A NN ARBRES DU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE. ‘ ENSÛURS +: tent Op 11 LTÉE D ANNALES DU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE, PAR LES PROFESSEURS DE CET ÉTABLISSEMENT. OUVRAGE ORNÉ DE GRAVURES. TOME NEUVIÉÈME. A PARIS, cz TOURNEISEN ris, LIBRAIRE , RUE DE SEINE, FAUBOURG SAINT-GERMAIN, N° 12. 1807. NOMS DES PROFESSEURS. Messieurs , . Hauyx . . ,; . .: . : Minéralofie: Fauyas-SaINT-Foxp : Géologie, on Histoire naturelle du globe, : Fourcroy. . . . . Chimie générale. VAUQUELIN . . . . Chimie des Arts. DESFONTAINES . . , Botanique au Muséum. A.L. Jussieu . .: :: Botanique à la campagne. Y } A. THOUIN . . . . (Cultureet naturalisation des végétaux. GEOFFROY.-ST.-H1iLAIRE. Mammifères et oiseaux . . . . LacÉPÈDE. . . . . Reptileset poissons. . . . . . .\ Zoologie. LAMARCK. . . . . Insectes, coquilles, madrépores, etc... PORTAL . . . . . Anatomie de l'homme. _ CUVIER . . . . . Anatomie des animaux. - VANSPAENDONCK . . Iconographie, ou l’art de dessiner et de peindre les productions de la nature. DELEUZE. . . .... . Secrétaire de la Société des Annales. ANNALES DU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE, ANA EAN SE D'une stéatite verte qui nous & été remise par M. FaAausA5-DE-SA41NT-FOND. PAR M VAUQUELIN. Das son dernier voyage en Italie, M. Faujas a recueil, entre beaucoup d’autres minéraux, sur le Monte-Ramazzo dans les Apennins de la Ligurie, plusieurs variétés de stéatites, dont il a donné la description dans un Mémoire fort intéres- sant, inséré au xLvir. cahier des Annales du Muséum, page 313. L'une de ces variétés qui contient de la pyrite martiale, répandue dans toute sa substance en parties extrêmement fines, est employée depuislong-temps, par M. Alberto Ansaldo, à la fabrication du sulfate de magnésie. Le procédé qu’il met en usage pour former ce sel , consiste à calciner la mine cassée par morceaux, à l’exposer pendant quelque temps à l'air , à la lessiver lorsqu'elle est suffisamment effleurie ; enfin à faire évaporer les eaux pour en obtenir le sel par cristallisation. 9: L 2 ANNALES DU MUSÉUM La belle couleur verte de ces pierres, l'usage que Von fait d’une de leurs variétés, ont fait désirer à M. Faujas qu'elles fussent soumises à l'analyse, pour en connoitre exactement les principes constituans, personne ne s’en étant encore OCCUPÉ jusqu'ici. Propriétés physiques de La stéatite. Le fond de la couleur de cette pierre paroit noir; mais sa poussière est verdâtre: sa surface est d’an vert légèrement jaune; sa contexture est lamelleuse. On remarque dans sa substance des lames brillantes, qui sont, à ce qu'il paroïît, du dialage. Elle fait sensiblement mouvoir l'aiguille aimantée; elle n’est pas fusible au feu du chalumeau. : Première expérience, sur cinq grammes de stéatite. La belle et riche couleur verte de cette pierre m'y ayant fait soupconner l'existence de l’oxide de chrôme, j'ai com- mencé à la soumettre à l'action de la potasse. Je reconnus facilement par la couleur jaune que prit l'al- cali dans cette opération, que l'apparence ne m'’avoit point trompé. Après avoir dissous l’alcali dans l'eau, et avoir fait bouillir la liqueur pour en séparer le manganèse, j'ai saturé la potasse par l'acide nitrique pur , et jy ai versé quelques gouttes de nitrate de mercure au minimum d’oxidation , dans l'in- tention d’en précipiter l'acide chrômique: mais je n’ai eu qu'une matière blanche qui s’est déposée promptement à laide de la chaleur; lavée et séchée, elle pesoit à peine un décigramume. Cette substance, mise sur un corps chaud, se volatilisant toute entière, élant insoluble dans l'acide nitrique et noireis- D'UHASTOIREUTNATUREZLLE. 3 sant par les alcalis fixes caustiques, j'ai été convaincu qu’elle étoit formée de mercure oxidé au minimum , et d'acide muriatique. La liqueur de laquelle ce miuriate de mercure s’étoit préci- pilé , ayant conservé sa couleur jaune dans toute son intensité, il étoit évident que le chrôme wavoit point été précipité par le mercure, quoique j'en eusse ajouté une quantité suffisante. J'en ai trouvé la cause dans l'acidité de la liqueur, qui avoit acquis par là la propriété de retenir le chrômate de mercure en dissolution ; jy ai donc ajouté avec précaution une petite quantité de potasse caustique, et aussitôt il s’est manifesté dans la liqueur un précipité rouge orangé. Ayant indiqué ailleurs la manière d'extraire loxide de chrôme engagé dans le mer- cure, je n’y reviendrai pas ici : je rappellerai seulement que pour obtenir la totalité de ce métal de sa dissolution , il ne faut pas se contenter du précipité rouge ; il faut mettre de lalcali dans la liqueur jusqu'à ce que le précipité devienne noir. Lorsque le minéral que l’on traite ainsi pour en avoir le chrôme contient de la silice et de l’alumine, comme dans le cas présent, les dernières portions du précipité mercuriel sont presque toujours mélées d’une certaine quantité de ces terres. Je dirai plus bas comment on peut parvenir à en opérer la division. Ayant reconnu , par les expériences que je viens de rap- porter, la présence du chrôme, du manganèse et de l'acide muriatique , dans la stéatite, je me suis occupé de la portion de cette pierre non dissoute par la potasse. Sans entrer dans de grands détails sur les moyens que j'ai mis en usage pour analyser ce résidu, ce qui seroit superflu dans cette occasion, je dirai seulement que je l'ai dissous dans l'acide muriatique, que j'ai fait évaporer la dissolution à siccité, et repris le résidu 1 * [A ANNALES DU MUSÉUM par l’eau aïguisée d'acide muriatique pour isoler la silice. J’ai ensuite mis dans la liqueur filtrée du carbonate de potasse sa- turé, jusqu'à ce qu'il ne se soit plus formé de précipité. La liqueur , soumise à une ébullition long-temps continuée, a fourni une quantité fort considérable de carbonate de magnésie ; enfin jai fondu avec de l'alcali caustique le premier précipité opéré par le carbonate de potasse, et dont la couleur jaune n'annon- çoit qu'il étoit abondant en fer : l'alumine en a été séparée par ce moyen. J'ai donctrouvé, comme on voit, dans la stéatite, sept subs- tances diflérentes, savoir: 1.° de la silice; 2.° de la magnésie, qui en fait près de la moitié; 3° de l’alumine en petite quan- üté ; 4° de l’oxide de fer au minimum d’oxidation ; 5.° duman- ganèse; 6° du chrôme; 7. enfin, de l'acide muriatique en très- petite proportion. Je n'ai point parlé des quantités respectives de ces substances, quoique j'aie eu soi de les noter toutes , parce que la somme qu’elles ont fournie par leur réunion, étoit loin de représenter celle de la pierre que j'avois employée. J'ai recommencé cette analyse par des moyens plus propres à me fournir des déterminations exactes des quantités, mais qui n’auroient. pas eu l'avantage de faire paroître chacun des élémens de cette pierre avec leurs propriétés les plus carac- téristiques, et conséquemment les plus propres à les faire reconnoître. Essai de la stéatite par le moyen de Tacide sulfurique. Pour connoïître d’où pouvoit provenir la perte assez con- sidérable que j'ai éprouvée dans l'analyse de la stéatite par la potasse, j'en ai soumis cinq grammes à l'action de l'acide sul- D'HISTOIRE NATURELLE. 5 furique étendu d’un tiers d’eau. J’ai mis le mélange dans une cornue à laquelle étoit adapté un récipient mouillé, afin que les gaz qui pourroient se dégager fussent absorbés. J'ai remarqué, 1° qu'il s’est développé de la chaleur au moment du mélange , signe de combinaison entre les ma- tières ; 2° que la poussière terreuse perdoit sa couleur verte et devenoit blanche; 3. que l'acide se coloroit légère- ment en vert; 4.” qu'aussitôt que la chaleur extérieure s’est fait sentir, des vapeurs blanches ont paru et n’ont duré qu'un instant ; 2." que par l'élévation de la température l'acide sul- fureux, mêlé d’acide sulfurique, a passé; 6° enfin, que le résidu avoit une teinte jaune dans les parties où il restoit en- core de l'acide sulfurique libre, et une couleur blanche dans le fond où il étoit sec. La liqueur obtenue dans l'opération que je viens de décrire, étendue de beaucoup d’eau distillée, a troublé sensiblement la dissolution de nitrate d'argent; ce qui n'auroit pas eu lieu, je crois, si elle n'avoit contenu que de lacide sulfurique:de là je conclus que la stéatite renferme de légères traces d'acide murialique. Le mélange resté dans la cornue, lavé avec de l’eau, a laissé une matière blanche très-divisée et floconneuse; ce qui indique que la pierre avoit été entièrement décomposée : cette matière pesoit 2 grammes 56 centigrammes. J’en reparlerai plus bas. La dissolution sulfurique avoit une couleur verte, une sa- veur métallique austère, à peu près comme celle du cuivre; ce qu’elle devoit sans doute au chrôme. Évaporée, elle a pris une légère teinte jaune vers la fin de cette opéralion, phénomène dù à la suroxigénation du fer : le résidu , repris avec une petite quantité d’eau chaude, sy 6 ANNALES DU MUSEUM estentièrement dissous, et la liqueur a recouvré sa couleur verte; elle contenvit un léger excès d’acide. En refroidissant , elle a formé des cristaux prismatiques qui avoient toutes les pro- priétés du sulfate de magnésie. Ce sel, redissous dans une grande quantité d’eau, fut mêlé avec une dissolution de carbonate d’ammoniaque, qui y occa- siona un précipité jaunàtre, formé pour la plus grande partie de fer oxidé et de chrôme. Je laisse pour un moment ce pré- cipité; jy reviendrai plus tard. J'ai fait évaporer la liqueur filtrée; j'ai calciné fortement, dans un creuset de platine, le sel qu’elle a fourni, pour volatiliser le sulfate d'ammoniaque; ce qui a parfaitement réussi. La matiere restée dans le creuset, étoit blanche, pulvérulente, ét pesoit 6 grammes 50 centigrammes ; sa saveur étoit chaude, et ensuite amère comme celle du sulfate de magnésie. Elle s’est entièrement dissoute dans l’eau avec un dévélop- pement considérable de chaleur ; ce qui prouve qu'elle étoit parfaitement sèche, La dissolution de ce sel m'a fourni , par le refroidissement , et par l’évaporation qui a suivi, des prismes quadrangulaires très-blancs et transparens. Je me suis assuré, par beaucoup d'essais, qu'ils ne différoient en aucune manière du sulfate de magnésie. Le sulfate de magnèsie , desséché comme celui-ci lavoit élé, contenant par quintal 36,38 de magnésie, les 6 grammes et demi de ce sel que j'avois obtenus devoient en contenir > grammes 37 centièmes environ. Mais ne voulant pas n'en rapporter à ces bases établies par Bergman, j'ai décomposé mon sulfate de magnésie par le carbonate de potasse , et après avoir lavé la terre, je l'ai fortement calcinée , et j'en ai obtenu D'HISTOIRE NATURELLE. 7 2 grammes 20 centièmes, c’est-à-dire, 17 centièmes ou envi- ron 3 grains de moins que le calcul ne m’avoit indiqué. La stéatite verte contient donc , d'après ce résultat, quarante- quatre parties de magnésie pure sur cent. Je reviens maintenant à la substance sur laquelle l'acide sul- furique n'a point eu d’action, et dont le poids étoit de 2 grammes 56 centièmes. Je lai fait fondre avec de la potasse; j'ai saturé cette com- binaison par l'acide muriatique, et j'ai fait évaporer pour en séparer la silice; celle-ci lavée et séchée ne pesoit plus que 2 grammes 20 centièmes ; il y a donc eu 30 centièmes de grammes, environ 6 grains, de diminution dus à des matières étrangères. De l’ammoniaque mêlée aux lavages de ma silice, en a effectivement précipité une petite quantité d’oxide de fer, contenant quelques traces d’alumine. La liqueur ainsi précipitée par lammoniaque, nra aussi donné, par l’acide oxalique, de légères traces de chaux, mais en si petite quantité qu'il n'a été impossible de l’évaluer. Il y a donc dans 5 grammes de stéatite, 2 grammes 20 cen- tièmes, de silice ou quarante-quatre pour cent, comme pour la magnésIe, Examinons à présent le précipité formé dans la solution sulfurique par le carbonate d’ammoniaque dont j'ai parlé plus haut. D’après la connoissance que j'avois acquise sur la nature des principes de cette pierre , par la premiere analyse au moyen de la potasse, ce précipité devant contenir du fer, du chrôme, du manganèse et de l’alumime, je ai réuni avec la petite quantité de matière précipitée des eaux de lavage de la silice par Pammoniaque, et j'ai fait fondre le tout avec trois parties de potasse caustique. En délayant dans l'eau bouillante 8 LNNALES Du MU SE vu " la masse résultante de la fusion , je devois obtenir par ce moyen le chrôme, le manganèse et l’alumine, en dissolution ; et c'est en effet ce qui est arrivé. J'ai séparé le manganèse par l’ébullition, ainsi que cela se pratique ordinairement. Il pesoit 15 centigrammes; ce qui fait environ trois pour cent. J’ai ensuite saturé la potasse con- tenue dans la liqueur, au moyen de l'acide nitrique, et jy ai mélé quelques gouttes d’ammoniaque pour avoir l’alumine : elle pesoit dix centigrammes; mais elle avoit entrainé avec elle, en se précipitant, une petite quantité de chrôme, qui lui donnoit en une fort belle couleur jaune, et la propriété de colorer le borax en vert d’émeraude, Enfin , la plus grande partie de mon chrôme restoit à l’état d'acide combiné à la potasse en dissolu- tion dans la liqueur, à laquelle il donnoit une couleur jaune prononcée, et la faculté de précipiter en rouge le nitrate de mercure. Je n’ai pas déterminé rigoureusement la quantité de ce métal dans la stéatite; mais j'estime, d’après la somme que forment les autres principes de cette pierre, qu’elle ne s'élève guère qu'à un décigramme ou 2 centièmes, à peu près comme le manganèse. Le fer , dépouillé des matières dont je viens de parler, avoit une couleur rouge très-intense ; son poids étoit de 56 centi- grammes : il paroissoit assez pur ; cependant jy ai encore trouvé de légères traces de chaux que je n’ai pas pu évaluer. Le fer étant dans la stéatite au minimum d’oxidation, c’est- a-dire qu'il ne contient que vingt-six pour cent d’oxigène ; et ce métal contenant, dans l’état où je l'ai obtenu, quarante-huit pour cent d’oxigène, les 56 centièmes doivent étre réduitsà 37 environ. Il résulte de cette analyse que la stéatite verte contient huit substances différentes, savoir : 1.” de la silice , 2.° de la magné- DR ENS ITIONTR EN AP U PET E, 9 sie, lesquelles forment la base principale de la matière; 3° du fer, 4.° du manganèse, 5.° du chrôme, qui ensemble produisent la couleur .qu'a la pierre; 6° de l’alumine; 7. de la chaux et de l'acide‘ imuriatique en quantité inappréciable. Les quantités relatives ont été trouvées ainsi qu'il suit : Sur cent parties de stéatite, MoNilICe Nec ebniee ele eue Liisieic lei e te 2,9 Magnésie je fax topo ft ie cpl © te te I 40. 44 3: Ferloxidé au minimum... |. «). 1.1. sc. 1. 1137 PO ENERGIE PONS OR EMI DO der deChrOME t-elle del E-Nee e-RRIe 6.°/Aluminme,e, 5 7 rhopaute + host Shots et et à 67214 12 7 "Enfin, chaüx et acide muriatique, quantités inappré- ciables. 120,5 J'ai mis beaucoup de temps et de soin pour cette analyse, et j'ai lieu de croire qu’elle est aussi exacte que les moyens de la chimie peuvent la fournir aujourd'hui. Cependant il seroit pos- sible que l'analyse, appliquée à d’autres variétés du même miné- ral, donnât quelques différences dans les rapports des élémens. Il seroit possible aussi que quelques-uns de ceux que jy ai irouvés y manquassent : car probablement tous ne sont pas essentiels à l'existence de la pierre; il est très-vraisemblable, par exemple, que lalumine et l'acide muriatique, qui n’y exis- tent qu’en très-petite quantité, ne sont qu'accidentels. À ces deux dernières substances près, ces stéatites se rapprochent beau- coup du péridot. 10 ANNALES, DU MUSEUM SUITE DES RECHERCIES LES OS FOSSILES DES ENVIRONS DE PARIS. ELA) RIM AC UD EIE TR: TROISIEME MÉMOIRE. TROISIÈME SECTION, LES PHALANCGES. Es denx sections précédentes ont eu pour objet la réinté- gration de la partie capitale des pieds, savoir: des tarses et métatarses , carpes et métacarpes. Il s’agit maintenant de les compléter, en y ajoutant les phalanges. Nous avons été fort heureux par rapport à celles des ano- plotheriums; car nousles avons trouvées, dans les trois espèces, attachées à leurs pieds : mais celles des palæotheriums ne se sont pas trouvées placées avec autant d'avantage. cr ART. I. PHALANGES D'ANOPLOTHERIUM. $. L° Anoplotherium commune. Celles du pied de devant nous sont fournies par_le mor- ceau (sect. préc. pl. IV, fig. 1), et celles du pied de derrière DIHIASTOIRE NATURELLE. If par le morceau ( THL.° Mém. sect. L, pl. I Gg. 7 }; mais comme Ponguéal y étoit mutilé, nous le retrouverons dans le morceau du quatrième Mémoire, pl. IV, fig. 9. Il est très-difficile où même impossible de distinguer celles des deux premiers rangs des deux grands doigts d’une extré- mité, de celles de Pautre: Pour celles de l'index, qui sont fort différentes , nous les avons eues jointes à leur métacarpien et à leur radius, Celles de la première rangée sont presque demi-cylindriques, un peu concaves en dessous. Leur face métatarsienne où mé- tacarpienne est d’une concavité uniforme et de la figure d’un rein; l’échancrure en arrière sert à recevoir dans la flexion une arête de los du métacarpe ou du métatarse. Elle y pro- duit deux protubérances. La face opposée est transversalement oblongue, et Se ment creusée én canal d’arrière en avant. Longueur ordinaire » . , LS rte RTE L0:000 Large). LME D RTE. CURE, E22:.1005 Diamètre antéro-postérieur . +. . . net Vos ts TC O0 Celles de la seconde rangée sont faciles à distinguer. Leur face supérieure se relève en avant et y forme une saillie qui remplit le creux des précédentes. Elle a du reste la figure d’un demi-cercle. L’inférieure, qui est aussi en demi-cercle , est creusée légèrement en canal pour recevoir longuéale. Il y a plus d’'inégalité dans leur volume. Longueur , depuis 0,025 jusqu'à 0,035 ; largeur , depuis 0,023 jusqu'à 0,08. Un des angles de la face supérieure est généralement plus élevé que l'autre. Les onguéales ( fig. 7 ) ont leur face articulaire (fig. 8) con- yenable pour répondre au creux léger des précédentes. Il y a > * 12 ANNALES DU MUSÉUM en outretrois autresfaces, une inférieuretrès-convexe (fig. 7 b.), et deux supérieures ( fig. 7 a. ). qui se rencontrent en manière de toit. L’interne est plus étroite; ce qui fait que l’arête se rapproche plus du milieu du pied que de son bord. L’extrémité antérieure est arrondie et très-inégalement per= cée , échancrée ou déchirée, par les trous destinés aux vais- seaux et à lier cette phalange avec son sabot. Les deux onguéales du pied de derrière (IV. Mém. pl. IV, fig. 9), que je donne ici de grandeur naturelle (fig. 9), sont beaucoup plus allongées et leur pointe est plus entière. J’ignore si cela lient à la jeunesse de l'individu, et si ce sont l’âge et la marche qni raccourcissent et émoussent les phalanges des in- dividus plus âgés. . Dans le cochon, les onguéaux de devant sont plus allongés que ceux de derrière et ressemblent beaucoup, à ceux-ci ; mais, dans le chameau et le lama , ils sont à peu près égaux aux quatre pieds. S Au total, c'est sans contredit du chameau que les doigts de l'anoplothertum se rapprochent le plns par la forme de leurs onguéaux ; mais ils ressemblent plus au cochon par la briéveté et la grosseur des deux premières rangées. Je ne doute donc point que les ongles de cet animal n'aient eu le plus grand rapport avec ceux du chameau, c’est-à-dire qu’ils n’aient consisté seulement en une petite lame au-devant de l'extrémité d'une large semelle. Nous avons vu ( sect. préc. p. 107) qu'outre ses deux grands doigts, l’'anoplotherium commune a un mdex fort petit. Le métacarpien de ce doigt n’a point d’aréte à sa face articulaire inférieure; aussi sa première phalange n’a-t-elle point d'échancrure en arrière. Elle est beaucoup plus petite D'HISTOIRE NATURELLE. 15 que celle des autres doigts et oblique. Nous la représentons fig 26. Nous n'avons pas eu la seconde, mais seulement son em- preinte. Elle est fort petite et paroit n’en point porter de troisième. $. I. Anoplotherium medium. Nous les avons toutes les trois dans le beau pied (TIL° Mé- moire, ÎL° sect., pl. IT, fig. 1), et nous les avons encore trouvées séparément dans d’autres morceaux. On les voit de grandeur naturelle et par leurs faces laté- rales, précédées de l'extrémité du métatarse, figures 10, 11, 12 et 13; leurs facettes articulaires, figures 14, 15, 16, 19, 18 et 19. Au fond, leur mécanisme est le même que dans l'espèce précédente : les creux, les saillies, sont semblables; seulement elles sont gréles et allongées , comme tous les autres os de cet anoplotherium medium. Elles se rapprochent beaucoup plus des ruminans que celles de l’anoplotherium commune. Leur ressemblance avec celles du lama va au point de faire illusion, à la grandeur près. La troisième phalange est même un peu plus grande à propor- tion que dans le lama, et se rapproche encore davantage en cela des ruminans ordinaires : elle le fait aussi par la figure, parce qu’elle est plus comprimée et que son arête supérieure est plus aiguë; ce qui lui donne même tout-à-fait l'air d’avoir porté un sabot complet, Longueur de la première, de 0,03 à 0,04. — de la seconde, de o,o11 à 0,013: — de la troisième, 0,018 14 ANNALES DU MUSEUM $. TL. Ænoplotherium minus. L Elles nous sont fournies par le pied de derrière (sect. préc. pl. V, fig. 1), par celui de devant (5. fig. 9 ) et par quelques autres morceaux. Nous les représentons de face et de côté, fig. 20 — 25. La description des précédentes leur convient parfaitement, et il n’y a qué la grandeur qui puisse les en faire distinguer. Nous avons donné en partie leurs dimensions ( sect. préc. D'A1xr) Longueur des premitres, de 0,015 à 0,02, —_— des secondes, de 0,008 à o,o1. — des troisièmes, de 0,005 à 0,007. Les plus petites sont peut-être celles de devant. Longueur des premières des doigts latéraux, 0,008. Nous n'avons eu aucune des phalanges de l'anoplotherium minimum. ART. II. PHALANGES DE PALÆOTHERIUM, S. L® Palæotheriunm crassum. Nous en voyons la coupe dans le pied de derrière (IIL° Mém. 1° sect. pl. V, fig. 2 et 4). Ce morceau nous prouve que les palæotheriums avoient les doigts beaucoup plus courts à proportion que les anoplotheriums. Les formes du palæotherium crassum en particulier de- voient beaucoup ressembler à celles du tapir, Nous n'avons pas eu séparément ses premières phalanges, mais bien les secondes. On en voit une, figures 30, 31, 32, POIL; #25] / | Ras : 66) ) A) \ ; À : eZ fl 26 ( CF Tig 16. FOSSILEAS DE PARIS . Æ Vhalan es. VA « ZLauridlird dl. elseufp : D'HISTOIRE NATURE L LE. 15 Elles sont remarquables par leur peu de hauteur, comparée à leur largeur transverse. Du reste, elles ont à leur face in- férieure une forte rainure pour l’onguéale. Hauteur, 0,01 ; lar- geur transverse, 0,02. On voit, par la coupe de la première phalange, qu’elle de- voit être ge de 0,015. La troisième est fort petite et arrondie. Celles des doigts latéraux sont plus petites et obliques. Nous n’en avons eu aueune du palæotherium medium. $. IL Palæotherium magnum. Nous n’en avons eu qu'une seule (fig. 33) : c’est l’onguéalc du milieu, etsa forme arrondiela fait ressembler à celles du rhi nocéros. S. IL Phalanges du palæotherium nunus. | Le pied de derrière (IIL° Mém. sect. I, pl. VE, fig. 7 et8) nous les fournit presque toutes. Nous donnons à part la pre- mière du doigt du milieu, fig. 27, 28 et 29. Elle est longue de o,o1 ; large de 0,008. En arrière et en haut est une forte protubérance échancrée, dont on voit aussi la trace dans la coupe de celle du palæotherium crassum. Celles des doigts la- iéraux du palæotherium minus sont extrémement petites. Lu 16 ANNALES DU MUSÉUM QUATRIÈME MÉMOIRE. SUR LES OS DES EXTRÉMITÉS. PREMIÈRE SECTION. LES OS LONGS DES EXTRÉMITÉS POSTÉRIEURES. ART. I.” LES FÉMURS. S. L Fémur du palæotherium medium ou crassum. J'ai restitué toutes les parties du squelette que les natura- listes ont coutume de regarder comme caractéristiques, parce que leurs formes sont visibles au dehors. Les autres os cependant ne sont pas moins en état de four- nir des distinctions génériques et spécifiques, lorsqu'on les compare exactement entre eux; mais on a généralement aban- donné cet objet aux anatomistes , quoique , dans une multitude d'occasions, les naturalistes puissent en tirer une grande utilité, Nous en allons avoir plusieurs preuves manifestes dans ce Mémoire ; et pour ce qui concerne les seuls fémurs, quand même nous n’aurions vu ni les dents ni les pieds de nos ani- maux des carrieres, la seule inspection de quelques-uns des fémurs qu'on y trouve nougapprendroit qu'il y a des espèces inconnues et nous diroit en même temps à quelles familles ces espèces appartenoient. Il ya, parmi les grands quadrupèdes vivans, trois genres distingués de tous les autres par une circonstance particulière DH Z\S T OIIR E ON A TU R EL L E. 17 dans la forme de leur fémur : ce sont les rhinocéros , les ta- pirs et les solipédes. Cette circonstance consiste dans le troi- sième trochanter , ou dans une forte apophyse située au bord externe de los, au-dessous de celle qu'on nomme vulgaire- ment grand irochanter. Elle sert à l'insertion du muscle ana- logue au grand-fessier de homme, lequel, dans ces animaux et dans plusieurs autres, n’est pas le plus grand des trois. On peut la voir nettement représentée dans nos planches de l’os- téologie du rhinocéros et de celle du tapir. Or nous retrouvons cette apophyse très-caractérisée dans Jun des fémurs fossiles de nos environs, et par conséquent ce seul os auroit indiqué par lui-même l'analogie de nos animaux avec les rhinocéros et les tapirs, que d'une part les dents et de l'autre les doigts indiquent déjà si bien; et l’ensemble de ces trois ordres de caractères , qui se confirment réciproquement, forme une masse de preuves irrésistibles. Le fémur dont nous parlons est représenté par sa face postérieure (pl. I, fig. 1), à moitié de sa grandeur naturelle. La face antérieure de sa tête l’est figure 2; la face externe un peu obliquement, figure 4 ; la face supérieure, prise l'œil étant dans l’axe de l'os, figure 5, et ce qui reste de la tête inférieure, figure 6. Sa longueur est de 0,24; sa largeur en haut, entre sa ile et son grand trochanter , de 0,8. C'est le fémur gauche : sa partie supérieure est singulière- ment aplatie d'avant en arrière. La tête est petite, pas plus élevée que le grand trochanter , et la plus grande partie de sa convexité regarde en haut. Son plus grand diamètre est de 0,037. Le bord externe s’élargit subitement, et forme une côte saillante en arrière, qui setermine en haut au grand trochanter, et se perd en bas vis-à-vis la naissance du troisième. Cette 9. 3 "12 PER ANNALES DU MUSEUM côte laisse à la face postérieure un enfoncement aplati qui 0c- cupe tonte cette face. Le grand trochanter est une grosse tubérosité qui fait en avant une saillie plate et triangulaire. Le petit n’est pas bien entier dans ce morceau. Le troisième est comprimé : son bord est arrondi , mousse, et 1] fait un peu le crochet en avant. Il est situé au bord ex- terne, un peu plus bas que le petit ne l'est au bord interne ; il y a entre lui et l'extrémité supérieure de los, 0,11. Au-dessous du troisième trochanter, le corps de l'os rede- vient un peu rond, mais bientôt après il reprend quatre angles et s’élargit pour former les condyles. Ce morceau ne montre que le condyle externe, qui est très- saillant en arrière. | La distance entre la partie la plus saillante en avant du bord externe de la poulie rotulienne du fémur et la partie la plus saillante en arrière du condyle du même côté, est de 0,06. Le bord interne de cette poulie est bien plus saillant en avant et plus obtus que l'autre. Leur distance pardevant est de 0,03. D'après les caractères que nous avons indiqués plus haut, et d’après sa grandeur, ce fémur ne peut être comparé qu'à ceux de l'âne et du tapir. Celui du tapir en approche davan- tage pour la grandeur que celui de l'âne : car, dans notre squelette de tapir, le fémur est large de 0,25 ; dans celui de âne , il est de 0,29. I! y a aussi plus de ressemblance pour la forme : 1° le troi- sième trochanter du tapir est situé an même endroit, c’est-à- dire, à 0,10 de distance de l'extrémité supérieure de los; ‘celui de lâne est placé plus haut à proportion , aussi à 0,10, mais sur une longueur de 0,29. D'HISTOIRE NATURELLE. 19 9. Cette éminence fait un peu le crochet vers la base dans l'âne. Elle a ses bords arrondis dans le tapir, comme dans notre fémur fossile. 3. Le corps de Pos fossile est beaucoup plus gros à pro- portion de sa longueur que celui du fémur de l'âne; il l'est même plus que celui du tapir. Le fossile a, dans sa partie la plus mince, 0,035 de diamètre; le tapir, 0,028 ; l'âne, qui a le fémur plus long, 0,30. Néanmoins ce fémur fossile se rapproche un peu plus de celui de l'âne en deux points: 1, En ce que le bord interne de sa poulie tibiale est bien plus gros et plus saillant que l'autre, comme cela a lieu dans l’éne : le tapir a ces deux bords presque égaux; 2.9 En ce que la face postérieure de la partie supérieure est très-aplatie, et que la côte saillante qui part du grand irochanter, y descend jusque près du troisième, comme dans l'dne , tandis que dans le tapir cette côte finit au tiers de lin- tervalle de ces deux éminences. ‘ Il résulte de cette comparaison, que ce premier fémur fos- sile n’est ni un fémur d'âne ni un fémur de tapir, quoiqu'il tienne de tous les deux ; et qu’au total il ressemble davantage à celui du dernier. Foutes les autres analogies que nous avons déjà trouvées entre nos pieds fossiles à trois doigts et ceux du tapir, ne nous permettent pas de douter que ce fémur ne doive étre rapporté à ces pieds, et qu'il n’appartienne par conséquent à notre genre palæotherium. Sa grandeur nous en indique en même temps l'espèce à peu de chose près. Nous avons vu que la tête du palæotherium medium est à peu près de la même grandeur que celle du tapir. Voici un a 20 ANNALES DU MUSEUM fémur de même grandeur aussi. Quoi de plus naturel que de les rapporter l'un à l’autre! Le pied que nous avons attribué au palæotherium medium est à la vérité un peu plus petit que celui du tapir; mais ce sera seulement une différence de proportion dans les parties du même membre, telle que lerègne animal nous en offre assez souvent entre deux genres voisins. Qui ne sait la différence des proportions du pied au fémur, entre lekanguroo et lephalanger, entre les makis ordinaires et les tarsiers et galagos? Elle est trois ou quatre fois plus forte que celle-ci. Cependant ces motifs n’établissent pas plus de droits au pa- læotherium medium qu'au palæotherium crassum ; et jusqu’à ce qu'on ait deux fémurs entre lesquelson puisse se déterminer, il n’y aura point de raison pour attribuer celui-ci à lune de ces deux espèces plutôt qu'à l'autre, Je n'ai eu ce fémur qu'une seule fois entier. S. IL Fémur d'anoplotherium commune. Un fémur plus grand que le précédent et plus commun dans nos carrières, est celui que représente par-devant, et à moitié grandeur, la figure 7 de la planche L C’est le morceau le plus complet que j'aie eu d’abord de cette espèce; et quoique presque toute la paroi antérieure de l'os soit enlevée, on en voit encore fort bien la plupart des caractères. Il a 0,36 de longueur entre la tête et le condyle interne &. Sa largeur entre la tête et le grand trochanter, de c en d, est de 0,12 ;et d’un condyle à l’autre, de een f, de 0,10 : le grand diamètre de sa tête, 0,047; la distance de la tête au petit tro- D'HISTOIRE NATURELLE. 21 chanter, d'a en g, de o,113:le corps de l'os, à sa partie la plus mince, vers 24, a 0,053 de diamètre. Il y a quelques variétés pour la grandeur. Ainsi j'ai une tête inférieure qui a d’un condyle à l'autre 0,115; une tête supé- rieure, dont le diamètre est de 0,055 ; une portion supérieure qui n'a que 0,8 de largeur entre la tête etlegrand trochanter : mais toutes ces variétés n’excèdent pas celles qui peuvent na- turellement se trouver dans une même espèce. La partie supérieure est fort plane en avant: le cou est peu prononcé; le grand trochanter ne Sélève point au-dessus de la tête: le petit est assez considérable , comprimé et placé tout-à-fait au bord interne de los, sous la tête, à peu près au tiers de la longueur totale. Il n’y a point de troisième tro- chanter. Tous les caractères donnés par ce premier morceau sont confirmés par quatre autres que je possède également. E/un d'eux me donne de plus ceux de la face postérieure de la même partie, On le voit figure 9. Cette face est aussi très-plane et même un peu concave. Îl nait du grand trochanter une côte saillante , k , qui reste au bord externe de los , et se ter- mine, en s'élargissant, à peu près à la même hauteur que lori- gine du petit trochanter , mais à une distance en travers qui équivaut à presque toute la largeur de l'os. Ainsi ce n’est point sur la fin de cette côte que naît le petit irochanter , conne dans tant d’autres animaux. Si nous comparons maintenant cette portion supérieure de fémur à celle des autres animaux, il faudra exclure d’abord ceux qui ont un troisième trochanter , ensuite tous ceux où le petit trochanter est à la face postérieure , et tous ceux où la eôte 22 ANNALES DU;MU,SE U M saillante qui nait du grand trochanter, se prolonge jusqu’au petit. Il ne reste alors absolument que le chameau ; car , même dans les autres ruminans, on observe la dernière circonstance. La ressemblance de la partie antérieure est même extré- mement frappante, surtout par l'aplatissement général qu'on y observe. Mais on voit une différence bien sensible à la partie posté- rieure : la côte L est bien plus courte dans le chameau que dans l'animal fossile; elle ne descend pas à moitié de la hau- teur du peut trochanter ; et le creux », formé derrière elle, est plus court et beaucoup plus profond. D'ailleurs la proportion générale de los est très-différente. Dans notre animal, la largeur en haut est de 12, la longueur de 36; comme 1 à 3. Dans le chameau, ces deux dimensions sont de 14 et de 56, ou comme 1 à 4. La tête inférieure ou tibiale de ce grand fémur présente aussi des caractères bien marqués, mais trèes-difliciles à ex- primer : tant la langue a peu de termes pour tous ces détails de formes et tant il est difficile de rendre, par un simple dessin, toutes ces variétés de courbures! On voit figure 10 la tête même de l'os de la figure 7; et en la figure 8, une autre que j'ai eue séparément, et qui appartenoit à un plus grand os. Les faces articulaires des deux condyles ont chacune une double courbure, La courbure antéro-postérieure du condyle interne o est moins bombée que celle de lexterne p. La courbure transverse d’o est plus uniforme ; celle de p a un méplat très-sensible vers p. D'HISTOVRE NATURELLE. 23 Ces deux faces se réunissent en avant pour former la demi- poulie rotulienne g, qui est assez concave, et dont la direction se porte un peu en dehors. Je n’ai pas eu ses bords complets ; de manière que j'ignore s'ils sont égaux ou inégaux. Le canal profond r, qui sépare les deux éminences condy- liennes, se porte un peu en dedans et en avant, et est coupé presque carrément. Si nous comparons maintenant celte tête supérieure de fé- mur à celle des autres animaux, nous trouvons que le plus tranché de ses caractères est que le condyle interne o se continue avec la poulie q, sans qu'il y ait vers $ une échan- crure qui en distingue les bords. Le chameau, le bœuf, le cheval, ont cette éminence tres- marquée; les autres ruminans, le tapir, ont aussi, quoique un peu moindre : le cochon en a presque aussi peu que notre fé- mur fossile. Les carnassiers l'ont peu marquée, et l'homme, les singes et le kanguroo ne l'ont pas du tout; mais ceux-ci offrent tant d’autres différences , surtout dans la largeur et la briéveté de leur poulie rotulienne, qu’ils ne donnent lieu à au- cune équivoque. On pourroit pousser la comparaison plus loin, et donner la proportion de la longueur des facettes à leur largeur, de leurs courbures , etc.; mais cela ne me paroît pas nécessaire pour le moment. Au total, c’est du chameau que ce fémur se rapproche le plus; et comme notre grand pied didactyle nous a aussi pré- senté des rapports très-marqués avec celui du chameau, et que la grandeur de notre fémur est assez d'accord avec celle de ce pied, pour qu'ils aient pu provenir du même animal, 24 ANNALES DU MUSEUM nous croyons pouvoir les regarder conume s'appartenans en £lfet. Voilà jusqu'où l’analogie nous avoit conduits avec desosisolés et mutilés. Ce paragraphe étoit rédigé, lorsque nous recûmes deux pierres qui en confirmoient parfaitement les résultats. La première contient un calcanéum et un cuboïde du côté gauche de ce grand pied didactyle que nous avons attribué à l'anoplotherium commune, avec un fémur, également du côté gauche, lequel, quoique fort mutilé , présente évidemment les mêmes formes, et a surtout des dimensions à peu près les mêmes que ceux que nous venons de décrire, Il a , entre la tête et le condyle interne, 0,375 ; et ses autres parties sont à proportion. Comme il est fort vraisemblable que le fémur est veru du même individu que ce calcanéum et ce cuboide, il prouve par le fait tout ce que nous n’avions conclu jusqu'ici que par le raisonnement. Ce morceau contient un péroné et une portion de radius dont nous ferons usage en temps et lieu. Nous en avons fait représenter un côté, pl. V, fig. 1. Le côté opposé de la pierre contient les fragmens enlevés à celui-ci, et nous a servi à compléter nos mesures ; mais nous avons jugé ivutile de le faire dessiner. Voici les dimensions des diverses parties, dont nous aurons encore plusieurs occasions de nous servir, Longueur du fémw, de sa tête à son condyle interne. . . . . 0,575 Largeur entre la tête et le grand trochanter, . . . . « . . . 0,13 Largeur d’un condyle 4 l’autre 2,1 ; . ,. . .. . .:. . . . - 0,09 Plus grande longueur du calcanéam, . . . . . . . . . . . . 0,105 Largeur de late doradins tnt. me 25100053 Longueur de la portion du péroné. . . . . . « . . . . . . . 0,25 Largeur de sa tèle inférieure. . : « . + + + » + + + + « + + 0,034 D'HISTOIRE NATURELLS. 25 La seconde pierre nous a été donnée par M. de la Métherie. Elle contient une tête inférieure complète, détachée, comme épiphyse, d’un jeune fémur évidemment de la même espèce que tous les précédens , jointe à un sémi-lunaire , du carpe que nous avons attribué à l'anoplotherium. ( LIL° Mém. sect. 1, PL IT, fig. 1.) Cette tête étant plus entière que les précédentes, nous la représentons (pl. TEL, fig. 14) à moitié grandeur. Le condyle interne ou le plus saillant est seulement un peu mutilé et rac- courci. « Plus prandeilarveur 24,01 NS El. 110085 Plus grande longueur entre le condyle interne et le bord correspondant de la poulie rotulienne . . , . . . . 0,093 Mème distauce du côté externe . . . . . . . . . . . . 0,079 Plus grande distance entre les bords extérieurs des deux condyles le IT Ne en: C15110:079 Profondeur de l’échancrure postérieure . . . . . . . . . 0,035 LEGS dat MM EMEA MST EMI ET S. IL Petite tête inférieure de fémur, .qui paroët venir de l'anoplotherium medium. ( PI. IV, fig. 10.) Elle est assez semblable à la précédente, pour étre du même genre; mais elle est moindre d’un peu plus de moitié. Cette dimension convient fort bien à l'anoplotherium medium , el en essayant cette tête inférieure de fémur sur ce qui nous reste de la tête supérieure du tibia de la même espèce, les deux os ont paru s'articuler ensemble. Mais la méme chose n’a pas eu lieu avec le tibia du palæotherium minus : il étoit trop large. 9- 4 26 ANNALES DU MUSEUM Cette petite tête de fémur ressemble beaucoup à celle d’un antilope , et on a déjà pu voir, par la forme élancée du pied , comme on verra bientôt par celle du tibia, que cet anoplo- therium avoit en effet toute la légèreté des antilopes. ART. If. LES TIBIAS. J'ai été plus heureux pour les tbias que pour les fémurs ; jen ai trouvé un plus grand nombre ; et plusieurs d’entre eux étoient encore attachés à leurs pieds, de manière que je n'ai pas eu besoin de raisonnemens pour les ÿ rapporter. S. IL. Les tibia appartenans aux pieds tridactyles ou au genre -palæotherium. a. Tibia du palæotherium medium. Ainsi le pied tridactyle que j'ai décrit dans le troisième Mémoire (art. 1y ), étoit accompagné de son tibia presque en- tier, tel que je le représente , pl IF, fig. 1. La tête supérieure étoit en partie enlevée, mais il en restoit assez en arrière, vers a, pour donner encore toute la longueur de los, qui est de 0,21. La tête inférieure avoit un peu souffert aussi, et il manquoit ane partie de la face articulaire inférieure. Ce qui en reste est représenté, figure 2, et vu de face, figure 3. Ces portions m'ont sufli pour reconnoître des têtes entières de la même espèce, tant inférieures que supérieures, que j'at trouvées isolées, et par conséquent pour compléter la des- cription de cet os. Ainsi la partie supérieure d’un os de la même espèce est D’ HAS TOUR D IN AU D 'AE L L E. 27 représentée pardevant, figure 4, et la tête d’un autre os de côté opposé ; l'est presque verticalement figure 31. La premicre tête avoit 0,055 de largeur transverse , et 0,04 d'avant en arrière, en u'ayant point égard: à léchancrure pos- térieure, Sa configuration générale ; celle de ses deux fosses, «, b; la position respective de ses deux tubercales, c, d; la forme et la position de sa tubérosité antérieure , e, se rapprochent plus du tapir que de tous les antres animaux: « Danse cochon, le diamètre transverse seroit moindre par rapport à l'autre : 'échancrure f sereit plus profonde ; la tu bérositée ; plus marquée et descendant plus bas, Elle le seroit encore bien davantage dans les rurninans. Dans les solipèdes , elle auroit un canal sar sa longueur ; dans les carnassiers les tubercules séroient beaucoup moins aigus et moins saillans , ete, On voit, sous le bord externe g, une petite facette pour lar- ticulation. du péroné. La partie la plus caràctéristique du tibia est sa tdte infé rieure, parce que Sarticulant avec l'astragale ; sa conforma- tion dépend de celle de ce dernier os, qui varie beaucoup dans les différens genres. Or, comme l'astragale de ce pied tridactyle ressémbloit beaucoup à celui du tupir (voyez HL° Mém. p. 66), je devois m'attendre à trouver la même ressemblañée dans létibia. La portion que j'en avois dans ce morceau (pl IE, fig. 2) me l'in2 diquoit déjà; mais j'en fus bien plus sûr quand j'eus trouvé des têtes inférieures entières, comme celle réprésentéé planéhie À (lg. 9 et 10), qui a 0,03 de largeur transverse, et 0,023 d'avant en arrière. Le caractère de ces sortes de têtes consiste à représenter un h # 28 ANNALES DU MUSÉUM quadrilatère oblique, dont l'angle le plus aigu est le posté- rieur interne, a; la partie la plus saillante vers le bas est en même temps celle du bord postérieur adjacente à cet angle. Une saillie arrondie, b, et se portant obliquement en arrière et en dehors, divise la face articulaire en deux enfoncemens: l'un , interne, est un véritable demi-canal , parce que la partie postérieure du bord interne d saille aussi vers le bas ; mais l'enfoncement externe e est simplement un plan oblique qui fuit vers le haut et en debors. Son bord externe, au lieu de saillie, porte une facette, f, qui regarde en dehors pour Sarti- culer avec la tête inférieure du péroné. Toutes ces particularités se trouvent également dans le tapir, dans ce tibia trouvé altaché au pied tridactyle, et dans trois autres têtes inférieures que j'ai reconnues être de même gran- deur et de même espèce : les petites différences des os fossiles au tapir, sont à peine exprimables autrement que par des figures répétées sur toutes les faces. Ainsi le tibia est fidèle à l’analogie indiquée par le pied, et en le rattachant au premier fémur décrit dans l'article précédent ; nous aurions l’extré- mité postérieure entière du palæotherium medium. Le tibia du tapir est précisément de la longueur de celui- ci : et-comme nous avons vu (IEL* Mém:. art.1v), que le pied fossile est long de 0,182, sans les phalanges,, et que le t@pir a cette partie de 0,22, on peut en conclure que notre animal avoit le pied plus pétit, proportionnellement à la jambe, que le tapir. Nous avons vu, dans l’article précédent, qu'il en est de même par rapport à la cuisse. D'HISTOIRE NATURELLE. . +6 b. Tibia du palæotherium magnum. . Outre ces têtes inférieures de tibia du palæotherium me- dium, Yen ai trouvé d’absolument semblables pour la forme, mais de trois autres grandeurs. L’une d'elles est précisément double, ayant 0,06 de largeur transverse , sans compter les inégalités de ses faces latérales, et 0,04 d'avant en arrière. Elle se rapportera sans difficulté au palæotherium magnum , et correspondra par conséquent au calcanéum décrit dans l’article v1 du troisième Mémoire. J'en donne la figure, planche IT, figures 5 et 6: lesleitres yont la même signification que dans les figures 9 et 10 ; seulement la figure 7 est en sens contraire de la figure 9, gest-à-dire que le tibia sy présente par devant. Il y est aussi représenté plus incliné. c. Tibia du palæotherium minus. Une autre est précisément moitié moindre que celle du palæotherium medium; elle a de’ droite à gauche 0,015, ét d'avant en arrière 0,01 1. Je ne donte pas qu’elle ne se rapporte au pied de Particle virdu troisième, Mémoire, c’est-à-dire à celui du palæotherium minus. Je n'en suis assuré de trois manières. J'ai d'abord rapproché les astragales de cette espèce que je pos- sède de ce tibia ,et j'ai vu qu'ils s'y ajustoient parfaitement, Je l'ai ensuite, comparée avec le fragment resté dans là piérre d’où j'ai tirémn des-pieds:de ce pælæotherium , et représenté dans le troisième Mémoire { pl. ILE, fg. 2); et j'ai trouvé que tout s’y acordoit. Enfin, comme il restoit plusieurs portions de la partie supérieure de l'os, je les ai comparées à la partie 30 ANNALES DÜMUOUSÉUN supérieure de l'os restée au squelette presque entier de cette espèce, trouvé à Pantin, et je n’y ai remarqué aucune dif- férence. Ce morceau, que je représente de grandeur naturelle, (pl. IE, fig. 6) me donne la longueur de ce tibia, en même temps que sa tête inférieure. Elle est de 0,r43, ou, à peu de chose près, la méme que celle du pied , déterminée dans l’article vit du troisième Mémoire. Le tapir présente à peu près la mémé égalité entre son pied et son tibia, et par conséquent le palo+ therium mirius s’en rapproche plus à cet égard que lé medium. J'en ai eurun second échantillon plus complet, que je repré- senté planche IV, figure 5, et la téte inférieure, planche TT, figure 12. I provenoit d’un individu plus jeune, parce que les épiphyses n’éteient pas encore soudées au corps de los. Il est parfaitement de la mème longneur et de la même forme. Au moment où j'écris, j'en recois un tout entier, parfaites ment d'accord. avèc les friägméns précédens, ( Voyez pl. V, fig. 2,3 et 4.) Méyennant ce tibia, complété et confirmé par le squelette de Pantin, le fémur donné tout entier par ce même squelette, et le pied décrit dans le troisième Mémoire, nous avons extré- mité postérieure complète, dans cette petite espèce comme dans la moyenne. Il est encore à remarquer que ce tibia nous sert à lier le pied au corps : car ce squelette de Pantin ayant le haut de son tibia, et Le petit pied tridactyle ayant été trouvé avec un bas de tibia; cet os-ci, qai rassenrble les deux extrénntés trouvées séparément , prouve l'identité d'espèce de ce pied et de ce squelette. D'HISTOIRE NATURELLE. 3x d. Tibia du palæotherium erassum. J’eus une dernière tête inférieure de tibia de cette forme, propre aux palæothertums, qui est d’ane grandeur telle que je ne pus la rapporter à aucun des trois os que je viens de dé- erire et de rendre à leurs espèces. Elle est intermédiaire entre celle du grand et celle du moyen , ayant 0,045 de largeur trans- verse, et 0,03 d'avant en arrière. Du reste , elle a tous Les ça- ractères des précédentes. J'imagimai bien vite de la rapporter au deuxième pied tri- dactyle, de moyenne grandeur, que j'ai décrit dans le troisième Mémoire, (sect. [, art. v),et que j'ainommé depuispalæotherium crassum (LIL Mém. sect. HE, p. go). Ce pied (ainsi qu'on le peut voir IIL° Mém. (sect. E, pl. VE, fig. r et 2) est accompagné d’un tibia qui ne donne aucun de ses caractères, excepté la longueur , laquelle est de 0,20 ou de 0,01 moindre que celui du palæotherium medium. La différence des deux pieds , sans les phalanges, est aussi à peu près la même. J'eus bien dans un autre morceau un tibia de 0,%0, par conséquent de même longueur que celui que je viens de citer; mais il n’avoit que sa tête supérieure : elle étoit large de 0,07, et d’ailleurs entikrement semblable à celle du palæotheriums medium. | Ces tibias , un peu plus courts, sont donc en même temps considérablement plus gros , et il wétoit pas impossible que la tête infériéure en question en provint. Cela s'accordoit même assez avec la forme du pied, que nous avens vu être bien plus gres, à longueur égale, que celui du palæotherium medium. Cependant cette tête inférieure me paroissoit un peu plus 32 ANNALES DU MUSÉUM grosse à proportion que la supérieure dont je viens de parler: elle est à celle du palæotheriunm medium, comme 0,045 à 0,03 ; tandis que les supérieures ne sont que comme 0,070 à 0,055. Je vis enfin que ce tibia étoit celui auquel tenoit l’astra- gale décrit dans l'article vu: du troisième Mémoire , représenté (ib. pl. I, 6g. 8 et 9) : car ayant présenté cet astragale à cette tête inférieure de tibia , ils s’articulèrent parfaitement et pa- rurent être entièrement faits l'un pour l'autre, Mais j'étois encore dans l’idée que javois eue lors de la premiére section de mon troisième Mémoire, que cet astra- gale de l'article vu différoit de celui du pied de l'article v, pied d’après lequel j'ai déterminé, dans la deuxième section de ce troisième Mémoire, l'espèce du palæotherium crassum. Ce n'est que depuis peu que j'ai trouvé ce pied presque entier et avec un astragale reconnoissable, et que je me suis assuré que l’'astragale en question de l'article vin est précisément celui du pied de l'article v. Je reviendrai sur ce sujet, et je donnerai ce pied entier dans un supplément. Il nous suflit de dire ici qu'il est donc prouvé que les tibias de cet article, longs de 0,20, larges de 0,07 à la tête supé- rieure , et de 0,045 à l'inférieure, sont ceux du palæotherium crassum. Il ne nous manque donc que la longueur du tibia du grand palæotherium ; pour compléter cette partie dans les trois espèces. Nous verrons, dans le paragraphe suivant , que certaines conjectures nous la font porter à 0,51. D'HISTOIRE NATURELLE. 33 $. IL Les tibias appartenans aux pieds didactyles ou au gênre anoplotherium. a. Tibia de l'anoplotherium medium. Je n'ai pas été moins heureux pour le pied didactyle allongé de larticlen (pl. HE, Gg. x du JIL° Mém.), que pour celui du palæotherium medium. J'en aitrouvé une partie parfaitement reconnoissable pour être de la même espèce, attachée encore à son propre tibia. Cette portion de pied m'a même été utile, parce qu’elle contient quelques os qui n’étoient pas si parfaits dans le premier morceau que j'avois décrit. Je laireprésentée de grandeur naturelle, planche TE, figure L: a est l’astragale entier. J'en avois déjà trois : deux sont figu- rés, planche LI du IL° Mémoire, figure 1 , et le troisième, figure 3; mais tous étoient mutilés. Celui-ci, qui est entier, ressemble parfaitement en petit à celui du grand pied didac- tyle de l'article premier de ce troisième Mémoire (pl. L, fig. 2) confirme et l’analogie deux espèces. Le calcanéum b, dont nous n'avions qu’un petit fragment, est ici presque complet, à son extrémité postérieure près, qui est mutilée. Il offre aussi tous les caractères de celui du grand pied diadctyÿle qu’on voit dans le troisième Mémoire (pl. I, fig. 1), et particulièrement l’éminence externe €, qui doit ser- vir à l'articulation da péroné ou de l’osselet qui le représente. Le cuboide d présente la forme caractéristique en équerre, propre à nos pieds didactyles ; il étoit au reste déjà entier dans le mor- ceau dn troisième Mémoire (pl. HE, fig. 2, d). On voit encore dans notre morceau actuel le scaphoïde e, le grand cunéi- forme f, et une petite portion du métatarsien externe où cu= boidal g. 9. 5 54 ANNALES DU MUSÉUM Où sait, par le troisièëme Mémoire, que cette sorte de pied est fort grele. On peut voir ici que le tfhia ne l’est pas moins, et l'on doit continuer à juger que les proportions de l'animal étoient fort légères. La longueur du tibia est de 0,20 ; la largeur transverse de sa tête inférieure, de 0,025; celle de sa partie la plus mince, de 6,015. La. longueur du tibia est donc précisément la même que celle du pied, à compter du bas de Pastragale , ainsi que nous avons vu au troisième Mémoire. Pour en venir aux caractères de ce tibia lui-même, il n'étoit pas assez bien conservé pour me les offrir entièrement ; mais ce que j'ai pu voir de sa tête inférieure, en la dégageant du plâtre, ressembloit parfaitement, pour la grandeur et pour la forme , aux parties correspondantes d’une autre tête que j'ai eue entière et libre, et j'ai pu me servir de celle-ci pour compléter la description de la première , et pour établir les caractères de cette seconde sorte de tibia. J'ai représenté la portion dont je parle, pl. TIF, fig. 2, par- devant; fig. 6, par le côté externe ; fig. 5 , par le côté interne; fig. 4, par derrière; et fig. 3, entièrement en dessous. Les mêmes lettres désignent les mêmes angles dans toutes ces figures. La plupart de ses caractères lui sont communs avec le cochon et les ruminans , comme l’on devoit $y attendre , d'après la ressemblance de son astragale avec les leurs. Ces caractères consistent, 1° dans le contour presque carré et non oblique ; 2.° Dans la côte saillante du milieu , droite et non oblique ; 3° Dans les enfoncemens plus prononcés, et interne li- mité par un bord plus saillant que l’autre; D’. H'X SC 6! D RME LUNI AETUU À RIBLI E. 35 4. Surtout dans une facette e, sur le bord externe, des- tinée à l'articulation de losselet péronien. Cette facette dis- tingue ce libia de celui du cochon, qui na de facette que tout-à-fait en dehors. Ici, comme dans les ruminans, elle re- garde en en-bas; mais, dans les ruminans, elle est plus com- pliquée, par une petite échancrure qu’elle a dans son milieu. Cette tête inférieure a quatre apophyses principales , dont la plus saillante est l'antérieure c, et la plus pointue, l'interne a. Celle-ci, dans les ruminavs , est aussi saillante que l'autre. Celle de derrière d fait un angle rentrant dans ce tibia, comme dans ceux des ruminans. : Le chameau différe un peu de ce tibia et de ceux des ru- minans ordinaires, en ce qu'il a celte partie plus large trans- versalement que d'avant en arrière. Au moyen de ces caractères , qui ne peuvent manquer d'être communs à tous les tibias d'anoplotherium, on les dis- tinguera toujours aisément de ceux de palæotherium. b. Tibia de l'anoplotherium commune. . C’est d'eux que je suis parti d’abord pour tâcher te distin- guer parti les grands tibias fossiles que je possédois, ceux qui devoient appartenir aux deux genres; car je n’ai point eu pendant long-temps de tibia bien caractérisé , réani à quelque portion du pied du grand anoplotherium , conne il eût été à désirer , pour obtenir une certitude complète. Le morceau contenant les deux doigts de cette espèce (re: présentés LL" Mém. pl. IT, fig. 1 et 2), offroit bien aussi ane portion de tibia propre à donner une idée des dimensions de la tête supérieure; mais le bas de los ÿ manquoit. 5 36 ANNALES DU MUSÉUM Un autre morceau double, contenant un astragale, un cu- boïde, une tête d’os de métatarse et quelques phalanges, offroit encore deux portions de tête inférieure dont j'ai figuré la plus entière (pl. L, fig. x1). L'autre portion la recouvyroit et com- plétoit l'apophyse de manière à la rendre tout-à-fait ressem- blante à celle qui porte la même lettre dans les figures 2, 3,4, 5.et 6 de la planche IIT , c’est-à-dire , à l'externe. La courbure de l'empreinte € répondoijt aussi très-bien à l'antérieure € des mêmes figures , et la postérieure 4 de ces figures étoit également bien représentée dans la pièce opposée; enfin, du côté externe on voit une empreinte g el une portion À k, du péroné , qui prouve que cet os n’est pas réduit, comme dans les ruminans , à un simple vestige. Ces renseignemens imparfaits me firent reconnoïtre deux tibias isolés de ma collection , dont les têtes inférieures , trop mutilées pour donner par elles-mêmes des indications claires de leur espèce, s’accordoient cependant, en tout ce qui en restoit, avec les caractères conclus de l'espèce précédente, et avec les dimensions données par les deux morceaux que je viens de citer. L'un d'eux est dessiné à moitié grandeur, pl. HT ,fig. 8: c'est celui du côté gauche. IL est posé dans le gypse, sur son côté interne, et n’a conservé de sa tête inférieure que l’apo- physe interne, qui, comme dansle morceau précédent, ne peut étre comparée qu’à celle marquée a dans lesfigures 2, 3, 4, 5 et 6. Aucune des têtes inférieures des tibias, que nous avons attribuées au genre palæotherium wa d’apophyse ressemblante à celle-ci. L'autre est dessiné pl II, fig. 9:1l est posé sur sa face postérieure. L'antérieure est écrasée , et il ne reste que la partie D'HISTOIRE NATURELL É. 37 postérieure de la tête inférieure , telle que je Pai représentée pl. LE, fig. 10. Mais, toute mutilée qu'elle est, on y reconnoït bien l'apophyse postérieure d, l'enfoncement interne f, l’ex- terne moins creusé g, la facette pour le péroné e; et en com- parant ces parties avec celles marquées des mêmes lettres dans la figure 3, on y observe autant de ressemblance qu’il est pos- sible dans un morceau si imparfait. J'adaptai à ces restes de facette quelques-uns des astragales de grand anoplotherium que je possède , et j'ai trouvé qu'ils paroissoient y aller très-bien. J’eus donc tout lieu de croire que ce sont ici réellement deux des tibias qui ont porté ces grands pieds didactyles , et qu'ils me complètent l'extrémité postérieure de cette espèce. Tous deux sont de même longueur , savoir de 0,27 ou 0,28 : la largeur transverse de la tête supérieure est , autant que ces morceaux permettent de la mesurer, de 0,08 ; celle de la tête inférieure, de 0,06. Le morceau dela planche F, figure 11, me donne aussi cette largeur de 0,06. Une tête inférieure entière ( pl. V, fig. 5 et 6) me montré que le diamètre antéro-postérieur est au transverse comme 5 à 3: c'est un nouveau rapport avec le chameau. Les dimensions courtes et grosses de ces tibias confirment bien tout ce que nous avons déjà présumé des proportions générales de cet anoplotherium. Ge devoit être un animal sin- gulièrement bas et épais de membres. Cependant javoue que ce tibia doit paroïtre encore bien court pour le fémur dout nous avons déterminé la longueur ci-dessus à 0,36 : c’est comme 3 à 4. Le rhimocéros l’a comme 4 à 5. Mais dans l'hippopotame le tibia est encore plus court: car il est au fémur comme 0,39 à 0,16; ce qui fait moins des 38 ANNALES DU MUSEUM deux tiers. Ainsi la proportion de notre animal est suflisamment justifiée. Celle du tibia au pied n’a rien d'extraordinaire : nous avons vu ({IL* Mém. art. 1) que celui-ci est long de 0,33; et il y a assez d'animaux dont le pied est plus long que la jambe. - Le péroné presque entier du morceau pl. V, fig. 1, con- frme d’ailleurs directement cette proportion. Il a 0,25 de longueur ; et s'il eùt été complet, il en auroit eu à peu près 68 pour un fémur de 0,33. Or le tibia ne pouvoit pas être beaucoup plus grand que son péroné. c. Digression pour déterminer la longueur du tibia du palæotherium NAT Tiurrt, Ayant ainsi rapporté à leur véritable espèce ces tibias gros et courts ,il n'en restoit yn beaucoup plus long, mais telle- ment mutilé, qu'excepté sa longueur on n’y reconnoissoit aucun caractère. Comme il ne me restoit qu'un grand animal à pourvoir de grand übia , il étoit naturel que je lui attribuasse celui-ci. C’est ce qui na fait dire plus haut que certaines con- jectures me faisoient croire que le übia du palæotherium magnum avoit 0,31 de long. C'est en effet la dimension de l'os en question , que j'ai représenté à moitié grandeur, plan- che LH, fig. 8. d. Tibia de l’anoplotherium minus. Un dernier pied, que j'ai trouvé encore articulé avec son tibia, est le petit tétradactyle que j'ai décrit dans le Méricire précédent, IE" sect, art. vi , et que j'ai attribué à l’anoplotke- rium minus. On le voit planche V de la section citée, fig. 1r. La longueur de ce tibia est de 0,093; sa largeur en hout D'HISTOIRE NATURELLE. 39 de 0,018; en bas, de 0,008; et à l'endroit le plus mince, de 0,006. Nous avons trouvé dans cet article, pour la longueur du pied , à compter du bas de Pastragale, 0,105 ou environ: ce qui le fait un peu plus long que le tibia. Ainsi cet animal avoit la jambe un peu plus courte, à pro- portion du pied’, que ne Favoit celui à picd didactyle grèle. Nous voyons aussi que la totalité Ge son pied et de sa jamhe est à peu près dans la proportion que pouvait indiquer le seul astragale (KL Ménx. art. x), c’est-à-dire qu'ils sont moitié des mêmes parties dans l’animal que je viens de nommer. Les deux têtes de ce tibia étant mutilées, je n'ai pu déterminer aucun de ses caracteres de forme;mais je me doute point qu'ils ne soient à peu près les mêmes que dans les deux précédens. e. Tibia d'un anoplôtherium non encore détermine. Ce übia est intermédiaire entre ceux du commune et du medium; je n’en ai eu qu'une portion infériéure, aÿec son péroné , déplacé et jeté sur le côté mterne: c'est celui du côté gauche. Sa tête inférieure est bien complète et présente par- faitement tous les caractères que nous avons reconnus à celle de l’anoplothertunr medium ; seulement elle est un peu plus large, à proporüon, de droite à gauche que d'avant en ar- rière. Elle a, dans le premier sens, 0,041,.et dans le second, 0,021. Elle est dessinée, pl IIT, fig. 7, vue verticalement, et la portion des deux os, dans sa longueur, pl: IV, fig. r. $. LIL. Supplément à cet article, contenant la description d'un tibia presque complet de palæotherium magnum. C'est ainsi qu'à force d’mductions et en comparant et com- 4o ANNALES DU MUSÉUM Dinant divers fragmens, j'étois parvenu à restituer les tibias de presque toutes nos espèces, lorsque j'ai trouvé dans le ca- binet de M. de Drée un bloc qui contient celui du palæothe- rium magnum presque entier, parfaitement conservé, et qui m'auroit épargné une grande partie des peines que cet article m'a données, si je lavois eu d’abord. J’aurois pu du moins éviter au lecteur celle de me suivre dans ceite pénible recherche, en me bornant à décrire l'os entier,, et en supprimant tout ce travail sur les fragmens, qui devient inutile en lui-même : mais j'ai vu une autre utilité à le laisser subsister. La belle confirmation que lui donne la dé- couverte de l'os entier , démontre de plus en plus la possibilité qu'a l'anatomie comparée de juger d’un os, d’un membre, d’un squelette entier, même sur une simple portion de facette, et ne peut qu'augmenter la confiance de mes lecteurs dans le cas où je ne trouverai point d’os entiers pour confirmer mes conjectures. C’est pour cette raison que je place ici la figure de ce tibia entier, comme je l’ai obtenu moi-même, après que je lavois déjà presque refait de toutes pièces IL est dessine à demi-grandeur , pl. IV, fig. x ; sa longueur est effectivement telle que je l’avois conjecturée dans le paragraphe précédent, c’est-à-dire, de 0,31. S. V. Deuxième supplément à cet article, offrant en un seul morceau quatre os de l'extrémité postérieure de l'anoplo- therium commune, et confirmant toutes les combinaisons précédentes. Les raisons que je viens d’alléguer m'’engagent encore à laisser ici, à la fin de l'article, un morceau que je viens de D'HISTOIRE NATURELLE. A recevoir, et qui en confirme tous les résultats de la manière la plus brillante. On le voit au tiers de sa grandeur, pl IV, fig. 9. Il contient le fémur , le tibia, le péroné et l'astragale du côté gauche, avec les deux phalanges onguéales d’un jeune anoplotherium commune. Le tibia, le péroné et 'astragale sont encore dans leur connexion naturelle. L'astragale étant le point d’où nous sommes partis pour la détermination du pied, il nous sert ici de repère irrécusable, Or ce tibia et ce fémur, qui ont évidemment appartenu à cet astragale, ont les mêmes formes que ceux que nous avons attribués à l’anoplotherium commune. Ils sont à la vérité plus petits, mais précisément dans la pro portion de cet astragale vis-à-vis de ceux de grandeur ordi- naire : et comme ils sont encore d’un tissu lâche, et que le pé- roné est épiphysé, l'on voit que eur petitesse tient à leur jeunesse. Enfin, le caractère le plus important qu’ils pouvoient fournir, leur proportion réciproque , est précisément celle que nous avions conclue des ossemens isolés. Nous avions trouvé, pour la longueur moyenne du fémur, 0,36; et pour celle du tibia , 0,28. Le fémur de ce morceau est long de 0,27, et le tibia, de 0,21; ce qui est rigoureusement la même proportion. L’astragale observe aussi parfaitement : les plus ordinaires ont 0,044 de largeur, et celui-ci a 0,033. C’est précisément comme 25 à 21,ou comme 36 à 27. L'individu dont vient ce morceau avoit donc en tout un quart de moins que les adultes, J'ai été tenté an instant de le croire de l'espèce du morceau pl. EV, fig. 1, et pl LE, fig. 7; mais celui-ci, quoique adulte , 9: 6 a“ kè ANNALES DU MUSEUM n'a que 0,041 de largeur ; et l’autre, quoique jeune , en a déjà 0,047. Ainsi, il ne peutserapporter qu'à l’'anoplotherium commune. Que l’on se rappelle que mon motif premier pour attribuer ce grand fémur à deux trochanters à lanoplotherium com- mune, a été la voie d'exclusion, fondée seulement sur le troi- sième trochanter de l'autre fémur , et le rapport qu'il établit avec le fapir; rapport qui m'a fait attribuer cet autre fémur au palæotherium. Ce motif, qui devoit paroitre bien foible aux personnes peu habituées à ce genre de rapprochemens, m'a cependant con duit, d’induction en mduction,à distribuer, comme je l'ai fait dans ce Mémoire, entre mes différentes espèces , les fémurs et les tibias que j'ai trouvés ; et voilà ces résultats confirmés directement par un morceau complet, qui m'y auroit conduit de son côté si j'avois commencé par lui la série de mes rai- sonnemens. J’appuie toujours avec soin sur ces détails, plus utiles encore par leur influence sur les principes généraux , dont ils cons- latent la certitude, que par les conclusions immédiates que Yon en tire dans les cas particuliers. ART. III. LES PÉRONÉS. Les anoplotheriums et les palæotheriums avoient un péroné complet et distinct, comme la classe entière des pachy«'ermes, à laquelle ils appartiennent, et toutes celles qni sont au des- sus d'elle dans échelle; tandis que les ruminans, les solipèdes, ont toujours cet os réduit à un simple rudiment. Le chameau même, qui ressemble d’ailleurs à l’'anoplo- therium, pax la distinction du scaphoïde et du cuboide du D'HISTOIRE NATURELLE. 43 tarse, a, comme les ruminans ordinaires , le péroné réduit à un petit osselet articulé par ginglyme sous le bord externe de la tête inférieure du tibia, et posant par son autre face sur une avance du calcanéum, comme y pose le péroné complet de l’anoplotherium. On retrouve dans le cochon, dans l'hëppopotame et dans l'éléphant, cette articulation du péroné avec le calcaneum ; mais elle n’a lieu dans aucun autre animal, pas même dansle palæotherium, qui se conforme en ce point, comme en tant d’autres, à la structure du tapir. Le péroné des anoplotheriums se distinguera donc parce que sa tête inférieure offrira deux facettes articulaires, une latérale astragalienne et une terminale calcanienne. On voit la tête inférieure d'un tel péroné , pl. IT, fig. 154 par sa face interne ; fig. 19, par l’externe. Un autre péroné presque complet est représenté à moitié grandeur, pl. IV, fig. 3 ; la face terminale de sa tête, fig. 4 , et Pinterne, fig. 5. Le grand morceau pl. IV, fig. 1, offre en 4, b, un pérüné presque complet , toujours de cette espèce, et confirme que c’est à l'anoplotherium qu'il appartient, puisqu'il y est avec d’autres os tous de cet animal. Le morceau pl IV, fig. 9, le confirme encore muieux , puisqu'on l'y voit encore dans sa connection naturelle avec ces os. Ainsi nul doute pour cette espèce. Le péroné de la plancheIV, figure 3 est long de 0,25 ; sa tête inférieure a 0,030 de large. Celui de la planche V, figure 1 , qui est presque complet, est long de 0,254, et sa tête inférieure, large de 0,033. L'anoplotherium indéterminé, dont on voitle tibia plancheIV, G * 44 ANNALES DU MUSÉUM figare 1, avoit aussi un péroné qui accompagne le tibia dans ce morceau ; mais on ne peut juger ni sa longueur ni sa forme. L’'anoplotherium medium avoit aussi un péroné ; quoique je ne aie pas , je le conclus de la forme des facettes qui le recevoient : pl. IT, fig. 1, 4, est celle de 'astragale; z, celle du tibia; et c, celle du calcaneum ; la facette tibialez, que l'on voit mieux encore en e, pl. IL, fig. 2,3, 4et 5,n’ayant point de saillies et de creux , ne faisoit qu’appuyer dessuset n'y en- grenoit pas, come son analogue dans les ruminans fait avec l'osselet Annie J'en conclus que le péroné étoit complet et non réduit à un pareil osselet. Je mai és vu de péroné à la jambe d anoplotherium mi- nus, que j'ai représentée dans le troisième Mémoire (IL sect., pl. V, fig. 11); mais c’est parce qu’elle présente le côté interne. Le péroné des palæotheriums est démontré , indépendam- ment de l’analogie, pour la jambe du palæotherium crassum , par le morceau du troisième Mémoire (section L°, pl V, fig. 1), où l'on en voitun presque entier à côté du tibiaen € , d- Pour celle du palacotheriunr münus ,par celui de nos planches actuelles, IV, figure 2, et IL ,figure 12 , où l'on voit en a latête inférieure du péroné à côté de celle du tibia; et par le sque- lette presque entier trouvé à Pantin , où la portion supérieure du péroné est encore posée sur le tibia. FOSSZLES DE PARIS.O0s long sde l'extrémite posterieure Canu seu = # \\ | LOSSILES DE PARIS. Os longs de l'extremite poskrieure :.PL:11: Couet veuf. x 3 ES LA LA = : Pr "+ PAS (12 9 5 RAL me } ————= == \ \ À À Val # | | | | LR TA FOSSILES DK PARIS. Os bngs de léxkemte postkreure LI. Carte veuf om 9: PE, 6; 1 FA CAES ZOSSILLS DE PARIS. Os Longs de l'extrenute posterteure .PL. F. Vaurdlird del Canu 0272 , | MR nn. Co LA ES RAR Se de 2 D'HISTOIRE NATURELLE 45 MÉMOIRE SUR LE GENRE CONVALLARIA. PAR M. DESFONTAINES. Lixveus et la plupart des botanistes qui sont venus après Jui ont réuni, sous le nom de convallaria, les genres polygona- tum et lilium convallium de "Tournefort, ainsi que trois espèces de smilax du méme auteur, lesquelles n’appartiennent pas à ce genre, savoir : le smilax humifolia humillima ,. le smilax aspera racemosa, et le smilax spicala,polygonatifolio. . Linnœus indique les taches dont la baie se colore avant Ja maturité, comme un caractère particulier et commun à toutes les espèces. Bacca immatura maculata notam pr&bet orani- bus communem. (Gen. plant. p.172). Mais ces taches, que lon n° aperçoit qu'à l'instant où le fruit commence à mürir » Et qui d’ailleurs n'existent pas dans plusieurs espèces, telles que les Conv. polygonatum, multifiora, umbellata, Japonica et autres encore, ne sont pas un bon caractère pour distinguer ce genre. Je pense donc qu’on ne doit pas ladopter, et que ‘pour éviter toute exception il convient de le diviser; d'autant mieux qu'il renferme plusieurs groupes bien distincts et indiqués par AG. ANNALES DU MUSEUM la nature même. Il est évident que les polygonatum de Tour- nefort différent essentiellement des convallaria, où muguets proprement dits, par leurs fleurs axillaires, allongées en tubes, ainsi que par leur tige et par la disposition de leurs feuilles ; que les convallaria racemosa, stellata, etc., offrent dans leurs fleurs terminales et dans les divisions très-profondes ‘et étoilées de leurs corolles, des différences assez sensibles pour les séparer des deux genres précédens; qu’enfin, le con- vallaria bifoliu , qui n’a! que quatre étamines et quatre divi- sions à la fleur ; et dont la baie est à deux loges, ne peut être réuni ni aux uns ni aux autres, sans que le caractère géné- rique souffre des exceptions. Dillenius avoit formé un genre particulier de ce dernier, sous Je nom d'untfolium ; Haller l'avoit conservé : et depuis, M. Roth et autres l'ont encore adopté sous le nom de maïanthemum ; dénomination qui me paroït préférable à celle de Dillenius et de Haller. D'après toutes ces considérations , je propose de partager le genre convallaria de Linnæus en quatre, savoir : conval- laria, polygonatum, smilacina , et maïanthemum. J' imdiquerai les caractères distinctifs de chacun de ces genres; jy rappor- terai les espèces qui leur appartiennent, et j'en ferai connoître quelques-unes qui avoient échappé aux botanistes. Les quatre genres en question peuvent étre caractérisés de la maniere suivante. CONVALLARITA. Calice nul. Corolle campaniforme à six divisions. Six éta- mines plus courtes que la corolle, attachées près de sa base. D'HISTOIRE NATURELLE. 47 Un style; un ovaire supère. Baie sphérique à trois loges, ren- fermant chacune une ou deux graines. Feuilles radicales. Fleurs en grappe sur une hampe simple. Convallaria maialis ( Muguet de mai ). C. scapo nudo lævti ; fols ovatis. Wir. Spec. IT, p. 660. = F1. dan. 1. 854.— Lilium convallium album. C. B. Pix. 304. — Tourner. Inst. 77, ur. Racines longues, fibreuses , traçantes, entrelacées. Deux ou quelquefois trois feuilles radicales ovales-allongées, lisses, entières. Pétioles rapprochés , entourés de gaines membraneuses d’inégale longueur. Hampe latérale, grèle, triangu= aire, plus courte que. les feuilles, renferméeinférieurement dans les gaines des pétioles. Fleurs blanches, penchées, disposées au sommet de la hampe en une grappe simple, unilatérale , accompagnées chacune d’une bractée membrancuse , lancéolée. Baie rouge , arrondie. Chaque loge eontient deux graines dont une avorte communément. On connoît une variété du muguet de mai à fleurs tachetées de pourpre. Il fleurit au printemps. Ses fleurs répandent uue odeur balsamique très-agréable qui passe avec l’eau dans la distillation. Séchées et pulvérisées, elles excitent l’éter- . hument. Haller dit qu’elles donnent une couleur verte qu'on fixe avec l’alun, et ui est très-belle et très-durable, P Convallaria japonica ( Muguet du Japon }. C. scapo nudo ,ancipiti; floribus racemosis, secundis ; foliis linearibus, scapo triplo longioribus. Las. rir. Suppl. 204. — C. scapo nudo ancipiti; racemo cernuo. Tauns. Jäp. 139. = Rinouré , Liliacées, Icon. — Rjuno fige. Kxwpr. Amen. exot. 823, Icon. ”. Racines blanches, touffues ; fibreuses, avec des renflemens allongés ou quel- quelois arrondis, Les feuilles qui naissent en touffe et en faisceaux près de la 45 ‘ANNALES DU MUSEUM racine , sont linéaires , dures , étroites, glabres , persistantes, d'un vert sombre , lisses en dessus , légèrement striées en dessous, embrassantes et membraneuses sur les bords. Hampe grèle, simple, striée, plus courte que les feuilles, ter- minée par une petite grappe de fleurs unilatérales inclinées, portées sur des pé- dicelles courts, qui sont solitaires et par paquets dans l’aisselle de petites brac- tées membraneuses, concaves et aiguës.Corolle blanche, petite, à six divisions qvales, ouvertes. Six étamines. Filets très-courts. Anthères un peu pointues , rapprochées. Un style. Baie sphérique bleue , entourée des débris de la corolle, Trois loges, dont une seule ordinairement fertile. Graine ronde, cornée. . Kæmpfer dit qu'au Japon on donne aux malades les tubercules des racines confits avec du sucre , et que la plante, qui est vivace et touffue, est utile pour fixer la mobilité des sables, Convallaria spicata ( Muguet à épi ). C. scapo nudo, racemoso, spicato; floribus aggregatis. Taoxs. Jap. 141% Cette espèce, qui n'est connue que par la description que M. Thunberg en a donnée dans sa Flore du Japon , est très-distincte ; il paroit. même douteux qu'elle appartienne au genre du muguet. Suivant cet auteur, elle a des racines fibreuses, des feuilles radicales linéaires , obtuses, striées , rétrécies inférieure- ment. La hampe est simple, longue d'une palme , plus courte que les feuilles. Les fleurs, rapprochées en faisceau, forment une grappe au sommet de la hampe, La corolle est violette , globuleuse, à six pétales ovales, concaves et obtus. Les étamines sont au nombre de six, L'ovaire esi supère, marqué de six stries. L'au- teur ajoute que Ja baie lui a para sphérique , mais que dans un individu il a cru distinguer une capsule à trois loges, renfermant chacune deux graines. POLYGONATUM { Porxconarum ). Calice nul. Corolle cylindrique. Limbe à six divisions ob- tuses, peu profondes. Six étamines plus courtes que la corolle, attachées à la partie moyeune ou supérieure da tube. Un style D'HISTOIRE NATURELLE. 49 Ovaire supère. Baie sphérique à trois loges, renfermant cha- cune deux graines, dont quelques-unes avortent souvent. Racines rampantes , articulées, épaisses. Tige simple, gar- nie de feuilles. Fleurs axillaires. s Polygonatum verucillatum ( Polygonatum verticillé ). P. foliis lanceolatis, verticillatis — Convallaria verticillata. Lax. Spec. 451. —FI. dan. t. 86. — Polygonatum angustifo- lLium non ramosum. C. B. Pix. 303. — Tourner. Inst. 78 w. Tige droite , simple , cannelée, creuse, nue inférieurement, garnie dans sa partie supérieure de feuilles lisses, glabres, lancéolées, entières, sessiles, verticillées trois à trois , quatre à quatre ou en plus grand nombre. Pédoncules grèles, axil- laires, solitaires, inclinés, rameux, quelquefois simples, terminés par une, deux, trois, ou un plus grand nombre de fleurs. Corolle cylindrique , verdôtre au sommet, une ou deux fois plus petite que celle du sceau de Salomon, polygo= natum vulgare. Divisions garnies de petites barbes à l’extrémité, Baie sphérique, violette. Loges à deux graines, Cette jolie espèce croît sur les Alpes, à l'ombre des bois. Elle est vivace comme toutes les autres espèces du même genre, et fleurit au printemps. Polysonatum vulyare. P. foliis semi-amplexicaulibus ; caule angulato; pedun- culis axillaribus, subumifloris. — Convallaria polysonatum. Law. Spec. 451. — FL dan. t. 377. = Polygonatum latifotium vulgare. C. B. Pix. 303. — Tourner. Inst. 78 x. Tige anguleuse , simple , arquée, un peu tortueuse. Feuilles ovales , alternes, glabres, sur deux rangs, rayées de nervures longitudinales, sessiles et embras- sant la tige à moitié, Fleurs axillaires, solitaires et quelquefois au nombre de deux sur un même pédoncule, pendantes, blanches, vertes aux deux bouts, longues de près de trais centimètres, sensiblement évasées de la base au sommet. Divisions 9: 7 50 ANNALES DU MUSEUM peu profondes, barbues intérieurement à l'extrémité. Étamines rapprochées , attachées vers le milieu du tube. Baie ronde , d’un bleu foncé. Loges renfermant deux graines dont une avorte souvent. Le sceau de Salomon croit dans les bois et fleurit au printemps. Ses fleurs sont odorantes. Polygonatum latifolium (Polygonatum à larges feuilles ). P. Caule angulato; folits sessibibus , ovatis, acuminatis ; pedunculis uni aut multifloris. — Convallaria latifolia. Jacc. Austr. t. 252.=— Polygonatum tertium latiore folio. Crus. Hist. 2756 x. = Polygonatum latifolium, hellebori albi foliis. C. B. Pix. 303.—Tourwer. Inst. 78. Le polygonatum à larges feuilles a des rapports marqués avec l'espèce précé- dente, par ses tiges anguleuses et par la grandeur de ses fleurs : mais ses feuilles larges , terminées en pointe, rayées de-nervures saillantes ; ses tiges pubescentes, ainsi que ses pédoncules à plusieurs fleurs , le distinguent et le font reconnoitre. Il croit en France et en Autriche, à l’ombre des forèts. Polygonatum mulliflorum ( Polygonatum à plusieurs fleurs). P. folis amplexicaulibus ; caule tereti; pedunculis axilla- ribus multifloris. — Convallaria multiflcra. Lan. Spec. 459. — F1. dan. t. 152. = Polygonatum latifolium maximum. C. B. Pix. 303. — Tourner. Inst. 78. x. Le polygonatum à plusieurs fleurs se distingue du sceau de Salomon par sa tige cylindrique plus élévée, par ses pédoncules à plusieurs fleurs sensiblement plus petites. Ses baies sont également d’un bleu tirant-sur le noir, Cette espèce’ vient dans les bois. Polygonatum orientale ( Polygonatam d'Orient ), Tas. T- P. caule subarcuato ; foliis ovato-lanceolatis , aeutis , bre- viter petiolatis ; pedunculis axillaribus multifloris.— P. orien- “ D'HISTOIRE NATURELLE. 5x tale latifolium flore parvo. Tourner. Cor. 1. — Vélins du Muséum. +, Tige simple, droite ‘ou pen arquée, longue de six à huit centimètres. Feuilles :8labres , alternes, ovales-allongéees, aiguës, portées sur un pétiole court, disposées sur deux rangs, larges d'environ trois centimètres sur une longueur double outriple. Fleurs axillaires , pendantes, soutenues sur un pédoncule grèle, divisé en plusieurs rameaux. Corolle cylindrique , blanche, rayée de lignes vertes longitudinales, moilié plus courte que celle du polygonatum à plusieurs fleurs. Limbe à six divisions ovales, obtuses, ouvertes, Six étamines plus couries que la fleur. Le fruit m'est inconnu. Le polygonatum oriental se distingue par sa tige très-peu arquée, par ses feuilles ovales-allongées , aiguës, portées sur un pétiole; par ses fleurs courtes, rayées de bandes vertes, et dont Le limbe est évasé . La gravure est faite d’après un dessin d'Aubriet, faisant partie de la Collection des vélins. SMILACIN A {Smizacrna ). Calice nul. Corolle à six divisioñs profondes , ouvertes en étoile. Six étamines écartées , attachées à la base des divisions. Un style. Un ovaire supère. Baie sphérique à trois loges. Tiges garnies de feuilles. Fleurs terminales. Smilacina racemosa. $. foliis , sessilibus, ovatis, nervosis, terminalibus, race- moso-paniculatis. — Convallaria racemosa. Lan. Spec. 452. — Polygonatum racemosum. Cornur. Canad. 36 Icon. — Smilax spicata polygonati folio. Tourner. Inst. 654. x. Racine épaisse, blanche, charnue, articulée. Tige un peu ‘tortueuse , haute d'environ un mètre, simple et quelquefois bifurquée, pubescente, anguleuse. Feuilleg grandes , sessiles ou presqus sessiles, ovales , terminées en pointe, légèrement ciliées sur les bords ; marquées de nervures longitudinales saillantes. Corolle à six divi- sions très-profondes , lancéolées , aiguës , ouvertes et étoilées. Six étamines écartées, 7 * 5e ANNALES, DU: M:USÉ:U M Un style. Baie ronde, parsemée d’un grand nombre de points rouges à l’époque de la maturité. On cultive cette espèce dans les jardins d'Europe. Elle est remarquable par la beauté de son feuillage et par ses baies tachetées. Elle croit naturellement en Virginie et dans le Canada. Smilacina stellata ( Smilacina étoilé ). $. foliis amplexicaulibus , ovato-ellipticis ; racemo sim- plici , terminali. — Convallaria stellata. Lax. Spec. 452.— Polygonatum canadense spicatum , sterile et fertile. Corxur. Cenad. 34, Icon. =S$milax spicata polygonati folio. Tourxer. Inst. 654. w. Tige droite, simple, cylindrique, haute de trois à six centimètres. Feuilles alternes , glabres, rapprochées sur deux rangs, ovales-allongées, un peu aiguës, rayées de nervures longitudinales , embrassant la tige à moitié ; leur longueur est de sept à huit centimètres sur quatre à cinq de largeur. Fleurs disposées en une grappesimple, terminale. Corolle blänche, divisions très-profondes , lancéolées. Style triangulaire. Trois stigmates. Baie sphérique, d’abord blanche et veinée de lignes pourpres cireulaires. Elle devient rouge en mürissant et les lignes disparoissent. Elle-est originaire de Virginie : on la cultive dans les jardins d'Europe. Elle aime l'ombre et fleurit en été. Suivant Cornuti, ce fut Jean Robin quicultiva le premier en France cette jolie plante. Le mème auteur ajoute que ses baies ont une Saveur amère et désagréable. Smilacina trifolia ( Smilacina à trois feuilles ). S.folis oblongo-ovalibus ; caule pubescente ; racemo ter- minali, laxo.— Convallaria trifolia. La. Spec. 452. = Con- vallaria floribus racemosis ; foliis ovatis, oblongis, caulinis. Gaec. Siber. 1, p. 36, t. 6. Racine rampante , grêle, garnie de fibres. Tige droite, simple, haute de deux décimètres , portant deux ou trois feuilles alternes, ovales-allongées, souvent terminées en pointe, rétrécies et embrassautes à la base, Cinq à neuf fleurs dis- D'ALT STOIRNE NATURELLE. 53 posées ‘en nne grappe lâche, terminale. Corolle blanche à six divisions très-pro- fondes. Six étamines. Filets violets au sommet. Baie rouge, sphérique , renfermant deux ou trois graines. On trouve cette plante en Sibérie et dans le nord de l'Amérique. Smilacina umbellata ( Smilacma ombellifère ), Tas. 8. $. foliis radicalibus oblongo-ovalibus ; scapo pubescente ; basi monophyllo ; umbella terminali nuda. — Convallaria umbellata. Mics. FI boreal. amer. 1, p. 202. ”. Racine rampante, garnie de fibres tortueuses. Feuilles radicales pétiolées, ovales , elliptiques, terminées en pointe, entières, ciliées sur les bords, de la forme et de la grandeur de celles du muguet de mai. Hampe cylindrique, droite, simple, puhescente, longue de deux à trois décimètres, munie d’une feuille à sa base, enveloppée inférieurement dans les pétioles des feuilles radicales, terminée par une ombelle de fleurs accompagnées de quelques braëtées qui se détachent et tombent très:promptement. Pédoncules simples, velus; uniflores. Corolle blanche, odo- rante, quelquefois tachetée de pourpre intérieurement, à six divisions très-pro- fondes, ovales, ouvertes. Six étamines un peu plus longues que la corolle, Anthères blanches, épaisses. Un style. Ovaire supère. Baie sphérique, bleue, à trois loges, renfermant deux graines dont ‘quelques-unes avortent. André Michaux a découvert cette belle espèce dans l’Amérique-Septentrionale, sur les monts Alleghanis. Smilacina ciliata (Swmilacina cilié ), Tas. 0. $. caule simplici, arcuato ; folis sessilibus, ovatis, ciliatis ; panicula terminali, conferta. — Polygonatoides canadensis flore minore. — Vélins du Muséum. ». Racine charnue, épaisse, blanche , traçante , articulée. Tige simple , arquée, haute de trois à six centimètres ; nue inférieurement, garnie dans-le reste de. sa longueur de feuilles alternes, ovales, disposées sur deux rangs, ciliées sur les bords, rayées de nervures longitudinales parsemées de petits poils. Fleurs termi- nales très-pelites, nombreuses ,:serrées, blanches , disposées en panicule, Corolle L_ EL ANNALES DU MUSEUM à six divisions très-profondes, ovales , aiguës, ouvertes. Six étamines plus longues que la fleur, Anthères épaisses , courtes, tétragones. Orvaire supère, pyriforme, terminé par un style court. à Cette espèce, qui est très-distincte, a été cultivée autrefois dans le Jardin des plantes. La gravure que j'en publie est faite sur un dessin d'Aubriet, faisant partie de la collection des vélins. | MAIANTHEMUM ( Maravrmemum ). Calice nul. Corolle à quatre divisions très-profondes , ou vertes en étoile. Quatre étamines. Deux styles ? Ovyaire supère, Baie sphérique à deux loges. Maianthemum bifolium (Maianthemum à deux fleurs }. M. Folüs cordatis, subtus villosis ; racemo terminali simplici. — Convallaria bifolia. Tax. Spec. 452. — FIL. dan., t.2091.— $milax unifolia humillima. Tourner. Inst. 654. — Lilium convallium minus. €. B. Pix. 304. x. Une feuille radicale , terminée par un long pétiole. Tige grêle, simple, tor- tueuse, haute d’un à deux décimètres, garnie de deux ou trois feuilles en cœur, entières , pétiolées , parsemées en dessous de petits poils très-courts visibles à la loupe. Fleurs blanches, disposées en une petite grappe simple, droite, terminale, Divisions de la corolle ovales-lancéolées, Baie rouge, sphérique, de la grosseur d'un petit pois. Elle vient à l'ombre des hoïs et fleurit au printemps, - Maianthemum canadense ( Maïianthemum de Canada). M. foliis cordato oblongis, subsessilibus | utrinque gla- berrimis ; racemo simplici, terminali.— Convallaria bifo- lia. Micu. FL boreal. amer. 1, p. 201. Z om lubrist 4 age } . Polvæonatum orientale . CR. lle. sem 724 LOI . à : cr Smilacina umbellata Poteur del | V4 TZ, DS f/ : N SN, PR Smilacina eiliata . D'HISTOIRE NATUÉEL L É. 55 Cette espèce a beaucoup d’affinité avec la précédente, dont elle n’est peut-être même qu'une variété produite par le climat. Elle en diffère par ses feuilles ses- siles ou presque sessiles, en cœur allongé, par leur surface inférieure entièrement glabre, enfin par le réseau des nervures, qui est plus saillant.. PLANCHE 7. BOLYGONATUM ORIENTALE F. Une fleur vue extérieurement. 2. Une fleur verticale, où l’on voit les étamines.: PLANCHE 8. SMILACINA UMBELLATA. x. Une fleur grossie.- 2. Une fleur ouverte pour montrer l’inserlion des élamines,- 3: Le fruit, PLANCHE 5. SMILACIA CILLATA;: Fr, Grappes de fleurs de grandeur naturelle. 3. Une fleur vue en devant. 5. Une fleur vue per derrière. 4 Une fleur grossie vue en devant. 5: La même, grossie, vue en dessous,- 6.. Une étamine grossie, ! 7. Une division de la corolle, 56 ANNALES “DU ‘M US É v x EE ; SUR LES CHAMPIGNONS PARASITES. j Extrait dun Mémoire lu à l'Institut le 26 octobre 1806. PAR M. DECANDOLLE. Les champignons vivent sur les autres végétaux de trois ma- nières fort différentes les unes des autres. Les uns, tels que les agarics, les bolets et en général ceux qui sont les plus grands et les mieux connus, naissent sur l'écorce des arbres morts ou vivans, ne sortent point de dessous l’'épiderme, et paroissent tirer leur nourriture ou de l'air où de lhumi- dité superficielle ; d’autres , tels que les sphéries , naissent de même sur les arbres morts ou vivans, ne sortent point de dessous leur épiderme, et se nourrissent de Fhumidité dont leur écorce ou leur bois sont imbibés; les troisièmes ne naissent que sur les végétaux vivans, se développent presque tous sous leur épiderme, qu'ils percent pour parvenir à lair libre, et se nourrissent évidemment des sucs mêmes de la plante. C'est à ces derniers qu'on a donné le nom de parasites. D’après ce terme, il ne faut pas penser , comme l'ont cru quelques personnes, qu’on ait voulu les comparer aux insectes parasites qui attaquent extérieurement la peau des animaux ; D'HISTOIRE NATURELLE. 57 ils sont plus réellement analogues aux vers intestinaux qui se développent dans Pintérieur de leur corps. $. L Classification des champignons parasites. Parmi les champignons parasites, les uns, tels que les gym- nosporanges , les puccinies , les urédos, les bullaires, les æci- diums ,les xyloma et quelques sphæria , naissent sous l’épi- derme des plantes et le percent ensuite pour parvenir à l'air libre; les autres, en nombre beaucoup moins grand, se déve- loppent sur l’épiderme, mais paroissent tirer leur nourriture de la plante qui les porte : tels sont les eryneums et les éry- siphés. Les caractères de ces genres et de la plupart des nombreuses espèces qui les composent se trouvent consi- gnés dans la Flore française ,troisième édit. vol. 2, et dans la Synopsis plantarum in Flord gallicä descriptarum : nous y renvoyons les lecteurs. Il faut seulement remarquer que, d'après de nouvelles observations, il paroït plus conforme à la nature de ne considérer comme puccinies que les espèces à deux ou plusieurs loges, et de rejeter parmi les urédostoute la section des puccinies à une seule loge. En effet, dans ces petits champignons, le pédicelle diminue graduellement de longueur ; et il est très-probable que si certains urédos en pa- roissent totalement dépourvus, c’est que ce pédicelle est très- court, ou que peut-être il s’oblitère à la maturité: sans cette explication, on seroit forcé d'admettre que ces plantes sont réduites au seul péricarpe ; ce qui esl contraire à toutes les lois de l’analogie. Il faut encore observer qu’on doit former une section ou un genre particulier des æcidiums, où le bord du peridium se prolonge en longs filamens , comme on le yoit 9. 8 58 ANNALES DU MUSEUM dans l’æcidium cancellatum, à l'occasion duquel ce groupe a recu le nom de cancellaria. S. IE Æistoire des champignons parasites. Linné n'avoit pas hésité à classer parmi les végétaux le petit nombre de champignons parasites qui lui étoient connus: Depuis lors , aucun des hotanistes qui ont étudié la cryptogamie n'a élevé de doute à cet égard. Cependant quelques observa- teurs ont cru que les maladies des plantes étoient produites par des animaux ; et ont sans doute été induits en erreur par la rencontre accidentelle de quelques animalcules infusoires ; mais Persoon, Hedwig fils, Faucher et moi, qui avons, cha- cun de notre côté et sans nous communiquer, observé au mi- croscope la presque totalité des champignons parasites connus, p’avons apercu en aucun d'eux aucune espèce de mouvement, et nous y avons reconnu des formes tellement analogues à celles des autres cryptogames, qu’on peut très-facilement dé- terminer leur place dans l’ordre naturel des végétaux. On a aussi considéré quelquefois ces maladies comme des: travaux d'insectes , et cette idée a quelque chose de spécieux, soit parce qu'on y a quelquefois observé certains msectes, soit à cause de leur ressemblance extérieure avec certaines gales ou certains œufs : ainsi les œufs de l'hémérobe ont été décrits: comme des plantes par des botanistes peu exercés à la crypto- gamie. Mais l'observation a prouvé que les insectes qu'on ren- contre dans les æcidiums n’y sont pas essentiels, mais pour ainsi dire passagers , et que l'anatomie de ces tubercules diffère: entiérement de celle des gales et des œufs des insectes. Quelques agriculteurs ont cru au contraire que ces champi- D'HISTOIRE NATURELLE. 59 gnons étoient des maladies organiques de la plante, auxquelles en effet les uredos ressemblent quelquefois; mais on ne peut admettre cette idée pour aucun des autres genres dont la structure est plus facile à déméler, et la différence entre les puccinies et les uredos est si foible que, dès qu'on admet la végétabilité des premières, on ne peut nier celle des secondes, Cette opinion est plus plausible relativement aux érynéums, que cependant leur ressemblance avec les bissus et leur manière de vivre rapprochent des végétaux. Muis si lon venoit à prouver que les érynéums sont tous ou quelques-uns des poils malades , et non des plantes, on n’en pourroit rien conclure, ni contre les autres genres, ni contre les faits que je vais tenter d'établir, Il se présente ici une question plus délicate à résoudre, c’est de savoir si ces champignons de forme plus ou moins diver- siliée, que nous apercevons sur différens végétaux, sont vérita- blement des espèces distinctes, ou s'ils sont des modifications d’une même espèce , produites par la différence des plantes qui leur ont donné naissance. J'observerai d’abord que l'analogie avec les animaux para- sites peut fournir une première présomption que nos cham- pignons sont véritablement distincts; en second lieu , dans l’état actuel de la science , personne ne contestera, je pense, qu’au moins les huit genres que nous venons d’énumérer sont des espèces distinctes : et si on le nioit, je citerais plusieurs plantes, telles que le rosier, la ronce , le laitron,lanémone des bois, qui portent souvent à la fois des champignons parasites de genres différens. Ce premier point accordé nous permettra de répondre à un doute élevé par sir Joseph Banks, dans son Mémoire sur la puccinia du froment : c'est que si l'épine-vi- 8 * Go ANNALES D'U' MUSEUM nette nuit au froment, comme le pensent quelques agriculteurs, ce n’est sûrement pas parce que les graines de l'æcidium ber- beridis, tombant sur le froment, y produisent la puccinie du froment: hypothèse que la simple observation suflit pour détruire, puisqu'on trouve souvent l’épine- vinette chargée d'æcidium auprès d’un champ de froment sans puccinies, et des fromens attaqués de puccinies ou d’urédos sans la proxi- mité des épine-vinettes; je n’aurois pas même agité cette dis- eussion, s'il eùt été question d’un végétal moins important que le blé, ou d'un savant moins distingué que sir J. Banks. Mais si l'on accorde que les genres sont distincts , les sections de ces genres, qui sont elles-mêmes très-prononcées, sont- elles aussi distinctes? en un mot , où nous arréterons-nous pour établir des limites, si des différences perceptibles dans la forme et dans la localité ne suflisent pas pour distinguer des espèces ? Quel sera dans des êtres si obscurs et si impos- sibles à cultiver, quelle sera , dis-je, la balance à laquelle nous peserons la valeur de leurs caractères. Mais indépendamment de cette diflicalté, qui ne tient qu'à notre ignorance, nous avons des preuves directes de la théorie que les cryptogamistes ont admise. 1° Les seules plantes pa- rasites bien connues sont le guy et la cuscute. Elles croissent June et l'autre sur différens végétaux, mais ne changent point de forme en changeant de nourriture : ainsi l’analogie doit nous porter à conclure que les champignons parasites peuvent bien croitre sur différens végétaux sans changer de forme. Et en effet, l'uredo vagans ,Yuredo segetum , Vuredo rubigo, Yæci- dium rubellum se trouvent sur différentes plantes. Mais puisque dans les exemples que je viens de citer la diversité de station n'a pas changé les formes, pourquoi admettroit-on que dans D'HISTOIRE NATURELLE. Gz les autres la diversité des formes est produite par celle des stations ? 2° S'il étoit vrai que les graines d'un de ces champignons peuvent indifféremment croitre sur la plupart des plantes, on ne verroit pas, dansun même champ ou dans un même jardin , une certaine espèce dont presque tous les individus sont attaqués par un champignon, tandis que toutes les autres plantes voisines ou mélées avec la première n’en offrent pas un vestige. J'ai observé ce fait tres-souvent, et j'en citerai quelques exemples. Jai vu un pré mélé de trèfle, de graminées et de plusieurs autres herbes, dans lequel tout le trèfle étoit surchargé de puccinia trifolii , et aucune herbe voisine n'étoit attaquée. Les pépimiéristes ont vu souvent tous les poiriers d’un jardin attaqués par l'æcidium cancellatum, tandis que tous les autres arbres étoient sains. J'ai vu un jardin négligé dans lequel croissoit beaucoup de liseron des champs, qui, comme on sait, s’entortille autour des plantes qu’il trouve ; presque tous les pieds de ce liseron étoient couverts de l’erysiphe convolpulis , et je n'ai pas trouvé sur toutes les autres plantes voisines le moindre indice du dé- veloppement de quelque érysiphé. Je n’entends point ici pré- juger la grande question de la distinction des espèces et des variétés ; mais je crois que l'on peut conclure des obser vations précédentes , que les différences que l’on observe entre les champignons parasites ne tiennent pas généralement à leur habitation sur telle ou telle plante, et que les espèces de ees genres méritent d'être distinguées tout autant que celles des autres genres de la cryptogamie, peut-être même que eelles des autres végétaux. S'il est vrai de dire qu’en général chaque espèce de cham- pigoons croit sur une espèce de plante particulière, il faut G2 ANNALES DU MU6É£UM observer cependant que plusieurs d’entre eux croissent sux différentes plantes; mais c'est presque toujours sur des espèces de même genre ou de la même famille. J'ai déjà indiqué ce fait dans mon Essai sur les propriétés médicales des plantes, et je le citais alors comme une induction pour penser que les plantes qui se ressemblent par leur structure se ressensblent aussi par leurs propriétés. Ainsi les puccinies des rosiers , deg ronces, des circées, des menthes, des raiponces, des trèfles, des véroniques, des pruniers; les urédos des rosiers, des ronces, des marceaux; les æcidiums du pin, des violettes, des pre- nanthes , du tussilage, le xyloma salicinum, croissent sur plus sieurs espèces des genres dont ils portent le nom. La sphérie des graminées, l’'urédo des blés et la puccinie des graminées, - attaquent toutes les espèces de graminées de nos prés et de pos moissons. Les urédos des sédums, des rhinanthacées, des chicoracées, des crucifères , l'æcidium des chicoracées, des borraginées, l'érysiphé des chicoracées, croissent sur plusieurs espèces de plantes de la même famille, L’æcidium cancellatuny croit sur plusieurs arbres de la première section des rosacées, Enfin, les trois espèces de gymnosporanges connues croissent indifféremment sur toutes les espèces de genévriers, et ont même attaqué les genévriers étrangers naturalisés dans nos jardins. J’observerai à cette occasion que, parrui les plantes étrangères cultivées en Europe , on ne rencontre de champi- gnons parasites que sur celles qui ont trouvé dans notre pays des plantes de même genre infestées par quelques champignons, et qu’on y trouve au contraire, Comme sur nos végétaux indi- gènes, les lichens , les mousses et toutes les fausses parasites. Mais comment les graines de ces champignons parasites sont-elles transportées d’une plante à une autre plante? et il D'HLSTOIRE NATUÜKÉLL.É,. 63 ñé s'agit pas ici seulement du simple transport des semences, que le vent ou tout autre cause pourroit facilement opérer , mais de l'introduction de ces graines dans le tissu même de la plante; car nous avons remarqué plus haut que presque tous ces parasites, à l'exception des érysiphés, naissent sous l'épiderme, le percent, et répandent leurs graines au dehors: Puisque ces champignons vivent sur les feuilles et les autres parties annuelles des plantes , il faut que leurs graines, après leur maturité, restent sans germer jusqu’au printemps suivant. Quant à l'introduction de ces graines dans le végétal , la cons- tance de leur position indique qu’elles ne sont point entrées par les gercures accidentelles de l'écorce, mais par les ouver tures naturelles des végétaux. On ne peut donc concevoir que deux explications plausibles ; peut-être même possibles : une, qui a été mise en avant par sir Joseph Banks, est que ces graines entrent dans les feuilles par les pores corticaux; l'autre, qui me paroit plus probable , c'est qu’elles sont introduites par les racines avec la sève. Les pores corticaux sont, comme on sait, épars sur toute la surface herbacée des plantes; ils servent généralement à la transpiration ; et, dans quelques circonstances, à l'imbibition des vapeurs et des gaz. Ainsi les graines de champignons qui flotteroient dans air pourroïent bien entrer dans ces pores et se développer sous l’épiderme. Ce soupçon semble même d'autant plus plausible, que généralement les champignons pa- rasites naissent à la surface inférieure des feuilles, qui est aussi celle où l’on trouve le plus de pores corticaux , et que quel- quefois les champignons sortent de ces pores ; comme M. Banks Pa remarqué relativement à la puccinia du froment. Mais celte théorie est sujette à des objections qui me paroissent importantes. 64 ANNALES DU MUSÉUM 1.” Il existe plusieurs feuilles qui ont des pores sur les deux surfaces, et quin'émettent de champignons que par lune d’elles. Tels sont la puccinie des graruinées , la puccinie de l’œillet et l'urédo des crucifères. 2° Il y a quelques plantes qui n’ont de pores qu’à la surface inférieure des feuilles, et qui ont les champignons à la surface supérieure : tels sont les puccinia des groseilliers et la plupart des xiloma. 3. Les champignons parasites naissent souvent sur des or- ganes dépourvus de pores corticaux. Ainsi on trouve l’uredo rosæ sur la base de l'ovaire et le pédicelle ; luredo segetum sur les ovaires; les puceinies de l’adoxe, de la ficaire , du trèfle; les urédos de la fève, de la potentille , du persil ; les æcidiums du pin , des violettes, de la barbe de chèvre, de lortie, du bunium , sur le pétiole, les nervures, et quelquefois sur les ra- meaux ligneux des plantes qu’elles attaquent. 4° Dans quelques plantes, telles que le framboisier et le tussilage , les champignons parasites naissent sous l’'épiderme, lequel est recouvert par un duvet serré , comme feutré, et qui repousse l'eau. 5° Quelques parasites naissent sur des plantes acotylédones qui sont toutes dépourvues de pores corticaux : tel est l’urédo des champignons et læcidium de la peltigère. 6° On sait que les injections colorées passent bien plus fa- cilement par les racines, quoique leurs pores soient encore mal connus, que par les pores corticaux , qui sont cependant bien visibles. D'après ces observations, il est plus plausible de penser que les graines des champignons parasites tombent à terre à leur maturité, se mêlent avec le terreau , sont entrainées par la sève D'HISTOIRE NATURELLE 6) aspirée, entrent dans les racines, montent le long du corps ligneux par les vaisseaux séveux , arrivent avec la sève dans les parties herbacées; que là, trouvant uné position ou une nourriture convenable, ces germes. se développent. On voit d’abord la couleur de la feuille s’altérer un peu, puis lépi- der ‘me se soulève et se fend. Si les parasites sont Lie communs à la surface qui porte les pores, c’est que la sève qui se di- rige vers eux y conduit naturellement les graines. Si on en trouve ailleurs, c’est 48° lx sève parcourt successivement tout le végétal. On ne doit point s’effrayer ici de l’extrême ténuité que je suppose dans les graines de nos champignons. En effet , une plante entière de puccinia n’a pas un douzième de millimètre de longueur ; chaque loge n’a pas un centième de millimètre , et cette loge renferme au moins cent petits globules à peine visibles au microscope, et certainement plus petits que cer- taines molécules terreuses ou colorantes que nous voÿons s’in- iroduire dans les vaisseaux des plantes. Au moyen de cette théorie, on explique facilement plusieurs faits dont la précédente ne peut rendre raison. 1.” C'est un fait qui me paroït constant, que si dans un cer- tain terrain les plantes sont attaquées d’un parasite, elles le sont encore les années suivantes. Or on rend bien plus facile- ment raison de ce fait, en admettant que les graines sont mélées avec le terreau, qu’en les supposant voltigeant dans l'atmosphère. J'ai vu pendant plusieurs années deux jardins séparés seulement par un espace de quelques toises, dont l'un avoit tous ses poiriers infestés de l'æcidium cancellatum, et l’autre avoit tous ses poiriers sains. L’erythronium , qui croit dans un petit bois près de Genève, y a été observé par 9: 9 L] 66 AINJN ALES Do MUSÉUM M. F'aucher, dix ans de suite, attaqué du même æcidium. J'ai vu un pied de cet erythronium attaqué de son æcidium , qu’on avoit enlevé avec la motte et qu'on avoit transporté à un quart de lieue de distancé dans une orangerie; année sui- vante, les nouvelles feuilles de cette plante étoient attaquées d'æcidinm comme celles de Pannée précédente. 2. Il me paroït prouvé par l'observation que les champi- gnons parasites ont chaque année une époque fixe; que ceux dé cette année ne peuvent provenir des graines disséminées actuellement par d’autres individus, mais dés graines de l’an- née précédente. Il faut en effet leur laisser le temps de croître : or , celte croissance n’est pas rapide, et tous ceux dont j'ai ew occasion de suivre l’histoire sont restés plusieurs mois pour parvenir à leur maturité, On sait d’ailleurs qu'on west point encore parvenu, en saupoudrant une plante de la poussière de son parasite, à faire développer ce parasite, quoique cette expérience ait été tentée plusieurs fois sur les parasites du fro- ment, et que je l’aie tentée pour quelques autres. Or si ces faits sont admis, ils s'expliquent bien plus facilement par la théorie que je propose, que par celle indiquée par sir Joseph Banks. On conçoit que les graines de champignons se conservent bien mieux déposées en terre que voltigeant dans l'air. De toutes ces considérations, je suis, ce me semble , autorisé à conclure, que si, comme personne n’en doute, ces parasites sont des végétaux qui se reproduisent de graines, si l'introduction de ces graines ne peut avoir lieu que par les pores corticaux où par ceux desracines , c’est à cette dernière voie qu’on doit donner la préférence (1). Il m'a paru même que le petit nombre d’objec- — (1} M. de Beauvois, dans un Mémoire lu à l’Institut , a objecté contre la théorie SMASTNONÉ ROEX NPAÏTIU REILAL &, 67 tions qu'ôn peut faire à cette théorie sont connnunes à l’une et à l'autre, Ainsi, par exemple, l’action du chaulage pour détruire Puredo des blés paroit contraire aux idées que je viens d’énon- cer ; mais je remarquérai que l'uredo des blés.sécarte, sous plusieurs rapports , des habitudescommunes à tous les uredos. Au lieu d'attaquer les feuilles , al s'établit de préférence sur les glumeset surtout sur les graines des graminées. Il’est probable que les semences de cet uredo restent, soit dans les graines, soit peut-être fixées à sa surface; qu’elles sont ainsitransportées par les semailles ; que le chaulage détruit celles de ces semences qui sont fixées à la surface des grains du blé : mais que si cette opération paroït ne pas réussir constamment , c’est qu’elle n’a aucupe action sur les semences d’uredo qui peuvent se trouver dans la terre où le hlé a été semé. Peut-être même pourroit-on déjà, au moyen des vues que je viens de présenter , indiqner quelque procédé pour dimi- nuer les ravages de ces parasites; et ce moyen sera une con- firmation de la vraie théorie des assolemens. Lorsqu'un champ de blé a été font attaqué par l’uredo ou le puccinia des blés, que j'ai proposée , qu'en observant attentivement et dans leur jeunesse les plantes qui doivent être attaquées de champignons parasites , on y distingue déjà de petits globules, les uns jaunes , les autres bruns et analogues à ces champignons. Jene m'arrêterai point à demander comment on peut deviner d'avance que:tels. ou-tels individus seront attaqués de champignons parasites, pour les observer; comment on peut savoir ,où ils sont placés pour les y trouver; comment enfin on peut s'assurer que ces globules si petits sont bien les mêmes espèces que ceux qui se développeront dans la suite. Négligeant ces observations, je demande si ces glo= bules qu'on dit avoir observés étoient dessus ou dessous l’épiderme. S'ils sont dessus, la question resle toute entière; car il s’agit toujours de savoir comment ils peuvent une fois traverser l'épiderme : s'ils sont dessous, la question reste également entière, et ils'agit de savoir comment ils y sout parvenus. LA gi a] , 68 AININ ALES DU MUSÉUM si l'année suivante on y resème ou du froment ou quelque autre graminée, cette nouvelle moisson en sera infestée comme la première ; mais si au contraire on y place des végétaux d’une autre famille, les graines de lurédo des blés y seront, il est vrai , introduites par la sève , mais n’y trouveront pas la nour- riture qui leur convient; elles avorteront sans produire de dommage, et le terrain s'en trouvera dépouillé. Je livre cet idée aux agriculteurs, pour que des expériences faites en grand la vérilient ou la condamnent, et je me hâte de passer à la derniere partie de ce Mémoiré, savoir, à l'influence des cham- pignons parasites sur les végétaux qu'ils attaquent. , S. IL Znfluence des champignons parasites sur les végé- taux qu'ils attaquent. Dès qu'un champignon parasite se développe sur la feuille d'une plante, l'effet le plus prompt et le plus général qu'oc- casionne cet hôte nouveau , est une tache colorée. Cette tache est ordinairement placée sur la surface supérieure de la feuille, c’est-à-dire , sur la surface opposée à celle par où le champignon doit sortir. Elle est visible avant que le cham- pignon ait percé l’épiderme, De cette circonstance il résulte que si, par une cause quelconque, le champignon vient à avorter avant d'être sorti du parenchyme, la feuille demcure tachée par le parasite, sans que la présence de ce dernier ait été manifeste. Cet accident est très-fréquent, par exemple, sur les feuilles desrumex attaquées par læcidium rubellum. Ces taches m'ont souvent servi d'indice dans les herborisations, pour découvrir des champignons parasites encore inconnus. Elles se distinguent , des simples panachures, par leur forme D'HISTOIRE NATURELLE, 69 plus arrondie et plus régulière; et des marques produites par des vers mineurs, en ce que celles-ci sont souvent sinueuses, décolorées , et que le parenchyme enleyé permet de distinguer les deux épidermes. Ces taches sont ordinairement de la même forme que les groupes de champignons placés à la surface opposée. Cepen- dant lorsque les groupes de champignons sont, comme on les rencontre fréquemment , disposés en anneau, dont le centre est sain , alors la tache correspondante a la forme d’un cercle, et occupe à peu près le même espace que celui qui reste au centre de l'anneau, On diroit que les radicules imperceptibles de tous ces petits champignons partent d’un centre commun placé au côté opposé de la feuille. Dans l'æcidium cancella- tum, on observe même des points noirs et distincts, placés sur la surface supérieure des feuilles de poiriers, au centre de la tache rouge que l’æcidium développe. Les taches produites par les champignons parasites sont généralement rouges ou jaunâtres. Cette couleur ne me paroit pas devoir être rapportée à la nature du parasite, mais à celle des sucs mêmes de la plante. En effet , les taches sont rouges dans toutes les feuilles qui, avant l'époque de leur chute, ont coutume de prendre une teinte rouge, comme on le voit dans les rumex, les fraisiers, les poiriers : elles sont jaunâtres dans lessfeuilles qui deviennent jaunes en vieillissant, celles, par exemple, des pruniers, des saules , des peupliers. L'influence des champignons parasites sur la forme des feuilles offre bien moins de régularité que celle qu'ils exercent sur leur coloration. Dans un grand nombre, la forme des feuilles n’est pas sensiblement altérée par la présence des pa- rasites. Dans quelques plantes où les champignons naissent no A N'N A LES D U :M{U°S'/ÉU M en grand nombre, les sucs nourriciers de la feuille étant dé- viés de leur usage naturel, la feuille reste plus petite et um peu rabougrie. Quelquefois au contriüre elle devient plus large , plus épaisse, et semble destituée de nervure, comme on le voit dans l'euphorbe-cypres. Ailleurs, les nervures ou les pétioles se boursouflent ou se déforment, comme on le voit dans l’adoxa , le buninm, etc. Quelquefois, et notamment lors- que le parasite est du genre érynéum , la feuille se relève en bosse irrégulière du côté supérieur, et l'érynéum se trouve niché dans la cavité opposée. Cette maladie est irès-eonimune sur la vigne. Enfin, les espèces d’æcidium qui appartiennent à la division des cancellaires, font naiître sur les feuilles qu’elles attaquent des espèces d’exostoses compactes, qui ont quelque ressemblance avec les gales des insectes, et qui sont parti- culièrement remarquables sur le poirier, Il arrive quelquois que l’action nuisible des champignons parasites ne s'arrête pas aux feuilles qu'ils attaquent. Ainsi on voit souvent, dans les euphorbes, les feuilles placées au-dessus de celles où le parasite est né , devenir pâles, jaunätres, rester petites et rabougries; souvent la plante entière offre une ap- parence de débilité et de maladie. Get effet s'explique natu- rellement par la diminution ou suppression de l’action des feuilles, si nécessaire à la vie des plantes. Mais cette maladie présente des caractères particuliers, lorsqu'elle s'établit ou qu’elle agit de loin sur les organes de la fructification. Dans quelques plantes , les uredos naissent sur les ovaires, dont ils génent le développement; c’est ce qu'on voit souvent sur les rosiers : c’est surtout ce que les agriculteurs ne con- noissent que trop sur nos graminées céréales. L’uredo des blés attaque les glumes, les ovaires des graminées , et pénètre même D'HWÉSTOIRÉ RATURÉ L L'É 4 dans l'intérieur du grain , dont il consume la fécule, et qu'il remplit d’une poussière noire. Cette maladie , très-bien décrite par M. Tessier, sous le nom de charbon , dans le Traité des maladies des grains, attaque le froment , l'orge et surtout Favoine : on la retrouve sur les graminées sauvages. L'action des parasites sur la fructification ne s'exerce pas seulement lorsqu'ils ont pris naissance dans la fleur , mais lors même qu'ils ne font que couvrir abondamment les feuilles. Je citerai quelques exemples détaillés de ce fait remarquable. Dans un voyage que j'ai fait à Dieppe, un cultivateur de éette ville me mena voir un champ qui depuis plusieurs an- nées étoit infesté d’une mauvaise herbe qu'on n’y avoit ja- ais vue fleurir , et dont le dos des feuilles étoit couvert de poussière brune comme un acrostique. Ce n’étoit autre chose que le chardon des champs ( serratula arvensis, Lin.), qui étoit tellement couvert de l'uredo suaveolens , qu'il ne pou- voit plus fleurir. Lorsque le parasite y est en moindre quan- tité , le chardon fleurit encore assez bien. Cette manière de croître des uredos sur le dos des feuilles, leur couleur et la non-floraison de la plante qui tes porte, ont fait que quelques botanistes des provinces m'ont envoyé des feuilles couvertes d'urédo comme étant de nouvelles espèces de fougères; erreur que l'inspection microscopique détruit facilement. On observe souvent cet avortement des fleurs dans l'eu- phorbe-cyprès, et il y est même assez commun ; pour qu'avant la découverte des champignons parasites, il se soit trouvé des botanistes qui ont décrit les pieds d’euphorbe-cyprès attaqués d’æcidium ; comme une espèce distincte qu’ils avoient nommé. euphorbia degener. De même plusieurs jardiniers ont re- 4 72 ANNALES DU MUSEUM marqué que les pieds d’anémone, attaqués de l'æcidium qua- drifidum , ne fleurissent pas. Quelquefois les fleurs se développent comme à l'ordinaire , mais si le champignon parasite ne prend tout son accroisse- ment qu'après la floraison , les fruits ne peuvent pas venir à maturité, Ainsi les agriculteurs ont remarqué que lorsque les feuilles des céréales sont attaquées par de puccinia des gra- minées , leurs grains sont généralement moins nourris , quel- quefois même stériles. C’est ce que j'ai observé plusieurs fois sur le noisetier , dont les fruits avortent souvent quand les feuilles sont abondamment chargées d’érysiphés. J'ai vu de même des liserons tout couverts d’érysiphés qui fleurissoient assez bien ; mais ensuite leur fruit se desséchoit et tomboit avant sa ma- turité, J'ai vu encore des pruniers dont tous les fruits tom- boient avant la maturité, et dont toutes les feuilles étoient chargées de puccinia. LES jardiniers m'’avoient expliqué ce fait comme à leur ordinaire, en me disant, les uus , que c’étoit le vent; les autres, que c’étoit la brume qui avoit fait tomber les prunes : et je pense que plusieurs des effets qu’on rapporte à ces causes obscures, devront être ramenés par l'observation à l'influence des champignons parasites. Au reste, je ne pré- tends pas que ceux-ci soient toujours des obstacles à la fruc- ülication. Leur action à cet égard est proportionnée à leur nombre , à leur proximité des fleurs, et au degré de foiblesse de la plante. Les faits dont je viens de rendre compte prouvent que les champignons parasites causent , dans les végétaux qu'ils atta- quent, des maladies nombreuses et qui n’ont été étudiées avec soin que dans les plantes cultivées. Ce n’est même que dans ces dernières années qu’on a acquis quelque notion précise à DHisrôinEe N \TURELLE 73 leur égard, et je pense qu'il n’est pas inutile d'mdiquer ici ra- pidement cellés des maladies des végétaux que, dns l'état actuel de la sciénce , où doit rapporter à cette classe: 1° On sait, depuis lé beau travail de Duhamel, que la nialadie connue én Gätinois sous le nom de mort du safran, et désignée par Plenck, dans sa Pathologie végétale, sous le - nom de nécrose des bulbes dii safran ; est due au chainpigron parasite, nommé sclerotium crocorun?; Pers. 2° La maladie que Plenck indique sous lé nom dé verru cosité des feuilles, est due au déveldppement des #eidiams sur plusieurs plantes. 3. Celle qui est nommée givre par ÆAdanson, où bune fongueux par Plenck, où quelquefois blané par les’ jardi- niers , provient de la naissance des diverses espèces d'érysi phé. 4° La maladie décrite par Ædanson, Tessier et Parmen- tier sous le nom de rouille, par Plenck sous celui de rouille des céréales, par Banks sous les noms anglais de blight, mildew et rust, est due à un champignon parasite qui change d'aspect selon son äge. Dans sa jeunesse, il est jaune, et a un pédicule si court , qu'il a été pris pour un urédo, et décrit par Sowerby, sous le-nom d’uredo longissima ; par Lambert, sous celui d'uredo frumenti, et par Persoon, sous celui d'uredo linearis. Dans un âge avancé , il devient noirâtre et évidemment pédiculé ; il a été décrit sous le nom de puccinia graminüm qu'il devra désormais conserver. Persoon et moi avions soupçonné cette identité, qui vient d'être mise hors de doute par l'excellent Mémoire de M. Bancks. 5° La maladie décrite par #danson, Tessier et Parmentier, sous le nom de charbon, et par Plenck, sous lenom de charbon des céréales, est due à l'uredo segetum. 9. 10 "4 ANNALES DU MU-SÉ UM 7 6° Depuis la lecture de ce Mémoire, M. Tessier m'a pro+ curé l’occasion d'observer la carie au microscope, et son ex- trême ressemblance avec le charbon m’a donné les plus fortes raisons de penser qu’elle est due, comme le charbon, à un champignon parasite. Ce champignon doit appartenir au genre des urédos, et se distingue de l'urédo du charbon par son odeur fétide et sa couleur ,non pas noire, mais d’un brun un peu verdûtre. Je vais suivre l'histoire de la carie: et si sa manière de vivre concourt à prouver qu’elle est un champi- gnon , elle deviendra une preuve directe de la vér ité de ma RAS ie, relativement à l'introduction des graines par les ra- cinest On sait en effet que tous les agriculteurs conviennent que la carie s'introduit par les racines et s'élève jusqu'à l'épi par l'intérieur même de la plante. D'HISTOTRE NÎÂTURELTLE, 75 EXAMEN De la pierre dité ZÉOLITE ROUGE du T! Tyrol. PAR A LAUGIER. Mr AUïAS, dans son voyage en Italie vers le mois d'octobre 1805 , a trouvé dans la vallée des Zuccanti en Vicentin, à la naissance des Alpes du Tyrol , un minéral , encore très-rare aujourd'hui, dont il a déposé un échantillon au Muséum d’'His- toire naturelle, et auquel il a provisoirement donné le nom de zéolite rouge du Tyrol. En effet, la disposition rayonnée des prismes aiguillés qui le composent, semble à peu près la même que celle que l’on remarque dans les zéolites. Cepen- dant les pierres de ce genre ayant la propriété de former des gelées avec les acides, et le minéral dont il s’agit ne présentant point ce caractère chimique, on ne peut avec fondement le mettre au nombre des zéolites. Mais si d’un côté il paroit constant que cette pierre n’est point une zéolite, de l'autre, il reste de l'incertitude sur le genre auquel elle appartient. Dans la persuasion que l'analyse chimique pouvoit jeter. quelque jour sur cet objet, M. Faujas a bien voulu me confier cette pierre pour que j'en fisse l'examen. Je vais en peu de mots décrire les expériences que j'ai faites, et en exposer lesrésultats. On pourra juger s'ils sont de nature à décider la question. Lazéolite du Tyrol contient toujours du carbonate de chaux, quelque précaution que lon ait prise pour l’en séparer méca- TON" 70 ANNALES \DU, MVSÉUM niquement. J'ai eu recours à l’acidenitrique affoibli : cinq gram- mes et demi en poudre fine, soumis à son action, qui a été ac- compagnée d’une effervescence assez vive ,avoient perdu, après vingt - quatre heures de repos, 1,54. Il est resté sur le filtre 3,96. La dissolution nitrique a été mise à part. Je reviendrai sur l'examen que j'en ai fait. Examen de la portion de la pierre, non soluble dans l'acide nitrique très-étendu d'eau. Les 3,96 non attaqués par cet acide se’ sont fondus avec la potasse caustique. L/eau versée sur la masse à pris une cou- leur verte que l'acide muriatiqué a fait passer au rose, phéno- mène qui indique la présence d’une certaine quantité de man- ganèse. Ea masse s'est dissoute en totalité dans l'acide mu- riatique, Cette dissolution , soumise à l'évaporation à siccité ,a fourni un résidu qui ne s'est dissous qu’en partie dans l'eau distillée. J'ai obtenu par la filtration une matière d’une blancheur ex- trême , pulvérulente , très-mobile , dont chaque molécule étoit cristalline et brillante, et qui se dissolvoit entièrement dans une solution de potasse caustique : c’'étoit de la silice parfaitement pure. Elle pesoit 2,47, ou quarante-cinq pour cent. La liqueur , dépouillée de la silice, contenoit un léger excès d'acide, que j'avois ajouté avant de la filtrer, pour reprendre quelques atomes de fer qui , vers la fin de l’'évaporation la plus ménagée , se séparent toujours d'avec la silice pour laquelle l'oxide de ce métal a beaucoup d'attraction, et qui en altère la pureté et la blancheur. | Dans l'intention de précipiter les oxides métalliques et lalu- mine que cette liqueur pouvoit contenir , je lai sursaturée d’am- D'HISTOIRE NATURELLE. sb moniaque; un précipité blane-rougeûtre, floconneux, s’est bien- tôt formé : je l'ai recueilli. La potasse caustique avec laquelle je l'ai traité lorsqu'il étoit encore humide, en a séparé l’alamine, et n’a laissé qu'une moindre quantité d'une matière rouge- brune qui a noirci par la dessiccation. L’alumine, isolée par les moyens connus, s'est entièrement dissoute dans Facide sul- furique , et cette combinaison a fourni de très-beaux cristaux d'alun par Paddition du sulfate de potasse. La portion non attaquée par la potasse étoit de Poxide de fer mélé à quelques atomes de manganèse. [/alumine pesoit 0,55 ou dix pour cent; le fer, mêlé de manganèse, 0,2475, ou quatre centièmes , en évaluant l'oxide de manganèse à un demi-centiéme. Si la zéohte du Tyrol contenoit de la chaux combinée, que j'appelle ainsi pour la distinguer de eelle du carbonate caleaire qui l'accompagne , où bien encore de la magnésie, Fune et l'autre étoient restées dans la liqueur déjà précipitée par l’'am- moniaque., Le carbonate de potasse y a en effet formé un pré- cipité assez abondant, floconneux d'abord , qui est devenu pulvérulent par l’ébullition du mélange. Ce précipité s'est pris en masse par la dessiccation ménagée; mais par la calcination au rouge , il a acquis une saveur àcre, piquante , urineuse, la propriété de s’échauffer avec l’eau et de verdir le sirop de violettes. Ces caractères annoncoïent la chaux pure,ou que cette terre formoit la plus grande partie du précipité. Cette matière pesoit 060,50 ou onze centièmes; elle se combinoit aux acides sans effervescence, et formoit avec l'acide sulfurique un sel s0- luble dans une grande quantité d’eau bouillante, Cette eau k essayée par les réactifs , offroit tous les caractères que lui com- munique le sulfate de chaux. Je n'ai pu découvrir dans les lavages de ce sel la plus petite portion de sulfate de magnésie, dont les cristaux'et la saveur sont 5i différens de ceux du ‘ 73 ANNALES DU MUSÉUM sulfate de chaux ; d’où je crois pouvoir conclure que cette terre n'existe pas dans la zéolite du Tyrol. Examen de la portion de la zéolite, enlevée par Tacide nitrique trés-affoibli. On se rappelle que les cinq grammes et demi de la zéolite avoient été réduits à 3,96 par l’action de l'acide nitrique. Pour m’assurer de ce qu'il tenoit en dissolution, je l'ai fait évaporer à siccité ; j'ai lavé le résidu qui s’est redissous totalement dans l'eau. L’ammoniaque en a séparé une petite quantité de fer. L'oxalate d’'ammoniaque y a formé un précipité très-abondant d’oxalate de chaux, qui, calciné dans un creuset, a fourni 0,54 de chaux. Ces 54 centigrammes, auxquels il faut ajouter 0,33,5 d'acide carbonique, représentent 88 centigrammes de carbonate de chaux ou seize centièmes. La différence assez con- sidérable qui existe entre 88 et 154 centigrammes que la zéolite avoit perdus par l'acide nitrique,ne pouvoit être attribuée qu’à la présence d’une grande quantité d’eau. Pour vérifier cette conjecture, j'ai chauffé dans une cornue de verre cent parties de la zéolite la plus pure en poudre très-fine : il s'est dégagé une assez grande quantité d’eau insipide ; le résidu étoit réduit à quatre-vingt-huit parties. L'eau forme donc douze centièmes de la zéolite. La chaleur n’avoit pas été assez forte pour dégager l'acide carbonique; car l’eau obtenue ne rougissoit pas le papier de tournesol, et l'eau de chaux , ajoutée dans le récipient, ne s'est aucunement troublée. Ces douze centièmes d’eau, obtenus par la distillation’, repré- sentent, pour la quantité de zéolite employée dans notre analyse, 0,66 , qui , ajoutés aux 87 ou 88 de carbonate de chaux enlevés par l'acide nitrique, forment exactement la somme de 154. D'HISTOIRE NATURELLE. 79 En rapprochant les résultats de chaque expérience, on en obtient le résultat général suivant. Cinq cent cinquante parties de la Cette quantité donne pour cent par- zéolite du Tyrol sont formées, de ties, Suite tee tele tte ee 7200) ES Cu TOME ADMIN NO RONA Carbonate de chaux . . . . 88 » Carbonate de chaux . . + . 16 Chaux combinée. . . .,. . 60,50 Chaux combinée, . , .« . . It AT AME MR PRET AIO: Eau de cristallisation. . . . 12 ATOMINER Motte lie nee et a lO DIS Alumine ze. ter stetetehenToe Kent. tete foie tete lets tt 22 ts LE ENION ATOME IL SI EMAIL Manganèse . . . . . . + .. 2,75 Manganèse. . . . . ...K 5% 5o AURAS 98,50 Perte ee raie tel 820 Perte ARR ne ioctellt ROO 550,00 100,00 Conclusion de cette analyse. Les caractères extérieurs de la zéolite prétendue ne sont pas assez prononcés pour qu'ils suflisent à la reconnoître. Il en est qui la rapprochent des grammatites; telle est la disposition de ses aiguilles rayonnées ; telles sont aussi les lames rhomboïdales de carbonate de chaux qui y sont intimement mélées. D’autres caractères donneroient lieu de soupçonner qu’elle appartient au genre stilbite. js Lorsque les principes constituans de deux corps sont les mêmes, et qu'ils ne diffèrent l’un de l'autre que par les propor- tions de ces principes, il n’est pas toujours facile de déterminer chimiquement, d’une manière aussi précise qu'ilseroit à désirer, la différence de nature qui existe entre eux ; mais si les corps qu’on a pour but de distinguer, contiennent des élémens divers, l'analyse possede alors des moyens sûrs de les reconnoüre, et c'est dans ce cas surtout que ses recherches méritent la plus entière confiance. Cette dernière considération est applicable aux genres gram- matite et stibite, qui renferment des principes tres-distincts. Les 80 ANNALES DU MUSEUM grammatiles contiennent toujours une assez grande quantité de magnésie ; cette terre leur est fournie, à ce que lon croit, par la dolomite (1), qui leur sert de gangue et qui y est mêlée très- intimement. En second lieu, les grammatites ne renferment pas un atome d’alumine ; au contraire, les expériences multi- pliées des chimistes leur ont appris que les stilbites ne contien- nent point de magnésie, tandis qu’ils y ont découvert une assez grande quantité d’alumine. Ces différences, comme on voit, sont tellement tranchées, que la chimie peut, sans beaucoup d'efforts, décider avec certitude si la pierre qu’on soumet à ses recherches appartient à l’un ou à l'autre des genres ci-dessus désignés. D’après les résultats qu'a fournis celte analyse , la zéolite ren- ferme de l’alumine et ne contient pas de magnésie: elle est donc semblable par sa nature aux pierres qué comprend le genre stilbite;.et je crois pouvoir conclure de mon travail que la pré- tendue zéolite rouge du Tyrol n’est autre chose qu’une véritable sülbite. M. Haüy , dans le premier appéndice de son Traité de Miné- ralogie (art. 14 ), en parlant de la zéolite rouge d'OEdelfors en Suède, fait mention d’ane substance én lainés rougeitres, nacrées, quele célèbre Dolomaeu avoit découverte dans le Tyrol. IL ajoute que cetté substance ne forme point de gelée avéc les acides, et qu'elle & d'ailleurs tous les caractères de la stilbite. On peut présumer qué malgré la différence de leur tissu dont l'un est lamelleux et l’autre aiguillé, ces deux pierres ne sont que la même substance. Il est à remarquer aussi que la couleur de ces deux pierres est de la même nuance. (1) On sait que la dolomite est un composé de carbonate de chaux et de magnésie, D'HISTOIRE NATURELIL +. 8r ANALYSE DE LA TERRE DE VERONE PAR M VAUQUELIN. Pinur les minéraux intéressans rapportés d'Italie par M. Faujas , se trouve de la terre de Vérone qu'il a prise lui-même sur les lieux. L'usage multiplié et utile qu’on fait partout de cette substance pour la peinture, la beauté et la grande solidité de sa couleur verte, lui ont donné le désir de la faire analyser, surtout pour en connoïtre le principe colorant. ; J’ignore si jusqu'ici quelque chimiste a fait l'analyse de cette terre : mais quand cela seroit, ce n’est pas une raison pour empêcher de la faire une seconde fois , lorsque surtout on est certain d'agir sur une matière dans son état naturel; avantage qu'on ne trouve pas toujours dans le commerce. Propriétés physiques de la terre de Vérone naturelle. 1. Couleur verte très-belle, intense et solide, qui la fait em- ployer en peinture, 9:- 11 82 ANNALES DU MUSÉUM 2. Toucher gras et onctueux. 3.° Contenant, à l'état de mélange, une assez grande quantité de quartz dont on peut séparer une partie par des lavages fants avec art. x 4. Fusible avec beaucoup de facilité au chalumeau en un verre noir, | 5° Prenant , à une chaleur rouge, une couleur jaune , même en vaisseaux clos et perdant 4 à 5 centièmes de son poids dans celte opération. G.° Se trouvant à Monte-Bretonico , dépendance de Monte- Baldo dans le Véronais, d’où elle tire son nom; se vend dans le pays sous forme de masses irrégulières. L'intensité et Fimmutabilité de la couleur de la terre de Vérone sembloient me donner l'assurance que j'y trouverois du chrôme en abondance, ou, à son défaut, le fer uni à quel- que substance susceptible de la défendre contre l’action de Fair et de l'humidité, qui, comme on sait , exercent une puis- sance très-active sur loxide de fer au minimum , état qui est, ainsi qu'on le verra plus bas, celui de la terre de Vérone. Mais les expériences auxquelles je lai soumise feront voir combien les analogies entre certaines propriétés physiques des corps sont trompeuses , et feront sentir la nécessité de ne jamais asseoir d’après elles seules de jugement définitif sur la nature des corps. Dans la confiance où j'étois que le chrôme formoit au moins un des principes colorans de la terre de Vérone, je l'ai sou- mise à toutes les épreuves les plus propres à faire découvrir ce métal; je les ai répétées plusieurs fois et de différentes manières, croyant toujours que j'avois mal opéré ; mais toutes mes tentalives ont été vaines: je n’ai pu en découvrir la moindre trace. à D'HISTOIRE NATURELELT. 83 Voyant qu'il me falloit abandonner l'idée du chrôme et convenir que mon premier soupçon n'avoit aucun fondement, j'ai porté mes vues du côté de l'acide phosphorique: tant il m’étoit difficile de penser que l'oxide de fer seul püt donner naissance à une couleur si belle et si solide! Sans dire ici quels moyens j'ai mis en usage pour rechercher la présence de l'acide phosphorique, parce qu'il n’est aucun chimiste qui ne les devine aisément , je dirai seulement qu'au lieu d'acide phosphorique ils n'ont fait découvrir de légères traces d'acide muriatique. J'ai d'abord fait l'analyse de cette terre au moyen de l'al- cali, et j'ai trouvé qu’elle étoit composée : * D'une grande quantité de silice, qui en fait plus de la moitié ; 2° D'une assez grande quantité aussi d’oxide de fer; ° D'une petite pee d’alumine ; je De magnésie à peu près à la même dose ; ; 5° Enfin de quelques traces de manganèse et de chaux. Mais j'ai éprouvé une si grande perte lorsque j'ai additionné les quantités de chacune des matières ci-dessus, que Jai été obligé de recommencer le travail en procédant d’une autre manière. La terre de Vérone étant tres-divisée , et conséquemment très-poreuse , j'ai d'abord soupçonné que l'humidité pouvoit faire une partie du déchet que j'avois eu. J’ai donc distillé dans une petite cornue munie d’un récipient cent parties de la terre eu poudre, et jai chauffé par degrés jusqu’au rouge cérisc. J’&i en effet obtenu quelques gouttelettes d’eau, que je n'ai pu peser; mais le poids de la matière restée dans la cornue avoit diminué de quatre parties. Après avoir coupé zx * 4 84 ANNALES DU MUSEUM le col de la cornue, je l'ai lavé, ainsi que le récipient, avec de l'eau distillée : cette eau a sensiblement troublé la dissolution de nitrate d'argent; phénomène qui confirme ce que jai dit plus haut sur la présence de l'acide muriatique dans cette terre. J’ai ensuite mis 5 grammes de terre de Vérone avec quatre fois son poids d'acide sulfurique étendu de moitié d'eau, et j'ai fait bouillir le mélange pendant plusieurs heures. Ce n’a été qu'avec beaucoup de temps et de difliculté que je suis parvenu à décolorer complétement cette terre : ce qui me fortifioit encore dans l'idée que l’oxide de fer étoit étroitement lié dans quelque combimaison ; car sans cela ilauroït été promp- tement dissous. La matière non attaquée par lacide sulfu- rique étoit blanche et assez divisée ; elle pesoit 3 grammes: mais elle a pris, par la calcination, une couleur jaune qui prouve qu’elle retenoit une certaine quantité de fer, que j'en séparai par l'acide muriatique bouillant; alors elle ne pesoit plus que 2 grammes Go centièmes. Je fis ensuite évaporer la dissolution jusqu’à siccité dans une capsule de platine; je donnai sur la fin un degré de chaleur capable de dissiper la plus grande partie de l'acide sulfurique surabondant. Je fis dissoudre dans l'eau distillée bouillante le résidu, qui avoit une légère couleur jaune , lequel cependant donna à la liqueur une teinte verte prononcée. Cette dissolution rappro- chée me fournit, par le refroidissement, des cristaux octaëdres qui avoient tous les caractères de l'alan. J'obtins, par diffe- rentes cristallisations successives, 3 grammes 20 centièmes de ce sel. Lorsque l'eau mère, concentrée par l’évaporation spon- tanée , refusa d’en donner de nouveau , je la calcinai fortement D'HISTOIRE NATURELLE. 85 dans un creuset de platine , jusqu’à ce que les vapeurs d’acide sulfurique cessassent de se dégager. La matière, alors de cou- leur rouge, fut lessivée avec de l’eau distillée bouillante, et celle-ci me donna, par l'évaporation à l'air, un gramme et demi de sulfate de magnésie contenant seulement quelques légères molécules de sulfate de chaux. : Enfin, pour compléter mon travail sur la terre de Vérone, il me restoit à examiner le fer abandonné par l'acide sulfurique. Tous les essais auxquels je l'ai soumis et que je supprimerai ici, ne ny ont fait découvrir que des vestiges de manganèse et de chaux que j'ai même négligé d'estimer. Ce fer pesoit 1 gramme 1/4 centièmes. L’alun que j'ai obtenu par ces expériences démontre évi- demment qu'il y a dans la terre de Vérone de la potasse et de lalumine; et ce qu'il y a de remarquable, c’est que ces deux substances s’y trouvent justement dans un rapport con- venable pour se convertir réciproquement en alun en se com- binant à l'acide sulfurique. Au moins, je nai pas retrouvé dans l’eau mère de quantité sensible de sulfate d’alumine, ni de sulfate de potasse libre. L’alun , contenant environ 12 grammes de potasse par cent, les 3 grammes 20 centièmes que nous ont fournis les 5 grammes de terre soumise à l'analyse, doivent en contenir 38 centièmes de gramme ou sepl et demi pour cent. ÿ En admettant, comme l'analyse la démontré, onze pour cent d’alumine dans Palun, il doit y en avoir environ 36 dans celui que nous avons obtenu; ce qui fait sept sur cent de la terre de Vérone. Enfin, dans le gramme et demi de sulfate de magnésie , il y a à peu près un cinquième de terre; ce qui donne 30 centièmes de gramune ou six pour cent. 86 ANNALES DU MUSÉUTM Voyons maintenant si en rassemblant les diverses quantités de malières que nous avons énoncées ci-dessus, nous retrou- verons à peu près la somme de terre de Vérone que nous : avons employée : : Sur 100 1-4 DICO he et re Re Eee tbe tai 00 O5 2: FETE DSIUE lobe HET ol lis ene ee te II. 9 ait. Pots l'E GENE NS 10e) Ro BSEE rois sr AloBiné te usuel t et heti095a 7 D MAPRGSTE CN: Us Neue. Lu ti OSDO NO CAE M ER ele chine a tieotieolle ce 0200 r° 7° Acide murialique, manganèse el chaux, quan- tité inappréciable. 4:977 — 99,5 Comparons maintenant cette analyse avec celles des miné- raux faites jusqu'ici, et voyons s’il s’en trouve quelqu’une à laquelle la terre de Vérone puisse être rapportée. M. Haüy, conduit par l'analogie de quelques caractères phy- siques , a placé la terre de Vérone parmi les variétés du tale, à laquelle il a donné le nom de talc chlorite zographique , à cause qu’elle sert à la peinture. L'anelyse que j'ai donnée du tale chlorite du même auteur, se rapproche , mais seulement par la nature des élémens , de celle de la terre de Vérone, et elle en diffère singulièrement par la proportion de ces mêmes élémens. Ces principes sont, dans le talc chlorite, savoir: Eu Hottes 2 CLEO EME CT RTS LH Ar RETURN 5) 1. AA En 11e née) ghetto} à LL Dhs Es see FR 3: Mans Re USE ELMEMNENMQL , HO FNANLIES 4 Ozidefdefen MM RTE cn lies 5 5 Muriate de potasse . . . . . . . Je à 202 OA LUS M EE TA ete un à Lie steel: CU CN D'HISTOIRE NATURELLE. 7 Mais je pente que s’il étoil possible d'enlever comlélement le quartz contenu à l’état de mélange dans la terre de Vérone, les résultats de l'analyse de ces deux substances se rapproche- roient davantage. Cependant je n'ai pas, dans le lemps, à beaucoup près tronvé dans la chlorite autant de potasse que dans la terre de Vérone, à moins qu'une partie de cet alcali ne m’eüt alors échappé: encore cet alcali n’y est-il qu’à l'état de muriate. Une réflexion que je ne dois pas omettre ici, parce qu'elle pourra peut-élre servir à faire décider une question agitée depuis quelque temps entre les minéralogistes et les chimistes, c'est l'état où se trouve le fer dans les minéraux pierreux, et spécialement dans la terre de Vérone. Les uns pensent que ce métal‘n’est que mélangé dans les pierres, et que l'existence de ces dernières est indépendante du fer qui sy trouve. Les autres croient, au contraire, que la plupart du temps il est uni aux autres principes de ces corps par une affinité chimique plus ou moins forte. Il est certain que, dans beaucoup de cas, la présence méme d'une assez grande quantité de fer ne change pas certaines pro- priétés physiques des corps, la forme cristalline , par exemple, puisqu'on la retrouve dans ces mêmes substances où le fer n'existe point. Mais cela n'empêche pas, ce me semble, que lorsque le fer se trouve das un corps, il ny soit combiné par une aflinité chimique: sans cela on ne pourroit concevoir comment ce métal , qui est si abondant et si divisé das la terre de Vé- roue, dont la texture est très-poreuse, n’éprouve aucun chan- gement de la part de Pair et de l'humidité ; comment il résiste si long-temps et si opiniätrément à l'action des acides les plus 53 ANNALES DU MUSEUM puissans, lors même qu’elle est aidée de la chaleur; comment enfin ce métal ne se dissout dans ces menstrues que simulta- nément et proportionnellement aux autres principes de cette terre; qu’on est obligé de regarder comme essentiels. D'après ces observations, je pense que souvent le fer est en vraie combinaison dans les composés pierreux, et particu- lièrenrent ici dans la terre de Vérone. Nora. M. Faujas nous a promis des détails sur les localités de cette terre et sur la nature des pierres qui, par leur décomposition , lui ont donné naissance. D'HISTOIRE NATURELLE. 89 SUITE DES RECHERCIIES SUR LES OS FOSSILES DES ENVIRONS DE PARIS PAR M CUVIER. QUATRIÈME MÉMOIRE. * SECONDE SÉCTION. LES OS LONGS DES EXTRÉMITÉS ANTÉRIEURES. | A nature de la chose nous servoit mieux ici que dans la section précédente, parce que les trois os longs de l'extrémité de devant, l’'Aumerus , le radius et le cubitus, ont des rapports mutuels plus intimes et des formes correspondantes plus pro- noncées que ceux de l'extrémité postérieure. Les circonslances nous ont aussi favorisés à quelques égards, en nous offrant les os dont nous allons parler, réunis dans les mêmes morceaux avec des os de pieds ou autres déjà déterminés. Ainsi le morceau de la section précédente , planche V, 9. 12 go ANNALES DU MUSÉUNM figure 1, mous donnoit une tête de radius avec un calcanéum, un cuboïde et un fémur d'anoplotherium commune. Ce même radius s'est retrouvé dans un autre morceau encore articulé avec le semilunaire du carpe de cet anoplo- therium ( IIL° Mém. sect. IT, pl. IT, fig. 1), et accompagné d'une partie de son Lumerus. Une portion de lumerus de Ia même espèce est, avec le même sémilunaire et deux doigts, dans le morceau de la même section, planche IV, figure 1. Le pied de devant de l'anoplotherium minus (ib. pl. V, fig. 9). éloit accompagné de son radius. Le pied de devant de palæotherium crassum( ib. pl. II, fig. 1 et-2 ) étoit aussi avec des portions plus ou moins con- sidérables des trois os de l’avant-bras. Enfin ,le squelette da palæotherüum muinus trouvé à Pantin ( V.' Mém. IL." sect. ), avoit ces trois os presque entiers. Mais ces secours, joints à ceux que je vais mentionner , sont devenus beaucoup plus importans par une division très- nette que je n’ai pas tardé à reconnoitre dans le système de l'articulation du coude, et d’après laquelle tous ces os se sont trouvés répartis en deux familles bien distinctes. Une partie de mes radius ont leurs têtes supérieures creusées de trois enfoncemens que séparent deux arêtes mousses. Les autres n’ont qu’une saillie au milieu, et par conséquent deux enfoncemens. T1 falloit nécessairement qu’il y eût deux sortes de têtes in férieures d'Aumertus : les unes à trois saillies, pour correspondre aux premiers radius, qui ont trois enfoncemens; les autres, à deux saillies, pour correspondre aux radius qui n’ont que deux enfoncemens. D'HISTOIRE NATUREULE. 1 Il s'est en effet trouvé des humérus de ces deux façons, et quand ils ont été avec leur radius, ces derniers étoient comme on devoit le conjecturer. J'ai vu ensuite que les radius joints à des pieds d’anoplo- therium, et que je viens de mentionner, étoient à trois en- foncemens. J’en ai conclu que ceux à deux devoient appartenir au genre palæotherium ; et en effet les morceaux contenant plusieurs os, et l’analogie du cochon ét du tapir, ont confirmé ces deux résultats. Examinant alors les cubitus d'après leur disposition à s'ar- üiculer aux radius et aux humérus ainsi déterminés , il ne nr'a pas été non plus diflicile de les répartir. Aïnsi j'ai trouvé moyen d’assigner le genre de tous les hu- mérus, les cubitus et les radius que j'ai eus en ma possession ; et leur grandeur, ainsi que leur réunion dans quelques mor- ceaux avec d’autres os déjà déterminés, m'ont aisément donné lieu de les rapporter chacun à son espèce. C'est d’après ces données que je vais les décrire. ART. I." LES OS DE L'EXTRÉMITÉ ANTÉRIEURE DE L'ANOPLOTHERIUM COMMUNE. 1 Le radius. Le triple enfoncement de latéte supérieure du radius fournit le caractère dominant de cette extrémité, dans le genre ano- plotherium. Cette tête est représentée de grandeur naturelle planche FF, figure 14: et lc radius lui-même, à demi-grandeur, figure 5. KoNe 92 ANNALES DU MIUSÉ UM Je l'ai eu, comme je viens de le dire . avec son cubitris, la tèle inférieure de son Aumerus et son sémilunaire; une autre fois avec divers 05 du pied, et plusieurs fois isolé, mais presque toujours mutilé. Sa téte supérieure est un ovale transverse. La concavité du milieu est un autre ovale qui a son grand axe dirigé oblique- ment. Les deux enfoncemens latéraux ne sont presque que des plans inclinés. Cette division en trois fossettes, qui rend le ginglyme du radius avec l'humérus pour aimsi dire encore plus serré que ne pourroit faire la division en deux, ne se trouve que dans le cochon et les ruminans. Les autres pachydermes n’ont que deux enfoncemens à leur radius. L'analogie est donc bien con- servée ici, puisque nous ayons toujours vu l’anoplotheriunr se rapprocher du cochon et des ruminans plus que ne fait le palæotherium. Mais dans ces animaux, c’est l’'enfoncement du milieu qui est le plus petit; et dans l’'anoplotherium, c’est le plus grand: par conséquent il a encore ici un caractère dis- tinctif qu'il ne partage avec aucun autre genre, et qui se re- trouvera nécessairement dans son humérus. La largeur d’une des plus grandes de ces têtes est de 0,055 ; sa hauteur, de 0,035. La longueur du seul radius que j'aie en entier étoit de 0,29 ; mais ce n'étoit pas tout-à-fait un des plus grands. La tête inférieure s’est trouvée beaucoup plus rarement complète que l’autre; je ne Pai eue qu’une fois, mais dans uue circonstance bien intéressante : elle était en place avee le petit os du métacarpe ( IIL° Mém. sect. IE, pL I, fig. 8 et Oo), que j'ai jugé devoir appartenir au pied de devant de l'anoplotherium commune. Depuis lors j'ai eu l'idée d'adapter DIHISITOIRE IN ATUR ELLE. 03 à cette tête de radius l'os sémilunaire (5d. pl. TEL, fig. 1, n.* 1 —6) du carpe de cette espèce : il sy est arrangé parfaitement, et Von a vu que la facette de l’un étoit faite pour Fautre. Ainsi non-seulement j'ai connu par là la tête inférieure du radius de celie espèce; mais ma conjecture sur le doigt imparfait ou surnuméraire de son pieddedevant {IEL.° Mém. sect. IT, p. 107) s’est trouvée parfaitement confirmée. La tête inférieure du radius en question est représentée de grandeur naturelle planche [, figure 8 : & est son bord anté- rieur ; D , le postérieur ; &, l’externe; d, interne. L’aréte oblique a e sépare la facette & e d, destinée à recevoir le sca- phoïde, de celle (a e be ) qui porte le sémilunaire. C’est cette dernière qui correspond si bien à la facette supérieure du sémilunaire (LIL° Mém. sect. IT, pl. LIL, fig. 1 , n° r). Cette aréte se prolonge sur cette portion de la face carpienne du radius » qui se recourbe sur le bord postérieur , derrière le scaphoïde, ene; et c’est ce qui fait un des caractères de ce genre, qui lui est commun avec le cochon, et plus marqué encore dans les ruminans ; Mais qui manque au {apir et au rhinocéros, dans lesquels cette partie recourbée est simple et sans aréte. Le diamètre transverse de cette face articulaire carpienne est de 0,055 ; l’antéro-postérieur , de 0,026. 2. 1’ humerus. J'en ai trouvé la tête inférieure avec l’un des radius précé- dens, et Les deux os $'articulent parfaitement. Cette tête est à moitié grandeur, planche I, figure 2, par devant; figure 3, par derrière, figure 4, en dessous. Il seroit fort imutile de vouloir la comparer à celle d'aucun 04 ANNALES DU MUSÉUM humérus connu. Sa poulie radiale a deux enfoncemens, et par conséquent trois éminences pour les enfoncemens du radius. Celle du milieu est arrondie comme une portion de sphéroïde, et plus large que les deux autres, qui ne sont qu’en portions de cônes , pour répondre aux plans inclinés du radius. Le bord interne descend 1res-bas, parce que la facette de ce côté s’'élargit beaucoup vers le bas. En arrière il n’y a qu'un seul enfoncement demi-circulaire pour le cubitus, qui est la continuation très-élargie de l'enfon- cemeni interne de devant. Le condyle interne est beaucoup plus saillant que autre. Au-dessus de larticalation devoit être un trou qui perçoit l'es d’outre en outre. Cela se juge , parce que le bord a, lig. 2, est entier et non rompu. La structure la plus approchante est celle du cochon et surtout du pécari; mais, comme je l'ai déjà annoncé, la saillie du milieu, loin d’être la plus large, est la plus étroite. Largeur de la paulie en avant. . , . . . . . . . . . 0,063 ————————— en dessous , , .,,. + . . + + « + 0,053 Son plus petit diamètre dans l'enfoncement interne . . . 0,03 Largeur de l'os d’un condyleà l’autre . . . . . . . .0,087 Un autre morceau, pl. E, fig. 1, m'a donné la coupe de la totalité de l'os ; celle de la tête inférieure, ainsi que sa gran- deur , ne laissent pas de doute sur Fespèce. Voici ses dimensions: Largeur en bas entre les deux condyles , . . . . . .0,09 Longueuritotales. :.=,1:0.101 MR TInL ES 2%, R 150525 Largeur emhaut, 4 4,2 4. 0, + + oo. + eo + 1 09075 Plus petit diamètre vers le tiers inférieur . . . ,,. . .0,055 Il ne seroit pas sûr de juger des formes de la tête supérieure d'après une telle empreinte; mais on peut toujours s'assurer D'HLSTOIRE NATUREDLUE. où que la crête deltoidienne descendoit fort bas, peut-être même plus que dans le cheval. Je n'aieu du cubitus de cette espèce qu’une portion de Fofé- crâne articulée avec un fragment de lhumerus. Elle m'en a fait reconnoître d’autres obtenus isolément, et dont je donne une de grandeur naturelle, pl. IT, fig. 6; mais comme l’arti- culation n’y est pas toute entière et que sa partie radiale manque tont-à-fait, je n’ai pu en tirer de caractère suflisant. Néanmoins les dimensions de lhumérus et du radius de cette espèce élant connues, nous avons les proportions de son extrémité antérieure , et nous pouvons la comparer à la pos- térieure. Le bras est long de 0,325. Le radius, et par conséquent lavant-bras, à compter da pli antérieur du coude, de 0,29 à 0,30. Dans la section précédente, nous avons vu un fémur de 0,37 , dans la même pierre avec une tête de radins, large de 0,053, précisément comme seroit celle qui correspondroit à notre humérus. Et par les proportions trouvées dans la même section, le tibia correspondant eût été de 0,283. Ajoutant de part et d'autre les pieds, on verra que lextré- mité postérieure n’excède pas beaucoup l’antérieure, et que cette espèce ne devoit pas être prompte à la course; ce que ses proportions trapues pouvoient déjà faire soupconner. ART. 11. LE RADIUS DE L'ANOPLOTHERIUM MEDIUM. J'ai eu deux têtes inférieures de radius qui, par leur forme, ne peuvent appartenir qu'à ce genre, et par les dimensions qu'à cette espèce. L’arête très-prononcée sur la portion re- 96 ANNALES DU MUSEUM courbée de la face articulaire qui correspond au scaphoïde du carpe, ne permet pas de méconnoitre un anoplotherium. Une de ces têtes est représentée de grandeur naturelle, par devant, planche I, figure 0 : par derrière, figure 10 ; par sa face carpienne, figure 11. & est la facette pour lextrémité inférieure du eubitus; D, celle qui recoit le sémilunaire; €, celle du scaphoïde ; d, la portion recourbée. Cet os porte à son bord interne une apophyse pointuee, dont il n’y a que les carnassiers et surtout les felis qui offrent quelque chose d'approchant : mais ce n’est pas une raison pour leur attribuer ce radius ; car les carnassiers n’ont, comme on sait, qu'un seul os pour remplacer le scaphoide et le sémi- lunaire , et par conséquent qu’une seule facette à leur radius. ART. LI. L'HUMÉRUS ET L'AVANT-BRAS DE L'ANOPLOTHERIUM MINUS. Nous avons donné deux portions d’avant-bras mutilées l’une et l'autre, IIL° Mém. sect. IE, fig. 9 et 10. Le radius de la figure 9 a sa tête supérieure bien entière. Nous le donnons à part, planche il, figure 8, par devant; figure 9, par le côté externe; figure 10, par derrière; figure 11, par le côté interne; figure 12, par sa face articulaire humérale : elle est parfaite- iment semblable en petit à celle de lanoplotherium commune , et leur proportion est comme 1 à 5; car la largeur de la petite est de o,o1, et celle de la grande, 0,055. Le petit radius a 0,07, et le grand, 0,30. Celui-ci est donc plus épais à proportion de sa longueur ; en quoi il suit la règle générale déterminée par les lois de la résistance. Le bord postérieur de cette petite tête ( pl. IE, fig. vo) montre deux facettes larges et presque contiguës pour Parti- D'HISTOIRE NATURELLE. 97 _ culation avec le cubitus ; mais la portion, de cet os (TIE° Mém. sect. Il, pl. V, fig. 10) ne m’a donné aucune de ses faces articulaires, et je n’en ai pas eu d'autre. J'ai obtenu récemment un Aumerus qui appartient évidem- mient à cette espèce. ( PL IE, fig. 13—16.) IL a 0,067 de long, 0,015 de large en bas. Sa tête inférieure représente très-bien en petit celle de l’'anoplotherium commune ; elle a les trois saillies, le grand trou, l'inégalité des eondyles, etc. Je mai pu encore trouver aucune partie du bras ni de lavant-bras de l'anoplotherium minimum. ART. IV. DES TROIS OS DE L'EXTRÉMITÉ ANTÉRIEURE DANS LE PALÆOTHERIUM MINUS. Les radius à trois enfoncemens appartenant aux anoplo- theriums , 1 ne restoit pour l'autre genre que ceux à deux. L’analogie justifie encore ici celte distribution. Le tapir et le rinocéros n’ont aussi que deux enfoncemens à leur radius, et deux saillies à leur Aumerus. Uneiète supérieure bien entière, articulée avec la tête supé- rieure.de son humérus et représentée avec elle (pl. IT, fg.r, 2, 3 6 / ), se trouve répondre , pour la grandeur , à lavant- bras du squelette entier de palæotherium minus de notre cinquième Mémoire. Je la considère done comme appar- tenant à cette espèce, d'autant que la tête inférieure de l’hu- mérus du même squelette s'articule passablement avec elle. 1° Ze radius. Sa tête ( pl. IE, fig. 3 ) est transyersalement oblongue , à 9. 13 98 ANNALES DU MUSÉUM peu près également haute des deux côtés. Celle du tapir et du rhinocéros est beaucoup plus étroite à l'externe. Le bord interne est moins saillant. Le bord postérieur ( pl. LU, fig. 4 ) a deux facettes presque dans le même plan, pour s’articuler avec celles de l'aumerus, sur lequel le radius doit être à peu près immobile. Le radius presque entier du squelette a 0,115 de long, jus- qu'a l'endroit où il est rompu. 2° Le cubitus. La facette sigmoide s’élargit en avant et se bifurque pour venir se joindre aux deux facettes radiales, qui sont presque dans le même plan que ses prolongemens, et dont elle ne se distingue que par une légère arête. Foy. planche IT, figure 2. La face de l'os qui regarde le radius est très-aplatie ; l'olé- crâne comprimé, plus concave du côté interne, se rejetant un peu vers l’externe. Voyez figure 1. Tout cela est assez semblable au tapir; mais dans celui-ci la facette sigmoïde ne se continue qu'avec la radiale interne, et est séparée de l’externe par un enfoncement. La radiale externe y est aussi plus saillante comme une pyramide trièdre. Le cubitus entier du squelette de Pantin est lgng de 0,143; l'olécräne , de 0,034 et haut de 0,017. C’est un peu plus que w’auroit l'os des figures 1 à 4 de la planche II. 3° L'humérus. Il nous est donné , et quant à ses dimensions et quant à sa D'HISTOIRE NATURELLE. 99 tête inférieure, par le squelette du cinquième Mémoire. Il a 0,105 de long et 0,035 de diamètre antéro-postérieur dans le haut. Sa tête inférieure est à deux saillies. ART. V. DES TROIS OS DANS LE PALÆOTHERIUM CRASSUM. L'empreinte complète de ceux de l'avant-bras et une partie de celle de lhumérus se voient dans le morceau représenté troisième Mémoire ( sect. IE, pl. IE, fig. 1 ). Le cubitus a 0,23 de long avec l'olécrâne qui en a 0,05; mais on ne peut rien distinguer de ses articulations. Ce qui reste de l’Aumerus s'accorde avec des fragmeus plus considérables que j'ai eus séparément. Trois sont des têtes inférieures complètes. J’en représente une de grandeur naturelle planche I, figure 5 et 6. Sa poulie articulaire est large de 0,045 , et l'os a entre ses deux condyles 0,095. Cette dernière dimension est un peu plus forte dans le tapir. L'autre est la même. Du reste, cette tête inférieure est semblable à celle du tapir; seulement la saillie externe de sa poulie est plus ronde , et non séparée du bord de los par une concavité. Le condyle externe est aussi moins gros, surtout par derrière. M. de Drée possède un humerus brisé longitudinalement, qui s'accorde, dans ce qui en reste, avec cette tête inférieure. Je le donne, à demi-grandeur, planche I, figure 7. Sa longueur d'a en b n’est que de 0,16; mais la tête supé- rieure y manque. Le tapir n'a pour la même partie que trois millimètres de plus. L'os entier fossile auroit eu 0,19, et en comptant les apophyses , 0,20. C’est une proportion convenable pour le fémur, que nous ayons trouvé, dans la section précé- dente, de 0,24. eu 100 A NN ALES DU MUSÉE UM Un radius qui s'articule parfaitement avec cet kumerus ne peut venir d’une autre espèce. Nous le représentons à demi- grandeur, planche IT, figure 16; et sa tête supérieure de grandeur naturelle, figure 15, et par derrière, figure 18. Elle est à deux enfoncemens : et le côté interne un peu plus étroit, précisément comme celle du palæotherium minus ( ib. fig. 3 et 4 }. De ses deux facettes cubitales l’une est plus étroite que autre, comme il le faut pour correspondre à celles d’an cubitus qui doit être semblable à celui de la figure 17. Le diamètre transverse de sa face humérale est de 0,04 ; l'antéro-postérieur , 0,02. On juge, par ce morceau, que ce radius doit être plus long que celui du tapir; car il ne s’élargit pas encore vers le bas, quoiqu'il ait 0,145, et celui du tapir le fait à 0,13. Il y en a d’ailleurs une autre preuve relative au cubitus. L’empreinte de cet 05 —— Mém. sect. IT, pl. IT, fig. 1) a 0,23. Le cubitus de tapir n’a que 0,21, quoique son EI ATS soit un peu plus long, ayant 0,06, et celui de notre animal seulement 0,05. De tout cela je conclus que la longueur totale du radins auroit été de 0,018; et c'est ce qu'annonce aussi l'empreinte mentionnée ci-dessus. Nous avons vu dans la section précédente que le tibia est long de 0,20, et celui du tapir, de 0,21. Notre palæotherium crassum avoit donc les pieds de devant un peu plus longs, et ceux de derrière un peu plus courts à proportion que le tapir, et devoit être encore un peu moins léger que lui à la course. J'ai une tête inférieure de cubitus que je crois devoir rap- porter à cette espèce; elle est semblable à celle du tapir, mais un peu plus large, D’HISTOLRE .N ATUR ELL E. GI ART. VI. DU CUBITUS DU PAUÆDTHERIUM MEDIUM ET DE SON RADIUS. J'ai eu le cubitus presque entier deux fois, mais toujours isolé. Cependant sa grandeur et sa ressemblance avec le tapir, jointes à ce qu'il est plus long et plus gréle que celui de l'article précédent, ne laissent point de donte sur l'espèce. Je représente cet os de profil, à demi-grandeur ( pl. IE, fig. 13), et sa partie supéricure, par sa face radiale, de grandeur natu- relle..( :b..fig. 417 ). La ressemblance de sa partie supérieure avec le tapir est à sy méprendre. Seulement l’espace non lisse qui sépare le côté interne de la facette sigmoïde de la radiale du même côté, 6st moins grand et moins enfoncé; Polécräne est à peu près de même longueur que celui du tapir, mais moins haut, et les facettes articulaires, ainsi que la largeur de Pos sous la tête du radius, sont beaucoup moindres. Los lui-même est beaucoup plus long et plus grêle. La face inférieure ou car- pienne ( pl. IE, fig. 19 ) est un triangle dont l'angle externe et l’antérieur sont un peu aigus et l'interne obtus. Le pre- mier se recourbe en arrière et en haut pour porter le prsi- forme. Le tout est fort semblable à la même partie dans le tapir. Quoique un peu plus petit , ce cubitus est long en tout de 0,2. L’olécräne a 0,05 de long, et 0,03 de haut. La largeur de la partie de l'os qui recoit la tête supérieure du radius est aussi de 0,03. La corde de l'arc de la facette sigmoide est de 0,025. La tête inférieure n’a que 0,02 sur son plus grand côté. Quant au radius, je n'ai eu qu'une moitié de sa tête infé- rieure, savoir la portion à laquelle s’attachoit le scaphoide 1292 - ANNALES DU MUSÉTM du carpe. Je l'ai trouvée avec le carpe même dans le morceau du cabinet de M. de Drée ( TIL*Mém. sect. IL, pl. I, fig.1,ab) Elle est semblable à la partie correspondante du tapir. Le creux antérieur & est plus profond, parce que le scaphoïde est plus saillant ; mais la partie recourbée en arrière b est Ja même dans les deux espèces, et n’a point l’arête qui la distingue dans les anoplotheriums. f Le hasard n’a pas permis que j'obtinsse aucun des trois os du palæotherium magnum ; mais je ne serois pas embarrassé de les rétablir , d’après les données que me fournissent les formes des espèces voisines et les proportions de celle-ci. V2? 10: « LL Care words Fign. Pi; .10. Liy.9: TND Fig. #, Laillerd del. ‘ Cane soufre. D'HISTOIRE NATURELLE. 103 NOTICE Sur les analyses du CHrômaTr DE FER, et de la variété d’ÉPrpore appelée Zoxsrr. PAR M. HAU Y. M. Laurier, aide-chimiste pour les analyses, a publié, dans le trente-cinquième cahier des Annales du Muséum le résultat de l'analyse qu'il avoit faite du chrômate de fer de Sibérie, et ce résultat s’est trouvé conforme à celui que M. Vauquelin avoit obtenu, en opérant sur le chrômate de fer découvert par M. Pontier dans le département du Var. M. Klaproth a répété depuis peu l'analyse de la même substance, sur un morceau qui provenoit de Krieglach en Styrie, etson résultat ayant été communiqué à M. Laugier , nous croyons devoir l'insérer ici comme offrant la confirmation des deux précédens. KrarroTr. Laucter. VAUQUELIN. Chrômate de fer de Styrie. Chrômate de Sibérie. Chrômate du Var. Oride delchrome 9160551540 EN RRRNREUEULPURS Fes EE CURE GG CEE TE EN EN ET RITES 34,7 ‘AMUrrEUINe At ete TIGE et SN eat IN UE LEVIN RENNES ss.» 190,3 SES CORNE 2 etc ANNEES AUX Déchet par grillage. 2° Do IC R ON MENSNENE So Rertersr MINIME A ANS AL EE CN DORA R LE RRE RASE REED 10! ÀANNALES DU MUSÉU M On lit dans le vingt-septième cahier des Annales le résultat d’une autre analyse faite par M. Laugier , et, qui avoit pour objet une substance grise rapportée du Valais, que j'avois re- connue , d'après sa structure et ses propriétés physiques, pour une varièté de l'épidote, quoiqu'elle différät par ses caractères extérieurs des cristaux de cette espèce observés jusqu'alors. M. Laugier trouva que les qualités et les quantités respectives de ses principes composans étoient les mêmes que dans lépi- dote d'Arendal et dans celui de France, analysés, l'un par M. Vauquelin, et l'autre par M. Descostils. La même variété existe aussi en Carinthie et dans quelques- unes des contrées voisines, et l'on a su depuis que M. Werner en faisoit une espèce particulière à laquelle il a donné le nom de zoysit, en l'honneur de M. le baron de Zoys. La distinction que M. Werner établit entre cette substance et notre épidote est en quelque sorte une suite de la nomenclature adoptée par ce célèbre naturaliste; car il donne à l'épidote le nom de pis- tazit (pierre de pistache ), parce qu'il est en général d’un vert plus ou moins foncé. Or ce nom semble exclure le zoysit, dont la couleur est le gris, le brun ou le jaune brunätre, et janrais le vert, au moins dans les échantillons que nous avons eus sous les yeux. M. Laugier a appris que MM. Klaproth et Bucholz ont ana- lysé récemment le zeysit, et voici leurs résultats, auxquels nous joignons celui qu’avoit obtenu le chnmiste français. D HI ST O IM E NA TU RE L LE. 109 Kzaprotu. Laucrer. Bucxorz. Épidote gris, dit ZOYSIt. Mème substance. Même substance, So nos del ME A EE RE Va an MMM ET 1 Alumine NE RENE CRIS EE RES 0 GI ON Re MN USo2 D CGhaUR ARE EEE or Re le LE US OrMENL Den ON RAR EL POTEMEL AN Oxide defer. . ., DES: VileiCanonle DL Leu e | Led ete lai cel 00 Oxidéldermanpanese!. 4# oo 2e “rer cp Pet $ del cp Or ee pete à vo ver 20,0 Eat NT PONS EN er tte ete lle) ON IN RIPPE REA Ur Perte rique de Ter IL TN RE nl … 01 oO 100 5 100 100 Si l'on compare ces trois résultats , soit entre eux, soit avec les autres qui ont eu pour objet l’épidote de Norwege et celui de France; et si d’une autre part on considère l'accord qui existe entre la chimie et la géométrie des cristaux , on aura les preuves les plus convaincantes que le zoysit doit être réuni à l'épidote, comme l’a été le minéral de Norwege, que l'indi- cation trompeuse de ses caractères extérieurs avoit fait placer dans une espèce particulière, sous les noms d’arendalite et d'akanticone. 106 ANNALES DU MUSEUM MÉMOIRE SUR LA LÉTHARGIE DES MARMOTTES, Envoyé par M. Mancrzr, professeur d'histoire naturelle à Pavie. Traduit sur le manuscrit italien par M. DELEUZE. Ux des phénomènes les plus dignes de l'attention des natu- ralistes , est ce sommeil profond nommé léthargie auquel sont sujets pendant l'hiver un grand nombre d’animaux à sang froid , et plusieurs de ceux à sang chaud, tels que les marmottes, les loirs, les chauve-souris, les hérissons, les muscardins, etc. Divers auteurs anciens et modernes ont traité ce sujet ; mais comme ils n'ont pas fait les observations et les expériences convenables, leurs écrits présentent beaucoup d'incertitude. Aussi llastitut national de France a-t-il invité les savans de l'Europe à examiner avec le plus grand soin, 1. les phénomènes que présentent en hiver les animaux en léthargie ; 2. la cause de cette léthargie; 3.° pourquoi elle est particulière à ces animaux, Sans prétendre donner la solution complète d’un problème D'HISTOIRE NATURELLE. 107 qui, tel qu'il est énoncé , me paroit très-diflicile à résoudre, surtout pour la dernière partie, j'exposerai dans quelques Mémoires ce que j'ai observé jusqu’à présent relativement aux marmottes, aux loirs, aux muscardins et aux chauve-souris. : Je me flatte que le résultat de mon travail fera cennoître aux savans les principaux phénomènes qui accompagnent la léthargie de ces mammifères, l’ordre que suivent leurs princi- cipales fonctions organiques, et quelle est l'action, soit d’une température élevée , soit d’une température très-froide, sur leur économie intérieure. Je ne dirai rien des habitudes de ces animaux dans l’état naturel et dans l’état d’esclavage ; j'aurai peut-être occasion d'en parler dans un autre temps : je me borne aujourd’hui à rendre compte de ce que j'ai observé sur les marmottes, qui occupent le premier rang parmi les animaux sujets à la léthargie périodique. Le but principal de mes observations a été d'examiner les divers phénomènes que présentent les marmottes pendant la durée de leur léthargie conservatrice , bien différente de la léthargie mortelle qui peut avoir lieu dans tous Les animaux par l'effet d’un froid plus ou moins vif. J'ai surtout étudié la marche que suivent alors leurs principales fonctions orga- niques, parce que les physiologistes ne sont pas d'accord sur ce point; les uns prétendant que ces fonctions sont entièrement suspendues, et les autres, qu’elles continuent quoique d’une manière languissante et qui suflit à peine pour faire connoitre l'existence du principe vital. Un célèbre naturaliste du siècle dernier s'ex prime ainsi : « Lorsque le sommeil commence , la respiration devient » moindre; elle est nulle lorsque laléthargie estcomplète. Alors DE 108 AN N AALUES. VD © M USE vw! M » la marmotte a les yeux fermés, son corps est courbé en arc, » elle est immobile et entièrement froide. On peut la rouler, » la jeter en l'air, la maltraiter, sans qu’elle donne le moindre » signe de vie ». Le même auteur soutient qu’un froid plus vif, au lieu de reveiller les marmottes, rend leur léthargie beau- coup plus profonde. | Je ne citerai point ce qu’ont écrit d’autres auteurs depuis quelques années, parce qu'on voit clairement qu’ils n’avoient pas fait les observations nécessaires pour prononcer avec connoissance de cause. Le 1° décembre 1803, on n'apporta à Milan trois petites marmottes prises sur les Alpes qui séparent le territoire de Chiavenne de celui des Grisons. L’une des trois étoit un peu apprivoisée et dans l'état de veille : je l'ai gardée deux ans pour étudier ses habitudes. Les deux autres étoient dans l’état de léthargie. Le même jour je pesai les deux dernières, afin de connoître combien elles auroient perdu de, leur poids au bout d'un certain temps d'une léthargie continuelle ; la première se trouva peser vingt-cinq onces milanaises , et la seconde, vingt- deux onces trois deniers (1). Au premier aspect, elles paroissoient privées de vie : elles étoient roulées en boule, ayant le nez appliqué contre l'anus, les yeux fermés, les dents serrées , et elles paroissoient tout-à-fait froides lorsqu'on les tenoit dans les mains. Cependant lorsqu'on les piquoit et qu’on les excitoit de plu- sieurs manières, elles donnoient des signes non équivoques de mouvemens d'irritabilité, et quelquefois , quoique rarement , (:) Le denier est la vingt-quatrième partie de l'once, D'HISTOIRE NATURELLE, 100 j'ai aperçu une foible dilatation et un abaissement successif dans les flancs, ou quelques indices d’une respiration languis- sante. Les deux marmottes restèrent dansla plus profonde léthargie jusqu'au 3 janvier 1804. Le thermomètre de Réaumur , placé : dans la chambre où elles étoient, ayant varié de cinq à neuf degrés au-dessus de zéro, le soir de ce jour la plus grosse passa de l'état de léthargie à celui de veille : et elle S'éloigna de sa compagne à côté de laquelle elle étoit couchée , pour chercher dans la chambre un endroit plus abrité où elle püt mieux se garantir du froid. Aussitôt que je m’aperçus que l’une des marmottes étoit éveillée, je les pesai toutes deux, et je trouvai que la plus grosse avoit perdu dix-huit deniers de son poids primitif, et l'autre, dix-sept deniers et demi. Au bout de vingt-quatre heures, la marmotte éveillée retomba de nouveau en léthargie, et elle resta dans cet état jusqu’au 11, la température de la chambre étant de cinq à huit degrés. Le 11 au Soir, la température extérieure étant d'environ quatre degrés, je pris le parti d'exposer la même marmotte à l'air libre sur la tablette de ma fenétre. Peu de temps après elle commença à s'agiter et à donner des signes de souffrance. Je remarquai même un léger indice d'inspiration et d’expi- ration; et craignant qu'un froid plus vif ne la réveillät entie- rement , je la replaçai dans son lit au bout d’une heure. Malgré celte précaution , elle continua à donner des signes non équi- voques d’une respiration plus fréquente. En effet, deux heures après je la trouvai presque entièrement éveillée; mais elle ne s'étoit pas fort éloignée de sa place, et elle se rendormit bientôt. D’autres tentatives la réveillérent de nouveau quelques jours 110 AN N À LLE/S. :D UAMUU!S Elu après , et elle retomba , pour la quatrième fois, dans lesommeil léthargique au bout d'environ vingt-quatre heures. J'ai dit que plus d'une fois j'avois apercu des signes non équivoques d’une respiration trés-lente. Je voulus m’assurer par l'expérience et par des observations réitérées , si cette res- piralion avoit une période régulière. En conséquence, le 4 février à neuf heures du soir, je placai la plus petite mar- motte sous une cloche dont les bords étoient plongés dans de l'eau de chaux très-claire. Au milieu de la cloche étoit un piédestal qui portoit une pièce de bois un peu concave sur lequelle la marmotte étoit placée comme dans un nid. J’eus soin que l’eau füt exactement de niveau au dedans et au dehors de la cloche an moment de l'immersion, et le lendemain 5 février à neuf heures du matin, je trouvai qu’elle s’étoit élevée d’en- viron trois lignes dans l'intérieur de la cloche, et qu'il s'étoit formé une pellicule à sa surface. Il me restoit à examiner l’état de l'air renfermé sous la cloche ct la nature de la pellicule. à J’essayai l'air avec leudiomètre du cél'ébre Volta, et je trouvai qu'il avoit perdu une partie de son oxigène; quelques gouttes d'acide nitrique, versées sur la pellicule, produisirent la plus vive effervescence en dégageant l'acide carbonique. Ces deux expériences m'ont convaincu que pendant le sommeil léthar- gique la respiration n’est point suspendue : d’où l’on doit pré- sumer que la circulation continue de même, mais avec une langueur proportionnée à celle de la respiration. Je m'en suis en effet assuré depuis par mes propres yeux en examinant avec un bon microscope les ailes des chauve-souris qui sont dans l'état léthargique, et j'aurai occasion de parler de ces mam- mifères dans un autre Mémoire. ; : n às La plus petite des deux marmottes soumises à l'expérience D'HISTOIRE NATURELLE. L QE continuant à être dans la plus profonde léthargie , je fixai mes yeux sur elle , et l'examinant avec beaucoup d'attention, j’aper- cus dans ses flancs un mouvement très-foible d’élévation et de dépression successives. Je pris ma montre et je m’assurai que ces signes non équivoques de respiration se renouveloient à des intervalles de quatre minutes ou quaire minutes et demie, et qu'il y en avoit quatorze dans l’espace d’une heure, tandis que dans l'état de veille parfaite il y en a environ quinze cents. Telle est la loi que suit dans ces mammifères l’une des prin- cipales fonctions organiques pendant la durée de la léthargie naturelle, que j'ai nommée léthargie conservatrice, pour la dis- tinguer de celle que produit un froid excessif : cette dernière est ordinairement suivie de la gangrène et de la mort, et me semble , par cette raison, devoir être nommée léthargie mortelle. Si lon s'étonne que j'aie placé mes marmottes à une tem- pérature de six à neuf degrés, je répondrai qu’en général les mammifères sujets à la léthargie périodique se renferment, pour sy livrer, dans des tannières où latempérature est douce; sans cela ils seroient réveillés par la douleur que leur cau- seroit le froid, et souvent ne pouvant trouver d’abri pour s’en garantir, ils seroient saisis par la léthargie mortelle, et passe- roient ainsi de la douleur à la gangrène et à la mort. En effet, ayant visité plusieurs fois dans le cours de l'hiver une fameuse grotte de mon département, dans laquelle ÿ'ai trouvé plusieurs centaines de chauve-souris engourdies, je me suis assuré avec un bon thermomètre de Réaumur que la température de celte grotte étoit constamment au-dessus de neuf degrés. On sera persuadé que la température doit être à peu près TI2 ANNALES DU MUSEUM la méme dans les tannières où se retirent les marmottes , si l’on réfléchit qu’elles les creusent à une profondeur considé- rable; qu'elles bouchent avec soin le canal qui y conduit et qui est long de plusieurs brasses , et qu’elles garnissent de foin le lit sur lequel elles se couchent. Il faut observer encore que la graisse dont elles sont pourvues contribue beaucoup à les garantir du froid. Il est vrai qu’elles habitent des lieux sau- vages et couverts de neige pendant plusieurs mois; mais cette neige leur est utile, en ce qu’elle empêche la gelée de pénétrer le terrain sous lequel elles sont enfermées. Une température modérée est nécessaire pour la continua- tion de la léthargie conservatrice ; les animaux qui y sont plongés éprouvent de la douleur, et sont réveillés par l'augmentation considérable du froid : alors ils s’agitent et montrent le plus vif désir de trouver un lieu où ils en soient garantis. J’ai eu plu- sieurs occasions de m'en convaincre. A la fin de décembre 1799, des araignées qui étoient dans mon appartement furent réveillées par la vivacité du: froid qui y avoit pénétré , et elles tournèrent de tous les côtés pour cher- cher des trous où elles pussent se mettre à l'abri. Le matin du 4 février 1803, je trouvai sur la tablette exté- rieure de ma fenêtre une chauve-souris commune , qui étoit morte, Ce pauvre animal, engourdi depuis quelques mois dans un trou de la muraille voisine, avoit été sans doute réveillé par la rigueur du froid de la nuit précédente, qui avoit été de onze degrés. Il avoit volé jusqu'à la fenêtre de ma chambre dans l'espoir d'y entrer ; mais ayant trouvé les vitres fermées , et ses ailes étant trop engourdies pour qu'il pût voler plus loin, il fat attaqué de la léthargie mortelle, sans pouvoir s’en garantir en changeant de place. D'HISTOIRE NATURELLE. 113 Revenons aux observations que j'ai encore faites sur mes marmottes. Le 5 février, les ayant pesées de nouveau, je trouvai que la plus petite pesoit vingt-une onces , et la seconde, vingt-deux onces et vingt-un deniers. La petite, depuis le premier jour où je lavois pesée jusqu’au 5 février, ne s'éloit éveillée qu’une fois; et cette veille, qui avoit eu lieu le 4 janvier, avoit duré moins de vingt-quatre heures. Il résulte de là que depuis le 4 janvier la perte de son poids se réduisoit à environ neuf deniers, tandis que la plus grosse, qui s'étoit éveillée plusieurs fois, avoit perdu trente- trois deniers dans le même intervalle. Cette différence de poids nous prouve évidemment que la graisse dont ces animaux sont pourvus leur est infiniment utile : non-seulement il sen consomme une partie pendant le som- meil léthargique, mais ils en sont encore nourris pendant les intervalles de veille auxquels ils peuvent être exposés par l'élévation où labaissement de la température. En effet, nous sommes parfaitement sûrs qu’ils passent ces temps de veille sans prendre aucun aliment, et que ce jeùne ne leur cause pas la moindre incommodité. Le même jour 5 février, ayant placé la plus grosse des marmottes sur un piédestal , et l'ayant couverte d’une cloche de verre dont le bord reposoit sur un récipient rempli d’eau de chaux, je fixai pendant une heure mes yeux sur son corps, pour mieux connoître les phénomènes relatifs à la respiration ; et je vis, àn’en pas douter, que pendant ce temps les mou- vemens d'inspiration et d'expiration se répétèrent quinze fois d'une manière distincte, et à des intervalles de trois , quatre ou cinq minutes. ‘6 15 114 ANNALES DU MUSÉUM Le même jour , à neuf heures du soir, je plaçai la petite marmotte sur la tablette extérieure de ma fenêtre, dans un petit Bt de foin. Elle resta quelque temps immobile, donnant seulement ces signes d'une respiration languissante qui continue toujours pendant la léthargie : mais au bout d’une heure , je m'apercus que sa respiration étoit devenue plus fré- quente, et qu’elle paroissoit plutôt dans l’état de sonnmeil que dans l’état de léthargie; tellement que la température extérieure, qui étoit de trois degrés et demi au-dessus de zéro, au lieu de diminuer la respiration, l'avoit considérablement accélérée. Je voulois la laisser encore une heure dans la même situation, mais voyant que sa respiration continuoit d’aug- menter , et m'étant apercu en la touchant que la chaleur de son corps s’étoit sensiblement accrue, je la retirai et la remis à sa place accoutumée dans la chambre. Je me flattois qu’elle ne s’éveilleroit pas entièrement et qu’elle rentreroit bientôt dans la léthargie ; mais l'ayant visitée vers les dix heures du soir , non-seulement je la trouvai éveillée , mais je vis qu’elle avoit repris sa chaleur et sa vivacité naturelle : elle sortit tout à coup de son nid et s’enfonça davantage dans le foin, comme pour chercher un abri contre le froid, les visites importunes, et les autres accidens qui pouvoient la tirer de sa douce lé- thargie. Il suit de là qu’il faut beaucoup moins de temps aux mar- mottes pour sortir du sommeil léthargique que pour y rentrer. L'autre marmotte, que j'avois placée sous la cloche, prit sur son petit bercéau, quoiqu’elle füt en léthargie, la position la plus convenable pour se garantir du froid , et elle continua à donner des signes d’une respiration languissante quatorze ou quinze fois par heure. J’observai aussi que l'eau s’étoit notable- D'HISTOIRE NATURELLE. ar ment élevée dans la cloche, et qu'il sy étoit formé une pellicule de carbonate de chaux. Le 6 février, le thermomètre se soutenoit dans la chambre entre six et sept degrés. À une heure après midi , la tempéra- ture extérieure s'étant fort adoucie et s'étant élevée jusqu’à sept degrés et demi, je résolus d'exposer sur la tablette extérieure de ma fenêtre la marmotte en léthargie qui étoit sous la cloche. Mon but étoit de savoir si l’action du froid , lorsqu'il s’accroi- troit par une gradation insensible , produiroit sur l'animal les mêmes effets qu'avoit produits un passage brusque, quoiqwil n’y eût jamais eu une grande différence entre la température de la chambre et celle de l'atmosphère extérieure. Pendant deux heures et demi la marmotte ne donna que les mêmes signes de vie que nous avons déjà remarqués ; mais à six heures et demie j'aperçus, quoique rarement , quelques indices d'une forte respiration. La nuit approchant, le ther- momètre descendoit peu à peu , tellement qu’à six heures celui qui étoit en dehors ne marquoit plus que quatre degrés. Ce fut en ce moment que je visla marmotte agitée de mouvemens convulsifs qui annoncçoient du malaise et de la douleur : ensuite elle s’étendit sur son berceau ; sa respiration devint plus vive et s’accéléra graduellement à tel point, qu’elle paroissoit plutôt dans l’état de sommeil que dans celui de léthargie. A sept heures elle respiroit déjà seize fois par minute, tandis que pendant la léthargie elle ne respiroit que quinze fois par heure. La chaleur de son corps, éprouvée par le thermomètre, aug- mentoit avec la fréquence de la respiration; tellement qu'à neuf heures et demie je la trouvai parfaitement éveillée. Convaincu par cette expérience que l’action du froid, quoi- qu'il s'accroisse par une gradation lente et presque insensible, HOT r'6 |: A NNUAILES : DU. U 6 EU produit dans les animaux en léthargie le malaise, la douleur et enfin le réveil, je retirai la marmotte de sa situation incom- mode, pour la replacer dans la chambre sur un lit de foin. Mais avant j'essayai de la faire marcher sur le parquet; en effet elle s’efforça de se trainer ça et là avec ses pattes de devant. Elle auroit voulu aller se cacher dans un coin ,mais elle ne put y réussir : ses membres postérieurs étoientencore trop engourdis, parce qu’étant plus éloignés de la cavité de la poitrine, ils ne jouissoient pas encore de la chaleur nécessaire pour mettre en jeu les muscles qui devoient les mouvoir; c’est pourquoi elle étoit obligée de traîner ses jambes de derrière. Le 20 février je voulus faire une autre expérience : à sept heures du soir , je pris la plus grosse des deux marmottes en léthargie; je la plaçai en dehors de la fenêtre dans nn récipient entouré de glace à laquelle j'avois mélé du muriate de chaux. Ce mélange produisit dans l'intérieur du récipient un froid si vif, que le thermomètre que j'y avois placé descendit à sept degrés au-dessous de zéro. Ce passage brusque du sixième degré au-dessus de zéro à sept degrés au-dessous , n’excita point subitement des mouve- mens convulsifs dans le corps de la marmotte. Mais il s’étoit à peine écoulé une demi-heure, que je remarquai en elle des signes de malaise et de douleur. Je vis de grands et fréquens mouvemens d'inspiration et d'expiration , qui alloient toujours en augmentant et qui devoient la fatiguer beaucoup. Cependant comme elle étoit dans la plus profonde léthargie,-et que l’at- mosphère dans laquelle je l'avois placée étoit extrémement froide, il lui fallut beaucoup plus de temps pour s'emparer du degré de chaleur nécessaire pour la faire rentrer dans l’état de veille, et lui faire recouvrer la puissance de sa volonté. D* HUIT IST ON RIRI EUGN LAND U R'EUL LE. 117 En effet, je la trouvai complétement éveiilée vers les onze heures du soir. Le froid continuoit à être tres-vif. Elle essaya plusieurs fois de s'échapper : elle s'agitoit de côté et d'autre , et ces mouvemens causés par le malaise et la douleur durerent fort avant dans la nuit. L À Je la visitai plusieurs fois, et je n’aperçus qu’elle m’étoit occupée qu’à se défendre du froid: elle étoit toute tremblante. Ses veux étoient encore à demi-fermés. Malgré cela, elle nese rendormit point, quoique je la laissasse exposée au méme degré jusqu’à neuf heures du matin. Je suis persuadé qu’un froid beaucoup plus intense l’auroit au bout d'un certain temps plongée dans cette autre léthargie qui est infailliblement suivie de la mort, à moins que des secours dontiés à propos n’y portent remède. Il seroit trop long de donner le détail de toutes les obser- vations que j'ai faites sur mes marmottes pendant le cours de plusieurs mois. Il me suffit d’avoir indiqué les principaux phé- nomènes relatifs à leur léthargie , la marche que suivent leurs principales fonctions organiques, et comment l’action d’une température trop élevée et celle d’une température trop froide produisent les mêmes effets sur leur écondmie intérieure. Dans un autre mémoire, j'exposerai ce que j'ai observé de- puis l’hiver de 1804 ,et même pendant la présente année, rela- tivement aux chauve-souris, aux loirs et aux muscardins; et je me flatte que de l’ensemble de mes observations résultera la connoissance des différentes causes qui concourent probable- ment à plonger ces mammifères dans un sommeil léthargique. 118 ANNALES DU MUSÉUM DUR LES PAR M. FRÉDÉRIC CUVIER, GARDE DE LA MÉNAGERIE DU MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE. L'uamronr où sont les hommes de voir les animaux qui les entourent parcourir toujours le même cercle d'actions, pré- senter constamment et dans le même ordre à leurs observations les mêmes mœurs , le même genre de vie, les a portés à con- clure que les diverses qualités dont ces animaux sont doués étoient essentielles à leur nature, et que chaque espèce les avoit reçues au moment de sa naissance , telles qu’elle les possède encore aujourd'hui. Cependant si l’on étudie avec quelque attention les animaux, on ne tarde pas à s’apercevoir que la plupart de leurs facultés, et souvent les organes qui en sont le siége, éprouvent des chan- gemens considérables. Plusieurs circonstances paroissent en être cause; quelques-unes ont été apercues , bien peu ont été appréciées. Les lieux, la nourriture , la plus ou moins grande liberté, exercent une action incontestable. Ces diverses causes peuvent se combiner de plusieurs manières , et déguiser ainsi la nature à nos yeux. D’après ces vérités depuis longtemps reconnues, que par la pensée on parcoure la surface de la terre, où trouvera- t-on un seul climat, une seule contrée qui soit entièrement DB M SE LOMIMRUEMENTA ET QUNRVE LL E. 11Q semblable aux autres? Quel est le pays oùles animaux soient à la fois exempts de l'influence des saisons et de celle de la nourri- ture, de la tyrannie des plus forts d’entre eux et de la ruse des plus faibles? Et qui ne s'est demandé cent fois : l'animal , comme l’homme de la nature , n'est-il pas entièrement un être de raison ? C’est dans ces vues que j'ai étudié les animaux confiés à mes soins. Les ménageries peuvent être pour ceux qui s'occupent de zoologie, ce que le laboratoire du chimiste est pour celui qui se livre à l'étude des corps bruts. On n’ÿ voit pas ce qui s'opère dans la nature, mais ce qui peut s'y opérer. Le sujet que je viens d'indiquer est trop étendu-pour être trailé dans un seul Mémoire ; je me propose seulement ici de présenter quelques observations faites d'après les principes que je viens d'exposer. Je choisirai celles qui se rapportent à l'un des phénomènes les plus singuliers de la génération, au rut. Chacun sait que le rut est la disposition où se trouvent les animaux lorsqu'ils sont entraînés à la génération. Dans quelques-uns, cette disposition subsiste dès qu’elle a commencé; dans le plus grand nombre, elle est périodique. Quelle est la raison de ces différences, et comment les causes qui les produisent agissent-elles sur chaque espèce en par- ticulier ? Telles sont les questions auxquelles mes observations se rapportent , mais qu’elles sont encore loin de résoudre. Pour les présenter , je suivrai les animaux dans leur ordre naturel. L'homme s'offre d'abord. C’est sans contredit de tous les animaux celui qui conserve le plus constamment dans l'âge de la force la disposition à se reproduire. Les deux sexes méme 120 ANNALES Du (MUSEÉUM se sont entièrement soustraits aux causes qui exercent un Si puissant empire sur les autres espèces. Chez tous les quadrumanes que j'ai pu observer, les mäles sont constamment disposés à l'accouplement, lorsqu'ils sont en état de santé et qu'ils supportent patiemment la gène où nous les tenons. Les femielles ne sont en rut qu'à certaines époques; cet état se manifeste par l’affluence du sang autour de la vulve, d’où il résulte quelquefois une vraie menstruation, Lorsque l'animal n’est point en rut, les parties génitales semblent étre, par rapport à la circulation , dans un état semblable à toutes celles du reste du corps; bientôt elles se colorent, le sang s y accumule par degrés, le gonfiement survient , et au bout d'un certain nombre de jours, qui diffère suivant les forces et peut-être suivant les espèces, il est arrivé à son dernier pé- riode. Alors on apercoit quelquefois un écoulement sanguin ; dès ce moment le gonflement diminue; le sang rentre dans la circulation générale , et toutes ces parties reviennent, après un temps à peu près égal à celui qu'il avoit fallu pour les faire changer, au point où elles étoient avant leur change- ment. La femelle ne recoit le mäle qu’au milieu de son rut, qui reparoit communément du vingtième au trentième jour ; hors de ce temps, il semble très-peu la rechercher. Pendant la gestation , le rut ne reparoît plus. Tels sont les résultats de mes observations sur un mâle et une femelle de mandril , simia maimon; sur un mâle et une femelle du papion noir du Cap; sur plusieurs magots des deux sexes, simia inuus ; sur un mâle et une femelle du malbrouck, simia faunus, et surtout sur une paire de maimons , simia nemestrina ; que nous avons vu produire; sur plusieurs makis, etc. Ces ani- maux étoient nourris avec soin, logés commodément et dans D'HISTOIRE NATURELLE. 12F une température convenable; ce qui a sans doute été cause de l'aniformité des phénomènes qu'ils nous ont présentés. Il n’en a pas été de même pour nos animaux féroces : tou- jours soumis aux variations des saisons, toujours nourris du même aliment, toujours contraints dans la plus étroite prison, ts sont alternativement exposés à tous les excès du chaud, du froid, de humidité, du dégoût, et leur vie n’est dans le fait qu’une succession de souffrances. Néanmoins , chaque fois que leur santé a pris assez de force et que leur férocité a pu être adoucie , le désir de la réprocuction s’est manifesté. Les espèces de chats des climats septentrionaux sont celles qui ont éprouvé les plus grands effets de toutes ces causes de maladie. Les males nous ont montré souvent et à toutes les saisons des signes de rut: il en a élé de même des femelles ; mais la durée de cet état chez elles étoit très-variable, ainsi que la distance qui en séparoit les époques. A Pirritation des parties génitales au moment du rut, accompagnée quelquefois d’un écoulement sanguin, succédoit toujours une sorte de repos dans ces mêmes parties, et comme chez les quadrumanes , le rut ne reparois- soit plus après la conception. Il ne s’est pas non plus mani- festé pendant lallaitement. On sait que nous possédons une lionne qu’on a vu concevoir, porter et allaiter plusieurs fois. Quant aux chats sauvages de nos contrées, l'hiver est la saison de leurs amours, et parmi ceux qui sont domestiques, on en trouve en chaleur à toutes les époques de l’année. La plupart des espèces du genre marte font, à ce qu’on rapporte, plusieurs portées depuis la fin de l'hiver jusqu’au commencement de l'automne : quant à moi, je n’ai pu observer qu'une paire de genette, viverra genetta. Elle venoit de Bar- barie. L’époque du rut ne w’a point paru réglée. Chaque fois 9. 16 122 A N N'ALES" D'U MUSÉUM que la femelle entroit en chaleur , le male étoit disposé à la couvrir. Dans cet état, les parties de sa vulve s’enfloient, et une menstruation sensible a eu lieu quelquefois. Après la con- ception , le rut ne reparoissoit plus. Notre genette a mis bas deux fois; mais elle n’a pu allaiter, ayant dévoré ses petits à mesure qu’ils naissoient. Parmi les chiens, on sait que nos loups sont en chaleur de décembre jusqu’en février; qu'ils ne portent que trois mois et une seule fois l'année. Ceux que nous possédons ne sont en rut qu'en mars. | Le chacal, canis aureus ,habitant des pays chauds, n'éprouve, rapporte-t-on, le besoin de l'accouplement qu’en hiver (1). Il en est de même de notre renard. Le corsac, canis corsak , a déjà mis bas à la fin d'avril. Sa portée est de trois à cinq petits ; il vit dans des terriers, et se trouve communément entre les /5.° et 60.° degrés delatitude (2). L'isatis, canis lagopus , qui habite les contrées septen- trionales, entre en rut à la fin de février, porte neuf se- maines et met bas de cinq à sept petits (3). Quant aux chiens domestiques , c’est également en hiver que la plupart des fe- melles entrent en rut ; mais toute l'année on en- trouve dans cet état. Plusieurs sont en chaleur deux fois par an : mais elles ne recoivent le mäle qu'à ces seules époques , quoique celui-ci _soit toujours disposé à l’'accouplement. Dans le genre civette, je n'ai été à portée d'observer que la mangouste d'Égypte et deux petites mangoustes du Cap ; mais (1) Güldenstaedt, Nov. Com. Petro. xx, 449, sq. t. XI. (2) Pallas, Neue. nord. Beyur.; 1, 29. (5) Gmelin, Nov. Com. Petro. NV, 358, sq- D'(HUT 5 TION REA NASTIURIEL LE. 123 ces animaux n’ont pu changer d'état d’une manière sensible, La première vit pourtant dans une liberté presque entière : les deux autres sont très-farouches, Au reste Buffon rapporte qu'un suricate femelle, viverra tetraductila , qu'il a eu long= temps vivant, venoit fréquemment en chaleur (1). Les ours entrent en rut en été. On sait que celui dés Alpes, ursus aclos, porte six mois et une seule fois dans l’année. L'époque du rut chez les mâles est très-marquée; c’est ce que j'ai souvent observé sur plusieurs de ces ours et pendant plu- sieurs années. Les hérissons paroissent étre en chaleur à la fin de l'hiver. J'ai vu deux kanguroos mäle et femelle qui-donnoient sou- vent des signes de rut, le mâle surtout; mais ces signes n’étoient point réglés. Dans la nombreuse famille des rongeurs , il est certain que les petites espèces , celles surtout qui cherchent des abris près de nos habitations et qui y trouvent constamment une nourriture abondante, font des petits dans toutes les saisons de l'année, Quelques-unes éprouvent à l'instant du rut des chan- gemens considérables dans les parties de la génération ; et cette particularité se retrouve encore dans des espèces plus grandes, comme le castor, l’ondatra, etc. Nos lièvres et nos lapins sont en état d’engendrer en tout temps; et la conformation particulière de la matrice des fe- melles en est sans doute une puissante cause. Chez les premiers cependant le rut le plus marqué est en février et ent mars (2). Parmi les cabiais, nous ne connoissons que le cochon d’inde sous le rapport qui nous occupe; mais son état de domesticité (1) Buffon, t. XIII. (2) Buffon, t. VI. 16 * 124 ANNALES DU MUSEUM le met dans le cas de tous les animaux que nous garantissons par nos soins des influences extérieures. Il peut engendrer à toutes les époques de l’année, hors le temps de la gestation et peut-être de l'allaitement. Quant aux castors, on dit que la gestation est de quatre mois, et qu'ils mettent bas à la fin de l'hiver ; ce qui repor- teroit leur rut au commencement de cette saison (1). La plupart des campagnols font plusieurs portées par an, excepté l'hiver. L'ondatra cependant n'entre en rut qu'au printemps (2). Pour notre écureuil, l'époque de l'amour est l’arrivée du printemps; ilmet bas à la fin de mai. Nous ignorons s'il porte plus d’une fois par an. Les hamsters sont en rut , pour la première fois de l'année, à Ja fin d'avril, et ils font plusieurs portées dans le courant du printemps, de l'été et de l'automne (3). Dans l’ordre des pachydermes , nous ne connoïissons que les éléphans et les cochons. Chez les premiers, le mäle paroit être toujours disposé à la génération, et la femelle nous a présenté les mêmes phénomènes que toutes les autres femelles des pays chauds : hors de la gestation, une succession d’irrita- tion et de relâchement dans les parties génitales; la durée de ces deux états n’a jamais été constante. Ces observations sont en partie conformes à ce qu’on rapporte de l'éléphant des Indes, qui n’a point de saison marquée pour la chaleur, et dont la femelle porte vingt à vingt-un mois (4). (1) Hearne, l’oyage à l'Océan du nord. (2) Sarrazin, WMém. de l’Académie des sciences, année 1925. (3) Buffon, 1. XII. (4) Corse, Mém. de Calcuta, 1. I, p. 229. D'HISTOIRE NATURELLT. 125 Le rut du sanglier femelle paroï chez nous en janvier et en février , et ne revient que l’année suivante à la même époque. La gestation dure environ quatre mois. Le mâle est toujours disposé à FPaccouplement. La laie domestique, la femelle de notre cochon, fait non-seulement plusieurs portées par an, mais elle reçoit le mâle même pendant la gestation. Le rut de la truie est souvent accompagné d’un écoulement sanguin; et si elle est séparée du mäle, cet état reparoït, comme nous lavons vu et comme nous le verrons encore dans d’autres ani- miaux , du vinglième au trentième jour. Les ruminans offrent à l'observation une foule de faits cu- rieux sous le rapport du rut; et quoique ces animaux soient plus complétement soumis à la domesticité que les cochons, ils semblent pourtant ne point avoir éprouvé autant que ceux- ci l'influence de cet état sur les organes de la génération. Quoique les dromadaires males que nous possédons soient toujours disposés à l’accouplement , leur rut ne se marque d’une manière sensible qu’à des époques particulières, au mois de janvier ; alors une matière visqueuse suinte de plusieurs glandes réunies derrière la tête. Le véritable rut de nos fe- melles est à la fin de mars; néanmoins des signes de chaleur se montrent de temps en temps: leur pis alors se gonfle, et il en sort souvent une sorte de lait. Nous possédons aussi deux chameaux males : leur rut, qui commence ordinairement au milieu de novembre , s'annonce par des signes très-prononcés. Il est précédé de sueurs consi- dérables et toujours accompagné d’un écoulement de matière brune et visqueuse qui sort des glandes situées derrière l’occi- put. Le rut cesse à la fin de janvier; à cette époque les sueurs reparoissent, et immédiatement après, la mue commence. 126 ANNALES DU MUSEUM Parmi les antilopes, je n’ai pu encore observer qu'un gnou femelle, antilope gnou. L'époque de sa chaleur n’est pas réglée : cet état se montre assez fréquemment, et toujours par un gonflement dans la vulve. On sait que l’époque principale de l'amour pour les brebis et les chèvres est le mois de septembre. Les mâles des unes et des autres sont toujours propres à la propagation ; mais quoique les femelles soient délivrées de leurs portées en janvier, elles refusent de recevoir le mäle avant le mois de septembre suivant. ‘ Le rut des boucs s'annonce par l’odeur très-forte qu'ils ré- pandent. Hors de cette saison cette odeur se fait à peine sentir: mais si alors on donne à ces animaux une chèvre en chaleur, cette odeur reparoit presque dans toute sa force et dure aussi long-temps que le rut de la chèvre; car , ainsi que cheztoutes les autres femelles que nous avons pu observer, chez celles des moutons et des chèvres qui n’ont point été couvertes à l’époque du rut, cet état reparoït de temps en temps et après des in- tervalles d'un mois environ. Nous devons ajouter à ceci que l'odeur, ce signe qui carac- térise le rut des boues , est infiniment moindre dans ceux d'Angora, dont la domesticité est très-ancienne, que dans ceux dès Alpes (1), qui conservent encore presque tous les carac- tères de leur état sauvage. Les cerfs de nos contrées, nos daims et nos chevreuils, entrent communément en rut en novembre; alors leurs bois ont ac- quis toute leur croissance : après le rut ces bois tombent. Les femelles des cerfs portent de huit à neuf mois : celles des che- (1) Capra AEgagrus. Cuvier, Description de la ménagerie du Mus. d'hist. naë D'HISTOIRE NATURELLE. 197 vreuils seulement de cinq à six. Elles allaitent jusqu'au mois de novembre suivant. Les rennes sont dans le même cas : leur rut vient à la fin de septembre , et la gestation est de huit mois. On dit qu'a Pépoque de leur chaleur elles sont très- maigres, et que les bois des mâles qui ont été soumis à la castra- tion, tombent néanmoins annuellement (1). Il n’en est pas de même pour laxis, qui nous vient de Inde: il n’a point d'époque parüculière pour son rut, ou plutôt il est toujours en rut. Je Pai vu couvrir ses femelles à différentes époques de l’année et à toutes les époques du développement de son bois. Les femelles ne le recoivent ni pendant la gestation ni pendant l'allaitement. Nos bœufs domestiques sont, comme on le sait, toujours disposés à se reproduire; et excepté lorsqu'elles sont pleines, leurs femelles les reçoivent en toute saison, J’ai vu un buffle fe- melle que j'avois séparée de son mâle, venir en chaleur à peu près tous les mois, et alors répandre du sang par la vulve. On sait aussi que les juméns recoivent le mäle dans toutes les saisons, et que quelques femelles le recoivent même pen- dant leur grossesse. Une femelle zèbre que j'ai observée venoit en chaleur à peu près tous les mois. Depuis qu’elle a été couverte par un âne et que la conception a eu lieu, sa chaleur na plus reparu. Je ne rapporterai pas ici un plus grand nombre d’observa- tions sur les mammifères, pour ne pas passer les bornes que je me suis prescrites, Au reste, on ne peut trop s'étonner du peu de soin que les naturalistes ont mis à recueillir des obser- vations de ce genre. Il me suffira , pour terminer, de dire - (1) Linn. Syst. nat. édit. x, p. 67. 128 ANNALES DU MUSEUM encore un mot des oiseaux. Dans nos climats, la fin de l'hiver etle printemps sont généralement pour eux la saison de l'amour. Quelques petites espèces font plusieurs pontes par an : mais seulement dans les saisons chaudes. De tous les oiseaux de proie que j'ai possédés, un seul vautour fauve, vultur fulvus, a pondu , et un seul œuf. Aucun ne s'est accouplé. Il est très-rare en effet que les oiseaux fassent des petits en simple esclavage , tandis que ceux dont les races sont devenues domestiques poussent la fécondité à un point éton- nant. Depuis plusieurs années nous avons cherché à faire pro- duire des tadornes, des bernaches, des milouinans, des canards siffleurs , etc., et nous n’ayons réussi que pour les premiers, et une fois seulement. On connoït au contraire la fécondité des poules, qui sont parvenues à pouvoir pondre sans le con- cours du mäle aussi abondamment que par son influence, excepté pendant l'incubation , la mue et le froid, qui suspen- dent la ponte et l'accouplement. Il en est de même pour nos pigeons et pour la plupart de nos oiseaux domestiques. Nous possédons une variété de canard, anas curvirostra , qui ne le cède pour ainsi dire point aux poules sous le rapport de la ponte. La mue seule et l’incubation larrètent ; Je froid n'a sur elle qu’une légère influence, D'après ces faits, n’est-il pas permis d'admettre , comme lois générales, Que les animaux males sont naturellement toujours dis- posés à la génération ; Que les femelles ne le sont qu'à certaines époques, qui se caractérisent par une irritation dans les parties génitales ; Que ces époques ont chez toutes une distance égale, qui paroit être communément de viugt-cinq à trente-cinq jours ; D'HISTOIRE NATURELLE. 129 Qu'à cette irritation succède un affaissement dont l'intensité et la durée lui est proportionnelle, comme dans tous les autres phénomènes de la vie où le repos est ordinairement la suite du mouvement et en proportion avec lui; Que plusieurs causes peuvent modifier cette loi générale, en favorisant plus particulièrement, et aux dépens des autres, lexercice de quelques organes ; Que la gestation , les maladies, la gêne et l'esclavage, sont, de toutes ces causes, les plus générales ; Que la nourriture et la température exercent une influence moins étendue, moins immédiate , et qui différe suivant la nature des animaux; Que dans les pays chauds la loi générale n’est point mo- difiée ; Qu'elle ne l’est également point dans les contrées septen- trionales, lorsque, par leur industrie ou par nos soins, les animaux peuvent se soustraire à l'influence du climat; Que dans le cas contraire, les rongeurs entrent en rut”au printemps ; les ruminans en automne et les carnassiers en hiver ; Enfin, que le développement du bois chez les cerfs n’est pas par lui-même un obstacle au rut, lorsqu'aucune autre cause ne concourt avec celle-là. Et si ces conséquences paroissent avoir quelques fondemens, ne soupçonnera-t-on pas encore, en voyant quelques-uns de nos animaux domestiques mäles, entrer en rut à une époque déterminée de l’année , et loin de toutes les circonstances qui originairement en avoient été cause, que des qualités qui ne sont d’abord qu’accidentelles, peuvent enfin devenir héréditaires si les causes qui les produisent exercent leur influence sur un ca 17 130 ANNALES DU MUSEUM certain nombre de générations? Et ne croira-t-on pas devoir attribuer à la même cause l’accumulation périodique du sang chez les femelles des quadrumanes , l'écoulement sanguin que nous apercevons dans presque toutes les espèces à l'époque du rut, dont Aristote avoit déjà parle ( liv. VE, $ 17 }, et la menstruation chez les femmes ? Enfin, sera-t-il permis de mettre encore la faculté qu’ont les hommes de se reproduire en toute saison au nombre des causes de leur civilisation , tandis que chez tous les animaux celte faculté est évidemment la suite de leur domesticité, qui est une sorte de civilisation ? Zom VE À. leure) autre. PA PS Lange PINOPEE DE FAUJAS. Vacques hailly , J cup D'HISTOIRE NATURELLE. x31 MÉMOIRE Sur un nouveau genre de Coquille de la famulle des ISOLÉNOIDES, PAR M. MÉNARD DE LA CGROYE Voy. PLANCHE 12, Y 0: trouve sur le Monte Pulgnasco, commune de Diolo, à neuf milles de F'iorenzola et à quatre de Custelarcuato, dans l’état de Parme, au milieu d’un sable quartzeux à grain fin, mêlé d'argile grise , non-seulement des restes considérables d'éléphans , derhinocéros, de dauphins, mais un grand nombre de coquilles marines fossiles de la plus belle conservation , trés-variées en genres et en espèces, confondues avec les débris de ces grands animaux. On peut voir ce que M. le conseiller Cortezi de Parme, qui possède la plus nombreuse et la plus intéressante collection de ces fossiles, a écrit sur ces animaux et sur leur gisement, dans un des derniers voluines des Opus- culi Scelti de Milan; il entre dans les plus grands détails sur ces animaux, dont il avoit déja annoncé la découverte, dans un Mémoire imprimé précédemment dans la même collection italienne, 17" 122 AUN: N 4 ALNELS D Ui 4 DS2É UT M. Faujas s'étant rendu à Fiorenzola dans l'intention d'y voir M. Cortezi, en fut accueilli d’une manière distinguée, vint ensuite à Plaisance avec lui, pour voir dans cette ville les collec- tions de cet estimable et zélé naturaliste, qui y sont rangées dans le plus bel ordre, et firent l’étonnement et l'admiration du géologue français. M. Cortezi s'attache essentiellement à recueillir les grands animaux fossiles du Monte-Pulgnasco , qui sont en effet des objets très-rares et très-précieux par leur belle conservation. Il ramasse en même tempsles coquilles fossiles qui les accom- pagnent , et fait de grandes dépenses pour des excavations et des fouilles, dans lesquelles il occupe beaucoup de monde: c'est le moyen de ne rien laisser échapper de ce qu'il y a de remarquable, Comme il vit que M. Faujas mettoit un vif intérêt à l'examen de ces coquilles, parmi lesquelles il re- connoissoit beaucoup d’analogues et de nouvelles espèces, M. Cortezi non-seulement partagea noblement avec lui tout ce qu'il avoit de double et de plus précieux en ce genre, mais se priva même de quelques objets uniques, dans l'espoir de les retrouver. Je tiens ces détails de M. Faujas, qui m'a parlé avec autant d'estime que de reconnoissance de la manière af- fable et généreuse avec laquelle M. Cortezi l'accueillit. M. Faujas possède donc à Paris la plus belle collection de coquilles fossiles de Monte-Pulgnasco. A son retour d'Italie, ce uaturaliste m’ayant parlé de cette collection et de l'intérêt qu’elle présentoit à la géologie, tant par des analogues bien distincts que par le nombre des genres et des espèces qu’elle réunit, je demandai à la voir, et j'avoue que ma surprise fut grande lorsque je reconus beaucoup de ces coquilles qui se rapportoient à des êtres encore vivans de diverses mers. Ma D'HISTOIRE NATURELLE. 133 curiosité fut d'autant plus satisfaite à ce sujet, que je w’avois pas encore une conviction bien complète sur l'existence des vé- ritables analogues. Mais lon verra bientôt que je fus forcé de convenir qu'il en existe beaucoup. M. Faujas m’ayant engagé à porter une attention particu- lière sur une grande et belle coquille bivalve d’une conserva- tion parfaite, mais pleine d'un sable dur qui ne permettoit pas de voir la charnière, je pris, au premier aspect, cette coquille pour la mya truncata Linn. Je vis ensuite qu’elle a plus de rap- port par sa forme avec les solens et même avec les glyciméres. Cette incertitude , que inspection de la charnière pouvoit faire cesser , m’engagea à prier M. Faujas de la faire débar- rasser du sable dur dont elle étoit remplie. Il y consentit avec plaisir. M. Defrance, qui est d’une adresse extrême pour ce genre de travail, voulut bien sen charger; il sen acquitta au mieux, et dans quelques jours nous eûmesla coquille telle que nous la désirions. Quelle fut ma surprise lorsque je reconnus par la charnière parfaiteænent conservée , qu’elle formoit un genre mixte qu'il faut placer entre les mnyes et les solens! Je consultai M. de Lamarck à ce sujet, en lui faisant part de mes observations, qu'il approuva. Ce célèbre conchyliologiste m’engagea à publier ce nouveau genre, et de son côté M. Faujas, à qui Pobjet appar- tient , m'invita à faire ce travail en me laissant le maïtre de le publier. Cette coquille, bien plus large que longue et à côtés iné- gaux , a une largeur de dix-sept centimètres ( 6 pouces 3 lignes) sur un décimètre (3 pouces 8 lignes) de hauteur ; elle est renflée et presque cylindrique dans sa partie antérieure, et au con- traire allongée, coupée obliquement dans la postérieure, et 134 ANNALES DU MUSÉUM présente un large orifice qui permet de voir tout le dedans par cetle ouverture , même lorsque ses deux-valves sont jointes, Son épaisseur est moyenne. L’extérieur est lisse, mais sillonné transversalement par des stries parallèles aux bords et qui ne > sont que l'effet des accrois- semens successifs, L'intérieur offre tout au tour du bord de chaque valve et particulièrement au bord supérieur, une large bande renflée, à bordure calleuse, lisse et luisante, qui s'élargit et remonte dans l’évasement sous forme d'angle. Cette bordure est produite par le manteau. Toute la concavité intérieure la plus rappro- chée du sommet offre un autre double plan à surface terne plus ou moins rugueuse, qui marque la partie où l'animal s’atta- choit; on voit aussi aux deux extrémités les impressions mus- culaires , une de chaque côté, en forme de demi-lune. Voyez les figures très -exactement dessinées par M. Delaunay de Beaurepaire. Cette coquille fossile a le plus grand rapport avec une grande et belle coquille vivante figurée par Aldrovaæde, qui lui donna le nom de chama glycimeris, qu'il regarda mal à propos comme la glycimère des anciens. Bonnani, Lister , Guaitieri , de Born, Chemnitz, Favane, Gmelin et beaucoup d’autres, ont cité et figuré la même coquille sous le nom que lui avoit donné Aldrovande. De Born l'a fait graver et colorier d’après un individu du cabinet de Vienne. Il n'y a donc point de doute qu’elle n'ait existé dans l’état vivant. Aldrovande dit qu’on la trouve dans la Méditerranée sur les côtes d'Espagne. Mais une chose irès-remarquable et qui prouve que cette coquille est rare, c’est que la collection du Muséum d'Histoire naturelle de Paris, celle si riche de M. Sollier, D'HISTOIRE NATURELLE 135 et tant d’autres que je pourrois citer, ne la possèdent pas. M.Pech seul en avoit une qui venoit originairement de la collection de l'abbé Nolin; mais son cabinet a été vendu à l'empereur d'Autriche. M. Pech qui a observé la coquille de M. Faujas, m'a dit què la sienne avoit en général les mêmes caractères; que la char- nière étoit la même, mais que la vivante étoit plus large, moins bombée à proportion de son étendue que la fossile , et qu’elle étoit bâillante aux deux bouts, moins cependant vers la partie postérieure que vers l’antérieure : tandis que la fos- sile a une ouverture à peine sensible vers la première partie; ce qui caractérise évidemment deux espèces dans le même genre. Or, comme cette coquille ainsi que la fossile n’appar- tiennent ni aux glyciméres , ni aux myes, ni aux cammes, il faut nécessairement en constituer un genre dont la place natu- relle est entre les solens et les myes ; et c’est bien là le senti- ment de M. Lamarck. Je propose donc de donner à ce genre le nom de Panopée, dérivé de Panope, une des Néréides de la fable; mais comme il y en a deux espèces bien distinctes, la vivante et la fossile, et qu'Aldrovande est le premier qui a figuré et décrit la pre- mire, je l'appelerai la Panopée d’Aldrovande , et la fossile , la Panopée ae F'aujas , en reconnoissance de ce qu'il a apporté le premier cette belle coquille fossile en France, et a donné lieu par là à l'établissement de ce nouveau genre. GENRE PANOPÉE. Panopea. Animal. Celui-ci n'étant pas connu, nous ne pouvons rien en dire de positif ; mais la structure de la coquille la rapprochant des solens et des myes, il est à présumer que le manteau est fermé par devant, et que cet acéphale marin à un 136 ANNALES DU MUSÉUM fort pied museuleux, plus ou moins rapproché de la forme cylindrique , et qu'il fait sortir ce pied par une des ouvertures de sa coquille. Coquille. Transverse, bâillante inégalement aux deux bouts, charnière sem- blable dans l’une et dans l’autre valve, ayant une callosité ou grosse dent allongée, placée en ayant et sur le corselet ; décurrente sur le bord intérieur, relevée en arête mousse et saillante postérieurement; une dent cardinale conique un peu comprimée et arquée , et sur la valve droite une fossette dans laquelle s’engrène la dent de la valve opposée ; ligament extérieur, crochets peu protubérans , cor- selet large, deux impressions musculaires dans. chaque valve situées vers les extrémites, ESPECES. Première Espèce. Panopée d'Aldrovande. — Panopea Aldrovandi, Chamæ £lycimeris Aldrovandi, Testac. Ub. 3, p. 472. — Grande glycimére Bonnani, class. II, fig. 59, et Mus. Kink. 2, p. 449, n° 155, fig. 59. Chame glycimère d'Aldrovande. Lasren. Hist. conch.'tab. 414, fig. 258. — Mya glycimeris Born. Mus. Caes. Vindeb. pag. 20, tab. 1 , fig. 8. Za Grande-Barque ou la Gueule de Saumon, Fayax. Catalog. de la Tour d'Auvergne, Mya glycimeris Gmelin, Syst. nat. ed. x1v, t. 2, p. 80. 17. Seconve espèce. Panopée de Faujas.— Panopea Faujas.(Voy.la figure ci-jointe), Coquille ovale allongée , à peine ouverte sur un des côtés , très-évasée de l’autre ; bombée , peu épaisse, lisse, avec des stries transverses peu profondes. Après avoir fait connoître ce nouveau genre de coquille, je crois devoir faire mention de celles qu’on trouve réunies dans le même lieu , qui ont encore leurs analogues vivans dans telle ou telle mer; ce qui répand un double intérêt sur ces fos- siles. Les coquilles fossiles de Monte-Pulenasco qui sont dans la collection de M. Faujas, sont d’un si beau choix et d’une conservation si parfaite, n'étant pas pétrifiées, mais simplement dans l’état fossile ; et elles sont si nombreuses en genres et en espèces, qu'elles peuvent jeter le plus grand jour sur la ques- tion encore contestée par quelques naturalistes, de l'existence actuelle des véritables analogues, D’ HIS. T OI R EN ATUIR ELLE. 137 # J'avoue de bonne foi que, malgré l'opinion de MM. de La- mark, Faujas, Defrance et dequelques autres naturalistes qui reconnoissent plusieurs coquilles fossiles absolument semblables à celles qui setrouvent vivantes, soit dans les mers européennes, soit dans les mers indiennes ou africaines , j’étois encore en sus- pens; j'avouerai même que jinclinois un peu pour lavis con- iraire , malgré les exemples rapportés par les naturalistes cités ci-dessus, et les raisons données pour les admettre dans le premier volume des Æssæs de Géologie, de M. Faujas. Mais je dois dire avec la même franchise que j'ai reconnu dans la collection dont il s'agit, c’est-à-dire dans celle de Monte- Pulgnasco, un grand nombre de véritables analogues, au sujet desquels il ne seroit ni juste ni raisonnable d'élever le moindre doute, et qui ne présentent absolument aucune dif- férence avec ceux qu'on trouve vivans dans diverses mers. Cet objet n'a paru si intéressant pour la géologie, que je vais rapporter ici le nom des genres et des espèces dont l'identité est parfaitement constatée. 1. Bulla lignaria. Xanx. Syst. nat. édit. xur. Species 575. Vulgairement l'Onblie, absolument analogue à celle qui se trouve dans la Méditerranée, vers l’Adriatique et autour de la Sicile. 2. La Parezcx , appelée vulgairement le Bonnet de dragon, analogue parfait de la Patella ungarica , Lanx. Sp. 761 de la Méditerranée. 3. Une Crévouce semblable à celle qu'on trouve fossile à Grignon, dont l'espèce analogue est vivante dans la Méditerranée, vers les côtes de Barbarie. {l M. de Lamarck l’a appelée Crepidula complanata. C'est la Patella crepidula , Laxx. Sp. 752. 4. Porcecaine. Cypræa.La Bossne. Cypræa mus, Lanx. Sp. 5/2. Se trouve, selon cel auteur, vivante dans la mer de Carthagène. 5. —Cypræapedieulus,Laxx. Sp.364.Vulgairement le Por. Commun dans l'Océan. 6. Ovure. L'espèce rare, connue sous le nom de petite Navette, absolument analogue à celle à laquelle Linné a donné le nom de Bulla birostris, Sp. 571 et qui vient de la mer de Java. 9 19 2 138 ANNALES DU MUSEUM 7 Cancetrame. L'espèce qui est sans aucun doute l'analogue de la so/uta cam cellata, Lixx. Sp. 415, qui vit sur la côte occidentale d'Afrique. 8. Nasse. Ne difière en rien de la vivante commune , que Linnéayoit appelée Buc= cinum reticulatum, Sp. 476, et qui vit dans la Méditerranée. | 9. Autre Nasse. Buocinum clathrum de Brueuière, Encyclopédie méthodique, n.” 45. Coquille rare qui vient des Grandes-Indes dans l'état vivant , et qu'on trouve aussi fossile à Courtagnon et à Pontlevoye. 10. Pourrae. Une pourpre armée d’une pointe saillante et aiguë, ou bord droit : c'est le Buccinum monodon, Gueux , Syst. nat. n° 50, sans la moindre différence, Celle-ci, qui forme une espèce peu commune, habite les mers d'Amérique. 11. Casque. Un très-analogue à l’échirophore , Buccinum echinophorum , Lin, Sp. 415, vivant dans la Méditerranée. 12. Rosreccaine. Le pied de pélican. Strombus pes pelicant, Lis. Sp. 490; se trouve dans la Méditerranée, dans l'Océan européen. 13. Rocuur. Murex lumpas. Laxx. Sp. 529. L'analogue vit dans la Méditerranée, 14. Autre Rocuer. Murex brandaris. Xaxx. Sp. 521. De la Méditerranée. 15. Autre Rocuer. Murex tripterus , ve Borx. Mus. Cæs. Vind. tab. 10, fig. 18et 19. Gueux, Sys. nat. n° 21. L'analogue , qui ést rare dans les cabinets, vient dans la mer des Indes du côté de Batavia. On la trouve aussi fos- sile à Grignon. 16. Pyruze. Bullaficus. Parfaitement la même que celle qu'on trouve à présent dans l'Océan indien et américain. 17. Nanice. Nerita canrena. Lans. Sp. 715. Guen, variété 8. C'est la ratice mouchetée de Cuemrz. Conch. tom. 5, p. 186, fig. 1862 et 1853, dont la vivante, peu commune, se trouve dans la mer de Madagascar. La fossile, d’une superbe conservation et d’un gros volume, a encore ses points ou taches ponctuées , qui ne sont qu'affaiblis. 18. Suicure. Une superbe espèce, qui se rapporte à la Serpula ANEUINAGTIE , Laixx. Sp. 805. Quoique les silicarres n'appartiennent pas aux coquilles, le rapprochement parfait de celle-ci avec l’anguinaria de Rumvn. m'a engagé à la citer à cause de sa rareté; se trouve dans la mer d’Amboine. 19. Arcne. Area Noæ, Lixs. Sp. 169. L'Arche de Noë, parfaitement analogue, vit dans la Méditerranée et dans la Mer-Rouge. 20. Isocanoe. Chama cor, Linx. Sp. 154. Cardite-Cœur, Baucuiène, Encyclopédie, n.” 1. Isocardia globosa , Liamancrk , Système des animaux sans ver- ièbres, pag. 118; vulgairement Bonnet de fou, Cœur de bœuf. V'ana- logue se trouve dans Adriatique, vers les côtes de la Dalmalie et ailleurs, La fossile est parfaitement analogue. D'HISTOIRE NATURELLE. 139 1. Soc. Le Sole vagina, Liwx. Sp. 55. De la plus parfaite conservation, avec ses deux valves fermées, et, à la couleur près, aussi parfait que s’il éloit vivant, quoique rempli de matières pierreuses. — Le Solen ensis, Linn. Sp. 55. Même conservation et analogue, ainsi que le premier, avec les espèces qu'on trouve dans nos mers d'Europe. 22. SroxpyLe. Un grand spondyle à peine altéré dans ses parties les plus déli- cates. Spondylus guæderopus, Yann. Sp. 151. Habite la Méditerranée, On sait que les spondyles fossiles sont rares. 25. Anomie. Une grande et belle Æzomre, parfaitement semblable à la Pe/ure d'oignon. Anomia ephippium , Lann. Sp. 218. L'analogue vit dans la Méditerranée et dans d’autres mers. Voilà incontestablement vingt-trois espèces de coquilles appartenantes à vingt-deux genres différens, et une silicaire, qui ne présentent pas la moindre différence avec les coquilles vi- vantes. J’aurois pu augmenter encore cette liste de plus de quinze autres genres ou espèces, si M. Faujas n’avoit absolu- ment exigé de moi que je ne donnasse ici le catalogue que des analogues parfaits, m’ayant fait rejeter ceux qui offroient de très-légères différences, souvent moindres que celles qu’on voit dans les coquilles vivantes de la même espèce, qui ont quel- quefois des variétés entre elles. — CS x 1/40 ANNALES DU MUSÉUM SÛR LE COCOTIER DES MALDIVES. Lxtrait un Mémoire lu à la première classe de l'Institut, le 14 octobre 1801. PAR M. LABI LE A.RB D LÉ R.E. L: palmier, connu vulgairement sous le nom de cocotier des Maldives, croit, comme on sait, aux Iles-Séchelles. Il avoit été pour Commercon le sujet d’un nouveau genre qu’il avoit appelé lodoïcea , nom que je conserverai ; mais sa description ne nous est pas parvenue. Sonnerat l’a depuis rapporté au genre borassus (1). I ne restera, je le présume, aucun doute d’après la description que je vais en donner, qu'il ne forme vraiment un genre à part. Le lodoïcea porte ses fleurs males sur des pieds différens de ceux qui produisent les fleurs femelles. Elles sortent les unes et les autres de spathes formées de plusieurs feuilles oblongues , aiguës. (1) Sonnerat , Voyage à la Nouvelle-Guinée, page 7 et 10. D D'HISTOTRÉ NATURELLE. sÂt Le régime des fleurs mäles est composé d'un très - petit nombre de chatons cylindriques, d'environ deux pieds et demi ( 8,1210 décimètres } de long, sur trois à quatré pouces ( 8,1210 à r0,8280 centnnètres) de diamètre, dont les larges écailles imbriquées se divisent en dessus et vers lé quari de leur largeur en deux lames à peu pres verticales, qui enve- loppent presque en entier un faisceau de fleurs dirigé dans sa plus grande longueur vers le centre du chaton. Chaque faisceau est à peu près réniforme ét composé de trente à qua- rante fleurs , disposées sur deux rangs, se croisant alternati- veinerit dans la moitié de leur épaisseur , et séparées chacune par une petite écaille oblongue, renflée du côté externe, atta- chéé comme les fleurs à un réceptacle presque demi-circulaire, dont la partie supérieure et postérieure est mobile; ce rétép- tacle étant divisé postérieurement par une fissure oblique dans les deux tiers de son étendue. Les fleurs ont pour calice six folioles longues , étroites, creusées en forrne de gouttière dans leur longueür ; les folioles extérieures, échancrées dan côté vers Pextrémité, l’autre côté présentant une pointe oblique, sont plus longues ét un peu plus coriaces que les intérieures allernes , dont la sommité est obtuse, et sont attachées à deux millimetres au - dessous d'elles, sur lé même pédicelle, qui s'amincit par bas. Les éta- inines , au nombre de vingt-quatre à trente-six, sont portées sur un réceptacle central de deux millimètres environ d’'éléva- tion, et qui semble être le prolongement du pédicelle dont nous venons de parlem Elles ont en outre un petit filaument pour chaque anthère yacillante, oblongue , obtuse , à deux loges s'ouvrant par le côté et un peu à l'intérieur, en répan- dant une poussière globuleuse et jaunatre. 142 ANNALES DU MUSÉUM Il est remarquable que le faisceau de fleurs porté par chaque écaille est en grande partie couvert par l'écaille supérieure, de sorte qu'il ne reste à la partie inférieure et externe , entre les deux limes mentionnées ci-dessus , qu'une petite ouverture par où il ne peut sortir à la fois qu'une seule fleur. Leur développement successif s'exécute par un mécanisme facile à concevoir à la première inspection de la figure g. Les fleurs les plus avancées se trouvent toujours vers * ,et leur épanouis- sement n'a lieu qu'après avoir quitté le réceptacle pour sortir par la petite ouverture dont il vient d’être fait mention, et faire place à la fleur voisine qui sort à son tour, et ainsi de suite, jusqu'à ce que, par l'évolution de ce même réceptacle, les fleurs les. plus éloignées en w aient aussi élé amenées vers d', pour trouver passage par la même ouverture; ce qui pro- longe singulièrement, comme on voit, le temps que mettent ces fleurs à répandre leur poussière fécondante, en assurant d'autant plus la réussite des individus femelles. Alors les petites écailles intermédiaires se sont rapprochées les unes des autres, woccupant plus que fort peu d'espace. Le régime des fleurs femelles, assez divisé , porte vers l’extré- mité ses fleurs qui sont sessiles. Le calice est formé de cinq à sept folioles ovales et très-larges. L'ovaire, presque sphérique, est surmonté de trois ou quatre stigmates sessiles, aigus. Il devient une baie ovale d'environ un pied et demi ( 4,8726 dé- canètres) de long, quelquefois terminée par une sorte de mamelon, et reufermant dans une enveloppe fibreuse trois à quatre noyaux qui rarement viennent tqus à bien. Ces noyaux, d'une dureté extrême, sont de forme ovale, aplatie, ayant au milieu une dépression répondant à une saillie intérieure qui représente assez bien une demi-cloison. Ils sont séparés en D'HISTOIRE NATURELLE. 143 deux lobes supérieurement , c’est-à-dire à leur extrémité la plus éloignée du calice, rarement en trois à quatre lobes. On en à vu plus rarement encore qui avoient jusqu’à cinq lobes. C'est entre ces mêmes lobes qu’on remarque dans le noyau une ouverture oblongue, garnie de fibres sur ses bords , et donnant issue à la radicule et à la plumule, lors de la ger- mination. L’amande, qui ne laisse pas d'acquérir une grande consis- tance, a la forme du noyau. On voit difiérentes coupes de l'un et delautre dansle Foy age à la Nouvelle-Guinée (pl. VE). L'embryon est enfoncé dans une cavité de l’amande abou- Ussant à sa superficie entre les lobes, vis-à-vis l'ouverture oblongue du noyau mentionnée ci-dessus : ainsi doit-on le regarder comme supérieur, Je n’en donnerai pas la figure, le fruit sur lequel je l'ai observé n'ayant pas acquis le degré de maturité nécessaire pour être bien conservé. Je dirai cependant que la plumule , dirigée vers l’intérieur , se termine en pointe recourbée., la radicule étant ovale, tuberculeuse à l'extérieur, où lon remarque une dépression longitudinale. Les caracteres énoncés ci-dessus, la position surtout de lembryon et la forme des noyaux de la baie fibreuse, le nombre des étamines, leur disposition et celle des fleurs mâles, suffisent bien pour létablissement du nouveau genre qui vient d’être proposé. Il ne peut être confondu avee le genre borassus, quoique d’ailleurs il ait avec lui beaucoup d’affinité, J'ai appelé lodoïcea Sechellarum ( lodoïcée des Séchelles ) le palmier qui fair le sujet de ce, Mémoire, dénomination ürée comme on voit, du groupe d’iles dont il est originaire. Mais on doit présumer , qu'à l'exemple de Sonnerat, qui la transporté à l'Ile-de-France, il se trouvera des navigateurs 144 ANNALES DU MUSÉUM jaloux d'enrichir quelque autre terre de cette belle production de la nature. | Le lodoïcée des Séchelles s'élève assez droit à quinze ou dix-huit mètres ( 46 pieds 2 pouces 1,440 lignes à 55 pieds 4 pouces 11,328 lignes) , quelquefois même beaucoup au-delà. Son tronc fibreux , assez semblable à celui du cocotier , est marqué dans toute sa longueur par empreinte des feuilles qui se détachent à mesure qu'il croit ; d'autres feuilles se développent en nombre à peu pres égal chaque année , de sorte qu'il se trouve assez constamment couronné du même nombre de feuilles { 15 à 20). On ne les a pas représentées toutes dans la figure ci-jointe , afin de faire mieux sentir leur forme. Elles sont d’une texture assez ferme, et, comme on voit, en éventail , ovales, échancrées à la base, divisées iné- galement dans leur pourtour, les divisions inférieures étant les plus courtes. Les pétioles , longs de sept à huit pieds(22,7388 — 25,9872 décimetres ), sont élargis à la base, où ils se dé- chirent quelquefois en deux parties, à mesure que les feuilles supérieures se développent. L’amande de ces grosfruits est un aliment assez médiocre, Je ne dirai rien des vertus imaginaires que lui avoient attribuées quelques botanistes et voyageurs des seizième et dix-septième siècles, et l'on doit bien présumer que je ne répéterai pas non plus les fables qu'ils racontoient sur l’origine de ce palmier. On trouvera ces matières traitées fort au long dans lÆZerbarium Amboinense du célèbre Ruwmphius, Zip. 12, chap. 8. HU y a même la figure d’un noyau de cet arbre intéressant. On y verra encore cités la plupart des auteurs qui en ont parlé avant lui. (1) Sonnerat, Voyage à la Nouvelle-Guinée, page 9. D'HISTOIRE NATURELLE. 145 Les feuilles servent à couvrir les toits : leur consistance les rend encore plus durables que celles du corypha umbra- culifera. Le tronc peut étre employé avantageusement à tous les usages auxquels on fait servir celui du cocotier. Quoique Sonnerat ait donné ,dansson ’oyage à la Nouvelle- Guinée ( pl. IT), une figure du lodoïcée des Séchelles, j'ai pensé qu'on verroit encore avec plaisir celle-ci, faite aux Iles- Séchelles par M. Lilet, correspondant de l'Institut; mais il éloit indispensable de donner les détails de la fructification. Je les ai dessinés d’après des échantillons conservés dans l’es- prit-de-vin, qu'il a encore bien voulu me communiquer. Explication des figures (1). PLANCHE XIIL a. Lodoicée des Séchelles, individu femelle. &. Fruit. e. Jeunes fruits. d. Portion de régime mâle. e. Écaille de régime mâle: on a écarté les deux lames verticales pour faire mieux voir le faisceau de fleurs. f. Faisceau de fleurs, vu en dessus, de grandeur naturelle, g. Le même, vu de côté. A. Petite écaille qui sépare chaque fleur. 2. Fleur. : Z. Étamines grossies, vues en différentes positions, —————_— (1) On indiquera les figures qui sont de grandeur naturelle et celles qui ont éLé grossies : les autres ont dù être diminuées. 9: 39 146 AN NIAÏLIE/S! D'UX M US'ÈU M EXT PA: ET D'un Mémoire envoyé au Muséum par M.Qué4v- Quixer , Commandant et Administrateur gé- néral des Iles Séchelles, sur le Parnrer qui produit Les fruits appelés Cocos DEs MALDIVES. - C Mémoire confirme les observations qu’on vient de lire et celles qu’on trouve dans Sonnerat. En faisant nos remercimens à l’auteur, nous nous bornerons à en extraire quelques par- ticularités intéressantes. Le grand palmier dont les fruits sont connus sous le nom de cocos des Maldives (1), ne croit naturellement que dans lIle-Praslin et dans lIle-Curieuse, situées dans l'archipel des (1) Ces fruits furent d’abord nommés cocos des Maldives ou cocos de mer, parce qu’on les avoit trouvés flottans sur la mer aux environs des Iles-Maldives, et qu'on ignoroit leur origine. L'arbre qui lés produit ne fut connu qu'après que M. de la Bourdonnais eut fait, en 1745 ou 1544, la découverte de l'Ile- Praslin, qu’il nomma l’Ile-des-Palmiers. Le nom de /odoicea Sechellarum, proposé par M. la Billardière, sera sans doute adopté des botanistes. Mais s’il ne passoit pas dans le langage ordinaire, il faudroit du moins, pour éviter une erreur, subslituer à la dénomination de cocotier des Maldives, celle de cocotier des Séchelles. D'HISTOIRE NATURELLE. x47 Séchelles, et séparées l’une de l’autre par un canal de trois cents toises. Il vient indifféremment dans les sables, dans les mares et sur les rochers. Il croit avec lenteur, et ne rapporte de fruit qu'au bout de ‘vingt ou trente années. Son tronc s'élève communément à huit ou dix toises et quelquefois à quatorze ou seize toises. Il est droit comme un mât, parfaite- ment cylindrique, etson diamètre, qui varie peu, est d’environ un pied. Le sommet est couronné par une touffe de douze à vingt feuilles. Ces feuilles ont jusqu’à vingt pieds de long sur dix à douze de large. Leur dimension la plus ordinaire est de huit à dix pieds sur cinq à six. Les pétioles sont quelquefois aussi longs que les feuilles. Le bois de l'arbre est très-dur à la surface, et l’intérieur est rempli de fibres molles qu’on sépare facilement, Chaque arbre porte environ vingt ou trente cocos pesant chacun de vingt à vingt-cinq livres. Ils sont plus d’un an à mürir et ne tombent souvent qu’au bout de deux ou trois ans. Avant leur parfaite maturité, ils renferment une substance gélatineuse, blanche, ferme, transparente et très-bonne à manger. Chaque coco en contient à peu près deux assiettes. Elle Saigrit et prend une odeur très-désagréable quelques jours apres que le fruit a été cueilli. Lorsque le coco mürit sur l'arbre, cette gelée se change en une amande dure comme de la corne. Le tronc de l'arbre, après avoir été fendu et dépouillé des fibres intérieures , sert à faire des jumelles pour recevoir l’eau, et des palissades pour les habitations et les jardins. Les feuilles sont employées à couvrir et à entourer les cases. Avec cent feuilles, on peut construire une maison commode, la couvrir, 100 48 ANNALES DU 'MUSÉU“ l'entourer , faire les portes , les fenêtres et les cloisons des Chambres. A l'Ile-Praslin, la plupart des maisons sont cons- truites de cette manière. Le duvet attaché aux feuilles tient dieu d’ouate pour garnir les matelas et les oreillers. On fait des balais et des paniers avec les côtes des feuilles; et les jeunes feuilles, séchées, coupées en lanières et tressées, servent à faire les chapeaux que les hommes et les femmes portent aux Îles Praslin. La noix de coco est employée à faire des vases de diverses formes. Ceux destinés à porter de l’eau sont des cocos entiers, percés au sommet et vidés dans l'intérieur. [ls contiennent de six à huit pintes. Les nègres en suspendent plusieurs aux deux bouts d’un bâton. Ces mêmes cocos sciés en deux servent de tasses, de plats, etc. Ils sont un objet de commerce, et fort recherchés dés marins, parce qu'ils ne sont passujets à se casser. On peut les graver, et ils prennent un très-beau poli. Parmi les diverses propriétés qu’on a attribuées au coco des Maldives, les unes sont fabuleuses , les autres ne sont pas bien constatées. On croit cependant que lamande a une qualité astringente et qu'on pourroit en faire usage contre la dys- setiterie, DELEUZE. D'HISTOIRE NATURELLT. 149 SUITE DU MEMOIRE SUR LES PLANTES D'ORNEMENT, ET SUR LEUR INTRODUCTION DANS NOS JARDINS (1). PAR J. P. F. DELEUZE. S$. IT. DE L'ÉTABLISSEMENT DES PRINCIPAUX JARDINS DE BOTANIQUE. Des jardins particuliers antérieurs aux jardins publics. voiQuE les anciens aient beaucoup écrit sur l’histoire des plantes et qu'ils leur attribuassent des vertus merveilleuses , ils ne songèrent point à avoir des jardins de botanique. Pline (2) nous apprend qu'Antoine Castor, lun des plus savans mé- decins de Rome , eut le premier cette idée. « Nous avons vu, » dit-il, la plupart des plantes dont nous allons parler, éhez » Antoine Castor, qui en élevoit un grand nombre dans son » jardin. Agé de plus de cent ans, jamais sa santé n’avoit été (1) oyez la première section de ce Mémoire ; Annales, om. 8, p. 227. (2) Liv. 25, chap. 2, 150 ANNALES DU MUSEUM » altérée, et il conservoit toute la vigueur de sa mémoire. » Mais la collection de cet illustre vieillard étoit uniquement composée de plantes pour l'usage de la médecine; et il ne paroït pas qu'après lui on ait continué à s'occuper de cette culture. Au commencement du xv1 siècle , l'amour de la bota- mique engagea quelques personnes à réunir dans un même lieu les plantes les plus intéressantes, pour les y voir fleurir et les comparer les unes aux autres. Euricius Cordus à Erfort, Nordecius à Cassel, et Gaspard de Gabriel à Pa- doue , furent, à ce qu'il paroïît , ceux qui en donnèrent l'exemple vers 1525. Le dernier, l'un des plus grands seigneurs d'Italie, fit des dépenses considérables pour former une nom- breuse collection de végétaux , et il voulut qu’elle füt ouverte à tous ceux qui désiroient les étudier (1). Bientôt après, le célèbre Conrad Gesner, l'un des restaurateurs des sciences naturelles , sentit la nécessité de cultiver les plantes qu'il vou- loit connoître et décrire. Sa fortune n’étoit pas assez consi- dérable pour qu'il pût avoir un terrain bien vaste ni plusieurs jardiniers; mais son activité suppléoit à tout, et il rassembla dans son jardin à Zurich ce qu'il put se procurer par ses nombreux voyages et par ses correspondances. Ce goût de culture se répandit en Allemagne, en Suisse, en France, et nous voyons, par l'Histoire des jardins de son temps, que le même Gesner écrivit en 1960 (2) , qu'il yen avoit déjà plus de cinquante dans ces divers pays. (1) Car. Stephanus, De re hortensi, $ 115, p. 4. ed. de 1556, in-8.” (2) Quoique le livre de GEsnen ait pour titre Æorti Germanie , il fait mention des jardins de France et d'Iulie. Il est imprimé à la suite des œuvres de 7’a/erius Cordus , 1561, in-fol, D'HISTOIRE NATURELLE. 191 Cependant, dans cet ouvrage, il n’est presque rien dit de ceux des Pays-Bas, où les plantes étrangères étoient plus recherchées que partout ailleurs. Les Flamands ayant alors un commerce considérable, faisoient venir des plantes du Levant et des deux Indes ; ils n’épargnoient ni soins ni dépenses pour les conserver malgré la rigueur des hivers, ei lon trouvoit dans leurs jardins bien plus de plantes rares et curieuses que dans tous ceux du reste de l'Europe. Il paroït même que ce goût étoit fort ancien chez eux, et que, sous le gouvernement des ducs de Bourgogne et même dès le temps des croisades, ils avoient reçu et cultivé beaucoup d'espèces du Levant. Mais, pendant les guerres civiles qui désolèrent ce pays, plusieurs de ces jardins furent abandonnés où détruits. Lobel , dans l’éloquente préface placée à la tête de la nouvelle édition de son Histoire des Plantes, publiée en 1576, déplore les mal- heurs du temps, et donne la liste des jardins les plus consi- dérables des Pays-Bas. Dans les autres contrées de l'Europe, ceux qui avoient le plus de réputation étoient (x) : A Venise, celui du sénateur Jérôme Corner, qui, ayant eu long-temps l’intendance de l'ile de Chypre, avoit fait venir des plantes de l'Egypte et du Levant. À Milan, celui de Scipion Simonetta, dont le Taegio (2) a donné la description et le catalogue. Cet amateur envoyoit, toutes les années , dans diverses contrées, pour recueillir des (1) Voyez Harrer, Bibl. bot, t. 1, p. 265. — Tiraroscni , Sror. dell, lert, tal. nov. edit., t.7, part, 1, Lib. 2, cap. 2. — Grsxer, Hort. Germ. (2) Villa , p. 80. 152 ANNALES DU MUSÉUM plantes nouvelles , et il communiquoit ses trésors avec li- béralité. A Eucques, celui de Vincent de Monte-Cattino, dont Belon parle avec éloge (1). A Rome, ceux de quelques couvens et suriout celui des Récolets ; sitüé sur le Capiole, dont le soin étoit confié à Palca et à B. della Villa, commentateurs de Mesué. A Naples, celui de Jean-Vincent Pinelli, où Barthélemi Marautase perfectionna dans la botanique, et composa son He- thodus cognoscendorum simplicium, publié à Venise en 1559, En Suisse et en Allemagne, ceux de plusieurs pharmaciens et de plusieurs curés; à Ausbourg, celui des Fugger. En France, celui de lévèque du Mans, René du Bellay, qui avoit envoyé en Orient le célébre Belon pour y faire des recherches d'histoire naturelle, etc. Nous renvoyons aux ouvrages de Lobel de lEcluse, de Dodoens et de Gesner, ceux qui désireroient connoitre plus particulièrement les jardins qui existoient en 1560 et le nom de leurs possesseurs. Il paroït que celui de Camerarius à Nuremberg, et celui du landgrave Guillaume à Cassel, sont postérieurs à cette époque (2). Des jardins publics. Le plus ancien des jardins publics consacrés à l’enseignement de la botanique est celui de Pise. Cosme de Médicis, premier grand-duc de Florence , ayant fondé l'Université de cette ville (x) Remont. d'age. p. 74. (2) Voyez la préface de l'Hortus medicus et philosophicus, de Camrenarius, Francof. ad Mænum , 1588, 1n-4° D'HISTOIRE NATURELLE. 153 en 1543, y établit une chaire d'histoire naturelle : il appela pour la remplir Euc Ghini, qui depuis seize ans professoit la même science à Bologne , etle chargea de construireun jardin, dont il lui confia la direction. Il donna pour cela, en 1544, un terrain situé au nord de la ville, sur le bord de Arno, près de Farsenal. Ghini envoya dans les provinces de l'Italie et voyagea lui-même pour obtenir des amateurs les doubles des plantes qu'ils cultivoient, et pour recueillir celles qui croissent naturellement sur les montagnes: et sur les bords de la mer. H fit aussi venir des graines des pays étrangers et prin- cipalement de Candie, où son frère résidoit. Dès 1545 , le jardin étoit en ordre et peuplé d’un grand nombre d'espèces. Il con- tinua à enrichir et à y professer jusqu’à son retour à Bologne, en 1554. En 1555, André Cæsalpin son élève lui succéda, et l’on juge combien le nouvel établissement dut prospérer sous la direction d’un homme également célèbre dans toutes les parties des sciences naturelles. On sait que Cæsalpin fut le premier qui considéra la botanique d’une manière philosophique , et qui distribua les plantes, non d’après des caractères tirés de la grandeur ou des propriétés , mais d’après une méthode fondée principalement sur la considération du fruit. Belon, qui passa à Pise en 1555 , fut étonné de la beauté du jardin, dela quantité de plantes qu’il renfermoit, et des soins qu'on pre noit pour les y faire prospérer. Les nombreuses occupations de Cæsalpin et la variété de ses études Pempéchant sans doute d'entrer dans tous les détails relatifs à la culture du jardin, la direction en fut donnée à Louis F éon, sous letitre de sémpliciste général. Mais,en 1563, le duc François, fils de Côme , ayant fait transporter les plantes 9 20 154 ANNALES DU MUSÉUM dans un autre local, Cæsalpin en reprit l’intendance, et il la conserva jusqu'en 1583, qu'elle passa à Laurent Mazzanga. En 1587, Ferdinand 1° succéda à son frère. Zélé pour les progrès des sciences comme ses prédécesseurs, il eut sur- tout un goût très-vif pour l'agriculture et la botanique. Il envoya en Crète et dans d’autres contrées du Levant un habile naturaliste nommé Joseph Benincasa (1), pour y recueillir les graines des plantes les plus remarquables. Le résultat de ce voyage fut l'acquisition de plusieurs belles fleurs qu’on n’avoit point encore vues, et qui, cultivées d’abord dans les jardins de Pise et de Florence, se répandirent en Italie et de là dans toute l'Europe. Benincasa , de retour en 1591 , fut , l'année d’après , nommé directeur du jardin et du muséum ; et, cette même année, le grand-duc voulut qu'on transportät encore les plantes dans un local plus convenable et plus spacieux. On bätit une maison pour loger le directeur et les jardiniers. On construisit une serre tempérée; on forma divers compar- timens pour les plantes qui exigent une culture différente, et on destina deux grandes platebandes aux liliacées et aux fleurs d'ornement. Ce jardin est le même qui existe aujourd’hui : on peut en voir le plan dans Tilli et dans Calvi. La place de professeur de botanique et celle de directeur du muséum et du jardin, presque toujours séparées depuis Cæsalpin , ne furent réunies que plus de quatre-vingts ans après dans la personne de Nati et des deux Tilli. Cette circonstance a donné lieu à quelques erreurs dans les listes qu'on a données des intendans du jardin, soit de Pise, soit de Padoue. Il n’est pas de notre sujet de les rectifier; mais il faut expliquer pour- @) C'est à tort que plusieurs auteurs l'ont appelé Casabona, D'ÉH As TO T RUE NATUREL LE. 195 quoi on séparoit deux places qui doivent naturellement étre réunies. La raison en est que le professeur de botanique n’étoit point chargé de faire connoître le règne végétal et de donner aux élèves des méthodes pour distinguer et classer les plantes, mais seulement de montrer les plantes usuelles, et de dis- serter sur leurs propriétés vraies ou prétendues , en commen- tant Dioscoride, Il falloit que la botanique eût fait des progrès pour qu'on l’enseignät indépendamment de la médecine , comme une des parties les plus intéressantes de l’histoire na- turelle. Le jardin de Pise s’'augmenta d’année en année ; mais ce fut surtout au commencement du xvin." siècle qu’il prit un accrois- sement considérable. Ange Tilli, nommé intendant du musée pendant qu'il étoit en Asie, apporta à son retour un grand nombre de plantes nouvelles; il obtint ensuite des magistrats d'Amsterdam les doubles des plantes que les Commelin avoient rassemblées , dont plusieurs , favorisées par le climat d'Italie, y réussirent mieux qu'elles ne faisoient en Hollande. Tilli publia le catalogue du jardin en 1723, avec une synonynrie et la figure des plantes nouvelles. En 1692 , Bellucci en avoit donné un qui n’est qu'une simple liste: il seroit plus curieux de voir celui qu’avoit fait Benincasa , ainsi que les figures des plantes qu’il avoit fait peindre par d’habiles artistes ; mais cet ouvrage wa point été publié, non plus queson Catalogue du jardin de Florence (x). L'Université de Padoue jouissoit d’une grande réputation dès le commencement du xvi. siècle. On y voyoit un grand (1) Voyez sur l'Histoire du jardin de Pise, Comment. inservitur. Histor. Pisani yvireti botanici academici, auctore Johanne Calvio, Pisis , 1777, in-4.° 20 * 156 ANNALES DU MUSÉUM concours d'étrangers , et l’on s'y rendoit même du fond de la Russie pour étudier les sciences et les belles lettres : mais les diverses parties de l'histoire naturelle n'y étoient point en- seignées d’une manière spéciale ; et ce ne fut qu'eu 1533 qu’on y fonda une chaire de botanique. Elle fut donnée à François Bonnefoi avec unerétribution, d’abord de cent vingt, et ensuite de cent quatre-vingts florms. Au moyen de cette rétribution , le professeur étoit chargée de se procurer les plantes qu'il jugeoit à propos de démontrer ; mais on sentit bientôt combien il seroit plus avantageux de les réunir et de les cultiver dans un même local. Daniel Barbaro, patriarche d’Aquilée, qui jouis- soit d’une grande considération , fit à cet égard les sollicita- tions les plus pressantes : et le sénat de Venise ordonna, par un décret du 30 juin 1545, qu'on formät aux frais du trésor public un jardin de botanique. En 1546, Louis Anguillara, élève de Ghini , fut chargé de la formation de ce jardin, dont il fut nommé directeur. Le désir d'observer les plantes lui avoit déjà fait faire plusieurs voyages dans les pays étrangers. Il mit tous ses soins à rendre le nouvel établissement digne de l'université dont il faisoit partie, et il fut secondé par quelques savans, tels que Pierre de Noali, médecin, et Louis Mondela, En 1561, Anguillara étant parti de Padoue, la place de di- recteur du jardin fut donnée à Melchior Guilandin , né en Prusse, avec six cents florins d’appointemens , et après lui à Jean-Antoine Cortusus, que ses voyages en Orient avoient rendu célèbre. À Cortusus succéda l'illustre Prosper Alpin, qui, après avoir passé cinq ans en Égypte et dans les îles de la Grèce, étoit revenu à Gênes, d'où il fut appelé à Padoue pour professer la botaniqueen 1593.11 y avoit deux jardiniers ou simplicistes attachés à l'établissement et chargés d’aller toutes D'HISTOIRE NATURELLE. 157 les annéesrecueillir les plantesles plusintéressantes sur lesbords de la mer , sur les Alpes et dans les îles de Crete et de Corfou. Le jardin de Padoue ajouta beaucoup au lustre de l'Univer- sité : il continua d’être dirigé par des hommes habiles. Il aug- menta singulièrement le concours des étrangers , et il fut cité comme une merveille par tous les voyageurs. Cependant, lors- que Guilandin en donna le premier catalogue en 1581 ,il ne possédoit encore qu'environ quatre cents plantes cultivées en pleine terre,-et un certain nombre qu’on élevoit dans des vases et qu’on rentroit dans la maison, sans doute pour les garantir du froid. Mais parmi ces plantes il s'en trouvoit plu- sieurs du Levant et de l'Inde qui étoient encore fort rares, telles que le bananier, la jacynthe, quelques casses , etc. Ce nombre s’accrut d'année en année, comme on peut le voir par les catalogues publiés successivement jusqu'à celui de Georges de la Tour ( G. a Turre) en 1662 (1). Après les jardins de Pise et de Padoue, le plus célèbre fut celui de Bologne , fondé d’après les sollicitations et par les soins d’Aldrovrande, qui y rassembla beaucoup de plantes étran- gères. En parcourant les ouvrages de cet illustre naturaliste, on y remarque üne érudition variée, une littérature brillante et beaucoup de goût pour le merveilleux; et l'on juge qu'un homme doué de ces qualités dut attirer à ses leçons nn grand nombre d'élèves, et redoubler leur enthousiasme pour une science que son maître Ghini avoit déjà professée avec succès. Joseph Monti, professeur de botanique à Bologne, dans (1) Voyez sur l’'Hist. du jardin de Padoue , Tirasosenr, Storia della letterat. ital. nova edir, tom. "7, part, 1, lib. 2, capr2, et Faccozati, Fasti gymn. Patav. par’, 5. 158 ANNÂLES DU'M®US E vu" un discours prononcé à l'ouverture de son cours en 1723(1), prétend que ce jardin existoit depuis long-temps lorsque la direction en fut confiée à Aldrovrande; il insinue même que la fondation en remonte au milieu du x1v.* siècle : mais les au- torités sur lesquelles il s'appuie ne sont pas d’un grand poids. On ne peut récuser de même celle de Cayetan Monti, fils et successeur de Joseph. Ce savant, dans une histoire abrégée du Jardin de Bologne (2), composée sans doute d’après les registres de l'Université, déclare positivement qu'il fat établi par un décret du sénat en 1568: il pense cependant que la bota- nique étoit beaucoup plus anciennement enseignée dans cette école. É L'époque du jardin de Florence n’est pas fixée avec autant de précision. Le duc Côme aimant beaucoup la botanique, n’épargnoit rien pour se procurer des plantes curieuses : elles étoient cultivées avec Le plus grand soin dans son jardin del Castello , et les espèces nouvelles y étoient semées avant de l'être à Pise. Il se plaisoit à s’entretenir avec les botanistes qui venoient les étudier. Mais le jardin consacré à l'instruction publique ne fut fondé et doté d’un revenu annuel que vers 1556. Luc Ghini en dirigea la plantation comme il avoit fait pour celui de Pise; et quelquetemps après, sous le duc Ferdinand 1”, Be- nincasa l’agrandit et enrichit d’une multitude de plantes du Le- vant. Il continua de prospérer sous Côme IIT, qui en donna l'intendance aux deux frères Donnini; mais vers la fin du siècle il (1) Plant. varii indices, etc. quibus præfixa est dissertatio rei herbariæ necnon horti bononiensis historiam præcipuë complectens. Bozontæ, 1724, in-4.° (2) Indices botanici, etc, quibus accedit horti publici bononiensis historia brevis, Bononiæ, 1753. D'HISTOIRE NATURELLE. 159 fut entièrement négligé. Alors des savans et des amateurs se réunirent sous le nom de Société de botanique , et firent lac- quisition d’un terrain pour conserver ce qui restoit des plantes rassemblées par Benincasa, Boccone , les Donnini , etc. Ce zèle de quelques particuliers ayant attiré l'attention du grand-duc, il voulut rétablir le jardin public, et, par un diplôme de 1718, il en donna la direction à la Société de botanique , en lui assi- gnant un fonds suflisant pour le replanter et l’entretenir. Le célèbre Micheli, membre de la société, fut nommé jardinier en chef, et l'établissement reprit alors le lustre qu'il a con- servé depuis (1). Le jardm du Vatican fut fondé à peu près dans le même iemps que celui de Bologne. Pie V en donna la direction à Michel Mercati, l'élève chéri de Gæsalpin, et qui fort jeune encore s'étoit acquis une grande réputation. Ce sayant profita de son crédit auprès de Sixte-Quint pour obtenir la construc- üon d’un magnifique cabinet d'histoire naturelle dans la partie du palais voisine. du jardin. Il:y:rassembla les productions les plus curieuses du règne minéral, et il en écrivit l'histoire sous le titre de Metallotheca Vaticana (2). . Les dates que nous avons adoptées diffèrent de celles qu'on trouve dans les ouvrages les plus célèbres. et les plus exacts —— 2 —— (1) Foyez l’histoire du jardin de Florence , celle de la Société de botanique, ete. dans la savante préface que Targioni Tozzetti.a mise à la tête de l’ouvrage pos- thume de Micheli, qu'il a publié avec des additions, sous le titre de Catalogus plantarum Lorti Cæsarei Florentini,auciore P. A. Micuecr. Florent. 1748, 1n-fol. (2) Ce bel ouvrage n'a été publié, que sous le pontificat de Clément XI, Dans la vie de Mercati, placée à la tête, on dit qu'il n’avoit que vingt ans lorsque Pie V, lui donna la direction du jardin. Mais Pie W ne fut élu pape qu'en 1566, et Mer- cati étoit né en 1541. Voyez Metalloth, Vatic, Romæ, 1717, 2u-fol. 160 ANNALES DU MUSEUM . sur l’histoire de la botanique. Tournefort, Haller, Linnœus, Adanson, s'accordent à citer le jardin de Padoue comme anté- fieur à tous les autres ; les uns en rapportant la fondation à Fannée 1533, les autres, à l'année 1540 : mais ces auteurs se sont copiés où’wont établi leur sentiment que sar des conjec- tures. Cette errear, introduite par Tomasini (x) et par Rol- fnc (2), a été rectifiée, premièrement par 4. Facciolati, dans l'Histoire de l Université dé Padoue(3) , composée par ordre du sénat et sur les titres originaux, et depuis, par Giovani Calvi (4) , dans l Histoire du jardin de Pise. Ce dernier, avec une érudition et une sagacilé peu communes, a montré les sources de l'erreur , en indiquant les passages équivoques qui ÿ avoient donné lieu. Enfin le savant Tiraboschi , dans la nouvelle édition de son Histoire littéraire d'Italie (5), s'est rendu à l'opinion de Calvi, et a ajouté une preuve sans ré- plique en nous apprenant que le décret du sénat de Venise, daté du 30 juin 1545, ainsi que le marché passé entre le sé- nateur Foscarini et les moines de Sainte-Justine desquels on acheta le terrain , existe entre les mains de M. Marsigli, pro- fesseur de botanique à Padoue. On s'est également trompé sur l'origine des jardins de Pise, de Bologne, de Florence et de Rome; mais toute discussion (1) Gymnas. Patav. Utini, 1654, fol, (2) De vegetabilibus, etc. Zib. 2,63, cap. 5. (3) Fasti gym, Patav. Parävit, 1757, in-4.° (4) Commentarium jinserviturum historiæ pisani vireti botanici academici, Pisis, ; 1977 » in-4 } (5) Sioria della letter. italiana. Modenx, 1791 , com, 7, part. à , ib.2 ; cap: 2, p: bob. D'HISTOIRE NATURELLE. 10€ sur cet objet seroit inutile. On trouvera dans les ouvrages cités plus haut la preuve de lopinion à laquelle nous nous sommes arrêtés. On voit que les premiers jardins de botanique furent établis en Italie. L'exemple qu’elle donna fut bientôt suivi en Hol- lande, où se trouvèrent dans le siècle suivant les plus beaux jardins de l'Europe. Celui de Leyde doit particulièrement nous occuper. L'université de Leyde ayant été fondée en 1575, les rec- teurs demandèrent aux magistrats d'y jomdre un jardin de botanique auquel seroit attaché un professeur. Ils y furent au- torisés par un décret, et le terrain fut acquis en 1577. La direction du nouvel établissement fat confiée à Théodore Auger Cluyt, botaniste passionné pour la culture, qui avoit rassemblé chez lui les plantes les plus rares. à Cluyt transporta dans le jardin de l’Université toutes les plantes du sien , et au bout d’un an il commenca à y faire des leçons quoiqu'il n’en füt point chargé. Ayant inspiré à son fils la même ardeur pour la science, il l'envoya en Espagne, en Italie, sur les côtes d'Afrique, pour recueillir des plantes vivantes et des graines. En 1587, Gérard Bontius fut nommé professeur en titre, et en 1589 on lui adjoignit Pierre Pavi, médecin d'Amsterdam. Ils furent chargés par les magistrats d'enrichir le jardin des plantes qu’ils pourroïient se procurer, soit à prix d’argent , soit par des échanges, soit par une correspondance suivie avec tous les botanistes. On pria plusieurs fois de suite le célèbre l'Ecluse , qui vivoit alors à Francfort, de venir à Leyde, non pour y faire des leçons , puisque son grand âge l'en empéchoit, mais pour diriger tout par ses conseils. L’Ecluse y consentit 9. 21 162 ANNALES DU MUSEUM en 1592:ilenvoya au jardin toutes les graines que le grand-duc avoit fait recueillir pour lui dans l'ile de Crète, et il engagea les recteurs à partager les fonctions entre Bontius et Pavi; de manière que l’'unfut chargé d'expliquer Théophraste, Dios- coride ou tout autre auteur, et l’autre, de démontrer dans le jardin les huit cents plantes qu’on y possédoit, et dont Pavi publia le catalogue en 1691. En 1599, on fit construire une serre tempérée. En 1653, Adolphe Vorstius publia un second catalogue : il contient onze cent quatre espèces. Schuil en augmenta le nombre d'environ deux cent vingt, comme il paroit par le troisième catalogue qu'il donna en 1668. A cette époque, les savans, les magistrats et les hommes riches, s'occupèrent à l’envi de faciliter les progrès de la bota- nique : il ne gortoit des ports de Hollande aucun navire que le capitaine ne füt chargé de se procurer partout où il relà- cheroit , des graines et des plantes vivantes, qu'il devoit, con- server dans des caisses four les rapporter à son retour. Les personnages les plus distingués, Beverning, Fagel, Beaumont, Bentiug, Rheede, eurent des jardins magnifiques qu'ils peu- plèrent à grands frais de plantes étrangères, et ils se firent un. plaisir de communiquer ces plantes au jardin de Leyde. Mais ce fut surtout Hermann qui l'enrichit par les envois qu'il fit pendant ses voyages à Ceylan et au cap de Bonne- Espérance, et par ses soins , lorsqu’à son retour il en fut nommé professeur. À cette époque, on se trouva posséder plus de trois mille plantes :et l'on construisit des serres chaudes. A Hermann succéda pierre Hotton, et à celui-ci lillustre Bocrhaave, qui ne négligea rien pour augmenter encore le jardin. Ilen publia de nouveau le catalogue, qui contient six mille D'HISTOIRE NATURELLE. 163 plantes. Ce nombre paroïît d’abord prodigieux; mais il faut observer qu’à cette époque on distinguoitles moindres variétés, et que les catalogues se trouveroient réduits au tiers, si on se bornoit, comme aujourd’hui, à ne parler que des espèces ou des variétés notables et constantes. C’est au jardin de Leyde qu'ont d’abord été apportées la plupart des plantes d’ornement du Cap, telles que les géra- niums et les ficoïdes (1). ñ L’utilité des jardins de botanique une fois reconnue, divers princes d'Allemagne voulurent en avoir dans leurs capitales. En 1580, l'électeur de Saxe ayant entrepris la réforme de l'instruction publique, en établit un à Leipsic. En 1605, Jungermann, botaniste célèbre ,en obtint un pour l'Université que le landgrave venoit de fonder à Giessen. Après lavoir disposé, il se rendit à Altorf, et de concert avec Gaspard Hoffmann et Georges Næsler , il sollicita la même faveur pour cette ville. Le sénat de Nuremberg se rendit à ses vœux en 1625, quoique le pays fût alors en proie aux désastres de la guerre, Jungermann , nommé professeur , mit sa gloire à faire prospérer un établissement qu’il regardoit comme son ouvrage, et publia en 1635 le catalogue des plantes qu’il avoit rassem- blées. Dix ans après on construisit une serre, et le jardin d'Altorf fut alors le plus beau de l'Allemagne. Celui qu'Ernest comte de Schawenbourg, établit en 1621 à Rintlen, acquit aussi beaucoup de célébrité. Ceux de Ratisbonne et d'Ulm sont de la même époque (2). (1) Voyez l'Histoire du jardin de Leyde, que Boerhaave a placée à la tete de l’?ndex alter plant. hort. Lugd. Bat. 1720, in-4.° (2) Vide Bauer De Hortis botanico-med. Germaniæ, et de Origine et fatis horti acad. Altorf, 1726, in-4.° DT 164 ANNALES DU MUSÉUM Depuis 1555 que l’Université d'Jéna avoit été fondée, on y professoit la botanique en menant les jeunes gens herboriser à la campagne. On jugea qu'il seroit bien plus avantageux de réuvir dans un même local les plantes qu’on vouloit leur faire connoître , et le gouvernement fit construire un jardin en 1629 La direction en fut confiée à Rolfince, qui a laissé sur les végé- aux un ouvrage curieux où l’on trouve une histoire des prin- cipaux jardins publics de*son temps (1). Belon, qui avoit voyagé dans le Levant et dans une grande partie de l'Europe pour faire des recherches d'histoire natu- relle, publia en 1558 ses Remontrances sur l'agriculiure, ouvrage tradüit en latin par l'Ecluse, sous le titre De neglecta plant. cultura. 1] ÿ indique les lieux où l’on peut se procurer les semences des arbres étrangers, et il fait la description des jardins qu'il avoit vus en divers pays. Il célébresurtout celui de Padoue, dont il parle avec enthousiasme. « Si la seigneurie de » Venise, dit-il, eût fait construire un théâtre de marbre, » enrichi d’or et d'argent, elle ne se füt acquis une si grande » gloire que par l'établissement de ce jardin où sont rassem- » blées les plantes les plus rares; ce qui amene dans la ville » de Padoue une multitude d’étrangers qui viennent apprendre » les sciences dans cette Université (2).» Belon expose ensuite les avantages qu'un semblable établissement procureroit à sa patrie , et il offre d'indiquer et de fournir les arbres et les plantes les plus utiles. Les dissensions politiques et religieuses détournoient alors les esprits de l'étude de la nature, et les Remontrances de (1) J’ide Rome, de Veget. lib. 2,6 3, cap. 13. (2) Remonir, d’agr, in-/o/. 71. D'HISTOIRE NATURELLE. 165 Belon furent long-temps sans effet; mais elles ne furent point oubliées : elles firent nupression sur les homines éclairés , et parvinrent jusqu’au trône lorsque Henri IV en fut tranquille possesseur. Ce prince fonda en 1597 le jardin de Montpellier , qui, construit et dirigé par Richer de Belleval ; donna un nouveau lustre à l'Université de cette ville. A la méme époque l'École de médecine de Paris fit aussi planter un jardin ; mais comme le local étoit très-petit et qu'on n’y cultivoit que des plantes usuelles, les sciences en tirèrent peu d'avantage. ; Les plus célèbres botanistes du temps , Gesner, l'Écluse , Dalechamp , Lobel, les Bauhin, avoient fait leurs études à Montpellier; et quoiqu'il n’y eût point de chaire consacrée à l'enseignement de la botanique, ils avoient inspiré le goût de cette science. Lorsque Richer de Belleval fut nommé profes- seur en titre, il trouva les esprits disposés à seconder son zèle. 11 fut encouragé à la fois par les états de la province et par les élèves qui suivoient ses lecons Le terrain qu'on lui avoit cédé avoit cinq à six arpens d’étendue, et dès 15:48 il fut peuplé de treize cents espèces distinctes, la plupart recueillies dans les campagnes du Languedoc, sur les Alpes et sur les Pyrénées: c'étoit plus qu’il n’y en eut à Padoue et à Leyde. Le jardin ayant été détruit quelques années après par la guerre civile, Belleval le rétablit et l’'agrandit encore; et Olivier de Serres le cite comme un modele. Cependant, si par son étendue et par le nombre des espèces il étoit plus considérable que ceux d'Allemagne, d'Italie et de Hollande, il leur étoit bien inférieur pour la culture des plantes du Levant et des deux Indes ; mais le jardin de Paris, dont la fondation fut ordonnée par Louis XII en 1626, surpassa bientôt tous ceux de 166 ANNALES DU MUSEUM l'Europe. M. de Jussieu a donné dans les Annales du Mu- séum (1) l'histoire de son établissement : ainsi nous n’en par- lerons pas. Je remarquerai, relativement au sujet de ce Mé- moire, que les plantes d'ornement dürent y être alors plus cultivées qu'aujourd'hui: Comme il n’y avoit point encore ‘de jardiniers fleuristes qui fissent le commerce des plantes étran- gères, c'étoit dans les jardins de botanique qu’on cherchoit à les näturaliser , à les faire doubler, à en multiplier les variétés. IL y avoit en 1635 au jardin des Plantes de Paris , en 1653 dans celui de Copenhague, bien plus de variétés de tulipes, de jacinthes , d’œillets , d’anémones, etc. (2), que nous n’en avons (1) Voyez les Mémoires placés à la tete des tome 1, 2, 3, 4 et 6. Je crois devoir joindre ïci une note pour fixer d’une manière précise l'époque à laquelle le jardin fut ouvert au publie. Le premier catalogue publié par Guy de la Brosse, en 1636, à la suite de la description du jardin, a pour titre : Catalogue des plantes qui sont de présent cultivées au jardin royal de Paris depuis deux ans et demi qu'il est dressé, 1656. Dans l'Épitre dédicatoire à Monseigneur de Bullion, surintendant des finances, l'auteur s'exprime ainsi : Depuis deux ans et demi que les plantes des divers climats végétent en ses carreaux, la porte en & éte ouverte aux nations étrangères, qui le sont venues visiter et admirer. | D'où il suit que le jardin fut achevé de planter et ouvert au public en 1654. Les démonstrations ne commencèrent cependant qu’en 1640. Guy de la Brosse prononça, à cette occasion, un discours dans lequel on lit cette phrase: Ce jardin est le fruit de vingt-quatre années de travaux, dix-huit de pour- suite et six de culture. La Brosse montre ensuite que les autres jardins de l'Europe sont bien peu de chose en comparaison de celui de Paris. Voyez l'Ouverture du jardin royal, Paris, 1040 , in-8.° (2) Dans le plan du jardin, joint à la description donnée par la Brosse en 1656, on voit à la droite du bâtiment un parterre nommé le Jardin des tulipes. D'HISTOBRE NATURE L IE. 167 aujourd’hui au Muséum. Depuis que ces plantes sont dans le commerce, on se borne à élever dans lécole de botanique un ou deux individus de Pespèce qui a produit les variétés , et l’on réserve ses soins et le terrain dont on peut disposer, pour les espèces nouvelles ou peu communes (1). Une fois qu'on les a répandues chez les fleuristes, on ne s’en occupe plus. « Les sciences sont heureuses chaque fois qu'un objet leur » échappe... Les choses dont utilité est généralement recon- » nue ne regardent plus les savans comme savans , ils peuvent » s'en rapporter à l'intérêt du commun des hommes (2).» Il n'entre point dans notre plan de donner l'histoire des jardins publics postérieurs à celui de Paris ; il en ést cepen- dant quelques-uns dont nous croyons devoir dire un mot, soit à cause de leur célébrité, soit parce qu'ayant eu des cor- respondances directes avec les pays étrangers, ils ont intro- duit beaucoup de plantes nouvelles , soit enfin pour indiquer l'institution des premiers jardins dans les diverses contrées de l'Europe. Pierre Castelli, d’abord professeur de médecine à Rome, puis à Messine, obtint, en 1638, des administrateurs de cette ville , qu’on y établit un jardin de botanique, et il en publia le ca- talogue en 1640 (3). IL est malheureux que cet établissement ait (1) Il yau Muséum deux parterres destinés aux plantes propres à décorer les platebandes ou à faire des bordures dans les jardins. Chaque année on y sème plusieurs espèces différentes de celles qui y étoient les années précédentes , en choisissant les plus rares et celles qu'il est le plus intéressant de multiplier. C'est de là principalement qu’elles se répandent dans les jardins particuliers, soit} de la capitale, soit des départemens. (2) Rapport fait à l'Institut, sur les trayaux de la classe des sciences physiques et naturelles pendant lan xur, par M. Cuviee. (3) Foyez la préface de l'Hors, Messan, aucr, P, Casreuut , Messane , 1640, 168 ANNALES DU MUSÉUIM été négligé depuis. Messine étoit peut-être le lieu de PEurope le plus propre àacclimater les plantes des contrées méridionales(x). Il étoit bien plus difficile de former des collections de végé- taux dans les pays du Nord; mais l’industrie sut vaincre les obstacles , et la culiure s'y perfectionna d'autant plus, qu'il falloit prendre plus de précautions pour garantir ê plantes de la rigueur du climat. , - Le jardin de Copenhague existoit en 1640. En voyant les catalogues publiés par Sperling en 1642, et par Simon Pauli en 1653, on est étonné des nombreuses variétés de plantes d'ornement qu'on y avoit rassemblées. - Celui d'Upsal fut fondé en 1657 sous les auspices du roi Charles Gustave , et par les soins d'Olaüs Rudbeck. Ce savant, secondé par le crédit du comte de la Gardie, chancelier de l’Académie d'Upsal, obtint les fonds nécessaires pour la cons- truction d'une serre tempérée et pour faire venir des plantes étrangéres, et il l’'augmenta par le don qu'il fit de son propre jardin en 1662. On peut voir les progrès de cet établissement en comparant les trois catalogues donnés par Rudbeck en 1658 , 1666 et 1685. Ce dernier fait mention de mille huit cent soixante-dix plantes, parmi lesquelles on peut compter six cent trente espèces distinctes de plantes exotiques. En 1502 , l'incendie qui consuma la moitié de la ville d'Upsal réduisit en cendres l’orangerie, et les plantes des climats chauds auroient péri, si le professeur Olaüs Celsius ne les eût retirées chez lui pour les rendre dans la suite, (1) La canne à sucre est cultivée en Sicile. On sait que eette ile étoit autrefois la contrée de l'Europe la plus célèbre par sa fertilité, et par la multitude et la variété des fleurs qui couvroient les délicieuses campagnes d'Enna. Voyez Diod, de Sie. Liv. 5. D'HISTOIRE:NATUMEL LE. 169 Le jardin fut dans un état déplorable jusqu'en 1740 qu'on en releva les murs. Deux ans après, la chaire de botanique et la direction du jardin furent données à Linnæus, et l'Université, excilée sans doute par ce réformateur de l'histoire naturelle, se chargea de toutes les dépenses nécessaires pour lacqui- sition, et la conservation des plantes. Linnœus sentant combien il étoit essentiel d’être secondé dans tous les instans et'pour tous les détails, appela près de lui Diederic Nietzel, jardinier habile, qui avoit visité attenti- vement les jardins d'Allemagne, de Hollande et d'Angleterre, et quiétoit alors chargé de celui de Cliffort. Il fit ensuite construire de nouvelles serres destinées aux végétaux des divers climats, et il s’adressa, pour avoir des plantes, aux directeurs des prin- cipaux jardins de botanique de l'Europe, qui s'empressèrent de répondre à son invitation (1). Bientôt après, plusieurs de ses élèves dont il avoit excité l'enthousiasme allèrent au- delà des mers recueillir pour lui des espèces nouvelles; et des plantes des tropiques, semées d’abord à Upsal, furent en- voyées de là dans les contrées méridionales de l'Europe. On peut voir dans les Amænitates academicæ (Dissert. vx, tom, 1,p. 172) la description et le plan du jardin d’'Upsal. Linnæus publia en 1748 et en 1753 le catalogue des plantes qu'on y cultivoit. Leyde fut pendant plus de cinquante ans la seule ville de Hollande où il y eut un jardin de botanique; mais, avant le oo (1) Nous remarquerons , à l'honneur du jardin de Paris, qu’en témoignant sa reconnoissance à ses correspondans , Linnæus dit que celui de tous qui lui a rendu le plus de services est Bernard de Jussieu Religuis in ac parte facile præfes rendus. Amæn. Acad, 4. 1,p. 197. 9- 22 17 ANNALES DU MUSEUM milieu du dix-septième siècle, on en établit dans presque toutes les provinces. Ceux d'Amsterdam et de Groningue mé- ritent une notice particulière. L'Ecole de médecine d'Amsterdam avoit depuis long-temps un jardin auquel etoit attaché un professeur ; mais le local étoit fort petit : on se bornoit à y cultiver des plantes usuelles, et il fat abandonné lors de l'agrandissement de la ville. C’est seulement de 1684 que date le jardin de botanique. Nicolas Witsen en fut le véritable fondateur; et ce service n’est pas le moindre de ceux qu’il rendit à sa patrie (1). Il en donna la direction à Jean Commelin, qui, par ses vastes connoissances et par son amour pour la botanique , étoit l'homme du monde le plus propre à seconder ses vues. Cemmelin voulut que l'établissement confié à ses soins rivalisät avec ceux de Leyde et'de Paris. Il se réunit à Witsen pour faire venir des plantes de tous les pays et principalement de lInde, et disposa le local de manière à les conserver. Bientôt le nombre des espèces exotiques devint si considérable, qu'on crut devoir établir une chaire spéciale pour leur démonstration. Cette chaire fut donnée*à Gaspard Commelin , nevéu de Jean. L'un et l'autre étendirent partout la réputation du jardin en publiant l'his- toire des plantes nouvelles dont ils lavoient enrichi. Les gra- vures de ce bel ouvrage furent exécutées aux frais de la ville. Le jardin s’accrut sous la direction de Burmann; mais dans la suite il fut éclipsé par d’autres. On y voit cependant encore plusieurs plantes apportées du temps des Commelin. 1) Warsex occupa treize fois latplace de : bourguemestre : il fut conseiller de I P 5 l'Amirauté, directeur de la Compagnie des Indes, et ambassadeur dans plusieurs. cours. D'HISTOIRE NATURELLE. roi On ne doit pas oublier que c’està Amsterdam qu'a été cul- tivé le premier pied,de café apporté en Europe. Depuis que Nicolas Witsen avoit établi-le jardin , il désiroit l’enrichir de cet arbre précieux. Il s’adressa à van Horn, directeur de la Compagnie des Indes, qui résidoit à Batayia, et le pria de faire venir d'Arabie des graines fraiches, de les semer et de lui envoyer du plant. Lorsqu'il en eut recu un pied, ille donna au jardin ,.où l’on en obtint des fruits qui furent semés et pro- duisirent de nouveaux individus (1). M. Paneras, bourgue- mestre d'Amsterdam , en envoya un à Paris en 1714; il fut placé au jardin du roi où il fleurit la même année (2). On le inultiplia dans les serres, et c'est de là que furent trés les deux pieds envoyés à la Martinique en 1726, et qui seuls ont produit tous les caliers cultivés dans nos colonies (3). Le jardin de Groningue fut créé par Henri Munting. Ce savant eut dès sa jeunesse une ‘telle passion pour la bota- nique, qu'il voyagea pendant huit ans dans les diverses con- trées de l’Europe pour observer les plantes et pour former des liaisons avec les botanistes et les cultivateurs. De retour dans sa patrie , il employa la plus grande partie de sa for- tune à rassembler chez lui les espèces les plus rares, et son jardin acquit rapidement une telle réputation, qu’on venoit de fort loin pour l'admirer. En 164 , les états de Groningue, (1) Ita quidem, ut rarissimæ arboris spectaculum in Europà unius Wirsex curæ debeatur et liberalitati , errentque qui aliter de hâc re publice commentati sunt. Boeru. Tadex alter Plant. Hort. Lugd. Bat. 1.2, p. 217. (2) Foyez le Mémoire d’Ant, ne Jussieu lu en 1715 , imprimé parmi ceux de l'Académie, dans le volume de 1715. (5) Ravwaz, Hist. des établ. etidu commerce ete. Ziv. xvr, cap. 20. 29 * A N:N°AÀ LE S "DU! MUSÉE U M 172 jugeant qu'un établissement si célebre et si utile devoit être 8 la protection de la république, donnèrent à Munting le titre de botaniste de la province, avec des appointemens destinés à l'entretien du jardin, et quelques années après ils le chargèrent d'y faire des lecons. Le catalogue qu'il publia en 1646 contient environ quinze cents plantes, sans y com- prendre plus de six cents variétés, dont cent d’œillets et cent cinquante de tulipes. Parmi ces plantes, il ÿ en a plusieurs d'orangerie et de serre ; il falloit même que Forangerie fût très-vaste, car on y remarque beaucoup d'arbres qui ne peuvent passer l'hiver en pleine terre à Groningue. Abraham Munting, élevé au milieu des fleurs et des arbres de tous les pays, et ne s’entretenant qu'avec des curieux qui venoient les admirer, prit dès son enfance les goûts de son père, auquel il succéda dans la place de professeur. Ses divers ouvrages et particulièrement son Phytographia curiosa , publié après sa mort par Kiggelaer, prouvent que plusieurs plantes remarquables avoient fleuri pour la première fois à Groningue (1). s En Angleterre , avant l'établissement des jardins publics, il y en eut de particuliers fondés par des botanistes : tels furent ceux de Jean Gérard et des deux Tradescant. Le jardin de Chelsea appartenoit au chevalier Hans-Sloane. Ce savant en fit don à la compagnie des apothicaires de Londres, à condition qu'on y introduiroit chaque année cinquante plantes différentes de celles qui y étoient auparavant, jusqu'à ce que le nombre en füt porté à deux mille. Cette condition Q) Poyez l'Éloge d'Abraham Muxrne, à la ile du Phytographia curiosa: D'HISTOIRE NATURELLE. 173 a été remplie et le catalogue des cinquante plantes a été publié chaque année dans les Transactions philosophiques , depuis 1722 jusqu'en 1773. Quelques-unes n’avoient point encore paru en Angleterre, si l’on s'en rapporte à Aiïton. Le jardin de l'Université d'Oxford, fondé vers 1640, n’acquit de la célé- brité que lorsque les deux frères Sherard lui eurent donné celui qu'ils possédoient à Eltham. Le goût qu'on avoit eu pour la botanique en Espagne et et en Portugal au commencement du xvr° siècle , se ralentit avec celui des sciences , et ce pays où elles avoient été cul- tivées dans un temps où l'Europe étoit barbare, parut tomber dans l’apathie après avoir brillé du plus grand éclat sous Charles-Quint et sous Emmanuel de Portugal. C'est seulement en 1753 qu'a été établi le jardin public de Madrid. Le roi Ferdinand VI en donna l'intendance à son premier médecin Don Joseph Sagnol. IT fit acheter le jardin particulier de Don Joseph Queer, qui cultivoit chez lui un grand nombre de plantes étrangères; il nomma ce botaniste professeur et lui adjoïgnit Don Jean Minuart. Il fit en même temps rédiger àne instruction pour les voyageurs qui alloient en Amérique, et leur ordonna de rapporter des graines en y joignant l'indication du climat et de la nature du sol où on les avoit recueillies. Enfin on envoya des voyageurs chargés spécialement de faire des collec- tions de végétaux. Il est résulté de ces mesures que le jardin royal de Madrid est devenu la pépinière des plantes du Pérou , du Mexique et du Chili, et que c’est de là qu’elles ont été en- voyées dans les autres jardins de l'Europe. M. Cavanilles en a pendant plusieurs années fait passer beaucoup au Muséum , et il est remarquable que dans ce nombre il s'en trouve plusieurs 174 ANNALES DU MUSÉUM de propres à l’ornement des jardins, surtout dans la famille des corymbifères, des bignones , des liserons, etc. Le jardin de Coïimbre, établi en 1773, nous a procuré beaucoup de plantes du Brésil. Nous ne dirons rien des autres jardins publics fondés dans le siècle dernier : presque tous se sont enrichis par leur corres- pondance avec ceux qui existoient déjà. Mais nous croyons devoir faire mention de quelques jardins particuliers qui, s'ils n'ont pas été aussi utiles aux progrès de la science, l'ont été pour le moins autant à la propagation des espèces utiles ou agréables, Des jardins particuliers. Indépendamment des jardins de plaisance que quelques princes et grands seigneurs firent construire d’abord en Italie et en Allemagne, tels que celui du prince Doria à Gênes, où Belon vit un laurier-cérise lorsque cet arbre n’existoit dans aucun autre endroit de l'Europe ; celui que Bernardin Rota fit planter à Naples en 1555, et qui fut dédié aux Muses ; celni de M. du Belay , évêque du Mans, que Belon enrichit d’un grand nombre de plantes apportées d'Allemagne, d'Italie et du Levant; celui que le cardinal du Belay avoit à Saint-Maur, et que le même Belon cite comme le plus beau qu’il eût vu après celui de Padoue; ceux des Cesi, des Borghèse et des Barbe- rini à Rome; il y eut à la fin du seizième siècle un grand nombre de jardins uniquement destinés à introduire, à naturaliser et à répandre les plantes étrangères. L'Écluse, qui consacra sa vie entière aux progrès de Ja bota- nique, cultiva, soit à Vienne, soit à Francfort et à Leyde, une multitude de plantes dont il donna l'histoire. Il parcourut la D'HISTOIRE NATURELLE. NS France, l'Allemagne, l'Espagne , l'Angleterre; il acquit une grande considération : il eut pour amis les hommes les plus distingués par leur état et leurs talens, et il profita de leur crédit pour se procurer les plantes du Levant, et celles que des voyageurs espagnols, portugais ; flamands , anglais, apportoient des deux Indes. Il mourut en 1609 âgé de quatre-vingt-quatre ans ,ayant eu le bonheur de voir répandues dans les jardins de l'Europe une foule de plantes dont il avoit obtenu les graines et dont il avoit le premier essayé et conseillé ja culture. En louant l'Écluse , Qui fut le premier botaniste de son siècle, nous devons un nt de reconnoissance aux princes éclairés qui secondèrent ses vues. Maximilien IT, qui occupa le trône impérial depuis 1564 jusqu’en 1576, fit construire à Vienne un magnifique jardin dont il lui confia la direction. Il n'épargna rien pour se procurer des plantes de tous les pays , et il chargea particulièrement ses ambassadeurs auprès du grand-sultan de lui envoyer toutes celles qui décoroient les jardins de Constan- tinople. Rodolphe IT, fils et successeur de Maximilien , enrichit encore ce jardin. La culture des plantes d'ornement y fut extré- mement soignée , comme on le voit par le Florilegium de Sweert, publié en 1612. Elle se répandit chez les grands sei- gneurs : les dames surtout en firent leurs délices. En parcou- rant les ouvrages de l'Écluse , de Dodoens et de Lobel, on est étonné du grand nombre de jardins qu'ils citent comme appartenans aux personnes les plus distinguées, du prix que les femmes attachoient aux fleurs, et des soins qu’elles se don- noient pour en faire venir des pays étrangers. Chaque année, deux jardiniers envoyés dans les principales villes de Flandre portoient aux amateurs les plantes qu’on avoit recues de Cons- tautinople, et rapportoient en échange celles qui leur parois- 156 ANNALES DU MUSÉUM soient nouvelles, Ce goût se ralentit en Allemagne vers le milieu du dix-septième siècle ; mais il se conserva en Flandre et en Hollande, où il devint la source d'un commerce con- sidérable. En Espagne et en Portugal, quelques botanistes, tels que Monardes, Simon de Tovar, cultivèrent aussi les plantes ap- portées des deux Indes. Jean Gérard eut un jardin de botanique près de Londres: il en publia le catalogue en 1596; et l'on voit, par l'Hortus Keswensis , que l'Angleterre dut à ses soins beaucoup de plantes étrangères: A Florence , le sénateur Nicolas Gaddi fut l’un des premiers qui se procura des plantes d'Egypte et du Levant. Il les con- servoit en hiver par des moyens alors imusités , inusitalo mo- limine, et il se plaisoit à les propager dans toute l'Etrurie (1). C'est à lui que la botanique doit Jean Benincasa, Il l'avoit fait venir de Flandre pour prendre soin de son jardin ; mais lorsqu'il eut reconnu en lui des talens supérieurs à cette place, il le recommanda au grand-duc, qui, comme nous l'avons vu, le fit voyager et lui donna la direction des jardins de Florence et de Pise. A Rome, le cardinal Farnèse rassembla chez lui un grand nombre d'espèces alors nouveiles ou fort rares, dont Aldini publia l’histoire en 1625. C’est là qu'ont été d'abord introduites la grenadille et l'espèce de mimosa aujourd'hui cultivée en Provence. Mais de tous les jardins connus à cette époque, le plus a ——————————————_————————— (1) Foyez Tarciont, Hist. Lort. florent, D'HISTOIRE NATURELLE. 077 célébre fut celui que Conrad de Gemmingen , évêque d’Aichstet, it construire près de son palais à la fin du seizième siècle. Conrad dépensa des sommes considérables pour faire venir, non-seulement d'Europe, mais du Levant et des deux Indes, les plus belles plantes. Il tira des jardins de botanique celles qui s’y trouvoient, et il voulut qu’elles fussent gravées dans un magnifique ouvrage dont la direction fut confiée à Besler. Cet ouvrage, publié en 1613, un an après la mort de Conrad, ayant fait connoître des fleurs superbes, on désira générale- ment de se les procurer , et il paroît qu'il a singulièrement contribué à les répandre. Dans lemêmetemps, Jean Robin cultivoit à Paris un jardin dont il publia le catalogue en 1601. Il en avoit commencé la plantation dès sa jeunesse, et n’avoit cessé de l’enrichir de plantes venues des pays étrangers et surtout de l'Amérique septentrionale. Il étoit également chargé de celui de Henri IV, qui lui avoit donné le titre de Simpliciste du roi(1).Sa passion pour les fleurs étoit telle qu’il employoit à s’en procurer non- seulement les appointemens qu’il recevoit , mais encore la plus grande partie de ses revenus. Il fit partager ses goûts à son fils Vespasien, qui communiqua au jardin de Paris, lors de sa fondation, toutes les plantes que son père et lui avoient rassemblées pendant soixante ans. Le luxe des broderies étant singulièrement à la mode au (:) On lit dans Tournéronr, sagoge in rem hérbariam , p. 50, que Henri IV, roi de France et de Navarre, donna le soin de son jardin à Jean Robin vers 1570. Cette date est évidemment une faute d'impression; elle a cependant été copiée par Linnæus , qui même a confondu le jardin particulier de Henri IV avec le jardin dé Paris. Voyez Biblior. bor, p.55, et Amæn Acad, 1,2, p. 175. Elle a depuis passé dans d'autres ouvrages, l 9. 23 178 ANNALES DU MUSEUM commencement du dix-septième siècle, Pierre Vallet, brodeur dé Henri IV, fit graver én 1608 un grand nombre de fleurs choisies pour servir de modèles. Ces gravures eurent un double effet : elles inspirèrent aux amateurs de la nature le désir. de posséder les plantes à cause de leur beauté, et aux artistes celui de les cultiver: pour les représenter sous divers points de vue ;, et ne pas copier rigoureusement les dessins déjà em- ployés. Ainsi la culture des fleurs fit faire à l’art de la bro- derie de grands progrès, et le désir de perfectionner la bro- derie fit rechercher les fleurs nouvelles. La même chose se pratique encore à Lyon. Les dessinateurs attachés aux manufactures de cette ville sont en relation avec les botanistes, et lorsqu'une plante élégante paroît dans quelques jardins , ils s’empressent d’en reproduire l'image sur leurs étoffes: On remarque même que le goût qu'on à depuis peu pour les arbustes étrangers a influé sur le ca- ractère des dessins. Au lieu de les charger de roses, de tu- hpes , d’œæillets ,comme on le faisoit il y a cinquante ans, on y met de préférence des guirlandes de petites fleurs telles que le fuchsia , le lopesia, etc. Les mêmes ta, se re- trouvent sur!les porcelaines. | Apres la publication de l Hortus Ey drofemsis. du jardin de Henri IV par Vallet, du Florilegium de Sweert, le goût des plantes d'ornement devint général : la culture produisit des variétés remarquables, et plusieurs amateurs voulurent avoir des, jardins décorés de plantes exotiques et nouvelles. Il seroit trop long de donnér l'histoire -de ces jardins; nous aurons occasion d'en citer plusieurs en parlant des plantes qu'ils ont introduites : nous croyons devoir nous borner ici à indiquer succinctement ceux qui ont eu le plus de réputation. D'HISTOIRE NATURELLE. 179 À Blois, celui de Gaston de France, .duc d'Orléans, dont Morison publia le catalogue en 1633 ; c’est d’après les plantes qui y étoient cultivées que fut commencée la magmifique col- lection de peintures sur vélin, aujourd’hui déposée à la Biblio- thèque du Muséum : à Paris, celui de Joncquet, depuis pro- fesseur au jardin du Roi: à Beaugencier près de Toulon, celui du fameux Peiresc, qui le premier se procura et cultiva le myrte à fleur double , le jasmin des Indes, la bignone écar- late, etc. En Angleterre ; celui.de Jean Tradescant, planté vers 1630, et le plus ancien après celui de Jean Gérard. Le roi Charles LE" et les seigneurs dela cour qui venoient souvent le visiter y prirent le goût de la culture des arbres exotiques , et plusieurs plantes introduites par Tradescant furent alors désignées sous son nom, comme, 4$ter Tradescanti , Ephemerum Tra- descanti, etc: Voyez Parkins!: o(1). Celui de Henri Compton, qui, nommé évêque de Londres en 1635 , rassembla à Fulham un grand nombre d'arbres exotiques qu'on n’avoit point eu- core vus en Europe (2). Celui de Collinson, situé à Müll- Hill près dé Londres, où furent apportées beaucoup de plantes d'Amérique (3) : enfin, celui des frères Sherard, si célèbre par lhistoire que Dillenius en a publiée sous le nom d’AHorius El- (1) Jean Traneseanr, après avoir parcouru la Barbarie, l'Égypte ; la Grèce et la plupart des contrées de l’Europe, fit dans sa maison à Lambeth une collection de curiosités de la nature et des arts. En 1656, son fils en publia le catalogue, ainsi que celui du jardin, sous le titre de Musæum | Tradescantianum. C'est le pre= mier établissement de ce genre en Angleterre. ’oyez les Transactions philosoph, an 1775, tom. 63. : (2) Voyez Trans. phil, an 1951 , tom. 47. —Abrégé des Trans, phil, £. 1, p. 268, (5) Ge jardin étant considéré comme un terrain classique à cause des plantes nouvelles dont il avoit enrichi l’Angletcrre, et parce que Linnæus, ami de Col- Ge li 180 ANNALES DU MUSÉUM thamensis, et qui, comme nous l'avons dit, fut donné à l’uni- versité d'Oxford. A Padoue, celui de J. F. Mauroceni, dont Antoine Tita publia le catalogue en 1713. À Misilmeri près de Palerme, celui du prince de la Catho- lica, dont Cupani donna l'histoire en 1696. À Montbelliard, celui du prince Frédéric de Wirtemberg, dont Le soin étoit confié à Jean Bauhin, qui le cite à chaque page de son Âistoire des Plantes. A Leiïpsic, celui de Gaspard Bose, où furent d’abord cul- tivés plusieurs asters d'Amérique et l'amandier nain. Le cata- logue de ce jardin a été publié successivement par Amman, Peine et Wehmann, depuis 1686 jusqu'en 1723. Il ÿ avoit une multitude de fleurs d'ornement. A Carlsrouhe, celui que le prince de Bade-Dourlach fit cons- truire en 1715, et pour lequel il fit voyager Thran avec He- benstreit , lorsque ce dernier naturaliste fut envoyé en Afrique par le roi de Pologne Frédéric-Auguste I.” (1). C'est de ce jar - din qu'ont été envoyés au Muséum les deux superbes lataniers ( chameærops humilis, L.) qu’on place tous les étés devant la porte de lamphithéätre. | A Jacobsdal près de Stockholm, celui du sénateur La Gardie, publié par Rudbeck en 1664. La Hollande eut, à la fin du dix-septième siècle , une foule de botanistes distingués , et ce fut le pays où l’on se livra le plus à la culture des jardins. Celui que Simon de Beaumont, secrétaire des états, avoit à La Haye, ceux de Beverning et de linson, y avoit travaillé, M. Salysbury l’a acheté, il y a sept ans, pour y faire sa résidence et le rendre à la botanique. (1) L y avoit à Carlsrouhe, en 1757, 154 variétés d'orangers et de citronniers- D'HISTOIRE NATURELLE. i8r Fagel, introduisirent un grand nombre de plantes étrangères. De tous les jardins de ce pays, le plus célèbre, et par sa ri- chesse, et par la description que Linnæus en a publiée en 1737, c'est celui que Cliffort avoit à Hartecamp, à une lieue de Harlem et à trois lieues de Leyde. Cliffort se procuroit tout ce qui arrivoit de nouveau en Angleterre et en Hollande; il étoit en correspondance avec les botanistés de tous les pays. Bocrhaave lui avoit communiqué les plantes de son jardin, Siegesbeck lui en avoit envoyé de Russie, Haller des Alpes, Burmann, Roëll, Gronovius et Miller lui avoient fait part des graines qu'ils avoient recues des diverses parties du monde, Il avoit quatre serres magnifiques ; une pour les végétaux du midi de l'Europe et du Levant, uneautre pour ceux d'Afrique, une troisième pour ceux de l'Inde, une quatrième pour ceux des climats chauds de l'Amérique. Les possesseurs des collections dont nous venons de parler ne se bornèrent point à exciter l'admiration des botanistes, à leur faciliter les moyens d’étude et de comparaison, à con= server ce qui pouvoit étendre le domame de la science : ils propagèrent et multiplièrent ce qui leur paroissoit intéressant; ils distribuërent gratuitement ce qu'ils s'étoient procuré avec tant de peine et de dépenses. Le goût des plantes étrangères devint général , surtout chez les Anglais. Miller, qui avoit ras- semblé et cultivé toutes celles qui paroïssoient, observe, dans la huitième édition de son Dictionnaire, publiée en 1768, que pendant les trente ans écoulés depuis la premièré le nombre de ces plantes étoit plus que doublé. Il saccrut encore dans le jardin fondé à Kew vers 1760 , qui, comme nous le verrons bientôt, réunit le premier une foule d’espèces recueillies dans des pays nouvellement découverts. 182 | A NINIALES- DU, MU SÉU z Parmi les. végétaux étrangers semés :dans les jardins #de Rotanique ilse trouvoit plusieurs arbres. qui, fort petits pen- dant,les premières années, étoient, devenus superbes, et atti- roient tous les yeux , soit par la singularité de leur port , soit par leur majesté. Ce fut probablement la cause de la révolu- tion opérée en Angleterre dans, l'art des jardins vers le milieu du siècle dernier ; et qui leur fit prendre un nouveau caractère de grandeur et de variété. Plusieurs seigneurs voulurent peu- pler leurs parcs d’arbres et d’arbustes exotiques : on étudia l'art de les assortir et de les faire contraster : on vit des arbris- seaux , qui seuls et isolés, n’appeloient point l'attention , pro- duire des effets pittoresques lorsqu'ils étoient réunis en masse ou associés à d'autres : on renonça presque aux palissades d'ifs, de buis et de charmille, aux allées d'arbres taillés au ciseau : on opposa le itamarix si léger et si mobile au thuya, dont les rameaux ressemblent aux feuillures d’un rocher :! le saule pleureur, l'olivier de Bohême, l’amandier d'Orient, contrastèrent par leur couleur argentée et par leur port avec les sapins de Canada, dont la tige pyramidale est toujours cou- verte d’une sombre verdure : on plaça dans les allées des plantes grimpantes , qui formoient des. guirlandes ou: des ber- ceaux ; les grappes de fleurs du g/ycine frutescens parurent suspendues aux branches des érables : on planta des bosquets de diverses saisons, et l’on disposa les arbres en amphithéätre d’après leur grandeur, de manière que le tulipier élevat sa tête superbetau- dessus des açacias, et que le cèdre du Liban étendit ses rameaux au-dessus des genévriers : on garnit les inurs ayec la bignone écarlate, la grenadille et la clématite bleue. Le goùt des arbres étrangers passa d An gleterre en PF rance; DH MST ONMENN AUTDURE HE LE. 193 mais leur prix excessif et la difficulté de Sen, procurer les auroïient pendant longtemps empéchés, dese pépandre:, si quelques hommes distingués par leur crédit: et leur fortune: et, zélés pour le bien public, n'eussent mis leur gloivé:à-en én- richir leur patrie. Duhamel fut le premier à former ce projet, et il mit dans son exécution une suite ef ung/activité inconce+ vables: ‘Il obtint de l'amiral la Galissonière.son amai} qu'ik lui énvoyät des tonnéaux de graines d'arbres etarbustesrecügillies ‘au hasard dans l Amérique septentrionale. Il en fit des essais en grand dans ses terres de Dénainvilliers; du Monceau et de Vrigny. Ils yréussirent si bien , et les espèces étoient tellement nombreuses , que souvent les botanistés ; en: allant visiter ses, pépinières ; y trouvoient des plantes qui leur: étoient incohnues. Le duc d'Ayen, ‘depuis maréchal de Noailles, fit.à Saint- Germain-en-Laye, une vaste plantation d'arbres exotiques. Là fleurirent , pour la première fois, plusieurs hOyÉTS d'Amérique et le sophora du Japon. Son pare étoit ouvert à tous, les jama- teurs, Ce futen y accompagnant Louis XV, qu'il lui i inspira le désir d'établir à Trianon, pourd’amusementidela famille royale, et pour le progrès de la science; cette école de botaniqué, où Bernard de Jussieu disposa, pour la premiere fois, »Àes plantes dans l’ordre:des familles naturellés;, & 2456420100 29 8 : Le chevalier deJ'ansin ft acheter, dans tous.les penside L Eus. ropeiet dans lés pays étrangers, les arbres qu'il:espéroit pou- voir acclimater : 1 les: planta «ét les multiplia: dans son jardin situé àla ile de-Chaillet-(5l) ;.et iles distribua aux, bota. user ol 19, s:mtluo ul $saioe 9B eul« somm0b tiovmoa.li .solis as re Ï : 3 $ 7e: n = et 91 lag 20 3} Ft ouysre l ooctaeurcb soil TOI Eräin a passé depuis à madamerde es et apparyisht aujourd'hui à M. de Choiseul-Gouflg:. 9h ) Y ( »2 184 ANNALES DUIMUSÉUM nistés et aux cultivateurs. On voit encore, dans le même local, . des arbres superbes, qui ont produit ceux de la même espèce aujourd’hui répandus dans toute la France. - Unimagistratillustre ; dont le nom , cher aux amis dessciences et de la philosophie , rappelle le souvenir de toutes les vertus, Eamoignon de Malesherbes, fit pendant toute sa vie ses dé- lices de l'histoire naturelle et particulièrement de la botanique : il se .plaisoit dans la société de ceux qui partageoient ce goût avec lui ,-et cherchoit à le répandre et à lé rendre utile. IL naturalisa dans sa terre de Malesherbes un grand nombre d'arbres et d’arbustes étrangers ; il essaya, le premier, de faire en grañd des sémis d’arbres fruitiers pour obtenir des variétés nouvelles. En rendant à sa mémoire les hommages de la recon- noissance et de l'admiration , écartons l'idée des malheurs dont il fut la victime. Ne souillons point le tableau des beautés de la nature par le récit des crimes que produisirent la destruc- tion des principes et le bouleversement de la société. Les: hotimes dont je viens de parler entretenoient des relations çontinuellés avec un savant du premier ordre , ca- pable de les aider de ses conseils et de seconder leurs projets: on voit que je veux parler du célèbre Lemonnier , celui de tous ses contemporains à qui la botanique d'agrément a le plus d'obligations. La collection de plantes qu'il avoit formée pen- dant quarante ans avoit un avantage sur celles des jardins publics. Comme il négligeoit la série des végétaux pour ne s'occuper ‘que des espèces nouvelles et de celles qu'il croyoit utiles, il pouvoit donner plus de soin à leur culture et les mul- tiplier davantage. Plusieurs fleurs de nos parter res, plusieurs des arbres qui décorent nôs parcs, sont dus à ses recherches et à ses soins. Voué par état à la médecine, qu'il pratiquoit D'HISTOIRE NATURELLE. 185 surtout par bienfaisance, la botanique étoit son unique dé. lassement. Sa réputation l'ayant fait appeler à la cour, et sa place ayant augmenté sa fortune, il employoit ses revenus à se procurer des plantes étrangères, à défrayer des voya- geurs. Il cultivoit dans son jardin les espèces les plus rares : ious les travaux qu'il ne pouvoit faire de ses mains étoient exécutés sous ses yeux et sous sa direction. Lui-même semoit et récoltoit les graines, et son bonheur étoit d’en distribuer à ceux chez qui il espéroit les voir réussir. Dans un petit espace, il avoit préparé des terrains de différente nature et ménagé des sites convenables aux plantes des divers climats. Sur un fonds de terreau de bruyère, croissoient en foule et sans ordre plusieurs espèces de kalmia , d’itea, d’azaléa , de rhodo- dendron, parmi lesquels le lis superbe de Canada élevoit ses tiges fleuries. Des buttes couvertes de mousse étoient arrosées par une eau jaillissante, qui, s'infiltrant doucement , entretenoit une fraîcheur continuelle. Là, de jolies saxifrages, des mitella , des gentianes, des soldanelles, des mœhringia et autres plantes charmantes, rappeloient aux botanistes les gazons humides des Alpes. A l'ombre des sapinettes, des acacia, des tulipiers et des magnolia , on voyoit de petites plantes de Laponie , de Sibérie et des terres magellaniques ; tandis qu'une serre ex- posée au midi renfermoit les productions les plus précieuses des tropiques. L'ardeur que Lemonnier avoit eue pour la botanique dès son enfance ne se ralentit point dans sa vieil- lesse; elle fut sa consolation au milieu des pertes et des cha- grins qui l’accablèrent pendant les orages de la révolution, A l'âge de quatre-vingt-quatre ans, il jouit , comme Lécluse au seizième siècle, du bonheur de retrouver partout des planies et des arbres qu'il avoit introduits. à 24 186 ANNALES DU MUSEUM Parmi ceux qui suivirent l'exemple de Lemonnier, on doit distinguer un savant dont la perte récente a été vivement sentie par les amateurs de l'agriculture et de la botanique. M. Cels entendoit parfaitement l’art d'élever les plantes étran- gères , et le soin deles propager occupoit tout son loisir avant que le dérangement de sa fortune l'engageät à en faire une spéculation de commerce. Plusieurs espèces aujourd’hui très- répandues ont été introduites par lui, et l'on voit, par la description des plantes nouvelles ou peu connues de son jar- din, publiée par M.Ventenat, combien il a été utile aux progrès de la science. Nous avons négligé de parler de plusieurs jardins moins considérables , soit de France, soit des principales villes de l'Europe ; mais nous ne pouvons passer sous silence ceux de Schoenbrun et de Kew. Le palais de Schoenbrun étoit à peine commencé, lorsqu’en 1553 l’empereur François 1.” destina une portion du jardin à la culture des plantes exotiques. Il voulut que cet établissement füt digne de la magnilicence impériale, et qu’il étendit le domaine de la botanique, en réunissant des végétaux jusqu'alors in- connus en Europe. D’après le conseil de van Swieten, il fit venir deux fleuristes célèbres , l'un de Leyde, l’autre de Delft. Le premier, nommé Adrien Steck-Hoven, dirigea la cons- truclion desserres ; le second ,nommé van der Schott, apporta iout ce qu'il avoit pu recueillir dans les jardins et les pépi- nières de Hollande : ainsi , dès la première année, on se trouva posséder beaucoup d'espèces curieuses ; mais ce n'étoit qu'un premier pas vers le but qu’on se proposoit. L'empereur proposa au célèbre Jacquin d'aller aux Antilles. Ce botaniste partit en 1754, accompagné de van der Schott D'HISTOIRE NATURELLE. 187 et de deux zoologistes italiens , chargés de procurer des ani- maux à la ménagerie et au Muséum. Ces voyageurs visi- tèrent la Martinique , la Grenade, Saint-Vincent, Saint-Eus- tache, Saint-Cristophe, la Jamaique , Cuba, Curacao , ete. En 1755 ils firent un premier envoi, et en 1756 van der Schott arriva avec une collection d'arbres et d’arbustes, presque tous dans le meilleur état. Les arbres avoient cinq à six pieds de haut, et plusieurs avoient déjà donné des fruits. On les avoit arrachés en motte, et la terre, enveloppée de feuilles de bananier , étoit contenue par des cordes d’hibiscus tiliaceus. Ainsi emballés, ils pesoient cent livres l’un dans l'autre. Ces végétaux et l’eau nécessaire pour les arroser formoient la plus grande partie de la cargaison du vaisseau qui avoit été expédié de la Mar- tinique pour Livourne. De Livourne, les plantes furent trans- portées à dos de mulet et placées en pleine terre dans les serres préparées pour les recevoir. Le troisième et le qua- trième envoi vinrent de la même manière. Le cinquième et le sixième arrivèrent de Curacao par Amsterdam. Enfin Jac- quin, parti de la Havanne, conduisit à Schoenbrun la dernière collection en 1750. Dans le même temps on avoit recu des envois de différens pays; il est inutile d'ajouter qu'a mesure qu’on faisoit des frais pour se procurer des plantes, on bâtissoit des serres et des orangeries, et que la grandeur des édifices répondoit à celle des arbres qu'on vouloit y voir fractifier. En effet il y a à Schoenbrun plusieurs serres de quarante à cinquante toises de longueur sur trente pieds d’élévation; et les arbres y sont, non dans des caisses, mais en pleine terre, et ils restent à la même place l'hiver et Pété, in 1780 , un accident causa la perte de la plupart des planies 4 * 188 ANNALES DU MUSÉUM de la grande serre. Van der Schott étant malade, le jardinier qui le suppléoit oublia, pendant un nuit très-froide , d'allumer les poëles : s’en étant aperçu le matin , il crut remédier au mal en faisant un feu très-vif. Ce changement subit de tempéra- ture fit périr plusieurs arbres dont le tronc étoit de la gros- seur du bras. Pour réparer cette perte, l'empereur Joseph IT voulut que des naturalistes entreprissent un nouveau voyage. Le profes- seur Matter fut nommé chef de l’expédition : on lui donna pour compagnon le docteur Stupiez, les jardiniers Boose et Bredemeyer et le dessinateur Mol. Is allèrent d'abord à Phi- ladelphie , et visitèrent les États-Unis, la Floride et l'ile de la Providence. Bredemeyer , de retour de la Caroline en 1784 , eut à peine déposé ses plantes, qu'accompagné d’un autre jardinier nommé Schucht il alla rejoindre le docteur Matter, et visita avec lui plusieurs iles d'Amérique et une partie du continent, jus- qu'à l'embouchure de l'Orénoque. En 17985, M. Boose revint des îles Bahama où il avoit séjourné huit mois, et il fut aussitôt envoyé à l'Ile-de-France et à ‘ile de Bourbon avec le jardinier Scholl. Il y fit une collection si considérable qu'il ne lui fut pas possible de la transporter jusqu’en Europe. Il la déposa au Cap, où il laissa Scholl, qui se chargea d'en prendre soin et de l’envoyer par parties avec une autre que M. Géré préparoit encore à l'Ile-de-France. A son retour à Schoenbrun, il fut chargé en chef de la direction du jardin. Cependant la collection restée au Cap et celle de M. Céré n’étoient point encore parties en 1791 : des plantes cultivées en PRE CREER six ans devenoient chaque jour plus dif- D'HISTOIRE NATURELLE. 189 ficiles à transporter ; on les attendoïit avec impatience, et Scholl désiroit vivement de revenir. Ces considérations détermi- nèrent l’empereur Léopold à envoyer à l’fle-de-France Bre- demeyer et van der Schoit, fils de celui qui avoit accompagné Jacquin en Amérique. A leur arrivée , ils trouvèrent le capi- taine Baudin , qui consentit à placer sur le vaisseau qu'il com- mandoit-la collection de M. Céré et celle de Scholl , et qui les ramena à Trieste en 1792. ï Après la mort de Léopold , Francois IT fit construire une serre de deux cent trente-cinq pieds de long , uniquement destinée aux plantes du Cap (1). Ces soins continus , ces dépenses faites successivement , mais à propos et d’après un plan déterminé d'avance, ont réuni des végétaux de tous les climats , ont conservé ce qu’on avoit acquis , et ont donné à toutes les parties de l'établissement un ensemble qui fait l'admiration des étrangers. Comme les serres de Schoenbrun sont les plus vastes qu’on ait construites en Europe, les arbres des tropiques y déve- loppent en liberté leurs branches ; ils y donnent des fleurs et des fruits. Les palmiers les plus rares, le cocos nucifera , le caryota urens, lelæis guinensis, ÿ croissent avec vigueur ; le corypha umbraculifera y étend ses larges feuilles à douze pieds à la ronde, et des oiseaux d'Afrique et d'Amérique y voltigent au milieu des arbres de leur pays (2). Mais ce n’étoit point assez d’avoir rassemblé tant de plantes étrangères, de les faire végéter comme dans leur sol natal ; il (1) 7oyez Short account of the imperial botanic-garden at Schoenbrunn. 41- nals of Botany, n. 5, p. 582. (2) Voyage en Hongrie de R. TowWxsow, (om 1, chap. x. 190 ANNALES DU MUSEUM ne suflisoit pas même d'en distribuer des graines et de jeunes pieds : pour que cette collection fût utile aux progrès de la botanique , il falloit la faire connoître en donnant la descrip- tion et la figure de toutes les plantes qu'on voyoit fleurir pour la première fois loin de leur pays, soit qu’elles fussent nou- velles , soit qu'elles eussent été désignées dans le $ystema plantarum, d'après les herbiers ou d'après l'indication des voyageurs. Le célèbre Jacquin s’est chargé de cette entreprise, et l’a exécutée en publiant successivement les trois grands ouvrages connus sous les noms d ÆHortus schœænbrunensis, Ico- nes plant. rariorum, Fragmenta botanica. Venons maintenant au jardin de Kew, dont le caractère est fort différent de celui de Schoenbrun, mais qui est encore plus riche en espèces, et plus spécialement consacré aux progrès de la botanique. Frédéric, prince de Galles , père du roi actuel, et protec- teur éclairé des sciences, ayant acquis la maison que Samuel Molineux , secrétaire de George II, possédoit à Kew sur les bords de la Tamise, à sept milles de Londres , voulut en faire un palais élégant et y joindre un jardin de plantes étrangères. Ce projet, qu'il n'eut pas le temps d'exécuter ; le fut par la princesse douairière, qui chois:t Kew pour sa rési- dence. Six William Chambers , architecte du roi, fut chargé de la construction des édifices, et il en publia la descripuon , les vues et les plans, en 1763 (1). « Le jardin des plantes exotiques , dit Chambers’, ne fut commencé qu’en 1760 ; ainsi il ne peut étre encore parvenu à sa (1) Plans, élévations, sections and perspective views of the gardens aud buil« dings at kew in Surry. Lond. 1765, in-fol D Œ 1 S'IMON RENATURE LL E. 101 perfection : mais, d’après les vastes connoissances en botanique de celui qui en a la principale direction , et d’après les soins qu’on prend pour faire recueillir des plantes dans toutes les parties du globe, on peut assurer que dans peu d'années il renfermera la plus riche collection de végétaux qu'il y ait en Europe. Pour recevoir ces plantes, j'ai déjà bâti une orangerie de cent quarante pieds de long, vingt de large et vingt de hauteur, et plusieurs serres. » Le savant dont parle Chambers est sans doute lord Jean Steward, comte de Bute, qui ayant été gouverneur de George IT, fut ensuite son premier ministre. Lord Bute étoit en effet fort instruit en botanique et pas- sionné pour celte science, et ce fut lui qui dirigea tout ce qui étoit relatif au jardin (1). En 1768 , Jean Hill en publia un catalogue, qui déjà pré- sente un grand nombre d'espèces dont plusieurs n’avoient point encore paru en Europe. George II seconda les vues de lord Bute, et accorda à cet établissement une protection particulière. Il envoya Masson au Cap ,et de là aux Acores, à la Jamaïque et dans l'Amé- rique septentrionale, pour recueillir des graines. Les voyageurs qui accompagnèrent le capitaine Cook, sir Joseph Banks, Solander , Forster , déposerent à Kew les plantes nouvelles (1) Le comte de Bute est l’auteur des Tables botaniques des genres de plantes d'Angleterre, en 9 volumes in-4.®, ouvrage d’un grand luxe, dont ilne fit tirer que douze exemplaires. Voyez Biblioth. Banks. tome 5, page 132. Il fit aussi les frais de la publication du grand ouvrage de Hizr, The vegetable system., en 26 vo- Jumes in-fol., avec de belles planches, C'est à Ini qu'on a dédié les deux geures stewartia et butea. 102 ANNALES DU MUSEUM qu'ils avoient rapportées ; et depuis l'établissement des Anglais à la Nouvelle-Hollande , tout ce que les botanistes ont pu ra- masser dans ce pays a d’abord été envoyé à Kew. William Aiton , placé à la tête du jardin vers 1772, dirigea les cultures avec autant de zèle que d'intelligence, et il entre- ünt uue correspondance suivie avec les botanistes étrangers. On doit lui rendre cette justice, qu’il n’a jamais voulu réserver pour lui seul ce qu’il lui étoit possible de multiplier. Dans le catalogue du jardin qu’il a publié en 1789, et qui présente la collection la plus nombreuse qu’on connoisse après celle de Paris (1) , il indique à quelle époque les plantes étrangères ont été introduites en Angleterre et de qui il les à recues. M. Thouim y est souvent cité; mais il faut dire aussi que William Aiton nous a souvent procuré des plantes que nous n'aurions pas eues d’ailleurs. Son fils, M. William -Townsend Aiton , qui lui a succédé dans la place de jardinier en chef en 1793, suit les mêmes principes. Les serres de Kew ne sont pas aussi vastes que celles de Schoenbrun , ni même que celles du Muséum de Paris; mais elles sont en grand nombre. Chacune est destinée à un choix d’espèces auxquelles convient la même culture. Non-seulement on y gradue diversement la chaleur; mais dans les unes on entretient une chaleur humide, dans d’autres une chaleur sèche : leur exposition et leur construction sont adaptées aux plantes qu'on se propose d'y élever. Les plantes annuelles ne sauroient être aussi nombreuses à Kew qu'à Paris , parce que l'été n'est pas assez long et assez (1) Ce catalogue contient environ cinq mille sept cents espèces, sans y comprendre les variétés, D'HISTOIRE NATURELLE. 193 chaud pour en mürir les graines, et qu’on ne peut les élever toutes dans les serres : cet inconvénient est compensé par l'avantage d’une température plus égale, qui permet de laisser en pleine terre des magnolia et autres arbres de la Caroline, que nous sommes obligés d’abriter dans l’orangerie. Dans le jardin, les plantes ne sont point arrangées d’après leur classification systématique , comme on seroit obligé de le faire si c’étoit une école de botanique ; chaque espèce est plantée dans le sol et à l’exposition qui lui convient le mieux ; et les sites mêmes retracent, autant que le local peut le per- mettre , le lieu d’où les plantes sont originaires. Quoique ce jardin ne soit pas public, l'entrée en est ou- verte à tous ceux qui se livrent à l'étude ; et il n’est aucun jardin particulier qui soit aussi utile aux progrès de la science. Le catalogue publié par Aiton sous le nom d’Aortus kewen- sis, est un modèle en ce genre. Il est du nombre des livres classiques continuellement cités par les botanistes (1). Nous terminerons cette Notice sur les jardins de bota- nique , en citant celui de Demidow à Moscou, le plus con- sidérable qu'aucun particulier ait jamais possédé. Demidow jouissoit d’une fortune immense : il avoit des connoissances étendues en histoire naturelle, et la botanique étoit sa passion (1) W. Aiton a été aidé dans son travail par M. Dryander. (1) Les botanistes qui connoissent les talens et l'exactitude de M. Aiton fils, désirent vivement qu'il donne une nouvelle édition de cet ouvrage, enrichie de ses propres observations, et de l'indication des plantes acquises depuis 1789. Je crois deyoir remarquer ici qu'on ne doit pas toujours s’en rapporter aux cata- logues pour juger de la richesse d’un jardin. Les catalogues font autorité lorsqu'ils sont donnés par des botanistes tels que Haller , Linnæus, M. Desfontaines. Mais il en est qui sont faits pour ainsi dire au hasard , et dans lesquels on nomme beau- coup de plantes qui n’ont jamais existé dans le lieu où on les indique. 9. 25 194 ANNÂLÉS DU MUSEUM dominante. Non content d'entretenir des correspondances dans tous les pays civilisés , chaque année , pendant la belle saison, il faisoit voyager deux habiles jardiniers dans les vastes déserts de la Russie asiatique. Les serres qu'il avoit fait construire occupoient plas d’un arpent de terrain (1). Le catalogue de sa collection, qu'il publia en 1786, contient quatre mille trois cent soixaute-trois espèces ou variétés notables, sans y com- prendre cinq cent soixante-douze variétés d’arbres fruitiers, six cens variétés de fleurs, comme tulipes, jacinthes, oreilles d'ours , etc., et deux mille éspècés de plantes qui n’avoient pas encore fleuri. Nous devons à Demidow la connoissance de quelques procédés particuliers pour faire lever les graines des plantes étrangères : et c’est lui qui à envoyé au jardin de Paris les robinia althagana, pygmæa, halodéndron , quelques spi- ræa ct plusieurs autres belles plantes de Sibérie, qui sont main- tenant recherchées pour la décoration, et répandues dans le commerce (2). On voit que si le jardin de Paris surpasse de beaucoup tous les autres jardins publics de l'Europe, et par le nombre des plantes, et par l'étendue des correspondances, nos jardins par- (1) Correspondance manuscrite de Deminow et de M. Tours. (2) Une seule anecdote prouvéra quelle importance Demidow mettoit à enri- chir son jardin. Etant à Rome vers 1775, il trouva chez les Pétits-Augustins del Corso un oranger planté eu pleine terre, qui, par sa forme et sa beauté, surpas- soit tous ceux qu'il avoil vus. Les moines ne vouloient pas s'en défaire, et il fallut employer beaucoup d'argent et beaucoup de crédit pour vaincre leur résis- tance. Ftant enfin parvenu à l'obtenir, il fit creuser un large fossé pour l'en- lever en motte sans éndommager les racines ; et l'ayant encaissé , il fit construire un Char Exprès pour le transporWr à Moscou. Je tiens ce fait de M. Corrca, qui en a été témoin. D'HISTOIRE NATURELLE. 19) üculiers m'ont pas eu jusqu'à présent le même avantage; mais nous nous flattons que bientôt la France n'aura rien à envier aux pays étrangers. Quoique le jardin de la Malmaison ne soit commencé que depuis peu d'années , les principes d'après lesquels il est dirigé autorisent notre confiance. Le bel ouvrage de M. Ventenat a fait connoitre les plantes nouvelles qui y ont déjà fleuri, et dont le nombre s'accroît de jour en jour par les envois des cours étrangères et par ceux des voyageurs. Ce qui distingue ee jardin de tous les autres, c'est que l’'Impératrice a voulu le consacrer principalement à l'acquisition et à la propagation des espèces utiles. D’après ses ordres, les graines qu'on y a reçues ont été partagées avec le Muséum, où lon à même fait passer les plantes qui n'iutéressent que les botanistes, pour multiplier en plus grand nombre celles qui doivent être d’une utilité plus géné- rale, Déjà les pépinières qui y sont établies ont produit plu- sieurs espèces d'arbres exotiques , et des caisses de jeunes élèves ont été données aux administrateurs des départeñiens , Chargés de les distribuer dans les lieux où ils peuvent réussir. Ainsi se réalisera le vœu formé par Belon, et depuis par tous les amis de l'agriculture et de l'histoire naturelle, celui de voir le sol de la France réunir tous les arbres étrangers qui peuvent supporter lhiver de nos climats. De l'augmentation progressive qui a eu lieu dans le nombre des plantes d'agrément, depuis le quatorzième siècle. 11 faut nous arrêter un moment ici pour comparer entre eux , sous le rapport des plantes dont ils étoient décorés, les jardins antérieurs à la renaissance des beaux arts, ceux des 250€ 106 ANNALES DU MUSEUM seizième et dix-septième siècles, et ceux que nous avons au- jourd’hui. Pierre de Crescent , sénateur bolonoiïs, composa en 1300, à l’âge de soixante-dix ans, un ouvrage d'agriculture qu'il dé- dia à Charles IT, roi de Naples et de Sicile. Il est divisé en douze livres, et le huitième traite des jardins d’agrément. L’au- teur enseigne les moyens de les construire et de les orner ; il les partage en trois classes : ceux des personnes qui ont peu de fortune , ceux des personnes aisées, et céux des princes et des rois. Ces derniers doivent avoir une ménagerie d'animaux paisibles, et être peuplés d’oiseaux dont le chant fasse entendre une douce mélodie sous des berceaux d'arbres et de vignes; ils doivent être, comme les autres, décorés de gazons, d'herbes aromatiques et de fleurs. Les plantes aromatiques que nomme Crescent, sont la rue, la sauge, le basilic, la marjolaine, la menthe; les fleurs sont la violette, le lis, la rose, l'iris : il ajoute, et d'autres semblables ; mais on juge bien qu'il cite leSPlus intéressantes. En effet, dans le cours de l’ou- vrage il a parlé des divers arbres, et l’oranger et le grenadier sont presque les seuls arbres étrangers qui soient destinés à Yornement. Cependant il n'oublie rien de ce qui peut embellir les jardins où il veut que les princes aillent quelquefois se délasser des affaires. Il est remarquable qu'il ne parle point des giroflées, que les anciens Romains cultivoient en grand. Bocace , dans son Decamerone, décrit avec cette richesse et cette poésie de style qui n'appartient qu'à lui les jardins des environs de Florence. On y voyoit des orangers , des rosiers, des jasmins , des genets d’Espagne , et les gazons étoient émaillés de fleurs; mais il ne parle ‘pas de parterres destinés particulièrement à cette culture. D'HISTOIRE NATURELLE. 197 Charles Etienne publia en 1536 un traité sur les jardins, ayant pour titre De re hortensi. Cet ouvrage est remarquable par l'ordre des idées, par l’élégance et la clarté du style. Une partie est consacrée aux plantes d'ornement. On voit qu’elles sont en petit nombre , que les fleurs doubles y sont extrême- ment rares, et que pour faire dans les parterres des compar- timens et des bordures, on n’employoit guère d’autres plantes que le buis. La description des jardins d'Allemagne , de Suisse et d'Italie, donnée par Gesner en 1560, présente une augmentation con- sidérable dans le nombre des espèces. On y voit quelques plantes étrangères, et plusieurs des indigènes sont indiquées comme propres à faire des bordures. En 1579, Dodoens donna un ouvrage sur les plantes d’or- nement :ila pour titre, f'lorum et coronariarum arborum historia. C'est un catalogue de toutes les plantes cultivées dans les jardins d'Anvers, avec leur description et leur figure. IL y a joint celles dont la fleur lui a paru remarquable , quoi- qu’elles ne fussent pas cultivées. Il y a ici beaucoup plus de plantes d'ornement que dans Charles Etienne et dans Gesner , et plusieurs nouvellement arrivées des Indes , comme le soleil , la capucine; mais ce nombre est encore bien petit en com- paraison de celui qu’offrent les jardins d’Aichstet ou celui de Robin. Ainsi .c’est seulement à la fin du seizième siècle , et par l'influence des jardins de botanique , que la culture des fleurs a fait des progres ; encore ne connoissoit-on, à l'époque de Sweert, ni les jacinthes doubles, ni les renoncules doubles, ni la plupart des fleurs les plus communes aujourd’hui. Cest au dix-septième siècle qu’elles ont été successivement intro- 1098 ANINIA LES DU MUSEUM duites , et que des jardiniers fleuristes en ont multiplié les va- riétés et en ont fait un objet de commerce. Enfin, dans le dix-huitième siècle, le nombre des plantes d'ornement est devenu dix fois plus considérable. On ne s’est plus borné aux fleurs cultivées dans des vases on dans les platebandes des parterres : on a recherché surtout les plantes de bordure et les arbustes étrangers, qui, par leur élégance, pouvoient , dans les diverses saisons, offrir une décoration variée dans des sites différens , et qui, flattant les sens par leur beauté ou leur parfum, rappeloient à l'esprit les pays d'où ils étoient originaires, Les marchands ne se sont plus bornés à vendre d'innombrables variétés de jacinthes, detulipes, d'œillets, d’oreilles-d’ours , de renoncules. Il s’en est trouvé qui ont ac- cueilli et acclimaté toutes sortes de plantes étrangéres, et MM. Kenardy et Lée ont formé en ce genre une collection magnifique à Londres. On ne peut voir sans admiration les plantes nouvelles qu'acquièrent chaque année les fleuristes de Paris, et qui se montrent successivement sur le pont des Arts et sur le quai des Fleurs : presque toutes ont été, l'année pré- gédente, cultivées au jardin du Muséum, La culture des plantes et des arbres exotiques s’est, depuis quelques années , prodigieusement répandue en France. L'idée qu’on avoit eue d’attacher un jardin de botanique à chaque école centrale en est la principale cause. Lors de la fonda- tion de ces jardins, le Muséum a envoyé à chacun d’eux une collection de végétaux , ayant soin de choisir les plus intéres- sans, les moins connus, et ceux qui pouvyoient le mieux réussir dans le lieu pour lequel on les destinoit. Ces acquisitions nou- xelles ont éveillé la curiosité ; et lorsque les écoles centrales ont D'HISTOIRE NATUREL LE. 199 été supprimées et les jardins donnés aux villes, les uns ont été conservés et considérablement enrichis (1); d’autres ont été convertis en pépinières nationales; et si quelques-uns ont été abandonnés , divers particuliers se sont disputé l'avantage de recueillir chez eux les plantes intéressantes et les jeunes arbres : ils en ont pris soin et en ont distribué des graines et des bou- tures. Comme le goùt des plantes s'accroit à mesure qu’on $y livre, les amateurs ont cherché à sen procurer d’autres , qu'ils ont de même propagées, et bientot un grand nombre d'espèces curieuses ont été cultivées dans des pays où peu de temps auparavant on ignoroit leur existence. Cette influence s'est mênge fait sentir à Paris. Les fleuristes et les pépiméristes recevant plus de demandes des départemens, ils ont redoublé d'activité ; ils ont augmenté leurs cultures; ils ont étalé leurs richesses aux yeux du public pour attirer l'attention, et l'on peut remarquer que dans la belle saison ,non-seulement comme autrefois le quai aux Fleurs, mais les boulevards et plusieurs rues , Sont décorés de caisses et de vases remplis de plantes et (1) Je me borne à citer pour exemple le jardin de Gand, fondé en l'an y ( 1799)..La ville. qui s'en est chargée, donne annuellement 6000 fr. pour son en- tretien. On y à construit une vaste orangerie et deux serres, et l’on à fait acheter des plantes en Angleterre et en Allemagne. 11 renferme aujourd’hui plus de trois mille espèces, et il a répandu dans le pays le goût de la botanique et celui de la culture des arbres étrangers. La direction enest confiée à trois amateurs éclairés, MM. de Baut, van de Woestyn et Dierix, et l'on se propose d'y établir bientôt un professeur. É Le jardin est décoré des bustes des trois plus célèbres botanistes flamands, Léeluse, Dodoens et van Sterbeeck; et pour que ces monumens annoncent le bienfait en exprimant la recommoissance, chacun a été placé au centre d'un petit bosquet formé des plantes et des arbres introduits ou cultivés par celui dom le buste offre l'image. 200 ANNALES DU MUSEUM d'arbustes, dont les uns étoient inconnus il y a dix ans , et dont les autres ne se trouvoient que dans les jardins de quel- ques amateurs, Le nombre des plantes étrangères doit s’accroître de jour en jour, parce qu’une circonstance nouvelle en favorise l'introduc- tion. Nous voulons parler de la création de quelques jardins hors de l'Europe, destinés à servir de dépôt aux plantes re- cueillies par les voyageurs dans les contrées voisines. Cet avan= tage est immense, parce que certaines graines devant être semées peu de temps après leur maturité, et d'autres ne pou- vant passer la ligne sans perdre la faculté de germer, il y a plusieurs plantes dont on seroit privé si on ne les faisoit lever dans le pays, pour transporter ensuite en Europe de jeunes pieds tirés de la pépinière au moment du départ des vaisseaux. Le jardin de la compagnie hollandoise au Cap avoit rendu les plus grands services au milieu du dernier siècle. On sait avec quel enthousiasme les voyageurs en avoient parlé ,et com- bien il avoit fait passer de plantes en Hollande. Il a été fort négligé depuis ; mais on en est dédommagé par plusieurs autres qui n’existoient point alors. Les principaux sont : Celui de Ténériff, fondé par le roi d'Espagne actuel, pour naturaliser les plantes des tropiques; Celui de la Société des sciences à Calcuta, où sir William Jones a élevé et décrit les plantes des Indes lesiplus célèbres (1); (Gi) Je ne sais si le jardin de Ceylan, le premier de ceux qui ont été fondés dans l’Inde , existe encore aujourd’hui. Il fut planté vers 1750 par J. G. Loten, gouverneur de l’ile de Ceylan, Foyez Linnæus, Syse, nat. au mot Certhiz lotenia, D'HISTOIRE NATURELLE, 201 Celui de la Jamaïque, dont le docteur Clarke avoit dirigé les cultures; : Celui de Cayenne, fondé par le chevalier Turgot, aujour- d'hui dirigé par M. Joseph Martin , et particulièrement con- sacré à naturaliser les arbres à épicerie; Ceux qu'André Michaux avoit plantés à New-Yorck et à Charles-Toywn, qui nous ont fourni tant d'arbres de l'Amé- rique septentrionale. Les mêmes ressources nous sont encore offertes par dugl ques jardins nouvellement établis en Amérique pour Pinstruc- tion : tel est celui de Mexico, dont M. Cervantes est profes- seur; celui que le docteur Osack a planté à Elgin en 1804, où il fait des leçons et dont il vient de publier le catalogue; enfin celui de Charles-Town, établi en 1805 par un acte de la législature ,.et dont les frais ont été faits par souscription. IL paroit que plusieurs autres villes des Etats-Unis, et même quelques-unes de l'Amérique méridionale, jouiront bientôt du même avantage. Les jardins de botanique sont une source de richesses non- seulement pour le pays dans lequel ils existent, mais pour toutes les nations. Leur correspondance mutuelle fait insen- siblement passer dans chacun d’eux ce qui se trouve dans les autres , et propage les variétés intéressantes produites par le hasard ou par la culture. Si les souverains en multiplient le nombre sur divers points du globe, s'ils leur accordent une protection éclairée, s'ils en confient la direction à des savans zélés pour le bien public, s'ils favorisent les communications et les voyages; ces établissemens finiront par naturaliser dans tous les pays civilisés ceux des végétaux utiles, à la culture 9. 26 202 AN INTrARLIESSL D'UMT IT IS HER AUUIX desquels la différence du climat n’oppose pas un obstacle invincible. k Je pense qu’on sera bien aise de trouver ici l'indication de ceux des jardins de botanique situés hors de l'empire français , qui sont en relation directe avec celui de Paris. Je vais en donner la liste d’après nos registres de 1805 et 1806. Je ne parlerai point des jardins particuliers bien plus nombreux, me bornant à en citer quelques-uns qui sont connus par des catalogues imprimés , ouverts aux , botanistes et consacrés aux progrès de la science. Je joindrai au nom de chaque jardin le nom du directeur ou professeur qui entretient la correspondance avec le Muséum. Je ne classerai point ces jardins dans l'ordre de leur importance : la distinction seroit difficile à établir ; d'ailleurs il en est qui sont particulièrement destinés à tel ou tel geure de culture. Je les nommerai en partant de l'Italie et en faisant le tour de l’Europe. Je finirai par ceux qui sont établis dans les autres parties du monde. NOMS NOMS DES PROFESSEURS DES VILLES. Ou DIRECTEURS. Pavie ( jardin de MM. botanique). . . Scanegatti, direc- teur. (Jardin d'économie rurale). . . . . Beyle Barilli,zdem. Parme . . . . . Pascal , professeur. Milan. . . . . . Armano, recteur. Vicence. . . . - Baldini, professeur. Vérone (jardin de la soc. d’agric.). . Lecomtede Gazola, directeur. Bologne. . . . . Philippe Ré, pro- Jfesseur. Pise. . . . : , . G. Santi, idem. NOMS DES PROFESSEURS NOMS DESANILLE Ee Où DIRECTEURS. Florence (jardin du Muséum). . . Zuccagni,professeur. (J. d'écon. rurale.) Targioni Tozzetti, rd. Palerme. . . . . Vaccari ,rdem. Madrid . . . . . Zéa, idem. Coimbre. . . . . Brotero, dem. Cambridge. . . Kew . . . . . . Aïton, directeur. Middelbourg . . . Reytsma, z/em. Harderwick. . . . Reinwardt, profes= . James Donn, zdem, seur. Amsterdam. . . . Glucher, directeur. Groningue. . . , Munick , dem, (mort l'année der- nière. ) D'HÉSTOIRE NATURELLE. 503 NOMS NOMS NOMS NOMS DES PROFESSEURS DES PROFESSEURS DES ACTES Où PIRÉCTEURS. DES VILLES. Où DIRECTEURS. Utrecht. . . . . Van-Genus,profes- | Cracovie. . . . . Schultes , profes. seur.. è seur, Leyde... . . . . Brugmans, idem. Vienne. . . . .Jacquin,idem. Copenhague . . . Hornmann, idem. Schoenbrun. . . . Boose, directeur. Upsal. . . . . . Thunberg, idem. Zurich. . , . . . Roemer,professeur. Lund . . . . . . Retzius, zdem. Berne. , . . . . Morell, directeur. Berlin. . . . . : Willdenow , idem. | Bâle . + . Hagenbach, profes- Dresde. . . . . . Seidel, recteur. seur. Hall... . . : . . Sprengel, zdem. Pétersbourg(jard.de Weimar. . . . Reichart, idem, lImp-douairièr.): . . . . 02 Saltzhourg. : . . Ranfils, zdem. Moscow. . . . . Redonski, idem. Eclang: sets Schreiber ; idém. Calcuta . . . . . Roxburgh , direce- Kiel. . . . . . . Weber, professeur. * Leur. Dusseldorf. . . . Weghe, directeur. | Ile-de-France. . . Céré, idem. Heidelberg. + . . Zuccarini, profes- | Cayenne ( jard. de Seur: naturalisation). . Martin, rdem. Gottingue . . . Schrader , idem. : New-Yorck , . , Osack, professeur. Carlsrouhe . . .Schweïckert, direc- Leur, Je joins.ici la liste de ceux des jardins publics de France qui me sont connus par leur correspondance avec le Muséum. Je n’y comprends point les pépinières nationales. Agen . . . . . . Saint-Amans, pro- | Blois . Jesseur. Bordeaux . . . . Leupold, directeur. Alfort ( jard. de l’é- Brest . . . . . . Laurent, idem. cole vétérin.) . . Dupuy, idem. Bruxelles. . . , . Dekin, z/em. Angers . . . . . Batard, zdem. Caen . . . . . . Roussel, professeur, Arras. . . . . . Pochon, z4em. Clermont. . . . . Lacoste de Plai- Avranches. . . . Buisson, directeur. sance, zdem. Bastia (jardin de na- Colonel turalisation ) . . Lasalle, z/em. Dijon . . . . . . Valot, zdem. Besançon. . . . . Morelle,professeur. | Douai. . . . , . 20/4 ANNALES DU MUSÉUM RE ———_—_—_—_—_———_—_—_—— tt NOMS DES PROFESSEURS NOMS DES VILLES. OU DIRECTEURS. . Debaut, v. deWoes- tynet Dierix, di- *Gandi,n 0 recteurs. + . Viviani,professeur. . Neckre de Saussure, ‘idem. (Jard. de la société d'hist.nat.). . . Michaeli, recteur. LeHavre . . . . Fréret, idem. Lille . . . . .:.Lestiboudois, pro- Gênes . . . . Genève . . . . fesseur. Lorient . . . . . Dupuy, directeur. Louvain Are Le Lyon (jardin du dé- partement) . . . Gilibert,professeur. ( Jard. de l’école vé- térinaire). . + . Hénon, z4em. Marseille . Mayence . . . . Koeler, professeur. Montpellier . . . Broussonet, rem. - . Villemet, z/em. «. .« «+ Lacour, directeur. NOMS DES PROFESSEURS Où DIRECTEURS. NOMS DES VILLES. Niort. . . . . . Joseau, professeur. Paris (jardin de lé- cole de médec.) . Richard, zdem. (Jardin de l’école de pharmacie , . . Guyart, idem. . De Nesle, idem. Reims . . . . . Noël, idem. : Rennes , . . . . Arthus de Villar- moy , idem. . + Chapiotin, idem. Poitiers . , . . Rethel. , , . Roanne . +. + - Lapierre, idem. La Rochelle . . . Bonpland, idem. Rochefort . . . Robe Moreau, zdere, Rouen . . . , , Varin, directeur. Saint-Brieux fie) B re lv ce: r SUITE . Villars, professeur. . Martin , directéur. . Lapeyrouse, profes= seur. Strasbourg. : . LOU Per Toulouse , . . Toursbr sr IR EN ANT MONELRONL Turin. . . . . . Balbis, dem. Valenciennes! MEME D'HISTOIRE NATURELLE. 205 SUITE DES RECHERCHES SUR LES OS FOSSILES DES EN VIRONS DE PARIS. PAR M CUVIER. C4 QUATRIÈME MÉMOIRE. TROISIÈME SECTION. LES OMOPLATES ET LES BASSINS. Lrs os plats sont les plus difficiles à obtenir entiers : il n’y a peut-être dans aucun cabinet une omoplate fossile qui ne soit fracturée , même de celles que l’on trouve dans les terrains meubles. Les os de même nature, incrustés dans nos pierres à platre, se brisent inégalement quand on fend celles-ci; et si leur empreinte atteste encore leur contour , il n’y reste presque jamais d’apophyses, ni d’autres saillies minces, assez entières pour qu'on puisse déterminer leurs formes. Ce n’est qu'après beaucoup de temps et des prodiges de patience de la part de mes aides, pour dégager de la pierre les parties foibles , que j'ai pu rassembler les renseignemens imparfaits qui rempliront cette section. 206 ANINALES:DU ‘MUSÉU M er ART. 1. LES OMOPLATES. Toutes celles que j'ai eues se sont clairement laissées rap- porter à deux formes générales. Les unes, comme celle dont la tête est représentée planche T, fig, 7,8, 9, avoient un acromion, c’est-à-dire que leur épine, plus saillante en avant que dansle reste desa longueur , y émetde son angle externe une production isolée qui se dirige aussi en avant. Les autres (fig. 1 et 3) n’ont aucun acromion; l'épine se confond en avant avec la face externe de l'omoplate, et s'élève insensiblement jusqu'aux deux tiers de sa longueur, où est sa partie la plus saillante, et où son bord est en même temps le plus élargi. Un des objets principaux de l’acromion étant de donner attache à la clavicule ,on devoit s'attendre qu’il n’existeroit point dans les animaux où la clavicule manque entièrement. Cela est en effet presque toujours ainsi. Les pachydermes et les solipèdes n’en ont pas même de vestige : dans les rumi- nans, la partie la plus saillante de l’épine est bien en avant; mais elle y est tronquée net. Il n’y a que le genre des chameaux qui fasse exception à cette règle ; l'angle antérieur et externe de l'épine s'y pro- longe et y forme un véritable acromion , encore plus marqué dans le lama que dans le chameau et le droite En voila assez pour nous faire rapporter nos omoplates fossiles pourvues d’acromion à notre genre anoplotherium , puisque nous sommes habitués par toutes nos recherches précé- dentes àle voir serapprocher des chameaux dans toutes les cir- constances où il s'éloigne un peu des pachydermes ordinaires. Les omoplates sans acromion appartiendront donc aux D'HISTOIRENATURE L LE. 207 palæotheriums ; et en effet l’analogie vient de son côté con- firmer ce résultat. L’épine de lomoplate du rhinocéros et du tapir a sa partie la plus saillante vers le tiers postérieur de los, et ses deux extrémités se perdent insensiblement dans la face externe. Le cochon et le cheval ont aussi ce caractère ; mais l’hëppopo- tame se rapproche davantage de la forme des ruminans. D’après cette règle ,il nous sera aisé, en ayant égard aux grandeurs, de répartir entre les espèces les omoplates ou les fragmens d’omoplates que nous avons recueillis. $ IL” Omoplates de palæotheriums. J’en ai eu de trois sortes. La première, représentée à moitié grandeur , planche I, figure 1 et 2, ne peut être comparée qu'a celle du rhinocéros par son contour ovale, sans fortes échancrures , et par la po- sition de son épine. Dans le tapir , l'épine est un peu plus vers le bord posté- rieur ; les fosses y sont par conséquent moins égales : et il y a une échancrure demi-circulaire derrière le tubercule qui tient lieu de l’apophyse coracoïde. ( Voyez nos planches sur l'ostéologie de ce genre.) Le tubercule ressemble ici à celui du rhinocéros; mais lépnme commence plutôt : elle forme sa saillie moins subite- ment ; son bord est renflé sur plus de moitié de sa longueur. La fosse post-épineuse est coupée plus obliquement en arrière; . le bord postérieur de lomoplate n’a point de bourrelet, etc. ( Comparez cette figure avec celles de nos planches sur los- téologie du rhinocéros). Cette omoplate est longue de 0,22 ; large à Pendant qui l'est 208 ANNALES DU MUSEUM le plus, de 0,091 ; à l'endroit le plus étroit, de 0,035. La plus grande saillie de l'épine est de 0,02; la hauteur de la tête articulaire, de 0,035 ; sa largeur , de 0,03; la saillie da tu- bercule acromial , de o,of. La seconde sorte d’omoplate se voit également en demi-pro- portion , planche, figure 3. A peu près de la même grandeur que la précédente, elle en diffère sensiblement par le contour de sa fosse post-épi- neuse, qui s'élargit davantage en arrière; ce qui donne à los une figure plus triangulaire, et le rapproche davantage du rhinocéros et du cochon. Du reste, l’épine , le tubercule et la tête articulaire sont à peu près les mêmes. Le bord de l'os et celui de la tête articulaire étant mutilés, on ue peut pas en donner des dimensions générales bien pré- sises ; mais voici celles de quelques parties. Largeur à l'endroit le plus large , 0,12. C’est un quart de plus que dans la précédente. Largeur à l'endroit le plus étroit, 6,043; il lui faudroit 0,048 pour avoir la même proportion. Plus grande saillie de l’épine, 0,02; du tubercule acromial, 0,01. On voit par ce qui reste qu'elle devoit être au moins aussi longue que l'autre. Ces deux omoplates conviennent chacune à peu près éga- lement bien, par leur grandeur, au palæotherium medium et au palæotherium crassum. A n’y a pas de motifs bien positifs our en accorder une à la première espèce plutôt qu’à la seconde. Cependant je ne crois pas non plus aller contre la vraisemblance, en donnant de préférence lomoplate la plus large au palæotherium crassum. Le fragment de tête figures 4 et 5, quoique un peu plus grand que la tête de la figure 5 , ne pat pas en différer par D'HISTOIRE NATURELLE. 209 l'espèce; mais je crois avoir une portion d’une troisième sorte, dans le morceau représenté figure 6. La hauteur de la tête n'y est qu'un peu plus deanoitié de celle de notre première sorte , et la longueur totale de los ne fait que les trois cin- quièmeés. En comparant ce morceau avec ce qui reste de lomoplate au squelette presque entier trouvé à Pantin, j'y trouve assez de ressemblance pour l'attribuer à la même es- pèce; je crois donc que c’est ici l’omoplate du palæotherium minus. On y voit la tubérosité qui caractérise cet os dans les palæotherimns , et ce qui reste de la naissance de l’épine est très-semblable. La forme générale , telle que l’a fournie le sque- lette de Pantin, paroït avoir ressemblé un peu plus au palæo- therium crassum qu'au medium. Longueur de l'os dans le fragment détaché . . . . . . . 0,156 Hauteur de la tête . . , : + 4. . + . : . . . . . . 0,025 MArSEUD Ie eee eee eee puise ele Mo Lere: pe {0010 Longueur de ce qui reste de l'os dans le squelette de Pantin. 0,115 Sa plus! grande! largeur 1.1. . . . 4 4 :)) . 4! . . L, 0,036 Hautruride satele ac: il ete ele Pal IL) 00,02 Hauteur de sa tubérosité "+ . +. . . , +. ..,.. 0,006 lerseuriderlatéte = MN EN NeNr me lle etlente Oo! Je n'ai eu aucune partie de l'omoplate du palæotherium MAS. S Il. Omnoplates d'anoplotherium. Nous avons eu deux têtes bien entières, dont une, avec la naissance de l’épine et l’acromion complet, est représentée par sa face externe, figure 7; par son bord inférieur ou posté rieur , figure 8 ; par sa face articulaire, figure 9. L’acromion ressemble par sa forme et par sa saillie à celui du lama; mais 9- 27 2r0 ANNALES DU.:MUSIÉEUM la tubérosisé coracoidienne ressemble davantage à celle du chameau, surtout par ce caractère de n'être point séparée du bord de la face articulaire par unegchancrure. C'est aussi là ce qui nous aidera à distinguer les omoplates d’anoplothérium qui n’ont pas conservé leur acromion. Au reste, la face articulaire du chameau et du lama est beaucoup plus ronde, et celle de lanoplotherium se rapproche un peu pour le contour de celle du tapir. Hauteur de la face articulaire . . . . . . . . . . . , .0,06r Darveure ef. t-il dure ee se, eee + 11,:10:049 Elévation de l’acromion sur la face externe de l'os. . . . 0,04 Profondeur de l’échancrure de l’épine sous l’acromion . ..0,025 Largeur de l’os à l'endroit de la tubérosité . .:. . . . . 0,08 o t) Nous avons trouvé dans le cabinet de M. de Drée l'empreinte d'une grande omoplate dont la tête étoit évidemment sem- blable à celle que nous venons de décrire. Nous en donnons une figure au quart de sa grandeur , planche I, figure 11. Quoique les limites de los n’y soient pas bien entières, on y voit cependant que les omoplates de ce genre étoient beaucoup plus larges à proportion que celles des palæotheriums ; leur longueur étoit au moins 0,25 , et leur largeur devoit fort approcher de 0,2. Il est évident qu'une omoplate de cette grandeur ne peut appartenir qu'à l'anoplotherium commune. Ses proportions nous autorisent à rapporter aux anoplothe- riums medium et minus , les omoplates représentées figures 13 et 12, quoique ni l'une ni l’autre n'ait conservé les parties ca- ractéristiques de la tête. La premiere est du cabinet de M. de Drée; la seconde, de celui de M. Camper, qui a bien voulu m'en envoyer un dessin. J’en possède moi-même une portion de D'HISTOIRE NATURELLE. 211 cette dernière sorte, qui me fait voir que celle de M. Camper n'avoit pas conservé toute sa largeur. , Longueur de l’omoplate de l’anoplotherium médium . . . 0,193 CE ETS Eu) 0 LA UNS l'O DAESELE T0) EN 0 LR ANT LUS CE BE ES Ro | Lafseutduicoutl thon meet Hs les re 0,466 Longueur de l’omoplate de l'azoplotherium minus . ... . 0,085 Parceuniduteout Ne RC NES rc D CR O0 UE Il ne nous reste donc à désirer que lomoplate de l’anoplote- TiUM MUNUS. ART. II, LES BASSINS. $ L Bassin d'anoplotherium commune. Les bassins sont plus difficiles encore que les omoplates à obtenir un peu entiers, à cause des différentes courbures suivant lesquelles leurs parties se replient , et qu’il est presque impossible de ne pas briser avec la pierre. Cependant nous avons eu des renseignemens assez complets sur celui de l'anoplotherium commune : nous en avons trouvé plusieurs parties essentielles bien conservées, et le: squelette presque entier trouvé à Montmartre en contenoit assez pour nous démontrer, d’une manière positive, l'identité d'espèce. La portion la plus considérable est représentée à moitié grandeur, planche IT, figure 1 et 2. Une autre portion (fig.5) nous a servi à compléter ce qui manquoit à la première pour le pubis et la fosse cotyloïde ; mais nous n'avons pas encore pu y joindre la partie inférieure de Pischion. Ce bassin, comparé à ceux des autres animaux, ne montre d’analogie qu'avec ceux du tapir et du chameau. Cest au chameau qu'il ressemble davantage: par la grandeur et la figure de lx partie ‘évasée de Vos: des îles, par la largeur du cou de ce même os; mais il a plus de rapport avec le tapir ae 212 ANNALES DU MUSÉUM par la fosse cotyloide, le pubis, le trou ovalaire et tout ce que l'on voit de l'ischion. La partie évasée de l'os des iles est plus arrondie à pro- portion: son épine antérieure est moins pointue que dans le chameau; l'échancrure de la fosse cotyloïide est plus large, et son bord, derrière cette échancrure, moins saillant. Dans le chameau , ce bord dépasse la partie adjacente du bord du trou ovalaire, et il y a entre deux un canal assez profond qui va gagner l’échancrure; dans l’anoplotherium , au contraire, le bord du trou ovalaire n’est point caché derrière celui de la fosse : il le dépasse de plusieurs millimètres. Le tapir tient le milieu entre ces deux structures. La branche transversale de los pubis est beaucoup plus courte dans le chameau, et s'élar- git beaucoup plus promptement du côté de la ligne médiane, que dans l’anoplotherium et le tapir. Principales dimensions de ce bassin. Diamètre de la fosse cotyloïde . . . . . . . . . . . . . 0,06 Nous avons vu qu’il y a des têtes de fémur larges de. . . . , 0,055 Largeur du cou de l’iléon à l'endroit le plus étroit . . , . 0,06 Largeur de sa partie évasée . . . . se + 5 .. «0,2 et plus. Nous ne pouvons pas donner la longueur totale du bassin, parce que nous n'avons pas ses deux extrémités entières; mais elle doit être au moins de 0,58 à 0,4. Diamètre longitudinal du trou ovalaire . . . , . , . , . 0,085 Diamètre trausversal . . . 4 4. 4: + 4. . . . . . . 0,06 Longueur de la branche transversale du pubis. . . . . , 0,07 Largeur . . . .« . + « » + + Dis holael ohte Le de Tetai ele UD D'HISTOIRE uNMATURE L LE. 213 S IL. Bassin de palwotherium crassum ou medium. C’est à ce genre que nous rapportons le morceau repré- ‘senté, à moitié grandeur , planche IT , figure 4 et 5, et celui du côté opposé, figure 6; et nous avons pour cela deux sortes de motifs, qui ne sont pas pris à la vérité dans les analogies anatomiques, mais qui ne nous en paroissent pas moins suili- sans, eu égard à l'ensemble des circonstances. 1° Ce bassin est plus petit que celui de l’anoplotherium commune, et cependant il n’est pas assez petit pour con- venir à l’'anoplotherium medium. 2° Il offre des différences qui peuvent passer pour géné- riques. Le cou de los des iles est beaucoup moins large à proportion, plus prismatique. L’échancrure de la fosse coty- loïdeest imprimée d’une manière moins profonde : l'ischion est moins large à sa naissance derrière la fosse cotyloïde. Tous ces caractères rapprochent un peu cet os de son analogue dans le tapir. 3. Enfin, nous en avons trouvé une fois une portion jointe à une partie de la queue; et celle-ci étoit formée de ver- tebres beaucoup plus petites et garnies d’apophyses beaucoup plus saillantes que la partie correspondante de la queue de l’'ano- plotherium; elle appartenoit donc à une queue plus petite et plus courte, comme nous verrons par plusieurs autres mor- ceaux , qu'étoit la queue du palæotherinm. L’ischion de ce bassin est remarquable par la manière dont il s’'évase et s’élargit en arrière, surtout à son bord dorsal; ce qu'on voit du bord opposé montre que le trou ovalaire de- voit être très-allongé. 214 ANNALES (DU MUSÉUM On voit qu'il n’y a dans nos motifs rien qui puisse faire douner ce bassin au palæotherium medium plutôt qu’au crassum. Principales dimensions de ce bassin. Diamètre de la fosse cotyloide . . . . ME te totalise 1 0,0% Nous: avons vu que celui de la tête du fémur ésbrde 2. FPE) 20,037 Largeur du cou de l'os des iles ..,.: pus us os . + «1,6 1: 0,055 Longueur totale du bassin , au moins, 4. , . DOG CE Distance depuis le bord postérieur de la fosse, à créé pos- térioüreMde 11ischiéh". 7 Ne NN RRQ UE PTE '0,07à Moindre largeur de l'ischiont. 4 4 21,1. 1. 410 0, 2°, . 'o,015 Largeur de son évasement en arrière, au moins, . VE Lt) Longueur du trou ovalaire , au moins . . . . . . , . . . . . 0,065 S IL. Bassin d'une troisième sorte, que nous conjecturons appartenir à l'anoplotherium medium. Sa grandeur proportionnelle est encore ici notre moÿif principal. Notablement plus petit que le précédent , il est presque aussi large au cou de l'ischion : sa fosse cotyloide a à peu pres moitié de la largeur de celle du bassin d’anoplo- therium commune, ce qui doit trés-bien convenir à l'ano- plotherium medium ; mais seroit un peu trop grand pour le palæotherium minus. Nous avouons cependant que ce que nous en possédons n’est pas assez complet pour nous fournir des caractères convain- cans : nous en avons un os des iles, mutilé vers le haut, et représenté, à demi-grandeur , planche [, figures 14 et 15. La fosse cotyloide s'y trouve encore presque entière: Nous complétons ce morceau au moyen d’un ischion de la même espèce , planche }, figure 16,et planche 1, figure 7. On voit GC. Cuir del. Tom . A. Laurilard del Couet re D'HISTOIRE NATURELLE. 215 que la parte postérieure de l'ischion s’évase d’une manière plus oblique que dans le bassin de palæotherium. Voici les dimensions que nous avons pu obtenir. Larseuriduieou/de los tesrilest reset eee ae 0e 0,032 Diamètre de la fosse COLYLOÏ de ere EEE MNRIG0S Distance du bord postérieur de la fosse à l'extrémité de l’ischion. 0,063 Moiïndre largeur-de: lischion 4°. +... {. , —. .. 0,012 Rarreuridelsa partieltvasceh eee Lee eue cn sn lise Ule 0,045 Voilà tout ce que nous avons pu recueillir jusqu'ici de mor- ceaux caractérisés appartenans aux bassins. Si nous en re- cueillons quelques autres, nous les donnerons dans un supplé- ment. Nous avons donc terminé , autant qu’il dépend de nous, la description des extrémités de nos singuliers animaux, et il ne nous reste, pour terminer celle de leurs squelettes, qu’à parler de leurs vertèbres et de leurs côtes. 216 ANNALES DU MUSÈUM MÉMOIRE SUR LE CUVIERA, Genre nouveau de la fanulle des Rusracéss. PAR M. DECANDOLLE. Daxs mon Mémoire sur la famille des rubiacées (1), j'ai montré que les caractères qui jusqu'ici avoient été regardés comme essentiels à cette famille , souffrent des exceptions assez remarquables : ainsi l’'adhérence du calice avec l'ovaire, qui a long-temps passé pour son caractère principal, n’a point lieu dans le gærtnera et le pagamea , comme M. de Lamarck l'avoit déjà observé ; dans l’Aoustonia et le polypremum , d'après M. Richard; dans le monodynamis , d'après M. Kœænig, et dans mon nouveau genre baconia. La régularité dans le nombre et la grandeur des parties de la fleur, quoique en général assez constante , se dément cependant dans le diodia, le monodynamis , le pinkneya et quelques mussænda. Le oo (1) Lu à l’Institut le 21 septembre 1806, et destiné à être imprimé parmi ceux des sayans étrangers. D'HISTOIRE NATURELLE. 217 fruit présente des variations assez nombreuses , et le périsperme lui-même, qu'on avoit regardé comme caractère essentiel , est corné dans les étoilées et les cofféacées, charnu dans les cin- chonacées , et présente une apparence grumeleuse dans le gru- milea de Gærtner et dans mon nouveau genre rutidea. 11 résulte de la comparaison des Rubiacées, 1.° que les ca- ractères vraiment essentiels de cette famille sont: Un embryon dicotylédone , logé dans un périsperme; Une corolle monopétale , régulière, staminifere ; Des feuilles entières , verticillées ou opposées avec des sti- pules intermédiaires; 2° Qu'on doit y réunir, comme caractères secondaires et sujets à exception , les suivans : Un calice régulier, divisé en autant de lobes que la corolle; Un ovaire adhérent au calice , surmonté d’un petit godet, et chargé d’un seul style ; Des étamines en nombre égal à celui des lobes du calice ; Des stigmates en nombre égal à celui des loges de l'ovaire; 3° Que la famille des rubiacées doit être divisée en quatre tribus, savoir : Les étoilées ( stellatæ ). Périsperme corné : fruit à deux coques séparables et à graines presque nues: feuilles verticillées. Les cofféacées (coffeaceæ ). Périsperme corné: fruit à deux loges monospermes : feuilles opposées avec des stipules inter- médiaires. Les cinchonacées (cinchonaceæ ). Périsperme charnu : fruit à deux loges polyspermes : feuilles opposées avec des stipules intermédiaires. Les guettardacées (guettardaceæ ). Périsperme charnu (?) : 9 28 218 ANNALES. DU MUSÉUM U fruit à plusieurs loges : feuilles opposées avec des stipules in- termédiaires. | J'observerai ici, pour éviter toute objection, que le belo- nia, qui à les feuilles dentées, n’est pas une rubiacée , et que l'ixora , dont le fruit présente deux loges dispermes , pourra bien, lorsqu'il sera mieux connu, former une tribu particu- lière entre les coffeacées et les emchonacées. Sans entrer dans des détails eireonstanciés sur les genres nombreux de cette fanulle, dont j'ai présenté le tableau , je crois devoir, avant d'en venir à celui que je me propose de décrire , donner une note abrégée de ceux que j'aï établis. 1° Oxsaxraus. Calycis tubus ovario adhærens apice: cons- ietus, limbus aculissime quinquefidus. Corolla infundibuli- formis, tubo tereti longissimo, Himbo 5-partito, lobis acutis- simis; stamina à ad faucem sessilia; antheræ exsertæ acutis- simæ ; oyarium ovoideum ; stylus 1; stigma 3. Fructus bilo- cularis polyspermus. :: 2 sui Ce genre appar tient. à :la tribu des cinchonacées. et est très-voisin du tocoyena et surtout du posoqueria ; il diffère: de Jun et de l’autre par son: stigmate simple , par les lobes irès-pointus que portent son calice.et sa corolle ; par son fruit qui paroit devoir être, couronné par le calice, et par son in- florescence latérale. Son nom provient des mots 4x (acutus )] CL tes (flos). L'espèce que je décris est indigène de Sierra-Leona, d'où elle a été rapportée par Smeathman, et a recu le nom d'oxyanthus.speciosus, . 2° Amaova. Ce genre établi par Aublet, et depuis lors réuni à celui de l’hamellia, doit être conservé, parce que son fruit offre un caractère remarquable et unique dans la famille D'HISDOLRE, NABUREIMIE. 219 des rubiacées. Ce fruit est à six loges-polyspenmes |, et chaque loge est divisée en un grand nombre de petits loculamens mo- nospermes, par des membranes transversales. 3.° Ronpea. Calycis tubus ovario adhærens , limbus 5-par- titus parvus. Corolla infundibuliformis, tubo apice dilatato, limbo 5-partito patente. Stamina 5 ad faucem sessilia. Ova- rium globosum , apicé umbiticatum. Stylus r ; stigmia, 1, longi- tudinalitér duplici sulco notatum. Bacca éxsucca, globosa , uniloculari;, monosperma. Semen globosum basi nie tac : extus rugosun. Périspermum magnum , éartilagineum , intus grumosum,. Corculum teres, obliquum. Ce genre appartient à la tribu des cofféacées ; il ressemble par son port au buena et au ‘bertiera,, et ne, peut; par ses caracteres, être rapproché que du. grumilea. de Gæriner. H en diffère par son calice à cinq, parties et non à cinq! dents, par son fruit non couronné par le calice, par sa baie mono- sperme, par son stigmate simple. Son nom. est, tiré du mot gs , 1 ,ruga, et fait allusion à son ,périsperme, L'espèce sur laquelle je décris ce, genre est indigène de Sierra-Leona, d’où Smeathman en a rapporté des échantillons. Je la nomme rutidea parviflora. 4° Baconra! Calyx ovario non adhærens, 4-fidus, lobis obtusis. Corolla infundibuliformis 4- fida , fauce barbata, limbo patente. Stamina 4 ad faucem inserta ; ÉTAT para an- theræ exsertælineares , post fecundationem contortæ. Ovarium liberum apice umbilicatum. Stylus 1 ; stigma 1. Bacca exsucca, bilocularis , disperma. Semina semiglobosa. Perispermuin car- tilagmeum. Corculum teres, erectum. Ce genré, qui fait naître des doutes sur le vrai caractère 28 * 220 ANNALES DU MUSEUM de la famille des rubiacées, a été dédié à Bacon de Véru- lam , qui le premier enseigna l'emploi de l’art du doute dans l'étude de la nature, et qui par sa saine philosophie a influé sur les progrès de toutes les sciences. Le baconia appar- tient à la tribu des cofféacées, et ne peut être rapproché que du gærtnera. Il en diffère par ses fleurs non entourées de bractées, et dont toutes les parties sont au nombre de quatre et non de cinq; par la gorge de sa corolle qui est barbue ; par ses anthères saillantes ; par son stigmate simple et par ses stipules non ciliées. Ce genre est établi sur un arbuste de Sierra-Leona que je désigne sous le nom de baconia co- rymbosa. Après avoir indiqué ces différens genres , je vais donner quelques détails plus circonstanciés sur celui qui fait l'objet spécial de ce Mémoire, et qui mérite une attention particu- lière à cause de la singularité de ses caractères distinctifs. Le nom du philosophe auquel j'ai dédié le genre précé- dent, s’est lié dans mon esprit avec celui d’un naturaliste qui, comme Bacon, se distingue surtout par la variété de ses con- noissances, par la sagacité et la logique sévère qu’il a portées dans l'étude de la nature. J’ai donc donné à ce genre le nom de mon savant ami M. Cuvier , afin de consacrer par un nouvel exemple que toutesles branches dé l'histoire naturelle font partie d'une même science , et que les travaux qui concourent à avancer dans un des règnes la théorie de la classification na- turelle, ont aussi une influence importante sur létude des autres règnes. Ce nom avoit déjà été donné par M. Kc&ler à un genre de graminées; mais je ne vois pas que ce genre ail élé admis par les botanistes subséquens, et j'ai moi-même exposé, D'HISTOIRE NATURELLE. 221 dans la troisième édition de la Flore française, vol. IT, page 91, des observations qui me paroissent prouver que le cu- rivera de Kcler ne doit point étre séparé des elymus. J'ai lieu d'espérer que mon nouveau genre aura un sort plus durable. En effet, le cuyiera diffère non seulement de la section à laquelle il appartient, mais de la famille entière des rubiacées, et peut-être de tous les végétaux, par des caractères remar- quables. 1. Les lobes de sa corolle se terminent en une espèce de pointe demi-épineuse , et c’est , je crois, le premier exemple de ce genre d’endurcissement dans les lobes de la corolle. 2.° Le style porte à son sommet un stigmate très-grand, pelté, ra- battu sur les bords, et imitant ainsi la forme d’un éteignoir, ou plutôt celle d'une cloche qui seroit soutenue au centre par un pivot, et qui auroit l'ouverture dirigée en bas. Cette forme de stigmate n’est, ce me semble, encore connue dans aucun végétal. 3° Son ovaire ne porte à son sommet aucun godet particulier , et parmi toutes les rubiacées ce genre est le seul, avec le monodynamis , où ce godet n’existe pas, Le cuviera, ayant le fruit à plusieurs ‘loges, appartient à “la tribu des guettardacées ; il doit être placé dans la première section de cette tribu, qui est caractérisée par les graines soli- taires dans chaque loge, et il se range entre le vanguiera et le nonatelia. Lors même qu’il manqueroit des trois caractères doni j'ai parlé plus haut, il différeroit encore de tous les genres de sa section, soit par son fruit à cinq loges, sa fleur à cinq divisions et à cinq étamines; ce qui l’éloigne des genres psa- thura, myonyma, pyrostria et guettarda : soit par sa corolle en cloche assez ouverte et à lobes profonds , et par son calice divisé en cinq parties profondes; ce qui le distingue des genres nonatelia , laugeria , erythalis, vanguiera , mathiôla. 222 A NN À LES a DU MUSÉE Ù M 11 (et Ce genre ne renferme encore qu'une espèce, qui est un ar- buste indigène de Sierra-Leona; elle y a été découverte par Smeathman qui en a rapporté des échantillons desséchés. J'en donne ci-après la figure et la description. CUVIERA. | Calycis tubus brevis, ovario adhærens ;limbuslongus, quin- quepartitus , patens , foliaceus ; corolla campanulata, quinque- fida; lobis acutissimis, apice spinescentibus. Stamina 5 , non exserta. Ovarium calyci adnatum, supernè non umbilicatum. Stylos 1 filiformis. Stigma magnum, extinctoriiforme,subpen- tagonum, obtusum. Pericarpium quinqueloculare, loculis mo- nospermis. CuYIERA ACUTIFLORA. Tab, Frutex omnino glaber. Rami teretes, duri , oppositi, divaricati supra-axillares , ad insertionem subincrassati. Folia cruciatim opposita, bréviter petiolata, super ramos articulata , ovali-oblonga, acuminata, coriacea , subtus pallidiora, 2 decim. longa, 8-9 centim.,lata. Petioli semi-teretes, supernè eanaliculati, 8-10 millim, longi. Stipulæ supra folium connatæ in vaginam strictam brevem truncatam in duos mucrones vix productam 5-6 millim. longam, Flores numerosi; in paniculam terminalem dispositi; peduneuli ex axillis superioribus et ex:summa vagina orti pluries dichotomi ; pedicelli uniflori; bracteæ lineares , foliaceæ ,pedicelli long tudine ; corolla post inflorescentiam persistens, fructum juniorem tegens; tubo brevi, lato, intus membrana petaloidea sub staminibus separabili instructo; an staminum filamenta basi produeta et dilatata ? Explication de la planche. Un rameau du cwviera, de grandeur naturelle, chargé de quelques fleurs et . . 4 LT 4 de plusieurs fruits avant leur maturité. . Une fleur entière. _ . Le calice avec le pistil. . La corolle étalée. Tous ces détails sont grocsis. . L'ovaire et le style fendus en long. , Le péFicarpe coupé en travers, Cræ C1 D 72P2 k rs PLÉ CE uviera acutflora , P'HPSTONRE N AÂTURELVE)! 223 Sur un métis d'âne et de femelle zétre. 1 Tes avons fait connoître , tome 7, page 245 de cet ouvrage, les circonstances qui ont accompagné l'accouplement du zèbre femelle de la ménagerie avec un fort. bel âne de Malte : nous décrirons aujourd’hui le métis qui est provenu de celte union. 11 diffère peu de sa mère par les proportions, la physionomie et la grandeur relative des: oreilles ; il est zébré comme elle, mais seulement sur les oreilles , les cuisses et les jambes; les raies n’y sont ni moins larges, ni plus nombreuses. Ce n’est que par les couleurs du reste de son pélage qu’il annonce son autre origine. Le fauve châtain est sa couleur générale, aussi bien que celle des in- tervalles qui séparent les raies noires des cuisses et des jambes. Il tient surtout des ânes par la croix ou ces deux lignes d’un noir foncé, dont l’une s'étend sur toute l’arête du dos, et l'autre transversalement sur les épaules : toutefois celle de ces lignes qui part du garrot pour se rendre à l'épaule, offroit cette différence, qu’elle se partageoit en trois à son extrémité inférieure: les couleurs de la mère se retrouvent encore dans des raies qu'on voit sur le chanfrein, le poitrail et les flancs, mais qui sont si étroites qu'elles ne sont visibles que sous un certain aspect ; elles se détachént en bran, quoique formées par la petite pointe des poils , qui est noire , à cause des teintes claires du pélage : il est assez vraisemblable que ces raies paroîtront davantage avec l’âge. Le dedans des cuisses est blanc, et la crinière, prolongée de la nuque jusqu’à la queue, est fournie, principalement sur le ou, d’un poil assez long, roide et frisé. M. Giorna a pareillement décrit, dans les Mémoires de l’Académie de Turin pour l'an 11, un mélisné, comme le nôtre, d'une femelle zèbre et d’un âne. 11 paroit qu'il tenoit un peu plus de son père: il portoit au front , ainsi que tous les Ânes nouveau-nés, une Louffe de longs poils que nous n'avons pas trouvée dans le uôtre : sa croupe offroit aussi plusieurs raies parallèles dans le même cas, et ses cuisses en avoient de plusnombreuses, Enfin la raie qui descendoit sur l'épaule étoit beaucoup plus large. Notre petit zibre à Loutes les habitudes des Anons : il se laisse assez bien ca- resser: sa mère au contraire est devenue d’une approche très-difficile, Elle a mis bas dans la soirée du 13, mars dernier ; elle avoit été saillie à deux reprises différentes, le 28 février et le 2 mars 1606 : ce qui donne douze mois et demi environ pour la durée de la gestation, G£orFrRoY-Sainr-HiLaine, 224 ANNALES DU MUSÉUM 2 NOTICE Sur le MaDprérorrTE à odeur de truffes noires, des environs de Monte-V'iale dans le Vicentin. PAR M. FAUJAS-SAINT-FOND. Âsenr Forris a fait mention de ce madrépore dans ses Mémoires pour servir à l'histoire naturelle de l'Italie, tomer, page 36. II dit qu'on le trouve dans le district de Monte- Viale , dans le Vicentin, à six milles environ de Vicence. Voici de quelle manière il s'exprime: « On trouve dans le » district de Monte-Viale une sorte de madrépore changée en » Spath calcaire grisätre , ashestiforme, qui exhale une forte » odeur de truffes fraiches, lorsqu'on frappe dessus avec un » marteau. » Comme cette espèce particulière de madréporite est rare, et que je ne l'ai vue à Vicence que dans le cabinet d'histoire naturelle du docteur Scortegagna et dans celui de M. Marzari, et à Castel-Gomberto , dans la riche collection de fossiles qu’a formée M. Castellini, je fus bien aise, pendant mon séjour à Vicence, de me rendre sur les lieux , ou plutôt d'aller à leur recherche ; car Fortis désigne simplement le district de Monte- V'iale, qui est d’une grande étendue ; d'ailleurs les natu- D'HISTOIRE! N'AIT U RE L LE. 225 ralistes de Vicence , à qui je demandai des renseignemens sur le local, ne purent me donner aucune notion positive à ce sujet. Je me rendis alors à Castel-Gomberto , à dix milles de Vi- cence, pour me concerter avec M. Castellini que cite Fortis. En effet, M. Castellini me dit qu’il avoit fait ce voyage avec ce savant , il y a plusieurs années , et qu'il croyoit pouvoir recon- noître le local où il avoit trouvé, à cette époque, deux échan- tillons de ces madrépores à odeur de truffes noires, et qu'il présumoit que les eaux de pluies les avoient entraînés d’une colline qu’il espéroit retrouver. Ce naturaliste, plein de com- plaisance, eut la bonté de nr'offrir de me conduire sur les lieux; nous partimes le lendemain, en suivant la route de Castel-Gomberto à Monte-Viale, qui n’est pas la plus com- mode ni la plus courte; car il vaut beaucoup mieux partir de Vicence. Nous nous rendimes de Castel-Gomberto au pied de Monte- Viale ; dans moins de trois heures, et après quelques recherches d’abord infructueuses, nous arrivämes enfin dansuné partie de chemin creux situéentre des collines assez élevées , et nous trou- vâmes l'emplacement où lon voit beaucoup de madrépores pétriliés , isolés , que les eaux ont détachés des petites collines voisines ; mais nousne découvrimes point parmi ces madrépores isolés l'espèce odorante que nous cherchions. Ce local, qui mous mettoit sur la voie, est dans l’escarpement situé au bas de Monte - Viale , à trois cents pas environ d'un plateau volcanique sur lequel les habitans ont planté anciennement une croix. Mais si l’on sy rend par Vicence, il faut tra- verser alors le village de Monte - Viale, arriver sur le pla- teau où se trouve la croix , et descendre par le chemin rapide 9: 29 226 ANNALES DU MUSEUM tracé au milieu d’une belle brèche volcanique noire , com- posée de fragmens de laves compactes basaltiques, de frag- mens de laves dures de diverses espèces, et de gros noyaux de pierres calcaires, dures, d’un blanc grisätre , liés par une pâte formée des détritus plus ou moins atténués des mêmes laves dont la brèche est composée. On suit cette route, qui est située sur une pente escarpée , pendant trois cents pas environ : c’est alors qu'on commence à rencontrer sur la partie gauche du chemin des madrépores pétriliés isolés , en assez grande quantité, que les eaux de pluies réunissent là en les arrachant des pentes rapides. C'est ici qu'il faut s'arrêter et porter toute son attention sur la petite colline à droite, escarpée et attenante au chemin; et pour peu qu'il ait plu et que la terre soit humide, si lon fait fouiller dans l'escarpement dont il est question, il s'en exhale une odeur de truffes noires , sans qu’on rencontre pour cela des madrépores odorans : mais on trouve dans ce terrain, qui est un tuffa volcanique boueux, formé de laves décompo- sées, dont quelques-unes sont terreuses et quelquefois même argileuses, des madrépores isolés, engagés dans ce tuffa jau- nâtre, On peut les retirer facilement, et on y distingue de fort belles espèces; mais celles-ci n’ont absolument aucune odeur. J'en ai reçueilli une belle collection dont on trouvera ci-joint la détermination des espèces. On y trouve aussi quelques coquillages , tels que des strombes et une grosse cérite, qui sont changés en spath calcaire, de même que les madré- porites. j Enfin, en y mettant de la constance et en employant deux ouvriers , pendant trois heures, à abattre le tuffa de cet escar- pement d'où s’exhaloit l'odeur de truffes noires, je parvins D'HISTOIRE NATURELLE. 297 à trouver trois fragmens, dont deux assez gros, lautre beaucoup plus petit, du madrépore odorant : c'est de ce dernier que M. Vauquelin a bien voulu se charger de’ faire l'analyse. dl Un fait très-remarquable, c’est que les autres madrépores qui accompagnent celui-ci n’ont. absolument aucune odeur; ce qui démontre que ce n’est point à la qualité particulière du sol que celle-ci est due, mais peut-être à un reste de prin- cipe animal que ce madrépore a conservé: c'est au reste ce que l'analyse confirmera ou détruira. Le madrépore à odeur de truffes noires a été appelé par Fortis madrépore asbestiforme, parce qu'à Pextérieur sa structure est formée de linéamens dontla direction longitu- dinale a une sorte de rapport et de ressemblance avec l’as- beste ; mais cette forme fibreuse a un plus grand rapport encore avec celle de certains bois pétrifiés , au point que l'œil le plus exercé pourroit sy méprendre, si en faisant couper et polir les extrémités des'morceaux , on nei distinguoit pas les très-petites cellules madréporiques qui se manifestent particu- lièrement dans une fissure ‘triangulaire qui part du centre de chaque morceau , et diverge en trois rayons qui: s’amincissent à mesure qu'ils se prolongent vers: les bords. Un des -échan- tillons que j'ai trouvés a cinq pouces de longueur'sur un pouce six lignes de largeur; il ‘est de forme triangulaire. Il forme une espèce dont l’analogue n’est pas connu. Les autres espèces qu'on rencontre: avec celle-ci, mais qui n’ont absolument aucune odeur, sont d’une -belle conservation. J’y ai reconnu les espèces suivantes, que j'ai déterminées d’a- près Linné, en consultant les figures d'Ellis, de Solander, et celles publiées par Æsper, dans sa Monographie des ma- 207% 228 ANNAËLES'/DU:-MUSÉUM drépores ; ainsi que la riche collection da Muséum d'histoire naturelle de Paris. 1 Madripora labyrintiformis , Lux. meandrites , id. ananas , 2. —_—@————— fascicularis , 2d. + CAVernOSa , 4. cellulosa , 4d. favosa, id. J'ai trouvé aussi parmi ces madrépores une cérite, un strombé et une ampullaire, changés en spath calcaire ; mais ces coquilles n’étoient pas d’une assez belle conservation pour pouvoir déterminer les espèces ayec certitude. Cette quantité de beaux madrépores changés en pierre cal- caire de la nature du marbre, présentent un fait géologique intéressant sous lé rapport du nombre dés espèces, mais par- ticulièrement sous celui du gisement de tant de corps marins au milieu d'un tuffa volcanique, qui porte les caractères in- contestables du pouvoir des feux souterrains et de l'action combinée des eaux de la imer, J'espère que je pourrai démontrer, dans une seconde notice relative à d’autres madrépores et à de belles coquilles qu’on trouve dans les tuffas de Montechio- Maggiore ; à six milles de Monte-Viale, que. ces corps marins étoient déjà pétrifiés avant que les laves boueuses, s'en emparassent, et que des volcans sousmiavins se manifestassent dans ces contrées du nord de l'Italie. D'HISTOIRE NATURELLE. 229 ANALYSE D'un MaADRrÉPORITE & odeur de trufj es. PAR M VAUQUELIN. NME. Favsas a trouvé ce fossile à Monte-Viale dansle Vicentin, où il est renfermé dans une lave boueuse avec beaucoup d’autres madréporites. Cette substance a une couleur brune, et répand , quand en la frappe avec un corps dur ,une odeur très-marquée de truffes. Elle est connue en Îtalieet conservée dans les cabinets sous le nom de tartufoli. M. Fortis en fait mention dans sa Géologie du Vicentin. Pour tâcher de découvrir la nature du principe qui donne à ce madréporitela propriété de répandre l'odeur de truffes parla per- cussion, j'en ai fait dissoudre douze grammes dans l'acide nitrique affoibli: cette dissolution s’est opéréeavec une effervescence écu- meuse. Il est resté une matière brune sous forme de flocons lé- gers , lesquels séchés pesoient environ deux décigrammes. Cette matière avoit acquis par la dessiccation une dureté assez considérable, et une sorte de flexibilité qui en rendoit la pulvé- risation difficile. Elle n’avoit point d’odeur ; mais exposée àune chaleur rouge, elle en répandoïit une semblable à celle des bi- tumes: animalisés. Fondue avec du borax, elle lui a communiqué une couleur jaunâtre, comme l’auroit fait un peu d’oxide de fer. Traitée avec l'acide muriatique, elle l'a coloré en jaune sanss”y dissoudre 230 ÂNINALES DU'MUSEÉUM entièrement. L’infusion de noix de galle et le prussiate de po- tasse ont prouvé que la matière dissoute par l'acide muriatique étoit de l'oxide de fer. La substance non dissoute par ce même acide étoit composée d’un bitume sec et d’un peu de silice; car chauffée dans un creuset de platine, elle a brülé et a laissé une poudre blanche qui avoit tous les caractères du quartz. Les flocons bruns dont nous venons de parler , et dans les- quels nous croyons que résidoit l'odeur de truffes, ne nous ayant point présenté cette propriété , nous avons soupçonné que ce principe, quel qu'il soit, s’étoit dissous dans l'acide nitrique. En conséquence, nous avons soumis cette dissolution à la dis- tillation ; mais le produit que nous en avons obtenu n’avoit nul- lement l'odeur des truffes; il avoit au contraire celle de l'acide nitrique qui a été distillé sur de la graisse. Pour savoir si par hasard ce principe odorant n’avoit pas été retenu en dissolution dans la liqueur restée dans la cornue, nous y avons mélé de lammoniaque, qui y a formé un pré- cipité brun assez abondant et qui pesoit environ quatre déci- grammes. Ce précipité , fortement frotté et même chauffé, n’a point répandu l’odeur des truffes. Calciné, il n’a pas produit d'odeur empyreumatique, comme la matière restée après la dissolution du madréporite dans l'acide nitrique; il étoit surtout formé d’oxide de fer, d’un peu de manganèse et d’alumine. La liqueur d’où ces matières avoient été séparées par l’am- moniaque, a donné un précipité blanc abondant avec le carbo- nate de potasse ordinaire. Ce précipité éloit du carbonate de chaux légèrement jaune , mais n'ayant nulle odeur de truffes. Il pesoit onze grammes. Voyant que l'odeur du madréporite s’étoit entièrement anéantie par sa dissolution dans l'acide nitrique, nous en avons D'HISTOIRE: NATURELLE. 231 mis quatre grammes dans de l’eau et quatre grammes dans de l'alcool, que nous y avons laissés pendant plusieurs jours à la tem- pérature de vingt à vingt-cinq degrés ; mais ces menstrues n’ont point contracté l’odeur de truffes , seulement lalcool a pris une opacité laiteuse que la filtration n’a pu faire disparoitre. Espérant qu'une température plusélevée pourroit développer le principe odorant et favoriser son union avec lesliqueurs dont nous venons de parler , nous les avons distillées sur la substance du madréporite : cette opération n’a pas eu plus de succès que la précédente ; seulement nous avons observé que l'alcool ainsi distillé blanchissoit légèrement avec l'eau, et que Peau également distillée sur le madréporite avoit une odeur de graisse ; enfin, que la surface des vases où cette opération avoit été faite étoit grasse. Il faut donc conclure de ce qui précède, que l'odeur de truffes que répand ce madréporite tient à un principe très-destructible ou très-volatil , puisque les moyens que nous ayons employés, quoique doux, ont suffi pour la détruire entièrement. Ce principe semble cependant n'être pas très-volatil,, lors- qu’on voit qu'il ne se développe que par une percussion vive etrépétée avec célérité au moyen d’un corps dur ;mais d’un autre côté, comme ce n’est qu’au moment où l’on brise le minéral que l'odeur sefait sentir, et qu'aussitôt qu'ilest pulvérisé elle s'anéantit sans retour, quelque soit le frottement qu’on lui fasse éprouver, on est forcé d'admettre dans ce principe odorant une grande volatilité. Ce principe , insoluble dans l’eau et dans l'alcool, tire sans doute son origine des débris des polypes qui ont habité ce madréporite, lesquels se sont décomposés avec le temps et dont il reste encore des traces de charbon bitumineux etanimalisé, 232 ANNALES DU MUSEUM CORRESPONDANCE NOTICE sur divers objets trouvés dans une tourbière de la commune de Burre , dépar- tement de la Somme. Ex lisant la description des mines de terre d'ombre ou de turffa des environs de Cologne, publiée par M. Faujas-Saint- Fond dans les Annales du Muséum d'histoire naturelle, tom. 1, p. 445, j'ai vu qu'on trouvoit dans la profondeur de ces grands dépôts de matieres végétales exotiques, plusieurs frag- mens de véritable charbon de bois, absolument semblable à ceux que la combustion ordinaire fait passer à l'état de charbon. Quoique en petite quantité et disposés sur divers points, ces charbons n’en existent pas moins en fragmens de la grosseur du doigt. Ce fait m’en a rappelé un fort singulier qui mérite peut-être d'être connu. Les tourbières de Buire, situées à sept on huit kilomètres de Péronne, sont traversées par la Caniselle, jadis la Cologne, qui se jette dans la Somme à Flamicourt sous les murs de Péronne. Cette rivière prenoit autrefois sa source dans le département de l'Aisne, à deux kilomètres de celui de la Somme, dans le bois de Cologne, où le bassin de cette source D'HISTOIRE NATURELLE. 233 se voit encore plein d’eau; mais elle n’a plus de cours. Elle a iosensiblement reculé vers l'embouchure de la rivière, entre Marquais et Timourt, et elle tend à baisser encore. Mon estimable ami Pincepré-Buire est le premier qui ait fait exploiter une tourbière dans la commune de Buire: il fai- soit creuser dans son parc une jolie rivière et de vastes étangs bordés de belles plantations , lorsqu'il fit la découverte curieuse des objets suivans. 1° Du charbon de tourbe fabriqué , sous un banc de sept à huit pieds d'épaisseur. Ce qui prouve qu’on savoit an- ciennement donner cette préparation à la tourbe. 2.9 Des tas de foin bien conservés, ainsi que des noix et des noisettes, trouvés à cinq pieds au-dessous de la tourbe. 3° Un collier, facon de perle en succin ou ambre jaune. Les perles avoient la forme d’un cône aplati, dont la base étoit tournée en bas, afin qu’étant placé sur le cou , elles se rapprochassent suflisamment pour ne point laisser de vide vers le haut. Les plus grosses se trouvoient placées vers le milieu ; les autres diminuoient graduellement de grosseur sur les côtés. Toutes étoient percées de trous assez larges pour y passer un tuyau de plume. Ces perles de succin étoient dis- posées dans la tourbe , comme si elles eussent été encore en- filées ; mais le lien étoit dissous et avoit disparu. 4." Quatre ou cinq chênes que le volume des branches fait présumer avoir appartenu à des arbres très-gros. Ces bois étoient renversés horizontalement du nord-ouest au sud-ouest; leur tronc se trouvoit engagé sous la terre végétale; la tête et les branches étoient sous la tourbe, qui n’est pas encore fort épaisse dans cette partie. Les branches de ces bois fossiles sont nombreuses , très-grosses , noires , très-dures et susceptibles 9: 30 234 ANNALES DU. M,U,S.É U M de recevoir un assez beau poli ; mon ami en fit faire une jolie petite console, Elles tenoient ausurplus encore au tronc, comme lorsque l'arbre étoit vivant. Quant aux troncs, ils sont encore ensevelis à la même place : il eût fallu de trop grands travaux pour les extraire. On trouva à d’autres époques, dans la même tourbière, Vos de la corne d’un animal du genre bœuf: Le tronçon avoit environ cinquante centimètres , et supposoit une corne très- grande. Une rotule, qui paroït avoir appartenu au même animal et qui étoit encore attachée à l’ossement de la jambe; mais des paysans le détruisirent, Cet ossement étoit fort courten raison de sa grosseur. On trouva également à peu de distance de ces assemens, mais à une grande profondeur dans la tourbe, des bois et des squelettes de cerf et de chevreuil, ou d’animanx congé- nères. Un fragment de bois d'un animal du genre cerf, de qua- rante-cinq centimètres de longueur et de quatorze de circon- férence. Ce bois avoit vers le milieu du fragment un andouillon qui se brisa. Un os très-gros et très-pesant appartenant à la jambe d’un animal de la même espèce que l'animal dont il est fait men- tion ci-dessus. Cet os a trente-neuf centimètres. Je crois que quelques-uns de ces divers ossemens ont été envoyés par mon ami au Muséum d'histoire naturelle. Enfin, et ceei revient plus directement à FPobservation faite par M. Faujas-Saint-Fond sur le bois converti naturellement en charbon et sans le secours de l'art dans les mines de terre d'ombre des environs de Cologne; enfin, dis-je, on a trouvé D'HISTOIRE NATURELLE. 235 dans la tourbe du parc de Buire, plusieurs troncs d'arbres qui ressemblent à du chéne et qui sont convertis en charbon, semblable en tout au charbon de bois: mais cet état de car- bonisation est naturel, de même que celle des bois des en- virons de Cologne ; car c’est dans la partie intérieure des troncs que le charbon se manifeste avéc plus d’abondance, et la partie extérieure a plus généralement conservé son état naturel et ses propriétés de bois. Je me ressouviens à cette occasion qu’un de mes parens, qui a résidé en Irlande pendant plusieurs années , m’a dit plusieurs fois que dans les tourbières, qui sont très-commanés et très- abondantes dans les miontagnes de cé pays, on trouvoit une grande quantité de dépouilles d’animiaux, semblables à celles de la vallée de Buire, et beaucoup d'arbres passés en un état de charbon plus ou moins avancé. Ces arbres sont fort recher- chés des gens riches, qui s’en chauffent ordinairement ; ils donnent une chaleur vive et douce et une flamme gaie et bril- lante. Ce fait, ainsi que le précédent, se trouve fort analogue avec l'observation géologique de M. Faujas-Saint-Fond. Signé M. R£ÉVEILEIÈRE-LÉéPAUXx. 30 * 236 ANNALES DU MUSÉUM RER PE EXPLICATION DES PLANCHES Kelatives aux coquilles fossiles des environs de Paris. (Nota. Ces planches font suite à celles déjà publiées dans les volumes 6, 7 8 des Annales, ) QUINZIÈME PLANCHE. Fic. 1, Miliole grimagçante, Miliolites ringens. Annales, vol. 5 ,p. 551, n. 1. a. Figure grossie. b. La mème, de grandeur naturelle. 2, Miliole des pierres. Miliolites saxorum. Annales, vol. 5, p. 552, n. 5. a. Coquille, vue du côté de l'ouverture. &. La même, vue du côté opposé. ot . Miliole cœur de serpens. Miliolites cor anguinum. Annales, vol.5, p. 551, n. 2. La coquille est vue de différens côtés. 4. Miliolite trigonule. Miliolites trigonula. Annales, vol. 5,p. 351, n. 3. La coquille est vue de différens côtés. 5. Miliolite opposée. Mr/rolites opposita. Annales, vol. 5, p. 553, n. 6. 6. Rénulite operculaire. Renulites opercularia. Annales, vol. 5, p. 354. . Gyrogonite médicaginule, Gyrogonites medicaginrla. Annales, vol. 5, p. 356. 3 2. Coquille, vue dans l’un de ses pôles. L. La mème, vue latéralement. c. Une de ses pièces linéaires séparée. COQUILLES F'OSSIZ LS des environs de Lars. PL: NT”. Liph - l'squenot eur . Luph P'iquenet set D'HISTOIRE NATURELLE. 237 8. Pinne nacrée. Pinna margaritacea. Annales, vol. 6, p. 118. 9. Moule à crevasse. Mytilus rimosus. Annales, vol. 6 , p. 120 ,n.1. 10. Modiole subcarinée. Modiola subcarinata. Annales, vol. 6, p. 122,n. 1. a. Valve, vue en sa face interne. 8. Valve , vue en dehors. 11. Modiole sillonnée. Modiola sulcata. Annales, vol. 6, p. 125, n. 2. a. Valve, vue du côté du dos. à. Valve, vue en sa face intérieure. 12. Modiole pectinée, Modiola pectinata. Annales, vol. 6, p. 125, n. 5. a. Valve, vue en sa face interne. &. Valve, vue du côté du dos. SEÏZIÈME PLANCHE. L Fic. 1, Modiole arquée. Modiola arcuata. Espèce non décrite. a. Valve, vue du côté du dos. 8. Valve , vue en sa face interne. a. Modiole en cœur. Modiola cordata. Autre espèce non décrite. a. Valve, vue extérieurement. ° &. Valve, vue en sa face interne. c. Les deux valves réunies. 3. Nucule nacrée. Nucula margaritaceà. Annales , vol. 6, p.125, n. 1. a. Valve, vue du côté du dos. &. Valve , vue en sa face interne. 4. Nucule striée. Nucula striata. Annales, vol. 6, p. 125, n. 2. a. Valve , vue du côté du dos. b. Valve, vue en sa face interne. 5. Nucule deltoïde. Nucula deltoidea. Annales, vol. 6, p. 126, n. 3. z. Valve, vue du côté du dos. 238 ANNALES DU’ MUSÉU b. Valse , vue en sa face interne, e. Les deux valves réunies. 6. Pétoncle granulé. Pectunculus graniléts. Annales , vol. 6, p. 216, n. 4. a. Valve , vue en sa face interne. 8. Valve, vue du côté du dos. 3. Pétoncle à côtes étroites. Pectunéulus arngnititostatus Annales , vol. 6, p. 215, n. 1. a. Valve, vue en sa face interne. 8. Valve, vue du côté du dos. 8. Pétoncle nuculé. Pectunculus nuculätusi Annales , vol. 6, p.217, n.5. Valve, vue en sa face interne. 8. Valve, vue du côté du dos, 9: Pétoncle en oreiller, Pectunculus pulvinatus. Annales, voL 6, p. 216, n. 2. a. Valve, vue en sa face interne. b. Valve , vue du côté du dos. 10. Arche scapuline. 4rca soapulina. Annales, vol. 6, p. 221, n. 6. a. Valve, vue en sa face interne. 5. Valve, vue du côté du dos. DIX-SEPTIÈME PL A NCINME Fic. r. Arche quadrilaière. Area quadrilatera. Annales, vol. 6, p. 221, n. 7. a. Valve, vue à l'extérieur, b. Valve, vue intérieurement, 2, Arche à deux angles. Ærca biangula. Annales , vol. 6, p. 219 , n. 2. a. Valve, vue intérieurement. 6. Valve, vue à l'extérieur. . Arche scapuline. #rca scapulina, Annales, vol. 6, p. 221, n. 6, a. Valve, vue intérieurement, B. Valve, vue à l'extérieur. 4. Arche étroite. Arca angusta. Annales, vol. 6, p. 220, D. 4. Qt (4 © 14 lCZLLE 15" PA OSSZZ 7 45, des enpr'ons de Paris. PL » XVIT, Zu 7 Piquenot we mc nn, Æumphr. 1 Vreguenale COQUILLES FOSSILES, des environs de Parts. PZ.XVI1Z. D'HISTOIRE NATURELLE. a. Valve, vue intérieurement. &. Valve, vue à l’extérieur. 5. Cardite rude. Cardita aspera. Annales, vol. 6, p.340, n. 1. a. Valve, vue intérieurement, b. Valve, vue à l'extérieur. ce. La même, de grandeur naturelle. 6. Cardite aviculaire. Cardita avicularia. Annales , vol. 6, p. 540, n. 2. a. Valve, vue à l'extérieur. &. Valve, vue intérieurement, 7. Bucarde aspérule. Cardium asperulums. Annales, vol. 6, p. 543, n. 5. a. Valve, vue intérieurement. &. Valve, vue à l'extérieur. 8. Bucarde granuleux. Cardium granulosurm. Annales, vol. 6,p. 344, n.6. a. Valve, vue intérieurement, L. Valve, vue à l'extérieur, 9. Bucarde poruleux. Cardium porulosum. Annales, vol. 6, p. 342,n. 2, a. Valve, vue intérieurement, 8. Valve, vue à l'extérieur. 10. Bucarde discordant. Cardium diséors. Annales, vol. 6, p. 342, n. 1. a. Valve, vue intérieurement, &. Valve, vue à l'extérieur. DIX-HUITIÈME PLANCHE Fia. 1. Bucarde oblique. Cardium obliquum Annales, vol. 6, p. 344, n. 5. a. Valve, vue intérieurement, 2. Valve, vue à l'extérieur. 2. Bucarde lime. Cardium lima. Annales, vol. 6, p. 344, n. 7. a. Valve , vue intérieurement. b. Valve, vue à l'extérieur, 240 ANNALES DU MUSEUM 5. Mactre demi-sillonnée. Mactra semi-suleata. Annales, vol. 6,p. 412, n.1. a. Valve, vue intérieurement. &. Valve, vue à l'extérieur. 4. Crassatelle lamelleuse. Crassatella lamellosa. Annales, vol. 6, p.410, n. 4. a. Valve, vue intérieurement, &. Valve, vue à l'exterieur, 5. Crassatelle comprimée. Crassatella compressa. Annales, vol. 6, p. 410, n. 4. a. Valve, vue intérieurement. 8. Valve, vue à l'extérieur. 6. Crassatelle triangulaire. Crassatella triangularis. Annales , vol. 6, p. 411, n. 7. a. Valve, vue intérieurement. &. Valve, vue à l'extérieur. 7. Crassatelle-renflée. Crassatella tumida. Annales, vol.6, p. 408, n.1. a. Valve, vue intérieurement. &. Valve, vue à l'extérieur, 8. Bucarde calcitrapoide. Cardium calcitrapoides, Annales, vol.6, p. 343, n. 4. a. Valve, vue à l'extérieur. &. Valve, yue intérieurement. D'HISTOIRE NATURELLE. 241 ANALYSE COMPARÉE De l'Axazcrme de M. Hauwy et de la S'ircozrre de M. Towpson. PAR M VAUQUELIN. M. Favras-savr-Fown n'ayant remis une pierre à laquelle M. Tompson a donné le nom de sarcolite, parce qu’elle a une couleur de chair, pour en faire l'analyse et démontrer par là si elle est de la même nature que l’analcime , ainsi que M. Haüy est porté à le croire d’après la forme cristalline , jointe a quel- ques autres analogies extérieures et leur gisement commun, je vais n’’acquitter de cette tâche ; mais pour arriver à ce ré- sultat , il m'a fallu faire aussi l'analyse de l'analcime qui, à ma connoissance, n'a pas encore élé faite (1). Pour cet effet, M. Faujas a bien voulu me donner un mor- ceau de lave poreuse tendre dans laquelle il y avoit un grand (1) L’échantillon de sarcolite sur lequel j'ai opéré, a été trouvé par M. Faujas dans les laves poreuses de, Montecchio-Maggiore , à cinq milles de Vicence. Cette lave renferme en même temps de l’analcime, de la stlbite, de la zéolite et de la chahasie. 9: 31 242 ANNALES DU MUSÉUM nombre de cristaux d’analcime, que j'en ai détachés et netloyés avec le plus de soin qu'il m'a été possible (x). J'ai commencé à comparer ces deux substances par leurs propriétés physiques, et je me suis bientôt convaincu, r.° que la dureté de l’analcime est beaucoup plus grande que celle de la sarcolite. L’analcime raye sensiblement le verre ordinaire , tandis que la sarcolite est rayée profondément par le verre, et à plus forte raison par l’analcime. Ainsi, en ne considérant que cette propriété dans ces deux pierres , on seroit déjà forcé de les regarder comme des espèces différentes. Mais les cir- constances de leur formation pouvant seules influer sur la du- reté, ce caractère ne suffit pas pour établir cette division. 2° Je me suis également assuré que leur pesanteur est dif- férente d’une quantité notable. Jai trouvé celle de la sarcolite de 2,083 , et celle de l'analcime de 2,244. Ce résultat annonce de plus en plus une différence entre ces deux pierres. 3. La légèreté de ces pierres m'y ayant fait soupconner la présence de l'eau en combinaison, je les ai calcinées à une forte chaleur pour connoître ce qu’elles perdroiïent ; la sar- colite a éprouvé une diminution de vingt-un centièmes, et l’analcime de huit centiemes et demi seulement. Or cela prouve qu'il y a nécessairement des différences très-grandes dans la proportion des principes de ces pierres, si toutefois il n’y en a pas dans la nature de ces mêmes principes. 4e Je me suis assuré aussi qu’elles ne fondent pas au même degré de feu : au chalumeau , la sarcolite s'est boursouflée et fondue en un émail blanc phosphorescent ; cette fusion n’a cependant eu lieu qu'avec beaucoup de temps et de difficulté. (1) Cette lave contenoit, outre l'analcime , des globules de carbonate de chaux et de la zéohite fibreuse, D'HISTOIRE NATURELLE 243 L’analcime v’a point fondu au même feu, ce qui établit une quatrième différence entre ces minéraux. Enfin , si lon compare leur structure intérieure, lon trou- vera encore une différence marquée entre ces pierres : la sar- colite présente une cassure lamelleuse, et celle de l’'analcime est au contraire lisse et comme vitreuse. Voilà comme on voit bien des différences entre les pro- priétés physiques des pierres dont il s’agit. Mais quelles causes produisent ces différences ? L'analyse chimique peut seule nous les faire connoitre. ESSAIS CHIMIQUES. J'ai d’abord soumis ces deux substances à l’action de l'acide sulfurique et de l'acide muriatique. Je vais décrire les phé- nomènes que chacune de ces pierres a présentés avec ces acides et les autres matières que j'ai employées dans le cours de cette opération. Ces expériences préliminaires n’étoient destinées qu’à m’ins- truire sur la nature particulière et comparée des deux pierres, et non pour déterminer les rapports de leurs élémens, me proposant, lorsque j'aurois connu ces derniers, d’en faire une analyse rigoureuse. SARCOLITE ET ACIDE SULFURIQUE. Après avoir réduit en poudre fine cmq grammes de sarcolite, je l'ai mise avec quatre parties d'acide sulfurique étendu de son poids d’eau: j'ai remarqué qu’au bout de vingt-quatre heures le volume de la poudre avoit sensiblement diminué, et que ce qui restoit avoit pris une forme floconneuse et légère. +) us 244 ANNALES DU MUSÉÈUM Pour favoriser l’action de l'acide et la rendre plus complète, j'ai fait bouillir le mélange, et l'ai fait évaporer à siccité. J'ai ensuite lavé le résidu avec de l'eau bouillante, afin de séparer tout ce qui pouvoit avoir été rendu soluble par l'acide sulfurique; le résidu insoluble ne pesoit plus que 3 grammes 98 centièmes. Je me suis d'abord occupé de rechercher la nature des substances contenues dans la liqueur ; j'y ai mélé de l'ammo- niaque, et j'ai obtenu un précipité blanc floconneux et demi- transparent ,quiavoit l'apparence de l’alumine, seulement moins transparent. Combiné avec l'acide sulfurique et une certaine quantité de potasse, le précipité n'a fourni de l’alun qui étoit mélé de sulfate de chaux, dont la base, entrainée par l’'alumine, étoit la cause de la légère opacité de cette dernière. Toutes les recherches auxquelles j'ai soumis ce précipité, n’ont pu m'y faire découvrir autre chose que de l’alumine , un peu de chaux et un atôme de fer. J'ai fait ensuite évaporer la liqueur d’où j'avois précipité ces trois substances par l'ammoniaque; j'ai calciné le résidu fortement pour volatiliser le sulfate d’ammoniaque : il m'est resté environ huit décigrammes d’une. substance saline un peu grise, dont la saveur étoit chaude et amère, J'ai dissous ce résidu dans l’eau bouillante , et après avoir concentré la li- queur par l'évaporation , je l'ai abandonnée pendant quelques jours à l'air libre: elle a fourni des cristaux prismatiques qui, quand ils ont été secs, se sont eflleuris, ce qui me fit soup- conner que c'étoit du sulfate de soude. En conséquence, j'ai dissous ces cristaux dans l’eau, et j'y ai mêlé de l’eau de ba- rite jusqu'à ce qu'il ne se soit plus formé de précipité, Jai filtré la liqueur, et y aiintroduit en soufilant de l'acide carbo- D'HISTOLRE NATURELLE. 245 nique pour séparer l'excès de barite, Jai filtré de nouveau, et après avoir séparé par lévaporation la liqueur elaire, je l'ai abandonnée pendant quelques jeurs à l'air, où elle a fourni des cristaux de soude carbonatée: il y en avoit huit décigrammes. Cette soude contenoit un peu de potasse; car elle préeipitoit légèrement la dissolution de platine pur. L’acide sulfurique avoit donc enlevé à la sarcolite de l’alu- mine, de la soude et de la chaux. Revenons maintenant à la portion de la pierre qui n’avoit pas été dissoute par l'acide sulfurique : son opacité, son volume et son poids m’ayant fait penser qu’elle retenoit une partie du sulfate de chaux formé pendant la première opération, j'ai traité ce résidu avec trois parties de carbonate de potasse, et une certaine quantité d’eau. Après avoir fait bouillir ce mé- lange pendant quelques heures , j'ai filtré la liqueur , et me suis apercu qu’en effet elle contenoit beaucoup d'acide sulfurique. Le précipité , beaucoup plus floconneux qu'auparavant, étant sec, je l'ai ensuite traité par l'acide muriatique, qui a produit une légère effervescence. J’ai fait bouillir la liqueur : j'ai lavé et séché le résidu, qui ne pesoit plus que 2 granimes 6 dixièmes. L’ammoniaque a formé dans les liqueurs réunies un léger précipité, lequel étoit encore de Palumine mélée d’une petite quantité de chaux comme la première. Enfin, l’oxalate d'ammoniaque.a produit dans ces liqueurs, après que l’alumine en a été séparée , un précipité qui m'a présenté toutes les pro- priétés de l’oxalate de chaux. La portion de sarcolite non dissoute par l'acide sulfu- rique, traitée au moyen de la potasse, s'y est fondue ; et l'examen auquel j'ai soumis cette combinaison , m’y a démontré la présence d’une grande quantité de silice, d'un peu d'alu- 246 ANNALES DU MUSEUM mine et de chaux, échappés à l'action de l'acide sulfurique. J'ai donc, par ces premiers essais, démontré que dans la sarcolite il y a, 1. de la silice ; 2° de l'alumine; 3 de la chaux ; 4.° de la soude mélée de potasse ; 5. de l’eau et quel- ques atômes de fer. / L’acide muriatique attaque aussi la sarcolite; mais ilne n’a rien appris de plus que l'acide sulfurique sur la nature de cette pierre. Je vais maintenant tâcher de déterminer par les expériences suivantes la quantité relative de chacune de ces substances. Deuxième opération. — Analyse quantitative de la sarcolite. PREMIÈRE EXPÉRIENCE. Désirant obtenir à part l’alcali contenu dans cette pierre, j'en ai traité cinq grammes dans un creuset de platine avec deux parties de nitrate de baryte; le mélange ne s'est fondu qu’im- parfaitement :n’ayant pu le délayer dans l’eau bouillante, j'ai été obligé de l'enlever du creuset à l'aide de l'acide muriatique très-étendu , et de la chaleur. La plus grande partie de la matière s'est dissoute dans l'acide muriatique ; cependant il restoit une petite quantité de poudre blanche qui paroissoit être une portion de la pierre non attaquée. La liqueur, évaporée à siccité, s’est prise en gelée vers la fin de l'opération, et a laissé une poudre d'un blanc jaunâtre qui, reprise par l'eau, s'est convertie en une substance parfaitement blanche , très-légère, et qui, après avoir été bien lavée et calcinée, pesoit deux grammes et demi, Pour m'assurer si cette matière étoit de la silice pure, je D'HISTOIRE NATURELLE. 247 lai fait bouillir avec une dissolution de potasse concentrée ; elle sy est dissoute, moins six centièmes de gramme de sar- colite non attaquée par la baryte. II EXPÉRIENCE, La liqueur, provenant du lavage de la silice, laquelle con- tenoit le muriate de baryte et les principes de la sarcolite solubles dans l'acide muriatique, a été précipitée par une suffi- sante quantité d'acide sulfurique. Le sulfate de baryte qui en est résulté , bien lavé, j'ai réuni les liqueurs, et j'y ai mêlé de l’'ammoniaque en excès; par ce moyen j'ai obtenu un pré- cipité qui avoit toutes les apparences de l'alumine, et qui pesoit un gramme étantsec. Pour connoître ensuite si cette substance précipitée par l’ammoniaque étoit de l’alumine, je l'ai traitée par la potasse caustique, qui l’a entièrement dissoute, à l’excep- tion de quelques atômes inappréciables d’oxide de fer. 111. EXPÉRIENCE. J'ai mélé dans la liqueur d’où cette alumine avoit été sé- parée , comme on vient de le dire , de l’oxalate d’'ammoniaque, et jai obtenu un précipité pesant quarante centièmes de gramme : c’étoit de l'oxalate de chaux. Enfin la liqueur, de la- quelle j'avois séparé successivement la silice, la baryte, l'alu- mine et la chaux, a été soumise à l’évaporation jusqu’à siccité, et le résidu salin calciné dans un creuset de platine pour vola- _tiliser le sulfate d’ammoniaque , et obtenir séparés les autres sels alcalins, il est resté dans le creuset une petite quantité de ma- tière grise pesant sept décigrammes. Cette substance, redissoute dans l’eau et abandonnée à l’évaporation à l'air libre, a donné 2,8 ANNALES DU MUSÉUM des cristaux qui se sont effleuris, et qui avoient la saveur et toutes les autres propriétés du sulfate de soude: ils pesoient, avant d'être effleuris, quatorze décigrammes. La sarcolite est donc composée, d’après cette analyse, con- forme à mes premiers essais , de cinq substances, savoir: 1° de silice ; 2.° d'alumine; 3.° de chaux; 4.° de soude; 5.° d’eau, et un atôme de fer oxidé. Résultat. Les rapports entre ces substances dans cette pierre sont ainsi qu'il suit : Sur 500 parties. Sur 100. 1 Siice three eleltaielialeten ie latte 250 ou 50 2% Alumine.se +. Le = jee set. « Stle le + 100 —120 GREAT Ti, CUiSRte tete lidiei et on cies FOIRE NAT 4° Soude mêlée de potasse . . . . . . . * . . . 22 — 4,5 DSCRAUL sel eme sie ee let eat le ets Je EU 6° Atome inappréciable de fer. . . .« . « . . . 499 —100,0 ANALYSE DE L’ANALCIME. Ayant soumis l’analcime pulvérisé aux mêmes “épreuves, il m'a presenté à peu près les mêmes phénomènes que la sar- colite : iln'a paru seulement qu’il opposoit une résistance plus forte à l’action des agens chimiques. J'en ai fait l'analyse par le moyen du nitrate de baryte; et en suivant les procédés que j'ai indiqués pour celle de la sarcolite, j'en ai retiré les mêmes substances absolument que de cette derniere, mais dans des rapports très-différens. Voici quels sont ces rapports sur cinq grammes de matière. D'HISTOIRE NATURELLE. 249 Sur500: Sur 100: A SIICEA Eee Te ie lee ie ele e 20004 2. Alumineneste le ne. tr Cr NEO 10 DAS GSCO MELON EVANS ORAN A EENT PQ pal LE De Lo MEN EN Et OA TRES CLR LE RTUES 5 42,5 — 8,5 iuGbautiper te EL: SR oui te) ro) it 6Fer(oxidé une Itrace e 40.01. Le: (1) — 482,95 — 96,5 Perte mate ie Mile Pets ele el ele te eee TO TE 500,0 —100,a Ces résultats comparés nous prouvent que quoique la sar- colite et lanalcime soient composés des mêmes principes, il est cependant impossible de les considérer comme la même espèce de pierre, puisque leurs élémens sont presque tous dans des proportions inverses, ainsi que le tableau suivant le montre à l'œil. Sarcolite: — Silice, o. Soude, 43. Eau,ar. Chaux, 4. Alumine, 20, Analcime:— Silice, 58. Soude, 10. Eau,84. Chaux, 2. Alumine, 18. Il n’y a donc que l’alumine dont les proportions , dans ces deux pierres ,se rapprochent beaucoup. Ces résultats nous fournissent une nouvelle preuve que les propriétés physiques et chimiques des substances minérales, aussi bien que les matières organiques, ne dépendent pas seu- lement de la nature des principes qui entrent dans leur com- position , mais aussi de leurs proportions. La grande quantité d’eau contenue dans la sarcolite explique (x) J'attribue cet atome de fer à la petite quantité de lave qui adhéroit aux cris- taux d'analcime, et qu'il nya été impossible d'enlever, 9: 32 250 ANNALES DU MUSEUM assez bien pourquoi cette pierre est plus légère et moins dure que l’analcime. Il paroît que la formation de l'anialcime a précédé, au moins dans quelques cas , celle de la sarcolite; car dans le milieu de l'échantillon de cette dernière, que-M. Faujas m'a donnée pour analyser , jai trouvé deux cristaux d’analcimé cristallisés, et qui ont laissé l'empreinte de leur forme dans l'endroit où ils étoient enfermés: | Il faudra donc, dans les systèmes de minéralogie , admettre la sarcolite comme une espèce de pierre particulière, et la placer dans la section des pierres alcalinifères, à côté de l’anal- cime. Cependant M. Haüy à trouvé entre la sarcolite et l’anal- cime une identité parfaite de forme cristallisée, quoique d’autres piérres , bien moins différentes par les proportions de leurs principes, n'aient point du tout les mêmes formes; ce qui doit donner matière à de nouvelles réflexions sur la cristallisation. MÉMOIRE Sur le Drcirprer et le Brecnuar, genres nou: veaux de plantes, composés de plusieurs espèces auparavant réuntes au JUSTICIA. PAR A L° DE JUSSIE U LP est utile en botanique de subdiviser les genres dont les espèces sont nombreuses , surtout lorsque ces espèces offrent des caractères distinctifs tranchés et très-naturels, qui éta- blissent dans le genre des sections bien marquées: C’est ainsi que des familles qui paroïssent ne former qu’un genre, ont été subdivisées dans la suite en plusieurs. Le geranium , com- posé de plus de deux cents espèces, est maintenant partagé en trois genres. On recommence à distinguer avec Tournefort J'Hélianthême du Giste ,en ayant égard à la structure du fruit, jugée mois importante par Linnæus, qui des deux formoitun seul genre beaucoup trop nombreux. M. Desfontaines a déta- ché avec raison de l'antirrhinum les espèces à corolle ou- verte, dont il a formé son enarrhinum, et on est forcé d'en séparer encore toutes Les Linaires de Tournefort, distinguées, osit par léperon de leur corolle, soit par la structure de leur 32 * 252 ANNALES DU MUSÉUM capsule. Nous avons essayé de partager de même Je genre centaurea, dans lequel Linnæus en a confondu plusieurs de Fournefort. On sera encore forcé de faire des divisions sem- blables dans les genres salvia ; protea, mimosa , hedysarum , hypericum, erica,melastoma, carex , et dans plusieurs autres dont l’organisation offre des moyens faciles de subdivision, C'est en suivant ce principe, que nous nous proposons de réduire le genre justicia à un moindre nombre d'espèces, en. lui Gtant celles qui ont la capsale autrement conformée. Tour- nefort n’en connoissoit que trois rapportées à son genre adha- toda, auquel il joignoit le phryma, p'ante labiée maintenant mieux connue. Linnæus, en 1753, dans sa première édition des Species, décrivit onze espèces, en substituant au nom adhatoda celui de justicia emprunté de Houstoun, qui avoit formé son genre de deux espèces, J. sexangularis et J. scor- pioides , dont nous possédons des échantillons donnés par lui el étiquelés de sa main sous le nom de justicia, avec des phrases descriptives rédigées dans la forme suivie de son temps. Ces espèces ne furent adoptées que long-temps après par Linnæus, qui, dans son premier travail, ne prit que le nom générique. Sa seconde édition , de 1762, contient dix-huit es- pèces. Murrai, en 1784, porta ce nombre à trente; M. La- marck, en 1783, dans la Nouvelle encyclopédie , à quarante- deux , éten 1991, dans ses Illustrations, à cinquante-neuf , au moyen de l'addition des diverses espèces du dianthera , genre très-voisin et peu différent. En mêle temps Gmelin, dans son édition des Species de Linnæus, en 1791 , comptoit quarante- sept justicia outre vingt-deux d'anthera. La monographie con- fondant les deux genres, publiée la même année par Vahl dans la seconde partie de ses Symbole, admet soisante-six espèces. D'HISTOIRE NATURELLE, 253 M. Willdenow.en 1797, adoptant son travail et son plan, en décrit quatre-vingt-neuf; et par une progression rapide, ce nombre est porté à cent quarante-sept dans le premier volume de l'Enumeratio plantarum, etc., publié par Vabl, en 1805, peu de temps avant sa mort. Ces espèces si multipliées ne peuvent être bien distinguées que par emploi des caractères propres à établir des subdivi- sions très-naturelles. Linnæus séparoit les ligneuses des her- bacées ; mais cette distinction, adoptée depuis par plusieurs autres botamistes , n’est pas assez tranchée ; et de plus , elle éloigne des espèces que la nature semble rapprocher. On sera tenté de préférer , avec Vahlet Willdenow, les caractères de calice simple et calice double , de corolle à limbe labié, ou en masque, ou presque égal; mais ils ne remplissent pas encore suffisamment l’objet proposé. Il paroïtroit plus naturel demettre ensemble , 1.0 les espèces à fleurs opposées solitaires, ou deux ou trois aux aisselles des feuilles sans bractées; 2.° celles à fleurs presque verticillées et accompagnées de grandes bractées; 3.° celles qui ont les fleurs en épi serré, séparées les unes des autres par des bractées assez grandes ; 4° celles à fleurs en épi lâche ou en panicule, opposées sur la tige, dépourvues de bractées ou n’en ayant que de très-petites ; 5.° celles qui ne diffèrent des précédentes que par des fleurs non opposées, por- tées d’un seul côté ; 6.° celles dont les fleurs sont disposées en corymbes, élevées sur des pédoncules opposés. Mais avant de. s'attacher à ces divisions, nous devons en faire précéder une plus naturelle, fondée sur la structure du fruit , et qui peut servir non-seulement à former dans le genre deux grandes sections, mais même à établir deux genres très- distincts, quoique toujours voisins. 224 AIN N'AIL:E S, D U.}; MJUYS Ë UM Dans le plus grandnombre des espèces, et particulièrement dans les adhatoda de Tournefort, la capsule allongée, renflée et à deux loges , s'ouvre avec élasticité en deux valves qui, en s'écartant de hauten bas dans un sens contraire à la direction de la cloison, emportent avec elles une de ses moitiés adhé- rente dans leur milieu. Du bord de cette demi-cloison, qui forme dans chaque valve deux demi-loges, sortent, à droite et à gauche, deux ou trois dents allongées, fermes et courhées en crochets, tenant lieu de cordon ombilical, au-dessous de l’ex- trémité desquelles est attachée une graine, d’où résulte la pré- sence de quatre ou six graines dans chaque loge. ( Voyez pl. XXII, fig. 4. ) Quelques espèces, et surtout celles qui ont recu les premières de Houstoun le nom de }usticia , ontune capsule très-différente. Elle est courte, comprimée , présentant la forme d'un cadre arrondi ou oval dont le rebord est renflé , et se partageant en deux valves naviculaires qui s'éloignent avec élasticité l'une de l'autre, et prennent une direction presque horizontale par suite du redressement du rebord marginal, auparavant courbé en arc. Ce redressement ne peut avoir lieu sans que les côtés de la valve se détachent du rebord, depuis leur base jusqu'à leur sommet par lequel leur adhérence subsiste, de manière qu'après l'écartement, ils ressemblent à deux ailes tenant à l'extrémité supérieure d’un pivot, qui prend ainsi la forme d’un caducée, De ce sommet, entre les deux ailes , s'échappe de haut en bas un appendice solide , élargi, comprimé, recourbé en crochet, terminé inférieurement par une ou plus souvent deux dents relevées, contre la base extérieure desquelles est attachée une graine orbiculaire aplatie, Cet appendice ainsi formé peut être regardé comme remplaçant la demi-cloison qui, dans les autres Q e D'HISTOLRE NATURELLE. espèces, partage la valve en deux demi-loges , et ses dents in- férieures, portant les graines, répondent à celles que lon observeailleurssur cette demi-cloison. (Voyez pl. XXHIE, fs. 3.) On voit ici que ce fruit differe de celui des autres espèces, 1.0 par sa forme arrondie et comprimée avec rebords relevés; 2.° par le redressement de ces rebords qui oblige les deux côtés de chaque valve de se séparer de bas en haut, en res- tant attachés en forme d’aïles à la partie supérieure du rebord redressé et tranformé en pivot; 3.° par l'absence de cloison que remplace dans chaque valve un appendice non adhérent, trop étroit pour , avec l’'appendice correspondant, séparer entière- ment la capsule en deux loges ; 4° par la situation des dents de cet appendice, qui sont placées à sa base; 5.0 par leur nombre réduit à deux, d’où il résulte que chaque valve ne contient que deux graines au plus. Ce caractère de la capsule paroit avoir été observé par Houstoun, si l'on en juge par la figure qu'il en donne dans la planche représentant la fleuret le fruit du justicia scorpioides, placé à la tête de ses Reliquiæ, publiés par M. Banks; mais il n'en fait aucune mention dans sa description trop abrégée et trop vague. C’est peut-être cette structure du fruit, si dif- férente de celle des adhatoda de Tournefort , qui avoit d’abord déterminé Linnæus à ne prendre que le nom générique de Houstoun en négligeant ses espèces. Cependant il les adopta dans sa seconde édition, malgré cette différence , et son anto- rité a tellement prévalu que ceux qui ont ajouté après lui de nouvelles espèces, n’ont également tenu aucun compte de ce caractère. Vahl, dans la seconde partie de ses $yméolæ, qui renferme une monographie du justicia , passant en revue les divers caractères qui peuvent servir à former des subdivisions 256 ANNALES DU MUSÉUM dans ce genre, fait, pour la première fois, mention de celui tiré du fruit ; et il ajoute même que pour diviser convenable- ment le genre en deux, les espèces qu'il a observées ne lui ont fourni que ce caractère tiré de la diversité de ses capsules: unicam suppeditarunt notam , némpe diversitalem in earum capsulis obviam. Prenant le crochet élargi dans le fruit orbi- culaire pour une cloison , il distingue les capsules à cloison ” adhérente aux valves et celles à cloison libre ou non adhérente. Il parle de la direction horizontale que prennent les valves dans ces dernières, et des deux lames en forme d’ailes qui restent attachées au sommet de chaque valve. Ce caractère lui paroït avec raison bien plus important que celui des loges d’anthères, séparées ou rapprochées, que Linnæus emploie pour distinguer le dianthera du justicia. Cette forme de capsule qu'il a fait des- siner dans la planche 26 de l'ouvrage cité, est indiquée par lui dans les J. chinensis, bivalvis, frondosa, pubescens, lavigata, repens ; et il ne fait que soupconner son existence dans les J cuspidata, martinicensis, crinita, pectinata, clavata. On doit regrelter qu'après avoir entrevu et même apprécié un carac- tère aussi important , il labandonne sur-le-champ pour éta- blir sur d’autres moins solides ses divisions du genre. Les auteurs de la Flore du Pérou ont retrouvé le même caractère dans leurs dianthera mucronata ( justiciæ peru- viana, Lam.) et D. acuminata ( justicia acuminata, Vahl.), et ils l'ont parfaitement tracé dans leur dessin, planche 16; mais il n'est pas clairement énoncé dans leur description, lorsqu'ils expriment par ces mots, capsula bivalyis, valyis cymbiformibus basi utrinque defixis. Nous avons observé cette organisation du fruit, soit dans les justicia chinensis , lævigata, repens, déjà indiqués par D'HISTOIRE-NATURELLE. 257 Vahl, soit dans les justicia multiflora , retusa, umbellata el trinervia de cet auteur; les justiciæ peruviana, ocimoides et verticillaris de M. Lamarck ; les justicia assurgens et sexangularis de Linnœus; les justicia martinicensis, pectinata et clavata, dans lesquels Vahl n’avoit fait que la soupconner. Elle existe encore dans une plante qui a été vivante dansle jardin du Muséum d'histoire naturelle et dans celui de Cels, et qui paroit être le justicia sexangularis de Cavanilles , pu- blié dans ses /cones , vol. 3, p. 2 ,f. 203. L'une et l’autre ont la tige anguleuse, et laissent échapper des aisselles de leurs feuilles des pédoncules allongés, souvent solitaires, semblables à des commencemens de rameaux. Ils sont terminés par une seule fleur cachée entre deux grandes bractées, et entourés à leur base de plusieurs autres fleurs presque sessiles , également munies chacune de deux bractées pareilles , du milieu desquelles sort une corolle renversée sur le côté, d’où vient pour cette plante le nom spécifique resupinata, substitué par Vahl à celui de sexangularis, donnéantérieurement à une autre espèce. Ca- vanilles a figuré à la vérité un autre fruit; mais en examinant avec attention sa description et sa figure, on rectifie en idée lune et l'autre, et l’on reconnoit l'identité des deux plantes, Celle du Muséum et du jardin de Cels provenoit de graines envoyées du jardin botanique de Bordeaux , qui l'avoit pro- bablement recue de Cavanilles. M. Ventenat, qui l'avoit ob- servée sans apercevoir l'identité, la nomme dans son Herbier justicia peduncularis. Ce nom spécifique, qui exprime un ca- ractère plus frappant , lui auroit peut-être mieux convenu ; mais comme d’autres espèces ont des longs pédoncules; et comme d’ailleurs le nom resupinata, déjà consacré par lim- pression, peut s'appliquer , soit aux fleurs penchées, soit aux 9- 33 rQ 0 290 ANNALES DU MUSEUM feuilles renversées contre la tige, suivant l'observation de Ca- vanilles, nous laisserons subsister ce dernier. On retrouve la même organisation de la capsule dans une espèce de la Guiane , très-voisine du justicia chinensis, dont elle diffère, non-seulement par le lieu de son origine, mais encore par ses bractées plus grandes, plus larges, plus arron- dies, moins acuminées et très-ciliées dans leur contour. Ce der- nier caractère doit lui faire donner le nom spécifique ciliaris, qui peut être adopté si cette plante est placée dans un genre différent du Justicia ciliaris de Linnæus. Nous la placerons comme espèce à la suite de celle de la Chine, dont par la suite elle pourra être considérée comme simple variété si la cul- ture fait disparoitre ses différences. Au moyen de ces additions , le nombre des espèces dont le fruit est conformé comme celui des premiers justicia vus par Houstoun, s'élève à vingt-deux, sans compter celles dans les- quelles cette organisation n’est que soupconnée. En se décidant à les séparer des autres pour en former un genre bien caractérisé, on seroit tenté d’abord de leur con- server le nom Justicia qu'une des espèces a porté la première, et de donner celui d’adhatoda, mtroduit par Tournefort, à toutes celles dont les valves restent entières. Mais quoiqu’on désapprouve le premier changement, on seroit peut-être plus blamable encore de vouloir réformer une nomenclature con- sacrée par une possession d’un demi-siècle, surtout lorsque cette réforme porteroit sur plus de cent-vingt plantes qui , connues seulement depuis la substitution faite par Linnæus , ont toujours été désignées par lui et ses successeurs sous le nom de justicia. H faut donc renoncer au dessein de s'emparer de ee nom pour le nouveau genre. On ne peut également lui D'HHM SURIONR EN ATAUTRUEG LE. 259 appliquer celui d’'adhatoda , spécialement consacré au jus- ticia adhatoda , arbrisseau de Ceylan, devenu commun dans nos orangeries, où ce nom de pays lui a toujours été conservé. Pour éviter toute confusion d'idées et de mots, il est plus simple de donner au nouveau genre un nom différent qui ne puisse s'appliquer qu’à lui, et qui lui conviendra mieux lors- qu'il exprimera son caractère. Si l’on se rappelle que chaque valve de la capsule , redressant sa carêne par suite de l’écar- tement, conserve ses deux parties latérales attachées au som- met sous forme d’ales, on approuvera peut-être le choix du mot dicliptera, composé du grec et signifiant deux battans en ailes. Comme ce travail que nous présentons aujourd’hui étoit déjà projeté depuis quelques années, nous avions en même temps choisi ce nom générique; et M. Ventenat , auquel nous en avions fait part, l'avoit consigné dans son graud et bel ou- vrage sur les plantes de la Malmaison , à l’article du }usticia orchioides , +. 51, où il est question de cette séparation future de quelques espèces. Cette annonce déjà ancienne nous en- gage et nous autorise même à conserver ce nom de préférence à celui plus récent de diapedium, que proposent MM. Konig et Sims, auteurs estimés des Annals botany, dans leur ana- lyse (n.° 4 , p. 179, 189) de l’Enumeratio plantarum de Vaht, en parlant de son genre justicia et des différences remar- quables dans le fruit. Si lon cherche à joindre au caractère de la fructification ceux que peut fournir le port pour distinguer les espèces qui doivent appartenir au genre dicliptera, on observe d’abord que toutes celles à fleurs axillaires, disposées en anneaux et cachées entre deux bractées plus grandes que le calice, ont présenté le fruit de ce genre, lorsqu'on a en l’occasion de 33 * Ca ANNALES DU: MUSÉUM lobserver. Telles sont les justicia chinensis, multiflora , bi- valyis, retusa, martinicensis , lævigata , peruviana , resupi- nata , verticillaris. I est plus que probable qu'il est le même dans les Justicia crinita et tomentosa, dont les fleurs dis- posées de même ont de pareilles bractées. On le retrouve dans quelques espèces à fleurs également verticillées ou axillaires, mais dont les bractées , plus petites que le calice, le laissent à découvert dans les Justicia umbel- lata, ocimoides , acuminata. Cependant cette disposition de fleurs a lieu aussi dans des espèces, telles que le justicia litho- spermifolia, qui n’ont pas le fruit du dicliptera. Ce fruit existe encore dans plusieurs espèces dont les fleurs, rassemblées en épi serré plus ou moins long, sont cachées sous des bractées Simples , plus grandes que le calice, qui accom- pagnent chacune d'elles, comme dans les justicia pectinata, repens , trinervia ; néanmoins il en existe un plus grand nombre qui, aux fleurs disposées de même, joignent un fruit organisé comme celui de ladhatoda ou justicia. On remarque aussi que dans le nombre des espèces à fleurs en épi lâche, écartées les unes des autres et munies de tres- petites bractées doubles qui ne peuvent les recouvrir, beau- coup ont le fruit du justicia, quelques-unes celui du dichptera. Parmi ces dernières, on compte les justicia scorpioides , sexangularis, assurgens. Enfin ce caractère existe pareillement dans le justicia cla- vata, observé sur un échantillon donné par Forster au Mu- séum d'histoire naturelle, qui a les fleurs disposées en panicule ambellée , suivant l'expression de ce voyageur botaniste , c’est- à-dire portées sur des pédoncules partagés plusieurs fois en deux ou trois rameaux, ou pédicelles. On peut des-lors pré- D'HISTOIRE NATUREL L E. 26x sumer qu'il doit être le même dans d’autres espèces qui auront la même inflorescence, et il se retrouve en effet dans les jus- ticia pubescens et frondosa. Ainsi le port ne peut pas fournir dans le dicliptera' un caractère uniforme, propre à le faire reconnoitre dans toutes ses espèces sans le secours du fruit. Les observations précé- dentes doivent même déterminer la division du genre en cinq sections naturelles, caractérisées par la disposition des fleurs, et le nombre ou la dimension des bractées. En donnant à chaque espèce le nouveau nom générique, on pourra lui conserver la première désignation spécifique qui fa- cilitera les moyens d'établir la synonymie. Dans le choix de la nomenclature, on suivra le plus ordinairement, comme on a déjà fait dans le cours de ce Mémoire ; celle qui a été adoptée dans l'ouvrage de Vahl, le plus récent et le plus complet sur le justicia. Outre les plantes rapportées à ce genre nombreux, que la forme de leur fruit ramène au dieliptera , il en est encore quel- ques-unes qui, semblables en ce point, différent, soit par le nombre des étamines, qui est de quatre au lieu de deux, soit par la disposition des fleurs rassemblées en épi large, serré et écailleux, présentant en quelque manière la forme d’une téte de houblon ou d'un petit cône de sapin. C’est pour cette raison que M. Lamarck a donné à une de ces espèces, dans ses Illustrations , le nom de justiciæ lupulina. Chacune des écailles de l'épi est une bractée large et en cœur allongé, qui recouvre deux à trois fleurs munies de deux autres petites bractées, et dont le calice est à cinq petites divisions presque égales. Vahl, parlant de cette espèce dans son Ænumeratio plantarum, vol. 1, p. 191, dit qu’elle est la même que le 262 ANNALES DU MUSEUM ruellia blechum de Linnæus; et en effet , lorsqu'on compare ces plantes dans les herbiers, on retrouve l'identité parfaite : elles sont de plus indiquées toutes deux comme originaires de la Jamaïque et des Antilles. Il n’est pas surprenant que M. E a- marck, trompé par le fruit, qui est fort difiérent de celui du ruellia , et ayant probablement mal vu sur le sec les étamines très-pelites, ait rapporté sa plante au usticia. Elle a bien véritablement, ainsi que le ruellia, quatre étamines réunies par paires, dont deux sont plus longues et deux plus courtes; mais son fruit, au lieu d’être long, cylindrique et séparé en deux valves qui restent entières comme dans le ruellia, est orbiculaire, comprimé, et ses valves en s’écartant présentent dans leur déchirure la forme observée dans le dicliptera. La cloison ou appendice intérieure n’adhère également à la valve que par son sommet. Sa partie inférieure, recourbée de même, paroïît plus épaisse, moins comprimée, et se termine par six dents très-rapprochées, qui annoncent l'existence d'autant de graines orbiculaires. Ce premier apercu de la structure de l'appendice offre une différence qui, jointe à celle du nombre des étamines et de la disposition des fleurs, semble devoir faire séparer cette plante du justicia et du ruellia. Nous trouvons dans l’herbier de l'ile de Bourbon, fait par Commerson , une autre espèce très-voisine de ce justicia lupulina ou ruellia blechum. Elle a de même les fleurs en épi serré et écailleux, cachées au nombre de trois sous chaque écaille ou bractée. Ces fleurs sont dépourvues de bractées par- tielles, au moins apparentes, qui paroissent remplacées par une des cinq divisions du calice , de forme ovale et différente de celle des quatre autres, dont deux sont latérales et filiformes, deux plus élargies, opposées à la première. La corolle très- D'HAISNTNONTUR € ANA MT (ORNE LL E. 205 petite renferme quatre étamines de longueur inégale , et le fruit est semblable à celui du dicliptera ; mais l'épi est moins gros et plus allongé que celui de l'espèce précédente: il a des bractées plus petites, plus arrondies et plus sèches. De plus, au lieu de lappendice simple tenant lieu de cloison qui pend au milieu de chagne valve entre les deux ailes, on voit dans la même position deux filets courbes partant du même point, placés lun contre l'autre (pl. XXHIE, fig. 1.92), mégaux en lon- gueur , terminés inférieurement chacun par une ou deux petites dents, et conséquemment devant porter chacun une ou deux graines. Cette division de lappendice en deux parties, qui ne se remarque dans aucun des dicliptera déjà observés, est un caractère très-singulier qui, joint aux précédens, doit suffire pour établir un genre assez tranché. On est cependant géné dans cette détermination par le jus- ticia lupulina, qui, semblable dans les points principaux à cette plante de l'ile de Bourbon, paroït en différer par son appendice simple, et tenir en quelque manière le milieu entre elle et le dicliptera. Cette difficulté nous a engagé à revoir avec attention l'appendice du justicia lupulina, qui nous avoit d’abord paru seulement plus épais que celui des autres espèces de di- cliptera. Son examen à la loupe a fait apercevoir sur son dos uu sillon qui régnoit dans sa longueur : nous avons pu alors soupçonner que le corps étoit double; et en effet, à l’aide de la pointe d’un instrument tranchant inséré dans le sillon , nous l'avons séparé en deux parties planes et lisses du côté de leur contact, un peu anguleuses du côté opposé, et encore adhérentes par leur sommet ( pl. XXIIE, fig. 2). Elles ne sont pas aussi minces et déliées que les deux filets de la plante de Commer- son, et chacune est terminée inférieurement par trois dents. 264 ANNALES DU MUSÉE U % Ainsi celte strncture, qui confirme d’une part la distinction des espèces, fortilie Fs l'autre leur aflinité générique. Dés-lors on peut et on doit les séparer du justicia, du di- cliptera et du ruellia, pour en former un genre particulier auquel il ne sera pas difficile d’assigner un nom, si l’on se rap- pelle que ia première espèce nommée par Linnæus ruellia blechum, étoit auparavant un genre distinct établi par Browmne, dans son Histoire de la Jamaique, page 261, sous le nom de blechum , donné par Pline, suivant Calepin, à une plante semblable à l'origan qui ,comme celle-ci ,a lesfleurs rassemblées en épi renflé , court et écailleux. Browne assignoit à son genre les caractères suivans : un calice à cinq divisions aiguës et pro- fondes; une corolie monopétale à tube allongé et étroit, à limbe divisé en cinq parties presque égales; quatre étamines, dont deux plus courtes, toutes insérées au tube de la corolle, qu’elles ne débordent point; un ovaire surmonté d'un style et de deux stigmates; une capsule comprimée, ovale, biloculaire, à valves carinées et à graines arrondies , attachées à lombilic de la capsule, semina umbilico capsulæ adnata. Ce caractère du fruit n’est pas suffisant ni assez clairement énoncé. M. Swartz, qui dans ses Observationes botanicæ, page 243, décrit aussi le ruellia blechum , entre dans plus de détails sur diverses parties , mais néglige de même les vrais caractères de la cap- sule , lorsqu'il dit simplement qu'elle est ovale, acuminée , à deux loges, et qu’elle s'ouvre avec élasticité du sommet en deux valves naviculaires. Il faut donc , en rétablissant le genre blechum de Browne, que l'inspection du fruit auroit dù toujours faire séparer du ruellia, emprunter de la description de cet auteur et de celle de M. Swartz, tout ce qui est propre à ce genre, et y ajouter D'HISTOIRE NATURELLE. 265 celle du fruit , telle que nous l'avons présentée plus haut. Ce genre sera composé, 1.0 du ruellia blechum de Linnæus, ou justicia lupulina de M. Lamarck, que l’on peut nommer ble- chum Brownei, en mémoire de celui quile premier a établi le genre sur cette espèce; 2. du ruellia blechioides de M.Swartz, qui, suivant lui, diffère du précédent par un stigmate simple et coudé , des feuilles plus entières , des épis plus lâches, de forme ovale, et que d’après ce dernier caractère plus appa- rent, on peut nommer blechum laxiflorum; 3., de l'espèce recueillie par Commerson dans l'ile de Bourbon , qui a beaucoup de rapport avec le ruellia imbricata de Vahl, que cet auteur, dans ses Symbolæ, 2 , p. 73, dit se trouver dans cette ile et dans l'Arabie. Il l'indique aussi dans l'Inde, et cite comme synonyme de sa plante le ruellia dorsiflora de Retz (Observ. botan. VI, p. 31 ) , originaire du Bengale, La descrip- tion de ce dernier est trop incomplète pour constater l'iden- tité. Dans celle de Vahl, beaucoup plus détaillée et présentant plusieurs caractères de la plante de Commerson, ce rapport est cependant atténué par la forme différente de la capsule, que l’auteur dit semblable à celle du ruellia ; ce qui l'a fait supposer allongée ,cylindrique et munie de cloisons adhérentes aux valves. Peut-être Vahl a-t-il vu la capsule avant sa matu- rité, ou il n'aura voulu la comparer qu'à celle du ruellia ble- chuim. On peut encore soupconner qu’il n’a rapproché la plante de l'ile de Bourbon de celle d'Arabie que d’après l'inspection du port, et leur identité reste douteuse, quoique dans notre herbier la première soit inscrite sous le nom de ruelliaæ im- bricata par Vabl lui-même. Nous joignons ici sa gravure avec les détails de sa fructification ( pl. XXL, fig. 1 },en la désignant sous Le nom de blechum anisophy llum (oi feuille, 4% inégal), 9: 3 266 ANNALES DU MUSÉUM pour exprimer le caractère de ses feuilles dont les deux opposées sont toujours de grandeur inégale; ce qui n’a pas lieu dans les deux premières espèces. 4.° Nous possédons encore en herbier des échantillons d’une plante des Antilles en fructification avec quelques fleurs avancées , mais dénuées de feuilles, qui ont tout le port et les caractères dela plante de Commerson , et même les doubles appendices filiformes de la capsule, et qui ne diffèrent que par leurs épis plus gros et plus courts; ce qui ne suffit pas pour en faire une espèce distincte, tant qu'on ne pourra étudier sur de meilleurs échantillons les autres parties de la plante. Si, mieux examinée dans la suite, elle étoit la même que le blechum laxiflorum qui croit dans les mêmes lieux, Fintérieur de sa capsule fourniroit un caractère de plus pour la distinguer du blechum Brownei, dont les appendices ont une forme différente. 5.° IL existe de plus dans l'herbier de M. Richard une plante du Bengale à rameaux opposés , ainsi que les feuilles qui sont ovales, lancéolées , dentelées inégale- ment et couvertes d’un léger duvet blanchätre ; ses fleurs sont disposées en épis écailleux, semblables à ceux des vrais ble- chum, mais plus minces. Comme les fleurs sont seulement en boutons, elle n’est indiquée ici que d’après la conformité du port. Les faits que l’on vient d'exposer suffisent pour prouver la né- cessité de rétablir les deux genres formés d’abord par Houstoun et par Browne. Pour compléter ce travail, nous pensons qu'il convient de résumer, dans la forme et la langue adoptées par les botanistes , les caractères distinctifs de ces genres, en les mettant en parallèle avec ceux donton les sépare, et d’y joindre dans le mème plan lénumération des espèces groupées d’après les rapports qui paroitroni les plus naturels. Comme aucune DH LS!T O IR El NATUREL E. 267 dans le genre dicliptera n’est nouvelle, on se dispensera de grossir ce travail par des descriptions déjà très-détaillées dans ouvrage de Vahl, auquel il suflit de renvoyer, et on se con- tentera de donner sa synonymie exacte , ainsi que celle des auteurs qui ont parlé des mêmes plantes, en ne citant de Lin- nœus que la première et la dernière édition où elles sont mentionnées. DicLriPTERA. Calix 5-partitus. Corolla irregularis bilabiata. Stamina duo. Stigma unicum aut duplex. Capsula orbicularis compressa subbilocularis, elasticè bivalvis, valvis carinatis, carinà primüm curvà, mox dehiscendo rectà , lateribus indè à basi utrinque fissis , apice persistentibus et summæ carinæ annexis alarum instar. Appendix in singulà valvà simplex, inter alas eidem carinæ suprà adnata, infra libera et à carinà discedens, com- planata septi æmula, sed valvä angustior ( undè loculi non omnino distincti ), incurvata hamiformis basi bidentata den- tibus latere exteriore seminiferis. Semina indè im singulà valvà duo, orbicularia, quorum unum quandoque abortivum. Herbæ aut rariùs suffrutices. Folia opposita. Flores in plurimis brac- ieà geminà latà aut angustà stipati et axillares subverticillati, in peucioribus densè spicati unibracteati bracteà latiore, aut laxissimè spicati bibracteati bractea angustiore, aut dichotome subumbellati. Antherarum loculi in alüs approximati, in als distineti. Am, valvæ bifores, z54, ala. À Justicià discrepat capsulæ valvis dehiscendo non integris sed fissis, et septo non üisdem continuo nec loculos omnind distinguente, sed libero et angustiore et appendiciformi ; à Blecho differt staminum numero, et appendice simplici, ct florum dispositione. 268 ANNALES DU MUSEUM I. FLORES BIBRACTEATI BRACTEIS MAGNIS, AXILLARES SUBYERTICILLATT, 1. DicriprerA cuinENsis. — Justicia chinensis Linn. Sp. ed. 1, p. 16. Linn. Willd. 1. p. So ; Burm. Ind. p. 8, t. 4, f. 1 ; Lam. LL. 1. p.19; Vahl, Symb. 1, P- 4,et2, p. 15. Enum. plant. 1, p. 110. — Justicia sexangularis Forsk, Æg. 5, n. 13. 2.D. axrams. Æffinis D. chinensi, sed bracteæ ciliatæ , latiores, rotundiores, minus acuminatæ. Ex Guianà. 5. D. sivarvis. —Justicia bivalvis Linn. Sp. ed. 2.p. 25. Linn. Wilid. 1. p. 82 ; Lam. Dict. 1. p. 651. JL. 1. p. 41 ; Vabl, Symb. 1. p. 5 et 2. p. 13. Enum. 1. p. 149. — Justicia fœtida Forsk. Æg. 5. n. 12. — Folium tinctorum Rumph. Amb. 6. PAbE than it re 4-D. marrinicexsis. — Justicia martinicensis Jacq. Amer. p. 5. t. 4. f. 3. Pict.p. 8. t. 6; Vahl, Enum. 1. p. 150. — Dianthera martinicensis. Linu. Murr. ed. 2. p.64. Lino. Gmel. 56. 5. D. murrircora.— Dianthera multiflora Ruiz-Pav, F1. Peruv. 1. p. 10. t. 14 b. — Justicia multiflora Vahl, Enum. 1. p. 160. 6. D. reTusA. — Justicia retusa Vahl, Symb. 2. p. 8 et 15. Enum. 1. p. 156. Linn. Willd. 1. p. 92. 7. D. Lxvicara. — Justicia lævigata Vahl, Symb. 2. p. 9 et 15. Enum. 1. p.149; Linn. Willd. 1. p. 95. 8. D. PERUvIANA. — Justicia peruviana Lam. Il 1, p. 42; Vahl, Enum. 1.p. 148. — Dianthera mucronata Ruiz-Pav. FL. Peruv. 1. p. 11.t. 16 a. 9. D. rEsurINATA. — J'usticia sexangularis Cavan. Icon. vol. 3. p. 2.t. 203, — Jus- ticia resupinata Vabhl, Enum. 1. p. 114. 10. D. vErTICILLARIS. — Justicia verticillaris Linn. fil. Suppl. 85; Linn. ed. Murr, ul 62 ; Lion. Willd. 1. p. 80; Lam. Ill. 1. p. 40; Vahl, Symb. 2. p. 15. Eaumw. 1. p. 110. 2, FLORES BIBRACTEATI BRACTEIS ANGUSTIS, AXILLARES SUBVERTICILLATI. 11. D. uusecLaTA. — Justicia umbellata Vahl, Enum. 1. p. 111. 12. D. ocumoines.— Justicia ocimoides. Lam. Dict. 1, p.650. IL. 1. p. 19; Vahl, Symb, 1. p. 15. 13. D. acuminara. — Dianthera acuminata Ruiz-Pay. F]. Peruv, 1. p. 10. t,16 b. — Justicia acuminata Vahl, Enum. 1. p. 151. 3. FLORES UNIBRACTEATI BRACTEIS CALICE LATIORIDUS, DENSÈ SPICATI. 14. D rEcrinaTa.— Justicia pectinata Linn. Sp. ed. 2, p. 22. Linn. Gmel. 54; Lam, D'HISTOIRE NATURELLE. 269 Dict. 1. p. 650. IL 1. p. 59.t. 15. £. 5; Vahl, Symb. 2. p. 16. Eoum. 1. p. 154. — Cabling et Cadlum Camell. ic. 224. Raï. Hist. 5. Luz. p. 5. n. 8. ex Lamarck. 15. D. rePENs. — Justicia repens Lion. Sp. ed. 1. p. 15. Lion. Willd, 1. p. 96; Lam. Dict. 1. p. 629. Il. 1. p. 59; Vahl, Symb. 2. p. 16. Enum. 1. p. 154. — Adhatoda.... Burm. Zeyl. 7. t. 3.f. 2. 16. D, rRivervia. — Justicia trinervia Vahl, Enum. 1. p. 156. 4. FLORES PIBRACTEATI BRACTEIS CALICE ANGUSTIORIBUS , LAXE SPICATI DISTANTES, 17. D. sconrioines. — Justicia Linn. Sp. ed. 2. p. 21. Linn. Willd. 1. p. 85; Lam, D'ct. 1. p.627. IL. 1. p.37; Vahl, Symb. 2. p. 5 et 15. Enum. 1. p. 115.— Justicia.. Houst. Reliq. 1. t. 1. 18. D. sexancuzaris. — Justicia sexangularis Linn. Sp. ed. 1. p. 16; Lam. II]. 1. p. 39; Vahl, Symb. 2. p. 15. Enum. 1. p. 115.— Euphrasia…... Pluk. t. 270. f.6. 19. D. assuncexs. — Justicia assurgens Linn, Sp. ed. 2. p. 23; Linn. Willd, r. p. 845 Lam. Dict. 1. p. 651. Il. 1. p. 40; Vahl, Symb. 2. p. 15. Enum. 1. p. 116. — Justicia... Brown. Jam. 116. t. 2. 1. 5. PEDUNGULI AXILLÂARES DI AUT TRICHOTOMÉË MULTIFLORI DIVISURIS BRACTEOLATIS, 20. D. PurEscens. — Justicia pubescens Vahl, Symb. 2. p. 9 et 16. Enum. 1. p, 146. — Dianthera cærulea Forst. prod. n. 14. 21. D. ccavara, — Dianthera clavata Forst. prod. n. 15. — Justicia clavata Vahl, Enum. 1. p. 146. 22. D. rroposs, — Justicia frondosa Vahl, Symb. 2. p. 8 et 16. Enum. 1. p. 145. Bcecuum Brown. Calix 5-partitas, æqualis aut inæqualis. Corolla tubulosa, limbo quinquelobo subæquali. Siamina quatuor didynama, non exerta. Stigma simplex aut bifidum. Capsula Diclipteræ, similiter dehiscens , valvis à basi fissis et in alas suprà expansis. Appendices in singulà valvä duæ , pariter apice adnatæ , infrà liberæ et mcurvæ , nunc latere plano arctè in unam junctæ crassiorem et septiformem basi sexdentatam et hexaspermam, nunc distinctæ filiformes basi uni aut bidentatæ et mono aut 270 ANNALES DU MUSÉUM dispermæ. Semina orbicularia, quædam sæpè abortiva. Herbæ. Folia opposita. Flores in ramis terminales, densè spicati spicà strobiliformi aut lupulinä , imbricatä bracteis latis, singulis uni bi aut trifloris. 5#%», nomen pulegii cujusdam origano similis, ex Plinio. Afline Diclipteræ, sed tetrandrum et geminà intrà utramque valyam appendice constans , et florescentià diversum. A Ruellià differt præcipue structurà capsulæ non cylindricæ nec in valvas integras dehiscentis. Bcecaun Browxer. — Barleria... Plum. ic. 42. f. 5. — Prunella.… Sloan. Ja- maic. t. 109. f. 1. — Blechum..... Brown, Jamaic. 261. — Ruellia blechum Linn. Sp. ed. 2. p. 884. Linn. Willd. 5. p. 562; Swartz. Obs. 243; Poir. Dict. Encycl. 6. p. 557. — Justicia lupulina Lam. IL 1. p. 40. — Folia serrato-dentata subhir- suta. Spicæ breves tetragonæ. Bracteæ cordatæ, trifloræ , basi bibracteolatæ. Calix 5-partitus divisuris omnibus subulatis. Corolla albida. Sigma bifidum. V’alvarum appendices in unam crassiusculam junctæ. Ex insulis Antillanis et Dominicanà et Jamaicensi. Caracler ex Swarlz et ex sicco. B. Laxircorum. — Ruellia blechioides Swartz. Prod. 94. Flor. occid. 2. p. 1068 ; Linn. Gmel. 057. Linn. Willd. 5. p. 562; Poir. Dict. Enc. 6. p. 558. — Folia in- Legra aut vix dentata , glabra. Spicæ ovatæ. Bracteæ cordato-ovatæ laxé imbri- catæ, uni aut bifloræ, basi bibracteolatæ. Calix quinquepartitus divisuris subu- latis. Corolla cærulea. Stigma simplex acutum incureum. Ex Jamaïcà. Caracter ex Swartz, qui nec hujus nec præcedentis structuram capsulæ interiorem de- scribit. 5. B. amsoruyzium. Herba prostrata diffusa, ramis subangulatis. Folia ovato- cordalà subpilosæ, nebvo medio subobliquato; horum in oppositione alterum minus. Spicæ oblongæ cylindricæ. Bracteæ cordato-subrotundæ acuminatæ 3- floræ. Calix 5-partitus laciniis oblongis inæqualibus, unà interiore lanceolatà bracteolam æïnulante, duabus lateralibus Jiliformibus, duabus interiori oppo= siris ligularis. Qéolla tenella alba. Stigma bifidum. V'alvarum appendices disrincte filifonmes. Ex insulà Borbonicä à Commersonio lectum et partim des- criptum. Ex ipso calicis divisuræ numero variæ, interdüm quatuor aut tres in eodem individuo, Caracter capsulæ ex siccâ. Valdè affinis et fortè conspecifica Ruellia imbricata Vahl, Symb. 2. p. 75, descriptione sat similis et conterrancea ; sed obstat capsula Ruellig huic ab autore adscripta, ideoque à capsulà Blechi discrepaus, FS Tom . 9: PL . 21 LZ4 & d r | | \ in | Ÿ/ | Poirau del 7 Pre fe ve Pig. BLECHOM Arisoplyluan . 5. DICLIPTERA . 2. BLECHUM Promnet . 4 » JUSTICE D’ HAS T O I RE YN:A T U RE L.L.E, 271 Explication des figures de la planche X XIII. Fiqure 1, Blechum anisophy um. —a. Fleur complète. — 4. Son calice séparé — c. Sa corolle séparée. — d. La mème, ouverte. — e. Capsule de grandeur natu- relle, — f. La mêmegrossie, commençant ä s'ouvrir par le haut et à détacher in- férieurement dans chaque valve les deux côtés de la carène.— g. La mème, ou- yerte et grossie pour montrer la forme de sa déchirure et de ses ailes. — X. Une des valves séparée avec ses ailes écartées pour laisser apercevoir ses deux ap- pendices. j Ficure 2. 4. Capsule ouverte du Z/echum Brownei, dans le fond de laquelle on entrevoit le bas des appendices.— 2. Une des valves ouverte pour montrer les deux appendices ordinairement rapprochés en un seul et que lon peut séparer. — ce. Calice de cette espèce avec les deux bractées partielles. Ficure 5. a. Capsule ouverte du dicliptera avec ses déchirures et ses ailes et ses appendices simples. — 2. Une des deux valves munie de ses deux ailes et de son appendice. Ficure 4. Capsule du }ustieia, ouverte pour montrer sa éloison adhérente au milieude chaque valve et l’altache des graines aux dents ou crochets qui sortent de cette cloison, 272 ANNALES DU MUSÉUM SUITE DES RECHERCHES SUR LES OS FOSSILES DES EN VIRONS DE PARIS. PAR M CUVIER. V: MÉMOIRE. II SECTION. DESCRIPTION DE DEUX SQUELETTES PRESQUE ENTIERS D'ANOPLOTHERIUM COMMUNE. ARTice I. Premier squelette trouvé dans les carrieres de Montmartre. (PL I, fig. 1.) J E travaillois depuis plus de huit ans à l'examen des osse- mens de nos carrières , et, toujours réduit à des fragmens isolés , je n’avois pas même eu l'avantage de trouver une seule réunion d'os propres à confirmer par le fait la combinaison opérée seulement par l’analogie, des deux sortes de pieds avec les deux sortes de machoires. Le squelette de Pantin, décrit dans la section précédente, ne me donnoit lui-même rien d'absolu à cet égard , puisque les pieds y manquent, et que lon n'y voit qu'une portion assez peu considérable de la mä- choire inférieure, DHEISTOÔIRE NATURELLE. 573 SI Enfin, au mois de décembre de l’année dernière , j'eus le bonheur de voir mes travaux couronnés par un morceau qui démontre sans équivoque la justesse de mes rapprochemens, et leur ôte toute apparence de conjectures. On découvrit dans la grande carrière de Montmartre, dans le milieu de la couche dite des Hauts piliers, le squelette presque entier d’un animal de la grandeur d’un petit cheval. Les ouvriers recueillirent avec assez de soin et m’apporterent cinq grosses pierres (A, B,C, D, E) qui se rapprochent encore par leurs jointures naturelles, et qui comprennent une grande partie de la queue , le bassin , les côtes, les deux tiers du fémur et quelques os épars du pied de derrière. Ils m’apporterent aussi deux autres pierres (F, G) qui contiennent les deux mächoires ; mais la partie qui joignoit cette tête au tronc étant tombée en petits éclats, ils négligérent de la recueillir. Ce squelette, comme tous ceux des grandes espèces de nos car- rières , ne comprend que les os d’un seul côté, celui sur lequel le cadavre étoit tombé, le côté opposé ayant été détaché et enlevé avant que la pierre à plâtre eüt pu l’incruster. Il paroït aussi que, pendant cet intervalle, une cause quelconque, peut- être des animaux voraces, avoient fait disparoître l'extrémité antérieure, et enlevé et rongé une partie de la postérieure; car il est aisé de voir que le bas du fémur (&) avoit été emporté avant d’être incrusté. La même cause aura sans doute détaché la jambe et séparé les os du pied : mais il n’en reste pas moins constant pour quiconque jette un coup d'œil sur ce beau mor- ceau, qu'il nous présente une portion considérable du squelette d’un seul et même animal; que ces mächoires, ces côtes, ce bassin, celte queue, ces os du pied se sont appartenus, et 2; 35 274 ANNALES DU MUSEUM qu'ils sont les restes d’un cadavre tombé dans le liquide où se cristallisoit le gypse. Or ce squelette nous confirme tous les caractères de l'ano- plotherium commune, tels que je les avois établis sur des mor- ceaux isolés, et nous apprend une infinité de circonstances que je n’aurois pas pu deviner sans lui. 12 Nous avons conclu ( IL° Mém. art. n1, $ I ) que l’ano- plotherium devoit avoir quarante-quatre dents , savoir : onze de chaque-côté à chaque mächoire, sans canines saillantes. On voit ici en effet (en b, c)les vingt-deux dents du côté droit, onze en haut et onze en bas, toutes avec les figures que nous leur avions déterminées , et comme nous les donnerons plus en détail dans notre Supplément. 2° La combinaison de ces têtes à quarante-quatre dents avec les grands pieds de derrière didactyles , que nous avons établie dans notre IIL* Mémoire, L" section, article X, se trouve aussi pleinement confirmée. Le calcanéum, le scaphoïde, le cunéiforme , le métatarsien et les phalanges éparses dans l’une de nos pierres E) ,. sont précisément les os dont nous avons composé ce pied. 3° Une circonstance particulière de la composition de ce pied, que nous avons exposée dans l'article premier de la même section , se trouve ici non-seulement confirmée, mais encore déterminée avec plus de précision. Nous y avons dit qu'outre les deux doigts parfaits il devoit y avoir un petit os surnuméraire, articulé à la petite facette du scaphoïde et à celle du métatarsien interne. Cet osselet est ici en place (en d), de forme ovale et ne dépassant que de très-peu le cunéiforme voisin. Nous avons eu deux autres réunions de ces mêmes os, et nous les décrirons dans un supplément. DH 1,5 T O/10R E, .N A TU R EL LE. 27b 4° Dans notre IV." Mémoire, L” section , article L°, 2, nous avons altribué à l’anoplotherium les grands fémurs à deux trochanters : c’est en eflet un semblable fémur dont la partie supéricure se trouve ici en place (en a, f). Nous insistons exprès sur ces détails, pour démontrer de plus en plus la certitude des lois zoologiques, relatives à la coexistence des diverses formes. Voici maintenant ce que nous avons appris pour la première fois par la vue de ce squelette. 1.0 Comme nous le possédions déjà lorsque nous avons ré- digé la troisième section de notre Mémoire précédent, c’est lui qui nous a dirigés, amsi que nous l’avons dit, dans la ré- partition des bassins entre les différentes espèces. 2.9 11 nous a donné la proportion réelle de la tête et des autres parties du corps que nous n’aurions pu avoir autrement, puisque les seuls fémurs varient entre eux d’un quart pour la longueur , selon les individus auxquels ils ont appartenu. 3.° Le nombre des côtes, qui est de toutes les circonstances anatomiques celle qui échappe le plus complétement aux lois de l’analogie zoologique, nous est donné à trés-peu près Il y en a onze entières, et en avant g un petit fragment d’une dou- zième. Ce nombre de douze étant précisément celui du cha- meau est bien convenable pour un genre qui a déjà tant d’ana- logie avec celui-là. Ce qui pouvoit étre resté à ce squelette en vertèbres cervi- caries, aorsales ou lombaires, a été négligé par les ouvriers, et nous aurions été frustrés par leur négligence du renseigne ment qui nous étoit peut-être le plus indispensable, si ce se- cond squelette que nous avons à décrire n’y avoit suppléé. 4° Mais la chose qui nous à été la plus nouvelle dans ce 35* 276 ANNALES DU MUSEUM squelette, celle à laquelle nous avions le moins lieu de nous attendre, ç'a été la grandeur énorme de la queue. Les dix vertèbres conservées intactes et articulées ensemble (4,7) ne sont pas à beaucoup près les seules dont elle se composoit. On voit à leur grosseur, à la saillie de leurs apophyses , à la grandeur des petits osselets en chevrons attachés sous leurs jointures, qu'il devoit y en avoir encore beaucoup d’autres; et en effet nous en avons trouvé dans deux autres morceaux plusieurs dont nous ne doutons point qu’elles n’aient appar- tenu à la portion de queue qui manque ici; mais comme elles ne viennent pas du même endroit, et encore moins du même squelette, nous les avons fait représenter séparément. Il y en a d’abord ( fig. 2) quatre trouvées ensemble ; et l'on juge par la grandeur de la première qu’il devoit y en avoir au moins une entre elle et la dernière de celles qui sont restées au squelette. L'autre morceau (fig. 3) en offre cinq qui terminent la queue, comme on peut le juger par la forme de la dernière ; mais leur grandeur ne permet pas d'en supposer moins de deux entre la première des cinq et la dernière des quatre précédentes: d’où je conclus que la queue de l’anoplotherium avoit au moins vingt-deux vertèbres , et qu'elle égaloit le corps en longueur, si elle ne le surpassoit pas. Aucun quadrupède connu n’a la queue de cette grosseur et de cette longueur , si l’on en excepte le kanguroo : et c’est encore là un caractère à ajouter à tous ceux qui font de l'ano- plotherium Vun des êtres les plus extraordinaires de cet ancien monde dont nous recueillons si péniblement les débris. Des os de queue si considérables ne pouvoient manquer d'avoir des muscles proportionnés : nous avons sur ceux de l'anoplotherium plus que des conjectures. Leurs tendons, qui neo Dim L JDE 07727172 È 77 P AUEIN}T O4} dDUGUO]G 20004 CYNIHNO) HINUAHLO TIONTP MES nd Éd À 5 AYIT ‘/d ‘A1 0 D'HISTOIRE NATURELLE. 537 étoient apparemment en partie ossifiés , ont laissé sur la pierre des traces qui nous font juger que l'épaisseur de cette queue étoit aussi énorme que sa longueur. On ne doit pas être étonné de ces traces, puisque les cartilages des côtes en ont laissé aussi de fort évidentes. Dimensions de ce squelette. Longueur de la mâchoire inférieure, depuis la premitre incisive jusqu’à lianclespostérienret(ei-tt20 Mere ect let es ils) EN De ele 0225 Idem, jasque derrière la dernière molaire . + + « . . . . . . . 0,212 Distance depuis le bord du petit fragment de première côte, jusqu’au bord postémeumideladennrere Mel 1 dép clic ie ele telle ie 0,7 Largeur de la partie évasée de l'os des îles . « « . . . . . . . . . . 0,204 Dongueuriprobaple du/cout HSM RIRE EE ORNE 0:06 Longueur que los innominé devoit avoir, en calculant d’après les mor- ceaux décrits dans le mémoire précédent . . . . . . . . . . . « .0,4 Longueur du calcanéum . . . . . HOMO MOMENT AN ECE 15 4 Hauteur Vertiealedeson corps. delete SIL ANS 2 2800,058 Hauteur du scaphoïde en avant, . . MR EU, de SR SEEN AE Eg- où Hautéuriducuneohmest-des ct dar lise ice à me le net ee - 0,014 Lonpueur du meétatareient- 4e eee Lette meleste lee Diet UMA ere + 0,104 Longueur de la première phalange. . . . . . . + . . . . . . . . 0,035 ———— de la seconde, , . . . … , Eire ot Part Choc IE de Ja troisieme: 4. 2:21 A cl. 0 0 018 Diamètre du corps du fémur . . , . . . CEE haie c10210:00 Longueur de ce qui reste de queue . . . . . + . . . nier 00 Longueur probable de ce qui en manque d'après les pièces citées ci-dessus. 0,45 Longueur totale de la queue . SL AUOT ST DEL AS Ar 08 Longueur probable du corps ayec la tête et sans la queue . + . . . , . 1,5 ah ss A APE 69 56 ou un peu plus de sept pieds et dus dont A queue prend trois pieds quatre pouces, Longueur totale, à peu près . . . . \ Nous établirons dans notre résumé général les proportions qu'un tel individu devoit offrir dans toutes ses parties. 278 ANNALES DU MUSEUM ART. 11. Autre Squelette de la méme espèce, trouvé à Antony. A peine avois-je achevé l’article précédent, que je reçus un second squelette du même animal, plus complet encore, à certains égards, que le premier, mais qui avoit surtout cela d'heureux, que ce qui s’y trouvoit le mieux conservé étoit précisément ce qui manquoit dans l’autre ,et par conséquent ce qui me restoit à connoitre pour compléter l’ostéologie de l'espèce. On l’avoit découvert à Antony , à deux lieues au midi de la rivière , dans le commencement du mois de mars. Les carrières de cet endroit sont à près de cent pieds sous terre, et descendent au moins à cinquante ou soixante pieds au- dessous de la rivière de Bièvre qui coule à peu de distance. La masse principale de gypse qui occupe le fond est épaisse de huit pieds, et recouverte d’un grand nombre de bancs de différentes sortes de marnes, entremélés de quelques petits bancs de gypse. Le squelette s’est trouvé entre deux de ces bancs de marne : un inférieur plus blanc, et un supérieur plus brun et plus feuilleté. Cette partie est nommée par les plätriers le souchet. On avoit déjà trouvé, il y a quelques _années , un grand squelette de cette espèce dans le même banc, et j'étois descendu moi-même dans la carrière pour le voir en.place ; mais comme je ne possédois pas alors les moyens que j'ai depuis imaginés, de conserver et de dégager de leur gangue des os les plus fragiles, je ne pus tirer presque aucun parti de cette découverte. J’ai été plus heureux cette fois, comme on va le voir. M. Cadet-de-Gassicourt, pharmacien de l'Empereur, et M. Ducler, professeur de cosmographie à l'Athénée de D m'r/s r OUR EU APTIDÉRIE"LILÉE. 279 Paris, ayant été avertis de ce que l’on venoit de trouver, enga- gérent les ouvriers à retirer les morceaux avec soin, et voulurent bien me donner tous ceux qu'on leur remit; néanmoins ils meurent pas tout à beaucoup près : une partie des pièces fut portée chez M. Defrance , habile naturaliste qui demeure à Bourg près d’Antony, et la distribution du tout s'étoit faite si irrégulièrement qu'aucun des morceaux donnés séparément à ces personnes ne pouvoit se rejoindre. Mais M. Defrance s'empressa de son côté de nvapporter les siens, et je re- connus alors, en consultant la correspondance des cassures, ainsi que celle des os restés de part et d'autre, que tous ces morceaux avoient été disposés dans la carrière, précisément dans l'ordre où notre planche IT les représente. Les récolant Jun à l’autre, soutenant avec du plâtre ceux qui étoient trop foibles, et enlevant avec les précautions convenables toutes les portions de marne qui recouvroient encore quelques parties des os, on a mis ce squelette dans l’état où la figure le montre. Il a été facile alors de reconnoitre que le corps de Fanimal s'étoit trouvé enfoui, couché sur le ventre, dans une position horizontale; que sa tête seulement, & , b,e, avoit été dérangée et jetée sur le côté; que les côtes, f, g, h, r, avoient été brisées et écrasées, ainsi que tous les autres os, par la pesanteur des couches qui s’étoient formées dessus, mais qu’elles étoient à peu pres restées à leur place; que toutes les vertèbres dor- sales , Æ, /, lombaires, m,n,etsacrées, oo, p, avoient conservé leurs connexions naturelles entre elles et avec le bassin, et étoient restées en ligne droite, mais que leurs apophyses épi- neuses avoient été affaissées par la même cause qui avoit dé- primé tous les autres os , et que de cette manière, elles avoient été fléchies en arrière, dans les vertèbres dorsales , et sur le côté gauche dans les lombaires et les sacrées. 280 AN NA LES:DU MUSÉ UM On reconnoissoit aussi facilement des portions considérables des deux os des iles, surtout du gauche g, du fémur du même côté ss’, de son tibia t # , et de son péroné # w , et sa rotule toute entière #, encore dans leurs rapports naturels. Presque tout l’avant-bras gauche w w' étoit placé obliquement sous les côtes du même côté ; la main gauche toute entière xæ, très-peu déplacée , se trouvoit sous les apophyses transverses droites des vertèbres lombaires. Il restoit aussi quelques par- üies de lomoplate y , et de lhumérus z droit, et l’on voyoit en arrière quelques vertébres de la queue éparses, & &', ainsi que la tubérosité de l'ischion droit 11, qui devoit avoir été brisé et déplacé avant d’être incrusté. Il manquoit entièrement à ce squelette les vertebres du cou, l'avant-bras et la main du côté droit , Fomoplate et l'humérus du côté gauche, le pied gauche et toute l'extrémité postérieure droite , soit que ces parties aient été enlevées avant l'incrus- tation complète du squelette, soit, comme il me paroit plus probable, que les ouvriers aient négligé les morceaux qui les contenoient ou qu’ils les aient donnés à des personnes qui ne me les ont pas remis. Quoi qu’il en soit, ce morceau, tel que je l’ai rétabli, nous donne’une infinité de renseignemens précieux ou de confir- mations heureuses sur la structure de cet animal antique, au- quel j'ai donné le nom d’anoplotherium commune. 1 Sa tête est la plus complète que j'aie encore obtenue: elle confirme tout ce que j'ai découvert sur les dents; elle me donne le profil tout entier, l’arcade zygomatique, également entière, © d, la portion de l'orbite 2, celle de la suture inter- maxillaire, 3, par conséquent la détermination positive du nombre des incisives, qui est de six, enfin la forme du nez. La D'AISTOIRE NATURELLE. 281 description de cette tête fera l’objet d’un article de mon Sup- plément. 2. Je vois à peu près quelle étoit la forme des vertebres du dos, k, L, etsurtout la longueur de leurs apophyses épineuses. On se rappelle que dans Particle précédent nous en avons fixé le nombre à douze par le moyen de celui des côtes, mais que nous n’en connoissions pas encore la forme. 3.° J'obtiens le nombre et la forme des vertébres lombaires, m,n;ily en a six: leurs apophyses transverses, surtout celles des quatre dernieres, sont extrémement longues, larges, et se dirigent un peu en avant. C'est un rapport frappant de notre animal avec le cochon et les ruminans, dont nous avons vu qu'il se rapproche par tant d’autres points. 4, Je compte trois vertèbres sacrées, 0, p ; toutes les trois extrémement fortes et pourvues de grosses apophyses, telles qu’elles devoient être pour porter l'énorme queue que nous avons vue dans l'article précédent. Si nous n’avions pas connu cette queue , nous n’aurions pu deviner l'usage de vertébres aussi considérables placées à cet endroit. 5. Mais ce qui m'a le plus intéressé dans ce squelette, c’est sans contredit la main, x x. Dans mon troisième Mémoire, javois reformé le carpe de l'anoplotherium avec une partie seulement de ses os tronvés chacun séparément, et jamais je n’avois eu aucun morceau propre à confirmer mes conjec- tures en me montrant ces os dans leur connexion naturelle ; le nombre même des doigts étoit pour moi, comme on l’a vu, un résultat de conjectures. J’ai eu le bonheur de trouver ici une main presque entière et précisément telle que je l’avois devinée. Elle à deux doigts parfaits seulement, et le vestige d’un 9. 36 282 ANNALES DU MUSÉUM troisième : le semi-lunaire, Yunciforme et le grand os, que j'ai décrits dans mon troisième Mémoire, section IE, article V,se trouvent entiers et en place. Ils y sont accompagnés de par- celles du scaphoide, d’une portion considérable du cunéiforme, du trapézoïde et de l’unciforme. Les sésamoïdes y sont en place. Je donnerai la description détaillée de cette partie et sa figure en grand dans un article de supplément. Cet individu étoit un des plus grands dont j'aie encore pos- sédé des parties. Voici celles de ses dimensions qu'il a été pos- sible de prendre : Dimensions de ce squelette. Longueur de la tête depuis les incisives jusqu'à la crète occipitale . . . 0,435 Longueur de la mâchoire inférieure depuis les incisives jusqu'à son angle postérieur-inférieur . . . . + + . «4 . + « ed ou + + + + « + 0 0,95 Hauteur de la même depuis son bord inférieur jusqu'au condyle articulaire 0,106 Hauteur de la même derrière Ja dernière molaire. . . . . . . . . 0,06 Hauteur de la tête à ce même endroit. . . . . . .. + + . . + . « + Sa-khauteur 4-l'extrémité du nez/e 2) CUT TENQIR CHEN à UN a, ra Distance des incisives à l’apophyse postorbitaire de l'os de la pomette . . 0,256 AH iron sousorbItaIre Eee sas deete enr nine fe sé er0 10 Longueur des six vertbres lombaires prises ensemble . . . . . . . .0,415 Fargeur de laquatrieme MEME RE A Me NT et 010,20 Longueur des os dumétacarpe . « . . . 4 4 © + «+ . . + « + + + » 0,13 LL PTE SM ET A CO LRO DE IS TEL mer On CONTI PAPE de Longueur des premières phalanges . . , . . . . + . . « . . . . . . 0,042 THEREUL 1 ne et nilelade e ele Ars tee lle» etai te » + a «10,02 C7 2 Antony . NAS louve J'yuelole d'ANOPLOTHERIUM COMM Can ve wf 5 de l grandeur naturelle . U lludienu ” ll dl . D'HISTOIRE NATUREL LE. 283 EEE VUES CARPOLOGIQUES. PAR M CORRÉA DE SERRA. L'onservarion exacte des faits, sans aucun égard à un système quelconque , et la déduction raisonnée des résultats généraux des faits ainsi observés, sont les seuls moyens par lesquels la science de la nature puisse faire des progrès so- lides. Dans l’état actuel de l'histoire naturelle, le premier de ces deux moyens de lavancer est bien plus important, et plus sùr que le dernier. Des faits bien observés, quelque aride que leur exposition puisse paroître , sont des vérités permanentes, dont la somme totale doit un jour nous donner la connois- sance du plan sur lequel la nature a été calquée. Les résultats généraux , au contraire, tels que nous pouvons les déduire du nombre encore limité des faits connus, quoique plus flatteurs à l’amour-propre, peuvent bien nous induire en erreur, par là même qu'ils ne sont des conséquences que d’une partie seulement des phénomènes. Cependant Paridité apparente des détails ne plait qu'aux naturalistes consommés , et les résultats seuls ont des attraits pour la généralité des lecteurs, Cette raison me détermine à présenter successivement, ct peu à peu ,sous différens points de vue, les résultats genéraux que la comparaison attentive des fruits et des graines a paru offrir JO 284 ANNALES DU MUSÉU M à mes yeux. J'ai täché de les déduire avec circonspection , et je vais les exposer avec candeur. Ils ne peuvent pas être nombreux dans une branche aussi nouvelle que la carpologie ; ils ne pourront pas être très-approfondis dans un travail dont ils ne sont pas l'objet principal : mais ils serviront de point de repos aux lecteurs fatigués de la sécheresse et sévérité des détails. ARTICLE PREMIER. De la différence des graines entre les séries primordiales des végétaux. . Tout est nécessairement lié dans la structure des corps organisés. La présence ou l'absence d’un organe, ses diverses modifications , sont toujours la cause ou l'effet d’autres modi- fications, qui rapprochent ou éloignent ce corps des différens êtres du règne où il est placé. Ce principe, que des mains habiles ont appliqué de nos jours avec tant de succès à la zoologie , et qui la rendra plus que tout autre une science ri- goureuse, n’a eu que très-peu d'applications à la botanique. Le petit nombre des fonctions connues des végétaux, et leur obscurité, ont peut-être été la cause du manque d'observations de ce genre; mais cetteraison , qui est une excuse très-valable pour les botanistes passés , doit être une invitation pressante à les faire pour les botanistes actuels. Parmi les organes des plantes, la graine est sans doute le plus important dans ses fonctions, et l'un des plus compliqués dans sa structure. Il est évident que des rapports directs existent entre ses modifications, et la nature de chacun des groupes du règne végétal. Il sera donc utile de remarquer ce D'HISTOIRE NATURELLE: 285 qui est propre aux graines de chaque groupe, en attendant que des observations postérieures nous mettent un jour à même de lier les fonctions et les particularités des autres organes de ces groupes , aux différences observées dans les graines qui leur sont propres. Deux siècles d'observations ont déjà démontré que le règne végétal se divise en trois grandes séries ; que, d’après une ob- servation très-ingénieuse de Césalpin, on a nommé les aco- tylédons , les monocotylédons , les dicotylédons. Quel que puisse être dans le temps à venir le sort de ces dénominations, il devient chaque jour plus évident que ces trois séries sont radicalement différentes. La diversité de leur structure se confirme par de nouveaux caracières de séparation plus frappans même et plus décisifs que l'absence ou le nombre des cotylédons. Les graines de la première de ces trois séries ne peuvent être soumises à notre examen; car leur exis- tence, dans le plus grand nombre de genres, est à peu près ce que nous en connoissons actuellement. Le jour qui éclaire leur structure est, pour me servir de l'expression d’'Euripide, une lumicre de la nature des ténébres (1), etil nous faut les abandonner, quoique à regret. Les deux autres séries nous dédommageront peut-être en partie de cette privation. Ii est en effet remarquable que, dans tous les monocotylé- dons, l'embryon soit plus ou moins parfaitement cylindrique. Le diôscorea , seul genre qui semble faire exception, offre des anomalies telles que lon peut, avec fondement, le croire étranger à cette série, nonobstant son aflinité apparente avec le tamus et le rajania. Ce seroit le seul des monocotylédons ms (1) Zxoreivoy Pos. Herc. Fur, v. 62, 286 ANNALES DU MUSÉUM où l'on trouvät des espèces à feuilles opposées , propriété qui paroït répugner à la structure , et surtout à la germination particulière à cette série. D'ailleurs l’aplatissement de la par- tie supérieure de l'embryon du dioscorea peut très-bien être tout autre chose que son cotylédon. Sa germination peut seule nous indiquer sans réplique quelle est sa nature. L’embryon foliacé semble donc appartenir exclusivement à la série des dicotylédons. Ce n’est pas que tous les embryons de cette série présentent au premier abord cette apparence; car la radicule étant toujours conique, si les cotylédons sont trop petits à l'égard de celle-ci, on ne distingue pour ainsi dire qu’elle seule : mais tous tendent à étre foliacés, et il n’en existe de vraiment foliacés que dans cette série. L’organe que l’on a nommé la papille embryÿotège, ne se trouve et paroît ne pouvoir exister que dans la série des mo- nocotylédons. La germination, qui est le meilleur interprète de la nature particulière des organes contenus dans la graine, nous montre que la papille elle-même est le vrai embryon, et que ce qui paroît être la radicule, contient aussi une espèce de cordon ombilical par où la jeune plante se lie an péri- sperme , et naturellement en absorbe la substance, Tous les monocotylédons n’ont pas cette structure ; mais les commelines, les rotangs , les palmiers et les plantes voisines de celles-ci, qui jouissent de cette structure, sont toutes de la série des monoco- tylédons, et cette structure même paroît incompatible avec la germination propre à l’autre série. La séparation entière du périsperme et de l'embryon, ne se communiquant entre eux que par le collet de ce dernier, et la présence d’un corps qui couvre l'embryon ainsi mis à nu, sont des caractères qui n’appartiennent de même qu’à la série D'HISTOIRE NATURELLE. 287 des monocotylédons. Cette structure paroît incompatible avec ce que l’on observe dans les grames des dicotylédons. Elle est propre aux graminées ; mais on en trouve des vestiges dans les familles qui n’en sont pas éloignées. On trouvera peut-être de lanalogie entre cette disposition de parties, et celle que l’on observe dans l'autre série, dans les caryophyllées, les nictages, les amarantes, les arroches et nombre d’autres familles, où embryon rejeté de côté, environne le périsperme au lieu d’en être enveloppé ; mais cette analogie disparoit lorsque l’on considère que, dans ces familles dicotylédones, l'embryon et le périsperme en contact immédiat entre eux, sont tous deux également renfermés dans la même mémbrane où ils ont eu origine. Il est bien remarquable que la graine de tous les végétaux monocotylédons soit pourvue de périsperme, sans aucune ex- ception connue , tandis qu'un nombre très-considérable de dicotylédons en est absolument dépourvu. Il est remarquable aussi, que ces végétaux dont la graine est dépourvue de pé- risperme ne sont pas ceux dont la structure est la moins com- pliquée, ou le tissu plus foible. Seroit-il donc vrai que toutes les: graines ont dans leur origine un périsperme, et que la différence ne consisteroit que dans l'époque où les cotylédons absorberoient la substance de cet organenourricier? dans quel- ques-unes, lorsqu'elles végètent dans le fruit, comme graines; dans d’autres, lorsqu'elles se développent dans la germination comme plantes ? Quelques phénomènes pourroient être cités à l'appui de ce soupçon; mais il vaut mieux attendre les lu- mières que des observations directes pourront nous apporter. Le premier devoir du naturaliste est de prendre toujours garde que son imaginatign ne vienne se placer entre lui et la nature. 288 ANNALES DU MUSÉUM Les conséquences que l’on peut déduire de tout ce qui vient d’être exposé, semblent être, 1.” qu'un embryon foliacé ou un embryon sans périsperme sont des caractères de la série des dicotylédons ; 2° qu'un embryon cylindrique, une papille -embryotège, un embryon nu, attaché par une partie seule- ment au périsperme et couvert par un corps étranger, n’ap- partiennent qu'a la série des monocotylédons. SUITE DES OBSERVATIONS CARPOLOGIQUES. XIII COMUTUS RUMPHITL Tabl. VIE, 6g. 1. (Palma vinaria secunda Rumphui, t. x, p.57.) *. FRUGEDS. Semen tantam videre licuit, sed cum ex ejus singulari forma abandè constet huic pertinere plantæ, non absurdum esse reor, ex Rumphii descriptione , quæ non ipse vidi bic addere. Ind. Calix squammosus. Peric. Drupa ex rotundo triangularis. Caro succulenta. Plac. Chorda pistillaris, triscapa peripherica. Delise. Nulla. **#, SEME N. Forma. Nuces tres in unam ad centrum coalitæ, obsoletè tri- gonæ, hinc convexæ, inde planæ. Tom 9: Pl .24. CARPOLOCIE PL. FI. Pig. Gomutus Zumphi . Hiy.2.Pattera Ponat e Ve BA D'HISTOIRE NATURELLE. 289 Jateg. Putamen tenue, ligneum, durum, nigrum, levissimum, lucidum, in dorso papillà embryonitegà notatum. Perisp. Semini conforme, corneum, durum , propè periphe- riam aqueo glancum , in centro album opacum. In dorso cavitate oblonga, conica , pro embrione ex- sculptum. ÆEmbr. Monocotyledoneus, subpiramidatus , horizontalis, lac- teus , in perispermi dorso positus. Exec. ric. 1. a, Nux ternaria. b, Una & nucibus seorsim à parte interiore. c, Eadem horizontaliter dissecta. d, £mbrio. XIV. RITTERA PINNATA. Tab. VII, fig. 2. -* FRucTUS. Ind. Nullæ. Peric. Liegumen oblongum , teres submoniliforme lignosum; extus sericeo tomentosum, nervis elevatis insculptum, uniloculare bivalve polyspermum. Placent. Chorda pistillaris dorsalis , ex quà ad singulas legu- minis stricturas funiculus procedit umbilicalis, longus, compressus, varicosus, Contortus, cui semen aflixum ; apice ad leguminis pedunculum verso. Dehisc. Ut in leguminibus per suturam ventralem. #** SEMEN. Î'orma. Semen ovato conicum, apice complanatum, basi 9- 37 290 ANNALES DU MUSÉUM \ arillo vestitum. Arillus incompletus, spongioso mem- branaceus, plicatus , fuscus | loculamenta inguinans. Hilum sub arillo oblongam, perforatum ; margine lato, plano , stris elevatis radiatim notato. Integ. Duplex , exterius cartilagineum spadiceo rufescens, in- terius membranaceum tenuissimum concolor , arctè exteriori connatum. Perisp. Nullum. ÆEmbryo. Semini conformis. Cotyledones crassæ , carnosæ, intùs planæ, extùs convexæ. Plumula minuta. Radi- cula brevis, crassa. Exec. r1G. 2. a, Legumen dehiscens. b, Ejusdem portio in- terna ut funiculus umbilicalis et seminis situs videan- tur. c, Semen qué hilum videtur. 4, Idem in dorso. e, Cotyledon seorsim cum plantulæ rudimento. XV. THESPESIA POPULNEA. ( Soland. Mss. ) Tabl. VILLE, fig. 2. ( Hibiscus populneus. EL. Malvaviscus populneus. Gærtner , t. 135 ). * Frucrus. Induy. Cdlicis persistentis reliquiæ. Peric. Capsula carnosa , subglobosa , obsoletè pentagona , um- bilicata, mucrone parvo ( styli rudimento ) ad umbi- licum notata. Cortex coriaceus incrassatus ( pulpa ex Gærtnero lutea succulenta fugax), loculamenta quinque Jom : 9: FL. ê NN « Pig :2. CARPOLOCIEÆ PL. TL. Æiy.1.Thespesia lopunea . Hg. 2. Eugema Maliccensis. LL pe À D'HISTOIRE NATURELLE. 201 completa, dissepimentis tenuibusmembranaceis divisa; alterna inveniuntur quinque alia dissepimenta ; in- completa ad basim fructus internam, tantummodo visi- bilia in sicco. Semina in singulo loculo quaterna. Plac. Chorda pistillaris centralis composita , cujus chordulis partialibus semina ad dimidiam altitudinem aflixa sunt. Delisc. Non patet. **# SEMEN. Forma. Ovato acuminatum hinc convexum , inde angulatum, tomento holosericeo, fulvo, pubescens, præsertim juxta hilum et in vertice. Ab hilo ad verticem sulcus est late- ralis rectus per quem Raphe vesiculosa excurrit. Integ. Triplex, extimum cuticula tenuis tomentosa; medium coriaceum tenue; intimum furfuraceo membranaceum rufescens , et in obtusiori sua extremitate, latissimä cha- lazà ferrugineä notatum. Perisp. Tenue carnoso membhranaceum intra cotyledones des- cendens. ÆEmbr. Dicotyledoneus, magnitudine seminis, horizontalis. Co- tyledones foliaceæ, lividæ, glandulis vesiculosis cons- persæ , chrysaloideo contortuplicatæ. Radicula teres albida. Exp. ric. a, Fructus integer.b, Idem quà calicem spectat. c, Capsula horizontaliter dissecta ad busim. d, Ejus- dem dimidiatæ sectio verticalis. e, Semen Lberum. f, Idem ablatis integumentis. g, Embrio. h, Idem expansus. 5 ÿ LE 292 ANNALES DU MUSEUM \ XVI EUGENIA MALACCENSIS. Tabl. VIII, fig. 2. * FrucTus. Induv. Stylus persistens, et calicis superi reliquiæ carnosæ. Peric. Bacca infera, sphæricea , unilocularis, calicinis lacinis carnosis supernè terminata. Cortex levis. Caro cor- tici proxima firmior uniformis, in centro pulposa fu- gax, fibris innumeris intertexta. Placent. Chorda pistillaris centralis. Ad ejus basim placenta spongiosa , in lobos divisa , quorum singulo semina nu- merosa suis umbilicis inferis aflixa sunt , sed quatuor ad quinque tantum perficiuntur. Delisce. Nulla. ** SEMEN Forma. Semen trigonum , ovato acuminatum, in exteriore latere convexum. Integ. Simplex, cartilagineum, spadiceo rufescens. Perisp. Nullum. ÆEmbr, Dicotyledoneus. Cotyledones crassæ, carnosæ, corneæ, gibbæ, angulis inter se conferruminatæ. Radicula in- fera subcylindrica , intra cotyledones latens. Exvz. rc. a, Fructus integer.b, Ejusdem sectio horizontalis. c, Chorda pistullaris cum placentis et ovulis effaætis. d, Embrionis sectio horizontalis. Tom . 9. ‘ ÉD. CARPOLOGIE. PL. IX. Pourreña Zb4orea . | D'HISTOIRE NATURELLE. 203 XVII. POURRETIA ARBOREA. (74. Sp. pl) Tab. IX. *ÆFavierus. TInduy. Calix persistens, inferus, monophyllus, campanulatus, quinquefidus, laciniis acutis patentibus. Peric.Capsula coriaceo membranea, oblongo ovata, pentap- tera, alis foliaceis obovatis latissimis venosis; unilocu- laris evalvis? monosperma. Loculamentum (in sicco specimine ) materià spongioso furfuraceà intus ob- ductum. Placent. Simplex in fundo loculamenti. DER CEE SE En AS à A EE ° « - . ” X** SEMEN. Forma. Oblongo ovatum, loculamenti forma. Integ. Simplex, membranaceum tenue, Perisp. Adesse suspicor ; fortasse farinosum ut in hibiscis ali- pp Ï 5 quibus , Sed in vivo inqurant antoptæ. ÆEmbr. Dicotyledoneus. Cotyledones foliaceæ chrysaloideo y y y contortuplicatæ. Radicula crassa teres infera, ExPc. rc. a, Fructus integer. b, Capsula alis denudata. e, LEadem operta. 4, Embrio prout in capsula existit. e, Idem explicatus. 294 ANNALES DU MUSÉU M MAP AURTE D'un Memoire sur les Tracnées pu BANANIER ef sur les usages auxquels elles peuvent étre employees, adressé à M. ve Fowrcrox par M. Harer-1a-Cnewaye , habitant de la Guade- loupe, secretaire de la chambre d'agriculture de cette ile et correspondant de l'Institut national. Lxs trachées des plantes sont des vaisseaux formés par une lame mince, élastique, de couleur argentine , et roulée en spi- rale, de manière que ses circonvolutions se touchent par les bords. Si on tire une trachée par ses deux extrémités, elle se déroule en forme de tire-bourre , et elle se resserre sur elle- même dès qu'on cesse de la distendre. Dans les tiges des di- cotylédons, les trachées entourent le canal médullaire ; dans les monocotylédons, elles occupent le centre de tous les filets ligneux dont la tige est formée : ce ne sont point des vaisseaux aériens , comme on l’a cru pendant long-temps; leur usage est de conduire la sève et de la distribuer aux divers organes des végétaux. D'HISTOIRE NATURELLE. 209 M. Hapel-la-Chenaye , en étudiant comparativement la structure des trachées dans différentes plantes, a découvert que la tige du bananier en contenoit un nombre prodigieux : il a concu le projet d'employer cette substance à des usages économiques, et il en a recueilli assez pour en adresser une caisse au Muséum et une à M. de Fourcroy. Ces caisses ne sont point arrivées; mais les professeurs du Muséum ayant répété lexpérience sur un tronc de bananier cultivé dans les serres de cet établissement, ils ont trouvé que ce que dit M. de la Chenaye du nombre des trachées et de la facilité de les ex- traire est parfaitement exact. Pour rendre compte des faits exposés par M. Hapel-la- Chenaye , nous allons le laisser parler lui-même, en trans- crivant les articles les plus importans de son Mémoire. « Le bananier, dit-il, déjà si précieux par l'aliment qu’il fournit aux Africains et aux habitans de nos colonies, par l’eau- de-vie suave et manifestement éthérée que j'ai retirée de ses fruits (1) , par la farine propre à la panilication qu’on peut préparer avec ces mêmes fruits cueïllis avant leur maturité et ensuite séchés et râpés, offre encore une nouvelle espèce de coton dont la légèreté ne le cède point à celle de l’'édredon, et qui peut être employé aux mêmes usages. » Chaque tronc de bananier donne jusqu'à cinq ou six grammes {un gros et demi } de trachées, dont les fils sont plus longs , plus élastiques et plus disposés à se lier entre eux que ceux des diverses espèces de coton. (x) La pelite quantité d’éther que contient cet alcool paroit produite par l’'ac- tion qu'exerce sur le liquide l'acide acéteux développé par la fermentation acéteuse, qui s'établit en même temps que la vineuse dans le moût de ce fruit, ( Note de l’auteur du Memoire. ) 296 ANNALES DU MUSEUM » La figure de ces trachées , observées au microscope, est celle d’un ruban dont la trame seroit composée de huit à vingt-deux fils blanes , argentés, diaphanes , très-brillans et peut-être tubulés , entre chacun desquels existe un écartement égal à leur grosseur, qui est la même pour tous. Chaque fil est alternativement et transversalement enlacé en dessus et en dessous par un fil semblable, qui, serpentant régulièrement , forme la chaine de cette jolie trame. L’intervalle entre les vaisseaux de cette chaine est à peu pres égal à l'espace qu'oc- cupent en largeur dans le ruban trois ou quatre vaisseaux de sa trame. Ce ruban est à jour et formé de mailles en losange qui paroissent se dilater et se contracter alternativement dans le mécanisme de la végétation. » Le savant Sennebier(1) nous paroît s'être trompé en comp- tant l’indivisibilité au nombre des caractères des trachées, puis- qu'on peut les séparer en autant de fils qu'on en compte dans le ruban qu'elles forment. » Pour extraire les trachées du tronc du bananier , j'attends que le régime de fruits soit récolté. Alors, au lieu de laisser pourrir la tige sur pied, je la coupe au-dessus du collet d’où sortent les caieux qui fournissent de nouveaux jets, et je la dépouille de ses feuilles. » Le tronc mis à nu a d’un mètre et demi à deux mètres de longueur, et son diamètre est de trois à huit centimètres, Pour le rendre facile à exploiter , je le divise en trois ou quatre tronçons. Je prends l'un de ces tronçons, et avec un couteau je le coupe transversalement en tranches d'environ six milli- mètres d'épaisseur. Les trachées, qui se déroulent et s'étendent, (1) Physiolog. végét. tom. 1, p. 115, D'HISTOIRE NATURELLE. 2097 obéissent sans se rompre à la pression de la lame, qui coupe facilement les fibres. J’enlève ensuite verticalement la tranche coupée : toutes les trachées en sortent et s’en délachent, et je les en sépare en abaissant le tronçon. » Par ce moyen, j'obtiens facilement de chaque tranche, depuis deux cents ou trois cents jusqu’à deux mille quatre cents ou deux mille cinq cents trachées, formant autant de fils de huit à vingt-quatre centimètres { 3 à 9 pouces) de longueur. Plus le tronçon se rapproche de la base , plus il fournit de trachées. Il n’en donne que très-peu à trois décimètres au- dessous de la naissance du régime. » Aussitôt que j'ai extrait ainsi le produit de cinq à six tranches, je le jette dans l’eau pour éviter que loxigène de la sève qui l’humecte , en réagissant sur son hydrogène, ne pré- cipite une portion de son carbone sur les trachées et ne leur donne une teinte fauve, » La récolte de cette production pourroit être confiée au garde de la bananière, qui exploiteroit facilement chaque jour tous les troncs dont on détache les fruits. On voit donc que, sans dépense de main-d'œuvre, on pourroit obtenir cette ma- ère en quantité assez considérable pour en faire un objet de commerce. Cette spéculation seroit d'autant plus impor- tante , qu'elle exciteroit à augmenter dans chaque habitation Ja culture du bananier, et que cette culture qui n’exige pres- que aucun soin accroitroit les moyens de subsistance. On sait qu'un régime de bananes composé de soixante à cent fruits, suffit à la nourriture d'un nègre pendant huit jours ; et le calcul démontre qu'une bananière formée seulement de deux mille touffes, donnant l’une dans l'autre six tiges dans le cours d’une ge 35 298 ANNALES DU MUSÉUM année, fourniroit environ soixante-huit kilogrammes ( 140 livres ) de trachées. Il ne s'agit que de tirer parti de cette ma- tière , pour augmenter le produit des bananieres (1). » Venons maintenant à sa préparation. » Apres avoir plongé les trachées dans l'eau à mesure qu’on les retire du bananier , je les lave à deux ou trois reprises dans de nouvelle eau; j'étends ensuite les Hocons sur un linge pour les faire sécher au soleil : la couleur de ceux qui avoient une téinte fauve s'affoiblit par l'effet de la lumière. » Quand les flocons sont desséchés, j'en démêle les fils en les ürant doucement en tout sens et sartout en longueur. Ces fils qui s’étorent réunis se divisent par celte opération, que j'ap- pelle carder à la main. Cela n’est pas difficile ; mais je crois qu'il sérot plus avantageux d'envoyer les flocons en Europe dans leur premier état , on les y carderoït avec plus d'adresse. » La matière ainsi préparée conservant encore la rudesse du gros colon et n'étant pas d’une blancheur éclatante, j'ai es- sayé de rendre les fils plus moëélleux et plus blancs. » Pour cela je les ai fait rouir pendant quatre jours ; mais le rouissage n'ayant pas détruit la teinte fauve, je les ai fait macérer pendant une heure dans de l'eau acidulée par le jus de citron, qui les a rendus parfaitement blancs : l'eau aciduiée par l'acide muriatique oxigéné a produit le même effet. » Les dissolutions alcalines ont donné aux trachées une teinte soufrée et verdâtre : l'eau de savon les a colorées de même ; (1) Les tronçons de bananier desquels on a séparé les trachées peuvent encore être employés utilement : bouillis avec un peu de gros syrop, ils sont un aliment luès-propre à engraisser les porcs et autres animaux de basse cour, D'HISTOIRE NATURELLE. 299 mais elles ont acquis plus de moëlleux , et les eaux acidulées les ont blanchies sans leur faire perdre leur souplesse. » Plongées dans une eau légèrement colorée par lindigo ; elles ont pris une teinte plus agréable. » Enfin , un dernier procédé plus simple , et par cette raison préférable , consiste à employer le lavage dans plusieurs eaux aussitôt après l'extraction de la matière , ensuite la macération dans de nouvelle eau du soir au matin, enfin un dernier la- vage et la dessiccation. » Privé d'artistes, je n’ai pu faire essayer ici de fabriquer différens tissus avec cette matière. Je me suis borné à la faire filer pour l’employer à la broderie et au tricotage. Jai été satisfait des résultats. » On pourra sans doute en fabriquer des étoffes qui seront d’une extrême légéreté. Elle doit surtout étre propre à la fa- brication des chapeaux ; car j'ai reconnu que ses fils contournés en spirale se contractent fortement et se lient entre eux par un degré de chaleur peu supérieur à celui de l’eau bouillante, caractère qui les rapproche de la laine. #*, Celte matière est moins conductrice du calorique que le coton , ct elle est infiniment plus légère : d’où il suit qu'on lemploieroit avec beaucoup plus d'avantage pour ouéter les babillemens d'hiver. » Cette matière est encore excellente pour faire des mèches dans la fabrication des chandelles. L’incinération de ces mèches ne tarde pas à s'opérer après leur carbomisation ; elles ne forment point, comme les mèches de coton, ce champignon qui diminue beaucoup la lumière, et les chandelles n’ont be- soin d'être mouchées que de loin en loin.» Après avoir rendu compte du Mémoire de M. Hapel-la-Che- 38 * 300 ANNALES DU MUSÉUM naye, nous devons ajouter que quand même les trachées du bananier ne pourroient être employées dans les usages éco- nomiques avec autant d'avantage qu'il le présume, son obser- vation seroit toujours intéressante et utile aux progrès de l'anatomie végétale, parce qu'on ne connoït aucune plante où les trachées soient aussi abondantes que dans le bananier et où il soit aussi facile de les observer. - Après qu'on a coupé le tronc du bananier et les feuilles qui l'enveloppent, il en sort une grande quantité de suc limpide qui présente quelques propriétés particulières. MM. Fourcroy et Vauquelin ayant jugé à propos de l’examiner, nous allons dovner l'analyse qu’ils en ont faite. D’ HE S TOI RE, NA T U/R:E.L li E. 30x ANALYSE : DU SUC DE BANANIER: PAR MM. FOURCROY ET VAUQUELIN. 1° Ce suc est un peu coloré, très-liquide et nullement vis- queux, comme le sont la plupart des sucs végétaux. 2.0 Il n’est ni acide ni alcalin : sa saveur est légérement pi- quante. 3. Il est abondamment précipité par l’eau de chaux, sous la forme de flocons blancs. 4° Il est également précipité, par le nitrate d'argent, en une substance qui n’est qu'en partie redissoute par l'acide nitrique : ce qui prouve qu’il y a dans ce suc deux acides qui précipitent l'argent. 5+ Soumis à l’évaporation , ce suc ne s’est pas troublé comme ceux des autres végétaux : ila seulement déposé quel- ques légers flocons rougeûtres. 6° La liqueur, réduite en consistance de syrop clair, a fourni une masse saline, cristallisée confusément en aiguilles colorées légèrement en jaune. Ces cristaux, égouttés et mis sur les charbons allumés, ont fusé à la manière du nitre ordi- aire; mais ils laissoient un résidu charbonneux. Mille grammes de ce suc ont donné environ quinze grammes de ce sel, ce qui est un et demi pour cent. Pour connoitre la nature des substances salines contenues 302 “UAINNALES DU MUSÉUM dans le suc de bananier , on a redissous les cristaux dans l’eau, et on y a versé de l’eau de chaux jusqu'à ce qu'il ne se soit plus formé de précipité : celui-ci séché pesoit cinq grammes ; il avoit toutes les propriétés de l’oxalate de chaux. 8., Ce sel décomposé par le carbonate de potasse , et la li- queur saturée par l'acide nitrique, a donné par l’évapora- tion trois grammes et demi d’oxalate acidule de potasse. Le résidu étoit du carbonate de eliaux qui se dissolvoit! avec ef- fervescence dans l'acide nitrique; cependant il contenoit en- core une petite quantité d’oxalate de chaux.” 9° La liqueur d'où lacide oxalique avoit été précipité par la chaux, a été évaporée à siccité, et le résidu traité par l'al- cool à trente degrés ; celui-ci, évaporé à siccité, a fourrt un mélange de potasse et de muriate de potasse : cé qmi ne s'est pas dissous dans l'alcool redissous dans Peau , et abandonné à l'air libre, a donné beaucoup de cristaux de nitrate de potasse ; il y en avoit environ huit grammes. Quant à la quantité de muriate de potasse, on ne l'a pas déterminée. Le suc de bananier est donc composé, 1., de nitrate de potasse, qui fait la plus grande partie des matières salinés ; 2.° d’oxalate de potasse neutre, qui y est aussi assez abondant; 3° de muriate de potasse en petite quantité ; 4° une’ petite quantité de matière colorante qui se dépose pendant Péva- poration. Le bananiér contient tant de ces sels, que son trone, coupé par tranches et exposé à Pair, offre sur chaque tranche, en $e desséchant, des efflorescences salines très-abondaumtes, Il y a si peu de matière végétale dans ce sue, qu'on pour- roit le regarder comme une simple dissolution saline, DES HAUTEURS ET DES POSITIONS CORRESPONDANTES DES PRINCIPALES MONTAGNES DU GLOBE, Et de l'influence de ces hauteurs et de ces po- sitions, sur les habitations des animaux. PAR LACÉPÈDE Os connoit à trés-peu pres la hauteur des principales mon- tagnes du globe. Mais on n’a pas examiné en grand les rap- ports de position de ces montagnes principales : on n’a pas assez comparé les relations de leurs diverses élévations ; on n’a pas cherché la véritable influence qu’elles exercent sur la nature des habitations des animaux. Occupons-nous de ces objets importans. On ne peut pas douter que les montagnes principales de la terre n'aient eu, dans des temps plus ou moins reculés, une hauteur supérieure à celles qu’elles présentent maintenant. D'un auire côté , on ne peut pas croire qué leurs sommets se soient abaissés d’une manière proportionnelle à leur élévation primitive. Mais ces différences passées, qu'il est impossible de 344 ANNALES DIU MUSÉUM connoître avec précision, ne peuvent pas influer sur les effets actuels de la hauteur de ces montagnes. On verra également que les erreurs qui ont dù avoir lieu dans l'évaluation du plas grand nombre de hauteurs actuelles que l’on a crues déterminées, avant que les progrès de la phy- sique, et particulièrement les découvertes de M. De Laplace, eussent perfectionné l'art de les mesurer, n’ont pas dù m’em- pêcher de présenter les résultats généraux que je vais offrir, et qu'on pourra d’ailleurs modifier facilement à mesure que ces erreurs seront rectifiées. Pour mieux entendre ce que je désire d'exposer , supposons que le globe entier a été recouvert par les eaux de l'Océan. Supposons encore que la surface des mers se soit abaissée graduellement depuis que les grandes montagnes ont pris leur forme actuelle, Divisons le temps de cet abaissement progressif de l'Océan en époques déterminées. Quelle qu’ait été la durée particu- fière de chacane de ces époques, marquons-en les limites par les différentes hauteurs dont les eaux sont graduellement des- cendues; et comptons, par exemple, une époque particulière pour chaque hauteur de cinq cents mètres dont les eaux se sont successivement abaissées, La plus haute montague du globe a plus de six mille cinq cenis mètres d’élévation. La première époque sera pour nous celle à la fin de laquelle les eaux de la mer w’étoient plus élevées que de six mille cinq cents mètres au-dessus de la surface actuelle de l'Océan, Alors le Chimboraco paroissoit seul au-dessns du vaste Océan qui environnont la terre. Le Chimboraco est un volcan ; il appartient à une parte de la terre à laquelle on auroit, D'HISTOIRE NATURELLE. 305 d'aprés notre supposition , glonné improprement le nom de nouveau continent ; il est situé dans la zone torride , très-près de la ligne, et dans l'Amérique - Méridionale, La seconde époque a commencé lorsque la mer ne s’éle- voit plus que de six mille mètres au-dessus de son niveau ac- tuel. Elle a laissé alors à découvert une grande partie de la chaine des Cordilières , le volcan de Cotopaxi, Cayambéoréou, Antsana , le pic d'Orisabo dans la Nouvelle-Espagne; mais toutes les sonimités qui s’élevoient au-dessus des eaux ,appar- tenoient à la partie de l'Amérique située sous la zone torride : à douze ou treize cents imyriamètres de ces sommités, mais tou- jours sous la même zone , parut la montagne de Maunakoal de l'ile de Sandwich. Pendant la troisième époque, l'Océan aura baissé de cinq cents mètres , sans qu'aucune nouvelle terre se soit montrée au-dessus de sa surface. A la fin de la quatrième époque , l'Océan n’étoit plus élevé que de cinq mille mètres au-dessus de son niveau actuel. De nouvelles parties des Andes , et particulièrement le volcan de Sangay et celui d’'Unguragua, étoient sortis du sein des eaux, ainsi que Mauna-Roa de l'ile de Sandwich. Mais ce que nous devons surtout remarquer, c'est que pen- dant cette époque païrurent les montagnes du nord et du nord-est de la Chine, celles qui la séparent de la Tartarie et du désert de Cobi ; et il est vraisemblable qu'il faut rapporter à la même date ou à peu près l'apparition des hautes mon- tagnes de l’intérieur de l'Afrique. Nous ne pouvons que conjec- turer à cet égard , la véritable hauteur de ces montagnes nous étant inconnue, Mais, quoi qu'il en soit de l'élévation de ces montagnes africaines, c’est à cette quatrième époque qu'il 9: 39 306 ANNALES DU, MUSÉUM faut rapporter le commencement de l’émersion du continent que nous nommons l’ancien , et cette émersion a commencé vers le 45. degré de latitude nord, à 165 degrés ou environ des montagnes les plus élevées de l'Amérique. Les deux pics de l'ile de Sandwich sont situés à une dis- tance à peu près égale de ces montagnes et de celles de l'Amé- rique équinoxiale ; et de plus elles sont placées sur une bande qui s’étendroit des unes aux autres. Si nous exceptons les montagnes africaines, nous. verrons donc que les grandes sonmmités qui s’élevoient à la fm de cette quatrième époque au-dessus du niveau des mers, composoient une bande interrompue qui partoit des environs de l’'équa- teur dans lAmérique-Méridionale, se prolongeoit par les iles Sandwich jusqu'au nord-ouest de la Chine, parcouroit près de la moitié de da circonférence du globe, et faisoit avec l'équateur un angle d'environ quarante-cinq degrés. A la fin de la cinquième époque, le volcan du Pitchincha, qui fait partie des Andes américaines, .s’élevoit au-dessus des mers, Les plus hautes montagnes de. l'Europe ,'le Mont-Blanc , le mont Rose et l’'Orteler du Tyrol, montroient déjà leurs som- mets; le mont Ophyr de l'ile de Sumatra paroissoit aussi, et Hi bande interrompue dont une extrémité étoitce mont Ophyr de Sumatra, etdont l’autrese composoit du groupe formé par le mont Rose, l'Orteler et le Mont-Blanc, s’étendoit, comme celle de la quatrième époque , depuis les environs de la ligne jusqu’au 45.‘ degré de l'hémisphère nord , parcouroit en diagonale près de cent degrés, se dirigeoit vers le nord-ouest , comme la bande qui alloit d'Amériqne en Asie , et étoit presque parallèle à cette dernière bande. Pendant la sixième époque, les eaux ont baissé de cinq cents D'HISTOIRE NATURELLE. 307 mètres. Le groupe composé du Mont-Blanc , du mont Rose et de lOrteler tyrolien , s'est agrandi par l'apparition du Lou- pilou, du mont Viso, du roc de la Nière, de l'Olan et du Maaren , compris dans le département de France connu sous le nom de Hautes-Alpes, ainsi que par celle de la plus hautesom- mité du département des Basses-Alpes, et du Finster-Aarhorn, du Monch et du Schreckhorn, du canton de Berne. Avant la fin de la même époque, le mont de la Nouvelle- Espagne qui porte le nom de Coffre de Pérote, a paru au- près de l’Orisabo dont nous avons déjà parlé, et qui seroit la plus haute montagne du globe si le Chimboraco n’existoit pas. Remarquons que, parmi les montagnes des Hautes - Alpes que nous venons denommer , celle d'Olan, qui s'élève à quatre mille deux cent huit mètres, renferme une mine de cuivre et de plomb, et que celle de Mauren, dont la hauteur est de quatre muiie quatre mètres, présente non-seulement du quartz et du granit, mais encore de la stéatite et une mine d’or. Pendant la septième époque, les eaux ont baissé jusqu'à trois mille cinq cents mètres, et par conséquent de près de la moitié de la hauteur totale à laquelle nous avons commencé de les considérer. La direction des montagnes qu’elles laissent à découvert n’est plus de la ligne vers le nord-ouest : celles qui se montrent maintenant forment une bande dirigée au contraire de la zone torride vers le nord-est. Les principales sommités qui paroissent à celte septième époque, sont en effet, si nous les considérons d’après leur arrangement géographique , et non d’après la gradation de leurs hauteurs, le Wieshach-Horn desenvyirons de Saltzhourg, le Gros-Glockneu du Tyrol, Le Fœdiberg de Glaris , le Gallen= stock et le Sustenhorn du canton d'Uri,le Wetter-Horn et le 39 * 308 ANNALES DU MUSEUM Balm Horn du canton de Berne, le Laurang et les trois Ellions du département des Hautes-Alpes, le Mont-Perdu et la Mala- detta , les deux plus hautes montagnes des Pyrénées, les mon- tagnes du royaume de Maroc, et enfin le volcan ou pic de Ténériffe, qui s'élève à plus de trois mille huit cents mètres, et qui borne, du côté du tropique, cette chaîne que nous venons de parcourir, en partant des environs du 48. degré, et en allant du nord-est vers le sud-ouest. Les trois Ellions des Hautes-Alpes que nous avons indiqués, contiennent du cuivre et du plomb, comme l'Olan, qui ap- partient à la sixième époque. Avant que la huitième époque ne füt terminée, etlipel européen qui paroissoit déjà et qui étoit composé des plus grandes sommités des Pyrénées et des Alpes, s'étoit agrandi par l'apparition du Wotzmau, voisin de Saltzbourg, du Hohen- Schwartzhæhe et du Plateskogel du Tyrol, du Stella et du Marschol. Horn des Grisons, de lOber-Albstok et du Klari- denberg du canton d'Uri, du haut Gadmenstock d'Unterwald, du Rityli-Horn du canton de Berne, du Tiulis et du Buet, du Muan de Bellone et de l'Aïguille Noire de Neuvache du département des Hautes-Alpes, du Lausanice du département des Basses-Alpes, et du Vigne-Male, du Cylindre de Marboré, du Mont-Tourné, du Pic-Long, du Néouvielle et du pic du Midi, qui hérissent maintenant la longue chaîne des Pyrénées. Les terres européennes forment , pendant cette époque, une bande dirigée dans le même sens que pendant la sep- tième; mais vers le milieu de cette période paroit l'Etna, qui porte son sommet à trois mille deux cent vingt mètres , et s’écarte vers le sud, de la bande inclinée vers le nord-est. Lorsque cette période se termine, les eaux ne s'élèvent plus D'HISTOIRE NATURELLE. 30) qu'à trois mille mètres au-dessus de la surface actuelle des mers. Mais alors avoit paru, dans l’'Amérique-Septentrionale, cette continuation des Cordilières à laquelle on a donné le nom de Stony ou de Rocky mountains, que les deux capitaines des Etats- Unis , Lewis et Clarke , envoyés par M. Jefferson , viennent de traverser , et dont les sommets, sur une largeur de douze myriamètres, présentent des glaces qui ne fondent dans au- tune saison. Pendant la neuvième époque , le sommet du Liban paroit à deux mille neuf cent quatre-vingt-quatre mètres. L'/Océan laisse ensuite à découvert la pointe de Lomnitz, qui fait partie des monts Krapacks , et qui prolonge toujours vers le nord- est la bande européenne, le Geyerkopf de Saltzbourg, le Solms- hœhe du Tyrol, le haut Sentis d'Appenzel, le Rosstock du canton de Schwitz, le Hochhut d'Unterwald , le Rothstock et le Siedelhorn du canton de Berne, le mont Genis, le Monte- Vellino des Apennins, le pic de Servières qui présente du trap et des variolites, l'Obioux qui montre du calcaire coquillier , des ammonites et des oursins sur du calcaire compact, l’Au- rouze, l’Infernay et le Faraël du département des Hautes- Alpes, le Monte-Rotondo de Corse, le Canigou des Pyrénées orientales, la partie de l'Atlas qui avoisine Alger ; et, vers le commencement de cette période, les terres de l'Amérique équinoxiale s'étendent par lapparition de la vallée où est située maintenant la ville de Quito, de même qu'avant la fin de ce laps de temps paroit, au nord-est de l'Asie, le pic de Langle, ainsi nommé par La Pérouze. A peine la dixième époque est-elle commencée, que le pic des Acores, élevé de deux mille quatre cent soixante-seize 310 ANNALES DU MUSEUM iuètres , élargit la bande européenne vers une de ses extré- mités, pendant que le Budislaw de la Transilyanie l'agrandit vers l'autre bout, que la découverte du petit Altai de Sibérie remplit une portion du grand intervalle qui la séparoit des montagnes du nord de la Chine , et que le Syltoppen de Suède et un volcan des iles Kuriles l'étendent pour ainsi dire vers le cercle polaire. C’est à cette même période qu'il faut rapporter l'émersion du mont Pilate de Lucerne, du Stock-Horn de Berne, du Ochsenstock et du Weïdi-Horn d'Unterwald, du col de Lau- taret où l’on trouve de la tourbe et du granit secondaire, et du mont Genèvre qui offre de la tourbe dans laquelle on re- connoît des feuilles de pin et des feuilles de méleze. La onzième époque est celle pendant laquelle paroissent au-dessus des eaux de l'Océan l’'Unterberg de Saltzhourg, le Villard d’Arène et le mont Lagrave du département des Hautes- Alpes, ainsi que la Falliouse des Basses-Alpes. Pendant ce temps, les divers groupesetles différentes chaînes que nous avons considérés jusqu'à présent , se rapprochent par divers nouveaux chaïnons, et s'étendent en différens sens, notamment par l'apparition de l'Elboruse du Caucase, qui porte sa tête à plus de mille huit cents mètres, de l’'Adelut de Suède , du Schnækoppe de Bohème, du Snæfsals-Jækul d’Ir- lande, qui s'élève à mille six cents mètres , du mont d'Or, du Cantal, du Puy-de-Dôme, et du Reculet du Jura. Lorsque la douzième époque a été terminée, l'Océan avoit laissé paroiître le mont Eryx de Sicile, le Vésuve, le Rigi du canton de Schwitz, le Schneeberg et le Hoheule de la Silésie, le Hampelsbaude de la Bohème, le Broken du Hartz, D'HISTOIRE NATURELLE. 321 le Feldherg de la Forêt-Noire, le Snowdon du pays de Galles, le Bennewis d'Ecosse, et enfin la Pointe-Noire et le Parnasse du Spiizberg. La mer ne s’élevoit alors qu'à mille mètres au-dessus du niveau actuel. Il n'entre pas dans notre sujet de comparer les positions des montagnes ou plutôt des collines qui n’ont pas mille mètres de haut, ou, ce qui est la même chose, d’énumérer celles qui, dans notre supposition, n’ont paru que pendant une treizième ou une quatorzième époque. Quelle que soit la vérité de cette hypothèse, elle montre les rapports de hauteur et les correspondances de position des principales montagnes de la terre. Mais cette considération ne suffit pas pour avoir une idée juste de l’influencé de ces montagnes sur les habitations des animaux. La température de l'atmosphère ne diminue pas seulement en raison des hauteurs auxquelles on s'élève, mais encore en raison de l'éloignement de la zone torride. Il résulte de la combinaison de ces deux décroissemens , que l'atmosphère peut être considérée, sous le rapport de la tem- pérature, comme composée de couches placées les unes au- dessus des autres , qui font le tour du globe dans le sens de l'équateur , mais dont les moins hautes s'inclinent dans chaque hémisphère vers la surface de la terre, la rencontrent d'autant plus tôt, et par conséquent s'étendent d'autant moins vers le pole, qu’elles sont moins élevées. Ces couches sont innombrables ; mais, pour mieux exposer ce que nous avons à dire, n’en considérons que sept prin- cipales. 312 ANNALES DU: Mu S É um La première et la plus haute est celle dont la surface in- férieure s'élève, au-dessus de l'équateur terrestre, à une hau- teur de six mille mètres. Son élévation au-dessus des poles est beaucoup moindre; mais elle enveloppe tout le globe. La seconde s'élève, dans sa partie supérieure et au-dessus de l'équateur de la terre, jusqu’à six mulle mêtres, pendant que sa surface inférieure n’est élevée, sous ce même équateur , que de quatre mille huit cents mètres, hauteur à laquelle se trouve au-dessus de la ligne équinoxiale la limite des glaces ou neiges qui ne fondent dans aucune saison. Cette seconde couche a donc au-dessus de l'équateur une épaisseur de douze gents mètres. Elle environne tout le globe, comme la première ; mais sa surface inférieure repose sur la terre, vers le soixante-sixième degré et demi de latitude, c’est- a-dire versle cercle polaire , où pendant presque toute l’année, la région de la glace touche la surface du globe. Cette surface inférieure présente une courbure plus ou moins éloignée de la courbure sphérique, comme sa surface supérieure, et comme les deux surfaces de toutes les autres couches. Cette même surface inférieure de la seconde couche se confond au-dessus de tout le globe avec la limite des glaces et des neiges qui ne fondent pas pendant l'été; elle est donc élevée de 4,200 mètres au-dessus des tropiques, de 2,700 mètres au-dessus du 45° degré de latitude, etc. Nous supposons à la troisième couche, qui est placée immédiatement au-dessous de la seconde, une épaisseur telle que sa surface inférieure rencontre la terre, vers le 55 degré de latitude, Cette même surface inférieure ne doit avoir, au-dessus de la ligne équinoxiale, que quatre mille mètres D'HISTOIRE NATURELLE. Fite) de hauteur, parce que c’est à cette hauteur de quatre mille mètres qu’on trouve, au-dessus de l’équateur de la terre, une température à peu près égale à celle qu’on éprouve, à la sur- face du globe, vers le cinquante-cinquième degré de latitude. Par une raison semblable, la quatrième couche, qui touche la terre au quarante-cinquième degré, n’est élevée dans sa sur- face inférieure que de trois mille deux cents mètres au-dessus de l'équateur terrestre. Le dessus de la cinquième couche n’a que deux mille quatre cents mètres d’élévation au-dessus de la ligne équinoxiale, et cette cinquième couche se confond avec le niveau actuel de l'Océan au 35: degré. La sixième couche rencontre ce niveau des le tropique, ou, ce qui est la même chose, dès le 23° degré et demi; la hauteur de sa surface inférieure n’est, au-dessus de la ligne équinoxiale, que de seize cents mètres, parce que, tout égal d’ailleurs, et en supposant le soleil toujours au-dessus de l'équateur, la même température règne à seize cents mètres au-dessus de la ligne, et au niveau des mers sous le tropique. Enfin la septième couche comprise entre les deux tropiques touche la terre dans toute l'étendue de sa surface inférieure ; et la plus grande hauteur de sa surface supérieure n’est, au- dessus de l'équateur terrestre, que de seize cents mètres. Rappelons maintenant que nous avons proposé, il y a déjà plusieurs années, aux zoologues géographes de diviser la sur- face sèche du globe en vingt-six régions , que nous avons nom- mées zoologiques : nous leur en avons indiqué les limites ; et les recherches dirigées, depuis cette époque, vers la rectifi- cation de cette distribution, ont paru confirmer lassentiment 9- 4o 314 ANNALES DU MUSÉUM qu'on a bieu voulu donner à la détermination de la circonfé- rence de ces vingt-six régions. Pour avoir, cependant, une idée plus vraie de la nature des habitations que ces vingt-six régions présentent aux animaux, et de leur influence sur la nature ou les habitudes de ces der- niers, ilest nécessaire de tenir compte des effets que les mon- tagnes qui environnent ces régions peuvent produire sur ces contrées, par l'action qu’elles exercent sur la température de leur atmosphère, sur l'espèce, le nombre et le développement des végétaux qui y croissent, sur l'abondance et sur les qua- lités des eaux qui les arrosent. Il est aisé de voir en effet que la nature et l'abondance des eaux, les propriétés, la grandeur et le nombre des végé- taux, la chaleur on le froid de l'air, sont les trois grands élémens de toutes les modifications que peuvent éprouver les animaux qui respirent l'air, s'abreuvent des eaux, et se nourrissent de végétaux directement ou indirectement. Mais cette influence des hautes montagnes, cette sorte de perturbation produite dans les phénomènes que présenteroit la surface de la terre si elle n’étoit pas hérissée en certains endroits de grandes chaines de pics trés-élevés, est, tout égal d’ailleurs, en raison, premièrement de l'élévation de ces mon- tagnes, ou du nombre de couches atmosphériques qu’elles traversent, et deuxièmement des parallèles entre lesquelles elles sont situées. Il en résulte que, sous le cercle polaire, aucune montagne n’exerce d’une manière sensible cette influence que nous exa- minons, puisqu'elles ont toutes leur base dans la seconde des sept graudes couches atmosphériques dont nous venons de D'HISTOIRE NATURELLE. 315 parler, et que cette seconde couche, ainsi que nous l'avons dit, est au-dessus de la ligne de glace. Entre le cercle polaire et le cinquante-cinquième degré, les montagnes qui parviennent jusqu'à la seconde couche, dont les sommets peuvent être par conséquent toujours cou- verts de glaces ou de neiges "et qui ont plus de mille trois cent cinquante mètres de hauteur, exercent une action que nous pouvons appeler du premier ordre; celles qui ne tra- versent que la troisième couche n'ont qu’une influence du second ordre. Entre le 55° et le 45° degré, les montagnes qui ont plus de deux mille sept cents mètres d’élévation parviennent jus- qu’à la seconde couche, et ont une action du premier ordre; celles dont la hauteur est comprise entre mille trois cent cinquante et deux mille sept cents mètres exercent une in- fluence du second ordre, et les moins élevées n’en ont qu’une du troisième. Si nous considérons les montagnes comprises entre le 45° et le 35 degré, nous trouverons, premièrement que les montagnes hautes de plus de quatre mille deux cents mètres s'élèvent jusques à la seconde couche, dépassent par consé- quent la ligne de glace, et ont une influence du premier ordre ; deuxièmement, que celles dont l'élévation est entre quatre mille deux cents mètres et trois mille cent cinquante mètres ont une influence du second ordre, parce qu’elles arrivent jusques à la couche qui rase la surface du globe entre le cercle polaire et le 55 degré; troisièmement, que celles qui n’ont pas trois mille cent cinquante mètres d’élévation, mais qui ont plus de deux mille cent mètres de haut, ont leur sommet dans la quatrième 4o * 316 ANNALES DU MUSÉUM couche, et par conséquent une influénce du troisième ordre; quatrièmement, que celles dont la hauteur est entre deux mille cent et mille cinquante mètres ont une influence du quatrième ordre, et cmquièmement , que celles qui ont une hauteur moins considérable n’exercent qu'une influence du cinquième ordre, parce que leurs somimités ne défassent pas la limite de la sixième couche, qui s’appuie sur la surface de la terre entre le 35.‘degré et le tropique. L'on peut voir enfin que, sous la zone torride , les montagnes qui dépassent la ligne de glace, et par conséquent portent leurs sommets au-dessus de quatre mille huit cents mêtres, sont les seules dont l'influence soit du premier ordre; qu’une influence du second ordre appartient aux montagnes dont les sommités sont comprises entre une élévation de quatre mille huit cents mètres et une hauteur de quatre mille; que les mon- lagnes moins hautes que ces dernieres, et qui cependant ont plus de trois mille deux cents mètres d’élévation, ont une influence du troisième ordre ; qu'elle n’est que du quatrième dans les montagnes inférieures, quoique ces dernières soient hautes de plus de deux mille quatre cents mètres ; qu’elle n’est que du cinquième dans celles qui sont encore moins élevées, quoiqu’elles parviennent à la sixième couche, c'est-à-dire, quoiqu'elles aient plus de seize cents mètres de haut, et que toutes les autres montagnes n'étant situées que dans la sep- tième couche , et par conséquent dans la plus basse, n’ont que la plus petite influence , c’est-à-dire celle du sixième degré. Lorsque j'ai cru que lon devoit diviser la surface sèche du globe en vingt-six régions zoologiques, c’est en rappro- chant les observations des voyageurs sur les rapports des dif. D'HISTOIRE NATURELLE 317 férentes espèces d'animaux avec la nature des contrées qu'ils habitent, que j'ai déterminé le nombre, la position et les li- mites de ces vingt-six régions. Leurs circonférences n’ont été iracées que d’après les faits. Mais en rappelant ce que nous venons de dire, il sera possible de se rendre raison , jusqu’à un certain point, de la diversité de leur action sur les ani- maux. En examimant, par exemple, la latitude moyenne d’une de ces régions, en mesurant la hauteur des montagnes qui forment son enceinte, et en connoissant le degré d'influence que ces montagnes doivent exercer, on expliquera pourquoi les rapports de cette région avec les animaux sont différens de ceux d’une autre région dont la latitude moyenne est la même, mais qui est circonscrite par des montagnes dont la hauteur est plus ou moins grande que les élévations qui en- ceignent la première. Il faut observer encore que la température moyenne des couches de l'atmosphère n'existe telle que nous lavons ex- posée, que pendant le temps des équinoxes. En effet, à mesure que le soleil paroït s’avancer vers le tropique, la température de la couche la plus basse de la zone torride, s'étend progres- sivement versle pôle et parcourt tous les degrés de latitude jus- que vers le cercle polaire. Mais bien loin de s'élever à seize cents mètres de hauteur au-dessus de toutes les parallèles, comme au-dessus de l'équateur terrestre, son élévation va toujours en diminuant à mesure qu'elle se rapproche du pôle, parce que la ligne de glace permanente, ou, si je puis parler ainsi, la surface concaye où l’on suppose la limite de la glace du- rable, et qui environne le globe, est même le jour du solstice, très-prèes de la surface de la terre, dans les parallèles voisines 318 ANNALES DU MUSEUM du pôle, et placée au contraire, le jour de l’équinoxe, à quatre mille huit cents mètres au-dessus de l'équateur terrestre. Le probleme dont nous nous occupons est donc très- compliqué ; mais quand on ne le résoudroit que par ap- proximation, je tâcherai de faire voir, dans un ouvrage auquel je travaille depuis long-temps, et qui sera intitulé, Essai sur l'histoire des principales races de l'espèce humaine, quel parti on peut tirer des diverses considérations que nous venons de présenter , pour l'explication de plusieurs phénomènes dignes de toute l'attention des naturalistes. DHISTOIRE NATHRELLE. 319 N'O TE Sur le CurAxGA , genre nouveau de plantes de la famille des personées. PAR A: L DE JUSS.I EU, E existe dans l'Æerbarium amboinense de Rumph, vol. 5, p. 459, & 190, 7, une plante décrite et figurée sous le nom de serratula amara, que Linnæus à cilée comme synonyme de son seutellaria indica. Pour qu’elle pût appartenir à celte espèce, ou du moins au genre seutellaria, il faudroit qu'elle eût un fruit composé de quatre graines nues comme dans les labiées, et quatre étamines. Cependant Rumph n’admet que deux étamines avec un fruit allongé rempli de graines menues comme du sable. 11 résulte de ces caractères que cette plante, loin de se rapprocher du scutelluria, doit être mème reportée hors de la famille des labiées. En parcourant les herbiers de Commerson , j'ai trouvé dans celui de Java une plante sans nom, qui, comparée avec la figure de Rumph, lui ressemble par- faitement : je n’ai pu analyser ses fleurs très-petites et presque passées, mais son fruit m’a offert des caractères bien tranchés ; et en joignant sa description sur le sec à celle de la fleur assez détaillée dans l'ouvrage de Rumph, on obtient le caractère suivant, qui distingue cette plante de tout autre genre. Le calice est composé de deux feuillets aplatis, dont l’un est plus grand que l’autre, et de deux langueltes intérieures opposées. La corolle, cachée entre les feuillets, est monopétale, attachée sous l'ovaire , divisée en deux lèvres, dont la supérieure est à trois lobes et l’inférieure à un seul beaucoup plus large. Les éta- mines sont au nombre de deux, attachées sous la lèvre supérieure. L’ovaire est libre , surmonté d’un style persistant ; il devient une capsule terminée en pointe, recouverte par les feuillets du cahice qui ont acquis plus détendue; elle est à 320 ANNALES DU MUSÉUM deux valves et à deux loges remplies de graines menues, séparées par une cloison parallèle aux valves, sur le milieu de laquelle s'élève de chaque côté une ligne saillante servant de point d'attache aux graines. La tige est herbacée , traçante ; les feuilles sont simples, opposées: les fleurs sont porices en petit nombre sur des pédoncules axillaires. Cette plante croît, selon Rumph, dans les champs et les vallées, le long deshaies et dans les lieux ombragés. On la nomme en langue malaise daun cucurangh , d'où j'ai tiré le nom de Curanga pour désigner ce genre. Sa fleur le place dans la classe des monopétales à corolle hypogyne; sa capsule, dont la cloison est parallèle aux valves, la ramène à la famille des scrophulaires ou personées ; et le nombre de deux étamines établit son affinité, soit avec le pæderota, dont elle diffère surtout par la structure de son calice, soit avec le gratiola , qui n'a cependant ni le mème calice, ni la capsule divisée intérieurement de la même manière. On emploie cette plante à Amboire en décoction, comme la petite centaurée, pour guérir les fièvres tierces; en quoi elle a quelque rapport avec le scutellaria galericulata, nommé en françois la certianaire. C'est peut-être cette identité de vertus qui avoit fait croire à Linnæus que le curanga faisoit partie du genre seutellaria. lies caractères indiqués ont prouvé le contraire, et le curanga paroïit ètre un genre très-naturel, appartenant à la famille des personées. Cette observation, faite il y a quelques années, avoit été communiquée dans le temps au célèbre Vahl, qui a adopté ce genre dans le premier volume de son Ænumeratio plantarum, p. 100; mais par une faute d'impression, il y est nommé caranga au lieu de curanga qui dérive mieux du nom mälais. Je crois devoir le rectifier en ajoutant à son caractère les deux languettes intérieures du calice , observées plus récemment sur mon échantillon incomplet ; c'est ce qui fait l'objet principal de cette note. Comme l'espèce décrite a les feuilles en cœur et crénelées , semblables à celles de la mélisse, je l’avois d’abord nommée dans mon Herbier Curanga melissæ- folia; mais pour éviter un nouveau changemeut, je crois devoir adopter le nom spécifique amara donné par Rumph et conservé par Vahl à cette plante, à cause de sa qualité amère, qui la rend fébrifuge, D'HISTOIRE NATURELLE. 391 EXAMEN CHIMIQUE D'une substance animale de la Grotte de l'Arc, dans l’ile de Caprée. PAR A LAUGIER. Os trouve dans l'ile de Caprée une substance épaisse, vis- queuse , brune et odorante, dont l’origme n’est pas connue des naturalistes. Voici comment s'exprime sur cette substance M. Breislak , minéralogiste, dans son Voyage de la Campanie. « Dans la partie méridionale de File de Caprée et vers la » moitié de la hauteur de la montagne, se trouve un enfon- » cement peu profond, mais dont la hauteur excède trente- » quatre mètres ( 104 pieds), qu'on nomme la Grotte de l'Arc. » Le sol en est fort incliné, et l’on n’y peut gravir qu'au moyen » d’une échelle. Les parois, le sol, la vote de la Grotte, sont » de pierre calcaire sur laquelle, en beaucoup d’endroits, on » voit une substance noire, polie, luisante, configurée tantôt » en mamelons de cinq à six centimètres de diamètre, en- » viron deux pouces, et tantôt en protubérances allongées et » un peu déprimées, comme si elles avoient eu un certain » degré de mollesse. Cette substance adhère à la pierre, au 9. 41 322 AUNIN A L'ESi:,D OU, MU S'É U M point d'exiger un marteau pour en être détachée. En cassant la pierre sur laquelle elle est attachée, son intérieur ne montre pas un atome de cette matière. Quand cette subs- tance étoit Juisante et polie, sa couleur étoit constamment noire et avoit l'aspect du bitume. Lorsque sa superticie étoit roideet formée de petits globules granulés en forme de choux- fleurs , sa couleur étoit gris-foncé tendant au roussatre, et des irrégularités de sa surface sortoient de petits pois en forme de laine , qui, au tact, se montroient parfaitement arides et n’avoient m flexibilité ni onctuosité. Son odeur rap- peloit celle du tan. Le sol de la Grotte étoit couvert de cette substance, en partie tombée de la voûte où elle abon- doit, et en partie née sur le sol même. Mise sur le feu , elle brüloit et rendoit une odeur fétide : elle se dissolvoit en grande partie dans l’eau, sur laquelle nageoïent quelques- uns de ses poils. Soumise à la distillation , elle produisit une huileempyreumatique , une substance ammoniacale, et laissa un résidu charbonneux. Il n’y a point de doute qu’elle ne soit une substance animale. » M. Faujas ayant rapporté, de son dernier voyage en Italie, une certaine quantité de cette substance, en a remis au labo- ratoire des recherches chimiques du Muséum d'histoire natu- relle, dans Fespérance que l'analyse jeteroit quelque jour sur la nature et l'origine de cette matière singulière. MM. Four- croy et Vauquelin ont bien voulu me charger de l'analyse de cette substance, et suivre les expériences qu’elle a nécessitées, (D'HISTOIRE, NAITIUIRELLE, 323 S I er Propriétés physiques. La substance de la Grotte de l'Arc dans Pile de Caprée a une couleur brune-roussätre; sa consistance est molle; elle adhère aux doigts, ainsi qu'aux instrumens dont ôn se sert pour la diviser. Ce qui frappe d'abord en l'exaäminant, c’est son odeur forte, analogue à celle des fumiers, à la bouse de vache, et en même temps à celle du castoréum. Elle est mélée de poils durs, d’un brun fauve, de cinq à six lignes de longueur. On apercoit cà et là, à la surface de cette substance et dans son intérieur , de petits cristaux blancs-jaunâtres, d'une saveur fraiche, piquante, et fusant sur les charbons rouges, à la manière du nitrate de potasse. Placée sur un fer rougi, cette substance se boursoufle et noircit, en exhalant une odeur piquante, un peu moins fétide que celle de la plupart des substances animales, quoiqu’elle en ait le caractère. ÿ S IL Traitement de la substance par l'eau d'stillée. — Examen de la portion insoluble dans ce liquide. L'eau distillée se colore en rouge-brun très-foncé à l'instant même où on la versesur cette substance, et, à l’aide d’une douce chaleur, elle lui enlève en peu de temps plus de la moitié de son poids. Sur quinze grammes soumis à son action, elle a dissous sept grammes six décigrammes. mt 324 ANNALES DU MUSÉUM L'alcool , mis en digestion sur le résidu de ces quinze grammes insoluble dans l'eau, ne s’est coloré que très-lége- rement. Cet alcool, filtré et évaporé dans une cornue, va laissé que 0,15 d’une matiere brune, insoluble dans l’eau, de nature résineuse, que je n'ai pu examiner en détail, à cause de sa petite quantité : elle ne forme que le centième de la substance, La portion des quinze grammes sur laquelle ni l'eau ni l'alcool n’avoient eu d'action, auroit dû peser 6 grammes 55 c., après la défalcation des 7,6 enlevés, par l’eau, des 0,15 dis- sous par l'alcool, et des 0,7 adhérens au filtre à travers lequel étoit passée la dissolution aqueuse : elle ne pesoit réellement que &.5o. Les 2,05 qui sont la différence, doivent étre attri- bués à l'humidité que contient la substance, dont on se rap pelle que la consistance est molle. On remarquoit dans ce résidu, outre un grand nombre de petits fragmens pierreux, provenans sans doute du rocher auquel avoit adhéré la substance, un assez grand nombre de poils, et des brins de paille comme hachée. Introduit dans un creuset, et suffisamment chauffé pour brûler sa portion combustible, le résidu a exhalé une odeur de paille brülée. Il a perdu par cette opération 1,35, et s’est réduit à 3,15. es 3,15 se sont dissous dans l'acide muriatique avec effer- vescence, à l'exception de 0,22 d’un mélange d’oxide de fer, de silice et d’un atome de chaux; l'oxide de fer pesoit 0,07, la silice 0,15 : l'ammoniaque avec laquelle j'ai sursaturé la dissolution muriatique a précipité 0,06 d’oxide de fer et 0,08 d’alumine, que j'ai séparés par la potasse caustique. L'oxalate d'ammoniaque versé ensuite dans la dissolution nurialique, y a formé un précipité très-abondant, qui, par D'UHAT SN ON MR E EN VANTIU REUL|L €. 325 une calcination longue et soutenue, a laissé une substance grise, d’une saveur alcaline, verdissant le sirop de violettes, s’échauffant avec l’eau, ayant enfin tous les caractères de la chaux vive. Cette terre alcaline pesoit 1,49, qui représentent 2,72 de carbbnate de chaux. La dissolution muriatique, privée du fer, de lalumine et de la chaux qu'elle contenoit, a laissé, par l’évaporation à siccité et la calcination forte, une matière en quantité presque inappréciable, adhérente au creuset, comme vitriliée, et d’une saveur acide. Cette matière n'a paru étre un mélange de mu- riäte de potasse et de phosphate acide de chaux. SULRE Examen de l'eau chargée des principes solubles de la substance. L'eau que l’on a fait digérer sur la substance de la Grotte de PArc a une couleur brune-noirätre , et cependant elle est trés-limpide et ne forme aucun dépôt par l'évaporation. Elle ne rougit ni ne verdit les couleurs bleues végétales. Réduite en consistance mielleuse par l'évaporation au bain-marie, elle a fourni un extrait qui, desséché avec précaution, pesoit 7 grammes 6 décigramimes. Cet extrait a une saveur piquante et une odeur forte, sem- blable à celle de la matière dont il provient. Il se dissout en totalité dans Feau, qu'il colore en rouge- brun. Il attire fortement l'humidité de l'air , et reprend bientôt une consistance muelleuse. Exposé à une chaleur rouge, il se charbonne après s'être 326 ANNALES DU MUSÉUM boursouflé, et se réduit facilement en une cendre grise-ver- dûtre et alcaline. L’acide sulfurique concentré dégage de cet extrait une odeur vive, piquante , cuflicile à déterminer par lanalogie qu’elle a avec celle de plusieurs acides volatilisés ensemble. Sa dissolution concentrée précipite abondamment par le nitrate d'argent et le muriate de platine, très-légèrement par loxalate d’ammoniaque, le nitrate de baryte et la teinture de noix de galle. La potasse caustique n’en dégage aucune odeur ammoniacale, Ces essais mdiquoient la présence d’une assez grande quantité d'acide muriatique et de potasse, et celle digne très-pelite quantité d'acide sulfurique, de chaux et de matière animale. Désirant connoïtre les produits que cet excès donneroit par la distillation à feu nu , et plus exactement la nature et la pro- portion des sels fixes qu'il contient, j'ai introduit dans une cornue trois grammes de cet extrait desséché, et je les ai exposés à une chaleur douce que j'ai augmentée par degrés. La matière s’est boursonflée; il est passé une certaine quan- tité d'un liquide rougeitre, et bientôt après quelques gouttes d'une huile brune : jai aperçu presque en même temps se former au col de la cornue de petits cristaux aiguillés. J'ai continué le feu jusqu’à ce que le charbon resté dans la cornue füt complétement desséché , et j'ai déluté l'appareil. Le produit obtenu exhaloit l'odeur fétide des matières ani- males ; il étoit fortement ammoniacal et verdissoit sensible- ment les couleurs bleues végétales ; le sel cristallisé étoit du carbonate d’ammoniaque: on ne pent donc douter de lanature animale de la substance soumise à l’expérience. Pour juger de la nature et de la proportion des sels demeurés avec les charbons, DV ENST EMOUTUR ME (IN AUTRE (LE. 327 j'ai pulvérisé celui-ci, qui pesoit 1,22 , et je l'ai chauflé avec de l'eau distillée; il a perdu , par cette opération, 0,78. L'eau du lavage, évaporée convenablement et abandonnée au repos, a fourni un grand nombre de cubes parfaitement formés; ces cristaux séparés de l’eau-mère et égouttés, sesont desséchés complétement. L’eau-mère a donné, au bout de plusieurs jours, des cristaux plus petits, mais de la même forme ; ce qui restoit d’eau-mère a refusé de cristalliser et de se des- sécher ; elle avoit une saveur très-alcaline ; elle verdissoit le sirop de violettes; elle donnoit un précipité abondant par le muriate de platine pur : elle avoit tous les caractères de la po- tasse non saturée d'acide carbonique mêlée à une petite quan- tité d’un muriate; car une petite portion du précipité que cette liqueur épaisse formoit dans la dissolution de nitrate d'argent, refusoit de se dissoudre dans Pacide nitrique. Les cristaux cu- biques qui s’étoient séparés de leau-mère n’étoient autre chose que du muriate de potasse. Quelques-uns d’ent’eux sembloient, au premier coup - d'œil , être des prismes quadrangulaires aplatis; mais en les examimant avec soin, j'ai reconnu que ces prétendus prismes m’éloient que deux cubes allongés réunis par leurs extrémités : tous indistinctement , dissous dans ure goutte d’eau, précipitoient abondamment par les dissolutions de muriate de platine et de nitrate d'argent. Ainsi lessubstances salines fixes restées avec le charbon étoient du muriate de potasse et de la potasse. Le sel desséché pesoit 0,58; l'alcali ne pesoit que 0,17. Il est facile de concevoir que cette potasse provenoit au moins en partie de la décomposition du nitrate de potasse opérée par le charbon. On ne peut douter de l'existence de ce dernier sel dans la substance de la Grotte de Arc, puisquon en apercoit des cristaux disséminés à sa 328 ANNAÎLES “D U (NUS EU M surface et dans son intérieur, Le poids du charbon d’où les sels énoncés ci-dessus avoient été séparés , étoit de 0,44. Une chaleur rouge l’a réduit assez facilement en cendres blanches- grisätres du poids de o,r1. Cette cendre s’est dissoute avec effervescence dans l'acide nitrique : lammoniaque a légèrement troublé cette dissolution , l’oxalate d’ammoniaque en a séparé les deux tiers de chaux ; le reste étoit de la magnésie, qui, avec l'acide sulfurique, a donné des prismes tétraëdres aplatis, très-reconnoissables pour du sulfate de magnésie. Le résultat de cette première analyse par l’eau, l'alcool et le feu, ne me présentant qu'une substance végéto-animale extractiforme , peu précipitable à la vérité par la teinture de noix de galle , mais donnant de lammoniaque par le feu, contenant du muriate, du nitrate de potasse et un peu de sulfate de chaux, je n'y trouvois pas les moyens d'expliquer, 1° l'odeur pénétrante et en même temps suave que l'acide sulfurique dégageoit de l'extrait; 2° sa saveur piquante et tout à la fois aromatique; 3.° l’avidité avec laquelle il attiroit lhu- midité de l'air. Je résolus de pousser plus loin mes recherches. L'idée qui s'offroit le plus naturellement étoit celle de la pré- sence de lacétate de potasse; mais il étoit à craindre que l'acide sulfurique, qui est le moyen usité pour décomposer ce sel, ne déterminät la formation d’une certaine quantité de l'acide que je cherchois. Pour éviter cet inconvénient, autant qu'il étoit possible, j'étendis un gros d'acide sulfurique de sept à huit fois son poids d’eau, et je le versai sur trois grammes du méme extrait que j'avois introduits dans une petite cornue de verre adaptée à son récipient. Je luttai avec du papier imbibé de colle, et je distillai à une chaleur très-ménagée. Lorsque l’eau fut à peu près passée dans le récipient, et avec = 9 D'HISTOIRE NATURELLE, 329 elle quelques gouttes d’une huile brune , je remarquai qu'il se condensoit vers le milieu de la paroi inférieure du col de la cornue de petits cristaux aiguillés. Leur réunion forma en peu de temps une masse saline qui s’étendoit tout le long du col de la cornue. Au même moment il s'exhaloit à travers le lut de papier une odeur piquante et suave à laquelle succéda bientôt celle de l'acide sulfureux. Je cessai le feu lorsqu'il ne se dégagea plus rien, et je laissai refroidir l’appareil pendant vingt-quatre heures. Outre la masse aiguillée dont j'ai parlé, il y avoit dans le col de la cornue quelques cristaux en ai- guilles d'un blanc argentin, d’une grande légèreté, ressemblant parfaitement aux fleurs de benjoin. Je remarquai encore à la voûte de la cornue de petits cristaux immédiatement appli- qués et en forme d’herborisation, qui ne ressembloient en rien aux premiers. Je me suis assuré par des expériences posi- tives que ces derniers cristaux étoient du sulfite d’ammoniaque. En délutant l'appareil , il se répandit une forte odeur d’acide sulfureux mélé du parfum de l'acide benzoïque, qui se distin- guoit facilement. Il ne me resta plus de doute, lorsqu'après avoir coupé la cornue et retiré la masse aiguillée salie par un peu d'huile empyreumatique , j'obtins , par la rectification à une chaleur très-douce, des aiguilles d'acide benzoïque carac- térisé par toutes les propriétés qu’on lui connoït. Son poids formoit la quinzième partie de l'extrait soumis à l’expérience, Il paroit qu'une portion de la potasse, retirée du charbon de l'extrait distillé , étoit combinée à cet acide benzoïque. La pro- priété déliquescente du benzoate de potasse, comparée à celle que l'extrait de la substance de la Grotte de l'Arc a présentée, rend cette opinion très-vraisemblable. Quoique je fusse loin de m’attendre à trouver l'acide ben- 9- 42 330 ANNALES DU MUSEUM zoïque dans l'espèce de substance que j'examine, il ne me paroit pas diflicile de concilier ce fait chimique ‘avec mes soupçons sur sa nature excrémentielle. En effet, il résulte des travaux de MM. Fourcroy et Vauquelin, que cet acide existe dans l'urine des mammifères herbivores, comme dans celle des enfans. On l'a rencontré aussi dans l'eau de fumier. La présence du même acide dans la substance de la Grotte de Arc ne rend-elle pas au moins vraisemblable la conjecture qu’elle est le produit de quelque animal herbivore? Cette con- jecture n’acquiert-elle pas un nouveau degré de vraisemblance par le mélange des poils rudes et fauves, les fragmens de paille, que l’on y trouve , et par l'odeur très-caractérisée de bouse de vaches que l’on y reconnoit? A la vérité, les quadrupèdes her- bivores ne peuvent atteindre à la Grotte de l'Arc, à cause de sa position à pic; mais peut-on assurer que sa position ait toujours été inaccessible? ne peut-on pas présumer aussi que quelques quadrupèdes grimpans ou vivant dans des terriers ont pu y faire leur séjour ? Quelques naturalistes, en exami- nant les poils trouvés dans la substance de l'ile de Caprée, ont cru reconnoitre que c'étoit à ceux de rats, de lièvres ou de marmottes qu'ils ressembloient davantage. Ceci, au reste, n’est qu'une conjecture. Examen comparatif du castoréum du Canada. Il est rare dans les sciences qu'un fait nouveau ne mène pas à d’autres faits nouveaux. L’analogie frappante qui existe entre l'odeur de la substance qui fait l'objet de ce Mémoire et celle du produit animal connu sous le nom de castoréum, n'a engagé à appliquer à celui-ci le procédé qui m’avoit servi à découvrir l'acide benzoïque dans la première substance. D'HISTOIRE NATURELLE, 397 J'ai mis en digestion, dans de l'eau distillée, quatre grammes de castoréum du Canada. Deux portions d’eau, successivement ajoutées et réunies après leur action sur la substance, avoicnt une couleur jaune de topaze. Le papier de tournesol que l’on y plongeoit éloit fortement rougi; ce qui ne laissoit aucun doute sur Ja présence d’un acide libre dans le castoréum. Mais de quelle nature étoit cet acide? Afin d'empécher qu'il n’échap- pät à mes recherches dans le cas où. il seroit volatil, ce qui étoit présumable, j’ai eu la précaution, avant de soumettre la liqueur à l'évaporation, de saturer l'excès d’acide qu’elle conte- nuit avec quelques gouttes de potasse, qui augmentèrent très- sensiblement l'intensité de sa couleur. Après avoir ainsi fixé l'acide de la dissolution aqueuse, je l'ai fait évaporer à siccité ; l'extrait que j'en ai obtenu ne pesoit que 0,8 décigrammes. Je les ai introduits dans une cornue de verre, et je les ai dis- tillés après y avoir mélé un gros d'acide sulfurique très-étendu d'eau. Une masse saline aiguillée s’est bientôt formée tout le long de la paroi inférieure du col de la cornue. Il s'est en- suite dégagé une grande quantité d'acide sulfureux, L'appareil deluté exhaloit l'odeur suffoquante de ce gaz acide; mais on distinguoit, comme dans la première expérience, une odeur suave d'acide benzoïque. La liqueur du récipient, saturée par la potasse pour neutraliser l'acide sulfureux, a donné un pré- cipité blanc pulvérulent, qui avoit une odeur agréable, quoique foible, d'acide du benjoin. J'ai pensé d’abord que cette poudre blanche étoit de l'acide benzoïque qui , tenu en dissolution par l'acide sulfureux , avoit été abandonné par cet acide à fur et à mesure qu'il avoit été saturé par lalcali; mais cette poudre recueillie et introduite dans un vase distillatoire ayant refusé de se sublimer, je l'ai examinée avec plus de soin, et ka * ? , 332 ANNALES DU MUSEUM je w'ai pas tardé à reconnoitre que ce prétendu acide benzoï- que n’étoit autre chose que du sulfate de potasse. Sans doute ce sel étoit le résultat de la combinaison de la potasse avec une portion d’acide sulfurique enlevé avec l’eau pendant la distillation ; et comme ce sel est peu soluble à froid, il n’avoit pas trouvé assez d’eau pour se dissoudre. J’ai eu plus de succès en recueillant la masse aiguillée qui s'étoit arrêtée dans le col de la cornue : elle s’est entièrement sublimée dans le vase distillatoire où je l'ai chauffée ; elle s’est présentée sous la forme de belles aïguilles argentines et brillantes, et avec toutes les propriétés qui caractérisent l'acide benzoïque dans toute sa pureté. Cet acide formoit au moins la huitième partie de la matière enlevée par l’eau à quatre grammes de castoréum. Voilà donc un cas assez remarquable où l’analogie d’odeur entre deux substances m'a conduit à l’'analogie de leur nature chimique. On pourroit cependant faire lobjection suivante. L'acide benzoïque appartient-il réellement à la substance contenue dans les poches inguinales du castoréum ; ou bien n'est-il qu'une des matières que lon emploie pour augmenter cette matière assez précieuse, et par conséquent un ingrédient de sophistication ? Pour résoudre cette question complétement, il faudroit pouvoir analyser l’espèce de Sibérie comparative- ment à celle du Canada; et c’est ce que je me propose de faire aussitôt que j'aurai pu me procurer cette dernière es- pèce, dont on ne fait point usage ici, et qui ne se trouve point dans le commerce en France. Ce que néanmoins je puis aflirmer d'avance, et ce qu'il est facile de vérifier, c’est que l'odeur du castoréum de Sibérie a encore plus d’analogie avec la substance de la Grotte de l'Arc, que n’en a celle-ci avec le castoréum du Canada, où j'ai constaté la présence de l'acide benzoïque. D'HISTOIRE NATURELLE. 333 ANALYSE De la Cnasasre de l'ile de Féroë, pour faire suite à celle de la S4rcoLzITE et de l'ANALcIrme. PAR M VAUQUELIN. Carre pierre a été nommée chabasie par M. Bosc Dantic, qui le premier l’a décrite, dans un mémoire communiqué à la Société d'histoire naturelle. La variété dont il a parlé se trouve en cristaux, près d'Ober- stein, garnissant l'intérieur des géodes de quartz-agate, ou quelquefois ils sont associés au quartz-hyalin en fumée. Romé Delile la regardoit comme une espèce de zéolite, à laquelle il avoit donné le nom de zéolite en cubes. Sa pesanteur, suivant M. Hauy, est de 2,7176; Sa dureté, à peine suffisante pour rayer le verre; sa forme primitive, le rhomboïde un peu obtus; sa fusion, facile au chalumeau, en une masse blanche spongieuse. Celle qui fait le sujet de cette analyse m'a été remise par M. Haüy; elle vient de l'ile de Féroë, où elle accompagne une lave poreuse grisatre. | Elle est d'un blanc mat; ses cristaux sont fendillés, et se divisent facilement par un léger effort. 334 ANNALES DU MUSEUM Ces cristaux étant engagés assez profondément dans la lave, il m'a été impossible de les en débarrasser complétement , maloré le soin que j'y ai pu apporter. Je n’ai pu m'en procurer que trois grammes, en sorte que j'ai été dans l'impossibilité d’en répéter l'analyse par plusieurs moyens, et de déterminer d’une manière trèsrigoureuse les rapports de ses principes. . Je crois cependant n’en être pas tréséloigné, et surtout qu'aucun de ses élémens ne n'a échappé; au surplus, c’est ce que l'expérience apprendra, lorsqu'on aura pu s’en procurer une plus grande quantité. La chabasie se trouvant souvent dans des laves poreuses conjointement avec la zéolite, l'analcime et la sarcolite, j'ai soupconné qu’elle pouvoit contenir, comme ces pierres, de Yalcali, et je l'ai en conséquence analysée au moyen du nitrate de baryte, J'ai suivi pour cette analyse le même procédé et les mêmes manipulations que pour celle de là sarcolite et de l’analcime, ce qui doit me dispenser de les décrire ici. Cette pierre n'a fourni les principes suivans sur 3 grammes, Savoir : x De silice tee ehibiir nbriielfe ns Uc:iT 10 ATAIUTES aMDalUmINEr. tele nr ioMelel sels le Mis lei 000 Abe chaux NES Me le le totietlente tente eee TO 4.” De soude mélée de potasse . . . . . . + . . 0,28 SAD'eaut Gt. Nes re hé Li set Pre 0109 6° De magnésie et defer, un atome inapprécié, 2,99 grammes, Ces quantités converties en centièmes, donnent les rapports SUIVADS ; | D'HISTOIRE NATUREL LE. 335 MOI CEE EU NAN EMI ER LUE 47 ai A lumEne rte era lee lets lee elle eee t22:00 DHCHaUX Eee er MON telle lee Poire lente ele CNED 4..1Soude mêlée depotasse te 4 40e een ONE 00:54 PEUT S SN ETS D ee lee AN EN ENST 2 TS 00: Fer et magnésie, une trace, 99:07 J'ai déduit la quantité de chaux, de celle du sulfate de cette base que j'ai obtenu, en y admettant quarante pour cent de chaux lorsqu'il est privé d’eau. J'ai reconnu la présence de la potasse dans la soude, par le moyen du muriate de platine, qui, comme on sait, forme avec lalcali une combinaison triple peu soluble. Je dois avertir que ie soupconne la quantité d’alcali indi- quée dans le tableau ci-dessus un peu trop forte ; mais, comme je l'ai dit plus haut, je n'ai pu la vérifier par une seconde analyse, faute de matière. Je soupçonne encore que les traces de magnésie et de fer, que j'ai aperçues parmi les autres produits, viennent des par- celles de laves qui sont restées attachées à la pierre, malgré l'attention que j'ai mise pour les séparer. Quoique les résultats de cette analyse se rapprochent de ceux de la sarcolite, cependant ils en différent par la pro- portion des principes. Si la forme cristalline, comme cela est probable, s’opposoit à la réunion de ces deux pierres en une seule espèce , il faudroit au moins les placer près lune de l'autre. D'après la composition de la chabasie, et surtout la grande quantité d'eau qu’elle contient, elle doit être atiaquable par les acides, et former gelée avec eux ; mais c’est ce dont je n'ai pu nrassurer, par les raisons exposées plus haut. 336 ANNALES DU MUSÉUM MEMOIRE Sur les ossemens d'oiseaux qui se trouvent dans les carrières de pierres à plâtre des environs de Paris. PAR M CUVIER. Les naturalistes conviennent que les oiseaux sont de tous les animaux ceux dont les ossemens ou les autres débris se ren- contrent le plus rarement dans l’état fossile; quelques-uns même nient absolument qu’on les y ait jamais trouvés : et en effet, par une de ces nombreuses singularités réservées aux couchesde gypse denosenvirons, il n’y a presque d’autres os fos- siles d'oiseaux bien constatés que ceux qu’elles récèlent ; encore est-ce que depuis bien peu de temps que la véritable na- ture de ces fossiles a été mise en évidence. Pour nous convaincre de cette assertion , examinons rapide- ment les divers témoignages sur lesornitholithes vrais ou préten- dus tels. #7alch (1) en a déjà recueilli plusieurs ; Âermann (2) (1) Commentaire sur les monumens de Knonn , some IT, seconde partie , edit, all. p. 177 et suivantes. (2) Leure à Fonris, Journal de physique, floréal au 8, com. Z, p. 54a. LE A / (a D'HLISTOTRE "NÉTURELVE. y ena ajouté d’autres : leurs indications nous serviront de guides, sans nous dispenser néanmoins de remonter aux originaux; car le premier s’est trompé lui-même plusieurs fois faute de cette précaution. D’ailieurs nous avons quelques passages à discuter qu'ils ont omis l'un et l'autre. Déjà Conrad Gesner (1) déclare que les pierres nommées d’après des oiseaux, comme le kiéracites et le perdicites ,w'ont d'autres rapports avec eux que des ressemblances de couleur. Des figures grossières d'oiseaux , tracées par le hasard sur des pierres colorées, n’appartiennent pas davantage aux orni- tholithes ; et l’on ne doit pas y rapporter non plus les pierres ou cailloux figurés qui ont une ressemblance quelconque avec des parties d'oiseaux : le coq d'Agricola, et la poule de M lius, empreinte sur un schiste d’Ilmenau , n'ont pas d’autre origine. Les auteurs ont aussi quelquefois regardé fort gratuitement comme ornitholithes des os fossiles, seulement parce qu'ils étoient légers et grèles, mais qu'un examen un peu attentif fait bientôt reconnoïtre pour des parties de poissons, de petits quadrupèdes, ou quelquefois même de coquilles et de crusta- cés. Ainsi le sulcatula litoralis rostrata de Luid (2) ne me pa- roit que l’extrémité de lépine dentelée de la nageoïire de quel- que poisson. Les becs des environs de #eimaret d'Jena, dont parlent Vallerius et Linnæus (3) n’ont, selon F7'alch (4), qui étoit de ce pays-là, qu’une ressemblance extérieure. Romé Delile, dans le catalogue du cabinet de Davila, cite © (1) De fig. lapid. ec. XIT, fol. 167. (2) Lithophyl. britan. p. 79, 2.° 1561, tab. 17. (5) System. nat. el. Guec. IL. 588. (4) Comment, sur Knorr, tome Il, part, IL, 9. 43 338 ANNALES DU MUSEUM un bec des environs de Reutlingen (1), qui a été adopté par Linnœus (2), et un os de Canstadt, qui lui a paru de poulet ; mais son bec ne paroït-être qu'une coquille bivalve qui se montre obliquement à la surface de la pierre. Si c’étoit un vrai bec, il différeroit prodigieusement de tout ce que nous connoissons dans les oiseaux d'aujourd'hui; quant à l'os, il n'y en a dans l’ouvragè ni description ni figure. Scheuchzer parle d'une tête d'oiseau dans un schiste noir d'Æisleben ; mais il ajoute de suite que l'on pourroit aussi la prendre pour une fleur d’œillet (3) : c'en est assez pour la juger. Plusieurs(/) citent la description des environs de Massel par Hermann, comme sil y étoit parlé d’os d'oiseaux ; mais l’au- teur n’annonce réellement que de petits os, sans dire qu'ils soient d'oiseaux (5). L'erreur des compilateurs, par rapport au coucou pétrifié de Zannichelli (G), est encore plus forte et vraiment plai- sante. Il s'agissoit du poisson coucou, qui est une espèce de trigla ( en italien pesce-capone ), et non pas de l'oiseau. D'autres témoignages ne donnent aucuns détails, ni descrip- : tions ni figures, propres à les justifier. Tel est celui de 7 olk- man, dans sa Silesia subterranea(j), et ceux qu’allèguent les (1) Catal. TIT, 225. (2) Lin. ub, sup. (5) Mus. diluv. p. 106. (4) Lesser, Laithothéol. WarLerrus. (5) Mastographia, p. 224, et Henwax. de Strasb. ap. Fonnis. Journ. de phys. floréal an 8, 20me À , p. 540. (6) Darcenvie, Orn. p. 555, et W azcu. Com, sur Kxonn, II, p, 12, (7) Page 144. LL) D'HISTOIRE NATURELLE. 339 minéralogistes systématiques ; il est impossible de rien éta- blir sur de pareilles mdications. Il est bien clair que les incrustations n’appartiennent point à notre sujet ; il ne s’agit pas de savoir si des oiseaux exposés dans quelque endroit particulier à des eaux chargées de subs- tances minérales peuvent être enveloppés de ces substances , mais bien s'il y a eu des oiseaux saisis et renfermés dans les grandes couches régulières qui occupent la surface exte- rieure du globe. Ainsi les exemples d'oiseaux, d'œufs et de nids, incrustés de gypse, de tuf, de sel ou d’autres minéraux, et rapportés par Volkman (1), Lesser (2), Gesner (3), Bruckmann (4), Baccius ( 5 }), Bütner (6), Dargenville, Bock (3) ,etc., fussent- ils tous vrais, ne prouveroient rien pour l'existence des orni- tholithes. Après toutes ces exclusions, il ne reste donc que des par- ties contenues dans quelques schistes, comme ceux d'OEningen, de Pappenheim et du mont Bolca, qui puissent prétendre à un examen sérieux, et qui &ent en effet été prises pour des ornitholithes par de véritables naturalistes. Or presque tout ce qu’on en cite est encore plus où moins équivoque, ou du moins n’est pas appuyé de figures et de des- cripuons suflisantes. Ces schistes fourmillent tous de poissons (1) Siles. subterr. p. 144. (2) Lithothéol. p. 601. (3) De petrif. p. 67, (4) Epist. it. cert. IL, p. 25, t. V ec VIII es Cert. IT, ep. V. (5) De Thermis. lib. V,c. 4, p. 154. (6) Ruder. dil. test. p. 64. (7) Hist. nat. de Prusse II, 403. 310 ANNALES DU MUSEUM et d’autres produits de la mer ; les os y sout comprimés, Qui oseroit se flatier de distinguer toujours dans cet état un os de poisson d’un os d’oiseaa ? Les plumes même sont-elles tou- jours aisées à distinguer des sertulaires ? Comment donc juger quand on n’a pas quelque partie uu peu considérable, comme tout un membre ? ? La meilleure autorité pour une recherche de cette nature seroit sans contredit celle de M. Plumenbach ; mais il se borne à dire que l’on trouve à OEningen des os d'oiseaux de rivage (1). Pour ceux de Pappenheimn ; 1 renvoie aux Mé- moires de l'Académie de Manheim (2 }; mais il n’y est sûrement question, à l'endroit qu'il cite, que d'un reptile fort singulier, dont nous parlerons ailleurs, et non pas, comme le dit M. Blu- menbach, d'un oiseau palmipéde. Zannichelli avoit, à ce qu'il dit, un bec d (enmerns mais étoit-il plus vrai que celui dé Davila ? Scheuchzer.eite une plame du même endroit (3); mais il n’a pas persuadé l'ortis, qui croit que c’est une sertulaire (1), ni //ermann , qui (dit-il) s’esttoujours moquéde cette préten- due plume (5). Il faudroit l'avoir sous les yeux pour en juger. ‘Fortis n'avoit pas mémeété convaincu par les échantillans de plumes du #ont-Bolca,qu'il avoit vus à #’érone {6) , dont deux viennent ‘d'être pabliéspar M. F'aujas (7 ). J'avoue cependant (1) Manuel d'hist. nat. rad. fr. I, 408. (2) At. ac. Theod. pal. V,p. phys. 65. (5) Mus. diluy. p. 106 ; Pise. querel. p. 14; Phys. sac. I, 45. LIN, . 22, (4) Jours. de physt flor. an &, p.554: (5) Jbid. p. 340. (6) Zbid. p. 554. (7) Aunales du Muséum d'hist, nat. VI, p.21 ef pl. I, D'HISTOIRE NATURELLE. 341 que s’il est quelques pièces faites pour porter la conviction, ce sont celles-là, que j’ai examinées avec soin plusieurs fois, et où je n'ai pu découvrir aucun caractère qui les distinguat des plumes. Mais en supposant qu’elles en soient en effet, elles ne prou- veroient rien contre ma première assertion , qu'il ny a encore que dans nos gypses des os bien constatés, Ils ne le sont pas depuis bien long-temps. Lamanon avoit, il est vrai, décrit dès 1782 une empreinte d'oiseau entier, trouvé à Montmartre par feu M. Darcet ; et si l’on s’en étoit rapporté à sa figure, il ne seroit pas resté de doute , car elle représente parfaitement un oiseau ; il y a même placé des plumes à l’aile et à la queue: malheureusement son imagination lavoit un peu aidé, et il s’en falloit beaucoup que l’image ressemblät à l’objet. Fortis, qui avoit conçu de fortes préventions contre l’exis- tence des ornitholithes,examina de nouveau celui qu'avoit décrit Lamanon ; il en donna une figure faite d’après ses idées, et c’est un exemple notable du degré auquel un seul et même objet peut paroïtre différent selon les yeux qui le regardent. On ne distingue plus rien du tout dans cette figure donnée par Fortis : la tête y esten bas; toutes les inégalités de la pierre sont ren- forcées, les empreintes osseuses affoiblies ; en un mot, l’auteur déclare qu'il ne voit dans ce morceau qu'une grenouille ou un crapaud, Le fait est cependant que c’est un véritable ornitholithe ; mais à peine auroit-on osé le soutenir, si l’on n’avoit décou- vert depuis, dans nos plâätrières, des pièces plus caractérisées et propres à confirmer celle-là. Pierre Camper en annonça une, mais sans la décrire, dans un article sur les os fossiles de Maësiricht, inséré dans les 32 ANNALES DU MUSEUM Transactions philosophiques de 1786. C’est un pied trouvé à Montmartre, dont M. Camper fils m'a envoyé un dessin que jai fait graver dans le Bulletin de la Société philomatique de fructidor an vur. J'en eus moi-même une seconde, consistant également dans un pied, Elle étoit de Clignancourt sous Montmartre. Je la décrivis dans une note lue à l'Institut le 1.7 thermidor an vi, et insérée dans le Journal de Physique dumême mois, p. 128 et suivantes, avec une gravure, pl. 1, qui fut reproduite dans le Bulletin de la Société philomatique de fructidor an vu, et ensuite dans divers journaux étrangers, A cette occasion jappris qu'il en existoit deux autres dans les mains d'un particulier d’Abbeville, M. Ælluin, graveur, qui les avoit aussi reçues de Montmartre; et M. de Lamé- therie fit graver, dans le même n° de son Journal, planche IT, un dessin un peu grossier, qui lui en avoit élé envoyé par M. Traullé. C'étoit le corps d’un oiseau et la jambe d’un autre. Il étoit aisé de voir que la jambe n’avoit pas appartenu au même individu ,et même que la pierre qui l'incrustoit venoit d'un autre banc. C’est le jugement qu’en ont porté MM. Baillet et Traullé (x) ; M. de Burtin le confirme dans une note jointe à une descrip- tion de ce fossile, publiée par M. Goret d'Abbeville (2). Ayant eu nous-mêmes le morceau quelque temps sous les yeux, nous nous sommes assurés de ce fait. Il y avoit donc, dès l'an vus, quatre morceaux différens bien déterminés; celui de M. d'Arcet faisoit le cinquième. (1) Jour. de phys. thermid. an var, tome LI, p. 152. (2) Notice sur un oiseau fossile incrusté dans du gypse, lue par M. Goner à le Société d'agriculture d'émulation, et imprimée à part, p, 6 et 7, D'HISTOIRE NATURELLE. 343 Depuis lors j'ai continué mes recherches; et j'en ai recueilli un si grand nombre, qu’il ne peut rester aucun doute que nos plâtres ne contiennent beaucoup de débris d'oiseaux. Je vais décrire successivement les morceaux que j'ai obtenus, en commençant par les pieds, qui sont la partie la plus frap- pante, même pour les yeux les moins habitués. En effet, le pied d’un oiseau quelconque est composé d’une manière absolument particulière , et ne ressemble à celui d’au- cun autre animal. C’est d’abord la seule classe où il n’y ait qu'un os unique pour tenir lieu de tarse et de métatarse. Dans les chevaux et les ruminans , le métatarse ou canon est bien d’une seule pièce, maisle tarse en contient plusieurs. Dans les gerboises proprement dites, jerboa et alactaga , il ÿ a bien aussi un os unique du métatarse, qui porte les trois doigts principaux; mais les os du tarse restent distincts. Dans les tarsiers etles galagos , les os scaphoïde et cal- caneum sont prolongés de manière à donner à leur tarse au- tant de longueur qu’à celui des oiseaux ; mais les autres os du tarse et du métatarse ne subsistent pas moins. Les grenouilles, rainettes et crapauds ont aussi le tarse allongé; mais il est toujours formé de deux os longs et de plusieurs petits. Secondement, on tronve dans le nombre des doigts et dans celui des articulations de chaque doigt, des caractères presque aussi marqués que ceux que fournit le tarse. Les oiseaux sont la seule classe où lon observe des doigts tous différens par le nombre des articulations , et où ce nombre et l’ordre des doigts qu’ils ont, soient cependant fixes. 344 ANNALES DU MUSÉUM Le pouce en a deux; le premier doigt du côté interne, trois; le doigt du milieu, quatre; et l'extérieur, cinq. Cette règle ne souffre au-dedans de la classe que deux pipes d’exceptions. La premnicre est celle des oiseaux qui n’ont pas de pouces: les autres doigts y conservent leurs nombres ordinaires. La seconde se remarque dans l’autruche et les casouars. Ces espèces ont trois articles seulement à tous leurs doigts. Au-dehors de la classe, cette règle ne se retrouve jamais complètement observée. Les quadrupèdes ont deux articles aux pouces et trois aux autres doigts, quel que soit leur nombre. Les paresseux seu- lement n’en ont que deux, parce que leurs premières pha- langes se fondent avec leurs os du métatarse. Quelques doigts cachés sous la peau manquent seuls du nombre ordinaire. Dans les reptiles , le nombre des articulations est moins égal; cependant il ne se rencontre presque jamais exactement le même que dans les oiseaux, Ainsi, en commençant par le pouce et finissant par Île doigt extérieur , on trouve les nombres d’articulations exprimées dans la table ci-jointe. Hortuetde técre,:. Metro ie tee lie CHENE MANS USER ANS Tortue-marine !. 2%... 41,7 aus te SIN 1e te 215: DAC Grocodilesitinaltés san: Uni tri SEP Meta None Lézards de toutes les espèces, iguanes, agames, stellions, cordyles, geckos , anolis, scinques, . . . . . . . . 92. 35. 4. 5. 5 Chinéléons REV ORCRS P Ra ler siPetteils RAT 0) Seps tétradaetyle. . . , . . . . MIS ie, an Seps tridactyle. .,, «+ + 9 + de + + + + + + + , « 2 5. 4, Grenouilles, crapauds et rainettes. . , . . . . . . . .2. 2. 3. 4. 3. Salamandres, .*. :1. cs EME EN Vs 2 CUITE D'HISTOIRE NATURELLE. 345 On voit donc queles seuls crocodiles ont les mémesnombres de phalanges que les oiseaux ; mais comme chacun de leurs doigts est porté en outre sur un o$ du métatarse particulier , et ceux-ci sur plusieurs os de tarse, il ne peut y avoir d’équi- voque. Si nous cherchons maintenant ces x D dans les dif- férens pieds représentés dans notre première planche, nous verrons qu'ils sy rencontrent tous. Pour épargner la place, je me suis borné à faire graver les os et leurs empreintes , et j'ai supprimé les contours des pierres qui les portent. On trouve donc déjà très-clairement les caractères dont nous parlons, dans le pied que j'ai décrit en lan vu, et dont je reproduis la figure ( pl. L, fig. ro ). Le pouce y manque ; mais on y voit en a le petit osselet surnuméraire qui le porte dans beaucoup d'oiseaux, J’attribue à la même espèce le pied de Ja figure 8, parce que toutes ses parties sont de la même grandeur et dans les mêmes proportions. Le fémur y manque, mais le pouce et les trois autres doigts y sont bien complets et munis de toutes les arti- culations qu'ils doivent avoir. Le pied de la figure 2 me paroît encore de la même espèce, par les mêmes raisons. Il manque de fémur et d’une partie de son tibia, mais les doigts y sont bien parfaits. C'est toujours à cette espèce qu'il faut rapporter le pied de la figure 1, plus comfiplet que tous les autres, et qui manque seulement de larticulation du genou emportée par la manière dont la pierre s’est cassée. Enfin je crois pouvoir y rapporter encore le morceau incom- plet de la figure 9, qui n'offre qu'une empreinte , quelques 9- 44 ”! , 346 ANNALES DU MUSÉUM fragmens du tarse et une partie seulement des articulations des doigts. Une pièce pareille, seule, seroit susceptible de con- testation; mais appuyée comme elle l’est par les précédentes, elle ne laisse aucun doute. La figure 3 représente un pied, du cabinet de M. Dela- métherie : es cédens, les os me paroissent un peu plus épais, et son tarse peu près de même grandeur que les pré- un peu plus arqué dans sa longueur. Il a d’ailleurs tous les caractères d'un vrai pied d'oiseau ; seulement le doigt extérieur n'ayant laissé qu’une empreinte de sa partie supérieure, on ne distingue pas très-bien les trois articulations dont il devoit être composé. La figure G a et b est une copie exacte et faite par moi- même du pied qui appartient à M. Elluin, et qu'on avoit gravé fort incorrectement dans le Journal de physique de thermidor an vu. En comparant ce pied avec le corps (pl. IT, fig. 2 a et b) auquel on l’avoit joint, on verra aisément qu'il ne peut lui appartenir, puisque ce corps a déjà ses fémurs, et que néan- moins il se retrouve un autre fémur avec ce pied, qui d’ailleurs est beaucoup trop grand à proportion. Il est aussi trop grand et ses os trop épais, pour qu'on puisse le confondre avec les premiers que nous avons décrits; par conséquent , il indique l'existence d’une troisième espèce dans l'état fossile. Du reste il a tous les caractères d’un pied d'oiseau. Le doigt externe est complet äflec ses cinq articu- lations du côté 4 ; l’interne du côté b paroit avoir perdu une partie de sa première phalange. Ce qui reste du pied de la figure 4 offre à peu près les mêmes dimensions et pourroit bien venir de la même espèce ; D'HISTOIRE NATURELLE. 347 il »’y a que les premières phalanges du pouce , du doigt externe et de celui du milieu : les autres manquent en- tiérement. Le pied de la figure 51 me paroïit un peu plus petit, et pourroit bien annoncer une quatrième espèce. Son fémur , son tibia, son tarse, ou au moins leurs empreintes, y sont bien complets ; le doigt interne y est aussi en entier : mais les deux autres n’y sont qu'indiqués, et le pouce a perdu sa deuxième phalange. On sent qu'après un si grand nombre de morceaux qui attestoient par leur ensemble l'existence des ornitholithes dans les couches pierreuses régulières, il n'étoit plus possible qu'il me restät de doute à cet égard , et que tous les argumens négatifs de J'ortis et de quelques autres naturalistes tom- bèrent d'eux-mêmes devant les faits. Je me mis alors à rechercher et à examiner les petits os isolés, jugeant bien qu'il y en auroit aussi quelques-uns qui ne pourroient se rapporter qu'a des oiseaux. Tel fut d'abord pour moi le fragment de la figure 3 ; c’est une portion de tarse divisée par le bas en trois apophyses, terminées chacune par une demi-poulie pour l'articulation des premières phalanges des trois doigts de devant. Ïl n'y a parmi les quadrupèdes que le jerboa et l'alactaga ( mus sagitta et jaculus. Lin.) qui offrent quelque chose de semblable; mais comme il n’y a dans toutes nos plâtrières aucun autre indice d'animaux de cette famille, nous ne pou- vous leur attribuer ce fragment. Les fémurs des oiseaux ont aussi un caractère distinetif qui a sa source dans la nature particulière de leur genou. 44% \ 348 ANNALES DU MUSÉU M M. Duméril a fait connoître {1} que cette articulation est munie chez les oiseaux d’une espèce de ressort analogue à celui de la charnière d’un couteau. On sait en effet que la lame d’un couteau n’a que deux points où elle puisse rester en repos, celui d'ouverture et celui de fermeture complètes, parce qu'il n’y a que ces deux points où le ressort ne soit pas écarté de sa position naturelle. Les oiseaux ne portant que sur deux pieds et ayant besom d'y trouver une assiette solide, ont reçu une articulation de ce genre qui a aussi deux points fixes, celui de la plus grande flexion et celui de l’extension la plus parfaite. Ce sont là les seuls où les ligamens ne soient pas tiraillés et où les os restent dans leur situation respective par l’action simple de ces liga- mens, à moins d’un effort de la part de l'oiseau pour les dé- placer. La tête du péroné produit cet effet par sa figure et sa manière de s'engrener dans une fosse particulière du fémur. Cette tête s'élargit beaucoup d'avant en arrière, et son bord supérieur est une ligne à peu près droite, qui monte obliquement en arrière, ce qui rend son extrémité postérieure plus élevée que l’autre. Le fémur appuie sur cette ligne droite par une ligne saillante sculptée sur son condyle externe, dont le milieu fait une convexité presque demi-circulaire, et dont les deux bouts au contraire sont un peu concaves; et les deux os sont attachés en cet endroit par un ligament élastique qui va de lun à l'autre en croisant presque perpendiculairement la ligne par laquelle ils se touchent. (1) Bulletin des sciences par la Soc. philomat., germinal an 7. D'HISTOIRE NATURELLE. 349 Il est donc sensible que ce ligament sera plus tiraillé tant que le fémur touchera le péroné par la convexité de la ligne saillante que nous venons de décrire, c’est-à-dire tant que la jambe ne sera ni complétement étendue ni complétement fléchie; mais dans ces deux états extrêmes, le péroné ren- trera dans l’une des concavités placées aux deux bouts, et il y sera retenu par la contraction élastique du ligament. Le fémur des oiseaux se distingue donc de celui des qua- drupèdes en ce que son condyle externe, au lieu d'offrir en arriere une convexité simple, pour la fossette externe de la iête du tibia, y présente deux lignes saillantes : l’une plus forte, qui est le vrai condyle et qui répond à la facette supérieure externe du tibia et à la facette interne du péroné; et une autre qui est plus extérieure, qui descend moins ei qui repose sur le bord supérieur du péroné. Le condyle externe des oiseaux est donc fourchu ou creusé d'un canal plus ou moins profond en arrière. Les seuls quadrupèdes où l’on ait pu soupconner quelque chose d’analogue étoient ceux qui, comme les oiseaux, se tiennent et sautent sur leurs pieds de derrière avec le corps oblique, je veux dire les kanguroos et les gerboïses. On trouve en effet dans les divers kanguroos un léger enfon- cement en arrière du condyle, auquel répond le péroné, mais seulement par un tubercule. Les gerboises n’ont pas cette conformation; dans celle du Cap, il y a cependant un osselet particulier qui établit une liai- son entre le péroné et le fémur, mais non pas de la même manière. Il y a d’ailleurs beaucoup de traits qui empécheroient de confondre un fémur d'oiseau avec celui d’un kanguroo, comme 350 ANNALES DU MUSÉUM de tout autre quadrupède ; telle est surtout la largeur du grand trochanter d'avant en arrière, etc. Au moyen de ces caractères, nous n'avons point hésité à reconnoître pour des os d'oiseaux les deux fémurs repré- sentés planche IT, fig. 13 et 14 : leur cavité s'étant remplie de matière gypseuse, ils n’ont point été écrasés par le poids des conches qui se sont déposées sur eux, et leur forme s’est con- servée dans son intégrité. On peut voir en x, dans les deux figures, l’'échancrure péro- nienne du condyle externe. Tout le reste des os n’est pas moins fidèle aux règles observées dans toute la classe. Ces fémurs me paroissent l’un et l'autre trop grands pour avoir appartenu à aucun des pieds de notre planche I. Ils indi- quent donc une cinquième et une sixième espèce d'oiseaux dans nos plätrières, Les humérus des oiseaux ne sont pas moins reconnoissables que leurs fémurs. Leurs caractères se prennent de leurs deux extrémités. Dans le haut, leur tête est toujours oblongue de droite à gauche, pour jouer en charnière dans l'articulation à laquelle concourent l’omoplate et la clavicule. Deux crètes latérales élargissent extraordinairement cette partie de l'os, La supérieure, ou plutôt l’externe, qui est angu- leuse, et dont le bord est tranchant et un peu recourbé en avant, sert à donner des attaches suffisantes au muscle grand pectoral, dont l'action puissante est le principal mobile du vol. La crète opposée est moins longne, et a son bord arrondi et un peu recourbé en arrière, où il forme, vers la tête de los, un petit crochet. C’est sous ce crochet qu'est le trou par où l'air pénètre dans la cavité de l'os. D'HISTOIRE NATURELLE. 351 Dans les quadrupèdes, la tête est toujours ronde; les crêtes petites ; leur partie voisime de la tête forme des tubérosités. Les chauve-souris même ne ressemblent point aux oiseaux par leur humérus. Il n’y a que la taupe qui ait avec eux quelque rapport à cet égard, parce que la manière dont cet animal repousse la terre en arrière quand il creuse, exige également une grande force dans les muscles pectoraux ; mais il est inu- tile de s'arrêter à cette exception, le reste de l'humérus de la taupe ayant des formes si extraordinaires qu'il est impossible - de le confondre, non-seulement avec celui des oiseaux , mais même avec celui d'aucun animal connu. Les caractères de la tête mférieure de l’humérus des oiseaux ne sont pas moins frappans que ceux de sa tête supérieure. La poulie articulaire se divise en deux parties : une interne ou inférieure, presque ronde, pour le cubitus ; et une externe ou supérieure, pour le radius, qui est oblongue, dans le sens de la longueur de l'os, et remonte ainsi un peu obliquement sur sa face antérieure. De cetie maniere, le radius a un plus grand arc à parcourir que le cubitus, et le mouvement de lavant-bras ne se fait pas dans un plan perpendiculaire à la face antérieure de lhumérus. La partie inférieure de cette facetteradiales’élargiten arrière, et repose encore sur une facette articulaire externe du cubitus. Il n’y a rien de semblable dans les quadrupèdes. La poulie cubitale y est toujours concave, et la radiale est aussi creusée d’un sillon dans ceux dont l’'avant-bras n’a point de supination. Tous ces caractères distinctifs de lhumérus des oiseaux $e rencontrent dans les trois os représentés, par leurs deux faces, dans nos figures 9, 10 et11, planche IT. Le dernier est un peu 352 ANNALES" DUSMUSÉUM mutilé dans le haut ; il paroït néanmoins de la même espèce que l'avant-dernier. Pour le premier, il est beaucoup plus grand. Il seroit diflicile d’assigner auxquels des pieds ou des fémurs décrits ci-dessus ces humérus appartiennent. La proportion de la longueur de l'aile à celle du pied varie trop dans les oiseaux, selon la portée de leur vol, pour qu’on puisse rien calculer à cet égard. Nous trouvons aussi les caractères du radius des oiseaux dans les deux os représentés planche IF, fig. 7 et 8. Tous deux ont la tête supérieure ronde, un peu concave; le plus petit, fig. 8, a son extrémité inférieure plus élargie, préci- sément comme dans les oiseaux. Le morceau dessiné planche IT, fig. 12, & et b, est la tête d’une omoplate d'oiseau très-bien caractérisée ; elle ressemble même en petit à celle d’un cormoran, plus qu'à aucun autre genre. Après avoir reçu tant d'os séparés qui appartenoient à l'aile, il étoit naturel que j’espérasse en obtenir quelques-uns de réunis. Je vois en effet que les os représentés figures 4 et 5, pl. IF, sont des portions d’aike. Figure 4 offre le bas d’un humérus (a); un cubitus (b) ; les deux osselets du carpe (c); ceux des deux branches de l'os du métacarpe ( 4), avec l'empreinte de son apophyse destinée à porter le pouce (e); et celle d’une partie de son autre branche (f). Ainsi il n’est pas possible de mécon- noitre cette aile pour ce qu'elle est. "L'autre, figure 5, est un peu moins évidente, parce que les os n’ont pas conservé leurs facettes articulaires, et que l'avant bras est déplacé, de manière que le radius y est inférieur. Cependant le üssu des os et la forme générale de la coupe de D'HISTOIRE NATURELLE 353 Jhumérus ne laissent guère de doute. Ce morceau est du cabinet de M. Delamétherie. Il n’y a guère dans les oiseaux de partie osseüse mieux carac- térisée que le bec. J’ai aussi eu le bonheur d'en recevoir un pour compléter mes preuves. J'en donne la figure, planche, figure 5 ; etilest inutile que j'y ajoute aucun commentaire : tout le monde voit que c’est une mandibule inférieure, posée hori- zontalement, et dont le condyle gauche seul est un peu mutilé. Si l'on ajoute à tous ces morceaux la côte, pl. TE, fig. 6, et la phalange d’une grande espèce, pl Il,fig. 3, a, b, c, que j'ai aussi reconnus par comparaison, Comme appartenant à des oiseaux, on verra que j'ai eu séparément un bien grand nombre de leurs parties. J'en ai eu beaucoup d’autres dont je ne parlerai pas aujour- d'hui, parce qu’elles sont moins évidemment reconnoissables , et pour ne pas affoiblir des preuves déjà plus que suflisantes. On sera donc disposé à croire qu'il a pu se conserver aussi, dans nos couches gypseuses, des corps d'oiseaux plus ou moins entiers. Celui de M. ÆElluin dont je donne (pl. TE, fig. >, &, b) les deux côtés, exactement dessinés par moi-même, n’est d’ailleurs guère susceptible de doute. Quoique aucun os n'y soit entier et n’y ait conservé les formes de ses articulations, la position et les proportions de tous les os y sont encore assez visibles, pour que l’on recon- noisse le bec, latête, le cou, le corps , les deux ailes, les deux cuisses et une partie des deux jambes d’un oiseau. Ce corps paroïit avoir été écrasé par les couches supérieures, etentièrement aplati. Il n’a laissé qu'une lame brune, et dont l'épaisseur est à peine appréciable. On ne peut y distinguer, ni 9. 45 354 ANNALES DU MUSÉUM les os de la tête, ni les vertèbres, ni les côtes, ni le sternum. On voit seulement d’un côté, vers æ, quelques vestiges de bassin. Pour des plumes, il »y en a pas la plus légère apparence. L'oiseau de M. d Arcet est encore plus maltraité; et il n’est. point étonnant du tout qu'il ait occasioné des discussions et des doutes. Cependant il a une aile presque entièrement carac- térisée, et dont on voit fort distinctement lavant-bras, le métacarpe et le commencement du grand doigt. L'autre aile et le bec peuvent à la rigueur aussi se reconnoitre ; mais ce qui reste des pieds et des os du corps a perdu toute espèce de caractère. On peut en juger par la figure 1 de notre planche IT, que nous avons faite sans aucun préjugé et sans vouloir favoriser aucune opinion, puisque l’existence des ornitholites dans nos carrières est maintenant fort indépendante de la vérité de celui-ci. Il ne s'agiroit plus désormais que de déterminer jusqu’à un certain point les genres auxquels appartiennent ces diverses ornitholites; mais j'avoue que c’est un problème très-diflicile, pour ne pas dire impossible à résoudre. Les oiseaux se ressemblent entre eux beaucoup plus que les quadrupèdes ; les limites extrêmes de la classe sont plus rappro- chées, et le nombre des espèces renfermées entre ces limites beaucoup plus considérable; les différences entre deux espèces seront donc quelquefois entièrement inappréciables dans le squelette. Les genres même n'ont pas toujours des caractères ostéologiques suflisans ; presque tous ont été distingués d’après la forme du bec qui ne se conserve pas en entier dans le sque- lette; encore moins dans des fossiles comprimés et en partie fracturés , comme ceux de nos carrières à plätre. D'HISTOIRE NATUREIL!L E. 355 Ce qui me reste à dire se réduit denc à bien peu de chose, et n’est guère au-dessus des simples conjectures. L’omoplate de la figure 12 m’ayant mis sur la voie, j'ai trouvé que le fémur de la figure 3 ressemble aussi à celui d’un pelecanus plus que de tout autre oiseau ; mais il vient d'une espèce bien plus grande que cette omoplate, plus grande même que le cormoran (pelecanus carbo ), mais inférieure au pélican proprement dit ( pelecanus onocrotalus ). Cest surtout à la forme de larticulation inférieure que ces rapports se font sentir. La même partie, examinée dans le fémur de la figure 14, me le fait rapporter à l’ordre des échässiers (grallæ ); 1 me paroit même qu'il doit venir de quelque grand courlis, surtout de lun de ceux à cou nu, si mal à propos réunis par Gmelin au genre T'antalus. On sait que j'ai montré que libis des anciens Égyptiens appartenoit à ce genre. Ce femur a en effet beaucoup de rapport avec celui d’un zbis antique , mais il ne vient pas de la même espèce. L’humérus séparé (pl. IT, fig. 9.) appartient aussi à l’ordre des oiseaux de rivage, et paroit tenir de près à celui de la bécasse. Le petit ( fig. 11 ) ressemble extrêmement à l'humérus de l'étourneau. C’est aussi l'étourneau, parmi les passereaux, qui se rap- proche le plus, par les proportions du bec et des membres, de l'oiseau entier de la figure 2. J’ai annoncé dès l’an 8 que le pied ( pl. F, fig. 10 ) étoit très-voisin de celui de lalouette de mer. Je trouve la même ressemblance entre l'aile de cet oiseau et celle de la figure 5, plauche IL. | 45 * 356 ANNALES DU MUSÉÈUM Mais, je le répète, et les naturalistes le sentiront assez sans que je le dise, ce ne sont là que des conjectares qui sont bien éloignées d'être: aussi certaines que mes propositions relatives eux os de quadrupedes. C’est bien assez d'avoir montré l'existence de la classe des oiseaux parmi les fossiles, et d’avoir prouvé par-là qu’à cette époque reculée où les espèces étoient si différentes de celles que nous voyons maintenant, les lois générales de co-exis- tence, de structure , enfin tout ce qui s'élève au-dessus des simples rapports spécifiques , tout ce qui tient à la nature même des organes et à leurs fonctions essentielles , étoient les mêmes de nos jours. On voit en effet que dès-lors les proportions des parties, la longueur des ailes, celles des pieds , les articulations des doigts, les formes et le nombre des vertèbres, dans les oiseaux comme dans les quadrupèdes , et chez-ceux-ci le nombre, la forme , la position respective des dents, étoient soumises aux grandes règles tellement établies par la nature des choses, que nous les déduisons presque autant du raisonnement que de l’observation. Rien n’a été allongé, raccourci, modifié, ni par les causes extérieures ‘ni par la volonté intérieure; ce qui a changé a changé subitement , et n'a laissé que ses débris pour traces de son ancien état. NN. B. A l'instant où je livre ce mémoire à l'impression, je reçois de M. Jæger une bonne notice sur les fossiles d'OEningen, insérée en 1805 dans les écrits de Ja Société des natwralistes de Souabe, tome 1.", par M. ÆXarg, médecin et professeur x Constance. L'auteur fait mention de déux pieds d’oiseanx, et en représente un, pl. II, fig. 1, qui me paroit l'être véritablement. M. Xarg les croit l’un et l’autre de Zecasse, aurillerd del. et scube : baurrlard del et scup D'HISTOIRE NATURELLE. 357 LE PREMIER MÉMOIRE (1) SUR LES POISSONS, Où l’on compare les pièces osseuses de leurs na- geotires pectorales avec les os de l'extrémité antérieure des autres animaux à vertèbres. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. J'ivors examiné en Égypte les organes iniérieurs d’un grand nombre de poissons, et j'avois cru voir, ainsi que l’avoient trouvé avant moi tous ceux qui s'étoient livrés à la même re- cherche, qu'à beaucoup d’égards les poissons ne se rappor- toient pas au type commun des animaux à vertébres. En n'occupant, cette année, à l’occasion de la prochaine publication du grand ouvrage sur l'Égypte, de donner la dernière main à mon Ichthiologie du Nil, j'ai revu ces mémes organes, et j'ai essayé de nouveau de les ramener à un même système de formation. Je n'ai pas tardé à apprécier les nouvelles circonstances de ma position : l'avantage de pouvoir user des riches collections Ne Ph ie MP RAS MOE MRer tete cie 246 Ts Lea (1) Communiqué à la classe des sciences physiques et mathématiques de l’Ins- titut de France, le 2 mars 1807, 358 A NN ALE'S:DU:M'US É UM d'anatomie qui se forment tous les jours dans le Muséum d'histoire naturelle, sous les yeux et par les soins de M. Cuvier, a décidé du succès de ces nouvelles recherches. J'ai eu en effet la satisfaction de découvrir que les organes même qui s’étoient le plus constamment refusé à toute com- paraison ,retrouvoient leurs analogues chez les autres animaux vertébrés. Je vais essayer d’en fournir une première preuve, en expo- sant d’abord dans ce Mémoire les observations que j'ai faites à l'égard de l’appareil osseux qui soutient la nageoire pec- torale. Opinions .des naturalistes sur le membre pectoral des poissons. Peu de personnes se sont occupées de cette matière : cepen- dant, dès les temps les plus reculés, on avoit soupçonné l'analogie de ces nageoires avec les pattes de devant des qua- drupèdes ; on trouve ces rapports déjà indiqués dans Aristote, Cette opinion fut adoptée par les modernes, et tellement établie de nos jours, que Linnæus en prit occasion d’ap- peler du nom d’apodes (sans pieds) les poissons qui n’ont pas de nageoires ventrales. Mais si l'on croyoit superflu d'examiner cette idée ingénieuse, il étoit du moins naturel de la suivre dans ses conséquences ; et puisqu'on avoit trouvé que les nageoires pectorales correspondent aux mains des mammiferes, il falloit rechercher si à leur tour les os qui portent les nageoires correspondent aussi aux autres pièces de l'extrémité antérieure de ces animaux. L'on pou- D'HISTOIRE NATURELLE. 359 voit ainsi obtenir des preuves directes de lingénieux aperçu d’Aristote. Artedi fut le premier des modernes qui, en 1735, s’occupa de cette recherche; mais la mort qui le surprit au commen- cement de sa carrière, ne lui laissa pas le temps de faire con- noitre toute sa pensée à cet égard (1). M. Gouan la développa depuis dans l'excellent Traité d’ich- thiologie qu'il publia en 1770: ayant fait graver un squelette de poisson, il entreprit d’en décrire toutes les parties. A l’exemple d'Artedi, qui avoit employé pour chaque pièce un nom pris dans la langue des anatomistes, et pour se con- former au même plan que cet auteur , il appela des noms de clavicule et d’omoplate deux des os du membre pectoral. A peu près dans le même temps, Vicq-d’Azir publia, dans les Savans Étrangers pour l’année 1774, deux Mémoires , d’un très-grand intérêt, sur l’anatomie et spécialement sur le sque- lette des poissons ; mais il n’y fit aucune mention de leurs nageoires. Ce ne fut qu’en 1786 , dans le second discours qui précéda son magnifique ouvrage sur le cerveau, qu'ayant eu alors connoissance de l’ichthiologie de M. Gouan, « il rappela » les tentatives d’un auteur moderne, et le bläma d’avoir em- » ployé les noms de clavicule et d’omoplate pour des osselets » qui n’avoient pas le degré de précision et de mobilité que » donnent aux bras ces os, dont il est évident, ajoute-t-il, » que la famille des poissons est dépourvue. » Son illustre successeur , M. Cuvier , sans adopter ce résultat, (1) Ossa pectoris et ventris in piscibus reperiintur ; suntque in piscibus Spi- SR ES . : à , nosis, 1. claviculæ, 2° sternum, 5° scapulæ seu ossa quibus pinnæ pectorales ad radicem affiguntur. Art. Partes piscium, p. 50. 360 À N_N A LE S DU. .M. U S:É:UrM fut toutefois persuadé (1) qu'on ne pouvoit comparer d’une manière positive le membre pectoral des poissons à celui des autres animaux vertébrés; et dans la première partie de son Anatomie qui parut en 1800, il traita, dans un article sépa- ré (2), de l'extrémité antérieure des poissons. Il crut toute- fois y reconnoitre la clavicule dans une longue épine, libre à l'une de ses extrémités, et à laquelle il me paroïit que per- sonne ayant lui n’avoit encore fait attention, et il détermina comme omoplate le bandeau osseux sur lequel bat loper- cule, et dont M. Gouan avoit fait ses os claviculaires. Mais comme alors M. Cuvier n’avoit pas réuni assez de pièces pour entreprendre un travail ex professo et prononcer définitive- ment , il préféra, en attendant qu'il püt se livrer sur cet objet à un examen plus approfondi, comprendre tout l'appareil osseux des nageoires pectorales sous la dénomination générale d'os en ceinture. Enlin, le même ensemble fut revu trois ans après par M. de Lacépède. Dans l’éloquent discours que ce savant mit à la tête de son cinquième et dernier volume de l'Histoire des poissons , il voulut compléter ses recherches sur leur organisation inté- rieure ; et il enrichit son grand et important ouvrage de la description de plusieurs de leurs squelettes qu'il eut l'attention de choisir dans des familles très-différentes ; il avoit à s décider entre les dénominations de ses prédécesseurs, et il n'adinit que celle de la clavicule, dans le méme esprit que M. Gouan. Nous fournirons plus bas des preuves de la jus- (1) Leçons d'Anatomie comparée, vol. 1, page 255. (2) {bd vol. 1, 551. D'HISTOIRE NATURELLE. 361 tesse de cet aperçu , et nous établirons que la clavicule des pois- sons est la seule pièce de l’appareil osseux de leurs nageoires pectorales qu’on ait rapportée à sa véritable analogie. De telles incertitudes à l'égard d’un si petit nombre de pièces osseuses qu'il est facile d’obtenir et d'observer ; prouvent que leur détermination présente des difficultés réelles; et en effet ces difficultés naissent de la position même du membre antérieur. Il se trouve situé en arrière de la cavité pectorale, et il est néanmoins articulé avec le crâne, disposition vérita- blement très-singulière, et que le manque absolu de cou et une combinaison des pièces du sternum avec celles de la tête pouvoient seuls rendre possible. Cependant toutes ces difficultés ont fini par s’aplanir du mo- ment où j'ai fait marcher de front la détermination des os du bras et celle des autres parties avec lesquelles ils sont en connexion. Cette dernière recherche m'a conduit à beaucoup d’autres résultats que j'ai cru devoir recueillir entièrement avant de mettre sous les yeux du public les observations suivantes. Description et détermination des os de la nageoïre pectorale. 1.0 Des os de l'épaule. — Ya cavité pectorale danses pois- sons est terminée en arrière par une réunion de pièces osseuses dont plusieurs se trouvent placées bout à bout et disposées en demi-cercle. Celle qui forme un des bords de louverture des ouies, et que recouvre la membrane branchiostège, est la cla- vicule de M. de Lacépède. Elle mérite eneffet ce nom, dès qu’à l'une de ses extrémités elle se réunit avec $a congénère pour s'appuyer sur le sternum , et que vers l'autre elle donne S: 46 362 AN N ALES DU MUSEUM naissance à un système d'os que terminent les rayons des nageoires. Dans les autres animaux, le demi-cercle osseux placé au devant du thorax, et dont les deux clavicules sont les pièces du centre, a ses ailes formées par les omoplates ; on trouve des os très-semblables dans les poissons. Mème connexion avec les clavicules, même position par rapport au dos, mêmes at- taches aux grands muscles de lépine au moyen d’aponé= yroses : tout demortre leur analogie; leur forme même rap= pelle l'idée d'une omoplate:il ne leur manque, pour être tout-à-fait en harmonie d'usage comme de forme avec celle- ci, que d’être libres à leur extrémité vertébrale ; mais on sent bien que c’est ce qui ne pouvoit pas arriver chez des animaux en qui le cou manque entièrement, et dont l'extrémité anté- rieure est alors contiguë avec la tête: tout concouroit d’ail- leurs à rendre cet état de choses nécessaire; les organes pectoraux ayant passé sous la tête, laissoient les os de l'épaule sans support, et il falloit bien que le demi-cercle qu'ils fornient avec les clavicules retrouvàt un autre soutien, en allant se réunir vers le haut à d’autres parties solides. Ces considérations toutefois ne s'appliquent point à l'an- guille : son omoplate ne se joint pas à la tête; la grandeur excessive des ouies fait, que cet os est même éloigné d’elle d'un intervalle qui égale la longueur de son crâne. On sent bien qu'il en résulte que les os en ceinture n'ont plus la même fixité que dans les autres poissons ; mais, d’un autre côté, on ne tarde pas à s’'apercevoir qu’elle n’est pas également nécessaire. L’oper- cule ne bat point sur la clavicule : très-loin d'elle, il m'étoit plus nécessaire qu'elle füt fermement enchässée entre des pièces osseuses, Cette anomalie est des plus curieuses; cepen- D'HISTOIRE NATURELLT. 363 dant je ne m'y arréterai pas, devant plus naturellement en parler, lorsque, dans le quatrième de ces Mémoires, e traiterai des dépendances du sternum. Il me suffit que cette singulière exception nv’ait montré l’omoplate exactement dans les mêmes circonstances que chez tous les autres animaux ver- tébrés, c’est-à-dire, libre à l’une de ses extrémités, et engagée seulement entre les muscles du dos. Quelles que soient doncleurs attaches, les deux pièces qui sont dans le prolongement des clavicules, et qui forment avec elles l'os en ceinture proprement dit , sont de véritables omoplates. L'épaule d’un grand nombre de poissons est en outre for- mée, comme celle des oiseaux, d'une troisième partie analogue à la fourchette ou os furculaire (1} ; du moins c’est ainsi que je determine cette longue épine dont j'ai déjà dit que M. Cu- vier (2) avoit le premier parlé : elle existe seulement dans tous les poissons osseux, ou bien entière, ou tout au moins en ru- diment; on n’en trouve aucune trace au contraire dans les poissons à squelette cartilagineux. Elle naît en arrière de l'extrémité scapulaire de la clavicule, et descend presque toujours derrière la nageoire, parallèle- ment aux côtes : sa forme est celle d’un stylet, du moins sa forme la plus habituelle ; car, dans quelques espèces qui s’éloignent beaucoup du plus grand nombre des poissons, elle prend un tout autre aspect, entre dans de nouvelles combi- naisons avec lés parties environnantes, et se rend remarquable par des usages nouveaux et tres-singuliers. (1) Voyez au sujet de cette dénomination le volume 1 des Lecons d’Anafomie comparée de M. Cuvier, page 246. (2) Zbidem, page 535. A6 * 364 ANNALES DU MUSÉUM On éprouve tout naturellement d'abord quelque répugnance à considérer cette épine et sa congénère comme les analogues des deux branches de la fourchette ; mais on y est bientôt disposé quand on a parcouru toute la chaine des êtres: quelques poissons, comme le centriscus scolopax , le zeus vomer et le scarus siganus, nous montrent les deux Jurcu- laires prolongés jusqu’à l'arête abdominale, inclinés l'un vers l'autre, et soudés ensemble à leur point de rencontre, Si ce ne sont toutefois que des anomalies qui, dans cette classe , nous présentent la fourchette comme réunissant toutes les condi- tions attachées à l'idée de cet os, une semblable anomalie nous la montre , dans les oiseaux, disjointe et séparée en deux pièces, comme elle l'est dans la plupart des poissons : l'au- truche et le casoar en ont les deux branches contiguës, mais non soudées ensemble, et telle est aussi la condition de ces deux pièces dans la plupart des fœtus d'oiseaux. Elles forment donc primitivement deux os qui finissent par se rencontrer et se souder ; résultat nécessaire pour maintenir l’'écartement des ailes dans les violens efforts du vol. Je suis d'autant plus autorisé à penser que ces deux longues épines correspondent aux deux branches de la fourchette, que, par des recherches ultérieures et dont je ne tarderai pas à publier les résultats, j'ai découvert que les poissons osseux étoient généralement formés sur le type des oiseaux : les poissons cartilagineux (1), qui sont formés sur le modele des (1) On à dans ces derniers temps étendu cette expression aux Branchiostèges d’Artedi et de Linnæus; nous croyons qu'elle ne s'applique qu'aux seuls Chou- droptérygiens de ces deux auteurs. Nous donnérons par la suite plusieurs preuves à l'appui de cette opinion. D'HISTOIRE NATURELLE. 365 reptiles, animaux dépourvus d'os furculaires, n’en devoient montrer aucune trace; ce qui, en effet, est conforme à l’ob- servation. Les poissons osseux ont donc l'épaule formée par la cla- vicule, Vomoplate et le furculaire. 2. Des os du bras.—Il existe en outre chez ces animaux, entre la clavicule et la nageoire, une lame osseuse, formée de la réu- nion de trois pièces soudées ensemble : c’est celle qu'Artedi et M. Gouan avoient décrite et prise pour une omoplate. Sa situa- tion entre la clavicule et la nageoire, ou, ce qui revient au même , entre l'épaule et la main, ne permet pas de la mécon- noître : il est évident que ce n’est pas abuser de l’analogie, que de la considérer comme renfermant les rudimens du bras et de l'avant-bras. Nous allons voir qu’ils se retrouvent en effet chez tous les poissons, quelque influence qu’exerce sur leur bras le milieu où ils Habitent On a déjà examiné la modification que le membre pectoral a subie dans d’autres animaux nageurs, tels que les cétacés, et l’on a remarqué qu’elle n’avoit donné lieu qu'à un simple changement dans la proportion des parties. Le bras d’un cétacé n’est comparé à celui des autres mammiféres, que plus court, plus large, et surtout beaucoup plus aplati; mais d’ailleurs aucun des élémens qui le constituent ordinairement n'y est omis : résultat d'autant plus remarquable, que pour faciliter lanatation la main , transformée en une véritable rame, avoit encore besoin d’être rapprochée et appuyée sur le tronc, et que le moyen le plus simple d'arriver à ce but paroissoit être de sacrifier entièrement les os du bras ; mais loin.de là, ils ont été soumis à une loi d'un effet plus général. Comme matériaux donnés de l’organisation, il falloit bien qu'ils fussent 366 ANNALES DU MUSÉUM employés; et comme inutiles, ils ont été rapetissés au point que leur ensemble a moitié moins de longueur que la main ou la nageoire elle-même. C'est dans toutes ces circonstances que l’on trouve le membre pectoral des poissons ; il est, de même, court, large, comprimé, et, à l'exception de la nageoïire, également ren- fermé sous les tégumens du corps. Si les trois os du bras re sy manifestent au premier apercu que sous l'apparence d’une lame triangulaire adossée à la nageoire, un œæil attentif y découvre bientôt trois centres d’ossification, correspondans par leur position respective à l’humérus, au radius et au cubitus : cette disposition se voit très-bien, principalement dans les espèces du genre gade, et mieux encore dans tous les jeunes sujets , où alors ce sont antant de pièces différentes réu- nies par un cartilage; quoiqu’elles s’ossifient entre elles dans les poissons qui prennent de l’âge, on parvient toujours à les désarticuler au même point, en les soumettant à une macé- ration plus ou moins longue. On auroit lieu d’être surpris qu’on n’eüt pas encore donné d'attention à un arrangement aussi simple, si je ne me hà- tois de prévenir qu'il se complique, par une anomalie bien singulière, dans la facon dont le bras est porté par l’épaule. On ne connoiït au bras qu’une seule maniere d’être dans les animaux vertébrés, c’est de se prolonger dans une direction à peu près perpendiculaire au plan de la clavicule : dans les poissons, au contraire, il est situé tout le long de la face ex- terne de cet os, de manière à lui tenir par plusieurs points de son bord radial, et à former une sorte d’épine en dedans et en dehors de laquelle sont logés les muscles qui meuvent la nageoire; au surplus, quoi qu'il arrive, la nageoire est D'HISTOIRE NATURELLE. 367 toujours tournée du côté du dos, et lhumérus dirigé en sens contraire. Cette disposition counue, l'intervalle non ossifié qu'on a remarqué entre la clavicule et une partie de la lame du bras n'a plus rien qui nous doive étonner : ce vide sépare naturellement l’humérus de la clavicule ; ce qui suit du paral- lélisme de ces deux os, et de ce que, dans ce singulier arran- gement , il n'y a que l’extrémité cubitale de l’humérus qui fournisse une crête pour son articulation avec la clavicule. La lame osseuse qui remplace les trois os du bras tient encore à la clavicule, non-seulement par le bord externe de la partie qui répond au radius, mais en outre par une pièce d’une ossifi- cation toujours trèsavancée, et qui appartient le plus souvent aux os du carpe. Tous les poissons ne participent pas à une aussi étrange anomalie: quelques-uns, comme la baudroie , toutes les lophies : et un nouveau genre que j'ai trouvé dans les eaux du Nil et que jai fait connoitre sous le nom de polyptére, ont le membre pectoral dans la même situation que les cétacés. Leur nageoire, ainsi qu'on l'a dit à l'égard des lophies, est portée à l’extrémité de prolongations charnues ; et n’étant plus atta- chée par un de ses angles, ni le bras appliqué tout le Jong de la clavicule, lhumérus, le radius et le cubitus, n’ont plus été contraints de croitre en largeur, de se réunit et de se confondre : on les trouve au contraire séparés, disposés et conformés comme daus tous les autres animaux vertébrés. L’humérus dans la baudroie forme une pièce distincte, mais qui avec l’äge se soude à la clavicule : il conserve encore mieux sa forme habituelle dans le po/yptère, où il n’est pas même soudé à la clavicule, et ne lui tient que par engrenage. Pour le radius et le cubitus, ils sont, dans la baudroie, dans un état 368 ANNALES DU MUSÉU-M si semblable à ce qu'on observe dans les mammiferes et les oiseaux, qu'on pourroit aisément, au premier aperçu, Se mé- prendre sur leur origine, et les attribuer à l’une ou à l’autre de ces classes. Dans le polyptére, ces deux os s'écartent sous un angle de 45 degrés, pour développer un bord aussi large que celui de la nageoire, etreposent , à leur côté intérieur , sur un os du carpe, plat etarrondi, qui en maintient l'écartement. Si l'on avoit pu conserver encore quelques doutes sur ce que j'ai avancé, et balancer à croire que la lame triangulaire adossée à la nageoire dans la plupart des poissons contient les rudimens du bras, ou n’en sauroit plus douter, je pense, en venant à connoitre ces espèces anomales, où l’on voit si évidemment comment le bras est ramené aux formes des autres animaux, par un simple changement dans sa position et ses ‘ attaches. 3° Des os de la nageoïre.—Je nerappellerai icila nageoire, ou la partie du membre pectoral correspondante à la main des cétacés, que pour ne pas paroitre l’omettre entièrement. Comme elle a été en quelque sorte décrite pour chaque poisson par tous les Ichthiologistes, je crois inutile d'en parler plus au long. Je ie contenterai de remarquer que c’est seulement dans quelques genres me trouve des os du carpe bien distincts; que tantôt ces'os sont réunis et confondus avec les osselets des phalanges ou des rayons de la nageoire; que d'autrefois ils sont en partie soudés avec le radius, et qu’enfin il arrive aussi qu'ils manquent entièrement : toutes ces circonstances étant assez indifférentes en elles-mêmes, et ne pouvant exercer une grande influence sur les mouvemens de la nageoire, on ne doit pas s'étonner de les voir varier dans toutes les combi- uaisons possibles, D'HHSÉOHRRE NATURELLE. 369 Des différentes formes des os du membre pectoral. Le bras est sujet à autant de variations. Les trois pièces osseuses dont il est formé ne conservent pas toujours leur grandeur respective : ainsi, dans le brochet, l’humérus forme à lui seul cette lame triangulaire sur laquelle s'appuie la nageoire, et l’on ne retrouve le radius et le cubitus que sur la ligne des os du carpe, dans une condition semblable, placés vers l’angle externe de la nageoire, mais ayant toute- fois assez bien conservé leur forme habituelle, pour qu’on ne puisse se méprendre dans leur détermination. L’omoplate présente des différences plus importantes dans les poissons qui vivent de proie : elle est formée de deux pièces ; de sorte que le bandeau osseux qui porte les nageoires est rendu plus mobile, joue sur un plus grand nombre de char- nières, et développe dans le besoin une plus grande ouverture. La clavicule a au contraire une forme plus constante : elle est la même dans tous les poissons, sauf de légères diffé- rences qui tiennent à la configuration générale de ces êtres. On peut en assigner pour cause qu’elle entre dans de nou- velles relations avec un organe du premier rang : car elle ne fait pas seulement partie du cercle osseux où sont attachées les nageoires, mais elle forme de plus le fond de la cavité pectorale, et fournit un rebord que recouvre la membrane branchiostège, et sur lequel s’operent les battemens de loper- cule. Appropriée aux mouvemens de celui-ci, comme un .chambranle l'est à ceux de sa porte, et d’une utilité mani- feste, quoique passive , dans l'acte de la respiration, elle devient ime pièce indispensable dans la construction organique des poissons, et se classe parmi les organes d’un ordre supérieur. 9: 47 370 ANNALES DU MUSÉUM Mais si la clavicule acquiert de nouvelles fonctions dans les poissons, en revanche l'os furculaire y perd, sous le rapport de ses usages, de importance qu’on lui connoit chez les oiseaux. J'ai déjà eu occasion de rappeler que dans ceux-ci il forme, réuni avec son congénère, une pièce dont la struc- ture, la disposition et les usages sont entièrement relatifs à la faculté du vol. Il ne pouvoit avoir la même destinée dans les poissons; mais il ne fait pas moins partie de leur membre pectoral, à cause, sans doute, de laflinité des poissons avec les oiseaux, et de la tendance de la nature à faire reparoitre sans cesse les mêmes organes dans les animaux formés sur le même type. Sans objet direct dans des animaux nageurs, sans une utilité déter- minée à l'avance, et jeté, pour ainsi dire, comme au hasard dans le champ de l’organisation, le furculaire entre en connexion avec les organes dont il est proche; et selon la manière dont celte association est formée, il prend des usages qui lui sont en quelque sorte prescrits par eux. Ainsi le sort de cette pièce singulière est d’être dans une absolue dépendance des organes qui Favoisinent, d’en être sans cesse modifié, et de se prêter, dans le besoin, aux combinaisons les plus étranges. Elle m'a tellement intéressé, que je me suis réservé d’en donner l’histoire dans un Mémoire subséquent : je terminerai celui-ci par le résumé suivant, RESUME. 1.” La charpente osseuse du membre pectoral est composée des mêmes pièces que celles de l'extrémité antérieure des autres animaux vertébrés; lEpaule, de /a clavicule, de Tomo- D'HISTOIRE NATURELLE. 371 plate et du furculaire ; le Bras, de l'humérus, du radius et du cubitus, et la Nageoire, d'os carpiens et de phalanges. 2. Les clavicules et les omoplates contribuent seules à for- mer la ceinture osseuse qui sépare la cavité de la poitrine de la cavité abdominale. 3.” La clavicule est articulée par un bout avec sa congénère et le sternum, et de l’autre avec l’omoplate : elie porte le bras, oppose la fixité de son assiette aux battemens de l'opercule, et donne attache, en dedans, à un diaphragme étendu entre la poitrine et l'abdomen; en arrière, aux muscles du bras et du furculaire; et, en dehors, aux tégumens communs : comme pièce indispensable, elle existe partout et varie peu; du moins jamais au point d’être privée d’une seule de ses fonctions. 4° F’omoplate est immédiatement articulée avec les os de la tête, d'où provient la solidité si grande du bandeau osseux dont elle fait partie : un seul exemple nous la montre dans toutes les relations qu'on lui connoit chez les autres animaux , c’est-à-dire éloignée de la tête, et simplement posée sur les muscles dor- saux. Elle est quelquefois d’une forme aussi compliquée que dans les mammifères; mais beaucoup plus souvent semblable à l'omoplate longue et étroite des oiseaux. Enfin, elle est formée de deux pièces dans les poissons qui vivent de proie, comme pour donner à la ceinture osseuse les moyens de jouer sur un plus grand nombre de charnières, et de proportionner la grandeur de son ouverture à celle de la bouche. 5 L’osfurculaire nait de l'extrémité scapulaire de la clavicule; réuni avec son congénère, il rappelle la fourchette des oiseaux. G° Le bras tient à la clavicule de deux manières : ou il est couché tout le long d’elle, ou il s'en détache, de facon que la nagecire paroît portée comme sur un pédicule, dans ce I) ot 372 À NN à LES, D'UN MUSEUM dernier cas, il est parfaitement en rapport avec celui des mammiferes et des oiseaux, Sa forme, sa position, ses usages même, ne présentent pas des différences bien importantes, L'humérus toutefois ne se détache pas de la clavicule; mais y est soudé, ou fortement attaché par engrenage. L’avant-bras se meut sur l'humérus , et la nageoire, sur le cubitus et le radius, lesquels rappellent invinciblement la forme de ces os longs dans l’avant-bras des mammiferes. Mais si, pour que la nageoire soit plus rapprochée dutrone , le bras est couché lelong de Ja elavicule ( ce qu'on voit das la plupart des poissons ) , la tête scapulaire de l’humérus garde avec la clavicule le parallélisme qui résulte de cette position, et souvent n’y est point articulée : l’humérus lui tient par une ex- pausion osseuse d’un de ses flancs, parce qu'il forme avec le radius et le cubitus une seule lame, dont tout un bord pose sur la elavicule : il est rare que les sutures des trois centres d'ossilication , correspondans dans cette lame à lhumérus, au radius et au cubitus , s’effacent entièrement avec l’âge. 7° Il y a des os du carpe dans quelques genres, et il en manque dans d’autres. 8.” Et enfin, les phalanges sont devenues ces rayons des na- geoires pectorales, décrits avec tant de soin par les naturalistes. EXPLICATION de la planche représentant les os de la nageoire pectorale des | 4 Je les ai fait graver en les choisissant dans les espèces où ilsmontrentle plus de différences : leur état le plus habituel est comme dans le cyprinus carpio , où o est l’omoplate ; c, la clavicule ; % , Vhumérus ; f, le furculaire , et n, la nageoire. Les figuresrelatives au zeus vomer, au scarus siganus et au centriscus scolopax , nous font voir les fureulaires prolongés jusqu’à l’arête abdomi= nale , réunis l’un à l’autre et semblables aux deux branches de la fourchette des oiseaux. Le cu- bitus g et le radius se voient manifestement dans le lophius piscatorius : p désigne les os car - pieus, et l'os unique qu sontient les deux nageoires ventrales, Tétraodon, fhaca n\ lasselquist : ANT - Mug ‘cephales. / ?, op". pr g : Zeus vomer Jcarus siyanus & OS DE LA NAGEOIRE PECTORALE DES POISSONS . oO. OUmoplate [an Clavieule . } . Llumerus YA Lurculure AV: Wageotre . U 7 ARadius. 7 Cubitus . pP:08 carprens. o. Os des nageotres ventrales Ü \ Laurillard del , Canu 0272 r. eZ D'HISTOIRE NATUREL LE. 373 | OBSERVATIONS Sur les habitudes attribuées par Hérodote aux Crocodiles du Nil (à). PAR M GEOFFROY-SAINT-HILAIRE, L'uisro: RE d'Hérodote est un des monumens les plus pré- cieux de la littérature : c’est la plus ancienne que nous con- noissions , et c’est peut-être aussi la plus considérable pour le nombre et l'importance des faits. Cependant elle a eu beau- coup de détracteurs, surtout à l'époque de la vaine et ridi- cule dispute de la prééminence des anciens sur les modernes. Hérodote n’a été accusé de raconter des prodiges que pour avoir été jugé du point de vue où nos institutions nous ont placés ; mais quand on a visité les monumens et les catacombes de l'ancienne Fgypte, et qu'on a apercu tant et de si ma- gniliques débris de son organisation sociale , on trouve qu'Hé- rodote n’a du rien ajouter au tableau qu'il nous a tracé de l'antiquité. Telle est lopinion que jen pris sur les ruines de la fameuse Thèbes aux cent portes : jy passai la plus grande partie du mois d'octobre de l'année 1799, et j’employai quelques momens (1) J'en ai trouvé deux espèces, dont je ferai incessamment connoitre les différences. 374 ANNALES DU MUSÉUM de loisir à constater pareillement la véracité d'Hérodote sous le rapport de ses observations en histoire naturelle. Je me bornerai davs'cet article à rapporter celles qu'il a données touchant le crocodile. Je n’avois que cette oecasion d'étudier ce célèbre animal. On sait qu'il n'existe que dans la ‘Thébaïde et dans tout le Haut-Nil. N'ayant pas séjourné assez long-temps à Thèbes pour répéter toutes les observations d'Hérodote, j'y ai suppléé pour quelques-unes par des renseignemens que j'ai pris auprès des pécheurs de Luxor, de Carnate et de Medinet-Abou. Il est bon de savoir que ces sortes de gens ont, en Égypte, généralement plus de connoissance de leur métier et plus d'instruction sur les habitudes des animaux nageurs, que leurs confrères d'Europe : ils exercent l’état de pécheur de père en fils, et se transmettent leur pratique avec d'autant plus d'intérêt qu'ils ne craignent rien tant qu'une dépense inutile de mouyemens et de travaux. Ils disent dans le même sens que les naturalistes, et presque toujours avec une jus- tesse singuhère : Tel animal est de ce genre, et tel autre n'est qu'une variété de celui-ci. Ils ont aussi notre nomen- clature binaire, et désignent chaque espèce sous des noms génériques et spécifiques. Quoi qu'il, en soit, jai été dans le cas de me défier de leur paresse d'esprit, et surtout de la souplesse de leur carac- ière : ils n'aiment pas à causer beaucoup, et, dans l'espoir d'une meilleure récompense, ils sont assez courlisans pour ne vous pas déplaire par un démenti; aussi ce qu'ils pré- ferent et ce qu'ils font toujours naturellement et sans reflexion, c'est de vous répondre oui à toutes les questions daus les- quelles ils ne sont pas intéressés. D'HISTOIRE NATUREL LE. 379 © Ainsi prévenu sur le caractère de mes pêcheurs, et à peu près certain de leur sincérité, j'aurois pu épargner ces détails à mes lecteurs; mais il m'a paru que, ne les omettant pas, on sauroit mieux à quoi s'en tenir sur les observations suivantes. Hérodote commence ainsi, au sujet du crocodile, dans la traduction de M. Larcher : « Passons au crocodile et à ses qualités naturelles. Il ne mange point pendant # les quatre mois les plus rudes de l’hiver.ss J'ai interrogé sur cela mes pêcheurs : ils n’ont su ce que je leur demandois. Cependant la proposition d //érodote ne répugne pas au caractère connu des reptiles. Bartram dit positivement la même chose des crocodiles ou caimans de l'Amérique septentrionale : mais, à la vérité, ces animaux vivent dans une contrée plus froide, habitent une terre plus nouvelle, et parviennent facilement à trouver, à portée de leur résidence ordinaire, des anses ou lieux déserts, où ils peuvent se cacher et rester impunément engourdis pendant l'hiver. Sil y avoit encore des crocodiles dans la Basse- Égypte, comme il s'en trouvoit au temps d’Aérodote, il est très-vraisemblable que son observation leur seroit applicable ; cette portion de l'Égypte, surtout du côté de la branche pélu- siaque et du lac Menzalé, étant remplie de marais inabor- dables, et beaucoup plus froide, tant par sa situation plus septentrionale, qu'à cause de pluies abondantes qui tombent en hiver sur la côte. Hérodote n'auroit-il entendu parler ue de ces crocodiles du voisinage de la mer ? q 8 376 ANNALES DU MUSÉUM s Quoiqu'il ait quatre pieds, il est néanmoins amphibie : il passe dans les lieux # secs ka plus grande partie du jour, et la nuit entière dans le fleuve; car l'eau » est plus chaude que l'air et la rosée. ss Ces observations sont remplies de justesse. C’est du moins ce que font les crocodiles toutes les fois que des circonstances de localités ne s'y opposent pas. Ils vivent en troupe à la tête des îles qui sont en très-grand nombre dans le fleuve. Ils ne s'écartent des parages qui les ont vu naître que pour aller à la pêche; mais ils y reviennent à des heures déterminées, et vont se reposer en commun sur la grève. Ils ne s'y croient pas en süreté : aussi dès qu'il se fait le moindre bruit autour d'eux , et surtout s'ils aperçoivent qu'on se dirige de leur côté, ils se plongent à l’eau , ou la troupe sé sépare et nage à l'aventure. Quand on vient à se placer sur la grève qu'ils occupoient, et qu'on y séjourne quelque temps ( ce que j'ai eu la patience de faire durant une demi-journée avec quelques amis et mes guides ), on leur procure le plus vif désagrément. Ils ne peuvent rester sous l’eau plus de dix minutes, et ils n’attendent même pas que ces dix minutes soient écoulées pour lever la tête de manière à mettre leur boutoir à fleur d’eau. Les ouvertures nazales existant äu milieu, ils hument ainsi de l'air, lequel, par la disposition de leurs arrières-narines passent dans la trachée-artère, sans que le liquide ambiant puisse s’y porter. Au surplus cette manière de respirer en nageant les fatigue à la longue : alors ils se partagent en deux troupes; les plus petits s'en vont au loin gagner une berge où ils soient en sûreté, mais les plus grands se contentent de sé rapprocher dela rampe produite à la tête de chaque ile par l’attérissement des tèrres, D'HISTOIRE NATURELLE. 377 Comme elle forme sous l’eau un plan très-légèrement mcliné, ils s’en rapprochent de manière à toucher le fond; il ny a guère que les plus hardis qui prennent ce parti, ils y voient du danger , en ce qu’ils sont forcés de se rapprocher de l’obser- vateur. Portés sur leurs pieds ou couchés à plat ventre, ils n'ont plus d’autres soins à prendre que de lever ou d'abaisser leur tête’, qui joue sur sa mâchoire inférieure, ainsi qu’on le fait faire au couvercle d’une tabatière à charnière. Ils portent par ce mécanisme leurs ouvertures nasales dans l'air atmos- phérique, ce qu’ils exécutent très-vite pour dérober d’autant mieux la connoissance de leurs retraites ; car ils s’enfoncent assez pour n'être pas visibles sous la masse d’eau qui les couvre. Tant d'inquiétude à la vue d’un seul homme annonce une sorte de timidité dans le caractère; le crocodile en effet est craintif, lorsqu'il est à terre : mais il faut avouer qu'il s’en dé- dommage quand il est à l'eau. Il n’est pas prudent de se baigner dans son voisinage. Les cris d’effroi que j’entendis jeter à des habitans de Luxor, à la vue d’un François qui commit cette imprudence, nous apprirent quelle idée ils avoient de la puis- sance et de la férocité du crocodile. Il n’est pas rare de rencontrer dans la Thébaide des paysans qui manquent d’un bras ou d’une jambe; si on leur demande à quel accident ils ont dù leur mutilation, ils répondent : Ce malheur me vient du crocodile, s$ IL pond ses œufs à terre et Les y fait éclore. ss Aristote parle aussi de l'incubation de la femelle du croco- dile ; cependant on a des observations contraires : les pécheurs m'ont assuré que la seule chaleur du soleil faisoit éclore les œufs du crocodile. Hérodote auroit-il entendu, par lexpres- 9. 45 378 ANNALES DU MUSÉUM sion dont il s'est servi, les soims que les mères se donnent auprès de leurs œufs, lorsqu'ils sont prêts d'éclore ? J'ai demandé combien il s’écouloit de temps entre la ponte des œufs et la naissance des jeunes crocodiles : on m'a toujours dit un mois, sans qu’on ait pu m'indiquer au justé le nombre de jours. Deux ennemis du crocodile, l'ichneumon et le tupinambis(1), y sont constamment occupés à en chercher les œufs, dont ils sont trèsfriands. Ces animaux ont excité la reconnoissance des anciens Égyptiens, en attaquant ainsi dans les sources de sa reproduction un des êtres les plus malfaisans de l'Égypte (2). Le tupinambis, qui nage très-bien, fait en outre une guerre continuelle aux jeunes crocodiles, et s'acharne à leur pour- suite jusqu'à ce qu'ils aient trouvé un abri parmi les grands individus de leur espèce. Les Égyptiens s'imaginent que le tupinambis est le premier état du crocodile: ils ont souvent occasion de rectifier leur jugement sur ce point; mais ils y persévèrent, parce qu'un fait qui tient du merveilleux ne manque jamais d'enthousiastes pour le conter, ni de gens crédules pour y ajouter foi. (1) Ouaran el bar des Arabes, Lacerta nilotica d'Hasselquist. (2) Plusieurs autres contrées de la terre sont désolées par la grande multipli- cation du crocodile. Puisqu’on ne sauroit rien faire ni de sa chair ni des parties solides de son corps, et qu'il faut perdre l'espoir d'en recommander la destruction au commerce, né pourroit-on pas y suppléer en plaçant dans son voisinage des animaux comme le tupinambis, la tortue molle et l'ichneumon, qui en diminue- roient le nombre par la destruction de ses œufs ? Combien suriout un pareil se- cours deviendroit précieux à Saint-Domingue, dont unc parlie des meilleures terres est envahie par les crocodiles! DHISTOIRE NATURELLE. 379 #» De tous les animaux que nous connoissons, il n’y en a point qui devienne si ÉD grand après avoir élé si petit. Ses œufs ne sont guère plus gros que ceux des » oies, et l'animal qui en sort est proportionné à l'œuf; mais insensiblement il # croit et parvient à dix-sept coudées et même davantage. » Elien raconte qu'on en a vu un de vingt-cinq coudées sous Psammeticus, et un autre de vingt-six, sous ÆAmasis : les érudits nous ont appris que cette mesure équivaut à trente- cinq ou trente-sept pieds à peu près. Prosper Alpin, Has- selquist et Norden, parlent de crocodiles de trente pieds : M. Lacipierre, oflicier de santé et membre de notre Com- mission en Égypte, possède des dents qui proviennent d’un crocodile d’une aussi grande dimension. Or on sait qu'un crocodile est long de neuf pouces au sortir de l'œuf; il peut donc acquérir plus de quarante fois la longueur qu'il a dans son premier âge. Au surplus, ce qu'Aérodote rapporte de la dimension de l'œuf est aussi parfaitement exact. « Ila les yeux de cochon, les dents saillantes et d'une grandeur proportionnée » à celle du corps. ss Le père Feuillée ( Obs., tom. 3, p. 373) a répété, à l'occasion du crocodile de Saint-Domingue, qu'il a des yeux de cochon; ce qui doit sans doute s'entendre de ce que le crocodile a l'œil petit, saillant, recouvert et comme voilé en dessus, Sa paupière inférieure se meut seule vers la supérieure. Comme, au rapport de Swvamnmerdan, il a la prunelle sus- ceptible de se resserrer , ainsi que celle du chat, et de devenir perpendiculairement longue, les érudits, et notamment M. Camus, qui a vu à Paris en 1772 un crocodile vivant, lui ont irouvé les yeux plus semblables à ceux du chat. J’observerai 18 380 ANNALES DU MUSEUM sur cela que c’est un caractère qu’il a de commun avec beau- coup d'animaux nocturnes, comme aussi d’être pourvu dune membrane nictitante. Quant à ses dents, chacun les connoît; et l’on peut d’ail- leurs consulter ce qu’en rapporte M. de Lacépède, dans son intéressant article du Crocodile. « C’est le seul animal qui n'ait pas de langue. # Oui, sans doute, qui n’ait pas de langue apparente : telle est l'opinion qu’on est dans le cas d'en prendre d’après le vivant, et qu'en donnent Aristote en deux endroits de ses ouvrages, Seba, Hasselquist et tous les voyageurs. Cependant elle a été depuis retrouvée par Olaüs Vormius, Girard, Borrich et Blasius. Les premiers anatomistes de l'Académie des Sciences, qui l’ont aussi décrite, en ont fait le sujet d’une accusation d’inexactitude contre /érodote; mais il en est parfaitement justifié ; dès que la langue du crocodile ne s’est manifestée que sous le scalpel des anatomistes. J’engage à relire ce que j'ai déjà imprimé à ce sujet, tome 2 de ces An- nales, page l2. « Il ne remue point la mâchoire inférieure, et c’est le seul animal aussi qui » approche la mâchoire supérieure de l’inférieure. 5# On a beaucoup écrit pour et contre cette proposition. Je suis étonné qu’elle ait fait si long-temps le sujet d’une ques- tion : je l'ai traitée fort au long dans le même écrit que je viens de citer ci-dessus, voyez page 38. Le crocodile est en effet le seul dés animaux connus dont la mâchoire supérieure, entre les branches de laquelle le crâne se trouve compris ; SOit D'HISTOIRE NATURELLE. 381 mobile sur la mâchoire inférieure, qui n’a presque aucun mouvement. Hérodote ne pouvoit pas établir la distinction que je fais. Il avoit sous les yeux des crocodiles vivans, et il a été pleinement autorisé à parler du mouvement de leurs mâchoires comme il l’a fait. Le crocodile a les griffes très-fortes , et la peau tellement couverte d'écailles ” sur le dos, qu’elle est impénétrable. + On ne parvient en effet à percer la cuirasse d’un crocodile, qu'en se servant de lingots de fer : la balle de plomb s'aplatit dessus, mais ne pénètre pas ; à moins pourtant qu’elle n’at- teigne le crocodile sous l’aisselle, ou près des oreilles. ss Il ne voit pas dans l’eau; mais à l’air il a la vue très-pereante, ss La première proposition ne peut que signifier qu'il voit moins bien dans l’eau ; mais la seconde est parfaitement vraie, Procope a vérifié ce fait : il a souvent essayé d'approcher assez des crocodiles pour tirer dessus, et il les a toujours vus disparoître et plonger dès qu'il en a été aperçu. J'ai répété la même observation à l'ile de Thèbes et à celle d'Hermuntis. Aussitôt que les crocodiles m’eurent apercu, je les vis se re- tourner lentement , et se diriger vers le fleuve : ils s'y rendirent d’abord en s’observant et à pas comptés; mais parvenus à une certaine distance , ils sautèrent brusquement, et tous à la fois, dans le fleuve. Je me portai de suite sur la grève qu'ils ve- noient de quitter, et je jugeai à l'impression de leurs pas sur le sable que le plus grand d’entre eux avoit franchi un espace de huit pieds. 382 ANNALES DU MUSÉUM Je me suis aussi assuré que les crocodiles entendent de très- loin ; mes conducteurs, qui ne l'ignoroient pas, avoient soin de me recommander le plus grand silence, comme le seul moyen de les approcher de plus près. « Comme il vit dans l'eau , il a le dedans de la gueule rempli de sang-sues. » Toutes les bêtes, tous les animaux le fuient ; il n’est en paix qu'avec le #ro- » chilus, à cause des services qu'il en reçoit; car il tient sa gueule ouverte, Le 5 trochilus y entre et y mange les sang-sues. Le crocodile prend tant de plaisir(1) » à se sentir soulagé, qu'il ne lui fait pas de mal.» Cet article est un de ceux qui ont le plus exercé la sagacité des commentateurs. 11 en est qui ont pris le parti de nier le fait; mais il est certain qu'ils ont eu tort de donner ce démenti à notre véridique historien. Je me suis soigneusement attaché à constater qu'il existe en effet un petit oiseau qui, voltigeant sans cesse de grève en grève, et élant continuel- lement occupé de la recherche de sa nourriture, s’en va fureter dans la gueule du crocodile endormi, et le débarrasse d'insectes suçans du sang, et non pas de sangsues dans l’ac- ception rigoureuse de ce mot, tel que l'établit M. Larcher, dans sa traduction. Il n’y a pas de sangsues dans le Nil; mais ce fleuve fourmille à sa surface de cousins qui tour- mentent extrêmement le crocodile, en insérant leur suçoir dans les orilices des glandes dont sa langue et le palais se trouvent remplis. 4 On ne connoit encore l'oiseau qui rend ce bon office au crocodile, que par les contes ridicules qu'il a donné lieu de faire pour l'explication de ce passage. a ————————————— 2 ——— {1} Voyez, vers la fin de ce volume, l'article ayant pour titre : Observations sur l'affection mutuelle de quelques animaux. D'HISTOIRE NATURELLE. | 383 Blanchard, enir'autres, dans les Mémoires de l'Acadé- mie des Inscriptions, lui attribue, sans doute d’après une fausse interprétation d’une phrase de Scaliger, des épines sur le dos et au bout des ailes : il le peint comme un ser- viteur officieux, qui s’empresse d’endormir le crocodile par un doux chatouillement. Auroit-il cru, par linvention de cette fable, augmenter la probabilité du récit d'Hérodote? Marmol, qui n’en sait pas plus à ce sujet que Blanchard, assure que c’est ün oïseau blanc, de la grosseur d’une grive. La plupart des traducteurs en ont fait un roitelet, en don- nant un sens trop absolu à un passage de Pline sur le tro- chilus : cette erreur a été relevée par M. Zarcher, qui a judicieusement observé que le roitelet est un oiseau des bois qui hante les lieux secs et les haies. Aldrovande , qui parut avant tous les érudits des temps modernes, est celui qui a le plus approché de la vérité, quand il conjéctura, sur plusieurs données qui lui ont été fournies par Aristote et Athénée, que le trochilus est le cou- reur, oiseau aquatique, palmipède, léger à la course, ayant les jambes longues, et le bec droit et effilé. Salerne chercha depuis à faire prévaloir cette opinion, en l'appuyant de nouvelles preuves. Enfin le trochilus a été véritablemeut apercu dans les temps modernes:le père Sicard, l'un des missionnaires en- voyés dans le Levant, en prit connoissance; car il l'indique sous son nom arabe de sag-saq (1). Il est fächeux qu’il n’ait (1) La première fois qu'on me donna le nom arabe du charadrius ægvptius, on me le prononça et on me le fit écrire sexaq: mais depuis, M. Laporte, un des 384 " ANNALES DU MUSEUM pas su nous dire à quelle espèce appartenoit cette dénomination, Il n'y a pas d'oiseau plus abondant sur les bords du fleuve que le trochilus : Hasselquist Ya publié sous le nom de charadrius ægyptlius. C'est une espèce distincte, mais très-voisine du peut pluvier d'Europe. C’est avec raison qu’Aristote et Athénée disent de lui qu'il court très-vite, et qu’il va, en temps calme, chercher sa nourriture sur l'eau, « Toutes les bêtes , tous les animaux fuient le crocodile, # Le Aéron ordinaire semble au contraire l'affectionner ; du moins il en recherche le voisinage: il a pourtant soin de mettre le fleuve entre lui et ce compagnon, sans doute pour n'être pas à portée de tomber sous sa dent. En voyant des hérons, nous ne doutions jamais qu’il n’y eût des croco- diles à l'autre bord du fleuve, Je me rappelle que la présence de ces oiseaux nous dirigea, le 21 octobre 1799, sur une troupe de quinze crocodiles qui reposoient tranquillement à terre , et parmi lesquels nous jetämes l'épouvaute par un coup de canon à mitraille que notre bâtiment tira sur eux : les seuls hérons ne furent pas effrayés, et continuerent à faire le guet. Ils se tiennent ainsi à la portée du crocodile pour profiter de la terreur qu’il sème dans le fleuve , et pour être plus à méme de se saisir des poissons que sa présence fait fuir et disperse de toutes parts. orientalistes les plus instruits de l’armée d'Égypte, aujourd’hui chancelier à Tunis, voulut bien me prévenir qu’on devoit écrire et prononcer 4ek-t4k; ce mot signifie qui touche, et exprime très-bien une des habitudes de ces petits pluviers qu'on voit constamment heurter le sable du bout du bec, pour en extraire les insectes dont ils se nourrissent. D'HISTOIRE NATURELLE. 3385 Le pélican a le même instinct; mais il ne se borne pas à cette unique pêche, et il ne s’y opiniâtre pas avec la même patience que le héron. Lorsque le crocodile se repose sur terre au sortir de l’eau , il a coutume de # se tourner presque toujours vers le côté d'où souffle le zéphyr, et de tenir la # gueule ouverte. s C'est ce que j'ai fort bien vérifié aux iles de Thébes et d'Hermuntis. J'ai pu remarquer très-distinctement sur le sable humide les traces de deux troupes de crocodiles que mon approche avoit fait fuir; ils avoient presque tous la gueule dirigée vers le nord-ouest; il s’en trouvoit qui avoient reposé sur le flanc, et leur gueule à demi-ouverte étoit. très-bien dessinée sur le sable. Mes guides profitèrent de ces circonstances pour me faire observer la différence des mäles aux femelles, qu’ils me dirent constante. Je crus en effet remarquer que les empreintes qu'ils attribuoient aux mäles montroient une tête plus forte et un peu plus courte. À cette occasion ils nous vantèrent beaucoup la supériorité des males sur leurs femelles; ajoutant que les males savent trés-bien s’en faire obéir, en les mor- dant, ou en les frappant rudement de la queue. Les crocodiles avoient laissé de leur fiente sur le rivage ; elle étoit moulée comme celle de l’homme, partagée en deux tronçons, d’un diamètre un peu plus gros et d’une longueur de cinq à six pouces pour un crocodile de neuf pieds Sa consistance étoit peu considérable; son odeur, nulle; et sa couleur d’un vert-brun. K Une partie des Égyptiens regardent les crocodiles comme des animaux 9- 49 386 ANNALES: DU: MUSÉUM # sacrés... Les habitans de Thèbes entr'autrés ont pour eux beauconp de véné- # ration... Le crocodile sacré est nourri avec la chair des victimes, et on lui # donne d’autres, alimens prescrits. Tant qu "il vit, on en prend le plus grand # Soin; quand il meurt, on l'embaume et on le défiose danslune caisse sacrée. 5 On a trouvé plusieurs momies de crocodile dans les cata- combes oùlon enterroit la population de la ville de Thebes : jen ai trouvé deux pour ma part; M. Pugnet, un des plus habiles niédecins ,de l'armée d'Orient, en trouva pareilement une. très-belle ; enfin les grottes d’ HE étoiént remplies d'ossemens de grands CAE embaumés, ou qui lavoient été. J'ai aussi rapporté, des mêmes lieux et des sépultures de Memphis, des figures de crocodiles , modelées en porce- laine et en terre cuite, qui ont vraisemblablement été em- ployées dans des bandelocques. «Les habitans des environs de Thèbes choisissent un crocodile, qu'ils élèvent # et instiuisent avec soin à'se laisser toucher avec la main. On lui met des pen- » dans d'oreille d'or ou de.pierre, factice. Il n’y a pas jusqu'à cette circonstance, bien minutieuse sans doute, que je,n’aie eu occasion de vérifier. Ayant eu besoin, pour une recherche dont je rendrai compte dans un autre article, de la tête d’une de mes momies de croco- dile, je Ja retirai des langes où elle avoit été enveloppée, et jeus la satisfaction d’apercevoir, aux opercules de ses orcilles ; des preuves non: équivoques qu'ils avoient été per- forés pour y suspendre des pendans; les trous évidemment destinés à cet. usage ayoient été, pratiqués à la partie anté- rieure de lopercule. On ne connoit pas exactement cette pièce, quand on ne l'a vue que dans nos cabinets, sur des individus, desséchés où elle éprouve un retrait considérable : D'HISTOIRE NATURELLE. 387 elle est étendue en avant et sur le conduit auditif. On ne sait ce qui a engagé MM. de l’Académie des Sciences à in- férer de l'observation d' Hérodote , qu'il-croyoit à une autre sorte d'oreille externe. ù J'ai commenté tout le paragraphe d’Æérodote sur le ero- codile, et jé puis dire que je lai fait sans prévention et avec toute la sincérité possible. On ne pourroit me soupçonner que d'admiration pour ce grand-homme, et je ne’ dissimulerai pas que c’est le sentiment que la lecture de ses ouvrages m'a inspiré. 388 ANNALES DU MUSÉUM NOTICE Sur une portion de tronc de palmier, trouvée à soixante pieds de profondeur , au milieu d'un tuffa ou brèche volcanique de Montechio- Maggiore dans le Vicentin. PAR M. FAUJAS-SAINT-FOND. Lis volcans éteints du Vicentin, que Dolomieu et Fortis ont visités , et dont ils ont fait connoître plusieurs belles variétés de laves, ont le plus grand rapport avec ceux des monts Couerons, département de l'Ardèche, que je fis connoïitre et figurer il y a vingt-cinq ans, et sur lesquels M. Marzari de Vicence vient de publier de nouvelles observations. Malgré la grande distance qui sépare les volcans du Vicentin et ceux des monts Couerons , on trouve dans les laves boueuses des uns et des autres des empreintes de plantes, des bois car- bonisés exotiques et des restes de poissons fossiles ; ce qui sert à démontrer que, lorsque les circonstances sont les mêmes, les irruptions volcaniques donnent des résultats semblables, et particulièrement que le plus grand nombre des volcans éteints ont élé baignés par les eaux de la mer, et qu'ils étoient en ac- D'HISTOIRE NATURELLE. 389 üvité à des époques où le globe terrestre avoit déjà des parties dont la végétation s’étoit emparée. Cette dernière observation est d'autant plus digne d'attention, que sans affoiblir en rien la très-haute antiquité du monde , elle diminueroit néanmoins celle que Fortis a cru devoir donner aux volcans en général, et particulièrement à ceux du Vicentin, qu'il a pris pour exemple et qu'il suppose avoir existé avant les bancs calcaires, coquilliers et madréporiques, qui constituent les montagnes au milieu desquelles ces volcans se sont fait jour. Je donnerai incessaniment une notice sur les coquilles pé- trifiées qu’on trouve dans les mêmes tuffas de Montechio- Maggiore , et qu’on voit dans le même état de pétrification au milieu des bancs caleaires adossés contre cet ancien volcan. Je me borne ici, afin de séparer le genre végétal des co- quilles, à faire mention d’une portion de palmier carbonisée, et de divers fragmens d’un arbre qui paroït étre du genre des polypodes en arbres. Le volcan éteint de Montechio-Maggiore est situé à sept milles de Vicence: Fortis a dit avec raison que son aspect, la couleur noire de ses layes, les grands courans qui sont des- cendus par ondulation du haut de la montagne , donnent à ce volcan un ton de conservation qui le dispute au Vésuve. Mais ce qui rend ce volcan encore plus digne d'attention, c’est que de vastes courans d’un tuffa volcanique, accumulés les uns au-dessus des autres, ont formé une montagne com- posée de blocs de lave basaltique et de gros fragmens de laves poreuses de diverses couleurs, entourés de parties granuleuses et pulvérulentes des mêmes matières liées par des sédimens spathiques calcaires. L'expérience ayant appris que ce tuffa pouvoit être taillé 300 ANNALES DU MUSEUM. en dalles qui résistvient au feu le plus violent, les villes et les villages du Vicentin en tirent de grandes quantités pour des Hide de cheminées, pour les fours à cuire le pain, et pour fa’ construction des Rébr fu destinés à la filatüre de la soie. IL en est résulté, à là longue, de grandes et profondes exca- vations, formées à carrières ouvertes, qui pénètrent dans le massif de ce tuffa , et ont mis à découvert diverses coquilles et tpuclques madrépores fracturés én général; mais dont j'ai pu me procurer des individus bien conservés. J'occupai pendant'trois seniaines deux ouvriers à fouiller dans ces carrières pour y recueillir des fossiles, et j'eus le plaisir d’être témoin lorsqu'on trouva le tronçon de palmier qui fait l'objet de cette notice. ristel * Cé tronçon avoit deux pieds de longueur sur un pied deux pouces de diamètre : ‘comme il étoit carbonisé, et que le tuffa volcanique qui lenveloppoit de toutes parts étoit fort dur, äl fut impossible, malgré les précautions qui furent prises, de le relirer entier, et 1l fut divisé en plusieurs pièces; mais trois des morceaux ontun pied de longueur sur six pouces de dia- mètre, et lon y distingue parfaitement l’organisation parti- eulière au bois de palmier. En disant que ce bois fossile est carbonisé, je n'entends pas énonéer par là qu'il est converti en véritable charbon, sem- blablé à celui du bois calciné; mais bien qu'il a éprouvé une altération analogue à celle des bois et des fruits de palmiers, qu’on trouve dans les amas immenses de bois tourbeux des environs de Brull etde Liblard, et qu'on désigne sous le nom impropre de terre d'ombre de Cologne (1). Une portion de (1) On peut consulter la description que j'ai publiée de ces mines de tourbe ligneuses dans 1e premier volume des Annales du Muséum , page 449. D'HISTOIRE NATURELLE. ‘391 ce boïs étoit recouverte extérieurement d'une belle cristallisa- ton calcaire, dont les cristaux, bien distincts, bien saillans et séparés les uns des autres, offrent la chaux canhotgide à inverse de M. Haüy: ces cristaux sont très-brillans, mais un peu co- lorés en noir par des éléméns: très-atténués dé! la substance ligneuse du palmier. On trouve quelques-uns de ces cristaux dans la substance même du bois. à À peu de distance de ce palmier carbonisé, on découvrit d’autres bois dans le même état, dont l'écorce Annee a tous les caractères d'un grand hote en arbre; comme en les tirant du tuffa volcanique ceux-ci ont souffert, et que les morceaux ne sont guère plus grands'que la main, on ne sau- roit en déterminer l'espèce avec certitude ; mais Les botanistes célèbres qui les ont examinés ontireconnu que ces bois de- voient avoir appartenu à des polypodes en arbres. 392 ANNALES DU MUSÈËUM NOTICE MINÉRALOGIQUE ET GÉOLOGIQUE Sur le quartz fétide des environs de Nantes. PAR M. P. M. S. BIGOT DE MOROGUES. Lx sol des environs de Nantes, quoique presque plat et peu élevé au-dessus de la mer , doit cependant être considéré comme primitif, au moins dans le sens donné jusqu'à-présent à la dénomination de roche primitive. Toutes les masses prin- cipales sont granitiques : le quartz, le feld - spath et le mica, sont les substances dominantes. Chacune d'elles offre dans cette localité des variétés intéressantes , soit par rapport aux formes, soit par rapport aux substances qui les accom- pagnent. L’amphibole y forme une masse très-considérable, qui s'étend entre la route de Vannes et la Loire , en suivant les bords du bassin de ce fleuve pendant l'espace de plusieurs lieues. C’est dans les fissures de cette masse amphibolique que M. Dubuisson, minéralogiste habile, a trouvé le titane silico- calcaire,la chaux phosphatée , lémeraude et plusieurs autres minéraux également intéressans, qu'il a fait connoïître dans une notice insérée par M. Tonnellier dans le Ne 97 du Journal des Mines. Ayant observé précédemment avec MM. Alluau et de Tristan la fétidité dans les quartz des environs de Chanteloub, dépar- D'HISTOIRE NATURELLE. 393 tement de la Haute-Vienne, à dix lieues de Limoge , l'aspect de ceux des environs de Nantes me fit présumer qu’ils pourroient aussi jouir de cette propriété ; en conséquence ayant remis à M. Dubuisson un des morceaux que j'avois rapportés de Chanteloub, je l’engageai à venir avec moi essayer les quartz de son pays: nous nous rendimes donc sur la route de Rennes, et nous eumes la satisfaction de trouver que je ne nrétois pas trompé dans ma conjecture Les quartz fétides des environs de Nantes, ainsi que ceux de Chanteloub, différent essentiellement de ceux de l'ile d'Elbe, rapportés antérieurement par M. Lelièvre; non-seulement par leurs caractères extérieurs, mais encore par leur position géc- logique: car ils sont adhérens au feld-spath et au mica, et même forment un des élémens du granit primitif de ces cantons. Les environs de Nantes sont remplis de quartz fétides ori- ginaires du granit ; et le plateau de la Salle Verte n’est qu'un bloc de granit dont tous les quartz ont plus ou moins cette propriété. J’eus lieu de remarquer dans ce local, 1.0 que tous les quartz n’y sont pas également fétides; 2.° que , dans un un même bloc de quartz, toutes les parties ne jouissent pas au même degré de cette propriété; 3.° que le feld-spath et le mica ny participent pas; 4° que plus le granit est à gros grains , et plus le quartz est fétide ; 5° que cette propriété est plus énergique dans les granits de la superficie, que dans ceux du fond des carrières; 6.° que le feld-spath cristallisé et le mica rhomboïdal accompagnent souvent le quartz fétide; 7° enfin, que ce quartz offre quelquefois des formes régulières. Par ses caractères extérieurs, ce quartz fétide se rapproche beaucoup du quartz hyalin ; je n’en ai cependant pas trouvé d’absolument blanc ni de diaphane : il est d’une couleur gri- 9- bo 394 ANNALES DU MUSÉUM sètre, demi-transparent et jamais opaque ; il est vivement phosphorescent lorsque dans lobscurité on frappe deux mor- ceaux lun contre lautre. Sa cassure est presque vitreuse, tirant plus ou moins sur l’écailleuse. Ses formes sont celles du quartz hyalin, et sa dureté est à peu près la même. La pesanteur spécifique d’un morceau de quartz fétide se trouva de 2,639294 ; tandis que celle d’un morceau qui avoit perdu sa fétidité et qui étoit rempli de fissures , étoit de 2,6482/0 : ce qui prouve que le quartz fétide augmente de poids en perdant sa fétidité. Le principe de la fétidité est donc plus lé- ger que l'eau. Cette grande légèreté, sa fugacité et son odeur, me font présumer que l'hydrogène en est au moins un des elémens les plus abondans; qu’il s’y trouve renfermé à l’état solide, soit par une affinité indéterminée, soit par la force de cohésion du quartz, et qu'il en est dégagé toutes les fois que le calorique vient augmenter J’élasticité de l'hydrogène, ou que la cohésion du quartz se trouve assez diminuée pour que l'élasticité la- tente de l'hydrogène l'emporte sur elle. Le quaniz fétide differe essentiellement du quartz hyalin ordinaire , par l'odeur vive et désagréable qu'il répand par le choc ét souvent méme par le simple frottement. Le choc sur les angles d’un fragment dégage une odeur plus sensible que celui sur le milieu d’une des surfaces , parce qu'il produit plus facilement de petits éclats capables ide laisser échapper le principe odorant; l'odeur dégagée a quelque analogie avec celle des gaz hydrogènes salfuré et carburé,et dans les mor- ceaux bien féudes, elle se conserve plus d’une minute après le choc. J'observai comme je lai dit, les quartz fétides sur la route de Frennes , depuis Nantes jusqu'à une lieue au-delà ; quelques- D'HISTOIRE NATURELLE. 395 uns d’entre eux, peu fétides, provenoient d’un filon de quartz qui se trouve dans des gneiss en couches verticales à gauche, un peu avant la barrière. Le fer sulfuré se trouve dans ces mêmes gneiss; mais les échantillons les plus fétides provenoient des granits voisins de la route dont je visitai une carrière ou- verte un peu à gauche, à une lieue de Nantes. Là je fis les mêmes observations qu'à la Salle Verte: le quartz fétide s’y trouve de même faire partie du granit; mais il y est quelquefois, quoique rarement , accompagné de fer arsénical amorphe. J'ai cru remarquer que les quartz exposés à l'air extérieur dégagent plus facilement l'odeur fétide, soit que l’action de la lumière, celle de la chaleur ou quelque autre cause ait rendu plus libre le principe odorant. Un fragment de quartz grisàtre , demi-transparent et très- fétide , ayant été chauffé entre des charbons, fut retiré du feu avant d’avoir rougi. Pendant le refroidissement, il répandit une légère odeur fétide, semblable à celle qu'il dégageoit aupara- vant par le choc. Examiné après le refroidissement, il avoit blanchi et perdu sa fétidité, et, en le cassant, il ne dégageoit plus aucune odeur que celle des pierres siliceuses. _ Les portions du quartz fétide qui ont perdu leur fétidité sont par [à devenues susceptibles d'acquérir de la transparence par limbibition de l’eau ; tandis que les parties qui sont en- core fétides , restent opaques. En perdant sa fétidité , ce quartz devient donc légèrement hydrophane; il ne s’imbibe cepen- dant que d’une très-petite quantité d’eau , car elle n’augmente pas sensiblement son poids. Au reste, l'analyse seule pourra nous éclairer sur la nature du principe odorant du quartz fétide. F 5o * 306 ANNALES DU MUSÉUM DESCRIPTION DE LA MORÈNE A ÉPONGE.(/ydrocharis spongia.) PAR L. BOSC. FE: genre morène , kydrocharis, Lin., est plus remarquable que beaucoup d’autres, en ce qu’il ne contient qu'une espèce et qu'il constitue presque, seul une famille. Je dis presque seul, car les trois ou quatre genres qu'on rapporte à celle qui porte son nom , s’en écartent par quelques caractères ou ne sont qu'imparfaitement connus. J'ai observé dans les eaux de la Caroline une seconde es- pèce de ce genre, qui présente une organisation assez parti- culière pour intéresser les botanistes; et comme il n’a paru qu'il devoit être difficile, pour ne pas dire impossible , de l’étu- dier a près sa dessiccation, je l’ai décrite et dessinée sur le vivant! quoique je dusse supposer qu'elle faisoit partie de la riche collection transportée en Europe par Michaux. Cette morène, que j'appelle morène à éponge, ydrocharis spongia, a les ra- cines vivaces, fasciculées, vermeilles, blanchâtres. Les tiges sont rampantes , stolonifères, gläbres , spongieuses et verdätres; ses feuilles, toutes radicales et réunies en faisceaux , sont longuement pédonculées , cordiformes, obtuses, glâbres et d’un vert foncé. Les premières de ces feuilles , c’est-à-dire celles qui poussent en hiver ou au commencement du printemps, sont portéessur des pélioles gréles, nageantes et pourvues en dessous d’une saillie d'environ deux millimètres d'épaisseur , de même forme, mais plus étroite qu’elles, Les secondes, ou celles D'HISTOIRE NATURELLE. 397 qui se développent peu avant ou en même temps que les parties de la fructifica- tion sont portées sur des pétioles droits, demi-cylindriques , spongieux , très- épais et presque engainans à leur base, aussi longs qu’il est nécessaire pour les élever à quatre ou cinq centimètres au-dessus de l'eau. La morène d'Europe, Lydrocharis morsus ramæ, Lin., est dioique. D’après l'observation unanime des botanistes , celle de Caroline est monoique , à moins que ses fleurs femelles n'avortent par défaut de nourriture. Les fleurs mâles de cette dernière sont renfermées, avant la floraison , au nombre de sept à huit, dans une spathe allongée, composée de quatre folioles demi-transparentes, inégales, dont les deux antérieures ont souvent plus d'un pouce de long et sont striées de rouge. Elles se développent les unes après les autres, jamais plus d’une chaque jour. Leur pédoncule est mince, fragile, radi- cal, aussi long qu’il est nécessaire pour être à moitié hors de l’eau. Chacune de ces fleurs est composée 1° d’un calice de trois folioles vert-päle ; 2.° d’une corolle de trois pétales blanchâtres , semblables au calice, dont ils sont o écartés d'environ deux millimètres ;,3.° de huit à douze étamines , et quelquefois plus, alternes sur un axe fourchu à son somme., et long de six à neuf millimètres. Les fleurs femelles sont solitaires dans une spathe de deux folioles , plus petites, mais semblables à celles des fleurs mâles. Elles sont portées sur un‘pé- doncule cylindrique, spongieux , épais de deux ou trois millimètres, assez long pour atteindre la surface de l’eau, dans laquelle il se recourbe après que la fruc- tification est accomplie. Chacune de ces fleurs est composée, 1. d'un calice de’troïs folioles lancéolées, d’un vert blanchâtre ; striées de rouge ; 2.° d’une corolle de trois pétales presque linéaires, blanchâtres ; 3.° d’un ovaire inférieur, à peine plus épais que le pé- doncule , portant six styles profondément bifurqués et velus. Le fruit est une capsule ovale, moitié plus longue que large , gläbre, striée de rouge, et composée de six loges, renfermant chacune plusieurs semences ovales , aiguës d’un côté, logées dans une pulpe gélatineuse, La morène à éponge croît dans les fossés bourbeux de la Basse-Caroline, qui n'ont pas plus d’un décimètre d’eau, et dont le niveau change peu. Elle fleurit au milieu de l'été, Si elle a échappé aux recherches des botanistes , c’est parce que ses fleurs sont peu apparentes et ne durent que quel- ques instans. Moi-même je ne l'aurois peut-être pas remar- quée, si le coussinet de la surface inférieure de ses feuilles 3098 ANNALES DU MUSÉUM primordiales ne n'avoit frappé et ne m’avoit engagé à porter sur elle, à toutes les époques de l’année , une attention sou- tenue. Ce coussinet, qui n’est que le tissu cellulaire plus dilaté, offre des bulles presque hexagones qui se voient à travers le parenchyme. Iloffre un mode de suspension sur l’eau qui n’a pas encore été observé. La position des étamines sur un axe et l'écartement du calice de la corolle ( ou des deux calices} sont encore plus remarquables ; ces deux caractères sufliroient pour autoriser la formation d’un nouveau genre, si le fruit et l'ensemble de tous les autres caractères ne sy opposoient Les graines de la morène à éponge , comme celles de la plupart des plantes aquatiques de la Caroline, germent dans leur capsule , qui s'ouvre par suite de leur gonflement et tombent immédiatement au fond de l’eau, Chaque pied est déjà pourvu avant l'hiver de deux ou trois feuilles à coussinet. Les autres ne poussent qu’au printemps. Il faut observer que les eaux où croit cette plante sont si chaudes certains jours de l'été, qu’on ne peut pas y tenir la main, et que les poissons qui s'y trouvent meurent, C'est à cette époque que les graines germent; mais la plante ne paroît à la surface de l’eau que lorsque l'atmosphère est très-refroidi, EXPLICATION de la planche qui représente la Morène à éponge de grandeur naturelle. 1. La spathe de la fleur mäle avant la floraison. 2 La même au mo- meut de la floraison. 3, Le calice, la corolle et les étamines grossies et dans leur position naturelle sur l’axe. 4. L'ovaire et la spathe de la fleur femelle. 5. La fleur femelle épanouie. 6. La capsule après la fécondation, se recourbant dans l'eau. 7. La capsule au moment de la maturité des graines, coupée transversa- lement pour montrer la disposition des loges. 8. La même, coupée transyersale- ment pour indiquer la situation des graines. 9. Une graine très-grossie, Pl For Lambert 72 ie del . Bose | COQUILLES FOSSILES des environs de Paru . PL. XIX. Lip. Z rquenot "à } D'HISTOIRE NATURELLE. ‘309 EXPLICATION DES PLANCHES Relatives aux coquilles fossiles des environs de Paris. (Nota. Ces planches font suite à celles déja publiées dans les volumes pré- cédens des Annales). DIX-NEUVIÈME PLANCHE Fia. 1. Érycine lisse. Erycina lævis. Annales, vol. 6, p.414,n.1. a. Valve , vue en sa face interne. La même, vue du côté extérieur, 2 Érycine transparente. Erycina pellucida. Annales, vol. 6, p. 414, 1n. 2. a. Valve, vue en sa face interne, b. Valve, vue du côté extérieur, d Érycine trigone. Érycina trigona, Annales, vol. 6, p. 414, n. 5. a Valve, vue en sa face interne. b. Valve, vue du côté extérieur. 4. Érycine diaphane. Erycina translucide. Érycine transparente. Annales, vol. 9, p. 55 ,nu&, a. Valve, vue en sa face interne. 2. Valve, vue du côté extérieur. 5. Érycine ondulée. Erycina undulata. Annales, vol. 7, p. 53 ,n; 7. a. Valve, vue en sa face interne. &. Valve, vue à l'extérieur. 6. Érycine elliptique. Erycina elliptioa, Annales , vol. 6,p. 415, n. 6. a. Valve, vue du côté extérieur, 460 ANNALES DU IMUSÉUM à. Valve, vue en sa face interne. 7- Érycine miliaire, Erycina miliaria, Annales, vol. 7, p. 54, n. 10. a. Valve, vue en sa face interne. &. Valve, vue à l'extérieur. 8. Érycine rayonnée, Érycina radiolata. Annales, vol. 7,p. 54,n. 11. a. Valve, vue ensa face interne. 8. Valve, vue du côté extérieur. 9. Érycine obscure. Ærycina obscura. Annales, vol. 7,p. 54, n. 9. a. Valve, vue en sa face interne. &. Valve, vue à l'extérieur. 10. Vénéricarde à côtes plates. F’ezericardia planicosta. Annales, vol. 7,p. 55, n. tr. a. Valve, vue en sa face intérieure. 2. Valve, vue en sa face externe. VINGTIÈME PLANCHE. Fic. 1. Vénéricarde imbriquée. V’enericardia imbricata. Annales , vol. 7, p. 56, n. 5. a. Valve, vue en sa face interne, &. Valve, vue en son côté extérieur. 2. Vénéricarde à côtes aiguës, Fenericardia acuticosta. Annales, vol. 7, p. 57, n. 4. a. Valve , vue en sa face interne, &. Valve, vue à l'extérieur, 5. Vénéricarde élégante, Venericardia elegans, Annales , vol. 7, p.59, n. 10. a. Valve, vue en sa face intérieure, 2. Valve, vue à l'extérieur. 4. Vénéricarde tuilée. V’enericardia squamosa, Annales, vol. 7, p. 58, n. 8. a. Valve, vue en sa face intérieure. &. Valve, vue en sa face exlerne, 5. Vénéricarde treillissée. 7’enericardia deçussate. Annales, vol, 7, p. 59, n. 9. 2€ PA 1 ons de Par 17/2 COQUILLES LOSSIZLZS des ent ip L 'rquenot 27/12 D'HISTOIRE NATURELLE. a. Valve, vue en sa face interne. 8. Valve, vue à l'extérieur. 6. Vénus calleuse. Z/enus callosa. Annales, vol. 7, p. 130 , n. 3. a. Valve, vue en sa face interne. 8. Valve, vue à l'extérieur, 7: Vénus oblique. 7’enus obliqua. Annales , vol. 7, p.62, n. 2. a. Valve, vue en sa face interne. &. Valve, vue à l’extérieur. 8. Venus petite rape. Venus scobinellata. Annales, vol. 7 , p. 131, n. 5. a. Valve, vue en sa face interne, &. Valve, vue à l'extérieur, 9. Vénus changeante. Venus mutabilis, Annales, vol. 7 » P-61,n.r. a. Valve, vue en sa face interne, &, Valve, vue à l'extérieur, 5r 4ox Lo2 ANNALES DU MUSÉUM NOTE sur le genre Puysrium de Loureiro. PAR A. L..DE JUISSAUE D le nombre des genres de la Flore de la Cochinchine décrits par Loureiro, il en est un qu'il nomme pAyskium et qui se trouve dans des bras de rivière dont le cours est ralenti. C’est une herbe vivace qui n’a que des feuilles radicales et des hampes solitaires uniflores. Selon l’auteur, l’espèce est composée de deux individus différens, Dans l’un , la hampe, très-longue, porte une fleur hermaphrodite, à calice tubulé , divisé par le haut en deux lobes arrondis. La corolle est composée de trois pétales ovales placés au-dessus du pistil et persistans ; il y a six étamines à filets courts , à anthères droites et ovoides. L’ovaire, placé entre le calice et les pétales, est surmonté d’un style court et épais, terminé par trois stigmales dont le som- met est aigu et bifide; il devient un follicule long, cylindrique, étroit, à une seule loge polysperme ,couronné par les pétales et les stigmates persistans; les graines sont adhérentes à la cavité du follicule. L'autre individu a une fleur femelle sans calice ni corolle, portée sur une hampe courte et épaisse. Son ovaire est conique, sans style , marqué seulement de quelques pores au sommet ; le fruit est un follicule court, également à une seule loge , contenant beaucoup de graines globuleuses portées sur un réceptacle subulé. En examinant ce caractère avec attention, on est d’abord surpris de voir sur deux individus de la même espèce deux organisations si différentes dans la fleur et le fruit. Ensuite on se trouve embarrassé pour rapprocher cette plante d’un genre déjà décrit ou au moins d’une famille connue. Cette difficulté seroit levée en partie si le caractère du physkïum étoit présenté d’une autre manière. Loureiro admet dans sa fleur hermaphrodite an oyaire placé entre le calice et la corolle. Linnæus en décrit un pareil dans l’adoxa et le sanguisorba , en le comptant néanmoins au nombre des fructifications singulières ( PArlos. bot. p. 71,n. 105); mais ce qu'il nomme oyaire dans ces deux genres est désigné par lui comme tube de la corolle renfermant l'ovaire dans le porerium , dont l'organisation du fruit est évidem=- ment la mème que celle du sanguisorba. I en résulte une contradiction inadmis- sible , et l’on cest forcé de reconnoitre que l’oyaire n'est point nu dans le sangui- sorba et l'adoxa, qu'il est recouvert d’une enveloppe florale comme dans le poterium , et que dès-lors il ne doit plus être question de cette fructification sin- gulière, mentionnée dans le PAilosophia botanica. De plus, si la corolle ne de- vient jamais l'enveloppe subsistante du fruit nommé infère ou adhérent, et si ce D'HISTOIRE NATURELLE. 403 privilége est réservé au calice, comme tout semble le prouver, on trouvera que nous avons eu raison de transformer en calice la corolle du poterium, et consé- quemment des deux autres genres, en prenant pour de simples écailles florales ce qui avoit été nommé calice. Nous avons été d’autant plus fondés à adopter cette dénomination , qu’elle est conforme dans les genres près desquels ceux-ci se placent naturellement; savoir dans le chrysosplenium , voisin de l'adoxa , dans le cliffortiaet V'atchimilla, qui ne peuvent ètre séparés du sanguisorbaetdu poterium. Cette digression nous conduit à changer également le caractère du physkium, à transformer en braetée ou spathe le calice de sa fleur hermaphrodite ,son ovaire en tube calicinal adhérent à l'ovaire et devenant avec lui une capsule, et ses pé- tales en divisions de ce même calice. Alors, n'admettant plus de corolle, nous écartons un caractère dont l'absence permet de, rapprocher ce genre des Mono- cotylédones avec lesquelles on croit lui trouver de affinité, à cause de ses feuilles radicales , de ses hampes et du lieu qu’il habite. Cette division des végétaux ne présente des ovaires adhérens que dans les classes des étamines périgynes et des étamines épigynes. Elle montre des fruits uniloculaires polyspermes dans les seules familles des Orchidées et des Hydrocharidées réunies à la derniere de ces classes. Le pAyskium diffère beaucoup des Orchidées par la structure de ses parties, C’est donc dans les Hydrocharidées seules qu’il faut chercher quelques affinités. Nous croyons en trouver dans le genre va/lisneria , placé à la tête de cette fa- mille, qui a d’abord lemême port, la même habitation , les sexes séparés, les feuilles également radicales et les hampes uniflores. Son individu mâle a une hampe courte, une spathe conique divisée en deux ou quatre parties, qui, en s'écartant , laissent apercevoir beaucoup de petites fleurs en boutons rassemblées en tête sur un spaiix ou réceptacle commun. La hampe de l’individu femelle est très-longue ; sa fleur a une spathe tubulée bifide. Son calice, adhérent à l'ovaire, est long, cylindrique , divisé à son limbe en six petits lobes dont trois sont linéaires. L’ovaire est sur- monté d’un style très-court ou presque nul, terminé par trois stigmates ovales , bifides, garnis chacun en dessous dans leur milieu d’un appendice filiforme, H devient une capsule longue cylindrique , couronnée des divisions calicinales et des stigmates, a une seule loge remplie de graines menues attachées à ses parois, Si l’on compare maintenant les deux caractères , on croit reconnoitre que le physkium v'est qu'un vallisneria différemment décrit. En changeant le follicule de sa fleur femelle en spathe, et ses graines nombreuses portées sur un récep= tacle en autant de boutons de fleurs non développés, on reconnoit parfaitement le caractère de l'individu mâle du val/lisneria. Sa fleur hermaphrodite répond à Ja fleur femelle de ce genre, dont la hampe est de même très-longue. Son calice bilobé est en rapport avec la spathe bifide, Les trois stigmates fendus supérieure- ment sont les mèmes dans les deux genres, ainsi que le fruit adhérent, long >» 4o4 ANNALES DU MUSÉUM cylindrique , a une seule loge polysperme. La seule différence consiste dans l'ad- mission de trois pétales, ou, si l’on veut, trois divisions calicinales et de six éta- mines décrites dans le physkum , pendant que le va/lisneria n'admet que six divisions calicinales sans étamines. En supposant que les éamines décrites par Loureiro ne soient que des filets stériles, quoiqu'il admette affirmativement des arthères, on trouveroit un commencement de correspondance dans les trois divisions linéaires du calice du vallisneria, dont les trois autres divisions plus larges seroient assimilées aux pétales du pAyskium. Si l'on ajoute à ces six par- ties les trois appendices des stigmates du premier, appendices bien exprimés dans la figure de Micheli ( Nov. gen, t. 10), on complète ainsi le nombre des six filets mentionnés dans le dernier. Quant à l'existence des anthères, tout porte à croire qu’elle n’a pas lieu dans le physkium, si le vallisneria en est dépourvu, et l’on doit inviter ceux qui verront ce dernier vivant à vérifier ce caractère. La différence indiquée n’empèche pas de reconnoitre que ces genres sont le même présenté d'une manière différente , et peut-être sera-t-il difhicile d'en former deux espèces distinctes. Voici en conséquence la rédaction nouvelle du genre. Vacusverta , Michel. Lin. — Doica. Masc. ( Vallisnerioides Mich. ) Spadix ir scapo brevi terminalis conicus parvus, spathaä cinctus 2-4-partità patente flo- ribus minimis sessilibus tectus. Singulis calix 5-partitus (corolla L.); stamina à (germini abortivo imposita ?) Foew, ( Vallisneria Mich. ) scapus spiralis longus 3-/lorus ;spatha floris tubulosa 2-fida. Calix superus seu germiniadhærens, lon- gissimus ad limbum6-partitus, laciniis alternis ( petala L, : an potius fi.amenta sterilia ?) linearibus, Ovarium inferum seu calici concretum; stylus o; stigmatæ 5 ovalia semibifida, subtis medio appendiculata appendice ( nectarium L. ) filiformi. Capsula infera longa eylindrica, 5-dentata 1-locularis polysperma, ad parietes seminifera. Herbæ submersæ vado affixe > folia radicalia; seapi 1-/lori. Car. ex Michel. et Lin. Flores fœminei laxato, quantüm satis est, spirali scapo detenli supernatant; masculi, scapo non protenso invitè demersi, adapertà spathà et rupto supra spadicem nexu ad aquæ superficiem liberi elevantur , hiant , cateryatim juxtà fœmineos revinclos vagantur, et mox perituri præludunt genesi novæ prolis quæ , in pistillo concrescente latens, ejusdem retracto paulatim scapo, sub undis clam maturescit, Cerld congener et fort conspecificum physkïum Lour, Coch. 814, eujus, inverso partium nomine ; flos fœmineus pro capitulo maseulo ;. folliculus pro spathà , seminum congeries pro flosculis clausis, flos hermaphro- ditus pro fœmineo , hujus petala pro divisuris 3 calicinis latioribus, stamina 6 pro 5 aliis divisuris linearibus et 5 Gliformibus st gmatum appendicibus habeantur. Autore tamen antheras memorante, ilerim examiganda Vallisneriæ vivæ organa linearia. An ejusdem embryo verè bilobus ? D'HISTOIRE NATURELLE. 405 EXPÉRIENCES Sur l’acide tartareux ‘et particulièrement sur l'acide qu'il fournit par la distillation sèche. PAR MM. FOURCROY ET VAUQUELIN. Les chimistes savoient depuis long-temps que la plupart des substances végétales fournissoient des produits acides par la distillation : en comparant ces produits obtenus d’un grand nombre de matières végétales , on crut d’abord devoir distin- guer trois espèces d’acides obtenus par le feu , et on leur donna en 1787 des noms composés de ceux des matières d’où ils provenoient , et de celui du moyen employé pour les obtenir. On nomma lacide obtenu du tartre distillé, acide pyrotarta- reux ; celui du bois, pyroligneux ; et celui des gommes, py- romuqueux. Dans le volume 35 des Annales de chimie ( 30 messidor an vi), nous avons publié un Mémoire où, en rendant compte des expériences qui nous déterminèrent à regarder les acides py- roligneux el pyromuqueux comme de l'acide acéteux modifié par une espèce d'huile particulière à chaçun d'eux, nous ayons 9. 24 166 ANNALES DU MUSEUM annoncé que l'acide pyrotartareux nous paroissoit étre de la même nature. Voici comme nous nous exprimions à ce sujet: « Du tartre blanc a donné par la distillation près de la moitié » moins deliquideatidé queile sucre.» Ce produit acide, obtenu par une chaleur bien ménagée, étoit presque blanc. Il avoit une odeur d'empyreume;il surrrageoit une huile fétide ettrès- colorée : malgré son odeur piquante, il eû& été diflicile de le reconnoitre pour de l'acide acétique par cette seule expérience; mais il ne nous en pas imposé long-termps. L’ayant saturé de potasse , ton l'a distillé, après son évaporation &siccité, avec de l'acide sulfurique affoibli ; et il nous a fourni de l'acide acétique bien reconnoissable etsans mélange d'empyreume, etc. Nous terminons cet article en disant : « {l n’est donc pas dou- » teux que l'acide pyrotartareux n’est que de l'acide acéteux, » sali par une portion d'huile empyreumatique, produit de » la décomposition de l'acide tartareux par le calorique. » Quoique nous eussions fait beaucoup moins d'expériences sur l'acide pyrotartareux que sur les acides pyroligneux et pyromuqueux, celles auxquelles. nous l’avions. soumis nous avoient néanmoins donné des résultats tellement conformes aux autres, à l'odeur moins pénétrante prés, que nous sommes demeurés jusqu’à ce moment dans la persuasion que cet acide étoit véritablement. du vinaigre uni à une huile, particulière. Mais M. Gehlen, chimiste tres-distingué de Berlin, ayant der- nieérement élevé: quelque doute sur l'identité de l UE du tartre distillé avec le vinaigre , nous ayons cru devoir faire de nou- velles expériences sur cet objet. + Avant d’ enexposer la série }YAPpOr tons ce > que dit M, Gehlen sur cet objet. Après ayoir pd de l'acide des fourmis, qu'il ne croi pas être de Vacide acétique , il ajoute :« Il en est de D'HISTOIRE NATURELLE. 407 » même de l'acide tartareux,:que MM. Fourcroy.et Vauquelin » prétendent aussi être de l'acide acétique. La liqueur acide » obtenue par la distillation sèche de la crême de tartre, exposée » à une évaporation lente, laisse pour résidu beaucoup de cris- » taux qui ne peuvent pas étre de l'acide acétique , et qui ne sont » pas non plus de l'acide tartareux , comnie mes expériences et » celles de M. Rose l'ont prouvé.» (Annales de chimie, n.° 178, octobre 1806 , p. 78 ). Nous ajouterons ici letableau de quelques propriétés d'après lesquelles nous avions, en 1798, fondé notre opinion sur la nature de l'acide du iartre obtenu par la distillation. Cet acide est volatil; sa combinaison avec la potasse cristallise par éva- poration en petits feuillets nacrés. Elle a une saveur piquante et àcre; elle attire fortement l'humidité de l'air etse résout en liqueur; elle est soluble en totalité dans l'alcool; elle exhale une odeur piquante lorsqu'on la mêle avec l'acide sulfurique. Il étoit diflicile, après avoir constaté la nature acétique des acides pyromuqueux et pyroligneux, de ne pas voir dans les propriétés qu'on vient d’énoncer les caractères de l’acide acé- tique. Cependant presque tous les corps ayant {oujours un certain nombrede propriétésanalogues, nous avons cru , d’après l'assertion de M. Gehlen, devoir soumettre de nouveau l'acide pyrotartareux à des épreuves.différentes , et le comparer soi- gneusement avec l'acide acétique. Voici le résultat de nosnou- velles expériences. , 1. Nous avons saturé la liqueur acide 6btenue par la dis- üllation du tartre, avec du carbonate de potasse. Une partie de l'huilerdissoute par cet acide s’est précipitée sous la forme d'une résine brune ; cependantil enest, resté.une gçaade quan- üité en combinaison. A Ga * 408 ANNALES DU MUSEUM 2.° Cette combinaison , évaporée à siccité et redissoute plu- sieurs fois dans l'eau, a fourni un sel d’une couleur brunäâtre , d’une saveur chaude et piquante, de forme écailleuse , comme l'acétate de potasse. 3° Ce sel précipitoit en paillettes blanches les nitrates de mercure et d'argent; mais il précipitoit aussi la dissolution d’acétate de plomb: ce que ne fait pas l’acétate de potasse. - 4° Exposé au feu, il s'est boursouflé et charbonné. 5e Distillé à une chaleur douce avec de l'acide sulfurique affoibli, il a noiïrci et fourni, vers la fin de l'opération, un sublimé blanc qui s'est attaché sur toute la surface de la cornue, sous la forme de lames. La liqueur qui a passé avant que le sublimé ne parût , avoit une acidité très-marquée, qui n’étoit pas due à l'acide sulfuri- que employé; mais elle n’avoit qu'une très-légère odeur de vinaigre. 6. Cette opération ( la distillation du sel formé par l'acide pyrotartareux et la potasse ) nous a fourni le sujet d’une re- marque assez singulière : la liqueur acide dont nous venons de parler contenoit à sa partie inférieure un gros globule d’un autre liquide légèrement coloré en jaune , qui rouloit par le mouvement, sans se méler à la liqueur. Il ressembloit à du phosphore fondu au fond de l'eau. Comme il étoit nuit, on boucha exactement le vase pour l'examiner plus facilement le lendemain. Mais douze heures après on n’aperçut plus rien ; le globule pesant s’étoit mêlé avec l’autre liquide pendant la nuit. 7 Après avoir coupé la cornue, nous en avons détaché les cristaux le plus exactement possible : ils nous ont présenté les propriétés suivantes : D'HISTOTRE NATURELLE. 4og a. Leur saveur est extrémement acide. b. Ils se fondent et se volatilisent très-promptement en fumées blanches, sans laisser de résidu , quand on les met sur un corps chaud. . Ils se dissolvent en grande quantité dans l’eau, et celle-ci tristallise de nouveau par une évaporation spontanée, . Leur dissolution ne précipite pas celle d’acétate de plomb ni celle de nitrate d’argent, mais elle précipite le nitrate de mercure. Cependant quelque temps apres qu’on a mélé cet acide avec la dissolution d’acétate de plomb, on y trouve des cristaux en aiguilles, dont se représente des aigreltes. . La dissolution de cet acide, en partie saturée par la potasse, ne fournit point de sel acidule semblable à l'acide tarta- reux ; mais elle précipite sur-le-champ l'acétate de plomb, quoique l'acide concret sublimé nele précipite pas lorsqu'on l’emploie pur et isolé. La combinaison neutre de cet acide avec la potasse est déli- quescente , soluble dans l'alcool; elle ne précipite point les sels de baryte, ni ceux de chaux, comme le font les tar- trites alcalins. . La liqueur obtenue par la même opération que les cris- taux dont nous venons de parler , évaporée à une tres-douce chaleur, fournit aussi des cristaux qui ont des propriétés absolument semblables à celles des premiers. Il est évident, d’après l'exposé de ces caractères, que l'acide fourni par le tartre distillé n’est point de l'acide acétique, comme nous l’avons cru autrefois, ni de l'acide tartareux , ainsi que l’ont très-bien remarqué MM. Gehlen et Rose de Berlin, En effet, acide acéiique est plus volatil , plus odorant, ne ro ANNALES DU MUSEUM cristallise point par l’'évaporation , et sa combinaison avec la potasse ne précipite pas l'acétate de plomb, comme celle de l'acide qui nous occupe. L’acide tartareux précipite l'acétate de plomb, la chaux + la baryte; il forme un sel acidule peu soluble avec la potasse, et l'acide pyrotartrreux ne produit rien de semblable. Sj Fon compare aussi cet acide avec les autres acides végétaux ,on ne lui trouvera point d'identité avec aucun d’eux. L’acide tarta- reux , en se décomposant par le feu, donne donc naissance à un acide différent de tous les autres et de lui-même, et nous reconnoissons avec MM. Gehlen et Rose l'acide pyrotarta- reux comme un acide paticulier et différent de tous les autres. Dans l'intention de mettre cette vérité hors de doute pour les autres chimistes comme pour nous-mêmes, nous avons fait une expérience qui prouve sans réplique que l'acide pyrotar- tareux ne peut pas être du vinaigre dont les propriétés auroïent été changées par sa combinaison avec l'huile produite en même temps que lui. Nous avons distillé plusieurs fois de l'acide acétique très-concentré sur de l'huile, du tartre ; nous avons ensuite combiné cet acide, devenu par là très-empyreumatique, avec de la potasse , et distillé le sel qui en est résulté, avec de l'acide sulfurique un peu fort : nous n'avons obtenu par là que du vinaigre empyreumatique, qui ne jouissoit pas des pro- priétés caraëtéristiques de l'acide empyreumatique du tartre. Il ne faut cependant pas conclure de ces faits que dans au- cun cas l'acide du tartre ne ‘puisse être converti en vinaigre : cette conclusion séroiten: contradiction avec plusieurs faits qui passent pour bien avérés. On se rappelle en effet que Grosse, ancien pharmacien très-distingué de Paris, ayant abandonné une combinaison d'acide lartareux et de chaux , dans un flacon D'HISTOMRE NATIU MELLE. Lux fermé, avec de l'eau , la trouva transformée en acétate de chaux au bout de quelques mois. Nous croyons même que dans la circonstance qui nous occupe , il s'en développe aussi une petite quantité; et c’est celui-là qui nous a trompés. On le reconnoît à odeur piquante et aigre qui se manifeste quand on jette de l'acide sulfurique concentré sur le sel résultant de Punion de l'acide empyreu- matique du tartre avec la potasse; mais la quantité de cet acide acétique est si petite et ses propriétés sont si voisines de celles de l'acide pyrotartareux du tartre, qu'il nous a été impossible de les séparer lun de l'autre. Ces nouveaux résultats que nous avons obtenus , et l’'adop- tion définitive de lacide pyrotartareux comme acide parti- culier différent de l'acide acétique, ne doivent porter aucune atteinte à l'opinion que nous avons émise sur les acides py- romuqueux et pyroligneux. On se doute bien qu'à l’occasion de nos nouvelles recherches sur l'acide pyrotartareux, nous avons dû nous occuper encore de ceux que fournissent les bois et les mucilages. Nous nous sommes confirmés dans notre opinion à leur égard, et nous n’y avons trouvé que de l'acide ‘acéteux altéré par une huile empyreumatique. La même conclusion s'applique également à l'acide formique, qui contient beaucoup d'acide acétique déjà, reconnu avant uous par plusieurs chimistes habiles; mais au lieu d'acide ma- lique dont nous Pavons cru mêlé , nous avons reconnu que c’est de l'acide phosphorique combiné à une matière animale qui lui donne quelques-unes des propriétés appartenant à l'acide malique. Au reste nous reviendrons bientôt sur ce fait. Nous terminerons ce Mémoire en annonçant que nos expé- riences très-nombreuses et très-variées sur l’acidule tartareux , Lao ANNALES DU MUSÉOUM faites dans l'intention de reconnoitre le résultat annoncé ci- dessus , nous ont fourni quelques connoissances de plus sur la nature de cet acidule. Sans décrire tous les moyens que nous avons mis en usage pour reconnoître et séparer les différens corps qui existent dans ce sel , nous nous bornerons à dire que mille parties de tartrite acidule de potasse ou de crême de tartre, nous ont donné, par la distillation et sans compter le produit acide ni le charbon, 1.° 550 parties de carbonate de potasse très-pur et très-sec ; 2.° 6 parties de tartrite de chaux ; 3.° 1,2 de silice; 4° 0,25 d'alumine ; 5.° 0,75 de fer mêlé de manganèse. Le tartrite acidule de potasse de la plus belle qualité, est donc loin d’être un sel pur ; il contient aussi de légères traces de sulfate et de muriate de potasse. Le tartre brut recèle en- core plus de ces différentes matières. D'HIS TO LRE( NA CURE LIL E. 413 SECOND MÉMOIRE | SUR LES POISSONS. CONSIDÉRATIONS Sur l’Os FrurCULArRE, une des pièces dé'la Na- geoire pectorale. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. Dis notre précédent Mémoire nous avons fait connoitre l'os furculaire : nous avons indiqué sesrelations ayecles autres pièces delanageoire pectorale, et nous croyons avoir prouvé qu'il est analogue à l’une des deux branches de la fourchette des oiseaux : nous allons le considérer, dans cet article, sous le rapport des changemens qu'il subit dans les diverses familles de poissons ; ses nombreuses métamorphoses et ses divers usages présentent assez d'intérêt pour fixer un instant l'attention des physiolo- gistes. 11 paroït que les poissons osseux ne sont pas tous également pourvus de l'os furculaire : je n’en ai aperçu aucune trace dans la plupart des Jugulaires, dans quelques Thorachiques et dans les Apodes. Les espèces que j'ai trouvées dans ce cas sont tousles Blennius , Ÿ Uranoscopus scaber, le Cepola tænia, VEche- C4 53 b14 ANNALES DU MUSÉUM neis remora , les, Gasterosteus , le Gobius niger, le Mullus barbatus, Y Anarichas lupus et les Muræna. Je ne donne néanmoins ces observations qu’en faisant remarquer que l'os fur culaire, réduit quelquefois à à n'être qu’un filet grêle , pourroit avoir été émporté ave les-Chairs dans la formation des sque- lettes de ces animaux ; j'élève ce doute à cause de l’afünité de ces poissons avec les autres espèces des mêmes ordres, quoi- que je sache d’un autre côté qu'on ne sauroit prendre trop de confiance dans l'exactitude de l’estimable M. Rousseau, aide-naturaliste du Muséum d'histoire naturelle , chargé de faire ces sortes de préparations. L’os furculaire n’est le plus souvent’ qu’une épine à tête large et déprimée : il s'éloigne bien peu de cette forme dans les Chétodons, les Pleuronectes ,les Scorpènes,les Holocentres, quelques Labres, quelques Esoces , les Gades, les Cyprins, les Clupées, les Salmones et les Mormyres ; mais tantôt il montre plus de largeur et se voit sous l'apparence d’un tran- chant, comme dans le Lutjanus labriformis et le Labrus ni- loticus ; d'autrefois il ressemble à un fer de lance, tel que dans le Lutjanus polymmne et le Centriscus scolopax ; ou bien il est surmonté d’une tête extrêmement large et échancrée sur ses bords , ce qui est le cas de la plupart des Perches ; ou enfin , comme dans le Labrus cyanopterus , cette tête est in- clinée de côté sous un angle qu'elle forme avec le corps de la pièce. Dans la plupart de ces poissons l'os furculaire est placé en avant des côtes vertébrales : il leur est parallèle , et n’a souvent d'autre usage que de concourir à les mettre en mouvement. Ce mécanisme s'exécute, ainsi que je me suis attaché à le cons- tater particulièrement dans les Cyprins, au moyen de deux F2 D'HISTOIRE NATURELLE. 4x9 muscles carrés-longs qui proviennent de la clavicule et se portent sur le furculaire :l’un d'eux s'y termine; mais le se- cond, après y avoir fourni plusieurs attaches, se prolonge au- delà et va s'implanter sur tout le bord de la première côte. Si ces deux muscles se contractent, ils entraînent du côté de la clavicule, non-seulement l'os furculaire etla première côte où ils aboutissent et s’attachent, mais en outre toutes les côtes à la fois, attendu qu’elles sont liées les unes aux autres par une aponévrose. L'effet général qui en résulte est de ramener dans une di- rection perpendiculaire à la colonne épinière toutes les côtes naturellement un peu inclinées en arrière , d'augmenter par là la capacité de l'abdomen, de permettre à l'air contenu dans la vessie natatoire de se dilater, et de procurer en dernière analyse aux poissons une plus grande légèreté spécifique. La restitution des muscles du furculaire et la contraction des muscles dorsaux qui ramènent les côtes à leur incli- naison habituelle, sont les moyens dont se servent les pois- sons pour reprendre leur première pesanteur : à quoi, s'ils veulent descendre à pic au fond des eaux, ils ajoutent la contraction des muscles de l'abdomen ; d’où résulte une com- pression de tous les viscères , une forte condensation de l'air contenu, tant dans la vessie natatoire, que dans l'estomac et les intestins, et en général une diminution de volume qui les rend plus lourds que le volume d’eau qu'ils déplacent. Cette manière, qui n'est propre, d'expliquer l'influence de la vessie natatoire sur le balancement que le corps des pois- sons éprouve dans l’eau, indépendamment des organes du mouvement, ne pouvoit être appréciée tant que l'os furculaire et ses muscles restoient à connoitre. sat 416 ANNALES DU MUSEUM Il ne remplit pas toujours une fonction aussi déterminée : ainsi il est à peu près sans usage dans le Brochet, où je lai trouvé sous la forme d’une épine très-déliée. Les muscles ab- dominaux de ce poisson ne s'arrêtent point à los furculaire conne dans la carpe, mais se prolongent jusqu’à la clavicule, oùils s’'insèrent ; le furculaire n’est plus engagé dans leur masse: seulement, au moyen de tissu cellulaire, il est fixé à leur couche extérieure en travers des fibres musculaires; en sorte qu’il os- cille sur son axe, selon que ses fibres s’allongent ou se raccour- cissent. Je n’en ai point examiné les relations dans les autres espèces dont j'ai parlé ci-dessus, et dans lesquelles j'ai remarqué qu'il s'éloignoit de la forme d’une épine. Son utilité se manifeste davantage dans les Muges, où il donne appui aux os des nageoires ventrales. On ne connoissoit jusqu'ici que trois manières d’être relativement à la situation de ces nageoires : ou elles sont appuyées sur la clavicule et le sternum , comme dans les Jugulaires ; ou elles sont articulées uniquement avec la clavicule, ce qui est le propre des Tho- rachiques ; ou bien enfin elles sont engagées dans les chairs, caractère par lequel on distingue les Abdominaux. Cette qua- trième combinaison étoit inconnue , de sorte que, quand on vint à remarquer la position équivoque des nageoires ventrales des Muges , on ne sut dans quel ordre ranger ces poissons; ce qui est démontré par la place qu'ils ont successivement occupée parmi les Thorachiques et parmi les Abdominaux. L’os furculaire rend le même service dans quelques espèces de Chétodons, avec cette différence, qu’au lieu d’être attaché par son extrérmmié avec la tête des os des nageoires ventrales, DHISTOLRE NATURELELE. ka5 comme dans l'exemple précédent, il s'unit à ces os très-près du point où s'y attachent les nageoires. Les usages, ainsi que la forme du furculaire, varient dans les Lophies, parce qu'on a compris sous ce nom générique des poissons fort différens. Il concourt, dans la Baudroie, à ouvrir les ouies, et dans les autres Lophies, à les fermer. Si lon se rappelle ce que j'ai dit de la position du furculaire, on sera sans doute étonné de le voir figurer au nombre des pièces de l'ouverture branchiale: car la clavicule qui les sépare ordi- nairement semble un obstacle à leur rencontre. Mais une ano- malie vraiment remarquable opère cette réunion dans la bau- droie , et les rend nécessaires l'un à lautre. La membrane branchiostège n’est. plus ce simple rideau qui sétend sur la clavicule pour fermer la cavité pectorale : elle se prolonge beaucoup au-delà, accompagne tout le bras, qui est, comme on sait, d’une longueur considérable, se porte avec lui du côté de la queue, et longe dans sa route la région où se trouve l'os furculaire. Je ne me fus pas plutôt rendu compte de tout cet arrange- ment, que je ne doulai plus que los furculaire, qui n’a pas de fonction constante, et dont j'avois déjà reconnu la tendance à s’accommoder de tous les changemens qui surviennent dans l’organisation, ne füt entré en connexion ayec cette membrane et lié avec elle d'usage. Je l'avois vu dans le squelette sous la forme d’un filet tres-long , un peu raboteux et d’un diamètre presque égal dans toute sa longueur (1). Je lexaminai dans une Baudroie conservée dans la liqueur : quelle fut ma sur- prise quand j'eus constaté qu'il faisoit partie de l’un des plus (1) Voyez Lophius piscatorius, PI, 29. ! 418 ANNALES DU MUSEUM singuliers instrumens de pêche qu’il soit donné de trouver dans les poissons. Les noms vulgaires de grenouille péchense , martin-pécheur et raie pêcheresse, qu'on a donnés à la Baudroie , me per- suadent qu'on n’a pas toujours été dans l'ignorance de ses moÿens de pêche. Les naturalistes ont expliqué ces dénomina- tions en faisant remarquer que la Baudroie, qui est fort atten- tive à se cacher dans des touffes de plantes marines, a l’ins- ünct de faire surnager au dehors les trois filamens qu’elle a sur la tête, et de les agiter en différens sens, de manière à faire croire à un passage continuel de vers : de là on a dit qu’elle prenoit le poisson à la ligne. Montrons qu’elle le prend aussi à la nasse ou à l’épervier. La membrane des ouies n’est pas seule parvenue à l'éten- due dont nous avons parlé. Les six rayons branchiostèges sont tout aussi allongés ; ce qui ne pouvoit manquer d'arriver, puis- qu'ils n'existent qu’à son sujet et lui sont en toutsubordonnés : il en est alors de ces rayons comme de la membrane qu'ils soutiennent. Leur accroissement énorme fait qu'ils ne peuvent plus remplir leurs fonctions habituelles; mais il y est sup- pléé par un mécanisme équivalent. L'opercule, pièce qu’on a jusqu'ici méconnue dans les Lophies et qui ne manque dans aucun poisson osseux ; recouvre avec une partie de sa face inférieure le large bord de la clavicule; de manière que Veau, pressée dans la cavité pectorale , éprouve pour en sortir la même résistance qu'entre les rayons branchiostèges lorsqu'ils sont employés dans les autres poissons à clorre l’ou- verture des ouies. Pour avoir une idée de ce que vont devenir les rayons bran- chiostèges , je dois faire connoïtre la manière dont le furculaire D'HISTOIRE NATURELLE. 419 leur est associé : d’abord il leur est en tout semblable, il leur est aussi parallèle, et enfin il se termine au point où ils cessent de se prolonger ; il n’a cependant que moitié de leur longueur, parce qu'il naît de la clavicule , et que les rayons branchios- tèges viennent de beaucoup plus haut. Ceci connu , on a peut-être déjà deviné les usages du fur- culaire. Il est destiné à soutenir la membrane branchiostège du côté du dos avant qu’elle aille se confondre avec les tégumens communs. Ses muscles sont disposés de manière à lécarter de ce même côté, tandis que ceux de la membrane branchiostège déploient les rayons des ouies et les éloignent en sens contraire. Quand ces muscles agissent simultanément, ils tendent de toute part la membrane branchiostège ; ils en ouvrent la bouche extérieure ou l'ouverture branchiale : ils la font enfin apparoître sous la forme d’une bourse ou d’un grand sac dont la profondeur égale presque la longueur de l'abdomen. Que l'animal se serve de ces sacs ou de ces espèces de nasses qu'il a sous les bras pour prendre du poisson, je n’en saurois douter d’après une observation que j'ai faite sur une petite Baudroie (1) : jai retiré de son grand sac branchial une sole (>) qui y étoit (1) Je connois quatre espèces de Baudroïe toutes publiées, mais confondues sous le nom de Zophius piscatorius. Celle de la Méditerranée, parfaitement figurée par Salviani, n'arrive jamais à une grande taille. (2) M. Pichon, que le Muséum d'histoire naturelle s'est adjoint pour corres- pondant et qui a mérité celte distinction par de nombreux envois d'animaux marins qu'ils nous a faits, a eu la bonté de m'écrire de Boulogne, sous la date du 22 mars dernier, qu’il a aussi trouvé des poissons dans le grand sac branchial d’une baudroie, Il m’a informé en outre qu’au moment où il fit celte trouvaille, il fut visité par un marin qui lui dit savoir que la baudroie se servoit de oe sac pour meitre sa pêche en réserve. 420 ANNALES DU MUSEUM entrée par la tête et qui y avoit été engloutie du vivant de la Baudroie , autant que j'en ai pu juger par l'état parfait de conservation des deux poissons. Les rayons branchiostèges remplissent ainsi à l'égard de ce singulier instrument de pêche l'oflice des cerceaux dans les nasses des pêcheurs. La Baudroie ferme à volonté cette espèce d'épervier au moyen de son bras, qu'il lui suffit pour cela de rapprocher du corps. Ce mouvement entraine les rayons, plie et resserre la membrane branchiostège , et étend en quel- que sorte autour du poisson qui a donné dans le piége, une enveloppe qui lui ôte tout moyen de faire aucun mouvement: il est alors à la discrétion de la Baudroie, qui ne manque pas de le frapper rudement avec son bras, et qui sans doute ne le laisse échapper qu'après l'avoir étourdi, fatigué et mis hors d'état de fuir : c’est vraisemblablement le moment qu’elle choi- sit pour l’engloutir dans son énorme gueule. Je reviens à l'os furculaire. Il est plat, lancéolé dans les autres Lophies ; j'ai dit que dans celle - ci il servoit à fermer l'ouverture branchiale. Voici comment. La membrane bran- chiostège , sans être accompagnée de ses rayons, se prolonge tout autant que dans la Baudroie. L'ouverture branchiale est située à une distance égale et vers le point où aboutit le fur- culaire. Elle est fort étroite, terminée par une peau flasque qui fait fonction de soupape à l'égard du liquide ambiant , et de plus garnie dans son pourtour de fibres musculaires qui s’in- sèrent sur le furculaire. Ces fibres, agissant à la manière d’un sphincter , diminuent au gré de l'animal le diamètre de cette ouverture (1). (1) Dans la Lophie Faujas, le Lophius stellatus de M. Wabl, le Lophius ves- D'HISTOIRE NATUREÆLLE. hox Dans les autres Branchiostèges, qui, aussi bien que ceux dont nous venons de parler, sont à peu près tous dépourvus de côtes vertébrales, l'os furculaire devient une pièce d’un très- grand intérêt , en ce qu’elle supplée à l'absence de ces côtes et donne, à leur défaut, attache aux muscles de l'abdomen. Il falloit alors qu’elle fût , et elle est en effet, beaucoup plus forte et plus robuste que dans les Thorachiques et les Abdo- minaux. C’est pour l'avoir vue dans un développement extraor- dinaire et dans un usage très-compliqué, lorsque je n’occu- pois d'examiner de nouveau les viscères du Tétrodon du Nil, que j'ai désiré en connoître la forme et les relations générales dans l’ensemble de l'organisation , et que j'ai été entrainé dans les recherches dont je publie aujourd’hui les résultats (1). Ayant eu en Égypte à ma disposition un grand nombre de Tétrodons du Nil, j'ai souvent eu occasion d'apprécier les divers usages de leurs furculaires. Ils s'étendent tout le long des deux branches de la vessie natatoire, et quand ils sont entrainés par la contraction de leurs muscles à se porter Jun vers l’autre et qu'ils se rapprochent à leur extrémité libre, pertilio et plusieurs autres espèces nouvelles, les deux ouvertures des ouies sont si étroites, que les eaux provenant de la cavité pectorale ont, en quelquesorte, besoin de s'ouvrir un aulre passage. Cette troisième ouverture, pratiquée au travers du crâne , s’apercoit entre les narines. M. de Lacépède l'a mentionnée en parlant de la Lophie Faujas; elle est également fournie d’une soupape consistante en une mem- brane de forme irrégulière, et que la pression du liquide ambiant applique dans la cavité qui la contient. J’avois, à l’occasion de cette note, dans ce Mémoire que j'ai déposé aux archives de l’Institut, proposé une division en cinq genres des Zophius, dont je connois plus de vingt-cinq espèces. Je reviendrai sur ce sujet dans une monographie de ces ani- maux que je ne larderai pas à publier, Dans ce nombre ne sont compris, ni le Lophius Fergusson, espèce à supprimer et qui n’avoit été établie que d’après un dessein inexact d’une Baudroie , ni le Lophius dubius, qui est un Couus. (1) Voyez cette pièce, article T'esraodon fahaca , pl. 29. o 5! 422 ANNALES DU MUSEUM ils poussent la vessie natatoire sur le col de l'œsophage, qui demeure exactement fermé par cette pression. Tout, dans ces singuliers animaux , est dans un ordre renversé : ainsi c’est l’es- tomac lui-même qui fait fonction de vessie natatoire , dans ce sens qu'il se remplit d'air. Il se porte à un tel développement et se gonfle à tel point, que toutes les autres parties du poisson disparoissent sous le volume énorme qu'il prend alors. Le Tétrodon n’est plus-qu’un sphéroïde qui cesse de participer aux mouvemens volontaires des animaux , qui obéit, comme toute masse inorganisée , aux seules lois de la gravitation, que le poids de la colonne vertébrale renverse sur le dos, et qui reste flottant sur l'eau commeune vessie qui y auroit été abandonnée. Dansun autre Tétrodon (le Poisson-Lune, Tetraodon mole, L.), mais que M. Cuvier regarde avec raison commeletype d’un nouveau genre, l'es furculaire reçoit une nouvelle et bien sin- gulière destination. Ce branchiostège est privé précisément de l'organe dont la nature a été la pluslibérale envers les poissons, dont elle a porté les dimensions au plus haut point, et dont enfin elle a fait le principal instrument du mouvement pro- gressif, c’est-à-dire, de la queue et même de toute vertébre coccygienne. Borné aux seules nageoires de la poitrine , du dos et de l'anus, il a fallu qu’il les trouyät plus fermement conso- lidées pour être à même de les employer avec plus d'énergie que ne le font ordinairement les poissons. C’est ce qui ne pouvoit arriver à l'égard du membre pectoral, que nous avons dit couché le long de la clavicule, et attaché seulement par un des bords de la lame dont il est formé, surtout dans une es- pèce qui appai tient à une famille confondue jusqu'ici avec les cartilagineux, et dont les muscles n’ont que des os minces et flexibles pour soutien. Une telle nageoire , dans une position aussi vacillante , auroit cédé sous l'effort que la résistance de = D'HISTOIRE NATURELLE. Lo 3 Es Veau lui eût opposé, si elle n’eût été bridée et retenue à son bord cubital ; c’est à quoi pourvoit l'os furculaire : il est con- formé comme un hamecon présentant à son extrémité libre un crochet dans le milieu duquel l'angle de la nageoire, opposé à la clavicule, s'insère et trouve une assiette solide (1). Dans les Balistes , autre genre de la famille des Branchios- tèges , les deux furculaires , de concert avec l'unique pièce qui remplace les os des nageoires véntrales, forment la charpente solide de la cavité abdominale : selon que les muscles qui se portent de la base de la nageoire anale sur ces os et la clavi- cule se contractent ou se rétablissent , les furculaires pressent les viscères de cette cavité ou s’en écartent. Je n’ai pas été à même de suivre ces recherches dans d’autres branchiostèges: j'en ai d'autant plus de regret que j'aperçois qu'il ny a pas un genre de cette famille où l'os furculaire ne présente une configuration extraordinaire. Toutefois ce n’est pas chez les seuls Branchiostèges qu'on rencontre cette pièce osseuse dans un état singulier et digne de piquer la curiosité du naturaliste ; les Thorachiques et les Abdominaux en offrent aussi des anomalies très-remarquables. Ainsi, dans un nouveau genre voisin des Sciena et des Scarus, auquel appartient le Scarus siganus de Forskaël(1), et dont j'ai trouvé une nouvelle espèce dans la mer Rouge, les os furculaires sont dans un état d’anomalie si singulier, qu’on a en quelque sorte besoin d'en justifier, en les montrant dans le squelette: aussi longs que l'abdomen et beaucoup plus épais , plus forts et plus robustes que dans aucun autre thorachique, ils descendent du bras en se courbant en arc, et vont s'appuyer sur la (1) Voyez Tetraodon mola, pl. 2ge (2) Voyez planche 29. Sa 424 ANNALES DU MUSÉUM pièce qui soutient la nageoire anale. Les Siganus (tel est le nom de ce nouveau genre dans mes manuscrits } sont des poissons orbiculaires, très-comprimés latéralement et surtout remarquables par la mollesse de leurs chairs ; leurs viscères et muscles abdominaux n'étant soutenus ni par les côtes beau- coup, trop courtes, ni par la peau qui est mince, ni par les écailles si petites qu'on les distingue diflicilement à l'œil simple. Mais ces imperfections sont” rachetées par une ceinture de pièces osseuses qui bordent tout le pourtour des Siganus et sur lesquelles sont appuyées et comme bandées toutes les par- es molles. On conçoit alors la nécessité de l'extrême longueur des furculaires; ils complètent cette sorte d'encadrement vers l'arête abdominale. 11 y a en effet dans le pourtour des Siganus ane telle tendance à l’ossification, que non-seulement la plus grande partie des nombreux rayons de la nageoiïre du dos et de celle de anus sont osseux , mais que de plusles deux rayons extrêmes de chaque nageoire ventrale sont dans le même cas, combinaison assez singulière qui n’a, je pense, encore étéaper-- çue dans aucun aulre poisson. Le Centriscus scolopax présente un système d'encadrement analogue , à l'exception que la portion du cadre qui borde l'arête abdominale est fournie par deux pièces osseuses, autres que les furculaires ; la première, qui forme un peu plus de moitié de la longueur de l'abdomen, est analogue à la pièce unique qui remplace dans les Balistes les os des nageoires ventrales , et la seconde, en partie cartilagineuse, paroït pro- venir des os qui soutiennent les rayons de la nageoïre anale, Au moyen de cet arrangement , l'usage des furculaires qui se réu- nissent à l'extrémité de la première pièce de l’arête abdominale, se borne à suppléer à l'absence des côtes et à flanquer les viscères; à quoi contribuent pareillement les humérus qui se portent D'HISTOIRE NATURELLE. 425 etse joignent ensemble vers le milieu de.cette même pièce (x). Un autre arrangement produit dans le’ Zeus vomer une pa- reille disposition. C’est le seul poisson que je connoisse qui ait les côtes vertébrales prolongées au point de se rencontrer et de s'unir à l’arête de l'abdomen. Les furculaires et les hu- mérus eux-mêmes sont dans le même cas. Toutes les côtes , les furculaires, les humérus et les clavicules, sont à des distances à peu près égales et dans un parallélisme parfait, de manière à former autour des viscères abdominaux un coffre entière- ment fermé de toutes parts : c’est-ainsi que nos os furculaires se trouvent accommodés à ces nouvelles circonstances et bornés à la seule et même utilité que les côtes (2). Cette organisation diffère entièrement dans le poisson Saint- Pierre (Zeus faber), placé d'abord dans le même genre quelle Zeus vomer, mais que M. de Lacépède a déjà prouvé en devoir être séparé. Les côtes du poisson Saint-Pierre sont extrémé- ment petites ; mais en revanche ses os furculaires ont acquis une très-grande dimension : ils servent d'appui, non-seule- ment aux muscles abdominaux , mais encore à la peau elle même ; aussi sont-ils quadrangulaires. Les tégumens communs. adhèrent en effet si fermement à leur face externe, qu’on: aperçoit en dehors le relief de ces os, n’offrant pas cependant assez de saillie pour qu’on ait été autorisé à les figurer comme pièces de l'extérieur du poisson , ainsi que le montrent les plan- ches 41 del’Icthyologiede M. Bloch et 39 de l'Encyclopédie mé- thodique. La face antérieure du furculaire et celle de derrière sont creusées en gouttière et raboteuses pour offrir des attaches plus muluipliées et plus solides aux muscles qui s'y insèrent. (1) Voyez la figure relative à cette espèce, pl. 29. (2) Voyez Zeus vomer, pl. 20, 426 ANNALES DU MUSEUM La derniére déviation des os furculaires que nous ayons à considérer a lieu dans les Silures épineux. On peut dire qu'iciles anomalies renchérissent les unes sur les autres. Ces os , cons- tamment enveloppés sous les tégumens communs, et quijusqu’à présent ne nous avoient paru offrir qu’une base plus ou moins ferme pour des attaches musculaires, affranchis de toute entrave et libres au dehors destégumens, sont transformés dans ces Silures en une puissante armure qui leur inspire l'audace de provoquer le Crocodile. Dans le Nil, où ces animaux sont souvent en présence, c’est le Crocodile qui fuit les Silures, ob- servation faite avant nous par les anciens et consignée dans Strabon. . On a jusqu'ici parlé de cette armure sous le nom d’épine, de rayon épineux ou de premier rayon de la nageoiïre pec- torale : on l’a prise pour un rayon, c’est-à-dire, pour un os- selet de la main , parce qu’elle accompagne la nageoire, qu’elle lui fournit même un point d'appui et qu’elle en règle lesmouvemens. M. de Lacépède (1) a le premier fait connoître sa singulière articulation et l'obligation où elle est de tourner d’abord sur son axe avant de se fléchir ou de s’abaisser. Je prouve qu’elle est vraiment analogue à los furculaire, dès qu’on aperçoit en dehors tous les os du bras, qu’elle a son extrémité articulaire enchässée dans la clavicule (2) , qu’elle est mue par des muscles propres et distincts de ceux de la nageoire, et qu'il n'y a dans le voisinage aucune saillie ou apo- physe qu’on puisse lui attribuer. Pour que cette preuve soit complète, il faut que les Silures, privés d'épines ,nous montrent sous les tégumens los furculaire. Je l'ai cherché dans le Silure (x) Histoire naturelle des Poissons, om. V, p. 63. (2) Observation de M. Cuyier, Leçons d'anatomie comparée, rom. I, p. 534. D'HISTOIRE NATUREL L E. 427 électrique, dontlanageoire pectorale n’est formée que de rayons flexibles , et je l'y ai en effet trouvé :il y est petit, grêle et soudé vers les deux bouts. CONCLUSION. Les faits principaux qui me paroissent établis par cette série d'observations , sont: 1.° Que l'os furculaire n’est conservé dans les poissons osseux que parce qu'ils sont formés sur le même type que les oiseaux, mais que d’ailleurs il n’y joue qu’un rôle très-secondaire , les poissons pouvant s’en passer ; ce que font la plupart des Jugu- laires, et ce que montrent même aussi certains Abdominaux où los furculaire est si grêle et si délié qu’on ne sauroit lui attri- buer d'influence ; 2.° Que son peu d'utilité dans son emploi ordinaire est en outre prouvé par sa facilité à se lier d'usage avec les organes de son voisinage qui sortent de leurs formes et de leurs rela- tions habituelles ; 3° Qu'il tient généralement lieu d’une côte de plus, et em remplit les fonctions ; 4° Que son existence est tellement liée à celle des côtes, qu'il disparoit, quand celles-ci peuvent se sufire à elles-mêmes, ou qu'il acquiert de très-grandes dimensions quand elles sont trop petites où manquent entièrement; il les supplée dans ce cas et recoit en eflet une disposition qui lui permet d'offrir un point fixe aux attaches des muscles de l'abdomen; 5, Enfin, qu'il s'élève ainsi quelquefois au rang d’organe de première importance, dès que la machine dont il est un des principaux rouages , cesse d’agir sans son concours. (Lu à l'Institut de France le 23 mars 1807 ). 428 ANNALES DU MU SÉ!UM SUR LES ESPÈCES DES ANIMAUX CARNASSIERS Dont on trouve les ossemens mélés à ceux d'ours, dans les cavernes d'Allemagne et de H ongrie. PARA COCO VITE R: 1. D'un animal du genre de l'ayÈxe. J'u déjà fait connoître dans mon article particulier sur l’Ayène fossile , qu'on en a trouvé les os dans la caverne de Bau- mann et dans celle de Gaylenreuth. J'en ai à présent de nouvelles preuves à donner pour ce dernier endroit. Planche TI, figurer, est un côté de mächoire plus complet que ceux que jai représentés ci-devant, mais offrant absolument les mêmes caractères. Je l'ai retiré moi-même d’un groupe de Gaylenreuth, qui n'avoit été donné par l'habile naturaliste M. de Roissy , et qui contenoit une multitude d’autres os, surtout d'os d'ours. On y voit les quatre mächelières un peu cassées , le condyle articulaire, et tout le bord inférieur bien D'HISTOIRE NATURELLE. 429 entiers. Il n'y a de mutilé que l'extrémité antérieure et l'apo- physe coronoïde. Les quatre mâchelières occupent une longueur de 0,092 , à peu près la même que dans le morceau de F'ouvent. La figure 2 est un fragment venu du même lieu et remar- quable par la grandeur de l'individu auquel il a appartenu. En prenant la largeur de l'os mandibulaire d'a en b pour terme de comparaison, on voit qu'il a dù étre à notre plus grande hyène du levant, comme trois à deux. Aussi étoit-il fort âgé : sa dernière molaire inférieure est usée à sa face externe, par le frottement contre la supérieure. La figure 5 est une quatrième ou principale molaire supé- rieure , encore du même lieu, dont M. Blumenbach a bien voulu m'envoyer le dessin. 2° D'un animal du genre du iere ou du 110N,. Un très-grand animal du genre des felis a également laissé de nombreuses dépouilles dans ces cavernes. On en trouve des preuves pour celles de Hongrie, dès le Mémoire de Vollgnad (Ephem. nat. Cur, an. IV, dec. I. Obs. CLXX., p. 227 ). La figure B de la planche jointe à ce mémoire représente à coup sûr une phalange onguéale de ce genre, aisée à reconnoître par sa grande hauteur verticale, son peu de longueur , la grande gaine de sa base et la grande saillie de la partie mférieure de son articulation. Pour la caverne de Schartzfels, on a la portion de crâne représentée par Leïbnitz dans sa Protogæa, pl. XI, fig. x, Ce morceau , qui se trouve encore au cabinet de l'Université 0. 55 430 ANNALES DU MUSÉÈUM de Gœættingen , a été soumis à un nouvel examen par le ce- lèbre anatomiste M. Sœmmerring, qui l'a fait dessiner plus exactement et qui la comparé avec un cräne de l'ours des cavernes et avec celui d'un lion ordinaire. Son Mémoire à ce sujet, imprimé dans le Magasin pour l'histoire naturelle de l'homme, de M. C. Grosse, tome ILE, cah. I,ne 3,p. 6o, est un chef-d'œuvre de précision. Il y assure que ce crâne s’est trouvé ressembler entièrement à celui d’un lion de moyenne taille, et différer de celui de l’ours des cavernes par trente- six points différens, qu'il expose séparément ; mais la plupart de ces points appartiennent en commun à tout le genre felis, autant qu’à l'espèce du Zion en particulier. Pour la caverne de Gaylenreuth , on voit déjà dans E'sper plusieurs dents qui ressembleroient bien à celles d'un felis, si l'on étoit sûr qu’elles eussent été bien dessinées ; mais les dif- férences de quelques-unes de ces dents et de celles de l’hyène tiennent à des nuances si délicates, qu’elles ont pu échapper à un peintre ordinaire. M. Rosenmüller nous annonce aussi, p. 11, qu'il fera bien- tôt paroître un ouvrage qui contiendra la description des os d'un animal inconnu de la famille du lion; et, p. 19, il ajoute que ces os ne sont pas exactement semblables à ceux du lion actuel, En attendant , il donne déjà, sans s’en apercevoir, trois os de ce genre, qu'il a laissé glisser, comme nous l'avons dit ci- dessus, parmi ceux de l'ours ; savoir ; le scaphoido-semilu- aire , le cuboïde du pied de derrière, et le premier cunéti- forme; mais si ses figures sont de grandeur naturelle, lin- dividu doit avoir été d’une taille prodigieuse; et c'est ce que les autres ossemens que j'ai pu examiner ne confirment point. D'HISTOIRE NATURELLE. h3x En effet, j'ai moi-même à produire quelques morceaux nou- veaux tant de Gaylenreuth. que d’autres endroits. Les deux premiers sont des dents isolées. Figure 3, plancheIÏ, est la seconde molaire d’en haut d'un felis ; figure 4 est la troisième ou principale d'en haut: June et l’autre de Gaylenreuth. La figure 6 est la même dent, vue du côté interne, mais de la caverne d’'Altenstein. J'en dois le dessin à la complai- sance du célèbre M. Blumenbacl. En comparant ces deux figures avec la cinquième, qui re- présente la dent analogue de lhyène, on saisira bien leur ca- ractère distinctif. Le bord du lobe postérieur &, qui est le plus large , forme une pointe proéminente dans les felis : il est tron- qué obliquement dans l’hyène. Mon troisième morceau , qui est le plus considérable, est encore de Gaylenreuth; c'est une demi-mâchoire inférieure du cabinet de M. Adrien Camper, dont je donne le dessin tel qu'il a bien voulu me lenvoyer, fait par lui-même avec la scrupuleuse exactitude qui caractérise les ouvrages de ce savant anatomiste , comme ceux de feu son illustre père (planche I, figure 7). Il ne manque à ce morceau qu’une dent et le condyle. C’est bien la demi-mächoire d’un felis. La dent postérieure bilobée et sans talon, le vide en avant de l’alvéole de l’anté- pénultième , la direction du bord inférieur , la position des trous mentonniers , ne laissent aucun lieu d’en douter. Sa com- paraison avec la figure 1 de la même planche, donne occa- sion de bien apprendre à distinguer cet os dans les felis et dans les kyenes. Les quatre mâchelières de celles-ci, le talon de la Dour 432 ANNALES DU MUSÉUM dernière, la convexité du bord inférieur ne les laisseront jamais confondre. Mais lorsqu'il s’agit de déterminer de quelle espèce de felis cette demi-mächoire de la figure 7 se rapproche le plus, la chose n’est pas si aisée : j'ose dire qu’elle seroit impossible sans les moyens nombreux de comparaison que j'ai eu le bonheur de réunir. Or ces moyens m'ont démontré et démontreront de même à quiconque voudra les employer , que ce morceau ne vient ni du Zion, ni de la Zionne, ni du tigre, encore moins du léopard et de la petite panthère des montreurs d'animaux ; mais que si l'on vouloit le rapporter à une espèce vivante, ce seroit au seul raGuAR, ou grande panthere œillée de l Amé- rique Méridionale, qu'il ressembleroit le plus, surtout par la courbure de son bord inférieur. | Les idées peu exactes que l’on a jusqu'ici sur les diverses espèces de grands felis , feront peut-être douter de ce résultat ; mais les caractères de ces animaux et leur ostéologie feront l’objet d’une dissertation séparée qui lèvera toutes les difficultés. Elle seroit un peu trop étendue pour entrer ici sous forme de digression. 3° D'un animal du genre du roue ou du cmiex. Voici la première fois que je trouve parmi des fossiles des ossemens qui ne se distinguent en rien de ceux d'animaux en- core aujourd’hui habitant à la surface du même pays; mais c'est dans un genre où la distinction des espèces par les seuls os isolés est presque impossible. Daubenton a déjà dit combien le squelette d’un loup est D'HISTOIRE,NATURELLE. 433 difficile à distinguer de celui d’un mâtin ou d’un chien de berger de même taille. Plus intéressé que lui à en trouver les caractères, j y ai travaillé long-temps, en comparant avec soin les têtes de plusieurs individus de ces races de chiens avec celles de plusieurs loups. Tout ce que j'ai pu remarquer, c’est que les loups ont la partie triangulaire du front en arrière des orbites, un peu plus étroite et plus plate, la crète sagitto-occipitale plus longue et plus relevée, et les dents, surtout les canines, plus grosses à proportion ; mais ce sont des nuances si légères, qu'il y en a souvent de beaucoup plus fortes d’individu à individu dans une même espèce , et que l’on a de la peine à s'empêcher de penser, comme l'a fait Daubenton , que le chien et le loup sont de la même espèce. L'existence des os de loup dans les cavernes de Gaylen- reuth a été annoncée par Esper, dès son premier ouvrage ; il en donne une portion de mâchoire supérieure , planche X, figure &, et trois canines, planche V, figure 3 et 4 ,et planche XII, figure 1. Il ajoute dans son second Mémoire, qu’on y a trouvé des crânes de grandeur ordinaire, presque autant que de ceux d'ours , mêlés avec des cränes de chien de même gran- deur et avec d’autres plus petits ; mais je doute bien fort qu'Esper ait eu assez de connoissances en anatomie comparée pour discerner les cränes de loups de ceux des chiens. M. Rosenmuller reconnoit aussi que les os de la famille du loup se trouvent à Gaylenreuth dans le même état que ceux d'ours, et qu'ils y ont été déposés à la même époque. M. Fischer nva envoyé le dessin d’une de ces têtes de loup, prise de Gaylenreuth et conservée au cabinet de Darmstadt. La figure 1 de la planche IL en est une copie diminuée d’un tiers. 134 ANNALES DU MUSEUM C'est plutôt la tête d’un loup que celle d’un chien par l'élé- vation de la crète sagitto-occipitale; mais si l'on peut s’en rap- porter au dessin, la face seroit plus longue à proportion du cräne que dans le loup commun. Le museau seroit aussi plus mince, absolument parlant. ° J’engage donc les personnes qui auront à leur disposition de ces cranes de loups fossiles , d’en faire une comparaison soignée; avec des mesures exactes, elles pourront peut-être y trouver quelque caractère spécilique constant. Je n’ai eu sous les yeux que des mâchoires inférieures. Notre Muséum en possède quatre dont je donne les trois plus en- üères, planche IL, figure 2 , 3 et 4. Elles viennent toutes de Gaylenreuth. J’en ajoute (fig. 5) une du même lieu du cabinet de M. Camper. Tous ces morceaux ressemblent tellement à leurs analogues dansles loups et les grands chiens , que l’œil a peine à y trouver des différences, même individuelles. La branche montante , fig. 2, ressemble cependant plus au chien qu’au loup , parce qu’elle est plus petite à proportion , et que le condyle articu- laire y est plus gros. La fosse pour l'insertion du muscle mas- seter , est aussi plus étroite et plus profonde: mais, je le répète, ces caractères sont si foibles qu'on n'oseroit les proposer comme distinctfs, si l’analogie des autres animaux fossiles ne nous autorisoit à croire qu'il y avoit aussi pour celui-ci des différences spécifiques. Au reste, si ces différencesnesont passuflisamment prouvées, l'identité d’espèce ne l’est pas non plus par cette ressemblance de quelques parties. Les différentes espèces du genre du chien, les divers re- nards, etc., se ressemblent tellement par la taille et la figure, D'HISTOIREUNATUR EL LE. 435 qu'il seroit fort possible que quelques-uns de leurs os fussent indiscernables. Il est bon de remarquer ici que ces os, quels qu'ils soient, sont dans le même état que ceux d'ours, de félis et d'hyène; même couleur , même consistance, même enveloppe : tout annonce qu'ils datent de la même époque, et qu'ils ont été ensevelis ensemble. J’ai retiré moi-même d’un bloc de tuf pétri d'ossemens la dent, fig. 6 , pl. IT, et l'os du métacarpe du pouce, fig. o et 10. Celui-ci ressemble aussi en tout à son analogue dans un loup ou dans un grand chien. Cette espèce de loup s'est trouvée, comme celle de l'hyène, avec des ossemens d’éléphans. M. Jæger m'a envoyé le dessin de sa principale molaire inférieure trouvée à Cantstadt, pl. IT, fig 7, et M. Camper, celui d’une dent de même sorte trouvée à Romagnano dans le lieu où se sont trouvés les os d'éléphans décrits par Fortis. M. Esper dit aussi qu'il yavoit de cestêtes de loup à Kazl- dorf, dans le pays d'Aichstædt, dans la fouille où fut prise la tête d’hyene décrite par Collin: , et dont j'ai parlé ailleurs. 4° D'un animal fort voisin du RENARD , si ce n’est le RENARD : je \ lui-même. M. Rosenmüller pense que les ossemens de renard de Gay- lenreuth sont , ainsi que ceux d'homme, de mouton et de blai- reau, beaucoup plus modernes que ceux d'ours, parce qu'ils sont mieux conservés. Il est possible qu’il y en ait en effet aussi de tels ; mais ceux dont je vais parler ne sont point dans ce cas. Ils étoient pétris 156 AIN NALIES DU MUSÉUM dans le mème tuf que ceux d'ours et d'hyène; je les en ai retirés moi-même : et ils ne sont pas moins altérés que ceux- là dans leur composition. S'ils sont plus blancs, c'est peut- être même parce qu'étant plus petits, les causes qui pouvoient les priver de leur matière animale ont agi sur eux avec plus de force. Il faut qu'ils y soient communs; car j'ai tiré tous ceux dont je vais parler, d’un bloc de quelques pouces de diamètre, composé en grande partie d'os d'ours et d’hyène : mais ceux qui ont fait des fouilles dans ces cavernes n’ont été frappés que des grands os et ont négligé les petits, qui ne sont cepen- dant ni moins curieux, ni moins importans pour la solution du grand problème des os fossiles en général. Mes os de renard se réduisent donc aux suivans : 1.0 Une incisivé inférieure externe, pl LE, fig. 8. 2.° Une canine inférieure, fig, 9. 3.° Une phalange onguéale, fig. 10. 4x Une phalange intermédiaire, fig. 1x. 5. Une première phalange, fig. 18. 6° Une phalange du vestige de pouce des pieds de derrière, fig. 12. 7°. Un premier 'os, du métatarsé, fig. 15 et 16. 8.° Un os cunéiforme du carpé, fig. 13, a et b. 9° Un premier cunéiforme du tarse, fig. 19 et 20. 10° Un deuxiéme cunéiforme du tarse, fig. 21 et 22. 11 Une vertébre du milieu de la queue , fig. 17. 1 2.” Plusieurs os sésamoïdes. Je rapporte encore à cette espèce la canine représentée dans Esper , tab. X} fig. e: Tous ces os comparés à leurs analogues dans un squelette . F D HISTOIRE NATURELLE. 435; de renard adulte, se sont trouvés un peu plus grands; celui du métacarpe étoit surtout un peu plus long sans étre plus gros : mais ces différences ne sont pas assez fortes pour établir une différence d’espèce. D'un autre côté les différens renards , comme le corsac ,l'isatis, le renard du Cap ( C.mesomelas), les deux d'Amérique ( €. virginianus et cinereo-argenteus), se ressemblent trop par le port pour que l’on puisse croire que ces parties du squelette, qui en général ne sont point très-carac- téristiques , offrent des différences plus grandes que celles que j'ai observées dans ces os de renard fossile. Il reste donc à exhorter les personnes placées près des ca- vernes, à se procurer quelques autres os de cette espèce , et surtout des crânes, pour qu’on puisse en reprendre la com- paraison. D'après ce que je puis juger, sur un squelette incomplet de chacal que j'ai à ma disposition, je ne serois nullement étonné que ces os ressemblassent plus à cet animal qu’à notre renard commun. 5° D'un animal du genre de la warre et ressemblant au PUTOIS D'EUROPE, GinSi QU'au ZORILLE OU PUTOIS DU Car. Le méme bloc qui m’a donné les os du genre du renard que je viens de décrire , m’en a fourni d’un carnassier beaucoup plus petit: ils consistent en, 1.0 Une portion de bassin comprenant l'ischian et le pubis, pl IL, fig 1x. 2.° Les deux os les plus extérieurs du métatarse, fig.13 et 14, 3.0 Une phalange de la seconde rangée, fig. 15. 9 56 L 438 ANNALES DU MUSÉUM 4.° L'avant-dernière vertèbre dorsale, fig. 12. 5.° Deux vertèbres de la queue, fig. 16 et 17. Ce sont bien certainement des os de marte, et parmi les martes dont j'ai le squelette à ma disposition, il n'y a que le putois d'Europe et le zorille ou putois du Cap de Bonne- Espérance auxquels on puisse les rapporter. La marte, la fouine, ont surtout les os du métatarse incom- parablement plus longs. Ils sont dans le zorille et dans le putois entièrement sem blables aux échantillons fossiles. La vertèbre dorsale est moins longue et plus grosse que daus le Putois; elle ressemble à celle du zorille , et ce rappro- chement me frappa d’abord singulièrement, vu que les os d'hyène de ces cavernes ressemblent aussi beaucoup à ceux de Yhyène tachetée, qui vient du Cap comme le zorille. Mais le fragment de bassin me ramena au putois d'Europe, auquel il ressemble plus qu'au zorille. Ainsi je n’osai pas établir une proposition qui m’avoit séduit abord , que c’est vers le Cap qu’il faut chercher les animaux fes plus semblables à ceux de nos cavernes. IL est encore bien intéressant qu'on recueille davantage de ces petits os, et qu'on les compare aussi à ceux du putois de Pologne ou pérouasca (must. sarmatica), et à ceux de la zibelline et de la marte jaune de Sibérie ( M. sibirica). Je n'ai pas eu jusqu’à présent les squelettes de ces trois espèces. Au reste, conime ceux qui ne connoissent le zorille que d'après Buffon et Gmelin , pourroïent être étonnés de nen- tendre dire que c’est une marte, et une marte africaine, il est nécessaire que j'entre à cet égard dans quelques éclair- cissemens. CE rend del . 0 PA “ L . # . * Sel . FAN es mer + {Il | CARNASSIERS fossiles . Z. Couat-cenfr À \ Er b" reed on AR de 0 Ve Lu, % ed Wine! D’ Has) À ONTER E9 AN AUTÈBRIE L LE, 439 G° Digression sur les mouffettes et sur le zorille. On trouve en Amérique plusieurs petits carnassiers qui répandent une odeur forte et désagréable comme nos fouines, nos martes, nos belettes et nos putois ; mais les voyageurs, suivant leur usage, en ont tellement exagéré l’histoire, qu’on a cru voir dans leur odeur des raisons de les considérer comme une famille toute particulière. Buffon , réunissant diverses notices vagues prises de différens auteurs, et quelques peaux empaillées qu'il avoit observées, mais qui manquoient toutes d’une partie de leurs dents, établit quatre espèces, qu'il mtitula coase, conepate, chinche et zo- rille, et auxquelles il donna le nom commun de mouffettes, mais sur celte seule propriété de répandre une forte odeur et sans leur attribuer de caractère commun d'organisation ; il distribua sur chacune des quatre, mais entièrement au hasard, les noms et les descriptions des différens auteurs , et il y ajouta, dans son Supplément posthume, tom. VIT, une cinquième espèce, la mouffette du Chili. Le Coase étantd’un brun uniforme ne prête à aucune équi- voque : nous y reviendrons bientôt; mais, en attendant, c’est uniquement sur les quatre autres, sur celles qui sont rayées de blanc et de noir, que vont d’abord porter nos remarques. Gmelin en adopte trois, qu'il range dans le genre des ci- vetles ou viverra, sous les noms de putorius , de mephitis et de zorilla. Il a ignoré la quatrième, n'ayant pu consulter le Supplément posthume, qui n’a paru qu'après son ouvrage. Il adopte aussi presque toute la synonymie de Buffon , et y ajoute deux espèces tirées, l'une de Hernandes ( conepail) , et l'autre 56 * 44o ANNALES DU MUSÉÈUM de Mutis (mapurito ); en même temps il reporte le chinche de Feuillée, que Buffon avoit confordu avec le sien, sous le grison du même Buffon, qu'il nomme wiverra vittata. Comme une nomenclature pour être solide ne peut étre fondée que sur l'inspection même des objets on sur des des- criptions faites par des auteurs qui les ont vus par eux-mêmes, remontons à ces deux sources, sans nous arrêter à toutes ces combinaisons contradictoires. Nous y apprendrons bientôt, 1. Que le nom espagnol de zorille, qui signifie petit renard, est appliqué à un animal puant rayé de noir et de blanc, à queue touflue, commun dans toute l'Amérique; 2.9 Qu'il a été étendu ensuite à quelques autres animaux puaus, qui se trouvent par cette raison indiqués en latin sous le nom de vulpecula; 3, Que le zorille proprement dit varie si fort par les raies dont son poil est marqué, ou que ceux qui l'ont vu lont ob- servé avec si peu d'attention, qu'il n’y a pas deux auteurs qui le décrivent de la même manière; mais en même temps, que les différentes variétés qu’on en indique rentrent tellement par nuances les unes dans les autres, qu'on est presque tenté, ou de n’en admettre qu’une seule espèce, ou d’en admettre quinze. En effet, voici quinze indications que j'ai recueillies d'au- tant d'auteurs différens. 1.0 Le deuxième isquiépatl de Hernandès, marqué de plu- sieurs raies blanches. 2° Le polecat ou putois de Catesby, marqué de neuf raies blanches, et digitigrade, à en juger par la figure. 3° Le conepate de Buffon qui est dessiné plantigrade et porte six raies blanches. Je crois sa figure composée d’après D'HISTOIRE NATURELLE. AA celle de Catesby; car sil en eût existé une peau au cabinet, Daubenton n’auroit pas manqué de la décrire, ce qu’il n’a pas fait. 4. Le conepatl de Hernandes qui n’a que deux raies blan- ches régnant sur la queue. 5° Le mapurito de Mutis, qui n’a qu'une raie et le bout de Ja queue blanc. G+ La mouffette du Chili de Buffon, qui a deux raies et la queue toute entière blanche. Cette variété existe au Muséum, mais la peau de la tête, a été trop bourrée, ce qui gâte la figure gravée dans les Supplémens. La peau de cette variété est abondante dans le commerce de fourrures. 7. Le chinche du même, dont le dos a deux raies blanches excessivement larges et la queue toute entière de la même couleur. Cette variété est la plus commune dans les cabinets : j'en aï vu trois individus, dont un vivant. La figure de Buffon a la tête beaucoup trop petite, parce qu'on avoit enlevé la tête osseusé et laissé dessécher la peau sans la bourrer assez : ce qui fait qu'au premier coup-d’œil jeté sur Îles figures, cet animal et le précédent paroissent trés-différens, tandis que ce sont à peine des variétés individuelles. 8° Le cinche de Feuillée, marqué de deux raies blanches qui s’écartent et finissent sur les côtés. 9° Le yagouare de & Azzara , marqué de deux raiesblanches qui vont jusqu'à la queue. 10, Le polecatou putois de Kalm, qui a trois raies blanches. 119 Le zorille de Gemelli Carreri, indiqué seulement comme blanc et noir. h42 ANNALES DU MUSÉEUM 12.0 Le mapurito de Gumilla, tout tacheté de blanc et de noir avec une belle queue. 13.° Le puant de Lepage Duprats, dont le mäle est noir et la femelle bordée de blanc. 14.0 L'ortohula de Fernandes, noir et blanc, avec du fauve sur quelques parties. 15° Enfin le tamaxtla du même, sans fauve, avec quel- ques anneaux noirs et blancs à lasqueue. Je le demande, quel seroit aujourd’hui le naturaliste assez hardi pour faire un choix dans ces quinze indications, pour déterminer celles qui doivent rentrer les unes dans les autres, pour décider enfin combien d'espèces véritables ont servi de fondement réel à des descriptions si variées? Si l'on réfléchit à ce nous venons de dire de la presque identité du chinche et de la mouffette du Chili et aux témoi- gnages de Catesby , de Lawson et de d'Azzara , ne sera-t-on pas même porté à croire que tous ces animaux ne sont que des variétés d’une seule et même espèce? « Tous ceux que j'ai vus, dit Catesby, IT, 62, étoient noirs » et blancs, quoiqu'ils ne fussent pas marqués de la même » manière, » « Le putois d'Amérique ( polecat où skunsk ) dit Lawson » Carol., 119), est plus épais que celui d'Europe et de plu- » sieurs couleurs, sans qu’un individu ressemble à l’autre. » « Dans la multitude de peaux que nous vendent les Indiens, » dit d'Azzara, 1, 216, on remarque qu'avec le temps » elles perdent leur couleur noire qui se change en chätain ; » quelques-unes deviennent brunes et même blanchâtres dans » la partie de l’épine; quelques autres manquent absolument D'HLSTOTRE NATUREL Lx: 443 » de raies blanches. Il y en a qui les ont à peine indiquées ou peu sensibles sur les côtés; et dans d’autres elles s'étendent » plus ou moins ou point du tout sur les côtés de la quene. » Quelques personnes m'ont assuré avoir vu des individus en- » tiérement blancs.» Ainsi l’on auroit pu multiplier encore beaucoup les descrip- tions de mouffettes, si lon avoit eu les diverses peaux que mentionne ici M. d Azzara. Je ne dois pas cacher cependant que les trois individus que j'ai vus du chinche se ressembloient presque parfaitement pour les couleurs Je puis assurer aussi que l'odeur du chinche n’est pas à beaucoup près si terrible qu’on nous la représente. J'en ai vu un vivant ; je l'ai fait menacer par un chien: sa colère se bor- noit à relever sa queue en létalant comme un panache; mais l'odeur qu'il répandoit n'égaloit pas celle de notre putois. Je puis assurer également que ni le chinche ni la mouffette du Chili n'ont la poche pleine de matière puante qu’on leur attribue, et je suis persuadé que leur odeur fétide , ainsi que celle de tous les zorilles ou mouffettes , et due, comme celle des martes et putois, aux deux petites glandes qui aboutissent dans son rectum, et qui sont plus ou moins prononcées dans beaucoup de carnassiers. Cette bourse prétendue ne justifie donc point leur réunion au genre des viverra. Les tégumens de la langue ne la justi- fient pas davantage, car elle est douce dans le cinche comme dans les martes, et non äpre comme dans les verra, soit civettes, soit ichneumons. Enfin, les dents justifient cette réunion moins encore que tout le reste, 444 ANNALES DU MUSÉUM Les civettes et les mangoustes ont comme les chiens deux molaires tuberculeuses derrière la principale tranchante d’en haut. Le chinche et la mouffette du Chili n’en ont qu'une comme les martes , et je suis trop habitué à reconnoîïtre la constance de ce caractère pour douter qu'il ne se retrouve dans toutes Jes vraies mouffettes , S'il y en a plusieurs espèces. Cependant le chinche et la mouffette du Chili ne res- semblent pas en tout aux autres martes par les dents. Leur molaire postérieure tuberculeuse est beaucoup plus grande que la principale tranchante et aussi longue que Jarge : la principale tranchante a un talon interne considéra- ble, et ils n’ont en tout que quatre molaires de chaque côté en haut, dont l’antérieure est très-petite et tombe de bonne heure : alors ils n’en ont que trois. Dans les martes proprement dites et les fouines, cette dernière molaire tuberculeuse est plus large que longue , et n'offre guère plus de superficie que la principale tranchante : le talon interne de celle-ci est fort petit. Il y en a de plus cinq en tout, et quatre quand la première est tombée, Les putois, furets , hermines et belettes , qui different sen- siblement des martes et des mouffettes par la forme de la tête, en différent aussi un peu par les dents, La dernière tuberculeuse est plus large que longue, comme aux martes , mais plus petite encore en superficie ; et il n’y en a que trois en avant, comme aux mouffettes. Ces deux ca- ractéres réunis en font la famille la plus carnassière du genre. Les loutres ont les dents comme les martes, excepté que Je talon interne de Ja principale mächelière est large comme aux mouffettes, et que leur dernière tuberculeuse est aussi D'HISTOIRE NATURELLE. 445 plus large à proportion ; deux points qui les aident dans leur régime piscivore. Enfin, les blaireaux ont cette dernière tu- ‘berculeuse encore plus grande, et servent de nuance entre cette série des putoës , martes , mouffettes ; loutres et le genre des ours. Le glouton du nord (ursus gulo), et ceux d'Amérique, c’est-à-dire le grison ou la grande fouine de la Guyane de Buffon, petit furet de d’'Azzara(viverra vittata de Gmel), et le tayra ou grande marte de la Guyane de Buffon; grand Juret de d'Azzara (mustela barbara de Gmel.), sont des martes par les dents; mais ils ont les uns et les autres les pieds plantigrades. Le premier n’a que cela de commun avec les ours. Ces caractères de détail, pris de la forme des dents, sont d'autant plus utiles pour subdiviser le genre des martes, qu'ils sont d'accord avec les nuances de leur forme, comme avec celles de leur naturel. Comparez à ce que je viens d'en dire mon article sur les os fossiles d’hyène. Aux caractères pris des dents, on peut ajouter pour les mouffettes celui que fournissent les ongles longs et forts (un- gues fossorü ) des pieds de devant, comme on a déjà employé depuis long-temps pour les loutres celui que donnent leurs pieds palmés. Si, après toutes ces déterminations et rectifications , nous venons à examiner en lui-même l'animal auquel Buffon a ap- pliqué le nom de zorille, et qu’il a représenté Hist. nat. in-4», tome XIIT, pl. 42, nous trouvons qu’il ressemble par les dents, par les ongles et par la forme, comme par la grandeur, à notre putois d'Europe. 9: 57 446 ANNALES DU MUSÉUM C'est déjà un point de fait qui montre qu'il ne doit point être mis, comme Gmelin l’a fait, avec les wiverra ; et même que, dans le genre des martes, on ne peut le placer que dans la subdivision des putois. Un autre point de fait, c’est que cet animal n’est point d'Amérique, et que par conséquent c’est moins à lui qu’à tout autre que l’on devoit appliquer le nom espagnol zorillo. Buffon étoit pardonnable : trouvant une peau noire et blanche sans étiquette ni indication de pays , n'ayant d’ailleurs point eu occasion de déterminer les caractères des vraies mouffettes, il étoit pardonnable, dis-je, de prendre cette peau pour un de ces animaux, aussi noirs et blancs, déerits si va- guement et de tant de manières par les voyageurs em Amérique. Il l'auroit été encore davantage, s'il eût vu l'animal vivant; car c’est le plus puant de tous les putois, et il surpasse beau- coup le chinche à cet égard. Un individu que jai vu dans l'esprit-de-vin répandoit encore une infection insupportable. Mais il est hors de doute aujourd’hui que cet animal est du Cap. Sparrmann Vy a observé; le cabinet du Stadhouder Favoit tiré de R, et M. Péron l'en a rapporté en peau et en \ squelette. Sparrmann, le regardant comme une vraie mouffette, en avoit même voulu tirer une exception à la règle des climats établie par Buffon; mais la distinction que nous venons de dé- velopper, rétablit cette règle dans son intégrité. Pour terminer ici tout ce qui concerne les animaux rangés mal à propos parmi les mouffettes, nous ferons remarquer, 1.9 Qu'il suilit de jeter un coup d’œæil sur la figure de l'isquié: pail de Hernandes, p.332, dont Linnœus et Gmelin ont fait D'HISTOIRE NATURELLE. 447 leur viverra vulpecula, pour voir qu'il est du genre des glou- tons d'Amérique; d'AÆzzara le croit même synonyme de son grand furet (viverra barbata ), et la chose est très-vraisem- blable; 2.9 Que le coase de Buffon est presque impossible à recon- noître, à moins que ce ne soit une peau de coati défigurée, comme le pense aussi d Azzara ; 3.° Que l’animal que Séba, I, tab. 42, fig. 1, a considéré comme l'isquiépatl de Hernandes, et dont Gmelin a fait son viverra Quasje, est certainement un jeune coati brun ; 4° Que la figure 2 ,tab. 4o de Séba, dont Gmelin a fait, mais avec doute, un synonyme du précédent, est un jeune glouton d'Amérique , soit le grison, soit le taira, mais sans qu’on puisse déterminer lequel des deux. 448 ANNALES DU MUSÉUM PRÉCIS D'un Mémoire de M. Minver, correspondant de l'Institut, sur l'anatomie des fleurs. PAR M. DESFONTAINES, L'ivrevr de ce Mémoire a eu pour objet de savoir s’il existe dans les organes intérieurs des plantes des caractères propres à distinguer les familles naturelles et les genres. Cette question importante d'anatomie végétale avoit fait le sujet d'un prix quela classe proposa au concours il y a quelques années. M. Mirbel dit qu'ayant porté ses recherches sur un grand nombre de tiges , il y a aperçu des différences très-re- marquables, mais qu'il n’a pu encore y trouver des caractères généraux, ni discerner l'influence que doivent avoir la forme et la disposition des organes internes sur les développemens extérieurs. Il à été plus heureux dans l'examen qu'il a fait des diffe- rentes parties de la fleur; et s'il n’a pas résolu le problème, il en a du moins reconnu la possibilité, et ses recherches lui ont offert plusieurs observations nouvelles et utiles aux progrès de l'anatomie végétale. D'HISTOIRE NATURELLE. 49 Tous les organes de la fleur sont formés par le développe- ment des vaisseaux du pédoncule qui la soutient. Ils se groupent, se ramilient et s'épanouissent suivant la forme, la situation et le nombre des parties auxquelles ils donnent naissance. Dans les monocotylédons, ils sont disposés en filets distincts et parallèles, enveloppés par la moëlle; dans les dicotylédons, ils forment un étui autour du cylindre médullaire, et on y aperçoit déjà les traces des rayons divergens de la moëlle qui se prolongent vers la circonférence. Les caractères particu- liers des monocotylédons se trouvent dans le nombre et la disposition des filets vasculaires : ainsi, par exemple, il y a constamment trois faisceaux placés en triangle équilatéral dans le pédoncule de la fleur de l'Alétris du Cap , et il sen trouve régulièrement cinq à neuf dans les pédoncules des Aloës. Les caractères des dicotylédons sont dans les formes de l'étui qui emboïte la moëlle du pédoncule. Le plus grand nombre des vaisseaux de cet organe sont des trachées qui ne se développent que dans les parties molles où la végétation est très-active, telles que les jeunes rameaux de l'année, les feuilles, les fleurs, etc. La largeur et la forme de leur tube coupé en hélice facilitent singulièrement la marche des fluides. De là ces développemens rapides des parties où les trachées s'organisent. L'auteur , en disséquant l’enveloppe colorée de la fleur de: plusieurs monocotylédons , a remarqué que dans les unes, telles que ceile de la Jacinthe et de l'A/etris capensis , le tissu du pédoncule est intimement uni et continu avec l'enveloppe florale, et que dans d’autres de la même série, comme les lys et les aloës, ce même tissu s'arrête tout-à-coup à la base de 450 ANNALES DU MUSÉUM la fleur , où il forme un bourrelet qu’on seroit tenté de prendre pour un rudiment de calice. Les botanistes ne sont pas d'accord sur les caractères distinc- tifs du calice et de la corolle. On avoit espéré que l'anatomie végétale parviendroit à tracer la limite qui sépare ces deux organes; mais c’est tout le contraire : elle les unit et les confond, puisque, dans un grand nombre de plantes, les vaisseaux du calice et de la corolle sont disposés de la même maniere. Quelques auteurs ont dit que l'épiderme des calices étoit criblé de pores allongés , et que celui de la corolle n’en avoit point. Mais ce caractère n’est pas général à beaucoup près; car il existe des calices sans pores, et il y a des filets d’éta- mines qui en ont de semblables à ceux des calices. Tout le monde sait que les étamines ent les plus grands rapports d’or- ganisation avec la corolle. Suivant Linnæus, le calice est un pro- longement de l'écorce , et la corolle , une production des lames internes du liber; mais cette opinion n'est pas admissible. L'écorce et le liber n’ont pas de trachées, et il en existe dans les corolles et dans un grand nombre de calices. L’enveloppe florale de plusieurs monécotylédons, telle que celle des lys, des jacinthes , des alétris , des iridées, etc. , contient beaucoup de trachées, Dans les dicotylédons, il est souvent facile de distinguer à la simple vue les calices qui ont des trachées de ceux qui n’en ont pas. Les premiers ont des nervures saillantes , ou bien donvent naissance aux pétales et aux étamines. Ceux qui en sont privés sont minces, sans nervures apparentes, et leur base n’est point dirigée vers le centre du pédoncule. Ainsi, le calice du Cobæa, sur lequel on voit de grosses nervures, celui de la D'HISTOIRE NATURELLE. 451 rose de Noël, qui a la consistance et la couleur d'une corolle, ceux des roses et des saxifrages , sur lesquels reposent les pétales et les étamines, etc. ont toujours des trachées. Au contraire, les calices des œillets , des anagallis, etc. en sont privés. La dé- finition de Linnæus n’est donc applicable qu’à ces derniers. Il faut conclure de ces observations, que nous ne connoissons aucun caractère tranché au moyen duquel on puisse distinguer dans tous les cas le calice d'avec la coroile, à moins qu’on n’emploie un caractère de convention. Les filets des étamines ont à leur centre un faisceau detra- chées, lequel part du réceptacle dans les 4loës , les Riododen- drum , les Anagallis , etc.; mais dans l_Æletris capensis il nait de l'enveloppe florale; de la corolle, dans le Cobæa; du calice, dans les saxifrages, les roses, etc. Ces observations sont d’une grande importance pour déter- miner avec précision et d’une manière invariable, dans cer- tains cas, la véritable insertion des étamines. Ainsi, quand les vaisseaux du réceptacle produisent les filets, ils sont né- cessairement posés sous l'ovaire : d’où il suit que les étamines des Rhododendrum et des Aloës ne sont pas pérygines, mais bien Lypogynes; et lorsque les filets des étamines sont formés par les vaisseaux du calice ou de la corolle , ils en fixent lin- sertion à l’un ou à l'autre de ces organes. L'auteur en conclus que cette insertion ne donne pas toujours des divisions natu- relles ; car l 4/oés et l’Aletris capensis sont évidemment d’une même famille, et cependant leurs étamines, comme on vient de le dire, n’ont pas la même insertion. L’anthère est ordinairement fixée au sommet du filet, C’est une petite boîte à plusieurs loges qui contient le pollen. Sa forme la plus commune est oblongue, et elle est ordinairement 452 ANNALES DU.MUSÉUM partagée dans sa longueur en deux lobes inégaux , séparés par un sillon qui indique l'endroit par où les loges doivent s'ouvrir. Les deux lobes de l'anthère sont réunis par un corps charnu dans lequel pénètre la pointe du filet, et le faisceau de tra- chées est placé à son centre. On croiroit, dit l'auteur, que Fanthère est à deux loges, mais elle en a réellement quatre. Les valves de chacun de ses lobes se replient jusqu’au fond de chaque loge avant l'émission du pollen, et y forment une cloison qui la partage en deux dans sa longueur. Duhamel avoit soupconné que la rupture de l'anthère dé- pendoit d'une cause mécanique, et il ne s’étoit pas trompé. La surface de cet organe est revêtue d’une lame de tissu cellulaire tres-làche dont les membranes sont d’une finesse extrême. Au-dessous se trouve une seconde lame également cellulaire , mais d’un tissu ferme, élastique et susceptible de se contracter par le desséchement. Cette contraction a lieu dans un sens déterminé par la forme et la disposition du tissu. Quel- quefois elle est si rapide qu’en un clin d'il les valves s'ouvrent, Yanthère est repoussée en arrière et le pollen lancé vers le stigmate. Ce mouvement n’est dû qu'à l’élasticité du tissu, et la vacillation de l’anthère sur le filet dépend de deux causes mécaniques : la première est le poids inégal de ses deux moitiés. Lorsqu'elle vient à s'ouvrir par une de ses extrémités et qu'une partie du pollen en est sortie , l’autre, devenue plus pesante , imprime un mouvement à ce corps léger suspendu en équilibre sur la pointe du filet. La seconde cause dépend de la contraction des trachées qui unissent l’anthère au filet. Ces vaisseaux élastiques, contournés en tire-bourre, resserrent leur spire lorsque les fluides qu'ils D'HISTOIRE NATURELLE. 453 contiennent viennent à s'échapper avec le pollen, et contribuent aussi à faire vaciiler l’anthère sur son pivot. Les vaisseaux qui entrent par le pistil se partagent en plu- sieurs faisceaux qui suivent différentes directions. Les uns pénètrent dans la paroi de l'ovaire, les autres dans le placenta. On trouve trois faisceaux de tubes dans les parois de l'ovaire des liliacées , dont le pistil est libre, et chaque faisceau est placé dans la suture par où le péricarpe doit s'ouvrir. Les ovaires des Rhododendrum ont cinq faisceaux de tubes situés égale- ment dans les cinq sutures de la capsule. Il y en à six dans le Cobæa, dont trois dans les sutures et trois aü milieu des valves. M. Mirbel pense que lorsqu'un ovaire surmonté d’un style n’adhère pas au calice, les faisceaux de tubes qui en nour- rissent les parois s'arrêtent brusquement à la base du style: c'est ce qu'on observe, dit-il, dans plusieurs liliacées, dans le khododendron, le Cobæa, etc. Quand , au contraire , le calice fait corps avec le pistil , les vaisseaux des parois de l'ovaire montent dans le style et vont jusqu’au stigmate. Cette organisation se remarque dans les Narcisses , la Campanule dorée, etc. Les vaisseaux qui se rendent aux ovules se partagent sou= vent en autant de faisceaux distincts qu'il y a de placentas. Dans lAnagallis il n’y a qu’un faisceau : on en trouve deux dans les Cruciferes, et trois dans les Liliacées, divisés chacun en deux branches qui se séparent et restent fixées à chaque valve quand elles sont ouvertes. Dans la Saxifrage à feuilles épaisses, il y a quatre paquets de vaisseaux ramiliés comme un tronc d'arbre, et il existe quatre placentas dans l'ovaire de cette plante. On trouve cinq 0. : 58 454 ANNALES DU MUSÉUM faisceaux dans le RLododendrum , et ces vaisseaux donnent au- tant de cordons ombilicaux qu’il a d’ovules. Il est des plantes où on ne trouve qu'un seul faisceau de tubes pour plusieurs placentas réunis; mais alors ils jettent des ramifications qui répondent à chacun. Cette organisation est très-remarquable dans le Cobæa : un cordon central de vaisseaux monte vers le sommet de l'ovaire, et produit dans sa route des rameaux qui redescendent vers la base de la fleur et jettent de distance en distance des cor- dons ombilicaux qui vont aboutir aux graines. De chaque placenta monte un faisceau de tubes dans le style, et quelquefois il y en a un plus grand nombre, parce que dans certains cas, comme on l’a dit, les vaisseaux des parois de l'ovaire y parviennent aussi. Un style qui a plusieurs faisceaux de tubes est en quelque sorte une réunion de styles sous un même épiderme. Beaucoup de céréales qui passent pour avoir deux styles n'en ont réellement qu'un. Si on les dissèque, on verra qu'ils ne sont que les divisions d’un seul faisceau plongé dans le tissu de lovaire. Quelquefois les vaisseaux suivent la route la plus courte pour se rendre au stigmate; d’autres fois, comme dans l’Anagallis, ils se divisent en plusieurs branches qui se réunissent au som- met en un seul corps qui se prolonge jusqu'au stigmate. Ces vaisseaux sont sans doute les conducteurs de l’aura seminalis. Mais ils se perdent dans le tissu cellulaire, et l'œil armé du microscope ne peut suivre les derniers rameaux, tant ilssont déliés. Ainsi l'observateur est arrêté dès les premiers pas, et le phénomène de la fécondation reste environné de té- ucbres. D'HISTOIRE NATURELCL EYE. A55 Le stigmate est en outre formé de tissu cellulaire. Sa sur- face est tantôt mamelonnée , et tantôt couverte de papilles où les vaisseaux vont aboutir. : Quand les fleurs sont nouvellement écloses, aucun stigmate n'offre de canal central; mais au bout d’un certain temps il se perfore souvent par le déchirement du tissu cellulaire placé au centre. Après avoir examiné anatomiquement les fleurs de plusieurs plantes, l’auteur s’est occupé de la structure des glandes. Sui- vant lui, on a étendu ce nom à des organes dont la nature et les usages sont inconnus. L'organisation des corps glanduleux qui se trouvent dans un grand nombre de fleurs appartenantes à des familles très: distinctes, lui a suggéré quelques idées qu'il croit utiles de dé- velopper. Il y a de ces glandes qui sont uniquement composées de tissu cellulaire , et d’autres qui renferment du tissu cellu- laire et des vaisseaux. $ Le fond du calice de la Saxifrage à feuilles épaisses est ta- pissé par une lame jaune qui distille une liqueur sucrée ; cette lame est sans vaisseaux. Ceux qui entrent dans le calice, les pétales et les étamines, passent au-dessous sans communiquer avec elles. Pareillement, les filets des deux plus courtes étamines du Cheiranthus chetri ou giroflée jaune, sont entourés à leur base d’un anneau glanduleux formé d’un tissu cellulaire très- serré. Les vaisseaux des étamines passent au centre de la glande et n’ont aucune communication avec elle, Il en est de même de ces fossettes qui se trouvent sur la base des divisions de la fleur de la Couronne impériale. Les vaisseaux passent au-des- sous sans y jeter de ramifications. Elles sont remplies d’une liqueur un peu trouble, d’une odeur pénétrante et d’une saveur Da 456 ANNALES DU MUSÉUM assez semblable à celle de l’eau dans laquelle on auroit délayé de l'ail et du sucre. Cette liqueur , d’après l'analyse qui en a été faite par M. Vauquelin, est composée, 1.° D'une matière sucrée qui en fait la plus grande partie ; 2.0 De malate de chaux avec excès d'acide; 3° D'une matière mucilagineuse ; 4° D'un principe fermentatif (matière aatpiennEr à 5. De beaucoup d’eau. Il ya à la base du pisul du Cobœæa un bourrelet is. et blan- chäâtre, ayant cinq replis très-apparens. Tous les vaisseaux qui vont à l'ovaire se plongent dans ce bourrelet, s'y ramilient, s'y courbent en plusieurs sens, reviennent sur leurs pas et montent eufin dans l'ovaire. Cette organisation est très-différente de celle des glandes cellulaires dont on vient de parler. On voit, d’après ce qui vient d'être dit, que le nombre, la disposition, les ramifications des vaisseaux les fleurs offrent des caractères très-différens et tres-variés, et qu'il ne seroit peut-être pas impossible d'établir un système d'anatomie comparée dans les végétaux. L'auteur est porté à le croire; et quand bien même on n’y réussiroit pas, il en résulteroit toujours des observations utiles aux progrès de la physiologie végétale. Zom : (74 . Fr Fig-5. N°2. Fig Nr. KW Vf LU Fig. 6-W2z. Fig. 6 N°2. PAPE ——., ANATOMIE DE LA FLEUR.PL.ZL. N a Ÿ à s S La S w NS & à à Ÿ S = » = D'HISTOIRE NATURELLE. 457 EXPLICATION DES FIGURES. Nous ne nous bornerons pas ici à donner une simple expli- cation des figures, nous ajouterons quelques notes qui servi- ront à éclaircir plusieurs faits importans d'anatomie végétale. Fic. 1. Coupe verticale de la fleur du Cobæa scandens, Cav. A. Vaisseau du pédoncule. Ce sont des trachées environnées d’un tissu z , fin, allongé, transparent , origines de ces longues cellules qui ressemblent à de petits tubes parallèles et dont la réunion forme le bois. Ce tissu, dans l’état où il est représenté ici, est susceptible de développement, Sa présence même indique que la croissance de la partie où il se trouve n’est pas entièrement terminée. Osservarions., On voit que lestrachées environnent la moëlle, comme ilarrive toujours , selon M. Mirbel (1), dans les plantes à deux cotylédons. Cette opinion n’a cependant pas été adoptée par tous les physiciens. Quelques-uns ont prétendu que dans l'écorce de trés-jeunes branches on observoit souvent des trachées ; mais M. Mirbel répond que lorsque le diamètre d’une branche n’a pas plus d’un à trois millimètres, il est impossible de distinguer , (1) Voyez le second Mémoire de l’auteur sur l'organisation végétale, imprimé dans le Journal de physique , tome 58, page 291 , cahier de germinal an xu { 1804 ). 458 AUNIN À LES. D U M US É U M sans une anatomie très-diflicile et très-délicate, la situation relative des parties, et que, quant à lui , à l’aide du microscope, il a trouvé constamment les trachées autour de la moëlle, quels que fusserit d’ailleurs l’âge et la grosseur des branches. En effet , tous les dessins qu'il a fait paroïître confirment celle assertion. L B. Naissance du calice. On voit qu'il contient beaucoup de trachées. C'est ce qui © a lieu dans tous les calices dont la contexture ressemble à celle des feuilles, ou qui sont épais et charnus. Ainsi l’on ne peut dire, comme l'ont avancé quelques auteurs, que cet organe ne contient jamais de vaisseaux à lame roulée en hélice , et que c’est le caractère propre qui le distingue de la corolle, M. Mirhbel donne le nom de vaisseaux caliciniens aux tubes qui péuètrent.dans le calice. C. Naissance de la corolle, On y trouve des trachées de même que dans le calice. M. Mirbel nomme vaisseaux corolliens ceux qui parcourent cet organe. IL est à remarquer ici que les trachées de la corolle tirent leur origine de celles du calice. On distingue quelques ramifcations des dernières qui se courbent en plusieurs sens et pénètrent dans la corolle. A la base de celle-ci, est un tissu cellulaire obscur , désigné par la lettre ce. Ce tissu est rempli par la matière verte , qui se montre toujours dans les parties herbacées des plantes. Cette matière se forme à mesure que la fleur vieillit, et elle finit par interrompre la communication des vaisseaux de Ja fleur avec ceux de la corolle; ce qui amène la chute de cette enveloppe. L'auteur du Mémoire a fait cette observation sur le Cobæu ; mais il ignore si la même chose a lieu dans les autres plantes. D. Vaisseau du réceptacle. Au sommet du pédoncule, les vaisseaux s’écartent et se partagent en un certain nombre de faisceaux qui vont se rendre dans les. différentes parties de la fleur. Cette divergence des vaisseaux occasionne un ren{lement extérieur que les botanistes désignent sous le nom de réceptacle. E. Corps charnu, ferme, blanchâtre, formant un anneau à cinq replis et envi- ronnant la base de l'ovaire. Il offre à l’anatomiste un tissu cellulaire très- fin , dans lequel se rendent, par cinq ouvertures inférieures , tous les vais- seaux destinés pour l'ovaire. Les vaisseaux se courbent et se, ramifient de mille manières dans ce tissu. Ce sont le petits tubes coupés dans leur lon- gueur par une multitude de fentes ; mais l’auteur ne peut dire s'ils se dé- roulent. D'HISTOIRE NATURELLE. A5g Oss. En considérant la situation du corps charnu et son organisation interne, on ne peut guère se refuser à l'idée que c’est un corps £landuleux danslequel s'élaborent certainsfluides ps £ I quidoivent nourrir l'ovaire. Il y auroit donc dans les plantes des glandes analogues à celles des animaux , et ce fait , soupçonné depuis long-temps, deviendroit évident par la découverte de És PS»; Ï l’auteur. Il nomme ces glandes vasculaires. Nous verrons tout 8 + « . , . à l'heure qu'il désigne sous le nom de glandes cellulaires d’autres corps dans lesquels il n’a pu apercevoir de vaisseaux. P q I F. Ovaire fendu verticalement dans toute sa longueur. À droite est une cloison f dont l’organisation interne est à découvert ; à gauche est une loge remplie d'ovules qui commencent à se développer; au milieu est le placenta, qui jette des ramilications vers les ovules. G. Vaisseaux que l’auteur nomme placentaires. As sont trèe-remarquables ici; ils s'élèvent de la base en un seul faisceau, et jettent de distance en distance des ramifications , lesquelles redescendent vers le point de départ. Chemin faisant, elles produisent les cordons ombilicaux auxquels sont suspendus les ovules. Les prolongemens supérieurs des placentaires montent dans le style, et forment les conducteurs dont il sera parlé plus bas. Les placentaires du Cobæa sont composés en grande partie de trachées que l'auteur est parvenu quelquefois à dérouler. H. Naissance du style. J. Vaisseaux qui servent au développement et à la nutrition de l'ovaire. Ce sont les péricarpiens. Ns doivent leur origine aux vaisseaux du réceptacle et vont s'attacher au sommet de l’oyaire sur les conducteurs. K. Prolongement des placentaires dans le style. L'auteur les considère comme les vaisseaux qui servent immédiatement à la fécondation, et il les nomme, par cette raison, corducteurs de l'aura seminalis. Les conducteurs sont, dans le Cobæa au nombre de trois, nombre égal à celui des placentas et des stigmates. Ils partent du sommet des placentaires et vont se rendre dans - les stigmates. Ce sont des trachées que l’on peut facilement dérouler. L. Base du canal excrétoire. L’auteurnomme canal excrétoire une cavité quise forme souvent dans l'intérieur des styles pourvus de plusieurs conducteurs. Cette cavilé n'existe point dans les styles très-jeunes ; mais, quand ils ont pris + 46o ANNALES DU MUSÉUM quelque développement , il s'opère un déehirement interne du tissu mem- braneux , et de là, cette cavité, comparée à tort, par quelques auteurs , à la vulve des animaux. Ce déchirement interne, dans les styles qui ont plusieurs conducteurs, vient à l'appui du sentiment de M. Mirbel, qui regarde chaque conducteur comme un style particalier, et la réunion des conducteurs comme plusieurs siyles environñés d’un seul épiderme, | M. Ovules dans leurs premiers développemens. Le centre de chaque:ovule con- tient la liqueur que l’auteur a décrite sous le nom de cambium (1). Le reste de la cavité est rempli par un tissu cellulaire très-fin et transparent. Oss. L'auteur n’a pas parlé du développement des graines, craignant sans doute d'introduire dans son Mémoire un épi- sode étranger au sujet qu'il traitoit. Nous croyons que ses observations sur l'organisation du fœtus végétal ne paroïtront pas déplacées ici : nous allons les publier telles qu'ils nous les a connnuniquées. DÉVELOPPEMENT DES GRAINES. « J'ai observé, dit M. Mirbel, le développement de l'em- » bryon dans plusieurs fruits; ce que j'ai vu n’est pas par- » faitement conforme aux phénomènes annoncés par quelques » naturalistes. J’ai démélé la cause de cette différence dans » nos opinions; je la ferai connoître tout à l'heure, » À laide du microscope, on peut examiner la graine du » haricot lorsqu'il est encere en fleur. Cette graine n’est alors » qu'un point pour lœil nu; mais avec le microscope on » reconnoit que c'est un petit sac de tissu cellulaire, dont le (1) Voyezle Mémoire de M. Mirbel surles lnides contenus dans les végétaux, Annales du Muséum d'Histoire naturelle, lome 7, p. 274. % D'HISTOIRE NATURELLE AGx centre contient une liqueur transparente (1). Quand le lé- gume commence à grossir, le petit sac se gonfle, les pre- mieres cellules développées s’agrandissent, et il s’en forme intérieurement de nouvelles. Alors la liqueur du centre dispa- roit et le tissu cellulaire, quine cesse de se développer, prend sa place. Jusque-là ce tissu avoit été parfaitementtransparent et sans couleur, si ce n’est à la circonférence, où il étoit co- loré en vert; mais à l'époque où il remplit toute la cavité, il devient opaqueet verdit. Cette espèce de tache qui s’avance de la circonférence vers le centre et qui est produite par la substance amilacée qui se dépose dans les cellules, finit par occuper toute la capacité de la graine. » Dans ce même temps, les deux cotylédons qui n’étoient pas distincts le deviennent, et l'on aperçoit de petites veines dessinées dans le tissu cellulaire, lesquelles se rendent vers le germe. Ces veines sont l’origine des vaisseaux mam- maires (2). » Au premier aperçu on croiroit que la tache verte est un corps tout à fait distinct du tissu cellulaire; que ce corps est l’embryon, et qu'il repousse le tissu, dont il finit par occuper la place. C'est l'erreur dans laquelle plusieurs auteurs sont tombés. Ils ont pris l'apparence pour la vérité. La vérité est que c’est le tissu cellulaire lui-même qui, con- tinuant de se développer, forme l'embryon, et qui recevant (1) Pai vu le cambium dans la graine qui commencoit à se développer , dit M. Mirbel dans son Mémoire sur les fluides contenus dans les végétaux. (2) Voyez le second Mémoire de l’auteur sur l’organisation végétale, imprimé dans le Journal de physique, tome 58, p.291 , cahier de germinal an xu (1804). 9- 59 462 ANNALES DU MUSEUM » dans ses mailles la substance amilacée, verdit et devient » opaque. » J'ai suivi avec soin le développement du grain de blé; j'y ai découvert des phénomènes tout à fait semblables. » Dans l’amandier , le pêcher, l'abricotier, le cerisier, etc., on observe quelques différences, mais elles ne sont pas es- sentielles. Le noyau est d’abord rempli d’une substance humide, semblable en apparence à un fluide visqueux. Bientôt il se forme à l'ombilic une tache blanchätre qui grandit peu à peu et finit par remplir toute la cavité du noyau. Malpighi a cru que cette tache étoit le fœtus qui, en se développant, repoussoit la substance humide, comparable, selon lui, à la liqueur de l’amnios : il s'est trompé; cette substance est un tissu cellulaire qui constitue les premiers linéamens de l'embryon, et devient opaque et blanc par l'addition d’une substance amilacée, laquelle paroït d’abord à lombilic et s'accroit insensiblement. L'erreur de Malpighi vient donc de ce qu'il n’a pas aperçu le tissu cellulaire qui existoit avant l'apparition de la tache blanchätre. » A la vérité, Grew a vu ce tissu; mais il a cru qu'il étoit distinct de l'embryon: par conséquent son opinion difière peu de celle de Malpighi. » Si l’analogie doit être ici de quelque poids, j'observerai que l'on a remarqué le même mode de développement dans le fœtus animal : il n’est, dans l’origine, qu’une masse de tissu cellulaire; mais bientôt les organes se développent dans ce üssu, et les différens fluides s’y déposent. Ainsi, dans l'animal et dans la plante le tissu cellulaire est la base première de l'organisation. » Quant à la différence observée entre le développement D'HISTOIRE NATURELLE. 463 » de la graine de l’abricotier, du cerisier, ete., et celle du ha- » ricot, je l'attribue à la différence des péricarpes, et, comme » je l'ai dit plus haut, elle ne me paroît pas importante. L'air » et la lumière, ces deux grands agens de la végétation , » n’agissent que très-difficilement sur une amande recouverte » d’une enveloppe ligneuse chargée d’une pulpe épaisse; mais » leur action est bien plus sensible sur une graine environnée » d'un péricarpe mince, d’une substance herbacée. C’est ce »_ qui fait que l’amande de l’abricot, dela cerise, etc., est étiolée » dès sa naissance, et qu'au contraire la graine du haricot ». prend d’abord une couleur verte. Et si dans les premiers la » substance amilacée commence à se déposer vers l’'ombilic, » cest parce que l’ombilic est l'unique voie par laquelle. la » nourriture arrive à l'embryon ; tandis que dans le haricot » les enveloppes étant de nature à ne point s'opposer à l'action » de l'air et de la lumière, cette même substance amilacée doit » se produire premièrement , et se produit en effet sur tous » les points de la circonférence. » F1. 2. Coupe véritable du pistil du blé. A. Place de l'embryon. B. Conducteur de l'aura seminalrs. C. Prolongement du conducteur , qui se divise en deux branches à peu de dis- tance de son origine. D. Naissance des stigmates. E. Situation du tissu cellulaire dans les cavités duquel doit se déposer peu à peu la substance amilacée qui constitue l'albumen. Oss. L'auteur avance que les conducteurs de l'aura semi- nalis ne peuvent, dans une fleur donnée, être plus nombreux que les placentas. En ne considérant les graminées qu’à l'extérieur, on doit penser qu'il se trompe; car l'ovaire de ces # 59 : 464 ANNALES DU MUSEUM plantes offre souvent deux stigmates divergens et parfaitement distincts, bien que cet ovaire ne contienne qu’une graine. Il sembleroit que M. Mirbel ne pourroit justifier cette ano- malie apparente qu'en démontrant que l'ovaire a réellement deux placentas, et par conséquent au moins deux graines , mais que dans le développement un placenta et une graine avortent : or il lui seroit bien difficile de prouver un pareil fait, et la nature lui fournit un moyen plus simple pour appuyer son opinion. Le blé, l'orge, l'avoine et les autres graminées pourvues de deux stigmates, n’ont réellement , comme on le voit par l’ana- tomie, qu'un conducteur ;mais ce conducteur se partage en deux branches, et chacune se rend vers un stigmate. Ainsi les gra- minées , loin d’être en opposition avec la règle générale, ne font que la confirmer. Fic. 5. Sômmet du style de l’Æzagallis coupé verticalement. À. Conducteur. B. Stigmate. Fic. 4. Sommet du stylede l’Ælerris capensis, Lin. (velthermia viridifolia, Jacq.), coupé verticalement. À. Les trois conducteurs. B. Stigmate. Fie. 5,n. 1. Stigmate du Nareisse. Il:est partagé en trois lobes papillaires, et chaque lobe correspond à un conducteur. Fic. 5, n.° 2. Coupe transversale du style du narcisse, IL est triangulaire ; à chaque angle est situé un conducteur 4. Entre les angles en B passe un faisceau de tubes qui n'est autre chose qne le prolongement des vaisseaux des parois de l'ovaire. L'auteur nomme tous les prolongemens de cette na ture de faux conducteurs, parce qu'ils ressemblent aux conducteurs par leur situation dans le style; mais qu'ils aboutissent inférieurement aux vais- seaux des parois de l'ovaire et non aux placentas, eomme les véritables conducteurs. Fic. 6,n.° 1. Stigmate de l’Azalea pontica, vu en dessous. Il offre cinq mame- lons , au milieu desquels on aperçoit l'ouverture du canal excrétoire. D'HISTOIRE) NATURELLE. 465 Fic. 6, n.° 9. Le même stigmate, vu de profil. Fic. 6, n.° 5. Coupe transversale du style. Fic. 6, n.° 4. La mème coupe considérablement grossie, Elle présente einq angles et à chaque angle un conducteur. Au centre, on voit l’ouverture du cansl excrétoire. Fire. 7 , n° 1. Coupe verticale de la fleur du Saxifraga crassifalia. À. Vaisseaax du pédoncule, B. Vaisseaux du réceptacle. C. Caliciniens. D, Corolliens, E. Sraminiens. C'est ainsi que l'auteur nomme les vaisseaux des élamines. Il est bon de remarquer qu’ils prennent naissance sur les caliciniens , et non sur les corolliens ; ainsi les étamines sont /ypogyneset non périgynes. M. Mirbel observe à ce sujet que le système des znsertions est souvent en opposition avec les faits tirés de l'anatomie végétale , d’où il conclut que ce système doit être considéré comme artificiel. F. Glandes cellulaires formées par un tissu très-fin. Elles distillent uu sue mielleux. Elles n’ont, comme on voit, aucune communication directe ayee les vaisseaux. Ceux-ci passent à quelque distance au-dessous. G. L’intervalle G est rempli par un tissu cellulaire lâche, dont les membranes très-foibles sont déchirées en beaucoup d’endroits. Plusieurs observations font soupconner que iles glandes vasculaires sont élaboratoires et les cellulaires excrétorres. Mais pour confirmer cette opinion, il faut de nouvyeaux faits. n H. Péricarpiens. Ils s'élèvent jusqu'aux stigmates, et il semble d’abord que, ce. soit une exception à la loi qui veut que dans les plantes dont le calice n’adhère pas à l'ovaire , les péricarpiens s'arrêtent brusquement à la naissance des styles ; mais ce n’est point une-exceplion : car dans cette saxifrage il n'y a pas de style, et l’on voit par l'anatomie que l'ovaire se prolonge jusqu'aux stigmates. J. Placentaires rameux. Dans la coupe transversale que l’auteur a dessinée , mais dont nous ne donnons pas "ici la figure, on reconnoit qu'il y a quatre placentas,, et que le placentaire est divisé en quatre troncs principaux. K. Conducteurs. Ils sont au nombre de quatre, comme on peut le voir dans la figure 7, n°2, lettre Æ. Cette figure offre la coupe transversale de l'ovaire au voisinage du stigmate. Les points Æ7 indiquent les péricarpiens. ‘EL. Stigmate. M. Ovules. Leur développement est semblable à celui des ovules du haricot. Foyez ce qui a été dit précédemment touchant le développement des graines. 466 ANNALES DU MUSÉUM Fig. 8. Ovaire du haricot, coupé verticalement. A. Placentaire. B. Péricarpien. C. Stigmates. D. Ovules. 4 E. L'auteur a voulu représenter en Æ l'état de l'intérieur de l'ovaire dans ses premiers développemens. Toute la cavité est. alors remplie d’une espèce de glaire dont les ovules ne se distinguent pas d’abord. A mesure que les ovules deviennent apparens et que la loge se dilate, la glaire disparoit. Cette glaire est évidemment le cambium dont il est fait mention dans le Mémoire de M. Mirbel sur les differens fluides des vègétaux, tome 7, page 274 des Annales du Musèum d'Histoire naturelle. Fic. 9. Coupe verticale de la fleur de l’Æ/erris capensis, Lin. (veltheimia viridi- folia, Jacq. ) A. Vaisseaux du pédoncule. B. Vaisseaux du réceptacle. C. Vaisseaux de l'enveloppe florale que M. de Jussieu regarde comme un calice. D. Placentaires. » E. On voit en Æ, comment par des ramifcations latérales, plusieurs placentaires peuvent communiquer les uns avec les autres ; ce qui vient à l'appui de l’opi- nion de ceux qui ont avancé que le contact du pollen avec un seul stigmate suffisoit pour féconder toutes les graines d'un ovaire à plusieurs placentas et même à plusieurs loges. . Cordons ombilicaux. a Ovule. Il se développe de mème que le tive et le grain de blé. H. Péricarpiens. J. Naissance des conducteurs. L."Tissu cellulaire formant l’une des cloisons de l'ovaire. Fic. 10. Coupe transversale du pédoncule de la fleur de l’Æ/oes fruticosa. Fic. 11. Coupe transversale du pédoncule de la fleur du Æyacinthus orientalis. Fic. 12. Coupe transversale du pédoncule de la fleur de l'Aletris capensis, Lin. Fic. 12. Coupe transversale du pédoncule de la fleur du Cheiranthus cheiri, Lin. On voit que la distribution des vaisseaux diffère beaucoup dans ces pé- doncules. Fic. 14. Anthère de l’Æ#/erris capensis, Lin., coupée transyersalement et dont on voit la moitié inférieure d'un lobe. A. B. Cette moitié Æ est partagée en deux loges par le rentrement Z des valves du lobe. C. Tissu cellulaire susceptible de contraction par le desséchement. D'HISTOIRE NATURELLE. 467 D. Tissu cellulaire lâche, placé à la superficie de l’anthère. E. Filet qui porte l’anthère. OBSERVATION. L'auteur du Mémoire n’a pas toujours pu s'assurer que cer- tains vaisseaux qui avoient l'apparence de trachées en étoient réellement. On conçoit combien il est difficile d'acquérir cette certi- tude dans une anatomie aussi délicate et aussi pénible. Mais M. Mirbel ne pense pas qu'il soit tres-utile aux progrès de la physiologie végétale de distinguer rigoureusement , dans tous les cas, les trachées des fausses trachées; il va plus loin : il croit que les tubes poreux , les fausses trachées et les trachées ne sont qu'une modification d’un même genre de vaisseaux et que leurs fonctions sont les mêmes. Il n’est pas d'accord sur ce point avec plusieurs natura- listes allemands qui ne veulent pas reconnoitre l'existence des tubes poreux, et qui aflirment que ce que M. Mirbel considère comme des pores, ne sont que de petites éminences semées sur les membranes. M. Mirbel répond qu'il ne nie pomt l'existence des émi- nences dont il s’agit, qu'il en fait mention , puisqu'il dit expres- sément que chaque pore est environné d'un petit bourrelet saillant ; qu’à l’aide des fortes lentilles-du microscope de Del- labarre, on peut voir distinctement un pore situé au centre de chaque bourrelet (1), et qu’enfin le raisonnement et l’ana- nm (x) Voyez ce que l’auteur a écrit sur ce sujet, tom. 1, page 364, 565 et 366 de son Traité d'anatomie et de physiologie végétale, 468 - ANNALES DU MUSÉUM logie confirment l'observation: car, ajoute:t:il, onremarque dans des situations semblables les trachées, les fausses trachées et les tubes poreux, ce qui doit faire présumer que ces tubes ont la même destination. Tous les végétaux parfaits soumis à l’obser- vation microscopique offrent au moins une de ces espèces de tubes ; les trachées etles fausses trachées sont souvent garnies de bourrelets semblables à ceux des tubes poreux ; on voit entre ces vaisseaux des nuances intermédiaires qui semblent prouver que la nature n’a pas établi entre eux de différences majeures: ainsi les fausses trachées ont quelquefois des fentessi prolongées, que l'on peut à peine les distinguer des trachées ; d’autres fois la distinction est plus facile à saisir, parce que les ouvertures sont moins prolongées; d’autres fois encore les fentes sont si petites que les vaisseaux qui en sont pourvus forment la nuance entre les fausses trachées et lestubes poreux proprement dits; enfin les pores de ces dernières ne sont perceptibles qu’à l'aide des plus forts microscopes. Le même vaisseau, dit encore M. Mirbel , présente souvent , dans un très-court espace, les spires des trachées, les fentes des fausses trachées et les pores des tubes poreux (1), en sorte qu'il est impossible de ne pas apercevoir le lien commun qui unit ces trois espèces de tubes. Il conclut de tout ceci qu'on ne sauroit révoquer en doute l'existence des tubes poreux. (1) Voyez Traité d'anatomie et de physiologie végétale, tom. 1, p. 569. D'HISTOIRE NATURELLE. 469 OBSERVATIONS Sur l'affection mutuelle de quelques animaux, et particulièrement sur les services rendus au Requi par le Piore. PAR M GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. Ex lisant dans Hérodote (1) que le crocodile renonce à sa férocité naturelle en faveur d’un petit oiseau, à cause des ser- vices qu'il en reçoit, on se demande s’il peut exister entre ces deux animaux une sorte de convention tacite, d’après laquelle il soit prudent au plus foible de se confier au plus fort : je n’en vois pas l'impossibilité. Il suffit pour cela que l'animal qui est pourvu des moyens de nuire n’en veuille point faire usage; il est bientôt compris des animaux qui l'entourent, et ceux-ci finissent par se familiariser avec lui. Nos ménageries nous en offrent sans cesse des exemples. Plusieurs lions et lionnes ont vécu à Versailles et au Muséum d'histoire naturelle avec des chiens. Dans la confiance qu'ins- pire à ceux-ci le caractère débonnaire de leurs compagnons, G) Voyez ci-dessus, Observations sur les habitudes attribuées par Hérodote aux crocodiles du Nil, page 582, 9. Go 470 ANNALES DU MUSÉUM ils se permettent assez souvent de'les tourmenter et de les mordre. Il n’est pas nécessaire, pour qu'ils se lient d'amitié, qu'ils soient élevés ensemble dès leur premier âge. Le premier lion de la ménagerie du Muséum d'Histoire naturelle, ayant perdu son chien, mort de maladie, en accueillit un autre; non pas le premier qu’on lui présenta, qui fut frappé à la vue du lion dela plus vive terreur, qui s’obstinoit à rester tapi dans un coin de la loge, et que le lion punit en quelque sorte de sa méfiance par un coup de patte qui l’étendit roide mort. Un aigle que le docteur Paulet vient de nous adresser de Fontainebleau , après lavoir guéri d’une fracture du tarse droit, a pareillement admis un coq dans sa société. Il fut, à son arrivée, plusieurs jours sans manger : on crut qu’il dédai- gnoit les lambeaux de chair dont nous nourrissons nos aigles. On lui donna un coq; mais il ne lui fit aucun mal, et accepta le lendemain les mêmes morceaux de chair qu'il avoit refusés quelques jours auparavant ; on retira ce coq et on lui en donna un autre, qu'il accueillit pareïllement: Un autre aigle, à la ménagerie de Versailles, avoit aussi vécu avec un coq. On a vu des chattes allaiter des écureuils (1) et des rats (2). Hest certain que quoique les animaux naissent avec un instinct déterminé, ils le modifient pourtant selon que changent autour d'eux les localités et les êtres au milieu desquels ils se trouvent : ainsi l'oiseau de proie varie ses ruses selon les habi- tudes qui sont propres à chaque espèce ; il tourne autour de celle-ci, et tombe à plomb sur cette autre. D’un autre côté (1) Biblioth. Brit., vo. :, pag. 28. (2) Ce fait a eu lieu, ily a dix-huit mois, à Boulogne-sur-Mer, D’ H LS/TI0 NH RE: N AoT U ACTU L E. PER l'oiseau chassé combine sa défeñse où sa fuite sur les res- sources dont il sait que son agresseur peut faire usage. Ainsi la corneille mantelée est timide ét fuit en France du plus loin qu'elle aperçoit quelqu'un, tandis qu'en Egypte elle suit les pas du laboureur qui trace un sillon , et qu'elle se fie assez sur son affection (1) pour venir se poser sur sa charrue. Voilà donc des habitudes qui semblent annoncer &n con- cert (2) entre des animaux de mæurs différentes , quoique chacun d'eux n’agisse que pour son intérêt pérsonnel. (1) Le cultivateur égyptien affectionne en effet Ja corneille mantelée, Un jour que je me disposois à en abattre une d’un coup de fusil, un paysan qui étoit à son travail vint me conjurer de l'épargner, L'ayant interrogé sur l'espèce d'intérèt # qu'il lui portoit :« Elle détruit, me répondit-il, les insectés qui causent un #» grand dommage à nos moïissons. 55 £ (2) M. de Lamarck, entendant lire ces observations, s'est rappelé le fait suivant, dont il a bien voulu me permettre de disposer. Étant avec sa famille, au printemps de 1708, à sa terre d'Héricourt, «dépar- tement de l'Oise, il avoit remarqué un nid d’hirondelle placé à l’une de ses fenêtres : un enfant du fermier vint à le détruire. Le couple à qui appartenoit le nid se trouvant sans asile an moment où la femelle alloit pondre, parvint sans doute à informer de sa détresse les ‘hirondelles du voisinage; Car on yit inconlinent au moins dix à Fous hirondelles se rassembler au lieu du dégât. Elles étoient fort agitées , faisoient beaucoup dé bruit et sembloient d'abord se quéreller; mais on ne tarda pas à s’apercevoir de leur dessein : elles alloient et venoient de manière à demeurer plusieurs auprès da nid. On vit enfin qu’elles tayailloient en commun à sa reconstruction. On sait que les hirondelles em- ploient de huit à douze jours à faire leur nid; mais celles dont il est ici ques- tion firent tant de diligence, qu’elles eurent achevé leur travail dans la matinée du lendemain qu'elles l'avoient commencé. M. de Montbeillard les a aussi vues travailler en commun: il en a compté jusqu'a cinq posées dans un même nid ou FERTACRCE autour, sas y comprendre celles qui alloient ét venoient, Go * 472 ANNALES DU MUSÉUM La liaison du crocodile et du petit pluvier n’est pas plus singulière, et il ne répugne point à la raison de ladmettre dans le sens d'Hérodote. Il est en effet naturel que le croco- dile prenne du plaisir à être débarrassé des insectes qui l’in- commodent, et qu'il épargne l’oiseau qui lui rend ce service; il n’y auroit rien d'étonnant, à ce que, ainsi que le rapporte Pline, le crocodile l’y invitât en s'étendant pour cela à terre sans mou- vement et la gueule ouverte. = On comprend aussi comment le petit pluvier, habitué à courir sur la grève et à furter partout, aura pu être excité par l’appât d’une nourriture abondante et par le sentiment de son agilité à entrer dans la gueule du crocodile pendant son sommeil, et comment à force de répéter cette manœuvre sans accident, il aura acquis la sécurité qu'on lui attribue. Aristote fut persuadé que ces deux animaux vivoient en très- bonne intelligence. Voici comme il s'exprime à leur égard: « Lorsque le crocodile a la gueule ouverte, le trochilus ÿ vole » et lui nettoie les dents. Le trochilus trouve là de quoi se » nourrir: le crocodile sent le bien qu'on lui fait, et il ne » cause aucun mal au trochilus. Quand il veut le faire envoler, » il remue le cou afin dene pasle mordre.» Arisr., Lip. 3, trad. de Canus. Les Arabes parlent d’une espèce de felis qui seconde le lion dans ses chasses , et que pour cette raison ils appellent :le guide ou le pourvoyeur du lion. C’est l'animal auquel Buffon a donné le nom de Caracal. Thévenot, sur le dire des gens du pays, nous apprend qu'il précède le lion de quelques pas, qu'il le conduit vers les endroits les plus abondans en gibier, et que s'il en est éloigné il jette un cri particulier , dont l’objet est de fixer l'attention du lion sur une proie qui va passer à D'HISTOIRE NATURELLE. 473 sa portée : le lion, pour prix de ses services, lui abandonne une part de l'animal qu'il a éventré. Il paroïît qu’au Sénégal il fait choix d’un autre compagnon qu'on ne supposeroit pas aussi oflicieux. Adanson ( Foy. au Sén., p. 116 ), dit savoir, à n’en pas douter , quele loup fraie avec le lion; qu’on les trouve souvent ensemble le long du Niger , et que cent fois il a entendu leurs mugissemens partir des mêmes lieux. Il ajoute qu'une nuit, couchant dans une case de nègres sur le comble de laquelle on avoit mis sécher du poisson, un loup et un lion vinrent ensemble y prendre de ce poisson. Adanson les distingua très-bien, et sut encore mieux qu'ils avoient marché côte à côte, en allant le lendemain examiner l’impression de leurs pas sur le sable. En admettent ces faits ainsi qu'ils sont racontés, on est toujours dans le cas de douter si le commerce de ces animaux est l'effet d’une association réciproquement consentie. Pour être à même d'en prendre cette opinion, il faudroit une ob- servation qui réunit en sa faveur un tel concours de circons- tances , qu'il devint certain que ces animaux sont dans l’m- tention de s’obliger mutuellement. Je crois le fait suivant dans ce cas, et je vais le raconter. DU REQUIN ET DU PILOTE. On a écrit que les requins avoient soumis à leur empire un trés-petit poisson du genre des gades , que celui-ci pré- cédoit son maitre dans ses voyages, lui découvroit les en- droits de la mer les plus poissonneux , qu'il lui indiquoit à la piste les proies dont il étoit le plus friand, et qu’en recon- noissance de services aussi signalés, il en étoit eflicacement protégé. C’est à peu près ce qu’on a dit du lion et du caracal. 474 ANNALES DU MUSEUM Les naturalistes, justement en garde contre les exagérations des voyageurs, ont pour la plupart révoqué ces faits en doute, parce qu'ils n’ont pu concevoir les motifs d'une pareille asso- ciation :. on va voir que c’est à tort. Les observations que je vais publier à ce sujetne se sont peut-être offertes qu'à moi dans toutes les circonstances que je vais rapporter. Le 26 mai 17398 , je me trouvois à bord de la frégate V Alceste, entre le Cap-Bon et l'ile de Malte; la mer étoit tran- quille , les passagers éloient fatigués de la trop longue durée du calme, lorsque leur attention se porta sur un requin qu'ils virent s'avancer vers le bâtiment. Il étoit précédé de ses deux pilotes , qui conservoient assez bien une même distance entre eux et le requin ; les deux pilotes se dirigèrent vers la poupe du bâtiment, la visitèrent deux fois d’un bout à l'autre, et après s'être assurés qu'il n'y avoit rien dont ils pussent faire leur profit, reprirent la route qu'ils avoient tenue anparavant. Pendant tous leurs divers mouvemens, le requin neles perdit pas de vue, ou plutôtil les suivoit si exactement , qu'on auroit dit qu'il en étoit trainé. Il n’eut pas été plutôt signalé, qu’un matelot da bord pré- para un gros hamecon qu'il amorça avec du lard; mais le requin et ses compagnons s’étoient déjà éloignés d’une certaine distance, quand le pécheur eut achevé toutes ses dispositions : cependant il jeta à tout hasard son morceau de lard à la mer. Le bruit qu’en occasiona la chute se fit entendre au loin ; nos voyageurs en furent étonnés et s’arrétèrent : les deux pilotes se détachèrent ensuite et vinrent aux informalions à la poupe du bâtiment. Le requin, pendant leur absence, se joua de mille manières à la surface de l'eau ; il se renversa sur le dos, se rétablit en- D'HISTOIRE NATURELLE. 475 suite sur le ventre ou s’'enfonçca dans la mer, mais il se ünt toujours dans la même région. Aussitôt que les deux pilotes eurent atteint la poupe de V Alceste et aperçu l’appat offert au requin, ils allèrentretrouver leur compagnon. Ils ne l’eurént pas plutôétæejoint, que celui-ci se mit à continuer sa route; les pilotes firent effort pour le gagner de vitesse. Ils nagèrent l’un à sa droite et l’autre à sa gauche. Des qu'ils l'eurent devancé, ils se retournèrent brus- quement et revinrent pour la troisième fois à la poupe du bà- üment. Cette fois ils étoient suivis du requin, qui parvint ainsi, grâces à la sagacité de ses petits amis, à apercevoir la fatale proie qu'on lui avoit destinée. On a dit du requin qu'il avoit Fodorat très-délicat; j'ai fait attention à ce qui s’est passé dans le moment où il s'est ap- proché du lard : il n’a paru qu'il n’en fut avisé qu'a l'instant où ses guides le lui eurent pour ainsi dire indiqué. Ce n’est qu'alors qu'il nagea avec plus de vitesse , ou plutôt qu'il fit un bond ponr s’en emparer. Il en détacha d’abord une portion sans être harponné; mais, à la seconde tentative qu'il fit, lhamecon pénétra dans la lèvre gauche: il fut pris et hissé à bord. Ce ne fut qu’au bout de deux heures pendant lesquelles je m'occupois de quelques recherches anatomiques sur ee squale , qu'il me vint à la pensée d'examiner l’espèce qui se vouoit ainsi volontairement au service du requin ; on m'informa qu’on pou- voit me la procurer, parce qu'il étoit certain qu’elle n’avoit pas quitté les environs du bâtiment, et quelques momens après on fit mieux, on n'en présenta un individu, que je reconnus pour appartenir au pilote ou fanfre des marins et au gaste- rotheus ductor des naturalistes. On peut, jusqu'à un certain point, se faire une idée des 456 ANNALES DU MUSÉUM motifs qui dans cet exemple déterminent le requin à ne faire aucun mal au pilote ; mais on n’apercoit pas de même ceux du pilote pour s'imposer les devoirs pénibles de la domesticité à l'égard d'un maïtre comme le requin. M. Bosc a été à même d'apprécier ces motifs dans sa traversée d'Europe en Amé- rique. Il a bien voulu m'informer que les pilotes se nourrissent de la fiente des requins ; ce qui explique , par la raison d’un intérêt mutuel, cette association de deux espèces qui ne peuvent différer davantage par le volume et les habitudes. Je n’ai rien dit ici que les marins ne sachent très-bien; mais il n’a semblé que mon observation avoit réuni un con- cours de circonstances qui ne laissent plus de doutes sur l’in- tention où sont quelques animaux de s’entr'aider : j'ai cru utile de la communiquer au public. 2774] = 2P PRIOPT ‘FWHdODNAT FINIS , RS sé *L: 410 Ze "LI D'HISTOÏRE (NATURELLE. 457 DESCRIPTION D'un papion qui pourrouit se rapporter a l’une des espèces décrites par PENNANT. SIMIA LEUCOPHÆA. PAR M FRÉDÉRIC CUVIER. L, famille des quadrumanes est si nombreuse , les espèces qui la composent sont si variées, et les caractères qui Les distinguent si fugitifs, que l’histoire de ces animaux est encore couverte d’une assez grande obscurité. On distingue, il est vrai, faci- lement les singes de notre continent de ceux du nouveau- monde, mais quoique les auteurs systématiques aient formé plusieurs divisions des premiers, ils ne sont'd’accord ni sur les espèces qui doivent entrer dans ces divisions, ni sur le nombre de celles qui doivent résulter des descriptions des voyageurs et des naturalistes, Ces difficultés, qui malheureusement ne sont point parlicu- lières aux quadrumanes, viennent généralement du peu de détails dans lesquels on est entré sur la couleur exacte des diverses parties du corps des animaux, sur les dimensions de leurs membres, sur leurs formes générales et particulières, sur l'âge des individus qu’on observoit , en un mot, de lincorrection Ge Gx LA 478 ANNALES DU MUSEUM avec laquelle ils ont été décrits et dessinés. La critique par- vient quelquefois à reconnoïtre dans tous ces débris épars d'animaux dont l’histoire saturelle estembarrassée, ceux qui avoient été réunis par la nature, et à reformer ainsi de toutes pièces les véritables espèces; mais il existe une foule d'êtres qui ne se montrent encore à nous que par quelques-unes de leurs faces, et qu’on ne parviendra à connoître véritablement que lorsqu'on en aura donné des descriptions plus détaillées. Le singe que je me propose de décrire et de figurer ici, est dans ce cas. Il a peut-être déjà été décrit et peint; mais il ne la sûrement jamais été, ni sur un individu vivant, niavec assez détendue pour qu'il soit possible de le reconnoitre dans les descriptions et dans les figures inexactes qui peuvent en avoir été faites. Aussi, à cause de l'incertitude qui doit rester à cet égard , croyons-nous à propos de rapporter ce qu'il nous a été possible de recueillir sur ces singes à queue courte, qui ne sont encore qu'imparfaitement connus. Pennant trouva entre autres choses, dans la collection d’his- toire naturelle d'Ashton-Lever à Londres, quatre singes em- paillés qu'il ne regarda peut-être que comme des variétés d’une méme espèce , et qu'il décrivit dans sa division des babouins à queue courte. Il ne donna que la figure du premier qu’on retrouve dans les Supplémens de Buffon; il le nomma wood baboon, babouin des bois : il donna au second le nom de vellow baboon, babouin jaune; au troisième, celui de cinereous baboon , babouin cendré : mais il décrivit le quatrième sans lui donner de nom. Son wood baboon a le museau allongé d’un chien , la face noire et luisante , les pieds et les mains nus et noirs comme la face ; le poil de toutes les parties de son corps long et agréa-- D'HLSTOÏRE NATURELLE. h7g blementmélangé de noir et de brun, les ongles Manes ;:6a taille est d'environ trois pieds de hauteur ane pouces fran- çois) lorsqu'il est debout. Sa queue, qui n’a pas trois pouces, garnie de poils en dessus. Son yellow baboon a la face noire , les oreilles cachées dans la fourrure, de longs poils au-dessus des yeux, et des poils qui lui couvrent les mains. Sa couleur ést d’un jaune brillant, mélangé de noir. Il ressemble fort au babouin des bois, excepté par sa taille qui n’est que de déux pieds, et par ses maius velues. Son cinereous baboon a la face de couleur de suit, la Barbe brun-pâle, le corps et les membres brun-cendré, mélé de jaune sur la tête. Enfin, celui qui n’a point de nom a la face bleue, la barbe brun-päle, deux dents de devant larges et plates, de longs poils sur chaque @il , et une touffe derrière chaque oreille. Le pélage est noir et cendré, mélangé avec beaucoup de roux. Il paroït aussi que feu Hermann, de Strasbourg, possédoit dans son cabinet une espèce de babouin à queue courte, à en juger par la note qui se trouve dans ses opuscules posthumes intitulée Observationes zoologicæ, sur un smge auquel il donne le nom de sänia sphingiola , et qu’il croitne point avoir été décrit avant lui. Voici cequ'il en dit : Ce petit papion , que j'achetai mort en janvier 1589, et que je possède empaillé , est brun-verdâtre; sa quene a deux pouces de long, avec du poil seulement en dessus; ses oreilles sont très-distinctes, et l'on voit sur sa tête une aigrette comme dans le simia aygula de Linnæus; des poils naïssent-du milieu des joues, et se dirigent, les uns vers le haut'entre les deux (ÉY An 480 ANNALES;:DU/MUSÉUM oreilles, les autres en arrière du côté des tempes; les canines sont tres-fortes, et la face ressemble à celle d’un chien , sans être aussi saillante, Le front paroissoit plus proéminent avant que l'animal fût empaillé. Le scrotum est aussi apparent que celui de l’homme, et le pénis, qui est de grandeur médiocre, contient un petit os. Les callosités des fesses ne sont pas fort étendues , pas plus que dans la figure da petit papion de Buffon et de Schreber, et que dans le platypigos, auquel il ressemble du reste beaucoup, excepté par sa taille plus petite et par sa cou- leur plus verte. Cet animal étoit d’un caractère doux, ete., etc. La figure de ce singe se trouve dans Schreber (1), mais fort mal faite d’après Pindividu empaillé. Quant au platypigos,-de ce dernier(2), cité par Hermann, il n’est autre cliose quele singe à queue de cochon d'Edwards, le maimon de Buffon, simia nemestrina de Linnæus, et il est certain que la note que nous venons de transcrire ne se rapporte pas au maimon. Je ne serois même pas éloigné de croire, d’après la figure de Schreber, que l'individu qu’elle représente n'étoit autre chose que quel- que macaque, et peut-être le callitriche, simia sabæa, Lin., dont la queue auroit été mutilée; car il arrive communément aux montreurs d'animaux d'amputer la queue à leurs singes, soit pour cicatriser la plaie que ces animaux sont sujets à en- tretenir sur cet organe en le rongeant, soit pour prévenir cet accident, si commun chez les singes à longue queue non prenante. c Reste le simia apedia de Linnæus, qui ne peut en aucune (1) Table VI, B. vol. r, (2) Table V, B. vol. 1, D'HISTOIRE NATURELLE. 48x manière se rapporter aux espèces précédentes, puisque son caractère, si toutefois il est réel, consiste à avoir le pouce de la main adhérent aux doigts ; un caractère de telle importance n’auroit pu échapper à Pennant ni à Hermann. Le babouin , qui fait l'objet de cette note, éloit une jeune fe- melle ; son poil n’avoit point encore ce lustre qui caractérise celui des animaux adultes; ses crêtes sourcilières ne parois- soient encore que comme de légères saillies, et ses canines égaloient à peine en longueur ses incisives : mais à la position de ses yeux , à l'étendue de son organe de l'odorat, à ses na- rines placées au bout du museau, on ne pouvoit douter que, dans un âge adulte, il n’eût la tête et les molaires des babouins, comme il en avoit déjà tous les autres caractères; un corps porté sur des jambes hautes et minces, des abajoues, des callosités sur les fesses, etc., etc. Sa face , comme nous venons de le dire, n'avoit point encore l'allongement de celle des babouins, parce que ses dernières molaires n'étaient point encore dé- veloppées; elle étoit nue et d’un noir bleuâtre : il avoit le cercle de Piris fauve, les oreilles nues, rondes et noires; les mains étoient noires en dessus, couleur de chair en dessous; les ongles noirs et bien faits, et les doigts réunis par une membrane jusqu’à la seconde phalange, comme, au reste, la plupart des autres babouins. Toute la partie supérieure du corps étoit d'un gris un peu jaunâtre , plus brun sur la tête, le long de lépine du dos, sur les bras, les jambes et la partie inférieure des cuisses. Tout le dessous du corps et l'intérieur des membres étoit blanchatre et le dessous de la mächoire inférieure jaune. Quel- ques poils gris très-fins couvroient légèrement la queue. Les poils des parties les plus foncées avoient du gris à leur base, 482 ANNALES DU MUSEUM du brun au milieu et du jaune sale au bout ; ceux de la tété étoient les plus longs, et ils paroissoient former une sorte de toupet. Partoutoù la couleur étoitsombre, la peau étoit bleuâtre; où les poils étoient blancs, elle étoit couleur de chair. Le cli- toris se prolongeoit singulièrement. Sa longueur totale, y compris la tête, étoit de , . . . 0,370 Sa hauteur au garot et aux reins, de. . . . . . . . .0,500 Sa queue égaloit à peine . . . . . . . . . . .« . . , 0,060 Ce singe appartenoit à des montreurs d'animaux qui l'avoient acheté à Bordeaux. L'espèce se trouve très-rarement dans le commerce , et vient probablement des côtes d'Afrique. TABLE DES MÉMOIRES ET NOTICES Contenus dans ce neuvième volume. M HAU Y. Notre sur les analyses du Chromate de fer et de la variété d'Epidote appelée Loysit. page 103—105 M FAUJAS-SAINT-FOND. Notice sur le madréporite à odeur de truffes noires , de Monte-V'iale, dans le Vicentn. 224—228 Notice sur une portion de tronc de palmier , trouvée à soixante pieds de profondeur, au milieu d'un tuffa ou bréche volcanique de Montecchio-Maggiore, dans le Vicentin. 388—391 MM FOURCROY ET VAUQUELIN. Analyse du suc de bananier. 301—302 Expériences sur l'acide du tartre, et particulièrement sur celui qu'il fournit par la distillation sèche. 4o5—A412 484 S' SD E 7 DÉE SYUM'E MUONIIRUESS M VAUQUELIN. Analyse dune stéatite verte qui a été remise à M. Vau- quelin par M. Faujas-Saint-Fond. 1—9 Analyse de la terre de Vérone. 81—58 Analyse d'un madréporite à odeur de truffes. 229—23x Analyse comparée de lanalcime de M. Hay et de la sarcolite de M. Tompson. 241—250 Analyse de la chabasie de Tile de F'eroé, pour faire suite à celle de la sarcolite et de l'analcime. 333—335 M DESFONTAINES. Mémoire sur le genre Convallaria. 45—55 Précis d'un mémoire de M. Mirbel, correspondant de l Ins- titut , sur l'anatomie des fleurs. 448—/68 M DE JUSSIEU. Mémoire sur le Dicliptera et le Blechum , genres nouveaux de plantes, composés de plusieurs espèces auparavant réunies au Justicia. 251—271 Note sur le Curanga , genre nouveau de plantes de la fa- mille des personées. 319—320 Mote sur le genre Physkium de Loureiro. 4o2—404 M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. Note sur un métis d'äne et de femelle zèbre. 223 ET NOTICES. 485 Premier mémoire sur les poisssos, où l’on compare les pièces osseuses de leurs nageoires pectorales avec les os de l'extrémité antérieure des autres animaux à vertèbres. 357—372 Observations sur les habitudes attribuées par Hérodote aux crocodiles du Nil. 373—3387 Second mémoire sur les poissons. — Considérations sur l'os furculaire | une des pièces de la nageoire pec- torale. 413— 427 Observations sur l'affection mutuelle de quelques animaux , et particulierement sur les services rendus au requin par le pilote. 469—/476 M. DE LACEÉPÉDE. Des hauteurs et des positions correspondantes des princi- pales montagnes du globe, et de l'influence de ces hauteurs et de ces positions sur les habitations des animaux. 303—318 M LAMARCK. Explication des planches relatives aux coquilles fossiles des environs de Paris. 236—2/0—399—/01 M. CUVIER. Suite des recherches sur les os fossiles des environs de Paris. Troisième mémoire, section ur: Sur les pha- langes. 10—15 9. G2 486 TABLE DES MÉMOIRES Quatrième mémoire. Sur les os des extrémités. 16—44 Quatrième mémoire , 11° section. Sur Les os longs des extré- mités antérieures. 89—102 Quatrième mémoire, ure section. Sur les omoplates et les bassins. 205—215 Cinquième mémoire. Descriptions de deux squelettes presque entiers d'Anoplothérium commune. 272—282 Mémoire sur les ossemens d'oiseaux qui se trouvent dans les carrières de pierres à plâtre des environs de Paris. 336—356 Mémoire sur les espèces des animaux carnassiers dont on trouve les os mélés à ceux d'ours dans les cavernes d'Allemagne et de Hongrie. 428—447 M LAUGIER. Examen de la pierre dite Zéolite rouge du Tyrol. 75—80 Examen chimique d'une substance animale de la grotte de l'Arc, dans l'ile de Caprée. 321—332 M. FRÉDÉRIC CUVIER. Du rut. 118—130 Description d'un papion qui pourroit se rapporter à une des espèces décrites par Pennant ; Simia leucophæa, : h77—h82 M DELEUTZE. Recherches sur les plantes d'ornement et sur leur introduc- tion dans nos Jardins. Section 11. De l'établissement des principaux jardins de botanique. 149—204 E TL NO (TUTUICUE FS: 487 M. DECANDOLLE. Sur les Champignons parasites. 56—;4 Mémoire sur le Cuviera, genre nouveau de la famulle des Rubiacées. 216—222 M CORRÉA DE SERRA Vues carpologiques. 283—288 Suite des Observations carpologiques ou Description de divers fruits. 288—2093 M LABILLARDIÈRE. Sur le Lodoicea ou Cocotier des Maldives. 140—145 M. BOSC. Description de la Morëne à éponge (hydrocharis spongia ). 396—398 M. MAMGILI, professeur d'histoire naturelle à Pavie. Mémoire sur la Léthargie des marmottes, traduit sur le manuscrit italien par M. Dereuze. 106—117 M. MÉNARD DE LA GROYE. Mémoire sur un nouveau genre de coquille de la famille de solénoïdes. 131—139 Gare 488 TABLE DES MÉMOIRES ET NOTICES. CORRESPONDANCE. Extrait d'un Mémoire envoyé au Muséum par M. Quéav- Quincy, commandant et administrateur général des Îles Séchelles, sur le palmier qui produit les fruits appelés cocos des Maldives. 146—148 Notice sur divers objets trouvés dans une tourbière de la commune de Buire , département de la Somme , adressée au Muséum par M. Réveuuère - Lépaux. 232—235 Extrait d'un Mémoire sur les trachées du bananier et sur les usages auxquels elles peuvent étre employées, , adressé à M. de Fourcroy par M. Haper-La-Cne- NAYE, habitant de la Guadeloupe et correspondant de l'Institut. 294—300 Notice minéralogique et géologique sur le quartz fétide des environs de Nantes , par M. Bicor ne Morocurs. 392—305 nm " INDICATION DES GRAVURES DU IX° VOLUME. Planche I. Os fossiles des environs de Paris. Phalanges. page 14 IT, IE, IV, Vet VL Os fossiles des environs de Paris. Os longs des extrémités postérieures. 44 VIT. Polygonatum orientale. 55 VIII. Smilacina umbellata. ibid. IX. Smilacina ciliata. ibid. X et XI Os fossiles des envrons de Paris. Os longs de l'extrémité antérieure. 102 XIL. Panopée de F'aujas. 131 XIII. Lodoicée des Séchelles. 145 XIV et XV. Os fossiles des environs de Paris. Omoplates et bassins. 215 XVI. Cuviera acutiflora. 299 XVIT, XVIIL, XIX et XX. Coguilles fossiles des environs de Paris. 240 XXI. Blechum et Dicliptera. 271 XXIL Squelette d'Anoplotherium commune trouvé à Montmartre. 277 XXIIL Squeleite d'Anoplotherium commune trouvé à Antony. 282 XXIV, XXV et XXVIL Carpologie ou Anatomie de divers fruits, savoir : Gomutus Rumphü , Ruttera pinnata. 2838 490 INDICATION DES GRAVURES. Thespesia populnea, Eugenia malaccensis. 200 Pourretia arborea. 203 XXVIL et XXVIIL Os fossiles des environs de Pa- ris. Ornitholites. 356 XXIX. Os de la nageoire pectorale des poissons. 372 XXX. Hydrocharis spongia. 308 XXXI et XXXII Coguilles fossiles des environs de Paris. 399 et 4oo XXXIIT et XXXIV. Os fossiles des animaux car- nassiers. 438 XXXVet XXXVI Anatomie des fleurs. 457 XXXVIL Simia leucophæa. 477 . { TABLE ALPHABÉTIQUE DES ARTICLES Contenus dans ce neuvième volume. A. AE PYROTARTAREUX. Voyez Æcides végétaux. Acides végétaux. Expériences sur l’a- cide que le tartre fournit par la distillation sèche, et comparai- son de cet acide avec les autres acides végétaux, 4o5ÿetsuiv. Ædathoda. Structure de la capsule dans les adathoda de Tournefort, 254. Voyez Justicia. ÆAmaïova. Caractère de ce nouveau genre de rubiacées, 218. Ænalcime et Sarcolite. Analyse com- parée de ces deux pierres , 241 et suiv. — Elles sont composées des mêmes élémens, mais dans des proportions très-différentes ; ce qui doit les faire considérer comme deux espèces, 249. Analyse chimique d’une stéatite verte, 1 etsuiv.;—de lazéolitedu Tyrol, 75 et suiv.; — de laterre de Vé- rone et de la chlorite, 81 et suiv.; —duchromate de fer et du zoyzit, 105;— d'un madréporite odorant, 229 etsuiv. ;—de l’analcime et de la sarcolite, 241 et s.; — du suc debananier, 501 ;—d’une subs- tance animale de la grotte de l'Arc ,321 et suiv.; — de la cha- basie, 555 et suiv. Voy. Acides végétaux. Anatomie comparée ( articles d’) ren- fermés dans ce volume. Foyez dans la table précédente les titres des Mémoires de MM. Cuvieret Geoffroy. ÆAnalomie végétale. Précis d’un Mé- moire sur l'anatomie des fleurs et de toutes les parties de la fruc- tification , 448 et suiv. Diffé- rence de l’organisation intérieure des plantes qui appartiennent à diverses familles, z4. Observa= tions sur le développement des graines, 460 et s. VCarpologte. Animaux, Observations sur les diffé- rences que présentent les divers genres d'animaux lorsqu'ils sont dans l’état de rut, 118 et suiv. Voyez Rue Obseryations sur l'affection mutuelle de quelques animaux et sur les services rendus au requin par le pilote , 469 et suiv. Voÿ. Zoologie, 402 TABLE Animaux perdus. Voyez Os fossiles. Anoplotherium. Voyez Os fossiles. Atmosphère. De sa température à di- verses hauteurs et sous les divers degrés de latitude, 311 et suiv. Hypothèse à ce sujet, 76. Voyez Montagnes. B. Babouins ou Singes à queue courte (observations sur les ). Caractère des quatre espèces décrites par Pennant, 478. Voyez Papion. Baconia. Caractère de ce genre nou- veau de la famille des rubiacées, 219. Bananier. Mémoire sur les trachées du bananier et sur les usages aux- quels elles peuvent être em- ployées, 294 el suiv.V.Trachées. Analyse du suc de bananier, 3o1. Baudroie. Voy. Poissons. Blanc. La maladie à laquelle les jar- diniers donnent ce nom est pro- duite par diverses espèces d’éry- siphé. Voy. Champignons pa- rasiles, Blechum. Genre nouveau formé de plu- sieurs espèces de justicia. Rai- sons pour l’établir, 262 et suiv. Caractère du genre et descrip- tion de trois espèces , dont une inédite, 269 et suiv. Voyez Jus- ? L cia. Botanique (articles de) renfermés dans ce volume. P’oyez dans la table précédente les titres des Mé- moires de MM. Desfontaines, dé ALPHABÉTIQUE Jussieu , Bosc, Labillardière , Corréa de Serra, Decandolle et Mirbel. Voyez aussi Jardins de botanique. C. Carie du froment. Cette maladie pa- roit due à un champignon du genre uredo, 74. Voy. Champi- grons parasites. Carpologie. Vues sur cette science, 2853etsuiv. Différence des graines entre les séries primordiales des végétaux, 284 elsuiv. Caractères qui distinguent les graines des monocotylédons, 285 et suiv. Castoreum de Canada (examen chi- mique du }, comparé avec une substance animale de la grotte de l’Arc dans l'ile de Caprée, 350- et suiv, Chabasie de l'ile de Féroé. Analyse chimique de cette pierre, qui est voisine de la sarcolite, 333 ets. Champignons parasites. On a donné ce nom à ceux qui se dévelop- pent sousl'épiderme, qu'ils per- cent pour parvenir à l'air libre, Ou peut les comparer non aux insectes, mais aux vers intesti- naux ,56. Leur classification, 57 etsuiv. Leur histoire, 58 et suiv, Sont de véritables plantes et forment des genres distincts, 4. Leur différence ne tient pointà leur habitation sur telle ou telle plante , mais à leur espèce, 6x et suiv, La même espèce se re- trouve sur plusieurs plantes ana- D ES logues, 6. Comment les graines de ces champignons sont trans- portées d'une plante à l'au- tre. Il paroit qu'étant mélées avec le terreau, elles s’intro- duisent par les racines avec la sève et se développent sous l’é- piderme, 62 et suiv. Observa- tions qui confirment cette théo- rie, 65. Influence des champi- guons parasites sur les végétaux qu'ils attaquent ,68 et suiv. Leur abondance émpèche souvent les plantes de fructifier, 26 et suiv. Plusieurs maladies des plantes attribuées à diverses causes sont produites par les champignons parasites, 75. À quels champi- gnons sont dues les maladies connues sous les noms de mort du safran, de verrucosité des feuilles, de blanc, de rouille, de charbon et de carie, 74. Charbon trouvé dans des tourbières. Voyez T'ourbières. Charbon des céréales. Gette maladie est due à un champignonnommé uredo segetum. Noy. Champi- gnons parasites. Chauvesouris. Observations sur la lé- thargie de cés animaux pendant l'hiver, 111etsuiv. Chlorite ou Talc chlorite. Principes qu'on y trouve par l'analyse , 86. Comparaison de cette substance avec la terre de Vérone, 4. Chromate de fer. Comparaison des analyses faites decelui de Styrie, de celui de Sibérie et de celui 9: AR TT AC Ti ES 493 du Var, 103. Cocotier des Maldives où Lodoicée des Séchelles. Description de ce palmier et de ses fruits, 140 et suiv. Observations sur son ac- croissement et sur se$ usages , 146 et suiv. Convallaria (mémoire sur le} de Lin- næus. Division de ce genre en quatre autres dont on établit le caractère , et à chacun desquels on rapporte les espèces qui lui conviennent, 45 etsuiv. Descrip- lion de trois espèces de convalla- ria, 47 et suiv. Coquilles fossiles. On trouve à Monte: Pulgnasco, dans l'état de Parme, un grand dépôt de coquilles fos- siles dont les analogues vivans existent dans diverses mers , 137. Indication de vingt - trois espèces de ces coquilles, z4. et suiv. V. Panopée. Coguilles fossiles figurées dans ce volume. Voyez les planches 17, 18,19, 20,51 et 52, et l'expli- cation de ces planches, p. 256 et 399. Ces coquilles appartien- nent aux genres Arche, Bucarde, Cardite, Crassatelle, Érycine $ Gyrogonite , Mactre, Miliole, Modiole , Moule, Nucule, Pé- toncele ; Pinne , Rénulite, Véné- ricarde, Vénus. Cortezt. Ce savant a fait une nombreuse collection d’ossemens et de co- quilles fossiles. recueillis dans l'état de Parme, 151 et suiv. Cristailisation, Est la même dans des 63 T À BOULE 494 pierres qui diffèrent par l'ana- lyse chimique. Voy. Sarcolite. Crocodile du Nil. Observations sur plusieurs passages d'Hérodote, relatifs aux habitudes de cet animal, 375 et suiv.N. Égyptiens Curanga. Note sur ce genre de la fa- mille des personnées, 319. Lin- næus l’avoit mal à propos rap- porté au scutellaria, 26. Recti- fication du caractère de cegenre, ibid. Cuviera. Mémoire sur ce nouveau genre de plantes de la famille des ru- biacées, 216 et suiv. D. Dicliptera. Considérations sur ce nou- veau genre ; formé de plu- sieurs espèces de justicia, 254 et suiv. Caractère du genre et énumération des vingt-deux espèces qui le composent, 267 et suiv. Duhamel a le premier introduit et paturalisé en l'rance un grand rombre d'arbres de l'Amérique septentrionale, 183. E. Égyptiens. Vénération des anciens Égyptiens pour le crocodile du Nil, 386. À Thèbes, on élevoit un crocodile auquel on mettoit des pendans d'oreille, z8. On embaumoit après leur mort les crocodiles sacrés, et l’on a trouvé ALPHABÉTIQUE à Thèbes plusieurs momies de crocodiles , zb. V. Crocodile. Élémens. Les propriétés des minéraux ne dépendent pas seulement de la nature, mais encore de la pro- portion des principes. Voyez Analcime. Epidote gris dit Zoyzit. Comparaison des analyses que divers chimistes 104. Eugenia malaccensis. Description de ont faites de ce minéral, son fruit, 2092. F. Fer. Ce métal n’est pas seulement mé- langé dans les minéraux pier- reux, mais il y est combiné par une affinité chimique, 87. Fleurs. Introduction et culture des fleurs. Voyez Jardins de botanique. L'art de la broderie a engagé à cultiver des fleurs, et la culture des fleurs a fait faire des progrès à plusieurs manufactures, 178. Fossiles (animaux). On en trouve un grand nombre à Monte - Pul- gnaseo dans l’état de Parme, 131 et suiv, On y trouve aussi des coquilles fossiles, 7’oyez ce mot. Voy.aussi Os fossiles. Froid. Effet d’un froid très-vif sur les animaux en léthargie. V. Mur- mottes. Furculaire (os). Voy. Poissons. G. Genres. Il est utile en botanique de di- viser les genres dont les espèces sontnombreuses, lorsqu'elles of- PA “ DES frent des caractères tranchés, . 251 Géographie physique. N. Montagnes. Géologie. Noy. Montagnes, Os fossiles. Voy. aussi dans la table précé- dente les titres des Mémoires de MM. Faujas, Bigot et Ménard, Glandes des plantes. N. Anatomie vegétale. Gomutus Eumphii. Description de son fruit, 288. Graines. Observation sur leur déve- loppement, {60.Y. Carpologie. Graines des champignons CTRRRTE Sont d’une extrême ténuité, Se conservent leng-temps dans la terre ; s'introduisent dans les plantes non par les pores cor- ticaux, mais par les racines ; montent'avec la sève dans les vaisseaux et se développent sous l'épiderme qu’elles crèvent , 62 et suiv. V. Campignons pa= rasites. Grammatite et Srilbite. Comparaison de ces deux pierres qui renfer- ment des principes très-distinets, 79: Grotte de l'Arc dans l'ile de Caprée. Examen chimique d’une subs- tance animale qui se trouve dans cette grotte, 321 et suiv. Com- paraison de cette substance avec le castoreum du Canada , 230 el suiv. H. Hérodote. Examen de plusieurs pas- sages d'Hérodote relatifs au cro- AURORIICNE ENS. 465 codile du Nil, avec des observa- tions qui expliquent et confir- ment celles de cet historien, 575 et suiv. Hydrocharis. Voy. Moréne. J. Jardins de botanique (histoire de l’é- tablissement des principaux ), 149 et suiv. ; — des jardins par- ticuliers antérieurs aux jardins publics, 2. ; — des jardins pu- blics, 152 et suiv. Le plus an- Pise 7. sa fondation et celui de Histoire de de ses progrès, 14. Jardin de Padoue, 155 et suiv. — de Bo- cien est logne , de Florence et de Rome ; 157 ei Suiv. ; — de Leyde, 164 et suiv. Jardins d'Allemagne , 163:et suiv. Jardin de Montpel- lier, 164; — de Paris, 165; — de Messine, 167. Jardins du nord, 168 et Suiv. ; — d'Angle- terre , 172 ; — d'Espagne et de Portugal, 173. Jardins particu- liers établis dans les diverses contrées de l’Europe, depuis le milieu du seizième Jusqu'au mi- lieu du dix - huitième siècle, 174 et suiv. Introduction des ‘arbres étrangers et révolution dans les jardins d'agrément, 18r et suiv. Jardin de Lemonnier, 184. Jardin de Schoenbrunn, 186 et suiv. Jardin de Kew > 190 et suiv. Jardin deMDemidow à Moscou, 195. Jardin de la Mal. maison, 194. Augmentation pro- 496 TABLE gressive des plantes d'agrément dans nos jardins depuis le qua- torzième siècle, 197. Utilité des jardins de botanique fondés hors de l'Europe, 200 et suiv. Iudi- cation des jardins de botanique actuellement en correspondance avec celui du Muséom ,202 ets. Justicia. Considérations sur ce genre de plantes, 251 et suiv. Il com- prenoit seulement onze espèces lors de la 1." édition du Species plantarum , et ce nonxbre est porté à cent quarante-sept dans l'Enumeratio plantarum de Vahl, 252. Comment ce genre peut êtresubdivisé, 255. Établis- sement de deux genres nouveaux formés de sa subdivision , d’a- près les caractères du fruit, 254 et suiv. Voyez Blechum et Dicliptera. L. L'Écluse cultiva et introduisit dans nos jardins un grand nombre de plantes, 170. Lemonnier. Services que ce savant a rendus à la botanique et descrip- tion de son jardin, 185 et suiv, Léthargie des marmottes etdes chauve- souris. V. Marmottes. Loduicée. V.Cocotier des Maldives. M. n Madréporite à odeur de truffes noires (notice sur le ) de Monte-Viale daus le Vicentin, 224 et suiv. Son gisement dans le tuifa vol- ALPHABÉTIQUE canique avec d’aatres madrépo- rites inodores, :6.Ses propriétés physiques et son analyse chi- mique , 229 et suiv. Le principe odorant de ce madréporite se détruit par la pulvérisation et par les moyens employés pour en faire l'analyse, 251. Maianthemum. Caractère de ce genre, qui est une division du Con- vallaria de Linnæus, et descrip- tion de deux espèces, 54 et suiv. Maladies des plantes. Voy. Cliampi- g'10NS PUTASUES« Maleshertes. Services qu'il a rendus à l'agriculture et à la botanique, 184. Marmottes (mémoire sur la léthargie des ) où l'on examine les phé- nomèues que présentent en hiver les animaux en léthargie et les causes de cette léthargie, 106 et suiv. Expériences faites à ce sujet sur des marmottes et sur des chauvesouris , 24. La respi- ration , la circulation et les autres fonctions organiques sont rallenties mais non suspendues pendant la léthargie , 28. Un froid très-vif réveille les ani- maux en léthargie, et s'ils y restent exposés , ils passent de la léthargie conservalrice à une léthargie mortelle, 111 et suiv. Minéralogie. V. Analyse chimique et Quartz. Minéraux. Leurs propriétés physiques et chimiques ne dépendent pas seulement de la nature, mais en- core de la proportion des prin- D'FLS, A R-T.E C L\ENS 497 cipes qui entrent dans leur com- position, 249. Voy. Sarcolite. Monocotylédons. Caractères qui dis- tinguent leurs graines de celles des dicotylédons, 285 et suiv. Montagnes (mémoire sur les) dans le- quel on compare leur hauteur , leur rapport de position et l’in- fluence de ces hauteurs et de ces positionssur l'habitation des ani- maux, 505 et suiv. On peut sup- poser que l'Océan, qui d'abord couvroit tout le globe , s’est abaissé peu à peu, que les di- verses montagnes ont paru dans l’ordre de leur élévation, et di- visant en époques le temps de leur émersion, comparer la di- rection des diverses chaines, 74. Comparaison de la température des montagnes en raison de leur hauteur et de leur éloignement de la zone torride, 311 et suiv. Hypothèse à ce sujet , 0. In- fluence des montagnes sur la nature et les habitudes des ani- maux, 514. Division du globe en régions zoologiques, 316. Morène à éponge ( hydrocharis spon- gia). Description decette espèce, dont les feuilles inférieures sont munies d'un coussinet spongieux qui les soutient à la surface de l'eau, 396et suiv. Mort du safran. Cause de la maladie connue sous ce nom. Voy. Cham- pignons parasites. Mouffettes. (Remarques sur les espèces de) et sur le zorille,/459 et suiv, Os Ces animaux ne doivent point être réunis au genre 7’iverra, 443.L'odeur qu’ils répandentest due , comme celle des martes et des putois , aux deux glandes qui aboutissent au rectum , 26. N. Nageoires (os des). Voyez Poissons, 0. Oiseaux fossiles. Voy. Ornitholites. Ornitholites (mémoire sur les), 336 et suiv. Ceux des carrières à plâtre des environs de Paris sont pres- que les*seuls qui soient bien constatés, 536. Examen des di- vers Lémoignagessur ces fossiles , 1b. et suiv. À quelle époque leur existence a été prouvée , 342. Caractères qui distinguent les os d'oiseaux, et comparaison de ces os avec ceux des autres ani- maux, 545 et suiv. Description de plusieurs ornitholites, 345. Os fossiles ( recherches sur les) qui se trouvent dans les carrières de pierres à plâtre des environs de Paris, 10 et suiv. 89 et suiv. 205 et suiv. 272 et suiv. 536 et suiv. Phalanges d’anoplotherium etde palæotherium, 10 et suiv. Fé- murs des mêmes, 16 et suir. Tibias de palæotherium , 26 et suiv. Tibias d’anoplotherium , 35 et suiv. Supplément aux ar- ticles précédens, 59 et suiy. Pé- ronés, 42 ets. Os longs des ex- trémités antérieures radius, liu= merus etcubitus des mèmes anis C4 498 maux, 89 et suiv. Omoplates et bassins, 205 et s. Description de deux squelettes presque entiers d'anoplotherrumcommune, 72 et suiv. Os d'oiseaux, 536 et suiv. Os d'animaux carnassiers qu'en trouve mèlés à ceux d'ours dans les cavernes d'Allemagne et de Hongrie, 418 et suiv. Os d'un animal du genre del'hyène, 428; — du genre du tigre ou du lion, 49; — du genre du loup oudu chien, 435; — du genre du renard 455 ; — du genre de la marte, , 455 Os fossiles d'oiseaux. N. Ornitholites. Oxyanthus. Caractère de ce nouveau genre de rubiacées, 218. PE: Palmier fossile et presque carbonisé trouvé au milieu du tuffa dans le Vicentin, 388 et suiv. Palæotherium. Voy. Os fossiles. Panopée. Mémoire sur ce nouveau genre de coquilles de la famille des solénoïdes , 151 et suiv. Des- criplion du genre et de deux es- pèces, 190: Papion ( description d’une espèce de } et considérations sur Ja famille des singes en général , et sur celle des babouins ou papions en par- ticulier, 477 et suiv. Physiologie. Voyez Marmottes , Ru. Physiologie végétale. Noy. Champi- g'ons parasites. Noyÿez aussi Anatomie végétale. Physkium. Comparaison du caractère TABLE ALPHABÉTIQUE de ce genre établi par Loureiro avec celui du vallisneraria ,; de laquelie il résulte que le phys- kium n’est qu'un vallisneria dif- féremment décrit, 402 et suiv. Pilote ou F. anfre(gasterotheus ductor.) Observations sur les services que ce poisson rend au requin, 75 et suiv. Plantes d'ornement ( suile des recher- chessur les). Combien leur nom- bre a été progressivement aug- menté dans nos jardins depuis le 14. siècle, 195. Des moyens par lesquels les plantes étrangères ont été introduites chez nous, et des hommes qui les ont intro- duites et naturalisées. Voyez Jardins de botanique. Polygonatum. Caractère de ce genre qui est une division du convallu= ria de Linnæus, et description de cinq espèces, 48 et sui, Poissons. Comparaison des pièces os- seuses de leurs nageoires pec- torales avec les os de l'extrémité antérieure des autres animaux : 357 et suiv. Considérations sur la forme, lasituation et les usages de l'os furculaire, une des pièces de la nageoire pectorale, 413 et suiv. Comment la baudroie “prend les poissons dont elle se nourrit, 419. Observations sur l'association du requin et du pi- lote (gasterotheus ductor), 473 etsuiv. DES Pourretia arborea. Description de son fruit, 295. Principes. Voy. Elémens. Q. Quartz fétide des environs de Nantes. Notice sur ce minéral et sur son gissement, 392 et suiv. k. Requin.Observation sur l'association de ce poisson ayec un autre nommé pilote. Voy. Pilote. Rittera pinnata. Description de son fruit, 289. Fouille des céréales. Cette maladie est due à un champignon du genre Ppuccinia, 73. V. Champignons parasites. Rubiacées. Observations sur cette fa- mille de plantes et sur ses carac- ières essentiels, 216 et suiv. elle doit être divisée en quatre tribus, 217. Caractère de cinq genres nouveaux que l’auteur établit dans cette famille , savoir: oxyanthus, amaiova, rutidea, baconia et cuviera, 218 et suiv. Ruellia. Deux espèces de ce genre doi- vent être réunies au nouveau genre &/echum , 262. Rue, Cette disposition dans les animaux est ou constante ou périodique. Examen des différences que les divers animaux présentent à cet égard, et recherches sur les causes de ces différences , 1i8et suiv. Lois générales qui parois- sent devoir être admises,, 128, & RIT PF C LES, | 499 Rutidea. Caractère de ce nouvean genre de rubiacées , 219. S. Sarcolite et Analeime. Ananalyse comparée de ces deux pierres , 241 et suiv. La sarcolite est une pierre alcalinifère, différente de l’analcime , quoiqu’elle- ait la même cristallisation , 250. Scutellaria indica, lin. V. Curanga. Simia leucophæa. Voy. Papion. Singes. Noy. Papion. | Snilacina. Caractère de ce genre qui est une division du convallaria de Linnæus, et description de cinq espèces, 51 et suiv. Solénoides. Voyez Paropée. Sommeil des marmottes. Voy. Mur- mottes. Siéatite verte du Monte-Ramazzo, em- ployée à la fabrication du sul- fate de magnésie. Ses propriétés physiques, ses usages et son ana lyse chimique, 1 et suiv. Con- tient huit substances différentes ct se rapproche du péridot, 9. Suilbite et grammatite. Comparaison de ces deux pierres, 79. La pré- tendue zéolite du Tyrol paroit être une véritable sülbite, 8o Voyez Zéolite. Sulfute de magnésie. Voy. Stéatite. 1h, Tartre. Expériences sur l'acide qu'il fournit par la distillation sèche, et comparaison de cet acide avec les autres acides végétaux , 405. Tartufoli. Nom qu'on donne en Italie 500 TABLE à un madréporite à odeur de truffes. Voyez Madréporite. Terre de Vérone. Ses propriétés phy- siques et son analyse chimique , 8r et suiv. Sa comparaison avec le tale chlorite, 86. Le fer y est combiné par une affinité chi- mique, 87 Thespesia populnea. Description de son fruit , 200. Tourbières.Noticesur divers objetstrou- vésau-dessous de la tourbe; parmi ces objets étoient un collier en succin, des squelettes d'animaux et des bois convertisen charbon, 252 eLsuiv, Trachées des plantes. Observations sur ces organes , 294 et suiv. Le tronc du bananier en contient un nombre prodigieux ; 295. Comment on peut les retirer et les préparer pour les employer dans les arts , lorsqu'après la ré- colte des bananes , le tronc est devenu inutile, 26. ets. Des tra- chées et de leur situation dans les organes de la fructification, et comment on distingue à l'as- pect les calices qui en sont pour- vus et ceux qui en sont privés , ALPHABÉTIQUE 448et suiv. V. Anat. végétale. ve Vaisseaux des organes de la fructifi- cation des plantes, Noy. Ana- tomie végétale. V'allisneria. Noy. Physkium. V'errucosité des feuilles. Maladie due au dévoloppement des æcidiums. Voy. Champignons parasites. Z. Zébre. Note sur un métis d’äne et de femelle zèbre , 2923. Zéolite ronge du Tyrol. Examen et analyse chimique de la pierre qu'on nomme ainsi, 75 et suiv. Quoique cette prétendue zéolite ait des rapports avec les gram- matites, l'analyse chimique sem- ble prouver qu’elle est une vé- ritable stilbite, 80. Zoologie. N. Rut, Montagnes. Tourbe. Voyez aussi dans la table précé- dente les titres des Mémoires de MM. Geoffroy , G. Cuvier et F. Cuvier. Zoyzit. Voy. Épidote gris. Zorille. Remarques sur ce genre d'ani- maux et sur les mouffettes, 439 et suiv. Voyez Mouffettese ee Favures essentielles à corriger. Page 9, ligne 9, au lieu de fer oxidé au minimum 37, Lisez : fer oxidé au minimum 7. —— 9—— 15, au lieu de x 20,5 ,/152Z :100,5. —— 51—— 91, au lieu de #ervosis, terminalibus , lisez : nervosis; floribus terminalibus. ——198—— 15; aulieu de Kenardy, isez : Kennedy, 7 CP VOvaAreE Le: ROLE |