LA ANA De APCE ETAT MARNE MAX RO DA } A ET A ANA AE MAR Hi R RO ALI i RME RENTE RE a AE NAN NAN \ hihi SA We eut Ki AR RTAL ETAT jt ii eu HR BRU AA FU AD ss dt SMART DRARIQTE PAS CA) si fi 1) 4 CA MAS nul PLs [UT pe RENE AN et % Re AU Es wir & He A qu tres ae 1f ; LH HOME ME FE D) DELA, HE ZA MERE PE IA CA 1 tal 4 anus; 114 DONUIDIOR Dee 15} 1 JR | | RAUTES uf PNPRTA | fin) TR RAD MMN LA AO OC ET TR POLTE AO ME mA CH AE he pe RAA ARE } (à F4, ARRET i4 CAD dk ja nl Voir 4, LA CORNE PA A PR A TO TNA MAT M à MU NH ïl | DAC ANIEETIEIE 6) ANA LU AUS NE AOL TER Hi ANT MASNTE 1 \ | K tn 10 WI] j ‘M1 i | M MN La ' | mms > LT — = 7 ff W ÿ k /&SS ADN (42%: 5) { / (| \ [ / Libruxn of tbe Museum Or COMPARATIVE ZOOLOGY, AT HARVARD COLLEGE, CAMBRIDGE, MASS. Hounded bp private subscription, in 1861. SAISIR SIN SAS Deposited by ALEX. AGASSIZ. 1 No. 10 ; / or he RON Mie Ve f Fe ’ ES nu ni LI TRATS LENS TTL ; ve ‘ : i À \ L " 0 e à ll 10 î in à ) " ! Ÿ HOT M M hi b "nl ri A | 2 vou 1 / {l 1 > L À ' 3 4 ï l ÿ | 1 ‘ À M FOUR | | ; ne Ü 0) ' L L a » ‘ : . \ ne ÿ, L À / 4 mia 3 { = L t to . AT ; 2 Q [l : “ à ANNALES DES SCIENCES NATURELLES SEPTIÈME SÉRIE ZLOOLOGIE 14731, -- Imprimeries réunies, A, rue Mignon, 2, Paris. ANNALES DES SUIENCES NATURELLES ZOOLOGIE ET PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L’ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. A. MILNE EDWARDS TOME VI PARIS G. MASSON, EDITEUR LIBRAIRE DE L'’ACADÉMIE DE MÉDECINE DE PARIS Boulevard Saint-Germain et rue de l’Époron EN FACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 71888 dr _ « (O LM { LITE THIN ft { COMPARAISONS ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE Par 1e D' P.-C. AMANS. INTRODUCTION Un petit nombre de naturalistes ont étudié la locomotion des animaux aquatiques. On n’a jamais tenté de comparer la totalité des animaux aquatiques; on à bien été frappé par la diversité des formes, mais on a oublié d’éclareir et de trier les différences, les points communs. Il y a des mémoires sur tel ou tel organe, telle ou telle fonction, mais aucun travail d'ensemble. On a imaginé des théories, qui pèchent pour vouloir être trop générales ; ceux qui les ont émises auraient eu plus de réserve, s’ils avaient examiné plus à fond l’infinie variété de moyens dont disposent les animaux aquatiques. Le nombre de faits connus n’est pas encore assez grand pour fonder une solide théorie sur la locomotion; 1l reste encore beaucoup à observer avant de disserter. La variété des appareils aquatiques est bien plus grande que celle des aériens. L’étude des derniers (1) nous avait con- duit à un tableau unique, résumant l’ensemble des facteurs constants, nécessaires et suffisants à la locomotion aérienne. Ce tableau était assez chargé, c’est-à-dire que le volatile le moins bien doué présentait un grand nombre de traits (1) Comparaisons des organes du vol dans la série animale, par P.-C. Amans. — Thèse présentée à la Faculté des sciences de Paris, 1885. Annales des sciences naturelles. ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI {, — ART, N°. 10 P.-C. AMANS. communs avec le plus parfait. Une telle analogie n'existe pas entre les animaux aquatiques; il y a un abime de structure mécanique entre le premier et le dernier d’entre eux, à l’ex- clusion bien entendu de ceux qui ont un ‘déplacement insigni- fiant. Le Criquet a de nombreux points de comparaison avec l’Hirondelle; par contre, quelle différence entre une Méduse el un Marsouin! Ces derniers ont sans doute un principe com- mun : une masse à surface convexe d’un côlé, concave de l’autre, frappant l’eau par sa concavité, et se dirigeant con- vexité en avant ; en dehors de ce principe commun, on ne peut noter que de profondes différences. À défaut d’un tableau unique, je pourrai dresser une série de tableaux dans chacun des deux grands groupes Vertébrés et Invertébrés. Je signalerai, chemin faisant, les particularités anatomiques intéressant l’anatomie générale; je comparerar les meilleurs nageurs dans chacun de ces groupes, et mon but sera atteint Si je puis donner un type de machine, réunissant les meilleures conditions de stabilité et de vitesse, ces deux irréconciliables facteurs. Étre utile à la fois à l’anatomiste et au mécanicien, telle est mon ambition. Je puis rassurer d'avance les lecteurs peu familiarisés avec les procédés et le langage mathématiques. Mon travail est avant tout un chapitre de morphologie générale et non une dissertation mécanique. Le jour est encore loin où lon pour- rait rigoureusement traduire les données anatomiques en langage mécanique. Si j’emploie parfois des termes de géomé- trie, c’est pour la commodité, pour la précision de la descrip- tion. Il ne faudrait pas les prendre tous dans leur rigueur mathématique; en parlant de sinussoïde, hyperboloïde, ete., je n'ai pas en vue d’équation déterminée; J'entends seulement désigner les lignes ou surfaces qui se rapprochent le plus des objets étudiés. Je ne me suis permis de néologisme qu’à la dernière extrémité, ne trouvant nulle part de termes conve- nables soit en anatomie, soit en mathématiques. Le plan de mon travail est original; je m'en suis assuré par de nombreuses lectures; j'aurai néanmoins à citer et à com- ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 3 menter des observations, des vues intéressantes, publiées çà et là, dans diverses langues. La connaissance des langues étran- gères devient de plus en plus impérieuse ; les langues latines et germaines ne nous suffisent plus : la connaissance de la langue russe devient, sinon indispensable, du moins très utile au naturaliste. Certains ouvrages sont traduits, mais la majo- rité de ceux qui nous intéressent ne le sont pas. Les principaux faits de mon travail sont illustrés par plus de deux cents dessins. Je répéterai ici ce que je disais à propos des études de locomotion aérienne : le crayon est indispen- sable au naturaliste, mais les outils de sculpture sont encore plus utiles. La reproduction artificielle des animaux par des modèles en cire, paraffine, bois, bronze, ete., la manipulation de ces modèles force l'attention à s'arrêter sur des formes géo- métriques, des conditions d'équilibre, qui sans ‘cela passe- raient inaperçues. C’est en outre la façon la plus claire d’ex- poser ses idées, J'ai hésité longtemps avant de publier ces observations; J'aurais voulu présenter un travail beaucoup plus complet, à conclusions plus nettes, plus précises. Mais je ne suis pas très sûr d'améliorer cette publication, en la retardant de jour en jour. Le défaut de matières premières, d'outillage, un isole- ment presque absolu paralysent souvent mes efforts, m’empê- chent d'arriver aux solutions désirées. Je livre donc au public cette première partie de mon travail, avec ses lacunes et ses imperfections; je la recommande spécialement aux médita- tions des chercheurs plus fortunés et mieux outillés que moi. PLAN DU TRAVAIL Une masse protoplasmique, semi-granuleuse, semi-liquide, à pseudopodes mobiles, représente le type le plus ancien et le plus simple des animaux aquatiques. L’Amibe se fabrique à volonté des organes de locomotion; on peut bien donner ce nom aux prolongements contractiles de la masse. Ils se for- ment et disparaissent au gré de l’animal et du milieu. En 4 P.-C. AMANS. adhérant sur le milieu, ils produisent une sorte de reptation, un mode inférieur de natation. À un degré plus élevé, la cellule prend un squelette externe, une membrane d’enveloppe recouverte de cils (sic Proto- zoaires, Larves ciliées). La forme du corps et la disposition des cils varient à l’infini. Les cils produisent les mouvements les plus divers, en ligne droite, brisée, spiralée, suivant leur dis- position et leur mode d’action. Le mouvement de ces cils est conique ; il a été comparé à celui d’un bras faisant le moulinet dans son articulation. Quel que soit le mode de fixation de ce cil, il n’est pas absolument libre à la base, il est lié à son sup- port, il ne saurait donc rouler toujours dans le même sens autour de son propre axe. Son mouvement est un mouvement alternatif. | Le mouvement circulaire est le plus emplové dans les machines arüficielles ; 1l est exceptionnel dans les machines animales, et, lorsqu'il existe, c’est plutôt un mouvement résul- tant que composant. Ainsi le corps entier peut prendre un mouvement giratoire avec trajectoire circulaire ou spirale (larves ciliées, rotifères, certains poissons); mais les mouve- ments composants des cils ou nageoires sont alternatifs (1). Les cils sont implantés sur la membrane d’enveloppe et se remuent sans l’aide d'aucun muscle. On peut les observer en très petit nombre dans les spermatozoïdes et les zoospores de certaines Algues. (1) Certains mécaniciens et ingénieurs (Dupuy de Lhome en tête) ont fait du mouvement circulaire continu un type de supériorité qui n’est pas atteint dans la série animale. J’ignore sur quoi ils se basent pour avancer cette supériorité. Un véhicule est supérieur à un autre, lorsque, à poids égal, 1l donne plus de vitesse et plus de variété dans la forme du mouvement. L'avantage de Ja com- paraison reste à la Nature. Du reste, cette distinction en mouvement circulaire et mouvement alternatif est oiseuse. Nous avons aussi des mouvements alter- natifs dans le jeu des pistons des machines à vapeur, dans la transmission des courants électriques. Toutes ces alternances sont elles-mêmes le résultat d'actions moléculaires. De quelle forme sont ces mouvements moléculaires? La question ainsi ramenée à l’œuf est tout aussi insoluble pour une machine inor- ganique que pour un être animé. Un fait certain, c’est que les animaux n'em- ploient jamais le cercle et la ligne droite. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 5 La cellule musculaire est un produit de différenciation plus élevé que le cl. On à cru voir un muscle dans le pied des Vorticelles, et Rouget en a fait le prototype de la fibre muscu- laire. Sa théorie a été vivement discutée et finalement délais- sée. Je resterai en dehors de la discussion, mais j’arrêterai un instant l’attention sur le pied de la Vorticelle. Le mouvement de retrait est si rapide qu’on ne peut analyser exactement le phénomène; comment pourrait-on l’interpréter ? 4° Le pied est élastique ; la tête, grâce aux cils, tourne rapi- dement sur elle-même, ce qui amène un raccourcissement du pied avec disposition en spirale. Expérimentalement, on obtient ce résultat avec un fil en caoutchouc. 2° Le pied est une colonne élastique creuse avec une zone d’amincissement en spirale. L'intérieur est parcouru par un protoplasme. À l’état normal, il y à équilibre entre la tension du protoplasme et les parois de la colonne; mais la contrac- tion du protoplasme détruit cet équilibre, et la tige s’incurve en chaque point du côté de plus faible pression, c’est-à-dire du côté de la zone d’amineissement en spirale. On peut se faire une idée de cette deuxième hypothèse par l'expérience sui- vante : Je prends un tube élastique, cylindrique. À un niveau quelconque du cylindre, Je fais une zone d’amincissement, embrassant la plus grande partie du pourtour; j'obtiens ainsi un dédoublement du cylindre en deux branches, séparées par cette zone, et n'étant en continuité de substance que par une faible partie du pourtour. Cette partie respectée par lamin- cissement va Jouer le rèle d’articulation ; aux moindres varia- tions de pression que je produis dans le tube, les deux branches se fléchissent l’une sur lPautre. En augmentant le nombre de ces sortes d’articulations, en variant leur position, je puis reproduire les trajectoires les plus fantaisistes à deux ou trois dimensions. Nous indiquons seulement ces deux procédés expérimen- taux; nous ignorons absolument si le pied de la Vorticelle se comporte ainsi, encore moins s’il doit être pris comme type de 6 P.-C. AMAXNS. la fibre musculaire plus perfectionnée, soit lisse, soit striée. Robin a dessiné chez les Vers des fibres lisses, présentant au repos l'aspect rubané, à bords parallèles; en contraction, on a des renflements, des étranglements; dans ces renflements, la fibre se courbe en spirale. Il y a donc une certaine analogie de contraction entre ces fibres et le pied de la Vorticelle. L’analogie devient plus difficile à maintenir avec la fibre striée. On est encore loin d’être d'accord sur la signification morphologique des striés (1). Les uns y voient l'indice de deux substances absolument distinctes dans le myosome, les autres un phénomène post mortem. Ranvier semble un moment par- tisan des sarcous elements, puis prend la fibrille primitive comme unité de muscle. Sa critique de la théorie de Rouget n’est pas convaincante. « M. Rouget, dit-il, devrait d’abord prouver que la fibre musculaire est en spirale. Serait-ce même exact, on ne comprendrait pas le raccourcissement. » Sur ce dernier point, nous serions d’un tout autre avis; comme je l’ai expérimenté, il est facile d'obtenir le raccoureissement d'une fibre rectiligne par sa transformation totale ou partielle en fibre spirale (2). Mais, je le répète, j'ignore si les choses se passent ainsi pour la fibre musculaire. Résumons les faits. À l’origine, la force musculaire n’a pas de foyer spécial; elle réside dans une masse protoplasmique, ayant la propriété de se contracter. Plus tard, apparaissent (1) Voy. pour plus de détails les Traités généraux d’histologie et d’anatomie générale. (2) Un troisième mode de raccourcissement est le suivant. Je forme une colonne au moyen de disques empilés les uns au-dessus des autres ; chacun de ces disques forme un électro-aimant relié à ses voisins par le même fil qui ferme le circuit. Leur distance est réglée de façon que l’élasticité du fil suffise à maintenir les pôles à une distance minime les uns des autres. Le courant venant à passer, la série des disques s’empile les uns au-dessus des autres; la fibre se raccourcit ; elle revient à sa longueur primitive, lorsque le courant cesse. On a ainsi une colonne vibrante d’un nouveau genre; dix petites bobines, distantes de 1 millimètre, donnent un raccourcissement de 4 centimètre, ce qu'il serait impossible à atteindre avec deux seules bobines équivalentes aux dix (et, en effet. l’attraction décroît comme le carré des dis- tances). ARTICLE N° 4. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIOQUE. 7 des organes spéciaux, membranes à cellules vibratiles, cellules ciliées, cellules musculaires, fibres lisses, fibres striées. Mal- ré toutes les théories avancées pour expliquer tel ou tel aspect, la question n’a guère dépassé l’axiome suivant : « la substance musculaire se contracte, parce qu'elle est contrac- tile. » Le mouvement le plus simple se réduit à un courant de va- et-vient exécuté par les oranulations protoplasmiques et le liquide qui les charrie. Indépendamment des actions phy- siques et chimiques, ce courant obéit à cette sorte de force spéciale aux êtres vivants, force confuse dans les organismes inférieurs, peu distincte des forces purement physiques et chimiques. Gette force se traduirait par des mouvements alter- natifs, des pseudopodes, des eils, du corps tout entier. Ces mouvements sont plus ou moins réflexes, intelligents ou volontaires; sûrement, ils sont alternatifs. Même chez les Rotifères et les Protozoaires qui tournent sur eux-mêmes, la trajectoire n’est pas circulaire, mais ondulée. En général, les bons nageurs ont le corps allongé, et ils avancent par les ondulations de ce corps. Nous verrons les nombreux moyens employés soit par les Invertébrés, soit par les Vertébrés. J’ai tâäché chaque fois de réaliser mécaniquement les dispositions principales, afin d’éelaireir et d'agrandir le sujet. Nous avons vu plus haut divers moyens de faire vibrer une droite. Dans le cas de la Vorticelle comme dans celui des bons nageurs, le mouvement résultant est assez comparable à un mouvement spiralé. Le cylindre sur lequel serait tracée la spi- rale est presque circulaire chez la Vorticelle; celui décrit par la queue des bons nageurs est très aplati, mais par suite de la résistance de l’eau, la spirale ne se transforme jamais en zig- zag plan. Il y a toujours un peu de roulis et de tangage, par suite de cette spirale. Le centre de gravité roule autour de l’axe du mouvement; ce balancement est inséparable d’une locomotion aquatique. Il importe seulement d’en étudier les conditions, de voir les organes qui le modifient. La spirale décrite par la Nature est Le résultat d’une vibra- 8 P,-C. AMANS. ton et non d’un roulement cireulaire. Il faut donc se garder d’assimiler cette spirale à celle qui est décrite par un point d’une hélice de bateau. Si la Nature préfère vibrer que rouler, il y a sans doute tout intérêt : économie de force motrice et souplesse de mouvement. Au-dessus des organes inférieurs à prolongements ami- boiïdes ou cils, nous trouvons une infinité de types aquatiques parmi les Cœlentérés, Vers, Mollusques, Tuniciers, Arthro- podes et Vertébrés. Au point de vue mécanique, on peut les ranger tous en deux grands groupes : 1° les animaux à organes érectiles ; ? les animaux à leviers articulés. Le Mollusque, par exemple, nous offre un type de machine érectile : du liquide est poussé dans tel ou tel organe, et en modifie la forme au mieux des intérêts de la locomotion. Chez un poisson, au contraire, la charpente de l'organe à une forme indépendante du système vasculaire; il se compose de tiges articulées, rigides ou élastiques, mais non érectiles. Certains animaux ont des organes mixtes ; ainsi le masque des Odonates est formé de plusieurs tiges articulées, mais l’intérieur est creux, communique avec le liquide de la cavité sénérale. Ce liquide peut être poussé dans l’intérieur des tiges, srâce à celte espèce de piston, que J'ai découvert et nommé diaphragme (1). La flexion est produite par des muscles, l’ex- tension par une poussée liquide. Le masque des Odonates est donc un appareil mixte, semi-articulé, semi-érectile. Je ne m’oceuperai dans ce travail que des animaux à leviers articulés. (1) Association française pour l'avancement des sciences. Alger, 1581, — Recherches anatomiques et physiologiques sur les larves d’Eschna grandis (Revue des sciences naturelles. Montpellier, 1881). ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 9 POISSONS ÏJ. — TYPE SCYLLIUM. Je débute par des Poissons cartilagineux, par des Plagio- stomes. Cette classe renferme deux types très différents d’al- lure, les Squales et les Raies. Le Squale a le corps allongé, l'allure vive et rapide; la Raiïe a le corps plat et des mouve- ments lents. Une analyse détaillée de chacun de ces types nous permettra de juger la elasse tout entière. Prenons le Scyllium Catulus (le vulgaire Cat de mar de nos côtes). Avant de décrire sa forme extérieure, quelques défini- tions sont indispensables. Presque tous les animaux aquatiques dont je vais parler ont une forme ovoide, allongée d'avant en arrière. La surface externe de cet ovoide a un seul plan de symétrie, le plan vertical de symétrie bilatérale : la moitié droite est égale à la gauche (voy. pl. LE, fig. 18). L’intersection de la surface par ce plan donne le profil. La courbe de profil peut toujours se représenter par une figure fermée, une sorte d’ovale dissymétrique en tous sens. Le plus grand diamètre ab du profil forme le grand axe de l’ovoide ou axe longitudinal, ou axe tout court. Le front est la courbe de contact du cylindre, tangent à l'ovoide parallèlement au grand axe «b. L’horizon est la courbe de contact du cylindre circonserit verticalement. L’horizon et le profil se coupent aux points a et b. Ces points sont les sommet antérieur et sommet postérieur de l’ovoide. L’horizon et le front se coupent aux points f et f”, symétriques par rapport au plan de profil ; ce sont les sommets latéraux. Le front et le profil se coupent aux points c et d, ce sont les sommet dorsal et sommet ventral. La droite ed, qui Joint les sommets dorsal et ventral, consti- tue le diumètre vertical ou dorso-ventral. 10 P.-C. AMANS. La droite /f', qui joint les sommets latéraux, constitue le diamètre latéral. | La perpendiculaire ch, abaissée du sommet dorsal sur l’axe, est la hauteur dorsale; la perpendiculaire de, abaïssée du sommet ventral sur le même axe, est la hauteur ventrale (de). La hauteur de l’ovoïde est la somme des hauteurs dorsale et ventrale. Il ne faut pas confondre cette longueur avec le dia- mètre vertical cd. Chez le Scyllium, la hauteur dorsale est > la hauteur ven- trale. La hauteur totale est à la longueur de l’axe comme 1 est à 45; le diamètre latéral est à l’axe comme 1 à 10. Le profil et l'horizon ont gros bout en avant (fig. 4 et 2). La partie antérieure de l’animal a la face inférieure aplatie; cet aplatissement est augmenté par une paire de grandes nageoires, presque horizontales. L’axe vertébral est plus facile à courber de haut en bas (fig. 4) que de bas en haut, dans la partie postérieure; c’est l’inverse dans la partie céphalique. Les figures 1-7 montrent que le maximum de flexion a lieu de gauche à droite. Je resterai pour le moment très réservé sur les formes exactes de l'horizon et du front; elles sont difficiles à déterminer à cause de la grande flexibilité de toutes les parties de l’animal. En tous cas, on voit aisément que ce ne sont pas des courbes planes ; l'horizon forme de chaque côté une sinussoïde à plusieurs branches, et le front donne en projection la figure F (pl. LD), un ovale à gros bout inférieur. Axe vertébral. — I est composé de nombreuses vertèbres, réunies entre elles par soudure cartilagineuse élastique. Le corps de la vertèbre a la forme d'une bobine à extrémités creuses, hémisphériques. Le méridien horizontal est plus incurvé que le vertical, d’où 1l résulte que la flexion est plus srande de droite à gauche que de haut en bas. La partie cen- trale, rétrécie du corps de la vertèbre est la plus dure, la plus cassante. Dans la région abdominale, les apophyses inférieures diver- gent transversalement. À ce niveau, la section frontale peut se ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 11 schématiser par un ovale, à gros bout inférieur. Ce gros bout porte les apophyses transversales, tandis que le bout effilé se termine par l’apophyse épineuse. Dans la région post-anale, le schéma change; l’ovale dys- symétrique devient symétrique, lenticulaire; les apophyses transverses se soudent chacune avec sa symétrique, ne restant séparées qu'à la base pour former le canal vasculaire. La différence du schéma dans ces deux régions modifie le sens de la flexion, la flexion est gènée dans la région abdo- minale; elle a son maximum de droite à gauche dans la région post-anale. Ces conclusions reposent sur le fait d’obser- vation suivant : Une lame élastique aplatie a son maximum de flexion de droite à gauche de l'aplatissement. La moelle est logée dans un canal, formé par des apophyses en forme de double croix. Le pied de la eroix repose sur le dos de la bobine; l'extrémité opposée va à la rencontre de sa symétrique, les quatre autres extrémités de la croix s’unissent à celles des apophyses précédente et suivante. La colonne vertébrale est fléchie par le système des #uscles latéraux. La disposition de ces muscles est difficile à suivre par suite du grand nombre de couches et d'inscriptions tendi- neuses. La description de Gegenbaur et les dessins de Müller peuvent en donner une idée, mais une idée trop générale. Gegenbaur distingue quatre muscles latéraux, les deux plus volumineux médians, formés de cônes complets, concentriques à pointe en avant, les deux autres, le dorsal et le ventral, for- més de cônes incomplets à pointe en arrière. En est-il réelle- ment ainsi ? Quels sont les vraies directions des fibres mus- culaires, leurs points d'insertion, et les raisons mécaniques des inscriptions téndineuses ? La partie postérieure du Scyllium en arrière du maitre couple forme une sorte de cône lenticulaire, dont la charpente est ainsi formée : 1° au centre, un axe solide, l’axe vertébral, décrit plus haut; % à la périphérie, une coque rugueuse, épaisse, c’est la peau (cette peau est munie de piquants 12 P.-C. AMANS. coniques, à sommet tourné en arrière, ce qui favorise la pro- pulsion, mais gêne le recul) ; 3° du centre à la périphérie deux systèmes d’aponévroses, aux cloisons fibreuses : a. Un système de cloisons longitudinales, sortes de méri- diens du cône lenticulaire ; | b. Un système de cloisons transversales, sortes de parallèles du cône. Les principales cloisons longitudinales sont au nombre de quatre : deux dans le plan vertical de profil, une dorsale etune ventrale ; deux dans un plan horizontal, une à droite, l’autre à gauche, les premières sont planes, les secondes légèrement courbes à la facon du contour d'horizon. Les cloisons transversales forment des surfaces courbes, sinueuses, à la façon du contour de front. Ge sont elles qui à la périphérie figurent les inscriptions tendineuses, en forme de È; les branches médianes du È convergent vers la tête, de même la supérieure avec sa symétrique, et l’inférieure avec sa symé- trique pendant que les sommets intermédiaires , # sont tour- nés en arrière (fig. 17). La forme des È varie chez les Poissons ; mais un fait con- stant, c’est la convexité en avant des branches médianes. C’est là une fatalité géométrique, un cas particulier du raccorde- ment ou plissement des solides. Aïnsi un plan se plisse suivant une droite, un cylindre cireu- laire suivant une ellipse, un cône suivant une courbe à econ- vexité tournée vers la base (comme les inscriptions tendi- neuses), une surface courbe suivant une ligne sinueuse (se sinussoïde de l'aile d’une Cigale). Si donc on voulait faciliter la flexion ou la courbure d’un de ces corps, il faudrait au préa- lable y placer des centres de flexion, des septa conformes à ces lignes de plissements. La région postérieure du corps des poissons est une sorte de cône destiné à se glisser de haut en bas, et surtout de droite à gauche; la forme des cloisons transversales est en rapport intime avec la forme du cône et le sens des plissements. On est nettement frappé de ce rapport en observant les lignes ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 15 de rupture ou de flexion de surfaces planes, cylindriques, coniques, etc. Nageoire pectorale. — Le squelette de la nageoire pectorale est formé de deux parties : 1° ceinture scapulaire; 2° nageoire proprement dite. 1° La ceinture scapulaire forme un are épais en arrière des ares branchiaux. L’arc a son sommet sur la face inférieure, en arrière du plancher buccal; les branches se dirigent de bas en haut, et d'avant en arrière. Les nageoires s’articulent vers le milieu des branches avec un axe moyen de roulement moins incliné que les branches sur l’axe du corps: les branches sont inclinées à 45 degrés, l'articulation à 80 degrés. Étudions une des moitiés de la ceinture, c’est-à-dire une des branches de l'arc. Chaque branche peut se subdiviser en trois parties : 1° une partie inférieure, aplatie de haut en bas, à bord antérieur épais ; 2 une extrémité spatuliforme, aplatie de dedans en dehors ; 3° une partie moyenne, massive, sur laquelle s’articule la nageoire. Dans la partie inférieure on peut distinguer une face supérieure et une face inférieure ; la face supérieure devient interne dans la partie moyenne, l’inférieure se soulève pour former une sorte de montagne pyramidale à quatre ver- sants, aplatie d'avant en arrière. L'un des grands versants regarde en avant et en dehors, l’autre versant en arrière et en dedans; entre les deux, en bas, un mince versant horizontal, et en haut un versant vertical. C’est ce dernier qui s'articule avec la nageoire. La surface articulaire est volumineuse ; elle est au sommet de la pyramide, se dirige en s’effilant sur Parète limitrophe du versant antérieur; elle a une forme de raquette, la queue en l'air. Par rapport à l’axe vertébral, elle est dirigée de bas en haut, en avant et en dehors (à 25 degrés environ en avant et en dehors). Le versant antérieur est légèrement concave, à contour triangulaire ; il est percé à son centre d’un large trou. Ce trou est l’ouverture d’un canal qui en traversant la pyra- mide sv bifurque et débouche sur le versant postérieur par 14 P.-C. AMANS. deux couvertures séparées. Ge dernier versant est plutôt con- vexe. La nageoire proprement dite se compose d’un grand nombre de cartilages, formant un organe aplati, triangulaire, collé aux flancs par un de ses côtés, « bc. Ce côté est le plus épais ; l’épaisseur diminue graduellement en s’éloignant de ce côté vers la périphérie (pl. E, fig. 5). La base est formée de trois cartilages qu’on a nommés le Pro, le Meso, et le Metapteryqium (pl. F, fig. 3). Le Metaptery- gium p est le plus long ; 1l a la forme d'un scalpel à bout ar- rondi; le dos de la lame est large, plat, convexe, tourné vers l'axe vertébral. L’extrémité du manche présente une surface arrondie, s’articulant avec la ceinture ; à ce niveau elle est séparée de la tête articulaire que mesoptérygium par une dépression profonde. Le Mesopteryqium est trois fois plus court, mais plus massif dans sa partie articulaire : c’est le type général de la nageoire, des bords épais à la base, s’amincissant vers la périphérie. La face antérieure est bien plus convexe que la postérieure; sa base s’articule avec la ceinture par une surface concave, ovale à gros bout postérieur. Entre le mésoptérygium et le méta- ptérygium se trouve une lacune en forme de losange allongé, lacune qui est comblée par du tissu fibreux ; elle correspond par sa position à la dépression médiane de Paile des Insectes. Le Propteryqium est mince, triangulaire isocèle; un des côtés s'articule sinueusement avec le mésoptérygium et la première phalange; la base s'articule avec la ceinture par une gouttière tordue. J'insiste sur ce type d’articulation. Une souttière ordinaire est de la forme figure 12; supposons main- tenant qu'on étire les flancs en sens inverse, nous aurons le type de surface qui nous oceupe (pl. !, fig. 9) ou plus schéma- tiquement encore la figure 11, c’est-à-dire une demi-gouttière en avant et à gauche, se raccordant avec une demi-goutttière en arrière et à droite. Les extrémités a et b d’une telle articu- lation proéminent comme des condyles. La gouttière n’est guère complète que dans la zone de raccordement. La tête ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 15 articulaire du mésopté rygium peut aussi se rattacher à ce type d’articulation. La base totale peut être comparée à une gouttière tordue, couronnée par quatre condyles alternes, deux en avant («, b) et deux en arrière (ce', d) (fig. 9). Les autres cartilages sont alignés suivant des rayons con- vergeant vers la base. On peut en décrire trois rangées prinei- pales, séparées les unes des autres par des lignes brisées con- caves vers la base. Les deux premiers de la première rangée sont articulés avec le proto et le mésoptérygium. Le second a la forme d’une main avec ses cinq divisions centrifuges. Il forme avec le mésoptérygium le versant antérieur de la dépres- sion médiane. Après la main viennent huit rayons de moins en moins longs qui s’articulent avec le métaptérygium. Le neuvième est double et séparé du huitième, en haut, par un rayon qui se prolonge jusqu'à la deuxième rangée. Son extré- muité centrifuge est en même temps celle du bord externe de la nageolre. Revenant sur nos pas, nous trouvons la deuxième rangée formée par une douzaine de cartilages bien plus courts. Ils sont liés les uns aux autres suivant des lignes pentagonales dans la région postérieure, hexagonales dans la région anté- rieure. Ceux de la troisième rangée sont au contraire de forme hexagonale en arrière, pentagonale en avant. Ils sont plus courts, plus larges que ceux de la deuxième rangée. On peut y ajouter une quatrième rangée de sept bien plus petits délimitant le bord postérieur de la nageoire. Tous ces cartilages sont liés par des symphyses qui per- mettent une légère flexion. Le sens des flexions est indiqué : 1° par les lignes radiales plus ou moins rectilignes qui con- vergent vers la base articulairede la nageoire ; 2° par les lignes courbes qui coupent les rayons en travers et séparent les quatre rangées de cartilages. Tout ce système de lignes, y compris la base, a une grande importance mécanique. Elles figurent en quelque sorte la résistance habituelle offerte à lanageoire parle liquide ambiant, 16 P.-C. AMANS. Ces lignes changent avec l'organe et le mode de locomotion de l'animal. Peut-être par de nombreuses comparaisons, pour- rons-nous en dégager des lois simples, qui nous permettraient de construire des appareils appropriés à tel ou tel genre de mouvement. Muscles de la nageoire pectorale. — La nageoire est entiè- rement garnie de muscles et de tendons. Elle est fixée au corps non seulement par la base articulaire, mais encore par tout le bord interne du métaptérygium. Un détachement des muscles latéraux du tronc longe son bord interne des deux côtés, en bas et en haut, et va s’insérer sur l'arc ; la branche supérieure s’insère sur la spatule, l’autre sur le sternum. La cemture est maintenue en avant par des muscles qui vont se fixer aux arcs branchiaux et au maxillaire inférieur. Il y a quatre muscles principaux de la nageoire : A. Surface inférieure. — 1. Abaisseur superficiel, à base épaisse, en raquette, qui va en s’élargissant de la base à la périphérie. Son extrémité périphérique se fond en une large aponévrose qui porte les rayons de la nageoire. La base se fixe sur le versant antérieur de la pyramide (x, pl. E, fig. 6). 9. Abaisseur profond (4, fig. 6). — Muscle en éventail, s’in- sère sur les trois basilaires, couvre encore de fibres charnues la première rangée, se perd sur les deux dernières rangées par des fibres tendineuses. B. Surface supérieure. — 3. Élévateur superficiel (x, fig. 5). Moins puissant que l’abaisseur superficiel et d’une forme dif- férente ; sa section de base est triangulaire et non en raquette. Il s’insère à la base sur le versant postérieur de la pyramide, et à la périphérie il se comporte comme antagoniste de l’abais- seur superficiel. 4. Élévateur profond (#', fig. 5). — Positions antagonistes de l’abaisseur profond. On peut distinguer encore les muscles suivants : 9, 6. Deux faisceaux spéciaux au Propteryqium qui le fixent à la crête externe de la ceinture, l’un en haut (0, fig. 13), l’autre en bas (0'). ARTICLE N° 1. ORGANES. DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 17 7. Un accessoire de l’abaisseur superficiel, plus spéciale- ment destiné au mésoptérygium ; il est situé au-dessous de - l'abaisseur 7%" (fig. 6). C’est le faisceau mésoptéryqien. 8, 9. Deux interosseux comblent la dépression médiane ; celui de la face inférieure est plus net qu’à la face supérieure. La nageoire considérée au complet (squelette, muscle, peau) est un solide tétraédrique (A BCS, fig. 13, 14). La face ABC est collée aux flancs (région du Mefapteryqium) ; le sommet S est le sommet externe du Propteryqium. La petite face À B S sert de raccordement entre les deux derniers, l’une inféro-antérieure BGS, l’autre postéro-supérieure A CS. L’arête GS se prolonge, s'étale et constitue la partie la plus large, la plus mobile de la nageoire. Ses mouvements sont sous la dépendance des quatre principaux abaisseurs et éléva- teurs. Les flexions sont indiquées par les lignes radiales et les courbes transversales. La partie charnue finit à peu près vers le milieu de la seconde rangée. Ainsi done, considérée isolé- ment, la membrane de la nageoire a uniquement des mouve- ments d’élévation et d’abaissement autour des courbes qui sont sous-tendues par l’are GS. Mais la membrane n’est pas seule mobile. Le Metapteryqium à un certain degré de mobilité; il est seu- lement côtoyé par les détachements des muscles latéraux et bridé par la peau, organe souple et élastique. Sous l’in- fluence des abaisseurs et élévateurs superficiels, il peut tour- ner légèrement sur son articulation avec la pyramide. Le Mesopteryqum et Propteryqium ont aussi la possibilité de tourner sur la ceinture ; le Propteryqium a mème des muscles propres, cités plus haut. En présence de cette multiplicité d’axes de roulement et de flexion, 1l est difficile de conjecturer la forme du mouvement total. On peut s’en faire une idée en comparant la nageoire à un hyperboloïde construit de la manière suivante : AB et ÿe sont deux droites non situées dans un même plan (pl. LE, fig. 15) ; AB représente l'articulation de la ceinture, te le bord le plus ANN. £C. NAT., ZOOL., 1888. NID MARTIN" 1. 18 P.-C. AMANS. mince. Je joins ces deux branches par Ae Bi et des droites intermédiaires. Cette espèce d’éventail diffère essentiellement des ailes par la quasi-fixation de Bi; ses principaux déplace- ments sont de haut en bas, mais non d’avant en arrière. Nageoire abdominale. — Le squelette se compose d’un car- tilage médian impair, avec lequel s’articulent les cartilages de la nageoire proprement dite. Il y a deux cartilages basilaires, l’interne quatre fois plus long que l’externe (fig. 16). 1. Le basilaire externe S'articule avec le cartülage médian, qui forme le bassin, par une ellipsoïdarthrose ; c’est le médian qui forme le condyle, avec une convexité peu prononcée. Les autres articulations ont de même une courbure peu pronon- cée, ce qui dénote des mouvements peu étendus. 9. Le basilaire interne à la forme d’une cheville à section quadrilatère. La direction générale est concave en dedans. Son arête externe est creusée en escalier, destiné à recevoir les rayons de la première rangée. Ceux-ci ont, grâce à cette articulation, un léger mouvement d’arrière en avant et de haut en bas. Le pénultième est plus court, mais plus gros que les précédents. Il est à trois phalanges ; les autres en ont deux seulement. Le pénultième est juxtaposé à son symétrique ; cette juxtaposition entraine celle des bords internes des na- seoires, formant ainsi le fond d’une vallée qui conduit à l'anus. Les muscles de la nageoire sont peu épais; celui de la face inférieure est plus puissant que celui de la face supérieure. Le muscle inférieur s'insère sur le cartilage médian et sur une forte membrane fibreuse, qui tapisse tout l’espace compris entre le médian et les basilaires internes ; 1} est groupé par faisceaux parallèles aux cartilages de la première rangée. Chemin faisant, ces faisceaux sont grossis par ceux qui sin- sèrentsur le basilaire interne ; celles-ci sont fortement accolées à Ja première rangée. La zone striée finit au niveau de sépara- ton de la première et deuxième rangée ; à ce niveau commence la membrane à nervures. Le muscle supérieur part directement du basilaire interne. Nugeoires terminales. —CGe sont les nageoires dorsale, anale ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 1%) et caudale. Leur importance est secondaire à côté de la queue avec ses muscles latéraux. Le squelette de la première nageoire dorsale se compose de 14-15 rayons cartilagineux, implantés sur la colonne ver- tébrale. Chaque rayon se compose lui-même de trois parties : une basilaire, une médiane, la plus longue, et une distale, la plus petite. Une quatrième rangée complète les rayons (de 3 à 10). Le treizième n’a que deux parties. Le squelette de la ventro-caudule a une forme plus allongée que celle de la dorsale. Elle compte vingt-cinq rayons environ; les supports 6, 8, 9, 11, 12, 16 sont remarquables par trois rangées, tandis qu'il n’y en a que deux dans les autres. C’est sans doute pour favoriser la flexion transversale uniquement au niveau de ces supports. Les muscles s’insèrent : 1° en bas sur les cartilages basilaires et une forte aponévrose qui les sépare des muscles latéraux; 2° en haut, la partie striée finit au niveau de séparation de la première et deuxième rangée. La deuxième dorsale est bâtie sur le type de la première dorsale. Comme position, la première dorsale est la plus anté- rieure ; les autres suivent en alternant de haut en bas (fig. 2). Les nageoires dorsales sont moins longues, mais plus hautes que Îles anales ou ventro-caudales. Celles-ci sont des cônes bas, aplatis, fixés par une base fusiforme. Les dorsales ont un contour quadrilatère et non triangulaire. La deuxième anale et la terminale ont un squelette diffé- rent des dorsales et première anale. Il se réduit en bas aux apophyses épineuses des vertèbres. La région ventrale est plus développée que la dorsale. Chaque vertèbre donne une large expansion, qui forme les parois du canal vasculaire; cette expansion semble être constituée par deux parties, l’une anté- rieure, courte, épaisse à la base, l’autre plus longue, creusée sur son bord d’une légère excavation, pour recevoir le bord antérieur de l'expansion suivante. La région dorsale des vertèbres présente une série linéaire de nodules cartilagineux, au-dessus du canal médullaire. I 20 P.-C. AMANS. en résulte une espèce de scie à dents rondes, entre lesquelles s’implantent les supports dorsaux, bien plus nombreux et plus courts que les ventraux. Les mouvements de la terminale sont produits par les muscles latéraux. La deuxième anale a des muscles propres, courts et de direction inverse à celle des nervures (4, pl. E, fig. 17). Le peu de développement de ces muscles laisse le principal rôle aux muscles latéraux. En somme, l'organe propulseur de lanimal est la queue avec l’ensemble des nageoires dorsales, anales et terminale. L'animal entier est un ovoide allongé, à tête aplatie et se mou- vant de haut en bas, à queue aplatie et se mouvant surtout de droite à gauche. Il. == TYPE RAJA. Ce second type de Sélaciens est représenté par des animaux larges et aplatis, se tenant en général sur les fonds et doués de mouvements peu rapides. Son profil est, jusqu’à un certain point, comparable à celui du Seyllium (ovoïde allongé, aplati en avant sur sa surface inférieure, pl. IT, fig. 2); mais il en diffère totalement par les coupes de front et d'horizon. L’horizon imite les contours d’un cerf-volant, muni de sa queue (fig. 1); le front est triangulaire isocèle, semblable à un arc détendu (fig. 3). Les parties latérales de notre cerf- volant enlevées, il reste une sorte de violoncelle ; ces expan- sions latérales sont formées par les nageoires pectorales ; ce sont elles qui jouent le principal rôle dans la locomotion. Nageoires pectorales. — La ceinture est un arc à sommet sur Ja face ventrale ; ses branches s’articulent avec la colonne vertébrale, Elles se prolongent fortement en arrière, le tout forme une espèce de selle, sur laquelle chevauchent les carti- lages basilaires. On peut encore schématiser cette ceinture par trois arcs transversaux (4, 8, y, fig. 4) à extrémités réunies par une paire de traverses À W. Entre les arcs z, $, se trouve ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 21 un trou pour le passage des nerfs. La nageoire s'articule sur les sommets «, B, y et sur la commissure À”, qui joint les som- mets 8, y. De chaque côté de la commissure se trouvent deux trous ovales, le supérieur plus grand et plus irrégulier que l'inférieur. L'un et l’autre sont bouchés par une forte mem- brane fibreuse, qui tapisse toute la face interne des arcs. L’extrémité supérieure de l'arc « s'articule avec une expan- sion linguiforme de la colonne, avec la moitié postérieure de cette expansion. Les sommets de « et y sont des fuseaux ellip- soïdaux, à grands axes verticaux ; le sommet de Best un fuseau ovoide, à grand axe horizontal, plus incliné sur laxe ver- tébral que le petit axe de x (pl. IF, fig. 7 et 8). Le petit axe de y est parallèle à l'articulation vertébrale de la ceinture. L’axe principal de & rencontre celui de y au-dessous du milieu de larticulation vertébrale, en un point plus rap- proché de la branche supérieure de l'arc « que de la branche inférieure. La direction de l'axe principal de 8 passe en arrière du point 0. Un mot sur l'équilibre des supports. L'équilibre d’un support (la ceinture pectorale, par exemple) est assuré, lorsque les forces qui agissent sur lui, tombent en dedans de la base de sustentation. La base de sustentation de la cein- ture est un triangle joignant le point médian abdominal de la ceinture, et les points médians des articulations vertébrales (en supposant bien entendu ces points complètement immuables, ce qui n’a jamais lieu en mécanique animale. Cependant l'hypothèse peut être maintenue, vu que les oscil- lations du système sont rendues presque impossibles en haut par la raideur des articulations dorsales, et en bas par des museles qui brident la ceinture en tous sens). Les actions qui agissent sur les têtes articulaires & et y tombent dans la base de sustentation, mais non celles qui agissent sur $ (fig. 7). On peut donc conclure à priori que 1° ou bien les forces qui agissent sur 6 sont considérables, et alors l'équilibre du support est compromis, son extrémité postérieure tend à osciller, 2 ou bien ces forces sont peu considérables, l'effort 22 P.-C. AMANS. principal se portant sur œet y. La tête 6 serait soumise à des forces plutôt tangentielles que normales. Nous verrons que cette deuxième proposition est la vraie. Nageoire. — Le squelette de la nageoire forme une lame quadrilatère, ou un losange curviligne articulé par deux côtés adjacents (fig. 6). Plus simplement encore, la nageoire est un solide triangulaire, fixé par un côté; la base de fixation est sinueuse à la facon d’un violoncelle, c’est-à-dire concave en dehors au milieu, concave en dedans aux deux extrémités. C’est la partie médiane seule qui s'articule avee la ceinture. Voici du reste les divers éléments de la base de fixation : 1° En avant, le Propleryqium s’articulant avec &. C’est une sorte de barre à T (fig. 5), concave en dedans, formée de sept parties, alignées l’une derrière l’autre par rang de taille décroissante à partir de la base. Sa base s'articule : 4° avec « de la ceinture par un creux triangulaire sphérique ; ® avec le Mesopteryqium par une symphyse sinussoïde ; 2 Au milieu, le Wesopteryqium. C’est un mince cartilage pentagonal; le côté antéro-interne est en face le trou anté- rieur ; le côté postéro-interne s'articule avec le sommet de $ et le commencement de la commissure À” par une surface adéquate; les côtés postérieur et externe sont intimement soudés aux rayons correspondants. 3° Le restant de la commissure X” est lié directement aux nervures sans l'intermédiaire des cartilages basilaires. Il y a trois de ces nervures ; puis vient le Metapteryqium. 4° Il est moins long et moins large que le Propteryqium. Sa section transversale est plutôt ovale qu'en forme de T; sa surface articulaire est comme celle du Propteryqium, en forme de triangle sphérique. Cette cavité articulaire est bien plus courte que le condyle correspondant y de la ceinture. Par conséquent, elle aura une course assez longue sur ce condyle. Le Metapteryqium forme le pendant du Propteryqium ; 11 est plus court, d’une cour- bure plus prononcée. Sa face interne est concave en dedans non seulement en long, mais en travers. L’extrémité effilée ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. DE du Metapteryqium est formée de trois cartilages, les deux der- niers courts, aplatis. Les bases du Propteryqium et du Metapteryqium sont épaisses, rigides; celles du Mesopterygium et les nervures médianes sont au contraires minces, flexibles. Avec une telle disposition, l’are $ et la commissure À” fatigueront bien moins que les arcs « et y; ceci cadre déjà avec la seconde proposi- lion émise plus haut, à propos de l'équilibre des supports. Les bords externes des Propteryqium et Metapterygqium sont taillés en escalier pour recevoir la base des rayons ou ner- vures. Les rayons forment la masse principale de la nageoire, et en surface plus des deux tiers de la surface totale de lani- mal. Le Propteryqium reçoit une trentaine de nervures, le Metapteryqium, trente-quatre environ, et le Wesopteryqium une douzaine dont la base semble fondue avec le WMesoptery- qium. Trois rayons s’articulent directement avec la ceinture ; chacun d’eux est formé de nombreux articles, alignés Pun derrière l’autre, de plus en plus courts, à partir de la base. Leur nombre va de 0 à 18 vers le centre. L’extrémité distale se bifurque. Chaque article est formé d’un axe solide, strié (fig. 9) bifurqué et trifurqué ; de cette manière l'articulation est plus large que la diaphyse, etle roulement est assuré exclusivement dans le sens de cette largeur; si l'articulation était moins large, le roulement pourrait avoir lieu dans plusieurs sens. Dans la zone distale, chaque rayon se bifurque; les sous- articles ainsi formés n’offrent plus cette disproportion entre la largeur de la diaphyse et celle de la surface articulaire. La direction des rayons est voisine de la ligne droite vers le quinzième (&, fig. 6), vers le quarantième (b) et le dixième avant-dernier (€). Avant &, leur extrémité distale est concave en dedans et en avant; de & à b, en arrière; de b à €, en arrière et en dedans ; après € en avant et en dehors. Voilà done un premier genre de flexion bien déterminé : la flexion radiale. La flexion anti-radiale s'obtient aisément par la réunion des points équidistants de la base ; on obtient 24 P.-C. AMANS. ainsi une série de courbes sinussoïdes à trois branches. Les branches moyennes ont leur concavité tournée en dehors; les sommets de ces branches moyennes forment des points singuliers analogues aux points latéraux médians des 2 ten- dineux. En langage géométrique, ce sont des points de rebroussement. Hs sont situés 1e1 sur le trente et unième rayon environ, c'est-à-dire sur le premier du Mesopterygqium. La direction générale de ces courbes se rapproche de celle des Ÿ ou énscriptiones tendinosæ. Dans les deux cas, la pointe de rebroussement se trouve dirigée vers la base de l'organe frappeur : c’est là encore une application particulière du prin- cipe des plissements, énoncé plus haut. C’est lui qui nous gui- dera, plutôt que la règle vague et parfois en défaut de Gegen- baur et Müller. Nous ferons du reste un rapprochement plus étroit entre cette nageoire et la queue des Téléostéens. Celle-er ne montre les flexions transversales que dans les vertèbres et les muscles correspondants ; quant à la nageoïire caudale pro- prement dite, la palette à rayons, elle fait voir uniquement les flexions radiales, mais non les anti-radiales. Les ondula- tions anti-radiales échappent à l’œil, et, à moins de faire de la photographie instantanée, on ne peut tracer avec précision les courbures de flexion. Tel n’est pas le cas chez la Raïe ; ici les articulations sont assez nombreuses (plus de 600) pour conjecturer avec certitude les principales lignes de flexion. Le Metapteryqium est plus court que le Protopteryqium, et cependant 1l donne insertion à un plus grand nombre de rayons ; les articulations y sont plus nombreuses, par suite les déplacements plus étendus que dans la zone proptérygienne. C'est naturellement la zone mésoptérygienne qui offre le plus de flexions transversales ou anti-radiales. Muscles de la nageoire pectorale. À. Face supérieure. — En allant d’arrière en avant, on trouve (pl. I, fig. 10): «. Muscle dorso-métaptérygien, relie le Metapteryqium à la colonne vertébrale. Ses fibres se dirigent obliquement à 45 degrés sur la colonne d’arrière en avant ; elles brident le Metapteryqium concurremment avec le ventro-métaptérygien. ARTICLE N° Î, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 95 ce. Muscle allongé dont les fibres font suite aux faisceaux du erand releveur X. Elles s’insèrent en commun sur une ligne _ tendineuse qui suit le bord supérieur du Metapteryqium et la branche supérieure interne de la ceinture. Elles recouvrent en dedans les extrémités externes du dorso-métaptérygien, s’amincissent à ce niveau, de manière à fondre leur surface avec ce dernier, sans solution de continuité. [Il semble que par la nature de ses insertions, on pourrait le désigner sous Île nom de releveur propre du Metapteryqium. d. Fait le pendant du précédent. On pourrait de même le considérer simplement comme la base de k. Seulement, à ce niveau, les fibres s’insèrent parallèlement au bord supérieur de l’arc antérieur et du proptérvgien. C’est donc le releveur propre du proptérygium. L’écartement réciproque des propté- rvgium et métaptérygium est bridé par de forts tendons fibreux qui tapissent tout l’angle mésoptérvgien, jusqu’à l’extrémité supérieure de l’are métaptérygien. e. Muscle court, épais, allant de l’extrémité supérieure de l’are antérieur (immédiatement en avant de l'articulation vertébrale) à la colonne vertébrale. Il fixe la ceinture en avant. {. Releveur du nez, muscle des plus curieux. S’insère en arrière, au-dessus de e, en avant de l’articulation vertébrale sur une aponévrose sous-cutanée, qui relie l’are antérieur et l’apophyse £. Son insertion basilaire forme une courbe concave en dehors; il se dirige d’abord obliquement de dedans en dehors vers le crâne. Ses fibres convergent à ce niveau en un filet tendineux, qui, recouvert par la peau, arrive jusqu’au bord antérieur de l’animal, près de la pointe nasale. Sa cour- bure générale est concave en dedans. Il sert à relever la pointe nasale ou le bec. En même temps, il aide Le muscle suivant. g. Métaptérygien dorso-occipital, allfnt du crâne aux muscles latéraux ; il est releveur de la tête. h. Grand releveur de la nageoire. — Le plus volumineux des muscles de la Raiïe, il occupe toute Ia face dorsale de la nageoire. Il se compose d'autant de faisceaux radiaux qu’il y a de rayons. Chaque faisceau s’insère : 1° à la base sur la face 26 P.-C. AMANS. externe de la ceinture, et chemin faisant dans l’espace inter- radial ; 2 latéralement, sur une aponévrose qui s’insère sur le milieu de chaque rayon; 3° en haut, sur l’aponévrose sous- cutanée. Chaque faisceau longitudinal est lui-même décomposable en deux faisceaux secondaires superposés. C’est ce que montre la coupe (fig. 13) faite parallèlement à la base (ce genre de coupes sinueuses est plus rationnel que les coupes planes; celles-ci, n'ayant aucun rapport avec la flexion des rayons, ne sauraient donner une idée exacte de la disposition des muscles). Cette coupe montre qu’à une petite distance de chaque extrémité, le faisceau se dédouble en deux, de volume inégal. Le supérieur (s) part de zéro et grandit peu à peu, en allant des extrémités périphériques vers le milieu, où il devient, en hauteur, les 5/7 du faisceau inférieur s° (fig. 14). L’inférieur a une forme prismatique biconvexe; le supérieur est convexe en haut, concave en bas, pour s’emboîter sur l’inférieur. C’est là Le type le plus simple d’emboiîtement. Le faisceau inférieur n’est pas implanté normalement à la surface du squelette radial; il est, en général, incliné en arrière, et le supérieur en avant. La fibre striée n'arrive pas jusqu’à l’extrémité distale du rayon. Elle devient tendineuse et se fond dans la zone mem- braneuse périphérique. B. Sur la fuce inférieure ventrale nous avons (fig. 11) : i. Grand abaisseur de la nageoire. — La section (fig. 13-14) fait voir qu’il est moins volumineux que le releveur. (TE — LE environ ; à est un peu > = À o un peu > oB). Le grand abaisseur s’insère sur la ceinture et les faces imfé- rieures du proptérygien et du mésoptérygien. j. Muscle mince, superficiel, dont les deux moitiés H et N sont réunies par une sorte de ligne blanche, médiane, au- dessus du muscle k. Les fibres convergent rapidement en un long tendon qui passe sur le cerveau etse termine au voisinage ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 97 du bec. C’est l’antagoniste de f; on pourrait donc le dénom- mer l’abaisseur du nez. k. Muscle en goulot de champagne, S'insérant en arrière sur _l’aponévrose /, en avant sur le maxillaire inférieur. l. S’insère en arrière sur la ceinture, forme d’abord un large plastron qui sert de paroi inférieure à la cavité car- diaque. En haut, il passe dans un canal fibro-cartilagineux, au-dessous de l’arc +, et va s’insérer à l’angle interne de la mâchoire par un double tendon. m. S'insère : l° en arrière, sur le sternum, et la branche montante de l'arc antérieur de la ceinture, immédiatement à côté du muscle e (fig. 12); 2° en avant, sur le squelette formant la paroi supérieure de la cavité cardiaque. La cavité cardiaque est donc fermée en bas par les couches successives /, À, j, latéralement par #, en haut par le sque- lette cartilagineux. Le muscle »# à une forme générale triangu- laire, sommet en avant, base sur le sternum. n. Muscle ventro-métaptérygien. — Mince couche muscu- laire incluse dans une épaisse membrane fibreuse, formant avec la peau un solide trait d'union entre les deux métaptérv- giens et les nageoires abdominales. L'élément musculaire y est moins bien représenté que dans le dorso-métaptérygien. Ce dernier présente (a') un fort faisceau de renforcement qui va des derniers articles du métaptérvygien vers la masse muscu- laire de la saillie dorsale de la nageoire abdominale. Reprenons notre violoncelle (fig. 10). Le protoptérygien est relié au crâne par le cartilage allongé (w). Ce cartilage est articulé de façon à permettre un déplacement perpendiculaire à sa direction. Un petit muscle (p) le relie au crâne, en arrière. Le muscle a' forme le pendant du système 6 p; il y a donc plus de mobilité en arrière qu’en avant. Les treize muscles cités jouent tous un rôle plus ou moins important dans la nage. Certains ont une double fonction. L'animal presque tout entier participe activement à la loco- motion. À l'inverse de la grande majorité des poissons, sa tête est mobile et sert de gouvernail horizontal. 19 8 P.-C. AMANS. Nageoire abdominale. — T faut distinguer la ceinture et la nageoire proprement dite, avec les basilaires antérieur, pos- térieur et les rayons intermédiaires. Ceinture. — Lame aplatie sur sa face inférieure, convexe sur la face supérieure ; latéralement, le versant antérieur se prolonge par une longue apophyse emprisonnée dans le musele ventral; le versant postérieur par l’articulation du basilaire postérieur, la crête de séparation par une saillie (s) dirigée de bas en haut et en arrière, aplatie de devant en dehors (fig. 15). Plus schématiquement, la ceinture anale peut se repré- senter (fig. 16) par un lambeau quadrilatère de surface gauche /sA0 : lso forme le versant antérieur, s0P Je versant postérieur; la ligne os a sa cavité tournée en haut, /P en bas. À l’entre-croisement de ces diagonales se trouvent deux trous. L’articulation À est située vers le milieu du côté ls; sa forme est ovoide-sinueuse, à gros bout supérieur. Son principal dia- mètre est dirigé de bas en haut, en arrière et en dedans; son plan diamétral passe vers la zone médiane renflée de la ceim- ture. L’articulation P est arrondie en arrière, effilée en avant, avec deux petites rigoles (l’une postéro-supérieure, l’autre antéro-inférieure) et une échancrure en arrière et en dehors. On pourrait la nommer petite échancrure, en laissant le nom de grande échanerure à celle qui sépare s de P. Basilaire antérieur. — Cartilage allongé, élargi à ses extré- mités (fiv. 15); l'extrémité distale est aplatie et son diamètre fait avec celui de la base un angle de 30 degrés environ; les deux diamètres se raccordent par des arêtes courbes. On dis- tingue trois faces : 1° Supéro-postérieure à la base, supéro-antérieure à lex- trémité distale ; 2 antérieure à la base, postérieure à l’autre bout; 3° postérieure triangulaire et trois arêtes. La torsion de ces faces est due au mouvementrameur; nous avons déja nolé des torsions analogues dans les organes de vol; c’est là un phénomène universel en mécanique animale : ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 29 Duns un organe de soutien et de progression, dl y à toujours divergence de plans entre le proximal et le distal. L’extrémité proximale du basilaire antérieur est une cavité plus-large que le condyle correspondant de la ceinture, mais moins longue; cette extrémité jouira donc de mouvements très étendus en long et en travers de ce condyle. L’extrémité distale, bien plus mince, est ovoide, concave en dehors, gros bout en arrière. Les extrémités méritent le nom de condyles. Au milieu chevauche, d'avant en arrière, une sorte de pouce, petit cartilage conique, bifurqué à la base, se prolongeant à la périphérie par deux phalanges. Basilaire postérieur. — Sorte d'hémi- cindie appliqué aux flancs par sa face plane, portant sur l’autre, sur la face bom- bée, de nombreux rayons. Sa base porte une cavité sphérique plus large et moins longue que le condyle correspondant. La ligne d'insertion des nervures est plus près du bord inférieur que du bord supérieur. La face interne oblique vers le haut, surtouL son extrémité dorsale et les deux osselets qui Ja ter- minent. Le basilaire postérieur porte dix-neuf rayons environ, 1m- plantés encore plus obliquement que les métaptérygiens de la nageoire pectorale. Le premier est implanté à 45 degrés, le dernier à 5 degrés. Ils vont en diminuant de grosseur et de longueur du premier au dernier. Chaque rayon se compose de sept articles, différents de structure. Le premier est 4-5 fois plus long que les suivants, qui à leur tour diminuent rapide- ment de longueur. La forme du premier est pyramidale, en forme d’alêne ; il est formé de piles convergentes, au lieu d’une seule pile comme les nervures pectorales. Entre le premier rayon et le basilaire antérieur se trouvent trois rayons sans articulation basilaire. Les deux postérieurs ont leur proximum très voisin de la base; l’antérieur en est plus éloigné. Nous verrons, à propos des muscles, quel peut être le rôle de ces nervures. Muscles de la nageoire abdominale. — La ceinture donne insertion : 1° en avant aux muscles ventro-métaptérygien et s1Ù P.-C. AMANS. dorso-métaptérygien (y compris le faisceau a’); 2° en arrière, en haut, à un détachement du tronc latéral ; en arrière et en bas, à une masse formant culée en avant de l'anus. Cette masse commune s’insère à la face postérieure de la ceinture, se rend au bord interne inférieur du basilaire postérieur, et se continue avec le grand abaisseur de la’ nageoire (un peu dans le genre de e et d, vis-à-vis de k, dans la nageoire pecto- rale). Il forme avec le grand releveur une sorte de dièdre, étroitement collé aux flancs par une aponévrose commune avec la peau. V. Muscle diédrique volumineux, S'emboitant sur la face antérieure du basilaire antérieur; part du ligament fibreux de l'articulation distale, adhère sur les deux tiers distaux de fa diaphyse (v'), glisse sur le ers inférieur et sur l'articulation basilaire, pour se fixer en v à la base de la corne. Le versant iuférieur du muscle fond ses faisceaux avec ceux de la masse commune des abaisseurs. W. Extenseur du pouce. — Cest un court faisceau, faisant Jouer le proximum du pouce sur le distum du basilaire. X. Masse commune des abaisseurs. — Getie masse distribue des faisceaux : 1° à la face à 6 y, qui, nous le savons déjà, est inférieure au distum, postérieure au proximum. Ces faisceaux s’insèrent en bas, à la base du condyle &«$ et de la saillie 0; 2° aux trois premiers rayons. Ces faisceaux ne sont pas paral- lèles aux rayons, comme dans la nageoire pectorale. C’est ainsi que le troisième est croisé par les abaisseurs des deux premiers et du basilaire antérieur ; 3° chacun des rayons suivants reçoit de même un faisceau distinct, de forme triangulaire, qui se fixe sur sa postérieure, au niveau de la première articulation. Ces faisceaux sont confondus à la base; ils s’attachent au basi- laire postérieur. Face supérieure. — À chacun des faisceaux précédents correspond un faisceau éleveur sur la face supérieure. [ls ne diffèrent des inférieurs que par leur volume plus considérable et leur direction. Hs adhèrent en effet au basilaire postérieur beaucoup plus obliquement. Ils semblent tous converger vers ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. ji la saillie 0. On voit un fort tendon aller de cette saillie vers la colonne ; c’est sur ce tendon que s’insèrent le releveur propre . du basilaire antérieur et l’accessoire du dorso-métaptérygien. Colonne vertébrale. — La colonne, avec son système de muscles latéraux, forme le manche de notre violoncelle ou (la comparaison est encore plus exacte) la queue du cerf-volant. Cette queue est, comme le reste de l’animal, bombée en haut, aplatie en bas. La coupe transversale au niveau de la base du basilaire postérieur nous montre six groupes principaux de muscles parallèles à la colonne. La section vertébrale est hexagonale ; son plus grand diamètre est vertical, ce qui indique un maxi- mum de déplacement horizontal. D'un autre côté, le plus gros bout est en bas, ce qui indique un plus grand déplacement de bas en haut que de haut en bas. Ce dernier caractère est com- mun aux vertèbres et au squelette de la nageoire pectorale ; mais celle-ci, à l’inverse de la queue, a son maximum de déplacement non pas horizontal, mais vertical. Le volume des muscles est en rapport avec les mouvements conjecturés d’après la section vertébrale. Ils sont les plus volumineux latéralement, moyens en haut, petits en bas. Les lignes de séparation de ces groupes sont accusées sur la face supérieure par quatre tendons longitudinaux, le plus fort de chaque côté du sommet dorsal de la vertèbre; les trois autres séparent les deux dorsaux et les deux latéraux. Sur la face inférieure il n’y en a aucun d’accusé; des deux muscles ventraux, le plus inférieur est très mince. Le plus volumineux des muscles latéraux présente dans son intérieur des fragments de courbes concentriques ouvertes en dedans, du côté de la vertèbre. On peut rattacher ce sys- tème de lignes concaves à celui des septa radiaux des abais- seurs et releveurs pectoraux. Quelle est l'utilité des septa, et pourquoi ont-ils la forme de courbes concentriques, concaves en dedans? D'une manière générale, le septum joue un rôle complexe, rôle de soutien pour la fibre musculaire, ses vaisseaux et ses 92 P.-C. AMANS. nerfs. Sa courbure est intimement liée aux exigences méca- niques de la flexion ; nous avons déjà insisté à ce sujet, à propos des inscriptions tendineuses. La proposition complète serait la suivante : a. Un ovoide élastique se plisse suivant des lignes ayant leur convexité tournée vers la base ou le front. b. Les fibres qui déterminent le plissement sont disposées en couches ayant même sens de courbure que l'axe vertébral. La section frontale change de forme vers le milieu de la queue. Le groupe N est celui qui se dédouble plus en avant et donne les trones G et E, c’est-à-dire que le feuillet externe de N grossit et donne E. Le muscle E s’insère à la face interne de l’oreille et ne va pas plus loin (fig. 17, 19). Les sections de profil donnent au milieu de la colonne l’as- pect de bobines alignées. Chaque vertèbre est séparée de ses voisines par des lignes sinueuses. La figure 18 donne la coupe faite au niveau des extrémités antérieures des cornes de la nageoïire abdominale. Elle indique les positions nouvelles prises par les muscles À, B, G. Remar- quons l'implantation profonde des tendons qui lient ces mus- cles à la peau. Ge type de section se maintient jusqu’à larti- culation de la ceinture pectorale. À ce niveau, e se fixe à l'extrémité supérieure de la ceinture. À et B continuent leur route sous la palette vertébrale (x, fig. 12) et s’insèrent au condyle postérieur du crâne (c’est le muscle 4, fig. 10). On peut ajouter à ce groupe le petit muscle g' (fig. 10), allant de ce même condyle à l'extrémité céphalique de la crête spinale. Considérations physiologiques. — La Raïe est une sorte de cerf-volant de 23-24 de long sur 26 de large, 2 de hauteur et une queue de 14-15. Ajoutons encore ad —11, ab =17, be—13\ñg4); Les muscles élévateurs étant plus volumineux que les abais- seurs, les efforts principaux de l’animal tendent à aller de haut en bas et à se maintenir sur le sol, soit qu'il veuille se tapir sous le sable ou emprisonner sa proie. Les grands mouvements d’élévation et d’abaissement de la nageoire pectorale pro- duisent la propulsion avec ascension ou descente, suivant la ARTICLE N°. 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 39 prédominance d'action des muscles supérieurs ou des muscles inférieurs ; les mouvements de la tête et de la queue servent à Ja direction de droite à gauche (queue) ou de haut en bas (tête). Les mouvements ascendants, par exemple, sont obtenus par des battements énergiques de haut en bas; le profil a la forme figure 21; dans les mouvements descendants, il y a de forts battements de bas en haut, et le profil prend la forme figure 22. Il peut descendre plus simplement encore; sa forme large, aplatie, favorise la descente en aéroplane, sous l’in- fluence unique de la pesanteur. L’aéroplane Raja est assez simple ; il pourrait se schéma- tiser par un hémi-ovoide allongé, muni latéralement de deux paires d'ailes. L’axe de profil est formé de trois pièces arti- culées dont les deux extrêmes sont mobiles : 1° la céphalique de bas en haut; 2° la caudale surtout de droite à gauche et inversement. Malgré sa simplicité, cet appareil est plus com- pliqué que les divers cerfs-volants usités jusqu’à nos jours, sans excepter celui de Maillot. Le cerf-volant de Maillot (1) est un octogone régulier. La corde d’amarre et une balançoire sont suspendues au tiers supéro-antérieur de l’octogone. L’aéronaute est assis sur la balançoire ; grâce à descordages qui le relient aux côtés supérieurs et inférieurs, ainsi qu'aux sommets latéraux supérieurs, 1l peut faire varier l’inclinaison de l’octogone de droite à gauche, ou de haut en bas. L'appareil n’a ni tête, ni queue, et il est symétrique en tous sens, ce qui est un grave défaut pour la pénétration dans un milieu quelconque. Il serait bon de rendre la face inférieure du cerf-volant convexe, tout en laissant la face supérieure (1) Le cerf-volant mesurait 72 mètres carrés, du poids de 75 kilogrammes. 1! a enlevé un sac de 68 kilogrammes, plus 15 kilogrammes de cordes d’amarre, en tout, en y ajoutant son poids, 158 kilogrammes. Il s’est maintenu à 10 mètres de haut, sous un vent de 7-10 mètres. La vitesse du vent et son incidence n'ayant pas été mesurées, il est difficile de calculer avec précision le pouvoir de sustentation de l'appareil (voy. Aéronaute, juillet 1886). D] ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888 VI. 94 — ART. N° {, 54 P.-C. AMANS. plate. C’est ainsi du reste que sont construits certains cerfs- volants japonais. Je conseillerai aussi à M. Maillot d’imiter les articulations céphalique et caudale. Les cordes en main, 1l obtiendrait des inclinaisons partielles céphaliques et caudales, ce qui serait préférable aux déviations en bloc de tout l’octo- gone. Quant aux déviations latérales, je n’en vois pas l’utilité, sile véhicule est amarré et dans la direction du vent. Sur un hémi- ovoide bien construit, le roulis serait insignifiant ; la résistance du vent le poussera surtout de bas en haut et en avant. Si lon veut supprimer la corde d’amarre, il faut remplacer cette force d'attraction par un hélicoptère ou un système d'ailes. La Raja a pour cela ses grandes nageoires pectorales; mais ce n’est pas dans les animaux aquatiques qu'il faut chercher les moyens de remplacer la corde d’amarre. Les animaux aériens nous donnent l'embarras du choix. Nous continuerons jusqu’à preuve du contraire à penser que l’aréoplane réduit à un plan rigide est un véhicule aérien contre nature. Les seuls animaux qui s’en rapprochent (Pleu- ronectides, Sélaciens plats, Dytiscides, Nautonectes, ete.) sont des animaux aquatiques, vivant dans un milieu infiniment moins compressible et moins mobile, où parsuite le couple dû à la pesanteur et à la traction a moins de chances de danser. | La Raja est un aéroplane disposé pour descendre ; nous ver- rons bientôt un Téléostéen, la Trigle, se servir de ses grandes pectorales pour faire aéroplane, dans la descente. D’autres enfin (Dystique, Nautonecte) ont un schéma inverse de celui de la Raja; le plat est en haut, et le convexe en bas : ce sont: des aéroplanes disposés pour l'ascension. | Ê II: — TYPE TRYGLA. La Trygle est un Téléostéen, inais par son genre de vie et de locomotion se rapproche du type précédent. Sa face infé- ARTICLE. N° 1, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 35 rieure est large, plate, disposée pour les glissades en aéro- plane. Il a de grandes nageoires qui lui ont valu en certains . endroits le nom d’Hirondelles de mer; nous la comparerions plutôt à une sauterelle : il y a entre ces deux animaux une grande analogie dans la forme des contours apparents et dans la forme du mouvement. La figure 26, planche IT montre la coupe du profil. C’est une figure trapézoïdale (fig. 32) à grand côté ventral. La ligne de séparation de la zone sombre, dorsale et de la zone claire ventrale indique lhorizon. La partie caudale forme une zone demi-sombre. C’est une zone en fuseau effilée en avant et en arrière; cette zone indique en même temps entre quelles limites varie le contour d'horizon. Nous admettons en effet que cette zone de démarcation entre les deux pigmentations est due à l’action des rayons solaires et se confond avec le contour apparent tracé par ceux-ci. Gette assertion est du reste facile à vérifier expérimentalement pour les animaux cités dans mon travail. La figure 23 montre la projection horizontale de ce contour d'horizon. Elle fait voir en même temps les projections des crêtes dorsales. En a, la ligne médiane de profil se bifurque en deux crêtes «ab, «a b'; les courants qui passent dans la vallée céphalique entre ces deux crêtes, viennent se brisér contre la nageoire, s’échappent latéralement sur les flancs ou conti- nuent leur route dans la rainure assez profonde où est implan- tée la nageoire dorsale (1). La figure 27 représente en projection sur un plan perpen- diculaire à l’axe fictif le contour de front, c’est-à-dire, par définition, la trace du cylindre circonserit parallèlement à l'axe fictif; la figure 25 le représente en perspective; la figure 24 le représente visé aussi de face, mais de plus haut : (1) La figure 26 représente la projection du contour apparent de profil, c’est- à-dire Ja trace d'un cylindre circonscrit perpendiculairement au plan de profil. Il est ici très différent du profil lui-même (section déterminée par le plan de symétrie bilatérale). En général, cependant, les deux courbes sont identiques, et l’expression de profil répond à tous les cas sans confusion possible. 36 P.-C. AMANS. c’est un autre contour frontal ; on obtiendrait des figures nou- velles, en faisant dévier plus ou moins l’axe de visée de l’axe ficuüf. Le vrai front est-il le plus petit des contours frontaux ? Soit, pour fixer les idées, le trapézoïde A BCD (fig. 31, pl. ID). 1° A B est supposé parallèle à AB et à D C, l'axe fictif. On voit aisément que la distance des deux côtés À B et A B' repré- sente le plus petit contour de visée frontale. Dans ce cas c’est le contour de front, tel que nous l'avons défini. % En réalité chez la Trygle le trapézoïde est de la forme figure 39, c’est-à- dire que AB et A'B'ne sont pas parallèles. Bien plus, les con- tractions musculaires rendent la direction A°B° très variable. Il en résulte des changements de front, utilisés pour ralentir ou accélérer la marche. Le plus petit des fronts chez la Trygle est une ligne sinueuse stuvaæ (fig. 26 et25), qui part du premier rayon de la première nageoire dorsale, passe au-devant des nageoires pectorales et abdominales. Elle forme une sinussoïde analogue à celle des È tendineux du Scylllum, mais retournée de 180 degrés : c’est un È tourné en arrière. Le contour de front a une grande importance, c'est lui qui sert à distinguer le gros bout de lovoide. C’est lui qui sous une forme beaucoup plus simple jouait le principal rôle (je dirais même le seul rôle) dans les calculs de Newton, Ber- noulli, etc. I ÿ a cependant tout lieu de croire que le rôle des deux autres contours n’est pas moindre. Remarquons que : 1° la projection de ce contour a son gros bout en bas. 2° L’horizon est une sinussoïde à deux branches, la branche céphalique a sa concavité tournée en haut. Nageoire pectorale. — Le squelette est formé de deux os, los antérieur et l'os postérieur (fig. 29). Os antérieur. — Ya l’air d’une cheville dont la tête est suspendue à la colonne, et dont la tige est trécarénée en fer à T. La face antérieure donne insertion à des muscles rétro- maxillaires ; la face postérieure forme une large gouttière dans laquelle s’implantent los, support de la nageoire, et les ARTICLE N° Î. ORGANES DE LA: LOCOMOTION AQUATIQUE. 91 muscles correspondants. La face interne présente dans le second quart inférieur une surface d’adhérence pour l’os de Ja nageoïre abdominale. | Me postérieur ou ÊTES de la nageoire est une laine mince, tordue en S; elle s’appuie sur la face postérieure de la cheville par deux pieds, l’un supérieur, l’autre inférieur. Un réseau cartilagineux délimite les pièces S, [, et 1, 2, 3, 4. Nageoire. — Elle est formée de la nageoire proprement dite et de trois pseudo-pattes. La nageoire est formée d’une douzaine de ravons, de longueur croissante du premier au cinquième, décroissante du cinquième au douzième. Les deux apophyses basilaires de la première nervure sont réunies par un fibro-cartilage en selle de cheval (fig.33); Papophyse pos- térieure est la plus massive (sic dans les nervures suivantes). Gette selle roule sur une tubérosité de l’os support; cette tubérosité est précédée et suivie d’une dépréssion: Chaque nervure présente à la base les deux condyles articulaires et les apophyses des muscles JUS IAA æetr (fig. 34); les ten- dons antérieurs & et à \ig- 36) n’ont pas d ini d’in- sertion aussi saillantes. Les condyles antérieurs de la nageoire sont séparés des postérieurs par une gouttière Aro rtilesinente, Au niveau de cette gouttière, la section transversale forme un ovale très allongé, étranglé au niveau des premiers rayons. Un peu au- dessus de l'articulation, l’ovale est plus régulier, sans étran- element. Nageoire abdominale. — Le support de la nageoire abdo- minale forme avec son symétrique une espèce de fourche à trois branches (fig. 1, pl. IT) : une médiane grêle, courte, deux latérales, larges avec une section transversale en fer à T. On peut distinguer une face inférieure, une supérieure et une antérieure. L’antérieure (d, fig. 2) sert à l’adhérence avec le support pectoral. L’articulation de la nageoire précède immédiatement l'origine de la branche à T: Les directions principales de l'articulation sont deux diagonales de courbures opposées (la 38 P.-C. AMANS. courbure longitudinale est concave en avant, la transversale en arrière). La plus grande largeur est vers le tiers postérieur de l’articulation. | On peut distinguer sur la crête qui porte l’articulation Fe éléments suivants : a. Une dépression allongée; b. la selle articulaire ci-dessus décrite; c. une cavité, dont les bords saillants forment des arêtes de roulement pour les condyles du bord épais de la nageoire. . La nageoire est formée de six grosses nervures plus He neuses que celles de la nageoire pectorale. Elles décroissent régulièrement de grosseur de la première à la sixième. La courbure périphérique est de la forme figure 20; 4 et 5 sont les plus longues. La première nervure présente à la base trois condyles : erochu ou antérieur, rond et postérieur. Les autres nervures manquent du condyle rond. Entre les condyles antérieurs et postérieurs est tendue une gouttière fibreuse, qui s’emboîte sur l’articulation. Les nervures présentent deux courbures; elles sont concaves inférieurement vers la base, en dedans vers la périphérie. Pattes. — Les pattes des Trigles sont des rayons pectoraux modifiés pour la marche. Ils s’insèrent sur la branche infé- rieure du support, sur la branche qui est légèrement concave en arrière, sur les cellules 3 et 4 (fig. 29-30, pl. ID). Elles présentent à la base les mêmes éléments que les ner- vures pectorales, mais avec les modifications suivantes : l’apo- physe de » est devenue la plus forte, tandis que + (1) a diminué et changé de direction, elle est longitudinale et non perpen- diculaire à la direction de la nervure. Les niveaux & et à se sont rapprochés (comparer fig. 35, pl. Ilet fig. 5, pl. ID) et occupent une hauteur intermédiaire entre 7 et æ. Il y a trois pattes de chaque côté, de moins en moins lon- (1) Ges lettres servent à la fois pour les apophyses et Lou les muscles qui s’y insérent. ARTICLE N° la ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 39 gues, en allant de haut en bas et d’arrière en avant. Chaque patte, de même que les rayons pectoraux, est formée de deux _moitiés, une antérieure et une postérieure. La moitié anté- rieure est dans son tiers inférieur plus volumineuse que la postérieure, tandis que l'inverse paraît avoir lieu pour les nervures pectorales. Chaque moitié forme une baguette très élastique, grâce à de nombreuses striations annulaires d’une substance moins rigide que le reste de la nervure. Les deux moitiés sont liées ensemble, mais non soudées; la liaison est de plus en plus serrée à mesure qu'on s'éloigne de la base. Elles peuvent glisser longitudinalement l’une sur Pautre : c’est là le fait anatomique le plus saillant, celui d’où résulte l’incurvation de la patte. Soit À une baguette rigide (fig. 6, pl. IT), concourarit avec P, une baguette élastique. Je suppose que ces baguettes peu- vent rouler sur leurs points d'insertion sur le support. Si je tire l’ensemble des baguettes du côté P, l'extrémité distale de P sera obligée de suivre l’are de circonférence tracé par l'extrémité de À, et non celui qu'aurait tracé la baguette P si elle était libre. Celle-ci, étant élastique, fléchira avec une force de réaction de sens contraire au mouvement (fig. 7). En réalité, la baguette A, elle aussi, est élastique; seule- ment elle est plus rigide dans son tiers inférieur et son condyle a moins de Hélacomont que celui de la baguette postérieu- rement. Ces liaisons sont telles qu’en tirant À en avant, l’extré- mité de la patte se courbe en arrière et en bas. Cette incurvation, en quelque sorte automatique, facilite là marche. C’est un type de membre non encore articulé. Il est done plus simple que celui des Sélaciens (basilaire antérieur des Raies) où les muscles accompagnent des articles distincts. L’écartement graduel de l'axe du corps, en allant d'avant en arrière, est un fait commun chez les Hexapodes. Muscles de la nageoire pectorale. — Nous avons distingué plus haut dans la ceinture pectorale une pièce en forme de cheville, et une lame tordue portant les rayons. Cette lame 40 P.-C. AMANS. est soudée sur la face postérieure de la cheville. Cette face. est en forme de nacelle à versants inégaux. Le plus grand est l’antérieur ; la lame tordue a un pied sur chaque versant; entre les deux pieds est un espace hibre, qui fait communiquer les deux versants. | Les muscles moteurs de la nageoire sont situés de part et d'autre de la lame tordue; les uns s’insèrent sur le versant antérieur, les autres sur le versant postérieur. A. Sur la face antérieure, nous distinguons de dehors en dedans : 1° une peau épaisse allant à la base des nervures à 9-3 millimètres au-dessus des apophyses. Elle adhère forte- ment à ce niveau, et à partir de là recouvre tout le reste de la nervure comme un doigt de gant palmé. On pourrait dési- ner le niveau d’adhérence basilaire sous le nom d’empreinte cutanée. 2° Une couche musculaire superficielle qui va de la marge du versant antérieur à l’empreinte cutanée (a, fig. 35, pl. IT; fig. 8, pl. IT). Les faisceaux a sont confondus, sauf au voi- sinage de l’empreinte, où ils sont légèrement distincts. Les faisceaux a' sont destinés aux pattes; 1ls sont plus volumineux et plus distincts. 3° Une couche musculaire profonde s’insère en avant et en bas sur le versant antérieur de la cheville et sur la face anté- rieure de la lame tordue; — en arrière et en haut sur les apophyses (4, fig. 35-86, pl. ID). À cette couche profonde, il faut rattacher le muscle z. Il s’insère à la base de la première nervure, passe sous une poulie de renvoi et s'attache le long du versant au fond de la vallée. Les faisceaux +’ sont destinés aux pattes. 4 Le muscle €, allant de l'extrémité inférieure de la che- ville à la quatrième cellule de la lame, immédiatement en arrière de la plus courte patte. B. Sur la face postérieure, nous voyons d’abord la peau avec empreinte cutanée analogue à celle de la face antérieure, puis les muscles (fig. 9, pl. ID). r. Faisceaux superficiels, allant de l’empreinte cutanée à la ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. A face postérieure de la tête de la cheville au voisinage d’une écaille qui attache la ceinture à la colonne. r'. Muscles superficiels, destinés aux pattes. y. Faisceau situé au-dessous des précédents, spécialement destiné au bord supérieur de la nageoire, qu’il fait mouvoir concurremment à z. [l s’insère en haut sur la cheville, un peu plus bas que le système » r”, en bas, sur le rebord supérieur de la nageoire. æ, æ. Couche profonde, s’insère sur le versant postérieur de la cheville et la face postérieure de la lame tordue. Elle s’at- tache d'autre part aux apophyses correspondantes des nervures pectorales et des pattes. t. C’est le pendant du muscle €; il bride la quatrième cellule. Schématiquement (fig. 10), la nageoire pectorale est solli- citée dans les quatre directions «, ?,r,æ. Les muscles superfi- ciels a et r tirent en haut, 2 et æ en bas; « et c en avant,ret x en arrière; «@ el æ déterminent une rotation longitudinale, de même que r et 2, mais en sens inverse de @ et &. Cette rotation est spécialement accentuée pour le rebord supérieur par l’ac- tion combinée de y et z. Nous pourrions encore considérer les combinaisons trois à trois : air, aix, iræ, par la photographie instantanée ou toute autre méthode, on pourrait voir quelles sont les combinaisons habituelles de lanimal et la forme du mouvement qui en résulte. MUSCLES DE LA NAGEOIRE ABDOMINALE À. Sur la face inférieure du support : f. En avant, sur l’extrémité antérieure de la branche à T; en arrière, au bord antérieur de la nageoire. g. S'insère : 1° sur la face inférieure du support de la nageoire et sur une aponévrose qui réunit la branche médiane du sup- port à l’arête interne de chaque branche à T ; 2 à l'empreinte cutanée sur la base de la nageoire, De la masse commune y il 49 P.-C. AMANS. se détache un faisceau distinet pour lapaphyse cuephue fe le première nervure R u représente un Fa Jligament à 45-190 degrés sur la “eus tion du muscle g. Il se rend du bord externe du pied de la fourche à la seconde apophyse crochue. K. Couche profonde au-dessous de g;,: s’insère sur la face inférieure de la branche à T, et de là se rend aux apophyses crochues. : B. Sur la face antérieure (c’est-à-dire sur la barre trans- versale du TL); | L. S'insère sur cette face antérieure, et de là se rend à l apo- physe ronde de la première nervure. | c. Sur la face supérieure, 1l y a trois couches PJ inci- pales. _p. Se rend de l’arête antérieure de la cheville aux apophyses postér ieures des trois dernières nervures. ñn. En partie sur la même arête et sur la face supérieure de la branche à T. De là à la base des apophyses Pas ne des nervures. mn. Su la face supérieure de la branche à T; de là sur le bord inférieur des apophyses. Les figures 8 et 9 montrent encore d’autres muscles ayant des rapports avec les os pectoraux et abdominaux, mais non avec les nervures. Ge sont: . d. Part de la masse antérieure rétro-maxillaire e, glisse entre les deux nageoires, longe la base (le tiers antérieur seulement) de la nageoire abdominale CLISE jt dans Le muscles abdo- minaux. Ces mêmes muscles D déchout un aoan grêle isolé qui se rend à l'empreinte cutanée des premières nervures. Il fait le pendant de p.. 1 | h. Part de l'extrémité antérieure de la branche à T et bride l’arête inférieure de cette branche. Comme il s’insère sur l’aponévrose médiane qui lie les trois branches de los abdo- minal, il bride avec sa symétrique l’écartement de ces bran- ches. C’ est une sorte de ressort destiné à modérer les secousses ARTICLE N° 1. : : É ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 48 communiquées au squelette par les muscles moteurs de la nageoire. .… Le pied de la fourche abdominale est maintenu de tous côtés par la masse abdominale D, l’antagoniste de e. . Si l’on coupe les supports des deux nageoires et des pattes à moitié hauteur, parallèlement à l’articulation basilaire, on obtient la figure 41. Les couches musculaires sont plus épaisses sur la face postérieure du support pectoral et la face inférieure du support abdominal. À vrai dire, la différence ÉARSeur est peu considérable pour la nageoire pectorale.. : : . Un fait plus saillant est le suivant : la couche rx est plus épaisse au niveau af, mais la couche 42 au niveau yô. Il en résulte une certaine similitude de fonction entre le bord supé- rieur et le bord inférieur de la nageoire, seulement dans des sens opposés, c’est-à-dire que le battement principal du bord supérieur est dirigé de haut en bas et d’avant en arrière, tandis que celui du bord inférieur est dirigé de bas en JE et d’ar- rière en avant. Dans la figure 12, la nervure étant au repos, les directions principales D projetées sur la lame tordue ont à peu près les positions figurées dans le dessin. Nageoire caudale. — C’ est une palette à nervures comme les nageoires déjà décrites ; 1l faut distinguer une nageoire supérieure et une inférieure. Elles sont bâties sur le même type et ne diffèrent que par quelques détails secondaires. La nageoire dorsale semble plus longue et mieux musclée. Le bord supérieur de la dorsale est très épais ; son plus long rayon est renforcé à la base par quatre rayons de taille décrois- sante et fortement soudés. En dessous du long rayon on en compte cinq autres de plus en plus courts, mais à extrémités distales bifurquées, souples. Les extrémités proximales des rayons sont fortement échancrées, surtout vers le bord supé- rieur ; ils forment une gouttière profonde, tapissée par une forte membrane fibreuse, qui s’emboîte sur le squelette de la queue (voy. la courbure d’emboîtement, figure 14). . Même description pour la moitié inférieure de la nageoire ; 44 P.-C. AMANS. il suffit de retourner la moitié supérieure de 180 degrés. Le squelette qui supporte la nageoire se termine par une surface articulaire, analogue à celle de la nageoire pectorale : surface convexe, à contour ovale, étranglé; elle en diffère en ce qu’elle a un plan de symétrie; l’axe de symétrie à une forme sinueuse (sinussoïde à cinq branches). Les figures 43-14 montrent les principaux muscles de la nageoire caudale. On peut distinguer deux couches : I. Couche superficielle formée en haut des muscles à, b, en bas des muscles a’, b'. x) b et b' s’insèrent sur une crête latérale à la base du support; ils vont de là à la base des nervures, au niveau de l’origme de la bifurcation ; b se rend à la base de toutes les nervures, b’ à la base de la médiane seulement. Le muscle supérieur b est plus volumineux que l’inférieur b/; il fait en outre avec l’axe vertébral un angle de 60 degrés environ; celui de D avec ce même axe est seulement de 40-45 degrés. a et a’ s’insèrent immédiatement au-dessous des muscles précédents, sur les bases des nervures; ils convergent en avant vers les parois latérales des vertèbres caudales. IT. Couche profonde formée des muscles €, d, €’, d'. Dans chaque groupe on peut distinguer deux faisceaux : l’un 6, destiné à la base du premier rayon, l’autre d, à la base des autres rayons, à l’apophyse proximale des branches de bifurcation. Ces apophyses proximales sont Die une à l’autre par un fort ligament. Les muscles e, e’ ne sont pas des muscles moteurs de la nageoire ; ils s’insèrent immédiatement en avant de €, €, sur le support de la nageoire. IT. Les muscles » sont situés entre les rayons ; on a les nommer interradiaux. Is sont surtout développés entre les deux médians, où ils sont le plus larges, et entre le médian et l’antémédian, où ils sont le plus longs. Chaque interradial s’insère à la face interne (celle quiregarde l'axe vertébral) d’un rayon, et à la base de la face opposée. Les coupes 15-16 faites au voisinage de linsertion per- ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 45 mettent de suivre les couches musculaires. Les muscles «, a’ proviennent du tronc latéral, tandis que la couche profonde débute à 2 centimètres seulement, en avant de l'insertion des rayons. Il est intéressant de comparer la coupe 16 avec la coupe 17, faite à un niveau plus antérieur, plus près du maître couple. À ce dernier niveau, le gros bout est en bas; au niveau 16, les deux moitiés dorsale et ventrale sont symétriques; au voisi- nage immédiat de l'insertion des rayons le rapport est changé; la moitié dorsale est plus développée que la ventrale. Ge chan- sement a lieu au niveau du point d'inflexion du contour d’ho- rizOn. Il y a quatre groupes principaux de muscles latéraux de chaque côté de la colonne, un dorsal, deux médians, un ven- tral. La coupe 17 fait voir des couches concentriques comme chez les Scyllium et les Raïes; nous remarquerons une fois de plus que ces courbes ne sont pas fermées; elles sont largement ouvertes vers l’axe vertébral. La forme des * tendineux est un peu différente (fig. 18) ; la convexité médiane est bien tournée vers la base, mais elle est complexe, forme une sinussoïde à trois. branches, dont la branche médiane est convexe en arrière. Quelle est l’action probable de ces divers muscles ? Les mouvements principaux ont lieu de droite à gauche, parce que les muscles médians sont les plus volumineux. Les mouve- ments particuliers de la nageoire caudale sont soumis à deux groupes, un superficiel SS° par exemple (je suppose S = ab, S'— ab") et un profond Il (1—cd, l —c'd'); s’il en est ainsi à gauche, nous aurons à droite même répétition avec les groupes ss’, 22 symétrique des SS’, IT". Première combinaison : tous les muscles de droite se con- tractent, puis ceux de gauche. La surface formée par la na- geoire à sa concavité principale tournée tantôt à droite, tantôt à gauche. Deuxième combinaison : la moitié supérieure bat à droite, pendant que la moitié inférieure bat à gauche; puis l'inverse a 46 P.-C. AMANS. lieu dans le deuxième temps. La surface formée prend alors l’aspect d’une hélice, parce que les deux moitiés ont leurs concavités principales tournées en sens inverse dans le même moment. Mais elle diffère profondément d’une hélice parce que 1° ses génératrices ne sont jamais parallèles à un même plan, même en repos, où leurs extrémités sont dans le plan de profil. 2° Dans cette dernière position, elles font des angles variables entre elles. 3° L’axe d'implantation des génératrices est une ligne courbe plane et non une droite. 4 La surface est élastique, et le mode du mouvement est alternatif. L’élasticité et le grand nombre de combinaisons nous défendent de préciser à priori la forme de cette surface. I est inutile de discuter des combinaisons hypothétiques ; elles sont en effet très nombreuses ; chacun des huit groupes principaux se dédouble (S par exemple est formé de « et de b, etc.), ce qui donne seize moteurs pouvant se combiner un à un, deux à deux, etc. De plus les mouvements particuliers de nageoire peuvent se combiner avec les mouvements généraux de la queue, dus aux muscles latéraux. On peut simplifier le raisonnement en constatant que chaque moitié se comporte; prise isolément, à peu près comme une nageoire pectorale; une fois en mouvement, elle forme une surface gauche, avec dièdre basilaire : les muscles super- ficiels sont très obliques sur la direction des génératrices. La notion du dièdre basilaire, que j'ai introduite le premier en navigation aérienne, peut aussi s’employer en navigation aqua- tique, néanmoins avec des différences qui seront signalées plus tard. Les muscles interradiaux ne figurent pas aux nageoires pec- torales et abdominales. Leur rôle est évidemment de brider l’écartement des deux moitiés dorsale et ventrale, ils modi- fient la largeur de la palette, sa force de résistance, et par suite l'intensité de la résultante. La moitié dorsale étant plus longue, plus ere bat- tements l’emportent en intensité sur ceux de la moitié Infé- rieure. La palette tend done à monter, la partie antérieure de ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 41 l'animal au contraire a son gros bout en bas et tend à des- cendre, à moins que les grandes nageoires du maître couple ne s’y opposent. Si ces nageoires restent immobiles collées aux flancs et que la palette caudale supérieure seule se remue, Panimal fait la culbute tête en bas. Nous avions déjà un grand nombre de sshbirgo he avec les mouvements particuliers de la nageoire caudale, et les mouvements généraux des muscles latéraux. Si nous y ajou- tons les mouvements des nageoires antérieures, le nombre des combinaisons devient inabordable. Quelles que soient les hypothèses examinées, il y a dans toutes un facteur de premier ordre, la symétrie ou la dissymétrie des formes. Il ne suffit pas pour définir une nageoire de donner son contour, les directions de ses génératrices et celles de ses Hosolee il faut y ajouter la forme de son articulation basi- laire, et celles des sections parallèles à la base. Il n’est pas indifférent que ces sections aient ou non un axe de symétrie, avec gros bout en avant ou en arrière. La connaissance des trois contours principaux est aussi importante pour une partie isolée de la machine que pour la machine tout entière. On n'a déjà reproché d’attacher une trop grande importance à celte Symétrie ou dissymétrie de formes. Les ingénieurs peuvent aborder les problèmes de navigation rapide en négli- geant ce facteur, mais la nature en tient fous plus encore peut-être pour les machines aquatiques qu’aériennes. L’hélice' marine actuelle est une monstruosité. Nügéoire dorsale. — La première dorsale est formée de dix rayons épineux, durs et volumineux. Ils s’insèrent dans une gouttière osseuse, qui fait partie de la crête dorsale. Chaque segment de la crête est formé de trois lames, une lame dans lé plan de profil, et les deux lames qui forment les ver-"” sants de la rainure. La section frontale de cette crête forme une fourche dont le pied s’éngage entre les apophyses épi- neuses. | Le pied de la fourche a une forme quadrilatère ; la diago- nale verticale est occupée par une crête inclinée en arrière, 48 P.-C. AMANS. l'appui ; l'extrémité de l'appui présente une excavation arron- die pour le roulement du rayon. Chaque segment de la crête est uni à ses voisins: 1° par les quatre sommets des lames horizontales ; à ce niveau les bords sont.taillés en biseau, incliné en arrière. Ces symphyses laissent entre elles un espace vide, qui est occupé par la tête du rayon. L’appui coupe cet espace vide en deux; il en résulte deux trous, l’un antérieur, l’autre postérieur ; 2° par une rai- nure profonde située sur la lame verticale, en avant de Parti- culation. Cette rainure s’emboîle dans une saillie correspon- dante de la lame précédente. Les rayons sont légèrement courbés en arrière. Ils ne sont pas symétriques par rapport au plan de profil. Le premier est symétrique ; le second présente deux rainures longitudinales sur la face gauche ; le troisième sur la face droite, et ainsi de suite. C’est alternativement la moitié droite ou la moitié gauche qui est la plus large d’avant en arrière. L’extrémité proximale du rayon est allongée transversale- ment ; la partie médiane de cette extrémité est plus mince que les deux bouts. Le milieu roule sur l'appui vertical; chaque bout donne insertion aux muscles antérieur et postérieur. Le muscle antérieur est séparé du postérieur par la crête de l'appui. L’un tire le rayon en avant, l’autre en arrière. De forts ligaments assujettissent toute l'extrémité infé- rieure des rayons dans les ouvertures de la gouttière dorsale. Ces ligaments sont en outre séparés de la peau par des bour- relets cellulo-adipeux. La membrane qui unit les rayons s’insère dans les rainures longitudinales des rayons; par suite de la disposition de ces rainures, elle ondule de droite à gauche : par suite le repliement est plus facile. C'est là, Je crois, le seul but de cette dissymétrie des rayons : favoriser le repliement. Il est clair que les rayons se rabattraient moins facilement l’un sur l’autre, si la membrane unissait la ligne médiane antérieure de l’un à la ligne médiane postérieure du précédent. Les deux premiers segments de la crête dorsale manquent ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 49 des lames horizontales ; les appuis sont très larges, et leurs cavités articulaires plus étendues transversalement ; en avant de la première est un fort tubercule. Les condyles des deux premiers rayons sont réunis entre eux, à ce tubercule et au troisième segment par de forts ligaments. La face antérieure des condyles du deuxième rayon s'articule sur la face posté- rieure concave des condyles des premiers rayons. La face antérieure des condyles du premier rayon donne insertion à un muscle antérieur, trois fois plus volumineux que les autres muscles antérieurs. Il s’insère au voisinage de l'articulation, tandis que le muscle postérieur s insère à à Pex trémité des condyles. Les autres nageoires du plan de profil ont des rayons moins rigides et des articulations plus souples. Ces nageoires en se redressant augmentent l'étendue du plan de UE et par suite la résistance dons les battements de droite à gauche. Elles modèrent du même coup la tendance au rouhs. Cette action est connu depuis longtemps. Gouan (1) a fait des expériences à ce sujet, il y a plus d’un siècle, et Borelli (2) depuis deux siècles. Barthez (3) cite ces expériences et ajoute une mauvaise explication. [Il croit que « les nageoires dorsales et ventrales facilitent la descente ou la montée en formant une lame mince qui fend l’eau plus facilement ». La vitesse de déplacement de haut en bas ne dépend pas de cette lame mince, mais bien de la forme des sections frontales. Du reste les nageoires dorsales et anales sont des moins constantes parmi les organes de la locomotion aquatique. IV. — TYPE LEUCISCUS. Les figures 93, 24, 95 représentent les trois projections planes des contours apparents. La projection frontale a le (1) Gouan, Histoire des Poissons. (2) Borelli, De motu animalium, Propos. 212, (3) Barthez, Nouvelle mécanique de l'homme el des animaux. Carcassonne, an VI (1798). ANN. SC: NAT:, 200L:, 1888: VI. 4 —VART.AN0 1. 90 P.-C. AMANS. gros bout en haut (il était en bas chez les Trigla). La moitié inférieure du profil est plus incurvée que la moitié supérieure (c’est encore l'inverse chez les Triglu). Nageoire pectorale. — La ceinture pectorale se compose de deux os intimement soudés, l’un antérieur, l'autre postérieur. Le premier sert de support au second; celui-ci supporte la nageoire (fig. 20-21, pl. TT). Os antérieur. — Sorte d’équerre, avec un angle de 120 degrés ouvert en avant. Le côté supérieur, tricaréné, s'articule avec la colonne par l'intermédiaire d’un petit os, l’analogue de l'écaille des Trigles. Le côté inférieur est bien plus large, concave postérieurement ; il est limité par trois arêtes : interne, externe, postérieure. Il s’arc-boute avec son symt- trique sur un os impair, sous-lingual. Le coude de l’équerre forme une saillie; l’arête interne porte deux échancrures; la supérieure sert à loger le système des trois trous, l’inférieure forme la grande ouverture inférieure. Os postérieur. — Forme aussi une sorte d’équerre, un côté est supérieur, l’autre inférieur; 1l s’arc-boute par ses deux extrémités sur l’arête interne de l’os précédent. L’angle de l’équerre est percé d’un petit trou ; le côté supérieur est formé de trois branches réunies à leurs extrémités, de manière à délimiter trois trous (fig. 21). L’une de ces trois branches, la branche externe, porte la nageoire. Cette branche a un con- tour sinussoïde à deux branches. Osselets basilaires. — La nageoire roule sur l’os postérieur par l'intermédiaire de quatre osselets (+, 6, y, 5). La ligne d'in- sertion est sinueuse ; la concavité principale est tournée en bas. L’osselet « a son bord interne plus épais que l’externe. D'une manière générale, l’épaisseur va en augmentant de dehors en dedans, soit dans chaque osselet, soit dans leur ensemble, Chacun des osselets 8, y est recourbé de dedans en dehors. Les projections longitudinales de «, 8 (c’est-à-dire quand on les voit par la tranche) sont sensiblement recti- lignes; celle de y est légèrement courbe. à est massif, plus gros et plus court que y (fig. 30). ARTICLE N° ©. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. o1 Les surfaces articulaires correspondantes à ces osselets sont : #, une sorte de suspension ligamenteuse ; 6, une énar- -throse; y, une surface large, presque plane, une espèce de symphyse; à, une articulation en selle. Les extrémités supé- rieures des osselets sont en rapport avec de petits sésamoïdes. Nageoire. — Elle est de faible volume, comparée à celles que nous avons déjà vues. Son contour est triangulaire. Le bord antérieur le plus épais se divise en deux moitiés, l’une antérieure (4), l’autre postérieure (p) (fig. 31). 1° L’antérieure présente un rebord postérieur aminei (d), qui se continue dans la région centrifuge par une substance élastique striée. Notons encore l’apophyse pointue (e, fig. 31); 2° la posté- rieure, plus large, présente une articulation en selle de cheval et une rigole, », pour l’encastrement de la moitié antérieure. De même, chacune des seize nervures suivantes est double; elle est formée de deux nervures soudées : une nervure anté- rieure à apophyse pointue, et une nervure postérieure à extré- mité inférieure plus grêle. Entre les deux têtes proximales se trouve un sésamoïde, en rapport avec les tèles des osselets. Comparaisons avec une aile d'insecte. — Si nous comparons cette nageoire à une aile d’insecte, nous remarquons les points communs suivants : 1° contour triangulaire à petit côté cen- tripète. L’épaisseur diminue graduellement de la base au sommet et d'avant en arrière; 2° le pivot fixe est situé à la base des nervures antérieures. Le système des osselets rap- pelle l'appareil terminal; 3° les apophyses basilaires des ner- vures sont alternativement antérieures et postérieures; de même, chez les Insectes, J'ai distingué des nervures dorsales et des nervures pleurales. Ces nervurés sont distinctes complè- tement chez les Insectes (sauf parfois celles du bord anté- rieur), tandis que chez les Leuciscus les deux moitiés du rayon sont soudées sur la plus grande partie de leur trajet; 4 courbure antéro-postérieure des nervures ; 5° prédominance en grosseur des muscles abaisseurs sur les éleveurs. La nagcoire pectorale du Leuciscus diffère d’une aile d’In- secte par les points suivants : 1° Le rapport de son volume au LL 59 | P.-C. AMANS. volume du corps tout entier est de beaucoup plus petit. 2° I] n’y a pas de squelette à réaction élastique, jouant le rôle d'appareil de pronation. 3° La nageoire peut, dans une posi- tion déterminée, prendre la forme d’un tétraèdre très allongé, à surfaces antérieure et postérieure quasi planes; elle peut même aller en deçà ou au delà, de manière à présenter sa concavité soit en avant (sic Insectes), soit en arrière (ce qui n’a pas lieu chez les Insectes). En un mot, la dissymétrie des orandes faces est moins accusée que dans Paile. Une autre conséquence, c’est que le Poisson pourra utiliser sa nageoire pour aller dans des directions diamétralement opposées, suivant le sens vers lequel se tourne exclusivement la concavité. Si, au contraire, les battements sont à peu près isodynamiques, qu’il y ait changements alternatifs du sens de la concavité, du dièdre, en un mot, la coupe transversale de la nageoire en mouvement est une sinussoide régulière dont l'axe indique la direction du mouvement. C’est là le batte- ment ondulatoire, qui n'existe jamais chez les aériens, du moins sous cette forme (sinussoïde régulière avec un axe de symétrie). Comparaisons avec nageoires pectorales de Scyllium, Raja, Trigla. — Chez tous ces animaux, comme chez Leuciseus, l'appareil pectoral est un organe symétrique de droite à gauche, mais non de haut en bas, ni d'avant en arrière. Cette remarque s'applique à tous les organes de locomotion, même à la queue, qui est toujours hétérocerque. La nageoire pectorale de Raja se rapproche du type caudal de certains Téléostéens. Prenons, par exemple, une nageoire caudale de Téléostéen; bridons les bords supérieurs et infé- rieurs, inclinons-les davantage en avant, et nous avons le type de la pectorale de Raja (bords internes épais; zone centrale mince; courbure basilaire en forme de sinussoïide à trois branches, la médiane concave en dehors, du côté des rayons). La ressemblance ne va pas plus loin; la caudale des Téléo- stéens à un plan de symétrie; la pectorale de faja n'en a aucun. Son battement le plus énérgique est de bas en haut, ARTICLE ‘N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 53 la grande préoccupation de cet animal étant de gagner le fond et de s’y aplatir. La ligne d'insertion basilaire chez Leuciscus et Scyllium fait un angle positif (1) avec l’axe fictif (de 25 degrés chez Scyllium, de 45 degrés chez Leuciscus), un angle voisin de zéro chez Raja, un angle négatif chez Trigla (de — 45 degrés environ). La comparaison entre les nageoires des Sélaciens et des Téléostéens est rendue difficile par ce fait que, chez les Téléos- téens, la partie libre de la nageoïre est entièrement osseuse et membraneuse, tandis que chez les Sélaciens une bonne par- tie est occupée par les muscles. Cette différence est du même ordre que celle qui sépare les ailes d’Insectes des ailes d’Oi- seaux. Au point de vue géométrique, il faut comparer les parties vibrantes dans leur ensemble, qu’elles soient ou non pourvues de muscles. En résumé, la pectorale est un tétraèdre allongé, dans lequel on peut distinguer deux grandes faces et deux petites, dont l’une longue et l’autre courte. 1° Chez Scyllium, le tétraèdre s'articule par la courte; il est bridé, collé aux flancs par la longue. 2 Chez Raja, il y a deux tétraèdres analogues, accolés par l’arête adjacente aux grandes faces. 3° Chez Trigla et Louciscus, le tétraèdre s’articule par la courte face; les trois autres faces sont mobiles en tous sens. La mobilité est plus grande chez Leuciscus que chez Trigla, à cause du système des osselets. Nous retrouvons ces osselets chez Trigla (les pièces 1, 9, 3, 4, fig. 29, pl. [T, sont proba- blement les homologues des pee œ, Bi 0, f1e D20 SD! pl. ID) ; mais ils sont ankylosés. Cette ankylose est en rapport avec la forme de l articulation basilaire, dans laquelle il y a peu de différence entre les deux extrémités ; nous avons vu de même que les rayons extrêmes différaient peu. C’est plutôt un type de nageoire ondulatoire, (1) Je compte les angles positifs en allant du sommet antérieur de l’ovoïde vers le sommet dorsal, et les angles négatifs en allant du sommet antérieur vers le sommet tal, 04 P.-C. AMANS. et, dans ce cas, l’ankylose est nécessaire pour résister aux tiraillements alternativement de sens contraires. Peut-on établir des analogies entre les osselets basilaires du Leuciscus et du Scyllium? Il y a seulement analogie de position et de longueur entre les trois basilaires du Scyllium et les quatre du Leuciscus. D’après Gegenbaür, le système des osselets des Téléostéens est tout ce qui resterait de l'appareil compliqué formant les supports primaires des ravons; le plus constant de tous serait le métaptérygium. Si nous n’examinons que le squelette du Scyllium, nous voyons que son bord le plus épais est celui du métaptérygium. Si le bord métlaptérygien était en même temps très mobile, il serait comparable au bord antérieur d’une aile, dont les élé- ments ont une grande fixité. On s’expliquerait alors aisément la persistance du métaptérygien, surtout si l’on montrait parallèlement sa croissance en mobilité. L'opinion de Gegenbaür est probablement la vraie pour ce qui regarde le passage aux reptiles. Il s'appuie sur la persis- tance du métaplérygium chez les Sélaciens, alors que les autres pièces manquent. J’ajouterai une considération physio- logique en faveur de cette persistance : le bord métaptérygien est le plus épais, et il est inférieur par rapport aux autres pièces; c’est donc lui qui s’essaye le premier à marcher sur le sol, et qui prend le principal rôle, à mesure que le Sélacien devient quadrupède ; c’est donc lui qui persiste. Cette considération perd de sa valeur pour le passage aux Téléostéens. Les nageoires de ceux-ci ont pour fonction de battre ou d’onduler, et non de marcher. Gegenbaür dit : € D’après ce que nous avons vu chez les Ganoïdes, nous devons reconnaitre dans ces pièces celles qui se sont montrées le plus constantes, c’est-à-dire l’os basilaire du métaptérygium. » fl reconnaît, du reste, qu’il est pour ainsi dire impossible de les reconnaitre exactement. Muscles pectoraux, —T, Antérieurs, —Ils peuvent se diviser en {rois groupes : Ï. À constitue un faisceau superficiel le plus long et le plus ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 59 large. Il s’insère en bas sur les branches inférieures des deux os pectoraux, en haut sur les apophyses basilaires des rayons. 2° A est un accessoire de À ; il est plus court et situé au-des- sous du précédent. Il longe les osselets basilaires, s’insère en bas au-dessous du petit trou, et en haut aux apophyses basi- laires. 3° A’ s’insère en bas au-dessous de la saillie de l’équerre et sa commissure, en haut sur la face antérieure de la base du premier rayon. À est antérieur, À’ antéro-interne, A” antéro-externe. Il. Postérieurs. — Nous avons de même un muscle posté- rieur P, un postéro-interne P’ et un postéro-externe P”. 4° P s’insère en haut et en dedans dans la gouttière de la branche supérieure de l’équerre, en bas et en dehors sur les apophyses postérieures des rayons. 2 P’ passe sous la commissure postérieure et se rend à la face postérieure de la base du premier rayon, au niveau de l'articulation. Il est antagoniste de A”. 3° P” s’insère en dessous du petit trou, et est antagoniste de A”. Cette musculature peut se comparer à celle de Trigla ; les muscles À P correspondent aux couches superficielles, A'P'aux couches profondes; chez les deux poissons, le bord antérieur a des muscles spéciaux, et les directions des couches superfi- cielles présentent une grande divergence. Ainsi, chez Leu- ciseus, le muscle antérieur tire en bas et en avant; l’action directement antagonisie serait de tirer en haut et en arrière. En réalité, le muscle postérieur tire en haut el aussi en avant. Pareille prédominance d'action propulsive est un fait général chez les organes servant spécialement à la marche, à la nage ou au vol. Comparez, par exemple, les directions des muscles pecto- raux et dorsaux chez Aquila, Vespertilio, Acridium. Cette grande divergence de directions entre un rayon et les fibres qui le meuvent tend à faire tourner le rayon autour de son long axe. Nageoire ventrale. — L'os support de la nageoire est de la 56 P.-C. AMANS. forme figure 35 (pl. IT). Les branches À BC donnent insertion aux muscles; la branche T porte la nageoire. À la branche C aboutissent les forts tendons des muscles abdominaux et un ligament qui l’unit aux apophyses basilaires inférieures de la nageoire. | Les principaux #useles de la ceinture sont les suivants : I. Inférieurs. — a s’insère sur la face interne de la branche B et aux apophyses basilaires inférieures des rayons; a’ est un accessoire de @, situé plus profondément (fig. 33); b, entre les branches A et B; il se rend à l’apophyse inférieure de la pre- mière nervure. IT. Supérieurs.—c entre les deux branchés À et B, sur la face supérieure, et aux apophyses supérieures des rayons (fig. 34); d, faisceau plus spécialement destiné au premier rayon. IT. Externe. — e s’insère sur la face externe de la bran- che A, et dans l’échancrure basilaire du premier rayon. La nageoire ventrale est formée de huit doubles rayons accolés, un rayon inférieur et un rayon supérieur. C’est le rayon inférieur qui est le plus fort. Le bord antérieur le plus épais présente, en outre, un rebord pro-antérieur, court et massif; ce rebord est échancré et reçoit l’insertion du musele externe e. Chaque moitié de rayon présente une apophyse basilaire pour l’insertion des muscles supérieurs et inférieurs. Dans la vallée située entre ces apophyses se trouvent trois osselets intermédiaires entre les rayons et la surface articulaire du support. Ces trois osselets sont, par leur position, l’interne, le médian, l’externe. Le médian, le plus petit, est cylindroïde, creusé d’une rigole articulaire; il est placé entre les branches du cinquième rayon. L’externe est cunéiforme, creusé sur une face d’une rigole qui continue celle de l’osselet médian; il roule entre les branches des quatre premiers rayons. L’interne, le plus volumineux, en forme de virgule, ferme la vallée par sa partie élargie. L’articulation de la nageoire ventrale est un type d’articu- lation à la fois rigide et élastique : 4° rigide par les osselets et ARTICLE N° 1, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 57 le support; 2° élastique par les branches élastiques de bifur- cation de chaque nervure. Peut-on réaliser artificiellement un _tel genre d’articulation? Prenons huit axes d’articulation non situés dans un même plan, le huitième normal à la surface ventrale, le premier oblique (imiter l’obliquité du bord anté- rieur), les directions des autres étant graduellement intermé- diaires entre celles du premier et du huitième. Les longueurs des axes vont en diminuant du premier au huitième; faisons passer maintenant une série de couples autour de ces axes, et nous aurons une reproduction approchée de la nageoire. L’éventail ainsi formé est de la même famille que celui des Chéiroptères, c’est-à-dire que les axes sont situés sur une surface gauche, et que leur longueur, ainsi que celle des couples, va en diminuant du premier au dernier. Seulement la divergence des axes extrêmes est bien moins prononcée, ainsi que la courbure des rayons. Comparaisons avec nageoires abdominales de Trigla, Raja, Scyllium. — La différence avec Raja et Scyllium consiste dans la non-fixation du bord interne, et dans l’indépendance réciproque (autant du moins que le permet l'étendue et l’élas- ticité de la membrane interradiale) des rayons. Ils sont juxta- posés au repos; ils divergent dans l’extension, ce qui augmente la surface de la nageoïre. Nous n’avons pas ce déploiement en éventail chez les Sélaciens; la nageoire peut fégèrement s’avancer dans son propre plan, mais d’un seul bloc. La différence est du même ordre, par exemple, entre le déploiement de l’élytre et celui de l’aile membraneuse chez un Acridium. La nageoire abdominale de Leuciseus est située très en arrière de la pectorale, tandis que chez Trigla les deux cein- tures se touchent. Le rapprochement des nageoires pectorales et abdominales chez Trigla est sans doute lié au grand déve- loppement de la tête, à la position céphalique du centre de gravité. Soit, en effet, un projectile ovoide lancé à toute vitesse, et portant une paire d’ailettes repliées contre les flancs pen- dant la marche. Si le centre de gravité est en arrière des 58 P.-C. AMANS. ailettes et qu’il veuille s'arrêter brusquement par l’action de ces aileltes, il risque de culbuter. Si l’on veut éviter un mou- vement de bascule autour des ailettes, 1l sera bon d’en placer une seconde paire en arrière du centre de gravité. C’est le cas de Leuciscus. Plus le centre de gravité est éloigné de lu nageoïre pector ae, plus la nageoire abdominale se porte en arrière. Nageoire dorsale. — Elle est formée de rayons doubles à moitiés symétriques. Entre les quatre apophyses basilaires du bord antérieur est solidement fixé un sésamoïde b qui roule dans la cavité 8 du support (fig. 26 et 27). Le support présente de chaque côté de la cavité : 4° les quatre surfaces articulaires quasi planes correspondant aux apophyses basilaires des rayons; 2° la cavité & destinée au sésamoide b du métamère précédent. Chaque support se com- pose (fig. 28) : 1° d’une tête munie de ses articulations B 0e; 2° d’un pied à deux lames qui se coupent perpendiculaire- ment; celles qui sont perpendiculaires au plan de profil for- ment l'appui, déjà désigné chez Trigla; ces lames servent à l'insertion de deux paires de muscles, une paire de museles antérieurs et une paire de muscles postérieurs. Artificiellement, on pourrait reproduire cet appareil par une série d’axes parallèles, graduellement moins longs du premier au neuvième. Le chevauchement latéral est insigni- fiant, les ligaments autour de y à étant très serrés; mais, comme la nageoire est très élastique, les extrémités peuvent serpenter. Nageoire ,anale. — Plan vertical de symétrie, comme la nageoire dorsale, mais quelques différences dans la forme des pièces, indiquant plus d’élasticité et de souplesse : les ner- vures sont plus fines et les sésamoïdes d’un équilibre plus instable. IT y a dix-sept nervures environ; le bord antérieur est formé de trois rayons accolés l’un derrière l’autre, de plus en plus longs du premier au traisième. L'ensemble est porté en avant par trois paires de muscles, en arrière par une seule paire ARTICLE N° 1. * ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE, 59 Chaque rayon suivant a deux paires de muscles, une paire antérieure et une postérieure. = Toutes les nervures ont en outre un muscle médian super- ficiel, transversal, qui s’insère à une zone sous-cutanée fibreuse. Ce muscle doit pouvoir donner une légère oscillation latérale. A la face ventrale est dévolu le rôle de sustentation, de direc- tion, de serre-frein, parfois de propulsion. De là une plus grande souplesse et une plus grande étendue de déplacement dans les organes ventraux que dans les organes dorsaux. Nageoire caudale. — La charpente de la nageoire caudale est formée par les trois dernières vertèbres. L’antépénultième donne une épine dorsale et deux ventrales. La pénultième en donne une de chaque côté; la dernière donne trois dorsales et cinq ventrales, et une apophyse latérale, dirigée de bas en haut et en arrière. Les deux moitiés sont dissemblables; aucun support n est pareil ; l’hétérocerquie est complète. Les têtes articulaires cartilagineuses des supports s’em- boîtent dans le canal fibreux en forme de 8 formé par la bifur- cation des rayons de la nageoire. La branche supérieure du 3 diffère de l’inférieure par le degré de courbure; à cela près, les deux moitiés (dorsale et ventrale) sont construites sur le même plan. Considérons seulement la moitié dorsale. Le rayon supérieur est le plus gros et le plus long; la gros- seur et la longueur des rayons suivants diminuent graduelle- ment d'avant en arrière. Le rebord pro-antérieur est très développé, formé de six petits rayons; ce rebord modifie la courbure du bord supérieur de la nageoire; le long rayon supérieur est concave en bas, tandis que son rebord basilaire est concave en haut (fig. 29). Cette différence de courbure pourrait s'exprimer ainsi : le bord épais d’une nageoire forme une sinussoide à deux branches : 1° une courte, la protimale, à concavité tournée en dehors; ® une longue, la distale, à con- cavité tournée en dedans. Muscles de la nageoire caudale. —- On distingue : 60 P.-C. AMANS. Ï. Couche superficielle. — Q se rend à la base des rayons, en arrière du canal articulaire. | IT. Couche profonde. — P provient des trois dernières vertèbres ; il s’insère à l’extrémité proximale des rayons. JT. Interradiaux. — Ont une disposition différente de celle des interradiaux de Trigla. Geux de Trigla allaient d’un rayon au suivant, se logeant dans les interstices interradiaux ; ceux de Leueiscus ont une disposition rayonnée, convergent tous vers le milieu basilaire de la nageoire (M, fig. 29). Ils servent ainsi à brider l’écartement de haut en bas et à produire des ondulations partielles de la queue. V, — TYPE EXOCŒTUS. Malacoptérygien anacanthine. — Nageoires dorsale et anale l’une au-dessous de lautre; elles sont peu développées. Les nageoires pectorales sont très longues; repliées au repos, elles arrivent presque à l’origine de la nageoire caudale. Les nageoires abdominales sont placées très loin en arrière. Type élancé, effilé, par la forme générale du corps et celle des nageoires. La moitié inférieure de la nageoire caudale est plus longue que la moitié supérieure. C'est l’'Exocœtus volitans qui a servi de sujet à mes obser- vations. Les figures 1-3 (pl. IV) représentent une vue horizontale avec les nageoires repliées (fig. 1) et étalées (fig. 3). La figure 2 est une vue de profil et la figure 4 une vue de front. La dissy- métrie des contours est du même ordre que celle des Leuco- ciscus : gros bout en avant et en haut. La figure 5 est un schéma très caractéristique. ; Le quadrilatère #0" ff" est une section plane passant par la base de la nageoire pectorale. L’ovale e fghg'f limite une surface quasi plane, située entre l’origine # de la nageoire anale et le point médian de convergence des ares branchiaux e. Cet ovale diffère peu d’un losange qui passerait par les points ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA :BOCOMOTION AQUATIQUE. 61 ehgg'. Les points gg! sont les niveaux d'intervention des nageoires abdominales. L’ovale abcb' part de l’origine & de la nageoire dorsale et va jusqu'à l'extrémité antérieure de lPanimal (extrémité de l’axe fictif). Get ovale limite une surface légèrement bombée : elle est distincte du contour apparent horizontal #0 cb, sauf dans la partie 6 b b', qui est commune aux deux courbes. L’ovale dorsal a gros bout en avant, l’ovale ventral à gros bout en arrière. La tête de l'animal forme un tétraèdre ce à D à faces quasi planes ; la région caudale en arrière du niveau ab est un conoïde aplati de droite à gauche, un peu plus renflé en bas qu’en haut (c’est-à-dire l'inverse des figures #et 7). Nageoire pectorale. — Elle a, au repos, un contour trapé- zoïdal (fig. 2); étalé, il devient lancéolé, pentagonal, en sché- matisant le bord supérieur épais de la nageoire par une ligne droite. | | Elle est formée de dix-sept rayons environ, augmentant rapidement de longueur du premier au sixième, diminuant plus lentement du sixième au treizième, rapidement du trei- zième au dix-septième. Dans les deux premiers, les deux moi- tiés sont accolées dans toute leur longueur ; les autres ne sont accolées que dans leurs parties proximales; au ‘distum, les moitiés se séparent, tendant à se mettre dans un même plan, divergeant du plan proximal d’un angle << 90 degrés. La moitié ou nervure, qui est antérieure dans la région proximale, devient supérieure dans la région distale. Cette divergence de plans peut se comparer à celle du basi- laire antérieur de la nageoire abdominale de Raja; elle est plus nette encore que chez Raja, puisque les deux parties de l'organe sont distinctes. Repliée, au repos, l'extrémité de l’aile se moule sur l'arrière du tronc; les rayons sont alors sensiblement parallèles. Dans le relèvement, ils divergent chacun dans le plan de son axe principal de roulement. Ils forment alors une surface gauche, de la famille des Hyperboloides à une nappe. 62 P.-C. AMAXNS. Le premier rayon est étroitement soudé au second sur toute sa longueur. On y remarque un renflement «et deux apophyses, l'une longue, effilée, p, l’autre plus trapue, a. La longue apo- physe appartient à la face postérieure. Le second rayon pré- sente aussi deux apophyses, & et p; la postérieure est plus large. Entre les deux rayons se trouve un osselet articulaire. Les deux moitiés sont étroitement accolées depuis l’échancrure basilaire jusqu’à l’extrémité distale (fig. 12). La nervure postérieure du second rayon présente un élar- oissement basilaire; cet élargissement est plus prononcé dans le troisième rayon, de même dans Îles rayons suivants; ils se recouvrent ainsi comme les tuiles d’un toit. La longueur de cet élargissement atteint son maximum dans le sixième; ses extrémités distales décrivent la courbe x y (fig. 6), tandis que la courbe wvt représente celle des points proximaux y (fig. 24). Le point y est une échancrure entre l'élargissement et l’apo- physe p. La figure 14 représente une coupe transversale des apo- physes basilaires; la courbe w'v'f représente le heu des extré- mités proximales externes des apophyses postérieures, la courbe wef le lieu des points d’origine interne des mêmes apo- physes. La plus grande longueur ev' appartient approximati- vement au huitième rayon. Entre les apophyses antérieures et postérieures se trouvent autant d’osselets qu'il y a de rayons. Ces osselets sont noyés dans une masse fibreuse, fixés d’une part aux apophyses we, au ligament / (fig. 13, 13), d'autre part aux bords de l'articulation. Le ligament /’ rattache le creux d’un rayon à la convexité du suivant. i et g sont les insertions des muscles profonds ; les museles superficiels postérieurs s’insèrent aux points y, c’est-à-dire sur la courbe uvt; les muscles superficiels antérieurs s’insèrent au-dessus de 4, sur la courbe mno (fig. 8, pl. IV). Une peau épaisse relie la base de la nageoire à la dernière écaille branchiale. L’hexagone figure 7 représente exactement la section schématisée par 4 ff! 0" dans la figure 5. A l’état de repos, le bord antérieur de l'aile s'applique sur le versant ARTICLE N° Î. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 63 supérieur de l'hexagone; l’aile se conforme à la courbure de l’hexagone. Cette position diffère du repliement des ailes d’Or- . thoptères et autres insectes. Chez Acridium, par exemple, le bord antérieur de lélytre, dans une coupe analogue, serait sur le versant inférieur. La face externe de l'aile au repos est convexe; elle devient plane dans une demi-extension, concave en pleine extension (fig. 10). Pendant ce temps, la face interne reste sinussoïde, mais le point d’inflexion tend à disparaître. Je ne parle, bien entendu, que de la base de l'aile, sa partie distale étant plus mobile, variable dans ses déformations. La nageoire est reliée à la ceinture par un système d’osselets analogues à ceux de Leuciseus. Ceinture. — L’appui de la nageoire (l’ensemble des pièces nommées généralement scapulum, coracoïde et clavicule) est formé de pièces soudées ensemble, formant un os unique. Vu de dehors, cet os a la forme d’une défonceuse, avec soc el versoir. Son contour est triangulaire, sphérique ; Pun des côtés BC vient tangentiellement à son symétrique vers le point c; le côté AG tourne sa concavité en avant, le côté AB en dedans, le côté BC en haut. Le côté BC porte une arête ce perpendiculaire à BD; BD est la partie de AB sur laquelle s’articule la nageoire. Le gros bout de l'articulation porte une rainure pour le roulement du bord antérieur de la nageoire. Cette rainure est oblique à la direction générale de l’articula- tion. Le bord A CG est l’arête commune du soc et du versoir; ce versoir est une lame d'épaisseur uniforme séparant les muscles pectoraux de la chambre branchiale. Une commissure p (fig. 11) réunit cette lame à la base de l’articulation du bord antérieur de la nageoire. Au-dessous du pont p est le trou s. Le sommet À est massif; il s'unit à la colonne vertébrale par un osselet long, effilé ; sa face externe est fortement convexe: sa face interne forme un creux. La surface externe de la ceinture pectorale est convexe dans la région du sommet À, concave au milieu, convexe vers le 64 P.-C. AMANS. bord BC, et ec forme la crête de celte convexité. sus la face interne, c’est l'inverse qui a lieu. L'os étant desséché laisse voir les soudures des parties constituantes. Il y en a trois principales, que par analogie avec les vertèbres terrestres, on pourrait appeler scapulum, coracoiïde et clavicule. Au point de vue statique, notre triangle À BC a deux points solidement fixés en À et G, tandis que B conserve une certaine mobilité. Gette mobilité est cependant très petite, parce que 4° le sommet c est uni à son symétrique sur une certaine lon- gueur, ce qui fait une ligne de points de fixation, et non un seul point; 2 de même À est uni à la colonne par plus d'un point. Cependant losselet de suspension en À a une certaine mobilité, et la ligne c est peu épaisse, liée aux déplacements du plancher buccal. Muscles de la nageoire pectorale. — Sur la face externe, on remarque : a, une couche superficielle s’insérant sur le bord BC, sur le soc et sur la ligne # x 0 de la nageoire ; b, un muscle spécial pour le versant antérieur de la nageoire ; ce muscle s’insère dans le dièdre compris entre Île socetle versoir. Son tendon supérieur passe au-dessous du pont p, et s’insère à la face externe du bord antérieur de l'aile. i, couche profonde, s’insérant dechaque côté de la crête ec, dans la concavité médiane et sur le restant du soc. En haut, elle s’insère sur les apophyses antérieures des rayons. Sur la face interne, on remarque de même une couche superficielle, qui va de la courbe wvt au creux du sommet À. La couche profonde e fait le pendant de 2. Si la face interne de la ceinture osseuse était régulièrement concave, arciforme, les contractions des muscles qui y sont logés amèneraient une flexion. C’est sans doute pour éviter ces déformations, que les sections partant du sommet À vers B G sont sinussoïdes et non elliptiques. Nous avons vu (fig, 14) une position de l’aile, où sa base est ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 65 presque plane sur la face antérieure ; elle reste convexe sur la face postérieure. Nous n'avions pas observé un contraste si _ frappant dans lesnageoires précédemment étudiées. Les courbes d'insertion des muscles superficiels avt et mon sont aussi très différentes. La courbe wvé est plus éloignée de l'articulation ; elle a, en outre, un seul sens de courbure : concave vers la base. La courbe #0 n forme une sinussoïde à trois branches; la branche moyenne tourne sa concavité vers la base. La courbe wvt indique un repliement brusque, d’un seul bloc; la courbe #0 n est l’indice d’un mouvement ondulé. Ce simple caractère anatomique est incompatible avec une aile qui se tiendrait exclusivement étendue à la façon d’un aéroplane. Le muscle superficiel & qui s’insère en mon est très mince ; le muscle postérieur qui s’insère en wvt est bien plus fort. Par contre, le muscle profond antérieur est bien plus volumineux que le muscle profond postérieur. Au-dessous du muscle superficiel postérieur est un faisceau plus spécialement destiné au bord antérieur de Paile; 1l n’a pas une individualité marquée comme celle du muscle D; on pourrait le rattacher à la couche profonde. Il est court et s’in- sère à l’entrée du creux A. Sur la face antérieure de la nageoire, les deux couches mus- culaires ont leurs insertions très rapprochées ; elles sont plus écartées sur la face postérieure. En d’autres termes la distance entre les courbes mon et u'o'test plus courte que celle entre les courbesuvétetu'v {. Pareil fait était frappant dans les pattes de Trigla. En résumé, la nageoire pectorale des Exocætes a beaucoup de traits communs avec les nageoires précédemment étudiées ; elle s’en rapproche plus que d’une aile aérienne quelconque, si simple que soit l'aile. Elle diffère des nageoires par la grande longueur des rayons, la largeur basilaire de la nageoire, la larceur correspondante de la ceinture, le volume de ses muscles, par les encaissements profonds qui séparent chaque rayon sur la face antérieure (la membrane interradiale s’in- ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI, D. — ART. N° Î. (619) P.-C. AMANS. sère plus près de la face postérieure que de l’antérieure : de là ces encaissements antérieurs). | Le muscle b est entièrement comparable au muscle z de Trigla. Ge musele maintient le bord antérieur de la nageoire penché en avant, d'autant plus solidement qu’il passe sous un pont, véritable poulie de renvoi. Ce pont est fibreux chez Trigla, osseux chez Exocœte. L'action du muscle b est facilitée par celle du grand superficiel postérieur, qui élève puissamment la nageoire. Une fois la nageoire élevée, le muscle b frotte contre la poulie de renvoi, et amarre solidement le bord antérieur. Libre aux autres muscles de faire battre et onduler, lui tient bon, limite leurs écarts, résiste aux coups de vent, veille à l'intégrité du dièdre basilaire. Nulle part cette dualité d'action du grand superficiel postérieur et de l’extenseur propre du premier rayon n’est aussi accusée que chez Exocæte. Nageoire abdominale. — Elle est située à égale distance des nageoires pectorales et de la bifurcation de la nageoire caudale. Au repos son distum s’applique à la face inférieure de la région caudale, pendant que la base continue le plan ventral. En extension, le distum du premier rayon peut se porter, pendant que le bord mince s’éloigne très peu de la face ventrale, en bas et en avant (fig. 1,2, 3, 4) (1). Le squelette se compose de deux branches réunies en équerre, la plus large en bas (fig. 15, pl. IV). Chacune des branches est triangulaire, allongée (ABC, ADE) ; AE est (1) On remarquera que jamais je ne dis tout court : la nageoire se porte en bas, en arrière, etc. C’est là un contresens anatomique, qui a été commis, qui se commet encore, et qui ne contribue pas peu à obscurcir les dissertations sur le vol ou la natation. La nageoire n’est pas comparable à une palette rigide et plane; il faut toujours distinguer les mouvements partiels des mouvements d'ensemble, Je suppose, par exemple, que le bord antérieur se porte en avant et le bord postérieur en arrière. On est bien forcé de dire qu’il y a deux par- tes allant en sens inverse, et de préciser dans tous les cas analogues quelle partie du squelette et quelle combinaison de muscles on a en vue. C'est pour le mème motif que je suis très réservé sur le nom des muscles. Tel est élévateur dans une combinaison, abaisseur dans une autre. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 67 à 70 degrés environ sur A C. Le plan À B C est à 130 degrés sur ADE. C'est le côté AB qui porte l'articulation. On ‘remarque une forte apophyse à l'extrémité du gros bout de l'articulation (celle-ci, comme dans toutes les nageoires abdo- minales déjà étudiées, forme un ovale relativement plus large que celui des nageoires pectorales). La lame A BC porte deux crêtes convergentes vers la base de l’articulation. Schématiquement, lappareil se réduit à trois pieux (fig. 16); les plus forts sont A E et AC. Il y a six doubles rayons qui s'ouvrent en éventail gauche. Ils présentent chacun une divergence de plans au proximum et au distum (sic la dans nageoire pectorale) ; ainsi dans le premier rayon la moitié qui est antérieure au distum devient inférieure au proximum. Elle forme à ce niveau une apophyse, lPapophyse inférieure ; l’apophyse supérieure formée par l’autre moitié de rayon est très large. La figure 19 montre qu’à la base les apophyses inférieures convergent vers le tiers interne, c’est-à-dire que le proximum du quatrième rayon est rectiligne, et les proxima voisins tournent vers lui leurs concavités. Les muscles de la nageoïre abdominale ne présentent aucune particularité. Il y a une couche supérieure, une couche infé- rieure, et un muscle spécial pour tirer le bord antérieur en avant et en dehors. Nageoire caudale. — La moitié mférieure de la nageoire est bien plus large et plus longue que la supérieure. Elle à huit rayons principaux, et 5-6 petits à la base du premier; leur ensemble peut se désigner sous Le nom de rebord pro-antérieur par analogie avec celui des ailes aériennes (r, fig. 18). La moitié supérieure de la nageoire a sept rayons, moins larges et moins longs que les inférieurs. Les premiers rayons sont les plus larges; les suivants ten- dent à sé dichotomiser et à se barbeler vers leurs dista ; ceux du milieu jouissent d’une certaine indépendance vis-à-vis des autres. La base du rayon médian inférieur est saillante et reliée au 68 P.-C. AMANS. squelette supérieur de la queue par un fort ligament / (fig. 18). Les rayons 6-7 en bas, 5-6 en haut sont encore assez libres ; leur échancrure basilaire est bien moins profonde que celle des premiers rayons. Ceux-ci chevauchent sur le squelette caudal plus profondément encore en bas qu’en haut ; ils sont étroitement soudés entre eux sur la plus grande partie de leur longueur. La figure 17 montre les principaux faisceaux qui meuvent la nageoire caudale. On peut distinguer une courbe superfi- cielle abcd, se rendant un peu en arrière de la couche # "' d’arliculation, et une couche profonde efqh s’insérant à la courbe nn! décrite par les proxima des rayons. Les faisceaux médians bc sont analogues aux faisceaux médians rayonnants du Leuciseus ; ils s'éloignent considéra- blement du type interradial de Trigla. Comparaisons générules entre Exocætes et Dactyloptères. — Le Dactyloptère est moins effilé ; il a Ja tête plus massive ; sa face ventrale est plus large, plus plate. Ses nageoires pecto- rales sont plus étendues, d’un contour analogue à celui des pectorales de Raja; leur insertion est presque parallèle à lPaxe du corps (autre point de ressemblance avec Raja). Il y a bien moins de dissymétrie entre les moitiés supérieure et inférieure de la nageoire caudale. Les rayons sont alternativement grèles et forts : caractère commun à beaucoup d’ailes et qui est destiné à favoriser la formation de dièdres. C’est l’analogue des encaissements de la face antérieure de la face pectorale d'Exocæte. Vu de front, nous avons la figure 22, où le grand élargisse- ment inférieur est produit par les prolongements des maxil- laires supérieur et inférieur, c’est-à-dire un pentagone de fd'e’. Le côté dd' est < ee’ et ce’ est plus rapproché de f que dd; ce qui veut dire que legros bout est en haut, comme chez les Exocætes (fig. 23). Cette disposition favorise l'ascension et la projection hors de l’eau. La disproportion de volume entre les rayons anté- rieurs et les postérieurs est bien moins forte chez les Dactylo- ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 69 ptères que chez les Exocætes. L'insertion basilaire est bien plus inclinée et plus basse. Ces trois caractères font de la nageoire dactyloptère un type plus éloigné de l’aile aérienne. C’est plutôt un organe de sustentation et de glissement que de progression. Considérations physiologiques. — Les poissons volants ont excité de tous temps la curiosité des naturalistes. Môbius (1) a fait l'historique de cette question, dans laquelle il a apporté des observations personnelles. C’est ainsi qu’il résume Îles faits relatifs au vol des poissons volants, plus spécialement des Exocætes, car Mobius n’a guère observé que les Exocætes : « Les Exocætes s’élancent hors de l’eau avec une grande force, sans se préoccuper de la direction du vent et du cours des vagues. « Leurs nageoires pectorales et abdominales ne produisent pas pendant le vol des battements réguliers; elles s’étalent tranquillement. « Une fois étalées, elles peuvent produire des vibrations très rapides. « La partie postérieure du corps, durant le trajet, pend plus bas que la partie antérieure. « Leur trajectoire est plus longue, perpendiculairement au vent, qu'avec le vent, ou inclinée sur le vent. € La plupart des Exocætes qui volent contre le vent, con- servent durant tout le trajet la direction initiale prise au sortir de l’eau. « Si les vents soufflent par côté de celte direction initiale, ils la tournent dans leur propre direction. « Tous les Exocætes qui s’éloignent des navires se tiennent tou le temps au voisinage de la surface. « Lorsque par des vents assez forts, ils volent contre le cours des vagues, ils se tiennent habituellement un peu au-dessus d'elles, et trempent parfois le bout de la queue dans la crête. € Ils ne s'élèvent guère plus haut (au maximum cinq mètres (1) Môbius, Die Bewegungen der fliegenden Fische durch die Luft. 70 | P.-C. AMANS. au-dessus de la surface) à moins d’être croisés en route par un navire. | « Le jour, il tombe rarement des poissons sur les vaisseaux ; le plus souvent c’est la nuit, et seulement quand le vent souffle. Ils tombent principalement sur des navires qui ne s’élèvent pas à plus de deux à trois mètres au-dessus de l’eau, lorsque ces navires ont la voile au vent ou au demi-vent et filent bon train. « Jamais les poissons volants n’abordent du côté opposé au vent, mais toujours du côté du vent. € Il n’est pas rare que sitôt avoir plongé la nageoïire cau- dale dans l’eau, ils décrivent dans le plan horizontal de leur trajectoire une conversion à droite ou à gauche. € Ils apparaissent plus fréquemment au-dessus de l’eau avec le vent et une mer agitée que par un temps calme. « Les Exocætes s’élancent dans l’air aussi bien au-devant des vaisseaux qui traversent leurs bandes en train de nager, qu'au-devant des poissons de proie et des cétacés. » Un grand nombre d’observations, entre autres de Humboldt, de Freminvilie, Valenciennes, Martens, Kneeland, Petitgrew, ont considéré le genre de locomotion des poissons volants comme un véritable vol. Certains ont vu nettement l'animal changer de direction et faire des battements. Môbius ne nie pas ces faits, seulement, pour lui, le change- ment de direction est produit par les coups de queue sur la surface de l’eau; quant aux battements, il ne les accepte que comme des vibrations passives dues à la résistance de l'air. Comme Burmeister, il estime que les ailes restent passives et immobiles. Il s'appuie sur ses propres observations de visu, sur l’anatomie des Exocætes et sur certains faits de physique. « Le poids des muscles pectoraux comparé à celui de l’ani- mal entier est comme 1 à 6,22 (Hartings) chez l’Oiseau, comme à 13,6 chez la Chauve-Souris, Chez les Exocætes, le rapport n'est que 1/32 (1). » (1) 1 peut être de 1/10 chez les oiseaux qui volent très bien, comme les Goélands. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 71 Ge rapport, à notre avis, prouve seulement que l'Exocæte est dans des conditions plus désavantageuses que l’Oiseau et . la Chauve-Souris; mais cela ne prouve pas qu’il ne puisse uti- liser un battement, pour varier sa direction, soit même pour lutter contre la pesanteur. Môbius lui-même nous dit que d'habitude 1ls s’élancent hors de l’eau, un peu au hasard, sans se préoccuper de la direction du vent, et filent à une hauteur au-dessus des vagues sur lesquelles ils ricochent. Un navire vient-il à se trouver devant eux, au moment où ils sortent de l’eau, ils s’élancent bien plus haut (des observateurs comme de Fréminville parlent de 18 pieds). Pour atteindre une pareille hauteur sans battement, il faut qu’ils donnent un bien vigoureux coup de queue ; cette queue, nous l’avons vu, est admirablement bâtie pour projeter l'animal ; mais pourquoi se passerait-elle du concours actif des nageoires pectorales ? Un concours actif de celles-ci ne nous paraît pas irrationnel. Môbius cite le cas d’un Dactyloptère qu'il a poursuivi et vu de très près : « Ses nageoires pectorales restaient étendues comme deux grandes surfaces planes, immobiles. Je m’en suis convaincu avec une telle certitude... » L'observation relative au Dactyloptère ne doit pas être un argument contre le vol des Exocætes. Comme j'en ai parlé plus haut, il y a des différences anatomiques assez grandes, pour en déduire un type différent de vol. Môbiusa fait une description minutieuse des rayons; il a été frappé avec raison des sillons profonds qui séparent chaque rayon. « Le recouvrement en tuile des apophyses postérieures est destiné à la transmission intégrale d’un coup ou pression venant d’en avant et de haut en bas. » On peut ajouter un autre but : augmenter la résistance des sillons interradiaux dans l'extension; l’air qui vient frapper la base de l'axe trouve une zone rigide non seulementdans la moitié antérieure des rayons, mais dans les angles des sillons. Il n’en est pas ainsi chez les Dactyloptères. Il dit plus loin: « Les muscles pectoraux des Exocœætes ne se distinguent des muscles analogues d’autres poissons osseux 72 P.-C. AMANS. que par un plus grand volume. D’autre part ce volume estil assez grand pour supporter le poids du corps dans l’air ? » La question ainsi posée n’est pas complète. Le poids des muscles pectoraux n’est pas seulement en rapport avec le poids total de l'animal, mais aussi avec son genre de vol, Pétat du milieu, les dimensions et la consistance de l'aile. Un oiseau luttant uniquement contre la pesanteur dans un air calme doit donner des battements assez énergiques pour que la résistance aérienne, unie à la réaction élastique des ailes, égale son propre poids (1); il obtient l'équilibre avec un paquet de muscles égal au 1/6 de son poids ; le Vespertilio pipistrellus se maintient avec le 1/15 seulement, « L'Exocæte n'ayant que 1/32 environ, et n'ayant pas, qu'on sache, une force musculaire supérieure à celle des autres Vertébrés, nous devons leur refuser le pouvoir de battre des ailes. » Cette conclusion me parait exagérée. Admettons la pro- portion 1/32. Il est très probable que 10 grammes, par exemple, de substance musculaire ne peuvent lutter contre les 320 grammes dus à la pesanteur ; seulement ces 10 grammes ne sont pas seuls; ils ont dans le vent (pour ne citer que ce facteur) un auxiliaire précieux, qu'ils utilisent d'habitude ; car (voy. plus haut) les Exocætes apparaissent plus fréquem- ment au-dessus de l’eau avec le vent et une mer agitée que par un temps calme. Le vent se charge d’une partie de ces 320 grammes; plus il est fort, plus il est directement opposé à la pesanteur, plus il diminue ces 320 grammes. Finalement, nos 40 grammes de pectoraux peuvent parfois largement suffire à donner une traction horizontale, sans être. obligé chaque fois de donner un coup de queue. Les battements des Exocœætes sont donc possibles et efficaces dans certains cas du problème, non pas tel que Le pose Môbius, maus tel qu'il est en réalité. (1) J'ai parlé plus en détail de la réaction élastique des ailes dans une com- muuicalion au Congrès pour l’avancement des sciences, Oran, 1888 (Rapports de l’hydronautique et de la mécanique animale). ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 19 Il est encore vrai que la longueur relative (1) de leurs ailes l : == 2,40 d’après Hartings, 3,38, d’après Mübius) est plus "NH / ° pe 4 l 9 petite que chez les Chéiroptères Ée = 5); c'est un argument V e de plus pour Môbius. Son raisonnement est le suivant : « Non seulement l’Exocœte a un poids deux fois plus fort à soulever que les Chéiroptères, mais encore il dispose de bras, de leviers presque deux fois plus courts. » Cet argument ne prouve rien contre la possibilité des batte- ments ; un levier agissant contre le vent peut produire autant et plus de résistance qu’un levier deux fois plus long sur un air calme : cela dépend de la vitesse et de la direction du vent. Môbius termine son mémoire par une explication du vol des Exocætes : « Ce n’est pas un vol proprement dit. L’Exocæte file en vertu de la vitesse initiale donnée par les muscles laté- raux du tronc; le grand développemont de la moitié inférieure de la nageoire caudale lui permet de s'élever plus haut que le Dactyloptère, dont la nageoire caudale est assez symétrique. Si d'habitude :l rase la surface, c’est qu’il va ainsi tomber plus loin, pour échapper à ses ennemis. Les vibrations des nageoires doivent être attribuées non à des battements actifs, mais aux réactions élastiques des rayons, sous l’influence de courants sensiblement parallèles à leur surface. « L’ascension des Exocætes au-dessus de la crête des vagues peut avoir lieu sans coup de queue, ni de nageoires, par un simple phénomène physique. Le vent qui passe sur les crêtes détermine dans les vallées intermédiaires un courant, une aspiration d’air dans sa propre direction. Ce courant agit brusquement sur l’Exocæte, chaque fois qu’il se présente au sommet d’une crête, sans qu'il fasse aucun mouvement. « C’est encore le vent qui est l’unique cause de leur chute sur les navires. » (1) Cest le rapport de la longueur de l'aile au côté du eube équivalent à animal tout entier, 7% P.-C. AMANS, Ge parti pris de nier tout battement actif n’est pas, à mes yeux, suffisamment justifié. J'ai, dans un autre travail, distin- gué huit types principaux de machines aériennes, et résumé leurs caractères communs. Les plus imparfaites utilisent surtout la force du vent et la marche en aéroplane ; elles pro- duisent néanmoins des battements propres à faire changer de direction, ou à réagir contre le poids du corps. L’anatomie des organes pectoraux de l’Exocœte montre certainement plus d’analogie avec celle des Poissons qu'avec la moindre de nos huit machines. Elle à cependant des facteurs suffisants pour en faire un neuvième type aérien, capable de vol. Nous le défi- nirions : un aéroplane se lançant avec le vent et doué d’une certaine force de traction propulsive (1). L'ingénieur Lippert (2) a été frappé par le mouvement ondu- latoire des organes du vol. Il examine dans son mémoire les diverses propositions émises par les ballonnistes et les avia- teurs, et expose ses vues dans la dernière partie, Wellenflug. (1) De nombreux articles ont paru après celui de Môbius. Je citerai : Julien, Remarques sur le vol des Exocætes (Bulletin de la Société z00lo- gique de France, vol. HI, p. 109, 1879), Whitman, Do flying Fish fly? (American Naturalist Sept., p. 651-653, 1880). Jordan, Do flying Fish fly? (ibid., p. 804). Hadfield, Of the fly of flying Fish (Zoologist, fév. 1881). Pascoe, The flying Fish (Nature, vol. XXIIT, n° 588). D’Urban, Does the flying Fish fly? (Zoologist, 1881, p. 146). D'après d’Urban, le poisson volant ne vole pas; il est incapable de guider sa course dans l’air. Le coup de queue peut faire changer la direction. Il peut y avoir vibration, mais non vrai battement. D’après Pascoe, il peut à l’occasion changer de direction sans toucher l’eau. Hadfield dit, contrairement à Whitman, qu'il n’a jamais vu les poissons volants voler contre le vent; il ne croit pas à l'efficacité du coup de queue dans les ricochets. D'après Whitman, en sortant de l’eau, il y a un battement des nageoires pec- torales; les ventrales restent étendues. La queue peut les aider à sortir de l’eau, mais il faut admettre qu’ils sont doués de la faculté de vol. Il a encore paru un article de Môbius, sous le titre significatif de Flying Fish do not fly (Nature, vol. XXXI, p. 192, 1885). (2) Nalurliche Fliegesysteme, deren wissenschaftlisch Enräthselung und praktischer Aüsbau. Lippert, Wien, 1885. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE,. 79 Il est bon d’en donner une idée; car il me paraît avoir puisé surtout chez les animaux aquatiques sa conception du vol; . bien plus, l’Exocæte est plusieurs fois figuré dans le cours du mémoire, et il lui sert de frontispice. « Peu importe que nous représentions les trajectoires des animaux volants comme de vrais prodiges de complication, ou comme de simples lignes ondulées; la plus simple logique nous force d'attribuer l'effet propulsif des ailes à un mouve- ment courbe, pressant de haut en bas, avec les surfaces alaires inclinées en avant. « À notre étonnement, Petitgrew obtient la propulsion par l'inverse, par un mouvement des ailes analogue à celui d’un Oiseau qui aborde (1); mais l’Oiseau utilise ce mouvement uniquement dans le but d'arrêter son trajet au lieu d’abordage ; ce mouvement trop répété Jetterait indubitablement l’Oiseau en arrière... « En revanche, le professeur Welner s’est épris de ce pseudo- vol ondulé, dans lequel la machine aérienne produit périodi- quement la poussée en avant, avec la face dorsale des ailes placées obliquement. La pratique d’un vol avec la face dorsale des ailes, à l’aide d’un mouvement négatif, c’est-à-dire frap- pant en haut, est une telle monstruosité que nous pouvons nous dispenser de le prouver. « Nous y voyons seulement un moyen de conduire à l’ab- surde les calculateurs de flottaison, lorsque (comme en 1887) ils réclamment 800 chevaux pour flotter, là où 467 suffiraient même pour des méthodes de si haut luxe. « Les renseignements contre nature qui règnent sur le principe de flottaison ont assurément trouvé un éloquent (1) Petitgrew, en effet, dit : « Le coup effectif doit être donné en bas et en avant. Je répète, en bas et en avant. » Je répéterai à mon tour que l’aile n’est pas une pièce rigide, se mouvant d’un bloc, qu'elle est formée de plusieurs parties, et que, pour bien fixer les idées sur son mouvement, il faut indiquer les mouvements des diverses parties. Je n’ai pas à intervenir dans une discus- sion où l’on néglige de part et d’autre : 1° ces mouvements partiels ; 2° la forme ovoïde des sections transversales, 76 P.-C. AMANS. porte-voix dans le professeur Welner. Pour cette sorte de mathématiciens qui posent sérieusement l’équation : voler — flotter + voler, le principe suivant de Welner ne peut être que bien venu, « que le vol soit rapide ou lent, qu'il en résulte un trajet grand ou petit, la part de travail destinée à maintenir flottant l’ani- mal (pour un poids déterminé) est toujours la même dans un temps déterminé, et le léger excès de dépense pour la propul- sion serait insignifiant, quelque rapide que soit le vol ». « Ge principe est en flagrante contradiction avec la nature. Or les dispositions naturelles ont pour elles la sanction de millions d'années d'expérience, de luttes pour l'existence et de sélection. « D’après une vieille routine, la continuité du choc est, aux yeux des mécaniciens, le nec plus ultra de toute économie de travail. Pour atteindre cette uniformité d’allures, on a inconsidérément employé une combinaison d’hélices, agissant continuellement contre la pesanteur, avec des hélices dis- tinctes pour la propulsion. En regard de pareils systèmes d'ailes, frappant les unes en avant et en arrière, les autres en haut et en bas, il est surprenant de voir avec quelle simplicité de moyens la nature obtient chaque fois le meilleur effet possible... » J n’y a sûrement aucun doute que, dans un trajet plus ou moins horizontal en air calme, la résistance de l’air et de la pesanteur le long de ce trajet ne peut être surmontée que par la force musculaire de l’Oiseau. Mais il faut noter dans la trajectoire une branche descendante, où le poids du tronc, en glissant, amasse sur sa large face ventrale une force vive pour remonter la branche montante. € Il emmagasine de même un reste de travail provenant du battement des ailes pendant une partie du trajet, pour sou- tenir l'élévation en aéroplane pendant l'autre partie. L'oiseau utilise les mouvements de bas en haut aussi bien que de haut en bas pour produire les résistances propres à la suspension; ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 17 car il possède de grandes surfaces de sustentation, au moyen desquelles la charge glisse en bas et en haut, et le travail . musculaire n’a, comme dans un pendule suspendu, qu’à rem- placer le travail de résistance réellement employé, travail qui serait donné à l’air sans retour. » J'accepte volontiers cette comparaison, à condition de rester dans l’hypothèse de Lippert, dans le cas d’un vol horizontal ondulé. Les nombreuses sinussoïdes que j'ai remarquées dans les machines aériennes et aquatiques sont fonctions de la marche ondulée; celle-ci permet sans doute une grande éco- nomie de travail musculaire ; car, dans la couche descendante, la résistance de l'air directement opposée au poids va en crois- sant, diminue le poids et soulage d’autant les efforts de susten- tation. C’est là évidemment l’idée dominante de Lippert. Les appareils qu'il veut construire sont basés sur ce principe; ce sont, à la rigueur, des aéroplanes se mouvant en anguille. On conçoit qu'avec ces idées 1l ne peut admettre le dessin de l’Exocæte tel que le représente Petitgrew; il ne saurait y avoir un trajet ondulé et économie de travail avec des ailes immobiles. Il le dessine à son tour, mais un peu trop théori- quement. La base d'insertion n’est pas aussi horizontale ni aussi ondulée qu'il la représente. En résumé, l’Exocæte constitue un type curieux de naviga- teur aérien, d’une plus grande simplicité que les oiseaux aquatiques et même que les insectes amphibies. Malgré sa sim- pheité, 1l est cependant plus compliqué que la plupart des oiseaux dits artificiels ; les aviateurs se contenteraient bien, je crois, d’imiter ne serait-ce qu’un Exocæte. VI. —— TYPE HIPPOCAMPE. L’Hippocampe diffère des types précédemment éludiés par la constitution de la peau dure et tuberculeuse, par la mobilité de la tête, par une queue préhensile, enfin par la forme géné- rale du corps, la position et Ia forme des organes de locomo- ton. 78 P.-C. AMANS. L'animal possède trois nageoires, deux impaires (dorsale- anale), une paire (pectorales). La tête a une certaine ressemblance de profil avec celle du cheval ; le tronc est un solide heptagonal, ventru, et la queue est une pyramide effilée à quatre pans. La dureté de la peau est telle qu'on peut faire de cet animal un type à squelette externe, Il y a des zones d’épaississement, les unes longitu- dinales, marquant les arêtes du tronc et de la queue, les autres transversales, polygonales. Le tronc est un solide : 1° heptagonal ; il y a en effet sept arêtes longitudinales et une douzaine de polygones transver- saux, la plupart heptagonaux, dont chaque sommet est marqué par un tubercule pointu tétraédrique; 2° il est ventru, c’est-à- dire que les trois arêtes ventrales forment des arcs de cercle, à concavité tournée vers le dos. Les quatre arêtes dorsales sont presque rectülignes. Le premier polygone transversal est une sorte d’hexagone arrondi inférieurement, à peu près plan; il correspond au milieu du cou. Les autres polygones ne sont pas plans; ils sont situés dans des plans brisés. Dans les polygones ITI-IV, par exemple, la concavité regarde en avant; dans le polygone IX, la courbure est celle d’un Z; dans VI, d’un Z à l'envers, avec des angles de brisure très faibles. Le polygone XIT est un tra- pèze ; il commence la série de la queue. / La figure 29 représente une projection horizontale. En avant du cou on voit les saillies AX formées par les arcs des nageoires pectorales. La largeur AN constitue un maximum, que nous retrouvons du niveau VI à XIE. La figure 50 donne une vue de front, une sorte de bouteille, le goulot en bas. Nageoire dorsale. — Elle est formée d’une vingtaine de rayons mous, implantés sur une crête courbe, formant saillie sur la face dorsale. Cette crête s'appuie : 4° de haut en bas sur 15-16 rayons convergents, interceptés à mi-chemin par la colonne vertébrale AB (fig. 31, pl. IV); 2% latéralement sur les polygones IX, X, XI ; 4° en avant et en arrière sur des masses ARTICLE N° Î. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 79 cartilagineuses et osseuses. La crête est ainsi solidement fixée. De chaque côté des rayons-supports sont situés les muscles de la nageoire. Ge sont de petits muscles beaucoup plus sem- blables à ceux des insectes qu’à ceux déjà décrits. Ils se ter- minent chacun par un tendon fin, délié et long, qui traverse toute l’épaisseur cartilagineuse du toit, pour aboutir à la base de chaque nervure. Chacune de ces nervures donne insertion à deux muscles, l'un b, plat, mince, situé en arrière et plus en dedans que l’autre, «. Le muscle «& est surtout abducteur, le muscle b fléchisseur en arrière. Les fibres s’insèrent en bas sur le plancher et sur les flancs des rayons-supports. Chaque couple ab est séparé de ses voisins par une simple aponévrose ; il n’y a pas de lame qui sépare « de b, comme cela a lieu dans toutesles nageoires dorsales étudiées jusqu'ici. Cette lame y sépare un muscle antérieur d’un muscle posté- rieur ; le mouvement principal est d'avant en arrière. L’ab- sence de cette lame chez l’Hippocampe signifie donc le peu d'importance de ce mouvement. En revanche, la lame longitu- dinale est très forte, ce qui dénote une prédominance d’action de droite à gauche, comme dans une nageoire caudale. Nous verrons que cette analogie est encore plus intime, car la dor- sale de l’'Hippocampe est le principal organe de propulsion de cet animal. Histologiquement, les muscles & b diffèrent des autres muscles du tronc par la petitesse des fibrilles, la richesse en noyaux des gaines conjonctives. La crête basilaire est liée à chacun des sommets s des poly- gones IX-X-XI par un système de quatre rayons convergents vers ce sommet (fig. 30) ; cela fait donc en tout trois paires de ces systèmes. La crête est courbe, à grand rayon de courbure ; sa corde est inclinée en avant. La courbe décrite par les extrémités des rayons étalés n’est pas parallèle à la crête; les rayons postérieurs sont plus longs. Cette proportion est l’inverse dans les nageoires dorsales des autres poissons. Nageoire anale, — Elle est soutenue par quatre rayons- 80 P.-C. AMANS. supports et mue par un couple de muscles allongés, beaucoup plus longs que ceux de la nageoire dorsale. Ils sont recouverts et séparés des viscères abdominaux par une enveloppe tibreuse très résistante ; une cloison encore plus dure s’en détache et sépare les muscles droits des muscles gauches. Nageoire pectorale. — La ceinture diffère totalement par le squelette de celles déjà étudiées. La base d'insertion dans celles-ci repose sur un arc (clavicule) par l'intermédiaire d’un pilier solide (scapulum et coracoïde), de chaque eôté duquel s'appuient les muscles protracteurs et rétracteurs. Ce pilier solide n’existe pas chez l'Hippocampe. A la place, nous trou- vons une lame triangulaire plane (/, fig. 34). La courbe xy (fig. 33, pl. IV) représente la base d'insertion; elle est fixée dans la peau durcie située entre les ares. Il y a dans ce mode de fixation et celui d’un Leuciscus, par exemple, une différence du même ordre qu'entre un pont sus- pendu (Hippocampe) et un pont sur pilous (Leuciscus). L’arc À est l’analogue de la clavicule; c’est un arc puis- sant, allant du plancher buceal à la crête céphalique. La par tie médiane se prolonge à l’intérieur sous forme de lame qui sépare les branches des muscles pectoraux. Le bord interne de cette lame se replie en arrière pour s’unir en partie au bord interne du triangle /. C’est dans ce rebord que s’in- sère la couche superficielle des muscles antérieurs s. La coupe faite normalement à la base vers son milieu (fig. 34) montre les rapports des muscles pectoraux. Le paquet posté- rieur a une forme triangulaire, l’autre hémi-ovoïde. La couche, superficielle postérieure s' est plus petite que la superficielle antérieure s; mais la profonde postérieure © est plus grande que la profonde antérieure 2. Le muscle + tire plus en bas que s; l’angle des directions 2 et s est aigu, tandis que celui des directions ? et s’est obtus. C’est là un fait déjà observé, et qu'on pourrail énoncer ainsi : Dans toute nageoire pectorale, les deux directions princi- pales des muscles antérieurs font entre elles un angle aigu, et celle des muscles postérieurs un angle obtus. ARTICLE N° 1, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. Si Le muscle s s’insère en bas sur le rebord interne de l’arc À; le muscle :, vers sa terminaison médiane sur le plancher. Le -musele s° s’insère en haut, sur une arête longitudinale qui unit l'arc À au premier quadrilatère cervical. La base d'insertion est presque plane. C’est là un caractère propre aux nageoires iImpaires, mais non aux nageoires paires. Cette nageoire pectorale a, comme la dorsale, une épais- seur uniforme du premier rayon au dernier. La base seule- ment est renflée pour l'insertion des muscles; un rayon se projette de front suivant une épingle, et non un triangle (Leuciseus, Trigla, etc.). C’est là une coupe d’organe ondulant plutôt que rameur. La courbe périphérique de la nageoire pectorale n’est pas parallèle à celle de la base ; les plus longs rayons sont vers le tiers antéro-supérieur. Action des nageoires dorsales et pectorales. — La nageoire dorsale est impaire, symétrique de droite à gauche. Le mou- vement résultant sera donc dans ce plan, si toutefois les muscles agissent également de part et d'autre. Un battement alternatif de droite à gauche porterait l’animal normalement à la courbe d'insertion, ou plus exactement, suivant la direc- tion moyenne des normales à cette courbe, qui sont situées dans le plan de profil. De même, dans une nageoïre caudale, la résultante passe au voisinage de l’axe de la queue, si toutefois la nageoire est symétrique par rapport à cet axe. Si la nageoire est dissymé- trique, la résultante ne coïneidera pas avec cet axe (elle pas- sera par exemple au-dessus de l’axe chez l'Exocæœte, au des- sous chez Trigla). Il doit en être de même chez l’'Hippocampe, où la moitié postérieure de la nageoire est plus large que la supérieure antérieure. Aussi la résultante sera un peu plus de haut en bas et d’arrière en avant que la direction moyenne des rayons-supports. Ce que je dis de la nageoire entière s’applique aussi à un rayon considéré isolément; la résultante du mouvement alternatif de chacun d’eux sera dans la direction moyenne de ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 6, — ART. N° 1. 82 P.-C. AMANS. son déplacement. La résultante du tiers supérieur de la nageoire est dirigée de haut en bas; celle des deux tiers infé- rieurs de bas en haut. Comme chaque rayon a ses muscles propres, il peut effectuer un mouvement indépendant de ses voisins. Un battement isolé des deux tiers aura une résultante dirigée de bas en haut et en avant; un battement du tiers supérieur aura une résultante de haut en bas et en avant. Des combinaisons convenables de ces deux sortes de battements nous donneront des résultantes horizontales, ou plus ou moins au-dessus ou au-dessous de l’horizontale. Les battements en bloc sont possibles chez l'Hippocampe ; nous savons cependant qu'il emploie de préférence les batte- ments isolés successifs de chaque rayon, c’est-à-dire l’ondu- lation. Ici, le phénomène est un peu plus compliqué. Dans le battement en bloc, nous n'avions guère à considérer que le mouvement de droite à gauche; dans le battement isolé de chaque rayon, nous y ajouterons le mouvement dans le sens antéro-postérieur. Les muscles a «' bb" alternant en diago- nale, l'extrémité du rayon parcourt le chemin indiqué par les flèches dans les sens figure 35 ou figure 36. Soit figure 35. Deux cas : 1° le coup fort va de a’ vers b'; l’animal tend à monter ; 2° le coup fort est de D’ vers a; l’animal tend à descendre. Dans le cas figure 35, c’est lin- verse. Le coup faible devant, par économie de travail, par- courir le plus court trajet, les quatre cas se réduisent à deux : I. Un coup fort, de « vers b' pour monter; IT. Un coup fort, de 4! vers « pour descendre. Prenons plusieurs rayons agissant alternativement de l’une ou l’autre de ces deux façons ; si la nageoire se meut rapide- ment, elle donne à lœil limpression d’un myriapode en marche, chaque rayon donnant des coups de pied latéraux, comme les pattes de cet animal. Si, au lieu de faire alterner les muscles & b a’ b', nous les combinons plus ou moins, si nous considérons, en outre, la courbure imprimée par la résistance de l’eau, la boucle brisée a ba D deviendra une lemnicaste ; l'animal étant en marche, ARTICLE N° 1. | ORGANES DE LA EOCOMOTION AQUATIQUE, 83 la lemniscate s'ouvre et décrit une sinussoïde. Les autres rayons agissant tous d’une façon analogue, leurs extrémités -décriront aussi une sinussoïde. Quelle sera la figure de l’en- semble ? Il est oiseux de pousser plus loin l'analyse ; les com- binaisons de vingt rayons, deux à deux, trois à trois, etc., sont excessivement nombreuses. Il est plus simple et plus prudent de recourir à l’observation pure. L’impression habituelle dela nageoire est celle d’une sinus- soide à branches très rapprochées et à flèche assez courte ; les mouvements sont très rapides. Je crois avoir donné une idée suffisante du phénomène en le rattachant à la cinéma tique des nageoires caudales. En résumé, cette nageoire dor- sale peut servir toujours à avancer, quelquefois à descendre, le plus souvent à monter. La nageoire pectorale tient le milieu entre le type des nageoires paires et celui des nageoires impaires. Comme la nageoire dorsale, elle peut avoir des ondulations régulières de droite à gauche, car les muscles? ont leurs fibres parallèles ; la base est à peu près plane, et l’épaisseur des rayons est uni- forme. La résultante habituelle, en tenant compte de la posi- tion de la base et de la direction des rayons, passe à peu près par le tiers supérieur de la base, et par une saillie en avant du tubercule inférieur de l’are À du côté opposé. Ainsi une ondulation complète, isodynamique d’avant en arrière de la nageoire droite, par exemple, pousse la tête à droite, en bas et en avant. Les deux nageoires ondulant ensemble, la tête est poussée en avant et en bas; ce mouve- ment, combiné avec une ondulation complète de la nageoire, quitend à faire monter, donnera un mouvement résultant voisin de l'horizontale. Si lon compare l’Hippocampe aux autres poissons déjà étu- diés, on voit que sa nageoire pectorale a une plus grande auto- nomme des rayons. Chacun a deux faisceaux distincts, superfi- ciels et profonds, munis l’un et l’autre d’un tendon délié. Dans la nageoire, exclusivement rameuse, les points d'attache for- ment une masse commune fibreuse sut laquelle peut agir la 84 P.-C. AMANS. couche en bloc ; schématiquement, il n’y a que deux régions à attaches distinctes, le versant antérieur et le versant pos- térieur. La nageoire pectorale de l'Hippocampe se rapproche des autres nageoires pectorales par l’inégalité de volume des muscles antérieurs et postérieurs, par l’angle obtus des muscles postérieurs (superficiels et profonds). Comme dans les autres nageoires, nous pouvons avoir des battements par combinaisons de couches. Ainsi, par exemple, la combinaison is, ts donnera un battement à résultante propulsive ou rétractive suivant la direction du coup fort. Les combinaisons croisées des quatre couches nous donne- ront une sinussoïde à deux branches ; la discussion nous mon- trerait comme plus haut que la résultante peut être dirigée en haut ou en bas, suivant la direction du coup fort. En résumé, une ondulation régulière de la nageoire pecto- rale droite pousse la tête en avant, à gauche et en bas; une ondulation régulière des deux nageoires pousse la tête en avant et en bas. La nageoire peut encore servir à reculer, et même à monter. La tête étant elle-même mobile, la résultante totale des nageoires dorsale et pectorales, varie suivant les positions de la tête. La queue peut aussi intervenir, soit en faisant le pen- dule, soit en se déroulant brusquement. Les oscillations de la tête autour du cou tendent à l’abaisser ; celles de la queue à faire monter la queue. Ces actions alter- nent parfois ; alors Panimal bascule autour du tronc. Structure de la queue. -— J'ai déjà dit que la queue est une pyramide à quatre pans, très allongée, dont le sommet corres- pond à l’extrémité caudale. La coupe transversale est une sorte de trapèze isocèle, à grand côté ventral. La colonne vertébrale est plus rapprochée de la face dorsale que de la ventrale; elle est reliée avec la peau par quatre prolongements solides; les deux verticaux forment une lame normale aux deux côtés parallèles (dorsal et ventral), tandis que les deux latéraux sont légèrement ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 85 inclinés vers la base. Comme la peau est très épaisse, il en résulte que la pyramide totale est décomposable en quatre . pyramides secondaires, à l’intérieur desquelles sont logés les muscles. Les pyramides ventrales sont les plus spacieuses. Les enscriptiones tendinosæ sont ici remplacées par une tren- taine d’épaississements transversaux trapézoïdes (analogues aux polygones du tronc). Les côtés latéraux et le dorsal sont dans un même plan ; le dorsal et le ventral sont concaves supé- rieurement ; de plus, le ventral tourne sa convexité vers la base de la queue. Les derniers arcs présentent plus de courbures; tous les côtés sont courbes à convexité tournée vers la base de la queue, ce qui lui donne la facilité de se courber en tous sens, tandis que la partie principale se courbe principalement sur une face, la ventrale, la seule qui présente la courbure de flexion. Les ares correspondent à la séparation des vertèbres; la lame om qui relie Les vertèbres aux ares est épaissie au niveau des ares. Le paquet d est libre sur sa moitié interne (fig. 37); il est fixé d’une part à la colonne, de l’autre au tiers externe des côtés ventraux de chaque are. Sa moitié externe s’appuie sur le paquet b. Les coupes longitudinales montrent que les fibrilles ont une direction oblique d’arrière en avant et en haut. La figure 38 représente la face interne du groupe &. La figure 39 représente le même groupe en perspective. Les sur- faces abcd, a b'c'd' représentent des segments de surface courbe, à contour triangulaire, à sommet en avant (1). Nous retrouvons donc dans ces muscles le caractère général des muscles latéraux des Poissons; seulement ces inscriptions sont sur la face interne et ventrale, au lieu d’être latérales. Le groupe supérieur est libre dans l’angle d; 1l porte sur la face correspondante des inscriptions plutôt rectilignes que paraboliques. (1) La figure 38 montre que les lignes ac, bd sont paraboliques à sommet en avant. 86 P.-C. AMANS. Critique bibliographique. — Le mouvement spécial. des nageoires de l’Hippocampe a frappé depuis longtemps les observateurs. [Il est tout naturellement cité par Strasser (1) dans sa théorie générale du mouvement ondulatoire. Cette théorie a le tort de n’être précédée d'aucun cas particulier. L’ondulation peut être produite dans des conditions très différentes de celles où se place Strasser. La forme de l’onde, la forme et la position des articulations basilaires, la consis- tance et le volume des diverses parties de la nageoire, les types et les directions et les combinaisons des muscles moteurs sont autant de facteurs variables qui ne sauraient être prévus par une théorie si générale. « Supposons, dit Strasser, qu’un corps cylindrique, allongé, flexible, reposant horizontalement dans l’eau, soit mû par une voile assujettie le long de la ligne médiane supérieure. Parta- geons le tronc et la bordure par un grand nombre de coupes minces transversales de façon à avoir une série de disques sur- montés d’un prolongement aliforme. « La bordure doit pouvoir se mouvoir comme si elle était liée au milieu de sa base avec le tronc au moyen d’une articu- lation en boule. Pour plus de simplicité, mettons de côté toute vitesse acquise; admettons que le mouvement initial provient des forces internes. Elles doivent agir sur la ligne médiane, de façon que la rotation de l'aile autour de son long axe soit négligeable. On peut remplacer ces forces par deux autres, situées l’une dans le plan de l'aile, l’autre dans un plan per- pendiculaire à la surface alaire. « Supposons que le rayon (2) prolongé rencontre l’axe du tronc, et qu'il lui soit perpendiculaire. Admettons aussi que des résistances produites dans l’eau, il y ait à se préoccuper uniquement de celle qui frappe l’aile. Cette résistance a une (1) Strasser, Zür Lehre von der Ortsbewegung der Fische, p. 112. Stütt- gart, 1880. (2) Un dessin accompagne le texte dans l'original. A défaut de dessin, j’em- ploie ici le terme rayon (ligne om) comme plus bas axe longitudinal (ligne lh, ro). ARTICLE N° 1, ORGANES DE LA LOGOMOTION AQUATIQUE. 87 résultante normale à la surface alaire en un point” du rayon, et agit dans un même plan avec l’une des deux forces internes, . celle qui tend à tourner l'aile autour d’un axe longitudinal (1). Ce plan passe par le centre de gravité du tronc et de tout le système. Le mouvement total se compose : € 4. Du mouvement interne du système par la composante Î (et — f) agissant dans le plan F de l'aile; « 2. Du mouvement du système par la deuxième compo- sante # (et — x) dans un plan N perpendiculaire à la surface alaire en son milieu, suivant le rayon ; € 3. Du mouvement résultant de la résistance externe w. « À produit un mouvement parallèle au plan F; 2 et 3 pro- duisent des mouvements parallèles au plan N. La direction 1 n’est pas influencée par la résistance. La résistance w change l'angle qui sépare les deux masses partielles dans le plan N en sens inverse des forces internes + » et — n, mais pas si fort que celles-ci. Soit v et — v la fraction de » et — » capable de produire le même mouvement, pendant que l’autre fraction v'et—v' est employée à neutraliser w. « C'est grâce aux deux forces v et f (sans oublier bien entendu leurs antagonistes — v et — f) qu'est obtenu le dépla- cement final réciproque de l'aile et du tronc. On peut rempla- cer ces deux forces par une force unique interne, qui produi- rail un mouvement parallèle à un plan D, intermédiaire entre Net F. Le système dans son ensemble n'éprouve par » et f, ni une rotation, ni une poussée du centre de masse. Avec ce mouvement interne se combine maintenant aussi une action équivalente à celle d’une force externe w appliquée au système supposé rigide. « Il y a intérêt mécanique pour activer le mouvement du tronc à ce que la grosseur de » prédomine celle de /, e’est-à. dire que les forces internes agissent dans des plans le plus possible perpendiculaires à la surface alaire. Le déplacement est dû surtout à l’action de +’ et w. » (1) Ligne !h, ro du texte. 88 P.-C. AMANS. On pourrait dire plus simplement qu'il vaut mieux frapper par le plat que par la tranche. « Aux flexions latérales de la nageoire Pre. des flexions de sens contraire du tronc, mais beaucoup moins visibles. Le maximum de rotation est au sommet des ondes; mais elles sont alternativement de sens contraires. La ligne d'insertion de la nageoire prend la part principale au déplace- ment. Une rotation du tronc, suivie d’une déviation en bas (plus simplement une rotation de haut en bas) est à peine possible. En revanche les impulsions dirigées d’arrière en avant peuvent communiquer à chaque segment du trone un mouvement de translation. De segment en segment, le mou- vement peut se transmettre sans secousse. » Ce raisonnement, en somme, revient à ceci : les efforts laté- raux de droite neutralisent ceux de gauche ; il ne reste d’efforts effectifs que dans le sens antéro-postérieur. « Le plus souvent l’obliquité de l’aile sera disposée de façon, tout en évitant la résistance de l’eau sur le bord antérieur, à se mouvoir dans une direction transversale, c’est-à-dire que les points décriraient un huit de chiffre. La liaison de chaque partie de nageoire avec ses voisines sert à régulariser l'étendue de rotation de chacune d’elles. » J'ai considérablement écourté le raisonnement de Strasser, qui est juste, mais trop long. Pourquoi tant d’hypothèses, de compositions et décompositions de forces, pourquoi tant de plans pour arriver à ce résultat : la nageoire collée sur le dos d'un animal ondule de façon que les déviations latérales se détruisent et qu'il ne reste qu’un mouvement dans son plan? Strasser fait voir comment, le principe assez naturel étant admis, on pourrait l’expliquer par le jeu des forces internes et externes; mais il ne démontre nullement qu'il doive en être ainsi. À défaut de photographie instantanée, il vaudrait mieux faire voir les moyens dont pourrait disposer la Nature pour arriver à ce résultat. C’est ce que j'ai fait pour la dorsale de l’Hippocampe, pour les nageoires impaires d’autres poissons, e que Je ferai pour les Pleuronectes, Hétéropodes, etc. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE, 89 VII. —— TYPE PLEURONECTES. Les pleuronectides sont des Poissons aplatis sur les flancs, de façon que l’une des faces latérales devient ventrale, l’autre dorsale; les yeux se transportent sur la face devenue dorsale. La Sole, la Plie, le Carrelet, la Limande, sont des types divers de cette famille. Je choisirai la Plie (Pleuronectes Platesta) comme un type des plus communs et des plus aelifs. La figure 41 montre la projection horizontale. L'animal est aplati sur le flanc gauche. La symétrie primitive entre les flancs gauche et droit a disparu, depuis que le flanc gauche est devenu ventral et le flanc droit dorsal. La symétrie entre les faces dorsale et ventrale se voit figures 492 et 43. La ligne latérale délimite assez bien la région droite de la gauche (fig. #1); sa portion caudale occupe au début une position médiane entre le bord droit et le bord gauche, puis elle passe à gauche. Cette portion caudale prolongée en avant irait passer vers le point de convergence des bords droit et gauche. La ligne æy ainsi obtenue peut être considérée comme le grand axe de la projection horizontale. On voit que la moitié droite est plus étendue que la gauche; le minimum dp est plus en avant que gp’. Tout le côté gauche est muni d'une nageoire, depuis la mâchoire supérieure jusqu’au voisinage de la queue. La nageoire droite s'arrête aux nageoires abdominales rudi- mentaires; par conséquent, le tiers antérieur du bord droit est dépourvu de nageoire marginale. Lorsque l’animal est posé à plat sur sa face ventrale, son profil (fig. 42) montre la forme ondulée du contour d'horizon ; il forme une ligne sinueuse à trois courbures. La face ventrale n’est guère plate que dans sa partie moyenne; le côté droit est plus renflé que le gauche; aussi, dans sa position d’équilibre à plat, l'animal penche plutôt du côté droit que du gauche. Ce dernier caractère (asymétrie de droite à gauche) diffé- rencie profondément les Pleuronectides des Sélaciens plats, 90 P.-C. AMANS. avec lesquels on serait tenté de les rapprocher. La Raiïe file suivant son axe fictif; la Plie dévie toujours à droite. Le con- tour d'horizon ou de profil est ondulé à trois branches chez l’un et chez l’autre ; mais en projection horizontale, il est simple- ment ovalaire chez la Plie, tandis que chez la Raie il forme une sinussoide à trois branches (comparer pl. II, fig. 4, et pl. IV, fig. #1). Nageoires latérales. — Te squelette de la nageoire latérale peut se schématiser ainsi : un axe médian à double courbure, sur lequel s’appuie un triple système de rayons (fig. 44-46); les premiers, À, lui sont soudés par une large base; les seconds, B, sont unis aux extrémités des premiers par un fort tissu fibreux ; leurs extrémités intimement accolées forment une surface articulaire pour la base des troisièmes, G. Ceux-ci sont les rayons de la nageoire proprement dite. Dans la vertèbre, nous remarquerons : l’épine gauche est un peu plus courte que la droite; ses branches de soudure sont plus larges que celles de la droite; on y voit même en arrière une petite saillie e. La protection de la moelle est ainsi plus assurée que celle des vaisseaux vertébraux. Le trou de la moelle est arrondi, celui des vaisseaux est ovale. Ce caractère et la largeur des insertions basilaires suffiraient pour la dia- gnose des deux épines droite et gauche. La face dorsale de la vertèbre se distingue de la vertèbre par des apophyses #, figure 46, un peu > #". Les courbes aBy, « $'y', figure 44, achèvent de préciser la forme du sque- lette vertébral. Les épines sont creusées d’un sillon antérieur plus grand que le postérieur ; au distum, elles ont quatre sil- lons. Les lignes ÀX' semblent être la soudure d’interépineux, système de rayons qui se trouvent libres chez d’autres Pois- sons. Les supports B ont leurs extrémités proximales tétrasul- quées, ce qui favorise et consolide leur union avec les épines (Je dois dire que ces quatre sillons ne sont pas visibles chez les Soles). La moitié externe est formée de deux lames se coupant à angle droit; elles continuent par conséquent le système des ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 91 quatre sillons, et on peut distinguer deux lames verticales (une lame dorsale à peu près symétrique de la ventrale) et deux . lames horizontales (la postérieure plus large que l’antérieure). L’extrémité distale est renflée et munie de deux surfaces arti- culaires inclinées en sens contraire, comme deux U adjacents par les sommets, l’antérieur, le plus gros, incliné en avant, le postérieur en arrière. Ces surfaces sont légèrement concaves,. Par suite de leurs inclinaisons, il en résulte une série de gon- doles entre chaque tête articulaire. | C’est dans la gondole que roule le rayon de la nageoire, par l'intermédiaire d’un ovoide très allongé, à gros bout postérieur. Le rayon est à cheval sur la partie antérieure de l’ovoïde ; un ligament réunit les ovoides bout par bout. Il y a en outre deux ligaments, /, #, réunissant chaque apophyse basilaire du rayon aux extrémités de l’ovoide correspondant. C’est au niveau de cette apophyse que s’insère le muscle M; les tendons des muscles À et P passent au-dessous des liga- ments / et». Chaque rayon a à son service une paire de mus- cles À, M, P. Le muscle M est superficiel; c’est le plus large et le plus court. Il s’insère à moitié chemin du support sur une zone fibreuse sous-cutanée. La peau adhère fortement à ce niveau et tout le long de la cloison médiane verticale. Comme les cloisons horizontales sont unies entre elles par une mem- brane fibreuse, on voit que chaque groupe est enfermé dans une sorte de chambre, close de tous côtés. Le muscle-M est libre durant son trajet, c’est-à-dire qu'il ne présente d’adhérences qu’au niveau de la zone fibreuse. Les muscles À et P s’insèrent au contraire tout le long du support, jusqu’à une seconde zone fibreuse, celle qui réunit les sup- ports aux épines. Ils sont donc plus longs que M; l’un tire en avant, l’autre en arrière, tandis que M tire par côté. Il est probable que les contractions de M se combinent avec des con- tractions partielles de À et P, soit pour le coup d'avant, soit pour le coup d’arrière. On peut se faire une idée des prinei- pales combinaisons et des mouvements résultants d’après la forme en H de leurs insertions sur le support (M s’insère sur 92 P.-C. AMAXS. la barre horizontale de l’H, À et P sur les deux barres verti- cales). Si nous comparons ce cas particulier au cas hypothétique de Strasser, nous ne voyons pas d’analogie entre les deux. Il y à, par exemple, dit Strasser, intérêt mécanique à ce que les muscles agissent dans un plan perpendiculaire à celui de la nageoire. Où est ici la disposition correspondante à cet intérêt? C'est plutôt l'inverse qui a lieu; le plan principal de notre H se rapproche surtout du plan même de la nageoire. Tout ce que nous pouvons conclure des positions réciproques du rayon, du grand axe de l’ovoïde articulaire et des directions museu- laires, c’est que le déplacement est plus étendu d’avant en arrière que de haut en bas; ou encore dans le plan de la nageoire que dans le plan perpendiculaire. Ce dernier déplacement est cependant bien plus marqué que dans la nageoire anale du Leuciscus, où il existe un musele analogue de M, mais bien plus court et plus petit. Autre dif- férence : le rayon chez Leuciscus roule sur la tête du support; le muscle À est séparé de P par une cloison fibreuse. Chez Platessa, le rayon roule sur la moitié antérieure d’une tête de support et sur la moitié postérieure de la tête précédente; il n’y a pas de cloison entre À et P. En résumé, chez Platessa la cloison du support, normale au plan de la nageoire, devient plus petite; enfin, elle dispa- rait chez l’Hippocampe; M s’allonge et absorbe A. Le déplace- ment de droite à gauche est augmenté chez l’'Hippocampe ; il reste cependant moins étendu que le déplacement antéro-pos- térieur. Les descriptions qui précèdent s'appliquent à un rayon quelconque de droite ou de gauche. Il y a des différences seu- lement pour la longueur des supports, des rayons. La courbe distale de droite a une courbure différente de celle de gauche ; aucune des deux n’est plane. Les rayons antérieurs convergent de chaque côté avec les rayons postérieurs, aux points d'et g' correspondant aux plus longs rayons. On voit que g', celui de gauche, est situé plus ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 93 en avant que d'. Cela cadre avec la direction générale du mou- vement, allant obliquement de gauche à droite et en avant. La normale à la base de la pectorale passe au niveau g'; la corde du bord antérieur de cette nageoire par le niveau d”’. Nageoire pectorale. — La nageoire pectorale supérieure est plus grande que l’inférieure. Elle présente les dispositions principales de toute nageoire pectorale : une paire de muscles spéciaux au bord antérieur de la nageoire, des muscles superficiel et profond pour le restant de la nageoire; grand angle obtus entre le superficiel antérieur et le superficiel pro- fond ; niveau plus élevé des insertions radiales de ce dernier; sillons interradiaux plus profonds sur la face externe; fibres des superficiels antérieurs plus longues que celles des muscles postérieurs. En somme, cette nageoire est propre à faire avancer l’ani- mal, avec des déviations à droite, surtout à gauche. Le support de la nageoïre anale s'appuie en un point com- mun à la ceinture pectorale, et à un os rélro-maxillaire. La nageoire anale, malgré son petit volume, est comparable à celles déja étudiées. Nageoire caudale. — Elle a la forme d’un trapèze curvi- ligne, symétrique par rapport à la ligne latérale, qui se pro- longe jusqu’au bout de la queue, et sépare nettement les muscles droits des muscles gauches. On y remarque : 4° Les interradiaux situés entre les dix-huit rayons. Leur insertion supérieure décrit une sinussoïde. L'indépendance relative de ces muscles favorise le mouvement ondulatoire ; 2% Le muscle superficiel S, allant de la ligne médiane ver- tébrale supérieure aux apophyses supérieures des rayons. Ses fibres terminales ne se distribuent pas isolément à ces apo- physes ; elles se fondent en une aponévrose unique, une sorte de tendon commun (caractère moins propre aux ondulations). Ses fibres externes s’insèrent en s, sur les épines, jusqu’à l'extrémité distale du support; 3° Le muscle profond ?, plus épais, s’insère sur toute la palette, tandis que s est libre d'adhérence sur toute sa face 94 P.-C. AMANS. inférieure (caractère commun à tout muscle superficrel). Les fibres convergent comme celles de s vers l’axe des vertèbres; 4° Un muscle superficiel « pour le bord antérieur du pre- mier rayon; il agit aussi sur le deuxième rayon par l’intermé- diaire d’un ligament /. Ce muscle est long, libre d’adhérences sur sa face inférieure ; 5° Un musele profond w, court et destiné à ce même bord antérieur. Le squelette de la nageoire est un peu plus fort à gauche. Les supports sont d'épaisseur uniforme; les sillons qui les séparent se continuent sur leur tête renflée ; il en résulte une série de condyles entre lesquels s'appuient les apophyses des rayons. L’échancrure articulaire de ceux-ci est bien moins profonde que dans les espèces déjà étudiées. BATRACIENS — TÉTARDS VIII. — LARVES DE BATRACIENS. Je prendrai comme type la larve de Pélobate, la plus grosse larve de nos mares. C’est un ovoide apode sans autre organe de propulsion que la queue. Sa forme est donnée par les pro- jections (fig. 19-90, pl. V). Le type de section « à gros bout supérieur est général de la tête à la queue; le type 6 à gros bout ventral n’a lieu qu’au niveau du paquet intestinal. Le profil a la forme d’un ovale muni d’une queue sur son quart postéro-supérieur. L’horizon présente la courbure géné- rale commune à la plupart des animaux aquatiques, c’est-à- dire une courbe ondulée dont la branche céphalique est con- cave inférieurement. L’horizon est moins effilé en avant que le profil. Abstraction faite de la masse viscérale, on pourrait schéma- tiser le têtard par une pyramide à quatre faces (fig. 21). Dans leur attitude ordinaire, les têtards ont l’axe longitu- dinal incliné à 45 degrés sur l'horizon. Le centre de poussée ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 95 se trouve vers la partie supérieure au-dessous de la région lombaire, et le centre de gravité en dessous, plus en arrière, . dans la masse viscérale. On peut expérimentalement faire varier les positions respectives de ces centres. Si l’on coupe, par exemple, le rebord inférieur de la queue, l'animal se tient horizontalement ; la ligne des centres est devenue perpendiculaire à l’axe du corps. Gette nouvelle posi- tion gêne beaucoup l’animal ; il ne peut plus affleurer avec la gueule pour brasser l'air, qu'au prix de violents mouve- ments. Si l’on coupe la queue à un têtard, elle repousse, mais avec une courbure différente ; la branche caudale du contour d’ho- rizon à un plus petit rayon de courbure (fig. 24). La queue de première formation dépend surtout de l’héré- dité ; la seconde, de l’hérédité et de la fonction. Le néoplasme, qui va reformer la queue, n’est plus dans les mêmes condi- tions de mouvement que le tissu embryonnaire de première formation. Celui-ci a marché parallèlement au développement des autres organes, tandis que l’autre va se greffer sur un tronc complètement développé, et doué de mouvements autrement puissants qu'immédiatement ab ovo. Pour cette cause ou pour une autre, l’extrémité caudale pions une con- cavité plus profonde qu auparavant. L'influence du milieu est ici manifeste ; les adversaires de l’évolution seraient bien embarrassés de donner une explica- tion plus rationnelle. Ils peuvent dire, il est vrai, que ce sont là des modifications passagères, non transmissibles. En tout cas, l’importance de ces modifications nous autorise à douter de la fixité de tel ou tel système. Le système nerveux lui-même, considéré comme ayant la plus grande valeur au point de vue des homologies, n'échappe nullement à cette influence du milieu. Les expériences de Vanlair (1) démontrent la possi- bilité de diriger l’évolution du néoplasme nerveux presque au (4) Vanlair, Influence des conditions mécaniques sur la reproduction des nerfs (Association française pour l'avancement des sciences. Toulouse, septembre 1887). 96 P.-C. AMANS. gré de l’expérimentateur. Ces expériences, ainsi que les miennes citées plus haut, prouvent l'importance des conditions purement mécaniques en dehors de tout plan préconçu. Chez tous les animaux étudiés jusqu’à présent, l’horizon et le profil ont le gros bout en avant. La nature obéit ici à une nécessité mécanique. Soit un losange irrégulier dont deux côtés sont plus longs que les autres, de manière qu’on peut distinguer une tête et une queue. Lançons-le dans un fluide, la queue en avant; la résistance sur la queue doit être plus crande que sur la tête; car la moindre déviation de parallé- lisme entre la force propulsive et ces résistances va produire un mouvement de bascule de 180 degrés, tendant à mettre la tête en avant. Il y a donc tout intérêt à se diriger gros bout en avant; l'équilibre est plus stable. Il y a moins de résistance, comme cela est prouvé par l'expérience. La queue des têtards diffère de celle des Poissons par l’ab- sence d’un squelette vertébral solide. Le centre est occupé par un canal à parois fibreuses, autour duquel sont groupés les faisceaux musculaires. Ceux-ci sont disposés en courts fais- ceaux parallèles ; les septa qui les séparent sont formés de tissu conjonctif mou. [ls forment un grand méridien dans Île plan de profil, et un grand nombre de parallèles. Chacun de ces derniers forme latéralement une ligne brisée à deux branches, et son sommet dirigé en avant. La brisure des septa avec sommet dirigé en avant est donc une disposition générale ; c’est, comme je l'ai dit plus haut, une nécessité géométrique. Elle est très nette et très simple chez les larves de Pélobates. Elle diffère de £ des Sélaciens par l’arrondissement des deux angles dorsal et ventral, et des quatre angles postérieurs. Les bords dorsaux et ventraux ont, en guise de nageoires, une membrane gélatino-conjonctive, qui ondule passivement dans les mouvements de la queue. Le bord inférieur est plus large que le supérieur. L'absence de nageoires pectorales et abdominales, le gros ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 07 volume du tronc par rapport à la queue, contribuent à rendre la démarche du têtard lourde et titubante. La simplicité de la machine têtard m'avait poussé à en fabriquer une artificielle. Au centre d’un gros bouchon de liège, J'avais fixé le barillet d’un mouvement d’horlogerie (B, fig. 25). Sur le plateau e, on voit la petite colonne k sur le sommet de laquelle tourne de droite à gauche une queue arti- ficielle en baleine. La roue R porte une tige qui est prison- nière dans une glissière située à la base de la queue. De cette façon le mouvement circulaire du barillet se transforme en mouvement alternatif de la queue. Des ligatures en caout- chouc mince, sans gêner le mouvement, empêchaient l’eau: d'entrer, soit à la base de la queue, soit à la base de la clef F. Avec la cire à modeler, j’achevais de donner à l'appareil une forme de têtard; l'addition de grains de plomb à cette cire me permettait de régler l'équilibre, de façon que l’axe longitudinal fùt à 45 degrés sur l'horizon, l’attitude ordinaire du têtard. Sitôt que le ressort se détendait, la queue sortait violemment de l’eau, en m'éclaboussant; si l’appareil était immergé plus profondément, 1l plongeait tête en avant. La tendance de cette queue artificielle à se redresser paral- lèlement à l’horizon est conforme à celle de la queue vivante : c’est là un fait d'observation courante. J'aurais désiré utiliser cet appareil pour comparer le travail d’une queue hélicoïdale à mouvement circulaire, avec celui d’une queue piscoïde à mouvements alternatifs. Je n'ai pas de résultats assez rigoureux pour en parler; une des pierres d’a- choppement est la construction d’un ovoïde élastique. Le succès appartient au constructeur assez bien outillé pour faire des moulages en substance élastique et hydrofuge. RANA J'ai pris comme type celui dont je disposais, la Rana Latas- Lei, excellent nageur, fréquent dans les lagunes de Venise. Ma ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 7, — ART: N° 1. 98 P.-C. AMANS. description est cependant assez générale pour s'appliquer à la majorité des Rana. La Rana est un ovoïde trapu, à gros bout de profil en arrière (fig. 4, pl. V), à gros bout d'horizon en avant (fig. 3), à gros bout frontal successivement en bas (en avant) et en haut (en arrière). Nous n'avons vu jusqu’à présent aucun pois- son qui ait un tel contour de profil; une telle forme favorise le recul. Du reste, le contour d’horizon lui-même change lorsque l’animal recule. Il faut alors tenir compte de ses énormes paltes repliées contre le tronc (fig. 3); le gros bout ob est reporté en arrière ob". Il en résulte que dans cette posi- tion l'arrière dans son ensemble est bien plus renflé que de l’avant ; il est donc dans d’excellentes conditions mécaniques pour s’enfoncer dans la vase. Les différences entre Rana et les Poissons sont autrement considérables, si l’on considère les organes de locomotion. Les nageoires sont remplacées par deux paires de battoirs, la main et le pied, situés chacun à l'extrémité d’un système de tiges articulées. Le premier système, le moins volumineux, est situé au tiers antérieur, et correspond aux nageoires pecto- rales; le second roule à l'extrémité de l’ovoide, dont il est le principal, on pourrait dire l'unique agent de propulsion. Les figures 1, 2 donnent une idée de ce système, au repos et en mouvement. La surface plantaire du pied au repos forme un plan oblique sur le plan de profil; il regarde à 45 degrés environ en dehors et en bas, et légèrement (10 degrés) en avant. Dans la détente, 1] se retourne peu à peu, regarde de plus en plus en arrière, et finit par regarder en haut. La détente du pied s'opère au moyen de trois tiges articulées (fig. 2); le résultat est de projeter l'animal en avant et en haut. La surface de la main est inclinée un peu en avant, surtout en bas; elle est disposée transversalement, l’extrémité en dedans, presque horizontalement. Le reste du système est formé de deux tiges seulement. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 99 MEMBRE ANTÉRIEUR Ceinture thoracique. — Elle est formée de trois os rayon- nants : l’un, supérieur, scapula, se fixant sur la colonne; les deux autres, coracoïde et précoracoïde, s'appuient sur leurs symétriques à la face inférieure au moyen de cartilages. Cette commissure inférieure est plus allongée d’avant en arrière que chez les Sélaciens, grâce au développement de l’épister- num et de l’hyposternum. On trouve cependant chez Scyllium le germe de cet allongement,; le plus grand diamètre longitu- dinal du sternum se trouve dans le plan de profil. La direction de ce diamètre va de bas en haut et en avant chez les deux types. La direction moyenne des autres parties (latérale et dorsale) est dans un plan normal à l’axe fictif chez Rana, dans un plan incliné en arrière chez Scyllium. La sca- pula est très large et spatuliforme dans sa partie terminale; l’aplatissement des extrémités dorsale et sternale est un fait constant dans les ceintures thoraciques. Le rendez-vous des trois os forme une cavité articulaire (cavité glénoïde) pour le premier levier du membre (humérus). Chez Scyllium la cavité se trouvait non sur la ceinture, mais sur la base de la nageoïire. Le coracoïde forme la partie infé- rieure, le précoracoïde, l’antérieure, et la scapula, la supé- rieure, et un cartilage la partie postérieure. Comment et pourquoi s'est formé le dédoublement de la partie inférieure de la ceinture en coracoïde et précoracoïde ? Il est probable que ce dédoublement est corrélatif du grand développement du sternum; en tout cas, 1l y a économie à avoir un double pilier au lieu d’une seule lame de support. C’est aussi ce que nous avons vu chez Leuciscus. La section frontale de la ceinture donne un polygone hexa- gonal irrégulier plus large que haut, à gros bout dorsal ; il y a un sommet dorsal, un ventral et quatre latéraux. La cavité glénoïde est sur les sommets latéraux inférieurs. La ceinture a des rapports : 1° en avant par l’épisternum 100 P.-C. AMANS. avec le plancher buccal : son extrémité cartilagineuse s’est fixée entre les muscles submaxillaire, hyo-glosse, génio-hyot- dien; % en arrière elle est bridée par un certain nombre de muscles (1). Humérus. — Os massif, à long axe concave supérieurement, à extrémités renflées, élargies par des crêtes ; lesplans moyens de ces élargissements sont à 75-80 degrés l’un sur l’autre. La tête proximale est arrondie sur la face postérieure creusée de deux sillons sur la face antérieure; le sillon supérieur coiffe une saillie correspondante de la cavité glénoïde ; il est uni par un fort igament au trou de la cavité glénoïde ; le bord inférieur de l’autre sillon forme une arête tranchante qui se place sur la séparation du coracoïde et du précoracoïde. La cavité glénoïde se divise en deux segments osseux et deux cartilagineux, rayonnant autour du trou: 1° deux segments solides, l’un supérieur allongé (scapula), l’autre inférieur, eir- culaire, plus large (coracoïde) ; ils correspondent done à l’ef- fort maximum, dirigé de dehors en dedans et en arrière. 2° Les deux segments souples, cartilagineux, sont l’un anté- rieur, l’autre postérieur. Si l’on supprime ces deux derniers, la forme de larticulation devient ovalaire allongée, dernier trait de ressemblance avec celle des Sélaciens. La moitié proximale de l’humérus présente sur son bord antéro-imférieur une large crête, avec un tunnel pour le pas- sage du long fléchisseur de l’avant-bras. Le corps principal de l'os forme un cylindre, dont le diamètre va en diminuant vers l'extrémité distale. En revanche, il s’élargit considéra- blement dans le sens antéro-postérieur. Gette direction est à 75-80 degrés environ sur celle de l'élargissement proximal. C’est à peu près l’angle qui chez les Sélaciens sépare le plan moyen proximal des trois os basilaires de leur plan distal; cet angle va en augmentant dans les autres rangées et atteint 90 degrés. Cette divergence de plans est un fait général chez les ani- (1) Voy. Dugès, ARTICLE N° {. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 401 maux aquatiques et aériens; elle est commune à tout organe destiné à battre de haut en tee et d'avant en arrière. Elle est assez voisine de 80 degrés chez les Chéiroptères. Dans cer- tains cas, chez l’homme en particulier, les extrémités proxi- male et distale se raccordent au moyen de crêtes spiralées, si bien que l’os semble avoir été tordu sur son axe. Geci nous amène à parler de la théorie de la torsion, imagi- née par Martins, perfectionnée par Gegenbaür et Broca. On a beaucoup discuté sur cette torsion, les uns la considérant comme réelle, les autres la niant. « L’ none de l'Homme, d’ après Martins (1), est un os tordu sur son axe de 180 dons. le fémur est un os droit sans torsion. Pour se convaincre de la réalité de la torsion de l’humérus, il suffit de suivre sur un humérus d'homme ou de quadrupède la ligne âpre qui part de l’épicondyle, se dirige obliquement vers la face postérieure, la contourne en longeant la gouttière de torsion du nerf radial, et vient aboutir à la partie la plus marquée du col, au-dessous de la tête du col. La torsion est de 180 degrés environ chez l'Homme et les Singes anthropomorphes, et porte tout entière sur le corps de l’humérus; elle est aussi de 180 degrés chez les autres Mam- mifères, mais se décompose en deux : une torsion du col de 90 degrés et une torsion du corps de 90 degrés. La torsion de l’humérus dans les Chéiroptères, Oiseaux et Reptiles est de 90 degrés ou moins de 90 degrés seulement... La torsion de 90 a est une des Le ec du vol et de la reptation. » D’après Gegenbaür, l'axe du col de l’humérus et l’axe de la trochlée font entre eux un angle de 12 degrés, ce qui donne pour l’angle de torsion de l’humérus une moyenne de 168 degrés. Sur huit humérus frais de jeunes enfants de trois à neuf mois, l’angle de torsion s’est trouvé n'être plus que de 146 degrés, et sur huit fœtus âgés de douze à seize semaines, il se réduit à 120 degrés. Ainsi chez un fœtus de huit mois, (1) Martins, Annales des sciences naturelles, Zoologie, 4° série, t, VIII, 102 P.-C. AMANS. l'os est tordu de 1921 degrés; « seulement, dit Martins, cette torsion n’a pas eu lieu en réalité; elle est virtuelle, l'os ne présentant à cet âge aucune trace de torsion. » Mais depuis cet âge jusqu’à l’âge adulte, il se tord effectivement de 47 degrés. Entre autres objections à cette théorie, on a fait remarquer que la position du membre abdominal de tous les Vertébrés terrestres est une position acquise et non point primordiale ; M. Martins a donc tort de considérer le fémur comme un membre typique, non transformé, auquel devrait être ramené le membre thoracique pour l’établissemeut des homotypies [Julien (1), Sabatier (2)]. Huxley (3) n’a pas recours à la théorie de la torsion pour expliquer l’apposition du coude et du genou chez l'Homme. € Dans leur position primitive, les membres sont droits et tombent en dehors à angle droit suivant l’axe du corps; plus tard, ils tombent en forme de Z. Chez les Oiseaux et Mammi- fères, de plus grands changements surviennent. Chez tous les quadrupèdes ordinaires, le bras se tourne en arrière et la cuisse en avant, de manière que le coude et le genou se trou- vent rapprochés du tronc. Enfin, chez l'Homme, le dos du bras correspond au devant de la jambe, et le côté externe de la jambe au côté interne du bras dans la station verticale. » En résumé, le membre antérieur subit un mouvement de rotation en arrière, et le postérieur en avant. C'est, comme on voit, une idée très générale; Huxley ne dit pas comment s'effectue cette rotation, si elle porte unique- ment sur l'articulation huméro-scapulaire, ou si elle se décom- pose en rotation partielle dans chacun des articles. M. Julien, moins réservé, place cette rotation dans les arti- culations scapulo-humérale et coxo-fémorale. M. Sabatier ajoute à ces rotations basilaires : 1° un mouvement de prona- (1) Julien, De l’homotypie des membres thoraciques et abdominaux (Mé- moires de la Société d'anthropologie, 1878). (2) Sabatier, Comparaisons des ceintures et des membres, 1880. (3) Huxley, Éléments d'anatomie comparée des Vertébrés. ARTICLE N° {.. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 103 tion progressif de l’avant-bras, qui amène l'extrémité de la main en avant, tandis qu'un mouvement de supination beau- coup moins prononcé de la jambe amène l’extrémité du pied légèrement en dehors. Ces mouvements étant en sens inverse, les têtes proximales, qui étaient identiques à l’origine (Ich- tyosaures, Plésiosaures) et semblablement placées, prendront aussi des cols dirigés en sens inverse. « La ligne âpre décrit une spirale de 90 degrés au plus, et non de 180 degrés. Pourquoi, du reste, cette ligne serait-elle la seule à porter des traces de torsion? Pourquoi n’y a-t-il pas de traces sur le bord antérieur et sur le bord interne? On ne saurait admettre la torsion d’un prisme dont les trois dièdres ne présenteraient pas tous des traces de torsion. Pour le même motif, il est imexplicable que des cinq nerfs terminaux du plexus brachial, un seul, le radial, a le trajet en hélice, les quatre autres ont un trajet rectiligne. Si l’humérus était tordu, les museles qui s’insèrent sur un parcours assez étendu de sa longueur, devraient présenter des surfaces d'insertion en hélice. Or il n’en est rien. » À l’hypothèse de la torsion, M. Sabatier objecte une autre hypothèse, celle de la fixité des muscles et de l’inamovibilité des points d'attache. [Il nous semble cependant que la trans- formation ou déformation totale d’un organe est un ensemble de déformations partielles, portant sur tous les éléments de cet organe. A une machine nouvelle correspondent des moteurs nouveaux. Certains muscles peuvent disparaitre et des nou- veaux se produire, sans imiter absolument la forme du néo- plasme osseux. Ge néoplasme peut se gauchir, par exemple, sans que ses muscles aient une insertion spiralée. Il y a, dans le remarquable et peu connu travail de Haughton (1), de nombreuses formes d’insertions musculaires ; je n’en ai pas vu à insertion spiralée, bien qu’elles s'appliquent parfois à des solides gauches. « Les déviations des surfaces osseuses tiennent à des dévia- (1) Haughton, Principles of animal mechanic, London, 1870. 104 P.-C. AMANS. tions musculaires; la courbe de l’humérus, qui n’occupe que le 1/3 inférieur de l’humérus, est le résultat et exclusivement le résultat de la pronation de l’avant-bras, puisqu'elle ne se produit que lorsque l’avant-bras est placé ou peut se placer, comme chez l'Homme, dans une pronation extrême. » Ce dernier argument a une grande valeur. On pourrait, il est vrai, suivre les traces de torsion jusque dans le tiers supé- rieur, au-dessus de la gouttière proprement dite de torsion. Mais cette torsion affecte surtout les Insertions du long supina- teur, radiaux externes et épicondyliens; celles du vaste interne et brachial antérieur occupent des surfaces trop étendues pour entrer en ligne de compte. Quant au principe que les déviations des surfaces osseuses tiennent à des déviations musculaires, il revient à celui-ci : c’est le muscle qui fait los. Cela peut ne pas être toujours absolument vrai. Je citerai des membres où la flexion des divers articles s'opère sans l'intervention directe d'aucun muscle nouveau. Les pattes des Trigles sont des nervures modifiées sur tout leur parcours, et non pas seulement à la base d'insertion des muscles. Les articles primitivement rigides sont devenus souples à leur point de jointure, sous l’influence d2 la fonction nouvelle, de la marche. Avant tout, c’est la fonction qui fait l’organe. Lorsque la fonction résidera dans le muscle, on pourra ajouter : c’est le muscle qui fait l’os. Mais lorsqu'un organe est soumis surtout à l’influence du milieu, os et muscles en éprouvent les effets simultanément et non successivement. Cette restriction posée, j’admets pleinement lexplication de M. Sabatier pour le cas de l’humérus humain, c’est-à-dire : la déviation osseuse est surtout liée à l’action musculaire des pronateurs. « Les variations angulaires, mesurées par Gegenbaür, ne sont pas accompagnées de signes de torsion. Chez les fœtus de tout âge, et jusqu’à l’époque de la naissance, le corps de l’humérus (abstraction faite de ses épiphyses articulaires) est un os identique, pour la forme, au corps du fémur. C'est ARTICLE N° Î, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 105 un os phalangiforme, régulier, légèrement aplati d'avant en arrière, et ne présentant absolument aucune trace de torsion, .nisur ses faces, ni sur ses bords. Il y a, entre les deux os, cette seule différence que la face convexe de l’humérus est plus ou moins postérieure, tandis que celle du fémur est plus ou moins antérieure. La crête de torsion commence à peine à apparaître à l’âge de huit ans. « Quant à la torsion supposée de 90 degrés du col chez les Mammifères, il est bien difficile de l’admettre; chez la plu- part des Mammifères, ce col n'existe réellement pas. La déviation de l’axe du col de l’humérus par rapport à l’axe de la trochlée n’est nullement une preuve de torsion de l'humé- rus. « En l’absence de col, on se base, pour déterminer l’axe de la tête de l’humérus : 1° sur le centre de la plus grande saillie excentrique de la tête; 2° sur le sens des mouvements les plus étendus. De là le tableau suivant, comme angle entre cet axe et celui de la trochlée : Batraciens, Hommes. Anthropoïdes. Oiseaux. Crocodiliens. . Cham oNnMSAUurIens ee Me non detente dire elere rs eu 180 degrés. Quadrupèdes. Chéiroptères. Chéloniens.................. SOMME Batraciens he tan made me à tr At lotaré tetes D « Ge tableau n’est pas favorable au principe énoncé par Martins, que « la torsion de 90 degrés serait une des condi- tions ostéologiques du vol et de la reptation ». Il n’est pas exact non plus que le défaut de torsion soit l'indice d’une disposition primitive en relation avec le milieu aquatique, et que la torsion apparue plus tard soit une adaptation fonction- nelle à un nouveau milieu [Durand de Gros (1), Martins (2)|. Les humérus de Tortues marines, Cétacés, Protées, ne sont (1) Durand de Gros, Les origines animales de l'Homme éclairées par la physiologie et l'anatomie, 1871. (2) La torsion de l’'humérus et les origines animales de l'Homme (Bulle- tin de la Société d'anthropologie, 2° série, t. III, 1868). Dans une communication récente (17 octobre 1887, Comptes rendus Ac. sc.), M. Durand de Gros confirme les vues de Martins. 106 P.-C. AMANS. pas dépourvus de traces de torsion; si les traces de torsion font défaut chez certains animaux, c’est que les mouvements de l'articulation du coude sont presque nuls chez eux. » Tels sont les principaux arguments pour et contre la théorie de la torsion. Ge qui m’a le plus frappé dans le débat, c’est l'absence de toute considération mécanique sur la résistance du milieu et la forme de l'organe qui s’y meut. Huxley dit que primitivement les membres sont droits et tombent dans un plan perpendiculaire à l’axe du corps. Gette indication est trop vague ; 1l importe de préciser la forme de ce membre primitif. Est-ce un cylindre, un cône, une palette conoïde? Son plan est-il réellement perpendiculaire à l’axe du corps? Et d’abord, chez quel animal prendre le type primitif? Ce n'est pas dans les fœtus humains, dans ceux des Reptiles et même dans celui des Sélaciens actuels qu’il faut le chercher. Chacun sait que ce type nous est inconnu. C’est parmi les Vers qu’on trouve le plus d’affinités avec les Sélaciens. L'apparition d’une tête dans un Ver cylindrique indique en général le sens de la marche. L'animal se dirigeant tête en avant, sa forme générale cesse d’être cylindrique; la résistance du milieu le rend ovoïde; les appendices latéraux cessent d’avoir un plan de symétrie perpendiculaire à l’axe du mouvement. Cette symétrie supposée par Huxley est inadmis- sible; elle serait incompatible avec la progression. Cirrhe, palette ou nageoire, l’organe de progression est toujours dis- symétrique ; les faces sont dissemblables, et les bords inégaux d'épaisseur. Quelle que soit la position de la nageoire par rapport au tronc de l’animal, quel que soit le nombre de ses articles et leurs relations, toujours le plan de l’extrémité distale fait un angle avec celui de la base. C’est là une nécessité méca- nique. Une expérience très simple en fait voir la nécessité. Si l’on appuie sur une palette plane perpendiculaire à ce plan (fig. 9), il se produit une courbure de flexion plus grande que si l’on agit dans le même plan ou parallèlement à ce plan; en d’autres ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 107 termes, une palette plane se fléchira plus facilement suivant le plat que suivant la tranche. Une palette dont les plans . proximal et distal divergent réalise toutes les positions inter- médiaires entre celles du plat et de la tranche; si l’on agit, par exemple, perpendiculairement à l’extrémité distale, on agit en même temps parallèlement à l’extrémité proximale; il y à un coup de plat au distum, un coup de tranche au proximum, et des coups graduellement intermédiaires entre le distum et le proximum. La résistance à la flexion va en croissant du distum au proximum, grâce : 1° à cette divergence des plans distal et proximal ; 2° à la diminution graduelle d'épaisseur du distum au proximum. La nageoire est plus solide et le chemin par- couru plus considérable; il est inutile, je crois, de le démon- trer plus longuement. J’ai constaté cette divergence chez tous les animaux volants, et nous la retrouvons chez les animaux aquatiques. Pour ces derniers, je puis répéter ce que Je disais pour les Oiseaux et les Insectes : « Le résultat de ces circumductions successives est de produire une torsion longitudinale du bord antérieur de l'aile. L’angle de torsion est en raison inverse de la distance à la base de Paile. » Aucune nageoire paire, si primitive qu’elle soit, n'échappe à ces lois. Pour avoir une nageoire symétrique, de haut en bas et d'avant en arrière, il faudrait supposer l’animal immobile. Soit alors le bourgeon qui doit former la nageoire ; 1l pousse sous forme d’une éminence papuleuse, sphérique. Soumettons-le tout à coup à des résistances d'avant en arrière ; le bourgeon refoulé tendra à prendre la forme figure 6, convexe en avant, effilée en arrière (1). Si on lagite de haut en bas en même temps que d’avant en arrière, le bourgeon tendra à s’aplatir au distum, où le chemin parcouru, par suite la (1) Ge n’est pas une simple vue de l'esprit. Une sphère en substance plas- tique qui tombe dans l’eau, tend à prendre une forme ovoïde. Le granit qui veut barrer le cours des gaves s’effile en aval. En somme, l’œuf lui-même est sphé- rique, dans son enfance; il s’ovoiïde dans la marche, etc., etc. 108 P.-C. AMANS. résistance, est plus grand qu’à la base. Il semble que l'organe gagne en étendue horizontale ce qu'il perd en hauteur ; comme le maximum de perte est au distum, celui-ci se trouve finale- ment dans un plan différent du plan proximal, qui à moins bougé. | L'hypothèse de mon bourgeon n’est pas éloignée de la vérité. Dès qu’un animal est assez différencié pour avoir une tête el un sens de marche déterminé, 1° il est toujours soumis à une résistance dans ce sens, qui tend à l’ovoider; 2° le batte- ment complète cette action par un gauchissement de l'organe vibrant. Toutes ces modifications sont naturellement très lentes, pro- gressives; elles peuvent se produire sans torsion réelle. Le gauchissement d’un organe peut s'expliquer simplement par une répartition spéciale de nutrition, de développement. L’angle de torsion (angle de divergence serait, d’après ce qui précède, un terme plus juste, moins risqué) varie suivant les types de nageoires, mais varie peu. Chez tous les animaux aériens et aquatiques, il est voisin de 90 degrés et positif. L’angle dont je parle est celui du plus grand plan moyen proximal avec le plus grand plan moyen distal ; il est indépen- dant du nombre de pièces articulées et des muscles, puisqu'il est avant tout fonction de la résistance du milieu. S'il y a un certain nombre de pièces articulées, cet angle peut se décom- poser en une série d’angles partiels, qui vont en diminuant de la base au sommet. Prenons par exemple une patte posté- rieure de Rana. L’angle de gauchissement total, c’est-à-dire l'angle du plus grand plan diamétral de la tête du fémur avec le plan de la surface des phalanges, est de 80 degrés environ. Cet angle peut se décomposer ainsi : Angle de la tête fémorale avec le genou ....... 50 degrés. Du genou avec le plan calcanéo-astragaléen.... 20 — Des phalanges avec calcanéo-astragaléen...... 10 — 80 degrés. Mesures analogues chez les Chéiroptères, ARTICLE N° |, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 109 Le membre antérieur de la Grenouille obéit à la loi de l'angle total, mais échappe à celle des angles partiels. C’est un membre dévié qui a perdu ses fonctions de propulsion, et qui est devenu un organe de soutien et de préhension. Quant au membre antérieur de l’homme, il est encore plus éloigné du type nageoire par suite de la pronation. L'histoire complète de son évolution sortirait à la fois de mon sujet et de ma compétence. Du reste, elle est à faire. Il me suffit d’avoir appelé l'attention des anatomistes sur un nouveau criterium des phénomènes de torsion. Primitivement, le qauchissement existe, el il est mécaniquement forcé d'exister; c’est une des conditions essentielles de la propulsion et de la sustentation. L’articulation bumérale du coude est une simple gourde lagéniforme (1), gros bout en avant, sur lequel roule (oblique- ment au plan distal de l’humérus) la cupule à contour ovale du proximum radio-cubital. Le radio-cubitus est une réunion de deux os soudés; l’angle de torsion de ses deux extrémités est de 20 degrés environ. Son extrémité distale est une gourde à col plus allongé que celui de la gourde humérale; le gros bout est en bas, un peu en avant. Le carpe se compose de six os disposés en deux rangées. Sa face inférieure est fort concave; une vallée profonde sépare le pyramidal, le caprtato-hamatum d'une part, du trapèze, trapézoïde, scaphoïde, semi-lunaire d'autre part. Elle forme la diagonale d’un quadrilatère et aboutit à l'insertion d l'index. | Ceinture pelvienne. —Elle a la forme d’un disque biscornu. L’ischion et le rubis sont soudés avec leurs symétriques. Les iléons sont distincts; 1ls s’articulent en haut avec la dernière apophyse transverse des lombes. C’est autour de cette articu- lation que s’opère la flexion des reins sur le bassin. Les trois parties du bassin concourent à former l’acetabu- lum ou cavité pelvi-fémorale. La partie pubienne est moins dure que les autres ; la partie iliaque forme une cupule ellip- (1) Gourde de pèlerin. 110 P.-C. AMANS. tique, qui regarde légèrement en arrière, tandis que la cupule ischiatique plus arrondie regarde légèrement en avant. Le fémur est un os sigmoïde, à extrémités renflées. La tête du fémur est arrondie ; c’est un segment de surface sphérique à contour stomatoïde (1) (fig. 1). Le méridien æy appartient au plus grand plan diamétral; 21° est l'axe principal perpen- diculaire à ce plan : de forts tendons s’insèrent à leurs extré- mités. Le méridien x y est placé d’avant en arrière, entre les cupules iliaque et ischiatique; la région y de la stomatoide est plus large que la région x. La convexité proximale de la diaphyse est tournée en avant, la distale en arrière; c’est l’inverse pour l’humérus des Chéi- roptères et Oiseaux. Cela tient sans doute au mode de replie- ment qui est inverse. Le distum fémoral a une forme cuboïde à quatre faces latérales, et une transversale, l’articulaire. La surface articu- laire donne insertion, dans le sens de sa plus grande largeur, à un fort tendon musculaire qui s’élale sur toute la surface articulaire du tibia. Celle-ci présente une légère rigole dans laquelle glisse le tendon. Le tibia est à double courbure comme le fémur, mais en sens inverse. La partie distale du tibia est aplatie; sa surface articulaire forme une bande étroite légèrement bombée, oblique sur le plan distal. Les extrémités de cette bande sont assez saillantes, sans mériter cependant le nom de condyles. L'une, la postérieure, s’arc-boute derrière une saillie corres- pondante du calcanéum, l’autre glisse sur un plan incliné de l’astragale. Le bord postéro-supérieur du tibia est plus épais que l’an- téro-inférieur ; de même le calcanéum qui le continue est plus épais que l’astragale, et d’une courbure moins prononcée. Les deux extrémités proximales et distales des deux os (1) J'ai donné ce nom à une courbe rappelant les contours de la bouche. Cette courbe est très fréquente en mécanique animale; on la rencontre aussi en géométrie descriptive, daus les intersections de surfaces de second ordre, mais sans désignation spéciale. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. tt calcanéum et astragale sont intimement soudées. On peut voir néanmoins que le proximum calcanéen est << proxi- .mum astragaléen, et que le distum calcanéen est > distum astragaléen. L’extrémité proximale présente la saillie et le plan incliné dont j'ai parlé plus haut. Le distum forme une tête ovoïde tordue (fig. 12), à gros bout postéro-supérieur. L’ovale distal nous rappelle les surfaces à contour sinueux de certaines nageoires pectorales. Nous pouvons même com- parer les doigts aux rayons. Les doigts V-[V sont les chefs de file; les autres diminuent de longueur à partir de IV, le plus long et le plus épais ; celui-ci a cinq phalanges; V et IIT en ont quatre, Il et I seulement trois (fig. 11). Le contour du pied est analogue à celui des nageoires des poissons. Les articulations des phalanges peuvent être unies par diverses lignes transversales analogues à celles des Séla- ciens. : Les phalanges s’appuient sur le distum calcanéo-astraga- léen, en partie directement, en partie par des osselets. Le plus large, «, correspond à [I-IIT, un peu à IV; 1l forme avec IV la saillie w, spécialement logée en w. L’osselet à est interposé entre [et astragale ; IV s'appuie presque en entier directement, V tout à fait directement. Dugès considère « comme le euboïde et à le scaphoïde. Mécanique du membre postérieur. — Le membre postérieur de la Grenouille est le principal organe de propulsion de Pani- mal. Il constitue dans son ensemble, avec ses quatre leviers articulés, un nouveau type de locomotion aquatique. Cest une locomotion à battements énergiques, étendus, mais rares. Ge n’est pas une natation proprement dite, mais un saut. Tout animal sauteur a le schéma de profil (fig. 15, pl. V). C’est un ressort à cinq branches, ABCDEF. La droite AB représente l’axe vertébral; AB est ondulant chez le Tigre, réductible à deux droites chez Rana, leur sommet o correspond à l'articulation vertébrale du bassin. Le membre est dans ce schéma représenté par le système BCD E,. 119 P.-C. AMANS. Le levier fémoral BC n’a pas d’analogue géométrique chez les Poissons étudiés. Le dernier levier DE, le pied, est le seul organe qui pourrait se comparer avec une nageoire paire de poisson. Le squelette du pied a le type nageoire par la courbe péri- phérique, par les courbes interarticulaires des phalanges, par l'épaisseur du bord le plus long, calcanéen, par la forme angu- laire, cunéiforme du coussinet mobile (tarse), intermédiaire entre les rayons et le support, par la forme de la tête articu- laire du support (calcanéo-astragale). La position du sommet du coin sur le bord épais a pour résultat de rendre ce bord moins mobile, plus stable que le bord opposé, plus mince. L’instabilité du bord mince est nécessaire dans le coup négatif, lorsque la résistance de l’eau doit être évilée. La musculature du pied peut encore se comparer à celle des nageoires : de chaque côté une couche superficielle et une couche profonde, à fibres croisées. Le bord épais a des mus- cles spéciaux. Comme direction, les fléchisseurs sont paral- lèles au grand doigt, et les extenseurs ont une direction en diagonale du digitule au calcanéum. La face dorsale du pied est bombée, la face plantaire est plate au repos. Les plans moyens de la musculature du membre posté- rieur font entre eux des angles analogues à ceux dont nous avons parlé à propos de la torsion. Lorsque le membre est replié, on pourrait placer ces plans sur le tronc de pyramide ABCDEFC (fig. 14). Le plan moyen de la cuisse coïncide avec ADEF, celui de la jambe avec A BCF, et celui du pied avec BCDE. La cuisse étant étendue, les limites des plans moyens for- ment deux sinussoïdes divergentes (fig. 16) ; l’ensemble forme une surface gauche. Nous arrivons donc peu à peu à retrouver les principaux caractères géométriques de l’organe primitif, de lanageoire des Sélaciens. Les modifications les plus grandes sont corrélatives du repliement en zigzag. ARTICLE N° 15 ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 115 La nageoire du Sélacien possède de nombreuses articulations qui lui permettent de varier les courbes de flexion; mais ce sont des symphyses à roulement peu étendu. La flexion longi- tudinale est ondulée et jamais à droites brisées, comme avec des tiges articulées. Les flexions transversales se trouvent seu- lement au pied chez Rana ; elles ont lieu uniquement dans un sens, du côté de la face plantaire. On peutencore, à l’aide de ces flexions, comparer le membre postérieur à la queue larvaire, qu’il remplace, et à celle des Sélaciens, mais avec cette restriction que les leviers du membre Rana sont peu nombreux, très longs, tandis que ceux des Sélaciens sont courts et nombreux (vertèbres). Il en résulte une figure ondulée pour le poisson, une ligne brisée pour la Rana. Nous pouvons conelure par expérience que la première est l'indice d’un mouvement régulier, continu, tandis que la deuxième dénote le saut. La ligne ondulée est surtout liée à la vie aquatique. Elle permet, du reste, le saut, de même que la ligne brisée permet une démarche moins saccadée que le saut. Entrela ligne ondulée et la ligne brisée, il peut y avoir des formes intermédiaires, formes de passage de la vie aquatique à la vie terrestre, ou inversement. Si lon compare la ligne brisée de la Rana à celles des mem- bres antérieurs des Chéiroptères et Oiseaux, on est tenté de faire de la ligne brisée une caractéristique de la vie terrestre et aérienne. Il ne faut pas se hâter de tirer cette conclusion pour la vie aérienne. La ligne brisée des volatiles est surtout des- tinée à replier l’aile contre le corps, dans la position au repos; elle n’a pas de muscles volumineux destinés à la raccourcir ou l’allonger alternativement. L’aile de l’Oiseau a surtout un mou- vement ondulé, de haut en bas et d’avant en arrière, mais non du proximum au distum, ou inversement. Du reste, le vrai type d’organe aérien se trouve chez les Insectes et certains Oiseaux à humérus très court (Martinet). L’aile fortement rameuse est l’organe aérien par excellence. La palette élastique n’y est pas située à l’extrémité de longues ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI, 8. — ART. N° {, A14 P.-C. AMANS. tiges articulées ; elle se rapproche de la ceinture pectorale. Je crois donc pouvoir conclure que : La ligne brisée est l'indice d'une vie terrestre, ou qui l’a été récemment, tandis que l'organe ondulé caractérise la vie aqua- tique, aérienne. Cette diagnose générale de la vie dans les divers milieux, est plus juste que celle de Martins, basée uniquement sur la torsion de l’humérus. La torsion ou plutôt le gauchissement d'un organe est l’indice d’un fait beaucoup plus général, de la progression dans un milieu quelconque. Si l’on veut pousser plus loin l'analyse, il faut distinguer entre le gauchissement normal, anatomique, et le gauchis- sement volontaire, sous la dépendance des muscles. Nous avons vu, en effet, chez tous les animaux, des muscles spé- ciaux et des articulations en gourde, destinés à produire des mouvements de rotation longitudinale. Nous avons observé de tels muscles et de telles articulations chez Rana, mais bien moins prononcés que chez les volatiles (comparer genou de Rana et coude des volatiles). On peut donc formuler ainsi les deux termes de la diagnose : I. La ligne brisée est l'indice d’une vie terrestre; la ligne ondulée, celle d'une vie aquatique et aérienne. Il. Le gauchissement volontaire est plus étendu dans la vie aérienne el aquatique que dans la vie terrestre. Reprenons le schéma du membre postérieur (fig. 16). La ligne AEFG partde l'insertion du droit antérieur de la cuisse, longe le vaste externe, le gastro-cnémien, le bord latéral de l’astragale et se termine à l'extrémité du pouce. La ligne DE’ F'G' part des insertions du petit droit interne, et grand droit interne, longe le bord antérieur du tibia, le bord latéral du calcanéum et se termine au bout du plus long doigt. Ces lignes sont des courbes fictives servant à raccorder les plans moyens de plus grande largeur. Coupons ces lignes en travers, au niveau de la cuisse, de la jambe, du pied. Nous remarquons aisément que dans les sec- tions ovales ainsi obtenues, le gros bout se trouve du côté de ARTICLE N° Î. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 115 la ligne D G'. D’après mes observations antérieures, cela signifie que D G' est la ligne d’attaque de l’eau; elle corres- pond au bord antérieur des ailes aquatiques et aériennes. Devons-nous conclure que toutes les sections analogues ont le gros bout du côté D G/? Nullement, puisque, au cou-de-pied, le gros bout Fest du côté de l’astragale, c’est-à-dire sur À G. Ceci est conforme à une disposition déjà observée pour les sec- tions frontales des poissons; la conformité apparaîtra plus nette, si, au lieu des lignes À G, D G’, nous considérons l’axe osseux du membre. Soit oefk l’axe osseux de nos plans moyens, c’est-à-dire l'axe du squelette osseux ; 1l occupe une position moyenne, entre les lignes D Get AG. Il forme une sinussoïde à quatre branches. On remarque alors que : 1° les sections faites nor- malement à la courbe aux points sommets sont des ovales dont le gros bout est concave du même côté que la courbe ; 2 les sections faites normalement aux points d'inflexion sont des cercles. C’est là un fait assez général pour l’axe vertébral des Poissons. On pourrait le formuler ainsi : IT. La courbure en un point d'un axe du squelette est tou- jours de même sens que celle du gros bout de la section plane musculaire, normale en ce point. C'est là, sans doute, un principe très général, qui doit s’ap- pliquer à la résistance dans un milieu quelconque. URODÈLES — TRITON Le Triton est plus allongé que Rana ; il en diffère, en outre, par la persistance de la queue. Le voile membraneux qui borde la queue s'étend sur le dos de l’animal jusqu’à la tête. Le Triton avance beaucoup mieux par les ondulations de la queue et du tronc que par les mouvement des pattes. Les figures 26, 27, 28 montrent les projections des trois contours apparents. Les sections frontales ont le gros bout en bas, sauf à la queue, où 1l y a presque symétrie. Le rebord ventral de la queue est moins étendu que le rebord dorsal 116 P.-C. AMANS. (c'est l'inverse chez les larves de Pélobates). L'action aussi doit être inverse, c’est-à-dire que la queue du Triton a plus de tendance à s’abaisser qu’à s'élever; ce n’est qu’une conjec- ture cependant : la dissymétrie des sections frontales de la queue est trop peu accusée pour tirer cette conclusion. Membre antérieur. — Le membre antérieur du Triton diffère bien moins du postérieur que chez Rana, où l’inégalité de développement est due uniquement à la disparition de la queue larvaire. Schématiquement, le bras présente trois faces principales : l’une est occupée par les muscles extenseurs de lavant-bras ; une autre est occupée par les muscles fléchisseurs de l’avant- bras. L’avant-bras est une pièce à deux faces principales occu- pées par des muscles fléchisseurs et extenseurs de la main; le plan proximal de ces muscles est à 90 degrés sur celui des muscles branchiaux. L'humérus est aplati à ses deux extrémités, de façon que les plans d’aplatissement soient à 90 degrés l’un sur l’autre. Le plan proximal est voisin de la verticale, le distal d'un plan horizontal. Si l’on admettait que cette divergence de plans soit l'effet d’une torsion, dans quel sens aurait-elle marché, cette torsion ? De haut en bas et en avant, ou de haut en bas et en arrière ? L’analogie avec les nageoires abdominales des Sélaciens, nageoires d’Exocæte, ailes aériennes, me porte à croire que le bord supérieur de lPappendice primitit, représenté actuelle- ment par la crête supérieure de l’humérus, s’est porté en avant, et le bord inférieur en arrière. Car dans l’hypothèse que la fonction naissante de l’appendice est de pousser l'animal en avant et en haut, c’est le bord supérieur qui doit s’épaissir et marcher en tête pendant que l’inférieur s’amincit et devient postérieur. On peut, du reste, observer ce phénomène à l’avant-bras et à la main sans le secours d'aucune hypothèse, puisqu'il y à des os distincts pour représenter les bords supérieurs et infé- rieurs. Si alors on place le proximum vertical, l'os qui est ARTICLE N° Î. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 117 supérieur, le radins se porte en avant, et le cubitus en arrière. La divergence du cubitus et du radius se continue dans la main, qui tend à se mettre dans le plan du distum huméral, à 90 degrés sur le proximum de l’avant-bras. La main se com- porte, par rapport à ce proximum, comme le distum huméral par rapport au proximum huméral. La crête inférieure de la crête humérale est antéro-infé- rieure par rapport à son opposée ; elle donne insertion à tous les muscles scapulaires et sternaux : ces derniers sont les plus puissants (action de tirer en bas et en avant). IL y a quatre doigts à la main, cinq au pied. Le plus long de la main est le second ; le plus long du pied est le médium. Le carpe présente sept osselets. Quoique les longueurs a a’ et pp soient peu différentes, le bord supérieur pp'n'a n’a que deux osselets à sa disposition, tandis que le bord opposé en à trois (fig. 25); le mouvement de celui-ci est par suite plus varié. Les sections suivant «p, a'p' ont, en outre, leur gros bout du côté pp', c’est-à-dire au bord supérieur. C’est done, bien celui-ci qui est le chef de file pour attaquer l’eau ; il correspond au bord épais des nageoires pectorales des Téléostéens. Le contour du carpe étant presque un parallélogramme, ce caractère différencie profondément la main du Triton de l’en- semble des osselets du Leuciscus. Pour avoir l’analogue de celui-ci, 1l faudrait fixer les osselets 1 et 2 ; les quatre autres osselets formeraient une masse mobile, à contour, avec sommet à la base du bord épais (sic Leuciscus). Les deux faces du carpe sont bien différentes ; la face dor- sale est très bombée ; c’est la paume qui donne le coup creux. Le schéma des muscles pectoraux des Poissons se retrouve dans les muscles de la main du Triton. Le gros bout du distum huméral est du même côté que le bord épais de la main. | | Pour déterminer la direction générale du mouvement com- muniqué par un battoir, il suffit de connaître la position du 118 P.-C. AMANS. bord épais ; le mouvement a toujours lieu du côté convexe de ce bord. Membre postérieur. — La base d'insertion de la cuisse (os et museles) est quadrilatère. Au côté postéro-supérieur cor- respondent les muscles coxo-fémoraux (rétracteurs du fémur) ; au côté supéro-antérieur, les extenseurs du genou et une partie des protracteurs du fémur; au côté antéro-imférieur, l’autre partie des protracteurs et une faible partie des fléchis- seurs de la jambe; au côté postéro-inférieur, les fléchisseurs de la jambe. Le plan proximal du fémur est placé un peu plus haut que celui de l’humérus, au-dessus de la ligne inférieure du profil; il est, en outre, plus rapproché de son symétrique. Il est incliné à 45 degrés en avant, c’est-à-dire à l'inverse du proxi- mum huméral. Le fémur est plus court que l’humérus, mais plus massif. La jambe et le pied sont plus larges que l’avant- bras et la main. Le pied possède cinq doigts. Le distum est à 90 degrés sur proximum. Le reste du membre peut se schématiser par un triangle ABC, ayant sa base au distum fémoral, et par un quadrilatère BDFI per- pendiculaire au plan du triangle. Le tarse forme une surface plus convexe en avant que celle du carpe. [ y a trois séries d’osselets, en allant de haut en bas (du bord péronéen au bord tibial), une de deux. Le proximal, dans cette rangée, est le plus volumineux (sic au carpe), les deux autres de trois. L'ensemble 1 et 5 du carpe est l’analogue de 1 du carpe. Le tarse forme une calotte sphérique, circulaire. Le plan BCDE oscille autour d’une droite I perpendiculaire au distum fémoral, c’est-à-dire qu’il se meut presque parallèlement au proximum fémoral. Ceci mérite attention; c’est tout à fait dif- férent au membre antérieur, où le triangle analogue à ABC est perpendiculaire au distum huméral et non dans son pro- longement. Le carpe est dans le plan du distum huméral ; le tarse dans le plan du proximum fémoral. Il en résulte le tableau comparatif suivant : ARTICLE N° 4. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. MEMBRE ANTÉRIEUR. L’humérus se dirige de haut en bas et en arrière. L’avant-bras roule de haut en bas, en avant et en dedans. 119 MEMBRE POSTÉRIEUR. Le fémur se dirige de haut en bas et en avant. La jambe roule de haut en bas, en arrière et en dedans. La main frappe surtout de bas en Le pied frappe surtout de dehors en haut. dedans. La main est indispensable dans les Le pied, dans le demi-tour et pour culbutes. faire halte. SAURIENS — SCINQUE Le Scinque officinal n’est pas un animal aquatique; mais il vit dans un milieu excessivement mobile, capable de submer- ger et d’enterrer les corps qui viendraient le fouler. Ge milieu est le sable mouvant, très fin et comme porphyrisé, se trou- vant, par places, disséminé dans le Sahara. L'animal destiné à vivre dans un tel milieu doit avoir des qualités de nageur pour ne pas être englouti (1). Le Scinque a la forme générale d’un Lézard, mais il en diffère par les organes de la locomotion. La tête est celle d’un fouilleur (Porc, Triglides) et les pattes sont palmées. La queue est très puissante, à peau dure, épaisse, très lisse. Membre postérieur. — IL est formé de trois leviers princi- paux au lieu de quatre, comme chez Rana. Le tarse est très réduit; la jambe à un tibia et un péroné analogues au calcanéo- astragaléen de Rana. Le péroné à un gros distum comme l’astragale, et le tibia un gros proximum comme le calcanéum. La tête du fémur se compose d’un segment ovoidal, dirigé d’arrière en avant et en bas, à gros bout antérieur. Perpendi- culairement à sa grande largeur, plus près du gros bout, (1) J'ai pu observer ces animaux vivants chez un herpétologue distingué, M. J. de Fischer, dont l'habitat est un vrai Terrarium. Il les élevait dans le sable mouvant, provenant de Tuggurt, leur pays d’origine. Très vifs, très alertes, ils plongeaient tête baissée et se poussaient entre deux sables par des mouvements de la queue et des pattes postérieures. Le sable n’étant pas trans- parent, il est difficile de suivre leurs évolutions sous-sableuses. On pourrait bien les placer entre deux parois de verre parallèles, très rapprochées, mais on n’a alors sous les yeux que des mouvements gênés, anormaux. 120 P.-C. AMANS. prend naissance une crête analogue à celle de l’humérus des Oiseaux. Vue de front, la tête fémorale forme gourde, avec une échancrure plus profonde en arrière qu’en avant. La courbure en S de l’axe disto-proximal est moins prononcée que chez Rana. Les doigts sont formés, le premier ou le pouce de deux articles et les suivants successivement : deuxième de trois, troisième de quatre, quatrième de cinq et cinquième de quatre. Les derniers doigts sont élargis et aplatis de plus en plus du cinquième au premier. Avec la peau qui les recouvre, ils forment des palettes élargies au distum, analogues aux doigts de certains Palmipèdes, servant à la natation ou à la marche sur la vase. La peau de chaque doigt est recouverte d’écailles formant un rebord latéral mince de chaque côté, si bien que la section transversale est de la forme figure 35. Les figures 33, 34 représentent les projections horizontales. On y voit sur chaque face une marge mince (surtout au bord postérieur), avec rigole. Au dernier article distal correspond la plus grande écaille. Chaque doigt de Scinque présente, vers la base, sur la face inférieure, une forme diédrique; c’est surtout apparent dans les deuxième et quatrième doigts. Nous y retrouvons donc nos deux triangles schématiques, adjacents dans deux plans diffé- rents, triangles immanquables dans tout battoir destiné à la locomotion. Il en résulte une série de creux successifs, ce qui augmente la prise et la résistance sur le sable. La courbure des doigts est sinussoïde à deux branches, tracée sur une surface fortement concave en bas. La branche distale est très nette, car les derniers articles sont tordus sur les précédents comme les doigts de certains mécaniciens (habitude prolongée de tourner des écrous, des robinets, ete.). Cette incurvation était inappréciable chez Rana. C’est peut- être un caractère spécial aux Scinques et à la nage dans les sables. En tout cas, ce caractère fait défaut chez les animaux précédemment étudiés. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 191 Les grands plans principaux des membres postérieurs ont les dispositions suivantes : la cuisse est aplatie de haut en bas, * la jambe dans un plan vertical, le pied entre les deux, dans des plans variables (fig. 36). Le tibia est bien plus fort que le péroné; le bord du côté du pouce, c'est à-dire le bord postéro-inférieur, est plus épais que l’autre (c’est l’inverse chez Rana). Membre antérieur. — L’humérus a le proximum aplati, concave inférieurement. Les extrémités distale et proximale sont moins massives, plus aplaties que celles du fémur. La têle articulaire proximale, vue de front, forme une sorte de parallélogramme courbe; elle occupe la moitié supérieure de la crête, entre une petite tubérosité en arrière, une grande en avant. Au distum fémoral, il n’y a pas de petite tubérosité. Le plan principal du distum huméral k' (fig. 36) est à — 45 degrés environ sur k, celui du proximum; celui-ci est incliné environ à 20 degrés sur le plan sternal AB (1). Le proximum de l’avant-bras est à — 45 degrés et le dis- tum à 90 degrés sur le distum huméral. L’avant-bras forme donc, comme chez le Triton, un couple de génératrices de surface gauche; même remarque pour la main, qui, du proxi- mum au distum, va de — 90 degrés à — 180 degrés dans son maximum de torsion. La main tend donc à battre dans le plan du distum huméral ou encore à — 45 degrés du proxi- mum, à — 25 du plan sternal. Plus simplement, la main tend à se mettre dans le plan sternal avec des variations d'angle comprises entre un angle droit (entre — 135 degrés et — 295 degrés). La divergence des os de la jambe est moins prononcée que celle des os de l’avant-bras. Le proximum fémoral fait un angle > 45 degrés avec le plan ventral sous-pubien; le distum fémoral fait — 90 degrés avec le proximum fémoral. La jambe fait un angle négatif avec le distum fémoral, et le pied tend à (1) Je compte les angles positifs en allant du sommet dorsal vers l’antérieur, et les négatifs en allant du sommet antérieur vers le ventral. 199 P.-C. AMANS. se mettre à — 90 degrés sur ce distum, ou encore à — 180 de- orés du proximum fémoral, dans le propre plan de ce proxi- mum. Par rapport au plan ventral, le pied bat de — 45 degrés à — 135 degrés, tandis que la main bat de — 135 degrés à — 995 degrés. Cela signifie, en langage ordinaire, que la main frappe surtout de bas en haut, et le pied d’avant en arrière. Le pied servirait plutôt à la propulsion, et la main aux culbutes. La figure 37 représente le membre antérieur replié et le poing fermé : abcd est une section transversale au niveau du pli du coude ; a be appartient à l’avant-bras, «cd et «8 au bras. L’avant-bras à une forme pentaédrique (fig. 38); les quatre faces latérales sont : aca' interne, bcb' externe, aba'b' posté- rieure, ca b' antérieure. Le Scinque et le Triton ont les proxima huméraux et fémo- raux aplatis comme les proxima huméraux des Oiseaux; les Rana les ont plus arrondis, ce qui dénote chez Rana une rota- tion longitudinale plus accentuée. La ligne métatarso-tarsienne forme une sinussoïde à trois branches, comme la base de la queue des Poissons ; seulement la branche médiane est convexe en dehors chez Scinque et non en dedans. Ce sommet médian serait comparable au sommet du dièdre basilaire alaire. Le tarse a une forme triangulaire chez Rana, il est moins souple et moins riche en osselets que les tarses de Rana et Triton. Le nombre et la souplesse des pièces du tarse est en rapport avec la mobilité du milieu. INSECTES — DYTISCUS Les Insectes présentent un grand nombre de types aqua- tiques, généralement dans l’eau douce. Leurs modes de loco- motion sont trop variés pour en donner même une idée dans ce travail. Je me bornerai à l'étude du Dytique, plutôt comme point de comparaison avec les Vertébrés. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 193 Le Dytique est un Insecte trapu, court. La section frontale a gros bout en haut; le profil a gros bout en avant; l'horizon a gros bout en arrière. Aucun des animaux précédemment étudiés n’avait l’horizon à gros bout en arrière. Il en résulte que le maître couple forme une stomatoide très allongée. Ce sont là d’excellentes conditions pour la stabilité, mais au détriment de la vitesse. Des trois paires de membres du Dytique, c’est la postérieure qui joue le principal rôle dans la locomotion; c’est elle qui remplace la queue des Poissons. Le membre postérieur se compose de quatre parties princi- pales, que l’on désigne, par analogie avec les Vertébrés, sous le nom de hanche, cuisse, jambe et pied. La hanche est une lame trapézoïdale. Le sommet b porte un pivot p (fig. 7-9, pl. VI) normal à la lame ; le sommet c s’articule avec le plan- cher abdominal. La cuisse peut se schématiser par un dièdre à deux trian- gles. La jambe est bien plus courte; elle se place repliée dans l’angle des deux triangles. Le pied peut se schématiser par une palette allongée triangulaire pouvant se rouler autour d’un axe longitudinal (de 50 degrés environ). La cuisse a dans l’extension en arrière sa face inférieure dans le plan ventral; elle fait avec ce dernier un angle de 45 degrés dans l’extension en avant. Elle change ainsi de plan, grâce à une gouttière hélicoïdale située sur le plancher abdo- minal, à la base de la bouche. Cette gouttière sert de guide, de rail, pour produire un mouvement qui, sans elle, nécessi- terait des muscles spéciaux. Grâce à cette gouttière, deux muscles suffisent pour pro- duire à la fois le mouvement antéro-postérieur du membre et sa rotation longitudinale. L'un, # (fig. 7), appliqué de part et d'autre d’une large plaque chitineuse, porte le membre d'avant en arrière ; l’autre, »', latéral, moins volumineux, amène l’ex- tension d’arrière en avant. L’articulation entre la hanche et la cuisse est très serrée. Cependant la face supérieure de la cuisse peut osailler légère- 194 P.-C. AMANS. ment, positivement ou négativement, sur la face correspon- dante de la hanche. Il est probable que dans le coup en arrière son inclinaison est négative, comme par exemple chez le Triton, l’inclinaison du distum sur le proximum de l’avant- bras. De même, la jambe tourne négativement sur la cuisse, mais le pied tourne positivement. On peut représenter toutes ces inclinaisons par le schéma figure 11. On voit que le pied op a tourné de 135 degrés sur la jambe oj ou de 90 degrés sur la hanche 0 k. Le résultat total de ces changements de plan est le même que si nous prenions une règle élastique par les deux bouts et que nous la tordions de 90 degrés. Une telle règle serait facile à imiter avec des ressorts de sens opposé, et l’on aurait ainsi un type d’aviron bien supé- rieur à celui que les anciens nous ont léqué, et que conserve pieusement la routine moderne. D'une manière générale, on peut dire qu’il est plus facile d’imiter la machine Insecte que la machine Vertébré; il est plus facile d’imiter une patte de Dytique que celle de la Gre- nouille. Il faut bien reconnaître cependant que la complication des moteurs chez Rana est compensée par une diminution de frottement. S'il suffit au Dytique de deux muscles et d’une gouttière pour changer de plan, en revanche il y a un frotte- ment considérable dans la gouttière. Le pied n’est pas le seul organe qui s’articule avec la jambe. Le distum de celle-ci est percé de trois trous (fig. 6), l’un externe, le plus gros, o, pour le pied P ; l’autre moyen, interne, $, pour un aiguillon k, large et mince; le troisième supérieur, plus petit, {, pour un second aiguillon L, plus court et moins large que le précédent. La base des trois appendices est étran- glée, forme un cou qui s’emboîte dans les ouvertures circu- laires correspondantes. Leur insertion est élastique; dans le coup effectif, elles présentent automatiquement leur grande face ; dans le coup opposé, elles présentent la tranche. Les trois tiges (aiguillons et pied) divergent entre elles. Elles forment au niveau de leur implantation une sorte de creux ARTICLE N° 1, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 195 axillaire, comparable à celui que nous avons observé à la base de toute aile. L'animal vu de front (fig. 3) donne l’image d'une barque avec ses avirons, mais renversée. Le pied forme un angle positif, avec l’axe horizontal de front; par conséquent, ses vibrations pousseraient le front en bas. S'il faisait un angle négatif, 1l le pousserait en haut, de même que l’aviron fait sauter la barque sur la vague. Cette attitude de la patte coïncide avec ce fait que le Dytique est moins dense que l’eau. [l vient, du reste, faire de temps en temps sa provision d’air à la surface de l’eau. Il s’y présente, non tête première, comme le têtard, mais avec son derrière. Son contour d'horizon favorise ce mouvement ; mais le contour de profil lui permet de faire l'inverse, c’est-à-dire de se pré- cipiter tête en avant pour saisir sa proie. Son dos plat favorise la remontée en aéroplane. Le membre postérieur s’insère aux deux cinquièmes postérieurs de l’ani- mal ; la ligne des centres se trouvant en avant de notre section frontale, l’arrière-train suivra la direction communiquée par le membre postérieur, et la tête ira du même côté que le pied. Si, par exemple, il donne un coup de pied droit, la tête tiendra à aller à droite; ce mouvement s’accentuera si, en même temps, les pieds gauches des paires médiane et antérieure viennent à battre : tout se passe alors comme si l’on avait un couple pivotant sur la ligne des centres. La démarche du Dytique est saccadée, désordonnée: 1l semble toujours en lutte avec son lest d’air. Il file néanmoins plus vite que la plupart des autres animaux vivant dans les mares ; les larves de Diptères, Névroptères, Goléoptères, Batra- ciens sont ses proies habituelles. La plupart de ces larves mar- chent d’un mouvement serpentiforme; certaines utilisent des palettes spéciales; d’autres enfin, les larves de Libellules, expulsent de l’eau par le derrière, ce qui projette la tête en avant. Les larves de Culex se dirigent d’abord la queue en avant; dans une période plus avancée, elles se plient à la façon d’une Langouste : la première forme larvaire offre une allure 126 P.-C. AMANS. complètement différente de celles que nous avons observées ; de même le coup de palette, dans la seconde forme larvaire, diffère notablement du coup de queue dans la Langouste. J'espère revenir plus tard sur ces types de locomotion, ainsi que sur celui des Patineurs. CRUSTACÉS Je serai aussi bref et aussi incomplet sur les Crustacés que sur les Insectes. Ce n’est pas un chapitre, mais un volume qu'il faudrait consacrer à la locomotion dans chacune de ces classes. Je parlerai seulement de l’Apus et de la Langouste. Apus. — L’Apus (fig. 24, 25, 26, pl. VD) est intéressant par sa parenté avec les Trilobites. Ses nombreuses pattes ser- vent à la fois à la locomotion et à la respiration. Elles se meuvent au-dessous d’un bouclier et balayent ses parois, à la façon d’un piston dans un corps de pompe. De chaque côté de la ligne médiane se meuvent une vingtaine de rames en forme de palette. L’eau qui est chassée par ces palettes fuit et con- verge vers l’origine de la queue. J’ignore si les mouvements sont successifs ou simultanés, et quelles sont les combinaisons possibles. Il est probable que les mouvements sont successifs; la première paire débute, Je suppose, puis la seconde, etc. Le mouvement se communique comme une onde de la première paire à la dernière; lorsque l’un des couples postérieurs va d’avant en arrière, 1l yen a un antérieur qui est déjà en train d'aller d’arrière en avant. De cette façon, 1l y a toujours, à un instant quelconque, un certain nombre de couples donnant le coup efficace, à maximum de résistance : 1] y a une sorte de continuité de chocs utiles, com- parable à celle d’une roue à palettes. C'est le manque de continuité que reprochent aux animaux les adversaires du mouvement alternatif. Ce reproche n’est pas fondé, parce que : 1° le manque de continuité d’efforts n’est pas un défaut. J'ai déjà fait allusion à ce sujet au commence- ment de ce travail; 2° la continuité peut être obtenue même ARTICLE N° Îe ORGANES DE LA. LOCOMOTION AQUATIQUE. 127 avec des mouvements alternatifs et sans employer de roues- L’Apus en est une preuve. Beaucoup de mécaniciens ont voulu utiliser pour la loco- * motion divers types de surfaces courbes s’ouvrant en arrière, se fermant en avant (une sorte de parapluie s’ouvrant et se fermant alternativement). C’est un mauvais système pour la locomotion. Il vaut mieux employer des surfaces ouvertes (pattes de Grenouilles, Canards, Dytiques, nageoires, etc.). L’aile la plus schématique est réductible à la moitié seule- ment d’une pyramide tétraédrique. De même le système de l’Apus est comparable à un piston se mouvant dans une moitié seulement de corps de pompe (bouclier). Le parapluie complet est réalisé cependant chez Méduse, et le corps de pompecom- plet chez les larves d’Odonates. Langouste. — Dans la marche ordinaire, avec ses pattes, elle se dirige tête en avant. Dans la natation c’est l'inverse : l'animal se plie en deux, fait gros dos, et file gros dos en avant. Il offre alors les divers aspects figures 12, 13, 14. Ici comme chez les Poissons, c’est la partie postérieure qui par ses vibrations pousse l'animal en avant; seulement ue ne donne de coup efficace que d’un seul côté. La queue est formée de deux parties principales, le système des anneaux et celui des palettes terminales. Chaque anneau est de la forme figure 16; la surface dorsale forme un fuseau courbe, et la moitié ventrale une tige droite dont les extrémités élargies se réunissentaux pointes du fuseau : tel un arc (face dorsale) tendu par sa corde (tige ventrale). Les extrémités élargies de chaque tige ventrale présentent un trou (0, fig. 16) pour l'implantation d’un appareil spécial. Cet appareil se compose de deux pièces principales: 4° un membre à trois articles; 2 une palette lancéolée, à la base de l’article proxumal. L'ouverture o est unie au proximum du membre par un ligament, en forme de tronc cylindrique, dont les bases for- meraient un angle aigu (fig. 17). La partie externe de cette articulation (e, fig. 17, 18) a plus de jeu que l’interne 2. 128 B.-C. AMANS. * La base supérieure du tronc cylindrique passant par les points «, b (fig. 17) est représentée sous un autre aspect figure 48. C’est en réalité un collier chitineux mcomplet; il est ouvert en avant. Le premier article du membre roule en char- nière sur cet anneau. Son proximum est taillé obliquement sur ses deux faces internes, de manière à former une anse; l'ouverture externe de l’anse s'articule avec la grande palette, l'ouverture interne est elliptique (abcd, fig. 48, 29) et les sommets du grand axe de l’ellipse s A avec le collier aux points a et b. Ce genre d’articulation permet au membre d’aller à la fois d'avant en arrière (charnière 2e) et de dehors en dedans (char- nière ab). L’anse proximale du membre est unie au collier par un ligament plus large en arrière qu’en avant. Dans l'articulation de la palette, 1l y a aussi deux axes de roulement. La partie massive centrale de la palette est reliée au membre par un osselet, mais un côté seulement au point c (fig. 22); au point d elle s'articule elle-même directement. Il en résulte deux actes de roulement concordants, cd et df. En y ajoutant a b et ie cela fait quatre axes différents pour les mouvements de la palette ; il est curieux de comparer ce nou- veau mécanisme avec ceux déjà décrits pour opérer les tran- sformations de plan. Le résultat est le même, mais les procé- dés très différents. Une autre palette, mais bien plus petite, de forme triangu- laire, se trouve insérée entre le premier et le deuxième ar- ticle. Palettes terminales. — Le dernier anneau de la queue porte trois palettes terminales. Soit » #k l'ouverture postérieure de l'anneau ; # est la partie ventrale. La palette médiane s’ar- ticule sur la région dorsale aux points KK”; les palettes laté- rales s’articulent indirectement sur l'anneau par l’intermé- diaire de la pièce p. La pièce p (fig. 15, 19) forme un tronc de cylindre très régu- lier. L'ouverture proximale u est plus petite que la distale v; tout son pourtour est uni par un ligament à l’échancrure Il ARTICLE N° {. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 190 (fig. 21), mais c’est au niveau y qu’elle est plus étroitement unie. La pièce p forme à ce niveau une sorte de condyle creux avec collerette qui s'enfonce dans l’échancrure. Le bord tran- chant » de l’anneau butte contre la collerette, et la pointe entre les deux mamelons & B. Le flanc convexe È s'appuie sur le creux correspondant de l’anneau. Les points y et x sont les niveaux d’articulation avec la palette latérale interne + et la palette externe p. Celle-ci chevauche sur & par une apo- physe légèrement excavée; quant à +, l'articulation est une symphyse. La palette médiane présente deux cavités correspondantes aux condyles K K de l’anneau. Elle roule sur cet anneau d’avant en arrière, pendant que la palette externe se meut à 90 degrés sur le mouvement précédent, c’est-à-dire de dehors en dedans. La palette latérale interne à une moins grande étendue de déplacement. Chaque palette latérale peut se schématiser par une nervure épaisse, rigide, acuminée au distum, bordée sur son côté interne d’un voile chitineux. Même schéma pour la grande palette médiane ; seulement ici les deux nervures forment au proximum une masse commune. La courbe de flexion XYz est une sinussoïde à trois branches analogues à celle de la nageorre caudale des Poissons (fig. 23). Les faces dorsale et ventrale de chaque palette ne sont pas symétriques; c’est la face inférieure ventrale qui donne le coup efficace. C’est un coup d’arrière en avant, et l’animal à chaque coup fait un bond en arrière. Une telle nageoire est une des plus simples que nous ayons vues, et cependant nous n’y voyons pas moins de trois nervures; d’après tous les ani- maux précédemment étudiés, on peut dire que ce nombre de nervures est un chiffre minimum. Le pied du Dytique, plus simple encore, présente lui aussi trois nervures. C’est là une nécessité géométrique pour la formation du dièdre basilaire. Chacun des membres à palettes peut se schématiser par un appareil analogue à celui des palettes paires caudales; seule- ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI, 9. — ART. N° 1. 130 P.-C. AMANS. ment elles ont leur concavité tournée en sens contraire, si bien que le mouvement résultant peut être l’inverse de celui de la queue. HÉTÉROPODES J'ai étudié les Ptérotrachéa et les Carinaria. Ils s’éloignent profondément des types précédents par l’absence de leviers articulés, par l’inconstance des formes ; 1ls s’en rapprochent cependant par la présence de nageoires dorsale et caudale. II me suffira de décrire le Ptérotrachéa. La forme générale du corps est allongée, cylindroïde. Ge cylindre débute par une trompe effilée, porte vers son milieu une nageoire ventrale, et se termine par une nageoire caudale. Comme il nage le ventre en l'air, sa nageoire ventrale est ana- logue comme position à la nageoire dorsale des Hippocampes. J'ai figuré des vues de profil et d'horizon figures 29 et 30; ces figures sont faites d’après des animaux sortant de l’alcool ; elles ne sauraient donner une idée des contours apparents. I est ici absolument indispensable d'observer les animaux vivants pour connaitre les variations de ces contours. L’enveloppe du corps forme une peau flasque, se détachant facilement dela couche sous-jacente. Gelle-ci est musculaire ; elle est séparée de la cavité générale par une masse mucilagi- neuse assez résistante pour offrir un point d'appui aux muscles. La nageoire ventrale est (prenons comme points de repère : 1° en arrière, la masse viscérale, allongée verticalement; 2° en avant la base de la trompe, en avant des yeux) à 2/5 de la base de la queue, aux 3/5 de la base de la trompe. Pour mesurer cette distance, j’ai choisi sur la nageoire elle-même une zone facile à retrouver; c’est la zone d’élargissement du proximum. Nous avons vu chez les Poissons que la ligne d’in- sertion des nageoires formait un ovale à extrémités dissem- blables. Il en est de même chez Ptérotrachéa ; le gros bout est ici du côté de la queue. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 131 Le contour libre de la nageoire est une ligne arrondie; elle s'implante sur le tronc à 70 degrés environ en avant, à 45 de- _grés en arrière. Cette dernière portion présente un point d’inflexion ÿ. Cette nageoire rappelle assez la forme d'un porte-monnaie, à parois musculaires, etremplie de mucilage. Les parois sont formées chacune de deux couches muscu- laires, à directions croisées. Les faisceaux sont étroitement juxtaposés du côté de la base ; ils divergent vers la périphérie et se dichotomisent. Ils forment à la périphérie une zone (esquissée figure 29) remarquable par son teint clair et sa transparence. En outre de ces deux couches, on remarque trois museles à la base : &, filet allongé; #, faisceau élargi au distum; diverge de son symétrique p, plus court que le précédent ; le distum converge vers son symétrique, avec lequel il semble soudé. Le bord correspondant p 4 est très épais. Le manchon musculaire du tronc est formé de chaque côté par deux couches de faisceaux longitudinaux ; une dorsale d et une ventrale v, séparées par une couche de faisceaux tran- sversaux /. Du côté de la queue tous ces faisceaux tendent à être tous longitudinaux. La queue se détache facilement du cylindre. Elle n’est reliée au cylindre que par du mucilage et les prolongements effilés des quatre paires de muscles [, If, TT, IV (fig. 31). La section transversale est ovale, à gros bout supérieur. La queue du Ptérotrachéa tient à la fois de la queue des Cétacés et de celle des Poissons. La masse principale est aplatie verticalement, mais l’extrémité horizontalement. Cette extrémité est cordiforme. L’enveloppe sous-eutanée qui fait suite au manchon ren- ferme quatre paires de muscles : I, une paire supérieure, se rendant à la face supérieure de la palette cordiforme; les trois autres paires à la face inférieure. Les muscles de la paire supérieure [ s’anastomosent entre eux, avant d'arriver à l’échancrure médiane de la palette. Is forment ainsi une sorte d’V. En dehors et en dedans des 132 P.-C. AMANS. branches de cet Y, rayonnent une série de petits filets mus- culaires transversaux ; leurs autres extrémités s’appuient sur un filet elliptique passant par les trois extrémités de l'Y. La paire IV se jette dans IT avant d'arriver à la palette. La paire IV se jette au confluent de IT, à l'origine de la face infé- rieure de la palette ; la ligne unique, résultant de la fusion des trois paires, se continue dans le plan de profil jusqu’à la pointe de l’Y. Sur cette ligne rayonnent des filets musculaires analogues à ceux de lY. À la face inférieure de la palette cordiforme pend un voile situé dans le plan de profil; 1l continue donc en arrière la nageoire verticale. Schématiquement, je représenterai l’ensemble de la nageoire caudale par un tétraèdre allongé isocèle, dont la base est hori- zontale et se termine par une palette cordiforme. Je me bornerai à exposer ces faits; 1l serait imprudent, avec un animal de ce genre, de tirer des conclusions exactes sur le rôle locomoteur des diverses parties. Il faut ici observer de visu les évolutions, les variations de volume de l’animal ; en l’absence de tout squelette solide, on est livré aux hypo- thèses les moins certaines ; quant à la nageoiïre caudale, elle deviendra plus claire par l’étude des Cétacés. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LA RÉSISTANCE DE L'EAU Après avoir passé en revue des types aquatiques si diffé- rents, nous leur avons reconnu un certain nombre de traits communs, Caractéristiques de la vie aquatique et de la résis- lance du milieu. En regard des enseignements tirés de l’ob- servation directe des animaux, il est intéressant d'examiner les résultats obtenus par les mathématiciens purs ou par les physiciens. Les premiers savants qui se sont occupés de la résistance de l’eau, tels que Newton, Euler, Bernoulli, d’Alembert sont restés dans le domaine spéculatif. Newton pose la formule ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 133 [I À v° À ; ; R = OR (R est la pression exercée sur un corps plongé dans l’eau; À la section du cylindre circonscrit parallèlement au mouvement ; x le poids du mètre cube d’eau). D’après Newton, tout se passe comme si le corps recevait le choc d’un cylindre d’eau ayant À pour base. Dans la formule de Newton comme dans celle de Poncelet, le corps est réduit à un plan de surface A battu par un liquide de vitesse uniforme v; la résistance est proportionnelle au carré de la vitesse et au sinus de l’angle d'incidence. Ces for- mules n’ont aucun intérêt pratique. La méthode expérimentale ouvre de nouveaux horizons. Dubuat, Coulomb, Baufoy, de Prony, Eytelwein tiennent compte des pressions latérales ; leur formule est de la forme IT At° R = ee + TS (av—+ bv) dans laquelle « et b sont des coefficients de frottement, et S la surface latérale mouillée. La formule de l’amiral Bourgois tient compte, en outre, de la longueur du corps, et du dénivellement déja mesuré par les académiciens français. Les expériences de Bourgois, Scott- Rossel, Rankine, Bouratchek, Froude, s’appliquent presque exclusivement aux navires. Un vaisseau à contours rectangulaires réclame pour la transmission d’une vitesse déterminée, un principe tout autre qu'un modèle anguleux, serait-il semblable à ceux de Bossut et de Baufoy. Dans un tel modèle, le travail moteur est employé à communiquer une certaine quantité de mouvement aux tourbillons de l’eau, tandis qu'avec un vaisseau à contours convenables ce travail s'applique exclusivement aux vagues formées, au frottement de l’eau sur les flancs du vaisseau. Telle est l'explication de la théorie de Rankine. Scott-Rossel s’est montré très pratique, mais parfois trop hâtif dans ses conclusions. Il à tort de baser uniquement la résistance sur le soulèvement de l’eau au-devant du bateau. Le grand mérite de Scott-Rossel, c’est d’avoir attribué une grande importance au roulement des molécules d’eau l’une sur l’autre, à leur frottement réciproque et à la façon de 134 P.-C. AMANS. l’atténuer par des courbes convenables. Ce frottement molé- culaire était complètement négligé par les premiers auteurs, Newton en tête. Scott-Rossel jetait des boules de verre au- devant de ses barques, ayant même tirant d’eau, même largeur et longueur ; il observait les mouvements de ces boules, et leur rapport avec la forme des contours (1). On a fait, en Angleterre, de nombreuses el coûteuses expé- riences (Baufoy-Froude) pour calculer la meilleure forme à donner aux bateaux. Je citerai une conférence de Froude, relatant ses expériences sur la résistance de l’eau (2). « Je m'occupe de la résistance de l’eau sur un modèle de navire, se mouvant avec des vitesses différentes. Pour plus de commodité, j'ai introduit la courbe des résistances ; elle s’ob- tient en représentant les vitesses par les abscisses, et les résis- tances par les ordonnées correspondantes. L'expérience montre que la courbe passant par les sommets des ordonnées donne avec une précision suffisante les résistances correspon- dant aux vitesses intermédiaires. « J'ai fait le modèle en paraffine, substance qui se prête admirablement à toutes les opérations de moulage. On la coule dans une matrice en argile, dont l’intérieur répond approxi- malivement aux contours externes du vaisseau. L’âme de la matrice est faite d’un léger treillage en bois, recouvert de calicot, et d’une petite couche d'argile et de plâtre de Paris ; il est rendu ainsi imperméable à la paraffine fondue. On lui met au fond un léger ballot, afin qu'il se tienne dans la matrice, comme le vaisseau dans les docks. On y verse, en (1) A ce propos, Mendelieev conseille, comme plus facile, d'employer l'huile de naphte mêlée au chloroforme, de manière à avoir des densités voisines de celles de l’eau. La nature fournit elle-même des corps analogues, sous forme de petits glaçons. De là l'observation suivante prise sur la Néva : un navire laisse derrière lui un canal libre de glaçons, ce qui prouverait l’ascension des couches profondes. Cette observation de Mendelieev est originale et cadre très bien avec la forme de la sinussoïde vertébrale, chez certains animaux, chez ceux qui ont la section frontale de l'arrière à gros bout supérieur; car, dans ce cas, la pression de l’eau a une résultante dirigée de bas en haut. (2) South Kensington Museum. Conferences held in connection wilh the special loan collection of scientific apparatus (Physic and mechanic, p. 298). ARTICLE N° 1, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 195 outre, de l’eau pendant la coulée de la paraffine, ce qui lem- pêche de flotter et refroidit la paraffine. Le matin suivant, la paraffine étant complètement refroidie, on peut retirer le modèle et le soumettre aux opérations suivantes. » _ Suivent des détails sur le rabotage du modèle, afin de lui donner les contours et la ligne de flottaison désirés. « Les modèles employés étaient de 6 à 16 pieds de long, de 48 pouces à 2 pieds de large, du poids de 200-800 livres. Les expériences avaient lieu dans un bassin (de 200 pieds de long, 10 pieds de profondeur et 36 pieds de large) recouvert d’un hangar. « Le modèle est uni d’un mouvement parallèle à un véhi- cule qui marche sur des rails solidement fixés, et reliés au hangar, sans aucun rapport avec la surface de l’eau. La résis- tance de l’eau sur le modèle se mesure par la tension d’un ressort, qui se transmet à un levier et s'inscrit au crayon sur un cylindre enregistreur. La vitesse du cylindre est à celle du véhicule comme un cinquième de pouce à un pied. Un autre crayon müû par un mouvement d'horlogerie marque sur le tambour un point chaque demi-seconde. « J’ai rendu le mouvement du modèle parallèle à celui du véhicule, afin d'éviter les déplacements à droite ou à gauche ; il en résulterait la formation de courants et de tourbillons qui viendraient augmenter la résistance. Toute liberté est laissée aux déviations de haut en bas. — Le véhicule dynamomé- trique est mis en mouvement par une machine à vapeur ; un régulateur très sensible permet de lui donner la vitesse uni- forme désirée (de 50 à 4200 pieds à la minute). « Une circonstance non encore signalée est la variation des profondeurs d'immersion suivant les vitesses. Certaines formes de navires ont une tendance à cabrioler, d’autres à se cabrer. Cela influence évidemment sur la résistance. Aussi ai-je intro- duit un appareil enregistreur qui me permet d’en tenir compte (1). » (1) C’est surtout le contour de profil qui, chez les animaux, donne la clef de 136 P.-C. AMANS. Avant de comparer les courbes de résistance sur le vaisseau lui-même et sur le modèle, un mot de théorie. Depuis longtemps, on à pris comme unité de résistance de l’eau sur les vaisseaux la résistance sur sa section maitresse. On admettait qu'avec des extrémités de plus en plus aiguisées, on pouvait réduire la résistance totale à celle du plus grand plan transversal, perpendiculaire au mouvement. Maintenant, les mathématiciens eux-mêmes reconnaissent le peu de fonde- ment de cette théorie ; une autre a surgi récemment, celle des lignes courantes. D’après cette théorie, s’il n°y avait pas, dans l’eau, de frottement, le Poisson une fois en mouvement n’éprouverait aucune résistance s’il continuait à nager, ce Poisson serait-il même réduit à un plan perpendiculaire au mouvement. L’unique résistance aurait lieu au début, pour passer de l’état de repos à l’état de mouvement. Les courants donnent sur le corps en mouvement la même pression à la sortie qu’à l'entrée. Justifions plus amplement cette assertion, qui paraît paradoxale. « Au lieu de prendre le corps mobile dans un milieu tran- quille, supposons l'inverse, c’est-à-dire le corps immobile et le liquide en mouvement; dans les deux cas, évidemment, les conditions sont les mêmes (1). Chaque ligne courante éprouve une incurvation en approchant du corps; mais, une fois celui-ci contourné, elle reprend sa direction primitive. Sa vitesse augmente dans le contournement pour devenir la même à la sortie, et cela sans l'introduction d’une force nouvelle. Établissons ce dernier point. ces variations. Le profil prédispose aux cabrioles de haut en bas chez Trigla, Raja, Scinque, Phocæna, etc.; aux cabrioles de bas en haut chez Exocæte, Dytique, Nautonecte, Pterotrachea, etc. On verra dans mes conclusions la loi générale de ces variétés de profil. (1) Pas tout à fait. Il n’est pas indifférent pour un Poisson de rester immo- bile dans un fort courant, ou d’intervertir les rôles. La résistance ne dépend pas seulement de la vitesse, mais de la forme du mouvement, forme très diffé- rente, chez le Poisson, de celle du courant. Du reste, les expériences de Dubuat prouvent que, dans le cas d’un corps immobile dans un courant, la résistance est plus grande que dans le cas d’un corps mobile dans une eau immobile. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 137 « Prenons un tube d’égal diamètre partout et légèrement courbé, de façon à avoir les extrémités parallèles. La dévia- tion du courant par la courbe du tuyau développe une force centrifuge qui tendra à mouvoir le tuyau dans une direction connue; mais, à la sortie, il se produira une autre force de sens contraire, qui neutralisera la première; finalement, le corps restera immobile. Même résultat avec une boule au lieu d’un tube. « S'il y a rétrécissement du même tuyau en un point, l’eau y passe avec une augmentation de vitesse et une diminution de pression sur les parois du tube. Pour expliquer cette aug- mentation de vitesse, il faut bien admettre que les molécules liquides éprouvent plus de pression en arrière qu’en avant. L’inverse a lieu, si le liquide passe dans une région de plus grand diamètre; celle-ci est la région de plus petite vitesse et de plus grande pression. Il y à compensation entre les deux écarts de vitesse et de pression, et le liquide reste le même à la sortie qu’à l'entrée. » Nous pouvons appliquer ces considérations au cas d’un Poisson supposé immobile dans un courant. La vitesse com- mence par diminuer, comme celle d’un liquide passant dans un élargissement ; le maitre couple passé, elle augmente en se dirigeant vers la queue. C’est l'inverse pour la pression, qui augmente d’abord, puis diminue, et redevient au bout de la queue ce qu'elle était à la tête. Finalement, le Poisson ne bougerait pas de place. « Il n’en est pas ainsi pratiquement, car il y a frottement dans les tubes et sur le Poisson lui-même (le frottement est même d'autant plus fort que la surface est moins dure). Dans les vitesses assez modérées, pour éviter la formation de vagues étendues (vagues sous la dépendance des inégalités citées plus haut), la résistance sur les vaisseaux dépend uniquement du frottement superficiel. Il pourrait rester encore une certaine résistance provenant des tourbillons, mais on peut les éviter avec des contours convenables. Dans nos expériences, par exemple, nous voyons que des modèles de 10-20 pieds, à la 158 P.-C. AMANS. vitesse de 50 pieds à la minute, n’éprouvent que la résistance due au frottement superficiel. Je mesurais ce frottement en tous les points de planches (1/8 de pouce d'épaisseur, 19 pouces de haut, et longueurs variables de 3-4 pouces à 50 pieds). « Iressort de ces expériences que la résistance sur la partie antérieure de la planche est plus grande que sur la postérieure. Cela provient de l'entrainement des molécules d’eau dans le même sens que la planche. Ainsi, avec une planche de 50 pieds, on peut voir des deux côtés, à l’arrière, un courant de 7-8 pouces, et la vitesse moyenne des molécules de ce courant est presque égale à la moitié de celle de la planche; le frottement doit donc être moindre à l’arrière qu’à l'avant. € Si la proue est faite d’un métal poli et couverte d’une épaisse couche de graisse, le frottement forme sur celle-ei des sillons d'autant plus petits qu'on s'éloigne davantage de la proue ; mais, à 10 pieds de la proue, la diminution reste station- naire. En variant la nature et la qualité de la surface, on voit que le frottement est une fonction très sensible de cette nature. « Ainsi, une planche recouverte d’une feuille d’étain de 7-8 pouces de long éprouve seulement la moitié de la résistance d’une planche recouverte de laque. D'un autre côté, si la planche à 50 pieds de long, la résistance est la même dans les deux cas. On pourrait en conclure que les corps à surface lisse et molle (1), comme les Poissons, éprouvent plus de frotte- ment que les corps à surface dure et polie. Il faut admettre qu'un modèle de 20 pieds de long se mouvant à la vitesse de 15-16 pieds à la seconde (ce qui équivaut au cas d’un vaisseau de 300 pieds de long se mouvant à la vitesse de six nœuds à l'heure) éprouvera une résistance dépendant uniquement du frottement superficiel; les mesures dynamométriques ont montré qu'effectivement 1l en est ainsi. « La formation des vagues dans les grandes vitesses com- (1) Expression impropre pour les Poissons, et en général pour tous les ani- maux aquatiques. La surface de leur corps est élastique et vibrante; il est imprudent de la comparer à une matière inorganique. ARTICLE N° 1.. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 150 plique la question; c’est pour éviter ce genre de résistance qu'on recherche les meilleurs contours à donner. Le pro- blème, pour nous, doit se poser ainsi : construire un vaisseau d’un déplacement avantageux, à une vitesse donnée, avec le moins de dépense possible. Par déplacement d’eau, nous entendons le poids total du navire; une diminution de cette quantité ne peut être qu’utile. « La forme des contours a une influence considérable sur la vitesse. Les contours qui conviennent à un long navire pour des vitesses de 7-8-9 nœuds, sont absolument désavantageux pour des vitesses de 16-18 nœuds. Pour les vitesses modérées, il vaut mieux un vaisseau court (1). « Voyons maintenant la comparaison des résistances sur le modèle, avec celle du vaisseau. Un modèle de longueur / et de vitesse v, quelles sont les L et V du navire donnant des vagues semblables (la résistance d’ondulation s'obtient par une diffé- rence d’ordonnées entre les courbes de résistance Lotale et de résistance de frottement). Pour qu'il en soit ainsi, il faut la Ne VE proportion== —. Ainsi, pour un modèle seize fois moins long que le vaisseau et ayant une vitesse de 2 nœuds 1/2, il faut donner 10 nœuds au vaisseau. Quant à la résistance résul- tant de ces vagues semblables, elle est proportionnelle au cube des longueurs (dans notre cas, 16° — 4096). Telles sont les bases de comparaison pour la résistance des vagues. « Pour le frottement, c’est plus difficile à comparer, étant donné que son unité varie suivant la longueur des navires. On peut cependant, en comparant des navires semblables, négli- cer la longueur et dire : les résistances totales de vaisseaux semblables, doués de vitesses concordantes, sont entre elles comme les cubes de leurs dimensions. (1) Ces deux observations s'accordent avec celles de mécanique animale. Les contours changent suivant les vitesses, non seulement d’une espèce à l’autre, mais chez le même individu. Le Limnée, par exemple, rampe à la surface de l'eau; son pied forme un ovale qui s’allonge ou se ramasse, suivant la vitesse à obtenir. 140 P.-C. AMANS. « Les longs vaisseaux conviennent aux grandes vitesses (1), les courts aux moyennes. De deux vaisseaux à contours pareils c’est celui de moindres dimensions qui éprouve moins de résistance. » Mendelieev a consaeré un chapitre spécial aux travaux de Froude; je citerai seulement quelques-unes de ses cri- tiques (2). « Froude, partisan de la théorie de la friction, place dans le frottement la principale dépense du moteur, la principale cause de résistance, sinon pour un modèle anguleux, du moins pour le vaisseau. Les appareils dynamométriques de Froude mesurent plus que le frottement réel. Il y a en outre : 1° résis- tance de l’air sur les parties mobiles des appareils; 2° résis- tance de l’eau sur l’arbre de réunion des appareils avec le nez; 3° résistance de l’eau sur les parties saillantes, sur les aspéri- tés de la planche ; 4° résistance dépendant de l’épaisseur de la planche, de sa largeur, de la forme de la proue et de la poupe, ou des angles de rencontre et d’éloignement de l’eau et du corps en mouvement; 9° résistance des bords supérieur et inférieur de la planche, susceptibles d’être courbés soit par dif- férences de plan de l’eau et de la planche, soit par défaut de parallélisme avec les rails; 6° soit encore par des ondulations serpentiformes propres à de longues et minces planches. » Mendelieev insiste avec raison sur l’importance de la coupe, de la forme des contours. C’est en effet d’une importance capi- tale et c’est un de mes criteriums principaux dans l’étude dela locomotion aquatique. Si Froude a noté des différences de frottement à l’avant et à l'arrière, c’est qu’il n’a pas tenu compte de la courbure du nez et de la poupe, qui sont loin d’être parallèles au mouve- (1) Robert Duncan, constructeur de Glasgow, dit que la longueur d’un bateau à vapeur ne doit pas être moindre que le carré de la vitesse projetée; à trente nœuds à l’heure, par exemple, il le faudrait de neuf cents pieds (Nautical Magazine, 1887). (2) O soprotivleni jidkostei i vozdouxoplavanii. Sur la résistance des liquides et la navigation aérienne, par Mendelieev (texte russe). Typog. Demakof, Saint-Pétersbourg, p. 62. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. LA ment. Malgré les expériences de Froude, Mendelieev n’admet pas que Fa planches ne différant uniquement que par la nature de la surface polie produisent des résistances diffé- rentes. Ge serait contraire aux expériences de Coulomb, faites avec toute la rigueur scientifique. Du reste, des tubes propres différant seulement de substance, ont le même débit. Les différences de poli entraînent des variations de frotte- ment de À à 3,60 — 4 (planches sableuses de Froude, tubes incrustés de Darsi). Cette différence ne provient pas de la nature de la surface, mais de sa surface, qui est évidemment plus grande avec que sans aspérités. En somme le frottement des liquides est un élément impor- tant de résistance, change comme la résistance totale, et peut par suite se confondre avec elle. Mais il est insuffisam- ment bien étudié pour les surfaces inclinées ; par consé- quent : 1° On ne peut évaluer les frottements avec certitude que pour les surfaces parallèles à la direction du mouvement, et cela dans le cas des surfaces polies; 2° Le frottement des plans inclinés et des surfaces rugueuses ne se soumet pas encore au calcul ; 3° Par suite, pour l’étude de la résistance, pour obtenir par exemple des formes nautiques, des corps de moindre ou de plus grande résistance, 1l ne faut pas dans la majorité des cas séparer le frottement de tous les autres facteurs de résistance. Dans les vitesses ordinaires, les lois de frottement sont très voisines des lois de résistance (l’une et l’autre force croissent proportionnellement au carré de la vitesse). Cela porte à faire confusion ; de là l'oubli complet du frottement dans les pre- mières théories. Fort de ces conclusions, je puis ajouter que malgré de nom- breuses et coûteuses expériences, on a peu perfectionné les formules de résistance. On à introduit des coefficients nou- veaux, variables suivant les conditions de l’expérience et les idées de l’auteur. Si l’on réalise parfois des contours conve- nables, le succès ne se généralise pas ; il reste limité au cas 149 P.-C. AMANS. particulier, dans lequel même il ne se retrouve pas toujours. Comment en serait-il autrement, lorsque les formules ne tiennent aucun compte : 1° De la forme du corps. L'évaluation de cette forme est inabordable en algèbre et ce n’est qu’au prix de longs tâtonnements que l’expérience se rapproche quelque- fois du but : aller le plus vite, et dépenser le moins possible. Il y a des animaux qui ne tâtonnent plus et ont atteint ce but; l'observation directe de leurs formes est plus instructive que les appareils de Beaufoy et Froude. 2 De la forme du mouvement. I n’est pas indifférent que les forces internes du corps le poussent en ligne droite ou ondulée. La forme du mouvement est un facteur important ; les lignes sinussoïdes et stomatoïdes signalées dans mon tra- vail sont en rapport avec ce facteur. 3° De la différence de pression à des profondeurs diffé- rentes (1). C’est elle qui cause la dissymétrie complète de la figure de profil. Gette dissymétrie est quelquefois liée au genre de vie de l'animal; je rappellerai seulement les tendances à se cabrer ou à cabrioler. Mais il est d’autres cas, où elle ne peut être attribuée qu'à la différence de niveau ; lorsque l'animal par exemple évolue indifféremment, et de la même allure dans les trois directions de l’espace. Je n'ai pas vu dans le travail de Mendelieev des indications spéciales pour la navigation sub-marine. J’ignore sur quoi sont basées les formes données aux bateaux sous-marins ; il est cer- tain qu'avec les formules ordinaires de la résistance des liquides, les contours du bateau et de ses appendices sont tracés un peu à l'aventure. Un mot sur cette branche de la navigation : elle nous imtéresse de bien plus près que la navi- gation flottante, puisqu'elle s'occupe comme nous de corps entièrement immergés. (1) Je dois dire, cependant, que Jorge Juan et Poterat ont insisté sur l’inéga- lité de résistance à des profondeurs différentes. Mais la formule de Jorge Juan n’a pas été reconnue exacte dans tous les cas, et les idées de Poterat (théorie du navire) n’ont pas eu d'applications pratiques (Dictionnaire des mathéma- Liques appliquées. Sonnét, art. RÉSISTANCE DE L'EAU). ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 143 Il n’est pas connu, le premier qui a eu l’idée d’un bateau sous-marin. Il est probable que les premiers chercheurs ont voulu imiter les animaux aquatiques. Il semble bien établi que sous le règne de Jean [®, un Hollandais, Drebbel, inventa un vaisseau conduit sous l’eau par douze phoques sous la surface de la Tamise (1). Le marquis de Worcester, dans son Century of inventions (1663), parle d’un certain Day, qui plongea avec son sous-marin dans le détroit de Plymouth en 1774, C'est à Robert Fulton que nous sommes redevables des premières idées bien défi- nies sur ce sujet. En 1801, il descend à une profondeur de vingt-cinq pieds dans le port de Brest, et démontre expé- rimentalement que la montée et la remontée peuvent se faire sans danger. Une fois, il reste près de six heures sous l’eau. | En 1856, Bauer fit des essais dans le port de Cronstadt (2). C'était un ouvrier tourneur, plus tard sous-officier d'artillerie. La nature fut son seul maître, et le Phoque son modèle. Mal- gré d’heureuses expériences, 1l fut, comme Fulton, un peu partout traité de fou, et mourut misérablement. En 1860, un essai est fait en France, mais sans succès. Il yaune vingtaine d'années, beaucoup d’expériences ont été faites en Russie mais sans applications pratiques. Il y a quelques années deux sous-marins étaient construits à Liverpool sur les plans de Garret, qui employait des pro- cédés chimiques pour revivifier l’air. Le mieux réussi des deux s’est perdu sur les Welsh Coast. Les types le plus en renom sont actuellement Nordenfeldt, (1) J'ai pris la plupart de ces détails dans l’article Submarine boats, in Scientific American (Supplem., 12 Fevr. 1887, d’après English Mechanic). (2) Bauer n’est pas cité dans l’article d'English Mechanic. J'ai comblé cette lacune par la lecture du Gartenlaube, Leipzig, 1861. On a relevé récemment (Ilustrirte Zeitung, July 1887. — Scient. Amer., Supplem., 24 Sept. 1887) le sous-marin de Bauer, englouti et resté introuvable depuis plus de trente- six ans dans le port de Kiel. D’après les dessins de ce modèle retrouvé et les descriptions anciennes du Gartenlaube, il est facile de voir que Bauer était soucieux avant tout d’imiter les animaux, en particulier les Cétacés, 144 P.-C. AMANS. Tuck, Goubet, Campbell. Nordenfeldt et Tuck emploient la vapeur, Goubet et Campbell l'électricité. Le dernier modèle du Nordenfeldt, autant qu’on peut en juger par une vue laté- rale, ressemble grosso-modo à un Cachalot. Goubet semble avoir été frappé par la mobilité de l’axe caudal chez les Poissons ; en tout cas, il a rendu mobile l'axe de l’hélice, de façon que celle-ci, sans cesser de tourner, peut donner des directions différentes à l'arrière du vaisseau. L’hélice serait ainsi à la fois propulsive et directrice. Campbell remarque que les Poissons montent et descendent simplement par des contractions ou expansions de la vessie natatoire. Il a imité la vessie natatoire par une série de tubes métalliques, lesquels sont garnis de rames ou baguettes sus- ceptibles d’être projetés ou retirés par un procédé simple. Il est facile de régulariser la rapidité de montée ou de descente, la quille reste toujours de niveau (1). La vessie natatoire joue un grand rôle chez beaucoup de Poissons ; mais je n’en ai pas parlé, vu que c’est un organe inconstant, pouvant se trouver chez de mauvais nageurs, manquer chez d'excellents fileurs. Cet organe ne se trouve guère que chez les Poissons, et encore parmi ceux-ci des ordres entiers (Leptocardes, Cyclostomes, Sélaciens) n’en ont pas; parmi les Téléostéens, des familles entières en sont dépourvues ; on voit même, parmi ces derniers, des espèces très rapprochées se distinguer par la présence ou l’absence de cet organe. Un des derniers auteurs qui ait étudié la physiologie de la vessie natatoire, Bieletsky, débute justement par une critique de ce terme natatoire. Il intitule son travail : « Physiologie de la vessie aérienne ». Il fait une étude spéciale des gaz qui se trouvent dans la vessie, et compare longuement ses résultats avec ceux de ses devanciers. Cette comparaison est riche (1) Submarine boat Nautilus (Scient. Amer., 26 mars 1887), On trou- vera dans ce journal de nombreux détails sur le Nautilus et autres sous- marins. Je me borne à citer les points de comparaison avec la mécanique animale. ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 145 en observations personnelles et en documents bibliogra- phiques (1). Ce court aperçu historique montre l'importance de la mécanique animale au point de vue des bateaux sous-marins. Ceux-là seuls ont obtenu des demi-succès qui ont cherché à imiter les animaux. Mais comment les ont-ils imités? Il ne suffit pa$ de voir plonger un Phoque, d’en prendre même le moulage, il faut, en outre, le scalpel. Je doute fort que les Fulton, Bauer, etc., eussent une connaissance tant soit peu approfondie des animaux auxquels ïls ont bien voulu emprunter certaines dispositions. Il serait intéressant de comparer les formes de leurs véhi- cules avec celles des animaux aquatiques ; l'absence de dessins me rend cette comparaison presque impossible. Que dire, par exemple, du Nautilus de Campbell? il est figuré : 1° par un profil lenticulaire, allongé, plus bombé en bas qu’en haut; 2% par une section transversale, aux trois quarts circulaire ; on peut dire qu’elle est à gros bout inférieur. La courbe inférieure du profil a un plus petit rayon de cour- bure que la supérieure. Lorsqu'il en est ainsi chez les Pois- sons, la section transversale a le gros bout en haut, du moins dans la partie antérieure, car généralement les sections fron- tales ne sont ni semblables, n1 semblablement placées, suivant qu’elles sont céphaliques ou caudales. — Ce même profil semble symétrique d'avant en arrière, ce qui n’a jamais lieu chez les animaux. Le Nautilus a 60 pieds de long, 8 pieds en travers; le Nor- denfeldt 100 pieds de long, 19 en travers. Ces largeurs trans- versales nous rendent perplexe ; pour discuter ces dimensions, il nous faudrait des termes moins vagues. Les mots de hau- teur, largeur sont inapplicables aux animaux; je les rem- placerai au besoin par les cotes du contour apparent de front. Dans ce cas, la hauteur serait une somme des distances: (1) Bieletsky, Phiziologiia vozdouchnago pouzyra ryb (texte russe). Xarkov, 1885. ANN. SC. NAT., ZO0L., 1888. VI. 10. — ART. N° 1. 146 P.-C. AMANS. 1° du sommet dorsal du front à l’axe fictif; 2 du sommet ventral à l’axe fictif. La largeur serait la droite qui joint les deux sommets latéraux du même contour de front. Les rap- ports de ces grandeurs à la longueur totale du corps sont très variables chez des animaux d’une allure rapide, mais d'espèces différentes. La hauteur est chez le Scyllium (chat de mer), — = chez | Œ : la Truite, le Loup, le Marsouin. L’épaisseur est — à at le 1 1 Scyllium, 55 chezle Marsouin,— chez # Truite. hauteur est = : dans le sous-marin de Campbell, 42 a 5 dans celui de Nor- ur dans celui de Bauer à Cronstadt. L’épais- L. seur du dernier était =; les proportions de Bauer se rap- %c 7 ) prochent de celles du Phoque ; c’est certainement le construc- teur qui s’est le moins préoccupé des formules de la résis- tance. Si j'en juge par le dessin de lIlustrirte Zeitung, 1 a tout simplement copié le maitre couple du Phoque. À vouloir imiter les grands amphibies, il vaudrait mieux choisir le Marsouin, comme modèle de vitesse. D'une manière générale, tout dépend des conditions du problème posé aux constructeurs ; il faudra prendre des données animales celles qui conviennent plus spécialement à ces conditions. GÉNÉRALITÉS SUR LES ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE Les machines aquatiques peuvent se diviser en deux grands oroupes : 1° les machines érectiles, où le système vasculaire et conjonclif joue le principal rôle ; 2° les machines articulées, formées surtout de leviers solides et de muscles. C’est de ce second groupe que je me suis occupé. Je vais successivement passer en revue les trois facteurs ARTICLE N° 1, ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 147 principaux de la locomotion aquatique: forme extérieure du véhicule, nageoires et moteurs. L. Forme extérieure. — La forme extérieure est celle d’un ovoide plus ou moins allongé, à un seul plan de symétrie, celui de symétrie bilatérale. Je rappellerai 1e1 les définitions posées au début. On distingue dans l’ovoïde trois contours apparents, trois axes et six sommets. Le profil est l’intersection de la surface par le plan de symétrie bilatérale. La courbe de profil peut toujours se représenter par une figure fermée, une sorte d’ovale dissymétrique en tous sens. Son plus grand diamètre est supposé horizontal ; ce diamètre est l’axe de: l’ovoide. Le front est le contour apparent de l’ovoide parallèlement à Son axe. L’horizon est le contour apparent, parallèlement à une verticale. Les intersections des trois contours profil, horizon et front déterminent les six sommets de l’ovoide : sommets antérieur, postérieur, dorsal, ventral et latéraux. La droite qui joint les sommets dorsal et ventral est le dia- mètre dorso-ventral ; celle qui joint les sommets latéraux est le diamètre latéral. La hauteur dorsale est la perpendiculaire abaissée du sommet dorsal sur le grand axe; la hauteur ventrale, la per- pendiculaire qui est abaissée du sommet ventral sur le grand axe. La hauteur de l’ovoide est la somme des hauteurs ven- trale et dorsale. a. Le profil forme toujours un ovale dissymétrique, même chez les animaux qui vivent entre deux eaux, et quise portent indifféremment en haut ou en bas. Chez certains la moitié supérieure du profil présente un point d’inflexion céphalique, de manière que cette moitié débute par une ligne concave en haut et en avant (Trigla, Scinque, Phocæna). Chez d’autres animaux, c’est la moitié inférieure qui présente ce point d'in- flexion (Pterotrachea, Dytique, etc.) ; en même temps la hau- teur ventrale l'emporte sur la dorsale. 148 P.-C. AMANS. Toujours le profil a le gros bout en avant, c’est-à-dire que le diamètre dorso-ventral est plus rapproché du sommet antérieur que du postérieur. b. Le contour d'horizon forme de chaque côté une sinus- soïde à trois branches. La projection horizontale peut se schématiser par un ovale, dont le gros bout (diamètre latéral) est tantôt en avant, tantôt en arrière. Chez les bons fileurs cet ovale est corrigé par deux points d’inflexion, un cépha- lique et un caudal (Xiphias, Phocæna). Les bons fileurs ont le gros bout d'horizon en avant; comme celui de profil est toujours en avant, on peut dire alors que l’ovoïde tout entier a le gros bout en avant. L’horizon à gros bout postérieur se rencontre chez des ani- maux ayant souvent besoin de se diriger en arrière (Dytique, larves d’Odonates). Cette disposition favorise la stabilité au détriment de la vitesse. La projection de l’horizon sur le plan de profil forme une sinussoide, dont le sens des courbures varie comme celui de l’axe vertébral (quand il existe). Il varie en tous cas suivant l'allure habituelle du véhicule; chez les animaux à démarche régulière, sensiblement rectiligne, la branche céphalique est légèrement concave en bas. c. Le front ou maître couple forme une stomatoïde (courbe en forme des contours de la bouche); les branches latérales sont généralement convexes en avant. Le diamètre dorso-ven- tral est incliné sur le grand axe, tantôt en avant, tantôt en arrière ; lescontractionsabdominales peuvent modifier la moitié inférieure du front, et par suite la direction du diamètre dorso-ventral. Les variations angulaires du diamètre dorso-ventral avec le grand axe entraînent des variations de même sens dans la tra- jectoire, en laissant de côté, bien entendu, toute action des nageoires. L’inclinaison en arrière du diamètre dorso-ventral coïncide en général avec le gros bout en bas du front (Trigle, Pho- cæna, Ostracion, triquèstre). ARTICLE N° {. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 149 Principe des sections frontales. — 1° Les sections planes menées normalement à l’axe vertébral ou, à défaut, à la projec- tion verticale de l’horizon, forment des ovales dyssimétriques de haut en bas aux points maxima et minima; elles sont moins dyssimétriques aux points d'inflexion ; 2° la courbure du gros bout de la section est du même sens que la branche de sinussoïde aux points d’intersection (fig. 47, pl. V). Par conséquent, le gros bout est en haut aux points maxima, en bas aux points minima. Le diamètre latéral est, chez les bons fileurs, un peu moindre que la hauteur. Le rapport de la hauteur au grand axe est d’un eimquième environ (Truite, Marsouin, Espadon). Les vibrations d’un tel ovoïde le poussent : 1° dans une direction voisine de la diagonale du parallélogramme construit sur le grand axe et le diamètre dorso-ventral comme côtés; 2° du côté des gros bouts du profil et du front. IT. Nageoires. — T’ovoïde aquatique est muni d’appendices mobiles, qui modifient la forme des contours, et par suite celle du mouvement. Il y a des appendices sur le profil même et sur l’horizon (nageoires impaires); il y en a au voisinage des con- tours d'horizon et de front (nageoires paires). Toute nageoire rentre dans un des quatre types sui- vants : a. Cône circulaire à base proximale : type primitif, faisant le moulinet en tous sens (fig. 33, pl. VI). b. Palette bisymétrique. Le cône s’est aplati; le cercle proximal est devenu une ellipse très allongée, dont le grand axe sert de charnière à la palette (fig. 34). Une telle palette ne pourrait se trouver que sur le profil, ou à la jonction du profil et de l’horizon. En réalité, elle n’existe etne peut pas exister sur un ovoide ; il y a seulement des types approchants (caudale de Pleuronectes, nageoire dorsale d’Hip- pocampe). c. Palette unisymétrique. L’ellipse proximale devient un ovale unisymétrique; le petit axe se rapproche d’un des som- mets du grand axe. Il est suivi dans ce mouvement de transla- 150 P.-C. AMNANS. tion par le troisième axe de la palette, l’axe disto-proximal. fl s’est différencié un bord épais (fig. 35). Le petit axe de l’ovale mesure l'épaisseur, le grand axe la largeur, et l’axe disto-proximal la longueur. Une telle palette se trouve sur le profil (nageoires impaires dorsales, anales, caudales). | Les deux ovales s’unissant par le bout effilé figurent la sec- tion transversale basilaire de la nageoire caudale (fig. 36). Celle-ci diffère profondément de l’hélice marine ; elle est bâtie comme toutes les palettes du type unisymétrique : chaque moitié de nageoire caudale forme un cône ovoidal à un seul plan de symétrie, plan passant par le sommet et le grand axe de largeur. d. Palette dissymétrique. L’ovale proximal devient dissy- métrique. Outre le bord épais, il faut distinguer deux faces inégales, l’une plus convexe que l’autre (fig. 36). À ce type appartiennent les nageoires paires : 1° les nageoires pectorales, situées au voisinage des sommets latéraux de Povoïde; % les nageoires ventrales, au voisinage du sommet ventral. Dans celles-ci l’ovale proximal est généralement moins effilé que dans les pectorales. Toutes ces palettes sontélastiques. Elles sont parfois dépour- vues de squelette solide; le plus souvent elles sont charpentées par un système de baguettes ou rayons, allant du proximum au bord mince et au bord épais. Chacune de ces baguettes est faite à l’image de l’ensemble; elles roulent autour du grand axe de la base, et autour des droites parallèles au petit axe, et au disto-proximal. Ces droites divergent dans les palettes dis- symétriques. Le bord épais est formé par un système de rayons générale- ment accolés; il est toujours convexe au dehors, souvent avec un point d’inflexion à la base. Ge fait si général peut s'exprimer ainsi : 4° le bord épais d’une nageoire est concave .en dehors, dans la partie basilaire et concave en dedans dans la partie distale ; 2° la ligne proximale est bien plus courte que la dis- tale. Le bord mince est plus variable, tantôt convexe, tantôt ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 151 concave. D’après la forme du contour périphérique, on peut distinguer des nageoires triangulaires (Scomber, Belone), qua- drilatères (Charax, Dentex), lancéolées (Anguis, Conger), scal- pelliformes (Trigla lyra, Exocæte), en éventail (Labrus, Cari- eus), réniformes (Scorpena), etc. Ges distinctions sont secon- daires. L’axe disto-proximal de chaque rayon peut rouler autour des deux axes basilaires d’une façon indépendante de ses voi- sins. Il peut en résulter un élargissement de la surface avec ondulation. L’ovale proximal est plus modifié, par suite du peu d’étendue de son déplacement; mais les sections parallèles forment des ovales sinueux, analogues à ceux d’un horizon d’anguille, et à courbures d'autant plus accentuées qu’elles s’éloignent davantage de la base et du bord épais (dorsale d’Hippocampe, anale de Leuciseus, pectorale de Raïe, caudales en général). Si les baguettes se portent toutes du même côté, on a des battements en bloc. L’ovale sinueux de tantôt se réduit à deux branches, changeant alternativement de sens de courbure. Il se réduit même à une seule branche dans le coup concave des palettes fortement dissymétriques ; alors l’axe disto-proxi- mal forme l’arête d’un dièdre. Ce dernier cas est possible chez les animaux aquatiques ; c’est la règle sans exception chez les aériens. Les nageoires utilisent surtout la dissymétrie du bord épais au bord mince, du proximum au distum ; les ailes utilisent en outre la dissymétrie des grandes faces, ce qui entraine la dis- tinction entre un coup fort ou concave et un coup faible ou convexe. L’ondulation peut être produite soit par le procédé déjà décrit, par un écartement angulaire des rayons (ondulations radiales), soit par des flexions transversales des rayons (ondu- lations antiradiales). Qu'il y ait ondulation ou battements en bloc, la nageoire est avant tout un cône ovoidal, soumis comme le corps tout entier à la loi des gros bouts. Les vibrations d’un tel solide le pous- 152 P.-C. AMANS. seront vers le bord épais et vers la base du cône. Elles le pous- seront en outre du côté de la face convexe, dans les palettes dissymétriques. Il y a entre le véhicule et ses appendices un certain parallé- lisme de forme, qui peut se résumer dans le tableau suivant : I. — AU REPOS, Véhicule. Forme sphérique (cellules, orga- nismes inférieurs). Forme ovoïde circulaire (certaines larves ciliées). Forme ovoïde-elliptique (animaux vermiformes, cylindroïdes). Forme ovoide unisymétrique (pres- que tous les Vertébrés aquatiques). Forme ovoide dissymétrique (type rare. Sic Pleuronectides). Nageoires. Bourgeon embryonnaire. Cône circulaire (cils vibratiles). Cône bisymétrique (type idéal, dont se rapprochent seulement quelques nageoires). Cône ovoidal unisymétrique (na- geoires impaires). Cône dissymétrique (nageoires pai- res, mains, pieds, ailes). IT. — EN MOUVEMENT. L’ovoide unisymétrique oscille au- tour des axes du front ou autour d’axes semblables (axes vertical et horizontal des vertèbres situées en arrière du maitre couple). Le maximum de déplacement a lieu autour du plus grand axe. Ces deux genres de flexion se tra- duisent sur ie corps par des lignes sinussoïdes en forme de #, ayant leurs convexités médianes tournées vers la base de l’ovoide. Les vibrations de l’ovoïde le pous- sent du côté des gros bouts des trois contours apparents. Le cône ovoïdal unisymétrique os- cille autour des axes de l’ovale basi- laire. Î Idem. L’oscillation autour du petit ne s’ac- compagne pas de flexion. L’oscilla- tion autour du grand se traduit aussi par des ? à convexités médianes tour- nées vers la base. Les vibrations du cône ovoïdal le poussent vers les gros bouts du cône, c’est-à-dire vers la base et le bord épais. Les nageoires impaires sont reliées au profil directement ou par l’intermédiaire des sésamoïdes, diminuant le frottement comme dans les roulements à billes, La surface articulaire à ARTICLE N° 1. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 153 un contour ovalaire analogue à celui de la section proximale, que nous avons prise pour base de nos cônes. Seulement, jamais l’axe de cette surface n’est une droite; il forme une courbe plane. Les nageoires paires sont reliées à leur support soit direc- tement (dissymétrie peu accusée), soit par l'intermédiaire d'une pièce mobile (osselets des nageoires pectorales, tarse, carpe) en forme de coin, ayant son sommet vers la base du bord épais. Le coin peut être lui-même relié à l’ovoide par un système de tiges articulées. Le disto-terminal d’une nageoire ou d’une aile rameuse forme une baguette flexible ondulante : le disto-terminal des membres articulés, une ligne brisée. La hgne ondulée est le propre de la vie aérienne et aqua- tique ; la ligne brisée caractérise plutôt la vie terrestre. Moteurs. — La propulsion de l’ovoïde est due aux vibrations de la partie effilée, munie le plus souvent d’une double palette impaire (nageoire caudale). Ces vibrations sont produites par les contractions des grands muscles latéraux, dorsal et ventral. Le groupe latéral fait rouler autour des diamètres dorso-ven- traux des vertèbres, le groupe dorso-ventral autour des axes latéraux. De même chaque nageoire a deux groupes de museles : lun groupe qui fait rouler autour des petits axes basilaires (muscles antérieur et postérieur des nageoires dorsales, anales, couche profonde des nageoires paires); ® un groupe qui fait rouler autour du grand axe basilaire (muscle latéral des nageoires impaires, couche superficielle des nageoires paires). On voit que le parallélisme entre le véhicule et la nageoire se maintient pour les muscles. Mais voici de grandes diffé- rences : dans les nageoires dissymétriques, il y a une muscu- lature spéciale pour le bord épais ; elle s’est surtout développée du côté concave. En général : 1° le superficiel du côté convexe est plus puissant que le superficiel du côté concave; 2° le pro- fond du côté concave est plus puissant que le profond du côté convexe ; 3° le superficiel convexe fait un angle obtus avec les trois autres; 4° l’articulation est assez souple pour permettre 154 P.-C. AMANS. une légère rotation longitudinale autour des axes disto-proxi- maux. | Phénomènes de torsion. — La torsion des os est une question très débattue ; je lai rattachée à un phénomène très ancien et très général, au gauchissement des nageoires. [Il faut distinguer un gauchissement momentané dû aux flexions radiales et anti- radiales et un gauchissement fixe qui atteint le squelette. Le premier gauchissement est dù à l’élasticité des rayons com- binée avec l’action des muscles et la résistance du milieu; il se constate dans toute espèce de nageoire. Les grands axes des sections parallèles à la base Frs de plus en plus de eelui de la base, à mesure qu’on s’en éloigne; finalement, le plan distal diverge du plan proximal. Il se pro- duit des torsions réelles partielles (mouvement ondulé) ou totales (battements en bloc) changeant alternativement de sens. Le gauchissement fixe ne se rencontre que dans les nageoires dissymétriques. L’habitude de taper plus fort dans le coup concave entraine une modification persistante dans le sque- lette. Il forme une surface gauche, soumise aux lois suivantes : 1° Le grand axe de chaque section normale au disto-proxi- mal fait un angle avec celui de la section voisine (sic les tra- verses d’une aile de moulin à vent. 2° Cet angle va en diminuant de la base au distum. 3° La somme de ces angles ou torsion totale est voisine de 90 degrés. 4° La torsion a lieu de façon que le gros bout de la section se dirige de la face convexe vers la face concave. La divergence des plans distal et proximal est la caracté- ristique de tout membre servant à la fois à la progression et à la sustentation (fig. 38-39). Dans un prochain travail, je traiterai des centres de gravité et de poussée, et c’est avec des chiffres que j'établirai les fac- teurs principaux des véhicules à grande vitesse. ARTICLE N° 1. QU ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 45 EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE I. Scyllium. Fig. 1-2. Horizon et profil du Scyllium en mouvement. Fig. 4-7. Les mêmes en état de flexion maximum. Fig. 3. Squelette de la nageoire pectorale droite; face supérieure : &, propté- rygium; M, mésoptérygium; p, métaptérvgium. Fig. F. Section frontale céphalique. Fig. 5. Nageoire pectorale droite; face supérieure : n, élévateur superficiel; n', élévateur profond. Fig. 6. Nageoire pectorale droite; face inférieure : m, abaïsseur superficiel (il est excisé transversalement et les bords déjetés, de facon à laisser voir l’abaisseur profond); "m', abaisseur profond; m'"', faisceau mésoptérygien. Fig. 8. Section transversale basilaire de la nageoire. Fig. 9. Surfaces articulaires proximales des trois cartilages basilaires. Fig. 11. Gouttière hémi-cylindrique tordue. Fig. 12. Gouttière hémi-cylindrique. Fig. 13. Nageoire pectorale, vue de devant et par la tranche. Fig. 24. Nageoire pectorale, vue par dessous. Fig. 15. Schéma de la torsion de la surface. Fig. 16. Nageoire abdominale. Fig. 17. Extrémité de la queue du Scyllium : à, inscriptions tendineuses des muscles latéraux ; g, muscles propres de la deuxième anale. Fig. 18. Ovoïde théorique. Il est représenté en haut, projeté sur le plan de profil; en bas, en perspective : acbd, contour de profil; afbf", contour d'horizon; cfdf', contour de front ou maître couple; a, sommet antérieur; b, sommet postérieur; c, sommet dorsal, d, sommet ventral; f,f", sommets latéraux. — ab, grand axe; ff", diamètre ou axe latéral; cd, diamètre dorso- ventral; ch, hauteur dorsale ; de, hauteur ventrale. PLANCHE II. Raja. Fig. 1. Projection horizontale de l’horizon. Fig. 2. Profil. Fig. 3. Projection verticale du front. Fig. 4. Schéma de la ceinture pectorale. Fig. 5. Vue latérale d’un fer à T. 156 P.-C. AMANS. Fig. 6. Nageoire pectorale droite; face supérieure. Fig. 7. Surfaces articulaires de la ceinture pectorale. Fig. 8. Cavités correspondantes de la base de la nageoire. Fig. 9. Articulation radiale. Fig. 10. Muscles de la région pectorale; face supérieure. Fig. 11. Muscles de la région pectorale; face inférieure. (Le muscle m est limité par des traits (----- ), le muscle / par des points (.....). Fig. 12. Vue latérale des muscles e et m. Fig. 13. Section parallèle à la base de la nageoire pectorale. Fig. 14. Une partie de cetie section, représentant la disposition des couches superficielles et des couches profondes. Fig. 15. Ceinture abdominale et basilaire antérieur (nageoire droite). Fig. 16. Schéma de la ceinture abdominale. Fig. 47-18-19. Coupes frontales à différents niveaux de la queue. Fig. 20-21-22. Variations principales du profil. Trigla. Fig. 23. Projection horizontale de l'horizon. Fig. 24-27. Deux aspects de front. 2 Fig. 25. Front osseux de la Trigle. © Fig. 26. Profil. Fig. 28. Vue de plat de la nageoire pectorale. Fig. 29. Ceinture pectorale droite; face externe. Fig. 30. Courbure de l'insertion basilaire de la nageoire. Fig. 31-32. Profils théoriques trapézoïdes. Fig. 33. Surface articulaire du premier rayon. Fig. 34. Vue postérieure de la base des deux premiers rayons. Fig. 35. Vue d’un rayon, par la tranche. Fig. 36. Vue antérieure de la base des deux premiers rayons. PLANCHE III. Trigla. Fig. 1. Os du bassin (f, k et g sont des insertions musculaires). Fig. 2. Os du bassin, montre la surface d’articulation avec la nageoire. Fig. 3-4. Vues par la tranche des rayons de la nageoïre abdominale. Fig. 5. Pseudo-patte. Fig. 6-7. Schéma des mouvements d’une patte. Fig. 8. Muscles des nageoires pectoralé et abdominale; côté gauche; face externe. ARTICLE N° 1, ORGANES DE LA. LOCOMOTION AQUATIQUE. 197 Fig. 9. Muscles des nageoires pectorale et abdominale; côté gauche; face interne. Fig. 10-12. Directions principales des muscles de la nageoire pectorale. Fig. 11. Sections parallèles à la base des nageoires pectorale et abdominale. Fig. 13-14. Muscles de l'extrémité caudale. Fig. 15-16-17. Sections frontales à différents niveaux en arrière du maitre couple. Fig. 148. Inscriptions tendineuses des muscles latéraux. Fig. 19. Nageoire abdominale. Leuciscus. Fig. 20. Nageoire pectorale gauche et son support; face externe. Fig. 21. Support de nageoire pectorale droite. Fig. 22. Schéma de la figure précédente. Fig. 23-24-25. Projections de profil, d'horizon et de front. Fig. 26. Rayon de nageoire dorsale avec son sésamoïde, Fig. 27-28. Supports des rayons de la nageoire dorsale. Fig. 29. Muscles interradiaux de la nageoire caudale. Fig. 30. Osselets basilaires de la nageoire pectorale. Fig. 51. Bord épais de la nageoire pectorale. Fig. 32. Support de nageoire pectorale droite; face interne. Fig. 33. Support de la nageoire abdominale ; face externe. Fig. 34. Support de la nageoire abdominale ; face interne. Fig. 35. Schéma de la ceinture abdominale. PLANCHE IV. Exocæte. Fig. 1-2-3-4. Vues de profil, d'horizon et de front. Fig. 5. Figure schématique d’Exocœæte. Fig. 6. Nageoire pectorale d’Exocæte. Fig. 7. Section frontale au niveau de la base d'insertion des nageoires. Fig. 8. Courbes d’insertions des muscles superficiels postérieur et antérieur. Fig. 11. Support de la nageoire pectorale avec les insertions musculaires ; nageoire droite ; face externe. Fig. 12. Premier et deuxième rayon de la nageoire pectorale. Fig. 13-13’. Rayon pectoral, montrant l'élargissement, l’échancrure et les apo- physes basilaires. Fig. 14. Coupe transversale de la nageoïire pectorale au niveau de la base. Fig. 15. Support de la nagcoire abdominale. Fig. 16. Schéma de ce support. 158 P.-C. AMANS. Fig. 17. Muscles de l’extrémité caudale. Fig. 18. Squelette de l’extrémité caudale. Fig. 19. Directions basilaires des rayons de [a nageoïre abdominale. Fig. 20-21-22-23. Vues d'horizon, de profil, de front de Dactyloptère. Hippocampe. Fig. 29-30. Vues d'horizon et de front d’Hippocampe. Fig. 31. Squelette du support de la nageoire dorsale. Fig. 32. Un rayon de nageoire dorsale avec ses muscles. Fig. 33. Nageoire pectorale droite et ses muscles; face antérieure. Fig. 34. Coupe radiale de la nageoïire pectorale, montrant la disposition des muscles antérieurs et postérieurs. Fig. 35-36. Trajectoires d’un rayon de nageoire dorsale. Fig. 37. Coupe transversale de la queue. Fig. 38. Muscle latéral; vue latérale. Fig. 39. Muscle latéral ; schéma géométrique. Pleuronectes platessa. Fig. 40. Muscles de la nageoire caudale. Fig. 41-42-43. Vues d'horizon, profil et front. Fig. 44. Épine vertébrale et support d’un rayon de nageoire latérale. Fig. 45. Muscles d’un rayon de nageoire latérale. Fig. 46. Vertèbre, vue frontale. Fig. 47. Squelette de l’animal. PLANCHE V. Rana. Fig. 14-2-3-4. Vues de front, d'horizon, de profil. Fig. 5. Tête du fémur. Fig. 6. Battoir à section ovalaire. Fig. 7. Figure tétraédrique montrant la divergence des aplatissements au proximum et au distum. Fig. 9. Battoirs plans. Fig. 10. Battoirs gauches. Fig. 11. Squelette du pied : &, astragale. Fig. 12. Surfaces articulaires du tarse et du calcanéo-astragale. Fig. 14. Tronc de pyramide, sur les faces de laquelle seraient posés les articles repliés du membre postérieur. Fig. 15. Schémas d'animaux sauteurs. Fig. 16. Schéma du membre postérieur. ARTICLE N° Î. ORGANES DE LA LOCOMOTION AQUATIQUE. 159 Fig. 17. Relations entre les courbures du grand axe d’un solide et les sections normales à cet axe. Fig. 18. Directions principales des muscles du pied : d, face dorsale; p, face plantaire. Larves de Pélobates. Fig. 19-20. Vues d'horizon, de profil : «, coupe frontale céphalique; B, coupe ventrale; y, coupe caudale. Fig. 21. Schéma de la larve, moins la masse viscérale. Fig. 22. Inscriptions tendineuses des muscles de la queue. Fig. 23. Tétard artificiel. Fig. 24. Têtard dont la queue a été amputée et a repoussé. Triton. Fig. 26-27-28. Vues de profil, horizon et front. Fig. 25. Carpe. Fig. 29. Membre antérieur droit; vue horizontale d'en haut. Fig. 30. Schéma des membres droits; vue latérale. Fig. 31. Squelette du membre postérieur. Scinque. Fig. 32-33-34. Pied et doigts isolés : trente-cinq coupes transversales d’un doigt. Fig. 36. Angles de divergence des divers articles des membres avec l’axe de l'animal : AC, plan sternal; k, proximum; k/, distum d’humérus; @, proxi- mum; &, distum d’avant-bras. — sq, plan pelvien : f, proximum; f”, distum de fémur. Fig. 37-38. Membre antérieur replié. Fig. 39. Membre postérieur. PLANCHE VI. Dylique. Fig. 1-2-3. Vues de l’horizon, de profil et de front. Fig. 4. Membre postérieur. Fig. 6-8. Jamhe; trous d’articulation avec le pied P et les aiguillons L, K : vu par la tranche, P donne P' et K donne K'; 8, face inférieure de jambe. Fig. 7. Muscles du pied. Fig. 9. Gouttière hélicoïdale pour la hanche. Fig. 11. Schéma des changements de plan : k, hanche; c, cuisse; j, jambe; p, pied. 160 lP.-C. AMANS. Langouste. Fig. 12-13-14. Vues de profil, horizon, front. Fig. 15-19. Support des palettes latérales. Fig. 16. Type d’un anneau de la queue. Fig. 17. Ligament cunéiforme. Fig. 18. Axes de roulement d’une palette dans un des anneaux de la queue. Fig. 20. Palettes terminales; face antérieure. g. 21. Échancrure destinée au support des palettes terminales latérales. Fig. 22. Palette d’un des anneaux de la queue. Fig. 23. Palettes terminales : face postérieure. Apus: Fig. 24-25-26. Vues d'horizon, de profil et de front. Fig. 27-28. Patte natatoire. Pterotrachea. Fig. 29-20. Vues de profil et d'horizon. Fig. 31. Nageoire caudale. Fig. 32. Schéma de nageoire caudale. Généralités. Fig. 33. Cône circulaire. Fig. 34. Cône bisymétrique. Fig. 35. Cône unisymétrique. Fig. 36. Schéma de nageoïire caudale. Fig. 37. Cône dissymétrique. Fig. 38. Cône dissymétrique montrant la torsion des rayons. Fig. 39. Sens de la marche de torsion dans un organe de soutien et de progres- sion. Fig. 40. Ondulations d’un organe bisymétrique. Fig. 41. Ondulations d’un organe unisymétrique. Fig. 42. Ondulations d’un organe dissymétrique. ARTICLE N° 1, TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION. — But du travail. — Considérations générales sur les mouvements des organismes inférieurs. — Mouvements circulaire et ondulatoire. — Tige de la vorticelle; interprétations expérimentales de son mouvement; un mot sur la théorie de Rouget. — Plan du CRAVATE ei ere D dla Se à de POISSONS I. Type ScyLLIUM. — Définitions des lignes principales (contours appa- rents et leurs axes; sommets; hauteur). — Colonne vertébrale. — Courbures horizontales et verticales de la colonne. — Disposition des muscles latéraux. — Raisons mécaniques des inscriptions en >; prin- cipes des raccordements de surface. etes ele ol elelelo tele etes ele es eee, 1e 10067 Ceinture pectorale. — Nageoire pectorale : formes et rapports des trois pièces basilaires; articulations en gouttière tordue; description des rangées longitudinales et transversales. — Importance des flexions radiales et antiradiales comme mesures de la résistance du milieu... Muscles de la nageoire pectorale. — Mouvements possibles. rss Nageoire abdominale. — Nageoires terminales....................... IL. Type RAJA. — Contours apparents. — Ceinture pectorale : forme des articulations ; un mot sur l'équilibre des supports. — Nageoire pecto- rale : pièces basilaires ; rayons ; comparaison des coupes antiradiales avec les Inscriptiones tendinosæ ; muscles de la nageoire (sections verticales des muscles suivant une courbe antiradiale) ess... eee Nageoire abdominale : description et schéma de la ceinture; torsion du basilaire antérieur. — Rayons sésamoïdes. — Muscles de la nageoire. — Schéma des résultantes............. ds Colonne vertébrale. — Sur les couches concentriques des muscles laté- raux. — Division de l’axe vertébral en trois parties : céphalique, pec- ORALE MC AUTALES UNE" IT LENS CRAN CRUE SE Ne a ss... Considérations générales sur les mouvements de la Raie. — Cerf-volant de Maillot. — Aéroplanes animaux et artificiels. ..........,........ ANN. SC. NAT., ZOOL., 1887, VI. 11. — ART. N° 1. 13 18 28 31 32 102 P.-C. AMANS. II. Type TRIGLA. — Contours apparents. — Nageoire pectorale. — Nageoire abdominale. — Mécanisme des pattes (comparaison avec les Hexapodes)......... FR See MER PR Eee PSS Muscles des nageoires pectorale et abdominale; coupe parallèle à la base. — Schéma des résultantes. .......... SN tns Es ie Nageoire caudale : rôle des muscles interradiaux ; peut-on comparer cette nageoire à une hélice ? — Grande échancrure des nervures.......... Forme des muscles latéraux. — Action des muscles de la nageoire cau- daless en SA SES ACL NES MES RAS ARE Léna Nageoire dorsale. — Action des nageoires dorsale et anale............. IV. Type LEUCISCUS. — Ceinture pectorale; nageoire ; schéma du sque- lette de la ceinture et de la nageoire ; osselets basilaires. — Compa- raisons entre une nageoire pectorale et une aile d’insecte........... : Uomparaisons des nageoires pectorales de Leuciscus, Trigla, Raja, Scyllium. —- Sur l’hypothèse de la persistance du Metapteryqium..… Museles pectoraux : sur la divergence des couches superficielles et pro- JOnAS MPAPMRER NRESUN Be a BA DM RE AE 5 0 se Nageoire abdominale : muscles; osselets basilaires ; schéma de l’articu- lation. — Comparaisons avec nageoires abdominales de Trigla, Raja, PTE) AA L'ÉNOSNEOENPRNIEESEREV S E A R RUE des Nageoire caudale..... A RAR Tee à te TO beNe SCA EE V. Type Exocæœre. — Nageoire pectorale : forme du contour périphé- rique. — Gauchissement des rayons ; apophyses basilaires ; élargisse- ment des moitiés postérieures des rayons et lieux des points extrêmes de ces élargissements; coupe transversale des apophyses basilaires; courbure des deux grandes faces de la nageoiïre. — Ceinture pectorale : squelette; muscles; courbes d'insertion des muscles superficiels et PEOIONUS RE SR NP Ce DCréasrsera en a Nageoire abdominale. — Nageoire caudale. — Comparaisons générales entre Exocæœtes et Dactyloptères............... MR dope Considérations physiologiques sur le vol des Exocœtes : Mémoire de Môbius: surlevol/ondulé de Lippert”.." "7220-22" ANCNE A à VI. Type HippocAMPE. — Structure géométrique du squelette cutané; arêtes longitudinales; polygones transversaux; contours apparents. — Nageoire dorsale : courbure de la crête dorsale. — Nageoire anale. — Nageoire pectorale : caractères ostéologiques d’un membre ondulant et d’un membre rameur ; action des nageoires dorsale et pectorale (bat- tements partiels, en bloc; oscillations céphaliques et caudales). — Structure de la queue; disposition des muscles latéraux. — Sur le mou- vement ondulatoire, :. UHR AEMRe D CIE D CAUPE did be LL IPRUICRR ARTICLE N° 1. J4 49 92 54 99 99 60 66 69 1 1 TABLE DES MATIÈRES. VIL. Type PLEURONECTES. — Dissymétrie de l'horizon. — Nageoires horizontales : articulation en gondole ; roulement à billes ; différences de forme et de longueur des trois muscles de chaque rayon; pas de cloison entre les muscles postérieur et antérieur; différences entre nageoire droite et nageoire gauche. — Nageoire pectorale; nageoire CAUAALÉ die noce uen SAUT ANNEE SRE Ar A ee BATRACIENS VIIT. LARVES DE PELOBATES. — Contours apparents ; schéma de la forme du corps. — Opérations sur la queue du Têtard ; courbure de nouvelle formation ; influence du milieu. — Muscles de la queue ; courbes de flexion. — Sur un Têtard artificiel. ........... au at : IX. RANA. — Contours apparents : comparaisons avec Poissons. — Membre antérieur. — Ceinture thoracique : dédoublement de la partie inférieure de la ceinture. — Humérus : élargissement distal et proximal; EURE ENCE AE LE A Me RENE de date Théorie de la torsion : historique; critique bibliographique. — Condi- tions mécaniques du gauchissement d’un organe; distinction entre le gauchissement partiel d’un organe et le gauchissement total. — Prin- CIDEME SANS Ie TDESIONE PE Rd Te ; Ceinture abdominale. — Courbure longitudinale du fémur ; comparaison avec humérus des animaux aériens, et bord épais des nageoires. — Courbure longitudinale du tibia. — Calcanéo-astragale. — Pied : comparaisons avec nageoires. — Mécanique du membre postérieur : schéma des sauteurs ; schéma du membre dans l’extension et compa- raisons avec nageoires, membre ondulant et membre brisé. — Loi de relation entre la courbure d’un axe et la figure de la section normale CORHES DOUANES AT ONE EM PERRIN LARE BA EAST MALE RS ENS AREA © X. TRITON. — Membre antérieur : marche du gauchissement, — Diver- gence du cubitus et du radius. — Carpe ou Triton et osselets du Leu- ciscus. — Membre postérieur : comparaisons avec le membre antérieur. SAURIENS XI. SGINQUE. — Membre postérieur : incurvation spéciale des doigts. — Membre antérieur : gauchissements comparés des deux membres... INSECTES XII. DyTique. — Contours. — Horizon à gros bout postérieur. — Membre postérieur : gouttière hélicoïdale ; changements de plan de la jambe, du pied ; aiguillons basilaires du pied. — Démarche du Dytique 163 89 94 97 101 109 115 119 164 P.-C. AMANS. CRUSTACÉS XIII. Apus. — Forme et mouvement des pattes. — Corps de pompe et parapluies Dee RARES RCE ER CRCÉACE AN dE LAN IE RS ASE 1 UM26 XIV. LANGOUSTE. — Contours. — Forme des anneaux et des nageoires de la queue ; sur les ligaments cunéiformes, les colliers et sésamoïdes chitineux. — Palettes caudales. — Comparaisons avec palettes de cer- taines larves de Diptères et pseudo-Névroptères....,............... 127 MOLLUSQUES XV. PTEROTRACHEA. — Forme générale du corps. — Nageoire ventrale. — Nageoire caudale (palette verticale; palette horizontale)... ...... 130 Considérations générales sur la résistance de l’eau. — Formule de Newton et ses perfectionnements. — Méthode expérimentale. — Théories de Rankine, Skott-Rossel, Froude. — Expériences de Froude. — Critiques de ces expériences par Mendelieev ; ses idées sur le frotte- ment. — Causes d’imperfection des formules de la résistance, d’après le‘eriteriuin anatomique #fhane2el PUR PE RENE RTS esse 132 Sur les bateaux sous-marins. — Historique. — Phoque de Bauer. — Hélice de Goubet. — Vessie natatoire de Campbell (travail de Biéletsky). — Comparaisons des contours des bateaux sous-marins et des animaux aquatiques > HER A UE SARA ER 1e LLC El SR See Re 145 Généralités sur les organes de la locomotion aquatique...... Dr 146 Explication des planches PME AE BCE Hole nes .. 155 ARTICLE N° Î. RECHERCHES SUR LES PREMIÈRES PHASES DU DÉVELOPPEMENT DE LA NEICHE (SEPIA OFFICINALIS) Par M. L. VIALLETON. INTRODUCTION Le développement des Céphalopodes a été, dans ces quinze dernières années, l’objet des recherches de nombreux embryo- logistes. Ray Lankester et Ussow se sont occupés principale- ment de l’évolution de l’œuf ovarien, de sa structure, de la segmentation, de la formation des feuillets, et, d’une manière moins étendue, de la formation des organes. Grenacher a donné des détails très complets sur la forme du corps et le développement des organes d’un Céphalopode à sac vitellin réduit ; enfin, Bobretzky a décrit le développement du Calmar d’une manière qui, d’après mes recherches, me semble à peu près irréprochable pour ce qui a trait aux phases avancées pos- térieures à la formation des feuillets germinatifs. Cependant, malgré tous ces travaux, le développement des Céphalopodes présente encore beaucoup de points obscurs. Ray Lankester et Ussow ne sont pas toujours d'accord sur la structure de l'œuf ovarien, ni sur le sort de la vésicule germinative. La segmentation, étudiée d’une manière véritablement appro- fondie par Ussow seul, n’a pas été complètement élucidée par lui ; sa marche a été mal suivie, et ses relations avec la seg- mentation des autres Mollusques ont été l’objet d’une attention insuffisante, qui a conduit Ussow à une comparaison inadmis- sible. Pour la formation des feuillets, les lacunes sont encore 166 L. VIALLETON. plus grandes, et les opinions les plus diverses ont été soute- nues. Pour Bobretzky, le mésoderme est formé par une invagi- nation du bord de l’ectoderme ; pour Ussow, il provient du feuillet externe par délamination. D’autre part, ces deux auteurs considèrent la membrane périvitelline comme une différenciation du mésoderme ; Ray Lankester, au contraire, fait dériver cette dernière membrane de noyaux spéciaux, qui apparaissent dans le vitellus et se rangent plus tard à sa sur- face. Le savant anglais introduit ainsi dans le développement des Céphalopodes une théorie célèbre, qui a été formulée pour les Vertébrés, et qui distingue dans le germe deux par- tes : l’une formée par les éléments dérivés de la segmentation proprement dite, l’archiblaste, l'autre constituée par des élé- ments qui apparaissent dans le vitellus nutritif d’une manière plus ou moins bien déterminée, le parablaste. La simple énumération de ces divergences d’opimion, et de ces théories, montre que les premières phases du développe- ment donnent lieu à un certain nombre de problèmes intéres- sants; et quelques-uns de ces problèmes, comme la formation de la membrane périvitelline, prennent, par l’existence même de dispositions plus ou moins semblables chez d’autres ani- maux, une importance générale. La théorie de larchiblaste et du parablaste a déjà été l’objet de nombreuses critiques; 1l ne sera certainement pas inutile de rechercher dans un cas de segmentation partielle aussi typique que l’est celle des Cépha- lopodes, si cette théorie répond oui ou non à la réalité; la notion de la segmentation partielle deviendra en même temps plus claire et plus précise. Je me suis efforcé de donner une solution à toutes ces ques- tions dans le travail que je présente aujourd’hui. Les matériaux de ce travail ont été recueillis, et les obser- vations sur lesquelles il repose ont été faites pendant les deux années que j'ai passées dans le laboratoire du professeur Kleinenberg, à Messine. À mon arrivée dans son laboratoire, au commencement de l’année 1886, le professeur Kleinen- ARTICLE N° 2, DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 167 berg me conseilla de suivre d’une manière très rigoureuse les premières phases du développement de la Seiche. La facilité . avec laquelle on se procure les œufs de cet animal le désignait avant tous les autres, el je n’ai eu qu'à me louer de lavoir choisi, car aucun autre Céphalopode n'aurait pu me fournir le nombre d'œufs suffisant pour achever ce travail. Comme il faut, pour l'étude, isoler le germe du vitellus nutritif, on perd un grand nombre d'œufs pendant cette opération délicate, et lon peut s’estimer heureux quand on conserve un blastoderme sur trois ou même plus. Par le nombre de préparations que je possède, et dont on se rendra compte à la lecture, on pourra imaginer facilement le nombre d'œufs que j'ai dû employer. Mes études sur les Géphalopodes ont été commencées sous la savante direction de M. le professeur Milne Edwards ; c’est lui qui, plus tard, m'a engagé à aller à Messine, et il a fait pour favoriser mes études tout ce qui était en son pouvoir. Je le prie de vouloir bien agréer l'expression de ma plus vive gratitude. Pendant tout le temps où M. le professeur Klemenberg m'a donné une si aimable hospitalité dans son laboratoire, il m'a guidé et conseillé, et a mis à ma disposition son grand savoir embryologique, sans lequel j’aurais dû renoncer à des recherches bien au-dessus de mes propres forces. Qu'il me permette de lui témoigner publiquement ma reconnaissance. > CHAPITRE PREMIER Remarques sur la structure de l'œuf avant la ponte. Les recherches de Ray Lankester (1) et d’'Ussow (2) ont fixé dans ses traits généraux l’histoire du développement de (1) E. Ray Lankester, Observations on the develop. of the Cephalopoda (Quaterly Journal of micr. Science, t. XV, 1875). — The growth of the ova- rian Egg of Loligo and Sepia (Phil. transactions, 1875). (@) M. Ussow a publié divers mémoires allemands ou russes sur le déve- C4 168 L. VIALLETON. l'œuf; il reste cependant des points importants sur lesquels ces auteurs ne sont pas d'accord, par exemple le sort de la vésicule germinative ; et d'autre part, leurs recherches ont été faites à un moment où l'attention n’avait pas été encore appelée comme elle l’est aujourd’hui sur les phénomènes de maturation de l'œuf. Pour toutes ces raisons, je reviendrai rapidement sur la structure de l’œuf ovarien, en corrigeant quelques-unes des données généralement admises, qui m'ont paru inexactes, el en insistant surtout sur les transformations de la vésicule germinative et sur la constitution de l’œuf au moment de la ponte. Avant tout, j'exposerai les méthodes dont je me suis servi. Pour les œufs ovariens, leur grosseur et la présence autour d'eux d’un follicule épais et plissé rendent impossible l'étude par transparence. Il faut donc recourir aux coupes en séries faites après l’action des réactifs fixateurs. Les mêmes causes qui empêchent l'observation directe, c'est-à-dire le volume des œufs et la présence du follicule, nuisent aussi à la fixation, qu'il est difficile d'obtenir parfaite ; cependant je suis arrivé à de bons résultats avec l’acide osmique et avec la liqueur picro-sulfurique de Kleinenberg. La liqueur picro-sulfurique que l’on emploie actuellement au laboratoire du professeur Kleinenberg, et dont je me suis servi, se prépare de la façon suivante : on verse dans une solution saturée d’acide picrique 20 pour 100 d'acide sulfu- rique concentré, on filtre et l’on ajoute pour une partie du mélange filtré trois parties d’eau, puis on dissout 2 pour 100 de sel marin dans cette dernière liqueur. Après un séjour de deux heures environ dans la liqueur picro-sulfurique, les objets sont portés dans l'alcool à 70 degrés, renouvelé jusqu’à déco- loppement des Céphalopodes, de l’année 1874 à l’année 1879. En 1881, il a publié dans les Archives de biologie de Van Beneden (t. Il), ses Unter- Suchungen über die Entwickelung der Gephalopoden, dans lesquelles il résume ses anciennes recherches, en y ajoutant quelques faits nouveaux. C’est à ce dernier mémoire que je renvoie constamment, sauf indication précise du contraire. ARTICLE N° 2, DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 169 loration parfaite, puis colorés au carmin et débités en coupes. L'étude au moyen de coupes est seule possible pour les œufs revêtus de leur follicule, parce que les plis folliculaires qui pénètrent jusqu’à une certaine profondeur dans l’intérieur de l’œuf empêchent d'isoler convenablement le vitellus for- matif et de l’étaler pour l’examiner à plat; mais, lorsque les œufs ont abandonné leur follicule et sont tombés dans la poche péritonéale qui renferme l'ovaire, le vitellus formatif, rassemblé au pôle aigu de l’œuf sous la forme d’une lame bien distincte, peut être facilement isolé et examiné à plat dans toute son étendue. Ces préparations de la lame protoplasmique sont les plus instructives, voici comment on les obtient. Les œufs retirés de la poche péritonéale et de l’oviducte où ils sont empilés, sont portés dans un mélange à parties égales, fraîche- ment préparé, de liqueur de Kleinenberg et d’une solution de bichromate de potasse à 2,5 pour 100 (1). Le chorion qui en- veloppe l’œuf devient immédiatement plus ferme; à l’aide de fins ciseaux on coupe l’œuf en travers suivant l’équateur, et l’on porte l'hémisphère aigu dans la liqueur de Kleinenberg seule. Le mélange ci-dessus n’est pas employé comme fixateur, mais seulement pour durcir le chorion et pour permettre de le séparer plus facilement du vitellus; en effet, si l’on coupe l'œuf directement sous la liqueur picro-sulfurique ou sous l’eau de mer, le chorion se gonfle et adhère à la lame proto- plasmique dont il est bien difficile de le séparer ensuite sans déchirer cette dernière ; au contraire, après l’action du bichro- mate, le chorion s’enlève comme une calotte en laissant libre et intact le contenu de l’œuf. Les œufs doivent rester à peine une ou deux minutes dans le mélange picro-chromique, et ne doivent pas présenter de traces de coloration par le bichro- mate. On les place ensuite dans un cristallisoir bas contenant de la liqueur de Kleinenberg, en les faisant reposer sur leur section, de manière que la lame protoplasmique soit tournée (4) Ce mélange m’a été indiqué par mon ami le Dr R. Fusari, qui l’employait pour ses recherches sur le développement des Téléostéens faites au labora- toire du professeur Kleinenberg. 170 L. VIALLETON. en haut. Au bout d’une heure et demie on peut, à l’aide d’une spatule, détacher peu à peu la lame protoplasmique du vitellus nutritif sous-jacent, on la reçoit dans un verre plat contenant très peu d'acide picro-sulfurique où elle s'étale d’une manière parfaite. On remplace alors l’acide picro-sulfurique par de l'alcool à 70 puis à 90 degrés. Par cette méthode on obtient des préparations sans aucune déchirure. L’acide osmique et la liqueur de Flemming sont loin de présenter tous ces avan- tages; ils rendent la lame protoplasmique très friable, il est difficile de l’enlever en entier, en outre ils colorent trop forte- ment les globules vitellins qui restent attachés à sa face infé- rieure et obscurcissent la préparation. Cependant on peut les employer lorsqu'on veut faire des coupes totales de l’œuf, et ils rendent des services en permettant de contrôler les résul- tats fournis par la méthode précédente. Pour isoler le blastoderme dans les œufs pondus, on emploie exactement la même méthode que ci-dessus, à cela près qu'une fois les premiers stades de la segmentation passés, 1l n’est plus besoin de couper les œufs sous le mélange de bichromate et de liqueur picro-sulfurique, parce que le chorion se détache très facilement du germe. Il suffit alors de recevoir directe- ment les œufs dans l’acide picro-sulfurique après les avoir dépouillés de leurs enveloppes colorées. J’ai toujours employé parallèlement (à partir du moment de la chute des œufs) ces deux moyens d'étude : 1° examen à plat du vitellus formatif isolé; 2° coupes en séries, soit de la lame isolée seule, soit de l’œuf entier avec le chorion pour les rapports. Quel que soit le mode de fixation adopté, J'ai employé concurremment les trois modes de coloration sui- vants : 1° le carmin boracique à l’alcool préparé suivant la formule de P. Mayer, surtout pour la coloration d’embryons avancés; 2° l’hématoxyline de Kleinenberg, qui donne d’excel- lents résultats dans l'étude de la karyokinèse, — les figures de la division des noyaux se voient très bien après l'emploi de la liqueur picro-sulfurique ; — 3° la safranine. Je me suis servi de ce dernier mode de coloration pour contrôler les ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 171 résultats que me donnaient les deux autres pour l'étude de la division des noyaux. L’ovaire d’une Seiche examiné au moment de la reproduc- tion renferme des œufs à tous les stades de développement, les plus petits sont à peine visibles à l’œil nu; les autres, plus gros, sont revêtus de leur follicule encore lisse, qui devient réticulé dans les œufs plus avancés, enfin un certain nombre ont abandonné l'ovaire et sont tombés dans la poche périto- néale qui l’entoure. Je décrirai d’abord les plus petits. Ils consistent simple- ment en une cellule d’assez grande taille (fig. 1) munie d’un noyau, dépourvue de membrane propre, mais enveloppée d’une couche très mince de cellules aplaties qui forment le rudiment du follicule. Le protoplasma est homogène, sans granulations vitellines n1 graisseuses ; le noyau ou vésicule ger- minative, assez volumineux (950 4 de diamètre), présente une membrane très nette, el un contenu dans lequel on distingue : 1° des globules assez volumineux, sphériques, fortement colo- rés par le carmin ; 2° des grains évidemment de même nature que les globules, mais beaucoup plus petits qu'eux, et qui forment un passage entre les globules et les éléments de la troisième catégorie qui sont : 3° des granulations forte- ment colorées, un peu plus grosses que les granulations du protoplasma de l'œuf, et qui constituent une grande partie du contenu nucléaire. Les globules sont en nombre variable, en général d'autant plus nombreux qu'ils sont plus petits ; on en trouve quelquefois seulement un ou deux très gros; mais Île cas le plus général est celui que représente la figure 1. En examinant un certain nombre d'œufs, on voit que les varia- tions dans le nombre et dans la grosseur des globules sont telles qu’il est impossible d'attribuer aucune fixité à ces corps, et qu'il paraît évident qu'ils sont capables de se diviser un orand nombre de fois. Les globules et les grains, étant donnée leur coloration intense par le carmin, doivent être considérés comme représentant la substance chromatique du noyau. Une 172 L. VIALLETON. telle disposition de la chromatine a été vue dans d’autres œufs. Carnoy (1) a montré que dans le noyau des œufs du Brochet, à un stade jeune la nucléme se présente à l’état de nom- breuses sphérules de tailles diverses; les globules et les grains semblent répondre à ces sphérules; quant aux granulations, on verra par la suite qu'elles dérivent probablement des glo- bules et des grains. Après l’action des réactifs, le contenu du noyau se rassemble souvent en un amas plus fortement coloré que le protoplasma de l’œuf, et qui laisse entre la membrane du noyau et lui-même un espace vide. C’est probablement à. tout le contenu nucléaire ainsi condensé et fortement coloré que R. Lankester donne le nom de nucléole. Sa figure 14 (2), et la description qu'il donne ensuite de la disparition du nucléole sont bien d'accord avec cette hypothèse. Ussow (3) a dessiné des vésicules germinatives renfermant un certain nombre de corps sphériques qui correspondent évidemment à mes globules chez Argonauta argo, Ommastrephes todarus, Loligo vulgaris. Dans des œufs un peu plus gros (fig. 2), le follicule jusqu'alors simple et composé de cellules aplaties se com- plique; celles de ses cellules immédiatement appliquées sur le protoplasma s’arrangent les unes à côté des autres à la manière d’un épithélium, et forment le feuillet interne — feuil- let épithélial (R. Lankester), membrana granulosa (Ussow) — tandis que les cellules externes se disposent en un feuillet lamelleux — theca folliculi (Ussow). — L’œuf qui fait saillie à la surface libre de l’ovaire est rattaché à ce dernier par un pédoncule, et présente dès lors la forme d’un ovoide avec un pôle fixe (celui qui correspond au pédoncule), large et arrondi, et un pôle libre aigu. Des vaisseaux arrivent par le pédoncule, passent entre le feuillet interne et le feuillet externe; puis la membrane granuleuse jusqu'alors lisse, se fronce, et com- (1) Carnoy, la Biologie cellulaire, p. 223, fig. 80. (2) E. Ray-Lankester, The growth of the ovarian Egg.…., p. 39-40. (3) Ussow, HaGxrjenia HaXP pasBuTieMP TONOBOHOTHXB MOIIHCKOBE. Cephalopoda Guv. Moscou, 1879, fig. 4, 4, 6 dans le texte, et 2 À et 5, pl, I. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 173 mence à édifier le système de plis compliqués caractéristique de l’œuf ovarien des Céphalopodes. Pendant ce temps le volume de l’œuf s’est considérablement accru, celui de la vésicule germinative également; cette dernière a maintenant un dia- mètre double de celui qu’elle avait au stade précédemment décrit. Son contenu a subi en même temps des modifications considérables (fig. 2), le nombre des granulations s’est con- sidérablement augmenté pour répondre à l'accroissement de volume signalé, mais on ne trouve plus un seul globule, et les grains sont devenus très rares, on n’en compte plus que quelques-uns. La disparition des globules et des grains coïnci- dant avec l'augmentation du nombre des granulations, porte à penser qu'il y a entre ces deux phénomènes une corrélation, et si l’on se rappelle les formes de transition qui existent entre ces divers éléments, il parait vraisemblable que les globules se sont résolus en granulations. À la suite de ces changements, le contenu de la vésicule germinative devient plus uniforme, il se compose d’un fond de granulations fortement colorées, sur lequel se détachent quelques grains. À cause de la forte coloration des granulations, il reste encore plus coloré que le protoplasma de l’œuf (fig. 2). Mais à mesure que l’évolution de l'œuf continue, les granu- lations elles-mêmes deviennent de plus en plus fines et ne se colorent plus aussi vivement ; de sorte que finalement (fig. 3) la vésicule germinative apparaît remplie d’une masse très finement granuleuse. Cette masse a tous les caractères du protoplasma ; moins colorée que le protoplasma de l'œuf, elle renferme quelques corpuscules très colorés, mal définis, et qui semblent résulter de l’accolement de quelques-unes des granulations qu’on trouvait au stade précédent. Une telle structure n’est pas sans analogie avec celle que présentent les œufs du Brochet, auxquels j'ai déjà fait allusion; et les trans- formations de la vésicule germinative chez ce dernier animal concordent assez bien avec celles qui ont lieu chez la Seiche, en ce sens que, dans les deux cas, le contenu du noyau se compose en majeure partie, au début, de chromatine, tandis 174 L. VIALLETON. qu’à la fin c’est le protoplasma qui l’emporte de beaucoup en quantité. Garnoy admet que le protoplasma nucléaire provient du protoplasma cellulaire ; chez la Seiche, la transformation de la substance chromatique en protoplasma nucléaire me semble suffisamment prouvée par la disparition progressive de la chromatine à mesure que le noyau grandissant se remplit de protoplasma (1). La vésicule germinative reste dans cet état environ jusqu’à la déhiscence du folhcule. Ray Lankester, qui a suivi avec soin ses transformations, à signalé la disparition du nucléole, qui semble se dissoudre et se perdre dans le contenu de la vésicule germinative. Gette description concorde parfaitement avec ce que J'ai vu, si l’on admet que l’auteur anglais donne le nom de nucléole à tout l’amas de corpuscules chromatiques qui occupe le noyau au début; car, dans ce cas, la transfor- mation de ces corpuscules colorés en un protoplasma pâle et délicat aurait produit exactement l'apparence d’une disso- lution et d’une disparition du nucléole. Dès que la formation des plis du follicule est assez avancée, les cellules de la membrane granuleuse commencent à sécréter le vitellus nutritif, qui apparaît à la surface des plis comme une couche continue, puis quise concentre çà et là sous forme de globules s’empilant dans les espaces laissés libres entre les plis. Ces globules sont très réfringents, parfaitement homo- gènes : ils se colorent fortement par le carmin et par lhéma- toxyline. Pressés les uns contre les autres, ils prennent des formes très irrégulières, présentant des dépressions et des crêtes, ou bien des pointes plus ou moins allongées qui leur donnent parfois un aspect étoilé assez semblable à celui de cellules animées de mouvements amiboïdes. Le vitellus nutri- tif s’accumule au pôle fixe de l'œuf et repousse vers le pôle (1) Wielowjejski (Zoolog. Anz., 29 juin 1885) a déjà remarqué la possibilité de transformation de la chromatine en la substance pâle et peu colorable du noyau : Das echle chromatin schwindel nach und nach aus dem Kerne sich vielleicht direct in die andere, in typischen Keimbläschen vor findende und in Methylgrün nicht farbbare Substanz um wandelnd. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 175 libre le protoplasma et la vésicule germinative. Comme la fait remarquer Ussow, il ne se mélange pas au protoplasma, de sorte que, par son accroissement, 1l le presse de plus en plus contre la paroi du follicule et le réduit à une lame située au- dessous de la membrane granuleuse, au pôle aigu de l'œuf. La vésicule germinative renfermée dans le protoplasma se trouve par conséquent repoussée à la périphérie. Elle prend place dans un petit espace circulaire qui existe au pôle libre de l’œuf, et vers lequel la membrane granuleuse ne présente pas de plis. Kôlliker (1) paraît l’avoir observée en place sur des œufs durcis. Lorsque la sécrétion du vitellus nutritif est achevée et que l'œuf a atteint sa grosseur définitive, on voit apparaître au- dessous de la membrane granuleuse, entre cette dernière et l'œuf, une membrane protectrice spéciale, le chorion. Le cho- rion apparait d’abord sous la forme d’une substance hyaline qui double les plis de la granuleuse en dedans, et en suit naturellement toutes les inflexions. Il est beaucoup plus épais vers le pôle aigu de l'œuf, dans les limites de son contact avec le protoplasma. Au delà des bords de ce dernier, là où la granuleuse repose directement sur le vitellus de nutrition, il est très mince. Au sommet de l’œuf, les membranes follicu- laires offrent une disposition particulière en rapport avec la formation du micropyle. Sur la figure 3, on voit qu’en ce point la membrane lamelleuse externe s’épaissit et forme comme une lentille dont la convexité s’engage dans la granu- leuse, en la découpant sur une partie de son épaisseur. C'est en ce point que se formera ultérieurement le micropyle. Cette disposition suffit déjà pour indiquer que c’est bien vrai- ment le follicule qui sécrète la membrane protectrice et que, par conséquent, le nom de chorion donné à cette membrane par Ussow est bien choisi. Pendant les premiers temps de la formation du chorion, sa face inférieure en contact avec le (1) Külliker, Entwickelungsgeschichte der Cephalopoden, Zürich, 1844, poletmMo. 176 L. VIALLETON. vitellus formatif est découpée sur de nombreux points par des prolongements que le protoplasma envoie à travers son épais- seur. Cette disposition est due, sans doute, à l’activité propre du protoplasma, qui tend à se rapprocher des cellules follicu- laires chargées de la nutrition de l'œuf. | Kôlliker avait reconnu l'existence d’un chorion qu’il appe- lait à tort membrane vitelline. R. Lankester (1) n’a pas vu le chorion, il pensait que l’œuf tombait dans la cavité du corps sans présenter d’enveloppe, et que la membrane percée du micropyle, que l’on trouve autour des œufs pris dans l’ovi- ducte, se formait dans ce conduit. J'ai déjà dit qu'Ussow a reconnu la véritable nature du chorion. Lorsque l’œuf à subi toutes les modifications décrites c1- dessus, 1l ne va pas tarder à abandonner ses enveloppes folliculaires pour tomber dans la poche péritonéale; mais, auparavant, la vésicule germinative disparaît. On connaît déjà la structure de la vésicule germinative; au moment présent, elle offre quelques déformations qui résultent de la pression exercée sur elle, plus ou moins directement, par le vitellus nutritif; en outre, les corpuseules colorés répandus dans son intérieur sont devenus plus réguliers d'aspect et forment des petits grains chromatiques très nets. La membrane de la vési- cule germinative disparait alors sans laisser de traces; son contenu se mêle d’une façon absolument parfaite avec le pro- toplasma qui l'entoure, et on ne trouve plus dès lors, dans l’œuf, que le protoplasma et le vitellus nutritif, le noyau a entièrement disparu. Les grains chromatiques contenus dans la vésicule germinative passent dans le protoplasma, en même temps que la vésicule mêle son contenu à ce dernier, puis s’ordonnent entre eux en formant une couronne (fig. 4). C’est à ce moment que se produit la déhiscence du follicule. À ce propos, R. Lankester pense que les cellules de la mem- brane granuleuse, à la fin du développement, émigrent dans l’intérieur de l’œuf, servant ainsi de nourriture à ce dernier et (1) R. Lankester, Observ. on the develop. of the Cephalopoda, p. 38. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. TA amenant en même temps, par la destruction de la granuleuse qui résulte de cette migration, la rupture du follicule. La pré- sence du chorion s'oppose déjà à une telle absorption de la granuleuse; mais, en outre, les figures que donne Lankester pour montrer le passage des cellules dans l’œuf ne me per- suadent point. Ainsi dans sa figure 23, planche XII, les points de passage des cellules dans le vitellus sont simplement dus à ce que, en ces endroits, les plis folliculaires ont été coupés obliquement. J’ai représenté (fig. 3), un noyau d’une cellule épithéliale qui semble précisément pénétrer dans le vitellus ; mais, lorsqu'on examine les coupes qui suivent et celles qui précèdent la coupe dessinée, on voit bien que ce noyau fait partie d’un pli obliquement coupé et qu’il rentre parfaite- ment à son rang parmi les autres. En outre, les dessins de l’auteur anglais, qui représentent des cellules émigrées de la paroi dans l’intérieur du vitellus, se rapportent sans doute à des globules vitellins déformés. Je n’ai jamais observé la migration des cellules du follicule dans les œufs possédant leur système de plis complètement édifié. Quoi qu’il en soit, la déhiscence du follicule se produit, les plis s’effacent et l'œuf présente dès lors une surface lisse et unie, formée par le chorion. C’est le chorion qui maintient la forme de l’œuf, dont le contenu mou et presque fluide s'écoule en quelque sorte dès que l’on a coupé cette enveloppe. Le chorion est parfaitement transparent; 1l est souvent recouvert par places de débris épithéliaux provenant de la membrane granuleuse. Comme je l'ai déjà dit, il présente sa plus grande épaisseur au pôle aigu de l’œuf, où 1l est percé d’un canal très fin à bords parallèles, le micropyle. Le micropyle se forme au centre de l'aire circulaire laissée libre entre les plis convergents du follicule; cette aire ne se trouve pas absolument au pôle géométrique de l’œuf, mais un peu au-dessous. Le chorion est appliqué immédiatement sur le corps de l’œuf, et l’on ne trouve pas Interposée entre les deux une couche d’albumine, comme on l’a constaté chez d’autres Céphalopodes. ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 12. — ART. N° 2. 178 L. VIALLETON. Le chorion mis à part, l’œuf se compose alors du vitellus nutritif qui forme la plus grande partie de sa masse, et du vitellus formatif qui occupe l'hémisphère aigu, sous la forme d’une lame d'épaisseur inégale, assez forte sous la pointe de l'œuf, mais qui va diminuant rapidement vers l’équateur, où elle devient si mince qu’on ne peut l’apercevoir que sur les coupes traitées par l'acide osmique, qui, en faisant ressortir en noir les grains graisseux qu’elle renferme, permet de la recon- naître. En étudiant le bord de cette lame protoplasmique, on voit qu’il s'accroît d’une manière continue aux dépens du vitel- lus de nutrition, de la même façon que l’on voit se former le protoplasma aux dépens du vitellus des premières sphères de segmentation chez d’autres Mollusques. Il en résulte que l’œuf finit à un moment donné par être entièrement recouvert de protoplasma. Du côté de la face interne (vitelline) du proto- plasma, la limite entre ce dernier et le vitellus de nutrition est toujours parfaitement nette et incontestable. Jamais le proto- plasma n’envoie de prolongements dans le vitellus, jamais il n'existe entre eux de zone intermédiaire à caractères mixtes et douteux, comme cela se voit dans d’autres œufs mérobla- stiques. L’œuf de Seiche représente le plus haut type des œufs à vitellus formatif et nutritif séparés, des œufs méroblastiques. Si l’on se rappelle le mode d'apparition du vitellus nutritif qui repousse au-devant de lui le protoplasma sans se mêler à lui, on voit que la distinction entre les deux vitellus est primitive, contrairement à ce qui se passe dans d’autres œufs où elle ne s'établit qu'après la fécondation (Téléostéens). Lorsqu'on examine la lame protoplasmique à plat après l'avoir isolée du vitellus de nutrition (fig. 5), on y distingue une série de lignes sombres qui convergent vers un point, mais s'arrêtent à une certaine distance de ce dernier, et quelques-unes d’entre elles se réunissant à ce niveau par des anastomoses circonscrivent une sorte de cirque incomplète- ment fermé. Ges lignes correspondent à des épaississements en forme de crêtes basses et larges que présente le protoplasma à sa face inférieure ou vitelline. Les crêtes correspondent aux ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 179 plis des follicules, elles sont des lieux d'élection pour labsorp- tion du vitellus par le protoplasma, absorption qui s’opère de la manière suivante : un globule vitellin, recouvert par le pro- toplasma, est finalement attiré dans l’épaisseur de ce dernier; lil s’'entoure d’une vacuole claire, se décolore et se fragmente, puis ces fragments eux-mêmes disparaissent et la vacuole subsiste seule à sa place. Ces vacuoles disparaissent aussi après un certain temps, ou du moins cela est probable, car on en trouve de toutes les grandeurs, jusqu’à de très petites, ce qui tend à faire croire que leur contenu se répand peu à peu dans le protoplasma. La disposition des crêtes est la même que celle des plis lon- gitudinaux du follicule, et l'aire circulaire qu’elles entourent répond à l’aire dépourvue de plis dans laquelle se trouve le micropyle. Vers leur périphérie, ces crêtes diminuent de hau- teur et de largeur, et, après s'être quelquefois divisées, se perdent dans le protoplasma où elles forment encore parfois des réseaux assez peu nets qui semblent correspondre aux mailles du follicule. Cette disposition tend cependant peu à peu à s’effacer, le nombre des crêtes diminue et l’on voit celles qui restent disparaître progressivement. Il est probable que cette ordonnance des crêtes est commandée par l’arrangement des plis du follicule dont elle est comme un dernier reflet. La couronne de grains chromatiques que j’ai signalée plus haut se retrouve facilement, mais dans la plupart des œufs elle est devenue la plaque équatoriale d’un fuseau. Ce fuseau (fig. 6) est de petite taille, 1l est situé obliquement dans l'épaisseur de la lame protoplasmique ; il occupe presque tou- jours le bord du cirque entouré par les crêtes, et de préférence l’épaisseur d’une des crêtes qui en forment la bordure. La direction de ce fuseau par rapport au centre de convergence des crêtes est assez variable, mais en l’absence de point de repère précis, je ne puis la spécifier davantage. Ce fuseau qui provient en somme de la vésicule germinative puisqu'il se forme autour des grains chromatiques qu’elle renfermait, paraît évi- demment correspondre au fuseau qui produit les vésicules 180 L. VIALLETON. directrices, aussi je le nommerai premier fuseau de direction. Je l’ai retrouvé dans les œufs pris dans l’oviducte de diffé- rentes Seiches. Malgré mes soins, je n’ai jamais pu observer la formation des globules polaires : tous les fuseaux que j'ai examinés se trouvaient à peu près au même point d'évolution, à savoir au moment où les grains chromatiques dessinent la plaque équatoriale. Kôlliker (4) avait reconnu que la vésicule germinative a dis- paru dans les œufs après qu’ils ont abandonné leur follicule. Trente ans après, R. Lankester (2) confirmait ces données. Au contraire Ussow admit dès ses premiers travaux que la vésicule germinative persiste et est divisée en deux par le premier sillon de segmentation. Dans son dernier mémoire, après avoir signalé en note (3) que les transformations de cette vésicule pouvaient bien lui avoir échappé à l’époque où il faisait ses recherches, 1l reproduit dans le cours du texte et dans ses con- clusions son opinion ancienne. Grenacher (4), dans des œufs pondus et non segmentés, n’a pas trouvé de vésicule germina- tive. Il importe de résumer rapidement les données que nous avons acquises sur la structure de l’œuf ovarien, ce sera la fin de ce chapitre. L’œuf est au début une simple cellule pourvue de son noyau, et entourée de quelques cellules aplaties qui lui forment un rudiment de follicule. Le follicule se complique bientôt, et présente une couche interne épithéliale, et une couche externe conjonetive et lamelleuse. La couche épithé- liale se plisse suivant des méridiens et des cercles de latitude, et commence à sécréter le vitellus nutritif qui ne se mêle pas au protoplasma ovulaire, mais le repousse à la périphérie sous le pôle aigu de l’œuf avec la vésicule germinative qu’il ren- ferme. Les cellules du follicule n’émigrent pas dans l’intérieur (1) Külliker, Entwick. der Cephal., p. 10. (2) R. Lankester, Devel. of the Ceph., p. 39. (3) Ussow, Untersuchungen über die Entwik. Ceph., p. 590. (4) Grenacher, Zur. Entwick. der Ceph. (Zeitschrift für wissensch. Zool., XXIV, 1874, p. 424). ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 181 de l'œuf pour servir à sa nourriture, et fournissent simple- ment à ce dernier leur sécrétion. L’œuf s’aceroît; la vésicule germinative s’accroit en même temps et subit des modifica- tions considérables; son contenu, qui consistait principale- ment, au début, en matière chromatique à différents états de division, ne renferme plus maintenant que quelques grains chromatiques répandus dans une masse considérable de pro- toplasma finement granuleux. Lorsque les cellules folliculaires ont sécrété tout le vitellus nutritif nécessaire à l’œuf, elles fournissent à ce dernier une enveloppe protectrice munie d’un micropyle : le chorion. La vésicule germinative disparaît alors, mêlant son contenu au protoplasma de l’œuf dans lequel les grains chromatiques qu’elle renfermait, devenus libres, s’or- donnent en une couronne qui deviendra la plaque équatoriale du premier fuseau de direction. À ce moment les plis du folli- cule s’effacent et l’œuf tombe dans la cavité péritonéale. L’œuf est mûr, son vitellus formatif que l’on peut aisément isoler du vitellus nutritif (méroblastie) présente encore quel- ques traces de la disposition plissée du follicule, sous la forme de crêtes longitudinales (méridiennes) convergentes qui s’ar- rêtent un peu avant d'arriver à leur pôle de réunion, et cir- conscrivent ainsi une aire Circulaire en un point du pourtour de laquelle se trouve le premier fuseau de direction. Les œufs que l’on trouve dans l’oviducte ne présentent jamais de globules polaires. CHAPITRE II La fécondation. Lorsqu'on examine un certain nombre de pontes de Seiche, on en trouve toujours quelques-unes dont les œufs ne présen- tent encore aucune trace de segmentation. C’est là un fait connu depuis longtemps, Kôlliker l’a signalé (1) et Ussow l’a observé également (2); mais, jusqu’à présent, personne n’a (1) Entwick. der Cephal., p. 20. (2) Untersuch. ub. d. Ent., p. 574. 182 L. VIALLETON. donné de plus amples détails sur la structure de ces œufs, ni sur les phénomènes dont ils sont le siège avant le commen- cement de la segmentation. Grâce aux méthodes que J'ai employées, et aussi à l'abondance des matériaux que j'ai eus entre les mains, je puis combler cette lacune et fourmir des données précises sur cette phase du développement. Le pré- sent chapitre est consacré à l’exposition de ces données, des- quelles il résulte, pour le dire tout de suite, que le temps qui s'écoule entre le moment de la ponte et le commencement de la segmentation est employé à la conjugaison de deux noyaux en un seul, qui devient le premier noyau de segmentation, c’est-à-dire à l’accomplissement des phénomènes internes (intra-ovulaires) de la fécondation. Les œufs fraichement pondus se reconnaissent à ce que leur capsule est particulièrement lisse et brillante, assez épaisse, de la consistance d’une gelée solide, qui donne au toucher une sensation d’élasticité, et en même temps de mol- lesse spéciales ; plus tard, la substance de la capsule devient plus ferme, la capsule s’amincit, et l'œuf, au toucher, est plus dur et plus résistant. Si l’on examine le vitellus formatif de ces œufs, on voit que la lame qu’il constitue possède une structure bien différente de celle qu’elle avait dans les œufs renfermés dans l’oviducte. Les épaississements en forme de crêtes qu’elle présentait alors ont disparu, et son aspect est devenu plus uniforme. On peut la considérer comme formée de fines granulations plongées dans une substance hyaline; peu à peu, les granulations se rassemblent autour d’un point, formant un épaississement cir- culaire ou ovale, de sorte que la lame protoplasmique, con- stituée par le vitellus formatif, semble finalement composée de deux parties : une aire centrale granuleuse à peu près circulaire, assez épaisse, et une partie périphérique mince, pâle et hyaline. Il n’y a pas entre ces deux parties de limite tranchée, en ce sens que les granulations de l'aire centrale passent sans transition brusque dans la zone périphérique, mais là elles sont très rares, de sorte que le contraste entre ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 183 les deux régions est très marqué. L’aire granuleuse répond au disque germinatif, c’est elle qui sera plus tard le siège de la segmentation, et pendant toute la durée de cette dernière, elle s’accroîtra d’une manière continue par tout son pourtour aux dépens de la portion hyaline. La condensation des granu- lations protoplasmiques autour d’un point pour former l’aire granuleuse s'opère peu à peu; elle est beaucoup moins mar- quée dans les œufs fraichement pondus (fig. 7) que dans ceux qui sont sur le point de se segmenter (fig. 10). Sous quelle influence se produit ce remaniement du protoplasma, en vertu duquel il se différencie en un disque germinatif granuleux et en une portion hyaline marginale, nous le ver- rons plus loin; pour le moment, je ferai seulement remar- quer que le disque germinatif ne se trouve pas situé exacte- ment au pôle aigu de l’œuf, mais assez au-dessous dé lui (Kôlliker). Sur un point du pourtour du disque germinatif, on trouve deux petites cellules de taille et de forme différentes, qui sont les vésicules directrices ou globules polaires. Elles sont dépourvues de membrane propre isolable, mais à leur péri- phérie le protoplasma forme une très mince couche diffé- renciée. La plus grande a une forme allongée, irrégulière, elle possède deux noyaux situés aux deux extrémités de son plus grand diamètre, ce qui indique qu’elle a été le siège d’une division, laquelle toutefois est restée incomplète et limitée au noyau. La division d’une des vésicules directrices est un fait assez répandu chez les Moilusques, et il faut voir dans la dis- position décrite ci-dessus uné tendance à cette division ; mais je n’ai jamais vu chez la Seiche cette division s'effectuer réelle- ment de manière à porter à trois lé nombre total des vésicules directrices. Cependant Ussow en décrit trois chez Logo et Argonautà. La vésicule directrice binueléée est sans doute la première des deux vésicules de direction, c’est en effet celle-ci qui Se divise d'habitude. Elle manque souvent dans des pré- parations où l’autre persiste. La seconde vésicule directrice est plus petite, arrondie ou ovoïde, pourvue quelquefois de fins 184 L. VIALLETON. prolongements qui semblent être des pseudopodes (fig. 7). Elle possède un seul noyau. Dans tous les œufs que j'ai observés après la ponte, les vésicules directrices étaient déjà formées. Ussow n’a pas reconnu dans les vésicules directrices la présence d’un noyau el. les considère comme de simples sphérules protoplasmiques; 1l admet, sans plus d'explications du reste, qu’elles se forment après la fécondation (1). Le disque germinatif est formé, comme je l’ai dit, de granu- lations protoplasmiques. Ces granulations sont souvent dis- posées en files qui convergent autour du centre du disque comme des rayons, ce qui semble déjà indiquer qu’elles obéis- sent dans leur groupement à une attraction exercée au niveau du centre du disque. Dans l’épaisseur de l'aire granuleuse et particulièrement vers sa périphérie, on trouve en outre un grand nombre de vacuoles claires de grandeurs variables, dis- posées elles aussi en files radiales, et qui font place vers le centre du disque à de petites sphères brillantes (fig. 10) qui ne se colorent pas par l’hématoxyline ni par le carmin, et que l’acide osmique teint en noir foncé comme des gouttes de graisse. Les vacuoles ont été vues par Ussow, qui les a inter- prétées (assez mal à mon sens) comme des noyaux altérés pro- venant des cellules épithéliales du follicule émigrées à l’inté- rieur de l’œuf. Avec les réactifs usités aujourd’hui, qui ne permettent pas de méconnaitre un noyau, il est impossible de se méprendre sur la nature de ces vacuoles, ce sont tout simplement des espaces clairs formés autour des grains vitel- lins digérés par le protoplasma; dans quelques-unes d’entre elles (fig. 7), on voit encore des fragments de globules vitel- lins décolorés. Dans l’épaisseur du disque germinatif, on trouve deux noyaux assez semblables d'aspect, quoique de taille un peu inégale, mais qui présentent dans des œufs différents des variations assez considérables, tant dans leur volume que dans leur position réciproque. Les figures 7, 8 et 9 montrent (1) Untersuchungen über d. Entw., p. 590. ARTICLE N° 2. ._ DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 185 quelques dispositions typiques de ces noyaux. Dans le cas représenté (fig. 7), la concentration du protoplasma granuleux n’est pas encore poussée très avant, et le disque germinatif, bien que déjà indiqué, n’est ni aussi épais ni aussi large qu'il le sera plus tard. On observe à son bord supérieur une seule vésicule directrice dont le corps, en forme de ballon, émet par son extrémité arrondie deux fils très fins qui sont probable- ment des pseudopodes. Un peu au-dessous d’elle, on trouve un noyau arrondi de petite taille (12 x) dépourvu de toute autre membrane qu'une mince couche de chromatine (1), et dont le contenu clair renferme des grains colorés à peu près tous de même grosseur. Il n’y a pas de nueléole. À une assez grande distance du premier noyau, on en trouve un second un peu plus gros (14 x), mais possédant d’ailleurs exactement les mêmes caractères que le premier. Dans un autre œuf (fig. 9), l'aire granuleuse est plus marquée, et dans son épaisseur, on trouve deux noyaux sem- blables aux précédents, mais plus grands et plus rapprochés l’un de l’autre. Comme dans le cas précédent, le plus petit (20 y) est le plus rapproché de la vésicule directrice, qui dans ce cas encore est unique. Autour du plus gros (22 y), on voit une couronne de rayons protoplasmiques. Ce noyau parait être le centre du groupement du protoplasma granuleux, qui aboutit à la formation de l’aire granuleuse, car le système de rayons qui l'entoure se confond absolument avec celui que présente l’ensemble des granulations de cette aire. Les deux noyaux ne sont pas situés à une même hauteur dans l’épaisseur du disque germinatif, le plus petit est placé un peu plus superficiellement que le plus gros; aussi, lors du contact, le plus petit passe un peu au-dessus du plus gros et se superpose à lui. C’est ce que montre la figure 8, qui repré- sente deux noyaux superposés et dessinés à part, sous un (1) On verra plus loin, à propos de la genèse des noyaux de segmentation, dont la structure se rapproche beaucoup de celle des pronuclei, sur quoi je me fonde pour admettre la nature chromatique de la très fine pellicule qui limite ces derniers. 186 L. VIALLETON. plus fort grossissement, pour montrer quelques détails de leur structure. On voit qu'ils renferment quelques filaments de chromatine avec des grains de la même substance, qui for- ment un réseau peu compliqué, aux points nodaux duquel on trouve quelques sphérules de chromatine assez volumi- neuses. Faut-il considérer ces dernières comme des nucléoles? Je ne le crois pas, parce que je ne les ai rencontrées qu’un très petit nombre de fois, et que leurs dimensions pas plus que leur présence n’ont aucune fixité. Ge sont donc des dis- positions en quelque sorte accidentelles, et de peu d’impor- tance. Après que ces deux noyaux sont restés au contact pendant un certain temps, leur paroi disparait sur toute leur surface de contact, leur contenu se mêle et l’on ne voit plus à leur place qu’un seul noyau dont la structure est la même que celle des noyaux qui lui ont donné naissance (fig. 10). Ussow a observé ce noyau (1), mais il l’a pris pour la vésicule germina- tive qui aurait persisté. Bien qu'il soit inutile de réfuter lon- guement cette interprétalion après la série d'observations qui précèdent, il est bon toutefois de faire remarquer que la vési- cule germinative se distingue du noyau en question par de nombreux caractères, entre autres par sa taille qui est relati- vement énorme à côté de celle de ce dernier. L'examen rapide que nous venons de faire, montre que deux noyaux d’abord assez petits et placés à une assez grande dis- tance l’un de l’autre dans le disque germinatif ont marché l’un au-devant de l’autre, grossissant pendant leur trajet, se sont joints, et finalement se sont fusionnés eu un seul. Si je dis par anticipation que ce dernier noyau est le premier noyau de segmentation, il est évident que nous avons eu sous les yeux les phénomènes de la fécondation, et que les deux noyaux trouvés dans le disque germinatif sont le pronucleus imäle et le pronucleus femelle. Leur présence dans des œufs fraîche- (1) Untersuch. über d. Entwick., p. 587 et suivantes, et HaGrpoyenis, etc., pl'H, fig: 12. ARTICLE N° 2, DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 197 ment pondus et non encore segmentés, leur marche à la ren contre l’un de l’autre, et leur fusion en un seul noyau qui est le premier noyau de segmentation ne peuvent laisser de doute sur leur signification. Je reviendrai plus longuement sur eux, mais auparavant je veux faire remarquer dès maintenant que ce sont eux précisément qui semblent grouper autour d'eux les granulations protoplasmiques qui forment le disque germina- tif. En effet, peu marqué dans les cas où les pronuclei sont éloignés l’un de l’autre, ce disque devient de plus en plus distinct à mesure qu'ils se rapprochent, et il est toujours par- faitement constitué lorsque le premier noyau de segmentation est formé. Il semble donc que les pronuclei exercent une influence considérable sur le groupement du protoplasma pendant leur trajet à travers ce dernier, et les rayons protoplasmiques qui les entourent (bien que plus marqués autour de l’un des deux, ces rayons ne sont pas l’apanage exclusif d’un seul des pronuclei), — seraient une des marques visibles, la seule peut- être dans les œufs holoblastiques, de cette influence. Les re- maniements que la fécondation opère dans la lame protoplas- nique de l’œuf de la Seiche, peuvent se rapprocher de l’ac- tion qu’elle exerce dans l’œuf de quelques Téléostéens, par exemple, où elle détermine la séparation du vitellus formatif d’avec le vitellus nutritif, avec lequel il était jusqu'alors inti- mement mêlé. Comme, chez les Céphalopodes, la séparation entre les deux vitellus existe dès le principe, la fécondation se borne chez eux à spécialiser pour ainsi dire dans le proto- plasma là partie qui sera Le siège de la segmentation, le disque germinatif. Pour étudier de plus près la marche des pronuclei, j'ai représenté d’uné manière schématique leurs positions rela- tives, éhtre eux et par rapport aux globules polaires, dans un certain nombre de cas. Ces schémas reproduisent des rapports parfaitement exacts. En effet, ayant pris les mesures micro- métriques du diamètre de chaque pronucleus, de la distance où se trouve chacun d’eux des vésicules directrices et de l’in- 188 L. VIALLETON. tervalle qui les sépare l’un de l’autre, J'ai reporté ces mesures sur le papier en gardant rigoureusement leurs proportions, et j'ai établi ainsi des figures parfaitement exactes, qui relracent sous une grande amplitude les faits observés. Je dois avertir seulement que les pronuclei et les vésicules directrices sont représentés ici sur une même ligne droite, ce qui est rare- ment le cas dans la nature. Ces re montrent mieux que de longues descriptions la marche des pronuclei et ils per- mettent d'en étudier les détails. Vésicules directrices. 1 2 3 4 5 6 7 8 £) 10 11 12 13 Distance du pronucleus.-F18p- proximal a ces dernières: : D Pronucleus proximal ” Distance entreles deux. |" pronuclei On voit tout d’abord que, quelle que soit la grandeur des pronuclei, ils présentent toujours entre eux la même différence de taille (soit 2 y environ la différence de leur diamètre), ce qui indique qu’ils s’accroissent proportionnellement à leur diamètre primitif. Le plus petit est d'habitude le plus rap- proché des globules polaires ; pour cette raison, Je l’appelle- rai pronucleus proximal, réservant au plus gros qui est plus éloigné des globules polaires, le nom de pronucleus distal. Dans le plus grand nombre de cas on observe la disposition que je viens de signaler ; cependant, deux fois, J'ai vu le plus gros pronucleus être le plus rapproché des vésicules direc- trices. Si l’on cherche la règle qui préside à l’accroissement des pronuclei, on voit qu'ils sont d'autant plus grands, toutes choses égales d’ailleurs, que le proximal est plus éloigné des globules polaires. Ainsi les pronuclei les plus petits se ren- contrent dans les cas représentés dans les schémas 1 et 2, où la distance qui sépare le plus petit pronucleus des globules polaires est réduite à son minimum, soit 16 et 30 y. On peut ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 189 donc supposer que le point de départ du pronucleus proximal est assez voisin des globules polaires, car il est clair, d'autre part, que d’une manière générale l'accroissement des pronu- elei augmente avec le chemin qu'ils parcourent. Par consé- quent, on peut admettre que les deux pronuclei partent de deux points assez distants l’un de l’autre, dont l’un est situé au voisinage des globules polaires, et l’autre assez loin de ces derniers, mais tous les deux étant du même côté des vési- cules directrices. Pendant la marche des pronueclei leur dia- mètre s’accroit ; lorsqu'ils sont voisins, le plus petit peut avoir un diamètre de 18 à 20 , le plus grand de 20 à 29 &. Leur rencontre el leur conjugaison ont lieu à une distance des vési- cules directrices assez variable, dont on peut fixer la moyenne à 120 y environ. Si l’on compare les cas où les pronuclei sont les plus distants, avec ceux où 1ls sont accolés ou fusion- nés, on voit que la rencontre a lieu à une distance des vési- cules directrices plus grande que la moitié de celle qui sépare de ces dernières le pronucleus distal : par conséquent, que le pronucleus proximal, que l’on peut considérer au début comme très voisin des vésicules directrices, a parcouru la plus grande partie du chemin pour aller sé fusionner avec le distal. Cette règle paraît être constante, du moins Je n’ai pas observé un seul cas qui lui soit contraire; et elle est intéressante à signa- ler, parce qu’elle semble montrer que dans la marche des deux pronuclei tout se passe comme si ces deux corps étaient attirés l’un vers l’autre, suivant les lois de l’attraction uni- verselle (1). S'il est facile de distinguer les pronuclei entre eux, l’un étant constamment plus petit et voisin des globules polaires, l’autre plus gros et éloigné de ces derniers, peut-on main- (1) Je ne veux pas dire que lattraction universelle soit la cause première de la marche des pronuclei à la rencontre l’un de l’autre; cette cause doit résider dans leur nature même, puisque l’on sait que les pronuclei, sexuelle- ment différents, s’attirent seuls, tandis que ceux de même nature se repoussent (Fol) ; mais le mouvement de conjugaison une fois commencé, sa marche paraît réglée par les lois de l’attraction universelle. 190 L. VEALLETON. tenant dire lequel des deux est le pronucleus mâle, lequel est le pronueleus femelle? N'ayant pas assisté à la formation des pronuelei, il m'est impossible de répondre à cette question. J'avais pensé tout d’abord (1) que le petit pronucleus, étant assez voisin des globules polaires et, par suite, du micropyle, point d'entrée des spermatozoïdes, pouvait être le pronucleus mâle. Mais, comme il m’a été impossible de fixer d’une ma- nière précise la distance du micropyle aux vésicules directri- ces, — le chorion qui porte le micropyle ayant dû être enlevé dans les préparations — je préfère laisser la question non résolue, J’ai dit plus haut que les deux pronuclei et les vésicules directrices ne se trouvaient pas toujours sur une même ligne droite. En effet, dans un certain nombre de cas, une ligne menée par ces deux noyaux passe un peu à droite ou un peu à gauche des vésicules directrices. C’est une observation extrè- mement facile à répéter, et qui ne laisse pas d'incertitude. La ligne qui joint les centres des deux pronuclei fait un très petit angle (20 degrés au plus) avec une ligne qui passe par les vési- cules directrices et le centre du disque germinatif. Dans les figures 7 et 9, la vésicule directrice coïncide presque avec la direction des pronuclei; toutefois, on voit que pour la figure 7 la vésicule se trouve rejetée un peu à gauche, et dans d’autres - cas cela est bien plus marqué. J’ai noté dans trente-quatre œufs que les vésicules directrices se trouvaient quinze fois sur la ligne des deux pronuclei, douze fois étaient situées à droite de cette ligne et sept fois à gauche. Ces chiffres n’ont d’autre but que de montrer que mes observations reposent sur un nombre de faits suffisant pour avoir quelque valeur, et comme on le verra dans la suite, il était d’une grande importance de préciser les rapports que je viens de signaler, rapports qui, chez la Seiche, peuvent s’observer plus facilement peut-être que partout ailleurs, à cause de la disposition du vitellus for- matif en une lame mince, qui fait que les phénomènes de la (1) Développ. de la Seiche (Zoolog. Anzeig., n° 256, 1887). ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 191 conjugaison se passent pour ainsi dire sur un même plan et sur une surface relativement très étendue. Il est possible d'aborder maintenant une question encore assez mal connue : le mode de fécondation de la Seiche. Ce que je vais dire s'applique à la Seiche, au Calmar, et probable- ment aussi à tous les Céphalopodes qui placent leurs sperma- tophores sur la membrane buccale des femelles, mais à ceux- là seuls. Le mode opératoire de la fécondation, je ne dis pas la fécondation en elle-même, est en effet assez divers chez les Céphalopodes, et c’est pour avoir voulu généraliser à tous ces animaux les résultats recueillis pour quelques-uns d’entre eux que l’on a commis des erreurs. D’après l’état des œufs qui, pris dans l’oviducte, présentent à peine les premiers phénomènes de la maturation, et ne ren- ferment jamais les pronuclei que l’on trouve au contraire tou- jours après la ponte, on peut affirmer hardiment que la fécon- dation n’est pas interne. Où et à quel moment se fait-elle donc ? On sait que les Seiches (1), pour pondre, lancent par leur entonnoir leurs œufs revêtus seulement de leur chorion, puis les retiennent quelque temps entre leurs bras ventraux, et avec l’aide de ces derniers et de leur membrane buccale, les enroulent dans la lame élastique qui constitue leur enveloppe, et les fixent aux corps submergés. On sait aussi depuis long- temps que la membrane buccale de la femelle porte, après l’accouplement, un certain nombre de spermatophores qui y sont déposés par le mâle. Cela avait déjà fait penser à quel- ques auteurs que la fécondation avait lieu au moment où les œufs viennent en contact avec la membrane buccale. Depuis, j'ai moi-même décrit 1l y a trois ans (2), dans la membrane buccale des Seiches et des Calmars, une disposition qui donnait à cette hypothèse une nouvelle force. Il existe, en effet, chez la Seiche, dans l’axe de chacun des lobes ventraux de la mem- brane buccale, une sorte de poche racémeuse allongée, qui (1) P. Fischer, Manuel de Conchyliologie, p. 70. (2) Sur la fecondation chez les Céphalopodes (Comptes rendus de l'Acad. des Sciences, septembre 1885). 199 L. VIALLETON. débouche au sommet du lobe et qui, au moment de la repro- duction, est constamment remplie de spermatozoïdes venus des spermatophores déposés sur la membrane buccale, et qu’elle a collectés, pour les tenir en réserve. Ces organes sont à n’en pas douter des poches copulatrices, et ils assurent en quelque sorte le rôle de la membrane buccale dans la fécon- dation. Mes recherches actuelles, en montrant que la fécon- dation (conjugaison des pronuelei) n’a lieu qu’après la ponte, et ne se rencontre Jamais dans les œufs encore renfermés dans la poche ovarienne ei dans l’oviducte, viennent à l'appui de l'hypothèse que les dispositions anatomiques avaient fait for- muler. On peut dire, par conséquent, que chez la Seiche l’im- prégnation des œufs se fait par le moyen des poches copula- trices de la membrane buccale, au moment où l’œuf est saisi par les lobes de cette membrane pour être revêtu de ses enve- loppes et fixé à son support. La conjugaison des noyaux mâle et femelle est accomplie peu d'heures après la ponte. Il n’est pas possible de fixer d’une manière précise le temps employé à la conjugaison des pronuclei. J’ai trouvé ces der- niers dans des œufs qui m'’étaient apportés le matin par les pêcheurs, et qui avaient été très probablement pondus pendant la nuit, ou tout au moins quelques heures avant le moment où ils venaient entre mes mains (1). Kôlliker, qui avait parfaitement observé la disparition de la vésicule germinative dans les œufs renfermés dans la cavité du corps et qui pensail que cette disparition coïncidait avec la fécondation, croyait que chez la Seiche les œufs étaient fécondés dans l’intérieur du corps, lors de la rupture du folli- cule, par des spermatozoïdes venus des spermatophores placés par le mâle dans la cavité palléale de la femelle, et qui au- (1) J'ai eu un grand nombre de poutes récentes par un pêcheur qui, occupé à prendre des Seiches en se servant d’une femelle captive, explorait avec atten- tion le long des quais les plantes submergées auxquelles sont attachés les œufs, et ne manquait pas de voir une ponte pour ainsi dire dès qu’elle était déposée. Les œufs se trouvent en plus grande abondance le long du côté est du port, depuis la lanterne de San-Salvatore jusqu’à l’embarcadère de Reggio. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 193 raient gagné la cavité du sac ovarien par les conduits génitaux et par les conduits aquifères. Un tel mode de fécondation peut être celui des Octopodes et des Décapodes qui placent les spermatophores dans la cavité palléale de la femelle, mais il ne se rencontre pas chez la Seiche. Ussow, ayant observé des œufs segmentés dans l’oviduete de l’Argonaute, admet que chez tous les Céphalopodes la fécondation est interne (Loc. cit., p. 574) et qu'elle a lieu au moment où l’œuf abandonnant son follicule tombe dans la cavité du corps (4bid., p. 586). Mais, comme il a observé que chez un grand nombre de Céphalopodes y compris la Seiche, la segmentation ne commence qu'assez longtemps après la ponte, il imagine que chez ces derniers 1l s’écoule un certain temps entre la fécondation et la segmentation, ce qui n’aurait pas lieu chez l’Argonaute. Il n’est pas besoin de recourir à une telle explication. Si chez l’Argonaute la segmentation est déjà commencée dans l’oviducte, c’est que la fécondation est interne ; si elle n’est pas encore commencée chez la Seiche, c’est que la fécondation est externe. Mais dans les deux cas le temps qui s'écoule entre l’imprégnation et le commencement de la segmentation peut être le même. Ussow, comme Kôl- liker, a généralisé à tous les Céphalopodes un mode de fécon- dation qui n'appartient qu'à quelques-uns d’entre eux. Fol (1) a trouvé chez la Sépiole, dans des œufs fraichement pondus, un certain nombre de spermatozoïdes morts, rassem- blés autour du micropyle ou même engagés dans ce canal. Cette observation est plutôt en faveur d’une fécondation externe. Chez la Sépiole les spermatophores sont disposés autour de l’orifice de l’oviducte dans la cavité palléale, et il est probable que la fécondation se fait au moment même de l'expulsion des œufs. Cependant il n’est pas impossible que quelques spermatozoïdes pénètrent dans l’intérieur du corps par l’oviducte et y fécondent les œufs. En somme la fécondation est interne chez les Octopodes (1) Fol, Recherches sur la fécondation, p. 248. ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 13. — ART. N° 2, 194 L. VIALLETON. (Ussow) ; elle peut encore être interne chez les Décapodes qui placent leurs spermatophores dans la cavité palléale de la femelle; elle est externe et se fait au moyen des poches copula- trices de la membrane buccale chez la Seiche et chez les Cépha- lopodes qui placent leurs spermatophores sur la membrane buccale des femelles. Résumé.—L'œufabandonne|loviduete avant d’être fécondé. Il est expulsé par l’entonnoir, saisi par les bras ventraux et la membrane buccale, arrosé de sperme par les poches copulatrices que renferme cette dernière ; puis il est enveloppé dans sa capsule et fixé aux corps submergés. La formation des globules polaires a lieu sans doute au moment où l’œuf est expulsé (le premier fuseau de direction existe dans les œufs renfermés dans l’oviducte). Dans les œufs les plus fraîchement pondus que j'ai observés, les globules polaires étaient toujours parfaitement formés. Ces œufs renfermaient toujours deux petits noyaux (pronu- cleus mäle et pronucleus femelle), en marche l’un vers l’autre, en voie de conjugaison ou déjà conjugués. Les deux pronuclei ont une structure identique, ils ne possèdent pas de mem- brane propre isolable, mais une très fine pellicule de chroma- tine ; leur contenu clair est semé de grains chromatiques nom- breux et de petite taille, rarement disposés en réseau bien net. Leurs diamètres sont différents. Le plus petit est toujours le plus rapproché des vésicules directrices, le plus volumineux est plus éloigné de ces der- nières. D'abord de petite taille lorsqu'ils sont éloignés l’un de l’autre, les pronucler grossissent au fur et à mesure qu'ils se rapprochent; mais leur accroissement est proportionnel à leur volume primitif, de sorte qu’ils gardent toujours la même différence de grandeur. Les deux pronuclei marchent à la rencontre l’un de l’autre ét se fusionnent en formant un noyau, le prenner noyau de segmentation. Pendant la marche des pronuclei à travers le vitellus for- ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 195 matif, les granulalions protoplasmiques que renferme ce der- mer, se groupent autour des pronuelei en formant un disque assez épais, le disque germinatif. À sa périphérie le disque germinatif passe dans le restant du vitellus formatif, qui con- stitue une lame très mince, hyaline, laquelle s’étend assez loin sur le vitellus nutritif et se confond peu à peu avec ce dernier. Les globules polaires sont situés sur le bord du disque ger- minatif, ils sont au nombre de deux, l’un d’eux possède deux noyaux. Le premier noyau de segmentation est situé à peu près, mais non pas exactement, au centre du disque germi- natif. Une ligne menée par les centres des deux pronuclei, et pro- longée Jusque vers le bord du disque germinatif, rencontre rarement les vésicules directrices, mais passe souvent un peu à droite ou un peu à gauche de ces dernières. CHAPITRE IT La segmentation. D’après Ussow, la segmentation commence, dans l’œuf de la Seiche, de cinq à huit heures après la ponte. N'ayant pas moi-même observé le moment de la ponte, je ne sais si ces données sont rigoureusement exactes; en tous cas elles sont vraisemblables : attendu que la conjugaison des pronuclei et la formation du premier noyau de segmentation demandent, comme on l’a vu, un certain nombre d'heures, et que la conju- gaison des pronuelei ne commence qu'après la ponte. On peut donc admettre que la segmentation ne commence jamais moins de quelques heures après la ponte, sans fixer d’une manière plus précise ce nombre d'heures. Au point de vue pratique, il est certain qu’il est extrèmement commun de rencontrer des œufs non segmentés, Kôlliker le premier en a observé beau- coup pendant ses recherches. Depuis Kôlliker, Ussow est le seul qui ait donné une des- cription complète de la segmentation. Les autres naturalistes & 196 L. VIALLETON. qui se sont occupés de ce sujet n’ont décrit convenablement que quelques stades, les plus remarquables, et ont laissé sub- sister de nombreuses lacunes. Mais la description d’Ussow n’est pas elle-même à l’abri de toute critique; tout d’abord elle ne parait pas pouvoir s'appliquer à la Seiche, ensuite 1l est certain, comme on le verra par la suite, qu’après les pre- miers stades la marche de la segmentation a été établie d’une manière arbitraire. Enfin les comparaisons que l’auteur semble vouloir faire entre la segmentation des Céphalopodes et celle des autres Mollusques me paraissent peu correctes. Pour toutes ces raisons, il n'a semblé utile de reprendre entière- ment l'étude de ce point important du développement. J’ai pu le faire avec d'autant plus de facilité que mes matériaux étaient très abondants, et que la liqueur de Kleinenberg que j'employais comme agent fixateur met admirablement en lumière les phénomènes de la division des noyaux, qui m'ont été d’un grand secours pour suivre la marche de la segmen- tation, en me permettant de retrouver aisément les descen- dants d’une même cellule, et de préciser ainsi le rôle de chaque cellule dans la segmentation. Le premier sillon de segmentation divise le disque germina- tif en deux parties, lesquelles se divisent à leur tour et en forment quatre, et celte bipartition se continue régulièrement pendant assez longtemps. Lorsque les parties en lesquelles le serme est ainsi divisé atteignent un certain nombre, elles ne se divisent plus toutes simultanément, mais les unes com- mencent et achèvent leur division avant les autres. En tous cas la segmentalion ne recommence jamais, dans un élément d’un blastoderme, avant qu’elle ait porté sur tous les éléments de ce blastoderme, présents au moment où les premières divi- sions se sont montrées. Chaque fois que la segmentation se sera effectuée, d’une manière simullanée (premiers stades) ou d’une manière progressive (stades ultérieurs), sur toute l'étendue d’un blastoderme, je dirai qu’un stade de la seg- mentation est accompli. Ainsi le premier stade est celui où le germe se divise en deux; au deuxième stade le germe se divise ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 197 en quatre, au troisième en huit et ainsi de suite. Ge mode de distinguer les stades n’a pas été admis par tout le monde; ainsi Ussow (1) compte comme stades véritables, des dispo- sitions évidemment transitoires, son stade FI établi pour des blastodermes divisés en six parties est pour moi une phase intermédiaire entre les stades IT et HT; j'en dirai autant de son stade X, etc., etc. Mais ces stades intermédiaires, pré- cisément parce qu'ils sont produits par l’action de la segmen- tation sur quelques-unes seulement des parties du blasto- derme, ne peuvent pas être légitimement considérés comme des stades de la segmentation : ce sont tout au plus des étapes entre deux stades successifs. Je suivrai done dans ma description les stades d’après la définition que je viens d'en donner et qui paraîtra encore plus rationnelle et plus légitime dans la suite. Premier stade. — Après la conjugaison des pronuclei, le disque germinatif est de forme ronde ou ovale, et le premier noyau de segmentation occupe dans son étendue une position irès légèrement excentrique (fig. 10). Autour de ce noyau, les granulations protoplasmiques sont rangées en files rayon- nantes. Lorsque la segmentation va commencer, aux deux extrémités d’un diamètre du noyau, qui est précisément parallèle au grand axe du disque germinatif lorsque ce der- nier à une forme ovale, on voit apparaitre des rayons proto- plasmiques bien marqués. Puis les points où ces rayons con- vergent s’éloignent l’un de l’autre, et il se forme une sorte d’ovoïde clair, au milieu duquel se trouve le noyau un peu déformé, mais encore pourvu de sa membrane chroma- tique. La figure 23, montre quelque chose de tout à fait com- parable à l’aspect que présente alors le premier noyau de segmentation. Un peu plus tard l’ovoïde nucléaire s’est trans- formé en un fuseau à l’équateur duquel la matière chroma- tique du noyau forme un disque, et qui présente à chacune de ses pointes un aster protoplasmique. Bientôt la plaque équa- (1) Unters. über d. Entiv. (Tableau de la segmentation, p. 606). 198 L. VIALLETON. toriale du fuseau se divise en deux zones qni se dirigent cha- cune vers une des pointes du fuseau, les noyaux fils se forment par un procédé que j’exposerai plus loin, et il apparaît dans le protoplasma une ligne claire coïncidant avec le plan équa- torial du fuseau, et qui indique la place du premier sillon de segmentation. Lorsque les deux noyaux nouvellement formés ont atteint à peu près leur taille et leur place définitives, on voit à la place de la ligne claire ci-dessus, un sillon qui divise le disque germinatif en deux parties égales (fig. 12). Dans toute la portion centrale du disque, les deux lèvres de ce sillon sont étroitement accolées l’une à l’autre, de sorte qu'il forme une incisure linéaire ; mais aux deux extrémités les deux lèvres s’écartent, et le sillon se continue comme une large souttière sur une partie de la zone périphérique hyaline. La for- mation du sillon est due à des modifications du protoplasma, qui se traduisent par l’apparition de la ligne claire dont j'ai parlé, avant celle du sillon lui-même. Après que ce dernier est formé, chaque segment estilimité du côté du sillon, par un trait sombre très fin doublé en dedans d’une couche hyaline, formant une sorte d’écorce ; cette couche claire est une diffé- renciation externe du protoplasma, un ectoplasma qui revêt la périphérie des sphères de segmentation, lesquelles ne pos- sèdent jamais de membrane propre. Le premier sillon n’en- tame toute l’épaisseur du protoplasma que dans l’étendue du disque granuleux, au delà de ce dernier il se continue comme une gouttière, de sorte que les deux segments sont séparés l’un de l’autre seulement dans leur portion centrale granuleuse, dans laquelle est situé leur noyau, et sont conti- nus par leur périphérie avec le reste du vitellus formatif et entre eux. Comme la segmentation n’agit efficacement que sur la partie épaissie, granuleuse du vitellus formatif, c'est-à- dire sur le disque germinatif,, on peut donner comme limite périphérique aux segments le bord de ce disque ; mais 1] faut se souvenir que cette limite est variable et recule sans cesse par l'apport de nouvelle substance granuleuse, et qu'il y a continuité parfaite entre l’aire granuleuse et la zone hyaline. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 199 Chacun des deux segments a la forme d’un demi-cercle ou d'un ovale allongé dans le sens du premier sillon. Le noyau en occupe non pas le centre même, mais un point situé un peu au-dessous de ce centre, et en dedans de lui, c’est-à-dire plus rapproché du premier sillon. Cette position du noyau a une importance qui ressortira lorsque je parlerai plus tard des phénomènes intimes de la segmentation, aussi je l’ai contrôlée avec soin et, en prenant des mesures micrométriques, je l’ai toujours vérifiée. À l’état de repos les noyaux présentent une forme arrondie, ils n’ont pas d'autre membrane d’enveloppe qu’une fine couche de chromatine. Leur contenu, clair, est semé de nombreux grains de grosseur variable, quelquefois il renferme un ou deux grains chromatiques plus volumineux, mais jamais de véritable nucléole, ainsi que l’a déjà dit Ussow. Cette absence de nucléole dans les noyaux de segmentation ne se rencontre pas seulement chez les Céphalopodes, mais elle a été vue aussi ailleurs. Pour terminer ce qui a trait au premier stade, je ferai remarquer que le premier sillon présente avec les vésicules directrices exactement les mêmes rapports que la ligne d'union des deux pronuclei présentait avec ces dernières. En effet comme on le voit figures 12, 15 et figure 16, les vési- cules directrices se trouvent un peu en dehors du premier sillon, tantôt à droite (fig. 13, 16), tantôt à gauche (fig. 19), ou bien elles sont placées sur le trajet même de ce sillon. J'ai comparé trente préparations présentant les pronuelei en voie de conjugaison, avec vingt préparations de blasto- dermes à deux et à quatre segments, présentant encore les vésicules directrices, et, dans tous les cas, les relations des vésicules directrices avec le premier sillon de segmentation correspondaient parfaitement avec celles que ces vésicules montraient avec la direction des pronuclei. On peut donc dire que la direction du premier sillon de segmentation coïncide avec la direction des pronuclei marchant à la rencontre l’un de l’autre. Il y a peu de temps, Wilh. Roux (Beiträge zur Entiwickelungs mecanik des Embryo. in Archiv. für Mikrosc., 200 L. VIALLETON. 1887) à démontré que, chez la Grenouille, le premier sillon de segmentation coïncide avec la ligne de copulation des pro- nucleï. La Seiche présente un cas très net où le premier sillon de segmentation ne passe pas toujours par les globules polaires, et même où il semble assez indépendant de ces derniers, car ses relations avec eux sonttrès variables. J’indiquerai en même temps que les globules polaires n’occupent pas le pôle de l’œuf en voie de segmentation. En effet ils se trouvent assez éloignés du milieu du premier sillon, qui sera le point de con- vergence des divers sillons méridiens, et par conséquent le pôle de segmentation. En un mot chez la Seiche les globules polaires ne sont ni polaires ni directeurs ; je leur ai conservé ces noms parce qu’ils sont usités partout. Deuxième stade. — En examinant un blastoderme à deuxseg- ments sur le point de subir une nouvelle segmentation, tel que celui représenté figure 13, on voit que les fuseaux formés par les deux noyaux sont obliques par rapport au premier sillon, la pointe supérieure de chaque fuseau étant plus éloignée de ce sillon que ne l’est la pointe inférieure. Il en résulte, une fois la division achevée, que les seconds sillons de segmen- . lation, qui passent par les plans équatoriaux de ces fuseaux, sont très légèrement inclinés sur le premier sillon, et déter- minent ainsi la formation de quatre segments inégaux, deux plus grands et deux plus petits. De chaque côté du premier sillon il y à un grand et un petit segment, de sorte que le blastoderme est symétrique par rapport à un axe qui est préci- sément le premier sillon de segmentation. On peut rechercher les relations qu’il y a entre les axes de l’œuf et l’axe du blastoderme, et l’on voit que ces relations sont extrêmement variables, et indiquent que la segmentation est absolument indépendante des axes de l’œuf. On sait depuis Kôlliker que le disque germinatif est situé non tout à fait à la pointe de l’œuf, mais sur le côté, assez au- dessous de cette pointe. Le premier sillon de segmentation, c’est-à-dire l’axe du blastoderme, est en général dirigé dans ARTICLE N° 2. Dre DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 201 le sens d’un méridien de l’œuf; cependant il coincide rare- ment avec un méridien, bien plus souventil est dirigé plus où moins obliquement par rapport à un méridien, et même 1l peut être situé sur un cerele de latitude, c’est-à-dire transversale- ment par rapport au grand axe de l’œuf. En raison de cette indépendance entre l’axe de l’œuf et celui du blastoderme, on peut considérer ce dernier isolément et lui donner une orien- tation qui, bien entendu, ne s'applique qu’à lui seul, et n’a pas de rapport avec les axes de l’œuf. Je désignerai l’axe du blastoderme par les lettres « à’, et je le considérerai comme dirigé de haut en bas, les vésicules directrices se trouvant placées en haut. Par conséquent les grands segments occupent la partie que l’on peut appeler antérieure ou supérieure, les petits segments se trouvent à la partie postérieure ou infé- rieure. L’étendue du disque germinatif s’est accrue, une nouvelle quantité de substance granuleuse est venue se grouper autour de celle qui existait déjà, de sorte que les vésicules directrices qui, au premier stade, occupaient la périphérie du disque germinatif, sont maintenant reportées assez en avant dans ce dernier. En même temps, les sillons se sont allongés de ma- nière à diviser toujours toute l'étendue du disque granuleux, au delà duquel ils se prolongent dans la zone périphérique sous la forme d’une gouttière, ou d’un sillon large et peu pro- fond. Les noyaux occupent dans les segments une disposition qui se déduit de la direction des fuseaux qui les ont précédés, c’est-à-dire que ceux des segments supérieurs sont plus éloi- gnés du premier sillon que ceux des segments inférieurs ; en d’autres termes, ils occupent les sommets d’un trapèze dont la grande base est tournée en haut. La figure 16, dispense d’ailleurs d’une plus longue description. Troisième stade. — Au troisième stade, chacun des seg- ments supérieurs est partagé en deux partes presque égales par un sillon y qui tombe obliquement sur le second sillon, assez loin du point où ce dernier coupe l’axe du blastoderme ; chacun des segments inférieurs est, au contraire, divisé d’une 202 L. VIALLETON. manière très inégale par un sillon y parallèle à l’axe du blasto- derme et assez rapproché de lur. À la suite de ces divisions, le blastoderme prend un aspect très remarquable : ilse compose de six segments supérieurs et latéraux triangulaires, larges, presque égaux entre eux, et de deux segments inférieurs étroits, rectangulaires (fig. 17). La division des segments supérieurs d’un blastoderme à quatre segments commence un peu avant celle des segments inférieurs, mais la diffé- rence est si minime que l’on peut dire que la division est encore simultanée. L’accroissement du disque germinatif” continue, mais la substance granuleuse nouvelle se groupe principalement de chaque côté des sillons, et reste en moins grande quantité vers le milieu des segments, qui par consé- quent sont limités du côté de la zone hyaline par une ligne concave. Dans les blastodermes à huit segments, les vésicules direc- trices ont généralement disparu. À partir de ce moment, 1l se produit une légère rétraction des segments, lorsqu'on traite les blastodermes par l'alcool, rétraction qui amène la forma- tion d’une lacune au point de convergence des segments au centre du blastoderme. Gette lacune est donc absolument artificielle ; on ne la constate jamais sur le frais. Lorsque la segmentalion est plus avancée, et que, par suite, les éléments de segmentation sont plus petits, la rétraction produite par l'alcool étant moindre, cette disjonction des éléments ne se produit plus, comme on le voit dans les figures 32 et, 33. Quatrième stade. — Dans les blastodermes à huit segments, les divisions ne se font plus simultanément dans tous les segments à la fois; les segments supérieurs subissent les premiers les modifications qui aboutissent à la division, puis ces modifications se produisent dans les segments latéraux successivement et'en suivant une marche régulière. Ainsi, dans le blastoderme représenté figure 17, le segment supé- rieur et le segment latéral supérieur de chaque côté pré- sentent leur noyau à l’état de fuseau ; le noyau du segment ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 9203 % latéral inférieur présente à ses pôles les premières indica- tions de la formation du fuseau, le segment inférieur étroit a son noyau au repos. En suivant cet ordre, les segments supérieurs et les deux segments latéraux de chaque côté se divisent longitudinalement par des sillons à, de façon que chacun d’eux forme deux segments inégaux, l’un plus étroit et plus allongé, l’autre un peu plus court et plus large. Cette différence entre les nouveaux segments se voit très bien sur la figure 18, et je la signale parce qu’elle ne sera pas sans influence sur la suite de la segmentation. La division des seoments supérieurs et des segments latéraux s’achève avant celles des segments inférieurs étroits. Il en résulte que l’on trouve des blastodermes à quatorze segments, mais cet état dure peu, et bientôt les segments étroits se divisent à leur tour. Leur division présente une particularité importante. Jusqu'ici les sillons étaient méridiens, c’est-à-dire conver- geaient autour du centre du blastoderme comme autant de rayons, de telle façon qu'ils divisaient la plaque germinative en languettes triangulaires, séparées les unes des autres à leur pointe, mais continues à leur base avec la masse restée indivise du vitellus formatif, et entre elles. La division de chaque segment étroit se fait au contraire par un sillon équa- torial, qui coupe les deux côtés parallèles de ce segment et détache sa portion centrale sous forme d’un élément parfai- tement limité de tous côtés, qui prend place au centre du blastoderme. Dès lors, on peut distinguer dans ce dernier deux sortes d'éléments : les uns, les derniers produits, limités de tous côtés et parfaitement individualisés, correspondent aux sphères de segmentation, et je les appellera comme ces dernières blastomères ; les autres, que nous avons jusqu'ici nommés segments, ne jouissent pas d’une individualité bien marquée, leurs limites n’étant pas fixées du côté de la péri- phérie du blastoderme, et variant sans cesse sous l'influence, d’un côté de l'accroissement dont ils sont le siège à leur base, d’un autre côté des troncatures répétées que subira leur sommet; je les appellerai désormais blastocones. De prime 9204 L. VIALLETON. . abord, il peut paraître peu convenable de substituer le mot nouveau de blastocone à celui de segment que tous les auteurs ont employé jusqu'ici pour désigner ces éléments; cependant je ferai remarquer que le mot de segment, s’il peut être employé correctement pour les premiers stades, devient très impropre à la fin de la segmentation, car alors les prétendus segments ne sont point séparés les uns des autres par des incisures faites dans le protoplasma, comme ils le sont au début, mais ne sont que des accumulations de protoplasma eranuleux, pourvues d’un noyau et disposées régulièrement dans l’épaisseur de la lame hyaline, qui est parfaitement con- tinue entre eux; ce ne sont donc plus à ce moment des seg- ments, mais bien des corps nouveaux sur lesquels je reviendrai plus amplement en temps et lieu. Pour le moment, j'ai voulu chercher à justifier un terme dont l'utilité se verra peut-être mieux dans la suite; toutefois, pour les premiers stades, on peut employer le terme de segment concurremment avec celui de blastocone. Lorsque la division des deux segments Imférieurs étroits est achevée, le quatrième stade est accompli, et le blastoderme comprend en tout seize éléments répartis en deux blastomères et quatorze blastocones. La figure 18, représente un tel blas- toderme avec tous ses noyaux en repos. Cinquième stade. — Au cinquième stade, la segmentation se continue en suivant toujours le même ordre, c’est-à-dire en commençant par les segments supérieurs et en continuant régulièrement, de telle façon que les éléments du groupe infé- rieur (les deux blastomères et les deux blastocones étroits) ne se divisent qu'après que tous les autres se sont divisés. Pour suivre facilement l’ordre des divisions, numérotons les segments d'un blastoderme du stade précédent, en commen- çant par en haut : il y a de chaque côté sept segments ou blastocones, le septième correspondant au blastocone infé- rieur étroit. La segmentation procède de la façon suivante : le premier blastocone se divise en travers, donnant un blasto- mère et un blastocone ; le second se divise en long, donnant ARTICLE N° 2, DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 905 deux blastocones ; le troisième se divise en long ; le quatrième en travers; le cinquième en travers ; le sixième en long. Tous les sillons du stade V sont désignés par la lettre &. Mais les blastocones 1 et 2 d’un blastoderme au quatrième stade, pro- viennent de la division du blastocone 1, d’un blastoderme au troisième stade; 3 et 4 du blastocone 2; 5 et 6 du blastocone 3 d’un même blastoderme. On voit donc que chaque groupe de deux blastocones nés d’un segment préexistant se comporte de la même façon, l’un de ces blastocones se divisant en long et l’autre en travers, de sorte que chaque groupe donne, après la segmentation, trois blastocones et un blastomère. Les divisions que je viens d'indiquer s'effectuent avant que le blastocone inférieur étroit et le blastomère correspondant se soient divisés. Lorsqu'elles sont achevées, on a un blasto- derme avec huit blastomères et vingt blastocones (fig. 19). Parmi les huit blastomères, les six nouvellement formés se distinguent aisément par leur taille des deux autres qui ont été produits au stade précédent, et cette différence de taille s’explique par leur production aux dépens des sommets de blastocones beaucoup plus larges que ne l’étaient les blas- tocones inférieurs ; mais en dehors de la grandeur, il n’y a aucune différence entre les grands blastomères, qui pro- viennent des blastocones supérieurs et latéraux, et les petits blastomères qui proviennent des blastocones inférieurs. Pour que le cinquième stade soit achevé, 1l reste encore aux blastocones étroits et aux petits blastomères à se diviser. Les deux petits blastomères se dédoublent et les blastocones se divisent en travers, de sorte que, le cinquième stade accompli, le blastoderme renferme douze blastomères et vingt blastocones, soit trente-deux éléments (fig. 29). On voit que chaque blastocone inférieur étroit d’un blasto- derme au troisième stade aura donné trois blastomères et un blastocone, tandis que les autres blastocones du même blasto- derme ont produit trois blastocones et un blastomère. Cette inversion à la règle générale tient seulement à la formation précoce d’un blastomère par le blastocone étroit au quatrième 206 L. VIALLETON. ‘stade, mais elle n'implique pas une différence radicale entre les blastocones étroits et les autres, car les huit blastocones que l’on trouve au troisième stade, ont tous produit par leur divion des blastocones et des blastomères, et aucun d’eux ne s’est divisé un plusg rand nombre de fois que les autres. On verra en outre, par la suite, que la précocité de la formation des blastomères par les blastocones étroits au quatrième stade peut s’expliquer par la forme même de ces segments, et qu’elle ne dépend pas d’une valeur morphologique spéciale des blas- tocones étroits. On peut donc considérer les huit segments d’un blastoderme au troisième stade comme morphologique- ment égaux entre eux. Il importait de faire ressortir cette équivalence morphologique des différents segments inégaux en grandeur d’un blastoderme au troisième stade, parce que l’on à attribué à l'inégalité de ces segments une importance bien au delà de sa valeur. Lorsque Ussow (1), par exemple, compare l’inégalité de forme que présentent les huit premiers segments du blastoderme des Céphalopodes, à l'inégalité que lon observe dans la segmentation des autres Mollusques, 1! commet une grosse erreur. En effet, chez les Mollusques aux- quels il fait allusion, la différence de volume des sphères de seementalion est liée à une différence considérable dans la valeur morphologique de ces sphères, puisque les sphères de même taille se groupent pour former un même feuillet fonda- mental, les petites formant l’ectoderme, les grosses l’ento- derme. Or, dans le blastoderme à huit divisions d’une Seiche peut-on opposer ainsi un ou plusieurs segments aux autres, et les regarder comme constituant un groupe spécial, équiva- lent au groupe des micromères ou au groupe des macromères, (1) Unters. üb. d. Entw. d. Ceph., p. 592. Ussow n’exprime pas très claire- ment comment il comprend la comparaison entre la segmentation des Cépha- lopodes et celle des Gastéropodes. Après avoir dit que la segmentation est irrégulière à partir du troisième stade, il ajoute en note : € Le présent travail ayant été écrit avant l'apparition des beaux travaux de Fol, Bobretzky, Ray- Lankester, etc., sur le développement des Mollusques, je ne pouvais donc pas savoir que ce stade, aussi bien que les suivants, fût, sauf quelques modifica- tions, caractéristique pour tous Les représentants du type des Mollusques. » ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 207 et chargé de produire, comme chacun de ces derniers, un feuillet distinct? En aucune façon. Tous les segments se com- portent de même, et engendrent tous des blastocones et des blastomères. Ce n’est donc pas dans l'inégalité des premiers segments des Céphalopodes qu’il faut chercher un point de comparaison avec la segmentation inégale des autres Mol- lusques ; j’essayerai de montrer plus loin comment on peut relier ces deux formes de segmentation, mais auparavant il faut d’abord finir l’étude de la segmentation. Le cinquième stade accompli, le blastoderme présente trente-deux éléments dont douze blastomères et vingt blas- tocones. Les six blastomères qui proviennent des blastocones inférieurs ne se distinguent des autres que par leur taille (fig. 25). Avant d’aller plus loin, 1l est bon de faire un certain nom- bre de remarques qui sont suggérées par l’étude des stades précédents, et qui permettront d'exposer plus facilement la suite. Nous avons vu que les blastomères peuvent être consi- dérés comme les sommets des blastocones détachés par un sillon équatorial; mais ce sillon équatorial présente ici cette particularité très remarquable de ne pas s'étendre sur tout le blastoderme, et d’être limité seulement à quelques éléments de ce dernier. Ainsi au stade IV on voit un sillon équatorial apparaître seulement sur les blastocones inférieurs étroits, au stade V un sillon équatorial apparait sur les blastocones 1, 4, 5, 7 de chaque côté, or il est très remarquable que ce sont là les blastocones les plus étroits que présente le blasto- derme; les autres blastocones, plus larges, se divisent en deux par un sillon méridien. [l semble donc qu’il y a dans la largeur des blastocones une limite telle, qu’au-dessus d’elle la division du blastocone est longitudinale, c’est- à-dire est obtenue par un sillon méridien, tandis qu’au- dessous de cette limite, la division est transversale et obtenue par conséquent par un sillon équatorial. En d’au- tres termes, chaque élément du blastoderme se comporte dans la segmentation comme s’il était seul, sans suivre aucu- 208 L. VIALLETON. nement le mode de division de ses voisins, et la direction du sillon qui le divise semble donnée par la forme même qu'il présente : ainsi un élément allongé et étroit se divise d’ordi- paire transversalement, sillon équatorial, un élément large et court se divise au contraire en long, sillon méridien. Les termes, transversal et longitudinal se rapportent aux éléments considérés avec la position réelle qu’ils occupent dans le blas- toderme, la direction longitudinale correspondant à un méri- dien, la direction transversale à un cercle delatitude. Je revien- drai ultérieurement sur cette division, il suffit de l'avoir indi- quée brièvement pour le moment. Il arrive souvent que la direction du plan de division est intermédiaire entre la position méridienne et la position équatoriale, c’est-à-dire est oblique, et alors tel blastocone, par exemple, qui devrait donner nor- malement deux blastocones nouveaux, en se divisant longitu- dinalement, donnera par un sillon oblique un blastocone et un blastomère, ce dernier présentant du côté périphérique du blastoderme un angle aigu, qui s’enclave dans la ligne des blastocones. C’est ce qui est arrivé dans le blastoderme figure 26, où le blastocone situé à gauche du sillon &, au lieu de se comporter comme son homologue du côté droit, s’est divisé en un blastocone et un blastomère. Ce mode de division explique comment il se fait que très souvent le nombre des blastocones est impair. ce qui ne devrait jamais arriver si toutes les divisions étaient régulières. Naturellement, lorsque le nombre des blastocones est impair, celui des blastomères l'est aussi, parce qu'il y a en plus du nombre habituel un blastomère qui normalement aurait dû être un blastocone et le nombre total des éléments du blastoderme est toujours pair. Enfin il peut se produire des divisions anormales, c’est- à-dire qui ne peuvent pas se déduire d’après la règle ci-dessus de la forme extérieure des segments. Telle est la division en long d’un des blastocones inférieurs étroits, que j'ai assez souvent constatée, el qui est contraire à la règle ci-dessus. En tous cas, toutes ces variations ne font que confirmer ce que l’on sait depuis longtemps, à savoir que la segmentation ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 209 n'est qu'un cas particulier de la division cellulaire, puisque tous les éléments qui composent le blastoderme à un moment donné, se divisent comme le font les cellules, et obéissent dans leur division à des forces qui leur sont propres, et non à une sorte de loi générale qui s’appliquerait à tous les élé- ments du blastoderme à la fois. Déjà à partir d’un blastoderme à trente-deux éléments, les blastomères se déplacent légèrement les uns sur les autres, de façon que l’axe du blastoderme qui était jusqu'alors une ligne droite, est décomposé en une ligne brisée; ainsi dans la figure 25 la portion supérieure de l’axe comprise entre les deux blastocones supérieurs est rejetée un peu à droite. Dans la même figure on voit que les blastocones et les blasto- mères supérieurs et latéraux sont en voie de division assez avancée, puisque leurs noyaux sont déjà transformés en fuseaux ; au contraire les éléments inférieurs (blastomères et blastocones) ont encore leurs noyaux au repos. Sixième stade. — Les divisions qui conduisent du stade V au suivant sont assez irrégulières, c’est-à-dire peuvent se faire dans les blastocones au moyen de sillons méridiens ou de sillons équatoriaux, sans que l’une ou l’autre de ces directions se montre plus fréquemment dans des blastocones déterminés. La règle générale (les divisions prévues par la figure 25 ne rentrent pas dans le cas le plus habituel) est que les blastocones 1 et 2 se divisent en long, 3,4, 5 en travers, 6,7 en long, 8, 9, 10 en travers, de sorte que de chaque côté il y a quatre blastocones qui se divisent en long, c’est-à-dire en for- meront huit une fois leur division achevée, et six qui se divisent en travers, c’est-à-dire formeront six blastocones et six blastomères. Ainsi, la division des blastocones présents au stade V accomplie, il y aura de chaque côté du blasto- derme quatorze blastocones et six blastomères. Si l’on ajoute les douze blastomères qui proviennent de la bipartition des six blastomères existant au stade V, on verra que, à la fin du stade VI, il y aura de chaque côté quatorze blastocones et dix-huit blastomères, soit trente-deux éléments, et par con- ANN. SC. NAT., ZOOL. 1888. VI. 44. —— ART. N° 9. 9210 L. VIALLETON. _séquent pour le blastoderme tout entier soixante-quatre élé- ments. La figure 26 représente un blastoderme très voisin du stade VI. Ce blastoderme renferme soixante éléments. Il a été produit par la bipartition de tous les blastocones et de tous les blastomères d’un blastoderme du stade précédent, moins quatre blastomères appartenant au groupe inférieur, qui ont encore à se diviser, ce qui portera le nombre total des éléments à soixante-quatre. De ces quatre blasto- mères, deux, v, sont à un état de division déjà assez avancée (fig. 26) et renferment deux petits noyaux; les deux autres, p, compris entre les deux premiers, sont plus en retard et pré- sentent seulement le fuseau qui indique une division pro- chaine. Ces quatre blastomères font partie du groupe infé- rieur ; au-dessous d’eux on trouve quatre blastomères o, dont les noyaux, encore Jeunes, indiquent qu'ils viennent seule- ment d'achever leur division ; au groupe inférieur appartiennent encore les blastomères x et les blastocones étroits x. On voit que le groupe inférieur a suivi dans ce stade la règle qui préside jusqu'alors à sa segmentation, il s’est comme tou- jours segmenté le dernier, et sa segmentation n’est pas encore achevée. De chaque côté du groupe inférieur, on voit quelques blastomères et deux blastocones dont les noyaux sont parfai- tement arrondis, mais présentent déjà les signes d’une division prochaine (apparition des asters aux pôles); malheureusement, ces détails ne peuvent pas être figurés au grossissement em- ployé pour le dessin. En remontant davantage de chaque côté, on voit les noyaux déformés et aplatis, par conséquent dans un état très voisin de la formation du fuseau. Enfin plus en dessus, dans la partie supérieure du blastoderme, la formation des fuseaux est achevée partout, et même dans certains cas, la plaque équatoriale du fuseau est déja dédoublée. Ainsi ce blastoderme confirme parfaitement la marche que j'ai attri- buée jusqu'ici à la segmentation, les blastomères et les blas- tocones inférieurs se divisant chez lui comme toujours, les derniers. En outre, avant que la segmentation soit totalement achevée dans le groupe inférieur, les noyaux des éléments ARTICLE, 2° N. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 211 supérieurs ont déja commencé leurs transformations. Dans ce blastoderme le nombre des blastocones est de vingt-sept, au lieu de vingt-huit qui est le nombre normal; cela tient à ce que le sillon s, qui aurait dû être longitudinal, est oblique, de sorte qu'au lieu de déterminer la formation de deux blasto- cones, 1l a formé un blastocone et un blastomère. Le dépla- cement des blastomères que j'ai déjà signalé au stade précé- dent est maintenant bien plus accusé. Le premier sillon qui constitue l’axe du blastoderme ne forme plus une ligne droite comme auparavant, mais une ligne brisée, qui part du point en haut, à droite du blastocone supérieur présentant le sillon oblique s, passe entre les deux grands blastomères, puis entre les deux blastomères du groupe inférieur dont le noyau est transformé en fuseau, et se continue au-dessous de ces der- niers, en venant finir entre les deux blastocones inférieurs. À cause des variations que j'ai signalées plus haut, dans la direction des sillons de segmentation, si le nombre total des éléments du blastoderme est toujours constant et double de celui du stade précédent, le nombre des blastocones et celui des blastomères, considérés à part, peuvent varier : nous venons de voir un cas où le nombre des blastocones était de vingt-sept et celui des blastomères (une fois toutes les divisions terminées) de trente-sept; dans d’autres cas, J'ai trouvé trente blastocones et trente-quatre blastomères; dans un autre cas encore, 1l y avait seulement vingt-quatre blastocones et quarante blastomères. Ces variations s'expliquent aisément, comme on l’a vu, par ce fait qu’un sillon peut être méridien dans un cas, et équatorial dans un autre cas : la première disposition conduisant à la formation de deux blastocones, la seconde aboutissant à la production d’un blastocone et d’un blastomère. Les blastomères forment une sorte de disque central que _ les blastocones entourent complètement. Ils ne sont pas tous égaux de laille, ce qui tient à ce que les uns proviennent de la division des grands blastomères supérieurs, tandis que les autres sont produits par la division des petits blastomères du 212 L. VIALLETON. groupe inférieur; mais, à part cette différence de taille, ils n’en présentent aucune autre, dans leur structure, ni dans leur manière de se comporter vis-à-vis des réactifs, contraire- ment à ce que certains auteurs ont pensé. Septième stade. — La figure 26 nous fait prévoir que la plupart des éléments du blastoderme, c’est-à-dire tous ceux qui occupent les parties supérieure et latérale, se seront divisés avant les éléments du groupe inférieur. Le blastoderme (fig. 32) représente précisément un cas où tous les blas- tocones et les blastomères, moins ceux du groupe inférieur, se sont divisés. En effet, ce blastoderme comprend cent douze éléments, qui se décomposent ainsi: deux blastocones et quatorze blastomères, soit seize éléments représentant le groupe inférieur, non encore divisé : puis quatre-vingt-seize éléments qui ont été formés par le dédoublement des quarante- huit qui, avec les seize du groupe inférieur, constituaient les soixante-quatre éléments du sixième stade. Le groupe inférieur est très facile à reconnaire. Les deux blastocones inférieurs qui font partie de ce groupe se retrouvent tout de suite; 1ls sont les seuls qui présentent leur noyau à l’état de fuseau +. Au-dessus d’eux, les deux blastomères 7 les plus inférieurs du groupe sont au même état de division, c’est- à-dire présentent également un fuseau. Plus en dessus, on voit quatre blastomères o dont le noyau clair et volumimeux présente à ses pôles les taches polaires, indice, comme on le verra plus tard, de la formation prochaine du fuseau; ces quatre blastomères correspondent à ceux du blastoderme représenté figure 26, dont les noyaux jeunes sont encore de petite taille et qui sont désignés par la lettre o. Les quatre derniers blastomères du groupe inférieur qui, dans le blastoderme (fig. 26), n'avaient pas encore achevé leur divi- sion, sont représentés ici par les huit blastomères disposés en deux files superposés indiqués par les lettres pet v. Lorsque les seize éléments du groupe inférieur auront accompli les divisions qui s’indiquent déjà dans la plupart d’entre eux, le nombre des éléments de tout le blastoderme sera augmenté ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 913 de seize el montera par conséquent de cent douze à cent vingt- huit. Le septième stade sera alors achevé. Le blastoderme que nous venons d'étudier confirme encore ce que j'ai dit sur l’ordre et la marche de la segmentation, et il correspond bien avec ce que fait prévoir le blastoderme (fig. 26) En effet, dans ce dernier, la segmentation du groupe inférieur est presque achevée, et déjà les noyaux des éléments supérieurs et latéraux sont à l’état de fuseaux ; dans le bastoderme (fig. 32), ces derniers noyaux sont encore à l’état de repos, mais en même temps la segmentation du groupe imférieur est à peine commencée. Les blastomères forment un disque central entouré, comme auparavant, par les blastocones; mais la ligne de contour de ce disque n’est pas absolument régulière, comme elle le serait si elle avait été formée par un sillon équatorial régulier, et portant sur tous les blastocones; plusieurs blastocones enfoncent leur sommet entre les blastomères et prennent en quelque sorte place parmi ces derniers. Cela se voit surtout pour les deux blastocones étroits +. Les blastocones présentent en outre une disposition intéres- sante. On se rappelle que les sillons méridiens, arrivés à une certaine distance du centre du blastoderme, s’élargissent et se terminent en une espèce de large gouttière. Jusqu'ici, les blastocones étaient limités entre eux par la portion linéaire des sillons, et, par conséquent, étaient étroitement serrés les uns contre les autres. Maintenant ils atteignent, par l’accrois- sement continu de leur base, le point où les sillons s’élar- gissent, et alors s’établissent entre eux des intervalles tels que ceux que l’on voit en ir, qui représentent précisément l’écartement des lèvres des sillons. Dès lors les blastocones ne sont plus contigus entre eux, mais en quelque sorte disloqués. La dislocation des blastocones commence seulement au septième stade; plus tard, elle est poussée beaucoup plus loin ; en tout cas on peut déjà remarquer, à ce stade, qu'elle crée des conditions nouvelles et spéciales pour les blasto- cones. En effet, comme la partie élargie des sillons est une 914 L. VIALLETON. simple gouttière creusée dans le protoplasma, mais ne le divisant pas sur toute son épaisseur, 1l en résulte que les blastocones qui occupent les bords de cette gouttière ne sont point séparés les uns des autres latéralement par une solution de continuité faite dans le protoplasma, mais peuvent être considérés, à partir de ce moment, comme de simples épais- sissements localisés d’une lame protoplasmique continue. Au delà du septième stade, 1l m'a été imposible de suivre régulièrement la segmentation comme je l'avais fait jus- qu'alors; tout ce que je puis dire, c’est qu’elle se continue encore pendant un certain temps, et que le nombre des élé- ments du blastoderme augmente encore avant la fin de la segmentation. Le blastoderme (fig. 33) est assez voisin de la fin de la segmentation ; on peut lui considérer deux parties: 4° un disque central composé de blastomères et 2° une zone périphérique occupée par les blastocones. Le disque central renferme un grand nombre de blastomères (quatre cents envi- ron) de forme et de grandeur très diverses. En général, les plus gros se trouvent à la périphérie; au centre, les blasto- mères sont plus petits, et les plus petits de tous forment deux petits groupes (#, n). Dans l'impossibilité de retrouver l’axe de ce blastoderme, je ne saurais rien dire d’absolu sur la position réelle de ces deux groupes; cependant il me semble qu'ils peuvent provenir des petits blastomères centraux du groupe inférieur qui, à la fin du septième stade, forment, comme on l’a vu, une sorte de bande étendue transversale- ment suivant la largeur du blastoderme. En effet, les deux groupes de petits blastomères du blastoderme que nous exami- nons forment, eux aussi, une bande assez large. Si cette hypothèse est exacte, il faut alors regarder cette bande comme transversale et, par conséquent, orienter le blastoderme comme 1l l’est dans le dessin. La zone des blastocones est beaucoup plus importante à considérer. A la fin du septième stade, les blastocones com- mencent à s’écarter légèrement les uns des autres par l’écar- tement des lèvres des sillons qui les limitent latéralement; ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 915 dans la suite, l’accroissement du disque germinatif se faisant toujours comme précédemment par un apport continu de nou- velle substance granuleuse, cette dernière vient s'ajouter à la substance granuleuse des blastocones et prolonge ainsi ces derniers dans la même direction qu'ils avaient lorsqu'ils ont commencé à s'écarter les uns des autres. Il en résulte que, après quelques divisions transversales qui tronquent encore leurs sommets et les font rentrer dans le nombre des blasto- mères, les blastocones sont assez éloignés les uns des autres, et forment autour du disque central des rayons, comme on le voit dans le blastoderme (fig. 33). Chacun de ces blas- tocones est une masse de protoplasma granuleux, renfermant un noyau dans sa portion la plus épaisse, contiguë au disque central, et qui, vers la périphérie, va en s’amincissant de plus en plus pour se perdre dans la lame hyaline du proto- plasma formatif. Sur les côtés, les blastocones passent égale- ment dans la lame hyaline qui est continue entre eux, mais leurs bords latéraux ne s’abaissent pas progressivement comme le fait le bord périphérique et, au contraire, se relèvent très nettement sur la membrane hyaline, bien que, je le répète, il n’y ait pas de solution de continuité entre le corps du blasto- cone et la lame hyaline. Le blastoderme représenté figure 33 est très voisin de la fin de la segmentation. En effet, les blastomères centraux du disque se divisent encore un cer- tain nombre de fois en tendant à s’égaliser de plus en plus; puis on voit apparaître les premiers indices de la forma- ton d’un feuillet profond, ce qui indique que la segmentation est achevée. À la fin de la segmentation, le blastoderme res- semble donc assez exactement à celui de la figure 33, à cela près qu'il renferme un plus grand nombre d’éléments ; mais les dispositions essentielles des parties n’ont pas changé, la zone des blastocones n'offre aucune particularité nouvelle ; quant au disque central, ses blastomères centraux ont pris un aspect plus régulier et plus uniforme, comme on peut le voir dans le fragment de blastoderme représenté figure 36. Les blastomères périphériques sont restés plus que toutes 216 L. VIALLETON. volumineux et forment une zone (z#, fig. 36) assez nette, qui va jouer bientôt un rôle important, mais qui, pour le moment ne se distingue que par la dimension de ses éléments. Le blastoderme forme un strate unique, appliqué très exactement sur le vitellus nutritif. Il n’y a pas de cavité de segmentation. Le disque central formé par les blastomères mesure à peu près partout la même épaisseur, mais les bords du blasto- derme diminuent peu à peu d’épaisseur. Après cet exposé de la segmentation, je n’entrerai pas dans de longs détails historiques sur les travaux des divers natu- ralistes qui s’en sont occupés. Cet historique est déjà fait dans le travail d'Ussow; aussi je me contenterai d'examiner avec soin les recherches très importantes et très complètes de ce dernier auteur, et de comparer ses résultats aux miens (1). Mais auparavant je dois exprimer un doute. Ussow a-t-il étudié suffisamment la segmentation de la Seiche? Il dit que ses recherches ont été faites surtout sur le Loligo (L. vulgaris et L. sagittata) et toutes ses figures de segmentation se rap- portent à ces animaux, mais il ajoute que chez tous les autres Céphalopodes, y compris la Seiche, bien entendu, la segmen- tation est la même que chez le Loligo. Or il m'est impossible de faire concorder mes descriptions avec les siennes, qui se rapprochent au contraire assez de celles de Bobretzky, les- quelles ont été faites sur le Calmar. Il ne peut être question d’une différence d’espèce dans les animaux que nous avons étudiés l’un et l’autre, car les recherches d’Ussow ont été faites comme les miennes à Messine. Il est donc plus probable que la segmentation de la Seiche présente quelques différences avec la segmentation du Calmar, telle que l’ont établie Ussow et Bobretzky, et qu'Ussow n'a pas remarqué ces différences. Elles sont d’ailleurs de peu d'importance, elles n’entrainent pas de dissemblance fondamentale dans le type de la segmen- tation, et elles s’expliquent probablement par l'influence que (1) Le travail de Brooks : The developpment of the Squid (Loligo Peali), Boston, 1880, ne renferme rien de nouveau ni d’important sur la segmen- tation. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 947 la forme des segments exerce sur leur mode de division. Ussow à très bien observé la première segmentation, et la figure qu'il donne d’un blastoderme à ce stade (1) concorde parfaitement avec ce que j’ai vu moi-même. En effet dans cette figure le premier sillon ne rencontre pas les vésicules direc- trices, mais passe à une certaine distance de ces dernières. Quant au second sillon, Ussow déclare qu’il est perpendicu- laire au premier, ce qui n’est pas exact ainsi que le montre la description précédente. Il ajoute qu’une fois les quatre pre- miers segments formés, — ces quatre segments sont pour lui égaux — les segments inférieurs se divisent les premiers, for- mant chacun un segment Imférieur plus étroit et un segment latéral plus large, puis que les segments supérieurs se divisent à leur tour, et qu’alors le blastoderme comprend huit seg- ments disposés comme le montre ma figure 17. Je suis bien d’accord avec Ussow quant à la disposition des huit segments, mais Je ne puis admettre l’ordre d’apparition qu'il leur assigne en faisant commencer la division par le segment inférieur, ce qui est précisément le contraire de ce que j'ai observé non seulement à ce stade, mais pendant une période assez longue de la segmentation, c’est-à-dire jusqu’au stade VIT inclusivement. Quoi qu'il en soit, il résulte des observations de Bobretzky, de celles d’Ussow et des miennes, qu’à un moment donné le blastoderme des Céphalopodes se compose de huit segments inégaux disposés comme dans ma figure 17. À partir de ce moment, les divergences entre les descriptions d’Ussow et les miennes s’accentuent. D’après Ussow, aussitôt après le stade à huit segments, les segments inférieurs étroits se divisent en travers en donnant deux petites cellules qui se placent au centre du blastoderme ; les pointes des segments supérieurs se détachent à leur tour en donnant deux nouvelles cellules qui s'ajoutent aux deux autres au centre du blastoderme, puis les deux segments laté- raux de chaque côté se divisent longitudinalement, de sorte (1) HaGrprenis, pl. I, fig. 14. 218 L. VIALLETON. ces divisions achevées on a un blastoderme composé de douze seements et de quatre cellules centrales, tandis que celui de la Seiche au même stade présentait quatorze segments et seulement deux cellules centrales (blastomères). N'ayant pas observé la segmentation de Loligo, je ne puis savoir si.les choses se passent comme le décrit Ussow, mais comme les figures données par Bobretzky (1) pour ce stade concordent avec celles d'Ussow, je suis porté à croire exactes les données de ce dernier auteur. En même temps je suis obligé d’ad- mettre qu'il y a une différence entre la segmentation du Calmar et celle de la Seiche, car pour ce dernier animal, mes observations portent sur un nombre de cas assez grand pour que mes deseriptions ne soient pas fondées sur un accident. Je possède en effet vingt-sept blastodermes de Seiche se rappor- tant à différents états entre le stade IIT et le stade V, et tous, sans exception, présentent le mode de segmentation que j'ai décrit. Il y a donc une différence entre le blastoderme de la Seiche et celui du Loligo au stade IV. Cette différence consiste seulement en ce que le segment supérieur s’est divisé en tra- vers chez le Loligo, tandis qu’il s’est divisé en long chez la Seiche. Après ce que nous avons vu sur la possiblité de varia- tions assez grandes dans la direction des sillons, cette diffé- rence ne paraîtra pas avoir une valeur bien considérable. Le stade à trente-deux éléments est figuré exactement par Ussow, ou du moins tel qu’on peut le prévoir d’après la consti- tution qu’il assigne au blastoderme au stade précédent, et la marche ordinaire de la segmentation. Pour le stade suivant Ussow admet qu’un sillon équatorial coupe les sommets de tous les segments (blastocones) et forme dix-huit cellules nou- velles qui s’ajoutent aux quatorze cellules qui occupent déjà le centre du blastoderme. Je n’ai Jamais observé chez la Seiche, à un stade aussi précoce, de sillon équatorial portant sur tous les segments à la fois. (1) Comparez les figures 19 et 20 dans le texte d’Ussow (HaGrrwozxenia) avec les figures 2 et 3, planche I, de Bobretzky, HaexbxoBania o pasBuTin roxoB0H0- ruxB, Moscou, 1877. ARTICLE N° 2, DÉVELOPPEMENT. DE. LA SEICHE. 919 À partir de ce moment, il devient difficile de suivre les des- criptions d'Ussow. Il détermine les stades de segmentation d’une façon tout à fait arbitraire, et dont l’incorrection est frappante; par exemple je ne puis comprendre comment il peut y avoir un stade renfermant un nombre impair d'éléments et c’est le cas de son stade XI, dans lequel il y aurait d’après lui vingt-trois segments et cinquante-deux cellules, soit en tout soixante-quinze éléments (1). Il est évident que ce stade et le suivant, stade XIT, à cent huit éléments, sont des inter- médiaires entre mes stades VI et VIT. L'erreur d'Ussow tient à ce qu'il n’a pas eu une notion exacte de la marche de la seg- mentation. [l n’a pas vu que tous les éléments du blastoderme participent à la segmentation, et il a cru au contraire que certains groupes de cellules se divisaient à l’exclusion des autres (2). D'ailleurs Ussow a décrit assez exactement la forme d’un blastoderme arrivé à la fin de la segmentation, comme on peut s’en convaincre par l’examen de ses figures. En somme les descriptions d’Ussow. présentent avec les miennes des différences qui peuvent tenir à deux causes : 1° à ce que la segmentation de la Seiche n’est pas absolument identique, quoi qu’en pense Ussow, à celle du Loligo. Si ces deux segmentations sont les mêmes, les descriptions d'Ussow sont toutes erronées; % à ce qu'Ussow a méconnu l’ordre et la régularité de la segmentation. REMARQUES SUR LES PHÉNOMÈNES INTIMES DE LA SEGMENTATION Après avoir exposé ci-dessus les résultats de la segmentation, je reviendrai sur quelques faits que j'ai pu constater dans la division des noyaux, et qui me paraissent devoir être signalés, comme fournissant quelque contribution à l'étude de ce phénomène, l’un des plus intéressants de l’histologie, et qui est en outre tout à fait d'actualité. Après l’action du liquide de Kleinenberg, les figures karyolitiques sont très visibles, et les (1) Voy. Untersuchungen, Tableau de la segm., p. 606. (2) Unters., p. 598 et 599. 290 L. VIALLETON. _blastodermes de Seiche, par cela même que leurs différents segments ne se divisent pas en même temps, fournissent un excellent objet pour l'étude de ces figures, car on peut trou- ver dans un seul blastoderme des noyaux à tous les stades de division. J’exposerai tout d’abord le mode de formation des noyaux. Formation des noyaux. — On sait que les noyaux se forment autour des fils chromatiques de chacune des deux plaques secondaires qui proviennent de la plaque équatoriale du fuseau divisée, lorsque ces plaques sont arrivées au voisinage des pointes de fuseau. La plupart des auteurs admettent qu’une certaine partie du protoplasma qui entoure ces plaques, est employée avec ces dernières pour former le noyau qui compren- drait ainsi, dèsson apparition, deux parties différentes, l’une venue du noyau ancien, la substance chromatique, l’autre fournie par le protoplasma cellulaire. Chez la Seiche, les choses se passent autrement. Lorsque la plaque équatoriale du fuseau se divise, on voit de chaque côté se former les zones latérales au moyen des fils chromatiques qui composaient cette plaque. Tout à fait au début, ces fils sont disposés longi- tudinalement les uns à côté des autres sans se toucher, comme le sont les fils achromatiques du fuseau qui les supportent (fig. 28); mais, à mesure qu’ils avancent vers les pointes du fuseau, ils se resserrent les uns contre les autres suivant la convergence des fils achromatiques, et finissent par arriver tous au contact. À ce moment, un peu avant d'atteindre la pointe du fuseau, ils se gonflent légèrement et se fusionnent les uns avec les autres de manière à former une masse homo- gène ne renfermant aucune vacuole, aucune substance autre que la chromatine dont ils sont composés, et par conséquent colorée uniformément et d’une manière très intense. Le mode de formation de cette masse par coalescence des filaments se reconnaît aisément sur les figures 24 et 27. On voit en effet que le nouveau noyau forme comme un anneau plein qui occupe la place de la zone latérale des filaments. Du côté de la pointe du fuseau, et du côté de l’équateur, c’est- ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 991 à-dire sur chaque face de l’anneau, quelques-uns des fils chromatiques qui dépassent la masse commune, montrent d’une manière évidente que cette masse est formée par la fusion de la portion centrale de ces fils. Les bords de l'anneau plein qui représente le jeune noyau sont déjà à ce moment fortement convexes. Bientôt les prolongements formés par les fils chromatiques disparaissent, en rentrant à leur tour dans la masse commune qui prend la forme d’un ovale dont le grand axe est perpendiculaire au grand axe du fuseau. Ce corps ovale n'aura plus qu’à s’accroitre et à subir quelques modifications dans son contenu pour réaliser la forme et la structure défi- nitives des noyaux. Sa masse tout entière se compose de chro- matine parfaitement homogène, et ne renfermant aucune vacuole ni aucune granulation. A sa périphérie il n’y a pas de véritable membrane propre, mais la substance chromatique est un peu condensée, de manière à former une pellicule nette. À ce moment le jeune noyau est formé exclusivement par la substance des fils chromatiques, qui arrivés au contact se sont fondus ensemble, de manière à ne plus laisser de trace de leur structure primitive. Ge mode de formation du noyau devait être signalé, car dans beaucoup d’autres cas, d’après divers auteurs, les choses ne se passent pas de même. Ainsi, il est assez fréquent de voir les filaments chromatiques se recourber et se souder les uns aux autres en entourant des espaces clairs pris dans le protoplasma voisin. Chez la Seiche cela ne se pro- duit jamais, et la fusion des filaments se fait toujours comme on a vu. Les jeunes noyaux s’accroissent peu à peu, et, simultané- ment, la substance chromatique dont ils sont formés devient plus claire. Après un certain temps on commence à distinguer dans leur intérieur quelques grains extrêmement fins qui paraissent comme une poussière. Avec l’éclaircissement du noyau, la pellicule de chromatine qui l'entoure, devient de plus en plus nette. Des grains plus volumineux apparaissent dans l’intérieur du noyau dont le contenu s’éclaircit de plus en plus, et quelquefois ces grains présentent une disposition 222 L. VIALLETON. très remarquable, ils sont soudés à la paroi chromatique et disposés en lignes parallèles entre elles, en général perpen- diculaires au grand axe du noyau qui, à ce moment, est de forme ovale (fig. 29). Ces lignes de granulations qui ne sont, en somme, que des épaississements de la pellicule chromatique, ont précisément la même direction que les fils chromatiques qui ont formé le noyau. Les files parallèles de grains chromatiques se rencontrent dans les noyaux jeunes. Avec le temps, cette disposition s’efface et fait place à une disposition réticulée des grains chromatiques. Dans le plus orand nombre des eas, celte réticulation elle-même disparait, et l’on trouve le sgrains chromatiques de tailles diverses, mais toujours assez petite, irrégulièrement disséminés dans le contenu clair du noyau. Ce dernier a alors toute sa taille, et il est venu se loger dans l’espace dépourvu de granulations protoplasmiques qui se montre maintenant à la place du centre des asters. Pendant toute la durée de la segmentation, je n’ai jamais constaté la présence de nucléoles. Les noyaux ne possèdent jamais d’autre membrane que la pellicule de chromatine que nous avons vue se former dès le début. Il résulte de ceque l’on a vu, que chez la Seiche, lesnoyaux de segmentation ne renferment, au début, aucune partie venue du protoplasma cellulaire, puisque la masse de chromatine qui les constitue est bien limitée, et s’entoure de très bonne heure d’une couche condensée qui la sépare franchement du protoplasma. Plus tard, lorsque le noyau s'accroît, il'est pro- bable que son contenu clair lui est fourni par le protoplasma, et pénètre dans son intérieur après avoir traversé par endos- mose la couche dense périphérique. Mais cet apport fourni par le protoplasma cellulaire au noyau, est tardif, et n’a lieu qu'après que le noyau est constitué dans sa forme, et indivi- dualisé par sa membrane chromatique. En outre, la substance ajoutée est une substance liquide, il n'entre jamais aucune partie quelconque solide et figurée du protoplasma dans le noyau. J’ai insisté là-dessus parce qu’on à souvent considéré comme entrant dans la constitution du noyau diverses forma- ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA $EICHE. 223 tions (taches polaires) situées vers les pôles du fuseau, et qui auraient été englobées avec les zones chromatiques sous une même enveloppe, qui devenait la membrane du noyau. Je ne puis passer en revue ici les nombreuses opinions qui ont été émises sur la formation du noyau, je ne prétends pas non plus que ce que j'ai observé se rencontre ailleurs que chez la Seiche, je me contente de signaler ces faits aux personnes qui s’occupent plus spécialement de ces questions. Taches polaires. — On a observé depuis longtemps déjà, c’est-à-dire dès les premières observations faites sur la karyo- kinèse, de petits amas d’une substance spéciale, très avide de matières colorantes, et qui occupent les pôles du fuseau nucléaire. Ce sont les areal corpuscles de Mark, les Polarkôr- perchen des auteurs allemands. Nous les désignerons sous le nom de taches polaires. Pour faire leur étude, prenons un noyau sur le point de se diviser. Ce noyau présente l’aspect ordinaire des noyaux adultes (fig. 20 et 21); aux deux extrémités d’un de ses diamètres, en dehors de sa membrane on voit deux petits amas d’une substance homogène qui se colore fortement sous l’influence des réactifs. Chacun d’eux est le centre d’un aster pro- toplasmique en voie de formation. Les rayons de laster sont encore peu abondants et peu marqués ; comme dans tous les asters, les files de granulations n’arrivent pas jusqu’au centre de la figure, et dans cette place on trouve autour de la tache polaire une substance pâle, très finement granuleuse et d'ap- parence presque homogène. Un des premiers signes de la division est que les taches polaires s’écartent l’une de l’autre en suivant la direction prolongée du diamètre sur lequel elles se trouvaient. Le protoplasma périnucléaire suit leur mouve- ment et s’écarte un peu du noyau à ses deux pôles (fig. 22 et 23) de manière que le noyau se trouve finalement situé au milieu d’un espace clair ovoïde. Jusqu'alors le noyau est resté intact, et son contenu n’a pas changé beaucoup de volume. Lorsque la formation de l’ovoïde est achevée, le noyau se ratatine, sa membrane se plisse, et son contenu clair 294 L. VIALLETON. semble disparaître en partie. Des taches polaires partent des fils qui s'étendent suivant le grand axe de l’ovoïde, en passant au-dessus du noyau qui se trouve enfermé au milieu d’eux. Ces fils ne sont autre chose que les fils achromatiques du fuseau, qui se constitue bientôt après l’achèvement de l’ovoide. Je ne puis donner aucun détail particulier sur la manière dont se forme la plaque équatoriale du fuseau; d’ailleurs je ne m’occuperai dès maintenant que des taches polaires. Ces dernières, tant qu’elles occupent les pôles de l’ovoïde, ont la forme de disques assez larges, pâles (fig. 23) ; lors- que le fuseau est formé, elles se contractent en de petites sphères plus colorées (en raison même de la concentration de leur substance) qui occupent les pointes du fuseau. À mesure que la division progresse, et lorsque les noyaux fils se forment, les taches polaires s’écartent de plus en plus l’une de l’autre. Finalement elles se trouvent assez loin derrière chacun des deux nouveaux noyaux, au milieu d’un espace clair qui occupe maintenant l’aster dont elles étaient le centre (fig. 24 et 27, 28, 31). Elles forment comme deux petites taches colorées, placées sur le prolongement de la direction des deux nouveaux noyaux, et leur aspect est si net et leur disposition si frappante, qu’on les reconnaît même à de faibles grossisse- ments (fig. 19) dans les blastocones inférieurs étroits. Leur constitution a peu changé, cependant elles semblent s'être contractées encore, de mamère qu'elles ont une colo- ration plus intense, leur contour est devenu irrégulier et déchiqueté, et elles se sont divisées de manière à former deux ou trois petits corpuscules groupés les uns à côlé des autres. Ces petits corpuseules, qui représentent les taches polaires, se trouvent comme ces dernières dans le prolongement d’une ligne qui passerait par les centres des deux nouveaux noyaux. Les noyaux gagnent peu à peu l’espace clair dans lequel se trouvent les taches polaires, el se rapprochent ainsi de ces dernières, de sorte qu’à un moment donné on trouve les taches polaires presque au contact du noyau (fig. 30). Cette disposition a été remarquée par les auteurs qui ont étudié ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 2925 dié la division des noyaux, mais la destinée ultérieure des taches polaires est restée indéterminée. Les uns ont pensé qu'elles entraient dans la constitution du noyau, les autres qu'elles disparaissaient ; ni l’une ni l’autre de ces hypothèses ne se réalise chez la Seiche. En effet, lorsque les deux ou trois corpuscules qui représentent la tache polaire sont arrivés au contact du noyau, 1ls se partagent en deux groupes, formant deux petits amas (fig. 14 et 15) qui tendent à s’éloigner l’un de l’autre en glissant à la surface du noyau avec lequel is gardent toujours le contact. Ces deux amas parcourent ainsi à la surface du noyau deux routes opposées, ils s’écartent de plus en plus l’un de l’autre, et arrivent finalement à se placer aux deux extrémités d’un diamètre du noyau, où ils constituent deux taches polaires qui seront le point de départ d'une nouvelle division. Les figures 14, 15 et 20, montrent trois stades successifs de cette migration. Lorsqu'elle est accomplie, c’est-à-dire lorsque les corpuscules formés par l’ancienne tache polaire se sont placés aux deux pôles d’un diamètre du noyau, il arrive souvent que la division du noyau commence aussitôt (fig. 22), les deux fragments diamétra- lement opposés de l’ancienne tache polaire remplissant à leur tour le rôle des taches polaires. Cela est très facile à con- stater dans les blastomères du groupe inférieur qui sont à des stades de division très voisins, les uns avec les taches polaires en voie de migration, les autres au début de leur division. Mais il y a des cas où, après que les deux fragments de la tache polaire sont arrivés aux deux pôles d’un dia- mètre nucléaire, on les perd de vue. Le noyau reste quelque temps au repos, sans qu’on puisse distinguer autour de lui rien qui rappelle les taches polaires, puis des taches apparais- sent de nouveau et la division recommence. Les taches polaires pâles (fig. 21) paraissent se former aussi de nouveau. L'observation ci-dessus que j'ai répétée un grand nombre de fois me paraît donc démontrer que les taches polaires peuvent provenir de taches polaires préexistantes. Cela est contraire à l'opinion qui considère les taches polaires comme se formant de ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 15. — ART. N° 2. 226 L. VIALLETON. toutes pièces, au moment de la division, par le mélange d’une substance venue du noyau avec une autre substance fourmie par le protoplasma. Malheureusement je ne puis donner aucun renseignement sur lapparition des premières taches polaires autour du premier noyau de segmentation. L'importance des taches polaires dans la division ne peut échapper à personne, en effet elles sont à la fois le centre de la formation des fils achromatiques, c’est-à-dire de la division du noyau, et le centre de la formation des asters, c’est-à-dire de la division du protoplasma (on sait que la division du protoplasma se fait sui- vant le plan d’intersection des rayons des asters). Les taches polaires sont bien évidemment le'centre de ces deux mouve- ments, puisque d'une part les fils achromatiques se produisent toujours après Leur formation et à partir d’elles, et que d'autre part elles précèdent la formation des asters, car il est incon- teslable, dans le cas où elles proviennent de celles qui exis- taient lors de la division précédente, qu’elles se montrent avec tous leurs caractères avant l'apparition des asters. Les taches polaires ne sont done pas produites par une substance parti- culière qui s’'accumulerait au centre des asters, ensuite de la formation de ces derniers, mais elles préexistent aux asters eux-mêmes. REMARQUES SUR LES RELATIONS QUI EXISTENT ENTRE LA FORME DES ÉLÉMENTS ET LE PLAN DE LEUR DIVISION On a vu que les blastocones se divisent longitudinalement ou transversalement suivant qu'ils sont larges et courts ou bien étroits et allongés. Cela indique déjà que leur forme exerce une grande influence sur leur division. Nous laisserons pour l’examiner ensuite la première segmen- tation, dans laquelle Le plan de division montre des relations spéciales avec les pronuelei, et nous examinerons immédiate- ment ce qui se passe au début de la seconde segmentation. Le fuseau nucléaire qui se forme alors dans chacun des deux vremiers segments, est oblique par rapport au grand axe de ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 227 ces segments (fig 13), de telle façon que le sillon de seg- mentation qui passe par le plan équatorial du fuseau sera lui-même oblique sur le premier sillon, au lieu de lui être perpendiculaire, comme cela se rencontre communément dans la segmentation d’autres animaux. D'où vient cette obliquité du fuseau? J'ai déjà fait remarquer que le noyau n’occupe pas exactement le centre du segment, mais se trouve situé un peu au-dessous et en dedans de lui (plus près du premier sillon). Par conséquent le protoplasma est réparti autour du noyau d’une manière inégale, et se trouve en plus grande quantité au-dessus et en dehors du noyau qu’au-dessous et en dedans de lui. Or la pointe supérieure du fuseau est dirigée vers le centre de la masse protoplasmique prépondérante, en dehors et au-dessus du noyau ; 1l semble donc que la distribution du protoplasma règle la direction du fuseau. La même chose s’observe au stade suivant. Examinons séparément chaque segment d’une moitié du blastoderme (fig. 16). Dans le seg- ment supérieur le noyau est plus rapproché du bord infé- rieur horizontal (second sillon) que du bord vertical (premier sillon), et par conséquent la portion prépondérante du proto- plasma est, dans ce cas, celle qui est comprise entre le noyau et le premier sillon. Cest aussi dans ce sens que se diri- gera l’axe du fuseau, lequel sera disposé non pas exactement suivant la plus grande largeur du segment, mais un peu plus horizontalement, la pointe du fuseau qui regarde le premier sillon étant légèrement abaissée, et le plan de division tombera sur le second sillon. Quant au segment inférieur, sa portion protoplasmique prépondérante est située en dedans du noyau, entre ce dernier et le premier sillon, et à peu près à la même hauteur que le noyau, ce qui tient à la forme étroite du seg- ment. Par suite le fuseau est à peu près perpendiculaire au premier sillon, d’où il s'ensuit que Île sillon qui lui succède est presque parallèle au premier sillon. Ainsi les sillons méridiens de troisième ordre ne partagent pas en parties égales les seg- ments préexistants comme cela arrive habituellement dans la segmentation. Cela tient à ce que les noyaux n'étant pas situés 228 L. VIALLETON. au centre des segments, le protoplasma est réparti inégale- ment autour des noyaux, et que la portion prépondérante du protoplasma dévie de son côté l’axe du fuseau. Dans tous ces cas le noyau est excentrique dans l'élément considéré. Cette position du noyau se rencontre surtout au début de la segmen- tation, elle est due à ce que, lorsque l'aire des segments est très étendue, l’écartement des taches polaires qui règle la posi- tion des futurs noyaux, n'est pas aussi grand que l’écartement des centres des nouveaux éléments formés. Dans les cas où le noyau est situé au centre des segments, la forme du proto- plasma influe également sur la direction du fuseau, laquelle est donnée par la position des plus grands amas de substance protoplasmique que l’on peut distinguer autour du noyau. Ainsi dans le cas d’un segment étroit et allongé (supposé dirigé verticalement) le protoplasma est plus abondant au-dessus et au-dessous du noyau que sur les côtés, le fuseau sera donc dirigé de haut en bas et la division sera transversale. Dans un seoment triangulaire large constitué comme le sont ceux de la Seiche, le protoplasma est plus abondant au contraire à droite et à gauche du noyau, et le fuseau se dirige d’un côté à l’autre, et la division est longitudinale. Il est inutile d'insister davantage là-dessus. 0. Hertwig (1) a déjà fait remarquer il y a peu de temps que la position d’un fuseau est réglée par la distribution du protoplasma qui l’en- toure. Je ne suis entré dans quelques détails au sujet des pre- mières segmentations, que pour deux raisons. Premièrement parce que celte étude montre d’une manière incontestable l’influence du protoplasma sur la direction de la segmentation, comme l’a déjà indiqué Hertwig, et secondement parce que cette étude donne la raison de l'inégalité des premiers seg- ments du blastoderme de la Seiche. Mais, avant d’insister sur ce dernier point, je veux dire encore un mot sur la première segmentation. (1) Welchen Einfluss übt die Schwerkraft auf die Theilung der Zellen (Jenai. Zeitsch. Naturwiss., Bd XVII, 1885). ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 299 Les observations que l’on possède sur les relations qui existent entre la direction des pronuclei et la direction du pre- mier sillon de segmentation ne sont pas assez nombreuses (voy. p. 199) pour permettre de décider si le rapport qui existe chez la Seiche entre ces deux phénomènes est général et con- stant. En admettant qu'il le soit, l'influence que la direction des pronuelei exerce sur la première segmentation est-elle contraire à notre manière de voir sur le rôle du protoplasma comme directeur de la segmentation? En aucune façon, parce qu'il est évident que les pronuclei exercent tout d’abord une action considérable sur le disque germinatif, et que ce dernier n'existe pour ainsi dire que par eux. En outre, pendant leur marche à travers le protoplasma, les pronuclei peuvent créer dans ce dernier des modifications multiples, lesquelles agiront plus ou moins directement sur le premier noyau de segmenta- tion pour diriger sa division, et la concordance entre le plan de la première division et la ligne de direction des pronuelei peut tenir précisément à ce que les modifications créées dans le protoplasma sont réparties également des deux côtés de cette ligne. L'inégalité des quatre premiers segments du blastoderme de la Seiche est liée à la position des noyaux des deux premiers segments. De même la forme des huit segments du stade sui- vant se déduit de l’inégalité des quatre premiers et de la posi- tion de leurs noyaux. Ainsi de suite, on peut rattacher la forme des éléments de chaque stade à celle des éléments du stade précédent. Donc l'inégalité des segments et la symétrie bila- térale du blastoderme trouvent leur raison d’être dans ce fait que les deux premiers noyaux de segmentation ne sont pas placés au centre des segments auxquels ils appartiennent. Nous avons déjà vu, par le mode de se comporter des segments inégaux, que ces segments ont tous la même valeur morpho- logique. Avec l'explication précédente la clef de leur inéga- lité en grandeur nous est donnée, et nous voyons que cette disposition ne dépend que de la forme du disque germinatif et de la position des noyaux au commencement de la segmenta- 230 L. VIALLETON. ton, et qu’elle n’a aucune signification embryologique spé- ciale. : | COMPARAISONS ET CONCLUSIONS GÉNÉRALES Pour comparer la segmentation des Géphalopodes avec celle des autres Mollusques, je choisirai parmi ces derniers un type dont l’œuf possède une grande quantité de vitellus de nutri- lion, etse rapproche par conséquent le plus possible de celui de la Seiche. L’œuf de Nassa mutabilis étudié par Bobretzky (1) est à peu près dans ces conditions. Chez cet animal, avant la segmentation, le protoplasma est accumulé à un des pôles de l’œuf. Au début de la segmentation ce pôle est détaché du reste de l’œuf par un plan équatorial, en même temps qu’un sillon vertical le divise en deux sphères égales possédant cha- cune un pôle protoplasmique et un pôle vitellin; une de ces sphères se soude au reste de l’œuf, et la masse qu’elle forme avec lui se divise de nouveau comme l’œuf l’a fait, c’est-à-dire en engendrant deux petites sphères et une grosse. Dans Île même temps la petite sphère de la première segmentation restée libre s’est divisée en deux, puis une des dernières sphères produites se soude de nouveau à la grosse sphère vitelline, de sorte que l’œuf consiste à ce moment en trois petites sphères libres, et une grosse sphère renfermant une quantité consi- dérable de vitellus nutritif, et dont l’extrémité protoplasmique est voisine du pôle protoplasmique des trois sphères hbres, et forme avec ces dernières une figure en rosace. Au centre de la rosace les sphères produisent par bourgeonnement chacune une petite cellule, et ce processus continue assez longtemps, —— ces petites cellules se multipliant elles-mêmes par division — de sorte que l’on a à la fin un strate de petites cellules pro- duites par un bourgeonnement des quatre sphères. Parmi ces dernières, les trois sphères libres se sont écartées les unes des autres et se sont reportées sur les côtés de la grande sphère. (1) Studien über die embryonale Entwickelung d. Gasteropoden (Archiv. für Mikroscopische Anat., t. XI). ARTICLE N° 2 DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 231 Enfin la partie protoplasmique de ces sphères est employée à former une couche spéciale de cellules (l’hypoblaste), et la partie nutritive s'ajoute à la masse vitelline. Gette masse vitel- line, qui comprend la plus grande partie de la grosse sphère, ne se segmente pas, et constitue simplement une réserve nutri- tive comme le vitellus de la Seiche; les cellules formées par les quatre premières sphères, après avoir achevé leur bour- geonnement, forment l’entoderme, les petites cellules bour- geonnées constituent l’ectoderme. Donc il y a chez la Nassa toute une portion du vitellus qui ne se segmente pas et qui forme une masse nutritive de nature non cellulaire, contraire- ment à ce qui se rencontre d'habitude chez les Gastéropodes. C'est là un cas qui se rapproche tout à fait de la segmentation partielle des Céphalopodes. À première vue, la séparation des sphères vitellines du reste de l’œuf, par le moyen d’un plan équatorial, semble s'opposer à un tel rapprochement, mais il faut bien remarquer que cette division n’a pas une signification capitale dans la segmentation. Je m’explique. On sait que dans quelques Mollusques le premier sillon de segmen- tation est équatorial et partage dès le début l’œuf en une grosse sphère entodermique (macromère) et en une petite sphère ectodermique (micromère). Si le plan équatorial qui sépare les sphères vitellines chez la Nassa était équivalent au sillon équatorial des Mollusques que je viens de citer, il est clair que la segmentation de la Nassa n’aurait plus rien de commun avec celle des Céphalopodes. Mais précisément le sillon équatorial de la Nassa n’est pas homologue avec le sillon équatorial que l’on observe chez les Mollusques auxquels je fais allusion, et qui détermine chez ces derniers la séparation des éléments de l’ectoderme d’avec ceux de l’entoderme, puisque les sphères vitellines qu'il sépare au pôle protoplas- mique de l’œuf ne fournissent pas l’ectoderme seul, et que la masse inférieure de l’œuf qui reste après son apparition, ne constitue pas le matériel entodermique de l’œuf. En effet les sphères vitellines contiennent à la fois les éléments de l’ectoderme qu’elles produisent par le bourgeonnement de 2859 EL. VIALLETON. leur pôle protoplasmique, et les éléments de l’entoderme, (formés par ce qui reste de leur corps après le bourgeonne- ment de l’ectoderme) qui s’écartent plus tard du sommet de l'œuf, et viennent se placer sur les côtés de la masse inférieure purement nutritive et qui se segmente pas. Par conséquent le sillon équatorial de la Nassa, loin de séparer dès le début le matériel des deux feuillets fondamentaux de l'organisme, isole simplement la partie active de l’œuf, celle qui se segmentera, de la partie inerte et purement nutritive, et cet isolement est dù sans doute à ce que chez la Nassa, le vitellus formatif est accumulé à un pôle de l’œuf, d’une manière prépondérante, et est répandu dans le reste de l’œuf en proportion très faible ou même nulle. Deux choses parlent en faveur de cette hypo- thèse : premièrement ce fait qu'un sillon vertical apparaît simultanément avec le sillon équatorial, ce qui n’arrive jamais dans les autres cas; secondement la fusion qui s’opère entre une des sphères protoplasmiques et la masse inférieure de l'œuf. Par conséquent les sphères vitellines de la Nassa sont des sphères contenant à la lois les éléments de l’ectoderme et ceux de l’entoderme, et les segments de la Seiche leur sont tout à fait comparables. En effet imaginons que le protoplasma qui chez la Nassa est accumulé en quantité assez considérable à l’un des pôles de l’œuf, soit réduit à une lame très mince comme il est chez la Seiche, quelles modifications cela entrai- nerait-1l dans la segmentation”? Tout d’abord il est clair que le protoplasma ne pourrait pas s’isoler par un sillon équatorial de la masse du vitellus, car sa surface de contact avec le vitellus est beaucoup trop étendue et sa minceur est trop grande pour que la formation d’un pareil sillon soit possible. Quant aux sillons verticaux qui chez la Nassa divisent en deux le pôle protoplasmique de l’œuf, détaché par le sillon équatorial, rien ne s’opposerait à leur production. C’est préci- sément ce qui arrive chez la Seiche, le protoplasma ne se sépare pas de la masse principale de l'œuf, et reste sous forme d'une lame mince appliqué à la surface du vitellus nutritif, mais des sillons verticaux le découpent suivant son épaisseur ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 933 en segments qui convergent autour d’un point, autour duquel ils produisent par des divisions répétées de leur sommet un grand nombre de petites cellules. Les premiers segments de la Seiche sont donc comparables aux sphères vitellines de la Nassa, et par suite aux sphères de segmentation dites macro- mères; comme les sphères vitellines de la Nassa, ils produisent par des troncatures répétées de leur sommet des éléments auxquels j’ai donné le nom de blastomères, et qui corres- pondent évidemment aux micromères, car le mode de produc- tion des blastomères par division n’est pas en opposition avec la production des micromères par bourgeonnement, vu qu'il n’ya entre le bourgeonnement et la division cellulaire aucune différence irréductible. Comme les sphères vitellines de Îa Nassa, les blastocones de la Seiche s’écartent de plus en plus les uns des autres, par la production même des micromères à leur sommet. Par suite de l’amincissement graduel de la lame du vitellus formatif à mesure qu’on avance vers la périphérie, les sillons méridiens qui divisent le germe et forment les blas- tocones (macromères) ne s'étendent pas sur toute l’étendue du vitellus formatif, qui dans sa périphérie reste insegmenté. Il en résulte que par l’écartement continu des blastocones, il arrive un moment où ces derniers se trouvent dans la zone périphérique insegmentée du vitellus formatif, dans laquelle ils forment des épaississements qui ne sont plus isolés les uns des autres par des sillons. Cette disposition des macromères qui se rencontre à la fin de la segmentation est secondaire, et tient à la minceur de la lame du protoplasma formatif, et ne peut en rien s'opposer à l’homologation que j'ai faite entre les blastocones de la Seiche et les macromères ordi- naires. La conclusion est que les blastocones et les blastomères de la Seiche sont respectivement comparables aux micromères et aux micromères des Mollusques à segmentation inégale. Les blastocones présentent en outre la même valeur physio- logique que les macromères. C’est par eux que se fait l’accrois- sement du disque germinatif qui fournit la substance des 234 L. VIALLETON. nouvelles sphères de segmentation en voie de production incessante. | Le fait que les sillons méridiens des premiers stades ne se coupent pas perpendiculairement, comme cela est la règle habituelle, s'explique par la raison que les noyaux des pre- miers segments sont excentriques, et que, par suite, la divi- sion des premiers ségments est inégale. D'ailleurs, on peut trouver d’autres cas où les premiers siilons méridiens sont dirigés un peu irrégulièrement. Ainsi, Salensky a démontré que dans l’Esturgeon 1l apparaît tout d'abord, au pôle protoplasmique, un sillon peu profond et qui ne s'étend pas très loin sur là surface de l’œuf. Un peu plus tard, deux sillons situés à peu près dans le prolonge- ment l’un de l’autre coupent le premier à angle droit; enfin, au troisième stade, un sillon également méridien se forme dans chacun des quatre segments délimités par les sillons anté- rieurs et détermine ainsi la production de huit segments. Ges huit segments ne sont pas tous égaux entre eux (1), car les sillons ne viennent pas tous converger au centre du blasto- derme, en interceptant entre eux des angles égaux, il en est qui tombent sur les premiers sillons, à quelque distance du centre, et divisent ainsi le segment dans lequel 1ls se trouvent en deux parties inégales. L’Esturgeon fournit done l’exemple d’une segmentation qui présente certains rapports avec la seg- mentation de la Seiche, car, au début, la segmentation dans l’œuf d’Esturgeon est tout à fait superficielle, et les trois pre- miers stades sont obtenus, comme chez la Seiche, par huit sillons méridiens ne se coupant pas régulièrement à angles droits. À cause des relations qui existent entre la segmentation de l’'Esturgeon et celle de la Seiche, je veux insister un peu sur la segmentation du premier, pour faire bien ressortir la nature et la signification de la segmentation chez les Céphalopodes. Les premiers sillons méridiens qui apparaissent chez lEs- (1) Recherches sur le dével. du Sterlet (Arch. de biologie de Van Beneden, t. IT, pl. XV, fig. 8). ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 939 turgeon sont très superficiels et, dans les premiers moments, ne s'étendent pas sur toute la surface de l’œuf. Si les choses en restaient là, la segmentation de l'Esturgeon ressemble- rait tout à fait à celle de la Seiche, et n’en différerait que parce que, chez cette dernière, l’irrégularité des premiers segments est beaucoup plus grande et, en même temps, est distribuée d’une manière constante, aboutissant à la formation d’un blastoderme symétrique. Mais plus tard, chez l’Esturgeon, les sillons superficiels s’approfondissent, s’étendent sur toute la surface et sur toute l'épaisseur de l’œuf, qu'ils découpent en segments disposés comme les quartiers d’un fruit. Alors appa- raissent des sillons équatoriaux très rapprochés du pôle proto- plasmique de l’œuf, qui détachent le sommet des segments sous forme de petites cellules qui constitueront l’ectoderme, tandis que le reste des segments constitue l’entoderme. Lors même que la segmentation resterait cantonnée à la superficie de l'œuf, cela ne changerait rien à la valeur des segments déterminés par elle, car on sait bien que l’extension d’un sillon dans un œuf dépend simplement des quantités relatives du protoplasma et du vitellus nutritif au sein de cet œuf. Par conséquent, les segments de la Seiche, qui sont produits par des sillons superficiels et sont limités à la superficie de l'œuf, peuvent se comparer aux segments de l’Esturgeon, et, de même que chez ce dernier, la portion supérieure (polaire) de ces segments produit les cellules ectodermiques, tandis que la portion inférieure des segments, la base des blastocones chez la Seiche, représente les cellules entodermiques. Les exemples de la segmentation de l’'Esturgeon et de celle de la Nassa mutabilis suffiront pour faire comprendre ma manière de voir au sujet de la segmentation de la Seiche. La segmentation de la Nassa est, en réalité, le cas le plus rap- proché de la segmentation partielle que l’on puisse trouver parmi les Mollusques, et je suis convaincu que la segmentation partielle est arrivée à s’établir chez les Céphalopodes en sui- vant une série d'étapes dont le cas de la Nassa marque lune des dernières. 9236 L. VIALLETON. RÉSUMÉ DE LA SEGMENTATION Le vitellus formatif est réduit chez la Seiche à une lame placée à la superticie du vitellus de nutrition, au pôle aigu de l'œuf, et dans laquelle on distingue, immédiatement après la fécondation, une portion centrale granuleuse épaisse, disque germinatif, qui passe graduellement dans une portion péri- phérique très mince, formée d’un protoplasma hyalin, lequel se différencie peu à peu à la surface du vitellus, en gagnant le pôle mousse. Le premier sillon de segmentation est méridien, et divise le disque germinatif en deux parties égales. Il est indépendant des globules polaires, c’est-à-dire passe rarement par ces der- niers, mais bien plus souvent à leur droite ou à leur gauche, et sa direction présente, avec les globules polaires, les mêmes rapports que les deux pronuelei, marchant à la rencontre l’un de l’autre, présentaient avec ces derniers. Les deuxième et troisième stades sont produits respecti- vement par deux, puis par quatre sillons méridiens qui déter- minent la formation de quatre, puis de huit segments inégaux, symétriquement placés par rapport au premier sillon, qui devient l’axe du blastoderme. Les globules polaires n’occupent pas exactement le point de convergence des sillons, mais se trouvent placés auprès du premier sillon, à quelque distance du centre du blastoderme. Si l’on oriente le blastoderme en plaçant en haut la partie de l’axe près de laquelle se trouvent les globules polaires, on voit que les huit segments sont ainsi disposés : de chaque côté de l’axe, en haut, un segment large suivi de deux autres segments larges latéraux, et enfin, en bas, un segment étroit. Ces huit segments, bien qu’inégaux, ont tous la même valeur morphologique : ils représentent des macromères. Au quatrième stade, les six segments supérieurs et latéraux se divisent chacun en deux par un sillon méridien; mais les deux segments inférieurs étroits se divisent au contraire par ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 937 un sillon équatorial, qui détache leur sommet sous forme d’une petite cellule qui prend place au centre du blastoderme. Ces cellules, que j'ai appelées blastomères dans le cours de ma des- cription, correspondent à des micromères. A la fin du qua- trième stade, le blastoderme comprend donc deux micromères et quatorze macromères. La segmentation consiste dans la bipartition de chacun des éléments (micromères et macromères) que comporte le blas- toderme à un moment donné. Cette bipartition ne se fait pas simultanément dans toute l’étendue du blastoderme, mais elle commence d’abord dans les éléments (blastocones et blas- tomères) placés dans la portion supérieure du blastoderme, et elle s'achève dans ces éléments avant que les blastocones et les blastomères inférieurs se soient divisés ; mais elle ne recom- mence jamais dans la partie supérieure du blastoderme avant que les éléments qui occupent la partie inférieure se soient divisés à leur tour. À la fin du cinquième stade, le blastoderme comprend douze micromères et vingt macromères. Les douze micromères sont produits de la façon suivante : quatre viennent du dédouble- ment des deux micromères qui existent au stade précédent ; les huit autres sont fournis par la division du sommet de huit blastocones, lesquels descendent directement de chacun des huit blastocones présents au troisième stade, de telle façon que, le cinquième stade accompli, chacun des blastocones (macromères) présents au troisième stade aura fourni au moins un blastomère (micromère). La segmentation continue régulièrement comme une bipar- tition de tous les éléments du blastoderme, mais le nombre des blastomères augmente plus rapidement que celui des blastocones. Par exemple, dans un blastoderme comprenant cent douze éléments (un peu avant la fin du septième stade), ontrouve trente-deux blastocones et quatre-vingts blastomères. A la fin de la segmentation, les blastomères (micromères) sont fort nombreux, plus de trois cents. [ls forment une plaque circulaire limitée en dehors par la zone des blastocones. Les 238 L. VIALLETON. . micromères qui forment cette plaque sont disposés sur un seul plan, leur contour est polygonal irrégulier et leur taille est variable. En général les plus petits occupent le centre, les plus grands le bord de la plaque circulaire qu’ils constituent par leur réunion. Par suite, on peut distinguer dans cette dernière une aire centrale formée par de petits micromères assez régu- liers, et une zone située en dehors de ces derniers, occupée par des micromères de plus grande taille, qui joueront un rôle spécial dans la suite. C’est la zone moyenne. En dehors de la zone moyenne se trouve la zone des blastocones, lesquels sont à ce moment de simples amas de protoplasma granuleux pourvus d’un noyau, situés dans la lame hyaline très mince et parfaitement continue entre eux. CHAPITRE IV Formation de l’embryon et de la membrane périvitelline. Pendant tout le cours de la segmentation, le blastoderme se compose d’un seul strate d'éléments appliqués étroitement sur le vitellus, et ne laissant entre eux aucune cavité de seg- mentation. D'accord avec Ussow, nous avons fixé la fin de la segmentation au moment où l’on voit apparaître dans des points déterminés, un second plan de cellules engendrées par la division des blastomères perpendiculairement à leur hau- teur. Ces cellules ont été généralement considérées comme formant la première ébauche d’un feuillet distinct, le méso- derme. Les changements dont le blastoderme est le siège à cette période du développement ne se bornent pas seulement à la production du strate profond dont je viens de parler; la zone périphérique du blastoderme, occupée par les blastocones, se transforme en une couche spéciale très mince, qui recouvre le vitellus, et s’intercale peu à peu entre lui et l'embryon, et à laquelle on a donné le nom de membrane périvitelline. Le rôle des blastocones dans la constitution de la membrane ARTICLE N° 9, DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 239 périvitelline a été entièrement méconnu, aussi bien par les auteurs anciens que par les plus récents, sans doute à cause des changements profonds que ces éléments subissent, et qui, en leur faisant perdre leur aspect primitif, ont fait penser à la plupart qu’ils disparaissaient, sans doute aussi à cause de la minceur et de la fragilité de la membrane périvitelline, qu'il est difficile d'isoler du vitellus au début de sa formation et qui, restant adhérente à ce dernier, se sépare du blastoderme lorsqu'on le prépare pour létude. La connaissance du mode de formation et de l’origine de la membrane périvitelline est d’une importance capitale pour la compréhension des feuillets fondamentaux de l'embryon, l’ectoderme et l’entoderme. Pour en donner une idée exacte, je considérerai isolément tout d’abord les transformations qui s’opèrent dans chacune des zones que l’on peut distinguer dans un blastoderme à la fin de la segmentation. Ces zones sont au nombre de trois : 1° la zone périphérique ou zone des blastocones; 2° la zone moyenne, et 3° la zone centrale, ces deux dernières constituées exclusivement par des blastomères. La zone périphérique répond à la portion hyaline amincie du vitellus formatif. Les blastocones sont à ce moment de simples épaississements de protoplasma granuleux pourvus d’un noyau, disposés dans la continuité de cette mince lamelle hyaline. Ils ont la forme de massues, ou selon l'expression de Kôlliker de comètes, leur partie renflée (tête) est contiguë aux blastomères, et leur partie effilée (queue) s’allonge dans la direction d’un rayon, en s’amincissant de plus en plus. Leur noyau occupe leur partie renflée. À un certain moment ces noyaux se multiplient et le corps du blastocone se divise en autant de parties qu’il y a de noyaux. Alors à la place de chaque blastocone on trouve un groupe de quatre, six, huit, etc., éléments disposés les uns à côté des autres par files serrées, qui forment autour du blastoderme des rayons assez larges, auquels on peut donner le nom de files radiales (fig. 35). Les éléments produits par la division des blastocones pré- sentent ceci de particulier, que les sillons qui les séparent 9240 L. VIALLETON. les uns des autres ne pénètrent pas dans toute l’épaisseur du protoplasma, mais restent limités à sa surface, de sorte que les éléments nouvellement produits ne sont séparés les uns des autres qu’à leur superficie, et communiquent largement par leur profondeur entre eux et avec la lamelle hyaline qui les supporte. Le peu de profondeur de ces sillons est prouvé par l’examen des coupes ; on voit par exemple, figure 40, un sillon légèrement oblique, qui n’entame que la partie superficielle du protoplasma. Au début les nouveaux élé- ments qui proviennent de la division des blastocones ont la forme de polygones à quatre ou cinq côtés, serrés les uns contre les autres, de sorte que les files radiales ont l’aspect d’un épithélium pavimenteux (fig. 35); plus tard ils s’écartent les uns des autres, d’abord très légèrement, leurs angles s'émoussent, et leur contour, de polygonal devient arrondi, puis peu à peu la distance qui les sépare grandit, si bien qu'ils forment des corps arrondis ou ovales, pourvus d’un noyau, dispersés à quelque distance les uns des autres, isolément ou par groupes de deux. Par cette série de transformations qui commencent à la périphérie des files radiales, ces dernières se disloquent et s’égrènent pour ainsi dire. On voit alors comme dans la figure 35, les files radiales encore larges et à élé- ments polygonaux dans leur partie qui est en contact avec les blastomères, se prolonger vers leur périphérie par des éléments arrondis isolés. Il y a donc une véritable migration des éléments produits par la division des blastocones, migration qui les transporte à des points assez éloignés de leur lieu d’origine. En outre, à mesure qu’ils s’écartent les uns des autres, les éléments des files radiales subissent des change- ments importants dans leur constitution. Ils deviennent moins apparents, comme s'ils perdaient une partie de leur sub- stance, et leur contour devient moins net.On voit figure 38, un groupe de deux de ces éléments arrondis, séparés l’un de l’autre par un sillon très étroit, pourvus chacun d’un noyau et pré- sentant un contour très net. À côté d’eux se trouvent deux éléments évidemment de même nature, ainsi que le prouvent ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 241 leur mode de groupement de part et d'autre d’un sillon, les caractères de leur noyau, leur aspect, en un mot toute leur structure, mais qui présentent avec les premiers une différence importante, en ce que leur contour n’est pas limité. Le pro- toplasma granuleux qui constitue leur corps, plus épais autour du noyau, diminue peu à peu d'épaisseur en s’éloignant de ce dernier, et passe dans la lame hyaline sans transition marquée, et comme en s’y perdant peu à peu. C’est là une forme de transition, dans laquelle on peut encore reconnaître quelques- uns des caractères des éléments formés par la division des blastocones, mais qui présente cette disposition importante, que le contour propre des éléments a disparu, et que leur individualité tend à se perdre. Ainsi les éléments des files radiales, de polygonaux deviennent arrondis, puis s’écartent les uns des autres, et enfin leur protoplasma commence à diffuser peu à peu dans la lamelle hyaline. Finalement le pro- toplasma se réduit encore davantage, et à la place d’un élé- ment arrondi présentant un corps protoplasmique assez volu- mineux et un noyau, on ne trouve plus qu’un noyau logé dans la couche hyaline du vitellus formatif, dans laquelle il déter- mine un léger renflement. Ces noyaux entourés d’une faible quantité de protoplasma granuleux, et qui sont disposés autour du blastoderme à la surface du vitellus de nutrition, répondent à ces noyaux que Ray Lankester a appelés autoplastes et que d’autres auteurs appellent noyaux vitellins. La formation des noyaux vitellins ne se fait pas seulement à l’extrémité périphérique des files radiales, c’est-à-dire dans la partie de ces files la plus éloignée du blastoderme ; mais entre deux files radiales à éléments polygonaux, on trouve souvent des blastocones qui ne sont pas divisés, et se sont trans- formés immédiatement en noyaux vitellins, de sorte que l’on peut rencontrer des noyaux vitellins parfaitement constitués, dans l’étendue de la membrane hyaline comprise entre deux files radiales consécutives, dont les éléments sont encore au début deleurs transformations. ANN. SC. NAT., ZOOL. 1888., VI, 16. — ART. N° 2. 249 L. VIALLETON. Les noyaux vitellins se présentent sous deux aspects prin- cipaux. Les uns sont volumineux, ovales, quelquefois un peu déformés; leur contenu est clair et renferme des grains chro- matiques de petite taille (fig. 39). Les autres sont plus petits et plus nettement arrondis, leur contenu est moins clair, et leurs grains chromatiques sont plus serrés les uns contre les autres. Cette dernière forme paraît devoir se rapporter à des noyaux jeunes. On trouve souvent deux noyaux vitellins assez voisins l’un de l’autre, et formant un groupe isolé dans la membrane hyaline. Cette disposition est-elle due à la transfor- mation sur place d’un groupe de deux éléments comme ceux que représente la figure 38, ou bien à la division d’un noyau vitellin? Ces deux hypothèses sont également acceptables. Il est assez rare d'observer la division indirecte des noyaux vitel- lius, bien que cette division existe comme on le verra plus loin, et, comme ces noyaux se multiplient beaucoup, 1l est probable qu'ils se divisent à la fois par division indirecte et par simple étranglement. Lorsque les transformations des éléments des files radiales sont achevées, la zone périphérique a pris une structure spé- ciale. Primitivement elle consistait en une lame hyaline, dans laquelle les blastocones étaient disposés comme une couronne autour du disque formé par les blastomères. Actuellement, elle consiste en une lame protoplasmique continue semée de noyaux, c’est-à-dire en un véritable plasmodium. Son bord interne est situé immédiatement en dehors des blastomères ; du côté de la périphérie, elle a les mêmes limites que le vitellus formatif, lequel, on s’en souvient, se différencie peu à peu à la surface du vitellus, en gagnant le pôle mousse de l’œuf. Au début, les noyaux ne se répandent pas dans la membrane hya- line très au delà de l'extrémité des files radiales, et ils forment autour du blastoderme une zone assez étroite, et qui n’atteint pas, dans les premiers temps au moins, l’équateur de l’œuf. Plus tard cette zone s’étend dans les deux sens, en dedans où elle s’avance au-dessous du blastoderme, et en dehors où elle tend à recouvrir le pôle vitellin de l'œuf. Il est l'acile de recon- ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 243 naître sur les coupes la zone périphérique, parce que Le proto- plasma qui la forme est plus homogène et plus réfringent que le protoplasma dont sont formés les blastomères, et cette diffé- rence est toujours très marquée, de sorte que les coupes présentent l’aspect que j'ai dessiné figures 41, 49, 43, 44. Cette membrane semée de noyaux, qui s'étend peu à peu sur le vitellus, constitue ce que l’on appelle la membrane péri- vitelline ou yolk epithelium (R. Lankester). En même temps que la zone périphérique subissait les transformations qui aboutissent à la formation de la membrane périvitelline, la zone moyenne du blastoderme est devenue le siège d’une prolifération abondante, qui a amené la formation de plusieurs strates de cellules superposés. Les cellules pro- fondes engendrées par cette prolifération, ont été considérées, avons-nous dit, comme représentant le mésoderme; on verra que ces cellules forment en réalité un bourrelet qui sert à l’accroissement du bord du blastoderme. Get accroissement une fois terminé, l’aire embryonnaire est formée, et les pre- mières ébauches des organes apparaissent. La première indication que J'ai trouvée de la formation des strates profonds m'a été fournie par le blastoderme dont j'ai représenté une partie figure 56. On voit queles blastomères qui répondent à l'aire centrale, sont assez petits, en forme de polygones réguliers, pourvus d’un noyau généralement en repos. Les blastomères qui forment la zone moyenne sont au contraire un peu plus grands, et en voie de division active. Beaucoup viennent d'achever de se diviser, on reconnait leurs noyaux ovalaires, assez colorés, et plus petits que ne le sont les noyaux adultes. D’autres en sont aux premières phases de la reconstitution des noyaux fils, les plaques chromatiques secondaires formées par la plaque équatoriale du fuseau ont à peine fusionné leurs filaments en une masse commune. Enfin quelques-uns présentent un beau fuseau nucléaire. La plupart de ces divisions se font suivant des plans verticaux, de telle manière que les deux cellules nouvellement formées prennent place l’une à côté de l’autre dans le plan du blastoderme, 244 L. VIALLETON. Cela est indiqué très nettement par la position des noyaux jeunes et par la direction des fuseaux dont l’axe est horizontal et situé dans le plan du blastoderme. Mais dans les cellules fv, fv, l'axe du fuseau est au contraire perpendiculaire à ce plan, de telle sorte que le fuseau se présente à l’observateur debout, c’est-à-dire avec son axe dans la direction du rayou visuel ; on voit alors la plaque équatoriale du fuseau de face, et elle apparaît comme un disque formé de petits traits ou de points, suivant que les filaments chromatiques qui la com- posent sont vus plus ou moins en raccourci. Dans une autre cellule ob, le fuseau est très fortement oblique dans le sens vertical. Chacune de ces cellules, en se divisant, produira deux cellules superposées et non plus placées côte à côte sur un même plan, et qui constitueront les premiers rudiments d’un strate profond. Les cellules qui se divisent ainsi sont situées sur un cercle placé un peu en dedans du bord du blastoderme comme on le voit dans la figure 36, et dans les coupes 40 et 41. En dedans de ce cercle se trouve l’aire cen- trale, en dehors de lui les blastomères périphériques forment pour quelque temps encore une seule couche, mais bientôt ils se divisent à leur tour, et toute la zone moyenne présente une épaisseur de deux à trois couches de cellules. À cause de cette épaisseur, la zone moyenne présente une teinte plus sombre que le reste du blastoderme, ce qui lui a fait donner par Ussow le nom d’aire opaque (area opaca). Cette expression rend bien l’aspect de la zone moyenne, mais 1] faut la rejeter cependant, parce qu’elle peut faire naître des confusions. Ce que l’on appelle aire opaque chez les Ver- tébrés, n’a en effet rien à faire avec la zone moyenne du blasto- derme des Céphalopodes, c’est une partie extra-embryonnaire, et qui ne prend aucune part à la formation du corps, tandis que la zone moyenne chez la Seiche fournit la majeure partie du corps, la zone centrale n’étant employée qu’à la formation de l’épithélium coquillier. Les premières cellules du strate profond prennent une part active à la prolifération du bord du blastoderme, et fournissent ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 945 de nombreux éléments en même temps que les cellules super- ficielles qui continuent à se diviser suivant leur hauteur. Il en résulte que la zone moyenne forme en réalité un bourrelet assez épais, dans lequel on ne peut pas reconnaître pour le moment des feuillets distincts; les éléments y sont confondus d’une manière imextricable, comme dans tous les points où la prolifération cellulaire est très active, et qui servent à l’ac- croissement de l’embryon. Il faut se rappeler que les premiers éléments des strates profonds sont engendrés par délamination aux dépens des cellules ectodermiques jusqu'alors disposées sur un seul plan. [ls entreront dans la constitution du méso- derme. L’aire centrale située en dedans de la zone moyenne offre peu de modifications; ses cellules ont régularisé leur forme de plus en plus, et ont pris l’aspect de polygones réguliers à cinq ou à six côtés. Sur les coupes, ces cellules paraissent comme des prismes rangés les uns à côté des autres, et pré- sentent un noyau situé dans leur moitié supérieure. L’aire centrale reste formée d’un seul plan de cellules qui reposent directement sur le vitellus nutritif. Il n’y a pas de cavité de segmentation. Toutes ces transformations achevées, les différences qui existent dès les premiers stades de la segmentation entre les blastocones et les blastomères sont arrivées à leur maximum. Les blastomères forment un disque cellulaire pluristratifié sur ses bords (le blastoderme); les blastocones ont semé leurs noyaux dans toute l'étendue de la lame hyaline, la transfor- mant ainsi en une couche multinucléée, véritable plasmo- dium, la membrane périvitelline. Les rapports entre la membrane périvitelline et le blasto- derme changent alors, et il en résulte une disposition nouvelle d’une grande importance. Le bord du blastoderme empiète sur la membrane périvitelline et la recouvre peu à peu. Par quel mécanisme cela se produit-il? Se produit-il, à un moment donné, une rupture mécanique entre le blastoderme et la membrane périvitelline, ensuite de laquelle les rapports de ces 946 L. VIALLETON. - deux parties seraient changés? En aucune façon. La superpo- sition du blastoderme sur la membrane périvitelline résulte simplement de la structure différente qu'ils présentent l’un et autre. La membrane périvitelline en tant qu’elle est un plasmodium constitue une formation particuhère, qui par la multiplication de ses noyaux tend à augmenter l’étendue de sa surface, mais non pas à concourir en commun avec les cellules du blastodérme à l’aceroissement général du bord de lem- bryon, et par sa nature même, elle doit occuper une position particulière dans le germe, et former une couche indépendante spécialisée. Au début de sa formation, elle s'appuie contre les cellules du blastoderme (fig. 40); par son accroissement, elle envoie au-dessous de ces dernières une mince lame de sa propre substance (fig. 42); en même temps, les cellules du blastoderme se multiplient, elles forment le bourrelet que nous avons décrit, lequel s'enfonce légèrement dans le vitel- lus nutritif. Alors, la membrane périvitelline, qui est déjà en partie sous le blastodeérme, subit vers le bord de ce dernier une inflexion assez forté, sa partie périphérique se trouvant à la surface du vitellus, sa partie interne étant enfoncée dans le vitellus par l'accroissement du bourrelet. Lorsqu'il se trouve un noyau vitellin au niveau de cette inflexion, le protoplasma qui l'entoure, refoulé entre le blastoderme et le vitellus, prend la forme d’un coin, avec sa base tournée en haut, et son tran- chant s’enfonçant dans le vitellus, Ges noyaux donnent aux blastodermes, examinés à plat, un aspect particulier. On les voit formant autour du blastoderme une ligne plus ou moins continue, et ils apparaissent, bien qu'à demi-recouverts par le bord du blastoderme, grâce à leur teinte assez foncée et à leur aspect homogène (fig. 37). Le bord interne de la membrane périvitelline est ainsi inter- calé entre le vitellus et le blastoderme, en dehors de ce dernier la membrane périvitelline recouvre seule et pour un temps encore assez long le vitellus. Au début, elle ne s'étend pas sous le centre du blastoderme (fig. 34), mais bientôt ses noyaux se multiplient à son bord interne, en se divisant sui- ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 947 vant le procédé indirect (ils montrent alors les figures karyo- litiques ordinaires), et au bout de quelque temps elle est parfaitement continue, s’interposant partout entre le vitellus et l'embryon, et ne laissant aucun point de ce dernier en contact direct avec les substances nutritives. Sur les coupes, on trouve souvent au-dessus du blasto- derme une fine membrane, fortement colorée par l’hémato- xyline, qui recouvre le pôle protoplasmique de l’œuf. Cette membrane est très souvent emportée dans les préparations que l’on fait subir à l’embryon avant de le mettre en coupe; je pense qu’elle répond à la membrane vitelline de Bobretzky, et sa présence donne raison à ce dernier auteur contre Ussow, qui nie à tort qu'il y ait jamais de membrane autre que le chorion, au-dessus du blastoderme. Les différents auteurs sont loin d’être d'accord sur les phéno- mènes qui se passent dans le blastoderme des Céphalopodes à la période où nous en sommes arrivés. Les divergences qui les séparent portent principalement sur les trois points sui- vants : 1° que deviennent les segments (blastocones) ? 2° com- ment se forme le mésoderme ? 8° comment se forme la mem- brane périvitelline ? Kôlliker, qui a d’ailleurs très bien décrit la constitution du blastoderme à la fin de la segmentation, a le premier émis l'hypothèse que les segments se fondaient dans le vitellus et disparaissaient (1). Quant à la constitution de l’embryon après la période qui suit la segmentation, Kôlliker en a eu une notion très juste, comme le montre la citation suivante (2) : « .… Le germe se divise en deux couches, une interne et une externe : la première forme le sac vitellin interne et externe, et comme cela se verra encore plus clairement dans la suite, n’est d'aucune importance pour la formation de l'embryon, mais constitue simplement une couche qui limite ce dernier d'avec le vitellus; la seconde forme l’embryon avec tous ses organes, et comme le montrera le prochain chapitre, forme de (1) Entwik. d. Ceph., p. 28. (2) Ibid., p. 61. 948 L. VIALLETON. préférence avec ses couches Internes les organes de la vie végétative, et avec ses couches externes les organes de la vie animale. » Il est impossible de mieux opposer la membrane périvitelline et le blastoderme, et de mieux exprimer la struc- ture de l'embryon. Aussi, bien que Külliker ne soit pas arrivé à la notion des feuillets telle que l’ont formulée plus tard les embryologistes, on doit reconnaître qu’il s’en est approché de bien près. Les opinions des auteurs postérieurs à Kôlliker peuvent se ramener à trois : 1° le mésoderme se forme par invagination du bord du blastoderme (Bobretzky) ; 2° le mésoderme se forme par délamination (Metschmikoff, Ussow). Dans les deux cas, la membrane périvitelline est une différenciation du méso- derme ; 3° la membrane périvitelline est formée par des noyaux libres (R. Lankester, Brooks). Nous examinerons séparément chacune de ces manières de voir. Bobretzky (1), n'ayant pas observé la division transversale des cellules du blastoderme pour former le plan profond, pense que cette division n'existe pas, et que le mésoderme est produit par une inflexion en dedans du bord du blastoderme. C'est là une idée purement théorique, ainsi que le montre l’ob- servation directe. Pour ce qui est de la membrane périvitel- line, Bobretzky pense qu’elle est formée par une différenciation du mésoderme, bien que son origine soit restée peu claire pour lui. Il la regarde en outre comme une formation secondaire de peu d'importance, ce que réfute suffisamment son apparition si précoce. La formation du mésoderme par délamination a été sou- tenue par Ussow, qui a donné de bonnes preuves en faveur de cette opinion. Ussow a très bien vu la formation des files radiales, et paraît même avoir observé la migration des élé- ments de ces files, si l’on s’en rapporte à ses figures (2), mais il n’a pas suivi la transformation de ces éléments en noyaux de la membrane périvitelline, et il pense que la formation des (1) Mecrbropauia, etc., p. 10. (2) Hadzrwozenia, pl. IV, fig. 37. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 949 files radiales (multiplication des segments) n’est que la conti- nuation du processus de segmentation dans la portion péri- phérique mince du vitellus formatif, et que les éléments qui résultent de cette segmentation contribuent à l’extension du blastoderme (1). En réalité il ne les distingue pas des autres éléments de segmentation. Naturellement à la suite de cette erreur, 1l n’a pu reconnaître exactement le mode de formation de la membrane périvitelline, et il a pensé qu’elle se formait par une différenciation du mésoderme. Ray Lankester (2) admit de son côté que des noyaux se for- maient dans la profondeur du vitellus, et venaient se placer à la surface de ce dernier autour du blastoderme. Ces noyaux, qui différaient des noyaux de segmentation en ce qu’il « ne se seg- mente pas une aire protoplasmique autour d’eux », jouaient un certain rôle dans la constitution du blastoderme, à l’excep- ton de l’ectoderme où ils ne pénétraient pas, et finalement formaient à la surface du vitellus, au-dessous du blastoderme, le yolk epithelium qui correspond à la membrane périvitelline. Ray Lankester opposait ces noyaux sous le nom d’autoplastes aux noyaux de segmentation qu'il appelait Ælastoplastes. Les transformations des blastocones expliquent tout autrement l’origine des noyaux de la membrane vitelline, mais il faut faire remarquer en outre que ces noyaux ne prennent pas part à la formation du blastoderme. 11 n’est pas besoin d’ajouter que la production de nouveaux noyaux est toujours limitée au disque germinatif, et qu'il ne se produit jamais d’éléments cellulaires en dehors de ce dernier, dans le vitellus nutritif. Si cela arrivait, je n’aurais pas manqué de le remarquer sur mes nombreuses coupes, qui ne m'ont jamais rien présenté de pareil. Ces remarques faites, J'ajouterai que Ray Lankester est certainement celui des embryologistes qui a le mieux connu la nature de la membrane périvitelline ; sans qu’il se soit pro- noncé d’une manière catégorique sur sa valeur morphologique, il tend à la regarder comme une formation entodermique, et (1) Untersuchungen, p. 603. (2) Observ. on the devel. of the Ceph., p. 39-40. 950 L. VIALLETON. _il Va comparée avec la membrane périvitelline des poissons osseux, ce qui me parait Lout à fait fondé. Nous reviendrons d’ailleurs sur ce sujet. Brooks a adopté les idées de R. Lan- kester sans rien y ajouter de nouveau. La membrane périvitelline par son mode de formation, par sa structure et par ses rapports, mérite qu’on lui accorde une crande attention, Par son mode de formation elle se montre comme une formation entodermique, puisqu'elle provient des blastocones qui sont de vrais éléments hypoblastiques. À cette période du développement, de nouveaux rapprochements s'imposent entre l’œuf de Seiche et celui de la Nassa. Si l’on compare la figure 34 qui représente un œuf de Seiche au moment où la membrane périvitelline commence à être recouverte par le bord du blastoderme, avec la figure 28, planche IX de la Nassa donnée par Bobretzky, on voit que la membrane périvitelline présente exactement les mêmes rap- ports avec le reste de l’œuf, que les cellules hypoblastiques de la Nassa. Celles-ci sont intercalées entre le bord de lectoderme et le vitellus de nutrition non segmenté, absolument comme l’est la membrane périvitelline de la Seiche, et comme cette dernière, elles sont limitées à une zone située au bord du blas- toderme, qui lui-même ne recouvre encore qu’une partie du vitellus. Une coupe de l’œuf de la Seiche à cette période du développement correspond donc tout à fait à une coupe de l’œuf de la Nassa. Dans les deux cas l’ectodérme forme une calotte qui recouvre en partie le vitellus de nutrition com- posé d’une masse non segmentée, et l’entoderme est représenté par une bande étroite de cellules placées au pourtour de l’ec- toderme, et qui s’intercalent entre ce dernier et le vitellus. La position du mésoderme chez la Nassa correspond aussi à celle du mésoderme chez la Seiche, si l’on considère comme méso- derme les couches profondes du bourrelet cireulaire du blas- toderme. [l est vrai que l’hypoblaste de la Nassa diffère de la mem- brane périvitelline en ce qu’il se compose de cellules assez volumineuses, distinctes les unes des autres, tandis que la ARTICLE N° 2, DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 9251 membrane périvitelline est un plasmodium. Mais la disposition de la membrane périvitelline en un plasmodium peut tenir à des causes secondaires : par exemple à la minceur de la lame protoplasmique dans laquelle se trouvent les blastocones, minceur qui s'oppose à la segmentation de cette lame, ou bien encore à la présence d’une grande quantité de vitellus nutritif, eten fait, dansles œufs méroblastiques des Vertébrés, la couche cellulaire en contact avec le vitellus est souvent disposée en un plasmodium. D'autre part l’hypoblaste de la Nassa ne s'étend pas dans la suite tout autour du vitellus comme le fait la membrane périvitelline, mais il reste limité à une petite étendue, et de plus il forme directement lerevêtement du tube digestif, ce que ne fait pas la membrane périvitelline ; mais ces différences, par cela même qu’elles se produisent tardive- ment, n’ont qu’une importance secondaire, et ne peuvent pas infirmer les rapprochements qui s'imposent entre la membrane périvitelline de la Seiche et l’hypoblaste de la Nassa, au moment de leur formation. Par conséquent, aussi bien l’origine de la membrane périvi- telline, que ses rapports et les analogies qu’elle présente avec l’hypoblaste de certains embryons, permettent de la conisidé- rer comme une formation entodermique. Dans l'œuf de Seiche arrivé à la période de développetnent que nous venons de considérer, on peut donc distinguer : 4° l’ec- toderme qui forme une plaque arrondie unistratifiée dans son centre, et composée sur son pourtour de plusieurs rangs de cellules, produites aux dépens de la couche superficielle par délamination; 2 le mésoderme (purs), représenté par les strates profonds des bords du blastoderme ; 3° la membrane périvitelline, que l’on peut regarder comme l’endoderme primitif. 9259 L. VIALLETON. CHAPITRE V Les feuillets germinatifs. Le chapitre précédent expose le mode d’origine des trois feuillets germinatifs, ectoderme, mésoderme et entoderme (membrane périvitelline), mais la phase du développement à laquelle nous avons laissé l’embryon, n’est pas assez avancée, pour que nous puissions prendre une notion suffisante de ces feuillets, et il est bon de suivre leur destinée dans des phases ultérieures pour se faire de chacun d’eux une idée exacte. Pour cela, j’exposerai tout d’abord les modifications exté- rieures qui se produisent dans l’embryon, et sont la première expression de la formation des organes, puis, à l’aide de coupes choisies parmi les plus importantes, J'étudierai rapide- ment la disposition des feuillets dans chacun des cas consi- dérés. La connaissance de la forme extérieure de l’embryon deve- nue classique depuis le travail de Kôlliker, me dispensera d'entrer à ce sujet dans de bien grands détails, et je me con- tenterai de donner une description assez brève, destinée seu- lement à rectifier certaines inexactitudes échappées au grand embryologiste allemand, et à permettre de suivre aisément la description des coupes. J’ai figuré seulement quelques coupes qui présentaient les points les plus importants et les plus instructifs, mais je rappelle que mes descriptions sont faites d’après un grand nombre de séries très complètes, et qui m'ont toujours donné des résultats concordants. Lorsque la membrane périvitelline est constituée et qu’elle commence à être recouverte par le blastoderme, ce dernier a la forme d’un disque, mince dans sa partie centrale, qui appa- rait comme un cercle clair, et plus épais à son bord, qui forme une zone obscure (area opaca Ussow). Le bord du blasto- derme s’accroît d’une manière notable, tandis que l’aire cen- trale garde à peu près les mêmes dimensions. À partir d’un ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 953 certain moment, le bord du blastoderme, tout en continuant à s’accroître et à s'étendre sur le vitellus, devient plus mince, et par conséquent plus clair. Toute la portion du blastoderme comprise en dedans de la bande claire qui se forme ainsi à son pourtour constituera le corps de l’embryon; on peut donc l'appeler aire embryonnaire ; la bande claire périphérique est la première indication de cette partie du blastoderme qui entourera plus tard tout le vitellus, c’est-à-dire le sac vitellin exierne. Dans l’aire embryonnaire apparaissent bientôt des change- ments importants (fig. 44,) : le cercle clair qui en occupe le centre se limite plus nettement par un rebord légèrement saillant sur tout son pourtour, sauf vers le haut, où le rebord est interrompu. En dessous de ce point, on distingue une petite tache circulaire sombre gl. ch, que j’appellerai la tache coquillière, parce que c’est à son niveau que se forme, comme on le verra plus tard, l’épithélium qui sécrète la coquille. La zone obscure ne présente pas partout la même teinte; mais elle paraît formée de deux moitiés plus sombres, séparées l’une de l’autre sur la ligne médiane par le cercle central, et par des espaces clairs situés au-dessus et au-dessous de ce dermier. L'espace clair supérieur a la forme d’une large bande, à bords parallèles, qui semble passer dans le cercle central par l’inter- ruption déjà signalée de son rebord. L’espace clair inférieur forme comme un coin qui s’avance entre les deux moitiés de la zone obscure. Il n’atteint pas jusqu’au cercle central, mais laisse se réunir les deux moitiés de la zone obscure au-dessous de ce dernier. Au point de réunion de ces deux moitiés se trouve un épaississement très marqué ep. #” en forme de trait ou de point d'exclamation. Ainsi, dès ce moment, une symétrie bilatérale se manifeste dans l’embryon, de même que l’on en constatait une dans le blastoderme en voie de segmentation. Ayant noté la position d'un certain nombre d’embryons par rapport à l’œuf, j’ai remarqué que l’axe de l’aire embryonnaire se comportait à peu près comme l’axe du blastoderme, c’est- à-dire qu’il était situé tantôt sur un méridien de l’œuf, tantôt 954 L. VIALLETON. - sur un cercle de latitude, mais d’une manière générale en concordance avec ce que l’on peut noter pour le blastoderme, la partie que J'ai appelée supérieure étant tournée vers le pôle aigu de l'œuf. À cause de ces analogies, je suppose que l'axe de l'aire embryonnaire est le même que celui du blasto- derme, mais je n’en ai aucune preuve directe. L’axe de l'aire embryonnaire passe dans le plan médian vertical du corps de l'adulte. Ussow à déjà admis que l’axe du blastoderme est le même que celui du corps ; mais il ne dit pas comment il est arrivé à cette opinion. L’aire embryonnaire augmente d’étendue, non en empiétant sur la partie du blastoderme qui forme le sac vitellin externe, mais par un accroissement propre, intercalaire, de ses diffé- rentes parties. Elle présente en même temps des différencia- tions nouvelles (fig. 45). Dans sa moitié supérieure, de chaque côté, on voit apparaitre une figure ovalaire epe dont les bords sont épaissis et obscurs, et dont le centre est mince et clair. Ces formations occupent les deux côtés latéraux supérieurs de l'aire embryonnaire. Leur bord externe forme sa limite du côté du sac vitellin externe; leur bord interne, divergent du haut en bas, contourne le cercle central à une certaine dis- tance, et leur pointe inférieure est située sur les côtés, un peu au-dessous du centre de la figure. Le bord inférieur de l'aire embryonnaire est marqué par deux épaississements en forme de demi-croissants, bb, qui commencent tous deux à quelque distance de la ligne médiane par une partie renflée, et qui remontent de chaque côté de l'aire embryonnaire en s’effilant de plus en plus. Le cerele central ne présente rien de particu- lier, sinon que son rebord est encore plus marqué; autour de lui et un peu au-dessous du cercle central se trouvent des épais- sissements assez mal limités ep. s, qui entourent plus ou moins la ligne sombre que forme l’épaississement en point d'exclama- tion. En suivant le développement à partir du stade précédent, il est facile de voir que toutes les parties que je viens de nom- mer se sont différenciées dans l’intérieur de l’aire embryon- naire, telle que nous l’avons limitée plus haut ; aucune ne s’y ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 9255 est ajoutée venant d’un point situé en dehors de cette aire. Cela est important, parce que l’on a pensé que les bras nais- saient comme de petites éminences isolées au pourtour de l'aire embryonnaire ; il n’en est rien : ils naissent dans le rebord inférieur épaissi bb, de l’aire embryonnaire, comme on le voit en suivant les figures 45, 46, 47. D’ailleurs, à partir de ce moment (fig. 45), on peut déjà indiquer les différentes parties du corps. Les bras naîtront du rebord inférieur, les figures ovales situées de chaque côté, à la partie supérieure, formeront les parties latérales de la tête, en même temps que les yeux ; à cause de cela, on peut les appeler plaques ou lobes céphaliques (Kôlliker). Les épaississements mal définis qui existent au-dessous du cercle central formeront les différentes parties de l’entonnoir ; le rebord du cercle central est destiné à fournir le manteau, auquel se rattache l’épaississement en point d'exclamation. Plus tard, les rapports de ces différentes parties changent un peu, en même temps que ces dernières se compliquent (fig. 46). Les lobes céphaliques s’accroissent considérable- . ment par leur partie inférieure, de telle manière qu'ils descendent plus bas qu'auparavant dans l’aire embryonnaire, et leur pointe inférieure vient se placer vers le bord inférieur de l’aire embryonnaire, immédiatement en dedans du bour- relet brachial. Dans la moitié supérieure de chaque lobe céphalique apparaît l'œil, lequel à la forme d’un rein allongé, avec son bord convexe parallèle au bord du lobe céphalique. L’œil se développe par sa partie inférieure et externe, de manière que sou bord convexe et son bord inférieur sont déjà fortement marqués, alors qu’à sa partie supérieure 1l se diffé- rencie seulement peu à peu du lobe céphalique. En dessous et en dedans, l’œil est embrassé par un sillon large et assez profond, dont la lèvre interne formera plus tard un pli sail- lant. J’appellerai ce sillon et ce pli, sillon et pli périoculaires. Le pli périoculaire ne divise pas réellement le lobe céphalique en une mpitié postérieure et une moilié antérieure, comme le croyait Külliker ; il est limité seulement au pourtour de l’œil. 956 L. VIALLETON. Du côté de leur sommet, les deux lobes céphaliques passent insensiblement dans la portion de l’aire embryonnaire située sur la ligne médiane et qui les séparait aux stades antérieurs, alors que leurs sommets étaient mieux limités qu'ils ne le sont maintenant. Dans le bourrelet brachial, qui embrasse maintenant les lobes céphaliques, sa branche montante s'étant étendue en haut, on distingue des petits mamelons saillants qui corres- pondent à chacun des bras, et qui sont au nombre de dix. Les plus rapprochés de la ligne médiane forment les bras de la quatrième paire ; puis en dehors, en allant de chaque côté, on trouve les ébauches des bras tentaculaires, puis des bras de la troisième et de la deuxième paire ; les ébauches des bras de la première paire sont situées en avant, de chaque côté de l'œil. L'ordre des bras est le même qu’il sera chez l’adulte ; 1l n’y a pas d’interversion, comme le croyait Kôlliker, ainsi que l'a déjà fait remarquer Bobretzky pour le Calmar. L’aire centrale a pris un aspect spécial ; le repli palléal qui l’entourait est devenu plus large et forme un écusson penta- gonal à sommet inférieur. Sur la ligne médiane, l’épaississe- ment en point d'exclamation est maintenant nettement com- pris dans le repli palléal. Le repli palléal tend à prendre la forme d’un T, dont la branche verticale représenterait son insertion sur le blastoderme, la branche transversale corres- pondant à deux replis qui se forment bientôt, et dont l’un, l'interne, se refermera au-dessus de l’épithélium coquillier, en formant le sac de la coquille, tandis que l’autre, l’externe, deviendra le repli du manteau qui circonserit la cavité palléale (le repli externe se forme un plus tard que l’interne). Les épaississements latéraux ep. s, peu nets au stade précé- dent, ont fait place à des parties bien distinctes. On trouve d’abord de chaque côté de l’écusson palléal les branchies br, puis, en dehors d’elles, un épaississement qui entoure à la fois les branchies et le manteau, et dans lequel on distingue une branche montante et une branche horizontale, réumies entre elles par une courbure. La branche montante représente la ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 257 base de l’entonnoir, sp, la branche horizontale fournira le muscle rétracteur du siphon #r. Les replis tubaires du siphon apparaissent, pour le moment, comme deux épaississements linéaires, so, isolés l’un de l’autre, et des autres parties de l’entonnoir. Enfin, entre les replis tubaires et l’angle inférieur du lobe céphalique, on distingue un épaississement circulaire qui est formé par l’otocyste. L’embryon, que nous décrirons le dernier (fig. 47), diffère peu du précédent; cependant ses lobes céphaliques et son manteau se soulèvent déjà un peu sur le vitellus, et son dia- mètre transversal à diminué en raison même de ce mouve- ment. Sur la ligne médiane, en haut, entre les deux lobes céphaliques, on voit une dépression circulaire qui représente le commencement de l’invagination du stomodœum. Les yeux sont plus arrondis, leurs bords se sont relevés et marchent au- devant les uns des autres ; ils laissent entre eux une fente allongée. Les replis tubaires de l’entonnoir se sont soudés à l'angle de réunion du repli de la base de lentonnoir et du muscle rétracteur. Ils se sont réunis l’un à l’autre sur la ligne médiane, bien qu’ils restent moins marqués en ce point. L’oto- cysle a contracté des rapports spéciaux avec l’entonnoir : elle s’est placée à l’angle externe des replis de la base et des replis tubaires, et elle a alors la forme d’une petite fossette hémi- sphérique entourée d’un rebord mince saillant. Les bran- chies sont déja mamelonnées; sur la ligne médiane, entre Île siphon et les branchies, on trouve un petit tubereule saillant, dû à un épaississement particulier, qui correspond à l’organe assez énigmatique que l’on trouve dans l’entonnoir, et que l’on appelle, du nom de celui qui l’a découvert, organe de Muller. Il faut faire remarquer ici quelques cas où la position de l'embryon par rapport à l’œuf est assez anormale. La position qui m’a paru la plus fréquente et que j’incline à regarder comme la normale, est la suivante : l’axe de l'embryon passe à peu près par un méridien de l’œuf, le sommet de ce dernier étant ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 17. — ART. N° 2. 958 EH. VEALEETON. _ situé juste au-dessus de l’écusson palléal; par conséquent toute la portion inférieure de l'embryon descend plus bas d’un côté de l’œuf, que ne le fait la portion buccale de l’autre côté, puis- que le centre de l'embryon ne se trouve pas au pôle de l’œuf, mais un peu au-dessous de lui. IT peut arriver d’autres fois que, son axe étant toujours vertical, Pembryon atteint seulement le pôle aigu de l'œuf par son bord supérieur ; dans ce cas il ne coiffe plus le sommei de l’œuf, mais est situé tout entier sur un de ses côtés. Enfin le sommet de l’œuf, au lieu d’être sur la ligne médiane de l'embryon, peut se trouver au milieu d’un lobe céphalique, par exemple, de sorte que embryon coiffe l’œuf d’une manière asymétrique. D’autres fois l’axe de l’em- bryon est disposé suivant un cercle de latitude, alors le lobe céphalique droit par exemple touche le pôle aigu de l'œuf, tandis que le lobe céphalique gauche atteint le pôle mousse. Enfin il est des cas, assez rares 1l est vrai, où l’embryon recouvre le pèle mousse (1). Ces variations si considérables dans les rapports de l’em- bryon et de œuf semblent se produire seulement avec la for- mation de l'aire embryonnaire ; en effet, dans les œufs en seg- mentation, j'ai toujours trouvé le blastoderme situé auprès du pôle aigu de l’œuf, et jamais au pôle mousse, tandis qu'il n’est pas très rare de rencontrer à ce pôle l'embryon avancé. Il est donc probable que ces variations tiennent à des modifications dans l’accroissement de l’aire embryonnaire. On comprend en même temps combien 1l devient difficile de décider, en pré- sence de telles variations, si axe du blastoderme en voie de segmentation se mamtüent le même dans la formation de Paire (1) Il est intéressant d’indiquer ici que l'on à noté dans d’autres animaux, une certaine variabilité dans la position de l’axe de l’embryon par rapport à l'axe de l’œuf. Ainsi, chez la Poule, Mathias Duval à montré (Ann. des sc. nat., Zool., 1885) que le corps du petit poulet est d'habitude dirigé perpendi- culairement sur le grand axe de l’œuf, le côté gauche regardant le gros bout de l'œuf. Mais il peut aussi être quelquefois légèrement oblique sur cet axe, et d’autres fois même renversé, c’est-à-dire le côté droit tourné vers le gros bout de l’œuf. Chez la Poule, la position de l'embryon paraît plus stable que chez la Seiche. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 9259 embryonnaire. Un certain nombre de coïncidences entre la position du blastoderme, et la position des embryons qui m’a paru la plus fréquente, me le font penser, mais on voit que cette opinion n’est pas prouvée d’une manière certaine. Nous étudierons maintenant sur des coupes la constitution de l’embryon aux différents moments de son évolution que nous venons de décrire. L’aire embryonnaire est formée, comme on a vu, par un accroissement du bourrelet que forme le bord du blastoderme. Par suite de cet accroissement, les élémenis de ce bourrelet se disposent suivant deux couches parfaitement distinctes, l’une supérieure, l’ectoderme, et l’autre inférieure, le méso- derme. La figure 50 représente la moitié d’une coupe transver- sale passant par le milieu d’un embryon à peu près semblable à celui de la figure 44, dans lequel toutefois la tache coquil- lière n’était pas encore apparue. Sur cette coupe les feuillets présentent les dispositions suivantes : L’ectoderme forme une couche de cellules aussi hautes que larges, au niveau de Paire centrale. Dans cette partie de embryon 1l n’y a pas de mésoderme, et l’ectoderme repose directement sur la membrane périvitelline. En # on remarque un léger soulèvement qui correspond au rebord circulaire de l'aire centrale, et au niveau duquel lectoderme se continue avec les mêmes caractères que ci-dessus, mais plus en dehors, il se montre composé de cellules plus hautes et plus larges, ce qui lui donne en ces points, ep. c, une plus grande épaisseur. Cette région correspond aux futurs lobes céphaliques. En dehors d'elle, l’ectoderme devient de plus en plus mince et se compose de cellules basses, qui passent finalement dans un épithélium aplati, lequel fait partie du sac vitellin externe. Le mésoderme forme une couche de cellules aplaties, dispo- sées longitudinalement entre l’ectoderme et la membrane péri- vitelline. Ces cellules forment généralement une seule assise qui s’étend depuis le pourtour du cercle central jusqu’à la péri- phérie, cependant vers le rebord du cercle central #, elles sont quelquefois disposées sur plusieurs rangs, et ce sont elles qui, 260 L. VIALLETON. par leur présence, déterminent le soulèvement de ce rebord. La membrane périvitelline #pv est partout continue sous le blastoderme, elle forme une lame très mince qui se distingue surtout grâce à la présence des noyaux qu’elle renferme. Ces derniers sont assez volumineux, et en général fortement colo- rés. Ils commencent à ce moment à présenter des déforma- tions considérables, leur surface se couvrant de protubérances et de bosselures; mais ces déformations, qui seront si fré- quentes dans les stades ultérieurs, sont encore rares, et la forme des noyaux de la membrane périvitelline est encore assez régulièrement ovale. Ges déformations des noyaux paraissent liées à la reproduction des noyaux, et elles sont dues à une sorte de bourgeonnement. À mesure que les différenciations de l’aire embryonnaire s’opèrent, on note dans la disposition des feuillets des chan- gements importants. La coupe 51 est faite sur un embryon semblable à celui de la figure 45 et passe transversalement par la tache coquillière et la partie inférieure des lobes céphaliques. En allant du bord au milieu de l'embryon, on rencontre d’abord un ecto- derme formé de cellules aplalies qui appartiennent au sac vitellin externe @. ex; puis les cellules ectodermiques devien- nent plus hautes et prennent une forme cylindrique, c’est le bord de l'aire embryonnaire, lequel passe peu à peu dans le lobe céphalique. À ce niveau (bord externe du lobe cépha- lique) les cellules commencent à se disposer sur deux rangs, en se divisant non pas franchement en travers, mais oblique- ment, de telle façon que des deux cellules nouvellement for- mées, toutes deux aient bien leurs extrémités sur la face externe et sur la face interne de l’ectoderme; mais l’une a sa base tournée en bas vers la face interne et son sommet vers la face externe, et l’autre cellule est placée en sens inverse. Il en résulte que les noyaux se placent suivant des hauteurs diffé- rentes, et forment deux ou trois rangées superposées. Cette porüon de lectoderme est suivie de cellules cylindriques hautes, mais qui ne présentent pas de tendance à se disposer ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 261 en plusieurs couches, et dont les noyaux forment une seule rangée; ces cellules correspondent au centre plus clair du lobe céphalique; elles sont suivies par un nouvel épaississe- ment de lectoderme faisant partie du bord interne du lobe céphalique, et dont les caractères sont semblables à celui du bord externe. Passé ce dernier, l’ectoderme redevient mince, et formé de cellules presque aussi larges que hautes, et se con- tinue ainsi jusque vers le bord de l'aire centrale. À ce niveau il passe dans des cellules qui deviennent de plus en plus hautes, jusqu’au centre de l'aire, où elles forment un épais- sissement marqué, dans lequel les noyaux sont disposés sui- vant plusieurs rangées. Cet épaississement correspond à la tache sombre que nous avons notée dans l’aire centrale. Dans toute l'aire centrale, l’ectoderme est comme auparavant en contact direct avec la membrane périvitelline, il n’y a pas de mésoderme. Le mésoderme présente les même dispositions qu’au stade précédent, toutefois il semble encore plus mince qu'aupara- vant dans les points où l’ectoderme est épaissi; au-dessous des lobes céphaliques, ses cellules sont très rares et forment à peine une couche continue; elles sont plus nombreuses vers le milieu du lobe. Enfin au pourtour de l'aire coquillière, elles forment une couche plus épaisse et plus serrée, laquelle est en rapport avec la formation prochaine des replis palléaux. La figure 52 représente une coupe longitudinale médiane d’un embryon du même âge, qui nous permettra de compléter nos idées sur la disposition des feuillets à ce stade. La partie a. ex correspond au rebord inférieur de l’embryon. En ce point l’ectoderme est bas (cellules aussi larges que hautes) et se continue de la sorte jusque vers l’épaississement en point d'exclamation. On voit qu’en ce point il présente un épaissis- sement notable, dû à des cellules très hautes ep. m, disposées sur un seul rang. Puis l’ectoderme redevient bas et passe dans l’aire coquillière, reconnaissable à l’absence du mésoderme. Dans la partie inférieure de cette dernière les cellules de l’ec- toderme sont cylindriques; elles deviennent de plus en plus 2692 L. VEALLETON. hautes jusque vers le point qui correspond à la tache coquil- Jlière, laquelle est située comme on sait à la partie supérieure de l'aire coquillière. Au delà de l’aire coquillière l’ectoderme se continue, sans Changements importants, sous la forme d’une couche de cellules basses, jusque vers le bord supé- rieur de l'embryon. Le mésoderme présente quelques disposi- tions intéressantes. Dans le bord inférieur de la coupe, il est disposé en une couche mince comme à l’ordinaire, mais en avant de lépaississement ectodermique en point d’exclama- tion, il est formé d’un amas assez épais ams de grosses cellules à noyaux parfaitement sphériques et pourvues d’un corps pro- toplasmique assez volumineux. L'aspect de ces cellules et leur grosseur les font distinguer aisément du reste du méso- derme. L’amas qu’elles forment se retrouve depuis le moment de la formation de l’aire embryonnaire jusque dans les em- bryons, tel que celui représenté figure 46. La position de ces cellules, jointe à tous leurs caractères particuliers, fait suppo- ser qu’elles constituent dans le mésoderme un groupe spécial. En effet, elles occupent cette partie du corps dans laquelle se formeront plus tard le tube digestif et les organes qui l’envi- ronnent, c’est-à-dire les reins, le système vasculaire cen- tral, etc. Je ne veux pas dire que ces cellules servent à former ces organes, cela n’est pas certain, mais elles peuvent être en relations lointaines avec leur formation, et la préparer en quelque sorte. Au-dessous de lépaississement en point d'exclamation, le mésoderme présente ses caractères habituels, il manque dans l'aire coquillière, et au delà de cette dernière forme un léger épaississement. Il s’étend ensuite en une couche mince dans la partie qui correspond au milieu de la portion antérieure comprise entre les lobes céphaliques. Pour résumer la disposition des feuillets dans un embryon tel que celui de la figure 45, on peut dire que l’ectoderme forme un seul plan de cellules peu élevées sur les bords de l'embryon, mais qui deviennent plus hautes au niveau de l’aire coquillière, de l’épaississement en forme de point d’ex- ARTICLE N° 2, DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 963 clamation, et dans les bords des lobes céphaliques, où l’ecto- derme tend à devenir pluristratifié. Le mésoderme, plus épais autour de l’aire coquillière, forme dans le reste de l'embryon une couche mince à peu près égale partout d'épaisseur, sauf au-dessous de l’épaississement en point d'exclamation, où il forme un amas d’allures spéciales. Les coupes 53 se rapportent à un embryon intermédiaire entre ceux des figures 46 et 47, elles sont transversales. La première, 4, passe au niveau de l’épaississement médian en point d'exclamation et de l’otocyste. Son bord représente la coupe de l’épaississement duquel naissent les bras bb. L’ecto- derme en ce point est en voie de prolifération active, surtout dans la partie la plus externe, où il présente plusieurs rangs de noyaux superposés, plus loin il devient mince et unistra- tifié, et enfin passe dans un épaississement epe, qui répond à l'angle inférieur du lobe céphalique, et dans lequel on trouve plusieurs rangs de noyaux. Cette disposition est due à la pro- lifération très active des cellules du lobe céphalique que nous avons déjà vu s’indiquer au stade précédent. Ensuite de cette prolifération le corps protoplasmique des cellules diminue considérablement, il devient difficile de séparer les différentes cellules les unes des autres, et l’ectoderme, au lieu de présen- ter la disposition d’un épithélium plus ou moins haut, se montre comme une couche épaisse de noyaux étroitement ser- rés les uns contre les autres, dont les figures 49 et 54 peuvent donner une idée. Vers la surface seulement on retrouve assez aisément les limites des cellules qui le composent. En dedans du lobe céphalique, on trouve l’otocyste of, quise présente à ce moment comme une simple plaque unie de cellules cylin- driques hautes, disposées sur un seul rang. En dedans de l’otocyste, on rencontre un épaississement ectodermique so, qui correspond à la base du siphon, et sur lequel nous revien- drons plus loin. Au delà l’ectoderme se continue sous la forme d’un revêtement simple de cellules basses, qui s’étend depuis la base du siphon jusqu’au voisinage de la ligne médiane où il se continue avec les cellules hautes de l’épaississement en 964 L. VEALLETON. point d'exclamation, ep, qui s’infléchissent sur la tance mé- diane en formant une légère gouttière. Dans cette coupe le mésoderme est assez rare au-dessous de l’otocyste et du lobe céphalique. La membrane périvitelline ne présente rien de particulier. La coupe suivante, b, passe par le milieu de l'aire coquil- lière et des lobes céphaliques. Le rebord brachial ne présente rien de particulier ; le lobe céphalique, qui est coupé dans sa plus grande largeur, se montre comme un épaississement à noyaux pluristratifiés. Puis l’ectoderme est bas, jusqu’au niveau de l’aire centrale dont les cellules sont devenues toutes égales en hauteur, tandis que jusqu'ici elles étaient plus éle- vées à la partie supérieure, éache coquillière, et plus basses dans le reste de l’aire. Le mésoderme est particulièrement rare au-dessous de l’ectoderme du lobe céphalique, ce qui peut tenir à ce que son développement dans celte partie n’a pas été suffisant pour répondre à l'augmentation des surfaces résultant de l’accroissement général. La coupe c passe en dessus de l’aire coquillière et par le milieu de l'œil. On rencontre en allant de dehors en dedans l’épaississement ectodermique du rebord brachial, puis une couche ectodermique pluristratifiée ep. ç, qui appartient à la partie du lobe céphalique comprise entre le bord de l’embryon et l'œil; un peu avant d'atteindre l’œil, l’ectoderme forme une simple couche de cellules basses, qui se soulève un peu, puis s'infléchit brusquement pour se relier au bord externe de l'œil. Ce dernier, æ, a une forme légèrement bombée, il se com- pose de cellules très hautes et très minces, dont les noyaux pour trouver place ont dù se placer à diverses hauteurs. Son bord externe est plus développé que son bord interne, lequel passe peu à peu sans présenter d’inflexion bien marquée dans un ectoderme bas, qui appartient au sillon périoculaire. Au delà on trouve un épaississement ectodermique formé par la portion interne du lobe céphalique. En dedans de ce dernier, c’est-à-dire dans la portion qui correspond à l’espace situé en dessus de l’écusson palléal, on trouve un ectoderme bas. Le ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 965 mésoderme présente dans cette coupe des dispositions impor- tantes à noter, parce qu’elles sont en rapport avec la formation de certains replis qui vont jouer un grand rôle dans la con- stitution des organes. Ainsi on trouve un coin mésodermique vers le bord externe de l’œil, qui soulève peu à peu ce bord, et va former la lèvre externe de la coupe oculaire; de même vers le bord interne, bien que d’une façon moins marquée encore. Ainsi, dans un embryon tel que celui de la figure 46, l’ectoderme forme des épaississements dans toute l’étendue des lobes céphaliques, sauf la région de l’œil; dans la portion médiane supérieure située entre les lobes céphaliques, dans la région de la base de l’entonnoir et enfin sur le bord externe de l'aire embryonnaire qui constitue le bourrelet brachial. Au niveau de l’otocyste et de l'œil, il forme un épithélium senso- riel particulier. Dans la région palléale, il forme l’épithélium coquillier et l’épaississement spécial en point d'exclamation. Les replis palléaux et les autres parties du corps qui ne sont pas comprises dans l’énumération ci-dessus possèdent un ecto- derme disposé en une simple couche de revêtement. Telle est la disposition grossière, macroscopique pour ainsi dire de l’ectoderme ; mais lorsqu'on l’étudie de plus près, on voit que ce feuillet présente avec le mésoderme des rapports particuliers, et d’une importance considérable. En effet, dans certains points du corps, on ne peut établir aucune limite entre ces deux feuillets, et l’on peut dire qu'ils passent l’un dans l’autre. Cela arrive principalement dans les points où l’ectoderme présente des épaississements, et dans le pour- tour de l’œil. Nous étudierons quelques cas d’une manière spéciale. Dans la plupart des coupes, l’ectoderme de la lèvre externe de l'œil est nettement distinct du mésoderme sous-jacent, comme on le voit dans la figure 53, c;, mais dans d’autres coupes du même embryon, on voit souvent une ou deux cel- lules de l’ectoderme proliférer, dépasser la limite inférieure de ce feuillet et passer dans le mésoderme. C’est ce que 9266 L. VEALLETON. montre la figure 48. Au point », l’ectoderme composé de part et d'autre de ce point de cellules disposées sur un seul rang présente deux ou trois noyaux superposés, et une cellule cpen voie de division avancée; les cellules du point » sont com- munes pour ainsi dire à l’ectoderme et au mésoderme. En outre, dans cette figure, l’amas cellulaire #es est assez bien distinct du mésoderme sous-jacent mes', de sorte qu’il paraît avoir été fourni tout entier par une prolifération ectoder- mique comme celle que l’on voit se faire dans son bord. Des exemples de prolifération ectodermique tels que celui-ci, se voient souvent sur des embryons de cet âge, mais cette proli- fération se fait toujours aux dépens de quelques cellules seu- lement à la fois, qui engendrent quelques éléments qui passent dans le mésoderme, puis cette prolifération cesse en ce point, et l’ectoderme se limite alors nettement des couches pro- fondes. Puis le même processus recommence plus loin avec la même issue. Il n’y a pas de points de prolifération spé- claux, engendrant continuellement pendant un temps plus ou moins long de nouveaux éléments, mais cette prolifération peut se faire isolément dans n’importe quel point du pourtour de l’œil. Dans les épaississements de la base du siphon on observe à peu près la même chose (voy. fig. 49). Là il est impossible de décider où finit le mésoderme et où commence l’ecto- derme, les caractères des cellules de ces deux feuillets sont identiques, et, comme on le voit par la figure, on ne peut douter que quelques cellules profondes ne viennent de l’ecto- derme. Ainsi la cellule inférieure produite par la division de la cellule cp sera comprise dans le mésoderme, tandis que la cellule supérieure sa sœur restera dans l’ectoderme. La même chose se passe vers le rebord externe du bourrelet brachial. Mais il est encore un cas particulier de prolifération de l’ectoderme que je veux signaler parce qu’il présente une importance spéciale. Dans un embryon tel que celui de la figure 47, si l’on examine les coupes des lobes céphaliques ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 267 (fig. 54), on voit que ces derniers ont une épaisseur assez considérable, et qu’ils sont formés de noyaux assez petits empilés les uns au-dessus des autres. Dans la partie profonde de l’épaississement on voit de petits groupes de ces noyaux, plus petits encore et plus colorés que ceux de la partie super- ficielle, qui rompent la limite inférieure de l’ectoderme, et deviennent libres au-dessous de lui. Cette prolifération se fait dans toute l'étendue des lobes céphaliques, mais en plus grande abandance vers sa partie interne, en dedans de l'œil. On peut très facilement reconnaître les éléments qu’elle en- gendre, à leur petite taille (comparer ces noyaux avec ceux des autres figures dessinées au même grossissement), à leur forme arrondie et à leur coloration assez intense. Or, si l’on suit ces éléments dans les stades ultérieurs, on voit qu’ils contribuent à former la majeure partie des ganglions nerveux situés dans cette région, c’est-à-dire les ganglions optiques et les ganglions cérébroïdes. 11 n’est done pas douteux que l’ectoderme fournisse des éléments qui vont émigrer loin de lui, dans le feuillet appelé mésoderme. Cette prolifération, je l’ai constatée bien souvent, sur des embryons de différents âges, dans les points que j'ai signalés, et je rappelle que mon affirmation n’est pas basée sur des cas douteux, comme par exemple l'absence de limite tranchée entre deux feuillets d’une région, mais sur la consta- tation directe de la prolifération de l’un dans l’autre par l’exis- tence de figures karoykinétiques disposées à cheval sur la limite des deux feuillets pour ainsi dire. Il est encore un point remarquable dans l’histoire de l’ecto- derme, c’est la formation de l’épithélium coquillier. Get épithélium est produit par une transformation sur place des cellules ectodermiques de l'aire centrale, qui de basses et larges deviennent hautes et étroites. Cette modification com- mence à partir d’un point qui est en même temps le siège d’une prolifération active. En ce point, qui n’est autre que la tache coquillière, les cellules se divisent un grand nombre de fois parallèlement à leur hauteur en restant toujours 9268 L. VIALLETON. disposées sur un seul rang, 1l s’en forme ainsi un grand nombre, qui ont pour but de fournir à l’accroissement dont l'aire coquillière devient bientôt le siège, en même temps que tout l'embryon lui-même. Dans l'embryon représenté figure 47, la tache coquillière n’existe plus, ou plutôt lPépi- thélium tout entier de Vaire coquillière s’est transformé en cellules hautes, cylindriques, comme celles qui formaient la tache coquillière. La tache coquillière me semble avoir une signification morphologique particulière, et je la crois compa- rable à la formation que l’on a appelée la glande coquillière, ou tout au moins dérivée de cette dernière. En effet, la glande coquillière n’est pas autre chose que le point du corps où l’ectoderme indifférent se transforme en l’épithélium coquil- lier, de même que la tache coquillière est le point de départ de la transformation histologique de lépithélium de Paire centrale. Il est vrai que pour la glande coquillière cette trans- formation s'accompagne d’un processus assez compliqué, d’abord d’invagination, puis d’évagination; mais ce n’est pas là une différence capitale, car cette disposition peut tenir à des causes secondaires. On peut objecter encore que le tampon chitineux que l’on trouve dans la glande préconchy- lienne n’a pas de représentant dans la tache coquillière de la Seiche, cela est vrai, cependant on ne peut nier qu'il y ait une grande analogie de fonction entre la glande préconchy- lienne et la tache coquillière, puisque l’une aussi bien que l’autre sert à préparer, si j'ose ainsi dire, l’épithélium qui sécrètera la coquille. En outre il y a entre elles deux une réelle analogie de position; Ray Lankester ayant montré que, con- trairement à quelques apparences, le sac coquillier des Gépha- lopodes n’a rien de commun avec la glande préconchylienne, il me semble que la tache coquillière devient le seul organe de la région palléale comparable à l’invagination préconchy- lienne. Laissant de côté maintenant le rôle de l’ectoderme dans la constitution des organes des sens, et de l’épithélium de revête- ment du corps, il faut revenir sur son rôle dans la formation ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 9269 du mésoderme. Il fournit, par délamination de son bord, les couches profondes de la zone moyenne, area opaca d'Ussow, couches que l’on regardait comme représentant le mésoderme tout entier, tandis qu’elles ne constituent en réalité qu’une partie de ce dernier, puisque l’ectoderme fournit encore, par de nouvelles délaminations, des éléments qui rentreront dans le mésoderme. Les points où se font ces délaminations secon- daires sont : 1° le pourtour de l’œil, où l’ectoderme fournit en partie le mésoderme des replis de cet organe; 2° Le siphon, où il donne naissance par prolifération à une masse dans laquelle se différencieront plus tard les muscles du siphon et le gan- glion viscéral; 3° les lobes céphaliques, où il engendre des éléments qui entreront pour la plupart dans la constitution des ganglions optiques et cérébroïdes ; 4° l'extrémité des replis brachiaux, où il fournit également des éléments destinés aux ganglions brachiaux et pédieux. Le caractère de ces délaminations secondaires est d’être isolées et partielles, c’est-à-dire que l’on ne voit pas en une région donnée, étendue, une prolifération continue, engen- drant une ébauche massive, mais, au contraire, on voit une ou deux cellules bourgeonner, envoyant dans le mésoderme pré- existant un ou deux éléments nouveaux, qui se mêlent à ceux qui existaient déjà, puis cette prolifération cesse en ce point et recommence à quelque distance. La prolifération secon- daire de l’ectoderme produit les éléments de tissus bien diffé- rents, comme on l’a vu plus haut, puisqu'elle donne à la fois des masses qui deviendront musculaires, d’autres qui devien- dront nerveuses. Il résulte de tout cela que le mésoderme tel qu’il existe au début, avant les différenciations de l’aire embryonnaire, chez un embryon dans lequel la zone moyenne vient de se consti- tuer, et le mésoderme d’embryons tels que ceux représentés dans les figures 46 et 47, ne sont pas une seule et même chose, un seul et même feuillet qui se serait accru d’une ma- nière propre, puisque le dernier contient tout le premier, plus desmatériaux qui se sont ajoutés à lui dans la suite du 970 L. VEALLETON. développement. Il est donc déjà difficile de considérer le méso- derme comme un feuillet légitime, comparable aux deux autres feuillets; mais bien d’autres raisons encore forcent à rejeter cette opinion. Par son mode de formation, le mésoderme des Céphalopodes présente déja une particularité importante, en ce qu'il se forme par une délammation qui a lieu sur {oute la surface du corps, moins une très petite partie de ce dernier, l’aire coquil- lière. C’est là un caractère qui l’éloigne du mésoderme des autres animaux, lequel se forme généralement dans des points limités du corps, soit à partir des lèvres du blastopore, soit aux dépens de cellules spéciales isolées de bonne heure (ini- tiales du mésoblasie), soit, et ce dernier cas est le plus inté- ressant pour nous, au moyen d’une prolifération de l’ecto- derme se faisant suivant deux bandes latérales du corps (Lumbricus trapezoides Kleinenberg). Les analogies sont si nombreuses entre le développement des Vers et celui des Mol- lusques, que l’on pourrait être tenté de regarder la zone moyenne (aire opaque, Ussow) du blastoderme des Céphalo- podes, lieu d’origine du mésoderme, comme représentant les deux bandes germinatives d’un Ver, qui se seraient réunies en avant et en arrière, et qui, par réduction de la longueur du corps, auraient formé un cercle au lieu d’un ovale allongé qu’elles formeraient chez un Ver, leur réunion effectuée. Mais la zone moyenne n’est, comme on la vu, qu'un bourrelet d’ac- croissement destiné à former l’aire embryonnaire. Par suite, elle ne représente pas une région limitée du corps comme les bandes germinatives, mais elle constitue le corps tout entier, à l’exception de l’aire coquillière, et le mésoderme se produit sur toute sa profondeur, c’est-à-dire, en réalité, sur toute l'étendue du corps, et non pas seulement suivant des bandes spéciales. La formation du mésoderme chez les Géphalopodes s'éloigne donc de la formation de ce feuillet chez les Vers, avec laquelle elle ne présente que des ressemblances appa- rentes, et elle s'effectue suivant un mode qui n’avait encore été signalé chez aucun animal il y a quelques années, Mais ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 971 récemment, Sarrazin (1) a montré que, chez un Mollusque, la Bithynia, le feuillet moyen se forme par délamination de l’ec- toderme sur toute la surface du corps, et qu’il reçoit de l’ecto- derme de nouveaux éléments, par des délaminations secon- daires qui se continuent pendant le cours du développement. Il en conclut que le feuillet moyen n’est pas un feuillet auto- nome, comparable aux feuillets primordiaux ectoderme et entoderme. C’est aussi la conclusion à laquelle nous sommes arrivés chez la Seiche. Voici donc deux cas bien nets, dans lequel le mésoderme se montre comme une production hété- rogène, qui ne peut plus être considérée comme un véri- table feuillet. Cela heurte de front les opinions généralement admises. Ne pouvant pas entrer dans des considérations géné- rales à ce sujet, je me contenterai de dire que déjà on a montré que le feuillet moyen ne doit pas être considéré comme un feuillet véritable et, par conséquent, les cas relatés ci-dessus perdent beaucoup de leur apparence daradoxale. Le profes- seur Kleinenberg enseigne dans ses leçons et a montré dans ses recherches sur le développement des Annélides (2), que l’on peut faire dériver tous les organes d’un animal des deux feuillets primordiaux, ectoderme et entoderme, et que lon peut se passer, dans l’embryologie, de la notion du méso- derme. Plus on avance dans la connaissance du développe- ment, plus le nombre des organes que l’on ne peut pas faire dériver de l’ectoderme ou de l’entoderme diminue, et l’on peut espérer qu’il ne restera plus une seule partie du méso- derme que l’on ne puisse rattacher à l’un ou à l’autre de ces feuillets. Déja des formations que l’on considérait comme vraiment mésodermiques, il y a peu d'années, la corde dorsale et les ganglions spinaux, ont été reconnus comme venus res- pectivement de l’entoderme et de l’ectoderme. Je ne puis entrer plus avant dans ces explications, j’en ai dit quelques (1) Entwickel. der Bithynia tentaculata (Arbeiien aus den Zool. Inst. in Würzburg, 1882, t. VI). (2) Die Enistehung der Anneliden aus der larve von Lopadorynchus (Zeitschrift für Wissensch. Zool., 1886). 272 L. VIALLETON. mots seulement pour faire voir que la conception du méso- derme, à laquelle nous à conduit l'étude de la Seiche, rentre assez bien dans le cadre de lembryologie, et n’est pas par trop hérétique; pour des détails plus étendus sur la question géné- rale de la nature du mésoderme, je renvoie au mémoire du professeur Klemenberg. Je dirai quelques mots maintenant sur la formation du tube digestif et des organes annexes, et sur l’apparition du feuillet qui leur donne naissance, auquel on a donné le nom d’ento- derme. L’entoderme apparaît assez tard, et ce n’est pas là une des moindres singularités du développement des Céphalopodes, que ce feuillet, qui d'ordinaire est formé dès les premières phases du développement, ne se montre chez ces dermiers qu'après que des organes comme les yeux, les premières ébauches des replis palléaux, sont déjà formés. Cette appari- tion tardive, en attendant toute autre explication, me permettra de désigner cet entoderme si spécial sous un nom particulier qui empêchera toute confusion. Je l’appellerai entoderme défi- nitif. À un moment donné, on voit apparaître sur la ligne médiane, entre le siphon et la pointe de l’écusson palléal, une sorte de cavité ou de fossette (fig. 55), circonscrite par des cellules épithéliales hautes, cylindriques. Gette fossette est tournée du côté du vitellus, dont elle séparée par la membrane périvitelline, qui passe au-devant de son ouverture. Elle repré- sente une portion de la future cavité digestive et de la poche du noir. De chaque côté de cette cavité, à droite et à gauche, se développe une lame de cellules qui formera, en reployant ses bords, un tube clos qui n’est autre chose qu’un diver- ticule hépatique. Au début, les cellules qui donneront plus tard naissance aux tubes hépatiques forment une lame absolu- ment plane, qui, sur ses bords, passe dans les cellules du mésoderme d’une façon tellement insensible, qu’il semble que ces dernières viennent s’ajouter à elle pour augmenter son étendue. C’est l'opinion qu’a adoptée Bobretzky, et 1l admet que l’entoderme est engendré par des transformations sur place des cellules mésodermiques, et par l’adjonction ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. DATES continue de nouvelles cellules ainsi transformées à celles qui existent déjà. Les autres auteurs qui ont étudié le déve- loppement des Céphalopodes, ont également tous admis que l’entoderme dérive du mésoderme. Je ne puis malheureu- sement fournir là-dessus aucune donnée positive. L’entoderme définitif apparaît chez des embryons très voisins de la forme représentée (fig. 46). Son développement s’effectue si rapi- dement, qu'il est extrèmement difficile d’en voir les premières phases, et personne jusqu'ici n’a eu la bonne fortune de les observer. J'ai rassemblé un certain nombre d’embryons qui, par leurs apparences extérieures, semblaient identiques et paraissaient intermédiaires à ceux dans lesquels l’entoderme n'existe pas encore et à ceux dans lesquels il est entièrement constitué, et jamais je n’ai pu observer exactement le mode de formation de ses cellules. Cependant je ferai remarquer qu’elles ont des rapports avec la membrane périvitelline; la figure 55 montre que les noyaux de cette dernière ont la même direction que les noyaux les plus inférieurs de l’ento- derme, et que ces derniers sont disposés comme s'ils étaient passés de la membrane périvitelline dans la constitution de l’entoderme. En outre, le protoplasma de la membrane péri- vitelline semble plus ou moins directement uni avec celui des cellules entodermiques. La fossette est remplie par un protoplasma disposé en trainées plus ou moins fondues ensemble, et qui font communiquer les cellules entoder- miques et la membrane périvitelline. Souvent on trouve cette fossette occupée par un noyau vitellin qui semble former le moule sur lequel se sont ordonnées les cellules entodermiques. Plusieurs observations me portaient à croire que la formation de l’entoderme définitif était due à la membrane périvitelline, mais je n’ai pas pu réunir unnombre de preuves suffisant pour cela, et je ne puis que signaler la possibilité de cette hypo- thèse. Laissant donc en suspens, à mon grand regret, cette importante question, je n’affirmerai rien de catégorique sur l’origine de l’entoderme définitif, mais Je ferai remarquer, toutefois, que s’il est dù à des transformations des cellules du ANN. £C. NAT., ZOOL., 1888. VI. 18. — ART. N° 2. 274 L, VIALLETON. _mésoderme, comme l’ont admis tous les auteurs, il n’en est pas moins vrai que ses cellules contractent à ce moment des rapports étroits avec la membrane périvitelline, leur proto- plasma entrant en communication plus ou moins directe avec celui de cette dermière, et un noyau vitellin servant d'habitude de moule pour la future cavité de l’entoderme définitif. J'ai donné à la portion de l’entoderme qui forme le revête- ment de la cavité digestive le nom d’entoderme définitif, pour la distinguer de lamembrane périvitelline, à laquelle je réserve le nom d’entoderme primitif. En effet, la membrane périvi- telline est formée par des éléments de segmentation qui sont absolument comparables à ceux qui forment partout ailleurs l’entoderme ; elle représente donc vraiment l'entoderme de la Nassa, ou celui des autres Mollusques, et, comme l’entoderme du tube digestif n'apparaît que tardivement après elle, 1l faut la distinguer de ce dernier et lui donner le nom d’entoderme primiuf. Sa dérivation directe d'éléments spéciaux de la seg- mentation, sa formation précoce, et enfin ses rapports, indi- quent suffisamment son importance, et sa valeur comme véri- table feuillet germinatif; je ne veux pas revenir là-dessus, et Je renvoie pour cela au chapitre précédent. Bobretzky (1) considère la membrane périvitelline comme une formation secondaire, si peu importante, qu’il ne se préoc- cupe pas de sa présence, lorsqu'il compare l’entoderme de la Nassa avec celui des Céphalopodes, et 1l fait remarquer que la membrane périvitelline mise de côté, l’entoderme de la Nassa occupe par rapport au vitellus la même position que celui des Céphalopodes, et comme chez ces derniers s’étend sur une portion très limitée du vitellus. On peut objecter à Bobretzky qu’une membrane dont l'apparition est aussi pré- coce que l’est celle de la membrane périvitelline, ne saurait guère être une formation secondaire. De plus, nous savons que cette membrane n’est pas une simple différenciation du (1) Siudien über die embry. Entwick. de Gasteropoden (Archiv. für Mikroscop. Anat., t. XILE, p. 159). ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 975 mésoderme comme le croyait cet auteur. Mais en outre la comparaison de Bobretzky me paraît pécher en un autre point. En comparant l’entoderme de la Nassa et celui des Céphalopodes, il compare un feuillet dont les cellules sont reconnaissables et distinctes dès les premières phases de la segmentation (lhypoblaste de la Nassa), avec un feuillet dont les cellules n'apparaissent que très tard et n’ont aucun rap- port direct avec les premières sphères de segmentation, puisque pour Bobretzky lui-même, l’entoderme des Céphalo- podes est une différenciation de mésoderme. Par conséquent l’entoderme de la Nassa est primitif par rapport à l’entoderme des Céphalopodes, et il est représenté chez ces derniers par la membrane périvitelline. Ray Lankester me semble être bien plus près de la vérité lorsqu'il compare la membrane périvitelline des Céphalopodes à la membrane quientoure le vitellus, dans l’œuf de Coregonus et des autres Téléostéens, et à laquelle on a donné différents noms, parmi lesquels je rappellerai seulement celui de péri- blaste. Le périblaste des poissons osseux estune couche proto- plasmique multinueléée, un véritable plasmodium, qui enve- loppe le vitellus de toutes parts, formant autour de lui un sac clos, de sorte que le vitellus de nutrition est absolument isolé de l’entoderme, dont les cellules ne sont jamais en contact direct avec les substances nutritives. Il y a donc entre la mem- brane périvitelline des Céphalopodes et le périblaste des poissons osseux les traits suivants communs : 1° tous deux sont formés par des cellules entodermiques ; 2° Ieur structure est la même (ils forment un plasmodium); 3° ils forment autour du vitellus un sac complètement clos; 4° leur fonction est la même, ce sont eux qui assimilent les substances nutri- üves de l'œuf. Grâce à l’obligeance de mon ami le D’ Fusari qui étudiait à Messine le développement d’un téléostéen, le Cristiceps argentatus, Jai pu comparer le périblaste de cet animal à la membrane périvitelline de la Seiche, et je me suis convaincu de la réalité des analogies qu’il y a entre ces deux formations, et que Ray Lankester a signalées le premier. Sans 976 L. VIALLETON. - vouloir établir des rapports plus étroits entre les Téléostéens et les Céphalopodes, ce qui serait certainement inexact, 1l me semble cependant que l’on peut plemement accepter la com- paraison faite par Ray Lankester, entre le périblaste des pre- miers et la membrane périvitelline des seconds, et les ressem- blances qu'il y a entre ces deux formations s’expliquent suffisamment par cela que leurs conditions d’origine (au contact d’une masse énorme de vitellus nutritif) et de fonctionnement sont à peu près les mêmes. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE VII. Fig. 1. Œuf pris dans l’ovaire. Coupe longitudinale (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — fl, follicule; p, protoplasma ; vg, vésicule germinative; chr, chromatine. Fig. 2. Œuf pris dans l'ovaire (plus avancé que le précédent). Coupe longi- tudinale (Oc. 1, obj. 6, Ver.). — {, enveloppe lamelleuse du follicule; gr, membrane granuleuse du follicule; mi, épaississement de la lamelleuse au point où se trouvera plus tard le micropyle ; pn, protoplasma de la vési- cule germinative. Autres lettres comme daas la figure 1. Fig. 3. Œuf pris dans l’ovaire (plus âgé que les précédents). Coupe longitu- dinale (Oc. 1, obj. 6, Ver.). —- Lettres avec la même signification que ci-dessus. Fig. 4. Œuf mûr pris dans l'ovaire ; la déhiscence du follicule est prête à s'effectuer. Coupe longitudinale (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — ch, chorion; fd, premier fuseau de direction ; vn, vitellus nutritif. Fig. 5. Vitellus formatif d’un œuf mûr pris dans l’oviducte, isolé et examiné à plat (Oc. 1, obj. 0, Ver.). — cr, épaississements protoplasmiques ; æ, point où se trouve le premier fuseau de direction. Fig. 6. Portion de cette lame protoplasmique prise au voisinage du point x et vue à un plus fort grossissement (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — cr, épaississe- ments protoplasmiques ; fd, premier fuseau de direction. Fig. 7. Vitellus formatif d’un œuf récemment pondu, isolé et examiné à plat (Oc. 1, obj. 6, Ver.). — vd, vésicules directrices ; prp, pronucleus proximal; prd, pronucleus distal; vac, vacuoles dans le protoplasma. Fig. 8. Deux pronuclei superposés dessinés à part (Oc. 3, obj. 6, Ver.). ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 9 PLANCHE VIII, Fig. 9. Vitellus formatif d’un œuf récemment pondu, isolé (Oc. 1, obj. 6, Ver.). — vd, vésicule directrice; prp, pronucleus proximal; prd, pronucleus distal. Fig. 10. Vitellus formatif d'un œuf récemment pondu (Oc. 1, obj. 6, Ver.). — vac, vacuoles dans le protoplasma; ns, premier noyau de segmentation; vd, vésicules directrices. Fig. 11. Id., id. — fs, premier fuseau de segmentation. Fig. 12. Blastoderme divisé en deux segments (Oc. 1, obj. 2, Ver.). — ai’, premier sillon de segmentation; dg, disque germinatif; /hy, portion hyaline du protoplasma. Fig. 13. Blastoderme à deux segments prêt à subir une nouvelle segmentation (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — Les fuseaux f sont légèrement obliques par rap- port à ax”. Fig. 14. Noyau nouvellement formé. Les taches polaires ac sont encore assez rapprochées l’une de l’autre (Oc. 2, obj. J. à immers. dans l’eau, Zeiss). Fig. 15. Id., id. — Les taches polaires appliquées contre le noyau ont com- mencé leur mouvement de translation autour de lui. PLANCHE IX. Fig. 16. Blastoderme à quatre segments au repos (Oc. 1, obj. 2, Ver.). — ax", premier sillon; 6, second sillon. Fig. 17. Blastoderme à huit segments. La division des segments supérieurs va commencer (Oc. 1, obj. 2, Ver.). — +, sillon de troisième ordre. Fig. 18. Blastoderme à seize segments au repos. — d, sillons de quatrième ordre ; bm, blastomères ; bc, blastocones. Fig. 19. Blastoderme à vingt-huit segments. Procède du dédoublement d’un blastoderme tel que le précédent, dans lequel les deux blastomères et les deux blastocones inférieurs ne se sont pas divisés. — e, sillons de cinquième ordre. Fig. 20. Noyau jeune. — Les taches polaires ac se sont placées aux pôles opposés d’un même diamètre (Oc., ob]. J. Zeiss). Fig. 21. Noyau adulte. Les taches polaires ont presque disparu (Oc. 2, obj. J. Zeiss). Fig. 22. Noyau adulte. Les taches polaires s’écartent légèrement du noyau (Oc. 2, obj. J. Zeiss). ; Fig. 23. Apparition du fuseau f autour du noyau n. Fig. 24. Formation des noyaux fils nf par coalescence des fils chromatiques des zones latérales (Oc. 3, obj. 9 à immers., Ver.). 978 L. VIALLETON. PLANCHE X. Fig. 25. Blastoderme à trente-deux segments. La division recommence dans la partie supérieure du blastoderme (Oc. 1, obj. 2, Ver.): —wvo, blasto- mères du groupe inférieur; 7, blastocone du groupe inférieur. Fig. 26. Blastoderme à soixante segments. Résulte du dédoublement du pré- cédent, moins quatre blastomères y et y du groupe inférieur, qui ne sont pas encore divisés. — $, sillon oblique dans le blastocone supérieur gauche. Fig. 27. Formation des noyaux fils par coalescence des fils chromatiques (Oc. 2, obj. J. Zeiss). Fig. 28. Fuseau avec les zones latérales des filaments chromatiques (Oc. 3, obj. 9, imm:, Ver.). Fig. 29. Un noyau très jeune isolé (Oc. 3, obj. 9, imm., Ver.). Fig. 30. Noyau nouvellement formé. Les taches polaires ac arrivent à son contact (Oc. 3, obj. 9, imm., Ver.). Fig. 31. Noyaux très jeunes, à la phase qui suit celle représentée figure 27 (Oc. 2, obj. J. Zeiss). PLANCHE XI. Fig. 32. Blastoderme à cent douze segments résultant du dédoublement d’un blastoderme à soixante-quatre segments, moins tous les éléments du groupe inférieur qui ne se sont pas divisés. La division des éléments de ce groupe commence dans les blastocones et les blastomères +, les plus inférieurs. — in, intervalles qui apparaissent entre les blastocones. Fig. 33. Blastoderme vers la fin de la segmentation. — bc, blastocones ; Ihy, lame hyaline ; nn, groupe de petits blastomères. Fig. 34. Coupe transversale passant par le milieu d’un blastoderme semblable à celui de la figure 35. — c, centre du blastoderme; 3%, zone moyenne; mpv, membrane périvitelline (Oc. 1, obj. 2, Ver.). PLANCHE XII. Fig. 35. Blastoderme montrant la formation de la zone moyenne (Oc. 1, obj. 2, Ver.). — bcd, blastocones divisés; n°0, noyaux vitellins libres résultant de la division des blastocones. Fig. 36. Bord d’un blastoderme semblable à celui de la figure 33 (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — fv, fuseaux verticaux qui produiront des cellules profondes; ob, fuseau oblique ; zm, zone moyenne. Fig. 37. Bord du blastoderme après la disparition des blastocones. — nv, noyaux vitellins ; {hy, lame hyaline; 31, zone moyenne. ARTICLE N° 2. DÉVELOPPEMENT DE LA SEICHE. 979 PLANCHE XIII. Fig. 38. Bord du blastoderme après la disparition des blastocones. —- z1%, zone moyenne ; {hy, lame hyaline ; nv, noyaux vitellins (Oc. 3, obj. 6, Ver.). Fig. 39. Un noyau vitellin dans la lame hyaline. — pr, protoplasma périnu- cléaire ; n, noyau (Oc. 3, obj. 6, Ver.). Fig. 40. Coupe du bord du blastoderme au moment de la formation de la membrane périvitelline. — b{, blastoderme; mpv, membrane périvitelline placée dans le prolongement du blastoderme (Oc. 3, obj. 6, Ver.). Fig. 41. Id. La membrane périvitelline commence à s’enfoncer sous le blasto- derme (Oc. 3, ob]. 6, Ver.). Fig. 42 et 43. La membrane périvitelline est recouverte par le bord du blasto- derme. — vn, vitellus nutritif (Oc. 1, obj. 6, Ver.). Fig. 44. Jeune embryon vu de face (Oc. 0, obj. 1, Ver.), réduit de moitié. — aeæ, aire extra-embryonnaire (sac vitellin externe); a.emb, aire embryon- paire; gl.ch, glande coquillière ; ep.m, épaississement médian. Fig. 45. Embryon plus âgé, id., id.; mêmes lettres que ci-dessus ; en outre, ep.c, épaississements céphaliques ; eps, épaississement d’où naîtront l’enton- noir et les branchies; bb, bourrelet brachial. Fig. 46. Embryon plus âgé, id., id.; mêmes lettres que ci-dessus ; en outre, bb, 1, etc., bras n®% 1 à 5; æ, œil; plo, pli périoculaire; m, manteau; ot, otocystes ; sp, siphon postérieur (base de l’entonnoir); sa, siphon anté- rieur (tube de l’entonnoir) ; br, branchies. Fig. 47. Embryon un peu plus âgé que le précédent. Mêmes lettres. — me, muscle rétracteur du siphon; bo, bouche. Fig. 48. Coupe du bord externe de l’œil d’un embryon semblable à celui de la figure 46. — ect, ectoderme ; mes, coin mésodermique qui formera le rebord saillant de la cupule oculaire; mes’, mésoderme général du corps; cp, cel- lule ectodermique en voie de prolifération dans le mésoderme ; n, point où l’ectoderme et le mésoderme sont en continuité (Oc. 3, obj. 6, Ver.). Fig. 49. Coupe de l’épaississement ectodermique au voisinage du siphon anté- rieur dans un embryon identique au précédent. — cp, cellule ectoder- mique proliférant dans le mésoderme. Mêmes lettres que ci-dessus (Oc. 5, obj. 6, Ver.). PLANCHE XIV. Fig. 50. Coupe médiane transversale d'un embryon tel que celui dela figure 44 (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — a.ic, aire coquillière; m, manteau ; ep.c, épaississe- ment céphalique ; mpv, membrane périvitelline ; a.eæ, aire extra-embryon- naire. La flèche à cheval sur la coupe indique le milieu du blastoderme. Fig. 51. Coupe médiane transversale d’un embryon semblable à celui de la figure 45 (Oc. 1, obj. 6, Ver.). 280 L. VEALLETON. - Fig. 52. Coupe médiane longitudinale d’un embryon du même âge que Île précédent (Oc. 1, obj. 6, Ver.). Mêmes lettres que ci-dessus. — En outre, sa, siphon antérieur; ams, amas mésodermique; epm, épaississement médian, Fig. 53 a. Coupe transversale d’un embryon semblable à celui de la figure 46, passant par les deux otocystes (Oc. 1, obj. 2, Ver.). — bb, bourrelet brachial; ot, otocyste. Autres lettres comme ci-dessus. Fig. 53 b. Coupe transversale du même embryon passant par le milieu de l'aire coquillière. — sp, siphon postérieur. Fig. 53 c. Coupe transversale du même passant par les deux yeux. — ®, œil; plo, pli périoculaire. Les flèches indiquent le milieu du blastoderme. Fig. 54. Coupe de l’épaississement céphalique d’un embryon du même âge que celui de la figure 47 (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — ect, ectoderme; mes, méso- derme ; prol, prolifération de l’ectoderme dans le mésoderme. Fig. 55. Coupe longitudinale médiane d’un embryon à peu près du même âge que celui de la figure 46 (Oc. 3, obj. 6, Ver.). — ect, ectoderme ; mes, méso- derme; ent, entoderme définitif, nv, noyaux vitellins; mpv, membrane périvitelline. ARTICLE N° 9, LA MUE DES ARAIGNÉES Par M. Wol. WAGNER En examinant les questions relatives à la mue des Arai- onées, nous aurons à considérer deux catégories de phéno- mènes. La première embrasse les processus qui se répètent périodiquement durant la vie de l’Araignée, et qui présentent la nature même du phénomène biologique connu sous le nom de mue. Comme résultat de l’activité de ces processus, on voit, d’un côté, la perte de certains organes de l’animal (des organes usés); d’un autre, la substitution complète ou par- tielle de nouveaux organes à ceux qui se trouvent hors de service. L'examen de ces processus constitue certainement la partie importante de la tâche. Nous y rapportons : 4° La formation du nouveau tégument et le rejet de l’an- CIen ; 2% La formation des poils ; 3° La mue des yeux; %° La mue des organes respiratoires (trachées et poumons) ; 5° La mue des glandes; 6° La mue de l'intestin; 7° La mue des tendons; & Les modifications qu’on observe dans les corpuscules sanguins des Araignées et qui accompagnent périodiquement la mue de ces animaux; 9% Enfin les phénomènes biologiques qui accompagnent la mue. À la seconde catégorie doivent être rapportés les phéno- mènes qui n’ont avec la mue qu’une connexion indirecte, c’est-à-dire les phénomènes relatifs au développement de l'animal, à sa croissance graduelle et aux modifications exté- rieures et intérieures qui sont en connexion avec ce dévelop ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 18*F, — ART. N° 3. 289 WAGNER. pement et cette croissance; pour ces phénomènes la mue ne correspond qu'au moment qui sépare un stade de lautre, et n’est que l'acte, périodiquement répété, qui marque lun ou l’autre stade des processus constants et non périodiques de la croissance. L'examen de ce côté de la question est chose secondaire pour nous, et importante seulement en tant que les phéno- mènes de cette seconde catégorie peuvent contribuer à éclairer les phénomènes de la première. Nous les examinerons par conséquent avec beaucoup moins de détails, en nous arrêtant seulement sur : 1° Les modifications des organes externes : a, modifica- tions de leur forme et coloration; b, des téguments du corps et des appendices; c, des organes génitaux externes de la femelle et du mâle ; 2 Les modifications des organes internes : &, des glandes; b, de la musculature; c, des organes respiratoires. Tel est le plan que je me suis proposé de suivre en exposant mes recherches sur la question de la mue des Araignées. À la fin de ce travail, je tirerai des observations partielles précédentes quelques déductions générales qui me permet- tront d'apprécier la véritable signification de la mue comme phénomène biologique. Formation du nouveau téqument et perte de l’ancien. — En temps ordinaire, la matrice des Araignées présente une couche de protoplasme à nombreuses cellules. Toute cette couche se colore également, les cellules, comme toujours, avec plus d'intensité, le plasma moins Imtensivement. À me- sure que la mue approche, on n’observe plus légalité de colo- ration dans le plasma : ses couches supérieures, adjacentes à la vieille cuticule, se colorent de plus en plus faiblement. Enfin, au moment où la couche fine du plasma, adjacente à la cuticule, cesse de se colorer et perd sa granulation, et quand, par conséquent, nous sommes en droit de la considé- rer comme transformée en couche chitinogène, commence la séparation lente du tégument futur de l’ancien. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 9283 À mesure que le nouveau tégument se rétracte de la vieille cuticule, l'intervalle qui se forme ainsi se remplit de liquide; celui-ci, en petite quantité d’abord, augmente ensuite gra- duellement avec l’agrandissement de la cavité. Le nouveau tégument s’accroit très rapidement; ne pouvant avoir une extension complète dans le céphalothorax, il forme beaucoup de plis (fig. 2, ct), en détruisant de cette manière la couche de la vieille cuticule, qui s’est rétractée avec lui et dont il se dégage peu à peu. On n’observe pas de plis au jeune tégu- ment de l’abdomen, car l’ancien est assez dilatable pour ne pas empêcher la croissance du premier. Vers le moment où les nouveaux poils se sont complètement formés, il ne reste de la couche de la vieille cuticule, rétractée avec la nouvelle, que les tubes qui servent de gaines aux nouveaux poils. Un jour avant la mue, ou le jour de la mue même, ces tubes se détruisent. Si quelques heures avant le rejet du tégument on le retire artificiellement, on n’aperçoit plus de liquide au- dessous : il a disparu; on ne voit entre les nouveaux poils et sur les poils mêmes que des fragments de gaines. Il n’y a presque rien à ajouter à ce qui vient d’être dit sur la formation du nouveau tégument. Je dis presque, parce que certains détails dont je n’ai pas encore parlé seront exposés plus tard, en temps plus opportun, vu leur connexion intime avec les phénomènes dont il sera question ultérieurement. Je me bornerai, pour le moment, à mentionner tout ce qui a rapport immédiat à la mue proprement dite du tégument. Le procédé même du rejet de la vieille cuticule présente ce qui suit : avant tout, le vieux tégument crève au point de la jonction de la partie supérieure céphalothoracique avec l’infé- rieure, sur la ligne d'implantation des membres, à partir de la tête, Immédiatement au-dessus des palpes et des pattes. La ligne À B, sur la figure 3, indique le point où, pendant la mue, commence la rupture de l’ancien tégument et le sens dans lequel elle se propage, à partir du point À jusqu’au point B. Ensuite l’animal rejette la partie supérieure du corselet cépha- lothoracique, sans que les pattes y prennent part, et unique- 984 WAGNER. ment sous la pression du tégument nouvellement formé ; les pattes se déchaussent des vieilles gaines d’arrière en avant, pas tout d’un coup, mais graduellement : d’abord la paire pos- térieure se dégaine sur l'étendue de quelques lignes, ensuite la deuxième, la troisième, la quatrième paire et les palpes, puis répétitions successives du phénomène dans le même ordre. En dégainant les pattes, l’Araignée trouve un point d'appui sur les pattes mêmes : elle s'appuie sur la troisième paire pour dégainer la quatrième ; sur la deuxième pour dégainer la troi- sième, ainsi de suite, Jusqu'à ce qu’elle recommence dere- chef. Chez la Tarentule (Trochosa Singoriensis) la partie supé- rieure rejetée du céphalothorax en connexion avec l'abdomen est retenue par le tégument du pédoncule, qui se déchire en deux parties à peu près égales : la supérieure et l’inférieure (fig. 3). La partie supérieure relie le corselet supérieur du Céphalothorax à l’abdomen, et l’inférieure — l'abdomen à la partie inférieure du céphalothorax (fig. 3). La ligne A B, de la figure 3, indique en profil la ligne de rupture du vieux tégu- ment; cette rupture, comme on le voit sur la figure 3, divise le vieux tégument à peu près en deux moitiés et s'étend un peu au delà de la moitié de l'abdomen. Ce mode de rupture (ou déchirure) du vieux tégument doit être considéré comme règle générale; il présente cependant beaucoup d’exceptions. Parfois, par exemple, le tégument se déchire, de manière que la partie supérieure du corselet du céphalothorax se sépare de sa partie inférieure et de l'abdomen sur toute son étendue par une crevasse qui s’étend, comme dans le premier cas, le long et au-dessus de la ligne d’attache des membres et des maxilles excepté la partie céphalique ; alors le tégument de l’abdomen crève non par les côtés, mais au-dessus du cœur et à peu près au niveau de ce dernier. Ce mode de rejet du tégument a plus de similitude avec ce qui nous est connu de cet acte chez les Écrevisses, où le thorax se sépare tout d’abord de l’abdomen, circonstance rare chez les Araignées, car chez la plupart la partie supérieure du cépha- ARTICLE N° 8. LA MUE DES ARAIGNÉES. 285 lothorax reste, comme il a été dit, jointe à la partie supérieure du tégument rejeté de l'abdomen. Outre la similitude du mode de rejet du tégument chez les Araignées et les Écrevisses, dans le cas de sa rupture au point d'insertion du céphalothorax à l'abdomen, on observe encore de la similitude dans le fait suivant. La partie supérieure du corselet ne se tire pas en arrière par la dessiccation et le retrait du tégument de l’abdo- men, comme c’est ordinairement le cas, mais reste en place. Chez les Araignées et les Écrevisses, ces parties se rejoignent en effet au point de la déchirure (cela ne se produit évidem- ment que dans le céphalothorax), la dépouille gardant ainsi la forme de l’animal entier, de sorte que, si on ne fait pas atten- tion à l’abdomen, il semblera qu'il y a deux Tarentules dans le logis. Outre ce qui vient d’être dit, la mue de la Tarentule présente d’autres déviations du mode général de la rejection du tégument. Il arrive parfois que la partie supérieure du corselet s’arrache, comme de coutume, par devant, mais seu- lement d’un côté, le long et au-dessus de la ligne d’attache des membres, et reste de l’autre côté joint avec la partie infé- rieure du céphalothorax. Il y a bien encore d’autres dévia- tions du mode général, moins considérables, dont par cette raison je ne ferai pas mention. L’abdomen ne commence à muer qu'après le céphalothorax chez la Tarentule. Il se dégage du tégument également sans le secours des pattes, à l’aide de contractions des muscles abdominaux, qui produisent des mouvements ondulatoires du tégument dans la direction du céphalothorax aux filières. Le tégument rejeté de l’abdomen est toujours très chiffonné, ce qui provient de son extrème finesse et de la nécessité de se plisser au moment où l’abdomen s’en dégage. Dans le sac formé par le rejeté de l’abdomen, on trouve les poumons et les glandes qui ont subi la mue, et les fragments provenant de la mue de l'intestin et de muscles. Il en sera question plus tard. Pour le moment, je me bornerai à signaler que sur la dépouille de la Tarentule il est aisé de voir des conformations qui, à ma connaissance, ne sont pas encore décrites — les unes 286 WAGNER. sur la partie supérieure du pédonceule (fig. 14, pr) au nombre de vingt-deux de chaque côté ; les autres — sur la partie Imfé- rieure de l'abdomen (fig. 36, pr) au nombre de trois. M. Schim- kewitch (Anatomie de l'Épéire) en décrivant de pareilles con- formations, leur a donné le nom de pores sur la partie infé- rieure du céphalothorax, des palpes et des pattes de l’Épéire : « Chacun de ces pores, dit l’auteur, présente une fente à bords épaissis; sous la fente nous voyons sur les coupes un large canal, qui est rempli d’une masse plasmique. » Je vais ajouter à cette description que les pores que j'ai indiqués chez la Tarentule, ont leurs bords bien plus épaissis (fig. 195) que ceux que j'ai observés chez F'Épéire, où ils ont la forme d’une fente étroite; il est aisé de voir sur le tégument rejeté que du côté intérieur des pores sort une petite gaine chitineuse, dont la hauteur surpasse un peu la largeur du pore (fig. 16). C’est le canal du «pore », qui a passé par la mue. Le nouveau tégument de l’Araignée, qui vient de subir la mue, est extrêmement fin et délicat. D'abord il est tout plissé, comme il l'était sous le vieux tégument; il est si mou, qu'aux mouvements des museles des pattes, quand l’Araignée dégage ces dernières de l’ancien tégument (ces muscles dans le cépha- lothorax, ense contractant, entraînent le tégument avec eux), 1l paraît que sous la membrane du tégument extérieur 1l se trensvase quelque fluide dans la direction de l'abdomen à la tête : ce sont les contractions successives des muscles, dirigeant les pattes de la quatrième à la première paire. Ces mouve- ments se succèdent à tel point sans interruption, que chez les jeunes Araignées cela fait l’effet comme si les téguments du céphalothorax faisaient des mouvements ondulatoires de l’ab- domen à la tête, et ceux de l’abdomen, comme nous l’avons dit, du céphalothorax aux filières. Les jeunes Araignées passent toutes les phases dans l’espace de deux minutes; selon l’âge et la vigueur, un peu plus tôt ou un peu plus tard. La mue des adultes, et surtout de certains senres, dure beaucoup plus longtemps et ne présente presque pas de différence de détail. Verslemoment delamue, l'abdomen ARTICLE N° 9. LA MUE DES ARAIGNÉES. 287 devient gris blanchâtre, ce qui dépend de l'air qui pénètre à ce moment entre l’ancien et le nouveau tégument. Les extré- mitésn’ontpascet aspect. La mue ne s’interrompt pas lorsqu'on retire l’Araignée de son domicile, et lors même qu’on la prend dans la main. Les jeunes comme les vieilles Araignées se reposent d'autant plus longtemps, après la mue, que cette dernière a été pémble; elles paraissent tout à fait exténuées, de sorte qu'on peut les toucher, les bouger sans qu’elles s’y opposent et parfois même sans présenter quelques indices de vie. Il est facile à comprendre par là pourquoi, à l'approche de la mue, les Araignées, qui la subissent péniblement, font dans leurs gîtes, en liberté comme en captivité, des préparatifs, propres à les garantir de toute attaque. Pour ce qui concerne le nombre de mues chez les Araiïonées, ce côté de la question, à ma connaissance, est aussi peu approfondi que bien d’autres ayant rapport au phénomène en général. Stavely (1) suppose que « les Araignées passent par plusieurs mues » ; les autres arachnologues, y inclus Bert- kau, supposent quatre mues. Mes recherches sur la Taren- tule (2) et l’Altus terebratus en constatent cependant un bien plus grand nombre. Les mues de la Tarentule s’accomplissent dans l’ordre suivant : le premier féqument se rejette dans l’œuf, après quoi l’Araignée reste dans le cocon. Avant de parler de la mue sui- vante, je dirai quelles sont les raisons qui me font supposer que la première mue s’effectue dans l’œuf et non pas après l’éclo- sion, comme le pensent la plupart des arachnologues ; quoique quelques-uns supposent cependant que la membrane de l'œuf doit être considérée comme le tégument rejeté de la première mue de l’Araignée, opinion plus proche de la vérité, bien que demandant certaines réserves. Degeer (3) (qui le premier a exprimé la supposition, répétée (1) British Spiders. (2) Voy. ma note biologique sur la Tarentula (Comptes rendus de la sect. sool. de la Soc. imp. des amis des sc. nat. de Moscou, 1866). (3) Degeer, Abhandlung zur Gesh. d. insect. 9288 WAGNER. par bien d’autres auteurs depuis, que la membrane de l'œuf est aussi le premier tégument de lPAraignée, qui, en sortant de ce dernier, subit la première mue), Herold (4), Ziboldt (2), Claparède (3), Zalensky (4) et autres, supposaient que l’œuf de l’Araignée n’a qu’une membrane, qu’ils décrivaient comme vitelline, et que Ziboldt nomma chorion. Il s’ensuivait donc que si le premier tégument de l’Araignée est la membrane de l'œuf, le chorion devait être le tégument de la première mue — ce qui n’est pas juste. L'analyse chimique de Verson (5) sur le chorion de œuf de Bombix-mori a montré à Verson que le chorion ne présente ni la chitine ni la substance chitino- gène, d’où résulte vraisemblablement que la membrane de l'œuf ne peut être considérée comme le premier tégument de l’Araignée. Un examen détaillé de lPenveloppe de l’œuf de l’Araignée a amené Balbiani (6) à la considérer comme formée de deux membranes : l’inférieure, qui est homogène (membrana vitel- lina) et qui est le produit de la sécrétion de l'œuf, et la supé- rieure, le chorion, également sans structure et également le produit de la sécrétion de l’oviducte. Des observations ulté- rieures confirmèrent le fait de l’existence d’une double enve- loppe chez les Araignées : le chorion et la membrane vitelline. W.-A. Locy (7) aindiqué entre autres que les ornements sculp- turaux du chorion chez différentes espèces d’Araignées sont différents. W. Shimkewitch (8) a eu la chance de découvrir et expliquer l’origine même de ces ornements du chorion, qui (1) Herold, De generatione Aranearuwm in 0v0. (2) Ziboldt, Lehrbuch der Vergleich. Anat. (3) Claparède, Recherches sur l'évolution des Araignées. (4) Zalensky, Histoire du développement des Araignees. (5) Verson, La composizione chimica dei gusei nelle uova dei felugello (Bollet. mensile di Bachicolt, 1884, n° 9). (6) Balbiani, Mémoires sur le développement des Arancides (Ann. des sc. nat., vol. XVIIÏ). (T) Locy, Observations on the development of Agellena Naevia (Bul. of the Museum of Comparative Zoology at Harvard College, vol. XIF, n° 3). (8) Schimkewitch, Maleriaux pour la connaissance du developpement des Araignées (Mém. Ac. sc. St-Péterb, suppl. au t, LIT, n° 5). Un] ARTICLE N° 9. LA MUE DES ARAIGNÉES. 289 sont le produit des cellules de l’utérus et non de Poviducte. Si, à ia suite de ce qui vient d’être exposé, on ne peut pas considérer le chorion de l’œuf comme premier tégument de l’Araignée, la supposition que la membrane de l'œuf joue ce rôle sera juste, si on y inclut la réserve que, sous cette enve- loppe, on doit entendre la membrane inférieure (#embrana vitellina) et non la supérieure (le chorion). Gette première embrasse d’abord fortement le contenu de l’œuf, et se tient étroitement contiguë au chorion, quoique une macération puisse l’en éloigner. À mesure que l’œuf se développe, elle se rétracte graduellement du chorion, et vers la fin de l’époque embryonnaire de l’embryon, elle revêt le corps de l’Araignée et ses extrémités en guise de gaine, tout à fait comme le fera le vieux tégument dans les mues ultérieures de l’animal. Stavely (1), à ma connaissance, fut un des premiers à la signaler, disant que « chaque petit est muni d’enveloppe ou follicule, qu'il conserve quand l'œuf est cassé; les petits ne quiltent pas le cocon jusqu’à ce qu'ils rejettent cette enve- loppe ». L'auteur ne dit rien n1 de son origine ni de sa desti- nation. &. Simon (2) mentionne aussi cette membrane. Voilà ce que nous lisons chez lui : « Les jeunes Araignées sortent de l’œuf ayant les pattes collées sous l'abdomen; elles restent dans cette position pendant six jours, après quoi elles rejettent le prermier tégument et quittent le cocon, ou y restent parfois un certain temps. » Ge renseignement de Simon demande la rectification suivante : | 4° Le fait qu'il a signalé ne s’observe pas chez toutes les Araignées : 1l y en a qui sortent de l’œuf avec les pattes libres. 2° Les Araignées qui sortent avec les pattes privées de mouvement, comme les Epeiride et les Theridiidæ, ne les ont pas collées, mais renfermées dans la membrane fine ou folli- cule, qui à été constatée par beaucoup d’arachnologues, entre (1) Stavely, British Spiders. (2) Simon, Histoire naturelle des Araignées. ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 19. — ART. N° 5. 290 WAGNER. autres par Stavely. Cette membrane, dont les jeunes Arai- gnées ne se débarrassent pas toujours dans l’œuf, reste parfois sur leurs extrémités après l’éclosion, et présente la membrane vitelline, c’est-à-dire le tégument de la première mue des Araignées. Concernant la structure de ce tégument, nous n’m- diquerons (après l’éclosion de l’Araignée) que les épaississe- ments linéaires, assez éloignés l’un de l’autre, comme on le voit à la figure 8. Le deuxième téqument se rejette au bout de cing à six jours, à l’époque où les jeunes Tarentules habitent en partie ie cocon et en partie sur Le corps de la mère. Le troisième tégument est rejeté six à sept jours après sur le corps de la mère et non dans le cocon, que les Araignées quittent à cette époque. Le quatrième téqument est rejeté sept à huit jours après, en partie sur le corps de la mère et en partie dansle terrier. Bien- tôt après cette mue, les jeunes Araignées quittent le terrier de la mère pour passer à la vie indépendante. Par conséquent les quatre mues de la Tarentule s'effectuent avant de com- mencer la vie indépendante. Après ces quatre mues, la Taren- tule n’a pas encore atteint, non seulement le stade de maturité sexuelle, comme on le supposait jusqu’à présent, mais même la dixième partie de sa grandeur normale, et elle a en pers- pective à passer par toute une série de mues (voy. ma note, loc. cit.). | La période de temps nécessaire pour le développement complet et pour toutes les mues équivaut de cent soixante à cent quatre-vingt-quinze Jours, les mois d'hiver exclus; à un an à peu près, ycompris les mois d'hiver. L'époque de l’appa- rition des Araignées à l’état parfait n’est pas toujours la même et est soumise en partie à l'influence du temps. La tempéra- ture, étant, en effet, la même pour tous les individus, n’agit cependant pas de la même manière sur tous, mais diffère, suivant qu'ils sont plus adultes et plus vigoureux, ou plus jeunes et plus faibles. Gette époque d'apparition dépend aussi en partie de la nourriture, dont l'influence pendant la mue ARTICLE N° 3e LA MUE DES ARAIGNÉES. 291 est plus considérable durant les derniers stades que pendant les premiers, où elle n’est presque pas observable (j'aurai occasion, plus tard, de revenir sur cette question de l'influence de la quantité de chaleur et de nourriture sur la mue, lorsque je traiterai les phénomènes biologiques en connexion avec la mue des Araignées), et enfin, principalement, de l’époque de la ponte. Dans la région centrale de la Russie, j'ai observé les pre- miers cocons de la saison chez les femelles, à la fin de mai: les derniers à la mi-juillet. Les premières jeunes Araignées se rencontrent au commencement de juin; les plus en retard à la fin de juillet, et parfois même le 4° ou le août. [! résulte de ce que je viens de dire, que la différence dans l’époque de l'apparition des Araignées équivaut parfois à plus de deux mois. Il va sans dire que les plus précoces des Araiï- gnées sont les premières à atteindre l’époque du dévelop- pement final. Les premiers Imagos mâles se rencontrent en juillet. Ce sont les plus adultes et les plus vigoureux. Les dernières Arai- gnées écloses subissent tard leur dernière mue, parfois à la seconde moitié, ou même à la fin d'août. Il est d'autant plus difficile de s'expliquer une si grande différence d’époques pour la ponte des œufs de la Tarentule, que la fécondation a lieu pour toutes les femelles, quoique à divers moments, toujours cependant durant l’été précédent, c’est-à- dire dix à onze mois avant la ponte. Peut-être cela dépend-il de l’âge de la femelle, de la quantité de nourriture, autant que de l’époque même de la fécondation. Il semble que les’femelles âgées de deux ans commencent la ponte plus tôt; celles âgées de trois ans plus tard, tandis que celles âgées d’un an ne pondraient pas du tout. Quant aux femelles de l’Attus terebratus, elles pondent pendant tout l'été ; on peut les trouver dans des cocons avec des œufs à partir de mai jusqu’au mois d'août inclusivement. Les jeunes Araignées supportent l'hiver à tous les âges, c’est pour- quoi, au printemps, on peut en rencontrer de toutes jeunes 299 WAGNER. et d'adultes des deux sexes. Par suite, Je ne puis dire combien de temps il se passe entre la fécondation de la femelle Aus terebratus et la ponte. Vu l’époque tardive de la copulation de ces Araignées, il me semble naturel de eroire qu’elles peuvent, comme les femelles de la Tarentule, pondre au bout de neuf à dix mois après la fécondation; mais je ne suis pas capable de laffirmer, car une femelle, ayant été fécondée tard en automne, à bien pu avoir été fécondée encore une fois au commencement du printemps. Les mâles Attus terebratus, au stade de maturité sexuelle, supportent en effet l'hiver, comme nous l'avons vu, ce qui n’est pas le cas pour les Taren- tules. En ce qui concerne les modifications du tégument même et les particularités qu'on y observe chaque fois vers le moment de la mue, elles consistent entre autres dans la modification des figures que présentent ses épaississements linéaires, qui sont dignes d’être examinés avec plus de détails. Treviranus a signalé les stries ondulatoires qu’on observe sur l’abdomen des Araignées, stries qui forment des cereles concentriques vers la base des poils. Plus tard Leidig a émis l'hypothèse que ces stries ne sont pas des plis de la chitine, mais des épaississements. La justesse de cette manière de voir est démontrée, selon moi, par le fait que sur le tégument rejeté pendant la mue, ces stries restent à la même distance les unes des autres, comme la figure 4 le représente (1). Si ces cinq stries étaient des plis etnon des épaississements, elles devraient être épaisses et situées bien près les unes des autres sur le jeune tégument, parce que l'abdomen de lArai- gnée doit grandir et augmenter de dimensions; tandis que sur le vieux tégument, ces stries devraient être, ou bien très fines et à grande distance l’une de l’autre, ou bien disparaître entièrement, car, vers la mue, le tégument de l’abdomen se dilate jusqu’au maximum, et finit par se rompre en certains (1) Fig. 4, tégument rejeté; fig. 5, le jeune tégument tout de suite après la mue. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 9293 points. Nous ne le voyons pas ainsi en réalité. Toute la diffé- rence entre ces épaississements consiste en ce que, sur le vieux tégument, ils ont un aspect ondulatoire, et surle jeune presque linéaire, ne s’infléchissant que vers la base des poils, pour y former des cercles concentriques (fig. 4 et 5), ou près de l’épaississement local de la chitine, au point d'insertion des muscles. Îl n’en est pas ainsi chez quelques Aquarines, par exemple, dont le tégument se rapproche beaucoup de celui des Arai- gnées ; là, ce qui semble être des épaississements, d’après les coupes, n’est, en effet, autre chose que des replis. Chez les Araignées, c’est la couche supérieure de la cuticule qui épais- sil, épaississement qui ne se colore pas par les réactifs. Les stries s’observent chez les jeunes sujets tout de suite après l’éclosion, et même sur le premier tégument, qu'ils rejettent dans l’œuf. Ils sont disposés sur ce dernier à grande distance (chez l’Attus terebratus), très régulièrement (fig. 6). Examinant de plus près la structure des épaississements chez certaines Araignées, par exemple, Episinus (Theridiideæ), ou Marpissa et [llenus (Attideæ), il est aisé, à de forts grossis- sements, de remarquer que les points qui, à un faible grossis- sement, paraissent opaques (fig. 7, b), sont des couches épaisses de tégument à pores, régulièrement disposés. Je nai pas eu occasion de constater la présence de ces pores sur le premier tégument de l’Attus terebratus. À côté des lignes de la chitine épaisse et poreuse, on observe d’autres lignes (fig.7, a) fines, diaphanes et sans pores. C’est l'alternance de ces lignes épaissies et fines qui forme l’épaississement du tégument linéaire. Certaines Araignées, comme les Pachygnathes, par exemple, n’ont pas d’épaississements linéaires; elles ont les rangées régulières des pores de la couche supérieure de la cuticule dont il vient d’être question (fig. 2). À côté de ces stries plus épaisses, à grands pores, on n’ob- serve pas de stries à tégument plus fin; par conséquent, tout le tégument est d'épaisseur égale et également parsemé de pores. Ces derniers sont disposés en rangées régulières chez 29% WAGNER. l’Atius terebratus; outre cela, chaque rangée donne, à droite et à gauche, wne strie d’épaississement du tégument, qui est suivie de stries fines (fig. 7). Sur les stries épaisses de Miranda cucurbitina, on observe une, deux, trois, parfois quatre rangées de pores; aussi les endroits minces du tégument sont-ils plus rares (fig. 9). Les épaississements du tégument chez Salticus heliciticus préséntent déjà des plages épaissies (fig. 10), au lieu de stries ; les épaississements sur l’abdomen ne sont pas linéaires, comme chez les espèces précitées, mais réticulaires. Chez Eresus, Philodromus, Thomisus (fig. 11) et autres Arai- gnées, la forme de ces épaississements présente des dessins plus ou moins caractéristiques. Je ne puis m’arrêter 101 sur l'examen de ces particularités, car cela m’éloignerait trop de mon sujet. Je me bornerai à dire : 1° Que les espèces d’un genre, à ma connaissance, ont les mêmes épaississements, Comme par exemple chez Aftus tere- bratus, À. brevipes, À. arcuatus, À. medius, À. albocinctus, À. hastatus, etc. ; % Qu’entre les genres d’une famille on rencontre aussi des épaississements qui ont de la similitude, comme par exemple le genre Heliophantus de la famille Attidæ, dont les épaississements linéaires sont tout à fait semblables à ceux qui figurent sur le dessin du tégument d’un jeune Attus tere- bratus de la même famille (fig. 5), mais souvent on en trouve d’autres, qui n’ont aucune ressemblance, comme nous l’avons vu chez Salticus heliciticus de la même famille (Attidæ). Tout ce que j'ai dit sur l’épaississement du tégument se rap- porte à l’abdomen. On en observe cependant également sur le céphalothorax, mais ces épaississements diffèrent toujours par leurs formes de ceux de l'abdomen. W. Schimkewitch (Anatomie de l'Épéire), en décrivant ces épaississements chez l’Épéire, remarque que sur l’abdomen ils sont linéaires, sur le céphalothorax et sur les extrémités réticulaires. Ge fait est vrai pour bien d’autres Araignées; en outre le passage d’une sorte d’épaississement à l’autre se fait brusquement. Dans l'intervalle de deux mues successives, chez la plupart des ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 9295 ÂAraignées ce n’est que sur l’abdomen que les épaississements changent de figure; ces modifications ont lieu toujours de la même manière : ainsi les lignes ondulatoires sur chaque vieux tégument, sauf le premier, des Araignées du genre Attus se présentent presque droites sur chaque nouveau tégument. Pour terminer avec les détails plus ou moins intéressants, qu’on observe sur le tégument rejeté de l’Araignée, j’indique- rai l'organe, qui pour la première fois a été constaté par moi en 1882 (1). Sa structure sur le tégument rejeté de la Taren- tule présente des particularités, qui n’ont pas été signalées dans la description de cet organe faite en 1883 par Dahl (2) et en 1885 par W. Schimkewitch (Loc. cit.). Sur une certaine partie de la cuticule (fig. 12), où il n’y a pas de poils et qui par conséquent se présente isolée du reste de la cuticule, se trouve un organe de forme particulière différente à différents endroits. Il se présente sous forme d’une plaque chitineuse mince, entourée d’une corde chitimeuse (fig. 12, v); entre les deux bords de cette corde s'étendent des épaississements chi- tineux, en forme de cordons, situés presque parallèlement (fig. 1, 2, cr). Sur chacun de ces cordons on observe une conformation presque ronde, dont le plus petit diamètre est doublement plus grand que la largeur du cordon même; cette conformation est voilée par une membrane très fine (fig. 12, o). Quelle est la fonction de cet organe? Les opinions diffèrent sur ce point. Dahl (loc. cit.) suppose qu’il sert à restaurer la soie de l’Araignée, quoiqu'il ne l'ait pas vu en fonction et qu’il n’appuie cette supposition sur aucun fondement. W. Schim- kewitch suppose que ces organes sont comparables aux organes cordotomales porifères des Insectes, avec les pores cloisonnés (décrits par Graber). Quant à moi, je suppose que ce sont les organes auditifs des Araignées. J'aurai occasion d’exposer dans un travail spécial les données sur lesquelles je base mon opinion à cet égard. (1) Voy. la note de W. Schimkewitch, Sur un des organes des sens des Araignées (Zoolog. Anzeiger, 1885, n° 201). (2) Dahl, Das Gehôr- und Geruchsorgan der Spinnen (Zool. Anz.). 296 WAGNER. Formation des poils. — Le poil des insectes, comme on le sait (1), tire son origine d’une cellule trichogène; l’appendice d’une de ces cellules passe entre les cellules de la matrice et se transforme en poil (ou écaille). Les poils des Écrevisses prennent naissance, comme il est reconnu, sous l’ancien céphalothorax, et ce ne sont que les plus petits d’entre eux qui sont le résultat d’un seul chitinoblaste; les grands poils sont le produit d’un plus ou moins grand nombre de chitino- blastes. Chez les Araignées, autant que je sache, nous n’avons sur ce sujet que les recherches de W. Schimkewitch. Voilà ce que nous lisons chez l’auteur (2) : « Aux derniers stades du développement, quand la cuticule embryonnaire s’est sécrétée, certaines cellules de la couche chitinogène s’augmentent en dimensions, prennent une forme sphérique et se disposent sous la couche chitinogène, qui forme au-dessus d'elles quelque chose comme une voûte en relevant la cuticule. Les noyaux de ces cellules sont de grand calibre; les contours, qui les séparent des cellules environnantes, ne sont pas dis- tincts. Quelque temps après, ces cellules augmentent encore en dimensions, mais leurs noyaux deviennent comparative- ment plus petits. Ces cellules sont déjà disposées immédiate- ment sous la cuticule; il est évident qu’en croissant, elles ont écarté les cellules chitinogènes vers les côtés. Les contours des cellules trichogènes deviennent plus apparents et les cellules chitinogènes voisines, à contours ordinairement distincts, s’étirent, prennent la forme semi-lunaire et revêtent par les côtés les cellules trichogènes, comme les Mantelzellen. Je n’ai pas eu occasion d'observer les détails de la formation du poil, mais dans tous les cas le poil des Aranéines est une for- mation monocellulaire. Les cellules, qui environnent la cel- lule trichogène, servent probablement à sécréter la gaine du poil. » (1) G. Semper, Ucber die Bildung der Flügel, Schuppen und Haare bei den Lepidopteren (Z. f. W. Z. Bd. VII) et autres. (2) Matériaux pour la connaissance du développement des Araignées, 1886. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 9297 Quant à mes recherches, elles ont été faites sur des Araiï- gnées qui muaient, aussi ne parlerai-je que de la formation du poil pendant ce phénomène ; avant tout il convient de dire quelques mots de sa structure. Le poil tactile, à l’état parfait, renferme la tige (fig. 17, px) et le radix (fig. 17, ep. r). L'une et l’autre sont des forma- tions de la couche inférieure de la euticule (fig. 17, cé, 5), qui, ayant monté en haut en forme d’un tube (fig. 17, 6), perforent les couches, disposées au-dessus d’elle, et font hernie au dehors. Dans la région de la couche cuticulaire supérieure (fig. 17, ct, À) ce tube fait un pli (fig. 17, ep. r) qui forme le radix du poil. La cavité du tube est pleine de plasma (fig. 17, mt), qui remplit également la cavité du poil (fig. 17, cu) dans sa partie inférieure. La partie supérieure du poil renferme des granules de pigment, particulièrement nom- breux chez les Araignées, dont la coloration dépend de la coloration des poils et non du pigment de la matrice du tégu- ment. J'ai à ajouter à cette description, que vers le radix du poil arrive un nerf, qu'il n’est pas difficile de constater dans le plasme, qui remplit le tube et en partie le poil (fig. 17, N). Je ne dirai rien présentement concernant la structure des poils protecteurs et autres et en même temps des poils que Dahl (1), sans raisons suffisantes, nomme auditifs (2), parce que la différence de leur structure n’ajouterait presque rien à la question de la formation des poils pendant la mue. En principe cette structrure ne diffère en rien de ce qu’on verra dans la description, que je vais faire, du poil tactile. C’est à la formation de ce dernier pendant la mue que Je passe maintenant. À une certaine époque de la vie des Araignées, plus ou moins longtemps avant la mue (cette période n’est pas la même chez toutes les Araignées), la couche inférieure vieillie (1) Dahl, Dad Gehôr und Geruchsorgan der Spinnen (Zool. Anz., 1883, Hp 2071.) (2) Voy. ma note Poils, nommes auditifs, chez les Araignees (Bulletin des naturalistes de Moscou, 1888, n° 1). 998 WVAGNER. de la cuticule se rétracte des autres, et l’intervalle, qui s’est ainsi formé, se remplit d’un liquide. Gette rétraction s'effectue très lentement. Les coupes, faites pendant ce stade, présentent l'apparence suivante (fig. 18); la couche inférieure de la euticule (fig. 18, cé, 4) s’est écartée loin des autres couches (fig. 18, ct), et dans l'intervalle rempli de liquide, qui s’est ainsi formé (fig. 18, {!), on voit flotter le tube, qui dans le temps a servi à former les poils primitifs (fig. 18, #). La position qu’on lui voit sur le dessin n’est d’ailleurs pas la plus commune, mais très rare; le plus souvent on le voit recourbé d’une façon ou d’une autre, suivant le siège du poil. Tandis que ces choses ont lieu, une des cellules de la matrice (l'inférieure, autant que j'ai eu occasion de l’observer) aug- mente en dimensions et s’étire en forme de papille elaire (fig. 18, ér) dans la direction du tube que je viens de décrire. Un certain temps après, cette papille s’engaine dans la cavité du tube, en perforant la couche de la matrice, située au-des- sus d’elle (fig. 18, mt); c’est alors que la coupe nous présente dans la couche de la matrice une cellule trichogène qui donne naissance à une papille — le poil futur. Si l’on essaye d'enlever artificiellement le vieux tégument, quand le jeune poil s’est formé, ce dernier reste à sa place, tandis que sa game s’arrache parfois près de l'extrémité du nouveau poil, comme on le voit sur la figure 19, £; on remarque alors l’extrémité dégainée de ce dernier se dressant librement (fig. 19, pi, 2), et tout le reste enfermé dans la gaine. Pendant qu’on voit apparaître la pubescence sur le jeune poil, son radix se trouve formé (fig. 19, ép. r), quoique la couche cuticulaire nouvelle soit encore très mince (la position de son extrémité par rapport au vieux poil est repré- sentée dans la figure 20). À cette époque le liquide, qui rem- plissait l’espace entre l’ancien et le nouveau tégument, dis- paraît; ensuite la gaine du nouveau poil crève et ce dernier se trouve tout formé sous le vieux tégument. Les poils des Araignées sont par conséquent produits par des cellules de la matrice, ils sont donc monocellulaires; quant ARTICLE N° à. LA MUE DES ARAIGNÉES, 299 aux épines, elles paraissent être des formations polycellu- laires. Lorsque les poils se sont complètement formés, le follicule de poils tactiles se trouve la plupart du temps dans une posi- tion inclinée (fig. 19) et celui des poils protecteurs dans une position verticale. On peut se l'expliquer par le fait que ces derniers au sortir de leur loge se courbent tout de suite d’un certain angle et se chitinisent dans cette position, qu’ils con- serveront toujours; tandis que les poils tactiles, en commen- çant à se chitiniser, ne se courbent pas, mais restent droits, et comme le tégument primitif presse dessus, ils prennent une position horizontale (qui, on le voit ainsi, ne leur est pas propre), en courbant la jeune cuticule, encore molle de côté. C’est ce qui explique la forme toujours irrégulière et raboteuse de la jeune cuticule, jusqu'à ce que le vieux tégument soit rejeté et que le nouveau poil prenne sa position normale. Avant la mue encore, c’est-à-dire avant le rejet de la dépouille, les jeunes poils cessent de se colorer et ce n’est que le plasme, qui remplit leur cavité, qui se colore. La cavité des vieux poils à cette époque est souvent remplie d’air, quoique ce ne soit pas le cas pour tous, même jamais pour les poils protec- teurs, dont la cavité reste toujours remplie de granules de pigment, qu on peut même observer encore sur les poils de la dépouille. J'ai déjà eu occasion de dire que ce n’est pas chez toutes les Araignées, que les poils apparaissent à un seul et même âge; que lAttus, par exemple, en a déjà au second tégument (seconde mue), tandis que la Lycose ne les a qu’à la troisième mue, lorsque les Jeunes Lycoses quittent le cocon et se dis- posent sur le corps de la mère. Comment s'expliquer ce phé- nomène ? Il est possible que ce soit par suite de leur position dans un cocon resserré et peu élastique, dans lequel ces ani- maux se trouvent emprisonnés et pressés l’un contre l’autre depuis leur éclosion jusqu’à la troisième mue; tandis que le cocon de l’Attus est si grand, que les jeunes animaux s’y trouvent logés tout à fait librement, peut-être par suite d’une 300 WAGNER. sélection naturelle qui aurait ainsi élaboré cette condition si avantageuse pour les Lycoses. On ne pourra décider cette question que lorsque les recherches concernant l'influence du cocon sur les Araignées en bas âge seront faites sur un grand nombre d'espèces. | J'ai à ajouter que la disposition des poils sur tout le corps est parfaitement régulière et symétrique, comme on peut Île voir sur le second tégument de l’Attus. Sur les téguments ultérieurs, cette disposition devient plus difficile à constater, bien que cependant elle paraisse demeurer la même. La mue des yeux. — Pour s'expliquer ce phénomène, il est important de connaître l’histoire du développement embryon- naire des yeux; mais malheureusement nos renseignements sur ce sujet ne sont pas bien précis. Voici ce que W. Schim- kewitch (1) dit à ce sujet : « Le nerf optique, en s’approchant du tégument cutané céphalique, forme un renflement avant forme d’épingle, dont les cellules se disposent sur la péri- phérie en rangées régulières, c’est-à-dire comme lPépithélium. L’ectoderme du tégument cutané forme autour de ce renfle- ment une saillie annulaire, qui embrasse ce dernier. Ensuite les cellules de lectoderme au-dessus du renflement du nerf optique prennent chacune la forme d’un cylindre élevé et le point de la lentille future se renfle un peu. Ces cellules ne sont autre chose que les cellules formatrices de cette dernière, ou le corps vitré. La lame existant entre les conformations précitées se forme du névrilemme, que le nerf optique entraîne en croissant, et en partie de la couche sous-cutanée du tissu conjonetif; cette lame présente la lame future prérétinienne de œil. Par conséquent, résume l’auteur, lœil de PAranéine, comme celui de l’Astacus et des Vertébrés, provient de trois rudiments : nerveux (sa partie rétinienne); cutané (sa partie épithéliale) (c’est-à-dire la lentille et le corps vitré) ; et méso- dermique (lenveloppe de l’œil). » (1) W. Schimkewitch, Matériaux pour la connaissance des Araneina (Mém. Ac. sc. St-Pétersbourg, suppl. au t. LIT, n° 5). ARTICLE N° 93, LA MUE DES ARAIGNÉES. 301 D'autre part, d’après les recherches de W. Locy (1), le développement de l'œil s’accomplirait autrement. L'auteur le décrit de la manière suivante : « Avant tout, 1l se forme sur l’ectoderme un épaississement local, qui se replie ensuite en forme de pli sous la partie non modifiée de l’ectoderme, de manière que la surface, jusqu'alors externe de lépaississe- ment, devienne actuellement interne et que l’interne se trouve rapprochée de l’extérieure. De là résultent trois couches : la couche externe, c’est-à-dire la partie non modifiée de Pecto- derme, sous laquelle s’est replié lépaississement local; la couche médiane, l’épaississement lui-même, et la couche interne — celle qui a été entraînée par ce dernier quand il se repliait. Quelque temps après, l'ouverture du pli se referme par le rapprochement de ses lèvres. » La couche externe donne naissance à la lentille et au corps vitré ; la couche médiane, à la rétine de l’œil, et la couche m- terne à l’enveloppede l’æœil (Pauteur n’affirme cependant pas ce dernier point, mais l’émet comme supposition, ajoutant pourtant cette restriction qu'il ne pourrait confondre les élé- ments de cette enveloppe avec ceux du mésoderme). Le phé- nomène du développement de l'œil se termine vers le moment de l’éclosion des Araignées par l'allongement des fibres ner- veuses partant du ganglion nerveux et se dirigeant vers les yeux, qu'ils unissent ainsi aux ganglions nerveux. Je n’ai pas eu occasion d'étudier par moi-même le dévelop- pement embryonnaire des yeux de l’Araignée; aussi me bor- nerai-je à indiquer la diversité d’avis qui existe à ce sujet. D'un côté, cette discordance nous prive de criterium pour l'appréciation de certaines données que présente la mue des yeux de l’Araignée ; d’un autre côté, elle enlève aux études de ce procédé les principes qui pourraient servir de guide, part- culièrement précieux dans le cas donné. En revenant à la mue, je crois utile, avant de parler des modifications que subissent les yeux à cette époque, de m’ar- (1) W. Locy, Observations on the development of Agalena nœvia, Jan. 1886 (Bull. of the Mus. of Comp. Zool. et Harvard College). 302 WAGNER. _rêter à l’énumération des parties constituantes de ces organes, qu'on y distingue actuellement. Ge sont : 1° La couche supérieure cuticulaire, qui, s'étendant au- dessus de l’œil, ou plutôt au-dessus de la lentille, forme une espèce de coupole dont les parois sont d'épaisseur égale sur toute son étendue; c’est la cornée de l'œil (fig. 24, cr, À); 90 Sous la cornée, les couches de chitine forment un élar- découvert par Muller (1). Le corps vitré est séparé de sa partie rétinale, disposée en dessous de lui, par une lamelle rétinale (fig. 21, pré. l) dé- crite par Grenacher (2); cette lamelle rétinale forme une membrane, enveloppant tout l’œil avec toutes ses parties. Plus avant, dans l’œil, se voient des parties qui, d’après Schimkewitch (Loc. cit.), se forment aux dépens de Pélargisse- ment du nerf optique. L'ensemble de ces parties forme ce que cet auteur nomme la partie rétinienne (3), pour la distinguer de la partie épithéliale, sous laquelle 1l comprend la cornée, le cristallin et le corps vitré. D’après les recherches de Locy, la partie rétinienne de l’œil se forme aux dépens de l’épaississement primitif de lecto- derme, qui, après Ja formation du pli par la voie de l’invagi- nation, forme la couche médiane de l’œil embryonnaire de l’Araignée. Le phénomène de la mue se borne ici en ce que la parte rétinienne de l’œil, dans un certain temps, plus ou moins court, avant la mue, se rétracte un peu des deux enveloppes au point de jonction de son enveloppe prérétinienne avec l'enveloppe générale de l’œil (fig. 24, À). Cette partie rétractée est fortement pigmentée, et d’après les préparations, faites avant et après la mue, a comparativement augmenté en dimen- (1) Muller, Sur les yeux des Insectes, des Arachnides et des Crustacés (Ann. des sc. nat., t. XVII). (2) Grenacher, Untersuch. üb. das Sehorgan der Arthropoden, 1879. (3) Anatloïnie de l’Épéire. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 303 sions. Par conséquent, les modifications de la partie rétinienne de lœil pendant la mue se bornent à la croissance de cette dernière, croissance à laquelle la matrice ne prend cependant pas part évidente. À la description des parties de l’œil faite ci-dessus, il est indispensable d'ajouter certaines indications de détails faites par différents auteurs, qui se sont occupés de l’organe de la vue chez les Araignées. Dujardin (1) a indiqué le premier que la lentille de l’œil des Araignées se colore sous l’effet du réactif de Milon. Schimkewitch (Anat. de l'Épéire), en signalant ce fait, y ajoute un autre, qui a échappé à Dujardin, c’est-à-dire que ce n'est qu'une partie de la lentille qui se colore, — celle qui doit son origine aux deux couches internes de la chitine; quant à celle qui se forme aux dépens de la couche supérieure de la cuticule — la cornée, elle est réfractaire à la colora- tion. C’est également Dujardin qui a découvert la structure lamelleuse concentrique de la lentille par toute son épaisseur, de même que la différence de longueur dans la courbure des rayons de ses zones. L'auteur à donné à ce phénomène une explication physiologique. Leidig (2) et Graber (3) ont indiqué la présence des stries, perpendiculaires aux lamelles concentriques qu’ils considèrent comme des pores. Schimkewitch les à vues chez la Tarentule et ne les a pas découvertes chez l’Épéire (loc. cit.). Grenacher les nie complètement. J’ai à dire quelques mots sur la nature de l’enveloppe géné- rale de l’œil. D’après Graber, cette dernière forme la continua- tion de la couche conjonctive tégumentaire, qu’il considère comme sous-cutanée, comme une cuficule interne; l'auteur signale une nature cuticulaire à cette lame, ainsi qu’à la (1) Dujardin, Mém. sur les yeux simples (Ann. des sc. nat., t. VIL, 5° série). (2) Leidig, Zum feineren Bau der Athropoden (Muller’s Arch.). (3) Graber, Ueb. das unicorneale Auge (Arch. f. Microsc. Anat., 1 Heft., 21 Bd). 304 WAGNER. lamelle rétinienne. Schimkewitch (loc. cit.) considère la cuti- cule interne de Graber comme une couche conjonctive. Après avoir ainsi brièvement décrit les parties de Pœil qui sont sujettes à la mue, revenons maintenant à cette dernière et aux phénomènes auxquels elle donne lieu. Les coupes de l’œil à différents stades de la mue nous décou- vrent ce qui Suit : A l’époque où dans différentes régions du corps de l’Arai- gnée commencent à apparaître les phénomènes qui précèdent la mue, l'œil commence à les présenter également. La mue commence de la manière suivante : la matrice, en croissant, s’insinue entre le corps vitré et l’enveloppe préré- tinienne, dont les cellules s’écartent de cette manière vers le haut et perdent leur forme régulière. Il n’y a pas de doute qu'à partir de ce moment précis, l'Araignée ne perde la faculté de voir avec les veux où le phé- nomène a lieu. Je ne puis d’ailleurs pas affirmer s'il a lieu dans tous les yeux à la fois. Il me semble même que non. En tout cas, il est indubitable qu'il ne se termine pas simultané- ment pour tous les yeux. Chez l’Atius terebratus les yeux latéraux sont les premiers à terminer leur mue. L'histoire du développement embryonnaire ne nous apprend pas avec précision quelle est l’origine de la lame préréu- nienne; est-ce du névrilemme qui engaine l’épaississement du nerf optique dans sa portion la plus proche de l’épaississe- ment des téguments cutanés et du tissu conjonctif sous-cutané (innere cuticula, de Graber) qu’elle prend naissance, comme il semble résulter des études de Schimkewitch, ou de la couche supérieure de la cuticule elle-même, comme nous Pappre- nons des recherches de Locy? Est-elle sujette à la mue? Je n'ai pas pu le voir. Il me semble cependant que non, et, en tout cas, si le phénomène a lieu, il n'aurait lieu que partielle- ment comme je puis conclure de ce qui suit. Il est intéressant de remarquer que les coupes de l'œil peu de temps avant le rejet du tégument, après une double coloration à laniline et au carmin, présentent l'apparence ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 305 suivante : le corps vitré, nouvellement formé, et la partie rétinienne de l'œil, sont bleus sous l’action de laniline; quant à la lame prérétinienne, elle est d’un rouge intense produit par le carmin, dans une certaine partie du moins : de la lettre À jusqu’en B (fig. 21). Traité de même par le carmin, l’enve- loppe générale de lPœil se colore également en rouge sur une certaine étendue, notamment du point © jusqu’au sommet de l’œil; les autres parties, entre le point CO d’un côté de l’œil et le point C de l’autre côté de ce dernier, se trouvent colo- rées de bleu. J'ai dit que les cellules de la matrice, qui se sont insinuées entre la lame prérétinienne et le corps vitré, à mesure de leur croissance écartent de plus en plus le corps vitré de l’ancien œil et le poussent vers le cristallin muant; elles Paplatissent à la longue en feuillet fin de tissus d’une structure indistinete (fig. 24, c. v, 1). C'est à ce moment que commence l’activité chitmogène de certaines cellules de la matrice insinuée, qui produit peu à peu les éléments principaux de la partie épithé- liale. Avant tout, sous l’ancien cristallin, prend naissance, d’après le même mode que dans tous les autres endroits du técument, la couche supérieure de la cuticule. Ensuite se forment simultanément les parties supérieures du cristallin et du corps vitré. Arrêtons-nous sur ce point avec plus de détails. Commençons par le cristallin. J'ai dit que la partie supérieure se forme avant les autres; c’est qu'en effet }’y dis- tingue deux parties contrairement aux descriptions générales, faites jusqu’à présent. Je me base : 1°sur le fait que ces parties apparaissent à différentes époques : une seule paraissant en même temps que le corps vitré; l’autre, — non seulement après que ce dernier s’est développé, mais même, — comme c’est le cas dans la Tarentule et probablement les autres Araignées — après que le vieux tégument est déjà rejeté ; 2° sur la différence de structure des deux parties (ce dont il sera question plus bas), différence surtout sensible les pre- miers jours après le rejet de la dépouille, c’est-à-dire au moment mème où celte seconde partie du cristallin prend ANN. SC. NAT., Z0O0L., 1888. VI. 20. — ART. N° 3. 306 WAGNER. naissance. Les coupes du cristallin peu de temps avant le rejet de l’ancien tégument, nous montrent la partie supérieure du cristallin plus ou moins épaissie (fig. 21, cri, 2). Outre cette différence d'épaisseur, le cristallin ne présente pas d’autres distinctions, dépendant de l'approche plus ou moins immi- nente de la mue. La structure lamelleuse du eristallin s’accuse très tôt. « Il présente, comme l’a signalé encore Dujardin (1866), dans son épaisseur, une structure lamelleuse con- centrique. » J'ai déjà eu l’occasion de dire que la couche de chitine supérieure, seule, ne se colorait pas sous l’action des réactifs dans le céphalothorax. Les couches de la partie supérieure du cristallin, au contraire, semblent une continuation directe des couches de la cuticule qui se colorent; sur les coupes du moins on voit que les couches du cristallin se continuent dans le tégument de l’Araignée, et, quoiqu’elles y soient considé- rablement plus fines, leur nombre semble être le même. On n’observe pas de stries perpendiculaires dans la lamelle concentrique de cette partie du eristallin, chez la Tarentule. C’est ainsi que se présente le cristallin un jour avant le rejet du vieux tégument (fig. 21, cri, 2). Cette partie du cristallin doit son origine aux mêmes cellules de la matrice, qui servent à former le corps vitré. Ces cellules s'étant disposées sous les parties muantes de l’œil, c’est-à-dire immédiatement sous le vieux corps vitré, commencent à s'étirer. En même temps, elles se resserrent si étroitement entre elles, que leurs noyaux sont presque en contact mutuel. — Les limites des cellules à cette époque sont indistinctes. — La couche supérieure de la cuti- cule — la future cornée de œil —- se forme par le même mode que le tégument en général — le mode de sécrétion. Sous cette couche et au-dessus des extrémités libres des cellules étirées du futur corps vitré on voit apparaître une substance homo- gène, qui se colore faiblement, et qui devient de plus en plus épaisse; à la longue, seulement, apparaît la partie supérieure précitée du cristallin. Par conséquent cette dernière, par son développement, ne diffère presque en rien de ce que nous ARTICLE N° 5, LA MUE DES ARAIGNÉES. 307 présente la formation du tégument. Je n'ai qu’à signaler que n1 la cornée, ni le cristallin de l’œil (comme il est aisé de le comprendre, d’ailleurs), ne présentent à cette époque la con- vexité, et la forme générale qu’on leur voit à l’état normal. Les deux parties de l’œil présentent un enfoncement, comme on le voit sur la figure 21, cr, 2, cri, 2. Cependant la ligne de l’enfoncement ne suit pas la sinuosité du cristallin, qui à subi la mue (fig. 21, cri, 1), mais se présente moins con- vexe. Le corps vitré vers cette époque, c’est-à-dire dans les der- niers Jours précédant la mue, présente ce qui suit : Les cellules de la matrice, dont il tire son origine, se sont considérablement étirées dans la direction du cristallin, mais ne sont pas serrées contre lui; leurs contours sont maintenant très distincts. Entre les cellules du corps vitré et la partie supérieure du cristallin on observe une masse sans structure et assez épaisse de la couche chitinogène (fig. 21, cg). Par conséquent, la couche de la matrice, qui s’est Insinuée entre l’ancien corps vitré et la lame prérétinienne, donne naissance à une série de cellules du corps vitré, qui séerètent au-dessus d'elles la chitine du cristallin, couche après couche, comme elle se sécrète dans l'épaisseur du tégument par les cellules de la matrice. La veille de la mue la partie supérieure du cristallin, comme je l'ai déjà dit, est complètement formée et se sépare du corps vitré par la couche chitinogène. La formation de la région inférieure du cristallin s’effectue après le rejet du vieux tégument; c’est pourquoi, avant d’en parler, je dirai quelques mots sur l’état que présente la partie de loœeil qui vient de subir la mue, c’est-à-dire la partie rejetée avec la dépouille. La cornée (fig. 21, cr, 1) de l’œil de la Tarentule n’est diaphane que sur les trois quarts de sa surface. Plus la couche cornéenne approche de la cuticule du corps, plus elle devient opaque; au point de jonction elle est tout à fait noire. Nous voyons la même chose sur la nouvelle cornée après la mue. Ge qui fait que les rayons de lumière, tombant de côté de l’œil, ne peuvent pénétrer dans ce dernier, et con- 308 WAGNER. sidérant la grandeur considérable de la partie opaque de la couche cornéenne, on est porté à croire que le champ visuel de l’œil des Araignées n’est pas très grand. Pour ce qui est du cristallin rejeté, j'ai à signaler : 1° qu’il se colore très bien; 2° qu’à sa face inférieure, on observe des fragments de tissu (fig. 21, ce. v, 1) — restes du vieux corps vitré. En dernier lieu la mue de l’œil s'effectue, comme je lai déjà dit, de la formation de la région inférieure du cristallin ; ce phénomène ne se termine que durant les premiers jours qui succèdent à la mue de lanimal. Au bout de trois jours, une coupe de l'œil d’Aftus d'âge moven nous présente l'apparence de la figure 22, B. La partie inférieure du cristallin (fig. 22, B, cri. in) est presque complètement formée et c’est à ce moment que les distinctions de structure entre les deux parties se pré- sentent avec une netteté parfaite. 1° D'une part, les couches de la partie supérieure du eris- tallin s'étendent jusqu’à celles du tégument et peuvent y être reconnues jusqu à leur point de jonction avec ces dernières; la longueur de toutes les couches, demeurant à peu près la même, est égale au diamètre de l'œil, leur épaisseur et leur position seules varient; d’autre part au contraire la partie inférieure présente une autre apparence. [ei la longueur de la couche est en effet d’autant moins considérable, qu’elle approche davantage du centre de l'œil, et qu’elle est située plus bas et plus profondément. Chacune de ces couches sem- ble n'avoir rien de commun avec les couches de la cuticule. 2° Pendant que les couches de la partie supérieure du cris- tallin semblent présenter la continuation des couches de la cuticule, les couches de la partie inférieure sont parfaitement indépendantes et se trouvent en contact avec les cellules du corps vitré (fig. 22, cre. in; c. v). Il est facile de comprendre ainsi que plus la couche de la partie inférieure du cristallin est près du centre de l’æil, plus elle doit être courte, et vice versa; plus elle est près du point où les cellules du corps vitré sont contiguës aux cellules pigmentées, — plus elle doit être longue. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 309 Les sinuosités de ces couches sont aussi distinctes de ce que nous présente la partie supérieure du cristallin, comme on le voit sur la figure 22. Là elles sont régulièrement convexes dans la direction du dehors, — ici elles vont d’abord parallèlement aux couches de la partie supérieure du cristallin, ensuite loin d'atteindre le milieu, font une courbe en bas, présentant ainsi une courbure plus ou moins brusque. C’est dans cet état que la partie inférieure du cristallin se présente presque au terme de son développement. Mais ce développement n’est pas encore terminé, ce qu’indique sa forme un peu différente de ce qu’elle doit être, de même que la présence du tissu chitinogène à ses bords (fig. 29, cg), tissu qui continue encore à servir de cloison entre le corps vitré et le corps du cristallin lui-même, ce qui, à l’état de développement complet, ne peut avoir lieu, car alors le corps vitré est immédiatement contigu au corps du cristallin, comme il l’est maintenant dans la partie médiane. Plus tard, avec le développement ultérieur, le rapport des couches aux cellules du corps vitré, de même que la direction de ces cou- ches, change. La partie inférieure du cristallin augmente rapi- dement en dimensions, ses couches s’épaississent, et en se recourbant dans sa région médiane le cristallin prend sa forme et sa position définitives. Le dernier trait distinctif enfin de la partie inférieure du cristallin, ce sont les séries transversales, particulièrement apparentes les premiers Jours qui suivent la mue (fig. 22, cri. in), stries dont le nombre est considérable et la direction régulière. À tout ce que J'ai dit sur la mue des yeux, j'ai à ajouter que l’Araignée perd sa faculté de voir, comme il s'ensuit de la description des procédés de la mue de l'œil, plus ou moins longtemps avant le rejet du vieux tégument, suivant le stade de développement de l'animal : plus PAraignée est développée, plus tôt surviennent les phénomènes précités avant le rejet du vieux tégument, et vice versa. Après que l’ancien tégument est rejeté, la faculté de vision ne revient pas tout à coup, et ce sens à cette époque doit être 310 WAGNER. loin d’être parfait, ear la partie inférieure du cristallin n’est pas encore finalement développée. Par conséquent, par rap- port à la vue, l’acte du dépouillement chez lAraignée ne con- stitue pas le dernier des procédés de la mue. Ces procédés continuent encore et se terminent plus ou moins longtemps après. | La mue des organes de la respiration. — Les organes de la respiration sont les poumons et les trachées. Examinons la mue de chacun de ces organes à part. Commençons par Îles poumons, ayant soin de jeter un coup d'œil dans l’histoire de leur développement embryonnaire. Les recherches sur le déve- loppement embryonnaire des Araignées faites pendant les der- nières années par Locy (Observations on the development of Agalena nœvia, 1886), et Schimkewitch (Anatomie de l'Épéire, 1886), nous apprennent ce qui suit : Locy constate que les poumons se forment par une invagination étendue des cellules de l’ectoderme. Ces cellules aux premiers stades sont super- posées les unes au-dessus des autres en rangées parallèles en forme de lames. Elles sont d’abord de la même forme; ensuite les cellules d’une série s’aplatissent d’un côté et deviennent convexes d’un autre; les cellules de la série voisine en font de même, en même temps que les cellules des deux séries vol- sines tournent leurs faces convexes les unes vers les autres et les faces plates du côté opposé. Ensuite chaque paire de cel- lules des deux lames voisines se fusionne ensemble par ses faces convexes, en formant ainsi une espèce de colonne. Par consé- quent deux lames de cellules fusionnées forment un seul feuil- let pulmonaire. Sur la face externe de ce feuillet les cellules sécrètent une enveloppe chitineuse, qui se continue avec la membrane chiti- neuse du feuillet pulmonaire voisin, formant ainsi une espèce de follicule chitineux. Les membranes chitineuses des feuillets dans leur ensemble, forment une série de follicules chitineux, dont les cavités constituent la cavité du poumon, qui se remplit d'air, Dans chaque feuillet on observe une cavité (qui a pris naissance des deux lames voisines dont il était question plus ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 911 haut), interrompue parfois par les colonnes précitées, formées par deux cellules disposées l’une vis-à-vis de l’autre et fusion- nées ensemble par leurs faces convexes. Cette cavité commu- nique immédiatement avec la cavité générale du corps, les cor- puscules sanguins peuvent donc y pénétrer librement. Telle est en substance l’origine des poumons d’après les études de Locy. Il faut y ajouter qu'avant constaté ces faits et autres, constituant le procédé de la formation de ces organes, l’auteur ne se propose pas de questions ni sur l’homologie des pou- mons avec les trachées, ni sur le procédé de la respiration. Il est indispensable en outre de noter que Locy n’a pas vu la for- mation de l'enveloppe environnant les lacunes des poumons, du moins il ne mentionne pas son existence. Les recherches de Schimkewitch confirment en partie celles qui ont été faites avant lui (1880) par Balfour, en partie présentent des notions nouvelles concernant les derniers stades de la vie embryon- naire des Araignées. Selon l’auteur, les poumons à ce moment présentent la forme complète de trachées en faisceaux; l’unique différence entre les premiers et les derniers consiste en ce que les pou- mons n’ont pas de {unique conjonctive externe, que l’auteur wa pu trouver mn chez les embryons, ni chez les adultes. En ce qui concerne la structure des feuillets du poumon, la disposi- ion des cellules, selon lui, est quelque peu différente de ce que nous apprend Locy. Ces cellules ne joignent pas les deux parois externes de chitine du feuillet pulmonaire ; on n’observe non plus entre ces parois de cellules en colonnes, comme le figure Locy, mais elles sont disposées dans un certain ordre, les unes par la paroi supérieure interne du feuillet,:les autres par la paroi inférieure interne, et forment une cavité, dans laquelle pénètrent des cellules sanguines. Se basant sur ce qui vient d’être exposé, l’auteur n’est pas d'accord avec Bertkau et Mac-Leod sur la possibilité de paral- lélisme entre la cavité pulmonaire et le tronc des trachées, et entre les intervalles des feuillets du poumon à épines sur la face supérieure et les cavités des rameaux secondaires du tronc 312 WAGNER. principal des trachées. « Pour que cette comparaison soit exacte, chaque cavité secondaire, selon Schimkewitch, de- vrait être entourée : 4° d’une tunique interne; 2° d’une tunique chitinogène, et 3° d’une tunique externe ; ainsi chaque feuillet, qui divise les cavités voisines devrait présenter deux couches cellulaires, séparées par deux couches de la tunique externe et enfermées entre deux couches de la tunique interne. » Cette disposition n’existe pas; en effet, Mac-Leod nous apprend que les cellules des feuillets se disposent dans l’ordre suivant : une cellule est située près de la face supérieure, et la cellule suivante près de la face inférieure du feuillet. Ge fait peut faire croire à une disposition des cellules sur deux couches, mais sous l’action des réactifs toutes les cellules des feuillets se confondent en une seule couche sans limites, ce qui prouve qu'il n'y existe aucune tunique interne. I me reste à indiquer que l'étude de la structure anatomique des poumons des Araignées (Anatomie de l'Épéire) à con- duit Pauteur, avant qu'il ait entrepris Pétude de leur embryo- logie (1884), à découvrir l'enveloppe conjonctive entourant la lacune des poumons. Voilà ce qu'il dit à ce sujet : « Sur les coupes longitudinales nous voyons que de l’intérieur vers les poumons se dirige un vaisseau, dont la paroi supérieure se confond avec la couche conjonctive des organes voisins et la paroi inférieure avec la couche conjonctive du tégument. En arrière ce vaisseau est ouvert. Par une série de coupes nous pouvons nous assurer que ce vaisseau est un prolongement de la veine pulmonaire; nous pouvons aussi supposer que la partie postérieure de ce vaisseau, qui constitue une enveloppe aux poumons, joue vis-à-vis d'eux le rôle d’une tunique externe. » Ge sont là, à grands traits, les données que nous présente l'histoire du développement des poumons. Mes études sur la structure de cet organe à différentes époques de la vie des Araignées et sur sa mue me permettent de conclure : 1° Que la cavité interne des feuillets pulmonaires existe en effet; ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 313 9 Que la lacune pulmonaire est indubitablement entourée de tunique. Par conséquent le sang de ces organes n’a pas accès immédiat dans la cavité du corps (comme le suppose Locy), mais passe dans la lacune, entourée de tissu conjonctif, comme l’a constaté Schimkewitch; 3° L'enveloppe précitée de la lacune (tissu conjonctif) ne Joue pas seulement le rôle de « tunique externe » des poumons, comme le suppose le dernier auteur, mais présente véritable- ment la tunique externe de ces organes, sans dépendance aucune du vaisseau de la veine. Voici comment cela s’effectue. Les celiules de l’ectoderme en s’invaginant pour former les poumons, entraînent avec elles la couche du tissu conjonetif cutané, ènnere cuticule de Graber. Cette couche est justement la tunique externe des poumons futurs. Les cellules invaginées de l’ectoderme, ayant déjà pris la position décrite par Locy, continuent encore à présenter une masse, où la tunique externe ne peut pénétrer; cette dernière les revêt de dehors comme une couverture. Ensuite la forma- tion des feuillets pulmonaires ne présente pas de ramification, comme dans la formation des trachées. {ci cela se passe autre- ment. Les cellules, disposées en plusieurs séries continues, se divisent pour se foliacer et former des lames, qui plus tard eroissent ensemble deux à deux et ayant constitué ainsi un feuillet pulmonaire, produisent sur sa face externe une couche de chitine. La tunique externe n'a jamais pu évidemment pénétrer dans la cavité des feuillets pulmonaires et l’entourait comme un organe entier, comme elle Le faisait du temps de l'invagination des cellules. De là il est aisé de comprendre ce qui doit se passer dans les poumons pendant la mue : l’activité de la matrice cutanée se borne évidemment à former de nou- velles enveloppes chitineuses de stigmates; la matrice cutanée ne monte pas jusqu'aux feuillets pulmonaires pendant la mue, et la nouvelle chitine ne s’y forme qu’aux dépens des cellules des feuillets mêmes, qui, avec la croissance de l’animal, augmentent en nombre et agrandissent de cette manière la dimension du poumon. La formation des nouveaux feuillets 314 WAGNER, s'effectue sur les bords du poumon, et évidemment aux dépens de la matrice adjacente. Je n’ai pas eu occasion d'observer si le tissu conjonelif de la lacune pulmonaire subit la mue. Je ne m’arrêterai pas à la des- cription du poumon rejeté pendant la mue, car c’est un fait connu depuis longtemps. Je n’indiquerai que les détails suivants de ce phénomène pour les poumons. Les épines qu’on observe sur la surface supérieure du follicule chitineux entre les feuillets, et qui chez la Tarentule ont l'aspect de colonnes fines, s’élargissant à leurs sommets (fig. 24), se forment à neuf sous les vieilles épines. Par conséquent la coupe du feuillet pulmonaire au moment du rejet du tégument nous présente la figure (fig. 23) : dedans le follicule, entre les feuillets du jeune poumon (fig. 25, f.e, 2) sur la surface duquel se sont déjà formées les enveloppes chitineuses, se trouve le vieux follicule chitineux (fig. 23, f. e, 1) ayant sa face à épines superposée aux nouvelles épines, dont chacune (fig. 23, ep, 2) est disposée sous les anciennes épines correspondantes (fig. 23, ep, 1). J'indiquerai encore qu’au même moment, c’est-à-dire au moment du rejet du tégument, les cellules des feuillets pul- monaires présentent une autre apparence que plus tard. Elles ne sont pas disposées à ce moment en deux séries, dont l’une est contiguë à la face supérieure du feuillet pulmonaire, et l’autre à la face inférieure, formant une cavité entre elles, comme il a été dit plus haut, — mais comme pendant le déve- loppement embryonnaire du poumon d’après la description de Locy. Les coupes du poumon à ce moment présentent une cavité, interrompue par des colonnes (fig. 25, cl) ; ces colonnes sont formées par deux cellules, qui joignent les surfaces du feuillet pulmonaire, et proviennent probablement de la fusion de deux cellules situées vis-à-vis l’une de autre. À ce moment on observe dans la cavité des feuillets pulmonaires une quantité de corpuscules sanguins (fig. 25, c. s) distincts des cellules des feuillets mêmes par leur position, leur taille et leur structure. ARTICLE N° 3, LA MUE DES ARAIGNÉES. 315 En finissant, je dirai que la respiration de Panimal pendant la mue est difficile, comme d’ailleurs il semble naturel, et cela d'autant plus que les deux poumons subissent la mue stricte- ment ensemble et que toutes les anciennes enveloppes chiti- neuses sont rejetées à la fois. Get état n’est pas durable cependant, car : 1° L'acte de la mue ayant commencé ne se termine que quand le tégument tout entier est rejeté et s’accomplit cepen- dant relativement dans un court espace de temps; 2° Les enveloppes chitineuses nouvelles, étant très fines, se forment très vite. Mue des trachées. — En examinant les trachées rejetées par la Tarentule pendant la mue, on voit que le stigmate des trachées s’ouvre quelque peu au-dessous de la ligne qui joint la paire inférieure des filières (fig. 26, sé. fi, 3). Le stigmate n’est pas circulaire, mais a la forme d’un rectangle à bords arrondis, dont la largeur est presque deux fois moindre que la longueur (fig. 68, st). En outre au milieu de sa plus grande longueur, ce rectangle est un peu comprimé. Par conséquent le stigmate présente l'aspect de deux orifices soudés, dont les limites sont distinctement marquées par l’étranglement pré- cité au milieu de sa plus grande longueur. Les bords de ce stigmate présentent un épaississement assez considérable, pas sur toute leur étendue, cependant : tout le milieu de la partie inférieure du stigmate n’est pas épaissie (fig. 68). Le stigmate conduit dans le tronc court commun (fig. 26, #r. g), qui se ramifie en deux rameaux (fig. 68, tr, 1). Ces derniers se ramifient à leur tour à une certaine distance en deux rameaux secondaires (fig. 67 et 68, tr. a; tr. b). Ces branches dichotomiques sont toutes disposées à peu près sur le même plan, et sont toutes comprimées de haut en bas. Sur les rameaux internes s’observent des appendices (fig. 26, ér. c), rameaux secondaires des trachées. Les parois des trachées renferment, comme il est connu d’après Mac-Leod (1), trois (1) Mac-Leod, Structure des trachées. Bruxelles. 316 WAGNER. couches : la tunique interne, la tunique chitinogène et la tunique externe. | Pendant la mue les deux premières couches seules se renou- vellent. La matrice qui enveloppe les vieilles trachées en guise de gaine donne naissance à la nouvelle chitine en dedans des trachées de la même manière que sur les téguments cutanés. La formation des nouvelles trachées pendant la mue offre tant de traits communs avec celui de la formation des glandes pendant la mue, que pour Comprendre ce mode de formation il suffira de s’arrêter à la description dans l’un de ces organes. Je renvoie par conséquent pour cette description détaillée à la mue des glandes à soie, que je donne plus loin. La mue des glandes. — Les glandes à soie chez les Arai- onées présentent, on le sait, plusieurs types différents de structure. Je ne m’arrêterai pas à leur description, parce que 1° cela ne fait pas directement partie du sujet de mon travail, et 2 parce que la mue des différents types de glandes à soie s'effectue à peu près de la même manière. J’indique donc seulement d’une manière sommaire Les parties de ces organes, qui doivent être mentionnées dans cet exposé du phénomène de la mue : la tunique intime de la glande passe dans un conduit, qui s’élargit au point de sa Jonetion avec la glande à soie, ce conduit est recouvert sur toute son étendue d’une spirale chitineuse fine, plate, à peine distincte. Ce conduit traverse d’abord l’organe, nommé filière, ou papille, et entre ensuite dans l’une des verrues (fig. 28, ver) dont le nombre et la forme sur les filières chez différentes Araignées sont diffé- rents, il finit par pénétrer dans le fube terminal de la verrue (fig. 28, tu) où il se soude aux parois internes de ce dernier, en faisant leur continuation immédiate (fig. 28, cond, 1). Pour faire un examen détaillé du sujet, nous nous arrêterons à la mue d’une des glandes de la Tarentule, qui s'ouvrent dans la paire médiane des filières. Pour bien se l’expliquer, il est indispensable d'examiner : 1° l’état des glandes quelque temps avant la mue — période qu’on ne peut définir exactement par le nombre de jours, car elle varie suivant les âges ; c’est ARTICLE N° à. LA MUE DES ARAIGNÉES. 917 la formation de la nouvelle cuticule sous la vieille qui l'indique, c'est-à-dire à peu près l’époque où prennent naissance les poils; 2° l’état des glandes au moment même du rejet du tégument, et enfin 3° le tégument rejeté pendant la mue par l’Araignée. Les faits, constatés sur des préparations faites à ces divers moments, nous expliquent suffisamment comment s’effectue la mue des glandes. Examinons d’abord l’état des glandes quelques jours avant le rejet du tégument. À l’époque de la formation du nouveau tégument, la matrice croît dans la verrue filière, en même temps que la couche chitinogène. Déjà formée près de la base du tube, elle s’étend de la verrue, se recourbe d’abord dans la cavité de cette dernière (fig. 28, M£, 1) pour se redresser ensuite et s'étendre vers le haut (fig. 28, Mf, 2), jusqu’au point de jonction de la paroi interne du tube avec le conduit de la glande à soie (fig. 28, A). Le pli, qui s’est formé ainsi (fig. 28, pl. Mer), reste dans cet état jusqu’au rejet du vieux tégument, de même que les plis nombreux à différents autres endroits, où la vieille cuticule n’est pas assez élastique pour se dilater et donner place à la nouvelle formation qui s'accroît en des- sous. Plus tard seulement le pli précité se redresse et ses parois forment le tube plus ou moins long de la verrue. Une couche fine de la matrice engaine le conduit de la glande (f) depuis le point de la jonction avec le vieux tube à l’état de mue, et s'enfonce dans la cavité du corps. Le même procédé a lieu pendant la formation des nouvelles trachées (fig. 27, Mi), et à mesure que cette couche avance vers l’intérieur, les vieilles conformations cuticulaires s’atrophient et de nouvelles pren- nent naissance au-dessous de ces dernières. Examinons la coupe transversale de la papille, ou plutôt de ses deux verrues (d’ancienne et de nouvelle formation). Au moment de la mue, quand le vieux tégument s’est déjà rétracté à tel point du jeune que les plis de ce dernier ont eu le temps de se redres- ser, et en même temps qu'eux le pli de la matrice, qui a donné naissance au tube de la verrue, nous voyons alors ce 318 WYAGNER. tube complètement formé, —une des verrues, —la supérieure, — appartient au vieux têgument, l’autre, — l’inférieure, — au nouveau, elle est située librement sous la première et en partie s'enfonce par le bout supérieur de son tube dans la cavité de la partie basale de la verrue supérieure. Le jeune conduit de la glande à soie présente un aspect bien différent de celui qu'il a normalement ; ses parois sont maintenant bien plus épaisses; elles se colorent parfaitement sous l’action des matières colorantes ; enfin la spirale de chi- tine à peine distincte, fine, plate, qui environne le conduit de la glande (/f) à l’état normal, se présente maintenant très épaisse, chitinisée seulement en partie et entortillée, non en forme d'une bande sèche plate, mais en forme de cordons élastiques, faisant une ligne ondulatoire sur le contour du conduit (fig. 29, Sp). Examinons maintenant l’autre extrémité des conduits, au point de leur jonction avec les glandes. Les préparations des glandes à soie, faites à ce moment de la vie des Araignées, nous présentent une quantité de tubes s’élargissant fortement au bout (fig. 30, e. fu); de l’intérieur de ces tubes sortent des appendices plus ou moins longs (fig. 30, sq. gl) ; ces appendices ont parfois l'aspect d’un cordon qui s'élargit au milieu de son étendue, parfois d’une bande partout également épaisse et large, etc. Il n’est pas difficile de reconnaitre dans ces parties les conduits des glandes à soie, qui en s’approchant de ces der- nières s’élargissent en forme de tube; quant à l’appendice, qui sort de cet élargissement, il représente la tunique interne de la glande mème. Le conduit est resté presque sans modifi- cation ; quant à la tunique interne, elle en a au contraire subi une considérable, elle s’est desséchée et rétrécie au point qu'il est difficile de la reconnaître dans l’appendice précité du conduit (fig. 30, sg. gl). Il est facile de se présenter les degrés de cette modification, si on se rappelle d’un côté sa finesse en général, d’un autre si on prend en considération à quel point s’amincit avant la mue la cuticule desséchée sur le corps ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 319 même, endroit où elle était pourtant comparativement épaisse ; à l’état habituel elle est dense et si épaisse, grâce à la pulpo- sité de ses couches de dessous, qu’étant ôtée d’une Araignée tuée elle est peu diaphane, tandis que la même cuticule reje- tée après la mue se transforme en lame extrêmement fine et tout à fait diaphane, dont les couches de dessous ne sont pas du tout distinctes. En résumant, les premiers moments de la mue nous pré- sentent ce qui suit : 1° La matrice, qui jusqu'alors a donné naissance aux jeunes ussus du conduit des glandes et de leur tunique interne, ne s’observe plus n1 sur les conduits, ni dans la glande même; 2° Les produits de la matrice sont loin de leur développe- ment final : ils se colorent facilement sous l’action du car- min, sont mous et élastiques et très épais comparativement avec ce que présentent les glandes à leur état normal ; 3° Les conduits des glandes ne se modifient presque pas vers la mue, à moins qu'on ne prenne en considération qu’ils sont devenus encore plus fins qu’à l’état normal ; 4° La tunique interne vers lamue change considérablement de forme : elle se dessèche, se rétrécit et ressort en forme d’appendice de lélargissement tubuliforme du conduit qui, à l’état normal, existe au point de réunion du conduit et de la glande. Revenons maintenant à l'examen du tégument rejeté par l’Araignée. Voici à cet égard ce que nous ont montré nos recherches. Dans la soie, qui se trouve à l’endroit où, au moment du rejet du tégument, la Tarentule s’est attachée par ses filières (toutes les Araignées, dans la mue que j'ai eu l’oc- casion d'observer font la même chose, c’est-à-dire s’attachent à quelque objet au moyen de leurs filières), il est facile de découvrir une quantité de conduits de glandes à soie, em- brouillés avec les filaments de la soie mème. Mais il n’est pas bien difficile de les dissocier, sinon avec l'aiguille, du moins sous la lamelle. Ayant trouvé le bout libre d’un des conduits, on peut faei- 320 WAGNER. . lement constater sur lui (en cas où il n’est pas déchiré) un petit épaississement en forme de calotte (fig. 29, 0. cn, 1). Suivant le conduit dans la direction du corps, on y découvre parfoisune petite gaine en forme decônetronqué (fig. 29, x. g); nous verrons plus loin comment le conduit entre dans le tube de la verrue (fig. 29, fu, 1), mais dans le cas qui nous occupe le tube est naturellement toujours cassé. En comparant la ligne de fracture du tube avec la même ligne sur la gaine conique (fig. 29 {w.,g) ci-dessus mentionnée, 1l n’est pas ciffi- cile de voir que ce cône est la partie cassée du tube, entraînée par le conduit pendant la mue de la glande ; la calotte a son bout libre — le bout terminal du. tube de la verrue, qui est par conséquent cassée en trois parties. Suivant le conduit encore plus loin, nous découvrons (main- tenant dans la cavité de la verrue et de la filière) un élargis- sement tubuliforme au bout du conduit (fig. 30, e. tu) au moyen duquel ce dernier se joint immédiatement à la glande. Cette partie élargie abouche ses bords avec le reste du tube, dont le lumen est trop petit pour le laisser entrer, et les parois trop denses et peu élastiques pour se dilater (fig. 30). Le bout élargi du conduit est suivi par la tunique interne, rétrécie de la glande à soie (fig. 30, sg. gl). En se basant sur ces observations on peut décrire ainsi l'acte même de la mue des glandes. Vers la mue, l’'Araignée attache fortement, au moyen de la soie, les bouts des tubes à quelque objet dur ; ensuite, pendant l’acte même de la mue, quand le tégument supérieur est devenu très fin et fragile, les tubes attachés se cassent à leurs bouts par suite des mou- vements de l’abdomen, qui ne cessent pas durant le rejet du tégument ; les conduits avec les bouts cassés de leurs tubes sortent des jeunes organes, qui jusqu'alors les entouraient en forme de gaines, et dont la mollesse et l’élasticité n’empêchent pas le passage des organes rejetés. Le tableau schématique de l'acte de la mue des glandes nous présente ce qui suit (fig. 29) en commençant par le haut : 1° Le bout libre du conduit avec unecalotte — le tronçon ARTICLE N° à, LA MUE DES ARAIGNÉES. 321 du bout du vieux tube — à son sommet (fig. 29, 0. cn, 1). Plus loin dans la direction du corps : 2° La partie du conduit, sortie de la cavité de ce dernier (Hom209 cn, li: 3° La partie basale du tube qui a subi la mue, d’où sort le conduit à l’état de mue (fig. 29, fu, 1) ; 4° Le tégument de la verrue, qui a subi la mue (fig. 29, cé, 1); 9° Le conduit placé entre le vieux tégument et le corps de animal (fig. 29, en, 1); 6° La paroi extérieure du jeune tube (fig. 29, ru, 9) ; 7° Le conduit nouveilement formé de la glande (fig. 29 cn, 2); sa partie chitineuse (fig. 29, sp); sa spirale ; 8° Le conduit à l’état de mue (fig. 29, cn, 1); 9° La partie du conduit s’élargissant en forme de tube (fig. 29, e. tu), d’où sort : 10° Le squelette de la glande à soie (fig. 29, sg. gl). La mue de toutes les glandes à soie se passe-t-elle de cette manière? En traits généraux oui, mais en détail il y a quelque différence. En examinant le tégument rejeté, on peut constater que ce n’est qu'aux verrues d'un type que les tubes se cassent et que les conduits sortis de ces dermiers qu’on observe dans la soie, sont alors les plus épais; quant aux verrues mêmes, ce sont les plus basses et larges, à tube court et large. La plupart des tubes chez la Tarentule sont entiers; leur aspect et la jonction des parois internes avec le conduit de la glande prouvent que les conduits #e sortent pas dehors le tube pendant la mue. Nous ne trouvons pas dans la soie d’at- tache pendant la mue de conduits de calibre aussi menu, que ceux qu'on trouve dans ces tubes non cassés. En comparant les verrues à tubes entiers avec celles dont les tubes sont cassés, il est aisé de voir la différence évidente de leur struc- ture. Ces dermières sont plus longues que les premières, de même que leur tube est plus long; enfin leur lumen est beau- coup plus étroit, et le conduit est de calibre plus fin. Les cir- constances énumérées de même que le fait que les verruers ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 21. — ART. N° 3. 322 WAGNER. - à tubes entiers sont beaucoup plus nombreuses que celles décrites ci-dessus , indiquent qu’elles appartiennent aux con- duits excréteurs des glandes piriformes les plus menues, qui sont disposées en masses près des filières mêmes. Leur posi- tion à l'extrémité de l’abdomen ne présente aucune nécessité de longs conduits, c’est pourquoi leur mue se fait sans qu'ils ressortent en dehors. Cela nous explique pourquoi nous ne trouvons pas de ces conduits dans la soie qui sert à l’Araignée pour s'attacher à quelque objet vers le moment de la mue; ils se trouvent tous avec les squelettes de leurs petites glandes dans la gaine du vieux tégument, tandis que les conduits des olandes de plus grand calibre sortent dehors pendant la mue, et ce ne sont que les bases des conduits, avec leurs élargisse- ments tubuliformes et les squelettes de leurs glandes, qui restent dans la gaine du vieux tégument. Il est à peine néces- saire d'ajouter ici que le processus de la formation des nou- veaux tissus de la glande à soie pour remplacer les vieux, de même que le processus de la mue, sont en principe, chez tous, les mêmes. Jusqu'à présent J'ai parlé de la mue de la glande à soie; mais, outre ces glandes, l’Araignée en a beaucoup d’autres. Elles se développent toutes également par la voie d’invagination ectodermique; mais sont-elles toutes sujettes à la mue comme les glandes à soie? Nous sommes obligé de répondre négative- ment à cette question; moi du moins, je n'ai pas eu la chance d'observer la mue de glandes d’aussi grand calibre que la glande venimeuse de la Tarentule. L'histoire de leur dévelop- pement explique, jusqu’à un certain point, ce phénomène. Les études de W. Schimkewitch (1) nous enseignent que les glandes, pourvues d’une tunique interne cuticulaire, comme les glandes à soie, se développent en forme d’invaginations ectodermiques à cavités, et acquièrent la tunique interne simultanément avec l'apparition de la cuticule embryonnaire ; (1) Matériaux pour la connaissance du développement embryonnaire des Arancina (Mém. Ac. sc. St-Pélersb., suppl. au t. LIT, n° 5). ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 323 par contre, les glandes privées de tunique interne se déve- loppent comme des invaginations ectodermiques denses sans cavités. Au nombre de ces organes il faut compter les glandes venimeuses. Par conséquent à la mue sont sujettes seulement les glandes qui se développent comme des invaginations ectodermiques à cavités et qui sont pourvues de tunique interne cuticulaire ; quant aux glandes du second type, elles ne sont pas sujettes à ce phénomène, leur conduit chitineux excepté. La mue des parties de l'appareil digestif soumises à ce phé- nomène. — Dans la partie antérieure de l'appareil digestif c’est le pharynx et l’æsophage qui sont sujets à la mue; dans la partie postérieure, la portion rectale de lintestin. Je n’ai pas besoin de faire la description de la structure anatomique de ces parties, parce qu’elle est bien connue. En se dévelop- pant par le mode de l’invagination ectodermique, à l’état de mue, elles n’ajoutent rien de nouveau à ce quiest déjà exposé; c’est pourquoi je m'y arrêterai pas, me bornant à dire que la sécrétion de la nouvelle cuticule commence un peu plus tard que sur les téguments du corps et se fait plus rapidement; ce qui est d’ailleurs compréhensible. Sur le tégument abdominal, rejeté d'une Tarentule, on peut voir un tube fin, pas long et très chiffonné (fig. 26, int), c’est la partie rectale qui a subi la mue sur la partie inférieure du céphalothorax, le pharynx et l’œsophage cuticulaires (fig. 40, cé) et qui restent immédiate- ment joints à la cuticule du tégument, comme ils l’étaient durant la vie de l’Araignée. J’ai à ajouter que plus ou moins longtemps avant la mue — d'autant plus longtemps que lani- mal est plus âgé — les Araignées commencent à jeùner. En captivité, trois ou quatre jours avant la mue, la Tarentule fait des arrangements pour le moment de larejection du tégument, ayant bien soin de s’isoler complètement des insectes qu'on lui donne pour sa nourriture, de sorte que ces derniers n'aient point accès près d’elle; si son gîte est par trop serré, elle ne pense qu’à isoler les insectes, qu’elle emprisonne dans sa soie. La mue des tendons. — Les muscles des Araignées sont in- 394 WAGNER. - sérés aux téguments du corps suivant deux modes : les uns, immédiatement, les autres, par l'intermédiaire des tendons. Les muscles qui se conjoignent au corselet du céphalothorax s’insèrent presque tous à la cuticule sans imtermédiaire des tendons. Les muscles dilatateurs de l’organe de la succion fai- sant seuls exception ; j'en parlerai plus bas. Dans l'abdomen également, 1l n’y a que quelques muscles rétracteurs des filières, qui sont insérés à la cuticule par l’intermédiaire des tendons (à moins qu'on ne compte les tendons des grands muscles longitudinaux) ; les autres, comme nous le verrons plus tard, sont insérés immédiatement à la cuticule. Enfin tous les muscles des extrémités et des appendices s’insèrent à la cuticule par l’intermédiaire des tendons. Par conséquent, le moyen le plus aisé d'étudier la mue des ten- dons, c’est de faire des recherches sur les extrémités; aussi allons-nous examiner les plus développés d’entre eux, dans les chélicères et les pattes, tels que, par exemple, dans les chélicères, les tendons du crochet. En examinant le tégument rejeté de la Tarentule, on peut constater au crochet des chéli- cères des tendons de structure suivante : de la face externe du crochet, on voit s'étendre deux grands tendons, qui se ramifient bientôt en quantité de branches divergentes ; les muscles, qui s’y conjoignent, servent d’extenseurs du crochet; de la face interne du crochet — quoique pas directement d'elle, mais du bourrelet chitineux qui y est rattaché par une jonc- tion mobile (fig. 37, ep. ch) — s'étend en forme d’une bande continue toute une rangée de faisceaux tendineux (fig. 37, en) qui se ramifient également à leur extrémité libre. Ces tendons se joignent à tout un système de muscles fléchisseurs du ero- chet. En fait d’autres tendons, moins développés, je citerai ceux des muscles, qui prennent naissance entre les yeux mé- dians et latéraux et s’attachent aux bords supéro-intérieurs des chélicères ; ils font mouvoir les chélicères vers l’intérieur et n’ont de tendons qu’au point de leur insertion, c’est-à-dire à l'endroit imdiqué des chélicères. Ces muscles sont, comme on le voit d’après les tendons qui ont subi la mue, plus déve- ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 399 loppés que leurs antagonistes, qui prennent naissance de la paroi supérieure du céphalothorax et sont insérés au point de jonction du bord intérieur des chélicères avec la paroi tho- racique. La différence dans le développement de ces muscles s'explique entre autres par un fait biologique connu, que la Tarentule s'étant, au moyen des chélicères, emparée d’un mor- ceau de cire, y enfonce les crochets par l’intermédiaire des muscles du premier groupe, si fort qu’elle n’a plus la force de les retirer au moyen des muscles de la seconde catégorie; c'est pourquoi il est facile de la retirer de son gîte par ce moyen. Les autres tendons des chélicères sont beaucoup moins dé- veloppés, aussi ne m’y arrêterai-je pas. En fait de tendons des pattes, les tendons qui dirigent les mouvements des crochets sont les plus développés. Sur le técument rejeté de la Tarentule, il est facile de les voir à tra- vers le tégument de la patte. Ils s'étendent à partir des cro- chets en forme d’un double cordon épais (fig. 32, ten, 1; ten, 2), traversent le point de la jonction du dernier article de la patte (tarsus) avec lavant-dernier (metatarsus), entrent dans la cavité de ce dernier, montent presque jusqu'au point de sa jonction avec le troisième article, où ils s’épaississent (fig. 39, e. t) et se joignent avec les muscles forts et courts, insérés à la cuticule de la patte au point de la jonction des deuxième et troisième articles de la patte. Concernant l’union des tendons avec les crochets de la patte, nous voyons que la base des deux crochets pectinés à chaque patte de la Tarentule est unie à une conformation chitineuse particulière par une Jonction presque immobile; cet organe a des bords de chitine épais et un orifice au milieu (fig. 32 et 31, c. c. a); je le nommerai organe du crochet auxiliaire, parce que chez la Tarentule ce crochet auxiliaire (sans dents) est inséré à demeure sur la face externe de cet organe. Les tendons sont insérés de la manière suivante : deux d’entre eux avancent pour s’unir à une paire de crochets pec- tinés au point où ces derniers, formant un angle, donnent 326 WAGNER. - dans la cavité de la patte et adhèrent immédiatement à l’or- gane précité (crochet auxiliaire) (fig. 32); un seul — le plus développé — dont l’épaisseur surpasse presque doublement celle des deux premiers pris ensemble, se joint à la face externe la plus courte de l'organe. Dans l’épaisseur du dernier tendon est disposé un trait épais, quoique assez court, de chitine jaune engainé dans un tendon diaphane, dont la structure filamen- teuse peut être constatée, bien que d’une manière assez peu nette. Du point de sa jonction avec l'organe du crochet auxi- liaire, ce tendon s'étend droit en haut, c’est-à-dire vers le point de jonction du tarse avec le métatarse. Dans sa course on voit se joindre à lui les tendons des crochets pectinés, qui tous, formant avec lui un seul faisceau, dans lequel ils peuvent cependant être parfaitement distingués, avancent vers le point de jonction du tarse avec le métatarse. De cette description, ainsi que des figures ci-Jointes, 1l n’est pas difficile de voir : 4° Que le tendon du crochet auxiliaire, par l’intermédiaire duquel les crochets pectinés se courbent en dedans, joue le rôle d’antagoniste des autres tendons, qui se joignent aux cro- chets pectinés et Les font courber en dehors ; 2° Que lactivité du premier tendon est considérablement plus forte que celle des derniers, et que, par conséquent, c’est avec plus de vigueur que les crochets peuvent se courber en dedans qu’en dehors ; 3° Enfin, que la présence de la chitine dans l’épaisseur du tendon indique que les cellules de l’ectoderme prennent dans sa formation une part immédiate. Une certaine période avant la rejection du tégument — pé- riode qui n’est pas la même pour les différents âges et d'autant plus longue que l’espace de temps séparant la mue donnée de la précédente, est plus longue (autrement dit, que le stade est plus avancé), on voit un développement anormal de la matrice. Vers les extrémités des pattes, cette couche s’élève d’abord en forme de bourrelets autour des tendons, au point de jonction avec les crochets pectinés et avec l'organe ARTICLE 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 397 du crochet auxiliaire. Ces bourrelets croissent et environnent les tendons, montent le long de ces derniers vers le haut, en formant autour d’eux une gaine contenant de grosses cellules ovales. Le point, où se joignent les tendons des crochets pec- tinés et du crochet auxiliaire, sert aussi de point de jonction aux gaines de la matrice en une seule gaine commune. Cette gaine monte de jour en jour plus haut, jusqu’à ce qu’enfin elle atteigne le point de jonction des faisceaux musculaires avec le sommet du vieux tendon. À mesure que la croissance de la matrice avance, le vieux tendon commence à s’atrophier, privé de la nutrition qu’il recevait jusqu'alors du sang qui l’environnait, et qui maintenant est cloisonné par la couche épaisse de la matrice. Cette dernière, avec une extrême rapi- dité, donne naissance au nouveau jeune tendon, qui ren- ferme en dedans les faisceaux du vieux. Une coupe longitudinale du tendon à ce stade de dévelop- pement présente l'aspect suivant : en dehors une couche mince de tissu conjonctif (1) (fig. 34, c. c), ayant en dessous une couche de grosses cellules ovales de la matrice (fig. 34, M) ; plus loin, en dedans, la gaine filamenteuse élastique diaphane du jeune tendon (fig. 34, ten, 2), dans la cavité duquel on voit le cordon jaune atrophié de l’ancien tendon (fig. 34, ten, 1), n'ayant presque plus de structure et tout à fait fragile. On voit sur les préparations que la matrice environne le nouveau ten- don d’une couche compacte continue (fig. 33), dont l’enve- loppe est particulièrement apparente aux endroits qui ont été repliés par hasard durant l’opération (fig. 33). Ultérieurement la couche de la matrice devient de plus en plus mince, et le nouveau tendon augmente en épaisseur (fig. 35), puis survient le rejet du tégument. Le tendon pré- sente à ce moment sur la préparation l'aspect suivant (fig. 31) : les grosses cellules ovales de la matrice, disposées à une cer- (1) Cette couche tégumentaire, tout à fait comparable à la couche conjonc- tive de l’Écrevisse (décrite par Haeckel) et à la cuticule interne de Graber, a été constatée, la première fois pour les Araignées, par W. Schimkewitch dans son Anatomie de l'Épeire. 328 WAGNER. taine distance, forment une couche qui environne le jeune tendon, déjà considérablement développé (fig. 31, Mf, 2). Le vieux tendon se trouve encore dans sa cavité (fig. 31, £en. b), mais il s’est déjà rétracté dela musculature. [l estentraïné par ses parties basales, c’est-à-dire par son point de jonction avec les crochets pectinés el auxiliaires, et, à mesure que la patte se déshabille du vieux tégument, le vieux tendon se dégaine du jeune. La figure 51 présente l'aspect du phénomène au moment même de la mue. L'ancien tégument s’est déjà rétracté à une certaine distance de l’extrémité de la Jeune patte; il ne se tient que par les traits des vieux tendons, qui, en partie, se sont déjà dégainés des jeunes tendons (fig. 31, ten. a, et fig. 31, ten. b). Enfin les pattes engainées de jeune tégument se débar- rassent des vieilles gaines et les vieux tendons se dégainent également des jeunes. Ils se dressent alors chacun à part dans la vieille dépouille de la patte, et sont restés désumis : les tendons des crochets pectinés qui sont sortis de la gaine du jeune tendon de ces crochets au point de leur jonction avec l'organe du crochet auxihaire (fig. 31, 0, 1), sont disposés plus près de la surface externe de la patte; le tendon du crochet auxiliaire est sorti de l’orifice de la face opposée à cet organe (fig. 31, 0, 2) et se trouve disposé plus près de la surface interne de la patte. La mue des vieux tendons est terminée ; mais la formation du jeune tendon dure encore quelques jours après la mue. On peut donc signaler les phases suivantes dans la marche de cette formation : 4° L’orifice de la cavité des jeunes tendons se cicatrise, après que les anciens les ont évacués; ensuite sous l’effet de l'activité des cellules ectodermiques de la matrice, la cavité même se referme. Les premiers jours après la mue, le jeune tendon du crochet auxiliaire a encore cette cavité, quoique son orifice se soit déjà cicatrisé. Par la suite on ne trouve plus de trace de cette cavité à cet endroit et elle est remplacée par un petit cordon jaune chitineux sans structure, cordon dont il à été question plus haut. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 399 9 La couche de la matrice, environnant le jeune tendon, s’amincit de plus en plus; ses cellules, d’ovales qu’elles étaient, deviennent oblongues, fusiformes, comme on le voit sur Îles préparations (fig. 35, c. Mo) et les coupes (fig. 36, c. Ms). Gette métamorphose des cellules de la matrice nous indique entre autres la cause de l’allongement filamenteux des tendons, qui leur doivent leur origine. La matrice environnant le tendon disparait complètement à la longue; le tendon, entièrement formé, présente un cordon élastique, incolore dans sa plus grande partie, à fibres visibles dans les premiers temps, qui, avec le temps, deviennent moins distinctes. 3° L'insertion des faisceaux musculaires a lieu sur l’extré- mité du tendon nouvellement formé. La matrice qui engaine le vieux tendon est montée jusqu'au sommet du tendon, et, après que ce dernier s’est atrophié et rétréci, elle a pris place entre les faisceaux musculaires et l’épaississement du vieux tendon, auquel ces derniers étaient insérés, se trouvant ainsi dans les mêmes conditions que pour la mue des muscles, qui sont insérés directement sur la cuticule et dont il sera question plus tard. En effet, dans les deux cas les faisceaux de muscles se rétractent du point de leur insertion primitive; là comme ici, la matrice remplit l’interstice entre les bouts libres des faisceaux musculaires et l’épaississement du tendon atro- phié dans un cas, et entre la vieille cuticule rétractée dans un autre cas. Dans les deux cas le tissu conjonctif se fusionne avec le sarcolemme des faisceaux musculaires. Toute la dif- férence consiste en ce que dans un cas les faisceaux muscu- laires s’insèrent sur la cuticule, dans un autre sur l’épaississe- ment du tendon. À cet état, on peut considérer l'acte de la mue des tendons comme terminé. Il ne s’accomplit pas d’ailleurs et ne se termine pas simultanément sur tous Îles tendons de l’animal. La mue semble être en dépendance de leur grandeur et s’effectue d’autant plus rapidement que les tendons sont plus petits. C’est grâce à cette circonstance que nous pouvons observer sur un seul animal différents états du développement et de la structure des tendons en commençant 330 WAGNER. par ceux qui ont presque subi la mue jusqu’à ceux qui en ont à peine passé la moitié. Dans les mandibules, les pattes, le céphalothorax et l’ab- domen, la mue s’accomplit dans le même ordre qu’on l’a vu s’accomplir dans les tendons des crochets des pattes. La drffé- rence ne dépend que de la part, plus ou moins active, que prennent les cellules de la matrice dans la formation des ten- dons. Le fait est que dans un cas ces dermiers doivent leur origine uniquement aux cellules de la matrice, comme nous l'avons vu dans le cas décrit; dans un autre, ils se forment aux dépens du sarcolemme musculaire, qui a été seulement chi- tinisé par Pactivité de la même matrice. Les tendons des organes lyriformes des pattes peuvent servir comme exemple de la formation de la dernière catégorie; en effet dans leur base ils doivent encore leur origine à la matrice, mais leur plus grande partie (leurs extrémités) présente le sarcolemme mus- eulaire chitinisé. Les tendons, qui dirigent les mouvements des crochets des pattes, présentent un autre exemple de la formation de la première catégorie. Le corps des Araignées, outre ces tendons, en renferme cer- tains qui ne sont pas sujets à la mue; tels sont par exemple la lame aponévrotique du céphalothorax chez la Tarentule, qui présente un tendon très puissant et d’autres divergeant à partir de cette lame dans tous les sens, tels encore les tendons longitudinaux de l'abdomen. Ces faits s'expliquent facilement si l’on songe que la lame aponévrotique du céphalothorax, qu’on a supposée longtemps d’origine ectodermique, n'est en réalité que le produit du mésoderme, comme l’a montré, au- tant que je sache, pour la première fois M. Schimkewitch (1); les tendons de l'abdomen sont également d’origine mésoder- mique. Il est vrai que la chitinisation de ces tendons s’accom- plit aux dépens des cellules de l’ectoderme, qui plongent dans la cavité du corps, et, par leurs extrémités, viennent en con- (1) W. Schimkewitch, Matériaux pour la connaissance du developpement embryonnaire des Araneina (Mém. Ac. sc. St-Pétersb., suppl. au t. LIL, n°5). ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 331 tact avec le tendon; mais cette union, d’après l’auteur pré- cité, ne s’observe qu’aux derniers stades du développement embryonnaire, et n'existe pas chez les adultes. Je crois pouvoir tirer ainsi de mesrecherches sur la mue des tendons chez les Araignées les conclusions suivantes : 1° Les tendons, qui doivent leur origine au mésoderme, sans que les cellules de Pectoderme y prennent aucune part, — comme la lame aponévrotique des Araignées, — ne sont pas sujets à la mue; 2° Les tendons d’origine mésodermique avec le concours des cellules ectodermiques en qualité d’élément chitinisateur subissent la mue uniquement dans le cas où leur union avec les cellules précitées ne s’interrompt pas pour toujours ; c’est ce qui nous explique pourquoi les tendons des muscles longi- tudinaux de l’abdomen ne subissent pas la mue, tandis que ceux des organes lyriformes et d’autres organes, d’origine analogue, la subissent (1) ; 3° Enfin la mue se présente de la manière la plus nette et la plus parfaite dans le cas des tendons, qui doivent leur ori- gine uniquement aux cellules de l’ectoderme, comme c’est le cas pour les tendons des crochets des pattes. Revenant main- tenant aux muscles, insérés immédiatement sur la cuticule, je commencerai par la description d’une forme qui nous pré- sente un cas où se réunissent les indices des deux modes d’in- sertion : immédiat et par l’intermédiaire des tendons. Je lai mentionné ci-dessus.C’est une excroissance cuticulaire en forme de crête, située sur le corselet du céphalothorax, et à laquelle sont insérées les fibres musculaires de l'organe de la succion, en partie immédiatement, en partie par l’intermédiaure du ten- don. Un examen détaillé de cet organe nous découvre que la (1) Ces tendons, comme il a été dit plus haut, ne doivent leur origine aux cellules de l’ectoderme qu’en partie; car le sarcolemme des muscles y prend également part; or ce dernier, d’après les recherches de Froriep (Ueber das Sarcolemm und die Musculkern. Arch. f. Anat. und Physiol., 1838), est considéré comme une conformation de tissu conjonctif, c’est-à-dire comme produit mésodermique. 339 WAGNER. crête en question consiste en deux feuillets cuticulaires qui se sont fusionnés par leurs bords le long de toute leur étendue dans la cavité du corps et s’écartent un peu lun de l’autre au point de leur insertion sur la cuticule du céphalothorax. Ii se forme de cette manière un sac dont le côté ouvert est tourné en dehors, et celui qui est fermé par cette fusion, en dedans. La couche supérieure de la euticule ne prend aucune part à la formation de ce sac et s'étend au-dessus de son ouverture. La couche inférieure, en s’approchant du sac, s’amincit et s’évanouit, comme elle le fait en s’approchant des épaississements de la chitine, aux points d'insertion immé- diate des fibres musculaires à la cuticule. Par conséquent on peut considérer cette forme comme transitoire entre lépais- sissement de la chitine tégumentaire aux points d'insertion immédiate des fibres et les tendons chitinisés. En effet, par la forme et par le mode d’insertion des muscles, cette con- formation rappelle plutôt un tendon chitinisé qu’un simple épaississement de la chitine, auquel elle ne ressemble nulle- ment; tandis que par l’origine on doit, au contraire, la consi- dérer comme un simple épaississement de la chitine, au bout duquel sont insérés les tendons. Les traces de l'insertion des fibres musculaires sur les parois du follicule et leur rôle phy- siologique nous expliquent la forme de l’organe en question. Sa destination ne consiste pas seulement à servir de point d'appui le plus ferme possible pour l'insertion des fibres, comme c’est le cas pour les fibres, immédiatement insérées à un épaississement local de la cuticule, mais surtout à don- ner place à l'insertion d’un plus grand nombre de fibres mus- culaires. Il n’y a, en effet, aucune nécessité de lever avec force les parois de l'organe de la succion, mais il est mdispensable de lever le plus grand nombre possible de points de ces parois. Revenons maintenant à l’examen des muscles immédia- tement insérés à la cuticule. Un examen détaillé du tégument rejeté pendant la mue de la Tarentule constate l'existence de deux espèces de points d'insertion immédiate des muscles, ARTICLE N° 3, LA MUE DES ARAIGNÉES. 333 qui diffèrent par leur structure et par leur calibre. Les uns présentent un épaississement plus ou moins considérable d’une sculpture tuberculeuse à l’extérieur (fig. 39, A), et ont une rangée d’alvéoles à parois plus ou moins épaisses à l’intérieur (fig. 39, B). Chacune de ces alvéoles sert de point d'insertion immédiate à un faisceau musculaire : le nombre d’alvéoles sert donc à indiquer le nombre de faisceaux. Une coupe transver- sale nous montre que cet épaississement dans l’abdomen consiste seulement dans les couches supérieure et médiane de la cuticule, aux dépens de laquelle se produit uniquement l’épaississement de chitine; on n’observe point la troisième couche. Les épaississements sont partout d’une couleur jaune plus ou moins intense. L'autre mode d'insertion immédiate des muscles ne pré- sente pas d’épaississement de la chitine; on observe à ces points, sur le tégument, des épaississements linéaires à peine distincts, qui indiquent la limite du point d'insertion du muscle et de chacune de ses fibres prise à part. La cuticule, en ces points, reste aussi incolore et transparente qu'aux autres endroits VOIsins. La similitude consiste en ce que : 1° dans les deux cas, on n’observe au-dessus du point d'insertion n1 poils n1 autres con- formations analogues ; 2° en ce queles épaississements linéaires du tégument, en s’'approchant des points susdits, les entourent en forme de cercles concentriques. | | Concernant la répartition de ces deux conformations sur la culicule, elle indique que le nombre de muscles dans l’abdomen de l’Araignée (où l'insertion immédiate des muscles à la cuti- cule estcaractéristique) est bien plus considérable qu’on ne le supposait jusqu’à présent. D’après les recherches de M. Schim- kewitch (Anatomie de l'Épéire), le nombre des muscles dans l’abdomen présente ce qui suit : Trois paires de muscles dorso-ventraux (1, 2 el 3); Sept paires de muscles insérés à la partie inférieure de l'abdomen, dont érois sont, d’après l’auteur, des muscles pul- monaires (huitième, neuvième et quatorzième paires), et deux 394 WAGNER. des muscles dilatateurs de la fente gémitale (la septième et la dixième) ; Deux paires de muscles élévateurs de la paroi inférieure de l’abdomen (onzième) ; Le muscle rétracteur de la filière inférieure (douzième) ; Le muscle de la paroi antérieure de l'abdomen (treizième). Je ne mentionne pas les autres, parce qu'ils ne prennent pas leur point d'insertion sur la cuticule de l'abdomen. Le muscle rétracteur de la filière inférieure seul (le dou- zième) est inséré à la cuticule par lintermédiaire d’un ten- don ; tous les autres s’insèrent immédiatement. Tout ce que nous venons de dire donnerait droit de ne s’at- tendre qu’à sept paires d'épaississements locaux de la eutieule sur la moitié inférieure de l'abdomen (pour les huitième, neu- vième, quatorzième, septième, dixième et onzième paires de muscles), et quatre sur la supérieure (pour les première, deuxième, troisième et treizième). En réalité, cependant, nous avons sur la partie inférieure (fig. 38) deux rangées médianes d’épaississements consistant en seize paires (fig. 38, 1-16), peu espacées l’une de l’autre; ensuite en deux rangées laté- rales d’épaississements (fig. 38, 17-39). Ces rangées consistent en vingt-trois paires d’épaississements, disposées d’abord (près des poumons) irrégulièrement, et ensuite par lignes presque droites et parallèles aux deux médianes. Au total nous avons là, à la face inférieure de lPabdomen, trente-neuf paires d’épaississements représentant les points d'insertion, e’est-à- dire un bien plus grand nombre qu’on ne le suppose; fait auquel on devait s'attendre, vu la quantité de fonctions variées des organes de l'abdomen. M’arrêter à la description de ces muscles et à l'examen de leurs fonctions, m’éloigne- rait trop du but que je me suis proposé dans le travail présent. Nous avons en outre un bien plus grand nombre de points d'insertion immédiate des muscles à la cuticule sans épais- sissement de la chitine à ce point. Le siège de ces muscles est strictement déterminé; on ne les observe qu’à gauche et à droite de la ligne des épaississements latéraux de chitine. ARTICLE N° 9. LA MUE DES ARAIGNÉES. 539 Les mêmes conformations s’observent sur la face dorsale : à côté des épaississements locaux de la chitine aux points d'insertion des muscles dorso-ventraux et dans l'intervalle compris entre les lignes des épaississements locaux sur la face dorsale et la ligne latérale des épaississements (fig. 38, 17 et 39). Les conformations appartiennent à la musculature sous-cutanée, qui n’est par conséquent pas partout dans les mêmes rapports à la cuticule du tégument. Quant aux muscles, insérés à la face dorsale de l'abdomen, d’après W. Schimkewitch, 1l y en a quatre paires. Aux points de leur insertion nous observons quatre paires d’épaississements locaux de la chitine; il faut y ajouter encore deux paires d’épaississements, se trouvant sur la face dorsale de l’abdo- men un peu plus haut que l'anus et sur ses côtés. Concernant la mue des points d'insertion immédiate des muscles, j'ai pu constater ce qui suit : Les coupes à différents moments, plus ou moins éloignés du rejet du vieux tégument, nous montrent que le phénomène commence par l'accroissement de la matrice autour du point d'insertion du muscle, qui environne peu à peu les faisceaux musculaires, comme elle le fait avec les tendons, d’abord par une couche mince s'épaississant ensuite vers le haut. Est-ce seulement sous la pression mécanique de la croissance de la matrice, qui forme à plusieurs endroits des plis, ou sous l'influence d’autres causes encore, que le sarcolemme des faisceaux musculaires se déchire à une hauteur à peu près égale à la largeur d’un faisceau de grandeur moyenne? La matrice qui à monté maintenant jusqu'au point de rupture du sarcolemme se courbe pour pénétrer dans l’espace qui s’est formé entre les extrémités des fibres musculaires et le point de leur insertion primitive. Les gaines de sarcolemme détachées se trouvent de plus en plus serrées par la matrice contre l’ancien tégument. La marche de la formation du jeune tégument a lieu suivant l’ordre général. Aux endroits où se trouvaient les alvéoles on voit des papilles chitineuses prendre naissance, elles forment à la longue la sculpture 396 WAGNER. tuberculeuse de la cuticule externe aux points d'insertion des fibres musculaires, etc... Autour des bouts des fais- ceaux musculaires libres on voit se former de nouvelles gaines du tissu conjonctit, qui se fusionnent avec les gaines de sarcolemme, phénomène lent, qui ne se termine qu'après la mue des Araignées. Arrive enfin le moment de la mue : le vieux tégument se rétracte graduellement du jeune. Les gaines des fibres musculaires, qui ont subi la mue et ont été jusqu'à présent chiffonnées, se redressent. À ce moment la coupe nous présente l'aspect suivant : 1° Couche supérieure de la cuticule tégumentaire (fig. 41, v. ct, 1), sur laquelle s’observe la sculpture tuberculeuse (fol isc NE % Seconde couche de la cuticule, aux dépens de laquelle proprement se forme l’épaississement de la chitine au point d'insertion des muscles (fig. 41, ct, 2); 3 Troisième couche de la cuticuie, qui ne prend pas part directement à la formation de l’épaississement précité (fig. 4T, CLS); % Les bords élevés des alvéoles (em); (en) leurs enfonce- ments dans lesquels étaient disposées les extrémités des fibres musculaires ; 5° Les gaines qui ont subi la mue (fu) ; G° Les tubercules (sc. t, 2) du jeune tégument, se trouvant sous les alvéoles du vieux tégument; 7° 8° 9% Les couches supérieure, moyenne et Imférieure de la jeune cuticule (nct, 4, N. cé, 2, N. ct, 5); 10° La matrice (Hé); 41° 42% La couche de tissu conjonctif, qui passe dans le sarcolemme (sr) des fibres musculaires ; 13° Les fibres musculaires (Ms), qui, à cette époque, c’est- à-dire dans la période de leur croissance pendant la mue, présentent un aspect assez caractéristique : leurs extrémités ne sont pas contiguës les unes aux autres et ne forment pas par conséquent de faisceau unique commun, comme c’est le cas dans le temps ordinaire, mais chaque fibre se termine à ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 337 part dans l’alvéole. Traitée par les réactifs, la partie terminale nouvellement formée des fibres semble s’être rétrécie plus considérablement que la partie correspondante vieille ; de là l’aspect que présente la figure 41, Ms. p. J'ai déjà dit que la fusion du tissu conjonctif avec le sarco- lemme resté sur les fibres musculaires s'effectue lentement et s'achève après la mue. En effet, en faisant les préparations, le mode d’attache de ces organes cède facilement, ce qui donne souvent occasion de voir deux faisceaux de gaines : les unes, vieilles, sous le vieux tégument, les autres, nouvelles, sous le nouveau tégument, arrachées à peu près au même point que les vieilles. Ces faits fournissent des arguments en faveur de cette opi- mon : 1° qu'il n’y a qu'une partie des gaines des fibres muscu- laires qui est sujette à la mue, celle qui se forme aux dépens du tissu conjonctif sous-cutané et que leur sarcolemme ne subit pas la mue; 2 que la réunion de la couche du tissu conjonctif cutané avec le sarcolemme des fibres se fait à une certaine hauteur de la cuticule ; 3° que la rupture des gaines a lieu justement au point de jonction des couches précitées. La description de la mue des tendons et des extrémités des gaines des fibres musculaires fait supposer que l’Araignée éprouve une difficulté de mouvement pendant une période de temps plus ou moins proche du rejet du vieux tégument, période qui est en rapport avec l’âge de l’animal. Mais au moment de la mue, quand la matrice est à peu près formée complètement en différents endroits, les mouvements de l’ani- mal sont, quoique faibles encore, déjà plus énergiques. La justesse de cette supposition se vérifie d’ailleurs par l’obser- vation qui nous montre que l’activité formatrice de la matrice ne se termine pas avec la mue, comme on peut le voir par les faits qui ont été indiqués plus haut, et entre autres par ce fait que l’épaississement de la chitine au point d'insertion des fibres musculaires sur le nouveau tégument est plus faible que sur l’ancien tégument, l’activité ultérieure de la matrice devant seulement bientôt après la mue atteindre et même ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 22. — ART. N° 3. 338 WAGNER. surpasser l’épaisseur obtenue en ces points par l’ancien tégu ment. Des modifications dans les corpuscules sanguins des Arai- gnées pendant la mue. — Gomme j'ai déjà publié une note spéciale sur les corpuscules sanguins des Araignées (1), je ne m'arrêterai pas iei sur ce sujet et me borneraï à citer quelques extraits de cette note ayant un rapport direct avec la mue. On observe dans le sang des Araignées deux types fonda- mentaux de cellules sanguines : les cellules colorées (fig. 44) et les cellules amiboïdes (fig. 42), bien distinctes : 1° Par la forme; les premières ont l’aspect de lames rondes, les secondes de lames ovalaires ; 2° Par la forme des pseudopodes, qui sont très caracté- ristiques chez les cellules amiboïdes (fig. 43) et les cellules colorées (fig. 45) ; 3° Par leur manière de se comporter devant les réactifs, et en particulier devant les particules des matières colorantes, comme le cinabre ou l’indigo; ces particules s’introduisent en dedans des cellules amiboïdes, ce qu’on n’observe jamais dans les cellules colorées, auxquelles ces particules ne font que s’accoler en dehors. Le nombre des cellules amiboïdes d'un sujet adulte est à peu près 60 pour 100 du total général des corpuscules san- guins et le nombre des cellules colorées 35 pour 100; les o pour 100 restants se composent en partie de cellules sphé- riques, dont je parlerai plus bas (3, 4 pour 100), en partie des ballons (4, 2 pour 100). Ces derniers n’ont pas de rapport direct avec le sujet qui nous occupe pour le moment : c’est pourquoi je n’en parlerai pas, renvoyant leur étude à la note citée plus haut. Outre les types de cellules sanguines en lames, on observe encore dans le sang des Araignées d’autres cellules qui ont la forme, non de lames, mais de sphères; ces sphères, outre le protoplasme, contiennent un noyau et des vacuoles (fig. 46”). (1) Du sang des Araignérs (Archives Slaves, janvier 1887). ARTICLE N° 9. LA MUE DES ARAIGNÉES. 339 Les traits caractéristiques qui distinguent les cellules ami- boïdes et colorées consistent : 1° Dans leur calibre, notablement plus grand que celui des cellules colorées ; 2° Leur Imcapacité de mouvements indépendants à cause du manque de pseudopodes; leurs mouvements sont causés par la circulation du sang, par lequel elles se laissent entrai- ner. Le nombre de ces cellules est en général peu considé- rable et ne dépasse pas 3 à 4 pour 100 du total des corpuscules sanguins ; souvent il est même moindre. J'ai à ajouter que les cellules sphériques ne font pas un type imdépendant de cellules et ne présentent qu’un état pro- visoire d’autres cellules sanguines; la métamorphose des cellules colorées en sphères peut être parfois dessinée sur une cellule sous la lamelle recouvrante. Cette métamorphose a leu pendant la prolifération. En les observant à cette époque, on peut remarquer, chez quelques-unes d’entre elles, que le noyau devient ovalaire (fig. 47, #), au lieu de rond quil était jusque-là. Quelques-uns de ces noyaux renferment deux nucléoles ; on voit d’autres sphères qui contiennent des noyaux à l’état de prolifération (fig. 48); enfin des sphères à deux noyaux (fig. 49). Dans le sang fraîchement retiré de l’ani- mal, on peut enfin examiner pas à pas les diverses phases de la prolifération sur une de ces sphères à deux noyaux, ou même sur toute une série de ces sphères à divers états d'avancement du phénomène. Parfois les noyaux se dispersent vers les différents pôles de la cellule et la prolifération n’a lieu qu'après cette dispersion; parfois le phénomène ne com- mence qu'après la prolifération du noyau. Dans ce cas, la sphère s’étrangle insensiblement sur le point correspondant à celui de la division du noyau (fig. 49 et 50). La vacuole de la cellule sphérique se partage aussi ensemble avec le noyau en deux parties à peu près égales, la prolifération de ce der- nier précédant selon toute apparence celle de la seconde. Les cellules sphériques à noyaux étirés ou à l’état de proli- fération ont, pour la plupart encore, une vacuole non proli- 340 WAGNER. férée (fig. 47 et 48); les sphères binuclées ont deux vacuoles. En tous cas, il est indubitable que la prolifération du noyau dans les sphères précède la division du corps de la sphère. Il résulte par conséquent de tout ce qui vient d’être dit que les cellules sphériques doivent être considérées comme l’état provisoire d’autres cellules sanguines pendant leur proliféra- tion, et le fait que le nombre des cellules sphériques chez les Araignées ne dépasse pas ordinairement 3 à 4 pour 100, per- met de conclure que, quoique la prolifération de cellules s'effectue à toutes les époques de la vie des Araignées, elle s'effectue avec peu d’intensité. Pendant la mue le rapport des corpuscules sanguins change subitement et d’une manière très remarquable, l'aspect du sang change aussi. Avant tout, pendant ce phénomène il devient blanchâtre et trouble, et non plus incolore et dia- phane, comme il était auparavant; au toucher 1l semble plus gluant que d'ordinaire. Sa valeur devient maintenant pour l'animal de grande importance; s’il est permis de s’exprimer ainsi, en effet, la perte de deux-irois gouttes, retirées à l'animal, lui coûte parfois la vie. L’examen microscopique du sang à cette époque découvre à peu près 90 pour 100 de sphères, au lieu des 3-4 pour 100 au temps ordinaire; presque tous les corpuscules sanguins se sont transformés en sphères à quel- ques exceptions près, en d’autres termes, ils sont tous à cette époque à l’état de prolifération. Pendant les jours suivant immédiatement la mue, la pro- lifération de la grande majorité des cellules s'effectue done à peu près simultanément. Le jour de la mue, quand le nombre de cellules sphériques atteint son maximum, je n’en ai pas vu une à deux noyaux, quoique J'en ai examiné plus d’un millier; le lendemain, elles paraissent déjà en grand nombre; leur prolifération est presque à son terme pendant les deux, trois jours suivants, car le surlendemain le nombre de sphères baisse jusqu’à 45 pour 100 du total des corpuscules sanguins, tandis que celui des cellules amiboïdes et colorées revient en pro- portion à ce qu'il était avant la mue, et cela malgré l’ac- ARTICLE N° 3, LA MUE DES ARAIGNÉES. 341 croissement de volume des lacunes et vaisseaux sanguins de l'animal; autrement parlant, il est devenu presque double. Ce fait prouve entre autres que la prolifération s'effectue dans une période de temps comparativement très courte. Qu'est-ce qui peut expliquer ce phénomène? Dire qu'un organisme, qui tout à coup atteint une croissance aussi con- sidérable que celle d’une Araignée après la mue, — exige à peu près le double des cellules, — serait ne rien dire. D’un autre côté, donner une réponse décisive, c’est-à-dire expliquer ce phénomène par un autre, est assez difficile. On ne peut que s’éclairer tant soit peu sur ce sujet par les considérations sui- vantes : Si on prend le sang de l’Araignée, contenant des corpus- cules sanguins, par exemple, en rapport de quantité suivant : 10 pour 100 de cellules sphériques, 60 pour 100 de cellules amiboïdes et 30 pour 100 de cellules colorées, on verra que parfois et même très souvent, la métamorphose des cellules dans le sang retiré de l'animal s'effectue avec tant d’inten- silé qu’au bout d’une demi-heure ou une heure, ce rap- port devient tout fait différent; ainsi, par exemple, on verra 50 pour 100 de sphères et 50 pour 100 de cellules colorées et amiboiïdes prises ensemble. Si au bout de la même période de temps, c’est-à-dire d'une demi-heure ou une heure, on retire encore du sang au même animal, les rapports de quan- tité de toutes les variétés de cellules y seront tout à fait diffé- rents de ce que nous présente le sang de la préparation ; ce rapport v reste, comme par le passé, 10 pour 100 de cellules sphériques sur 90 pour 100 de toutes les autres (colorées et amiboïdes). Qu'est-ce qui s’est passé de nouveau dans les con- ditions dans lesquelles se trouve le sang qu'on explore sous le microscope? En quoi diffèrent-elles de celles dans lesquelles se trouve le sang dans le corps de l’animal? Une de ces conditions se présente évidemment dans l’ab- sence du mouvement du sang de l’animal généralement très énergique. Pour vérifier l'influence du mouvement sur le rap- port de quantité des corpuscules sanguins dans des conditions 342 WAGNER. les plus approximatives possible à celles du corps de l'animal, je faisais l'expérience suivante : Je coupais la patte à une Araignée, au second ar ces le plus près possible du corps et laissais le membre coupé crue pendant environ une heure; il va sans dire que la circulation du sang ne pouvait y avoir lieu et par cela même le sang s’est trouvé sous ce rapport dans les mêmes conditions que le sang sur le verre de la préparation. Immédiatement après l’opé- ration, le sang de la plaie contenait environ 10 pour 400 de sphères, 40 pour 100 de cellules colorées et 50 pour 100 de cellules amiboïdes. Environ une heure plus tard, j’exprimais une goutte de sang de patte coupée et trouvais que ce dernier contenait 70-80 pour 100 de cellules sphériques sur 20-30 pour 100 d’autres. Cette expérience prouve d’un côté que dans de certaines conditions la métamorphose des cellules amiboïdes et colorées en sphères ne demande pas beaucoup de temps ; d’un autre, que le manque de circulation du sang peut présenter un des agents qui servent de cause à cette métamorphose. À ce point de vue, il devient, jusqu’à un certain point, com- prébhensible : pourquoi pendant les premiers jours après la mue, la métamorphose des cellules amiboïdes et colorées en sphères attemt-elle le maximum qu’on ait jamais observé chez les araignées? La circulation du sang à cette époque, doit, à priori, être la plus lente d’un côté à cause de la faiblesse de l'animal après la mue; d’un autre, parce qu'après ce phéno- mène les lacunes et les vaisseaux sanguins deviennent tout à coup beaucoup plus volumineux qu'ils ne l’étaient aupa- ravant quand plusieurs d’entre eux étaient plus que double- ment amoindris par les plis, dont vers l’époque de la mue est recouvert tout le corps de l’animal sous la vieille enticule du céphalothorax et des extrémités (1). Les observations directes confirment au mieux et à simple (1)5Voy. ma note biologique sur la Tarentule (C. R. de la section zool. des amis des Sc. nat. de Moscou, 1886). ARTICLE N° à. LA MUE DES ARAIGNÉES. 343 vue ce que nous venons de dire : le sang de la plaie (d’une patte coupée, par exemple) dont une goutte sort d'ordinaire presque à chaque instant immédiatement la plaie faite, — le lendemain de la mue ne sort qu’à peine en formant lentement une petite goutte trouble, — fait très compréhensible, si on prend en considération le travail difficile du cœur à ce moment, qui n’a pas encore d'activité nouvelle. Les faits et circonstances exposés nous autorisent à sup- poser qu’une des causes qui créent la métamorphose simul- tanée d’un aussi grand nombre de cellules en sphère pendant la mue est, comme Jje l’ai dit, la lenteur de la circulation du sang, qui met les corpuseules sanguins dans des conditions ano- males. Il est indubitable cependant que ce n’est pas là l'unique cause du phénomène, qu'il y en a d’autres, parmi lesquelles une seule repose dans les cellules mêmes, c’est-à-dire dans des conditions qui nous sont inconnues, peut-être aussi d’autres phénomènes, qui accompagnent la mue, y sont-ils pour quelque chose, comme semblerait le prouver l'expérience suivante : Je prenais une Araignée du stade, où le nombre des sphères ne dépassait pas 1-2 pour 100, c’est-à-dire où 1l était normal pour un imago et où 1l était au minimum pour un sujet non adulte; je lui coupais la patte comme à l’Araignée précé- dente, et trois quarts d'heure après J'en exprimais le sang; je découvrais que le contenu, quoique changé de quantité, ne l'était que très peu de nature, circonstance qui prouve que le mouvement du sang n’est qu'un des agents de cette métamor- phose et qu’il n’est pas assez puissant pour créer par lui seul la métamorphose d’une partie de cellules en sphères; en un motqu'il existe d’autres causes, d’autres phénomènes inconnus qui agissent également sur le phénomène. Quelles que soient ces causes, ilest évident qu’elles sont tou- jours en action pendant la mue des Araignées, et se répètent périodiquement dans la vie de l’animal autant de fois qu'il y a de muesen causant des modifications dans le sang. Ces causes créent par conséquent un agent qui, une fois évoqué, ne peut 344 WAGNER. laisser sans influence les procédés ultérieurs de la mue, — influence de la plus haute importance. La valeur de cet agent devient tout à fait compréhensible, si on prend en considération qu'avec la rejection du vieux tégument le procédé de la mue, au fond, est loin de son terme, et que ce terme n'arrive que plusieurs jours après la rejection du vieux tégument. À cette époque s'effectue le développement ultime à peu près de toutes les parties de l’organisme, qui ont pris naissance avant le rejet du tégument. Ce dernier acte par conséquent doit être consi- déré, non comme l’acte principal dans la mue, mais comme secondaire. Les phénomènes biologiques qui accompagnent la mue. — Les jeunes Araignées subissent ordinairement la mue dans le cocon où les œufs ont été pondus. Si ce dernier est petit et serré, comme chez la Lycose et la Trochose, par exemple, qui le portent attaché aux filières, les jeunes Araignées restent après l’éclosion auprès de lenveloppe rejetée jusqu'à la seconde mue. Après cette dernière elles quittent le cocon, dont la soie, vers ce moment, à été si bien amollie et en partie déchirée par la femelle au point de jonction de ses deux moitiés supérieure et inférieure que les jeunes Araignées n’ont aucune difficulté pour en sortir, Elles quittent alors ce cocon pour passer sur le corps de la mère. Fait intéressant, si le cocon de la Lycose est pris à la femelle aux premiers stades de développement des œufs et qu'il est encore entier, que la femelle n’y a pas fait de préparatifs pour la sortie des jeunes, ces derniers y meurent faute d'espace et d’issue. Il n’en est pas de même avec les cocons, comparativement grands, comme chez certaines Attides, par exemple. Les jeunes Arai- gnées, après l’éclosion, c’est-à-dire ayant subi la première mue, ne restent pas en place, mais émigrent dans la partie opposée du cocon, où elles subissent la seconde et parfois la troisième mue en masse et ce n’est qu’alors qu’elles quittent le cocon. C’est pourquoi dans de pareils cocons on peut rencon- trer en trois points des tas de téguments rejetés de différents âges. Si après la seconde mue on Ôte les jeunes Attus terebratus ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 345 du cocon et qu’on les place dans un local convenable, chacune d'elles se fait un cocon séparé avec des soies d’une extrême finesse et y subit la troisième mue chacune en particulier, ce qui montre la capacité remarquable de cet animal dès l’âge le plus tendre de savoir se ürer d’affaire dans un milieu inconnu et de prendre des mesures de prévoyance pour la mue à venir. Les Araignées de la famille des Attides que j'ai eu occasion d'observer subissent, après l’éclosion, les mues qui suivent, toujours dans des cocons à soie; mais elles ne se les prépa- rent pas toujours; au contraire, elles semblent éviter d’en fabriquer de nouveaux et profitent volontiers de cocons étran- gers; ceux qui paraissent leur plaire davantage semblent être ceux que les femelles ont faits pour la ponte des œufs (après que les jeunes les ont quittés); c’est pourquoi on y rencontre parfois non seulement un tégument de mâles, mais deux. Les jeunes Tarentules, après la quatrième mue, quittent la mère pour commencer une vie indépendante. En captivité la mère quitte la plupart du temps ses jeunes plus tôt, si elle ne les a pas dévorés. En liberté ce pas vers la vie indépendante ne se fait pas tout à coup; elles commencent par ne plus monter sur le corps de la mère et habitent son terrier en s’assemblant autour d'elle et se dispersant vers le soir dans différents sens pour chercher la proie. Au bout de quelques jours elles quittent le terrier maternel et se construisent leurs propres domiciles ; leurs terriers ne sont pas éloignés du terrier maternel et sont assez rapprochés les uns des autres. Ces terriers sont assez réguliers et faits d’après le type de ceux des Taren- tules adultes, mais ils sont certainement moins profonds et moins larges. Avec l’âge la forme du terrier ne change pas; mais la bâtisse en est plus parfaite, et les espaces qui les séparent augmentent de plus en plus. En observant les jeunes Araignées en captivité depuis le moment de l’éclosion, j'ai remarqué au bout de deux ou trois semaines une différence assez considérable dans leur taille : les unes étaient plus vigoureuses et plus agiles, les autres 346 WAGNER. faibles et servaient d'ordinaire de proie aux premières. La cause de cette inégalité réside dans ce fait qu'entre l’éclosion des premières et des secondes il se passe vingt-quatre heures et souvent plus. En général, on remarque dans le cocon, vers la seconde mue des Araignées, qui ont devant elles deux ou trois Jours jusqu'à la mue, d’autres qui en sont à la veille; enfin d’autres encore à l’état de mue, et ayant déjà rejeté le second tégument. Il suffit de cette seule circonstance pour qu'après les deux mues les plus fortes des Araignées s’empa- rent des plus faibles comme d’une proie et en fassent leur nourriture. Il ne s'ensuit pas que la progéniture, en passant à la vie imdépendante, consiste Seulement en sujets robustes et vigoureux; 1l y en à de faibles, qui, non seulement en liberté, mais en captivité même, trouvent des ressources pour leur développement et leur croissance aux dépens de sujets encore plus faibles et des œufs non développés qui sont la plupart du temps très nombreux dans chaque cocon de Tarentule. Indépendamment de l’éclosion plus ou moins précoce, la quantité de matière nutritive, que tel ou tel sujet reçoit dès les premiers jours de son existence, exerce une grande influence sur la croissance de la Tarentule, en la rendant plus ou moins vigoureuse et capable de se procurer une proie plus abondante. Cette hypothèse se trouve confirmée par ce fait que le moment de la mue chez les Tarentules, comme chez les autres Araignées, ne dépend pas de la taille de l’animal, mais survient à des périodes régulières, comme il à été dit plus haut. Il est facile à comprendre de là qu’un sujet faible ayant rejeté un certain nombre de téguments, se trouve à la longue finalement développé et incapable de plus de croissance, comme le serait un sujet de plus forte taille. Les Araignées adultes de certaines espèces font divers prépa- ratifs pour leur mue; les Araignées d’autres espèces n’en font pas et se choisissent seulement des coins sombres et des cre- vasses solitaires; parfois même elles subissent leur mue à l'air et à découvert, sans la moindre précaution. La Tarentule (Tro- chosa singoriensis Lax.), ne montre cette insouciance que ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 347 dans le bas âge, en rejetant le técument n’importe où et sans préparations d'aucune sorte; elle mue sur le corps de la mère et dans son terrier; mais plus tard, quand la mue devient plus difficile, les Tarentules entreprennent des travaux, dans le but de se rendre inaccessibles aux insectes, dont les uns peuvent les déranger et les autres les attaquer, vu l’impossi- bilité de leur part de se défendre en cet état d’infériorité et de faiblesse causé par la mue; en même temps aussi, la Tarentule fait des préparatifs afin de prendre une position de nature à faciliter le rejet du vieux tégument. Dans cette der- mère intention la Tarentule en liberté ferme son terrier avec un auvent à l'entrée, s'attache à ce dernier au moyen de ses filères et reste ainsi suspendue au commencement du Lerrier, la tête en bas. En captivité ces préparatifs changent dans leurs détails, mais leur but reste le même et est toujours atteint de manière ou d’autre (1). Je ne connais pas de cas où une Tarentule et, autant que Je sache, d’autres Araignées, qui ont un gite constant, pro- fitassent de gîtes étrangers, soit qu'ils appartiennent aux Araignées de la même espèce ou à une autre. Par contre chez les Araignées qui n’ont pas de logis stables, j'ai rencontré des cas où la mue se passe dans des cocons préparés par les congénères les plus proches (par exemple, chez certaines espèces de la famille Attides), ou dans des locaux préparés non seulement par des Araignées d’autres espèces, mais souvent pas même par des Araignées, comme par exemple, dans des abris préparés par certains insectes; plusieurs espèces d'Araignées collent les bords d’une feuille et rejettent le tégument à l’intérieur de cette dernière, d’autres, comme je Vai dit, ne font point de préparatifs; ainsi les Opilionides qui passent par la mue sur des murailles et des haïes; plusieurs d’entre les Thomisides qui rejettent leur ancien tégument sur une feuille d’arbre ou une fleur, etc. (1) Voy. la description détaillée de ces préparatifs dans ma note : Sur la Tarentule (loc. cit.), 1886. 348 WAGNER. Ces préparatifs sont d’ailleurs probablement en relation directe avec la difficulté de la mue; ainsi les Trochoses singo- riensis, comme je l’ai dit, #e font aucun préparatif dans la période de leur vie où ce phénomène semble s'effectuer plus facilement, de même que chez quelques Attides, par exemple, la mue dure à peu près aussi longtemps que l’état d’immobilité, dans lequel reste l’animal évidemment exténué de fatigue après elle ; tandis que chez plusieurs Thomisides ce phénomène se passe si facilement et rapidement que l’Araignée se remet et reprend son activité presque immédiatement. C’est par là qu'on peut s'expliquer pourquoi l’Attus cherche à s’isoler dans un endroit solitaire pour y subir la mue, et la Thomisus supporte au contraire ce phénomène à découvert. Où chercher l'explication de ce fait que certaines Araignées supportent la mue facilement, les autres difficilement ? C’est une question à laquelle il est difficile de répondre avec le peu de renseigne- ments qu'on a sur ce sujet. La majorité des Araignées cependant se trouve dans un état d’exténuation si complète après le rejet du tégument qu’elles peuvent servir facilement de proie aux ennemis dix fois plus faibles. Les sujets malades supportent, comme on peut le pré- voir, ce phénomène avec le plus de difficulté. J’ai eu souvent occasion d'observer la mue des Tarentules, piquées par l'espèce du Pompilius, qui en fait la nourriture pour ses Chenilles; j’en ai fait ia description détaillée dans ma note sur la Tarentule, c’est pourquoije ne parlerai 1ei que de ce qui a rapport direct à la mue. Une Tarentule mâle, piquée le 8 juillet, a subi la mue seulement le 7 août. Elle a été bien malade après la piqûre et a peu vécu. Pendant la mue, probablement faute de force, elle s’est tordue toutes les pattes, ce qui l’a privée de mouvement. Un autre mâle piqué en même temps (le 8 juillet) n’a commencé la mue que le 17 août, c’est-à-dire au bout d’un mois et dix Jours après la piqüre, ayant un grand retard comparativement aux sujets de son âge qui avaient depuis longtemps fini leur mue. La mue du mâle malade ne commença que le 17 août et ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 349 dura jusqu’au 2 septembre, quand je lemis, à demi mort, dans de l’alcool sans qu’il pût achever de muer, il n’eut le temps que de rejeter le tégument de l'abdomen et de la partie supé- rieure du céphalothorax. Quant aux pattes, quoique le matin elles fusssent dégaimées du vieux tégument et semblassent être normales, elles se sont vers le soir recourbées et aplaties, ce qui à résulté évidemment de l'alimentation trop pauvre pendant les deux mois après la piqüre et de l’imperfection des phénomènes de mue intérieurs. Je n’ai pas besoin de dire que pas une de ces Araignées piquées n’a fait de préparations pour subir sa mue; il n’y avait même pas trace de soie à l’endroit où elles commencèrent leur mue. En hberté on ne rencontre pas de ces difformités après la mue chez les Tarentules piquées par la Guëêpe : elles servent souvent de proie aux larves de cet insecte, et j'ai rencontré plus d’une fois des infirmités causées par la perte des pattes et des palpes. Si l’Araignée perdait la patte, par exemple, étant très Jeune, cette dernière se régéné- rait avec tant de perfection vers la dernière mue, qu'il n'y avait pas moyen de la distinguer des autres. Si elle perdait la patte plus âgée, après la huitième ou la neuvième mue, le membre perdu ne se régénérait au contraire qu'imparfaite- ment, et malgré le nombre complet des articles, on pouvait facilement le distinguer des voisins normaux : il était plus court, considérablement plus petit, avec une coloration plus pâle et à poils comparativement moins nombreux. Pour définir le temps nécessaire pour la régénération d’un membre perdu, j'ai pris des sujets de différents âges et leur coupais les pattes. Si la patte était coupée peu de temps avant la mue, elle n’était pas régénérée après ce phénomène ; je n’observais à sa place qu'une petite papille de couleur blanc sale : c’est l'endroit où prend naissance l'organe futur. Après la mue suivante apparaissait déjà la patte bien mince, très pâle, très courte d’abord, puis après la mue suivante déjà plus épaisse et plus semblable à la normale. Si la patte est arrachée bientôt après la mue, elle a le temps de se reformer dans la période de temps qui sépare deux mues successives. 390 WAGNER. Une araignée qui avait subi sa mue le 20 juillet, avait une patte coupée le 22 du même mois. La mue suivante eut lieu le 10 août, après laquelle la patte s’est trouvée déjà reformée. Par conséquent pour la régénération de la patte 1l a fallu seu- lement 19 jours. Cependant ce terme n’est pas le même pour tous. Aux stades précoces la régénération de l’organe demande moins de temps qu'aux stades plus avancés. On peut établir par rapport au temps nécessaire pour la formation des organes perdus pendant le développement, la règle suivante: lor- gane perdu régénère dans la période de temps qui sépare une mue de l'autre au stade de développement pendant lequel il était perdu (4). | Ce qui est curieux, c’est qu’une patte étant coupée ou arra- chée près du milieu de sa longueur, tous ses tissus se résorbent et la nouvelle patte prend naissance seulement dans le premier article. J’ai vérifié ce fait plus d’une fois et mes observations m'ont toujours amené au même résultat. Un autre fait biologique en connexion avec le premier ne présente pas moins d'intérêt: la Tarentule arrache presque toujours le résidu de la patte opérée, contenant deux à deux et demi articles, de sorte qu’il n’en reste que l’article basal, celui où prendra naissance le nouvel organe, devant rem- placer le membre perdu. En outre quelques-unes d’entre elles (pas toutes) sucent le membre arraché avec le même zèle que toute autre proie; mais toutes, sans exception, se mettent à sucer le sang de la plaie après l'opération, soit en y appliquant leurs palpes à tour de rôle et en transportant par leur inter- médiaire le sang à la bouche, soit en y approchant vers Îa bouche le moignon, s’il est assez long, au moyen des pattes. Prenant en considération que les Araignées arrachent la patte après l'opération {oujours au point de jonction de l’ar- ticle basal avec le deuxième, c’est-à-dire auprès de l’article où prend naissance le nouvel organe, remplaçant l'organe perdu, (1) Voy. ma note : Régénération des organes perdus chez les Araignées (Bullet. de la Soc. Imp. des naturalistes de Moscou, 1887, n° 4). ARTICLE N° 2. LA MUE DES ARAIGNÉES. 351 j'en supposai d’abord que ce phénomène avait quelque con- nexion avec la régénération des organes. Cependant des obser- vations sur des Tarentules à l’état de maturité sexuelle, c’est-à- . dire des sujets qui n'avaient plus de mue en perspective, m'ont permis de conclure que la régénération n’y est pour rien, car de pareils sujets (mâles et femelles) arrachent les moignons après l'opération au point précité de même que les Jeunes. L'observation suivante éclaire tant soit peu ce phénomène : ayant coupé à un imago d’abord la troisième patte, à peu près au milieu, et presque aussitôt après, la deuxième, il arrivait que la Tarentule n’arrachait que le moignon de la deuxième patte, et pendant que, de la troisième patte, la première cou- pée, la lymphe de sang continuait à couler, on ne voyait pres- que point de sang à la plaie plus récente de la deuxième patte (au point de jonction de l’article basal et du deuxième). Pour vérifier le phénomène, je ne coupais pas, mais j'arrachais la la patte au point où après l’opération l’Araignée elle-même l’arrache et de la même manière qu’elle le fait, c’est-à-dire en la courbant en dedans, jusqu’à ce que la face interne du deuxième article touche la partie inférieure du céphalothorax (l’Araignée le fait avec l’aide des pattes seules sans user les maxilles) ; alors la patte s’arrache au point de jonction de son article basal avec le deuxième, comme si on y avait fait une incision. À mon étonnement il découle après cette sorte d'opé- ration beaucoup moins de sang qu'à la coupe; parfois n’en sort pas du tout de la plaie (1). (1) Ghez les Écrevisses d’eau douce et autres, les pattes s’arrachent d’après les recherches de Fredericq (Sur l'autotomie, ou mutilalion par voie réflexe comme moyen de défense chez les animaux, in Arch. de Zool. expérimen- tale, 1883) à la limite des deuxième et troisième articles ; chez le Crabes, le second article se casse en deux parties, dont une reste au pied détaché, et l’autre fragment reste sur l’animal. Prenant en considération que le second article du pied d’un Crabe correspond aux deux articles de l'Écrevisse (d’eau douce), qui se sont fusionnés ensemble, et que la rupture de la patte se fait par la suture des articles fusionnés, l’endroit où s’arrachent leurs pattes, cor- respond au même endroit (sur la limite des deuxième et troisième articles), où elles s’arrachent chez les Écrevisses. Par conséquent, sous ce rapport entre les Écrevisses, les Crahes et les Araignées, il y a une différence, car chez ces der- 359 WAGNER. J’aieu l’occasion de parler en détails des phénomènes qui ont lieu dans le moignon de la patte après l’opération, dans la note que j'ai citée plus haut (sur « la régénération des orga- nes perdus chez les Araignées »), aussi n’en parlerai-Je plus ici (1). Quelle que soit la différence entre les Araignées sous le rapport de la plus ou moins grande facilité avec laquelie elles supportent la mue, et des plus ou moins grands préparatifs pour le phénomène, — toutes subissent la mue à des inter- valles d’abord moins grands, ensuite de plus en plus longs; le procédé même est plus facile aux premiers stades et plus difficile — plus tard. Il demande bien des efforts même d’un jeune organisme, c’est pourquoi en cas de manque de nour- riture beaucoup de jeunes Araignées succombent au moment de ia rejection du tégument. Par quoi peut-on expliquer le fait que les mues se font à des intervalles dont la longueur augmente graduellement avec l’âge du sujet donné? Je suppose qu’une des causes — si ce n’est pas la principale — qui pourraient expliquer le phéno- nières les pattes s’arrachent, comme il a été dit, à la limite des premiers et des deuxièmes articles. En se distinguant par cette différence, ces animaux ont cependant de la similitude dans le fait que, chez tous, les pattes s’arrachent facilement toujours à un seul endroit déterminé. I reste à signaler qu’au point de vue physiologique la cassure des pattes chez l’Araignée a plus de similitude avec la même opération chez les Écrevisses qu'avec celle-ci chez les Crabes, car la cassure chez elles se fait par la même voie que chez les Écrevisses d’eau douce (d’après Huxley), si on l’a saisie par la pince, c’est-à- dire par un moyen purement mécanique et non à la suite de phénomènes réflexes en connexion avec une contraction énergique des muscles, et créés par la frayeur chez les Crabes (d’après Frédéricq). (1) La régénération des extrémités perdues par suite de déchirure ou cas- sure chez les Écrevisses, semble s’effectuer en général de la même manière que celle que j'ai observée chez les Araignées, autant qu’on peut en juger du moins d’après les indications (très générales et décousues cependant) de Huxley (L’'Écrevisse, 1880), qui nous apprend que quelque temps après, à l’endroit de la déchirure apparaît la cuticule, sous laquelle se forme une espèce de bour- geon; ce dernier prend la forme de la partie perdue et augmente en dimen- sions avec chaque mue successive, jusqu'à ce qu'enfin il reçoive une forme définitive. Mettant de côté les détails du phénomène que Huxley n’a pas décrits pour l’Écrevisse, celui-ci s’effectue de la même manière chez les Araignées. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 393 mène, c’est la dépense pour la locomotion, augmentant gra- duellement avec l’âge de l’Araignée. Vu que les poids chan- gent comme les cubes et le système musculaire comme les carrés des dimensions, la dépense nécessitée par la locomotion augmente d'autant plus rapidement que l'animal s’aceroit. Avec l’âge, ces dépenses doivent créer des difficultés dans l’or- ganisme de l’animal pour amasser les matériaux nécessaires en cas de mue. La justesse de cette considération se constate d'un côté par le fait qu'entre les mues des jeunes Tarentules il sepasse moins de temps qu'entre les mues des Araignées plus développées ; d’un autre cté— que chez les sédentaires, dont les dépenses pour la locomotion sont, évidemment, moins grandes que chez les vagabondes, la différence en longueur des périodes, qui séparent une mue de l’autre, est beaucoup moins grande que chez ces dernières (1). Pour résumer ces notes biologiques sur les phénomènes accompagnant la mue, j'ai à ajouter qu’en hiver, comme cela se comprend, les Araignées ne subissent pas de mues, et leur vie pendant cette saison présente un phénomène de caractère léthargique. Outre mes propres observations, nous avons en- core quelques détails sur ce sujet chez Mac-Cook (2). Mais (1) Il est intéressant de noter ici la considération suivante. Si la dépense pour la locomotion n’est pas la même chez les Araignées de différents groupes et si elle présente un agent plus ou moins influent sur le budget général des dépenses de l'animal, si on peut s’exprimer ainsi, une dépense outre mesure, dans cette direction va se ressentir semblablement, sinon pareillement, sur les différentes dépenses de l'organisme. Si la dépense pour la locomotion est en effet un agent capable de consumer de grandes provisions de matériaux amassées par l'organisme et par conséquent de retarder de plus en plus la mue, il doit évidemment avoir la même influence, entre autres, sur la généra- tiou. Les observations constatent la justesse de cette considération : les Lyco- sides, en général, autant que j'ai eu occasion de les observer, et les Tarentules en particulier, par le nombre d’œufs pondus à la fois, de même que par le nombre de pontes mêmes, sont bien inférieures aux autres espèces de la famille Epeiridæ. La Licosa saccata, par exemple, qui vit et agit pendant le jour, dont les mouvements sont d’une rapidité surprenante, est de beaucoup inférieure par sa fécondité à la Tarentule, qui vit plutôt pendant la nuit et bouge comparativement avec moins de vitesse. (2) Mac-Cook, Hibernation and winter habits of Spiders (Proc. Ac. Nat. ANN. SC. NAT., ZOO0L., 1888. VI. 23. — ART. N° 9. 354 WAGNER. si nous éloignons l’agent principal de cet état de torpeur et tenons pendant l'hiver une Tarentule eaptive dans une cham- bre chauffée, nous verrons qu’elle subira la mue quoique pas toujours et surtout pas dans l’ordre habituel sous le rapport des intervalles entre les mues. J’ai recueilli toute une série d'observations là-dessus. | Ainsi on observe que des sujets d’un même stade de déve- loppement et du même âge ne subissent pas la mue simultané- ment, si on les tient à différents endroits de la chambre — l’une sur la fenêtre, par exemple, dans la température de 7 à 19 degrés Réaumur ; l’autre — près du poêle chauffé à 18 ou 99 degrés Réaumur : la dernière des deux subira la mue plus Sc. Philad., 1885, p. ID, qui a publié toute une série de travaux biologiques très circonstanciés et extrêmement intéressants dans sa note Sur la reégénéra- tion des membres, nous apprend qu’il avait une Tarentule captive, qu'il nour- rissait en hiver avec de la viande crue. Je suis porté à croire que l’auteur a été induit en erreur : il lui semblait que l’animal mangeait; moi, du moins, qui ai eu occasion d'observer non pas une, mais des dizaines de Tarentules captives pendant des années, je n'ai jamais vu chose pareille. Dans ma note précitée sur la Tarentule, j’en parle en détails et j'affirme positivement qu'ayant commencé la vie indépendante, la Tarentule ne s'empare de la proie que lorsque cetle dernière bouge, et ne s’en nourrit que si elle bouge quand elle Va saisie; ce ne sont que les jeunes Tarentules, avant de commencer la vie indépendante, qui se contentent de proie non vivante, tuée ou blessée par leur mère. Ce fait explique bien des phénomènes dans la vie des Tarentules et d’autres Araignées vagabondes, et entre autres, pourquoi en captivité, parfois ayant attrapé un insecte, elles le rejettent et attrapent immédiatement après un autre dont elles se régalent : on peut être sûr que le premier des deux insectes était très endommagé quand elles l’attrapaient, et par conséquent malade. 11 paraît probable que l’Araignée de Mac-Cook ne se nourrissait de rien en hiver, ce qui est possible et a dû avoir lieu dans le cas donné, car pendant la mue au printemps (c’est-à-dire après la disette d'hiver) la Tarentule, d’après ce que nous dit l’auteur, a eu bien de la peine à rejeter le vieux tégument et a perdu deux pattes entières et une partie de la troisième en même temps, ce qui n'arrive qu'en cas de grand épuisement de lanimal. S’étant passablement nourrie en été, la Tarentule s’est remise et a acquis des forces, c’est pourquoi au mois d'août, en subissant de nouveau la mue, elle n'a non seulement pas perdu quelque nouveau membre, mais a eu ses organes perdus régénérés. Les faits décrits n'auraient guère pu avoir lieu si la Tarentule s'était nourrie, en hiver, de viande : elle aurait eu, dans ce cas, assez de forces vers le printemps. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 399 tôt et plus souvent que la première. En outre, on découvre que la période qui sépare une mue de l’autre, est beaucoup plus longue en hiver qu’en été. Par exemple, une Tarentule de stade moyen, captivée le 20 août et placée près d’un poële, a subi (en captivité) la mue le 5 décembre, c’est-à-dire au bout de trois mois et quinze jours; l’autre, du même stade, habitant une fenêtre, l’a subie beaucoup plus tard. La cause du phé- nomène repose évidemment d’une part dans la température froide, de l’autre dans le manque de nourriture. Le fait que des Tarentules d’un seul et même stade de développement subissent la mue à différentes époques, si une d’elles habite la fenêtre, tandis qu’une autre se trouve près d’un poêle, prouve que la température chaude est un agent de grande valeur dans la question des périodes qui séparent une mue de l’autre. Les Jeunes Argyronètes de premiers stades, placées dans des aquariums, subissent la mue pendant l’hiver comparativement avec la Tarentule à des périodes plus courtes et assez voisines de celles qui sont habituelles aux Araignées du même âge en liberté durant l’été. Les Araignées de stades moyens, de même que les Tarentules, s’éloignent bien plus considérablement des périodes normales de l’été. Cela s'explique très facilement; la mue demande en général une activité forcée de l’organisme, et ne survient par conséqnent dans des climats tempérés et dans des conditions normales qu'avec le retour annuel de la saison chaude ; autrement dit avec la période, où la diminu- tion de dépenses pour soutenir la chaleur coïncide avec l’ac- croissement de la quantité de nourriture. Les conditions arti- ficielles où je plaçais les Araignées satisfaisaient jusqu à une certaine mesure les conditions nécessaires : elles éloignaient la nécessité de dépenses pour soutenir la chaleur, mais le manque de nourriture rendait impossible l’emmagasinement opportun de matériaux nécessaires pour l’activité forcée de l'organisme ; tandis que les Argyronètes des premiers stades de développements subissent la mue sous les mêmes condi- tions concernant la chaleur et la nourriture : elles peuvent se procurer cette dernière, quoique en petite quantité. Les Argy- 396 WAGNER. ronètes plus âgées, qui demandent plus de matériaux pour se nourrir que Ceux qui peuvent satisfaire jusqu à un certain point les jeunes, quoiqu'elles soient sujettes à la mue, le sont à des périodes de temps, qui s’éloignent bien plus considéra- blement des normales que chez les Jeunes Argyronètes. J'ai dit plus haut que les Araignées placées en hiver dans des conditions artificielles, ne subissent point de mue parfois; cela s’observe, à ce qu’il parait, dans des cas où l’Araignée s’est déjà épuisée dans la captivité avant l’arrivée de l’hiver, et quand les conditions de cette vie en captivité sont par trop différentes de celles dont elle jouit en liberté. Malheureusement je n’ai pas de renseignements sur la mue des Araignées exotiques (des tropiques), mais prenant en con- sidération les faits que J'ai cités sur la mue des Araignées en hiver, je puis supposer que ces Araignées doivent subir leurs mues sans interruption en hiver, ou, si cette Interruption a lieu, elle ne peut être d’aussi longue durée que dans notre chmat (4). Il est d’ailleurs indispensable d’avoir en vue que les Taren- (1) Les faits que la faculté de reproduction chez les animaux à l’état de maturité sexuelle s’observe dans la période d’activité forcée de l’organisme, c’est-à-dire coïncide avec l’époque d’agrandissement de nourriture et de cha- leur, s’observent, en Océanie, par exemple, où (d’après Hild, The Birds of Aus- tralia) certains oiseaux se reproduisent quatre et cinq fois dans l’année, et en outre, pondent moins d'œufs au printemps, quand il y a moins d'insectes, et un plus grand nombre plus tard dans année, quand il y a plus d’insectes, et peuvent servir de soutien indirect à la supposition susdite. La capacité de reproduction chez les animaux à l’état de maturité sexuelle et la mue des larves constituent deux phénomènes, certainement différents, quoique tous les deux prennent leur source dans les réserves de organisme. Il est connu, par exemple, que créant les conditions nécessaires pour le développement de la reproduction, nous sommes quelquefois en état de provoquer artificiellement la reproduc- ton inopportune chez les animaux à l’état de maturité sexuelle, de même que la mue chez les jeunes Araignées. Les Poules pondent pendant les saisons froides, si on les entretient dans la chaleur; les Pigeons commencent à couver au printemps beaucoup plus tôt que leurs congénères en liberté, si on les entre- tient dans une température chaude, et pondent bien tard en lPautomne; les Gallinacés, importés en Océanie, se reproduisent parfois trois et quatre fois pardan,161C.. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 397 tules frès jeunes subissent la mue en captivité pendant l'été à des périodes de temps régulières, comme j'ai eu occasion d'observer maintes fois; ex outre la quantité de nourriture, dont elles jouissent, joue un rôle peu considérable; le plus ou le moins de nourriture ne semble influer que sur la croissance de l'animal, ce qui sert à expliquer la différence parfois très considérable de grandeur chez des sujets, éclos simultané- ment, se développant soit en liberté, soit en captivité. Plus l'animal se nourrit, plus grande est sa taille, et vice versa; les périodes de la mue se succèdent en se soumettant à des lois particulières, quoique dépendant de la nourriture et de la température chaude. Par conséquent la mue, à uotre point de vue, peut être considérée comme dépendant de trois sortes d’agents : 4° Des conditions intérieures du développement de l'animal ; 2% Des dépenses de réserves pour le maintien de la chaleur interne et de la locomotion de l'animal ; 3 Des conditions extérieures, c'est-à-dire de la quantité de chaleur et de nourriture. Par rapport à la question de l’époque de la mue, le princi- pal de ces trois agents est certainement le développement intérieur des organes, qui peut être retenu ou complètement arrêté par une baisse considérable de température et Île manque de nourriture. Ge dernier agent (le manque de nour- riture) est, comme je l'ai dit plus haut, de valeur secondaire; cependant pour les Tarentules de stades moyens, les condi- tions de la nutrition présentent un agent de beaucoup plus srande valeur que pour les jeunes. Il est vrai que les Jeunes Tarentules ont subi chez moi la mue en hiver, privées pendant plus d’un mois de nourriture, mais la période de temps, qu! sépare en hiver une mue de l’autre, est beaucoup plus longue que celle d’été pour les sujets du même âge. Il est évident qu’on doit rapporter ce délai d’un côté au manque de nour- riture, d’un autre au manque de la quantité de chaleur nécessaire. Le manque de nourriture a considérablement reculé l’époque de la mue des Tarentules d'âge moyen et le 358 WYAGNER. moins de chaleur reçue par ces sujets, maintenus sur la fenêtre, a encore plus contribué à reculer l’époque de leur mue com- parativement aux sujets qui étaient restés auprès du poêle. Revenant maintenant à la seconde catégorie de phénomènes, qui n’ont qu’une connexion indirecte avec la mue, comme il a été dit plus haut, Je m'arrêterai sur l'examen de certaines modifications extérieures et intérieures, en rapport avec l’âge de l'animal. Je dis « certaines » et pas toutes, parce que: 4° une partie de ces modifications ne présente rien d'inté- ressant, outre l’agrandissemement de taille ou de nombre; par exemple, l’armature du Goxognathe, qui consiste entre autres en dents de différentes formes et longueurs chez les différents genres d’Araignées, et qui varie avec l’âge seule- ment par le nombre et par la taille des dents. L’Attus, après l’éclosion, a près d’une vingtaine de ces dents; ensuite ce nombre augmente graduellement et atteint finalement Île chiffre de 45-50 ; 2 parce que certaines modifications ne présentent que la répétition d’autres; par conséquent mi par leur nature, ni par leur signification, ils n’ajoutent rien de nouveau à la représentation biologique de la mue. Telles sont, par exemple, les modifications qu'on observe avec l’âge de l’Araignée dans les parties externes des organes génitaux de la femelle et du mâle, et quelques autres. Il suit de ce que je viens de dire, que je me borneraï à signaler un petit nombre de modifications chez les Araignées pendant leur croissance et uniquement pour l’appréciation de leur signification biolo- gique en rapport avec la mue. Modifications de la forme et de la coloration suivant l’âge. — À mesure que les Araignées croissent (Aftus terebratus, Trochosa singoriensis, Lycosa saccata et autres), elles chan- gent de forme, de taille et de coloration avec chaque mue, quoique les Araignées précitées adultes aient une colora- tion très modeste et, à première vue, peu distincte de celles qu’elles avaient primitivement aux premiers stades de déve- loppement. Ces modifications s’effectuent chez la femelle et le mâle si parallèlement et uniformément que, dans les périodes ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 359 des premières quatre ou cinq mues chez les Attus et les Lycoses, et des six ou sept chez les Throcoses, on ne saurait distinguer le sexe. N. Wagner (1) dit que, jusqu’à la dernière mue, le mâle a la même coloration, la même forme et la même longueur des organes avec sa femelle, et ce n'est qu'après le rejet du dernier tégument qu’il accuse une organisation particulière de palpes, une autre forme du corps et une autre coloration. Un examen détaillé fait découvrir que cette obser- vation n’est juste que jusqu'à un certain stade du dévelop- pement : chez l’Attus, comme je lai dit, seulement jusqu’à la quatrième et cinquième mue, chez la Trochose jusqu’à la sixième et septième. Avec les mues ultérieures, ces distinctions deviennent de plus en plus marquées, quoique pas toujours au même degré. Par exemple, concernant la forme du corps et la taille des extrémités, on ne peut indiquer la différence entre le mâle et la femelle que dans les premiers temps après la mue ; plus il avance et s'approche du rejet du tégument, plus difficile est la distinction. La cause repose dans ce fait, qu’à mesure de la croissance du corps, les téguments dilatables de l'abdomen eten partie du céphalothoraxgrandissent au point de jonction de la partie supérieure avec l’inférieure, de sorte que la longueur relative des pattes devient de plus en plus petite. Par exemple, le mâle, tout de suite après la mue, a les pattes relativement plus longues que la femelle, et vers le moment de la mue cette longueur devient relativement moindre, ear le volume du corps a grandi et les pattes sont restées de longueur presque invariable. Par conséquent, le mâle Trochosa singo- riensis, par exemple, vers la septième mue par la taille et la longueur relative des pattes ressemble parfaitement à la femelle de la sivième mue; son corps est de la même taille avec celui de la femelle à ce stade de développement; la lon- gueur relative des pattes rappelle également celle des pattes de la femelle de ce stade. On voit la même chose chez l’Attus aux stades correspondants de développement. Cependant, à (1) N. Wagner, Observations sur la Tarentule, 1868. 300 WAGNER. mesure que l’animal approche du terme du développement (Attus, vers la sixième et septième mue; Trochosa, vers la neuvième et dixième mue), il est plus facile de distinguer le mâle de la femelle par la forme du corps et la longueur rela- tive des pattes; l’augmentation de longueur des pattes chez le mâle, comparativement avec la femelle, va presque en pro- portion avec la diminution de grosseur de son corps, compa- rativement avec celui de la femelle. La dernière mue, après laquelle les Araignées sont tout à fait formées, ne présente que le dernier pas dans ce sens, et pas du tout le moment après lequel apparaissent toutes les distinctions extérieures sexuelles des Araignées, qui jusqu'alors étaient soi-disant indistinctes, ou à peine distinctes. Darwin (1) dit: « Si les sexes diffèrent l’un de l’autre dans ce sens (moyens d’exciter et de captiver les femelles), on peut considérer, comme loi générale, que le mâle adulte se distingue plus ou moins des jeunes mâles; d’où il suit que les déviations graduelles, au moyen desquelles a changé d’aspect le mâle, ne pouvaient survenir avant la matu- rité sexuelle. » Les distinctions en coloration et surtout dans la forme du corps et la longueur des pattes (traits qui distin- guent le mâle adulte des femelles et des jeunes mâles), dis- tinctions qui doivent par conséquent être expliquées par l'effet de la sélection sexuelle, surviennent, comme je l’ai dit, chez les Araignées précitées longtemp savant la maturité sexuelle, prenant en considération le nombre de mues qu'elles ont en perspective, et les périodes de temps qui séparent ces der- nières l’une de l’autre. Il est indispensable de noter que les modifications exté- rieures apparaissent chez les mâles des Araignées à l’époque où commencent à se développer les organes copulateurs, et ces derniers, comme nous le verrons, se développent, non dans la période entre les deux dernières mues, mais une période beaucoup plus longue. Par conséquent, la distinction caractérisant la forme du (1) Darwin, Sélection sexuelle, 1"° part. ARTICLE N° à. LA MUE DES ARAIGNÉES. 361 corps des mâles commence à se manifester comparativement assez tôt; mais ces distinctions s’effacent par le fait que la longueur croissante de leurs pattes va parallèlement avec la - diminution des dimensions du corps; c’est pourquoi il n'est possible de constater l’existence de distinction que bientôt après la mue, et c’est jusqu’à ce qu’à la longue le rapport de la longueur des pattes avec la taille du corps devienne aussi notable que pendant les dernières mues, qu’on est en état de constater la distinction entre le mâle et la femelle. Jai à ajouter que la longueur relative des pattes. chez les femelles des Araignées précitées, ne s'éloigne pas beaucoup de celle qu'elles avaient dans la première période de leur vie post- embryonnaire. Quant à la forme et aux dimensions des corps, au rapport des dimensions de l'abdomen avec celles du cépha- lothorax, — les modifications semblent être les mêmes chez les deux sexes ; ce rapport chez les mâles est devenu moindre, et chez les femelles, plus considérable qu'il n’était aux pre- miers stades de développement. Outre la forme du corps, c’est par la coloration qu’on dis- tingue généralement les sexes des Araignées ; cette coloration se manifeste non pas après la dernière mue, mais bien plus tôt. La coloration, chez les Trochoses mâles, pendant les deux ou trois dernières mues, est notablement plus claire que chez les femelles ; chez l’Attus, dans les périodes correspondantes du développement, on voit distinctement apparaître des parti- cularités dans la coloration, qui deviennent de plus en plus intenses avec chaque mue et qui après la dernière mue s’ac- cusent avec le plus d'apparence. En somme, le mâle subit plus de modifications que la femelle dans la forme du corps et la coloration compara- tivement à ce qu’il était au moment de l’éclosion ; mais, d’ail- leurs, la femelle elle-même change d'aspect en forme et colo- ration à l’époque adulte. Les poils et les téquments. — Concernant les poils, je noterai : 1° que leur disposition symétrique, que j'ai men- tionnée ci-dessus, et qui est si notable aux premiers stades de 369 WWAGNER. développement, s’efface graduellement avec la croissance de l'animal ; 2 ce qui est particulièrement intéressant, c’est qu’a- près la première mue certaines Araignées se trouvent dépour- vues de poils, par conséquent l'apparition de ces derniers, après la seconde mue, présente une modification d'âge particu- lièrement caractéristique; ce n’est pas cependant toujours Île cas que les Araignées, qui à l’âge adulte sont pourvues de poils tactiles et protecteurs, les reçoivent tout à coup après telle ou telle mue; parfois on leur voit paraître d’abord des poils tacüles, et ensuite des poils protecteurs. J’ai eu occasion d'observer des cas où, après la première mue, l’Araignée est complètement nue, comme je lai dit plus haut; ce sont les Araignées qui sont très étroitement logées les premiers jours de leur vie, comme la Lycosa saccata, par exemple; au con- traire, chez les Araignées dont les cocons sont vastes, comme chez certaines Attides, par exemple, le second tégument, autant qu’il m'est arrivé de voir, est couvert de poils. Je noterai encore un détail relatif à Attus. On sait que ces Arai- onées ont sur les pattes, à côté des crochets, une touffe de poils distincts des autres par leur forme, et dont la destination consiste à aider l’animal à sauter. On n’observe point de ces poils et de ces touffes sur le second tégument de PAraignée, c’est-à-dire après l’éclosion. Ils apparaissent après la seconde mue en petit nombre, qui augmentent avec chaque mue suc- cessive, et atteignent sur quelques pattes (car ce nombre n’est pas le même sur toutes les pattes) d’un sujet adulte le nombre de soixante. En ce qui concerne les modifications de la cuticule même, elle présente ce qui suit. Sur le tégument rejeté d’un mâle de l’avant-dernière mue sur le point du palpe, sous lequel est situé l'appareil copulateur, on observe un épaississement plus ou moins considérable de la chitine (fig. 13). On ne peut altri- buer qu’un rôle à cet épaississement : celui de protecteur de l'appareil copulateur contre les agents extérieurs; rèle qui appartenait jusqu'ici aux poils qui recouvraient cet endroit et qui maintenant n'existent plus. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 363 Par conséquent, j'ai à signaler l’existence d’organes provi- soires chez les Araignées, qui disparaissent à l’époque de la maturité sexuelle. Comme exemple d'organes provisoires peut servir aussi le calamistrum; chez les mâles de certains genres d’Araignées cet organe s’observe aux premiers stades de déve- loppement et ne s’observe point chez les sujets à l’état de maturité sexuelle. Modifications aux crochets des pattes et des palpes. — Après l’éclosion, c’est-à-dire après la première mue, on observe sur les pattes de l’Artus deux petits crochets (fig. 58, cr, 4) lisses (ou l’un d’eux seul ayant une dent), relativement très petits, étant au moins quatre fois plus petits que les crochets qui vont se former en dessous d’eux vers la fin de la période pré- cédant la troisième mue (fig. 58, cr, 2). Ces nouveaux cro- chets, après deux mues (sur le troisième tégument), sont assez grands ; l’un d’eux est dentelé, l’autre non; le nombre des dents est différent sur différentes pattes. Ce nombre de dents et de crochets augmente très lentement avec l’âge; une dent nouvelle apparait d’abord sous l’aspect d’un tubercule à peine visible ; à la mue suivante, cette dernière s’étire en forme de dent et croît ensuite, pendant qu’à côté d’elle apparaît un nouveau tubercule, et ainsi de suite. La lenteur avec laquelle eroissent et augmentent en nombre les dents peut expliquer Je phénomène que, pendant toute la période post-embryon- naire, à partir de la deuxième mue, le nombre général n’at- teint que trois et même deux dents de plus comparativement à ce que nous avons vu après la deuxième mue. En revanche, pendant la période entre les deux dernières mues, le nombre des dents augmente considérablement, non seulement au cro- chet qui en portait après la deuxième mue, mais même sur celui qui, tout le temps, c’est-à-dire pendant la période de toutes les mues, est resté lisse. En chiffres, cette augmenta- tion s’exprimera ainsi : 304 WAGNER. NOMBRE DES DENTS SUJET SE ST RE Un el nu rm EU PL TE SUR LA 1"® PATTE| SUR LA 2° PATTE | SUR LA 9° PATTE | SUR LA 4° PATTE à l'état de ES PS RS ES Sur Sur Sur Sur Sur Sur Sur Sur MATURITÉ ISEXUELLE un l’autre un l’autre un l’autre un l’autre | Par conséquent les deux crochets du mâle ne deviennent dentelés qu’au stade de maturité sexuelle, ce qui est d'autant moins explicable que le mâle ne fabrique de cocon que pour l'hiver, et que, chez la femelle, au stade de maturité sexuelle, ces crochets sur les trois pattes restent lisses, et ce n’est qu’à la troisième paire de pattes qu’on observe des crochets à trois dents. Voici comment les choses se passent chez la Tarentule : NS OS Crochet Crochet|Crochet|Crochet{Crochet Crochet|Crochet Crochet} droit |gauche| droit | gauche! droit | gauche! droit | gauche À | ——————— ————Ù A ———— 0 | ——— | k Période des 2% et MUST eee 7 8 9 8 9 8 8 4 8 L'avant- dernière mue du mâle..... 6 6 6 6 6 9 8 10 10 A NN TE Une épi AE A ee tt 0 8 | 9 9 | 10 | 10 À 11 | 42 {re PATTE 2° PATTE 3° PATTE 4° PATTE maturité sexuelle. (1). L'avant- dernière mue de la femelle. 6 7 7 5 6 7 7 8 8 Femelle à l’état de maturité sexuelle(‘) 5 7 7 4 6 8 o I I Par conséquent le nombre général de dents aux crochets des pattes du mâle pendant l’avant-dernière mue a baissé de soixante-deux jusqu’à soixante et un et est monté, chez un (1) Tous les crochets de la femelle sont plus courts que ceux du mâle. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 369 sujet à l’état de maturité sexuelle, jusqu’à soixante-dix-neuf. Ce nombre, chez la femelle de l’avant-dernière mue, est tombé à cinquante-cinq, et, chez un sujet à l’état de maturité sexuelle, reste presque invariable à cinquante et un. Gette circonstance confirme par conséquent que le mâle a dévié de sa structure primitive dans un sens et la femelle dans un autre : le mâle à un surplus de dix-sept dents comparati- vement aux premiers stades et la femelle onze de moins. = La modification aux crochets des palpes a marché, au con- traire, dans un autre sens. Vers l’époque de la maturité sexuelle d’un mâle, le crochet même.s’est transformé en épine ; chez la femelle 1l est resté presque invariable. Dans ce sens par con- séquent la femelle a subi moins de modifications que le mâle. Les crochets des pattes chez les Lycoses ne présentent presque pas de différence avec les Affus. Dans les deux cas, ils ne sont pas grands sur le deuxième tégument, c’est-à-dire après l’éelosion ; mais les Lycoses ont encore, outre ces deux, un troisième crochet rudimentaire : ils sont tous lisses, sans dents. Comme chez les Attus, vers la fin de la deuxième période, on voit se développer en dessous d’eux deux crochets dentelés quatre fois plus grands et un auxiliaire lisse. Le palpe de l’Attus n’a pas le moindre vestige d’un crochet, même à l’âge le plus tendre. Tout de suite après l’éclosion, c'est-à-dire après la première mue, on n’observe à l’extrémité du palpe que des poils tactiles rares qui ne se distinguent en rien des autres. Ghez la Lycose saccata, nous remarquons après l’éclosion la particularité suivante : au bout du palpe on voit un petit crochet (fig. 54) de forme tout à fait pareille à celui de la patte. Vers la fin de la deuxième période de la mue, sous celui-ci on en voit apparaître un autre relative- ment très grand et dentelé (fig. 55), ne différant pas à sa forme de ceux de la patte. Nous verrons plus tard que, ehez la femelle, le nombre de dents à ce crochet dentelé n’augmente pas avec la croissance, comme on l’observe sur les pattes, mais diminue graduellement aussi. Pour ce qui concerne les mâles, ce crochet dentelé se métamorphose chez eux peu à 366 WAGNER. peu en une simple épine assez épaisse (fig. 57). Par consé- quent, chez ces Araignées, comme chez bien d’autres, les crochets des extrémités, d'abord tout à fait semblables, durant la période post-embryonnaire, se modifient dans deux sens contraires : sur les crochets des pattes le nombre de dents augmente chez les mâles et atteint son maximum vers l’époque de la maturité sexuelle; quant à ceux des paipes, le nombre en diminue et, vers l’époque mentionnée, le crochet même se transforme en épine. Les faits discutés constatent : 1° que les modifications chez les Tarentules et quelques autres Araignées s'effectuent gra- duellement durant toute la vie, quoique ces modifications soient plus considérables pendant la période qui sépare les deux dernières mues que pendant les précédentes ; 2° que le mâle comme la femelle s’éloignent du type primitif, quoique le premier plus que la dernière. Modifications de l'appareil copulateur. — Occupons-nous maintenant des modifications des parties extérieures des organes génitaux; ces modifications, chez le mâle, sont beau- coup plus compliquées que chez la femelle ; c’est pourquoi Je m'arrêterai à leur description détaillée pendant le développe- ment de l’appareil qui a pour siège le tarse du palpe. Comme mes recherches sur la fonction des parties séparées de l'appareil copulateur m'ont amené à des conclusions un peu différentes de ce qui était jusqu'à présent connu de ces organes el que, par cette raison, J'ai dû donner de nouvelles dénominations à certaines parties de l'appareil qu’il faudra prendre en considération en discutant l’histoire de leur déve- loppement en connexion avec la mue des Araignées, je con- sidère comme indispensable, avant d'exposer cette histoire, de faire connaître en peu de termes au lecteur les résultats de mes études sur la structure anatomique desdits organes, en renvoyant ceux qui voudraient des rensergnements plus détaillés sur ce sujet à ma note spéciale (1). (1) Voy. ma note : Le développement de l'appareil copulateur (C. R. sect. ARTICLE N° 3, LA MUE DES ARAIGNÉES. 367 Dans un appareil de complication moyenne, chez Aftus ou Thomisus par exemple, je distingue les parties suivantes (1) (He b9)e 4° Cymbium. Sous cette dénomination est compris le tarse modifié du palpe d’un mâle chez les Araignées, sur lequel est placé lPappareil copulateur. Plus la structure de ce dernier est compliquée, plus la forme du cymbium est éloignée de la forme du tarse de la femelle, par conséquent plus sa modifi- cation est considérable. Le rôle de cette partie est depuis longtemps connu : elle porte l’appareil copulateur de l’Arai- onée. 2 L’alveolus (fig. 59, Alv). Ainsi s’appelle la concavité dans le cymbium, cavité dans laquelle est placé l'appareil copu- lateur. Sa forme dépend de la structure du cymbium. Chez certaines Araignées il occupe la moitié de la surface de ce dernier, et, dans ce cas, le cymbium a la forme d’un canot. Chez d’autres, il est plus petit, comme chez la Segestrie, par exemple, chez d’autres encore, plus grand et occupe toute la surface du cymbium. Plus la structure de l'appareil est simple, moindre est l’alveolus en circonférence, comme en profondeur, et vice versa; plus l'appareil est compliqué, plus il embrasse d'espace dans tous les sens. La destination de l’alveolus est de servir de siège au hæma- todocha ou follicule, situé en forme de spirale et destiné, chez certaines Araignées, à servir de siège à l'appareil copu- lateur lui-même. L’alveolus n’a pas de signification indépen- dante; sa forme, comme son calibre, en se développant, sont en dépendance des autres parties de l'appareil. Dans l’intérieur du cymbium est situé : 3° La Lacuna tarsi (fig. 59, L), qui remplit complètement toute la cavité de ce dernier, et qu’on voit parfaitement dans zool. Soc. Amis sc. nat. Moscou, 1886), et mon travail : La systématique des Araignées (Mém. de la Soc. entom. russe, 1887). (1) Le dessin (fig. 59) qui figure ces parties, est schématisé ; il présente une coupe longitudinale du Cymbium avec l’appareil copulateur tiré dehors et placé à un plan avec la coupe. 368 WAGNER. les coupes longitudinales et transversales. Elle a la fonction suivante : au moment de la copulation, le mâle, au moyen des contractions musculaires de l'abdomen, renvoie le sang dans cette lacune et de là dans le hæmatodocha par l’orifice au fond de ce dernier (orificium hæmatodocheæ) (fig. 59, or). % Les cellules glandulaires (fig. 59, c. gl), qu’on observe chez de certaines Araignées, comme les Attides, par exemple, et qui sont situées au bord de lalveolus. Les téguments chiti- neux au-dessus d'elles, dans le cymbium, sont percés d’une quantité de canaux, qui servent évidemment de conduits aux sécrétions des cellules glandulaires. 5° Hæmatodocha (fig. 59, hæm) est un organe chitineux délicat, qui se colore facilement au carmin. Dans son entier, cette partie présente un sac, dont le fond est inséré dans Pal- veolus et le bord supérieur à la face inférieure du tegulum (voy. plus bas), de manière que toute la partie basale du recepla- culum seminis, qui est située sous le {equlum, se trouve dans la cavité du sac mentionné (fig. 59, r.s). Sur les coupes on voit que les parois de ce sac sont très fines et plissées, ce qui permet de conclure d'avance que si le sac est rempli de quelque chose, il peut atteindre de grandes dimensions. À l’état ordi- naire, chez la plupart des Araignées, il est plié en spirale et situé dans l’alveolus. J'ai à ajouter que le fond par lequel le sac est attaché dans la concavité de l’alveolus a un onifice rond, orificium hæmato- dochæ, qui sert à unir la cavité du sac avec celle de la lacune du cymbium, située en dessous (fig. 59, or). Pendant la copu- lation, le hæmatodocha ne se remplit pas de sperme, comme certains observateurs le supposent, mais vers ce moment se remplit de sang, de quoi on peut se convaincre par une expérience directe. Il a pour rôle de transmettre (sous la pres- sion de ses parois élastiques) le sang, qui lui est arrivé de la lacune, dans la cavité du receptaculum seminis (dont il sera question plus bas) à travers des canaux fins (meati sanquinis) (fig. 99, #. s), par lesquels la cavité du receptaculum s'unit à la cavilé du sac. Par conséquent, la fonction du hæmato- ARTICLE N° 9. LA MUE DES ARAIGNÉES. 309 docha consiste en ce que, par son intermédiaire, par son concours, le sang prend part dans la fécondation en péné- trant, quoique en petite quantité, avec le sperme dans la fente génitale de la femelle. 6° Receptaculum seminis (fig. 59, r.s). Sur la partie supé- rieure de l’appareil copulateur, et en partie dans la cavité du hæmatodocha, sous le tegulum, est situé un tube à parois chitineuses épaisses, qui, chez différentes espèces d’Araignées, est différent de forme, de longueur et de position. L’extrémité de la partie située sous le tegulum, et que je nomme partie basale du tube, est toujours fermée (fig. 59, r.s). Le bout opposé, le bout terminal, se termine toujours par un orifice (fig. 99, o) au sommet de l’embolus (fig. 59, emb). Le lumen du tube n’est pas le même chez toutes les Araignées. Vers Le moment de la fécondation, ce tube est tout rempli de sperme et se nomme receptaculum seminis. Son rôle est le suivant : bientôt après la mue, ce tube, d’abord vide, se remplit de sperme que le mâle fait sortir de son orifice génital sur une membrane préalablement préparée. Le mâle plonge ses palpes dans celte goutte de sperme, et par lorifice dans l’embolus, cette dernière monte sous l'influence de la loi de la capillarité dans le receptaculum. Ce dernier est le seul organe de l’appa- reil copulateur qui reçoive et conserve le sperme. Ce dernier ne peut en sortir que par l’orifice de l’embolus, par lequel 1l est entré. Les canaux menus (meati sanguinis), qui servent d'union au receptaculum seminis avec la cavité du hæmato- docha sont d’une finesse si extrême, qu’ils ne peuvent servir au sperme de conduit dans la cavité de ce dernier, et ce n’est que le plasme sanguin, qui, sous l'effet de la pression des parois du hæmatodocha, peut y pénétrer pour passer dans la cavité du receptaculum. Par conséquent, le rèle de ce dernier consiste à servir d’organe passif, recevant le sperme et le transmettant dans la fente génitale de la femelle sous Peffet de la pression du sang, qui pénètre du hæmatodocha dans sa cavité par l'intermédiaire des meati sanquinis. 7° Meati sanguinis. En examinant de plus près la structure ANN. SC. NAT., ZOOL., 1888. VI. 24. — ART, N°3, 970 WAGNER. du tube (receptaculum seminis), nous remarquons que dans la région de l’embolus, il est dans toute son étendue fin, tout à fait lisse et dépourvu de pores (cette partie lisse du tube, je la nomme partie terminale). Plus loin vers son bout fermé, les coupes transversales constatent un amas de canaux menus (fig. 59, ».s), qui percent la paroi du receptaculum seminis. Ces canaux se présentent parfois sous forme de faisceaux dont les bouts, dirigés en dedans du tube, sont plus rapprochés les uns des autres que les bouts opposés. Ces canaux sont différemment disposés : chez de certaines Araignées ils sont dirigés en forme de spirales autour de toute la partie basale du tube; chez d’autresils vont sans interruption le long de la face inférieure du receptaculuin seminis soit en désordre, soit en plusieurs rangées, etc. Mais toutes les Araignées sont pourvues de ces canaux que j'ai nommés san- QUINS —- /NEQI SANGUINIS Leur rôle, comme l’exposition précédente nous le fait voir, est de servir de conduit au sang du hæmatodocha dans le receptaculum seminis. 8° Tegulum (fig. 59, teq) présente une plaque assez épaisse de chitine, servant à couvrir par en haut Le receptaculum senu- nis et à le défendre. Bien des Araignées, comme les Attides, les Thomisides et autres, n’ont, outre ce egulum, aucune conformation chiti- neuse sur l’appareil copulateur ; mais les Araignées avec une organisation plus compliquée de cet appareil sont pourvues de beaucoup d’autres organes chitineux auxiliaires, sous forme de lames, de dents et d’excroissances de formes les plus origi- nales et les plus variées. 9 Embolus (fig. 59, emb). — C’est un organe de nature chimeuse, la plupart du temps subuliforme ou ayant forme de houssine, que le mâle introduit dans la fente génitale de la femelle. Au bout de l’embolus il y a un petit orifice (fig. 59, 0) qui laisse passer le sperme du receptaculum seminis du mâle pendant la fécondation. L'articulation de l’embolus avec Île tegulum peut être mobile ou immobile, pouvant présenter ARTICLE N° 9. LA MUE DES ARAIGNÉES. 371 une simple continuation de la lame de chitine du tegulum. La fonction du tegulum et de Pembolus est visible par suite de la description même qui vient d’être faite. L'activité de ces parties de l’appareil copulateur consiste en ce qui suit : le mâle prêt à la fécondation applique à la fente génitale de la femelle la face extérieure de son palpe et au moyen de contractions de l'abdomen, qu’on lui remarque avant la fécondation et auxquelles prend part la musculaiure sous-cutanée, pousse le sang dans la cavité du hæmatodocha par lorifice qui unit cette dernière avec la lacune du cymbium. Le sang, entré dans le hæmatodocha, gonfle ce dernier, pousse en dehors l'appareil copulauf et ayant — par l’intermédiare des canaux sanguins (#eali sanquinis) — pénétré dans la cavité du recep- taculum seminis, entraine Le sperme dans la fente génitale de la femelle. Quand le sang commence à diminuer, retournant dans le corps du mäle, il remplit de nouveau le sac aussi amplement que la première fois, opération qui se réitère jusqu’à ce que la fécondation soit terminée; alors le palpe se retire de la fente génitale de la femelle, le hæmatodocha se contracte entièrement à une certaine distance de l’abdomen de cette dernière et le tegulum reprend sa position habituelle. L'histoire du développement de l'appareil copulatf pré- sente ce qui suit d’après mes études. Pendant la période des premières mues, les mâles des Araï- onées ne se distinguent point des femelles, comme on le sait. Durant le développement ultérieur, les distinctions apparas- sent bien avant la dernière mue, après laquelle le développe- ment post-embryonnaire des Araignées se termine. Longtemps avant que l’appareil copulateur futur commence à prendre naissance, les deux derniers articles des palpes, qui présen- taient d’abord un corps entier, commencent à se diviser. Leur cavité, qui d’abord ne renfermait point d'organes et présen- tai un sac continu, rempli de sang, est pourvu maintenant de musculature dans la partie du tibia. Tous ces deux articles sont couverts de poils continus. Les modifications ultérieures de ces organes pendant les 312 WAGNER. - mues consistent en ce que le Uibia et le tarsus qui, en se divi- sant, présentaient d’abord deux articles de longueur égale, différent ensuite à tel point que le calibre du tarse, qui com- mence à croître rapidement, surpasse quadruplement celui du tibia, et cela avant que l’appareil copulateur commence à prendre naissance. | La formation de ce dernier, longtemps avant la dernière mue, commence de la manière suivante : à l’endroit où le sujet adulte a l'appareil copulateur, apparait avant tout une papille de la matrice, dont le sommet est dirigé dans la cavité du cymbium et en avant (fig. 60, in. p). Les parois de cette pa- pille donneront naissance plus tard aux parois de lalveolus (fig. 60, alv). Les coupes indiquent l'existence d’une cavité dans cette papille. À cette époque, 1l y a plus de musculature dans le tibia et déja dans deux sens, quoiqu’elle ne soit pas encore en fonction, parce que les articles en question présen- tent encore presque un corps inarticulé et comme d’une seule pièce. Le développement ultérieur de appareil copulateur con- siste en ce qui suil. La papille, ayant atteint le maximum de sa hauteur, com- mence à s’enfoncer par son sommet en dedans de sa cavité (fig. 61, eg). La coupe nous fait voir par conséquent un double pli, dans lequel on doit distinguer les parties suivantes : Le tegulum (fig. 61, teg) — le sommet de la papille, enfoncé dans la cavité ; l’hæmatodocha (fig. 61, haem) — les parois de la papille, qui étaient d’abord situées dans la cavité de Par- ticle, sont placées maintenant dans la partie inférieure de la cavité de la papille mème. Ces parois formeront le hæmato- docha de l'appareil copulatif, Palveolus (fig. 61, alv) ; — enfin les parois de la partie inférieure de la papille, qui formeront l’'alveolus de l'appareil copulatif. Le sommet de la papille, ayant atteint le tégument cuticu- laire de l’article, commence à s’élargir (fig. 62, £eg) et prend peu à peu l’aspect du tegulum d’un sujet adulte. Mais encore plus Lôt, au moment précis, où le sommetdela papille vient de ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 373 s’approcher des téguments de l’article, dans la cavité inté- rieure de ce dernier prend naissance une seconde papille (fig. 62,r.s), qui diffère de la première par le mode de son origine, car il apparait sous forme d’une colonne continue de cellules, sans cavité en dedans. Cette dernière s’y forme plus tard ; quant à la papille même, elle donne naissance au recep- taculum seminis. En se développant, cette papille croît rapi- dement en longet atteint, chez différentes formes d’Araignées, une longueur différente. ‘ centre de la colonne de cellules, d’abord continue, on voit apparaître la cavité, qui augmente peu à peu (différemment chez différentes formes d’Araignées) ; la chitine des parois du tube se sécrète de la même ma- nière que sur le tégument, dans les trachées, les glandes à soie, et comme elle le fait dans toutes les autres parties de l'appareil copulateur. Vers celte époque, l’aspect extérieur du palpe devient très caractéristique en ce que, au-dessus de la cuticule, au point sous lequel est situé l'appareil copu- lateur, on ne voit pas de poils. Leur rôle en qualité d'organes protecteurs de la néoformation incombe à l’épaississement chitineux que J'ai mentionné ci-dessus (fig. 13). Avant la dernière mue, toutes les parties de l’appareil copu- lateur sont presque finalement formées. Il n’y a que les meati sanquinis qui ne le sont pas et que le receptaculum seminis, qui ne s’est pas finalement développé, comme on le voit dans ce qui vient d’être dit. Les meati sanguinis se forment, en général, comme le receptaculum seminis. D'abord, dans les endroits où, avec le temps seront ces canaux, on voit s’accumuler des cellules de la même manière qu’elles le faisaient au moment opportun, à l’époque de la formation du receptaculum seminis. Ces amas de cellules se différencient en parties, dans lesquelles se forme une cavité. D'abord ces canaux, environnés de cellules, sont plus grands que ceux qu’on observe plus tard chez un sujet adulte ; ensuite, quand les cellules, qui les ont formés, ayant recueilli leur but, disparaissent, les canaux diminuent en dimensions et prennent leur calibre normal. 374 NVAGNER. Avec la formation des meati sañguinis se termine la forma- tion de l'appareil copulatif et après la mue 1l présente l'organe, dont les parties ont été décrites précédemment. Par conséquent, l’appareil copulateur est le produit de la matrice; toutes les parties qui le constituent sont en chitine, formée ici par les cellules de la matrice, comme dans tous les endroits de l’organisme, où lesdites cellules prennent une part directe dans la formation de la chitine. Chez les Araignées dont l'appareil copulateur est d’orga- nisation la plus simple, comme les Segestries et les Drassus, par exemple (1), la mue, en général, marche de la même manière, avec la différence que la première papille, qui, chez la grande majorité des Araignées, prend naissance sur la face intérieure du tarsus, à peu près au milieu de ce dermier, et s'étend profondément dans la cavité du cymbium (tig. 60), se forme dans ce cas autrement. Ce n’est pas au milieu qu’elle surgit, mais bien au sommet du tarsus (fig. 64) et ne s’étend pas dans la cavité du cymbium, mais a lair de se rétracter de manière que son sommet n’est jamais tourné vers l’inté- rieur de la cavité du cymbium, mais, du commencement jus- qu'à la fin, tourne sa face supérieure vers la culicule de l’article. Avec le développement, le pli, qui sépare cette papille du corps du cymbium (fig. 65), s'enfonce en dedans, sans changer la position de la papille. Prenant en considération la corrélation entre les parties de l'appareil copulateur d’un sujet adulte et les parties qui leur donnent naissance, 1l n’est pas difficile, — vu la particularité signalée du développement de lappareil copulateur chez la Segestrie, la Dysdère et autres pareilles — de décider à priori que ledit appareil, chez ces dernières, n'aura presque pas d’alveolus, aura un très petit hæmatodocha et un très grand tegulum (fig. 63). C’estcompréhensible, les parties qui donnent naissance à l’alveolus et au hæmatodocha, ne se développent (1) Voy. mon travail : Copulationsorgane des Männchens als Crilerium für die Systematik der Spinnen (Mém. Soc. ent. russe, t. XXII, mai 1887). ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 3179 presque pas chez elles; en revanche, celle qui donne nais- sance au tegulum, est énorme. La formation du receptaculum seminis dans la cavité de la première papille ne présente rien de particulier. Je ne par- lerai pas d’autres détails, qui ne présentent pas d'intérêt pour nous. Par conséquent, la principale distinction dans la forma- tion d’un appareil copulateur, de structure du plussimple type, consiste en ce qu'il se forme d’une manière, pour ainsi dire, abrégée; qu'il commence son développement au milieu. J'ai déjà donné l'appréciation de ce phénomène, c’est-à-dire de sa plus grande simplicité de structure, dans mon travail précité, sur la systématique des Araignées, c’est pourquoi ici je n’en parlerai pas. Pour conclure, j’ai à ajouter quelques indications, expli- quant les causes pour lesquelles ma nomenclature des diverses parties de l'appareil copulateur diffère de celle qui est géné- ralement adoptée (1). Avant tout il est indispensable que je donne la littérature du sujet. Le fait que le mâle transporte le sperme dans l’organe géni- tal de la femelle au moyen des palpes, a été constaté depuis bien longtemps par bien des naturalistes, comme Lister, Klerk, Brandt, Platzebourg, Menge et, enfin, Bertkau, quoique Tre- viranus, par exemple, en douta et expliqua le rôle des palpes pendant la copulation comme celui d’un simple « Vorspiel der Begattungen ». Pour ce qui est de la connaissance des détails et de la pre- mière description circonstanciée de la structure de lPappareil copulateur, nous la trouvons dans le beau travail de Menge. Ayant indiqué que les palpes consistent en cinq articles (tro- (1) Dans ma note : Sur la fécondation des Araignées (Bull. Soc. imp. des Amis des sc. nat., t. XXXVIT, 1880), je nommais ces parties d’après Menge, c’est-à-dire d’une manière différente que celle que j’emploie. La cause en était en partie dans la connaissance incomplète des fonetions des différentes parties de l’appareil, en partie parce que l’histoire de leur développement ne m'était pas alors connue. 370 WAGNER. chanter, femur, patella, tibia et tarsus, à un article), il distingue au dernier article du palpe les parties suivantes : 4° Cymbium. Dernier article du palpe avec une concavité en forme de canot ; 2 Alveolus. La concavité même, qui renferme lappareil copulateur ; 3° Stemma. Différents organes transmissifs ; 4° Un muscle en forme de spirale, qui consiste en une fibre tendineuse sans striation transversale et qui passe à travers tous les stemmas. Ce muscle, d’après Menge, augmente considérablement en dimensions pendant la copulation, de sorte que souvent 1l se gonfle et pousse le stemma de lalveolus. Dans le stemma, cet auteur distingue les principales parties de l'appareil copulateur : le spermophore et lembolus, et, en outre, différentes sortes d'organes chitineux (Platten, Blätter, Zähne, Haken, Nadeln oder Spitzen, etc.). Par spermophore l’auteur entend la partie de stemma qui porte le sperme et qui est, la plupart du temps, en forme d’une langue, d’une feuille, d’une auge, ete. Gette partie est molle à un de ses bouts et parsemée de petits tuberculestriangulaires et coniques pour qu'elle puisse recevoir et retenir les « sperma- tozoides ». Par embolus, l’auteur sous-entend la partie élastique subu- liforme ou en forme d’une houssine, contiguë au spermophore. « Je ne puis dire, lisons-nous chez Menge, qu’il serve unique- ment pour frayer passage au spermophore; il est possible qu'il pousse les spermatozoïdes dans la fente génitale de la femelle, —rôle pour lequel il semble être possible par sa forme et sa finesse. » Plus loin l’auteur ajoute : « Les observa- tions sur ce sujet sont difficiles et demandent énormément de temps, sans apporter parfois des résultats. » Il suit de ce qui vieut d’être exposé, que la description des indices extérieurs de l'appareil copulateur, faite par Menge, est tres détaillée; mais, comme le rôle physiologique de ses parties et l’histoire de leur développement lui étaient inconnus, il ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 277) s'ensuit, que certaines dénominations ne correspondaient par conséquent pas à leur signification réelle et ne peuvent, par cette raison, être retenues. À cause de cela je ne retiens de la nomenclature de Menge que les dénominations suivantes : 4° Cymbium ; 20 Alveolus : 3 Embolus. Sous les deux premières, j’entends la même chose que l’auteur précité. Pour ce qui est de l’embolus, Menge , comme on le voit par sa définition de cette partie de l’appareil («sert-il uniquement à frayer passage au spermophore, ou pousse-t-il les sperma- tozoïdes dans la fente génitale de la femelle »), n’avait pas de connaissance déterminée sur sa fonction; en outre, quoique l'auteur nomme embolus des parties différentes de lPappa- reil copulatif, par leur fonction et signification, le confondant souvent tantôt avec son spermophore, tantôt avec les confor- mations secondaires de l'appareil, — je retiens néanmoins cette dénomination, vu que Menge était le premier à signaler sous ce nom juste là partie de l'appareil, qui s’introduit dans la fente génitale de la femelle, quoique l’auteur n’ait pu la découvrir chez toutes les espèces des Araignées. Je comprends par embolus, comme je l’ai dit plus haut, la partie de l’appareil qui s’introduit dans la fente génitale de la femelle et dans laquelle se termine le receptaculum seminis, en s’ouvrant par son orifice extérieur. Les autres dénomina- tions de Menge ont été ou omises entièrement par moi, ou remplacées par d’autres pour les raisons suivantes : 1° Siemma, sous lequel Menge entendait « différents organes intermédiaires, » — dénomination que J'ai omise, par la rai- son qu'il n’existe point de ces organes transmissifs. Qu’y a-t-il en effet à transmettre? Peut-être encore Menge a-t-il sup- posé que le sperme se transporte par les parties extérieures de l’appareil copulateur; mais l’étude de la structure de ce dernier ne peut permettre cette supposition. Le stemma, d’après Menge, se compose aussi de différents 3178 WAGNER. organes chitineux, parmi lesquels il place son spermo- phore, l’embolus et autres formations sous forme de dents, d’épines, etc., qu'il nommait d’après leur aspect extérieur. Je les désignerai sous le nom général de conformations externes chitineuses auxiliaires, parmi lesquelles je ne distin- guerai que l’embolus dans le sens établi ci-dessus, et le fegulum, pour désigner sous ce terme la lame de chitine qui, chez la majorité des Araignées, est située sur le sommet de l’appa- reil et qui à pour rôle de servir de défense au receptaculum seminis, placé en dessous d'elle. 2° Le spermophore de Menge n’existe point. Menge en effet, et après lui quelques autres, supposaient que le sperme se transmet non ex dedans de l'appareil copulateur, mais en dehors au moyen d’un appareil chitineux (spermophore), qui, par sa forme et sa structure extérieure, présente le plus de convenance pour recevoir et retenir les spermatozoïdes, étant pourvu dans ce but de différentes excroissances. D’après les figures, faites par Menge, des palpes de diffé- rentes espèces d’Araignées avec les explications qu’ilen donne, ce qu'il entend par embolus et spermophore présente beau- coup d'erreurs; l’auteur, en définissant ces organes, s’est moins basé sur leur véritable rôle, que sur un rôle faclice, qu'il leur attribuait d’après leur forme ; 1l eroyait en outre que le sperme est transporté par le mâle en dehors de Pappareil, ce qui expliquerait la forme de l’auge du spermophore de ses dents, etc. Par conséquent, vu 1° que Menge décrit sous le nom de spermophore des parties différentes par leur fonction; 2° que les Araignées mâles n’ont pas de parties, auxquelles puisse convenir la définition générale, donnée au spermophore, comme organe transmettant le sperme, j'ai omis complè- tement ce terme de la nomenclature des parties de lappa- reil copulateur des Araignées. 3° Le muscle en forme de spirale, sous lequel Menge entend la partie inférieure de l’appareil la plus proche du cymbium, à laquelle il n’assigne pas de rôle particulier pendant la copu- ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 379 lation et que bien d’autres arachnologues, faute de connaître l'histoire du développement de cet organe, appellent après lui de la même manière, est remplacé dans mon travail par la dénomination de kæmatodocha, qui mdique sa fonction. Il est parfaitement erroné de nommer cette partie du nom de « muscle », parce que son origine est identique avec celle des conformations de chitine, qu’on observe dans les autres parties de l'appareil copulateur, que tous les arachnologues appellent chitineuses, comme : le spermophore de Menge et ses Blätter et Platten. La nature du hæmatodocha, comme le montre l’histoire de son développement, est la même que celle des articulations des articles séparés des palpes. Par conséquent, ayant constaté l’origime et la fonction, tout à fait différentes de celles qu’on supposait au « muscle spiral » des auteurs précédents, ces remarques m’empêchaient de retenir une des dénominations admises jusqu’à présent. Après Menge, autant que je sache, Fickert le premier s’est occupé de la question de la structure de l'appareil copula- teur. Il a étudié Les palpes en les plongeant dans la solution de potasse. On ne peut s'étonner qu’il n’ait pu voir, par consé- quent, avec cette préparation, que les conformations chiti- neuses. [l a pu constater par ce moyen un tube au dedans de l'appareil copulateur, mais comme ce mode de préparation avec la potasse n’a pas pu certainement lui faire découvrir le contenu du tube, il a supposé que ce dernier devait servir de conduit pour les sécrétions d’une glande particulière, qu’il a nommée Fasterdrüse. Il envisageait toutes les autres par- tes de l’appareil comme tous les autres auteurs après Menge. Il supposait aussi que le sperme se transporte en dehors de l'appareil sur le spermophore de Menge et que la sécrétion de sa glande doit couler à travers les spermatozoïdes, qui se trouvent sur le spermophore (1). Lebert (2) n’a rien découvert de nouveau sur le sujet (1) Fickert, Ueber einen männlichen Copulationsorgan bei den Araneiden (Entom. miscel., 1879). (2) Spinnen der Schweiz. 380 WAGNER. et n’a fait que répéter les erreurs de Menge et Fickert. Ensuite, Ste a figuré, dans l’atlas de Carus, l'appareil copu- lateur et y a nommé Île tube de Fickert (receptaculum seminis) . Par conséquent, la véritable signification physiologique de cette partie de l'appareil, à ce qu’il me semble, est signalée par Stein; c’est pourquoi J'ai retenu la dénomination donnée par cet auteur au tube. Mais on était encore loin d’avoir éclairei la question. On s’est borné, en attendant, à établir le fait, que le sperme se transmet par l’Araignée en dedans de l'appareil par un organe spécial et non en dehors. Il restait à définir : 1° comment le sperme parvient à pénétrer dedans le tube ; 2° quels sont les agents nécessaires pour le transvasement du sperme de dedans le tube dans la fente génitale de la femelle; 3° quel est le rôle des autres parties de l'appareil copulateur, quel rapport elles ont avec l’acte de la fécondation et quels sont leurs rapports mutuels ; 4 enfin, il fallait tracer l’histoire du développement de cet appareil. Après les auteurs précités, la question a été étudiée par Bertkau, qui l’a considérablement avancée (1). Avant indiqué les tentatives de Menge pour l’éclaircissement de la significa- tion physiologique des parties séparées de l'appareil, Bertkau admet « qu'il n’est pas facile de déterminer la signification de toutes les parties, de se présenter une figure claire de tout appareil ». Lui-même, 1l donne quelques explications sur la physiologie des parties séparées de l'appareil copulateur, quoique ses recherches aient été dirigées principalement d’un autre côté; il fait la description anatomique des parties de lorgane et découvre que le sperme se trouve en dedans dans un canal spécial, qu'il appelle Kügelträger. Il a découvert ce canal chez beaucoup d'espèces d’Araignées et entre autres chez Segestria bavarica, supposant, avec justesse, que la forme de structure de cet appareil, chez ces dernières, est la plus simple. (1) Bertkau, Ueber den Generationsapparat der Araneiden (Arch. f. Naturg., 1875). ARTICLE N° 3. e LA MUE DES ARAIGNÉES. 381 La description du canal même n'est pas exacte, c’est pourquoi l’auteur n’a pas pu se rendre compte de sa fonction. La sphère chitineuse, dans laquelle est placé son Kügelträger, ‘est nommée par lui Samenbchalter. Je ne retiens pas une de ces dénominations : € Kügelträger », parce que ce canal a été déjà déerit plus tôt par Fickert et sa fonction physiologique signalée par Stein également plus tôt et ce canal avait déjà reçu le nom de receptaculum seminis; « Samenbehalter », parce que cet organe, n1 chez la Segestrie, n1 chez les autres Arai- onées, ne contient jamais de sperme. Ge que Bertkau propose d'appeler de ce nom (qui indique lui-même une certaine fonc- tion), n’est pas autre chose qu'une de ces conformations auxi- liaires de chitine, que j'ai nommées fequlum et qui ne sont pas séparées de l’embolus chez la Segestria Bavarica et présentent un corps entier. En considérant comme parties importantes de l'appareil le « Samenbehalter » et le « Kügelträger », Bertkau ne déter- mine pas leur fonction et leur rapport mutuel. En déter- minant ces fonctions par les dénominations données aux organes, nous devons conclure que la solution de la ques- Lion dans ce sens n’a pas fait de progrès, parce que Bertkau a montré que le sperme a deux sièges dans l’appareil copula- teur au lieu d’un seul receptaculum seminis. La description des parties dudit organe, faite par Bertkau, indique, en général, une connaissance imparfaite de leur fonc- tion. Par exemple, en décrivant la copulation des Scytodoides thoracicus, 11 dit que l’appendice étiré en forme de fil, dont la destination ne lui était pas claire, s’est maintenant déter- minée : € I a, dit-il, pour rôle de frayer passage au véritable Samenbehalter. Vers cet appendice étiré en forme de fil appro- chera l’Eindringer (embolus), de Menge, continue l’auteur, que cet arachnologue reporte chez d’autres Araignées aux autres parties. » Il est évident que Bertkau a eu affaire à l’embolus de Menge, qui ne fraye pas du tout passage au Samenbehalter de Bertkau, car ce Sameubehalter ne renferme pas de sperme. 3202 WAGNER. La remarque de Bertkau sur le fait, que Menge, sous le le nom d’embolus, comprend différentes parties de l'appareil copulateur, est juste; cela s'explique par cela même que ce dernier auteur donnait ses dénominations à la suite de considé- rations générales sur le degré de convenance de forme de telle ou telle partie à porter ce nom; il le faisait encore, parce que la signification physiologique des différentes parties de l’appa- reil lui était inconnue. Mais Bertkau, par la même raison, pou- vait parler des erreurs de Menge, uniquement en se basant sur des considérations générales et tombait à son tour dans des erreurs, supposant que l’appendice filiforme fraye passage à unorgane qui n'existe pas, comme son Samenbehalter (bien qu'il l'ait nommé « véritable »); d’après la figure de lPappa- reil copulateur chez Pholeus, Bertkau n'a évidemment pas vu son receptaculum seminis. Il avoue cependant, avec justesse, en résumant son opi- nion sur la structure de l'appareil copulatif des Araignées, que pour résoudre la question, 1l faudrait, avant tout, con- naître l’histoire du développement de l'organe qui lui était inconnu. Le mérite de cet auteur, concernant la question de la struc- ture de lappareil copulateur, consiste en ce qu'il a confirmé encore une fois (après Stein), et prouvé, pour la première fois, que le spermophore de Menge, c’est-à-dire l'organe, qui a pour rôle de transmettre les spermatozoïdes de la fente géni- tale du mâle dans celle de la femelle, n'existe pas; qu'il v a dans l'appareil un canal spécial pour ce rôle, qu'il a nommé Kügelträger. Gette découverte de Bertkau a donné à la ques- tion dela fonction des parties séparées de l'appareil copulateur une direction correcte, et quoique l’auteur nait pas complè- tement profité des résultats de sa découverte, néanmoins il a considérablement contribué à l’éclaireissement défimiuf de la question. Je ne connais pas de travaux ultérieurs après Bertkau sur la question présente. Par conséquent, concernant la question de la structure ana- Le] ARTICLE N° o. LA MUE DES ARAIGNÉES. 389 tomique, à Menge appartient la description de quelques par- ties extérieures : cymbium, alveolus et embolus. À Stein, nous devons la découverte du receptaculum seminis. À Bertkau, la confirmation de la découverte de Stein, une description détaillée du receptaculum seminis chez certaines espèces d’Araignées, et la constatation du fait que le sperme ne se transmet pas en dehors du palpe d’un mâle, mais en dedans. Enfin, à l’auteur de ce mémoire : 1° la description de la véritable structure et du rôle du Aæmatodocha ; ® la deserip- tion des meali sanguinis, qui servent à transporter le sang du hæmatodocha dans le receptaculum seminis; 3° la description de l’orifice du Aæmatodocha; 4 l’histoire du développement de l'appareil copulateur en connexion avec la mue des Arai- gnées. Modifications d'âge des organes intérieurs. — Les modifica- tions de ces organes s'expriment d’un côté dans l’augmentation du nombre et des dimensions, la modification de la forme et de la position; d’un autre côté, dans la formation, pendant le développement, de nouveaux organes, qui jusque-là n’exis- taient pas. J’indiquerai quelques-unes de ces modifications, qui peuvent servir d'exemple. Je commencerai par les parties internes des yeux. Ces derniers se modifient pendant les premières mues dans la forme générale de leurs parties internes, dans le rapport de là partie nommée épithéliale à la partie rétinienne, et enfin dans le rapport du corps vitré et de la partie supérieure du cristallin avec sa partie inférieure, qui, chez les Tarentules de la deuxième et la quatrième mue, est très grande. Les glandes se modifient dans un autre sens avec l’âge. La glande venimeuse, par exemple, après la première mue, est située, chez l’Attus, dans la maxille et ne dépasse pas ses limites ; en outre, le bout inférieur de la glande est placé plus bas que la ligne médiane de la maxille (fig. 53, gl. v). Ensuite les parties supérieures des glandes sont sorties hors de la maxille à un tiers de longueur (fig. 59, gl. v), et leurs bouts inférieurs n’atteignent pas la ligne médiane de la maxille. 304 WAGNER. Enfin, après une série de mues, la glande ne se trouve plus dans la maxille, et est entièrement sortie hors les limites de cette dernière (fig: 91, g/. v) et s’en rétracte de plus en plus loin avec chaque mue successive. Les dimensions de la glande augmentent en même temps, de même que le nombre de fibres musculaires. Par conséquent, la modification de la position de la glande durant la vie d’un individu peut nous servir de guide dans l'appréciation de modifications semblables chez les Araï- onées dans leur développement phylogénétique. Les formes primitives ont évidemment dù avoir ces glandes de petite taille, et placées dans la maxille; avec le développement ultérieur des formes, à mesure d’une plus grande déviation du type primitif, a dù se modifier la position de la glande ; elle augmentait en dimension et se rétractait de plus en plus dans le corps, en se joignant avec la maxille par un conduit plus ou moins long. Les faits constatent, autant que Je sache, ce qui vient d’être dit. Chez l’Épéire, le calibre des glandes veni- meuses est considérable, et ces dernières se placent dans la partie antérieure du céphalothorax à une distance assez consi- dérable des maxilles, avec lesquelles elles se joignent par un conduit assez long. Chez les Clubiones, les glandes venimeuses sont de plus petit calibre que chez l’Épéire, et ce n’est qu’une partie qui se trouve dans le céphalothorax, le reste de la olande est situé dans l’article basal des maxilles; chez la Mygale enfin, toute la glande est située dans Particle basal. Par conséquent, les modifications d'âge pour la glande veni- meuse consistent dans laugmentation de sa taille et le chan- sement de sa position. Îl est opportun de signaler ici que lPap- pendice en forme de crochet, qui s'articule avec la maxille, et dans lequel s’ouvre le conduit de la glande venimeuse, se présente, après la première mue, lisse et sans dents (fig.95, cr). Avec l’âge, c’est-à-dire avec chaque mue nouvelle, le nombre de dents qui, chez Attus, par exemple, apparurent, pour la pre- mière fois, après la seconde mue, au nombre de huit, aug- mente graduellement et atteint à la longue celui de éreute- trois (fig. 51, d. cr). La figure même de l’appendice se modifie ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉE . 389 en même temps, ainsi que le rapport de sa partie terminale avec la partie basale, comme on le voit sur les figures 51, 52 et 3, cr. Les glandes à soie (fig. 69) changent de forme avec l’âge de l’Araignée, parfois très considérablement, comme, par exemple, les glandes à soie tubuliformes chez la Tarentule, et en outre augmentent en nombre parfois aussi considérable- ment. Concernant les glandes à soie, il est indispensable d’indi- quer encore le fait suivant. Chez les Araignées adultes des deux sexes les glandes ne sont pas toujours les mêmes ; les femelles ont des glandes qu’on n’observe pas chez les mâles et qui ser- vent à fabriquer la soie du cocon; tandis qu'aux premiers stades, ces glandes sont les mêmes chez le mâle que chez la femelle. Outre les glandes à soie, les autres glandes augmentent en nombre et en taille. Par exemple les glandes maxillaires, qui, d’après Schimkiewitch, chez les jeunes Épéires sont au nombre de trois, atteignent chez l’Épéire adulte le nombre de neuf, c’est-à-dire que ce nombre a triplé avec l’âge. Les modifications d'âge des poumons consistent dans l’aug- mentation graduelle du nombre de feuillets de ces derniers — augmentation qui n’atteint son maximum qu’à l’état de ma- turité sexuelle de l’Araignée. Les modifications d'âge des trachées présentent chezla Taren- tule les détails suivants : aux premiers stades du développe- ment le tronc général des trachées, par lequel elles s'ouvrent en dehors, (fig. 68, &r. g), est plus court qu'aux stades ulté- rieurs (fig. 67, ér. g); en revanche les premières branches qui, pendant les premiers stades s'étendent de ce tronc général (fig. 68, tr. g) sont épaisses et presque doublement plus lon- gues que le tronc général (fig. 68, fr. g), tandis que chez les Tarentules adultes ces branches (fig.67, &r,1) ne sont pas plus longues que le tronc général des trachées (fig. 67, ér. g) — circonstance indiquant, entre autres, que la fusion des deux troncs trachéens ne devient que graduellement plus profonde ANN. SC. NAT., ZOCL., 1888. VIE. 25. — ART. N° 9. 380 WAGNER. avec l’âge. Un autre fait est digne d’être mentionné: c’est que les branches de trachées de troisième ordre (fig. 26, ér. c), qu’on observe sur les branches internes du second ordre, aug- mentent en dimension avec l’âge et atteignent le maximum de leur développement chez les individus adultes. Enfin, les modifications d'âge des muscles s'expriment par l'accroissement graduel du nombre de fibres musculaires, ce qui peut être facilement et exactement observé sur certains muscles de labdomen par le nombre d’épaississements alvéo- liques de la cuticule au point de leur insertion à cette dernière. En outre, certains muscles changent avec l’âge leur position; les muscles sous-cutanés de l’abdomen présentent un intérêt particulier sous ce rapport. En examinant la position de la museculature sous-cutanée d’une Araignée adulte et celle des Araignées des premiers stades, nous remarquons ce qui suit: pendant que, chez les premières, cette disposition présente un réseau irrégulier, et toute la musculature sous-cutanée un sac uniforme réticulaire de fibres musculaires, les muscles des Araignées de premier stade présentent une disposition segmentale régulière, comme on le voit à la figure 70, #s. La transition d’une disposition à l’autre s'effectue graduellement durant toute une série de mues, suivant évidemment un ordre strictement déterminé chez les Araignées des différents types. Le cœur, qui d’abord ne présentait qu'une membrane pul- satile avec le développement ultérieur, reçoit un plus grand nombre de fibres musculaires et augmente en dimensions. Les modifications d'âge intérieures el extérieures que l’Arai- gnée subit pendant la période qui sépare la première mue de la dernière, ne se bornent pas à celles que Je viens de signaler. Elles sont plus considérables par le nombre des organes qui y sont sujets et par la profondeur de modification de chaque organe, pris à part, que cela n’a été indiqué par moi. Mais pour ma tâche, consistant à indiquer les procédés constants de la croissance, accompagnée de modifications des organes internes et externes qui s'effectuent de concert avec ARTICLE N° 5. LA MUE DES ARAIGNÉES. 387 les procédés périodiques de la mue — il suffit de celles que j'ai signalées. Je reviendrai dans un autre travail sur l’appré- ciation de ces deux séries de phénomènes, s’accomplissant ‘ simultanément, au point de vue de la mue comme phénomène biologique. CONCLUSIONS En résumé, sans entrer dans les détails, nous sommes en présence des données suivantes : 1° Le rejet de l’ancien tégument chez les Araignées ne con- stitue qu'une partie du procédé de la mue et c’est la partie secondaire ; 2 Les procédés de la mue, dans quelques-unes de leurs parties, commencent comparativement longtemps avant et se terminent après le rejet du tégument, et en connexion avec ce fait: l'animal — en partie avant la rejection du tégument, en partie au moment même de cet acte et même après — se trouve privé de quelques-unes de ses facultés: de la vue, de l’ouie, du toucher, de mouvement et même — quoique pour très peu de temps — de respiration; 3° À la mue sont sujets: «. les produits ectodermiques, quoique pas tous, comme cela résulte des données ci-dessus exposées ; b. les produits mésodermiques, au cas où ces der- mers sont sujets à l’activité chitinisatrice des cellules ectoder- miques ; 4° Les corpuscules sanguins qui, chez les Araignées, se for- ment aux dépens de l’endoderme, sont sujets avec chaque mue à des modifications périodiques, dont le résultat final est la prolifération de la grande majorité d’entre eux; 9 À côté des procédés périodiques précités de la mue mar- chent des procédés constants de modifications intérieures et extérieures, qui s’accomplissent principalement vers l’époque de la mue, setrouvant en connexion plus ou moins étroite avec cette dernière ; 6 Les modifications auxquelles sont sujettes les Araignées 388 WAGNER. dans leur développement post-embryonnaire ne se bornent nullement à la taille seule et au développement final des organes SÉNILAUX ; 7° Avec la mue des Araignées sont en connexion non seule- ment les modifications ci-dessus mentionnées, mais encore les facultés spéciales, qui ne sont propres à l’animal que durant la période de ses mues. Telle est, par exemple, la faculté des Araignées de régénérer leurs organes perdus : les pattes, arra- chées à la Tarentule la première année de sa vie, c’est-à-dire durant la période de temps qui embrasse toutes ses mues, régénèrent avec chaque mue nouvelle, relativement dans un espace de temps très court, et ne régénèrent pas si elles ont été arrachées après la période des mues, quoique l’Araignée survive à l’opération deux à trois ans et plus; 8° Enfin, en connexion avec tel ou tel nombre de mues l’Araignée se trouve en possession de certains organes provi- soires, dont les uns disparaissent plutôt, les autres seulement avec la maturité sexuelle. Pour ce qui concerne la question de savoir ce que présente la mue des Araignées comme phénomène biologique en con- nexion avec la métamorphose de ces animaux — j'en remets la discussion détaillée à un travail prochain et me borne ici à signaler la similitude presque complète des procédés de la mue des Araignées avec ceux des larves en mue de certains Insectes à métamorphose, nommée incomplète (Orthoptera, Pseudoneuroptera et Hemiptera, par exemple). APPENDICE Après que ce travail était imprimé, j'ai reçu de Mac-Cook une explication relative au fait (mentionné dans la note de la page 394) de la nourriture d’une Tarentule captive avec de la viande crue. Cette explication m’apprend que, dans le cas donné, il s'agissait d’une espèce des Theraphosides, Wygale Hentz, connue en Amérique sous le nom vulgaire de Taren- ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 309 tule (épeler avec la voyelle a au lieu de e). Tarentula is the popular name for our large brown Teraphosid, which is gene- rally know as Mygale Hentzi. Je n’ai jamais eu occasion d'étudier les Theraphosides; c’est pourquoi, n'ayant point de raisons de douter de la jus- tesse des observations d’un biologiste aussi renommé que M. Cook, je dois donc admettre qu'il existe, par rapport au fait discuté, une différence caractéristique je marquée entre les Theraphosides et les Lycosides. EXPLICATION DES PLANCHES Fig. 1. Gé, 1, 2, 3 et 4. Couches de la cuticule. — Gg, couche chitinogëne. Fig. 2. Cé, plis de la jeune cuticule sous le vieux tégument. — M, la matrice. Fig. 3. A, B, ligne par laquelle se déchire le vieux tégument. — Mx, les maxilles ; p, les pattes; c, partie supérieure; d, partie inférieure du cépha- lothorax; g, abdomen. Fig. 4. Une partie du tégument rejeté de l’abdomen d’un Attus terebratus. Fig. 5. Une partie du jeune tégument d’Attus terebratus tout de suite après la mue. Fig. 6. Les épaississements linéaires du premier tégument d’Attus terebratus. Fig. 7. Épaississements linéaires du tégument d’Attus terebratus à un fort grossissement. — b, couche épaisse de la cuticule avec des pores régulière- ment disposés ; &, Stries fines sans pores. Fig. 8. Pachygnata (épaississements linéaires de la cuticule). Fig. 9. Miranda cucurbitina — —= RE Fig. 10. Salticus heliciticus — — TE Fig. 11. Thomisus = NE ue Fig. 19. Organe auditif des Araignées. — v, cordon shitineux de cet organe; cr, cordons qui s'étendent entre les bords de ce dernier; 0, conformation voilée par une membrane fine. Fig. 13. Épaississement de la chitine sur le tégument du dernier article du palpe d’une Tarentule mâle vis-à-vis du point où prend naissance l'organe copulatif. Fig. 14. Pr, pores sur la partie supérieure du pédoncule. Fig. 15. Un de ces pores chez une Tarentule — avec une gaine chitineuse — en face. 390 WAGNER. 16. Un de ces spores — en profil, avec une gaine chitineuse rejetée pendant mue ({). — pr, orifice du pore. Fig. 17. Coupe d’un poil tactile. — pi, tige du poil; ep.r, radix du poil (propre- ment son épaississement); ca, cavité du poil; c£ 5, couche inférieure de la cuticule, donnant naissance au poil; €, tube en forme duquel s'élève la couche inférieure de la cuticule; ct, 1, 2, 3, 4, couches de la cuticule, dispo- sées sur la couche inférieure de ct 5; M£, plasme de la matrice, remplissant le tube; n, nerf. Fig. 18. Cé, 4, couche inférieure de la vicille cuticule, rétractée du vieux tégu- ment; cf, couche de la cuticule du vieux tégument; f?, fluide remplissant les interstices entre ces dernières; {, tube du vieux poil; tr, cellules tri- chogènes; Mf, matrice; cg, couche chitinogène. Fig. 19. {, tubes déchirés près du sommet du jeune poil; pé, le sommet dégainé du jeune poil; ep.r, radix du jeune poil; pu, vieux poil. Fig. 20. Pu, vieux poil; &, son tube; ct, couche de la vieille cuticule; pi, sommet du jeune poil. Fig. 21. Œil de l’Araignée peu de temps avant la rejection du vieux tégument. — cri, cornée du vieil œil; cri 1, cristallin du vieil œil; c. v 1, corps vitré du vieil œil; cr, cornée du jeune œil; ct, cuticule du jeune tégument ; cri, cris- tallin du jeune œil (proprement la partie supérieure du cristallin); c.v.p, cel- lules foriement pigmentées du jeune corps vitré; À, B, partie de la lame prérétinienne de laquelle s’est détachée (pendant la préparation) la rétine Ré, fortement pigmentée à cet endroit; À, CG, partie du névrilemme de Pœil (Nr), occupant par rapport à la rétine (R£) la même position; c.v, corps vitré du jeune œil, prt. l, lame prérétinienne; cg, masse chitinogène, sécrétée par les cellules du corps vitré et disposée entre ces dernières et le cristallin; Mé, matrice. Fig. 22 B. Jeune œil de la Tarentule après la rejection du vieux tégument. — cr, cornée ; cri. su., partie supérieure du cristallin; cri. in, partie inférieure de ce dernier; cg, masse chitinogène; ct, la cuticule du tégument; c. v, corps vitré; e.c, enveloppe de l'œil. Fig. 22 A. c.v, cellules du corps vitré; cri. in., partie du cristallin inférieur avec une striation transversale dans ses couches. Fig. 23. F.c 1, téguments chitineux, rejetés par deux feuillets pulmonaires voisins d’une Tarentule; ep. 1, épines chitineuses du feuillet supérieur; f.c. 2, nouveaux téguments chitineux de deux feuillets pulmonaires voisins; ep 2, nouvelles épines du feuillet supérieur. Fig. 24. Épines chitineuses du poumon d’une Tarentule, à un fort grossisse- ment. Fig. 25. Coupe du poumon au moment de la mue. — c.s, cellules sanguines dans la cavité des feuillets pulmonaires; cl, colonnes qui semblent s’être formées de la fusion de deux cellules opposées du feuillet pulmonaire; ch, chitine des feuillets pulmonaires. Fig. 26. Trachées et une partie de l’intestin rectal de la Tarentule, rejetés pendant la mue. — st, stigmate des trachées; £r.g, tronc général des tra- ARTICLE N° 3, LA MUE DES ARAIGNÉES,. 391 chées; tr.a, tr.b, rameaux des trachées; el. tr.b, élargissement du rameau interne des trachées au point où, du principal rameau, prennent naissance des petits rameaux, fr. c; fig. 1, 2, 3, siège des trois paires de filières; An, anus ; Ch. an, épaississement de la cuticule auprès de l’anus; ént, partie de l'intestin rectal qui a subi la mue. Fig. 27. Partie des trachées vers l’époque de la mue. — Mf, matrice. Fig. 28. Coupe transversale de la verrue àsoie etson tube (fu). —cond, parois chitineuses du conduit à l’état de mue; M, Mt, matrice; pl. mt, pli de la matrice; COnd:, chitine du jeune conduit de la glande à soie; ver, parois de la verrue. Fig. 29. Mue des glandes à soie au moment de la rejection du vieux tégument. — 0.Cn 1, bout libre du conduit de la glande avec la calotte, tronçon du bout du vieux tube à son sommet; cn 1, la partie du conduit en mue de la glande à soie s'étendant au dehors; {u.g, tronçon du tube, qui engaine le conduit de la glande en forme de cône tronqué; êu 1, partie basale du tube qui a subi la mue, d’où sort le conduit à l’état de mue; ct, 1 le tégument de la verrue qui a subi la mue; cn 1, conduit placé entre le vieux tégument et le corps de l’animal; {4 2, paroi extérieure du jeune tube; cn 2, par- tie chitineuse du conduit nouvellement formé de la glande; sp, sa spirale; cn. a, conduit à l’état de mue de la glande non sortie dehors de la cavité des organes nouvellement formés; e. {u, partie du conduit s’élargissant en forme de tube, d’où sort : sq. gl, squelette de la glande à soie, verrue du tégument rejeté (ver). Fig. 30. Cn 1, conduit de la glande, dégainé jusqu’à son élargissement tubu- liforme (e. tu) ; tu, 1 partie basale du tube de la verrue, en partie cassée à à son sommet ; sq. gl, squelette de la glande. Fig. 31. Dessin un peu schématisé au moment même de la mue des tendons. — cr 2, crochets nouvellement formés; cr 3, crochet auxiliaire ; c.c.a, confor- mation chitineuse du crochet auxiliaire, pas encore complètement développé; ten. a, partie dégainée du vieux tendon; ên.b, partie non dégainée du vieux tendon se trouvant encore dans la cavité du jeune tendon ; £en2, jeune tendon; mt, matrice sous le tégument des extrémités ; Mte, matrice, engainant le jeune tendon ; 0, orifice par lequel sort le vieux tendon des crochets pectinés; 0, orifice par lequel sort le vieux tendon du crochet auxiliaire; c.c, couche du tissu conjonctif. Fig. 32. Tarse et métatarse des pattes. — cr 1, crochet de la patte; crs, cro- chet auxiliaire ; a, conformation chitineuse du crochet auxiliaire; {en:, tendon des crochets principaux; {ens, tendon du crochet auxiliaire; et, épaississe- ment des tendons à leurs bouts libres, auxquels s’insèrent les muscles. Fig. 33. Partie du tendon vers l’époque de la mue. —mt, matrice en forme de gaine, engainant le cordon du jeune tendon placé dedans ten: ; Miz, matrice dans sa partie inférieure reculée de côté par l’aiguille. Fig. 34. Partie du tendon en coupe longitudinale, — tent, vieux tendon placé dedans la conformation. 99 NVAGNER. Fig. 35 et 36. Partie du tendon aux stades plus avancés de développement. Les parties correspondantes sont marquées par les mêmes lettres. Fig. 37. Aspect de la face interne du crochet de la maxille, en face. — epch, épaississement de chitine uni au crochet par une jonction mobile; ten, faisceau de tendons. Fig. 38. Face inférieure du tégument rejeté de l’abdomen pendant la mue. — 0. gen, orifice génital; pr, pores; 1-16, seize paires de points d'insertion des deux séries médianes de muscles; 17-39, vingt-trois paires de points d'insertion aux deux séries latérales. Fig. 39 A. Sculpture tuberculeuse au point d'insertion des muscles d’en haut. Fig. 39 B. Sculpture tuberculeuse au point d'insertion des muscles d’en bas, à un fort grossissement (schématisée). Fig. 40 A. Le pharynx et l’œsophage qui ont subi la mue. Fig. 40 B. La partie ap. (fig. 40 A) en coupe transversale. Fig. 41. V. ct 1, couche supérieure de la cuticule du tégument sur lequel on observe la sculpture tuberculeuse (sc. t. 1). V. ct 2, seconde couche de la cuticule, aux dépens de laquelle se forme l’épais- sissement de la chitine dans le point d'insertion des muscles. V. ct 3, troisième couche de la cuticule qui ne prend pas part directe dans la formation dudit épaississement; em, coupes des bords élevés des alvéoles (en, leurs enfoncements où étaient situés les sommets des fibres musculaires) ; lu, gaines qui ont subi la mue et qui renfermaient les sommets des fibres musculaires; sc. t 2, les tubercules du jeune tégument, disposés sous les alvéoles du vieux tégument et recouverts de gaines rejetées des sommets des fibres musculaires (tu); n. ct 1, couche supérieure de la jeune cuticule sur laquelle sont disposés les tubercules précités; n. ct 2, seconde couche de la jeune cuticule; n. ct 3, troisième couche de la jeune cuticule; mt, ma- trice; cou. c, couche du tissu conjonctif qui passe en sr, sarcolemme des fibres musculaires, 5, fibres musculaires; em, coupes des bords élevés des alvéoles du jeune tégument avec les enfoncements entre eux. Fig. 42. Cellules amiboïdes du sang fraichement retiré à une Tarentule. Fig. 43. Cellules amiboïdes du sang fraîchement retiré à une Tarentule quel- que temps après que le sang est retiré, quand la cellule émet ses pseudo- podes caractéristiques. Fig. 44. Cellules colorées du sang fraîchement retiré à la Tarentule. Fig. 45. Cellules colorées du sang quelque temps après que le sang est retiré, quand la cellule émet des pseudopodes. — n, noyau. Fig. 46. Cellules colorées à vacuoles dans leur cavité. — n#, noyau; v, vacuole. Fig. 47, 48, 49 et 50. Différents moments de prolifération des cellules colo- rées. Fig. 51, 52 et 53. Position de la glande venimeuse (gl. v) à différents âges de la vie d’une Tarentule. — cr, appendices ayant forme de crochets; d. cr, dents des appendices ayant forme de crochets. ARTICLE N° 3. LA MUE DES ARAIGNÉES. 393 Fig. 54, 55, 56 et 57. Aspect du crochet palpal d’une femelle Tarentule à diffé- rents stades de son développement. Fig. 58. Modifications des crochets des pattes chez Attus terebratus aux premiers stades de développement. — cr 1, crochets à l’état de mue sur le second tégument; cr 2, jeunes crochets du troisième tégument dans la vieille gaine du tégument (pa 1). Fig. 59. Coupe schématisée de l'appareil copulateur des Araignées.—emb, em- bolus ; r.s, receptaculum seminis; teg,tequlum; m.s, meati sanguinis ; c. gl, cellules glanduleuses ; hæm, hæmatodocha; alv, alveolus; or, orifi- cium lacune; l, lacuna tarsi. La signification des lettres de cette figure reste la même pour les figures 60, 61, 62, 63, 64, 65 et 66. Fig. 60, 61 et 62. Différents stades de développement de l’appareil copulateur des Araignées en coupe transversale. Fig. 63. L'appareil copulateur d’une Dysdère. Fig. 64, 65 et 66. Différents stades de développement de cet organe. Fig. 67 et 68. Aspect des parties des trachées d’une Tarentule à différents stades de sa vie. — {r. g, tronc général des trachées; tr, rameaux des tra- chées primaires; tra, rameaux des trachées secondaires. Fig. 69. Glandes à soie d’une Tarentule à la période de la seconde et troisième mues. Gl. 1, gl. 2, gl. 3. — Trois différentes variétés de glandes. Fig. 70. Aspect de la musculature sous-cutanée à la période de la première mue. — Co, cœur; ms, muscles. HR 5 A “Art CEE TO NA { Qu ï TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. Pages. ARTICLE N° 1. Comparaisons des organes de la locomotion aquatique, PAIE RD ER EUEPANMTANSÉEEMER SERRE Ce TAC CCCLe 1 ARTICLE N° 2. Recherches sur les premières phases du développement de la Seiche (Sepia officinalis, par M. L. VIALLETON.. 165 ARTICLE N° 3. La mue des Araignées, par M. W. WAGNER............ 281 TABLE DES MATIÈRES PAR :NOMS D'AUTEURS Pages. | Pages. AMANS. — Comparaisons de la . pement de la Seiche (Sepia locomotion aquatique. ...... 1 officinalis).).. NN en 165 VIALLETON. — Recherchessurles WAGNER (W.). La mue des Arai- premières phases du dévelop- DNÉBSE he ee ce CC 281 TABLE DES PLANCHES CONTENUES DANS CE VOLUME Planches 4 à 6. — Organes de la Jocomotion aquatique. Planches 7 à 14. — Développement de la Seiche. Planches 15 à 18. — Mue des Araignées. M4731 — Imprimeries réunies, À, rue Mignon, 2, Paris. Zool Tone VAI CPINTe éTLe An. des Sciences nat 7° = de RE ge RER E Mille btk D, mp. Edouard. Bry, Paris. .Amans del. Organes de la locomotion aqualique Zool. Tome VZ P1 1 Ann. des Sciences nat 7° Série. B == =—_—— Ho DR Messsvonn SR CUT D ER UN Lnp. Edouard Bry, Paris. Millot lit Amans del. Organes de la locomotion agualique. Zool Tome VIT. PL {1 Serre «Millot se. Lith Edouard Bry 18%} Denfert-Rochereau, luris. . Ann.des Sciences rat J ( = < < > > Organes de La locomotion aqualique . Ann.des re nat. Z'Serie Zoo! Jome VI PLIV7 RE LE 3 € 7 Se a — < Amarns del. Afillot se. Organes de La locomotion aquatique Lith. Edouard Bryy 18 Be, Denfert-Rochereau Paris UE - inr.des Sciences nat. J'Serie Zool.Zlome IT PI L ne 0 es ar mans del. eMillot se. Organes de la locomotion aquatique Lith Edouard Bry 16 Ër Denfert-Rochereau Paris. . {nn.des. Srirnces nat Z‘Serte - Zoo Jome VLPL EEE = 107 DA . Hillot se. Organes de la locomotion aquatique Lith Flouard Bry 18 *%r Denfert-Rochereau Luris. LS L'E Ann. des Scienc. nat. 4 € Serte Zoo. Tome VI. PI 7. I.Walleton, de] Héliotypie J7. Quinsac & G Baguie. Paris Développement de la Seiche Ann. des Scienc nat. TS Serie Zoo. Tome V1 PI 8. L. Vialleton, del seu . _ , Aéliotypie JA. Quinsac & G.Baguié, Paris. Developpement de la Seiche - | un des Screnc nat Fe € Serie. Zool. Tome VT FI 9. 77 A7. ; > : D HS 2 Vallston de] Héliotypie JT Quinsac & G Baguie, Paris Developpement de La Seiche ! des Sctenc nat. 7° Serie Zoo. Tome VI PI 10 D CHA tt tes | 172 \ } Î | Z. Vialleton del. Héhoëypie À Quinsae % G. Bague Paris Developpement de la Seiche % # $ É , Ann des Scenc nat. 7 € Serie Zoot. Tome WT. FI. 11 Héhotypie Jl Quinsac & G. Baquie, Paris. L. Vialleton, del . Développement de la Seiche Kéliogrpie ÎT Quinsac & G. Baguié, Paris. Zoo. Tome VI] PJ] 12 CA LEE œ ÉÈ } Le Developpement de la Seiche AE 4 * SRE De 247 ANT 7 & : Fig. 35: Ann. des Scienc. nat. 7 Serte È j ' & & À 0 Ann. des Scenc ne ae Serte’ Zool. Tome VI FI 13 F Ë Héliotypie ÎA Quinsac & G Baquié, Paris. I Valleton del. tpie 1.9 Développement de La Seiche YN2S D} 2p juouoddo7a0q PP UoxjeA 7 SILET, embegb 2 °esunff H erdorpy a PAR Deere Ds nn — ROSES re ann ITS EXC DRE FT DRE = Do I LION $ 14 CRETE ST Pile RTS RE ; DSP est) ee Lai à ni . (o) er 0 Se F | AU 2 ‘og $u = ‘vs ‘PLI 2 de k , ; Re > 2 ee DUDIDG Sep UUY AAC 7007 RE — Ann des Se nat. T*Serie Zool. Tome VT PL 15 to ES GNT cg- C£.#. RE = CEONOUUE, Biadeaul£ lit Imp Edouard Bry, Paris. .MWMue des «1raignees. FRS Se ae en Se S = RS RS SES TRES SSSR = => RSC Se TRS ste u 5 ETS SSSR = : À $ = SES Re RE ES UE Ann des Se.nat 7° Serie. Zoot Tome V] PI 16 Se — pE../ miiamcOn AT. En con 2. Lux mr | HS IE br TT Bideaul£ lith. Znp. Edouard BP. Ty Paris. Mie des «1raignees. DR SR a —— È Ë = ÈS 5 = a rés Ann des Se. nat 7° Série. Zool. Tome WT FL 17 4 1) ; T 2 à IN Pideault lit ; Imp. Edouard Br, laris Mue des .Aræignees. _ Zoo. Tome VI. PL 18. Je LD. # | 70 NS a —_—— SET Te TE = = }2. ÿ — > s =: è ÊZ — 2] PE N «{ @ rer à # : = 57 me > À Ur Qt STE Sy) EN ETITTR my y & à STE fat kr | Bideautt lith Imp Edouard Bry, Paris Mnedes 27 raiqnees. 7) FFC 1 2 58: ANNÉE. — VII: SÉRIE. T. VI. Ns 1,2 et 3. PO ANNALES l Dee. 11 F8 ; DES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE ET PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L’ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. A. MILNE-EDWARDS TOME VI. — N° 1, 2 et 3. PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE Boulevard Saint-Germain et rue de l’Éperon EN FACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE. 18838 Paris, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 32 Fr. Conditions de la publication des Annales des sciences naturelles SEPTIÈME SÉRIE ZOOLOGIE Publiée sous la direction de M. A. MINE EDwARDS, L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d'environ 400 pages avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d’une année. Les tomes IIT et IV sont complets. BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. Pa. VAN TIEGHEM. L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d’une année. Les tomes V et VI sont complets. Prix de l'abonnement à 2 volumes : Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. HéBerr, et pour la partie paléontologique, par M. A. Mr2NE ED WARDS. L'abonnement est fait pour un volume d’environ 300 pages, publié en plusieurs fascicules dans le courant d’une année. Prix du volume : Paris : 15 fr. — Départements : 16 fr. — Union postale : 17 fr. Le tome XIX est publié. Prix des collections. PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (Rare.) . DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie 20 vol. 250 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie 20 vol. 250 fr. CINQUIÈME SÉRIE (1864-1873). Chaque partie 20 vol. 250 fr. SIXIÈME SÉRIE (1874 à 1885). Chaque partie 20 vol. 250 fr. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER ARTICLE N° 1. — Comparaisons des organes de la locomotion aquatique, par le D: P.-C. AMANS. ARTICLE N° 2. — Recherches sur les premières. phases du développement de la Seiche (Sepia officinalis), par M. L£ VIALLETON. Table des Planches contenues dans ce Cahier. Planches:1 à 6: Planches ” et 8. Développement de la Seiche. Imprimeries réunies, A, rue Mignon, 2, Paris. G. MASSON, ÉDITEUR 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 120, A PARIS. RECHERCHES SUR L'APPAREIL VÉGÉTATIF DES BIENONIACÉES, RHINANTHACÉES, OROBANCHÉES ET UTRICULARIÉES _ Par MAURICE HOVELACQUE Docteur ès sciences naturelles. 1 fort volume in-8° de 765 pages, avec 650 figures dans le texte...... 20 fr. MŒURS ET MONUMENTS DES PEUPLES PRÉHIST ORIQUES Par M. le marquis DE NADAILLAC, correspondant de l’Institut, 1 vol. in-8° avec 110 fig. dans le texte. Br., 7 fr. 50. Relié avec luxe. 10 fr. Cet ouvrage, d’une lecture facile et attachante, est consacré à l'étude de l’une des découvertes les plus étonnantes du dix-neuvième siècle, celle de l’homme préhistorique. L'auteur, après un chapitre consacré à l’âge de pierre, examine la nourriture des peuples primitifs, leurs armes, leurs outils, leurs premiers essais artistiques, leur industrie, leurs camps, leurs guerres, ete. C’est enfin une histoire complète des premiers hommes hasée sur l'étude des faits et des découvertes scienti- fiques dont on trouve les derniers résultats acquis. LA VIE DES ÊTRES ANIMÉS Par ÉMILE BLANCHARD, de l’Académie des sciences. LES CONDITIONS DE LA VIE CHEZ LES ÊTRES ANIMÉS L'ORIGINE DES ÊTRES 1 vol. in-18..... A PSE UE PE AR SN He 3 fr. Ce livre, écrit par un des savants naturalistes de l'Académie des sciences, pourrait sembler exclu- sivement destiné, par son titre, au monde des savants et des naturalistes ; il a au contraire de plus amples visées ; il s'adresse à tous ceux qui aiment la nature, qui se plaisent à observer les êtres animés, et qui se préoccupent des efforts que fait la pensée humaine pour pénétrer les phénomènes de la vie. Après avoir étudié les conditions de la vie chex des étres animés, M. Émile Blanchard aborde les questions du transformisme et de l’évolution continue ; il combat ces doctrines, sinon d’une façon absolument victorieuse, toujours au moins avec une grande conviction et un remarquable talent d'exposition. L'ÉVOLUTION ET LA VIE Par M. DENYS COCHIN Troisième édition, entièrement remaniée et précédée d’un rapport de M. Caro à l’Académie des sciences morales et politiques. { vol. in-18....,,.. 3 fr. 58° ANNÉE. — Vil: SÉRIE. T. VI. N° 4, 5 et 6- Mr ee D 5 ANNALES Mare£ Ly7 DES SUIENCES NATURELLES ZOOLOGIE ET PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L’ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. À. MILNE EDWARDS TOME VI. — N° 4, 5 et 6. PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L’'ACADÉMIE DE MÉDECINE * Boulevard Saint-Germain et rue de l’Éperon EN FACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 1888 Paris, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 32 FR. Les Annales des sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels, Conditions de la publication des Annales des sciences naturelles SEPTIÈME SÉRIE ZOOLOGIE Publiée sous la direction de M. A. MINE EDwARDS, L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’environ 400 pages avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l’intervalle d’une année. Les tomes V et VI sont complets. BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. Px. VAN TIEGHEM. L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d’une année. Les tomes VIT et VIIT sont complets. Prix de l'abonnement à 2 volumes : Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. HÉBERT, et pour la partie paléontologique, par M. A. Mine Epwarps. L'abonnement est fait pour un volume d’environ 300 pages, publié en plusieurs fascicules dans le courant d’une année. Prix du volume : Paris : 19 fr. — Départements : 16 fr. — Union postale : 17 fr. Le tome XIX est publié. Prix des collections. PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 80 vol. (Rare.) DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie 20 vol. 250 fr. QuarrièMe SÉRIE (4854-1863). Chaque partie 20 vol. 290 fr. Cinquième SÉRIE (1864-1873). Chaque partie 20 vol. 250 fr. SIXIÈME SÉRIE (1814 à 1885). Chaque partie 20 vol. 250 fr. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER ARTICLE N° 2. — Recherches sur les premières phases du développement de la Seiche (Sepia officinalis). par M. L. VIALLETON (suite). ARTICLE N° 3. — La mue des Araignées. Table des Planches contenues dans ce Cahier : Planches 9 à 14. — Développement de la Seiche. — 15 à 18. — Mue des Araignées. Imprimeries réunies, À, rue Mignon, 2, Paris. G. MASSON, ÉDITEUR 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 120, A PARIS. RECHERCHES SUR L'APPAREIL VÉGÉTATIF DES BIENONIACÉES, RHINANTHACGÉES, OROBANCHÉES ET UTRICULARIÉES Par MAURICE HOVELACQUE Docteur ès sciences naturelles. 1 fort volume in-8° de 765 pages, avec 650 figures dans le texte...... 20 fr. MŒURS ET MONUMENTS DE PEUPLES PRÉHISTORIQUES Par M. le marquis DE NADAÏILLAC, correspondant de l’Institut. 1 vol. in-8° avec 110 fig. dans le texte. Br., 7 fr. 50. Relié avec luxe. 10 fr. Cet ouvrage, d’une lecture facile et attachante, est consacré à l’étude de l’une des découvertes les plus étonnantes du dix-neuvième siècle, celle de l’homme préhistorique. L'auteur, après un chapitre consacré à l’âge de pierre, examine la nourriture des peuples primitifs, leurs armes, leurs outils, leurs premiers essais artistiques, leur industrie, leurs camps, leurs guerres, ete. C’est enfin une histoire complète des premiers hommes hasée sur l'étude des faits et des découvertes scienti- fiques dont on trouve les derniers résultats acquis. LA VIE DES ÊTRES ANIMÉS Par ÉMILE BLANCHARD, de l’Académie des sciences. LES CONDITIONS DE LA VIE CHEZ LES ÊTRES ANIMÉS L'ORIGINE DES ÊTRES 1VOIMNEIS EEE D AA EDS DA AE EEE PANNE PETER RS 9 (r. Ce livre, écrit par un des savants naturalistes de l’Académie des sciences, pourrait sembler exclu- sivement destiné, par son titre, au monde des savants et des naturalistes ; il a au contraire de plus amples visées ; il s'adresse à tous ceux qui aiment la nature, qui se plaisent à observer les êtres animés, et qui se préoccupent des efforts que fait la pensée humaine pour pénétrer les phénomènes de la vie. Après avoir étudié les conditions de la vie chez des étres animés, M. Emile Blanchard aborde les questions du transformisme et de l’évolution continue; il combat ces doctrines, sinon d’une façon absolument victorieuse, toujours au moins avec une grande conviction et un remarquable talent d'exposition. L'ÉVOLUTION ET LA VIE Par M. DENYS COCHIN Troisième édition, entièrement remaniée et précédée d’un rapport de M. CaRo à l’Académie des sciences morales et politiques. 1 vol. in-18........ 3 fr. 1 | ai no que <. crre Bookbinding Co., Inc. 300 Summer Street Boston, Mass. 02710 LULU ES = RESTE re 2: Here RER ER > LEE AE = ESS = æ ae HAN ART 1 qu pa rs AMIE NU (i au 1) a ( fe in fl FA f (l rot 4) D fi l He AA UE UN JA \ EN 4 F RS 2 < = ETS a LEE TES ETS NAT NTI j ALTO) ot j ji su HE ) K ol Hi JR AA ii % HE HN TTEME ZX 5 TE DA LA HOPATN EM l (ur nn Na TE a A La UE a HAUT DATE rat PST. 5. 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