de collen- chyme (pl. IV, fig. 6). Dans le nœud, l'écorce devient presque entièrement collenchymateuse; seules les parties les plus voisines de l’endoderme sont formées de parenchyme mou (pL. IV, fig. 7). Le péricycle est formé dans l’entre-nœud d’un épais anneau scléreux formant un cercle complet; dans le nœud, le péri- cycle conserve à peu près la même épaisseur, mais devient entièrement collenchymateux (pl. IV, fig. 6, 7). Les modifications de l'écorce et du péricycle présentent leur maximum au niveau el surtout un peu au-dessus de l’in- sertion foliaire. Dans l'Oxrybaphus nyctagineus, l'accroissement du col- lenchyme dans les nœuds est plus considérable encore; presque tous les éléments de la tige deviennent collenchyma- teux, même les rayons médullaires, même les éléments de soutien du bois des faisceaux; il n’y a d'exception que pour quelques parties de la région interne du parenchyme corti- cal et de la moelle; les seuls éléments lignifiés sont les vaisseaux du bois. Ces modifications sont surlout sensi- bles un peu au-dessus de l'insertion foliaire. SIUM SISARUM. La tige est fistuleuse dans cette plante; les feuilles sont grandes, alternes et engainantes; le renflement nodal est peu marqué. A. Structure de l'entre-nœud. — 4° Écorce. — L'épiderme est composée de cellules assez petites, un peu allongées dans le sens de l’axe, à paroi externe cutinisée. Le parenchyme cortical présente au-dessous de l'épiderme 3 assises de petites cellules contenant de la chlorophylle, ces cellules sont un peu allongées suivant l'axe. Viennent ensuite # assises de très grandes cellules à peu près incolo- res fortement allongées dans le sens de l'axe. Au-dessous de l’'épiderme, on trouve en outre, dans les points qui corres- 314 A. PRUNET. pondent aux côtes que présente la surface de la tige, des paquets de collenchyme à éléments longs. 2 Cylindre central. — Les faisceaux libéro-ligneux, très nombreux, sont de deux tailles et sont séparés par de larges rayons médullaires. Les faisceaux les plus grands se ren- dent à la feuille supérieure, ce sont les faisceaux foliaires, les plus pelits restent dans la tige, ce sont les faisceaux caulinaires. Ordinairement on trouve 10 faisceaux foliaires et 30 faisceaux caulinaires ; les faisceaux caulinaires sont réunis par groupes de 3 (voir fig. 29, pl. VI), chacun de ces groupes alternant régulièrement avec un faisceau foliaire. Les faisceaux foliaires ne diffèrent pas seulement des faisceaux caulinaires par la taille, ils en diffèrent encore par la structure. Les faisceaux caulinaires présentent 4-6 vaisseaux surtout ponclués et rayés accompagnés de fibres ligneuses à parois épaisses et d’un petit nombre de cellules de parenchyme ligneux. Les faisceaux foliaires présentent, vers l’intérieur, des vaisseaux annelés et spiralés disséminés sans ordre dans du parenchyme intra-ligneux séparé de la moelle par une gaine scléreuse. Vers l'extérieur, se trouvent des vaisseaux ponctués ou rayés accompagnés de fibres ligneuses el de quelques cellules de parenchyme ligneux. Les faisceaux sont unis entre eux par des bandes scléreuses formées de fibres à parois épaisses. Les rayons médullaires sont formés de grandes cellules de parenchyme ligneux à parois minces vers la moelle, plus épaisses vers l'extérieur. La moelle est résorbée en très grande partie; les portions qui persistent au voisinage des faisceaux sont formées de grandes cellules faiblement lignifiées, à parois minces; ces cellules sont allongées dans le sens de l'axe. B. Séructure du nœud. — 1. Faisceaux foliaires. — Les faisceaux foliaires présentent les modifications habituelles : les éléments de soutien sont remplacés par du parenchyme NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 315 mou, les vaisseaux deviennent beaucoup plus nombreux el réduisent leur calibre, les vaisseaux ponctués et rayés sont remplacés par des vaisseaux annelés et spiralés; comme toujours encore, la multiplication des vaisseaux et leur réduction de calibre porte surtout sur les vaisseaux ponctués et rayés (1). Dans le pétiole, les faisceaux reprennent la même struc- ture que dans l’entre-nœud : les vaisseaux augmentent de calibre et deviennent moins nombreux; les plus externes sont ponctués ou rayés; les éléments de soutien reparais- sent à la partie extérieure des faisceaux. Un arc scléreux péricylique se montre même ici à la partie externe des fais- ceaux; nous n’en avions pas trouvé dans la tige. Comme dans la tige, les faisceaux foliaires présentent d’ailleurs vers la moelle une gaine scléreuse. Il. Tissus propres de la tige. — 1° Écorce. — Les cellules épidermiques s’agrandissent, et il en est de même des cellules du parenchyme cortical et des éléments collenchymateux des côtes de la tige. Dans la partie moyenne du nœud, les cellules diminuent un peu de calibre et deviennent plus nombreuses; leurs parois s’épaississant, elles deviennent un peu collenchymateuses; ces faits comme toujours sont sur- tout accentués au voisinage immédiat de la base de la gaine. On peut observer que c’est dans la région moyenne du nœud que les éléments collenchymateux des côtes de la lige attei- gnent leur calibre le plus considérable. Les faisceaux libéro-ligneux caulinaires éprouvent des modifications profondes. Leur volume s’accroît énormément et le nombre de leurs vaisseaux devient considérable; à la parlie inférieure du nœud, ils se rapprochent de façon à former des groupes de trois faisceaux, intercalés régulière- ment aux faisceaux foliaires; le nombre des faisceaux fo- liaires étant de 10, comme nous l'avons vu, il y a donc 10 groupes de trois faisceaux. A la partie moyenne du nœud, (1) Comme dans l’Aconit, les faisceaux foliaires augmentent de volume en grande partie par accroissement de leurs dimensions radiales. 316 A. PRUNET. les trois faisceaux qui constituent chaque groupe se fu- sionnent de façon à n’en plus former qu’un seul très volumi- neux (voir fig. 23, pl. V). Après le départ des traces foliaires, ces grands faisceaux caulinaires se morcellent en un grand nombre de faisceaux plus petits et l’anneau libéro-ligneux reprend peu à peu l’aspect que nous lui avons vu dans l'entre-nœud. Dans les trois parties inférieure, moyenne et supérieure du nœud, les faisceaux caulinaires ont la structure sui- vante : vers Le centre, ils présentent un très grand nombre de vaisseaux de petit calibre surtout annelés et spiralés, disséminés dans du parenchyme intra-ligneux; en dehors, on voit une épaisse couche de fibres ligneuses fortement slérifiées renfermant quelques vaisseaux ponctués ou rayés de diamètre assez réduit. Les larges rayons médullaires que laissent derrière eux les faisceaux foliaires en passant dans l’écorce sont formés de grandes cellules un peu collenchymateuses allongées dans le sens du faisceau sortant. La moelle devient pleine dès la base du nœud; une lacune reparaît au centre un peu au-dessus de la feuille ; cette lacune s'accroît graduellement jusque vers la partie moyenne de l’entre-nœud. Les cellules médullaires sont lignifiées dans la partie inférieure et dans la partie supérieure du nœud; là aussi elles sont à peu près isodiamétriques ou même allon- gées dans le sens transversal, surtout à la base du nœud; elles présentent des ponctuations plus nombreuses dans les parties les plus voisines de la base dela feuille. Ces cellules du reste paraissent ne contenir guère autre chose que de l’eau. Dans la partie moyenne du nœud, les cellules médullaires perdent leur lignification et deviennent un peu collenchyma- teuses; elles sont à peu près isodiamétriques ou un peu allongées dans le sens radial et paraissent assez riches en protoplasma (voir pl. IV, fig. 20, 21). Nous avons vu dans la Vigne la moelle, cellulosique dans l’entre-nœud, devenir ligneuse dans le nœud; nous NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 317 constalons ici la transformation inverse. Il paraît probable que dans la Vigne, la moelle n’élait lignifiée que pour des causes toules mécaniques, afin d'offrir aux feuilles une base d'insertion plus solide. Dans le Sim, la solidité du nœud est largement assurée par l'accroissement si considérable du volume des faisceaux caulinaires d’une part, el d'autre part par la transformation en collenchyme des éléments paren- chymateux de l'écorce. Dans le Thalictrum minus, la moelle présente des modifi- cations comparables à celles que je viens de décrire dans la Sium Sisarum, mais dans le Thalictrum le plancher cellu- losique du nœud est parcouru transversalement par des faisceaux anastomosés entre eux et d'autre part avec les faisceaux foliaires et les faisceaux caulinaires. Ces faisceaux sont presque exclusivement formés de vaisseaux à fond mince, c'est-à-dire très propres à la diffusion des liquides. LONICERA FLEXUOSA. Le renflement nodal est peu accentué surtout au-dessus du pétiole. La tige, fistuleuse dans l’entre-nœud, devient pleine dans le nœud. Les faisceaux foliaires et les tissus nodaux présentent des modifications générales assez analogues à celles que j'ai dé- crites dans le Periploca græca, mais on trouve dans le Loni- cera flexuosa une particularité qui me paraît intéressante à signaler. On sait que dans les Lonicérées (1) le périderme, d’origine péricyclique, est précoce. Aux nœuds, l’anneau péridermi- que s’interrompt de distance en distance de même que l’assise de fibres péricyclique qui limite en dehors le péri- derme, afin de laisser passer les faisceaux foliaires, au nom- bre de trois pour chaque feuille. Comme ces solutions de (1) Vesque, Mémoire sur l'anatomie comparée de l'écorce (Ann. des sc. nat. botan., 6° série, t. IL, p. 192). — J. Moeller, Anatomie der Baumrinden, p. 143. — Morot, Recherches sur le péricycle (Ann. des sc. nat. botun., 6° série, t. XX, p.271). — H. Douliot, Recherches sur le périderme (Ann. des sc. nat., T° sér... t. X,p. 386). 318 A. PRUNET. continuité s'ouvrent avant l’arrivée des faisceaux foliaires et ne se ferment pas immédiatement après leur passage, il s'ensuit qu’une large communication est ainsi ouverte entre l'écorce primaire et les parties plus internes de la lige; dès lors l'écorce primaire conserve toute son activité dans les parties voisines du nœud. Vers l’époque de la chute des feuilles, le périderme devient absolument continu et l'écorce primaire se dessèche alors comme dans l’entre-nœud. EUCALYPTUS OBLIQUA. On sait que les nœuds de cette plante portent des phyl- lodes persistants d’assez grande taille et non de vraies feuilles. Le faisceau unique qui se rend au phyllode présente au nœud les modifications habituelles et reprend sensiblement dans le phyllode la même structure que dans l’entre-nœud. Dans le bois, la proportion des petits vaisseaux annelés et spiralés augmente et du parenchyme intra-ligneux se montre à la partie interne des faisceaux. La moelle et l'écorce s’ac- croissent considérablement au voisinage de la base du phyl- lode, et comme sans doute le parenchyme mou qui les forme serait impuissant à soutenir le phyllode, de grandes cellules pierreuses viennent renforcer ce tissu. La moelle renferme bien dans l’entre-nœud des cellules pierreuses, mais au nœud leur nombre se multiplie et leur taille s'accroît dans des pro- portions considérables. Ces cellules ont d’ailleurs dans le nœud une cavité relativement plus grande que dans l’entre- nœud et elles sont plus richement ponctuées. » Voici, avec les indications bibliographiques, la liste com- plète des plantes que j'ai étudiées. Benonculacées (1): Aconitum intermedium, Clematis tu- (4) P. Marié, Séruclure des Renonculacées (Ann. des sc. nat., 6° sér., t. XX, 1885, p. 5-180). NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 319 bulosa, Thalictrum minus (2). — Dilléniacées (3): Dillenia scandens. — Magnoliacées : Magnolia grandiflora (4). — Lardizabalées (5) : Hollboellia latifolia. — Ménispermées (6) : Menispermum canadense. — Berbéridées (1): Berberis vul- garis, Nandina domestica. — Papavéracées (8): Macleya cordata. — Crucifères (9): Sisymbrium strictissimum, Di- plotaxis tenuifolia, Lepidium glaslifolium. — Cappari- dées (10): Capparis spinosa. — (éraniacées (11): Geranium sanguineum, G. nodosum, Pelargonium viscosissimum. — Balsaminées(12) : Impaliens longicornu. — Polygalées (13): Polygala cordifolia. — Ampélidées (14): Vitis vinifera, V. in- divisa, Cissus antarctica, C. orientalis, Ampelopsis hedera- cea, À. quinquefolia. —Staphyléacées : Staphylea colchica. — ) De Bary, Vergl. Anat., p. 259, 336, 436. ) Crüger, Botan. Zeit., 1850. — Eichler, Flora brasiliensis, fasc. 31, p. 336. ) A. Gris, Sur la moelle des plantes ligneuses (Ann. des sc. nat., 5° série, ONE (5) Decaisne, Mémoire sur la famille des Lardizabalées (Arch. du Muséum, 1839, I, p. 143-213). (6) Radikofer, Ueber das Anomale Wachsthum des Stammes bei Menisper- meen (Flora, 1858, p. 193-206). — Nägeli, Beitr. zur wissensch. Botan., I, p. 16- 19. — Eichler, Flora brasiliensis, p. 207-214 et Denkschr. der botan. Gesell. Regensburg, Bd. V, Heft I, 1864. — Brottière, Étude anatomique de la famille des Ménispermées, Paris, 1886. (7) Büning, Anatomie des Stammes der Berberitze (Inaug. Dissert., Künigs- berg, 1885). (8) J. Michalowski, Beitr. und Entwicklungsgesch. von Papaver somniferum (Inaug. Dissert., Breslau, 1881). (9) E. Fournier, Recherches anatomiques el taxonomiques sur la famille des Crucifères, 1865. -- E, Dennert, Beitr. zur vergl. Anatom. des Laubstengels der Cruciferen (Inaug. Dissert., Marburg, 1884). (10) Vesque, Essai d'une monographie anatomique et descriptive de la tribu des Capparidées (Ann. des se. nat., 4° série, t. XIII, 1882, p. 47-135). — F. Pax, Beitr. zur Kenn{niss der Capparidaceæ (Engler’s Jahrb., Bd. IX, 1888, p. 39-69). (41) Jännicke, Beitr. zur vergl. Anat. der Geraniaceen (Abhandl. der Senken- berg. naturforsch. Gesell., Bd. XIV, p. 3, 1886). (12) G. Beyse, Unters. über den Anat. Bau und das mech. Princip im Aufbau einig. Arten d. Gattung Impaliens (Nova acta Car. Leopold, etc., Bd. XLITT). (13) R. Chodat, Monographie des Polygalucées (Compte rendu de la 72° ses- sion de la Soc. Helvétique des sc. nat., Genève, 1889, p. 9-28). (14) D'Arbaumont, La tige des Ampélidées (Ann. des se. nat., 6° sér., t. XI, 1881, p. 186-255). — Sur la position des faisceaux dans la tige, la feuille et les bourgeons de quelques Ampélidées (Bull. de la Soc. bot. de France, 1881, p. 278- 286). 320 A. PRUNE. Li Sapindacées (15): Dodonea mundiana, Sapindus Saponaria. — Acérinées : Acer opalinum, A. crelicum. — Méliacées : Melia argutta. — Aurantiacées : Citrus Aurantium.— Æypé- ricinées (16) : Hypericum elatum, H. Androsæmum. — T'ern- stroemiacées (17) : Camellia japonica. — Tiliacées (18) : Tilia sylvestris, Aristotelia Maqui. — Sterculiacées (19) : Sterculia diversifolia. — Malvacées (20) : Malva capensis, Sparmannia africana, Abutilon vexillarium, Hibiscus syriacus. — Cistinées (21) : Helianthemum grandiflorum. — Caryophyl- lées (22) : Saponaria officinalis, Gypsophila Steveni, Cucu- balus bacciferus, Silene viscosa, Spergularia rubra, Ceras- tium arvense, C. lanatum', Stellaria nemorum. — Franké- niacées : Frankenia laevis. — Portulacées (23) : Portulacaria afra. — Zygophyllées (24) : Zygophyllum Fabago, Z. more- sana. — Âiosmées : Boronia polygalaefolia. — Zanthoxy- lées : Choisya ternata. — Celastrinées : Evonymus europaeus, E. lucidus. — Térébinihacées : Eucalyptus hemiphloia, E. macrorhyncha, E. obliqua. — Léqumineuses (25) : Pha- Pet (45) Voir la bibliographie in de Bary, Vergl. Anat., p. 598. (16) Turner, Beitr. z. vergl. Anat. der Bixaceen, Samydaceen, Turneraceen, Cistaceen, Hypericaceen und Passifloreen, Gütlingen, 1885. (17) K. Hitzemann, Beitr zur vergl. Anat. der Ternstraemiaceen, Dipterocar- paceen und Chlenaceen (Inaug. Dissert., Kiel, 1886). (18) Dumont, Rech. sur l'anat. comparée des Malvucées, Tiliacées, Stercu- liacées (Ann. des sc. nat., T° série, t. VI, p. 129-246). (19) Dumont, loc. cit. (20) Dumont, loc. cit. (21) Turner, loc. cit. (22) G. Regnault, Rech. sur les affinités de struct. des Cyclospermées (Ann. des se. nat., 4° sér., t. XIV, p. 87). — 0.-G. Petersen, Momenter til Caryophyl- laceernes Anutomi (Botan. Zeitschrift, Bd. XVI, H. IV, p. 187-202). —J. Vesque, Ann. des sc. nat., t. XV, 1883, p. 105. — Christ, Vergl. Anat. der Caryophyl- lineen (Inaug. Diss., Marburg, 1888). (23) Christ, loc. cit. (24) Engler, Die natürlichen Pflanzenfamilien, Lief 52, p. 75. (25) Th. Jaensch, Zur Anat. einig. Leguminosenhôlze (Ber. der deutsch. bo- tan. Gesell., Bd. II, 1884, p. 268-292). — Jännicke, Beitr. zur vergl. Anat. der Papilionaceæ (Inaug. Dissert., Marburg, 1884. — Leclerc du Sablon, Sur la tige de la Glycine (Bull. de la Soc. bot. de France, XXX, p. 275). — Ph. van Tieghem, Sur les faisceaux libéro-ligneux des Vicices (Bull, Soc. bot. de France, 1884, n° 3). — Rhein, Beitr. zur Anat. der Cesalpiniaceen (Inaug. Dissert., Kiel, 1888). NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 321 seolus multiflorus, Robinia pseudo-Acacia, Genista ramosis- sima, Cercis siliquastrum, Pueraria thunbergiana, Gledits- chia triacanthos, Acacia pendula. A. latifolia. — Aosa- cées (26) : Rosa bengalensis, Cydonia vulgaris, Pyrus com- munis, Malus communis, Sorbus Hostii, Cerasus lusitanica, Rubus fruticosus, Rhodotypus soute — Myrtacées (27) : Eugenia apiculata. — Calycanthées (28) : Calycanthus flori- dus, C. macrophyllus: Æaloragées : Cercodea erecta. — Trapacées (29) : Trapa natans. — Lythrariées : Cuphea visco- sissima. — Onagrariécs : Fuchsia globosa, Schufa arbores- cens. — Philadelphées : Decumaria barbata, Philadelphus pubescens. — Saxrifragées (30) : Hydrangea acuminata. — Crassulacées (31) : Sedum Telephium, S. spectabile, Crassula ane Sempervirum barbatum. — Mésembryanthé- mées (32) : Tetragonia expansa, Mesembryanthemum cordi- folium. — Passiflorées (33) : Passiflora cærulea, P. lutea, P. racemosa. — Pegomacées (3%) : Begonia Richardii, 6) E. Cloay, Rech. anat. et phys. sur les Dryadées, Paris, 1888. 7) O0. Lignier, Recherches sur l'anat. comp. des Calycanthées, des Mélasto- es et des Myrtacées, 1887. 8) De Mirbel, Annales des sc. nat., t. XIV, 1828. — Gaudichaud, Archives de botan., t. 11, p. 493, 1833. — Woronin, Ueb. den Bau des Stammes von Calycanthus (Bot. Zeit., 1860, p. 177-182). — O. Lignier, Loc. cit. — Pax, in Natürlichen Pflanzenfamilien de Engler et Prantl, Lief, 28. (29) Sanio, Bot. Zeit., 1865, p. 193. — De Bary, Vergl. Anat., p. 230, 254, 393: (30) Christ, Beitr. zur vergl. Anat. der Caryophyllineen und Suxifrageen, Marburg, 1887. — K. Leist, Beëtr. zur vergl. Anat. (ler Saxifrageen (Botan. Centralblatt, Bd. XLIIT, p. 100 et suiv., 1890). — Thouvenin, Recherches sur les Saxifragées (Ann. des se. nat., 7° sér. t. XII, 1890). (31) Brongniart, Archives du Muséum, t. 1. — G. Regnault, loc. cit. — L. Koch, Unters. über die Entwick. der Crassulaceen, Heidelberg, 1879. — Mori, Sagio monografico sulla struttura istologica delle Crassulacee (Nuov. giorn. botan. Italiano, t. XI, p. 161, 1879). à 2 2 cé C ( ma (2 (32) Regnault, loc. cit., p. 9% et 101. -— Hagen, Unters. über die Entwick. und den Bau der Mesembryanthemeen (Inaug. Dissert., Bonn, 1872). — Fal- kenberg, Bot. Zeit., 1876, p. 317. — Dannemann, Beitr. zur Anat. und Ent- wick. der Mesembryanthema (Inaug. Dissert., Halle, 1883). (33) Turner, loc. cit. (34) Hildebrandt, Anat. Unters. über die Stämme der Begoniaceen, Berlin, 1859. — De Bary, Vergl. Anat., p. 550. — G. Haberlandt, Zur Anat. der Be- gonien (Mitth. d. naturwiss. Vereins f. Stleiermark, 1887). — H. Duchartre, Observations sur le sous-genre Lemoinea, Paris, 1889. ANN. SC. NAT. BOT. xuI, 21 322 A. PRUNET. B. wettoniensis. — Cucurbitacées (35) : Cucurbila Pepo, Bryonia dioïca. — Cornées : Cornus alternifolia, C. sangui- nea. — Ombellifères (36): Sium Sisarum, OEnanthe pimpi- nelloides, Seseli montanum, Fœniculum dulce, Bupleurum falcatum, Daucus gummifer, Crithmum maritimum. — Com- posées (37): Hieracium hirsutum, H. coronopifolium, Cosmos bipinnata, Dahlia rosea, Lynosiris vulgaris, Eupatorium corsi- cum, Ageratum cæruleum, Polymnia Uvedalia, Pyrethrum sinensis. — Campanulacées (38) : Canarina Campanula. — Caprifoliacées (39) : Sambucus nigra, Lonicera flexuosa. — Rubiacées (40) : Rubia tinetorum, Leptodermis lanceolata. — Apocynées (41): Apocynum hypericifolium, Vinca major, Nerium Oleander. — Asclépiadées : Periploca græca, Ascle- pias mexicana, Arauja albens. — Oéinées : Fraxinus excel- (35) De Bary, Vergl. Anat., p. 65, 337, 351. — H. Lotar, Essai sur l'ana- tomie comparée des organes végétutifs et des téguments séminauæ des Cucurbita- cées, Lille, 1881. — Dutailly, Assoc. franc. pour l'avancement des sciences, 1877, 1879, 1884. (36) De Candolle, Organographie, 1, p. 484. — Jochmann, De Umbellifera- rum structura, 1854. — H.-W. Reichardt, Ueber centrale Gefässbiündelsystem cinigen Umbelliferen (Sitzungsber. der Wiener Akad. der Wissensch., Bd. XXI, 1856, p. 133. — Courchet, Études anatomiques sur les Umbellifères, etc. (Ann. des se. nat., 6° sér. t. XVII, p. 107-129). (37) Vuillemin, De la valeur des caractères anatomiques au point de vue de la classification : Tige des Composées, Thèse, Nancy. — Hildebrandt, Beitr. zur vergl. Anat. der Ambrosiaceen und Senecionideen (Inaug. Dissert., Marburg, 1887). — P.-0. Michael, Vergl. Unters. über den Bau des Holzes der Composi- ten, Caprifoliaceen und Rubiaceen (Inaug. Dissert., Leipzig, 1857). — Schu- mann, Beitr. zur Anat. des Compositenstengels (Botan. Centr., Bd. XLI, p.193). Seligmann, Ueber anal. Beziehungen der Campanulaceen und Lobeliaceen zu den Compositen (Bot. Centr., Bd. XIII, p.1). (38) Wettstein, Denkischr. der Wiener Akad. der Wissensch., 1887, p. 19 et suiv, — Heinricher, Ber. der deutsch. botan. Gesell., Bd. I, p. 3. — Wester- maier, Monatsber. der Berliner Akad. der Wissensch., 4881, p. 1064. — Peter- sen, Engler's Jahrb., Bd. II, 4882, p. 391. — Weiss, Bot. Centr., Bd, XV, 1883, p. 385. — Seligmann, loc. cit. (39)J. Hanstein, Ueber Gürtelfürmige Gefässtrangverbindungen (Abhandl. der Berliner Akad. der Wissensch., 1857, p. 82, 83, 90). — E. Grignon, Étude comparée des caractères anatomiques des Lonicérées el des Astéroïdées, Paris, 4884. — P.-0. Michael, loc. cit. (40) P.-0. Michael, Loc. cit. (41) De Bary, Vergl. Anat., p. 262, 352, 585. — Garcin, Recherches sur les Apocynées, Lyon, 1889. — Michael Leonhard, Beilr. zur Anal. des Apocyna- ceen (Bot. Centr., Bd. XLV, p. 1). NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 323 sior, Syringa vulgaris, Ligustrum japonicum. — Borragi- nées : Echium bifrons. — Verbénacées : Vilex Agnus-castus, Clerodendron Bungei. — Labiées (42) : Marrubium vulgare, Salvia splendens, Leonurus Cardiaca, Ocimum Basilicum, Cedronella triphylla, Lamium purpureum. — Scrofulari- nées (45) : Brunfelsia eximia, Capraria salicifolia, Veronica Lindleyana, Budleia Lindleyana. — Acanthacées : Ruellia varians (pl. IV, fig. 24, 25), Adathoda vasica, Justicia hys- sopifolia, Thunbergia fragrans, Libonia floribunda, Strobi- lanthes Sabiniana. — Bignoniacées (44) : Tecoma capensis, Catalpa Bungei. — Primulacées (45): Lysimachia vulgaris. — Plumbaginées (46) : Plambago rhombifolia. — Æricacées : Andromeda mariana, Arbulus Unedo, Arctostaphylos Uva- ursi. — Convoloulacées : Balalas edulis. — Po/ygonées : Polygonum tinctorium, P. Persicaria, P. Hydropiper, P. orientale, P. Sieboldi, P. Fagopyrum, Rumex lunaria, Muehlenbeckia complexa, M. sagittifolia. — Chénopo- diées (47) : Alriplex hastata, Chenopodium Bonus-Henricus. — Nyctaginées (48) : Oxybaphus nyctagineus, Mirabilis lon- giflora. — Ayistolochiées (49) : Aristolochia Clematitis. — (42) À. Born, Vergl. system. Anat. des Stengels der Labiaten und Scrophu- lariaceen (Inaug. Dissert., Berlin, 1886. (43) A. Born, loc. cit. (#4) Pour la bibliographie, voir de Bary, Vergl. Anal., p. 586. — Hove- lacque, Recherches sur l'appareil végétatif des Bignoniacées, Rhinanthacées, Orobanchées, Utricularinées, Paris, 1888. (45) Kamienski, Vergl. Anat. der Primulaceen (Inaug. Dissert., Strasbourg, 4879). — Westermaier, Beitr. zur Anut. der Primulaceen (Monatsber. der Ber- liner Akademie der Wissensch., 1881, p. 1050). — Ph. Van Tieghem, Séruc- ture de la tige des Primevères du Yun-nam (Bull. soc. bot. de France, XXII, 1881, p. 95-103, 126-131). (46) Maury, Études sur l'organisation et la distribution géographique des Plumbaginées (Ann. des se. nat., 7° sér. t. IV, p. 1). (47) Pour la bibliographie, voir de Bary, Vergl. Anat., p. 607. — Gheorg- hieff, Beitr. zur vergl. Anut. der Chenopodiaceen (Botan. Centr., Bd. XXX, p. 117 et suiv., Bd. XXXI, p. 23 et suiv.). (48) Pour la bibliographie, voir de Bary, Vergl. Anat., p. 607, — Reiche, Pringheins Jahrb., Bd. XVI, 1885, p. 647-649). — Heimerl, Sitzungsber. der Wiener Akad. der Wissensch., Bd. XCIHI, 1886, p. 232-246 et Denkschriflen der Wiener Akud. der Wissensch., Bd. LIL, 1887, p. 62-78. (49) Solereder, Beitr. zur vergl. Anat.der Aristolochiaceen (Engler's Jahrb., Bd. X, H. 4, 1889, p. 410-524). 394 A. PRUNET. Euphorbiacées (50) : Mercurialis annua, M. perennis, Eu- phorbia cyathifera, Ricinus communis. — Urticées (51) : Bœhmeria spicata. — Pipéracées (52) : Piper blandum. — Saururées (53) : Houttuynia cordata. — U/macées (54) : Ul- mus americana. — Morées (55): Morus mullicaulis, Ficus carica. — Salicinées (56) : Populus balsamifera, Salix alba. — Corylacées (57): Corylus Avellana. — Cupulifères (58) : Caslanea vesca, Quercus Robur, Q. Iex. — Juglandées : Ju- glans olivæformis (4). RÉSUMÉ. I. Faisceaur foliaires. — Les faisceaux s’accroissent en général dans le sens tangentiel et se réduisent dans le sens (50) Pax, Anat. der Euphorbiaceen (Engler's Jahrb., Bd.:V, 1884, p. 384). (51) Weddell, Monographie de la famille des Urticacées (Ann. des sc. nat., 3e série, XVII, p. 197 et 4° sér., FL, p. 174 et surtout in Archives du Muséum, IX, 1856). — Fugairon, Recherches anut. sur le groupe des Urticinées, Toulouse, 1879. — A. Gravis, Recherches anat. sur les org. végét. de l'Urtica dioïca, Bruxelles, 1885. (52) Moldenhawer, Beitr. zur Anat. der Pflanzen, p. 5. — E. Meyer, De Houttuynia et Saurureis, 1827. — Unger, Ueber Bau und Wachsthuin der Diko- tyl.-Stammes, p. 68 et suiv.— G. de Candolle, Mémoire sur la familleides Pipé- racées (Mém. de la Soc. phys. de Genève, t. XVIII). — E. Schmitz, Das Fibro- vasalsystem der Piperaceen (Inaug. Dissert., Essen, 1871). — J. Weiss, Wachs- thumverhalten der Piperaceen (Flora, 1876). —F.-G.Debray, Étude comparatuwe des caractères anatomiques et du parcours des fuisc. fibro-vascul. des Pipéracées, 1885. (53) De Bary, Vergl. Anat., p. 225, 436, 438. — E. Meyer, loc. cit. (54) Engler, Die natürlich. Pflanzenfamilien, Theil HIT, Abth. I, p. 60. (55) Trécul, Mém. sur la famille des Artocarpées (Ann. des sc. nat., 3° sér., XII, p. 38). — De Bary, Vergl. Anat., p. 485, 494, 496. (56) Pax, in Nalürlichen Pflanzenfamilien de Engler et Prantl, Lief 14, p. 30. (57) H. Schacht, Beitr. zur Anat. und Physiol., p. #3-50. (58) H. Schacht, loc. cit., p. 33-43. — A. Frank, Bot. Zeit., 1864, p. 377. — Abromeit (Ueber die Anat. des Eichenholzes (Pringsheim’s Jahrb., Bd. XV, p. 209-282). (a) Voir en outre pour un très grand nombre de familles : De Bary, Vergleichende Anatomie. — Vesque, Mémoire sur l'anatomie com- parée de l'écorce (Ann. des se. nat. botan., 6° sér., t. Il, p. 192). — J. Moeller, Anatomie der Baumrinden. — O. Petersen, Ueber das Auftreten bicollateraler Gefässbündel in verschied. Pflanzenfamilien (Engler’'s Jahrb., Bd. II, 1882, p. 382). — Hérail, Recherches sur lanat. de la tige des Dicotylédones (Ann. des se. nat., 1° sér., t. IL, 4885). — Morot, Recherches sur le Péricycle (Ann. des se. nut., 6° sér. t. XX, p. 271). — H. Solereder, Ueber den syst. Wert der Holzstructur bei den Dikotyledonen (lnaug. Dissert., München 1885). NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 325 radial (Periploca, Ruellia, Eucalyptus, ete.); ce n'est que par exception qu'ils s’accroissent radialement el se réduisent plus ou moins dans le sens tangentiel (Clematis, etc.). Les vaisseaux diminuent de calibre et deviennent plus nom- breux ; ils sont tous à fond mince, c’est-à-dire annelés et spi- ralés ou très rarement scalariformes, au moins pendant leur trajet à travers l'écorce. Ces modifications de l'appareil vas- culaire foliaire portent surtoutsur les grands vaisseaux ponc- lués ou rayés de la partie moyenne ou externe des faisceaux ; les vaisseaux les plus voisins de la moelle, déjà de faible ca- libre et pour la plupart annelés ou spiralés, ne présentent soit dans leur taille soit dans leur nombre que des modifications beaucoup moins sensibles. [l en résulte que, dans la plupart des cas, les vaisseaux les plus larges s’observent non plus à la partie externe des faisceaux, mais au voisinage de la moelle (Vitis, Eucalyptus, etc.). Les vaisseaux se disposent en gé- néral en files radiales régulières ( Vitis, Eucalyptus); ce n’est que par exception qu'ils se présentent sans aucun ordre (Aco- nilum, Clematis, etc.). Les éléments de soutien des faisceaux {fibres ligneuses, parenchyme ligneux) disparaissent d’une façon complète et sont remplacés par du parenchyme mou. La différencialion des faisceaux foliaires commence en général à devenir ap- parente dès la base ou le milieu de l’entre-nœud (Vitis, CLe- matis, etc.), cu même à l’entre-nœud précédent (Po/ygalu cordifolia, Echium hfrons, etc.); elle augmente rapidement dès la base du nœud et devient maximum pendant le trajet du faisceau à travers l’écorce. Dans le pétiolé, les faisceaux foliaires présentent comme un retour vers leur structure première : les vaisseaux en général deviennent moins nombreux et augmentent de cali- bre (Periploca, Clemalis, elc.); les vaisseaux ponctués et rayés reparaissent fréquemment ainsi que les éléments de soutien des faisceaux (Vitis, Clematis, Acer, Menisper- num, elc,). Le tableau suivant fait connaître dans un certain nombre 326 A. PRUNET. d'espèces la section lotale de l'appareil conducteur foliaire dans l’entre-nœud, le nœud et la partie moyenne du pétiole, cette section étant représentée par 100 dans l’entre-nœud (1). Entre-nœud. Nœud. Pétiole. Vitis viniféra. Eee SN 100 62 98 Sambhucus nivra.s. fev srruelne 100 18 102 Fraxinus excelsior............... 100 80 108 Ligustrum japonicum............ 100 75 96 Melia: arguttass. nus 100 76 99 Physalis peruviana.............. 100 80 193 On voit donc qu’au moins dans un cerlain nombre de plantes, la capacité lotale de l'appareil vasculaire foliaire présente un minimum au nœud. Lorsque les faisceaux foliaires sont accompagnés dans l’entre-nœud d’un are scléreux péricyelique, cet arc persiste quelquefois au nœud (Clematis) mais il disparaît le plus souvent el alors il peut être remplacé par du parenchyme mou (Physalis, Vitis, etc.), ou par du collenchyme (Magno- lia, etc.) LE. Tissus propres de la tige. — 1° Ecorce. — Les cellules épidermiques accroissent en général leurs dimensions {rans- versales (Clematis, Thalictrum, Saponaria, Polygonum, etc.) Le parenchyme cortical s’épaissit notablement; cet épais- sissement est dû à la dilatation transversale de ses éléments autant et même plus qu’à leur multiplication. Les dimensions longitudinales des cellules corticales se réduisent notable- ment ou tout au moins ne s’accroissent pas. Les diverses modifications soit de l’épiderme, soil du pa- renchyme cortical, dont je viens de parler, sont particulière- ment accenluées ou parfois même limitées au voisinage de la feuille. D'une façon générale, le collenchyme est plus abondant que dans l'entre-nœud (Vifis, Ruellia, Mirabilis, Orybaphus, Geranium, Saponaria, etc.). Il prend dans les nœuds d’au- (4) J'ai dessiné à la chambre claire sur du papier quadrillé au millimètre la section des vaisseaux foliaires dans chacune de ces régions et j'ai ensuite calculé la surface totale des sections vasculaires, NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. DA tant plus d'importance que les éléments scléreux soit du bois, soit du péricycle deviennent plus rares; c’est-à-dire que le collenchyme tend à remplacer dans les nœuds le scléren- chyme comme tissu mécanique. Dans la règle, les cellules de l'écorce de la tige les plus voisines de la base de la feuille deviennent collenchymateu- ses, en même temps que leur calibre seréduit; ces modifica- tions s’observent lout au moins vers l'angle interne du pé- tiole. Ce tissu contribue à fixer la feuille et à lui permettre de se maintenir plus ou moins dressée par rapport à l'axe. Dans certains cas, très rares d’ailleurs, le parenchyme mou, très accru, du nœud, peut être renforcé non par du collenchyme, mais par de grandes cellules seléreuses à parois richement ponctuées (Æucalyptus obliqua, Salvia involu- crala). Lorsque le périderme est profond (Leptodermis, Loni- cera, elc.), il s’interrompt au nœud pour laisser passer les traces foliaires ; il en résulte que l'écorce primaire peut con- üinuer à vivre dans la région nodale. Après la chute des feuilles, le périderme devient absolument continu et l'écorce primaire se dessèche comme dans l’entre-nœud. 2 Cylindre central. — Les fibres péricycliques disparais- sent fréquemment d'une façon plus ou moins complète {Vitis, Physals, etc.); lorsqu'elles persistent, leur calibre, en général, s'accroît et leurs parois s’amincissent; ces chan- gements devenant apparents soit dans toute l'étendue du péricycle (Aconitum, etc.), soit seulement au voisinage des faisceaux foliaires (Capparis spinosa, elc.). Lorsque le péricyele forme un anneau seléreux continu dans l’entre- nœud, cet anneau devient souvent discontinu dans le nœud (Clematis lubulosa, Thalictrum minus, etc.). Lorsque les fibres péricycliques disparaissent, soit parliellement, soit totalement, elles peuvent être remplacées soit par du paren- chyme mou (Physalis, ete.), soit par du collenchyme (Aris- tolochia Clematitis, ete.). Le liber ne présente pas de particularité bien intéressante 328 A PRUNET. à signaler. Dans le bois, la proportion des petits vaisseaux augmente en général, cette mulliplication portant surtout sur les vaisseaux annelés et spiralés de la partie interne des faisceaux; par contre, la proportion des grands vaisseaux diminue ordinairement (Vitis, Ruellia, Pelargonium, elc.). Dans beaucoup de cas, la réduction du nombre des grands vaisseaux n'est pas compensée par la multiplication des petits et il en résulte alors que la capacité totale de l'appareil vas- culaire caulinaire présente un minimum au nœud, soit au niveau de l'insertion foliaire (Campanu/a, elc.), soil un peu au-dessus (Vits, Ruellia, Mercurialis, etc.). La méthode de mensuralion déjà employée pour les vaisseaux foliaires m'a fourni les résultats suivants : Entre-nœud. Nœud. NIUSAVIDHO PA Ne UR R eee 100 T5 Ruella varians. ss M2 ie ete 100 60 Oxybaphus nyctagineus................. 100 70 Aristolochia Clematitis.................. 100 82 Euphorbia'Cyathyfera...:.:47 Ni 100 85 Geranium sanguineum.................. 100 76 Impatiens longicornu,..:.:......2:..:. 100 70 Pelargonium viscosissimum............. 100 80 Une exception remarquable est présentée sous ce rapport par les plantes pourvues de feuilles à gaine très développée (Ombellifères, Polygonées, etc.); dans les nœuds de ces plantes, en effet, la multiplication des vaisseaux est telle que la seclion lotale de l'appareil conducteur caulinaire aug- mente considérablement. Voici quelques exemples : Entre-nœud. Nœud. SUN SISAEUM re ce ete Aorene ct es 100 530 Polygonum cymosuru.................. 100 350 Houftuyniacordata 2.1/2 NT. 100 380 OEnanthe pimpinelloides............... 100 270 SESCHMONTANUM ES ent ere 100 280 Fœniculum officinale .:.::........... 100 390 Il est à remarquer que la réduction de la capacité lotale de l'appareil conducteur caulinaire est surtout marquée dans les cas où le maximum de différenciation des tissus nodaux s’observe au-dessus de l'insertion foliaire. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 329 Les éléments de soutien du bois disparaissent en général, soit à peu près complèlement(Vitis, Physalis, Canarina, ele.), soit seulement vers le centre el sur une étendue plus ou moins grande (Periploca, Aconitum, Euphorbia cyathy- fera, etc.). Par exception, les éléments de soutien peuvent se multiplier en mème lemps que les vaisseaux (Sium Sisa- rum, Œnanthe, elc.). Les rayons médullaires se multiplient fréquemment sur- tout au voisinage des faisceaux foliaires sortants. En général ils s’élargissent, soit par simple dilatation de leurs éléments (Thalictrum minus, etc.), soit à la fois par dilatation et mul- lüiplication {Vés, etc.); dans certains cas ils perdent toute lignification et leurs éléments sont alors formés soit de parenchyme (Vitis, Ruellia, ete.), soit de collenchyme (Oxry- baphus, etc.). Les rayons médullaires foliaires ont en général leurs éléments très allongés dans le sens radial, c'est-à-dire dans la direction du faisceau sortant el beaucoup plus réduits soit dans le sens langentiel, soit dans le sens axial ; les parois de ces éléments peuvent être formées de cellulose (Vitis, Tilia, elc.), ou ètre lignifiées (Cornus, Cercis, elc.); dans ce dernier cas elles sont richement ponctuées. La moelle augmente fréquemment de volume { Vitis, Juel- la, elc.), mais cet accroissement est d’une façon générale moindre que celui de l'écorce; il résulte en général beau- coup plus de la multiplication des cellules médullaires que de leur dilatation transversale. D'une façon générale, les di- mensions axiales des cellules médullaires se réduisent; d’une façon générale aussi, leurs parois sont plus richement ponc- luées que dans l'entre-nœud. Dans quelques cas, la moelle, cellulosique à l’entre-nœud, devient ligneuse au nœud (V:- tis, elc.), où bien, dans quelques cas aussi, elle éprouve la modification inverse (Sium, Thalictrum, elc.); mais en géné- ral la nalure de ses éléments reste la même. Enfin, dans quelques plantes, il peut exister dans la moelle au niveau de l'insertion foliaire, une sorte de plancher vasculaire transver- sal en rapport à la fois avec les faisceaux caulinaires et avec 330 A. PÆUNET. les faisceaux foliaires {Thalictrum minus, Canarina Campa- nulata, etc.). Dans le tableau qui suit, j'ai indiqué pour quelques plantes les dimensions respectives des diverses parties de la tige dans les nœuds; ces dimensions étant calculées en repré- sentant par 100 celles des mêmes parties de l’entre-nœud. Écorce. Bois, Moelle. Ruelltavarians er etant 165 45 110 Vitis vinifera si une ete 370 90 190 Périploca græca..:..26. 20... 325 100 123 Mercurialis perennis........... 250 90 123 Fuchsia globosa............... 290 100 150 Decumaria barbara ............ 515 100 122 (1) On voit donc que d’une facon générale les tissus nodaux sont caractérisés par l'extension des tissus parenchymateux, écorce, moelle et rayons médullaires, dont les éléments réduisent leurs dimensions longitudinales et accroissent au contraire plus ou moins leurs dimensions transversales; par une augmentation dans la proportion des vaisseaux de petit calibre à fond mince et par une diminulion dans celle des grands vaisseaux à fond épaissi; enfin par une réduction des éléments lignifiés non vasculaires et par une tendance du collenchyme à se substituer au sclérenchyme comme lissu mécanique. Toutes ces particularités doivent avoir pour résultat de faciliter les mouvements des liquides entre l'axe et ses appendices. Le maximum de différenciation des issus nodaux se trouve en général au niveau de l'inserlion foliaire (Physalis, Sium, Robinia, etc.); mais il peut aussi dans certains cas se trouver au-dessus (Vés, Mercu- rialis, etc.). Dans un grand nombre de cas, la différenciation s'élend de part et d'autre de l'insertion foliaire (PAysalis, Vihs, elc.); dans un grand nombre de cas aussi elle est limilée à la partie inférieure et à la partie moyenne du nœud (ÆRobinia, Ulmus, etc.); très rarement elle est bornée (1) Pour les Ruellia varians, Vilis vinifera et Mercurialis perennis, les mesures ont été prises à la partie supérieure du nœud; pour les autres plantes, à la partie moyenne. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 331 à la partie moyenne et à la partie supérieure du nœud (Ye- nispermum, Dillenia, ete.). L'accroissement des tissus parenchymateux et en parli- culier de l'écorce augmente évidemment la proportion des éléments actifs et il en est de même de la substitution du parenchyme mou aux éléments de soutien des faisceaux. Toutefois les cellules corlicales à peu près incolores qui avoisinent les faisceaux foliaires sortants paraissent êlre surtout riches en eau. L'amidon est plus abondant dans les nœuds que dans les entre-nœuds, en particulier au voisinage des faisceaux foliaires; il en est de même des organes d’excrétion, poches à gomme, canaux sécréleurs, etc.; il en est de même aussi des cristaux d’oxalate de chaux. Ces der- niers sont surtout nombreux au niveau de l'insertion foliaire, même dans les cas où le maximum de différenciation des tissus nodaux se trouve dans une autre partie du nœud (Po/y- gonum. tinctorium, etc.) Comme je l'ai déjà fait remarquer au commencement de ce travail, les nœuds étudiés ont été pris parmi les plus jeunes nœuds adultes dont les entre-nœuds correspondants, c’est-à-dire immédiatement inférieurs, avaient cessé de s’ac- croître en longueur. Les nœuds placés au-dessous, surtout ceux de la base des rameaux sont en général moins différen- ciés. La différenciation anatomique des nœuds est. donc maxi- mum vers le sommet où la partie moyenne de rameaux et diminue ensuite graduellement vers la base où elle peut même devenir très faible dans les nœuds qui re portent que des feuilles rudimentaires. Les axes à fruits (Pirus, Sorbus, Malus, etc.), qui ont des entre-nœuds presque nuls, présentent dans toute leur éten- due la structure nodale. 2° NŒUDS DES TIGES SOUTERRAINES. Les tiges souterraines sont pourvues de feuilles rudimen- taires dont la transpiration est faible ou nulle. Si les di- verses modifications que présente la structure des tiges 9342 A. PRUNET. aériennes dans la région nodale ont quelque rapport avec la transpiralion qui s'exerce par les feuilles, ces modifica- tions doivent être singulièrement atténuées dans les nœuds des tiges souterraines dont les feuilles se réduisent à des écailles à transpiration faible ou nulle. L'étude comparative des nœuds et entre-nœuds aériens et souterrains d’une même plante montre en effet que la dif- férenciation des nœuds souterrains est toujours très faible, toujours moindre que celle des nœuds aériens de la base même de la tige ou des rameaux. Pour ne pas étendre ce travail outre mesure, je ne décri- rai qu’un pelit nombre d'exemples. Vitis vinifera. — Comme objet d'étude, j'ai pris, en juin dernier, une pousse issue des parties souterraines d’un vieux pied. Écorce. — À l’entre-nœud, l'écorce présente au-dessous de l’épiderme quelques assises de collenchyme à parois minces, puis du parenchyme mou à méats assez réduits. Dans les diverses parties du nœud on lui trouve sensiblement la même structure, son épaisseur ne varie guère et ses éléments. conservent à peu près la même taille et leurs parois la même épaisseur. On sait que dans les nœuds aériens, aw contraire, l'épaisseur de l'écorce, la taille et la nature de ses. éléments présentent des différences extrêmement sensibles; on voit en particulier le collenchyme acquérir dans la partie: supérieure du nœud un développement considérable. Péricycle. — Les fibres péricycliques se retrouvent dans les diverses parlies du nœud; on sait que dans les nœuds aériens elles perdent leur lignification à la parlie supérieure du nœud. A la partie supérieure des nœuds souterrains, ces fibres cependant sont moins nombreuses que dans l’entre- nœud. Anneau libéro-ligneux. — Les modifications que présente, dans les nœuds aériens, le bois des faisceaux sont ici extrê- mement atténuées; les vaisseaux annelés et spiralés ne sont guère plus nombreux qu’à l’entre-nœud et le parenchyme NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 399 mou ne remplace pas complètement à la partie supérieure du nœud les éléments de soutien du bois. On sait qu'à la partie supérieure des nœuds aériens, au contraire, cette substitution est complète. Moelle. — La moelle re se lignifie pas dans la partie moyenne du nœud comme cela a lieu dans les tiges aé- riennes. Elle s’épaissit un peu cependant el ses éléments éprouvent les variations de taille que nous avons observées dans les nœuds aériens, mais ces changements sont de moindre valeur. Quant aux faisceaux foliaires, ils sont en même nombre que dans la tige aérienne, mais dans leur lrajet à travers l'écorce ils ne présentent que quelques petits vaisseaux el sont accompagnés d’un petit arc péricyclique lignifié : ils ne se modifient pas sensiblement en passant dans l’écaille qui représente une feuille rudimentaire. On sait qu'au contraire les faisceaux foliaires des vraies feuilles perdent, en traver- sant l'écorce, l'arc scléreux péricyclique qui les coiffe en dehors dans l’entre-næœud, et éprouvent des modifications considérables dès leur entrée dans le pétiole. Aristolochia Clematitis. — Comme objet d'étude, j'ai pris, en juin dernier, une pousse vigoureuse ayant 0,50 de lon- gueur au-dessus du sol. On sait que les parlies souterraines des pousses de cette plante portent au lieu de vraies feuilles des écailles foliaires engainantes dont la taille décroît à mesure qu'elles s’éloi- gnent de la surface du sol; parmi ces écailles, les plus voi- sines de la surface sont verdâtres, les suivantes sont jau- nâtres. Prenons un nœud portant une de ces dernières et comparons sa structure à celle de l’entre-nœud sous-jacent. Écorce. — L'écorce est plus épaisse qu'à l’entre-nœud, mais en grande partie par mulliplication de ses éléments. Cette écorce, presque entièrement collenchymateuse dans les nœuds aériens, est ici formée de parenchyme mou. Cylindre central. — Péricycle. — Nous savons que dans la partie aérienne de la tige, l'anneau scléreux péricyclique de 334 A. PRUNE. l'entre-nœud devient collenchymateux dans la région supé- rieure du nœud, ici le péricycle n’éprouve aucune modifi- calion. Anneau bhéro-ligneux. — Le bois des faisceaux conserve sensiblement la même structure. Dans la tige aérienne, au contraire, les éléments de soutien du bois disparaissent à peu près complètement, du moins dans la parlie supé- rieure du nœud. Moelle. — La moelle augmente un peu de volume comme dans les nœuds aériens. Les faisceaux foliaires sont réduits, comme dans la vigne, à quelques très pelits vaisseaux accompagnés d'un arc sclé- reux péricyclique assez volumineux. Si nous examinons maintenant un nœud pris sur un rhi- zome à marche horizontale, entièrement souterraine, nous pourrons constater que l'accroissement des tissus paren- chymateux que nous avions observé dans le nœud précédent devient à peu près nul. Nous pourrions faire dans les tiges souterraines du Saponaria officinalis et du Aubia linctorum des observalions analogues à celles que je viens de signaler dans l’Aristoloche. Dans le C/erodendron Bungei et le Cornus allernifolia, 1 est bien difficile de trouver une diffé- rence de structure entre les nœuds et les entre-nœuds souterrains. Les nœuds aériens sont au contraire très diffé- renciés. Dans le Spiræa Lindleyana et le Æhus copallinum la diffé- renciation des nœuds aériens est assez sensible; elle est très faible dans les nœuds souterrains. Dans le Polygonum cymosum et le Physostegia imbricata, les entre-nœuds aériens sont fistuleux, les entre-nœuds souterrains, au contraire, sont pleins comme les nœuds. Il y a déjà là évidemment une atténuation dans les différences de structure de ces nœuds et de ces entre-nœuds. D'ailleurs les autres caractères différentiels des nœuds aériens, loul en se retrouvant dans les nœuds souterrains, y sont notablement amoindris. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 399 RÉSUMÉ. Il semble résulter de cette élude que dans les nœuds sou- terrains la différencialion est faible ou nulle. On n’y observe pas en particulier cette augmentalion de volume souvent si considérable des tissus parenchymateux, celte réduction de la lignificalion, cet accroissement des tissus collenchy- mateux que nous avons observés en général dans les nœuds aériens. Enfin les faisceaux qui se rendent aux écailles sont absolument rudimentaires et ne présentent pas ces modi- fications si remarquables de structure que l’on {rouve dans les faisceaux qui se rendent aux feuilles aériennes. 3° NŒUDS COTYLÉDONAIRES. [. Cotylédons épigés. Espèces étudiées : Phaseolus vulgaris, Prunus domestica, Eucalyptus globulus, Bicinus communis, Cucurbita Pepo, Borrago officinalis, Sinapis nigra, Acer campestris, Faqus sil- valica. Les faisceaux qui se rendent aux cotylédons présentent les mêmes modifications générales que ceux qui se rendent aux vraies feuilles. Dans les nœuds cotylédonaires les modifications des tissus propres de la tige sont moins marquées que dans les nœuds foliaires. IL. Cotylédons hypogés. Espèces étudiées : Quercus Cerris, Eriobotrya japonica, Vicia Faba, Pisum satioum, Castanea vesca. La différenciation des faisceaux cotylédonaires et des üissus propres de la tige est extrêmement faible ou nulle. 4° NŒUDS PORTANT DES AXES FLORAUX EL): J'ai éludié uniquement les cas dans lesquels les axes (4) Laborie, Recherches sur l'anatomie des axes floraux, Toulouse, 1888; Trautwein, Ueber Anatomie einjähriger Zweige und Blüthenstandaxæen (Inaug. Dissert., Halle, 1885); Nanke, Vergl. anatom. Untersüch. über den Bau von 336 A. PRUNE. floraux se terminaient immédiatement ou presque immédia- tement par une fleur. C’est dire que J'ai laissé de côté les inflorescences telles que celles du Lilas, de la Vigne, du Sureau, etc. Voici les principaux résultats de mes observa- tions qui portent sur une trentaine d'espèces. On n’observe en général à la base des axes floraux qu’un accroissement peu sensible des tissus parenchymateux du aœud (1). Les axes floraux du Prunier, du Cerisier et de quelques autres arbres à fruit charnu font cependant excep- tion : l'écorce de l'axe s’épaissit très notablement au voisi- nage de leur point d'insertion. Jusqu'à l'épanouissement de la fleur, le bois des faisceaux est formé dans la règle de quelques vaisseaux annelés et rayés accompagnés de parenchyme mou; ces vaisseaux de très faible calibre sont réunis d'ordinaire en petits amas plus ou moins irréguliers, et non en files radiales disposées en éventail comme cela arrive le plus souvent pour les vais- seaux qui se rendent aux feuilles. Leurs parois sont aussi plus épaisses que celles des vaisseaux foliaires, enfin ils sont formés d'articles beaucoup plus courts. Après la floraison, sauf dans des cas rares (Canarina Cam- panula, Geranium sanquineum. etc.), des éléments de soutien apparaissent au nœud à la base des pédicelles; ces éléments de soutien peuvent même être très abondants lorsque ïes pédicelles supportent soit certains fruits secs dressés comme dans la Giroflée, soit des fruits charnus de poids relative- ment considérable (Prunus, Persica, Armeniaca, etc.). Mais, même dans ces derniers cas, les fibres ligneuses et le paren- chyme ligneux sont moins abondants que plus loin dans le pédicelle ; au voisinage des vaisseaux, au moins des plus in- ternes, on rencontre toujours du parenchyme mou, ces diverses particularités, sans être comparables à celles qu'on Blüthenstand. vegetativen-Achsen, dikotyler, Holzpflanzen (Inaug. Dissert., Kœnigsberg, 1886); Besser, Beiträge zur Entwicklungsgeschichte und verglei- chende Anatomie von Blüthen und Fruchtstielen (Inaug. Dissert., Leipzig, 1886). (1) Abstraction faite, bien entendu, de l'accroissement que l’on observe normalement dans les nœuds ne portant que des feuilles. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 337 observe à la base des feuilles, sont cependant de nature à faciliter les mouvements des liquides entre l’axe et les fleurs ou les fruits. Ces mouvements doivent en effet présenter une certaine intensilé, afin que les fleurs puissent réparer les pertes occasionnées par la {transpiration dont elles sont le siège, el aussi afin que l’eau si nécessaire aux migrations el aux transformations des principes immédiats abonde plus tard dans les organes reproducteurs au moment de la for mation des fruits et des graines. 9° NŒUDS PORTANT DES RAMEAUX FEUILLÉS. Les bourgeons formés sur la lige ou sur les rameaux recoivent, on le sait, un certain nombre de faisceaux dont. les relations avec les traces foliaires sont bien connues, em particulier depuis les travaux de Nägeli (1), Hanstein (2), Frank(3), ete. Il m'a paru intéressant de voir si ces faisceaux ne présentent pas, en passant dans le bourgeon, des varia- lions de structure. Dautre part, j'ai cherché aussi à savoir si certaines des modifications de la tige aux nœuds ne sont pas amenées par la présence des bourgeons. Enfin j'ai étudié également la structure des tissus qui vont quitter l’axe pour passer dans l’une de ses ramificalions ; je me contenterai d’ailleurs de faire connaître les résullats généraux de mes observations. I. Nœuds portant des bourgeons. — L'écorce de l'axe s'épaissit notablement au voisinage des bourgeons; ses élé- ments y sont plus riches en protoplasma, plus riches aussi en matières de réserve; les cellules eristalligènes y sont en général plus abondantes (Corylus, Populus, ele.). Le large rayon médullaire laissé libre par le départ des traces foliaires établit d’ailleurs une communication facile entre la base du bourgeon et la moelle de l'axe. Le fais- (1) Nägeli, Zeitschrift für wissenschaftliche Botanik, Heft TIL et IV, p. 129; Beitr. für wissenschaft. Botanik, Bd. 1. (2) Hanstein, Jahrb. für wissenschaft. Botan., Bd. T, p. 233, (3) Frank, Bot. Zeit., 1864, p. 154 et 382. ANN. SC. NAT. BOT. XIII, 22 338 A. PRUNET. ceau foliaire qui aboutissait à la base de ce rayon médul- laire n’en persistant pas moins après la chute des feuilles, on comprend que le printemps venu, ce faisceau pourra amener vers la base du bourgeon une quantité d’eau assez grande pour en faciliter dans une sensible mesure le déve- loppement. D'ailleurs, les réserves accumulées, nous l'avons vu, dans le rayon médullaire foliaire, en rendront aussi le développement plus facile. D'une façon générale, le bois des faisceaux gemmaires en approchant du bourgeon perd peu à peu ses éléments de soulien et finalement ne fournit au bourgeon que quelques vaisseaux annelés et spiralés. D'une façon générale aussi, le liber des faisceaux gemmaires ne fournit pas au bourgeon de tubes criblés. Dans quelques cas cependant, dans la Vigne par exemple, les faisceaux gemmaires au moment où ils vont pénétrer dans le bourgeon ont encore des éléments de soulien, mais seulement dans la partie extérieure, non vas- culaire des faisceaux; les vaisseaux, sous annelés et spi- ralés et cantonnés dans la partie interne des faisceaux, sont accompagnés de parenchyme mou. Enfin dans des cas plus rares encore, dans le Hêtre par exemple, les faisceaux gem- maires au moment de passer dans le bourgeon ont la même constitution générale que les faisceaux de l'axe, à cette différence près que les grands vaisseaux secondaires sont absents. L'absence à peu près générale de tubes criblés dans les tissus vasculaires qui se rendent au bourgeon parait surpre- aante, étant donné le rèle que l’on attribue à ces éléments. Si les tubes criblés en effet se rendent des lieux de produc- tion aux lieux de consommation, on devrait les trouver à la base des bourgeons. D'ailleurs j'ai observé que dans tous les cas les premiers éléments vasculaires qui sont fournis au bourgeon, au moment de son développement, par l'assise génératrice, sont, non des tubes criblés, mais des vaisseaux du bois annelés et spiralés. Ces observations confirment en les étendant celles de NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 339 M. A. Fischer (1) qui, cherchant les tubes criblés dans une pousse de Cucurbita en partant du sommet végétatif, ne les atrouvés qu'à partir du troisième entre-nœud, de M. Blass (2) qui n'a trouvé pareillement les tubes criblés qu'à partir du troisième entre-nœud dans le Syringa et du deuxième dans le Tilia, le Quercus, le Fraxinus et le Betula. Ces résultats sont peut-être de nature à restreindre le rôle des tubes criblés dans le transport des matières plas- tiques. En tout cas l'apparition des vaisseaux du bois avant celle de tout autre élément vasculaire montre combien est considérable le rôle de l’eau dans les phénomènes de crois- sance. D'ailleurs, si l'on se rappelle que les éléments cellu- laires voisins de la base du bourgeon sont riches en subs- tances plastiques et que les premiers vaisseaux gemmaires sont annelés et spiralés et par suite très propres à la diffu- sion des liquides, on comprendra que l’eau fillrant abon- damment à travers les parois des vaisseaux activera Îles transformations et les migrations des principes immédiats contenus dans ces éléments cellulaires. Cette circonstance permettra sans doule un développement assez rapide des bourgeons, en attendant que des tubes criblés viennent leur amener des matières plastiques pour remplacer celles qui ont été consommées. IL. Nœuds portant des rameaux. — Voici les divers types que j'ai rencontrés : Canarina Campanula. — Les faisceaux qui se rendent aux rameaux présentent au nœud des modifications ana- logues à celles que nous avons observées dans les fais- ceaux foliaires, mais cependant un peu moins profondes. Ces faisceaux perdent leurs éléments de soutien comme les faisceaux foliaires; leurs vaisseaux, plus petits, sont presque lous annelés et spiralés. Dans les parties voisines (1) A. Fischer, Studien über die Siebrôhren der Dicotylenblätter, Leipzig, or Blass, Untersüchungen über die physiologische Bedeutung des Siebtheils der Gefässbündel (Berichte der deutsch. botan. Gesellschaft, Bd. VIIL, Heft I, p. 57, 1890). 340 A. PRUNEX. du rameau, l'écorce est plus épaisse qu'à l’entre-nœud et le collenchyme y est plus développé. Les rameaux présen- tent à leur base un renflement dans lequel les divers Lissus et en particulier les faisceaux conservent la même structure que dans le nœud de l’axe qui les porte. Ce renflement a en somme la structure d’un nœud, quoiqu'il ne porte pas de feuilles. Au-delà du renflement basilaire, le rameau prend une structure analogue à celle d’un entre-nœud ordinaire, c'est-à-dire que les éléments de soutien reparaissent et avec eux les grands vaisseaux rayés ou ponctués, et que le collen- chyme diminue beaucoup d'importance dans l'écorce. Ces diverses particularités ne sont pas exclusives aux rameaux très jeunes; je les ai observées à la base de rameaux de 50 centimètres de long, les plus grands que j'ai eus d’al- leurs à ma disposition. Le (reranium sanquineum appartient au même type. Vülis indivisa. — Aci les faisceaux conservent la plus grande partie de leurs éléments de soutien même dans les rameaux Jeunes; mais dans ceux-ci, toutefois, les vaisseaux annelés et spiralés du centre sont plus nombreux et le pa- renchyme intra-ligneux qui les accompagne plus abondant ; les faisceaux conservent les arcs péricycliques qui les coif- fent en dehors. Le rameau présente à sa base un renfle-. ment qui a la structure d’un nœud, c’est-à-dire que là, dans les rameaux jeunes, les faisceaux perdent tous les éléments: de soulien qu'ils avaient conservés en traversant le nœud de l'axe-mère ; les arcs péricycliques adossés à leur liber per- dent aussi leur lignificalion. On le voit, le Vifis indivisa se rapproche du Canarina Campanula par l'existence à la base des rameaux d’un renflement à structure de nœud, mais en diffère par la per- sistance, au nœud de l’axe-mère, des éléments de soutien des faisceaux destinés aux rameaux. La structure nodale du ren- flement basilaire du Vis s'explique par l'existence à sa base sinon de vraies feuilles, du moins d’écailles gemmaires. A ce Lype appartiennent le Vitis vinifera, le Cissus orien- NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 341 talis, V'Amperopsis quinguefolia, le Libonia floribunda, le PBarleria cristata, etc. Genista ramosissima. — 1° Rameau ayant 1°,5 de lon- .queur et portant 3 feuilles. —ÆEn traversant l'écorce du nœud, les faisceaux perdent la presque totalité de leurs éléments de soutien, qui sont remplacés par du parenchyme mou; les ‘éléments de soutien reparaissent dès la base du rameau; au nœud, les vaisseaux sont presque tous annelés ou spi- ralés. 2° Rameau de 8 centimètres portant quatorze feuilles. — Au nœud, la proportion des petits vaisseaux à fond mince est plus considérable que plus bas et que dans le rameau lui- même; du parenchyme mou se substitue à une partie des éléments de soutien. 3° Rameau d'un an, lui-même ramifié. — Le parenchyme mou ne se retrouve qu'en très faible quantité à la partie la plus interne des faisceaux; les vaisseaux de grand calibre se montrent dans la zone périphérique du bois. Cornus sanguinea. — Les modifications présentées par les faisceaux dans leur passage à travers l'écorce sont analo- gues à celles que je viens de décrire dans le Genista, mais le parenchyme mou disparaît plus tôt. Dans Le Persica vulgaris, au contraire, il persiste plus longtemps. À ces trois types se rattachent la plupart des plantes Dicotylédones (Salix, Corylus, Rosa, Hibiscus, Cerasus, Syringa, Evonymus, etc.). On le voit, nous trouvons encore à la base des rameaux feuillés des particularités de structure qui paraissent propres à faciliter les mouvements des liquides entre ces rameaux et l'axe qui les porte. Ces particularités sont surtout accentuées alors que les rameaux encore très jeunes ont besoin de recevoir en abondance de l’eau et des matières nutritives. Elles s'atténuent en général dans la suite, lorsque les ra- meaux plus volumineux et abondamment pourvus de feuilles possèdent une certaine réserve aqueuse et ne sont plus seu- 349 A. PRUNEZ. lement des lieux de consommation, mais encore des lieux de production des principes immédiats. Il. Nœuds et entre-nœuds de tiges ou de rameaux âgés de plus d’un an. Nous avons vu que dans les tiges ou les rameaux d’un an, les lissus nodaux présentent une différenciation très marquée; il était intéressant de savoir si celle différenciation se pour- suit pendant les années suivantes. D'autre part, il ne m'a pas paru inutile de rechercher les changements qui peuvent survenir après la première année dans les {races foliaires soit des feuilles caduques, soit des feuilles persistantes. Enfin j'ai étudié les modifications qui surviennent avec le lemps dans les rapports des bourgeons dormants avec les lissus de l’axe, el les causes qui amènent soit la persistance, soit le développement, soit la destruction de ces bourgeons. Afin de ne pas allonger démesurément ce travail, je me conlenterai presque loujours de faire connaître les résultats généraux de mes observalions. [. — ÉCORCE. Les couches corticales formées après la première année ont sensiblement la même structure au nœud qu'à l’entre- nœud. IL. — PÉRICYCLE. Les différences que l’on pouvait observer la première année dans la structure des formations péricycliques des nœuds et des entre-nœuds, disparaissent après la chute des feuilles; c'est ainsi que dans les Lonicera, le Leptodermis lanceolata, le périderme forme aux nœuds un cercle complet. TIT. — ANNEAU LIBÉRO-LIGNEUX. Les couches annuelles libéro-ligneuses présentent au nœud la même structure qu’à l'entre-nœud. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 343 IV.— PARENCHYME INTRA-LIGNEUX. Dès la fin de la première année le parenchyme intra- ligneux se lignifie aussi bien aux nœuds que dans les entre- nœuds. Toutefois, il peut persister pendant plusieurs années, principalement aux nœuds, dans quelques arbres à bois tendre el à moelle cellulosique (Tia, Æsculus, ete.). J'en ai encore trouvé au contact des vaisseaux primaires dans un rameau de 7ilia âgé de quinze ans, el chose remarquable, ce paren- chyme, encore très riche en protoplasma, contenait de la chlorophylle. V.— FAISCEAUX LIBÉRO-LIGNEUX DES FEUILLES CADUQUES. D’après M. 0. Markfeldt{1), dans les trois plantes ligneuses Dicotylédones à feuilles caduques suivantes : Magnolia tri- petala, Ficus carica, Quercus sessiliflora, les traces foliaires se déchirent dès l’année suivante au voisinage de l’assise généra- trice. Mes observalions, qui portent sur une centaine d’es- pèces m'ont fourni les mêmes résultats. A la suite de cette rupture, une portion de la trace foliaire reste dans l'écorce et l’autre dans le rayon médullaire fo- liaire. VI.— FEUILLES PERSISTANTES. D’après M. 0. Markfeldt, dansles plantes ligneuses à feuilles persistantes, les traces foliaires subissent, à la suite de l’6- paississement de la tige, une traction parfois suivie de rup- ture partielle {//ex A quifolium) (2). Les rayons médullaires foliaires s’accroissent dans le sens radial, en conservant d’ailleurs les mêmes caractères, à me- sure que lanneau libéro-ligneux augmente d'épaisseur. Par suite les couches annuelles libéro-ligneuses continuent à (1) O. Markfeldt, Ueber das Verhalten der Blattspurstränge immergrüner Pflanzen beim Dickenwachstum des Stammes oder Zweiges (Inaug. Dissert., Breslau, 1885, p. 31-32). (2) O. Markfeldt, loc. cit., p. 21. 344 A. PRUNE. s'interrompre en face des traces foliaires ; la moelle du pé- tiole est ainsi toujours en communication avec celle de J'axe. VIT. — BOURGEONS DORMANTS. On sait que parmi les bourgeons formés la première an- née sur la tige ou les rameaux des plantes ligneuses, il en est toujours un certain nombre qui ne se développent pas l’année suivante. On sait aussi que, d'après Th. Harlig, ces bour- geons sont susceptibles de rester à l’état latent pendant de longues années, jusqu'à ce que des circonstances favorables en amènent le développement. Hartig n’a pas fait de travail sur les bourgeons dormants, mais il a cependant, dans deux de ses ouvrages (1), indiqué les rapports qui, d’après lui, exis- tent entre ces bourgeons et les axes qui les portent. Plus tard M. Hansen (2), reconnaissant que les idées de Harlig sont en somme toutes théoriques, entreprit de les vérifier et il constata simplement d’ailleurs l'existence de bourgeons dormants dans le Symphoricarpus vulyaris, les Gleditschia triacanthos et sinensis. Évidemment il y avait là une lacune à combler. Je me suis d'abord proposé de rechercher l'existence et la répartition des bourgeons dormants dans des espèces ligneuses assez nombreuses el variées, et ensuite d'étudier les rapports des bourgeons dormants avec l’axe qui les porte. Je ne décrirai en détail que les exemples qui me parais- sent représenter des types autour desquels Les autres plantes peuvent venir se grouper. CORNUS SANGUINEA (fig. 15, pl. V). 1° Æépartilion des bourgeons dormants. — On trouve nor- 7 (4) Th. Harüig,fLuft, Boden und Pflanzenkunde, p. 150 et Physiologie der Holzpflanzen, p. 229. (2) Hansen, Untersuchungen über adventivbildungen bei den Pflanzen (4b- handl. der Senkenb. naturf. Gesell., Bd. XIT, p. 147). NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 349 malement à l'aisselle de chaque feuille deux bourgeons su- perposés, le supérieur très saillant, du moins aux nœuds du sommet où du milieu de l’axe, l'inférieur beaucoup moins visible. Si le bourgeon supérieur ne se développe pas en rameau, il périt très souvent dès l’année suivante; l'inférieur au contraire peut continuer à vivre fort longtemps à l’élat latent. Aux nœuds de la base de l’axe, le bourgeon supérieur beaucoup moins apparent peut lui aussi persister à l’état de bourgeon dormant. Dès lors tandis que les nœuds de la partie supérieure et de la partie moyenne de l’axe ne portent ordinairement qu'un seul bourgeon dormant, on en trouve le plus souvent deux aux nœuds inférieurs. Ce n’est pas seulement à l’aisselle des feuilles normales que l’on peut trouver des bourgeons à l’état de vie latente ; on en rencontre aussi d'ordinaire à l’aisselle des feuilles rudi- mentaires de la base des rameaux. Ces bourgeons sont ordi- nairement très petits et l'observation microscopique est souvent nécessaire pour en conslater l'existence. Les entre- nœuds étant très rapprochés à la base de la tige ou des rameaux, on conçoit que les bourgeons latents y seront beau- coup plus nombreux que dans les parties moyenne et supé- rieure de la tige. Mais ces bourgeons dormants axillaires ne sont pas les seuls que l’on puisse rencontrer dans le Cornus. Chaque bourgeon axillaire peut, en effet, être accompagné d’un ou plusieurs bourgeons accessoires, capables de le rem- placer s'il vient à disparaître. Enfin des bourgeons dormants extra-axillaires peuvent apparaître en des points du nœud correspondant à chacune des traces foliaires latérales. I n’y a rien d’absolu soit dans la répartition, soit dans le nombre des bourgeons dormants du Cornouiller; on observe sous ce rapport de nombreuses variations individuelles. Les bourgeons dormants sont surtout nombreux sur les individus fréquemment et fortement taillés. Sur des tiges de trois à sept ans, j'ai pu par une taille énergique amener la forma- tion à chaque nœud de # à 8 bourgeons dormants axil- 346 A. PRUNET. laires au lieu de 1 ou 2 qu'on y rencontre normalement. C’est sur ces tiges que j'ai pu aussi constater l’existence de bourgeons dormants superposés aux traces foliaires laté- rales. Étudions maintenant les rapports des bourgeons dormants avec l'axe qui les porte. 1° Rapports avec l'écorce. — Les bourgeons dormants du Cornus sont parfois visibles à la surface de la tige, mais souvent ils sont enfoncés dans des anfractuosités de l'écorce, qui les entoure ainsi de toutes parts. Les cellules corticales voisines de la base des bourgeons ont des parois plus déli- cales et sont plus riches en protoplasma que les autres cellu- les de l'écorce. D'ailleurs l'écorce s’épaissit sensiblement au niveau de ces bourgeons. 2° Rapports avec le cylindre central. — Les bourgeons axillaires sont à l’origine en communication avec la moelle de l'axe par l'intermédiaire d’un très large rayon médullaire résullant du départ de la trace foliaire correspondante. Lorsqu'un de ces bourgeons se développe en rameau, ce rayon fait communiquer la moelle du rameau avec celle de l'axe; si ces bourgeons ou l’un d’eux reste latent, le rayon n'en persisie pas moins pendant les années suivantes, s’élar- gissant graduellement vers l'extérieur. Ce rayon qu’on pour- rait appeler gemmaire est formé de parenchyme ligneux à cellules assez petites allongées dans le sens radial, réduites dans le sens longitudinal et pourvues de nombreuses ponc- tuations. Chaque trace foliaire latérale laisse aussi après elle un large rayon médullaire, qui deviendra un rayon gemmaire si un bourgeon se forme vers son extrémité. L'accroissement d'un rayon gemmaire résulte de l’activité des cellules de son bord externe contiguës à l'écorce. Cet accroissement est en quelque sorte parallèle à celui de l’an- neau libéro-ligneux. Chaque année, le rayon s’épaissit de telle sorte que sa partie lignifiée dépasse un peu à l'extérieur le contour du bois ; il s'ensuit que si l’on enlève l'écorce el NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 347 le Liber d’un rameau, les rayons gemmaires sont rendus visibles par les petites saillies coniques qu'ils forment à la surface du bois. Les couches annuelles des rayons gem- maires correspondent d’ailleurs sur les bords aux couches annuelles du bois; elles sont rendues distinctes par la légère réduction de calibre que présentent les dernières assises cellulaires formées à la fin de la belle saison. S'il ne s’est pas formé de bourgeons vis-à-vis l'émergence des traces foliaires, ou si les bourgeons existants périssent pour une cause quelconque, le rayon médullaire foliaire, après avoir persisté pendant un nombre variable d'années, se rétrécit peu à peu vers l'extérieur jusqu’à prendre les dimensions d’un rayon médullaire ordinaire, ou bien se résout en un certain nombre de rayons médullaires ordinaires. Le rayon médullaire gemmaire est riche en amidon. Les faisceaux gemmaires sont situés de part et d’autre de la base du rayon gemmaire ; ils ne fournissent d’ailleurs au bourgeon avant son développement que quelques vais- seaux annelés et spiralés. Ces vaisseaux sont les seuls élé- ments qui relient le bourgeon à l'anneau libéro-ligneux de la tige. Les autres éléments du bois et le liber n'appa- raîtront que si le bourgeon s’allonge en un rameau et encore lorsque ce rameau commencera à devenir un peu apparent. Hartig supposait que les bourgeons dormants se forment tous la première année ; il n’en est pas ainsi dans le Cornus, ni d’ailleurs dans la plupart des autres Dicolylédones Hi- gneuses que j'ai étudiées ; il peut en apparaître à tout âge en face des rayons médullaires gemmaires. Ces bourgeons recoivent quelques vaisseaux annelés el spiralés provenant de l’assise génératrice, ce qui permet de déterminer leur âge. Ils peuvent d’ailleurs se développer aussitôt ou demeurer latents. Lorsque plusieurs bourgeons se trouvent ainsi côle à côte, ils peuvent se séparer plus tard à la suile de la croissance intercalaire qui accompagne la 348 A. PRUNE. dilatation de l'écorce et alors le rayon gemmaire primitif se ramifie en autant de rayons secondaires qu'il y a de bourgeons. Cette ramification n’est pas très fréquente dans le Cornouiller, mais on l’observe normalement dans les nœuds âgés du Corylus Avellana, du Cercis Siliquastrum, etc. Les intervalles que laissent entre elles les ramifications du rayon gemmaire sont remplis par du bois. Par suite de l'accroissement en épaisseur de l'axe qui le porte, un bourgeon dormant, quelle que soit du reste l’époque de sa formation, s'éloigne de plus en plus des fais- ceaux qui lui avaient fourni des vaisseaux lors de sa forma- ion; il en résulte qu’une traction est exercée sur ces vais- seaux et en détermine bientôt la rupture. Ainsi se trouvent interrompues les communications entre le bourgeon et l’an- neau libéro-ligneux. Dans les années suivantes, le bourgeon continue à être isolé de la région vasculaire de l'axe. Cependant dans cer- taines années où la poussée séveuse du printemps est plus énergique, quelques vaisseaux peuvent se détacher de l’as- sise génératrice et se rendre à la base du bourgeon dor- mant qui dès lorsgrossil un peu. J’ai pu provoquer expéri- mentalement celte formation vasculaire en tronquant au mois de mai 1890 quelques tiges de Cornouiller. Tandis que les bourgeons les plus voisins de la section avaient fourni des rameaux, les suivants s'étaient simplement un peu ac- crus, les plus inférieurs n'avaient éprouvé aucun change- ment de volume. L'observation anatomique me montra que les bourgeons de la base de l'axe étaient toujours isolés de l'anneau ligneux, tandis que les autres avaient reçu quelques vaisseaux. D'ailleurs, sur des tiges non tronquées, mais dans lesquelles la poussée séveuse avait été particulièrement éner- gique, je pus faire des observations analogues. Après la rupture des vaisseaux gemmaires, deux faits peu- vent se produire. Si le bourgeon est très saillant à la sur- face de l'écorce et qu'il ne se développe pas en rameau, il périt par dessiccation après un temps qui varie nécessaire- NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 349 ment avec ses moyens de défense contre la {ranspiration. Des deux bourgeons axillaires du Cornouiller, le supérieur, ai-je dit, est très saillant dans les parlies moyenne et supé- rieure de la tige, l’inférieur est au contraire beaucoup moins visible, d’abord parce qu'ilest plus petit, ensuite parce qu'il est en partie caché dans l'écorce; si pendant la pre- mière année le bourgeon supérieur ne se développe pas en rameau, il périt souvent dès l’année suivante, tandis que l'inférieur peut continuer à vivre fort longtemps. Mais aux nœuds de la base de l'axe, le bourgeon supérieur est beau- coup moins apparent, parfois même entièrement caché sous l'écorce; là il peut persister pendant de longues années. Il est évident, en effet, que les pertes d'eau par transpiralion seront d’aulant moindres que la surface externe du bourgeon sera plus réduite. En résumé le bourgeon périra si les per- tes d’eau qu'il éprouve par transpiration ne sont pas com- pensées par un apport suffisant de liquide. Les cellules de l'écorce voisines du bourgeon peuvent lui fournir de l’eau, mais ce liquide lui arrive principalement par le large rayon médullaire qui vient déboucher à sa base. Lorsqu'un bourgeon dormant se développe, le système conducteur du rameau formé provient des parties de la cou- che cambiale qui avoisinent l'extrémité périphérique du rayon gemmaire, de telle sorte que la moelle de l’axe soit toujours en communication avec la moelle de l’appendice par l'intermédiaire du rayon gemmaire. . Les bourgeons dormants qui se développent tout d’abord, par exemple à la suite d'une taille énergique, sont ceux qui correspondent au bourgeon axillaire supérieur, puis ceux qui correspondent au bourgeon axillaire inférieur, viennent ensuite les bourgeons accessoires les plus voisins des précé- dents. Les bourgeons dormants correspondant aux traces foliaires latérales ne se développent que très rarement et seulement à la suite de pincements réitérés. Les divers bourgeons dont je viens de parler, toujours en relation avec des traces foliaires, sont en quelque sorte 350 A. PRUNET. les bourgeons normaux du Cornouiller, mais ce ne sont pas les seuls que l’on puisse trouver dans cette plante. On sait en effet qu’à la suite d’une lésion provenant d’une meurtrissure où du développement d'un parasite des bour- geons peuvent apparaître dans certaines plantes en des points très variables. Des bourgeons de ce genre peuvent s'obser- ver dans le Cornouiller. Ici encore, si le bourgeon reste latent, il se forme un rayon gemmaire. Mais ce ravon peut n'avoir aucun rapport avec la moelle ; il part en effet du siège même de la lésion; de là aussi partent les premiers vais- seaux du bourgeon, lesquels dès lors peuvent n’avoir aucune relation avec les traces foliaires. Enfin, en dehors de toute lésion, des bourgeons d’une na- ture toute particulière peuvent apparaître encore en des points très divers surtout sous l'influence de la taille ou de pincements réitérés. Ces bourgeons sont purement corticaux et n’ont aucune relation avec les parties plus internes de la tige. Quand ils persistent, ils peuvent grossir, formant au sein de l'écorce des nodules ligneux de taille variable. Ces curieuses forma- tions peuvent dans certains cas donner de petites feuilles; je n’en ai jamais vu dans le Cornouiller donner de vérita- bles rameaux. Parmi les plantes que j'ai étudiées, la plupart se rattachent au Cornus sanquinea quant à l'existence et à la nature des bourgeons dormants, quant à leurs rapports avec l'axe, et en général aussi quant à leur répartilion. Voici leurs noms : Menispernum canadense, Vilis vinifera, Ampelopsis quin- quefolia, Æsculus Hippocastanum, Acer campestre, Terns- træmia japonica, Tilia silvestris, Zanthorylon frarineum, Lobinia pseudo-A cacia, Acacia Julibrisin, Styphnolobium ja- poricum, Pirus communis, Prunus domestica, Armeniaca oulgaris, [tea virginica, Cornus alternifolia, Syringa vulgaris, Frarinus excelsior, Catalpa bignonioides, Laurus nobilis, Morus alba, M. italica, Ulmus americana, Platanus orientalis, Alnus glutinosa, Salix alba, Populus pyramidalis, Corylus NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 391 Avellana, Carpinus Betulus, Quercus Robur, Faqus silva- tica, Castanea vesca. Nous allons maintenant passer à l’étude de deux autres Lypes, le Cercis Siliquastrum et le Zizyphus vulgaris. CERCIS SILIQUASTRUM (fig. 16, PL. V). On sait que, dans cette plante singulière, les fleurs appa- raissent même sur les parties les plus âgées de la tige. Une observation attentive permet de constater que la production des fleurs est localisée en des parties un peu renflées de la tige ou des rameaux qui ne sont autre chose que des nœuds plus ou moins âgés. Étudions le développement de ces ren- flements nodaux. Si l’on prend d’abord un rameau d’un an et que l’on examine l’un des nœuds de la base, on voit qu'il porte un certain nombre de bourgeons axillaires, les- quels sont en communication avec la moelle de l'axe par un très large rayon gemmaire avant une structure analogue à celle des rayons du Cornouiller. Ces bourgeons reçoivent des vaisseaux annelés ou spiralés, provenant des faisceaux les plus voisins du rayon gemmaire. Le nœud est d’ailleurs un peu proéminent dans la région correspondant au rayon gemmaire. Si l’on étudie ensuite un rameau de deux ans, on voit que ses nœuds sont encore un peu plus renflés vers l'extrémité du rayon gemmaire et on constate que les bour- geons de l’année précédente, qui ont fleuri, sont remplacés par de nouveaux bourgeons dont les vaisseaux proviennent de l’assise libéro-ligneuse de la deuxième année et sont fournis par les faisceaux contigus au rayon gemmaire. Le rayon gemmaire lui-même s’est accru de telle sorte que son bord externe dépasse un peu la surface externe du bois de la deuxième année ; en même temps, il s’est élargi dans le sens tangentiel. Après la troisième année, le renflement nodal s’est encore accentué ; de nouveaux bourgeons se sont déve- loppés à côté de ceux qui ont fleuri ou de ceux qui ayant été formés la première ou la deuxième année ont persisté à l'état de vie latente. Ces bourgeons reçoivent leurs vaisseaux des 352 A. PRUNEM. parlies de l’assise libéro-ligneuse de la troisième année con- tiguës au rayon gemmaire. On peut encore constater que le rayon gemmaire a continué à s’accroître dans le sens radial et à s’élargir dans le sens langentiel. EL ainsi de suite, de nouveaux bourgeons se formant chaque année, d’autres fleurissant, d’autres se desséchant, d'autres encore restant à l'élat de vie latente, et le rayon gemmaire s’allongeant et s'élargissant chaque année. Mais à mesure que le rameau avance en âge, par suite de la croissance intercalaire qui accompagne la dilatation de l'écorce, des bourgeons dor- mants, d’abord rapprochés côle à côte, s’écartent les uns des autres et alors le rayon gemmaire primitif se ramifie en autant de rayons secondaires qu'il y a de bourgeons ainsi isolés. Les bourgeons continuant à se multiplier d'année en année et la croissance inlercalaire des portions de l'écorce qui les séparent continuant à les isoler les uns des autres, les rayons secondaires, à leur tour, peuvent se ramifier en rayons tertiaires, ceux-ci en rayons de quatrième ordre el ainsi de suite, chacun de ces rayons venant aboutir à la base d’un ou plusieurs bourgeons dormants. Les intervalles com- pris entre les divers rayons sont remplis par du bois. Les rayons gemmaires dépassant tous la surface du bois et l'é- corce étant toujours un peu plus épaisse en face d'eux, on comprend que les parties de l’axe qui portent les bourgeons dormants forment une saillie plus ou moins volumineuse. A la suite de la multiplication continue des bourgeons dor- mants, le renflement nodal s’élargil peu à peu; ainsi se forment sur les rameaux âgés ces sortes de loupes qui se couvrent chaque année de fleurs et de fruits. Des sections faites à travers une de ces loupes suivant l’axe de la tige ou perpendiculairement à cet axe, ou encore des séries de cou- pes tangentielles permeltent de suivre la ramification du rayon gemmaire primitif. La formation des couches annuelles libéro- ligneuses amène d’ailleurs bientôt, comme dans les plantes précédentes, l'isolement des bourgeons demeurés latents, par rupture des Re NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 359 vaisseaux qui les reliaient à l’assise ligneuse contemporaine de leur formation. Parmi ces bourgeons, les mieux protégés contre la transpiration persistent, les autres se dessèchent. On conçoit que chaque rayon gemmaire doit renfermer des restes de tous les vaisseaux qui l'ont traversé à ses di- vers âges, que ces vaisseaux aient appartenu à des bour- geons demeurés latents ou morts par dessiccation ou déve- loppés en rameaux floraux. C’est [à évidemment une cause de complication qui rend l'étude des nœuds âgés particu- lièrement difficile. En résumé, le système des bourgeons dormants du Cercis est analogue à celui que nous avons trouvé dans le Cornouil- ler et dans toutes les autres Dicotylédones ligneuses étudiées, en particulier à celui qu'on peut observer dans le Coudrier. La seule différence essentielle à signaler est que ce système est constitué par des bourgeons à axes floraux et non par des bourgeons à axes feuillés, et que ces bourgeons au lieu de se former et surtout de se développer en petit nombre et irrégulièrement, se forment et se développent en grand nombre chaque année. Enfin, le cas du Cercis résulte d’a- bord d’une persistance dans la production des bourgeons floraux, ensuite d’une exagérationet d'une régularisation dans la formation et le développement des bourgeons dormants. Le Cercis canadensis appartient au même type que le Cercis Siliquastrum. ZIZYPHUS VULGARIS (fig. 26 à 29, pl. VII. On connaît le mode de végétation si curieux du Jujubier. On sait que dans cette plante les feuilles et les fleurs sont por- tées sur des rameaux cadues se formant chaque année sur des renflements des nœuds. La signification de ces renfle- ments à préoccupé divers botanistes, parmi lesquels en par- üiculier M. Laborie (1), qui les a considérés comme représen- tant de véritables axes à fruits. (1) E. Laborie, Recherches sur l'anatomie des axes floraux, p. 181-182, Tou- louse, 1888. ANN. SC. NAT. BOT. XII, 23 304 A. PRUNET. Étudions le développement de ces formations. Sur un rameau d’un an, on voit à l’aisselle de chaque feuille une petite saillie qui, étudiée au microscope, se montre constituée par un amas de petits bourgeons tous en com- municalion avec la moelle du rameau par l'intermédiaire d’un très large rayon gemmaire. Ces bourgeons recoivent des vaisseaux provenant des faisceaux contigus au rayon gemmaire. Pendant les années suivantes, comme dans le Cercis, cerlains de ces bourgeons se développent à leur tour immédiatement ou persistent plus ou moins longtemps à l’état de vie latente. Comme dans le Cercis, le rayon gemmaire primitif s'accroît chaque année, et peut se ra- mifier sous l'influence des mêmes causes; mais ici les rayons gemmaires secondaires sont moins nombreux et plus larges; à l'extrémité de chacun d’eux, se trouve un nombre variable de bourgeons dormants; la répartition des bourgeons dormants comme celle des rayons gemmaires est assez irrégulière. Les rapports des bourgeons demeurés latents où déve- loppés en rameaux, avec l'anneau libéro-ligneux de l'axe, sont d’ailleurs les mêmes que dans le Cercis. Mais, dans le Cercis, l'ensemble du système formé par les rayons gem- maires peut se développer dans le sens tangentiel grâce à la croissance en épaisseur assez rapide de la plante; dans le Jujubier, au contraire, les rameaux ayant une crois- sance en épaisseur très lente, le système des rayons gem- mairesne peut se développer que très peu dans le sens tangen- tel, et comme la formation des rameaux feuillés est cependant continue, et nécessite un accroissement en surface des renfle- ments nodaux, le système des rayons gemmaires se développe considérablement dans le sens radial, dépassant bientôt de beaucoup la surface des rameaux. L’écorce de la tige épaissie recouvre d’ailleurs toujours le renflement nodal ainsi accru. Comme dans le Cercis et les autres plantes étu- diées, l'écorce est plus épaisse au-dessus du système des rayons gemmaires que dans Îles autres parties de l'axe. Le NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 309 rayon gemmaire el ses ramificalions, comme toujours encore, sont bordés par les couches annuelles du bois, il s’ensuil que sur une coupe transversale, une nodosilé âgée peut présenter une apparence rappelant plus ou moins celle d'un rameau. Mais l’élude du développement (voir fig. 26 à 29, pl, IV) ne permet pas, à mon avis, de se méprendre sur la véritable signification de ces nodosités. D'ailleurs la struc- ture même d’une nodosité âgée est très différente à certains égards de celle d’un rameau quelconque. On ne voit point ici, en effet, de bourgeon terminal avec point végétalif et diffé- rencialion progressive descendante ; nulle part de trace de feuille, propre du moins, à la nodosité. La seule feuille qu'’ait porlé cette région de l’axe est celle à l’aisselle de laquelle le renflement nodal s'est ébauché la première année. En somme, 1] y a analogie complète entre les renflements no- daux du Cercis et ceux du Jujubier; dans le premier, le système des rayons gemmaires s’est surlout accru dans le sens tangentiel, dans le second surtout dans le sens radial; dans le Cercis les rameaux issus des bourgeons dormants ne portent que des fleurs, dans le Jujubier ils portent à la fois des feuilles et des fleurs, comme d’ailleurs dans la plu- part des Dicotylédones. RÉSUMÉ. 1. Existence et répartition des bourgeons dormants. — J'ai trouvé des bourgeons dormants dans toutes les espèces ligneuses étudiées; mes observations confirment pleinement de ce côté les idées de Hartig. Mais ces formations sont chez les Dicotylédones beaucoup plus fréquentes, et se pré- sentent en des points plus variés que ne le supposait cel auteur. Hartig ne parle pas des bourgeons dormants qui apparaisssent à l’aisselle des feuilles rudimentaires de la base des rameaux (Cornus, Pirus, Quercus, elec.) ou même à l’aisselle des écailles gemmaires (Viñis, Quercus, Æscu- lus; etc). 356 A. PRUNET. Divers auteurs (1) ont signalé dans quelques Dicotylédones l'existence de bourgeons axillaires multiples, présentant d’ailleurs ce fait comme étant absolument exceptionnel. Une observation microscopique attentive m'a montré que cette multiplicité des bourgeons axillaires est au contraire la règle. Chaque bourgeon axillaire est ordinairement accom- gné d’un ou plusieurs bourgeons accessoires destinés à le remplacer s’il vient à disparaitre. Enfin, dans certains cas même, j'ai pu observer des bourgeons dormants extra-axillaires en face des traces foliaires latérales, dans divers arbres à feuilles plurifasci- culées (Cornus, Corylus, Cercis, ete.). Parfois ces bourgeons quoique plus ou moins cachés dans l'écorce étaient com- plètement formés, d'autres fois ils n'étaient qu'ébauchés, d’autres fois encore on trouvait simplement à l'extrémité du rayon médullaire foliaire un petit amas de cellules corti- cales plus petites et plus riches en protoplasma que les voisines. Les bourgeons axillaires et surtout les bourgeons accessoires qui les accompagnent peuvent se présenter sous ces divers élals. Comme je l'ai déjà fait remarquer à propos du Cor- nouiller, il n’y a d’ailleurs rien d’'absolu soit dans la répar- {ition soit dans le nombre des bourgeons dormants; on peut observer sous ce rapport de nombreuses variations individuelles. Les bourgeons dormants sont surtout nom- breux sur les individus fréquemment et fortement taillés. Dans le Syringa vulgris, par exemple, les feuilles rudimen- aires de la base des rameaux en sont ordinairement dé- pourvues chez les individus non taillés, mais les rameaux qui naissent sur des pieds souvent laillés présentent 3 bour- (4) Irmisch : Ueber einige Pflanzen bei denen in der Achsel bestimmter Blät- ter eine ungewënhlich grosse Anzalhl von Sprossanlagen sich bilidet (Abhandl. des naturwiss. Vereins zu Bremen, Bd. V). — Gœbel : Ueber die Verzwet- qung dorsiventraler Sprosse (Arbeiten des botan. Instituts zu Würzburg, Bd. IH, p. 391) et Vergleichende Entwicklungsgeschichte der Pflanzenorgane (in Schenk’s Handbuch, Bd. IX, p. 198) — Velenovsky : © serialnith pupenech, Prague, 1884. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 397 geons dormants axillaires à chaque nœud, un médian assez volumineux, deux latéraux très réduits, J'ai déjà dit que sur des liges de Cornus sanguinea de lrois à sept ans, j'ai pu, par une taille répétée, amener la formation à chaque nœud de 4 à 8 bourgeons dormanis au lieu de 2 qu’on y rencontre normalement. Enfin la multiplication des bourgeons dor- mants est particulièrement frappante dans les Saules élevés en lêlards; dans les Chênes ou les Charmes élevés en taillis, dans les Peupliers et les Ormes dont les rameaux sont coupés régulièrement après une année ou un pelit nombre d'années de croissance. Dans ces cinq dernières genres en effet, l'observation montre que les nombreux rameaux qui se développent après la taille proviennent presque toujours de bourgeons dormants préexislants, rarement de bourgeons adventifs formés aux dépens d’un tissu cicatriciel. D'ailleurs, comme j'ai pu l’observer dans le Saule, l'Ormeau, le Chêne, certains de ces rameaux peuvent provenir de bourgeons formés seulement après la taille à côté de bourgeons pré- existants. La présence des bourgeons dormants à la partie inférieure de la tige ou des rameaux, soit à l’aisselle des feuilles rudi- mentaires, soit à l’aisselle des écailles gemmaires et la brièveté des entre-nœuds qui les séparent dans cette région ont pour résultat d’accumuler vers les portions les plus centrales du corps un grand nombre de rameaux en puis- sance et de permettre ainsi à la plante de réparer facilement les mutilalions même profondes qu’elle peut éprouver. Il. Æapports des bourgeons dormants avec l'axe qui les porte. — Dans toutes les plantes éludiées, l'écorce est plus épaisse dans les portions qui renferment des bourgeons dor- mants que dans les autres régions de l’axe. Au voisinage des bourgeons les cellules corticales sont plus petites, plus riches en protoplasma; c’est ce qui explique que de nouveaux bour- geons puissent se former à tout âge en face des rayons gemmaires. Dans le Cornouiller, les éléments du rayon gemmaire 358 A. PRUNEX. sont lignifiés, ils sont formés de cellulose dans le Tilleul; d'ordinaire les parois cellulaires du rayon gemmaire sont cellulosiques quand la moelle de l’axe est en entier cellu- losique, lignifiées quand la moelle est elle-même lignifiée, soit totalement (Cercis), soit du moins à la périphérie (Cor- nus). Le rayon gemmaire ainsi étendu entre la moelle de l'axe el la base des bourgeons à une importance physiologique considérable. Si, en effet, on se rappelle qu’une trace foliaire vient déboucher à sa base, que sa surface de contact avec le bois est très grande, on comprend que ce rayon pourra à un moment donné conduire vers les bourgeons une grande quantité d’eau et en permettre ainsi le développement. Enfin l’'amidon et les autres matériaux nutritifs contenus dans le rayon gemmaire et les cellules corticales voisines forment une réserve spéciale destinée à être tout d'abord consommée lorsque le bourgeon s’allongera en un rameau. Ainsi s'ex- pliquent la promptitude et la vigueur avec laquelle se déve- loppent les bourgeons dormants après la troncature d'une branche ou de la tige d'un arbre. Lorsqu'un bourgeon dor- mant se développe en rameau, le rayon gemmaire, ai-je dit, fait communiquer la moelle de l’appendice avec celle de l'axe; on conçoit que cet intermédiaire facilite singulière- ment les mouvements de l’eau et des matières nutrilives entre l’axe qui représente un lieu de réserve et ses ramifica- tions, lesquelles constituent, suivant le cas, des lieux de consommation ou de production. Dans le Cornus les couches annuelles du bois ne se modi- fient pas sensiblement au contact du rayon gemmaire, mais fréquemment les parties du bois les plus voisines du rayon ont des éléments plus volumineux el plusallongés dans Le sens tangentiel; cela est bien visible par exemple dans le Tilleul. Lorsque les bourgeons dormants sont floraux, comme dans le Cercis, les faisceaux contigus au rayon, lesquels four- nissent, on le sait, des éléments aux bourgeons, ont des vaisseaux plus petits que ceux des faisceaux plus éloignés. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 309 C'est là une particularité qui est en rapport avec la struc- ture spéciale des axes floraux (1). Hartig avait vu une formation parenchymateuse accom- pagnée de vaisseaux étendue entre la moelle de l’axe et la base des bourgeons dormants ; cette formation élail pour lui une tige interne dont le bourgeon formait le sommet, tige dans laquelle il s’'élonnait d’ailleurs de ne pas trouver de Liber. Quant à la ramification de ce que J'ai appelé le rayon gemmare, elle représentait, à son avis, une ramifi- calion interne de la tige du bourgeon initial tout à fait comparable morphologiquement, disait-il, à ces productions qu'on appelle des balais de sorcière (Hexenbesen) (2). La constitution anatomique du système gemmaire ne justifie pas à mon avis celte manière de voir. Non seulement cette lige interne n’a pas de liber mais elle ne présente pas non plus de vrai bois ; les couches ligneuses annuelles de l'axe limitent immédiatement le rayon gemmaire comme elles limi- tent tout rayon médullaire; le rayon gemmaire résulte d’une simple interruption dans le bois comme un rayon médul- laire quelconque. Lorsque des vaisseaux se détachent des faisceaux de l'axe contigus au rayon gemmaire pour se rendre à un bourgeon, ces vaisseaux suivent lantôt les bords du rayon, tantôt sa partie moyenne; dès lors le rayon gem- maire représenterail, ici l'écorce, là, la moelle, parfois les deux successivement suivant les parties du rayon que l’on examinerait. D'ailleurs la structure des rayons médullaires foliaires vis-à-vis lesquels il ne s’est pas formé de bourgeon est absolument semblable à celle des rayons gemmaires. Enfin le mode de développement des rayons gemmaires, que Jai décril en délail dans le Cornouiller, me paraît devoir lever les derniers doules sur la signification morphologique de ces formations. En résumé, les rayons gemmaires sont des rayons médul- laires plus larges que les autres, mais résultant comme eux de (1) Laborie, loc. cit. (2) Physiol. der Holzpfanzen, p. 231, 360 A. PRUNET. simples interruptions dans l'anneau libéro-ligneux de l'axe. Ces rayons géants mettent en communication la moelle de l’axe d’abord avec celle des feuilles, ensuite avec celle des rameaux feuillés ou floraux; grâce à eux l’axe et ses rami- fications forment un ensemble dont les diverses parties sont toujours en relation intime les unes avec les autres. IL. Durée des bourgeons dormants. — J'ai déjà dit que la durée des bourgeons dormants me paraît dépendre surtout de leurs moyens de défense contre la dessiccation (1). Dans les espèces étudiées les bourgeons de la base de la tige ou des rameaux sont d’une façon générale les mieux protégés : ils sont toujours plus ou moins cachés dans l'écorce, aussi la plupartse conservent fortlongtemps.Cette parlicularitépermet à la plante de survivre à des mutilations même très profondes. IV. Bourgeons anormaux. — Les bourgeons dormants formés aux dépens d’un tissu cicatriciel à la suite d’une lésion ou du développement d’un parasite, peuvent subsister à l’état latent; comme nous l’avons vu, il se forme alors un rayon gemmaire partant du siège même de la lésion et qui dès lors n’a pas de rapport soit avec la moelle soit avec les traces foliaires. L'expérience (2) montre que les rameaux issus d’un tissu cicatriciel (bourgeons adventifs des forestiers sont beaucoup moins robustes que ceux qui résultent du développement de bourgeons normaux (bourgeons proventifs des forestiers); ces derniers, en effet, grâce à leur rayon gemmaire étendu jusqu’à la moelle de l'axe ont des rapports plus intimes avec cet axe et peuvent en recevoir une nour- riture plus abondante. D'ailleurs sauf dans le Hêtre, peut- être, les bourgeons issus d’un callus sont rares, même dans les taillis. (4) Voir en particulier pour l'étude de ces moyens de défense : A. Feist, Ueber die Schutzeinrichtungen der Laubknospen dikotyler Laubbaüme vährend ihrer Entwickelung (Nova acta der kais. Leopold. Carol. deutsch. Akad. der Naturforscher, Bd. Il, p. 303-343, 1887). (2) E. Bartet : De l'influence exercée par l'époque de l'abatage sur la produc- tion et le développement des rejets de souches dans les taillis (Comptes rendus, 16 juin 1890). NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 361 Des bourgeons purement corticaux, analogues à ceux que j'ai signalés dans le Cornouiller, peuvent apparaître dans le Hêtre, le Charme, etc. Harlig qui avait vu ces formations dans ces deux dernières espèces, les appelait Augeltrieb- Anospen (1). Il admettait que c'était des bourgeons dormants dont les relations avec la moelle avaient été interrompues avec le temps par l’interposilion de couches de bois, et qui dès lors s’élaient trouvés isolés dans l'écorce, donnant nais- sance à des nodules ligneux de taille variable, mais incapables de fournir de vrais rameaux. Harlig accompagne l'exposé de ses idées sur l’origine de ces formations d’une figure théorique très nette. Mes obser- valions ne me permeltent pas d'accepter sur ce point l'o- pinion de Hartig. Je n'ai trouvé qu'un seul cas se rappor- tant à son schéma : un bourgeon cortical s'était développé, lardivement sans doute, en face d’un rayon gemmaire corres- pondant à une trace foliaire latérale de Cornouiller, lequel rayon, comme cela a lieu d'ordinaire lorsque des bourgeons dormants manquent à son extrémité, s'était fortement ré- duil après la troisième année, jusqu'à prendre les dimen- sions d’un rayon médullaire ordinaire. Mais ce n’est là sans doute qu’une coïncidence, car des bourgeons corticaux peu- vent se trouver en des points quelconques de l'axe sans rapport avec les traces foliaires et alors on ne frouve rien d’analogue à la figure de Hartig. M. Gœbel (2) appelle bourgeons normaux ceux qui se forment au point végétatif de la tige et bourgeons adventifs ceux qui naissent directement ou indirectement (par l'inter- médiaire d’un callus) de parties de tissus déjà parvenues à un élat définilif. Mes observations sur la formation de bourgeons après la la première année à l'extrémité des rayons gemmaires ne me paraissent pas permeltre d'accepter ces deux définitions. (4) Loc. cit., p. 231. (2) Gœbel, Entwicklungsgeschichte der Pflinzenorgane (in Schenk’s Handbuch Bd. IL, p. 203). 302 A. PRUNET. D'ailleurs M. Gœbel ne se faisait sans doute pas d'illusion sur leur valeur, car il dit lui-même : « Cette définition (celle des bourgeons adventifs) n’établit pas de distinction tranchée entre la ramification normale et la ramification adventive. Ce sont par exemple des bourgeons adventifs ceux qui nais- sent sur les souches d’un callus provenant du cambium, mais le cambium n’est pas un tissu définitif. Ils sont cepen- dant adventifs dans le sens du mot (1). » À mon avis, les diverses catégories de bourgeons latéraux que l’on peut observer sur les portions épicotylées de la tige des Dicotylédones peuvent se distinguer de la façon sui- vante. À. BourGEONs Normaux. Ils sont placés à l'extrémité d'un rayon gemmaire résultant originellement du départ d’une trace foliaire. a. Axillaires......., Le rayon gemmaire correspond à la trace foliaire médiane. b. Extra-axillaires... Le rayon gemmaire correspond à l’une des traces foliaires latérales. B. BOURGEONS ANORMAUX OU ADVENTIFS. ..... Ils ne correspondent pas à un rayon gemmaire ou bien le rayon n’a aucun rapport avec les traces foliaires. a. Cycliques ...,.... Ils sont en relation avec le cylindre central de la tige et s’ils sont dormants, ils correspondent à un rayon gemmaire n'ayant pas de rapport avec les traces foliaires. b. Corlicaux........ Is n’ont aucune relation avec le cylindre central de la tige et ne correspondent pas à un rayon gemmaire. SUR LA SIGNIFICATION DU PARENCHYME INTRA-LIGNEUX. Il me paraît ulile de rechercher maintenant la signification de ce parenchyme mou que J'ai appelé intra-ligneur el que j'ai rencontré dans les nœuds de toutes les plantes que j'ai éludiées, soit dans les faisceaux qui se rendent aux feuilles, aux pédoncules floraux, aux jeunes rameaux, soit dans les faisceaux de l’axe lui-même. (1) Gœbel, loc. cit., p. 203-204. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 363 Ce n’est pas la première fois que du parenchyme mou esl ainsi observé à la partie interne des faisceaux ligneux ; mais ce tissu n'ayant jamais élé cherché que dans les entre-nœuds a été considéré comme étant très rare; de là, sur sa nature, des interprétations qui me paraissent peu justifiées. Pour de Barv (1), l'existence de parenchyme mou dans le bois de la tige des Dicotylédones constitue une anomalie et il relève avec soin tous les exemples connus de son temps. C'est ainsi qu'il signale cette anomalie dans les Crassulacées, d'après Brongniart (2), dans les Cactées, d'après Bron- gniart (3) et Schleiden (4), dans certaines Caryophyllées, d'après Regnaull (5), dans quelques Légumineuses à lige nageante (Æschynomene, Hermainiera, elc.), d’après Hal- lier (6); lui-même enfin l’a observée dans quelques plantes : Rumex. lunaria, Centradenia grandifolia, Campanula Vi- dalii (7). Depuis de Bary, ce tissu a été signalé par M. Vesque (8) dans un cerlain nombre de genres appartenant aux familles des Borraginées, des Scrofularinées et des Gentianées, par M. d’Arbaumont (9) dans quelques Ampélidées, par M. 0. G. Petersen (10), dans les Haloragées et dans l'A/somitra sarco- phylla, par M. Ferd. Pax (11) dans quelques Euphorbiacées (1) De Bary, Vergl. Anat., p. 513-515. (2) Brongniart, Archives du Muséum, t. I. (3) Brongniart, loc. cit. (4) Schleiden, Anatomie der Cacteen (Mémoires de l'acad. impér. des sciences de Saint-Pétersbourg, t. IV, p. 143). (5) Regnault, Recherches sur les Cyclospermées (Ann. des sc. nat. botan., 4°s., t. XIV, p. 118, pl. VD. (6) Hallier, Botan. Leilunq., 1859, p. 152 et 1864, p. 93. (7) De Bary, loc. cit., p. 514. (8) Vesque, Mémoire sur l'anatomie comparée de l'écorce (Ann. des se. nat., 6e série, €. II, p. 141, 143, 144). (9) D'Arbaumont, La tige des Ampélidées (Ann. des se. nat., 6° série, t. XI, 1882, p. 186-255). (10) 0. G. Petersen, Ucber das Auftreten bicollateraler Gefässbündel in ver- schiedenen Pflanzenfumilien (Engler's Jahrb., Bd. TT, 1882, p. 369 et 375). (11) Ferd. Pax, Die Anat. der Euphorbiaceen (Engler's Jahrb., Bd. V, 1884, p. 38%, 421). 30% A. PRUNET. par M. Solereder d’abord dans 16 genres (1) répartis dans diverses familles, puis dans les genres Gyrinopsis et Linos- toma (2), par M. Radkofer (3) dans le genre Serjania. Enfin M. Raimann (4) décrit en détail ce tissu dans Les entre-nœuds de quatre nouveaux genres, mais il déclare l’avoir observé dans un certain nombre d’autres plantes. À l'exemple de de Bary, M. Solereder considère ce paren- chyme mou comme constituant une simple anomalie et il lui altribue une importance systématique considérable. MM. Pe- tersen, Pax, Radkofer et Raimann le regardent comme re- présentant un liber rudimentaire. M. Vesque (5) réserve son opinion, car il a vu certains de ses éléments se transformer en cellules ligneuses. La structure de ce tissu et son évolution ne permettent guère à mon avis de se méprendre sur sa vérilable valeur morphologique. Comme nous l'avons vu, {le parenchyme intra-ligneux se compose de cellules plus ou moins allongées dans le sens longitudinal et à parois transversales horizon tales ou un peu obliques, c’est-à-direrappelant par leur forme les cellules ordinaires de parenchyme ligneux. On n’y trouve jamais trace de tubes criblés (6). On sait que les premiers éléments de soutien du bois appa- raissent non à la partie la plus interne des faisceaux, mais un peu plus en dehors; il s'ensuit que si l’on examine des rameaux suffisamment jeunes, on trouve du parenchyme intra-ligneux à la partie interne de tous les faisceaux, aussi bien dans l’entre-nœud que dans le nœud. Dans l’entre- nœud, ses éléments sont en général lignifiés lorsque la crois- (4) H. Solereder, Ueber den system. Wert der Holzstructur bei den Dikoty- ledonen (Inaug. Dissert., München, 1885). (2) H. Solereder, Botan. Centralblatt, Bd. XLI, p. 250, 1890. (3) Radkofer, Ergänzungen zur Monographie der Sapindaccengattung Ser- jania, München, 1886, p. 16. (4) R. Raimann, Ueber unverholzte Elementein der innerste Xylemzone der Dico- tyledonen (Sitzungsber. der Wiener Akadermie der Wissenschaften, Bd. XCVINH, Heft I-IIT, p. 40-75, 1889). (5) Vesque, loc. cit., p. 144, en note. (6) Auct. cit. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 365 sance longitudinale est terminée, ou tout au moins à la fin de la première année. Dans les nœuds, la lignification ne se produit dans la règle qu’à la fin de la première année; elle apparaît d'abord dans les nœuds de la base des rameaux puis dans ceux du sommet. Si l’on prend avant la fin de la vé- gélation, par exemple un rameau de Periploca græca, et que, partant de la région moyenne d’un nœud adulle on fasse des coupes successives vers les deux entre-nœuds contigus, on pourra voir les éléments du parenchyme intra-ligneux se transformer graduellement et sans changer de forme en cellules de parenchyme ligneux ordinaire. Ainsi que j'ai déjà eu l’occasion de le signaler, j'ai tou- jours rencontré ce tissu dans les nœuds de la tige, à la par- tie interne des faisceaux qui se rendent aux feuilles, aux axes floraux, aux rameaux feuillés, aux vrilles mêmes; là aussi je l'ai vu se transformer en général avec l’âge en paren- chyme ligneux. Dans certains cas la lignification du parenchyme intra- ligneux est tardive. M. Raimann a encore trouvé ce tissu dans une lige d’Aristolochia Sipho de vingt-deux ans; moi-même je lai rencontré dans un rameau de Tilleul de quinze ans, mais en supposant même que, dans ces deux plantes et dans quelques autres, la lignification ne survienne jamais, il n°y aurait là qu’une persistance d’un état que l’on observe chez toutes les Dicotylédones à un certain stade de leur dévelop- pement. D'ailleurs entre les cas de lignification précoce et les cas de lignification extrêmement tardive, on peut obser- ver toutes les transitions. Ces transitions peuvent même être fournies par une même espèce. M. Raimann a, en effet, cons- taté que le parenchyme intra-ligneux avait conservé tous ses caractères dans les entre-nœuds de rameaux d’Æsculus de onze ans, tandis qu'il était déjà lignifié dans les entre- nœuds de rameaux d’un an fournis par le même arbre. De tout ce qui précède, il semble résulter que, sauf dans des cas sans doute extrêmement rares, le parenchyme in- tra-ligneux représente non pas un liber rudimentaire, 3066 A. PRUNET. mais du parenchyme ligneux qui n’est pas encore lignifié. D'autre part, ce issu, existant à un moment donné dans tou- tes les Dicotylédones et pouvant d’ailleurs persister plus ou moins longtemps soit dans le nœud, soit dans l’entre-nœud, dans une espèce donnée, ne me paraît avoir qu’une impor- tante très minime àu point de vue systématique. On comprend que grâce à la minceur et à la nature chimi- que de ses parois et grâce au voisinage des trachées qui lui fournissent de l’eau en abondance, le parenchyme intra-li- gneux puisse présenter une aclivité beaucoup plus grande que les éléments cellulaires voisins soit du bois, soit même de la moelle. IL. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 1° Conséquences de la suppression de feuilles jeunes sur la structure du nœud. Mes expériences ont porté sur le Vifis vinifera, V'Eucalyp- tus obliqua el le Corylus Avellana. Les feuilles supprimées étaient encore extrêmement petites. Vitis vinifera. — Les nœuds privés de feuilles sont exté- rieurement différenciés des entre-nœuds contigus, mais ils sont moins volumineux que les nœuds voisins inférieurs et supérieurs. Les faisceaux foliaires ont dans l’entre-nœud une structure normale; au nœud, ils disparaissent; à leur place, on trouve un large rayon médullaire en dehors duquel se voit un petit amas de fibres péricycliques. L'écorce est plus épaisse qu’à l’entre-nœud, mais elle est moins développée que dans les nœuds normaux; on n'y ob- serve pas en particulier cette dilatation considérable qui, dans les nœuds normaux, se produit au moment du passage des faisceaux foliaires. Le collenchyme est moins abondant et les parois de ses éléments sont moins épaissies. Les modi- fications que présente habituellement le bois des faisceaux se retrouvent dans leur ensemble, mais elles sont sensiblement NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 367 alténuées. La lignification du parenchyme intra-ligneux est plus précoce que dans les nœuds pourvus de feuilles. La moelle est notablement moins épaisse que dans les nœuds ordinaires. Dans ie tableau suivant se trouvent indiquées pour deux nœuds voisins, l'un privé de feuilles, l’autre normal, les di- mensions respectives de l'écorce et de la moelle dans la partie moyenne du nœud; ces dimensions étant calculées en repré- sentant par 100 celles des mêmes parties dans les entre- nœuds correspondants. Ecorce. Moelle. Neudnormaleee re Me Re en 380 189 Nœud privé de feuille............. 190 158 EUCALYPTUS OBLIQUA. Le nœud est représenté extérieurement par un renfle- ment à peine visible. Le faisceau foliaire disparaît au nœud comme dans la Vigne. L’écorce et ia moelle sont beaucoup moins dévelop- pées que dans les nœuds normaux et renferment beaucoup moins de cellules scléreuses; les cristaux d’oxalate de chaux y sont moins abondants. La différenciation du bois est beaucoup plus faible. Ecorce (1). Moelle Nœudsirormaux:, 24440005 Re 305 300 Nœuds privés de feuilles, ..,...,.. 110 115 CORYLUS AVELLANA. Le renflement nodal est à peine apparent. Les faisceaux foliaires disparaissent. L’écorce el la moelle sont beaucoup moins développées que dans les nœuds normaux, la différenciation du bois est beaucoup moindre, les cristaux d’oxalate de chaux sont moins abondants. (4) Au voisinage de la feuille. 3068 A. PRUNET. Écorce (1). Moelle. Nœuds NOPMAUX.. 5... ereleregere 445 195 Nœuds privés de feuille........... ait 109 En résumé, la suppression de la feuille paraît amener dans la structure des nœuds des modifications importantes: les faisceaux foliaires disparaissent, les issus parenchy- maleux, l'écorce surtout, se réduisent dans des proportions considérables, la différenciation des faisceaux caulinaires s’atténue, les cristaux sont moins abondants. 2° Conséquences de l’éniolement sur la structure du nœud. — L'éliolement ne supprime pas les feuilles, mais réduit consi- dérablement l'importance de leurs fonctions. Dès lors, si la feuille a quelque influence sur la structure du nœud, on. peut supposer que les nœuds des plantes étiolées ne seront pas absolument semblables aux nœuds des mêmes plantes qui se sont développées à la lumière. J'ai fait un certain nombre d'observations sur des pieds de Canarina Campanula el d’Aristolochia Clematitis dont les uns avaient poussé dans l'obscurité et les autres à la lu- mière; en voici les principaux résultats. Les feuilles des individus étiolés sont, comme il arrive en pareil cas, plus petites que celles des individus restés à la lu- mière ; les nœuds sont extérieurement moins différenciés. L'étude anatomique montre que les faisceaux foliaires sout moins volumineux, que les tissus parenchymateux, l'écorce en particulier, sont moins développés. Écorce. Moelle. Canarina Campanula : Individus normaux.....,......... 350 160 = ÉTOLÉS RENAN IT Le 202 150 Aristolochia Clematitis : Individus normaux....,.......... 480 — ÉLIOLES MARIE GRRRRE 250 Comme on devait s’y attendre, la réduction des tissus parenchymateux, quoique sensible, est moindre qu’à la suite de la suppression des feuilles. (4) Au voisinage de la feuille. NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 309 CAUSES DE LA DIFFÉRENCIATION INTERNE DES NŒUDS. Les causes sont sans doule multiples, mais lune des plus importantes semble se trouver dans les fonctions spéciales de la feuille. Nous avons vu, en effet, que la différenciation des nœuds est plus marquée dansla parlie moyenne ou supérieure des rameaux, c’est-à-dire en des points où les feuilles sont surtout actives et où en particulier elles transpirent au maxi- mum, et qu’elle est à peu près nulle dans les nœuds les plus inférieurs portant des feuilles rudimentaires ; nous avons vu qu'après la chute des feuilles, les lissus de nouvelle forma- lion sont à peu près identiques dans les nœuds et dans les entre-nœuds ; nous avons vu aussi que la différencialion est faible ou nulle à la base des écailles des tiges souterraines et des cotylédons hypogés dont le rôle au point de vue de la transpiralion et de l’assimilalion chlorophyllienne est négli- geable, et qu'elle est au contraire sensible à la base des co- tylédons épigés dont les fonctions se rapprochent davantage de celles des feuilles. Enfin, l'expérience nous a montré que l’affaiblissement des fonctions de la feuille par l’éliolement el mieux encore, sa suppression, ont pour résultat de réduire singulièrement la différenciation des tissus nodaux. Il va sans dire que les bourgeons, les axes floraux et les rameaux feuillés peuvent avoir aussi une certaine influence sur la structure des nœuds. Enfin, il se peut que dans certains cas, au moins, la présence des appendices ne soit pas la seule cause déterminante de la différencialion des nœuds. CONCLUSIONS GÉNÉRALES. Il résulle de toul ce qui précède que, d’une façon géné- vale, les nœuds se différencient des entre-nœuds non seule- ment au point de vue exlerne mais encore au point de vue interne. Les conclusions particulières fournies par les diverses parties de ce travail peuvent se résumer de la façon sui- vante : ANN. SC. NAT. BOT. UT, 24 910 A. PHRUNE. A. Partie descriptive. — a. Naœuds fohaires de l'année. — Dans les faisceaux foliaires, les vaisseaux sont plus petits, plus nombreux, tous à fond mince et les éléments de soutien disparaissent. Dans les faisceaux caulinaires, la proportion des petits vaisseaux à fond mince augmente, celle des grands vaisseaux à fond épaissi diminue et les éléments de soutien se réduisent plus ou moins. Les Lissus parenchymateux du nœud, l'écorce surtout, augmentent de volume, les dimensions transversales des cellules corticales s’accroissent, celles des cellules médul- laires varient peu, les dimensions longitudinales des cel- lules corticales et des cellules médullaires diminuent. Les rayons médullaires s’élargissent ou même se mulli- plient. La réduction des tissus de soutien à parois lignifiées, déjà signalée dans le bois, se retrouve dans le péricycle; elle est habiluellement compensée par un développement plus con- sidérable du collenchyme. Ces diverses modifications des tissus nodaux sont surtout accentuées et parfois même limitées aux parties du nœud les plus voisines de la base de la feuille; elles peuvent ne pas se trouver réunies dans les nœuds d'une plante donnée, mais on y en trouve toujours quelques-unes. La différenciation des lissus nodaux est maximum dans les nœuds portant les plus jeunes parmi les feuilles adultes: elle est faible à la base de la tige ou des rameaux, presque nulle dans les nœuds qui ne portent que des feuilles rudi- mentaires. b. Nœuds des tiges souterraines. — La différencialion esl faible ou nulle. ce. Nœuds cotylédonaires. — La différenciation est compa- rable à celle des nœuds des tiges aériennes lorsque les cotv- lédons sont épigés, à celle des nœuds des tiges souterraines quand ils sont hypogés. d._Nœuds portant des axes floraux ou des rameaux feuilles. — Les faisceaux qui se rendent aux axes floraux ou aux ra- NŒUDS ET ENTRE-NŒUDS DE LA TIGE. 371 meaux feuillés présentent au nœud une différenciation tout d’abord comparable à celle des faisceaux foliaires, mais qui, plus tard, s’alténue souvent dans les axes floraux, plus souvent encore dans les rameaux feuillés. e. Tiges ou rameuux ügés de plus d'un an. — Après la chute des feuilles, les tissus de nouvelle formation ont sen- siblement dans les nœuds la mème structure que dans les entre-nœuds. {. Bourgeons dormants. — Les plantes ligneuses présen- tent toujours des bourgeons dormants en relation avec la moelle de l’axe par l'intermédiaire d’un large rayon médul- laire, le rayon médullaiïre gemmaire, ayant pour point de départ un rayon médullaire foliaire. Les bourgeons dormants peuvent se rencontrer non seu- lement à l’aisselle des feuilles ordinaires, mais encore à la base des feuilles rudimentaires et des écailles gemmaires. Un ou plusieurs bourgeons de remplacement peuvent ac- compagner le ou les bourgeons axillaires normaux. Des bourgeons peuvent se former à tout âge en face des rayons médullaires gemmaires, les uns se développant aus- silôl, les autres demeurant latents. Le nombre des bourgeons dormants s’accroil beaucoup par la taille ou le pincement. B. Partie expérimentale. — La différenciation des tissus nodaux se réduit sensiblement par l’éliolement, considéra- blement par la suppression de la feuille. EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE 1V Vilis vinifer«. Fig. 1. — Section transversale d'un faisceau foliaire dans la partie moyenne d'un entre-nœud, — /, hber; b, bois; pil, parenchyme intra-ligneux. Gross. 160. Fig. 2. — Section transversale du même faisceau dans son (rajet à travers l'écorce. — vb, vaisseaux du bois; pil, parenchyme intra-ligneux. Même gross. Fig. 3. — Section {transversale de l’un des faisceaux du pétiole faite dans la partie moyenne de cet organe. Mèmes notations et même gross. Fig. 4. — Coupe longitudinale axiale de la moelle dans la partie moyenne d'un entre-nœud. — m, moelle. Gross. 100. Fig. 5. — Mème coupe dans la partie moyenne du nœud immédiatement superposé. — m"m, moelle. Même gross. Aristolochia Clematilis. Fig. 6. — Coupe transversale schématique d'une portion de l'entre-nœud. — col, collenchyme; pm, parenchyme mou de lécorce; fp, fibres péri- cycliques lignifiées ; fl, faisceau libéro-ligneux. Fig. 7. — La même coupe dans le nœud. Mêmes notations. Les fibres ligni- liées du péricycle sont remplacées par du collenchyme. PLANCHE V Clematis tubulos«. Fig. 8. — Section transversale d'un faisceau foliaire dans la partie moyenne d'un entre-nœud. — 4, Liber; b, bois; pil, parenchyme intra-ligneux. Gross. 100. Fig. 9. — Section transversale du même faisceau dans le nœud. — vb, vais- seaux du bois. Même gross. Fig. 10. — Section transversale de l’un des faisceaux du pétiole faite dans la partie moyenne de cet organe. Mèmes notations et même gross. Canarina Campanula. Fig. 41. — Section transversale schématique de l'écorce dans la partie moyenne d’un entre-nœud. — col, collenchyme; pm, parenchyme mou. Fig. 12. — Même coupe dans la partie moyenne d'un nœud. — Mèmes no- tations,. Fig. 43. — Section transversale de quelques-unes des cellules du paren- chyme mou de lécorce de l'entre-nœud, prises dans la région indiquée par Pextrémité de la ligne pm, fig. 12. Gross. 160. Fig. 44, — Section transversale de quelques cellules du parenchyme mou de l'écorce du nœud prises dans la région indiquée par l'extrémité de la ligne pm, fig. 13. Même gross. SUR LES NŒUDS ET LES ENTRE-NŒUDS. JL Cornus sanguineu. Fig. 15. — Coupe transversale schématique d'un rameau àgé. — e, écorce ; b, bois; m, moelle; rgp, rayon gemmaire primitif; rgs, rayon gemmaire secondaire; rgl, rayon gemmaire correspondant à une trace foliaire laté- rale; bea hourgeon extra-axillaire ; rmf, rayon médullaire foliaire. Cercis Siliquastrum. Fig. 146. — Coupe transversale schématique d’un rameau àgé. — Mêmes notations. PLANCHE VI Periploca græca. Fig. 17. — Coupe transversale d’un faisceau foliaire dans la partie moyenne d’un entre-nœud. — !, liber; db, bois; pil, parenchyme intra-ligneux. Gross. 160. Fig. 18. — Coupe transversale du même faisceau dans Le nœud. — vb, vais- seaux du bois. Même gross. Fig. 19. — Coupe transversale du même faisceau dans la partie moyenne du pétiole. — Mèmes notations et même gross. Sium Sisarum. Fig. 20. — Coupe longitudinale axiale de la moelle dans la partie moyenne d'un entre-nœud. Gross. 100. Fig. 21. — La même coupe au nœud. — pe, plancher transversal eellulo- sique. Même gross. PLANCHE VII Sium Sisarum. Fig. 22. — Coupe transversale d’un groupe de trois faisceaux caulinaires dans la partie movenne d’un entre-nœud. — {, liber; b, bois; pil, paren- chyme intra-ligneux. Gross. 100. Fig. 23. — Coupe transversale, faite au nœud, d’un faisceau caulinaire ré- sultant de la fusion des trois précédents. — Mêmes notations et même gross. Ruellia varians. Fig. 24: — Coupe transversale d’un faisceau caulinaire dans la partie moyenne de l’entre-nœud. — {, Liber; b, bois; pil, parenchyme intra- ligneux. Gross. 160. Fig. 25. — Coupe transversale du même faisceau dans la partie supérieure du nœud. —}, liber ; vb, vaisseaux du bois; pil, parenchyme intra-ligneux. Même gross. ZLizyphus vulgaris. Fig. 26, 27, 28. 29, — Coupes transversales schématiques faites dans des aux nœuds de rameaux âgés respectivement de un an, deux ans, trois ans, cinq ans, montrant les phases successives du développement d'un ren- flement nodal. — e, écorce; b, bois; m, moelle; bour, bourgeon; r4p, rayon gemmaire primitif; »gs, rayon gemmaire secondaire. ADDITION AUX RECHERCHES SUR LA STRUCTURE ET LES AFFINITÉS DES MÉLASTOMACÉES Par Eh. van E'ieghem. Dans un mémoire Sur la structure et les affinités des Mémécylées, inséré dans ce volume (pp. 23-92), j'ai exprimé le regret de n'avoir pu faire l'étude anatomique de la tige que dans 126 genres sur 135 que comple aujourd’hui la famille des Mélastomacées. Depuis lors, des 9 genres qui avaient échappé à mes recherches, j’ai pu m'en procurer 4 el je m’empresse de combler en ce qui les concerne la lacune de mon travail. Dalenia et Carionia. — La tige du Dalenia pulchra et du Carionia elegans à une écorce sans faisceaux libéroligneux, munie de cellules scléreuses isolées ; l’endoderme est formé de cellules aplaties, à plissements latéraux lignifiés, qui parfois épaississent plus lard et lignifient leurs membranes (Carionia). Le périderme y est sous-épidermique. Le liber et le bois y sont normaux. Outre sa zone criblée périphérique, la moelle renferme tantôt une vingtaine de faisceaux libéroligneux assez gros (Dalenia), tantôt seulement # à 6 fais- ceaux à liber prédominant, n'ayant au centre qu'un ou deux vaisseaux (Carionia). Les Dalenia el Carionia appartiennent donc à la tribu des Mélastomées el à la sous-tribu des Myélodesmes. Triana plaçait ces deux genres dans le groupe des Dissochétées, qui sont des Myélodesmes (loc. cit., p. 88); l’ana- tomie confirme ce classement. Dicellandra. — La tige du Dicellandra Barteri a une section carrée et son écorce renferme à chaque angle un faisceau libéroligneux, qui s'épaissil tout autour à l’aide d’une assise génératrice; l’endoderme y est formé de cellules assez hautes, munies latéralement de petits plissements lignifiés. Le liber et le bois y sont normaux. Outre sa zone criblée périphérique, la moelle contient vers le centre 2 ou 3 faisceaux libéroligneux. Le Dicellandra est donc une Mélastomée de la sous-tribu des Derrmomyélo- desmes. Triana le classait, comme les deux geures précédents, dans les Dis- sochétées, qui sont des Myélodesmes. Il doit en être retiré el, puisqu'il est d'Afrique, rangé dans les Osbeckiées (loc. cit., p. 86). Opisthocentra. — La tige de l’'Opisthocentra clidemioides a une écorce dé- pourvue de faisceaux libéroligneux, avec un endoderme à cellules plates, munies latéralement de plissements lignifiés. Le liber et le bois sont nor- maux. Le tissu criblé périmédullaire est strictement limité à la pointe des faisceaux libéroligneux. La moelle elle-même est entièrement dépourvue de faisceaux surnuméraires, soit libériens, soit libéroligneux. L'Opisthocentra est donc une Mélastomée de la sous-tribu des Adesmes. Triana plaçait ce genre dans les Mérianiées, qui sont des Myélodesmes. Il doit en être extrait et, puisqu'il est du Brésil, classé dans les Loreyées (loc. cit., p. 89). En résumé, des 4 genres monotypes nouvellement étudiés 2 (Dalenia el Carionia) subissent l'épreuve anatomique saus changer de place, tandis que les 2 autres (Dicellandra et Opisthocentra) doivent, à la suite de cette épreuve, entrer désormais dans d'autres sous-tribus, le premier parmi les Dermomyélodesmes chez les Osbeckiées, le second parmi les Adesmes chez les Loreyées. Le lecteur voudra bien introduire cette petite modification dans la liste générale des genres (p. 86 et suiv.). Restent les 5 genres : Lithobium, Monolena, Pleiachiton, Catocoryne et Plethiandra, sur la vraie place desquels Fanatomie n'a pas encore slatué. Il est à désirer que cette petite lacune puisse être bientôt comblée. TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANS CE VOLUME Nouvelles recherches sur l’origine des grains d'amidon et des grains déchlorophyile-par:ME:Belzung..t.s.… Sur la structure et les affinités des Mémécylées, par M. Ph. van Tie- CITE de A R MRINRS ANR ARR es PRET et Sen Un pion Recherches sur la croissance terminale de la tige et de la feuille chez:les\Graminées, par M. H. Douljot.::....111.. 70... Sur les feuilles de quelques Monocotylédones aquatiques, par M. C. SAUVE DE Re ane norte de dunes mia nite ce © Din ue eine Recherches sur les nœuds et les entre-nœuds de la tige des Dicotylé- dones pat Mir A Pret ME NE pure nr A RS RENE see Addition aux recherches sur la structure et les affinités des Mélasto- macées, par M. Ph. van Tieghem TABLE DES MATIÈRES PAR NOMS D'AUTEURS BELzuNG (E.). — Nouvelles re- SAUVAGEAU(C.).— Sur les feuilles cherches sur l'origine des de quelques Monocotylédones grains d'amidon et des grains aquatiques. "re ARPennrr deschlorophylle- .:....-.1... 5e : ÿ D Se Re TiecHEu (Ph. van). — Sur la a aie ete structure et les aftinités des a Cr mit Pre M ue LU : Mémécylées: 204), nt tige el de la feuille chez les Graminées CN SE DEL OL HN MEET 93 TiEGHEM (Ph. van). rte) Addi- Pruner (A.). — Recherches sur tion aux recherches sur la les nœuds et les entre-nœuds structure et les affinités des de la tige des Dicotylédones.. 3741. Mélastomacées ......,...... 103 TABLE DES PLANCHES ET DES FIGURES DANS LE TEXTE CONTENUES DANS CE VOLUME Planche 1. — Origine des grains d’amidon. Planche 2. — Structure des Mémécylées. Planche 3. — Croissance terminale des Graminées. Planche 4 à 7. — Structure des nœuds et entre-nœuds. Figures dans le texte 1 à 63. — Structure de la feuille des Monocotylé- dones aquatiques. À LA ‘5 L - € re > > { 27 Ann, des Seine. rat. 7 A J'erte Pot. Tome 13, PL .1 & « Belxung del. ÆHunely ve Oréqui e des ,gjrains d'anudon et de ch lorophytle. € 1, 6, 8.,,9.l'haseolus vulgaris, 2,6, Faba vulgaris, | ï D Zupinus elegans,; 4,5, 7, Les um SaAUvUIR, 20, 11,19, Lupinus albus ; 12, lhaséolus maulkflorus ê EE EC ER CNE RS TOP ES JE : 7 D Hnin. des Seieñc. nat. 7e d'érte . Pot-Llome 13, LL. 2. ÈS C5 02 = y AU) AU Ph. van Treghem del, J'ructure des Mém eeylees Le Ann, des Setene. nat. réa J'erce. Pot. Tome 17, LL.3. Æ Douliot del. Ilimely se. re Jommel de da ge des Graminees. € . 4 Pot. Tome 13, PE Ann.des Jetenc. nat. 7 Serre. a LE ni 5 Aimely ve. { Vites vinifera 11-58) Aristolochta Clematilts 1027 |. ME. ‘A,Pruncé del, lé té Ann. des Jetenc.: nat. 7 2 J'érce., Bot. Tome 13, LU. 9. Si ee se CES Rs en (Es = . PE KT û cr (y D: x 0 1 à Og À À & : RP TT LEE PR CUT ON wi TUPTDIDIIITE © \T & vao e KX “ Se TE 0 \ | | Nes # Press TS AN A.Prunet del, Himely se. Clematis tabulosa / 8.10 } Canartna campanulata [2-14 - É / Cornus sanquinea,15- Ue ercés Jéiquastrum, 10. . € LP, PL : one ok. Ann. des Seiene. nat. 7° Jerce ©. GAU SE Ge OCR mp, HR — Mrsaas ot STE Or OF sue S LC imely A, Îrunet del, _ 21). P erIp lca græca [17-19 ) 2 S'éum Sésartm / 20 ARTE Ann. des Seiene. nat. 7° Série. Loi Tome 13, F1. 7: 2,9 TN a SR VS %\ Ÿ ne co 9 et (@) O D} Roi SO af, A.?runel del, É Aimely se. J'eum Sésarum /22- 23) Ruelliax varians [2425 ). Zéyphus vulgaris /26- 29 }. UP PU OURS CA EE SN EE A SOON IC RIRE EST SO RGO IS SR IA